''jj/tmarm !■■■< imwij?i— fWKw a mwhw y» ■ g f i. ASSOCIATION FRANCMÎ '1 fi J Li POUR L'AVANCE M t NT DES SCiENCi ' 'mMfmmnufiv^ft^ > 70P 1905 ■ÉMMIÉllMi iMi'îiÉinliÙ^^"''''''''^"' '^•■^■''•^ ■ xe .CS'^Y Se?. 2a pr POUR L'AVANCEMENT DES SCIENCES Une table des matières est jointe à chacun des volumes du Compte Rendu des travaux de l'Association Française en igoS. Une table analytique géné?'ale par ordre alphaliétique termine la 2me partie; dans cette table, les nombres qui sont placés après la lettre/) se rapportent aux pages de la i"^^ partie, ceux placés après l'astérisque * se rapportent aux pages de la 2°^« partie. Les indications bibliographiques se trouvent à la table des ma- tières des volumes. Anf^ers, imp. Germain et G. Grassin. — 2010-4. POUR L'AVANCEMENT DES SCIENCES FUSIO^JNEE AVEC L'ASSOCIATION SCIEMIFIOUE DE FRANCE (Fondée par Le Verrier en 1864 ) Reconnues d'utilité publique COMPTE RENDU DE LA 32"' SESSION ANGERS — 1903 — SEOOKTIDE F-A.K,TIE NOTES ET MÉMOIRES NEW BOÎ PARIS AU SECRÉTARIAT DE L'ASSOCIATION 28, rue Serpente (Hôtel des Sociétés savantes) Et chez mm. MASSON et Ci^, Libraires de l'Académie de Médecine 120, boulevard Saint-Germain 1904 ■/ ' ASSOCIATION FRANÇAISE POUR L'AVANCEMEM DES SCIENCES NOTES ET MÉMOIRES LIBRARV NEW YORK M. Edouard COLLIGNON Inspecteur général des Ponts et Chaussées PROBLÈME CE GÉOMÉTRIE — Séance du 5 août — [M- 3i] INTRODUCTION EMPLOI d'uX système PARTICULIER DE COORDONNÉES Soit AB(/î^. jr^une courbe donnée, rapportée à un système d'axes rectangulaires OX, OY. En un point M menons la tangente MR, qui fait avec l'axe OX un angle «. Appelons .Y l'abscisse OP. r l'ordonnée PM. La courlîc peut être définie de foi^me par une relation (i) r = P («) entre l'ordonnée )' et l'angle a. Pour passer de là à l'équation cartésienne de JLI^' 2 6 1906 0 R FiG. I. 2 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, (lÉODÉSIE KT MÉCANIQUE la courbe, (liilerentions Téquation (i); nous aurons d)' = ¥' (a) ^/«, et multipliant par cot « les deux membres, il viendra dx =: d}^ cot a =: F' (a) cot « dv.. L'abscisse x est donc définie par l'équation (2) .V = C + I 1' («) cot a fi?a, r F' («) avec une constante arbitraire C qui fixe la position de la courbe le long de l'axe OX, sans iniluer sur sa forme. Si l'on suppose tracées dans le plan des axes une infinité de paral- lèles à l'axe OX , le long de cbacune l'ordonnée y aura la même valeur, et l'angle « sera le même; on voit que l'équation (i) définit une infinité de trajectoii^es toutes égales, qui cou])ent sous des angles a déterminés les parallèles à l'axe OX qu'elles rencontrent. Les divers éléments géométriques de la courbe peuvent se déduire de féquation (i). Rq/yon de courbure p. On a d'abord pour l'arc élémentaire ds ds = 1/ dx' + dr' = F' (a) r/« ^^ I + cot «2 - ^.^^ ^ et par suite (3) '^^ ^' ^«^ TÛ^P sin « Coordonnées x', y' du centre de courbure. On a en général r'-j^ = l±J^, x'-x = -P<^+Pr Dans ces équations p est la première dérivée de j' par rapport à X, et l'on a p = tang a ; q est la seconde dérivée , ou la dérivée de p par rapport à x ; on a donc dp dp pdp ) r F lu' — 7r tang a est l'équation de la développée. Relation entre le rayon de conrhure et la tangente. Minimum de la longueur de la tangente MR et de la normale MN. La tangente jNIR =: ^ a pour longueur il) t = sin « F(«) sin a MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Si l'on compare la longueur du rayon de eourl)ure /s à la longueur t de la tangente, on a (8) de sorte que le rapport du rayon de courbure à la tangente est la dérivée du logarithme de la fonction F. La tangente t devient infinie, en général, pour a = o, a := tt ; entre ces deux limites elle a une valeur minimum, qui correspond à la relation dt = o. Mais dt = sin « (ly — j' cos « f/s sin^ X ce qui donne pour le minimum cherché dy F' (k) ^ p (9) cet a = COS a j-da. F (a) t sin a OU bien p sin a = t cos a, de sorte, c[u'à l'endroit du minimum de la tangente, le rayon de courbure et la tangente ont la même projec- tion sur l'axe OX; en d'autres termes les points S et R (Jig. 2) coïn- cident. Dans le cas général les quatre points R, S, M, G sont sur une même circonférence , dont le diamètre est CR. Dans le cas particulier du mini- mum de la tangente, les deux points R et S se confondent en un seul et la circonférence GMR (Jîg. 3) est tangente _ en R à l'axe OX. ' La longueur de la normale MN est donnée par l'équation R FiG. 3. (10) Nr=: y cos a cos a Elle est infinie i)our a = — , si l'ordonnée n'est pas nulle en même temps. Le minimum de N correspond à l'équation CCS a dy 4- y sin a ^a = o. ED. COLLIGNON PROBLEME DE GEOMETRIE c'est-à-dire, (II) tang « = cJ}' F (a) ou bien t sin « = — p cos a ou encore, en posant a = tt — «', (12) f sin a' = |0 cos a. Si « = MR (fig: 4), cette rela- tion . d'après la figure , donne l'égalité p = MN ; de sorte que le minimum de la normale a lieu lorsque le centre de cour- bure se trouve sur l'axe OX. t Courbe roulante eng-endrant la courbe AB. Soit GH (fig. 5) la courbe qui, en roulant sur l'axe OX, engendrera la courbe AB ; nous prendrons pour pôle le point décrivant, M et nous poserons MN = r, rayon vecteur de la courbe cher- chée. Nous compterons les angles polaires 6 à partir dune droite MM' arbitraire, faisant corps avec la courbe GH. Si l'on appelle pt l'angle ONM de la tangente à GH avec le rayon vecteur, nous aurons tang p /y/0 dr ' or l'angle ^ est le complément de l'angle « dans l'état représenté par la figure. On a donc rd^ 1 . lA dr . —7 — = cot a ou bien «9 = cot a — dr r pour l'équation de la courbe GH , sauf à y exprimer r en fonction de a. Or de l'équation _F(«) r r cos « cos « 6 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE on déduit, en prenant la dérivée logarithmique des deux membres^ dr dy d (cos «) F («) doi , ^- T^ , . + tang a «a. r (a) '^ r y cos a. Multiplions de part et d'autre par cot «, il vient F (a) dh F(«) cot a dx -\- r/a, et en indiquant la quadrature à exécuter , (i3) e = 0o + «+ r^cot«rf«, équation qui, jointe à l'équation (i4) F(«) cos a' rei)résente la courbe GH en coordonnées polaires. Les signes que nous avons adoptés sont ceux qui correspondent à l'état de la figure; dans chaque cas particulier et, par exemple, par les divers arcs de la courbe AB, il faudra une discussion ])our savoir quels signes on doit attribuer aux termes des équations (i3) et (i4). Enveloppe des tangentes transportées parallèlement jusqu'à l'arc OY. Si Ion considère toutes les courbes représentées à la fois par- l'équation J^ = F(«), l'angle « est déterminé dès que l'ordonnée j^ = MF (fig. 6) l'est elle-même; les tangentes aux divers points de la parallèle MM' à l'axe OX sont donc parallèles. Transportons l'ordonnée PM en OM' , en entraînant dans ce transport la tangente MT, qui prendra la position M'T'. Fai- sons de même pour toutes les ordonnées MP, et nous aurons une série de droites M'T', qui en- ï'i^- ''■ velopperont une certaine courbe que l'on peut construire. ED. COI.LIGXOX — PUOULEME DE GEOMETRIE 7 L'écfiiation de la droite M' T' sera , en appelant | et vj les coordon- nées d'un de ses points , »i =J^ + ? tang « = F («) + Ç tang a. Pour avoir les coordonnées du point où la droite touche son enve- loppe quand « varie , prenons la dérivée par rapport au paramètre variable sans faire varier Ç et » ; il viendra o = F' («) + ^ ■ COS ^a' ce qui donne pour les coordonnées du point de contact ( Ç = — F' («) COS 2«, ^^^^ j V, = F («) — F' («) COS « sin «. La différence F (a) — » = ;>- — -n est représentée par la projection M'G' sur OY du segment MF', coHipris entre le point M' et le point F' où la droite touche son enveloppe ; de plus G'F' est la pro- jection surOX du même segment, valeur absolue de l'abscisse Ç; on a donc M'G' = F' (a) COS « sin « G'F' = F' (a) COS V. Soit MG = jo le rayon de courbure de la courbe AB au point M; on aura F- (g) p -— —■ , sui « et par conséquent M'G' = p COS a sin 'a, G'F' = p sin a COS 'a ; d'où l'on déduit MF = p sin a COS a. Mais l'angle que fait MC avec l'ordonnée est égal ku, eX p sin a cos a s'obtient en projetant le centre G sur l'ordonnée en D, et le point D en E sur la normale ; il vient ED =: p sin a cos « ; et pour avoir le point F , il suffira de mener EF parallèle aux ordonnées jusqu'à la rencontre de la tangente en M, puis FF parallèle à OX, jusqu'à la rencontre de MF'. 8 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE. OEODESIE ET MECANIQUE Enveloppe des normales transportées de même à l'axe OY. On peut opérer de même pour les normales et . si Ton appelle -§' et Yi les coordonnées d'un point pris sur la parallèle M'N' menée à C FiG. la normale MX. on aura pour l'équation de la droite M'N' >/' = F (a) — Ç' cot a; car l'angle a' est égal à a -| — , et tang a' =: — cot «. Prenant la dérivée par rapport à a, il vient o = F'(«)+ -^^i-; ^ ' ' sin- a de sorte qu'on a pour les coordonnées du point de contact F", (i6) Ç' zr — F' (a) sin- a = — p sin^ a . rj = F (a) -j- F (a) sin « cos K =j' -\- p sin^ « cos «. Si l'on rapproche les équations (i5) des équations (i6), on en déduit, en ajoutant et en retranchant. Ç + ?= — ^ (f^)- T, -\- r,' ^= 2 F (a), et par suite le point K, milieu de F' F" est sur le prolongement de MM' : puis Ç — c =F (a) cos 1 a \ . V) — yj ^, . et par suite -; >; — r, z= t («) sni 2a/ H — Ç tangr 2 a. La droite F' F", qui joint les points de contact des deux enveloppes, est parallèle par conséquent à la médiane MI, menée du sommet M de l'angle droit au milieu I de l'hypoténuse NR du triangle rec- t'ingle RMN. ÉD. COLLIGXOX — PUOBLÈME DE GÉOMÉTRIE De plus, M'K est égal en valeur absolue à la demi-somme ç + ? _ F («) 9 et puisque langle F M' F' est droit, on a 2MK = F' F" = F' (a) ; de sorte que la dérivée F' (a) est représentée sur la figure par la dis- tance F' F" des deux points de contact, et l'on a de plus F' F" = SP, projection du rayon de courbure iNIC sur l'axe OX. Le lieu du point K, milieu de cette distance F' F", aura pour équa- tion le résultat de l'élimination de « entre les deux équations (17) 2 '2 ^ ' fi 4" V)' F' («). On en déduit . en divisant la première égalité par la seconde , il 1 F' («) 2 F («) 2 / Si donc le rapport -t- du rayon de courbure à la tangente est cons- tant, le rapport — ^ lest aussi et le lieu du point K est une droite passant par l'origine. Trajectoires oi^thogonales des courbes y = F (a). Au point M de l'une des courbes AB, la trajectoire or- thogonale FF a même abcisse X, même ordonnée j', mais elle est tangente à la normale MN, et l'angle a se change par con- séquent en «' = a + — . L'équa- tion des trajectoires orthogo- nales est donc, dans notre svstème de coordonnées, FiG. 8. r =F T =*(«')- et de cette relation on tirera, par l'application de nos formules, les éléments de la courbe, tangentes, normales, rayons de courbures, etc. La courbe enveloppe des normales à AB, transportées parallèlement lo MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE à elles-mêmes, permettra de tracer la courbe EG par l'enveloppe de ses tangentes. ConstT'iiction approximative des courbes. Les courbes j^ = F (oi),j'' = * (a), peuvent être tracées à l'aide des rayons de courbure calculés par les formules F (g) sin a <^ -, H 2 ^ot a = o. ^ ^'^ rt^ sin^ a 2^- rt-* ED. COLUGXOA — PROBLEME DE GEOMETRIE li Etude particulière de la courbe m = i. Parmi toutes ces courbes, il y en a une qui se distingue des autres (le cercle étant écarté), par la simplicité de la relation qui rattache l'ordonnée à l'angle «. C'est la courbe qui correspond à ni=zi. On a alors J' = Ce''« , et par conséquent le rapport du rayon de courbure à la tangente , F lal)les les unes aux autres. On reconnaît en même temps que, pour passer sur une même courbe, de la branche comprise entre les parallèles à la branche située entre les parallèles suivantes ;- = CeC'- + ^>^ et j- = Ce(''- + 2) r.h^ il suffit d'altérer la constante C dans un certain rapport. Reprenons en effet les deux équations j' = Ce''"', X— C = Ch je''" cot a (la; si nous augmentons l'arc a de la demi-circonférence tt, ce qui n'altère pas la cotangente, cela équivaut à conserver à « sa valeur, sauf à poser j^ = Ce^h X e'»« X — C = Che^-^i je''^ cot a dx, c'est-à-dire à remplacer la constante C par le produit Ge"^'* . Les diverses branches de la courbe sont donc toutes semblables entre elles ; le rapport de similitude change lorsqu'on passe de l'une des branches aux autres. L'étude de la forme de la courbe peut par conséquent s'effectuer «n considérant seulement l'une de ses branches, celle par exemple qui est comprise entre les parallèles j- = G et j' z= Ce~'', en faisant varier a entre les limites o et k. La constante G', qui ligure dans la valeur de x, reste constante pour une branche en particulier, mais on peut en changer la valeur quand on passe d'une branche à la suivante, puisque la continuité de la courbe est rompue par le passage de l'asymptote intermédiaire. On peut amener, par exemple, toutes les tangentes perpendiculaires à OX, qui correspondent aux valeurs —, —, —, — . . . de 1 arc «, ED. COLI.IGNOX — PROBLEME DE GEOMETRIE 21 à occuper un seul et même alignement, répondant à une même valeur de l'abscisse. Nous pouvons encore limiter l'étude de la branche unique à l'arc compris entre les limites a = o et « = — . Si a est en effet compris entre — et tt, on posera « = 7t — « , et «' sera ramené entre o et — . On 2 2 aura e'"' z= e'^'' X ^ ~ ^'^\ avec cot « = — cot a', et d». = — da.' , ce qui entraine la relation e''« cot « da. = e"'' X ^ " ''" f*ot «' f/«'. On est, en définitive, ramené à intégrer la[différentielle e — '"'• cot a' du , avec «' variable de o à -;;^, sauf à changer le signe de h. Le problème se trouve réduit à chercher J e^'" cot a ^/a, avec a TT variable de o h —, h pouvant être positif ou négatif. 2 Lernnie préliminaire TT Soit a un arc de cercle, positif et moindre que — ; cet arc est com- pris entre son sinus et sa tangente trigonométrique et, si l'on appelle m et 11 deux nombres positifs, variables et convenablement choisis, on pourra poser l'égalité m sin K -\~ n tang X « - m -\~ n On en déduit m II tang « — - a a — sm 5 a m tang a — a ,.t n a. — sm a. m -j- n tang « — sin a 7/1 -f- « tang « — sin a On peut en effet vérifier l'identité (tang a — ^ a) sin « + (« — sin a) tang a tang a — sin « La somme des coefficients de sin a et de tang a , dans la formule j)rimitive, est égale à l'unité. 22 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE On reconnaît aisément que le coefficient de tan»' a 1 , varie d'une manière continue de -5- à zéro lorsque l'arc a varie de o à 71 2 - — . coefficient de sin a, varie dans les mêmes conditions de -^ -f /i j tt; m 2[' 771 à l'unité. Le tableau suivant fait connaître, du reste, les valeurs suc- cessives de ce coefficient en fonction de l'arc a. en degrés Arc a en parties du rayon m tang ». — a n a. — sin « m-\- n tang « — sin». m-j-n lang». — sin « 0° 0,000000 0,666667 0.333333 lO" O.I74-^^^ 0,671642 0, 328358 20° 0,349066 0,(179563 0,320437 3o" 0,523599 0,694893 o,3o5io7 40° 0,698132 0,718099 0,281901 5o° 0.872665 o,749-'^49 0, 25045 1 60° 1. 047198 0,790813 0.209187 70" 1. 221730 0,84407*3 0,155927 80" 1.396263 0,912204 0.087796 90° 1,570796 1,000000 0,000000 Si l'on construit la courbe représentative des valeurs de^' = n jn-{-n en fonction de a, on obtient une ligne AMB (fi g. 20), continue, entre les limites assignées à l'abscisse. Les différences d'or- données entre la courbe et la jiarallèle j' = i menée à l'axe 0 10- ?o- 50" u° W 60- 70' 80- 9cfB QB. fcront comiaîtrc Ics valcurs FiG. 20. complémentaires du coefficient ; — • ^ m -j- n On pourra donc représenter, avec autant d'approximation qu'on le voudra , les valeurs des coefficients variables par un développe- ment parabolique de la forme n r m -\- n = A + B« + C«2 + + G«/' , ÉD. COLLIGXON — PROBLÈME DE GÉOMÉTRIE 23 ordonné suivant les puissances successives de a, et formé d'un nombre limité de termes, réglé par le nombre de points qu'on aura pris pour déterminer cette fonction — j- — . Si Ton prend p -{- l lit' I IL points sur la courbe, le développement sera du degré/). On aura de même pour l'autre coeftîcient y z= 1 n m = (I — A) — Ba — C«2 GaP m -\- n n -\- n ce qu'on écrira, pom' donner plus de symétrie aux notations, _r' = A' + B'a + C'rx'- + + G'aP. Appliquons, par exemple, la méthode déduite de la formule des différences a I « / « \ 1.2 /m h + 7:bx x-'llx--h3r„+ en nous bornant aux premiers termes , nous prendrons h = 3o°, et nous donnerons à « les valeurs o'', 3o", 6o°, 90°. Il viendra pour les différences a 0° 3o° 60° 90° 0,333333 o,3o5io7 0,209187 0,000000 — 0,028226 — 0,095920 — 0,209187 0,067694 0,113267 ^sj' — 0,045573 et nous aurons la formule approximative r = j — = 0,333333 — -T" X 0,028226 jii - T T (1 - ") X "■°'^^'^ -iT(i-')(x-^)x 0.0455,3, qu'il reste à ordonner suivant les puissances ascendantes de -j- 24 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉGANIQUE L'emploi de 4 points de la courbe, équidistants en projection sur l'axe des abscisses, nous conduit à une courbe parabolique du troisième ordre : 2 3 y = o,333333 — 0,009.570 -j- — 0,011060 -jj — 0.007595 -ry. Application Venons enfin à l'intégration de la fonction e''=< cot a (h., « variant entre les limites o et -. 2 Quel que soit l'arc a, on a l'égalité ' I ' 1.2 ' 1.2.J ' série toujours convergente, et qu'on peut supposer indéfiniment prolongée. Substituons cette série au facteur e''"- dans la différen- tielle , et écrivons j, 7 1 , ^"- 7 1 ^'""'^ 7 r e"* cot « (la. ■=. cot a. civ. -\- — cot a dv. -A cot (/. du. -\- ' I '1.2 ' 7 , ^ / K 7 , ^'« / X 7 , • ^'^^-^ / ^ 7 r = cot (Z rt« H (a. cot «) «« + (a COt «) «« H rj (« COt «) rt« + , , . , ' I ^ ' '1.2 1.2.3 en réunissant à cot « l'un des facteurs « dans chaque terme à partir du second. Le premier terme cot a c?« a pour intégrale / (sin «). Pour les termes suivants ils sont tous de la forme (a cot a) d(A, 1.2.3. . . Il et l'on pourra remplacer dans la parenthèse le facteur « par sa . m . , n , . ,„ . valeur ; — sin a -\ \ — tang « , en substituant aux coeiiicicnts m -\- n ^ m -\- Il ^ de sin a et de tang a les développements paraboliques qu'on vient d'établir. Il en résulte l'égalité cota a«: (A' + B'a + CV + +G'«/>)sinacotarf« n I n -j- (A + Ba + ( V + + G«/') tang a cot a du (A' + B'« +•••• + G'»/» ) cos a cU + (A+B« +..••+ G«p )rfa n 25 ÉD. COLLIGXOX — PROBLÈME DE GÉOMÉTRIE c'est-à-dire une somme de termes, dont les uns sont de la forme M «g- cos a dy.. et les autres de la forme N y.gcl(/., N et N étant des coefficients connus et g un exposant entier, positif et détermine. Ces termes sont tous intégrables. On a up: du /' î->' Quant au terme uS cos a dv., on peut, pour l'intégrer, appliquer la règle suivante : « Ecrivons, dans une colonne verticale, aS" et ses dérivées succes- « sives jusqu'à la valeur constante qui termine la série ; en regard « écrivons sin « et les dérivées successives de sin a, qui reproduiront « périodiquement les termes sin a, cos a, — sin «, — cos «, série « qu'on prolongera autant qu'il est nécessaire ; puis faisons le pro- « duit des dérivées de même ordre placées en regard l'une de « l'autre dans les deux colonnes. La somme algéljrique de ces pro- « duits donnera l'intégrale demandée.)) On aura et par suite J v.g cos y. dy. = y.g sin a a.H gy.g-^ g{g—l)y.g Sin y cos y — sin y o- — 1 cos y + 8'a — 2 sm y Il est aisé de vérifier la règle en prenant la dérivée de la fonction qu'elle conduit à former. Elle est applicable de même à la recherche de l'intégrale f y? sin a dy, sauf à partir de — yg cos a; ce qui revient du reste à changer cos y en sin y, et sin y en — cos y, dans l'intégrale générale de f yg cos y dy. Prenons quelques exemples simples : / f' S' y cos y dy = y sin a -\- cos y, ^ COS y dy ■= y? sin a -|- a a cos y — i sin a, y? cos y dy = y? sin y. + 3 y? cos y. — 6 5< sin a — 6 cos a, y} sin y , yr Sin y y Sin y 2 y COS y 3 7.2 cos y 1 cos y 2 — sin y 67. 6 — sm y — cos y 26 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE Chaque terme de l'intégrale indiquée conduit à un semblable développement, et la réunion de tous les termes ainsi foi^més finit par constituer le développement en série de l'intégrale générale cherchée, La méthode indiquée s'étend, comme nous l'avons vu, à toute la courbe. Elle n'a qu'un inconvénient qui la rend peu pratique, sa longueur. L'intérêt du problème en lui-même, et la facilité de construire graphiquement la courbe, écartent l'emploi d'un procédé analytique aussi laborieux. Courbes entre lesquelles la courbe cherchée se trouée comp?ise. Occupons-nous en particulier du tronçon compris entre les limites a = oeta:= — ; on a dans cet intervalle 2 sin a < a < tang a, et par conséquent a cot a < tang a cot a , c'est-à-dire < i , a cot y. > sin a cot a ou > COS a. Le produit a cot a est donc toujours compris entre cos a et l'unité. On a d'ailleurs, abstraction faite de la constante G', X = Ch I (?'»'■' cot a (h = CA Tcot a fh -\- f (a cot y.) (h. . Le premier terme entre crochets donne / cot y. (h. = l (sin a). Le second est compris entre les deux limites dy. et I cos a dx on aura donc X < Chll (sin a) + r^^" ~ ^ d-y\ Ch I / sin y. -|- / cos a dy /e"" — I -^ dy. se ramène à la transcendante connue sous le nom de logarithme intégral, en posant e^'" = u. X oh'/. ED. COLLIGXOX — PROBLEME DE GEOMETRIE 27 Les deux intégrales indiquées sont d'ailleurs développables en série et l'on a en définitive X < C/i X > GA 1{1U a) 4- ^TT + - ^ ^ ' I ' 1.2.2 1.2.3.3. I, h'y} 2.3.4.4 + h r h r Ir r l(hiy.)-{— I COS a r/x-j- — ;- j acosaf/a-j —5 I y.'^ c OS y. dy.-\-. Tous les termes de la seconde série sont calculables, et l'on obtient ainsi deux séries conver- v 1^ / . B , b gentes, qui renferment entre elles la valeur exacte de l'abscisse .v. A ces valeurs- limites de X correspond une ' même valeur dej' fournie parféquation ^ p, p ^ ^ FiG. 21. Si l'on trace dans le plan des axes les deux courbes -limites (fig- 21), savoir la courbe ah, y = Ce'"' , /ph'j. __ T __ doL, puis la courbe àh\ r + c/,/( y = Ce'"' , g/ia I COS a f/a. la courlîe cherchée AB sera comprise dans la bande intermédiaire et serrera de plus en plus près la seconde courbe ah' , qui correspond à une limite inférieure des abscisses ; on aura OP =: .V, Op' = X, , Op = X, , p'm' = PM = pm =jr. CHAPITRE III COURBE m = I CONSIDÉRÉE AU POINT DE VUE CINÉMATIQUE ET MÉGANIQUE Déplacement du triangle RMC. Le triangle RMC (fig". 22), rectangle en M, conserve sa similitude, puisque l'angle en R, égal à 7, est constant. Le déplacement élémen- taire du triangle se décompose par conséquent en trois mouvements : 28 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE 1° Une translation parallèle à OX ; 2" Une rotation autour du point R ; 3" Une amplification proportionnelle des dimensions linéaires du triangle, qui l'amène à sa nouvelle grandeur. 1° La translation parallèle à OX est mesurée par la différentielle d \x — y~i~. de l'abscisse du point R, c'est-à-dire car dy dx — d (y cot y.) = dx — dr cot a A- y . .' dx = d)' cot Cf.. --J- sm y. 52° La rotation autour du point R est donnée par la différentielle dx de l'angle a. Ces deux mouvements élémentaires se composent en un seul, autour du centre instantané de l'angle CRM, considéré comme constituant une figure invarial^le. Le point R de ^ette figure décrivant la droite OX, le centre instantané est situé sur la normale RG à l'axe des abscisses. La droite RM enveloppe la courbe AR ; le centre instantané est donc „ „ o o NX ^^^' ^^ normale MC à la courljc, et FiG. 22. il est situé en G, à l'intersection des deux normales MG, RG. L'angle RGM étant égal à a, on a RG sin y. = RM, et RM sin y. = MP = r; donc RG = ^V ' d'^^- ' ^ ' sin'' y. cord avec le résultat obtenu nlus haut. La translation r . , s'opé- rant dans le sens RX et la rotation autour du point R, dans le sens de la flèche indicpiée sur la figure, le point G reste immobile à la y dislance ." ^ comptée sur la normale RG à la trajectoire du point R. 3° L'accroissement proportionnel de l'une RC = /> des dimensions linéaires du triangle mobile est exprimé par le rapport dp 9 , , SP RP , Ul — cot a) dy. = • — — dy. = y J' RS Ml 5 dy.. Si l'on projette le point G en p sur la droite RC, on aura le point p. où cette droite touche la courbe qu'elle enveloppe dans son dépla- ÉD. COLLIGXOA' — PUOULÈME DE GÉOMÉTUIE 29 cernent. Les angles ^ et M étant droits, les quatre points G, u., M, R sont sur une même circonférence, laquelle est tangente à l'axe OX, puisque son centre est situé sur la normale RG à cet axe. On a d'ailleurs, d'après la figure, l'égalité RP- = NM X NG, ce qui vérifie le résultat obtenu. En définitive, les trois sommets R, M, G du triangle mobile par- courent simultanément : Le sommet R, l'axe des abscisses OX; Le sommet M, la courbe AR, enveloppe du côté RM ; Le sommet G, la développée de cette courbe, enveloppe du côté MG ; Eniin la droite RG enveloppe une certaine courbe qu'elle touche au point n. Si l'on appelle Ç et v? les coordonnées du point ^a, x et r étant toujours les coordonnées de point M de la courbe, et p la dérivée dr . dx _, égale à tang a, on aura (I) ^ />- (I + h') équations que l'on pourra réduire à ne contenir que le paramètre a. Le point ^ est sur la droite. (3) ^J^j,, = x + p' qu'il est facile de construire sur la figure. L'élimination de 7. entre les deux équations (i) et (2) donnera l'équation de l'enveloppe. Courbe m = i considérée comme trajectoire d'un point libre Supposons qu'un point mobile M (fi g 2 3), de masse égale à l'unité, ait à chaque instant ime vitesse c représentée par la longueur MR de la tangente à la trajectoire , et définissons le mouvement du point par la condition que la vitesse angulaire de la tangente MR, c'est- , T , dy. . a-dire le rapport -y. > soit constante et égale FiG. 23. 3o MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE à w. Les équations du mouvement projeté sur les axes OX, OY seront -£=k X RP = /9- cota, k désignant le coefficient constant de proportionnalité de la vitesse p à la longueur RM. Il faut joindre à ces équations la condition Nous pouvons poser k = Aw, en désignant par h le rapport 'cons- tant du coefficient A; à la vitesse angulaire ta. Les équations du mou-^ veinent deviennent alors dx = hj' cot a X « di = Jvy cot a de/., dj" = hj' dy., c'est-à-dire les équations mêmes de la courbe ni = i. On aura pour les composantes de la vitesse q dx -^ =^h Mj- cot a, d}^ dt = h Mjy , d'où résulte, en élevant au carré et ajoutant, puis prenant la racine carrée de la somme. /dy.^ , dr' _ /;2 0 ,, 1 ,2 , /'«r pM. puisque le rayon de courbviro p est égal à -^ — ; . Ce résultat était facile à prévoir. Dans un intervalle de temps infiniment petit dt, le mobile se déplace avec une vitesse angulaire w autour du centre G du cercle osculateur, et décrit l'arc pu dt ; sa vitesse est donc pM. Cherchons les accélérations. On a d'abord dy dt = ho^y d\r , dr dx La différentiation de — tt- donne d I dx \ d [—-rr = —jj- ift^'l)' t'ot y) = h^orj- cot a — Iim^ 2 „> ÉD. COLLIGNON — PROBLÈME DE GEOMETRIE 3i de sorte que raccclération parallèle à OX est la somme de deux termes. Le premier, /i^w^ cot a, peut être facilement composé avec l'accélération dp h^ tà^ y\ la résultante sera dirigée suivant la tangente RM, et elle aura pour valeur lî^ w' X RM. Reste à y adjoindre la seconde composante Y — Ao)^ . o , dirigée suivant MF (fig. 24)-, parallèle à l'axe OX. Nous pouvons décomposer cette accélération MF en deux accéléra- tions dirigées, l'une suivant MR, l'autre suivant la normale MG , ce qui donnera MF = MF cos y.=z — hraly cos a sin^ a = - /?co2 RM cot a. MF" — MF sin y. hw^y sni y. ' u Cette dernière composante MF" est la composante normale de l'accélération totale ; elle est égale à — et l'on a — = om^ ce cru'on P P pouvait déduire de l'expression {> = pu de la vitesse. La somme algéJjrique des deux accélérations h^ «2 X RM et — /îo)^ RM cot a donne pour la composante tangentielle —jj de l'accélération dt dv ^^^ = «2 X RM. (cot a — h) h = pu^ (cot y. — h) car h X RM est égal au rayon de courbure p. On trouve la direction de l'accélération totale en employant seu- lement des composantes qui sont données par les formules les plus simples. d-)' Suivant l'axe OY on a -~ = h^oil)% et suivant la normale OC, df 0 Si on laisse de côté le facteur w^ , on aura l'accélération MM' =: /i^ suivant l'ordonnée PM prolongée, et l'accélération MC = p suivant 32 MATHiÎMAïIQUES, ASTRONOMIE, GEODKSIE ET MECANIQUE la normale à la courbe. Menons MS (fi g- 20), en formant l'angle MSP égal à 7; on am^a SP = hj". Abaissant PS' perpendiculaire à SM, jusqu'à la rencontre de l'ordonnée es du centre de coui'bure, on aura SS' = SP X tang 7 = hy. Il suffit donc de mener S'M' parallèle à SM pour obtenir le point M'. Elevant M'H perpendiculaire à MP, et GH perpendiculaire à MC, on aura au point H de ces deux longueurs un point qui appartiendra à la direction MJ de l'accélération totale clierchée. Soit (f l'angle JMR, de l'accélération totale avec la tangente, on aura cot (f = tang HMG HG HC GM~ p ■ (h Mais HG est la composante tangentielle —rr, au lacteur w' près. On a donc HG =z-/^. = RM X h (cot a — h) = p (cot y. — h) et par suite HG zzz cot f =^ cot y. On arrive donc à ce théorème : la différence des cotangentes des angles variables a et ^ reste constante pendant tout le mouvement. On déduirait ce théorème de la comparaison des deux compo- santes — := M'p, P dv _ di~ qu'on tire de la relation p = pw. Il en résulte en effet dp dr w cot «p = — dt M 0 dp dp d ,j . /5 X w (fi pf^'^- ^''^- ' et la difTérentiation logarithmitiue de l'équation p =: -^ sni y. conduit immédiatement à la relation chei'chée cot çp = cot y. — h. É. FONTANEAU. — PRÉLIMINAIRES d'hYDRAULIQUÈ 33 M. Éléoûor FONTANEAU Ancien Officier de marine, à Limoges PRÉLIMINAIRES D'HYDRAULIQUE [S 2] — Séance du 5 août — II I. — Dans la première partie de ce travail (Congrès de Montauban 1902), j'ai montré comment l'emploi des vélocités /3, y, pour intégrer les équations aux dérivées partielles de l'Hydrodynamique, se rattache au mode de transformation qu'avait proposé Lagrange dans le même but. Si l'on pose et qu'au moyen de ces équations différentielles on forme les expres- sions cU d& dy d& dy d8 l'équation aux différentielles totales (2) u dx -\- ç dj^ -{- w dz ■=^ o sera toujours intégrable et aura pour facteur d'intégration p = — • Si ri donc, on pose : dw dv /f/p dy f/j3 dy ^ dj^ dz yIX dz dz dj' du dw /fZ/3 f/y r/jS dy ^ ^ \ ^ dz dx \dz dx dx dz ^ dv du /r/,8 dy dp dy dx dj' \dx dj' dy dx et qu'au moyen de u, v, w substituées aux composantes de la vitesse, on parvienne à vérifier les équations aux déi'ivées partielles de 3* 34 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE l'Hydrodynamique, il sera facile d'en déduire p, q, r, comme aussi les expressions correspondantes des vélocités p, y. On peut, sans inconvénient, remplacer les expressions (i) de n, v, ((', par celles-ci : ^^^ ) , (h dy d(i où T désigne une fonction arbitraire de x,y, z eX t\ puisque cette fonction disparaît dans la formation des quantités p, q, r, de qui dépendent exclusivement les composantes L, M, N de la rotation élémentaire. Cette addition peut être utile, car elle influe sur les expressions des vélocités /3, y, et, comme il est possible d'en disposer de manière à rendre intégrable l'équation : <5) (» + 'j^ <'■'' + ('; + $) *' + ('" + Ê) ''^ = "' on pourra employer trois fonctions quelconques n, ç, w pour appli- quer le procédé de Lagrange, saut à déterminer ensuite les vélocités correspondantes /3, y, au moyen des équations (4) et obtenir en même temps une intégrale e qui, jointe à ces vélocités, constitue un système de coordonnées curvilignes à substituer aux coordonnées carté- siennes. 2. — Lorsqu'on prend pour point de départ de l'intégration des composantes connues de la rotation élémentaire et leurs expressions au moyen des vorticites Ç, •/?, dç do d'; dn f/Ç (h dt, fh dj" dz dz djy dz dx dx dz ~~ dx dj' dy dx On peut, par analogie à ce quiprécède, poser : dr dv, de dr _ dvi dK P + d7: = ^d^~''d^ '^~^di'-'^dP~''d^ '" + dz —^dz~ "' dz ' Car il en résulte : ^ ^^ — dj' dz ^ -^^ — dz. dx ^ ^^ - dx dj- É. FONTANEAU. — PRÉLIMINAIRES d'hYDRAULIQUE 35 €t si l'on parvient à vérifier les équations aux dérivées partielles de l'Hydrodynamique, avec ces expressions connexes des composantes de la vitesse et des composantes de la rotation élémentaire, on obtiendra aisément les trois coordonnées curvilignes s, Ç, «, en inté- grant d'abord l'équation . rendue intégrable par la détermination de t, au moyen de l'équation aux dérivées partielles du premier ordre et linéaire (9) L ^. + M 1^. + N ^ = Lp + Mq + N/' = o puis en faisant usage des relations (7). On voit d'ailleurs que s'il s'agit ici, comme je le suppose, d'un iluide incompressible, la l'onc- tion T doit vérifier non seulement l'équation (9) mais aussi l'équation aux dérivées partielles du second ordre Je ferai d'ailleurs observer que l'emploi de la fonction auxiliaire t devient ici indispensable, parce que les quantités p, q, r entrent en même temps que les fonctions L, M, N dans les équations aux dérivées partielles d'intégrabilité et les différentes valeurs que peut avoir r sont de nature à influer sur les résultats de l'intégration. De plus, si l'on met en regard de l'équation (8) celle-ci (11) p dx -f- q dj' ~\- î' dt- = o l'une et l'autre correspondent à des cas différents du mouvement des liquides. La dernière ne convient qu'aux mouvements ortho- goniès et par son intégration, on obtient une des vorticites que je désignerai généralement par a. L'équation (8), au contraire, convient aux mouvements loxogoniès et pour en déduire une intégrale s qu'on puisse employer comme vorticite ; il faut la rendre intégi-able en faisant usage de l'équation (9). Cette observation, qui permet d'envi- sager sous un même point de vue les divers genres de mouvement, exprime la généralisation d'une propriété, dont j'avais formulé le postulat, dans une communication précédente (Congres de Paris, 1900). 3. — Pour présenter sous un point de vue plus général et commun les divers procédés que j'ai proposés pour l'intégration des équations 36 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE aux dérivées partielles de rHydrodynamique, j'insisterai ici sur une méthode dont j'ai déjà parlé (Congrès de Nantes, 1898), plus géné- rale et dont ces dilTérents modes ne sont, en réalité, que des spécifi- cations particulières. Je reviens, dans ce but, aux équations diffé- rentielles simultanées (12) dx T dy dz = dt qui servent de lien commun |aux deux méthodes générales usitées d'aj)rès Lagrange et ses illustres devanciers Euler et d'Alembert, pour l'étude des fluides en mouvement. Je suppose quep, q, r y aient des valeurs déterminées et j'en considère trois intégrales distinctes (i3) a=f,{x,y,zj) b=f,{x,y,z,t) c=f,{x,y,z,t) qui doivent , comme on sait , vérifier les équations aux dérivéesjpar- tielles du premier ordi'e : da da da , da (i4) ^if-+^i?+'''^.+^=^ db hlb] 'db] db_ de , de , de , de Pd-x + '^dJ^ + ''Tz+Tt = ''' Si, prenant à volonté une fonction G de x.jy, z, t, on considère le déterminant fonctionnel -j^ . dG da db de \ — dx dj' dz dt (i5) at a^ «2 bt &i b., et Ci e, \ a, a., at b., b, bt Cj C3 et dG dx dG dz -- " df a^ at «1 63 bt b, , q, v respectivement les expressions sui- vantes : P = — I D «2 a. at h. &3 ht c. C-s et (17) (/ = 1/ '' — ~D a, «2 rt^ ^ b,bt Ci Ci et I "D cm clG, dK ' a. a, at K h ht c. Ci et dG, dOt dGi a, h, c en seront trois intégrales distinctes, puisque les équations (i4) ,se vérifient alors identiquement. On peut donc poser généralement P (18) l q da, D f/D at dârD dDat da^ D (mhj_ ' dh, D crDhj_ dh, D f/D ht dD cj_ de, D (/D et de, D dT} et da, ' dh, de. ^'DE, + aE. f/D da.. f/63 D f/c,, D f/a = ^E,+;^E2 + dh. de^ de. E3 E, où les quantités E, , E^ , E^ sont définies par les égalités (19) DE,+^ = o DE2 + '^ = o DE3 + §f = o. dt Pour se rendre compte du motif qui nécessite l'introduction des quantités E , il faut observer cpie d'après les formules de la transfor- mation des coordonnées curvilignes (Congrès de Boulogne-sur-Mer, 1899) on a en général _dB_dx T_crD_4r £^_f^ i^crD__dx J_dB__djr Bdâ^~"dâ' Vida^da' J}da~da' D dh,~ dh' Ddh, dh' i^dD_dz j_cm_dx ±([^_dr, i dB _dz T>dh,~db'' \ydc~ de' B dei~ de' Dde, de et, par suite, il résulte des équations (18) dx da dx dh dx de P~~'dadt~"dh'di~~'dcdt' ^ — ~ r dz- da dz dh da dt dh dt dyda dj- flb^__4T^. ïïâTït dh di de dt^ dz de de dt' 38 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE Or, ces expressions, sans être absolument inexactes, ne sont pas généralement exactes; elles ne peuvent l'être d'après Lagrange et Kirclihoff, que si l'on a déterminé a, b, c de manière à obtenir pour t = o le point initial du mouvement moléculaire , ou bien la surface initiale du mouvement de déformation et de déplacement des vélo- cités. C'est pour satisfaire à cette obligation qu'ont été inti-oduites les quantités E destinées à avoir une première détermination au moyen des équations aux dérivées partielles de l'Hydrodynamique , puis une seconde et définitive détermination au moyen des équa- tions (19), en opérant conformément aux conditions établies par Lagrange et Kirclihoff. 4- — Si, dans le but de généraliser les formules (18), on y remplace a, b, c i^ar des fonctions arbitraires f,-^, y. de ces variables, il vient (20) l p = I ?2 ?3 ?' h h ^t Xj y-j y-t ^1= I A ?.i ?' ?l •f-. ■h ^1 ^i "''•1 y-t ?i ?^ ft ^1 4-. ^/ "''■1 X, y-t où A désigne le déterminant fonctionnel des quantités r^, -i^, x. Or, en substituant dans ces égalités les expressions développées des quo-^ tients différentiels de y, \|/, x; décomposant les résultats en détermi- nants partiels , de manière à éliminer ceux qui se détruisent et recons- tituant ensuite les déterminants fonctionnels , on olitient les relations suivantes : d = F{a,b,e), égalité qui constitue une relation de dépendance mutuelle entre les quantités a, b, e, parce que les coefficients de la fonction F sont indépendants du temps. On me permettra aussi de déduire des rela- tions dont il s'agit la justification d'une remarque énoncée dans la première partie de ce travail, n° i (Congrès de Montauban, 1902), au sujet du théorème de Lagrange sur les mouvements irrotation- nels. Ce théorème, ai-je dit, s'applique à tous les genres de mouve- ments, quelle que soit la nature du fluide et sous l'influence de quelques causes qui se produisent, tant que la nature de ses vélocités reste la même. J'ajouterai qu'à ce degré de généralité, on peut le considérer comme un principe dont il convient, à ce que je crois, de faire honneur à la mémoire de ce grand géomètre. Ce principe résulterait implicitement de plusieurs remarques énoncées dans la Mécanique analytique et notamment de ce passage (onzième section, n° 8). — « Si on veut que les mêmes particules qui sont une fois à la surface y demeurent toujours et ne se meuvent 42 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE que le long de cette surface, condition qui paraît nécessaire pour que lejluide ne se divise pas et qui est reçue généralement, dans la théorie desjluides, il iaudi'a que réquation dont il s'agit (l'équation des parois du vase, A= o) ne contienne point le temps /; par consé- quent la fonction A de x,j', z, devra être telle que t,)' disparaisse,, après la substitution des valeurs de x,j-, z en a, b, c, t. » Lagrange présentait en ces termes le type des vélocités absolues ^ que je désigne ainsi pour les distinguer des vélocités instantanées de mes précédentes communications. Des observations présentées dans le numéro précédent et dans celui-ci , il résulte incontestable- ment que, dans tout fluide dont le mouvement s'effectue, en tous ses points, conformément à la loi de continuité, on peut toujours et à chaque instant considérer la masse mobile comme divisée jusqu'en ses molécules élémentaires, par trois groupes distincts de vélocités, dont la considération suffit pour caractériser l'état mobile du fluide. La continuité du mouvement est indispensable pour qu'il en soit ainsi et l'équation (27) , qui ne serait pas exacte en dehors de cette hypothèse, donne l'étendue du domaine de continuité, puisqu'au moyen de trois vélocités connues elle permet d'en déterminer un quatrième et successivement tous les autres. La caractéristique des surfaces de discontinuité ou surfaces de séparation (Trennungs flache) , suivant l'expression de Hehnholtz (ueber discontinuirliche Flussigkeitsbew^egungen), résulte de cette observation. Ce sont des surfaces qui, tout en ayant la même propriété que la paroi A, de Lagrange, sont néanmoins indépendantes des vélocités absolues a, h, c, d'un mouvement continu, auxquelles on les réfère. Le principe de Lagrange ainsi compris permet de constater la continuité d'un fluide en mouvement et, s'il y a des discontinuités, d'en distinguer les régions à raison de la diversité des mouvements. G. — Si ce critérium était d'un emploi facile, on pourrait en faire de nombreuses ai)plications, mais il faut avouer qu'il est malaisé de le préconiser, en présence de la répugnance qu'éprouvent les meil- leurs esprits à se représenter dans un liquide en mouvement des surfaces dont chacune fasse partie d'une série à un ])aramètre et change à la fois de forme et de position avec le temps. Il semble que de tels oljjets ainsi délinis soient inconcevables et l'esprit rebuté s'obstine en dépit de l'analyse, à ne voir dans la masse liquide, qu'une agglomération plus ou moins distincte de filets mobiles, qui, X)ar leurs changements d'état, semblent donner un aperçu plus net du mouvement général. C'est ce qui m'engage à reproduire ici un passage où M. Charles Neumann (Hydrodynamische unter suchungen. É. FONTANEAU. — PRELIMINAIRES d'hYDRAULIQUE 43 Eiiilcitung, n° 2) présente en termes précis, mais en se plaçant à un autre point de vue que moi, la notion des surfaces mobiles dans un fluide. — « Considérons, dit-il un fluide incompressible, limité par une surface extérieure o-q et autant qu'on a oudra de surfaces inté- rieures (T,, 0-^, cr, . et dont chacune soit à volonté une membrane légère ou la surface extérieure d'un corps solide... Pour plus de généralité, il me paraît préférable d'adopter le premier système de représentation (Vorstellung) et de considérer les surfaces o-q , a^, ^ = ^ 777 = ^' et elles deviennent : da da ,^,,j i'-- da.Y}-- da,^ 'I- da,B-da,^ <^^> < da __dD dt __ dB dttj D dttj ' tandis que les relations (19) donnent cette seule équation /o X T^T^ 1 ^^^ (^^ T- ^^« I ^-^D ^ da . f/D ^ da da 0:) DE + ^7^ = ^E.^^.+ ^E.^^ + ^E.^+^ = o Dans ce cas où le mouvement est stationnaire , c'est-à-dire se conserve la stabilité des filets liquides (Congrès de Paris et d'Ajaccio 1900-1901), la manière de procéder coïncide avec celle que j'ai indi- quée précédemment, sauf un complément nécessaire. Les vélocités instantanées p, 7 deviennent des vélocités absolues b, c, mais la coordonnée curviligne y. doit être remplacée par une troisième vélo- cité a qui doit satisfaire à Téquation aux dérivées partielles du pre- mier ordre et linéaire (ij). On peut alors opérer comme il suit ; il faut d'abord déterminer/^, q, r, de manière à vérifier les équations aux dérivées partielles de THydi^odynamique , en supposant que E est une fonction de /3, 7, si le fluide est incompressible et sans cette restriction, si le fluide est aériforme. Dans la première hypothèse, il n'y a plus qu'à intégrer l'équation aux dérivées partielles du premier ordre (S^) en y donnant à E sa valeur. Il y a pour cela un procédé général qu'il me paraît bon de signaler. Les équations différentielles simultanées qui correspondent à l'équation aux dérivées partielles à É. FOÎVTANEAU, — PRÉLIMINAIRES d'hYDRAULIQUE ^5 intégrer sont les équations (12) et, comme p, q, r ne contiennent] le temps t que par leur facteur commun E, on aura d'abord pour les intégrales /3, 7 des fonctions de x,j', z à coefïicients constants, j On pourra ensuite déterminer a en faisant usage de la relation (ID , , f/D , , É?D , , pdx -[- qd)' -\- rdz da^ da.^ da, \da^ ' da^ ~^ da.^ ] d'où l'on déduit : JD , , ^/D , , f/D , /-" -7— dx -\ — 1— dr 4- -, — dz /■ , / da. ' da., -^ ' r/«, , ^^ ^ (38) /e rf< - / 'rfD^ rfD, ,;u; + f (P. ï) = «• H~ r da^ da.i da^ Dans le premier membre de cette égalité , l'intégration devra jêtre effectuée par rapport à t sans égard à p, y, seules variables qui entrent dans E avec le temps , et pour le second membre il y a lieu de faire une distinction. Si la relation /Q X dTi j . djy . . dB j <^9) ^^ dx + j^/y^- ^^ dz = o est une équation difierentielle intégrable dont l'intégrale soit a =^ const, on pourra poser (congrès de Nantes, 1898) dB_ (h (TD _ d^ dB_ dy. da, dx da, cly da^ dz et on aura pour le second membre de l'équation (38) /dy. "D ' à cause de l'égalité r» _ f^D , fHD xdB _ [dy., dy., dy., ^ ~ ^ • ^ dy., ' ^ dy../' - "" \dx ^dj^~^l~z D en résulte (4o) /^ '^^ - / ï + '^^'^' ^^^ = "^ ' en supposant que D ait été exprimé en fonction de y., p, y et que 46 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE l'intégration du second terme soit effectuée par rapport à a en trai- tant |3. 7 comme des constantes. Si l'équation (Sq) n'est pas intégrable , on peut lui substituer une relation différentielle par rapport aux variables z, /3, 7, en faisant usage des formules de transformation pour les coordonnées curvi- lignes (Congrès de Boulogne-sur-Mer, 1899) et poser -=- dx + -1— <0^ + -7— dz. = D dx, dj', dz, dor. "^ dy. "^ dy. I dx dx dy dy _i_ ^ f^\ ir. \i ^^■'^ ^l^ .(^dj'dz^ch\ ,1 '^ \ch. Ir^'^ Ib. t^ '^ Wj. dp] '" "^ \7r7 dy. ^ T^ dy. ^ d^ dy.) ^J où l'on doit siipprimer les termes où dp et dy entrent en facteurs parce que /3 et 7 doivent être traitées dans l'intégration , comme des constantes. Gomme on a d'ailleurs, en vertu des mêmes formules f/D, _, dT), , dT), -p^a {f^-^i _i_ (b'i 1 f^-i lu, ^ Ih, '^ H, ~ ych.^lh.^lh. 11 en résulte que le second terme de l'équation (38) se réduira encore /dy. -—et que la formule (4o) donnera encore l'expression de a. Dans ce calcul , on pourrait donner à a une valeur arbitraire , mais il paraît préférable de lui substituer la quantité s dont il est question au n? 3, en même temps qu'y est indiqué le moyen de l'obtenir, en modifiant l'équation (39). Si par la nature du fluide , ou à raison des influences auxquelles il est soumis, on était obligé d'avoir égard à ses changements de volume, E devrait, comme je l'ai dit, dépendre généralement de ^, de ^, 7 et d'une fonction arbitraire a. Dans ce cas l'équation /f/D , ^t\ , , IdJy . dT\ , , IdB . dr\ , <4") ^'" dV. , rfD. , rfD. -" — - H -^ dy, dy.^ dy.j se changerait par l'introduction des coordonnées curvilignes /3, 7, e, à la place de x,j', z en une équation différentielle qu'il y aurait à intégrer en traitant /3. 7 comme des constantes, puis on en désigne- rait par a la constante. 7. — Lorsque b, c, dépendent du temps aussi l>ien que a, l'emploi des formules (18) devient moins facile, mais dans un grand nombre É. FONïANEAU. — PRÉLIMINAIIIES d'hydRAULIQUE • 47 , q. i\ des expressions valables, il n'y aura pas de dépendance immédiate de ces variables intermédiaires aux vélocités absolues a, b, c. On sera donc libre d'adopter de préférence pour données celles que Ton croira de nature à conduire aussi aisément que pos- sible au but poursuivi , sauf à le compléter au moyen des relations (19) ou plutôt d'une de ces équations aux dérivées partielles du premier ordre et linéaire , dont l'intégration donnera simultanément les trois fonctions a, h, c. Les formules générales de la transformation des coordonnées curvilignes (Congrès de Boulogne-sur-Mer, 1899) sont indépendantes du nombre de ces coordonnées. Pour les appliquer au cas où il y aurait à considérer plus de trois coordonnées , il faudrait avoir soin seulement de tenir compte des changements de signe qu'amène dans le développement par voie récurrente d'un déterminant le fait d'être de degré impair ou de degré pair. Si , conformément aux données du n" 3 , on fait correspondre aux 48 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE quatre variables x,j^, z, t, les coordonnées curvilignes a, b, c, G, on peut poser : f dx dl\ \^ dG dG, ^^^> ^ dt dK ( ^G dGt dx dR dx ^^ da da, db ' dt. dR ^ dt da dat ^^ db dR ^ dx _ ~ db^ de " _ dR ^ dt _ ~ dbt de~ dR ~ de, dR ~ dct et il en résulte : dx dG <^^> P = dt dG dy dG ^ dt dG dz dG "^ dt' dG Si dans ces expressions on fait G = ^ ce qui est permis, puisque G désigne une fonction arbitraire sauf à être indépendante dea,b, c, elles se réduisent aux identités dx djy dz P^Tt ^ '^'dt ^ -~Tf Ce calcul n'a d'ailleurs quelque intérêt qu'au point de vue théo- rique; il ne pourrait être utile que pour substituer aux procédés usités pour la mesure du temps, un mode spécial d'évaluation emprunté à l'Hydrodynamique; de même, par exemple, qu'on s'est. servi du théorème de Sadi-Carnot pour introduire dans la Thermo- dynamique la notion des températures absolues. Si j'ai cru devoir le présenter, c'est que les anciens géomètres se sont beaucoup occu- pés de la théorie d'horloges spéciales désignées sous le nom de Clepsydres et fondées sur le mouvement des liquides ; il en est encore question dans le traité d'Hydrodynamique de Bossut. 8. — Si, quand a, b, e dépendent du temps, il jiarait impossible, à raison des circonstances, de réduire, comme il vient d'être dit, au cas de la stabilité des filets liquides , l'intégration des équations aux dérivées partielles de l'Hydrodynamique; s'il s'agit, par exemple, du calcul de Felfet des machines ou du mouvement d'un ou de x^lu- sieurs corps dans un liquide , on sera obligé d'employer les expres- sions (i8) dans toute leur généralité. Lorsqu'il s'agit d'un fluide incompressible, c'est-à-dire d'un liquide à température uniforme et constante, la condition de continuité du liquide (23) se réduit à dp , da , dr É, FONTANEAU. — PRÉLIMIXAIKES d'iIYDUAULIQUE 49 et il en résulte pour les quantités E^ , E2 , E3 , une relation spéciale que j'ai démontrée dans une communication antérieure (Congrès de Nantes, 1898). Je la reproduis ici avec les notations actuelles : ,^ -^ ^ SD / d (la . d db , d dc\ dE, , f/E., , f/E, T7 ~^\-r -77 + -JT ^-\- i--77] = o -~ -| — jj^ -| p = S/ \da dt ' db dt ' de dtj (45) { D^ ^ j _, da db dc\ ^ où F désigne une fonction à coefficients constants. On a d'ailleurs pour la première des relations (45) aD sin^ 6, , dX sin- 6.. sin^ e. U A' sin^ (' dt B- sin^ ç C^ sin- q ..^. I cose^cose, — cosô, d cose, cosô, — cos9. (4b) { ^T^ — ;-^ -j-, (13C COS 9.) — ^TTT r— 5 ^ ^ I BL snr p f/^ ^ ''^ CA sm^ ç d .^. ^. COS 9, COS Q, — cosS, d ^.^ 5-^ (CA COS 6.) - ^^g^r^^ ^^ (AB COS e,) = 0, n posant pour simplifier et conformément à l'usage , ., dû dû da db , db , de dx ^ dy ^ dz dx ^^ dj^ ' rf;- C^ z= c?c fie .de dx'^^d^-'^-^dl'' da db . da db . dadb . _. db de , db de , db de -J--! — ti- -J — — r-'-7-=ABcos93 -i--7 — — j-^--\ — 7 — 7-=BCcos9, dxdx ' dj'dj' ' dz dz ' dxdx ' dj-dj- ' dz dz "'-^'-"^■'1 f/c f/« , de da de da —J 7 \- -, -J 7 7— := CA COS 9, dx dx dy dj- ' rf3 dz ^ et sin- p = I — cos^ 9, — COS- 9, — cos^ 63 + 2 cos 9, cos 0, cos 9j Dans tous les cas , on a les expressions suivantes à former ( Lp + M, + N. = n=(L:i|; + Mg + N:f)E. et (48) da , T^^ - .N f ) E. = (2 A3 b,—o. A, c,) E, + (2 A, f , — 2 A3 a,) E, + (2 A, rt, — 2 A, &,) E3 ^ \ (If, de,] E. FONTANEAU. — PRELIMINAIRES D HYDRAULIQUE 5l = (2 A3 6, — 2 A, c,) E, + (2 A, c, — 2 A, a,) E, + (2 A, a, — 2 A, b,) E, .L,_.Mp = (.Lg-.M;j^)E, + (.L i!--f)-. de, dc^i == (2 A3 &3 — 2 A, c,) E, + (2 A, C3 — 2 A3 «3) E, + (2 A3 «3 — 2 A, b,) E, , , j dB ,, dD\ „ + 2L -^ — 2M -f- 1 E, En effet, iljen résulte cette transformation des équations cLEuler et Navier f ^^ - A A^ + 2 (A, E3 - A3 E,) a, + 2 (A3 E, - A, E3) b, + 2 (A, E, - A, E,) c, = ^ dx (5o) ^ _ J^ aV + 2 (A, E3 - A3 E,) «, + 2 (A3 E, - A, E3) b, + 2(A,E,-A,E,)c, = g /,^W-I!-^ + (^+/Oô — -- ^'r + 2 (A, E3 - A3 E,) a, + 2 (A3 E, - a, E3) b, + 2 (A, E, - A, E,) c, ^ ^ d'où il résulte pour les équations d'intégrabilité : ^_AA^L-f-«3^(A.E3-A3E,) + Z,3|;(A3E,-A,E3) + ^3 A^ (-^1 E. - A, E,) - «. ^ (A, E3. - A3 E,) -b,~ (A3 E, - A, E3) - c. A (A, E, - A, E,) ^^M 1 ;3M + a, ^^ (A, E3 - A3 E,) + b, ^^ (A3 E, - A, E3) (5i) dt + c, ^ (A, E, - A, E,) - «3 A- (A, E3 - A3 E,) dz dx - ^. ;^ (A3 E, - A, E3) - c, ^^ (A, E, - A, E,) d: 1 dx dx d dx + c. ^. (A. E, - A, E,) - a, ^ (A, E, - A, E,) - ô, A. (A3 E, - A, E3 - c, A (A, E, - A, E,). 52 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE On déduit de ces dernières (la IdL A , ,T \ I d^ /f^M dx \ dt dy \ dt M+PÀ da Id^ _ h ^^^\ dt a + ^ :è C-^. E. - V, E,) - ;^ -1 (A, E. - A. E,) f/c.) d f/D d db, dj h , (A, E, - A, E,) -~4: ( ^1 E. - A, E,) dbj dz db IdL dx \dt p I f/D d dy \dt p 1^ dz. \ dt p dD d ^ - - -^^L + ^. (^^ - - A^M) +:v^ ri±:_ - A^NI (52) = ^ ^. ^'^ ^^ - '^ ^^> + ^ dj^ ^'^ ^^ - ^^ E^> + ^4(A,E.-A.E.)-^^(v.E.-A3E.) ddi dz de, dx dD d ^ ^ ^ , r/D f/ - (A, E, - A3 E,) - ;^.;^ (A, E, - A3 E,) dc.^ dj' de, dz dx \dt p / ' dj' \dt p / ' dz \dt p j + SI<*'E,-.v.E.)-g^(,v.E.-A,E.) Il faut remplacer, dans ces différentes formules, les fonctions E par leurs expressions déduites des équations (19) ; d'où il résulte A,E3-A3E. = ^ .3^ (53) A3 El — A, E3 = — - 1 A.E^-A.E,= j^lU^-A, ^^ db dt (h ' dt da \, de ' 'dt da dt db Dans ces expressions, le dénominateur commun D est une fonction à coefïicients constants des quantités a, b, c, mais rien ne dit qu'il en soit ainsi des trois numérateurs db de de '^3 -77 — Ai -77 ' Ai -j- — A dt dt dt da 'dt' ■da db ^'Tt -^''dt' É. FONTANEAU. — PRÉLIMINAIRES d'hYDRAULIOUE 53 Néanmoins on peut toujours les exprimer en fonction de ces mêmes quantités et du temps t; car il n'y a qu'à y remplacer partout x,j-, z, par leurs expressions en a, b, c, sans s'occuper de t. Par suite, on peut substituer aux relations (52) les suivantes : (54) P I ' dj' \dt p } ^ dz \dt p dx \ dt = D dh^ IdJL dx \ dt h_ P ^ (A3 E, - A, E,) - A (A, E, - A, E,) -)+l-•(f-^-)+::^(f-^- = D |^(A,E.-A.E.) d_ de de IdL h j \ de UM h TiT.\7rT-J^^j^dJ''\dt~J dx \ dt (A, E, — A3 E,) de IdM h / ' dz \ dt A^N \ D db (A, E3 - A3 E,) da (A3 E, - A, E3) A ces formules, qui sont relatives aux équations d'intégrabilité, on peut ajouter les suivantes qui se déduisent des équations (5o) (55) dxldp_h_ \ ^iridq_h \ ch^ I dr h_ da\dt p ^)^da\dt p ^j^da\dt. p + 2 (A, E3 - A3 E,) = '^ d-y l dp h \ dj- I dq h \ dz I dr h } db\dt~'J Pj^db\dt~i^l^db[dt~J-'l + 2:(A3 E, - A, E3) = J|. A. = w -Xl_ ^ + (o.+ /o e (j:^ [dp _ h^ ^ \ .({r l dq _ h_ ^.^ \ (h ldr_à^,j, de \dt p ^ 1^ de\dt p ^ ] ^ de \dt p \ + 2 (A, E, - A, E,) = dk de en faisant entrer, d'après M. Boussinesq, dans l'expression de k un terme qui déi)end de 6 = -^^ — \ — ^ -j j— et des constantes û' et h dx ' dj' ' dz relatives à la nature du fluide, parce qu'il s'agit ici aussi bien des lluides aériformes que des liquides. Lorsqu'on se restreint au cas des liquides et qu'on fait abstraction 54 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE de la viscosité ; les équations (55) doivent se réduire à celles de Lagrange, que KircldiolF présente ainsi après les avoir généralisées. (56) dx ^p dj- Sy 1 d-- §/' (la M ^ da U ' da U dW d m da da p dx 5/) dj' Sf/ dz §/' db U ' (ib U '' db U dW d co db db p dx S/j dj' §f/ dz §/' de U de U de U r/W fi ^ ^ de de p Ici j'ai employé S pour indiquer la diflcrentiation totale des quan- tités p, (/ , r. par rapport à t et il faudra pour l'accord indiqué des formules que l'on ait [Pd^^'^dJ^^' 7hld^'^\P dx^'^J^^'^lhj (la . .1 dr . (h- 1 <://'\ d: dY /, t? , t? \ [Pd^^'^dy^' 7h]ib'^\Piûr^'^7ij^^' dzjdb [P-d^r^'^-dJ-^'^z] ^+i^M^ + '^^ + ' dz] de Ainsi qu'il en soit, si on fait la somme des équations (56) après les avoir multipliées respectivement par —— , -j-, -j-, il en résulte Idx da dx db dx de\ S/) Idj' da _,({)' db_. dj' (lc\ Sy [(hidl^db dt^dc'dij'Û'^\(fâTt^'([b di^d^dtjÛ ^ , _, Idz da dz db . dz dc\ §/• ,_ r/a rf w db d m ^''^'^^ '^[dâll'^ (WTn '^dcdtjû^ dTdâJ~^ dTdbJ de d 03 (l\Y da d\Y db r/W de _ ^ '^ dt de p da dt db dt de dt~^' Si on pouvait, conformément aux expressions (i8) des compo- santes de vitesse, poser pour p — - dx da ~ da dt dx db dx de db dt de dt ^l dz da dz db da dt db dt d)- da da dt ~ dz de ~ de dt (ly db db dt dj' de de dt É. FONTANEAU. — PRÉLIMINAIRES d'iIYDRAULIQUE 55 l'équation (5 7) se réduirait à _ Sp_ Sy_ ^ j_ I _d_ ffa _£ db d de] o^' P U 'i U '' dt + \da dt ^' db dt '^d^dtjj \da dt~^ dbTt^d^ ~dt] ^^ = ^ D'autre part, si on opère de même sur les équations (55) après y avoir supprimé tous les termes qui dépendent de la viscosité, on obtient par suite des relations (53) .g dp dq dr dk da , dk db , dk de W P dt+'lTt+'^di-d^Tt+db-dt + Tc-di Le résultat de ces opérations est, comme il a été dit au \i° 3, d'une exactitude douteuse, parce qu'elles s'effectuent avec des valeurs imparfaitement déterminées de a, b, c. Néanmoins on peut observer que l'on satisfait simultanément aux équations dont il s'agit en supposant que l'on ait <58) ^- W =f{a, b, c) ^' =p (a, b, c) avec des coefficients indépendants du temps. S'il était possible de démontrer rigoureusement l'exactitude de ces formules, on aurait deux théorèmes généraux d'une grande importance pour les fluides sans viscosité. Je crois donc pouvoir les signaler à l'attention pour qu'on essaie de les vérifier tout au moins dans des cas particuliers. Je ferai observer encore que les équations (56) ont été intégrées par Caucliy et après lui par Kirchlioff qui en a présenté ainsi les intégrales On en déduit 2A, 4-A'D = o 2A, + B'D = o ■2\,-\-GD = o. Gomme ces équations sont indépendantes de W et de — ce sont de P véritables équations d'intégrabilité et il suffit d'y satisfaii^e pour 56 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉGANIQUE être assuré que la quadrature nécessaire pour obtenir l'expression de — iiourra s'effectuer. P Revenant au cas général, si l'on a dp h , dq h , dr h ^ il vient pour la détermination de k k = if{x, E3 — A3 E,) da + (A3 E, - A, E3) db + (A, E, - A, E,) de formule plus généralement intégralile si l'on a rfL ,^ dM ,,^ d^ *-^'L = o -^-.'^1 = 0 ^-^'N = « Je me suis jusqu'ici exclusivement occupé de la méthode d'inté- gration basée sur l'emploi des vélocités ; quant à celle qui procède d'une connaissance plus ou moins complète des vorticites, je lerai observer qu'il est possible d'opérer comme on l'a fait pour les com- posantes de la vitesse, c'est-à-dire de poser : .^ . dx dy dz , et en déduire pour les composantes de la rotation élémentaire des éxj)ressions analogues à celles qui ont été données ]50ur les compo- santes de la vitesse. Mais ici la question de continuité n'est pas en jeu et L, M, N ne sont assujetties qu'à vérifier l'équation dL , dM , f/N <^^> ^ + 7^ + ^ = ^- Il faudrait donc restreindre la généralité des formules ainsi posées de manière à ce qu'elles vérifient la condition analogue à celle qui est donnée par la première des relations (45) ; cette complexité ne paraît pas nécessaire et on pourra se contenter d'employer, comme on la fait jusqu'ici, deux vorticites Ç, r, et une troisième coordonnée curviligne Ç généralement arbitraire, mais pour laquelle il peut j avoir avantage à prendre l'intégrale de l'équation différentielle à trois variables (8). É. FONTANEAU. PRELIMINAIRES d'hYDRAULIQUE - 5j 9. — Pour donner une application simple, soit : p = Ky- + 2Br; + A"z^ + iCy + aC";- + D 2L='^- J = 2(B"-B').v + 2A:;'-2A"^ + 2(C'-G") q = A"^^ + 2B':..v •+ A.v^ + aC"; + aC.v + D' ^^'^ j^M = ^ - '1^ = - 2 A.V + 2 (B - B' ) j' + a A'.. + a (C' - C) /• = A.v^ + iWxy + Aj'^ + 2C.V + aCj' + D" 2N = ^-^' = 2A.v-2Aj- + ^(B'-B)r + 2(G-G') Il ne peut s'agir ici que d'un liquide, puisque les composantes de la vitesse vérifient l'équation (44) d'incompressibilité et il faut que ces composantes et celles de la rotation élémentaire satisfassent aux équations d'intégrabilité : JL h ^ , dh , Id^l , dL\ , IdL , f/N\ dn dt--p''^ + 'dxP-^W^di--]^+[d^+lû-j' = dx \dM h ,, , IdM , dL\ , dU . jd^ . dm . du n = Lp + Mq + Nr On a pour cela 2^=2(B -B). 2^=2(B — B ), 2 ^=2(B — B) a.x- ' «>' «r ' dz- dz ax et '— = (X'j'^ — A"c.^) (A — B' - B") + 2A [(B" + B — A) x^ + (A"-B-B')c.v] + ^' = (A"^^ - Aa-) (A' - B" - B) + 2A' [(B + B' - A")j^z + (A-B'-B")A:r] + dz. ~ = (Ax' — A>0 (A" — B — B) + 2A" [(B' + B" — A) zx + (A' - B" - B)jrz] + 58 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE en se bornant à écrire les termes du second degré en x,j^, z. Comme ces termes doivent s'annuler séparément dans les équations (6i), il en résulte : A(A' — A") = o A'(3B" — B — A") = o A " (A ' + B " — 3 B) = o B (B" — B) = o AB + A'B' — A A" = o A"B" + AB = A"A' = o et les douze relations analogues cju'on obtiendrait en effectuant les opérations circulaires. Je suppose qu'aucune des quantités A, B ne soit nulle ; il faudra donc, pour vérifier toutes ces égalités, que l'on ait A = A' = A " B = B' = B" A = 2B. Par suite les équations d'intégrabilité deviendront + A (D" + D') ^ . - ^ x+^^ (C " - C) = 2 A' (C - C')y + 2C' (G - G") + A' (D — D ") ^ X- ^j-+ j^ (C - G') = 2A" (G' - G) ^ + 2G" (G' - G) + A " (D' — D) et il en résulte G = G' = G" D = D' = D" ^1=0 D'après cela les équations (Gi) se réduisent à ( /> = A (jr^ +j'z + z.^) + 2G O^ + c.) + D L = A Cr - s) (C3) )q = X{z^-^ zx + A-O + 2G (c + a) + D M = A {z - x) {r=A {x^ + -v;- +J-) + 2G (a- + j-) + D N = A (a- -y) et il en résulte ' (64) L79 4-Mr/ + N/' = n = o Dans ces conditions le mouvement est orthogonié, stationnaire, et on peut lui appliquer la méthode du n" 6, soit d'abord pour détermi- ner j3 et 7 les équations différentielles simultanées dx A 0-^ +J- ■r) + '2 GO- :.) + D A(:: ^2 ■,x -\- A-O + dz 2G(: A) + D (65) 1 -^ \^ -r ^'^ -T '^ / -T -'^ V- -r -^z -r ' ^ dz A {X' + AT +J-) + 2G (A- +J-) + D - '" É. FONTANEAU. — PRÉLIMINAIRES d'hYDRAULIQUE Sq On en obtient une première intégrale en observant qu'à raison de l'identité n = o et en multipliant respectivement les deux termes de chacun des trois rapports respectivement par ;' - — z, z — x, x — y et faisant la somme des produits, il vient (6(3) Q. _ c) ,/,v + (c - .V) dy + (.V -J-) (h = o, équation qui peut remplacer l'une des équations (65) ; elle est inté- grable et on en déduit (67) P-'^'~' X — Pour avoir une seconde intégrale, il faut dabord éliminer z de <;elle des deux premières équations différentielles (65) où n'entre pas sa différentielle.. On a pour cela r — jS-V . I ^__ — px + i'i — p)j' (i — 2,5).V+J^ ■^ ~ I — /3 -^ "1 '■■ "■ I — .3 .. -t- .\ — j _ ^^ ,. , ,.. , ,. _ ^-.v- + (;5- - 3^) -vr + (^- - 3p + 3)j- ., I ., I ^. (35--35+i)A-^+'(r-33)Afr+.r •et il vient ])Our l'équation à intégrer dx A[/3^v^ + C3^-3j3).v:;- + (/S^-3p + 3)j-] + 2G(i-/5)[2j'-p(.v+;')] + D(i-|3)^ — A[(3,S^-35+i)A- + (i-3fi).v;'+j-]V2C(i-,5)[(i-2p)eV+ji+D(i-p)^ Si pour simplifier on jiose X = A (j- +j-:. + z-^) + 2C (j- + c) + D Y = A (c^ + ^-v + .v^) + 2C (c. + .V) + D Z = A (A- + xj' +J-) + 2C (A- +J-) + D, le dernier multiplicateur f* de l'équation différentielle (68) aura pour expression, d'après le théorème de Jacobi, M dz en désignant par M un facteur commun tel que l'on ait identique- ment, d (MX) d (MY) (/ (MZ) _ ~(br + dy + dz -^ (Boole, Équations différentielles, cli. XXXI). 60 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE Or ici cette dernière relation se réduit à cM cM cM dx "^ dj^ "' dz y — z et on peut poser M = p = . ^ , puisqu on ei dQ , f/5 , f/5 par suite il vient p _ i5 /.. .^ _ r^ (69) i^ = jp = (7^77) <-^" - ^■> = (T=iy. (-v - J*)- dz On peut prendre .%• — j' pour le dernier multiplicateur et de son emploi ; il résulte [A (3,8^ — 3p + i) .%•' — 3A pKxy + 3A px^^ — k.y + 2C (I - S) (I - 25) A- + 4C (I - ,8) p xj' - 2C (I - fi) jr^ + D(i-i5)^(A--j-)]dx ^^^^ ^ _^ [A (p^ — 35 + 3) j-^ — 3A XX' + 3A |3.v^j- — Kp' x^ + 2C (I - ,3) (12 - p) j- - 4C (I - p) .xj- + aC (I - ,5) p.x- + D (I - p)-^ O' - A-)] ^/;^ = o pour l'équation à intégrer. Intégrant on obtient (3p. _ 3.5 + I) -^^ + A (,5-^ - 3,5 + 3) '-^ - AS^xl)' 7 = KV — ^.^ -t- ^^ 7 — Ar^v 4- 3A/5 A'^;- .3 1,-3 ^^'^ ^ + aC (I - p) (I - 25) j + 2C (I - ,5) (2 - .5)^y + 2C (I - 5) Pa-^' - 2G (I - ,5) j-x + D (I - /3)^ '1 + D (I - /3)^-^~ D (I - r,y xy + ,, (S), en désignant par y une fonction arbitraii'e. 10, — Il faut encore intégrer l'équation diflerentielle : , (^2) pdx -\- qdj' -\- l'dz = o qui dans le cas actuel est intégrable. Pour cela, j'observe d'abord que l'équation différentielle (^-2 ^ ^.. _|_ .2) ^_^. _^ (.. _|_ .^. _^ .^.2) ,/^. _|_ (.^.2 4_ .vr +j^^) f/^ = o É. FONTANEAU. — PRÉLIMINAIRES d'hYDRAULIQUE 6i a pour intégrale £ (Calciil intégral de Lacroix, chap. iv, n" ^oS). Soit ensuite pour abréger on pourra mettre l'équation (72) sous la forme : Hir +J'Z + ^^) d'X + (;-^ + ;.V + A-) dj' + (A- + XJ' +jr^) dz] + 2C I f/? — 2C f/v, + Df/ç = o et comme on a f/ = ^^" +^^'^ + "^ '^■^' + ^'' + ^•^' + •^"> ^^' (•^" + •^■>'* +J'" ^l~- il vient AÇ^ dt + (2CÇ + D) di — 2G f/y, = O. On peut réduire cette équation différentielle à ne contenir que deux varialjles, en ayant égard aux relations l' = i-n + iK s = |; car il en résulte ^dK — Kdl ^dl =r dr, + dç, de = V et par suite l'équation différentielle à deux variables (73) (A? + 2C)f/ç - (A? - B)dS = o qui a pour intégrale ^^^^ " - AÇ + 2G - A(A+j- + c.) + 2C • En effet, il vient dy._ X{r +y^ + Z-) + aC cr + --) + D ^A- ^ (A? 4- 2G)^ dy-_. A(c-^ + ;a- + ^'^ + 2C (^ + .y).-}- D dj ~^ (AÇ + 2G)^ ^ , . A(a-^ + xy + j-^) + 2G (.r 4- r) + D dz^ ^ (A? + 2G)^ 62 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE ce qui montre que l'équation difTérenticUc (72) a pour facteur d'inté- erration ^ A II. — Pour compléter la solution du prol^lème, il faut encore qu'on puisse donner aux composantes de la vitesse les expressions I_db de dbdc^_ (h_ _db^dc^ __db dc^_ (J^ P^dJ-Tz^Tz dj' — '' dx ^— dz. dx dx dz —^dj- _dh^dc_ db_dc^_ d^ ^ dx dj- ~ dj- dx dz ' en faisant b = S et déterminant c par la relation c ^ f (y), où / dé- signe une fonction à déterminer. Dans cette hypothèse, les équa- tions (^5) deviennent _ld3 dj_ d^dy\dc^ Idfi dy _ dS dy\ de P—\dy~ch~dz^^]'dy ^ ~ \dz dx dx dz ] dy _ Idp^ dy ^ dy\ de ' \dx dj' dj' dx] dy Il suffit dune seule de ces expressions pour déterminer C et dans ce but je prendrai l'expression de r. Pour abréger, je pose X = A (3;3^ _ 3/3 + i) x' — 3A/3^vy + ?>Kpx)^' — Ay + 2G (I - p) (I - 2,5) X-' + LC (fi - /30.vr - 2G (I - ^)jr' + D (I - 5)^ (.V -j^) W \ Y ^ A (S' — 3;3 + 3lr' — 3Axj-' + 3Ap.V^- — Ap^x» + 2G (I - p) (2 - p)j- - LC (I - p)xjr + 2C (I - p)x' + D (I - 5)^ O' - •^) On a d'après l'expression (71) de 7. flr_dydy^dl_ ,3 dy^ dx ~~ dx "1 dp dx ^ "i .Y — c- dp ^""'^ ^ dj' — dj' ^ dp dj^~ ^ x — z dp dy dy dp p — I dy dz dp dz .V — z dp' d'où il résulte dl g ^ Id^^ dx dy _ dp dy dy\ de (78) { '' - \dx ' ^ .V - z dp djr "^ "t- .^. _ , ,1c, j d^ -\dx^ dj^^]dy É. FONTANEAU. — PRÉLIMINAIRES d'hYDRAULIQUE 63 à cause de la relation da , dp d^ + ^dP=^^ et il vient (1^ Y - 0 X j (.V _ .) = - (X + pX) = (p - if [A (x^ -J-) + 2G (A- -J-) + D (.V -j^)]. Par conséquent on aura de (79) •; dx dj- " [A(a-^ + a:;-4-j--) + 2C(.v+j-) + D](.v-^) _ i ■(S-i)HA(A-3-j-^)+2G(A--j-)+D(.v-r)]~ ip-ir' On voit que c doit être fonction à la fois de p et de 7; mais il n'en résulte aucune modification de calcul, parce que dans la formation des expressions (^5) le quotient différentiel de c par rapport à p dis- parait de lui-même. Il vient donc pour exprimer généralement la fonction c (80) (P - ^r + ^(/3) en désignant par ^ une fonction arbitraire. Si ce résultat a été obtenu en faisant usage seulement de la com- posante de vitesse r, on peut en contrôler l'exactitude en opéranf de la même manière sur les expressions des autres composantes de la vitesse. On a d'après les formules (77) (81) ( 1 'dp dp dy dj- dz dz Uf - dz X dp I dp dy' dz X — z dz dp_ p dp dy dp dp dy' — z dz dp dx dz dp_ de dp de dy dz dy de dp de dy ^ dz dy ' en vertu des formules <^=) È- 1 dp I dp p — I X — ~- dj' X — s dz X — z Des expressions (81). il résulte, eu ayant égard aux relations (79) et (82), (83) (•V - '^y 0' - -Vf (x-zY- .\3 (r - •^') 64 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Pour ne faire cette vérification que dans les limites du strict néces- saire, je me bornerai à reirectuer pour la composante p et seulement pour les termes de son expression qui ont A en facteur commun. Il Tient Y (.V — zy = A jj-^ — 3a:;'^ + 3.v^-r^ — xlr' -f- ix' - 3.x:)''- + 3xir - .v^) =^ + Lr' - 3r^v + 3x1}-^ - xy) = j + = x(j'-zy(r' + ~-^j") + Quant à la seconde forme indiquée dans les égalités (76) pour les expressions des composantes de la vitesse , elle est immédiatement donnée par les quotients différentiels de a. doù on conclut .._ V _ [A (A- +j' + ^) + aC]^ (84) , /f^ 1 (^ 1 ^ \ dx '^ dy'^ dz A Après avoir obtenu ces résultats, il n'y a plus qu'à déterminer a en faisant usage de la formule (4o). On a pour cela tous les éléments nécessaires, puisque la valeur de D est donnée par l'égalité en désignant par V la vitesse du liquide et celle de a par la for- mule (74)- Je ferai observer que les surfaces a jouent dans l'Hydrodynamique de Lagrange le rôle qu'attribuaient aux plans mobiles de l'afllux les anciens géomètres et les disciples de Bernoulli, pour faciliter l'application du principe des forces vives; mais les surfaces en question se meuvent conformément aux lois de l'Hydrodynamique et, pour préciser, d'après le principe de Lagrange; tandis que le parallélisme des tranches , utile il est vrai , dans certaines circons- tances, n'est jamais rigoureusement exact. Arrivé en ce point pour le problème en question, il n'est pas encoi'e résolu, puisque, assuré sans nul doute que les expressions (63) des composantes de la vitesse vérifient les équations aux déri- A^ées partielles d'intégrabilité, nous ne savons pas encore ce qu'on peut attendre de leur substitution, dans les équations aux dérivées partielles d'Euler et Navier. Mais la distribution des vélocités abso- lues dans la masse liquide est connue; nous avons en main, s'il est permis de le dire, tous les éléments actifs de son état mobile et je n'irai pas plus loin. Je ferai seulement observer que, pour obtenir G. ARNOUX. — TABLES DE PUISSANCES DES MODULES COMPOSÉS 65 des résultats différents et plus complets, il faudrait taire usage de la fonction E des variables /3 et 7. Ce serait une nouvelle étude à entre- prendre ; mais je n'insisterai pas, n'ayant ici d'autre but que de faire comprendre et, s'il est possible agréer, les explications théo- riques auxquelles je me complais, dans l'intérêt de la Science. M. Gabriel ARNOUX Aiicit'u Otticier de Marine, à Les Mées (Basses-Alpes) CONSTRUCTION DES TABLES DE PUISSANCES DES MODULES COMPOSÉS [i3] — aéance du 6 août — Étude dédiée à M. C.-A. Laisant. Au Congrès de Montauban (*) j'ai donné quelques explications succinctes sur la Constiniction des tables de puissances de modale composé: je vais dans ce mémoire, traiter la question plus à fond, en construisant les tables de quelques-uns des principaux types et accompagnant mes opérations des explications les plus strictement nécessaires pour que le lecteur puisse se rendre compte de ce que je fais. Tout cliiiTre de module composé m = m^ . m, (//i, et m, étant des nombres premiers) est le résultat de l'association d'un chiffre a de module m^ avec un chiiFre a de module m.^ par la formule a -\- mult. //i, z= or. -\- mult. m.^. Toutes les associations possibles d'un chiffre de module m^ avec un chilVre de module m.^ y sont comprises sans répétition ; si le module m = m^ . m.^ . m.^ , les termes du second membre étant des nombres premiers, il en résulte une simultanéité d'égalités a -]- mult. m^ = X 4" mult. m, -)- a mult. m,. Le nombre d'égalités simultanées peut augmenter indéfiniment, le principe reste le même. (*) Compte rendu du Congres de Montauban, p. 3i. 5* 66 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Table de miinération. — Cotte tahlc sert à résoudre rapidement et sans calcul la totalité de ces équations simultanées, quel qu'en soit le nondjre. Voici, comme spécimen, la table de numération de module i3.5. Table de numération de module 13.5 i3.5 I 2 3 4 5 () 7 8 "9 10 11 12 i3 i3 i 2 3 4 5 G 7 8 9 10 II 12 0 5 I 2 3 4 0 I 2 3 4 0 i 2 3 i3.5 i4 l5 16 i> 18 19 20 21 22 23 24 25 2G i3 I 2 3 4 5 6 1 8 9 10 II 12 0 5 4 O T VJ 3 4 0 I 2 3 r 4 0 I i3.5 ^: 28 ^9 3o 3i 32 33 34 35 3() 37 38 39 i3 I 2 3 4 5 G 7 8 9 10 II 12 0 0 2 3 4 0 I 2 3 4 0 i '2 3 4 i3.5 4o 4i 42 4'3 44 45 4G 47 48 49 5o 5i 02 i3 i 2 3 4 5 G 7 8 9 10 II 12 0 5 o I 2 3 4 0 I 2 3 4 0 I 2 i3.5 53 :>4 55 5(; •^: 58 •^9 (H) ()i G2 G3 04 ()5 i3 I 2 3 4 »' 0 G 7 8 9 10 II 12 0 5 3 4 0 i 2 3 4 0 I 2 3 4 0 Ces tables de numération sont de précieux instruments de calcul. Ainsi, dans les tables de puissance de module composé, on s'occupe exclusivement des cliilfres premiers au module ; — l'exclu- sion des chiffres non premiers se fait en supprimant les colonnes où il y à des zéros. Admettons maintenant qu'on veuille connaître les chifTres carres pour un module composé m; on sait que tout carré pour un module composé est un carré pour chacun des modules composants ; pre- G. ARNOUX. — TABLES DE PUISSANCES DES MODULES COMPOSÉS (jj nons pour exemple m = i3.5 et écrivons les tables de puissances pour chacun de ces modules I •2 3 4 5 6 7 8 9 lO II 12 Indices. 2 4 8 3 6 12 II 9 5 lO 7 I Puissances. X X X X X X Carrés. I 2 3 4 Indices. 2 4 3 I Puissances. X X Carrés. Marchons du pas 2 sur ces tables et notons les chiffres rencontrés ; nous avons les carrés pour chacun de ces modules. Prenons maintenant la table de numération et, disjîosant nos «arrés par ordre de grandeur (i , 3, 4> 9» 10, 12) module i3, (i , 4) module 5, notons-les sur chaque ligne de la table de numération, puis notons les colonnes où simultanément tous les chiflres sont notés; nous avons m ■= i3.5, la totalité des chiffres carrés. Quant au nombre des carrés pour un module composé, comme toute association des carrés pour les modules composants donne un <,"arré pour le module composé, ce nombre est le produit des nombres de carrés pour chacun des modules composants. Ainsi, soit m = 3.5.7; pour m = 3 ce nombre est i ; il est 2 pour m.^ = 5, et 3 pour m^ = 7 ; il est donc 1.2. 3 ^ 6 pour m. Pour m = 3.7. II, il serait 1.3.5 = i5. Dans les opérations de calcul concernant les fonctions arithmé- tiques, les indices jouent un rôle capital, et le plus grand codiviseur des indices et de leur module un rôle important ; cette dernière con- sidération revenant souvent, je la symboliserai par C. La période à laquelle un chiffre appartient, c'est-à-dire le nombre de termes différents que l'on rencontre quand on fait les puissances successives d'un chiffre quelconque, a également une grande impor- tance, je la représenterai par P. 68 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE , GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE Il y a entre ces deux considérations une relation importante, pour un même chiffre on a C.P = le module des indices si le module de la congruence est un noml)re premier, ce module des indices = ? (/n) = (m — i). . Je dois ici faire une petite digression. Le mot indicateur étant généralement adopté par les mathémati- ciens comme définissant le nombre des nombres entiers non supé- rieurs à un nombre donné et premiers avec lui et symbolisé par f (m), il y a un grave inconvénient à donner ce nom au module des indices. Le module des indices pour toute table de puissances concernant un chiffre quelconque est le nombre de termes de la ligne. Quand on fait la table de puissances des imaginaires du premier degré ou chiffres, si le module est un noml^re premier (représentons dune façon générale ce module par m), le module des indices est effectivement © {m). Si m est un nombre composé a" . b> . c: . \e module des indices devient le plus petit comultiple de 'f(«'), <^{h>). y(cv), généralement représenté par ■!^{ni) et appelé l'indicateur réduit. Si l'on forme la table des puissances d'une imaginaire d'un degré supérieur à i, le module des indices devient m'^ — i. Adopter le mot indicateur pour représenter des choses aussi diverses serait fausser les idées et créer une confusion regrettable; dans le progrès des sciences, au fur et à mesure que les idées s'élar- gissent, on s'aperçoit bien vite que certaines considérations, qu'on avait regardées comme naturelles, demandent à être modifiées. Comme tous les inventeurs, j'ai commis cette faute en donnant le nom d'indicateur à (/?i" — i)î je m'en abstiendrai à l'avenir, récla- mant l'indulgence de ceux qui voudront bien lire mes études. Ci-dessus j'ai appelé les chiffres des imaginaires du premier degré; je vais m'expliquer à ce sujet. Dans les sciences , il v a un avantaare incontestalile à ramener sous une rubrique générale le plus possible de considérations spéciales. On traite d'une façon spéciale ce qu'on appelle le réel et ce qu'on appelle l'imaginaire. Or. le réel n'est qu'un cas anomal de l'imaginaire, cas dans lequel certains paramètres de la question que l'on étudie ont passé à l'état modulaire. Au Congrès de Marseille, j'ai donné quelques explications à ce sujet, relativement aux fonctions algébriques; pareille chose a lieu pour les fonctions arithmétiques. G. AIIXOUX. — TABLES DE PUISSAXCES DES MODULES COMPOSÉS ()() Les êtres arithmétiques que j'ai appelés chiffres, pour faire image €t me rapporter à la théorie de la numération, ne sont qu'un cas spécial du cas général des imaginaires arithmétiques. Les cMffres sont des imaginaires du premier degré, les tables de puissances des chiffres, des tables de puissances dans lesquelles le module des indices wi" — i devient wi' — i. Les procédés qu'on emploie dans leur construction sont absolu- ment identiques, quel que soit n, et l'on peut très bien les faire ren- trer dans une théorie générale. Au Congrès de Montaulaan, j'ai donné quelques procédés spéciaux pour trouver une racine primitive pour m = 'j, n = 3 et m = 5 ^ = 4- Mais il ne faut pas oublier que ce sont là des procédés dans lesquels, pour abréger le travail, on utilise les conséquences de cer- taines anomalies. Quant à la méthode générale, elle est pour tous les degrés celle qu'on expose dans tous les ouvrages traitant des congruences, c'est-à-dire un tâtonnement raisonné, une suite de calculs de fausse position , qui, conduits avec méthode, mènent for- cément au but. Je ne puis la développer ici, mais, si mon âge et mes infirmités me le permettent, je reviendrai sm^ ce sujet dans de prochains mémoires. Qu'on veuille bien me pardonner cette digression, elle me paraissait absolument nécessaire. Maintenant, revenons à nos tables de puis- sances. Puisque je suis à corriger des errata, je vais en signaler un com- mis page 2i6 du compte rendu in extenso du Congrès de Montau- ban. Le carré au bas de la page décompose le nombre ii4 ba en ses facteurs premiers. Voici le talileau concernant le nombre io4 h a, qui est le cinquième du plan o, et doit être substitué à l'autre. MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE 1 b 104 b a a o i 2 3 4 O lO.IO io4 124 i34 12, l3 io3 102 102 I lO.II i33 II. i3 112 i4 IIOI 2 lO I04'-2 II, II 12,11 i4 1102 i3,i3 i4i 3 lO 1043 i4,i4 i4,i3 II i4o3 12,12 III 4 io,i3 123 12, i4 142 II 1404 Dans les calculs relatifs aux fonctions arithmétiques, il y a un avantage notable à décomposer les indices et leur module , en leurs facteurs premiers; les opérations deviennent beaucoup plus simples. Ainsi , pour calculer le plus grand codiviseur C , les facteurs com- muns sautent aux yeux et C s'écrit au courant de la plume. Si l'on est obligé de prendre l'indicateur d'un indice quelconque a'- b°^ c: ... on sait que y(a« b? c:) = fia") ^(b >) f(c!).:. que y(a'0 =z a^ — ^ (//?). G. ARNOUX. — TABLES DE PUISSANCES DES MODULES COMPOSÉS ^3 Table d'association. — Dans cette table : Table d'Association m r= i3.5. « & c d e / 2^3 2.3 2^ 3 2 I Pi ?(Pi) 2^ 2 4 2 2 2 I I a A A B A B B i5 2 I A G B G E E 7 I I A G B D E F P. KP.) la première ligne et la première colonne contiennent les lettres de référence des tables de période des chiffres des modules composants; les deuxième ligne et deuxième colonne les périodes P décomposées en leurs facteurs premiers , les troisième ligne et troisième colonne les indicateurs des nombres P, c'est-à-dire i}>(P). Dans l'intérieur du tableau, les grandes lettres représentent les chiffres de module M qui correspondent à l'association des chiffres compris dans les lignes du cadre représentées par une lettre de même nature dans les tables de périodes des modules composants. Leur situation sur la table est déterminée par la condition que leur période est le plus petit comultiple des périodes des modules composants. 74 MATHÉiAIATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE Ainsi, les chiffres de module M représentés par A ont pour période 2-. 3. plus petit comultiple des périodes 2^3 représentées par a, et des périodes 2- représentées par y.. Le nombre des chilïres se rapportant à une situation de A est le produit des marcher sur celle-ci du pas . ' y. Au moyen de ces éléments, il s'agit maintenant de construire la table des puissances. Prenons au hasard une des associations représentées par A, soit 2 module i3 et 2 module 5; faisons la période de 2 module i3. nous avons la première ligne de la table des puissances écrite module i3; faisons la période de 2. module 5, et répétons-la jusqu'à ce que la ligne contienne 12 termes; nous avons la première ligne de la table écrite module 5. Au moyen de la table de numération, associons les chiffres des deux lignes et nous avons la première ligne de la ta])le des puissances écrite module i3.5. 1 2 '4 8 1(3 32 <>4 (33 61 57 49 33 I Module i3.5 2 4 8 3 G 12 II 9 5 10 7 I Module i3 2 4 3 I 2 4 3 I 2 4 3 I Module 5 X X X X Chiffres de période 2 -.3 La quatrième ligne du tableau indique les chiffres de période 2 -.3, inscrits dans cette ligne. Mettons-les de côté et prenons une nouvelle association de chitfres A, différente de celles inscrites dans la pre- mière ligne, soit 11 module i3 et 2 module 5; faisons la même opéra- 78 :MATnirimitives. question que j'ai traitée au Congrès de Montauban. La i)rocédure ci-dessus peut servir de tyi)e pour la construction des tables à lignes exclusivement C()m[)lètes, cest-à-dire dans lesquelles les ex[)osants des facteurs j»remiers des indicateurs des divers modules sont ou égaux ou zéro. Je vais maintenant traiter un cas, celui de m = 17.0, dans lequel {i'j) = '2'' et (j)(5) = 2- pour bien montrer les conséquences des écarts des exposants. Les éléments sont les mômes que pour le cas des tables à lignes toutes complètes; je n'eu reproduirai que celles qui sont nécessaires à la partie que je vais traiter; ce sont les tables de périodes, la table d'association et la table des puissances de module 17.5. Table d'association m 17.5 85 a b c d e i' 2'' 2^ 1' I P 1' 2^ 2' I I HP) a 12" 12' A B C C C P 2' T A B G D D 7 I I A B C D E P ?(P) O. AUNOUX. — TABLES DE PUISSANCES DES MODULES COMPOSÉS 79 Table des Périodes m =: 17 Indices I 2 3 4 5 6 : 8 9 10 II 12 i3 14 i5 16 C I 2 I 4 I 2 I 8 I 2 I 4 I 2 I iG Piiissanc'os ■3 () 10 l3 .") 1 T) II i(; \\ s j r \ 12 V) () I a 8 16 3 . 10 , 5 . II . 14 . j , 12 , G . h 4 8 • 9 • • . i5 . . . 8 , . 2 . c 2 4 • • • i3 • . . . 4 . . . cl I 12 . . . . . » • i() . . . . . . . e I I • . . • • ■ • • • • • • • I ?(P) P Table des Périodes m = 5 Indices I 2 3 4 C I 2 I 4 Puissances 2 4 3 I a 2 4 2 . 3 • S I 2 • 4 • . 7 I I • • • I ?(P) p 8(> MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Table des Puissances m = i;.5 = 85 I •2 3 4 5 6 7 8 9 10 II 12 i3 14 i5 iG 3 9 2" 81 :'3 49 62 16 48 59 7 21 G3 19 5- i 82 9 58 81 12 49 23 iG 37 59 78 21 22 19 28 i 29 :<3 6 81 3i 3() •A i() \) 2G II 21 14 GG 41 I 56 :<3 :9 81 54 36 in iG 46 26 74 21 71 G() 44 I 2 • 4 8 iG 32 - G4 4*3 83 . 4 77 16 53 64 42 • • 33 • iG • 67 . • . 5-2 . iG . 18 . • • 19 • 84 • 72 • • • 38 • 84 • 47 • Sur la talïlc dassociation, faisons le calcul des nombres de chiffres ayant des périodes 2\ 2', 2'; nous avons le tableau suivant : A période 2^ B période 2 ' C période 2- 8/ 32 2'('-i + l + I) = 0.4 2^2 + 1 + 1) = 4.4 2 (2 + I + l) + 2(1 + I.) = 12 ^ ^ ^ iG Voyons maintenant ce qui se passe : On a (j> '^ {m) r= 2' = 8; il y a huit chiffres de période 2^ dans une ligne complète ; le nombre total de ces chiffres est de 32 ; il y aura 32 donc "0"= 4 lignes de 16 chilires. Tout carré module 17.5 a 4 racines carrées ; tout chiffre de période 2* a pour racines carrées des chiffres de période 2^. Les lignes com- plètes contiennent 32 chiffres de période 2*^; il y a donc dans ces 32 lignes— = 8 chiffres de période 2'; comme il y en a iG en tout, il en reste 8 de non inscrites. Dans une ligne, il y a ^(2') = 2- := 4 chiffres de j)ériode 2' il y Q aura donc -r =:: 2 lignes de 8 termes. 4 "^ Dans les lignes ainsi construites seront donc 'compris tous les chiffres de période 2^ et tous ceux de période 2^ G. AUNOUX. — TABLES DE PUISSANCES DES MODULES COMPOSÉS 8l Passons à ceux de période 2^ : il y en a 12 en tout. Chacun de ces cliifïi-es est une quatrième puissance d'un chilTre de période 2' pour jn = 17.5, toute puissance d'indice 4 a 4 X 4 = 16 racines quatrièmes réelles. De plus, ces chiffres sont des deuxièmes puissances des 32 chiffres de période 2'. Il y a donc — tt = 2 chiffres de période 2^ dans les lignes de 16 termes et 2 dans les lignes de 8 termes, total 4- Comme il y en a 12 en tout, il en reste 8 de non inscrits. Dans chaque ligne, il en a ^(2-) = 2; il y aura donc — = 4 lignes de 4 termes. Ces lignes, au nombre de 10, dont 4 de 16 chiffres, 2 de 8 chiffres et 4 (^e 4 chiffres comprennent la totalité des chiffres premiers à J7i ^ 17.5. Quant à la procédure de la construction de la table , il me semble inutile de la donner. Pour former les nouvelles lignes , on prend une des associations non inscrites dans les lignes précédentes. Je vais maintenant dire quelques mots concernant les colonnes à chiffres tous identiques. Prenons la table de module i3.5. Nous voyons que les colonnes d'indice (4, 8, i) sont composées de chiffres identiques. La raison du fait est fort simple. Ces colonnes contiennent les y i ; or, 'f(i3) = 2^3, ■y(5) = 2^; le nombre des racines cubiques module i3 est de 3. Mo- dule 5, f{m) ne contient pas 3 ou le contient avec l'exposant zéro ; or, 3"=r i; I n'a donc qu'une racine cubique, qui est i lui-même. Le nombre des racines cubiques de I^ module i3.5, sera donc le produit ■du nombre de ces racines module i3 par leur nombre module 5, c'est-à-dire 3.i = 3. De là il résulte clairement que les colonnes d'in- dice (4- 8, i) seront composées de chiffres identiques. Le môme fait se reproduira chaque fois que les indicateurs des modules composants auront des facteurs contenus exclusivement dans certains indicateurs. Ainsi, pour ne pas y revenir, dans ?n = 3.'j.iï comme on a y(3) = 2, <û('j) = 2.3, çp(ii) = 2.5. il y aura 3.5 = i5 colonnes à chiffres iden- tiques, c'est-à-dire la moitié de la totalité des colonnes qui sont au nombre de ^(m) = 2.3.5. Ce fait est donc une conséquence très simple de la loi générale du nombre des racines d'indice a pour un module composé. Je vais maintenant attaquer les cas dans lesquels le nojnbre des modules composants est supérieur à 2 — soit m =:: 3.5.-. 6* 82 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE Pour procéder régulièrement il faudrait, pour la table d'association, construire un espace à 3 dimensions, ce qui entraînerait des diffi- cultés de procédm^e dans les calculs et exposerait à des erreurs plus fi^équentes pour l'opération des plus petits comultiples ; mais on tourne parfaitement la' difficulté, en faisant d'abord la table d'asso- ciation des modules 5 et 'j, puis celle des modules 5. 7 et 3. Si le nombre des modules composants était supérieur à 3, on pourrait procéder par compositions successives, en n'ayant jamais à opérer que sur des espaces à 2 dimensions, c'est-à-dire avec î2 coordonnées, ce qui demande une tension d'esprit bien plus ftdble. Voici l'ensemble des tableaux nécessaires pour une pareille opé- ration. On commence par faire la table d'association des modules 5 et 7, que nous avons donnée ci-dessus ; on calcule le nombre de terme» de chaque période, ainsi qu'il a été fait ci-dessus, et on procède ensuite à l'association du module 3, au moyen du tableau. A C C D E F 2 '.3 2.3 2^ 3 2 I 8 6 4 2 3 I a b 1 I I I A, A, B, B, B, E. E, F. Faisons de nouveau le calcul du nombre de chiffres de chaque pé- riode; nous avons : A, période 2^3 B, 2.3 C, 2^ D, 3 E^ 2 F, I 1.8 + 1.8 16 1(6 + 2)+I (> — 14 1-4 + 1-4 8 1.2 1 1(3 + i) + i 3 — 7 i.i I 48 G. ARNOUX. — TABLES DE PUISSANCES DES MODULES COMPOSÉS 83 Le nombre des cliiffi-es de période 2^3 est de i6; il en va 4 à la ligne; il y aura — = 4 lignes complètes. 4 Le nombre des chitTres de période 2.3 est de i4; il y en a 2 dans les lignes de 12 termes, il en reste 12; comme il en va 2 à la ligne, 1 2 il y aura — = (> lignes de 6 tenues à la ligne. Total 10 lignes, dont 4 de 12 termes et 6 de 6 termes. La marche générale est la même ; — on prend l'une quelconque des associations A^ , soit 2 mod. 7, 2 mod. 5, 2 mod. 3. On l'orme les périodes de chacun de ces chilTres dans le module que cela concerne et on les répète jusqu'à avoir 12 termes pour chacune. 2 4 8 iG^ 32 64 23 46 92 79 53 I mod. 3.5^7 2 4 I 2 4 I 2 4 I 2 4 I mod. 7 2 4 3 I 2 4 3 I 2 4 3 I mod. 5 2 I 2 I 2 I 2 I 2 I 2 I mod. 3 Au moyen de la table de numération, que j'ai donnée dans un mémoire au Congrès de Montauban, on calcule les cliilTres M = 3..5.7 et l'on a la première ligne du tableau ci-dessus. On en fait autant pour les associations non inscrites, jusqu'à épuisement. Puis on opère, comme il a été dit ci-dessus pour les associations de chilTres de période 2.3, et on a les 6 dernières lignes de la table des puissances. Il me sendjle inutile d'entrer dans les détails ; les explications que j'ai données ci-dessus me paraissant suflisantes. Poui'tant, pour ne laisser aucune ombre dans l'esprit, je donne ici la table des puissances écrites dans les modules 3.5.7, niod. 7, mod. 5, mod. 3. ' 84 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE Table de Puissances de module 3.5 7. Table écrite module 3.5.7. Table écrite module 7. I 2 345 6 - 8 9 10 II 12 1 I 2 4 8 16 52 04 23 46 92 79 53 I 2 io3 4 93 16 :3 64 82 46 i3 ;9 52 I 3 57 4 43 16 6: 64 58 46 22 -9 88 I 4 68 4 62 16 38 64 43 46 83 79 17 I 5 lOI 16 41 46 26 I 6 II 16 :i 46 86 I J 94 16 34 46 19 I 8 3i 16 76 4(j 61 I 9 :4 16 29 46 44 I 10 59 16 104 46 89 I Table écrite module 5 • I I 2 3 . ; 5 (1 - s 9 10 11 12 2 4 3 [24312 4 3 I 2 3 4 2 [ 3 4 2 I 3 4 2 I 3 2 4 3 I 2 4 3 I 2 4 3 I 4 3 4 2 [342x3 4 2 I 5 4 1 4 I 4 I 4 I 4 I 4 I 6 4 I 4 I 4 I 4 I 4 I 4 I rf 2 4 3 I 2 4 3 I 2 4 3 I 8 4 I 4 I 4 I 4 I 4 2 I I 9 2 4 3 I 2 4 3 I 2 4 3 I 10 2 4 3 I 2 4 3 I 2 4 3 I I 2 3 4 5 6 ^ 8 9 10 II 12 I 2 4 I 2 4 I 2 4 I 2 4 I 2 5 4 6 2 3 I .5 4 6 2 3 I 3 2 4 I 2 4 I 2 4 1 2 4 1 4 5 4 6 2 3 I 5 4 6 2 3 I 5 3 2 6 4 5 6 2 4 I 2 4 I 2 4 I 2 4 I n 3 2 6 4 5 8 3 2 6 4 5 9 2 4 I 2 ^ 4 I 2 4 I 2 4 I 10 3 2 6 4 5 Table écrite module 3. I I 2 3 4 5 fi ; S (, 10 II 12 2 I 2 I 2 I 2 I 2 121 2 III I I I I I I I I I 3 I I I I I I I I I III 4 212 I 2 I 2 I 2 121 5 2 1 2 I 2 I (> 2 121 2 I ^ 212 I 2 I 2 I 2 I 2 I 8 2 I 2 I 2 I 2 I 2 I 2 I 9 2 I 2 I 2 I III 2 I 2 I 2 I Le lecteur, en conipurant les trois dernières tables, verra sans peine ce fait que la vacuité de certaines cases ne provient pas tou- jours du même module. 5 6 7 8 9 10 Lignes X . X X . X XX. .XX Mod. -j Mod. 3 La table ci-dessus résume la situation, les croix indiquent la vacuité des cases; — on y voit que, [jorn* les 5'"'^ et io'"<^ lignes, la G. ARNOUX. — TABLES DE PUISSANCES DES MODULES COMPOSES 85 raison de l'iniaginarité est double . pour les lignes 7 et 8, Timagina- rité provient du module 7 et pour les lignes 6 et 9, du module 3. Quant au module 5, toutes les cases du tableau sont forcément garnies. Ayant donné au Congrès de Montauban la table des puissances de module 3.7.1 1, je donne ici les tableaux principaux concernant la construction de cette table pour que le lecteur, s'il le désire, puisse s'exercer à la procédure des tables à composants multii)les. m = 3.5.7 I ^(3) = 2 I ^(7) = 2.3 I ^(11) = 2.5 y (/;?) = 3'. 3. 5 = 120 I 1^ (m) = 2.3.5 = 3o Table des Périodes m, =: 11. Indices I 2 3 4 5 6 7 8 9 10 C I 2 I 2 0 2 I 2 I 10 Puissances 2 4 8 5 10 9 r- J 3 6 I a 4 10 2 , 8 • • • 7 . 6' • b 4 5 • 4 • 5 • 9 • 3 • • c I 2 • • • • 10 • • • • • d I I • • • • • • • • • I ?(P) p » Table des Périodes ni Indices I 2 3 4 5 G C I 2 3 2 I 6 Puissances 3 2 (3 4 fc' .> I y. 2 (3 3 , • ■ 5 . ,5 2 3 • 2 • 4 • • 7 I 2 • • 6 • • • 5 I I • • • • • I ?(P) P 86 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MECANIQUE Table des périodes m =: 3. Indices I 2 C I 2 Puissances 1 I a I 2 2 , b I I • I ?(P) P Première table d'association m = 7.11. a b c d 2.5 5 2 1 4 4 I I a 2.3 2 A A G C P 3 2 A D C F 7 2 I B B K K S I I B E K L P ?(P) P ?(P) A 2 (4 + 4) + 2.4 24 A, — I (24 + 8) -f i .24 — 56 B 1(4 -1-4) +1.4 vi Bi — I (12 + 4) + 1.12 28 C 2 (l -|- l) -f- 2.1 6 C, — I (6 + 2) + 1.6 i4 D — 2.4 — 8 D, — 1.8 — 8 E 1.4 4 E, 1.4 4 F 2.1 2 F, — 1.2 — 2 K— I (I + i)+ i.i — 3 K,-i(3+i)-f 1.3 7 L i.i I L, i.i — I 60 120 G. ARNOUX. — TABLES DE PUISSANCES DES MODULES COMPOSÉS 87 Deuxième table d'association m = (7.ii).3. A 2.3.5 B 2.5 G 2.3 D 3.5 E 0 F 3 K 2 L I P 24 12 6 8 4 2 3 I t(P) a 1 I A. B. G, A. B, G, K. K. b I I A, B, G. D. Ei F. K. L. P t(P) Malgré mon vif désir d'être bref, il me semble nécessaire de donner quelques explications sur l'ensemble de ce qui précède. Dans une table de puissance que représentent les points , ou cases de la table où il n'y a pas de chiffres ? Une solution réelle pour un module composé correspond à une solution réelle pour chacun des modules composants; si, dans l'un quelconque de ces derniers, ou dans plusieurs d'entre eux, la solu- tion est imaginaire, elle le sera également pour le module composé. La table doit contenir toutes les associations possibles de chiffres des modules composants, ces chiffres ont une situation déterminée dans certaines colonnes de la table ; si les qualités du chiffre ne con^espondent pas à sa situation, il rendra vides certaines cases déterminées. Fidèle à ma façon générale de procéder, je vais donner des tableaux explicatifs, indiquant d'une façon sommaire ce qui se passe. Pour ne pas encombrer davantage mon mémoire de figures, je vais opérer sur le module 17. 5 dont j'ai donné la table ci-dessus. 88 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE e; cs -a *^ — — — > a; « -^ S I- > l^ a s 5 *i cr. "^ S u oc ►3 - i ^ f « t^ !/! ? o o •U « p 1 a. « j; « !•) •k^ !S W ^. cS i< O •^ cS Ci — - - •r. bc î/3 1- O 75 1 ^> zr. x •l-H , f-i u: C/3 O w • p-l -H o m v-f co « Cl oo LC vt M bc o S -> • G VT O o O o o o O O o 30 O o en O o d o o o r> o o CO o 5 ^ CO i?î h- CO m r> CO M HH v-r ■^ CO 1/1 es O h-; 'S. T. :- ;3 o "> Vf C/3 ce Ci n CO Cl CO CO c^ qui m 5 s'écrit Cl X M CO CO VT CO CO c^ G. ARNOUX. TABLES DE PUISSANCES ; LEUR CONSTRUCTION 89 M. Gabriel ARNOUX Ancien Officier de Marine, à Les Mées (Basses-Alpes) TABLES DE PUISSANCES DE MODULE Ik' ET 2" LEUR CONSTRUCTION PRATIQUE [I 31 — Séance du 6 août — Étude dédiée à M. C.-A. Laisant. SOMMAIRE : Construction des tables de puissances de modules de la forme a" et 2« : Considérations diverses sur le théorème de Wilson et sur le moyen de reconnaître si un nombre entier donné est premier ou composé. Solution de l'équation du troisième degré de module 5 par les procédés dlù'aristc Galois. Tables de puissances de module a' et 2", leur construction pratique. Dans un autre mémoire, jai donné la construction pratique des tables de puissances de module com^josé; dans celui-ci je vais m'oc- cuper de celles des modules de la forme a" et 2" . Le module a" est un anomal des modules composés, en ce sens que tous les facteurs sont égaux. De Tanomalie dans la constitution du module résultent des anomalies dans les tables de puissances. Ainsi pour a" on a i|/ (m) = f (m) , ce qui entraîne la conséquence que les tables de puissances de module «« ne contiennent qu'une seule ligne, fait d'une grande importance dans les calculs. Je dois faire également ici une autre remarque; c'est celle indi([uée par Serret dans son Algèbre supérieure, v. 11, p. 78 : « Une racine primitive g du module premier impair p est une racine primitive n-p — l j pour le module p^ , v étant > i, lorsque n'est pas divisible par p. Au contraire g- n'est pas une racine primitive pour le û'i> — ^ — i module />" quand est divisible par /). » Ces cas sont très rares ; mais pourtant ils se présentent, et la règle de Serret permet de les reconnaître. Cette vérification faite, on est 90 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE certain que toute racine primitive de module a^ est racine primitive pour le module a « . Comme dans les calculs des tables de puissances , soit de chiffres dits réels ou êtres arithmétiques du premier degré, soit d'êtres arith- métiques dits imaginaires, c'est-à-dire d'un degré supérieur à i . la grande question est d'avoir une racine primitive, je crois être agréable au lecteur en donnant ici la table des plus petites racines primitives, positives ou négatives, pour les modules premiers de i à 200. J'ai mis en regard de chaque module la décomposition en fac- teurs premiers de son indicateur qui, dans ce cas, est le module des indices et qui, par suite, joue un rôle considérable dans les calculs. Modules R.P. Indicateurs Modules R.P. 5 Indicateurs 3 •2 2' 97 2^3' 0 2 2^ lOI 2 2^5^ 7 2 2'. 3' io3 2 2'. 3'. 17' II 2 2'. 5' 107 2 2'. 53' i3 2 2^3- 109 6 2^3^ i: 3 2* 1x3 3 2^7' 19 2 2'. 3^ 127 3 2'. 3^7' 23 2 2\II' i3i 2 2'.5'.i3' 29 2 2-^7' i37 3 2^17' 3i 3 2'.3'.5' i39 > 2 2'. 3'. 23' 37 2 2^3^ i49 2 2^37- 41 G 2^5' i5i 5 2'.3'.5^ 43 3 2'. 3'. 7' i57 5 2^3'.i3' 4: 2 2^23' i63 2 2'. 3^ 53 2 2M3' 167 2 2'. 83' •'^9 2 2'. 29' 173 2 2^43' (h 2 2^3'.5• 179 2 2'. 89' 67 2 2'. 3'. II' 181 2 2'.3^5' 71 2 2'. 5'. 7' 191 2 2'. 5'. 19' :3 5 2 '.3^ 193 5 2«.3' 79 2 2'.3'.i3' 197 2 2-. 7' 83 2 2'.4l' 199 '2 2'.3mi' 89 3 2'. II' Ces observations préliminaires faites, j'entre en matière. G. ARXOUX. — TABLES DE PUISSANCES ; LEUR CONSTRUCTION 91 Plusieurs auteurs ont donné les tables de puissances des modules premiers de i à 200 , elles sont très utiles , très commodes dans les calculs; mais tout le monde ne les a pas à sa disposition, la méthode des Cycles permet de les construire avec rapidité, et cela mécanique- ment et sans calcul. Nous l'avons donnée avec M. Luisant, dans notre mémoire au Congrès de Paris en 1900; je vais la rappeler brièvement : Soit à construire la ta])le des puissances de module i3; 2 est une racine primitive de ce module. I 2 3 4 5 6 7 8 9 10 II 12 i3 Indices. 2 4 (5 8 10 12 I 3 5 r- 9 II i3 Mult. de 2. 2 4 8 3 6 12 II 9 0 10 j I Puissances. J'écris la suite des nombres entiers de i à i3. Sur cette piste je marche du pas 2 et j'obtiens la suite des nombres écrits dans la deuxième ligne du tableau ci-dessus. Ceci fait, je prends 2 sur la première ligne et trouve 4 au-dessous sur la seconde ; je prends 4 sur la première ligne et trouve 8 au-dessous sur la seconde , et ainsi de suite, jusqu'à épuisement. Le Cycle (2 étant une racine primitive) contiendra la totalité des chilTres premiers à i3, et la troisième ligne, sur laquelle ils sont inscrits par ordre de rencontre , est la table des puissances demandée ; les chilTres inscrits sur la première ligne et «ur la même verticale sont les indices de ceux inscrits sur la troi- sième. Passons maintenant aux modules de forme «« et prenons comme exem[)le ^^ =: 49- 92 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Construction de la table de Puissances de module 7- par la méthode des Cycles Nombres. I 2 3 4 5 6 7 8 9 10 II 12 i3 14 Mult. de 3. 3 (5 9 12 i5 18 21 24 27 3o 33 3() 39 42 Puissances. 3 9 27 32 4: 43 3i 44 34 4 12 36 10 3o Nombres. i5 i6 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 Mult. de 3. 45 48 2 5 8 II 14 17 20 23 26 29 32 35 Puissances. 4i 25 26 29 38 16 48 46 40 22 17 2 C> 18 Nombres. ^9 3o 3i 32 33 34 35 3(5 37 38 39 40 41 42 Mult. de 3. 38 4i 44 47 I 4 7 10 i3 16 19 22 25 28 Puissances. 5 i5 45 37 i3 39 19 8 24 23 20 II 33 I Nombres. 4'3 44 45 46 47 48 49 Mult. de 3. 3i 34 37 40 43 46 49 Le lecteur, par le tal)leau ci-dessus, peut s'assurer que la méthode des cycles s'applique aux modules de forme a" . Les puissances successives y sont écrites dans le système de numé- ration de base 10; maintenant écrivons-les dans le système de numé- ration de base 7, nous avons des nombres de 2 chiflres. Disposons notre table en lui donnant pour largeur un nombre de cases égal à f('j) = 6, et nous avons le tableau suivant, dans I(>({uel les chiffres de la colonne du cadre sont des multii)l('s de 6. G. ARNOUX. TABLES DE PUISSANCES ; LEUR CONSTRUCTION 93 Table de puissances de module 7- écrite dans le système de numération de base 7. I 2 3 4 6 G o3 12 36 44 65 6i I 4*3 (32 46 o4 i5 5i 2 i3 4--^ 56 34 35 4i 3 4 53 212 66 04 55 3i 23 02 o6 =^4 o5 21 5 (33 52 i6 54 25 II G 33 32 26 i4 45 CI 4 5 I 3 2 6 Observons ce qui se passe : dans chaque colonne de l'intérieur du tableau, les chilfres de droite sont identiques, les chillres de gauche forment une progression arithmétique dont la raison est inscrite au- dessous de la colonne. Ces raisons d"une colonne à l'autre se suivent dans le même ordre qu(> les chifl'res dans une table de puissances de module 7, c'est-à-dire (3, 2. 6, ^, 5, i) en faisant abstraction du point de départ. L'indice de la case où est inscrit le noml^re 43 est un multiple de 7 ; il en est de même de toutes les cases situées sur la diagonale partant de celle-là; les nombres inscrits dans ces cases ne sont pas des racines primitives ; si nous les mettons de côté , tous les indices des cases des colonnes i et 5, premiers à 6 = 2.3, sont premiers à 7.2.3 = 42 module des indices; les nombres inscrits dans ces colonnes sont donc des racines primitives et toutes les racines primitives, sans exception, y sont comprises. ]Maintenant , prenons un module premier plus petit que 7 , soit 5 , et formons les tables de puissances de 5', 5% 5^; nous avons l'en- semble des tableaux suivants : 94 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE 0} m (6 A (O a o •1-1 •tJ (A U '© a a a +J ce m 0) 1— I 00 a ce V •IH u '03 10 9 O a 0) CD (U O ce OQ 00 •IH 0) A CQ O Cl l-l C M o Vf O CI HH en X ^' Cl M Cl o CO Cl Vf CO Cl CO CO Cl Cl Vf oc o Vf CO Vf M CO Cl X ï^ Cl v-r vr Cl CI CI VT M HH •-- M M Cl v-r Cl Cl M Cl c Cl CO CA en c^ en Vf CO CO CO CO CO Cl CO CO Vf M M O vj- M Cl v-r M v-r M M Vf CO d X v: Cl Cl CI CO Cl en vf CO c Cl en M M M M Vf VT Cl h X :; 1— t en Vf c Vf V-r CO vT CO CO vT Cl VT M v-f v-r Cl Vf v-r VT VT VT VT Cl X C-. M v* Cl CI CI CI Cl Cl CO Cl VT M X M CO M VT M CI CO X t-- o CO c^ vrf o CI en M VT -.C' Vf Cl Cl Vf CI "^f Vf CI M VT- Cl CO Vf Cl O CI ^'^' Cl M M Cl H- 1 Cl Cl M CO CI Vf CI M o M v-r C^ ô M C-» c^ M en M CA Vf CO Cl CO X^ vt en CO CO M Cl CA Vf C<1 1 Cl vrf O Vf o M VT Cl X - Cl g Cl c Cl O Cl Cl o CO Cl o VT M r. o o h3 u < ■I-l O -0) lO 0) 1— I o a (D Ta CO o m ni te CO CO 0) 0) 1—1 CO 00 ce A (U t3 o •r-l ■U CO •Q) 0) 0) a 'tu 4J CO >> CO ID r— I 00 m CO 10 « I— t t3 O a 0) t) CO (D fl (0 00 00 •iH a> I— I CO CO il CO o 0^ • 1-4 es •yj ;i 'X l-H S F-H vT M CO CO Cl Vf M Cl '1 VT M VT l-H Cl o CO '■^^ c^ en rr^ CO en HH '-^ vT en Cl Vf VT VT vT VT Vf Cl O Cl VT M CO Cl Cl Cl Cl Cl "^ h^ Cl CO Vf ir. H ^ '-^ M Cl CO Vf ;3 ^ G. ARNOUX. — TABLES DE PUISSANCES; LEUR CONSTRUCTION qS Pour m =z 5^ j'ai pris pour largeur de la table le nombre 20 égal a y(5-) module des indices de la table des puissances de module 5-, tout comme j'ai pris pour celle de 5^ le nomljre 4 = y(5') module des indices de la table de module 5'. Par suite, la colonne du cadre contient des multiples de 20. Observons ce qui se passe : Bans la table de module 5^ nous avons des nond^res de 3 chitTres représentant les puissances écrites dans la numération de base 5, Dans chaque colonne, les deux chiffres de droite sont identiques dans toutes les cases ; ceux de gauche forment une progression arith- métique dont la raison est inscrite au bas du tableau, dans chaque colonne. Ces raisons, dans la ligne qui les contient, se succèdent dans l'oi'dre 2, 4' 3, i d'un bout à l'autre, c'est-à-dire dans l'ordre des chiffres dans la table des puissances de module 5'. Ici, si nous pre- nons les colonnes d'indices premiers à 20 (marqués d'une croix), tous les indices des cases de ces colonnes sont premiers à 5^2- = (^(5') = 100, module des indices de la table, et tous les nombres premiers à ce module j sont compris. Les nombres inscrits dans les cases de ces colonnes sont donc des racines primitives , et toutes les racines primitives, sans exception, y sont comprises. Admettons que l'on ait construit la première ligne de la table et le premier nombre de la seconde ligne, tout le i^este de la table est déterminé. La différence des chidres de gauche des deux premiers nombres de la première colonne donne le chiffre à insérer au bas de la colonne. Celui-ci connu, toute la ligne du bas de la table s'écrit au coui'ant de la plume. Cette ligne écrite, il n'y a, dans chaque colonne, qu'à ajouter au chiffre de gauche du nomlDre de la première ligne le chiffre du bas de la colonne et de former la progression arithmétique en descendant, puis, enfin, de l'épéter dans chaque colonne les chiffres de droite du nombre inscrit dans la première ligne. Et voilà la table constimite sans calcul ! Je demande pardon au lecteur d'entrer dans de pareilles explica- tions sur des choses qui sautent aux yeux. Mais ce qui saute un peu moins aux yeux , ce sont toutes les propositions démontrées par Serret dans son Algèbre supérieure, v. 11, pages 77 et suivantes, qui sont implicitement contenues dans ces talileaux , et qu'un visuel y lit couramment. Ainsi, dans chaque colonne à racines primitives, nous voyons que, si Ion prend le nombre qui a o pour chiirre de gauche et qu'on lui ajoute les multiples de 25 ou 5- ((5)), on a tous les nomljres de la colonne; que les indices seront celui de la pre- 96 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, OÉOUKSIE ET MÉCANIQUE micre ligne plus les nuiltiples de 20 = y(5-). c'est-à-dire 'f (5^) ((5)) . Les chiffres de droite sont les racines primitives de 5^ m = 5'. Donc, étant connues les racines primitives de m = 5^ on a toutes les autres en ajoutant 5^ ((5)). d'une façon générale /»" - ^ {(m)) pour m". Je laisse au lecteur le soin et le j)laisir de lire dans ces tableaux les propositions qui y sont implicitement contenues et d'étendre ce qui a été dit ci-dessus au module «' . C'est un exercice intéressant, qui vaut bien tous les jeux de cartes ou autres. Il y aurait certainement une foule de remarques intéressantes à faire; ainsi, pour le nombre des racines primitives des tables de m = rt" , le nombre des nombres premiers à «« est '^(a« ) = «" - ^ ?(«), ce qui donne le module des indices. Le nombre des nombres ju'e- miers à ce module est ??(«") = «'-' " ^ ?(«) ??(«)' fl"i ^'st par suite celui des racines primitives. Si l'on forme le taljleau suivant , nous voyons que, quand on passe de a =:; I à a = 2, le nombre des racines primitives est multiplié a" rM«) ... 'f{a) rf{a) a 'f{a) rf{a) Quand y. est sui»érieur à i . en passant de a à y. -{- i , le nombre des racines est multii)lié i)ar a ; tout cela saute aux yeux en regar- dant le tableau. On pourrait de même observer que certaines propositions ne sont pas exclusives aux racines primitives de la période maximum, mais qu'elles s'étendent à toutes les racines primitives sans exception : Indices I •2 3 4 5 () ~ 8 9 10 II 12 i3 14 i5 16 i; 18 19 20 C I ■2 I 4 5 2 I 4 1 10 I 4 I 2 5 4 I 2 1 I 2(» P 20 10 20 5 4 10 20 5 20 2 20 5 20 10 4 5 20 10 20 I ?(P) 8 4 8 4 2 4 8 4 8 I 848 2 ^ 2 4 8 4 I Puiss. 2 4 8 i() > 14 3 (\ 12 24 23 21 l- 9 18 II 22 19 i3 I G. ARNOUX. — TABLES DE PUISSANCES ; LEUR CONSTRUCTION 9,; ?(P) P (ùliillres de Péi'iocle P Puissances entières 8 4 4 2 I I 20 10 0 4 2 I 2, 8. 3, 12, 23, 17, 22, i3 4- i4- 9- 19 16, G, 21, II 24 I sont des racines primitives des puissances entières d'indice I 2 4 5 10 20 Ainsi, 4> i4' 9' i9' sont des racines primitives des carrés, i6, 6, 21. II, des racines primitives des puissances d'indice 4? et ainsi de suite. Reportez-vous maintenant aux tables de puissances et il s'ensuivra une foule de propositions intéressantes. Passons maintenant au module 2'^. Ici l'anomalie est double; tous les facteurs sont égaux, mais 'f(m) ^(m) , aussitôt que n est plus grand que 2 ; ce qui nous fait rentrer dans la catégorie des tables à plusieurs lignes. Pour aller plus vite en besogne, je donne la table de puissances de module 2*^ écrite module ^^ et module 2^ Table de Puissance de module 2". I ^ 3 4 5 6 7 8 9 10 II 12 i3 i4 i5 16 3 9 27 17 i3 25 II 3i 29 ^ 0 i5 19 J 21 ^ 9 27 17 i3 25 II 3i 29 23 5 10 19 j 21 1 9 17 17 20 3i 3i 3i 23 i5 i5 7 98 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Table de Puissance de module 2^ écrite module 2^. I 2 3 4 5 0 7 8 9 lO II 12 i3 i4 i5 i() 3 I 3 I 3 I 3 I 3 I 3 I 3 I 3 I I I I I I I I I I I I I I I • 3 , I • 3 . I . 3 . I • 3 • , , , 3 . • . I • • • 3 . • • • , , , . . . 3 . . . . . . . • • • • • • • 3 • • • • • • • Le nombre 3, racine primitive pour 2-, est racine primitive pour le module 2" , quel que soit n. Le module des indices ici J>(2^) = '^^^ = 2^ ^ 16. 2 Construisons par un procédé quelconque (la méthode des cycles, qui est également applicable ici , ou le calcul congruent) la première ligne et écrivons-la avec les chiffres négatil's ou positifs, suivant qu'ils sont plus grands ou moindres que 32 ; les lignes suivantes s'obtiennent en changeant les signes des termes de rang 2", 2', 2-.... 2" — ^. Il résulte de ces changements de signe des cases vides et la raison de la vacuité est la même que pour les modules composés, car, en écrivant la table module 2^ . les chiffres sont alternativement 3 et I dans chaque ligne , et 3 est racine primitive module 4 î — comme explication il n'y a du reste qu'à se rai)porter à la figure qui termine l'autre mémoire. Si Ion veut raccourcir le calcul, il n'y a qu'à observer que, dans la première ligne, si on la divise en deux parties égales dans chaque moitié, la somme des termes de même rang, pris en grandem- absolue, est égale à 2" — ^ et que ces termes sont de signe contraire. Quant au module des indices, il est 2" — 2, ce qui donne le nombre de termes de la ligne. Le lecteur peut remarquer, dans la colonne de rang 2" — 3, que les racines carrées de lunité sont 3i , 3i , i et i , et en général 2" — ï ± I et 2" ± I. Je donne ci-dessous la table de module 3.1;. pour que le lecteur puisse remarquer sa similitude de l'orme avec la table de module 2". G. AUNOUX. — TABLES DE PUISSANCES; LEUR CONSTRUCTION 99 Table de Puissances de module 3.17. '2 3 4 5 (; : 8 9 lo II la i3 i4 i5 i(3 5 25 23 i3 i4 19 5 25 i3 19 ~ i3 20 19 i3 7 16 22 8 II 16 "8 16 8 16 16 4 20 4 4 4 2 10 2 2 Même Table écrite module 3. I 2 I I I 2 I I I 2 I I 2 2 I I I I I 2 2 2 I I I 2 2 I I I I 2 2 I I I 2 2 I I I I I I I Quelle que soit la forme du module a\ «« , «« b? c'f , la méthode des cycles est applicable pour calculer toutes les lignes, du moment où l'on connaît une racine primitive de la ligne ; en commençant le mémoire, j'ai donné un moyen pour avoir les racines primitives de module a-. Pour 2", j'ai donné un moyen expéditif pour avoir la racine primitive de chaque ligne; le lecteur peut s'assurer, par une «xpérience rapide, que la méthode des cycles s'y applique. Si le module est composé, comme 3.5 par exemple, voici comment il faudrait procéder si l'on voulait employer la méthode des cycles. Pormons la table de numération : I 2 3 4 5 (3 7 8 9 10 II 12 i3 14 0 Mod. 3.5 I 2 3 4 0 I 2 3 4 0 I 2 3 4 0 Mod. 5 I 2 0 I 2 0 I 2 0 I 2 0 I 2 0 Mod. 3 ^^^ ~~^ ^"~" 100 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Puis la table d'association et les tables des périodes : a h c 2^ 1 I 1 I I a 1 I A 13 B f-' I I A B G P KP) I 1 3 4 Indices I •2 I 4 C •1 4 3 I Puiss. rt 1 4 1 , 3 . h I lî ■ r 4 • • c I I • • • I ?(P) P I 2 Indices I 2 G 3 I Puiss. a I Q 2 • P I I • I ?(P) G. ARNOUX. — TABLES DE PUISSANCES; LEUR CONSTRUCTION lOI Par leur moyen, calculons les racines primitives des périodes : Associations Mod. A 2 7 8 i3 3-5 12 2 3 3 2 I 2 I 5 3 ! 1 B Associations Mod. i4 4 II 3-5 4 4 I 2 11 0 3 Les racines primitives connues, procédons par la méthode des cvcles : 12335678 () 10 II 12 i3 i4 li 2 4' as été de faii'C un traité didactique de la question des modules composés dans les fonctions arithmétiques, mais ,de la signaler à l'attention des mathématiciens. Le lecteur trouvera sans doute que mon exposition laisse à désirer ; j'en conviens : mon âge et mes infirmités me servent d'excuse. J'ai cherché à fournir des matériaux de travail plutôt que de présenter un travail achevé; un jour ou l'autre, demain ou dans un siècle, j'ai le ferme espoir que les idées jetées ici attireront rattentioii de quelque mathématicien et qu'elles pourront conti'ibuer au progrès de l'arith- métique et à l'enseignement de la science des nombres. Dans de précédents mémoires j'ai donné des tables diverses con- cernant les équations du 2'"'=, S'"*", 4""^ degré de module 5; je vais ici compléter ce qui concerne ce module. Voici d'abord la table des puissances de l'imaginaire 2 -)- oi -\- i- -\- i', jusqu'à l'indice i56 = m" — i m — i G. ARXOUX. — TABLES DE PUISSANCES ; LEUR COXSTRUCTIOX 107 Pour être plus concis, j'écrirai désormais les imaginaires en sup- primant les symboles /", i\ i' — /" et remplaçant les termes à coeffi- cients égaux à zéro par des points. CN o a> > I o a u b) 0) a •IH U ce &^ OQ 0) ■IH C0 •IH a a 0) T3 co m o C! ce OD (O •1-1 0) T( 4) J3 ce Eh ^ • • M « . , ,, co es CA IH co VI" co c? M jq v-f c<> CT • "H M es ri . vt . v:^ . • es CA V!f M C<^ co v^ • ^ « CA vt v-r • v^ en îs vï- i-i co hi co ^1 vT vfc^i •cOMMcsvfcoc^cocovl-e^icoco yr. te ^ ^ <^ ^ ^ ^-^ ^-^ ^-r VI- VI- v-r Vf Vf v^ vj- i-c 10 iS S 10 S 10 CT O M . Vf M M C^ ►"! Vf Vf vf • Vf . Vf Vf vï" • H^ Vf ■ e^i w M es c>i ■ m m es c^ ^ *^ ^ ^ ^ ^ Vf Vf Vf f 1 Cl Cl co e>i Vf d M ÇOvfcOCOCOCOCO -Cqvfvj-M .mCOm . COMVfCOVj-vfMCSriHVf .MC^MCOM Vf i^f: -o r-. X Ci 0 HH Cl co Vf io cr: M M Cq es Cl Cl d Cil d r^ X Ci O 1- Cl en Vf Cl es dcn-nene^en Vf M es H^ Vf • W M Vf Vf • en Vf co Vf M Vf • fO VI- M Vf M en Vf es vf -h • ^-1 M es en co • • Cl es '^ • • '^ • -MVfdCOvfv-f- cn Vf Cl Cl • es Vf h-i Cl co Vf co dw vfcnMMCivi-Mvfvj- cs VI- en d . M Cl • d d f^ Cl en^ Vf- ic ->r; t--. X Ci c Ci Ci Ci Ci Ci Ci Ci Ci Ci C Cl en Vf If: \o r^ X Ci O m d en CCCCOCCOi-'HMM d CO M Vf d Vf d en H- COMdCOdd^^COdd CO M -MM -es • ^1 wvfdcovrvj-d •« •comco -cndddMMM Vf d Vf Vf Vf Vf en M d d CO vfMdvfddcnMJ-cOd VfVfVf MVf-dMMdd CiO w dcovfmo r-«x Ci C 1-1 d en Vf m o i^ X Ci O l^X X X X- X X X X X X Ci ^^'£2*i^^^J.'^<^Vï--dcnd • • -vfd vfcnrovfw •vfdcodcovfdwdcn .Jen MCOCOmM .fOCOMVfVf H^MeOH-d dCldMMMVfMdMCO .MMVfVfMCn d Vf en M CO 5^ ,t-. X Ci c « es CO Vf LO vr C-. X Ci o M d CO vî- ^r: -o r>, x Vf Vf Vf Vf ic ic ifî m ir: ir: irî »_n i^ u^ ç^ -o, ^ ^^ r^ -^ ^, ç^ r^ çovf • M dvfvfco MvfhH M-nvfM M CO M d CO • Vf CO • CO en « . m ^3-- -Vf. •cneSMvfddM -en vfdMH^ •'^dCOMvfdvfd cnM d M Cl d d d Cl en M Cl M M d d d • CO d • CO M CO • CO Vf 10 ^C- d d d r>.x CiO M cicovfuotc r-.x Ci Cl d cscoeococococococococo O- M d CO Vf 10 Vf Vf Vf Vf Vf Vf ^ Vf en M en en es vf vf d en . ci « v-i- >n vf d r^ ^n ^, vf i-i •^jr -Vf" -cnvfvfcnen -vfvfcn d es • -encnvf • Vf CO Vf • Vf M M Mcococo dco Mco Vf • eo en d d en dMdci Cl dvf .cnMMvf .vfdvf -dcnd'- M d eo Vf i,-^ -^ r^ X Ci C — Cl en Vf ijCw r^X CiO w dcn «MMMMMMMMMdddd io8 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Quand, au moyen de ce fragment de table on veut obtenir l'imagi- naire correspondant à un indice donné, voici la procédure à suivre : si l'indice est inférieur à i56, la ta]>le donne immédiatement l'imagi- naire; s'il est sui)érieur à i56, on retranche de l'indice le plus grand multiple de i56 qui y est contenu; on prend l'imaginaire correspon- dant au reste et on la multiplie par le chiffre correspondant dans le petit tableau suivant : i56 3 3l2 4 468 2 Ce qui donne l'imaginaire demandée. Si l'on veut résoudre l'opération inverse, trouver l'indice corres- pondant à une imaginaire donnée, on commence par chercher si l'imaginaire est dans la table; si elle n'y est pas, on la multiplie par (2, 3, 4); un des résultats sera forcément sur la table. Prenons son indice et ajoutons lui le nombre qui, sur la table ci-contre, corres- pond au multiplicateur; la somme donne l'indice demandé. 468 3 3X2 i56 4 2 Maintenant, pour calculer la case où une imaginaire quelconque doit être casée, on juMit ju'océder de la fa(,'on suivante : on prend G. ARIVOUX. — TABLES DE PUISSANCES ; LEUR CONSTRUCTION ICK) l'indico I do rimaoinaire et l'on a V 4 fois la partie 1(1) ■'2 4 réelle de I (I + 5) 2, -\- 1 4 1 imaginaire correspon- tlant I (I + 25) I (i -|- 5 4- 25) V 1 à l'indice I (i -^ 5 -(- 25 -|- 125) puis on fait à V c — 1 h — a Au Congrès d'Ajaeeio, j'ai résolu la question des imaginaires du troisième degré module 5 , en employant la formule algébrique dite de Cardan. Je vais ici résoudre la même question d'après les procé- dés cVÉi'ai'iste Galois. Tant qu'on ne dépasse pas le troisième degré, toute case blanche des espaces arithmétiques donnant les solutions réelles des équations correspond à une fonction irréductiljle , et toute fonction irréduc- til>le donne une équation réductrice pour ramener toutes les imao-i- iiaires résultant des calculs à une forme dans laquelle les exposants de i sont inférieurs au degré de l'équation. De plus, pour le module 5 et le troisième degré, toute case blanche prise dans une des colonnes dans lesquelles a =: (2,3) est une case à racines primitives. (Je traiterai la question générale concernant ce sujet dans un prochain mémoire.) Prenons donc au hasard une de ces cases, soit 042. Nous avons l'équation réductrice .v' -\- ^x -\- ti 'zE: o ou x'' = 3 -f-.v. ou enfin r' = 3 -|- ^ = 3i, suivant notre manière d'écrire les imaginaires. Ici il est bon de faire une remarque; dans les calculs concernant les fonctions , on ordonne la fonction suivant les puissances décrois- santes de .V et. dans ceux concernant les imaginaires , on ordonne suivant les puissances croissantes de i, ce qui donne certaines facili- tés dans les calculs. Si nous prenons pour base de la table une imaginaire résolvant l'équation .v' -f- 4-'^' + ^ = o et que nous la représentions par /, c'est- à-dire par . I . , nous avons la table suivante : IIO MATHÉMATIQUES, ASTUONOMIK, GKODESIE ET MECxVNIQUE Table des puissances m =^ 5 , n = '3. Équation réductrice a'' 4" 4'^" + a = <>• Iiulifcs I '2 3 4 5 6 7 Imag. . I . . . I 3i. .3i 3i3 4ii 3oi Cases 042 3ii ii3 3o4 042 i4i 4o3 Iiulices 8 9 10 11 12 i3 i4 Imag. 340 .34 243 4.4 23. .23 432 Cases ii4 242 3ii o33 434 412 4ii Indices i5 16 17 18 19 20 21 Imag. ii3 441 3o4 22. .22 122 l32 Cases ii3 i34 3l2 43i 143 3o4 322 Indices '2'2 123 'A 2.5 26 27 28 Imag. i33 443 424 232 143 444 234 Cases i4i 2l3 024 042 i4i o33 i34 Indices 29 3o 3i 1 Imag. 2l3 401 3.. Cases 3-22 i4i 123 Dans cette talde chaque terme se calcule en multipliant par i, celui qui le précède. Quand de cette multiplication il résulte des termes en i\ on remplace /' par 3i. et on raccourcit le calcul au moyen de la table suivante : i^ = 3i. I 2r' = i2. I 3/' = 43. I 4i' = 24. I Quant au calcul de la case où l'on doit loger chaque imaginaire, comme on n'a plus ici les ressources spéciales au moyen desquelles j'ai olitenu certains procédés abréviatifs, il n'y a qu'à procéder sui- vant la méthode générale que je vais donner brièvement ici. Toute fonction d'un degré n quelconque peut s'écrire : (- i)" 2„ .V" + (- i)' :^, A-" - 1 + (- i)^ s, .v" - ^ + + (— l)" ^n .V . G. AUXOUX. — TABLES DE PUISSANCES; LEUR CONSTRUCTION III En désignant par :s . la somme des produits v à v des solutions. Pour calculer ces i)roduits, nous remarquerons que, I étant l'indice d'une imaginaire, les indices des autres solutions sont I (//?'. m- , m" — I). Les produits d'imaginaires correspondant aux sommes de leurs indices, il est plus court et plus commode de procéder aux calculs, au moyen des indices. Fidèle à ma manière générale d'exposer, je vais procéder par des exemples facile à généraliser. Soit I l'indice de l'imaginaire . i . I 5 u5 . I '3i3 123l2 V ^1 • • • 6 3o 4ii i43 4-1 S' 4-. 3. 3 . V -^3 3 . Case o4'-2 Soit maintenant i3 l'indice de .23 i3 X I — i3 .23 i3 X 5 — 65 24- i3 X ^5 ■ jj 44*^ I . . i3 X 6 - :8 114 i3 X 2b _ 90 321 i3 X 3o — 18 22. 2, I. . i3 X 3i — 3i 3.. 2, 3.. Case 412 Il me semble inutile de dire que (i , 5 , 20) sont les sommes des indices pris i à i ; i -[- 5 = 6, i + 25 = 26, 5 -[- 25 = 3o les sommes des indices pris 2 à 2 et i -|- 5 -f- 25 = 3i la somme des indices pris 3 à 3. Les calculs sur les indices se font d'une manière générale en con- gruant par le module des indices qui ici est 124. 112 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Le calcul est certainement plus long que par les divers procédés expéditifs que j'ai donnés pour des cas spéciaux , mais en somme ils n'ont rien d'excessif. Je laisse au lecteur le soin et le plaisir de généraliser la méthode indiquée ici par des exemples qui parlent à l'œil et de la formuler par une expression symbolique. Pourtant je dois signaler un petit artifice de calcul qui abrège l'opéi-ation de la détermination de la case où une imaginaire doit être logée : Quand on multiplie une imaginaire par un chiffre K, i,j est multipliée par K^ . La seconde partie de la table s'obtenant, au moyen de la première, en multipliant les imaginaires par 3, on aura immédiatement les coefficients de la case en multipliant le premier par 3, le second par 3- =: 4» le troisième par 3' = a. Ainsi : 6 4ii i4i 37 233 3l'2 Indice Lnagin. Case Si l'on prend l'imaginaire /^îi , d'indice 6, case i4i, l'imaginaire d'indice 3^ = 31 -|- 6. s'obtiendra en multipliant par 3 chaque coeffi- cient de l'imaginaire 4ii et la case en multi[)liant terme à terme i4i par 342. Pour obtenir la troisième tranche . on riuiltipliera l'imaginaire de la première partie par 3- = ^ et l'on obtiendra la case où foiiMoit la loger en multipliant, chifl're à chiffre, les chiffi'es de la casepar 4 4^ 4' = 4^4 > et ainsi de suite. On voit par là combien l'analogie entre les fonctions algébriques et les fonctions arithmétiques peut venir en aide pour abréger les calculs. Je vais en terminant dire quelques mots d'un problème qui a passionné les amateurs de la science des nombres : un noml^re entier M étant donné , peut-on savoir s'il est premier ou composé ? G. AHNOUX. — TABLES DE PUISSANCES ; LEUR CONSTRUCTION Il3 Lucas, dans sa Théorie des nombres (p. ^^i), dit : « Si rt-^" — i est divisible par n pour x égal à (n — i) et s'il n'est pas divisible par n égal à une partie aliquote de (n — i), le nombre n est premier. » Traduisons ce langage en arithmétique graj^hique ; comme précé- demment, appelons P le nombre de termes de la période d'un chiffre quelconque, et constatons que la puissance d'indice P est le chiffre i. Si m est premier, P est l'un des diviseurs de (M — i). Prenons au hasard un chiffre et formons rapidement les puissances dont lindicc est un diviseur de (M — i), en procédant par ordre de grandeur. Si on ne rencontre i qu'à la puissance d'indice (M — i), sans le rencontrer polir des puissances d'indice inférieur, le nombre M est premier. Ce procédé implique l'obligation de savoir décomposer (m — i) en ses facteurs premiers. Admettons qu'on puisse le faire, rien ne vous guide dans le choix des chiffres à essayer; le plus court est de prendre la suite naturelle des nombres entiers à partir de 2. En létal actuel de la science, rien ne limite la grandeur de la plus X)etite racine primitive. En jetant un coup d'o-il sur la table de ces racines pour les nombres premiers jusqu'à 200. nous voyons que pour 191 cette racine est 19; il est vrai que — 2 est également racine ju-imitive. Mais pour 4i elle est 6, de sorte que vous ne réussirez qu'au onzième essai. Rien n'aflirme que pour de grands nombres cette racine ne soit pas un chiffre fort élevé. C'est donc une affaire de chance. Voici, d'ailleurs, la procédure à suivre dans l'opération. Soit à reconnaître si le nombre 87 est ^weinier ? Les diviseurs de (m — i) = 36 sont i, 2, 3, ^, 6, 12, 18, 3(3. I 2 2 + 1 3 2 + 2 4 4 + 2 6 16.4 2; 6 + 6 12 12+6 18 18 + 18 36 bidices 2 2.2 4 4.2 8 4-4 16 27.2; 2(i 26.27 36 36-36 I Puissances Comme la puissance d'indice 36 est égale à i et qu'on ne rencontre €e chiffre dans aucune autre case du taldeau ci-dessus, 2 est racine primitive et 3^ un nombre premier. 8* Il4 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉGANIQUE Le fait de donner i pour puissance d'indice (ni — i) n'est pas un cri- térium servant à afïirmer que m est premier. Ainsi Lucas (id. p. 422), SOUS le titre Vérifier la Congriience q^:-:^ — i = i (mod. 37.73), donne un cas de module composé pour lequel la puissance d'indice {m — i) d'un certain chiffre est égale à i. Ce fait se j^eprodiiiva pour tons les nombres composés, suivant le chiffre qu'on essq^'era. Les périodes pour un module composé sont les diviseurs de -i^ (m) ; représentons-les par P, . Toutes les fois que (m — i) sera un multiple de Pi, la i>uissance d'indice (m — i) du chiffre essayé donnera i pour résultat. Pour le cas de 2701:= 37.73, on a i|/ (m) = 72 = 2'. 3^ et 2700 = 2^3'. 5-. Lucas choisit le chiffre 2 dont la période est de 36 ; 2700 étant un multiple de 36, 2 2700 sevR forcément i. Mais, si le chiffre choisi a une période qui ne soit pas un diviseur de (m — i). la puissance d'indice (m — i) de ce chiffre sera diffé- rente de I. Ainsi, pour 2701 , si. au lieu d'essayer 2 on essaye un chiffre de période 72, par exemple, 5, 7, 11, i3, i4, i5, 17 la puissance d'indice 2700 sera un cliiffre différent de i. On a donc un critérium certain que 2^01 n'est pas premier. Le calculateur a donc à son serçice deux ressources ; ou d'açoir la certitude que le nombre est premier, ou d'avoir celle qu'il est composé. Je laisse au lecteur le soin de calculer le nombre de chances que l'on a de réussir d,ans ses essais. Pour un nombre premier, c'est le rapport de y (m — i) à (m — i). Pour un nombre composé, ce rapport peut se calculer au moyen des études qui })récèdent. L. LECORNU. — SUR LKS MOUVEMENTS PLANÉTAIRES Ïl5 M. L. LECORNU Ingénieur en chef des Mines, à Paris SUR LES MOUVEMENTS PLANÉTAIRES [Ui] — Si'ance du 6 août — I- — Les principales pro})riétés du mouvement d'une planète autour du soleil peuvent s'établir, connue nous allons le voir, par une méthode élémentaire, presque entièrement géométrique. Soient k la constante de l'attraction, h la constante des forces vives, C la constante des aires. Appelons r le rayon vecteur, p la distance du soleil à la tangente, c la vitesse. La mécanique fournit les deux équations : (I) — îl — 1 r 2 (2) pv d'où, par l'élimination de p : (3) C'est l'équation différentielle de la trajec- toire. Pour l'interpréter, cherchons la po- daire de cette trajectoire par rapport au soleil S. {Fi g. i). On sait que la tangente au point H de la podaire forme avec le rayon SH un angle égal à celui que la tangente HP à la trajectoire de la planète P forme avec le rayon SP. Si donc q désigne la distance de FiG. I. j' — ^ S à la tangente en H à la podaire, on a — =: ^ d'où r = — . L'équa- tion (3) devient ainsi (4) C-^ , h ^ = —k-^k ia6 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE D'autre part, considérons un cercle {Fig. 2) de centre O et de rayon a ; marquons un point fixe S^ dans le l)lan de ce cercle, à la distance c du centre. Soit M un point quelconque de la circonférence situé à la distance SiM =/>, de S, et soit q, la distance de S, à la tangente en M. En abaissant la perpendiculaire S^E sur le rayon OM, on trouve immédiatement : FiG. 2. p,^ = q,^ + S,E^ = q^' + c' — {q^ — «)' = c' + iaq,- a'- ou bien, en posant rt- — c^ = &^ : h^ , I (fi = — H Pi' Cette équation, abstraction faite des indices , devient identique à (4) si l'on prend : ia k ^ ^ a k ' (5) Ce lieu de H {Fi g. i) est donc une circonférence. On en conclut immédiatement que le point P décrit une conique admettant cette circonférence comme circonférence principale. Les axes de la conique sont égaux à rt et &. Sa nature dépend du signe de a, tel qu'il résulte de l'équation (5). La constante k de l'attraction étant essentiellement positive, le signe de a est le même que celui de h. Suivant que h est positif, nul ou négatif, on a une elli[)se. une parabole ou une hyper- bole. Nous supposei'ons désormais qu'on est dans le cas de l'ellipse. La formule (()) donne immédiatement le paramètre. L'élimination de h entre les équations (i) et (5) conduit à la rela- tion fondamentale : C) I a 2 k sur laquelle nous reviendrons bientôt. En remplaçant dans l'équation (G) la constante des aires par sa valeur — pp — (T désignant la durée de la révolution), on trouve cette autre relation fondamentale : (8) k = ï^ L. LECOUNU. — SUR LES MOUVEMENTS PLANÉTAIRES 117 qui permet, comme l'on sait, d'interpréter la troisième loi de Ké})ler. Rappelons, d'autre part, qu'en consi- dérant l'ellipse comme projection de son cercle principal et appelant u l'angle auxiliaire NOA {Fig. 3), c'est-à- dire l'anomalie excentrique de Kepler et G l'angle POA, l'on a : I-kI c := Il sin II (9) ï a r = a — c cos u r cos 0 = rt cos II — c r sin G = 6 sin u. II. — Le mouvement de la planète sur son orbite, tel qu'il résulte des formules précédentes , est susceptible dune interprétation remarquable. Faisons rouler, sur une droite fixe, une circonféi-ence de rayon a. Un point M (Fig'. 4) situé à la distance c du centre, décrit une cycloïde raccourcie. Soient r sa distance à la base du roulement, .v sa distance à une droite fixe, perpendicu- laire à la base, et u l'angle MOG. L'on a : FiG. 4 .x; =z au — c sin u 7' = rt — c cos a Ces formules deviennent identiques aux deux premières du groupe (9) si l'on pose -ppr = — . D'après cela : Si une circonférence roule sur une droite horizontale, de telle manière qu'un point M de son plan se meuve uniformément en pro- jection horizontale , la distance de ce point à la droite carie suivant la même loi que le raj'on vecteur d'une planète pour laquelle le demi-grand axe de Vorhite et la demi-distance focale seraient égaux respectivement au rayon de la circonférence roulante et à la distance du point M au centime. Ce résultat peut encore s'énoncer d'une autre manière. La vitesse du du "'dt de rotation est -7- • Mais -th- dt ï (a c cos u) -j^ = r La cil'- ii8 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE conférence roule donc avec une vitesse angulaire inversement pro- portionnelle, à chaque instant, à la distance du point M à la base. L'angle polaire 0 de la trajectoire elliptique peut être également représenté d'nne façon assez simple. Abaissons la perpendiculaire CH sur OM et divisons cette perpendiculaire dans le rapport jr^ = — . L'angle HMB est égal à 0. Cette propriété résulte immédiate- a ment de la comparaison des figures 3 et 4. De plus, MB est égal à r, et la parallèle à OM menée par le point B rencontre la verticale OC à une distance du centre O égale à b; c'est ce que montrent les deux dernières équations du groupe (9). IIL — Ces considérations sont applicables au cas général d'un mobile attiré par un centre fixe en raison inverse du carré de la dis- tance. Pour abréger le langage, je continuerai à appeler soleil le centre d'attraction et planète le point attiré. Je reste d'ailleurs dans l'hypothèse où la trajectoire est elliptique et où, par conséquent, p^ est inférieur a —p. Imaginons que la planète soit originairement placée en un point donné P, à une distance î\ du soleil S {Fig: 5), et quelle soit lancée FiG. 5. avec une vitesse initiale Po clans un plan fixe passant par PS. En fai- sant varier la direction de la vitesse initiale, on obtient diverses ellipses (E) pour lesquelles, en vertu de la formule (7), la longueur du grand axe est la même, et qui sont par suite, en vertu de la for- L, LECORNU. — SUR LES MOUVEMENTS PLANETAIRES II9 mille (8). parcourues dans le même temps T. Toutes ces ellipses admettent le même cercle directeur C , de rayon ia , ayant le soleil pour centre. Le lieu du second foyer F est une circonférence de centre P et de rayon ia — i\. Pour construire la trajectoire passant par deux points donnés P et P', il suffit de remarquer que , a étant connu, on connaît les distances du second foyer, F, à ces deux points. Il y a évidemment deux solutions. Cherchons l'intersection de deux trajectoires admettant le même point de départ P et la même vitesse initiale Co. Soient F et F' les seconds foyers de ces deux courbes et soit P' un point d'intersection autre que P. On a P'F + PS = FF' + PS, d'où P'F = P'F'. Mais déjà PF = PF'. Le point P' se trouve donc, comme P, sur la perpen- diculaire au milieu de FF'. On en conclut que les deux coniques n'ont qu'un point d'intersection réel en dehors de P. Si F' se rapproche indéfiniment de F, la position limite de P' se trouve sur le prolonge- ment de PF. La corde focale PQ détermine donc le point de contact Q de l'ellipse avec son enveloppe. Il est aisé de trouver le lieu de Q. On a en effet PF = ia — i\ et FQ + QS = 2«, d'où PQ + QS = 4rt — r,. Le lieu de Q, c'est-à- dire l'enveloppe des ellipses (E), est donc une ellipse (L) dont les foyers se trouvent en S et P. Cette dernière propriété est énoncée , sans démonstration, dans les Exercices de Mécanique rationnelle de M. de Saint-Germain (2'"^ édition, page 261). L'ellipse (L) a pour grand axe ^a — /'p. Elle est tangente au cercle directeur (C). Elle délimite les régions du i)lan qu'il est possible d'atteindre en partant de P avec la vitesse initiale ('„, c'est-à-dire le domaine correspondant à cette vitesse initiale. En faisant varier c^ sans changer la position initiale P, on fait varier l'enveloppe (L). L'ensemble de ces enveloppes constitue un système d'ellipses homo- focales. Il est clair que, si la vitesse initiale est dirigée d'une manière quelconque dans l'espace au lieu d'être contenue dans un plan fixe, la limite de chaque domaine devient un ellipsoïde de révolution et l'ensemlile forme un système d'ellipsoïdes de révolution homofocaux. Pour une valeur donnée de ç^ , le lieu des centres des ellipses (E) est homothétique, par rapport à S, du lieu des foyers F : c'est donc une circonférence. On en conclut que le lieu des périhélies et des aphélies est un limaçon de Pascal. Le lieu des extrémités du petit axe est évidemment une circonférence de rayon a. IV. — Si le point attirant S s'éloigne à l'infini dans une direction déterminée et si, en même temps, la constante K grandit dételle I20 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE manière que — tende vers une limite finie g; on se trouve finalement en présence du mouvement d'un projectile pesant. L'ellipse E dégé- nère en parabole. L'ellipse enveloppe L devient la parabole de sûreté. Le cercle directeur C a pour limite la directrice commune à toutes les paraboles de tir. Pour voir ce que deviennent les équations (9) dans ce cas extrême, il convient de compter les angles à partir de la ligne SF, dirigée vers l'apbélie, tandis que les formules (9) sont écrites, suivant l'usage, en dirigeant l'axe polaire vers le périhélie. Cela revient à remplacer M et ô par tt — h et tt — 0. En comptant, en outre, le temps à partir de l'instant du passage à l'aphélie et désignant par n le moyen mou- venient — , on a : nt = Il -[- — sin II j' =1 a il 4- — cos u\ Mais — tend vers l'unité et il en est de même du rapport — , en a 2a vertu de la formule (7). Cela exige que u devienne infiniment petit. On peut alors écrire : nt =1 au j^ r= aa — a — D'ailleurs, n = —j-, ou, d'après (G), ii = — i / — Si l'on remplace k par gr^'', on a : /i = — ^ \i ^ ^ v d'où 11=1 t II K. et r = 2« gt-. \ a 2 On vérifie ainsi que l'accélération verticale du mouvement limite est égale à g. En projection horizontale, le mouvement limite est re^wésenté par la limite de la fonction /- sin 0, égale à hii ou 6/1/^. Soit y. l'inchnaison de la vitesse initiale ('„ sur la perpendiculaire au rayon vecteur. On a : C = /)o Cq = *'o ''0 ^^^ y.=^ 1 ah \J -^-^ ce qui permet d'écrire : lim. 7' sin 0 — ''" ^'0 ^^^ ''' = p cos a.^, et l'on retrouve la loi connue. • La représentation du mouvement planétaire par la cycloïde rac- courcie de la figure 4 peut être considérée comme une générahsation du mouvement parabolique : en projection horizontale, le mou- COMMANDANT E.-N. BARISIEN. — POINTS REMARQUABLES d'uNE CONIQUE 121 vement de M est uniforme, comme pour le cas du mobile pesant ; en projection verticale, ce mouvement obéit à la loi /• = « (i -{--£- cos ii] et, pour les valeurs infiniment petites de ii, devient uniformément varie. M. le Commandaiit E.-N. BARISIEN en mission à Constantinople SUR CERTAINS POINTS REMARQUABLES D'UNE CONIQUE - [M'3j] — Séance du 6 août — Cas de la conique à centre, et en pai-ticuliev de l'ellipse Etant donnée une ellipse de centre O, si on considère trois points M, P, Q de la courbe, on sait que, si les points P et Q viennent se confondre avec M, le centre du cercle circonscrit au triangle INIPQ devient, à la limite, le centre de courbure G relatif au point M. Il est intéressant de se H demander ce que de- vient, à la limite, l'or-- thocentre de ce môme triangle MPQ. D'après les positions respectives du centre du cercle circonscrit , du centre de gravité et de l'ortho centre d'un même triangle, il est bien évi- dent que l'on aura la position de l'ortho centre limite H en prolongeant CM de MH = 2MC. Ce point H pourrait être dénonuné, par analogie avec le centre de courbure, orthocentre de courbure, ou ortlio centre du triangle formé par trois points infiniment voisins. FiG. I. 122 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE On pourra aussi considérer le centre du cercle des neuf points w du triangle MPQ; ce point w est le milieu de CH. Mais on peut encore considérer deux autres triangles. Soit S le pôle de la corde PQ par rapport à l'ellipse. La tangente en M ren- contre PS en T et QS en U. On poui-ra envisager ce que deviennent certains points remarquables des triangles SPQ et SÏU. Nous allons donc détei^miner ce que deviennent les points C^ , H, , w, de SPQ et les points Cj, Hj, w^ de STU, lorsque les points P et Q se confondent avec M. Il suffit de déterminer la posi- tion limite des centres des cercles C, et C.. Or. pour étudier la limite des cercles circonscrits aux triangles SPQ et STU, il suffit d'étudier cette limite sur le cercle circonscrit au triangle Q, c'est-à-dire sur le cercle osculateur en M {Fig. 2), de rayon R. Soit 2 a l'angle PCQ. Nous pouvons toujours supposer que MP : MQ. Calculons le rayon R, du cercle circonscrit au triangle SPQ. On a PO 2R sin a 2R sin a 2R, = ^ — — FiG. 2. sin SPQ sin(i8o« — 2 a) sin 2 a 2R, ^ . ^ COS a R, "^ ■ 2 COS a R 0, etR, — . A la limite, a Le centre C, est donc au milieu de CM. Calculons de même le rayon R^ du cercle circonscrit au triangle STU. On a TU 2R,= sin 2 a -Or, si I est le milieu de PQ, on a TU_SM PQ "~ SI ' TTT - PQ^^^ 1 u — yj COMMANDANT E.-N. BARISIEX. — POINTS REMARQUABLES d'uNE CONIQUE 123 Mais PQ = 2R sin a, COS a CCS y. QT en ^^ ^ T} R(i — cos^ y.) bl = bL — IL = K COS y. = . ces a COS y. Donc 2R sin a TU I -|- COS X* Alors 2R sin y. R 2R,= (i -)- COS a) sin 27. COS y (i -\- cos y.)' 2 COS y. (i -[- COS x) ■ Et à la limite pour y = o R -^ Le centre G^ est donc le milieu de C^M. Ailles des coiwbes décrites par les divers points G,, G., H, H,, H^, L'équation de l'ellipse donnée étant b' X' + a'j"^ — a'' b' = o, les coordonnées des points M et G sont, en fonction de l'anomalie excentrique 'f de M X,n = a cos 'f Xc = — COS^ 'f, y m = b sin 'f J'c=^ ^ sin-' » Soit L (X, Y) un point situé entre M et G et tel que LM _ m, LG ~ 7i • On a Xm — X m ou X — Xc n ' \{m -\- n) = nxm + mxc. 124 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MECANIQUE Il en résulte que les coordonnées du point M sont (m -\- n)X = na cos 'f -\- m — cos' 'f . (m -j- n)Y = nh sin '^ — m -^ sin' 'f. Le lieu de M est une sextique unicursale , ce que l'on voit facile- ment en posant tg- = t. La dilTérentielle de l'aire du lieu de L est rfU=Mx^Y — Yf/X). Or (m -f n) dX = — ina sin f + 3m — cos^ f sin 'fi d^^^ l'aire des deux boucles extérieures a ''''^^^\,^__^_^^,y^^^ une somme équivalente à l'aire de la FiG. afris. boucle intérieure. Pour la courbe Cj , si 9E = 7D. on trouve de même a^ _ 19 ± 2 v/78 b^- 7 Cas de la parabole. L'équation de la parabole étant y^ — 2/j.v = o , les coordonnées de M et G sont Les coordonnées du point L (X,Y) sont alors nx, + m (3.V, + />) _ (/t + 3/») a-, + np X = m -{- Il m -f II in)"^'^ Y = ^ m -\- n On tire de la première x, , et par suite j^^ En substituant dans la seconde , et élevant au carré , on obtient ^ ^ 2 [(,n -f- n) X — mp] [amX (m + n) — p (2//;^ + 3/»n + n')] p(//i -\- II)- (3//i 4" ")' COMMANDANT E.-N. BAUISIEN. — POINTS REMARQUABLES D'uNE CONIQUE IQJ Or 27/1^ -|- 3i)m -)- n^ = (m -f- n) (am -f- n) L'équation de la courbe devient donc p (3//1 -|- /i)' C'est une cubique unicursale ayant un point double sur l'axe des x, et un sommet sur le même axe. La courbe a donc une forme strophoïdale à branches paraboliques. Remarquons que dans les coordonnées X et Y , si l'on fait, n -f- 3m = 0. on a m -\- n 2 ' Le lieu est alors la directrice de la parabole. On a ainsi m = ■ — i, n = 3. On sait en effet que, si on pi^olonge la normale en M à la parabole jusqu'à son point de rencontre L avec la direc- trice, la longueur ML est la moitié du rayon de courbure MC. (Fig: 3.) Donc , la directrice est le lieu du point M ou H.,. Fig. 3. Les équations des divers lieux sont donc C. H H, H 2 ou w »2 Y. :^ (^x - p) (2X - 3py 32/> V. _ (4X - p) (ax - 5py 108/) Y. = ^(X + w) (4X - pY ajp y, ^ _ ^X- (X - p) p (2X + pY = o Y. ^ (4X+/>)(aX + 3p)^ ~ 4P ^. _ (8X 4- P) (^X + jpY loSp 128 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE M. le Colonel A. MANNHEIM Professeur honoraire à l'École Polytechnique, à Paris NOTE DE GÉOMÉTRIE CINÉMATIQUE fO 4 cl] — Séance du 6 août — Je me propose de donner une solution de ce problème qui , à ma connaissance, n'a pas encore été traité : Constfuitx' la tangente en un point de la ligne de striction d'un hyperboloïde à une nappe. Comme on va le voir, la construction est facile à obtenir en faisant usage de propositions de géométrie cinématique. En dehors de cette manière de procéder, je n'aperçois pas la pos- sibilité d'arriver à une solution géométrique de ce proldème. Appelons (H) un hypei'boloïde à une nappe, A, B, C les trois droites qui sont ses directrices. Par un point a de A et, respectivement par B et C, faisons passer des plans ; ils se coupent suivant une droite G génératrice de (H) : c'est pour le point central situé sur G que nous allons construire la tangente à la ligne de striction de (H). Pour c(da nous avons besoin de connaître le centre o de (H) ; construisons ce point. Par B et C, menons respectivement des plans parallèles à A; ils se coupent suivant un- droite A'. Dans le plan (A, A) menons une parallèle aux droites A, A' et à égales distances de ces droites, elle passe par o. On obtient de même des parallèles à B et C qui passent paro. Ce centre est donc déterminé. Le plan (o. G), qui est tangent à (H) au point à l'infini sur G, touche le cône asymptote de (H) suivant une droite parallèle à G. Cette génératrice de contact est la caractéristique du plan (o. G) pour un déplacement infiniment petit de G sur (H). Le plan mené par G perpendiculairement au plan (o, G) est le plan central de (II) relatif à G. Cherchons la caractéristique de ce plan; pour cela, appliquons cette proposition de géométrie cinéma- tique : A. MAXNHEIM. — XOTE DE GÉOMÉTRIE CINÉMATIQUE I29 Les caractéristiques des faces d'un dièdre mobile de g-randeiir invariahle sont les projections sur ces faces de l'adjointe à un plan perpendiculaire à l'arête du dièdre, adjointe qui appartient aupara- holoïde des normales, relatif à cette arête, de la surface engendrée par cette droite. La surface engendrée par l'arête du dièdre n'est autre que (H). Le liaraboloïde des normales à cette surface pour G est déterminé par les normales à (H) issues des points où G rencontre A. B. C. On prend alors les traces de ces normales sur le plan perpendiculaire au plan (o. G) et mené suivant la caractéristique connue de ce plan. Ces traces appartiennent à l'adjointe cherchée; il suffit de pro- jeter cette adjointe sur le plan central relatif à G pour apoir la caractéristique de ce plan central. Le point e, où cette caractéris- tique coupe G, est le point central sur cette droite; et l'harmonique conjuguée de cette caractéristique , par rapport à G et à la direc- trice de (H) issue de e, est la tangente à la ligne de striction. La tangente demandée et la caractéristique du plan central sont , en effet, deux tangentes conjuguées de (H). Résolvons le même problème après avoir changé la génération de riiyperboloïde. Prenons un hyperboloïde (H) lieu de l'arête G d'un dièdre droit dont les faces passent respectivement par deux droites fixes , A . B ; il s'agit toujours de construire la tangente à sa ligne de striction pour le point central situé sur G. Comme précédennnent , nous appliquerons la même i>roposition de géométrie cinématique, après avoir cherché la caractéristique du plan qui touclie (H) au point à l'infini sur G, pour un déplacement infiniment petit de cette génératrice. Déterminons d'abord le centre o de (H). Par A menons un plan parallèle à B; la projection B' de B sur ce plan appartient à (H). Dans le plan (B, B') la parallèle à B et B' à égales distances de ces droites passe par o. On a de la même manière une autre droite x^assant par ce point, en menant par B un plan parallèle à A. La rencontre des deux droites détermine o. Ce centre est, d'après cela, le mifieu du segment de la perpendiculaire commune à A et B compris entre ces droites. La pai-allèle à G menée du centre o est la caractéristique du plan (o, G) pour un déplacement infiniment petit de G. L'adjointe au plan perpendiculaire à G est la droite d'intersection des plans normaux aux faces du dièdre menés respectivement, 9' r3o MATHÉMATIQUES, ASTRONOAIIE, GÉODhSIE ET MECANIQUE suivant les droites A et B. Avec ce qui vient cVèti-e détermine, on peut maintenant, connue dans le premier cas considéré, résoudre le proldème de la construction de la tangente à la ligne de striction. Enfin on peut encore prendre cette génération de l'hyperboloïde : on donne deux droites A, B et un point fixe c. On prend une droite G qui rencontre A au point « et B au point b ; lorsque cette droite se déplace de façon que l'angle a c b reste égal à un droit, elle engendre un hyperboloïde (H). Avec cette génération, le problème se résout toujours de la même manière , et la proposition de géométrie cinématique employée est toujours la même. M. G. TARRY A Alger CARRES PANlMAGIQUES DE BASE 3/1 — Séance du 6 août — J'appelle carrés panmagiqiies des carrés magiques dans lesquels la somme des nombres est la même, non seulement dans toutes les directions du côté du carré et dans les deux diagonales, mais encore dans toutes les directions des diagonales, et par conséquent dans toutes les directions que détermine un carré. Cette dénomination me paraît préférable à celles de diaboliques et pandiagonaux sous lesquelles ces carrés sont désignés en France et à l'étranger. On ne peut, par les méthodes actuellement connues, obtenir de earré panmagique lorsque la base est un nombre impair de la forme 3/1. n ne contenant pas le facteur 3. Nous allons faire connaître une méthode qui résoudra ce pro- blème. Pour fixer les idées, je prendrai n égal à 5. La méthode consiste à superposer, case à case, les nombres de deux al)aques panmagiques de base i5. l'un renfermant les i5 pre- miers nondu'es entiers, et l'autre les i5 premiers multiples de i5, de G. TARHY. — CARRÉS PANMAGIQUES l3l 'O à i4 X i^^ cle manière à obtenir un carré formé par les i5- pre- miers nombres. Nous désignerons l'une et l'autre de ces suites de i5 nombres par les i5 lettres à indices composant le rectangle suivant : «1 a, a. «/. (h b, b.. b.. b. b. C^ c. c. c, c. Dans chacun des abaques paniiiagiques à superposer, chaque lettre est répétée 3 fois ou 5 fois dans toutes les lignes d'une certaine direction, et Ion démontre aisément que, si elle est répétée 5 fois dans une direction, elle sera répétée 3 fois dans une autre direction. Les abaques ne peuvent donc présenter que les cond^inaisons sui- vantes : 1° Lettres répétées 3 fois dans les lignes parallèles à un côté du carré ; 2° Lettres répétées 3 fois dans les lignes parallèles à une diagonale du carré ; 3° Lettres répétées 5 fois dans la direction d'un côté et 3 fois dans la direction perpendiculaire, parallèle à un autre côté ; 4" Lettres répétées 5 fois dans la direction d'un côté et 3 fois dans la direction d'une diagonale ; 5" Lettres répétées 5 fois dans la direction d'une diagonale et 3 fois dans la direction d'un côté ; 6" Lettres répétées 5 fois dans la direction d'une diagonale et 3 fois dans la direction de l'autre diagonale. Voici ces 6 abaques construits avec les i5 lettres à indices de notre rectangle . l'32 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, «EODESIE ET MECANIQUE Abaque 1 a, a. «3 «i a- «, a.. a. a, n, «, a. a. «'. a. h. b. b:. b. b. ^ b.2 bs bi b. ^ b. bi bi b. ^"t c. Ci Ci c. ^1 C-i c. Ci c. Ci c.2 Ci Ci C- a. «3 a, «:, «, a. «3 «', rt_ «1 a. a. «/. fl. «1 K ^^3 b„ b. ^ b, b-i b'. b. b. b. bi bi b. bi (-■2 ^3 Ci ^5 ^1 c. C3 Ci r- <'î C.2 Ci Ci c. Ci a. «4 a. «, a. «3 «', «:, a, a. a. «', «.. "i a. l\ b, b-. b. b. b. b,. b. b. b. bi ^'-, b: bi b.2 c. c, c. c, Ci c. Ci c. c, Ci Ci Ci c. Ci c.2 a, a. «1 a. a. «/, a «, a. «3 «7. a.. rt, «2 a. Ih b. ^ b. b. b. b. ^ b. ^'3 bi b. bi b.2 bi c, c. f", c. C-i C;, c. (', c. Ci Ci c. Ci c. Ci a. a, a. a. «'. a. a, 0, a. «', «5 rt, a. a. «', Ih ^ b. b. b. b. b. b.. b. bi b. bi b.2 bi bi c. c, c. C-i Ci Cj Ci c. c. Ci c. Ci c. Ci Ci Abaque 2 a, b.2 c.2 a, bi Ci a,, bi b. C, b, a, c, b, a, c, b, a, c\ b, a, a., c, &3 a, c, b., a, c, 6, ^3 c, b, b.i «3 ^3 &/. a. c. b^ a.j. Cj 63 rt; r,, c, 63 a, c, b., a, c, b., a., c, b, a, «3 C3 b^ a., c. 6, «2 ^2 ^3 ^4 <"'. ^5 ^3 «/. <^4 ''^5 "i c^ b.^ O3 c., /),. rt^ Cj o. b, C.J a, b, bi «5 />, a^ r, 63 rt; Cj Ô5 a, c, «4 C'. ^5 «1 c, b, a., b,^ rt- C5 ^?, 6, a- Cj b, a, c, b, a, c, b, a, c, C( &3 a, c, />j ^3 r, ftj r/.. r,, />, a, a- Cj 6, rtj Cj &3 fl^ c^ 65 a, c, Z^, &_ a, c, &2 «3 C3 ft, a, c, b, a, c, c, b, a, c, b, a, c, b, a, c, b, a, fl, c, b, a, c, b, a, c, b, a, c, b, b, o, r., b, a,, c, b, a, c, b, a, c. Cl' b-, c.2 «3 ^3 Ci Cfi b, b, c., «1 bi Ci a, b-2 (\ a, bi Ci a,, bi r, a G. TAURY. — CARRES PANMAGIQUES l33 Abaque 3 «, a, a. a, cr.. a, a. rt.) «4 a. a, a. a. «4 a. b. 6. b. b. b. b, b. b. bi b. b, b. b-s bi b. c^ c. C; c, c. c, c. e., Ci c. c, c. C3 Ci C- a, a. «3 «4 a a, a. O3 a, a. «i «2 «3 «4 «5 ^ b. b. b, b. b, b. b, b, b. b. b.2 ^3 bi b. ^1 c. c. Ci c. c, c. C-i Ci c, c, c. <^3 Ci c. a, a. a. a, a- fl, o. a., a, a~ a, a-i a. «4 «5 ^ b. b. b, b. b, b.2 b. b. b:, b, b. b. bi b. ^1 c^ Ca Ci c. c, C-2 C3 Ci C, c, c. C; c, Ci a, a. a. «. O- «. a. «3 a. rtj «, a. a. «4 «3 ^>, b. b. bi b-. b. b.2 b. b. b, ^ b.2 *3 bi b. ^1 (-■2 c. c, c. c, c, r., Ci c. c, Ci C-i Ci c. a, «S «3 a, a. a, «2 rtj a, «. a, a. «3 «4 a- b, b. b. bi b. b. b. b. bi br. b, b.2 b. bi b-. ^, C, c. c, c. c, C.2 c. Ci C. c^ C.2 c. c, C- Abaque 4 6., ûj r., &, «2 ^, a, c, b, C, 6, c. b, «3 ^4 ^3 «4 ^3 «4 a. a. Ci ^4 ^4 «4 6, fl. ^= C;, a, b. b, c~ o a. 6, a c, b., a,, c, b 0, b, a, c, b, a, c, b., a, c, «1 c, b, a, c, b, a, c, b, a, b, a, c, b, a, c, b., a, c, b, c, b, a, c, b, a, c, b, a, c. a, Cj b.^ a^ e. 6, a^ b, rt- 4 j b, a, c, 6, o, c, b., a, c, b, c, b, a, c, b, a, c, b, a, c, «1 ^2 *3 «4 c, b, a, c, b, a. b. a, c 3 ^4 «o c, b, a., c^ b. c, ^», a, c. a. b, a, c, b, a, c, «1 c^ b,, a, c, b, a, c, b^ a, bi «2 ^3 ^4 ^':, c, b^ O3 Cj b. Ci b, a, c, b, a, c^ b., a, c, a, c, b, a, r, b, a^ r., b, a. i34 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Abaque 5 a, ^.-, c. «;. ^2 C^ a. ^ C3 a, ^ c. «'. 63 c. a. ^ c~ «S ft. c. a, ^5 C4 «3 ^>2 c, fl, ^ c. a. b. C1 a. b, c. a. b, ^5 «4 ^3 ^2 «. ^3 c, a, b. c. «1 b~. c, a. />, Ci «5 b. C, a, b, C- «5 K C-i «2 b. c. «', ^3 c, a, b. Ci «3 b. C^ rt, b. :.C4 «:. b. ^1 a. ^'■. <':> «2 b. C5 a, b. C, «2 ^ C-, «4 b. c. «1 *3 C4 «3 b. c, a~ b. C, a. b. f"1 (h. b.. C3 a. b. C~ «4 b. c. a, b. C4 «', b.. c^ «1 b-. c, a. b. Ci «5 b. c. «2 b, C, «3 b. C3 flj b. c, «4 b-s C, «1 b~. C4 «3 b. C^ «. b. C4 «3 b., (\ «5 b. «-'s «2 b. C5 «4 ^3 C, ■ a, b, Cj «4 b. <'2 a, br. C4 «3 b. c. «3 b. C, a. b. c, «3 b. C3 a. b, C. «4 b. C2 a, bn C4 «i b. c, a, b~. Ca a. b. c, «5 64 C3 a. b, C- fl_ b. C3 «, b. c-. «4 b. c, «, b-. C4 a. b. C, Abaque 6 fl, ^'a /'3 «4 C5 ^ flj c. bi «3 c. 6, «3 Ci b. ^'2 «3 Cf. ^3 a, c. b. a, C-, ^ a, C3 ^4 «3 c, <^3 ^^. «3 C, ^2 a. C', b. «, c, b. «4 <-3 *, a. «4 <^ ^ «5 ^3 b. a. c, ^'2 «3 Ci ^3 a, c, b. b. a, '^2 /'3 «4 c. b. a. C3 bi «3 Ci b. a. c, c, ^ a. C4 ^'3 0, Ci b-. «4 c. b. «2 c. bi «3 «2 ^3 b. a. C, /'2 «3 Ci ^3 a, c. ^3 «4 c. b, ^>3 «', Cj /', a, C, b, «3 ^1 ^ a. C4 *3 a, c. ^4 ^'3 «, c, /^, a, c. ^ a, ^3 bi «3 t', b. a. «ô <-, b. «3 c, b. a, c, ^3 «4 c. b. a. c. bi ^ a. c. b. a. Ci b. a, Ci *3 «1 c. b. «4 c. ^3 b-. «4 c.. b, «2 c. ^ a- C, ^'2 «3 Ci ^'3 «1 «3 (U *3 «1 c. bs «4 C5 b. a, ^3 ^ «3 c, ^ /'4 a~ Cl '^2 a. c, ^'3 rt, C2 ^. «4 C- ^ «2 C3 C3 ^ «2 C, b, a. C, b. a. Ci *3 a, c. ^>3 «4 G. lAHUV. — CARRÉS PANMAGIQUES l35 Pour que ces abaques soient panmagiques. il faut et il suffit, pour les abaques i et 2, que la somme des 5 nombres soit la même dans les trois s^randes liji^ues du rectangle, et poin* les autres abaques que ce rectangle soit magique. Chacun de ces 6 abaques peut être superposé à l'un quelconque d'entre eux, de diflérentes manières, à la condition toutefois que l'oi-ientation soit choisie de telle sorte que dans les deux abaques les lettres ne soient pas répétées le même nombre de fois , 3 ou 5 , dans une même direction, afin d'éviter la-répétition d'association. Ainsi, on peut condùner l'abaque 2, dans lequel les lettres sont répétées 3 fois dans la direction d'une diagonale, avec un autre abaque 2 dans lequel la même répétition a lieu dans la direction de l'autre diagonale. Dans les'al)aques 2 on trouve i5 nombres différents dans chacune des lignes horizontales et verticales, et par conséquent tout carré panmagiquc obtenu par la superposition de deux de ces abaques fournit une solution du problème des i5' officiers. Carrés à grille J'appelle carré à grille, un carré de base ah tel que dans tous les rectangles de côtes a ei h, ef [de môme orientation , découpés sur le carré par une grille, la somme des a h nombres est la même. Il est aisé de voir que nos abaques i et 4 sont à grille. Leur super- position donnera donc un carré panmagique à grille rectangulaire de côtés 3 et 5, le grand côté horizontal et le petit côté vertical. Voici les abaques et le carre obtenus, en remplaçant les lettres par des nombres convenablement choisis. i36 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Abaque numérique 1 i3 3 I II 12 i'3 3 I II 12 i3 3 I II 12 i4 lo 4 2 5 i4 i5 4 2 5 i4 i5 4 2 5 8910G 7 89 10 6 7 8 9 10 6 7 3 I II 12 i3 3 I II 12 i3 3 I II 12 i3 10 4 2 5 14 i5 4 2 5 14 10 4 2 5 i4 9 10 6 7 89 10 6 7 89 10 6 7 8 1 II 12 i3 3 I II 12 i3 3 I II 12 i3 3 4 2 5 14 i5 4 2 5 14 i5 4 2 5 14 i5 10 6789 10 678 9 10 6789 11 12 i3 3 I II 12 i3 3 I II 12 i3 3 I 2 5 14 i5 4 2 5 14 10 4 2 5 14 10 4 6 7 8 9 10 6 7 8 9 10 (3 7 8 9 10 12 i3 3 I II 12 i3 3 I II 12 i3 3 I II 5 14 10 4 2 5 14 i5 4 2 5 14 i5 4 2 7 8 9 10 6 7 8 9 10 G 7 8 9 10 6 G. TARRY. — CARRÉS PANMAOIQUES l'i'J Abaque numérique 4 i8o 195 io5 lOO i5 75 3o 210 120 160 Go 90 0 45 i35 75 3o 210 120 i65 60 90 0 45 i35 180 195 io5 i5o i5 60 90 0 45 i35 180 195 io5 i5o i5 75 3o 210 120 i65 180 195 io5 i5o i5 75 3o 210 120 i65 Go 90 0 45 i35 75 3o 210 120 i65 60 90 0 45 i35 180 195 io5 i5o i5 60 90 0 45 i35 180 195 io5 i5o i5 75 3o 210 120 i65 180 195 io5 i5o i5 75 3o 210 120 iG5 60 90 0 45 i35 70 3o 210 120 i65 Go 90 0 45 i35 180 195 io5 100 i5 60 90 0 45 i35 180 195 i()5 i5o i5 75 3o 210 120 iG5 180 195 io5 i5o i5 "5 3o 210 120 i65 Go 90 0 45 i35 75 3o 210 120 i65 60 90 0 45 i35 180 195 io5 i5o i5 60 90 0 45 i35 180 195 io5 i5o i5 75 3o 210 120 iG5 180 195 io5 i5o i5 '5 3o 210 120 i65 Go 90 0 45 i35 75 3o 210 120 i65 60 90 0 45 i35 180 195 io5 i5o i5 60 90 0 45 i35 180 195 100 100 i5 75 3o 210 120 iG5 l38 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE. (lÉOnÉSIE ET MÉCAXKH/E Carré panmagique à grille 193 198 106 161 27 88 33 211 i3i 177 73 93 I 56 147 89 45 214 122 170 74 io5 4 47 140 194 210 109 l52 20 68 99 10 01 142 188 204 ii5 i56 22 83 39 220 126 1-2 i83 196 116 162 28 78 3i 221 l32 178 63 91 II 57 148 90 34 212 125 1:9 75 94 2 5o 149 195 199 10- i55 29 69 100 (> 52 143 189 2o5 III i5- 23 84 40 216 127 173 181 206 117 i63 18 7<3 41 222 i33 i(i8 61 lOI 12 58 i38 79 32 2l5 i34 i8o 64 92 5 59 1 5() i84 197 IIO i64 3o 7« 9 9 12 i5 I 4 7 10 i3 3 6 9 12 i5 I 4 7 lO i3 2 5 8 II i4 7 lo i3 I 4 8 II i4 2 5 9 12 i5 3 () 8 II i4 2 5 9 12 i5 3 6 7 lo i3 I 4 9 12 i5 3 () 7 lO i3 I 4 8 II i4 2 5 i3 I 4 J lO i4 2 5 8 II i5 3 () 9 12 l4 2 o 8 II i5 3 6 9 12 i3 I 4 7 lO i5 3 6 9 12 i3 I 4 7 lO i4 2 5 8 II 4 7 lo i3 I 8 II i4 2 6 9 12 i5 3 5 8 II i4 2 6 9 12 i5 3 4 7 lO i3 I 6 9 12 i5 3 4 7 lO i3 I 5 8 II i4 2 lo i3 I 4 7 II i4 2 o 8 12 i5 3 () 9 II i4 2 5 8 12 i5 3 (i 9 lO i3 I 4 7 12 l5 3 6 9 lO i3 I 4 7 II i4 2 5 8 i4o MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MECANIQUE ^^^_ B^^B ^^^M i8<) 3o 0 i5o i65 60 195 2IO 45 i5 75 90 io5 120 i35 ;5 90 io5 120 i35 180 3o 0 i5o i65 60 195 210 45 i5 Oo 19.5 210 45 i5 75 90 io5 120 i35 180 3o 0 i5o i65 i5o i65 180 3o 0 45 i5 60 195 210 120 i35 :5 90 io5 120 i35 '5 90 io5 i5o i65 180 3o 0 45 i5 60 195 210 45 i5 60 19.5 210 120 i35 :5 90 io5 i5o i65 180 3o 0 3<) 0 i5o iG5 180 195 210 45 i5 60 90 io5 120 i35 75 90 io5 120 i35 75 3o 0 i5o i65 180 19.5 210 45 i5 60 195 210 45 10 60 90 io5 120 i35 70 3o 0 i5o i65 180 i65 180 3o 0 i5o i5 60 195 210 45 i35 75 90 io5 120 i35 7.5 90 io5 120 i65 180 3o 0 i5o i5 (3o 195 210 45 i5 60 195 210 45 i35 :5 90 io5 120 i65 180 3o 0 i5o 0 i5o i65 180 3o 210 45 i5 60 195 io5 120 i35 :5 90 io5 120 i35 :5 90 0 lOO i65 180 3o 210 45 i5 60 19.5 210 45 i5 60 195 io5 120 i35 75 90 0 100 i65 180 3o En disposant en rectangle les i5 nombres d'une ligne horizontale ou verticale de lun des abaques, et les i5 nombres des cases corres- pondantes de l'autre abaque, on voit qu'en vertu du théorème la somme des produits deux à deux des nombres des cases correspon- dantes est constante. Or la somme des carrés des i5 nombres d'une ligne quelconque de chaque abaque est aussi constante. Donc la somme des carrés des nombres de chaque ligne du carré obtenu par la superposition des deux abaques est constante. Et il est clair que la somme des carrés des i5 nombres de chaque compartiment rectan- gulaire donne la même constante. La méthode ne donne pas l'égalité aux deux premiers degrés dans les diagonales, pai-ce que le nond^re de la base contient le facteur 3 à la première puissance seulement. G. ÏARRY. — CARRÉS PAXMACIQUES i4i Carrés cabalistiques. J'ai appelé carré cabalistique tout carré panmagique au premier degré et magique au second. On peut toujours construire un carré cabalistique lorsque la base est un nombre composé , autre que 4 , ne contenant pas de l'acteur premier à la première puissance seulement. Je me contenterai, dans cette note, de présenter une formule donnant une infinité de carrés cabalistiques de base 8. Carré cabalistique figurant une solution du problème des 64 officiers. a /) — f q — r + s b -\-d P q +.S b /> + /• + s a-{-c q — r a -j-d P +s b — c-\-d b P q 4- S /> + '■ b — c-\-d '/ — '• + « a P +s b — c 'I b -\-d p + r-\- s a + c^d '/ — '• «4-r + r/ P-\-i'-^s b +r/ q — r b — c P +s a 'I b — c-{-d P + r q — r-^S a^c P b q -\-s b — c-\-d P +s a -^d a + r b q — r a-\-c-\-d P b +fZ q +.S b — c /' + '■ a q—r-\-s q — r b — c-\-d P +-S b -\-d q — r-^s a q +.S b — c P b -\-d q a + c+rf P +s a q — r b — c p-\-r^s a 4-r/ q -\-s b — c-\-d P b q — r-j-s a-{-c P + r a-\-c q — r + s b p + r b — c + d q +S a -fr/ P b — c q—r a P + r + s a + c-\-d b -if-d P +s b — c q +s a P a + c+d b -\-d p^r a-j-c b P -\-s b — c-j-d q — r a -\-d p-^r-\-s Les 8 régiments sont figurés par a, a -{- c, b — c, b. a -\- d, a-\- c ^ d, b —c-\-d. b-\- d, et les 8 grades par p. p + r, q—r, y, 7; + s, /) + 7' + .s, r/ — 7' + s-, q + s. Quelles que soient les valeurs données aux lettres, notre carré 1^2 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE est panmagique et présente T égalité au deuxième degré dans toutes les lignes parallèles aux côtés ; enlln. il suffit que les valeurs données aux lettres satisfassent à la relation /(rt — h) = c(p — q) pour que léo-alité au deuxième degré s'étende aussi aux diagonales et que, par suite, le carré devienne cabalistique. En particulier pour a =ii . & = 4.c=i.c/ = 4'/> = 0'^ = ^4» /• = 8. .s = 3a, les 64 cases se trouvent remplies par les 64 premiers nombres entiers et le carré numérique ol)tcnu est cabalistique. M. le Commandant COCCOZ A Paris CARRÉS MAGIQUES [Ji] — Séance du 6 août — j" Suite aux explications énoncées au précédent Congrès et rela- tives à certaines propriétés des carrés magiques construits par diverses méthodes . Au Congrès de Montauban (*) , en terminant un exposé succinct du beau problème de partition résolu par M. Rilly et en faisant remar- quer que : quelques carrés ont des lignes autrement composées que celles obtenues directement par les méthodes précédemment décrites, nous insistions sur ce fait que les diagonales employées par l'auteur sont toutes de la classe ou famille i32. Or, il n'est pas rare que, par suite de changements dans Tordre de ses lignes, un carré puisse être X^résenté avec des diagonales de différentes classes. Prenons pour exemple le carré n« 220 de la brochure ; en changeant convenablement l'ordre d'inscription des horizontales et des verti- cales on aurait d'autres diagonales que celles 4i 4'^ 4^ et 44» '^^ notamment : 2 i4 20 32 3j 41 55 5q 3 i5 17 29 40 44 54 58 *^ oi_i 6 10 24 28 33 45 5i 63 7 II 21 25 35 48 5o 62 qui sont des classes 68 et 196. (•) Xalr Errata. — Pag-o i38. li^-ne i6, clemi-génératcui- au lieu de serai. — Pagre i46, 7 lig-nc en remontant, às ; r-, 14 au lieu de 28 7 35 i3. — Page i5o, 9» ligne, 2 X 10 = 20 au lieu de 2 X n = 22. — Page i.fâ, 5= ligne en remontant, ajouter M entre d^et D. — Dernière ligne, ajouter après Constante : ce qui les a lait appeler à grille. — Page I4S, carré n° i, colonne i : Yt au lieu de F. — Page iSti, carré n« 2, v colonne, B.v au heu de E.V. COMMANDANT COCCOZ. CARRES MAGIQUES 143 Carré n^ 220 initial. Après permutation de lignes. I 2 3 4 I 2 3 4 I 10 43 ou 19 8 3: 64 29 2 02 i: 12 41 62 31 6 39 3 21 56 45 16 2: 58 35 2 4 47 14 23 54 33 r 4 25 60 I 57 28 I 36 55 22 15 46 2 3 34 59 26 i3 4.^ 53 24 3 38 7 30 63 44 9 20 4'J ■ 4 32 61 40 5 18 5i 42 II i 3 4 3 4 ! 10 43 64 29 8 3- 5o 19 2 i 3 34 53 24 i3 48 59 26 21 56 35 2 27 58 45 16 \ ^" 14 25 60 33 4 23 54 1 ^' 28 i5 46 55 22 I 36 2 52 i: 6 3<) 62 3i 12 41 ; 38 1 j 20 49 44 9 3o 63 1 32 1 61 42 II 18 5i 40 5 Le carré est tel que l'on peut permuter deux rectangles; mais, au i^f degré, il y a d'autres particularités à signaler : il est à quartiers égaux, pandiagonal, et conserve cette propriété quand on permute verticales ou horizontales portant le même numéro d'ordre inscrit en tète ou en niarge du carré. Les carrés n° 78 et aSo de la brochure donnent lieu à des remarques semblables. La recherche des lignes de huit nombres donnant les deux cons- tantes 260 et II. 180, exige beaucoup de patience et cVordre. Il est indispensable d'avoir établi à l'avance des listes distinctes de nombres pairs et de nombres impairs. Toutefois, on abrège considérablement le travail intellectuel, ainsi que les écritures, en utilisant des formules calculées dans ces dernières années, après l'achèvement de la bro- chure, soit par exemple le 16*' groupe de la classe S. = 80; il se compose d'aliord des quatre égalités suivantes, dont les termes élevés à la seconde puissance S^ ont pour somme 2,664 • 48 i4 10 8 = 46 20 12 2 = 44 26 6 4 = 40 32 6 2 La belle formule S, + S, = i3o (S, — 44) (*) devient 2.664 + S', = i3o (80 — 44) = i3o X 36 = 4.680 et fait pré- sumer qu'il y a dans ce groupe un ou plusieurs compléments quar- tenaires tels que S'o = 2.016, soit (2.016 -\- 2.664 =4-^^^o)- Les listes des pairement et des impairement pairs donneront S', = 36^ 20^ 16^ 8- = 32=^ 28^ 12^ 8- = 32^ 24^ 20- 4^ = 2.016. (■) s 2 est la somme des carrés des 4 nombres pairs, S, complémentaires des 4 impairs de la suite considérée : a -\- h -\- c Ar d pairs, a' + ''' + c' + ''' impairs. ^rj. MATHÉMATIQUES, ASTUONOMIi: , GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE La somme des carrés des complémentaires à 65 de S, = 9164 , aoi6 -|- ()i()4 = II. 180, réciproquement, la somme des carrés des complémentaires à 05 de S', := 8.5iG qui ajouté «à 2,6(54 = 11,180. Un bel exemple de l'emploi des égalités est celui du i3r groxipe de la famille i32. La formule S, + S', 11,440 donne quatorze égalités ayant pour sommes . . les impairs complémentaires ont pour sommes il en résulte i()() bonnes lignes : No I _ 64 3o 20 18 4- 45 35 I N° 2 — 62 36 18 16 49 4> ^9 ^ ^0 3 __ 62 34 24 12 53 41 3i 3 N° 4 — ^^o 4« 18 i4 5i 47 25 5 No 5 _ 60 38 24 10 55 41 27 5 No 6 — 60 34 3o 8 57 35 3i 5 No ;; _ 58 36 32 6 59 33 29 7 N" 8 — 56 46 18 12 No 9 — 56 42 28 6 N° 10 — 54 4^ 20 10 N" II —54 42 32 4 N^ 12 — 52 48 26 6 N° i3 — 5o 48 3o 4 No i4 — 48 46 36 2 l32 et 5720; 128 et 5460; 53 4: 19 9 59 3: 23 9 55 45 17 II 61 33 23 II 59 •39 17 i3 61 35 17 i5 63 29 19 17 Parmi ces 196 lignes à deux constantes, les i4 du tableau sont composées chacune de quatre cou[)les 65 et , dans ce cas , la somme des cubes est une troisième constante égale à 54o,8oo, Si , au lieu de complémentaires à 65 d'une suite S , on prend ceux à 66, on obtient 4 nombres pairs 66 —a, 66 — &, 66 — c, 6() — d, qui appartiennent à la classe 264 — S,. Exemples : S, = 108 S, r= 100 on a 264 — 108 = i56 et 264 — 100 = 164. (108) 60 40 6 2 64 32 10 2 62 36 8 2 62 36 6 4 (i56) 64 60 26 6 64 56 34 2 64 58 3o 4 62 60 3o 4 (100) 64 18 i4 4 64 18 10 8 64 16 i4 6 64 i4 12 10 (i64)' 62 52 4^ 2 58 56 48 2 60 52 5o 2 56 54 52 2 Les classes qui comprennent une quantité assez importante de groupes et de lignes permettent de déterminer par le procédé suivant des groupes et des lignes de classes j^lus élevées qu'elles de 8 unités. Soient a, h. c, d, les 4 nombres pairs de la classe S, = i32 (aucun de ces nombres n'étant 64) on aura a-\-i,h-\-'2,c-\-'i, cl -\- 1 qui appartiendront à la classe S, -|- 8 = i4o et, ce qui abrège les calculs, les sommes des carrés S^ de la nouvelle classe s'obtien- dront en ajoutant aux S, de la composante 4 (^i + 4)' c'est-à-dire 4 (i32 + 4) = 544. Exemples : COMMANDANT COCCOZ. — CAUIIES MAGIQUES . 1^5 et en effet en ajoutant 544 il 6986 6920 6S-J-2 6760 6'j'2^ on a les nomljres appar- tenant à la classe i4o. S'il s'agissait de passer de i36 à i44» 1^ somme des carrés serait 4 (i36 -)- 4) = 56o. Exemples : (l32) (Carres) (i4o) (Carrés) 6o 56 i4 2 6936 62 58 16 4 • 7480 62 54 12 4 6920 64 56 i4 6 7464 60 56 10 6 6872 62 58 12 8 7416 58 56 16 2 6760 60 58 18 4 7304 62 52 12 6 6728 64 54 i4 8 7272 (i36) (Carrés) (i44) (Carrés) 60 58 14 4 7176 62 60 16 6 7736 71 7(5 -\- 56o . 7736 •62 54 18 2 7088 64 56 20 4 7648 7088 -]- 56o — 7648 60 54 20 2 6920 62 56 22 4 7480 ()920 -\- 56o - . . :48o 60 54 18 4 6856 62 56 20 6 7416 685() -|- 060 - - 7416 58 56 16 6 6792 60 58 18 8 7352 6792 — 060 7352 2° Propriétés de certains Carrés magiques de racine impaire Il y a dans le mémoire de Sauveur un carré magique de 10 l'ait par la méthode des indices qui, à cause du facteur 3, a dans chaque diagonale des périodes de termes les uns de la suite naturelle de I à i5, les autres appartenant à celle de la progression arithmétique dont la raison est i5 et la somme i575. On sait qu'il faut, pour cpi'vui tel carré soit pandiagonal, que les termes répétés aient des valeurs convenables. Voici les conditions dans lesquelles nous en avons construit un qui a été publié il y a plusieurs années dans les Tablettes du Cher- cheur. Les premiers indices sont 1 3 et 2 ; la première horizontale est : 126 24 i4o 166 i54 2i3 188 208 119 i5 87 41 70 92 52. Cela est suffi- sant pour construire le carré; nous ajoutons cependant quelques détails : La i"^ diagonale, ainsi que ses parallèles, comprend tous les termes de la progression dont la somme est i575, avec répétition de 6 I 8 i5 10 = 4o- Ses parallèles ont alternativement la même composition ou lune des deux = 94i3i22;5 3i4ii7= ^o. Dans la seconde diagonale sont les nombres de i à i5 = 120 et ftrois fois le groupe 4^ 3o io5 210 i35 = 525. Ses parallèles ont alternativement la même composition, ou l'un t-des deux autres groupes égaux à 525 répétés : 90 75 195 i5o i5, 60 [o 180 i65 120. Ce qui donne à toutes ces lignes la constante 1695. Ajoutons que, si l'on intervertit à la fois les colonnes et les rangées IQ* l^^'^ f timents =: 7155 l 12,600 donc 2*^ degré 2'' — 3oo 63o 420 o 60 = i4io dans les i5 compar- Mcme résultat si Ton réunit i5 éléments pris à raison d'un seul dans chaque compartiment et à condition que les cases occu[)ent des l)laces homologues; i""'" exemj)le : la i''<^ case; 2^ exemple : les cases centrales. i'^ verticale 54o i65 22.10 2730 i.56o = ^245 1 2^ — 33o i3.5 o 36o 54o = i365 12,600 3*= — io.5o 1260 520 67.5 4^0 =: 3990 ' Cases au centre i ^-20 2025 !\'2o 225 i.56o = 465o ( de cliaque i 1170 120 840 2160 i.5o = 444^ ] 12,600 com[)artinu*nt ( 270 i8i5 o yS i3oo = 35io l En général, par com[)artiments , on a des chilïres considérables. Partageons un carré de i5 en neuf carrés de 5 par indices, ayant par ordre pour constantes 6,5 190 3i5 44^^ -^^'^ 690 8i5 940 io65. On aura 690 65 940 = 1695 8i5 565 3i5 ^ 1695 190 io65 440 = 1695 1695 1695 1695 et, comme chaque carré partiel peut recevoir huit orientations, le nombre des variations sera 9** = 4^-046.721, indépendannnent de celles qui sont particulières à la méthode des indices et que l'on peut appliquer à sa guise. Au chapitre XI § 83 de son mémoire. Sauveur ébauche la question des cvd>es et des carrés composés avec trois sortes de lettres et des termes non consécutifs. Comme exemple, il donne un carré de 7 dont les premiers indices sont 2 3 4- Lettres et leurs valeurs , et première horizontale du carré : A B C D E E G p q r s t u x h i k 1 m n o o 21 4'-i 63 84 io5 126 ' 00007 i4i4' 1234567 l48 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE Aph Bqi Crk Dsl Etin Fun Gxo I 23 45 67 96 125 147 = 004. Pareille question n'avait jamais été présentée d'une manière aussi remarquable que par le Révérend A. H. Frost. Au Congrès de Caen nous avons mentionné l'un de ses mémoires daté de 1877, extrait du tome XV of the Quartelj' Journal of pure and applied Mathe- matics. Dans ce mémoire est décrit le modèle en Cristal d'un cube composé de 343 cuhelets ; chacun étant commun à plusieurs carrés, porte gravés les nombres qui déterminent sa ])lace dans le cube. Ce modèle est actuellement exposé au South Kensington Muséum A'oici l'un des carrés verticaux intérieurs du cube constante 1204, pour les détails, se reporter aux pages 171, 172, 173, 181 du volume 23*= session 1894. 0 I 2 3 4 5 6 000 C,r A4V F,s D,p Bjt G,q E,u 523 G,p E,t C,q AjU F,r D,;V B^s 346 D,u 631- G,v E„s C,p A,t F,q 162 A, s F«p D,t B,q G;U E,r C,v 6i5 E,q C,\x A,r F.v D,s B,p Get 43i B7V G5S E.p C,t A^q F,u D^r 204 F,t D,q B,;U G,r E,v C,s A,p 2G2 154 88 3i6 208 142 34 92 327 212 104 38 273 i58 223 108 49 277 162 54 33i 4 281 173 58 342 227 "9 177 69 297 238 123 8 292 3o8 242 127 19 247 188 73 i38 23 2.-.8 192 84 3l2 197 Sans construire un carré fait par indices, on peut se rendre compte de l'accord de la pratique avec ce qu'enseigne la théorie. Soit le carré de 26. Il est facile, un indice étant déterminé, de relever la suite des nombres des deux verticales extrêmes et des deux diago- nales. Laissons de côté les nombres ou indices o. i, 24. ainsi que le facteur 5 et ses multiples dont nous connaissons les motifs d'exclu- sion, et soit l'indice 5 — i =z 4 ^ Verticale de gauche o 4 8 12 16 20 24 3 7 11 i5 i""*^ diagonale o 5 10 i5 20 i 5 10 i5 20 1 Inutile de continuer; après la 11'= rangée, on constate la période des cinq termes : 5 10 i5 20 i. o 6 112 18 124 5 II 17 a3 4 o 7 14 •21 3 10 17 24 6 i3 ^4 5 II 17 23 4 10 i() '22 3 24 4 9 14 19) K . 4 9 14 19) COMMANDANT COCCOZ. — CARRÉS MAGIQUES l4() Opération semblable pour l'indiee 5 -|- i = 6 : Verticale de gauche i"""^ diagonale Verticale de droite 2^ diaifonale On voit que Ton doit éliminer des premiers indices les termes qui dillcrent de 5 et de ses multiples, d'une unité, en plus ou en moins. Par un procédé analogue , on constaterait que les indices restants que l'on peut accoupler sont : 2 3 ; 2 8, 2 i3, 2 18, 2 23 ; 3 7, 3 12, 3 17, 3 22; 7 8, 7 i3, 7 18, 7 23; 8 12, 8 17. 8 22 ; 12 i3, 12 18, 12 23; i3 17, i3 22; 17 18, 17 23; 18 22; 22 23. Parmi ces couples. 2 23, 3 22, 7 18, 8 17, 12 i3, sont prél'érajjles à cause de l'égalité à 20 de tous ceux qui sont mis en marge à leur suite, tandis qu'avec les autres cette suite est désordonnée. Bien que dans un carré de 35 il entre 600 termes de plus que dans celui de 2.5 , comme il faut éliminer les multiples de 5 et de 7 , il ne reste que 2 3 12 17 18 23 32 33, huit nombres au lieu de 10. Accou- plements préférables : 2 23, 3 32, 12 23, 17 18. 3" Carrés magiques de neuf diaboliques (ou pandiagonau.x). Sous le titre, nous avons donné (page i5o) deux exemples de carrés de 9 à gi-ille qui conservent leurs propriétés quand, dans les deux sens, les lignes du carré considéré comme initial sont inter- verties de six manières diflerentes ; il convient d'ajouter que cette propriété subsiste même quand l'intervention ne porte que sur les horizontales ou sur les verticales. Ainsi, le carré 11° 4, de M. PfelTer- mann (page 102), si les colonnes étaient suivant l'oî'dre naturel 123456789 aurait pour diagonales : I 61 21 77 47 67 45 i5 35 = 39 60 68 8 47 28 76 16 27 = 369 Si les colonnes seules étaient suivant : i 3 5 468 7 9 2 les diagonales seraient : I 3o 56 77 22 5i 45 71 16 = 78 35 10 38 22 63 7 66 5o = 369 On a construit beaucoup de carrés de 9 en se réglant plus ou moins sur celui de 3. A'oici avec application une notation bien simple imaginée en 1886 par M. le général Frolow pour obtenir des diabo- liques (ou pandiagonaux). IDO MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE l' b» 9« 6' 7« 26 8' •38 46 8"' 3^ 4^ i^ 5' 9' 6' 7=» 2" 6« 7'* 2! 89 3- 4'^ l9 54 9^ l6 o« 9" 66 n1 2^* 86 3» 4^ 8' 35 4^ I^ 5^ 9=» e'? 7^ 2* 6' 7« 2'- 8-' 39 4* l2 59 9** I» 56 9' 6« 7" 2' 8« 36 4^ 83 3' 4^ i» 5' 9^ 6' 7' 25 6' 7- 2« 8'. 32 4« !'• 52 9'-* I 44 78 46 62 i5 04 26 33 68 21 34 5 39 7>.) 5() 57 16 04 58 11 72 22 2;) 9 40 74 6 37 80 51 55 17 69 19 35 70 23 3() 7 41 75 52 59 12 47 63 i3 65 27 3i 2 45 76 8 42 73 53 60 10 71 24 28 66 25 32 3 43 77 48 61 14 49 56 18 67 20 36 4 38 81 Dans chaque compartiment sont deux fois les chiffres de i à 9, à raison de 2 par case ; l'un indique le numéro de la rangée d'une table d'addition, et l'autre, celui en exposant, le numéro d'ordre dans cette rangée. Ainsi, 5* de la table ordinaire exprime le 8^ nombre de la o^ rangée : 'ij 38 'Sg 4© 4i 4^ 4^' c'est-à-dire 44 ^t ainsi des autres. Le carré résultant est à gTille et pandiagonal, il possède toutes les propriétés de ces sortes de carrés. Avec la seconde et la troisième table d'addition on a les deux carrés suivants : I 5o 72 34 i5 58 26 39 68 9 46 II 33 79 44 57 22 54 64 5 78 16 29 21 40 62 la 31 80 45 55 23 69 7 47 76 17 30 19 41 63 52 65 6 35 75 13 59 27 37 2 5i 70 20 42 61 53 66 4 77 18 28 60 20 38 3 49 71 36 73 14 43 56 24 67 8 48 10 ^2 81 I 68 54 16 74 33 22 62 39 5o 9 64 29 i5 79 44 21 58 72 46 5 78 34 11 57 40 26 3o i3 80 40 19 59 51 n 65 76 35 12 55 41 27 70 47 6 17 7» 3i 23 63 37 2 69 52 56 42 25 71 48 4 77 36 10 24 61 38 3 67 53 18 73 32 43 20 60 49 8 66 28 14 81 En se guidant sur la seconde table d'addition I 2 3 10 II 12 19 20 21 o 3 6 2;^ 3o 33 54 57 60 et une autre notation , on a un carré à grille ayant toutes les pro- priétés déjà énumérées, et aussi en utilisant la Table n° 3. COMMANDANT GOCGOZ. — CARRES MAGIQUES loi 45 74 4 12 5o 61 69 26 28 76 9 38 02 57 14 19 33 71 2 40 81 59 16 48 35 64 24 34 66 23 I 42 80 58 18 47 68 25 3o 44 73 6 11 49 63 21 32 70 78 8 37 54 56 i3 53 55 i5 20 31 72 77 7 39 60 17 46 36 65 22 3 41 79 10 5i 62 67 27 29 43 75 5 45 74 4 3o 68 20 5i 62 10 76 9 38 70 21 32 55 i5 53 2 4^' 81 23 34 66 17 46 60 16 48 59 I 42 80 22 36 65 5o 61 12 44 73 6 29 67 27 a-j 14 52 78 8 37 72 20 3i 71 19 33 56 i3 54 77 7 39 24 35 64 18 47 58 3 41 79 28 69 26 49 63 II 43 75 5 Le diagramme du carré n" i (page i54) peut être varié de huit manières par interversion de ses horizontales tout en conservant le même entête : les premières verticales sont ainsi constituées : N° I N°3 N°4 N" 14 N° 7 N" 18 N9 i5 Ap Is Hq Fv Bu Gy Er Dt Gx Ap Er Fv Hq Cxx Dt Is Cy Bu Ap Dt Fv Hq Bu Er Cy Is Gx Ap Er Gx Bu Fv Cy Is Dt Hq Ap Dt Bu Gx Fv Is Cy Er Hq Ap Cy Gx Bu Hq Er Dt Is Fv Ap Cy Hq Fv Gx Is Dt Er Bu Ap Is Bu Gx Hq Dt Ev Cy Fv Une autre variante consiste à échanger dans toutes les cases, autres que celles de la première horizontale, une majuscule avec une minuscule A avec p, B avec q, et ainsi de suite. En opérant ainsi, le carré n° 2 (page i56) devient carré w" 4 qui est magique au second degi*é si l'on donne aux lettres les valeurs ABCDEFGH I 891645 723 ou bien : ABCDEFGHI 63 72 o 45 27 36 54 9 18 p ([ r s t u V X y 45 9 36 27 18 63 54 o 72 P q u 5438 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE Diagramme du Carré n° 4. Ap Bq Cr Ds Et Fu Gx Uk ly Dt î:u Aq Cx Ily II- Fs Bv Gp Fv Dp Gy lu Cs Ht Eq Ar Bx Hq Iv Ex Bt Gu As Cp Fy Dr Bu Cts Hv Ey Fi- Dx At Ip C(j El- Fx Bs IIp 1(1 Cv Dy Gt Au Cy Hr Du Av Bp Gq Ix Es Et Is et Fp Gr Ax By Hu Dq Ev Gx Ay It Fq Dv Ep Br Cu Hs Carré n° 4 magique aux 2 degrés. 63 72 o 45 27 36 :)4 9 i8 69 7^1 5 49 3o 44 61 10 27 48 35 65 I 18 23 40 79 60 43 5i 63 26 4 12 29 68 73 II 25 28 75 62 67 6 45 5o 80 58 16 36 41 46 66 24 2 32 37 76 i5 20 7 54 57 71 9 14 53 70 78 56 19 3i 39 22 3 42 59 64 81 17 47 34 55 72 21 38 52 33 77 8 i3 625 p q r 4 3 u 7 I 9 V X y Diagramme et Carré n° 5 magique aux 2 degrés et traduction en chiffres. 45 o 36 63 18 27 54 9 72 Ap Bq Cr Ds Et Fu Gv Hx ly [ Fy Hu As Ix Bp Cv Dq Er Gt 1 Gs Cp Iv Eq Fr Dy Ht Au Bx 1 et Ev Fx Gr Hy Aq lu Bs Dp Dx Ay Gq Bu Cs It Ep Fv Hr Hq Is Bt Fp Dv Ex Ar Gy Cu Ir FI Du Hv Ax Gp By Cq Es Eu Gx Hp Cy iq Br Fs Dt Av Bv Dr Ey At Gu Hs Cx Ip K<, 53 2 J7 68 22 33 61 18 75 3o i5 5o 81 8 43 65 19 58 59 44 79 20 28 66 i3 5i 9 40 25 36 55 12 47 78 5 71 72 48 56 6 41 76 26 34 10 II 77 4 35 70 27 46 57 42 73 3i 69 16 54 62 3 38 23 24 63 47 39 74 I 32 67 5o 7 64 21 60 49 14 45 80 29 l 8 2 i 5 4 6 7 9 3 P q r s t u V X y Produits des nombres accouples du carré n° 4 i'^'^ horizontale jre verticale . i'^« diagonale . '2'^ diagonale . 9"^ verticale . 378 144 o 180 81 288 378 378 i35 202 18 076 i35 o 378 2i() 486 21G 180 o 18 1G2 5o4 54 202 180 54 36o 162 324 72 220 o 5o4 108 109 36 = 9 l()2 1620 72 54 1620 90 36 — 1620 0 54 1620 00 36 — 1G20 COMMAXDAXT COCCOZ. — CARRÉS MAGIQUES l53 Produit des nonibros accouplés du carré n" 5 : 36o o 36 3i5 ^2 iCn 3^8 81 216 = 1G20 36o 81 270 144 567 18 72 108 o = 1620 36o 54 5o4 54 180 i(>2 o 202 54 = 1620 2i(3 18 36 90 180 216 378 486 o = 1620 216 216 o 5o4 9 216 90 3i5 54 = 1620 I"" horizonlale jie verticale , i'*^ diagonale . 2« diagonale . 9'= verticale . Le carré n° 5 a pour inverse un carré côté i3 dont la verticale de gauche est Ap, lu, Dv. Er, Hs, Bx, Cy,Ft, Gq, en faisant échange des lettres ainsi que des valeurs. Diagramme du carré 13 donnant même résultat que le n° 5. A B C D E F G H I 8 2 I 5 4 6 7 9 3 Ap Bq Cr Ds Et Eu Gv Hx ly lu Ex DpHy Aq Gr Bs et Ev Dv Ar Gy Bt Cu Is Ex Fp Hq Er Gt Hu Gv Ix Bp Ey Dq As Hs IP Bv Fq Dr Ey At (îu Cx Bx Dy Eq Au G s Ht Cp Iv Fi- Cy Eu Es Gx Hp Av I«I Br ])t Et Hv Ax Ir By Cq Du Es Gp 0. Cs It Ep Ev Dx Hr Ay Bu 53 2 37 68 22 33 61 18 7-5 3o i5 5o 81 8 43 65 19 58 59 44 79 20 28 66 i3 5i 9 40 25 36 55 12 47 78 5 71 72 48 56 6 41 7(3 26 34 10 II J J 4 35 7 324 i;85 36i 2109 400 24;o 441 2870 484 33 II 529 '^79'> o-jG 4324 625 4900 676 5525 729 6201 "M 6930 841 7714 900 8555 961 9455 G 0 I 6 20 5o 100 196 336 540 825 1210 1716 2366 3i85 4200 5440 6936 8721 io83o 1 33oo 16170 19481 23276 27600 32 5 00 38o25 44'-ia6 5ii56 58870 67425 7(388o D o i 3 6 10 i5 21 28 36 45 55 66 7^ 91 io5 120 i36 i53 171 190 210 23l 253 276 3oo 325 35 1 378 406 435 465 496 E o I 4 10 20 35 56 84 120 i65 220 286 3()4 455 56o 680 816 960 ii4o i33o i54o 1771 2024 23oo 2600 2925 3276 3654 4060 449^ 49()o 5456 F o o I 5 10 35 70 126 210 33o 495 j 10 lOOI i365 1820 238o 3o6o 3876 4845 5985 73i5 8855 10626 1 265o 14950 17550 20475 23751 27405 3i465 35960 40920 17 16 i5 14 i3 12 II 10 9 8 7 6 5 4 3 2 I il faut prendre pour origine de la numération ascendante des rangées Ne la — des couples égaux à 12. Exemple : soit à vériiier l'égalité 2 48, 8 4'^. 19 3i = 3 47- 6 44» 22 28, le point de départ sera la 25^ rangée ainsi composée : 57(3 4^24 ^7600. Négligeant la colonne B on aura : COMMANDANT COCCOZ. — CARUES MAGIOIIES DO A G A C 2 48 . . . 529 23276 3 47 • • . 484 I948I 8 42 . . . 289 6936 6 44. . . 36 1 io83o 19 3i . . . 36 io5 22 28 . . 9 854 6 854 3o3i7 3o3i7 Second exemple : A C A G 644. . . 36i io83o 5 45 . . 4o" i33oo 10 40 . . . 220 4200 14 36 . . 121 1210 21 29 . . . 16 20 16 34 . . 81 602 540 602 i5o5o i5o5o Les colonnes D E F sont les 3^, 4^ et 5"" du Fermât; elles sont utilisées dans le cas où les de parité différentes. Exemples de Gouples égaux à 65 origine Négligeant la colonne E. D F 276 i265o carré arithméti([ue de termes accouplés sont à l'horizontale 32. — 17. 9 56 17 48 1847 19 46 120 io5 91 238o 1820 i365 12 53 i3 52 14 5i 26 39 D 210 190 171 21 F 73i5 5985 4845 70 592 35 1 18215 20475 8 57 592 18215 6 59 3oo 14950 12 53 210 73i5 9 56 276 i265o 21 44 66 715 19 46 91 i365 22 43 55 49^") 27 38 i5 35 682 29000 682 29000 D F D F 2 33 120 238o 3 32 io5 1820 6 29 66 7i5 4 3i 91 i365 10 25 28 126 12 23 i5 35 17 18 0 0 i5 6 20 59 3 I 214 3212 2l4 3221 5 60 378 23751 35 1 20475 17 48 120 238o 12 52 210 73i5 1847 io5 1820 25 40 28 126 3i 34 I 0 27 38 i5 35 604 57951 604 27901 loG MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE 5" Appendice Les carrés tels que celui n" 220 sont faciles à construire; cependant le premier de ce genre n'a été publié que le 26 décembre i885 dans le journal Le Siècle; il est composé de 18 couples égaux à 5o et aussitôt connu, M. le professeur Reuss, de Strasboui'g, en a donné quatre variantes. 5 29 41 i3 i5 4: 34 40 I 43 12 ao 1 36 6 33 19 48 8 La moitié ci-jointe suffît pour qu'on puisse l'achever. Avec les mêmes nond>res, M. Huber, en 1892, et M. Tarry, en 1897, en ont construit chacun un. M. le général F'rolow a fait en 1887, un carré de ce genre (12 de base), dont un diagramme en lettres analogues et homologues montre, les propriétés sans nécessiter aucun calcul. p q r s tu 123456 P Q R S T U 12 II 10 98 7 a = 0 b = 12 c = 24 d = 36 e = 48 f = 60 A = l32 B = 120 C = 108 D = 96 E = 84 F = 72 ap AQ AR as at AU eP Eq Er eS eT EU BP bq lïr BS BT Ini Fp fQ IR Fs Ft iU CP cq cr es CT eu Cp eQ eR Cs et eU dp DQ DR ds dt DU dP Dq Dr dS dT Du ep EQ ER es et EU aP Aq Ar aS aT Au FP fq IV FS FT fu Bp 1>Q bR Bs Bt bU Ep eQ eR Es Et eU AP aq ar AS AT au fP Fq Fr fS fï Fu bp BQ BR bs bt BU cP Cq Cr cS cT Cu cp CQ CR es et CU Dp dQ dR Ds Dt dU DP dq dr DS DT du Ap aO aR As At aU EP e(j er ES ET cu bP B(i Bi- bS bT Bu IP FQ FR fs ft FU CH. LALI^EMAXD. — VOLCANS ET SÉISMES l5;; En 1901 , M. Pfefïennann a composé un carré avec les 5o couples égaux à 116, déduction faite des 7 dont les petits termes sont 6 1-2 18 29 35 4i 02. Il est à quartiers égaux, par indices, chaque quartier à la progression artithmétique de formation o 23 4(3 69 92 = 23o, complétée par les suites i 9 11 1920 = 27141621=4 5 i3 i5 23 = 38 10 17 22 = 60. Les premiers indices sont 3 2 et les premières horizontales égales à 290 sont i 78 34 11 1 66 = 71 3o ii3 60 16 = 45 86 3 56 100 = ii5 38 82 5 5o En mai i833, M. le colonel Deleval, alors Directeur d'Artillerie à Rennes , a fait un barème composé de 48 diagrammes , avec le mot Caroline en première horizontale. Chaque diagramme se conjugue ^8 V 12 avec 12 autres, ce qui fait - — — — =: 288 svstèmes. En remplaçant les lettres par les termes des progressions i 2 3 4 5 6 7 8 et o 8 16 24 32 40 48 et 56, chaque système de deux diagrammes, devenus carrés, donne 4o320 X 4o320 X 2 magiques et, comme il y a 288 systèmes possibles, on pourra en construire 4o320 X 4o320 X 2 X 288 = 936.404.582.400 que l'on devra diviser par 8, nombre des aspects différents sous lesquels un même carré peut être présenté, soit : 117.050.572.800. M. Gh. LALLEMAND Membre du Bureau des Longitudes, Vice-Président de la Société Astronomique. RELATIONS DES VOLCANS ET TREMBLEMENTS DE TERRE AVEC LA FIGURE DU GLOBE [523. i4:55i. 2-1-2] — Séance du 8 août — Instabilité de la croûte terrestre. — Pour beaucoup de personnes, dire que le sytème solaire est stable et que la croûte terrestre est en état d'équilibre, c'est, en quelque sorte, énoncer deux vérités n'ayant pas besoin de démonstration. Ne voyons-nous pas, en effet, chaque année, les astres revenir, dans le ciel, exactement à la place que leur assigne une théorie basée sur l'immuabilité des orbites? Les occultations d'étoiles, les éclipses de lune et de soleil ne se reproduisent-elles pas, avec une rigueur mathématique, à l'heure même indiquée par le calcul? l58 MATHÉMATIQUES, ASTUONOMIE, GÉaoïCSIE ET MECANIQUE Et, d'autre part, les déterminations de la gravité, les mesures d'ares de méridien , ou bien eneore les résultats de nivellements de ])récision eftectués en un même lieu du globe à des éi>o([ues dilTé- rentes, n'attestent-ils pas, par leur absolue eoncordance, la parfaite stabilité de la croûte qui nous porte? La répartition des continents et des mers, la distribution des montagnes et des lïeuves, demeurés les mêmes depuis que l'homme a une histoire, n'en seraient-elles pas, au besoin, une preuve sufiisante? La géologie nous enseigne, il est vrai, que cette répartition n'a pas toujours été ce qu'elle est aujoui'd'hui : à l'époque crétacée, par exemple , le lieu où se trouve Paris était le centre d'une mer. De la masse gazeuse ou dvi gloire de feu des temps originels à la sphère bosselée d'aujourd'hui, la figure de la terre a passé par maints as[)ects dillérents; mais on se plaît généralement à croire que chacun, de ces changements était le résultat d'une catastrophe soudaine, comme le déluge universel, dont parle la Bible, et qu'entre deux cataclysmes consécutifs, l'écorce terrestre — la lit/iosphèiv. comme disent les géologues — gardait un équilibre stable ou à très peu près. Avec sa magistrale autorité, M. H. Poincaré, de l'Institut, a dit ce qu'il fallait penser de la stabilité du système solaire (*). Elle est parfaitement illusoire; le système entier s'achemine lentement vers l'inéluctable repos tlnal. Et si. par exemple, on a pu si longtemps croire à la constance de la durée du jour et de l'année, c'est que les quelques dizaines de siècles sur lesquelles i^ortent les observations humaines ne sont qu'un instant inajjpréciable comparées à l'énorme dui'ée des périodes géologiques. Je voudrais, à mon tour, et après des savants bien i)lus autorisés, tels que M. de Lapparent (**), pour la France, et M. JohnMilne, en Angleterre, essayer de montrer que la stabilité de la croûte terrestre n'est pas moins chimérique. Tremblements de terî^e et volcans. — Les éruptions volcaniques et les tremljleinents de terre, deux phénomènes qui présentent entre eux les relations les plus étroites et qui vont souvent de pair, m'aideront à ftiire cette démonstration. En parlant de trend>lements de terre, je ne pense pas seulement à ces violentes secousses qui, en un instant, détruisent des cités (*) Auinuiirr du llurcuii des T,ongilndes pour raïuiéc i8<)8. Notices scicnlifl((ucs. (**) A. DE LAi'i'AiiiiNT : Lcsfrcini.ssi'incnis de l'écorce lerreslrc (Currespondaiil, io' y naturel, l'axe terrestre coïncide avec l'un ^""■"^T^^"'^ des axes de symétrie du tétraèdre, il ▼ doit exister, dans l'un des deux hémis- FiG. 2. — Tétraèdre en partie enve- phères, trois saillies continentales, tandis loppé par une sphère concen- trique, que le pôle correspondant sera occupé par une mer et qu'une protubérance continentale se fera jour au pôle opposé. Or, il suffit de jeter les yeux sur un globe terrestre pour constater que ces conditions se trouvent pleinement i*éalisées. On sait, en effet, que la terre ferme est, dune manière remar- quable, concentrée dans l'hémisphère boréal, où elle se répartit en trois massifs : le massif américain, le massif em-opéen avec l'Afrique (•) R. DE Girard : La Théorie tiira'driqnc de lo forme de la terre. Renie Ihomiste, 3= année, ip 4;»: à :4t. cil. LALLEMAND. — VOLCAXS ET SÉISMES l63 comme prolongement, le massif asiatique avec son prolongement australien. En outre, le j)ôle nord est recouvert par une mer pro- fonde, dont l'existence est devenue hors de doute depuis que Nansen, dans sa dernière exploration polaire, y a trouvé des fonds de 3. 800 mètres. Le pôle antarctique, au contraire, est le centre d'un continent qui sert d'appui aux vastes banquises de l'hémisphère austral et dans lequel Ross a reconnu la présence de sommets très élevés, atteignant près de 4-ooo mètres. Entre les massifs continentaux, d'autre part, s'étendent trois nappes océaniques : le Pacifique, l'Atlantique et l'Océan Indien. Cette ordonnance , il est vrai, paraît un peu en défaut, puisque l'Asie et l'Europe ne présentent entre elles aucune solution de conti- nuité. Mais ce désaccord s'atténue beaucoup si l'on veut bien se rappeler que toute la moitié occidentale de la Sibérie forme une contrée déprimée, qu'un très léger abaissement ramènerait au- dessous de l'Océan. Cette dépression, qui longe le pied de l'Oural, est déjà, du reste, nettement accusée par la présence de la mer Cas- pienne. La séparation des deux massifs devait fort probablement exister à une époque qui n'est pas encore très reculée. Il est, en outre, aisé de voir, d'une part, que les massifs continen- taux groupés autour des saillies doivent se terminer en pointe vers le sud et dans le sens de l'est à l'ouest, et, d'autre part, que les nappes océaniques doivent diminuer constamment de largeur, à mesure c[u'elles arrivent dans des latitudes plus élevées. C'est ce que la géographie confirme. Est-il, en effet, rien de plus frappant que la forme aiguë que prennent , vers le sud , l'Amérique , l'Afrique et le continent australo- asiatique ? Ne voit-on pas aussi l'Asie et l'Amérique i^usse tendre à se rejoindre à travers le détroit de Behring et diriger, l'une vers l'autre, deux pointes allongées? Pour achever l'identification de la forme générale du globe avec le système tétraédrique , il me reste maintenant à dire un mot d'une particularité de la plus haute importance , que cette théorie seml^le laisser inexpliquée. Je veux parler de la grande dépression inter- continentale, sorte de ceinture maritime qui partage la sphéroïde terrestre en deux moitiés. L'Europe est séparée de l'Afrique par la Méditerranée ; l'Asie , de l'Australie par une série de mers plus ou moins fermées entourant les îles de l'archipel polynésien. L'Amé- rique du Nord n'est rattachée à l'Amérique du Sud que par l'isthme de Panama; les Antilles émergent à peine du fond qui relie les deux continents. l64 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE M. Green justifie l'existence de cette dci)ression en faisant inter- venir le pliénomène de la rotation diurne, jusqu'ici laissé de côté. A l'origine, alors que la matière était encore plastique, le globe devait affecter la forme parfaitement spliérique. Mais, au fur et à mesure des progrès du i-efroidissement, la forme tétraédrique s' accentuant, les trois saillies de riiémisphère nord s'éloignaient chaque jour davantage de l'axe de rotation, tandis que les parties voisines de la pointe australe s'en rapprochaient au contraire. Les protubérances septentrionales se trouvaient donc avoir une vitesse de rotation plus faible que les points correspondants de la sphère primitive et restaient, par conséquent, en i-etard dans le mouvement de rotation de la terre sur elle-même, pendant que les terres de l'hémisphère sud, conservant un excès de vitesse, prenaient de l'avance vers l'est. De là, une sorte de torsion du solide tétraédrique, qui a fait naître, entre les reliefs septentrionaux et leurs prolongements vers Je sud, une lio-ne de rupture, dont la suite de dépressions occupées aujour- d'hui par la Méditerranée, le golfe Persique, les mers de la Sonde et le o-olfe du Mexique, atteste l'existence et jalonne le parcours. Il faudrait aussi voir, dans ce phénomène, la raison pour laquelle les terres de l'hémisphère austral : Amérique du Sud, Afrique et Australie, sont toutes déjetées vers l'est par rapport aux continents septentrionaux dont elles forment les x^rolongements. Telle est, dans ses traits principaux, la théorie tétraédrique. On lui a fait, il est vrai, cette objection que l'ensemble des mesures géodésiques concourt à assigner à la terre la figure d'un ellipsoïde et non celle d'une pyramide. Cette contradiction n'est qu'appa- rente (*). La géodésie ne définit-elle pas, en effet, la [forme [de la terre par la surface générale des mers prolongée parj;jia pensée sons les continents ? Rien d'étonnant dès lors qu'elle trouve, comme résultat de ses mesures, la figure ellipsoïdale [que la méca nique des fluides assigne à l'Océan. La théorie tétraédrique, au contraire, /aisan^ abstraction des eaux, vise [exclusivement l'écorce solide, dont le relief, par rapport à l'ellipsoïde des mers, est affaire de nivellement, non de triangulation. Et, d'autre j)art, ne serait-il pas facile de trouver, dans les ano- malies constatées de la gravité sur les continents, des arguments à l'appui de la thèse en question? Si en effet , la surface extérieure de la lithosphère présente une (•) cil. Lali.f.m.vnd : Lo ih'forTnation tétraédrique de l'écorce terrestre et la pesanteur. La Nature, ir 12 w, du i5 mai 1897. CH. LALLEMAXD. — VOLCAXS ET SÉISMES l6o figure ellipsoïdale avec une légère déformation tétraédrique , cette défonnation, toutes choses égales d'ailleurs, doit se retrouver en petit dans les surfaces de niçeaii et se traduire par des irrégularités corresjiondantes dans les mesures de la pesantevu* réduite au niveau de la mer, c'est-à-dire diminuée de l'attraction de la masse solide émergeant au-dessus de l'Océan. Par exemple, au voisinage des sonnnets du tétraèdre, la surface fondamentale de niveau (surface de niveau zéro , communément appelée le géoïdc) , faisant saillie sur l'ellipsoïde normal des géodésiens, l'attraction centripète doit y être plus faible et, en même temps, la composante verticale de la force centrifuge plus grande que sur l'ellipsoïde, double motif pour que la pesanteur effective, différence de ces deux actions, y soit moins forte que hi pesanteur normale calculée pour reIli[)soïde, d'après la loi de Clairaut. Or, précisément, les mesures continentales de la gravité s'accordent toutes pour accuser un déficit de pesanteur dans les grands massifs montagneux comme ceux des Alpes ou de l'Hima- laya par exemple. M. Faye expliquait ces anomalies par l'existence de vides ou tout au moins de matières moins denses sous les continents. Sans nier l'influence de telles causes dans la production des irrégularités en question, on peut se demander si une partie au moins de celles-ci ne seraient pas dues à la déformation tétraédrique de l'écorce. Un autre critérum de la déformation tétraédrique du géoïde serait fourni par la mesure de l'aplatissement du globe dans l'hémisphère sud. Par suite de la disposition et surtout de la moindre inqiortance des saillies continentales dans cet hémisphère, l'aplatissement, en effet, devrait y être trouvé un peu moindre que celui résultant des mesures actuelles d'arcs de méridiens, dont la plupart ont été prises dans la partie moyenne de l'hémisphère nord. On peut espérer que, dans un avenir prochain, cette dernière confirmation nous sera fournie par la mesure, que projettent les Anglais, d'un arc de méri- dien s'étendant du Cap au Caire, en Afrique, et aussi par celle, à laquelle songent les États-Unis, d'un arc analogue à travers l'Amé- rique du sud, complétant et prolongeant l'arc de Quito, ol^jet actuel des travaux de la mission française organisée par le général Bassot et dirigée par le commandant Bourgeois , chef de la section de géo- désie du service géographique de l'armée. Répartition des volcans et des tremblements de terre à la surface du Globe. — Il me reste à montrer le lien qui rattache à la théorie tétraédrique les phénomènes sisniiques et les éruptions volcaniques. l66 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE La contraction résultant du refroidissement du noyau a dû avoir pour conséquences des plissements de l'écorce, au début, alors qu'elle était encore plastique, puis, plus tard, des fractures, lors- qu'elle est devenue plus résistante. Le choc résultant de la rupture de l'équilibre en un point déter- minerait des vibrations multiples, d'amplitudes comme de périodes^ différentes, se propageant dans toutes les directions et produisant leur maximum d'effet le long des surfaces préexistantes de dislo- cation. Les plus rapides de ces vibrations, qui sont en même temps les plus destructives, s'éteindraient très vite, en vertu de l'inertie de la matière, et ne feraient sentir leur action que dans une zone restreinte autour de leur foyer d'origine. Les oscillations lentes, au contraire , se propageraient très loin , avec des vitesses et des inten- sités variables suivant le degré de continuité et d'élasticité des^ couches terrestres (*). Les manifestations du travail intériem* de l'écorce se traduiraient ainsi par des phénomènes vibratoires continuels et, de temps à autre, par des crises plus violentes, c'est-à-dire par des tremblements de terre. A travers les fissures ainsi produites dans l'enveloppe, dit M. de Lapparent, dans son classique Traité de Géologie, la masse fluide interne se ferait jour et s'épancherait au dehors sous forme de lave. De temps en temps , les gaz emprisonnés atteindraient une tension suffisante pour provoquer de violentes explosions ; d'autres fois, au. contraire, comme aux îles Sandwich, les matières seraient assez fluides pour ne pas obstruer les cheminées ; l'ascension de la lave serait alors continue et exempte de phénomènes explosifs. Pour M. Armand Gautier (**), de l'Institut, les masses de gaz et de vapeur d'eau, observées dans les éruptions volcaniques, provien- draient des roches cristallines superficielles, réchauffées jusqu'au rouge par le contact de matières en fusion venant des profondeurs. Les éruptions volcaniques et les tremblements de terre , bien que formant deux ordres de phénomèmes bien distincts, ne seraient ainsi que la conséquence naturelle et logique des mouvements de la lithosphère. Ces manifestations, bien entendu, se produiraient de préférence (*) D'après M. Milne , certaines de ces ondes se propageraient directement à travers l'épaisseur du globe, à raison de 5 et de lo kilomètres par seconde, pendant que d'autres ondulations chemineraient dans la croûte externe avec une vitesse de 2 kil. 5 à 3 kilo- mètres par seconde. (Geogrnphical Journal, igoS.) (**) Remarques sur l'origine des phénomènes volcaniques. Comptes rendus de l'Académie des Sciences. Séance du 5 janvier if)o3. CH. L ALLEMAND. — VOLCANS ET SEISMES 167 dans les régions où Técoive a su])i les plus grandes déformations et qui, par conséquent, sont restées des zones de moindre résistance, ai)pelées à céder au premier effort. Les lieux de prédilection des secousses seraient donc les régions a voisinant les arêtes et les sommets du tétraèdre et surtout la grande dépression intercontinentale, où la torsion de la pointe australe de la toupie terrestre ajoute ses effets à ceux du plissement des arêtes. L'existence d'une marée intérieure luni-solaire , en concordance avec les grandes marées de l'Océan, pourrait, enfin, au voisinage de l'équateur et dans toute la zone tropicale, devenir, à certains mo- ments, la cause de la rupture de l'équilibre. L'examen des faits semble confirmer la réalité de ces inductions. Comme on le voit sur le planisphère ci-après (Jig. 3) , reproduction LEGENOt pAr lez tremblemcnls dt terre 'sont diStJnguttîpurdKharh-jr^s pluz Ou moins serreea Sujv-o/it 'e degré de fréquence et / 'ir tensne des seowj^ses . -.j^^ ies 'cIcATis et fumerollei sont figurés parties points . « FiG 3. — Carte de la répartition des tremljlemeuts de terre et des volcans à la surface du globe, montrant leur relation avec la figure tétraédrique et avec la grande dépressioa intercontinentale. n t- d'une carte dressée par R. Mallet en i858 (*), l'Espagne, l'Italie, la Grèce, l'Algérie, autour de la Méditerranée ; l'archipel des mers de la Sonde, l'Indo-Chine, dans le massif asiatique ; l'Amérique centrale et les Antilles, tous pays situés le long de la grande dépression inter- (■) Cette carte est incomplète, surtout en ce qui regarde l'Afrique, dont le centre était encore inconnu à l'époque où elle a été dressée. l68 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE continentale, sont, en effet, les terres classiques où les tremblements de terre et les érui)tions volcaniques atteignent leur maximum de fréquence et d'intensité. Il en est de même, bien que peut-être à un degré moindre, de l'arête montagneuse du continent américain, ainsi que du Ja[)on et des îles Aléoutiennes qui forment le trait- d'union entre les massifs asiatique et américain. En résumé, loin d'être inerte comme on le croit trop souvent, le sol que nous foulons est une matière vibrante, j'allafs dire vivante. Tremblements de terre et volcans sont le mémento quia pulvis es, le signal d'alarme qui nous rappelle incessamment la fragilité des choses terrestres et nous invite à contempler, dans la face verru- queuse et glacée de la lune, l'image de ce que sera, dans quelques millions d'années, notre globe désert, parvenu au stade iinal du refroidissement et de la mort. M. le Colonel A. LAUSSEMT Membre de rinstitiit, à Paris LES PROGRÈS DE LA M £ T R 0 P H 0 T O G R APH I E 1;:.8:326.9] — fScancc du S auùt — Dans une conmiunication faite au cours de la session de 189a, à Pau, j'ai présenté un historique des essais tentés depuis 1849. dans le but d'utiliser les vues de monuments ou de paysages, dessinés à la chambre claire ou photographiés, pour lever les plans, décrit la méthode et les insti'uments à employer, enlin indic[ué quelques-uns des résultats les plus remarquables obtenus d'abord en France où cette application a été proposée en elfet pour la première fois. Depuis cette époque, ayant pu me mettre au courant des nom- breuses publications faites sur ce sujet, dans la i)lupart des pays civilisés, et du suce" s toujours grandissant d'un procédé que les per- fectionnements optiques et techniques de la photograjjhie ont rendu aboi'dable à tous les opérateurs, je me suis décidé, de mon côté, à publier un ouvrage (*) dans lequel , à la suite des principes fonda- mentaux ex])osés dans mes ])reiniei's mémoires, qui datent d'un (*) Jh'clirn-lics siii- /es iiislriiinrnl.s , l,:s nii-lliodis cl le dessin topogni/diiijiK's. Paris, Gauthier-AIllai-s, iS().S-niiii-iyo'i. COLONET. A. LAUSSEDAT. — LES PROGRÈS DE LA MÉTROPHOTOGRAPHIE i6() demi-siècle, et des améliorations que mes collaboratem-s et moi avions pu y introduire, se trouvent analysés les travaux les plus intéressants de nos énudes étrangers. La perspective conique ou centrale, qui est, à proprement pai'ler, la base de la nouvelle méthode, joue nécessairement le plus grand rôle dans les recherches dont il s'agit et, comme elle jouit de proprié- tés merveilleuses, on pouvait s'attendre à lui voir surmonter bien des difficultés. On n'en est pas moins soxivent surpris, en parcourant les ouvrages auxquels je fais allusion, du nombre de problèmes nou- veaux cfu'elle a suggérés, en en donnant d'élégantes solutions, pro- blèmes que l'on n'eût même pas songé à aborder avec les anciennes méthodes gra])hiques ou géométriques. Je m'abstiendrai, bien à regret, faute de place et de temps, de chercher à donner ici une idée de la bibliographie d'un art devenu universel pendant ces vingt dernières années et d'énumérer les grandes entreprises faites : en Allemagne (on VInstitut photog'rain- métrique, créé pour lever les plans des monuments et des travaux d'art en Prusse et dans les pays annexés, constitue à lui seul un grand service pulîlic). en Autriche, en Italie, au Canada, en Russie, etc. , où des levers topographiques considérables ont été exécutés excliisi- veinent à l'aide de la j)hotogTapJu'e. J'arrive donc immédiatement aux dernières étapes parcourues par la métrophotographie en France et à l'étranger, à savoir : ceUes qvn ont conduit à une utilisation plus conq)lète des vues prises en ballon ou par cerf-volant; à l'entreprise de reconnaissances à de grandes distances à l'aide de la téléphoto- grapliie, enfin aux applications aussi fécondes que curieuses delà stéréoscopie à la topographie et incidennnent à l'astronomie. En ce cjui concerne l'emploi des ballons et des cerfs-volants, sans parler des services rendus par les premiers pour effectuer des recon- naissances à la guerre et, en supposant qu'il s'agisse simplement de levers réguliers à faire en temps de paix dans les pays de plaines où le procédé i)hotographique ordinaire, fondé sur \r méthode des intei'- seetions, n'est pas aussi avantageux que dans les pays accidentés, on a pensé avec raison qu'en prenant des vues" de stations aériennes qui découvrent le terrain à distance, on en déduirait aisément et sûrement le tracé des routes et des chemins, des cours d'eau, des divisions de culture, etc. On y est même parvenu immédiatement, mais avec un ehani}) restreint, en dirigeant l'axe optique de l'appareil verticalement et, dans le cas où l'axe est incliné, pour end^rasser de plus grandes étendues, on n'a eu cju'à opérer la transformation néces- saire par des constructions géométriques c{ue l'on pourra môme sou- 170 MATHEMATIQUES, ASTUONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Ycnt supprimer en exécutant optiquement la transformation de la perspective obliquee en plan par un procédé que j'ai récemment décrit (*) et qui est fondé sur le principe de la photographie sans objectif. Le cerf-volant peut rendre des services analogues et deux de nos- compatriotes, MM. Arthur Batut et Emile Wenz ont déjà réalisé de si remarquables progrès dans la construction et la manœuvre du cerf -çolant photographe , que Ton est en droit d'espérer qu'ils par- viendront prochainement à lever les dernières difficultés, qui con- sistent, dans le cas supposé, à donner au cerf-volant une direction voulue, puis à détexnniner exactement l'inclinaison de l'axe optique de la chambre noire et la hauteur du cerf-volant, au moment du déclenchement de l'obturateur. La téléphotogrophie a été précédée par la télémétro graphie , que nous avons pi^atiquée depuis longtemps, notamment à l'occasion dn siège de Paris, à l'aide de lunettes puissantes près de l'oculaire de chacune desquelles était placée une chambre claire qui projetait les- vues (champs de lunette) sur une planchette où elles étaient dessinées successivement, de manière à former des panoramas, de stations convenablement choisies. Les renseignements ainsi obtenus avec le concours d'artistes éminents s'étendaient jusqu'à lo et 12 kilo- mètres en avant des forts et servaient à surveiller les mouvements de l'ennemi et à tenir à jour le plan directeur de ses travaux d'ap- proche. La téléphotographie, dont la portée est beaucoup plus considé- rable (elle peut dépasser 100 kilomètres), sert aujourd'hui à effectuer des reconnaissances même par -dessus les frontières ; il serait superflu d'entrer ici à ce sujet dans des détails, soit théoriques, soit pratiques , car ils sont connus de tous ceux que ce genre d'opérations intéresse. Pour la stéréoscopie, j'avais espéré donner de Aive voix d'assez longs détails, parce que le sujet s'y prête; mais obbgé, au dernier moment, de renoncer à me rendre à Angers, j'ai dû me borner, dans cette note adressée à notre honorable Président, à indiquer mainte- nant comment cette nouvelle et précieuse ressource a été mise à profit en métrophotographie. On avait, depuis plus de 4^ ^ns (l'astronome anglais Warren de la Rue), songé à ]>lacer dans le stéréoscope deux images différentes de la lune, dans une même n Compte rendu des séances de TAcadémie des Scienees, t. CXXXVII, p. 24, 0 juillel 1903. COLONEL A. LAUSSEDAT. — LES PROGRES DE LA METROPHOTOGRAPIIIE 1^1 phase, prises à des époques telles que le changement d'aspect résultant de la libration équivalait à un déplacement considérable de l'observateur dans l'espace ; d'où la sensation de la forme arrondie de notre satellite et des effets de relief à sa surface si accidentée. On a depuis lors pressenti qu'en prenant des photographies d'une planète ou d'une comète et de la constellation sur laquelle elle se projette, à plusieurs heures ou, dans certains cas, à quelques minutes d'intervalle seulement, le déplacement de la terre dans son orbite, pendant ce temps, fournirait une base suffisante pour accuser la parallaxe de l'astre qui appartient à notre système solaire, celle des étoiles demeurant absolument insensible. C'est ce qui est arrivé, et rien n'est plus saisissant et même plus surprenant, au premier abord , que la sensation produite par la vue de la planète ou de la comète , qui semble planer dans l'espace bien en avant des étoiles, lesquelles, dans le stéréoscope comme à l'oeil nu, continuent à former un/ond de tableau plan ou, si l'on veut, spliérique. On pressent cependant la possibilité d'évaluer plus tard les parallaxes des étoiles les plus voisines à l'aide de photograj)hies prises à de longs intervalles ; mais cette cjnestion peut être réservée pour le moment et, après les curieuses expériences précédentes qui devaient intéresser surtout les astronomes, dans lesc{uelles les longueurs des bases se chiffrent par milliers et millions de kilomètres, parce que les objets considérés sont eux-mêmes situés à dénormes distances, je me hâte de revenir à la surface de la terre et à ses paysages voisins où les petites bases que l'on emploie habituellement peuvent être encore réduites, grâce à la stéréoscopie. On sait qu'avec la méthode des intersections, qui est celle dont on se sert en général pour obtenir sur un plan les positions des points du terrain que l'on a reconnus, identifiés, sur deux photographies prises de stations différentes, la distance de ces stations doit être assez grande pour que les intersections des rayons visuels projetés sur le plan se fassent sous des angles qui ne sont point par trop aigus. Cela signifie, au fond, que les bases doivent êtr.e de même ordre de grandeur que les distances des points à déterminer. Or, avec, des vues prises de deux points assez voisins pour qu'on puisse les examiner simultanément sous le stéréoscope , il en est tout autrement, car les rayons visuels qui aboutissent aux mêmes points s'entre- croisent nécessairement sous de très petits angles , désignés sous le nom de parallaxes. Quand les deux vues ont été prises simplement avec une jumelle photographique, l'effet résultant du relief en profondeur est celui-là 1^2 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE même que produit la vision binoculaire immédiate sur le terrain. Cet eflet, qui pouvait déjà être mis à profit par les to^jograplies, en leur faisant mieux apprécier les formes du terrain rapproché qu'ils avaient à interpréter pour tracer les courbes de niveau , était néan- moins insurtisant pour permettre l'évaluation des parallaxes et par suite les véritables distances des différents points du paysage. Au delà de 4 à 5oo mètres, en effet, la ])arallaxe devient insensible et, plus près même, elle est encore trop faible pour pouvoir être mesurée. Mais en [)renant les deux vues aux extrémités d'une base, encore très petite si on la compare aux distances des objets représentés, qu'il s'agit d'évaluer, mais beaucoup plus grande que Fécartement des yeux humains ou des axes opti([ues de la jumelle photographique ordinaire, qui est de 6 à 'j millimètres, on est parvenu à accroître assez les parallaxes [)our les rendre mesurables avec précision au moyen d'appareils micrométriques d'une extrême délicatesse comme le Stéréo-conq)arateur (*) du D'' Pulfrich, d'Iéna, dont la description ne peut être faite dans cette note succincte , mais qui se trouve dans plusieurs imblications françaises et étrangères (**). Cet appareil a déjà fait ses preuves sous plusieurs ra[)ports entre les mains de son auteur, notamment en lui permettant de relever à la surface de la lune (dont deux images convenablement choisies lui avaient été communiquées par MM. Lœwy et Puiseux) une série de courbes d'égale distance apparente échelonnées depuis le centre du disque qui cori'es[)oud au point le plus rap])roché jusqu'aux bords. On peut donc être certain qu'en opérant avec soin sur des photo- gra])hies de paysages prises dans des conditions bien déterminées, on aurait ainsi un j)rocédé de lever topographique pouvant atteindre un haut degré de précision (***). Le seul inconvénient est le prix élevé de ce genre d'appareil et l'on a cherché à l'éviter très simplement (en sacrifiant un peu la (*) l'ii apparoil analojftu' a élé imag'iiié indépt-iulaimiiciil par 'SI. Fourcado, ajicnt foreslicr au (^ap de Boiiuf-Uspéraiice ({iii , d"a|)rès iiiu' Icdrc (pu' je viens de recevoir, le lait couslruire eu ce moment en Anglelerre. (**) Voyez mes JRi'chcrches -iur les inslriiiucitls, les inéthodrs et /(• dessin loiMu-riij)hi<[ucs. Gaulliier-\'illars , Paris t()o'î. Une Bibliograpiiie relative au Stéréoconi|)araleur e<)nii)re- nanl ilcja \\ivg\ numéros vient de i)araître dans une très récente pla(pietle inlilulée : Slercokoniparalar nach l'ulfricli , Cari Zeiss, lena I90'5. (***) l'ue ex|)érience tout à lait concluante a été laite, pendant l'été de Mio"?, aux envi- rons d'Iéna, sous les auspices du major général Scliul/e, cherde la section loi><)î,'-i'a|)lii([ue, par M. Paul Selij^cr, topogi'a])Iie royal, ([ui a déclaré qu'il opérerait aussi vile, dons le cabinet, sur les deux epi-euvcs stéréoscopi([ues (pi'il pourrait le l'aire sur le lei-rnin. Voyez i\ ce sujet : l eher eineni \'ersneh znr j)i-(il:liselien lîrpriïhuno- der Siereo-l'lutloo-rmn- inetrie fi'ir die Ziveel,-e der Titjiito-ropliie. Von Dr G. l'ulfrieii in lena. Sonder ubdrnel; ans Zeilselirifl fur Insirunienlenhnnde !<)(>'> Hefl il. COLONEL A. LAUSSEDAT. — LES PKOGUÈS DE LA MÉTUOI'HOTOGRAPIIIE I^S précision peut-être) en opérant innnédiatemcnt sur le modèle en relief, à une échelle bien déterminée, de la partie du terrain em- brassée des deux stations photographiques que l'on voit dans le stéréoscope (*). Il fallait, à la vérité, que ce modèle çivtiiel fût accessible, tan- gible en quelque mesure. Or, il est dans ce cas, dans le stéréoscope de Wheatstone disposé comme l'a fait le distingué M. E. Deville, arpenteur général du Canada, à qui appartient môme l'idée de ce procédé purement graphique et mécanique. Je ne pourrais pas le décrire ici sans recourir à une figure qui a été publiée dans mes Recherches, etc. Je me contenterai de faire remarquer, en ce qui concerne l'échelle, qu'elle résulte immédiatement du rapport qui existe entre l'écar- tement des yeux de l'opérateur et la distance des deux stations pho- tographiques. J'ajouterai enfin que des expériences ont été faites avec ce nouvel instrument, étudié à léna par le D' Pulfrich , sous le nom de Stéré aplani graphe et c[ue, de mon côté, j'ai pensé que l'on pourrait avoir recours au Stéréoscope si répandu de Brewster, que je suis parvenu à approprier très simplement à cet usage en déviant les rayons lumineux venant des images photographiques vivement éclairées au moyen de deux chambres claires de Govi, posées sur les lentilles du stéréoscope. Encore une fois, je regrette beaucoup de n'avoir pas pu me rendre au Congrès d'Angers pour donner de vive voix les détails nécessaires et fournir à mes collègues les explications qu'ils auraient pu pro- voquer. J'espère cependant en avoir dit assez pour appeler l'attention sur les progrès d'un art qui a déjà rendu des services considérables dans l'ordre d'idées que j'ai seulement voulu rappeer dans cette com- munication. Ceux de mes collègues c[ui voudraient se mettre au courant des autres applications de la métrophotographie à l'astro- nomie , à la météorologie , à la géographie (détermination des posi- tions géographiques), à l'hydrographie, etc., etc., consulteraient avec profit l'ouvrage de M. le professeur Dolezal, de l'Académie des Mines de Leoben, intitulé : Die Anwendiing- der Photographie in praktischen Messkiinst , Halle a. S. Wilhelm Knapp, 1896, et les (*) L'opéi'ateur qui posséderait un stéréo-comparateur et un stéréo-planigraphe pour- rait avantageusement les utiliser tous les deux en employant le premier à la détermi- nation précise d'un certain nombre de repères et en effectuant ensuite beaucoup plus rapidement le remplissage à l'aide du second. i;4 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE. GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE arliclos (lu inèiue auteur dans VEder's Jahrhach fiir Photographie où, depuis cette époque, il donne, chaque année, une analyse des publications faites dans tous les pays du monde sur la inétrophoto- graphie ou, comme on dit en Allemagne, la photograminétrie. M. E. MARCHAND Directeur de l'Observatoire du Pic du Midi OBSERVATIONS PHYSIQUES DE LA LUNE, TENDANT A CONFIRMER L'EXISTENCE D'UNE FAIBLE ATMOSPHÈRE, FAITES AU PIC DU MIDI (ALTITUDE 2860") DE 1897 A 1903. [523.35] — Séance du 8 août — On sait qu'un certain nombre d'observations , dont quelques-unes remontent à plus d'un siècle, tendent à démontrer que la lune pour- rait n'être pas totalement dépourvue d'atmosphère. J'ai pensé à profiter des conditions exceptionnelles dans lesquelles on peut souvent observer, au Pic du Midi, certains phénomènes lumineux de constatation difficile, pour ajouter quelques documents précis à ceux qu'on possède déjà sur cette question. Les observations que je vais résumer ont été faites pendant les années 1897 à igoS par moi-même ou par mon assistant du Pic du Midi, M. Latreille. Elles se divisent en trois catégories : 1° Observations, au voisinage immédiat de la nouvelle lune, de certains phénomènes de crépuscule lunaire ; 2" Observations de phénomènes crépusculaires sur le terminateur à diverses époques de la lunaison ; 3'^ Observations de phénomènes dus au pouvoir réfringent de l'atmosphère lunaire pendant les éclipses de lune ou de soleil. (a) Ohserçations faites au voisinage de la nouvelle lune. — J'in- siste tout d'abord sur la grande intensité lumineuse que la lumière cendrée présente souvent au Pic du Midi (intensité qui permet de voir un très grand nombre de détails du relief lunaire, môme au voi- sinage des quadratures). M. Latreille et moi-même, nous avons plusieurs fois dessiné des vues d'ensemble du disque lunaire, ainsi éclairé par la lumière que réfléchit la terre : l'aspect est très différent de celui de la pleine lune et E. MARCHAND. — OBSERVATIONS IMIYSIQUES DE I.A IXNE 1^5 la comparaison de ces aspects pourrait conduire à des résultats inté- ressants. C'est un point sur lequel je reviendrai, et je me bornerai dans cette note à signaler rapidement ce qui, dans nos observations, se rattache à l'existence possible d'une atmosplière. 1° Si l'on observe le croissant lunaire un peu après la nouvelle lune, lorsqu'il apparaît très délié, après le coucher du soleil, dans la lumière crépusculaire, on constate que les parties de lumière cendrée visibles les premières sont celles qui continuent pour ainsi dire les cornes du croissant. Ces mêmes parties , qui prolongent les cornes, conservent ensuite une clarté un peu plus grande que le reste de la lumière cendrée. Quand on observe le croissant un peu avant la nouvelle lune, c'est-à-dire le nuitin, avant le lever du soleil, les mêmes phénomènes se présentent dans l'ordre inverse. Ces faits avaient déjà été signalés; nous les avons observés plu- sieurs fois avec la plus grande netteté (par exemple , les 29 octobre 1897 (6 h. soir); 22 novendjre 1897 (6 h. matin); 27 novembre 1897 <6 h. soir); 17 juillet 1898 (4 h, matin), 2" Lorsque la lumière cendi-ée est devenue bien visible, les parties du contour lunaire qui prolongent les cornes du croissant restent l^resque toujours plus éclairées que le reste du disque. On voit, en général, sur ce contour et à la suite des cornes , un arc de plusieurs degrés lunaires (et d'ailleurs de longueur variable), formant comme un mince fdet de lumière. Ce phénomène a été observé une cinquantaine de fois au Pic du Midi; j'ai pu même le constater souvent à Bagnères-de-Bigorre (55o'" d'altitude), où l'atmosphère est parfois d'une transparence déjà très remarquable, quoique inférieure à celle de l'atmosphère du Pic du Midi. Ce filet lumineux n'est parfois qu'une partie un peu plus éclairée de la lumière cendrée : il apparaît alors à l'intérieur du contour de la lune ; mais, d'autres fois, il déborde un peu à l'extérieur de ce con- tour : cela s'observe surtout lorsque, le croissant étant encore assez délié, la lune est cependant déjà assez distante du soleil pour ne pas se coucher avant la fin du crépuscule. Il est parfois difficile de distinguer la limite extérieure des cornes du croissant; dans un certain noml3re de cas, j'ai même dû me servir d'un micromètre pour fixer, aussi bien que possible , les limites géo- métriques, diamétralement opposées, de la partie du disque directe- ment éclairée par le soleil et m'assurer que le mince filet lumineux saillant, dont je viens de parler, était bien situé au-delà de cette 1^6 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE limite et ne devait pas être confondu avec le prolongement extrême de la corne voisine. 3" Nous avons parfois observé, au voisinage de la nouvelle lune, que le bord de la lumière cendrée contigu au terminateur du crois- sant était légèrement plus clair, plus lumineux que le reste de cette lumière, sur une largeur de plusieurs degrés lunaires. Cette observation est délicate, elle exige une atmosphère très pure, laissant voir beaucoup de détails dans la lumière cendrée et permettant de tenir compte des diflerences de teinte dues au relief du sol lunaire ; nous avons pu cependant la faire plusieurs fois avec précision (24 octobre 1897, iG juillet 1898, 3i mars igoS). Le terminateur éclairé lui-môme présente, sur certaines parties peu accidentées du sol lunaire, une dégradation sensible qui s'observe d'ail- leurs plus aisément vers le premier ou le dernier quartier, sur une lar- geur de plusieurs degrés lunaires. Lorsqu'on observe ce terminateur au voisinage (pas trop immédiat) de la nouvelle lune , alors que la lumière cendrée est relativement intense , on constate donc un passage progressif de la grande luminosité du croissant au faible éclairement du reste du disque; ce passage progressif s'étend parfois sur 8° à 10° en lonsritude. 4 ' Enfin, la visibilité des détails, dans la lumière cendrée, est telle- ment variable , alors que les conditions de crépuscule terrestre et de transparence de notre atmosphère semblent à peu près identiques , que je me suis demandé souvent si ces variations ne proviendraient pas de l'atmosphère lunaire elle-même : on conçoit, en eil'et, que la transparence plus ou moins grande de cette atmosphère, si j^eu épaisse qu'on la suppose, peut avoir une énorme inlluence sur la visibilité d'objets extrêmement peu éclairés; et ce qui confirme cette hvpothèse, c'est que, parfois, on aperçoit également bien tous les détails principaux du relief, tandis que, d'autres fois, ils n'appa- raissent bien qu'en certaines régions. On conçoit que, dans la lumière directe du soleil, ces variations disparaissent totalement. (b) Observations de phénomènes de crépuscule lunaire, sur le terminateur , à diverses époques de la lunaison. — 1° x\insi que je l'ai déjà dit, le terminateur présente toujours, surtout en certaines parties peu accidentées, une dégradation très sensible de la lumière. C'est un fait observé depuis longtemps, que nous avons seulement cherché à vérifier dans des circonstances favorables. Le diamètre apparent du soleil, vu de la lune, étant d'environ Sa', la dégradation ^eo/zieZ/vY^ie du bord du croissant ne devrait s'étendre que sur environ 1/2 degré de longitude lunaire. Or, j'i»i observé E. MARCHAND. — OBSERVATIONS PHYSIQUES DE LA LUNE I^7 plusieurs fois une dégradation de 5° de largeur (22 novembre 1897 par exemple) et. pour m'assurer que cet effet n'était pas dû à une légère inclinaison de la surface éclairée (par rapport au plan tangent à la limite géométrique de la lumière), j"ai vérilîé, à une autre époque de la lunaison, qu'il se reproduisait sensiblement avec la même largeur, lorsque la lumière arrivait, d'une direction opposée, sur la même partie du sol lunaire. 2" J'ai déjà indiqué que le bord de la lumière cendrée, tout le long du terminateur, présente lui-même des traces de dégradation. On voit parfois sur ce bord une bande de 4'^ à 5" de largeur, qui semble un peu plus claire que le reste du disque; lorsque la lumière cendrée est relativement intense, la largeur totale de la dég'radaiion visible peut donc atteindre de 8" à io'\ Il ne semble guère possible d'expli(iuer cela autrement que par un effet de crépuscule dans ratmos[>hère lunaire. 3" Lorsque des sommets de montagnes lunaires sont éclairés en dehors du terminateur, l'intensité et la couleur des points brillants qu'ils produisent dépendent de leur distance au terminateur : les plus voisins sont éclatants et blancs, les plus éloignés, ternes et jaunes. J'ai o])servé cela plusieurs fois (par exenq)le le 3o novendjre 1897, le 3 juillet 1898, etc.). C'est encore un fait déjà connu; mais je l'ai vérilié de la manière la plus nette. 4" Au voisinage du terminateur, les ombres portées, sur les parties relativement planes, par les montagnes de la lune, ne sont pas toujours aussi noires qu'elles devraient l'être en l'absence de toute atmosphère. Cette observation est délicate, parce que l'intérieur de l'ombre géométrique peut être éclairé par la réflexion des ravons solaires sur une montagne voisine. Mais il y a des cas où cette cause ne peut être invoquée; ainsi le 3o novembre 189;, j'observais au nord de la mer de la Sérénité . plusieurs cirques, dans l'intérieur desquels l'ombre portée était certainement moins intense, moins noire pour ;^les plus voisins du terminateur que pour les ])lus éloignés. (La cause indiquée ci-dessus aurait alors produit l'effet contraire. Observations analogues le 7 décemljre.) 5" La lumière] cendrée, visible très souvent, au pic du Midi, au premier et au dernier quartier de la lune (et parfois même avec quelques détails de relief) présente , presque toujours , sur le bord du disque du côté opposé au croissant directement éclairé, une étroite bande de couleur jaunâtre ou un peu rougeàtre. L'existence de cette bande un peu colorée et qui, à cause de sa couleur, paraît quelquefois légèrement plus éclairée que le reste du disque cendré i;78 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE (lequel est gris), a été constatée plus de cinquante fois par M. Latreille OU par moi. Ne faut-il pas l'attribuer à la présence, au voisinage du bord du disque, d'une épaisseur d'atmosphère lunaire relativement considérable dans la direction du rayon visuel? L'atmosphère de la lune aurait alors à peu près, comme celle de la terre, la propriété de laisser passer surtout les rayons jaunes et rouges et d'éteindre plus ou moins le reste du spectre solaire. Ces observations sont à rapprocher des faits indiqués précédemment sur la couleur et l'éclat des sommets éclairés au voisinage et en dehors du terminateur. (c) Obserçations faites pendant les éclipses de lune ou de soleil, jo L'éclipsé de soleil du 28 mai 1900 nous a permis de constater quelques faits qui , à mon avis , ne peuvent s'expliquer que par l'inlluence de l'atmosphère de la lune. Cette éclipse a été observée au Pic du Midi par M. Latreille (assisté de M. Ginet), à léquatorial Brûnner, de 22 centim. d'ouver- ture, et à Bagnères, par moi-même (avec l'assistance de MM. Dort et Jules Sansot). au moyen d'une lunette de 16 centim. montée sur un pied azimutal. Dans les deux stations l'observation a été faite en projetant l'image du soleil sur un écran. Tandis que la lune s'avançait devant le soleil, nous avons tous porté notre attention sur la. forme des cornes de l'échancrure. Au Pic. où le ciel était beau pendant toute la durée de l'éclipse,^ on a observé constamment ce qui suit, et que nous n'avons vu à Bao-nères que par moments, dans les éclaircies d'une couche de strato-cumulus. Quand le bord circulaire de la lune coupait presque à angle droit celui du soleil, on voyait ti'ès nettement en dehors du disque solaire^ et sur le bord de la lune, deux petits filets lumineux terminés en- pointes et ayant, dans le sens du contour de la lune, une longueur angulaire d'environ 1°, parfois 2". Sur une image projetée d'environ 20 centim. de diamèti-e, la plus grande largeur de ce filet était à peine de i millimètre. Ce phénomène est tout à fait comparable à celui que je signalais i)lus haut : filet lumineux saillant continuant les cornes du croissant lunaire, au voisinage de la nouvelle lune. — C'est, pour ainsi dire, l'exao-ération de ce même filet, produite par un éclairage spécial arrivant tout à fait à l'opposé de l'observateur. Lorsque le bord circulaire de la lune coupait, au contraire, celui du soleil sous un angle aigu, le phénomène prenait un aspect un peu dilTérent, plus difficile à remarquer au premier abord : le filet lumi- neux ne faisait que rendre Jjeaucoup plus aiguës les cornes du E. MARCHAND. — OBSERVATIONS PHYSIQUES DE LA LUNE I79 croissant solaire; mais l'effet était des plus nets et frap[)ait l'obser- vateur aussitôt que son attention avait été appelée sur la forme des cornes. 2° Eclipses de lune. — Pendant l'éclipsé de lune du 12 avril 1903, que j'observais à Bagnères par un ciel d'une extraordinaire transpa- rence et d'une absolue pureté, j'ai porté toute mon attention sur les détails de la forme et de l'aspect de l'ombre de la terre couvrant le disque de la lune. Je dois d'abord constater (ce qui prouve la transparence extrême de l'atmosphère de ma station) que j'ai constamment vu, quoique difficilement parfois, le disque entier de la partie éclipsée; sa cou- leur était rouge brique et il fallait parfois, pour le voir, faire sortir du chanqi de la lunette le croissant éclairé (c'est ce que nous faisons souvent aussi pour mieux observer la lumière cendrée). Malgré cette fail)le visibilité du disque, l'éclipsé a été remarquable par l'opacité de l'ombre (*). Or, le bord de cette ombre s'est toujours montré moins sombre que le reste; il y avait d'abord une bande grise se raccordant par une dégradation rapide avec l'ombre noire; cette bande ne peut jias être confondue avec l'effet de la pénoml^re de la terre, elle s'étendait sur quelques degrés lunaires (8° à 10°); on la retrouve nettenient figurée sur les dessins de M. Latreille, comme sur les miens. Elle me paraît due plutôt à la réfraction et à la diffusion de la lumière du soleil par l'atmosphère de la lune. Mais un fait plus frappant encore est le suivant : j'ai constamment vu les deux exti'émités de cette bande, c'est-à-dire les parties voisines des deux bords du disque, un peu plus claires que le milieu , ce qui tendait à donner aux cornes du croissant lunaire un aspect plus aigu que ne le comportait la forme circulaire, à courbure assez faible, de l'ond^re. Or, si l'on analyse la marche des rayons solaires à travers une atmosphère , dans les régions du globe lunaire latérales par rapport à la ligne des centres de la terre et de la lune., on se rend compte qu'en ces régions la lumière directe du soleil doit, en effet, pénétrer dans l'ombre géométrique, par réfraction, un peu plus loin qu'au voisinage de la ligne des centres. Je note enfin que, immédiatement après le dernier contact, il m'a semljlé voir assez nettement la forme circulaire de J'ombre en dehors de la lune. Cette observation (déjà faite antérieurement, et toujours un peu (*) Ou sait que presque tous les observateurs ont cessé de voir la teiulc roug-e de la partie éclipsée du disque lunaire, longtemps avant la phase maxima de l'éclipsc. l8o MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE douteuse) ne peut-elle pas s'expliquer par la présence de l'atmos- phère lunaire, assez éclairée au-delà du disque pour que l'ornière s'y projette fugitivement et reste ainsi légèrement visiljle après le contact? Je résume cette note déjà longue, en disant que, d'après les obser- vations précédemment exposées , il semble bien c[u il existe autour de la lune une atmosphère dont la hauteur, pour la partie la plus dense, la plus active au point de vue des phénomènes lumineux, ne dépasse probablement guère la hauteur des pics lunaires les plus élevés. Gela n'est pas incompatible, d'ailleurs, avec les phénomènes qui tendent à prouver ral)sence de cette atmosphère, mais démontrent' seulement au fond que, si elle existe, elle ne i)eut être que très basse et de faible densité. M. Maurice d'OGAGNE Ing-énieur des Ponts et Chaussées, à Paris COUP D'ŒIL SUR LA THËORIE LA PLUS GÉNÉRALE DE LA NOMOGRAPHIE [X3aJ — Séance du S août — I. — La méthode graphique vient en aide au calculateur sous deux formes bien distinctes et qu'il convient de ne pas confondre (*). D'une part, les grandeurs soumises au calcul étant données sous forme d'éléments géométriques mesurables (segments de droite, angles, ). on exécute sur ces éléments géométriques une cons- truction propre à déterminer un autre élément géométrique dont la mesure fasse connaître précisément le résultat du calcul que l'on a en vue. Telle est l'essence du calcul graphique proprement dit. ou calcul par le trait, dont une des branches les plus importantes est constituée par la statique graphique. On peut, d'autre part, lorsque plusieurs variables sont liées par une équation, faire correspondre à chacune d'elles les cotes d'un système d'éléments (lignes ou points) de telle sorte que le lien analy- tique constitué enire les variables par l'équation donnée se traduise jiar une certaine relation de position simple entre les éléments cotés (") Sur cette distinction essentielle voir la Note que nous avons présentée au deuxième Congrès international des mathématiciens (Compte irrulu du Congres, p. 419). MAUniCE D OCAGNE. — I.A ÏHEOUIE DE LA NOMOGRAPHIE l8l au moyen des valeurs correspondantes de ces variables. On a ainsi une représentation nonio graphique de l'équation proi)osée. L'en- sendîle des systèmes cotés, ou nomo gramme , permet alors, lors- qu'on se doinie des valeurs arbitraires pour toutes les variables en présence moins une, d'obtenir par une simple lecture, une fois étaldie la relation de position voulue, la valeur correspondante de la dernière variable. Telle est l'essence du calcul nomo graphique. {<^i)i 8 9 10 La Nomographie est la théorie générale de la représentation des équations à un nondire quelconque de variables au moyen de sys- tèmes d'éléments cotés. Son princi[)al objet consiste dans l'appropriation des modes de représentation les plus simples, partant les plus usuels, aux types d'équations les plus fréquents dans la pratique (*). Elle doit, à ce point de vue, s'attacher à une foule de questions de détail soulevant des [)roblèmes d'analyse ou de géométrie dont la solution ne manque pas d'un intérêt propre (**). (•) Esquissée, à ce point de vue, cUius la i)etile lirocliure que nous avons publiée en i8t)i, et où a été projjosé pour la première lois le terme de Xoinogropliic , elle a reçu, dans le même ordre d'idées, son eom|)let développement dans \v Trail/' (h- Xomog-ra- phic que nous avons l'ail jjarailre en i8yi(. Les travaux qui ont donné naissance à ces ouvrasses ont eu Tlionneur d'une double sanction par l'Académie des Sciences en 1892 (Prix sur la fondation Leconte), et 1902 (Prix Poncelet). (") Voir à cet égard l'appréciation de M. J. Tannery («((//. des Se. iimlh. , 1899, p. 172). l82 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE Mais elle ne serait pas achevée si elle ne couronnait l'édifice de ces théories particulières par la détermination complète des modes de représentation les plus généraux de façon à mettre en évidence, dans toute son étendue, le champ de ses applications possibles. Cette théorie générale, développée dans le chapitre VI (section I) de notre Traité de Nomographie , a pris , dans un travail que nous avons publié récemment (*), une forme plus synthétique. 2. — Nous nous proposons ici d'en dégager de façon simple l'idée maîtresse. Nous aurons, pour cela, recoui's à un cas très élémen- taire, mais très impoi'tant pour la pratique, celui des éc[uations à trois variables a, , a^ , aj pouvant se mettre sous la forme (i) /, (='-i)+/.(0=/, o, qui comprend aussi la forme réductible à la précédente i)ar la transformation logarithmique (**) log ile Oj.r, est arrêtée en face du point y.^ de l'axe O^x^ , et si son point a, se trouve alors en face du point y.., de l'axe 0,x, , ces trois valeurs de a, , y., et y., satisfont simultanément à l'équation (i). Dans chacun de ces quatre modes de représentation, à chacune des variables a, . a, , a^ , correspond un système d'éléments cotés : des droites dans le premier cas, des points dans les trois autres. Et le lien analytique constitué entre ces variables par l'équation (i) se traduit par une de ces relations de position : I. Les trois droites (y.,), (y,), (y,), concourent en un même point ; II. Les trois points (a,), (a,), (a,), sont simultanément sous les trois index convenablement orientés ; III. Les trois points sont simultanéineut sous l'index unique ; l\. Quand le point O, est en face du point (/.,), le point (a,) est en face du point (a^). D'ailleurs, alors que, dans le premier cas, il n'y a en présence que des éléments fixes, on rencontre, dans les trois autres, un (*) Il sunU de maH[uer les graduations ('•'^,) et ('■'.,) sur les bords d'uue règle muiuc d-un tiroir à glissière portant la graduation («,) pour avoir le type classique des règles a ealcul. MAURICK d'OCAGNE. — LA THEORIE DE LA NOMOGRAPHIE l85 élément moljile, savoir le système des trois index concourants, l'index miique. on l'axe O.a'. portant la graduation (a,). 3. — Pour syntliétiser ces divers modes de représentation en un même type général , nous aurons recours à deux plans superposés TT et tt' sur lesquels nous supposerons marqués les divers éléments en présence, et nous conviendrons, pour simplifier le langage, de dire, si un point se trouve sur une certaine ligne , qu'il y a contact entre ce point et cette ligne. Le contact entre les éléments E et E' sera d'ailleurs désigné par la notation E ^ E'. Cela posé, nous remarquerons que les dé[)lacements relatifs des plans TT et tt' dépendant de 3 paramètres, il faut trois contacts entre éléments pris respectivement sur chacun d'eux pour les fixer l'un par rapport à l'autre. Soient : A HH A', B HH B', C KH C, ces trois contacts. Une fois les deux plans ainsi fixés l'un par rap[)ort à l'autre, on peut constater l'existence d'un contact D KH D' entre éléments pris sur l'un et sur l'autre. Si donc , parmi les 8 éléments intervenant dans ces 4 contacts , il s'en trouve 3 appartenant à des systèmes cotés, les 5 autres étant des éléments sans cote ou constants, on aura ainsi constitué un nomogramme à 3 variables. Voyons connnent les nomogranmies précédemment décrits pour l'équation particulière de type (i) peuvent être rattachés à ce type général : I. — Le nomogranmie ne comportant que des éléments fixes, on peut les supposer nuirqués sur le plan tt et faire abstraction du plan 7r' (ou rendre celui-ci invariable par rapport à tt, ce qui a lieu si les 6 premiers éléments sont constants). On constate alors le contact entre la droite (a,) et le point de ren- contre des droites (y.,) et (y.,), qu'on peut considérer connue point à 2 cotes (z,, a^). IL — Tout d'abord, l'orientation du système des index mobiles sera assurée si l'un d'eux I, est perpendiculaire à l'axe gradué O.v l86 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE correspondant, ou, ce qui revient au même, pour employer la termi- nologie ci-dessus définie, s'il est en contact avec le point J^^ à l'infini dans la direction normale à cet axe. On prendra donc d'abord comme élément A l'index I,, comme élément A' le point J^^ . Il suffira ensuite de prendre comme éléments B , G , D les points (k^), (a,), (a,) des axes O.v, Oj', Oz, et comme éléments B', C, D' les index I, , I^, I3 correspondants. III. — Prenant l'index mobile unique comme représentant à la fois les éléments A', B', G' superposés, on constituera les éléments A, B, G au moyen des points («,), (a^), (7.3). Le contact entre les éléments D et D' reste donc indéterminé. Gest qu'en effet, les deux premiers contacts une fois établis ne laissent à l'index que la seule possibilité d'un glissement sur lui-même. Si donc il est alors en contact avec un troisième élément, il ne cessera d'y rester quel que soit le glissement qu'on lui imprime et, par conséquent, le quatrième contact devient inutile (*). , IV. — Sent A une droite du plan tt, parallèle à 0^.\\ et 03.\'3, avec laquelle doit rester en coïncidence l'axe mobile O^x.^. Pour assurer cette co'incidence , il suffira que deux points. O^ et x^ de l'axe Oj x.2 restent constamment sur A. Donc, prenant la droite A à la fois comme ■élément A et comme élément B , on constituera les éléments A' et B' au moyen des points O^ et x^. Gela posé imaginons que par les points de division de O^x., passent des droites per[)endiculaires à cet axe , et marquées comme lui sur le plan n'. Nous les appellerons les traits (a^). Dès lors, il suffira de prendre pour éléments G et D les points (a,) et (z,), pour éléments G' et D' les traits O^ et (a,). 4. — Le type général dans lequel nous venons de synthétiser les diverses solutions particulières du problème qui nous a servi d'exeinide comprend de même fous les nomogrammes réductibles à deux systèmes plans composés d'éléments cotés ou constants, mobiles l'un par rapport à l'autre. Il suffit, pour qu'il soit susceptible de cette complète extension, de supposer : i" que les contacts ont (•) Ce cas (fcxccplioii rciilrc dans une catégorie donnée avec toute sa généralité dans notre Trnilr (p. 3;).-)) cl notre A'.v/jaw' syiilhrlifjue (p. "32), et qu'on peut ainsi caractériser : si trois des contacts sont conipatiL»les avec une même translation ou une même rotation, le quatrième contact peut être supprimé. MATRICE d'OCAGXE. — LA THÉORIE DE LA NOMOGRAPHIE 187 lieu non seulement entre droites et points, mais entre lignes quel- conques; 2" que les éléments cotés peuvent dépendre d'un nombre quelconque de cotes. La possi])ilité de l'introduction d'un nombre quelconque de cotes pour un même élément résulte d'ailleurs de l'emploi de systèmes ramifiés de lignes, sur lesquels nous ne nous arrêterons pas ici (*). Pour le cas où le nomogramme est uniquement constitué par des éléments fixes, nous avons fait voir que le type le plus général pou- vait* être considéré comme résultant du contact de points à 2 cotes avec des lignes an — 2 cotes (**). Pour le cas où le nomogramme est constitué par deux systèmes plans mobiles l'un par rapport à l'autre, la question se posait de former à priori tons les types morj^Jiologiqueinent distincts, c'est- à-dire distincts au point de vue de leur structure, abstraction faite de la nature géométrique des éléments en présence (***). Parmi les éléuients qui interviennent dans les 4 contacts dont la simultanéité constitue le mode d'emploi du nomogramme, les uns appartiennent à des systèmes cotés, les autres, dépourvus de cotes, sont ce ([ue nous avons appelé des éléments constants. C'est ainsi que, dans les exemples ci-dessus les points (a,), (y..,), (a,), sont des •éléments cotés tandis que les trois index et le point J^^ dans l'exemple II. l'index unique dans l'exemple III, la droite A, les points O^ et .v^ dans l'exemple IV, sont des éléments constants. Dès lors, le caractère sur lequel nous avons finalement fondé la distinction entre les types fondamentaux de nomogrammes , que nous avons appelés des types canoniques (****), tient au mode de répartition, entre les 4 contacts qui y interviennent, des éléments qui sont cotés et de ceux qui ne le sont pas. Représentant chaque élément coté par le nombre quelconque n des cotes qui lui correspondent et, par suite, par o tout élément constant, nous avons reconnu c|ue les types canoniques (irréduc- tibles les uns aux autres au point de vue de la structure , mais pou- vant s'appliquer à des équations identiques lorsqu'on définit la nature (*) Traite, p. 35i ; Exposé synthétique , p. 8. Les éléments à n cotes ne peuvent pas dépendre de ces cotes d'une manière quelconque , mais par substitutions successives de fonctions de deux variables, ce qui laisse encore un vaste champ aux applications. (••) Exposé synthétique , p. aS. ('**) C'est, au contraire, en particularisant cette nature (et, plus spécialement en idcn- lilianl ces éléments à des points et à des droites) qu'on eng-endre les modes de repré- sentation les plus utiles à considérer dans les applications, et la question qui se pose alors est d'amener les écjuations qui se rencontrent dans la pratique à la forme requise pour se prêter à de tels modes de représentations. (•*•*) Exposé synthétique , p. 33. l88 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE géométrique des éléments qui y inter\ iemient) sont au nombre de 19. Et nous avons adopté pour leur désignation un chiffre égal au nombre des éléments cotés correspondants, alTecté d'un indice d'ordre s'il y a lieu. Voici le tableau de ces 19 solutions : (^,) "1 l-H 0 Tij l-H 0 0 i-^ 0 0 i-i 0 (^.) "1 M 0 0 HH 7l', 0 )-i 0 0 >-i 0 (3,) «1 t-l 0 7i, l-H 0 77.) l-H 0 0^0 (3.) ;i, HH n'^ 71^ HH 0 0 }-( 0 0 l-H 0 (3.) n, t-H 0 7ii l-H 0 0 HH 77'^ 0 l-H 0 (4,) 'ï| HH 0 7Î. l-H 0 n., l-H 0 774 l-H 0 (4.) 7«, M n\ 7ij l-H 0 77., t-H 0 7J KH 0 (43) n, l-H 0 77. HH 0 77., l-H 0 0 l-H /i'i (4.) n, H^ n'i 71^ l-H 71'^ 0 KH 0 0 l-H 0 (4.) 'h l-H n\ 71. l-H 0 0 l-H 77'., 0 l-H 0 (4.) "i l-H 0 71^ 1— 1 0 0 l-H 77'^ 0 l-H 77'^ (5,) «1 KH n\ n, l-H 0 773 hH 0 77^ l-H 0 (5.) n, ^ n'i n, hH 77'. 77., >-H 0 0 l-H 0 (53) n, HH 7i', 71. HH 0 7Z.| ^ 0 0 l-H 77'4 (0,) n^ i-i n\ /Z. HH 77', 77, KH 0 77 ; l-H 0 (6.) '', M n',1 77. l-H 77'. • «:l '-' "':i 0^0 (63) ''1 1— ( n\ 77^ l-H 77'., 77., HH 7) 0 hH 77\ 0) '^1 KM n', 77^ l-H 77'. 7Z., HH 77'., 77^ l-H 0 (8) 'h hH 71 '1 77., M 77'^ 77., l-H 77'a 77.4 ^ 'i'4 On peut, pour la plus grande généralité, rattaclier à ce tableau le type unique des nomogrammes sans élément mobile au moyen de la notation (2()) 2^^77' Oi-hO 0^0 0^0 puisque trois contacts entre éléments constants (fictifs ici d'ailleurs) assurent la fixité des deux plans l'un par rapport à l'autre. On voit, en prenant les divers nondji'es 77 de cotes tous égaux à i, que les exemples qui nous ont servi plus haut rentrent : l'exemple I dans le type (a^), les exemples II et III dans le type 0^), l'exemple IV dans le type (3,). On peut accroître le cham|) d"a[)plication d(> la Nomographic en multipliant le nombre des plans mobiles su[)eri)osés les uns aux autres (*). Nous nous contenterons ici de signaler cette nouvelle (*) Trailr , p. 3<)7 ; Exposé synihriiijnc , p. 3i. II. ciiuÉTiEX. — l'Étude systématique des étoiles filantes 189 extension . notre but avant été de mettre en relief, par une marche intuitive, l'idée mère de la tliéorie noniographiquo la plus générale, non de reprendre tout le déveloj)penient de cette théorie qui se trouve dans les ouvrages ci-dessus cités. M. H. CHRETIEN A rObservatoirc Farman , à Clievrcuse (Seine-et-Oise) L'ÉTUDE SYSTÉMATIQUE DES ÉTOILES FILANTES ET LES TRAVAUX DE LA COMMISSION DES MÉTÉORES DE LA SOCIÉTÉ ASTRONOMIQUE DE FRANCE — Séance du S août — L'Astronomie Météorique est, sans contredit, et restera sans doute encore longtemps le sujet d'étude le plus complètement à la portée des « volontaires de la Science ». C'est ce qu'avait compris la Société scientifique de France qui, en 1869, organisa, sous la présidence de Le Verrier, l'observation systématique des Étoiles filantes aux époques d'apparition des pluies périodiques. Dans sa séance du i" mars 1899, la Société Astronomique de France, reprenant sur la proposition de quelques-uns de ses membres l'idée émise par Le Verrier, concluait à la constitution d'une com- mission spéciale, chargée d'organiser les observations et d'en discuter les résultats; cette Commission des Étoiles filantes et des Météores a été placée sous la présidence de M. Callandreau. membre de l'Institut, professem' d'Astronomie à l'École Polytechnique. Nous nous proposons de résumer ici . en qualité de secrétaire de cette Commission , les instructions et les méthodes d'observatiohs qu'elle a élaborées ainsi que les résultats qui ont été obtenus. Ces instruc- tions n'ont d'autre but que de faciliter la discussion des observa- tions par l'uniformité des documents ; elles sont d'ailleurs suffisam- ment élastiques pour ne pas gêner la propre initiative de chacun. Bulletin d'Observatioxs. — Les observations sont enregistrées sur un bulletin spécial établi selon la disposition suivante : iqo MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANI<)UE Observations du 1 M M Loiiffilude Noms et Initiales Observateui's / -^^ M M Localité : . («le Paris ou de Greenwich) Latitude : Etat du Ciel : Instrument de mesure (montre à secondes , chronomètre , etc.) : Heure employée (Paris, Greenwich, etc.) : a (I) HEURE (Correction faite de Tavance ou du retard) (a) POIXT dapparition AR u (4) POINT de disparition AR (5) D (6) REMARQUES Eclat (:) ^'itesse (8) Particula- rité (9) Poids (10) -o (II) Sous la rubrique « État du Ciel » on inscrira les différentes causes- qui peuvent altérer la valeur des observations : bruines, nuages, etc., réclairement de l'atmosphère occasionné par la présence de la lune ou du crépuscule, soit par des lumières artificielles. On spécifiera de quelle heure on fait usage ; cette indication est de toute nécessité pour la comparaison ultérieure des observations. Dans la colonne intitulée « heure ». on aura soin de n'indiquer que des heures corng'ées de l'avance ou du retard de l'instrument ; cette correction , facile k faire par l'oljservateur lors de la transcrip- tion de ses notes, évitera bien des erreurs par la suite. Les colonnes 3 à 6 seront remplies avec les indications tirées après coup de la carte. Dans la colonne n" 7 , on inscrira l'éclat par rapport aux étoiles et planètes visibles. La vitesse sera notée : lente, rapide, très rapide, etc., dans la colonne n° 8; la durée serait une indication préférable. Dans la colonne 9, on indiquera toutes les particularités observées : fluctuation d'éclat, forme de la trajectoire (curviligne, sinueuse, etc.), traînée (forme, couleur, persistance), durée de visibilité dans le cas de météores lents ; radiant probable. Si une étoile filante passe près d'une étoile brillante, dune planète, ou entre deux étoiles connues, on notera avec soin cette particularité. Enfin, la valeur que l'on attache à l'observation, selon les circons- H. CHRÉTIEN. — l'ÉTUDE SYSTEMATIQUE DES ÉTOILES FILANTES I9I tances qui ont pu augmenter ou diminuer sa précision, sera indiquée dans la colonne « poids » \)ri' les mots pas sûre , sûre, très sûre. Cartes. — La question des cartes a une importance capitale. Cer- tains observateurs ont préconisé l'emploi des cartes exi projection centrale, qui présente l'avantage de représenter les trajectoires des météores par de simples droites. Mais ce système a de graves incon- vénients : il déforme considérablement l'aspect des constellations un peu éloignées du centre de la carte ; les angles et les distances relatives sont altérés dans des proportions énormes et ne peuvent servir à repérer les points d'apparition et de disparition des mé- téores, ce qui doit cependant toujours pouvoir se faire rapidement et sans hésitation vu le caractère fugitif de ces phénomènes. La projection stéréographique qui est une représentation con- forme de la sphère, c'est-à-dire qui conserve les angles, n'altère l)as sensiblement les rapports des distances ni la forme des constel- lations pour des surfaces de peu d'étendue, est toute désignée pour l'étude des étoiles filantes ; sa qualité essentielle doit être une grande clarté et sous ce rapi)ort, les cartes que MM. Rudeaux et Touchet ont dressées pour la Commission ne laissent rien à désirer : l'accueil qui leur a été fait par les observateurs les plus éminents de tous les pays en témoigne. Ces cartes sont d'ailleurs une modification et un agrandissement de celles qui furent dressées par l'Association scien- tifique pour les observations de 1869 ; ces dernières retiré sentaient la sphère céleste vue de l'extérieur ; les nouvelles la représentent vue de l'intérieur, ce qui nous semble préférable. Le seul reproche qu'on pourrait faire à ces cartes est de repré- senter les trajectoires d'apparences rectilignes par des arcs de cercles, ce qui peut rendre dilîieile la détermination des radiants. Mais nous verrons par la suite comment on a j)u obvier à cet incon- vénient et, qui mieux est, en tirer parti pour la simplification de toutes les questions trigonométriques que l'on peut renconti^er dans la réduction des observations. Il est commode d'éclairer les cartes par dessous, en se servant d'une vitre inclinée, ce qui permet de régler facilement l'éclairage et de retrouver rapidement les constellations. On donnera à la trajectoire un iniméro d'ordre placé près du point de disparition et reproduit au bulletin d'observations; une flèche terminant la trajectoire donnera le sens du mouvement. Pour éviter les confusions au moment des observations, il importe d'être bien familiarisé avec la région du ciel où apparaissent les iga MATHÉMATIQUES, ASTUOXOMIli, GEODESIE ET MECANIQUE météores ; aussi conseillons -nous ridentilication préalable de la carte avec la sphère céleste. La connaissance détaillée des constella- tions est de la [)lus haute utilité pour le résultat final. Il est à recoinniander de ne pas inscrire plus d'une trentaine de trajectoires au voisinage des radiants et de les tracer à l'encre rouge, autant que faire se pourra. Caractères pliysiques des Essaims. — L'étude des caractères physiques généraux s'adresse spécialement aux observateurs isolés. On devra noter : 1° Le iioml)re horaire des lut-téores el coasétiueninienl le nombre lolal pour la durée de l'observation, sans s'occuper des points d'apparitions et de disparitions. Si un météore, par sa direction, n'api>artient visil)lement jias au groupe que l'on o]>serve, on meiilionnera celle parlicularilé; 2' Le mode (rai)])arilihique des étoiles filantes à été traitée, d'une i'avon complète, par M. le comte de la Baume Pluvinel dans le Bulletin de la Société astronomique de France, décembre 1897. Aussi nous bornerons-nous à reproduire ici les conclusions de ce savant. L'appareil ayant servi aux expériences était muni d'un objectif de Dalleineyer, de o™o8 de diamètre et de o™3o de foyer. Admettant, -d'après des moyennes d'observations, que la vitesse des étoiles filantes soit de 45" par seconde . ou arrive par deux méthodes essen- tiellement différentes, à cette conclusion que, pour cju'une étoile filante puisse être photographiée , il faut qu'elle présente un éclat de i5 à 18 fois plus cojisidérable que celui d'une étoile de XJ^emière grandeur ! Les météores qui présentent un tel éclat sont nécessairement très rares et l'on n'a pu. jusqu'ici, photographier les étoiles filantes d'une manière courante ; les quelques résultats obtenus sont dus plutôt au hasard qu'à des observations systématiques. Néanmoins, le Dr. AV.-L. Elkin, de Yale Ohservaiorj-, a combiné H. CHRETIEN. — L ETUDE SYSTEMATIQUE DES ETOILES FILANTES 198 un appareil servant à déterminer pliotographiquement la vitesse des météores. Cet appareil se compose d'une roue de bicyclette munie de douze secteurs opaques formant écrans et fixée devant une chambre photographique , de sorte que la rotation, qui s'effectue au taux de cinquante à soixante tours par minute, amène successive- ment tous les secteurs devant l'objectif. La vitesse de rotation, qui semble devoir être avantageusement augmentée dans les appareils futurs, est déterminée avec précision par un chronographe. La lon- gueur des interruptions produites par cet obturateur sur l'image photographique d'un météore permet de déterminer sa vitesse à chaque instant si, toutefois, une image analogue a pu être obtenue dans une station voisine. Les quelques résultats qui ont été obtenus à Yale Observatoiy montrent que la vitesse des météores , corrigée de l'effet de la résis- tance de l'atmosphère (ce que permet de déterminer entre autres choses les photographies) est encore en moyenne inférieure à celle qui est exigée par la théorie cométaire des étoiles filantes de Schia- parelli. Il est de la plus haute importance que de telles études puissent devenir courantes. « Tant que l'on ne pourra photographier cou- ramment les étoiles filantes d'un essaim, dit M. le comte de la Baume Pluvinel dans le mémoire rappelé plus haut, l'observation j)hotographique de ces météores ne présentera pas grand intérêt, car un progrès sérieux dans nos connaissances sur les orbites des étoiles filantes ne sera réalisé que le jour où l'on pourra photogra- phier un assez grand nombre de météores pour déterminer avec j^i'é- cision la position de leur centre de radiation. » Observation du spectre des Météores. — Les résultats extraordi- nairement féconds obtenus à l'aide de l'Analyse spectrale dans les différentes branches des sciences, devaient fatalement faire naître l'idée de l'utiliser en Astronomie météorique. Dans le but d'observer le spectre des étoiles filantes du mois de novembre 1866, M. J. Browning avait construit pour la « Commis- sion des météores lumineux », de la British Association for the Adçancement of Science, quatre ou cinq spectroscopes , sans len- tilles et à vision binoculaire directe. Ils se composent essentielle- ment de deux j)i'ismes de verre dont la section, indiquée par M. le Pr. A. Herschell, est telle que la déviation du faisceau lumineux est annulée j)ar deux réflexions totales sur les faces internes du prisme, sans annuler la dispersion chromatique des deux réfractions. Un de i3* Ï94 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE FiG. I. ces appareils est reproduit ici (fîg. i), d'après l'ouvrage de Ed. Becquerel sur La Lumière. La clarté de la (îgure dispense de toute explication. Mais la construction de ces prismes est délicate et, x^^i' suite, cofiteuse. M. le Pr. Herscliell a imaginé une autre forme de spectroscope à vision directe, bien plus facile à construire et d'un champ considérable : Deux prismes équilatéraux de verre, de ceux qui sont employés communément à l'ornementation des lustres, sont placés côte à côte sur une planchette bien dressée (fig. 2). On se rend aisément compte, par cette figure, comment la lumière, ré- fractée par son passage à travers le prisme anté- rieur , se réfléchit sur la base du prisme postérieur, de façon à être corrigée de la déviation causée ])ar la réfringence du premier x^risme : il s'ensuit que l'image d'une source lumineuse éloignée peut, après avoir subi la dispersion des prismes, être vue par vision directe dans sa direction primitive. Vu la quantité de météores qui laissent derrière eux des traînées persistantes, il est permis de croire qu'un avenir fécond est réservé à ces moyens, aisément réalisables par tous les observateurs, d'ob- server, bien que d'une façon rudimentaire , le s^^ectre des étoiles filantes. FiG. 2. Détermination des Radiants. — Les observations à faire dans ce but exigent une certaine précision et seront utilement abordées par ceux qui, connaissant bien le ciel, sont susceptibles de pouvoir tracer, sans hésitation, les trajectoires sur la carte. C'est surtout les extrémités de la trajectoire qui devront être notées avec ^Drécision, car ce sont les coordonnées de ces points qui figureront exclusive- ment dans les calculs. Pour déterminer le radiant, il faut prolonger en arrière les trajec- toires et nous avons déjà fait remarquer que, sur les cartes employées, ces trajectoires sont curvilignes. Nous avons proposé un procédé II. CHRÉTIEN. — l'Étude SYSTÉMATIQUE DES ÉTOILES FILANTES Io5 qui permet cratteindre simplement ce but. Ce procédé, qui a été adopté par la Commission, est basé sur la propriété fondamentale de la projection stéréograpliique qui, appliqué au sujet qui nous occupe , peut se formuler ainsi : La trajectoire d'un météore, supposée rectiligne, est rei)résentée par un arc de cercle qui rencontre le plan de la projection en deux points diamétralement opposés. Soient {fig. 3) \ O \e centre de la carte; EE' la trace de la sj^hère sur le plan de projection; H et D les projections des points d'appa- rition et de disparition d'un mé- téore ; sa trajectoire est représentée par l'arc de cercle AD qui, com- plété, passe évidemment par les projections A', D' des points de la sphère diamétralement opposés aux points d'apparition et de dispa- rition; on voit qu'il suffit de déterminer A' ou D' pour avoir les éléments nécessaires au tracé de la trajectoire. Proposons-nous donc de trouver A'. A cet effet, menons AO que nous prolongeons; puis la perpendiculaire OV; V est un rabattement du point de vue et la droite VA détermine en S, sur le cercle EE'. le rabattement du point de la sphère qui se projette en A; le point diamétralement opposé est alors S' et la droite YS' prolongée jusqu'à sa rencontre avec AO, donne le point A'. Il ne reste plus maintenant qu'à élever unej^erpendiculaire en M', miheu de A A, une autre en M, milieu de AD , pour avoir le centre G de l'arc ADA'. Bien que l'on ait choisi celui des points A ou D qui se trouvait le plus près de l'équateur, il arrivera souvent que A' (ou D) sera encore trop éloigné pour pouvoir être déterminé aisément. On peut alors_trouver M' d'uiiejiutre façon : soient r le rayon de la sphère (r= OX) et S l'angle ^OA: (dans le cas des projections sur le plan de l'équateur, comme celle de la carte que la Commission a pulîliée, S n'est autre chose que la déclinaison du point se projettant en A). Si l'on projette orthogonalement A sur OS, en H, on a : r = Ô cos 5 + HS D'autre part, les triangles SAH etS.A.P, rectangles, l'un en H, l'autre en P, sont égaux {KEll = Xs?); HS est égal à SP, c'est-à-dire à r sin S igG MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE et la relation précédente devient : /' = OA cos S + /' sin S d'où ÔX = rl^Z^ (I) cos 0 On trouverait de même I + sin 3 OA =r ~ ^ (-2), cos s car la déclinaison de A' est — S. On a d'un autre côté OM' = OA' — OA ce qui donne , en remplaçant OA et OA par leurs valeurs (i) et (a) OM' = r tang 5. On est alors conduit à prolonger OS jusqu'à sa rencontre en T avec la perpendiculaire élevée en X sur la droite OA. XT est la lon- gueur qui doit être portée sur le prolongement de AO , ou rabattue sur cette ligne, à partir de O, selon que A est à l'intérieur ou à l'extérieur du cercle EE'. Remarque. — Si l'on multiplie membre à membre les formules (i) et (a), on trouve OA X OA' = r' ce qui montre que les intersections I et I' sont sur la même droite passant iiar O, ainsi que nous l'avions annoncé et ce dont il était facile de se convaincre a priori. Cette méthode graphique, dont la précision ne dépend que de l'habileté de l'opérateur, conduit généralement à des constructions de grandes dimensions et par suite n'est pas toujours pratiquement api)licable ; le cercle que l'on a finalement à tracer nécessite souvent des instruments spéciaux. Pour remédier à ces inconvénients, la Commission a fait imprimer sur un papier transparent le graphique dont \a figure 4 donne une ir, CimETIEN. — L ETUDE SYSTHMATIQUE DES ETOILES FILANTES 197 FiG. 4. idée. Il se compose d'un grand nombre de circonférences (i8o) passant toutes par les deux points P et P', distants de 4© centimètres, diamètre de l'équateur de la carte dont nous avons parlé. Soient encore A et D les projections des points d'ap- parition et de disparition d'une étoile filante. Fixons, au moyen d'une épingle pi- quée verticalement, le cen- tre O du trans])arent au centre de la carte. On voit les points A et D au travers du graphique et on conçoit qu'en le faisant tourner autour de son centre — connue les circonférences sont suffisamment nom- breuses et serrées — on puisse trouver une ligne telle que PADP' qui passe à la fois par le point A et par le point D, ou tout au moins deux courbes consécutives qui comprennent entre elles ces deux points ; c'est ce qui arrive , par exemple , pour la tra- jectoire AD'. Dans le premier cas, la ligne ainsi trouvée est la trajectoire demandée puisqu'elle coupe l'équateur aux deux points P et P' dia- métralement opposés. Dans le second cas, il faut tourner le transpa- rent jusqu'à ce que les points A' et D' divisent l'intervalle des courbes qui les comprennent dans des rapports égaux, comme l'indique la figure. Une circonférence moyenne, facile à imaginer entre les deux autres, sera encore la trajectoire cherchée. Pour reporter ces trajec- toires sur la carte qui est au-dessous, il suffit d'immobiliser le gra- phique à l'aide d'un presse-papier, de glisser une feuille de papier à calquer bleu entre le graphique et la carte, le côté efficace en dessous, et de suivre sur le graphique avec une pointe mousse la courbe que l'on veut reproduire. Ce transparent est applicable à toutes les cartes en projection sté- réographique , sur l'équateur ou sur un plan quelconque, pourvu qu'elles correspondent à des sphères ayant un diamètre égal à PP'. D'ailleurs, il est constitué lui-même par le canevas d'une projection sur le méridien dont on a négligé les parallèles , afin de ne pas nuire igS MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE à la clarté des tracés. Le tracé complet permet, ainsi que nous l'avons montré ailleurs (*), et ce dont on se rendra aisément compte, de résoudre tous les problèmes de trigonométrie sphérique relatifs aux angles et distances. Afin de ne pas embrouiller la carte, on ne tracera des trajectoires que ce qui est juste nécessaire pour atteindre le radiant. La partie visible (AD) sera représentée par un trait fort à l'encre rouge , avec une flèche et un numéro d'ordre à Y extrémité D. Ces derniers détails n'ont d'autre but que de faire ressortir davantage la convergence des lignes. Si les météores sont suffisamment nombreux , le radiant apparaîtra- comme une surface dont on pourra déterminer le centre au jugé. Ces météores seront ainsi combinés jour par jour, quelquefois heure par heure , lorsque leur nombre le permettra , et de façon à tirer le meilleur parti possible des méthodes d'observation, si rudimentaires encore dans cette brandie de la science. Si l'on est en possession d'observations réputées excellentes, on peut employer une méthode un peu plus rigoureuse : On conçoit que, si tous les météores émanaient d'un centre unique, lem's pôles seraient situés sur un même grand cercle de la sphère céleste, lequel admettrait lui-même à son tour comme ^CAqs le radiant et l' antiradiant de ces météores. La multiplicité des radiants, les étoiles sporadiques et surtout les erreurs d'observation, viennent troubler considérablement la netteté de ce cercle ; le problème de la détermination des radiants revient alors à placer ce grand cercle dans sa position la plus probable ; il est analogue à celui de la déter- mination de l'apex solaire par la méthode de Bessel. Si l'on voulait traiter la question par le calcul, on aurait à faire un travail considérable et dont la précision serait du reste illusoire ; aussi y a-t-il avantage à réduire le nombre des pôles en les groupant par régions, comme on le fait pour les lieux noi'maux des planètes. DÉTERMINATION DES HAUTEURS. — Cc genre de recherches exige des observations très précises, lindicatioii très exacte de l'heure (à la seconde près) et une entente préalable des observateurs. On marquera avec soin les points externes de la trajectoire et sans s'occuper des particularités physiques que l'on ne mentionnera qu'accessoirement. On devra concentrer son attention sur les météores brillants et observe?' une région assez éloignée du radiant. Les stations seront distantes de 20 à 5o kiloin. ; la droite qui les (•) Bulletin de la Société ustronoinique de France, juillet igoS. II. CIIUETIEN. — L ETUDE SYSTEMATIQUE DES ETOILES FILANTES ÏQQ joint sera orientée dans un azimut différent autant que possible de 90" de l'azimut moyen du radiant au cours des observations. Dans le cas d'observations très précises, en particulier pour la discussion de clichés photographiques , on emploiera la méthode de calcul de Klinkerfues. Cette méthode a été reprise et employée par M. Schaelierlé à l'Observatoire Lick; nous l'avons exposée en détail dans le Bulletin de la Société Astronomique de France de juillet 1903. Mais dans la plupart des cas, le manque de précision des obser- vations rend illusoire le déploiement d'un tel appareil mathématique, et l'on peut se contenter de calculs approchés. D'abord, eu égard à la précision très douteuse des matériaux, la sphéricité de la terre et la différence d'altitude des stations deviennent négligeables. Tout se passe alors comme si les observateurs étaient situés en deux points S, et Sj dune plaine horizontale H, à la distance K l'un de l'autre ; nous [)rendrons comme lati- tude > de cette plaine la moyenne des latitudes des stations. Soit ]\Or la trajectoire du météore (fig. 5); l'analogie des sinus donne , dans le triangle MS, S., pi sm w — _Pl__ sin S, sin S^ FiG. jo, et p., étant respectivement les distances de M aux points S, et S. , w est le déplacement paral- lactique du point M. On aura p, et p, si l'on connaît S, et S, pi = K , sin S, SUlw ^. sin S, p., = K — — e ' sin w On aura de même pour le j)oint de disparition M' P^ = K . sin S', sni w _, sin S, p , = K — — z^ ' " sm w les lettres accentuées étant, relativement au point M', ce que les mêmes lettres non accentuées étaient au point M. Ayant les quantités p, on calcule la hauteur h de M par l'une des fornudes h = p, cos Ç, = p, cos Ç, ; 200 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE de même li , hauteur de M' est donnée par h' = p\ cos Ç', = p'i cos Ç'2, Ç, , Ç', ; Çj, C'a, étant les distances zénitales des points M et M', rela- tivement aux stations S, et Sj ; si je désigne par/,, la longueur appa- rente de la trajectoire, vue de S,, ou par 7^ sa longueur apparente vue de Sa, sa longueur réelle l sera donnée par l'une quelconque des relations ?' = /3r + |0',' —^P^ p\ cos V, = pr + /iV — 2 p. p'-i cos '/, Si donc on connaît les quantités w, w'; S, S', ou S, S'2 ; Ç, , K\ ou Çj, Ç'j; 7, ou 7o. le problème est ramené à l'application d'une des deux séries de formules très simples que nous venons d'établir. So\\ figure 6. la carte en projection stéréograpliique sur laquelle on a porté les couples d'observations correspondantes : soient sur FiG. 6. cette carte A'^ , D'^ ; A'^, D'^ les points d'apparition et de disparition du météore MM', vus respectivement des stations S, et S. (les indices se correspondant). Traçons sur cette carte le cercle Z. représentant le parallèle de déclinaison l et le cercle 2^ de déclinaison D, , décli- naison de la station Sj, vue de S,. Soit 9 l'heure sidérale de l'oljservation. La droite P© détermine Z, zénith de la plaine à ce moment; menons par P une droite faisant avec P© un angle a- égal à langle horaire de la station S^ mesuré de H. CHUÉTiEN. — l'Étude systématique des étoiles filantes 201 S,, le point S ainsi trouvé est la projection sur le ciel de cette station Si vue de S^ . Il faut d'abord rendre les observations compatibles ; à l'aide du gra- phique complet dont j'ai parlé, je détermine les points N etN', milieux sphériques de A', A ^ et de D', D ., ; le même graphique permet de tracer les arcs de cercles -^N et sN'; je prolonge les trajectoires par le même procédé et les quatre points A, A^ , D^ D^ sont les couples de points compatibles, qui auraient été probablement observés, si les observations avaient été précises. Si les distances A', A,, D', D, , etc., sont trop grandes, on rejettera les observations comme par trop défectueuses. L'observation étant ainsi prépai*ée , il ne reste plus qu'à mesurer au gi'aphique les quantités nécessaires : w est la distance A, A^; w' la distance D|D. ; S, est la distance i; A, ; S', := - D, ; ensuite enfin Ç, = ZA, , K\ = ZD, ; etc. En résumé, l'oi'dre des opérations est le suivant : I" Reporter les couples de trajectoires sur une même carte ; 2" Placer les points Z et s. (On choisit comme station S., celle qui donne un point 2 situé dans les limites de la carte , il est clair que pour la station S,, le point 2 correspondant est diamétralement opposé au premier; dans le cas des cai'tes de la Commission des Etoiles fdantes, la station So est la plus boréale du couple). Avec le grapliique : 3" Prolonger un peu les trajectoires de part et d'autres de leurs extrémités ; 4° Déterminer N et N' ; 5° Le méridien convenaljle du graphique étant placé selon sN, lire la longueur des arcs S, = :i A, , w = A, A, ; 6'^ Même opération pour l'arc de grand cercle sN'; 7' Relever encore 7, z:= A, D, ou 7. =; A. D^ ; 8° Mesurer enfin Ç, = Z~Vi et Ç', — Z^. Il ne reste plus qu'à appliquer les formules. Observations des Perséides. — La Commission ne s'en est pas tenue à indiquer les méthodes d'observation; eUene l'a fait qu'après 202 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE les avoir expérimentées par elle-inème. Dans ce but. les étoiles filantes du mois d'août (Perséides) ont été systématiquement obser- vées aux différents points de vue que nous avons indiqués plus haut, d'aljord en 1901, sous la direction de M. Camille Flammarion, par MM. Antoniadi, Bluin, Senouque, Touchet et Chrétien, membres de la Commission. MM, Antoniadi, Senouque et Touchet observèrent à l'observa- toire de Juvisy (Seine-et-Oise); MM. Blum et Chrétien à la station auxiliaire de la Croix-de-Berny, à Antony (Seine). Pendant les nuits des 11-12, i2-i3, i3-i4 août, 283 trajectoires furent enregistrées dans les deux stations ; la figure y représente la H. CHRÉTiEx. — l'Étude systématique des étoiles filantes 2o3 distribution sur la sphère céleste des pôles de ces trajectoires, ainsi que la position des trois centres principaux d'émanation, desquels semljlaient provenir la majeure partie des météores observés; ce sont : I" Le radiant de Perséides, le plus actif des trois et qui avait pour coordonnées, le 12 août : M = ^r D= + 54°; 2° Un radiant dans Cassiopée dont la position était iR = 12° D = + 55° 3° Enfin, un radiant dans Pégase, le moins actif des trois (16 mé- téores); ses coordonnées étaient approximativement M = 352° D = + i5". Pour ce qui est du noml^re horaire des météores , voici quelques chiilres relevés à Juvisy dans la nuit du 12 août : De o à I h ■ . . II- 1 à 2 h 35 2 à 3 h 28 3à3h. 1/2 23 C'est donc dans la première partie de la nuit que les météores sont le plus nombreux ; ils sont aussi plus brillants ; mais il faut se garder de donner à ce résultat plus d'importance qu'il n'en a , attendu que es olîservateurs se sont plutôt attachés à enregistrer les trajectoires bien observées qu'à dénombrer les apparitions de météores. Néan- moins, le nombre horaire moyen des trajectoires enregistrées a atteint son maximum dans la nuit du 12 au i3 août, ce qui semble indiquer que c'est à ce moment que se place le maximum d'activité du radiant des Perséides. Cette date est, on le voit, assez éloignée de celle ordinairement indiquée par les annuaires (9-10 août) et a besoin d'être confirmée par les observations futures. La détermination des hauteurs des étoiles filantes résulte de la comparaison des observations faites à Juvisy avec celles effectuées dans ce but à la Croix-de-Berny. Voici les positions respectives des stations : Observatoire de Juvisv. — Lonoitude 0° 2' o" E. Latitude 48°4i'37"N. La Croix de Berny. — Longitude o' i' 43 ' O. Latitude 48° 45' 02" N. 204 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE Elles sont situées de jiart et d'autre du méridien de Paris et à peu px'ès à la même distance; c'est l'heure de ce méridien qui fut donc adoptée pour la réduction des observations. La distance des stations est de 9 kil. 200; l'azimut de la station d'Antony est. par rapport à Juvisy, de -|- jf\(f3o'. FiG. 8. — Trajectoires observées en double à l'obscrvaloire de Juvisy et à la station d'Antony (Croix-de-Berny). H. CHKÉTiEX. — l'Étude systématique des étoiles filantes 2o5 Le nombre des météores enregistrés en douille est de 21 , déduits de 59 trajectoires de Juvisy contre 44 qui furent notées pendant la même période à Antony. Sur ces 21 météores, 8 ont finalement pré- senté les garanties suffisantes pour être soumis au calcul. C'est donc 16 pour cent des météores observés qui ont pu être sûrement identifiés ; ce résultat remarquable est dû à la proximité des stations et à la convention qui fut faite au préalable de porter l'attention principalement vers le zénith. Lr Jigure 8 représente les 16 trajec- toires apparentes , groupées deux par deux sur une même carte , de façon à mettre en évidence les effets de parallaxe. Les traits pleins représentent les trajectoires de Juvisy; les pointillés, celles d'An- tony; les lettres se correspondent. Voici, d'ailleurs, les coordonnées locales des points d'apparition et de disparition de ces météores; les azimuts, réduits à la ligne des stations , c'est-à-dire augmentés de 3oo3o', sont désignés par a, , a,, a„ a^\ les hauteurs angulaires par /?,. /?,. h.,, h^, les indices i et 2 correspondent à Juvisy; 3 et 4 à Antony; les chiffres impairs se rapportent aux points d'apparition, les indices pairs aux points de disparition. Météores «, h, B — 90° 23' 46° 16' F — i5o 17 35 34 G - 84 19 60 55 H — 107 56 64 21 I + 25 46 6744 J - 2434 39 12 K — 21 l5 37 53 L -f- 20 5 63 3i a. h. «3 h,, «4 — 86° 35' 40° 57' — 78-28' 49° 57' — 71° 56' — i56 41 29 58 — 135 8 5i 5i — 145 19 - 7648 65 57 — 79 55 58 20 — 70 46 — 137 26 48 16 — III 39 60 55 — 118 20 -\- 40 59 56 23 -f- 22 20 62 5i + 25 17 - 96 3o47 — 20 36 35 35 — 8 53 — II 57 32 56 — i-J 9 33 14 — 8 43 — 19 I 62 8 + 29 36 5934 — 9 55 h, 40° i3' 43 28 60 58 52 4 52 12 25 4 26 3i 57 37 Le tableau suivant renferme les résultats de la discussion des éléments des huit météores considérés. Hauteur Hauteur Longueur Météores à l'apparition à la disparition de la trajectoire B 38 kil. 29 kil. 9 kil. 800 F i5 — i3 — 2 — 25o G 107 68 48 - H 96 - 22 — 81 — I 119 — 86 40 - J 75 - 14 - 84 - K 92 — 23 95 - L 3o — 21 — II — 206 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE On voit que l'étoile filante la plus basse est apx^arue à i5 kil. de hauteur; la plus élevée à 119 kil. Il était important de pouvoir se faire une idée suffisamment nette de la précision que comporte ce genre d'observations et, dans ce but , l'emploi d'une troisième station de vérification était tout indi- qué. PERSËIPES 190» }f ce,^t,jfj/ FiG. 9. En 190a, la Commission a repris ses études pratiques sous la direc- tion de MM. le comte de la Baume Pluvinel et Camille Flammarion. Voici la nomenclature des stations et la distribution des observa teurs qui y étaient respectivement attachés : H. CHRETIEN. — QUADRATURE DES TACHES SOLAIRES 207 A) Observatoire de Juvisy : MM. A. Benoit; A. Kannapell et H. Chrétien ; B) Château de Marcoussis (S.-et-O.) : MM. G. Blum et A. Senouque ; C) Station de Clamart (S.) : MM. A. Jarson et Em. Touchet. La figure g donne la position de ces stations ; soixante météores y ont été enregistrés en double et seize en triple. Signalons aussi, en passant, les curieuses observations de météores nébuleux faites dans la nuit du ii août, simultanément à Juvisy et à Clamart, et qui établissent d'une façon indubitable la réalité de ce phénomène déjà signalé précédemment. La discussion de cette importante moisson n'est pas encore termi- née; elle promet d'intéressants résultats et nous nous ferons un devoir d'en tenir au courant l'Association française pour l'Avance- ment des Sciences. M. H. CHRETIEN Observatoire Farman , à Chevreuse (Seine-et-Oise) LA QUADRATURE MÉCANIQUE DES TACHES SOLAIRES [523.72 :5i3.i8| — Séance du S aoùl — La relation très étroite qui existe entre les modifications de la surface du soleil et les traits généraux de la Météorologie terrestre fait prendre une importance de plus en plus considérable à la sta- tistique des taches solaires et à la détermination de leur étendue. Aussi beaucoup d'observatoires ont-ils organisé un service jour- nalier d'héliophotographie ; les épreuves obtenues sont mesurées et l'aire des taches se déduit de ces mesures au moyen de formules de corrections ayant pour but de tenir compte de la déformation causée par la perspective. Lorsque la tache considérée présente une grande étendue dans le sens du rayon du disque solaire, on la divise en zones concentriques qui reçoivent séparément leur correction. Il y a là un travail long, pénible et minutieux, surtout si l'on veut obtenir quelque précision et seuls les observatoires qui ont les ressources suflisantes pour entretenir un bureau de calculateurs peuvent se 208 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE livrer avec fruit à ce genre de recherches. Il y a donc un réel intérêt à chercher des méthodes de réduction à la fois plus expéditives et au moins aussi précises, et dans cet ordre d'idée je signalerai celle proposée par M. Ém. Touchet à une séance mensuelle de la Société Astronomique de France (*). J'ai pensé, de mon côté, qu'on pourrait peut-être employer avec avantage les appareils connus sous les noms de planimètres et d'in- iégrateiirs et qui sont d'un usage courant dans les bureaux d'ingé- nieurs où ils rendent de très grands services. Pour que ces appareils soient réellement avantageux dans le cas qui nous intéresse , il faut trouver un appareil^ effectuant automatiquement la correction de perspective. Je me suis donc proposé de résoudre le problème sui- vant : Une tache solaire étant donnée par sa projection orthographique, effectuer sur la projection de son contour (C) une transformation algébrique par rayons vecteurs d'où se déduise un contour plan (r) avant même aire que la surface sphérique occupée par la tache. Cet énoncé , on le voit , contient des conditions , non nécessaires d'ailleurs, qui particularisent nettement la solution. L'aire sphérique qui se projette dans le contour (G) est donnée en coordonnées polaires par l'intégrale double (I) = \f-^ dr dO = (i ,^ r dr dO, R étant le rayon de la sphère, r et 0 les coordonnées d'un point quelconque de la tache. Remarquons que l'on a r dr , , , -====^(/c-^R-^_,.0; il vient alors par l'application d'un théorème célèbre de Green = R / (A- — i/R^ — rO ^0, le second membre étant l'intégrale curviligne prise le long du con- tour (G) de la projection de la tache. La constante k peut être laissée arbitraire tant que le contour ne renferme pas l'origine , mais pour n'avoir pas à distinguer les cas, nous la déterminerons par la condi- (") Didldin de la Société Astronomique de France , imn igoS. H. ÇHRETIEX. — QUADRATIUE DES TACHES SOLAIRES 2O9 tion que rintégrale se réduise à a tt R^ lorsque le contour (C) se réduit lui-même à l'intersection de la sphère et du plan de projec- tioii ; on trouve alors A- = R et il vient finalement (^) S = R / (R _ y /R^ — ,'2) fio^ Nous posons maintenant (3) -i-p^ = R(R-^/TF^r7^), il viendra ij. cette fois, l'intégration étant effectuée le long d'un contour (r) qui se déduit du contour (C) au moyen de la transformation algébrique par rayons vecteurs définie par la formule (3). C'est la solution demandée. On aurait pu considérer le contour (C) comme se rapportant à l'hémisphère situé au-dessous du plan des .v^'; dans ce cas la for- mule (3) deviendrait ^p-^ = R(R+v/R^-'"0, car la surface est alors vue par sa/ace négative. L'interprétation géométrique est facile ; soient : P, le point de la sph're qui se projette au centre de la projection orthographique; M, celui qui se projette en m sur le plan des xj' à la distance r d*u centre ; P' le point de la sphère diamétralement opposé à P ; H, le point de PP' qui a même cote que M. Le triano'le rectans!'le PMP' donne PM^ = aR X PH; mais PHz=R — ÔH = R- v/R^ — /-S d'où PM^ = aR (R — t/ R^ — r') ; ce qui montre que la^longueur p est tout simplement la distance du point considéré au pôle P. Le mode de représentation de la sphère ainsi défini où les paral- lèles sont représentés par des cercles de rayon égal à leur distance i4* 210 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE rectiligne au pôle, et les méridiens par les rayons de ces cercles, est connu sous le nom de pT'oJection de Lorgna: il n'est pas le seul qui jouisse de la curieuse propriété de conserver les aires, mais c'est un des plus simples (*). Il s'agit de trouver un appareil efTectuant automatiquement la transformation de (C) en (r); il existe une infinité de solutions de cette question; j'en indiquerai une qui consiste en un système exclu- sivement articulé. Posons 7' :^ R sin 'f ; il vient p = 2 R sin - • '^ 2 Ainsi , notre problème est intimement lié à celui de la bissection mécanique de l' angle dont la solution est donnée par les réver- seurs de Kempc (**). Il suffit, dès lors, de fixer le point de l'appareil décrivant (r) au style d'un planimètre d'Amsler, par exemple, et de contouinier les taches de la photographie solaire à mesurer pour avoir immédiate- ment sur un index la valeur de la surface sphérique tachée. On peut contourner plusieurs fois chaque tache et augmenter ainsi la préci- sion par le jeu des moyennes. L'emploi auxiliaire d'un pantogi^aphe permettra d'adapter l'appareil à des disques solaires de rayons R quelconques. M. Em. TOUCHE!' Secrétaire adjoint de la Société Astronomique de France, à Paris PHOTOMÉTRIE ASTRONOMIQUE [335.24:52o| — Sôance du S août — Il y a quelques années, en 1897, j'avais, en collaboration avec M. Quénisset, obtenu, au sommet de la tour EitTel, des photogra- phies de la lueur crépusculaire, à minuit, au moment du solstice (*) Voir Hermann Lalrknt. l'rnilc d'analyse, tome VII. (") Voir sur ces appareils cl les systèmes articulés les Leçons de Cinématique profes' sées à la Sorbonne, par M. G. KŒMtis. FiG. ÉM. TOUCHET. — PIIOTOMÉTRIE ASTRONOMIQUE 211 d'été. On sait, en effet, qu'à cette époque de l'année, la nuit n'est pas complète, le soleil ne descendant pas à i8 degrés sous l'horizon. En présentant ces photographies à la Société astronomique de France, le 5 janvier 1898, M. A. Cornu, membre de l'Institut, le très regretté président de l'Association française pour l'Avancement des Sciences, avait fait ressortir l'intérêt qu'il y aurait à effectuer des me- sures photométriques de la lueur crépusculaire, afin d'étudier la distri- bution de l'éclairement dans ce phénomène et d'en déduire la forme des courbes isophoti- ques de la lueur. En raison de la fai- blesse des éclats à com- parer, je n'ai pu trouver, dans les photomètres existants , un appareil permettant la solution de cette question ; la plu- part des photomètres in- terposent, en effet, entre l'œil et la lueur à mesu- rer, des milieux absor- bant la lumière déjà trop faible. Frappé de ce fait que, '' vu dans un tube noirci, le ciel même le plus sombre se détache en un rond lumineux sur FiG. 3. un lond nOHN j'ai utilisé Photomètre à vision directe pour l'étude des intensités cette remarque dans le lumineuses faibles. photomètre que je propose et dans lequel il n'y a aucun objet (écran, lentilles, etc.) interposé entre l'œil et la surface lumineuse à évaluer! L'appareil se compose essentiellement d'un tube noirci intérieure- ment AB (fi g: 3), ouvert en A d'un œilleton permettant de voir à l'intérieur du tube. En B, le tube est fermé à moitié par un écran, FiG. 2. 212 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE blanc intérieurement et en forme de demi-cercle. Le champ est ainsi ]»artagé en deux parties : un demi-cercle à travers lequel on voit la surface à étudier et un demi-cercle blanc, mais qui paraîtra noir tant qu'il ne sera pas éclairé. La méthode consiste à éclairer d'une manière déterminée cet écran en lui donnant un éclat égal à celui de la surlace à étudier. A cet effet est. en L, une lampe étalon, convenablement abritée, dont la lumière est réfléL-hie vers l'écran B par le miroir m. Dans ini premier appareil, la source de lumière utilisée était une lampe à acétate d'amyle dont la llamme avait une hauteur cons- tante. On découpait dans la flamme, par un diaphragme, un rectangle de hauteur fixe et de base variable. La variation de cette base était ]»roduite par une fente de spectroscope dont la vis portait un tam- bour divisé. Mais l'augmentation rapide de l'éclat dès l'ouverture de la fente et, en outre, la production de phénomènes de diffraction lorsque celle-ci est étroite, ma fait préférer l'emploi d'un écran diffuseur dans le genre de ceux utilisés dans le photomètre de M. Mascart. On emploie toujours un diaphragme rectangulaire variable ou un « œil de chat » comme dans le photomètre de ]M. Cornu. Une fente spé- ciale permet l'introduction de verres colorés pour donner à l'écran B la même teinte que la lueur à étudier. La lampe est fixe et sa lumière parvient au miroir m par l'axe de rotation de l'appareil qui est disposé à la manière d'un théodolite , aA'ec cercles d'azimut et de hauteur. Nous insistons, en outre, sur ce fait, que l'appareil, étant bien construit et pouvant permettre l'adjonction d'un objectif à la place de l'écran B, et d'oeidaires, pourrait être employé dans une cer- taine mesure, comme un théodolite. Il pourrait également servir à la photométrie des sources lumineuses faibles suivant la méthode employée par M. Henry, dans laquelle on mesure le diamètre du cercle de diffusion d'une étoile ou d'une source terrestre faible . au moment où. par la variation de la mise au foyer, ce cercle cesse d'être visible à cause de l'étalement de la lumière. Comme il est difficile d'apprécier le diamètre d'un cercle qui cesse d'être visible, il est préférable de remplacer la mesure de ce diamètre par celle de la longueur de la lunette (*). Le tulje de l'oculaire portera donc une échelle divisée et l'observation consistera à noter la division d(» (*) Ce procédé a été ('m|)loyé avec succès par >!. G. Bhim. à TObservatoire de la Société astronomique de France, pour la photométrie de l'éclipsé de lune du II-I2 avril i()o3. ÉM. TOLCHET. — PHOTOMÉTUIE ASÏUOJVOMIQUE 2l3 réelielle pour laquelle le cercle de dilTusion dune source lumineuse faible cesse d'être visible. On pourrait même, j)our la pliotométrie stellaire. adopter une division correspondant à la disparition des cercles de diffusion d'étoiles de grandeurs déterminées , c'est-à-dire qu'on lirait innnédiatement la grandeur de l'étoile observée. Il nous est impossible, dans le cadre de cette note, d'entrer dans de [)lus amples détails sur la description de cet appareil, que l'on pourra étalonner de diverses façons , en particulier en éclairant une surface blanche avec une source de lumière et en faisant varier la distance de cette source. On pourra ainsi noter, sur le tambour de l'écran, des valeurs correspondant à des éclairements déterminés. Comme ce qui importe dans certaines mesures comme le crépus- cule est la connaissance de la distribution de la lumière, c'est-à-dire la mesure de ses valeurs relatives, l'appareil se prête particulière- ment à cette détei'uiination , une même position de la vis correspon- dant alors à un même éclairement. en supposant la flamme cons- tante. Au cours d'expériences faites en juin dernier, au sommet de la Tour Eiil'el, en collaboration avec M. A. Senouque, nous avons enqtloyé un modèle de ce photomètre pour l'étude de la lueur crépus- culaire. Nous avons pu constater le fonctionnement très pratique de rapi>areil et la rapidité des mesures, condition indispensable pour l'étude d'un tel phénomène où les mesures doivent être très nom- breuses et faites en un temps très court. Nous avons pris soin, lors de ces expériences, de rapporter très souvent l'éclat de l'écran à celui d'une surface éclairée par une source constante afin d'éliminer la variation possible de la flamme au cours des expériences. En résumé, le photomètre que j'ai établi, et c[ui m'a déjà fourni des résultats intéressants, semble pouvoir donner des indications utiles dans de nombreuses circonstances. Etabli spécialement pour la pliotométrie de la lueur crépusculaire , il convient également bien pour l'étude de la lumière zodiacale, du gegenschein, de l'aurore boréale, etc. Modifié légèrement, il pourra être employé comme théodolite et, en outre, servir à la pliotométrie stellaire. Il pourra aussi servir à la comparaison des sources terrestres par les éclaire- ments qu'elles produisent. Il m'est impossible de fournir, pour cette année, les résultats complets des expériences de la tour Eiffel. Elles ont été en partie contrariées par le mauvais temps et surtout par un vent très violent qui a soufflé pendant plusieurs jours au sommet de la Tour au moment du solstice d'été. J'espère pouvoir revenir sur cette 2l4 MATHÉMATIQUES, ASTRONOMIE, GÉODÉSIE ET MÉCANIQUE question dans un prochain Congrès, et d'autant plus que je pense j)ouvoir perfectionner d'ici peu le premier appareil que j'ai cons- truit. M. L.-F.-J. GARDES Notaire honoraire , à Montaubau CALENDRIER PERPÉTUEL [529.5J — Séance du S août — J'ai donné au Congrès de Montauban, i^our le calcul de la date de Pâques, une formule en fonction de deux éléments du com[»ut : l'épacte et la lettre dominicale. J'ai pensé qu'il serait possible d'établir un calendrier permettant de trouver sans calcul tous les éléments du calendrier lunaire, comme il en existe pour le calendrier solaire. Après divers essais, je suis parvenu à un résultat qu'il me parait impossiljle de dépasser au point de vue de la facilité des recherches. Au calendrier lunaire j'ai joint un calendrier solaire, de façon à présenter un calendrier perpétuel complet. (Voir la Planche I qui contient toutes les indications nécessaires pour l'usage du calen- drier.) Pour se servir de ce calendrier, il faut le monter, c'est-à-dire, rendre mobile autour de son centre la rondelle limitée par une circonférence rouge. A cet effet, on découpe dans chaque cadran (Jjg'. I etjig\ a), en suivant cette circonférence, une rondelle et on découpe aussi les petites rondelles (fi g'- /'"'* et fi g- . 2'"'*), et il sullit ensuite de fermer le trou du cadre et de fixer en son centre, par leur centre, les deux rondelles obtenues, au moyen d'un fil à nœuds (ou d'un clou) qui sert de pivot. Les grandes rondelles ne doivent tourner que pour passer du calendrier Julien au Grégorien et parfois dans ce dernier, lorsqu'on change de siècle. En dehors de ces cas, les petites rondelles seules doivent être mises en place chaque mois pour donner, l'une le calen- drier de tout le mois et fautre l'âge de la lune à chacun des jours de ce mois. A. SENOUQUE. — SUR l'eNREGISTREMENT PHOTOGRAPHIQUE 2l5 M. A. SENOUQUE SUR L'ENREGISTREMENT PHOTOGRAPHIQUE DU ROULIS ET DU TANGAGE DES NAVIRES — Séance du 8 août — Il est intéressant de connaître avec une précision assez grande les mouvements que la mer imprime aux vaisseaux pendant le cours d'une traversée. Plusieurs méthodes peuvent être employées pour connaître ces mouvements; j'ai pensé que la photographie pourrait être utilisée avantageusement. L'emploi de la photographie dans ces expériences ne demande aucune installation spéciale. Il suffit, en effet, de fixer solidement , sur le pont du bateau, un appareil photographique dirigé sur un astre quelconque, ou sur un phare si l'on se trouve en vue de terre. En laissant l'appareil ouvert pendant quelque temps, l'objet lumi- neux visé produit sur la plaque photographique une traînée plus ou moins sinueuse qui représente fidèlement les mouvements du bateau par rapport à une direction fixe dans l'espace. Le voyage de la Mission astronomique, organisée par M. de la Baume Pluvinel pour l'observation de l'éclipsé totale de Soleil du i8 mai 1901 à Sumatra, ma donné l'occasion de faire quelques expériences qui ne présentent peut-être pas toute la précision dési- rable, mais qui, je l'espère, intéresseront le Congrès. J'ai employé l'appareil photographique qui me servait à prendre des vues pendant le voyage. L'objectif, de 25'"" d'ouverture, a un foyer de i3o""". J'ai dirigé cet instrument sur la Lune. J'ai employé des plaques Lumière, étiquette bleue, enduites d'un antihalo au collodion coloré par de l'azotate de rosaniline. La plus belle épreuve obtenue , celle qui accompagne la présente note, a été prise le 24 avril 1901, à bord du « Mérapi » , dans l'Océan Indien. L'appareil est resté ouvert pendant une minute. On voit très bien sur l'épreuve la traînée sinueuse laissée par la lune pendant la pose. En faisant quelcpies mesures sur ce cliché, on constate que le tan- gage, très faible, ne dépasse pas a^Zla'. Au Ein-egistrcment . ^ L "t ^1^^ roulis et du tang-age contraire, le roulis est beaucovip plus prononcé, son amplitude est de 6°^o. Un millimètre mesuré sur le cliché vaut 27 d arc. 2l6 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MECANIQUE Il serait préféralîle de diriger la chambre photographique sur une étoile brillante. La trajectoire enregistrée se réduirait aloi's à une ligne sinueuse très fine , susceptible de supporter des mesures beau- coup plus précises que les larges bandes données par la lune dans les expériences citées plus haut. De plus, lintensité plus ou moins grande de la trajectoire de l'étoile pourrait donner des renseigne- ments intéressants sur la vitesse des mouvements enregistrés. ' M. QUENISSET Membre de la Société astronomique de France PHOTOGRAPHIE DE LA LUMIÈRE ZODIACALE [523.59:78.83] — Séance du S août — Jusqu'ici les essais de photographie de la Lumière Zodiacale ont été peu nombreux. C'est un sujet, en effet, assez diflicile et les objectifs les plus lumineux n'ont encore donné que de bien vagues phototyxîes. Signalons cependant les très belles photographies de cette lueur obtenues en 1899 et 1901 à l'observatoire Lowell à Flagstaff (Arizona) aux Etats-Unis, par MM. A.-E. Douglass et W.- A. Cosghall. Ces astronomes ont employé un objectif de 23 milli- mètres de diamètre et 45""", 7 de distance focale. L'atmosphère très pure de l'Arizona a été certainement un important facteur de réussite. Encouragé par des essais effectués en 1898 et 1899. j'ai entrepris pendant les mois de janvier, février, mars et avril 1903, à mon observatoire de Nanterre , près Paris , toute une série de recherches dont j'ai l'honneur de présenter un court résumé à Y Association française pour V Avancement des Sciences. J'ai employé plusieurs sortes d'objectifs extra-lumineux, mais c'est celui constitué par les deux lentilles plan-convexe d'un conden- sateur de lanterne de projection qui m'a donné les meilleurs photo- types. Il a un diamètre de o™, 100 et une distance focale de ©'".oyS seulement. Comme un objectif qui a de tels éléments optiques doit donner forcément pas mal d'aberrations, on a réduit son diamètre en le diaphragmant, à 5 centimètres. Les images sont meilleures QUENISSET. PHOTOGRAPHIE DE LA LUMIERE ZODIACALE 217 qii on serait tenté de le croire au premier al)ord et nous nous sonnnes assuré, d'ailleurs, par des mesures prises directement sur les photo- types obtenus par ce procédé, que les déformations sont insigni- llantes pour les sujets que Ton pourra photographier au moyen de ces sortes d'oljjectifs. Nous les recommanderons tout spécialement l)our la photographie des étoiles filantes et des aurores x^olaires. J ai fait cette année un assez grand nombre de photographies de la lumière zodiacale. Celle que j'ai l'honneur de présenter à l'Asso- ciation Française a été obtenue le 2(5 féviner 1908 de i9''4o" à i9i'48'". Pholograijliie tle la Lumière Zodiacale le 26 février igoS de if)"4o'° à i9''48°'. Objectif de « = o^jioo (diapliragmée à o,o3),/ = o°,o;3. (Observatoire de Nanterre.) Cette épreuve montre bien l'allongement de la lueur dans le sens de l'écliptique. Une liande nuageuse cache la partie inférieure de la lumière zodiacale. On remarquera facilement les étoiles suivantes : a, fi. 7 du Bélier; r,. y. 'y. n, 0 des Poissons; Ç de la Baleine et d'autres étoiles, moins importantes, de ces constellations. 2l8 MATHEMATIQUES, ASTRONOMIE, GEODESIE ET MÉCANIQUE M. QUÉNISSET Membre de la Société Astronomique de France PHOTOGRAPHIES DE LA COMÈTE BORRELLY 1903 C. [523.6i:;7.83] — Scance du S août — A notre Observatoire de Nanterre, nous avons x^ris un certain nombre de photographies de cette belle comète, à l'aide d'un objectit à portraits de ©"^ojô de diamètre et o°^3oo de distance focale. Voici celles qui présentent les particularités les plus intéressantes. Le i4 juiHet 1903, nous avons pu obtenir deux phototypes : l'un de 21 h. 4'> 11^' à 22 h. i5 m., l'autre de 22 h. 3o m. à 22 h. oa m. Ils ont été combinés de façon à fournir une image stéréoscopique. Si on examine les deux épreuves dans un stéréoscope . on voit la comète suspendue librement dans l'espace, les étoiles environnantes parais- sant situées bien loin par derrière et formant le fond du tableau. Des photographies stéréoscopiques de comètes ont déjà été obtenues par M. Max Wolf, le sa- vant directeur de l'Obser- vatoire de Heidelberg. pour la comète Perrine (1902 b) et par nous-mème pour la comète Swift (1899 a). Ces sortes de photographies sont appelées , selon nous , à donner des renseigne- ments intéressants dans le cas de comètes à queues irréoulières et à fournir des indications utiles sur le mouvement de rotation de ces astres. Les phototypes du 14 juillet montrent une che- velure de II' de diamètre cl une queue de .V4o' au FiG. I. — J,c iS-19 juillet iyo3 de 23''44" à CSo". • i i . ,, moins de longueur (car elle atteint le bord de la x^laquc). QUENISSET. — PHOTOGRAPHIES DE LA COMETE BORRELLY 219 Une photographie faite le i5 juillet montre une queue plus fine, moins longue et en courbure sensible vers le sud. Le 18-19 juillet, une pose de i h. 6 m. (de 23 h. 44 ™- à o h, 5o m.) nous donna un phototype sur lequel la chevelure a un diamètre de 17' et la queue au moins 6° de longueur. Celle-ci devient plus lai'ge dans ses parties les plus éloignées de la chevelure. Une deuxième petite aigrette commence à apparaître près de la chevelure, vers le sud. Une photograx^hie prise le 24-25 juillet 1903, de 23 h. 9 m. à o h. 9 m., montre lesVu- rieux détails suivants : Lo. chevelure mesure 16' d(^ diamètre et on distingue plusieurs queues : une pre- mière aiorette lumineuse assez line, la plus occiden- tale, visible déjà sur le phototype du 18-19 jiiiH''^- de 55' de longueur ; une deuxième branche plus large, mais bien moins lu- mineuse, que l'on suit faci- lement sur le phototype sur une longueur de 3 '3o' : une aigrette plus lumi- neuse, très fine vers la chevelure, mais s'élargis- sant insensiblement jus- qu'à un centre de conden- sation bien marqué situé à i'^'3o' du noyau de la comète, ensuite cette aigrette se prolonge en devenant plus faible jusqu'à 3^20' environ; vis-à-vis du centre de con- densation de l'aigrette précédente, mais curieusement rejetée plus à l'est, on observe une cjueue. la plus Ivmiineuse, la plus large et la plus longue, qui atteint au moins 8°. Cette branche est elle-même très irrégulière dans ses parties les plus éloignées. Enfin inie cinquième queue, assez courte, mais large, la plus orientale, se voit assez bien sur le phototype, près de la chevelure. Une photographie prise le 25 juiUet. de o h. 52 m. à i h. 4 i"- '^^'6C un condensateur, accuse une queue de /6'° à 20° de longueur. FiG. 2. — Le 24-25 juillet igoS de 2'3''9" à o*"!)" 22(> GENIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION M. P. VAUDREY Constructeur à Paris SUR LES APPAREILS INDICATEURS ET ENREGISTREURS DANS LEURS APPLICATIONS AUX SCIENCES ET A L'INDUSTRIE [581-778J — Séance du 6 août — Les Appareils Indicateurs et Enregistreurs qui représentent, par un index mobile ou une courlje continue , les phases successives des différents phénomènes, rendent aux Sciences et à llndustrie des services considérables. Ce sont des agents toujours en éveil, qui suivent et notent sans se lasser toutes les variations des fonctions des éléments, hommes ou machines, qu'on les charge de contrôler. Ils donnent, en un mot, Ihistoire d'un appareil, par exemple, écrite par lui-même. Leur emploi se généralise de jour en jour et. partout où ils sont installés, ils deviennent indispensables dès que l'on a pu apprécier les grands services cj[u'ils rendent. Pénétré de l'avenir de cette question, nous en avons commencé, en 1889, l'étude et, depuis 1898, nous avons présenté presque chaque année de nouveaux a})pareils de ce genre , réalisant de grandes amé- liorations dans le travail, la marche de certaines industries où nous nous sommes spécialisé de préférence. Aujourd'hui, nous nous occuperons de notre Indicateur électrique de niveau à distance « Le Guetteur » et , si possible . de notre Indi- cateur métallique de tirage « lAspiromètre ». L'enregistrement mécanique des niveaux n'étant plus pratique au delà d'une centaine de mètres de distance de l'appareil transmetteur aux appareils récepteurs, on est obligé de recourir à l'électricité. L'installation se compose donc d'un appareil transmetteur, placé au réservoir , qui est chargé de recueillir les variations de niveau et de les transformer en signaux électriques, et d'un ou plusieurs appareils récepteurs, indicateurs simples, ou avec enregistreur, placés à l'usine élévatoire , s'il y a lieu , au bureau du Service des eaux qui traduisent ces signaux en mouvements de hausse ou de baisse de l'aiguille et du style de l'em-egistreur. p. VAUDREY. — SUR LES APPAREILS INDICATEURS 2!21 ■ Lorsque la distance à franchir n'est que de quelques centaines de mètres, on fait la marche à deux fils, c'est-à-dire qu'en utilisant la terre connue fil de retour on alTecte un de ces deux fils aux indica- tions de hausse et l'autre à celles de baisse. Mais, dans la plupart des installations, principalement dans les Distributions d'eau de Villes, l'cloignement des transmetteurs et des récepteurs est de plusieurs kilomètres; il y a donc intérêt à réduire le nombre des conducteurs. C'est alors qu'on emploie la marche à un seul fil. le retour étant toujours prévu parla terre. Le transmetteur, ayant ses connexions établies de façon différente en ce cas, émettra des courants positifs ou négatifs suivant que le niveau s'élèvera ou s'abaissera; un relais douldement polarisé recevra ces courants et fermera un circuit local sur les bobines des récepteurs correspondantes aux indications de hausse ou de baisse. Par la différence d'intensité de courant, on peut faire passer sur le même lîl les signaux de plusieurs appareils . sans que les indications respectives puissent se confondre entre elles. De même, au moyen de relais spéciaux, dits paresseux, on annihilera, pendant un ou plusieurs dixièmes de seconde, le fonc- tionnement d'une installation téléphonique pour transmettre, par sa propre ligne, les indications de nos appareils de niveau. Les déj)lacements de l'aiguille et les courbes du stvle de nos indi- <'ateurs-enregistreurs électriques ne sont pas continus , mais consti- tuent une succession de lignes brisées qui suivent toutes les fluctua- tions des niveaux à 2 cent. 1/2, 5. 10. etc. près, moins ou plus, selon que l'on a pris comme unité de transmission les 2 1/2. 5 ou 10 centi- mètres, etc. Le transmetteur n'émet donc un courant que lorsque le niveau a varié en plus ou en moins de la quantité prise comme unité. Pour obtenir une indication continue, on est obligé d'avoir l'indi- cateur-enregistreur sur place , fonctionnant mécaniquement sans l'aide de l'électricité. Plusieurs types peuvent être adoptés : I'' L'hydromètre à cloche d'air ; 2" L'indicateur à engrenages avec ou sans réducteur de course ; 3" L'indicateur à compensateur à mercure, etc. Mais cette disposition ne peut rendre les services de l'installation électrique où, à distance, l'indicateur simple renseigne le mécanicien de l'usine élévatoire ou garde-bassin du réservoir sur le niveau existant, par la position de l'aiguille sur le cadran gradué, indication 222 GENIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION qui est reproduite exactement au bureau du Directeur sur son enre- gistreur. Par la courbe ainsi obtenue de la marche des machines, le chef de service peut se rendre compte de l'heure exacte de l'arrêt et de la mise en marche, de la vitesse et du volume d'eau élevé, etc. On conçoit très bien d'ici les économies considérables que pro- curent ces appareils en assurant hi marche régulière de ces services qui, auparavant, ne pouvaient être conduits ni surveillés facilement. C'est pourquoi l'on peut prévoir que d'ici à quelques années toutes les distributions d'eau en seront munies, réalisant ainsi une amélio- ration sérieuse qui sera appréciée de tous les intéressés. Desckiptiox détaillée. — L'appareil est, à plus proprement parler, une conil)inaison de plusieurs appareils principaux : i" le transmetteur (placé au réservoir); 2° le ré-cepteiir-indicateur simple, jjar exemple, (placé à l'usine élévatoire) ; 3^ le réceptenr-indirateiir-enregistreiir, si on le désire tel, (placé au liureau du service des eaux). En outre : a, une I^atterie placée près de chaque appareil; h, un relais doublement polarisé placé près de chacun des appareils récej)teurs, si l'on veut ne marcher qu'à un seul fil; c, une sonnerie d'avertissement pour le maximum et le muiimum, si on le désire. Puis, flotteur, contre-poids et accessoires. Deux transmetteurs diftèrents ont été établis : Transmetteur n" i (Jig: i). — Un arl)re porte derrière la cage de l'appareil deux tambours en cuivre; au jfrand tami)our est susi)endu, par une corde métaUique, le flotteur; au petit, le contre-poids. Le même arl)re porte Fiu. I. Transmetteur ir i. p. VAUDREY. — SUR LES APPAREILS INDICATEURS 223 dans l'intérieur de la cage une traverse biseautée à ses deux bouts. Sur le pourtour inférieur de la platine de fond circulaire est disposée une gorge dont les extrémités sont dans l'axe de la traverse et dans laquelle circule luie bille en cuivre. A l'avant sont placés, à droite et à gauche, deux dispositifs à bascule correspondant aux mouvements de hausse ou de baisse. Lorsque, par le flotteur ou le contre-poids, les variations de niveau font tourner dans im sens ou dans l'autre la traverse, celle-ci entraîne la bUle et l'amène à l'extrémité de la gorge d'où elle tombe dans l'auget articulé correspondant à la hausse ou à la baisse, ce qui le fait Ijasculer. En ■tW»! •; «a^'W^ -W.» MM.'-.;»-. Ml ii»ll<1»jl.MjM^»WigB -.: jC fe- FiG. 2. — Transmetteur n° 2 (vue de face). FiG. 3. — Transmetteur n» 2 fvue de profil). 224 (tÉME civil et MILITAIUE, NAVIGATION même temps, mie pointe en platine n'étant pins retenue par le contre-poids de l'an^et vient, de son propre poids, s'incliner dans un bac à mercm^e où elle amène le courant de la masse (jui, de là, rejtart dans la ligne. La l)ille retourne dans la gorge par une glissière en (piittant l'aug-et : celui-ci se relève, ainsi (jne la pointe, par l'action de son contre-poids et le contact est sniiprimé. Transmetteur no 2 (_fis^. ^ et 3) (modèle simplifié). — Vn arbre porte derrière la cag-e de l'appareil une poulie à lacpielle sont suspendus , par une corde métallique, un flotteur et un contre-jjoids. Le même arlire porte, dans l'intérieur de la cage, un distpie à six g-oupilles (ou roue à six dents). Au-dessous est placé un index biseauté qui oscille à droite ou à gauche par l'action du ^flotteur ou du contre-poids, suivant que le niveau monte on l)aisse. Cette pièce, en oscillant d'un côté ou de l'autre, déiDlace à l'arrière, dans le sens opposé, un dispositif commutateur- inverseur à mercure ([ui, par ses pointes, amène les courants ou positifs, ou négatifs de la pile dans les bacs de gauche des pointes de l'avant correspondant aux lils de ligne; en même temjts, l'index repousse, mais toujours à droite, un liras qui est bandé par un ressort. Au déclanchement , ledit liras revient brnscpiement [lar l'action du ressort précité à sa position de repos. Ce faisant, il envoie le long d'une rampe une bille qui la fait baisser sous son poids dans une ramure et en même temps permet aux deux pointes en platine de l'avant de tomber dans leurs godets resiiectifs où elles trouvent le courant qu'elles lancent ensuite dans la ligne. Lorsqu'on doit se ser\ir d'une ligne téléphonique, on fait arriver les lils de ligne (i2 lils ou un seul iil et la terre comme retour) aux deux pointes avant et repartir jiar les deux godets à mercure correspondants de droite, ce qui fait ({ue lorsque l'appareil émet un courant, lesdites pointes, quittant leurs godets, coupent la ligne téléphonique. Nous croyons utile de vous dire deux mots sur notre Indicateur métallique de tirage « l'Aspiromètre ». Étant donné que le tirage est le facteur le plus important de la combustion et que, pour une quantité déterminée de charbon , il faut aussi une quantité d'air également l^ien déterminée. « rAspiromètre », en mesurant et en indiquant d'une façon constante au chauffeur l'état de la pression atmosphérique, comme le manomètre lui indique la dépression de la vapeur, lui permet de régler l'ouverture de ses registres ou de proportionner ses charges, pour assurer la combus- tion complète, l'utilisation économique du charbon pour la produc- tion de vapeur. Cet appareil est de grtinde utilité dans toutes les industries où il est déjà très répandu, notamment pour le contrôle de la marche des fours et surtout des générateurs (Usines clévatoires, etc.). DRUAUÏ ET LE ROY. — TYPE DE VOIE ÉTROITE 225 MM. MUART et LE ROY A Reims DÉTERMINATION DU TYPE DE VOIE ÉTROITE APPELÉ A RENDRE LE PLUS DE SERVICES [625.6] — Séance du 6 août — Lors du Congrès de l'Association, àMontanban, en 1902, la Section du Génie civil avait déjà mis à l'étude la Détermination du type de çoie étroite appelé à rendre le plus de services. Cette question a été examinée ; mais elle n'a pas été tranchée d'une manière définitive. Il semble qu'il y ait lieu d'y revenir, de la traiter à fond et de la résoudre en s'appuyant sur les données de la pratique. On peut classer les voies étroites employées sur les chemins de fer français en deux catégories : 1° Les voies de o"^8o et au-dessous ; 2" Les voies de i mètre. Les voies de o"^8o et au-dessous paraissent devoir être complè- tement abandonnées par les Compagnies de chemins de fer d'intérêt local; elles étaient en fort petit nombre et l'exemple donné, en ce moment , par le département des Ardennes , qui les remplace par des voies de i mètre , montre c{u'elles sont a^^pelées , sinon à dispa- raître, du moins à ne pas augmenter en nombre. La stabilité y est absolument insuffisante. Reste le type de voie de i mètre. Il en existe de nombreux spécimens dans presque toutes les régions de la France; elle y est très appréciée. La souplesse du matériel admis à y circuler permet bien souvent de faire pénétrer dans les villes les réseaux à voie étroite destinés à en desservir la Banlieue. Pour la même raison , la voie de i mètre peut être admise comme voie des tramways urbains. Sa largeur est suffisante pour assurer, d'une part, une stabilité i5* 226 GÉNIE CIVIL ET MILITA IHK, XAVIOATION convenablojaux véhicules, mènie chargés de lo tonnes de poids utile (*) et, de l'autre. i>our permettre de loger sous les châssis des moteurs des meilleurs modèles. De plus, si l'on tient compte de la possibilité d'utiliser cette voie pour recevoir ou expédier, sans transbordement, les marchandises en provenance, ou à destination, des lignes des Compagnies d'intérêt général, on constate que la voie de i mètre est appelée à rendre de très grands services. L'emploi des trucks-transporteurs, imaginés pour éviter les manu- tentions et pour amener chez les destinataires les wagons d'origine, quoique usité en Allemagne, ne parait pas se généraliser en France sur les voies d'intérêt local. Mais il ne saurait en être de même sur les réseaux ferrés urbains, où les services rendus par ces ap^jareils permettent aux embranche- ments particuliers grefïes sur la voie étroite de constituer, en quelque sorte, « des gares de débord », des voies normales, et de soulager d'autant les gares aux marchandises des grandes villes. La voie étroite peut, de ce chef, livrer passage à volonté à son propre matériel , ou au matériel des Compagnies d'intérêt général ; seule, elle Jouit de cette précieuse propriété qui assure sa supériorité sur la voie de i'"44' souvent adoptée pour les tramways urbains. La possibilité d'utiliser l'énergie électrique, comme puissance motrice, ne fait que confirmer ce qui vient d'être dit. Les remarquables avantages des moteurs actuellement en usage, avantages si bien |précisés , l'an dernier, par M. Monmerqué, pour la traction des voyageurs, sont encore plus appréciables pour le transport des marchandises : La diminution du poids mort , la simplicité des organes, la propriété d'avoir un couple moteur sensiblement constant pen- dant un tour de rotation, la possibilité d'obtenir un grand accroissement de ce couple moteur par le groupement en série au démarrage , sont évidemment de la plus haute importance lorsqu'on doit mou- voir des poids considérables et les traîner à une allure de lo à 12 kilomètres à l'heure, permettant de les intercaler entre les voitiu^es de voyageurs. Il est encore , à ce point de vue , un élément récemment constaté qu'il importe de faire connaître. (•) Et aussi de 20 tonnes, avec wai^ons nionlés sur l.i.^'-gies. DRUART ET I.E ROY. — TYPE DE VOIE ETROITE 227 Les moteurs électriques , grâce à leur grande vitesse de rotation, se prêtent très bien à la transmission par vis sans fin; or, les pro- priétés de cette dernière, combinées avec celles des moteurs précités, permettent d'obtenir des démarrages extrêmement doux et. en même temps , très avantageux au point de vue de la consommation d'énei'oie. Une charge totale de 5o à 60 tonnes démarre avec ^o ampères, à 5oo volts; c'est moins que n'absorbent, pour se mettre en marche, bien des types de voitures de tram\Yays, de 10 à 20 tonnes, munis de moteurs à en2:renaq,es droits. Bien que le rendement, en régime, d'une vis sans fin, construite avec les précautions nécessaii'es (*), soit de 10 °/o environ inférieur à celui d'un engrenage droit, il résulte de la propriété précitée que la vis peut, en raison des nombreuses manœuvres (et, par suite, des fréquents démarrages) d'un service de marchandises, être préférée aux engrenages droits dans certaines circonstances. Ces avantages trouveraient immédiatement leur application svu* la voie de i mètre pour le transport des wagons de grand gabaiit contenant des produits qui redoutent le transbordement. — C'est là un point important qui devait être signalé. De ce qui précède , on semble « en droit de conclure » que la voie de I mètre est, dans la presque totalité des cas, celle qui doit être adoptée par les lignes de chemins de fer' d'intérêt local aussi bien que pour les lignes de tramways urbains. Cette même conclusion, motivée dans deux cas bien différents, par des considérations distinctes , offre cet avantage que le matériel des compagnies d'intérêt local pourra, au besoin, emprunter les voies ferrées urbaines. Dans bien des circonstances, ce résultat sera d'une haute utilité. (*) Précaulions indiquées par MM. Blondel et Dubois dans leur ouvrage sur les Tramways électriques. 228 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION M. PRIEUR Ingénieui' des Arts et Manufactures, à Paris SUR L'INDUSTRIE DES CARRIÈRES [622.2] INTRODUCTION Au poiiit de A'ue administratif et légal, on comprend sous le nom ]de carrières les ardoises, les grès, les pierres à bâtir, les marbres, les granits, les pierres à chaux, les pierres à plàti-e, les pouzzolanes, les trapps, les basaltes, les laves, les marnes, les craies, les sables, les pierres à fusil, les argiles, les kaolins, les terres à foulon, les terres'à poterie, les substances terreuses et les cailloux de toute nature, les terres l^yriteuses regardées comme engrais. Ainsi, c'est la nature des sulîstances à extraire qui caractérise les carrières et nullement la méthode d'exploitation. Celle-ci varie tellement avec les matières à extraire que nous nous bornerons à décrire les carrières de grès et de porphyres que nous avons étudiées plus spéciale- ment. II NÉCESSITÉ DES GRANDES CARRIERES Les travaux publics consomment une quantité considérable de matériaux sous forme de pavés et de pierre cassée. l\"ous pouvons citer cV abord la ville de Paris, qui absorbe eliaque année sept millions de pavés. Les grandes villes, comme Lille, Le Havre , Bordeaux , entreprennent souvent de grands travaux de voirie pour lesquels il faut des millions de pavés. Ces chiffres , qui paraissent formidables , n'ont pourtant rien d'étonnant si l'on considère qu'une rue de i5 mètres de large exige l'emploi de 5o.ooo pavés j)Our une longueur de loo mètres. Quant aux matériaux d'empierrement, la production annuelle est en France de ii.5oo.ooo tonnes. Paris consomme à lui seul 80.000 tonnes de macadam. Certaines régions, telles que le Nord, le bassin de la Seine, l'Angleterre, sont à peu près dépourvues de matériaux d'em])ierrement, et cependant la majeure partie des routes y sont macadamisées. PRIEUR. — SUR l'industrie DES CARRIÈRES 229 On peut se rendre compte ainsi que, pour répondre à de sem- blables besoins, il est nécessaire d'avoir des carrières d'un débit considérable. Or, les carrières les plus communes sont celles qui ont pour objet l'entretien d'une section de route. La présence d'un gisement étant reconnue dans une propriété particulière, le carrier bénéficie d'une occupation temporaire ; il est à la fois extracteur et casseur , les transports sont exécutés généralement par prestations. Le carrier n'a donc pas besoin d'autre matériel que ses burins et ses massettes, ni d'autre capital que ses bras. Il en est tout autrement d'une grande carrière qui , au lieu d'avoir à fournir quelques centaines de mètres cubes par an , doit fabriquer parfois 5oo mètres cubes par jour. Nous nous proposons de montrer tout d'abord les difficultés qu'on rencontre dans la création d'une pareille entreprise, les soins qu'exige la mise en œuvre et l'importance des capitaux qui doivent y être engagés. III CHOIX d'un GISEMENT La condition essentielle au développement d'une carrière est que le gisement de pierre soit de toute première qualité. Il faut que la clientèle ne puisse hésiter entre les produits médiocres qu'elle peut trouver sur place , à bon marché , et les pro- duits fatalement plus chers que lui offre une grande exploitation, placée à une certaine distance. Le développement d'une carrière dépend ensuite de sa position géographique : la valeur marchande des matériaux étant relative- ment failjle, les produits des carrières ne peuvent supporter ni les longs transports, ni les transbordements répétés. Enfin, le gisement doit être d'une exploitation facile. La carrière idéale est celle où tous les produits peuvent descendre par leur propre poids et pour ainsi dire automatiquement du lieu d'extraction jusqu'au lieu d'expédition. Nous prendrons, par exemple, les carrières de grès quartzites ouvertes à Pléhérel, par M. Barrier, en 1887 (fig. i). Le gisement était situé sur le bord de la Manche, près du cap Fréhel. Les bancs qui apparaissaient sur la côte ont été retrouvés par une fouille faite sur le sommet du plateau et la pierre, utilisable 23o GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION pour la fabrication des pavés et du macadam, a été reconnue pour être d'une qualité exceptionnelle. :>^^:--:^.-\ ■ •■■■wr h *. ■jc\ •*1^' ,■%■■• FiG. I. — Port Barrier. Carrières de Pléhérel (Côtes du Nord). Les produits pouvaient être expédiés par mer sur les ports fran- çais et anglais, le voisinage de Saint-Malo permettait de desservir Paris, après transbordement sur ^vagon. Les bancs , d'une puissance illimitée , étaient inclinés vers la mer et semblaient d'une exploitation facile à tous égards. De telles considérations permettaient de bien augurer de l'avenir de la nouvelle exploitation ; mais nous vei'rons, par la suite, au prix de quels efforts le but a pu être atteint. IV OUVERTURE d'uNE CARRIERE 1° Premier Établissement. — Lorsque les points d'attaque sont déterminés , il faut attirer et maintenir dans le i^ays une population ouvrière : d'où la nécessité de construire , dès le début , les maisons des ouvriers, les forges, les bureaux. PRIEUR. — SUR l'industrie DES CARRIÈRES 23 1 Aussitôt que la carrière est ouverte . il faut se préoccuper d'ins- taller les voies, les appareils de manutention, les quais d'embarque- ment : d'où la nécessité d'acheter au plus vite le matériel et l'outil- lage. ..^r^-:> -_ FiG. 2. — Le matériel monorail. Les dépenses qui constituent le « Premier Etablissement » sont considérables; pour n'en citer qu'un exemple, nous avons relevé sur le l)ilan d'une Société exploitant sept grandes carrières et quelques petites que la valeur, en 1902, de ses immeubles, voies, machines fixes, locomotives, chevaux, wagonnets, appareils de levage, bateaux, etc., s'élevait à 2.800.000 francs. 1" Découverts. — Lorsque les premières voies sont installées, on peut passer à l'attaque du front de carrière ; mais , pour atteindre les bancs exploitables, il faut procéder préalablement à l'enlèvement de la couche de terre végétale et à l'extraction des bancs fileux ou de qualité inférieure. Les travaux qu'on nomme « Découverts » pré- cèdent toute espèce de fabrication et sont plus ou moins coûteux. Il 232 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION y a même des cas où Ton se trouve clans la nécessité d'abandonner complètement l'attaque sur certains points. Le choix de l'emplacement où doivent être mis en dépôt les déblais provenant des découverts et , plus tard , des déchets de la fabrica- tion, est une des questions les plus délicates. Il arrive trop souvent qu'au bout d'un certain nombre d'années on se heurte à d'anciens remblais; il faut alors, pour continuer l'exploitation, remuer de nouveau des masses de terre considérables. 3° Aménagements. — Lorsque les découverts sont terminés, la fabrication commence ; mais l'ère des dépenses improductives est loin d'être close ; il faut progressivement mettre la carrière en état de faire face à une production importante ; les travaux par lesquels on prépare ainsi l'avenir de la carrière sont appelés « aménage- ments ». Pour juger de l'importance de ces travaux, il est utile de connaître l'économie générale d'une carrière. Nous distinsruerons dans la fabri- cation quatre phrases : l'extraction , le cassage ou la taille , le triage et l'expédition. Étant donné que l'extraction est continue, tandis que l'expédition est intermittente . il est nécessaire d'avoir entre la montagne et le port d'embarquement des réservoirs ou dépôts. Entre le chantier d'extraction et le chantier de cassage ou de taille prend place le dépôt de matériaux bruts et. avant et après le triage, sont installés les dépôts do matériaux fabriques. On peut imaginer une voie de circulation constituée par une série de pentes ou de plans inclinés et reliant tous ces chantiers et ces dépôts dans l'ordre que nous avons indiqué. En outre, le chantier d'extraction est relié à la décharge et iiii embranchement doit être dirigé sur les magasins, les forges et les ateliers de réparation. Il n'est pas possible d'installer en un jour tous ces chantiers, ces dépôts et les voies qui les relient entre eux. Les plates-formes des chantiers et des dépôts sont gagnées peu à peu sur le front de car- rière ou sur les remblais de décharges. C'est donc là une œuvre de longue haleine et il faut des années d'efforts et de travail }>our amé- nager convenablement une carrière. Les travaux de découverts et d'aménagements ])euvent être [)lus ou moins coûteux, mais sont toujours importants. Nous connaissons plusieurs carrières où ces dépenses atteignent au moins i5o.ooo fr. PRIEUR. — SUR l'industrie DES CARRIÈRES 233 V LA QUESTION OUVRIERE I" Proportion de la main cV œuvre. — Découverts, aménagements, extraction, cassagc, taille, manutentions diverses, expéditions, tout sur carrières est main-d'œuvre. La main-d'œuvre joue donc un rôle i^répondérant dans l'exploita- tion des carrières et, quand nous aurons dit que les dépenses corres- pondantes peuvent être évaluées à 80 0/0 des dépenses totales , nous am'ons par cela même fait ressortir combien la question ouvrière préoccupe à juste titre les carriers. FiG. 3. — Carrière de Port-Blanc. — Erquy (Côtes du Nord), 1" Recrutement des ouvriers. — Lorsqu'une carrière est ouverte dans un pays, il est bien rare qu'on trouve sur place la population ouvrière dont on a besoin; au contraire, on se heurte [fréquemment à l'aiiiniosité dun milieu agricole qui est rebelle aux idées indus- trielles. Aussi est-il souvent nécessaire , dans les débuts d'une exploitation, 234 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION cV aller chercher les premiers ouvriers dans des centres cari'iers éloi- gnés. A Pléhérel, à Clierbourg, on a fait venir des Bretons, des- Belges, des Anglais, et même des Italiens. Le premier personnel est particulièrement instable et nous nous souvenons de colonies entières, qui étaient amenées à grands frais et disparaissaient moins de i5 jours après leur arrivée. Ces efforts ne sont pourtant pas inutiles, car la présence des éléments étrangers fait naître un sentiment nouveau chez les habitants du pays; ceux-ci ne tardent pas à sentir qu'en laissant pénétrer les étrangers chez eux . ils s'étaient frustrés eux-mêmes d'un gain auquel ils avaient droit les premiers: peu à peu. ils ont pris l'habitude de travailler aux carrières et v sont restés à cause des avantages nom- breux qu'ils y trouvent : L'ouvrier carrier a un métier sain et rémunérateur; les chances d'accidents graves sont heureusement très faibles ; les chômages n'existent pas là où l'exploitant dispose de capitaux suffisants pour constituer des stocks importants pendant les périodes de non activité. Enfin, dans la majeure partie des carrières, l'ouvrier jouit d'une liberté presque complète. Par exemple, dans les carrières à pavés, les extracteurs sont associés par groupes pour exploiter un chantier déterminé; ils s'en- tendent à leur gré avec des tailleurs, lesquels sont parfois aidés d'ai)prentis ; la direction n'intervient que pour recevoir les pavés terminés et pour distribuer à chacun la somme qui lui est due. Les ouvriers sont logés gratuitement et disposent souvent d'un jardin; les carrières étant généralement assez loin des centres, l'alimentation est à bon marché. Nous connaissons une Société qui avait fait construire et administrait une boulangerie, une boucherie,, une charcuterie et une épicerie; aujourd'hui, ces locaux sont mis à la disposition d'une Société Coopérative fondée et administrée par les ouvriers eux-mêmes. Dans ces conditions, l'ouvrier se fixe petit à petit au sol, y fonde un intérieur et une famille, les ouvriers passagers, si justement appelés les hirondelles de chantier, disparaissent pour faire place à une population attachée au sol et dont la descendance augmente chaque année le nombre. On peut voir à Pléhérel une population de 7 à 800 lîersonnes, là où il y a une dizaine d'années il n'existait que 2 ou 3 pauvres habitations. PRIEUR. — SUR l'iNDUSTRIE'^DES CARRIÈRES 235 VI CONCLUSION Cette courte étude ne peut donner qu'une idée bien imparfaite d'une exploitation de carrières. L'organisation de chaque exploita- tion varie d'ailleurs beaucoup avec la disposition des bancs, avec l'espace dont on dispose pour installer les plates-formes des chantiers et dépôts , avec la nature des matériaux fabriqués , avec l'importance de la production. Il n y a pas deux carrières qui puissent être adminis- trées exactement de la même fiiçon. On ne peut donc pas formuler de règles générales; chaque carrière se présente sous un aspect particulier et c'est la raison, le bon sens et la pratique qui doivent principalement guider le carrier. Ces diflicultés du métier et l'importance des capitaux à engager dans une semblable allaire ne sont pas de nature à encoui*ager cette industrie. Ajoutons à cela que les produits des carrières ne sont encore pro- tégés que par un droit de douane insuffisant. Il en résulte que, à inesure que les communications sont devenues plus faciles , certaines exploitations étrangères, puissamment outillées et protégées, ont réussi à ruiner les carriers français voisins des frontières ; favorisés par les Administrations publiques , ces étrangers font pénétrer leurs produits jusqu'au cœur de la France. Quelques parlementaires, justement émus, ont déposé un projet de loi sur le relèvement du droit de douane, et il faut espérer que leur appel sera entendu; car, s'il est vrai que le poids de cette pro- tection doit être supporté principalement par l'Etat, il est juste d'ajouter que l'argent des contribuables sera employé à faire vivre une classe d'ouvriers français particulièrement intéressante et qu'il rentrera dans les caisses de l'État sous une autre forme; au con- traire, dans les conditions actuelles, l'État français subventionne une industrie étrangère déjà trop puissante et l'argent dépensé est perdu sans ressources. 236 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATIOX M. mVET Ingénieur des Arls et Manufactures, à Luxé (Charcnle) POULIES EXTENSIBLES SYSTÈME FOUILLARON [53i.84] — Séance du S août Étant donné un moteur de puissance et de vitesse invariables, utiliser complètement son travail constant sur des résistances variables , tel est le problème qui se présente souvent en industrie , et toujours dans l'automobilisme, surtout lorsqu'on emploie un moteur à explosion. Soit T le travail constant fourni par l'arbre du moteur, si la résis- tance de l'arbre conduit est R , il faudra amener la vitesse V de cet arbre à une valeur telle que l'on ait : RV = T. Si R varie, il faudra, pour que T soit constant, faire varier la vitesse Y en raison invei^se de la résistance, et cela d'une façon continue, si la variation de résis- tance est progressive. On a cherclié à résoudre le problème par différents moyens, soit en donnant au moteur à explosions une certaine élasticité par diverses proportions dans les mélanges détonants, soit par des varia- tions de compression : ces résultats sont atteints, soit au régulateur, soit à la main ; mais la puissance de ces moteurs ne varie que dans des limites étroites et les différences ne sont obtenues qu'aux dépens d'une utilisation défectueuse de la clialeur et avec excès de dépense. C'est T qu'on fait varier, s'éloignant ainsi du régime qui permet d'obtenir du moteur le maximum de puissance avec la moindre dépense; aussi vaut-il mieux, toutes les fois que cela est possible, conserver T constant et faire varier R et V. Pour arriver à ce résultat, on a introduit dans les engrenages de transmission des automobiles diverses proportions au nondjre maxi- mum de quatre. Pour passer d'une vitesse à l'autre, il faut débrayer 1? moteur et. malgré la vitesse acquise, le changement est brusque NIVET. — POULIES EXTENSIBLES SYSTÈME FOLILLARON 287 loi'squ'on vient l'embrayer à nouveau. Ces quatre positions ne cor- respondent d'ailleurs qu'à quatre cas particuliers du problème, et l'on aura toujours, en dehors de ces quatre cas : RV < T, sous peine de ralentissement et d'arrêt; le travail du moteur, toujours en excès, se transformera en trépidations désagréables, chaleur, dépense et usure rapide des divers organes de la machine. Souvent le rapport de vitesses qu'on est forcé d'adopter est très éloigné de celui qui conviendrait à la bonne marche du moteur : par exemple, si. au lieu de la vitesse de 5o kilomètres, trop forte pour une rampe, il fallait obtenir celle de 4^ kilomètres, tandis que l'on n'a à sa disposition qu'une vitesse de 3o kilomètres, on perd la force superflue qui ne donnera que 3o kilomètres, tandis que la même force en devrait produire 48, et aussi la différence de temps très appréciable entre la marche à 3o kiloin. et celle à 4^ kilom. Dans l'industrie, lorsque la vitesse des appareils conduits est indif- férente, on peut conserver une puissance constante, soit aux machines à vapeur, soit aux moteurs hydrauliques, soit surtout aux dynamos, en changeant, par régulation automatique, la vitesse de l'arbre com- mandé. Le régulateur agit alors en déplaçant une courroie parallèle- ment à elle-même entre deux cônes, à axes parallèles et d'égale inclinaison, placés l'un en prise avec l'arbre moteur, l'autre sur l'arbre conduit et en sens contraires. La courroie est ainsi tendue également dans toutes les positions; la somme des circonférences parcourues sui' les deux cônes est toujours égale et constante, l'une augmentant d'une quantité égale à celle dont l'autre diminue. Avec cette disposition , on peut faire varier graduellement le rapport entre la vitesse constante de l'arbre moteur et les vitesses succes- sives de l'arbre conduit, dans des limites très étendues. Mais, pour que la courroie tienne sur ces surfaces inclinées, il faut que les angles au sommet des cônes soient assez faibles pour que la courroie ne puisse se déplacer sans augmenter de longueur; ce n'est qu'à cette condition qu'elle restera dans la position qu'on lui aura donnée. Il faut alors des cônes très longs, afin d'obtenir des écarts suffisants dans les rapports des vitesses. Aussi l'encombrement produit par cette longueur semlilait devoir rendre impossil^le cette disposition dans les automobiles. M. Fouillaron est parvenu à l'appliquer à ses voitures, grâce à son système de poulies extensibles : il emploie deux cônes fixes inclinés à 3o" sur l'axe, placés en sens contraires, et en face l'un de 238 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION l'autre, le premier sur larbre moteur, le second sur l'arbre conduit. Ces deux arbres^sont parallèles (fig. i)- o 3 O P^ ■n tn 'S 9 o L'entraînement est fait par une courroie triangulaire (fig. 2), dont le guidage est obtenu par deux cônes mobiles, A et B. opposés MVET. POULIES EXTENSIBLES SYSTEME FOUILLARON 289 parle soininet aux cônes fixes, et qui. par des vides laissés entre les génératrices, peuvent pénétrer dans les cônes fixes. Chaque cône, tant fixe ({ue mobile , est formé de lamelles partant du sommet pour rejoindre la base, laissant entre elles des vides dans lesquels viennent s'engager les lamelles du cône opposé. Ces cônes peuvent ainsi pénétrer l'un dans l'autre, formant une gorge angulaire d'angle toujours égal (60°) et de diamètres qui augmentent lorsque les som- mets s'éloignent et diminuent lorsqu'ils se rapprochent. Les cônes mobiles A et B sont liés entre eux par deux leviers ST et UY et la bielle TR. Ces leviers sont disposés de telle façon que, lorsque l'un d'eux éloigne du cône fixe le cône mobile qu'il dirige, diminuant ainsi la circonférence d'intersection dune certaine quan- tité, l'autre augmente d'égale cfuantité l'intersection du second jeu de cônes. Un écrou V, guidé par une vis, dont l'arbre est à la dispo- sition du mécanicien, peut faire varier à chaque instant la position de ces cônes. On a ainsi deux poulies à gorge, conjuguées, de diamètres va- riables : telles sont les poulies extensibles de M. Fouillaron. Les f apports extrêmes des vitesses sont , entre chacun des deux arbres , de i à 5 , ce qui permet un écart de vitesses inverses de i à 25. Le minimum de la vitesse est de 6 kil. à l'heure et le maximum de 5o à 100 kil. suivant la force du moteur. La courroie qui transmettra le mouvement devra s'inscrire dans l'angle à 60" fourni par les génératrices des cônes. Cette courroie est formée par une série d'éléments triangulaires en cuir, sortes de voussoirs, qui viennent épouser la forme circulaire des gorges et se redressent dans les lignes droites : ces éléments sont reliés par deux cordes à boyaux très résistantes (fig. 2). FlG. 2. 2^0 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION La forme donnée à chaque voussoir permet cVol)tenii' facilement la courbure et le redressement. M. Fouillaron appelle cet orfçane une cliaine-courroie. Le sommet des triangles qui s'insère entre les cônes est chanfreiné pour que les éléments de la chaîne ainsi cons- tituée pénèti'ent comme des coins dans la gorge des poulies : la courroie est toujours tendue par le jeu d'un ressort R, placé sur la bielle RT , et qui agit de façon à éloigner les sommets des cônes de l'arbre conduit, augmentant ainsi le diamètre de la poulie conduite dans les limites permises par la longueur de la courroie : il en résulte que cette courroie est appliquée fortement sur les gorges, ce qui évite les glissements. De petites nervures, peu saillantes, embouties sur les lamelles des cônes , tant fixes que mobiles , s'opposent aussi au glissement de la chaîne-courroie sans la déformer, les éléments de cette chaîne étant très mobiles les uns par rapport aux autres. Aussi cette courroie ne glisse pas même lorsque l'on produit l'arrêt en rampe, en négligeant de donner aux rapports des poulies la valeur convenable pour franchir l'obstacle. Cette chaîne est fermée par une agrafe qui permet un montage et un démontage rapides. Elle est essayée à la traction jusqu'à 1.800 kilo- grammes : la tension maximum en marche ne dépasse pas le ving- tième de cet effort. Ces courroies font jusqu'à 7.000 kilomètres sans réparation. Telles sont les dispositions du mode de transmission par poulies extensibles de M. Fouillaron. Quels en sont les avantages au point de vue des voitures auto- mobiles? Il est facile de se rendre compte que cette transmission produira des démarrages aussi doux que le voudra le mécanicien : au dé})art . les poulies, qui sont restées dans la position respective qui a contri- bué à la douceur du précédent arrêt, donneront une vitesse minimum de 6 kilomètres, que le conducteur augmentera jusqu'au moment où il aura obtenu l'allure qui conviendi*a au moteur, en passant gra- duellement par toutes les vitesses intermédiaires. Il évitera ces à-coups de changements brusques . qui sont si désagréables pour les voyageurs et si nuisibles aux bandages et à tous les organes de la machine (*). (*) Une voiture à poulies extensibles Fouillaron a participé à Tcxcursion du ç) août , conduisant le président et le sccrétairi' des '3' et 4" sections, ainsi que leurs dames. Les avantaffes du système ont été appréciés , non seulement par les voj'ageurs et voya- g-euses qui montaient cette voiture, mais par tous les cong^ressiles qui ont pu, à cliaque escale , en visiter le mécanisme ingénieux. NIVET. — POULIES EXTENSIBLES SYSTEME FOUILLARON 241 Le Châssis Fouillaron vu par dessous. A, poulie extensible réceptrice. — B, poulie^extensible de commande. — C, embrayage. — D, dilfércntiel et poulie de frein au pied. — E, silencieux. — FF, tambours de freins arrière. — G, volants de direction et de manœuvre. — P, pig-non de chaine — PQ, pig-non] de chaine avec débrayage pour la marche arriére. — R , Réservoir. — S et T, pédales de manœuvre et de freinage. FiG. 3. En maintenant le régime qui convient à son moteur, le mécanicien Xiourra, en l'oute libre, l'oreille indiquant le ralentissement ou Texcès de vitesse des pistons , trouver les rapports des poulies appropriés aux résistances. Il obéii'a à son moteur, au lieu de lui imposer des 16* 242 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION allures pour lesquelles il n'est pas fait. Il obtiendra ainsi l'équilibre entre les résistances variables et la puissance constante, et cette régularité se traduira par une économie d'essence qui peut être évaluée à i5 0/0, par comparaison avec tous autres systèmes. Avant l'arrêt, il ralentira progressivement, sans à-coups égale- ment et sans glissements, même sans se servir du frein. Avec ce système, le freinage, même en marche, ne sera que rarement employé, au grand bénéfice des bandages qui peuvent faire, sur les voitures Fouillaron, de 6.000 à 10,000 kilomètres. Enfin, le mécanisme devient très simple : au lieu de débrayer, changer la vitesse, embrayer, et régler un moteur, qui n'est jamais en équilibre, comme dans les voitures à engrenage, avec une seule manette, qu'un enfant peut manœuvrer, le mécanicien pro- duira graduellement tous les changements de vitesse. Cette simplicité laisse au conducteur une grande liberté d'esprit et de mouvements ; elle lui permet de jouir des agréments de la route sans avoir à se préoccuper continuellement des nombreuses manettes et pédales qui ornent les voitures à engrenages multiples. L'industrie commence à apprécier les avantages que présente le peu d'encombrement des poulies extensibles Fouillaron. L'adminis- tration de la guerre les emploie pour des machines outils, La figure 3 et la légende ci-dessus indiquent la disposition des. poulies extensibles dans le châssis d'une voiture Fouillaron. Dans d'autres modèles, les chaînes sont supprimées et la commande de l'arbre conduit est faite directement par engrenages. M. L. DUPLAN Directeur de la Compagnie d'Électricité d'Angers LA DISTRIBUTION ÉLECTRIQUE A ANGERS [538.83]: — Séance du lo août — L'usine génératrice est située à i.ioo mètres environ du centre de la ville, dans le quartier dit des « Prairies Saint-Serge ». Entre deux boulevards, dont l'un la sépare de la rivière « La Maine », l'autre delà gare Saint-Serge, l'usine se trouve dans une situation très avantageuse pour ses besoins d'eau et de charbon. L. DUPLAN. — I,A DISTRIBUTION ÉLECTUIQUE A ANGEIIS 243 Dans les prairies Saint-Serge on trouve , à douze mètres de pro- fondeur, un sol surtisant aux fondations d'une usine. Pour éviter les dépenses relativement considérables d'une construction sui* pilotis , on a établi celle de l'usine d'électricité sur un remblai en sable de Loire de quatre mètres environ de hauteur. La superstructure des bâtiments, au moins dans les parties essentielles, a été constituée par une ossature en ciment armé , disposée avec des ceintures hori- zontales, afin d'obtenir pratiquement sur les bases une répartition uniforme des charges et pour prévoir, sans inconvénient sérieux, la possibilité d'un tassement api>réciable. Les prévisions relatives aux bâtiments se sont réalisées. Lors de la mise en service des machines , on a constaté cependant un mou- vement de tangage très sensible dans les parties supérieures. Ce tangage a disparu après quelques détails de mise au [xiint, pour donner aux organes des machines en mouvement un équililu-e par- fait. Les génératrices sont à courant continu; elles alimentent directe- ment les fils extrêmes de la distribution qui est à 3 fils, 220 volts entre le fil neutre et le fil extrême de chacun des deux ponts. Le défaut d'équilibre du réseau, c'est-à-dire la différence de la consommation entre les deux ponts, est compensé : soit par un groupe de deux dynamos, dont l'une remplit le rôle de génératrice, lorsque l'autre remplit celui de réceptrice, soit par une batterie d'accumulateurs qui peut, en outre, assurer le service total aux heures de faible consommation et faciliter encore pendant le fonc- tionnement des machines une plus grande régularité de tension. Les deux dynamos du groupe équilibreur sont actuellement en cours d'installation ; elles commanderont un survolteur spécial pour la charge des éléments d'accumulateurs de réglage, hors circuit lors du fonctionnement des machines. L'ensemble de ce dispositif assurera aux génératrices princiiiales , comme aux éléments du groupe équilibreur survolteur, un ré"-ime de travail économique, fort appréciable au début d'une installation. — Il permet, en elfet, d'ajouter à volonté à la consommation utile tout ou partie de la charge des accumulateurs. Le réseau de distribution intéresse , à quelques dérivations près, le périmètre limité par les boulevards extérieurs de la ville ; il est en principe constitué par des câbles du système dit armé , jilacés directement dans le sol. Ce périmètre total est divisé en six secteurs de même importance électrique , choisis de façon à diminuer , autant que possible , la dis- 244 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION tance entre les centres de consommation de chacun d'eux , ce qui a permis , en plaçant les feeders sous le sol , dans la même tranchée , sur une grande partie de leur parcours , de réaliser une économie et de compter sur une meilleure utilisation du cuivre des feeders , en disposant à l'extrémité du parcours commun une boîte de jonc- tion spéciale pour leur mise en quantité. Les feeders ou câbles d'artère reliant l'usine au centre de chaque secteur sont à deux conducteurs concentriques, alors que très géné- ralement ces câbles sont à trois conducteurs, les deux extrêmes et le neutre ou intermédiaire. En'ne disposant pas dans chaque câble d'artère un intermédiaire, mais en faisant partir un seul câble neutre principal venant se rami- fier au centre de chacun des secteurs , il apparaît qu'on a compris le neutre d'une façon logique au point de vue du bon équilibre et de l'économie du cuivre. En effet, le défaut d'équilil>re total du réseau provient de la somme algébrique des défauts d'équilibre de chaque secteur. Les courants difTérentiels de chacun d'eux auraient donc à revenir tous à l'usine, le long du neutre de leurs feeders respectifs . pour y faire entre eux la compensation partielle résultant de leurs différences de sens. Ce long trajet occasionnerait une perte de charge très notable. Or, en employant le système du neutre ramifié , comme il a été exposé plus haut , on évite le retour à l'usine de la somme de tous les courants de compensation. Tout ce qui peut s'équilibrer le fait en route, en passant aux points de bifurcation des différentes branches du neutre ; il ne revient à l'usine que la diiférence finale des courants de compensation, c'est- à-dire celle seule à laquelle ont à parer les dispositifs de compensa- tion. Une section de cuivre beaucoup moindre sur le long parcours commun est alors aussi eflicace que beaucoup plus de cuivre dans les feeders sous forme de neutre isolé. Cette façon de comprendre le neutre . appliquée au réseau de dis- tribution de la ville d'Angers, a été réalisée par l'installation d'un câble compensateur unique, sur i.ooo mètres environ, et par une ramification d'une longueur moyenne de 200 mètres à cliaque artère pour une longueur totale de 8.000 mètres environ de feeders. Si par hypothèse on admet , sur chaque artère . une charge movenne de 100 ampères pendant les heures d'éclairage et un défaut d'équilibre entre les deux ponts de 20 0/0, comme du reste l'expé- rience le confirme, on trouve x^our ce défaut d'équilibre une perte CUENOT. — DEFORMATION DES TRAVERSES DE CHEMINS DE FER 245 correspondante à un courant de 20 ampères sur 1.200 mètres pour les ramifications et, en plus, sur une longueur de i.ooo mètres, la différence finale des courants de compensation qu'il est logique d'estimer également à 20 ampères; soit, au total, 20 ampères sur 2.200 mètres. Cette perte de 20 ampères serait sur 8.000 mètres, ou, en chiffres ronds, sur une longueur quatre fois plus grande, pour le cas d'un neutre spécial à chaque artère. Les câbles de distribution sur lesquels sont reliés les branche- ments des consommateurs forment ceinture autour des centres où aboutissent les feeders. Ces ceintures empruntent les voies principales et l'intérieur des périmètres partiels ainsi constitués est traversée, au fur et à mesure des demandes de courant, par de nouveaux câbles qui empruntent les rues transversales , reliant ainsi les points opposés de la cein- ture. Ces câbles maintiennent pratiquement la perte de charge cons- tante. Le réseau augmente en même temps que la consommation et on évite en partie de cette façon l'immobilisation d'une canalisation d'attente correspondante à des prévisions futures. On arrive avec un équilibre général de tension aussi uniforme que possible , une utilisation maximum du cuivre employé aux canalisa- tions électriques. M. CUENOT Ingénieur des Ponts-et-Chaussées, à Lyon RECHERCHE DE LA COURBE DE DÉFORMATION DES TRAVERSES DE CHEMINS DE FER [625.1:4-39.4] — Séance du ii août — On a admis jusqu'à présent, sans donner à ce sujet aucune preuve, que les traverses sur lesquelles sont posées les voies de chemin de fer, reposent sur toute leur longueur, lorsqu'elles sont chargées, c'est-à-dire lorsqu'elles reçoivent par l'intermédiaire des rails la charge des véhicules. 246 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION On en a déduit : 1° Que plus la traverse était longue , plus elle était apte à assurer la stabilité de la voie en raison de la répartition de la pression sur •tout son lit de pose ; 2° Que la traverse fléchissant, la pression transmise à l'assiette de la voie était en chaque point proportionnelle à son enfoncement, dans le ballast considéré comme élastique ; 3'^ Qu'en conséquence le ballast était susceptible de s'enfoncer de I centimètre sous une pression variant de 3 kilogr. à 8 kilogr. par centimètre carré; 3 kilogr. s'appliquent à un mauvais l^allast et à un sous-sol peu résistant et 8 kilogr. à l'assiette la plus solide. Aussi, dans cet ordre d'idée, les Ingénieurs de toute nationalité ont-ils préconisé dans les divers Congrès de Chemins de fer l'adop- tion dune traverse ayant au moins 2 m. 5o de longueur minimum. Les Allemands et les Anglais ont même proposé l'emploi de traverses de 2 m. 70 de longueur, qui sont en usage dans leur pays. L'étude d'une traverse mixte (fer et bois) m'a permis d'examiner de nouveau la question et de voir dans quelle mesure les théories admises jusqu'à ce jour étaient d'accord avec les faits. Cette traverse, constituée par une carcasse métallique en forme de fer Zorès et par des tasseaux en bois placés à o m. 35 de part et d'autre de l'axe du rail et coincés dans la dite carcasse de manière à obtenir un tout solidaire, permettait, en effet, d'analyser les mouve- ments de la voie d'une façon spéciale et sans qu'aucun élément étranger vînt troubler les résultats de cette étude. La carcasse métallique était une entretoise, réunissant les tasseaux en bois, sur lesquels s'exerçaient les pressions dues aux charges et qui leur étaient transmises par les rails au moyen d'une selle. Le ballast ne recevait que la pression qui lui était apportée par les tasseaux, la carcasse métallique n'ayant pas de ballast à son intérieur entre ces deux derniers. Les expériences faites ont eu pour Init de relever la flexion des traverses en bois et par comparaison des traverses mixtes placées en courbe de 600 mètres de rayon, sur la voie 2 très fréquentée de la ligne de Bourg à Saint-Amour. Elles ont été réalisées à deux éi)oques diflerentes , aux mois de mai et de juin derniers, après des périodes de [>luies assez longues, la première étant cependant plus importante que la seconde. Le l)allast était de mauvaise qualité et constitué par du gravier très argileux, sur lequel l'humidité avait [>ar conséquent une grande influence. La partie de l'assiette de la voie située du côté du petit rayon était par- CUENOT. — DEFORMATION DES TRAVERSES DE CHEMINS DE FER 247 .-/, 5o. ^- 0.60 . -V ticulièrement mouillée, en raison du dévers de o m. o83 donné à la voie et du profil de cette dernière (à Textrémité d'une pente sur 2 kilomètres environ). Néanmoins lés coui'bes relevées ont toutes la même physionomie, aussi bien sur les traverses en ^ ^^ bois que sur les traverses mixtes ; il y a cependant une ! déformation moindre dans la seconde série des expériences 1 , . , . FiG. I. — Déformation de la traverse en bois. que dans la première, en rai- son de l'état de l'humidité de l'assiette de la voie. La courbe de déformation de la traverse en bois présentait toujours les caractéristiques suivantes : 1° A partir des extrémités, sur o m. 70 enviz'on, partie fortement inclinée ; 2" Au-delà, en allant vers le centre, partie légèrement inclinée et présentant sa convexité vers le haut. La traverse a fléchi et cette flexion se traduit ainsi : i'"^ Série d'expérience : 2^ Série d'expérience : COTE COTES COTE du des à i3 cent. MILIEU POINTS EXTÉRIEURS INTÉRIEUR DU RAIL 2°'°'72 o°"°63 o^^So 2°'°'57 3°""02 2'°°'5l o°"°62 o°"°78 a-'-SS 2°""92 -IjfO o Si) La déformation de la traverse mixte est caractérisée par une ligne brisée très voisine de la droite. Il y a donc enfoncement mais presque pas de flexion, à peine o"''"3 au maximum, c'est-à-dire neuf fois moins que n'en présente la traverse o,3s en bois. Ces courbes ont été relevées au \ moyen d'une règle en acier munie de dents placées à des intervalles bien définies et contre lesquelles on FiG. 2. — Déformation de la traverse mixte. (i) La ligne supérieure représente la traverse non chargée ; la ligne inférieure la tra- verse supportant une charge. 248 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION introduisait un coin en acier gradué au dixième de millimètre. Deux lectm-es se faisaient en chaque point, la traverse étant au repos et deux autres la traverse étant chargée. L'inspection de ces courbes m'a prouvé : 1° Que la grande flexion des traverses en bois était due à leur longueur, puisque la traverse mixte, munie de simples tasseaux de o m. 'jO de longueur seulement, n'éprouve aucune flexion seml^lable ; 2° Que la traverse en bois ne devait pas reposer sur sa partie centrale dans tous les cas , puisque le ballast élastique déplacé par les tasseaux de la traverse mixte ne correspond qu'à une faible por- tion de celui qui semble être également déplacé par la traverse en bois, et qu'il suffit de limiter cette portion à la longueiu' du bourrage (environ o m. 70) pour obtenir l'équivalence entre les cubes dépla- cés par chacune des deux traverses. J'ai vérifié expérimentalement ces deux déductions : a) J'ai pris une traverse paraissant porter en son milieu : je l'ai fait charger dans son état actuel, puis je l'ai fait dégarnir en son milieu, laissant un vide central comme celui des traverses mixtes. Les deux courbes de déformation ont la même forme , le point central est au même niveau dans les deux cas à ©'"'"i près. Une légère aug- mentation d'enfoncement peut être attribuée au léger affaissement du bourrage coupé verticalement. b) J'ai enlevé le bourrage des extrémités et fait dégarnir le milieu de deux autres traverses de longueur et de section différentes. La flexion a diminué d'une manière très sensible, principalement, comme je l'avais prévu, sur celle présentant le plus fort équar- rissage. J'en déduis donc qu'une traverse doit avoir une longueur réduite, mais aussi une largeur plus grande que celle actuellement en usage ; autrement dit , il faut concentrer la matière autour des appuis et non pas l'étendre comme cela a été fait jusqu'à présent. Mais l'examen des courbes de déformation des traverses en bois montre qu'elle est toujours semblalile à elle-même; elle est comme un fond de bateau dont le centre serait légèrement relevé. Cette forme est bien celle qui résulte de l'analyse des phénomènes , c'est-à- dù^e qu'elle représente bien la figure d'une poutre élastique reposant sur une certaine longueur à partir de ses extrémités sur des appuis élastiques eux-mêmes, mais ayant une élasticité moindre. De même, j'estime que la déformation d'une traverse courte (environ 2 m. 10) est représentée par une courbe convexe comme ci-dessous : surtout si l'on pratique un bourrage dissymétrique, CH. DE MOCOMBLE. — ENGRENAGES A CAMES " DE GRISSON " 249 étendu vers le centre, puisque, dans û,3o 1 5o o 3o ce cas. le centre de pression doit se f-'-r- ' - ,^.'.~ trouver rapproché des extrémités. ' Il suffira alors de lui donner une lar- geur telle que l'on obtienne l'enfon- ^ ,. ^ FiG. 3. cernent limité que l'on désire. Il semble donc qu'on puisse trouver une longueur de traverse et de bourrage (quelle que soit la traverse) telle que la déformation ait lieu à peu près suivant une ligne droite. M. Gh. DE MOCOMBLE Ing-éniear-mécanicicn à Paris ENGRENAGES A CAMES " DE GRISSON " [621.83] — Séance du ii août — Le dispositif dont la description va suivre ne ressemble pas aux commandes par cames employées jusqu'à ce jour pour certains mécanismes de distribution ou dispositifs de commande de mouve- ments intermittents ou périodiques; le mouvement est ici, au contraire, d'une continuité et d'une régularité absolues. Ce nouvel engrenage se compose d'un arbre sur lequel est calée une double came dont le profil rappelle la courbe du colimaçon de Pascal et qui vient commander une roue à rouleaux E clavetée sur un arbre parallèle (fig. i et 2). Les deux cames A et B sont parallèles mais opposées , c'est-à-dire qu'elles sont orientées à 180" l'une par rapport à l'autre. La roue à rouleaux est double également et comporte, par suite, 3 toiles, sur lesquelles sont fixés, à distances égales et suivant une circonférence, les axes qui portent les rouleaux (Jjg'. 3). Dans l'exemple de la figure i , la circonférence a été divisée en 20 parties égales, et la roue E munie de 20 rouleaux disposés en échiquier et répartis par moitié sur chaque jante. Admettons que l'on imprime à l'arbre des cames une rotation de 25o GENIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION gauche à droite; la came A agira d'abord sur le rouleau rt, ensuite la came B viendra s'appliquer sur le rouleau b, plus tard, après une rotation de i8o°, la came A viendra se mettre en contact avec le rouleau c et ainsi de suite (Jig- i). +^^ FiG. I et 2. Le mouvement sera donc continu et le contact entre les cames et les rouleaux sans interruption. On comprendra facilement que, si la roue E comporte dans chaque plan lo rouleaux, le rapport de la transmission sera de i à lo. Nous verrons plus tard que ce rapport peut atteindre des valeurs beau- coup plus élevées. Lorsqu'on examine le fonctionnement de ce nouveau dispositif, on constate que tout y a été étudié en vue d'arriver à un roulement continu. Le rapport de la transmission est donné par celui des diamètres du moyeu de la roue à cames et de la roue E. CH. DE MOGOMBLE. — ENGRENAGES A CAMES DE GRISSON 25l Les cames sont tracées en partant de cette considération que tout doit se passer comme si les deux circonférences D et d roulaient librement l'une sur l'autre, c'est-à-dire que les chemins parcomnis par les deux circonférences doivent être égaux et que la normale en chaque point de contact de la came et du rouleau doit toujours passer par le point de tangence des cercles D et d. Ces deux conditions sont en effet nécessaires et suffisantes pour que le rapport des vitesses angulaires des deux roues reste invariable. Il ne faudrait pas assimiler ce nou- veau type d'engrenages aux anciennes roues à fuseaux ou aux dentures à point. Dans ces organes , la roue conduc- trice attaque toujours la roue con- duite au même point . phénomcno qui, joint au glissement des dents, amène une usure et \u\e modification rapides du profil. En outre dans ces roues, comme dans toutes les roues dentées, l'arc d'engrènement est forcément (assez limité et affecte toujours une forme assez tourmentée, en même temps que la nor- male aux différents points du profil fait avec la ligne des centimes des angles de plus en plus aigus, ce qui conduit à une augmentation de la pres- sion sur la denture pour cor- respondre à un effort tangen- tiel déterminé. Une des propriétés remar- quables du nouveau dispositif est de présenter une ligne d'engrènement de' forme nou- velle. Cette ligne prend, en effet, FiG. 3. FiG. 4. Epure de la ligne d'engjrènement pour un rapport de transmission de 5 : i. 2ii-2 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION la forme représentée par les figures 5 et 6; c'est une courbe présen- tant un point de rebroussenient à l'origine et qui , à peu de distance de ce point , affecte très sen- siblement le parcours d'une ligne droite m n. De plus , alors que pour le rapport de 5 : i . qui est le minimum compatible avec ce système, chaque branche prend une inclinaison a sur la ligne des centres, l'on constate que plus le rapport de la transmission augmente, plus l'angle se rapproche de (^o", ce qui est le desideratum à obtenir (\o\rjig. 4 <^t ^)- Enfin, il n'y a plus ici à craindre la pénétration des dents d'une roue dans l'autre aux extrémités de l'arc d'en- grènement; de plus, cet arc dengrènement pouvant être très développé sans inconvénient et les fuseaux étant disposés en échiquier , on conçoit que l'on puisse faci- lement assurer le contact de la seconde came avec un rouleau bien avant que la première came n'ait lâché prise. Ces diverses considérations permettent de comprendre pourquoi l'on a pu réahser des rapports de transmission très élevés même avec des vitesses angulaires très grandes. En dehors des nombreuses applications faites à l'étranger depuis deux années, il en a été fait déjà plusieurs en France par les soins de M. de Mocomble. concessionnaire des brevets de Grisson. Aux ateliers d'Hellemmes. de la Compagnie des Chemins de Fer du Nord, une machine-outils est munie d'un harnais présentant le rapport 12 : i qui transmet 2 chevaux à 1.200 tours. La maison Mollet-Fontaine a appliqué à une de ses pompes élec- triques un harnais (rapport 10:1) transmettant 5 chevaux à i.ooo tours. Enlin. une ap[>licati(>n i)lus probante encore a été faite aux acié- ries d'Isbergues (Pas-de-Calais) où deux treuils électriques de 20 chevaux sont commandés i)ar des dynamos tournant à 800 tours, qui actionnent directement larbre d'un tandjour tournant à 20 tours. FiG. 5. . Épure de la ligne d'engrènemcnt pour un rapport de transmission de 3o : i. CH. DE MOCOMBLE. — ENGRENAGES A CAMES " DE GRISSON " 253 Ici, le rapport de la transmission est de 32 : i. ^ Nous ne pensons j)as que l'on ait jamais x^u espérer de semblables résultats avec aucun des autres systèmes de roues dentées. Il existe encore bien d'autres avantages de ce dispositif; sans vouloir nous étendre trop longuement sur leur analyse, nous devons cependant signaler celui qui réside dans l'encombrement minimum qu'il présente. La raison en est facile à saisir; le pignon se trouve ici réduit à son minimum, puisqu'il n'a j^as de denture et que le rapport de la trans- mission est donné par celui des diamètres D et cl. Pour des rapports de i à lo, l'on arrive à un encombrement qui est environ 0,4 de celui que demanderait le harnais correspondant par roues dentées usuelles. Cette particularité n'est pas . comme on le voit . sans intérêt, i)rin- cipalement dans certaines applications où la solution est souvent imposée i)ar l'emplacement dont on dispose, tel que, par exemple, dans les automobiles. Le rendement organique de ce nouveau système de transmission a été l'objet de consciencieuses expériences au Conservatoire de Stuttgart par l'éminent professeur Bach. M. Bach a trouvé que, lorsque les rapports entre les diamètres des roues à rouleaux et la vitesse tangentielle étaient convenablement choisis, le rendement (la roue à cames étant conductrice de la roue à rouleaux) dépassait 0.90 et atteignait 0,95 à pleine charge, et cela pour des vitesses variant depuis 5oo tours jusqu'à i.3oo et même 1.400 tours. Bach eut l'idée de rechercher ensuite quel pouvait être le rende- ment des mêmes organes lorsque la roue à rouleaux devenait con- ductrice, c'est-à-dire lorsqu'au lieu d'un réducteur de vitesse Ion voulait transformer le système en accélérateur de vitesse. Il trouva que, dans les mêmes conditions du problème, ce ren- dement diminuait de 5 °/o environ et oscillait entre o.85 et 0,90. Ces derniers résultats ont conduit les inventeurs à tenter l'appli- cation des engrenages à cames à des roues hydrauliques à marche lente. C'est ainsi que l'on a pu commander des dynamos en partant de roues à augets tournant à 12 tours et même 4 tours. Actuellement M. de Mocomble étudie la commande d'une trans- mission à 3oo tours en partant d'une roue Sagebien tournant à un tour et demi. L'on voit donc qu'il y a réellement là un dispositif nouveau per- 254 GÉNIE CIVIL ET MILITAIRE, NAVIGATION mettant de réajiser d'une façon simple des px-oblèmes qui exigeaient jusqu'ici des combinaisons mécaniques coûteuses, encombrantes et com[>liquéi's. Nous pourrions citer d'autres exemples, notamment pour les omnibus et camions à vapeur, à pétrole et électriques par ti'olley, dont l'effort initial varie de 20 à 5o chevaux de force. Il paraît donc logique de croire que les applications, déjà mul- tiples, qui en ont été faites, augmenteront ra^iidement en noudn'e lorsque le système sera i)lus connu du monde industriel. . En effet, poui' tous les moteurs tournant à grande vitesse, tels que i)ar exemple les dynamos ou les moteurs à essence (type de Dion, Bouton et G'*"), et devant commander un organe à vitesse réduite, ces engrenages présentent indiscutablement la solution la plus simple et la meilleure. En même temps que leur emploi permet d'obtenir l'encombrement minimum, il assure un rendement en énergie supérieur à celui de toute autre transmission équivalente. Disons enfin que le fonctionnement de ces organes est aussi silen- cieux que celui de l'engrenage taillé le plus parfait et qu'au point de vue de la résistance ils présentent évidemment, en raison de leur construction même, une supériorité indiscutable sur tous les tracés antérieurs. Au point de vue de l'usage, ils ont donné toute satisfaction et présenté , après plusieurs mois de marche , des traces d'usure inap- préciables (*). En dehors des moteurs électriques et à essence , les engrenages à cames s'appliquent avec un égal succès, aux moteurs à vapeur à grande vitesse, aux transmissions souvent si compliquées de nom- breuses machines-outils, à la commande des pompes à mouvement alternatif dont la vitesse doit toujours être assez faible si l'on veut arriver au maxiuium d'effet utile et, enfin, à tous les appareils de levage pour lesquels ils présentent les qualités maîtresses de grande solidité et d'encombrement minimum. Tel qu'il est désormais, l'engrenage à cames est un mécanisme qui apparaît simple tout à la fois dans sa conception et sa fabrication ; il ne faudrait pas en conclui'e qu'il en fut ainsi dès le prime abord. C'est à la suite de longues et pénibles recherches, de tentatives noml)reuses et d'applications variées que l'on est arrivé à la solution d'un problème hérissé de dilUcultés pratiques, avec des résultats (*) Des liarnais, en loiu iioimcinciil continu (lci)iiis jilusiciirs mois, n'ont décelé qu'une usure de moins d'un denii-niillimèlre sur hi péripliérie des cames. CH. FABRY. — LA LUMIÈRE DU SOLEIL ET DES ÉTOILES 255 qui font le plus grand honneur à M. Grisson, l'ingénieur habile^et persévérant qui, pendant plusieurs années, s'est attaché à leur réahsation. Son système trouvera des applications dans l'industrie, la marine, les machines agricoles et les appareils domestiques, partout où le moteur à grande vitesse exige une réduction de grand rapport, ce qui sera très souvent obligatoire pour les cas précités. M. Charles FABRY Professeur à la Faculté des Sciences de ^Marseille COMPARAISON DE LA LUMIÈRE DU SOLEIL AVEC CELLE DES ÉTOILES RECHERCHES DE PHOTOMÈTRIE SOLAIRE ET STELLAIRE [585.322| — Séance du 5 août — Grâce aux travaux de plusieurs générations d'astronomes, nous avons maintenant des données numériques précises sur la compa- raison photométrique des étoiles entre elles. Il s'en faut de beaucoup que nos connaissances soient aussi exactes sur la lumière du soleil comparée à celle des étoiles. Certaines évaluations diffèrent dans le rapport de i à lo. Nos données actuelles sont également peu précises sur la compa- raison de la lumière du soleil ou des étoiles avec celle de nos sources artificielles, en particulier avec nos étalons photométriques. Pour la lumière du soleil . les évaluations sont extrèmemeiit discordantes. Pour les étoiles, je ne connais aucune tentative de comparaison di- recte, et le calcul, en partant de l'éclat du soleil, serait doublement incertain, puisqu'il introduirait l'intensité solaire et le rapport du soleil aux étoiles qui sont tous deux mal connus. La connaissance de ces diverses données numériques présente cependant un notable intérêt : Poui' les étoiles dont la parallaxe est connue, la connaissance du rapport de leur éclat apparent avec celui du soleil permet de calculer le rapport des intensités absolues de ces deux astres ; ce calcul est, jusqu'à présent, très incertain, à cause de l'incertitude sur les rap- ports photométriques. 256 PHYSIQUE La connaissance de l'éclat d'un astre en fonction d'un étalon plio- toinétrique bien déterminé n'est pas non plus sans intérêt. Ce nombi'C permet de relier l'unité photométrique des astronomes à celle des physiciens. Il est vrai qu'il dépend des conditions variables de l'ab- sorption atmosphérique; mais, à cause de cela, ces mesures permet- traient d'avoir des données numériques précises sur la transparence de l'atmosphère aux divers lieux et sur ses variations avec le temps. Enfin, spécialement appliquées au soleil et réi)étées pendant un temps assez long, elles permettraient sûrement de résoudre cette question importante : Le soleil est-il réellement une étoile cartable, au sens exact et précis de ce mot? Comme on le verra plus loin, les mesures de photouiétrie solaire, par couiparaison avec un étalon arti- ficiel, sont notablement plus précises que les comparaisons d'étoiles entre elles, et les difficultés dues à la variation de l'absorption atmos- phérique seraient très atténuées en opérant dans une station élevée. Dans ce qui va suivre, j'exposerai les méthodes que j'ai suivies pour résoudre ces divers problèmes et j'indiquerai les résultats numériques auxquels je suis parvenu ; ces résultats ne sont d'ailleurs . que provisoires, car ils ne sont basés que sur quelques mois d'obser- vation. Remarques swr les unités photométriqiies. — Les astronomes ont l'habitude d'exprimer l'éclat (*) d'un astre par un chifii-e appelé grandeur. Cette notion, simple indication vague au début, a fini par se préciser et prendre le sens suivant : La grandeur de deux étoiles diffère d'une unité lorsque le rapport des intensités lumineuses des deux astres (vus de la terre, cela va sans dire), est 2,5. Par défini- tion, les chilTres de grandeur les plus élevés correspondent aux étoiles les plus faibles. Si de plus on a choisi une certaine étoile et qu'on lui ait assigné une certaine grandeur (la grandeur i par exemple), les grandeurs de toutes les autres étoiles seront détermi- nées. Ces nombres sont naturellement indépendants de l'absorption atmosphérique, puisqu'une étoile donnée a une grandeur fixée une fois pour toutes. L'échelle des grandeurs est évidemment indéfinie dans les deux sens, les grandeurs positives les plus élevées correspondant aux astres les plus faibles, et les astres de plus en plus brillants étant mesurés par des chilYrcs négatifs de jilus en plus élevés en valeur (*) Ce mot, employé dans un tout autre sens par les physiciens, est complètement impropre dans le sens où je le prends ici, et qui est celui que lui donnent les astro- nomes. CH. FABRY. — LA LUMIERE DU SOLEIL ET DES ÉTOILES 267 absolue. C'est ainsi qu'Aldébaran est une étoile de grandeur i,o; Véga de grandeur o,'j ; Sirius de grandeur — 1,4, etc. Ce mode de notation est évidemment applicable à tous les astres, même les plus brillants. Le résultat des comparaisons photomé- triques entre le soleil et les étoiles peut se traduire par la connais- sance de la grandeur du soleil. Il va sans dire qu'il suffit pour cela de comparer le soleil avec une seule étoile. D'autre part, les physiciens choisissent comme étalon fondamental, pour leurs mesures photométriques, l'intensité lumineuse d'une cer- taine source de lumière, toujours identique à elle-même; appelons intensité d'une bougie l'intensité ainsi définie. Suivant qu'elle est placée plus ou moins loin, cette source produit un éclawenifnt plus ou moins intense. L'unité d'éclairement est celui qui est produit sur un écran recevant normalement les rayons provenant d'une bouoie placée à i mètre de distance. L'unité ainsi définie s'appelle le lux. Une source de i bougie placée à r mètres produit un éclairement de — ^ lux. Dans le cas des observations astronomiques, la distance de l'obser- vateur aux sources de lumière qu'il étudie n'est pas à son choix. La seule chose que l'on puisse observer est Y éclairement produit par l'astre observé, ou plus exactement l'éclairement qu'il produirait s'il était seul dans le ciel. Si donc on veut exprimer l'éclat d'un astre en unités photométriques, c'est en lux qu'il faudra l'exprimer. Si l'on connaît la distance de l'astre à la terre au moment de l'observation, on pourra en déduire Vintensité lumineuse absolue, qui s'exprimera en bougies. Soit alors un astre dont la grandeur est g et qui donne un éclai- rement de E lux. En se reportant à la définition de la grandeur don- née plus haut, il est facile de trouver la relation qui lie ces deux quantités. Cette relation est de la forme E==AX(o,4)^ (i) Pour déterminer ta constante A, il suffit évidemment d'avoir mesuré en lux l'éclairement produit par une étoile quelconque, de grandeur connue, ou même par le soleil, si l'on suppose la grandeur du soleil déterminée. Cette constante est évidemment variable avec l'absorption atmos- phérique, et sa connaissance donne l'indication la plus précise et la moins arbitraire sur la valeur numérique de celte absor])tion. Il est à remarquer que, sur l'absorption atmosphérique aux divers lieux et 258 PHYSIQUE aux diverses époques, les compai*aisons purement astronomiques ne peuvent que très difficilement donner des indications, presque toujours assez grossières. Si la comparaison, faite dans un lieu donné, entre un astre et l'éta- lon pliotométrique , indique une variation de ce rapport, on peut en conclure soit que cet astre a varié, soit que l'absorption atmosphé- rique s'est modifiée. L'observation d'un certain nombre d'astres permettra de trancher la difficulté. L'influence de l'absorption atmos- phérique sera en tout, cas diminuée en observant dans une station élevée. Choix d'un étalon pliotométrique. — Les seuls étalons actuelle- ' ment employés dans la pratique sont des étalons à Jlanunes , qui brûlent des produits hydrocarbonés divers. Quelques-uns de ces étalons ont une intensité suffisamment constante ; mais, au point de vue qui nous occupe, ils ont tous un inconvénient extrêmement ffrave : leur lumière est de teinte très dillérente de celle du soleil et de la plupart des astres ; elle est beaucoup trop riche en rayons de grande longueur d'onde, en d'autres termes, elle est fortement rouge par rapport à celle du soleil considérée comme blanche. Or, cette différence de teinte limite beaucoup la précision des comparaisons photométriques; entre lumières de même teinte, la précision des comparaisons peut, dans les meilleures conditions, déj^asser le centième; il peut y avoir des incertitudes dépassant le dixième lorsque la différence de teinte est aussi grande que celle qui existe entre la lumière du soleil et celle d'une lampe à huile. L'expérience montre qu'au moyen de milieux absorbants conve- nables, on peut modifier la teinte de la lumière de nos lampes , de manière à la ramener à celle du soleil. Il faut employer un absorbant de couleur bleue. Naturellement, l'interposition d'un pareil milieu modifie complètement la valeur de l'étalon photométrique, mais, si l'on a soin d'employer toujours le môme milieu, sous une épaisseur constante, on aura un nouvel étalon de teinte convenable et aussi invariable que le premier. Au lieu d'employer un çerre bleu, que l'on n'est jamais si\r de pouvoir reproduire identique à lui-même, j'ai cherché à constituer un liquide , de composition chimique déterminée et qui puisse être reproduit par tous les observateurs. Le liquide dont je me sers est la dissolution ammoniacale d'oxyde de cuivre, obtenue en ajoutant de l'ammoniaque à une dissolution de sulfate de cuivre. Un litre de ce liipiide contient : CH. FABRY. — LA LUMIERE DU SOLEIL ET DES ÉTOILES 209 Sulfate de cuivre cristallisé 20 gr. 8 Az H' (gaz sec) 16 gr. 4 On peut l'obtenir en prenant 100 centimètres cubes d'ammoniaque du commerce, de densité 0,93, étendant d'eau, ajoutant 20 gr. 8 de sulfate de cuivre cristallisé et additionnant d'eau de manière à former un litre. Sous une épaisseur de 2,60 millim., ce liquide exerce l'absorption voulue pour donner à la lumière d'une lampe Garcel une teinte rigoureusement identique à celle de la lumière solaire. Le liquide est enfermé dans une cuve à faces parallèles , limitée par des glaces de 1,5 millim. d'épaisseur. Les divers étalons à flammes ont à très peu de chose près la même teinte ; aussi ce liquide peut-il servir indistinctement avec ces divers étalons; je m'en suis assuré sur la lampe Garcel, la lampe Blondel (alcool et benzine) , les bougies ordinaires , la lampe Heffher (acétate d'amyle). Il y a plus : le milieu absorbant modifie les intensités de ces diverses sources exactement de la même manière. Prenons par exemple une lampe Garcel et une lampe Heffner et comparons-les directement. Comparons-les ensuite en interposant devant l'une et l'autre (ou, ce qui est plus simple, devant lo'il) le milieu absorbant; on trouve exactement le même rapport (*). Dans ce qui va suivre, je prendrai tomme unité i^hotométrique provisoire l'intensité que l'on obtient en faisant passer à ti^avers la cuve décrite ci-dessus la lumière d'un étalon à flamme d'iiydrocar- bm^e ou d'huile quelconque, de une bougie décimale. Je désignerai cette unité par le symbole BS. L'unité d'éclairement sera l'éclai- rement produit par une source de i BS à i mètre de distance ; je la désignerai par le symbole LS. Ges unités sont bien définies, et c'est l'essentiel; elles peuvent ctre re^H-oduites par tout le monde avec la même j)récision que la bougie décimale. Il est néanmoins utile de les exprimer en fonction des unités ordinaires des physiciens (bougie décimale et lux) ; ici reparait inévitablement la difficulté de la photométrie hétérochrome, €t les résultats présentent forcément une assez grande part d'arbi- (•) La teinte de la lampe Hcflfncr est très légèrement plus roug-e que celle de la lampe Carcel et des autres étalons à flamme , mais la différence est très faible. Je ne pense pas qu'on puisse sérieusement invoquer cette différence de teinte comme un obstacle à l'emploi de la lampe Heffner. On aurait pu s'attendre à ce que cette différence de teinte se traduisît par une diffé- rence dans l'absorption du sulfate de cuivre ammoniacal. Je me suis assuré directement ■que cette différence, si elle existe, est absolument insensible. 200 PHYSIQUE traire; mais du moins, si l'on juge à propos de modifier ce rapport, on saura comment devront être modifiés les nombres qui exprinvent les éclairements produits par les divers astres, et l'on n'introduit pas, dans la comparaison des astres entre eux, les diflicultés étran- gères au problème de la pliotométrie hétérochrome. J'ai trouvé que i BS = o,i52 bougies décimales. Par suite i LS = 0.102 lux. Pour la définition de la bougie décimale, j'avais le choix entre les divers étalons à flamme, en particulier entre la lampe Hefliier et la lampe Carcel. Comme on n'est pas définitivement d'accord sur le rapport entre ces deux étalons, il fallait choisir l'un ou l'autre comme étalon primaire. J'ai choisi l'étalon Heffner qui, malgré quelques petites imperfections, ma paru nettement supérieur. J'ai admis que la lampe Hefîner vaut 0.885 bougie décimale, de telle sorte que, lorsque je parlerai de bougie décimale, il faut entendre i,i3 Heffner. De même l'unité BS est i.i3 fois l'intensité que l'on obtient en inter- posant la cuve bleue sur le trajet des rayons de la lampe Heffner. Pour les observations astronomiques , l'emploi direct d'un étalon à flamme serait impraticable. Je me suis servi comme étalon secon- daire d'une lampe électrique à incandescence, employée dans les conditions que j'ai décrites dans un autre mémoire (voir ce volume, page 292). Cet étalon secondaire s'est toujours comporté d'une façon parfaite ; il est d'une constance absolue pendant des centaines d'heures et n'exige qu'une surveillance presque nulle. Cette lampe est de très petite dimension, et la petitesse du point lumineux est un avantage très notable. Emploi de deux réflexions pour ramener le faisceau à Vhorizon- tale. — Le faisceau de l'astre étudié est toujours ramené à la direc- tion horizontale par réflexion. Une seule réflexion aurait l'inconvé- nient d'un pouvoir réflecteur variable avec l'incidence. J'emploie deux réflexions totales à 45'' sur des prismes à réflexion totale. On peut ainsi ramener un faisceau quelconque dans la direction qu'on désire, et 1" affaiblissement est toujours le même. Ce rapport (entre l'intensité du faisceau deux fois réfléchi et celle du faisceau incident) a été mesuré directement et trouvé égal à 0,77. Mesures solaires. — La seule difficulté pour comparer l'intensité de la lumièi'C solaire avec celle de nos étalons provient de l'énorme intensité de la première. Il faut laflaiblir dans un rapport connu. Je me suis servi pour cela dune méthode imaginée par Bouguer ; CH. FABRY. — LA LUMIÈRE DU SOLEIL ET DES ÉTOILES 261 Faisons passer le faisceau solaire à travers une lentille (convergente ou divergente) de distance focale f et plaçons un écran à une dis- tance D du foyer. Si t est le rapport de transmission du verre de la lentille (rapport entre l'intensité de la lumière transmise à travers une lame du même verre et l'intensité incidente), l'éclairement pro- duit sur l'écran sera, avec celui que donnerait le faisceau solaire dii^ect, dans le rapport -— t. Si au lieu d'une seule lentille on emploie un système formé de n lentilles , la même expression reste applicable en remplaçant t par t^ , ce qui donne ^- /" . Pour des lentilles minces, la perte de lumière est uniquement due aux réflexions et l'on peut prendre t = o,Qi5, résultat parfaitement concordant des mesures directes et des for- mvdes de Fresnel (*). Il est très facile de mesurer, avec une approximation supérieure au centième, la distance focale d'une lentille ou d'un système optique, même lorsque f n'est que de quelques millimètres. On a donc un moyen de réduire dans un rapport connu, aussi grand que l'on veut, l'intensité de la lumière solaire. J'emploie comme photomètre celui de Lummer et Brodhun, qui est le meilleur appareil actuellement existant. L'une des faces de l'écran photométrique est éclairée d'une manière constante par l'éta- lon photométrique avec sa cuve bleue. L'autre face reçoit le faisceau solaire à travers sa lentille ; on établit l'égalité en faisant glisser la lentille, c'est-à-dire en faisant varier D. Les nombres doivent subir des corrections : i° pour ramener à la moyenne distance du soleil à la terre ; 2° pour ramener au zénith, en tenant compte de la différence d'absorption atmosphérique. D'ailleurs presque toutes les observa- tions ont été faites vers midi et près du solstice d'été ; cette correc- tion est alors négligeable. On trouve naturellement des nombres variables avec l'état du ciel. Mais, si l'on ne fait entrer en ligne de compte que les jours de ciel franchement beau, c'est-à-dire où l'œil ne perçoit aucun nuage ou nébulosité du côté du soleil, les résultats sont remarquablement concordants. La valeur de l'éclairement solaire, à la moyenne distance à la terre et au zénith, est de 660.000 LS, soit 100.000 lux. La plupart des résultats donnés par les autres observateurs sont (•) O. N. Rood, Amer. Joiirn. (2), t. XLIX, p. 145, et t. L, p. i ; 1870 et Mascart, Triiiié d'optique, t. II, p. 475. 202 PHYSIQUE notablement trop faibles ; beaucoup de ces observations ont, du reste, été faites dans des conditions déplorables et, en particulier, avec le soleil beaucoup trop près de l'horizon. Je dois faire remarquer que ces observations sur le soleil sont bien plus précises que les comparaisons entre étoiles : celles-ci se font par égalisation de deux points lumineux, tandis que dans le cas des mesures solaires faites par la méthode que je viens de décrire, l'obser- vation consiste à égaliser les éclairements de deux surfaces , ce dont l'œil juge avec bien plus de précision. En fait, sur une mesure isolée, on atteint à peu près la précision du centième , ce qui correspondrait dans les comparaisons stellaires à une incertitude moindre que o,oi de grandeur. Mesures stellaires. — La manière la plus simple et la plus directe de comparer la lumière d'une étoile à celle d'un étalon photomé- trique consiste à s'éloigner progressivement de cet étalon jusqu'à ce que, vu à l'œil nu, il apparaisse comme un point lumineux iden- tique à l'étoile qu'on veut lui comparer. La lumière de l'étoile sera renvoyée dans la même direction que celle qui vient de l'étalon au moyen du système de deux prismes à réflexion totale. J'ai employé cette méthode au début de mes recherches ; elle a l'inconvénient d'exiger un très grand espace découvert (3 à 4oo m. X^our les étoiles de prendère grandeur) ; il est de plus assez difllcile de réitérer plusieurs fois la mesure. Pour les mesures définitives, j'ai préféré adopter un dispositif un peu moins direct, mais préfé- rable. Je produis une étoile artificielle dont on peut faire varier l'éclat dans un rapport connu. La lampe électrique étalon L est munie de sa cuve bleue C {fig. i). La lumière traverse un système optique de c L -0 rf--- --4I Fig. I. CH. FABRY. — LA LUMIÈRE DU SOLEIL ET DES ÉTOILES 263 très court foyer g qui donne une petite image de la lampe , située sensil)lement à son foyer de gauche. La lentille h rend le faisceau parallèle. Ce faisceau tombe à 45" sur une lame de verre V, très légèrement prismatique , afin que les deux images soient séparées. La lumière de l'étoile parvient à l'observateur à travers la lame V après réllexions sur les prismes P. On voit alors l'une à côté de l'autre l'étoile vraie et une étoile artificielle ; pour faire varier cette dernière, il suffit de déplacer la lampe. Si D est sa distance au foyer de droite de g, l'éclat de l'étoile artificielle est de j^, , K étant la constante de l'appareil. Pour la déterminer, il suffît de faire une observation en prenant comme étoile une lampe étalon placée à une distance connue (quelques centaines de mètres). Presque toutes les observations ont été faites sur l'étoile Yéga. Elles m'ont conduit au résultat suivant : L'éclairement produit par Yéga au zénith est ii,a X lo — " LS, ou 1,7 X 10 — "^ lux. Il en résulte le rapport ~, — = 6 X 10 '" (60 milliards). Admettant pour Véga la grandeur 0,2, on trouve alors que le soleil à la moyenne distance est un astre de grandeur — 26,7. Enfin, les observations déterminent la constante A de la formule (i) qui lie la grandeur à l'éclairement. On trouve alors que, si un astre de grandeur g produit un éclairement de E lux , on a les rela- tions E = 2,i X io-«X (0,4)-"" g- = — 14,2 — 2,5 log. E Un éclairement de i lux correspond à la grandeur — i4»2. Toutes les observations précédentes ont été faites à la Faculté des sciences de Marseille, à une vingtaine de mètres d'altitude. Des observations analogues, faites sous divers climats et diverses alti- tudes, seraient d'un grand intérêt. Les plus faibles étoiles visibles à l'œil nu sont de grandeur 6. La formule précédente donne, pour l'éclairement qu'elles produisent, la valeur 10 — ^ lux. L'œil est donc capable de voir une source de lumière qui produit un éclairement de 10— ^ lux lorsque les rayons tombent directement dans l'œil et que la source se présente sans diamètre ap[)arent sensible. En d'autres termes, on peut voir à l'œil nu une bougie à 10 kilom., abstraction faite de l'absorption atmos- phérique. Avec une lunette qui montre les étoiles de quatorzième 264 PHYSIQUE grandeur, le plus petit éclairement perceptible est 6 X lo — '^; on verrait une bougie à 4f>o kilom. si l'absorption atmosphérique n'exis- tait pas. Occupons-nous enfin des intensités absolues des astres dont la distance nous est connue. Soit une étoile de grandeur g et dont la parallaxe, exprimée en secondes, est/>. Un calcul facile montre que le rapport des intensités absolues du soleil et de cette étoile est donné par 1 Soleil Voici le résultat trouvé pour quelques étoiles dont la parallaxe est plus ou moins exactement connue. Les parallaxes sont extraites de l'annuaire du Bureau des Longitudes. Soleil ÉTOILE p a Centaure o,'ji 2i.i85 Lalande. . . 0,48 61 Cygne 0,44 Sirius 0,37 34 Groombï'idge. . o,3i Procyon 0,27 ■n Cassiopée 0,21 a Aigle 0,20 Véga o,i5 Polaire 0,07 Le soleil, vu d'une étoile de parallaxe p serait une étoile de gran- deur g =^ — 0,2 — 5 log. p. 8 Etoile 0,2 . 0,75 6,8 142 5,1 25 -14 0,045 7'9 170 0,5 o,i3 3,6 1,45 0,9 0,11 0,2 o,o33 2,2 0,043 Grai ideur du soleil Parallaxe vu à cette distance l" — 0,2 0,5 1,3 0,2 3.3 0,1 4,8 o,o5 6,3 O.OI 9.8 Enfin, l'intensité totale que le soleil envoie dans la direction de la terre est, après son allail^lisscment par notre atmosphère. 2.2 X lO"^ bougies. Comme on peut admettre, vraisemblablement, que cet LALA & UODA-PLIUS. — REPRÉSENTATIONS GRAPHIQUES SIMPLIFIÉES 265 éclat est à peu près le même dans toutes les directions , le flux lumi- neux total émis par le soleil serait, après absorption atmosphérique, 2,8 X lo^** lumens. Si l'on suppose que l'éclat apparent du disque solaire est uniforme, on trouve que i millimètre carré de la surface solaire envoie nor- malement une intensité lumineuse de i4oo bougies. L'hypothèse faite n'est d'ailleurs pas exacte ; le centre du disque paraît i)lus brillant que les bords, de sorte que le nombre indiqué est un mini- mum ; il est de plus affecté par l'alisorption atmosphérique. Le nombre vrai, qui exprime l'intensité lumineuse émise normalement par millimètre carré de la surface solaire, ne doit ])as être très éloi<^né de 3.000 bougies. Rappelons que, pour le cratère ])ositif de l'arc élec- trique, on trouve des nombres voisins de i5o à uoo bougies par millimètre carré. M. Ulysse LALA Docteur es Sciences, Professeur de Physique à l'École des Beaux-Arts et des Sciences industrielles et à rÉcole Supérieure de Commerce de Toulouse ET M. J. RODA-PLIUS Boursier d'Agrégation des Sciences mathématiques à l'Université de Toulouse REPRËSENTATIOIMS GRAPHIQUES SIMPLIFIÉES — Séance du 5 août — Dans l'orientation nouvelle imprimée à l'enseignement élémentaire de la physique, l'emploi de diagrammes représentatifs, utilisés d'ailleurs par la plupart des professeurs , prend une importance par- ticulière. Car, comme l'a si justement dit M. H. Bonasse dans une étude très remarquée sur V Enseignement des Sciences phj'siques dans l'Enseignement secondaire, publiée en juin 1901 dans le journal Y Enseignement secondaire , « tous ceux qui s'occupent de sciences savent quels avantages sont attachés à l'emploi du tracé graphique j)our représenter la forme des fonctions empiriques, pour 266 PHYSIQUE résoudre pratiquement les problèmes qui s'y rapportent, pour en étudier d'une manière générale les propriétés les plus impor- tantes Les œuvres de grossière vulgarisation elles-mêmes, , utilisent la généi-alité et la simplicité de lu méthode de repré- sentation graphique ». Mais, si certaines lois simples, le mouvement uniforme, la seconde loi de la réfraction (*) par exemple , se prêtent à une représentation linéaire immédiate et si ce cas se présente d'ailleurs toujours lorsque l'on considère de faibles variations de la variable (dilatations, variation de résistance sous l'iniluence de la température, etc.), malheureusement, il n'en est pas toujours ainsi, et l'on se trouve dès le commencement de l'étude de la physique, en présence de lois fon- damentales qui s'expriment analytiquement par des fonctions X)lus compliquées. Telles sont les lois des espaces dans la chute des corps et de la compressibilité des gaz. On se trouve même parfois en pré- sence de formules comme donnant la pression atmosphérique A à un niveau z sur une verti- cale à température constante au pied de laquelle la pression est H. Or, si les élèves abordant l'étude de la physique comprennent assez aisément les considérations de proportionnalité et, par suite, les représentations linéaires, ils sont, i)ar contre, dans l'ignorance absolue des propriétés des courbes, même de celles dites usuelles et, par suite, éprouvent des difficultés insurmontables dans le cas des figurations non linéaires. Il y a donc intérêt à ramener, autant que possible, les diagrammes représentatifs à des lignes droites. Il est un cas très fréquent auquel on peut appliquer immédiate- ment cette méthode de réduction : c'est celui des formes hyperbo- liques; lois de Mariotte et d'Ohm YH = K m = E qui se représentent par des hj'perboles équilatères entre leurs asj^mptotes, quand on prend pour coordonnées V et H dans un cas I et R dans l'autre. Pour réaliser ici la sinqilification que nous pro- posons, il suffit de prendre, dans le cas de la loi de Mariotte, pour abscisses les volumes Y et pour ordonnées les inverses 77 des pres- (•) Eu prenant pour abscisses les valeurs de sin i et pour ordonnées celles de sin r. LALA & KODA-1'LIUS. — REPRESENTATIONS GRAPHIQUES SIMPLIFIÉES 267 sions et pour la loi d'Ohm, d'adopter pour abscisses les résistances R et pour ordonnées les inverses j des intensités (*). Immédiatement le diagramme de chacune de ces deux lois est une droite J' = A.V issue de l'origine. Dans chacun de ces cas, on peut même déterminer graphiquement une partie inconnue et fixe du volume ou de la résistance. On doit observer, en effet, que si l'on a V = p + P' R = /' -I- r' c' et 7'' étant fixes mais inconnus, l'adoption de ç ou /• variables et connus comme abscisses et de tj ou y comme ordonnées donne alors une droite ne passant pas par l'origine, qui fournit comme abscisse d'ordonnée nulle la valeur de ç' ou de r' suivant le cas (**). Cette introduction de l'inverse d'une des deux variables paraît très naturelle si l'on observe que cette manière de faire est couram- ment utilisée en optique pour l'évaluation des distances focales en dioptries, c'est-à-dire pour définir les puissances. Il est possible de donner une représentation linéaire de la formule hyperbolique des miroirs et lentilles - + --- qui devient d-\-d' = -^ en remplaçant les longueurs p , p, j, exprimées en mètres x^ai' leurs inverses, ce qui donne alors pour diagramme une droite. Appliquons ce procédé aux expériences de Regnault sur la loi de Mariotte en prenant pour abscisses les valeurs de - et pour ordon- nées les pressions p. Pour l'air et l'hydrogène, ces expériences donnent (***) (*) Ou inversement suivant les circonstances. (*•) Ce mode de représentation est précisément celui adopté par M. H. Bouasse pour établir la notion de force électromolrice dans son Manuel de Mécanique et Physique modernes (p. 3<5y). (***) Voir : Violle , Cours de Physique , Tome I , page 865. 268 PHYSIQUE Air llydr<)ji:cnc I I i,oooo 1,0000 I 2 2 1^9978 2,0011 I 4 4 3,9874 4,0069 .1 8 8 7-9457 8,0339 I 12 12 11,8822 12,0845 I i6 i6 15.8045 16,1616 I 20 20 i9>7i99 20,2687 D'après la loi de Mariotte, on devait avoir pv = I c est-à-dire, dans notre mode de représentation, la droite bissectrice de l'angle des axes, ce qui ç si pratiquement mais non rigom'eusement réalisé, de sorte que les points représentatifs se placent pour l'air sensiblement sur mie droite issue de l'origine, très voisine de la bissectrice, mais au-dessous de celle-ci (*). De même pour l'azote et le gaz carbonique. Pour l'hydrogène qui se comprime moins que ne le voudrait la loi, les points se disposent linéairement au-dessus de la bissectrice (**). On peut encore, ainsi que l'a déjcà fait l'un de nous (***), prendre comme abscisses les pressions initiales Po sous le volume i et comme ordonnées les différences 2 Po — P^ entre le double de la (*) Cette droite est représentée, pour Tair, par l'équation /) = 0,989 ( — ) (••) Dans le cas de l'hydrogène, omx p — i,oi3 l — j, (••*) Ulysse Lala : Recherches expérimentales sur l'élasticité des mélanges gazeux ; Annales de la Faculté des Sciences de Toulouse : i" Série , Tome V, Année 1891 , page G. Sa. LALA & RODA-PLIUS. — REPRÉSENTATIONS GRAPHIQUES SII^PLIFIÉES afit) pression initiale considérée et la pression finale P, relative au Yolume — . Avec ces conventions , la loi de Mariotte est représentée par (2Po-P,) = 0 c'est-à-dire par l'axe des abscisses et, en utilisant les nombres de Regnault, on obtient rig-oiireiisement des droites issues de l'origine, au-dessus de l'axe des abscisses pour les gaz plus compressibles (air, N, CO-) et au-dessous pour l'H (*). La loi de Jurin 2 A / I il \i se prête évidemment à des remarques analogues à celles que nous venons de faire sur les lois de Mariotte et d'Ohm. Il sera toujours possible de faire subir aux lois paraboliques une transformation linéaire en prenant pour coordonnées une des variables et le carré de l'autre. C'est ainsi que la loi des espaces dans la chute des corps sans vitesse initiale e = — ^P devient j- = -g.x droite passant par l'origine. D'ailleurs, en j)renant une origine des temps convenable, la forme la plus générale du mouvement parabolique peut toujours être ramenée à e = A + B^^ réductible à la droite X = K-{- Bx (*) Les équations de ces droites sont représentées par la formule (2 Po - Pi) = /c Po les valeurs du coefficient angulaire k étant + o,oo22 pour l'air , — + 0,0170 — le gaz carbonique CO', — + o,ooi3 — Tazote N , — — 0,0011 — l'hydrogène H. H-JO . PHYSIQUE en posant j^ = e X = t' (*) De même, on représentera linéairement les quantités de chaleur j^ (en cal-gr.) dégagées par des courants d'intensités variables I^™P passant durant un même temps ^«ec. dans une même résistance R ^\ (loi de Joule), par la droite j- = (0.24 RO .V en posant x = lK Ce procédé de simplification, aisément généralisable. peut s'apj)li- quer fréquemment. C'est ainsi qu'un grand nombre de phénomènes physiques sont représentés par la fonction — = e — -^•^' qui se transforme immédiatement en logj' = log ro — A.v forme simple sous laquelle il est x^ossible de la donner aux élèves peu avancés. Tels sont les exemples suivants cités par M. H. Bonasse dans un article sur l'aide réciproque que les professeurs de physique et de mathématiques doivent se prêter (**) : 1° Barre de longueur pratiquement infinie, chauffée à l'une de ses extrémités ; (•) Ainsi réquation e = \\ t -\ gt" réprésentant une parabole d'axe parallèle à celui des c , se simplifie en chang-eant l'ori- gine des temps par la définition ce qui revient à prendre Taxe de cette parabole pour nouvel axe des e. Dans ces condi- tions, l'équation devient e = - "^-^ + -^ T' 2g- 2 Appliquons le mode de transformation indiqué y — e X — T' nous avons la droite J = A + B.V en posant 2g- 2 {**) Jovrnal de Phys'Kjuc , Chimie et Histoire nattirelle élémentaires de A. Buguet, tome XVII , année lyoï-ujoa , pag-c y;. DEMERLIAC. — RÉSISTIVITÉ DE l'uRINE HUMAINE 27 1 2° Refroitlissemcnt d'un corps placé dans une enceinte à tempéra- ture constante; ^ 3° Variation de la pression atmosphérique le long d'une verticale, en supposant la tem^^érature constante. En posant Y = log >- et B = log j-o on a dans tous ces cas et les analogues , une di'oite Y=:B — Ax. En résumé, nous estimons qu'en raison de l'intérêt indiscutable qui s'attache aux représentations graphiques , il importe de les sim- pHfier et de les ramener, autant que possible, à des diagrammes linéaires afin de les rendre plus conq)réhensibles aux débutants auxquels elles faciliteront l'étude et lintelHgence des phénomènes physic[ues (*). M. DEMERLIAC Professeur de Physiq*ie à l'École de Médecine de Caen RECHERCHES SUR LA RËSISTIVITÉ DE L'URINE HUMAINE [537.311 :tJii. 46] — Séance dn 5 août — L'urine peut être regardée comme une solution aqueuse d'un grand nombre de composés : les uns sont de nature organique, les autres sont des sels minéraux. C'est à ces derniers seulement qu'est due la conductibilité électrique et, comme la richesse saline est très variable, (•) Dans les expériences personnelles, ces simpliiications seront souvent commodes. Si , par exemple , on se trouve en présence d'une fonction hyperbolique de la forme A.V — Bj' = G il y aura avantage à poser X' = w y — t ce qui conduira à vérifier, chose très facile, que les points expérimentaux sont en ligne droite. 2^2 PHYSIQUE il en sera de même de la conductibilité. Il est donc tout naturel de la déterminer, ou bien son inverse qui est la résistivité (*) , comme complément de toute analyse quantitative. La méthode de Kohlrauscli permet de faire rapidement et avec une grande approximation les mesures de résistivité des électrolytes; c'est elle que j'ai appliquée dans ce cas particulier. Mais, voulant réaliser un appareil simple , peu coûteux , de manœuvre aisée utili- sable en clinique, je me suis arrêté au dispositif suivant : Le pont avait deux résistances fixes formées par deux tubes en U contenant une solution de sulfate de cuivre pur, les électrodes en cuivre recouvert d'un dépôt électrolytique plongeaient de quelques centimètres dans cette solution ; après réglage de la résistance , les orifices des tubes étaient bouchés et cachetés à la cire Golaz. Ces tubes avaient sensiblement la môme résistance (environ 800 ohms); ils étaient placés côte à côte et par conséquent toujours à la même température. L'urine à étudier était contenue dans un tube droit en verre, entouré d'un manchon également en verre, où l'on i)ouvait faire cir- culer de l'eau à température constante; un sujqiort maintenait le système verticalement. Le tube était fermé à ses deux bouts par des bouchons en liège, traversés par des charbons à lumière entrés à frottement dur dans des disques de charbon ayant sensiblement le même diamètre que le tube. Ces charbons servent d'électrodes; on peut amener leur bord libre à l'affleurement de repères marqués sur le tube. La distance de ces repères étant bien déterminée, ainsi que la section moyenne du tube, on réalisait ainsi une colonne de liquide de dimensions connues. Naturellement, toutes les précautions étaient prises pour que les charbons soient débarrassés de toute substance soluble pouvant, en se dissolvant dans l'urine, en modifier la résisti- vité. Le bouchon inférieur étant en place, le tube était rempli et, en enfonçant doucement le bouchon supérieur, on amenait le charbon à sa place sans- qu'une bulle d'air restât emprisonnée au-dessous de lui C*). La résistance du liquide contenu dans ce tube était compensée par (•) La résisUvité étant la résistance d'une colonne d'urine ayant une section de i cen- timètre carré et une longueur de i centimètre , résistance évaluée en ohms lég-aux. (") J'ai employé deux tubes ainsi construits ; l'un avait une longueur de 53 centimètres entre les repères et une section de 3 cq. i ; l'autre avait une longueur de 20 centimètres et une section de 3 cq. o45. Le coefficient -j- était alors pour le premier o,o584 ; pour le deuxième o 1971. En conséquence, la résistivité f s'obtenait avec chaque tube en faisant le produit de la i"ésistancc 11 trouvée pour la colonne liquide par le coefficient corres- pondant. DEMERLIAC. — RESISTIVITE DE L URINE HUMAINE 278 celle d'une solution de sulfate de cuivre contenue dans un grand tube en U fixé sur une planchette verticale mobile , dont le mouve- ment, produit au moyen d'un pignon engrenant avec une crémaillère, était aussi lent qu'on le voulait. Deux gros fils de cuivre, fixes, plongeaient dans la solution suivant l'axe du tube; ils étaient eux aussi recouverts d'un dépôt électroly tique. En faisant monter ou descendre la planchette, et par conséquent le tube , la résistance du système pouvait varier dans des limites considérables, de i5o à 900 ohms, ordinairement, avec la concentration de la solution employée; mais l'on conçoit qu'en faisant varier cette concentration on pourra obtenir des limites très différentes , convenables pour les urines étudiées, les tubes à liquide utilisés, etc. La course de la planchette étant de 20 centimètres, on voit que chaque millimètre de hausse ou de baisse du tube amenait une variation de 4 à 5 ohms dans la résistance du système. Le courant alternatif qui traversait les branches du pont était pro- duit par un petit moteur de Gramme à anneau ; deux prises de cou- rant à 180° permettaient de recueillir le courant et la rotation de l'anneau était obtenue en lançant dans le moteur le courant continu fourni par quatre accumulateurs. Avec un rhéostat placé en série dans le circuit, il était possible de ùùvc vai'ier à volonté et simulta- nément la vitesse de rotation, la force électromotrice du courant alternatif engendré et sa fréquence. Mais cette force électromotrice était un peu faible, les résistances à traverser étant considérables ; un transformateur à circuit magnétique fermé permettait de l'élever facilement à 25 volts environ. Ce dispositif avait l'avantage de fournir un courant alternatif, sensiblement sinusoïdal ; par suite , le son rendu par le téléphone était très pur et l'observation des minima très facile. D'ailleurs, pour un téléphone donné, il y a toujours une fréquence pour laquelle le silence est plus facile à observer ; grâce au rhéostat, il était aisé d'obtenir cette fréquence et de se placer dans les meil- leures conditions d'observation. Il est à remai-quer qu'il n'est pas nécessaire d'employer un pareil producteur de courant alternatif; on peut faire de très bonnes mesures en utilisant une bobine de Ruhmkorff à chariot, modèle Du Bois-Reymond que l'on trouve partout dans les cliniques et dont l'interrupteur, fonctionnant sans bruit, permet de faire varier la fré- quence du courant alternatif induit dans des limites considérables. Le dispositif de cette bobine permet aussi de faire varier la force électromotrice du courant ; il suffit de changer la bobine induite ou 18* 274 PHYSIQUE de faire varier sa distance à la bobine inductrice. On peut donc tou- jours se placer dans les meilleures conditions possibles. Ouant aux capacités des tubes, elles doivent naturellement être élioisies avec soin , pour éviter les différences de décalage entre la force électromotrice et le courant. Ce choix est le meilleur quandle silence s'obtient au téléphone; en outre, il est bon que les tubes \k liquide aient des capacités voisines de celles des boîtes de résis- tances commerciales, si l'on veut comparer les résistances de ces tulles avec celles des bobines de ces boites. La résistance compensatrice, constituée par le tube à sulfate de cuivre, se gradue facilement en ohms à une température donnée, soit au moyen de boîtes de résistances, soit au moyen d'une solution titrée de chlorure de potassium d'après les résultats établis par MM. Bouty et Kohlrausch. Une table de corrections s'établit facilement pour les cas où la température de la solution de sulfate serait différente de celle qu'elle avait au moment de la graduation. D'ailleurs, il est facile de vérifier les résultats aj^rès chaque mesure ou chaque série en substituant au tube à urine soit le tube à chlorure de potassium, soit une boite de résistances, et cela par le simple jeu d'un commutateur. Ainsi monté, l'appareil permettait d'apprécier une variation de résistance de moins de 2 ohms ; or la résistance ordinaire que l'on mesurait était d'environ 3oo ohms au minimum. L'approximation de la mesure ressort donc à -^- lîour la résistance de la colonne de 100 liquide. La résistance trouvée R peut donc être R ± 2. Or nous aurons o = R X 0,1971 et ce coefficient a été trouvé après 2 mesures tovites les deux sujettes à erreur. Sans entrer dans le détail des calculs, je trouve que p est obtenu avec une erreur moyenne de 0*^,5 environ sur 60 ohms, c'est-à-dire que l'approximation dans la mesure de 0 ressort à environ, ce qui est suffisant. ' 100 Ces mesures de R ont été faites à -|- i3", température facile à obtenir et à maintenir en toute saison avec l'eau d'une grande ville, sans la complication du thermostat. Mes observations ont porté sui* 6 j)ei*sonnes pendant plusieurs mois, deux hommes, deux femmes, deux enfants, ayant une bonne santé générale et n'ayant eu pendant ce laps de temps aucune maladie , même légère , capable de déter- miner un mouvement fél^rile. L'alimentation a toujours été variée, copieuse, la boisson étant pour les uns le vin coupé d'eau bouillie^ DEMERLIAC. — RÉSISTIVITÉ DE l'uRIiXE HUMAINE 2^5 pour les autres le cidre. Je crois donc pouvoir donner ces mesures comme faites sur l'urine humaine normale. Variatiojia de la résistwité dans la même journée. — L'urine émise à divers monieuts de la journée n"a pas la niêiue composition; elle est plus ou moins aqueuse et par suite la résistivité varie. L'expérience montre que cette variation est considérable et suit une marche régulière. Afui de faire des comparaisons, je partage l'urine en quatre parts : 1° Celle émise le matin au lever, vers 7 heures; 2« celle émise à midi, avant le déjeuner; 3o celle éuiise à 6 heures du soir, avant le dîner; 4° entin celle émise au moment du coucher, après le dîner, c'est-à-dire vers dix heures du soir environ. La première partie a la résistivité maxinnun, bien que cette urine, ayant séjourné toute la nuit dans la vessie, ait une coloration foncée et une densité élevée. La deuxième partie a au contraire la résistivité niininmra, presque la moitié de la précédente, ce qui semble indiquer qu'après le réveil il y a élimination beaucoup plus considérable de matériaux de nature saline, tandis que la nuit il y aurait plutôt élimination de maté- riaux de nature organique. La troisièuie partie rei)résente l'urine émise après le repas de midi, ordinairement le plus copieux et le plus fortement arrosé; elle doit être naturellement plus aqueuse et partant [)lus résis- tante; l'expérience le montre, mais la résistivité reste très notablement ùiférieure à celle trouvée pour l'urine de la nuit. Quant à l'urine émise au moment du coucher, il faut s'attendre à lui trouver une résistivité voisine de la précédente , mais plutôt un peu plus faible. Les nombres du tableau suivant sont des moyemies obtenues avec l'urine d'un homme de 36 ans : ire partie 83 oluns. 2e » 4t) » 3e » 65 » 4^ » 61 » Le mélange de ces 4 parties constituant l'urine des vingt-quatre heures avait une résistivité moyemie, pendant la même j^ériode, de 70 ohms. Il faut donc faire les mesures de résistivité, comme d'ailleurs toutes les observations sur l'urine en prélevant un échantillon du produit total des 24 heures. Variation de la résistivité avec le temps. — La résistivité d'une urme augmente de 2 à 3 pour cent pendant les premiers jours qui suivent son émission (la durée de l'augmentation dépend de l'urine, c'est-à-dire de son acidité plus ou moins grande et de la température à laquelle elle est maintenue); cette augmentation est corrélative de la disparition de l'aci- dité, puis la résistivité diminue, revient an bout de quehpies jours à sa valeur première et lînalement devient un peu plus faible. Cette diminution correspond à la formation du carbonate d'ammonium par fermentation de l'urée. 2^6 PHYSIQUE RÉSISTIVITÉS initiale, après 2 jours, après 3 jours, après 5 jours, après 8 jours, après i3 jours. 106 109 108 107 io5 102 65,5 06,8 66,5 65 64 62 66,4 67 66,5 66,5 65 65 78,7 78 76 75,5 74 72,5 L'examen de ce tableau montre que la variation n'a pas pour chaque échantillon suivi la même marche; il importe donc, si l'on veut avoir des mesures comparables, d'opérer toujours avec de l'urme de la veille et de la conserver autant que possible à la même température dans des vases bouchés. Variation de la résistivité avec la composition. — La résistivité pour une même persomie n'est pas proportionnelle au volume ; d'antre part certaines urines très denses peuvent avoir des résistivités plus grandes que d'autres qui sont moins denses , la densité dépendant des produits extractifs totaux. Ainsi nous trouvons pour une même personne et 4 jours consécutifs : Volume de l'urine émise en 24 heures. Densité à + i5°. Résistivité à + i3< 2IOO«c 1,016 65«-,5 l45o 1,020 62 1700 1,019 61 5 1460 1,019 70 5 Si, au contraire, nous dosons le chlorure de sodium en solution dans une urine, nous trouvons que la résistivité augmente ou diminue d'une façon régulière avec la diminution ou l'augmentation de la richesse en sel marin, sans qu'il y ait toutefois une proportionnalité inverse rigou- reuse. Les nombres suivants se rajjportent à une même persomie et pour des cas pris au hasard. Homme de 36 ans Volume émis Poids de Nrt Cl en 24 heures Densité à 10» Résistivité à i3° par ■ litre en grammes 1700 1,020 63 8,2 1625 1,021 57 9.2 1260 I,023 55 •9.6 1875 I,ol85 65 7,93 1800 i,oi65 71,5 7,i5 1400 I,023 49 11,6 i56o 1,020 55,5 10 La conductibilité de l'urine dépend donc, en très grande partie, du chlorure de sodium qu'elle contient; la mesure de la résistivité nous ren- seignera avec une exactitude suflisantc, dans un certain nombre de cas, sur la teneur en sel marin et cette mesure a l'avantage d'être très rapide tandis ([u'un dosage i)ar les méthodes ordinaires est toujours assez long. A propos de ce dosage, je ferai remarquer qu'on peut le faire assez DEMERLIAC. — RESISTIVITE DE L URINE HUMAINE 277 facilement et avec toute la précision que donne la méthode volumétrique de la manière suivante. On prend 10 centimètres cubes de la solution d'azotate d'argent au titre de 29 gr. 075 par litre et on les met dans une petite capsule de porcelaine; on ajoute de l'acide acétique cristallisable pour aciduler fortement et 2 gouttes de solution de chromate de potas- sium pour obtenir le précipité rouge connu. Ceci fait, à l'aide de la burette de Mohr, on fait couler l'urine dans la li([ueur en agitant toujours avec une baguette de verre jusqu'à décoloration. Le virage est très net et bien visible sm* le blanc de la porcelaine , bien plus net ({u'en opérant d'une façon inverse, comme on le conseille généralement. S'il a falhi n centimètres cubes de l'urine j)0ur obtenir cette décolora- tion, le poids en grammes de Na C/ par litre se trouve en faisant le quo- tient de 100 par n. Quand l'urine est fortement colorée , ou bien si elle est fournie par un malade, on en prend 5o ccntim. cubes; on y ajoute quelques gouttes d'acide sulfurique pur et 20 cent, cubes d'une solution de permanganate de potassium au centième. Après ébullition on neutralise avec de la craie pure et l'on filtre avec les précautions ordinaires, de manière à avoir 100 centimètres cubes de liqueur claire. C'est cette liqueur que l'on emploie aux lieu et place de l'urine en appliquant la méthode précédente; mais, le volume ayant été doublé, le poids de sel marin, par litre, s'ob- tient en grammes en faisant le ([uotient de 200 par 11 {n rei^résentant le nombre de cent, cubes de liqueur employé). Je me suis assuré que ce procédé donnait les mêmes résultats que tous ceux indiqués par les auteurs, et il m'a i)aru avoir l'avantage de la rapi- dité et de la simplicité dans les manipulations. Cependant les autres sels en solution ne sont pas sans influence; pour s'en rendre compte il suflit de comparer la résistivité trouvée pour une urine donnée, à celle d'une solution de chlorure de sodium dans l'eau pure ayant la même concentration en ce sel. Cette comparaison m'a con- duit à mesurer avec mon ai)i)areil la résistivité des solutions de chlorure de sodium contenant de o gr. 6 à i5 grammes par litre. J'avais d'ailleurs mtérèt à faire ces mesures alin de comparer mes nombres avec ceux trouvés par Kohlrausch, Sheldon, etc., la comparaison devant me mon- trer cfuelle conliance je pouvais avoir dans mon appareil et quelle mfluence pouvait avoir la substitution d'électrodes en charbon aux élec- trodes en usage dans l'appai-eil d'Ostwald. J'ai trouvé directement les nombres suivants : Poids de Na Cl Résistivité à i3» Poids de Nrt Cl Résistivité à i3» par litre ? par litre 0 0^6 II40 8^ 91 l 670 9 82 2 340 10 74,5 3 23o II 68,5 4 177 12 64 5 143 i3 59,8 6 121 14 56 7 104 i5 52,5 278 PHYSIQUE Avec ces nombres, par interpolation, il est facile de trouver les valeurs de p correspondantes aux richesses intermédiaires. Une courbe cons- truite à grande échelle conduit aux mêmes résultats et montre bien la continuité de la variation de p dans ces limites de concentration. Les valeurs de la résisti^ité de la solution de chlorure de sodium domiées par Kohlrausch et Sheldon (Tables de Landolt) sont trouvées à 180. J'ai déterminé le coefficient moyen de variation de p avec la tempé- rature entre -)- 12 et -j- 25", aiin de calculer avec les nomI)res })récédents les valeurs de ^ à 180. J'ai trouvé que ce calcul peut être fait à l'aide de la formule : Pf — Pr.< [l — (^ — l3) 0,02] dans laquelle t est compris entre 12 et 25". Ainsi pour une concentration de 5 gr. 7 par litre on a p,, = 12; [i — 5 X 0,02] = II4''^3 Sheldon donne p,^ ^ ii5«^. Pour une concentration de 5o gr. par litre, on a ^ij = 17,6 Ti — 5 X 0,02] =: i5'^, 8. Kohlrausch donne /s,, = ^^'^^9- L'accord est satisfaisant. Conclusions. — Quel peut être l'intérêt des mesures précédentes et à quelles conclusions peuvent-elles nous conduire? Il nous faut, pour le voir, considérer les théories actuelles sur le fonctionnement du rein. D'après Koranyi, l'eau de l'urine sort par le giomérule et se trouve en partie résorbée dans les canalicules urinaires. Cette résorption se fera donc d'autant mieux que les canalicules seront plus longs, ou que l'urine y séjournera plus longtemps, pour une cause quelconque. D'autre part, on admet que le chlorure de sodium filtre seul parle giomérule et que les autres sels passent au niveau des canalicules ; mais à ce niveau la solution de sel marin n'est séparée du sang que par l'épitliélium canaliculaire, il s'établira par suite un double cou- rant osmotique et il y aura échange des molécules de chlorure de sodium avec les molécules d'autres sels contenus dans le sérum san- guin. Cet échange se fera d'autant mieux que les solutions resteront j)lus longtemps en présence et. par suite, toute cause qui ralentira la circulation dans les canalicules amènera une diminution dans la l'i- cliesse de l'urine en cldorure de sodium et une augmentation dans sa ricliesse en autres matériaux salins, sulfates, phosphates divers, etc. Enfin, une altération de l'épithélium canaliculaire gênera l'osmose ou la modifiera dans un sens ou dans l'autre. Comparons donc la résistivité d'une urine donnée à celle dune DEMERLIAC. — RÉSISTIVITÉ DE l'uRIXE HUMAINE 2:9 solution de chlorure de sodium d'égale concentration à la même température et faisons le rapport des deux valeurs trouvées. Ce rapport est évidemment plus petit que l'unité ; mais, si la fonction urinaire s'est faite normalement, avec une vitesse de circulation dans les canalicules voisines de la normale, l'épithélium étant sain, il doit être sensiblement constant et indépendant du volume de l'm'ine excrétée, de sa concentration, puisque chaque molécule de chlorure de sodium est remplacée par une molécule d'un autre sel. Ce rapport ne peut pas être rigoureusement constant, car la vitesse de la circu- lation rénale peut, à l'état physiologique, être influencée par des excitations extérieures, certains corps absorbés, etc. ; mais il semble évident qu'il doit osciller entre des valeurs voisines. D'ailleurs, ce rapport doit être indépendant du sexe, de l'âge, si les tissus épithé- liaux sont en bon état, car l'échange moléculaire se fera toujours dans les mêmes conditions. Par conséquent, ce rapport nous donnera un renseignement précieux sur la façon dont fonctionne le rein et sur le taux des échanges moléculaires dont il est le siège. Les tableaux ci-dessous sont des extraits de ceux que j'ai obtenus en étudiant les urines des six personnes dont j'ai parlé plus haut. J'ai choisi les cas où les richesses en chlorure de sodium étaient les j)lus différentes, afin de mettre en évidence le peu d'influence de la concentration sur la valeur du rapport — . Homme de 36 ans Homme de 23 ans Poids de Na Cl par litre en grammes Résistivité de l'urine à 13» 0 8,2 63 8 65 9'2 57 9'6 55 7.4 67,5 10 oo,5 11,6 49 7,i5 71,5 8,5 60,5 7v3 69,5 7'7 71 7,i5 70,5 6,6 76,5 7'04 72 4,9 98,5 Résistivité de la solution de Nn Cl d'égale concentration à i3» Pi Rapport des résistivités 89,1 0,707 91 0,71 80,3 0,71 - 773 0,71 98,5 0,68 74,5 0,74 65,8 0,74 101,5 0'7 86,4 0,7 99'^ 0'7 94>6 0,75 101,5 0,69 110,4 0,69 io3 0.7 146 0,675 28o PHYSIQUE Poids de K« Cl Résistivité Résistivité de la Rapport par litige de solution de No Ci des en l'urine d'ég'ale concentration résistivités grammes à iS" à iS» f P P 77 i7,2 69 lOI 0,68 6,5 82 112 0,73 7,8 72,5 93,3 0,76 7 7^ 104 0,7 6,6 78 110,4 0,7 V 5,5 89 i3i,5 0,68 Femme 13 iSg 23o 0,69 de < 4>i 122 173 0,7 25 ans f 5,2 97 i38 0,7 I 6,5 78,5 112 0,7 Enfant l ^^ ^^ ^^'^ «'75 ) IIj2 48 67,5 0,71 17 70 104 o,bb 10 ans f 9 58 82 0,707 \ 8,1 66 90 0,73 [II 5o 68,5 0,73 Enfant V 12,5 44'^ ^i»^ ^•7^ de < 10,4 52,5 71,8 0,73 7 ans / 8,3 59,5 88,2 0,67 l 9,2 58 80,3 0,71 Les moyennes du rapport -^ faites avec tous les nombres détermi- nés dans mes exj)ériences seraient les suivantes : Homme de 36 ans 0,71 » de 23 ans 0,71 Femme de 35 ans 0,69 » de 25 ans 0,7 Enfant de 10 ans 0,7 » de 7 ans 0,71 Les valeurs extrêmes trouvées, dues à des écarts de régime, à des alimentations excexitionnellement salées, des libations copieuses, sont 0,64 et 0,77. 11 semble donc que, toutes les fois que les fonctions du rein s'eftec- tueront normalement, le rapport -^ sera voisin de 0,7, tandis que, Pi CH. MAURAIN. — SIIR LES COHÉREURS A DIÉLECTRIQUE SOLIDE 281 s'il y a circulation trop rapide clans le rein ayant un épithéliuni sain^ le rapport -^ devra se rapprocher de l'unité, puisque les échanges se 1°) feront mal en un temps trop court. Au contraire, s'il y a stase rénale, les échanges auront une grande importance , la teneur en chlorure de sodium diminuera , tandis que la teneur en sels extraits du sang augmentera , alors , p conservant sensiblement sa valeur et p, augmentant, le rapport -^— diminuera. Si maintenant l'épithélium est altéré, les échanges ne se feront plus normalement et nous trouverons une valeur différente de -^ • Ordinairement l'altération épithéliale gêne l'échange moléculaire; nous devrons donc trouver , pour le rapport considéré , une valeur plus grande que 0,7. Les renseignements que l'on peut tirer de cette étude, joints à ceux que l'on peut tirer de la cryoscopie de l'urine me semblent devoir être précieux pour se faire une idée de l'activité plus ou moins grande de la circulation rénale , de la perméabilité des tissus , etc. Je ferai remarquer encore que les mesures de résistivité se fai- sant rapidement, avec un appareil des j)lus simples et j)eu coîiteux, on pourra les utiliser en clinique pour la confirmation des diagnos- tics et suivre la marche des affections du cœur et du rein. M. Gh. MAURAIN Maître de Conférences à la Faculté des Sciences de Rennes SUR LES COHËREURS A DIÉLECTRIQUE SOLIDE [538-562] — Si'ance du 5 août — L'action des oscillations électriques sur les conducteurs formés d'une limaille métallique et d'un diélectrique solide, agglomérés par la fusion de celui-ci, a paru difficile à expliquer dans la théorie de Lodge, basée sur l'hypothèse de la formation entre les grains de ponts conducteurs de poussières métalliques, et elle a été un des principaux arguments appuyant l'hypothèse d'une modilieation 282 PHYSIQUE du diélectrique sous l'influence des ondes électriques , invoquée par M. Branly pour ex[»liquer les propriétés des radioconducteurs. M. Fromme (*) suppose que de petites étincelles se produisent entre les grains et i^ercent dans le diélectrique des canaux dont les parois se recouvrent de poussières métalliques, mais il n'a pas appuyé cette hypothèse par des faits (**). J'ai été amené à faire sur ce sujet de nondjreuses expériences au cours d'essais sur les propinétés des diélectriques solides en couches très minces; j'espérais en déduire quelques renseignements sur la conductibilité des couches minces de diélectriques ; mais les résultats que j'ai obtenus me paraissent pouvoir s'interpréter en admettant que l'action prépondérante des oscillations électriques n'est autre que celle qui s'exerce sur les cohéreurs ordinaires; elle intervien- drait ici de la manière suivante. Les diélectriques utilisés subissent une contraction considérable par leur solidification et surtout par leur refroidissement à l'état solide; ce retrait porterait surtout , dans le cas qui nous occupe, sur les couches minces qui séparaient les grains à chaud, de sorte qu'entre les grains se produisent sans doute 4es cavités plus ou moins nombreuses sans diélectrique solide ; dans ces cavités peut s'exercer le mode d'action des ondes sur les cohé- reurs ordinaires. Voici des faits de genres divers qui appuient cette hypothèse et qui, indépendamment de toute interprétation, présentent quelque intérêt pour l'étude des substances hétérogènes. Variation ai>ec la température de la résistance d' agglomérés limaille-diélectrique . — La résistance de ces agglomérés augmente beaucoup quand la température croit; cette augmentation a déjà été signalée par M. Fronune dans la note citée plus haut; il a constaté, par exemple , que la chaleur de la main suffit pour élever beaucoup la résistance. J'ai étudié cette variation avec diflerents dispositifs; par exemple, l'aggloméré est obtenu dans un tube de verre mince; deux larges électrodes métalliques permettent de l'intercaler dans un circuit; le tube de verre traverse un ballon plein d'eau qui est chauffé assez lentement pour que le diélectrique suive la variation de température ; la résistance est mesurée au pont de Wheatstone; j'ai constaté que (•) C. Fkomme, Wied. Ann., t. LVIII, p. yfi: i8y(i. (**) On trouvera un excellent résumé des faits connus et la bibliographie de la ques- tion dans un article de M. amotte, Éclairage électrique, t. XXII, p. 4S1-490; 1900. CH. MAURAIN. — SUR LES COHÉREURS A DIÉLECTRIQUE SOLIDE 283 les variations ne proviennent pas , clans les cas étudiés ici , de phé- nomènes de polarisation, dont je n'ai trouvé aucune trace. L'accroissement de résistance devient extrêmement rapide pour une certaine température qui dépend de la nature du diélectrique (aS à 32" pour la paraffine, qui fond à 53"; 3o à 35" pour le blanc de baleine, qui fond à 44°) • '^i on accepte l'hypothèse faite plus haut, cet accroissement proviendrait, au moins en grande partie, de ce que le diélectrique, en se dilatant, se répand peu à peu dans les interstices que son retrait avait laissés libres , supprimant ainsi les contacts plus ou moins conducteurs qui avaient pu s'y produire entre les grains de limaille. Voici quelques exemples de variation (R est indiqué en ohms) : LiinaiUe de cuivre — paraffine (cylindre de 3""", 6 de long et i'"",^ de diamètre). i4° 19° 24° 29° 30° Si" 32» et au-dessus R oW,3 0,6 3 5o 3 ou 400 4 ou 5ooo supérieure à plusieurs millions d'ohms Limaille de fer — blanc de haleine (cylindre d'environ a*""^ de long, 4"'"^ dp diamètre). 12° i5° 21» 23» 25° ,5 3o» 3i° 33° 34" et au-dessus R i3oW 160 200 5oo i.ooo 20.000 4 ou 5oo.ooo environ S.oco.ooo supérieure à 10 millions Action des oscillations électriques. Sa variation avec la tempéra- ture. — Les agglomérés limaille-diélectrique fonctionnent comme cohéreurs à froid, mais l'action des étincelles (mesurée par le rap- port des valeiu's de la résistance avant et après la production des oscillations) est bien moindre en général que pour les cohéreurs formés de limaille seulement. D'ailleurs, l'action des étincelles s'atténue quand on cliauffe ces agglomérés et elle semble disparaître à partir de la température pour laquelle se produit l'accroissement rapide de résistance que je viens de signaler. Tout ceci s'interprète bien avec l'hypothèse d'une action ordi- naire dans des cavités : celles-ci ne comprennent qu'une faible partie de la masse, d'où la faiblesse relative de l'action; lorsque la température s'élève, elles disparaissent peu à peu. d'où la diminu- tion de l'action. L'action des chocs sur la résistance de ces agglomérés , lorsqu'elle a été diminuée par l'action des étincelles, est beaucoup moins nette 284 PHYSIQUE que pour les cohéreurs ordinaires et très irrégulière ; en général , le choc augmente la résistance, mais sans la i'aire revenir jusqu'à sa valeur primitive. Cela peut s'expliquer ainsi : les poussières métal- liques qui se forment, d'après notre hypothèse, dans des cavités, se portent en grande partie sur les parois, où elles sont moins mobiles que lorsqu'elles sont simplement suspendues en pont entre les grains. L'observation au microscope, que j'ai essayée de bien des façons, ne m'a jamais rien donné, dans les conditions correspcmdant à toutes les expériences dont il est question ici, c'est-à-dire l'oscillateur (de Hertz) étant placé à quelques mètres du cohéreur. Variation de V action des étincelles avec la pression. — Si l'action des étincelles s'exerce dans des cavités, on doit l'atténuer en com- primant la masse , car on fait ainsi disparaître progressivement les cavités. C'est ce que l'expérience vérifie très bien : L'aggloméré limaille-diélectrique, sous forme de cylindre court, est placé dans un tube pratiqué dans un bloc de fibre isolante et serré entre deux cylindres de laiton qui servent d'électrodes; ces cylindres entrent à frottement dans le tube. Cette disposition permet de comx^rhner énergiquemeiit la masse, ce que je faisais au moyen d'une forte vis en bois (à la température ordinaire). (3n constate que l'action des étincelles s'alfaiblit à mesure que la compression augmente et devient même insensible. On pourrait penser que l'alTaiblissement de l'action des étincelles provient de ce que la pression améliore tellement les contacts entre les grains , en les serrant les uns contre les autres , qu'il n'y a plus lieu pour les oscillations électriques d'agir (la résistance diminue, en l'absence de toute action des oscillations, à mesure que la x>i'es- sion augmente). Mais, si leur action prépondérante était une action s'exerçant entre les grains séparés par du diélectrique solide , cette action trouverait évidemment à s'exercer, même après un fort serrage, tandis qu'on s'explique bien la diminution de l'action des oscillations, si on admet que celle-ci s'exerce surtout à travers les cavités sans diélectrique solide. Étude d'un seul contact. — On peut obtenir ainsi des indications plus nettes qu'en utilisant des agglomérés dans lesquels existent de multiples contacts mal définis. Le contact est produit entre la pointe de la vis dun sphéromètre et la paroi d'une petite cavité pratiquée dans un bloc de cuivre. Le cil. MAURAIN. — SUR LES COHÉREURS A DIÉLECTRIQUE SOLIDE 285 tout est placé dans une étuve. On arrive facilement à un réglage tel que le contact soit, dans lair, sensible aux oscillations; on place alors dans la cavité un diélectrique, et on chauffe l'étuve de manière que le diélectrique fonde et s'intercale entre les deux électrodes; puis on laisse refroidir, mais en chauffant de temps en temps la sur- face du diéclectrique contenu dans la petite cavité, de manière que sa solidification commence doucement par le bas; dans ces condi- tions, il y a toute chance pour qu'on obtienne, après refroidissement, la séparation des deux pôles du contact par une lame diélectrique solide. Or, jamais je n'ai pu obtenir un tel contact sensible aux oscillations, quelle que soit l'épaisseur de cette lame diélectrique solide, que j'ai fait varier de plusieurs façons. De ])lus si. le diélectrique étant ainsi en place, on agit sur la vis de manière à réaliser le contact métallique en écrasant le diélec- trique , on retrouve facilement ensuite une distance où le contact est sensible aux oscillations ; l'action peut en effet s'exercer alors dans le petit espace qui est resté libre à travers le diélectrique , quand on a relevé la vis. Action possible à travers le diélectrique . — De ce qui précède doit-on conclure que ce mode d'action des oscillations sur les cohé- reurs à diélectrique solide est le seul qui intervienne ? Il paraît plus probable que, dans certains cas, intervient aussi une action s'exerçant à travers le diélectrique solide ; de nombreuses expériences, en par- ticulier celles de M. Branly, ont montré que les mélanges limaille- diélectrique liquide agissent comme cohéreurs ; les actions qui sont assez puissantes pour vaincre la résistance au déplacement d'un liquide peuvent aussi vaincre la cohésion d'une mince couche solide ; il est possible qu'il se produise de petits canaux , comme le suppose M. Fromme; il est possible aussi qu'il se produise une modification spéciale du diélectrique, mais rien ne le prouve, et les résultats des expériences peuvent s'expliquer sans faire intervenir une telle modi- fication (*). Les résultats que j'ai obtenus en prenant comme diélectrique de la cire molle , intermédiaire entre un solide et un liquide , semblent bien mettre en évidence une perturbation mécanique due à l'action des oscillations : on prépare le cohéreur en pétrissant à la tempéra- ture ordinaire une limaille , du fer porphyrisé par exemple , avec de (*) M. Lhuillier a fait de nombreuses expériences de genres divers, sans parvenir cà rendre conducteur un diélectrique sous faible épaisseur. (C. R. de l'Acad. des Seiences, t. CXXI, p. 345 ; 1895.) 286 PHYSIQUE la cire molle ; quand le mélange est bien foi-mc , on le comprime modérément dans le tube à parois en fibre dont j'ai parlé plus haut. L'aggloméré, étant ainsi préparé à froid, ne subit pas ensuite de con- traction et la masse ne présente sans doute pas de cavité; or, les oscillations électriques réduisent cependant beaucoup la résistance ; mais il se présente cette particularité que la résistance reprend peu à i)eu une valeur du même ordre que sa valeur primitive. L'action des oscillations a sans doute été de percer enti-e les grains des pas- sages où la conductibilité s'est améliorée par la formation de pous- sières métalliques ; mais le diélectrique mou reprend peu à peu, après cette déformation, sa forme primitive, en obturant les passages. Ce retour à la résistance primitive est plus ou moins rapide ; par exemple, une résistance de 4-ooo.ooo d'ohms étant descendue à 20.000 sous l'action des oscillations, a ensuite pris la valeur 200.000''^ en quelques secondes, puis, en une ou deux minutes, environ 2.000.000. Une autre résistance de quelques millions d'ohms, pour laquelle le serrage avait été plus énergique, fut réduite à 8.5oo par l'action des oscillations et remonta beaucoup plus lentement : ao.ooo*" après quelques minutes, 3oo.ooo après quelques heures. Si on fait aair à nouveau les oscillations, la résistance remonte plus lentement que la première fois. Phénomènes particuliers observés avec la paratoluidine et la naphtaline. — L'action de la température sur les agglomérés formés dune limaille et de paratoluidine ou de naphtaline est d'abord sem- blable à celle indiquée plus haut pour la paralline ou le blanc de baleine : la résistance croît avec la température, cette variation devenant extrêmement rapide à une certaine température (22° à 26" pour la paratoluidine, qui fond à 'icf; 45° à 5o'^ pour la naphtaline, qui fond à 79°). Pour la paratoluidine, la résistance, devenue très grande, demeure en cet état si on continue à faire croître la température, comme cela a lieu pour la parafline ou le l>lanc de baleine ; mais, tandis qu'avec ces diélectriques on trouve pendant le refroidissement des valeurs de la résistance de même ordre que celles obtenues pendant que la température croissait , avec la paratoluidine la résistance a bien une variation de même allure que pendant la chauffe, mais avec des valeurs plus gi-andcs ; parfois même les agglomérés à la paratoluidine conservent après retour à la tenq)érature ordinaire une résistance du même ordre que celle qu'ils avaient acquise pendant le chauffage après la période de variation rapide. 287 Les oscillations électriques agissent toujours à la température ordinaire, que la résistance ait sa valeur avant chauffage (quelques milliers d'ohms) ou la valeur très grande qu'elle conserve parfois après chauffage ; à chaud au contraire . au-dessus de la température de variation rapide, elles n'agissent pas. Pour la naphtaline, les résultats sont plus complexes : si on conti- nue à faire croître la température après la période d'accroissement rapide de la résistance , celle-ci se met à décroître , très rapidement d'abord, puis de plus en plus lentement; elle est représentée ainsi, en fonction de la température , par une courbe présentant un maxi- mum extrêmement accusé et on trouve à peu près la même courbe à la chauffe ou au refroidissement. L'action des étincelles est également plus complexe qu'avec les autres diélectriques, car j'ai pu obtenir une diminution de résistance à chaud (au-dessus du maximum de résistance). Je n'ai pas trouvé d'interprétation satisfaisante de ces faits relatifs à la naphtaline ; ils ninhrment d'ailleurs pas ce que j'ai dit relati- vement aux autres diélectriques ; ils montrent que les propriétés de ces substances hétérogènes peuvent être très singulières et qu'il y a intérêt à en continuer l'étude : c'est ce que je me propose de faire. M. G. TISSOT Lieutenant de vaisseau , Professeur à l'Ecole navale , à Brest SUR LA DURÉE DU PHÉNOMÈNE DE " COHÉRENCE " [538.562] — Séance du 3 août — Quand on soumet un cohéreur ordinaire à l'action d'ondes élec- triques, le système subit en général une chute permanente de résistance. Les phénomènes qui se produisent lorsqu'on prolonge l'action des ondes, c'est-à-dire lorsqu'on fait agir sur le système des trains d'ondes successifs, ont été récemment étudiés par M. Hurmu- zescu. Ce ne sont pas ceux que nous visons ici. Nous nous sommes proposé de suivre la marche de la chute de résistance lors de l'action de la première onde seule et de rechercher notamment si le phéno- mène est instantané ou progressif. 288 PHYSIQUE Le coliéreur présente, avant toute action de l'onde, une résistance que nous appelerons j^ésistance de retour et dont la valeur, variable selon le type de coliéreur considéré et le régime auquel il est sou- mis, est en général assez élevée. Après l'action de la px-emière onde ou, si l'on veut, d'une seule étincelle, le coliéreur prend une résistance notablement inférieure. Comment s'effectue le passage de la première des valeurs de la résistance à la seconde? C'est le point que nous avons tenté d'exa- miner. Notre étude a principalement porté sur les cokércurs à grande résistance de retour. r Le coliéreur étudié t est disposé dans un cir- _y~\ cuit qui comprend une source P (c'est-à-dire un ^^ potentiomètre convenable) et une résistance non p inductive p dont les extrémités sont reliées res- ^— { ° * pectivement aux armatures d'un condensateur C(fg.i.) Le tube étant décohéré , sa résistance a pour valeur R, résistance de retour, et la résistance p se trouve parcourue par un courant très faible B AA\AAAAAV\AAAAAAA' WA t'/A ~H- P d'intensité i^ FlG. I. în = R + z' Le condensateur est alors cbargé à une différence de potentiel o io que l'on mesure en le déchargeant dans le balistique G. On pro- duit, au temps t, une étincelle capable de coliérer franchement le tube. Le tube, étant placé très près de l'interruption où se produit rétincelle, commence à se cohérer à l'époque t. Au bout d'un intervalle de temps 0, très petit et variable, les extrémités de la résistance p sont isolées du condensateur. La résistance du cohéreur a varié pendant la durée G, de la valeur R à une certaine valeur r, de sorte que le courant dans la résis- e . . e tance p a varié de /„ = ^ i « ' = T^f ^^^ condensateur se trouve chargé au temps t ^ H i\ une différence de potentiel pi qu'il suffit de déterminer au bahstiquc G pour connaître la valeur r prise par la résistance du tube à l'époque G. En répétant immédiatement la mesure de pi sans cohérer de nou- veau le tube, mais après une durée suffisante, on aura la valeur r^ -de la résistance du tube complètement cohéré. K K o o (1) (2) L C. TISSOT. — SUR LA DURÉE DU PHÉNOMÈNE DE " COHÉRENCE " 289 Les opérations successives sont eftectuées à l'aide d'un pendule interru])teur de Bouty. On sait que ce pendule est un pendule de torsion, constitué essen- tiellement par un levier horizontal d'une certaine masse, supporté en son centre de gravité par un fil d'acier vertical invariablement fixé à la jjartie supérieure. Le levier, écarté de sa position d'équilibre, oscille en décrivant un plan horizontal. Il porte des ponts dont les branches viennent exé- cuter les commutations voulues en passant sur les ménisques de gouttes de mercure portées par des godets placés à hauteur conve- nable. Le dispositif employé (fig. 2) comporte deux ponts et trois sys- tèmes de godets. Le levier LL' étant mobile autour de l'axe ver- tical O, le pont (i) correspond au système de godets A. Il romjit. à l'époque t, un circuit auxiliaire qui comprend une pile et une résis- tance inductive et donne naissance à l'étincelle d'extra- coin-ant qui ' provoque la cohérence du tube. Le pont (2) correspond aux sys- tèmes de godets B et D. Ce pont (2) fait communiquer le condensateur avec les extrémités de la résistance p et rompt la communication au temps ^-j- 0. Il passe ensuite sur le système de godets D et décharge le condensateur sur le balistique. On fait vai'ier l'intervalle 6 en décalant le système B par rapport au système A par le jeu de vis micrométriques qui commandent A et B. Un doigt K, porté par l'extrémité OL du levier vient couper tous les circuits au bout de l'oscillation en faisant basculer un gyrotrope de Pohl, de façon à ce que l'on puisse laisser se produire les oscilla- tions successives du levier sans être gêné dans les observations. La clmte de résistance du cohéreur ne peut, évidemment, être enregistrée au balistique par la fermeture en D qu'autant que l'étin- celle s'est produite en A avant la rupture du circuit en B. Si l'étincelle a éclaté en A après que la rupture B s'est produite, la chute a bien lieu, mais elle n'est pas enregistrée au premier passage. 19* 00 Z? 00 A Fig. 290 PHYSIQUE (1) (2) Or, l'expérience montre que, si l'on décale progressivement les systèmes de godets A et B, on passe sans transition aucune des positions pom^ lesquelles il n'y a pas de chute enregistrée , aux posi- tions pour lesquelles la chute est complète. On constate, d'ailleurs, que, quand il n'y a pas de chute enregis- trée, le fait est dû uniquement à ce que la rupture en B a eu lieu avant la production de l'étincelle excitatrice, car, en laissant un second passage se produire en D, on observe bien que le tube s'est cohéré. La chute de résistance ne paraît donc pas être progressive. Etant données les conditions de l'expérience et la construction assez gros- sière de l'appareil, on n'en saurait conclure néanmoins à l'instanta- néité du x^hénomène. Le décalage des godets, qui fait passer de la position (a) où il n'y a pas de chute enregistrée à la position (p) où la chute est complète , correspond à coup svir à une durée notable- mont inférieure à 7 -. 4.10' Nous avons essayé de reculer ces limites en utili- sant le passage d'une balle de revolver pour opérer P les commutations voulues . (lîg. 3). La balle passe dans un premier cadre (i) et coupe à l'instant t un circuit in- ductif, ce qui donne naissance à l'étincelle excitatrice. Au temps t -\- H, elle traverse le cadre (2) et vient rompre la communication des extrémités de la résistance pi non inductive, avec le condensateur qui reste chargé à la différence de potentiel pt prise par les armatures au moment de la rupture. Le condensateur est ultérieurement déchargé par la clef K dans le balistique G. On peut, dans ces conditions, rapprocher les cadres à une distance de 2 c. sans que la chute cesse d'être complète. La vitesse de la balle est mesurée, pendant l'expérience même, par la méthode de Sabine à l'aide de 2 cadres auxiliaires placés de part et d'autre des premiers, à une distance de o^^ôo l'un de l'autre. Cette vitesse mesurée est en moyenne de 200 m. à la seconde. La distance de 2 c. des cadres correspond ainsi à une durée de — ;, . t' GO f FiG. 3. C. TISSOT. — SUR LA DUREE DU PHENOMENE DE " COHERENCE 29I Mais on doit remarquer que cette durée comprend en l'espèce : 1° La durée de production de rétincelle après la rupture du circuit inductif (i) à l'époque t; 2° La durée du phénomène de cohérence ; 3° La durée d'établissement du courant dans le circuit non inductif et très résistant qui comprend le cohéreur et la résistance p ; 4° La durée de charge du condensateur. En rapprochant les cadres au-dessous de a'' , on trouve une dimi- nution notable de p?'. Mais l'etTet observé ne paraît pas devoir être attribué à la durée de l'établissement de la cohérence, car, si l'on répète l'expérience après avoii* remplacé , à priori , le cohéreur par une résistance égale à celle qu'il prend lorsque la chute est complète, on observe la même diminution de pi. La résistance p est constituée par un crayon de silicium et a une A^aleur de 5.io^ ohms. La constante de temps du circuit du cohéreur est donc très faible. Mais la durée de charge du condensateur n'est pas négligeable et c'est elle qui intervient alors vraisemblal)lement. Nous avons songé à remplacer le condensateur G par un électro- mètre à quadrants (électromètre Mascart) en sui)primant le balis- tique , ce qui revient à avoir un condensateur de très faible capacité enregistrant lui-même la différence de potentiel des armatures. Mais on se trouve alors arrêté par le fait que la balle a une certaine lon- gueur, de sorte que l'on ne peut guère placer les cadres à une dis- tance notablement inférieure à 2 c. On peut donc affirmer seulement que la durée du phénomène est notablement inférieure à — r- 10^ Certains observateurs ont essayé d'expliquer les circonstances de la réception par cohéreur en faisant appel à une durée notable du phénomène de l'établissement de la chute de résistance. Cette opinion ne paraît pas fondée , du moins dans le cas de cohé- reurs à grande résistance de retour. D'autre part, M. le capitaine Ferrie a remarqué que le cohéreur est moins sensible aux ondes faiblement amorties qu'aux ondes for- tement amorties (à égalité d'énergie émise). Ce résultat, qui est conforme à nos propres observations, serait dû, selon M. Ferrie, à ce que le cohéreur est sensible à la somme algébrique des chocs qu'il reçoit pendant la durée de la chute de résistance et impliquerait l'existence d'une durée notable de cette chute. 292 PHYSIQUE Cette durée pourrait d'ailleurs être ici simplement de l'ordre de gran- dem* de celle du passage d'un train d'ondes, c'est-à-dire de —5 pour des ondes modérément amorties d'une période de ^• Bien que nos expériences n'aient pu nous permettre de faire des mesures certaines au-dessous de ces limites, elles ne paraissent cependant pas favorables à l'idée d'une non-instantanéité du phéno- mène. Nous ne pensons j)as qu'il y ait lieu de faire intervenir la durée de la chute pour rendre compte du fait que le cohéreur est relativement moins sensible aux ondes faiblement amorties qu'aux ondes forte- ment amorties. Le fait tendrait à établir simplement que les cohéreurs , ou plus exactement que certains cohéreurs (ceux dont la résistance de retom^ est très élevée) sont des détecteurs sensibles au choc du front de l'onde. M. Charles F ABU Y Professeur à la Facullé des Sciences de Marseille EMPLOI DE LA LAMPE ELECTRIQUE A INCANDESCENCE COMME ÉTALON PHOTOMÉTRIQUE [53;.832: 535.241 — Séance du 6 août — J'ai été amené à m'occuper de cette question en vue de recherche de photométrie stellaire et solaire qui font l'objet d'un autre travail. Il était nécessaire pour ces recherches de disposer d'un étalon qui ])ût donner une intensité lumineuse bien constante avec peu de sm'- veillance et en plein air ou dans un appartement imparfaitement clos. Les étalons à flamme s'accommodent très mal de cette condition, car ils exio-ent une atmosphère parfaitement calme. D'autres condi- tions rendaient l'emploi des étalons à flamme peu commode : il est impossible de les enfermer dans un petit espace fermé , à cause des produits de la combustion; enfin, pom^ des observations en montagne que j'ai lintention d'entreprendre plus tard, les variations de la CH. FABRY. — EMPLOI DE LA LAMPE ÉLECTRIQUE A INCANDESCENCE 2Ç)i pression atmosphérique eussent été une cause très gênante d'irrégu- larité. Tous ces inconvénients devaient disparaître par l'emploi de la lampe électrique à incandescence. Cet emploi est d'ailleurs loin d'être nouveau; la plupart des laboratoires de photométrie s'en servent connue étalon secondaire pour s'allranchir des soins très délicats qu'entraîne l'emploi quotidien des étalons à flamme. L'étude de cette application des lampes à incandescence est donc en elle-même une chose utile. Lorsqu'on veut maintenir constante l'intensité lumineuse d'une lampe à incandescence, il faut maintenir son régime avec une grande précision, une variation de i pour loo sur la tension aux bornes se traduisant par une variation de 5 à G pour loo sur l'intensité lumi- neuse. Il laut donc maintenir la tension (ou, ce qui revient à peu près au même, le courant) constant à i ou i millièmes près. Les appareils de mesure usuels permettent difficilement d'atteindre cette précision. Cette constance de régime étant supposée obtenue, toute variation accidentelle de l'intensité lumineuse sera éliminée. Mais il pourra subsister des variations lentes et progressives, tenant à la modifica- tion progressive de la lampe. On ne peut espérer éliminer complète- ment ces variations et c'est pour cela que la lampe à incandescence ne peut être qu'un étalon secondaire, qu'il est nécessaire de compa- rer de temps en temps aux étalons fondamentaux; il y a cependant avantage à ce que ces changements progressifs soient aussi lents que possible, afin de rendre le moins fréquent possible l'emploi des éta- lons primaires. Or, on aperçoit immédiatement deux causes de variation progres- sive de l'intensité lumineuse : 1° A la longue, l'ampoule finit j)ar noircir et l'intensité lumineuse diminue. Ce phénomène ne se produit qu'au bout de très longtemps si l'on a soin d'employer la lampe modérément poussée et de ne jamais dépasser son régime, môme pendant un temps très court. M. Fleming a conseillé, pour retarder encore ce phénomène, d'employer des hunpes à très grande ampoule (*). 2° Avec le temps, le filament se modifie et sa résistance varie, en général augmente. Si l'on opère à tension constante, la puissance dépensée dans la lampe, w- , diminue avec le tem^îs et la lampe fai- (*) Fleming, The Photometry of elcctric lamps (Journal of institution of ciccirical cngi- neers, t. XXXII, page 119. Londres, igoS). 294 PHYSIQUE blit. A intensité constante, la puissance Rr^ augmente et la lampe peut avoir une intensité lumineuse croissante. J'ai trouvé qu'on obtenait les meilleurs résultats en faisant tra- vailler la lampe à puissance constante. Mais la puissance doit être maintenue constante à quelques millièmes près, et l'emploi des watt- mètres industriels permettrait bien difficilement d'atteindre cette précision. La méthode d'équilibre suivante m'a permis d'atteindre le résultat cherché avec une précision bien plus que suffisante. Soit L la lampe (fi g. i) à laquelle l'énergie est fournie par une batterie d'accumulateurs A, avec interposition d'un rhéostat de réglage H. Intercalons sm* le (V) circuit une faible résistance constante /'. Si je maintiens constante la dilférence de po- tentiel V aux bornes de /% la lampe fonctionnera à courant constant. D'autre part, pla- çons en dérivation aux bornes de la lampe une grande résis- tance divisée en deux parties Mil . III a et 0. bi ]e maintiens cons- tante la différence de poten- FiG. I. '■ tiel V aux bornes de a, je ferai travailler la lampe sous tension constante. Ceci posé, maintenons constant, non pas V ou V, mais leur somme V -f V, c'est-à-dire la difterence de potentiel entre les points M et N. Nous ferons travailler la lampe à un régime qui ne sera ni à tension constante ni à courant constant, mais en quelque sorte intermédiaire entre ces deux régimes. Par un choix convenable des résistances, il est facile d'arriver à ce que la puissance soit ainsi maintenue cons- tante, du moins pour des variations modérées de la résistance de la lampe, ce qui est le cas de la pratique. Soient en effet, à un certain moment, R la résistance de la lampe, i le courant qui la traverse, e la dilférence de pol^entiel à ses bornes. a ' ^ On a V = e — i — r- Le courant qui traverse a et b est —j—j- Le a -{- o ^ a -j- o e courant total dans /• est donc i -\- — ; — r et i)ar suite ^ a -\- b ^ \ = T'i 4- r — , — 7 . ' a ^ b cil. FABRY. — EMPLOI DE LA LAMPE ELECTRIQUE A INCANDESCENCE 29a On maintient constante la somme Y -f~ ^ et on lui donne une valeur E. L'équation d'équilibre est donc : y + y = E, ou ri + e ^^4^' = E (i) Ce n'est donc ni i ni e qui reste constant, mais une fonction linéaire de ces deux quantités. En introduisant la résistance de la lampe, qui est l'élément sujet à varier, on a e = Ri (12) Enfin, la puissance dépensée dans la lampe est W = Ri^ (3) Les équations (i). (2), (3) permettent d'exprimer W en fonction de la seule variable R. On trouve, en éliminant e et i : w = i-> ^- (4) On veut que cette expression ne varie pas pour une petite varia- tion de R. Il suffit pour cela d'annuler la dérivée^^de cette expression par rapport à R , ce qui conduit à la condition : r — — = R (o) Cette condition étant satisfaite, la puissance dépensée dans la lampe passe par un maximum lorsque sa résistance a la valeur R; elle ne varie que de quantités absolument négligeables lorsque cette résistance varie de quelques centièmes à partir de cette valeur. On choisira donc r, a, b, de manière que l'équation (5) soit satis- faite, en y donnant à R la valeur Ro de la résistance de la lampe. L'expression de W peut alors s'écrire : R w = ^- X «' R Ro 296 PHYSIQUE Lorsque la résistance de la lampe passe de Ro à R, la puissance vaine d'une quantité aW, et l'on a : aW /R — R,^^ W \R + R, On en déduit facilement que , pour faire varier W de i millième , il faut une variation de 6,5 pour 100 sur la valeur de R, variation tout-à-fait impossible. Ainsi, W sera maintenu constant avec une approximation bien j)lus que suffisante . pourvu que l'on maintienne E constant. On pourrait évidemment le faire en se servant d'un potentio- mètre; mais, comme la valeur de E est à notre choix (par un choix convenable des résistances a, h, r), il est plus simple d'équilibrer cette différence de potentiel par la force électromotrice d'une pile étalon. Entre les points M et N, on dispose alors un circuit dérivé, comprenant la pile E, un interrupteur K et un galvanomètre G. La lampe est à son régime, lorsqu'en fermant l'interrupteur le galvano- mètre reste immobile. Sinon, on l'y ramène en agissant sur le rhéostat H (*). Quant au calcul des résistances a, h, r, on le fait de la manière suivante : On détermine d'abord le régime sous lequel il convient de faire fonctionner la lampe; je prends celui sous lequel elle donne une (•) Il faut remarquer que la force électromotrice E, ainsi que les valeurs des résis- tances a ,h, r, peuvent varier un peu avec la température: il en résultera de petites variations sur la puissance, et par suite sur l'intensité lumineuse de la lampe. On les évite complètement en employant comme étalon la pile Weston , dont le coefficient de température est nég-ligeable , et des résistances en métal à coefficient de température nul, comme le constantan ou le mang-anine. Dans le cas où ces divers coefficients de température ne seraient pas négligeables, il est facile de calculer le coefficient de tem- pérature de la lampe, c'est-à-dire la fraction de sa valeur dont varie l'intensité lumi- neuse pour une élévation de température de i degré. Un calcul facile conduit au résultat suivant : Soient V3 et a. les coefficients de température de la pile et de la résistance r ainsi définis : I f/E ^ 1 dr Le coefficient de température de la puissance I rfW est donné par l'équation w dT I ^v ^-'- Or, j'ai toujours trouvé que l'intensité lumineuse d'une lampe, au voisinage de son régime normal, varie très exactement comme la puissance 2, 8 de W. Il en résulte que le coefficient de température de l'intensité lumineuse I est : I dl „ I (/ W „ ,, . . „ Q „ T^T =^'» W -^^-.^''--.«^ Il est donc très facile de le calculer et de tenir compte des variations correspon- dantes si elles ne sont pas négligeables. en. FA15UY. — EMPLOI DE LA LAMPE ÉLECTRIQUE A INCANDESCENCE 297 lumière de même teinte que la lampe Carcel. Je mesure sous ce régime la tension aux bornes et le courant, d'où je déduis la résis- tance de la lampe. On a alors entre les trois quantités à déterminer, a, h, r, les deux équations i et 5. On pourra donc choisir arbitrai- rement l'une des quantités, h par exemple, que l'on prendra assez grand pour que le courant qui traverse la dérivation a b soit très faible. Il y a avantage à choisir des lampes à filament un peu gros et par suite à courant relativement intense. J'ai construit sur ce principe plusieurs lampes étalons , les unes de 5o volts. lo bougies, les autres de quelques volts et i bougie envi- ron. Je vais donner quelques indications sur ces dernières, qui ont cet avantage qu'une très faible batterie d'accumulateurs suffit pour les actionner et que, par suite, l'ensemble est transportable. Ce sont de petites lampes (*) (il y aurait avantage à ce que l'am- poule fût plus grande) qui prennent un courant d'environ 0,6 ampère. ■■>. Û3/vâ/?o/7?étre J!ccami//3tef/rj'¥ lampe* 6^200 *s. }-- 0,SS 0,S Y 2 FiG. 2. 'Accû/na/âfeùPs On a disposé tous les appareils accessoires (résistances, rhéostat, interrupteurs) dans deux boîtes ayant l'aspect de petites boîtes de résistance et dont la figure 2 donne le schéma. La lampe est reliée (*) L'emploi d'un très petit filament dans une g:rande ampoule réalise la meilleure condition pour diminuer les chances de noircissement de l'ampoule. 2q8 PHYSIQUE par un cordon souple de i mètres de long , qui fait pour ainsi dire partie de la lampe, sa résistance étant comptée avec elle. J'ai cons- truit deux lampes complètes de ce modèle. Après les avoir compa- rées, on a laissé brûler l'une d'elles, en la comparant tous les jours avec l'autre, qui ne brûlait que pendant le temps nécessaire aux comparaisons. Après 5oo heures d'allumage, le rapport n'avait pas varié de i centième. Le maintien du régime est extrêmement facile; il suffit de donner de temps en temps un coup d'œil au galvanomètre en fermant l'interrupteur et de toucher légèrement au rhéostat, si c'est nécessaire. Enfin, lorsqu'on juge à propos de changer la lampe, il suffit de modifier légèrement les résistances a et r. Souvent même on trouve dans un même lot des lampes assez semblables pour qu'on puisse les utiliser avec les mêmes résistances; naturellement, l'intensité lumineuse ne sera pas exactement la même, c'est-à-dire qu'il faudra refaire l'étalonnage photométrique. M. le D* Stéphane LEDUC Professeur à l'École de Médecine de Nantes. PHOTOGRAPHIE PAR MOULAGE TRANSPARENT L:7-o5I — Séance du 6 août — On peut, à Faide de moulages transparents, obtenir de bonnes photographies d'objets noirs ou éteignant les rayons photogra- phiques, ayant un faible relief, petits et difficiles à mettre au point. Ce procédé est susceptible de rendre de très nombreux services ; en numismatique il permet d'obtenir facilement les photographies de toutes les monnaies ou médailles (*) ; on peut aussi , sans aucun appareil spécial, obtenir des images photographiques de coupes métalliques ou d'alliages attaqués par les acides. En histoire natu- relle, on peut photograiihier les insectes noirs et leurs différents organes, les diverses parties des plantes, feuilles et graines (**). En (*) La figure i représente la photographie ainsi obtenue d'une pièce d'or. (") La figure 2 représente la photographie d'une graine de cresson alénois. D"" ST. LEDUC. PHOTOGRAPHIE PAR MOULAGE TRANSPARENT 299 anatomie et en médecine on peut ol)tenir par ce procédé des photo- graphies de la peau que ne donne aucun autre moyen. FiG. I. a#^^^ffl l^v ~ '■^^H FiG. 2. Les figures 3 et 4 sont des photographies par mouhige transparent de la peau du pouce et de l' avant-bras. On peut employer pour le moulage diverses substances ; nous nous sommes surtout servi de gélatine, que l'on emploie pure pour les objets ayant un fort relief, ou que l'on additionne de substances absorbant la lumière, d'encre de chine par exemple, dans une pro- portion d'autant plus grande que le relief est moindre. Des procédés de moulages dilïerents peuvent être utilisés. Pour 3oo PHYSIOUE FiG. 3. FiG. 4. D"" ST. LEDUC. — PHOTOGRAPHIE PAU MOULAGE TRANSPARENT 3oi les monnaies , les médailles et les métaux , celui qui donne les meil- leurs résultats et permet d'éviter facilement les bulles d'air qui altèrent le moulage en adhérant à la surface du métal, consiste à placer la médaille à mouler sur une plaque de verre et à couler sur elle une solution de gélatine à 20/100. à une température telle qu'elle ait la consistance d'un sirop visqueux; on ne laisse tomj^er ainsi que la quantité de gélatine nécessaire pour recouvrir la médaille; on place sur cette gélatine une lame de verre mince , qui étale la géla- tine; s'il existe des bulles d'air à la surface du métal on les aperçoit facilement et on les chasse par des petits mouvements latéraux de la plaque de verre. On laisse la préparation se refroidir et la gélatine bien prendre, puis on i)lace la lame de verre en dessous, la médaille en dessus et, à l'aide d'une petite pince à grifl'e. on démoule sans difliculté la médaille. On a ainsi un cliché en relief, dans lequel les creux de la médaille sont en noir et les saillies ayant produit les creux du moule laissent passer la lumière. On laisse sécher cette préparation qui donnera ensuite avec la lanterne d'agrandissement, des clichés négatifs, c'est-à-dire donnant des papiers positifs sur lesquels les saillies des médailles viendront en blanc et les creux en noir. Si l'on veut avoir des épreuves sans agrandissement, on tirera les négatifs directement par contact à l'aide du moule. Le moulage des insectes, des organes de plantes, des graines, etc., se fait en étalant uniformément une couche de gélatine à la surface de la jilaque de verre et en moulant l'objet à sa surface au moment où elle commence à prendre. Pour le moulage de la peau, il faut également couvrir la plaque d'une couche bien uniforme de gélatine fortement teintée par de l'encre de chine ; à l'instant où elle commence à prendre, on l'applique à la surface de la peau à mouler et l'on place sur le dos de la x^laque un vase en verre mince contenant de la glace ou un mélange réfri- gérant ; sans cette précaution , la chaleur du corps empêcherait la gélatine de se solidifier ; après quelques minutes de refroidissement le démoulage se fait facilement. Nos épreuves montrent, par les détails que l'on peut ainsi obtenir, que cette méthode x^ermet de fixer par la photographie les particularités anatomiques et pathologiques de la peau. 3o2 PHYSIQUE M. le D' Stéphane LEDUC Professeur à l'École de Médecine de Nantes CHAMPS DE CRISTALLISATION ET CRISTALLOGÈNIE [548.5] — Scnurc du 6 août — Lorsqu'on laisse dessécher une solution colloïde i^ure, on obtient un solide amorphe, homogène, isotrope. Si l'on a préalablement ajouté à la solution colloïde une substance cristallisable, on obtient des formes régulières qui ne sont pas celles des cristaux ; ces formes résultent évidennnent de l'intervention, pendant la solidification, de la force de cristallisation, c'est-à-dire de la force qui tend à diriger les molécules cristalloïdes dissoutes vers les centres ou noyaux de cristallisation ; il est aisé de reconnaître que les molécules des corps cristallisables entraînent dans leurs mouvements les molécules colloïdes et donnent ainsi naissance aux formes régulières cons- tatées. La cristallisation dans les colloïdes exerce donc une action morphogénique constante, dont le rôle dans la nature peut être très étendu, puisque tous les tissus végétaux et animaux résultent do la solidification de solution de colloïdes et de cristalloïdes mélangés. La cristallisation doit donc intervenir dans la morphogénie des êtres vivants. Nous avons indiqué cette action et expliqué son méca- nisme dans une note à l'Académie des Sciences, du 17 février 1902. Nous avons défini le champ de cristallisation, l'étendue de l'espace où s'exerce l'action d'un centre ou noyau de cristallisation. En éten- dant sur une plaque de verre une solution formée d'un mélange d'une substance cristallisable et d'un colloïde, les molécules s'orientent et se déplacent de façon à représenter, après la dessicca- tion, les directions suivant lesquelles elles ont été sollicitées, c'est-à- dire à tracer les lignes de force du champ de cristallisation. La ])ré- paration peut servir comme un cliché ordinaire pour en tirer des photographies avec la lanterne d'agrandissement. Suivant la propor- tion du colloïde, gélatine, gomme, albumine, etc., suivant la concen- tration du corps cristallisal)le et la rapidité de la dessiccation on obtient le champ seul, sans cristal perceptible au centre ou le champ avec un cristal plus ou moins complètement formé ; ces dernières D"" ST. LEDUC. — CHAMPS DE CRISTALLISATIOX ET CRISTALLOGÉME 3o3 2)réparations renseignent sur les rapports entre les cristaux et leurs champs. Nous avons , par ce pro- cédé, étudié la cristallisa- tion du chlorure de sodium et recueilli des faits dont rinterjîrétation doit éclai- rer la cristalloaéiiie. Avec une proportion suf- fisante de colloïde, le chlo- rure de sodium donne des croix simples comme celle de la figure i. Avec une proportion un peu moindre de colloïde; on obtient un champ de cris- tallisation complet, comme celui de la figure 2. On voit que ce champ est formé de deux axes perpendicu- laires, axes de cristallisa- tion sur lesquels s'élèvent de part et d'autre des lignes perpendiculaires surtout marquées dans la direction qui tend à sortir du champ; enfin on peut observer une quatrième ramification en- core perpendiculaire à la dernière. C'est le plan le plus commun du champ de cristallisation du chlorure de sodium, dans lequel on trouve toujours les deux axes perpendiculaires. La figure 3 représente une forme plus rare du champ, dans laquelle les lignes de force sont parallèles aux iixes de cristallisation re- Fk FiG. 2. FiG. 3. 3o4 PHTSIQUE FiG. 4. FlG FiG. 0. présentant des sortes de canaux dans lesquels on aperçoit des granulations, globulites , semblant se rendre vers le centre de cristallisation. La figure 4 représente un cristal au milieu de son champ; on voit que la di- rection des axes de cris- tallisation est celle des dia- gonales du cristal et que dans cette direction le cris- tal présente une belle croix blanche. Si les cristaux cu- biques de chlorure de so- dium sont homogènes et isotropes en ce qui concerne la réfraction et la polarisa- tion, on voit qu'ils ne le sont pas en ce qui concerne l'absorption de la lumière La ligure 5 représente un cristal plus complet avec son champ; il existe au cen- tre un cristal formant un novau dont les diagonales coïncident avec les axes de cristallisation ; puis, sur chacun de quatre côtés formant la projection des quatres faces latérales du cristal, se sont édifiés des prismes, par suite desquels on trouve constitué un nou- veau cristal ayant tourné de 45° par rapport au noyau et ayant par consé- quent les axes de cristallisa- tion perpendiculaires aux quatres faces latérales. MACÉ DE LÉPINAY & BUISSON. — SUR LES CHANGEMENTS DE PHASE 3o5 La figure 6 représente une formation analogue à celle de la figure 5, mais avec un noyau en trémie. On peut aussi varier les formes obtenues en ajoutant aux solutions les ions H ou OH par addition d'acide clilorhydrique ou de soude. En résumé : en faisant cristalliser, sur des lames de verre, des mélanges de solutions colloïdes et de substances cristallisables , on obtient des figures représentant les champs de cristallisation que l'on peut ainsi étudier. Cette méthode pei-met d'obtenir et d'étudier les diverses forma- tions des cristaux et leur rapport avec leurs champs, ce qui ren- seigne sur la cristallogénie. La cristallisation dans les solutions colloïdes a toujours pour con- séquence la production de formes variées et doit, par conséquent, intervenir dans la morphogénie des êtres vivants formés par la soli- dification de solutions colloïdes et cristalloïdes mélangées. Les champs de cristallisation peuvent servir à caractériser les substances. MM. J. MAGE DE LEPINAY et H. BUISSON A Marseille. SURÏLES CHANGEMENTS DE PHASE PAR RÉFLEXION NORMALE DANS LE QUARTZ SUR L'ARGENT [535.3i2] — Séance du 6 août — Les recherches que nous avons entreprises sur ce sujet l'ont été accessoirement , dans le com*s de nos essais préliminaires sur notre méthode nouvelle de mesure optique des épaisseurs (*). Cette dernière repose sur l'observation successive de deux phéno- mènes d'interférence produits par une même épaisseur de quartz, dans des conditions identiques de température et de pression. Ce sont, d'une part, les |franges mixtes, l'un des faisceaux interférents traversant la lame, d'épaisseur e, d'indice absolu N, l'autre l'air, d'indice absolu v ; leur ordi*e d'interférence p^ est lié à e, N et v par : (N — v) e = /), A f ) Comptes rendus , t. CXXXV, p. 283. 20* 3o6 PHYSIQUE Ce sont, d'autre part, les franges des lames à faces parallèles, l'un des faisceaux interférents étant réfléchi par la face antérieure, l'autre par la face postérieure de la lame à étudier, franges dont l'ordre d'interférence p.^ est lié à e et N par aNe =z p^ A De ces deux relations, on déduit à la fois : Ce serait sortir de notre sujet que de décrire ici l'appareil employé, les méthodes d'observation et de calcul. Signalons uniquement ce fait : dès que l'épaisseur de la lame dépasse un centimètre , la mé- thode du spectre cannelé est inapplicable , par suite de l'ordre élevé d'interférence des franges des lames parallèles et du resserrement excessif des cannelures du spectre ciui en est la conséquence. Nous opérons donc en lumière homogène (radiations rouge, verte et bleue du cadmium). Les franges des lames à faces parallèles se présentent alors sous la forme d'anneaux concentriques (anneaux de Lummer- Michelson). La partie fractionnaire s^ de l'ordre d'interférence au centre est alors proportionnelle, en lumière réfléchie, au carré du diamètre d.2 du premier anneau sombre ; on a donc : Px = q. + s. = ^2 + h(P, où q.2 est un nombre entier et h un coefficient connu d'avance. Cette méthode , appliquée sous cette forme à des lames de plus en plus épaisses, peut présenter des difficultés qu'il nous importait de prévoir et d'étudier. Elles peuvent provenir de ce que les radia- tions verte et bleue du cadmium ne sont pas parfaitement homo- gènes, la raie j)Hncipale étant accompagnée de satellites plus faibles, étudiés par Michelson, puis par Perot et Fabry. De l'existence de ces satellites , à chacun desquels correspond un système particulier d'anneaux et de la superposition de ces difl'érents systèmes aux anneaux de la radiation principale , peut résulter tout à la fois une diminution de visibilité des franges et, ce qui est plus grave, un déplacement, un changement apparent de diamètre des anneaux sombres ^av rapport à celui des anneaux que donnerait la radiation principale si elle était seule i^'). Ce double eiTet, insensible pour un ordi'e d'interférence relativement faible, croît d'alDord avec l'épaisseur de la lame étudiée et varie ensuite avec elle , suivant une loi d'ailleurs assez complexe. Pour éliminer cet efl'et , il suffit de substituer à l'observation des (*) Nous avons constaté l'existence de ce dernier efifet pour une lame de un centimètre d'épaisseur dans le cas de la raie verte de l'arc au mercure. MACÉ DE LÉPINAY & BUISSON. — SUR LES CHANGEMENTS DE PHASE 807 anneaux de Michelson dans la lumière réilécliie, obtenus avec des surfaces nues, celle des anneaux transmis obtenus en recouvrant les deux surfaces de la lame d'argentures translucides (Bouloucli, Perot et Fabry). L'emploi des anneaux ainsi obtenus serait avantageux même dans le cas des lames les plus minces, car les anneaux brillants, se pré- sentant, comme on le sait, sous l'aspect de lignes déliées se détachant sur un fond obscur, se prêtent particulièrement bien à des mesures précises. Pour les grandes épaisseurs, cet emploi peut devenir abso- lument nécessaire. Dans la lumière réfléchie, en eflet, les anneaux observés correspondent à une radiation moyenne mal définie. Dans la lumière transmise , au contraire , les anneaux brillants de chacun des satellites , grâce à leur étroitesse , se séparent de ceux qui sont dus à la radiation principale, de sorte que l'on peut faire ^lorter les mesures exclusivement sur ces derniers. Mais ici intervient une complication. Des deux faisceaux princi- paux interférant en un point quelconque du champ , l'un a été direc- tement transmis, l'autre s'est réfléchi deux fois dans l'intérieur du quartz contre l'argent. Or, chacune de ces réflexions sous incidence normale est accompagnée d'un changement de phase qu'il importe de connaître et qui est fonction à la fois du milieu, de la longueur d'onde et de l'épaisseur de la couche d'argent. A ce sujet, les résul- tats des expériences de Wernicke (*) et de Kath (**) ne pouvaient être considérés comme suflîsants. D'une part, ils sont relatifs à la réflexion dans le mica contre l'argent, d'autre part, la méthode employée par l'un et l'autre de ces auteurs ne peut se prêter à des mesures précises pour des raisons données plus loin. Deux méthodes ont été successivement employées et appliquées par nous aux trois radiations rouge (R), verte (V) et bleue (B) du cadmium. La lame de quartz à faces parallèles n'avait qu'un centimètre d'épaisseur. Dans ces conditions les satellites des radiations princi- pales ne pouvaient modifier l'aspect des anneaux réfléchis (***). Première méthode. — Elle est directe, en tant qu'elle nous demie direc- tement les corrections à apporter aux ordres d'mterférence mesurés en lumière transmise par une lame recouverte de demi-argentures. Elle est, d'autre part, deux fois plus sensible que l'autre. O Wied. Ann., t. LI, p. 448 et t. LU, p. 5i5. 1894. (**) Wied. Ann., t. LXII, p. 328. 1897. (***) Cela ressort en particulier de la concordance des mesures de rapport des lon- gueurs d'onde des trois radiations principales du cadmium effectuées par Michelson (anneaux rélléchis) et par Perol et Fabry (anneaux transmis). 3o8 PHYSIQUE Une lame de quartz à faces bien parallèles est argentée simultanément sur ses deux faces (*), à mi-hauteur seulement. Elle est recouverte d'un écran percé de deux fenêtres : l'une A, en face de la i)artie argentée; l'autre B, en face de la partie dénudée. Une image munochromatique de la source est projetée sur l'ouverture B; on mesure le diamètre d^ du premier anneau sombre. L'ordre d'interférence au centre est p^ -]- hd\. Déplaçons alors la lame, de manière à substituer l'ouverture A à l'ouver- ture B. et supposons pour un instant qu'à ces deux ouvertures corres- pondent des épaisseurs parfaitement identitpies de la lame. Dans ces conditions, s'il n'y avait aucun changement de phase par réllexion sur l'argent (**), les anneaux bi"illants transmis à travers les deux argen- tures en A et, en particulier, le premier d'entre eux aurait même diamètre que les anneaux sombres réfléchis en B. Comme il n'en est rien, mesurons le diamètre d^ du premier amieau brillant. L'ordre d'interférence au centre est : P, 4- hd\ L'accroissement de cet ordre d'interférence dû à l'effet de deux réflexions dans le quartz sur l'argent est alors donné par : Pi—Po + h id\ — d\) = q, + £, Ce nombre mesure le retard de phase dû à ces deux réflexions, exprimé, comme nous le ferons par la suite, en périodes. La valeur absolue du retard s'obtiendi'ait en multipliant ce même nombre par A. Nous devons faire, avant d'aller plus loin, deux remarques appli- cables également à la seconde méthode. Nous effectuons le calcul comme si le changement de phase étudié était un retard de i)hase. Cela revient simplement à considérer ce retard comme une grandeur algébrique. En fait, les nombres entiers Pj et po et, par suite q.^ étant jusqu'à nouvel ordre indéterminés, la partie fractionnaire, qui est positive d'après notre mode de calcul, est seule actuellement connue. Si nous parvenons, comme nous le ferons dans la suite, à déterminer la véritable valem* de q^. deux cas pourront se présenter. Si q. est nul ou positif, il s'agit réelle- ment d'un retard de phase; si nous trouvons pour q, une valeur négative, le retard de phase est négatif; en d'autres termes il s'agit en réalité d'une avance de phase. Nous avons supposé que les deux régions A et B de la lame avaient des épaisseurs identiques. Quelque bien travaillée qu'elle puisse être, il n'en est jamais ainsi. Mais il est facile d'en tenir compte. La lame étant désargentée sui' toute son étendue, nous (*) A cet effet, la lame est placée verticalement dans le bain d'arp-enture. (•*) Ou , plus rigrourcusement , si le chang-ement de phase était le même que par réflexion dans le quartz contre l'air. — Mais on sait que ce dernier est nul. MACÉ DE LÉPINAY & BUISSON. — SUR LES CHANGEMENTS DE PHASE SOQ comparons les diamètres da- du clu premier anneau noir en lumière réfléchie, en A et B. Le retard dû à la diiTérence d'épaisseur, lors- qu'on passe de B à A, est : pj^h {du — d'b). Gomme d'ailleurs ce retard (considéré toujours comme une gran- deur algébrique) est très petit, la valeur de p, qui est o ou i , est immédiatement connue. Ce retard atteignait, dans nos expériences, 0,143 pour la radiation V, ce qui correspond à un accroissement d'épaisseur de of^,023 seulement pour deux régions distantes de I centimètre environ. Ce retard de phase doit être retranché du retard apparent dû à l'argenture. Deuxième méthode. — Celle-ci présente une certame analogie avec celle de Weriiicke (*). La région B étant toujours dénudée, la région A n'est argentée que sur la face opposée à la source. On mesure les diamètres des anneaux soml)res, réfléchis, d^ en A et d^ en B. Le retard de phase dû à une seule réflexion dans le quartz sur l'argent est domié (sauf la correction d'épaisseur) par 7>> —P, + h {(1\ — d\) = g, + £,. Comme vériflcation, si l'on peut appliquer ces deux méthodes dans des conditions identiques d'argenture, on doit trouver : Comme les entiers y, et q.,. sont incoimus, la vériflcation ne peut porter, pour le moment du moins, que sur les parties fractionnaires des deux membres de cette égalité. On pom-ra, toutefois, en déduire l'ordre de parité de q^. Si q^ est pair, on aura si q.^ est impair, _ e., -1 — ■:^ £ £, ^ — -|- o,5o. 2 Ce dernier cas est celui qui s'est trouvé réaUsé dans nos expériences (**). (■) La lumière blanche , réfléchie normalement sur une lamelle de mica argentée sur l'une de ses faces, sur la moitié de sa hauteur, tombe sur la fente d'un spectroscope. On obliont deux spectres cannelés superposés. La partie fractionnaire du cliangemeut de phase par réflexion sur l'argent se déduit du déboîtement des franges noires de l'un des spectres par rapport à celles de l'autre. ^ (**) C'est ainsi que nous avons trouvé avec une argenture d'épaisseur moyenne : £, — 0,64, Sa = o,3o. On a bien (aux erreurs près d'expérience) ,,, o,3o , . «M = -^ + 0,00 3lO PHYSIQUE Ces deux méthodes ne peuvent être, en général, indifréremment employées. Si l'épaisseur d'argent et, par suite, son pouvoir réflec- teur, sont suffisants, les anneaux transmis par double argenture se prêtent à des mesures très précises , tandis que les anneaux réfléchis avec une seule argenture, étant dus à l'interférence de faisceaux d'intensité notablement différentes, sont indistincts. C'est précisé- ment dans des conditions analogues, défectueuses par suite, que se sont placés Wernicke et Kath. Pour des épaisseurs d'argent extrê- mement faibles, au contact desquelles le pouvoir réflecteur du quartz est à peine supérieur à celui du quartz contre l'air, les anneaux transmis sont peu discernables, tandis que les anneaux réfléchis avec une seule argenture tendent à devenir aussi nets qu'avec des surfaces nues La seconde méthode s'impose, alors, quoique bien inférieure à l'autre. Les épaisseurs d'argent ont été mesurées, pour les plus fortes, par la méthode de Fizeau (*), en transformant l'argent en iodure et examinant les colorations de la couche d'iodure obtenue. Pour les plus faibles, l'épaisseur de l'iodure a été déterminée en recouvrant le côté du quartz partiellement ioduré d'une lame de verre et obser- vant .en lumière monochromatique le déboîtement des franges pro- duites dans les deux lames minces d'air entre verre et quartz, d'une part, entre verre et iodure, d'autre part. Ce procédé est peu précis. Les résultats obtenus sont résumés dans le tableau suivant, où n'ont été inscrites que les parties fractionnaires s, du retard de phase dû à une s^^ule réflexion dans le quartz sur l'argent. Épaisseurs d'arg-ent eu ppi R V B 73 >> D o,63 o,65 40 0,65 o,655 0,67 37 o,63 0,64 o,65 3i 0,59 o,63 0,64 i5 0,61 o,63 o,63 i3 o,5o o,56 0,57 7 0,20 o,3i o,36 5 o,i3 0,18 o,3o De l'examen de ces nondjres ressortent les conclusions suivantes : 1° Quelle que soit la radiation considérée, l'excédent fraction- naire s, tend régulièrement vers zéro en même temps que l'épaisseur d'argent. Comme il doit en être nécessairement de même du change- (•) Comptes rendus, t. LU, p. 2:4- i86i. (**) Mesure non effectuée, Targeiilure étant opaque pour le rouge. MACÉ DE LÉPINAY & BUISSON. — SUR LES CHANGEMENTS DE PHASE 3ll ment de phase q^ +£,, nous en concluons que q, =: o. Il s'agit donc bien d'un retard de phase, dont les valeurs se confondent avec celles de e, (*) ; a" Ce retard de phase, lorsque l'épaisseur de la couche d'argent augmente, croît d'abord rapidement à partir de zéro, surtout pour V et B, moins vite pour R. Mais il ne tarde pas, pour des épaisseurs sui)érieures à Sopip., à j)rendre une valeur limite constante, indépen- dante de l'épaisseur. 3° Cette valeur limite est presque indépendante de la longueur d'onde. Elle croît légèrement quand la longueur d'onde diminue (c'est ce qui ressort nettement de chacune de nos séries de mesures prise isolément). Cette valeur Kniite est o,63 pour R, 0,64 pour V, o,65 pour B. Plusieurs de ces conclusions sont d'accord avec celles de Wernicke €t de Kath. Ces auteurs ont trouvé en effet que le retard de phase (algébrique) dans le mica contre l'argent était, pour des épaisseurs suffisantes, indépendant de la longueur d'onde et égal à/) -f O567. Mais, d'aj)rès ces auteurs, si l'on a affaire réellement à un retard de phase {q^ = o), dans le cas d'argentures peu adhérentes , on aurait, pour des argentures bien adhérentes à leur support, y^ = — i. Le changement serait dans ce dernier cas une avance, exactement complémentaire du retard qui se produirait aussitôt qu'il se trou- verait quelque impureté interposée entre la couche d'argent et son suj^port. Nous n'avons entrepris aucune expérience à ce sujet, nos recherches ayant, comme on l'a vu, un but spécial auquel elles répondent entièrement. La seule grandeur qu'il nous imj)ortait de connaître était en effet la partie fractionnaire du retard de phase introduit par réflexion sur l'argent, qui en fait, d'après Wernicke, serait indépen- dante de l'adhérence plus ou moins complète de la couche d'argent. Malgré l'absence, sur ce point, de recherches personnelles, qu'il nous soit permis de remarquer que les faits observés par Wernicke paraissent en contradiction avec le principe de continuité. On ne voit pas par quels intermédiaires le changement de phase passerait d'une valeur -|- £1 à la valeur complémentaire négative e, — i , si l'épaisseur des impuretés interposées venait à varier d'une manière continue en tendant vers zéro. (•) S"il y avait avance de phase, d'après notre mode de calcul, q^ serait un entier négatif, égal à — i, l'avance en valeur absolue serait égale à i — Si ; mais, comme cette avance doit tendre vers zéro quand l'épaisseur d'argent diminue, ei tendrait vers I, ce qui est contraire aux observations. 3l2 PHYSIQUE M. MATHIAS Professeur à la Faculté des Sciences de Toulouse REMARQUES A PROPOS DU MÉMOIRE DE W. RAMSAY ET SHIELDS [532-661 — Séance du 6 août — §. I. — Les idées de correspondance introduites dans la science par J. D. Van der Waals ont été appliquées aussitôt par lui aux phénomènes capillaires. Si l'on porte en ordonnées les valeurs de la tension superficielle A et en abscisses les températures, on obtient une courbe très analogue à une branche d'hyperbole qui admettrait une asymptote de coefficient angulaire négatif et dont le sommet se trouverait sur l'axe des abscisses en un point tel que i == 0 , 0 étant la température critique du corps considéré. Au voisinage de Ô, on peut poser : A = « (i — my, m étant la température réduite, a et b des constantes absolues qui doivent être les mêmes pour les différents cor[)s si les lois des états correspondants s'appliquent. J. D. Van der Waals a trouvé, comme valeur théorique au voisinage de 0 , b = 3/2 (*) ; mais les vérifications tentées par Verschaflelt donnent des nombres plus faibles voisins de 1,23 pour un grand nombre de liquides. De même, si l'on considère V énergie superficielle moléculaire A (Mv)^ , M étant le poids moléculaire et v le volume spécifique du liquide, c'est-à-dire l'inverse de sa densité, la théorie indique que —=— A (Mv)^ doit être la même fonction de la température pour tous les corps, cette fonction tendant, à quelque distance de la tempéra- ture critique, vers une distance voisine de 2,27 (Yerschaffelt trouve 2,22 d'après GO^ et 2,20 d'après A^'O). Alors qu'on s'est occupé d'appliquer les lois des états correspon- dants à la tension superficielle A et à l'énergie su^^erficielle molécu- (') J. D. Van de» Waals, Théorie thermodynamique de la Capillarité dans l'hypothèse d'une variation continue de densité, p. 5o. {Arch. Néerl. t. XXMII, p. 121). MATHIAS. A PROPOS DU MEMOIRE DE "SV. RAMSAY & SHIELDS 3l3 A (Mv)^ , on ne paraît pas s'être préoccupé , à ma connaissance du moins, de les appliquer à l'ascension capillaire h, qui constitue un élément directement tiré de lexpérience et qui ne suppose pas, comme la tension superficielle , la connaissance des deux sortes de densités du liquide étudié à la température de l'expérience. Cet oubli paraîtra surprenant si l'on songe que, d'après les recherches de Brûnncr et beaucoup de travaux récents, cet élément varie avec la température suivant une loi de décroissance presque rigoureu- hf sèment linéaire. Comme pour l'éner- gie superficielle moléculaire , ce n'est qu'à quelques dizaines de degrés de la température critique que l'on voit apparaître une courbure sensible de la ligne h =f(t), laquelle s'annule pour ^ = G et admet alors une tan- gente probablement parallèle à l'axe des ordonnées. Pour rendre les expériences comparables, convenons de rapporter les ascensions observées dans des tubes quelconques à ce qu'elles seraient dans un tube idéal de o""",i de rayon. Soit hj- l'ascension observée dans un tube de rayon j^ et h la hauteur que l'on observe- rait dans le tube idéal; on a, d'après la loi de Jurin-Borelli : r = h lOO d'où h = loo /*,-. 7' Nous supposerons, dans ce qui suivra, que les hauteurs d'ascension sont relatives au tube de lOO de centimètre de ravon. Cela étant, exprimons que, sauf au voisinage de 0, h est une fonc- tion linéaire et décroissante de la température; on aura, la courbe h =:f{t) ayant la forme ci-contre, h =:^ ho — c t = c {^ -^ d — t) =z c {& —T -\- d) c et d étant des constantes numériques, ï = l'j'i -{-tin température absolue et G = 2^3 -f- 0 la température critique absolue. Introdui- sons la température réduite ni , , il vient : h = c S I — — -\- z\ = h,n (i + £ — m), hm = cQ et £ = étant de nouvelles constantes qui , si les lois e 3l4 PHYSIQUE des états correspondants s'appliquent, devront être les mêmes pom* tous les corps. Si, au lieu d'écrire l'équation de l'asymptote à la courbe h ^f(t), on écrit l'équation d'une corde de cette courbe , ce qui arrive quand on ne dispose pas d'expériences suffisamment éloignées de la tempé- rature critique du liquide , le coefficient angulaire — c est trop grand en valeur absolue; par contre d est trop petit. Les valeurs de hm et de s seront donc en général par excès pour la première et par défaut pour la seconde. Cette remarque sera utilisée plus loin. Les mesures très précises d'ascension capillaires de Ramsay et Shields (*) per- mettent des A^érifications ; parmi les corps non associés , le formiate de métliyle, l'étlier, l'acétate d'éthyle, la benzine, le tétrachlorure de carbone, le chlorure de benzine ont été l'objet de recherches étendues. CORPS 9 ^'o <" hm ^ Formiate de niéthyle .... Ether ordinaire Acétate d'éthyle Benzine Chlorure de benzène .... Tétrachlorure de carbone . . On voit que les quatre premiers corps forment un groupe assez homogène caractérisé par une valeur de hm voisine de 12 et par une valeur de s voisine de 0,020. Par contre, le chlorure de benzène et surtout le tétrachlorure de carbone sont visiblement en dehors de ce groupe, à cause des valeurs divergentes de leurs hm- Les corps associés étudiés par Ramsay et Shields donnent les résultats suivants : CORPS 9 ho c hm e + 2l4" cm 5,6y5 0,025 55 12,441 0,018 + 194,5 5,243 0,026 49 12,384 0,007 + 25l 6,782 0,022 73 11,909 0,014 + 288,5 6,946 0,022 96 12,892 0,025 + 333 6,35i 0,017 07 10,347 0,064 + 283 3,540 0,011 57 6,58o 0,029 cm Alcool mclliylique + 240° 5,394 0,022 5i 11,546 o Alcool étliylique -)- 243,1 6,325 0,021 34 11,014 o,io3 Acide acétique -|- 32i,5 5,609 0,01 5 39 9,1 15 0,072 A part la divergence de e provenant de l'alcool méthylique, on voit que e a ici des valeurs sensiblement plus grandes que celles du premier groupe et du même ordre de grandeur que le £ du chlorure O Ramsay et Shields, Zeitsch,fiir phys. Chcinie, t. XII, p. 4^3, i8y3. MATHIAS. A PROPOS DU MEMOIRE DE AV. RAMSAY & SHIELDS 3l5 84 Éthylène 28 Sulfure de carbone 76 Peroxyde d'azote 6i> Chlorure de mélhjle 5o,5 Formiate de propyle 87,8 Acétate d'éthyle 87,8 Propionate de méthyle 87,8 Isopentane 72 Pentane normal 72 Fluorure de benzène 95,8 Chlorure de benzène 112,2 Éther 7'3,84 Acide sulfureux 64 Acétate de propyle 101,77 Propionate d'éthyle 101,77 Butyrate de méthyle 101,77 Isobutyrate de méthyle 101,77 Hexane normal. . . 85,82 Heptane normal 99,79 Acide carbonicp^ie 44 Protoxyde d'azote 44 Chlore 71 Octane normal ïi4 Bromure de benzène i56,6 lodiu'e de benzène 2o3,4 Trichloi'ure de jibosphore . . . i37,5 Tétrachlorure de carl)one. . . . i53,45 lodure d'éthyle 204 Oxygène 32 Chlorure d'étain 209,3 Azote 28 643 0,01068 5i3 0,01962 5i6 0,02484 4o3,5 0,02445 5o6,5 0,02958 487 o,o3i42 408,3 0,03462 5o6,7 0,03473 56i,7 o,o3247 282,3 0,03266 546 o,o3286 444,2 o,o345o 414,3 0,03298 537,85 0,03673 523,1 0,03776 53o,4 0,03724 460,8 0,03756 470,2 o,o368i 559,55 0,03742 633 .0,03675 467,4 0,03764 429 o,o373o 549,2 0,03969 545,9 0,03993 554,25 0,03943 540,55 o,o4o32 507,8 o,o383i 539,9 0,03985 3o4,35 0,04095 3ii 0,04007 419 0,04092 569,4 0,04129 670 0,04336 721 0,04797 558 0,04770 556,i5 o,o5i53 559,5 0,06194 i55 o,o65o3 591,7 0,06872 127 0,07260 320 PHYSIQUE M ^3 On voit que les valeurs de -r-, tout en variant de 0,01068 à 0,07260, sont particulièrement fréquentes autour de certains nombres o,o33 0,087 0,040 0,045 o,o65 ce'qui détermine les groupes dont il a été question plus haut. Le groupe le plus nombreux est celui qui correspond à 0,040 ; il donne, en remarquant que l'on a approximativement g = 1000, 2,12 X 200 h m = ZZZZ X 1000 0,04 40 10,6. On retrouve ainsi la valeur la plus fréquente de A;,,. Les corps de poids moléculaire élevé, ayant de grandes valeurs de , donnent de petites valeurs de km conformément à ce que l'on a trouvé. M. A. TURPAIN Professeur adjoint à la Faculté des Sciences de Poitiers SUR LE FONCTIONNEMENT DE COHËREURS ASSOCIES [538.362] — Séance du 6 août — Au cours des recherches que nous poursuivions dans le but de rendre aussi pratique et aussi complète qvie possible l'obsei'vation des orages par le cohéreur, nous avons dû étudier les particula- rités que présente le fonction- nement de plusieurs cohéreurs réunis à une même antenne, Dispositif. — Sur une plan- chette isolante en ébonite P (Jig- i) peuvent être fixés côte -3 à côte 6 cohéreurs à limaille de fer, qui sont serrés entre des FlG. 1. A. TURPAIN. — SUR LE FONCTIONNEMENT DE COHÉREURS ASSOCIÉS 321 pièces de cuivre a h, a b', isolées les unes des autres , de nia- lîicre à permettre facilement l'association des cohéreiirs en dériva- tion, en série ou même suivant un mode mixte d'association. — La décohésion se produit aisément par la frappe de la planchette qui est fixée par un de ses bords AB en porte-à-faux. L'antenne, qui peut être formée de un ou de plusieurs lîls parallèles, peut être mise en relation avec une électrode quelconque de l'un des coliéreurs. Ces communications diverses des électrodes des coliéreurs entre elles et avec les fils parallèles d'antenne s'obtiennent aisément au moyen de petits godets de mercure reliés entre eux par des ponts de lon- gueur et de forme appropriées. Une pile sèche d'un élément (i^5 environ) est shuntée par une résistance de 200" ; on envoie le courant emprunté aux extrémités d'une résistance de 3 à C^^ dans les coliéreurs et dans le circuit d'un galvanomètre très sensible (galvanomètre Chauvin et Arnoux don- nant le o,oo5 de micro-ampère). Les élongations du galvanomètre servent à juger du degré de cohésion des coliéreurs lors de chaque essai. On a étudié tout d'abord chacun des six coliéreurs en le disposant seul sur la tablette isolante. On a cherché à graduer la sensibilité de ces coliéreurs en variant la distance des électrodes. Ces électrodes sont éloignées, suivant les coliéreurs, de 8/10, 9/10, 10/10, 12/10, 14/10 et 16/10 de millimètres. Toutes choses égales, d'ailleurs, l'ordre des sensiliilités ne s'est pas toujou/s trouvé être l'ordre des écarts entre électrodes. Les coliéreurs ont été associés en dérivation et en série et ont donné lieu aux observations suivantes : I. Étude d'un seul cohéreur. — Lorsqu'on dispose dans le cir- cuit d'une pile et d'un galvanomètre un cohé- reur, le circuit compre- nant une résistance R (R = 8ooo«) (fi g: 2), on constate que la sen- sibilité du cohéreur est notablement différente, suivant que le circuit R = 8000^ est ouvert ou fermé au ^ \l\l\i\f\l\l\i\l — ' moment oii les ondes sont envoj-ees (ce qui s'obtient en séparant ou en réunissant a et k). 21" A 322 PHYSIC )UE c Distance du cohéreur (ai (antenne de récept tonne d'émission) on) au trembleur Cohéreurs 8/IO rcuit formé 45'='" Déviation du ffalvanométi 65 '0 Circuit ouvert 9/10 40 66 23 10/10 28 72 i3 14/10 iG/io 25 19 70 75 4 3 IL Cohéreurs associés ex dérivation. — Les électrodes des six cohéreurs associés sont réunies d'une part entre elles et à l'antenne A (Jîg. 3); elles communiquent chacune, d'autre part, avec de petits FiG. 3, ' godets de mercure a, h, c, d, e,f, dans lesquels on peut faire plonger à volonté le fil terminal k du circuit comprenant le galvanomètre G, la pile shuntée P et une résistance R de Sogo'**. En utilisant la même pile shuntée, on a constitué 3 circuits dérivés comprenant chacun une résistance R de 8000*" et permettant ainsi de mettre en circviit fermé jusqu'à trois cohéreurs à la fois. Si les cohé- reurs se trouvent tous les trois cohérés , les déviations du galvano- mètre s'additionnent; il est dès lors aisé de savoir, suivant la divi- sion indiquée par le galvanomètre, si un seul, deux ou trois cohéreurs, ont été cohérés. 1° Lorsque les 6 cohéreurs sont tous en circuit ouvert, ils con- servent la même sensibilité relative que s'ils sont tous en circuit fermé; mais la sensibilité de chacun d'eux est bien moindre en circuit ouvert qu'en circuit fermé. 2" Si un des six cohéreurs est placé on circuit fermé, les cinq A. TURPAIN. — SUR LE FOMCTIONNEMEXï DE COHÉREURS ASSOCIÉS 32*3 autres restant en circuit ouvert , le cohéreiir placé en circuit fermé acquiert une sensibilité beaucoup plus grande que celle qu'il pré- sente en circuit ouvert et peut se montrer plus sensible que le plus sensil)le des coliéreurs. Le tableau suivant, qui indique les déviations galvanométriques dans chaque cas, met ce fait en évidence. DÉVIATIONS OBSERVÉES APRÈS COHÉSIONS Coliéreurs eu circuit ouvert Tuu des cohéi [■eurs (*) étant en circuit fi ermé 8/10 53 86. 38 28 28 36 36 9/10 59 i3 88. 12 10 9 35 10/10 I I I 70. I I I 12/10 17 14 18 i3 87. 9 21 14/10 9 18 14 i3 0 73. 27 16/10 I 2 I I I I «9. 3" Si l'on disj)ose en circuit fermé plus d'un cohéreur (deux ou trois), les cohéreurs disposés en circuit fermé deviennent plus sen- sibles que ceux laissés en circuit ouvert, ainsi que le montre le tableau suivant. DEVIATIONS OBSERVEES APRES COHESION ohéreurs en circuit ouvert deux ou trois des cohéi-eurs C) étant en circuit 8/10 53 80. 68 26 61. 5i 9/10 59 58. 17 91. i4 67 10/10 I I 89. 2 I 88 12/10 17 , 19 19 16 88. 14 14/10 9 18 20 14 69. 23 16/10 I 3 80. 84. 8 80 4° Si l'onjréunit enseml)le toutes les électrodes libres des six colié- reurs, «, b, c, d, e,f, entre elles et qu'on place le faisceau ainsi formé en circuit fermé, on peut très simplement et très rapidement obtenir ainsi Vordre de sensibilité des six cohéreurs étudiés. Pour cela, on[colière par une émission d'ondes produite à mie distance telle qu'un seul ou deux cohéreurs se trouvent cohérés. — Ceci fait, on supprime le ou les deux cohéreurs ainsi cohérés et Ton cherche, par une nouvelle émission d'onde produite à la même dis- tance, à provoquer la cohésion des cohéreurs restant. On ol)tient (*) Les nombres suivis d'un point ont trait aux déviations fournies par les cohé- reurs en circuit fermé 324 PHYSIQUE alors en général la cohésion d'un ou de deux autres coliéreurs, que l'on supprime encore et l'on cherche enfin par une troisième émis- sion d'ondes à cohérer les coliéreurs restant. Le tableau suivant indique pour deux séries différentes de six coliéreurs le résultat de cette opération. Coliéreurs Déviations Coliéreurs Déviations 8/10 65 17/10 20 + -- 9/10 3 5 35 + 18/10 2 i3 + 10/10 I 62 + + 19/10 I I 3 12/10 5 5 8 40 20/10 2 2 24 14/10 10 7 32 21/10 3o + + 16/10 26 I I 2 22/10 I I 19 Le signe -{-indique cpie les coliéreurs ont été supprimés. D'après ce tableau, on voit que l'ordre de sensibilité des cohéreurs- de la première série est le suivant : , 8/10 10/10 9/10 14/10 12/10 16/10 Celui des cohéreurs de la seconde série est : 21/10 17/10 18/10 20/10 22/10 19/10 On voit donc . ainsi que nous l'indiquions précédemment , que cet ordre n'est pas toujours celui des écartements des électrodes. Ce procédé de détermination des sensibilités relatives de plusieurs cohéreurs associés , qui est une application immédiate des particu- larités que présentent le fonctionnement des cohéreurs en circuit ouvert et en circuit fermé, nous a permis de graduer à l'avance une série de cohéreurs destinés à suivre la marche des orages qu'ils décèlent. 5'^ La sensibilité relative que présente chaque cohéreur, qu'il soit en circuit fermé ou en circuit ouvert, est à peu près la même lors- qu'il est placé seul sur la planchette servant à les réunir que lors- qu'il se trouve entouré des cinq autres cohéreurs voisins. Toutefois les nombres trouvés sont un peu plus forts, toutes choses égales d'ailleurs, lorsque le cohéreur est seul, que lorsqu'il est accompagné de ses cinq voisins. IIL CoHKRKUiis ASSOCIÉS EN SERIE. — L'usagc dc godcts de mer- cure et de fils souples permet d'associer les cohéreurs en série comme l'indique la figure 4. On peut faille usage comme collecteur des ondes d'une série dc quatre antennes identiques (longueur 60 centimètres). A. TURPAIN. — SUR LE FONCTIONNEMENT DE COHÉREURS ASSOCIÉS 320 Ces antennes sont réunies , soit toutes quatre au même point du circuit Ibrnié par la suite des coliéreurs , soit chacune d'elles en un point dift'érent du circuit, l'une en a par exemple, la i^ en c, la 3<= en cl, la 4*^ en e, ou bien encore différemment. — Pour connaître FiG. 4. l'état de cohésion de chaque cohéreur après une émission dondes, on dispose, à l'aide de ponts de longueurs convenables le cohéreur en question . de manière à le placer seul dans le circuit comprenant la pile shuntée, la résistance R de 8000^^ et le galvanomètre. Les l'ésultats des observations faites sont les suivants : 1° La sensibilité que présentent les six cohéreiirs associés en série est à peu près la même que le circuit qu ils forment, qu'il soit ouvert ou qu'il soit fermé. 2° Lorsque l'antenne est fixée en un point du circuit (c par exemple) entrée deux cohéreurs (9/10 et 10/10 par exemple), ces deux cohéreurs acquièrent par là même une sensibilité plus grande. — Si l'antenne est placée à l'extrémité de la chaîne des cohéreurs (en a ou en g-), la sensibilité du cohéreur voisin (8/10 ou 16/10) se trouve accrue. 3" Si V antenne est constituée de 4 fi^^ parallèles égaux reliés entre eux à leurs extrémités avec un point du circuit des cohéreurs, la sensibilité de V ensemble des cohéreurs ne se trouve que légè- rement accrue. 4" *S'/ chacune des quatre antennes est reliée en un point différent du circuit, de manière à disposer une antenne entre chaque cohé- reur, la sensibilité du dispositif se trouve très notablement accrue. Le tableau suivant fournit des mesures en concordance avec ces divers énoncés. 326 Extrémités des coliéi'eurs Cohéreurs PHYSIQUE Déviations obtenues ; antenne en : d g a, c, d, e a h c d e f 8/10 9/10 10/10 12/10 14/10 iG/io circuit ouvert 21 14 O 40 46 circuit fermé 16 i3 o 36 44 56 45 o 6 I 36 7 52 40 21 I 33 2 o II 27 45 55 i3 37 20 17 16 IV. Association mixte des cohéreurs. — La plus grande sensi- bilité que l'on puisse obtenir avec six cohéreurs donnés semble être celle du dispositif qui consiste à j^éiinir les [cohéreurs deux à deux en série, chaque couple de deux \cohéreurs formant une dérivation, comme le montre la figure 5. — Les antennes, au nombre de trois, FiG. 5. sont reliées en «, &, c au milieu de chaque groupe de deux cohé- reurs. — On obtiendrait une sensibilité encore plus grande, toutes choses égales d'ailleurs, en plaçant six autres antennes en à et a" , b' et b", c'etc". Les trois circuits dérivés sont tous trois fermés et comprennent chacun une résistance R. BLOXDEL. — NOUVEAU RADIATEUR POUR LA TÉLÉGRAPHIE SANS FIL 32^ Conclusions et applications. — Le fait particulier qui se dégage de toute cette étude est la bien plus grande sensibilité que présente un coliéreur, toutes choses égales d'ailleurs, lorsqu'il est en circuit fermé que lorsqu'il est en circuit ouvert. En utilisant convenablement ce fait expérimental dans le cas de plusieurs cohéreurs associés, on peut en particulier l'appliquer : i*^ A la détermination commode et rapide de l'ordre de sensibilité de plusieurs cohéreurs associés en déification. Cette détermination a son application immédiate dans la constitution de dispositifs permettant de suiçre la marche des orages; 1° A la réalisation de dispositifs ti^ès sensibles formés de cohé- reurs associés en série ou d'une façon mixte et convenablement reliés à un certains nombre d'antennes. — Ces dispositifs semblent pouvoir être utilisés avec succès, tant en télégraphie sans fil qu'en télégraphie hertzienne avec conducteur. M. BLONDEL Professeui' à l'École Nationale des Ponts et Chaussées NOUVEAU DISPOSITIF DE RADIATEUR POUR LA TÉLÉGRAPHIE SANS FIL [538.562] — Séance du 6 août — On a cherché, depuis quelque temps, à augmenter l'énergie mise enjeu dans les radiateurs ou antennes, en accroissant le nombre et la surface des fils qui le composent. C'est ainsi que Marconi, par exemple, emploie dans le radiateur les formes d'éventail ou de pyra- mide formés de fils divergents , réunis à leurs parties inférieures à l'oscillateur au moyen d'une connexion assez courte. Ce dispositif présente plusieurs inconvénients : 1° La dii'cction de tous ces fils étant oblique les unes j^iar rapport aux autres, ils ne produisent un effet que proportionnel cependant à leur hauteur et non pas à leur longueur totale. 2" Comme ils divergent les uns des autres, leurs actions ne sont pas complètement concordantes à grande distance ; par exemple , si les fils forment une pyramide renversée dont la base a 5o mètres 328 PHYSIQUE de côté, les effets d'induction produits par les parties supérieures des fds se propageront avec une différence de i)hase pouvant atteindre 5o mètres entre deux fils extrêmes, et cette dillérence de phase peut être très sensible quand les longueurs d'ondes sont de l'ordre de 3 à 4oo mètres , comme on le prétend dans le cas particulier. 3" L'amplitude du courant oscillant dans les fds des antennes ainsi formées suit une loi d'intensité décroissante depuis le sol jusqu'à l'extrémité supérieure des antennes ; elle est maxinmm à l'extrémité inférieure et nulle à l'extrémité supérieure. La partie supérieure des fils est donc mal utilisée et ne produit que des effets d'induction plus faibles que les parties inférieures ; cette dis[)osition est d'autant plus mauvaise que ce sont les parties les x^lus élevées dont l'action sera la moins gênée par les obstacles naturels. L'objet du présent dispositif est de remédier à ces inconvénients en donnant au radiateur ini rayonnement à peu près constant sur toute sa hauteur utile, et sans diiférence de phase appréciable. A cet effet, il faut répartir les capacités mises enjeu d'une manière différente de celle réalisée habituellement (*). Je propose de consti- tuer cette capacité principalement sous forme d'im grand condensa- teur dont l'armature supérieure sera métallique et horizontale et dont l'armature inférieure sera formée par le sol lui-même (**). J'ob- tiens ce résultat en disposant un fdet formé de lils métalliques de forme quelconque horizontalement en AB {fi g-. /), à une distance comparable à celle de la hauteur des antennes ordinaires et en reliant le centre de ce fdet par un ou plusieurs câbles ou lils verti- caux ou à peu près verticaux, CD, aux appareils d'émission. Dans le cas de la figure par exemple, cet appareil est du genre de ceux employés par Lodge, Braun, Marconi, etc., c'est-à-dire qu'il consiste dans un circuit local soumis à des oscillations électriques et agissant j)ar l'intermédiaire d'un transformateur Tesla T sur un circuit formé de l'antenne CD et d'une plaque de terre E, qui peut être renq)lacée si l'on veut par une grande capacité. Dans cette figure, O désigne le déflagrateur ou déchargeur disruptif de nature quelconque alimenté par une source à haute tension, C un condensateur, T le transfor- mateur Tesla. Le filet à peu près horizontal AB peut être remplacé par des toiles métalliques quelconques ou par des feuilles de métal; il peut être supporté par des pylônes P ou des sup[)orts de disposi- (*) On a l)ion proposé de mettre en haut de l'antenne des plaques ou des cylindres en métal; mais les dimensions en étaient trop ])elites pour avoir une influeiice appré- ciable et on avait été ainsi conduit à les sui)i)rini('r comnn' inutiles. (*•) J"ai déjà signalé ce dispositif dans un pli cacheté déposé à l'Académie des Sciences le i5 avril ii.oi. BLONDEL. — NOUVEAU RADIATEUR POUR LA TELEGRAPHIE SANS FIL 329 tien quelconque, de hauteur et de force suffisantes pour le résultat à obtenir. La disposition ainsi réalisée produit les résultats suivants : toute charge envoyée dans l'antenne sert principalement à charger le con- densateur horizontal formé par le filet AB et la terre ; les lignes F L ^lil-A/\AAA/WvV\rn J — vWWvV/N -i 00 0 r FlG. I. de force dans le diélectrique seront verticales ou plus ou moins inclinées autour de la verticale. La partie verticale DC, qui relie le filet à loscillateur. présentera une capacité relativement beaucoup moindre par rapport à la terre ; on ne cherchera pas à augmenter cette capacité, mais seulement à diminuer la self-induction dans cette liaison DG, en remplaçant le cable unique par un grand nombre de fils. De cette manière, quand auront lieu les oscillations électriques du système CDE, le courant oscillant aura à peu près la même intensité tout le long du fil CD et la partie supérieure de celui-ci travaillera d'une manière aussi utile que la partie inférieure. La self-induction offerte par le filet AB au passage du courant oscillant qui rayonnera du centre C jusqu'au bord du filet sera minimum, en comparaison de la capacité obtenue. On peut donc, par ce procédé, réaliser un système oscillant de grande capacité et de faible self- induction, mettant en jeu la capacité maxima pour une période d'oscillations donnée et présentant en même temps l'action maxima pour une hauteur donnée des pylônes A et B. 33o PHYSIQUE En outre, un semblable système oflVe moins de j)rise au vent que celui de la pyramide de Marconi , car la plus grande partie des fils sont tendus parallèlement au sol et ne font pas obstacle au vent. A B IIT\A\ \ / lHj^^ B ^ ^ 1 \ \ ^^v^ T^^^:7--l, ' 1 FlG. 2. La figure représente un filet en forme de toile d'araignée , mais il peut avoir toute autre forme ; il peut être rond , carré ou polygonal, etc.. Au lieu d'un seul point d'attache c à l'antenne verticale, il peut y en avoir plusieurs. Le même système de radiateur peut être utilisé comme poste récepteur naturellement. L'antenne reste aussi efficace à la partie supérieure qu'à la partie inférieure. Cette disposition de filet supporté par des pylônes est susceptible d'applications intéressantes pour les antennes de petite hautevu' ; elle permettrait , en eftet . d'obtenir, par exemple, avec des supports de i5 m. faciles à établir et des filets de grande surface, des actions aussi énergiques qu'avec des antennes ordinaires de 4© à .5o m., qui exigent des mâts très coûteux et d'un entretien dillicile. Elle paraît intéressante à signaler à ce point de vue. APPENDICE Les considérations qui précèdent se laissent assez facilement pré- ciser par un calcul approximatif, de la manière suivante : Si on suppose constantes la self-induction / par unité de longueur et la capacité c par unité de longueur, féquaticm des oscillations s'établit aisément en négligeant l'amortissement dû à la radiation. Soit dq la charge élémentaire d'un élément de longueur dz, i l'inten- sité du courant qui le traverse, en allant de l)as en haut, v son poten- tiel. On a les deux relations connues de la propagation BLOiXDEL. — NOUVEAU RADIATEUR POUR LA TÉLÉGRAPHIE SANS FIL 33r OU dq —r- dt cdç ^ dz dç — l dz —rr dt dv I di dt c dz (I) dv j di (2) et par suite I d^ i , d' i .ox c" "dz' dt' ^ ' On peut satisfaire à cette relation en régime permanent , par une solution de la forme l = lo Sm 27r — cos -.-^ = lo sin an- — cos r — (4) en remarquant que i est maximum pour 2 ^ o à la base de l'antenne et posant (vitesse de propagation) : V = .-^ ; X = VT (longueur d'une période), de l'équation (i) on déduit en substituant (4) dç L 27r . t . an z ,r. — sin an- — sm (5) dt C 1 T 5i et en intégrant de o à ^ et admettant c = o pour :: = o ç = — ^ sin -^ cos 27r -^ (6) Soit G la capacité ajoutée au bout de l'antenne; à son entrée on a au point 3 ^ H la relation idt — C dv (7). En remplaçant dans (7) i et —j— par leurs valeurs , on en tire, en faisant :: = H I 277 H I 27r . 2TC H _ eos -^- = - _ sm ^P 333 PHYSIQUE OU UttH ^ / _Ji\_ G G uttH / H\ Kc C ,«. en appelant C la capacité totale de l'antenne. Cette équation déterniine 1 en fonction de G' et G. Si on remplaçait la terre par l'image de l'antenne, le système oscillant serait formé de 2 parties symétriques; le fil aurait une longueur Z = 2 H et une cajiacité double L' = 2 G' et le condensa- teur formé par les 2 lilets symétriques une capacité moitié moindre G r = — . L'équation (8) pourrait donc s'écrire îT L , / 7r L \ c[j 4r 4r 4 et retombe ainsi sur une formule connue de Kirclioff donnant la période d'oscillation d'un circuit fermé contenant un condensateur. On voit que l'addition de la grande capacité du filet accroît la lon- gueur d'onde réelle l, en même temps que l'intensité maxima Iq. Comme je l'ai dit dans une autre note, ces deux éléments agissent en sens inverse sur l'effet utile de l'antenne; pour voir ce qu'on gagne, il y a donc lieu de développer en fonction de > le calcul de l'inté- grale caractéristique de l'effet utile , .H ^H dz Qu'il y ait ou non un condensateur G. !„ est déterminé par le potentiel maximum au moyen de l'équation ((3), d'où on tire quand ç atteint son maximum ¥„ , au })oint ;: = H lo • H " — sin an — - c V D'où /27rH sin en A aleur absolue (sans condensateur H = — et par suite le déno- 4 mmateur se réduit à l'unité). L'amplitude de l'intégrale cherchée est donc proportionnelle à — / cos az = . 2 sm = 1^ /27r H\ î^ 27r 277 sin BLONDEL. — APPLICATION DES COUPLES THERMO-ÉLECTRIQUES 333 et on voit quelle croit proportionnellement à la longueur d'ondes, ou plus exactement au produit p^ >. Si donc on peut maintenir ç^ au moins constant au sommet de l'antenne, tout en augmentant la capacité du filet, celle-ci joue donc un rôle utile proportionnellement à la longueur d'onde réalisée ainsi. Au contraire, si l'on était limité à une certaine intensité maxima I, qu'on ne peut dépasser, l'intégrale aurait pour valeur VIo . '2%ll sin — ^ — 27r et irait par suite en diminuant quand on augmenterait X par l'adjonc- tion d'une capacité. M. BLONDEL Professeur à l'École Nationale des Ponts et Chaussées SUR L'APPLICATION DES COUPLES THERMO-ÉLECTRIQUES A LA RÉCEPTION DES SIGNAUX DE TÉLÉGRAPHIE SANS FIL [537.323:538.561 — Séance du 6 août — Dans ces derniers temps, on a imaginé de nombreux récepteurs d'ondes, ou kymascopes, selon le mot ingénieusement créé par M. le Professeur Fleming, pour remplacer le cohéreur. Le but que l'on' poursuit en général est d'augmenter la sensibilité , de supprimer la nécessité d'un tapeur et de faciliter la syntonie. Ce dernier point de vue est le plus intéressant et justifie seul la proposition que je vais faire d'un nouveau dispositif, non encore décrit à ma connaissance (*). Déjà des récepteurs thermiques ont été proposés par Fessenden, fondés sur un dispositif bolométrique ; mais il seml^le difficile d'obte- nir ainsi une suffisante sensibilité. Il parait, en tout cas, aussi simple de faire appel aux phénomènes thermo-électriques. (•) Jusqu'ici on n'a pas tiré paiMi dos couples thermo-électriques pour la réception des ondes électriques, bien que de semblables cou|)les aient été em])l()yés dans les expé- riences de laboratoire, notamment par Uubens, Lindemann, etc. a FlG. I. 334 PHYSIQUE Pour obtenir le maximum de sensibilité , il faut faire traverser le lîl même du couple par les ondes ou les courants oscillants induits par celle-ci, de façon que récliauflement des fds contribue à échauffer la soudure qui les réunit ; on emploiera des fils très fins en les plaçant dans le vide, afin de réduire le rayonnement. La figure i montre un exemple de la ma- nière dont peut être réalisé un semblable détecteur. Dans le tube /, où Ion fait le vide après construction, sont placées deux électrodes a et b reliées au circuit jjar des tiges soudées dans le verre et présentant une capacité calorifique suffisante pour ne pas s'échauffer sensiblement pendant le passage du courant. A ces électrodes sont sou- dés deux fils très fins ac et cb formés de métaux différents et soudés ensemble à leur extrémité c. Les fils qui donnent le meilleur résultat sont ceux de fer et de constantan . réduits à un diamètre extrêmement fin (inférieur au i/ioo de millimèti'e) par les moyens con- nus, notamment en faisant attaquer par un acide des fils déjà obtenus très fins par le tréfilage. Ainsi que l'a indiqué déjà pour une autre application M. Féry (*). la soudure au point c peut être faite au moyen d'une goutte d'étain qui rend la soudure trop conductrice, ou préférablement par soudure autogène (sous l'influence d'un courant électrique ou dondes électriques passant dans les fils préalablement amenés au contact), ou simplement en liant ensemble les deux bouts de fil. Quand le tube est parcouru par un courant traversant le cou[)le thermo-électrique, les fils a et b s'échauffent par suite de leur résis- tance et le point c se trouve maintenu à une tempéra- ture plus élevée que les extrémités a et b, constamment refroidies par leur contact avec les électrodes auxquelles elles sont soudées; une force électro-motrice prend donc naissance et peut être décelée par un téléphone sensilile monté en série ou en dérivation par rapport au circuit du tube détecteur. On peut par exemple mettre ce téléphone M en déri- vation sur le détecteur B monté en série entre le fil récepteur A et une grande capacité T, qui peut être la terre elle-même. Chaque passage des ondes électriques, FiG. 2. faisant naître une force électro-motrice dans le tid>e V, C) Dans su Irès iulércssante thèse sur l'étiulc du rayoïincnieiU (Gaulhicr-Villars, iyi>-)- BLONDEL. — AIM'LICATION DES COUPLES ÏHERMO-ÉLECTUIQUES 335 produit un petit son dans le téléphone par suite du courant auquel donne lieu cette force électro-motrice dans le circuit fermé VsN. Pour empêcher les ondes de passer dans le téléphone au lieu de passer dans le tube V, on doit ajouter une impédance ou bobine de self-induction s dans le circuit dérivé du téléphone. Comme la résistance du couple thermo-électrique est grande, l'action des ondes ainsi appliquées directement peut se trouver affaiblie ; en tous cas elle est limitée par la faildesse de la force électro-motrice produite dans le fil récei)teur A, laquelle est généralement inférieure à un volt. Pour tirer le meilleur parti de l'énergie » reçue par ce fd A, il pourra donc être avantageux d'élever la tension agissant sur le tube V au moyen d'un transformateur. C'est le but de la disposition représentée dans la figure 3, dans laquelle les lettres conservent la même signification. J repré- sente un petit transformateur du genre de ceux imaginés par Marconi et par d'autres inventeurs; le circuit primaire est monté en série avec le fil récepteur A, tandis que le circuit secondaire agit sur un circuit fermé contenant le tube détecteur Y et le téléphone M. Dans ce cas, les courants induits traversent le téléphone en même temps que le tube, mais il est à remarquer qu'une force électromotrice oscillante ne produit, en géné- ral, qu'une action très faible dans le téléphone, parce qu'elle change de signe constamment; le tube V, au contraire, produit sous l'effet de l'échavifTement une force électro-motrice de sens constant, dépen- dante des propriétés thermo-électriques des métaux employés pour former le couple; cette force électro-motrice apparaît pendant le passage des ondes et disparaît ensuite ; c'est donc elle qui fera sentir principalement son action sur le téléphone. Il y a intérêt, pour combiner l'effet des deux causes, lorsque les oscillations sont produites dans le fd récepteur A sur des oscillations amorties, à choisir la direction du courant induit dans le tube V, de manière que la force électro-motrice produite tende à s'ajouter à la force électro-motrice de la pre- mière oscillation, laquelle est généralement pré- pondérante par rapport aux oscillations suivantes amorties. On peut aussi placer le tube V, non pas en série dans le circuit secondaire du transformateur, mais fig. 4. FiG. 3. A ^iv A7 T 336 PHYSIQUE FiG. 5. en dérivation , comme l'indique la figm-e 4, en ajoutant ici encore, comme dans la figure i, une impédance s dans la branche dérivée contenant le téléphone. Le fonctionnement est alors le même que dans le cas de la figure 2, avec cette seule différence que la tension est augmentée par l'emploi du transformateur. Au lieu d'un transformateur, on x>eut employer aussi un simple umltiplicateur du genre de ceux déjà utilisés par Slaby. La figure 5 en donne un exemple dans lequel on voit que le multiplicateur Z est j^ar- couru en pai'tie par le courant oscillant du fil récep- teur A et que les extrémités sont mises en circuit avec le tube V, lequel agit sur le téléphone de la môme manière que dans la ligure 3 ou dans la ligure 4. Enfin le circuit local dans lequel se trouve placé le tul^e détecteur V peut être mis en résonance élec- trique avec les ondes reçues par l'addition de con- densateurs, suivant l'un quelconque des montages connus. Il suffit de remplacer dans tous les montages existants, ou tous ceux qui pourront être imaginés pour les circuits, des postes de réception des détecteurs d'ondes ordinaires par le nouveau détecteur. Je dois ajouter que malheureusement les sensibilités obtenues jus- qu'ici par le tube détecteur ont été trop faibles pour en permettre l'application pratique. Mais j'espère les augmenter en multiphant les couples, c'est-à-dire en réunissant en série des couples disposés en zigzag et réunis par des attaches fixées par un vernis isolant sur des masses métalliques qui les maintien- nent froides. La figure (3 indique ce dispositif, réalisé par une disposition de fils zigzaguant entre deux bagues métalliques BB' recouvertes de gomme laque et sur lesquelles seront collées, à l'aide du même vernis, les attaches froides. Les attaches soumises à l'échauifement seront disposées au milieu des fils libres ; malheureusement la préparation de ces couples en fils très fins présente de grandes difficultés. Une application intéressante de ces récepteurs pourrait être faite pour l'enregisti'ement des orages, au moyen d'un galvanomètre enre- gistreur analogue à ceux des couples Le Chatelier, ou au moyen d'un siphon recorder. Les amplitudes des élongations pourraient en effet donner une mesure relative de l'intensité des décharges atmosphé- riques agissant sur l'antenne. * iir : B'}] 1 FiG. 6. C. TISSOT. — APPAUEILS DETECTEURS DES OXDES ÉLECTRIQUES 33; M. C. TISSOT Lieutenant de vaisseau, Professeur à l'École navale, à Brest APPAREILS DÉTECTEURS DE MESURES POUR LA RÉCEPTION DES ONDES ÉLEC- TRIQUES. INFLUENCE DU DÉTECTEUR SUR LE PHÉNOMÈNE DE RÉCEPTION EN TÉLÉGRAPHIE SANS FIL. [538.562] — Séance du 6 août — Le phénomène de la réception en télégraphie sans fil est fort complexe, car il dépend non seulement de Faction des ondes sur l'antenne réceptrice, mais aussi de l'ellet enregistré par le détecteur. On se sert en général du cohéreur pour déceler l'action des ondes à distance. Le cohéreur est un appareil d'une extrême sensibilité, mais le phénomène qui s'y passe est encore bien obscur et les résul- tats qu'il fournit sont d'interprétation assez incertaine. Nous avons donc songé à recourir à d'autres genres de détecteurs pour étudier, d'une part, les phénomènes qui se ])roduisent dans l'antenne-réceptrice et, d'autre part, les effets qu'enregistrent les appareils utilisés à la réception des ondes (cohéreurs, auto-décohé- rents, etc.) L'un de ces appareils est le bolomètre de Rubens qui , comme tout api>areil thermique, enregistre à coup sûr la sonnne totale de l'énergie reçue, c'est-à-dire une quantité ])roportioiinell(^ à f i'dt étendue à la durée d'une pé- riode complète. Le principe de l'appareil est bien connu et nous avons donné déjà, dans^ les comptes rendus de l'Académie des Sciences, la description succincte de la forme que nous avons adoptée. Chacune des branches du bolomètre est constituée par quatre bouts de fil de platine pur (de 25 m/m de diamètre) par- faitement égaux et disposés en forme de pont de Wheastone. Les diagonales ac , ac sont intercalées respec tivement dans les branches MQ, MN d'un pont (fi g- i)- 22 338 PHYSIQUE L'équilibre est réalisé par des résistances p , p' et un pont à corde RR'. Le galvanomètre G est du type Rroca-Carpcntier et sa sensibilité est telle qu'avec une résistance des bobines de 3o ohms, il donne une déviation de i m/m sur échelle à i mètre, pour une force électromotrice de i volt sur 'jooo mégohms. Les résistances des branches du pont MNPQ, du galvanomètre et de la pile sont égales , de manière à réaliser les conditions de sensi- bilité maxima. L'antenne est reliée en b à l'une des branches du bolomètre et la terre en c. Comme les 4 branches du petit pont abcd sont rigoui'eu- sement égales et disposées avec une symétrie parfaite par construc- tion, leurs résistances et leurs self sont identiques. De sorte que l'effet de l'onde reçue par l'antenne reste localisé dans la branche MQ seule, ' Des précautions minutieuses assurent l'isolement thermique des branches bolométriques. Les systèmes abcd, a'b'c'd', sont renfermés, très près l'un de l'autre, dans une première enceinte A en laiton poli. La boîte A est isolée par des cales de liège au centre d'une seconde enceinte R en zinc et se trouve séparée de tous côtés par une lame d'air des parois de la boîte R. Cette boîte R se trouve complètement immergée dans une caisse doublée de zinc et remplie d'eau, placée elle-même dans une grande caisse en bois pleine de sciure de liège. Des tubes métal- liques livrent passage aux fils de prise de courant. Dans ces conditions, l'ap^iort d'énergie thermique enregistré pro- vient uniquement de l'effet d'induction dans l'antenne. L'appareil est assez sensible pour permettre de mesurer d'une manière certaine l'action exercée sur une antenne réceptrice d'une trentaine de mètres de longueur à plusieurs kilomètres du i)oste d'émission. L'autre appareil procède du détecteur magnétique de ^larconi. Les expériences que nous avons exécutées et décrites dans le Journal de Physique nous ont conduit à la conclusion que, à la sensibilité près, l'eifct enregistré par le détecteur magnétique est de même nature que celui qu'enregistre le dispositif de Rutherford. Ce dispositif consiste à faire agir les ondes électriques sur un faisceau d'aiguilles d'acier préalablement aimantées à saturation. Les ondes produisent une désaimantation partielle et permanente, que Rutherford décelait à l'aide d'un magnétomètre. Nous avions d'abord employé le même i^rocédé, puis substitué au magnétomètre FlG. 3. C. TISSOT. — APPAREILS DÉTECTEURS DES ONDES ÉLECTRIQUES 330 un balistique, en plaçant le noyau dans une petite bobine reliée au galvanomètre. Pour pouvoir utiliser le même procédé d'observation avecle détec- teur magnétique, nous avons songé à associer deux appareils iden- tiques en les mettant eu opposition sur un balistique très sensible (ou sur un électrodynamomètre genre Bellati). Il arrive en ellet que l'action produite sur le balistique par les variations d'induction dues à la rotation de l'aimant sont beaucoup ]»lus considérables que celle qui provient de l'eflet des ondes. Il faut donc annuler à tout instant l'elTet dû à la rotation du champ. Deux aimants RB, ll'B' sont calés sur le même axe et entraînés par la poulie p (fi g'. 2). Les systèmes A et A' sont aussi identiques que pos- sible et constituent les deux détec- teurs magnétiques. Ils com})ren- nent chacun un noyau de lames d'acier placé dans un enroulement })rimaire et par-dessus vm enrou- lement secondaire sous forme de bol)ine plate disposée au centre (*). Les bobines secondaires sont reliées en opposition sur le balistique et l'équilibre s'obtient par un réglage des distances des systèmes A et A' aux aimants respectifs. L'un des primaires seul, celui de A par exemple, est relié à l'an- tenne et à la terre. Dans ces conditions, l'effet de l'onde peut être enregistré à toute phase du mouvement et la substitution de l'observation d'une dévia- tion à l'audition téléphonique permet d'opérer des mesures (**). Tandis que le bolomètre donne une indication proportionnelle à l'énergie totale, le détecteur paraît bien fournir une indication qui dépend de l'intensité maxima. La comparaison des indications four- nies par les deux appareils permet de se rendre compte de l'amortis- sement des ondes dans dilférentes circonstances de réception et d'étudier ce qui se produit lorsqu'on substitue à la réception directe, la réception indirecte par transformateur ou « jigger ». Dans la réception par «jigger » notamment, si l'on intercale le bolomètre en série aux ditférents points du primaire, on peut déter- miner la région dans laquelle le courant conserve une valeur sensi- blement constante et limiter en conséquence le nombre des spires de (*) Los fils consliluant les enroulements ne sont pas représentés sur la figure. {**) Un modèle de l'appareil a été présenté à la section de physique. 34o PHYSIQUE l'enroulement. Les conditions qui assurent alors le meilleur « rende- ment » du « jigger » sont celles qui donnent au coefficient d'induc- tion mutuelle des deux circuits la valeur maxima. Le procédé nous a aussi permis d'étudier ce qui se produit lors de la modification de la forme de l'antenne réceptrice : accroissement du nombre des branches, épanouissement de ces branches, réparti- tion inégale de capacités de la base au sommet. Enfin, en comparant les résultats fournis par l'observation des appareils à ceux que donnent les détecteurs communément utilisés, le procédé a mis en lumière certaines circonstances intéressantes du mode d'action de ces détecteurs qui paraît tout dillerent pour les cohéreurs à grande résistance de retour et pour les auto-décohérents, les cohéreurs à faible résistance de retour paraissant se comporter d'une manière intermédiaire. M. Adolphe DIVAI Pharmacien de i" classe , à Angers Ex-Chef du Laboratoire de matière médicale de TUniversité de Bordeaux NOUVEL APPAREIL DE PHOTOMICROGRAPHIE [7:-o35J — Séance du 8 août — Dans tout appareil de photomicrographie, trois parties essentielles sont à considérer : 1° L'appareil microscopique ; 2° L'appareil photographique; 3° La source lumineuse. A. Appareil microscopique Le microscope , tel qu'il est disposé pour les examens ordinaires , nous fournit une image virtuelle et de sens contraire à l'objet. Cette image ne peut donc pas être fixée par la plaque photogra- phique. Pour résoudre le problème de la photomicrographie, il fallut obtenir une image qui , tout en étant agrandie, fût réelle. C'est ce A. DIVAI. — NOUVEL APPAREIL DE PHOTOMICROGRAPHIE 34l que l'on fit en soulevant le tube porte-lentilles du microscope, jusqu'à ce que l'image fournie par l'objectif vienne se former entre le foyer interne de l'objectif et celui (interne également) de l'ocu- laire. Dans la pratique, deux moyens sont employés pour arriver à ce résultat : 1° Conserver le microscope dans son état normal et l'adapter à une chambre photographique dépourvue de son objectif; 1° Retirer l'oculaire du microscope et placer l'appareil devant la chambre photographique, en laissant l'objectif de cette dernière. Notons, en passant, que l'image que nous aurons ainsi obtenue sur le verre dépoli sera réelle et de même sens que V objet : toutefois cette image am^a un diamètre inférieur à celle qu'on aurait obtenue avec le microscope ordinaire. Pour l'expression du grossissement photomicrographique , on ne pourra donc pas se servir de la table livrée avec l'appareil; on pourra cependant le calculer facilement en mesurant sur le verre dépoli les divisions d'un micromètre posé sur la platine du micros- cope et appliquant la formule du grossissement : Nous avons choisi, dans notre nouveau dispositif, le premier moyen, c'est-à-dire que nous conservons le microscope sans lui retirer l'oculaire. Ce procédé a l'avantage de donner, sur le verre dépoli, une image plus nette et d'un diamètre supérieur à celui qu'on obtiendrait avec un objectif photographique. De plus, il nous permet de faire certaines combinaisons d'oculaires, avec l'objectif du microscope, très favorables pour l'augmentation du grossissement. B. Appareil photographique Tous les appareils de photomicrographie peuvent se classer, à ce point de vue, en deux séries très définies : 1° Appareils horizontaux, c'est-à-dire appareils dans lesquels la lame porte-objet est placée dans un plan vertical; 2° Appareils verticaux dans lesquels la lame porte-objet se trouve dans un plan horizontal. Les appareils horizontaux sont, à notre avis, absolument à rejeter, car ils ne peuvent pas répondre à tous les besoins courants : si , en effet, ils permettent de faire, avec autant de finesse que les ai3pareils 342 IMIYSIÔUE verticaux, les jihotoj^raphies de préparations montées au Baume du Canada, ou à toute autre substance solidilial)le, ils sont, en revanche, absolument incapal)les de permettre la pose d'êtres animés ou de cristaux contenus dans un milieu liquide ou semi-lhiide. Dans ce dernier cas, on observe sur le verre dé[)oli un continuel mouvement vertical de haut m bas, i)roduit par le mouvement du li([uide qui s'écoule ainsi que j)ar des particules ténues qui se trouvent en sus- pension dans le milieu. Des photomicroora[)hies faites dans ces con- ditions montrent toujours des stries parallèles occasionnées pai^ le phénomène décrit ci-dessus. C'est pourquoi nous avons adopté l'appareil vertical, qui ne pré- sente, en aucun cas, cet inconvénient. Pour le montage de notre système, nous nous sommes servi, comme support de la chambre noire , du pied photomicrographique de Leitz. Cet appareil (fîg'. i) se com[)ose d'un plateau de fonte A suppor- tant une colonne en fer B. Dans cette pièce s'engage une glissière C, qui peut être maintenue à dif- férentes hauteurs, grâce à un écrou D. La "lissière C est pourvue d'une rainure longi- tudinale E, dans laquelle peut se mouvoir la tige F soute- nant la partie inférieure de la chambre photographique. Cette tige permet, par son dé- l)lacement dans la glissière, d'allonger ou de racourcir le soufflet et de le fixer dans la position désirée, à l'aide de l'écrou G. La chambre noire est cons- tituée par deux montures en '^iil noyer reliées entre elles par JliP un soufflet conique identique à ceux des a|>pareils photo- graphiques. Dans rintérieiu* de la monture inférieure H est un dia[)hi'agme tournant portant 5 ouvertures de diamètres différents et qui sert à limiter le chanq) de limage sur le verre FiG. I. A. DIVAI. — NOUVEL APPAREIL DE PHOTOMICROGRAPHIE 3^3 dépoli. Sous cette monture est un tube métallique a remplaçant l'objectif photographique et dans lequel on engage l'oculaire du microscope. La monture supérieure de la chambre photograpliique est analogue aux montures portant le verre dépoli des appareils photographiques ordinaires : elle est faite pour des plaques de i3 c/m X i^ c/m. On peut y adapter un verre dépoli ou des châssis simples renfermant les plaques sensibles. Des intermédiaires permettent d'employer des plaques de 9 c/m sur 12 c/m. Nous préconisons l'emploi de cette grandeur de plaques, qui sont suflisantes dans tous les cas. Dans l'appareil de Leitz, on place le microscope sur le plateau en fonte A, et l'on engage l'oculaire dans l'intérieur du tube métaUique a. Un manchon de toile noire, muni d'un élastique à chaque extrémité, permet, en embrassant d'un côté le tube métallique et de l'autre le pourtour de l'oculaire , de s'opposer au passage de la lumière par l'espace annulaire séparant ces deux parties. Cet appareil ne permet pas de faire des poses de 10 à 20 secondes sans donner, sur la plaque photographique, un voile très intense : en effet, toute la lumière émise par la source n'est pas uniquement réfléchie par le miroir du microscope et, par conséquent, ne passe pas en totalité au travers de la préparation : une notable quantité se réfléchit sur la lamelle et pénètre directement dans le tube du micros- cope. De plus, même en condensant avec un système de lentilles le faisceau , de façon à n'obtenir sur le miroir qu'un petit disque lumi- neux, et en se plaçant dans une chambre noire (pour éviter la réflexion des rayons solaires sur la lamelle), on constate encore un voile moins intense que précédemment, mais suffisant néanmoins pour ne pas permettre une pose un peu longue. Un procédé qui semblerait obvier à ces inconvénients consisterait à placer la source lumineuse dans un appartement voisin et d'amener ses rayons , par un tube muni de lentilles , dans la chambre noire où se trouverait disposé l'appareil. Dans ce cas, il y a encore une suffi- sante diffusion du faisceau lumineux pour donner un voile en 3o à 40 secondes. D'autre part, il est très gênant pour l'opérateur de se trouver dans une pièce obscure; les diverses manipulations, mise au point, placement de la préparation, mesure du temps de pose au chronomètre, etc.. exigent un grand soin, que l'on ne peut guère obtenir dans une chambre noire. Aussi avons-nous cherché à réaliser un appareil permettant d'opérer en pleine lumière et sans donner de voile. 344 PHYSIQUE Les conditions de bon fonctionnement d'un appareil pliotomicro- graphique peuvent, d'après ce que nous avons dit plus haut, se résumer ainsi : 1° Faire passer tous les rayons lumineux à travers la préparation, ce qui peut encore s'énoncer : ne recevoir sur la plaque photogra- phique que les rayons ayant franchi la préparation ; nous les nommons rayons utiles. a" Opérer dans une pièce éclairée, sans que les rayons solaires influent sur la plaque sensible : C'est en se basant strictement sur ces données que nous avons fait construire une petite armoire (Fig. 2) destinée à loger le microscope. Les dimensions sont un peu supérieures à celles de la boîte qui contient l'instrument et qui est fournie par le fabricant. Elle se compose de quatre faces verticales égales entre elles. La face antérieure A porte auprès de sa base une ouverture O de 5 cen- timètres de diamètre, munie d'un petit tube en cuivre dans lequel vient aboutir le tube qui amène les rayons lumineux. La face postérieure B est percée d'une petite porte , située à hauteur de la vis micrométrique du microscope et de dimensions suffisantes pour laisser passer la main qui doit manœuvrer cette vis. La face latérale droite C est constituée par une porte qui occupe sa totalité : elle permet d'introduire ou de retirer le microscope. Enfin, la face latérale gauche est pleine et correspond à la colonne en fer B du support de Leitz. Les deux portes ferment hermétiquement au moyen de feuillures recouvertes de velours, La partie supérieure de l'armoire porte un trou D de largeur légè- rement supérieure au diamètre du tube métallique a (fi g- j) placé sous la monture inférieure du soufflet de la chambre photographique. L'intérieur de l'armoire est entièrement peint au vernis noir : il est, en outre, divisé en deux parties par une cloison horizontale située à la hauteur de la platine du microscope (E, fig. 2) et formant avec la partie supérieure de celle-ci un seul plan horizontal. Cette sépa- ration se meut dans deux glissières F et F' situées sur les faces antérieures et postérieures de l'armoire et, de plus, elle est découpée en son centre de façon à emboîter très exactement le tour de la platine du microscope, ainsi que la partie postérieure de son pied. Pour permettre une plus grande imperméabilité à la lumière , tout le pourtour de cette ouverture intérieure est garni de velours. Nous avons séparé en deux parties cette cloison horizontale selon la ligne antéro-postérieure ah. A. DIVAI. — NOUVEL APPAREIL DE PHOTOMICROGRAPHIE 345 Le microscope se place en retirant d'abord la demi-portion située du côté de la grande porte latérale : on a soin de bien appuyer la platine sur le velours, puis on remet l'autre moitié de la séparation. FiG. 2. On voit de suite que toute la partie inférieure du microscope (c'est-à-dire l'appareil d'éclairage et le diaphragme) se trouve plongée dans la plus complète obscurité et ne reçoit de lumière que par l'ou- verture O pratiquée vers la base de la face antérieure A. Grâce à ce dispositif, toute la lumière qui parviendra jusqu'à la plaque photographique aura pénétré au travers de la préparation, car la seule ouverture, faisant communiquer les deux compartiments, correspond à l'orifice du diaphragme situé sous la platine. Tous les rayons du faisceau lumineux qui n'auront pas été réfléchis par le miroir ne serviront qu'à éclairer la chambre inférieure et ne pour- ront pas pénétrer dans la supérieure. Pour réunir le microscope à la chambre photographique , on sou- lève le tube de tirage, de façon à le faire sortir par le trou percé au-dessus de l'armoire, puis on l'engage dans le tube porté par la chambre et on place le manchon d'étoffe. Le tube est ensuite redes- cendu jusqu'à ce que le manchon, pénétrant dans le trou, vienne l'obturer complètement 346 PHYSIQUE C. Appareil d'éclairage La partie inférieure de la face antérieure de notre armoire porte une ouverture de 5 centimètres de diamètre {O, fig. 2) dans laquelle on adapte par friction un tube communiquant avec la partie anté- rieure d'un appareil de projection dont on a retiré l'objectif et laissé le condensateur. On centre avec soin le système, de façon que le faisceau émis par la source lumineuse forme un disque de diamètre à*peu près égal à celui du miroir du microscope. Sur le trajet de notre tube porte-lumière nous avons ménagé : 1" Une fente verticale destinée à recevoir une cuve en verre, à faces parallèles, contenant une solution concentrée d'alun; 2" Un obturateur à guillotine (constitué par une planchette verti- cale percée d'une ouverture de diamètre égal à celui du tulje porte- lumière et pouvant glisser dans une rainure) : il peut arrêter le faisceau lumineux ou le laisser passer, selon les besoins de la mani- pulation, et permet, en outre, de faire la pose ou l'instantané. D. Source de lumière. Développement Le foyer lumineux que nous avons utilisé dans nos expériences €st l'arc électrique. C'est celui qui nous a donné les meilleurs résul- tats et permis les poses les j^lus courtes. Les temps de pose ont varié pour les divers grossissements entre l'instantanté (3o à 4o diamètres) à i minute 1/2 (5oo à 600 diamètres) et même 2 minutes (1000 diamètres). En aucun de ces cas nous n'avons eu de voile sur les clichés. Pour la photographie des êtres animés , qui oblige à faire de l'ins- tantané, nous avons pris les précautions suivantes qui nous ont facilité l'obtention d'excellents clichés. On sait que les êtres inférieurs sont très rapidement tués par un excès de lumière et que leur aspect mort est très différent de celui qu'ils avaient pendant leur existence; d'où la nécessité de faire des photographies d'animaux vivants et avec un minimum de pose. Aussi, montons-nous deux préparations aussi identiques que possible. La première servira pour le réglage de l'éclairage , la mise au point du microscope, etc., et on la remplacera, au moment de la pose, par la seconde préparation. On obtient ainsi des clichés instan- tanés donnant très nettement les différentes phases de la vie de ces êtres. A. PASQUEAU. — REDRESSEMENT DES CLICHÉS PHOTOGRAPHIQUES 34^ Toutes les plaques ont été développées au diamidopliénol, d'après la formule suivante : Eau iooo''« Sulfite de soude anhydre aoe""^ Diamidopliénol 5^^" Ce bain, peu rapide, donne une plus g-rande lînesse dans les détails que les autres. Nous exceptons cependant les clichés faits avec des grossissements supérieurs à 800 diamètres, où 2 minutes de pose sont presque nécessaires. Nous avons employé, pour ces derniers, la solution concentrée de cristallos diluée dans la proportion de : Solution concentrée de cristallos . 10 à iS'^'' (selon le temps de pose) Eau Q. S. pour fjiire 100^" Cette solution donne une grande intensité aux clichés en même temps qu'un développement un peu plus rapide. M. A. PASQUEAI] Inspecteur général des Ponts et Chaussées, à Paris REDRESSEMEtyiT DES CLICHÉS PHOTOGRAPHIQUES PAR LE SCOPA, AMPLIFICATEUR REDRESSEUR, AUTOMATIQUE ET UNIVERSEL [::-8i3] — Séanre du 8 août — But et utilité du redressement. — Les lignes verticales de la nature sont reproduites , comme on le sait, sur le cliché photogra- phique par des lignes parallèles entre elles et aux bords latéraux de la plaque, quand la glace sensible a été, pendant la pose, rigoureu- sement verticale, aussi bien dans le sens transversal que dans le sens longitudinal de l'appareil. Lorsque cette double condition n'a pas été remplie, les lignes ver- ticales du motif convergent sur le cliché, les maisons des rues tombent les unes vers les autres , les édifices élevés menacent les l)assants, les eaux tranquilles accusent des réflexions déconcertantes. 348 PHYSIQUE Les groupes, les portraits n'échappent pas à cette loi générale et subissent, de ce fait, des déformations regrettables. Avec les appareils directs de grandes dimensions , qui sont tou- jours montés sur pieds, la verticalité de la glace sensible peut être obtenue, sans trop de difUculté, au moyen de deux niveaux fixés sur le chariot, lun dans le sens de sa longueur, l'autre dans le sens de sa largeur. Le premier permet de supprimer la pente de l'axe optique et l'autre de corriger le devers transversal de l'appareil. Quand la verticalité de la plaque a été ainsi réalisée, la ligne d'ho- rizon du motif passe forcément par le centre de la glace, et l'on constate alors que la mise en plaque du sujet est presque toujours inacceptable. On est donc obligé de rectifier la position du motif sur la glace, en décentrant peu à peu l'objectif, autant qu'il est utile et possible de le faire. Ce décentrement nécessite des objectifs beaucoup plus gros, plus lourds, plus chers, puisqu'ils doivent alors couvrir un disque de netteté beaucoup plus grand. Il est en outre insuffisant, dans bien des cas, en raison de la dimension limitée de la planchette d'avant et du faible recul dont on peut disposer. Ces difficultés , ainsi résolues en partie dans les appareils à pieds , deviennent des impossibilités quand on cherche à les surmonter, par les mêmes moyens, dans les appareils à main. Des tentatives nom- breuses sont faites dans ce sens depuis quelques années. Leur grand nombre jn'ouve combien il serait utile d'atteindre le but qu'elles poursuivent ; mais il faut convenir qu'elles donnent l'illusion et non la réalité d'une solution. Dans les appareils à main , en effet , la ligne de visée est presque toujours au-dessous ou à peine au-dessus de leur face supériem^e, qui seule peut porter un niveau. Il est donc presque impossilîle de bien voir en même temps le viseur et le niveau. De plus, avec tous ces appareils , sans exception , la mobilité de la main de l'opérateur et le tir au vol, qui est leur principale raison d'être, sont autant d'obstacles qui empêchent de maintenir la verticalité de la glace pendant la pose. Quant au décentrement , il est encore plus illusoire dans les appa- reils à main. Dans ces appareils, en effet, on emploie des objectifs à très courts foyers et à très grandes ouvertures. On demande à ces objectifs tout ce qu'ils peuvent donner et souvent plus qu'ils ne donnent. Si donc on décentre ces objectifs, il faut, ou bien les dia- phragmer énormément et perdre ainsi le bénéfice de l'instantanéité, ou renoncer à la netteté de l'épreuve, en admettant sur le cliché des A. PASQUEAU. — REDRESSEMENT DES CLICHÉS PHOTOGRAPHIQUES 349 parties de l'image que les bons opérateurs écartent avec le plus grand soin. En outre, la tendance est aux objectifs de plus en plus rapides et, par suite, de plus en plus gros. La planchette d'avant de ces appareils étant déjà trop étroite pour permettre un décentrement suffisant des objectifs peu volumineux, il faut renoncer au décentre- ment ou renoncer à augmenter l'instantanéité de ces instruments. Quelques auteurs conseillent, il est vrai, de renoncer à l'agran- dissenient de tous les clichés entachés des vices rédhibitoires dus à la pente et au devers de l'appareil qui les a produits; mais, comme il est difficile de trouver un cliché à peu près droit sur 20 instantanés à main, le sacrifice demandé revient à exclure ces instantanés de l'agrandissement, qui est le complément nécessaire de ces petits appareils. D'autres auteurs, et non des moindres, recommandent de faire sur pied tous les clichés d'appareils à main destinés à l'agran- dissement ; mais , avec ces appareils à main sur pieds , ils sacrifient la légèreté du l^agage qu'on emporte et les instantanés au vol qui constituent les avantages essentiels des appareils à main. Ne vaut-il pas mieux renoncer à ces illusions, à ces artifices? N'est-il pas préférable d'écarter franchement les pieds, les niveaux, le décentrement , des appareils à main , auxquels ils ne peuvent con- venir, et d'en arriver au redressement qui, seul, peut donner et donne en fait une solution rationnelle et satisfaisante de la question ? Le Scopa. — Je crois avoir réalisé cette solution d'une manière simple, complète et pratique , par le Scopa, amplificateur photogra- phique, redresseur automatique et universel, que j'ai imaginé et que j'ai fait construire en 1900-1901. Cet appareil est constitué par une chambre d'agrandissement à trois corps, pourvue des perfection- nements usités jusqu'à ce jour et pré- sentant en outre les dispositions sui- vantes. Le corps arrière, portant la plaque sensible, peut prendre une forte inclinaison, en basculant autour d'un axe horizontal passant exacte- ment par le plan de la surface sensi- bilisée et par son milieu. Le corps d'avant, qui porte le cliché, peut également basculer autour d un axe horizontal passant exactement par le plan de la surface impression- née du cliché à transformer. Le cliché est, en outre, monté sur un A C V ( ^/ \ G / \ \ \ E / ^\^ \ Y / / . t \ ^v..^^^ \ \ V 1 1 ^ i 1 " 3 • ) 35o PHYSIQUE disque tournant, qui permet dr disposer la ligne d'horizon parallè- lement aux axes des bascules. La bascule d'avant CD {Fig. i) est reliée à la bascule d'arrière AB par une connexion mécanique et automatique, qui est l'innovation principale de l'appareil. Cette con^ nexion est formée par une coulisse graduée , occupant la moitié supé- rieui-e AE de la bascule arrière. Un curseur, qui peut être fixé en un point quelconque de cette coulisse, porte un tourillon G, relié par une tige rigide GH à un autre tourillon ada})té invariablement en un point H de la moitié inférieure de la bascide d'avant CD. Cette tige rigide est composée de deux ou trois tubes qui peuvent télesco- per l'un dans l'autre, pour prendre dans cha([ue cas la longueur corrélative au tirage normal à donner à la clunnbre pour réaliser le rapport d'agrandissement ou de réduction ([u'on a en vue. Une virole de serrage fixe ensuite la tige à la longueur voulue: Cet amplificateur redresse toutes les déformations dues à \i\. pente de l'axe optique et au devers de l'appareil qui a produit le cliché. Il maintient automatiquement et rigoureusement la mise au point sm* toute la surface de l'épreuve à obtenir. Le même appareil peut recevoir tous les o1)jectifs et réaliser tous les rapports d'agrandisse- ment ou de réduction, dans les limites du format maximum pour lequel chacun d'eux a été construit. Le Scopa est donc bien un amplificateur, redresseur, automatique et universel. Théorie de l'appareil. — La théorie du Scopa est basée sur divers théorèmes dont la démonstration géométrique fait l'objet principal de la présente communication. . Dans le but de simplilier l'exposé de ce qui suivra, je rappellerai d'abord les causes bien connues des déformations qu'il s'agit de redresser. I. — Soit ABCD {Fig. 2) un rectangle vertical, OM la normale au plan de ce rectangle élevée par son centre de figure, O l'œil d'un obsei'vateur dirigé vers le point M. Tout plan, tel que ahcd, vertical et parallèle au tableau ABCD , coupera le faisceau des rayons lumi- neux envoyés par ce tableau vers l'œil O, suivant un rectangle ahcd semblable au rectangle ABCD. Ses côtés latéraux seront verti- caux et parallèles entre eux comme les côtés similaires du rectangle considéré. Remjdaçons l'œil O par l'objectif d'un appareil photogra- idiique dont l'axe optique serait dirigé suivant OM et dont la glace sensible a'b'c'd' , normale à cet axe, serait placée symétriquement à abcd par rapport au point O. L'image du rectangle ABCD sur la d' a ' A. PASQUEAU. — REDRESSEMENT DES CLICHÉS PHOTOGRAPHIQUES 35l glace sensible sera identique à celle ([iie le faisceau des rayons luini- nevix aurait produite sur la face antérieure du rectangle abcd, si cette face avait été ca- pable d'en conserver l'empreinte. Donc : Les lignes verticales de la nature sont re- produites sur le cliché par des lignes çerti- cales et parallèles aux bords latéraux de la glace sensible quand cette glace a été , pen- dant la pose , exacte- ment verticale, aussi bien dans le sens lon- gitudinal que dans le sens transversal de l'appareil. c^: .0 W" FiG. 2. II. — Bornons-nous, maintenant, à considérer ce qui se passe dans le rectangle abcd, que nous appellerons le contre - cliché , et inclinons l'axe optique OM de l'appareil suivant une ligne O'M, contenue dans le même plan vertical et formant un angle a avec OM (fg- 3). Dans ce mouvement, le plan du rectangle abcd, symé- trique du cliché, restant perpendi- culaire à l'axe optique O'M, cessera d'être parallèle au plan du taljleau ABCD. Son prolongement ira cou- per la verticale du point O' en un point p qui sera le sommet d'une pyramide triangulaire dont O'bd est la base et dont les arêtes pb et pd, qui convergent en p, sont les images des côtés verticaux AB et CD du tableau de la figure 2. Les lignes verticales de la nature sont donc , dans ce cas , reproduites sur le cliché par des lignes qui convergent vers un point de la médiane verticale de la plaque sensible et qui sont, par suite, disposées symétriquement, en éventail, de part et d'autre de cette médiane. FiG. 3. 352 PHYSIQUE Nous appellerons pente de Taxe o[)tique la tangente de l'angle a que cet axe faisait avec le plan de l'horizon pendant la pose. III. — Faisons tourner maintenant l'appareil, autour de son axe optique, d'un angle 5. que nous appellerons le devers de l'appareil récepteur. Dans ce second mouvement, l'image du tableau ABGD ne se déplacera pas dans l'espace ; mais, la plaque sensible ayant tourné, dans son plan, d'un angle S, les lignes ab et cd, figurant sur le cliché les verticales AB et CD du tableau , cesseront de converger vers un point situé sur le prolongement de la médiane de ce cliché. Elles iront se rencontrer en un point situé sur une ligne faisant , avec la médiane, un angle § égal au devers de l'appareil et leur faisceau sera dissymétrique par rapport aux bords latéraux de la plaque. Donc : La convergence des lignes verticales de la nature, sur le cliché , est due dans tous les cas à la pente de V appareil récepteur pendant la pose et la dissymétrie de cette convergence par rapport aux bords latéraux du cliché est déterminée par le devers de cet appareil. Le rectangle ABCD sera, par suite, figuré par le rectangle a (fi g- 4) ^ i^ ^ y ^ ^^^ ^^^ pente ni devers, par le trapèze b s'il y a eu pente sans devers et par le qua- drilatère c s'il y a eu simultanément pente et devers de l'appareil récepteur, lY, — Ceci posé, reprenons la figure 2, éclairons vivement la face postérieure du cliché a'b'c'd et rece- vons son image, produite par l'objectif O sur un papier sensible tendu sur le rectangle ABGD , dont ce cliché est l'image. Cet ensemble constituera un appareil d'agran- dissement dont les deux châssis seraient parallèles et dont les longueurs focales conjuguées seraient identiques à celles de l'olijectif o, quand il a produit le cliché. Les rayons lumineux, éma- nant du cliché et passant par l'objectif pour aller impressionner le papier sensilile, suivront exactement et en sens inverse le chemin suivi par les rayons lumineux partis précédemment de ABCD pour aller former l'image de ce rectangle sur le cliché. Cet amplificateur sommaire reproduira donc, dans tous les cas. le cliché sans modifi- cation. Si ce dex'nier est correct, l'épreuve agrandie le sera; mais, si le cliché présente des déformations dues à la pente et au devers, l'agrandissement obtenu sera allecté des mêmes tares, et ces défauts seront d'autant plus choquants que le rapport d'agrandissement sera plus grand. FiG. 4- A. PASQUEAU. — REDRESSEMENT DES CLICHES PHOTOGRAPHIQUES 353 V- — Reprenons, au contraire, la figm^e 3, qui s'applique au cas d'un cliché obtenu avec pente, sans devers, et constituons comme ci-dessus un amplificateur, en maintenant entre le plan du cliché et celui du papier sensible un angle a égal à l'angle de la pente de l'appareil qui a produit le cliché. Les rayons lumineux émanant du cliché continueront à suivre, dans ce cas comme dans le précédent, exactement et en sens contraire, le chemin que les rayons émanant du tableau avaient suivi pendant la pose du cliché ; mais l'image agrandie cessera d'être sendjlable au cliché et elle redeviendra identique au rectangle ABCD lui-même, auquel elle sera exactement sui)erposable dans toutes ses parties. Donc : Pour obtenir un agrandissement redressé d'un cliché déformé par la pente de l'axe optique de l'appareil récepteur, sans devers, il est nécessaire et il suffit d'établir, entre le plan du cliché et celui du papier sensible , un angle a égal à celui de la pente, quand la longueur focale conjuguée antérieure de l'objectif amplificateur est identique à celle qui a produit le cliché à redresser. VI. — Dans la pratique, l'égalité de ces deux longueurs focales n'est jamais réalisée, même lorsqu'on emploie le même objectif pour faire le cliché et pour l'amplifier, car cet objectif fonctionne dans les deux cas à des distances très inégales de l'objet à reproduire et, par suite, avec des longueurs focales conjuguées très notablement ditfé- rentes. Appelons donc F la distance réelle du plan focal de l'appareil récepteur au point nodal d'émergence de son objectif o, pendant la pose, et F' la distance du plan focal de l'appareil d'agrandissement au point nodal d'incidence de son propre objectif, qui peut être iden- tique à l'objectif o ou diflérent de celui-ci. Soit ab (fi g. 5) la moi- tié supérieure du cli- ché placé dans l'am- plificateur, oa la lon- gueur F et oa' la lon- gueur F' ci - dessus définies. Si F' = F, FiG. 5. nous avons vu que l'image du cliché ab sera exactement et totalement redressée, quand on aura incliné le châssis portant le papier sensible d'un angle a égal 23* c t t b /- V/ 1\ ^^-^x "Wj V ^^-^y^ a/ l ^^.--^'''^ / a / __l 0 0 354 PHYSIQUE à celui que l'axe optique do l'appareil récepteur formait avec le plan de l'horizon pendant la pose. Dans ce mouvement, la médiane hori- zontale du rectangle type de la ligure 'i ne change pas, l'image du côté supérieur de ce rectangle est allongée dans le rapport de ot à oh et le rectangle type déformé sur le cliché ah est rétabli dans sa forme réelle sur l'agrandissement ot. Si nous transportons maintenant le centre optique de l'ofjjectif amplificateur de o en o', le redressement cessera d'être com[)let, puisque le point h se projettera sur le plan at en un point 6' inférieur au point t. Continuons, au contraire, à faire basculer le châssis porte-plaque at autour de la médiane «, jusqu'à ce que le point h vienne se projeter en t' sur la ligne et parallèle à oa. Dans cette nouvelle position at du châssis arrière, l'image du bord supérieur du rectangle type sera amplifiée dans le rapport —rr- = — r- et le rectangle type sera de nouveau reproduit sur l'agrandissement avec ses bords verticaux. Or, et' étant parallèle à oa, on aura tg y.' o'a F' en appelant a' l'angle de redressement c &. t' . Donc : Le redressement complet peut être réalisé, clans tous les cas considérés , en établissant entre la surface du cliché et la glace sensible un angle y' tel que la tangente de y- soit à la tangente de a, comme la longueur focale conjuguée de l'objectif amplifica- teur est à celle de l'objectif qui a produit ce cliché. YII, — Ce qui précède suppose que le cliché n'a pas de devers et que le basculement a lieu autour de sa médiane horizontale, c'est-à- dire autour d'un axe parallèle à la ligne d'horizon du motif photo- graphié. Si le cliché présente, en outre, des déformations dues à la pente, un devers § dû à l'inclinaison transversale de l'appareil récepteur, on rentrera dans le cas précédent en le faisant préalaljle- ment tourner dans son plan, au moyen du disque tournant, d'un angle égal au devers S, puisque nous avons vu que la ligne d'horizon deviendra, dans ce cas, x>ai'iillèle aux axes des bascules. En dehors de toutes autres considérations, ce mouvement est indispensabk% dans la pratique, pour maintenir l'image agrandie dans les limites du x^fipier sensilîle qui doit la recevoir. Donc : Il est nécessaire et il suffit de faille tourner le cliché, dans son plan, d'un angle égal au devers de l'appareil récepteur, ou, en A. PASQUEAU. — REDRESSEMENT DES CLICHÉS PHOTOGRAPHIQUES 355 d'autres termes, d'amener la ligne d'horizon du eliché à être paral- lèle aux axes des bascules, pour redresser les déformations dues à ce devers et permettre de redresser ensuite les lignes verticales de la nature parallèlement aux bords latéraux de l'épreuve. YIII. — La relation -^ tg- y. F JO B ZF — D / / / / P -p-, établie ci-dessus, suppose que la mise au point n'est pas troublée par le basculement du châssis por- tant la plaque sensible. En fait, ce mouvement éloigne la partie inférieure de cette plaque du point correspondant du cliché et il est nécessaire de faire liasculer ce dernier, en sens contraire et d'une faible quantité . pour ré- talilir la mise au point à l'extrémité supérieure de l'épreuve à obtenir. Cherchons donc la re- lation qui doit exister entre l'angle de bascu- lement j5 du châssis ar- rière . porte-plaque .et A ^ l'angle de basculement 7 du châssis avant qui porte le cliché. Soit, à cet effet, AB le demi-cliché, CD son image agrandie, O l'objectif de l'amplificateur (fig- 6). L'appareil ayant été mis normalement au point, pour un rapport d'agrandissement CD OC ?/ Fig. 6. "^ÂB =^ OA' avec l'objectif aplanétique O. de longueur focale j)rincipalc F, on aura, d'après la formule bien connue des foyers conjugués OA = F + — etOC = F + nF Si nous inclinons le cliché d'un angle 7 suivant AB', l'image nette de B' ira se former en D', suivant un rapport d'agrandissement n', à une distance telle que l'on aura : OA' = F + ^ etOG' = F + /i'F n d' ou AA' = F 1^^ ^j, et ce = F {?i' — n) 356 PHYSIQUE AA' n — Il ou ce un' {n — n) niï Or AA' = A'B' tg /. CC = CD' tg p , et ^r = lï, tg 7 , I I donc ■ , ^= n X ~~' — = — ta: 5 n n n O J ou tg i = n tg 7 (2) Cette relation fondamentale est indépendante de la position du point B sur le cliché. Par suite, la mise au point est exactement rétablie, non seulement pour le point B considéré, mais [)our tout autre point situé sur le cliché, aussi bien au-dessous qu'au-dessus de l'axe de rotation. Donc : La mise au point, ti^oiihlée par le basculement du châssis arrière sous un angle 5, est rigoureusement rétablie sur tous les points de Vépreuve à obtenir quand on bascule le cliché, en sens inverse, sous un angle 7, tel que la tangente de fi soit égale à la tangente de 7 multipliée par le rapport n d' agrandissement quel qu'il soit, c'est-à- dire si l'on a tg jS = ft tg 7. Quant au redressement, il continuera à être complet si la somme des angles fi et 7 reste égale à l'angle de redressement y.' de la rela- tion (i) du § VI, soit p -\- y =z y.'. Il en sera de même de la correction du devers par le disque tour- nant, puisque la position relative des deux châssis n'aura pas changé. IX. — Les longueurs des tangentes diffèrent très peu de celles des arcs dans les limites considérées. On peut donc déduire des rela- tions tgfj = n tg 7 et /3 + 7 = y- la relation tgr^(i+^) = tg=''- Mais on a d'autre part, d'après la relation du § YI. tg y.' F' to- a — F ' "ts et l'on a par la formule des foyers conjugués F' = F 1 1 + -^ ' ' n A. PASQUEAU. — UEDKESSEMENT DES CLICHES PHOTOGRAPHIQUES 357 (jiiand Tobjectif amplificaleiir a la même longueur focale principale que l'objectif récepteur. De là on déduit : tgS ï + 7rl = *^^' tga hi doù tg p = tg y. OU Donc, dans ce cas, la tangente de l'angle de basculement du corps arrière est sensiblement égale à la pente de l'axe optique de l'appa- reil récepteur et, par suite, indépendante du rapport d'agrandisse- ment. Cette relation est intéressante, car elle m'a conduit à déter- miner très rapidement le devers et la pente de redressement d'un cliché donné, au moyen d'un calibre gradué, simplement appliqué sur le cliché ou sur une de ses épreuves ordinaires. Elle permet, en outre, de constater que le Scopa, tel qu'il est construit, peut redresser tous les clichés, dans tous les cas, et dans des limites qu'il est impossible d'atteindre avec aucun appareil à décentrement actuellement connu. X. — En se re^^ortant à la figure 3, il est facile de voir que le redressement rétablit rigoureusement, sur l'épreuve redressée, la perspective linéaire telle qu'on l'aurait oljtenue avec un appareil à pied sur une glace sensible . disposée verticalement pendant la pose, quand la longueur focale effective de l'amplificateur est identique à celle de l'appareil récepteur, soit quand F' =: F. Dans le cas ^dus général où F' diffère de F, féchelle des largeurs et le parallélisme des verticales sont encore exactement rétablis, mais l'échelle des hauteurs est légèrement modifiée dans le rapport des longueurs at' et at de la figure. 5. Cette différence est inappréciable à l'œil et n'excède pas celles qui résultent des aberrations inévitalîles des objectifs. On peut donc affirmer que le redresse- . Pn. >A ment rétablit la perspec- tive avec toute l'exacti- tude qui est pratique- ment désirable. XL — Il reste à éta- blir maintenant que le mode de connexion très simple auquel je me suis arrêté , de préférence à Fjg. 7. 358 PHYSIQUE tous autres, et que j'ai réalisé dans \eScopa, satisfait avec une pré- cision largement sullisante. dans la pratique, à toutes les conditions déterminées ci-dessus. A cet effet, appelons OO' les axes de rotation des deux bascules, D leur distance, A et B les tourillons arrière et avant de la tige télescopique , L la longueur fixe de cette tige, A et H les bras de leviers des deux bascules, S et 7 les angles de basculement de ces bascules. On aura (Jîg'- 'j) : L^=. AC^ + CB^ ={h + H)^ + D^ = /^^ + H^ + 2 m + D^ et L'^ = A'G" + C'B" =(/? cos p + H cos y)- -f- (D — A sin ,5 + H sin 7)^ D . D gsm7 = jj d'où fj sin 7 = TT sin S — cos j'5 cos 7 -|- sin |3 sin 7+1 ou sin 7 = - sin ,5 + j^ [i — cos (S + 7)] (3) en posant -j- = n, qui est le rapport d'agrandissement et en mar- quant que cos (p -)- 7) = cos /3 cos 7 — sin jS sin 7. Le dernier terme du second membre de la relation (3) étant relati- vement très petit dans les conditions de l'appareil considéré, on a très sensiblement sin ,3 =: n sin 7 ou tang .S = n tang 7. Soit, en effet, un cas très défavorable, tel que le suivant, dans lequel on a jS = 20°, tang ^5 ^ o,364o, h = o'"o5, H ^=. o'"20, /i = 4 et D = o'"56 ; ce cas correspond à un cliché G '/. X 9» en hauteur, dont la ligne d'horizon est à la limite de la plus grande dimension de la plaque et dont on veut faire un 24 X 3o en l'agrandissant 4 fois avec l'objectif F = o'"ii2 qui l'a produit. On trouve par la formule rigoureuse (3) que le Scopa donne 7 = 5° 23' alors que la relation tang p = n tang 7 donne 5'^ 12', d'où résulte une différence en trop de 11', soit de moins de 3 '/, "/o, dans la valeur de l'angle 7. Et, comme le point le plus bas du cliché est, dans ce cas, au ^/^ de H à partir de l'axe de rotation, la répercussion de cette très minime différence sur la mise au point de l'extrémité du cliché n'excède pas douze centièmes de rniUiinètve , soit moins des neuf dix milliènies de la longueur focale utilisée , qui est de j^Oram pour /l :^ 4- Le Scopa réalise donc la relation tang S = n tang 7 avec une pré- cision plus que suffisante dans la pratique. Cette précision est notamment très supérieure à celle de la théorie qui sert de base à cette formule et qui consiste à admettre, comme on le fait toujours en photographie pratique, que l'image d'une figure plane est formée A. PASQUEAU. — REDRESSEMENT DES CLICHÉS PHOTOGRAPHIQUES SSg siu" une surface plane appelée « plan focal » alors qu'elle se forme en réalité sur une surface concave par suite de l'aberration dite « courbure de champ » qui est commune à tous les objets. Une précision théorique plus grande serait d'ailleurs bien inutile; elle serait matériellement irréalisable avec le mode de construction des grands ajipareils les plus soignés; elle pourrait aller contre le but en appliquant trop exactement la formule dite « de netteté » qui est basée sur une hypothèse peu exacte ; elle serait difficilement applicable aux longs tirages, qui peuvent atteindre i"^4o dans le Scopa; elle sei*ait incompatible avec le changement d'objectif qui est iiïdispensable i)onv couvrir les clichés de tous formats, sans exagérer outre mesure le basculement des châssis. Le changement d'objectif est, au contraire, des plus faciles avec la connexion que j'ai adoptée, puisqu'elle est entièrement indépendante de l'objectif employé et de la position de ses points nodaux, par rapport à la planchette qui le porte. J'ai donc écarté toutes les autres combinaisons, théoriquement plus exactes, que j'avais essayées d'abord, et je m'en suis tenu à la solution simple, pratique et complète que j'ai réalisée dans le Scopa. Modèle 2^y^3o de igo3. — Le redressement ouvre, comme on vient de le voir, une voie nouvelle et féconde à la photographie en général et en particulier aux instantanés des appareils à main. Dans le but d'en faciliter l'accès à tous ceux que cette question peut inté- resser, j'ai fait établir, par la maison Gilles. 3i, rue de Navarin, à Paris, le modèle de Scopa 24X^0 que je soumets à l'appréciation du Congrès, avec une série d'épreuves redressées obtenues au moyen d'un appareil semblable. FiG. 8. 36o PHYSIQUE Dans ce nouveau modèle, la bascule d'avant est identique à celle d'ar- rière. Le châssis porte-cliché, ses deux décenlrenients et son disque tovir- nant sont disposés dans un cadre idenliciuc à celui du châssis porte- plaque; ces deux châssis sont donc interchang'eables (fi g. 8). Pour les ag-randissements, on met le porle-plaque à l'arrière et le porte-cliché à l'avant; pour les réductions on lait l'inverse; pour les rei)roductions en même grandeur, on emploie l'une ou l'autre des deux com])inaisons. La coulisse est graduée en nombres entiers, suivis d'une décimale, ce qui permet de placer exactement le curseur au point voulu pour tous les rap- ports d'agrandissement ou de réduction. La mise au point est assurée, quels que soient les objectifs employés, au moyen de trois bornes exacte- ment repérées; elle peut être faite sans loupe ni voile noir, au moyen d'une jauge à vernier, à i/io de millimètre près. Le chariot est à trois bri- sures; il développe i'"4i' ce qui permet d'amplilier sept fois un cliché 4X5 avec un objectif F := o"'o85 et de redresser en vraie grandeur un cliché 24X3o avec un F ^= o^aS travaillant à F = o^So. L'appareil rei^lié ne mesure avec son chariot que o"'44 de largem% o^Si de hauteur et 0^52 de longueur. Un pied spécial, qui peut se replier sous une épaisseur de quelques centimètres, permet de basculer tout l'appareil sous un angle de 5o'\ très favorable à l'imjDression par la lumière du jour. Mode d'emploi. — La manœuvre du Scopa est des plus fociles et des plus simples. Il suffit, en effet, pour opérer : i" de disposer la ligne d'horizon du cliché parallèlement aux axes des bascules au moyen du disque tournant ; 2" de mettre au point avec la jauge à vernier ou par tout autre moyen ; 3'' de placer les bascules vertica- lement, de fixer le curseur sur la division indiquant le rapport d'agrandissement choisi et de serrer la bague du tube télescopique ; 4" d'incliner ensuite la bascule arrière avec l'axe denté jusqu'à ce c[ue les lignes verticales de la dature , qui sont convergentes sur le cliclié, viennent reprendre leur verticalité sur la glace dépolie ; 5° de basculer ensuite l'allVit, si l'on opère à la lumière du jour, ou d'ap- procher une lanterne à condenseur, si l'on pi^éfère employer la lumière artificielle. O. ROCHEFORT. — RÉCEPTION ACCORDEE PAR COIIÉREUR-CONDENSATEUR 36l M. 0. ROCHEFORT A Paris RÉCEPTION ACCORDÉE PAR COHÉREUR-CONDENSATEUR ET RÉSONNATEUR OUDIN BIPOLAIRE [538.562] — Scancc du S août —■ FiG. Les appareils qui composent une réception de T. S. F. par inscrip- tion sur bande, au moyen de signaux Morse, sont les suivants : (schéma i). i" Une antenne récep- trice (H G) ; 2" Un fil de terre relié à un côté du cohéreur ; 3" Un relais télégra- phique (A B) d'un sys- tème ordinaire conve- nable, monté sur une pile locale d'un élément; 4° Un cohéreur à limaille (G G) ; 5° Un frappeur décohéreur à électro-aimant (D E F) ; G" Un récepteur Morse d'un type ordinaire (K L M). Ceci pour une réception par action directe. Pour la réception par action indirecte, que nous définirons plus loin, il faut ajouter un système inducteur ou résonnant, formé d'un ou deux solénoïdes, qui permet d'obtenir ce qu'on appelle 1' « accord », avec un système d'émission déterminé. Nous en parlerons plus loin. La partie relative au grand courant, c'est-à-dire celle qui permet d'utiliser la fermeture du relais sur la source (N) de 3 éléments, pour décohérer par frappe, d'une part, et inscrire un point ou un trait au récepteur Morse, d'autre part, est commune à tous les genres de réception actuelleuient en usage. Le fonctionnement d'une récex)tion par action directe s'explique de la façon suivante : Schéma i. — Un flux d'ondes hertziennes vient influencer l'antenne (H G) ; son action cohère la Umaille du tube (G C), relié en G à l'antenne 362 PHYSIQUE et on C à la terre. La eonflucliI>ilité du tube devient suffisante pour (jue le courant de la pile (P), (pii suil le chemin P A G C P, soit assez fort pour alimenter le circuit du relais (A), attirer la i>alette à ressort antago- niste et mettre en contact l'interrupteur (lî) du relais. Cet interrupteur (B) en contact livide passage au grand coiu-ant local (N) suivant le chemin N B D F N pour le Trappeur, et N B K L N pour le Morse. Le frappeur frappe et le Morse inscrit des points. A chaque frappe le tube se décohère et l'interrupteur (B) du relais s'ouvre. Si les flux d'ondes arrivent à intervalles très rapprochés , le roulement du mar- teau décohéreur sera rapide et le Morse tracera des jjoints très rappro- chés , se confondant en un seul trait. Si les flux d'ondes cessent d'arriver, puis reprennent, on aura un intervalle non inscrit au. Morse. On com- prend que des traits et des points formés ainsi à l'émission soient ainsi reçus à la réception. Le schéma i est celui qui fut le premier mis en usage à l'origine de la T. S. F. i)our le montage de la réception. On l'emploie avec des cohé- reurs peu sensibles, à électrodes de métaux oxydables et à limaille de ces métaux oxydables, tels que électrodes de fer et limaille de fer. Encore faut-il ([ue dans ces tubes la pression de la limaille , qui est pro- portionnelle à la flèche du segment de cercle (pie forme la section de la limaille sur l'électrode, ne soit pas trop considérable, sans quoi le tube, une fois cohéré, a une grande difficulté à se décohé- rer. Ceci provient de ce que la brusque remise du potentiel, qui est ici celui de la i)ile, aux deux électrodes sulTit à recohérer le tube, qui est dit « répéter ». Schéma 2. — On a alors ajouté une résistance (R) dans le circuit du petit courant , de façon à limiter l'ampérage du courant qui passe dans le tube et dans le relais. De plus, pour empêcher les ondes hertziennes de suivre le chemin (f A C , au lieu de G C cohéré, on a ajouté en S et S' des bobines de self qui, infranchissables pour l'onde hertzienne à oscillations rapides, font que tout le flux hertzien passe dans le tube pour le cohérer. Schéma 3. — On a alors essayé d'autres Cohé- reurs, formés d'électrodes en métal oxydable et de limaille en métal inoxydable: or, platine, argent. Ces tubes, beaucouj) plus sensibles, nécessitent aux bornes un voltage moindre que les piles Leclanché ordinaires à i,5 volt. On a employé certaines piles à bas voltage, donnant 0,0 volt, })ar exemple. Mais il est diflicile d'obtenir des cohéreurs tous iden- tiques les uns aux autres et on a intérêt à avoir une sovuxe du voltage tpii convient le mieux à chaque tube. Pour obtenir ce voltage variable, M. Blondel a imaginé de mettre un sinuit réglalde, shuntant à la fois le relais et le cohéreur, shunt ([ui se place entre U et N. La résistance (R) et le shunt réglable (U N) ]>ermeltent d'obtenir en G H G -^NW^ 'it'hn FiG. 2. FiG. 3. O. ROCHEFORÏ. — RÉCEPTION ACCORDÉE PAR COHÉREUR-CONDENSATEUR 363 H WWXAA- TTTTuTTTT. TERRE FiG. Cl C le potentiel que l'on désire. Cette disposition, analogue à celle des potentiomètres, a été baptisée « disposition à potentiomètre ». Remarques. — Ces trois premiers schémas indiquent trois disposition» pour ce que nous appelons « réception directe ». c'est-à-dire que l'onde hertzienne (pii ^•ient frapper l'antenne domie lieu à un courant électrique alternatif se rendant à la terre, en passant par le cohéreur qui se cohère par son action. Ces dispositifs ont le défaut de ne pas être très sensil^les et de permettre des cohérages parasitaires provenant : de l'électricité atmos- phérique à certaines heures de la journée ou de causes extérieures, telles que : dynamo ayant des étincelles aux balais , tramwavs à trolleys , etc. Ils ne permettent pas les accords délinis plus lom. Schéma 4- — Nous voyons apparaître dans le schéma 4 ^'^ réception par bobine d'induc- tion, que son inventeur, M. Marconi, a appelée « jigger ». La bobine d'induction, qui est ana- logue aux bobines employées dans le télé- phone, dans lesquelles on aurait sui)primé le // noyau intérieur en fer, est une bobine de Tesla i)our toutes petites puissances. Le pri- maire réunit directement l'antenne à la terre et l'oscillation électrique rapide produite dans le soléno'ide primaire ÇV) engendre un cou- rant dans le solénoïde secondaire (D) dont les deux extrémités sont réunies aux deux élec- trodes C et G du cohéreur. Mais les deux électrodes se trouveraient en court-circuit, par ce soléno'ide secondaire et on est amené à le couper en son milieu par un petit condensateur (E), qui empêche ce court- circuit Le cohérevir se trouve alors ac- tiomié par le flux secondaire et tout le reste de la distribution pourrait être le même que précédemment. GC — as — 7^. M \1 m J3- VXAAAAAA- FiG. 5. Uam^€)^^ Schéma 5. — Dans le schéma 5, le condensateur (E) n'existe pas et c'est sur la coiq3ure qu'est branché le circuit de la pile et ses accessoires. Ici, c'est la pile qui joue le rôle de condensateur. Le fonctiomiement est le même que précé- demment, avec cette diflerence que le courant de la pile passe par le solé- no'ide secondaire , ce qui n'arrivait pas dans la disposition du schéma 4« Schéma 6. — Nous trouvons ici l'emploi du résomiateur Oudin unipo- laire, c'est-à-dire d'un appareil d'induction ou de résonnance pour haute FiG. 6. 364 PHYSIQUE fiv(iuencc, dans lequel le primaire est une dérivation du secondaire. L'onde hertzienne suit le chemin A a T. Son passa^'-e produit une vibration électrique dans le solénoïde total (T a b), et celte vibration secondaire cohère le cohéreur G C. Comme le secondaire se trouve relié à la terre et que l'électrode C doit être reliée à la terre aussi, on est obligé de mettre en E tiu petit condensatem- qui empêche G et C d'être en court- circuit par la terre, le reste de la réception est analogue aux réceptions 4 et 5. Remarques. — Les schémas 4. 5, 6 représentent ce qu'on appelle une « réception accordée ». Sans préjuger des explications qui ont été données et sans discuter les questions que les amortissements d'ondes font naître, on appelle pratiquement « accorder » une émission déterminée avec une récep- tion par système indirect, trouver l'antenne et le solénoide primaire de la réception qui vil^rent électriquement au maximum pour la dis- 2)osition de 1 émetteur cV ondes. On cherche ensuite à trouver le solé- noïde secondaire qui donne avec le primaire le maximum d'action au cohéreur. En pratique, la disposition de l'antenne, le diamètre et le nombre des spires, l'écartement des spires du primaire, la qua- lité de grande conductibilité superficielle de la terre choisie, le bon choix du solénoïde secondaire, ont une action d'une importance très grande, puisqu'ils permettent, à puissance d'émission égale et à pi'ojection verticale des antennes égale, d'accroître la distance dans de très grandes proportions. Critique des six dispositions précédentes. — Les dispositions i, 2. 3 ne permettent pas d'elïectuer les accords dont il est parlé plus haut. Seules, la capacité, la longueur de l'antenne et sa projection verticale i)euvent être modifiées. Pour la réception directe , la disposition du schéma 3 est la meil- leure , en ce sens qu'elle permet de se servir de cohéreurs limaille or, électrodes acier, qui sont très sensibles. La disposition du scliéma 4 oblige à avoir deux circuits, l'un pri- maire et l'autre secondaire. Or, avec la puissance très faible dont on dispose à la réception, l'action du diélectrique qui écarte le pri- maire du secondaire est très importante et, si faillie que soit son épaisseur, si fin que soit le fil composant le circuit secondaire, la bolîine secondaire se trouve assez loin de la bobine primaire pour qu'une perte très sensible se produise. Le condensateur (E), qui coupe le secondaire, jette une perturba- tion très grande dans la production du llux en G et C. Par des essais pratiques faits sur de grandes puissances avec le résonnateur Oudin O. ROCHEFORT. — UÉCEPTION ACCORDEE PAR COHÉREUR-CONDE>fSATEUR 365 lîipolaire, nous avons vu, d'une façon manifeste, par amoindrisse- ment considérable des effluves secondaires, le rôle mauvais que joue, à ce point de vue, ce condensateur. Même critique pour la disposition du schéma 5, coupée par la pile dans le circuit de laquelle il y a la résistance (R), le relais et les bobines de self, ce qui est préjudiciable au bon rendement du flux secondaire. La critique de la distance entre le secondaire et le pri- maire sul)siste. Dans la réception schéma 6, par résonnateur Oudin unipolaire, nous voyons le primaire et le secondaire réunis et la perte . par la distance du primaire au secondaire, supprimée. Mais, par contre, nous n'avons pas l'avantage d'avoir aux deux électrodes deux flux à chaque instant égaux et de nom contraire. Nous avons d'un seul côté un flux qui se dirige vers la terre. Si encore ce flux se déchargeait directement sur une prise de terre, il aurait une certaine puissance, mais cette puissance est amoindrie par le condensateur (E) qui joue le rôle néfaste qu'il jouait déjà dans la disposition du schéma 4- Nous avons essayé ces dispositions maintes fois avec des solénoïdes puissants et vu comlîien ce condensateur (E) diminue l'effluve en G. J'ai cherché à créer un dispositif de réception accordée et les appa- reils qui correspondent, qui réalisent toutes les conditions reconnues nécessaires par les critiques qui précèdent, conditions qui sont les suivantes : 1° Réunion de l'antenne à la terre par les spires de l'inducteur, sans couper ces spires ; a" Pas de diélectrique entre le primaire et le secondaire ; 3'' Le secondaire est continu et ses deux extrémités directement réunies au cohéreur. sans condensateur interposé ; 4° Le secondaire agit par action bipolaire et symétrique ; 5° Le règlement du nombre de spires du primaire est facile à faire, même en cours de marche ; 6" Emploi des cohéreurs à limailles non oxydables et à électrodes oxvdables ; t. ' 7° Emploi du potentiomètre Rlondel ; 8° Augmentation de la puissance du courant agissant sur le relais. Pour obtenu* la solution du problème, il a fallu créer un nouveau type de cohéreur et employer le résonnateur Oudin bipolaire que nous avons étudié et breveté il y a cinq ans bientôt. Le tube que nous construisons (fi g', y), à électrodes de fer et limailles d'or, se compose de deux électrodes annulaires entourant un cylindre isolant (ébouite ou autre). Une tige conductrice passe 3G6 PHYSIQUE dans le cylindre isolant. Les deux anneaux sont respectivement sou- dés à deux fds de platine scellés aux deux bouts du tube. La limaille est mise entre les deux électrodes. Une sorte de cigarette de carbure de calcium dessèche le tube dans lequel on pevit faire le vide. 9 9 FiG. :• Le cohérage de ce tube à limaille inoxydable ne se produit pratique- ment qu'à la surface de l'électrode touchée par la limaille. Nous avons ici deux plans de cohérage comme dans tous les autres cohé- reurs à limailles inoxydables et à deux électrodes oxydables. J'ai imaginé de prendre entre ces deux électrodes un contact par métal non oxydable dans la masse de limaille elle-même. Nous aurons ainsi un tube ordinaire dans lequel nous pourrons prendre une troisième prise de courant sur la limaille. La disposition pra- tique de ce cohéreur est celle indiquée à la figure 7. Une tige cen- trale passe dans les deux électrodes annulaires à centre isolé. J'ai muni cette tige centrale de deux sortes de roues (fig. 8) en 111 d'or ou de platine. Ces deux roues 1 9 9 plongent dans la limaille et entre elles deux est ime masse de limaille qui ne servira qu'à remplacer peu à peu celle qui a servi et qui est placée entre la roue et l'électrode correspondante. Ce rempla- cement de la limaille s'eflectue par suite des petits mouvements pro- duits par les chocs de décohérage. Les trois prises sont klh. Les deux roues sont g g . (Si on dore les deux surfaces de l'électrode en contact avec la limaille, le tube semble toujours cohéré; il est toujours à basse résistance et pratiquement il est impossible de réduire assez le voltage pour lui donner une résistance apprécialjle, ce qui montre bien que le métal inoxydalile ne cohère pas prati- quement sur limaille de métal inoxydable). Le résonnateur Oudin bipolaire sera un soléno'ide formé d'un fd nu enroulé en spirales et supporté par six montants d'éljonite dont les rainures soutiennent les s^nres. Les prises de courant spéciales, au nombre de trois, permettent de prendre sur ce solénoïde trois points de contact en tels points que l'on choisit sur le solénoïde pour déterminer le primaire et une prise centrale. Schéma 9. — Le scliéma 9 nionti-e la disposition des connexions pour la réccpliun par Uibe condensaleur cl résonnateur Oudiu bipolaire. Nous O. ROCHEFORÏ. — RÉCEPTION ACCORDÉE PAR COHÉREUR-CONDENSATEUR 307 retiouvons le potcntioinèlre Blondel, fornié par les deux résistances R et S, le relais est en U, en Q ligure le millianipèremètre. L'antenne et la terre viennent aboutir en A, T, du résonnateur bipo- laire. En A et T, les deux lils secondaires sont réunis aux borues K et II du tube condensât ein\ Le pôle positif de la pile est réuni en un point du solénoïde <[ui sera celui de tension O, point entre A et T,. Le courant de la pile P, en sor- tant du tube condensateur en L suivra les con- nexions in(li(piées, il passera dans le milliani- pèremètre q , puis dans le cadre du relais n, puis dans la résistance R pour aboutir au pôle négatif. Le shunt formant potentiomètre est placé €ntre la sortie du relais et le pôle négatif de la pile. Au moment où l'onde hertzienne arrive à l'an- tenne, la vil)ration de l'antenne est transmise avi primaire A, T, du solénoïde. Cette vibration produit une vibration secondaire dans le secondaire A T, vibration qui cohère sans la moindre perte et dans les meilleures conditions possibles le cohéreur KII (pii, au point de vue cohérage, ne possède que deux élec- trodes et est absolument dans les conditions d'un cohéreur ordùiah-e à deux i)rises de courant. Mais le cohéreur, une fois cohéré, le jeu de l'ac- tion du courant de la i)ile est bien dillérent de toutes les façons conmies de l'utiliser. Le pôle positif de la pile envoie deux courants parallèles qui se dirigent, l'un par le chemin P O A, A K L Y R P, l'autre par le che- min P b T, T II L Y R P. Ces deux courants, dont le voltage est réglé par le potentiomètre RS, viennent agir tous les deux et en quantités sur le relais X Y qui, à voltage égal, reçoit plus d'intensité qu'il n'en rece- vrait dans un système ordinaire semldable, où seule la prise sur la limaille n'existerait pas. Un calcul simple montre (pie théoriquement, en supposant le potentiomètre réglé également dans les deux cas, cette mten- sité serait ([uatre fois plus grande à coliérage égal. En ellet, les deux résistances supposées A égales à chaque plan de cohérage, résistances qui sont en tension sur le petit courant dans le tube ordinaire, deviennent en parallèle sur le tube condensateur. De jjIus, nous n'avons plus besoin de bobine de self, le pôle positif P étant réuni au point O du solénoïde. Toutes les con- tlitions énumérées plus haut sont remplies dans cette réception. Schéma io. — Le schéma lo donne une autre forme de la réception par tul^e condensateur. Ici, le courant de la pile ne passe \Awn par le solénoïde, les deux bobines de self V et V empêchent le flux cohérant de passer par le covirt-circuit produit par la réunion des électrodes K et H au pôle positif P de la pile. Cette secoiule forme n'est du reste qu'nne variante de la i)remière 308 PHYSIQUE Le tube (fig. y) est employé tel ([u'il a été décrit plus haut. La distance entre les deux couronnes qui permet une réserve de limaille a un intérêt très grand, i)arce (ju'il semble que les cohéreurs à limaille d'or périssent par les limailles qu'il est intéressant de renouveler. MM. Blondel et Ferrie emploient mie sorte de cohéreur avec une réserve de limaille placée derrière l'une des électrodes, limaille dont on peut faire l)asser une partie entre les électrodes, au moyen d'une rainure pratiquée dans une électrode contre le tube. L'écartement de nos deux roues permet d'obtenir automati([uement le mélange et le renouvellement de la limaille ({ui a travaillé, seulement l'écartement matériel des deux électrodes deve- nant plus considérable, la surface de la limaille doit être liorizontale et nous avons dû uiunir le porte-tube de deux vis de réglage (pii j)ermettent de placer le tube horizontalement dans l'espace et de pouvoir le baisser ou le remonter parallèlement à lui-môme. Le récepteur est muni de trois prises dont l'une à pmce. Les figures ii et 12 en donnent le plan et l'élévation. FlG. II. Cette nouvelle forme de réception a été essayée par nous à grande distance et nous a donné de très bons résultats. Il est très facile avec la disposition des prises de courant sur le solénoïde, de faire varier le nouiljre de spires de A^ T, même en cours de marche, jusqu'à ce qu'on l'eçoive dans les meilleures conditions. Si on émet de deux postes démission, dillérant par leur longueur d'onde, il est possible de recevoir sur deux réceptions, ayant même O. KOCHEFORT. — RÉCEPTION ACCORDÉE PAR COHÉREUR-CONDEXSATEUR 36g antenne, de chacun de ces deux postes, en ayant deux systèmes, tels que celui décrit à la ligure 9. en réglant A A, ï, T pour correspondre avec une des émissions sur une des réceptions et pour correspondre avec la seconde sur l'autre réception. L'appareil n'est pas plus compliqué que le système ordinaire. Une comporte qu'un cohéreur. une pile, un potentiomètre, un relais, un milliampèremètre, un solénoïde, l'antenne et la terre, c'est-à-dire le minimum d'organes possible pour une réception accordée. JQ^ FiG. 12. Schéma i3. — Il est quelquefois commode, au cas où l'on veut recevoir les ondes de toutes les longueurs, de se servir de la réception par action directe. I.e système par tube-conden- sateur s'appli({ue au schéma i3, en ajoutant simplement dans le circvdt de la pile, en GJet C, deux selfs et en •connectant l'antenne en G et la terre ■en C après ces selfs. Des exjjlications qui précèdent, on comprendra facilement le fonction- nement du récejiteur cl du tube dans ce cas, et l'on i)eut remarquer que l'on ne bénéiîcie plus (jne de l'augmen- tation de l'intensité dans le relais. L"ai)pareil récepteur lui-même n'est pas changé , car les lîls (pii amènent la self et l'antenne, le self et la terre aux deux électrodes du tube, sont en dehors de Tappareil récepteur qui ne comprend que le i^orle-tube et le T FiG. i3. frapi)eur. af 370 PHYSIQUE M. Ferdinand BRAUN A Strasbourg' TÉLÉGRAPHIE SANS FIL — Séance du S août — L'auteur a ordonné deux diverses manières produisant des ondes électriques pour la transmission de la télégraphie sans lil. D. R. P. (brevet du 11 octobre 1898). Ces deux manières produisent des oscil- lations électriques dans un circuit fermé, contenant un condensateur et une bobine de self-induction. Les ondes ainsi protluites, s'éva- nouissant lentement, sont ramenées à l'antenne. On peut faire cela de deux manières. Premièî^ement (méthode directe): on joint l'antenne à un point du circuit, un autre étant ramené à un fd auxiUaire, aboutissant librement ou armé d'une plaque (fg\ i a), ou enfin descendant à terre (fig: i b). — Deuxiè- mement (méthode indirecte) : les oscillations de l'antenne sont mises Fi(j. I a. Fk;. I /). en mouvement par induction (fig'- 2). Les dimensions électriques du cercle de vibrations doivent être d'accord aA ec celles de l'an- tenne ; le tout formant un système uni, dont les deux parties sont F. BRAUX. — TELEGRAPHIE SANS FIL 371 plus ou moins fortement jointes (couplées) entre elles. En général, le système possède deux différentes sortes de vibrations. Les avanta2:es du système trans- o t. metteur de l'auteur se déclarent par le fait : que l'énergie i^ayon- née par l'antenne est remplacée pai le « cercle vibrant », repré- sentant pour ainsi dire , un réser- voir d'énergie. On a trouvé récemment que l'antenne rayonne jusqu'à 70 "/^ de l'énergie électro - magnétique du cercle vibrant. Voilà pourquoi on a abandonné les manières em- ployées autrefois, profitant d'une charge électro-statique. (Marconi et Lodge se servaient de ces mé- thodes.) Le procédé de l'auteur a particulièrement rempli les conditions nécessaires pour établir la télégraphie syntonique. FiG' 2. j° Télégraphie dirigée. Problèmes de cette télégraphie. Les méthodes d'autrefois, employées pour diriger les ondes dans un but ordonné, profitant du miroir de Hertz ou des lentilles, étaient sans succès pratique . ce qui s'explique par le peu d'énergie dont on pouvait disposer dans le petit radiateur. Voilà deux autres dispositions pour éviter ces désavantages. On peut les partager en deux points de vue différents. ^4. Supposé, vous aA'ez un cercle vibrant dans le focus d'une sphère fictive ou d'une paraboloïde ; vous dispos.ez sur ces surfaces des cercles contenant chacun un condensateur; ces cercles sont vibra- toires, étant excités par le cercle dans le focus, ce dernier étant le seul que vous chargiez directement. Pour obtenir des oscillations aussi fortes cpie possible , ces cercles sont menés à résonance au cercle originaire. Pour faire rayonner ces énergies accumulées, on a disposé une antenne à chaque circuit, l'ensemble des antennes paral- lèles formant en elles-mêmes un cylindre, à base d'un cercle ou d'une parabole. Par l'ensemble de cette disposition, vous obtenez des vibrations dans les divers circuits, et avec eux aussi, dans leurs antennes, réglées d'après la même loi que les oscillations qui s'éta- blissent dans les parties d'un miroir Hertz, divisé en bandes, séparées 3j2 PHYSIQUE lune de l'autre. Le résultat en sera qu'une onde électrique plane marchera dans la direction de l'axe, du cercle ou de la parabole. En cela on met à profit qu'il y a des forces d'induction , émanant d'un cercle fermé jusqu'à des distances considérables, mais limitées; par ce moyen on distribue l'énergie partagée dans le circuit au focus, et ensuite on la pousse dans l'espace , par les antennes formant des courants ouverts. Veuillez considérer que le circuit originaire peut être muni d'anneaux, situés dans deux ou trois plans, perpendicu- laires entre eux ; les anneaux horizontaux induisent sur les anneaux horizontaux à la surface de la sphère; de même sorte les anneaux verticaux induisent sur les anneaux verticaux. En négligeant cette circonstance vous rencontrerez des dimensions de ces circuits induits, incompatibles avec les conditions du pi'oblème. B. Un autre dispositif serait d'arranger un nombre de bandes verticales en forme de cylindre parabolique et de les exciter par des vibrations, différentes en phases entre elles, suivant la même loi que si les bandes étaient excitées par une seule vibration, sortant du focus du cylindre j)arabolique. C'est un renversement du principe Huyghens. Les sources fictives de lumière du système Huyghens se réalisent en forme de sources réelles. L'avantage de cette disposition est de pouvoir employer plus d'énergie. Cependant un nouveau problème se présente là : 2" De créer des çibrations , différentes en phases entre elles. Je passe à cet autre problème. a. Une première méthode dérive directement des méthodes em- ployées pour r électro-technique. Supposez qu'on divise un courant de charge d'un condensateur en deux branches, l'une de ces branches contenant seulement de la self-induction, l'autre contenant de la self-induction et de la résis- tance ohmique ; il en résultera que les deux courants sei'ont déplacés entre eux dans leurs phases. On peut se servir de cette méthode, mais elle n'est pas pratique par raison d'une trop grande absorption d'énergie, partant de la résistance ohmique. b. Une seconde méthode, la plus claire que j'aie trouvée jusqu'à présent, est prouvée en ceci : qu'un premier circuit oscillant induit sur un second fermé métalliquement (Jïg'. 3). En cas de résonance, le deuxième courant marchera en i)hasc F. BRAUN. — TÉLÉGRAPHIE SANS FIL 373 CD ^-- -o o- -^ Fkj. 3. avec la force électro-motive , impressionnée extérieurement ; par la raison que cette force est proportionnée à la variation temporaire du courant i, ; cette force môme est déplacée vers le courant i, même de 90 degrés. Par conséquent, le courant induit i,_ est aussi déplacé en jûmse vers le courant /, de 90°. Voilà le résultat de la théorie, sous restreinte d'un couplement assez léger. La question impor- tante est comment la chose se rapporte pour un couplement plus fort et le seul qu'on puisse em- ployer dans la pratique. L'expérience prouve ce qui suit : on peut faire passer 3o «/^ au moins de l'énergie du premier circuit au second , avec un déplacement en phase de 72 à 78 degrés. Une troisièiiie muniève, moins simple en théorie, moins claire dans les résultats . mais d'une grande utilité pratique, est celle que j'ai l'honneur de vous démontrer maintenant. Nous avons ici (Jig: 4) deux cercles oscillants , couplés entre eux d'une manière nouvelle. Nous avons deux circuits: le circuit n° i et le circuit n" 2. On charge l'ai-mature A de l'électricité posi- tive , et l'armature B négative ; les électricités se déchargent dans les circuits i et 2. Les étincelles, si capricieuses d'ha- bitude, dépendent les unes des autres dune façon toute surprenante et exacte ; de sorte qu'on peut ordon- ner aux étincelles une différence de phases, que j'estime même à i/iooo (millième) de la durée d'une seule vibration. On peut régler la différence des phases par le choix de la self-induc- tion dans les fils qui lient les conden- sateurs entre eux « tils couplants » MN et PQ. Pour démontrer et mesurer ces dif- férences en phase des courants, je me sers d'un circuit résonna- teur (Jig-. 5). Le circuit se compose d'un condensateur 7, de la selt-^ r\ th kJ |W\MW FiG. 3. 3^4 PHYSIQUE induction o-, d'un thermomètre de Riess th et de deux petites bobines a et ^; (*). Pour expliquer simplement la façon de mesurer, nous supposons que la force d'induction sur la bobine a sera égale à l'action induc- trice sur le cercle h. Si la différence des phases était égale à zéro, le thermomètre n'indiquerait pas de chaleur en cas que les bobines a et h soient opposés, mais bien un maximum s'ils étaient liés en série. Pour une différence de phase de 90 degrés, il n'y aura pas de diffé- rence entre la chaleur indiquée par le thermomètre , quelle que soit la manière de joindre les deux anneaux. Évidemment on peut construire par les courants, différents en phase, un champ magnétique tournant avec une vélocité réglée par la fréquence des vibrations, à l'analogue des procédés employés dans r électro-technique. On peut prendre de ce champ des courants de n'importe quelle phase. M. André BLONDEL Professeur à l'École nationale des Ponts et Chaussées, à Paris NOUVEAU SYSTÈME DE RADIATEURS POUR LA TÉLÉGRAPHIE SANS FILS [538.562] — Séance du 8 août — On n'a pas résolu, jusqu'ici, le problème de concentrer l'énergie émise par les antennes de la télégraphie sans fils dans une direction plutôt que dans les autres, ni celui de déterminer au poste de réception la direction des ondes reçues. On a bien proposé des artifices, mais sans que ceux-ci répondent théoriquement ni prati- quement aux illusions de leurs auteurs. Nous espérons être plus heureux en indiquant ici des dispositions jxmi ambitieuses, mais rationnelles. Etant données les grandes longueurs d'onde, qui donnent une importance énorme aux phénomènes de diffraction , nous ne préten- (*) Dans la figure 5 les anneaux a r\ h devraient être remplacés par des bobines comme findique le texte. A. BLONDEL. — NOUVEAU SYSTÈME DE RADIATEURS 375 FiG. I. dons pas produire des faisceaux parallèles ou très concentrés, mais sevdement une concentration relative. Notre principe est de combiner les radiations simultanées de plu- sieurs antennes espacées d'une certaine distance et recevant des oscillations ^irésentant des différences de phases, de façon que les effets de ces antennes s'ajoutent suivant une certaine direction et s'annulent suivant la direction perpendiculaire. Nous remarquons à cet effet que, si l'on dispose plusieurs antennes parallèlement telles que A,B, , A.B, (fîg-. i) et qu'on produise dans chacune des oscillations électriques i^ar les méthodes usuelles et de même pé- riode, les actions produites à distance par le svstème ainsi formé seront la somme des effets des diverses antennes, mais en tenant compte des phases des cou- rants dans chacune et des distances qui les séparent. Chaque antenne se com- porte , en effet , comme un tuyau sonore ouvert à sa partie inférieure et fermé à son extrémité supérieure , et présente un ventre de cou- rant en A et un nœud en B , et on peut considérer qu'elle rayonne avec une même j)hase sensiblement sur toute sa hauteur, de sorte qu'on peut, sans grande erreur, attribuer à chaque antenne, au mo- ment de la production des oscillations, une i)hase unique. Si on établit entre les phases de deux antennes parallèles une différence égale à une période, moins la pliase perdue pendant le temps que mettent les ondes à parcourir l'intervalle qui les sépare , les oscillations des dites antennes produiront des effets exactement concordants dans la direction de leur plan commun et , au contraire , qui se réduiront au minimum dans la direction perpendiculaire. Les directions des maxima et minima seraient inversées si la différence de phase indiquée ci-dessus était accrue ou diminué d'une demi- période. Tel est notre principe nouveau (analogue à celui des réseaux en optique). Le cas d'api)lication le ]A\xs intéressant de ce principe est celui de deux antennes distantes d'une demi-longueur d'onde et formant les deux extrémités d'un système oscillant correspondant à une lon- gueur d'onde. Dans ce cas, l'effet maximum dans le plan des antennes égale le double de l'effet d'une antenne seule, et l'effet devient zéro dans le plan perpendiculaire. Plus généralement, il varie proportionnellement au cosinus de l'angle formé par la direc- tion où on le mesure avec le plan commun des antennes. 376 PHYSIQUE Bl Al -a^ ''v? B2 n2 •^XTC\ i Fi(i. 2. Les figures i et 2 illustrent ce cas pi-incipal d'application. La figure i représente un j^remier dispositif, dans lequel on emploie, pour produire des oscillations durables, un circuit local OSCA formé d'un condensateur G et d'une bobine de self induction S, reliés en série et se déchargeant par le déflagrateur à boules O. Le condensateur est chargé périodi- quement par le circuit secondaire d'une bobine ou transformateur D, analogue aux appareils similaires généralement employés. Les deux antennes verticales A,Bi » AjBa sont reliées aux deux boules de l'oscillateur, fune direc- tement, l'autre par l'intermédiaire d'un fil horizontal, de longueur égale à la demi-longueur d'onde des oscillations réalisées, et elles ont chacune une longueur égale au 1/4 de la même longueur d'onde L. Il est facile de voir que, dans ces conditions, les antennes seront le siège d'oscillations électriques différant d'une demi -période et dont les amplitudes (amplitudes des variations de potentiel en chaque point) sont représentées perpendiculairement à chaque fil par la distance du trait pointillé tracé à côté des fils. Il y aura des nœuds de potentiel aux extrémités inférieures des antennes et des ventres aux extrémités supérieures et au milieu du fil de jonction. Ce dispositif fondamental est susceptible de diverses modifica- tions. D'abord, on peut placer le déflagrateur et son circuit local non pas au pied d'une antenne, mais au milieu du fil horizontal, si l'on a soin de faire transmettre les oscillations du circuit local au système des antennes par un transformateur de façon à produire un ventre de potentiel au milieu du fil horizontal, ainsi que le montre la figure 2 , dans laquelle les lettres ont conservé même signification et où T désigne en outre le transformateur. Celui-ci est analogue aux transformateurs à haute fréquence de Tesla. Thomson. Marconi, et formé de quelques tours de câbles isolés, primaire et secondaire enroulés sur un même cadre et plongés dans l'huile ou isolés de toute autre manière. Le nombre de spires au secondaire étant très faible n'intervient pas beaucoup dans la longueur totale du circuit des antennes , mais on peut en tenii' compte en réduisant la hauteur de celles-ci de façon que la longueur totale représente toujours une demi-longueur d'onde. Plus généi'alement , on peut modifier les dispositifs des figures i A. BLONDEL. — NOUVEAU SYSTEME DE RADIATEURS 377 B2^ et -2 en donnant aux antennes des hauteurs quelconques inférieures au 1/4 de la longueur d'onde si l'on ajoute d'autre part, dans le fd horizontal, des spires enroulées représentant une longueur équiva- lente (longueur fictive équivalente tenant compte des effets de réac- tance dont les spires enroulées sont le siège) de façon que la lon- gueur équivalente du système oscillant des antennes soit encore égale à la demi-longueur d'onde et présente deux ventres aux extré- mités supérieures. Ces bobines, ajoutées éventuellement, sont représentées en poin- tillé sur la figure 2 et remplaceront le trait plein qu'elles entourent-! Enfin, il n'est pas nécessaire, pour produire un effet cumulatif, que les antennes soient juste à une distance d'une demi-longueur d'onde entre elles ; seulement l'addition des effets ne se ftùt plus alors aussi complètement, à cause de la différence de phases qui s'introduit. La figure 3 indique une autre variante dans laquelle le circuit secondaire , soumis aux oscillations électriques , n'est plus un circuit ouvert comme les précédents , mais un circuit fermé. On donne aux deux an- tennes A,Bi' AjB^^ des hauteurs encore voisines de 1/4 d'onde si on les réunit en haut et en bas par des fils horizon- taux ayant aussi environ 1/4 d'onde. Le circuit fermé doit, dans tous les cas, avoir une longueur équivalente (en te- nant compte des réactances et capacités) à une longueur d'onde, de façon à se mettre en résonnance avec les oscillations du circuit local semblable à celui de la figure 2. Les traits pointillés montrent la répartition des potentiels. Les oscillations des deux antennes différant en phase de 1/4 de période et leur distance étant de i/4 d'onde, leurs effets s'ajoutent encore dans la direction du plan vertical qui les contient et s'annulent dans la direction perpendiculaire. Enfin , la figure 4 indique un dispositif à 4 antennes en quinconce, formé de deux svstèmes de deux antennes semblables à celui de la figure i et placés parallèlement l'un derrière l'autre à une distance égale à la demi-longueur d'onde commune des deux circuits locaux. La figure 4 6st une M2 Uyi- T Bi 'Al r?îïïT FiG. 3. 3^8 PHYSIQUE Bf ai G a- a FiG. 3. représentation en plan, de sorte que les antennes, dont la hauteur est environ i/4 d'onde, sont figurées sim})lement par des points marqués A A. Les lettres ont la même signiiieation que précédemment et F désigne des plaques de terre. Le circuit secondaire du transforma- teur D. fermé par la terre ou par une connexion directe A,A ,, indi- quée en pointillé, charge simultanément les deux condensateurs G jusqu'à ce que des étincelles disruptives éclatent dans les déflagra- teurs OO'. A partir de ce moment naissent dans les deux circuits locaux des oscillations qui sont synchrones s'ils ont été bien égalisés. Les mêmes groupements d'antennes peuvent être utilisés pour la réception, comme le montrent par exemple les figures 5,6,7. La première représente le montage le plus simple de deux antennes dis- posées comme celles de la figure i , mais sans déflagrateur. et agissant ~f(2 synchroniquement sur un cohéreur placé au milieu du fil de jonction horizontal, lorsque le plan des an- tennes coïncide avec la direction de propagation. En effet, la longueur du système des antennes réunies étant prise par construction égale à la longueur d'onde, et la distance des deux antennes étant choisie égale à une demi-longueur d'onde, il en résulte que le système est en unisson avec les ondes et que, d'autre part, les actions de celles-ci sur les deux antennes sont con- cordantes et s'ajoutent. Au contraire, si on oriente le système des antennes réceptrices dans un plan perpendiculaire à celui des ondes, les deux antennes étant siège de forces électromotrices égales et syn- chrones, il ne se produit aucune oscillation ou du moins aucune oscillation notable. Les fils a et & représentés sur la figure 6 mettent le cohéreur G en communication avec une pile , un relais et les appareils frappeur et « récepteur , comme dans les postes ordinaires de télégraphie sans fils. Les traits pointillés représentent la répartition des amplitudes fl des potentiels oscillants le long des fils. La ligure 6 représente une disposition plus parfaite avec transformateur (jigger) inter- calé sur le fil horizontal et dont le secondaire agit sur le cohéreur G. Ge circuit secondaire sera complété de la même manière que dans les systèmes de télégraphie syntonique de Marconi ou autre par une capacité réglable, en dérivation de A. BLONDEL. — NOUVEAU SYSTÈME DE RADIATEURS S^Ç) laquelle agit le eireuit de la pile et du relais. On règle les longueiu'S du lîl horizontal et de l'antenne de façon à tenir compte de la lon- gueur équivalente du eireuit primaire du jigger. de façon que la distance des antennes soit d'environ une demi-longueur d'onde et la longueur totale équivalente du circuit oscillant formé par les antennes égale à mie longueur d'onde. On transformerait de même le dispositif de la figure 3 en un dis- positif récepteur en rem[)laçant le transformateur T et son circuit local par le jigger J et le circuit local indiqué sur la figure (>. Ces dispositions d'antennes doubles réceptrices, tout comme celles des antennes génératrices , se distinguent de tous les systèmes de Marconi publiés jusqu'ici par l'espacement spécial des antennes et le choix de la longueur totale, en fonction de la longueur d'onde. Ces systèmes sont indépendants de toute prise de terre. Dans certains cas seulement , pour favoriser la production des nœuds de potentiel , on peut mettre les points où ils se produisent en comnmnication avec la terre ou simplement avec de grandes masses métalliques isolées ou non. En outre, ces systèmes d'antennes jouissent des propriétés curieuses de concentrer l'énergie dans certaines directions. A la réception ils peuvent, si on les rend mobiles autour d'un axe verti- cal, servir à déterminer la direction d'où viennent les ondes, ce qui est susceptible de très utiles api)lications sur les navires. En plaçant même deux antennes fixes sur un navire, il suffit de faire évoluer celui-ci et de noter les positions de maxima et de minima des signaux reçus pour connaître la direction d'où viennent ces signaux. Pour cette dernière application, il n'est pas même nécessaire que les antennes et leurs distances soient choisies rigoureusement comme on vient de l'indiquer. Car un simple cadre i£_o coupé d'un côté par le coliéreur G et de l'autre par ^ un condensateur C (fi g. y) peut suffire. On peut en j^ accroître la sensibilité en donnant au condensateur une capacité convenaljle pour que le circuit ainsi formé coi'- Fig. 7. responde aune demi-longueur d'onde, capacité comprise, en ajoutant au besoin des self induction en série. Quelques essais qu'a bien voulu exécuter M. le capitaine Ferrie, pour vérifier par expérience les raisonnements ci-dessus et l'effica- cité de ces dispositifs, ont confirmé mes prévisions, mais ils n'ont j)u être étendus à des distances suffisantes pour que la vérification soit définitive. A petite distance, en effet, les effets parasites se font toujours sentir et empêchent l'extinction complète des signaux. 38o PHYSIQUE Il convient de remarquer, en terminant, que les dispositifs d'an- tennes doubles que j'ai décrits se prêtent à une sélection des signaux par syntonie plus parfaite que les antennes simples, car les ondes non accordées avec le système récepteur non seulement n'excitent pas la résonance de celui-ci, mais produisent dans les deux antennes des effets discordants. En particulier, des ondulations dont la longueur d'onde serait la moitié de celle du système récepteur donneraient des forces électro- motrices s' annulant réciproquement et ne pouvant impressionner le cohéreur. Enfin il est intéressant de remarquer que la partie horizontale du système radiateur ne donne lieu théoriquement à aucun accroisse- ment de l'amortissement , puisque l'image du lil horizontal par rap- port à la surface de la terre , supposée conductrice , est un autre fd horizontal très voisin et que le rayonnement du couple de ces deux fds est nul. Mais ce n'est vrai qu'autant que la terre est suffisamment conductrice; sinon il se produit une pei'te d'énergie et par suite un amortissement supplémentaire . M. A. AURIG Ingénieur des Ponts et Chaussées , à Valence NOTE SUR LA THERMODYNAMIQUE [336-7] — Séance du S août — Je partirai de la notion universellement admise que les corps sont constitués par de la matière en mouvement. Les parties insécables de la matière (atomes) forment entre elles des systèmes distincts (molécules), de même que l'ensemble du soleil et des planètes forme le système solaire. L'ensemble des molécules de même nature constitue un corps, un milieu, de même que l'ensemble des étoiles, dont le système est analogue au système solaire, forme une partie déterminée de l'uni- vers. En poursuivant l'analogie que nous venons de signaler, d'ailleurs à titre de simple indication , on est conduit à admettre que les dis- A. AURIC. — NOTE SUU LA THERMODYNAMIQUE 38l tances de ces molécules entre elles sont infiniment grandes par rapport aux dimensions de ces molécules et que leurs attractions mutuelles sont régies par la loi de la gravitation universelle , si heu- reusement dénommée loi de nature. Par suite, les mouvements des atomes d'une même molécule doivent être régis exclusivement par leurs relations mutuelles, à cause de la petitesse des mouvements de leur molécule par rapport aux distances des autres molécules. Ces mouvements atomiques doivent être très probablement ana- logues à ceux des planètes de notre système solaire ; abstraction faite de mouvements plus complexes, dus aux perturbations de toute nature, ils doivent se résoudre en mouvements de gyration autour d'eux-mêmes et de rotation autour de leur centre commun de gravité. Ce centre de gravité de la molécule n'est d'ailleurs pas fixe dans l'espace ; soit par suite d'un mouvement originel , soit par suite de mouvements communiqués, il exécute des vibrations périodiques autour de sa position moyenne d'équilibre. A une première approximation, on peut admettre que la force attractive exercée sur une molécule écartée de sa position d'équilibre est dirigée suivant le rayon vecteur et proportionnelle à la longueur de ce rayon vecteur; il en résulte, d'après une théorie bien connue, €[ue le centre de gravité de la molécule décrit une ellipse dont la position d'équilibre est le centre. Ce sont ces mouvements moléculaires dont l'étude est du domaine de la physique, par opposition aux mouvements atomiques dont l'étude paraît appartenir exclusivement à la chimie. Appelons : m la masse de la molécule ; a. b les demi-axes de l'ellipse décrite; T la durée d'une vibration complète. La demi-force vive moyenne moléculaire sera, ainsi qu'un calcul bien simple permet de l'établir : I Ott mov — nw- = m ^ (a- -\- b-) C'est cette demi-force vive moyenne qui constitue la chaleur molé- culaire ; elle se compose de trois facteurs : 1° La masse m de la molécule qui est vraisemblablement propor- tionnelle au poids atomique du corps ou du milieu ; 382 PHYSIQUE .. ' — 2 2" Le facteur ^ qui indique la rapidité du mouvement molécu- T " l'aire et que nous appellerons la hauteur calorifique H ; 3'^ Le facteur (a- -f- b') qui indique l'amplitude du mouvement moléculaire et que nous appellerons Vinten.^ité calorifique I. I^a chaleur q d'une molécule est donc donnée par la formule : q = niRl et pour un corps composé de molécules identiques ayant au total la niasse M, on a : Q = MHI Il est essentiel de faire immédiatement une remarque : Si l'on fait abstraction de la résistance du milieu étliéré au mou- ^'ement moléculaire , résistance (pii doit être d'autant plus faible que la densité de l'étlier est elle-mènu? plus faible, ce mouvement sera jiermanent et ne pourra être modifié que par une cause extérieure, c'est-à-dire, soit par la création de résistances passives ou d'accéléra- tions actives, soit par la présence d'un corps à une hauteur calori- fique H'dzH. car par un phénomène analogue à ceux d'inlluence, d'induction, de résonance, etc., les molécules voisines ont une- tendance naturelle à vibrer synchroniquement, ce qui s'explique mathématiquement par la plus grande stabilité des vibrations syn- chrones. Il est évident que la durée de la vibration finale sera une moyenne entre les durées respectives des deux vibrations initiales, ce qui constitue au fond un axiome analogue à celui de Clausius : « On ne saurait élever la hauteur calorifique d'un corps par « rapproche d'un corps à une hauteur moindre. » La hauteur caloriiique H est une variable essentiellement indé- pendante ; les actions moléculaires étant en eflet au total des valeurs moyennes d'intégrales durant une période, peu importe que le mou- vement vibratoire soit plus ou moins rai)ide ; cela ne change en rien les actions molécvdaires, qui restent les mêmes, toutes choses égales d'ailleurs, quelles que soient les variations de H. Au contraire , ces actions moléculaires dé])endent essentiellement de l'intensité calorifique I. car il est évident que les variations d'am- idilude de la vibration moditient les distances mutu(>lles moyennes des molécules entre elles et. par conséquent, les actions attractives qui eu résultent. Réciproquement, l'intensité calorifique dépend des actions molécu- A. AURIG. — NOTE SUR LA THERMODYNAMIQUE 383^ laircs, ce qui revient à dire que la chaleur moléculaire x^eut être modifiée par l'exercice d'un travail positif ou négatif, qui changerait les distances mutuelles des molécules ; c'est ce qui constitue au fond l'axiome de la possiliilité de transformer le travail en chaleur et réciproquement. Soit un milieu indéfini composé de molécules identiques ; nous le supposons indéfini pour faire disparaître les effets irréguliers dus aux parois limites. Considérons la pression p qui s'exerce par unité de surface sur l'élément cIm (fig. i). On appelle ainsi la résultante, ramenée à l'unité de surface, des actions ([ui s'exercent entre toutes les molécules M, M' placées de telle sorte que la droite MM' coupe l'élénu^nt cIm. Le nondjre des molécules situées à une distance R de M et à l'intérieur de l'angle solide SMT est évidemment proportionnel à R' et, comme cha- cune d'elles exerce une action attractive inver- sement proportionnelle à — , il en résulte que l'ac- tion totale est proportionnelle au nombre des mo- lécules rencontrées par la direction moyenne MM', c'est-à-dire à la densité linéaire du milieu. La pression sur f/w qui est la résultante totale de toutes ces actions élémentaires, sera dès lors proportionnelle à la densité cubicpie du milieu. En d'autres termes, si »' est le volume de l'unité de masse, on aura : po = K, K, étant vraiseml>lablement proportionnel au carré du poids ato- mique du corps considéré et dépendant du mode d'assemblage de» molécules , comme aussi de l'intensité calorifique I que nous avons supposée constante. C'est l'énoncé de la loi de Mariottequi, en théorie, est rigoureu- sement exacte. Considérons maintenant les variations d'amplitude des mouve- ments moléculaires : il serait facile d'établir par le calcul la loi qui réo'it les variations de la in-cssion en fonction de celles de l'inten- site L 384 PHYSIQUE Lorsque le milieu est polai^isé , c'est-à-dire, lorsque les plans des mouvements moléculaires sont orientés parallèlement et qu'en outre il n'existe pas de difTérence de phase dans ces mouvements rapportés à leurs axes resjiectifs , une variation de I n'entraîne aucune varia- tion dans les distances mutuelles des molécules , car ces distances restent égales et parallèles ; dans ce cas spécial K, est indépendant de I. Dans le cas général, lorsque les jilans des mouvements molécu- laires ont une orientation quelconque et qu'il existe, en outre, une différence de phase , les actions moléculaires changent avec les varia- tions de I; le calcul serait long et compliqué, mais sans présenter de diflicultés spéciales. Pour le but que nous avons en vue, il nous suffira d'admettre que le produit />u est une fonction continue de I qui peut dès lors être développée au moyen de la formule de Maclaurin : />P = K, (i + '''I+r5l^+ ) En pratique, les variations comme les valeurs absolues de I étant très faibles , il suffira de conserver le 2^ terme et d'écrire : pi> = K, (l + a I) ou en mettant en évidence le poids atomique n du milieu pç = K n' (i + y- I) C'est l'énoncé de la loi de Gay-Lussac qui, à l'encontre de la loi de Mariette, ne constitue évidemment qu'une siuiple approximation. Le coefficient K devient ainsi une nouvelle variable indépendante, mais liée à la hauteur calorifique H par l'équation caractéristique du milieu On peut trouver étrange que la loi de Mariotte soit applicable, théoriquement, à tous les corps, alors que l'expérience semble le démentir surtout pour les solides et liquides. En ce qui concerne les gaz , la loi de Mariotte est à peu près vérifiée et c'est seulement linfluence des parois ou les changements dans le groupement moléculaire qui en faussent les résultats. En ce qui concerne les liquides et solides, il convient de remarquer que ces corps sont soumis à une pression initiale très considérable, de sorte que les changements de pression auxquels on les soumet A. AURIC. — NOTE SUR LA THERMODYNAMIQUE 385 sont relativement très faibles et ne peuvent produire qu'un change- ment relatif très faible dans le volume de l'unité de masse. Considérons l'unité de masse d'un milieu et communiquons-lui une énergie égale à ^E. Celle-ci sera employée : 1° A produire un travail extérieur, lequel est égal à p dç comme il est facile de l'établir; 2° A augmenter la chaleur moléculaire I H du corps considéré ; 3° A augmenter la chaleur atomique. Laissons provisoirement de côté ce troisième élément ; nous aurons f/E = pdv + d (IH) c'est là l'énoncé du principe de l'équivalence. Considérons le cas où rfE =: o ; c'est ce qu'on appelle une trans- formation adiabatiqiie; le corps ne reçoit aucun travail extérieur; il n'est mis en communication, ni avec un corps ayant une hauteur plus élevée, ni avec un corps ayant une hauteur moindre; c'est sinr- plement la variation de pression qui produit un changement d'inten- sité calorifique ; dès lors , d'après la remarque faite précédemment , H doit rester constant et l'on aura c?H = o d'où dE = o = pdv + mil = Kn' (I + a I) ~ + ndl. Cette expression devient intégrable en la multi[)liant par I 1 +al car on a alors o = Kn' h di> , Rdl ou Ç ^ I +al H çKnî (i _^ a I) « = C'« Telle est la solution de l'équation différentielle '^ "■ =cfe Kn' C'est l'énoncé de la formule de Laplace donnant la compression ou la détente adiabatique d'un coi'ps quelconque. Si dans la transfoinnation f/E = p dç + d (I H) nous voulons que toute la force vive communiquée soit transformée en travail, il faudra que f/ (I H) = O I H = O'^ La transformation est appelée dans ce cas isothermique; elle ne « peut être obtenue que si la source de chaleur avec laquelle le corps est mis en communication possède une quantité de chaleur infini- ment grande par rapport à celle du corps et à la même hauteur que cette dernière; c'est, par exemple, le cas d'une enceinte qui cède la quantité de chaleur nécessaire au travail sans que le corps y contri- bue d'une manière appréciable. Nous avons alors I H = G'" et la loi de Gav-Lussac devient : pv — Kn' (i + ^^1 En résumé nous estimons que, comme pour les phénomènes acous- tiques, optiques et électriques, où la durée de la vibration est nette- ment distinguée de l'amplitude de celle-ci, il convient de faire une distinction semblable dans les phénomènes thermiques et magné- tiques et qu'il y a lieu de dédoubler en quelque sorte les notions A. AURIC. — NOTE SUR LES DIVERS ÉTATS DES CORPS 887 ^généralement connues sous le nom de température et de moment magnétique , en faisant intervenir les notions x^lus précises de durée et d'amplitude des vibrations élémentaires qui leur donnent nais- sance. M. A. AURIG Ingénieur des Ponts et Chaussées, à Valence NOTE SUR LES DIVERS ÉTATS DES CORPS — Séance du 8 août — On admet généralement que les corps peuvent se présenter sous trois états différents : solide, liquide et gazeux. Quelques auteurs ont également mentionné un quatrième état (ultra-gazeux ou radiant), mais les définitions données, tant x^our ce dernier état que pour les trois premiers, paraissent manquer complè- tement de précision, et cela parce qu'elles reposent implicitement sur l'aspect physique des corps, lequel dépend essentiellement des con- , ditions extérieures — pression, chaleur, etc. — auxquelles les corps sont soumis. Il paraît désirable de faire reposer cette classification siu' une donnée plus rigoureuse et c'est dans ce but que nous avons eu la pensée de définir l'état d'un corps d'après la nature des vibrations (longitudinales ou transversales) qu'il est susceptible de propager. Nous avons été amené à reconnaître ainsi qu'il n'y a pas de diffé- rence essentielle entre les corps solides et les corps liquides ; mais, ■ par contre, qu'il est nécessaire d'introduire un état intermédiaire (vapeurs) entre les solides-liquides et les gaz, et enfin que létat radiant ou éthéré correspond bien à une propriété caractéristique quant au mode de propagation des vibrations. Notre classification serait donc la suivant ^ : 1° Solides-liquides ; 2° Vapeurs; 3" Gaz; 4° Ultra-gaz, et la chaîne de transition entre ces divers états serait : 388 PHYSIQUE Solide parfait ou plein parfait, solide ordinaire, corps mous, liquide ordinaire, liquide parfait, vapeur, gaz, ultra-gaz, étlier par- fait ou vide parfait. Considérons un corps homogène et isotrope. Appelons E son coefficient d'élasticité. Si la force dP produit sur l'élément de longueur l la déformation proportionnelle -y par définition, on a Si nous appelons P la force initiale absolue dont clF représente la variation, il est naturel de poser dl ,, dP K l — ^^ P K étant alors un coefficient numérique qui ne dépend que de la constitution du milieu (poids atomique des molécules, disposition mutuelle de celles-ci, etc.). Des deux relations ci-dessus on tire : E--^P c'est-à-dire que le coefficient d'élasticité est proportionnel à la pres- sion absolue. Nous allons introduire un nouveau coefficient o- qui représente le rapport de la contraction latérale à l'allongement produit par une force; ce coefficient n'a évidemment de sens que pour les corps solides, mais son introduction dans les calculs aura l'avantage de nous permettre d'établir d'une manière simple les formules fonda- mentales de la théorie de l'élasticité et d'en déduire des conséquences intéressantes. Appelons dPx, dPy, dP : les composantes, suivant les axes de coordonnées, d'une variation de force dP; appelons également O.v, 0 V- , Oi , les déformations linéaires proportionnelles suivant ces mêmes axes. Par définition, dPx produira un allongement égal à EO.v suivant l'axe des x, et une contrartion égale à — o-EO.v, suivant chacun des axes des j^ et des z. On aura dès lors : A. AURIC. — NOTE SUR LES DIVERS ÉTATS DES CORPS 889 e.v = -^ j ^/P.v - 0 + l2a0.v _ E<7 E Telles sont les formules fondamentales que nous voulions établii* Nous y joindrons les deux suivantes : Si nous supposons f/P.v = dPy — dF, = -^ nous aurons : I dP 0 = -j^ (i — 2a) X -y d'où I 2(T L'expression — — ^— représente le coefficient de compressil^ilité c; il est égal au quotient de la variation de force par la déformation cubique proportionnelle. 3c)0 PHYSIQUE En tenant compte des équations précédentes, nous aurons également : _ _ JL_ / " I \ _ E (I — g) Ces deux relations nous seront utiles dans la suite. Nous rappellerons qu'un milieu homogène et isotrope est en géné- ral susceptible de propager des vibrations longitudinales et transver- sales, les premières avec la vitesse v/ > -)- 2|X et les deuxièmes avec la vitesse p étant la densité du milieu, c'est-à-dire une quantité toujours positive. Il résulte de la forme de ces expressions que les vitesses ne seront réelles, c'est-à-dire les vibrations réellement propageables, que si l'on a respectivement > -|- 2 p. > O il > O Ceci admis, portons les valeurs de -|- 2f* et de fx en ordonnées, nous obtenons deux courbes qui, à un facteur numérique près, représentent le carré des vitesses de propa- gation des vibrations (fig. i)» • * i .î- -/ "I ^ .-^t . Vibrations Longitudinale . Trmsversalez • ♦ I 'Si % «§1 »J I co ■*- -^ N + + + f^ .t.-t-.-^..-»- ♦-■ t *.■•'.*?". ^ N 5 FiG. I. — Valeurs de X -f 2^ et de u en fonction de a. A. AURIC. — NOTE SUR LES DIVERS ÉTATS DES CORPS 89! De — 00 à — I , les ordonnées des deux courbes sont négatives ; donc, poui" les corps qui correspondent à ces valeurs de a-, aucune viljration n'est propageable. De — I à -| , comme de + i ^ + •^■' l^s ordonnées des deux courbes sont positives; donc, les corps correspondants peuvent pro- pager les deux sortes de vibrations. Enfin, de -|- — à + i , lune des deux ordonnées est positive et l'autre négative; donc, les corps correspondants peuvent propager les vibrations transversales, mais non les vibrations longitudinales. Nous obtenons ainsi quatre régions qui doivent correspondre à des états distincts des corps et qu'il convient de définir plus rigoureuse- ment en faisant appel à d'autres considérations. Pour cela, nous considérerons le coefficient de compressibilité 3E 2(7 Pour un corps indéformable, ce coellicient doit être infini; or, l'in- déformabilité étant la caractéristique du solide parfait, cet état doit correspondre à l'abscisse (t = — . Pour un corps indéfiniment déformable, ce coefficient doit être nul; or, il doit en être ainsi pour les vapeurs et les gaz à un certain degré de ténuité, lequel état correspond dès lors aux abscisses Nous avons dit que l'état de ténuité ne doit pas dépasser une cer- taine limite au-delà de laquelle les valeurs absolues des actions mutuelles étant très faibles, leurs variations, si faibles qu'elles soient, deviennent comparables à ces valeurs absolues et les définitions admises ne sont plus applicables. C'est à cette circonstance qu'il convient de rattacher l'état ultra- gazeux dont la limite — le vide parfait — est en théorie aussi indé- formable que le plein parfait. Considérons en second lieu le coefficient f* : il représente ce qu'on appelle le glissement, ou distorsion en d'autres termes, les altéra- tions des angles droits avant la déformation. Dire que p est infini, c'est dire qu'un effort infiniment faible peut produire une distorsion appréciable ou, ce qui revient au même, que 392 PHYSIQUE le glissement est négligeable; cet état semble correspondre à celui (lu liquide parfait qui , dès lors , doit être obtenu lorsque o- = — i , car alors ix est en eflet infini. Réciproquement, les gaz et les vapeurs qui présentent une résis- tance presque nulle, quant à la compressibilité, doivent présenter des résistances au glissement des molécules de plus en plus grandes. Ayant l'emplacement des solides et des liquides parfaits et des notions sur les vibrations que les gaz et les vapeurs peuvent propa- ger, nous pouvons compléter notre figure par les énonciations que nous y avons ajoutées. Nous y voyons que les solides , les liquides et les gaz peuvent pro- pager les deux sortes de vibrations, mais que les ultra-gaz ne peuvent propager que les ondes transversales, lumineuses ou calorifiques par exemple. Ce résultat est de tous points conforme aux expériences et aux constatations. Par contre, les vapeurs ne peuvent propager aucune vibration et les expériences suggestives et caractéristiques de Tyndall viennent corroborer cette conclusion. M. Ch.-Ed. GUILLAUME Directeur-adjoint du Bureau International des Poids et Mesures, Pavillon de Breteuil, à Sèvres SUR LA VARIATION DU MODULE D'ËLASTICITË DU FER AUX TEMPÉRATURES ÉLEVÉES — Séance du 8 août — Je désire traiter avec quelque détail, dans cette note, une question déjà efïleurée dans une communication faite récemment à l'Académie des Sciences et au sujet de laquelle une brève indica- tion a été donnée à la fin d'un article consacré, dans la Reî'ue g-éné- raJe des Sciences, à la théorie des aciers au nickel. En mettant en parallèle toutes les anomalies si singulières que présentent ces alliages, en montrant leur évidente parenté, en éta- blissant une complète analogie entre les proi)riétés réversibles ou irréversibles qu'ils possèdent suivant leur teneur, je crois avoir C.-E. GUILLAUME. — VARIATION DU MODULE d'ÉLASTICITÉ DU FER 3q3 démontré, d'une façon irréfutable, que toutes ces anomalies sont dues uniquement au fait que les transformations du fer, s'opérant à des températures élevées dans le métal pur, sont ramenées, parla présence du nickel, à des températures beaucoup plus basses et sont de plus considérablement déformées. On a étudié jusqu'ici, dans le fer pur, essentiellement les varia- tions des propriétés magnétiques, celles du volume et les dégage- ments de chaleur distincts des phénomènes dus seulement à l'existence de la chaleur spécifique et qui sont l'indice des transformations moléculaires. Ces transformations sont dans le fer, au nombre de deux au moins, séparant les trois états du fer caractérisés par M. Osmond et désignés par lui sous le nom de fer a, fi ou 7. Le passage du fer a au fer p s'opère graduellement et s'achève vers ^55°, température à laquelle le magnétisme sul>it une chute très rapide. Le second passage est beaucoup plus brusque ; il se produit vers 890° et s'accompagne d'une diminution du volume, qui reprend ensuite sa marche ascendante. C'est seulement à l'état 7 que le fer devient fai- blement magnétique, dans le sens donné jiar M. Curie à cette expres- sion. A partir de cette seconde transformation, la susceptibilité magnétique est. en effet, indépendante du champ et inversement proportionnelle à la température absolue. Lorsqu'on ajoute progressivement du nickel au fer, on voit, ainsi que l'a montré M. Osmond, les deux transformations se rapprocher et finir par se confondre sensiblement en une seule. Ainsi, l'alliage devient fortement magnétique au refroidissement en même temps que ses autres changement commencent à présenter un caractère anomal. J'ai consacré de longues recherches à l'étude de deux de ces chan- gements, celui du volume et celui du module d'élasticité. Tous deux sont anomaux , en ce sens que , dans les transformations réversibles ou irréversibles, le volume de l'alHage augmente virtuellement ou réellement lorsqu'il se refroidit, tandis que le module d'élasticité diminue considérablement dans tout le passage, à température des- cendante, par la région de transformation. La variation brusque et de sens anomal du volume du fer, rappe- lée plus haut, est bien connue. Sa mesure, bien que délicate, n'a pas présenté de grosses difficultés, et on en connaît bien la valeur, grâce surtout aux travaux de M. H. Le ChateUer et de MM. Charpy et Grenet. J'ai démontré que toutes les anomalies de dilatation des aciers au nickel s'expliquent, si l'on admet que le fer 7 transporte toutes ses propriétés jusqu'au seuil de la transformation, et retrouve. 394 PHYSIQUE au cours de cette dernière, le volume qu'il aurait dû prendre contor- mément aux indications numériques tirées de cette hypothèse. On est moins renseigné sur le module d'élasticité. La raison en est facile à saisir : à la température de sa transformation supérieure , le fer est extrêmement mou, et les moindres déformations qu'on lui fait subir x^euvent devenir en partie permanentes. De plus, aux tempé- ratures élevées, l'uniformité est très difficile à réaliser, et c'est seu- lement en s'entourant de grandes précautions que l'on peut être certain d'obtenir une suffisante égalité de température sur les deux faces du barreau en expérience. Alors les dilatations peuvent inter- venir pour une forte part dans les flexions observées, et on aura à en tenir compte d'autant plus que les variations du volume avec la température y sont extrêmement rapides et que le dégagement ou l'absorption de chaleur par la transformation faussent complètement la notion même de conductibilité thermique. C'est pour ces multiples raisons qu'on ne pouvait en aucune façon considérer comme concluante une expérience, d'ailleurs très rapide de M. Howe, dans laquelle il avait observé, jiendant la chaufl'e, un raidissement subit d'une barre , bientôt suivi du retour à la flexion primitive et de laquelle il avait x^ensé pouvoir déduire l'existence d'une sorte de sommet brusque dans la courbe du module d'élasticité, exprimé en fonction de la température. Il semblait beaucoup plus naturel, en effet, d'expliquer cette expérience x^ar le fait d'une transformation s'ox^érant successivement sur les deux faces, la variation du volume moléculaire étant une raison suffisante x)our le redressement de la barre. Mais l'étude des aciers au nickel a montré , comme il a été dit x^lus haut, que toutes les anomalies x^i'ésentées \)av les variations de leur volume x^euvent être rax^x^ortées aux variations de même nature du fer, considéré comme dilué dans le nickel. On sera donc fondé à X)enser que les anomalies de variation du module auront la même origine et devront être cherchées dans les changements éx^rouvés X^ar le fer. On en conclura que le fer éx^rouve, au cours de l'une de ses transformations, un changement du module, de sens contraire à celui qui accoinx)agne le changement de la temx^érature dans tous les métaux ou alliages étudiés jusqu'ici. Une seule hésitation x^ourra demeurer, concernant celle des deux transformations qu'accomx)agne ce changement du module. Mais cette hésitation sera de courte durée. Comme toutes les manifestations de l'élasticité dans les corx^s nodule Volume C.-E. GUILLAUME. — VARIATION DU MODULE D'ÉLASTICITÉ DU FER SgiS peuvent généralement ' être attribuées à des variations de la distance des molécules , on devra s'attendre 'à trouver des variations considé- rables du module là seulement où le volume éprouve une variation importante. C'est donc dans le passage du fer S au fer / que la rigi- dité du fer doit augmenter brusquement. Les changements de volume du fer et ceux de son module seront donc représentés par deux courbes d'allure symétrique, telles que celles de la figure i . En retournant à l'ex- périence de M. Howe, on verra aisément qu'on pouvait avoir de justes raisons de n'en interpré- ter qu'avec beaucoup de circonspection l'intéres- sant résultat. En elïet, si nos déductions sont exactes, on ne devrait pas observer, dans la chauffe d'une barre de fer, un raidissement sui- vi immédiatement d'un retour au module primitif. Et , s'il en était ainsi, il serait inadmissible que les transformations, transportées aux températures ordinaires, pussent se traduire par une longue liériode de changement anomal du module. Il est donc extrêmement probable que les causes de trouble indiquées plus haut ont agi pour fausser l'observation de M. Howe et lui enlever le sens qu'il avait pensé pouvoir lui donner. Je ne sam-ais me dispenser de repéter ici une conclusion d'ordre plus général, présentée déjà à l'occasion d'un précédent travail : c'est que l'étude des propriétés des alliages du fer avec un corps abaissant la température de ses transformations de manière à les rendre très facilement accessibles à l'expérience permettent souvent de tirer, relativement au fer pur, des conclusions plus exactes et plus délicates que celles auxquelles conduit son étude directe, à moins de s'entourer d'un ensemble de précautions qu'il n'est pas toujours facile de réaliser. FiG. I. 396 PHYSIQUE M. A. TURPAIN Professeur-adjoint à la Faculté des Sciences de Poitiers LES PHÉNOMÈNES D'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÈRIOUE OBSERVÉS AU MOYEN DU COHÉREUR — Srancp du 8 août — Nous nous sommes proposé , tout en continuant l'observation des orages parle coliéreur, (rai)pliquer ce délicat appareil à l'étude du potentiel en un point de l'atmosphère. Nous exposerons successive- ment les progrès que nous avons fait subir à nos dispositifs d'obser- vation des orages et comment nous avons appliqué le coliéreur à l'étude du potentiel de l'air. I. Observation des orages. — Les dispositifs qui nous ont servi en 1902 à Saint-Einilion pour déceler les orages dès leur production dans le golfe de Gascogne (*) ont été utilisés, après avoir subi plu- sieurs perfectionnements, à l'observation des orages faite à l'obser- vatoire du Puy-de-Dôme. Comme l'an dernier, M. O. Rochefort a bien voulu mettre gracieusement à notre disposition les récepteurs de télégraphie sans fil et relais que nous utilisons. M. Brunhes, l'ai- mable directeur de l'Observatoire météorologique du Puy-de-Dôme, a non seulement offert une large hospitalité à nos appareils , mais il a encore très bienveillamment mis à notre disposition les ressources de son observatoire et celles de son laboratoire. Nous avons dû consacrer les quelques jours que nous avons passés au sommet du Puy-de-Dôme à l'installation des dispositifs qui ont été laissés aux bons soins de M. David, météorologiste à l'observa- toire de la montagne. Malgré ses nombreuses occupations, M. David a non seulement utilisé les dispositifs à observer, d'une manière des plus suivies les orages, mais il a bien voulu faire à leur aide un grand nombre d'observations intéressantes. Ces observations, ainsi que les détails du dispositif établi au Puy-de-Dôme, feront l'objet d'une communication spéciale. Nous nous bornerons ici à indiquer (•) La prévision des ordres au moyen du cohrrcnr. — Congrès de Montauban, 1902 (2= partie, p. 3;8). A. TURPAIN. — PHENOMENES d'eLECTUICITÉ ATMOSPHERIQUE 3q'j les perfectionnements que nous avons apportés à nos dispositifs antérieurs et nous nous étendrons surtout sur l'application que nous avons ftiite des propriétés que présentent les associations de coliéreur dans le but de suivre la marche des météores. Comme dans la campagne de l'année précédente , le coliéreur , en actionnant le relais sous l'inlluence d'vme émission d'ondes d'origfine atmosphérique, met en mouvement, par l'intermédiaire d'un électro- aimant, une plume d'inscripteur qui, disposée parallèlement à celle d'un baromètre enregistreur Richard, permet l'inscription de chaque décharge atmosphérique sur la bande même du baromètre, au-dessous de l'indication de la pression à cet instant. Quand les décharges se succèdent à intervalles très rapprochés, leurs tracés se confondent par suite de la lenteur avec laquelle tourne le cylindre enregistreur. On peut mettre alors le relais en communication avec un électro- aimant inscripteur dont la plume tracera les décharges sur la bande d'un anémomètre qui se déroule d'un mouvement bien plus rapide. Dans le but de suivre les déplacements mêmes de l'orage, nous avons songé à employé une série de cohéreurs associés et choisis de sensibilités différentes. L'utilisation d'une telle association nécessite tout d'abord une étude préalable complète du fonctionnement de cohéreurs voisins et associés. On pouvait craindre que les cohéreurs inlluent les uns sur les autres, que leur ordre de sensibilité, lorsqu'ils sont associés, ne soit plus le même que celui qu'ils présentent lors- qu'ils sont employés isolément et successivement. Il fallait enfin trouver un moyen commode et rapide de déterminer les sensiliilités relatives des cohéreurs associés, afin de pouvoir traduire les observa- tions de ces cohéreurs relativement au déplacement probable de l'orage. Ce moyen doit être rapide, afin de permettre le remplacement éventuel d'un ou de plusieurs cohéreurs mis hors d'usage par une décharge trop violente. Nous avons résumé dans une communication précédente (*), les résultats auxquels nous a conduit l'étude des cohéreurs associés. Nous appliquons ces résultats de la manière suivante. Ayant déterminé l'ordre de sensibilité de six cohéreurs associés en dérivation, nous pensions pouvoir nous rendre compte du nombre de ces cohéreurs, tiui se trouvent cohérés après une décharge d'ori- gine atmosphérique, d'après la valeur de l'intensité du courant qui parcourt un galvanomètre sensible, établi dans le circuit comprenant les six cohéreurs en dérivation. Le circuit se trouvait alors comprendre (') Sur h', fonctionnement de cohéreurs associés. — Congrès d'Angers, août 1903. SqS physique les six cohéreurs en dérivation, dont les six électrodes d'un côté se trouvaient réunies d'une part à l'antenne et d'autre part à un rhéostat de résistance variable (R =: 8000^^), à la suite duquel se place le gal- vanomètre sensible dont la seconde borne est reliée aux six élec- trodes restées libres des cohéreurs. Dans ces conditions, l'intensité du courant qui circule dans le galvanomètre, lorsqu'un seul cohéreur est cohéré, ne diffère pas sensiblement de celle qui parcourt le galvanomètre lorsque les six cohéreurs sont cohérés. Gela tient à ce que la résistance d'un cohéreur cohéré est pratiquement négligeal^le par rapport à la résis- tance de réglage R de 8000". — On eût donc été astreint à établir, dans chacune des six dérivations comprenant im cohéreur, une résistance de réglage de 8000" environ. — Gela nécessite 6 rhéostats de 8 à loooo*^ chacun et complique le dispositif en le rendant assez coûteux. — Nous avons préféré ne nous servir que d'un seul rhéostat, successivement mis en circuit avec chacun des six cohé- reurs. — Les cohéreurs sont alors disposés de manière à n'être en général cohérés par la décharge atmosphérique qu'en circuit ouvert. Gela diminue beaucoup leur sensibilité, ce qui est un avantage, étant donné que les cohéreurs à limaille sont, en général, plutôt trop sen- sibles pour l'observation des orages que pas assez sensibles. Un contact tournant met alors successivement en circuit les 6 cohéreurs utilisés. L'état de conduction que présentent les cohéreurs peut être connu par la valeur de l'intensité du courant qui parcourt chaque fois le galvanomètre. Gette valeur est enregistrée photogra- phiquement par les déplacements du spot lumineux dû au miroir du galvanomètre sur une bande de papier sensible qui se déroule d'un mouvement continu. Lorsque chaque cohéreur a été alors interrogé par le passage du contact tournant, on doit produire la décohésion des cohéreurs afin d'être assuré que la cohésion relevée au cours d'une nouvelle consul- tation des cohéreurs est bien due à faction d'une nouvelle décharge atmosphérique. — Non seulement on doit assurer l'efficacité de cette décohésion, mais il est essentiel d'être renseigné, au moment où Ion va relever à nouveau fétat électrique des cohéreurs, sur leur conduction et d'être assuré qu'ils ont bien été décohérés; sans quoi, les cohésions relevées pourraient être attribuées à lellet de décharges antérieures. — Il arrive en elfet fréquemment que des décharges atmosphériques cohérent assez fortement des cohéreurs pour que la frappe , même énergique , se montre impuissante à produire la déco- hésion. Il est essentiel d'être averti du moment où ce phénomène se A. TURPAIN. — PHÉNOMÈNES d'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE 3q^ produit, moment à pai-tir duquel le dis^iositif cesse de fournir des indications certaines. La ligure i montre par cpiel mécanisme simple le dispositif imaginé peut fournir les divers renseignements en question. FiG. I. Le galvanomètre utilisé G est du type Chauvin et Arnoux ; il est très sensible et peut assez aisément donner le — — de microampere. Ce galvanomètre est enfermé dans une chambre noire ainsi qu'un dévidoir à papier sensible formé de deux cylindres parallèles à axes horizontaux C,C' mus par un mouvement d'horlogerie et qui per- mettent de faire passer une bande de papier imprégné de bromure d'argent de l'un des cylindre sur l'autre. — L'axe K de l'un des cylindres entraîne le contact tournant B qui passe sur huit contacts échelonnés sur le pourtour d'une circonférence. Six de ces contacts a, b, c, d, e, /correspondent à la consultation successive des six cohéreurs i, a, 3, 4, 5, 6, associés en dérivation. La durée du 4oO PHYSIQUE contact avec les touches successives a, b,.. est très légèrement supérieure au temps que met l'aiguille du galvanomètre à aller du zéro de la graduation à l'extrémité de l'échelle. De cette manière, les cohéreurs sont successivement mis en circuit le moins de temps possible. Lorsque le contact B a épuisé les six touches de cohéreurs, il arrive en conmiunication avec une touche D formée de six lames conductrices isolées les unes des autres par une lame d'ébonite. Ces six lames sont reliées respectivement aux six touches a, b, c, d, e,f. Ce n'est pas, à proprement parler, le contact B qui est en communi- cation avec D, mais un pont conducteur P qui se trouve dans la direction même du bras mobile B, faisant corps av«c lui, mais isolé de B. Ce pont mobile P établit la communication entre D et F, de telle sorte que, si l'un quelconque des cohéreurs 1,2, 3, ^,5, 6 se trouve cohéré , le courant de la pile p' qui le parcourt actionne le relais Claude p, lequel provoque la mise en action du frappeur de décohésion qui vient heurter la planchette sur laquelle se trouvent disposés les cohéreurs. La durée de la réunion de P et de F est un peu supérieure à celle nécessaire pour provoquer la décohésion de cohéreurs assez fortement cohérés. — Avant de revenir sur la touche a, le bras mobile B amène le pont P en relation avec les deux touches D et O, de manière à fermer le circuit p'ODRa'Sp". Si un des cohéreurs se trouve alors cohéré , un courant de sens contraire aux courants précédemment admis dans le galvanomètre G parcourt ce galvanomètre dans le sens y.p et le spot lumineux s , provenant de l'envoi du rayon lumineux, émis par une source S, sur le miroir m du galvanomètre, indique ainsi que la décohésion a été incomplète. Si donc le tracé du sj^ot lumineux s- sur la bande sensible présente des portions situées à gauche de la ligne de foi (les consultations des cohéi-eurs se traduisent par des élongations inscrites à droite de la ligne de foi), les indications données par l'appareil après cette incur- sion du spot à gauche, doivent être rejetées, car on n'est plus sûr que les cohéreurs se soient tous complètement décohérés. Le tracé de la ligne de foi est très nettement produit sur la bande pendant tout le temps que met le bras mobile à aller de D ka. On peut donner à la vitesse de rotation du bras B une valeur telle que chaque tour dure de 2 minutes 1/2 à 3 minutes; la durée des contacts avec les touches ab,... n'a pas besoin d'excéder 5 secondes ; elle peut d'ailleurs être encore réduite. De cette manière, les cohéreurs ne demeurent en circuit que 3o à 35 secondes par tour, c'est-à-dire pendant le 1/5 du temps. On a donc cinq chances contre une pour qu'une décharge atmosphérique ne se produise pas lorsqu'un des cohéreurs A. TUUPAIX. — PHÉNOMÈNES d'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE 4^1 est en circuit fermé. Si toutefois la chose a eu lieu, il est aisé, au déiwuillé de la bande, de le reconnaître. En particulier, si un des cohéreurs b, c , d, e, f, se montre cohéré alors que a ne l'est pas. et en général si un cohéreur se trouve cohéré alors que ceux qui sont plus sensibles que lui ne le sont pas, c'est qu'il l'a été à la faveur de la coïncidence entre sa mise en circuit fermé et l'époque de la décharge qui l'a cohéré. D'ailleurs il est toujours possible d'interpréter les résultats trouvés au dépouillement, en ajant soin d'établir l'exacte concordance entre le temps marqué par l'appareil et celui qu'indique un enregistreur à cohéreur unique (plus sensible que le plus sensible des cohéreurs i à 6). Toutes les décharges étant enregistrées, quelles que soient leurs distances, par l'enregistreur à cohéreur unique (bande d'anémomètre par exemple), on peut toujours savoir à quel point de son parcours se trouvait le bras B lors de la décharge considérée et ne tenir compte que des décharges s'étant produites alors que B était entre O et a. La comparaison des inscriptions provenant de plusieurs décharges successives produites durant cet intervalle de temps favorable permettra de savoir si le météore s'est éloigné ou approché du lieu d'oliservation. La mise en observation de ce dispositif, basé sur les propriétés des «ohéreurs associés, nous paraît de nature à fournir relativement aux orages des renseignements plus complets que ceux déjà obtenus par l'utilisation d'un cohéreur imique. Nous espérons l'expérimenter incessamment à la station du sommet du Puy-de-Dùme. IL Étude du potentiel de l'air. — Nous avons appliqué un dispo- sitif du môme genre, mais beaucoup plus simplifié, à l'inscription du potentiel en un point de l'atmosphère à divers instants successifs. On met l'antenne, convenablement isolée et qui doit être terminée par une pointe , ou mieux par une flamme , en communication avec une sphère soigneusement isolée. Cette sphère acquiert un certain potentiel, de telle sorte qu'elle se trouve chargée. De temps en temps, à des intervalles de temps égaux par exemple, on décharge cette sphère dans le circuit d'un cohéreur. L'état de conduction dans lequel cette décharge met le cohéreur . état fourni par la déviation (enregistrée photograi)hiquement) d'un galvanomètre sensible , peut fournir une indication du potentiel auquel la sphère est amenée au moment où on la décharge. Ici encore, on a soin, entre deux mises en conununication successives de la sphère et du cohéreur, de pro- duire la décohésion du cohéreur et de s'assurer que la décohésion a bien été complète. 26^ 4o2 PHYSIQUE Les cohéreurs dont on doit faire usage dans cette recherche peuvent être très sensibles, alors qu'au contraire ceux destinés à l'observation des orages sont choisis d'une sensibilité plutôt médiocre. Il est bon de ne faire x^asser dans le circuit comprenant le cohéreur qu'une partie de la décharge fournie par la sphère, ce qui s'obtient aisé- ment par un shuntage convenable. En définitive, l'emploi dune sphère isolée, reliée à l'antenne, constitue une réédition de l'expérience première et bien connue de de Saussure. L'usage du cohéreur permet d'obtenir une graduation très étendue des états électriques différents auxquels se trouve ame- née cette sphère. De plus, ce dispositif simple, se prêtant à la réa- lisation d'un isolement très complet, permet d'éviter la dissémina- tion graduelle de l'électricité atmosphérique captée. Nous avons essayé de déterminer i^ar ce procédé le potentiel de l'air en un point de la cour de la Faculté des Sciences de Poitiers, et les résultats obtenus nous font bien augurer de la mise en pratique de ce procédé qui nous semble devoir fournir des indications très- sûre Si M. A. TURPAIN Professeur adjoint à la Faculté des Sciences de Poitiers ET M. P. DAVID Météorologiste à l'Observatoire du Puy-de-Dôme ENREGISTREMENT D'ORAGES PAR LE COHÉREUR A L'OBSERVATOIRE DU PUY-DE-DOME DURANT L'ÉTÉ 1903 [538.562 :55i. 55 J — Séance du 8 août — L'installation des appareils, qui date des derniers jours de mai 1903, est faite dans la tour de l'Observatoire située à la partie culmi- nante de la montagne (i465"^) et dominant de près de 3oo mètres les pays les plus élevés de la chahic des Dômes. Cette station se trouve lîlacée dans des conditions extrêmement favorables pour des obser- vations de ce o-enre. L'obstacle le plus voisin, est le massif des A. TURPAIX & A. DAVID. ENHEGISTREMEXT d'oRAGES ^0% monts Dore situé à environ 3o kilomètres au S.-S.-W. Les ondes d'ori- gine atmosphérique, émises au sein des nuages orageux, à une alti- tude généralement supérieui'e à 2000 mètres , peuvent donc arriver directement aux antennes réceptrices dès leur production. Poiu* la réception, on a disposé deux antennes, l'une àl'E et l'autre à rW de la tour, ayant respectivement i6'" et i5'"5o de hauteur. L'antenne W aboutit directement à une des électrodes du cohérem% dont l'autre est mise au sol par l'intermédiaire d'un câble relié au paratonnerre de la tour; l'antenne E arrive à la même électrode après avoir contourné une partie de la tour. De cette façon, l'une au moins des antennes se trouve toujours directement frappée par les ondes et on supprime ainsi l'obstacle que formerait la tour. Le dispositif récepteur se compose d'un récepteur ordinaire de télégraphie sans fîl, dans lequel on a remplacé le Morse [)ar un électro-aimant, qu'on fait inscrire sur le tambour d'un bai-omètre enregistreur à coquilles, de façon que les deux courbes se corres- pondent. De cette manière, on peut observer directement les varia- tions de la pression atmosphérique pendant les manifestations ora- geuses. Depuis l'origine de l'installation, on a pu enregistrer un grand nombre d'orages plus ou moins éloignés. On a enregistré des orages, deux et quelquefois même trois jours avant qu'on en observe direc- tement les décharges, et de cette façon on a pu ainsi être averti très longtemps à l'avance du début d'inie période orageuse. Malheureusement, l'enregistreur demande une surveillance cons- tante et sa sensibilité doit être vérifiée journellement. Pour l'obser- vation d'orages éloignés, on est en effet obligé de rendre le récepteur très sensible; il suffit alors d'une onde un peu plus intense que les autres pour cohérer la limaille , d'une façon telle que le frappeur est insuffisant pour la décohérer. Dans ce cas, il passe alors un courant continu dans les électro-aimants inscripteurs et les piles sont très rapidement polarisées ; il faut alors leur laisser un repos assez long pour qu'elles puissent fonctionner de nouveau normalement. Il serait dans ce cas très utile de pouvoir remplacer les piles par des accumu- lateurs, en faisant fermer au besoin le circuit par un relais intermé- diaire, pour éviter la détérioration par les étincelles de rupture du relai sensiljle en circuit avec le cohéreur. On éviterait ainsi les chô- mages forcés de l'appareil pendant un temps plus ou moins long, après une période de cohésion continue. On espère toutefois pouvoir obvier à cet inconvénient en rendant intermittente la mise en circuit du cohéreur et en observant les 4o4 PHYSIQUE orages à l'aide d'un coliéreur disposé en circuit ouvert qui ne soit fermé sur le relais que pendant un intervalle de temps suffisant k l'inscription. Létude faite par l'un de nous des propriétés que pré- sente le cohéreur disposé en circuit ouvert nous donne bon espoir de rendre cet appareil plus constant et d'une sensibilité mieux appro- priée aux observations auxquelles on le destine. A titre d'indications, nous donnons le relevé suivant fait à l'Obser- vatoire du Puy-de-Dôme concernant les orages du 17 juin au i3 juillet 1903 : Dans le bulletin du Bureau central météorolog-ique du 18, on signale un orage de la veille à Biarritz, qui doit probablement correspondre à l'enregistrement du 17. Dans le Ijulletin du 19, on signale des orages à Nancy et Rochefort qui doivent probablement correspondre à l'enregistrement du 19 , à 6 lieures du matin. Le ])ulletin du 20 mentionne les orages observés le 19, à TE de Cler- mont , vers 5 heures du soir et d'autres dans le Midi. Le bulletin du 21 signale des orages la veille à Paris, Nancy, Besançon et le Mont Mounier : enregistrés au Puy-de-Dôme. Le bulletin du 22 ne mentionne pas d'orage mais seulement des pluies de l'E. Le 24 juin, on enregistre un orage entre 6 heures et 8 heures du matin. Le bulletin du Bureau central du 25 en mentionne un la veille à Perpi- gnan. Le 28 juin, orages dans l'W : non enregistrés. Le 29, orages locaux faibles : enregistrés. Le 3o , à 6 heures du matin , orage signalé au S-W à l' Aigoual : enre- gistré. Dans la journée, orages voisins : enregistrés. Le 2 juillet, orage signalé à Biarritz, probablement enregistré au Puy- de-Dôme. Le 3, orages locaux très violents, avec nombreuses chutes de foudre et personnes foudroyées : enregistrés. Le 4, enregistrement d'orages signalés le 5 dans le bulletin comme produit à Aigoual. Le 5, orages enregistrés et produits à l' Aigoual, Lyon, Perpignan. Le 6, orage enregistré et non signalé. Le 8, orage enregistré et non signalé. Le 9, orage enregistré et non signalé. Le II, orage enregistré et non signalé. Le 12, orages locaux. Le i3, orages locaux. A. TURPAIN. — INTERRUPTION DU CIRCUIT PRIMAIRE 465 M. A. TURPAIN Docteur es sciences, Professeur -adjoint à la Faculté des Sciences de Poitiers SUR L'INTERRUPTION DU CIRCUIT PRIMAIRE DES BOBINES D'INDUCTION [537-51] — Séance du lo août — De la rapidité avec laquelle se produit la rupture du primaire d'une bobine d'induction dépend la longueur d'étincelle qu'on peut obtenir, toutes choses égales d'ailleurs, entre les pôles de l'induit. Si rinterrui)tion est assez rapide , on peut même supprimer avec avan- tage le condensateur de la bobine. C'est ainsi que lord Rayleight, en coupant le fil du circuit secondaire avec une balle de fusil, a pu supprimer le condensateur et obtenir alors une étincelle d'induction notablement plus longue que par une interruption ordinaire. Nous avons pu obtenir des résultats semblables en utilisant la rup- ture produite à l'aide dun interrupteur ordinaire. On peut, en com- binant convenablement les organes mécaniques d'un interrupteur, arriver à réduire autant qu'on le désire la durée de la rupture. Considérons trois tiges d'interrupteur A, B, C (fîg:i), i)longcant dans trois godets de mercure Ma, Mb, Me et reliées entre elles en 4ob PHYSIQUE série (Ma au pôle -|- de la source AàMn, BàMc, Cau primaire de la bobine relié d'autre part au pôle — de la source). Dans ces condi- tions, si les 3 tiges sortent du mercure en même temps, l'arc qui s'établirait pour une différence de potentiel et une intensité données entre une seule tige et son mercure se scinde en trois arcs contem- porains présentant chacun une même longueur moindre que celle d'un arc unique. Les tiges étant animées d'un mouvement de vitesse donnée, la durée de l'interruption sera moindre dans le cas de trois tiges reliées en série que dans le cas où l'interruption ne se produit qu'entre une seule tige et son mercure. Dans la pratique, il est commode de rem[)lacer l'interrupteur à tige par un interrupteur à balais et à contacts tournants. On peut, avec avantage, employer le cuivre sur cuivre, ou le charbon sur cuivre, le tout plongeant dans l'huile de vaseline ou dans le pétrole. Il y aurait également avantage , au point de vue des phénomènes de self-induction, à scinder le primaire en autant de tronçons qu'on emploie d'interrupteurs -série et à placer une interruption entre chaque tronçon. Soient n le nombre d'interruptions-série ainsi réalisé. In la lon- gueur maxima de la suite des n arcs qui s'établissent dans l'isolant baignant l'interrupteur, w la vitesse angulaire de l'interrupteur rota- tif, /• le rayon du tambour sur lequel les balais interrupteurs frottent, le temps t que dure l'interruption est t= '" nrtù Pour une valeur donnée du potentiel aux bornes du secondaire et par suite de l'intensité du courant secondaire —aune valeur donnée. La durée d'interruption est d'autant i^lus courte que r et w sont plus grands. Pour le cuivre et le charbon dans le pétrole et pour I = i5 ampères, Z„ = 6"^"^ (pour n = 6). Si r = ô*^"" w = 5 tt de seconde. ^85 En mettant en œuvre un interrupteur rotatif à six contacts-série tournant à cette vitesse, nous avons pu obtenir, sans condensateur, une étincelle de i8 centimètres entre les pôles d'une bobine qui, utilisée dans les mêmes conditions avec un interrupteur ordinaire et avec condensateur, ne donnait que 12 à i4 centimètres d'étincelles. A. BLOXDEL. — LES EFFETS DES ANTENNES DE TRANSMISSION 4^7 Il peut être avantageux, dans certaines recherches, de changer entre chaque interruption le sens du courant primaire. Nous avons indiqué (*) une manière facile de réaliser un interrupteur inverseur, en rendant le commutateur inverseur d'un interrupteur Foucault solidaire du moteur de l'interrupteur et en lui imprimant , à laide d'un engrenage, une vitesse de rotation telle qu'il fasse un demi-tour entre chaque plongée successive de l'interrupteur. Il est d'ailleurs aisé de construire un semblable interrupteur inverseur muni de plusieurs interruptions en série. On obtient alors des étincelles nota- blement allongées et d'une remarquable constance. M. A. BLONDEL Professeur à l'École nationale des Ponts et Chaussées, à Paris QUELQUES REMARQUES SUR LES EFFETS DES ANTENNES DE TRANSMISSION — Séance du lo août Dans une précédente communication (**), j'ai indiqué la façon la plus simple de se représenter l'ébranlement de l'éther produit par une antenne verticale, sous la forme d'une onde hémisphérique polarisée, les lignes de force électriques étant des méridiens circu- laires, et les lignes de force magnétiques étant des cercles de révolu- tion. Depuis cette époque, divei's auteurs anglais et américains ont donné des représentations différentes des ondes, en les figurant comme des tores elliptiques de hauteur constante , glissant à la sur- face du sol et s'agrandissant seulement en diamètre (fig. i)- ^y///// //////y ^)W^ (•) Interrupteur inverseur pour bobines d'induction. — Congrès de l'Association Jrari' çaise pour l'avancement des Sciences. Ajaccio, igoi, p. 29;. (**) Congrès de l'Association française à Nantes, 1898. 4o8 PHYSIQUE Il y a là, je crois, une erreur résultant d'une interprétation incom- plète des résultats théoriques de Hertz, dont on a prétendu tirer ces conclusions. Il est facile de montrer, au contraire, que la représen- tation du champ au voisinage de l'antenne, qui résulte des travaux de Hertz , se concilie parfaitement avec la production d'ondes sphé- riques à grande distance. Comme je l'ai dit antérieurement, le système antenne-terre est équivalent à un oscillateur de Hertz de longueur double AA' (fig- 2), obtenu en ajoutant à l'antenne OA une par- A ^• ^\ tie symétrique OA' formée de son image \ '^ électrostatique par rapport à la surface de .\ \ ■— la terre, qui joue le rôle d'une surface ; / conductrice (l'hypothèse de la conductibi- /' lité parfaite de la terre n'est évidemment qu'approchée, mais suffisante pour une ^"^* ^' théorie élémentaire). Le champ au voisi- nage de cet oscillateur rectiligne AA' (Jig: 2) sera analogue à celui que Hertz a étudié autour d'une petite oscillation électrique rectiligne. Ce champ est formé d'une série de boucles qui se ferment, puis se détachent et se transportent perpendiculairement au fil de l'oscilla- teur, tout en s'agrandissant. La substitution d'un excitateur rectiligne Uni à la petite oscillation ne modifie pas le phénomène au point de vue qualitatif et nous donnera bien encore des lignes de force en boucle engendrant des surfaces de révolution représentant le champ de force électrique. Le processus suivant lequel ces boucles se détachent se déduit des figures de Hertz, comme l'a déjà signalé M. Fleming, et peut être expliqué parles schéma ci-joints (fi g'. 2, • ^ ""x 3 et 4)- Lps charges , ou électrons sui- / '' "^ \ vaut la terminologie actuelle , positives / / \ \ et négatives, se déplacent en sens in- 1 '— r verses vers les extrémités opposées de \ ; ' l'excitateur, tout en restant reliées par ^x \ ' ' des lignes de forces, comme toute masse ^v / d'électricité décomi)Osée en ses élec- ^-'-' trons. Pendant la première partie de ce ï"'«- 3. mouvement, les lignes de force élec- triques forment des boucles de dimensions croissantes comme le inontre à un instant donné la figure 4- piiis la propagation subit une réflexion aux extrémités et les boucles se referment peu à peu A ^ , \ 1 _p \ 1 -4 1 \ 1 \ > / A r 0 X \ > J r / / A. BLONDEL. — LES EFFETS DES ANTENNES DE TRANSMISSION 409 (fig. i); puis, en vertu de l'inertie des électrons, ceux-ci dépassent la position d'équililjre O et les lignes se croisent, comme le montre la iigure 3; enlin, après croi- ^'""^v. sèment, elles se séparent en / * boucles distinctes comme le / /' ^ ^ montrent les figures 3 et 4» et les boucles détachées conti- nuent leur propagation sous forme d'ondes libres. La pré- sence de la terre ne laisse place qu'aux moitiés supé- rieures des boucles ; les lignes de force électrique se forment ^^ ,' horizontalement par la terre Pj^ ^ sous forme de courants superficiels. Mais il ne faut pas croire que ces boucles vont se transporter par un simple mouvement de translation en restant semblables à elles- mêmes (Jig: i), car les lignes de force tendent à s'étendre dans toutes les directions ; elles augmenteront donc de hauteur en même temps qu'elles se propageront le long de la terre, à laquelle elles aboutissent sensil)lement normalement comme sur toute surface conductrice. En même temps, elles s'incurve;ront vers l'axe vertical \ de l'antenne, ainsi qu'il résulte de l'étude du champ hertzien à petite distance. On doit donc, je crois, se i-eprésenter la propagation des lignes de force électrique sous la forme que représente en al^rege la 4lO PHYSIQUE figure 5. Je dis en abrégé, parce que cette figure est un simple schéma, sans prétention à la rigueur mathématique. Elle sert à montrer que peu à peu les boucles, en s'allongeant, finiront par se rejoindre sur l'axe de figure et deviendront ensuite parfaitement spliériques. A partir de ce moment, la propagation sera purement transversale et se fera avec la vitesse de la lumière. Avant d'arriver à cette distance limite, à partir de laquelle les ondes sont sphériques , le champ suit des lois bien plus complexes ; la vitesse n'est pas celle de la lumière, les lignes de forces oscillent, ainsi que Hei'tz Va montré, et les phénomènes sont compliqués et difficilement accessibles à l'analyse et. jjour la pratique ordinaire, la représentation schématique ci-dessus paraît suffisante. Car on peut se contenter d'étudier ce qui se passe à grande distance. A cet ellet, on est obligé de faire d'abord une hypothèse simple sur les oscillations dont l'antenne elle-même est le siège. La j)lus simple est d'admettre qu'elles sont simplement sinusoïdales en fonction du temps et de l'ordonnée, comme les oscillations d'un tuyau sonore ouvert au sommet et excité à la base. Il résulte en effet des expériences de Slaby et d'autres que l'antenne, en régime oscillant permanent, présente toujours un nœud du potentiel et un ventre du courant à la base, et un ventre de potentiel et un nœud du courant au sommet (fg: 6). Si on néghge, faute de mieux, les per- turbations à l'extrémité où se produit la réflexion des ondes (et l'expérience semble en donner le droit, car en changeant la forme de l'extrémité et y ajoutant même des petites boules ou plaques ou pointes variées , on ne constate aucun changement appréciable dans la longueur d'onde mesurée) et si on néglige des variations de la capacité et de l'inductance linéaires le long de l'antenne, on j)eut donc écrire l'équation du courant sous la forme élémentaire sui- vante : 7ZZ . \t .0 cos _ sm . -^ 1 j ttZ . M l = !„ COS -— Sin TT -=r=r A. BLONDEL. — LES EFFETS DES ANTENNES DE TRANSMISSION 4^1 en appelant I l'intensité au point ; et au temps /, I^ l'amplitude de I, z la hauteur du point considéré, H celle de l'antenne, V la vitesse de la lumière. Cela posé, on peut aisément se rendre compte, par le «alcul approximatif suivant, de la façon dont se répai-tit l'énergie sur l'onde sphérique à grande distance. D'après Hertz (Wied. Annalen, t. 36, I, 1888, p. 147), tout élément fh de courant oscillant I rayonne autour de lui l'énergie à grande distance suivant une loi sphérique, et avec un retard de phase correspondant au chemin 7' parcouru par l'induction avec la vitesse de la lumière V. Les forces électriques E et magnétiques P sont toutes deux perpendiculaires au rayon vecteur r, et égales «ntre elles , et leur expression est : _, „ dz d r sin 0 ï^ = P=V*'('-7) — en désignant par l(t — L\ la valeur du courant I à l'époque f _ £ et j)ar G l'angle du rayon /• avec la direction de l'élément de courant. D'où, ici, en remplaçant I par sa valeur ci-dessus, E = P = -^eos -glcos 2H sin 0 Pour avoir les champs produits par l'antenne entière, il suffît d'in- tégrer les champs élémentaires de tous les éléments. A petite dis- tance on devrait poser : /' = 7'^^ + -'- — a/'oS cos Go et intégrer les deux composantes des chamj)s E.v = E sin 6 E.^ = E cos 0 ee qui entrahie à une grande complication (*). Mais en nous bornant à ce qui se passe à grande distance, nous pouvons négliger les varia- tions de e et faire 6 = Ôq» ^l'où : r = t'q — z cos % O Une Théorie plus complète, et bien plus compliquée naturellement, a été établie par M. Max Abraham. (Voir Annales de Driide , 1901 et 1902, et Physikalische Aeitscnnjt, 1902); mais il y manquait les explications physiques qui font l'objet de la présente note. 4l2 PHYSIQUE et , toutes les forces élémentaii'es E et P étant respectivement concor- dantes en direction, les résultantes sont en grandeur : .+ Il \og "^V^ — /'o + 2 cos Oo) •^— H 2H dz 7rl„ sin 0,, , 4H • "^ \2 "/ l ^ \rt -— " ^ 4- ^2— sni Lf — j L cos -r? V f _ 12H /' TT 2 sni 260 \2H cos 1 — cos 0, '■o ■-0 cos I— cos 0, 2L U ^"-^ '«/ 77 ^os rs (^* — ^0) 7'q sin Og 2H On voit que les forces des champs varient en fonction de l'angle 9^ comme cos I— cos 0(, sin Oq L'énei'gie varie d'autre part proportionnellement au vecteur radiant de Poynting. lequel (E et P étant rectangulaires), a pour expres- sion : EP _ E^ et varie donc proportionnellement à cos ^ — cos ô, \^ sin ^Oo Or, il est facile de se rendre compte que la réception dépend de l'énergie reçue par l'antenne; cela est évident pour les récepteurs thermiques ou autres analogues qui intègrent l'énergie reçue par unité de temps. Gela est vrai également pour les récepteurs du genre cohéreur, qui sont sensibles au choc électrique reçu à l'arrivée de chaque train d'ondes; en effet, on définit bien d'ordinaire les condi- tions de cohérence par la tension nécessaire pour la produire ; mais il est évident que, pour oljtenir la soudure des particules métalliques, il faut aussi une certaine quantité minimum d'électricité; c'est donc le produit de l'intensité par la tension qui détermine la cohérence. Or, deux antennes de hauteurs égales peuvent donner lieu à une force électro-motrice égale ; mais celle qui a la plus grande surface met en jeu la plus grande quantité d'électricité et produit par suite A. BLONDEL. — LES EFFETS DES ANTENNES DE TRANSMISSION 4i3 des effets de réception meilleurs, ainsi que l'on s'en assure facilement. C'est donc en délinitive Y énergie reçue par l'antenne sous forme de lignes de force électriques et lignes de force magnétiques qui entre en jeu pour la récei)tion. La sensibilité réalisée peut donc être consi- dérée comme proportionnelle au vecteur radiant dont nous venons de calculer l'expression. On voit ainsi que l'effet utile des ondes décroit en raison inverse du carré des distances 7'^ et non pas en raison inverse des distances, comme il résulterait de la théorie anglaise, critiquée plus haut. D'autre joart, si l'on construit en fonction de l'angle la courbe représentative du facteur cos cos 0, siii ■'Oo on obtient les valeurs relatives représentées par les rayons vecteurs de la courbe ci-jointe (fi g- 6). Le tableau ci-dessous indique ces valeurs relatives en fonction du rayon dirigé suivant l'horizontale prise comme unité. 0„ o^ IO° 20" 3o" 40° 5o" 60° 70° 80° o 0,019 0,074 o,i85 0,3l2 0,482 0,6(37 o,836 0,906 90° 1,000 On voit que l'énergie va en décroissant rapidement quand on s'élève au-dessus de l'horizon; la théorie précédente rend donc compte des phénomènes observés par divers expérimentateurs. En particu- lier, en France, M. le capitaine Ferrie a reçu des signaux en ballon, jusqu'à une hauteur de quelques centaines de mètres au-dessus du sol et constaté nettement la décroissance rapide de la réception quand on s'élève. En outre, il est bien évident que la courbe de répartition conserve la même forme à toute distance ; mais , plus on sera éloigné, moins on pourra s'écarter du sol pour recevoir encore des signaux perceptibles, parce que l'énergie reçue diminue en valeur absolue. Cette théorie, qui suppose le sol un conducteur parfait, peut s'appliquer parfaitement à la transmission à la surface de la mer; elle n'est qu'approchée quand il s'agit de la propagation sur un sol peu conducteur, qui joue alors le rôle d'un semi-diélectrique. Quand les ondes se propagent à grande distance, la courbure de la terre intervient, mais elle ne gène pas à la propagation, d'après ce que l'on sait de la propagation des ondes le long de corps conducteurs ; 4l4 PHYSIQUE les ondes s'infléchissent de manière à suivre la surface, ainsi que l'ont démontré les expériences de Sarrasin et de la Rive. Blondlot, etc. (*). En résumé, la simple application des propriétés connues des ondes hertziennes suffit à expliquer d'une manière très suffisamment satis- faisante tous les phénomènes observés, sans qu'il soit nécessaire d'attribuer aux ondes des propriétés nouvelles ou mystérieuses. Je me suis proposé dans cette note simplement de rendre plus claire l'interprétation des phénomènes et d'expliquer comment, malgré le régime très complexe et difficile à analyser qui s'établit au voisi- nage de l'antenne, la propagation à g-rande distance se ramène tout simplement à celle des ondes hémisphériques, ainsi que je l'avais énoncé en 1898. Ces ondes hémisphériques sont des ondes polarisées; c'est pour ce motif qu'elles ne propagent pas l'énergie d'une façon égale, suivant toutes les directions angulaires, et présentent un eifet maximum vers l'horizon et nul suivant le zénith. M. NOGIER Préparateur de Physique biologique à la Faculté de Médecine de Lyon VARIATIONS DE L'INTENSITÉ ACTINIQUE DE LA LUMIÈRE AVEC L'ALTITUDE [53:.23I — Séance du 10 août — L'année dernière, nous avons communiqué au Congrès de Mon- tauban les recherches que nous avions faites pour mesurer l'intensité actinique des diverses sources lumineuses. Nous nous sommes demandé cette année comment variait l'intensité actinique de la lumière du jour avec l'altitude et ce sont nos premiers résultats que nous apportons aujourd'hui. (*) Il convient de signaler une cause possible importante de pcriurbation de la pro- pagation à grande distance dans la raréfaction des couches élevées de Tatmosphère. Au delà de 5o kilomètres et jusqu'à une distance plus grande, elle i)réscnte une con- ductibilité analogue à celle du gaz dans les tubes de Geissler et on peut se demander ce que deviennent les lignes de force dans un pareil milieu. Si cette conductibilité des couches supérieures de l'atmosphère équivaut à celle tl'une surface métallique (ce (jui n'a pas été démontré expérimentalement), les ondes se proi)ageraient a partir d'un certain moment entre deux calottes conceniriques conductrices, et tendraient à devenir des cylindres normaux à ces calottes; l'elfet utile décroîtrait alors seulement en raison invei^se de la distance et non plus du carré de la dislance. NOGIER. — l'intensité ACTINIQUE DE LA LUMIÈRE ET l' ALTITUDE 4^5 Nos observations nécessitaient un appareil enregistreur. Nous l'avons imaginé aussi simple que possible, de façon à en faire un instrument robuste et peu sensible aux intempéries auxquelles il est exposé. Il se compose d'un châssis photographique format i3 X i8 dont la glace a été remplacée par un verre très mince, sur lequel ont été fixées 60 feuilles de papier paraffiné. Ces feuilles sont groupées FiG. I. deux par deux, de telle sorte qu'elles se recouvrent incomplètement les unes les autres , si bien que la lumière doit traverser successive- ment 2, 4, 6, 8, 10, etc.. , Go épaisseurs de papier. L'instrument rax^pelle, comme on le voit, la disposition adoptée par M. Benoist pour son radiochronomètre ; seulement l'instrument affecte ici la forme d'un rectangle au lieu d'être circulaire. 4i6 PHYSIQUE m \ O ^ ? CM [ / \ '*-, e<<. V ^. y tfi / \ CM • tt / / Ci / \ ^ \ w \ \ a> T~ K ^ ,-"-" IC 1 ^- ^ ^1 r' m / \ ^^^' ] *" 1 ■ \ / / \ K «^ \ 1 1 1 ^ "^ ^ 1 / c / "•^^ V ,.'• ^\ >L ^\ 0> -> 1 o OJ / c h^ * fa CM • / s • n >v. *^*' «^ ^ -^""^ i *— \ ^•>» A \ / / (s ^ 1 / 1 ^^•" ^ (JCO Jy ,^-" --r 4^ 1 1 1 r a> E E' O o> c o o CM Au-dessous de cette plaque ainsi préparée , on place un pa- pier sensible photographique et au-dessus une large règle en zinc munie d'une fenêtre allongée et mobile entre deux coulisses dont lune est munie de repères. Supposons maintenant que la règle se déplace une fois par jour d'une longueur calculée d'avance, le jiapier photogra- phique noircira d'une façon va- riable suivant l'intensité des rayons chimiques qui auront traversé l'appareil. A la fin de la semaine se trouveront enre- gistrés à coté les uns des autres les renseignements que l'on dé- sirait obtenir et il n'y aura plus qu'à compter le nombre des pe- tites cases venues en noir sur le papier sensible, jusqu'à la der- nière visible (fig. i). On aura ainsi des chiffres qui donneront tous les éléments d'une courbe. C'est ce que nous avons fait et nos premiers essais ont porté sur Lyon (igo"" d'altitude) et Ambert (Puy-de-Dôme) à .55o mètres. Nous avons nous-mème choisi l'emplacement de nos ins- truments qui sont orientés en plein nord, inclinés à !\ô° sur l'ho- rizontale, regardant les nuées, et protégés latéralement contre les rayons obliques du soleil levant et du soleil couchant. L'édifice contre lequel ils sont 2)lacés les garantit du soleil aux autres heures de la journée. La courbe que nous avons NOGIER. — l'intensité ACTINIQUE DE LA LUMIÈRE ET l'aLTITUDE 4^7 tracée à l'aide des résultats obtenus montre nettement que, d'une façon constante, pendant deux mois, le rayonnement actinique a été plus élevé à l'altitude de 55o mètres qu'à l'altitude de 190 mètres (fig- 2). Pour éviter toute cause d'erreur, nous nous sommes entouré de toutes les précautions possibles : 1° D'abord les insti-uments ont été placés rigoureusement au nord et inclinés de la môme manière ; 2° Ils ont été exposés en plein air. En effet, des essais nous ont montré (ainsi que l'indique l'épreuve photographique ci-jointe) qu'un ciel ouvert muni de vitres de 4""" d'épaisseur arrête presque la moitié des rayons chimiques ; 3° Les insti'uments ont été comparés à Lyon pendant une semaine pour s'assurer que les chiffres fournis étaient bien identiques lors- qu'ils se trouvaient dans les mêmes conditions ; 4° Le papier photographique employé dans les deux stations a toujours été de la même marque (Lumière et fils). Il a été pris dans la même pochette et les deux feuilles 9 X 12 employées à Lyon et à Ambert, pendant une même semaine, provenaient d'une feuille i3 X i^ divisée en deux. 5° De petits points, opaques pour la lumière, tracés sur les degrés de l'appareil ont permis de mieux juger, par contraste, de la dernière division atteinte et ont servi à augmenter la sensibilité du procédé. Il nous est donc permis de conclure , en attendant les recherches que nous allons poursuivre dans des stations alpestres , que l'inten- sité des rayons chimiques de la lumière croit à mesure que l'on s'élève. Cette conclusion, basée sur l'expérimentation, vient exjjli- quer la facilité avec laquelle on prend une insolation en montagne et met en relief l'importance de la cure d'altitude lorsque, malade, on veut s'abreuver aux sources de la vie : l'air pur et la vivifiante lumière. af 4l8 PHYSIQUE MM. H. BORDIER et BRIDON à Lyon PHÉNOMÈNES DE FLUORESCENCE D'ORIGINE MÉCANIQUE [535.37] — Séance du lo août — Avant de décrire les phénomènes que nous avons découverts, il est utile de bien préciser ce que l'on entend par fluorescence d'un corps. La fluorescence, d'une façon générale, est le phénomène lumineux dont un corps est le siège pendant que ce corps est excité par des radiations de longueur d'onde plus petite que celles qu'il émet pen- dant l'excitation. La fluorescence se distingue de la phosphorescence par ce fait que l'émission de lumière i^ar le corps phosphorescent dure après l'excitation. Une solution de fluorescéine est fluorescente tant que celle-ci est soumise à l'action des radiations bleues ou violettes. Dès que les radia- tions excitantes cessent d'agir, la fluorescence s'éteint. Le sulfure de baryum devient phosphorescent lorsqu'il a été soumis à l'action de rayons actiniques et la phosphorescence persiste un certain temps après l'excitation. Mais on doit prendre la définition de la fluorescence dans un sens plus large et plus général. Le phénomène de fluorescence peut être observé avec des excitants autres que la lumière. Au nombre des excitations susceptibles de produire la fluorescence, nous plaçons, en outre de l'excitation lumineuse : i° l'excitation électrique, 2° l'excita- tion mécanique ; 3° l'excitation chimique; 4" l'excitation calorifique. Tous les phénomènes de fluorescence que l'on peut observer rentrent dans l'une ou l'autre des cinq catégories précédentes. Les phénomènes qui vont être décrits sont des phénomènes de fluorescence consécutive à ime excitation mécanique, c'est-à-dire des phénomènes de fluorescence résultant de la transformation de l'énergie mécanique en énergie lumineuse. Les phénomènes qui vont être décrits sont d'ailleurs du même ordre que ceux observés sur le sucre de canne soumis à une action mécanique. (Pulvérisation, écra- sement, trituration, etc.) H. BORDIER & BRIDON. — PHÉXOMÈXES DE FLUORESCENCE 4^9 Nous avons été mis sur la voie de cette étude par l'observation faite sur du valérianate de quinine que nous pulvérisions au moment où le jour commençait à baisser. Pendant que nous écrasions au mortier les petits cristaux de valérianate de quinine, nous avons aperçu sous le pilon des traces lumineuses , peu visibles à cause de l'éclairement encore trop grand de la pièce. Mais, nous étant trans- portés dans un local complètement obscur, nous nous sommes rendu compte de la grande netteté du phénomène. Nous avons pensé dé suite que le valérianate de quinine n'était pas le seul corps à jouir de celte propriété et, nous rappelant que le sulfate de quinine chauffé peut devenir lui aussi fluorescent (fluorescence calorifique), nous avons supposé qu'il devait y avoir une relation entre ces deux cas et que tous les sels de quinine devaient jouir de propriétés analogues. Nos recherches ont porté sur les autres sels de quinine et particuliè- rement sur les sels à acide organique (tannate, salicylate), mais nous n'avons i-ien observé. Les mêmes résultats négatifs furent fournis par les sels de l'acide valérianique (valérianate de zinc ou d'ammo- niaque). Parmi les autres alcaloïdes ou glucosides, nous n'avons pas non plus rencontré de corps donnant par excitation mécanique une émis- sion de rayons lumineux. Mais nous avons obtenu d'excellents résultats avec le salophène (éther salicylique de l'acétyl-paramidophénol). Ce sel, trituré dans un mortier, frappé dans une capsule avec un agitateur, ou même tout sinq)lement écrasé sur un papier glacé aA'ec une spatule métal- lique, donne une fluorescence très visible et qui permet d'apercevoir très nettement les parois de la capsule ou du mortier. En percutant rapidement avec l'extrémité d'un agitateur, on obtient une série de petites aigrettes violacées comparables par leur aspect aux décharges qui se produisent dans un tid^e de Crookes. Avec la phénacétine, on obtient aussi une fluorescence mais dont l'intensité ne peut pas être comparée à celle que donne le valérianate de quinine ou le salophène. Nos recherches ont été infructueuses avec un grand nombre de corps soumis à l'expérimentation et parmi lesquels nous [)Ouvons citer les amidophénols, le menthol, le thymol, le gaïacol, son carbo- nate et son phosphate, l'europhène, le citrophène, les phénols (résor- cine, hydroquinone, pyrocatéchine) ; les naphtols a et ,S, le salol, le hétol, la chloralose, la terpine, le tannigène, sulfonal, trional, exalgine , chloral , acétanilide , pyramidon , antipyrine , aspyrine , hypnal, etc. 420 PHYSIQUE Xoiis avons clone dû revenir aux eorps préeétlemment indiqués, et nous avons surtout étudié le salophène. puisque c'est lui qui donne la fluorescence la plus intense. Nous nous sommes demandé d'abord si les ravons émis pendant la fluorescence de cause mécanique sont capables d'impressionner la plaque photographique. A'oiei les résul- tats constatés : i*^ Les radiations émises pendant la fluorescence du salophène assissent sur une plaque photographique à la façon de la lumière solaire: en appliquant sur une capsule de porcelaine contenant le salophène une plaque photographique (gélatine en dessous) et en ménageant latéralement une ouverture pour le passage de l'agitateur qid devait produire l'excitation mécanique du salophène, nous avons obtenu, en développant, après i5 ou 20 minutes de pose, une image ti'ès nette de la capsule sur le cliché. 2" Les rayons ne traversent pas les lames métalliques: une pre- mière expérience faite avec un cache en aluminium a prouvé l'imper- méabilité de ce métal à ces radiations: une deuxième expérience,, cette fois avec une grille métallique à réseau peu serré, nous a donné sui' le cUché une image très nette de ce treillis. FiG. I. 3° Le papier et le bois sont opaques à ces rayons, 4 Le verre est transparent : une lame de verre appliquée sur la gélatine n'a pas laissé de traces sur le chché; c'est à peine si au développement on pouvait en distinguer les contours. Une autre preuve de la perméabilité du verre existe dans l'expérience sui- vante : nous avons pu impressionner une plaque photographique placée sous un petit cristaUisoir remplaçant la capsule des expé- riences précédentes. II. BORDIEll & BUIDON. — I'HÉXOMÈXES DE FLUORESCENCE 421 Des expériences analogues ont été faites avec le valérianate de quinine et nous ont conduits à des résultats identiques, quant à la nature des radiations lumineuses émises et quant à l'opacité ou la transparence des corps cités plus haut. Mais la pose avec le valé- rianate de quinine a dû être prolongée davantage à cause de la moins grande richesse en rayons chimiques. Quant à la phénacétine. son action est beaucoup plus faible; après 3o minutes de pose, nous n'avons obtenu au développement qu'une image à peine visible de la capsule. Pourquoi cette propriété est -elle dévolue à un petit nombre de corps seulement de constitution chimique si différente, tandis qu'elle n'appartient pas à d'autres offrant cependant avec les premiers de grandes analogies de constitution. Il doit y avoir probablement une relation entre le système cristaUin des corps et les propriétés optiques qui nous occupent. Quoi qu'il en soit, nous avons cherché à voir si l'écrasement complet des cristaux ne faisait pas disparaître la fluo- rescence mécanique. Si on triture longuement et vivement le salo- phène, les rayons lumineux, d'abord intenses, diminuent peu à peu d'intensité à mesure que l'état cristallin fait place à l'état pulvérulent, et, si l'on continue longtemps la porphyrisation pour avoir une poudre parfaitement ténue, on obtient un salophène inactif ne donnant lAns par action mécanique trace de fluorescence. Mais, si ce salophène inactif est traité par un dissolvant neutre approprié (alcool à 9.5"). ou mélange de deux parties d'alcool pour une déther, et si l'on fait avec ce dissolvant une solution saturée à chaud, de façon à obtenir par refroidissement une cristallisation, on constate, après avoir recueilli les cristaux et les avoir séchés, que ce salo]û\ène précédemment inactif ionit de nouveau des mêmes pro- priétés et est redevenu actif, c'est-à-dire qu'il devient fluorescent j)ar l'excitation mécanique. La même expérience réussit très bien avec le valérianate de quinine; la cristaUisation dans ce cas est plus pénible, mais elle est facilitée en employant l'alcool ou le chloroforme comme dissol- vant. L'identité est donc absolue entre ces phénomènes de fluorescence et ceux connus depuis fort longtemps qui se produisent lorsqu'on pulvérise du sucre. Nous avons pu, en elfet. obtenir avec le sucre de canne un sucre in actif en le pulvérisant, et cette pulvérisation n'a pas besoin d'être aussi parfaite que pour le salophène. On y parvient après lo minutes environ de trituration au mortier. En faisant cris- talliser ce sucre dans un dissolvant qui cette fois est leau. nous 422 PHYSIQUE avons obtenu un sucre donnant une fluorescence par excitation mécanique. Enfin, nous avons constaté que la lactose, sucre également en Qii JJ22 Qii donnait la même fluorescence que la saccharose. MM. BORDIER et BRIDON A Lyon SUR QUELQUES PHÉNOMÈNES DE FLUORESCENCE D'ORIGINE CHIMIQUE [535.37 — Séance du 10 août — Nous avons déjà fait connaître (Bulletin de la Société de Phaiina- cie de Lyon, février i9o3) quelques phénomènes de fluorescence provoqués par l'excitation mécanique et ol^servés sur des produits pharmaceutiques. Nous avons montré qu'il existait d'autres phéno- mènes ne différant des premiers que par leur mode d'excitation et, qu'en particulier, l'excitation chimique était capable de produire la fluorescence ; ce sont les résultats de nos recherches sur ce derniei- point que nous allons indiquer dans cette note. De tous les composés minéraux ou organiques, les huiles essen- tielles j)araissent être les corps qui se prêtent le mieux à la réalisa- tion des phénomènes de fluorescence d'origine chimique. Celle-ci, découverte il y a quelques années par INl. Duljois (*). professeur de Physiologie à la Faculté des Sciences de Lyon, méritait d'être étu- diée, car son étude est susceptible d'applications intéressantes au j)oint de vue pharmaceutique. On peut encore rapprocher des essences, comme donnant des réactions analogues, d'autres corps qui n'ont, avec les huiles essen- tielles, aucune analogie d'origine ou de constitution chimique; telle est l'esculine. Ces expériences reposent sur le i^rincipe suivant : si l'on fait agir sur une essence un agent d'hydratation (nous verrons plus loin auquel il faut donner la préférence), il se produit un phénomène lumineux {') C. R. Académie des Sciences igoi, p. 43i-432. H. BORDIEU & BRIDOX. — PHÉNOMÈNES DE FLUORESCENCE CHIMIQUE 423 dont la durée et lintensité varient avec l'essence employée et aussi avec la i^lus ou moins grande x^ureté de l'essence. Si on mesure ces éléments, durée et intensité, on peut en déduire des noml^res précieux pour la recherche des falsifications de quekpies huiles essentielles. La durée est facile à déterminer. La mesure de lintensité ^Drésente quekpies difficultés. On peut néanmoins y parve- nir en cherchant quelle est l'épaisseur d'un liquide absorbant (solu- tion de bichromate de potasse ou de sulfate de cuivre ammoniacal) capable de l'éteindre , ou bien encore en employant deux prismes de verre fumé à angle au sommet, très aigu et ghssant l'un sur l'autre, de façon à obtenir une épaisseur variable de la lame absorbante. Enfin , il est encore une autre caractéristique de ces phénomènes de fluorescence et d'où l'on pourrait peut-être tirer des indications inté- ressantes , mais qu'il est fort difficile d'utiliser à cause de la trop faible intensité de la source lumineuse ; nous voulons parler de l'exa- men spectroscopique. Les agents chimiques donnant avec les essences des réactions pro- duisant la fluorescence sont les alcalis caustiques. Le meilleur réac- tif consiste en une solution saturée à froid dans l'alcool de potasse caustique aussi pure que possible (en pastilles ou en cyhndres). L'alcool à 95" donne de bons résultats, mais il est préférable d'em- ployer l'alcool absolu. La solution aqueuse de potasse doit être rejetée, de même que la lessive de soude, la solution alcoolique de soude ne donne aucun résultat. Enfin, avec l'alcoolate de barji^e, on obtient des résultats satisfaisants avec quelques essences, mauvais avec beaucoup d'autres. Nous avons donc adopté comme réactif une solution saturée de potasse caustique dans l'alcool. Il est nécessaire de ne lu'éparer la solution que par petites quantités, afin de l'avoir toujours récente et de la rejeter dès qu'elle prend une teinte brunâtre. Technique à emploj'ev. — 2 ou 3"™' de réactif sont versés dans un tube à essai et chaufl"és rapidement dans la flamme d'un bec de Bunsen ; on laisse alors tomber dans le tube trois ou quatre gouttes d'essence, en évitant de les faire couler contre les parois; on agite rapidement et on examine dans l'obscurité ; quelquefois immédiate- ment , le plus souvent après quelques secondes , on observe un phé- nomène lumineux qui s'accentue beaucoup par agitation à l'air. Pour bien observer , il convient de prendre les précautions suivantes : ne pas passer du grand jour dans la chambre noire pour y faire une observation, mais séjourner longtemps (20 minutes au moins) dans une salle peu éclairée (avec une source lumineuse dont l'intensité ne dépasse pas celle d'une bougie) ; cet éclairage est suffisant pour eflec- 424 . PHYSIQUE tuer les manipulations, après quoi il faut éteindre et observer clans l'obscurité la plus complète. Pour des déterminations plus précises et pour arriver à des résul- tats numériques , nous avons effectué nos recherches sur des quan- tités toujours identiques d'essence et de réactif. Nous avons adopté 2 ce. de solution potassique et cinq gouttes d'essence. Pour ces déter- minations, le dispositif a dû être quelque peu modifié : un brûleur de Bunsen est entouré de toutes parts de carton d'amiante, de façon à à ce que la flamme chauffante ne projette aucune clarté. Au-dessus, une capsule de 5oo<""^ environ sert de bain-marie à une autre capsule de 30*^™^ , contenant l'essence et le réactif. Dans l'eau du bain-marie plonge un thermomètre. On allume le brûleur de Bunsen et on place dans la capsule intérieure le volume exactement mesuré de réactif et les cinq gouttes d'essence. On dépose cette petite capsule sur l'eau où elle flotte et, le chronomètre à la main, on examine le moment où apparaît la fluorescence. Au moment précis où l'on voit le fond de la capsule s'illuminer, on met le chronomètre en marche, puis on éteint le bec Bunsen, on arrête le chronomètre au moment où le liquide de la capsule cesse d'être visible. Pour corriger dans la mesure du pos- sible les causes d'erreur attachées à cette méthode, nous avons pris les précautions suivantes : 1° On a placé dans le bain-marie, à côté de la capsule contenant les substances, une autre capsule semblable mais vide, de façon à mieux saisir le moment précis où apparaît la fluorescence ; 2° On a répété 2 ou 3 fois les mêmes déterminations et l'on a pris la moyenne des résultats trouvés. Ces déteiuninations ne sont pas sans difliculté. La fluorescence n'apparaît jias brusquement, de même qu'elle ne disparaît pas tout d'un coup. Mais avec une certaine habitude on arrive néanmoins à des résultats comparables. Quelques essences brillent à la température ordinaire avec la potasse alcoolique. Nous pouvons citer comme appartenant à ce groupe les essences de badiane et de romarin. Mais la température optima paraît être vers 3o° — 35°. Il n'y a presque pas d'essences qui ne donnent au-dessous de 40" un phénomène lumineux jilus ou moins visible. Mais l'intensité va en général en augmentant avec la tenqjé- rature et atteint son maximum vers 89° — 90° environ. Mais, si à cette température l'intensité est maxima, la durée est loin d'atteindre celle que l'on observe à la température où elle apparaît (3o" — 3.')''). Il n'est pas possible d'attribuer cette différence à la volatilisation jjIus ra])ide à cette température de l'iiuile essentielle, car les essences forment, avec la solution alcoolique de potasse, un liquide homogène H. BORDIER & BRIDOX. PHÉNOMÈNES DE FLUORESCENCE CHIMIQUE ^10 peu volatil. Du reste, nous avons pu répéter avec de l'essence de térébenthine, dans un petit ballon muni d'un réfrigérant ascendant, des déterminations analogues qui nous ont amenés à des conclusions identiques. Quant à Tesculine (glucoside du maronnier d'Inde : Esculus bypocastanum), c'est elle qui nous a fourni les plus beaux résultats : une trace d'esculine dans i ou S*"™^ de réactif nous a donné , à froid , une fluorescence durant dix-huit heures. Pour éviter les erreurs de pesées, nous avons eu recours à une solution alcoolique titrée d'esculine à i o/oo (dont i ce. = i milligramme) et nous avons obtenu des résultats très nets avec 2 milligranmies d'esculine. Enfin, les variations de température n'influent pas sur cette fluorescence — elle se produit à froid aussi bien qu'à l'ébidlition — et nous l'avons même obtenue au sein d'un mélange réfrigérant à la tempé- rature de — 15°. ÉTUDE DES DIFFÉRENTES ESSENCES Parmi les essences donnant la réaction , nous pouvons distinguer deux grands groupes : les Essences des Labiées et les Essences des Rutacées. Essences des Labiées. — Cette famille est particulièrement riche en plantes à essences, et ces essences deviennent presque toutes fluorescentes. Au premier rang se place l'Essence de Romarin. Même très récente, cette essence donne en solution alcoolico-potassique une lluorescence dont la durée atteint quatre minutes. Cette durée et cette intensité sont consi- dérablement augmentées si l'on emploie une essence anciemie et résini- fiée; elle peut durer alors jusqu'à sept minutes ^t la nuorescence produite peut égaler en intensité celle de f esculine. L'Essence de T1\rm donne des résultais analogues, moins durables; cependant, puisque, avec des essences plus ou moins anciemies, nous avons obtenu des résultats variant entre deux et trois minutes; le temps paraît exercer sur l'essence de Tliyin une action moins profonde que sur l'essence de Roniarm. L'Essence de Lavande véritable donne une belle réaction, mais dont la durée ne dépasse pas une minute à une minute et demie, tandis qu'avec l'Essence d'Aspic cette réaction peut être observée pendant dix minutes. Si l'on additionne l'essence de Lavande d'une quantité de 20, 40, 60, 80 0/0 d'essence d'As{)ic, on obtient comme durée des nombres cjui viemient s'échelonner entre une mmute et 10 minutes. Il serait sans doute exagéré d'en conclure qu'il y a proportionnalité entre la durée de la fluorescence et la quantité d'essence d'Aspic que j)eut contenir ime essence de Lavande. Mais ce qui est incontestable, c'est que ces deux facteurs varient dans le même sens et, s'il n'y a pas possibilité de déter- imner rigoureusement les proportions relatives d'essences de Lavandula Vera et de Lavandula Si)ica, il y a là un procédé rapide pour les distin- guer l'une de f autre. 426 PHYSIQUE Une relation analogfue, quoique moins accusée, a été trouvée parmi les essences de Menthe de diverses origines. Les essences de Menthe du commerce donnent une fluorescence bien nette , tandis que les essences anglaises ne donnent qu'mie réaction faible et fugitive. Essences des Rutacées. — L'Essence de Citron donne une belle réac- tion dont la durée peut attendre trois à quatre minutes. Elle est mieux accusée avec l'essence résinillée. L'essence de Citron par expression paraît domier une plus belle réaction que l'essence par distillation. De plus, la durée est généralement supérieure avec la première. Il paraît donc y avoir là un moyen de reconnaître le jn-océdé d'extraction d'une essence de Citron. Ce procédé serait facilement applicable si l'on opérait sur des essences récentes, mais avec les essences anciemies la réaction se complique et il n'est guère possUîle de les caractériser. L'Essence de Xéroly est, ajjrès l'essence de Romarin, celle qui nous a fourni, avec la potasse alcoolique, le phénomène lumineux le plus durable en même temps que le plus intense. On n'observe rien à froid, mais seulement à une température un i)eu élevée (60 à 65°). Des détermi- nations faites avec des essences diverses (de Paris, du Midi, récentes, résiniliées) nous ont fourni des résultats presque identi(iues. Entln nous avons pu reproduire avec une essence de Néroly, dite Essence Synthétiqne trouvée dans le commerce, une réaction analogue. Si l'on rapproche de ce fait cet autre que nous n'avons i^as pu réaliser la réaction avec aucun corps synthétique ou mélange de corps synthé- tiques voisins des essences (salicylate de Méthyle gaïacol), nous sommes en présence d'une anomalie et nous avons pensé de suite que certains fabricants d'essences synthétiques, pour donner à leurs produits les parfums caractéiùstiques de la plante, parfums auxquels on parvient rarement par la sAiithèse, ajoutent aux essences qu'ils obtiennent artifi- ciellement une petite quantité d'essence naturelle. Dans le cas qui nous occupe, une petite quantité d'essence de Néroly, ajoutée à un produit synthétique, suffît à lui domier les propriétés citées plus haut. En résumé, nous pouvons considérer dans les essences de la famille des rutacées deux groupes bien distincts. Le premier groupe comprend des essences ne donnant pas la réaction ou ne donnant qu'une réaction vague et fugitive et qu'il est souvent impossible d'ol)tenir sans avoir recours à des artifices spé- ciaux (dilution de la solution alcoolique de potasse , élévation de la température jusqu'à ébullition) ; c'est à ce groupe qu'appartiennent les essences de Portugal et de Cédrat. Un second groupe d'essences de cette famille donne au contraire des réactions très nettes et durables. A ce groupe appartiennent les essences de citron et de Néroly. Parmi les autres essences, nous pouvons citer, comme donnant une belle fluorescence en solution alcoolico-potassique : les essences d'.4./n'.s vert, assez durable mais peu intense; de Badiane (Illicium H. BOUDIER & BRIDOX. — PHÉXOJMÈNES DE FLUORESCEXCE CHIMIQUE 4^7 anisatuin, I. religiosum, I. parviflorum), plus nette que la précédente mais moins durable; de Genièvre et de Géranium rosa, bien nettes surtout avec les essences résinifiées. Les essences de santal, de sassafras, de cèdre, de cajeput donnent des réactions fugitives mais incontestables. Enfin, Y Essence de Térébenthine est, de toutes les essences, celle qui montre le mieux l'influence du temps. L'essence récente donne à peine la réaction, mais, au fur et à mesure que cette essence se rési- nifie , la fluorescence devient de plus en plus nette , pour atteindre avec les essences très anciennes le degré de netteté et la durée que nous avons obtenus avec l'essence de romarin ou l'essence de Néroly. Cette propriété n'est pas la seule modifiée par le vieillisse- ment de l'essence de térébenthine (phénomène auquel, sans trop savoir pourquoi, on donnait autrefois le nom d'ozonisation). Il est parfaitement démontré aujourd'hui que l'ozone ne joue aucun rôle dans cette transformation, puisqu'une essence récente saturée artifi- ciellement d'ozone ne jouit pas des propriétés de l'essence vieillie (réaction du sang avec la teintui'e de gaïac et l'essence de térében- thine résinifiée) A côté de l'essence de térébenthine, il convient de citer la Téréhène qui, cependant, n'est pas une huile essentielle et qui donne une magnifique réaction. Enfin, il existe des essences pour lesquelles la réaction est néga- tive , quelle que soit la température à laquelle on opère , quelle que soit la dilution de la solution potassique , quel que soit enfin l'agent d'hydratation employé. Gomme essence appartenant à ce groupe, nous citerons les essences de cannelle de Chine , cannelle de Ceylan et Wintergreen. CONSÉQUENCES PRATIQUES DE CETTE ÉTUDE Quoi qu'il en soit, ces observations peuvent rendre des services au point de vue de l'essai des essences et de la recherche de leurs falsi- fications. Ce procédé n'offre pas évidemment les garanties que l'on peut demander à la détermination des constantes physiques ou chimiques des essences suspectes. Mais la méthode que nous venons d'exposer offre un incontestable avantage, c'est d'exiger une quantité insignifiante de substance, puisque deux ou trois gouttes suffisent généralement, avantage qui n'est pas à négliger pour les essences d'un prix élevé (rose, camomille). Ce procédé permet également de se rendre compte du plus ou moins grand degré de i)ureté des. 428 PHYSIQUE essences employées à la préparation des capsules médicamenteuses (santal, térébenthine). Le contenu d'une seule capsule suffit. On obtient une fluorescence fugitive avec une capsule récente, tandis qu'avec une capsule ancienne ou préparée avec une essence résini- fiée. la réaction est très nette. De même, l'essence de cèdre donne une réaction beaucoup plus nette que l'essence de santal, et cette remarque peut servir à reconnaître la substitution de l'une à l'autre dans la préparation des capsules médicamenteuses. M. K DEVILLE Ancien élève de l'École Polytechnique, Vice-Président de la Société protectrice de la vie humaine, à Paris INCENDIES A BORD DES NAVIRES [6i4.84:359l — Séance du 10 août — Les statistiques du bureau Veritas permettent de constater une très inquiétante fréquence des incendies à bord, mais elles ne donnent aucun renseignement sur les causes qui les ont provoquées, ni sur les moyens qui ont pu être employés pour combattre le feu. Les pertes qui en résultent chaque année, soit pour les Compagnies d'assurances, soit pour les armateurs, sont très considérables. Il a paru intéressant de rechercher quelles pouvaient être les causes variables et fréquentes de cette terrible catastrophe qu'est le feu en mer et d'étudier les moyens de le combattre le plus elïicace- ment possible. CAUSES DES INCENDIES A BORD Le danger d'incendie à bord varie naturellement avec le mode de construction des navires et surtout avec la nature de la cargaison. Les cargaisons les plus dangereuses sont évidemment celles qui comprennent des liquides susceptibles d'émettre des vapeurs facile- ment inflammables, tels que le pétrole, l'alcool, etc. La moindre imprudence peut alors amener une catastrophe susceptible de s'étendre et de prendre des proportions particulièrement épouvan- tables, comme celles qui se sont produites au Havre et à Marseille, U. DEVILLE. — INCENDIES A BORD DES NAVIRES 4^9 et dont la dernière date du mois de décembre iQoS. On peut citer encore le cas dun navire pétrolier qui prit feu dans le Canal de Suez, il y a quelques années. On eut tout juste le temps de le con- duire dans un des lacs et, pendant plusieurs jours, on eut la crainte terrible de voir le pétrole cnilammé se répandre jusque clans le canal lui-même. Aux causes ordinaires d'incendie résultant d'imprudences dans le maniement des appareils d'éclairage, d'accidents dans les chau- dières, etc., il faut ajouter l'écliauftement de certaines substances entrant dans la composition du chargement et qui est susceptible de donner naissance à des combustions spontanées. L'échauffement de la cargaison a été constaté dans des cas nom- breux et variés. Par exemple : Le navire hollandais Sala, où le feu prit dans une cargaison de tabac probablement humide au moment de l'embarquement; Le navire Main, de la Norddeutscher Lloyd, où le feu prit dans un chargement de coton ; L'Ama Begonakoa, navire espagnol, chargement de charbon ; L'Aberloiiv, navire anglais, chargement de pondre d'os qui s'échauffa assez pour donner de sérieuses craintes d'incendie ; "Le Kawachi-Maru , japonais, chargement d'huile de coco et de soie. Certains grains, mis en sacs mouillés ou humides, \&s foins com- primés, sont susceptibles, dans certaines conditions, de fermenter, de s'échauffer et même de prendre feu spontanément. Charbons. — Le transport des charbons par mer, en grande quan- tité et à grande distance présente des dangers extrêmement sérieux. Le danger varie naturellement avec les espèces de charbons ; parmi les plus dangereux, on peut citer les charbons écossais que le com- merce local avait depuis nombre d'années renoncé à exporter à de grandes distances. Il résulte d'une étude très documentée présentée par le comman- dant W. -F. Caborne, en novembre 1901 , au Royal United Service Institution, que le danger augmente avec la quantité transportée. Les accidents, qui sont dans la proportion de i 0/0 pour les cargai- sons ne dépassant pas i.ooo tonnes, s'élèvent à 9 0/0 pour celles qui dépassent 2.000 tonnes, en suivant une j)i"ogression croissante. C'est là un résultat glol^al ; naturellement le nombre des cas , pour chaque espèce, varie avec la nature du charbon et son mode d'arrimage. Le danger augmente avec la hauteur du chargement; l'écrasement 436 PHYSIQUE des couches inférieures est en effet susceptible de produire un déga- gement de clialeur. Aussi certains armateurs anglais exigent-ils l'in- troduction, dans les contrats, d'une clause restrictive de la hauteur du chargement. D'après le même auteur, les causes de la combustion spontanée sont les suivantes : Le chai'bon absorbe l'oxygène de l'air, d'où combustion lente et développement de chaleur, élévation de température et absorption plus considérable d'oxygène. Donc, pour qu'il y ait combustion spon- tanée il faut : 1° Alimentation suffisante en oxygène; 2° Conservation de la chaleur dégagée. Pour abaisser la température, on est conduit à çentiler les cargai- sons, mais juste assez pour abaisser la température sans trop donner d'oxygène. C'est là vuie opération délicate et, pour en déterminer l'intensité, il faut tenir toujours compte de la nature des charbons Naturellement, l'absorption de l'oxygène est proportionnelle aux sui'faces en contact avec l'air; donc, toutes choses égales d'ailleurs, le chai'bon en petits morceaux absorbe plus d'oxygène que le char- bon en gros morceaux. Mais, d'autre part, plus il est petit, plus il se tasse et moins l'air circule facilement. La conclusion de cette étude est c|ue le charbon le moins dangereux à transporter, c'est le gros avec du poussier. On supposait autrefois que l'oxydation des pyrites était la cause primitive des combustions spontanées; il est reconnu aujourd'hui qu'elles ne sont pas une cause chimique, mais seulement mécanique. En effet, lorsqu'un charbon pyriteux est humide, les pyrites s'oxydent, ce cjui occasionne le cassage du charbon et le rend plus apte à une combustion spontanée, en augmentant la surface susceptible d'absor- ber de l'oxygène. Il résulte d'ailleurs d'expériences méthodic[ucs , faites en Angle- terre et en Australie, que, toutes choses étant égales d'ailleurs, le charbon humide est moins sujet à la combustion spontanée que le charbon sec. L'ordre dans lequel les charbons ont le plus de tendance à s'en- flammer est, d'après leur espèce, le suivant : I" Lignite; 2° houille; 3° coke; 4' anthracite. Enfin, le danger augmente avec la tenq>ératurc du charbon au moment où l'on opère le chargement et celle qui existe dans le com- partiment où on l'introduit. La commission estime que, pour les grands navires dans lesquels R. DEVILLE. — INCENDIES A 150UD DES NAVIRES 4^1 la hauteur, du charbon est considérable, le ch.irgement devrait être interdit toutes les fois que la température s'élève au-delà de Se* Fahrenheit à l'ombre, ou iio au soleil. PROCEDES POUR COMBATTRE LES INCENDIES Le premier procédé qui vient à l'idée est l'emploi de l'eau. Eau. — Malheureusement, ce procédé est absolument illusoire. Avant de commencer à combattre l'incendie dans une cargaison , il faut tout d'abord trouver le foyer de cet incendie, ce qui est une grande difliculté dans les grands vaisseaux transportant une cargai- son importante et qui sont fractionnés en compartiments. Une odeur de brûlé, suivie peut-être d'une fumée significative, se dégageant de quelque ventilateur, permet bien de reconnaître que le feu est dans telle ou telle cale; mais, comment découvrir dans cette cale, bourrée de marchandises, l'emplacement exact du feu. Il peut être loin de l'endroit par où la fumée s'échappe. Si on ouvre les écoutilles, farrivée de l'air active le feu. n n'y a qu'une chose à tenter, tenir tout fermé et inonder la cale ; car, si par un heureux hasard, le feu ne se trouve pas au fond et près de l'endroit où l'eau est amenée, il faut pomper jusqu'à ce qu'elle arrive au niveau du feu. Alors, si celui-ci est en haut, il peut se faire que, sous l'énorme pression de l'eau, la cloison ou le fond cèdent, et c'est alors la perte probable du navire. C'est en tout cas la perte de toute la partie de la cargaison susceptil)le d'être détério- rée par l'eau et qui se trouvait dans la ou les cales inondées. Un incendie se produit-il sur le navire lorsqu'il est au port? c'est encore au même procédé qu'on a généralement recours ; les moyens, d'ailleurs, sont un peu plus grands, mais, comme exemple des résul- tats qu'on peut attendre, il suffit de citer le cas de la Toiivaine, incendiée dans le port du Havre au mois de janvier 1903. Il fallut 7 heures pour éteindre l'incendie, et les dégâts commis par le feu et par l'eau furent évalués à 2.000.000 de francs. Et cependant , on avait pu mettre en œuvre des moyens extrême- ment puissants, dont on ne dispose d'ailleurs que dans un grand port et qui peuvent même faire au moins partiellement défaut en cas de gelée. Vapeur. — Depuis quelques années, on a appliqué à certains navires un nouveau dispositif d'extinction par la vapeur. Un système de tuyautage à demeure permet de prendre la vapeur 432 PHYSIQUE dans la chaudière et de la lancer à volonté dans telle ou telle cale. Ce système, qui donne quelques résultats, a été imposé dans certains pays, à tous les navires emportant des passagers. (Aux Etats-Unis, en Italie, les navires de toutes nationalités ne sont autorisés à prendre des passagers que s'ils sont munis de ce dispositif; en France, il n'est imposé qu'aux navires français.) Mais le feu peut couver longtemps sans être éteint par ce pro- cédé; la prise de vapeur pour l'extinction est susceptible de ralentir considérablement la marche du navire et il faut l'interrompre de temps en temps. Quoiqu'il en soit, le procédé d'extinction par la vapeur, plus pra- tique que celui d'extinction par l'eau, ne donne pas une sécurité com- plète et il n'est pas sans inconvénients, puisqu'il ralentit la marche du navire et que, d'autre part, il est susceptible d'avarier les mar- chandises détéi'iorables par l'eau. Gaz extincteur. — Depuis quelques années, on s'est beaucoup préoccupé, en Angleterre et en Amérique, de la recherche d'un moyen scientifique d'éteindre les incendies à bord. Le fractionnement en cloisons étanches est un dispositif qui facilite la création , dans la cale où le feu couve , d'une atmosphère extinc- trice. C'est dans cette voie que doivent se diriger les recherches : elles se limitent tout naturellement, à l'examen des conditions dans lesquelles peuvent être employés deux gaz dont les propriétés extinc- trices sont bien connues : Y anhj'dride carbonique et Y anhj'dride sulfureux. En ce qui concerne le premier de ces gaz , les essais faits sont peu nombreux. Tout récemment. l'Internationale Fire Engine C" d'Elmira (New- York) a construit un engin automoteur de grande puissance, qui, d'après ses constructeurs . a une efficacité 20 fois supérieure à celle d'une pompe à incendie ordinaire (*). On peut aussi songer à l'emploi de l'anhydride carbonique liquide, mais il serait matériellement impossible à un navire d'emporter un chargement suffisant des nondjreux cylindres spéciaux qui lui seraient nécessaires en cas d'incendie, et qui constituent de véri- tables obus, encombrants et lourds. En outre, il lui serait difficile de renouveler son approvisionne- ment dans la majeure partie des ports. D'autre part, le procédé (*) La Nature, du n jiiillot ii)o3. R. DEVILLE. — INCENDIES A BORD DES NAVIRES 433 serait très coûteux en raison du prix élevé de cet approvisionne- ment. Il faut, en efTet. un pourcentage de i6 o/o d'anhydride carbo- nique pour obtenir l'extinction; enfin, le gaz peut se répandre dans les cales et y séjourner sans que rien décèle sa présence, ce qui peut être dangereux pour l'équipage. Le gaz, sulfureux s'obtient à meilleur compte, le soufre étant une matière première d'un prix peu élevé; la présence de simples traces de ce gaz se décèle immédiatement par l'odeur, et il suffit d'une projiortion de 4^5 o/o pour obtenir l'effet d'extinction. Si donc on dispose d'un moyen pratique de le produire rapidement et de le lancer à volonté dans les cales, il semble, à priori, que l'on touche de bien près à la solution du problème. Ce moyen pratique est réalisé par l'appareil « Claj'ton », déjà employé pour la désinfection des navires par les services sanitaires maritimes Installé à bord d'une façon permanente , communiquant avec les diverses cales par un tuyautage installé à demeure, il permet de rem- plir rapidement de gaz sulfureux extincteur celle dans laquelle il se produit un échauffement dangereux ou un commencement d'incendie. Diverses expériences faites en 1908 en Angleterre, en Amérique €t en France, avec l'appareil Clayton, devant des Commissions officielles, ont pleinement établi l'efficacité du gaz qu'il produit pour prévenir et éteindre les incendies , dans les espaces clos et suffisam- ment étanches, même lorsqu'il s'agit des matières les plus inflam- mables. Les conclusions de ces expériences furent que la comljustion dans les locaux fermés, tels que les cales des navires, est impossible en présence du gaz sulfureux produit par l'appareil. La puissance de pénétration de ce gaz est très considérable ; peu importe la nature de la cargaison , que ce soit du charbon , du coton , du jute , de la laine, du foin ou toutes autres matières inflammables, la source du feu est atteinte, même si elle se trouve au miUeu d'une balle de coton comprimé. Le gaz produit par l'appareil Clayton n'a aucune action nocive sur les marchandises de toutes sortes telles que thé, café, vanille, biscuit, grains, matières alimentaires diverses , tissus imprimés aux nuances les plus délicates et métaux variés. Il semble donc que, dans l'emploi de cet appareil, se trouve la solution scientifique du problème de la prévention et de l'extinction des incendies à bord, sans danger d'altérat'ondes marchandises non ■atteintes par le feu. 2^* 434 PHYSIQUE CONCLUSION Il est actuellement assez difficile d'avoir des renseignements très complets sm* les accidents du feu qui se sont produits à bord des navires, sur leurs causes reconnues ou probables, ainsi que sur les pertes qu'ils ont occasionnées , et enfin sur les moyens qui ont été employés pour les combattre. Il serait à désirer que tous ces renseignements fussent méthodi- quement réunis et publiés avec commentaires , sinon par l'initiative privée, au moins par les services publics; ce serait la seule manière de rendre profitable à tous l'expérience acquise, par quelques-uns, à leur propre détriment, et d'éviter que le même cas ne se produise en mer, nombre de fois. C'est ainsi qu'il serait bon de mettre en évidence que les dangers d'incendie ne vont pas en diminuant avec les progrès de l'industrie, pour bien des raisons, parmi lesquelles on peut donner comme exemple les suivantes , qui sont déduites de l'examen critique d'un ffrand nombre d'accidents survenus dans ces dernières années : 1° Le transport des produits frigorifiés olfre un réel danger par suite de l'emploi de charbon de bois placé en couches espacées : ce produit est particulièrement apte à entrer en combustion et, une fois allumé, est très difficile à éteindre; 2° Par suite de la nécessité de faire rapidement les expéditions, on a souvent recours à un empaquetage incomplet et insuffisant des marchandises susceptibles de donner lieu à des comljustions sponta- nées (laine, coton, par exemple). 3° La vaste étendue et la profondeur des cales des vaisseaux modernes présentent matériellement de grands risques, spécialement dans le cas de cargaisons en vracs (charbons). Ces conditions ne permettent pas de localiser un incendie dans une cargaison et par conséquent empêchent de prendre les mesures nécessaires dès ses premières manifestations . Il y aurait également tout intérêt à ce que le pul^lic maritime français fût exactement tenu au courant des efforts faits par les Com- pagnies étrangères pour assurer la sécurité des passagers et amé- liorer les conditions du trafic maritime, en diminuant les dangers d'incendie , soit par les précautions prises, soit par l'installation à bord d'appareils extincteurs. ANDRÉ BROGA & TURCHIiM. — COURANTS DE HAUTE FRÉQUENCE ^35 M. André BROCA Agrégé à la Faculté de Médecine de Paris ET M. TURCHINI Préparateur à la Faculté de Médecine de Paris MESURE DES COURANTS DE HAUTE FRËQUENCE [538.56] — Séance du lo août — Le seul procédé employé jusqu'ici pour la mesure du courant à haute fréquence a été celui des galvanomètres thermiques. Ceux-ci ont, en effet, deux avantages : i° Ils sont à peu près indifférents aux forces électrostatiques considérables qui ne peuvent être évitées quand on met un appareil quelconque à équipage mobile en commu- nication avec un des pôles d'une bol^ine de Ruhmkorff; 2° Ils pré- sentent une self-induction aussi faible que possible et une faible capacité. Gomme ils sont réduits à un seul fil, le courant y passe forcément. Mais, à côté de ces avantages, ils ont un inconvénient grave, c'est que leurs indications dépendent de la période des oscillations. On sait, en effet, que la résistance d'un conducteur n'est pas une cons- tante absolue, "à cause de la répétition des courants de haute fré- quence à sa surface. Le rapport de la résistance en courant continu à la résistance en haute fréquence a été calculé par Lord Rayleigh et Lord Kelvin et on voit que ce rapport est d'autant plus voisin de l'unité que le fil est plus fin, que sa résistivité est plus grande et que sa perméabilité magnétique est plus voisine de i. On a donc cru faire de bons instruments avec des fils très fins et très résistants. Mais les alliages qui les constituent contiennent du fer ou du nickel et, malgré tout, les indications de ces instruments ne sont pas fidèles ; nous le montrerons dans un travail plus étendu. Nous avons cherché à établir un instrument à l'abri de ces reproches, pouvant servir à étalonner les instruments pratiques et 436 PHYSIQUE FiG. I. aussi à étudier théoriquement les propriétés des conducteurs rela- tives aux courants de haute fréquence. Nous sommes arrivés à la solution du problème de la façon suivante : Une lame d'aluminium de 3o microns d'épaisseur, de i"^ de large et de 60" de long est encastrée verticalement en A, et horizontalement en B (fig". i). Deux lames fixes CD, EF, sont de part et d'autre ; elles ont également i'' de large, et sont à i'' l'une de l'autre. Les connexions sont celles de la figure. Quand le courant passe en ABCDEF, la lame mobile est attirée par EB où le courant est de même sens et repoussée par CD. On pointe son déplacement au mi- croscope (*). Le calcul montre que, quand la distance des lames fixes tend vers o, la force agissante tend vers une limite finie, et qu'elle varie fort peu quand l'écartement varie notablement; on peut alors construire pra- tiquement l'appareil, sans nuire à sa sensibilité. Pour éviter les forces électrostatiques, l'appareil est dans un conducteur creux , les conducteurs du courant passant par des bou- chons isolants en a, ,5, y. En A, existe une communication métal- lique. Dans ces conditions, aucune déviation ne se produit quand on porte l'appareil à 3oooo ou 40000 volts. Au contraire, dès qu'un courant de haute fréquence se pi'oduit, il dévie. Cet appareil permet de mesurer une fonction simple de l'intensité maxima, de la période et de l'amortissement des ondes, et il est étalonnable en courant continu. Etudions dans quelles conditions on peut l'utiliser. Quant un courant continu le traverse , la lame AB est déviée d'abord électrodynamiquement, comme nous l'avons dit déjà, mais aussi par le champ terrestre. La force qui agit et par conséquent la déviation de la lame sont de la forme /"= Ni'^ -(- Mi. Il suffit de faire une deuxième observation en inversant le courant dans les lames fixes sans l'inverser dans la lame mobile poiu* avoir une deuxième équation /' = — N?"^ + Mi d'où/ — /' = a N/^ Nous opérons le (*) Il faut que la distance frontale du microscope soit très grande , car sans cela la lame ne serait pas au point dans toutes ses positions, à cause des imperfections de la direction du microscope, de la forme de la surface focale de celui-ci, et aussi à cause de l'attraction due à la masse de verre de l'ohjectif. Nous avons alors employé un objectif faible, placé sur une monture à crémaillère pour la mise au point, et un oculaire porté par uu support indépendant à 80= de robjeclif. A. BLONDEI.. — AUGMENTATION DE LA PUISSANCE DANS LES ANTENNES 4^7 renversement au moyen d'un appareil à bascule et à godet de mercure, facile à imaginer. Dans le cas des hautes fréquences, il peut y avoir une différence de potentiel de marche entre CDEF, et la lame mobile, assez grande pour donner lieu à une déviation électrostatique, car l'appareil ne peut jamais être exactement symétrique. La caractéristique de cette action est de ne jamais changer de sens, quelles que soient les con- nexions de l'appareil et le sens du courant. Elle ne dépend pas de l'intensité I et de l'impédance de jSy. Nous appellerons L le coelîi- cient qui s'y rapporte. D'ailleurs, si l'ondulation était assez amortie, elle pourrait donner lieu à une déviation magnétique par une somme d'impulsions balistiques. On distingue les deux effets l'un de l'autre, en opérant d'abord comme il a été dit ; puis, en inversant entre eux X et Y et recommençant les opérations, on a alors quatre équations : f, = m-' + MI + Lp /; = — NP + MI + LP /; = NP — MI + LI^ /, = — NI^ — MI + LI^ d'où /; — f, = a NI^ d'où /.+/.-/.-/. = 4 MI en appelant I l'intensité maxima du courant. Le facteur M s'est toujours montré négligeable dans nos expé- riences. M. A. BLONDEL Professeur à TEcole Nationale des Ponts et Chaussées, à Paris SUR L'AUGMENTATION DE LA PUISSANCE MISE EN JEU DANS LES ANTENNES DE TRANSMISSION — Séance du lo août Je me propose de faire connaître un dispositif que j'ai proposé, il y a plus d'un an, dans un pli cacheté déposé à l'Académie et auquel de récents essais faits à l'étranger donnent une certaine actualité. 438 PHYSIQUE a -o o- I'ItI'I'I e J'ai pensé à alimenter les oscillateurs, non plus par les bobines tle RulimkorlT, ni par des transformateurs à courants alternatifs (qui du reste paraissent donner des résultats inférieurs), mais par des courants continus à haute tension , fractionnés par un condensateur en shunt. Ce dispositif, très simple, est indiqué par la figure i, dans laquelle a est le déflagrateur, placé en série avec le primaii*e du Tesla/qui excite l'antenne g\ h est un condensateur shuntant la batterie à haute tension e, qui peut être remplacée par une dynamo du genre Thury. La difficulté résidait dans la suppression f%% de l'arc permanent qui tend à se produire à l'étincelle du déflagrateur. Dans ce but, il suffit d'employer, en outre des divers arti- ' fices connus (tels que refroidissement du dé- flagrateur, emploi de métaux anti-arcs), de grandes résistances ou impédances d en série entre la batterie et le circuit oscillant, de façon à réduire la vitesse de charge du con- densateur. Les meilleurs résultats s'obtien- □ nent avec des rhéostats d'eau distillée. En réglant leur résistance, toujours rela- ^'*^' ^" tivement grande, on fait varier comme on veut le noml^re de décharges oscillantes à la seconde, qu'on peut rendre même aussi réduit que celui d'une machine électrostatique. (Ce dispositif peut être employé aussi pour éviter l'arc sur les cou- rants alternatifs). L'intérêt du dispositif est de pouvoir augmenter beaucoup plus la fréquence des décharges, jusqu'à plusieurs miUiers à la seconde, que par les procédés ordinaires, et de leur maintenir un caractère de parfaite régularité. L'idéal serait d'arriver à une parfaite continuité des oscillations, c'est-à-dire à des décharges se répétant à haute fré- quence sans aucune interruption ni amortissement, et tel était le but que je poursuivais en imaginant le dispositif et que d'autres aussi, plus récemment, ont désiré réaliser ainsi. Mais heureusement, quand on réduit trop les impédances additionnelles en vue d'accroître la vitesse de recharge, il s'étabHt de l'arc au déflagrateur et la décharge oscillante se transforme en un court-circuit de la som'ce à haute tension. Quelques expci imcntateurs (Cooper-Hew itt, Ruhmer, etc.) avaient A. BLONDEL. — AUGMENTATION DE LA PUISSANCE DANS LES ANTENNES ^3cf €spéré dernièrement ol^tenir des interruptions toujours absolument disruptives au moyen des tubes à mercure, mais ils n'y sont pas parvenus et, quoique l'interrupteur à mercure dans le vide soit évidemment excellent, sinon le meilleur, parce qu'il est indéfiniment régénérable, et que l'absence de l'air favorise la rupture, il ne pré- sente pas de propriétés essentiellement différentes des déflagrateurs «ntre autres métaux quelconques. Tel qu'il est, le dispositif que j'ai décrit ci-dessus peut avoir des avantages pour la production des signaux à grande distance , quand on emploie comme récepteurs des détecteurs thermiques ou hystérétiques , d'autant mieux impres- sionnés que la fréquence des trains d'ondes reçus est plus grande. Il peut avoir également de l'avenir pour les transmissions télé- phoniques, sur lesquelles je reviendrai une autre fois. J'indiquerai seulement comment on peut produire aisément des courants continus à haute tension sans batterie ni machine trop coûteuse. Par exemple, on peut utiliser une bat- terie d'accumulateurs alimentant, par l'intermédiaire dun inverseur tournant, un transformateur de grande constante de temps, comme le montre la figure 2. On obtient ainsi au secondaire une force électromotrice très élevée à onde rec- tangulaire, qui donne des décharges aussi sensiblement régulières qu'une force électromotrice continue ; tandis qu'une force électromotrice sinusoïdale donne forcément des décharges variables au cours d'une même alter- nance , aussi bien comme espacement que comme tension. f -WMSSW ' TTtTrmr» J FiG. 2. 44o PHYSIQUE M. Ad. GOY Pharmacien de i" classe, ex-interiu' des Hôpitaux, à Paris SUR UN NOUVEL APPAREIL DE MESURE DES TEMPÉRATURES D'INFLAMMABILITÉ: — Si'ancc (la lo août — Un décret du i8 août 1866 fixe en France à 35° la limite inférieure de température à laquelle les huiles de pétrole destinées à l'éclairage peuvent émettre des Aapeurs susceptibles de s'enflammer au contact d'une allumette. On peut classer les appareils de mesure employés jusqu'ici en deux catégories : i'^ Ceux qui emploient pour produire l'inflammation une ilannne à pétrole (Garnier, Abel. Pinsky-Martens) ; 1'- Ceux qui emploient un fil de platine porté à l'incandescence (Conservatoire des Arts-et-Métiers), ou l'étincelle électrique (Saybolt, Engier). Les premiers de ces appareils , en raison de la .grande varialjilité des flammes, ne sont pas comparables entre eux; d'autre part, la chaleur et le volume relativement grands d'une flamme peuvent accroître brusquement la température du liquide et fausser j)ar défaut les résultats. Le choix du fil de platine porté à l'incandescence par un courant continu ne nous paraît pas très heureux, puisque certaines vapeurs peuvent d'elles-mêmes produire l'incandescence du fil, sans l'inter- vention du courant. Enfin, dans les expériences faites jusqu'ici avec l'étincelle, la nature de cette dernière n'a pas été suffisamment précisée, ce qui cependant a une grande importance pour l'iiomogénéité des résul- tats. L'appareil que nous avons fait construire et dans lequel nous nous sommes efl'oi'cé de tenir compte de toutes les conditions du pro- blème est en verre et se compose de trois pièces distinctes fji^'. i). j° Un anneau C portant deux électrodes de platine distantes de () millimètres ; AD. GOY. — MESURE DES TEMPÉRATURES d'iNFLAMMABILITÉ r.r.-, 2° Un tube A gradue en centimètres cubes et dans lequel on met le liquide dont on veut déterminer le point dinflammabilité ; 3" Un réci])ient de forme ovoïde B, pouvant servir de bain-marie ou de chand^re réfrigé- rante ; il est ouvert en o d'un orifice circulaire dans lequel peut s'introduire le tube A qui y est maintenu par son bord supérieur, légère- ment évasé et qui vient s'appliquer très exac- tement sur le récipient. Ce dispositif prévient tout mélange de l'eau et du liquide à essayer, ce qui arrive dans le cas d'une circulation trop intense dans le bain-marie. En h est ajusté uir tube servant à maintenir un thermomètre ; on aura ainsi à chaque instant la temjiérature du milieu où plonge le tube A. A la partie inférieure du récipient B deux tubu- lures munies de robinets le mettent en commu- nication; l'une c avec un robinet d'eau froide, l'autre d avec une source d'eau chaude placée à coté de l'appareil à un niveau un peu plus élevé, de sorte que par un simple siphon on peut ali- menter le récipient B; enfin, e est une autre tubulure par laquelle se déverse le trop -plein de l'eau fournie. Par ce procédé, on modifie à volonté, très facilement, la température du bain, par conséquent celle du liquide à étudier, et l'expérience devient réellement pratique. Pour que l'appareil soit prêt à fonctionner, on place dans le réci- pient B le vase gradué A contenant le liquide dont on veut détermi- ner le point d'iiiflammabilité , puis on coiffe ce vase de l'anneau G muni des électrodes reliées elles-mêmes à une bobine de Ruhmkorff, laquelle est alimentée par deux accumulateurs. Nous verrons plus loin par le résultat des expériences que le ren- dement de cette bobine est important à considérer et qu'il doit rester constant si l'on veut obtenir des résultats comparables. Un très grand soin doit être apporté dans le remplissage du vase A avec le liquide à expérimenter ; l'on veillera à ce qu'aucune goutte de ce liquide ne soit déposée sur la paroi du tube au-dessus de la surface du liquide, dans le voisinage des électrodes, ou même sur les extrémités de ces dernières, ce qui pourrait fausser les résultats; donc, on essuiera avec soin les bords du vase avant de commencer l'expérience. FiG. I. 442 PHYSIQUE La température d'inJlaimnahiUté est la température à laquelle s'enflamme instantanément une vapeur traversée par une étincelle électrique de température donnée à une distance du liquide égale- ment déterminée. Expériences. — Nous avons fait des expériences comparatives sur les points d'inflammal)ilité de diflérents liquides. Elles ont porté sur un volume constant égal à lo'^'"'^, l'étincelle éclatant à i4""" de la surface libre; les résultats ont été les suivants : Acétone 23» Stelline (distillation fractionnée 8oo à 100°) 25o Stelline (distillation fractionnée de 1000 à 1200) 4^° Benzine cristallisable 2703 Ces liquides forment une première série relativement peu inflammable. Dans une deuxième série d'expérience, réciproques des premières, nous nous sommes occupé de quelques liquides plus inflammables que les précédents et qui, dans les conditions de la première expéi'ience (c'est- à-dire à i4'"". de l'étincelle) , s'enflammaient instantanément à la tempé- rature de 0°. La température était alors maintenue constante et égale à 00, la distance de l'étincelle étant la variable indépendante. Voici, dans ces conditions, les résultats obtenus pour les liquides suivants : distance maxima Liquides à 0° d'inflammabilité mm Neufaline i4' Ether sulfurique 20""" Sulfure de carbone 27™™ Ether Hofl'mann 20™'" Troisième série. — a) Expériences comparatives sur le point d'inflam- mabilité de la Neufaline et de la Stelline; distance de l'étincelle : 32'"™. Neufaline 16° Stelline 35o Dans les mêmes conditions, la Stelline s'enflamme donc à 19" au-dessus de la Neufaline. b) Comparaison entre le pétrole Lenthéric et la Stelline; distance de l'étincelle : 27""". Pétrole Lenthéric 16° Stelline 32" On constate une difl'érence de 16° entre le point d'inflammabilité de la Stelline et le pétrole Lenthéric. c) Comparaison entre la Stelline ordinaire et la Stelline distillée de 100 à 120°; distance de l'étmcelle : 27™™. Stelline ordinaire 32° Stefline distillée ioo''-i20° 52° AD. GO Y. — MESURE DES TEMPETATURES D IXFLAMMARILITE 443 Le point d'inflammabilité de la Stelline distillée est retardé , comme on le voit, de 20° par sa distillation fractionnée. Notre appareil, en plaçant les liquides à étudier dans les conditions les plus exactement semblables que l'on ait réalisées jusqu'ici permet de déterminer avec beaucoup de précision leurs diflérences d'iuilamma- bilité. Quatrième série. — Pour un certain nombre de liquides, il nous a paru intéressant de déterminer la température d'inflammabilité à des distances variables des étincelles. Nous avons expérimenté sur les liquides sui- vants : sulfure de carbone, éther sulfurique, éther Holfman, acétone, benzine cristallisable , alcool absolu. Les résultats de ces expériences sont consignés dans le tableau suivant : Températures d'inflammabilité de différents liquides à des distances variables de l'étincelle 0 ^ 0 — Sulfure de carbone Éther sulfurique Acétone Benzine cristallisable Alcool absolu 14 — 2l°o — IO°0 2300 27° 3 46°o 20 — 2,6 — 2,6 23,0 28,3 48,0 27 + 0,9 + 0,9 26,6 291 3 5o,o 33 3,2 3,2 27,1 33,0 62,0 40 4,8 4,8 32,4 38,2 61,0 46 6,4 10. 0 38,3 45,2 62,0 53 10,3 12,1 40,8 48,4 66,0 60 17,2 12,0 41,5 494 68,0 66 17,7 14,0 40,6 57,9 68,0 73 18,5 14,2 41,3 07,0 68,0 Le graphique ci-dessous (fig. 2) présente ce tableau d'une façon plus intéressante. Nous avons porté en abscisses les distances d de l'étincelle et en ordonnées les températures d'inflammabilité correspondantes 9, L'examen de la ligne brisée qui joint les points bruts, tels qu'ils ont été donnés par les expériences , montre que l'appareil est d'mie réelle préci- sion. Nous avons tracé sur ce même graphique les courbes contmues qui semblent représenter le mieux possible la marche générale du phéno- mène. Ces courbes (j := f (d) présentent une inflexion et tendent à devenir, par leurs extrémités, parallèles à l'axe des distances, ce qui peut d'ailleurs s'interpréter facilement. Traçons, en effet, les droites 0 = C^" qui corres- pondent aux températures d'ébullition des li(iuides employés pour la pression de 760"^"^'. Ces droites sont évidemment asymptotes aux courbes 444 PHYSIQUE ^ z= f(d) correspondantes, en admettant toutefois qu'on laisse écouler un laps de temps suflisant entre l'obtention de la température d'ébullition et la production de l'étincelle, alin de permettre à la diffusion de se pro- duire et de prendre un état stationnaire. FiG. 2. D'un autre côté, lorsque l'on opère tout à fait au voisinage de la surface liquide, la tension des vapeurs varie très peu et par conséquent aussi la température d'inflammabilité , ce qui explique encore les tendance au parallélisme de la courbe avec l'axe des abscisses au voisinage de l'or- donnée d ^ o. Influence de la température de l'étincelle. — Pour rechercher cette influence, nous avons employé des bobines d'induction différentes mimies AD. GOY. — MESUKt: DES TEMPERATURES D IXFLAMMABILITE 445 de résistances convcnal)les. La première, (jiie nous désignons par (A) donnait 6""" d'étincelle; la seconde (B), 20"""; et cnlin le modèle (C) don- nait 5o'""'. Les électrodes étant distantes de (>""" dans tous les cas , les tempéra- tures des étincelles de ces bobines étaient évidemment croissantes dans l'ordre (A, B, C), ce donl nous avons d'ailleurs pris soin de nous assurer. La discussion complète des expériences faites à l'aide de la pile thermo- électrique nous permettra, lorsqu'elle sera terminée, d'être plus précis à cet égard. En attendant , les chiilres du tableau suivant montrent d'une façon indubitable (pie la température de l'étincelle employée est un facteur important et cpi'on ne saurait parler nettement des températures d'inttammabilité sans avoir défini a^ec précision cette circonstance des expériences. Les signes (?) remplacent des températures inférieures à celles que permettaient de réaliser les réfrigérants employés. La question des températures d'inflammabilité est, on le voit, fort complexe; bien que posée par des exigences industrielles, elle touche de très près aux théories des gaz et des vapeurs et peut y apporter un précieux concours. Nous n'entrerons pas, pour le moment, au cceur de la question; nous avons voulu seulement suggérer la possibilité d'a[>pliquer notre appareil aux spéculations de la Science pure , particulièrement en ce qui concerne l'étude et la vérification des lois de la diffusion de Maxwell et de Stéphan. 446 CHIMIE MM. V. THOMAS et LE GORGEU SUR LES HALOGÉNURES THALLIQUES [546.52J — Séance du 5 août — Quoique la découverte du thallium soit relativement récente, le nombre des travaux qu'il a suscités est fort considérable. Il semble, du reste, qu'on ait là une mine de recherches où beaucoup de pion- niers pourront encore peiner avec fruit. Les sels tlialleux, aujour- d'hui bien connus, ont été, il est vrai, un peu délaissés. En revanche, les sels thalliques ont une histoire encore confuse. Les travaux récents de J. Meyer (*), Cushmann (**) et ceux de l'un de nous (***), ont apporté quelque lumière sur ce sujet; malheureusement, les résultats auxquels sont arrivés séparément ces chimistes sont diffé- rents et nous avons pensé qu'avant d'aller plus loin il était néces- saire de faire un tri rigoureux pour séparer la bonne semence de la mauvaise et de débarrasser la bibliographie de ce métal des don- nées que nous pouvons dès maintenant considérer comme erronées. Le thallium forme , avec le chlore , deux chlorures dont l'existence n'a jamais été mise en doute, à savoir le chlorure thalleux TlCl et un chlorure thallique TlCPnaq beaucoup moins connu. On admet, en outre , que ces deux clilorures , en s'unissant ensemble , sont suscep- tibles de former des sels doubles , à savoir : TlCl'iTlCP.TlCl] et TZ^GP [T/GP.3Ï/G/] Les combinaisons bromées signalées correspondent aux chlorures. Quant aux dérivés iodés, leur histoire est encore bien confuse. Quatre composés différents ont été signalés. TU Ï/P Jr-V T/'P Nous passerons raï)idement en revue ces différents types de composés. (•) J. Meyer, Z. anorg. Ch., t. XXIV, pp. 321-368. (") CusuMAXN, Amer. Chem. Journ., sept. 1900, p. 222. ('") V. Thomas, Comptes rendus CXXXY, io5i, 1902. V. THOMAS & LE GORGEU. — LES HALOGÉNURES THALLIQIES 447 CHLORURES DE ÏHALLIUM Le corps dont nous sommes partis pom* cette étude est le proto- chlorure TlCl facile à obtenir à l'état de pureté (*). Action du chlore sur le chlorure thalleux. — a) Par çoie sèche. — Le clilore, en réagissant sur le chlorure thalleux par voie sèche, donne comme tei'me ultime de chloruration le bichlorure TICP. Les expériences faites à froid ne laissent aucun doute à ce sujet si on a la précaution d'opérer avec du chlore parfaitement desséché. Si le chlore est humide, la fixation du chlore est plus considérable, mais cette fixation est une conséquence de la fixation d'eau qui se produit en même temps. Si l'on opère à chaud, à température de fusion du protochlorure, la fixation de chlore ne saurait aller plus loin que celle exigée pour la fixation de bichlorure ; en admettant même la production transi- toire de trichlorure, ce composé se décomposerait immédiatement (voyez à trichlorure). Les données de Lamy, qui prétend avoir obtenu le perchlorure dans ces conditions, sont tout à fait erro- nées (**). On a mis en doute l'existence de ce bichlorure TICP (***). Sa for- mation à froid, dans les conditions que nous venons de signaler, nous paraît suffisante pour démontrer l'existence chimique de ce composé. b) Par paie humide. — La chloruration du chlorure thalleux , en présence de l'eau, conduit à la formation du trichlorure. Le fait, signalé d'abord par Werther (****), n'est pas, du reste, contesté. De la solution de chlorure thallique ainsi obtenue il est assez délicat de faire cristalliser le sel sans lui faire perdre de traces de chlore. C'est dans les divers procédés mis en œuvre pour obtenir cette cristallisation qu'on doit rechercher la cause des divergences observées par les différents auteurs. L'hy dilate qu'on obtient toujours est le telvahydrate TlCl\^R-0, mais ce telvahydrate est plus ou moins souillé de produits de chlo- ruration inférieure. Werther a signalé, dans ces conditions, la for- mation d'un monohydrate T/C/^H-O; mais ce fait peut être considéré comme erroné. (•) V. Thomas, Bulletin Société scientifique et médicale de l'Ouest, t. X, n' 4. 1901. (••) Lamy, Au. Ch. Ph. [3], LXVII , p. 4o4. i863. (*•*) WiEGAUD, Uber Halogenverb in dungen des Thalliums. Berlin, 1899. 1'*"} WektheRj Journal f tir praMische Chemie, XCI, p. 385. 1864. /J^8 CHIMIE Ce ti'iclilorure tclvahydraté est stable dans les conditions ordi- naires; hygrométrique suivant les uns, il pourrait se conserver sans absorber d'eau suivant les autres. L'un de nous a montré qu'en réalité cet hydrate a une tension de dissociation du même ordre de grandeur que la tension de la vapeur d'eau atmosphérique et que, suivant les cas, il est efllorescent ou hygrométrique (*). Si on le conserve dans une atmosphère sèche, il s'eflleurit com- plètement et donne le sel anhydre. Cette déshydratation ne peut être mise en doute : elle se produit dans le vide sur la potasse sans perte de chlore. A la pression ordinaire, elle se produit rapidement sur l'anhydride phosphorique : C'est là un mode de préparation pratique du sel anhydre. [Moyenne de nombreuses analyses 17. G9. 09. C/.34.o(). Calculé. T/.66.02. C/ = 34.10.] M. Cushmann et M. J. Meyer n'ont pu ainsi obtenir le sel anhydre; suivant ces auteurs, la déshydratation est accompagnée dune peinte de chlore. D'après M. Cushmann, on ne peut éliminer aucune molé- cule d'eau sans perte d'halogène; d'après M. J. Meyer, on peut aller jusqu'à la formation d'un monohydrate. Nous considérons que ces résultats ne sont pas exacts et que le seul corps qui se produit dans la déshydratation du chlorure tclvahydraté est le sel anhydi-e. Toutefois, si on opère la déshydratation sur un corps impur, on ne peut arriver au sel anhydi^e. Il y a là un fait particulier, que nous ne sommes pas seuls, du reste, à avoir remarqué (**). La décomposi- tion du chlorure tliallique pendant la déshydratation semble se pro- duire tout d'un coup, et grâce à la formation antérieure d'une très petite quantité de chlorure inférieur : en d'autres termes, il semlile que l'existence dans le chlorure tliallique hydraté d'une trace de chlorure inférieur soit nécessaire pour amorcer la décomposition. Cette remarque suffît pour expliquer les résultats des chimistes allemand et américain. Tandis que le chlorure hydraté (à 4 H ^O) absorbe très rapidement le gaz chlorhydrique avec formation d'un chlorhydrate de chlorure, T/C/^HCiSH^O, le sel anhydre, très hygrométrique, ne se combine au gaz chlorhydrique que lorsque ce dernier est imparfaitement desséché. D'autre part, tous les efforts que nous avons faits pour arriver à déshvdrater le chlorhvdrate de chlorure , sont restés sans %■■ *-■ résultat. Ce sont là des faits iiiq)ortants pour servir à élucider la (*) V. Thomas, Compte rendus CXXXV, p. io5i. 1901. (") M. J. Meyer a bien voulu nous communiquer une partie de ses notes de labora- toire où le phénomène est parfaitement décrit. V. THOMAS & LE GORGEU. — LES HALOGÉNURES THALLIQUES 449 composition du chlorure thallique et des hydrates qu'il peut être susceptible de foi*nier. Le chlorure anhydre se réduit facilement : riiydrogène sulfuré à température ordinaire le décompose complètement, avec dépôt de soufre et formation de protochlorure. L'acide brondiydrique exerce une action multiple : il sendjle que dans une première réaction il y ait déplacement de l'hydracide TICP + 3 HB/' =:: TlBr' + 3 HG/ et que le tribromure ainsi formé , instable, se dédouble immédiate- ment en brome et bibronuu'e, T/BH = TlBr' + Br. nUOMURE DE ÏUALLIUM Le l)romure T/Br. qui nous a servi comme matière première dans ces expériences , s'obtient par précipitation d'un sel de thallium en solution au moyen du bromure de potassium. L'acide bromhydrique dissout aussi très facilement le chlorure avec dégagement d'acide chlorhydrique. La réaction est complète. Le tribromure hydraté ÏBr^4 H-O, signalé par l'un de nous f), préparé comme le chlorure correspondant, est beaucoup moins stable. A température ordinaire, nous n'avons pu préparer, par aucune méthode . le sel anhydre : toutes les tentatives n'ont abouti qu'à la formation du bibromure. Cette série en TIX.^ n'est pas, du reste, avec le bromure, d'une sta- bilité bien grande, puisque l'hydrogène sulfuré le réduit à froid avec formation de bromure thalleux, dépôt de soufre et dégagement d'acide brondiydrique. lODURES DE THALLIUM (d'après Ics expériences de M. Le Gorgeu) Le seul composé qui soit assez bien connu est le protoiodure T/L C'est le type stable auquel se ramènent tous les composés plus iodés sous l'action de la chaleur. Le triodure a été obtenu par Wells et Penfeld (**) , en traitant le protoiodure par l'iode en solution alcoolique et faisant cristalliser. (*) Thomas, Comptes rendus, CXXXIV, p. 545. 1902. (") Wells et Penfeld, The Anieriean Journal of Sciences, I,p. 463. 1894. 29* 450 CHIMIE Pour olitenir ce triodure, il paraît inutile, du reste, d'opérer en pré- sence de solvant. En entraînant de la vai)eur d'iode sur du pro- toiodure, celui-ci se colore immédiatement en noir en fixant lente- ment, mais régulièrement, deux atomes d'iode. Le triiodure ainsi obtenu n'est stable ni dans le vide, ni à l'air. A température ordinaire, il a une tension de dissociation notable; il perd lentement de l'iode et laisse comme résidu un iodure intermé- diaire dont il est assez difficile de fixer très exactement la formule : ce composé paraît cependant correspondre à l'iodure décrit par J6rgensen, Tl'l'' (*). Les iodures de thallium s'éloignent, du reste, notablement des autres halogénures. La série en Ï/X^ ne pas paraît exister ici. De plus, tandis que le chlorure et le bromure thalleux se combinent très rapidement, le premier au brome, le second au chlore, pour donner des chlorobromui'es définis, nous n'avons pu jusqu'ici fixer d'iode ni sur le chlorure, ni sur le bromure. Par voie sèche, les chlorures et bromure se colorent à peine ; en présence de solvant, la réaction paraît tout à fait différente. Si l'on ajoute, par exemple, une solution alcoolique d'iode à une quantité de chlorure thalleux telle que le rapport entre l'iode et le chlorure soit celui exigé par l'équation TlCl + P = T/C/P une partie seulement du chlorure thalleux passe en solution. Cette solution abandonne par évaporation des cristaux de triiodure. Le résidu est constitué par du protochlorure inattaqué. Il semble, par suite, que le déplacement apparent du chlore par l'iode soit le résul- tat d'une réaction plus complète dans laquelle la formation de chlo- rure d'iode joue le rôle principal. - Si on remplace le chlorure par le bromure, les résultats sont exactement les mêmes. Iodure intermédiaire T/^I*. ■ — Jorgensen dit avoir obtenu ce com- posé : 1° En ajoutant de l'iodure de potassium à une solution étendue de sel thallique; 1" En évaporant à 70° une solution d'iodure thalleux dans l'acide iodhydi'ique chargé d'iode ; 3'^ en faisant digérer l'iodure de thallium avec une solution alcoolique ou éthérée d'iode. Ce troisième procédé de formation est une contradiction avec les données de Wells et Penfield et celles plus anciennes de Nicklès (**). (•) JoiuiENSEN, Journal Jïif iiraldisclw Chimie [2], VI, 82. (••) Nicklès, Journ. Pharin. Ch. [4J, I, 23. V. THOMAS & LE GORGEU. — LES HALOGENURES THALLIQUES 45l En réalité, cette contradiction n'est qu'apparente, car, pendant lévaporation du biiodure une partie commence déjà à se réduire, si bien que, suivant le temps plus ou moins long employé à l'évapora- tion complète , on obtient soit le triiodure , soit son produit de dis- sociation, soit un mélange des deux composés. Les analyses ne laissent aucun doute à ce sujet : Produit d'évaporation sur l'acide sulfurique conservé quelque temps sous la cloche à évaporation : I trouvé 4i-23. Calculé par T/P4341. Ce corps épuisé par du benzène, jusqu'à ce que le solvant ne se colore plus en violet, a donné des chiffres voisins de ceux requis par la formule T/'T : Perte d'iode du résidu (Transformation en TZI) Calculé par TZ3l4 10.16 11.33 10.08 » 10. o5 » Abandonné en vase clos en présence de potasse jusqu'à poids constant on obtient un résidu perdant de l'iode lorsqu'on le chauffe. 10.94 Iode Calculé 11. 33 Les nombres trouvés pour le produit d'épuisement au benzène sont un peu faibles , mais il est à noter ici que le benzène se colore tou- jours en jaune lorsque l'élimination de l'iode est complète. Le com- posé pourrait, par suite, être susceptible non seulement de se dissoudre dans le solvant, mais de subir de sa part une dissociation en iodure plus ioduré et un sel moins riche en iode. En tout cas ces nombres sont bien différents de ceux que Ton obtiendrait en décomposant le composé TFI^ obtenu par Knœsel (*) pour lequel la perte en iode s'élevait à 16 0/0. Il semble, par suite, qu'on peut admettre que le composé obtenu ci-dessus est celui de Jôrgensen. • Knœsel, Bed. Gesells. VII, 893. 552 CHIMIE M. DAUVE Professeur de Physique au Collège Monge, à Beaune (Côte-d'Or) SUR LA VITESSE D'ATTAQUE DES MÉTAUX PAR LES SOLUTIONS SALINES [542.6] — Séance du 6 août — I. — Dans la communication que j'ai faite l'année dernière (Congrès de Montauban), j'avais dit que la courbe d'attaque du Z/i par des solutions de SC^Ch de concentrations différentes était voisine de celle des conductibilités spécifiques : en réalité, les deux courbes se coupent; dans le diagramme (Jjg: i), on a porté en abscisses les %o %o %o % %o %o '/,o % % % FiG. I. concentrations des solutions de SO*G?« en mol. gr. par litre; on s'est arrangé de façon que la conductibilité spécifique de la solution de SO^C» à — moléc. gr. par litre soit exprimée par le même nombre (ii.i) que ^^ vitesse d'attaque de Z/i par cette solution. (La courbe des conductibilités spécifiques est l'objet de recherches plus j)récises en cours d'exécution). DAUVÉ. — ATTAQUE DES MÉTAUX PAR LES SOLUTIONS SALINES ^53 Remarque. — Avec une solution de SO^C?? à — m. gr. p. 1., le dépôt de Cil qui se l'ait sur Z/i est noir sépia; avec une solution de SO^Gk à— m. ffr. p. 1. il est franchement rouge; il est d'ailleurs lo » i déjà rouge avec une solution à — m. gr.; avant de devenir rouge, il est ocreux ; il quitte la couleur noire pour devenir ocreux pour une concentration de la solution de SO^Cii voisine de celle qui corres- pond au point de rencontre des deux courbes. IL — Dans les expériences précédentes, la conductibilité spécifique du sel décomposé était sensiblement la même que celle du sel formé (on sait en effet que, à concentration égale, la conductibilité spéci- fique des solutions des sels de métaux dont le poids atomique est voisin, est sensiblement la même); je me suis proposé de rechercher si, dans le cas contraire, le poids du métal déposé est encore propor- tionnel au temps. i« Zn i)longé dans une solution de SO'Ajg-"^ à -j^ nx. gr. p. Ut. Au bout de "io sec. le poids de Zn dissous était de o"'"'en. — 45 — • — o, 2. — Go — — o, 3. (fig. 2) 0 ^gsœ ^jsec Qf^sec FiG, 2. 0 1 mm. 2° Cm plongé dans une solution de SO*A^* à -— - m. gr. p. lit. Au bout de i min. le poids de Zn dissous était de o"""^»'!. _ 3 — — o, 2. -5 - - o, 3. (fig. 3) 3° Ca plongé dans une solution de AzO^Ag à --^ m. g. p. lit. Au bout de 2 min. le poids de Cu dissous était de o'""'e'^2. — 4 — — o, 4- - 6 - - o, 6. (fig. 4) 454 CHIMIE 4° Fe'^3 (V. Courbe (i) de — 3 — o, 3 3o sec. à 6o sec.) — 4 — o, 3 — 5 — o, 3 — 6 — o, 4 — 7 — "' 5 — lO — o, o Or, le poids de Z« nécessaire pour précipiter tout l'A^ contenu dans la couche liquide ABCD est de o'"™fc"3. M. F. TABOURY Préparatem- à la Faculté des Sciences de Poitiers ACTION DU SOUFRE ET DU SÈLËNIUM SUR QUELQUES COMPOSES ORGANOMAGNËSIENS DE LA SÉRIE AROMATIQUE {'] [542.2-2.3:34-.25J — Séance du 6 août — Sur les conseils de MM. Roux et Bodroux, j'ai entrepris l'étude de l'action du soufre et du sélénium sur les composés organométalliques obtenus en faisant réagir sur le magnésium les hydrocarbui*es aro- matiques bromes dans le noyau. L'action de l'oxygène sur ces com- posés organomagnésiens ayant fourni à M. Bodroux un certain nombre de phénols (C. R. t. CXXXYI, p. i58), je me suis proposé de voir si on obtient des réactions du même genre avec les autres métal- loïdes de la même famille, ce qui devait me conduire à l'obtention de thio et de sélénophénols. L'expérience a confirmé mes prévisions; mais en même temps il se forme une quantité plus ou moins grande de clisulfures ou de diséléniures provenant de l'oxydation des com- posés qui prennent naissance dans la réaction. J'étudierai successivement l'action du soufre et du sélénium sur les bromures de phénylmagnésium et d'« naphlylmagnésium et l'action du soufre sur les composés /Br ^TT-/!^!' ^^\C«H^Br ^* M^\G«H^C1 (*) Ce travail a été fait au laboratoire de Chimie de ri'niversité de Poitiers. F. TABOURY. — ACTION DU SOUFRE ET DU SÉLÉNIUM ^5"] I. — Action du soufre 1° Sur le bromure de phén)Hmag-nésiiim. — Dans une solution éthérée contenant une demi-molécule-granime (go&'^So) de bromure de phénylmagnésium, je projette par petites portions, en refroidissant le ballon, i6 gr. de soufre en canon pulvérisé, passé au tamis et séché. Le liquide entre aussitôt en ébuUition; au bout de quelques instants, il commence à blanchir, s'épaissit et ne tarde pas à se prendre en masse. Je termine l'opération en chauffant doucement pendant une demi-heure, puis je traite par l'eau acidulée d'acide chlorhydrique en évitant toute élévation de température. Si cette der- nière condition n'est pas réalisée, il y a un dégagement très abon- dant d'hydrogène sulfuré. La solution éthérée, préalablement filtrée, est soumise à un entraî- nement par la vapeur d'eau. L'éther distille d'abord, puis il passe un liquide incolore plus dense que l'eau. Ce produit est entièrement soluble dans la potasse. Il bout à iGS^-i^o" sous la pression de [jSo'"'". Sa solution alcoolique précipite en jaune par l'acétate de plomb. Il se dissout à chaud dans l'acide sulfurique en le colorant d'abord en rouge puis en bleu. Ce corps est le thiophénol CH^SH. Ses réactions sont bien celles qui ont été signalées par MM. Stenhouse, Friedel et Grafts et Stadler, et d'un autre côté l'analyse m'a fourni les résultats suivants : Trouvé : H, 5.92; C, 65. 11. — Calculé pour C«H^SH : H, 5.45; c, 65.45. La partie qui n'a pas été entraînée par la vapeur d'eau, abandon- née au repos, se prend rapidement en masse. Par cristallisation dans l'alcool on obtient de fines aiguilles blanches qui fondent à 59°-6o°. L'analyse montre que j'ai affaire au disulfure de phényle (^11^)^8^ Trouvé : H, 5.o3; C, 65,62; S, 29.12 et 3o.4. Calculé pour (C«H^)2S2 : H, 4.58; C, 66.o5; S, 29.87. Ce corps a déjà été obtenu par MM. Kékulé, Stenhouse, Krafft et Vorster. 2° Sur le bromure du naphtylmagnésium. — Après avoir opéré sur le bromure d'« naphtylmagnésium, comme je l'indique plus haut pour le bromure de phénylmagnésium, j'ai essayé de séparer le thionaphtol par entraînement par la vapeur d'eau. Les résultats étant mauvais, j'ai traité directement la solution éthérée par la potasse. Au bout de 24 heures, j'ai acidulé par HCl la solution alca- line et il s'est séparé une huile légèrement colorée en brun qui, sou- 458 CHIMIE mise à la (listillation, passe à 285" sous la pression ordinaire; c'est le thionaphtol C"°H-'SH. Pour identifier ce corps avec celui qu'obtinrent MM. Shertel, Mai- kopart, Kraift et Slionlierr, j'ai préparé son étlier benzoïque en fai- sant agir sur lui le chlorure de benzo\ le en présence de chlorure de zinc. Le corps obtenu fondait à ii^^'-iiS'' comme le thiobenzoate de naphtyle et m'a donné à l'analyse : Trouvé : H. 487 G, 77.06 Calculé pour C«H^GOSC»''H^ H, 4.04 0,77.27 La partie insolul^le dans la potasse, abandonnée à elle-même, s'est prise aussitôt en masse et a cristallisé dans l'alcool en petits prismes blancs fondant à 85^^. C'est le disulfure de naphtyle (C'"H')-S^ que MM. Shertel, Otto, Rosing, Troger ont préparé par d'autres méthodes L'analyse en effet donne : Trouvé : H, 5. 10 C, 75.28 Calculé pour (C*»H')2S- H, 4.40 C, 75.47 IL — Action du sélénium 1° Siu' le bromure de phénylinagnésium. — Dans une solution éthérée renfermant un quart de molécule-gramme (45 gr.) de bro- mure de phénylmagnésium, je projette 20 gr. de sélénium. La manière d'opérer et les précautions à prendre sont les mêmes que pour le soufre. Je traite par l'eau puis par HCl étendu en évitant toute élévation de température. Il est à remarquer, en eflet, qu'il se produit un dégagement abondant de SeH^, si cette précaution n'est pas prise. Par entraînement à la v.apeur d'eau on sépare un liquide huileux, légèrement jaune qui, après rectification, bout à 182" sous la i^res- sion ordinaire. Ce corps est identique au sélénophénol G^IPSeH obtenu par MM. Krafft et Lyons (D. ch. G., t. XXYII. p. 17G1). Récemment distillé il est incolore, mais il prend rapidement une teinte jaune en se transformant en diséléniure de phényle. La portion qui n'a pas été entraînée par la vapeur d'eau, aban- donnée au repos, se prend rapidement en masse. Par cristallisation dans un mélange d'alcool et d'éther, on obtient des aiguilles jaune d'or fusibles à 62 '. Les propriétés et l'analyse de ce produit nous indiquent que nous sommes en présence du « sélénophénol » de M. Ghal)rié, substance F. ÏABOURY. — ACTION DU SOUFRE ET DU SÉLÉMUM 4^9 que MM. Krailt et Lvons ont montré être le diséléniure de phényle (C''H^)^Se-. La détermination dxi poids moléculaire par la cryoscopie nous donne en efl'et un nombre double de celui qu'exige la formule CH^SeH. Le corps étant insoluble dans la potasse est (C®H'*)-Se^ et non G^H^SeH. Analyse : Trouvé H. 3.97 C, 46.32 Se, 5o.48 Calculé pour (C«H7-Se2 H, 3.19 C, 46.00 Se, 5o.;9 Poids moléculaire : 1° Benzène : 297 ; 2° Bromure d'éthylème : 317, calculé pour (G«H^)2Se2 : 3i3. 2° Sur le hroiniire d'à. napht)-hnagnésiiiin. — On opère comme précédemment. Après les traitements successifs par l'eau et HCl, l'entraînement par la vapeur d'eau ne m'a pas donné de bons résul- tats. J'ai eu un dégagement abondant de SeH^ et formation de naphtaline. J'ai donc abandonné cette manière d'opérer et j'ai épuisé directement la solution éthérée par la potasse. La solution alcaline, traitée par l'acide cblorhydrique, laisse déposer une huile légèrement rougeàtre plus dense que l'eau. Ce liquide, dont l'étude n'est pas achevée, ne peut distiller à la pression ordinaire sans se décomposer. Il est probablement constitué par le sélénonaphtol C'"H^ SeH, car au contact de l'air il s'oxyde lentement en se trans- formant en diséléniure de naphtyle, La portion, insoluble dans la potasse, se prend rapidement en masse et par cristallisation dans l'alcool on obtient de beaux prismes jaune orangé fusibles à 87°-88°. Ce corps est bien le diséléniure de naphtyle (G"'H^)^Se^, carl'anaj lyse fournit les résultats suivants : >ouvé H, 3.7 et 4.1 C. 59.4 et 58.9 Se, 38.6 [Calculé pour (C'«H-)2Se2 H, 3.38 C, 58.ii Se, 38.49 Poids moléculaire par la cryoscopie : Benzène : 4io Bromure d'éthylène : 4^5 Calculé : 4i5 Le mécanisme de la réaction semble être le suivant : X représen- ,tant S ou Se : /Br , ^. ^,. /Br Mfif & \ R + ^ - *'*'' \ X - R Mg G — GH^ Il GH GH CN — G — GOOGH' 3d* 466 CHIMIE Propriétés. — Les principaux caractères de ces étliers acyl- cvanacctiqiies, dont quelques-uns donnent de très beaux cristaux dont M. \\\vrouljoll" a bien voulu étudier la forme cristalline et que nous sommes heureux de remercier ici, sont : 1° Leur réaction neutre ; 2° L'absence de coloration par le perclilorure de ter ; 3° Leur facile saponification à la température ordinaire par l'eau, les alcalis, les acides ; 4° L'action de l'ammoniac et des aminés secs sur les solutions alcooliques ou étliérées qui donne à la fois le dérivé aminé R — C — NH^ II CN — C — COOCH3 et le sel ammoniacal RCO\ /NH^ GN/^\COOGH5 Nomenclature. — La nomenclature de ces corps est assez compli- quée. Le plus simple est d'en faire des dérivés de l'acide acrylique, le coi'ps : CH^ _ C.O — COC«H^ (I) \\ CN — G« — COOCH^ est le |5 méthyl, p benzoyloxy, « cyanacrylate de métliyle C«H^ — GpO GOGH' ■ (II) Il GN — G« — GOOGH^ le |3 phényl, p acétoxy, « cyanacrylate de métliyle. On peut rapporter (I) à l'acide crotonique et le nommer benzoy- loxy cyanocrotonate de métliyle. De même (II) est l'acétoxycyanocinnamate de métliyle. Enfin, si l'on veut indiquer que ces corps dérivent de l'acide cya- nacétique, que pour le premier radical d'acide la liaison se fait par le carbone; pour le second, par l'oxygène et qu'on a alfaire à un iiitrile et non à une carbylamine ; (I) sera le aC acétyl ,50 benzoyl aG cyanacétate de métliyle ; (II) le «G benzoyl jSO acétyl '/.G cyanacétate de métliyle. En résumé, dans les réactions que nous avons envisagées, les J. DUGAST. — LES PRINCIPALES VARIÉTÉS d'oLIVES d' ALGÉRIE 467 étliers acylcyanacétiques se conduisent comme des alcools tertiaires dont les dérivés alcoylacylés peuvent être considérés comme les éthers oxydes et nos dérivés acylacylés comme les éthers sels. M. J. DUGAST Directeur de la Station agronomique et œnologique d'Alger SUR LES PRINCIPALES VARIÉTÉS D'OLIVES D'ALGÉRIE [634.i53.i] — Séance du 10 août — La question de l'olivier n'est pas nouvelle en Algérie et, peu après la conquête, les premiers colons se préoccupèrent de mettre en valeur les oliviers sauvages et d'utiliser le produit des oliviers cul- tivés pour la fabrication de l'huile. Des eflbrts considérables furent faits à cette époque et, en i854, l'Algérie arrivait déjà avec une pro- duction importante. Le mouvement en faveur de l'olivier paraît ensuite s'être sensiblement ralenti, et bientôt tous les eftorts des colons se tournèrent vers la culture de la vigne. Mais, en 1893, à la suite de l'abondante récolte de vin dans la Métropole et de la mévente qui s'ensuivit, la question de l'olivier fut de nouveau remise à l'ordre du jour, et depuis elle n'a cessé de s'imposer de plus en plus. Les diverses assemblées délibérantes de la Colonie : Conseil supérieur, Conseils généraux, Délégations financières, se sont, tour à tour, occupées de cette importante question et ont émis des vœux j)0ur demander qu'on favorise cette branche de la production algé- rienne. En 1900, le Gouvernement général décidait d'accorder des primes aux agriculteurs qui créeraient des olivettes, soit par j)lantation, soit par greftage de sauvageons. Mais, avant de planter ou de greffer, il faut savoir quelles variétés il convient de choisir pour obtenir le maximum de rendement en huile. C'est alors qu'apparut la nécessité de faire l'étude de la composition des nombreuses variétés d'olives disséminées sur le territoire de l'Algérie. D'autre part, la culture de l'olivier et la production des olives 468 CHIMIE n'est qu'une partie de l'oléiculture et, si on doit encourager les colons et les indigènes à produire beaucoup de matière première de bonne qualité , il ne faut pas se désintéresser des transformations que la récolte est appelée à subir et chercher à l'utiliser dans les meilleures conditions possibles. Or, personne ne conteste que la fabrication de l'huile est encore souvent rudimentaire et qu'il reste beaucoup à faire pour augmenter le rendement des olives et améliorer la qualité de l'huile , aussi bien chez les européens que chez les indigènes. C'est pourquoi l'étude des huiles et des tourteaux n'était pas moins indispensable que celle des olives, pour avoir les éléments d'appréciation nécessaires pour réaliser une^ amélioration d'ensemble et placer les producteurs algé- riens au premier rang. C'est ainsi que certains pays voisins, comme le Portugal, l'Italie, la Tunisie, etc. sont arrivés à des résultats considérables par des recherches méthodiques analogues à celles que nous venons d'indi- quer, nous donnant l'exemple à suivre pour déterminer les règles dune bonne fal^rication. L'étude des huiles algériennes était encore utile à un autre point de vue, pour déterminer les variations des caractères chimiques et physiques dans les produits actuels, avec des données obtenues par l'examen d'échantillons de provenance authentique. Tandis que le Gouvernement général faisait faire une enquête sur les conditions économiques de la culture de l'olivier et la fabrication de l'huile, il nous chargeait de faire l'étude des olives, des huiles et des grignons de la récolte 1901-1902. Un travail aussi considérable demande nécessairement beaucoup de temps et, commencé à la fin de 1901 , il n'a pu être achevé qu'en 1903. Ces diverses études seront publiées avec tous les détails qu'elles comportent, mais il nous a paru utile de présenter, dès aujourd'hui, au Congrès de l'Association française pom' l'Avancement des Sciences, le tableau contenant le résumé des déterminations effec- tuées sur les olives. La culture de l'olivier en Algérie ne peut prendi'e une extension nouvelle qu'à la condition de cultiver de bonnes variétés et d'amé- liorer la fabrication de l'huile. J. DUGAST. — LES PRINCIPALES VARIETES D OLIVES D ALGERIE 469 Composition des olives PROVENANCE Poids de 100 olives en grammes DANS 100 GRAMMES D'OLIVES des olives et nom des variétés Pulpe Noyaux (coques et amandes) Amandes Pulpe HUILE Amandes Total Ténes, olives noires 92 66.69 33.31 3.33 23.35 I 52 24.87 — — panachées. . . . » » » » » » » Fort -National, olives Acha- melal 260 81.53 18.47 1.84 13.76 0.832 14.59 — olives Azibli. . 3o5 80.40 19.60 1.85 10. 36 0.833 16.57 — grosses olives . 457 83.11 16.89 1.09 19.75 0.70 20.45 — petites olives. . 205 79.18 20.82 1-79 14.70 o.8o5 i5.5o Tlemcen, olives sauvages Zem- boudj no 78.98 21.02 3.35 15.07 i.5o 16.57 — olives Beksi (petite vai-iétc assez rare). 198 82.25 17.75 1.53 10. o3 0.68 10.71 — olives demi grosses Teltsi 340 72.05 27.95 1-94 16.41 0.886 17.29 — grosses olives Limi . 594 87.75 12.25 0.96 20.68 0.435 2I.Il5 Haut-Sébaou, olives Aimel . . l32 70.82 29.18 2.85 16.18 1.28 17-46 — — Aabas . . 140 71.04 37.93 3.87 23.58 1.74 25-32 — — Achamelal io5 62.07 30.34 2.12 14.60 0.954 17-46 — — de M. Pa- tard 172 69.66 28.96 4.28 i5.i5 2.3l i5.55 Jemmapes (Communal de Ro- bertseau), olives greffées Médal. . 160 87.07 12.93 2.12 i3.io 0.77 13.87 — olives greff. Garel. 186 70.20 29.80 1.73 32.98 0.89 33-87 — — vert, grosses 36o 76.42 23.58 2.80 20.64 0.86 21. 5o — Picholine de Mon- sieur Basso . . . 3-0 » » 1.92 » » » — olives ordinaires de M. Basso .... i53 70.59 29.41 4.20 13.62 1-93 i5.55 — olives gros. Médal. 254 85.03 i4-97 1-79 17.89 0.706 18.64 — — Basso I" va- riété i64 78.51 21.49 3.46 14.26 1.55 i5.8i — olives Basso 2"' va- riété i64 75.02 24.98 2.93 13.76 1.27 i5.o3 — olives Médal. . . . 23o 78.54 21.46 3.16 15.64 i.5o 17.14 Bougie, olives Médal 200 82.00 19.00 2.88 14.60 1.29 15.89 Palestro, olives Zitoun .... i64 74.43 25.57 2.43 13.46 1.925 15.38 — — Bouchrouk Té- faïh 426 80.00 20.00 1.41 20.28 0.63 20.91 — olives Djerradj . . . 345 84.93 15.07 1.62 16.08 0-779 16. 85 Gouraya, — Ouallade . . . 107 79-91 29.09 2-49 16.23 1.07 17.30 Ces chiffres se rapportent aux olives telles qu'on les trouve dans les moulins , et non à des fruits choisis et cueillis à maturité parfaite. 4:o CHIMIE Composition des olives (suite) PTJnVPN" A VPF Poids de loo olives en grammes DANS 1 00 GRAMMES D'OLIVES ir ^\j \ £<-> --\..> v^iL. des olives et nom des variétés Pulpe Noyaux (coques et amandes) Amandes Pulpe HUILF Amandes Total Goui-aya, olives Reddoii. . . . i48 80.41 ; 19-59 1.32 14.70 0.59 15.29 — — Djeraiz . . . . 555 85.58 14.22 i.o5 23.88 0.47 24.35 — petit chembal . . . . 125 » » » 18.80 1.26 20.06 Oued-Marsa, olives Belloiit . . i55 71.55 28.45 3.18 14.32 1.44 15.7& — — Kasri . . . i63 80.00 20.00 2.12 17.50 0.95 18.45 Arba, olives Kasri 200 83.75 16.25 1.68 17.05 0.75 17.80 Taher, olives El Hanira .... i56 79 -37 20. 63 2.53 17.30 i.i3 18.43 — — Barbachi .... 125 79-39 20.61 0.34 16. 5o o.i5 16. 65 — — Elkaclila (petites olives noires. . io5 81.65 18.35 2.57 16.66 i.i5 17.81 — — Zidane 182 78.60 21 40 2.62 14.32 1.18 i5.5o Tababort, olives El djeraz. , . 192 82.20 17.80 1.45 16.73 0.65 17.38 — — El Amra . . i35 79-66 20.34 2.67 17.12 1.20 18.32 — — Hidane . . . 121 70. 38 29.62 4.17 15.40 1.87 17.27 — — Boukahila. . 88 76.73 23.27 3.45 18. o3 1.55 19.57 Mizrana, olives Boukahila . . 85 64.54 35.46 3.15 25. o3 1.41 26.44 Djurjura, olives Azebli .... 128 80.00 20.00 1.26 24.12 0.57 24.69 — — Azeradj. . . . 226 75.67 24.33 2.39 19.35 1.07 20.^ — — Achamelal . . 164 78.00 22.00 1.66 12.60 0.748 13.34 Bel-Abbès, olives Grouzalès. . 196 79.60 20.40 2.5l 14.33 i.i3 15.46 — — Morouna. . 325 80.62 19.38 1.25 17.33 0.57 17 90 — — Mouron. . . 207 82.62 17.38 2 97 11.73 1.33 i3.o6 AzeffouTn, olives Azemour. . . 73 34.87 45.13 3.19 25. 5o 1-44 26.94 Talîabort, olives de M. Lochard. 173 71.43 28.57 3.20 19-14 1-44 20. 58 AkJjou, olives Bauchout . . . 280 81.64 18.36 1.33 24.07 0.60 24.67 — — Elvamly .... i55 70.73 29.20 2.91 30.07 1.32 31.39 — — Djerraz 404 83.84 16.16 1.36 19-33 0.64 19-97 Haut-Sébaou. 180 78.50 21. 5o 1.85 20.91 0.83 21.74 Dra-el-Mizan, olives de Bel- khodja Chérif. 246 76.40 23.60 2.29 20.41 i.o3 21.44 — olives de Bou- ghai'-Ahmed . 225 78.03 21.97 1.37 14.21 0.63 14.88 — olives Michel . . 168 76.34 23.66 1.84 17.70 0.83 18. 58 — — Adjeraz. . » 80.00 20.00 » 26.49 0.91 27.40 — — Petit Chem- lal. . . . » 46.00 54.00 » 10.92 1.69 17.61 — — GrosChem- lal. . . . 256 » » » 21.80 i.5o 23. 3o — — Zeboudj . 1 i35 70 25 » 18.40 1.38 19.78 D"" CH. SCHMITT. — TOXICITÉ DU CACODYi:,ATE DE STRYCHNINE ^jl M. le D^ Charles SCHMITT A Paris TOXICITÉ DU CACODYLATE DE STRYCHNINE [CiS.g] — Séance du ii août — Le cacodylate de strychnine qui nous a servi dans nos expériences a été préparé par action directe de l'acide cacodvlique sur la stry- chnine en présence d'alcool absolu. Le titre de notre solution était de o gr. 2112 de sel par cent centi- mètres cubes. Un centimètre cube contenait o gr. 001639 d'alcaloïde et o gr. 000^73 d'acide. Nous avons opéré sur des chiens en injections sous-cutanées avec des doses fortes (o gr. 002 à o gr. 001 de sel par kilogramme d'ani- mal), avec des doses moyennes (o gr. 001 à o gr. 00042), avec des doses faibles inférieures à o gr. 00042. Ces dernières ne produisent pas la mort, l'animal se remet dans un délai plus ou moins long. La toxicité du cacodvlate de strvchnine , c'est-à-dire la dose minima mortelle pour un kilogramme de chien est donc de o gr. 0004224. Elle correspond à o gr. 0003278 de strychnine et o gr. 000094G d'acide cacodylique. Les observations que nous avons pu faire sont les suivantes : 1°) Les doses mortelles faibles tuent plus rapidement que les doses fortes. Avec les premières la mort est survenue dans un espace de temps moyen de quinze minutes, avec les secondes la moyenne de la survie est de vingt-sept minutes. Le P' Ricliet qui. le premier, a signalé ce paradoxe, admet qu'avec les doses élevées « la substance grise de la moelle est si fortement empoisonnée qu'elle ne peut plus donner de convulsions et que le tétanos musculaire est remplacé par la résolution de tous les muscles ». Or « c'est le tétanos musculaire généralisé qui est la cause immédiate de l'asphyxie promptement mortelle ». En général nous n'avons pu distinguer que deux phases dans la marche de l'empoisonnement : une phase choréique précédée de 472 CHIMIE légers tremblements , quelquefois d'hyperesthésie, d'une durée de deux à trois minutes ; une seconde phase tétanique lui succède sans interruption; elle se termine très rapidement par la mort. D'après Ricliet , on peut observer dans l'intoxication habilement conduite et pour ainsi dire atténuée par le chlorhydrate de strychnine , quatre phases se suivant dans un ordre bien marqué. Période tétanique, période convulsive , période choréique , période de résolution ; l'une ou l'autre de ces périodes pourrait manquer, si la dose est trop faible ou trop forte. Avec le cacodylate de strychnine il y a, la plupart du temps, absence de convulsion et les mouvements choréiques précèdent tou- jours les contractures tétaniques. Le cacodylate de strychnine ne paraît pas s'accumuler. Deux chiens ayant reçu, en deux fois, à /^o minutes d'intervalle, l'un o gr. 000459 de sel par kilogramme, l'autre o gr. 000428, ont survécu. Ils étaient complètement rétablis quatre heures après la première injection; le premier avait résisté à quatre attaques tétaniques, le second à cinq. Les jeunes sujets présentent une résistance plus grande. L'état de santé intervient aussi. Les animaux malades présentent certaines particularités. Un chien complètement paralysé, ayant reçu o gr. ooio56 par kilogramme, n'a présenté que de faibles convulsions, contrairement à ce que permettait de supposer l'observation de Magendie, qui avait remarqué que chez un hémiplégique les effets de la strychnine étaient plus marqués du côté paralysé. D'un autre côté , un chien choréique a vu ses tremblements diminuer sous l'ac- tion d'une dose faible de strychnine (o gr. 000214); i^ ^^ présenté de secousses tétaniques qu'après avoir reçu une nouvelle dose égale à la première : mais il présenta à la suite de la période de contractures une série de convulsions auxquelles il résista très bien. Enfin , chez un chien suspect de rage , la phase choréique fit com- plètement défaut. L'attaque tétanique fut extrêmement violente au début, puis l'animal ne fit plus que quelques légers soubresauts; le pouls s'accéléra de plus en plus, il devint irrégulier et présenta un arrêt toutes les trois ou quatre pulsations. Le temps qui s'était écoulé entre la première contracture et la mort fut de 7 minutes. Dans tous les autres cas il n'avait pas dépassé 4 minutes. Il semble donc que la toxine rabique ait modifié le mode d'action du cacody- late de strychnine. Il est très intéressant de rapprocher la dose mor- telle du cacodylate de strychnine de celle des autres sels de cet alcaloïde. D»" Cil. SCHMITT. — TOXICITÉ DU CACODYLATE DE STRYCHNINE /^"jS La dose mortelle généralement admise pour le nitrate de stry- chnine, seul sel pour lequel nous ayons trouvé des chilTres précis, est de o gi\ ooo^S par kilogramme de cliien. Pour comparer entre elles les toxicités de plusieurs sels d'un même alcaloïde, il nous semble nécessaire de rapporter les résultats au poids d'alcaloïde contenu, poids variable , comme le montre le tableau suivant : Sulfate de strychnine : (C2.ip2N802)2SO*H* + 5H«0 contient 78,04 0/0 d'alcaloïde Chlorhydrate : (C«'H"N«0*HC/ + I — H*0 contient 84,02 0/0 d'alcaloïde Nitrate : C2iir2*N»0«N05H contient 84,i3 0/0 d'alcaloïde Cacodylate : C«'H«2N20« (CFP) 2A.SOOH contient 77,62 0/0 d'alcaloïde On obtient, suivant la manière de calculer, des résultats qui sont loin d'être négligeables. Dans le cas qui nous occupe, si nous com- parons les deux sels, le cacodylate de strychnine est 1,77 fois plus toxique que le nitrate; si nous adoptons Tévaluation en alcaloïde, nous voyons que la strychnine à l'état de sel cacodylique est 1,92 fois plus active qu'à l'état de nitrate. — Il n'y a pas à faire intervenir ici le pouvoir toxique propre de l'acide, qui entre dans la proportion de o gr. 0000946 par kilogramme d'animal et dont l'effet serait négli- geable s'il était employé seul. Chaque sel d'alcaloïdes est un nouveau poison d'action propre. Un acide inactif par lui-même peut modifier l'eliét physiologique de la base à laquelle il est combiné. 4^4 MÉTÉOUOLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE M. l'Abbé RACLOT Directeur de TObscrvatoire météorologique de Langres RÉSUMÉ DES RÈGLES PRATIQUES DE LA PRÉVISION DU TEMPS A COURTE ÉCHÉANCE SUR LÉ PLATEAU DE LANGRES [551.5:44.33] — S(''ance du 5 août — Comme suite à ma communication de l'année dernière au Congrès de Montauban. je me propose de vous entretenir aujoui'd'hui, non des règles de pi'évision dues à l'étude de la météorologie dynamique et patrimoine commun de tous les météorologistes , mais plutôt de la combinaison de ces règles avec les signes climatologiques ou prodromes de changements empruntés à la nature du climat langrois. Or, ce climat otl'rant deux physionomies ])ien distinctes, celle de l'hiver et celle de l'été, nous les considérerons séparément et cette année nous nous bornerons à l'examen de la saison d'hiver. Prévisions d'Hiver sur le Plateau de Langres Ces prévisions concernent spécialement : i° le gel et le dégel ; 2° la pluie ou la neige ; 3° la nébulosité. I. Gel et Dégel a) Du i5 novemlîre au i5 mars, période hivernale, les gelées devant durer plusieurs jours, sinon même plusieurs semaines, s'an- noncent ordinairement, à la fin d'une période cj'cloniqiie , pat* le retour du baromètre au-dessus de la normale et la rotation directe du vent de l'W. au N. Le refroidissement sera alors d'autant plus intense et durable que la hausse barométrique aura été moins consi- dérable et plus faible ; car. si celle-ci est rapide et devient excessive , dépassant par exemple la cote ^-5, le refroidissement s'arrêtera et l'on n'aura que de faibles gelées nocturnes ; le vent pourra même rétrograder à 1'A^^ et ramener un léger récliauffement. La gelée peut encore survenir sous un régime anticyclonique per- l'abbé RACLOT. — RÈGLES PRATIQUES DE LA PRÉVISION DU TEMPS 4^5 sistant depuis quelque temps avec les courants équatoriaux. Elle est, clans ce cas, précédée du passage du vent aux régions Nord, sans modification appréciable de pression, et se produit lentement. Un autre cas plus rare, c'est celui de la gelée survenant par rota- tion rétrograde du vent du S. au N.-E. par le S.-E. Cette rotation peut se produire par régime anticyclonique, annonçant alors un refroidissement lent et progressif, ou par régime cyclonique ayant pour effet un refroidissement non moins sensible et plus rapide. Quoi qu'il en soit, le régime des gelées étant établi, à quels signes prévoir le dégel ? b) Le vent quitte les régions Est pour gagner le S. ]}Q.r le S.-E. Le baromètre, encore élevé, baisse, mais lentement, puis oscille dans le voisinage de la normale. L'inversion de température reste très accentuée ; au sommet, les minima se relèvent dans le voisinage de o° et le sol se couvre de givre la nuit, tandis que de grands froids noc- turnes persistent dans la vallée : le dégel est proche. II. Pluie ou Neige Quand on prévoit le mauvais temps, l'hiver, sur le plateau de Langres, il est très important de pouvoir annoncer sous quelle forme il se produira. Or les signes de neige diffèrent essentiellement de ceux de pluie. 1° Signes de neige Faisons plusieurs suppositions. a) La pluie va se changer en neige. — Le régime pluvieux est installé depuis plus ou moins longtemps ; mais le baromètre , qui oscillait jusqu'alors dans le voisinage et peu au-dessous de la nor- male, descend rapidement. Le vent continue de soufller de S. à W., mais avec une vitesse non proportionnelle à la rapidité de la baisse barométrique, le ciel est couvert de nimbus dont les déchirures laissent entrevoir par intervalle des cirrus chassant de l' W. : la neige va succéder à la pluie par rotation directe du vent à l'AV.-N.-W. dès que la cote barométrique avoisinera ^4^ > et couvrira rapidement le sol d'une couche qui aura chance de durée. h) La neige va continuer. — Le lendemain, après une hausse momentanée du baromètre , qui reste bien inférieur à la normale , une nouvelle baisse se produit par rotation rétrograde du vent au 4^6 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE S.-W. : nouvelle chute de neige avec retour du vent au N.-W. et accentuation du refroidissement. c) Le temps va redevenir neigeux. — Apres quelques jours de hausse harométrique au-dessus de la normale par vent de N. à E. et froid sensihle sur un sol couvert de neige, le vent s'afl'aiblit, tourne à N. , puis à S.-W. par l'W. , le ciel se couvre de nimbus, la tempé- rature s'adoucit, le baromètre baisse et retombe au-dessous de la normale : pas de dégel à craindre , le thermomètre eût-il remonté dans le voisinage de o°, mais nouvelles neiges à prévoir. cl) Poussière de neige. — En temps de gelée, sous un régime de surpression et de courants polaires, survient une faible baisse baro- métrique accompagnée de rotation rétrograde, mais incomplète, du vent de N.-E. au N.-W et non jusqu'au S.-W. : signes de neige fine, peu abondante et peu prolongée. e) Neige fine et prolongée. — Une dépression importante et médi- terranéenne sui'vient en plein régime de vent N.-E., le ciel se couvre d'un voile de cirro-stratus de plus en plus épais par un froid d'au moins 6 h j" : la neige va tomber en tourbillons et d'autant plus ténue que le froid est plus sensible , de sorte qu'une tourmente de vingt-quatre heures ne fournira guère qu'une couche de 8 à lo cen- timètres. f) Grains de neige. — Des nimbus abondent au milieu du jour par vent assez fort du N. avec faibles oscillations barométriques vers la cote ^65 : prévoir quelques grains de neige, flocons très peu chargés d'humidité qui ne laisseront sur le sol que des traces insi- gnifiantes, destinées à être mangées par le vent. 2° Signes de pluie a) La neige va se changer en pluie. — Pendant une période nei- geuse (vent variable de S.-W. à N.-W. avec le baromètre bas), la hausse barométrique qui accompagne la rotation directe du vent de S.-W. à N.-W. a dépassé la normale et la baisse consécutive de la rotation rétrograde du N.-W. au S.-W n'est plus que très faible, tandis que le vent fraîchit en accentuant son recul jusqu'au S. : c'est le dégel qui s'annonce, surtout si les murs se couvrent de givre, et la neige va faire place à la pluie. h) Le régime pluvieux va continuer. — Le baromètre oscille entre 765 et ^55, par vent assez fort de S. à W., baissant quand le vent rétrograde au S. et montant rapidement dès qu'il retourne à S.-W. et W. : persistance du régime pluvieux avec embellies, temps doux. c) Pluie fine ou bruine. — Le baromètre est supérieur à la nor- l'abbé RACLOT. — RÈGLES PRATIQUES DE LA PRÉVISION DU TEMPS 477 maie et n'a qu'une faible tendance à la baisse. Un voile de stratus couvre le ciel par vent modéré de S.-W. à W. : bruine qui peut durer plusieurs jours sans éclaircies et sans modification sensible de pression ni de température. cl) Verglas et pluie. — A la fin d'une période de gelée, le vent, quittant le N.-E., passe lentement au S. par lE., le baromètre baisse dans le voisinage et un peu au-dessous de la normale , des cirrus en bandes dégénérant en cirro-stratus et chassant de S.-W. apparais- sent et couvrent bientôt tout le ciel d'un voile de plus en plus épais , le récliaullement n'est pas encore sensible et la température reste inférieure à — 5" : neige improbable ou peu abondante et surtout peu durable, plutôt verglas suivi de réchauftement et de pluie. La situation est alors toute différente de celle que nous avons signalée tout à l'heure auparagraphe c des signes de neige. Dans ce paragraphe, il s'agissait d'un vent rétrograde du N.-E. au S.-W. avec adoucisse- ment de température semblant annoncer la pluie, tandis que la neige seule était à prévoir. Ici, au contraire, en dépit de la persistance du froid, ce n'est pas la neige mais le verglas et la pluie qu'il faut pronos- tiquer. Dans les deux cas il y a baisse barométrique avec appel de ralliement au S.-W. des courants supérieurs, cirrus et dérivés. Mais, pour obéir à cet appel, les courants de surface prennent deux routes opposées. Dans le premier, ils vont du N.-E. au S.-W. par le N.-W. avec esprit de retour, dans le second ils gagnent le S. par le S.-E. avec espoir de stabilité. Il est à remarquer, en effet, que les vents S.-W dus à une rétro- gradation du N.-E ou du N. à l'W. reviennent ordinairement, après un ou deux jours, à leur première direction, qu'ils ont provisoirement quittée pour aller faire provision de neige et où ils retournent pour maintenir le froid. Les vents, au contraire, qui sont venus du N.-E. rallier le S. par la voie de l'E. se fixent à leur nouvelle direction. S'ils s'en écartent quelque peu, soit au S.-E., par faible rappel vers l'E., soit au S.-W., sur l'invite des courants supérieurs, ils ne tardent pas à revenir au S., leur quartier général. Les vents S.-W., descendus du N. par l'W., sont donc des vents de transition, qui n'ont pas le temps de produire un récliaullement sérieux et qui d'ailleurs emmagasinent sur leur passage plus d'humi- dité que de chaleur. Par contre, les vents S. descendus du N.-E. par l'E. sont des courants de régime qui, sur leur parcours, font une plus ample provision de chaleur que d'humidité et par leur conti- nuité substituent à l'air froid de l'Europe Orientale la tiède atmos- phère du Midi de la France. 4^8 MET^OROLOGIK ET PHYSIQUE DU GLOHE III. Nébulosité En hiver, il n'y a qu'une faible relation entre la nébulosité et la pression barométrique. Ainsi, une pression excessive (de ^70 et au-dessus) peut coïncider avec une nébulosité totale, de même qu'une pression un peu inférieure à la normale (par exemple de 760), avec un ciel peu nuageux ou serein. La prévision de la nébulosité doit conséquemment . sans négliger la pression, tenir compte d'autres éléments. En dehors des cas où l'on prévoit le mauvais temps, pluie ou neige, par la même forte nébulosité, quels sont donc ceux où il faut encore l'annoncer, quoique sans précipitations aqueuses de quelque importance ? a) Après un régime pluvieux, un anticyclone s'établit sur la France, tandis que les dépressions continuent de balayer tout le nord de l'Europe; le baromètre se maintient au-dessus de 770; mais le vent continue de souffler des régions Ouest : probabilité de temps nébuleux, sans pluie, mais sans soleil. b) Nous ne sommes plus au centre, mais sur les bords occidentaux de l'anticyclone. Celui-ci, en s' étalant à l'E., a refoulé sur l'Océan les dépressions qui nous avaient auparavant envahis. Le baromètre est remonté au-dessus de la normale; mais le vent, d'ailleurs faible, rétrograde du S. au S.-E. : le plateau va se couvrir de brouillards qui le refroidiront lentement en produisant le givre. c) Signes tirés du givre. — Puisque nous venons de parler du givre, disons ce qu'il faut augurer de son apparition au point de vue de la prévision du temps. Le givre se forme sur le plateau de Langres dans deux circons- tances : sous un régime de surpression et sous l'influence d'une dépression prochaine. Dans la première, qui est celle que nous avons signalée tout à l'heure, il annonce le calme et le beau ; car, pendant que le plateau reste enténébré plusieurs jours par le brouillard, les contrées circonvoisines jouissent d'un ciel serein. Dans la seconde, c'est-à-dire si le givre annonce l'approche dune dépression, il annonce en même temps à quel genre d'ennemi, pluie ou neige, nous aurons affaire. La neige et le givre ont à la fois deux physionomies analogues et deux caractères opposés. Rien ne ressemble plus à la neige que le givre et rien n'est plus contraire à l'apparition de la neige que la for- mation du givre. Quand, sous un voile d'alto-stratus chassant de S. -AV., vient à se former par vent S. un brouillard de givre provo- DAVID. — ROULEMENT DU BROUILLARD 479 quant un chute de température de o ' à — 3 ou 4" avec baisse baro- métrique dans le voisinage, ou peu au-dessous de la normale, ce refroidissement n'est que passager, la pluie est proche avec hausse de température de 5 à 6". De là, le proverbe local : La neige ne prend pas sur le givre. Aussi, le brouillard qui accompagne la neige ne laisse-t-il sur les arbres aucune trace de givre et, si celui-ci se l'orme ensuite, la neige ne reparaît plus. Il n'y a d'exception à cette règle que dans les très basses températures (par exenq)le inférieures à — io°). Dans ce cas, le baromètre étant d'ailleurs beaucoup plus bas que dans le précédent, le givre peut se former le matin et la neige lui succéder la soirée, après disparition du brouillard, mais toujours comme précédemment à la suite d'une hausse sensible (de 5 à 6°) du thermomètre. Le brouillard de givre qui se forme sous un régime de mauvais temps révèle donc une inversion locale et passagère de la tempéra- ture, qui, au niveau du sol, s'abaisse au-dessous de celle des nuages pendant la durée de ce brouillard, mais se relève à son point primi- tif aussitôt après sa disparition. En conséquence, la seule tempéra- ture qui inllue sur la nature des précipitations aqueuses, pluie ou neige, étant celle de la région des nuages et cette température restant notablement supérieure à celle du brouillard , nous aurons ordinai- rement, à la suite du givre, la pluie et exceptionnellement la neige : la pluie, si le minimum du sol n'a pas dépassé — 3 ou 4"; et la neige^ si ce minimum s'est abaissé jusqu'à — lo'^. M. DAVID Météorologiste-adjoint à l'Observatoire du Puy-de-Dôme ROULEMENT DU BROUILLARD OBSERVÉ DANS LE RAVIN S.-W. DU PUY-DE-DOME • [531.5:: (44.59)1 — Séance du 5 août — Il m'est arrivé, à trois reprises différentes, d'observer au Puy-de- Dôme un phénomène tout à fait particulier, que j'ai désigné sous le nom de roulement du brouillard. Ce fait m'avait frappé une pre- mière fois au mois de février 1902. Je l'ai observé de nouveau deux 48o MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE fois durant l'hiver 1902-1903 et j'ai pu effectuer quelques détermina- tions de température. Quand (après une période assez longue de froid intense , pendant laquelle le Puy-de-Dôme, déjà recouvert de nei^e, reste constamment et sans interruption entouré d'un brouil- lard épais), le beau temps arrive, le brouillard commence à dispa- raître d'abord sur le sommet même de la montagne. On voit alors au-dessus le ciel pur, et la montagne elle-même apparaît comme enveloppée d'un voile peu épais (une dizaine de mètres et quelque- fois même moins) de brouillard assez compact qui semble faire l'ascension de la montagne du côté d'où vient le vent (généralement N.-E. ou E. N.-E.) et retomber de l'autre côté lentement, sans atteindre la partie culminante de la montagne où se trouve située la tour de l'Observatoire. Souvent, dans ces conditions, l'éperon situé au S. S.-W. de la montagne est ainsi complètement dégagé du brouillard. C'est ce qui m'a permis d'observer sur la pente à l'E., et près de cet éperon, le phénomène suivant : Tandis que toute la masse du brouillard semble s'écouler sur les flancs S. et S.-W. du Puy-de-Dôme dune façon très lente, il arrive quelquefois d'observer dans le ravin qui borde cet éperon à l'E. et dont la pente est d'environ 45", un fleuve de brouillard animé d'une vitesse très grande. Ce fleuve roule au-dessous d'un léger voile de brouillard qui atteint à peine 5o centimètres d'épaisseur et conserve sensiblement la vitesse de toute la masse environnante. Au contact supérieur de ces deux couches animées de vitesses différentes, on observe des tourbillons tout à fait analogues à ceux se formant sur les rives des cours deau; il en est de même au contact du sol, et c'est ce qui permet bien de voir les différences de vitesse des deux couches. On éprouve d'ailleurs la sensation d'un froid très vif quand on descend dans la couche de brouillard animée d'une plus grande vitesse. Mais ce phénomène dure peu, une demi-heure, trois quarts d'heure au plus. Les mesures de température effectuées le 6 décembre dernier à différents niveaux, dans le brouillard et au-dessus, ont donné les nombres suivants : Température dans la couche uniforme de brouillard sur le sommet même, à côté de l'abri, à .environ 4 à 5 mètres au dessous du niveau supérieur du brouillard — 14° Au pied de la tour (niveau supérieur du brouillard) — 10" Même endroit pendant un passage de brouillard — i"3°3 Sur le parapet de la tour, 8 mètres au-dessus du brouillard . — f ■70 G. GUILBERT. — PRÉVISION DU TEMPS 48l Dans la couche de brouillard en roulement, sur le chemin des Mulets allant au Petit-Puy-de-Dôme, à loo mètres du restaurant on a : Thermomètre posé sur la neige — 5° o — fronde à o'^^So au-dessus du sol — 12° o — — à i"\5o — _ i3oq — — à o"^3o — • . _ 1205 — —ài-^ — _ 1303 Au sol, sur la neige 50 ^ Ces mesures, faites entre i heure et i h. 3o du soir, montrent que la température décroît d'abord très rapidement en s'écartant du sol et conserve ensuite la même valeur presque jusqu'à la partie supé- rieure du brouillard où sur une très petite épaisseur la température croît de nouveau très rapidement. C'est, je pense, à ces différences de température qu'on peut attribuer le phénomène observé. La masse d'air ainsi saturée d'humidité et à une température très différente des couches supérieure et inférieure se comporte alors comme un véritable liquide et s'écoule dans le ravin comme un torrent. M. Gabriel GUILBERT Météorologiste à Caeii (Calvados) DE LA PRÉVISION DU TEMPS PAR LA PRÉVISION DES VARIATIONS BAROMETRIQUES _^^____ [55i-5] — Séance du 6 août Au Congrès de Caen, en 1894, c'est-à-dire il y a 9 ans, je décrivais une méthode de prévision du temps basée sur l'observation simulta- née du baromètre et des nuages, ou plutôt des successions iiung-euses. Mais il est évident que la Météorologie possède une autre base de prévision du temps, tout aussi précieuse , beaucoup plus répandue : je veux parler des cartes isobariques. Au Bureau central météorologique de France, comme dans tous les bureaux similaires d'Europe et d'Amérique, c'est l'étude de ces 3i* - 482 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE cartes qui permet rétablissement de la prévision du temps, aussi bien des tempêtes que des avertissements agricoles. Ce service ne date pas d'hier : il en est à sa 45^ année d'existence; il a donc pour lui la durée , l'expérience et l'examen approfondi et quotidien des cartes isobariques doit certes avoir permis la fixation des lois de la prévision. Hélas ! il n'en est rien, car ces lois se résument en deux lignes : « C'est une question de pure pratique », écrit M. Angot. le savant professeur. Nous n'avons pas de règles étroites, dit M. Mascart, l'éminent directeur du Bureau central, mais seule- ment une longue pratique et une longue expérience. Voilà des déclarations formelles autant que décisives. Elles sont, de plus, d'une rigoureuse exactitude. Après un demi-siècle d'exis- tence, la prévision du temps n'a encore ni règles, ni lois. Elle n'a pour se baser que l'expérience acquise et c'est bien peu à notre avis, car l'expérience est toute personnelle , ne se transmet pas , ne s'enseigne pas et, quand celui qui la possède quitte son poste, le successeur se retrouve sans boussole, puisqu'à défaut de l'expérience il n'a pour se guider aucune loi précise, aucune règle invariable. De cette capitale lacune naît fatalement l'absence de tout progrès. J'ai le désir, dans cette communication, de montrer que l'étude prolongée des cartes isobariques peut conduire, non pas seulement à l'expérience , mais à l'établissement de règles étroites , aussi impor- tantes que faciles. L'un des principes de la météorologie actuelle, démontré dans tous les traités, est celui-ci : La force du vent est proportionnelle au gradient. Or, ce principe est inexact. L'observation prouve, en effet, qu'avec un même gradient, il peut se produire indiiféremment des vents faibles, modérés ou forts. Des gradients ne paraissant devoir produire que des vents modérés en déterminent parfois de violents, tandis qu'inversement des vents faibles s'observent par un gradient proportionnellement beaucoup plus sensible. En résumé , des observations prolongées de la force du vent sur les cartes isol)ariques semblent ne révéler qu'un désordre profond. Les différences constatées paraissent le plus souvent inexplicables et composent un ensemble de faits discordants, incapables en apparence de se plier sous une loi unique. Cette loi existe cependant et nous croyons l'avoir découverte après plusieurs années de patientes recherches. G. GUILBERT. — PRÉVISION DU TEMPS 483 En voici l'énoncé : S'il n'est pas exact de dire que la force du vent est proportionnelle au gradient — principe purement théorique mais injustifialile en fait — il existe un vent animé d'une vitesse déterminée, mesurable selon le gradient et auquel nous donnerons le nom de vexï normal. De nos mesures, il résulte : Que le vent normal est faillie pour un gradient de i™™ par'Vleo-ré; modéré pour un gradient de 2™'"; fort, avec 3™'"; violent, avec 4""". En dehors de ces vitesses proportionnelles, les vents sont anor- maux. Ou bien par excès, c'est-à-dire trop forts, en raison de la pente atmosphérique; ou bien par défaut, c'est-à-dire trop faibles, en consi- dération du resserrement des isobares. Or, voici l'application pratique de cette loi : « Lorsque le vent est anormal par excès , il entraîne une hausse barométrique survenant dans les 24 heures , hausse proportionnelle en général à l'excès de vent constaté. » Au contraire : « Lorque le vent est anormal /)rtr défaut, une baisse barométrique se produit également dans les 24 heures, baisse le plus souvent pro- portionnelle à l'anomalie observée. » Et, par voie de conséquence : « Le vent normal n'amène ni hausse, ni baisse : c'est l'état station- naire. » Par conséquent, à l'aide de ces principes, de ces règles précises autant qu'absolues , il est loisible de prévoir les oscillations baromé- triques du lendemain. Les conséquences de ce genre de prévision sont importantes. Ainsi, la vitesse des bourrasquesest jusqu'ici, pour la science météo- rologique, une véritable quadrature du cercle. Dans son magistral « Traité de Météorologie », M, Angot écrit, p, 297 : « La vitesse de propagation d'une dépression est extrêmement variable d'un jour à l'autre et la forme de la trajectoire même peut être fort compliquée, La dépression, après avoir suivi d'abord une direction assez régulière, décrit tout à coup une courbe fermée revenant à un point où elle est passée auparavant La vitesse des dépressions est extrêmement variable, même pour une dépression et d'un moment à l'autre. Souvent on en voit qui, après un certain parcours, restent à peu près stationnaires pendant plusieurs joiu^s, puis se remettent en mouvement. » Et M. Millot, de Nancy, écrit avec une admirable concision : 484 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE « Certaines dépressions restent plusieurs jours stationnaires, puis se meuvent tout à coup en parcourant 3 ou 400 lieues en 24 heures. D'autres cheminent régulièrement en avançant seulement de 40 à 5o lieues par jour; d'autres enfin, après avoir marché dans une cer- taine direction , s'arrêtent tout à coup et s'évanouissent sur place en rebroussant chemin aussi vite qu'elles étaient venues : leur vitesse enmnie leur trajectoire semblent donc des plus capricieuses. » Telles sont, très exactement, les lois les plus sûres de la météoro- loo-ie sur l'un des points les plus importants pour la prévision. Or, avec nos principes, les dépressions cessent d'être capWc/eMses. Leur vitesse et leur trajectoire obéissent à une loi invariable et, par suite, peuvent être déterminées avec une approximation suffisante. En efîet, si je prévois une baisse barométrique sur un point et en même temps une hausse sur une autre région, il résultera nécessai- rement de ces oscillations inverses un mouvement de translation du centre de dépression. Nous aurons ainsi prévu la vitesse et la trajec- toire. Plus encore même : nous déterminerons l'importance pro- chaine du centre, car, s'il doit se produire 5'"'" de hausse par exemple et, dans le même espace de temps, lo""'» de baisse, nous nous atten- drons à une aggravation du centre de tempête : la dépression se creusera. Si, au contraire, la hausse doit l'emporter, on présumera avec raison l'atténuation des basses pressions : la dépression se com- blera . Et j'arrive ici au résultat le plus important de ma nouvelle méthode, au phénomène que je désignerai sous le nom de compression du CYCLONE. Supposez qu'en un point quelconque de l'Europe une forte dépres- sion détermine des vents de tempête; rien aujourd'hui, aucune règle, aucune loi, aucune observation, rien, absolument rien ne permet de présager l'avenir de la bourrasque. Le centre se creusera- t-il? se comblera-t-il ? stationnera-t-il ? La météorologie actuelle ne sait rien, ne peut rien savoir. Avec l'étude du cent normal, au contraire, nous pourrons réjîondi'e à ces intéressantes questions. En effet, si je constate des vents anor- maux par excès en arrière de la dépression, j'annoncerai hausse de ce côté; s'il y a excès en avant du centre, la même prévision de hausse s'imposera ; s'il en est de même sur les côtés maniai )les et dano-ereux du cvclone, il y aura encore hausse à prévoir. Mais, si partout la hausse doit avoir lieu en avant, en arrière, de tous côtés, il en résultera fatalement la suppression du minimum barométrique, la disparition de la tempête. G. GUILBERT. — PRÉVISION DU TEMPS 4^5 Alors que tout Bureau Central météorologique devra envoyer de tous côtés ses avertissements de tempête, de mauvais temps, je pourrai dire : Demain, la bourrasque aura disparu, le calme sera complet, les navires en relâche dans les ports pourront sortir sans crainte, Cliose curieuse ! La météorologie actuelle , qui a vu cent ibis — mille fois peut-être en un demi-siècle — une dépression disparaître dans ces conditions, n'a pas encore envisagé, même en une hypo- thèse théorique, la possibilité d'un pareil phénomène. La destruction soudaine d'une tempête ne paraît pas possible. La météorologie enseigne que dans un cyclone le vent, tout con- vergent qu'il soit vers le centre , ne peut arriver à combler le vide central, parce qu'il se forme en cette zone un couinant ascendant : d'où, aiïlux de l'air par en bas et expulsion par en haut ! Écoutez plutôt M. Angot (p. 280). « Le vent est convergent tout autour de la dépression dans les régions inférieures. Or, malgré cet afflux d'air incessant par toute la périphérie , une dépression peut persister longtemps , le plus sou- vent pendant plusieurs jours. Il faut bien que l'air qui arrive à chaque instant vers le centre s'échappe à mesure, sans quoi la dépression se comblerait rapidement. Il ne s'échappe certainement ni par en bas, où il y a le sol, ni i)ar la périphérie, par où il afflue : C'est donc nécessairement par le haut quil est expulsé. Ainsi, dans toute dépression, l'air possède, en même temps qu'un mouvement tourliillonnaire, un mouvement ascensionnel. » Nous voici revenus aux courants ascendants, aux pluies de con- vection, etc., etc, ; mais comment, dans le domaine des faits, un mouvement ascensionnel peut-il se produire lors d'une compression de cj'clone ? Les vents sont alors forts dans toute la périphérie, et plus ils sont forts plus ils convergent avec énergie vers le centre ; plus ils devraient, d'après la théorie exposée ci-dessus, former des courants ascendants, bientôt divergents dans les hautes régions. Jamais la dépi^ession dans cette hypothèse ne pourrait se combler ; sa destruc- tion serait absolument impossible. Or, bien au contraire, en réalité, l'observation prouve qu'avec des vents trop forts le centre de dépression peut être instantanément comblé. La théorie des dépressions doit donc se renouveler. Il faut qu'elle plie devant les faits , qu'elle reconnaisse davantage l'influence pré- dominante des vents de surface dans l'origine , la durée , la destruc- tion des cyclones. Les théories actuelles, thermique ou mécanique^ 486 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE sont totalement insuflisantes et , de plus , puisque le vent a le pou- voir, seul, de combler les dépressions, il a seul, aussi, le pouvoir de les faire naître. Cette hypothèse se vérifie d'ailleurs assez fréquemment sur les cartes isobariques : toutes variations de ternpérature et toute préci- pitation aqueuse étant écartées. Aussitôt qu'une dépression est formée, elle met en mouvement deux forces opposées : les forces centrifuge et centripète. Le tour- billon est centrifuge, le vent centripète. Le premier cause une per- turbation dans l'atmosphère, il produit un vide, il détruit l'équi- libre; le second rétablit l'harmonie, l'égalité dans la pression. Il accourt de tous côtés ; il se précipite et se dirigerait même en ligne droite vers le centre , selon la normale au gradient , si le tourbillon déjà formé ne se défendait. Ce tourbillon est en effet centrifuge, et par suite, il veut rejeter sur la périphérie l'air que lèvent, centripète, amène vers le centre. De ce conflit peut résulter une véritable tem- pête. Si la force centrifuge domine la force opposée, le vide, le minimum barométrique s'accentue. Si, au contraire, la force centri- pète, c'est-à-dire le vent, l'emporte, le centre se comble. Le vent est donc, en réalité, l'ennemi de la dépression. C'est un duel à mort entre deux forces contraires, duel intéressant d'où le vent sort le plus souvent vainqueur et qu'il est facile de suivre, puisque les phé- nomènes sont tous superficiels. Le gradient, que nous montrent chaque jour les cartes isobariques, représente la force centrifuge; le vent, la force centripète. Avec vent normal il y a égalité entre ces forces; avec vent anormal par défaut, prédominance de la force centrifuge ; avec vent anormal par excès , prédominance de la force centripète. Ces principes ne sont pas seulement du domaine de la théorie pure : ils ont subi l'épreuve de l'application pratique. Durant quelques semaines, aux environs de Paris, pendant les mois de mars à mai 1903, j'ai formulé cliaque jour des prévisions du temps d'après les cartes isobariques du Bureau Centi*al météorolo- gique. J'ai pu alors prévoir, non seulement la hausse et la baisse baro- métriques sur presque toute l'Europe, non seulement indiquer limportance approximative des oscillations prévues, mais encore souvent délimiter les zones de hausse et de baisse et jusqu'à la ligne de zéro variation qui les sépare. J'ai prévu avec succès de nom- breuses disparitions de bourrasques dans les vingt-quatre heures ; annoncé l'atténuation ou l'aggravation des dépressions ; l'arrivée B. & J. BRUNHES — TOURBILLONS ATMOSPHÉRIQUES & DES COURS d'eAU 4^7 d'anticyclones et, combinant ces nouveaux principes de prévision avec l'observation simultanée du baromètre et des nuages — telle que j'ai décrit cette méthode en 1886 et 1894, — j'ai plus d'une fois prévu l'approche de bourrasques océaniennes, alors absolument invisil)les au large, même des côtes irlandaises. La valeur pratique des nouvelles bases de prévision exposées dans cette communication est donc indiscutable et je suis persuadé que les météorologistes voudi^aient tous en voir l'application se généra- liser. Pour y parvenir , le moyen le plus pratique et à la fois le plus scientifique et le plus rationnel consisterait dans l'établissement d'un concours de prévision du temps , concours qui pourrait être placé sous les auspices du Comité météorologique international. Peut-être se trouvera-t-il dans notre riche et nombreuse Association quelque ami des sciences qui voudra bien doter ce concours — la valem' vénale du prix importe peu — et attacher ainsi son nom à une découverte utile par-dessus tout à la Marine de tous les pays, mais aussi profitable à tout le monde , ainsi qu'au bon renom de la Météorologie française. M. Bernard BRUNHES Directeur de l'Observatoire météorologique du Puy-de-Dôme ET M. Jean BRUNHES Professeur de géographie à l'Université de Friljourg (Suisse) LES ANALOGIES DES TOURBILLONS ATMOSPHÉRIQUES ET DES TOURBILLONS DES COURS D'EAU ET LA QUESTION DE LA DÉVIATION DES RIVIÈRES VERS LA DROITE [551.35] — Séance du 6 août — I. La « LOI DE BAER )) ET LES OB.TEGTIONS QU'eLLE SOULEVE Divers travaux récents ont , d'une part , apporté des notions nouvelles sur le mécanisme de l'érosion fluviale, d'autre part, agité à nouveau la question de la. déviation des rivières vers leur droite. Cette question de la déviation des rivières à droite fut soulevée en 488 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE 1869 et 1860, d'une façon indépendante, jjar Babinet, à l'Académie des Sciences de Paris (*) et par E. de Baer, à l'Académie de Saint-Péters- l)ourg-. Ces deux savants crurent remarquer et pouvoir ailirmer qu'il y a, dans riiémisplière nord, luie tendance des fleuves à incliner vers leur droite, et ils eurent l'idée de rattacher cette tendance à la rotation ter- restre. A leur suite, plusieurs savants affirmèrent la réalité de cet effet, auquel on a pris l'haljitude de donner le nom de « loi de Baer ». Parmi les nom- breux.travaux auxquels le sujet a donné lieu, et que l'on trouvera énu- mérés dans un court et très suljstantiel chapitre de l'excellente Morpho- logie der Erdoberfldche de Penck (**), nous citerons en particulier les études de Suess (***) sur le Danube , et celles de Baines (****) et de Johnston (*****) sur les rivières de la Nouvelle-Zélande et de l'Amérique du Sud : les deux derniers auteurs ont cru observer sur les fleuves de l'hémisphère austral xme tendance inverse à hicliner sur leur gauche. Il s'en faut de l^eaucoup qu'on soit ici en présence d'une « loi » univer- sellement acceptée. Deux sortes d'auteurs se sont incrits en faux contre les alïïnnations de Babuiet et de Baer : d'abord des géographes ou géologues qui, étudiant en détail telle ou telle rivière invoc£uée à l'appui de la loi , ont montré , ou qu'il n'y avait pas la marque d'une action déviante s'exerçant constamment à droite — c'est ainsi que , dans une thèse de l'Université de Halle, R. Potinecke (******), étudiant en détail tui ailluent de la Saale, la Bode, montre qu'il n'y a pas en moyenne de diffé- rence de hauteur entre les deux rives, — ou encore que l'attaque plus facile de la rive droite^ là où elle a été constatée, s'expliquait sans peme (•) Babinet, C. R. Acad. Se, XLIX, p. 638 (séance du 3i octobre iSSg). La communica- tion de Babixet est intitulée : Remarques présentées à l'occasion de la coinmunicaUon précédente. Cette communication est celle d'une expérience du plus haut intérêt de Perrot (même volume, p. 637) que nous n'avons vue citée dans aucune des bibliogra- phies de la question et sur laquelle nous reviendrons. L'omission serait sing-ulière si Ton ne réfléchissait que l'importance du rôle des tourbillons n'a été mise en lumière que très récemment. — Dans le Handbach der Geophysik de Siegmund Gu.ntuer, l'expé- rience de Perrot est mentionnée en un parag-raphe spécial sous le titre : Ausfhissers- cheinungen , mais sans être aucunement reliée au paragraphe : Verschiedenheil der Fhissiifer (2" Aufl., Stuttg-art, 189;, I, p. 242), et dans le volume II, où l'exposé de la loi de Baer est repris avec quelque détail et accompagné d'une abondante bibliographie, la note de Perrot n'est même pas rappelée (2° Aufl., Stuttgart, 1899, p. 9i4-9i3 et 934). — En dehors de l'ouvrage de S. Gûntuer, nous n'avons vu citer le nom de Perrot que tout à fait incidemment dans deux mémoires relatifs à la loi de Baer. Dans une courte note à l'Académie de Saint-Pétersbourg (Bull. Acad. Imp., t. I, p. ."i;!, note, 3 février 1860), Brasghmanx se contente de traiter mathématiquement la lliéorie de l'expérience de Perrot sans en déduire aucune conséquence. Dans un mémoire sur la question qui nous occupe, H. Dexzler (Mitt. naturforsch. Ges. licrn, IN'r. 43: /)/.s 4$(), Bern, iSd», ip.^iiÇ) indique simplement qu'une vive controverse s'éleva à l'Académie des Sciences ûv Pans « à la suite d'unp expérience instituée par Perrot pour démontrer directement la rota- tion de la terre », sans donner aucun autre détail sur cette expérience. (") A. Pexck, Morphologie der Erdoherflàche (Stuttgart, 1894), t. I, p. 33i-36o. (•") Ed. Sless, Veber den LauJ der Donau (Oesterreichische Revue, IV, i863, p. 262). (•**•) Bai.nes, On the Influence of the Earth's Rotation on Rivers (Trans. New Zealand Inst., X, 18::, p. 92). (""*) Keitu Jounston. Note on ihe Physical Gcography of Paraguay (Proc. R. Geog. Soc. London, XX, i8;6, p. 4<.i4)- (•"••••) R. Potine<;ke, Zur Kritil; des Baerschen Gesetzes und seine .\nwendbarkeit auf den Flusshuif der Rode. Inaiig. Diss. Halle, 1891. — Voir aussi : BitiNO Xeimann, Sludien liber dcr'i Ban der Strombetlen und das Baersehe Gesetz. Inaug. Diss. Konigsberg 1. Pr., 893. B. & J. BRUNHES. — TOURBILLONS ATMOSPHERIQUES & DES COURS d'eAU 4^ par d'autres causes physiques : différence de constitution géologique des berges, dissymétrie dans l'action des vents, etc. C'est par la prédomi- nance des vents pluvieux venant de l'Ouest et du Nord-Ouest que , lians un mémoire qui est un modèle de discussion minutieuse et précise., MM. Marchand et Fabre (*) ont expliqué la dissymétrie des vallées issues du plateau de Lannemezan. Le cas était d'autant plus intéressant à examiner que les vallées pyrénéennes avaient été citées souvent comme véritiant la loi : la vallée de la Garonne par Leymerie (**), qui avait écrit à ce sujet à Babmet, celles de ses affluents de gauche par M. Fontes (***), dans mie note dont il sera question plus loin. Les autres adversaires de la « loi de Baer » sont des mathématiciens ou physiciens qui, évaluant l'mtensité de la force centrifuge compo- sée (****) qui résulte du mouvement relatif de l'eau sur un globe en mou- vement, la trouvent beaucoup trop faible pour pouvoir exercer aucune action appréciable. Les auteurs du mémoire précédenunent signalé, MM. Marchand et Fabre, n'ont garde d'ailleurs de négliger cet ordre de considérations, et ils montrent qu'en tenant compte du frottement de l'eau sur le fond, les molécules d'eau du Gers, par exemple, ne seraient soumises , du fait du mouvement de la terre , qu'à mie action déviante égale au millionième de celle de la pesanteur. D'ailleurs , dès la séance même de l'Académie des Sciences de Paris cpii suivit celle où Baliinet formula ses « remarques », plusieurs de ses confrères opposèrent à son raisomiement la petitesse des forces en pré- sence. Sur le mode de calcul, ils n'étaient pas d'accord : Joseph Bertrand paraît même avoir commis au début une erreur qui se retrouve encore aujourd'liui dans d'importants ouvrages de météorologie et de géogra- phie, celle cpii consiste à dire qu'mi courant d'au- ou d'eau dirigé du S. au N. éprouve, du fait de la rotation terrestre, une force tlirigée vers sa droite qui n'a pas la même intensité que celle qu'éprouve un courant de même vitesse dirigé de l'E. à l'W. C'est à peu près la même erreur qu'avait commise, cent ans plus tôt, l'astronome Hadley dans son mémoire fondamental sur les alizés, où, le premier, il attribuait à la rotation terrestre l'mflexion vers ^\^^ des vents réguliers soufflant vers l'équateur. Il l'expliquait en disant qu'mi courant aérien dirigé, dans nos régions, du S. au N., vient d'un point où la terre est animée d'un niouve- {*) E. Marcuand, Directeur de l'Observatoire du Pie du ^fidi , et L.-A. Fabre, Inspec- teur des eaux et forêts à Dijon, Les érosions torrentielles et sulmériennes sur les plateaux des Hautes-Pyrénées (Comptes rendus Congrès des Sociétés savantes Toulouse iSyy, Paris, Imprimerie S'ationale, 1900, p. 182-220, 3 pi.). — M. L.-A. Fabre a repris ces idées dans un travail d'ensemble : La Dissymétrie des Vallées et la loi dite de De Baer , particu- lièrement en Gascogne (La Géographie, YIII. i3 nov. igo3, p. 291-316; carte, coupes et phot., Rg. 3:-42). (**) Leymerie, C. B. Acad. Se, XLIX, 1839, p. 795. (**•) Fontes C. B. Acad. Se, CI. i883, p. ii4i. (•***) CeUti force centrifuge composée, qu'il est nécessaire d'ajouter aux forces réelles agissant sur le corps mobile à la surface du globe, si Ton veut étudier son moui'eiiient relatif \)iir ra()port au globe animé lui-même d'un mouvement de rotation, est indépen- dante de la direction du mobile et proportionnelle à sa vitesse. Elle est égale à 2 n v cos 0, si V est la vitesse du corps, n la vitesse angulaire de rotation de la terre, et (=) la dis- tance au pôle (évaluée en arc de méridien) ou le complément de la latitude. (^^ "ii" Brillouin, Mémoires originaux sur la circulalion générale de l'atmosphère, Paris, Carré et IN'aud, 1900, p. 5i). 490 MÉTÉOnOLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE meut (le l'W. à TE. plus rapide tiuc; celui des points vers lesqiiels il souille; la masse d'air entraînée garde donc par inertie, en allant vers le N., une vitesse relative plus grande vers l'E. que le sol sur lequel elle souille: le vent de S. devient vent de S.-W. Par mie raison analogue, im A'ent de N. doit, en se continuant vers le S., devenir vent de N.-E. Le raisonnement de Hadley, utile comme moyen mnémotechnique, est insuflisant. En particulier, il n'ex]>liquerait pas la déviation vers la droite des courants aériens soufflant suivant un parallèle, c'est-à-dire d'W. ou d'E. C'est l'honneur de Ferrel d'avoir, en i858, introduit en météorologie mi calcul correct de l'influence de la rotation terrestre sur les courants aériens, calcul fondé sur le théorème capital de la dynamique des mou- vements relatifs, le théorème de Coriolis, dont la célèbre expérience du pendule de Léon Foucault avait été mie magnilique illustration. Il ne semble pas que Babiuet et ses confrères aient eu connaissance des mémoires de Ferrel, mais ils invoquent constamment les recherches de Foucaiût , qvii d'ailleurs avaient inspiré directement l'expérience de Perrot qui fut l'amorce de la discussion sur la déviation des cours d'eau. Et Babinet, en dépit de quelques inexactitudes commises au début, aflirme du moins très nettement que , s'il y a un déplacement vers la droite des cours d'eau dirigés du S. au N. ou du N. au S. , « d'après une imi)ortante remarque de M. Foucault, il en est de même pour les rivières allant de l'est à l'Ouest, ou de l'ouest à l'est, ou même dans une direc- tion cpielconque. Jusqu'ici, dans les questions analogues, ajoute-t-il, tout le monde, et moi le premier, nous étions complètement dans l'errem^ (*). » Les contradicteurs de Babinet : Delaunay, J. Bertrand, Combes, con- cluent à l'extrême petitesse des forces dues à la rotation terrestre. Delaunay calcule l'excès de pression qui, dans lui canal rectiligne à sec- tangulaire où coule de l'eau, s'exerce sur la paroi droite. Combes calcule la dénivellation de la surface de l'eau, et déclare que le soulèvement du niveau au bord droit est inférieur à celui que peut produire la jdIus légère brise. Ceux qui tiennent pour l'exactitude de la loi de Baer répondent au premier groupe d'objections que, s'il est absolument hors de doute (ju'en bien des cas, « d'autres influences plus considéraI:>les prédominent et Viennent rejeter le fleuve du côté opposé, telles qu'ajjports sédimentaires des affluents, vents dominants, constitution orographique et géologique des berges, ce qui explique que la déviation vers la droite des fleuves de l'hémisphère Nord soit si peu une règle exclusive, de même que la dévia- tion des fleuves à gauche dans l'hémisphère Sud » (**), il n'y en a pas moins une i)rédominance de la déviation à droite ; qu'on ne trouverait pas d'exemple de fleuve de riiéniis[)hère Nord qui, forcé de passer par des défilés étroits , aft'ecte entre ces défilés la forme d'une série d'arcs ayant leur convexité à gauche , tandis que le Danube afl'ecte cette forme de « guirlande » dont les arcs sont tous convexes vers la droite, ainsi que la reniar([ué Ed. Suess ; que, d'autre part, des fleuves de notre (•) G. R. Acad. Se. XLIX, j8.t9, p. ôSg. (**) A. Penck, (nivr. citi-, p. 35;. B. & J. BRUMIES. — TOURBILLONS ATMOSPHERIQUES & DES COURS d'eAU. 491 héinisplièie , comme le Danul)e , le Rhin , le Nil , quand ils coulent entre des bei-ges resserrées, creusent davantage leur lit à droite, et cela est manifeste pour le Danul)e à Vienne (*), pour le Rhin k Maxau, etc. Tels sont les faits qui ont déterminé l'adhésion à la a loi de Baer » de géo- logues et de géographes de premier ordre, comme Ed. Suess, Elisée Reclus, G. Schweinfurlh, et l)ien d'autres (**). A la seconde catégorie d'ol)jections on a fait des réponses ingénieuses, parfais un peu spécieuses. On a dit qu'une force, même très faible, agis- sant très longtemps, pouvait finir par ])roduire des elfets sensil:)les. On a cherché surtout, ce qui était très rationnel, à montrer que les forces dues à la rotation terrestre n'étaient pas hors de proportion avec d'autres forces dont aucun géographe ne met en doute l'action effective. C'est amsi que Penck, empinmtant les calculs de Dunker (***), montre que la dénivellation produite entre le bord droit et le bord gauche d'un lleuve large, par le fait de la force centrifuge composée due à la rotation de la terre, peut atteindre, dans le cas du Rhin en Hollande, le 1/9 ou le i/i5 de la dénivellation due à la pente dans le sens où coule le fleuve. M. Fontes, étudiant la Baïse à Condom, montre que, dans mi coude dont le rayon de courbvire est de 2^5 m., la dénivellation, (jui entre les deux bords atteint 5 mm., provient, pour 9/10 de la force centrifuge composée due à la rotation terrestre. Les deux forces ne sont donc pas hors de proportion. D'où cette conclusion « ([u'on ne saurait négliger les forces de Coriolis avant d'avoir examiné si elles ne sont pas du même ordre que celles dont on tient compte (****) ». C'est à ce raisonnement (pie MM. Marchand et Fabre répondent en observant que le raj^ijorl des pressions sur les deux rives, dans un cas de ce genre, est égal au rapport des nombres 4001 à 4000, c'est-à-dire trop peu différent de l'unité pour qu'il en résulte une poussée aijpréciable d'un côté. Nous croyons que la considération des tourbillons des cours d'eau, dont le rôle capital dans la formation des vallées résulte des travaux de l'un de nous , et la comparaison de ces tourbillons avec les tourbillons aériens permettent d'éclairer la (piestion d'une lumière nouvelle. Elles permettent de tourner, si l'on peut dire, l'objection mathématique en rattachant à la rotation terrestre, non un eflet statique, mais une prédo- (*) E. Suess, mém. cité, cl Dcr Boâen dcr Sladt Wh'ii nach sciiiçr Bildungsweise, Beschaffcnhi'it, iind seinen Beziehungcn zuin bûrgcrUchen Leben (Wien, 1862), p. 77-81. (*•) On a souvonl donné do hi « loi de Baor » rexprcssiou suivante : dans Tliémis- phère iVord les rivières tournent leur concavité à g-auche. Cette atrirmation, vraie pour un certain nombre de rivières et pour beaucoup de parties d'autres rivières, ne saurait être généralisée : elle se heurte à trop de laits qui la contredisent. Voyez par exemple l'ensemble des fleuves de la lîussie ou de FAmérique septentrionale. — Si tous les fleuves avaient orig-inellement une direction rectiligne, et s'il était bien réel qu'ils dussent porter leur principal effort de creusement vers la droite, ils devraient tous présenter une concavité vers la gauche: mais pour les sillons d'écoulement des eaux qui avaient à l'origine une concavité marquée vers la droite, à supposer que la « loi de Baer » fût rigoureusement vraie, les eaux ont pu fortement travailler sur leur droite sans arriver pour cela à modifier le dessin général du cours d'eau. ("*) E. Dunker, Ueber den Einjl'iiss dcr Rotnlion der Erde auf dcm Laufc der Fliisse (Zi-itsch. f. dii' gesammten NaUirwiss., Berlin, N. F., XI, 18-5, p. 472). Duxkek conclut d'ailleurs contre la réalité de la loi. (****) Fontes, C. B. Acad. Se:, CI, i885, p. 1148. 492 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE miiiance du sens d'un effet d^iiamique, et de réijondre à ceux qui sont frapi)és surtout par ce qu'on peut nommer Tolîjection géographique, en attirant leur attention sur des faits qui ])araissent du même ordre de généralité que la déviation à droite elle-même. En tout cas la i)résente étude nous paraît rapprocher pour la première fois divers phénomènes météorologiques et géogra})hiques où s'accuse, de manière plus ou moins nette, la prédominance d'un sens de rotation ou d'un signe d'action sur le signe et le sens ojjposés. II. Importance du rôle des tourbillons des cours d'eau ET DE leur mode d' ACTION Dans une série de notes et de mémoires résumant des observations faites sm* le cours du Nil et sur les vallées des Alpes suisses et fran- çaises (*), l'un de nous a mis en lumière l'action prépondérante des tour])illons des cours d'eau dans le creusement des vallées. C'est le tourbillon qui, dans la généralité des cas, est l'agent principal de l'ap- profondissement du lit des rivières. Dans ses mémoires, auxquels sont toujours obligés de recourir les hydrographes qui s'occupent de la régularisation des rivières ensa- blées et des estuaires des fleuves, M. Bouquet de la Grye a bien montré le rôle des tourbillons et celui de la courl)ure du lit des fleuves, dans le transport des sables et dans l'alTouillement du lit. Il a réussi à reproduire, par une expérience de laboratoire, le fait d'observation que « les plus grandes cotes se maintiennent constam- ment dans les concavités accentuées (**) ». « Si l'on verse, dit-il, dans un vase en verre, un liquide un peu plus dense que l'eau (aniline), puis de l'eau, et enfin une couche mince d'une huile quelconque , et que l'on donne aux liquides supé- rieurs un mouvement de rotation au moyen de palettes , on voit se produire une dépression centrale à la surface de l'huile ; un cône de ce liquide descend au centre de l'eau, tandis qu'une protubérance d'aniline s élève du fond du vase. » En répétant l'expérience dans une grande cuve , et en remplaçant l'aniline par du sable ou de la vase, on a vu de même le sable qui garnissait le fond de la cuve ramené au centre et soulevé. Si maintenant l'on considère l'ensemble d'une rivière à son entrée (*) Jean Bkundes, Le travail des eaux ruiiraiilcs : Lu tarliquc des loiirhillon.s... (Mérn. Société frihoiirfceoise des .Seienees iKiliirelles. série déologie et Géoa'rapliie. II. l'asc. ^, HK>2, p. i5'i-2a4, I lijî., 1 |)l. carlo, ."j ])l. pliot.), cl Marmites fUn'idles et toiirliillons (Le GIoIh', Genève, Bulletin, XLIl. i'5, p. cS5-<)'Jj. — ^'ui^ aussi : Paul (Jihahdin, h'aux courantes et tourijillons, d'après M. Jean Riumies (Annales de Géograpliie, Xll, 190'3, p. 35;-33y). (•*) Bouquet de la Grye. C. R. Acad. Se, LXXXIII, i8;6, p. 797. B. & J. BRUNHES. — TOURBILLONS ATMOSPHÉRIQUES & DES COURS d'eAU 49^ dans une partie eonrbe, on peut comparer le mouvement de ses filets liquides à ceux qui sont provoqués par une rotation dans la cuve à expérience en prenant, pour centre de la cuve, les points successifs de la rive convexe et, pour bord, la rive concave. On comprend ainsi le transport du sable du fond , de la rive concave à la rive convexe, d'où Tidée d'approfondir le lit en faisant appel à la force vive de l'eau elle-même et de recourir à un tracé rationnel de digues concaves (*). M. Bouquet de la Grye assimile un coude de rivière à un arc de grand tourbillon et applique aux rivières courbes ce que ses expé- riences lui ont révélé sur les tourbillons. Ce que nous en retiendrons ici, c'est la démonstration d'une corrélation nécessaire entre l'éléva- tion du niveau supérieur de l'eau sur l'une des rives et l'approfon- dissement du lit sur cette même rive. Nous y ajouterons cette remarque importante que raffouillement près de la rive concave, pouvant se continuer et s'exagérer, arrive à être beaucoup plus notable que la dénivellation au bord de cette même rive : la dénivellation est un fait qui n'aurait pas frappé les yeux et qui n'a été signalé que par certains observateurs guidés par la théorie (elle est de un demi-centimètre dans les mesures de M. Fontes sur la Baïse à Condom), tandis que l'approfondissement du lit du côté concave et l'ensablement sur le bord convexe sont des laits qui frappent l'observateur le moins exercé. La force centrifuge composée due à la rotation terrestre, l)ien plus petite en général que la force centrifuge proprement dite due à la courbure d'un coude , agira de même , et il ne faudi^a pas s'étonner qu'elle puisse produire des effets d'affouillement bien plus notables que ses effets de déni- vellation. Les tourbillons, avons-nous dit, sont les agents par excellence du creusement des vallées. Nous avons montré notamment quelle peut être leur rapidité d'action, même quand il s'agit de l'attaque de roches relativement dures (**). L'étude d'innombrables marmites flu- (•) « Système des rives directrices proposé par M. Edmond Laporte, et plus tard par M. de Véziaii. » (Elisée Reclus, La Terre, I, Les Continerils (Paris, 1868), 3= partie, chap. III, paragraphe 6, p. 44i, et ûg. 120.) — Il résulte de ces considérations qu'en Tab- sence de toute autre action générale dissymétrique, une rivière présentant des inéga- lités de profondeur dans son lit décrira une courbe ressemblant à une sinusoïde. Les géographes qui tiennent pour la loi de Baer croient pouvoir aflîrmer que , même dans le cas où il se produit des méandres, la force centrifuge proprement dite, due à la courbure du lit, dépassant de beaucoup la force que peut produire la rotation terrestre, la rotation terrestre intervient pour favoriser l'action de la courbure dans un sens et la restreindre dans le sens opposé , et pour accroître le développement des sinuosités qui naissent sur la rive droite aux dépens de celle de gauche (Penck, ouvr. cité, p. 336). (**) Jean Brunhes , Sur quelques phénomènes d'érosion et de corrosion fluviales (C. R. Acad. Se., CXXVI, 1898, p. 557-56o). 4C)4 MÉTÉOllOLOGIE Eï PHYSIQUE DU GLOBE viales à tous les stades de leur formation nous a permis de saisir sur le fait toutes les phases successives de l'action des tourl)illons. Elles ont présenté, dans un grand nombre de cas, cette protubérance au centre du fond de l'élégante expérience de M. Bouquet de la Grye. Nous avons pu suivre sur des épreuves de photographies stéréosco- piques l'analyse minutieuse de l'action de l'eau et noter même après coup des particularités essentielles auxquelles l'observation directe n'avait pas tout d'abord fait penser, par exemple, la prédominance systématique des tourbillons sinistrorsiim (c'est-à-dire en sens inverse des aiguilles d'une montre). On se rend très aisément compte de cette puissance surprenante des tourbillons en poursuivant l'assimilation, précédemment signalée, entre un coude de rivière et un arc de tourbillon. Prenons un cas tout à fait idéal : celui d'un fleuve coulant dans un canal rectiligne de section rectangulaire , et l^rusquement arrêté par im coude. A l'un des bords, la paroi tourne court pour se diriger en sens inverse, comme sur nos vieilles routes, à certains tournants dan- gereux , l'un des bords de la route s'arrête et repart dans la direction opposée, tandis que sur le bord opposé les deux directions succes- sives se raccordent par une demi-circonférence ayant pour rayon la largcvir de la route. Une compagnie d'infanterie en marche sur la route change de direction en arrivant au tournant : pour cela, elle tourne autour de l'homme qui est à l'un des bords comme pivot, l'homme qui est au boi'd opposé double sa vitesse , tandis que celui qui est exactement au milieu de la route conserve au tournant sa vitesse primitive. C'est à peu près ce qui se passera pour notre fleuve théorique , dont le lit subit un changement brusque de direc- tion. Sur l'un des bords du tournant, la vitesse sera presque nulle ; sur l'autre, à peu près double de la vitesse normale. La force vive par litre d'eau écoulé sera donc , au bord extérieur du tournant . le quadruple de ce qu'elle était au régime normal et, comme le noml>rc de litres est double de ce qu'il était, il en résulte que la force vive disponible par seconde, ou la puissance du illet d'eau au l)ord extrême du tournant, sera huit fois plus grande qu'elle ne l'était avant le tournant et qu'elle ne le sera après. On s'explique ainsi que cette force vive , localisée en certains points où elle est nuilti[)liée d'une façon formidable (*). y donne lieu plus aisément à des érosions (*) Il y a, clans ce passage du ivgimc clï-coulcmcnt en lit rocUlignc au régime d"écou- leuienl en tournant , deux circonstanees sur lesquelles il y aurait lieu d'appeler l'atten- tion : 1° créalion de force vive sensible ou énergie einélif[ue aux dépens d'une partie de rénergie i)otentielle du courant : 2° inégale répartition de celle force vive sensible aux divers points de la section du couranl de manière (ju'au bord extérieur la force B. «<: J. UUUNHES. — TOURBILLONS ATMOSPHÉRIQUES & DES COURS d'EAU /\[)5 et que le tourbillon soit l'outil naturel, par excellence, du creusement du lit des cours d'eau. Si, au milieu du lit d'une rivière ou contre une rive , un obstacle vient créer un point immobile . il se peut que ce point devienne le pivot initial du tourbillon , dont le rayon s'étendra plus ou moins loin, et que la distril)ution de la force vive sensible aux divers points de la section antérieure de ce tourbillon se répartisse comme dans le tournant du canal précédemment envisagé. En ce cas encore, au bord extérieur du tourbillon, la vitesse sera sensiblement double de la vitesse du cours d'eau, et elle sera presque nulle au centre. Si un pareil tourbillon n'est pas encore emprisonné et immobilisé dans un moule créé par lui-même , il sera en général plus ou moins entraîné dans le sens même du courant ; en tout cas il tendra à être entraîné. S'il est sinisfrorsum, la vitesse sera plus grande à son bord droit qu'à son bord gauche et, pour en déduire l'existence d'une diilérence d'action, il suflit de remarquer que le rapport des puis- sances de deux filets d'eau aux deux bords est égal au rapport des cubes des vitesses. Si l'une des vitesses est double de l'autre, le rapport des puissances est celui de 8 à i. Pour que la puissance d'un côté soit le double de l'autre, il suffît que le rapport des vitesses soit de 1,26 à I ou de I + 1/8 à I — 1/8, c'est-à-dire que la vitesse d'en- traînement du tourbillon soit un huitième de la vitesse linéaire sur son bord. Une observation directe effectuée par l'un de nous àl'Hexenkessel du Diindcnbach (Oberland Bernois), a montré qu'en fait un tour- billon évoluant dans une marmite déjà creusée a une vitesse angu- laire constante, c'est-à-dire une vitesse maximum à la périphérie ; le mouvement d'ensemble est nettement comparable à celui d'une meule tournant tout d'une pièce (*). Cette observation, qu'il serait désirable de voir répéter en d'autres points , prouve que le raisonnement et la comparaison qui précèdent vive soit très exagérée. En réalité, les choses seraient uu peu moins simples ; mais le i-aisonnement qui précède est suffisamment approché pour donner une image juste de ce qui se passe. (*) Observations faites par Jean Brunhes le 29 juin i^oS à THexenkessel du Diinden- badi (Kienthal). Il y a là une grande cuve naturelle* dans laquelle se précipite une partie des eaux d'une chute ; et il est plus facile qu'ailleurs, à cause des dimensions (diamètres en croix : 9 m. et 10 m.), d'observer l'allure du mouvement tourbillonnaire. J'ai précipité successivement quatre troncs d'arbres el mesuré le temps qu'ils metlaiont à l'aire un tour complet. De ces observations répétées, il résulte nettement que ces énormes flotteurs , à quelque distance qu'ils fussent du centre, mettaient toujours le même temps, soit la-iS secondes à revenir à leur point de départ : il leur fallait autant de temps pour pivoter sur place au centre que pour faire un circuit com|)lel à la peri- pliéric. Malgré les ridements d'écume qui marquent à la surface les contradictions des courants secondaires, l'ensemble de la masse d'eau paraît donc bien se déplacer comme une meule. 496 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE sont, dans leur ensemble, applicables aux tourbillons des cours d'eau qui produisent les marmites. III. Prédominance des tourbillons des cours d'eau a rotation DIRECTE (en sens INVERSE DES AIGUILLES d'uNE MONTRe) Il résulte des observations qui ont donné lieu à ces travaux sur le rôle des tourbillons, que les tourbillons des cours d'eau, observés soit en activité , soit dans leurs effets , dont les principaux sont les marmites fluviales, présentent dans notre hémisphère une prédomi- nance certaine des tourbillons à rotation directe (c'est-à-dire ayant lieu en sens inverse des aiguilles d'une montre) sur les tourbillons à rotation inverse. On a dit assez souvent que les tourbillons des cours d'eau, tels que ceux qu'on observe au voisinage des bords d'un fleuve ou des piles d'un pont, sont indifteremment, ou plutôt en proportions égales, dextrorsiiin ou sinistrorsiim (*). Si l'on oljserve les tourbil- lons des vallées en plein travail d'érosion , on constate que les tour- billons sinistrorsum sont de beaucoup le cas le plus général. De nombreuses photographies stéréoscopiquos prises par nous dans les Alpes Centrales, dans les Alpes Orientales et dans les Pyrénées mettent le fait en évidence avec une parfaite netteté. Bien plus, des observations statistiques nous mettent en mesure d'afiirmer péremptoirement que les tourbillons à rotation inverse des aiguilles d'une montre sont, dans les cours d'eau de l'Europe occidentale et centrale, incomparablement plus nombreux que les tourbillons dextrorsiiin (**). S'il est établi que les tourbillons sinistrorsum se produisent de préférence , il en doit résulter une action érosive plus active sur le bord droit du cours d'eau, soit que le bord du tourbillon effleure la rive, soit surtout que le lit lui-même, dans une région qui est le siège d'un tourl)illon, soit creusé plus profondément dans la moitié droite du cercle de base du tourbillon, et nous allons retrouver ici la dissv- métrie signalée pour la distribution des profondeurs dans la section transversale d'un fleuve. (•) Nous rappelons, pour éviter toute confusion, que nous prenons ])our synonymes, d'une part : rotation dans le sens des aiguilles d'une montre, rotation dexfrorsiiin, rota- tion iiH'iTfn'. et, d'autre part, leurs contraires : rotation eu sens inverse des aiguilles d'une montre, rotation sinislrorsitm , rotation directe. Les mots direct et inverse sont employés surtout en astronomie. Les vis employées' en Europe sont dexlrorsiim ; elles s'enfoncent en tournant dans le sens des aiguilles d'une montre. La ])lu|)art clés marmites fluviales présentent au con- traire un pas de vis .sinisirorsuin, résuUaiil d'un mouvement de rotation en sens inverse des aiguilles d'une moidre. (•*) ^'oir Ji;an Rhinuks, Sur le sens de rotation des tonrldllons des cours d'eau dans l'Europe centrale. (C. R. Académie des Sciences , Séance du 11 avril 1904). B. & J. BRUNHES. — TOURBILLONS ATMOSPHÉRIQUES & DES COURS d'eaU 497 Comment i^rocèdent en réalité les eaux entraînées clans un mou- vement tourbillonnaire ? Comment agissent-elles exactement sur le fond? Le problème est très délicat : les filets d'une nappe d'eau qui entrent dans un trou et participent à un tourbillon ressortent en contredisant partiellement le mouvement des nouveaux filets qui surviennent ; de là des mouvements contraires et embrouillés qui se laissent difficilement analyser. Mais les « marmites », c'est-à-dire ces curieuses formes d'érosion produites par les tourbillons, peuvent ici heureusement intervenir pour nous fournir des documents : elles nous offrent, lorsqu'elles sont encore jeunes et fraîches, ou du moins lorsqu'elles ont été bien conservées, des informations indiscutables, et par certains types de marmites , notamment par le type de maririite interrompue ou ina- chevée (type à fond conique), on peut discerner quelques-uns des faits qui caractérisent le mode d'opérer des tourbillons. Plusieurs mar- mites présentent sur leurs parois verticales un sillon hélicoïdal tracé par une vis gigantesque tournant en sens inverse de nos vis usuelles. Dans les marmites à fond conique, la ligne de plus grande profon- deur du sillon annulaire qui entoure la protubérance plus ou moins vaguement conique ne correspond pas à un plan horizontal; or, il est curieux d'observer que la partie la plus creusée de ce sillon, c'est- à-dire celle qui révèle le plus grand travail du tourbillon, est en général située dans le secteur de 90° compris entre les parties du tourbillon et du trou qui, par rapport au courant général de l'eau, marquent la droite et l'aval. Le bord droit est, en effet, pour un tourbillon sinistî^oï'snm ou direct, le « bord dangereux », celui des deux pour lequel l'action de la vitesse de rotation du liquide s'ajoute à l'action de la vitesse d'entraî- nement du cours d'eau lui-même, tandis que ces actions se retranchent sur le bord gauche. La prédominance des tourbillons directs doit donc entraîner, quelque opinion que l'on ait sur la réalité de la loi de Baer, une dissymétrie dans l'attaque des deux bords du lit d'un fleuve. lY. Tourbillons aériens : tornades et trombes COMPARAISONS AVEC LES TOURBILLONS DES COURS d'eAU Est-il possible, maintenant, de rattacher à la rotation terrestre la prédominance manifeste des tourbillons des cours d'eau à rotation directe? Nous répondons : l'on rattache à cette rotation terrestre, sans hési- tation, la prédominance, non seulement des cyclones tropicaux, mais 32* 4g8 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE eles tornades et trombes à rotation directe dans riiémisphère Nord Si le raisonnement est légitime dans le cas des tornades, est-il légi- time dans le cas des tourbillons des rivières? Dans les fluides , air ou eau , peuvent se produire deux types de mouvemements tourbillonnaires. Ou Ijien la vitesse maximum est localisée dans une gaine cylindrique très voisine de l'axe même du tourljillon, et au-delà la vitesse va en diminuant graduellement à mesure qu'on s'éloigne du vide central; c'est le cas des cyclones tro- picaux et de certaines trombes de nos régions Ou bien la vitesse maximum est atteinte à la périphérie de la masse en rotation, et l'ensemble du fluide tournant se meut comme une meule solide; c'est le cas de certaines tornades des régions tempérées, c'est le cas, semble-t-il, des tourbillons qui creusent les marmites. Ces deux types de tourbillons, dans le cas où le fluide est l'eau, peuvent être artifi- ciellement réalisés au laboratoire : on passe d'un type à l'autre , en changeant les conditions de l'écoulement de l'eau, comme l'ont montré les expériences de L. de Marchi dont on trouvera la description dans Sprung (*). Nous avons pu observer en détail les dégâts causés par une de ces tornades, aux environs de Brioude, en juin 1902 (**). L'étude du phénomène a montré l'existence d'une ligne de discontinuité absolu- ment tranchée, séparant la région dévastée de la région indemne; ce qui exclut l'hypothèse d'une vitesse maximum à une petite distance de l'axe du tourbillon, et décroissant d'une manière continue jusqu'à zéro, à mesure qu'on s'éloigne de l'axe, comme c'est le cas pour les cyclones tropicaux. Il est très vraisemblable que la vitesse maximum est atteinte au bord de la région dévastée. On aurait en ce cas une analogie étroite avec le tourbillon d'eau étudié à l'Hexenkessel. De plus, l'évaluation de la vitesse du vent, déduite des dégâts produits, rapprochés des eflets observés pour des vitesses de 60 m. et plus .obtenues au Puy-de-Dôme, et au Pic du Midi, nous a permis de fixer à 80 m. au moins la vitesse au bord de la tornade ; par suite, comme son rayon était de un kilomètre environ, la durée de rotation était au plus de 78 secondes, soit en gros i minute et i/3 (^î"**). (*) Doit. LuiGi De M.VHCiir, Biccrchc siiUa fcorio inul^'inalicd ilci w^nli (Eslr. dog-li Annal Ji meiforologia, i)artc I. 18S2, Homa, i88'3. Rcleral von Dr. Mahgl'les, Ocstcj-i-. Zcilsclirift Tir Mctcorolofiic, XIX, 1884,1). 278). Analysé clans Si'ulnc; , Lchrbiich dcr Mctcorologie Hamburg, 1880), p. i.5i. B. & J. BUUXHES. — TOURBILLONS ATMOSPHÉRIQUES & DES COURS d'eaU 499 Le rapport de la force centrifuge composée, due à la rotation ter- restre, à la force centrituge proprement dite, due au mouvement de rotation autour d'un centre, est donc ici mesuré par un nombre très faible. La considération de ce rapport a une grande importance pour exprimer le degré de probabilité des cyclones dextrorsiim ou sinis- trorsiim. On sait, en effet, que la dépression centrale produite dans un tourbillon quelconque fait équilibre à deux forces provenant du mouvement : la force centrifuge proprement dite , toujours propor- tionnelle au carré de la vitesse, et la force dite centrifuge composée, qui est proportionnelle à la simple vitesse et change de sens suivant le sens de rotation du tourbillon : elle n'est réellement centrifuge, dans l'hémisphère Nord, que pour les cyclones à rotation directe: j)our les autres, elle serait centripète. Ces deux forces s'ajouteront donc, dans notre hémisphère, pour un cyclone direct; elles se retrancheront pour un cyclone inverse. Si la force centrifuge composée, due à la rotation terrestre, est numéri- quement plus grande que la force centrifuge proprement dite, néces- sairement le cyclone ne pourra être que direct (*). Et c'est le cas des vastes bourrasques de nos régions, ayant leur centre de dépression sur l'Irlande ou sur la mer du Nord et donnant lieu ta un mouve- ment tourbillonnaire qui s'étend jusqu'à des distances de i.Soo kil. En ce cas, la rotation angulaire est assez lente pour que la force cen- trifuge composée dépasse en importance la force centrifuge propre- ment dite. Pour les cyclones tropicaux, et à plus forte raison pour les tornades ou trombes, la force centrifuge proprement dite est, au contraire, le plus important des deux termes qui équilibrent la dépression. Si, cependant, il n'y a pas disproportion trop grande entre les deux, il est clair que le cyclone sera mieux caractérisé, plus stable, dans le cas où les deux forces s'ajoutent que dans le sens où elles se retranchent ; le terme, qui est ici un simple terme complémentaire, dû à la rotation terrestre , intervient pour rendre plus importants et plus probaliles les cyclones à rotation directe que les autres. Il arrive en effet que, dans tel cas particuKer, l'on peut se rendre compte de la cause immédiate qui a provoqué , dans un cyclone ou une tornade la rotation directe , de même que nous avons vu en divers cas le sens de rotation d'un tourbillon de cours d'eau uniquement (") J. Hanx, Lchrbach dei- Météorologie, Leipzig, igoi. Voii- p. 671, paragraphe 7 : Beis- pielefur den Einjluss der Ablenkiingskraft dej- Erdrolaiion iind der gewôhnlichen Flieh- Uraft aufdie Gradienten in den atmospherischen Wirbeln der hôheren und der nicdrio-en Ureden. 50O MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE déterminé par les circonstances locales. Mais, en général, on peut dire que, lors de la production du vide central ou du remous qui déclanche le mécanisme du tourbillon, le sens de rotation est encore indifférent, ou plutôt il le serait, si la rotation terrestre n'intervenait. Du moment que la répartition des cyclones et tornades en directs et inverses n'obéit pas à la loi des erreurs fortuites, il est naturel d'attribuer la déviation à la règle générale dans un sens à une cause perturbatrice agissant en ce sens. Remarquons qu'on ne tombe pas ici dans la faute de raisonnement reprochée à de Baer et à ses contemporains. Ici, il ne s'agit pas de déviation par rapport à une position d'équilibre ; les cyclones doivent être où à droite ou à gauche ; à l'instant où ils naissent, la moindi*e impulsion, agissant toujours pour favoriser un sens de rotation aux dépens de l'autre . peut expliquer une prédominance de l'un de ces sens de l'otation. Pour prendre une comparaison, c'est ainsi que, si des billes solides venaient tomber exactement sur l'arête d'un toit, il est probable qu'il en tomberait exactement autant d'un côté que de l'autre, mais l'intervention d'une légère brise soufflant dans un sens, et exerçant une force hors de proportion avec le poids , suffirait à déterminer une prédominance des chutes d'un des côtés. Aussi n'hésite-t-on pas, pour lordinaire, à rattacher à la rotation terrestre la prédominance des tornades ou tromJ^es à rotation directe dans l'hémisphère Nord. Il faut pourtant que le rapport entre celle des deux forces qui nagit, en quelque sorte, que pour déterminer le sens de rotation, et celle qui constitue la presque totalité de la force agissante ne soit pas trop petit pour que l'explication soit raisonnable. Nous avons remarqué que, dans l'expression de ce rapport, on peut ne pas faire intervenir la vitesse de déplacement elle-même et qu'il se réduit (à un facteur près très simple , qui est le sinus de la latitude) au rap- port de la durée de rotation des particules matérielles du tourbillon à la durée de la rotation terrestre. On ne peut parler, à vrai dire, d'une durée de rotation définie que lorsque le tourbillon tourne comme une meule solide; et dans bien des cas, dans le cas de la plupart des troml^es de faible diamètre, la durée de rotation varie et diminue quand on s'éloigne de l'axe ; alors on peut apprécier tout au moins l'ordre de grandeur de la durée movenne de rotation. t.' Or , le rapport de la durée de rotation , entendue en ce sens, à la dm'ée de la rotation terrestre , est du môme ordre de grandeur ^lour les tornades et trombes aériennes et pour les tourlnllons des cours B. & J. BRUNHES. — TOURBILLONS ATMOSPHÉRIQUES & DES COURS d'eaU 5oI d'eau. Le rapport était, dans le cas de la tornade de Javaugues, le rapport de 80 secondes à i jour, soit i/iooo environ (il faudrait mul- tiplier par le sinus de la latitude de 45 degrés, ce qui donnerait 1/1400), Il est plus petit encore, très certainement, pour les trombes de plus petits diamètre, comme la trombe de Paris du 6 sep- tembre 1896 (*), à plus forte raison, pour les tourbillons aériens dont le diamètre ne dépasse pas 25 à 3o m. de diamètre et que M. Lan- caster (**) a souvent observés en Belgique, tourbillons suffisants pour tordre des arbres de 3o à 40 cm. de diamètre, tournant tou- jours en sens inverse des aiguilles dune montre, et poui' lesquels la durée de rotation moyenne des particules aériennes peut être de Tordre de 5 à 10 secondes. Revenons aux tourbillons des cours d'eau. L'application de notre formule montre que le rapport de la force centrifuge composée à la force centrifuge proprement dite ne fait intervenir ni la vitesse abso- lue des gouttes d'eau, ni le diamètre du tourbillon , mais seulement le rapport de la durée de rotation du tourbillon à celle de la rotation terrestre. Or, dans le cas de l'Hexenkessel, cité plus haut, on a mesuré directement la durée de rotation et on l'a trouvée sensiblement de i3 secondes : on l'a trouvée à peu près constante, quelle que fût la distance au centre. Dans ce cas, le rapport des forces est 1/6 de ce qu'il est dans le cas de la tornade de Javaugues; il est à peine inférieur à ce qu'il était dans le cas de la trombe de Paris. A coup sur, beaucoup de tourbillons des cours d'eau sont sensiblement plus rapides que celui de l'Hexenkessel : pourtant il semble bien résulter de l'analogie avec les tourbillons aériens qu'on puisse descendre à des durées de rotation de cinq secondes, sans que la rotation ter- restre cesse d'intervenir pour imprimer au tourbillons on sens ; mais, si l'on descend beaucoup au-dessous , le rapport finit par être trop faible et le sens devient indifférent, qu'il s'agisse d'un tourbillon dans l'air ou dans l'eau (***). Y, Expériences de perrot Il y a un argument plus décisif encore, c'est la description de l'ex- périence de Perrot, qui a donné lieu aux discussions soulevées par Babinet à l'Académie des Sciences en 1859. L'auteur intitule sa (') A Angot, Traité élémentaire de météorologie (Paris, in-8°, 1899), p. 356. (**) Communication personnelle de l'auteur. {'**) M. Lancaster a expressément remarqué que les très petits tourbillons aériens se produisent indifféremment dans les deux sens. 502 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE note : Nouvelle expérience poiw rendre manifeste le mouçemeni de la terre. « Je me sers, dit-il. d"un baquet circulaire de grande dimension^ plein d'eau et solidement établi sur des supports bien fixes. Je déter- mine l'écoulement par un trou circulaire percé en mince paroi au fond et au centre du baquet. Il résulte de la théorie que les particules de l'eau, en marchant du bord vers le centre , au lieu de suivre le rayon allant de la circonférence à ce même centre du liquide, doivent se porter vers la droite. Maintenant, si je répands à la surface, sui- vant un des rayons, une ligne de poussières flottantes, j'observe pendant l'écoulement que ce rayon, d'abord rectiligne, se courbe suivant une ligne dont les parties les plus voisines du centre se portent sensiblement à droite de la position qu'elles auraient occupée si elles eussent suivi exactement le rayon. Quand elles arrivent près, du centre d'écoulement, elles tournent en spirale et leur mouvement,, vu des bords du baquet, est encore à droite. » Et l'auteur conclut : « Je pense qu'on peut ajouter cette expérience aux brillantes expé- riences par lesquelles M. Foucault a rendu sensible ce point impor- tant du système du monde (*). » C'est la description de cette expérience qui fait songer Babinet à la déviation des fleuves à droite. Mais, dans les diverses communi- cations où il revient sur l'expérience de Perrot, il assimile toujours le fleuve , pris dans son ensemble , au rayon qui va de la circonfé- rence au centre du baquet ; à aucun moment il n'imagine que , dans le fleuve , peuvent naître et agir des tourbillons auxquels la rotation terrestre imprimera un sens prédominant, celui-là même qu'elle détermine dans l'expérience de Perrot. Il est vrai de dire qu'à l'époque de Babinet, on ne pouvait attribuer aux tourbillons des cours d'eau le rôle actif, dans l'érosion, que les recherches récentes ont révélé»^ L'attribution de la dissymétrie vers la droite à la prédominance des tourbillons directs présente d'ailleurs l'avantage, loin d'être une explication qui exclue les autres, d'être une explication plus compré- hensive qui vient donner une forme plus précise et une valeur plus satisfaisante à d'autres explications partielles, qui étaient en elles- mêmes insuflisantes. C'est ainsi que Baines (**), dans son mémoire (*) C. B. Acad. Se, XLIX, 1859, p. 63;. — Nous avons répété l'expérience avec un baquet en zinc de i m. de diainèli-o, ayant au centre un trou de 7 mm. aux bords duquel est soudé un tube vertical de même diamètre. Ce tube est relié par un tube de caoutchouc à un autre tube à robinet, qu'on peut ouvrir ou fermer. Le niveau de l'eau s'élevant à 10 cm. dans le baquel, on a eu, avec un écoulement d'environ i litre à la minute, une incurvation des rayons, nettement visible au bout d'une dizaine de minutes. — Nous serions heureux qu'on voulût bien répéter l'expérience, dans les- mêmes conditions, en un point de l'hémisphère austral. i") A. G. Baines, Amer. Journ. of Se. and Arts, III" Ser., XXVIII, 1884, p. 434. B. & J. BRUXHES. — TOURBILLONS ATMOSPHERIQUES & DES COURS d'eAU 5o3 On the Sujyicienc}' of Tervestrial Rotation for the Deflection oj Streams, reprenant et complétant une analyse de Gilbert (*), montre que la force avec laquelle un corps en mouvement est rejeté latéra- lement dépendant de sa vitesse, ce sont les gouttes d'eau animées du mouvement le plus rapide qui. dans nos pays, sont le plus fortement enti'ainées à droite, de telle sorte que c'est du côté droit du lit du fleuve que tendent à s'accumuler les filets d'eau les f>lus rapides (**). Or la diflérence de vitesse pourrait être insuffisante pour produire par elle-même une diflérence d'érosion. Elle peut être suffisante pour déterminer un tourbillon sinisti^orsum qui, lui, produira une érosion dissymétrique. Il n'y a rien là qui nous doive choquer et qui contre- dise, par exemple, le principe de la conservation de l'énergie. Répé- tons ici que le tourbillon ne correspond point à une création d'énergie, mais 1° au passage d'une certaine quantité d'énergie de l'état d'énergie potentielle à l'état d'énergie cinétique ou de force vive sensible; et a» surtout, à une inégale répartition dans l'espace de cette énergie cinétique, de sorte que. moindre qu'à l'état normal en certains points, elle devient énorme sur d'autres, et, là, se détruit par frottement en produisant des dégradations. VI. Conclusion Pour nous résumer, s'il paraît légitime d'attribuer à l'action de la rotation tei'restre la prépondérance des tornades et trombes à rota- tion directe dans Ihémisphère Nord, il ne semble pas illégitime d'expliquer par la même cause générale la prépondérance des tour- billons des cours d'eau à rotation directe dans l'hémisphère Nord. Ce rapprochement rendrait très bien compte du fait que la prépondé- rance, bien qu'existant pour les tourbillons des cours d'eau, soit moins accusée. D'autre part, la prépondérance des tourbillons des cours d'eau à rotation directe peut suflire à expliquer la tendance des fleuves de l'hémisphère Nord à attaquer de préférence leur rive droite, au moins dans les régions où le creusement de la vallée est dû à l'action des (*) G. K. Gilbert (même titre), Amer. Jovrn. of Se. and Arts, III'' Ser. , XXVII, 1884, p. 427. (**) C'est dans le même ordre d'idées que S. Giintheb, reprenant les conclusions d un article pulilié dans le premier vohime du Humboldt, revue depuis long^temps disparue (Die sichlbarcn und fûhlbaren Wirkiuio-en der Erdrotation), écrit :« Même si la tendance déviante de hi rotation de la terre n'est pas un important facteur morphologique, elle peut néanmoins coopérer en poussant l'eau [vers la droite, dans l'hémisphère NordJ a pousser aussi le lit, moyennant de longs espaces de temps. » Handbueh der Geophysik^ 2. AuU., Stuttgard, 189g, II, p. giS). 5o4 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE tourbillons, c'est-à-dire dans les parties où le cours d'eau, étant encore loin d'avoir atteint son profil d'équilibre, doit opérer, pour établir son lit, une forte érosion. Au contraire, dans les parties du cours où ce sont les phénomènes de dépôt ou d'accumulation qui dominent, les tourbillons ne jouent plus qu'un rôle plus restreint et la déviation à droite apparaît moins manifeste, ainsi qu'on l'a depuis longtemps remarqué. Ainsi se rattacheraient les faits de dissymétrie réelle groupés sous l'étiquette de la « loi de Baer » à l'action indirecte de la rotation terrestre, par l'intermédiaire des mouvements tourbillonnaires. Nous serions heureux que cet essai d'interprétation de quelques faits, qui nous a déjà conduits à des observations sur lesquelles sans cela notre attention n'eût pas été attirée, provoquât sur les tourbil- lons des études nouvelles : études sur la répartition et les effets des mouvements tourbillonnaires et, par-dessus tout, si possible , études quantitatives ; dans les cas notamment où l'on verrait ces tourbillons entraînés avec le fleuve lui-même, des observations de la vitesse d'entraînement et de la vitesse de rotation seraient du plus haut intérêt. Et, quant à la « loi de Baer » elle-même , mérite-t-elle le nom de « loi » ? Mérite-t-elle au moins le nom de « règle » que proposait en i865 Schweinfurth (*) ? Il y a sans doute un certain nombre de faits hydrographiques qui portent la marque de la rotation de la terre. Mais ces faits sont limités à certaines portions de fleuves : i" Ils ne se rencontrent, nous l'avons dit, ni dans les zones montagneuses des bassins hydrographiques, où les eaux tombent plutôt qu'elles ne coulent , ni dans les zones inférieures de remblaiement telles que les deltas ; ils ne se rencontrent que dans les parties moyennes où le cours d'eau est encore en travail. 2° Dans tous les tronçons de ces parties moyennes elles-mêmes où l'écoulement des eaux est dirigé par une cause prépondérante : pesanteur dont l'intensité croît avec la pente, vents dont l'action est en rapport avec l'orientation, etc., tous les autres facteurs , et en particulier le facteur de la rotation terrestre, ont une influence soit supplémentaire et imperceptible, soit contradictoire, mais minuscule, et de fait contredite (**). (•) G. Schweinfurth, Dcr Nil iiiul dos Bacr'.sche Gesetz der Ufcrhildiing (Pclennanns Mill., XI, i865, p. 126). [**) Voilà comment nous croyons volontiers avec M. L.-A. Fabre (La Dissyinrlric dcn VaUccs et la loi dite De Baei\particulicieinenl en Gascogne, à^ns, La Géographie, \\\\, i»)o3) que beaucoup de cas de dérivation des thahvcgs (vallées du Lannemezan , Rhône, etc.) s'expliquent par des facteurs g-éograidiiques locaux, vents, pente, charriage des alïluents, etc.; voilà comment nous approuvons Tespril de véritable observation qui se traduit par une phrase comme celle-ci : « Si le Mississipi se montre récalcitrant à la loi B. & J. BRUNHES. — TOURBILLONS ATMOSPHERIQUES & DES COURS d'eAU 5o5 Si la rotation terrestre agit en vérité, l'action n'en peut être tra- duite que par des effets de second ordre. Qui ne méconnaît ni la nature même de cette cause spéciale , ni la réalité géographique des multiples autres causes, tectoniques, topograpliiques et climatiques, doit être surpris, non plus de la relative rareté , mais au contraire de la relative généralité, de l'importance et du grand nombre des faits qui manifestent l'inégale attaque des deux rives d'un cours d'eau : « guirlandes » à concavité sur la droite (Danube ou Rhin), surélévation presque continue de la rive droite de longs fleuves (Volga ou Dniepr), etc. Or ces faits correspondent à des chenaux d'écoulement, où les eaux, échappant à la souveraineté exclusive de toute autre influence, sont en état de subir et de marquer l'influence assez faible, mais continue, incessante, qui résulte de la rotation de la terre. Comment se traduit cette action? Non seulement les filets d'eau tendent à glisser avec plus de vitesse et plus de force vers la rive droite (Baines, Gûnther) ; mais encore tous les mouvements tourbillonnaires hési- tants sont « déclanchés » dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. Si la « loi de Baer », sous sa forme absolue et exagérée, doit être rejetée, il n'en semble pas moins vrai que, dans la géographie des cours d'eau, toute une catégorie de faits disséminés, mais exactement localisés et similaires , peuvent être légitimement attribués au mou- vement quotidien de la terre sur elle-même. ■de De Baer, il se conforme sans cloute, comme la plupart de ses pareils, à d'autres lois moins al>straites et plus naturelles. » (P. '3i4.) Et i)ourtant nous estimons que dans la conclusion suivante, le mot: unique, dépasse les prémisses: « Cet exposé sommaire des cas les plus intéressants de vallées dissymétriques et de dérivations fluviales établit que le double phénomène est sous la dépendance unique de causes géologiques et géographiques. » (P. 3i3). 5o6 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE M. S. SQUINABOL Professeur à l'Université de Padoue LES CHAUDRONS DU BRENTON [55i.35J — Séance du 6 août — M. le professeur J. Brunhes a mis tout récemment en relief un fait qui, à première vue, paraît assez étrange, mais qui ne cesse pas d'être vrai et même extrêmement répandu, c'est-à-dire que le creu- sement des gorges et des couloirs est principalement dû à cette méthode qu'il a très heureusement définie la tactique toiirhillon- nante des eaux courantes (*). On était jusqu'à présent habitué à croire que les tourbillons tor- rentiels n'avaient dans le creusement des vallées de montagne qu'une importance tout à fait secondaire, que les marmites formées par eux n'étaient que des accidents tout à fait négligeables ou bien seulement remarquables par leur étrangeté et que l'eau courante ne travaillait qu'en usant le terrain comme une scie , profitant des diaclases et de& fissures des roches, aidée dans son action érosive par le roulement des blocs et du gravier entraînés par sa violence. En d'autres termes, on regardait le travail en ligne droite comme étant la règle, celui des tourbillons l'exception. Il aurait été cepen- dant suffisant de pénétrer en n'importe laquelle des gorges alpines et de porter son regard sur les parois sculptées par l'eau, pour décou- vrir à chaque pas les témoins des tourbillons anciens dans les magni- fiques sillons hélicoïdaux qui se superposent et s'entrelacent les uns aux autres, et être conduits aux conclusions si clairement et si élé- gamment exposées par le savant professeur de Fribourg. Les îlots granitiques de la première cataracte du Nil et les gorges du versant Nord des Alpes suisses illustrées par lui en sont de magnifiques exemples. Quant à moi je pourrais ajouter bien des exemples à ceux donnés par M. Brunhes. Dans mes excursions alpines j'ai plusieurs fois constaté la puissance et la fréquence de cette action, ou mieux de (•) Brunhes J. — Le travail des eaux courantes : I-a lactique des tourbillons. Mém. de la Soc. frib. des Sciences nat., vol. II, fasc. IV, Fribourj?, 1902. s. SQUINABOL. — LES CHAUDRONS DU BRENTON OOJ cette tactique tourbillonnante; mais, n'ayant pas encore terminé mes recherches et surtout complété les illustrations nécessaires, je me réserve de publier, sous peu, un travail sur une des gorges les plus merveilleuses des préalpes du Bellunais, la Val Maggiore, où ce type de creusement est bien visible dans toute sa fraîcheur et est d'une grandeur vraiment imposante. Dans cette note, je me bornerai à faire connaître un fait qui se relie de très près à celui dont j'ai parlé et qui n'est qu'une variété du premier, démontrant que, même dans les endroits où les tourbillons paraîtraient ne pouvoir subsister, ils sont au contraire mis en œuvre par les eaux courantes , qui con- naissent très bien de quelle force extrêmement puissante elles dis- posent lorsqu'elles s'acharnent contre les roches avec un mouvement giratoire. Le phénomène sur lequel je reviens dans cette note et dont j'ai déjà fait mention dans une brochure publiée en 1902 (*) est présenté par le Brenton, petit affluent du Mis dans les préalpes entre Feltre et Bellune. Le Brenton a son origine entre le mont Prabello (2076 mètres) et le mont Roa Bianca (1G80 mètres) et, après un cours presque en ligne droite de deux kilomètres et demi, va déboucher dans le Mis, à huit kilomètres environ du confluent de ce dernier avec le Corde vole. La vallée du Mis, comme tant d'autres dans les Alpes, dès la der- nière glaciation a été, en raison de la plus grande masse d'eau, bien plus rapidement et plus profondément érodée que les gorges dans lesquelles s'écoulent ses petits tributaires ; c'est ainsi que le Brenton, par exemple, est obligé de rejoindre le Mis par une série de sauts dans les derniers 600 mètres de son cours, dans lesquels la pente moyenne de son lit est environ de 20 0/0. Ces sauts , dont la hauteur varie de i à 7 mètres , ont donné nais- sance à des espèces de grandes écuelles à section horizontale ellip- tique et de profondeur variable, mais toujours assez grande et non proportionnée à la hauteur de la chute. Par exemple, le chaudron \\° 2 (c'est ainsi qu'on les nomme sur les lieux) est formé par vni saut de i mètre et mesure 2 m. 5o de pro- fondeur, et le chaudron n° 3, qui a été formé par un saut de 4 mètres, a la même profondeur. Le n° 9, avec une chute de 2 mètres, a. au contraire, une profondeur de 5 m. 5o. De plus , en regardant la chose de plus près , on s'aperçoit facile- ment de quelques autres particularités intéressantes. (*) Squinabol s. — Venti giorni siii Monti bellunesi. Note di Geografia Jisica. Livorno,. 1902, 5o8 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE D'abord, lorsqu'on observe la suite des sauts de face, on voit que, à commencer du sixième chaudron jusqu'au douzième , qui sont très rapproches les uns des autres, les chutes ne suivent pas, comme cela devrait être, une ligne parallèle à l'observateur, mais qu'elles suivent unc'gouttière alternativement oblique à droite et à gauche, de manière que la trace du saut et une verticale projetée sur un plan, lui aussi vertical, font entre elles un angle variable qui, parfois, arrive à 25°. En second lieu , la sortie de l'eau le long des petites terrasses qui séparent un chaudron de l'autre ne se fait pas, elle non plus, selon une ligne parallèle à la direction générale du thalweg du lit, mais elle est oblique alternativement à droite et à gauche, lormant un angle parfois même de 35° avec la direction générale indiquée. Enfin , en examinant chaque chaudron , on voit clairement que la forme solide de chacun est fortement ventrue , de manière que leur plus grand diamètre en tous les sens n'est pas à l'ouverture, mais bien à mi-profondeur entre la surface et le fond. J'ai cherché à expliquer ces faits et voici les conclusions auxquelles je suis arrivé. Quelques mètres avant d'atteindre le sixième chaudron, le lit du torrent fait un angle brusque de gauche à droite (si l'on descend le torrent), ce qui a pour effet de lancer la masse de l'eau dans un sens oblique relativement à la ligne générale du cours d'eau et de déter- miner ainsi une chute et une gouttière oblique dans le même sens. L'eau qui ne tombe donc pas verticalement est en conséquence forcée, à peine arrivée dans le réservoir sous-jacent, de prendre un mouvement giratoire dextrorse, qui a sa plus grande puissance à quelques décimètres au-dessous du niveau de l'eau et qui entraîne dans le même sens l'eau plus voisine de la surface. On comprend alors en premier lieu comment l'eau, en employant comme émeri le gravier qui est continuellement apporté dans les chaudrons et qui est bientôt réduit à n'être que du sable fin (les blocs, même les plus gros, sont bien vite réduits de volume et finissent par dispa- raître), a pu former des cavités bien plus profondes et jilus larges que ne le comporteraient la hauteur de chute et le volume d'eau; et, en second lieu, on explique très facilement la forme ventrue des chaudrons, due à ce que le tourbillon, comme je le disais, a sa i)lus grande puissance érosive à mi-profondeur et tend môme par son action continuelle à éventrer les chaudrons. On explique encore pourquoi la profondeur des chaudrons n'est pas en rapport avec la hauteur de cliaque saut; elle augmente plutôt s. SQUINABOL. — LES CHAUDRONS DU BRENTOJV SoQ avec l'angle que fait chaque chute ou chaque gouttière avec la verti- cale; comme il est bien facile de le comprendre, en effet, pour une chute rigoureusement verticale, on n'aurait point de tourbillon et la formation du puits serait exclusivement due à la force du choc de l'eau contre la roche, tandis qu'avec une chute de plus en plus oblique la vitesse augmente et avec la vitesse la force du tourbillon. D'autre part, l'eau mise en mouvement giratoire a naturellement une tendance à sortir de chaque chaudron, selon une tangente au bord de ce même chaudron; c'est ainsi que, lorsque la distance horizontale entre deux chaudrons n'est pas excessive , elle se creuse soit un lit oblique sur la partie plane entre le bord interne et le commencement d'une nouvelle chute, soit, toujours par suite de la même tendance, une gouttière oblique dans la partie verticale, ou de gauche à droite , ou de droite à gauche , selon que le tourl^illon d'où elle provient est sinistrorse ou dextrorse. Le mouvement giratoire dans le sixième chaudron étant dextrorse, la gouttière qui conduit l'eau dans le septième est de droite à gauche, mais alors le tourbillon qui se forme dans le septième est, par force, sinistrorse, d'où vient que la nouvelle chute d'eau entre le septième et le huitième chaudron est de gauche à droite et déter- mine dans ce dernier un tourliillon dextrorse, comme dans le sixième. On continue ainsi pour les autres chaudrons jusqu'au douzième, où cesse cette manière spéciale d'allure de l'eau à cause d'une plus forte distance entre deux chaudrons successifs. On peut évidemment en conclure que. de cette manière, le travail que l'eau peut faire est bien plus puissant que si elle faisait des sauts verticaux. Car s'il en était ainsi, l'eau en toml^ant sur la roche ne pourrait pas, comme je l'ai dit, donner naissance à des tourbillons; une petite partie seulement de sa force vive serait employée dans le travail d'érosion et l'eau sortirait de chaque réservoir avec une vitesse encore grande. En tombant, au contraire, plus ou moins obliquement, l'eau.. est forcée de produire des tourbillons ; en conséquence, le trajet que l'eau même fait dans chaque chaudron est plus long , elle perd bien plus de force vive et sort de chaque écuelle avec une moindre vitesse, mais le travail accompli est par cela même plus fort. Ce n'est pas autre chose que l'application du principe bien connu que la perte en force vive équivaut à un travail mécanique accompli. OIO MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE M. Emile GHAIX-DUBOIS Professeur de Géographie à TEcole Supérieure de Commerce Président de la Société de Géographie de Genève (Suisse) LE PONT DES OULLES, PHÉNOMÈNE D'ÉROSION PAR LES EAUX COURANTES [55i-35] — Séance du 6 août — J'emprunte depuis si longtemps le territoire français pour y récolter des photogrammes et des notes de géophysique, que je suis heureux de l'occa- sion qui se présente d'en faire profiter une réunion de savants français en leur donnant la primeur do quekjues glanures faites chez- eux. Le Pont des Oulles est mentionné, à ma connaissance, par le professeur E. Renevier (dans son Mémoire géologique sur la Perte du Rhône) (*), par le professeur H. Scliardt (dans ses Etudes géologiques sur le Jura méridional) (**), par M. H. Douxami (dans son Etude sur la vallée du Rhône aux environs de Bellegarde) (***), et par M. E.-A. Martel (Comptes rendus de l'Académie des Sciences de Paris, i5, XII, 1902.). En outre, je sais que M. le professeur Jean Brunhes a visité le Pont des Oulles et je ne doute pas qu'il y ait fait de bonnes observations. M. Renevier nomme le Pont des Oulles , sans en rien dire de particulier, et le fait figurer sur sa carte géologique. M. Schardt, dans ses deux notes, ne fait aussi que mentioimer le nom. M. Douxami, seul, parle, en quelques lignes, des j)hénomènes curieux d'érosion que présente cet endroit. D'autres font-ils fait sans que j'aie connaissance de leurs travaux? — C'est possible et je les prie de me pardonner cette ignorance. N'ayant pas eu l'idée de faire une étude ai^i^rofondie du Pont des Oulles, mais désirant uniquement réunir quelques documents, je n'ai pas suffisamment fouillé la littérature scientifique qui s'y rapporte. Au reste, mon rôle personnel se réduit à fort peu de chose : j'ai été plusieurs fois admirer le phénomène, j'ai fait queUpies photograpliies et •observations, et j'ai surtout constaté la parfaite concordance des faits observables au Pont des Oulles avec les exi^lications j^roposées par M. le (•) E. Rexevieu , Mémoire géologique sur la Perte du Rhône et ses em-irons, dans Mémoires de la Société heh'cfique des Sciences naturelles, i8.w. (**) H. ScuAUDT. — 1) Etudes géologiques sur l'extrémilé méridionale de la chaine da Jura 1891. — 2) Excursion géologique dans le Jura méridional, dans Li\'ret-Guide géolo- gique de la Suisse, 1894. (***) H. Douxami, îitudc sur la vallée du lihône, aux empirons de Bellegarde, dans Bulle- tin des senices de la Carte géologique de ta Erance, n» 81, 1. \II, i r<.ml)rc qu'il réussit le mieux, moyennant une pause. (*"*) Diamètre S.-A\'. — N.-E. = i'":5, — diamètre perpendiculaire — i'"4''>! — profon- deur = plus de o^So. L.-A. FABRE. — DISSYMÉTRIE DES VALLEES ET LA LOI DE BAER 5l5 marmite , en attendant que la grosse pierre culbute et offre au sable une autre de ses parties à polir (*). Or, à part la « meule », cette marmite ne contenait que du sable fin sans le moindre caillou (mais des œufs de lézard et quelques plantes). D'autres faits signalés par M. Brunlies sont encore illustrés au Pont des Oulles. Ainsi une marmite a deux étages. Il est probable que l'étage infé- rieur est dû à un abaissement brusque du déversoir. Une autre est un joli exemple de marmite inachevée présentant la forme en « fond de bouteille » (**). Cette marmite contenait du sable et des pierres allant jusqu'à o m. 02 de grand axe. En résumé, il me semble que tous les phénomènes signalés par M. J. Brunhes dans ses diverses publications sur l'érosion méca- nique trouvent leur confirmation au Pont des Oulles. Je n'ai pas su y en découvrir d'autres encore inconnus. Je crois donc que, grâce à lui, le mode d'action de l'eau tourbillonnante est bien et dûment connu. Il reste un problème capital à élucider : celui des diverses causes de ce mouvement giratoire si général. Je ne doute pas que quelque membre du Congrès n'apporte des documents importants sur ce sujet. M. L.-A. FABRE Inspecteur des Eaux et Forêts , à Dijon SUR LA DISSYMËTRIE DES VALLÉES ET LA LOI DITE : DE DE BAER [55i.35] — Séance du 6 août — La dissj'métrie des vallées et la dérivation des thalwegs sont des phénomènes connexes. Ils peuvent être localisés ou affecter l'en- semble des cours d'eau groupés dans une même région. Au xviii<= siècle , l'ingénieur hydrographe français de Lamblardie, (*) La forme irrégulière de la marmite peut s'expliquer par le fait que le bloc y est placé de travers. 11 est probable que l'eau tourne différemment des deux côtés. (*•) Diamètre N.-S. = o-^So; diamètre E.-W. = o'»^?. — Hauteur du cône au-dessus du fond : o»i3 du côté S., o-o^ du côté N. 5l6 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE étudiant ces phénomènes dans les vallées de la Haute-Normandie, les rattacha à des faits de déniidation consécutifs à l'action des vents dominants. Plus tard, après les expériences de Foucault, l'académicien Babi- net les attribua à l'action directe de la rotation terrestre. Le physi- cien russe de Baer reprit l'idée et formula la « loi » en vertu de laquelle « les rivières, sollicitées par la rotation terrestre , tendent à « dériver, à droite sur rhémisj)hère nord, à gauche sur l'hémisphère sud ». De nombreux faits, spécialement tirés de vallées suivant la direction d'un méridien, étayaient cette théorie, séduisante par sa nouveauté et sa simplicité. On l'allégeait il est vrai d'objections gênantes et particulièrement de celles relatives au frottement, con- sidérant l'eau des fleuves comme glissant sans lits et sans berges, idéalement, à la surface de la terre. La « loi » fut propagée par d'éminents géographes; Elisée Reclus retendit aux régions d'estuaires, de deltas; après lui, beaucoup d'auteurs lui ont trouvé des applications. Cependant, des observations scrupuleuses et l'interprétation métho- dique des faits commencèrent à faire douter de sa valeur. Il y a peu d'années, A. Penck, analysant les travaux de de Lam- blardie, recourut une seconde fois à Vinjluence éoliemie pour expli- quer la dissymétrie des vallées, particulièrement dans l'Europe cen- trale et dans la région sous-pyrénéenne. La dérivation des fleuves dans les deux hémisphères lui paraît être sans aucune relation avec la rotation terrestre et commandée seulement par des influences physiques. A. de La^iparent, G. de la Noë, E. de Margerie et la plu- part des autem-s qui ont étudié cette double question l'envisagent au môme point de vue. La région sous-pyrénéenne est certainement celle où les faits de dissymétrie et de dérivation ont été les plus signalés. Tous les cours d'eau sous -pyrénéens dérivent plus oïi moins; la section droite de leurs vallées est nettement dissymétrique , souvent sur de grandes étendues. É. Reclus et A. Duponchel expliquent ces faits par l'influence de la rotation terrestre ; Leymerie , Surrel , Delesse, Risler ne récemment à la « loi » que sous réserves. En 1898, nous avons présenté, M. E. Marchand, directeur de TOb- L.-A. FABUE. — DISSYMÉTRIE DES VALLÉES ET LA LOI DE BAER 5l7 servatoire national du Pic-du-Midi, et moi (*), une première étude des faits d'érosion, torrentielle et subaérienne, limités à la région des hauts plateaux gascons de Lannemezan, Orignac et Ger, restes des anciens cônes fluvio-glaciaires de la Neste-Garonne, de l'Adour et du Gave. Dans cette étude, nous avons sommairement examiné le régime météorologique, la constitution géologique de la région; l'en- semble des causes, rotation terrestre, vents dominants, vents plu- vieux, etc., qui peuvent intluer sur les faits considérés. Nous avons été conduits à reconnaître la continuité et parfois la simultanéité des actions ci-après : 1° Attaque éolienne prépondérante sur un des versants; 2° Exagération du ruissellement superficiel sur le versant où l'éro- sion se localise difficilement par suite de l'instabilité et du sol et du niveau de base ; 3° Orientation contre le front attaqué des apports torrentiels laté- raux qui affluent du front défilé, j)lus stable, et où l'érosion se loca- lise plus facilement; 4° Sapement de la base du versant attaqué, sa démolition par glissements, son redressement progressif; 5° Chasse et déblaiement torrentiels des masses détritiques accu- mulées dans les thalwegs ; 6° Triage hydraulique des déblais; le cailloutis siliceux fluvio- glaciaire, lourd et résistant, n'est que ditlicilement déplacé ; il enroche et pave les lits, obligeant les eaux chargées à dépenser leur force- vive plutôt latéralement que verticalement, et le long du versant attaqué, qui dérive. L'analyse nous a permis en outre de faire valoir la part considé- rable qui devait être faite aux frottements sur les lits et les berges des cours d'eau étudiés et l'impossibilité d'expliquer par des actions cosmiques, par la loi de de Baer, les faits observés. Ils trouvent tous leurs causes naturelles dans des relations exclusivement physiques tirées : 1° Du ruissellement superficiel, par l'attaque des vents pluvieux de l'Ouest ; 1° Des formes topographiques du sol, par l'extension torrentielle des vallées axillaires qui affluent latéralement contre les berges et les versants attaqués. Nous avons établi depuis que des considérations purement « géo- (•) Congrès des Sociétés savantes de 1899 à Toulouse, section des Sciences, pp. i83-aK», 3 pi. 5l8 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE logiques» résultant d'oscillations eustatiques du sol, et d'autres exclusivement « humaines », issues de la dénudation culturale, avaient pu activer la marche des phénomènes ; une partie de ces derniers reste acquise et se maintient telle; l'autre est actwe et pro- gresse tous les jours. C'est ainsi que les vallées extra-montagneuses de la Garonne , de l'Ariège, du Tarn, de la basse-Save, du bas Adour, du Gave, affectent souvent sur de grandes étendues des prolils de dissymétrie « acquise »; le redressement du versant s'est fait, à droite ou à gauche, suivant le front attaqué, soit par des afflux torrentiels latéraux issus des formes topographiques du terrain, soit par l'influence pure- ment éolienne. C'est par cette dernière influence très prépondérante que s'effectue la dérivation des thalwegs des torrents d'Armagnac et de Chalosse : elle se produit vers l'Est (à droite), ou vers l'Ouest (à gauche), suivant qu'un des flancs des vallées se prête plus que l'autre à l'attaque des vents de l'Atlantique. Au voisinage du seuil de Naurouze , le vent méditerranéen dit « d'Autan » a la même action morphologique, qui se traduit dans la vallée de l'Hers par une dérivation souvent occidentale (sur la gauche). Ces faits de déplacement latéral de thalwegs permettent d'expli- quer la morphogénie de la vaste région landaise, autrefois sillonnée par le prolongement du réseau fluvio-glaciaire de l' Adour et des Gaves de Chalosse, qui débouchaient directement soit dans la Garonne, soit sur le littoral. La pénéplanation du sol. l'échelonnement des captures qui tendent actuellement à répartir toutes les eaux , issues du front pyrénéen occidental, soit dans le Gave, soit dans la Garonne, résultent de l'attaque constante que subissent les sols meubles et frialîles de la Gascogne pyrénéenne : ils cèdent à l'effort permanent de la « lame éolienne » de l'Atlantique et à la chasse puissante des eaux torrentielles qui se condensent au voisinage de 1' « écran pyrénéen ». A part le i^lissement de Saint-Sever, les accidents tectoniques de la Cuvette gasconne, démantelés, décapés, noyés sous des masses alluviales accumulées depuis l'époque oligocène, n'ont pu avoir raison de cette double attaque , qui a semé très au loin des rivages actuels d'Aquitaine, sur les fonds précontinentaux , les épaves détri- tiques du sol gascon. La dissymétrie très accentuée de l'estuaire girondin, qui s'encaisse fréquemment à droite contre de hautes falaises, tandis que la rive gauche s'étale basse et sablonneuse, a été attribuée à la « rotation terrestre » (Lenthéric). Des travaux antérieurs (Krûmmel) avaient L.-A. FABRE. — DISSYMÉTRIE DES VALLEES ET LA LOI DE BAER ÔIQ établi l'impossibilité de constater cette influence. On sait d'autre part que l'estuaire actuel, assis dans une région faillie, n'est que l'ultime expression d'un ancien delta, encombré de masses caillou- teuses, de hauts fonds arénacés progressivement atterris de l'Ouest à l'Est : Dordogne, Garonne, Adour et Gave, charriant les débris du Plateau Central et des Pyrénées, y ont conflué après l'expansion fluvio-glaciaire pliocène. Les atterrissements, progressant sous l'in- fluence du courant littoral des Landes, déplacèrent du S.-O. au N.-E. les anciennes diramations du delta, qui se réunirent et s'encais- sèrent à l'Est contre la falaise tertiaire, toujours sapée par la mer et attaquée par les vents d'Ouest. Le chenal s'établit en Gironde sur la rive méduUienne convexe (à gauche), les atterrissements se font svu' la rive saintongeoise concave (à droite). (Hautreux.) La dissymétrie de la vallée et l'évolution des diramations du delta du Rhône n'ont pas échappé à une interprétation de la loi de Baer (Lenthéric, Monin, Malavialle). La continuité de l'afflux latéral des apports torrentiels qui ont encombré et encombrent encore la plus grande partie de la rive gauche du fleuve de Lyon au delta, rejetant son cours sur l'autre rive, a été magistralement exposée par Surrel : Les idées de léminent ingénieur se sont trouvées implicitement confirmées par les travaux géologiques de M. Ch. Dépéret. Dans la région du delta, E. de Beaumont et Lenthéric ont établi que la branche la plus ancienne s'est orientée contre la rive languedo- cienne sous l'influence du cône fluvio-glaciaire de la Grau formé par la Durance. Le jeu rythmé des atterrissements ultérieurs, plus ou moins facilité par l'intervention de l'homme , amena la création de nouvelles diramations orientées vers l'Est. II Interprétés à la lumière de ces observations , la plupart des faits de dissymétrie cités à l'appui de la loi de de Baer trouveront des explications physiques naturelles. Nous passerons très sommaire- ment en vue les cas les plus intéressants. La basse vallée du Tage est dissymétrique. Le fait est d'ordre tectonique et torrentiel : la rive gauche appartient à un comparti- ment affaissé qui a laissé la rive di'oite en saillie ; les affluents de gauche affbuillent des terrains meubles où ils se chargent de maté- riaux détritiques (Choffat). En Algérie le déplacement vers l'Est et 520 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE la formation des terrasses de l' Ysser ont été rattachés à un ensemble de phénomènes régionaux géologiques, captures, etc. et évasivement à des oscillations eustatiques de lignes de rivages , à l'exclusion de causes cosmiques (de Lamothe). La basse vallée du Nil, d'origine tectonique , orientée S.-N. s'appuie contre la falaise arabique et délaisse la rive libyque plus étalée. On sait que les vents d'entre N.-W. etS.-W. dominent en Egypte (Scliir- mer). E. de Beaumont fait remarquer l'analogie du sol libyque avec celui des terrasses de la Garonne. Lors des crues, le Nil remplit sa vallée. Au cours du creusement de cette dernière, la rive droite a donc certainement subi une action éolienne prépondérante , suscep- tible de produire la dissymétrie. Les effets de déflation (Walthers) et de corrosion éolienne (J. Brunhes) ont pu s'ajouter à cette action. Il est établi, depuis longtemps d'ailleurs, que. dans la région du delta, la branche canopique longeant la rive libyque, oblitérée aujourd'hui, était la plus ancienne : cette branche et celle de Rosette, par laquelle la masse des eaux du fleuve s'évacue maintenant, sont toutes deux orientées vers l'Ouest, à gauche de la vallée. La loi de Baer a été fréquemment invoquée pour expliquer les dérivations des fleuves de l'Inde. Le régime météorologique est ici sous l'influence de deux courants contraires très puissants, les alises et les moussons. Les effets de ce régime sur les rivières n'ont, pour ainsi dire, pas été étudiés. Toutefois Reclus a signalé que le delta de la Caveri était rejeté au Nord (sur la gauche) par les moussons. On a remarqué (E. Suess) que l'action sédimentaire du Brahmapoutre faisait dévier le Gange sur la droite. En Chine, des trois Kiangs par lesquels débouchait autrefois le Yang-Tse-Kiang, il ne reste plus que la branche la plus septentrionale (celle de gauche) (P. -H. Havret). Le Hoang-Ha a déplacé son embouchure de 7 degrés de latitude sm' la gauche (A. Wœikof). En Sibérie, l'Yenissei, l'Obi et l'Yrtisch ont assis leur vallée dans de véritables « cassures » (E. Suess); les lèvres orientales constituées par des terrains anciens , rocheux , font saillie sur les rives occiden- tales « effondrées » et alluvionnées par des sédiments récents, meubles. La Sibérie Occidentale est soumise à un régime alternatif de vents de N.-W. et de S.-E., avec prédominance de ceux de N.-W. : ce régime a certainement une influence sur le cours de fleuves puis- sants, largement étalés et dont les vallées s'orientent généralement du Sud au Nord. Comme ceux des toundras, les fleuves des steppes méridionales de la Russie, orientés vers le Sud et dont les rives occidentales redressées L.-A. FABRE. — DISSYMÉTRIE DES VALLEES ET LA LOI DE BAER 321 dominent les rives orientales, ont été cités par de Baer à l'appui de sa « loi ». Ici, les vents dominants sont ceux du Nord-Est, « dits de retour » ; ils attaquent les rives occidentales. Les faits géologiques sont particuliers. La basse plaine russe est une immense pénéplaine au substratum varié, généralement crétacique, recouvert d'un épais manteau lœssoïde relativement meuble , provenant du glacier Scan- dinave quaternaire (W. Davis). On estime que cette plaine a subi un exhaussement de loo à 200 mètres par suite d'un mouvement eusta- tique négatif de lignes de rivages. On conçoit que, sous la double influence des vents dominants et du déplacement du niveau de base, le creusement des vallées dans les sols meul^les et peu résistants ait sollicité les fleuves à dériver vers l'Ouest, sur la droite, délaissant constamment leur rive orientale, tandis que l'autre tendait à se redresser : la dissymétrie reste « acquise ». Ces faits d'érosion sont devenus « actuels » depuis que, sous l'influence de cultures intensives et de dénudations, les steppes à tchernoziom se sont ravinées outre mesure (Woeikof, Sibirtzew, Krasnow, etc.). Les « ovraji » qui ne « jouent », chaque année, que pendant un temps relativement court, mais suffisant pour étendre démesurément leur sillon dans la steppe , donnent une idée de la puissance érosive qu'eurent nécessairement les fleuves russes, très largement pourvus d'eau, lors de l'établissement de leur réseau hydrographique. En plusieurs points de son cours, et particulièrement dans les plaines hongroise et bulgare , le Danube a été manifestement dévié vers sa rive droite sous l'afllux de réseaux torrentiels issues des Carpates ou des Alpes de Transylvanie. Les « bouranes » de l'Est ont accentué cette « poussée » dans les putztas. Avant d'être endigué, le cours du Pô était alternativement rejeté à droite ou à gauche , sous l'influence torrentielle de ses tributaires des Alpes ou des Apennins. Du Texel à lElbe , on a constaté que le rivage Ouest des estuaires « monte raide, le rivage Est s'inclinant doucement » (O. Kriimmel). Il en est de même pour le Rhin, l'Escaut et la Meuse (E. Reclus) : cette disposition est à l'encontre de la loi de de Baer. La plupart des vallées de la Belgique occidentale , qui s'orientent du S. au N., ont une dissymétrie spéciale résultant de ce fait que, après leur creusement, elles ont subi l'alluvionnement éolien des limons heshayens, chassés par les vents secs de l'Est. Ces limons se sont plaqués de préférence sur les flancs gauches des vallées expo- sées à l'Est (Van den Brœck, Rutot) : les flancs droits, restant exposés 522 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE aux vents pluvieux de l'Ouest, se sont légèrement redressés et dénudés, si bien que, de place en place, on y voit apparaître en liséré le substratuin tertiaire recouvert par des limons polymorphes d'âges vai'iés, qui reste toujours caché sur les flancs gauches. Le nouveau monde présente deux cas remarquables de dissymé- trie fluviale, Tun pour, l'autre contre la loi de de Baer. Presque dès son origine et jusqu'à son delta, le Mississipi est en rébellion ouverte contre la « loi ». Sa rive gauche, semée de « bluft's », est relevée, son delta s'est déplacé vers la gauche. Lyell attribue à des affluences torrentielles de l'Ouest la dérivation du fleuve vers l'Est. On sait, d'ailleurs, que le vent du N.-W. domine dans la grande plaine alluviale américaine (Woeikof). Si l'influence cosmique est ici manifestement évincée, les faits d'ordre géogra- phique ou géologique acquièrent toute leur valeur pour expliquer les phénomènes observés. Le Parana et l'Uruguay, à l'inverse du Mississipi, sont cités (É. Reclus) comme suivant fidèlement la loi de dérivation : leur rive redressée se trouve à gauche, comme elle doit l'être dans l'hémisphère austral. Il convient de remarquer que le cours de ces fleuves , qui coulent dans l'immense plaine lœssoïde des pampas, est soumis à des influences torrentielles et éoliennes venues de l'Ouest et qui attaquent par conséquent leur rive gauche. Torrents andins et « pamperos » du Sud-Ouest ont certainement agi au cours du creuse- ment des vallées pour rejeter les eaux vers l'Est, déterminer une dissymétrie qui reste « acquise ». En ce qui concerne l'embouchure des fleuves de l'hémisphère Sud, « il est difficile d'opposer des exemples décisifs pour ou contre l'action de la rotation terrestre dans l'observation des courants de marées » (O. Krûmmel). III Ce rapide aperçu établit que le double phénomène de dissymétrie «t de dérivation fluviales est sous la dépendance prépondérante de causes géologiques et géographiques. Le principe formulé par de Baer n'a pas les caractères d'une « loi ». Dans la région des deltas ou des estuaires, les faits sont à peu près universellement contre la « loi ». Dans les vallées proprement •dites, la force cosmique déviante n'a pas une intensité suflisante L.-A. FAURE. — DISSYMÉTRIE DES VALLEES ET LA LOI DE BAER 523 pour vaincre la résistance des frottements que les rivières exercent sur leur lit et leurs berges. Toutefois , il n'en est pas de même pour les « fleuves » immenses et profonds qui sillonnent l'Océan : ceux-ci glissent, pour ainsi dire sans frottement, au milieu des eaux marines (J. Thoulet). Aussi, la rotation terrestre agit-elle puissamment sur les courants marins. La trajectoire des courants aériens, qui flottent encore plus libre- ment, est aussi sous cette influence : ces courants, à leur tour, orientent la marche des eaux superficielles de la mer (A. de Lappa- rent. Bouquet de la Grye, etc.). Le mouvement général de cet immense afflux liquide et éolien est ainsi concordant. La trajectoire aérienne s'oriente, à l'aller, par un mouvement ascensionnel, de l'Equateur aux Pôles et inversement ^u retour, suivant des directions obliques aux parallèles et aux méridiens. On conçoit, dès lors, que les vallées continentales, orientées sui- vant un méridien , aient un de leurs versants plus particulièrement soumis à l'attaque éolienne. Leur profil pourra donc se façonner suivant la loi de de Lanihlardie. Pour peu que les conditions pétro- graphiques et topographiques s'y prêtent, la dérivation des thalwegs sera manifeste. C'est cette « apparence », indirectement dérivée de la rotation terrestre, qui a sans doute motivé l'interprétation cosmique. Les forces de cet ordre, dans le grand travail de l'érosion des vallées continentales, ne paraissent exister qu'à l'état latent : elles restent subordonnées à des influences purement physiques. « La dissymétrie des vallées fluviales et la dérivation des thalwegs « résultent de causes géologiques et géographicpies , principalement « de l'érosion torrentielle et subaérienne du sol. » 524 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE M. C. BRUYANT Professeur suppléant à l'École de Médecine et de Pharmacie de Clermont Sous-Directeur de la Station limnologique de Besse LES SEICHES DU LAC PAVIN [525.66 — Séance du 6 août — « Les riverains du Léman appellent seiche un phénomène acci- dentel consistant en un mouvement alternatif et répété d'élévation et d'abaissement des eaux du lac. Dans certaines circonstances, on voit à Genève le niveau du lac s'élever lentement pendant 17 ou 36 min., d'une hauteur A^ariable de quelques centimètres à quelques déci- mètres ; puis il s'abaisse lentement aussi d'une quantité à peu près égale; puis il s'élève de nouveau pour s'abaisser encore, et ainsi de suite. On dirait des vagues gigantesques prodigieusement faibles et prodigieusement lentes ; on dirait des marées en miniatures , à périodes singulièrement rapides. » (Forel, Le Léman, t. II, p. 4o) L'étude des seiches, poursuivie en détail au lac de Genève, parti- culièrement par Forel, a donné lieu à de nomljreuses observations à l'étranger. Si les traits essentiels en sont aujourd'hui bien établis, quelques points nécessitent cependant de nouvelles recherches. Les seiches correspondent à un mouvement oscillatoire de la masse totale du lac. Dans le cas le plus simple, celui des seiches iininodales , la masse liquide se déplace en oscillant alternativement de chaque côté d'un plan vertical qui coupe le bassin en deux moitiés. Sur la ligne médiane, l'eau subit un simple mouvement oscillatoire horizontal; des deux côtés de cette ligne médiane nodale, le mouvement se com- plique et l'eau, tantôt amenée en excès tantôt enlevée par le balan- cement pendulaire, subit des variations de hauteur en outre du déplacement horizontal. Il en résulte que, dans les deux moitiés du bassin, la surface de l'eau présente des dénivellations rytluniques qui tantôt s'élèvent et tantôt s'abaissent au-delà du niveau moyen. Lors des seiches binodales, le mouvement de la masse liquide peut être considéré comme résultant de la juxtaposition de deux mouve- ments uninodaux. Supposons que, dans le milieu de la longueur d'un C. BRUYANT. — LES SEICHES DU LAC PAVIN SaS bassin, on imprime à l'eau un mouvement rythmique, en y faisant mouvoir verticalement un solide qu'on enfonce et qu'on soulève alter- nativement, on obtiendra un mouvement de balancement partiel dans les deux moitiés du bassin. Ce mouvement sera caractérisé par l'existence de deux lignes nodales, placées l'une au premier, l'autre au troisième quart du bassin, et de trois ventres d'oscillations : l'un médian, les deux autres terminaux. On peut de même concevoir la formation de seiches trinodales à trois nœuds et quatre ventres et, d'une manière générale , de seiches plurinodales avec un nombre de nœuds égal à n et un nombre de ventres égal à n -|- i. Dans tous les cas, il y a toujours un ventre d'oscillation à chaque extrémité du bassin, au point où la vague se réfléchit pour retourner en arrière. En effet, ces vagues d'oscillation fixe , pour adopter l'ex- pression de Forel, peuvent être considérées comme étant des séries de vagues d'oscillation progressive, arrêtées dans leur marche par une paroi contre laquelle elles se réfléchissent successivement. Elles retournent en arrière, chacune d'elles interférant avec les vagues qui lui succèdent et donnant un ventre aux points où deux sommets homologues coïncident, un nœud où la coïncidence se fait entre deux sommets inverses. Enfin, Forel a donné le nom de seiches dicrotes aux oscillations résultant de la superposition de seiches uninodales et de seiches binodales. Les tracés fournis par le limnographe, pendant ces séries de seiches, sont formés d'une succession de courbes à double sommet et rappellent les tracés sphygmographiques du pouls dicrote. Les seiches ou vagues d'oscillation fixe, vagues de balancement, ne sont jamais isolées. Étant l'expression d'un mouvement pendu- laire, elles se présentent sous forme de séries dont l'amplitude décroît jusqu'à o. L'amplitude est naturellement variable avec chaque série de seiches; mais la durée de chaque oscillation est constante pour chaque type considéré dans un même bassin lacustre. L'expérimen- tation établit que cette dm*ée est fonction directe de la superficie du bassin, fonction inverse de la profondeur. On doit à Lord Kelvin (sir William Thomson) une formule per- mettant de calculer approximativement la période de la seiche pour un lac de forme simple. Cette formule est la suivante : l 526 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE g est le coefricient de la i^esanteur, / la longueui- du bassin, h la pro- fondeur moyenne, exprimée en mètres; t exprime en secondes la durée de la demi-oscillation. La formule de P. du Boys est applicable aux cas où la profondeur du bassin est irrégulière. Enûn, en ce qui concerne les seiches bino- dales, du Boys considère ces vagues binodales comme ayant une durée de la moitié des vagues uninodales : y = 2, tandis que le pro- fesseur Sorct arrive à un résultat un peu différent. D'après ce dernier, la formule devient pour un lac de profondeur infinie tandis que la première ne s" applique qu'au cas où la profondeur tend vers G. Nous verrons plus loin que l'observation indique pour les diffé- rents lacs des durées fort variables. Quelle est la cause des seiches? Les seiches du Léman ont été signalées pour la première fois en lySo par Fatio de Duiller, ingéniem* des fortifications de Genève, qui en attribua la formation à l'arrêt des eaux du Rhône sur le banc de Travers, par les coups de vent du midi. Depuis ces premières constatations jusqu'au jour où l'on eut établi sur des bases solides cette théorie que nous avons essayé de résumer brièvement, bien des opinions ont été émises, même les plus fantaisistes. Cependant, la plupart des observateurs, parmi lesquels H.-B. de Saussure et Vaucher, voient une relation étroite entre le phénomène des seiches et les perturbations atmosphériques. Les très nombreuses observations de Forel établissent que les' seiches existent en tout temps, mais qu'elles s'exagèrent en cas de vent violent et qu'elles atteignent leur maximum d'intensité en temps d'orage. Les variations locales de la pression atmosphérique, comme il s'en produit lors des orages, traduites sur le baromètre par des sautes subites, sont toujours accompagnées de seiches. Les dimensions de celles-ci sont, d'autre part, en rapport avec l'ampliLude de la varia- tion barométrique (Forel). Le vent peut être la cause de dénivellations considérables de la nappe d'eau. L'eau est déprimée dans la région sur le vent; elle est soulevée, accumulée dans la région sous le vent. Or, si le coup de vent est subit ou s'il cesse subitement, si la vitesse de l'apparition C. BKUYANT. — LES SEICHES DU LAC PAVIN 527 OU de la disparition du pliénomène est en rapport avec le rytlmie du balancement de l'eau, il semble qu'il puisse y avoir mise en oscilla- tion de la masse du lac et production de seicbes. L'ol)servation con- duit à admettre cette conclusion; mais il est probable qu'il y a là une cause beaucoup moins puissante que la variation brusque de la pression atmosphérique , puisque le plus grand vent observé sur le Léman n'a été accompagne que de seiches de médiocre amplitude. * * * I Lac Léman. — Les seiches longitudinales uninodales ont une durée de ;3 uiin. environ. La ligne des nœuds ne coupe pas exactement l'axe longitudinal en son milieu (*); elle est de 24 kiloni. pkis rapprochée de Genî-ve que de MUeneuve. Le ralentissement de la propagation de l'onde, par le fait de la faible profondeur du Petit-Lac, est tel que la vague met autant de temps pour parcourir les 24 kilom. de Genève à Promenthoux que les 48 kilom. de Promenthoux à ^'illeneuve. La durée des seiches longitudinales binodales est de 35,5 à 35,6 min. : elle est donc un peu plus courte que la moitié de l'uninodale (— \ 2) p II est rare que les seiches longitudinales soient de type simple : le plus souvent, il y a coexistence des seiches uninodales et bmodales : ce sont là les seiches dicrotes. En ce qui concerne l'amplitude maximale des seiches longitudinales, les anciennes observations indiquent des chiffres très élevés (2 m.) qui se rai)portent non point aux dénivellations du Lac, mais à celles du Rhône, La hauteur maximale enregistrée par le limnographe de Sècheron, non loin de Genève, pendant une période de 17 années, a été de 63 cent. Les seiches transversales uninodales, observées à Morges, ont mie durée de 10 min. (**) et atteignent exceptionnellement l'amplitude de 20 cent. Les seiches de 5 min. sont du type binodal. Les seiches dicrotes sont également représentées. Les séries de seiches ont une durée variable; parfois elles ne com- prennent que quelques oscillations. Le plus souvent elles comptent des vingtames, des cinquantames d'oscillations successives. D'ailleurs, une série de seiches n'a ordinairement pas le temps de s'éteindre spontané- ment; elle est détruite par la production d'une nouvelle série qui, elle- même, sera remplacée par d'autres. La longueur des séries de seiches dépend ahisi, en général, de la fréquence des apparitions de nouvelles séries. Il est très rare, d'autre part, que le lac soit au calme plat au point de vue de ces vagues d'oscillation hxe. C'est ainsi, dit Forel, que « dans les six années pendant lesquelles le limnographe de Morges a dessmé pour moi les allures du Lac, je n'ai pas eu un seul jour ou je n'aie pu retrouver les indices d'un mouvement rythmique ». Enlln, à coté de seiches anormales, « oscillations peu fréquentes, qui [*J L'axe long-iludinal du Lac altcial 72 kilom. Profondeur maximale : 3io in.;*profon- deur moyenne : i5'5 m.; superficie : 8i) kilomètres carrés. [**] La larg-cur du Lac, au niveau de Morges, est de i"3 k. 8. 528 MÉTKOIIOLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE apparaissent j)arfois dans -des conditions mal déterminées et dont la sio-nilication n'est pas encore reconnue », Forel a donné le nom de vibra- tions à des oscillations qui apparaissent sur les tracés de tout linuio- graphe suffisamment sensible. La durée en est variable d'un jour à l'autre dans les limites de i5 ou 20 à 120 secondes (Morges). La hauteur, égale- ment variable d'un jour à l'autre, est comprise en moyenne entre j millini. et 5 cent. Les unes sont produites par les bateaux à vapeur qui circulent sur le Lac : consécutives , elles persistent des heures après le passage du bateau; antécédentes, elles s'inscrivent sur le limnographe en courbes de près d'mi cent, de hauteur, alors que le bateau est encore à 2 kilom. de distance. Les autres vibrations sont rapjjortées à l'action du vent. La période en est généralement comprise entre 20 et 60 sec. ; exceiîtionnelle- ment, elle atteint 2 min. Les oscillations- sont parfois aussi régulières que les seiches les plus caractérisées ; d'autres fois , elles sont irrégulières , heurtées , entre-choquées ; le rythme en varie d'un cas à l'autre. Nulles quand le Lac est au calme plat, elles sont d'autant i)lus accusées cpie le vent est plus foi't, sans avoir jîourtant de relation avec les vagues d'oscillation progressive. Elles peuvent se superjDoser aux seiches; pour- tant, quand elles sont fortes, elles semblent éteindre ces dernières. Quant à la nature de ces vibrations, Forel tend à admettre que ce sont des vagues d'oscUlation lîxe à un grand nombre de nœuds, des seiches multmodales. Quelle que soit l'origine de ces oscillations que nous venons d'énu- mérer , il est essentiel de faire remarquer que ni les seiches , ni les vibra- tions ne peuvent être confondues avec les vagues proprement dites ou vao-ues d'oscillation progressive. Ces dernières ont une durée incompa- rablement plus faible. Forel attribue, en elïet, lea dimensions suivantes aux plus grandes vagues qu'il ait observées sur le Léman : longueur : 35 m.' hauteur : i m. 70; vitesse jiar seconde : 7 m. 3o; durée : 4 sec. 7. Lac de Constance. — Le lac de Constance mesure 65 kilom. de lon- gueur et 90 m. de profondeur moyemie , la profondeur max. étant 252 m. Les seiches longitudmales unmodales ont une période de 55 mm. 8. La durée des seiches binodales , 28 min. i , est un peu plus longue que la moitié des luùnodales f -7 (^ 2^. Les seiches dicrotes existent également. Enfin, les oscillations de 4 nim., observées à la station de Kirchherg, peuvent être rapportées au type transversal uninodal. Lac de Zurich. — Au lac de Zurich, dont la longueur atteint 29 kilom. et la profondeiu' moyemie 44 "i- pour une profondeur max. de i43 m., la durée de la seiche uninodale est de 45 mhi. 6; celle de la seiche buiodale à peu près moitié moindre : 23 min. 5 (-rr \ aV JNLais les oscillations sont mal marquées, peu accentuées : elles forment des séries très courtes, qui s'éteignent rapidement. Lac de Neuchâtel. — Au lac de Neuchâtel, les périodes sont respective- ment de 5o et de 26 min. (-77 =2). La longueur du bassin est de 38 Idlom. C. BRUYANT. — LES SEICHES DU LAC PAVIN 520 la profondeur moyenne, 64 m., la profondeur max., i53 m. Les seiches sont aussi irrégulières, aussi peu définies que celles du Lac précédent. Lac des Qiiatre-Cantons. — Le lac des Quatre-Cantons a été l'objet des recherches de Sarasm. Le lac, « malgré sa forme compliquée, faisant mal augurer de la régularité des mouvements qui doivent s'y produire, s'est trouvé plutôt être un instrument vibratoire remarquablement accordé. Il présente en effet avec une grande netteté , suivant les stations , tantôt le grand mou>ement longitudinal uninodal, baisse à Lucerne, hausse à Fliileu, ou l'inverse, tantôt les subdivisions de celui-là, binodale, etc.; puis l'uninodale de bassins secondaires (Stansstad, Kûssnacht). ))La durée de la seiche unmodale est comprise entre 44 et 4^ min.; celle de la seiche binodale est de 24 min. i5 f-r<^ 2 V Enfin, l'uninodale Kûssnacht-Stanss- tad, c'est-à-dire de la branche transversale du Lac, dure 18 min. et se montre indépendante des autres mouvements du Lac dans la branche principale. A Flûlen, c'est-à-dire à l'extrémité même de cette dernière, le mouve- ment uninodal se produit presque constamment avec une extraordinaire régularité et en séries très prolongées. Celte régularité doit tenir à la position favorable qu'occupe le détroit des Nases, nœud forcé coïncidant bien avec le pivot naturel du mouvement de balancement des deux moi- tiés du lac qui se font é(iuilil)re de part et d'autre. C'est le contraire de ce que Sarasin a constaté sur le lac de Zurich, « lac avec mouvement de balancement irrégulier et peu constant, qui serait déréglé par la position fâcheuse du nœud forcé de Rapperswyl , qui ne coïnciderait pas avec un nœud naturel du lac et en ferait un instrument touché à faux par l'ins- trumentiste. » Lac Balafon. — Le lac Balaton est remarquable autant par son étendue que par sa faible profondeur : 77 kilom. de longueur; profondeur moyenne, 3 met.; profondeur maxima, 11 met. Aussi, les seiches y accusent-elles ime durée exceptiomielle, comprise entre 10 et 12 heures (Eugen von Cholnoky). Wnrmsee. — L'importante monographie de W.-Ule a fourni des docu- ments précis sur la limnologie du Wûrmsee du lac de Starnberg, situé non loin de Munich. D'autre part, nous devons à H. Ébert une étude des seiches de ce lac (1900-1901). Le ^^'ûrmsee, situé à 584 i^i- d'altitude, est le plus grand des lacs bava- rois. Il s"étend presque exactement du sud au nord du 47 '49' au 48" avec 57 k. 93 de superficie, une longueur de 19 k. 6, une largeur maximum de 4 k. 7. Son bassin, de forme générale très simple, présente une cuvette allongée, d'une profondeur moyenne de 54 m. avec maximum de i23 m. et une contenance de 3 milUards de mètres cubes. Son axe longitudinal s'écarte peu de la lign^ droite avec une légère courbure dont la conca- vité est tournée vers l'E. La moitié sud du lac est large et plaie, la moitié nord étroite et profonde. La nappe d'eau présente une oscillation rythmique très nette et persistante de 25 minutes de durée, qui est sans aucun doute possible, l'oscillation fondamentale, l'uninodale longitudi- 34* 53o MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOIJE nale. Cette oscillation ne manque presque jamais; elle se produit souvent en série ininterrompue pendant plusieurs jours. Même lors(iue la surface du lac est parfaitement tranquille et que le tracé du limnographe est presfiue une droite, on distingue encore sur colle-ci de faibles ondulations de la ])ériode précitée. Enfin, le liuiuograplie a encore révélé l'existence d'une oscillation de i6 minutes qui peut se superposer à la précédente (seiche dicrote), et d'une oscillation à période de 4 à 6 minutes qui appa- raît lorsque la surface de l'eau est violemment agitée. Ebert constate que, lors des variations brxisques du baromètre, les oscillations du lac reçoivent une impulsion nouvelle et que leur amplilude peut devenir subi- tement huit à dix fois plus forte ; cependant , les dénivellations ne sont pas du même ordre : « Nous sommes obligés d'admettre, dit Ebert, que ce ne sont pas les vai'iations brusques de la pression atmosphéritjue seules qui produisent ces fortes dénivellations des seiches, mais que les coiq)S de vent, qui en sont un phénomène consécutif, complètent l'action des premières. » La formule simple que nous avons citée plus haut don- nerait pour la période d'oscillation de la seiche une durée de 24 mmutes en chilTre rond; l'écart est donc peu considérable. Mais la seiche de lO min., dépassant de 26,4 0/0 la moitié de l'uninodale , ne peut être considérée comme une seiche longitudinale binodale. El)ert est porté à la considérer comme l'oscillation uninodale d'un bassin secondaire. Mafliisee. — Le Madûsee, le plus grand lac de Poméranie, mesure l5 k. 5 de longueur, 3 k. 2 de largeur pour une profondeur moATune de 20 m. et une profondeur max. de 42 m. Sa surface atteint 36 kq. et son volume 726 millions de m. c. On doit au professeur D' Willielm Hall)fass une étude très serrée des seiches de ce lac (1902). Les oscillations fonda- mentales ont une durée de 35 m. 5 et une amplitude maximale de 60 nun. Le limnographe décèle également des oscillations secondaires dont les périodes respectives sont : 20 min. i, i3 min. 7, 8 min. et 5 min. 5. Halbfass attire à juste titre l'attention sur le désaccord qui règne entre la théorie et l'observation au sujet de la durée des oscillations secon- daires et ({ui nécessite de nouvelles recherches. Quant à l'action des phé- nomènes atmospliériques sm* la formation des seiches, l'auteur constate que l'amplitude de la seiche décroît lorsque la pression atmosphérique augmente et inversement. Les séries d'oscillations de longue durée ne se ])résentent guère (jne lorsque le baromètre monte lentement ou se main- tient élevé; les seiches dicrotes et surtout les seiches plurinodales sont presque toujours accompagnées de petites dénivellations l)arométriques. Les seiches ont été observées dans un grand nombre d'autres lacs que nous ne pouvons énumérer ici (*). C'est à ce phénomène que nous rapportons les variations de niveau constatées par le profes- seur Alfred-H. Henry, au lac Krié. lors du jjassage des tempêtes (*) Cf. I,a l»il)liogrraphie de cette question dans : Fokel, L. Lemax, Monographie limno- louir/iii-. (. II. iS!i5. — W. Hall)la>s.Steli(Mulc Spicjrelsclnvanl^iinfrcn (Sciclics) im Madiisee, iiri^ounncrn-Zoilsclirilt l'ai' Gowasserlvunde, lyoa. C. BRUYANT. — LES SEICHES DU LAC PAVIN 53l {Monthlj- Weather Review, i5 mai 1900) (*). Enfin il nous semble rationnel de proposer la même explication pour les mouvements de la nappe d'eau du Tchad, signalés tout récemment par le lieutenant- colonel Destenave , dans un important article paru dans la Revue générale des Sciences (i5 juillet 1903). * Le phénomène des seiches n'avait jamais encore été reconnu dans les petits lacs d'Auvergne. Lecoq, qui a consacré à l'étude de ces der- niers plusieurs chapitres de son volumineux ouvrage intitulé : l'Eau sur le Plateau Central, mentionne bien les travaux de Vaucher et de Boue concernant les lacs de Suisse, mais ne rapporte aucune observation relative aux oscillations de nos nappes d'eau. Nous les avons constatées pour la première fois sur le Pavin . au cours de l'été dernier, par une forte tempête, alors que le lac était démonté et que le vent soulevait les embruns à plusieurs dizaines de mètres de hauteur. Les dénivellations observées à l'aide d'un simple tube gradué , placé en conti"e-bas dans le déversoir et mis en communication avec le lac, atteignaient 9 à 10 centimètres d'ampli- tude. La période d'oscillation paraissait un peu inférieure à <)0 secondes. Le lac Pavin est une nappe d'eau de 44 hectai'es de superficie. La forme en est grossièrement circulaire et les différents diamètres varient entre 700 et 770 m. La profondeur maximale déterminée par les sondages précis de Delebecque atteint 92 m. 10. Les profils ne sont pas absoluments symétriques comme dans les lacs-cratères typiques et difterent suivant le plan dans lequel on les relève. Néanmoins, dans l'étude des seiches, il ne peut être question d'oscil- lations longitudinales et transversales. En d'autres termes, les seiches ne peuvent êtres orientées comme dans un lac où la longueur est très différente de la largeur ; elles doivent se produire dans tous les sens, avec une durée très peu variable en rapport avec la pro- fondeur moyenne prise dans le plan de direction de l'oscillation. La formule appliquée au cas du Pavin , sur les données fournies par le plan de Delebecque (Atlas des Lacs français), indique comme mini- mum (diamètre de 700 m.) 54 sec, et comme maximum (770 m.) 61 sec. La période est très courte, mais aussi le Pavin est-il un des lacs les plus creux de Finance. Le rapport qui exprime la profondeur (*) G/. Ch. Rabot, Bn'iie de Limnologie (1900-1901). La Géographie, Bullelin de la Société de Géographie, juillet 1901. 532 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE relative est ^.20 Seuls le Lac Bleu et le Lac de Lesponne (Pyrénées) ont une profondeur relative jilus considérable : p— et jr- . Étant données d'une part la l^riéveté de la période doscillation, d'autre part l'impossibilité de laisser à demeure un appareil au bord du lac. nous avons construit au Laboratoire de Besse un limnograplie assez simple, mais qui a néanmoins donné des résultats satisfaisants. Ce limnographe (/tg: i) comprend essentiellement un récipient cylindrique R. mis en communication avec le lac par un tube de FiG. I — Schéma du limnographe de Besse. diamètre et de longueur appropriés et contenant un flotteur F. Un fil . fixé à ce flotteur et tendu par un contre poids , porte un index I, qui se déplace horizontalement à chaque variation de niveau. Les déplace- ments sont inscrits sur une feuille de papier noirci, placée elle-même sur une plaque de carton C qui glisse d'un mouvement uniforme sur deux baguettes de verre V et Y'. On obtient le mouvement uniforme grâce au dispositif suivant : la plaque est reliée à un flotteur R' placé dans un second récipient cylindrique, que remplit un jet d'eau cou- lant sous pression constante. La vitesse du mouvement dépend de lorilice d'écoulement et la durée de la marche de l'appareil est en rapport avec la capacité du récipient. On peut donc régler à volonté lune et l'autre. Par les temps de calme plat, le tracé du limnographe est une ligne droite : le lac est dans un état d'immobilité complète qui confirme C. BRUYANT. LES SEICHES DU LAC PATIN 533 .WA^ûi; 1902 43 l'observation faite parallèlement au tube gradué (limnimètre). Mais il y a lieu de faire remarquer qu'en réalité on ne pourrait conclure à l'immobilité absolue de la nappe d'eau qu'à la suite d'obser- vations portant sur deux stations limni- métriques ; il serait admissible, en effet, étant donnée la forme de la cuvette la- custre, que l'appareil unique fût placé sur une ligne nodale. Quand la surface du lac est agitée par les values d'oscillation > progressive, le limno- graphe décide aussi l'existence de vagues d'oscillation fixe. Le i j maximum d'ampli- 1 a 27Nov.?felge (•> FiG. 2. — Seiches du Pavin. 1 Tracé fourni par le limnographe mal accordé : 9 h. 24 à lo h. 4. 2 Tracé normal : 10 h. 36 à 11 h. 10. FiG. 3. — Seiches du Pavin. Tracé normal : 11 h. ij à II h. 46. FiG. 4- Seiches du Paviu. 534 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE tude constaté jusqu'ici est de lo centimètres Les oscillations les plus fréquentes sont d'autre part comprises entre lo et 20 mm. et se rapportent au type uninodal (fig. 2, 3, 4)\ la moyenne des obser- vations faites jusqu'ici conduit, en efTet, à leur attribuer une durée de 55 sec, comprise dans les limites assignées par le calcul. Nous ne possédons encore qu'une seule observation de seiches binodales, faite au limnimètre ; ces seiches semblent avoir une période à peu près moitié moindre. Ces premières constatations , encore incomplètes , démontrent seu- lement l'existence au lac Pavin de seiches identiques à celles des grands lacs. Mais il est nécessaire de procéder à une longue série d'observations, pour être à même de discuter certaines particularités déjà relevées dans les tracés et de rechercher la cause exacte de ces phénomènes caractéristiques des lacs. M. Gabriel GUILBERT Météorologiste, à Caen BRUME ET BROUILLARD — Séance du 8 août — Un nuage, disait Monge, est un brouillard dans lequel on ne se trouve pas et le brouillard est un nuage dans lequel on se trouve. Cette définition est encore exacte, au moins pour le brouillard. C'est, en effet, un nuage aqueux, un cumulus, beaucoup plus facile à observer que tout autre, puisqu'il se forme sous nos yeux. Mais son origine est-elle toujours identique? N'y a-t-il pas lieu de distinguer entre les brouillards du soir et du matin — nés dans la plaine ou sur les cours d'eau, dans les vallées ou sur les forêts — et les brouillards survenant à toute heure du joui' et paraissant descendre des régions aériennes? Si nous nous arrêtons au texte des Instructions météorologiques^ incontestablement nous ne ferons aucune distinction. Tout nuage humide qui se présente à la surface du sol est un brouillard et ne doit porter que le nom de brouillard. D'autres auteurs, l'excellent professeur Millot notamment, dis- G. GUILBERT. — BRUME ET BROUILLARD 535 tingucnt avec raison les brumes d'évaporation des brumes de con- densation; mais alors, au lieu de ne connaître que des brouillards, on ne désignerait ces nuages tei*restres que sous le nom de brume. Brume et brouillard, voilà l'habituelle confusion. Les marins appellent brume le même nuage appelé Ijrouillard par les habitants du continent et les météorologistes. Selon nos observations, ces deux désignations, journellement employées, sont loin d'être synonymes. Il existe des brunies et des brouillards. L'origine de ces deux phénomènes est absolument diffé- rente. Il est donc nécessaire d'attribuer à chacun d'eux une dénomi- nation particulière, un vocable distinct qui rappelle à l'esprit les conditions météorologiques de leur formation. Aucun terme nouveau n'est à créer ici, puisque les expressions brunie et brouillard sont adoptées et consacrées par l'usage. Définissons tout d'abord le brouillard, d'après l'observation directe. Lorsque dans une belle et calme soirée, soit d'hiver, soit d'automne, ou même, mais plus rarement, d'été ou de printemps, le refroidisse- ment nocturne s'opère avec quelque intensité, une vapeur légère et blanchâtre se forme tout d'abord dans les*vallées, près des cours d'eau, sur les étangs et les bois. Progressivement, cette humide vapeur, ce nuage naissant s'accroît en tous sens et surtout en épaisseur : il s'élève, atteint et dépasse les arbres, monte au flanc des coteaux et finalement les couvre de son voile, d'abord diaphane, bientôt opaque. Rien ne peut se soustraire à cette envahissante étreinte : le nuage vaporeux enveloppe tous les objets répandus à la surface du sol et devient enfin assez épais pour obscurcir le ciel et empêcher la A'ision des étoiles et de la lune. Tel est le brouillard. Tout autre est le mode de formation de la brume; tout auti*e sa propagation. Loin d'apparaître le soir ou la nuit, la brume naît le plus souvent en plein jour. Loin de se former toujours dans un air calme, la brume survient, quelle que soit la vitesse du vent, et ne dédaigne pas d'accompagner la tempête. Au lieu de prendre naissance au ras du sol et de s'étendre lentement comme le brouillard par un mouvement ascensionnel, la brume apparaît tout d'abord à une certaine hauteur dans l'atmosphère ; elle commence par voiler les rayons du soleil : elle le transforme en fromage à la crème, puis l'observateur apei*- çoit la cime des arbres ou la flèche des clochers environnées de confuses vapeurs, qui, poussées par la bise en volutes serrées, roulent 536 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE vers les vallons et tombent jusqu'à terre, après être visiblement descendues des hauteurs du ciel. La difterence d'origine est donc évidente : le brouillard est d'abord superficiel, puis il s'étend par un mouvement ascensionnel. La brume au contraire, se forme dans des régions élevées, au milieu de courants aériens, puis descend jusqu'à terre. Aussi peut-on résumer en une courte définition les caractères distinctifs des deux phénomènes : Le bvoiiillavd çient d'en bas et la brume d'en haut. Ou, le brouillard s'élève et la brume descend. Les conditions atmosphériques sont d'ailleurs tout opposées. Dans le calme du soir, la rosée est la première manifestation de l'humidité aérienne. Avant toute saturation de rair,avant toute condensation de vapeur, un humide dépôt se produit. Puis, le refroidissement aug- mentant progressivement, l'air parvient à la saturation , à la sursa- turation même. La vapeur d'eau passe alors à l'état humide, se tran- forme en vésicules : c'est le brouillard. Au contraire, quand la brume survient, l'air peut être très sec à la surface du sol. C'est un courant d'air froid, c'est une brise de mer, c'est une saute de vent près d'un centre de dépression qui, surve- nant inopinément, détermine une baisse de température — d'où condensation de vapeur dans les régions aériennes, d'où formation de brumes. Ces brumes ne parviennent pas toujours à gagner le sol : la séche- resse des couches d'air superficielles les dissipe, les résorbe. Ce n'est souvent qu'après plusieurs heui^es de chute continue de inarti- culés aqueuses et par suite d'un refroidissement progressif que la surface du sol se trouve recouverte d'un nuage humide qui dépose de nombreuses vésicules sur tous les objets. On voit donc que, si la saturation de l'air à la surface est néces- saire dans le cas d'un brouillard , si elle en est la cause seconde , il en est tout autrement dans la formation de la brume. La saturation n'est alors qu'un ejfet produit par la chute du nuage, tandis que le brouillard naît de la saturation de l'air. Avec les habitants de la plaine et les météorologistes, nous appel- lerons donc brouillard le nuage aqueux qui se forme au ras du sol dans le calme du soir ou de la nuit et — adoptant l'expression usitée dans le langage maritime — nous désignerons sous le nom de brume le nuage aérien qui descend jusqu'à terre, quelle que soit l'heure de la journée et la vitesse du vent. Mais une autre diUiculté se présente. Nous venons, en effet, d'employer l'expression brume \}onv àésï- G. GUILBERT. — BRUME ET BROUILLARD 537 gner un nuage humide, alors que ce nom est expressément réservé, par les Instructions météorologiques ollicielles, pour désigner une vapeur sèche, si Ion peut parler ainsi. Ce mot de « brume » sert à noter ce défaut de transparence de l'air, cette teinte blanchâtre ou fuligineuse qui s'aperçoit à une certaine distance ou seulement à l'horizon, dans les belles journées ou même avant la pluie, et qui n'est pas incompatilde avec la sécheresse de l'air, avec un état hygrométrique très peu élevé. Ce phénomène est très distinct et du brouillard et de la brume, tels que nous les avons décrits. Il ne s'agit plus ici de véritables nuages, localisés, limités en tous sens, se dispersant au souffle du A ent ou se précipitant avec lui : la brume dont parlent les « Instruc- tions météorologiques » n'a pas de forme définie. C'est une simple coloration de l'air, qui voile uniformément l'atmosphère; qui jamais n'éteint ni les rayons solaires, ni la clarté des étoiles; qui n'est pas plus sombre sur terre que sur mer, sur les vallées que sur les coteaux; qui, en un mot, n'a pas de formes et se confond avec l'infini. Que l'air soit calme ou que la tempête souffle; qu'il soit sec ou humide; que le temps soit au beau ou à la pluie, l'uniformité de la teinte grisâtre, brumeuse ou fuligineuse ne se modifie point. Ce n'est plus un météore aqueux : c'est un état particulier de l'atmos- phère, dont les causes vraies n'ont jamais été expliquées jusqu'à ce jour, mais qui, dans toiis les cas, ne doit point être confondu avec la brume, véritable nuage vésiculaire. Pour désigner un simple défaut de transparence de l'air, l'expres- sion air brumeux nous paraîtrait plus juste, car on peut alors apprécier diversement son intensité : air peu brumeux, air très bru- meux. Rien, dans ces termes, n'éveille l'idée de nuage. « Air bru- meux » évoque seulement la teinte grisâtre caractéristique de la brume ou du brouillard et peut être remplacé dans les observations quotidiennes par l'abréviation : brumeux. 538 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE M. DURAND-&IIÉVILLE A Paris PRÉVISION, QUELQUES HEURES D'AVANCE, DU PASSAGE D'UN GRAIN DE VENT AVEC ORAGE PROBABLE ET TORNADE POSSIBLE, EN UN LIEU DONNÉ, A UNE HEURE. DÉTERMINÉE. [55i.55] — Séance du 8 août — On assure que Le Verrier, s'il s'était avisé de faire des observa- tions avec le télescope ou la lunette astronomique, aurait obtenu des résultats moins précis que le dernier des astronomes de son obser- toire. Mais il avait du génie et tout le monde connaît la découverte qui l'a fait placer au rang des plus grands astronomes. De même il n'a peut-être jamais relevé une hauteur barométrique exacte ; mais , depuis le commandant Maury , personne n'a ouvert un plus vaste champ aux découvertes dans le domaine météorolo- gique. Marié-Davy et M. Fron, en suivant dans ses grandes lignes le plan général qu'il avait établi , organisèrent un système de prévi- sion des tempêtes, des pluies et des orages qui, depuis quarante ans, s'est répandu dans le monde entier. Par la suite, ce système s'est perfectionné quelque peu dans le détail, en France comme à l'étranger. Mais, malgré les savants tra- vaux d'une foule de météorologistes éminents, malgré les notions beaucoup plus complètes qui en sont résultées, notannnent à propos des orages, aucun principe nouveau ne s'est introduit victorieuse- ment dans la prévision du temps à brève échéance. Pour les tempêtes et les pluies, le principe traditionnel consiste à signaler l'arrivée, par l'Ouest de l'Europe, d'une dépression plus ou moins profonde, à gradient plus ou moins fort, dont le passage sur le continent amènera des pluies, des vents forts ou tempétueux. Pour les orages , outre la probabilité plus grande de leur appari- tion quand la température s'élève sur une vaste région , Marié-Davy et M. Fron avaient remarqué que cette apparition pouvait être annoncée d'une manière moins vague lorsque, sur les côtes de l'Atlantique, les isobares tracées de 5 en o inni. [)résentaient cer- taines irrégularités qui semblaient déceler l'existence de plusieurs « dépressions secondaires orageuses ». DURAND-GRÉVILLE. — PASSAGE d'uX GRAIN DE VENT AVEC ORAGE 53(> Les météorologistes allemands , étudiant les cartes d'isobares (tra- cées aussi de 5 en 5 mm.), observèrent à leur tour, dans ces courbes, des irrégularités en forme d' « anses de basse pression » et crurent remarquer que les orages se formaient « au fond » de ces anses. Ces deux remarques, faites par les savants des deux pays voisins, étaient un mélange d'erreur et de vérité et ne permettaient qu'une prévision énoncée en termes très généraux. LE RUBAN DE GRAIN L'élément nouveau qui établira, tant pour les tempêtes que pour les orages, un mode de prévision beaucoup plus précis, est ce que nous avons appelé le ruban de grain. Ayant raconté ailleurs, à plusieurs reprises, — en essayant de faire équitablement à chacun la part qui lui est due , -— l'historique de la découverte progressive du ruban de grain (*) , nous ne referons pas aujourd'hui cet exposé. Nous dirons seulement que la part qui nous revient a consisté à réunir en faisceau un grand nombre de décou- vertes fragmentaires, restées éparses et sans lieu, et à y ajouter un certain nombre de remarques nouvelles ; ce qui nous a permis d'at- tribuer au ruban de grain ses caractères, sa vraie longueur, sa vraie orientation, sa vraie relation avec la situation atmosphérique géné- rale sur le continent, avec les tempêtes et avec les orages. LE RUBAN DE GRAIN ET LES TEMPETES Les grands mouvements appelés bourrasques (cyclones par les météorologistes anglais) et dépressions barométriques ne sont pas toujours, comme on l'a cru, caractérisés par des isobares à peu près circulaires et des vents dont la force décroît régulièrement à partir des environs du centre jusqu'à la circonférence. Il y a des dépressions à rubans de grain dont les caractères sont très différents. Pour plus de clai^té, nous examinerons ici une dépression dans laquelle se trouve un seul ruban de grain. Ce ruban existe parfois dans la moitié nord , plus souvent dans la partie sud de la dépression dont il fait partie intégrante. Supposons-le dans la partie sud, celle qui visite ordinairement l'Europe occidentale et centrale. Ce ruban offre une largeur qui varie de lo à 80 kilom. Il s'étend (*) Voir Les grains et les orages (Annales du Bureau central météorologique de France, année 1892) et La loi des grains, mémoire lu au Congrès international de Paris (1900). 54o MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE des environs du centre jusqu'à la circonférence de sa dépression, sur une longueur qui peut, dans les cas extrêmes, atteindre et dépasser i5oo kiloni. Sa résrion moyenne offre une convexité tournée vers TEst. à peu près comme une voile vue de profil, qui serait poussée par un vent d'Ouest. Quand il fait partie d'une dépression immobile, le ruljan de grain tourne lentement, comme le rayon courbe d'une roue, en sens inverse du mouvement des aiguilles d'une montre. Mais le cas est très exceptionnel. En général, le ruban de grain appartient à une dépression voyageuse, dont il suit la marche en se déplaçant, à très peu près parallèlement à lui-même , avec une vitesse sensiblement égale à celle du centre de la dépression. Les phénomènes qui se passent dans l'intérieur du ruban de grain sont très différents de ce qui se produit en avant ou en arrière de lui. En avant, à l'Est de son bord antérieur, que nous avons appelé ligne de grain , il existe une bande de pression un peu plus faible que ne l'exigerait la distance de chacun de ses points au centre de la dépression. Cela se traduit, dans les cartes météorologiques, par une déformation des isobares qui s'écartent toutes du centre avec une convexité plus marquée vers le Sud. Le vent, dans toute cette région de pressions un peu trop faibles, souflle du Sud-Ouest, selon la règle, mais avec une force anormalement diminuée, quelquefois presque nulle. Dans des cas exceptionnels, cette bande de pressions faibles est le siège d'un vent faible qui souffle vers la ligne de grain , sous l'influence d'une sorte d'aspiration produite par le ruban de grain. Au lieu de suivre le ruban de grain dans sa marche vers l'Est, admettons, ce qui revient au même, qu'il soit immobile et que l'ob- servateur marche vers l'Ouest. Aussitôt que l'observateur pénètre dans le ruban , il constate que la pression barométrique s'élève brusquement, que le vent fraîchit (dans les deux sens du mot) très rapidement et tourne pour devenir rapidement vent d'Ouest, puis de Nord-Ouest. Le maximum de la hausse barométrique , de la rotation et de la force du vent (qui est devenu, dans bien des cas , un vent de tempête) se trouve beaucoup jîlus près du bord oriental que du bord occidental du rideau de grain. Si l'observateur continue sa marche vers l'Ouest, il voit la pression diminuer, la direction du vent retourner graduellement du Nord- Ouest au Sud-Ouest, la force du vent diminuer graduellement; de telle sorte qu'à la minute précise où l'on sort du ruban de grain par l'Ouest, on retrouve la pression barométrique, la direction et la force de vent qui correspondent à sa distance au centre. DURAND-GRÉVILLE. — PASSAGE d'uN GRAtN DE VENT AVEC ORAGE 54l En résumé , un vent très fort et même un vent de tempête souffle dans l'intérieur du rul^an de grain sur toute sa longueur, jusque clans le proche voisinage de la circonférence de la dépression. On voit tout de suite combien il est important, pour l'annonce d'un vent de tempête, de savoir si l'on est en présence d'une dépres- sion ordinaire, dans laquelle ce vent n'existe que jusqu'à une cer- taine distance de calme central , ou si l'on a affaire à une dépression à ruban de grain qui va éveiller la tempête sur toute la longueur d'un de ses rayons. DIAGNOSTIC DE l' APPROCHE d'uN RUBAN DE GRAIN Admettons qu'une dépression barométrique, dont le centre est quelque part sur les Iles Britanniques, commence à pénétrer sur les côtes occidentales de l'Europe. A quoi reconnaître si nous avons en perspective une dépression ordinaire ou une dépression à ruban de grain ? C'est la forme des isobares qui nous l'indiquera. Les diverses variations de pression que le voyageur, supposé marchant vers l'Ouest, a rencontrées en avant et dans l'intérieur du ruban de grain , ne peuvent avoir eu lieu que si les isobares , au lieu de rester circulaires, décrivent en avant et à l'intérieur de ce ruban un zigzag à trois branches, qui se raccorde avec la forme circulaire en avant de la zone de basses pressions et en arrière des hautes pressions du ruban de grain. Cela posé, si, sur les côtes de l'Atlantique, les portions les plus occidentales des isobares coupent le méridien à peu près à angle droit, c'est d'une dépression circulaire qu'il s'agit. Si, au contraire, elles s'infléchissent de façon à devenir presque parallèles au méri- dien, nous conclurons que chacune de ces portions d'isobares cons- titue la branche antérieure d'un zigzag de grains dont les deux autres branches sont encore sur l'Atlantique , et nous annoncerons l'arrivée très prochaine d'une dépression à ruban de grain, c'est-à- dire avec un vent de tempête tout le long d'un de ses rayons orienté à peu près Nord-Sud sans la considération de la Hgne de grain, on n'aurait pu prédire qu'une dépression avec une vitesse de vent crois- sant régulièrement pendant que le centre de la dépression s'approche et passe au minimum de distance de ce Heu proche et décroissant régu- lièrement à mesure qu'il s'éloigne vers l'Est ; et on aurait pu annoncer du vent de tempête que pour les régions plus ou moins voisines du centre. Nous insistons sur cette différence qui donne lieu à une prévision beaucoup plus précise. 542 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE RUBAN DE GRAIN SIGNALE TELEGRAPHIQUEMENï Si la question d'argent n'existait pas, la prévision pourrait faire un nouveau progrès non moins important. Supposons que la dépression soit très puissante et que son bord méridional s'étende jusqu'au Nord de l'Espagne, ce qui arrive plus d'une fois. Au moment où le ruban de grain aborde la terre ferme, les observatoires d'Irlande ou du Sud-Ouest de l'Angleterre , ceux de Brest et de la Corogne noteront presque simultanément le passage brusque d'un violent grain de vent, avec rotation brusque (de S. -AV. à N.-W.) de la direction du vent et hausse brusque du baromètre. Ils notifieront le fait télégrapliiquement au Bureau central en indi- quant l'heure exacte du début de grain. Les observatoires situés plus à l'Est verront, chacun à leur tour, le vent de grain passer sur eux et le signaleront de même. Au bout de deux ou trois heures, le Bureau central aura ainsi le moyen de tracer sur la carte les diffé- rentes positions isochrones de la ligne de grain (ligne de début du grain) ; il connaîtra la forme de cette ligne, qui se déplace parallèle- ment à elle-même ; il en connaîtra enfin la vitesse de translation et pourra . quand le grain sera dangereux par sa violence , en signaler télégrapliiquement le passage, à des heures précises, sur les endroits situés plus à l'Est. A condition de n'annoncer que les grains exceptionnels et dange- reux — deux ou trois par an — on pourrait réduire à peu de chose les frais occasionnés par ces annonces précises. PRÉVISION MOINS PRÉCISE, MAIS SANS FRAIS Même à la condition de se servir uniquement des télégrammes journaliers, rien n'empêcherait d'établir par millimètre — au lieu de 5 en 5 mm. — les cartes d'isobares journalières. Au lieu de l'appro- ximation dont plusieurs stations centrales se contentent actuellement, on aurait ainsi la vraie « topographie barométrique » de l'atmosphère. On apercevrait alors facilement ce que sont, en réalité, les prétendues « dépressions secondaires » qu'on voit souvent échelonnées dans les cartes depuis les environs du centre d'une dépression jusqu'à la partie méridionale de sa circonférence. Le météorologiste chargé de dresser une carte par millimètre, s'il s'abstenait soigneusement de faire abstraction des données gênantes, de laisser en dehors de l'iso- bare de 754, pai* exemple, certains points où la pression est ^53 et DURAND-GRÉVILLE. — PASSAGE d'uN GRAIM DE VENT AVEC ORAGE 543 même encore moins , apercevrait souvent , au lieu de ces « dépres- sions secondaires ». les énormes déformations d'isobares qui sont de règle dans le voisinage immédiat de la ligne de grain. Sachant qu'il a affaire à un ruban de grain , il rédigerait ses prévisions en consé- quence. Mais une carte par millimètre est longue à établir. Où trouver le temps ? On le trouverait , par exemple , en renonçant à tracer dans les cartes les lignes d'égale variation de la température ou de la pression <:jui, sans être inutiles au point de vue scientifique, ne sont pas d'une utilité immédiate pour la prévision du temps. En se servant uniquement des télégrammes du matin et du soir, et sans frais supplémentaires , on pourrait demander aux observateurs d'ajouter quelques lettres à leurs dépêches, F. G. 5 4© ni. par exemple : « Un fort grain est passé sur nous ce matin à 5 h. ^o. » On ne signalerait cpie les grains dont lesquels la vitesse du vent dépasse iG mètres (n" 9 de l'échelle télégraphique) et peut être dan- gereuse. Dans les cas où les dépêches journalières reçues au Bureau central sufliraient à renseigner sur la forme et la vitesse de translation dé la ligne de grain, le Bureau central pourrait signaler télégraphi- quement aux diverses stations . à leurs frais, l'heure approximative du passage de la ligne de grain , c'est-à-dire du début du grain , sur ces stations. Certaines dépressions renferment plusieurs rubans dé grain, disposés comme les rayons d'une roue, qui passent à plusieurs lieures d'intervalle. On ne signalerait que le grain le j)lus dangereux par la force du vent. AVERSES Leur relation ai'ec la ligne de grain. Leur prévision C'est l'affaire, non du Bureau central, mais du directeur de chaque station locale, d'apprécier s'il est plus ou moins probable qu'une averse (de pluie ou de grêle) se produira dans sa région à une heure déterminée. Ses éléments d'appréciation sont les suivants : L'averse coïncidera toujours, à peu de minutes près, avec le moment du passage d'une ligne de grain, qui lui est annoncé télé- grapliiquement . Toutes choses égales d'ailleurs, c'est-à-dire avec un vent de grain de vitesse donnée, il n'y aura pas d'averse si le ciel est pur et l'air 544 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE sec au-dessus de la station considérée ; il y aura de grandes chances d'averse de pluie (ce qui revient à dire : d'averse de neige fondue) si lair est chaud, chargé d'humidité et si le ciel est couvert de cumulus ; il y aura de grandes chances d'averses de grêle, si l'air est très chaud, très chargé d'humidité et si le ciel est couvert de cumulus à sommets très élevés. Inversement, pour un même état de l'atmosphère, l'averse est d'autant plus violente que le vent de grain est plus fort. ORAGES Leur théorie. Leur relation avec la ligne de grain Leur prévision Il V a orage, d'après la définition courante, toutes les fois que des décharges électriques ont lieu de nuage à nuage ou entre les nuages et la terre. Cependant, plusieurs savants météorologistes ont remarqué que l'orage coïncide ordinairement avec des changements brusques de pression barométrique, de température, d'humidité, de force et de direction du vent, et avec des averses de pluie et de grêle; ils ont attribué tous ces phénomènes à l'existence de « dépressions secon- daires orageuses ». Nous avons prouvé, dans des mémoires anté- rieurs, et vérifié très souvent depuis lors, que ces phénomènes concomitants à l'orage sont ceux du grain et qu'ils ne sont pas confinés dans des dépressions secondaires, mais répandus irrégu- lièrement sur toute la longueur du ruban de grain. Nous en avons conclu que l'orage est un grain orageux. Mais cette définition a un défaut, si on la prend au pied de la lettre. Elle pourrait faire croire que l'orage et les phénomènes du grain sont cause l'un de l'autre, tandis qu'en réalité ils dépendent seulement d'une même cause occasionnelle, l'existence d'une nappe d'air froid qui, venant des régions supérieures de la dépression, descend très obliquement dans l'intérieur de cette dépression, au lieu de diverger dans les hauteurs au-delà de ses limites pour aller alimenter une région de haute pression. Cette nappe, quand elle arrive près du sol, produit tout naturelle- ment les phénomènes de pression et de vent que nous avons signalés; si, sur sa route, elle rencontre des cumulus dont le sommet est en surfusion , comme cela se passe dans les dépres- sions sans grains, et surmonté de cirrus inférieurs, elle produit des grêlons qui fondent dans leur chute (averses de pluie) ou qui ai'i'ivent jusqu'à terre sans se fondre; si, en même temps, elle est DURAND-GREVILLE. — PASSAGE D UN GRAIN DE VENT AVEC ORAGE 545 chargée de cirrus supérieurs, elle devient un semi-conducteur, qui met en communication les régions supérieures, chargées d'électricité positive avec les sommets des grands cumulus qu'on appelle orageux, et les cumulus eux-mêmes déchargent parfois sur les objets terrestres, électrisés négativement, l'électricité positive qu'ils ont reçue des hautes régions (*). Mais, si le grain et l'orage n'ont d'autre lien de parenté que la cause occasionnelle qui les fait apparaître, il n'en est pas moins vrai que ces deux phénomènes sont concomitants. Sous nos lati- tudes, l'orage a pour condition à peu près absolue l'existence de la nappe d'air descendante qui produit les j)hénomènes du grain et, en chaque endroit, les premiers éclairs se produisent au moment du passage de la ligne de grain. Et la preuve que le passage de la nappe descendante est une cause purement occasionnelle, c'est que ce passage ne produit rien lorsque, selon l'expression un peu vague, mais juste, de Marié-Davy, l'atmos- phère, en un lieu donné, n'est pas « convenablement préparée ». La préparation locale consiste dans l'existence de grands cumulus qui , eux-mêmes , proviennent de forts courants ascendants d'un air très chaud et très chargé d'humidité. L'orage x^eut se produire sans cumulus; par exemple, quand des poussières atmosphériques renfermées en suffisante quantité dans la nappe d'air descendante, rendent celle-ci assez conductrice pour que les régions supérieures chargées d'électricité positive soient en contact direct avec la surface de la tei^re. C'est ce qui est arrivé récemment en Australie. De même, en Ecosse et en Scandinavie, on observe des oraaes dhiver, dans le voisinage du centre des dépressions et il est pro- bable que ce sont les masses d'air giratoires ascendantes, chargées de gouttelettes et de cristaux de glace , qui mettent les régions supé- rieures en communication avec la couche des nuages movens. Mais ces deux cas ne semblent pas s'être jamais présentés sous nos latitudes. L'action de la nappe descendante est la cause occa- sionnelle observée sous les latitudes moyennes. Ces considérations étaient nécessaires pour expliquer comment il se fait que les cartes d'isochrones d'orages présentent jusqu'ici des irrégularités déroutantes. Dans le sens de la propagation de lorage, il y a des isochrones qui manquent. Dans le sens de leur longueur, (*) Voir la théorie de l'orage, exposée par M. Ernesl Préaubert, dans une séance du même Congrès. 35" 5^6 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE telle isochrone n'a que quelques dizaines de kilomètres de longueur, OU moins que cela, tandis que l'isochrone suivante s'étendra sur des centaines de kilomètres. De la sorte, pendant que, de l'Ouest à l'Est, la propagation peut se produire assez régulièrement, avec une vitesse souvent inférieure à 3o km. par heure, l'orage aura l'air de se T)ropager vers le Nord ou vers le Sud avec une vitesse de loo et de 200 km. à l'heure, ou même davantage. Dans d'autres cas, deux « groupes orageux » situés à plusieurs centaines de kilomètres l'un de l'autre , par exemple , l'un au Nord de la France, l'autre au Sud, ont j^ourtant des isochrones qui indiquent une même vitesse de translation de l'Ouest à l'Est. Mais, si on y regardait de plus près, on s'apercevrait que les isochrones qui correspondent à la même heure se raccordent facilement en tra- versant des régions visitées à la même heure\)&.v\\w grain non orageux. En d'autres termes, au lieu de ces isochrones d'orage fragmen- taires irrégulières, capi'icieuses , tracez les isochrones marquant le passage du début du grain, c'est-à-dire les positions successives de la ligne de grain, vous verrez les isochrones de début de l'orage s'échelonner constamment sur une ligne de grain beaucoup plus longue qu'elles. Certains météorologistes, en Allemagne, avaient bien remarqué une lione de tempête — sturmlinie — qui n'était pas sans corrélation avec les isochrones d'orage. Mais, comme ils avaient établi des iso- chrones de maximum d'intensité orageuse et de maximum de force du vent, ils n'ont pas observé la concordance (beaucoup plus exacte) que l'on remarque entre les isochrones de début de grain et de début d'orale. En outre, ils n'ont pas cherché à voir si les isochrones de tempête se prolongent au Nord et au Sud et existent à l'Est et à l'Ouest des isochrones d'orage. On voit à présent comment , au moyen d'un nombre suffisant de télégrammes des régions situés près des bords de l'Atlantique, indi- quant l'heure du début du grain en chaque station, il serait possible et souvent facile de tracer les positions successives de la ligne de grain , de connaître par conséquent sa forme et sa vitesse de propa- o-alion (presque toujours de l'Ouest à l'Est) et d'annoncer télégra- l)hi(iuement l'heure du passage de la ligne de grain sur toutes les stations moins occidentales. Ce serait ensuite l'aflaire des directeurs de chacune de ces stations de voir si l'atmosphère environnante est très chaude, très lunnide et charo-ée de hauts cumulus, auquel cas il y aurait de grandes chances d'orage à l'heure exacte du passage de la ligne de grain. DURAND-GRÉVILLE. — PASSAGE d'uN GRAIN DE VENT AVEC ORAGE 547 Si la question des dépenses interdisait l'usage du télégraphe, ou ne pourrait plus annoncer d'une façon aussi précise le passage de la ligne de grain, mais les cartes d'isobares par millimètre diraient, du moins, si une ligne de grain existe sur l'Atlantique ou même sur rOuest du continent et permettraient d'alllrmer plus nettement la probabilité du passage d'un grain orageux — plus ou moins fort selon les cas. TORNADES Notre mémoire sur les grains et les tornades (*) et nos études subséquentes, non encore publiées, sur la tornade de Paris (lo sep- tembre 1891)), nous permettent d'affirmer que les tornades se pro- duisent toujours exactement sur la ligne de grain. Il est évident qu'en employant le procédé télégraphique dont nous avons parlé à propos des tempêtes, des averses de pluie ou de grêle et des orages, on pourrait annoncer télégraphiquement que, .S7* une tornade doit se produire en tel lieu dans le courant de la journée, ce sera à telle heure et non à une autre, et que cette heure sera exactement, à quelques minutes près, celle du passage de la ligne de grain. Il est vrai que certains rubans de grain sont formés de deux ou trois rubans accolés, plus petits, chacun de ceux-ci ayant sa rotation spéciale de la direction du vent , son maximum spécial de force du vent, de pression barométrique, etc. La tornade pourrait donc avoir l'air de se produire dans l'intérieur du ruban de grain au lieu d'apparaître sur son bord oriental. Mais les précautions à prendre en vue de l'apparition de la tornade resteraient les mêmes. Il sulïirait de prolonger ces précautions jusqu'à ce que l'ensemble de ce ruban de grain complexe fût passé et que le vent fût redevenu suffisamment normal en force et en direction, le ciel sulïisauniient clair. L'annonce de la possibilité d'une tornade est, d'ailleurs, inutile en Europe, vu la rareté et la faible intensité relative du phénomène dans nos régions. Elle n'aurait une utilité réelle qu'en Amérique, dans les plaines dont l'immensité est favorable à la production des tornades. {•) Mémoires des Annales du Bureau central météorologique de France, année 1894. 548 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE M. le D' A. GOGKEL Professeur à TUniversité de Fribourg (Suisse) SUR LA VARIATION DIURNE DE LA DÉPERDITION DE L'ÉLECTRICITÉ DANS L'ATMOSPHÈRE [53j.4i] — Séance du S août — L'essai , décrit ci-dessous , de déterminer la variation diurne de la déperdition de l'électricité dans l'atmosphèi^e est fondé sur plus de cinq cents observations que j'ai faites à Fribourg (Suisse), ainsi qu'au mois d'août dans les oasis de Biskra et de Tougourt, en sep- tembre de la même année sur la côte tunisienne, en mars 1902 dans la vallée de Zermatt, en septembre de cette année sur le Rothhorn (Alpes bernoises, altitude 2.3oo mètres). A chaque observation j'ai mesuré la déperdition d'une charge négative et celle d'une charge positive. En même temps j'ai déter- miné l'intensité du champ électricjue du globe, celle du rayonnement du soleil, de même la température, la pression atmosphérique, l'hu- midité absolue et relative. Pour fixer la variation diurne de la déper- dition de l'électricité, je n'ai pris en considération que les observa- tions effectuées les jours de beau temps, je n'ai pourtant pas exclu une série d'observations faites en hiver pendant qu'un brouillard léger couvrait le sol. Comme ces brouillards se présentent régulière- ment en hiver à Fribourg dans la matinée, l'image de la variation diurne se troublerait si on n'en tenait pas compte. Les mesures de la déperdition ont été faites avec l'instrument imaginé ]îar MM. Elster et Geitel. Le corps dispersant était entouré d'un cylindre abri en toile métallique à mailles de deux centimètres ; rarement on a tra- vaillé sans se servir de ce cylindre. La déperdition de l'électricité est en moyenne i,5 fois plus grande, quand on ôte le cylindre abri. A Fribourg, l'appareil était installé sur le l)alcon dune maison située hors de la ville. Pour les observations faites à d'autres endroits, je renvoie à un travail antérieur (*). C) Liiflelectrische Untersnchiingen, Fribourg (Suisse), 1902. D"" A. GOCKEL. — DÉPERDITION DE l'ÉLEGTRICITÉ DANS l'aTMOSPHÈRE 549 Les olîservations faites à Fribourg conduisent aux conclusions sui- vantes : /) La variation de la déperdition électrique ne change pas essen- tiellement au cours de l'année. La déperdition est plus faible dans la saison froide, mais l'allure de la courbe reste stationnaire. 2) La variation de la déperdition présente une oscillation double avec deux minima avant le lever et le coucher du soleil et deux maxima à 4 heures du soir et à lo heures du soir. (Voir lajig-ure i.) 3) On remarque une faible dépression de la courbe entre midi et 3 heures du soir correspondant à la diminution de la limpidité de l'atmosphère. 4) Le minimum du soir est très accentué pour la déperdition posi- tive ; c'est pourquoi , si les quantités «_ et a\ expriment en valeur absolue la perte pour cent, en une minute, de la charge ori- «— ginelle négative resp. positive, le rapport q = — atteint son maxi- mum à l'heure du coucher du soleil. En général, dans la plaine, le ra[)port q ne dépasse pas beaucoup l'unité, mais, comme je le démon- trerai, sa variation diurne présente une oscillation double avec deux maxima vers 8 heures du matin et après le coucher du soleil, et deux minima à 4 heures du matin et 5 heures du soir. Il ne faut pas oublier que les courbes représentées à la ligure i donnent chaque fois la moyenne de 6 mois. L'image véritable se trouble par là que les moments où les points topiques sont atteints se déplacent dans le cours d'une période de six mois. Pour déterminer la loi générale de la variation diurne, il faut poser la question suivante : Est-ce que l'allure générale de nos courbes reste partout la même, ou est-ce qu'il existe des divergences caracté- ristiques pour certaines localités? Par rapport à la chute de potentiel, M. Chauveau a démontré que des divergences locales s'accentuent dans le voisinage du sol et que la loi véritable de la variation diurne est représentée par les chiffres obtenus dans les hauteurs. Voilà pourquoi il est d'un très grand intérêt d'examiner si la courbe reste la même i^our les endroits situés plus haut. Malheureusement mon séjour sur le Rothhorn n'était pas favorisé par le beau temps et ce ne sont que les observations d'un seul jour qu'on peut utiliser pour notre but. Mais on peut ajouter les mesures faites par M. Le Cadet au sommet du Mont-Blanc, qui pourtant ne s'étendent qu'aux heures de 9 heures du matin à 4 heures du soir. La comparaison de ces observations (çoir les courbes, fig. i) conduit au résultat que, tandis que le maximum du soir s'accuse rigoureusement à ces alti- 55o METEOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE tildes, le maximum du matin est moins accentué sur le Mont-Blanc. Dans la vallée de Zermatt, le maximum du matin disparaît entière- ment et, ce que je veux ajouter, aussi le maximum de la pression atmosi)licrique observé ailleurs vers 9 heures du matin. Cela est peut-être en rapport avec le fait que les rayons du soleil n'atteignent le fond de la vallée c[u' après 9 heures. Dans les oasis de Biskra et de Tougourt, le maximum du matin était moins pi'ononcé et ne s'étendait qu'à la déperdition de l'élec- tricité négative. Par contre, le minimum du soir de la déperdition de charges positives était très accusé. La quantité a 1 tombait à cette heure à une valeur de i 0/0 et au-dessous, tandis qu'elle s'éle- vait en moyenne à environ 7 0/0 (*), A part ces deux moments, le coefiicient de déperdition restait stationnaire pendant tout le jour. A Hainmam-el-Lif, sur la côte tunisienne, je n'ai pu constater de même aucune variation diurne de la déperdition électrique. Comme pour le moment nous ne disposons pas d'autres observations des bords de la mer, je n'insisterai pas sur celles que j'y ai faites. A Innsbruck, M. Czermak (**) a effectué des observations qui ont montré que la variation diurne y présente un minimum très accentué (*) On a travaillé sans se servir du eylindrc abri. (**) P. CzEKMAK. Physik. Zeitschr. n» aji, 1903. D"" A. GOCKEL. — DEPERDITION DE l'ÉLECTRICITÉ DANS l' ATMOSPHÈRE 55l entre 1 1 heures et midi et un maximum entre 4 heures et 5 lieures du soir. A mesure que la saison avance vers l'hiver, ce dernier maximum se rapproche davantage du Midi et disparait, quand il gèle et quand le col se couvre de neige. On voit bien l'accord entre cette variation et les courbes dressées par moi (fig- 2). On peut donc formuler la loi générale de la variation de la déperdition électrique de la manière suivante : La variation diurne présente partout un maximum vers 4 heures du soir, suivi par un minimum très bas à l'heure du coucher du soleil et un deuxième maximum vers 10 heures du soir. Un deuxième minimum, moins accentué, se produit au point du jour. Un maximum secondaire a été constaté à quelques endroits, vers 11 heures du matin. Je passe à la discussion de la variation diurne du rapport q, dont le cours est semblable à celui de la déperdition elle-même. Il y a une oscillation double avec un maximum très accentué au coucher du soleil et un autre moins prononcé vers 8 heures du matin. Le mini- mum le plus accentué a lieu à 4 heures du matin , un autre moins intense dans l'après-midi. L'allure de la variation diurne de q ne O02 MKTEOUOLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE semble pas être modifié ni par la saison ni par la localité, seulement les valeurs absolues sont plus grandes en hiver qu'en été (çoirjig. 3). Je fais suivre les chiffres obtenus d'une part par M. Le Cadet (*) sur le Mont-Blanc, d'autre part par moi sur le Rothhorn. Mont-Blanc Rotthorn :ii . a i,3i 8 45 8,4i 9 1,68 9 i5 7,i8 lO 6,83 2,81 II 4:77 _ I P 9.9^ 2,02 I 45 i6,65 2 45 i4,ii 3 11,24 3,38 3 7 16,08 3 35 i5,i4 4 10,74 5 10,45 2,41 G P 4,93 8 1,02 (*) Le Cadet. Compt. rend., pp. i35, 886, 190?. n'" A. GOCKEL. — DÉPERDITION DE l'ÉLECTRICITÉ DAXS l' ATMOSPHÈRE 553 Le maximum du soir se produit au Mont-Blanc déjà de bonne heure. La dépression du Midi a été constatée aux deux montagnes. Une courbe parfaitement semblable a été obtenue par M. Ébert (*) sur le plateau de Munich. La dépression du Midi s'y présente entre II heures et midi. Cette dépression, de même que le minimum du soir, étaient très accentués à Zermatt. Le rapport q y tombait aussi aux journées très belles à o,5, tandis que le maximum était de 2,5. Une comparaison des courbes représentatives de la déperdition positive et négative (fig: i) montre que raugmentation du rapport q est due au premier ordre à la diminution de la déperdition positive. La variation de la quantité q est en rapport évident avec la variation de la pression atmosphérique et la variation du champ électrique terrestre. La pression atmosphérique, la chute de potentiel et le rapport q accusent des minima à 4 heures du matin et à 4 heures du soir, des maxima vers lo h. du matin et lo heures du soir. Le maxi- mum du rapport q et de la chute de potentiel , qui se produit brus- ment au coucher du soleil et dont je parlerai plus loin, n'est pas influencé par la variation générale de la pression atmosphérique. On sait, parles belles recherches de M. Hann, qu'on peut décomposer la variation de la pression atmosphérique en une onde diurne et en une onde semi-diurne, dont tantôt l'une, tantôt l'autre, est plus pro- noncée selon les lieux ; de même on peut distinguer deux types de la variation du champ électrique terrestre : a) Une douille oscillation diurne, avec deux maxima très accentués vers 8 heures du matin et 8 heures du soir, séparés par deux minima, l'un au milieu du jour, l'autre pendant la nuit; les heures de maxima ne sont pas les mêmes en tous lieux et en toutes saisons . mais elles ne s'écartent pas beaucoup de celles que nous venons d'indiquer; b) Une oscillation simple avec un minimum très prononcé dans les premières heures de la matinée , vers 5 heures , et un maximum peu net, s'étendant sur presque toutes les heures du jour. En beaucoup d'endroits, où le maximum du matin de la pression atmosphérique est supprimé, le minimum de la chute de potentiel n'a pas lieu non plus à ce temps. Surtout dans les hauteurs, la varia- tion du champ électrique, ainsi que celle du rapport q, accuse une oscillation simple avec un minimum vers 4 heures du matin et un maximum entre 3 heures et 5 heures du soir. Le minimum du matin , qui coïncide avec le minimum de la pression atmosphérique , a été constaté en tous lieux en même temps; c'est pourquoi (*) Ebert. Phrs. Zeitschr., iv, p. gS, 1902. 554 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE M. Chauveau (*) et M. Exner (**) tirent de leurs reclierehes la con- clusion que : la loi générale de la variation diurne du champ élec- trique terrestre , en dehors de toute influence perturbatrice , se tra- duit, dans son ensemble, par une oscillation simple avec un maximum encore mal déterminé pendant le jour et un minimum remarquable- ment constant vers 4 heures du matin. L'affaiblissement de la chute de potentiel, qui se produit au milieu du jour et qui est en relation évidente avec la dépression du rapport q accusé au même temps , doit donc être considéré comme une altération du champ normal, exercée seulement par le voisinage du sol. Le fait que cette altération semble être influencée par l'onde semi-diurne de la pression atmosphérique oblige de poser la ques- tion s'il existe un rapport entre les tourbillons atmosphériques et l'intensité du champ électrique terrestre. Une telle relation est, en tous cas, moins accentuée que l'influence de la vai'iation diurne de la pression atmosphérique. La seule chose qu'on peut aflirmer avec certitude, c'est qu'une prépondérance de la déperdition de charges positives en cas de beau temps coïncide presque toujours avec une baisse du baromètre. La diminution de la valeur q, observée dans ce cas, ne provient pas d'une diminution de la quantité a mais d'une augmentation de la la quantité a i Le fait, que l'influence des tourbillons atmosphé- riques sur la déperdition électrique est moins prononcée que celle de la variation diurne conduit à la conclusion que ce sont surtout les mouvements des masses contenues dans les couches inférieures de l'atmosphère qui influencent la conductibilité apparente de l'air. Ce résultat s'accorde avec la loi établie par M. Chauveau et par M. Exner, que l'action perturbatrice qu'exerce le voisinage du sol sur la valeur du champ électrique est restreinte aux couches infé- rieures de l'atmosphère. L'inspection des courbes représentées par les figures i et 2 montre que : 1° la déperdition de charges négatives et de charges posi- tives est plus grande en été qu'en hiver; 2° la valeur q est plus petite en été qu'en hiver, c'est-à-dire que la déperdition de charges positives augmente davantage en été que celle de charges négatives, ce qui revient à ce que la prépondérance de masses (ions?) négatives dans les couches inférieures est plus grande dans la saison chaude que dans la froide. Ce résultat s'accorde également avec le fait (*) A.-B. Chauvkac, Etude de la i'arintion diurne de l'électricité atmosphérique , 11' mémoire, p. iio. (") F. Exner, Wiener Sitzimgsherichte iio, II a, p. 38o, 1901. D"" A. GOCKEL. — DEPERDITION DE l'ÉLECTRICITÉ DANS l'atMOSPHÈRE 555 constaté par M. Chauveau, que le développement des masses néga- tives, qui exercent une influence perturbatrice sur la valeur du champ électrique, semble en rapport avec lélévation de la tempéra- ture. En adoptant la théorie de l'ionisation de Tatmosphère, on peut aussi dire, dans la saison chaude et aux heures chaudes du jour, cjue la mobilité des ions négatifs est moins affaiblie qu'aux autres temps. Quelles sont ces masses perturbatrices dont je viens de parler? Ce ne peut être la poussière emportée par des courants ascendants au milieu du jour, car celle-ci diminuerait la vitesse de la déperdition de l'électricité, tandis que le coeflicient de déperdition croît depuis le matin jusqu'à 4 lieures du soir; or, et j'insiste sur ce fait, la quan- tité a I augmente plus rapidement que le coeflicient a ce qui cause un minimum du rapport q et par là aussi celui de la chute de potentiel. Le fait que les maxiina et les ininima de la pression de vapeur coïncident avec les points topiques de la courbe représenta- tive de la valeur q nous donne une indication pour la solution de la question. En pai'ticulier, j'ai constaté en plusieurs endroits, où j'ai effectué des observations, que le minimum de l'humidité qui s'accuse dans l'après-midi coïncide exactement avec le minimum du rapport q. On peut conclure d'une série d'expériences que la vitesse de la déperdition de charges positives est diminuée, tout au moins par des hauts degrés d'humidité. A l'inverse, la quantité a i augmentera au temps du minimum d'humidité, et par là le rapport q s'amoindrira. De 9 heures du matin à 4 heures du soir, l'humidité diminue dans le voisinage du sol; voilà pourquoi la déperdition, spécialement celle de charges positives, augmente. A la même heure, où dans la saison chaude l'humidité accuse un minimum dans le voisinage du sol , elle présente un maximum à l'altitude de 3oo mètres ; c'est pourquoi le rapport q et l'intensité du champ électrique atteignent un maximum à cette heure à la tour Eiffel. Il serait d'un très grand intérêt de vérifier cette conclusion par des mesures directes de la déperdition de l'électricité. Gonime on peut ramener le minimum du soir de la valeur q au minimum simultané de l'humidité, on peut expliquer le maximum du matin du rapport q jîar le maximum simultané de la pression de vapeur. Ce maximum de la valeur q et de la chute de potentiel ne se produit ni à Zermatt, ni dans le désert. Aux mêmes endroits, la courbe représentative de la pression de vapeur d'eau n'accuse pas de maximum. Il faut ajouter encore un mot sur les maxima de la chute de 556 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE potentiel qui se produisent brusquement au lever et au coucher du soleil, appelés sauts maxima (sprung maxima) par M. Exner. Ces maxima sont causés par une augmentation forte du ra})port q , qui de sa part est due à une diminution très prononcée de la déperdition de charges positives. Pendant que je procédais à des mesures à Fribourg, sur le balcon de la maison, j'observais que l'élévation de la chute de potentiel se produisait au moment où une brume légère se formait à fleur de sol, tandis que l'hygromètre, placé à 7 mètres au-dessus du sol, indiquait une humidité relative de 5o 0/0. En même temps , la déperdition de charges positives diminuait de la valeur 2,56 à i,40. Il parait donc qu'une légère brume suflit pour paralyser la mobilité des ions, même dans une couche de 5 à 7 mètres au dessus du sol. De même, j'ai observé à différentes reprises dans la montagne que, aussi au milieu du jour, la valeur q augmentait dans les hauteurs, quand les vallées étaient remplies de brouillards. L'observation mentionnée me paraît très instructive, car elle montre que les sprung maxima sont déterminés par des procès qui ont lieu dans le voisinage immédiat du sol. Au moment où les rayons du soleil n'atteignent plus le sol, l'air cesse de monter à ras de sol, et il s'accumule de la vapeur d'eau. Cet état de choses se maintient jusqu'à ce qu'un équilibre soit rétabli entre la quantité de vapeur enlevée par diifusion et celle amenée par l'évaporation qui se pro- duit à la surface du sol. A partir de ce moment, le champ électrique terrestre reprendra sa valeur normale. A Zermatt, une couche de brume stationnait au voisinage du sol pendant toute la nuit; c'est pourquoi, le saut maximum étant passé, le rapport q. ainsi que la chute de potentiel, ne retournaient plus à la valeur qu'ils avaient avant le coucher du soleil. A Tougourt, l'air qui descendait à l'heure du coucher du soleil ramenait la poussière qui avait été enlevée vers le haut par la journée et empêchait en même temps la fumée des feux alhnnés dans la soirée de monter ; c'est pourquoi la dé])erdition de l'électricité, particulièrement de charges positives, diminuait très fortement; un soir, la valeur «1 baissait à o.ao 0/0, a 0,82 0/0 (7 0/0 pendant la journée). M. Mâche, ainsi, a observé le même phé- nomène à Delhi. Il me semble douteux, si le maxinmm du matin de la Aaleur q s'explique par le détournement des ions négatifs par la rosée, car ce maxinmm ne se présente aussi, en été, qu'entre 7 heures et PUÉAUBEllT. — l'ÉLECTKICITÉ ATMOSPHÉRIQUE EN TEMPS d'ORAGE 557 8 heures . c'est-à-dire à un moment où la rosée , depuis longtemps , a commencé à disparaître. Si jattribue les variations régulières de la déperdition de l'élec- tricité en premier lieu aux mouvements de la vapeur et de la pous- sière qui se trouvent dans les couches inférieures de l'atmosphère, je ne veux pas nier, par là, que les masses qui existent dans les couches supérieures peuvent exercer aussi, parfois, une influence. Ainsi, sous le régime du Foehn et de la Bora, la déperdition de charges négatives augmente. L'air qui provient des régions supé- rieures de l'atmosphère parait donc être plus riche en ions, surtout positifs. Plusieurs des questions traitées ici demandent des explications ultérieures. Comme les mesures faites par M. Chauveau au bureau central et à la tour Eiffel ont élargi nos connaissances sur la varia- tion de la chute de potentiel, ainsi des observations faites simultané- ment à ditféi'entes altitudes, avec l'appareil de MM. Elster et Geitel ou avec l'appareil de M. Ébert, donneront sans doute des lumières nouvelles sur le problème ardu de l'électricité atmosphérique. M. PREAUBERT Professeur au Lycée d'Angers SUR L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE EN TEMPS D'ORAGE [53:41] — Séance du S août — M. Préaubert rappelle des recherches déjà anciennes sur l'électri- cité atmosphérique en temps d'orage. Parmi les procédés d'exploration essayés par l'auteur, le plus intéressant consiste dans le dispositif suivant : Un faisceau de fils métalliques très effilés est monté sur un isoloir à la parafline. Cet isoloir est hissé au sommet d'un màt ; le faisceau de fds est relié par un conducteur à un tulse de Geissler de faible résistance, dont l'autre réophore est en communication avec la terre. Dans ces conditions, le tube se maintient illuminé pendant presque 558 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE toute la durée de l'orage et Ton peut reconnaître le sens du courant par l'inégalité d'aspect des deux pôles du tube. On constate alors les faits suivants : 1° En règle générale, un courant positif s'écovde de V atmosphère vers la terre; les inversions sont peu fréquentes et de courte durée.. 1" K l'instant même où un éclair éclate, le tube s'éteint; il faut ensuite un certain temps pour qu'il se rallume et reprenne peu à peu son premier éclat. M. Préaubert donne de ces faits l'interprétation suivante : Conformément à la théorie de M. Durand-Gréville , l'orage, ainsi que toutes les autres manifestations de la ligne de grain, est dû à un. coup de vent oblique, descendant des hautes régions de l'atmosphère. Ce coup de vent entraîne mécaniquement l'électricité positive de ces- hautes régions et en charge les cirrus à un potentiel extrêmement élevé (oljservations avant le commencement de l'orage, alors que les cirrus passent encore seuls au zénith). La chai-ge positive des cirrus agit par induction statique sur les nuages inférieurs, qui vont présenter une charge négative par en haut et une charge positive par en bas. Mais l'électricité positive de leur face inférieure /?n'i la terre par voie de décharge obscure. Ce courant positif est recueilli par tous les points du sol formant saillie, fouilles d'arbres, parties saillantes des toitures, etc. ; il suffit souvent de lever les mains en l'air pour être parcouru par ledit cou- rant. Mais bientôt le nuage inférieur ne sera plus chargé que négative- ment, et une étincelle éclatera entre les cirrus positifs et lui. Dans ces conditions, la colonne atmospliérique qui entoure verticalement l'observateur se trouve ramenée sensiblement au potentiel zéro ; il n'y a plus de manifestation électrique et le tabe de Geissler s'éteint. Mais bientôt un nouvel afflux d'électricité positive s'opère dans la ré2:ion des cirrus et tout recommence. Cette interprétation explique pourquoi, dans la majorité des cas,. l'éclair éclate entre les deux sortes de nuages et n'atteint pas le sol ; ce dernier cas n'a lieu que lorsqu'il y a un grand excès d'électricité positive (orages violents). Les diverses particularités de l'orage s'expliquent facilement à l'aide de cette théorie. En résumé, au point de vue électrique, l'orage apparaît comme un écoulement d'électricité positive des hautes régions de l'atmosphère vers la terre, chargée négativement ; cet écoulement s'opère en E. MARCHAND. — ALTITUDES, VITESSES ET STRUCTURES DES NUAGES SSg partie par voie obscure, en partie par voie disruptive. C'est une sorte de court circuit momentané entre les deux pôles de la machine électrique aérotellurique. A remarquer que cette interprétation ne préjuge en aucune façon de la cause première de la différence de charges et de signes élec- triques des hautes régions de l'atmosphère et de la terre. M. E. MARCHAND Directeur de FObservatoire du Pic-du-Midi NOUVELLES ÉTUDES SUR LES ALTITUDES, VITESSES ET STRUCTURES DES NUAGES INFÉRIEURS ET SUPÉRIEURS FAITES A L'OBSERVATOIRE DU PIC OU MIDI — Séance du lo août — J'ai présenté sommairement en 1901 , au Congrès d'AjAccio, quelques résultats des observations d'altitudes et épaisseurs de niiages inférieurs (strato-cumulus situés au dessous de 3. 000 mètres) faites au Pic-du-Midi (2860 mètres) et à Bagnères (55o mètres) par la méthode des repères pris dans le relief montagneux voisin de ces deux stations (*). J'ai indiqué l'année dernière, au Congi-ès de Montauban, la méthode que nous employons, dans les mêmes stations, pour déter- miner les altitudes et les vitesses dé nuages supérieurs. Je complète aujourd'hui ces communications en résumant les résultats obtenus depuis deux ans sur la structure des nuages inférieurs (enveloppant le Pic-du-Midi) et les altitudes et vitesses des nuages supérieurs. FRÉQUENCE RELATIVE DES DIVERS ÉLÉMENTS AQUEUX OU GLACÉS DANS LES STRATO-GUMULUS L'observation de ces éléments a été faite fréquemment, au Pic-du-^ Midi, depuis 1898; mais, pour arriver à une statistique précise, j'ai organisé, depuis 1901, un service régulier de ce genre d'études; pen- dant les deux années 1901 et 1902, ce service a fourni plus de 700 observations réparties en 270 jours. On a constaté ainsi que les brouillards (c'est-à-dire les strato-^ C) Congrès d'Ajaccio, 1901. — Comptes rendus, p. 342 et suivantes. 56o MÉTÉOUOLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE cumulus, cumulus, nimbus, etc.), enveloppant le Pic du Midi, sont composés : De o-outteleltes d'eau : 89 fois sur 100 observations ) à l'allitude DY'lt:-nients glacés : 61 — — \ de 2.860 mètres Ainsi que je l'ai remai^qué précédemment, ces brouillards sont surtout composés d'une multitude de très petits éléments (gouttelettes et grains) dont le diamètre est inférieur à o'"'"o5, mélangés à une quantité plus ou moins grande d'éléments plus gros. En ce qui concerne le brouillard aqueux (formé de gouttelettes liquides), on a trouvé : Gouttelettes d'eau microscopiques (ne 1 mouillant presque pas les objets) sans 4 fois sur 100 observations, mélange avec des éléments plus gros. . . ) Gouttelettes microscopiques mélangées 1 avec d'autres plus grosses (mouillant plus V 24 — — ou moins ) Gouttelettes de dimensions variables à ) l'état de siirfasion (donnant du givre ou ^ 11 — — du verglas) » Total 39 fois sm- 100 observations. En ce qui concerne le brouillard glacé (formé de petits grains de glace, plus ou moins mélangés d'autres éléments glacés), on a trouvé : Petits grains de glace microscopiques, (presque toujours mélangés de grains plus Ç ^g ^^.^ ^^^ ^^^ observations, gros) sans forme cristalline nettement visible 2 2 Petits grains microscopiques mélangés d'aiguilles de glace de grosseur variable. Petits grains microscopiques mélangés de petits cristaux Petits grains microscopiques mélangés | de paillettes ou lamelles ) Petits grains microscopiques mélangés | ^^ de petits cristaux étoiles \ Total 61 fois sur 100 ol)servations. E. MARCHAND. — ALTITUDES, VITESSES ET STRUCTURES DES NUAGES 56l dette statistique montre que les gouttelettes, à l'état de sur fusion, sont prol)al)lement moins fréquentes, dans les nuages, que les météorologistes ne l'admettent généralement. On doit remarquer que les ii cas (sur loo) où l'on observe, auPic- du-Midi. des gouttelettes en surfusion, comprennent 3 cas où ces gouttelettes sont mélangées de petits grains ou de petits cristaux de glace. Mais, en considérant même la totalité de ces ii cas, on voit ([uils ne représentent que i/5 à i/() du nombre des observations d'éléments "lacés. J'ajoute qu'au Pic -du -Midi les gouttelettes en surfusion ne paraissent guère exister au-dessous de la température de — 4' ou — .5'^': le plus souvent, elles se transforment en grains de glace lorsque le thermomètre descend à — 4"> et il n'est pas rare qu'on observe cette transformation dans le cours d'une même journée. Exemples : Le i6 juin i():)i, brouillard de gouttelettes à — o";, — 2"o, ])uis grains de glace à — 3"4; le 28 mars 1902. goiHiclettes à — 2'^8, et, plus tard, grains de glace à — 4""^ 1^' !^ jiùii, brouillard aqneiix à — i'^q, ])uis cristaux de glace mélangés de gouttelettes à — 3" 7; le \) juin, goutte- lettes à — r 3. paillettes de glace à — 3''6; le 14. surfusion à — i'^2, puis grains de glace à — 3 "3; le 28 mars 1902, gouttelettes en surfusion à — 4' 7: ^'f'^f lîi plus]»asse température à laquelle on ait observé ce ])héno- niène pendant les deux années 1901 et 1902. Quant à la pluie en surfusion, produisant du verglas, nous l'avons notée 9 fois, pendant ces mêmes années, par des températures variant de — 2" à — 4"- Ces diverses observations seront d'ailleurs continuées ré-iulière- ment au Pic-du-Midi. et je pourrai rectifier plus tard, s'il y a lieu, les résultats de la statistique précédente, résultats que je donne seulement comme des ap[)roximations provisoires. ALTITUDES ET VITESSES DES NUAGES SUPÉRIEURS Pour les couches de nuages cuniulo-stratus, cirro-cumulo-stratus, cirro-stratus, dont la surface inférieure est au-dessus du Pic-du- Midi, on peut encore employer la méthode des repères lorsque leur surface inférieure ne dépasse pas 3.4oo mètres (les sommets de la chaîne visibles du Pic-du-Midi s'échelonnant entre 2.800 et 3.400 mètres). Pour les nuages plus élevés que 3. 400 mètres, on détermine l'alti- tuile par la combinaison des deux vitesses angulaires dillcrentes obtenues au même instant à Bagnères et au Pic-du-Midi. 36* 562 MÉTÉOKOI>OGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE Je me ])orne ici à iinliqucr le principe de celte méthode qui sera décrite dans une notice ultérieure avec tous les détails nécessaires. Les deux stations de Bagnères et du Pic sont munies de deux appareils à miroirs (analogues au néphoscope suédois) tout à fait identiques, et les observateurs (se concertant par le téléphone) com- mencent par s'assurer qu'ils peuvent observer la même couche de nuages. (Le mot couche indique simplement pour nous une série de nuages de même espèce, continue ou discontinue.) Ils ont soin, ensuite, de déterminer la vitesse angulaire dans plusieurs azi- muths différents, c'est-à-dire dans plusieurs directions autour du zénitli ; ils s'assurent ainsi, par la concordance des nomjjres obtenus, que leur appareil est bien réglé et que la couche de nuao"es est sensiblement horizontale, dans les limites de l'approxi- mation que peuvent donner les appareils. — Cette dernière condition est essentielle à l'application de la méthode qui consiste, en résumé, à se servir de la variation de la vitesse angulaire entre les deux extrémités d'une base verticale de 2.320 mètres, pour calculer l'alti- tude des nuages observés. L'ai)i)roximation obtenue avec les appareils que nous employons varie de i/5o à i/ioo de la hauteur à déterminer. Quand cette hauteur est connue, les vitesses angulaires observées donnent la vitesse linéaire de la couche. On voit assez que cette méthode ne s'applique pas aux nuages isolés mais, en fait, les nuages isolés sont exceptionnels, et les nuages, plus ou moins séparés, mais formant inie couche plus ou moins discontinue, sont les plus fréquents. Aussi pouvons-nous utiliser très souvent nos ajipareils à miroirs pour ces déterminations; nous avons, d'ailleurs, calculé des tables qui nous permettent d'obtenir l'altitude et la vitesse cherchées, en 2 ou 3 minutes, de sorte (îue la durée d'une détermination complète (observations et calculs) ne dépasse jamais un quart d'heure. Je donne maintenant les résultats obtenus depuis la fin de l'année i«)oo (28 mois) sur les altitudes et vitesses des strato-cumulus supérieurs, des cumulo-stratus (alto-cumulus), des ciri-o-cumulus, et des ciro-stratus. I" Sti-ato-ciniiiilns. iiiiiihiis. runiiiIo-Jiiiiihns supérieurs. — Ces nuages oui il i»(t\ près le mC-me aspect, les niùiui's roniies o-énéi-ales que ceux des deux couches iulérieures éludiées (hius ma couuiuuiicatiou d'Ajaccio, nuiis ils soûl siluées eu moyeuue à nu uiillicr de mèlres pkis haut, leur surface luCérieure élanl comprise cuire •J.'îo;) (>t 'i.fioo mèlres. Iv.i rhertliuul la lrc(iucuce de la surlacc iulcrieurc de ces uuagcs à des E. MARCHAND. — ALTITUDES, VITESSES ET STRUCTURES DES NUAGES 563 altitudes équicUstantes de loo mètres, entre 2.400 et 3. 600 mètres, on trouve que cette fréquence présente un maximum net de 2.800 à 2.900 mètres; ce nombre représente aussi, sensiblement, la moyemie des alti- tudes observées pour ces nuages. . Entln, leur vitesse moyenne a été trouvée de 20 mètres par seconde pour l'ensemble de l'amiée moyemie et de 24 mètres en hiver, 14 mètres au printemps, 17 mètres en été et 20 mètres en automne (*). 2" Ciunulo-sfiritus (ou alto-cumulus). — Le même procédé de recherche de la fréquence relative de leur surface inférieure à des altitudes équi- distantes de 100 mètres, indique, pour ces nuag-es, un maximum entre 4.200 et 4-4oo mètres; et leur altitude moyemie, déduite des mesures faites par la méthode des vitesses simultanées (mesures d'ailleurs peu nombreuses juscjuici), est de 4-^90 mètres, avec une vitesse moyenne de 32 mètres. 3° Cirro-cnmnhis, cirro-camalo-stratiis. — Les altitudes mesurées jus- qu'ici sont comi)rises, pour ces nuages, entre 3. 400 et 9.400 mètres. La recherche île la fréquence relative aux diverses altitudes indique un maximum net voisin de .5.900 mètres, et un autre, moins mar([ué, vers 4.300 mètres. Il semljle donc que les nuages considérés, à l'observatoire du Pic-du-Midi, comme cirro-cumulus', tendent à se partager en deux couches diilérentes, dont l'une est à peu près à la même altitude que les cumulo-stratus supérieurs (ou alto-cumulus). Il faut conclure de là qu'il n'est pas toujours facile de distmguer l'mie de l'autre certaines espèces de nuag-es; c'est aussi la conclusion qid se dégage de l'examen des altitudes moyemies déjà publiées par divers éta- blissements météorologiques. La moyenne générale de toutes nos mesures (28 mois) est de 5.870 mètres pour l'altitude et de 3o mètres 5 par seconde pour la vitesse. ^'oici d'ailleurs les nombres obtenus par saison : hiver, altitude de 5.590 mètres avec vitesse de 27 mètres; printemps, 5.780 mètres, avec 33 mètres; été, 5.820 mètres avec 33 mètres; automne, 6.290 mètres avec 29 mètres La variation saisonnière n'est pas très régulière parce que nos obser- vations ne sont pas encore assez nombreuses: je ne donne donc ces nomjjres que comme approximations provisoii-es. 3 " Cirrus, cirro-stratus. — Les altitudes mesurées sont comprises entre 4.000 et 17.000 mètres et la recherche de leur fréquence relative aux diverses altitudes donne un maximum accentué vers 6.700 mètres, avec deux autres maxima, moins nets, vers 9.0(X> mètres et vers 12.000 mètres. Un quatrième maximum semble exister vers 5. 100 ou 5. 200 mètres. La moyemie générale de toutes altitudes est de 7.600 mètres, et la vitesse correspondante de 3o mètres par seconde. Par saison on irouAC : hiver, altitude de 6.880 mètres, avec vitesse de (*) Pour ces nuag^es et pour les suivants les vitesses moyennes son peu trop élevées, pai-ce que les observateurs renoncent assez fréqi la vitesse des nuages trop lents i)our être suivis dans le miroir. sont probablement uu peu trop élevées, pai-ce ciue les observateurs renoncent assez fréquemment à obtenir h 564 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE 24 mètres; pi'iiitemijs, 7.360 mètres, avec 29 mètres; été, 8.23o mètres, avec 3i mètres; automne, 7.94*) niètres, avec 36 mètres. La variation saisonnière de l'altitude apparaît nettement dans ce» nombres : les cirrus sont, comme les cirro-cumulus , plus élevés en été ({uCu hiver ('). M. E. MAILLET Ingénieur des Ponts et Chaussées, à Paris HYDROLOGIE DU RHIN ALLEMAND; LES CRUES ET LEUR PRÉVISION Première note (d'après MM. HONSELL et VON TEIK) [551.54:914.341 — Séance du 10 août — Dans un volume de '3Go pages grand in-4° (1889, Ernst et Korn,. Berlin), intitulé der Rheinstrom , le bureau central météorologique et hydrographique badois a publié une description hydrologique du hassin du Rhin. Cinq autres fascicules (Ernst et Sohn, Berlin, 1891, 1897 et 1901) intitvdés cahiers i, 2, 3, 4 et (3, parus ultérieurement, s'occupent plus spécialement des crues du Rhin et de ses afllvu'iits dans la partie allemande. Nous avons pensé qu'une analyse de cet important travail, édité en allemand, pourrait être utile aux météorologistes et aux ingénieurs, pourvu que cette analyse indiquât les points essentiels de l'œuvre du bureau badois. Nous présentons ci-dessous ce résumé en ce qui concei*ne la partie hydrologique générale (der Rheinstrom). Le résumé des cinq autres fascicules paraîtra ailleurs (V. Annales des Ponts et Chaussées, 1903, 2"^<= sem., p. 200). (*) Les observations rcsnnu'es dans celle note ont été faites surloni par mes princi- paux collaborateurs, .MM. (iiM-rr, Latukii.i.k el Dort, et calculées par .M. DuHr sous ma direction. E. MAILLET. — HYDROLOGIE DU RHIN ALLEMAND 565 II LE RÉGIME HYDROLOGIQUE DU RHIN Le bassin du Rhin jusqu'à l'entrce en Hollande, c'est-à-dire à peu près jusqu'à l'origine du delta du Rhin, a 169. 5oo kmqs (*). Les aflluents les x^lus importants sont indiqués ci-dessous. Rive g-auclif Rive droite Aare. . i^ÇiS kmqs Neckar 18970 kmqs Moselle. aSoSo Main. 27400 les autres ont moins de 6000 kmqs. Le Rhin, depuis sa source jusqu'à la frontière hollandaise a une longueur de io52 kms environ; il a i36o kms jusqu'à son embouchure. La pente varie conformément aux indications suivantes : 1° Rhin supérieur Rhm de Constance à la Hollande Lieux Distance à l'origine Altitude Sortie du ïomasee o 2340 ms Entrée dans le lac de Constance 170 kms SgS Lieux Distance à l'origine Altitude [longueur du fleuve] 2° Sortie du lac de Constance Bàle Kehl Worms Mayence Col)lence 0 31)0 167 kms 245 295 i34 444 86 498 81 590 59 686 3- 848 10 Cologne Emmerich Affluents. — Aare, longueur 292 kms; pente dans les 176 derniers kms de Berne à l'embouchure un peu plus de i m. par km. Neckar, longueur 870 kms ; x^ente dans les 201 derniers kms de Esslingen (près Stuttgart) à l'embouchure, o m. 78 par km. Main, longueur 5i4 kms ; pente dans les 4oo derniers kms de Baunach à rembouchure, o m. 38 par kil. (*) Dont ii65oo en territoire allemand, 2;;oo en Suisse, 9200 en France (14420 de moins qu'avant 1871). Nous passons sur la description orographique et géologique sommaires du Rhin. 566 METEOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE Moselle, longueur 54© kms; pente variant de i4 m. à i m. 4» par km. jusqu'à 20 kms à l'amont de Toul. De ce point à rembouchure , sur 4o5 kms, pente moyenne de o m. 40 par km. Largeurs moyennes et sections Hûningen (près Bàle). Kehl Worms Mayence Coblence. ...... Cologne "V\''esel Crues de décembre 1882 Larg^oiir Section 241 i486 219 14:2 ;56 4271 io63 5632 3oi 3io6 4i6 3984 1045 563 1 Eaux moyennes [.arg-cur Section 216 212 46- :38 272 3o6 369 562 681 1289 1739 1243 14% 1607 Basses eaux Larg-eur Section l32 164 336 709 25o 346 348 220 398 487 900 848 786 814 Cultures. — Elles se répartissent de la façon suivante : Tout le Rhin jusqu'à Emmerich (moins la ï"rance, le Luxembourg Forêts Terrains incultes .... Prés Autres cultures Reste (eaux, routes, etc.) Superlicie totale .... et la Belgique) Rhin allemand 3 1,6 0/0 340/0 5,5 1,4 4 4,1 55 55,6 3,9 4,9 147400 kmqs 1 16780 kmqs E. MAILLET. — HYDROLOGIE DU RHIX ALLEMAND 067 ta a a 0) o M x' ^- Ç C r^i i- r: X X V- - VT r^ "^^ '^~ '^ c^ ~ '^ ^T ^^ "^ VT îC I^ X l^ X X VT vr « ii^ X^ V- x' x' r: X X 2C 'fî, ^- ':» ~, " T\ >fî '-c' '^ i~^ '^ ~~ t^ l-\ X »^ X y ?i r^ î^ fO C) î^ X *~ " '■'^ '^^ i~ x' x' é-. 6: é-. — ' ~^ r^ lit vr lO - iS C - X vr -H C C es CT r^ J _^ ï I ^ ^ " iC C «es r^ X !;> ,t> XX . îS ^ - ^? ^ VT vT XX ^ îE; - VT >^ vr - c _ t-, - es i-C --s - if» JO -^ 1-1 X o :5 Z :^ H 568 MÉTÉOUOLOGIE Kï PHYSIQUE DU GlAMiK Linfluence de lallitude et de réloignement de la mer est très nette. Dans les hivers très froids on note des interversions de la variation de la température avec l'altitude : ainsi, en 18-9, le maximum du froid pour le Rhin supérieur (Suisse et Schwarzwald) avait lieu poul- ies altitudes de 400 à 900 mètres. 11 en résulte alors, sous riniluenee du soleilet de la croissance de la sécheresse de lair avec l'altitude, la disparition assez rapide des neiges dans les parties élevées (plus de 1000 mètres) par fusion et évaporation. YeiUs — Fœhn. — Le fo?hn est un venl chaud et sec venant du sud et du sud-est, ipii n'agit guère cjne dans les vallées suisses : celles-ci, dans le nord de la Suisse, sont d'ailleurs orientées dans le sens où il souffle. D'après Hann, il est produit par la chute des courants aériens du sud c[ui ont franchi les vastes barrages des Alpes et qui se réchauffent en partie grâce à l'augmentation de la pression de l'air (compression adiabatique). Le fœhn, rare en été, est souvent suivi de pluies abondantes ; il est utile à l'agriculture, parce qu'il adoucit le climat. Quand il souffle. l'Europe centrale est sou- mise à de fortes pluies (*) qui s'étendent ensuite à la Suisse. Pluies. — La hauteur moyenne de pluies pour le bassin du Rhin est d'environ 900 mms (660 mms pour l'Allemagne). La carte des pluies moyennes (**) (pendant 5 à i5 ans. de i8;o à i885) pour les diverses stations de ce bassin confirme la loi connue de croissance des hauteurs de ]»luie avec l'altitude. A'oici ce qu'on constate : (*) Daprcs une aulrc tliéorie du fœhn, celui-ci serait dérivé du vent saharien dit Sirocco (comp. Lknthkkic, le Bhônc, t. I. p. i:3; F. Forel, C. R.,ç) mars it)o3) qui amène parfois (les jjoussieres sahariennes en Suisse et même dans les régions voisines. Aux modillcations séculaires des contrées du nord de rAfri((ue et du IVrhii iiourraieni se rat lâcher, au moins en partie, les modillcations séculaires des placiers. (*•) V. Annales des Ponts et Chaussées, igoS, 2^ sem.. p. 2o3. MAILLET. — HYDROLOGIE DU RHIX ALLEMAND 569 Ballon de Servaiice (Vosges) .... Sommels des Vosges et du Schwarz- wald Rég-iou des petits afiluents de la Forèt-Noire et pourtour des Vosges. Quekjues points du bassin du Main et sources de la Sieg Environs des régions de la Forèt- Noire et des Vosges, savoir : Haute- Moselle, Haute-Saar, sources de la Nahe sur la rive gauche, pourtour et partie aval de Neckar, partie centrale du Main sur la rive droite ; de plus, frontière belge et hollan- daise, Ruhr et sources de la Lippe. Bords du Rliin, Moselle, presque tout le bassin du Main, du Neckar, de la Lahn, de la Lippe En queU[ues points seulement à Col- mar, Mayence et Marbourg. . . . 2™oo au moins. i'»6o à i'"8o i™oo à i"Mjo i'"oo a i"'2o la plus pluvieuse de rAUemagne 0"'8o à l"'00 o"' 60 à o'" 80 o™ 5o à 0"' ()0 ou même un peu moins Neiges. — On en a en moyenne o ni. 5o dans le Palatinat, o ni. 5o à o m. 90 dans la Bavière du Nord ; dans les Vosges et le Scliwarz- wald, à 1000 nis d'altitude, on a assez souvent jusqu'à i m. de neige, et même parfois 2 ms sur le Feldberg-, sommet du SchwarzAvald. La neige tomlie surtout de novembre à mars , en dehors des montagnes suisses où il peut en tomber même toute l'année. La neige séjourne souvent sur le sol en hiver dans le bassin du Rhin. 5^0 METEOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE III MOUVEMENTS DES EAUX DU RHIN Hauteurs du Rhin (1851-i886) et des affluents Moyenne criiiver Moyenne d'été Stations (Octobre-Mars) (Avril-Septembre) Minimum Maximum Constance 3'"oi 3"'8o 2"'i5 5™6i Bâle i'"24 2°^i3 o'" (î"HHy Kehl 2 "^70 3'"5o i'\52 (V";3 Mayence i™4i i"'"5 — «'"i^ 5'"95 Coblence 2"^ 74 2'" 77 o"'79 9'"20 Colog^ne 2"i87 2™ 85 o'^oc) 9"^ 52 Enimerich 2'" 45 2^24 — o'"29 7"' 53 Heilbronn (Neckar) . i™20 i-^oe o'"29 0'"36 Millenberg (Mabi)- . i'"68 i'"28 o'"7o 6"^94 Trêves (Moselle) . . i™44 o'""9 — o'"o4 7"'oo Rhin suisse. — Le Rhin et l'Aare sortent de glaciers dont hi sujierficie est de 265 kmqs pour le Rhin supérieur avant son confluent avec l'Aare, et 4^5 pourlAare. Leur rôle et celui des hautes régions de la Suisse est important pour la navigation, car ils contribuent à maintenir dans le Rhin, en été, un niveau qui est au moins aussi élevé c[u'en hiver, jusqu'à Cologne (*). Le Rhin, lAare et les affluents suisses traA^ersent un grand nombre de lacs dont les plus grands sont le lac de Zurich (Limmat, 88 kmc{s), le lac de Constance (Rhin, 528 kinc|s), le lac de Lucerne (Reuss, 11 3 kmqs), le lac de Neuchâtel (Zihl affluent de lAare, a^o kmcis), tous à une altitude voisine de 400 mètres. Ces lacs jouent un rôle considérable dans la régularisa- tion de l'écoulement des eaux et Tatténuation des crues, comme le montre le tableau suivant : Montée du Lac Bassin Superficie et emmagasinement correspondant du ■ — ^ — versant Lac Moyenne en une année ^Maximum en Maximum en [i8;2-i885J une année 24 heures Lac de Cuiistunce. ii.5(3o Icniqs 52.S lar là les 5^6 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE mouvements sismiques, les crevasses de la cioûte terrestre et les éruptions volcaniques. De même, les j)îissages des essaims périodiques d'étoiles filantes produisent par leur interposition entre la Terre et le Soleil des phé- nomènes semblables et de mouvements cyclonaux atmosphériques, de trombes d'eau et des trombes souterraines, causant les éruptions volcaniques, les sismes. Ils deviennent plus forts, quand les passages de corpuscules cosmiques, c'est-à-dire la densité do nuées cosmiques^ est plus grande. C'est ainsi qu'aux jours du 'j mai, date de la terrible éruption de la Soufrière, à () h. 4^ ni. du soir et du Mont-Pelé à 19 h. 55 m. le même jour (7 h. 55 m. du matin, le 8 mai 1902), se sont produites l)endant les passages continuels aux jours du 5*, 6*, 7* mai, coïnci- dant avec le jour de la période solaire du 7 mai 1902, x^endant que le Soleil O était éclipsé totalement à Martinique, vers 22 h. 34 m., le 7 mai (10 h. 34 m., le 8 mai) 1902. Le Soleil se trouva à peu près au zénith de Saint-Pierre et montrait des taches considérables. C'est donc à la simultanéité de ces positions de la Lune et du Soleil, enfin aux passages pendant trois jours consécutifs et à la coïncidence du jour de la période solaire avec eux, c'est-à-dire qu'un des pôle& dvnamiques du Soleil se trouvait en culmination au méridien cen- trale du disque solaire ! Le jour du 9 mai était le jour de la plus grande marée de l'année 1902 (à Ostende, à i3 h. 10 m. [i h. 10 m. le 8 mai] 1902. de 2 m. 38), les éruptions du Mont-Pelé, du 16 au 18 noveml^re 1902, coïncident également avec le passage continuel des essaims pério- diques : les Léonides, i3-i6 novembre, et les Grand-Oursides du i(3 novembre, et avec la grande marée de 2 m. 38 à Ostende et la pleine Lune du 17 novembre 1902. C'est donc dans ces deux positions opposées , de la Lune par rapport au Soleil et la terre , que ces deux éruptions se sont produites. Le cataclysme du Cracatoa s'est produit par l'éruption du volcan, le 25 août (jour du commencement de l'éruption) qui a fini le 27 août par la destruction de 7 villes et nombre de villages à Java et Sumatra, tuant 55. 000 honnnes. Or, la Lune nouvelle arrivait le i" septembre i8S3. à 3 li. 20 m. après midi, les passages des Lyrides, 23 août jusqu'au i'^'' se[)tembre, et des Draironides le 25 au 3o août, coïncident encoi'e et ces jours font série avec le jour de la péi-iode solaire du 27 août i883, du Soleil (pii (*) T-es astérisques signiticiil les plus loris [jassagos des cssaiius (ffldilcs lilaïUcs de l'anuée terrestre. CH.-V. ZEXGER. — THEORIE ELECTRODYJVAMIQUE DU MONDE B-J"^ se trouvait alors tout près de son activité maxima. montrant des taches énormes à sa surface, comme les observations de M. Faccliini le montrent. La surface tachée était : Le 2.5 août i883 : 4 groupes de 70 X lo ~ ^• Le 27 août i883 : 4 groupes de 98 X 10 ~ '"". Le 28 ftoùt i88'3 : 5 groupes de 146 \ ïo~ '^. Le 29 août i88"3 : 5 groupes de 2o5 X 10 ~ '\ Le 28 août, violentes secousses de tremblement de terre à Agram. en Croatie, avec bruit souterrain; le 3o, terrible tremblement de mer près Port-Saint-Louis; le i" septembre, violent tremblement de terre à Frase ati. Les éruptions du Mont-Pelé, en 1902 et 1903, se sont accomplies sous les mêmes circonstances : La première éruption du Mont-Pelé est arrivée le 20 avril 1902 (éruption de fumée et de poussière), au jour de la io'"<' période solaire du 25 avril, et du passage de l'essaim périodique du 2.5-3o avril. Le grand cataclysme avec cyclone igné , détruisant Saint-Pierre et les environs, 26.000 victimes le 7 mai, et l'éruption de la Soufrière à lile Saint- Vincent, au jour de la 11"'^ période solaire et du passage des essaims périodiques d'étoiles filantes du 5*, 6* et 7*. La troisième éruption du 25 mai, pas moins terrible au jour de la i2"^« période solaire et du passage de bolides du 20 et 21. La quatrième éruption du Mont-Pelé s'est produite le 9 juillet au jour de la période solaire i6"^« et du passage des étoiles filantes du 8 au 12 juillet et de bolides le 12 juillet. La cinquième éruption du 27 août, finissant avec le cataclysme épouvantable du 3o août à l'île Martinique, au jour même de la jfjme période solaire et du passage des Dragonides du 25 au 3o août et des Ly rides du 23 août au i^'^ septembre. Le cataclysme du i5 au 17 octobre de l'île Saint- Vincent , la Sou- frière couvrant l'île entière de boue brûlante, de laves et de cendres, qui a nécessité l'évacuation de lîle. Mais le jour de la 24'"'' période solaire et le 17 octobre, précédé le i5 octobre du passage de Géminides et suivie du 18* au 20* octobre du passage des Orionides. Le cataclysme de Guatemala, par l'éruption du 24 au 3o octobre, 3f 578 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE du Aolcan Santa-^NIaria , a détruit les villes de Palniaz, San Félice, Kolunibia, Kostepaz et a fini le 3i octobre avec la disparition de la ville et du port dOkus par un terrible tremblement de terre. Mais encore c'est le jour de la 20"'^ période solaire du 3o octobre, précédée du passage des Géminides, du 21 au 2.5 octobre, et suivie du passage de l'essaim du Bélier, du 3i octobre au 4 novembre. Concomitant avec les terribles cataclysmes des Antilles et du Golfe de Mexique (disparition de l'île Bermuja, en septembre 1902) et du Guatemala, nous voyons se produire en Italie les éruptions du Vésuve, du volcan éteint Monte-Alto en Calabre, du Stromboli et l'activité de l'Etna, les terribles et réitérées trombes de mer et inondations en Sicile; l'île Stromboli a dû être évacuée à cause des épouvantables et réitérées éruptions du Stromboli. La sixième éruption du Mont-Pelé, du 18 novembre 1902, co'incide avec les passages continuels des essaims de la Grande-Ourse du 16, suivie immédiatement du passage de Faurides, du 20 au 27 novembre, de Céphéides le 28 novembre , et , en effet : « La septième éruption du Mont-Pelé s'est produite le 28 novembre 1902, à I h. 5o m., éruption latérale ressemblant tout à fait aux pré- cédentes du 20 mai, 3o août et 18 novembre 1902. » La huitième éruption du Mont-Pelé s'est produite le 16 décembre, à 8 h. 24 m. du matin, plus forte que les deux précédentes, elle a coïncidé avec la pleine lune du i(3 décembre 1902 (2 h. 35 m. à Ostende), entre le passage de l'essaim d'étoiles filantes, du 10* au 12* décembre et la 28"^^ période solaire du 19 décembre, car la moyenne est de : ; ^= i5''5. Cette éruption, demiière de l'année 1902, était suivie de la : Neuvième grande éruption du Mont-Pelé, le 25 janvier 1903, jour de la seconde période solaire du 25 janvier et simultanée au passage de l'essaim périodique du 25 janvier, suivie du passage des Couron- nides le 28 janvier. La dixième grande éruption du Mont-Pelé, enfin, s'est produite le 28 mai 1903. suivie du passage de l'essaim du 29 au 3o mai et des bolides du 3i mai. On voit la concomitance de cyclones et des éruptions Aolcaniques due à la même cause originale : l'induction solaire, et aux passages de corpuscules célestes et de la Lune entre la Terre et le Soleil, coupant les lignes de force électrique et produisant le mouvement lourbillonnaire dans l'almosplière, dans les océans et dans l'intérieur fluide du Globe terrestre. CH.-V. ZEXGER. — THEORIE ELECTRODYNAMIQUE DU GLOBE 5^9 La table suivante montre, outre la périodicité solaire de 12,6 jours (demi- rotation du soleil), aussi la périodicité de 18,029628 ans, la période luni-solaire de 6585, 3i22 jours terrestres, d'après M. New- comb . où la lune revient aux mêmes i^ositions relatives au Soleil et à la Terre. La première colonne donne les jours de la période solaire de 12,6 jours, les deuxième et troisième, les jours de passage des étoiles filantes et de bolides, les autres colonnes, les jours de tem- pêtes dans la mer d'Allemagne, de 18-8 à 1901 , à l'intervalle de 18 ans, la dernière colonne, enfin, contient la statistique des répéti- tions des tempêtes. 58o METEOROLOGIE ET PHTSIQUE DU GLOBE O U • 1-1 a I— I o m I I— I O • rH Ci 1—1 'C5 c o CQ O »© (i ctf ÇU a2 pi; s o o a o U œ 0 ■H CD :l, > os n a 0) 1— 1 -r. l-H T. < 1— t -d "O ^ (D a « 1— 1 (D tJ (« O +3 O o »< H s PS es < co O o en -p . ro CT -O lO co v-r o '^ >-< vr Vf ro fA vr vr CO »n vr co o^ ^^ —' ^^^^^ ^^^^^ •**^ >i i^ l^ X ^ ,*. 01 01 es o è^ ^^ vr fO t^ ^: 1^ 1 LO 01 X c ^^ ro o 01 (•^ 01 Ôl "^ M ^ ^^mm """" ••/^ 'ct I-» O Ci ff m co a es es ^ f) CN 00 co i-'^ M ^ __^ es es -^ ^ (M ic' 1 vf 01 « cÔ , ^ ^^ 01 *^' ^H «.^ r- ri 1 1 — VT M '^ I^ )-^ ^ _^ ^iM 01 X ^ X X .^ Ci "■ ^ CI »iî '>C Q m r-. N- ( J-H 1 ÔI 01 co r^ _^ X Oii Ol vr es X r^ ce ^1 ^ 01 ^^ 01 ^ x' es 01 ro ce ce n ro X vr 01 Ol co r^ f C^ es oT vr 01 es /— ^ Tl 00 — ^ i-i « co 1 « -«^ .» ■-" i^ ^ i^ ce X HH " " * co ^^ vr co x^ z, (^ O ^^ oî 1 vr f: r^ H- 01 Ol 'o M i^ « k-H X Ol NH "O CM ro l-H 1 vr r> es 01 01 ^ 0l HH vr es CH.-V. ZENGER. — THEORIE ELECTRODYNAMIQUE DU MONDE 58i c es co vr ro V3- es CT o vt (M « IC fO vr JO hH en »o m 1.0 vr (M ?o V3- " en GO CO GO 00 fO 00 o Vf r^ fiH M es es M vr IM iO HH CT « r>v r*^ r> f^^ KH )-H CT es r^ 1 ^ r ■" VT X ^ >^ M n IC O es es 00 ce en M M w es O 00 o es es i vt vr 01 X r>. Ci vr ►- " es es I es -o I rri HH IC o r>. 1 O vr es Ci es CO rN X C5 o es ni «o es ^ es Ci "O 5 lo o c^ X Ci ;i O m es es o f^ es cq i-c e. '^ XC vt vr UO o M co vr VI- M co IlS vr rq xn vr 01 co lO co r-. vt M co es » in « I c^i co co o co 1^ o CO IH CJ o M • Ci co es -■ M es Cl s »— ( :C m ^ hH xo — o or, '"' H-( r-. C-} "es O C^ ^- vr _^ ■* ■" î^i es vr O 00 Cl es es — e^ « O co es va- m ce [>. X C: es ce" vr ce o co o es ^ es es es vr o es M w eq co r^ 00 co Ci co Ci XO r> w h-i^ es M ^^^ co CO V3" »^ es ce co O o l-H « e^i co es -^ vr m îO 1 1 1 r>. 00 es O C^ ■H NH e^i o 00 co -o r^ M d co m o r>. 00 co e^i es co \) i-i escovrxn-o r~.oo c; yzi ^ O es co vr irs vt 00 vr - « e>i 00 r-» co n es co CH.-Y. ZENGEU. — THEORIE ÉLECTRODYXAJXIQUE DU MOXDE 583 vr ri T^ ?■! r^ M i^ y^ — V— M ce V3- O Ci (M V3-. r^ VT -^ VT »-'î Vît- Ifi -^ — ■:•^ 't te 1^ M n r'i > ce' z - r^ vr iS « Cï v-r cq 0} ce — M x' X [ A X vr CT (M ri Cl ^ CT w 2 lO ;C r^ X C'. C n CN M 01 n ro ^ o CI c^ vrr i^ tC CT r~> 30 Cl c ^ ^ r<-i V— 1.'^ - « - ?i _- ^r fi M CN x' c- -' <^ Cl Cl o Cl 58;î METEOROLOGIE ET PHYSIQUE UU GLOBE >- VT M vr r) X) VTT -i M cô :C t-N es CN X 01 Vi- ol ce ro 1 ifi r-« ?l M 'o - -v^. ?1 01 ^ ^O ■^H (O i^ - ?r r^ 1 O t^ ?l Cn.-V. ZENGER. — THEORIE ELECTRODYNAMIQUE DU MOXDE 585 S. 5?^ ^!^ M -^ .1^ ~ HH HM — * "^ l-M NI "Z "T^ '^- z t.}=. •" h^ ^ " CN - — M r>i - M — « ro r'i vr c^i CN M. t_ M ^ — ^^ fO ^« ^ M o « „ 00 Cl « O o 2. ■■ d - r^ CN ro ce ■ co =c vt ce X c - vr C. O 1^ Hl h« CN c ce GC M ?o 3C r-. ■^ r> ce co R X r^ i". r^ OC *^ ^ o Cl ro C5 GC Cl w Cl Cl r-* ce ifi in ^ VT 05 n^ in c hN es "" V3- '^ O r-. ^ es ro va- O .-» r^ X t-H '", fo "^ in )-H - X C-. c O 3 ^- M '^ Vf *- - ^ Cl Cl 1 " fo " in hi o - Vf' « 586 METEOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE ■y. ^"~ ^f^ o = •3 o f à-^ rt ^.Q^-C fO M -H %-fo M M M M C^ Cl Z c; ^ M lO fA Vf M CS (-H M C^l es m M 01 vr •^ o œ co 00 ^ ^ O Ol -^ 01 1-^ M M OI 01 01 o M on ■■ 1 hH o ?r co g « 88 o 00 i-( Vt i>> 01 01 IC r^ 01 01 iC l.'î =£. fO o M vr 01 01 vr M CD «■ M 01 ce »i^' cr> r^ vr ic r\ •X C-. X ■ '■ vr in t^' i>. Cï 1— 1 C^l 01 01 1'^ X ^ X -< i?î -o r~v oc 1— ( -• en M ^o m M GO O o "o vr ^ ■C-. h-t H-l - 01 CS 01 00 ro O CS 0) ■p (D i-H H •H CH.-V. ZENGER. THEORIE ELECTRODTNAMIQUE DU MONDE 587 0 <1 s. sss= ^^= t-H hH Vf 01 0] M fq HH fO vr mi - fO CT M 01 fO _c ^ ro ^-^ C^l ■^ CN M NH Cl HH h- 1 h« 01 01 01 ■^ r-. « Ci 02 01 2, ~1 0 08 -- 0 co M X 01 , V3- xTi r> 0 CN ^ 1 f^ „ M ro CN vr 01 f^ vrr 1.0 '■C cf Î<1 r^^ _^ t^ ^^ 01 ç? i>» 10 ^ )-H 01 l-H S8 M l-H •0 M 6 (M 01 1 M CO ^ ^ 08 f-t hH Ci 0 M r-> ^ w5 X i>. ce 01 1 X 01 % vr 01 sa X 00 M vr i-Ci r^ 0 cq ^3 Vf 0 'O 01 CN -^H >o V3- V3- m -^ r^ X 0 0 V3- in - 0) es 0) 0| co 0 X 01 588 METEOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE P. 2 5 •^ '-r J: r^ v^— ■• ^] ^ *— « ■« »j ^] l-i CT D >-■ 01 î'* C^I f**^ V" >!T te es CN oc fO v* OC es 00 r^ 05 C^ r^ ' „ M Ci ri M D (D a û (D CD es 00 ce ce cç_ o ce ce n Cl fO vr X 'C; M M M M »i5 ►H c^i m es CT C<1 ^1 fo Cl o o ro ^ Cl rs GO fO O >- Cl Cl vr Cl Cl Cl 1 Cl C-. o t-> 00 X' CI ?1 1 Cl Ci ifi to vr Cl m r^QO C-. O -'^ "^ "^ ir: ^ , ^ ^ o o «TN 00 ?-. w m CI ro vr '"' ^ « ^ in o r^ Cl fo vf '■' "^ "^ X ,-— ». '-^ M Cl r>> -' ^ - «f o~ r; " M Cl CI Cl Cl Cl CO vr " M « « « ^^ CII.-V. ZENGER. — THEORIE ELECTRODYNAMIQUE DU MONDE 58c^ d) 0 0 0 rf^ m vr lO fO CO »o its Vf in VI- r^ fO vr IC vr m ■^ C-] vr vt ro fO m m -N^ r-» r^ y^ r^ -^ C-ï -o 00 o Wi' r^ o a 7 o '•n Ci l-H ? co o 00 Cl in 1 Cl c-T Cl 1^ vr ^_^ -o c^ HH o ci o vr •-. r^ »- in vr fO rN " Cl Cl — m ^ f<^ T_ Cl 1 Cl Cl Cl o in m c^ vr 00 o M M Cl vî- ^- N^ Cl ce o ^ O !M 1 'Ci r*^ Vf la O r^ 1 vr Cl Cl Cl Cl oc' Cl —v en l-H HH o o o =2., M ic PN Cl Cl fA ce HH h^ J ^ ^ Cl ce 'Ci ^H fn i-H —V Cl Cl Cl ro r. ao Ci rs w- r « IC Cl vr Cl Cl 'O C~l r-» 01 CA VT c; h-< ^H HH 00 C^ t^ vt- »c O Vf 1 Cl Cl Cl I' o Vf w 00 sO ce HH r> •— ( M c^ Cl Cl en ^O ^ v-^ X. vr ^^ ^H ^H Cl Cl vr "O VI- 00 c; O M n m r-H 00 o ■■»'•' vr GO HH h-( M ►^ vr tH CN Cl w O xO 00 o CD 590 METEOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE z'îi; vTvr»o Vf CN ri^ ts O »-o vi-»n en '~D tr^ i->.vrfO vr-o vrc**» c^ vi-vrro m zc vrfo u SI g 0 c X "O Ci «■ es 01 01 01' co C^ Vf c 01 01 01 01 0 1 es ^ M 05 • vf "^ -^ HH Vf 10 -,£ rNOO M 01 xn o 0 M cq fo Vf m r>.GO 01 01 05 01 01 01 01 01 0-1 vj- Cl o r-vXi Cl Vf 01 01 01 01 ce oî 01 ^ 2 Vf ^^ "1 c^ vr>-o o o w 01 01 01 01 01 01 M )-H 0 Z M 01 en Vf 'O i->x C-. 0 01 01 01 01 01 01 00 ro co 2 01 --C -i fO Vf 10 c: ta^ HH H-l l-« -^ 01 V-.- X c; 01 01 01 01 o o 00 Vf - X c; 01 01 ï '"' GC X HH 01 Vf'O" " 01 vTi?; -0 'oi X 01 ^0 h-< irt VT S 01' 1-1 01 o i^ ;x « 01 on stlio I r^wX 0 '^ 01 ^ ^^ |i(^ -^ r^X -K 01 01 01 -X CN I 01 o; 01 01 " Z — ' of ^ vfo' -^ i-^x' 01 01 01 -^' 01 01 01 01 01 '01 rn CI CH.-V. ZEXGER. — THEORIE ELECTRODYNAMIQUE DU MONDE 091 ^^B ^^^^H l^^^H ^^^1^ ^^^^^ ■^^^^ ^^^^^ ■t. ^ T Vf - .~ w -0 = 'ï' ■^ i^ M v^ „ vr r. i ï?"-i. v^ «î vr vr r^ C^ :C ic -è '"^ 1* -v^ y\ vr Vf vr ?o vr ^M vr C^l f^ M vr 0 00 '™' on vr ■-0 \rs 1 Vf Cl 1 yn 1 . ^^ M vd- _ C^l n C>I ro GC vr l~s « ^ ^ -V-S ^^^" r i.'î 01 -^ 0 c~ r vr co en QO co co M 0 M 1 '^ Cl r^ vd- 00 0 HH ^ri H^ ^, ?r Cl' %. Cl ^^ cq Vf X C\ [-^ ■n *-» M ^H ^* Cl i 1^ * ro i>> C5 0 H-l r^ VI- Ci fo 0 M x' Cl 0 01 X 01 X ri Cl 1 co Cl r-» M Oi 0 — «■ 00 CN CN (M K ce CO xr. ■-^ C-. h^ 'r>i CO 1 X Cl ^1 ce ce C-. 0 •^ ?i 01 c^ ^3 ri GO M vr W-i ri C) fM "0 va- 0 CO QO' 0 ■H Cl Cl . 0 r^ ?i 592 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE M. E. MATHIAS Professt'iu' ;i TUniversité dp ToiiloïKe SUR LA LOI DE DISTRIBUTION RÉGULIÈRE DE LA FORCE TOTALE DU MAGNÉTISME TERRESTRE EN FRANCE AU I ' JANVIER 1896 [538.;ii (44)1 — Séance dn 10 aoit — § I. — J'ai procédé poui' la foi*ce totale T comme je l'ai fait pour la composante verticale (*) en me limitant aux seuls nombres de M. Moureaux qui se rapportent aux 617 localités du Réseau magné- tique de la France (**). Comme pour la composante verticale, T est un élément calculé, non observé; la formule (,) ' T " cos I montre que les erreurs de détermination de la composante horizon- tale et de l'inclinaison se reportent sur T. Dérivons les deux membres de la formule (i), il vient : Q* T (2) f/T = ^^ éZH + H ^^^f/I. ^ ' cos 1 ' cos-^ 1 Si nous remarquons que la valeur moyenne de H est 0,2 et que tçA = 2 environ, 2 I sin I = 77^ cosI=~75=, V o V «3 il vient, toutes réductions faites, H et T étant exprimés en unités du cinquième ordre décimal et f/I = n en minutes : (3) dJ = \ï {dd + 12 /O Si dK et dl sont de même signe, les erreurs s'ajoutent; elles se retranchent si dK et dl = n' sont de signes contraires. Une erreur (*) E. Matiiias. Conimiinic;ilii)ii ilii (".ongrrcs de IMontanbin. (**) Th. MoLREVLX. Aitnalfs du liarcau central mctcréologicjiie pour iSgS. E. :MATHIAS. — DISTRIBUTION HEGULIÈRE DE LA FORCE DU MAGNÉTISME 5()3 de 20 unités du cinquième ordre sur H et de 2' sur I donnent, dans le cas où elles s'ajoutent, dJ = 2.24 (20 + 24) = 98,5, On voit donc cpi'une erreur de 100 unités du cinquième ordre sur T est de l'ordre habituel des erreurs d'expériences, cette erreur pou- vant monter à 120 unités dans le cas d'une erreur de 3' sur l'incli- naison. Les deux valeurs de T trouvées par M. Moureaux, à Toulouse, en 1884 et 1895, étant respectivement 0,40000 et 0,40100, conformément au résultat donné par les calculs antérieurs, j'ai admis pour la valeur de la force totale à Toulouse, au i" janvier 189G. la moyenne des nombres précédents, c'est-à-dire o.4oo5o, ou mieux 40000. En retran- chant ce nombre de toutes les forces totales de M. Moureaux, exnri- niées en unités du cinquième ordre décimal, on aura le iT observé ; le aT calculé sera donné par la loi de distribution régulière qu'il s'agit de trouver. § 2. — J'ai procédé dans cette recherche de la même façon que pour la composante verticale. Des tâtonnements réguliers m'ont per- mis de passer de la formule linéaire : (4) aT (cale.) = 1.3 (A long.) + 5 (A lat.), A'alable dans une aire étendue autour de Toulouse, à la formule plus exacte j AT (cale.) = -f 1,3 (A long.) + 5(A lat.) + 0,0008 (A long.)^ ^ \ — 0,0010 (A long-.) (A lat.) — 0,0008 (A lat. )^ applicable à toute la France, la Corse y compris. Tant que la diffé- rence aT (obs.) — aT (cale.) ne dépasse pas en valeur absolue cent unités du cinquième ordre et même 120 unités pour les grandes valeurs de (A long.) et (A lat.), on peut considérer la station comme régulière au point de vue de la force totale; au-delà, il y a anomalie. La formule (5) a permis de choisir dans les 617 localités visitées par M. Moureaux, So^ stations régulières; on a pu alors écrire So^ équations à six inconnues de la forme (fi) ^ AT(obs.) = .V + )\\ long.) + ;(A lat.) + /(A long.)^ ( + ii{\ long.) (A lat.) + t'(A lat.)- Si l'on pose j' =1.3 -^ry, -. = 5 -[- -', ' = + 0,0008 + i' Il = — 0,0010 -j- a', ç = — 0,0008 -(- i^' 38* 594 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE et si Ton retranclie memlire à memljre (5) de (G), il vient : ,. { .V +.r (A long.) + z'il lat.) + f(\ long.y- + u(\ long.) (A lat.) ^^^ i + (''(Alat.)^ = AT (obs.) — Aï (cale.) Les 5o- équations du type (7) à six inconnues x.j'', z, f, u\ v' ont été résolues au moyen de la méthode des moindres carrés par le ser- vice des calculateurs de l'Observatoire de Toulouse que M. B. Baillaud a bien voulu mettre à ma disposition comme par le passé. Ces prodi- gieux calculs ont été faits sous la haute direction de M. B. Baillaud. à qui j'exprime une fois de plus ma respectueuse reconnaissance. Les équations (7) ont fourni la solution suivante : X z=i -)- 16, .5 )•' z=: — 0.028 z =. -\- 0.0457 f = — 0.000088 li = — 0,000081 (' = — 0,000118 La loi de distribution régulière de la force totale pour la France entière, y compris la Corse, est par suite donnée par la formule .^ ^ aT = 4" i<»-->-[- I, 2;'-2(A long.) -[-5. o45-(a lat.)-)- 0.000; i2(A long. )- ( — o,ooio8i(A long.)(A lat.) — 0,000918 (A lat.)- Coinme on ne peut pas répondre de 16, 5 unités de cinquième ordre dans l'évaluation de la force totale, le terme constant de la formule (8) signifie simplement que la force totale admise pour Tou- louse o.45o5o est trop failde de 16 unités du cinquième ordre. § 3. — Le tableau suivant montre la vérification de la formule (8) pour 32 déi>artements entièrement réguliers, c'est-à-dire donnant pour la dilférence aT (obs.) — aT (cale.) une valeur absolue toujours inférieure» à 100 unités du cinquième ordre. Dans ce tableau. T,,„ est la force totale au i" janvier 1896 donnée par M. Moureaux. E. MATHIAS. — DISTRIBUTIOX UÉGULIÈRE DE LA FORCE DU MAGNÉTISME 5q6 STATIONS Belley.. Bourg-. . Xuiitua. Barcelonnetle. Digne Forcalquier. . . Sistci'on Privas Bolfort (i884). Boltbrt (1891) Ddle Aiigoulèmc (18SS) Barbezieux Cog'iiac RiiUcc Aubusson. Boiissac. . . Giiéret A LONG. A LAT. 96 AT (oBs.) AT (CALC.) OBS.-CALC. 1. — Ain - 253' 45 + 128' :5 0,4533 + 480 + 4i'- + :o — 225' o5 + i33' i5 0, 43<'5 + 600 + 565 + 35 — 249' 25 + i52'43 0, 43C3 + 58o + 533 + 4: 2. — Basses-Alpes 3ii':5 + 46' 35 0. 4490 - i.5o - 63 — 8: 285' (i5 + 28' 35 0,448: — iSo - i'3: — 43 259' 35 + 20' i|5 0.449: — 80 - i54 + :4 2(i8' :5 + 35' i5 0, 44o5 — 100 — 8: — i3 3. — Ardèche iSS'.S5 I + 6;' 23 I 0,4322 I + 170 1+ i5i 1 + 19 4. — Territoire de Belfort 324' o5 + 242' o3 0,4594 + 890 + 932 324' o5 + 242' o3 0. 4589 + 84o + 932 332' :5 + 234' o3 0, 4"i99 + 940 + 88; -42| — 92 i -6: 53 5. — Calvados Baveux Cacii Courseulles Falaise Lisieux S"-Honorine-(lu-Fay. Trouville Vii-e + 129' i5 + 109' cS5 + II 5' 45 + 99' 25 + :3'45 + 11:' o5 + 82' 85 + 140' o5 + ::'85 + 96' :"' + 10:' o3 + :•'■ 9 ' + 338' 85 + 333' :3 + 343' o3 + 3x6' 65 + 33i' i3 + 328' o5 + 344' 65 + 3i4'53 0,46:8 0,46:3 0,4680 0,466: 0,46:4 0,46:5 0, 4'l82 0,466: + i:3o + 1680 + i:5o + 1620 + iiH)o + 1:00 + i-o -T- 1620 ~r i:5o + 1:06 + i:53 + 1622 + 1658 + 1690 + 1:26 + i658 — 20 — 26 — 3 — 2 + 32 H- 10 + 44 — 38 Charente + 121' 65 + m' 45 + 124' o5 + i4-V4-> 0 4585 0 45:2 0 4^:9 0 4''96 + 8au + 6:0 + :4o + 910 + -II.) + 68(i + :jv) + 820 + 90 — 16 — 19 + 90 7. — Creuse 42' 35 45; :5 2 j' tt5 + 141' 4"' 0, 45:6 + i64'33 0, 4586 -j- i33' i5 0, 4583 + :io + 60() + 44 + 81 . + ::3 + 3: + :8j + :4i + 39 596 METEOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE STATIONS Belvès Bergerac. . ?s'iversac . . Nontron . . Périg-ueux Ribérac . . . Ludion Muret Saint-Gaudcns Toulouse (i884) Toulouse (i8<:)5) Villefranche-de-Laurag- Auch.... Condom Lectoure Mirande. Amboise Chinon Loches ISIontlouis.. . Tours Grenoble Saint-Marcellin La Tour-du-Pin Vienne Champagnole.. Dôle Lons-le-Saulnic Saint-Claude... A LONG. A LAT. AT (OBS.) AT (CALC.) OBS.-CALC. 8. — Dordogne + 26' 45 + a-' 63 + 39' 65 + 48' o5 + 45' o5 + 83' 45 + + + + + 69' 85 0,4545 :4'85 0,4554 91' :5 0, 4552 ii3'o5 0,456; 95' 25 0, 4560 gS'oS 0,45:3 + 400 + 490 + 4:o + 620 + 53o -f 680 + 39: + 460 + 520 + 642 + 543 + 6o3 9. — Haute-Garonne + + 52' 25 J 95 44' o3 0 0 i5 o3 49' «'5 0,4488 9'o5 0.449: 29' :5 0.4493 0 0.4500 0 0.4510 12' 85 o.43o3 + 10. Gers 11. — Indre-et-Loire + 28' :5 + :3'33 + 2:' 65 + 39' 35 + 4:' 45 + 228' 65 0,4616 + 2i3' i5 0, 4621 -f 211' 55 0, 4620 + 22:' i5 0,4626 + 228' o5 0, 4625 + IIIO + 11(10 + ii5o + 1210 + 1200 -f ii3i + io:3 + ii5: + 11:0 12. — Isère 256' 45 + 93' 85 0, 4529 + 240 + 229 23i'63 + 92' 63 0,4335 4- 3oo + 243 239' 85 + 11:' o3 0,4546 + 410 + 361 2o4' 65 + "4' 95 0,4548 + 43o -h 3:9 13. — Jura — 26:' 33 + 18:' 85 0, 4580 — 242' i3 + 201)' 35 0,4589 — 243' 35 + i83'35 0,45:9 — 264' 45 + i6:' 45 0, 4566 + :5o + 840 + :4o -f 610 + fi9: + .S21 + (Vjl + 59: + + + + + + 3 3o 5o 22 1:0 — 162 — 8 80 — 19 — 61 100 — :<3 — 24 3o + i: — 0: 5o + i: + 33 0 — 68 + 68 + 53' 25 + i'95 0, 4509 + 40 + 96 — 36 + 63' 93 -f 21' i5 0,4524 + 190 + 209 — 19 + 5o' 35 + 18' 95 0,451: + 120 + i:: — S: + 63' 95 — 5' 95 0,4521 + 160 + :i + 89 + ii53 — 43 + 2g + :: + 53 + 3o II 5: 49 3i + 53 + 19 + 49 + i3 E. MATHIAS. — DISTRIBUTION REGULIERE DE LA FORCE DU MAGNETISME 097 STATIONS Dax Mont-de-INIarsan iNIorcenx Saiiit-Martin-de-Hinx. Saint-Sever Ancciiis Chàteaubriant — Nantes (i8S4) Nantes (iS85) Nantes (i8i)6) Paimbœiif (1893) , Paimbœuf (1896) . Pornic Saint-Nazaire. . . . Cahors.. . Figeac. . Gourdon. Ag-en (i884). Agen (1895). Marmande. Nérac Villeneuve-sur-Lot. Château-Gontier, Laval (188S) Laval (1889) Maj'enne Beauvais. . . Clianlilly. . . Compiègne. Senlis Alençon... Argenton . Domfront. Laigle Mortagne . A LONG. A LAT. AT (ODS.) AT (CALC.) OBS.-CALC. I + i5 / .55 + 11: 85 + 142 03 + 163 53 + 121 55 14. — Landes + + + + 6' 25 0, 4528 16' 25 0,4536 25' 25 0,4329 i':5 o,433i 8' 65 0,4527 + + 4- + + 23o 3io 240 260 220 + 235 + 206 + 336 + 235 + 224 + 23 54 96 25 15, — Loire-Inférieure + 1.58 55 + 225' ,55 0,4637 + l320 + 1289 + 3i + 1:0' :5 + 246' i5 0.4648 + i43o + 1396 + 34 + 180' 95 + 217' 95 0, 464o + i35o + 1284 + 66j + 180' 95 + 217,95 0.4644 + 1390 + 1284 + io6|+23 + i8i.>' 95 + 217' 95 0,4623 + 1180 + 1284 — io4) + 2119' 55 -f 220' 45 0,4*339 + i34o + i332 + 8 + 2o8' 35 + 220' 25 0,4638 + i33o + i33o 0 + 2l3'25 + 210' o3 o,463i + 1260 + 1291 — 3i -(- 220' 35 + 219' 43 o,464i + i36o + 1342 + 18 16. — Lot + + 0' 95 + 4)':5 0,4540 + 35o + 267 + 83 !5' 45 + 59' 65 0,4537 + 320 + 273 + 47 4' 93 + 67' 55 0,4538 -f 33o + 36o — 3o 17. — Lot-et-Garonne + 01' 55 + 5i'55 + :'i'95 + 67' o5 + 35' i5 + 35' i5 + 53' 65 + 3i'25 o, 4J2a 0,4527 0,4539 o, 4536 + 45' 75 + 47' i5 0,4529 18. — Mayenne + 200 + 220 + 340 + 3io + 239 + + 209 383 + 260 39^ + 49 43 5o + 240 + 3io I — + 128' 65 + 233' i5 o,465i + 1460 + 1373 + 83 + i32'85 + 267' 65 0, 465o + i45o + 1445 + 5 + i33'75 + 268' 35 0,4656 + i5io + 1449 + 61 + 123' 75 + 281' 35 0, 4652 + 1470 + 1495 — 25 19. — Oise 37' 75 + 348' 45 o,4<569 + 1640 + i63i + 9 6i'65 + 334' 45 0,4662 + 1370 + 1548 + 22 80' 90 + 348' 95 0,4672 + 1670 + 1398 + 72 66' 95 + 335' 75 0,4665 + 1600 + i55o + 00 20. — Orne + 81' i5 + 289' 65 0,4657 + l520 + 1484 + 36 + 88' 45 + 3o8' 63 0,4667 + 1620 + 1573 + 43 + 127' 93 + 298' 43 0, 4655 4- i5oo + 1574 — :4 -f 5o' 85 + 309' 65 0,4656 + i5io + 1541 — 3i -f 54' 85 + 293' 65 0,4643 + i38o + i4:4 — 94 598 MÉTÉOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE STATIONS A LONG. A LAT. AT(OBS.) 21. — Pyrénées-Orientales Cerbère Céret Perpignan (i883) Perpignan (188;) Perpignan (1896) Prades (1894).... Prades (1896).... Aut un Chàlon-sur-Saône Cliarolles Màcon Tournus Annecy Bonneville Chamonix Evian-les-Bains . . Saint-Julien Bressuire Molle Niort Partenay Saint-Maixent Abl)evillc Amiens Doiillens Montdidier Péronne Saint-Valery-s. -Somme Albi ... Castres, Gaillac. Lavaur, 102' fl-i :j' 9"' 85' 55 85' 55 85' 55 58 o5 58' o5 70' 25 0.4463 6:' o5 0,4464 54' 65 0.4466 54' 65 0,4482 54' 65 0,44:8 60' 55 0.44:3 60' 55 0.44:3 22. Saône-et-Loire 23. — Haute-Savoie 2^9' 35 29;' 85 325' i5 :'45 -'85 24. + 11:' 55 + 95' 55 + Ii3'55 + ici' 35 + 99' 85 + i3:' i5 + 148' o5 + i38'65 + 166' 95 + i5i'85 o, 4oa2 0,4349 0,4551 o. 4561 o, 4561 Deux-Sèvres + 193' 45 0,4610 + 1 5(j' 25 0,439: + 162' 35 0. 46o5 + 182' o5 0,4610 + 166' 55 0,4399 25. Somme 23' 75 49' 85 52' ^5 6;' 25 89' 35 II' 55 -f 389' 55 + 3:5' 95 + SgS' 55 + 362' 55 + 3:8' 85 + 393' :5 46' 35 26' 85 26. — Tarn + + + 18' o5 0,4518 o'45 o,45o4 i:'35 0,4514 5' i5 0, 4499 + 4:o + 440 + 460 + 56o + 56o + ]84o + 1680 + iSio + 16:0 + 16S0 + 1S90 + i3o — 10 + 90 — 60 AT (CALC.) OHs.-CALr. 420 - 4:4 + 34 410 - 424 + 14 3t)o - 3:i - 19, 23o - 3:i + i4i +:2 2:0 - 3:i + loi) 320 — 3(i8 + 48 320 - 3as + 48 1:0' o5 + 200' 85 0.458: + 820 + 834 2o3' :5 + 190' 63 0, 4585 + 800 + :38 i6c)' 85 4- i6t)'25 0,43:: + :2o + (58o 201' 95 + 162' 85 0, 4560 + 55o + 622 206' 65 + i::' i3 0, 4580 + :5o + 689 + 433 + 4:6 + 409 + 565 + 3o9 + 1823 + i:43 + 1818 + iWH) + 1:25 + i85l -f + + + + -f + + a: — 44 + :i + l6 14 42 40 :2 61 36 5i 5 5i + io5o + 1094 — 44 + 920 + 895 + 25 + 1000 + 946 + 34 -f io5o + 1021 + 29 + 940 + 948 — 8 17 63 8 I 45 39 + :3 + 34 + 19. — :6 E. MATHIAS. — DISTRIBUTION REGULIERE DE LA FORCE DU MAGNETISME 099 STATIONS Castelsarrasiii (1S95)., Castelsarrasin (1896). Moissac (1895) Moissac (i8y6) Montauban (1895) Montauban (1896) Les Arcs — Brignoles . . . Drag'uig'nan. Toulon Fontenay-le-Comte Liiçon A LONG. A LAT. T AT (oits.) 27. — Tarn-et-Garonne + + + + + 20' 85 20' 45 22' 85 23' i5 6' 65 4' 25 + + + + + + 28. — Var 25' 85 0,4.523 26' o5 0,4514 29' 95 0, 4520 29' 65 0,4526 24' o5 0,4519 23' j5 0,4.528 + + + + + 180 90 i5o 210 140 23o 3oi' 45 2:6' 25 299' 35 2(H)' 55 9 2J 12' 25 4' 95 29' :3 0.4468 0^44" o.44:i 0,4454 La Roche-sur-You... Les Sables-d'Olonne. Chàtellerault Loudun Moiitmoi'illon Poitiers (i884) Poitiers (i8y3) Bellac Limoges Rocliecliouart Saint-Sulpice-Laurière Saint-Yrieix Auxerre Avallon Joigny Nuits-sous-Rivière Sens Tonnerre Villeneuve-l'Archevèq. . 29. — Vendée + i34':3 + i58'i5 + i:3'95 + 194' 35 + 1:0' :5 0.4610 + 1:1' 35 0.4616 + i83'45 0.4615 + i;3'65 0,4619 30. — Vienne + + + 54 00 82' 55 35' 35 68' 55 68' 55 + 192' 45 + 204' 45 + 168' 25 + 1:7' 35 + i::'55 0, 4602 o, 4625 o, 4<3oi 0,4588 o. 46o5 + Kl5o + IIIO + 1100 + "40 + 9:0 + 1200 + 960 + 83o + 1000 31. - Haute- Vienne + + + 2a 00 10' 35 37' 55 l'25 i4' 95 + i5o':5 0,4589 + i32'45 0.4571 + i33'35 0,45-3 + 145' 85 o,45;6 + ii4'o5 0,4565 32. Yonne 12;' 35 147' 35 116' 25 164' 95 108' i5 i5o' 95 125' '■5 + 25o' 25 + 233' 35 + 261' 43 + 247' o3 + 274' 95 + 254' 45 + 277' 45 o, 461 I 0,4612 0,4623 o 4617 0.4629 0.4620 0,4637 + 840 + 660 + 680 + :io + 6uo + 1060 + 1070 + 1180 + 1120 + 1240 + ii5o + l320 AT (CALC.) OBS.-CALC. + i:3 + i:4 + 196 + 11)5 + 146 + 141 + + + 84 46 i5 6 89 370 — 352 — 18 280 - 346 + m 340 - 327 — i3 3io - 435 — 75 + loii + 1044 + II20 -H iio3 + loi 3 + 1102 + 879 + 961 + 961 H- 39 + 66 — 20 + 37 -f 43 98 81 '3- -46 + 785 + 681 + :i: + :32 + 5i(8 + + + 1106 + lOdÇ) + 1168 + 1061 + 1238 + I lO" + 12*35 + + + + 53 21 37 22 2 46 61 12 59 2 43 85 6oo METEOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE Si l'on considère comme anomales les stations qui donnent pour la dilTérenee (obs.) — (cale.) une valeur absolue supérieure ou égale à loo unités du cinquième ordre, on en trouve pour la France entière une centaine environ. Les départements presque réguliers, c'est-à- dire qui ne présentent chacun qu'une anomalie sur une moyenne de cinq stations i>ar département, sont au noml)re de 36. Ce sont les suivants : Aisne, Allier, Hautes-Alpes , Ardennes , Ai'iège , Aube, Aude, Bonches-du-Rhône , Cantal, Charente-Inférieure, Corrèze , Donbs , Drame, Gironde, Hérault, Ille-et-Mlaine, Indre, Loire, Haute-Loii-e, Lozère, Maine-et-Loire , Manehe , Haute-Marne , Meurthe-et- Moselle (trois anomalies), Meuse, Nièvre, Nord, Pas-de-Calais, Basses-Pjv'énées (deux anomalies), Rhône, Haute-Saône (trois ano- malies), Savoie (deux anomalies), Seine, Seine-et-Marne , Vaucluse, Vosges (trois anomalies). Pour ne pas allonger outre mesure ce mémoire, le tableau suivant donne la comparaison des observations et du calcul pour la Seine et la Seine-et-Marne; les anomalies sont comme d'iialjitude indiquées par des italiques. STATIONS AT (ons.) AT (CALC.) Bonneuil Clianipi^ny Cliarcntoii Cliàlenay Clamarl Xoisy-le-Sec Pai'c-Saint-^Iaur Saiut-Maur-lcs-Fossés Stoins Brie-Comte'-Roljcrl . . . Chelles Coulomiiiicrs La Ferté-Gauclu'i' La Ferlé-sous-Jouarrc Fontainebleau Jiiilly Mraiix Melun Monterean Mûriiianl Morlccrt' IS'cmours Provins Saacy-sur-!Marnc — 6i' — 63' — 58' — 48' — 4-' — (io' — 02' — 6i' — 56' 85 45 25 i5 :3 o5 I Seine + 3 10' 35 + 5ii'95 + 312' i5 + 3o9'o5 + 3ii'45 + 3i:'45 + 3ii'85 + ■3ii'95 + 320' 95 0,4644 0,464; o, 465o 0,464; 0,4645 o, 464(i o,4''4: o,4artis uniformément sur la surface de la France, on peut aflirmer que la formule (8) représente bien la loi de distril>ution régulière de la force totale en France et que cet élément magné- tique est de beaucoup le plus régulier de tous. Remarque. — Dans son Réseau magnétique de la France au i^"^ janvier i8g6, M. Moureaux, cherchant à montrer l'influence de l'altitude sur la force totale, dresse le taljleau suivant qu'il donne à titre de simple indication, les déterminations du col du ïourmalet et de Luz-Saint-Sauveur correspondant à un état magnétique troublé. STATIOXS Bagnércs-dc-Bigorrc Campai! Luz-Saint-Sauveiir. . Col du Tourmalet . . Col (le Seiicours Pic-du-Midi ALTITUDE 540» 668» 700" 1800" 2366" 2856°' 1 OUCE TOTALE 0,4-"'l6 o, 4500 o, 4308 0,4493 0,44" Sous ces réserves, il conclut que la force totale parait diminuer quand l'altitude augmente. On peut objecter à cela que l'on compare des forces totales correspondant à des longitudes et à des latitudes difterentes et qu'en second lieu, des deux déterminations faites à Bagnères-de-Bigorre et au Pic-du-Midi , on n'a mis dans le tableau précédent que la valeur la plus élevée de la force totale pour Bagnères et la valeur la plus petite pour le Pic. En ce qui concerne Bagnères-de-Bigorre, la formule (8) indique que les mesures de 1882 et de 1891 sont entachées d'anomalie, la première par défaut (— 10;). la seconde par excès (+ 100); cette première localité doit donc être rayée du tableau. En ce qui concerne ()02 METEOROLOGIE ET PHYSIQUE DU GLOBE le Pic-du-Midi, la mesure de iSgS, que M. Moureaux a seule considé- rée, est affectée d'une énorme anomalie par défaut ( — 199) tandis que celle de 1891 est presque régulière et doit être seule employée. De plus, la formule (8) montre que le nombre de Luz-Saint-Sauveur est fortement anomal par excès (-|- 118), ce qui peut tenir à l'état magné- tique troublé dans lequel les mesures ont été prises. Il ne reste de comparable que les mesures de Campan, du Col du Tourmalet, du Col de Sarcoui's et du Pic-du-Midi (1891). Pour éliminer l'influence de la longitude et de la latitude, il suflira de comparer les dilTérences (obs.) — (cale.) fournies par l'observation et la formule (8). On obtient alors le tableau suivant, dans lequel les nombres de la der- nière colonne sont exprimés en unités du cinquième ordre décimal. STATIONS ALTITUDE T OBS.- CALC . Campan Col du Tourmalet Col dp Spiipoiirs 668» 1800" 2366° 2856" 0. 4500 0,4493 0.4492 0,4488 + 12 - 32 - 48 - 89 Pic-du-Midi (i8<-u) Dans ces conditions, toutes les stations considérées sont régulières, et sous l'influence de l'altitude la force totale diminue progressive- ment, mais avec une grande lenteur; la diflerence d'altitude de 2200 m. entre Campan et le Pic-du-]Midi se traduit par une diminu- tion de loi unités du cinquième ordre, c'est-à-dire est sensible- ment de l'ordre de grandeur des erreurs d'expérience. Cela montre pourquoi il est inutile d'introduire l'altitude dans la loi de distribu- tion régulière dont il est question dans ce travail. ^V. KILIAX. — LE JURASSIQUE MOYEN' DANS LES ALPES FRANÇAISES 6o3 M. W. KILIAN Professeur à TLiiiversité de Grenoble NOTE SUR LE JURASSIQUE MOYEN DANS LES ALPES FRANÇAISES r33i-:6 : y()J — Séance du 6 août — Lorsque l'on étudie . d'après les travaux les plus récents, le Juras- sique moyen d'un bout à l'autre des Alpes françaises où sa présence avait été longtemps méconnue et même niée, en 1847, par ThioUière (qui déclarait qu'entre les Cévennes et les Alpes, l'Oxfordien re})osait sur le Lias), il est facile de s'apercevoir que ce terrain est largement représenté dans cette région. Sa puissance est variable et atteint environ 400'" au maximum dans certaines parties de nos montagnes. Il nous a paru intéressant de tirer des descriptions éparses dans de nombreux recueils , ainsi que de nos observations personnelles , un aperçu d'ensemble sur la composition de ce terrain dans les Alpes occidentales. Le Dogger présente des changements de faciès qui permettent de distinguer plusieurs tj'pes dans la région située à l'Est-Sud-Est d'une ligne passant par Tlionon, Annecy, Chambéry, Grenoble, ce sont : Cl). — Un type vaseux caractérisé par le faciès dauphinois (*) des dépôts, par l'abondance des empreintes connues sous le nom de Cancellophycus , par des Posidonomj-es et parmi les Ammonites, par l'association constante des Lj-toceras et des Phj-llocevas à de nom- breuses espèces communes avec le Dogger de l'Europe centrale. M. Haug a donné, dès 1892, une description magistrale des dépôts de ce type vaseux entre Gap et Digne (Basses-Alpes). A la base, Y Aalénien schisto-marneux forme un niveau constant qui se confond par la partie inférieure avec le « Lias schisteux » et renferme à la base de nombreux exemplaires de Ludangia tolutaria Dum., spécialement abondante dans la région. (Environs de la Grave, etc.) Les fossiles rencontrés dans la région que nous avons spéciale- (*) Voir les publications de M. E. Haug. 6o4 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE ment étudiée , c'est-à-dire entre la chaîne de Belledonne- Aiguilles- Rouges , le Pelvoux et la zone du Briançonnais , permettent de sup- poser que les zones à Harpoceras Miirchisonœ , Harpoceras conca- çuin, Sphœroceras Sauzei, Witchellia Romani et Cosmoceras sub- fiircatiini y sont paléontologiquement représentées , comme elles le sont dans le bassin du Drac (*), dans le Gapençais et dans les envi- rons de Digne. Le niveau supérieur du Bathonien, formé de schistes marneux noirs, est peu fossilifère et se confond pétrograpliiquement avec les dépôts callo viens et oxfordiens; il n'a fourni une faune caractéris- tique qu'aux Dourbes, dans les Basses- Alpes, où M. Haug l'a étudié. Ces caractères se poursuivent des Alpes-Maritimes aux Alpes ber- noises. Le Dogger à faciès dauphinois existe également en Suisse, où il est riche en Céphalopodes, dans les Préalpes de Fribourg et dans la chaîne du Stockhorn (Sulzgraben, Rufîgraben. Blattenheid, Hohmad) ; à Dent-de-Lys, Rossinière, Sabletaz, Moléson, La Baisse, Grand-Caudon, Les Favres, dans les Alpes de Fribourg et de Yaud. Les faunes recueillies dans ces gisements et dont le Musée de Berne possède des séries remarquables (**) provenant de la collection Ooster, rappellent beaucoup les associations d'Ammonites de notre Juras- sique moyen de Villard d'Arène , du bassin du Drac et des Basses- Alpes; nous citerons : Cœlocevas Dajdei (notamment du col de Lys), Cœlocevas Humphviesi, Cœlocevas Blagdeni, Cosmoceras Garanti, Cosmoceras Braikenridgi, Lj'toceras tripartitiim (fréquent et carac- téristique), Phylloceras tatriciwi, Phylloceras Demidoffi , Phyllo- ceras viator ; Parkinsonia Parkinsoni, Morphoceras dîmoj'phum, Perisphinctes Martinsi, Witchellia Romani, etc., des Posidonomj'a et des Inocérames. Les gisements qui possèdent ce faciès se ren- contrent tous dans les Préalpes ou dans des chaînes dont M. Lugeon (***) admet l'origine « charriée », cest-à-dire dans des zones plissées dont les racines seraient à rechercher plus au Sud, dans les régions intraalpines. Il est donc probable que notre zone à faciès dauphinois se continuait dans les Alpes suisses, probablement au Sud des Alpes bernoises, sur un parcours qui reste à préciser. D'autre part, M. Hugi (****) a étudié, dans les Klippes, également charriées, de Giswyl, un Dogger formé de calcaires foncés, schisteux (■) D'après k's travaux de M. P. Loi-y. (") L. RoLLiKR. Bri-iclil ucbcr die jialœontolog SammJimgen des Xalnrli }fiiseiims in Berii. (Mitth. Xaliirf. Gesselich., in Uern, 1S91). — V. aussi, les travaux d'Ooster et de G. Sayn. (*'*) M. LuGEOx. La réjfion de la Brèche du Ghablais {BiiU. Sen-. C. G. F., t. Vil, uSyO). (****) HuGi. Die Klippenrcgion von Giswyl (1900, Bàle, Genève, Lyon). AV. KII.IAX. — LE JURASSIQUE MOYEN DA> S LES ALPES FRANÇAISES 6o5 OU compactes, parfois bitumineux, renfermant des Radiolaires, et dans lesquels on a trouvé, avec des empreintes de Cancellophj'ciis scoparius, une série d'Ammonites parmi lesquelles nous relèverons : Lytoceras triparfifum . Phylloceras tatriciwi, Cœloceras Freyci- neti, comme rappelant la faune de notre type dauphinois. M. Hugi distingue un Aalénien, un Bajocien, mais n"a pas rencontré de fossiles bathoniens. Ce cjui caractérise ce type vaseux, c'est sa grande uniformité litho- logique ; on n'y remarque pas. comme c'est le cas dans le bassin Anglo- Parisien, dans le Jura ou dans d'autres parties de l'Europe centrale, de minerais de fer, de lignites, d'oolithes ferrugineuses, de calcaires à silex, de grès, oolithes, de calcaires à Polypiers, de marnes ou de cal- caires marneux à My acées. à Brachiopodes ou à Ostracées ; on n'y ren- contre ni formations lagunaires comme dans le Languedoc, ni forma- tions récifales ou zoogènes, ni marbres à Brachiopodes, En outre, rien ne rappelle ni la « Malière » de Normandie . ni le Fullers'earth, ni les assises si variées de l'Angleterre ou du Jura. Tout au plus quelques niveaux à Ammonites ferrugineuses ou à nodules calcaires « miches », viennent interrompre la longue série de marno-calcaires et de marnes noirâtres qui constituent le Dogger dauphinois. Se rapprochant dans une certaine mesure , par la fréquence des Ammonites, de certaines assises médiojurassiques de l'Ouest delà France, notre type dauphinois s'endistingue par sanature lithologique, par son épaisseur, par la fréquence des Posidonoiiv)''es et aussi par la présence de types méditerranéens {Lj'toceras et Phjdloceims) qui y sont associés, ainsi que nous l'avons dit, aux espèces de l'Europe centrale, La fréquence de Posidonomj'a alpina et de certains Céphalopodes (Phylloceras, Lj'toceras tripartitiim) rappelle vivement les couches de Klaus, de Vils et de Brentonico dans les Alpes orientales, le Dogger de l'Apennin et de la Sicile. Toutefois, malgré ces analogies, notre type dauphinois diffère cependant nettement du Dogger des Alpes orientales par l'absence ou la grande rareté des Brachiopodes caractéristiques du type occidental (Sette communi) qui affecte du reste souvent un faciès marbre (Vils) très éloigné du nôtre. Ce n'est qu'à la Voulte, sur la rive droite du Rhône, et en dehors de notre région, qu'on rencontre quelques Brachiopodes de ce type oriental, dans des assises sublittorales de notre Dogger vaseux des Alpes occidentales. La faune de notre Aalénien dauphinois (Drac, Gapençais) rappelle également par de nomJjreuses espèces (Tmetoceras scissum, Erycites ()06 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE faUax), signalés dans le bassin du Drac par M. P. Lorv, les dépôts de même âge de San-Virgilio, sur le lac de Garde, cependant de nature lithologique si différente. h). — Type mixte (intermédiaire). — ^\n•s le bord externe de la région intraalpine, le Dogger présente de notal)les modifications ; conservant sa teinte foncée, il offre, à Corenc, près Grenoble, à la Tal)le et localement en Haute-Savoie, des intercalations de Calcaires à Entroques semblables à la « brèche à Echinodermes » duBajocien des Alpes suisses et aux Calcaires à Entroc|ues décrits par M. Léon Bertrand au même niveau, dans le voisinage du massif du Mercan- tour. Ces modifications préludent, à l'Ouest de la Chaîne de Belle- donne, à l'apparition àw. faciès jurassien, cjui est nettement caracté- risé dès le Mont-du-Chat, aux environs de Chambéry. A côté du Dogger vaseux à Céphalopodes qui se rapproche tant de notre tj'pe dauphinois, il existe également dans les Alpes ber- noises de nombreux gisements à faciès néritiques ou ferrugineux : calcaire à Entroques (dite « brèche d'Échinodermes »). oolithes fer- rugineuses où les Céphalopodes sont associés à des Bivalves, à des Brachiopodes, etc (Fabdumrothorn, Loetschenpass, environs de Meyringen, Untcrnusserln , Stufistein (*) (Lytoceras tripartituin), Urbachthal, etc..) qui appartiennent à un type différent provenant d'une zone bathymétrique intermédiaire, distincte de la zone fran- chement vaseuse du type dauphinois. c). — Un type néritique à Entroques, Pélécypodes, (Ostrea costata). Brachiopodes, représenté par des « calcaires à débris », forme à l'Est du faciès vaseux, du vol Ferret à la Haute-Lbaye . une bande d'affleurements sporadicjues cjui correspond à la zone du Briançonnais et sépare le domaine occupé par le Dogger vaseux de la réffion des « Schistes lustrés. » Ce type néritique peut être rapproché du Jurassique moyen des Alpes centrales de la Suisse; en effet, M. Tobler(**) a décrit, en 189-, le Jurassique moyen du bord septentrional du massif de l'Aar, et il ressort des études du géologue bàlois que sa composition est consiilérablement plus variée Cfuc dans notre type dauphinois; des (*) Ce gisement de Stufistein se rapproclie, par sa faune (rAniinoniles, de udIpc type dauphinois, malgré sa nature pétrographique diirérenle et la présence d"élémenls néri- tiques. ("•) Pour plus de détails, A'oir : A. Tonuicn : Vcber die dHrdcrano' dcr ntcsozoischcn Scdinirnir nin Xordrand des Aarmassivs. (Verli. der Xatiirforseli. Gesellseli. zii Basel , I. XII, 1, 189:). -VV. KII.IAX. — LE JURASSIQUE MOYEN DANS LES ALPES FRANÇAISES 607 calcaires à Entroques (brèches à Ecliinoclernies). des bancs de Poly- piers et une Oolillie ferrugineuse corallienne, ainsi que la présence de nombreux Pélécypodes, Gastropodes, Brachiopodes et Échino- dermes, donnent malgré la présence de quelques Ammonites, à cet ensemble un caractère nettement néritique. M. Tobler (=^) a décrit également, dans les « Klippes » de la région du lac des Quatre-Cantons . un Jurassique moyen à Ammo- nites débutant par des calcaires marneux à Ludiiug-ja Murchisonœ et Siephnnocevas Humphriesîaniim. Il a pu reconnaître aussi les zones k Parkinsonia hifiircata et à Oppelia fiisca. Quant au Batho- nien supérieur, il consiste en un calcaire g-réseux formant Tarète du Stanzerliorn et renfermant des restes de Rhynclionelles. des Bélem- nites et des débris de plantes (Zàmites Kaufinani). Ces dernières assises sont analogues aux « couches à Mj-tihis » des Alpes vau- doises. Il est à remarquer du reste que le faciès néritique à Entroques. Brachiopodes. Ostvea costata . etc., de la zone du Briançonnais ne peut être exactement assimilé à ces couches à Mj'tHus des Alpes vaudoises et du Chablais, qui possèdent un faciès plus marneux et, malgré quelques espèces communes, ont une faune notablement différente. D'autre part, nous croyons intéressant, après ^I. Haug. d'attirer l'attention sur le caractère essentiellement néritique du Jurassique moyen décrit dans le Val Ferret par Greppin. et qui rappelle davan- tage notre Dogger briançonnais. Ajoutons que. sur la bordure sep- tentrionale des Alpes bernoises, les travaux de MM. Baltzer. Stutz Heim, Moesch. Bodim ont mis en évidence un lacies néritique et sublittoral des dépôts jurassiques moyens. M. Zaccagna admet lexistence d'une lacune sti-aii graphique exûve le Lias et le Tithonique dans une partie des Alpes franco-italiennes ; nous nous sommes rallié, pour certains points, à cette manière de voir. Il sem])le en effet qu'une portion de notre zone du Briançon- nais , et notamment la bande axiale houillère dans laquelle le Dooo-er fait absolument défaut, ait dû être émergée pendant cette période. Nous reviendrons d'ailleurs sur cette question à propos de la trans- gression tithonique. d). — Un type provençal (Haug), remarquable par l'apparition de masses doiomitiques et la présence de faunes néritiques h. Échino- (*) A. ÏOBi.ER. Vurhnifiii-r Miithrihntoyii liber die Géologie der Klippcn am VierwaJds- iuttersee. (Eclogœ gcol. heh\. vol. VI. ii' i, Juin iSi)t).) ()()8 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE dermes, Brachiopocles, Pélécypodes (Lima hcteroinorpha pour le Bajocien; Ostvca costata pour le Bathonieii), etc., se développe par passage insensible entre Gréoux, Castellanne et le Yar, et se conti- nue dans les « Préalpes maritimes », jusqu'aux environs de Grasse, e). — Vers l'Est, il est probable qu'une partie de la puissante for- mation des « Schistes lustrés » com^espond au Dogger , ainsi que M. Bertrand l'a admis dès 1894 pour les schistes du vallon des Clia- pieux en Tarentaise, mais il est difficile, vu l'absence de fossiles,, d'affirmer rien de précis à cet égai'd. La répartition de faciès énumprés ci-dessvis permet de délimiter une aire centrale où ne se sont déposés que des sédiments vaseux à Céphalopodes (faciès bathyal) d'une notable épaisseur; cette aire, qui occupait la portion des Alpes françaises située à l'Ouest de la zone du Briançonnais, n'est autre chose que le géosj'iiclinal subalpin, dont l'existence était déjà très nettement dessinée dès l'épofpie liasique et dont M. Haug a, en 1892, indiqué le rôle et la signification. Lors- qu'on s'éloigne de cette aire centrale vers le Nord et le Nord-Ouest, les dépôts (type intermédiaire) accusent des caractères tout différents de ceux qu'ils ont au centre. Ils deviennent oolithiques et prennent une faune néritique; i)arfois, ils contiennent des minerais de fer (La Yerpillière). et l'on passe ainsi graduellement aux faciès si variés du Jura, du bassin de Paris et de l'Angleterre. Enfin, sur une partie de remj)Lacement actuel de la zone du Brian- çonnais. semble avoir existé, à l'époque du Jurassique moyen, un axe émergé, ou tout au moins une ligne de hauts fonds séparant le géosynclinal subalpin du géosynclinal piémontais et déterminant, entre la bande du Dogger à faciès dauphinois et celle des schistes lustrés, une zone néritique (^) dont nous trouvons les traces dans les dépôts sublittoraux du Galibier, du lac des Neuf-Couleur s et d'Escreins . (*) C"e-;t précisément cette même zone qui, plus tard, devieiil Taxe lecfoniqiie de l'éventail alpin, éventail que nous avons comparé à un verilaliie iiuis.sif rrrilral doi\l Terosion n"a point encore, à Tlienre ([u"il est, enlevé la converlure sédimenlaire si curieusement plissée. (Ass. Fr. pour l'Avanc. des Se, Congres de Boulogne.) A. BIGOT. — ASSÈCHEMENT DES RÉGIONS CALCAIRES 609 M. A. BIGOT Professeur de Géologie et Paléontologie à rUniversité de Ctien SUR L'ASSÈCHEMENT DES RÉGIONS CALCAIRES DES ENVIRONS DE CAEN [551.48 :(44.22)J — Scdiicc du l> août — Divers observateurs, et notamment MM. Martel et Fournier, ont appelé l'attention sur l'avenir que réservent aux régions calcaires l'ensevelissement des cours d'eau , la situation de plus en plus pro- fonde des nappes d'inliltration et la disparition des sources qui en est la conséquence. Cette note a pour but de montrer, pour une région assez étendue du Calvados, quels ont été les résultats de ces phénomènes sous l'in- fluence de conditions relativement récentes, et comment on peut concevoir la situation liydrograpliique future de cette région dans l'hypothèse où ces conditions se maintiendraient, La Campagne de Caen forme , au travers du Calvados , une large bande de plaines et de petits jilateaux, correspondant à l'affleure- ment des calcaires bathoniens. C'est une région à' architecture tabu- laire, essentiellement perméable, soit parce que la roche est plus ou moins meuble, soit parce quelle est divisée par de nombreuses fissures, élargies par décalcification. La forme topographique, caractérisée par des pentes généralement très douces, parfois même par des plateaux étendus, retarde le ruissellement et facilite l'infiltration. Une notable partie des eaux tombées à la surface de la région pénètre ainsi dans le sol pour former les nappes. Aux environs immédiats de Caen (*), ces nappes se rencontrent à plusieurs niveaux : I- Dans les calcaires Ijradfordiens, où elles sont déterminées soit par (*) A. Bigot. Sur raliiiK-nhilion ••ii l'aii polnbh' des communes du lilloi-al de Caen à CourscuUcs (Bull. Sol-. Liiiii. Xorm., 5= série, t. VII, igoS, p. 4'i). 39* 6io GEOLOGIE ET MINERALOGIE des lits argileux intercalés dans les calcaires , soit par des surfaces durcies désignées sous le nom de chiens. Ces niveaux imperméables n'ont pas une position constante ; ils ne sont pas continus ; les nappes qu'ils déterminent sont irrégulières en étendue et en posi- tion ; 2'^ A la base du Vésulien ; cette nappe est désignée par les sondeurs locaux sous le nom de « nappe du banc bleu » ; 3" Au niveau de l'oolithe ferru- gineuse bajocienne. Cette nappe alimente les puits, dits artésiens, de la ville de Caen ; à Caen, cette nappe est en elFet captîçe ; elle four- nit à 25-28 mètres de profondeur une eau ascendante dont la surface piézométrique arrive presque au niveau du sol (-[- 6 m.) dans les bas quartiers. Un forage fait à Caen en 1849, place Saint-Pierre, a été arrêté à une profondeui' de 66 mètres (cote — 59) dans les schistes précam- l briens sans rencontrer d'autres nappes dans les assises calcaires, marneuses et argileuses du Bajo- cien inférieur et du Lias. Dans le Bessin, la nappe bajo- cienne se continue; elle alimente notamment la Gronde de Ryes et a été rencontrée dans un forage exécuté à Ryes. Mais le Vésulien calcaire est rem- placé clans le Bessin par des argiles (Port-en-Bessin, Arromanches) ou des calcaires marneux (Crépon) ; la nappe vésulienne est très précaire- (Meuvaines), ou n'existe pas, mais rimperméa])ilité de ces assises dé- termine au-dessus d'elles, à la base du Bradfordien, une nappe assez importante, qui alimente à Crépon les sources du ruisseau de Pro- A. BIGOT. — ASSÈCHEMEXT DES RÉGIOXS CALCAIRES 6ll vence et qui est atteinte par certains puits de la région de Cour- seulles. notamment par un forage récemment exécuté à Reviers. Le Cinglais . entre les vallées de l'Orne et de le Laize, est formé par mi plateau de calcaires du jurassique inférieur, en partie décal- cifiés, qui surmonte une pénéplaine paléozoïque. Il n'existe qu'une seule nappe, au-dessus des terrains primaires, elle circule dans les calcaires charmoutliiens ou les graviers du Trias et alimente les sources des nombreux ruisseaux du Cinglais. A l'Est de la Laize s'étend une grande plaine calcaire, limitée au Sud par le massif ancien de Falaise et qui s'abaisse en pente douce vers la Dives. Il paraît n'exister, comme dans le Cinglais, qu'une seule nappe , logée à la base des calcaires jurassiques et maintenue par la sui^face du plateau primaire qui supporte ces calcaires. * La première de nos cartes (Jîg'. 2) montre combien sont rares les cours d'eau qui arrosent cette vaste région de la Campagne de Caen. De la SeuUes à la Dives, sur une longueur de 5o kilomètres, et une largeur moyenne de i<) kilomètres, correspondant à une surface de 800 kilo- mètres carrés, il n'y a qu'un petit nombre de ruisseaux, et la plupart de peu d'importance, qui prennent leur source dans la Campagne de Caen. Les grands cours d'eau qui la limitent et la traversent, — la Seulles , — l'Orne, avec ses affluents l'Odon et le Laize, — la Dives, avec son affluent le Laizon, prennent naissance en amont. A leur traversée de la Campagne de Caen, ces rivières jouent le rôle de collecteurs pour les nappes des calcaires, qui leur sont amenées par les affluents , ou qui se déversent dans le lit même des grands collecteurs. Les affluents de ces cours d'eau, nés dans la Campagne de Caen, sont les suivants : La SeuUes reçoit sur sa rive droite la Thue , grossie de la Gronde de T^antheuiL la Mue , grossie de la Chironne. L'Orne ne reçoit sur sa rive gauche que le Dan. Sur sa rive di'oite elle est grossie de la Rivière de Mondeville et du Ruisseau de Saint- Martin de Fontenaj", l'une et l'autre d'un débit sans proportion avec la brièveté de leurs cours. La Laize, affluent de la rive droite de l'Orne, née au sud de la région calcaire dans des schistes anciens qui dépendent du massif de Falaise, est un cours d'eau important qu'alimentent, sur sa rive 6l2 GÉOLOGIE ET MINERALOGIE droite, des ruisseaux de peu de longueur, mais qui naissent parfois de sources importantes; la plus puissante de ces sources, celle de la Fontaine-des-Rochers, à Saint-Germain-le-Yasson, captée par la ville C!"" 0.1 g ne t/e C3en FiG. 2. — Marais i-t dépôts litloi'aux uftucls. Héscau liydrographiquc acliu'l de la cainpaijiic de Cacn. de Caen, a un débit journalier moyen de 1800 mètres cubes (plus de lîo litivs à la seconde). Mais la Laize est surtout grossie sur la i-ive gauche jiar des aflluents nondu'eux, drainant vers la Laize une partie de la najipe du Cinglais qui se déverse, d'autre part, vers l'Orne. A. BIGOT. — ASSECHEMEAT DES UEGIONS CALCAIRES (il3 Dans les marais de la Dives, de Troarn et de la Vallée d'Auge, anciens estuaires maritimes récemment comblés, la Dives, née très loin en amont dans le Paj's (VAuge Ornais, reçoit sur sa rive L J\ ^ ^. w c H e: FiG. 3. — Réseau liydrograpliique ancien de la campagne dv Caen. gauche un affluent important, le Laizon, dont la source est, comme celle de la Dives. située en amont de la région calcaire. Une fois entré dans la Campagne de Caen , le Laizon ne reçoit plus , près de (il4 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE Potigny, que trois ou quatre petits ruisseaux, dont les sources sont liées à la réapparition des terrains anciens de la Brèche-au-Dia])le. Le Laizon se grossit de la Muance, ruisseau assez important, né à Saint-Sylvain, en pleine région calcaire, cl (jui r(^;oit à son tour L; Cours de JcuunUe et de petits ruisseaux nés au pourtour du marais des Terriei's, dépendance des marais de la Dives. Deux petits cours d'eau, tombant directement à la mer, le Ruis- seau de Provence et le Ruisseau de Luc, complètent le réseau des cours d'eau propres à la Campagne de Caen. L'examen de la première carte (fig. 2) montre encore la rareté des pertes des cours d'eau dans la région étudiée. On n'en peut citer que deux exemples : i'^' Interruption du cours de la Mue entre Saint-Manvieu et Rots, sur une longueur de 6 kilomètres. Cette interruption correspond à l'entrée du cours d'eau dans l'aflleui'ement des calcaires du Bajocien supérieur et du Vésulien. 2° Disparition, après un parcours de 3 kilomètres, du Ruisseau de Perrières, entre le Breuil et la Dives (i klm. 1/12). Ce ruisseau, né d'une source importante dans les calcaires bz'adfordiens , au contact du Grès armoricain, disparaît près de la Maison Neuve en abordant à nouveau les calcaires perméables du Bradibrdien (*). L'existence de nombreux vallons à flancs en pente très douce, ou de ravins étroits à fond plat, sans cours d'eau même temporaires, est un trait caractéristique que la Campagne de Caen partage avec de nombreuses régions calcaires. L'origine de ces vallons et de ces ravins ne peut prêter à aucune discussion. Ce sont d'anciennes vallées autrefois parcourues par des cours d'eau, qui les ont creusées. En supposant ces cours d'eau coulant encore dans leur ancieime vallée, aujourd'hui asséchée, on rétablit l'hydrographie ancienne de la région et on lui restitue à cet égard son ancienne physionomie. C'est cette reconstitution que nous avons figurée sur la seconde de nos cartes (fig. 3). On voit immédiatement combien était dillcrente la situation (*) En (leliors de la réj^inii ctiKlii^c. dans lo Hcssiu. TAurr présente à Comiiies un exemple de capture souterraine d"iin cours d"eau. L"a|)proloii(lissenient de la vallée de ce cours d'eau Ta amené au contact des calcaires très tissures du liajocien supérieur qui l'absorbent plus ou moins complètement aux Fosses dii Soiiry. Les sources qui se cîévcrsent à Port-en-Bessiii. an niveau de la mer, sont probal)lement alimentées en partie par ces perles de l'Aure. A. BIGOT. — ASSÈCHEMENT DES RÉGIONS CALCAIRES 6l5 hydrographique, quand des sources donnaient naissance entête de chacun des nombreux vallons asséchés à tout autant de cours d'eau. Le contraste des deux cartes pour la région située entre TOrne et la Dives est particulièrement saisissant. On reconnaît aussi que les cours d'eau propres à la région que nous avons énumérés ne repré- sentent que les tronçons inférieurs des anciens cours d'eau et qu'en amont des sources qui leur donnent aujourd'hui naissance leurs vallées sont continuées par des tronçons asséchés s'étendant parfois fort loin. Celui de la Muance, passant par Estrées-la-Campagne, se prolonge sur lo kilomètres en amont des sources de Saint-Svlvain. Les sources des cours d'eau ont donc reculé vers l'aval ; elles occupent des altitudes de plus en plus basses ; par suite , la surface piézométrique de la nappe qui les alimente s'est de plus en plus abaissée. Ces trois phénomènes, abaissement de la surface piézomé- trique. altitude décroissante des émergences, recul des sources vers l'aval dans les vallées, sont intimement liés lun à l'autre, et les chan- gements dans le régime hydrographique se rattachent en fait à l'abaissement de la surface piézométrique. Cet abaissement peut provenir de deux causes : I" Réduction du volume de la nappe. 2" Modilications géographiques résultant du déplacement des collecteurs dans le sens vertical. 1° Réduction du volume de la nappe. — Elle résulte d'une moindre alimentation, — soit par réduction des précipitations atmosphériques, — soit par changement dans le rapport des facteurs ruissellement , évaporation , infiltration. L'assèchement des vallées de la Campagne de Caen ne peut être rattaché à l'une ou l'autre de ces causes : a) — Les vallées et ravins secs sont remblayés par des limons de ruissellement. La base de ces limons, tout au moins, est parfaitement stratifiée et présente de petits lits de cailloux et de graviers à peine roulés. La disposition des dépôts, l'intercalation de lits irréguliers de graviers et de petits galets, impliquent un entraînement par des eaux de ruissellement abondantes , correspondant à des pluies d'in- tensité variable, avec épisodes semi-torrentiels. b). — Le changement dans le rapport des facteurs ruissellement, évaporation, infiltration ne peut résulter, dans le cas envisagé, que du déboisement. Or, si certaines régions de la Campagne de Caen 6i6 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE peuvent se prêter, grâce à Tépaisseur des limons superficiels, à rétablissement de forêts naturelles, la plus grande partie est rebelle à la culture des essences forestières. Partout où les calcaires sont superficiels, ils opposent un obstacle à la pénétration des racines des arbres ; les seuls qui y soient relativement prospères sont des sapins de plantation récente. Loin d'être un pays déboisé, la région cal- caire possède peut-être aujourd'hui plus d'arbres qu'elle n'en a jamais porté. 2° Modifications géog-vaphiques. — Le niveau de base d'une nappe étant déterminé par une couche imperméable au-dessus de laquelle s'arrêtent les eaux d'infiltration, ce niveau de base peut se trouver au-dessus ou au-dessous du collecteur qui draine la nappe, que ce collecteur soit un grand cours d'eau ou la mer qui est le collecteur général des nappes. Un abaissement du niveau des collecteurs aura donc une réper- cussion sur la position de la surface piézométrique , si le niveau des collecteurs s'abaisse jusqu'au niveau de la couche imperméable. Envisageons donc ce qui doit se passer d'une façon générale quand, par suite d'un abaissement du niveau d'un collecteur, celui-ci, d'abord situé au-dessus de la sm^face imperméable, se trouve progressive- ment amené au-dessous de cette surface. Soit (fi g. 4) une nappe telle que ABCD . logée dans des assises uniformément perméables et maintenue par une assise perméable CD, située au-dessous du collecteur A. La surface piézométrique de cette nappe, déterminée par l'écoulement au niveau du collecteur A, prendra la forme AB. Une vallée latérale AE coupera la surface piézométri([ue en S, où la nappe se déversera par une source ; de S en A, cette vallée latérale sera parcourue par un cours d'eau. Si (fig. 5), par suite d'un approlbndissement de la vallée du col- lecteur, A est abaissé en A', la surface piézométrique prendra la posi- A. BIOOT. — ASSECHEMENT DES REGIONS CALCAIRES 617 tion A' B' ; la vallée latérale coupera cette surface en S', point situé à l'aval de l'émergence primitive S et à une altitude inférieure ; de S' à A', la vallée sera parcourue parle cours d'eau prenant naissance en S', tandis que SS' sera asséché. FiG. 5. Quand A sera arrivé au niveau de C , l'écoulement de la nappe se fera seulement en C, et la vallée latérale sera complètement asséchée. Le déplacement des émergences se fait de l'amont à l'açal, et les émergences occupent des alfi fades de plus en plus basses. Le ruissellement sur les versants entraine des matériaux de rem- blayage qui s'accumulent au fond de la vallée parce que la pente du profil longitudinal est très faible et parce que la puissance de trans- port devient insullisante suivant l'axe pour entraîner les matériaux sur une pente plus faible. Ce transport se trouve en outre annihilé par ce fait que le fond de la vallée, formé de calcaires perméables, ou tout au moins jalonné par les cheminées des anciennes émergences absorbe rapidement les eaux de ruissellement qui sont les agents de FiG. 6. transport. Le remblayage va d'ailleurs s'accentuant tant que les versants ne sont pas sulïisamments aplanis, parce que les limons déposés dans le fond de la vallée sont essentiellement perméables et 6l8 GÉOLOGIE ET MINERALOGIE ne permettent pas rétablissement de com's d'eau temporaires, sus- ceptibles d'entraîner les dépôts de ruissellement. Sui)posons maintenant (Jfg. 6) que le collecteur, approfondissant de plus en plus sa vallée, s'enfonce progressivement au dessous du niveau imperméable CD. La nappe se déversera d'abord par une série d'émergences C situées sur la ligne d'allleurement du sommet de la couche imperméable CD. Mais les eaux de ces émergences, coulant sur le versant GA', exercent une action agressive qui aboutit à la forma- tion d'un sillon dans la couche imperméable ; par suite de cette éro- sion, le point C s'éloigne de plus en plus de A' à la surface de CD ; il est progressivement reporté en C'C" situés avec lui sur un même plan, qui est celui du sommet de la couche imperméable. Le déversement de la nappe dans le collecteur se fait seulement par les aflîuents de ce collecteur; le déplacement des éinei'gencesesl inverse du cas précédent ; il se fait de Vaçal à l'amont. L'existence d'un cours d'eau permanent, à pente souvent rapide, ne permet pas l'accumulation des limons de ruissellement dans la vallée. Bien plus, reconquérant la position qu'il avait progressiAe- ment abandonnée dans la phase précédente, ce cours d'eau remonte l'ancienne vallée, qu'il débarrasse du remblayage qui s'y était accu- mulé. Nous avons montré précédemment (*) qu'avant le quaternaire supérieur (phase à Elephas primigenius), la Basse-Normandie avait été fortement surélevée et que, par suite de l'abaissement du niveau de base, le cycle d'érosion des cours d'eau avait passé par une phase de rajeunissement caractérisée par un régime torrentiel. Cette phase de rajeunissement s'est traduite par un encaissement des grands collecteurs, dont la vallée s'est de plus en plus creusée. C'est dans cet encaissement qu'il faut chercher la cause de l'assè- chement des vallées de la Campagne de Caen. Les caractères du tracé hydrographique ancien et actuel de cette région s'expliquent par un abaissement de la surface piézométrique , consécutif à ren- foncement des grands collecteurs. Comme M. Dollfus la déjà dit pour la région de Rouen (**). il suffit de supposer le niveau de ces grands collecteurs progressive- (*) Notamment dans un travail récent : Xotcs pour servir d l'hisloirc pln:sit/iii' ilc lu vallée de l'Urne. — I. Le.s lerrasses pléistocèiies de la région de Feiiouerolles (UuU. Soc. Amis Se. Xat. Rouen, 2« sem. de 1903, iG p. 2 pi. {*•) Xote géologique sur les eaux de Houen, dans Eau.v du liohee. par Gahmeh, Paris, Kingclman, 1901, p. 24S. A. BIGOT. — ASSÈCHEMENT DES RÉGIONS CALCAIRES 619 ment relevé pour voir i*emonter les émergences le long des vallées asséchées et ces vallées ramenées à leur ancienne physionomie, alors quelles étaient parcourues par des ruisseaux nés de ces sources. Il est d'ailleurs facile de montrer par c[uclques exemples que la répartition des émergences et les caractères des vallées de la Cam- pagne de Caen sont conformes aux conditions théoriques qui ont été précédemment établies. 1° Xappe entamée par les collecteurs au-dessus de la couche imperméable qui détermine la naptpe. — Dans la région de Cour- seuUes, par suite de limperméabilité des assises vésuliennes, il se constitue une nappe à la base des calcaires bradfordiens (Jig'. i)- Les couches vésuliennes plongeant au N.-E., leur sommet se trouve à Courseulles, à une cinquantaine de mètres au-dessous du niveau de la SeuUes. La surface piézométrique de la nappe se relèAC à rO.. où elle donne naissance en aval de Crépon à des émergences assez importantes dans la vallée de Provence. Entre la vallée de la SeuUes et le ruisseau de Provence, le plateau bradfordien, recouvert de limon, est entamé par le ravin sec, en partie remblayé, des Vaux de Graye; ce ravin a été creusé par un ruisseau né d'émergences de la nappe , alors que la Seulles était moins profondément creusée et que la surface piézométrique coïncidait avec le fond de la vallée sèche. Cet abaissement de la surface piézométrique a eu en outre pour conséquence de reporter vers l'aval les émergences de la vallée de Provence, continuée à lamont de Crépon par un vallon asséché. Si l'encaissement de la Seulles s'était continué, les émergences du ruis- seau de Provence auraient continué à reculer, jusqu'à ce c[ue le creusement de la vallée de ce ruisseau eût atteint les couches imper- méables du Vésulien. c'est-à-dire le niveau de base de la nappe. 2° Xappe entamée par le collecteur au niveau de la couche imperméable. — C'est le cas de la nappe vésulienne à Allemagne ; cette nappe importante s'y déverse dans l'Orne aux sources du Bourbillon. Les émergences, situées dans le lit de la rivière, se déplacent verticalement par l'augmentation de charge qui résulte des variations du niveau de la rivière sous l'influence de la marée. A haute mer, elles remontent sur la berge, en même temps que monte le niveau de l'eau dans les puits. 3° Collecteurs cireuses au-dessous de la surface de la couche imperméable. — La Laize et l'Orne, qui encadrent le plateau du Cinglais, sont dans cette condition. L'encaissement de ces collée- (ko GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE leurs a dépassé la base des calcaires jurassiques dans lesquels est logée la nappe, ils sont descendus au-dessous du sommet de la l)énéplaine paléozoïque qui forme massif imperméable. Les émer- gences de la nappe sont localisées au contact des deux formations; elles donnent naissance à des ruisseaux inq)ortants ; la vallée de ces ruisseaux creusée dans les terrains primaires est prolongée à l'aval par une vallée sèche le long de laquelle les émergences tendent à remonter. Cette région fournit une démonstration évidente du cas théorique envisagé antérieurement {Jîg. 6). Modifications futures du régime hydrographique. — Elles peuvent être envisagées dans les trois cas suivants : I'' Le déplacement eustatic[ue de la région se poursuit et le niveau de base continue à s'abaisser; 2° Un abaissement de la région continentale succède au soulève- ment et le niveau de base se relève ; 3'' La région continentale est fixée dans sa position actuelle et le niveau de base demeure constant. Des observations que nous aAons relatées ailleurs démontrent qu'après le soulèvement qui a produit le rajeunissement du cycle d'érosion et les phénomènes spéciaux aux nappes que nous avons décrits, la région a été soumise pendant le Quaternaire tout-à-fait supérieur (depuis l'âge de la pierre polie) à un mouvement inverse qui a permis la suljmersion des tourbières littorales et l'envahisse- ment par la mer des estuaires des grands cours d'eau. Ce phénomène paraît se continuer de nos jours, mais il est si lent et ses résultats sont si faibles, en comparaison des phénomènes que nous allons examiner, que Ion peut considérer cet affaissement comme négli- geable et supposer que la région se trouve fixée dans sa position actuelle. Dans ces conditions, l'alimentation des cours d'eau dans la région calcaire est destinée à devenir de plus en plus faible et le régime des cours d'eau est appelé à subir des modifications intéressantes. Ces modifications tiennent à deux causes : a). — Abaissement progressif des napjics d'infiltration par suite de la corrosion chimique des fissures du calcaire en profondeur; b). — Réduction et destruction par érosion mécanique superfi- cielle des couches qui contiennent la nappe. A. BIGOT. — ASSECHEMENT DES REGIONS CALCAIRES 62I a). — L'infiltration dans les roches non perméables en soi est assurée par les fissures qui les divisent. Cette infiltration est d'autant plus facile que ces fissures sont plus nombreuses et , à nombre égal , qu'elles sont plus larges. Pour une position donnée du collecteur de la nappe, la circulation de l'eau dans les fissures des calcaires, au-dessus de la surface piézométrique de la nappe, considérée dans sa position la plus basse, détermine une corrosion chimique des parois des fissures et, par suite, un élargissement de ces fissures. Si le collec- teur s'abaisse, il n'est pas forcé que l'élargissement des fissures suive rigoureusement l'abaissement du collecteur. Lorsque celui-ci se trouve fixé à un niveau déterminé, si le travail de corrosion chimique est en retard il se continue alors que la position du collecteur demeure stable. Par suite de l'élargissement des fissures, la nappe descendra de plus en plus bas, entrahiant la disparition des émer- gences. Deux des cours d'eau du canton de Douvres nous fournissent des exemples manifestes de cet enfouissement des nappes, accompli sous nos yeux, et qui ne peuvent être rattachés qu'à une modification de la perméabilité des calcaires en profondeur. Le ruisseau de Luc, à la suite d'une période favorable pendant laquelle les précipitations atmosphériques ont été abondantes, est alimenté par des émergences situées un peu en aval de l'église de Douvres. La source pérenne du ruisseau, dont le débit est très faible au commencement de l'automne, est reportée à i kilomètres plus bas, au Vieux-Luc. Les émergences temporaires de Douvres fonc- tionnaient d'une façon constante il y a une cinquantaine d'années. Ces émergences, comme celles de la région crétacée de l'Eure, sont des mardelles-hétoives ou des mardeUes-sources suivant la position de la surface piézométrique de la nappe. Elles étaient exclusivement mar délie s-soiirces, quand, pour un volume égal de la nappe, la sec- tion des fissures, moins élargies par décalcification , était plus réduite, et quand, par suite, la surface piézométrique était plus rele- vée. * Le Dan, affluent de la rive gauche de l'Oinie, est réduit, pendant l'été, à un tronçon très court, dont l'origine est à Biéville. Suivant le relèvement de la nappe après les pluies, les émergences sont reportées très loin en amont, ordinairement jusqu'au Ponchet, ]»rès de Biéville, exceptionnellement jusqu'à Mathieu. Ces émergences étaient pérenncs pendant la première moitié du xix<^ siècle; il y avait une cressonnière dans le vallon asséché de Mathieu. 622 GEOLOGIE ET MI.XEUALOGIE b) Le recul des émergences vers l'aval clans les vallées du Cinglais tend à substituer au plateau d'architecture tabulaire, ibrtement incisé sur ses bords, que forment les terrains secondaires, une série dîlots séparés par les affluents de la rive gauche de l'Orne et de la rive droite de la Laize. L'érosion superficielle, déterminée par la régularisation des pro- fils longitudinal et transversal de ces affluents . a pour conséquence de réduire la surface occupée par les couches jurassiques qui forment le bassin d'alimentation de la nappe. Par suite, le volume d'eau fourni aux affluents par cette nappe doit diminuer progressivement. Les progrès de cette érosion superficielle doivent amener dans le Cinglais la disparition complète du revêtement jurassique et, par suite, de la nappe qui est à sa base. Dépouillé de ce revêtement tubulaire perméable, le sovdDassementpaléozoïque imperméable d'ar- chitecture plissée continuera d'être traversé par des cours d'eau surimposés, empruntant les tracés de ceux de l'ancienne région tubulaire. Mais l'imperméabilité de la pénéplaine paléozoïque ne peut être absolue; sa surface, soumise à l'action des agents atmos- phériques, prend une structure fendillée, favorable dans une cer- taine mesure à la constitution des petites nappes superficielles, ali- mentant des ruisseaux à régime très irrégulier, mais susceptibles de creuser à la surface de la plénéplaine des sillons plus ou moins importants, dont l'orientation est déterminée par l'affleurement des bandes tendres et des cassures qui les croisent. Le régime hydrographique du Cinglais, caractérisé parla dispari- tion divergente de ses cours d'eau, peu nombreux, mais aux eaux abondantes et à régimes réguliers, alimentés par une nappe puis- sante à la base d'un revêtement tubulaire, est destiné à être remplacé par le régime hydrographique du Bocage, aux cours d'eaux mul- tiples, disposés en réseau plus ou moins orthogonal, à régimes très irréguliers, alimentés par des nappes précaires, logées dans le som- met fissuré des couches paléozoïques. CONCLUSIONS 1° Avant le quaternaire supérieur (phase à Elcphas priniigenius), la Campagne de Caen était sillonnée de nombreux cours d'eau, alimentés par des émergences situées en tête des vallées asséchées ([ui sillonnent la région ; 2'^ Les quelques cours d'eau qui prennent naissance dans la Cam- A. BIGOT. — ASSÈCHEMENT DES REGIONS CALCAIRES 623 pagne de Caen ne sont que les tronçons inférieurs de cours d'eau plus étendus dont les. émergences ont reculé vers l'aval ; 3° Ces deux phénomènes — assèchement des vallées et recul des émergences vers l'aval — sont la conséquence d'un abaissement de la surface piézométrique des nappes ; 4° L'abaissement de la surface piézométrique résulte essentielle- ment de modifications géographiques dues à l'abaissement du niveau des collecteurs des nappes et en particulier de l'encaissement des grands cours d'eau ; 5" Ces modifications géographiques ont été produites par un mou- vement eustatique de la région ; celle-ci s'étant trouvée surélevée, — et par suite le niveau de base abaissé , — les cours d'eau ont passé par une phase de rajeunissement, caractérisée par des phénomènes tor- rentiels et une période active de creusement aboutissant à un encais- sement très accentué ; 6° L'abaissement de la surface piézométrique est déterminé en outre : a) par l'enfoncement de la nappe par suite de corrosion chi- mique élargissant les fissures des calcaires et permettant aux eaux infiltrées de pénétrer plus profondément ; — b) par la réduction, sous l'action de l'érosion superficielle, de la surface occupée par les bassins d'alimentation des nappes ; 'j" Dans le Cingiais où les collecteurs sont enfoncés au-dessous de la surface imperméable, les progrès de l'érosion tendent à substi- tuer au régime hydrographique des régions tabulaires perméables un régime hydrographique de région plissée presque imperméable ; 8° La substitution d'une circulation souterraine à une circulation superficielle dans les régions calcaires et en particulier dans la Cam- pagne de Caen permet de prévoir l'assèchement de plus en plus accentué de ces régions ; cet assèchement créera dans l'avenir de grandes difficultés au point de vue de l'utilisation de l'eau. En prévision de ce danger et en présence aussi du véritable gas- pillage auquel donne lieu l'utilisation des nappes souterraines, nous formulons la proposition suivante : La huitième section du Congrès de l' Association française à Angers émet le vœu que les pouvoirs publics se préoccupent d'assu- rer, par des mesures s'inspirant de la législation minière, la pro- tection et la conservation des nappes aquifères et d'en régler l'uti- lisation. 62^ GÉOLOGIE ET MINÉKALOGIE M. A. BIGOT Professeur de Géologie et Paléontologie à l'Université de Caen SUR L'AGE DES GRÈS A SABALITES DE SAINT-SATURNIN (MAINE-ET-LOIRE) — Séaiicc du ti août En 18G2, Hébert avait classé dans FÉocène, au niveau des sables de Beaucliamp, les grès à Sabalifes Andegaveiisia du Maine et de l'Anjou. Ce classement avait été unanimement admis jusqu'au jour où M. AVelsclî, en 1897, fit de ces grès un équivalent crétacé du Sénonien, par suite de la présence de Bryozoaires, Spongiaires et Huîtres du Sénonien à la base de ces grès. A la suite de la communication de M. AVelsch, j'ai fait connaître que nous avions constaté, M. Œhlert et moi, dans la localité clas- sique de Fyé (Sartlie), la superposition des grès à Sal^alites à des argiles contenant Potamides lapidiiin et de nombreuses Paludes- trines. C'est pour essayer de résoudre cette question que la Section de géologie du Congrès d'Angers l'avait fait figurer au programme de la session et qu'elle a visité la localité de Saint-Saturnin et les collec- tions du Musée paléontologique d'Angers. Notre visite au Musée d'Angers et les explications très précises de nos confrères, MM. Desmazières et Préaubert nous ont tout d'abord permis de reconnaître que les fossiles sénoniens se trouvent exclu- sivement à la base des grès et surtout dans un poudingue à gros élé- ments par lequel débute cette formation. La gangue de grès de ces poudingues réunit des Spongiaires très roulés, des fragments de Trigonies, de petites buîtres roulées, souvent brisées, rai)portées pai- M. AVelsch à \'0. ebiivnea Coquand. Au-dessus de ce lit de poudingue, dont l'épaisseur est de lo à 20 centimètres, viennent des grès à plantes qui renferment encore des liuitres, mais de petite taille, plus ou moins roulées ou brisées. Notre excursion à Saint-Saturnin ne nous a pas permis de voir en place le banc de poudingue, et par suite ses relations avec les A. BIGOT. — AGE DES GRÈS- A SABALITES 62.5 assises crétacées qu'il surmonte, mais l'étude des grands blocs du Musée, de ceux que nous avons trouvés à la surface du sol en descen- dant de Saint-Saturnin à Saint-Sulpice , nous permet d'établir les faits suivants : I" Tous les fossiles, Spongiaires, Huîtres, Trigonies. Rhynchonelle sont fortement roulés et constituent des galets du poudingue ; ■2° Les Spongiaires, les Huîtres, une Rliynclionelle. communiquée à M. Welscli par M. Desmazières, sont silicifîés et proviennent du Sénonien ; ' 3" Les Trigonies sont en Iragments indéterminables, mais leur aspect est celui des fossiles des Grès du Maine et il n'est pas impos- sible qu'elles proviennent du Cénomanien ; 4" Les fevulles qui accompagnent les Huîtres dans les grès au- dessus du ]ioudingue. au lieu de se trouver à plat et entières comme dans les lits sans huîtres, sont enchevêtrées, contournées, déchi- rées ; 5 ' Les Huîtres qui accompagnent les plantes se trouvent dans de petites lentilles de grès plus grossiers; elles sont classées avec des éléments sableux de densité comparable. De ces observations, il faut conclure que le poudingue de base est composé de débris remaniés des couches crétacées, — sénoniennes et peut être cénomaniennes . — ravinées par les eaux dans les- quelles se sont déposés les grès à plantes. Les couches crétacées à fossiles silicifîés sont surtout représentées dans les poudingues, parce que leurs éléments avaient une dureté suffisante pour résister au charriage auquel est dû ce poudingue. L'existence exclusive des huîtres dans les grès à plantes s'explique par le mode de formation du dépôt. A ce moment, la vitesse du courant était devenue insuffi- sante pour charrier des galets comme ceux du poudingue , mais la sédimentation était troublée par des remous capables de plier et déchirer les feuilles des végétaux, charrier des graviers et de j)etites huîtres (*). En résumé, la localité de Saint-Saturnin n'apporte aucun argu- ment en faveur de l'âge sénonien des grès à Sabalites de l'Anjou ; les observations faites par la Section tendent au contraire à démontrer que ces grès sont éocènes, comme dans la Sarthe, et que les fossiles marins qu'ils contiennent sont remaniés du Crétacé. (*) Dès i833, Rcrlraïul Geslin avait signalé la présence cVOsfrea coJuniba dans les sables ferrugineux de XoirmouUers, associés à des grès qui ont fourni à M. Crié la llore des Grès à Sabalites. Ces huîtres sont certainement remaniées des sables crétacés du bassin de Challans. 4o* 626 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE M. COSSMANN Iiijj-éniciir clicf des Services teeliuiriiies du Chemin de fer du Nord à Paris OBSERVATIONS SUR QUELQUES COQUILLES CRËTACIQUES RECUEILLIES EN FRANCE [504:55i.:;(44)] 6'' ARTICLE — Srance du 6 août — Nerinella flexuosa, Sow. (PL III, fi g- . 21) i83i. Nerineo flexuosa, Sow. Geol. Trans. II, sér. III, pi. XXXVIII, lig. 16. i836. — — Bronn. Jahrb., p. 563, pi. VI, lig. 19. 1843. — — Goldf. Petref. III, p. 4;, pi. CLXXVII, fig. 7. i85o. — — d'Orb. Prod. II, 22« et p. 219. i852. — — Zekeli. Gaster. Gosau, p. 38, pi. V, lig. .5. Rapports et dijfërences. — Cette esi)èce de Gosau n'avait pas encore été signalée en France; d'Orbigny a seulement décrit, du Beausset, un autre Nerinella, à tours évidés et lisses, ou simplement marqués de stries d'accroissement (N. siibpiilchella). tandis t[ue l'espèce autrichienne porte trois rangées spirales de granulations, dont Tune coïncide avec 1" arête suturale. A côté de cette forme, il en existe une autre, à Gosau, qui s'en distingue par ses quatre rangées beaucoup plus fines de granulations, avec d'autres cordonnets encore plus lins, intercalés entre les quatre prm- cipaux. Bien que les échantillons de Provence soient, en général, dans un état qui ne lîermelle pas d'y constater facilement d'ornementation spirale, j'ai pu nfassurer, notamment sur le fragment que je fais figurer, que celle ornementation se rapporte plutôt à N. flexuosa qu'à N. granulata Munsl. Quant à N. gracilis Zek., c'est une petite coquille plus courte et pupiforme, à tours étroits et non ornés, qui appartient à un tout autre groupe ({ue notre longue coquille cylindrique. Gisements. — Figuières, près le Cap Méjean, pi. III, fig. 21. ma coll. — Coniacien. Sainl-Cyr, près Toulon. — Sanlonien. Glauconia alternicosta, no\\ sjt. (PI. II , fuj. i) Taille moyenne; forme 1res trapue, subconoïdale au soauuel ; lours à peu près plans, dont la hauteur égale la moitié de la largeur, séparés par des sutures linéaires et peu visibles; ornementation composée de quatre cordons spiraux, déjà inégaux sur les jjremiers tours; fanlérieur est étroit et peu inodulcMix; le second est ])his largt^ et fortement perlé; le COSSMAXN. — OBSERVATIONS SUR QUELQUES COQUILLES CRÉTACIQUES 627 troisième est moins épais, moins saillant et obtusément muni de nodo- sités confluentes; le quatrième, en arrière, au-dessus de la suture, forme un ruban convexe, égal au tiers de la hauteur du tour, et il ne porte que des pustules très ellacées , écartées ; tous ces cordons ou rubans sont séparés par d'étroites rainures qui ne s'élarg-issent que sur le dernier tour, vers la périphérie de la base qui est convexe et munie de trois gros cordons. Dimensions. — Longueur probable : 42 millimètres; diamètre : 21 milli- mètres. Rapports et différences. — Cette esi^èce est évidemment très voisine de G. provincialis et j'ai même hésité à n'en faire qu'une variété; mais j'ai constaté que son ornementation, à cordons alternativement gros et mmces, existe à tout âge, au lieu que, sur les derniers tours de l'autre coquille, il n'y a plus que deux forts cordons suturaux, avec des filets médiaux. En outre, G. altei-nicosta atteint une plus grande taille et paraît plus conique, lîlus évasé. Je n'en connais malhem'cusement que des fragments plus ou moins incomplets, ne montrant aucim des caractères de l'ouverture. On la distingue tle G. Coqnandiana, \m\y le nom])re et l'inégalité de ses cordons. Localité. — Tourris (Var); type (PI. IL fi g. /), ma coll.; peu rare en fragments, recueilli par M. Michalet. — Coniacien. Natica Peuom, nov. sp. (PI. II, fig. /^-5) Taille petite; forme globuleuse, déprimée; spire très courte, peu saillante; cinq ou six tours étroits, convexes, séparés par de i^rofondes sutures que borde une rampe déclive, un peu excavée, avec de nombreux jilis d'accroissement très obliques. Dernier tour formant presque toute la coquille, arrondi, portant encore la trace des plis d'accroissement, moins visibles cependant que sur la rampe suturale; base convexe, très large- ment ombiliquée, avec un angle obtus autom- de l'entonnoir, surtout du côté antérieur où cet angle se transforme en mie sorte de carène émous- sée qui rejoint le contour supériem' de l'ouverture semi-kmaire; labre oblique; bord columellaire épaissi, non réfléchi sm" l'ombilic. Dimensions. — Hauteur et largeur : i5 millimètres au maximum. Rapports et différences. — Quand cette espèce n'a pas conservé son lest, il est très diflicile de la séparer de X. lirata Sow. que j'ai précédem- ment (Congr. de Carthage, 189(3) décrit et qui se trouve aussi dans la même localité; on pourrait croire, en effet, que N. Peroni n'en est qu'une variété un peu écrasée. Mais, en comparant des échantillons mimis de leur test, tels que ceux que je fais figurer comme tjpes de l'espèce, on s'ai)erçoit immédiatement que notre nouvelle coquille a la sj^irc beaucoup moins saillante, que ses tours sont plus enfoncés à la suture, avec des l>lis obliques qui ])araissent faire défaut à l'autre espèce. X. Peroni a plutôt le galbe de X lirata, tignré dans l'Atlas de Zekeli, ou plutôt de la coquille de ce gisement intitulée N. semiglobosa et que Stoliezka déclare n'être qu'une variété comprimée de N. lirata. L'une comme l'autre 628 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE paraissent avoir l'omljilic moins inrundil)ulirorme que X. Peroni qui, à ce j)oint de vue, ressemblerait pres({ue à un Gj-rodes. Locolités. — Sougraigne (Aude); types (PL II, fig. ^-5), ma coll. ; j)lus rare que X lirafa, coll. de Grossouvre. — Santonien iul'érieur. Nerita Fourneli Bayle (PL II, fig. g. et PL III, fuj. i fj) 1849. Xnfica Fourneli, Bayle in Fournel. Ricli. miner. Alg. p. 3(>4. pi. XVII, lig. 8-10. 1862. Otostojna Fourneli, Coquand. Géol. prov. Const, p. 180, {A. IV, fig. 11-12. 1870. Otostonia Fourneli, Nicaise, Catal. anim. foss. Alg-er, p. 68. 1879. Xerita Fourneli, Coquand. Etudes sui)plém., p. 62. i883. — Pérou. Assoc. franc. C.ongr. Rouen, p. 8 (tir. à part). 1889. — Pérou. Desc. moll. crét. Tunisie, p. ^1. Taille moyenne; Ibrme oblongue dans le sens transversal; spire très courte, sans saillie, à suture peu visible. Dernier tour formant toute la coquille, orné, à la partie inférieure et sur la rampe déprimée qui borde la suture , de côtes antécurrentes , saillantes et aplaties , lisses , un peu plus étroites que leurs intervalles, dans lesquels on compte cinc} ou six filets axiaux, minces et fascicules; un peu au-dessous de la moitié de la hau- teur du dei'iiier tour, ces côtes cessent subitement et sont remplacées par un nombre deux fois plus considérable de petites côtes minces et créne- lées, dans les intervalles desquelles se prolongent ceux des filets qui ne se sont pas anastomosés en côtes. Cette ornementation continue sur la base qui est convexe; bord columellaire droit et crénelé (fide Pérou). Dimensions. — Hauteur : i3 millimètres; largeur transversale : 20 mil- limètres. Observations. — Il m'a paru intéressant de donner ime figure de cette coquille, qui n'a été représentée que clans des ouvrages anciens et peu répandus. Le dimorphisme de son ornementation est tout à fait caracté- ristique et ne se retrouve jjas chez X. Archiaci Cocpiand. D'après M. Pérou, qui a particulièrement étudié les formes confondues sous la dénomination Otostonia, le l)ord columellaire de cette coquille a complè- tement la disposition de celui des Xerita; je n'ai pu Aérifier ce caractère sur mes échantillons. Localités. — Les Tamarins := M'zab-el-Messai (Algérie): plésiotype (PL IL fig. g; et PL III, fig'. ig), ma coll.; deux individus recueillis jjar M. Michalet. — Santonien. Neuita Grossouvrei, nov. sp. (PL II , Jig. j-S) Taille petite; forme glolndeuse, peu allongée dans le sens transversal; spire courte, à peine saillante; (piatre tours convexes, séparés par une suture sul)canaliculée. I)(M'nier tour formant presque toute la coquille, orné en arrière de nombreuses côtes olyliiiues el aniécurrcntes, à pcme plus minces (jue leurs interstices, dans lesijuels on aperçoit quekiues filets COSSMANN. — OBSERVATIONS SUR QUELQUES COQUILLES CRÉTACIQUES O29 axiaux et très tins; de i>lace en place, ces côtes se dédonljlent , ou Inen elles s'épaississent vers le quart inférieur de la hauteur, puis, vers la moitié, elles se dédoul)lent toutes et la région antérieure est traversée par des dépressions spirales qui produisent des crénelures allongées axialement sur les costules. Base bombée et plus obtusément crénelée. Vwiensions. — Hauteur : 9 millimètres; largeur transversale : 11 milli- mètres. Rapports et différences. — Il est incontestable que cette coquille ressemble beaucoup à X Fonrneli et c'est également l'avis de noli-e savant confrère, M. Peron, qui l'a eue entre les mains avant moi; toute- fois, comme on peut s'en rendre compte en examinant la ligure de l'espèce algérienne que j"ai précisément fait Jigurer à cet effet, X Grossouvrei est moins allongé transversalement ; sa spire est im peu plus saillante, inoins rapidement déroulée, presque sans dépression aux abords de la suture qui est simjïlemcnt canaliculée. Quant à rornementation, elle est moins grossière en arrière : les côtes, moitié moins larges et deux fois plus nombreuses, se dédoublent bientôt et celles qui leur succèdent, sur la région antérieure du dernier tour, sont découpées par des dépressions spirales moins rapprochées, de sorte que les crénelm-es sont axialement allongées, au lieu d'être suljgranuleuses. On peut aussi rapprocher cette espèce de X. rugosa Hœn., du moins telle que Zekeli l'a interprété dans sa Monograpliie de Gosau; toutefois la coquille tyrolieime a des rugosités bien plus fines sur la région antérieure. Localité. — Alîbaye de Fontfroide (Aude); unique (PI. II, fig. j-8), coll. de Grossouvre. — Santonien inférieur. Nerita cyriensis, nov. sp. (PI. II, fig. 6; et PI. III. fig. 18) Taille petite; forme globuleuse; spire sans saillie, formant un faible Ijombement au centre d'mie cuvette circulaire constituée par la ranqje aplatie ou subexcavée qui borde la suture. Dernier tour formant toute la coquille, subanguleux à la i^ériphérie de la rampe suturale, puis légère- ment vers le tiers inférieur, et enfin obtusément à la i)ériphérie de la base. Ornementation composée : sur la rampe, de plis d'accroissement tins et antécurrents ; sm- la région inférieure et jusqu'à l'angle situé au tiers de la hauteur, de rangées axiales et obliques de granulations; sur l'angle, ces granulations sont plus grosses et gemmées et, au-dessus, elles paraissent former plutôt des rangées spirales qui se prolongent concentri- (luement sur la base. Dimensions. — Hautem- : ; millimètres ; largeur transversale : 8 milli- mètres. Rapports et différences. — Encore plus globuleuse que X Grossouvrei, elle s'en distingue par sa spire aplatie et par ses costules crénelées même en arrière, avec des rangées spirales de granulations en avant. Si on la compare à X rugosa, on trouve que son ornementation est moins fine et que sa rampe, aplatie en arrière, l'en différencie complètement. Ce dernier caractère, bien conforme au galbe de tout un groupe de Nerita, ne permet 63o GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE j)as de rapprocher notre espèce de certains Xeritopsis granuleux, tels que X allaudiensis par exemple, précédemment décrit par moi dans une communication faite au Congrès de Carthage; aussi, bien (jue je n'en connaisse i>as l'ouverture, je crois pouvoir affirmer que c'est bien un Nerita et que ce n'est pas un Xeritopsis à ])ord columellaire échancré. Localité. — Saint-Cyr O'ar): \\nu[\\v(PL IL fi g. G; et PL [II L fi g: i8), ma coll.. échantillon recueilli })ar M. Michalet. — Santonien, près de la couche, à Ostrea proboscidea, dans im gisement bien au-dessus de celui qui a fourni les espèces coniaciennes. EucYCLus Lapeyrousei d'Arch. (PL II , fig. 10-12) 1854. Trochus Lapejroiisei, d'Arch., loc. cit., p. 219, pi. III, fig. 10. Taille un peu au-dessous de la moyenne; forme conique, brochoïde; spire peu allongée, non étagée {fide d'Arch.). huit tours plans, subimbri- cpiés en avant, dont la hautem" égale la moitié de la largeur, séparés par des sutures largement canaliculées entre deux rampes déclives; bords des deux rami^es formant chacun une carène subépîneuse, l'antérieure plus saillante, avec des tubulures plus écartées que celles de l'inférieure; entre les deux, sur la région plane, trois funicules spiraux, intermédiaires, gra- nuleux à l'mtersection de plis axiaux et obliques; sur la rampe anté- rieure, deux rangées inégales de Unes granulations; sur la rampe posté- rieure se prolongent les plis axiaux et antécurrents. Dernier tour grand, à base convexe au-dessus de la carène tubulée et périphérique, creusée au centre où elle est imperforée, ornée partout de cordons concentriques très déviés et finement granuleux. Ouverture subcù^culaire , dans un plan oblique; columelle un peu cailleuse. Dimensions. — Hauteur : 18 millimètres ; cUamètre : 14 millimètres. Observations. — D'Archiac a domié deux figures dissemblables de cette coc£uille, qui se rencontre dans les gisements de l'Aude, en compagnie d'un autre Eucychis encore plus abondant et qu'il faut nécessairement séparer d'elle; pour fixer à lacpielle des deux formes doit être api)liqué le nom Lapeyrousei, j'ai donc dû m'en rapporter au texte, attendu que ses figures avaient évidemment été restaurées avec des fragments appar- tenant aux deux espèces. Il est donc entendu que E. Lapeyrousei est la coquille à tours plans, avec des fmiicules serrés, et à base concentrique- ment sillonnée. L'attril^ution de cette coquille avi genre Eucyclus n'est d'ailleurs jjas douteuse et établit une transition entre les formes juras- siques et celles de l'Eocène. Localité. — Sougraigne (Aude); néot^pes {PL IL fig. 10-12), ma coll. ; peu rare, recueilli par M. de Grossouvre. — Santonien inférieur. Eucyclus extractus, ?iov. sp. (PL II, fig. i5-i-) Taille un peu au-dessous de la moyenne; forme troclioturbinée; spire peu allongée, subétagée; sept ou huit tours biangiileux, excavés entre les deux angles et de part et d'autre de la suture, la rami)e inférieure plus COSSMANX. — OBSERVATIONS SUR QUELQUES COQUILLES CRÉTACIQUES 63l large et plus déclive que raiilérieure; chacun des deux angles est muni d'une garniture de crénelures tuh.ulées et, entre les deux, on n'aperçoit pas de funicule intermédiaire, mais seulement une troisième rangée de crénelures sur la rampe antérieure, en avant de la carène. Dernier lom* égal à la moitié de la hauteur totale, portant une rangée secondaire entre les deux rangs principaux de tul)ulures, arrondi à la base, qui est élevée et convexe . imperforée et déprimée au centre , ornée de plis rayoïmants que croisent trois cordomiets grossièrement granulés. Ouverture circu- laire, oblifpie. Dimejisions. — Hauteur : i8 millimètres; diamètre : i4 millimètres. Rajjpot'ts et différences. — Cette espèce, très commune dans l'Aude, est généralement confondue avec la précédente , quoiqu'elle s'en distingue aisément, si on l'examme avec un peu d'attention. D'abord, elle a mie forme plus turbinée, moins trochoïde; ensuite ses tours ne sont pas ornés de la même manière : malgré l'état défectueux de la plupart des échan- tillons recueillis, on remarque que les tours ne sont pas plans et ornés de quatre cordons granuleux; les carènes sont plus tubulées et leur intervalle parait dépoiu'vu d'ornementation spii'ale ou axiale; cependant il doit y avoir un funicule intermétliau^e, car on le retrouve assez saillant sur le dernier tour. Enlin c'est surtout par l'aspect de la base qu'on peut immédiatement séparer les deux espèces : au lieu des filets simples et concentri(|ues (VE. Laperoiisei , celle-ci porte des plis rayonnants, curvi- lignes, et queUpies gros cordons granuleux et écartés, qui laissent mie trace bien différente, même quand le test est à demi décortiqué; la base, quoique imperforée au centre , est moins déprimée que dans l'espèce de d'Archiac. Localité. — Sougraigne (Aude); t^-pes (PI. II, fig. i5-iy), ma coll.; commun, recueilli par M. de GrossouA're. — Santonien uiférieur. EUGYCLUS TABULATUS, IlOV. Sp. (PI. III , ficj. 1-2) Taille assez grande; forme turbinée, trapue; spire peu allongée, très étagée; six ou sept tours tx'ès anguleux, dont la hauteur égale les deux cmquièmes de la largeur, séparés par des sutures très enfoncées, ornés : sur la région plane antérieure, de trois cordons spiraux égaux avec des tubulures courtes et serrées; sur la rampe déclive mférieure, de deux rangées écartées d'aspérités peu saillantes, plus espacées, semblables à des tubulures qu'on aurait rasées à leur base. Dernier tour mi peu supé- rieui" à la moitié de la hauteur totale, portant mi ciuatrième cordon crénelé à la périjjhéiie arrondie de la base , qiù est ornée de cinq cordomiets linement granuleux sur la région convexe, tandis que le centre, plus «léprimé , paraît imperforé et lisse. Ouverture subcirculaire , à péristome obliciue et épais. Dimensions. — Hauteur : 3i millimètres; diamètre : 29 millimètres. Rapports et différences. — Bien que cette belle coquille ait de nombreuses aflbiités avec les deux autres Encyclns recueilUs dans le même gisement, elle doit évidemment en être séparée, non seulement à cause de sa taille 632 GÉOLOGIE ET MIXÉUALOGIE plus jrraiulo et de ses tours francheuient étages par uue rampe postérieure sans rampe antérieure, mais surtout à cause de son ornementation, qui comporte trois cordons égaux, y compris celui (|ui couromie l'angle de la rampe; sa l>ase est simplement ornée de cordons spiraux, dépourvue des plis qui caractérisent E. extroctns; mais ces cordons sont moins nom- breux et ]>lus saillants que les lîlets qui ornent la base d'^". Lapeyrousei. On ne peut donc réellement pas admettre cpie cette espèce soit une variété plus adulte de l'une des deux autres et elle mérite bien d'en être distin- guée. Si on la compare à Delp/iiniila tricariuata Rœmer, de la Craie de TAllenuigne du Nord, récemment ligure par M. A. Wollemann dans les « Al)liandl. geol. Laudesanstalt », on remarque que ce dernier est plus étage, avec de larges ranij^es plates au-dessus des sutures. Localité. — Sougraigne; type (PI. III, fi g. 1-2), ma coll.; im autre individu, coll. de Grossouvre. — Santonien inférieur. Tuocuus (Tecfus) sougraigxe.xsis, iwv. sp. (PI. III, fig. ^-5) Taille mijyenne; forme régulière, àgalljeunpeu extraconique; spire un peu allongée, pointue au sommet; environ douze tours légèrement exca- vés, dont la iiauleur n'égale pas tout à fait le quart de la largeur, séparés par des sutures linéaires, au-dessous desquelles est un renllemenl obtus et mmii de pustules écartées, très obsolètes; sm* les premiers tours, on aper- çoit, en outre, dans la région située au-dessous de ce renflement antérieur, ase qui est jjlane, imi)erforée, prescpie lisse, simplement ornée vers le centre de quelques sillons concentriques. Ouverture quadran- gulaire. avec un gros tubercule à la l)ase de la cohuuelle. Dimensions. — Hauteur : iC) milHmètres; diamètre : 14 millimètres 1/2. Rapports et différences. — Cette intéressante coquille, qui ai)partient manifestement au Sous-Genre Tectiis , rappelle un i)eu , j^ar son gall)e et par sa cai-ène tul^erculeuse en avant, Trorhus Giierangeri. du Cénomanien du Mans; toutefois elle est moins élancée et son ornementation ne persiste pas comme celle de l'esjjèce cénomanienne. On peut encore la rapprocher de E. snbstriatulus d'Orb., du Néocomien de l'Yonne et de l'Aube, quoiqu'elle s'en distingue par sa carène ])lus obtuse et tuberculeuse, par ses tours moins ornés et par son gall^e extraconique. La ligure de la Paléontologie française n'indique pas de tubercule columellaire, mais M. Peron en mentionne l'existence sur les échantillons de l'Yonne. Localité. — Sougraigne (Aude); type {PI. III, Jl g. 4-5)- i>i« coll.; autre individu du Moulùi-TitTau, coll. de Grossouvre. — Santonien inférieur. TuocHus {Tectiis) Michaleïi, ihw. s/>. (PI. III . Jig. 3) Taille moyenne; foime conique: spire un peu allongée: sept ou liuit toiu-s convexes en avant, excavés en arrière, dojU la hauteur égale à peine le tiers de la largeur, séi>arés par des sutures linéaires, ornés de filets spi- COSSMAXN. — OBSERVATIONS SUR QUELQUES COQUILLES GRÉTAGIQUES 633 raux, peu apparents, et de plis d'accroissement oljliques, fascicules vers la suture au-dessus de laquelle se forme un léger bourrelet très obtusément crénelé. Dernier tour inférieur à la moitié de la liauleur totale, arrondi à la périphérie de la l)ase, qui est excavée et imperforée au centre, avec quelques lilets concentriques, minces et saillants. Ouverture su])quadran- gulaire, peu élevée, à lalu-e oblique; columelle calleuse, droite, paraissant terminée en avant jiar lui tul)ercule assez gros. Dimensions. — Hauteur : -i- millimètres; diamètre : 22 millimètres.. Rapports et dijférences. — On ne peut guère comparer cette espèce à la précédente, dont elle se dislingue par ses tours concavo-convexes, par sa base non carénée et jiar sou orneuientation. Bien que la jtartie antérieure de l'ouverture soit un peu mutilée et que fexistence d'un tubercule colu- mellaire n'ait pu être exactement constatée sur notre miique échantillon, il paraît l)ien probable, jjar l'allure de la partie inférieure de la colmnelle, que c'est bien une coquille du Sous-Genre Tectiis, de même que T. Son- graig-jiensis; les Troehithr sont d'ailleurs rares dans les couches supé- rieures du système crélacique, aussi bien sur le versant méditerranéen que dans la région nord de l'Europe. * Localité. — Figuières (Bouches-du-Rliône); uuique (7V. III, ft g. 5), ma coll. — Goniacien. Calliostoma MASsiLiEivsE, nov. s]>. (PI. II, fig. i3-i4) Taille petite; forme parfaitement conique, évasée; spire assez compte, continue; environ six tours plans, dont la hauteur égale le quart de la largeur, séparés par des sutures linéaires, ornés de quatre cordomiets spiraux, assez serrés, gramileux, l'antérieur un peu plus saillant et plus écarté de la suture que les autres ne le sont entre eux. Dernier tour à peu près égal à la moitié de la hauteur totale , caréné à la périphérie de la base, qui est lisse, excavée, imperforée au centre. Ouvertvire petite, dépriuiée, à péristome mince, un peu découvert à la base; labre très oblique; bord columellaire très court, arqué, dépourvu de tubercule antérieur. Dimensions. — Hauteur : 9 millimètres; diamètre : 8 milUmètres. Rapports et différences. — Quoique cette espèce ail complètement l'aspect classique des Calliostoma, je ne vois pas, parmi les Trochus décrits dans la Paléontologie française des terrains crétacés, de forme dont on puisse la rapprocher : T. diffîcilis d'Orb., de Royan, est une grande espèce dont rorneuientation paraît la même, mais dont les autres caractères sont imparfaitement comius; T. haimeanns d'Orl)., siuiplement signalé dans le Prodrouie et interi)rété dans l'excellente Monographie du JSéocomien de l'Yonne par M. Pérou, ressemble aussi à notre esi^èce, quoiqu'il ait une plus grande taille; mais sa base est élégamment treillis- sée et légèrement convexe ; entîn, M. Pérou signale l'existence, sur le l)ord columellaire, d'une dent biiide qui place évidemment l'espèce de d'Orbigny dans un groupe de Trochidcr absolument ditïérent du Genre Calliostoma. Dans la descri])tion des ÎNIollusques crétaciques de Tmiisie, il y a aussi un 634 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE T. cherbensis Thoni. et Peron, qui a le même gall)e et la base lisse, jn'esque creuse, mais avec beaucoup plus de stries spirales sur chaque tour. Eufm, T. jAicato-s^ranuIosus, de Gosau, qui a aiissi quatre cordons granuleux, a la base plan-convexe et ombiliquée ; en outre, le cordon anté- rieur est le plus petit. Localité. — Cap Méjean, près de Marseille; unique (P/. ll,fig. i3-i^), ma coll. ; recueilli par M. Michalet. — Coniacien (= Provencien, Coq.). MICHALETIA, nov. gen. Taille moyenne ; galbe rotelliforme ; spire un peu conique, ou solarioïde, généralement ornée; base lisse, imi^erforée, non calleuse; ouverture assez grande, sulîcirculaire à l'intérieur, très oblique et découverte; labre mince, Hsse à l'intériem"; coliunelle oblique, encroûtée sur le bord, dont répaississement se réfléchit avant de s'attacher sur la base. T^ije : M. semigranulata, nov. sp. Observation^^. — Il m'a été inipossiljle de classer cette espèce dans aucun des genres connus de Trochidœ; par ses caractères, notre nouveau G. Michaletia vient se placer entre Gibbula et Umbonium : toutefois sa base est dépom'vue de la callosité qui caractérise le second de ces Genres et du disque ombUiqué qui existe chez la plujiart des formes de Gibbula; le G. vivant Liçona, qui a également mi gaU>e semlilal)le, i)Ossède im ombilic et est lisse comme Umbonium et comme Ethalia. D'ailleurs, il n'existe pas cV Umbonium, ni de forme voisine, dans TÉocène; il est donc probable que la plupart des Rotelles secondaires ou paléozoïques appar- tiemient à des Genres bien distincts de la forme vivante. Déjà, l'espèce triasique figurée dans la Monographie de Saint-Cassian, par M. KittI {U. heliçoides Munst.), a une base excavée qui ne ressemble guère au bombement de la callosité des vrais Umbonium; toutefois, je ne pourrais aflirmer que, chez l'espèce triasique, le bord columellaire , qui paraît cependant calleux sur la figure très exacte de l'ouvrage de M. Kittl, pré- sente bien cet épaississement caractéristique, en foiMne de bouton, de notre nouveau Genre Michaletia qui, à ce i)oint de vue, est tout à fait comparable à ce qu'on observe dans Trochotoma, chez lesquels on remarque luie sailhe tuberculeuse au jDomt d'attache du bord columellaire; seulement les autres caractères ne sont pas comparables : il n'3- a aucime trace de fente chez MicJialetia, qui a une véritable columelle lîleme, au lieu de l'emboîtement successif des tom-s de Trochotoma. Michaletia semigranulata, /iop. sp. (PL III, Jig. G, j et iS) Taille moyemie; forme déprimée, solarioïde ou rotelloïde; spire courte, un peu extra-conique ou proboscidiforme au sonnnet. conoïdale et sur- baissée sur les derniers tours; chiq ou six tours, iornuint il'abord une saillie conique , puis légèrement convexes et plus larges , ornés de quatre ou cinq cordons spiraux et granuleux, séparés par des sutures peu dis- tinctes. Dernier tour égal aux deux tiers de la hauteur totale, muni de COSSMANN. — OBSERVATIONS SUR QUELQUES COQUILLES CRÉïACIQUES 635 six rangées spirales de fines granulations, jusqu'à la périphérie ai"ronclie de la base qui est lisse, excavée au centre et iniperforée. Ouvertvu-e, comme dans la diagnose du Genre, à contour basai im peu convexe, sinueux et excavé dans la région où il se raccorde à celui du labre qui est concave et assez oblique vers la suture. DimeJisions. — Hauteur : lo millimètres ; diamètre : i3 millimètres. Rapports ft différencen. — Ainsi que je l'ai indiqué ci-dessus, je ne vois gxière de formes crétaciques, déjà décrites, dont on puisse rapprocher l'espèce type de notre nouveau Genre; cependant, il en est mie que j'ai déjà signalée et figurée en 1896 (Congrès de Carthage) et dont la compa- raison doime lieu à quekiues hésitations : c'est DeljihiniiJa (?) gvanulata Zek. (Joe. cit., p. 22, PI. II, fi g. 3o-3i), recueilli en France à peu près au même niveau (jue nos Michaletia, c'est-à-dire dans le Coniacien d'Allauch; elle présente aussi une base imperforée, excavée au centre où la columelle prend son point d'attache; mais, outre que cette base n'est pas lisse, je ne distingue pas dans la disposition du bord columellaire cette torsion épaissie et réfléchie qui caractérise Michaletia; en outre, la spire est plus turbinée, moins solarioïde et siu'tout moins dimorphe sur les premiers tours. En définitive , non seulement il y a des caractères spécificpes bien distmcts, mais je ne crois même pas que ce soit le même Genre. Localités. — Figuières (Bouches-du-Rhône), type (PL III, fig. 6, j et iS), ma coll. ; Saint-Cyr (Var), plésiotypes plus déformés; écliantillons recueillis par M. Michalet. — Coniacien inférieur (rr: Mornasien, Coq.). Trochus, sp. siiiistj'a {PI. III, Jig. 8) Observations. — Je crois utile et intéressant de signaler et de fake figm'er cette coquille, l>ien qu'elle ne soit pas dans un état de conserva- tion qui me permette de lui domier un nom spécifique, ni d'affirmer qu'elle ai)[)artient au Sous-Genre Tectus ou au Gem-e Calliostoma. L'échan- tillon est senestre, fait assez rare chez les Trochidœ; mais, comme il est unicpie, je ne sais si c'est un caractère si^écifique ou mi fait mdividuel. Les tours, mi peu imbriqués en avant, portent quatre cordons spiraux, chargés de granulations, assez fines sur les trois cordons infériem's, plus espacées et plus grosses sur le cordon antérieur qui est plus saillant et cjiu^ coïncide avec l'angle imbriqué. La base, subanguleuse à la périphérie, est ornée d'mie douzaine de cordons concentriques, lisses, plus écartés à mesure qu'ils approchent du centre qui est imperforé. Dimensions. — Largeur probable : 28 miUiniètres; diamètre : 20 milli- mètres. Localité. — Figuières (Bouches-du-Rhône); miique (PI. III. fig. 8), ma coll. ; recueilli par M. Michalet. — Coniacien inférieur. COLLONIA (?) PILULA, CoSSm. (PI. III, fig. Q-IO) 1898. Assoc. franc.. Congrès de Nantes, p. 7, pi. II, fig. 22-24. Observations. — L'unique échantillon du gisement de Saiiit-G}T, que j'ai 630 GF.OLOOIE ET MINÉRALOGIE précédemment (igm-é, était un peu usé, de sorte qu'on n'apercevait ])as très nettement l'ornementation spirale. De nouveaux exemplaires de cette petite espèce, recueillis i)ar M. Michalet à Fig-uières. dans un gisement contemporain, me permettent de comi)léter la description : les lovu's sont convexes en avant, déprimés ou excavés sm* la moitié inlerieure, jusqu'aux sutures qui sont linéaires et faiblement bordées en dessus. Sur cette rampe excavée, on distingue cinq sillons spiraux, peu profonds, assez rappro- chés, tandis cpie la région antérieure paraît lisse, de même que la base; au centre de celle-ci, est une minuscule perforation, sans aucune trace de funicule ; enfin le bord columellaire forme une oreillette dilatée sur la face interne de laquelle on dislingue un sillon très obsolète. Ces deux derniers caractères me font penser que cette coquille n'est i)as un CoUonia et que ce sei'ait plutôt le précurseur des Leptothyra, Section Otaulax. Localité. — Figuières(Bouches-du-Rhône); plésiotvpes (P/. IlIJlg. g-io), ma coll.; recueillis par M. INIichalet. — Coniacien inférieur {= Morna- sien, Coq.). Chilodonta Marçaisi, d'Orb. (7^/. III, fig. i4-i6) 1842. Tvochiis Marçaisi. d'Orli. Pal. fr. terr. crét. II. p. igo.jd. CLXXXVI his, lig- 19- i85o. Trochns Marçaisi, d'Orb. Prod. II, 20 et. p. i5i, n° 10;. i8(j--. _ _ Guéranger, Alb. pal. Sartlie, p. 16, pi. X. lig. 16. Taille au-dessous de la moyemie; forme lurbinée, peu ventrue; spire im peu allongée , à galbe conoïdal ; environ six tours convexes , dont la liauteur atteint presque la moitié de la largeur, séparés par des sutures canaliculées, treillissés par cinq côtes spirales plus écartées en avant qu'en arrière et par des costules ol^liques , à l'intersection desquelles il y a des granulations régulières. Dernier tour à peu près égal aux deux tiers de la hauteur totale, obtusément anguleux à la périphérie de la l^ase à cause de la saillie plus grande des nodosités de la cliaînette périplié- rique ; base lui peu convexe , imperforée , ornée de sept cordons concen- triques, finement granuleux. Ouverture à peu près circulaire, très oblique, avec six crénelm-es internes, allongées, également espacées sur les bords. Dimensions. — Hauteur : 7 millimètres 1/2; diamètre : 6 millimètres. Rapports et différences. — Cette joUe coquille, — qui n'est é\ idemment ni un Trochiis, ni un Turbo, et cjui a été imparfaitement restam-ée dans la Paléont. française, puis figurée avec l'ouverture dans l'ombre par Gué- ranger dans son Album paléontologique du Déparlement de la Sarthe, — a complètement le gall)e, l'ornementation et l'ouverture tul^erculeuse du Genre Chilodonta Klallon, dont le type est C. clathrata, du Jurassique supérieur. Toutefois , la coquille cénomanienne ne porte aucime trace de varices, ni sur la surface des tours, ni à l'exlérieiu* du labre: en outre, les dents internes (hi |»('iistome ne paraissent pas aussi tuberculeuses que celles du type kiméridgien, iiguré par M. de Loriol dans son Etude sur A'allin. Ces différences légères ne paraissent pas sulTisantes pour exclure Trochns Marçaisi du Genre jusqu'à présent confiné dans le Kiméridgien. COSSMANN. — OBSERVATIONS SUR QUELQUES COQUILLES CRÉTACIQUES 687 Localités. — Gazonfier (Sarlhe) ; néotype {PL III, fig. i^-i6), ma coll. — Cénomanien. DeNTALIUM SOUGRAIGNENSE JJOK'. Sp. {PI. III, fig. I2-l3) Taille aii-dessous de la moyenne ; tube peu arqué , orné d'environ 16 côtes longitudinales assez saillantes vers le sommet et dans les inter- valles desquelles apparaissent ensuite d'autres costules plus fines, qui Unissent par égaler les premières, de sorte ([ue la partie antérieure de la coquille porte une trentaine de petites côtes égales. Dimensions. — Longueur probable : 2.5 millimètres; diamètre : 4 niilli- mètres. Bapports et différences. — Aucun des échantillons ne montre le sommet intact; il m'est impossible de vérifier s'il existe une lissure et par conséquent de savoir si celte espèce est un Dentaliuni s. s. ou im Entalis. En tous cas, elle possède beaucoup moins de côtes cpie D. octevillense, cp.ie j'ai précédemment décrit du Cénomanien (V. Assoc. franc.. Congrès de Nantes, 1898). D. rhotomagense d'Orb., est orné de côtes plus régulière- ment alternées en avant, et les principales sont plus saillantes. I). nudum Zek., du luronien supérieur de Gosau, est inditpié comme lisse et ne peut par suite être rapproché de notre cocpiille. Parmi les Dentales d'Aix- la-Cliai»elle, seul D. alternans MuU. pourrait être comparé à D. Soiigvai- gnense: toutefois, ses côtes paraissent plus saillantes et plus régulièrement alternées. Dans l'Emscherien supérieur de Maëstricht, M. Kaunhowen décrit deux espèces, dont l'une n'a cjue six pans et dont l'autre {D. angu- lare) ne porte cpie huit à dix côtes, de sorte qu'il n'y a aucune confusion possible avec D. sougraignense. Localité. — Sougraigne (Aude); types {PI. III, fig. i2-i3), ma coll.; peu rare, recueilli par M. de Grossouvre. — Santonien inférieur. An Pteropoda vel cephalopoda (?) {PI. III, Jig. i g) Ohseri'ations. — Je crois intéressant de faire figurer un corps singulier trouvé dans la Craie blanche par M. Thiot, aux environs de Beauvais, et qui, par la minceur du test, paraît se rapprocher des Ptéropodes; sa forme en hotte mucronée ressemble d'ailleurs à celle des Vaghielles; mais , au lieu d'un galbe comprimé , il a une périphérie à peu près circu- laire; en outre, la pointe mucronée paraît épaisse comme le rostre d'un Céphalopode, et il semble que la surface en est longituflinalemcnt striée. Le classement de ce corps est trop incertain pour qu'on puisse se hasarder à y mettre un nom spéciti(jue, et je suis d'avis qu'il faut attendre d'autres matériaux avant de se prononcer définitivement. Localité. —Notre-Dame du ïhil, près Beauvais, unique {PI. III, Jig- 19)^ recueilli par M. Thiot. — Emschérien supérieur. 638 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE LÉGENDE DES PLANCHES Planche II Fig. I. — GlAUCOMA ALTERXICOSTA. Cossm., grandeur naturelle . Tourris Coniac. — 2-3. — Campanile Grossouvrei, Cossm., grandeur iiatui*elle . Sougraigne . . Sant. — 4-5. — Natica Peroni, Cossm.. grossi 8 fois — — — 6. — Xerita cyriexsis, Cossm., grossi 3 fois Saint-C^T. ... — — j-8. — Nerita grossouvrei. Cossm., grossi 2 fois Foiilfroide ... — — 9. — NERiTAFouRNELi(Ba vie), grossi I fois 1/2 Les Tamarins . — — 10-12. — EucvcLus Lapetrousei (d'Arch.), grossi i fois 1/2 . . Sougraigne . . — — i3-i4. — Calliostoma massiliense Cossm. , grossi 2 fois .... Cap INIéjean . . Coniac. — 15-17. — Elcyclls extractus, Cossm., grandeur naturelle Sougraigne . . Sant. Planche III Fig. 1-2. — EUCYCLLS TABULATUS, CoSSUl., grossi 2 fois Sougraigne . . Sant. — 3. — Trochus (Tectus) michaleti, Cossm., grandeur naturelle . Figuières. . . . Coniac. — 4.5. _ Trochus (7'fc^«.s)souGR aignen- sis, Cossm., grandeur natu- relle Sougraigne . . Sant. 6-" et 17. — M1CHALETIA SEMIGRANULATA, Cossm., grossi I fois 1/2. . Figuières. . . . Coniac. _ 8. — Trochus (sp. sinistra), gran- deur naturelle — .... — — 9-10. — CoLLONiA PiLULA, Cossuianu. grossi 8 fois — .... — — II — NEuiTAFouRNELi(Bayle), grossi I fois 1/2 Les Tamarins . Sant. 12-1 3. — Dent ALI UM sougraignense, Cossm. , grossi 2 fois .... Sougraigne . . Sant. 14-16. — Chilodonta marçaisi (d'Orl)).. grossi 2 fois "... Gazonlier . . . Céiioni. G.-F. DOLLFUS i G. RAMOXD. — ÉTUDES GÉOLOGIQUES D.VXS PARIS 63q Fig. i8. — Nekita cyriexsis , Cossm. . grossi 8 fois Saiiit-C%T. . . . Satit. — 19. — An Pteropoda, vel Cephalo- poDA?. grossi I fois 12... X.-D. «lu Tliil. . Eiiisch . — 20. — Mesorhttis crexata. Cossm., grossi 2 fois Saint-C%T. . . , Sant. — 21. — Nerixella fuexuosa (Sow.). grandeur naturelle Figuières. . . . Coniac. G.-F. DOLLFUS Collaborateur principal à la Carte géologique de France ET G. RAMOXD Assistant de Géologie au Muséum d'histoire naturelle, à Paris ETUDES GÉOLOGIQUES DANS PARIS ET SA BANLIEUE IV LE CHEMIN DE FER DE PARIS A ORLEANS AUX ABORDS DE SAINT-MICHEL- MONTLKERY SEINE-ET-OISE) — Séance du 6 août — Tracé Xotre attention a été appelée sur liuléi et que présentait . au point de vue stratigraphitpie et tectonique (*). l'élargissement à quatre voies de la ligne de Paris à Orléans, entre Paris et Brétigny (embranchement), principalement dans la partie du tracé qui suit la Vallée de l'Orge. Le Chemin de fer d'Orléans, en quittant les bords de la Seine, à JuvisA-, s'engage dans celte vallée secondaire . en passant au-dessous de la Route de Fontainebleau, au Pont des Belles-Fontaines: puis il traverse l'Or^^e. croise normalement les Acpieducs des Eaux de la "N'anne , du Loing et du Lunaiu (III-XIX). laisse la ligne de a Grande-Ceinture » à droite, au-delà de Savigny--iu-Orge. puis franchit l'Yvette (aflîuent de l'Orge) et atteint Epmay. dont la station est située à 23 kil., .55 de Paris. Au delà, dexixième traversée de l'Orge sur un Aiaduc élevé, puis « tranchée des Franchises », (*) Les chLflres romains, gras (XIII) renvoient à VIndex ci-après. 64o r.EOLOGII-: ET MIXEUALOOIE d'une dizaine de mètres de profondeiu' niaxima. suivie d'tin remblai, lon- geant le Domaine de Vauclnse (Asile d'Aliénés) — (VII-XXII). La Station du a Perray-A'ancluse », ({ui dessert eet important Etablisse- ment, est à l'origine d'ime nouvelle tranchée, de plus d'un kilomètre de longueur, sur une profondeur de 8 mètres environ. La Station de « Saint-Michel », qui dessert Montlhéry, est à niveau du soL mais des chemins d'accès nous ont foiu-ni ■* -■, >• cr r. Ci c •r. * b ^ — 1. '^ H -; X G.-F. DOLLFUS & G. RAMOND. — ÉTUDES GÉOLOGIQUES DANS PARIS 643 bien en évidence ce que fait la Meulière et son argile (quel que soit leur âge géologique) ne sont qvinn faciès d'altération ou de transfor- mation du Travertin i^rimitivement déposé (on sait que, d'après la nouvelle classification , l'Horizon « de Brie » appartient au Sannoi- siEN supérieur). — (XVIII). COUPE A Près du Pont Métallique, au Kil. 3 0,0 Terrain . contemporain ; J?'^'^ végétale. I"20. <0 a U o Sables jaunâtres (Sables supérieurs ou « de Fontainebleau ») 2 à 3" Arg-ile brime, résiduelle (de précipitation chimique) o'"o5 Argiles jaunâtres ou brunâtres, emjjà- tant des Blocs de Meulières-Caillasses, l^lus ou moins disloqués Calcaire marneux, ])Ianc, de « Brie ». — farineux i'»3o visilîle sur i '". Alt. du Fond du Fossé 74 /•m La Glaise veiHe apparaît au fond des fossés de la môme tranchée, au kil. 29,9, et se poursuit vers le N. avec des ondulations remar- quables, plongeant au-dessous de la voie et reparaissant un peu plus loin (Voir Fig. n°= 12 et 3). 64Î GEOLOGIE ET MINERALOGIE « tn T3 OJ . * tn -■' , ï- pi-3 1:— - — X - fao =< V ^ — •u « S.£^ -y) e i: -To 4; .— T3 - _ H ►J Çp:S P3 f^^//-^^^ G.-F. DOLLFUS & G. RAMOXD. — ÉTUDES GÉOLOGIQUES DANS PARIS 645 -^ M _J i) »5 v^ «j w2 ^ ^ i> •^ ^ ■r. B ') o -1 u Z T3 v: rt ~ O ■> T. O es 3 Arg-ile vert-pomme o'^So Cordon de -Nodules marneux, blan- châtres o'"ioào'"3o Glaises vertes (proprement dites) compactes (Rognons strontiani- fères) visibles sur 3" Alt. du Fond du Fossé = ^3" On voit souvent les Blocs de Meulières reposer sur le Calcaire de Brie, solide, comme si ce calcaire avait été soustrait par leur présence au-dessus de lui aux j^hénomènes de décalcification progressive. Dans la Marne tendre, on voyait des nodules plus ou moins sili- ceux, constituant, en quelque sorte, un tenue de passage entre le Calcaire de « Brie » et la Meulière. G.-F. DOLLFUS & G. RAMOXD. — ÉTUDES GÉOLOGIQUES DANS PARIS 64^ A la Station de Saint-Michel (kil. 28.o5). nous avons relevé, dans le passage au-dessous de la voie, la coupe suivante : STATION 01 S '^MICHEL ..ef»^^'^^^^'- Meuherei df ^ ^ '■ '- "^ Mêmes blûnches^S^,,^^ a.'Z" a-Ti''~A. /ï>i^t>-s»"S PARIS 6^9 »:. «= •S^Si Tv^ -7^^ = >-*3 G5o GEOLOGIE ET MINERALOGIE verte » montre à son sommet le cordon de calcaires marneux , ])lan- chàtres qui est assez constant dans la région étudiée. Au-dessous, les Marnes feuilletées, à Cyrena coHce.Yrt,* puis des Marnes substratifiées , dcndritiques , sans fossiles ; les Marnes^ blanches {dites « de Pantin » ou « de Romainville ») débutent par une zone ligniteuse, de couleur noirâtre ou violacée, et se continuent par des Marnes blanchâtres d'aspect normal, ou parfois un peu verdàtres. L'ensemble des « Marnes bleues », pyriteuses, comprend des Marnes lileuàtres à cassures conchoïdales et des marnes argileuses, bleuâtres, dont les cassures sont de couleur brune ou rouille (réduc- tion du sulfate de fer, peu stable, colorant ces Marnes). Au kil. i>4.52 la coupe est la suivante : COUPE D Tranchée « des Franchises ».• kil. 2^,5 Terrain , . \ Terre vée-étale ) „ ontcaiporam ;<,..„ o'",20 _,,.,, / Limon roiiffe, caillouteux i Pléistocène 05 Meulière « de Brie » (Caillasses), en blocs disjoints, noyée dans des Marnes et Argiles blanchâtres ou jaunâtres, avec poches (le décalcilication i'",3o Marne blanche o"\8() Marne feuilletée, jaunâtre o"\4o S ^ Marne calcaire, blanchâtre o''\o5 a 0) • f^ *r^ ■1-1 S 3 CD ■'-' / O > o \ ti â x m r- ■- « "S -.a. 0) 'y es » i"M5 a i'",2a / Argile verte , a-vec 3 Cordons de Rognons \ strontianiens i Argile verte, stratiliée (Couche à Cjrena ' coiwexa) o"\2o à o"\4o Marne l)laiichâtre, à dendrites, sul)strati- liée i"Mo Marne violacée, Ug-niteuse, à Liinna'a st/-i- gosa, Planorhis planulatiis, Xystia Dn- chasteli, etc o'",i5 \ Marne Ijlanche , ou un peu verdàtre . o"\8(> Argile marneuse, verdùlre ou ))leuâtre, V ^^ ^ conii)acle, à cassures conchoïdales. . . ()"\25 S -^ ] Marne argileuse, verdàtre (zones brunes f de ]>récipilation chinii(iue), visil)l<' sur o"',(m> Alt. du Fond du Fossé : = 5'3"'. G. -F. DOLLFUS & G. RAMOND. — ÉTUDES GÉOLOGIQUES DANS PARIS 65l S o i4 ■a e<5 •V O 652 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE [N.-B. — Les Couches, dans leur ensemble, sont moins épaisses que celles relevées plus au Sud, vers Brétignj'.] On remarque dans cette dernière tranchée quelques paquets de sables diluviens, très granitiques. IV. — Résumé et Conclusion Les niveaux stratigraphiques étudiés comprennent (indépendam- ment des Terrains contemporain et Pléistocène) : les Sables supé- rieurs, oligocènes, dits « de Fontainebleau » (Stampienpioj'en) ; l'en- semble de la Formation « de Brie » (Sannoisien supérieur), sous ses deux aspects principaux : argilo-siliceux et calcaro-marneux . avec passage de l'un à l'autre par transitions plus ou moins ménagées ; les « Glaises vertes », si constantes dans la Région parisienne, avec leurs cordons de Marnolites ; les séries marneuses (Marnes jaunâtres à Cj'rena convexa; marnes blanches « de Pantin », à Lymnœa stri- gosa; marnes bleuâtres et verdâtres; marnes bleues, proprement dites. — Ces niveaux marneux, bien connus, se présentent en réalité à des cotes supérieures d'une dizaine de mètres à celles indiquées sur le Profil géologique Paris-Brest (par le réseau d'Orléans, IV). Le Stampien inférieur fait défaut. On peut dire que les horizons stratigraphiques en question ont une inclinaison, d'ailleurs faible, dans la direction de la voie ferrée, c'est-à-dire du Sud vers le Nord ; c'est, d'ailleurs, ce que faisait déjà ressortir nettement l'ancien Profil géologique sus-mentionné. Le document grapliique que nous mettons sous les yeux de MM. les Membres du Congrès d'Angers (8^ Section), établi à grande échelle, précise ces données en les complétant. V. — Tectonique Les cotes d'afïleurement du sommet de l'Argile verte, en suppo- sant qu'elle s'est déposée à l'origine, sur une surface horizontale, nous révèlent trois mouvements postérieurs : — C'est d'abord un mouvement général d'ascension de toutes les couches vers le Sud, puisqu'elles partentde l'altitude de Sa m. à la station d'Epinay jjour aboutir, à 7^5© m. plus loin, à la station de Brétigny, à l'altitude de 76 m., soit une rampe d'environ 3 m. par kilomètre ; G. -F. DOLLFUS & G. RAMOND. — ÉTUDES GÉOLOGIQUES DANS PARIS 653 — Puis, un mouvement de plissement à grandes courljures visible trois ibis ; indiqué par la série des cotes suivantes : Kil. ^42 Alt. 52'" 1 — a4^ — 60"^ > Anticlinal « des Franchises » ■2'V — 52'" S L'argile verte descend au-dessous de la voie. — Synclinal de la « Fontaine du Genou-Blanc ». vil. 26 1 Alt. 60'» — 2()6 — (55'" 20 ''1 ()()"> II Anticlinal « du Perray » vil. 28 Alt. Gfyi^ — 29 — 70'" — 29^ — -3,a — 29' — :5'" — 3o2 — :4'" — 3o^ — 72'" L'argile descend au-dessous de la voie. — Svnclinal de « Saint- Michel » et de la butte sableuse de « Sainte-Genevièçe-des-Bois . » III Anticlinal de la « Passerelle Dubouvg' » (Tranchée de Rosière) L'argile verte descend au-dessous de la voie; c'est le Synclinal de la Butte sableuse de « Brétignj'. » Ces dépressions dans la cote de l'Argile verte correspondent aux chapelets de buttes sableuses qui couvrent le plateau, p]niin, un troisième ordre de plissottements , très faibles, n'ayant que quelques mètres d'amplitude, correspondant à des phénomènes de tassement locaux des couches provoqué par des dissolutions, des poussées produites par l'inégale densité des assises , et non par les })hénomènes généraux dont nous avons indiqué la démonstration pour les autres mouvements. \J Anticlinal qui jalonne une partie du cours de l'Yvette, notam- ment près d'Orsay (Lozèi*e, etc.), passe à Ballainvilliers ; il se pour- suit par Vaucluse, Yillemoisson, Évry, Pont-Boury, Etiolles, etc., tandis que les Bandes gréseuses, stampiennes, visibles aux Bordes, à Brétigny, à Fleury-Mérogis, etc., occupent des dépressions syncli- nales (VI, VII, VIII, IX, XI, etc.). En terminant, nous devons remercier M. Jégou-d'Herbellxe, Ingéniem- en Chef des Ponts et Chaussées, attaché à la Compagnie (354 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE d'Orléans, des facilités qu'il a bien aouIu nous faire accorder pour l'étude des tranchées de la ligne. M. Aug. DoLLOT, Ingénieur, Correspondant du Muséum d'Histoire naturelle, a eu l'obligeance d'exécuter une série de photographies que nous sommes heureux de mettre sous les yeux des Membres du Congrès. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE RENVOIS, DOCUMENTS CONSULTÉS, CtC. I. — Belgrand. — La Seine. — Le Bassin parisien aux âges antéhis- tori(iues. — i vol. in-4'' et deux atlas (i86g). II. — La Seine. — Études hydrologiques. — Régime de la Pluie, des Sources, des Eaux courantes. — Gr. in-8", 1872. III. — Les Eaux nouvelles. — (Publié par MM. Buffet et Couche.) — (Géologie sommaire de l'Aqueduc de la ^'anne, traversant la Vallée de l'Orge à Savigny), etc. IV. — Delesse, Dumoulin, Triger, etc. — Prolil géologique de Paris à Brest (Réseau (FOrléans)^ à l'échelle de : ^-q^ pour les longueurs; ^-^ l^oiu' les hauteiu's (18OG). — Coiu'te Xotice explicative, rédigée par M. Mille, Ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées (18G;). M. P. VixcEY a signalé une erreur dans ce Profil, au P. à N. « des Franchises » (kil. 24.2 de Paris), entre les Stations d'Epcrnay-siir-Orge et de Perray-Vaucluse : le soniincl des « Glaises inertes » est i3 m. trop bas; en lait, il atteint la cote 52 (nivellement du elicniin de fer). Cette inexactitude de cote se poursuit jusqu'à Brétigny, d'après les observations directes de MM. G.-F. Dollfus et G. Ramond. V. — G.-F. Dollfus. — Carte géologique des environs de Paris, au 4„^ (1890). — (Explorations sur le Terrain de 1881 à 1889.) — Note explicative (in-4° carré). — Congrès géol. ùitern. IIP. Berlin i885. — Voir notamment la Carte des Altitudes du Sommet des « Glaises vertes ». VI. — Carte géologique détaillée de la France. — Feuille n" ().5 (Melun). 2*" étUtion. — Exploration sur le terrain de 1891 à 1894. (Pnl)liée en 1894). — Notice explicative. (Mars 189,5.) VII. — Recherclies sur la limite S.-O. (hi calcau-e grossier dans le Bassui de Paris (avec une carte au sTcWô- — Hall. Soc. géol. de France 0^ série), t. XXV, p. 5ç)--&ij (aimée 189;). — Détail du Forage du Perray- Vaucluse, de Saint-Michel, de Petit-Vaux, etc. G. -F. DOLLFUS & G. RAMOXD. — ÉTUDES GEOLOGIQUES DAXS PARIS 655 — Révision de la Feuille de Melnn. — Ext. Bull. Serv. Carte géol. de France, ii" 44 ^ to^^t' VII (iScjS-iSofi). — (Courte Notice.) VIII. — Reclierehes sur les Ondulations des Couches tertiaires dans le Bassm de Paris. — Idem. — Idem. — N" 14. tome II (1890-91), avec Carte. IX. — (i.-I". DoLLFUs. — Les derniers mouvements du sol dans les Bassins de la Seine et de la Loire. — Ext. Compte-remln du Congrès géologique international (VIIF), Paris, 1900. — In-8', publié en 1901 {avec une Carte). X. — Relations entre la Structure géologique du Bassin de Paris et son Hydrographie. — Ext. Annales de Géog., t. IX (1900), n"^ 46-48. — In-8" I Carte. XI. — Structure du Bassin de Paris. — Ext. Assoc. l'rançaise. Co/igrès de Paris, kjoo. — (2^ partie), pp. 546-548. XII. — Trois excursions aux Environs de Paris (Étami^es). — Ext. Ihill. Soc. Géol. de France (3« série), t. XXVIII, pp. 109-126. — Carte au ,-Woôo et coupes. Allure et faune des « Marnes à huîtres », de la « Molasse d"Etréchy », du Falun de Jeurre ». — Etude des Sables, « dits de Fontainebleau » (Stampiens, etc.. etc.). XIII. — L. Jaxet. — Elude sur les Gypses du Bassin parisien. — Bull. Services Carte géol. de France et des Topograjthies souterraines. — Divers articles, notamment t. XIII (n" 91), p. i63 (1901-1902). XIV. — De Lapi'arext. — La Géologie en Chemin de fer. — Descrip- tion géologi([ue du Bassin parisien. — In-8 " (1888). [De Paris à Brétigny, p. 454-] XV. — Traité de Géologie (4^ édition), (^'oir pp. 1479 et suivantes.) XVI. — Stanislas Meuxier. — Géologie des Environs de Paris. — ^1-8^* {i8:5). XVII. — La Géologie générale. (Vol. XCVIII de la Bibl. se. internatio- nale), in-8" 336, p. . — Alcan, éditeur, in-8", 1903. XVIII. — Minier -Cualm AS et de Lapparext. — Note sur la Nomen- clature du Terram sédimentaire. — BuJl. Soc. géol. de France (3^ Série), T. XXI. — In-8" (1893), pp. 438-^^9,^ (et Tableaux). XIX. — G. Ramoxd. — Étude géologique de l'Aqueduc du Loing et du Lunain. — Compte rendu du Congrès des Sociétés Savantes , en 1899. — Sciences, in-8" (pp. 140-147) [publié en 1900]. Traversée de la Vallée de l'Orge, prés de Savig-nj', etc. [Observations relatives aux « Marnes à huîtres » et aux « Glaises vertes », à Savig-ny-sur-Orge, Juvisy f^outerrain de Champagne, etc.)]. XX. — De Sénarmonï. — Essai d'mie Description Géologique du déj^ar- teinent de Seme-et-Oise, iu-8'% i844- — Carte géologique de Seine-et-Oise au §0000 (même date). 656 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE XXI. — G. Vasseur et L. Garez. — Sur un nouveau faciès des Marnes à Limnœa slrigosa, observé à Essonues, près Gorlieil. — Bull. Soc. de France Q^ Série), t. \, pp. 277-281 (avec ime coupe). — Février 1877. XXII. — Paul ViNCEY. — Garle agrononiii^ue du Domaine de Yaucluse, à Épinay-sur-Org-e (Seine-et-Oise), à ^hio [pul)liée eu 1895], avec la colla- boration, pour la partie géologique, de G. Ramoxd. Cette Carte porte en cartouche la coupe du p>iits foré dans le domaine par la maison. Lippmann et C'% eu iSya-oS. [Observations de M. Dollfus, sur rinterprétation de ce sondage et sur la cote réelle d'altitude du sommet du puits. — Voir ci-dessus (VII)]. M. G.-F. DOLLFUS Collaborateur principal à la carte géologique de France FAUNE MALACOLOGIQUE DU MIOCÈNE SUPÉRIEUR DE RENNES (ÉTAGE REDONIEN, GITE D'APIGNÉ) (ILLE-ET-VILAINE) — Séance du S août — Répondant à une demande formulée par le bureau de la section de géologie, je m'empresse d'extraire de mes notes une liste des coquilles rencontrées dans les sables du miocène supérieur des environs de Rennes. M. Kerforne a donné à plusieurs reprises lliis- torique des nouA'eaux gisements si intéressants, découverts aux environs de Rennes par M. Lebesconte et qui ravinent les faluns du miocène moyen; j'ai pu, grâce à l'obligeance de mes confrères MM. Seunes, Lebesconte, Kerforne, Boistel et d'après mes propres récoltes, j)i*endre une vue d'ensemble de la faune nouvelle et, après une comparaison soigneuse, j'ai vu qu'elle était identique à celle des ofisements bien connus dans la Loire-Inférieure et dans le Cotentin et dont la place stratigraphique n'avait pas été jusqu'ici complètement précisée, de telle sorte que j'ai été conduit à la création d'un étage nouveau, le Redonien, type à Rennes, groupant toute la faune mio- cène supérieure de l'Ouest (*). Cette faune est aussi distincte de celle des Faluns de la ïouraine que des îlots pliocènes du Bosq (*) Bulletin Service de la Carte Géologique, comptes rendus des collab. n» 93, p. 8, 1900. Congrès géologique internalional, Paris. i()oo. Derniers mouvements du sol dans les bassins de la Seine et de la Loire. Bull. .Sor. (u'-ologique de Franee, 4- série, t. I, j). 2;5, 287, 1901 Mémoires Soc. Gcol. de France, t. X, p. 87. Conchyl. Miocène-Loire. G.-F. DOLLFUS. — FAUNE MALACOLOGIQUE DU MIOCÈNE SUPÉRIEUR ÔSy cVAubigny et de Redon. J'ai écarté le terme de falun de l'Anjou, car en Anjou on trouve à la fois les faluns du miocène moyen et les sables du miocène supérieur, parfois même superposés. Les gisements du Redonien forment dans l'Ouest de la France une grande bande du Sud au Nord qui commence dans l'île dOléron, vient à Montaigu (Vendée), le Louroux-Bottereau (Loire-Inférieure), Saint-Clément-de-la-Place, Sceaux, Thorigné (Maine-et-Loire), Beau- lieu (Mayenne), Apigné, le Temple-du-Cerisier (Ille-et -Vilaine), Gourbesville, Saint-Georges-de-Bohon, Isigny (Manche). Gisements importants, reliés par beaucoup d'autres intermédiaires : La Clia- pelle-Hermier, la Forèt-de-Gàvre , Saint-Michel et Chanveaux, etc. Je n'avais pas indiqué jusqu'ici la liste d'espèces caractérisant cet horizon et leur examen complet dépasserait de beaucoup les limites qui me sont tracées ici; il me suffira d'indiquer la faune des environs de Rennes en mentionnant pour chaque espèce une figure propre à la faire positivement reconnaître et prise parmi les meilleures figures qui en ont été données dans les ouvrages récents les plus accessibles. J'ai laissé de côté tout ce qui était mauvais . douteux ou nouveau et les cent espèces que j'ai citées ne forment guère qu'un tiers de la faune totale du Redonien que j'ai entre les mains et que je décrirai ultéiûeurement. Je considère avec M. Kcrforne que la majorité des sables rouges, plus ou moins chargés de galets, qui couvrent les pla- teaux sur une si grande surface de l'Ouest de la France appartiennent au Miocène supérieur marin; leur coloration, leur stratification, prouvent à l'évidence qu'il s'agit d'une formation décalcifiée. Tous les gisements fossilifères du Redonien sont situés au-dessous du niveau hydrostatique local, ou protégés des infiltrations des eaux atmosphé- riques acides par quelques lentilles argileuses. Les gisements fossili- fères sont calcaires et les sels de fer y sont au minimum d'oxydation, tandis que les gisements sans fossiles sont siliceux, sans calcaire et les sels de fer en sont profondément atteints. M. Lebesconte nous fournit lui-même cette distinction capitale. Le gisement d' Apigné doit pour moi sa conservation à quelque lentille argileuse, celui du Temple- du-Cerisier est au fond d'un puits, ceux des bords de la Vilaine sont atteints par des dragages. ABeaulieu, le gisement paraît hors d'eau, mais c'est seulement un amas extrait d'un étang profond voisin, les sables rouges latéraux décalcifiés sont sans fossiles. Le gîte de Saint- Clément-dc-la-Place est dans une fontaine. Tous les gisements de la Loire-Inférieure, comme le Dixmerie, sont noyés. A Vieillevigne , Montaigu (Vendée), il s'agit de fonds d'abreuvoirs. Toutes les loca- lités fossilifères de la Manche sont au-dessous du plan d'eau. Je C58 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE pourrais multiplier ces exemples. Il n'y a pas dans l'Ouest deux formations d'âge difTérent, l'une, à la base, composée de sables calca- reux, stratifiés, verdâtres ou grisâtres, l'autre, au sommet, formée de sable pur. rubéfié, sans stratification, mais bien une seule formation sous deux aspects dilTérents. Que M. Lebesconte visite à nouveau la carrière de Lormandière avec nos idées modernes de métamorphisme atmosphérique, il y verra des transformations latérales les plus singulières. Il touchera du doigt le mécanisme de notre dualité d'aspect. Bien entendu, il y a lieu de ne pas confondre les sables et galets de miocène avec les sables graveleux et diluviens quaternaires, souvent aussi rubéfiés ; mais on sait que les sables du diluvium fluvia- tile ne s'écartent guère du fond des vallées actuelles et s'y main- tiennent en terrasses à de faibles altitudes ; leurs cailloux sont x^lats ; ils sont arrondis seulement cpiand ils ont été remaniés de galets ter- tiaires marins. Avec un peu d'habitude on distinguera les deux for- mations et on s'étonnera d'avoir vu si négligés deux dépôts qui ont chacun leur importance et leur intérêt. Liste de la Faune Malacologique du Miocène supérieur de Rennes (Redoiiien d'Apigné) PÉLÉCYPODES F. Corbiila revolnta Brocclii, sp. — Dollfus et Dautzeiil^erg-, ConchvL bassin de la Loire, I, p. 77, PI. III, fîg. 15-27. p. V. Mactra siibtrnncata Da Costa, sp. — Bucquoy, Dautzenberg et Dollfus. — MoU. (lu Roussillon, II, p. 559, pi. LXXXII, fig. 1-9. Venus (Ventricola) mnltilamella Lamk. — Sacco, I. Moll., Part. XXVIII, p. 3o, PI. VIII, lig. 1-8. F. V. Meretrix (Pitar) rudis Poli, sp. — Bucq., Dautz., D. Moll. du Rous., II, p. 33o, PI. LUI, fig. i-ii. F. Cvassatella concentvica Dujardin, Mém. sol. Touraiue, p. 4^, PI. XVIII, lig. 2. F. V. Digitaria digitaria L., sp. — Wood, Crag. Mollusca, II, p. 190,. Pi. XVII, lig. 8 c (tantum). Cardita (Venericardia) senilis Lanik. — Wood., Crag. Moll., H, p. i65, PI. XV, lig. I a-f. Cardita (Glans) rudisfa Lamk. — Sacco, I. Moll., Part. XXVII,. p. i5, PI. IV, lig. 26-29. Cardita (Glans) Beraudi Mayer., Jour., Gouchyl., t. XX, j). 229,. PI. XIV, fig. 3 (1892). (*) Lebesconte. Sables rouges pliocènes de la Lande d'Apigné. Bull. Soc. Scientif. Méd. de l'Ouest 1903, XII- — F- Keiuoum:. Sur le Redonien d'Ille-cl-Vilaine, idem. G.-F. DOLLFUS. — FAUNE MALACOLOGIQUE DU MIOCÈNE SUPÉRIEUR 65çf F. V. Cardifa (Coi-ipia) Corbis Philipp. — Eimin., Moll. Siciliye, I. p. 55, PI. IV, lig-. 19. Astarte sralafis Desh. (Cassiua) Dujarilia, Mém., sol ïouraiiie, p. 00, PL XVIII, lig. 5 (Méd.). Astarte Biirtiui Lajonkaire. — Wood., Grag-. Moll., II, p. i88, PI. XVII, lig. 5. F. V. Cardium (Parvicardinm) papiUosam Poli. — B. D. D. Moll. Rous- II, p. 2;4, PI. XLIV, lig. 9-12. F. V. Chaîna g-ryp/wides; Linné. — Sacco, I. Moll., Ter. Ter., Part. XXVII, p. 61, PL XIII, lig. i-(5. F. V. Chama grypliina L. — Sacco, idem., Part. XXVII, p. 66, PL XIV, F. V. Arca (type) Xoe L. — Biiq., Dautz., DolL, Moll. du Roussillon, II, p. i;4, PL XXX, lig. 1-5. F. V. Arca (Barbatla) bavbata L. — Idem., Moll. Roussillon, II, p. 182, PL XXXII, lig. 1-5. F. V, Arca (Fossularca) lactea L. — Idem., Moll. Roussillon, II, p. 180, PL XXXVII, lig. 1-6. F. Arca (Acar) clafhrata Defrance. — Sacco, I. Moll., Part. XXVI, p. 8, PL II, lig. 1-3. F. Arca (Amidara) tnronica Duj. var. — Sacco, I. Moll., Part. XXVI, p. 24, PL V, lig. 14-18. F. V. PectanciiluH i/i>inbricns Brocclii sp. — Sacco, I. Moll., Part. XXVI, p. 34, PL VIII, lig. 11-21. F. Pliçatula ruperella Dujardin. — Hoernes, Foss. Moll., Wien., II, p. 427, PL LXVII, tîg. 6«, 66. F. V. Radula lima L. sp. —Sacco, I. Moll., Terr. Ter., Part. XXV, p. i3, PL IV, tig. 28-33. F. V. Chlamrs varius L. (Pecten). — Wood. Grag. MoUusca, I, p. 33, PL VI, fig. 4, V. Pecten (Fexopecten) tigriniis Muller. — ^^■ood idem, I, p. 27, PL V, lig. 2, a, gr- Ostrea edali.'i L. var. obfon§;nla Sacco, I. MolL, Ter., Part. XXIII, p. 6, PL I, lig. i5-i6. Ostrea ednlis Linné var. iingulata Nyst. — Annales Musée de Bruxelles, III, p. i39, PL VIU, fig. i, d, e,f, g, h, L BRACHIOPODES F. V. Thecidea Mediterranea Risso var. testudinaria Michelot. — Phi- lippi Enuni., MolL, Sic, I, p. 99, PL M, lig. 17. Cistella costalata Segnenza. \a.r. — Sacco, I. Moll. Brachiopodes, p. 32, PL VI, iig. 34. GASTÉROPODES Pleurotoma (Siircula) intermedia Bronn. var. strigosa Millet. — Bellardi, I. Molluchi, II, p. 53, PL II, fig. 9. Pleurotoma (Clavatnla) romana Defrance. — Bellardi, I. Moll., II, p. 172, PL V, lig. 36. {]Qq GEOLOGIE ET MINERALOGIE r F . Pleiirotoma (Brilla) incrassata Dujardin. Etude sol Touraine, p. 82, PI. XX, {\g. 28. F. Plenrotoma (Drilla) puMulata Brocchi, var. — Bellardi, I. Moll. , t. II, p. io5, PI. III, lig. 3i. F Pleurotoîua (Asthenostorna) oniata Defrance. — Bellardi, I. Moll., t. II, p. 238, PI. VII, lig:. 25- F. Plenrotoma (Clathiirella) pagoda Millet, ann. Soc. Linnéenne de Paris, p. 5, PI. I, fig. i. F. V. Plenrotoma (Clathiirella) piirjnirea Montagn, sp. — Bastcrot, Descrip. géol. Bordeaux, p. 65, PI. III, lig. i3. F. V. Plenrotoma (Clathiirella) Lenfroyi Michaud. — B. D. D. Moll. Roussillon, I, p. 96, PI. i4, flg- 3-4. Plenrotoma (Baphitoma) viilpecnla Brocchi. — Conchy. subap. , I, p. 420, PL VIII, lig. 10. Plenrotoma (Raphitoma) harfjiila Brocchi., sp. — Conchy. subap., I,p. 421, PI. VIII, lig. 12. V. Plenrotoma (Mang-ilia) albida. Deshayes. — Expédit. de Morée, p. 176, PI. 19, lig. 22 et 24. F Plenrotoma (Mangilia) clathrata Marcel de Serres. — Géognosie Terr. Ter., p. ii3, PI. II, lig. 7-8. V . Plenrotoma (Hœdropleiira) septangiilaris Montagu, sp. — Testacea Britannica, III, p. 268, PI. IX, lig. 5. Mitra Astensis Bellardi, I. Moll. (et M. afllicta Bell.), Part. V, p. 21, PI. I, lig. 18. Mitra aperta Bellardi. — Idem. V, p. 42, PI. III, lig. 19. F. Mitra (Uromitra) recticostaBe\lRvdi,y ,Y>. 41, PI. V, lig. 46, lig. a et b. Coliimbella tiirgidnla Brocchi, sp., Conchy. sul)ap., II, p. 319, PI. IV, lig. 4- F Colnmbella tnronica Mayer. —Jour. Conchyl., 1869, t. XVII, p. 285, PI. X, lig. 5. F Ancilla (Sparella) obsoleta Brocchi, sp. — Conchy. subap., II, p. 33o, PL V, lig. 6. F V Maro-inella (Gibberiila) miliaria Linné. — B. D. D. Moll. Rous- sillon, I, p. 122, PI. XV, lig. 40-42. F. V. Erato lœvis Donovan, sp. — Wood. , Crag. Moll. , I, p. 18, PI. II, lig. 10 (var. Globosa). Triiùa pifiolina Lanik. , sp. (T. spha^-iculata , var. i)er()bsoleta Sacco). — I. Moll. XV, p. 49, PL II, lig. 33. Trivia affinis Dujardin, sp. — Méni. Géol. sol. Touraine, p. y4, PL XIX, lig. 7. — Sacco, PL III. lig. 3^. Typhis tetrapterns Bronn., sp. Michelolti monograph. , G. Murex, p. 7. PL I, lig. ()--. Murex (Miiricopsis) anstatiis Brocclii. — Conchyl. subaj)., p. 3()4, PL Vil, 11g. i5 (M. Blainvillei?). Fit.sns rostratns Olivi, sp. var. B. D. D. Moll. Rouss., I, p. 36, PL VI , p. 3. Pisaiiin c.xcnl/ita Dujardin, s]). (Purpura). — Méiu. Touraine, p. 87, PL XIX, lig. 8-9. F. F. V. F. V. F. V. F. G. -F. DOLLFUS. — FAUNE MALACOLOGIQUE DU MIOCÈNE SUPÉRIEUR 6(>ï Cancellaria (Brocchinia) mitrœformis Brocc. , sp. , var. Ciirta Sacco. I. Moll., XVI, p. 68, >1. III, lig. 82. F. V. Bittiiim reticiilatwn D. Costa, sp. — B. D. D. Moll du Roussillon^ I, p. 212, PI. 25, fig. 3 à 5. F, Bittinm ftpina Partsh. — Von. Koenen Gastéropodes Mioc. Nord- deuchll, II, p. 274. PI- ^I, fig- 20. F. V. Cerithiopsis tubercnlaris Montagu, sp. — B. D. D. Moll. Rouss. , I, p. 204, PI. 27, lîg. 1-4. F. V. Triforis perversiis Liiiné, sp. — Var. adversa. B. D. D. , Moll. Rouss., I, p. 209, PI. 26, lig. lo-ii. Triforis Fritschi v. Kœnen. — Gaster. holost. Nord. Deut. Mioc, p. 271, PI. VI, fig. 19. V, F. Nassa (Cœsia) limata Chemnitz. — Concliy. Cab., V. p. 87, fig. 1808-1809. — De Franchis. Moll. plioc. de Galatina, 1895, p. 145, PI. II, fig. 7-8. F. Xassa (Hinia) tnroniensis Desh. (N. granifera Dujardin). — Mém. Tour., p. 89, PI. XX, lig. 11-12 (non Kiener). F. V. Xassa (Hinia) reticiilata Linné, sp. — B. D. D. Moll. Roussillon; I,p. 49, PI. X,rig. 8-11. F. Kassa (Hinia) corrugata Brocehi. — Conchy, subap. (non costa- lata Renier), PI." XV, lig. 16. B D. D. Roussillon, I, p. 52, PI. XI, lig. 3o tantum. F. V. Xatica (Naticina) Alderi Forbes (N. catena Sacco). — I. Moll., part. VIII, p. O7, PI. II, lig. 43. F . Natica (Pollinices) redempta Michelotti. — Sacco, I. Moll. , Part. VIII, p. 95, PI. II, fig. 74. F. V. Tnrritella triplicata Brocehi, sp. (Turbo). — Sacco, I. Moll., Part. IX, p. 26, PI. II, lig. 32. F. TurritelJa sabangniata Brocehi, sp. (Turbo). — jSacco, i. Moll., Part. XIX, p. 9, PI. I, lig. 3u, var. F. V. Vermetns intortus Lk. sp. (Serpula) (Petaloconchus). — Sacco. I. Moll., Part. XX, p. 9, PI. I, lig. 12. F. Vermetns carinatiis Hoeriies. Foss. Moll., Wien. B. , I, p. ^86, PI. XLVI, fig. 17. F. Vermetns Desliayesi Mayer, Journal Gonch. 1889, t. XXXIX, p. 241, PI. XII , lig. 2. F. V. Siliqnaria seneg-alensis Recluz (Tenagodes anguinus Sacco), var. Linné, I. Moll. Part. XX, p. 17, PI. II, lig. 14. V. Cœcnm snhannnlafnni de Folin. — B. D. D., Moll. du Roussillon, I, p. 23 1, lig. 3. F. Scalaria (Hemiacirsa) lanceolata Brocehi. — Sacco, I. Moll., Part. IX, p. 90, PI. II, lig. 99-101. Scalaria (Cirsotrema) mio-varicosa. — Sacco, var., Part. IX, p. 52, PI. II, lig. 32-33. F. Alexia pisolina Desh. sp. ? — Tournouer, Jour, de Gonch. 1892, t. XX, p. 93, PI. III, fig. 9. F. V. Odostomia plicata Montagu sp. — B. D. D. Moll. du Roussillon, I, p. i63, PI. XIX, fig. 3-5. 662 GÉOLOGIE ET MINÉRALOGIE Pyramidella plicosa Bronn. — Lethea Geogostica, II, p. 1026, PI. XL , fig. 24 , var. eiilimoïcles Sacco. F. Pyramidella imisnlcata DTijardin. — Sacco, I. Moll., Part. XI, p. 3o. PI. I, lîg'. 62-(î5. Menestho Hwnboldti Risso. — Sacco, Idem., var. miobiilinea, PI. II, iig. 39; var. miolonga, ûg. 42. V. Tiirbonilla lactea L. Sacco. — Idem, PI. II, fig. 44-57> pl- ^'^^• V. Eiilima polita L. Sacco. — Idem. PI. I. variété subbrevis, fig. 4; var. percontorfa. fig. 5. F. V. EuUma (Leiostraca) sabnlata Donovan sp. — B. D. D. Moll. du Roiiss., I, p. 193, PI. XXI, fig. 9-10. Rissoina obsoleta Partsli. in Hœrnes. — Moll., Foss. , Wien. , I, p. 556, PI. XLVIII, fig. 3. F. Rissoia (Alvania) curta Dujardin. — ^lém. Géol. sol. Touraine, p. , PI. XIX, Iig. 5. V. Ri.s.Iong; alvéoles petites et profondes. — Pied souvent fascicule à la base. — Saint-Sylvain, 9 avril 1901. Cette espèce est la première qui ai)paraisse sur le marché d'Angers. 5. M. hot'tensis Boud. — Chapeau ])run, oblong conique, séparé du pied j)ar une vallécule, pied ordinairement court. — Sauit-Sylvain, 20 avril 1900. Au mois de mai 1902, il m'a été présenté un superbe lot de spé- cimens de cette espèce , recueillis aux environs d'Angers, dans im mélange de mâchefer et de résidus d'engrais chimiques : i5 kil. en ont été recueillis en une seule fois. y A. GAILLARD. — CATALOGUE DES DISCOMYCÈTES CHARNUS 665 6. M. costata Vent. — Grande espèce, chapeau ovoïde allongé, brim verdàtre, à longues côtes linéaires. Pied court, arrondi à la base. — Marché d'Angers, mi-avril. Var : acuminata Kick. — Plus petite , à chapeau très pointu. — Même provenance. GENRE MITROPHORA Lév, Mitrophora hybrida (Sow.). — De dimensions très variables. Chapeau conique, pointu, fauve ou brun, noircissant, à moitié libre (M. semilibera D. C), pied court ou allongé. Espèce tardive et assez commune; se vend sur le marché d'Angers sous le nom de Morillon. FAMILLE DES HELYELLÉS GENRE VERPA 8. Verpa dig-italiformis Pers. — Sur un talus, route de Naunet à Saint- Sylvain, avril 1901 ; Les Thibaudières, mai 1901. GENRE HELVELLA 9. Helvella crispa Fr. — Parc de Pignerolles, novembre 1899; Feneu, octobre 1901. — Forêt de Chandelais, octobre 1902 (MM. l'abbé Hy et D^ Dezamieau). 10. H. laciinosa Afz. — Pelouses du château de Beuzon, décembre 1899. 11. H. siilcata Afz. — Mongazon, novembre 1901 (M. l'abbé Hy). 12. H. Albipes Fekl. — Chapeau d'un brun noirâtre , pied lisse. — Terrains sablonneux, à Vaux, près Montreuil-sur-le-Loir, avril 1901 (M. Bouvet). — La Baromierie, 18 avril 1903 (M. le capi- taine Pyat). Tribu des Cupules FAMILLE DES PÉZIZÉS O-rovipe ca.es Discinés GENRE DISCIOTIS i3. Disciotis reticulata (Grév.). — Grande espèce pouvant atteindre 20 centimètres de diamètre, remarquable par l'intérieur de la cupule , garni de i>lis anastomosés qui forment des alvéoles. Les spores mêmes doivent être recherchés sur des exemplaires très avancés en âge. — Vaux (M. Bouvet) ; Seiches , avril 1902, M. Thézée, Orovipe des A.cô"tSLlo-u.lés GENRE ACÉTABULA 14. Acetabula vnlgaris Fuck. (Peziza acetabulum L.). — Sur les pelouses, au voisinage des pins. Château de Pignerolles, près Angers, avril 1900. — Le Puy-Notre-Dame, avril 1901. ■666 BOTANIQUE i5. A. leiicomeJas Pers. — Au voisinage des Pins en avril : cliâteau de Pignerolles ; route de Paris , à la Baronnie ; la Baumette (M. A. Cheux). O-roiape des .A.leu.riés GENRE ALEURIA iG. Alenria cerea (Sow.) Fr. — Var. hortensis, spores plus petites que dans l'espèce typique. — Sur des pots de fleur, dans la serre de l'Hôpital d'Angers, aS mars 1902. 17. A. vesicnlosa (Bull.) Fr. — Sur le fumier, en novembre et décembre. — Les Ponts-de-Cé , Le Champ-des-Martyrs , La Baumette. 18. A. varia Bres. — En grandes troupes dans les bois, parmi les feuilles mortes. — Forêt de Chandelais, 14 octobre 1901; Feueu, 20 octobre 1901. 19. A. tectoria Cooke. — Cupules d'un jaune ochracé, souvent confluentes. — Sur un mur humide, Saint-Jean-de-la-Croix, novembre 1901 (M. Mesfray). GENRE GALACTINIA 20. Galactinia succosa Berk. — Lait jaune. — Dans les bois à Beau- couzé, propriété du D'' Dezanneau, 18 juin 1900; Bois de la Baronnerie, route de Paris, i5 novembre 1901. 21. G. castanea Quel. — Lait blanc. — A terre, sous les feuilles. — Bois de la Baronnerie, i5 novembï'e 1901. 22. G. badia Pers. — Forêt de Chandelais, novembre 1901. )\ O-rovip© cies Calopézizés GENRE OTIDEA 23. Otidea oiiotica (Pers.) Fuck. — Parc de Pignerolles, 16 novembre 1899 (M. l'abbé Hy); je l'y ai retrouvée depuis; Forêt de Chandelais, octobre 1901. 24. O. umbrina (Pers.) Boud. — Feneu, 20 octobre 1901. 2.5. O. ahitacea Pers. — Feneu, bois de Monrepos, 20 octobi-e 1901; au bord d'une allée de pins à la Baronnerie, i5 novembre 1901. 26. O. radiculata (Sow.) Boud. — Espèce remarquable, que j'ai trouvée en compagnie du D"" Labesse sm' les pelouses du château de Beuson, sous les conifères, le 3 décembre 1899. C'est en vain que je l'y ai recherchée depuis chaque année. GENRE PUSTULARIA 27. Pastiilai-ia Gaillardiana Boud. , Bulletin de la Société Mycologique de France, 1902, p. 141, pi. VIII, ïig. i. — A terre, sous les feuilles tombées, bois de la Baronnerie, i5 novembre 1901. A. GAILLARD. — CATALOGUE DES DISCOMYCÈTES CHARNUS 667 GENRE PEZIZA 128. Peziza anrantia Pers. — Bois d'Avrillé, 8 novcni])re 1901. 29. P. polytrichina Pers. — Plus petite ([ue la précédente, mais à spores plus grosses. — Sous les pins, bois de Soucelles, 28 octobre 1901 ; dans une allée bordée de pins au bois de la Ilaie, près delà butte de sable, octobre, novembre 1900. GENRE SAUCOSCYPHA 30. Sarcoscj-pha coccinea (Jacq.). — Sur brindilles, et principalement sur les branches mortes du Prunus sj)inosa. — Echarl^ot, dé- cembre 1899, février 1900; chemin des Rêveries, etc. Assez com- nume dans le Saunuu-ois, où elle est connue sous le nom de « Coccig-rue ». GENRE LACHNEA 3i. Lachnea hemisphœrica Wigg-. (P. Labellun Bull.). — Au bord des sentiers dans les bois. — Beaucouzé, propriété de M. Dezanneau. GENRE SEPULTARIA 32. SepuUai'ia Siimneri (Berk.). — Se trouve sous presque tous les cèdres de la région : à Angers même, chez M. Foucher, à la Chalouère, mars 1900; à la Romanerie et à Echarbot, avril 1901 ; au Fresue, à la Baumette, mars 1901 (M. A. Cheux). 33. S.foliacea SchœH". — Espèce voisine de la précédente, mais à spores plus petites et moins ol)longues. — Je ne l'ai rencontrée qu'une seule fois sous les cèdres à la Romanerie, mêlée à la précédente. Tribu des Lenticules FAMILLE DES CILIARIÉS GENRE CIIJARIA 34. Ciliaria scntellata Linn. — Sur un l)ac en bois pourrissant. Serre chaude du Jardin des Plajites d'Angers, 2.5 avril 1900 (M. Bouvet). GENRE CHEILYMENIA 35. Cheiljmenia JîhnUoHa Currey. — Espèce nouvelle pour la Flore de France. — Cupules assez grandes (2, 2 1/2 centimètres de dia- mètre), d'un jaune orangé, }>lus pâles extérieurement et couvertes, principalement vers la marge tle poils hyalins, courts, formés de 3, 4 cellules, dont la supérieure se termine en masse. Spoi^es ovoïdes allongées, i)arai»hyses linéaires, surmontées au sonunet d'une sphère assez grosse, remplie de granulations orangées. Je n'ai trouvé ([u'une seule fois cette espèce en 2 échantillons, le 668 BOTANIQUE 7 décembre 1900, dans une coupe de chênes du Parc de Pig-ne- rolles, je n'ai pu la retrouver depuis. M. Menier l'a trouvée ég'alement aux environs do Nantes. 36. C. coprinaria Cooke. — Dans les prés, sur la bouse de vache, chemin des Fours-à-Chaux. Avril 1902. 37. C. pnlcherrima (Boud.) Cr. — Dans les prés humides, sur la bouse de vache. — Route de Paris, à la Lieue, 2 décembre 1901. Espèce beaucoup plus petite que la précédente , mais à spores un peu plus g-randes. 38. C. viimcea Rehm. — Sur le terreau renfermant du marc de raisin. — Feneu, 7 avril 1902. — Communiquée par M. Girard, phar- macien. FAMILLE DES HUMARIES GENRE HUMARIA 39. Hiimaria hiunosa F. — A terre, parmi les mousses. — Bois de la Haie, 12 décembre 1900; sur les rochers, parmi les mousses, Roche de Mûrs, i5 novembre 1901. 40. H. convexula Pers. — Sur les talus sabloiuieux, parmi les mousses. — Bois dvi Perray, 2'î janvier 1902. Cette espèce a parfois des spores asymétriques. 41. H. corallina Cooke. — Sur les talus. — Écouflant, Le Perray, i3 jan- vier 1901. Espèce facilement reconnaissable à ses spores naviculaires à deux g-outtelettes. GENRE LAMPROSPORA 42. Lamproftpora miniata (Cr.) de Not. — ■ Sur les murs, parmi le Bar- biila miiralis, parapets du château ol' Angers, tous les ans, de janvier à mars, sur les murs, à la Chalouère, route de Pruniers. Je retrouve chaque année sur un vieux mur, chemin d'Orge- mont, une forme beaucoup plus grande de cette jolie espèce, les spores sont d'un tiers plus grandes et plus linement aérolées que dans le type. GENRE COPROBIA 43. Coprobia granulata (Bull.) Boud. — Commune aux environs d'An- gers sur la bouse de vache. — Saint-Barthélémy, Echarbot, etc. 44- C- ascobolimorpha (Cr.) Boud. — J'ai observé cette espèce une seule fois, en janvier 1902, sur des crottes de mouton recueillies dans les i)rés, au pont de Soucelles en décembre 1901. GENRE PVRONEMA 45. Pyronema omphalodes (Bull.). — Sur la terre, au bord d'une haie à laquelle on avait mis le feu. Chemm des fours à chaux, mars 1901. A. GAILLARD. — CATALOGUE DES DISCOMYCÈTES CHARNUS 669 FAMILLE DES ASCOBOLÉS 1° Ascobolés vrais GENRE ASCOBOLUS 46. Ascoboliis fiirfnraceus Pers. — Conunun sur la bouse de vache. 47. A. iminersus Pers. — Sur le crottin de cheval. — Bois de la Haie; bois du Perray, juin 1900. 48. A. glaber Pers. — Bois du Perray, juin 1900. Idem., var. lenticidaris sur des crottes de lapm. — Bois d'Avrillé, février 1902. GENRE SACCOBOLUS 49. Saccobolns Kerverni (Cr.) Boud. — Sur la bouse de vache. — Bois de la Haie, 8 juin 1900; sur un tas de fumier, la Baromierie, 2.5 mai 1900. 50. S. neglectus Boud. — Sur des crottes de lapin, parc de Pignerolles, 23 mai 1900; sur la bouse de vache, Le Perray, 14 juin 1900. I. S. violascens Bond. — Sur la bouse de vache. — La Baumette, 10 décembre 1901. — Communiqué par M. le ca[)itaine Pyat. Espèce à peine visible à l'œil nu, remartiuable par ses para- physes renflées en massue et légèrement violettes au sommet. 2" Pseudo-ascobolés GENRE THECOTHEUS 52. Thecotheiis Pelletieri (Cr.) Boud. — Sur le crottm de cheval. — Bois de la Haie , 8 juin 1900. GENRE LASIOBOLIS 53. Lasiobolas pilosiis (Fr.) Sacc. — Sur les crottes des chèvres. — Champ- des-Martyrs, 25 juin 1900 (forme typitpie, sub-conique, d'mi jamie pâle); sur la bouse de vache. — Beuson, i5 déceml^re 1901 (variété i'accinns , d'un rouge orangé). 54. L. Ciliatns (Schmidt) Boud. — Sur la bouse de vache. — Prés Sauit- Serge , au pont du chemin de fer. Je n'ai trouvé cette espèce qu'une seule fois, mais en grande abondance ; son diamètre est de 1-2 millimètres, elle est convexe, d'un jaune orangé, à marge friable, plus pâle, couverte de poils l)lanchàtres, caducs; thèques assez larges, à 8 spores ovoïdes, hyalines, unisériées. Paraphyses msensiblement épaissies vers le sommet, légèrement javmàtres. GENRE ASCOPHANUS 55. Ascophamis Cœmansii Bovul. — Sur la bouse de vache. — Beuson, i5 décembre 1901. Paraphyses largement renflées au sommet, et colorées en jaune verdâtre. 670 BOTANIQUE 56. .4. gTanuUfoj-mis (Cr.) Boud. — Sur la bouse de vache. — Le Perray^ 6 mars 1902. Paraj)hyses tcrniiaces supérieurement par un bouton incolore; c'est la forme t^1)ique, d'un jaune ocracé que nous avons trouvée en Anjou. 57. A. vicimis Boud. — Sur les vieilles bouses de vache. — La Baumette, II mars 1902. Nous avons observé la forme d'un blanc lilas, à tlièques larges, insensiblement atténuées vers la base, où elles se rétrécissent brusquement pour former un court pédicelle. Spores largement ovoïdes; paraphyses hyalines renflées en massue et légèrement arquées au sommet, septées et formées d'articles légèrement étranglés aux cloisons. 58. A. hepaticus. — Sur le sable humide recouvert de crottes de lapùkS. — Route de Paris, à la Haie-Joulain, 28 janvier 1901. De 1-3 millimètres de diamètre, brun foncé, paraphyses ren- flées et brunes au sommet, spores hyalmes, longuement ellip- tiques. 59. A. sexrlecwisporns Boud. — Sur des crottes de mouton recueillies à Soucelles, en décembre 1901. Cette espèce se distingue facilement de toutes les autres par ses- thèques larges, contenant i(3 spores bisériées et ses paraphyses bifldes et articulées. 60. A. aiirora (Cr.?) Boud. — Sur la bouse de vache. — Bois de la Haie, 8 juin 1900. Petite espèce d'aspect gélatineux, d'un rose orangé, à para- physes filiformes , souvent arquées au sommet. 61. A. Carneus (Pers.) Boud. — Sur une toile d'emballage pourrie. — Le Perray, 2 janvier 1901. Spores très légèrement granuleuses, à la surface. GEXRE RYPAROBIUS 62. Ryparobias dnbius Boud. — Sur les crottes de chèvres, à la Lieue, 2 décembre 1901. S*^ Division. — I N O F El R, G XJ Li É S Tribu des Glavulés FAMILLE DES LÉOTIÉS GENRE MITRULA 63. Mitriila pahidosa Fr. — Sur les feuilles pourries , dans un fossé rem- plie d'eau. — Bois du Pei'ray, i3 jiùn 1900. Tribu des Garnosés FAMILLE DES OMBROPHILÉS GENRE BULGARIA 64- Bulgaria inqniiiaris Pers. — Comnuin sur les troncs al)allus. — Angers, chemin des Foursà-Chaux; forêt de Ciuiiulclais. A. GAILLARD. — CATALOGUE DES DISCOMYCÈTES CHARNUS 67I FAMILLE DES CALLORIÉS GENRE CALLORIA 65. Calloria fiisaroïdes (Berk.). — Siu* les tiges pourries de l'Ortie. — Ecouflant. GENRE ORBILIA &d. Orbilia Sarraziniana. — Sur des pieux enfoncés au niveau de la gare d'Ecouflant, 8 août 1900. 67. O. xanthostigma Fr. — Sur vieux Corticiiim sur branche pourrie de chêne. — Parc de Piguerolles, 9 août 1900. Tribu des Gyathulés FAMILLE DES HÉLOTIÉS GENRE SCLEROTINIA 68. Sderotinia tiiberosa (Hedw.). — Parmi VAnemone nemorosa, dans. une coupe de chênes du parc de Pignerolles, 9 avril 1900. 69. S. Trifolioriim. — Parmi les mousses, à Naunet, chez M. Letourneau, 19 décembre 1900. GENRE PHIALEA 70. Phialea echinophila (Bull.). — Dans les involucres pourris des fruits du châtaignier. — Beaucouzé, dans la propriété de M. le docteur Dezanneau, octobre 1900. — Feneu, septembre 1902. 71. P. Jîrma (Boit.). — Sur branche pourrie. — Parc de Pignerolles, i5 novembre 1899; sur brindilles dans les bois, route de Juigné- Béné, à Feneu, octobre 1902. GENRE CHLOROSPLENIUM 72. Chlorosplenium œruginosnin Fr. — Sur les troncs pourris. — Forêt de Ghandelais, octobre 1902. — Communiquée par MM. l'abbé Hy et le D^ Dezanneau. Cette espèce fructifie rarement en Anjou, bien que le mycélium se rencontre assez fréquemment dans les branches pourries. GENRE HELOTIUM 73. Helotium fructigeniini (Bull.). — Sur les glands du chêne en décom- position. — Bois de Beuson, 2 décembre 1901. 74- H. albeUum, var. ^Esciili Phill. — Sur les brhulilles. — Beuson, 9 décembre 1901. 75. H. salicelhini. — Sur les branches décortiquées des saules, au pied de la Roche de Mûrs, i5 novembi*e 1901. 76. H. serotinuin. — Sur les brhidilles, route de Corné, près de Pigne- rolles, 21 janvier 1901. 6^2 BOTANIQUE FAMILLE DES DASYSCYPIIÉS GENRE DASYSCYPHA 77. Dasyscypha virg'inea (Balsch.). — Sur les l)rindilles. — Parc de Pig-uerolles , 9 avril 1900. 78. D. nivea (Hedw.). — Sur tronc pourri, Parc de PigiieroIIes, 23 mars 1900; sur une trappe en bois, dans une cave, à Angers, avril 1902. Communiquée par M. Mesfray. 79. D. bicolor (Bull.). — Sur brindilles de chêne, bois de la Haie, mars 1901; bois d'Avrillé, avril 1902. GENRE TAPEZIA 80. Tapez-ia aiwelia (Pers.) Bond. — Sur les chatons pourrissants, les fruits et les feuilles du châtaignier. — Beaucouzé, dans le bois de M. le D^' Dezanneau, 25 mai 1900. GENRE MOLLISIA 81. MoUisîa albella. — A la face interne de l'écorce des pins. — Bois de Soucelles, 11 décembre 1901. Très petite, d'abord ]>lanche, puis d'un jaune citrin, opaque. Spores navicidaires , à deux sporidioles. 82. M. cinerea (Balsch.). — Commune sur les troncs coupés et les écorces pourries. — Parc de PigneroUes, mars 1900, 83. M. liviflo-fusca. — Un peu plus grande et de couleur i)lus foncée que la précédente. Spores plus allongées. — Sur l'écorce poui'rissante du bouleau. — Bois de Soucelles, 11 décem!)re 1901. 84. M. conigena. — Sur les cônes des pins. — Saint-Barthélémy, 9 avril 1900; route de Paris, à la Haie-Joulain, 28 janvier 1901. GENRE MOLLISIELLA 85. MoUisiella ceracella. — A la face interne de l'écorce pourrie du charme. — Bois de Beuson, 2 décembre 1901. G. BOUVET. — LES RUBUS DE l'anjoU 678 M. G. BOUVET à Angers LES RUBUS DE L'ANJOU. RËSUMË DES FAITS ACQUIS — Héance du 5 août — Depuis plus de 3o ans que j'étudie les Riibns de l'Anjou, j'ai réuni de nombreux matériaux qui, ajoutés à ceux reçus de Genevier lui- même ou retrouvés dans les herbiers de Bastard , Boreau , Provost, Lloyd, m'ont permis de rédiger un travail d'ensemble sur les formes observées jusqu'à ce jour dans la région. La communication que j'ai l'honneur de présenter au Congrès n'est qu'un extrait de ce travail réduit à ses grandes lignes. Je prie M. Sudre, l'éminent spécialiste qui a bien voulu revoir et annoter ma collection, en même temps que celle de Boreau, d'agréer ici l'expression de ma profonde reconnaissance. HOMEAGANTHI Bouv. Turion à aiguillons uniformes, égaux, régulièrement disposés sur les angles; pas d'aciciiles secondaires. Glandes pédicellées nulles ou acciden- telles. SUBEREGTI P.-J. Muel. Turion di'essé, arqué seulement au sommet , anguleux, glabre et luisant. Feuilles caulinaires vertes sur les deux faces, rarement grisâtres en dessous. Intlorescence en forme de grappe simple ou de coryml^e. Sépales verts ou bi'iins vevddtres sur le dos, à bordure blanche. — Glandes pédicellées nulles. Floraison précoce (commencement de juin). R. nitidus W. et N. — Turion à faces planes. Fleurs roses ou rosées. Trois formes : R. integribasis P.-J. Muel.; Genev. , Monog. 1880. R. plicatus sbsp. divaricatus p roseiflorus Boni., FI. Fr. (R. et C). R. divaricatus Boul., Ass. rub- n'^^ 36 1 et o3o ; Genev. p. max. p., non P.-J. Muel. Foliole cauHn. terminale oblongue allongée ou rIionil)ée. Inllorcs- cence en forme de grappe simple ou de coryml)e, parfois garnie de bractées foliacées jusqu'au sommet, peu aiguillonnée ; pédicellcs i)ri- maii-es allongés, grêles. Sépales étxdés, ceux de la fleur terminale 43* 6^4 BOTANIQUE appendiculés, parfois foliacés et redressés. Pétales rose pâle, oblongs, relaliveiiieiit étroits et distants. Etainines blanches, courtes, égalant ou dépassant peu les styles {'erts. Laudes humides, bois, sablouuières. — C. R. hamulosus Lel". et Muel. — Dillèré du précédeut par l'axe de l'in- iloresceuce , les pédoncules et pédicelles armés d'aiginllons uomljreux et recourbés en corne de bélier. R. — La Breille, marais des Loges {Herb. Bor.). R. holerythros Focke, R. nitidus Bor., FI. cent.; Genev. , p. max. p. — Plus robuste dans toutes ses parties. Feuilles caulin. à foliole terminale tronquée ou légèrement cordiforme à la l>ase ; les raméales finement veloutées et tendant à devenir grisâtres en-dessous. Inllor. plus compliquée, en partie covymhiiovmç , fortement aiguillonnée , à aiguillons robustes, droits ou faiblement arqués. Sépales réfléchis, excepté dans la fleur terminale où ils sont souvent étalés et appendi- culés. Pétales roses, plus larges, presque configus. Etamines roses, dépassant longuement les styles rosés. Landes, débris schisteux. — C. SILVATIGI P.-J. Muel. Turion élevé, arqué, procombant, anguleux ou subarrondi. — Feuilles caulin. vertes sur les deux faces, j^lus rarement grisâtres en dessous. Inflorescence en thyrse. Sépales gris-toinenteu.\ . — Glandes pédicellées nulles ou accidentelles. GRATI Sudre Calice étalé. — Pas de glandes R. clethrapliilus Genev. (an Boul. ?'?) , R. pedatifolius Genev. (olim.), R. clathrophilus Sudre. Foliole caulin. terminale brusquement acuminée. Bractées entières dans leur partie inférieure, à dents profondes, allongées et couchées dans leur partie moyenne et supérieure. Pétales carnés. Etamines blanches, dépas- sant les styles verdàtres. Jemies carpelles d'abord hérissés, bientôt glabres. — Floraison très précoce (lin mai-juin). AR. — Montreuil-Belfroy , forêt de Chandelais, forêt do Chambiers. — Champtoceaux (Genev. in herb. Bor.). — Le Fief-Sauvin (Préaubert). EUVIRESCENTES Genev. Feuilles vertes en dessous. Calice presque toujours réfléchi. Inflor. ordinaii'ement pourvue de cpielques glandes stipitées. + GALVESGENTES Genev. p.p. Tio-e stérile glabre ou glabrescente. Rameau florifère et inflorescence o-labrcscents ou maigrement hérissés. e> R. imbricatus Ilort. Ann. nat. Jiist. (i85i); Babgt. 7i. immitis Genev.! p. max. i)., non Bor.! G. BOUVET. — LES RUBUS DE l' ANJOU 6;5 Tarioii grêle, »iibarrondi. Feuilles 5-nées; foliole terminale largement ovale, en cœiu*, acuniinée; les latérales brièvement pétiolulées , les infé- rieures subsessiles ; toutes à dents irrégulières , fines , aiguës, profondes , minces, vertes en dessous et se recouvrant par les bords. Rameau arrondi, peu poilu, à aiguillons falqués. Feuilles 3-5-nées, plus pâles en dessous, rarement grises -tomenteuses au sommet. Infloresc. non glanduleuse. Calice non aculéolé, réfléchi. Pétales roses. Étamrnes blanches, dépassant les styles verdàtres. Jeunes carpelles poilus, abon- ■dants. R. — Torfou (Sudre). R. Questieri Lef. et Muel. ; R. calvatus Bor., FI. cent. Tige anguleuse à faces excavées. Infloresc. à bractées allongées, lon- guement acuminées, dépassant les ramuscules florifères. Calice réfléchi. Pétales roses, échancrés. Etamines lilanches, dépassant les styles d'un rose sale. Jeunes carpelles glabres. Bois, coteaux, débris schisteux. — C. 5 FALLAx (Chab.) BouL, R. acuminatus Genev. — Forme gréle, à feuilles minces et bractées longuement acuminées. — Bois couverts, Saint-Barthélémy (Préauliert), y APRiGA Bouv. — Feuilles raméales et bractées blanches en dessous ; panicule étroite, resserrée. — Angers, à Samt-Nicolas, sur les délais scliisteux. R. elumbis Sudre. Turion grêle, subarrondi, glabre ou presque glabre, à glandes sessiles, à aiguillons petits peu comprimés, presque égaux, droits ou décimés. Feuilles 3-4-nées, vertes et peu poilues en dessous, à dents très superfi- cielles, à mucron étalé: foliole caulin. terminale étroitement obovale , cunéiforme , entière, brusquement ac aminée, à pétioliUe égalant le i/5 de sa hauteur. Rameau arrondi, peu velu, à glandes courtes et rares, à aiguillons petits, déclinés; feuilles 3-nées. vertes en dessous, semblables aux caulinaires. bifloresc. petite, peu fouillée, hérissée, à aiguillons grêles, un peu glanduleuse sur les bractées ; pédoncules moyens 2-3-flores, à pédicelles lins, fascicules. Calice velu, ni glanduleux, ni aculéolé, réfléchi. Pétales roses, ovales, échancrés, rétrécis en onglet. Étamincs blanches, égalant les styles verdàtres. Jeunes carpelles glabrescents. R. — Forêt de Chandelais. ft PILETOSI Genev. pp. Tige stérile poilue. — Rameau florifère et infloresc. lâchement velus- hérissés, surtout au sommet. R. macrophyllus W. et N. (includens R. piletostachjs Gr. God.). Foliole caulmaire termmale insensiblement rétrécie en mi acumen laro-e à sa base. Pétales blancs, ou rosés {R. piletostachjs Gr. God.). Etamines blanches dépassant les styles verdàtres. Jeunes carpelles gla]>res. Bois, endroits couverts. AR. — Angers, bois de la Haie; forêt de Longuenée; Montigné; Montreuil-sur-Loir. — Chalomies (Bart.). — Le Longeron (Genev. m herb. Bor.). 676 BOTANIQUE R. macrophylloides Genev., 7?. carpinifoUiis flore roseo Bor. Diffère du précédent par la foliole caiilin. terminale ovale-elliptique ,. allong-ée, non échancrée à la base; les pétales, et étamines roses. R. — Ang-ers, à Saiiit-Nieolas. R. pyramidalis Kalt. , R. umbraticus P.-J. Muel. ! Genev. Feuilles épaisses, munies en dessous d'une villosité veloutée, dense, jau- nâtre, pectinée sur les nervures. R. — Le Longeron (Genev. in herb. Bor.). DISCOLOROIDES Genev. Feuilles , au moins les raméales supérieures , grises ou bl anche s-tomen- teuses en-dessous. Calice réfléchi. Pas de glandes. R. bipartitus Boni, et Bouv. , Ass. rub. n° 109; Genev., Monog. R. recognitus v. bipartitus Sudre. Turion glahre. Pétales rose pâle, profondément bifides; étamines plus ou moins roses, surtout à la base, dépassant ;^les styles vert-rosé. Jemies carpelles poilus. AC. — Angers, Beaucouzé, Écouflant, Montreuil-siu'-Loir. R. consobrinus Sudre, R. stereacanthus Genev.! sait. ex. p. (non MûlL). Turion un peu poilu, à grands aiguillons droits. Foliole caulinaire ter- minale seulement tronquée à la base, insensiblement termmée en pointe, largement et irrégulièrement dentée. Rameau florifère velu dès la base. Inflorescence à aiguillons nombreux , forts et longs. Sépales aculéolés, cuspidés-appendiculés dans la flem^ terminale. Pétales blancs, entiers. Etamines l^lanches, dépassant les styles verts. Jeunes carpelles glabres. R. — Angers. — Le Longeron (Genev. in herb. Bor.). R. cardiophyllus Lef. et MûU. ; Genev. p. min. p. Voisin du précédent, mais turion glabre, à feuilles supérieures seules discolores: foliole caulLn. terminale suborbiculaire , Jiettemejit en cœur à la base, bruscjnement et longuement acuminée, à denticuJation fine et peu profonde; rameau florifère glal^rescent; feuilles supérieures blanches- tomenteuses en dessous, les infériem^es vertes; infioresc. à aiguillons petits, espacés; pédicelles courts, fascicules; sépales non aculéolés, courts, Wn appendiculés , même dans la fletu" terminale. RR. — Angers, à Samt-Nicolas, sur les débris schisteux. DISGOLORES P.-J. MueL Turion arqué-procombant , anguleux, glabre ou à poils courts |etjappli- qués, souvent cérosineux. Feuilles caulin. nettement blanches-tomeiitenses en dessous. Infloresc. en thyrse. Sépales l)lancs-tomenteux, réfléchis. Pétales tantôt ovales, i>his ou moins oblongs. longuement atténués en onglet et distants, tantôt plus ou moins suborl)iculaires, rétrécis' en coin ou sul)itement contractés en onglet court et conligus. — Pas de glandes stipitées. — Floraison : juillet. G. BOUVET. — LES RUBUS DE l' ANJOU 677 RUSTICANI Genev. Turion à faces concaves, cérosineux, garni de flocons blancs appliqués ou coiwert comme d'un enduit farineux. Feuilles à surface convexe, à folioles inférieures pétiolulées (*). Infloresc. à tomentum ras, pubérulent, à aiguillons généralement falciformes. Pédoncules et pédicelles très étalés. Pétales contigus, plus ou moins suborbiculaires, rétrécis en coin à la base, rose plus ou moins foncé, rarement blancs. Étamines égalant ou dépassant peu les styles. R. ulmifolius Schott. f., R. rusticanus Merc. (sait. ex. p.). Haies, lieux secs et découverts, broussailles. — CC. Type excessivement polymorphe , dans lequel on peut établii' les divi- sions suivantes : I. Foliole caulin. terminale obovée-cunéifoi^me , élargie dans sa moitié supérieure, ou suboi^biculaire , ou, plus rarement, subrectangu- laire , entière ou légèrement échancrée à la base (forma obovata Malb.). 1. Folioles à dents fines et superficielles. 2. Folioles à dents larges et plus ou moins profondes. II. Foliole terminale oblongue-ellijitique , plus ou moiiis étroite, entière-arrondie ou très légèrement échancrée à la base (forma eUiptica Malb). EUDISCOLORES Genev. (R. hedycarpus Focke) Turion brun, rarement glauque, à faces planes ou excavées, rarement canaliculées , glabi^e ou glaljrescent. Feuilles à surface plane, k folioles inférieures distinctement pétiolulées. Infloresc. plus ou moms velue-héris- sée ; pédicelles étalés. Pétales roses ou rosés, largement ovales et insen- siblement rétrécis à la base, ou suborbiculaires et subitement contractés en onglet, contigus. Étamines ordinairement longues et dépassant beau- coup les styles. •f Fleurs roses ou rosées. § Pétales suborbiculaires, subitement contractés en onglet nette- ment accusé. O Turion à faces planes ou peu excavées. Infloresc. à aiguillons droits. R. discolor Genev. ! (an W. et N. ?). R. pseudo-bifrons Sudre, in herb. Mùll. R. cuspidifer /3 vulnerificus Boul. , FI. Fr. (R. et C); Ass. rub. , n°^ 77, 695. Turion d'abord plus ou moms poUu, à la fin glabrescent et brun. Feuilles épaisses, plissées et ondulées sur les bords, à dents fines, aiguës, (•) Lorsque les folioles inférieures sont sessiles et le calice étalé, c'est qu'on se trouve «n présence d'un hybride avec intervention de R. cœsius. 678 BOïAMQUE superficielles , à fomentum plus maigre en dessous que dans le suivant. Pétales roses. Etcunines égalant ou dépassant peu les styles. Jeunes car- pelles poilus. — Établit le passage entre R. ulndfoUus et R. jn'opinquus. AC. — Angers, à Saint-Nicolas; Pruniers. — La Membrolle , Le May (Préaubert). — Saint-Christophe-du-Bois (Genev. in herb. Bon.) R, propinquus P.-J. Muel.; Genev. p. min. p. Turion souvent glauque-cérosineux. Feviilles à tpmentum plus prononcé en dessous que dans le précédent, à dents plus larges et plus profondes. Infloresc. plus hérissée. Étaniines dépassant sensiblement les styles. AC. — Angers, bois de la Haie; Montjean; Tiercé. — Cholet, Torfou (Sudre). O Q Turion à faces profondément excavées ou canali- culées. A Inflorescence à aiguillons nettement crochus. R. hamosus Genev., R. macrostemon ^ hamulosus Sudre. — Turion à faces canaliculées, glabre ou glabresceut. Rameau florifère et infloresc. à aiguillons nettement crochus. Pétales roses ou rosés, suborbiculaires, sulùtement contractés en onglet prononcé. Étamines blanches ou rosulées, dépassant les styles verdâtres, parfois rosés à la base. Jemies carpelles à quelques longs poils. R. — INIontreuil-Belfroy. — Angers (Bor. in herb.). A A Inllorescence à aiguillons droits. R. confluentinus Wirtg. — Turion velu. Folioles rhombées , grossière- ment dentées. Aiguillons des rameaux florifères, longs, droits, déclinés. Sépales longuement cuspidés, surtout dans les flem's terminales. R. — Seiches, route de Montreuil. P Pétales ovales élargis, insensiblement rétrécis à la base. R. macrostemon Focke; Boni., pp. R. robustiis Mûll. — Turion à faces planes ou très peu excavées. Aiguillons des pétioles et du rameau flori- fère fortement falqués ou crochus. Pédoncules étalés. Pétales rose pâle. Étanùnes blanches, dépassant les styles verdâtres. Jeunes carpelles presque glabres. AR. — Angers. — Saint-Christophe-du-Bois (Genev. in herb. Bor.). R. occiduus Boid. et Bouv., Ass. rub. n" 4! O^on 148 nec 610); R. macrostemon /'«'* occiduus Sudre. — Turion glabresceut. Foliole raméale terminale longuement rétrécie, cunéiforme à la base. Pétales rose pâle^ ovales-oblongs, entiers. Étamines l)lanches ou rosulées, dépas- sant les styles rosés. Jeunes carpelles glabres. RR. — Angers à Samt-Nicolas. R. flexicaulis Genev.! ex spécim. herb. Bor., non Monog. 1880; R. Rei- chenbachii Bor. , FI. cent. ; R. macrostemon /'«" fle.xicaulis Sudre. — Turion angideux, à faces planes ou presque planes. Aiguillons des pétioles et des rameaux i)eu comprimés, longs, droits ou déclinés. Foliole caulinaire terminale brusquement et longuement acuminée. Rameau flori- G. BOUVET. — LES RUBUS DE l' ANJOU 6~Q fère flexiieux. Infloresc. à nombreuses g-landes sessiles. Pétales rose pâle, graiifls, légèrement échancrés an sommet. Etammes rosulées, beaucoup plus longues que les styles verts. Jeunes carpelles glal)res. R. — Montreuil-Belfroy. -|--|- Fleurs blanches. § Pétales ovales-oblongs , insensiblement rétrécis à la base. R. pubescens Weih.; R. elatior Focke. Turion à faces légèrement excavées, un peu velu. Foliole caulinaire terminale ovale-oblongue , entière à la base , insensiblement rétrécie au sommet en mi acumen j^rononcé. billoresc. hérissée; aiguillons falqués, à base dilatée, ce qui les fait paraître légèrement crochus ; pédoncnles pri- maires très étalés, à pédicelles étalés-divariqués. Pétales blancs. Etamines blanches beaucoup plus longues que les styles verts. Jemies carpelles glabres. AR. — Angers, Montreuil-Belfroy, Ville vêque. §§ Pétales suborbiculaires, subitement contractés en onglet nettement accusée R. emollitus Sudre. — Turion poilu. Foliole caulinaire terminale large et émarginée. Etamines blanches, dépassant les styles verts. Jemies carpelles presque glabi'es. AC. — Angers, Épiré, etc. R. amiantinus Focke. — Turion glabre. Foliole caulinaire terminale étroitement obovale, plus ou moms cunéiforme, brusquement et longue- ment acuminée. — Pétales blancs ou très légèrement rosés. Carpelles hérissés. R. — Angers, Prmiiers. THYRSOIDEI Genev. Turion à faces profondément canaliculées, glabre. Feuilles caulinaires à folioles inférieures sessiles ou très brièi^ement pétiolulées. Pédoncules ascendants. Pétales blancs, ovales-oblongs, distants. Etamines dépassant les styles. R. thyrsoideus Wimm. — Feuilles insensiblement rétrécies en milong acumen, vivement dentées, en dessous blanches-tomenteuses au soleil, grisâtres à l'ombre. Rameau tlorifère anguleux, glabrescent. biflorescence étroite, à aiguillons petits, déclinés ou falqués. Etamines blanches dépas- sant les styles verddtres. Jeunes carpelles glabres. — Deux formes : R. candicans Weih. — Feuilles caulinaires k folioles toutes étroite- ment ovales-oblongues. C. R. thyrsanthus Focke. — Foliole caulinaire terminale largement ovale-arrondie, plus ou moins en cœur à la base. Infloresc. à aiguillons légèrement falqués, plus robustes, vulnérants. Fleurs plus grandes. Floraison précoce (premiers jours de juin). RR. — Feneu. 68o BOTANIQUE TOMENTOSI Wirtsr. Turion très anguleux, à faces excavées on canaliciilées. Folioles grossiè- rement et largement dentées-lolmlées, les latérales très brièvement pétio- lulées. Pétales blancs. Étamiiies courtes, égalant ou dépassant peu les styles. R. Linkianus (Seringe) Focke"; R. Thuillieri v. pomponius Bor., FI. cent.; R. rolmst us flore pleno Genev. ! — Feuilles i)rotbnclément et double- ment dentées, subincisées. Fleurs doubles. Pétales blancs, légèrement rosés dans le bouton. Étamines blanches, dépassant peu les styles verts. CAiltivé dans les jardins et çà et là naturalisé dans les haies : Les Rosiers; Montsoreau. — Pontigné (Bor. in hei^b.). Vivy. — (Trouillard). R. malacus Sudre. — Plante d'un vert-jaunàtre. Turion glabre, à faces excavées ou canaliculées. Feuilles à dents larges, inégales, peu profondes; foliole terminale ovale, profondément émarginée à la base. Infloresc. à aiguillons génlculés. Fleurs Très fertile. R. — Thouarcé. R. collicolus Sudre. — Turion à faces plus ou moins excavées, glabre ou puljérulent , dépourvu d'acicules et de glandes. Feuilles cauli- naires toutes étroitement ovales-elliptiques. Intloresc. composée, poilue, à aiguillons déclinés ou laïques. Pétales blancs, à onglet fm, étroit. Étamines blanches, égalant les styles verdàtres. Jeunes carpelles i)lus ou moins velus. — Fertile. R. et très localisé. — Yzernay, Maulévrier, Mazières, Cholet (Préau- bert). — Thouarcé, Beaulieu (Bouv.). Obs. — Les R. Linkianus, malacus et collicolus sont intermédiaires entre les R. thyrsoideus et tomentosus v. glabratus. Joints aux hybrides du R. tomentosus qui ont absoluuHMit le même port, ils correspondent à ce que j'avais appelé autrefois R. calcicola. R. tomentosus Borckh. — Turion faible, décombant ou couché, garni d'aiguillons petits, falciformes , aciculés-glanduleu.x et plus abondants vers l'extrémité. Rameau llorifère grêle, anguleux, canaliculé, garni de petits aiguillons crochus. Jaunâtres. Inlloresc. presque simple, étroite, allongée, plus ou moins serrée contre l'axe. Pétales d'un blanc-jaunâtre, montrant une tendance marquée à la duplicature. Etamines blanches, courtes, égalant on dépassant peu les stj-les, verdàtres. Jeunes carpelles glabres, oblongs, peu nombreux, noirs à maturité. La véritable place du R. tomentosus est dans les Heteracaxthi, à côté des Triviales: toutefois, comme il se présente rarement dans nos régions sous sa forme typicpie (tige stérile à aiguillons inégaux, dissemblables, entremêlés d'acicules et de glandes pédicellées), mais, le plus souvent, sous des formes amoindries dans leurs caractères, profondément nu)di- ficcs par leur éloignement du centre de dispersion et se rapprochant de plus en plus des 'Ttn-rsoidei , il est peut-être plus ])ralique, à l'exemple tk' M.M. Boulay et Sudre, de le ranger parmi les J)iscolores. Deux formes : G. BOUVET. — LES RUBUS DE l'aNJOU 68i a GENuixus God., R. tomentosiis canescens Wirtg. — Feuilles cendrées- toinentelleuses en dessus. RR. — Maulévrier, entre la gare et le bourg. |5 Gi.ABRATus God., R. Lloydianus Gene\.— Feuilles glabres en dessus. R. — Maulévrier, entre la gare et le bourg; Mazières. — Soniloire (Bast.). — De Cholet à Mortagne (Genev.). La plante , dans ces localités , ne s'éloigne guère des bords des routes et n'est peut-être que naturalisée ; dans tous les cas , son introduction doit remonter à une haute anticjuité si l'on considère les nombreux hybrides auxquels elle a donné naissance autour d'elle. HETERAGANTHI Dum. Turion à aiguillons dissemblables et inégaux, dispersés sans ordre et entremêlés d'acicules et de glandes pédicellées. APPENDIGULATI Genev. Folioles toutes très distinctement pétiolulées. Inllorescence thATsiforme. Divisions du caHce ordinairement appendiculécs. Carpelles égaux, ni gonflés , ni pruineux. YESTITI Focke, pp. Tiu'ion nettement anguleux, robuste, plus ou moins élevé, arqué-pro- combant, muni d'aiguillons presque égaux, vulnérants, bien distincts des acicules qui sont peu nombreux. Glandes pédicellées rares. Feuilles blanches ou grisàtres-tomenteuscs en dessous, la plupart 5-nées. biflo- rescence très velue , hérissée , mais à peu près dépourvue (Y acicules et de glandes pédicellées. Divisions du calice étalées ou réiléchies après l'an- thèse. Pétales grands, suborl)iculaires ou largement obovés, rarement oblongs. •f- Fleurs blanches. R. separinus Genev. — Turion d'un vert glauque. Feuilles épaisses, coriaces, d'un vert glauque, à dents fines et aiguës; les caulmaires à foliole terminale largement ovale, à base arrondie, entière ou subéchan- crée; les raméales à foliole terminale rhomboïdale ou suborbiculaire. Calice rélléclii. Fleurs grandes. Pétales blancs, ovales. Étamines blanches, dépassant les styles violacés ou rouges. Jeunes carpelles glabres. R. et locaHsé : Montrevault. — Torfou (Sudre). ■|--|- Fleurs roses. R. Mercieri Genev,; R. spectahilis Merc, non Pursh. — Inflorensc. pourvue de quelques glandes slipitées. Turion glabre. Pétales roses, ovales, élargis dans leur milieu, à sonunet aigu. Jeunes carpelles un peu poilus. — Faciès d'un th^n^soïdeus ou d'un Radula dont on serait tenté de le croire hybride. R. — Beaucouzé. 682 BOTANIQUE R. alterniflorus Muel. et Lef. — Tuvion ^'eln. Foliole caulinaire teraii- nale ovalc-obloiigue , longuement acuniinée, larg(Mnent et prorondénient dentée, à surdents inégales, aiguës, divariquées. Calice réfléchi. Pétales roses, ovales-arrondis au sommet, brusquement contractés en onglet. Étamines roses, styles verdâtres. Jeunes carpelles glabres. — Faciès d'un discolor (hedj-carpus) dont il difl'ère surtoxit i»ar la i)résence de quelques rares glandes stipitées sur l'intlorescence. R. — Hauné. R. andegavensis Bouv. ; R. gymnoslachys Genev., p. niax. p.; R. wnbrosus Bor. — Turion poilu. Foliole caulinaire terminale à base et à sommet élargis, ce qui lui domie une forme un peu rectangulaire , brus- quement acuminée. Inflorescence hérissée, pourvue de quelques glandes rares et espacées. Calice réfléchi. Pétales d'un beau rose, suborbiculaires, subitement contractés en onglet. Etamines blanches-rosulées , égalant ou dépassant peu les styles verdâtres. Jeunes carpelles fjoilus. AC. — Angers, Montreuil-Belfroy, Saint -Lambert- la -Potherie, Saint- Jean-de-Linières, Lézigné, Brissac (où elle abonde). — Maulévrier (Genev.). — Lue, Bauné (Bor.). — Chàtelais, Chann>igny-le-Sec (Préaubert). R. oligadenes Sudre. — Turion canaliculé glabre. Feuilles d'un vert foncé en dessus, un peu grisâtres en dessous. Rameaux florifères très allongés. Inflorescence glanduleuse. Fleurs petites. Calice étalé. Pétales distants, rose pâle, échancrés. Etamines blanches, égalant les styles ver- dâtres, rosés à la base. Jeunes carpelles un peu velus. RR. — Angers, route de Saijit-Clément. R. Boraeantis Genev. — Turion à faces planes, poilu., glanduleux, à aiguillons très inégaux, les plus petits aciculaires. Divisions du calice étalées après l'anfhèse. Pétales roses, petits. Etamines rosulées surtout à la base, égalant ou dépassant peu les styles verdâtres, rosés à la base. Jeunes carpelles hérissés. C. — Angers, etc. R. adscitus Genev.; R. hypoleucos Lef. et Muel., non Yest.; R. micans Billot, non Gr. et God. — Turion anguleux, hérissé. Feuilles 3-5-nées. Inflorescence très hérissée de poils brillants, peu glanduleuse. Divisions du calice longuement acuminées en pointes étroites, réfléchies. Pétales rose pâle, oblongs, parfois légèrement échancrés au sommet. Etamines blanches, plus grandes que les styles verdâtres. Jeunes carpelles glabres. AC. — Angers, Montreuil-Belfroy, Beaucouzé, Mûrs, etc. SPECTABILES P.-J. Muel., p. p. Turion anguleux, robuste, élevé, plus rarement obtus ou subarrondi, faible ou couché, muni d'aiguillons très inégau.x; glandes jiédicellées plus ou moins longues, très abondantes. Feuilles 5-nées, i)lus rarement 3-nées. Inflorescence chargée de soies et de glaiules abondantes qui passent en nombreu.x acicules. Divisions du calice réfléchies après l'an- thèse, si ce n'est dans la fleur terminale où elles sont souvent relevées. Pétales ovales, plus ou moins oblongs. G. BOUVET. — LES RUBUS DE l'aXJOU 68S t SPECTABILES VERI Boul. p. p. Feuilles cauliiiaires grises ou blaiiches-tomenteuses en dessous. Fleurs^ l'oses. R. Genevieri Bor. — Divisions du calice longuement appendiculées , éttilées après l'anthèse puis réfléchies. Pétales roses, ovales-spatuUformes, ordinairement échancrés an sommet, hrusquement rétrécis en onglet long- et étroit. Élamines blanches, plus grandes que les stj'les verts, l'osés à la base. Jeunes carpelles hérissés. — Floraison tardive : juillet. AC. L. R. hracteatiis Bor. n'est cju'une forme anormale étal)lie sur des tiges de première amiée à inflorescences d'un développement exagéré et pour- vues par suite de nombreuses bractées. R. discerptus P.-J. Muel. — Feuilles grossièrement et très inégalement dentées, à dents aiguës, cuspidées , divariquées. Divisions du calice très longuement appendiculées. Pétales rose pâle, ovales, à onglet court. Etamines blanches rosulées, dépassant les styles Aerdàtres. Jeunes car- pelles glabres. AC. — Angers, Murs, etc. R. ericetorum (Lef.) Genev. ! R. uncinatus Boul., non Muel. — Divi- sions du calice réfléchies. Pétales roses, ovales, étroits, insensiblement atténués en onglet, très légèrement émarginés au sommet (et non biflde& comme le dit Genevier dans sa description). Étammes rosidées, dépassant les styles roses. Jeunes carpelles glabres. AC. — Angers, Beaucouzé, etc. R. mutabilis Genev. (sait. p. max. p.). — Turion anguleux glabres- cent. Di\,'isions du calice fortement aciculées, étalées, relevées dans la fleur terminale. Pétales rose pâle, oblongs, étroits. Etammes blanches,, dépassant les styles verts. Jeunes carpelles glabres. R. — Angers, en Reculée. f t SPECTABILES SUBGLANDULOSI Boul. Feuilles cauHnaires vertes en dessous. § Flem-s roses. R. Sudrei Bouv. — Turion subarrondi, très velu. Feuilles caulinaires. vertes en dessous , finement et mégalement dentées, k foliole terminale, subrectangulaire, un peu rétrécie à la base, brusquement contractée en acumen. Infloresc. à aiguillons droits , nombreux, robustes. Pétales roses^ ovales-oblongs. Etammes blanches, dépassant les styles verts. Jeunes carpelles glabres. R. — La Membrolle, Montreuil-Belfroy. Semble particulièrement répondre à la description du R. atratus Genev.; mais, connue celui-ci, d'après des échantillons de l'herbier Boreau, ne semble pas différer du R. ericetorum, dont ma plante, au contraire, s'éloigne beaucoup, je préfère, pour éviter toute confusion, lui donner un 684 BOTANIQUE nom et le dédier à M. Sudre, en reconnaissance du précieux concours que n'a cessé de nie prêter cet éminent botaniste. R. melanoxylon Muel. et Wirtg. — Tiivion arrondi, glabre. Feuilles rainéales supérieures blanches en dessous. Divisions du calice peu ou point aciculécs, réfléchies. Pétales roses, largement ovales, subitement contrac- tés en onglet court. Etamines blanches, rosulées, égalant ou dépassant très peu les styles verts, rosés seulement à la base. Jeunes carpelles glabres. RR. — Montreuil-Belfroy. R. scaber Weihe et Nées. — Turion faible, subarrondi, glabrescent. Feuilles à. folioles oblongues-allongées, long-uement acuminées, vertes en dessous. Rameau florifère grêle, à aig-uillons lins, droits. Calice étalé. Pétales rosés. Etamines blanches, dépassant beaucoup les styles roses. Jeunes carpelles hérissés. RR. — Forêt de Longuenée. R. squalidus Genev. — Turion anguleux, muni d'aiguillons très nom- breu.x, à base dilatée et renflée. Foliole caulinaire terminale ovale en cœur, arrondie dans les 2/3 inférieurs, souvent incisée au sommet, termi- née en pointe étroite, allongée, très aiguë. Rameau florifère à aiguillons déclinés ou falqués. Division du calice d'abord étalées, puis réfléchies. Pétales rose pâle, obovales, petits, un peu échancrés. Etamines blanches, dépassant un peu les styles verts. Jeunes carpelles hérissés. RR. - Torfou. R. adornatiformis Sudre, R. rosacens Genev., non Weihe. — Turion faible, rampant, arrondi, poilu. Feuilles vertes, la plupart 3-nées; les raméales à foliole terminale cunéiforme. Fleurs roses. Jeunes carpelles hérissés. RR. — BégroUes , à Bellefontaine (Genev.). §§ Fleurs blanches. R. fuscus Weihe. — Turion anguleux, velu. Infloresc. à aiguillons droits , un peu déclinés. Divisions du calice d'aljord étalées ou réfléchies, puis relevées au moins dans la fleur terminale. Pétales blancs, oblongs- étroits, insensiblement rétrécis en onglet. Étammes blanches, plus grandes que les stj-les verts. Jeunes carpelles poilus. AR. — Bois, lieux couverts : Angers. Bauné, forêt de Chandelais, Montreuil-sur-Loir, forêt de Longuenée, Montreuil-sur-Maine. — La Jaille- Yvon (Préaubert). R. conspectus Genev.; R. foliosus Weihe (sen.su lato). — Turion poilu. Folioles très finement dentées, 3 ou 5-nées. Divisions du caUce d'abord étalées, ])uis réfléchies, quekpies-unes seulement relevées sur le fruit. Pétales blancs. ol>l()iigs, étroits, rétrécis aux deux bouts, un peu aigus au sonunct (mais non Iniides comme le dit Genevier dans sa des- cription). Etannnes dressées, blanches, dépassant les styles roses. iQwnes carpelles d'abord un peu poilus, comme aranéeux, bientôt glabres. RR. — Angers, près du Champ-des-Martyrs et à Saint-Nicolas. P. rotundellus Sudre, in lilt. ; R. sa.\icolus Genev., non Muel. — Turion glabre. Feuilles ternées, vertes sur les deux faces, à folioles termi- G. BOUVET. — LES RUBUS DE l' ANJOU 685 nale ovhiciilaire , ciispidée. Rameau florifère et infloresc. glabrcscents, chargés d'aiguillons noml)reux et très inégaux. Calice à divisions forte- ment aciculées, étalées après l'anthèse. Pétales blancs, ovales-élroits, longuement rétrécis à la base. Étamines blanches, dressées, dépassant les styles blancs. Jemies carpelles un peu poilus. RR. — Beaucouzé. La présence en Anjou de cette plante des montagnes constitue un fait de géographie botanique des plus intéressants. GLANDULOSI P.-J. Muel. Tiu'ion arrondi, faible, déprimé ou peu élevé, mimi d'aigiùllons subulés, peu distincts des acicules et presque inoflensifs. Feuilles vertes en dessous, 3-nées. Divisions du calice redressées sur le fruit. Pétales blancs, petits, lancéolés-étroits. R. tereticaulis P.-J. Muel.; R. Bellardi Genev. ! non W. et N. — Feuilles glauques en dessus. Étamines blanches, plus grandes que les styles verts. Jemies carpelles glabres. RR. _ Bégrolles, à Bellefontaine (Genev.). — Ferrières (Préaubert). TRIVIALES P.-J. Muel. Folioles latérales des feuilles ternées et folioles inférieures des feuilles quinées sessiles ou subsessiles. Inflorescence corymbiforme. Carpelles arrondis, gonflés, souvent peu nombreux par suite d'avortement. R. csesius L. — Turion souvent glauque, arrondi ou obtusément angu- leux à faces conxey.es, faible, tombant ou couché. Feuilles toutes ou la plu- part 3-nées. Calice à divisions redressées sur le fruit. Fleurs blanches. Carpelles ordinairement recouverts d'une efllorescence glauque à maturité {mûre de Fromenteau). — Floraison précoce, commençant dès les premiers jours de juin pour se prolonger jusqu'à l'automne. Lieux frais et couverts, bords des rivières. — C. Deux formes : R. ligerinus Genev. — Foliole caulinaire terminale rhomboïdale. Inflorescence presque inerme. Divisions du calice ovales-lancéolées, étroites, longuement acuminées. Pétales blancs, petits, étroits. — C. l3 GLANDULOSA Focke. — Foliole caulinaire terminale presque aussi large que haute , échancrée à la base. Infloresc. et divi- sions du calice entièrement recouvertes de glandes violettes. — R. : Angers. 7 FLORmus ROSEis; R. Provosti BouL, Ass. rub. n° 8o3, non Genev. — Fleurs roses, fruit noir à maturité. — R. : Les Pouts- de-Cé. R. rivalis Genev.; R. spiculatus Boul. etBouv., Ass. rub. 71°^ 00 et 404 ; R. retrogressus Genev., sait, ex p.; R. corjlifolius Bor. — Foliole caulinaire terminale largement ovale ou suborbiculaire , en cœur à la base, cuspidée au sommet. Infloresc. à aiguillons déclinés. {jS6 botanique fins, aciciiloires. Dh'isicms du calice omics-élargies. FIciii-s très (/T'ondes. Pétales lilancs. très légèremeul rosés, siihorhicnlaires, échancrés au sommet. Étaiiiiiies blanches, rosulées à la base. Styles blanc-verdàtre. — AC. R. densispinus Sudre ; R. dh^ersifolins Liiull. . pp. , non Genev. — Tnrion auffulenx robuste. Rameau florifère et inflorescence chargés d'ai- guillons très inégau.x, les plus grands déclinés ou falqués. Divisions du calice étalées aj)rès l'anthèi^e. Pétales blancs, ovales-suborbiculaires, subi- tement contractés à la base en onglet très court. Etamines blanches, éga- lant les styles verts. Jeunes carpelles glabres. Fruit noir. RR. — Angers, à Saint-Nicolas. HYBRIDES Peut être considérée comme hyl)ride toute plante stérile ou presque stérile qm réunit en elle les caractères de deux espèces bien déterminées. L ll^l)ride se reconnaît encore à son inflorescence plus déwloppée et plus ramifiée, ses boutons plus petits, ses pétales souvent déformés, son pollen enlîn dont les grains sont plus ou moins atrophiés. Il se rencontre le plus souvent i>ar buissons isolés, en compagnie des parents qui lid ont donné naissance. Pratiquement, il n'est pas toujours facile d'interpréter d'une façon sûre et certaine l'origine d'mi hyl>ride. et, à part les cas où il est donné de pouvoir recomiaître sur place les deux ascendants, il faut bien avouer (pie l'on a seulement des probabilités. La dilliculté s'accroît de ce cpie les hyl)rides d'mie même formule sont susceptibles de varier à l'infuii. Voici la liste des hybrides que j'ai rencontrés ou qui ont été signalés jusqu'à ce jour en ;Maine-et-Loire : SILYATICI X SILVATICI R. Questieri X (imbricatus?). — Torfou. R. bipartitus : (macrophylloides?). R. contractifrons Sud. et Bouv. — Angers, à Saint-Nicolas. DISCOLORES X SILVATICI R. Questieri X ulmifolius, R. Galissieri Sudre. — Samt-Pierre-Mont- limart (Genev. in herb. Bor.). — Angers, à Saint-Nicolas. R. bipartitus X ulmifolius, R. lumecticolus Sudi-e et Bouv. — Angers, bois de la Haie. P L.VTiFOLius Sudre. — .\ngers, entre la route d'Épinard et celle d'Avrillé (Préaubert). R. thyrsoideus X (consobrinus?). — Angers, à Saint-Nicolas. R. vendeanus X clethraphilus: R. choletensis Sudre; R. Schultz-ii Genev. p. p., non Rip. — Le ]\Iay (Genev. in herb. Bor.). Le R. vendeanus Genev se rencontre tout près de là, dans les Dcux-Sèvrcs, et non loin des limites tlu département. G. BOUVET. — LES RLBUS DE l'aX.IOU 687 DISCOLORES X DISCOLORES R. propinquus X (ulmifolius ?) , R. propiiiqiiiformis Sudi-e et Bouv. — Angers, à Saint-Nicolas. — Cliulet (Préaubert). R. propinqaus X emoUitus, A', rigidispiniis Siidre et Bouv. — Seiches, route de M.Mitreuil-sur-Loir. R. [thyrsoideus (candicans)?] X ulmifolius , R. siibsterilis Sudi'e. — Maulévrier. R. [thyrsoideus (thyrsanthus) ?] X (propinquus?). — Maulévrier. R. ulmifolius X tomentosus (canescens), R. piilveriilentus Sudre. — Chalonnes (Bast. in hevb. Hort. andeg.). R. ulmifolius X Lloydianus. — Hybride collectif dans lequel on peut distinguer deux groupes : R. ulmifolius X Lloydianus, R. nothiis Sudre. — Soinloire (Préau- bert). R. Lloydianus X ulmifolius, R. roseipetahis Sudre. — Aubigné, Maulévrier, Mazières. — Toutlemonde (Genev.). R. propinquus X tomentosus (canescen;), R. hololeiicos Genev. — Chuk'l (Genev.). R. propinquus X (Lloydianus?). — Champigny-le-Sec (Préaub.). R. (emoUitus?) X Lloydianus. — [Maulévrier. R. thyrsoideus (candicans) X Lloydianus, R. polyanthiis P.-J. Muel. — Mazièi-es. — Cholet (Genev. iii lierb. Ror.J. APPENDICULATI X SIL^ ATICI R. clethraphilus X adscitus, R. clathrophiloides Sudre, R. Salteri Genev. pp. — Torfou (Genev.). R. (adscitus?) X consobrinus. — Angers, en Reculée. R. (elumbis?) X (hebecaulis)? — Chenillé-Changé (Préaubert). APPENDICULATI X DISCOLORES R. Boraeanus X ulmifolius, R. pseudo-Borœamis Sudre et Bouv. — Hybride collectif dans lequel on distingue : R. Boraeanus X ulmifolius. — Angers, bois de la Haie. R. ulmifolius X Boraeanus. — Angers, au Champ-des-Ma^t^Ts. R. adscitus X ulmifolius, R. Tomsainti Sudre. — Bégrolles, Saint- Christophe-du-Bois, Érigné (Genev., in herh. Bor.). R. adscitus X propinquus, R. mlne?'ithrsiis Sudre et Bouv. — Epiré. — Saint-Cliristophe-du-Bois (Genev., m lierb. Bor.). 688 BOTANIQUE R. Genevieri X ulmifolius, R. breviatus Sudre et Bouv. — Angers, au Chanip-des-Martyrs. R. pubescens X (Genevieri?). — Épiré. APPENDICULATI X APPENDICULATI R. mutabilis X adscitus, R. deceptorius Sudre. — Saint-Lég-er-des- Bois (Genev., in herly. Bor.). R. (ericetorum?) X (Genevieri?). — Angers, à la Paperie (Préau- bert). GLANDULOSI X DISCOLORES R. ulmifolius X tereticaulis, R. miicronulatiis Boul., Riib. galL, n" 13;. — Angers. TRIVIALES X SUBERECTI R. (plicatus?) X caesius, R. dissimulans Lindeb. — Montfaucon (Genev. in herb. Bor.). R. nitidus (integribasis) X csesius, R. scabvoi^iformis Sudre. — Jalais (Genev., in lierb. Bor.). TRIVIALES X SILVATICI R. imbricatus X caesius, R. imbricatiformis Sudre. — Saint-Chris- tophe-du-Bois (Genev., in herb. Bor.). R. macrophyllus X caesius, R. Balfoiirianiis Blox. — Montreuil- Belfroy. R. caesius X pyramidalis. — Le Longeron (Genev., in herb. Bor.). R. (bipartitus ?) X caesius. — Angers , à Saint-Nicolas. R. caesius X consobrinus, R. divexiis Sudre. — Angers, à Saint-Nico- las. — Saiute-Geninies-sur-Loire (Genev., in herb. Bor.). TRIVIALES X DISCOLORES R. caesius X ulmifolius. — Les formes résultant du croisement de ces deux espèces sont très fréquentes et aussi très diverses, les mies se rapprochant du R. cœsius, les autres du R. ulmifolius. Cela était à prévoir étant donné que les parents , le second surtout , sont eux-mêmes très répandus et extrêmement variables. Deux groupes : R. caesius X ulmifolius, R. assurg-ens Boni, et Bouv. (sensu amplo). — Plantes souvent grêles, se rapprochant du R. cœsius, fréquemment de la variété ligerinus. Turion glauque, à aiguillons faibles, souvent inégaux. Feuilles caulinaires ordinairement 3-nées, finement dentées, et vertes en dessous. Fleurs blanches ou rosées, plus rai*ement d'un rose vif. — CC G. BOUVET. — LES RUBUS DE l' ANJOU 689 R, ulmifolius X caesius, 7?. ainpUfoUatas Siidre (sensu amplo). — Formes vigoureuses, plus rapprochées du R. ulinifolius. Turiou robuste, glauque, à aiguillons forts, comprimés, presque égaux. Feuilles caulinaires amples , 5-nées , grises-tomenteuses eu dessous , à foliole terminale grande et large, à denticulation moins Une que dans le groupe précédent. Calice ordinairement étalé. Pétales grands, suborbiculaires , souvent roses, échancrés au sonmiet et rappelant par la forme ceux du R. cœsiiis var. ri^^alis. — CC. R. propinquus X caesius. — Lézigné , l)ords du Loir. R. caesius (spiculatus ?) X (hamosus ?), R. macropetahis Ass. vub., n° 799. — A'illevèqne , vallée du Loir. R. caesius X macrostemon. — Hybride collectif; deux formes : R. macrostemon X caesius, R. apertioniim Lef. et Muel. — Angers, Saint-Nicolas. R. caesius X macrostemon, R. centiformis K. Frid., R. diiricoriiis Genev. — La Possonnière (Préaubert). R. thyrsoideus (candicans) X caesius. — Angers. TRIVIALES X APPENDIGULATI R. Boraeanus X caesius, R. ohrotundatus Sudre. — Beaucouzé {Ass. riib. n° 5{)o). R. ericetorum X caesius, R. dissolntm-; Sudre. — Beaucouzé (Bor. in Jierb.). R. Genevieri X caesius, R. deceptiosns Sudre. — Angers, Avrillé Genevier). R. caesius X melanoxylon, R. decoratiis Sudre et Bouv,, R. ferox Bor. pp. — Montreuil-Belfroy. R. fuscus X caesius. — Petit-Montrevault (Genev., in herb. Boi-.) R. caesius X conspectus. — Angers, bois de la Haie. Au total 60 espèces distinctes , bien caractérisées et susceptibles d'être reconnues à première vue sur le terrain par im botaniste non prévenu et tant soit peu exercé , plus 5o hybrides dont l'origine . au moins en ce qui concerne l'un des ascendants , n'est le plus souvent que soupçonnée. Les nombreux points de doute (?) qui figurent dans ce travail disent assez tout ce qui reste à faire. Néanmoins je persiste à croire qu'en multipliant les récoltes, en apportant le soin voulu clans le choix et la préparation des échantillons, en notant sur le vif les caractères fugaces tirés des organes floraux , on finira par jeter un peu de lumière sur ces formes affines et en rendre l'étude, sinon facile, du moins plus précise et plus abordable. 44 690 BOTANIQUE M. W. RUSSELL (*> A Paris SUR LES MIGRATIONS DE LA CYTISINE CHEZ LE CYTISUS LABURNUM [583.32] — Séance du S août — Le Cytisus Laburnum L {Lahiivnum vulg-are, Griseb., Cytise commiim. Cytise à grappes, Faiix-Éhénier, Aiihoiir) est un arbris- seau fréquemment planté dans les jardins et que Ton rencontre ]3ar- fois à létat suljspontané dans les terrains calcaires de la région parisienne (*=^). C'est une plante dangereuse qui, chaque année, détermine des empoisonnements tant sur l'espèce Immaine que sur les animaux domestiques. Son principe actif est la Cydisine alcaloïde découverte par Chevalier et Lassaigne (***) et dont les propriétés chi- miques ont surtout été étudiées par A. Husesmann et Marmé (****). Les expériences physiologiques de Cornevin (*****) corroborées plus tard par les recherches microchimiques de M. Guérin (******) ont montré que dans les feuilles et les fruits la matière vénéneuse était susceptible d'éprouver des déplacements très remarqual)les au cours de la végétation; chez les fi'uits en particulier, l'alcaloïde, très abondant au début dans tous les tissus parenchymateux, disparaît ensuite au fur et à mesure, pour se concentrer définitivement dans la graine. Dans un travail récent (*******) j'ai montré que pendant le repos hivernal la cytisine s'accumide en très grande quantité dans les tiges et surtout dans les courts rameaux destinés , au printemps , à porter les inflorescences; il m'a paru intéressant de rechercher si, à la reprise de la végétation, la teneur en alcaloïde se maintient dans ces (*) Ce travail a été fait au Laboratoire de Botanique de la Faculté des Sciences de Paris. (•') Le Cytisus Laburnum est très abondant aTix environs de Gasny (Eure) et dans les bois voisins de Provins (Seine-et-Marne). (***) CuEVALiER et Lassaignu : Journal de Pliarniaric. t. IX, p. 254. /..».) j^ HcsEMANN et Marmk : Zcitch.,/. Cheinir, 18(15, p. lOi. /*«».»x Cornevin : Des plantes vénéneuses, Paris, i88;. .,»...«) Gl-éiux. Recherches sur la localisation de TAnagyrinc et de la Cytisine: /^h//. de la Soc. Bot., i8i)5, pp. 4*'^-432- /«.♦«••s -^Y. Rls?kli.. Du siè^'^e de quel([ucs principes actifs des végétaux pendant le repos hivernal : Hernie Générale de liolanique, iijo3. "\V. RUSSELL. — LA CYTISINE CHEZ LE CYTISUS LaBUUACJM 69I régions, identique à celle que l'on observe en hiver ou bien au con- traire si elle va en diminuant. On peut, pour mettre en évidence la présence de la cytisine dans les tissus , employer des réactifs donnant des précipités comme l'acide phosphomolybdique et l'iodure de potassium iodé ou bien des réactifs colorants tels que le perchlorure de fer, le réactif (*) de JNIandelin, l'acide sulfurique et l'alcool sulfurique. Les réactifs qui précipitent la cytisine permettent de déterminer exactement le lieu de localisation de ce principe actif, mais les réac- tifs colorants offrent l'avantage de reconnaître, d'après la plus ou moins grande intensité de la teinte obtenue, quelle est la teneur, en alcaloïde, dans une région donnée. J'ai employé de préférence, pour mes recherches, l'iodure de potassium iodé additionné de carbonate d'ammonium et l'alcool sul- furique ; en ce qui concerne ce dernier réactif, j'ai eu recours au procédé opératoire suivant : Je dépose sur une lame porte-objet une goutte de réactif composé à partie égale d'alcool absolu et d'acide sulfurique concentré, j'y plonge un certain nombre de coupes faites dans des organes recueillis à diverses époques de l'année (**), puis je chauffe la plaque pendant quelques secondes en la plaçant au- dessus de la flamme d'vni bec Bunsen. Les préparations observées ensuite au microscope ne tardent pas à présenter une coloration dans les cellules à cvtisine ; cette coloration varie du rose au rouffe ponceau, selon la proportion de l'alcaloïde. On n'obtient aucune coloration des coupes après un séjour d'une demi-heure dans l'alcool tartrique d'Errera. J'ai suivi, pour ainsi dire pas à ])as, la marche de l'alcaloïde depuis le mois de février jusqu'au mois d'octobre et je suis arrivé à cette conclusion que la cytisine, dans toutes les parties de la plante, est sovmiise à des migrations en i^elation avec la marche de la végétation. Si l'on considère, en particulier, une branche de deux ans au début du printenq)S. on constate que la cytisine accumulée dans tous les tissus parenchymateux des courts rameaux prend une belle colora- tion rouge ponceau en présence de l'alcool sulfurique ; quelque temps après, alors que les feuilles commencent à s'épanouir, la teinte observée est seulement rouge carmin ; plus tard elle pâlit encore et (•) Ce réactif, qui a été employé par Rosoll (Sitz d. Akad. de Wiss. d. Wien, 1884) dans ses i-cclierches sur la localisation de la cytisine, a l'inconvénient de désorganiser rapi- dement les tissus et de déterminer ainsi des phénomènes de dififusion qui gênent sin- gulièrement les recherches. (**) La cytisine n'est pas détruite par la dessiccation, de sorte que l'on peut, sans inconvénient, opérer sur des matériaux desséchés. 6g2 BOTANIQUE à la fin de la floraison on ne distingue plus qu'un léger ton rosé. Si alors on précipite la cytisine à l'acide de liodure de potassium iodé, on remarque qu'il ne se forme de précipité que dans le philloderme et dans quelques éléments libériens. Dans les entre-nœuds des longs rameaux, on obsei^ve de même une semblable diminution dans l'intensité des colorations et des pré- cipités. Les jeunes pousses renferment au début de la cytisine dans toutes leurs parties, mais en quantité assez faible sauf dans le méristème et les cordons j)i*ocambiaux de leur bourgeon terminal; l'alcaloïde disparaît bientôt de la moelle, puis de l'écorce, pour se maintenir dans le liber où il apparaît de x^lus en plus abondant avec l'âge; vers la fin de mai, la cytisine se montre à nouveau d'abord dans l'épi- derme i^uis dans les cellules périphériques de l'écorce ; elle fait ensuite son apparition dans les cellules voisines du péricycle et. au commencement du mois d'août, elle a complètement envahi l'écorce, les cellules parenchymateuses du péricycle, le liber et souvent même la zone périméduUaire. Les mêmes phénomènes s'observent dans les rameaux des années précédentes qui récupèrent peu à peu le principe actif qu'ils ont perdu au moment de l'entrée en végétation. Les feuilles jeunes renferment de la cytisine dans leur liber et dans leur mésophylle ; lorsqu'elles avancent en âge, le tissu lacuneux s'appauvrit singulièrement et vers le i5 juillet, seul le tissu en palis- sade et le liber offrent une légère coloration en présence de l'alcool sulfurique. Néanmoins l'alcaloïde persiste jusqu'au moment de la chute des feuilles; ce n'est que lorsque celles-ci commencent à jaunir, que la cytisine a totalement disparus. Le calice et la corolle , très vénéneux au moment de l'anthèse , ne contiennent plus de cytisine lorsqu'ils sont flétris. Les fruits, comme d'ailleurs l'a démontré M. Guérin, sont au début ti'ès riches en cytisine, puis j)eu à peu s'appauvrissent à mesure que les réserves s'accumulent dans les graines ; l'alcaloïde disparaît d'abord de la région externe du péricarpe, puis de la région interne et se montre fort longtemps dans le mésocarpe, particulièrement dans le liber des faisceaux. Les racines sont en été comme en hiver bourrées de grains d'ami- don, de sorte que les réactions de la cytisine sont en grande partie masquées si l'on emploie le réactif iodé ; avec l'alcool sulfurique, on peut constater que le maximum d'intensité de coloration a'oh- serve à la fin de l'automne ; dès le mois de février la teneur en cyti- sine commence à s'aiTaiblir. V. DUCOMET. MALFORMATION DE FRAISES G93 En résumé le principe toxique du Cytisus Laburnum éprouve des variations saisonnières en relation avec la végétation : il diminue au printemps pour se porter dans les régions en voie d'évolution puis augmente de nouveau pour atteindre son maximum de con- centration pendant le repos hivernal. M. V. DUCOMET Professeur à l'Ecole d'Agriculture de Rennes INFLUENCE DE LA FÉCONDATION SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ANNEXES DU FRUIT A PROPOS D'UNE MALFORMATION DE FRAISES [:>S;i.L>a :()>:>. iyi;| — Séance du 6 août — Il n'est pas rare de voir les fraisiers à gros fruits (F/rigaria chi- lensis et hybrides de Virginiana) présenter sur leurs i^seudoearpes réceptaculaires des malformations qui les font étrangement ressem- bler à certaines cécidies ou à des faseiations de sommités. Nous avons essayé de représenter quelques-uns des cas les plus typiques. FiG. I. — Types de fraises (2/3 nat.) montrant le parallélisme de développement des akènes et du réceptacle. 694 BOTANIQUE On voit que le pseudocarpe y est profondément mamelonné au lieu de présenter une surface réo-ulière et des contours nettement arrondis comme dans les formes sauvages ou même dans les formes de culture perfectionnée bien venantes. Ces mamelons sont tantôt nettement détachés de l'ensemble, tantôt au contraire ils résultent d'une sorte de fragmentation superficielle d'une bosse de grande taille. Les mamelons séparés sont particulièrement intéressants à obser- ver en ce sens que leur sommet est toujours occupé par quelques rares akènes, un seul parfois, mais toujours bien développés; les dépressions, au contraire, sont occupées par des akènes avortés, pressés les uns contre les autres comme à l'état de jeunesse, les parties mamelonnées tendant à les recouvrir. Ailleurs, le pseudocarpe tend à prendre la forme de pyramide à arêtes mousses. Le même phénomène se constate : les crêtes sont recouvertes d'akènes gros et très distancés, les faces déprimées par des akènes serrés et avortés. Ailleurs encore , cas le plus fréquent , les akènes fertiles sont distribués suivant un réseau surélevé ; ce n'est qu'une atténuation du premier cas. Il convient d'ajouter que les parties en relief, plages à akènes fer- tiles, se trouvent de préférence localisées sur la face opposée au sol, la mieux exposée à la lumière , là en somme où la fécondation se fait dans les meilleures conditions, par les tenq)s pluvieux surtout. La pigmentation d'abord, la maturation ensuite, apparaissent tou- jours plus tôt dans les régions à akènes fertiles, alors même que les régions à akènes stériles sont également exposées à la lumière. Par- fois même le pigment n'apparaît jamais dans ces dernières. Une relation très nette existe donc entre le développement des akènes, l'élaboration du pigment et la maturation du su]iport récep- taculaire, ces deux derniers phénomènes étant en réalité indépen- dants quoique marchant de pah^ dans les conditions normales. De niême une relation très nette s'observe entre le développement du réceptacle et celui des akènes qu'il supporte. Chaque akène fer- tile, et par le fait même qu'il est fertile, exerce donc sur son support une sorte d'attraction qui en détermine l'hypertrophie d'une inten- sité et d'une ampleur variajjles avec la race et les conditions d'am- biance. Mais il n'en est pas moins vrai cpie la carnosité du réceptacle se constate aussi, quoique à un degré bien moindi'c, dans les régions où nul akène fertile n'existe. V. DUCOMET. — MALFORMATION DE FRAISES Gqo Le réceptacle nous apparaît donc comme un ensemble divisible en deux portions : L'une purement végétative , à développement indépendant du car- pelle ; L'autre indissolublement liée à l'évolution de ce carpelle jouant le rôle d'excitant physico-chimique. C'est à cette dernière qu'appartient la majeure partie, sinon la totalité du pigment. Que l'on suppose une coulure complète dans ce gynécée dialycar- pelle , on arrive forcément à un état de dégénérescence de la partie comestible, dégénérescence en tant que volume, constitution chi- mique, rapidité d'évolution. C'est là un point important au point de vue pratique. La coulure est, dans le cas qui nous occupe, sous la dépendance des conditions d'ambiance ; l'horticulteur doit s'attacher à la réduire au minimum possible s'il veut obtenir des fruits de bonne qualité, de fort volume, de forme régulière. Ces observations , que beaucoup ont dû faire , sont aussi extrême- ment intéressantes au point de vue de la Biologie générale. On sait depuis longtemps que l'évolution du carpelle et des annexes faisant corps avec lui (pomme) est liée à l'évolution de l'ovule. Après avoir admis que la fécondation n'intéressait que l'ovule, on a été amené à reconnaître le rôle excitant de l'élément mâle vis-à-vis du carpelle. La pratique a bénéficié de l'observation attentive des faits : on sait que la coulure de la vigne ou plus exactement le inillerand, se prévient par le croisement assurant une meilleure fécondation. Une grappe est dite millerandée quand elle ne présente que quelques grains de la grosseur normale, la plupart étant petits, mal venants, quoique pouvant arriver à maturité et présenter des graines fécondes. La pollinisation artificielle, le croisement, les porte à la grosseur nor- male ; il y a donc une influence exercée par l'élément mâle, non pas seulement sur l'ovule, mais sur l'ensemble du fruit. On peut citer un fait plus typique encore au sujet de cette excitation du carpelle par le mâle, c'est la pigmentation directe par croisement de fi^uits inco- lores ; la constatation en a été faite parfois chez la vigne : ce n'est autre chose que de l'hybridation. Nous ne devons pas passer sous silence quelques observations que l'on pourrait considérer peut-être comme la contre-partie des précé- dentes alors qu'elles doivent s'y ajouter pui'ement et simplement. Le Corinthe blanc, le Chasselas des Demoiselles sont des raisins sans pépins, résultat d'une infécondation selon l'expression de Car- rière ; les grains en sont toujours plus petits que dans le type cor- respondant fécondé. Donc le carpelle comme le pseudocarpe du 696 BOTANIQUE fraisier, examiné dans les conditions normales de développement,, comprend deux parties : nue partie somatique capable de se déve- lopper seule et une partie à évolution liée à l'évolution de l'appareil reproducteur. Le même raisonnement doit s'appliquer au cas de divers hybrides , incapables de donner des graines , chez lesquels le fruit noue à peine alors que chez d'autres tout aussi inféconds le fruit j)eut se développer presque aussi bien que chez les parents. La por- tion somatique, végétative, l'emporte simplement ici au point de paraître exclusive. Nous ne rappelons brièvement ces faits connus que x^our les rap- procher du cas de la fraise bien fait pour nous porter à élargir le sens du mot fécondation et partant de l'hybridation. L'Hybridation nous apparaît aujourd'hui d'une extrême complexité ; contrairement à ce qui a été longtemps professé, elle ne s'exerce pas uniquement dans l'embryon. Hugo de Vries a insisté avec raison sur l'hybridation de l'albumen, de l'ensemble actif de la graine par con- séquent, ce qui trouve son explication dans les belles découvertes de Nawaschin et Guignard au sujet de la double copulation chez les Phanérogames angiospermes ; mais il nous est impossible d'aller plus loin quant à l'explication rationnelle des faits. Et cependant il y a parfois hybridation de carpelle, comme on l'a vu plus haut à propos de la vigne (*). Or, l'élément mâle agit sur le réceptacle du fraisier comme sur les carpelles de vigne susceptibles d'hybridation directe. Pourquoi ne pas admettre la possibilité d'hybridation de ce réceptacle ? Mais ce réceptacle est un organe tout autant somatique que reproducteur, si ce n'est davantage ! On se rappelle les discussion nombreuses que fit naître chez les zoologistes la doctrine de l'infection de la mère ? Je ne puis me défendre de croire en la possilnlité d'hybridation de l'appareil végé- tatif chez les Plantes. Ne serait-ce pas une marche vers l'infection de la mère ! (*) On pourrait citer d'autres exemples (Agave atlcmiata de François Gaulain, etc.)- V. DUCOMET. — LA BRUNISSURE DES VÉGÉTAUX 697 M. V. DUCOMET Professeur à l'Ecole d'Agriculture de Rennes LA BRUNISSURE DES VÉGÉTAUX ET SA SIGNIFICATION PHYSIOLOGIQUE [632J — Séance du 6 août — On sait que le terme de Briinissiire a été introduit en pathologie végétale par Pastre en 1891 pour désigner une affection des feuilles de vigne que l'auteur attribue à une cochenille (*). La maladie n'a cependant été nettement caractérisée que Tannée suivante par Viala et Sauvageau qui , les premiers , ont montré l'ac- cumulation de globules ]>runs plus ou moins tanniques dans les cellules épidermiques , ce pendant que les éléments du mésophylle présentent après action de l'eau de Javel un réticulum qu'ils n'hé- sitent pas à considérer comme l'appareil végétatif d'un nouveau myxomycète : Plasmodiophora vitis (**). La question est reprise en 1894 par Debray qui regarde les glo- bules bruns comme des kystes du parasite alors que Viala et Sauva- geau les tenaient pour des produits d'excrétion de leur Plasmodio- phora. Comme d'autre part le prétendu parasite cheminerait , non seulement à l'intérieur des tissus selon l'avis des premiers auteurs, mais aussi à l'extérieur où il prendrait fréquemment une apparence gommeuse, Debray croît devoir en faire sous le nom de Pseudo- commis vitis, le type d'un nouveau groupe des Pseudocommidés voisin des Vampj'rcllcs (***). C'est ce nom qui a généralement prévalu, bien qu'à peu près à la même époque, Ugo Brizi ait regardé les plasmodes de Viala et Sau- vageau comme des protozoaires (****) et que Prunet ait rattaché la Brunissure à cet ensemljle disparate d'affections (anthracnose ponc- tuée et défor^mante , gommose bacillaire , gélivure , coup de pouce, roucet, mal nero) qu'il désigne sous la rubrique commune de Mala- is) Pvogrca Agricole. (•*) C. R. Ac. Se. et Journal de Bot. 1892, Ann. Èc. d'A^r. de Montpellier i8q3. {•**) Revue de Viticulture. (**•*) Malattie Crittogainische delta Vite, iSgS. (5g8 ■ BOTANIQUE die ponctuée ou Chj'tridiose , ragent pathogène étant pour lui une Chytricliacée : Cladochj^triiim viticoliim (*). Avec De])ray le cadre s'élargit. Il faut bien reconnaître, en efïet, que si les globules bruns intraé- pidermiqucs, forme de repos de son Pseudocommis, que tout obser- vateur, même superficiel, peut aisément constater chez la vigne, ne se rencontrent pas partout avec la même constance ou la même netteté, il n'en est pas moins vrai que des phénomènes du même ordre peuvent apparaître chez beaucoup d'autres plantes. Debray a trouvé le nouveau parasite sur plus de 70 végétaux appartenant à 40 familles des plus diverses, partout, dit-il, où il Va cherché lorsque les conditions étaient favorables à son développement (**). Frappé de sa présence dans les groupes les plus variés , tant chez les Cryp- togames que chez les Phanérogames dont la presque totalité pour- rait être envahie (***) il n'hésite même pas à le considérer comme capable de s'attaquer aussi au règne animal. Il l'aurait rencontré chez les altises et serait fort porté en croire à sa présence chez des êtres plus élevés en organisation, les oiseaux par exemple où il aurait été signalé sous les noms erronés de Chj'tridiopsis socius (Schneider) ou Molluscum contagiosum (Pio Mingazzini) (****), Cette extraordinaire ubiquité bien faite pour nous étonner n'a cependant pas surpris tous les botanistes. Pour Roze en effet (*****) , la plupart des maladies de la vigne et autres végétaux que nous considérons — sur la foi d'expériences d'inoculations soigneusement conduites — comme produites par des organismes bien définis, ne seraient autre chose que des attaques de Pseudocommis ; tout ce que les jardiniers appellent hîmlures et coups de soleil seraient dans le même cas (loc. cit.) Roze dépasse donc Debray dans ses idées les plus extrêmes , bien que cependant quelques-unes de ses affirmations, celle par exemple qui consiste à regarder la couleur foncée du cœur des arbres comme le résultat d'une attaque de Pseudocommis soient bien faites pour nous porter à douter de la valeur de ses déterminations. La nature parasitaire de la Brunissure avait d'ailleurs été admise par divers auteurs avant la généralisation quasi-absolue de Debray et Roze. (•) Prog. agr. i8i)4. .(•• el •") Loc. cit. ("••) Rei\ Vit. i8i»5 et Bull. Soc. liât. i8<)8. <""•) C. R. t CXXIV et CXXV ; Bull. Soc. Myc. 1897. V. DUCOMET. — LA BRUNISSURE DES VEGETAUX 699 Cuboni {^■) et Yoglino (**) en Italie , Moritz et Busse (***) en Alle- magne se sont, dès le début, ralliés à l'opinion de Viala et Sauva- geau qui cependant ont alïirmé sans aucune preuve. Il en a été de même en Angleterre pour Massée (****) et Abbey (*****) qui ont décrit chez les orchidées et solanées deux nouvelles espèces de Plasino- diophora. Mais il devait fatalement se produii-e ce que l'on constate toujours dans les cas d'allirmation sans preuve ; beaucoup de botanistes ne pouvaient tarder à se laisser entraîner vers le doute ou même la négation. Dès 1894 en effet, Cavara croît devoir abandonner toute idée de parasitisme à propos de la Brunissure de la vigne pour conclure à une altération chimique du contenu des cellules provoquée par de brusques cliangements de conditions météoriques (******). Quelques semaines après la création de son Plasmodiophora Orchidis qu'il avait considéré comme la cause déterminante de la maladie du Spot, Massée établissait expérimentalement que le mal était dû à une trop grande quantité d'eau et une quantité insuffi- sante d'air en contact avec les racines et à des arrosages ou des aspersions coïncidant avec des températures élevées, amenant une précipitation du tanin et autres substances, parfois même une désorganisation complète des cellules (*******). De même Ray, en 1896, étudiant une maladie de la canne à sucre attribuée par Roze et Debray au Pseudocommis vitis déclare avoir bien vu les curieuses ^iroductions considérées comme des plasmodes ou des kystes, mais il est plutôt porté à les considérer comme le résultat d'une dégénérescence du contenu cellulaire (********). De même encore, Gutfroy n'ayant jamais pu distinguer de plasma autre que celui de la plante dans tous les cas de Brunissure étudiés par lui, se croit autorisé à regarder la maladie comme la consé- quence d'une réaction de la cellule vivante contre une cause nui- Tel était l'état de la question au moment de la publication de mon <*) Bollct. di Xotizic oc. Myeol., 1898. 700 BOTANIQUE mémoire de 1900 (*). Deux écoles opposées se trouvaient en pré- sence : Pour les uns la Briinissiire était une maladie parasitaire ; pour les autres elle était de nature phj^siologique. Faisant abstraction du spot des orchidées, il faut bien reconnaître que les preuves manquaient aussi bien d'un côté que de l'autre. Si les adversaires de la théorie parasitaire se sont trop étroitement cantonnés dans le domaine de l'observation pure et simple, Viala et Sauvageau, Debray et Roze , Prunet et Brizi ont de même commis une imprudence grave en se basant uniquement sur des analogies pour affirmer l'existence d'un organisme. Le problème était donc simplement posé. C'est à la recherche de sa solution définitive que je me suis appliqué. Il est de toute évidence qu'avant d'affirmer il aurait fallu prouver que les productions sjîéciales intra ou extracellulaires, plasmodes ou kystes, constituaient bien une individualité biologique, pom* arriver ensuite à en établir le parasitisme. Je sais bien que les ]iar- tisans du plasmode résistant à l'eau de Javel me parleront d'impos- sibilité d'isolement et partant de culture, toutes choses à priori indispensables à la démonstration de son activité propre, de son accroissement et de sa multiplication. Mais en serait-il de même pour les kystes intraépidermiques ou les formes externes de voyage décrites ^av Debray ? Admettons d'ailleurs l'impossibilité d'isolement ou en cas d'isole- ment possible rimpossil)ilité de culture (**). Mais il est un moyen capable de nous amener indirectement à la solution du problème, moyen qui nous permettra en même temps de répondre à la deuxième partie de notre proposition : un organisme étranger se trouve dans un tissu, cet organisme est-il parasite ? J'ai parlé d'inoculations méthodiquement conduites (inoculation de tissu malade à des organes sains avec ou sans stérilisation préa- lable, etc.). J'ai fait de très nombreuses expériences de cette nature, non seulement chez la vigne, mais chez une foule d'autres végétaux sans obtenir le moindre résultat positif. Ces essais négatifs ne me paraissant pas suffisamment concluants, j'ai cherché autre chose. Et je suis arrivé sans peine, guidé d'ailleurs en cela par les expé- riences de Massée sur le spot des Orchidées, à produire les globules intraépidermiques avec une remarquable netteté, en même temps (•) Recherchai sur In Bninissiire des iv^v/ah.v, in Ann. Éc. d'Agr. de Monlpcllier. (**) J'ai totalement écliouo dans ces essais de culture comme Ray d'ailleurs, à propos de la canne à sucre (op. cit.). V. DUCOMET. — LA BRUNISSURE DES VEGETAUX ^OI que les productions externes de Debray, ce pendant que le réticulum à allure plasmodique de Yiala et Sauvageau se maintenait très abondant dans les cellules chlorophylliennes après action de l'eau de Javel. Il serait trop long, je crois, d'entrer dans le détail de mes expé- riences de production de cette Brunissure artificielle (par frottement, pression, échauffement , refroidissement) identique par tous ses caractères macroscopiques et microscopiques à la Brunissure natu- relle. Je ne ferai que renvoyer à mon mémoire de 1900 pour retenir simplement les trois résultats essentiels suivants : i) Les productions caractéristiques du mal et susceptibles d'iso- lement ne peuvent se cultiver ; 2) Les inoculations méthodiquement conduites (*) ne donnent aucun résultat; 3) Tous les caractères macro et microscopiques de la maladie peuvent être réalisés expérimentalement par des moyens physiques en opérant dans les conditions d'asepsie les plus rigoureuses. Conclusion logique et forcée : La Brunissure est un simple accident pJiysiologique. Le Plasmo- diophora (vel Pseudocommis) viiis doit disparaître en tant qu'or- ganisme vivant. * Quelle est maintenant la nature intime des désordres observés au sein des cellules malades ? J'ai longuement insisté en 1900 sur leur processus. J'ai particuliè- rement insisté sur ce fait que le réseau intracellulaire à allure plas- modique de yi*ala et Sauvageau n'était au fond nullement caracté- ristique de la Brunissure. Les recherches j)oursuivies depuis cette époque n'ont fait que confirmer en les précisant mes premiers dires, à savoir que ce réseau peut se trouver dans les cellules malades pour les causes les plus diverses, qu'il n'est autre chose que le résultat d'une exagération du réseau simple ou fragmenté apparaissant à un moment donné dans les cellules parfaitement saines sous l'action de l'eau de Javel, que sa production est en grande partie le résultat de l'action du réactif sur un contenu cellulaire altéré. O II n'est pas inutile d'insister sur cette question de méthode, Debray et Roze pré- tendant avoir réalisé des infections. N'ayant pas laissé de témoins ou n'ayant pas pris la précaution cependant élémentaire d'opérer comparativement avec du tissu malade stérilisé ou non stérilisé, leurs expériences ne sauraient être considérées comme ayant une valeur scientifique quelconque. IJ02 BOTANIQUE En 1900 également . Albert-F. Woods (*) a pu s'assurer que le prétendu plasniodo était bien produit par l'eau de Javel, mais pour lui le contenu cellulaire serait au préalal)le plus ou moins oxydé. L'action du peroxyde d'Hydrogène suivie de celle d'un alcali dilué (potasse ou soude) donnerait le même résultat sur des cellules saines que l'eau de Javel sur des cellules brunies. AVoods en conclut que la maladie se résume en une dégénérescence cellulaire par suroxy- dation sous l'effet de diastases sécrétées par les cellules avec ou sans l'intervention de parasites (**). J'ai pu m' assurer de l'exactitude des faits annoncés par Woods, mais il y a plus. Déjà en 1900 je faisais remarquer que, contrairement à l'opinion de Yiala et Sauvageau, le réticvdum n'était i)as forcément partout et toujours entièrement protéique. J'ai pu m'assurer depuis qu'au moins dans beaucoup de cas il comprend deux parties mélangées sous l'action de l'eau de Javel. mais distinctes auparavant et sépa- rables après, grâce à l'emploi de réactifs appropriés : une partie azotée et une partie grasse. Les chloroleucites sont les organites les premiers atteints et dans beaucoup de cas ils subissent, comme le restant du protoplasme d'ailleurs, une véritable dégénérescence graisseuse. L'eau de Javel laisse fort longtemps en place les glo- bules o-ras, mais en leur faisant subir une telle vacuolisation qu'il serait bien permis de se méprendre sui' leur nature si l'on ne faisait agir les réactifs colorants et dissolvants. La production de ces matières grasses, substances très peu oxv«-énées, semblerait donc contredire l'hypothèse de Woods, d'au- tant mieux qu'on sait maintenant, grâce aux rechei-ches de Matru- chot et Molliard (**=^) , que la formation de gouttelettes huileuses aux dépens d'un cytoplasme qui en est normalement dépourvu est Tune des caractéristiques de la vie anaérolùe. La contradiction n'est en réalité qu'apparente. En admettant même comme constante la pro- portion d'oxygène au contact du complexe cytoplasmique ou engagé dans sa masse, l'ensemble se scindant en deux parties dont l'une infi- niment peu oxygénée, il n'est pas illogique de concevoir la deuxième comme pouvant par ce fait même subir une suroxydation qui en amène la mort après en avoir modifié l'arrangement moléculaire. (•) In Joiirii. Sfirnrc. (••) Ses rt'fhcrclu'S ont porté en pui-ticulipi- sur le Lis des Rcrmmlcs attaqué i)ar des apIiidU'us ci dont les Icuilli's noircissent tout autour des piqùi-os. II a pu s";issurer <[ue les IV-iiiUes qui réafîiss.Mit le plus par Teau de Javel sont celles (lui contiennent le plus d'oxydases. (*••) Recherches sur la reriuentalion i)ropre, in lh\: ^^cn. Bol.. i<)o3. V. DUCOMET. — LA BRUNISSURÉ DES VÉGÉTAUX Jpi Le réticulum intracellulaire n'est pas yisil^le qu'après action de l'eau de Javel; on peut, dans beaucoup de cas, l'observer directe- ment. Le protoplasme normalement granuleux devient progressive- ment vacuolaire, écumeux, à mesure que le Brunissement se caracté- rise. Il s'agit, en l'espèce, d'une modification morphologique que l'on peut constater dans la plupart des cas pathologiques, qu'il s'agisse d'altérations dues à la présence de parasites ou d'affections morbides provoquées par des conditions défavorables du milieu physico-chi- mique. Kuhne (*), Hofmeister (**), Molisch (**=>=), Klemm (****), Matruchot et Molliard (*****) ont insisté sur cette curieuse vacuoli- sation cytoplasmique sous l'influence des températures trop hautes ou trop basses, de la lumière, de l'électricité. Les derniers auteurs, surtout , ont montré avec une remarquable netteté la marche de la désorganisation cytoplasmique dans les cas de gel et insisté sur ce fait que les désordres sont de même nature que ceux produits par la plasmolj se ou la fanaison normale ou hâtée (******). La transformation du cytoplasme granuleux en cytoplasme vacuo- lisé à allure plus ou moins plasmoelique est en somme le résultat d'une déshydratation plasmolytique, son aspect écumeux est le résultat d'une contraction suivie de l'exosmose de l'eau entrant dans sa constitution sous forme de multiples vésicules crevant à T exté- rieur de sa masse, processus mor[)]iologique défini par conséquent ainsi que l'ont montré Hugo de Yries ^*******) et Matruchot et Mol- L'exosmose de l'eau de constitution du protoplasme suivant la disparition du contenu aqueux des hydroleucites étant la cause déter- minante du phénomène, on conçoit que toutes les causes capables de porter la déperdition deau au-delà de ses limites normales puissent aboutir au même résultat final. Quelle que soit la cause, « que l'exosmose de l'eau se fasse vite ou lentement , elle détermine dans les cellules des phénomènes analogues (^*********). Mais si au lieu d'envisager le résultat final . si au lieu d'observer la vacuolisation protoplasmique directement, sans l'intei'vention des (*) Voir LAnuÉ {Cytologie expérimentale). (") Die Zelle. (***) Unterrtucluingen ûber das Erfricren fier Pflazen. (**•*) Désorganisations Berelieinunj;en der Zelle. (••***) Modifications produites pur le gel dans la structure des cellules vég-étales (/Jce. gén. Bot. 1902). (•*****) Ils ont reconnu récemment que la vie anaérobie provoquait une pareille vacuolisation (op. cit.). C**"'") Plasniolytische Studien. (•**"•*") Matr. et MolL, loe. eit., /îci'. gén. Bol. 1902, p. 48r. -o4 BOTAMQUE réactifs, nous revenons à l'étucle de la formation progressive du réseau persistant après l'action prolongée de l'eau de Javel, nous trouverons, suivant là rapidité de sortie de l'eau, des dilférences liées pi'écisément à cette rapidité dexosmose ou, si l'on veut, à la plus ou moins grande rapidité de la mort de la cellule intéressée. Lorsqu'on essaie, comme nous l'avons fait, de déterminer la Bru- nissure par échauffement ou refroidissement , on arrive très souvent à provoquer la dessication rapide de la plage directement intéressée par la cause perturbatrice, cependant qu'un liséré brun ne tarde pas à se montrer sur tout le pourtour. Les caractères pseudoplasmodicpies n'apparaissent nettement que dans cette bordure, alors que vers le centre le contenu cellulaire résistant à l'eau de Javel se réduit à des fragments épars. C'est ce qui nous faisait dire, en 1900, que la brunissiu^e n'est autre chose qiiiin commencement de grillage. Dans le cas de grillage , le phénomène est purement physique ; il s'agit d'une simple mais si brusque déshydratation que la mort s'ensuit à peu près instantanément avec impossibilité de réaction; dans le cas de Brunissure, la mort venant plus lentement, le phéno- mène physique de la déshydratation se complique de réactions chi- miques débutant par une dégénérescence graisseuse corrélative d'une suroxydation du restant du protoplasme (*). L'étude comparée des désordres provoqués par des champignons différant par leur mode de parasitisme et l'intensité de leur action désorganisatrice conduit aux mêmes conclusions quant à la signifi- cation physiologique de la Brunissure. D'une façon très générale, les parasites subcuticulaires (Marsonia Rosœ, Asteroma gëographiciim, Fiisicladiiim pj'riniiin et dendriti- cwn, etc.) ou intraépidermiques {Marsonia PopiiU , Glœosporiiim Salicis, etc.) provoquent dans toute la région envahie un brunisse- ment longuement persistant. Les altérations x)roduites par les para- sites superficiels (Oïdiums) sont habituellement moins profondes. Par contre, les parasites internes (nomb. Phyllosticta, Septoria, etc.) conduisent ordinairement à une dessication hâtive des tissus inté- ressés. (•) Tous les intermédiaires existent naturellement entre jrrillag-e et brunissure aussi bien dans la nature que dans les expériences de laboratoire. Or, on sait que Viala et Sauva^eau, étudiant la Maladie de Californie, caractérisée par la dessication d<'S leiiilles de vig-ne suivant de lurfi:es i)lages faisant étrang-ement ressembler cette aflection aux coups de soleil {siin seald) ont trouvé dans les cellules, après Teau de Javel, un reticidum difFérent simi)lement de celui de la brunissure par sa frag-inentation. Ils en ont fait pour cette raison un deuxième Plasmodiophorn (P. californica). Bien que n'ayant pas eu Toccasion d'étudier la maladie de Californie, l'étude comparée et criti({ue de la bru- nissure et du grillage nous porte à la considérer comme un faciès de ce dernier i)liéuo- mène et nous entraine forcément à la négation du l'insinodioidiora californica. V. DUCOMET. — LA BRUNISSUUE DES VÉGÉTAUX 7o5 Les progrès de la désorganisation cellulaire sous TelTet du parasi- tisme de beaucoup de ces derniers champignons, dits maculieoles, sont particulièrement intéressants à suivre. Le centre de la tache, profondément envahi par le mycélium , est rapidement tué et dessé- ché : il prend tous les caractères du grillage. Le pourtour, occupé par les extrémités mycéliennes ou simplement intéressé par les excrétions du parasite, prend au contraire tous les caractères macro et microscopicpies de la Brunissure. Reste à envisager la question des globules bruns et tannifères intraépidermiques. Nous avons déjà fait remarquer en 1900 et nous l'avons maintes fois vérifié depuis, que leur production est loin d'être constante, que dans les feuilles des plantes xérophiles, à membrane épidermique interne épaisse, on les trouve souvent uniquement à l'intérieur du mésophylle, au voisinage de la surface à l'extrémité des cellules touchant l'épiderme pour les éléments palissadiques , au voisinage immédiat des lacunes [)our les éléments du tissu lacuneux, que ces globules sont souvent remplacés, surtout dans le méso[)hylle, par un coagulum amorphe, que dans l'un et l'autre cas la masse fon- damentale en est de nature protéique. Les cellules mortes finissent toujours par brunir; ce brunissement corrélatif d'une coagulation du ])rotoplasme et proportionnel à la provision de composés tanniques nous parait être, en grande partie du moins, le double résultat de l'oxydation directe de ces composés et de leur action sur le proto- plasme lui-même, après rupture des hydroleucites qui les contenaient sous l'effet de lexosmose trop rapide de l'eau, les maintenant primi- tivement en dissolution. Ces réactions s'effectuent-elles sur place? L'étroite localisation des globules vers ou dans l'épiderme tend à nous montrer que, au moins chez les feuilles où leur répartition est normalement homogène , les composés tanniques tendent à suivre le mouvement de l'eau vers l'extérieur de l'organe. La présence de bouchons bruns à ménisque interne concave à l'extrémité libre des éléments palissadiques ou au voisinage immédiat des lacunes en est une preuve nouvelle. Il est bon néanmoins de faire remarquer que , si chez les plantes où la soi'tie de l'eau est facile l'épiderme est le siège ordinaire de l'accumulation de ces globules, cela tient, non seulement à une plus grande facilité d' exosmose au travers de la membrane épidermo- palissadique , mais aussi à ce fait que le contenu des cellules épider- miques y est comparativement beaucoup plus riche en protoplasme que dans les plantes nettement xérophiles. Il convient maintenant de s'arrêter aux curieuses productions 45* ^06 BOTANIQUE signalées pour la première fois par Debray à l'extérieur des organes. Si ces masses spumeuses , grenues ou céroïdes , de composition et de structure variables avec les circonstances extérieures et la nature du substratum, particulièrement fréquentes sur la face inférieure, sont souvent le simple résultat d'une sortie des tissus par suite de la désorganisation des plages malades, il n'en est pas moins vrai qu'on peut les rencontrer sur des organes parfaitement endigués. J'ai pu m'en assurer expérimentalement, à la condition d'opérer en atmos- phère saturée, sous faible i»ression, aune température suffisamment élevée et sur des organes gorgés d'eau. Ces productions, sur la nature et la formation desquelles je me j)ro- pose de revenir, ne sont, on le voit, qu'une forme de rnieUat. Elles viennent dans tous les cas appuyer l'hypothèse que nous formulions déjà en 1900 , à savoir que les productions intraépidermiques sont, au moins en partie, le résultat d'une excrétion des éléments sous- jacents. if. ^ Les considérations qui précèdent montrent que la Briinissiire ne saurait être considérée comme une maladie spécifique. L'étude critique de ses manifestations extérieures, aussi bien que de ses caractères microscopiques , nous montre d'une façon péremp- toire qu'il s'agit simplement en l'espèce d'nn faciès de désorganisa- tion cellulaire sous l'effet d'un déséquilibre de nutrition aboutissant à la mort, suivant un processus morphologiquement défini. Les altérations observées sont simplement le résultat d'une exos- mose de l'eau du cytoj)lasme et des leucites assez lente pour permettre à ces deux éléments de la cellule de réagir de façon à modifier à la fois leurs relations, leur architecture physique propre et leur orga- nisation moléculaire. Toutes les causes cax^ables de provoquer cet état de chos'es, de porter l'exosmose au-delà de ses limites normales, sans cependant l'exagérer au x^oint d'amener la déshydratation protoplasmique, caractéristique du grillage, ou plus simplement de romi^re d'une façon convenable, ni trop lente, ni trop brusque, l'équilibre entre la transpiration normale et l'arrivée de l'eau dans les organes d'assimi- lation, sont, par cela même, des causes déterminantes du pliéno- mène. Or, on sait combien ces causes sont variées et quelle est la fré- quence de leur action. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que Debray et Roze se soient laissés entraîner au point de proclamer l'universa- V. DUCOMET. — LA BRUNISSURE DES VÉGÉTAUX [707 lité de leur Pseuclocommis. Leurs conclusions sont identiques aux nôtres, avec cette énorme différence cependant, que ce qu'ils consi- dèrent comme un organisme étranger à la cellule est regardé par nous comme le résultat de la mort de cette cellule suivant un pro- cessus défini. Il n'est peut-être pas inutile de faire remarquer que ces conclu- sions sont identiques dans leur essence à celles que nous formvUions en 1900. Elles les généralisent simplement en donnant à la Brunis- sure la seule signification physiologique qui lui convienne. Le premier, nous avons démontré expérimentalement que la Brunissure n'était pas de nature parasitaire, que l'exagération de la transpiration par insolation directe est Tune des causes principales de la Brunis- sure de la vigne telle que l'ont définie Yiala et Sauvageau. Gela n'a pas empêché Ravaz de dire que, jusqu'à lui, la cause en était restée inconnue (*), qu'elle était la conséquence d'une fructification exa- gérée (**). Il est certes bien évident, et les analyses de l'autem- ne sont nulle- ment nécessaires à la démonstration, que les grappes en excès drainent à la manière des parasites les principes fertilisants et les matières hydro carboné es des plantes qui les portent, que leur action est d'autant plus manifeste qu'elles sont plus nombreuses, que l'épuisement des tissus qu'elles provoquent se traduit constam- ment par un affaiblissement. Mais de là à conclure à la possibilité de se mettre à l'abri du mal en ramenant le rapport du poids des ■p fruits à celui des sarments — à une valeur déterminée, voisine de 3 d'après l'auteur, il y a loin. Que la Brunissure se montre surtout sur des souches chargées de fruits, cela n'est pas douteux; l'observation en a d'ailleurs été faite depuis longtemps. Mais là surproduction ne saurait être considérée que comme une cause indirecte et aggravante. En dehors de toute expérience, l'observation pure et simple suffirait à le démontrer, vu que des souches complètement dépourvues de fruits, même très vigoureuses, peuvent parfaitement brunir si les conditions météo- riques indispensables à la production du phénomène sont réalisées , et cela dans les régions seules où leur action s'exerce avec une inten- sité convenable. (*) Communicat, à la Soc. centr, d'Agr. de l'Hérault, 3 iiov. 1002. (**) C. R. Ac. Sc„ 25 mai igoS. -o8 BOTANIQUE M. M. GRILLE a Angers SUR MES HYBRIDES DE VIGNE ET SUR MON HYBRIDE VRAI DE CHASSELAS PAR VIGNE- VIERGE [634.6441; — Séance du 6 août — Mes hybridations datent des années 1901 et 1902. Je croisai diffé- rentes vignes françaises par les hybrides producteurs directs sui- vants : l'Auxerrois Rupestris, le Seilîel n° i, le Terras n° 20 et r Othello. L'Auxerrois Rupestris fonctionnant soit comme père soit comme mère, même associé à des cépages de faible vigueur, m'adonne j)resque constamment des hybrides très vigom-eux qui, pour la plu- part, ont reçu de lui la résistance à la gelée et au mildiou. Malgré la présence du phylloxéra, ils sont en général d'une belle verdeur, un petit nombre seulement sont légèrement atteints de chlorose. LOthello comme père ma donné des hybrides très A'igoureux. Le Terras n° 20 comme mère m'a donné des hybrides dune bonne vigueur et d'une certaine résistance au mildiou et à la gelée. Les hvbrides de Seil^el n° i se sont montrés aussi résistants à la t. gelée, mais c'est leur défense contre le mildiou qui est surtout remar- quable. Ceux de 1901 étaient des GroslotXSeDjel et des CôtXSeibel; la plupart ont été gravement atteints de chlorose phylloxcrique , plus même que de simples croisements français. J'ai cependant un Groslot X Seibel qui a toujours été d'une verdeur superbe et ne soutYre aucunement de la présence du phylloxéra. Sa physionomie me paraît même plus américaine que celle de son père. Je pense qu'en croisant le Seibel i avec des cépages très phylloxérants comme le Groslot, on n'obtiendra guère qu'un dizième de plantes résis- tantes ; mais avec des cépages très vigoureux ou ayant déjà une cer- taine résistance phylloxérique, comme le Caljernet-Sauvignon, on en pourra obtenir davantage. Il arrive parfois de rencontrer chez les hybrides des caractères qu'ils n'ont pu recevoir d'aucun de lem's j)arents et qui sont dus à une fantaisie de la nature provoquée par l'influence de l'hybridation. C'est ainsi que j'ai obtenu deux Cabernet X Auxerrois Rupestris qui M. GRILLE. — HYBRIDES DE VIGNE 709 ont les feuilles teintées de violet. Jai encore un Côt X -^^ixerrois Rupestris et un Auxerrois Rupestris X Muscat de Frontignan qui ont une allure des plus étranges. Leurs feuilles, au moment où elles se développent, sont extrêmement tourmentées et laciniées, elles portent des dents aiguës très longues ; le long des nervures , elles ont une panachure blanche et rose qui diminue dans la suite , mais les feuilles conservent toujours un aspect particulier, qui pourrait les faire comparer à celles du houx. Les cotylédons de ces vignes étaient d'un vert foncé cendré qui les différenciait très sensiblement de ceux des autres plantes. n est possible, dès la première année, d'établir quelques présomp- tions sur les qualités futures des hybrides. — C'est ainsi que des cotylédons violets ou des taches A'iolettes sur les feuilles feront présumer un cépage à vin très coloré. En cas de croisement entre vignes blanches et rouges, des tiges d'un violet intense feront présu- mer un cépage rouge , tandis que des tiges vert clair pourront faire espérer un cépage blanc. Là où le phylloxéra sévit intensivement, la chlorose se manifestera sur certains hybrides et produira une pre- mière sélection des plantes résistantes. Enfin, en cas d'attaque tar- dive du mildiou, vers la fin d'août, par exemple, les jeunes vignes pourront avoir acquis assez de force pour présenter une réelle résis- tance à la maladie. L'année suivante, il sera possilDle de faire un classement entre elles. J'arrive à l'hybridation de la vigne par la vigne-vierge (ainpelopsis- hederacea) . M. Millardet l'avait tentée en 1893. Au Congrès de l'hy- bridation de la vigne, tenu à Lyon en novembre 1901 , il rendait • compte de ses expériences. Il avait obtenu une cinquantaine de plantes en tout semblables aux vignes françaises qui lem' avaient servi de mères ; la vigne-vierge n'avait laissé aucune trace de sa paternité. Il appela cette hybridation au résultat négatif : « Fausse hybridation ou hybridation sans croisement des caractères. » En 1901, j'hybridai le chasselas par la vigne-vierge ; je n'obtins que deux plantes semlDlables au chasselas et qui moururent du mil- diou dans l'année. Je répétai l'expérience en 1902; j'obtins quatre plantes, dont trois furent seml^lablcs au chasselas, mais dont la quatrième se révéla un véritable hybride. Le 20 juillet 1903, cette plante, âgée d'un peu plus d'un mois, était haute de trois centimètres. Elle portait au-dessus des cotylédons quatre très petites feuilles linéaires, puis deux feuilles arrondies, une feuille lancéolée parfaitement régulière, une autre feuille lancéo- lée portant à gauche un petit éperon, enfin deux feuilles irrégulières 7IO BOTANIQUE se rapprochant de celles de la vigne, ayant tendance à la forme hastée et portant sur leurs limbes des taches rougeàtres pouvant faire présumer un cépage rouge. Les feuilles arrondies et lancéolées étaient portées sur de larges pétioles. En dehors de la diversité de leurs formes, toutes ces feuilles ont une teinte et un aspect spécial qui les différencient de celles des autres vignes ; elles se trouvent être de types variés et fantaisistes qu'on ne retrouve ni chez le chasselas ni chez la vigne-vierge. Le déveloxîpement très lent de cet hybride ne lui permettra peut- être pas de passer l'hiver, mais son existence suffît à prouver la pos- sibiUté de réaliser de véritables hybridations entre la vigne et la vigne-vierge, même dans des exjiériences assez restreintes. Peut-être serait-il téméraire den attendre des producteurs directs de grande valeur. Pour cela, il faudrait que les différences assez accentuées qui séparent les genres vitis et ampélopsis ne fussent pas un trop grand obstacle à l'établissement dune bonne fructification. Il faudrait encore que les fruits des hybrides obtenus n'eussent rien conservé de la fâcheuse saveur de ceux de la vigne-vierge. La résistance de cette dernière au mildiou et à l'oïdium est extrê- mement remarquable; d'autre part, la présence du phylloxéra ne parait pas l'incommoder. Ces qualités seraient précieuses chez ses- descendants. Les hybrideurs pourront, s'il leur plaît, élucider la question. M. &. DUTAILLY Ancien Professeur à la Faculté des Sciences de Lyon NOUVELLES RECHERCHES SUR LES GEUM ET LEURS HYBRIDES — Séance du S août — Je crois avoir démontré, en 1900 (*), que ce que l'on appelait jusqu'ici, chez certains Geiini, les carpelles à style « géniculé » est constitué en réalité par des ovaires à extrémité supérieure amincie en un bec qui su^iporte un style gynobasique. Je n'ai pas connaissance (•) Congrès internat, de Botaniq. (Paris, 1900). Comptes rendus, pp. iSS-igS. (Du style fcéniculé chez certains Geum.) G. DUTAILLY. — RECHERCHES SUR LES « GEUM » ET LEURS HYRRIDES 7II que cette interprétation ait été contestée. Pourtant, je ne m'en dissi- mulais pas les points faibles. Quand ils décrivaient le fruit du Geiim iirhaniun et des espèces similaires, les auteurs disaient : « Son style est à deux articles, dont le supérieur est caduc », tandis que, moi, j'appelais bec de l'ovaire ce qui, pour eux, était l'article infé- rieur du style. Il m'a semblé que je n'avais pas suffisamment diffé- rencié le becde l'ovaire du vrai style et que, sous peine de laisser des doutes dans l'esprit du lecteur, je devais faire appel à de nouveaux faits pour fortifier et définitivement établir ma démonstration. C'est dans ce but que j'enA'isagerai ici les carpelles des Geiim speciosiim et heterocarpum qui, à certains égards, diffèrent tant des Geuni du type reptans et des Geiim du type urbaniim. C'est dans ce but encore et en me plaçant à un point de vue tout spécial , négligé jusqu'ici j)ar les observateurs, que j'étudierai les divers hybrides des Geiim. J'ai pensé enfin que la clarté de mon exposé actuel et aussi de celui de 1900 gagnerait beaucoup à ce que les faits fussent traduits par des dessins et j'ai joint une planche à ces quelques pages. Résumons d'abord, aussi brièvement que possible, nos recherches précédentes. Je m'étais effoi'cé, il y a quatre ans, de mettre en lumière toutes les transitions qui existent entre le carpelle à ovaire sans bec et à style terminal persistant des Geiun l'eptans et inontaniiin et le carpelle à ovaire surmonté d'un bec et terminé par un style gyno- basique caduc du Geum iivhanum. Notre figure i représente un fruit du G. reptans. Comme on le voit, son ovaire porte des poils qui se continuent sans interruption sur le style persistant et terminal, de a k b. L'extrémité du style est totalement glabre. Mômes faits chez le G. montaniim. C'est d'ailleurs ainsi que décrivent ce fruit tous les auteurs exacts, et notamment M. Rouy. Après le fruit du G. reptans, je plaçais cekii du Waldsteinia geoïdes (fig. 2) construit fondamentalement comme le précédent, mais qui présente à la base du style, en a, une couche génératrice au niveau de laquelle le style se désarticule et se sépare de l'ovaire. Les poils du style n'existent que de a k h, c'est-à-dire sur le tiers inférieur de l'organe. Le Coliiria geoïdes (fig. 3) est très intéressant comme transition vers le Geum iirhaniun. parce que son ovaire est surmonté d'un très court bec s , au-dessus duquel se fait la désarticulation du style par le môme procédé que chez le Waldsteinia. A noter que le bec est ici dépourvu de poils et qu'il tranche ainsi sur le cor[)s de l'ovaire et sur JI2 BOTANIQUE la base du style qui, eux, au contraire, en sont revêtus. Endlieher avait déjà remarqué que le style est « subterminal », c'est-à-dire que le carpelle, à ovaire plus renflé sur l'un de ses lianes (ce qui n'est peut-être point assez accentué sur notre figure), présente un com- mencement de gynobasie. Nous rappelions que cette gynobasie est bien autrement prononcée chez le Fraisier et, en décrivant les premiers états du développement de son carpelle, nous en étudiions le système fasciculaire. Il suffira de se reporter à nos figures lo à i(3 pour se rendre compte et du développement et des faisceaux de ce carpelle. La figure lo le repré- sente très jeune, alors qu'il a la forme dune écaille légèrement concave en dedans, pourvue d'un faisceau médian c et de deux faisceaux latéraux r et t. Sur la figure ii, le car[)elle est déjà fermé; on distingue son ovaire renflé et son style à peu près terminal. Le faisceau ç est dorsal et les faisceaux /" et /, d'abord marginaux, sont maintenant intérieurs. Dans les figures 12. i3, 14, i5, l'ovaire se renfle de plus en plus dorsalement, le style restant à sa place première, mais, en raison de la gibbosité ovarienne, semblant deve- nir de plus en plus latéral et basilaire. On peut voir, sur les mêmes figures, ce que deviennent les trois faisceaux c. 7% t\ les faisceaux r, t , montent tout droit dans le style, tandis que le faisceau dorsal v contourne la bosse ovarienne, fig. i4 et 10, ascendant en dehors, descendant en dedans, (v') puis remontant, mais beaucoup moins haut que les faisceaux /• et t, sur le dos du style (v"). C'est cette distribu- tion des faisceaux que traduit, avec les mêmes lettres, le diagramme (fig. 16) qui représente la coupe transversale du carpelle au niveau de l'insertion du style. Si nous décrivons avec tant de minutie la distribution des trois faisceaux carpellaires du Fraisier, c'est que nous allons les retrouver dans le carpelle du Geiim urbanum, que la figure 18 reproduit à l'état adulte. Voici d'abord la figure 21, qui représente, du carpelle de ce Geum, un état jeune tout à fait comparable à celui du carpelle du Fraisier traduit par la figure 11. Les trois faisceaux ç, r. t, sont les mêmes. Bailleurs, pas plus de gjaiobasie dans un cai'pelle que dans l'autre. Ces trois faisceaux ç, r, t, se retrouvent dans les figures 20. 19, i^, qui re])résentent des états de plus en plus avancés du carj)elle du Geum lu^banum. La figure 20 montre, en m, le com- mencement de la gibbosité ovarienne, déjà légèrement pédicellée par le bec s, à son début. Le style k, terminal dans la figure 21 . est déjà légèrement déjeté, comme dans la figure i3, relative au Fragaria. Dans la figure 19, la gibbosité m est devenue très nette, et elle serait G. DUTAILLY. — RECHERCHES SUR LES « GEUM » ET LEURS HYRRIDES ^13 tout à fait comparable à celle de la figure i4 (Fraisier) si l'on suppri- mait le bec s cfui sépare cette gibbosité de l'ovaire. Le style k, qui s'insère en o, est maintenant tout-à-fait latéral. La figure 17 repré- sente, fortement grossie, l'extrémité supérieure du carpelle adulte (fîg: 18). La gynobasie s'est accentuée; le bec de l'ovaire s'est (en m) courbé en crochet et l'insertion du style k se fait en o. au- dessous de ce crochet. Il semble, au premier coup d'œil. que la diiîé- rence soit grande entre un tel carpelle et celui du Fraisier (Jig: 10). Supprimez cependant, des figures 17 et 18, leur long bec ovarien s; et les faits deviendront les mêmes chez le G. iirhanum et le Fraisier. Chez tous les deux, il y aura un style gynobasique sessile et personne ne songera à attribuer un style « géniculé » au Geiim. Il n'y a qu'une légère différence, à part le bec du Geum : c'est que, tandis que le faisceau dorsal v s'épuisait rapidement dans le carpelle du Fraisier, les faisceaux r et t le dépassant longuement dans le style, c'est au contraire ce faisceau dorsal qui est le plus long et le plus foi^t chez le G. urbaninn. Après avoir longé tout le bec (Jig: i^), il contourne son crochet terminal (p), pénètre dans le style et le suit dorsalement presque jusqu'à son extrémité. Les deux faisceaux r et /, au contraire, disparaissent avant le sommet du bec ovarien. Mais cette différence est de nulle importance et les faits sont fondamentalement les mêmes. Remarquons, et ce fait nous servira dans un instant, que les poils, abondants sur l'ovaire et sur la partie inférieure de son bec (/ig\ 18) manquent complètement sur le reste du bec. mais réapparaissent sur la partie inférieure du style (fig. i y et 18). Tels étaient, d'une façon générale, les faits sur lesquels nous avions insisté dans notre premier mémoire. On pensera, nous aimons à le croire, que le résumé qui précède, appuyé sur l'explica- tion de quelques-unes des figures de notre Planche, n'aura pas été inutile pour les préciser. Pourtant, ainsi que nous lavons dit plus haut, il nous a semblé que notre démonstration n'était pas complète, qu'elle pouvait laisser prise à quelque doute et, pour dire le mot, qu'elle présentait quelques lacunes qu'il était nécessaire de condDler. Et nous nous sommes décidé à entreprendre l'étude, aussi poussée que possible, de toutes les Rosacées du groupe des Geiiin, avec res])oir d'y trouver enfin les types de transition qui nous faisaient défaut. Que l'on compare la figure 3 avec les figures 17, 18, et l'on sentu'a 7l4 BOTANIQUE aussitôt qu'il y a loin du très court bec s de la figure 3 au long bec crochu des figures 17 et 18. Nous avions donc, à ce point de vue, à chercher des intermédiaires. En outre, il était indispensable de trouver des arguments décisifs pour répondre à ceux qui, après notre premier mémoire, pouvaient continuer à croire que, dans les^ Geum à « style géniculé », le bec et l'article supérieur caduc ne sont que les deux moitiés d'un même organe, le style. Disons tout de suite que ni les Cercocarpiis , ni les Cowania, ni les Fallugia, ni les Piirshia, ni les Ivesia , ni les Chamœbatia , ni les Horkelia ne nous ont fourni les faits que nous cherchions. Le» Cercocarpiis ledifoUiim et parvifolius, que j'ai étudiés, ont (comme on le décrit d'ailleurs) le style terminal persistant, à la façon de celui du Geum reptans , et poilu depuis sa base jusqu'à une faible distance de son sommet. Le Cowania mexicana , le Purshia Unden- tata , le Chamœbatia foliosa , le Fallugia paradoxa , ont également le style terminal et persistant qu'on leur attribue. Je note, en passant, que j'ai trouvé constamment deux ovules, l'un inséré au fond de la cavité ovarienne, l'autre un peu plus haut, dans le carpelle du Fallugia paradoxa, alors que tous les auteurs (Endlicher , Bentham et Hooker, Bâillon, etc.) ne parlent que d'un ovule unique. Quant aux Horkelia (vu H. congeata. tridentata, fuscà) et aux Ivesia (vu /. depauperata, Baylei, Pickeringii), dont Bâillon dit que la situation du style est variable et qu'il peut être terminal, latéral, articulé ou non, j'espérais trouver chez eux les chahions intermé- diaires dont j'avais besoin pour compléter mes séries de faits; mais mon attente a été déçue. Tous les Horkelia et Ivesia que j'ai examinés ont un style gynobasique caduc, inséré sur un ovaire dépourvu de bec; c'est-à-dire qu'ils réalisent, en somme, le type banal du Fraisier et de bien d'autres Rosacées. Je n'ai pas été plus heureux avec les Sieversia (vu S. Rossii, trijlora, elata) dont Bâillon fait avec raison, semble-t-il, des Geum et qui ont un style terminal, rectiligne, persistant, de Geum reptans. C'est en revenant au geîire Geum proprement dit et notamment aux G. speciosum et heterocarpum , que j'ai enfin trouvé ce que je cherchais. Le G. speciosum , dont notre figure 4 représente le carpelle, pos- sède un ovaire surmonté d'un bec s , encore assez court à la vérité , mais néanmoins notablement plus long que celui du Coluria traduit par notre figure 3. Le bec est séparé du style par une articulation a, au niveau de laquelle le style se détache à la maturité. L'ovaire et G. DUTAILLY. — RECHERCHES SUR LES « GEUM » ET LEURS HYBRIDES ^iS son bec sont chargés de poils , tandis que le style en est complète- ment dépourvu. Ce n'est point encore là le long bec du Geum iivhanum. Mais voici le Geum heterocarpwn qui va s'en rapprocher davantage. Le G. heterocarpiim , d'Espagne, d'Algérie, etc., est un Geum excep- tionnel, que Boissier (Flora orientalis) range dans sa section « Orthu- rus », caractérisée, selon lui, par un style « rectus, ad médium geniculato articulatus, articulo inferiore apice non uncinato ». Cette caractéristique n'est que partiellement exacte, interprétation mor- phologique à part. Que l'on se reporte à notre figure 5, q4ii repré- sente le carpelle dans la fleur épanouie, et l'on verra que 1' « article » supérieur, uni en a avec 1' « article » inférieur, n'est nullement « géniculé » par rapport à lui. En réalité, l'ovaire poilu est surmonté d'un long bec s, tout-à-fait comparable cette fois, par ses dimen- sions, avec celui du G. urbaiium; et ce bec s'articule, en a, avec le style placé bout à bout avec lui, par conséquent non gynobasique. Boissier a fort exactement décrit les poils qui revêtent ce carpelle à l'état adulte : « Carpellis adpresse hirtis, écrit-il, styli articulo infe- riori apice retrorsum barbellato, superiore basi hispido. » C'est ce que traduit notre figure 4 ? où l'on voit . en s , le bec chargé de poils dirigés vers le bas, tandis que ceux de l'ovaire sont orientés de bas en haut, comme ceux du style à partir de sa base a. A la maturité du fruit, le style tombe et l'ovaire, surmonté de son long bec à poils récurvés, s'accroche, grâce à ces poils qui sont des organes de dissémination, à la toison des animaux qui passent. C'est, on le voit, un tout autre procédé que celui du G. urhanum, dont le fruit s'attache par l'intermédiaire du crochet terminal qu'il doit à sa gynobasie. Si nous insistons sur le système pileux du fruit du G. heterocarpwn, ce n'est pas tant à cause de la fonction dissé- minatrice des poils du bec que parce que ces poils, par leur ordre d'apparition , créent entre le bec du fruit et le vrai style la ligne de démarcation profonde , absolue, que notre premier mémoire n'avait pas sulïisamment mise en lumière. Suivons, pour nous en convaincre, le développement du carpelle tel que le retracent les figures 9,8, '], 6. La figure 9 représente un état jeune, dans lequell'ovaire, encore dépourvu de bec, est surmonté directement par le style dont le sépare l'articulation a. A cette phase, le carpelle ne porte pas trace de poils. La figui*e 8 donne un état un peu plus avancé. Il existe alors un commencement de bec , s , et le style porte des poils encore rudimentaires et dont l'apparition s'est faite de haut en bas. Sur la yi6 BOTANIQUE figure 7, les poils du style se sont allongés; ceux de l'ovaire ont apparu; quant à ceux du bec s, déjà long, il n'en existe pas encore trace. C'est que le bec, organe tardif intercalaire, plus récent que l'ovaire et le style, n'est pas encore en âge de donner naissance à des poils. Ceux-ci (Jig: 6) n'apparaissent qu'un peu plus tard, de bas en haut et, presque tout de suite, les grosses cellules qui en sont le début se rabattent vers le bas. Cette formation, en trois temps, des poils sur le style, sur l'ovaire, sur le bec, est caractéris- tique, et nous croyons que désormais, pour qui aura quelque peu médité sur ces faits , il ne sera plus possible de soutenir que le bec du fruit des Geum du groupe du G. iirhanum n'est que l'article infé- rieur du style. * * * Un intermédiaii^e, dans la longue série des carpelles des Fraga- riées, me faisait encore défaut. Il y avait en effet un hiatus profond entre la carpelle à style gynobasique du Geiim urbaniim (fig. i y), avec son bec à crochet, et le carpelle du G. heterocavpum , avec son style terminal et son bec droit (fig. 5). J'avais essayé de combler cette lacune par les carpelles gynobasiques oixlinaires , du type du Fvagaria (fig.. 16) qui, certes, au point de vue anatomique et mor- phologique sont, nous l'avons vu. parfaitement comparables à ceux du Geum iirbanum. Néanmoins, en apparence et pour les observa- teurs superficiels qui ont besoin d'être convaincus comme les autres, la différence semblait grande. Je cherchais donc quelque type inter- médiaire et je désespérais de le rencontrer, quand l'idée me vint d'étudier les hybrides de Geum. Certains de ces hybi'ides, me disais-je, ont pour parents deux Geum ayant l'un et l'autre des styles dits « géniculés ». D'autres hybrides ont pour parents un Geum à style « géniculé » et un Geum à style terminal rectiligne persistant. Etudions ces hybrides au point de vue de la forme de leurs carpelles. Il existe un hybride du G. uvhanum et du G. rivale (tous deux à style « géniculé »). C'est le G. intermediwn Ehrh. Le D' Gillot, qui a étudié avec tant de sagacité les hybrides de Geum. voulut bien m'en envoyer un pied vivant, avec des fleurs et des fruits. Je n" atten- dais, je l'avoue, pas grand résultat de l'étude de cet hybride. La fécondation d'un Geum à style « géniculé » i)ar un autre Geum à style également « géniculé » ne saurait, a priori, produire qu'un troisième Geum à styles pareillement « géniculés » , quelle que soit d'ailleurs la longueur des deux « articles » de ce style. Mes prévi- G. DUTAILLY. — RECHERCHES SUR LES « GEUM » ET LEURS HYBRIDES 717 sions se réalisèrent. Tous les carpelles de l'hybride étaient égale- ment « génieulés ». Je ne retirai donc de cette observation rien qui m'intéressât spécialement, sinon un fait dû entièrement aux obser- vations du D> Gillot et qui, à un point de vue tout spécial, a son importance; c'est celui-ci : « Le G. interme diiim que je vous envoie, m'écrivait le D'' Gillot, provient d'un semis spontané de l'hybride sauvage cultivé dans mon jardin, et il est absolument identique à la plante-mère. » Voilà donc un hybride que ne modifie pas la culture, un hybride fixé. Quelle différence y a-t-il entre cet hybride, pour qui n'en sait pas l'origine, et une « bonne » espèce quelconque de Geiiin ? Mais laissons de côté pour l'instant ce fait qui, on le verra, se rap- porte assez directement à notre sujet. Après les hybrides à carpelles similaires, les hybrides à carpelles dissemJ:)lal)les. Trois de ces hybrides sollicitaient surtout mon atten- tion : le G. inclinatiiin, le G. Tirolense, le G. BilUeti. Tous les trois sont des hybrides du G. rnontaniiin (à styles droits, non articulés, terminaux) et du G. rivale (qui a les « styles articulés, génieulés »). Les descriptions que faisaient de ces trois hybrides les auteurs me permettaient d'espérer des faits curieux et utiles à ma thèse. On y décrivait, dans une même fleur, des carpelles divers : les uns, de G. montaniiin, à style droit; les autres, de G. rivale, à « style géni- culé ». Je comptais qu'un examen minutieux me ferait rencontrer autre chose encore , c'est-à-dire des carpelles intermédiaires aux deux formes, qui participeraient par conséquent de chacune d'elles par certains caractères. J'espérais, en d'autres termes, y trouver le passage entre le fruit à bec courbé et à style gynobasique du Geinn rivale et le fruit à style droit, sessile, non gynobasique, du G. mon- taniiin. Mon espoir fut d'abord déçu. Des fleurs du G. Tirolense, du G. inclinatwn, que je dus à l'amabilité généreuse de M. Rouy, ne m'apprirent rien de neuf. Tous les fruits des fleurs étudiées de ces deux Geuin avaient le même bec courbé et le même style. A ce point de vue, l'influence du G. rivale avait donc été absolument j)ré- pondérante. J'eus plus de succès avec la fleur de G. BilUeti que m'avait donnée M. Rouy. Tous ses fruits étaient du type rivale , sauf un qui m'ap- porta enfin le fait que je cherchais. Il est représenté par la figure aS et, à côté de lui, la figure 24 reproduit l'un des carpelles du type rivale. Celui-ci offre un long bec n, courbé en croc à sa terminaison et, sous le croc, s'insère le véritable style. Les poils du bec cessent de n à la pointe m du croc. Comparons la figure 20 à cette figure 24 ;7l8 BOTANIQUE et nous verrons qu'un seul organe manque à la figure -25 pour que les deux carpelles soient identiques : le crochet terminal du bec. Sur une longueur m ii, les poils s'interrompent sur l'un et l'autre car- pelle. Si le carpelle de la figure aS était un fruit de G. montanum, cette interruption des poils n'existerait pas. Mais ce fruit anoi-mal n'est j)as un fruit de G. montanum. Il est un fruit de G. rwale chez lequel, par suite du croisement avec le G. montanum, le crochet du bec, c'est-à-dire le gynobasie stylaire, a disparu. Dans ce fruit, le bec vient du G. riimle et l'absence d'articulation du style, en m, provient du G. montanum. Au total, dans une même fleur, on ren- contre des carpelles du type de la figure 17, c'est-à-dire du type du G. urbanum, et un carpelle (Jjg- 2 5) qui est fondamentalement du même type que celui de la figure 5. Le point de jonction des deux types, la transition cherchée, sont donc trouvés ; trouvés, il est vrai, dans un hybride , mais qu'importe ? J'en étais là de mes observations quand, en juin 1908, le D' Gillot m'envoya deux échantillons frais , admirablement démons- tratifs, de G. BilUeti. Dans le premier, la plupart des carpelles étaient « géniculés » dans la même fleur; cinq ou six seulement, dans cette fleur, étaient identiques au carpelle de la figure 25. Il n'y avait pas de vrai carpelle de G. montanum. Dans le second échan- tillon, une demi-douzaine seulement de carpelles étaient « géniculés », c'est-à-dire du type du G. rUmle. Tous les autres carpelles, très nombreux, étaient au contraire du type de la figure aS. Quelques- uns de ces derniers (fig. 16), dépourvus de poils de m à n, présen- taient dans cette région (tout à fait comparable à la région m n des figures 24 et 25) une sorte d'ondulation, une légère courbure, qui en faisaient quelque chose d'intermédiaire entre le bec droit de la figure 25 et le bec crochu de la figure 24. C'était un reste de gyno- basie ; et nous croyons que ce fait complète définitivement la démons- tration commencée par la figure 25. A un autre point de vue, il est clair que, dans le premier échantillon, c'est l'influence du G. rii'ale qui était dominante, tandis que, dans le second, c'est celle du G. mon- tanum qui paraît avoir eu la prééminence. Ainsi peuvent s'expliquer les divergences entre les auteurs, dans la description des G. Tiro- lense, inclinatnm, Billieti et autres. Le croisement à doses d'in- fluence variables ne peut que produire des hybrides à carpelles de formes également variables. J'ai, grâce aux plantes fraîches de M. Gillot, pu faire l'organogénie des carpelles du type de la figure 25. Les figures 22 et 23 traduisent deux états de l'évolution de ces carpelles, états très comparables à G. DUTAIM.Y. — RECHERCHES SUR LES « GEUM )) ET LEURS HYBRIDES Jlt) ceux des figures 8 et 7. Dans la figure 22, le style surmonte le court bec s de l'ovaire et les poils , nés sur ce style, apparaissent de haut en bas, l'ovaire en étant encore dépourvu. Dans la figure aS, les poils supérieurs du style se sont allongés, les inférieurs restant encore très courts, et l'ovaire commence à se garnir également de XJoiis qui se forment aussi de haut en bas. Cette apparition graduelle des poils, de haut en bas, sur le carpelle, s'explique ici comme dans les autres Geiim, par ce fait que le carpelle est à formation basi- pète ; que c'est l'extrémité suj)érieure du style qui apparaît la pre- mière ; que l'ovaire ne se constitue qu'ajîrès le style et que les poils apparaissent d'abord, tout naturellement, sur les parties les plus âgées. C'est pour cela que le bec carpellaire, constitué en dernier lieu, est aussi la dernière-portion du carpelle qui se revête de poils. On nous permettra d'excursionner un instant dans le champ des hypothèses et de poser à nouveau une question qui nous a déjà préoccupé lors de la rédaction de notre premier mémoire. En 1900, nous nous sommes demandé d'où provenait le bec crochu du fruit du Geum urhaniim, bec si utile à la dispersion du fruit, Et nous répondions que, sans doute, les ancêtres de ce Geum avaient possédé des ovaires sans bec, à style gynobasique, qui, « par un phé- nomène d'adaptation, sur lequel nous ne voulions point faire de con- jectures », avaient graduellement produit le bec utile à la dissémi- nation. Cette hypothèse est peut-être logique, mais on pourra la trouver surtout commode. Et puis elle a un grand défaut, c'est de ne point paraître susceptible de vérification. Je crois donc qu'aujourd'hui , après les faits que j'ai décrits chez le Geum BilUeti et que résument les figures aS et 26, on peut, à côté de cette hypothèse-là, en placer une autre. Nous avons rappelé que les hybrides des Geum sont fer- tiles et qu'en particulier le G. intermedium, d'après le D' Gillot, se reproduit de semis, identique au pied qui a porté les fruits. Nous avons vu, en outre, que le croisement d'un Geum à bec géniculé avec un Geum à ovaire sans bec, mais à style droit, produisait des carpelles à bec non géniculé. Pourquoi le croisement d'un Geum à bec long et droit, comme le Geum heterocarpum (fig\ 5) avec une Fragariée à ovaire sans bec et à style gynobasique (fig'- 10) ne pourrait-il pas produire un fruit à bec courbé et à style gynobasique, comme celui du Geum Ufhanum ? La difficulté est la même dans les -20 BOTANIQUE deux cas. La fécondation de G. rivale par le G. montanum la sur- montée dans le premier cas. Pourquoi la fécondation du Geiim hete- rocarpum par le pollen d'une plante à chercher parmi les Potentilles, les Sihbaldia, les Ivesia, les Horkelia, ne donnerait-elle pas, si elle était possible, un fruit à style « ^éniculé », très analogue à ceux des Geiim iirbaniim, rivale, et autres similaires? Pourquoi, surtout, si ces derniers Geum ont eu d'abord des fruits sans bec et à style gynobasique de Potentille, pourquoi ces Geum i)rimitiis, croisés avec d'autres Geum à bec droit, du type du G. heterocaî'piim, n'au- raient-ils pas pu constituer d'emblée des hybrides à fruits de Geum urhamim, hybrides qui, reproduits intégralement par leurs graines, seraient devenus les G. urhamim, rivale, etc., qui sont nos espèces incontestées d'aujourd'hui ? • M. Henri GOUPIN Docteur es sciences , à Paris SUR L'ALIMENTATION MINÉRALE D'UNE MOISISSURE TRÈS COMMUNE (STERIGMATOCYSTIS NIGRA) — Séance du S août — Les renseignements les plus précis que nous possédions^ sur l'ali- mentation des végétaux sont relatifs à une moisissure noire très commune, le Sterigmatocystis nigra, dont Raulin a fait une {étude magistrale en 1870. Je me suis proposé de compléter ces recherches et d'en vérifier les résultats en opérant, non comme le faisait Raulin, à l'air libre, mais dans des ballons stérilisés à l'autoclave, ie me contenterai d'énoncer les conclusions auxquelles je suis parvenu et dont certaines ont été déjà présentées |à l'Académie des Sciences et à la Société de Biologie : 1° Contrairement à ce qu'avait ditjRaulin, le fer, le silicium et le zinc ne sont d'aucune utilité dans la nutrition de la moisissure. 2° Le zinc même retarde le développement du mycélium, quand la nourriture est aljondanto et il le tue quand il est mal nourri. 3° Le mycélium est susce[»tible de fournir lui-même l'acidité néces- saii^e à son entier développement. H. COUPIN. — L ALIMENTATION MINERALE D UNE MOISISSURE ^21 4° La moisissure assimile le magnésium, non seulement à l'état de carbonate , mais tout aussi bien à l'état de phosphate , de sulfite , ■de chlorure, d'azotate, de bromure, de sulfate, de citrate et d'acé- tate. 5" On observe une grande facilité d'assimilation du phosphore qui , dans le cas du biphosphate de calcium , du pyrophosphate de potassium, du phosphate de potassium, du phosphate de magnésium, est utilisé çiéme avec plus de profit qu'avec le phosphate d'ammo- nium. La moisissure peut aussi prendre le phosphate à des com- posés du sodium , dont l'élément métallique ne lui est d'aucune uti- lité. L'hypophosphite de sodium seul s'est montré inassimilable ; il se comporte même comme un poison (à la dose de o gr. la par 3oo cmc. de liquide). 6^ Le soufre peut être emprunté à des états très divers par la mucé- dinée, qui est susceptible de s'en nourrir sous forme de sulfate (M^, Nrt, K, Am); de bisulfate (Na, K); de sulfite (N«); de bisulfite (N«); d'hyposulfite (Nrt, K) ; de sulfure (K) ; de sulfocyanure (K) ; de pyro- sulfate (K). Le monosulfure de potassium, le suif hydrate dammo- nium et le bisulfite de potassium se sont comportés comme des poi- sons (à la dose de o gr. o5 pour 3oo cmc. de liquide). Le sulfure de sodium est indifierent. La forme la plus assimilable est le sulfate d'ammonium qui, en outre, apporte au liquide nutritif un contingent d'azote. 'j'-' J'ai montré, en collaboration avec M. MoUiard, que le Sterigina- ios/s^i's privé de potassium, présente des formations tératologiques des plus singulières. 8" Le potassium ne peut être remplacé par aucun autre métal alcalin, ni le sodium, ni le lithium, ni le rubidium, ni le césium (recherches inédites). 9'^ L'aluminium et le calcium n'accroissent nullement le rendement de la moisissure, quelle que soit la forme sous laquelle on lui pré- sente (recherches inédites). Il y a encore de nombreuses questions à étudier sur le même sujet (forme assimable du potassium, forme assimilable de l'azote, assimilation des acides, des hydrocarbonés, etc.); je compte les résoudre d'ici la prochaine réunion de l'Association. (Travail du Laboratoire de botanique do la Sorbonne, dirigé par M. Gaston Boxxikr.) y22 BOTANIQUE Feu L. GÉNEAU DE LAMARLIÈRE et M. J. MAÏÏEU SUR QUELQUES MUSCINËES CAVERNICOLES DES TERRAINS SILICEUX — Srance du S août — Dans nos reclierclies précédentes, nous avons eu à nous occuper spécialement des Muscinées cavernicoles récoltées en terrain calcaire. Dans les terrains siliceux , les vraies cavernes sont plus rares , mais cependant les cavités humides et peu éclairées ne font pas défaut et leur population bryologique. quoique plus restreinte, n'est pas à négliger. Elle présente bon nombre de modifications intéressantes povir l'oljservateur, ou qui peuvent avoir leur importance pour la Bryologie générale et même pour la connaissance des variations morphologiques que peuvent subir les plantes de tout ordre sous rinlluence du milieu extérieur. Les matéi'iaux étudiés dans cette note proviennent surtout de la Chame des Vosges, aussi bien de la partie granitique que de la partie gréseuse. Celles du granité ont été recueillies au Hohneck^ dans le Frankenthal Keller, vers i.ioo mètres d'altitude, puis aux environs du Rudlin, entre 700 et 900 mètres. Les espèces recueilhes sur les grés proviennent des environs de Vexaincourt. Nous y avons joint quelques échantillons empruntés à diverses régions siliceuses de la France et des îles anglo-normandes. Plagiotheciinn silvaticiun Br. eur. — Les échantillons recueillis dans les anfractuosités obsciu-es des grés" du Mont Chauvet, à Fontaiiielileau, ont une couleur l)runàtre ; mais, à part cette coloration j)articuLière et l'allon- gement des tiges, rien ne les distingue du type. On observe la même coloration dans les nombi'eux individus de la caverne du Frankenthal. Mais, de i)lus, la plante est plus petite et plus grêle dans toutes ses parties. Les l'euilles plus distantes, plus étroites, sont proportiomiellement plus longues et i)lus aiguës au sommet, les cellules s'allongent aussi et sont moins larges, de manière à passer à la forme des cellules du P. denticalatuni qui diflère peu du P. Silvaiicum. La décurrence des feuilles est plus étroite, réduite souvent à une rangée de longues cellules. La présence de qnekpves rhizoïdes naissant sur la nervure des feuilles inférieures permet de rapprocher ces échantillons de la var. phyllorhizans Syr. que nous avons retrouvée plus accentuée et L. GÉXEAU DE LAMAULIÈRE & J. MAHEU. — MUSCINÉES CAVERNICOLES ^23 aussi en échantillons plus vigoureux dans des cavités fraîches et peu éclairées du vallon de Xéfosse, près le Rudlin et à Vexaincourt. Cette variété, d'ailleurs, peut très bien être consitlérée comme mie forme caver- nicole du PI. sih'aticiim. Plagiotheciwn elegans. Br. eiu*. (Cavités obscures et fraîches au-dessus du Rudlm, vers 800 m.). Il est peu différent du t^^pe, croissant aux envi- rons. Quelques rameaux sur le bord des touffes s'eflîlent, premient des feidlles petites et espacées, tendant vers les formes cavernicoles. Il ne faut pas confondre ces rameaux avec les ramuscules nombreux et caducs que produit la plante dans certaines circonstances encore mal définies. Thamnium alopeciwam Br. eur. — On retrouve à la caverne du Fran- kenthal presque toutes les variations qui ont été constatées pour cette plante dans les cavernes du Lot, en particulier à Padirac, et que nous avons décrites ailleurs. C'est ainsi que nous y avons constaté les formes distans, coinplanata (assez parement pures), filescens et enfin la variété gracilis G. Lama, et Mah. Cette dernière variété est tantôt isolée, tantôt sous forme de longs stolons fixés à des rhizomes normaux, ce qui lui ôte beaucoup de sa valeur et nous engagerait presque à la réduire à l'état de simple forme. Mais , si l'on trouve au Hohneck la plupart des variations observées dans les cavernes calcaires du Lot, il en est au moins une qui manque; c'est la forme pal 'eur , toujours jaunâtre et qui doit être due à mie sorte de chlorose attribuable, comme origine, au calcaire. Cette teinte se retrouve d'ailleurs dans la var. Hécartii G. Lanil). et Mah. , cpii croît sur la craie. D'une façon très générale aussi, les échantillons du Hohneck, quoi([ue plus hauts de taille (pie le tj-pe, sont moins développés que ceux de Padirac. Earhynchhim prœJongum Br. eur. — Outre quelques touffes très voi- sines du tjiie, mais plus vertes, la caverne du Frankenthal nous a fourni de nudtiples transitions à la \av. filijorine G. Laml. et Mah., ainsi que la variété elle-même, identique ou presque aux échantillons des cavernes du Lot. Eiirhynehiiiin Stokesii Br. eur. — Cette espèce est assez frécpiente dans les cavernes, mais elle ne nous avait pas encore présenté de variations notables. Dans la Frankenthal Relier, nous avons pu, pour la première fois, trouver le t^i^e d'une variété nouvelle. Les touffes en sont maigres et de taille réduite : les rameaux principaux, longs de 2 à 3 cm., sont simples ou ime seule fois pennés, et souvent assez irrégulièrement rami- fiés. Les feuilles caulinaires, plus petites environ de moitié que dans les types, conservent la forme normale, mais sont frécpiemnient entremêlées d'autres feuilles dites accessoires, dans lesquelles la longue pointe carac- téristique s'atténue à différents degrés et peut même disparaître complè- tement. La taille des cellules et la denticulation restent à peu près nor- males. Les feuilles raméales, très petites, sont longues et étroites et encore bien dentées. Nous avons appelé cette forme appauvrie, var. minus var. n. Eurliynchiam myosuroides Br. eur. — Une grotte de la falaise de la Corbière, sur le granit (île de Jersey), nous a fourni des échantillons à peu près normaux de cette espèce. ^24 BOTANIQUE Les anfractuosités obscures du granité au Rudliii (Vosges) recèlent la même espèce sous la forme Jilescens Ren. Mnium hornnm L. — Les écliantillons recueillis au Rudlin et dans le Frankeutlial-Keller montrent un certain nombre de variations concor- dantes, sinon toujours constantes. La tige tend à s'allonger, les feuilles à s'espacer et les toutïes deviemient plus lâches. Les feuilles sont généra- lement mi peu plus longues et relativement plus étroites. La marge et la nervure perdent plus ou moins leur couleur brunâtre et peuvent même être entièrement vertes. Les dents sont plus espacées, un peu plus longues et plus grêles. Le tissu de la feuille paraît varier assez peu ; cependant, les cellides de la base ont une certaine tendance à s'allonger, et d'une façon générale, les parois cellulaires sont moins épaisses. Mnium undiilatum Neck. — A côté d'échantillons stériles normaux et de o-rande taille, la caverne du Frankenthal nous a offert des variations intéressantes, à peu près dans le même sens que celles présentées par le M. horniim, mais plus accentuées. On y constate par exemple que les dents deviennent plus espacées et plus grêles, tandis que la forme géné- rale et la taille des cellules varie peu. Mais, dans d'autres échantillons, les feuilles ont une tendance à se raccourcir et à s'élargir tout en conser- vant les caractères généraux du type, de sorte que cette espèce a une certaine tendance à converger vers le Mnium affine, var. elatum Br. e., forme des endroits humides. Mnium affine Schw. — Nous avons d'ailleurs trouvé cette dernière variété au même endroit avec quekpies brms présentant les caractères de la var. transiens G. Lamb. et Mah. Mnium punctatum L. — Cette espèce a été constatée dans la caverne du Frankenthal et dans les anfractuosités obscures et humides des rochers à la cascade du Rudlin. Elle est à peine modifiée. Wehera alhicans Schimp. — Nous avons trouvé en très petite cjuantité à la caverne du Frankenthal et dans une cavité humide de la Montagne du Roule, à Cherbourg, ime variation notable de cette espèce que nous décrivons sous le nom de var. caveknarum var. nov. Elle iliffère du tj-pe par ses touffes très lâches , ses tiges plus grêles , vertes au sommet, roses au milieu, rouges seulement à la base, ses feuilles plus espacées , à ner- vure et à bords décurrents (la nervure est verte), ses feuilles plus étroites et plus aiguës, à cellules plus grandes , plus molles , à dents moins nom- breuses et moins fortes, manquant quelquefois entièrement. Cette variété montre bien toutes les variations caractéristiques des échantillons des cavernes. Fissidenfi adiantoides Hedw. — Dans la caverne du Frankenthal, cette espèce se présente à peu près normale. Fissidens taxifolins Hedw. — Touffes lâches, mais normales pour le reste. (Caverne à Vexaincourt.) Plagiochila asplenioides Dum. Cette espèce est assez abondante dan^ la caverne du Frankenthal. Elle s'y présente sous une forme particulière, à tiges assez longues (4 à 5 cent.), pres(iuc simples, ou même simples , à L. GENEAU DE LAMARLIERE & J. MAHEU. — MUSCIXÉES CAVERNICOLES 723 feuilles écartées , entières ou prescjue entières , ou présentant seulement quelques vagues sinuolations; les bords des feuilles sont plans. Nous considérons cette forme comme une variété : var. remotifolia var. nov. Une forme beaucoup plus grêle, dérivant évidemment de la précédente, est pour nous la forme depauperata. Metzgeria furcata Dum. — Caverne du Frankenthal. A peu près normal. Metzgeria conjiigata Lindb. — Caverne à Vexaincourt. Très développé, mais normal. Fegatella conica Corda. — Dans le Frankenthal Keller, nous avons trouvé la var. leptophylla G. Lamb. et Mah. , semblable ou presque sem- blable aux échantillons recueillis dans les cavernes du Lot. CONCLUSIONS Les cavernes des terrains siliceux , dont il est question dans cette note . possèdent un certain nombre de Muscinées silicicoles qui leur sont propres, comme Plagiotheciwn eleg-ans, P. silvaticiiin, Mniiiin horninn, Weheva albicans, etc., et chez ces espèces on observe des modifications parallèles à celles qui ont été constatées pour les espèces propres aux cavernes des terrains calcaires. Chez les espèces indifférentes à la nature du sol et qui ont été trouvées dans les cavernes des deux sortes de terrains, lorsque les variations sont poussées à l'excès, on constate la production de variétés et de formes semblables des deux côtés. Ce fait se constate très bien chez le Thainnium alopecurum (f. distans, f. complanata, î. Jilescens et var. g-racilc), chez V Euvhynchiuin prœlong-iuiin (var. filiforme) et chez le Fegatella conica (var. leptopJij'lla). Cependant il est à présumer cjue des recherches plus prolongées i)ourront amener la découverte de variations propres, dues à la nature chi- mique du sol, car nous avons déjà constaté que les formes pâles du Thamniiun alopecariim (j. pallens et var. Hecartii) paraissent manquer aux terrains siliceux. Le climat et l'altitude ne paraissent pas avoir une influence aussi sensilile dans les cavernes qu'au dehors. C'est qu'en eft'et la tempé- rature, qui est le facteur variant le plus avec l'altitude et le climat, varie l)eaucoup moins à l'intérieur des cavités qu'à l'extérieur, les autres conditions extei-nes pouvant rester à peu près semblables. Aussi . voyons-nous le Wehei^a albicans présenter les mêmes varia- tions à Cherbourg, presque au niveau de la mer, et dans un climat maritime et au Fi*tinkenthal , au-dessus de i.ooo mètres d'altitude et dans un climat très rude, tandis que ce même W. albicans dans les 726 BOTANIQUE régions alpines, en dehors des cavernes, présente une variation notable, la var. glaciale Br, eur. Le Thaniniuin alopeciirum et V Eurhj-nchium prœlonguin varient à peu près de la même façon dans les cavernes du Lot, entre 200 et 3oo mètres, dans un climat subméditerranéen, et dans les Hautes- Vosges. Cependant, la dernière espèce, dans les régions méridionales et en dehors des cavernes, j)ro- duit des formes spéciales, en particulier la var. rigidiini N. Boul. Cependant, })Our pouvoir être plus affîrmatif, il faudrait attendre d'avoir exploré des cavernes plus élevées que celle du Frankenthal, qui est seulement à la limite des zones subalpine et alpine. Enfin, il faut remarquer que la population bryologique des diffé- rentes cavernes explorées , quoique tendant à s'uniformiser , grâce à l'uniformisation des conditions extérieures d'existence , ne perd pas tout caractère individuel, ou au moins régional, et ce qui précède s'applique seulement à un certain fond de Muscinées , qui sont com- munes à beaucoup de cavernes explorées jusqu'ici. Mais, à côté de ces espèces uljiquistes, il s'en trouve d'autres plus spéciales aux cavernes de chaque région. Ce fait est dû à ce que la population bryologique des cavernes est toujours sous la dépendance étroite de la flore de l'extérieur qui lui fournit des germes plus ou moins fré- quemment renouvelés qui sont l'origine des individus cavernicoles. Ainsi que nous l'avons fait remarquer dans une note précédente (*) et sous ce rapport, les cavernes des Vosges se conforment à la loi générale : elles sont peuplées uniquement d'esj)èces appartenant à la région silvatique au voisinage desquelles elles se trouvent. M. G. POIRAULT Directeur de la Villa Tliuret , à Antibes SUR LE BOUTURAGE D'ÉTÉ [635.i4] — Séance du S août — L'obligation dans laquelle je me suis trouvé, en prenant la direc- tion de la Villa Thuret, de reconstituer des collections de plantes déti'uites ou fort compromises par la mauvaise culture et le manque (•) GÉNEAu DE Lamaulikue et INIahki' : Sur les nfjiniirs g ('•o graphique s des Muscinées des Cavernes (Assoc. fr. pour ravaiic. des Se, Congrès de Monlauban, 1902, p. 6-4). G. POIRAULT. — SUR LE BOUTURAGE D ÉTÉ 'JI'J de soin, m'a amené à étudier les diverses méthodes de bouturage. Les jardins du littoral m'ont fourni plusieurs centaines d'espèces dont les boutures ont été, de diverses manières, enracinées au Jardin Tliuret. Le procédé qui m'a donné les meilleurs résultats est celui sur lequel le regretté Maxime Cornu rappelait l'attention il y a quelques années : le boutvu'age en plein soleil. Les boutiu'es sont placées sous châssis, en plein soleil, dans des coffres bien drainés par un lit de pierres et de fascines recouvert d'un mélange de sable et de terre légère, le tout surmonté d'une couche de quelques centimètres de sable de rivière, dans lequel les boutures sont piquées directement. Pour empêcher la dessiccation des feuilles , qui ne manquerait pas de se produire rapidement, il est nécessaire de bassiner fréquennnent, le degré de fréquence de ces bassinages dépendant, naturellement, de l'ardeur du soleil. Ce procédé, qui a l'inconvénient d'exiger une main-d'œuvre continue (*), a pour lui l'immense avantage de provo- quer un enracinement très rapide. En quelques jours, des plantes molles (Salvia, Acanthacées, etc.) développent des racines nom- breuses, et la très grande majorité des espèces dont j'ai essayé l'en- racinement ont été bouturées en quelques semaines. Je ferai connaître ultérieurement pour chacune des espèces sou- mises à ces essais la nature des rameaux qui ont été employés, ceux qu'il convient de choisir de préférence et l'époque la plus favorable. J'indiquerai les nombreuses particularités intéressantes que j'ai été à même de noter au cours de ces expériences. Le but de cette courte note c'est d'abord de rappeler que j'ai pu enraciner, en un laps de temps relativement court, des plantes qu'il est parfois long et diffi- cile de faire enraciner autrement (Acacia, Hakea, Grevillea Greya Sutherlandi , Pittospomm , Pomaderris , Alyxia riiscifoUa, Noltea africana, Corokia cotoneastev, Lithvœa vene nosa, Schiniis, Mhiis, Murrq}^a exotica, Phj'llocladus UHchomanoides , Atalantia buxi- Jblia, Myrsine africana, etc., etc.). C'est ensuite d'appeler l'atten- tion sur la possibilité de bouturer en quelques jours des plantes qu'on multiplie d'ordinaire plus lentement par un tout autre procédé : je veux parler des plantes grasses. Les Crassulacées, les Portiilacées, les Rhipsalis, les Opuntia, les Mesemhrj'anthemwn , les Senecio de la section Alemm, XesAloe, etc., peuvent être bouturés en plein (*) Cet inconvénient est d'ailleurs assez mince si j'en juge par ce que j'ai vu à la Villa Thuret. En deux ans (1902, igoS) la Villa Thuret aura distriljué aux Jardins botaniques près de 1000 espèces de plantes. Sur ce nombre, plus de la moitié correspond à des plants de boutures. C'est donc plus de 10.000 boutures qui auront été faites ainsi. Or, les soins dont il vient d'être question ont été donnés par un seul apprenti qui, dans Tiu- tervalle des opérations de bassinage, était employé à un autre travail. 728 BOTANIQUE soleil avec une facilité extrême, à la condition de choisir des rameaux bien sains n'ayant subi aucune machure, l'atmosphère très chaude et très humide où se fait l'enracinement étant des plus favorables au développement de la pourriture. Le bouturage en plein soleil peut donc rendre les meilleurs ser- vices dans les Jardins botaniques. M. G. POIRAULT Directeur de la Villa Thuret, à Antibes SUR DES ANOMALIES DES FLEURS DU THEODORA ANGUSTIFOLIA E. MEYER — Séance du S août — Les botanistes qui ont visité la Yilla Thuret durant ces dernières années ont pu constater que la plujiart des massifs d'arbres et d'ar- bustes du Jardin de cet établissement sont beaucoup trop serrés et que, en maints endroits, des espèces d'un intérêt très secondaire étouffent sous leur développement des plantes plus intéressantes. S'il ne m'a malheureusement pas été possible, avec les crédits très restreints dont nous disposons — 5.3oo francs pour un Jardin de près de 5 hectares — de pratiquer dans tous les massifs les suppres- sions nécessaires, du moins ai-je cherché à dégager de mon mieux les plantes qui méritaient de l'être. Ces éclaircieset aussi la suppres- sion de tailles intempestives et pratiquées sans mesure, ont été suivies de la floraison de certaines espèces. Pour l'une d'elles, soit dit en passant, il s'est produit ce fait un peu inattendu que le dégagement dont elle a été l'objet a provoqué sa floraison à contre-saison. Il s'agit d'un Callistemon coccineus qui, débarrassé en juin 1902 du fouillis de plantes qui l'étouffait, a fleuri en décembre et janvier igo'i. Cette plante, à floraison estivale, a bien supporté les froids assez vifs du dernier hiver ( — 4 degrés au minimum) ; les fleurs ne se sont pas flétries, ont noué comme elles l'eussent fait en juin, époque de la floraison normale, et il semble que les graines soient bien constituées. Mais je n'ai cité ce fait qu'à l'occasion d'un autre qui relève sans doute des mêmes causes externes et qui justifie le titre de cette note. Il s'agit de la floraison de deux Theodora, sur la détermination G. POIRAULÏ. — ANOMALIES DES FLEURS DU THEODORA ANGUSTIFOLIA 729 desquels je ne suis pas encore absolument fixé et qui, en dépit de certaines apparences tenant plutôt à des dilTérences de station qu'à des différences essentielles, paraissent se rapporter tous deux au Theodora angusiifoUa E. Meyer. Les deux plantes ont fleuri en juin dernier, à quelques jours d'intervalle, le premier exemplaire, entièrement dégagé aujourd'hui, avant comme de raison devancé de quelques jours le second encore très gêné par les plantes voisines. Tous deux ont présenté des fleurs anormales et, autant qu'il m'a -sem- blé, aucune fleur qui fût bien constituée. Les anomalies de ces fleurs sont très inégalement marquées. Elles portent exclusivement sur l'androcée et le gynécée, les deux verticilles externes ayant les carac- tères normaux, et peuvent, en définitive, être résumées comme il suit : Du côté de l'androcée : tendance d'une des étamines à se trans- former en staminode. Elle se réalise très diversement suivant les fleurs. On trouve tous les passages entre l'étamine pétaloïde à sacs polliniques très réduits et l'étamine presque normale n'accusant cette tendance que par un léger élargissement du connectif ou le dévelop- pement d'ailes sur le filet. Je n'ai jamais vu une fleur ayant toutes ses étamines normales. Du côté du gynécée : tendance du carpelle à ne j)as se fermer et à développer sur ses bords ouverts des sacs polliniques au lieu d'ovules ; augmentation du nombre des carpelles qui varie de 2 à 5. Les ovules n'arrivent jamais à leur constitution normale. L'orientation de ces ébauches carpellaires multiples prouve qu'elles ne résultent pas du dédouljlement d'un carpelle primitivement unique mais qu'elles sont, dès l'origine, indépendantes. Un ou deux de ces carpelles prenant sur les autres une avance de développement, les choses se présentent comme si les carpelles surnuméraires s'étaient formés à l'intérieur des premiers. On a signalé à dillerentes reprises, chez les Gœsalpiniées, la pré- sence de deux carpelles. On sait que c'est le cas normal du Cœsalpi- nia digyna Rottl. et que le fait a été constaté accidentellement chez les Gleditachia sinensis et tviacanthos et le Dialiiim nitiduni. Mais, en dehors du Gymnocladiis canadensis , où AVigand a trouvé des fleurs à cinq carpelles, l'anomalie que je viens de signaler a été rarement constatée. Cette observation montre, une fois de plus, que le gynécée des Légumineuses n'est pas primitivement monocarpellé et qu'il ne le devient que x^ar suite de l'arrêt de dévelox^pement de quatre des ébauches carpellaires primitives. C'est en voulant étudier la plante pour la déterminer que j'ai 73o BOTANIQUE constaté ces anomalies. Il eût été intéressant de les suivre dans leur développement. Malheureusement les fleurs étaient déjà assez avan- cées quand j'ai constaté leur existence et les pluies exceptionnelle- ment violentes et abondantes du mois de juin 1903 (*) ont amené la chute des boutons et des fleurs , ce qui ne me permet pas de décrire les choses avec tous ces détails. J'espère que les plantes en question refleuriront l'année prochaine et qu'il me sera i)ossible de compléter ces renseignements. M. G. POIRAULT Directeur de la Villa Thuret, à Antibes SUR L'HYDNOCYSTIS PILIGERA TUL. — Séance du lo août — Le genre Hydnocystis a été créé par Tulasne, en 1844» pour un champignon trouvé par ce botaniste aux environs d'Hyères , \ Hyd- nocystis pUigeva qui, jusqu'ici, n'était connu que par les descrip- tions de son inventeur et qui n'était représenté dans les collections que par un minuscule échantillon de l'herbier Tulasne, conservé, comme on sait, au Muséum d'Histoire naturelle de Paris. J'ai retrouvé cette année, au mois de janvier, cette plante au Jardin de la Villa Thuret et si, malheureusement, les premiers états m'ont échappé, il n'en est pas moins certain que c'est bien là la plante de Tulasne, ainsi qu'il ressort d'un examen comparatif fait sur ma demande au Muséum par MM. Hariot et Patouillard. Il est certain aussi que la description de Tulasne est inexacte et incom- plète. Cet auteur décrit et figure (Fiingi hypogœi, p. ii'j , pi. XIII, fig. 2) des paraphyses linéaires libres. « Ce champignon, dit-il, est très remarquable par la dissociation des éléments de son hyménium, entre lesquels s'interpose une grande quantité dair. » C'est évidcm- (•) D'après M. Charles Naudin (Observations sur le climat et les productions du littoral de la P/'ocenfc, Rcv. g-én. Botanique, VI, 193-200), la ration niousuellc de pluie serait, pour juin, de 3r)°""23 avec 3 jours de pluie pour tout le mois, rs'ous avons eu en juin, cette année, i3 jours de pluie et, pour ce mois, une chute totale de 281"'° 55. Une seule pluie nous a donné plus de 96°"» d'eau. A. PRUNET. — LA ROUILLE DES CEREALES ^31 ment cette particularité qui a causé l'erreur de Tulasne. Les para- pliyses ne sont pas libres, mais soudées par paquets limitant des cavités ascogènes. Les asques difïluent d'assez bonne heure, laissant souvent les spores réunies par une substance qui résulte de la trans- formation de Tépiplasme. Je n'ai pu observer la formation des asques, les échantillons dont je disposais étant trop avancés en âge. Les spores mûres contiennent de nombreux noyaux (i5-i8) provenant de divisions caryocinétiques très probablement accompagnées de cen- trosome. Ces spores germent en donnant de i à 6 tubes germinatifs, généralement localisés dans un même hémisphère. Je suis arrivé à cultiver la plante sur des milieux artificiels où elle végète abondam- ment. Malheureusement jusqu'ici il ne m'a pas été possible de l'amener à fructifier. Sur la foi des dessins et des descriptions de Tulasne, tous les auteurs qui ont j^arlé de Y Hydnocystis piligera en ont fait un Dis- comycète. La structui'e et la disposition de l'hyménium est incompa- tible avec cette manière de voir. U Hydnocj'^tis piligera est non pas un Discomycète mais une Tubéracée inférieure. M. A. PEUNET Professeur à la Faculté des Sciences de Toulouse LA ROUILLE DES CÉRÉALES DANS LA RÉGION TOULOUSAINE EN 1903 — Séance du S août — On sait que le blé, le seigle, l'orge et l'avoine peuvent être attaqués par plusieurs espèces d'Urédinées appartenant au genre Puccinia. Le blé nourrit le P. graminis Pers., le P. gluniaviini (Schm.) p]i-ik. et Henn., le P. triticina Erik. Le seigle nourrit le P. graininis, le P. gluinaruin, le P. dispersa Erik. Sur l'orge croissent le P. graminis, le P. glwnariwi , le P. simplex (Kike.) Erik, et Henn., et sur l'avoine , le P. graminis et le P. coronifera Kleb. Dans la région toulousaine , considérée comme comprenant, outre le département de la Haute-Garonne, les départements du Tarn-et- Garonne, du Lot, du Tarn, de l'Aude, de l'Ariège et du Gers, ces 732 BOTANIQUE divers parasites se sont développés d'une façon très inégale sur leurs plantes nourricières pendant l'année igoS. P. graminis. = Cette espèce ne s'est montrée que vers la fin de juin et n'a pris un certain développement que sur les blés tardifs. Quelques-uns de ces derniers ont été très attaqués. Elle ne s'est montrée sur l'avoine que par exception et n'y a jamais pris qu'un très faible développement. Je ne l'ai pas observée sur l'orge et je ne l'ai trouvée qu'une fois sur le seigle et encore en petite quantité. P. giumaram. — Je n'ai observé cette espèce que d'une façon tout à fait exceptionnelle et seulement sur le blé , à partir de la fin de juin. P. triticina. — La date d'apparition du P. triticina sur le blé a présenté de grandes variations : clans certains champs, il était déjà visible dans les premiers jours de décembre, dans d'autres, il n'a paru qu'en mars, avril ou mai. Il a pris graduellement une extension et une intensité fréquemment importantes. P. dispersa. — N'a pris sur le seigle qu'un faible développement. P. simplex. — N'a pris un certain développement que sur les orges tardives cultivées pour le grain. P. coronifera. — Le P. coronifera s'est montré à peu près à la même époque que le P. graminis et comme ce dernier n'a présenté un développement d'une certaine importance que dans les champs ensemencés tardivement. Le développement relatif des diverses espèces de Piiccinia sur le blé , le seigle , l'orge , l'avoine a été par conséquent le suivant : Blé. — Le blé a été fréquemment très attaqué par le P. triticina; il a été généralement peu attaqué par le P. graminis; il a été très peu attaqué par le P. giumariim. Seigle. — Le seigle a été généralement peu attaqué par le P. dis- persa et très rarement attaqué [)ar le P. graminis. Je n'ai jamais trouvé, sur cette céréale, le P. giumariim. Orge. — Je n'ai trouvé, sur l'orge, ni le P. graminis, ni le P. glumarum et le P. simplex n'y a habituellement présenté qu'un faible déveloj)[)ement. Acoinc. — L'avoine a été généralement peu allaquée par le P. coronifera et très peu attaquée par le P. grajiiinis.. L. DANIEL. — OBSERVATIONS SUR LA GREFFE DE QUELQUES COMPOSÉES ^SS En résumé , la seule espèce de Piiccinia des céréales , qui ait pris en 1903 dans la région toulousaine, un assez grand développement et y ait présenté une intensité relativement considérable est le P. triti- cina sur le blé. Les P. g-raminis, giiimariim, dhpersa, siniplex n'ont apparu que tardivement — de la deuxième quinzaine de juin à la première quinzaine de juillet — et n'ont présenté que d'une façon tout à fait exceptionnelle un certain caractère de gravité. En 1902, javais déjà obsei'vé dans la région toulousaine une pré- dominance du P. triticina sur le blé, du P. dispersa sur le seigle, du P. siiiiplex sur l'orge, du P. coronifera sur lavoine. Toutefois, les P. dispersa, simplex et coronifera avaient paru plus tôt sur leurs plantes nourricières respectives et y avaient pris un plus grand développement. Le P . graminis et surtout le P. glwnarnin avaient beaucoup plus fréquemment accompagné sur le blé le P. triticina et y avaient pris un développement plus important. M. L. DANIEL Professeur à la Faculté des Sciences de Rennes OBSERVATIONS SUR LA GREFFE DE QUELQUES COMPOSÉES — Séance du S août — Récemment, dans un mémoire sur les capacités fonctionnelles (*), j ai montre 1 nilluence du rapport p— , qui existe entre les capacités fonctionnelles propres du sujet et du gretfon, sur l'état biologique et la durée des plantes greffées. J'ai indiqué que la valeur initiale de ce rapport a une répercussion considérable sur la réussite des greffes et j'ai essayé de déduire de la théorie des principes permettant de faire un choix rationnel des sujets et des greffons, d'après leur valeur propre comme af)pel, valeur qui est fonction d'une part de la situation de l'organe sur le - (*) L. Daniel, La théorie des capacités fonctionnelles et ses conséquences en agriculture, ■(Rennes, 1902, in-8°, 275 p., 91 fig-. dans le texte et 20 pi.). j34 BOTANIQUE corps de la ])lante et de la façon dont la plante entière a été antérieu- rement alimentée Cette année, je me suis attaché à étudier Tinfluence de la valeur initiale du rapport p- sur la réussite , dans une série de greffes de Conij)osées Radiées. J'ai réussi à greffer : 1° Sur boutures racinées d\4.nthemis frutescens , les plantes sui- yantes : Tanacetiim viilgare, T. boréale, Ptarinica vulgaris , Gala- tella cerulœa, Stenactis speciosa, Innla sqiiarrosa , SoUdago Vir- gaiivea, Agevatiiin coiryzoïdes , Senecio erucifoUus, Cinéraire hybride, Baccharis haUmifoUa, Eiipatoiniim cannabiniim ; 2° Sur boutures racinées ^ Ageratiini conjyzoïdes , les Composées suivantes : Galatella cerulœa, G. UnifoUa, Eiipatoriiimcannabiniiin, Ptarinica vulgaris, Inula crit/unoïdes. Ces greffes ont repris avec une facilité relative très différente et cette facilité n'a point été proportionnelle au degré de parenté bota- nique des plantes greffées, comme l'exigerait le principe d'Adanson, rigoureusement appliqué. Ce sont des exemples de plus qui viennent confirmer ce que j'ai indiqué dans une communication précédente (*). Ainsi, je n'ai pu obtenir la réussite complète de la greffe de divers Heliaiithus et du Dahlia sur V Anthémis frutescens. La soudure s'effectue bien, le greffon pousse quelque j)eu, se rabougrit et n'ar- rive pas à fleurir. Pourtant, ces plantes sont plus voisines de VAn- theniis qu'un certain noml^re d'autres qui ont réussi et figurent dana les listes ci-dessus. Ce que je veux faire remarquer plus spécialement, c'est l'influence de l'âge et de la préparation des parties de plantes qui servent dans la greffe. J'ai choisi comme sujets de jeunes boutures de cinq semaines bien A^goureuses et par conséquent encore peu ligniliées. De même, les- greffons choisis étaient des rameaux jeunes à tissus parenchvma- teux bien vivants et prédominants. J'ai fait une première série de greffes le 4 avril. Le 25 avril, j'ai refait la même série de greffes sur des boutures, qui, plus vieilles de trois semaines, s'étaient lignifiées et possédaient alors un système conducteur Ijien diflérent des premières. J'ai [)ris. des greffons à l'état semi-herbacé comme dans le premier cas. (*) L. Daniel, Le principe de la parenté botanique en fait de greffage. (C. R. de TAsso- ciation française, Congrès de Boulogne, 1899). L. DANIEL. — OBSERVATIONS SUR LA GREFFE DE QUELQUES COMPOSÉES 735' J'ai observé entre les deux séries, traitées par ailleurs de la inêiiie manière et dans des conditions essentiellement comparaljles, des différences très marquées comme réussite. Le Baccharis haliinifolia qui avait repris dans la première série avec des greffons semi-herbacés, mais non avec des greffons ligni- fiés, n'a pas repris du tout dans la deuxième série. D'une façon géné- rale, toutes les greffes ont moins facilement réussi ; les greffons sont restés plus faibles. Cette difficulté plus grande de la reprise a natu- rellement plus nui aux greffes qui, dans des conditions plus favo- rables, se développent avec difficulté. De ces expériences se dégage fort nettement un fait important, que j'ai mis en évidence déjà dans d'autres greffes : l'éducation du sujet et celle du greffon (*) ont une importance capitale dans la réussite des greffes ; c'est ce que l'on ne devra jamais perdre de vue dans la pratique. L'on conçoit facilement ces différences dans la réussite quand on opère sur des sujets boutures d'âge différent. La conduction du sujet, ttD^ qui est réglée par la formule t' = ^j— X constante pour un môme vaisseau, dépend aussi du nombre N des vaisseaux. Ce nombre N varie suivant l'âge du rameau bouture. Les conditions du rapport 7s- , après reprise, ne peuvent être les mêmes avec un greffon iden- tique et des sujets de capacité fonctionnelle difféi-ente. De là l'inéga- lité obligatoire dans la réussite. D'autre part, plus la plante est riche en tissus jeunes, en paren- chymes actifs, plus la soudure se fera facilement et plus elle sera parfaite comme conduction de la sève brute. A une interruption moins prononcée de la circulation doit correspondre tout naturelle- ment un rapport p^ , dont la valeur est plus rapprochée de i . Il va y^a de soi que le développement relatif des appareils respectifs de l'asso- ciation sera forcément meilleur. La théorie et la pratique sont donc entièrement d'accord. (•) L. Damf.l. L'accoutumance dans le greffage (Lyon-Horticole, 1902), etc. ^36 BOTANIQUE M. É. De WILDEMAN Conservateur au Jardin botanique de Bruxelles (Belgique) A PROPOS DE POISONS D'ÉPREUVES DE L'AFRIQUE OCCIDENTALE [615,97:67.2] — Séance du 10 août — Malgré la civilisation qui pénètre de plus en plus en Afrique tro- picale, le féticheur possède encore une influence considérable sur le noir; c'est lui qui impose les épreuves du poison, si fréquentes dans l'Afrique centrale. Les poisons employés pour ces jugements des dieux sont malheureusement encore bien peu connus et le blanc est souvent impuissant à combattre leui^s effets. Le Gouvernement de l'État Indépendant du Congo a eu à sévir maintes fois contre ces pratiques indigènes terribles et il à cherché à connaître de quels éléments étaient constitués ces poisons d'épreuves. Contrairement à ce que l'on a cru pendant longtemps, il n'y a pas, pour une région un peu étendue, une seule plante bien spéciale entrant dans la pré- paration du poison. Dans certains cas, la plante n'entre même pas du tout en ligne de compte et l'indigène se sert, pour préparer le poison d'épreuves, d'eau dans laquelle il a délayé de la x^ourriture, ce qui sullit fréquemment pour engendrer le tétanos ; dans d'autres cas. une plante constitue lélément principal du poison. L'année der- nière, nous avons reçu du district des Cataractes (Etat Lidépendant du Congo), par l'intermédiaire de la Direction de l'Agriculture, des fragments d'une plante, racines et branches feuillues, qui entrait dans la préparation d'un poison et qui portait le nom de n'Kasa. L'examen des matériaux incomplets nous permit de rapporter la plante au genre Strychnos. Déjà en 1897, l'État Indépendant du Congo avait reçu du capitaine de la Kéthulle des fragments de racines d'une plante trouvée dans les environs d'Umangi et dont les indigènes extrayaient un poison. De la similitude de ces fragments avec les racines du n'Kasa on i)eut conclure que la plante toxique d'Umangi se ra]q)ortc fort probable- ment à un Strychnos. Depuis, nous avons appris par des rapjxu'ts envoyés par les tribunaux du Congo au Gouvernement central que n'Kasa ne désigne pas, comme on le croyait, la [)lante d'où s'extrait le É. DE WiLDEMAX. — POISONS d'ÉPREUVES DE l' AFRIQUE OCCIDENTALE "'St poison d'épreuves, mais bien Tépreuve elle-même et ce nom de l'épreuve ne serait pas localisé dans le district des Cataractes seul, mais on le rencontrerait même dans le dialecte du peuple Banoala. De nouveaux matériaux reçus récemment ont confirmé notre pre- mière détermination et nous ont permis de rapporter la plante du n'Kasa au Stiychnos Dewevrei décrit par M. le professeur E. Gilo- de Berlin sur des matériaux peu complets récoltés au Congo par notre regretté confrère A. Dewèvre. L'étude des végétaux du genre Strychnos présente, au sujet de leurs propriétés, des particularités intéressantes; tandis que certains d'entre eux sont plus ou moins vénéneux, d'autres fournissent au contraire des fruits comestibles estimés par le noir et même par le blanc. Les fruits d'espèces comestibles et toxiques sont, dans cer- tains cas, si send:)lables qu'il faut une grande attention pour les distinguer les uns des autres et éviter des inconvénients parfois graves. Il nous a pal'u utile d'attirer l'attention sur les espèces de ce genre, car nous pouvons actuellement compléter la description du Stvychnos Dewevrei, dont nous avons des inflorescences et des fleurs. L'examen chimique de l'écorce des racines et des tiges de cette espèce a prouvé qu'elle contenait de la strychnine. La manière dont l'indigène prépare ce poison est peu connue ; d'après des indica- tions vagues, ce serait en grattant l'écorce des racines et des tiges et en mélangeant la poudre obtenue à de l'eau qu'on obtiendrait le breuvage de l'épreuve. Ce n'est pas la première fois qu'on signale en Afrique l'emploi de Stiy^chnos par les féticheurs. En 1879, Bâillon avait déjà attiré l'attention sur une plante de ce genre rapportée du Gabon. Les matériaux très incomplets qu'il avait eus à sa disposition avaient été récoltés en i854 par MM. Franquet et Aubry-Lecomte. Bâillon citait pour cette plante les noms indi- gènes : Icaja, Acaja, n'Caja, Encaja, Caja et également m'Boundou. Il faut faire remarquer ici la resseml^lance des dénominations appli- quées à la plante du Gabon : Icaja, etc., avec le nom de n'Kasa et, d'autre part, que le seul nom indigène relaté par Dewèvre , dans ses notes manuscrites, est «Boundou». D'après Bâillon, les noirs enlèvent par grattage une partie de l'écorce, qu'ils font infuser dans de l'eau; l'ingestion d'une petite quantité de ce liquide donne l'ivresse, une plus forte dose amène sûrement la mort. On apprit plus tard seule- ment que cet Icaja était un poison dépreuves très usité au Gabon. Des expériences entreprises par MM. Pecholier et Saint-Pierre, 47* ^38 BOTANIQUE Ralîuteau et Peyri, démontrèrent que l'Icaja boundou était un tétani- sant énergique. Bâillon faisait aussi remarquer que le Stiychnos Icaja. dont il créa le nom en 1872, était très semblable à un Strj'ch- jios américain, le Strychnos Johertiana, mais que, chose à noter, tandis que le Strj'chnos américain était un curarisant, le Strychnos africain était un tétanisant. Les analyses chimiques qui ont été faites sur le Strj'chnos Icaja, semlîlent prouver que dans cette plante la strychnine n'est pas accom- pagnée de brucine, ce qui est généralement le cas dans les Stij'chnoa à strychnine (*). En même temps que Bâillon signalait le Str^^chnos Icaja, il décri- vait un Strychnos densijiora provenant du Fouta Djallon, où il avait été récolté parHeudelot; mais il ajoutait à propos de cette der- nière espèce : « Nous ne pourrions affirmer qu'il ne constituera qu'une simple forme ou variété du S. Icaja. quand les oi'ganes de floraison de ce dernier seront connus ». Il ne peut y avoir la moindre confusion entre les Strychnos Icaja et Deweçrei, d'une part, et le Strj'chnos densiflora, d'autre part, lorsqu'on peut en étudier les fleurs. En effet, chez le *S'. densijiora , comme son nom l'indique, les inflorescences sont courtes et sessiles, forment presque des verticilles à l'aisselle des feuilles, tandis que, chez le S. Dewevrei, ces inflorescences sont allongées, plus ou moins longuement pédonculées ; en outre, les fleurs mesurent i cm. envi- ron de long chez le S. densijiora et possèdent 5 pétales, tandis que, chez le S. Dewevrei elles mesurent à peine 1 mm. de long et n'ont que 4 lobes à la corolle. Grâce à l'amabilité de M. J. Poisson, du Muséum d'Histoire natu- relle de Paris, nous avons pu examiner les feuilles des S. Icaja et densijiora et, contrairement à ce qu'en a dit Bâillon et ce que reprend M. Baker, nous ne pouvons trouver de ressemblance entre ces deux espèces. M. Baker, dans la « Flora of tro^j^cal Africa » croit, en effet, pouvoir afflrmer que le S. Icaja ne diffère matériellement ni par l'habitus, ni par les feuilles, du S. densijiora. Le spécimen sur lequel il base son dire avait été reçu à la Société de Pharmacie de Londres en i8G.5; nous ne savons s'il avait la même origine que le type de Bailhjii. La structure des feuilles de ces deux ;iS/r;'67î/io.s, édiantillons types, est cependant bien diiférente; Bâillon lui-même avait déjà (*) Pour (le plus auii)lcs rcusfi^iicmculs sur la composition cliiuu(pic de colle piaule, voyez : H. Bah. 1. on, Trailc dr hotmiiqne mcdicah\ ji. laUi; Dk Lankssan, Plantes iilUrs des coloitics fi-ancoisi's, p. 8'5i ; Hkc.kki, et Scui.Ar.oKNUAriiKN, .foiiiridl di' l'harnuirif et de Chimie ,'iSH'2. \). ia: Galthiot et Laitiku, Journal de J'harniaeie et de (.'liiiiiie, i8iil), p. y; rAHKic et lIoLMs. l'haniiaeeiitieal Joiinial. iSçn. p. (,i;. É. DE WiLDEMAN. — POISONS d'ÉPREUVES DE l' AFRIQUE OCCIDENTALE 789 cité ces différences sans les préciser suffisamment, il est vrai ; il dit en effet : « Les feuilles (*S'. densiflora) sont, quant à la consistance, à la nervation, à la forme générale, semblables à celles du S. Icaja. un peu moins allongées seulement et un peu moins longuement acumi- nées ». Si Ton examine avec soin les deux feuilles, on voit que, dans le S. densiflora, des cinq nervures caractéristiques les deux externes sont moins rapi^rochées du bord chez le S. densiflora que chez le S. Icaja, où l'ai'cature des nervures est moins marquée; en outre, les deux nervures internes naissent à une certaine distance de la base de la feuille chez le S. densiflora et à la base même chez le S. Icaja; ces nervures se continuent droites jusque dans Tacumen de la feuille chez le S. Icaja, tandis que chez le S. densiflora elles présentent vers le sommet trois ou quatre arcs très nets; en outre, l'acumen terminal est beaucoup plus grêle et plus long chez le S. Icaja que ^- chez le S. densiflora; chez ce dernier, il mesure de i2-i5 mm. de long et 5-6 mm. de large à la base; chez le S. Icaja, il mesure déjà dans les plus petites feuilles 20 mm. de long et 3-4 mm. seulement de large à la base. Si l'on se basait sur le nom indigène et sur les propriétés, le S. Dewevrei Gilg devrait disparaître pour faire place au S. Icaja, dont la priorité ne serait pas discutable et qui appartient dans le genre à un tout autre groupe que le S. densiflora, que Bâillon consi- dérait jusqu'à un certain point comme une simple forme. Mais l'examen des feuilles du S. Icaja, dont nous menons de donner les caractères, fait voir que cette espèce ne paraît pas devoir être rangée dans la synonymie du S. Dewevrei; dans cette dernière espèce les nervures latérales naissent à une certaine distance de la base du limbe; dans le S. Icaja elles partent de la base. Nous possédons cependant en herbier une plante récoltée à Kisantu par J. Gillet, que nous avons rapportée au S. Dewevrei el qui partage les caractères du S. Dewevrei et ceux du -iS. Icaja, les nervures étant légèrement supraJjasilaires. On ne pourra donc certifier les différences que lorsqu'on aura pu étudier ces plantes en fleurs et en fruits. Le S. Icaja ji peut-être lieaucoup d'analogie avec le S. kipapa Gilg; chez cette espèce, en effet, comme le montre la figure publiée par j\I. Gilg (*)' l*^s nervures latérales partent également de la base du limlje; nous ferons cependant remarquer que ces nervures laté- (*) Ucbor gifli^e uiul uiischâdliclic Strychnos Artcn in Bcr. cl. Dcutschcn Pharmaccut. ■Gcsell. 1900, pi. II, lig. A. ^ n/JO BOTANIQUE raies sont plus parallèles au bord de la feuille dans le type de Bâillon que dans le type décrit par M. Gilg, c'est-à-dire que, d'après le dessin pidîlié par M. Gilg, les nervures latérales se trouvent environ au tiers du limbe, dans le S. Icaja vers le quart. M. Gilg cite pour le S. Kipapa des feuilles de 24-28 cm. de long et 8-10 cm. de lai-ge; d'après les échantillons du Muséum, les feuilles du S. Icaja mesurent de 12-24 cm. de long et 4'5-i2 cm. de large. Les allinités des S. Kipapa et Icaja sont donc très grandes et ce ne sera guère que par les caractères floraux qu'on pourra décider si ces deux noms ne s'appliquent j)as à une seule et même plante. Depuis la publication de la note de Bâillon, relative à la toxicité du S. Icaja, on a signalé d'autres Strj'chnos vénéneux et, parmi ceux-ci, le S. Kipapa, dont nous avons déjà cité le nom et qui a été découvert par Pogge dans les environs de Mukenge (Etat Indépen- dant du Congo). D'ajjrès les notes manuscrites, jointes aux échan- tillons de cette plante, c'est à l'aide de l'écorce rouge des racines que l'indigène prépare le poison « Kipapa ». L'écorce est introduite dans une calebasse où l'on a placé au préalable des brins de paille; on ajoute de l'eau, on recouvre le mélange. Le liquide séparé a une teinte rougeàtre; pris à l'intérieur il occasionne des vomissements ou la mort précédée de très fortes convulsions. Parmi les Stry'chnos vénéneux, M. Gilg cite encore le S. Dekind- tiana, dédié à un missionnaire de l'Angola. Cette espèce paraît très voisine du S. coccuJoides Baker; mais, tandis que ce dernier n'est pas vénéneux, le S. Dekindtiana , dont les fruits ressemblent fortement à ceux de l'autre espèce, peut occasionner des accidents très graves. L'ingestion d'un demi-fruit de ce Strj^chnos vénéneux suffît pour occasionner la mort. D'après les renseignements commu- niqués de Huilla (Angola) par M. Dekindt, il existait en 1898. au dire des indigènes, dans les environs de cette localité trois pieds seulement de cette espèce et deux de ceux-ci auraient même été détruits ; le troisième , qui a été vu par le missionnaire portugais , atteia-nait 6 mètres de haut et un diamètre de 20 cm. Les gazelles qui broutent les jeunes feuilles de cet arbre meurent presque instan- tanément, ce qui n'empêche pas les indigènes de se nourrir de leur chair. Parmi les espèces vénéneuses, il faut encore citer le S. pungens,. bien que certains auteurs prétendent que les fruits de cette espèce sont comestibles et n'occasionnent aucun dérangement s'ils ne sont pas consommés en trop grande quantité , auquel cas ils pourraient provoquer des diarrhées. É. DE WiLDEMAX. — POISOXS d'ÉPREUVES DE l' AFRIQUE OCCIDENTALE 74^ Le s. omphalocarpa Gilg est également réputé vénéneux; il est originaire de l'Est africain allemand (West Useguha); ses graines sont très amères et la pulpe jaune qui les entoure est également dune grande amertume. Parmi les espèces comestibles appartenant au genre Strychnos , on signale pour l'Afrique tropicale : S. unguacha A. Ricli. (= S. innocua Del,); S. Qiiaqua Gilg; S. Cerasifera Gilg; S. tonga Gilg; S. spinosa Lam. ; S. Behrensiana Gilg et Busse ; S. cocciiloidcs Baker de l'Angola; plusieurs de ces espèces sont même très estimées par le noir, qui les réserve comme arbres fruitiers. Le nombre des espèces du genre Strychnos , trouvées dans l'État Indépendant du Congo et dans le Galm est encore relativement très réduit; sur plus de 80 espèces signalées en Afrique tropicale, les suivantes seules sont reconnues dans ces régions : Strj'chnos malacoclados AVriglit (Galm) Icaja Baill. Marquesii Baker congolana Gilg Kipapa Gilg Deweçrei Gilg Schweinfurthii Gilg flovihiinda Gilg longicaiidata densiflora Baill. pungens Solered. Gilletii De Wild. suherosa De AVikl. varialihis De AVild. gracilliina var. paii- cispniosa De AVild. ( Unguacha var. obo- vata De AVild. ( ( — ) (toxique) ( - ) (Etat Indép. du Congo ( . - - (toxique) ( - ) (toxique) Cette dernière est en usage dans la médecine indigène ; la décoc- tion de ses racines est employée au Katanga pour guérir les maux l'yeux des enfants. De nouvelles recherches amèneront sûrement, în Europe, les éléments nécessaires pour compléter nos connais- sances relatives à la toxicité ou à la comestibilité de ces plantes et feront sans aucun doute découvrir bien des nouveautés. Comme suite à ces quelques notes, nous décrirons trois *S7r?'c/j/i os 742 BOTANIQUE nouveaux du Congo et donnerons du Strychnos Deweirei une description plus complète que celle publiée par M. Gilg. Nous ne possédons malheureusement, sur ces trois espèces nouvelles, aucune indication quant à leurs usages indigènes. Avant de donner les diagnoses des trois Strychnos , nous attire- rons l'attention sur la valeur des caractères différentiels employés par M. Baker dans la Flore d'Afrique tropicale de M. This-Dyer. Le monographe anglais se base sur les caractères suivants pour classer en quatre groupes les espèces africaines de ce genre : Plantes buissonnantes grimpantes , munies de vrilles sans épines ; Plantes buissonnantes dressées à feuilles aiguës, sans épines ni vrilles ; Plantes buissonnantes dressées à feuilles obtuses ou obscurément cuspidées, sans vrilles ni épines ; Plantes buissonnantes dressées, épineuses, sans vrilles. Malheureusement ces caractères ne peuvent . dans bien des cas . servir pour différencier des plantes, telles par exemple le S. Dewevrei formant des buissons qui paraissent parfois privés de vrilles, celles-ci ne se développant que sur les extrémités des rameaux. Quant à la présence et à l'absence d'épines, ce caractère, à première vue si tranché, pourrait induire en erreur : nous avons observé dans une même espèce des rameaux munis et des rameaux privés d'épines. A divers points de vue, l'étude de ce genre parait donc digne d'être reprise. Strychnos Dewevrei Gilg in Engl. Bot. lahrb. XXMII (1899) p. 119; Baker in This-Dyer FI. trop. Afr. III, p. 52i. Plante glabre, dressée ou sarnienteuse, pouvant deveuii" une forte liane et atteindre 20 à 25 m. de long, à racine pivotante , à écorce rougeàtre , à tronc mesurant jusqu'à i5 cm. de diamètre, à bois léger, grisâtre, à saveur amère, à écorce d'un gris brunâtre, verruqueuse, à couche interne rougé. Cnres Ugneuses. Feuilles glabres à pétiole de 8-12 niillim. de long, à lame ovale ou oblongue, arrondie ou cunéilbrme à la base, acmninée au sommet, de 6-1.5 centimètres de long, acumen compris, celui-ci aigu, atteignant 2 centmiètres de long; limbe de 3-7 cm. de large, nienil:)raneux, ou subcoriace, plus brillant et plus foncé au-dessus qu'en dessous, à cinq nervures basilaires, dont les deux externes très Unes courent parallèle- ment aux bords; les deux mternes naissent à 3-8 millim. de la base du limbe; dans les feuilles des rameaux prmcii)aux, elles sont opposées; dans celles des rameaux supérieius latéraux elles sont alternes, se rap- l»rocliant plus du bord vers le sommet de la feuille cjue vers la base, dis- tantes vers le milieu de 5 à 14 niillim. de la nervure médiane, plus proé- minentes en dessous qu'au dessus, à nervation secondaire très visible sur les deux faces. Inllorescences glabres, en cîmes axillaires, opposées, soLi- É. DE WiLDEMAN. — POISONS d'ÉPREUVES DE l' AFRIQUE OCCIDEXTALE 74^ taircs ou au nombre de 2 à 5, rameuses, de 2,5-5 centim. de long-, pédon- cule compris, plus ou moins longuement pédonculées, à pédoncule aplati, mimies au niveau des ramifications de bractées ovales-aiguës, prescpie connées à la ]>ase. diminuant de grandeur de la base de la cime au som- met, les intérieures mesurant 2,0 millim. environ de long. Fleurs coui'te- ment pédicellées, à pédicelle glabre, de o,5 millim. de long. Calice à quatre lobes étalés pendant l'anthèse, de o,5 millim. environ de long. Corolle caduque, de 2-2,5 millim. de long, à quatre lobes soudés vers la base, elliptiques, aigus, gla])res sur les deux faces. Ovaire subglobuleux, surmonté d'un style environ aussi long que lui et terminé par un stigmate aplati plus ou moins lobé ; ovaire et style mesurant ensemlile i niillim. environ de long, entourés par les sépales qui se redressent après l'anthèse. Lukolela (Alf. Dewèvre, 7 avril 1896). Kwamoutli, 1902. Obs. — M. Gilg, en décrivant cette espèce que nous lui avions commu- niquée, n'en possédant pas de fleurs, la compare au S. Kipapa Gilg décrit en même temps et provenant également du Congo. Dans le travail inséré dans les « Berichte der deutschen pharmaceutisclie Gesellscliaft X », M. Gilg a publié, pi. II, lig. A, le dessin d'une feuille de ce S. Kipapa, qui permet de fixer la dilîérenciation du .S'. Dewevvei; en eflet, chez le S. Kipapa, les nervures sont toutes basilaires, i)artant du sommet du pétiole ; chez le .S'. Dewevrei, il y a entre les deux nervures de Ijordure et les nervures plus centrales une distance qui peut atteindre 10 millim. environ; il y a aussi une certaine diflérence dans la grandeur des feuilles, mais ce caractère n'est que de valeur secondaire, au point de vue mor- phologique, les deux feuilles se ressemblent fortement. Strychnos Gilletii De Wild. nov. sp. — Arbuste de la brousse, à rameaux épaissis et aplatis aux nœuds, d'un brun jaunâtre à l'état sec, courtement pu])escents, devenant plus ou moins glabres et à couche subé- rifiée épaisse, épines axillaires, grêles, plus ou moms recourbées, n'ap- paraissant que sur les ramifications stériles grêles, de 6-10 milUm. de long. Feuilles oblongues ou obovales. rétrécies à la base en un pétiole plus ou moins allongé et atteignant 2 centim. de long; limlje obtusément ciméiforme et apiculé au sommet ou profondément émarginé, coriace, de 4-" centim. de long et 2-4,5 centim. de large, brillant sur la face supé- rieure, mat sur la face inférieure, à cinq nervures principales, parfois sept, les deux inférieures formant une nervure peu visible assez près de la bordure; les suivantes se perdent vers le milieu de la feuille et s'anasto- mosent en arc , les plus internes opposées ou alternes , arquées vers le sommet et anastomosées avec les nervures secondaires peu visibles et en creux comme les nervures principales, sur la face supérieure, un peu plus proéminentes sur la face inférievire. Pétiole et nervures velus surtout vers la base à la face inférieure, à poils épars sur la face supérieure. Inflores- cences en cimes lâches, de i5 centim. environ de long, terminant les rameaux principaux ou latéraux, plus ou moins longuement pédoncules, à pédoncule de i5 millim. de long, courtement velu. Fleurs en cimes, à pédicelle grêle, velu, de i,5-3 millim. de long, numi à la J)ase ou vers le milieu de bractées linéaires, de 3 millim. environ de long ; sépales allon- gés-linéaires, de 5 millim. environ de long, velus-ciliés , aigus ; corolle de 744 BOTANIQUE 3-5 inillim. environ de long dans le bouton, rapidement caduque, velue extérieuremeirt ; ovaire velu à style court. Fruit assez gros de 5 centini. environ de diamètre. Kisantu (J. Gillet, 1899, n. i34 et 1900, n. 880). Obs. — Cette espèce a une certaine analogie avec le ,S. Ccm^allioi Gilg. ]ji En(/L Bol. Jahrb. XXYIII (1899), p. i23, et par suite avec le *S'. spinosa Lam. ; mais, si l'on compare la description puliliée par M. Gilg (loc. cit.) a^ec celle que nous venons de donner et si on met en présence des échan- tillons de S. Carvalhoi de Delagoa-Bay (Junod, n'^ io3), authentiqués par M. Gilg, et notre plante, ou remarquera de notaljles diUérences. Les feuilles du S. Gilletii sont plus grandes, plus coriaces, très lu'illantes sur la face sui^érieure et très nettement discolores; en outre, toutes les parties de Tin- florescence sont j)lus velues que dans le type décrit par M. Gilg. Peut- être le *S'. Gilletii constitue-t-il une forme occidentale du S. Cmvallwi, trouvé seulement jusqu'à ce jour dans la région du Mozambique. 'SI. Baker se base dans le Flora of tropical Africa, IV, p. 5i8-520, sur la présence d'éjjines et de vrilles pour classer en j^lusieurs groupes les espèces de Strychnos africains; nous nous permettons d'attirer l'attention sur le peu de constance de ces caractères, qui poiu^raient induire en erreur. Un même Strychnos peut se développer sous forme de liane ou rester buis- sonnant et présenter ou ne pas présenter de cirres ; de même une espèce peut présenter i^arfois quelques épines seulement et' cela encore sm' les parties stériles. Si notre collecteur, M. J. Gillet, n'avait pas, en nous envoyant ces échantillons, attii'é tout spécialement notre attention par le numéro appliqué à deux parties de la plante, nous aurions pu être amené à placer dans deux groupes différents nos échantillons, l'un ne présentant j)as trace d'épines, quoique bien adulte et fleuri, l'autre non fleuri, muni de (juelques épmes axillaires. Dans le n'^ 880 il n'y a également pas trace d'éi>ines. Quant à la forme des feuilles, elle ne peut également servir à classer les esi^èces de ce genre, car, comme nous avons pu l'observer dans la plante que nous décrivons, sur le même rameau on trouve des feuilles largement cunéiformes au sommet, d'autres profondément émarginées. Toutes les feuilles de certains de nos échantillons sont émargmées au sommet; or, d'après M. Baker, ce caractère n'existerait que chez le S. einarginata Baker (Djur Ghattas, Prof. Schweinfurth, n" 1396). Il n'est ])as possilile pour le moment de passer en revue les caractères miijor- tants de ce genre, mais nous croyons qu'il y am^ait avantage à se baser sur la forme et la longueur des lobes du calice, pour dilférencier les groupes, et d'abandomier les épines et la forme des feuilles comme carac- tères de second ordre. Strychnos suberosa De Wild. nov. sp. — Arbre ou arbuste, à rameaux épaissis et aplatis aux nœuds, d'un brmi foncé, plus ou moins luisants à l'état sec, courtemenl mais densément pubescents, devenant plus ou moins glabres et à couche subérifiée très épaisse, crevassée longitudinalement, à épines axillaires grêles, plus ou moms recoiu'bées, n'existant pas sur les rameaux florifères, de 7-8 millimètres de long. Feuilles largement ovales ou ovales-oblongues , arrondies ou cunéiformes à la I>asc, à pétiole plus ou moins long, atteignant environ i cent, de long, velu: à limbe aigu ou É. DE WlLDEM^N. — POISONS D'ÉPHEUVES DE l' AFRIQUE OCCIDENTALE 'J^O sul^obtus au sommet, sul)conace, de 6-7 cent, de long et 3,5-5 cent, de larg-e, mat ou devenant légèrement Iji-illant sur la face supérieure, mat sur la face inférieure, velu sur les deux faces à l'étal jeune, devenant glabre supérieurement, à 7 nervures principales bien marquées, les deux inférieures restant jusque vers le milieu à une certaine distance de la marge, les suivantes naissant au sommet du péjiole ou à une certaine distance, les plus internes alternes ou opposées anastomosées en arc vers le sommet avec les nervures principales et les latérales; nervures secondaires peu visibles , et en creux comme les principales sur la face supérievire, un peu plus fortement proéminentes sur la face inférieure. Pétiole et nervures velus, surtout vers la base, biilorescences en cimes compactes, denses, atteignant 3,5 cenlim. de long et 5 centim. de dia- mètre, terminant les rameaux principaux et latéraux, plus au moins longuement pédonculées, à pédoncule atteignant 3 centim. de long, velu. Fleurs en cimes, à pédicelle de i,5-2 millim. de long, velu, muni à la base ou vers le milieu de bractées linéaires, de i,5 millim. de long, ciliées ; sépales lancéolés velus et ciliés, de 2-2,5 millim. de long, aigus; corolle de 3,5 millim. de long, à lobes ti4angulaires, à tube plus long que les lobes, courtement velue extérieurement, glabre intérieurement, sauf à la gorge, où se trouve un anneau dense de poils blanchâtres ; ovaire velu à style court ne déliassant pas le tu])e de la corolle. Lemfu, 1902 (R. P. Butaye, coll. J. Gillet, n" 22(ii); Kisanlu, igoo (J. Gillet, s. n.) Obs. — Comme on peut le voir par la comparaison des descriptions, le S. Gilletii et le S. suherosa sont deux esiDèces très voisines. A première vue, la villosité assez constante des deux faces de la feuille et les inflo- rescences très denses paraissent suffire pour caractériser cette espèce; mais, quand on examine plusieurs échantillons, on trouve que les feuilles deviennent glabres avec l'âge et, sans devenu' aussi luisantes que celles de l'esi^èce précédente, présentent avec elles cepentlant l^eaucoup d'ana- logie: elles sont cependant toujours plus courtement i)étiolées et jamais aussi longuement cunéiformes à la base que celles du .S'. Gilletii. Le vrai caractère difl'érentiel réside dans la grandeur des lobes calicinaux , plus courts que ceux du S. Gilletii et plus longs (jue ceux du S. spinosa Lam., ce dernier se dilïérenciant facilement déjà rien que par la glal>réilé de ses feuilles. Strychnos variabilis De Wild. nov. sp. — Arbre de taille moyenne, à rameaux velus, à poils brunâtres appliqués et à soies longues étalées, privés de cirres. Feuilles ovales-ol)longues ou oblongues-lancéolées, par- fois largement ovales, très courtement pétiolées, à pétiole de 2-3 millim. de long, à poils brunâtres étalés, à limbe mince et mat sur les deux faces à l'état jeune, devenant épais et coriace à l'état adulte, plus foncé et plus brillant au-dessus qu'en dessous, glabre sur les deux faces, mais cilié sur les l)ords et sur les nervures, à poils brunâtres très apprîmes, arrondi ou suljcordé à la base, aigu subapiculé au sommet, ou arrondi et même émarginé par suite d'avortement , de 4-8 centim. de long et de 2-4 centim. de large, à cinq nervures basilaires ou sul>basilaires, les deux externes faibles, basilaires, anastomosées très rapidement en arc avec ^46 BOTANIQUE les nervures secondaires formant inie bordure interne à une certaine distance du bord; les nervures i)lus internes plus fortement proéminentes sur les deux faces naissant à la base du limbe ou se séparant de la nervure médiane un peu au-dessus de la base, opposées ou alternes, parfois à cinq millim. du sommet du pétiole, se prolongeant juscpe vers le milieu, à partir duquel elles s'anastomosent avec les nervures pennées latérales et forment des arches anastomosées avec les nervures secon- daires, biflorescences terminales, terminant les rameaux principaux et latératix, parfois raccourcies, assez denses, atteignant 3,5 centim. environ de diamètre, courtement pédonculées ou sessiles; fleurs courtement pédi- cellées, à pédicelle accrescent après l'anthèse et mimi de bractées linéaii-es, ciliées-velues, de 3-5 millim. de long. Calice à lol)es linéaires, de 4-5 millim. de long, ciliés longuement sur les bords; corolle de 5 millim. environ de long, à tube de 2,5 millim., glabre extérieurement, à lobes ciliés , triangulaires aigus , densément velus sur la face interne et à la gorge; ovaire ovoïde, surmonté d'un style de quatre millim. de long, assez longtemps persistant et dont la base reste sur le fruit mùr sous forme d'un acumen; fruit ovoïde ou sul^globuleux de 2-2,5 centim. de long et de 18-20 millim. de large, brunâtre, plus ou moins luisant, géné- ralement à mie graine. Kisantu, 1900 (J. Gillet, n° 808); Kiniuenza, mars 1901 (J. Gillet, n« 2.081) et octobre-novembre 1900 (J. Gillet, n° 1.726). Environs de Léopoldville , août 1902 (J. Gillet, s. n.). Obs. — Par son port di'essé, l'absence de vrilles et d'épines, la forme de ses feuilles et la disposition de ses fleurs qui terminent des rameaux, le S. i'at'iabilis paraît devoir se rapprocher du S. cerasifera Gilg, dont on ne connaît pas les fleurs ; la plupart des autres espèces rangées par M. Baker (in This.-Dijer¥\. trop. Afr. IV, p. 5i8-5i9) dans le même groupe sont à fleurs axillaires ou diffèrent par des caractères foliaires, tels que la nervation et la base cunéiforme. Un des caractères saillants de notre plante est la base des feuilles; on peut y ajouter la villosité des branches. Nous attirerons aussi l'attention sur la varialjilité des feuilles; celles-ci, normalement oblongues-aiguës, sont fréquemment sul^orbiculaires, obtuses ou émarginées et peuvent se présenter sous toutes les formes intermé- diaires. La texture varie également suivant l'âge ; à l'état jeune , lors de la floraison les feuilles sont peu épaisses, presque translucides; avec l'âge elles deviennent coriaces, épaisses, très luisantes. C. BRUYANT. — LA VÉGÉTATION MACROPHYTIQUE AU LAC PAVIN ^47 M. G. BRUYANT Professeur suppléant à l'École de Médecine et de Pharmacie de Clermont Sous-Directeur de la Station limnologique de Besse LIMITE INFÉRIEURE DE LA VÉGÉTATION MACROPHYTIQUE AU LAC PAVIN [581.91 (44-59)1 — Séance dii lo août — Dans ses « Recherches sur la végétation des Lacs du Jura », M. le professeur Magmn a déterminé, d'une façon précise, le mode de distribution des végétaux dans les lacs de cette région. Les zones s'échelonnent régulièrement ; sur la gi^ève, la beine, le mont et le talus du lac, jusqu'à une profondeur maximale de 12 à i3 mètres, au delà de laquelle on ne rencontre plus de végétation macrophytique. Les recherches cpie nous poursuivons au lac Pavin nous ont montré que cette stratification y existe d'une façon très nette avec des asso- ciations végétales particulières. En outre, la hmite inférieure de la zone littorale occupée par la végétation macrophytique y est consi- dérablement abaissée. La rive du lac présente une inclinaison considérable : par suite, la beine est très étroite, bien que nettement caractérisée. Les végétaux ne trouvent donc qu'un espace restreint pour se développer; le nomlDre des espèces est réduit, mais , si la flore est pauvre , le tapis végétal n'en est pas moins fourni. Les plantes de la première zone (Phragmitaie) sont très dissémi- nées ; elles appartiennent aux espèces '^suivantes : Phalaris ariindi- nacea, Eqiiisetiim Umosiim, Eqiiisetiim palustre. La zone des Myriophylles s'étend à partir du bord jusqu'à la pro- fondeur maximale de 4 mètres. Au M. spicatiim se joignent çà et là Raniinculuslaquatilis, Callithriche hamiilata, Potainogeton natans, — P. Liicens Polj'goniim ampliihinm. La Potamogetonaie est très nettement caractérisée. Elle forme une ceinture presque continue entre les coui'bes isobathes de 4 «i. et de 7 m., empiétant parfois sm' les zones voisines (minimum 2 m., maxi- mum 8 m.). Elle est exclusivement occupée par le Potamogeton prœlongiis. M. Magnin a signalé le premier l'existence de cette 748 BOTANIQUE forme, que nous croyions nouvelle pour notre région, dans les lacs du Jura oriental et central : Yal Dessous (5i8 m.), Saint-Point (849 !"•)• ïaillières (loS^ m.), Bellefontaine (1088 m.), Le Boulus (ii52 m.). Pt aussi dans les lacs d'Auvergne, d'après des échantillons indéterminés recueillis par M. Lamotte en 1862 et i863 et conservés au Muséum de Paris (Bull. Soc. Bot. de France, XLIII, 1896, p. 44^ et Bail, de l'Herbier Boissiev, 1897, n° 6, p. 412)- Le P. pr.nelongus avait été signalé autrefois dans la rivière de l'Orne par de Brel)isson. Il ne paraît pas y avoir été retrouvé depuis , et Grenier et Godron , dans leur Flore hésitaient à le considérer comme une espèce fran- çaise. On ne l'a jamais cité des lacs Pyrénéens (Prof. J. Lamic, Bull. Soc. Hist. liai, de Toulouse, i qo3). Enfin, la zone des Chara succède à la précédente jusqu'à la pro- fondeur de r;7 mètres. Les sondages effectués au lac Chauvet indiquent la même limite inférieure. D'autre part, Héribaud a indiqué l'existence, dans la zone de la grève, de quelques mousses intéressantes, parmi lesquelles Amhlj^s- legium irriguum, var. heterophj'lla, découverte par Thériot en sep- tembre 1893, Fontinalis squainosa, F. antipj-reticci et F. arvernica. Cette dernière, décrite par Renaud en 1886, a été trouvée également à Lugano et à Pola (Istrie), ainsi que Cardot l'a constaté dans riierbier de Bottini. Fontinalis arvernica est une forme très voisine dé F. antipjv'etica, dont elle semble une race adaptée à la vie lacustre et même à la vie profonde. Ces fontinales atteignent au moins au Pavin une profondeur de 20 mètres, à laquelle elles sont encore abondantes dans quelques points du Lac. La limite inférieure de la végétation macrophytique dans les lacs est, en réalité, fort variable suivant les conditions offertes par ces divers milieux. Dans le Léman, les grandes phanérogames s'arrêtent à 5 ou 6 mètres, les Chara à 10 mètres, les Nitella à 20 ou 25 mètres (Forel). Dans le lac de Constance, les phanérogames descendent jus- cjuà 6 mètres, les Characées jusqu'à 3o mètres (Schroter et Kirchner). Dans le Wurmsee, la limite de la zone des Nitella est j)ar 12 mètres (Brand) et il y existe à cette profondeur une variété spéciale de F. antipyretica. Kleebahn a dragué F. antipyretica jusqu'à 8 mètres de profondeur dans le lac de Schluen (Holstein). tandis que Forel ne l'a trouvée au Léman que dans une seule station, à Saint-Prex, ]>ar une profondeur de deux mètres au plus. En revanche, le Léman a offert le cas « encore isolé et non expli- cj[ué » d'une mousse végétant par Go mètres de fond. Il s'agit du Thamnium Lemani, décrit par Schnetzler comme une variété de JOUBIN. — FAUNE ENTOMOLOGIQUE ARMORICAINE ^49 Th. alopecnriiin et considéré par J. Amann comme une espèce distincte. Cette mousse se rencontre sur les pierres de la moraine submergée d' Yvoire ; on l'observe à tous les états de développement et les échantillons paraissent en parfait état , « brillamment chloro- phylles » (Forel). Pour en revenir aux lacs français , les faits précédents démontrent que dans les lacs d'Auvergne, ou du moins dans certains d'entre eux, la végétation s'étend sur une profondeur bien plus considérable que dans les lacs du Jura. L'abaissement de la limite de la végétation dans les premiers est en rapport avec la plus grande transparence de l'eau. Les chilïres fournis par diverses observations faites à l'aide du disque de Secchi viennent à l'appui de cette assertion. Mais, comme nous l'a fait observer M. le professeur Magnin, les conditions de température doivent également intervenir : de nouvelles obser- vations seront nécessaires pour établir la part qui revient à chacun de ces facteurs. M. JOUBIN Professeur au Muséum cVHistoire naturelle, à Paris FAUNE ENTOMOLOGIQUE ARMORICAINE [591.9(44)] — Séance du ô août — La publication d'une Faune entomologique m'iiioricaine était depuis longtemps réclamée par les Naturalistes bretons. Jusqu'ici, en effet, la Bretagne était très peu connue au point de vue entomolo- gique, malgré le talent des naturalistes qui l'ont explorée ; Griffitli a suffisamment énuméré, dans la préface de son Catalogne raisonné des Coléoptères de Bretagne, les raisons qui lui faisaient déjà vive- ment désirer, il y a trente ans, l'établissement de cette Faune. La Faune armoricaine comprendra tous les groupes et toutes les familles d'Insectes ; elle ne se bornera pas à faire connaître les carac- tères morphologiques qui intéressent les seuls collectionneurs; son idéal est plus élevé; elle s'étendra aussi sur les faits biologiques, sur les lois du développement, les relations des insectes avec les ter- rains, les x^lantes et les climats et quelquefois même, lorsqu'il s'agira des espèces les plus nuisibles, sur les méthodes de destruction. Tel que nous l'entendons, c'est-à-dire dans son étendue géolo- 700 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE gique , le massif armoricain comprend treize départements ; il ren- ferme en entier, cela va sans dire , les cinq départements bretons : Ille- et -Vilaine. Morbihan, Finistère, Côtes -du -Nord et Loire-Infé- riem^e, plus tout ou partie de la Mayenne, de la Manche, de lOrne, du Calvados, de la Vendée, du Maine-et-Loii*e, des Deux-Sèvres et de la Sarthe. Tous les documents connus jusqu'ici : travaux imprimés, manus- crits, collections, ont été soigneusement relevés et une première liste en a été donnée à la fin de l'introduction. Nous avons commencé la Faune entomologique par la famille des Longicornes, pour laquelle nous possédions des documents complets ; cette famille est illustrée de 146 ligures représentant les principales espèces, soit sous leur état parfait, soit à l'état de larves. En somme, telle qu'elle est comprise, la Faune armoricaine consti- tuera un travail dune haute importance scientifique et absolument unique jusqu'ici en son genre. La Société scientifique et médicale de l'Ouest a pris cet ouvrage sous son patronage et en favorise l'exécution (i). Au point de vue pratique , cette Faune armoricaine entomologique donnera tous les renseignements sur les insectes nuisibles et, autant que possible , sous forme de notes additionnelles, les moyens de les combattre. M. C. HOULBERT Professeur au Lycée de Rennes PREMIÈRES OBSERVATIONS SUR LA FAUNE ORTHOPTÈRIQUE DES COËVRONS — Séance du 3 août — La petite chaîne des Coëvrons située dans la Mayenne , à la limite orientale du massif armoricain, forme une ligne de hauteurs arides, couvertes de bois et de l^ruyères et encadi'ée de deux vallées pro- fondes. Au nord, la vallée de l'Erve la sépare du plateau granitique d'Izé (i) L'Association française pour rAvancement des sciences a bien voulu aider celle publication d'une subvenlion. C. HOULBERT. — LA FAUNE ORTHOPTÉRIQUE DES COËVRONS 761 €t de Saint-jMartin-de-Connée ; vers l'ouest, la rivière d'Erve la con- tourne en suivant Taxe de l'immense cirque d' Assé-le-Bérenger , limité du côté d'Évron par les hauteurs du bois de Crûn ; au sud, la profonde vallée du ruisseau de Voutré la sépare de l'anticlinal de Clou-Gautier. Du côté de l'est seulement, elle est rattachée topogra- phic|uement aux assises jurassiques de la Sarthe. Nos connaissances sur la distrilîution géographique des Orthoptères dans le massif armoricain, sont encore très incomplètes; mais ce que nous en savons déjà nous porte à croire, qu'à part quelques espèces qu'on rencontre à peu près partout dans les plaines, plusieurs autres sont très localisées et quelquefois cantonnées sur des surfaces très restreintes, surtout dans les régions accidentées. Les conditions biologiques variées qu'on rencontre dans les Coëvrons et dans les colHnes voisines , telles que la nature minéralo- gique du sous-soL l'uniformité relative de la flore, l'existence de petits taillis de chênes, de futaies de sapins, alternant avec des landes de l^ruyères et d'ajoncs, tout cela nous faisait espérer que la faune Oi'thoptérique des Coëvrons présenterait quelques particula- rités intéressantes. Nous n'avons pu malheureusement explorer qu'une très faible partie des collines mayennaises l'année dernière à la fin du mois de septembre ; la pluie et l'aliaissement de température qui se produi- sirent si malencontreusement pendant notre séjour à Voutré nous empêchèrent de récolter des Orthoptères en aussi gi-and nombre que nous l'avions espéré ; cependant les documents que nous avons recueillis sont sutiisamment intéressants pour nous engager à conti- nuer nos recherches dans cette région particulièrement favorisée. Ces documents, d'ailleurs, offrent d'autant plus d'intérêt qu'on pour- rait facilement compter les stations du sol français où des recherches orthoptériques suivies aient été entreprises; je n'oserais même pas affirmer qu'en dehors des observations de l'abbé Dominique et de MM. H. et Th. Piel de Churcheville, dans la Loire-Inférieure, il en ait été entrepris d'autres dans la région de l'Ouest. En ce qui concerne les Orthoptèi'es des Coëvrons, je laisserai de côté pour le moment les deux familles des Blattidés et des Forficuli- dés, qui fréquentent plutôt les endroits habités et qu'on retrouve dans toutes les localités de la plaine ou de la montagne où l'homme s'est établi. Nos observations ont surtout porté sur les groupes d'Orthoptères sauteurs Acrididés et Locustaires, qui fréquentent les bois et les pentes herbeuses des collines. ^52 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE Les Mantidés paraissent excessivement rares dans le massif armo- ricain; pour notre part, nous n'en avons jamais rencontré aucun dans la région des Goëvrons ; cependant nous pouvons allirmcr qu'un exemplaire de la Mante religieuse (Mantis religiosa) a été captui-é dans la Kabylie de Voutré, pendant lété de 1899, par M. Gervaise. Voici la liste des Orthoptères les plus intéressants : I. — ACRIDIDES Sténobothrns Uneatus Panz. — Assez commun dans les encboits herbeux des Goëvrons. St. j'ufipes Zett. — Assez commun dans les endroits secs et bien enso- leillés. St. bixotatus Charp. — Cette belle espèce se rencontre exclusivement dans les parties incultes des Coevrons; elle se tient-dans les endi'oits couverts de bruyères et d'ajoncs, à partir de l'altitude 200 m. jusqu'au sommet; elle est très agile et se distingue à première vue par son corps varié de l)run et de vert olive et par ses tarses postérieurs couleurs de corail et aimelés de jaune vers l'articulation de la cuisse. Je l'ai également observé dans le nord du département de la Mayemie,^ au sommet des collines de Villcpail. St. bicolor Charp. — Partout mais principalement dans les champs culti- vés après la moisson. St. hig'uttalus L. — Très commune partout dans les endroits herbeux et très variable comme coloration. St. pulvinatiis Fisch. — Cette espèce, si commune dans le centre de la France, me paraît rare dans les Coevrons; elle se tient de préférence dans les terrains en pente et ne descend pas très loin dans la plame. St. parallelus Zett. — Très commune dans les endroits frais. Œdipoda cœriilescens L. — Champs cultivés et terrains secs jusqu'au sommet des Coevrons ; assez commun dans les années chaudes. Caloptenufi italiens L. — et sa var. marg-ineUns Serv. — Assez communs dans les enreinière statistique semble confirmer, par contre, cette autre idée, répandue également (i) CuÉNOT. La distrihiilioji des sexes dans les pontes de pigeons. C. r. As., 1000, II, -56. G. LOISEL. — LA DESCENDANCE DES PIGEOXS VOYAGEURS 761 depuis Aristote , que le premier œuf pondu donnait généralement un mâle. Mais dans les 240 cas dont je nai connu que le sexe de la première ponte, jai obtenu 121 ibis des mâles et 119 fois des femelles; dun autre côté, dans les 166 cas où je n'ai connu que le sexe de la deuxième ponte, j'ai obtenu 86 fois des mâles et 80 fois des femelles. Nous concluerons donc, avec Cuénot : « ce second pré- jugé du premier œuf mâle doit être abandonné comme celui de la bisexualité des pontes. » J'ai recherché ensuite si la couleur du plumage des parents passait à celui des enfants. A. — Considérant d'abord le cas où les deux parents ont le même plumage ; nous obtenons les chiffres suivants : 1° Père et mère ayant un plumage écaillé : Sur 1066 jemies, giS ont eu le plumage des parents — ii5 — bleu — 12 — fouge — 7 — bronzé — 5 — mosaïcfiie — 5 — bariolé — 4 — meunier — 3 — noir — I — marron — I — blanc Dans les ii5 bleus, il n'y en a eu que 85 dont j'ai pu trouver l'as- cendance complète. Or. dans 58 cas, le plumage bleu existait, au moins une lois, chez les parents; dans les 27 autres cas, le bleu n'existait pas dans l'ascendance directe. 2^ Père et mère ayant un plumage bleu. Sur 39 jeunes, 32 ont eu le plumage des parents — 7 — écaillé Dans les 5 écaillés dont j'ai pu avoir l'ascendance complète, j'ai trouvé une fois seulement la couleur écaillée chez les grands parents mais les 4 autres cas provenaient de deux couvées du même couple. 3° Père et mère ayant un plumage rouge. Sur 18 jeunes, 11 avaient le plmnage des parents — 6 — écaillé — I — gris En somme, ces chiffi'es nous montrent bien que les enfants héritent du plumage de leurs parents. Il y avait à rechercher alors, par des 762 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE croisements appropriés, si un des sexes avait ici une influence pré- pondérante. Les éleveurs croient que le mâle donne son plumage aux enfants et nous croyons que Darwin confirme cette opinion. B. — Or, sur un ensemble de Sgi jeunes provenant de parents ayant deux plumages différents, nous avons vu que 299 avaient le plumage du père et 294 de la mère. Mais il est nécessaire de prendre chaque cas en particulier pour avoir une idée plus exacte de la question : 1° Père écaillé, mère rouge. Sur i35 pontes, 97 seulement ont donné chaque ibis deux petits vivants. Considérant d'abord ces derniers : Dans i(5 cas, les 2 petits avaient le plumage du père — i3 — — — de la mère — 37 — l'un des petits avait le plumage du mâle, l'autre celui de la femelle — 3i — lui seul des petits avait un des plumages des parents , l'autre avait lui plumage nouveau : bleu (21 fois), meunier (9 fois), gris (2 fois), argenté (2 fois), noir (i fois), mosaïque (i fois). Enfin, si nous considérons les 38 cas, où l'on n'a pu élever qu'un seul petit, à chaque ponte , nous voyons le plumage du mâle appa- raître 14 fois, celui de la femelle 21 fois, la couleur Ijleue une fois et la grise une fois. 2° Père rouge, mère écaillée. Sur 123 pontes, m ont donné, chaque fois, deux petits vivants. Dans 22 cas, les deux petits avaient le plumage du père — 16 — — de la mère Dans 5i autre cas, l'un des petits avait le plumage du mâle, l'autre le plumage de la femelle. Dans 22 autres cas, l'un des deux petits avait un plumage nouveau (11 fois bleu, 4 fois gris, 3 fois noir, bariolé, marron, bronzé, mosaïque, i fois), l'autre portant toujours le plumage d'un des deux parents. Tous ces chiffres montrent nettement, il nous semble, l'iniluence prédominante du mâle dans la transmission héréditaire du plumage, de même que la prépondérance de la couleur bleue dans l'apparition G. LOISEL. — LA DESCENDANCE DES PIGEONS VOYAGEURS 763 de plumage nouveaux. Or, comme on le sait, le bleu est la couleur du bizet, souche commune de tous les pigeons domestiques. 3° Père écaillé, mère bleue. Sur 109 pontes qui ont donné chaque fois deux petits vivants : Dans 49 cas, les deux petits avaient le plumage du père — 23 — — de la mère — 3i — lun des petits avait le plumage mâle, l'autre le plumage femelle. — 6 — f un des [)etits avait un plumage nouveau (ba- riolé, rouge ou bronzé), l'autre petit avait toujours le plumage du mâle. 5° Père bleu, mère écaillée. Sur 186 pontes, 120 ont donné deux petits vivants. Dans 27 cas, les deux petits avaient le plumage du père — 5o — — de la mère — 39 — l'un des petits avait le plumage mâle, l'autre le plumage femelle — 4 — i^ui des petits avait un plumage nouveau (ba- riolé, bronzé, rouge), l'autre avait toujours le plumage femelle. 6° Père rouge, mère bleue. Sur 77 pontes, 56 ont donné deux petits vivants. Dans 9 cas, les deux petits oiseaux le plumage du père. — 3 — — de la mère. — 34 — f un des petits avait un plumage nouveau (écaillé i5 fois, meunier 5, gris 3, bronzé i), l'autre avait le plumage d'mi des parents (du mâle, 24 fois ; de la femelle, i5 fois). — 10 — les deux petits avaient, l'un et l'autre, un plu- mage nouveau. 7° Père bleu, mère rouge. Sur 61 pontes, 42 ont donné deux petits vivants. Dans 2 cas, les deux petits avaient le plumage du père — 7 — — de la mère — 18 — l'un des petits avait mi plumage nouveau, (écaillé, II fois; meimier, 5 fois; gris et bronzé, i fois), l'autre avait le plumage d'mi des parents (du père, 3 fois; de la mère, i5 fois). — i5 — les deux petits avaient l'un et l'autre mi plu- mage nouveau. ^64 ZOOLOGIE, AXATOMIE ET PHYSIOLOGIE Ces statistiques partielles semblent montrer une prépondérance tantôt paternelle, tantôt maternelle. En réalité, il semble ])ien que ce soit plutôt tel ou tel plumage qui mieux fixé que les autres par l'hérédité, se transmettra plus facilement aux enfants; ceci est très net par exemple par les mélanges écaillé-bleu où nous voyons le plumage écaillé prédominer dans les deux sortes de croisements. Ces résultats sont à reprendre maintenant , pour voir s'ils suivent les données de Galton ou de Mendel ; mais nous voulons auparavant les contrôler par d'autres statistiques faites dans d'autres colomlaiers que celui que nous avons pu étudier jusqu'ici. M. Louis GERMAIN à Paris CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LA FAUNE MALACOLOGIQUE VIVANTE DU DÉPARTEMENT DE MAINE-ET-LOIRE L594(44i8)] — Séance du 5 août — Une étude suffisamment détaillée de la Faune malacologique de l'Anjou m'a permis de mettre en relief certains caractères sur lesquels il est bon d'attii'er fattention (i). Cette faune comprend, dans fétat actuel de nos connaissances, 364 espèces qui se répartissent de la manière suivante : i4 Lima- ciens ; 98 Gastropodes terrestres; 112 Gastropodes fluviatiles : 140 Acéphales. Les causes de cette exceptionnelle richesse tiennent : d'une part, à la douceur du climat, égal et humide, presque sans hivers rigou- reux; d'autre part, à la grande diversité pétrographique des sois où des calcaires remarquablement exposés au midi (rochers de Beau- lieu, coteaux du Thouet, à Montreuil-Bellay, etc.) alternent avec des schistes dans des situations également méridionales (rochers de l'étang Saint-Nicolas, près Angers). (I) Germain (Louis). Étude sur les Moll. terr. et fluv. viv. des env. d'Angers et du départ, de Maine-et-Loire: in Bull. Soc. Se. Xat. Ouest : igoS, pp. 1-240: édition à part : I YoL gr. in-8% 240 pag-es ; Paris, Bailliére, igoS (i" partie, lutrod. et Gastropodes). La 2" partie (Acéphales) paraîtra vers juillet 1904. L. GERMAIX. — LA FAUNE MALACOLOGIQUE VIVAXTE ^65 La faune fluvio-lacustre surtout est particulièrement riche, tant en espèces qu'en individus. Cette richesse — et le fait est intéressant à signaler — ne coïncide pas forcément avec la présence du calcaire : elle se manifeste pleinement, par exemple, autour d'Angers où les schistes composent presque exclusiA^ement le sol. Les genres Limnœa, Phj'sa, Planorhis , Valcata, VUnpara, etc., sont fort bien représentés ; c'est ainsi que sur 89 espèces de Planorhis connus en France, 10 se rencontrent en ^Maine-et-Loire et 22 habitent le seul marais de la Baumette, près Angers! Quant à l'abondance des indi- vidus, on s'en fera une idée lorsqu'on saura qu'à la fosse de Sorges (près des Ponts-de-Cé) ou à la Baumette (près Angers), les Pla- norbes, Limnées, Vivipares, etc., vivent en colonies de plusieurs milliers d'individus. Parmi les nombreux matériaux que j'ai recueillis, j'ai rencontré quelques espèces nouvelles : une Vwipare {Vivipara Locardi Ger- main) voisine, mais bien distincte du Vivipara Bourg-uignati Ser- vain (i), qui vit dans la Mayenne, non loin du viaduc de l'Ouest à Angers et que je suis heureux de dédier à mon savant maître, M. Arnould Locard; une Limnée (Limnœa Salmurina Germain) du groupe du L. glabra qui habite le Thouet, à Saumur; une variété du Limnœa peregra que j'ai nommée Andegavensis qui, mieux étudiée, pourra constituer une bonne espèce ; elle habite l'étang Saint-Nicolas, près d'Angers, et n'est pas sans analogies avec le L. peregra var. apricensis Adami (2); enfin, un petit Planorbe (Planorhis Ai'noiildi Germain) (3) fort intéressant par ses caractères et appartenant au groupe de Viimhilicatus Miiller. Je ne parle que pour mémoire d'un assez grand nomlire de formes locales. Certaines circonstances favorables m'ont permis d'étudier d'assez près la faune profonde de la Maine, entre le viaduc du chemin de fer de l'Ouest et le Pont de la Haute-Chaîne, à Angers. Le fond vaseux» ou mieux tourbeux de la rivière , est habité par une faune malacolo- gique extrêmement riche : les petits Bivalves, Sphœriiim et Pisidium, aljondent, ainsi que les Valvata. Les Sphœrium sont surtout repré- sentés x^ar de grosses espèces, parmi lesquelles domine le Sph. Scal- (i) Servain (G.). Bull. Soc. Mal. France, 18.S4, I, p. i;;, pi. III, fig. 6. (2) Adami. Molhischi terr. fluv.... iiella valle dcirOg-lio , in : Alti dclla Soc. Venelo- Trcntina, \ol. V, i8;6, p. 69, pi. I, flg-. 20-21. (i) Dédié à M. Arnould Locard, de Lyon. ^66 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE cUaniim Norm.; les Pisidium du groupe de Yaniniciim sont com- muns, et le P. inflatum Meg. von Muhl. notamment, uniquement signalé jusqu'ici dans le Midi de la France (i), n'est pas très rare. Quant aux Valvata, les V. contorta Menke, T". Servaini Loc, V. depressa Pf., T^ cristata^lviW., y forment des colonies très popu- leuses. Si, remontant la Maine, nous pénétrons dans la Mayenne, nous observons une faune curieuse, tant par sa composition que par son allure : elle est surtout caractérisée par l'abondance des Vivipares du groupe du V. contecta Millet, des Bythinies (B. tentacnlata L., producta Menke, inatritensis Bg., Sehethina Blanc, Leachii Shepp., etc..) et des Dreissensia (2). Toutes ces espèces ont un test forte- ment érodé : érosion des sommets et des valves chez les Acéphales, troncature de la spire, souvent très nette, chez les Gastropodes. Ce fait est d'autant plus remarquable que, tout à côté, dans le Loir, les coquilles ne sont pas érodées : chez les Acéphales, comme Unio patamius Bg. , U. Ligericus Bg. , U. tumens de Joann., etc., les sommets sont généralement absolument intacts. Les trous de carrières abandonnées, si nombreux autour d'Angers, ne possèdent qu'une faune très pauvre; quelques-uns même ne nourrissent aucun Mollusque; d'autres (trou aujourd'hui comblé à Angers même, rue Lardin-de-Musset, trous de Rivet, à Trélazé) ren- ferment certaines espèces dont quelques-unes, marquées d'un asté- risque, ne se rencontrent guère que là en Anjou : Limnœa vulgaris Pf., L. glahva Mûll., *Z. Ohertlmri Ancey, *L. Condatina Ancey, Anc)-lus simplex Buc'h. var viiidis Germ., Segmentina nitida Flem. Une faunule très intéressante est celle des boires des Sablons de la Varenne, à Murs. Ces boires, souvent très herbeuses, isolées les unes des autres et de la Loire par des étendues de sable relativement considérables, renferment une faune riche en Planovhes, Lininées, Amnicoles (3) et Anodontes. En dehors de la prédominance marquée des Limnées à galbe allongé {L. glahra Mûll., L. velaviana Bg,, — L. helophila Bg.. L. Wcsterlundi Loc), cette faune est surtout caractérisée par ral)ondance des formes niinov, abondance qui s'ob- serve même chez les espèces de très petite taille comme les Planor- (i) Aux environs de Grenoble et de Crémieux, dans l'Isère [Locard (Ar.). Coq. eaux douces el saum. France, iSijJ, p. l'jy]. (2) TS'otamraent Dreissensia Jhii'intilis, Pallas et D. Occidentiilis Bg. On rencontre, dans celle localité, une belle variété de ces espèces, que j'ai uoinméc ji)eniriJis, dont la nacre a la teinte et le brillant de la Malachite. (i) Amnicola celtica, Bg. en colonies extrêmement populeuses. L. GERMAIN. — LA FAUNE MALACOLOGIQUE VIVANTE ^67 bis sph'oj'bis L. et Valvata cristata Drap. L'explication de cette parti- cularité doit, selon moi, se trouver dans l'isolement à peu près par- fait de ces boires et dans la nature de leur fond, presque exclusivement siliceux. L'absence de calcaire provoque ici une dégénérescence de l'espèce, dégénérescence encore accentuée par l'isolement : les indi- vidus, d'ailleurs très abondants, devant nécessairement se reproduire entre eux sans sélection préalable, transmettent leurs tares à leurs descendants et finissent par abâtardir l'espèce : d'où naissance de nombreuses îovmes minor. Il y a là un fait, moins général, mais de même ordre que celui si bien mis en lumière par M. Ar. Locard à propos de la faune malacologique marine de l'ile de Corse (i). Je me suis tout particulièrement attaché à l'étude de la distribu- tion géographique des Unionidœ en Anjou et, par extension, dans tout le bassin de la Loire. Je suis arrivé aux conclusions sui- vantes (2) : « 1° La faune de la Haute-Loire et de ses affluents (surtout l'Allier) est caractérisée par l'abondance des Unios de la série de \'U. citer Nilss., à galbe allongé et à épidémie noir où très foncé; « î2° La faune de la Basse-Loire est caractérisée : «) par les Anodontes à prafil subtrigone (3) et à valves épaissies de la série de \A. spondea Bg. ; /3) par l'abondance des Unios du groupe du Bata- vus Mat. et Rack., qui présentent en outre un épidémie lisse et très brillant, coloré en marron plus ou moins foncé et orné de radiations vertes (4) ; « 3° La faune des affluents de la Basse-Loire (Maine, Sarthe, Mayenne et Loir; — Moine, etc..) est beaucoup plus voisine de celle de la Haute-Loire que de celle du bas fleuve. Ce caractère est surtout accentué pour la faune du Moine à Cholet ». II La faune terrestre, peut-être moins riche, est encore fort bien représentée, tant en genres qu'en espèces. Je n'ai pas à signaler de (i) Locard (AnNotLo). Obscrv. Moll. mar. côtes Corse ; 1901, in : C. R. Association française; Congrès d'Ajaccio; à part, p. 5. — Locard (A.) et Caziot. Coq. mar. côtes de Corse. Paris, 1900, i vol. gr. iii-8'\ (2) Germain (Louis). Étude Moll. Maine-et-Loire ; igoS, pp. 29-30. Je renvoie à ce mémoire pour les détails de cette étude. (3) Locard a observé, dans la Basse-Seine, un phénomène de même ordre : le galbe des Unionidœ devient subpenlag-one [Locard (Ar.). Descript. Union, nouv., in : JJull. Soc. Se. Nat. Elbeiif, 1893, p. 5o]. (4) Dans le Rhône, à partir d'Avig-non, les grands Anodontes présentent un galbe très arrondi, à test lisse et brillant. [Locard (Ar.), in litt., 1902; Locaud (Ar.), Contrib. ; XIV, iScio, p. 223]. ^68 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE formes nouvelles, mais seulement un assez grand nombre de variétés locales, dont deux surtout, mieux étudiées et retrouvées en dehors de l'Anjou, pourront constituer de bonnes espèces. L'une est une variété de taille moyenne de YH. çariahilis Drap. [var. Diivtalensis Germain], d'un gall3e plus déprimé que le type si bien figuré par Draparnaud; l'autre est une forme de Y Hélix ericetorwn MûU. [var. Servierensis Germain] , habitant les rochers dévoniens de la station méridionale de Beaulieu et dont le galbe, tectiforme-élevé en-dessus, se rapproche de celui de Y H. arenosa Zeigler (i). Cette laune est surtout remarquable par ses extensions méridio- nales. L'Anjou présente, en effet, un grand nombre de localités comme Beaulieu, le Puy-Notre-Dame, Angers (étang Saint-Nico- las), etc. (2), où vivent, au milieu d'une flore méridionale (3), un certain nombre de Mollusques du Midi. Parmi ceux-ci, je citerai SucciNEA Charpyi Baud.. S. elegans Risso (4); — Clausilia crenu- lata Risso, Cl. diihia Drap.; — Hyalinia intennissa Loc, H. apo- thecia Bg., H. Magonensis Bg. ; — YYeli^ revelata Mich., H. inonti- vaga West., H. Cyzicensis Gall., H. Canovasiana Serv., H. melan- tozona Caf., H. Mendozœ Serv., H. lineata Olivi, H. piliila Loc, etc.; — Cochlicella harhara L. ; — Limn.ea siiccinea Nilss. ; — Ancylus costulatus Kûst. ; — Pisidium injlatwn Meg. von Mulh., etc. (5). Les e.xtensions vers la faune maiitime sont également fréquentes. Si l'on rencontre, en Anjou, certaines espèces, comme Hélix recelata Mich., H. montiçagri West., H. cornea Drap., //. variahilis Drap., H. piliilaLiOC., etc., qui, s'éloignant volontiers du littoral, peuvent former loin de la mer des colonies définitivement acclimatées et remarquablement prolifiques (6), on y voit aussi d'autres espèces, appartenant désormais à la faune indigène, puisque leur introduc- tion, pour quelques-unes du moins, remonte au minimum à i8i3 (7) (1) Zeigler in Rossm'assler. Iconogr., VII, p. 35, fig. Sip. (2) ISIiLLET (P. -A.). — Géographie entomologique, in : Mcm. Soc. AffJ'. Se. Arts Ang'er.i ; VI, i848. (3) Celte flore abrite également une faime entomologique méridionale. (4) Douteux cependant en Anjou ; Millet, qui signale cette espèce sous le nom erroné de Succinea Corsiea Shuttl. [Millet. Faune in vert. Maine-et-Loire; t. I, i8;o, p. i5], l'a sans doute confondue avec le S. sublongiseata Bg. [Bourguign.\t. Aperçu genre Succinea, juillet 1877, p. 21], qui vit à Brissac! sur les bords de TAubance!! (5) Cette launule méridionale n'est pas sans analogies avec celle signalée par M. Ar. LocARD aux environs de Lyon. [Locahd (Ar.). Note niigr;ul. malacol. Lyon, 1878^ pp. 8 et suiv. LocARU (Ar.). Contrib., IV, sur présence esp. méridion. envir. Lyon ; 1882, pp. 6 et suiv.]. (6) Comme aux environs de Paris, de Lyon, etc. Locard et Gehmaix. — Sur présence espèc. niérid. l'aune Malakof. euv. Paris. Lyon, 1904, p. 74- (7) Comme la colonie de CoehUeella hnrhnra L., du vieux eliàteuu de ('liamptocé,. signalée par Millet dès i8i3. [Milllt (P.-A.). Mollusq. Maine-et-Loire, I8i3, p. 41, n'4J. L. GERMAIN. — LA FAUNE MALACOLOGIQUE VIVANTE 769 qui, pour vivre, ont absolument besoin de rinfluence marine. Tels sont les Hélix lineata Olivi, H. Scicyca Bg; — Cochlicella bar- bar a L. La population malacologique terrestre de l'Anjou appartient, avant tout, à la faune des régions de plaines basses. Les espèces subiQontagneuses ne s'y rencontrent même pas, ce qui explique suffisamment la pauvreté des genres Papa, Pupilla , Isthinia et Vertigo et le manque d'espèces du genre Pomatias , tout au moins autour d'Angers. Chez les Hélix, l'absence complète de toute forme du groupe de VH. Heripensis est caractéristique : ce groupe entier est remplacé par une riche suite à Hélix de la série de Yintersecta [Hélix intersecfa Poiret, H. subintersecta Bg., H. olisippensis Serv., H. pictoniiin Bg.]. Le groupe de Yiinifasciata manque encore à l'ouest d'Angers et ne commence à apparaître que dans le Saumu- rois. Peut-être ces espèces, très abondantes dans les régions septen- trionales et centrales de la France, manquent-elles, ou du moins ne se rencontrent-elles qu'exceptionnellement sur le littoral océanique français (i). III La distribution géographique des Mollusques de l'Anjou m'a conduit à séparer ce pays en quatre régions malacologiques, que j'ai distinguées sous les noms de Fauniila Ligerica, F. Salmurina, F. Choletina et F. septentrionalis , cette dernière, encore fort peu connue, se rapportant à la région située au nord, mais surtout au nord-est d'Angers. S L — Faiiniila Ligerica. — Elle a pour area une bande de terre relati- vement étroite, long-eant la Loire et s'étendant de chaque côté du fleuve, mais plus spécialement sur la rive gauche, sur mie largeur ne dépassant pas quelques kilomètres. Quelques espèces de cette faune (marquées d'un astérisque) ne se rencontrent absolument que là eu Anjou, d'autres, y sont plus particuUèrement abondantes (2) : * Siiccinea Charpyi Baud. ; — "" CUuiAiJia dilophia Mab; - '^ Hyaliida apothecia Bg. ; — * Hélix arbustorjini L., H. limhata Drap., H. revelata Mich., H. hispida L., H. lapicida L., *//. obvohita AIulI., H. cornea Drap., Krynickia lœvis MûU. Une telle faune offre un curieux mélange d'espèces plutôt septen- trionales {H. arbiistorum L., H. lapicida L., H. obvoluta MûU., etc..) et d'espèces franchement méridionales aACc i)rédommancc très marquée de (i) Ainsi que l'a fait pressentir iNI. Coutagne [Coutagxe (G.)- Reclicr. polymorp. Moll. France ; 1890, p. 4"]- (2) Germain (Loviis). Étude .Moll... Maine-et-Loire ; njo3, pp. 45-46. 49* TjO ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE ces dernières. Le voisinage du grand fleuve peut, juscju'à un certain point, exi)liquer Tapjxjrl des coquilles des régions inonlagneuses du centre. Il n'est jjas d'ailleurs sans intérêt de remarquer que, chez les insectes, il existe également mi Faunula Ligerica très nette, caractérisée par l'abondance des grands Cérambycides et des Chrysomélides. § II. — Faunula Salinurina. — On peut considérer Saumm- comme le centre d'une région malacologique distincte, dont l'area comprend tout le Saumurois [Fontevrault, Brézé, Saint-Cyr-en-Bourg, Saint-Just, etc.. (ter- L . Germ3 in _ De/. LEGENDE + Cochlicella barbura L. ^ Helix ai'bustoriiTn L. ' Helix pomatia L. — //t>//,v limbata Drap. A IJelix cor?}C(i Drap. Il Helix obi'oluta Wiill. (^houtlnis tridcns et C. qi. *=* (Iridens MùU. iT J'iijjo oraniformis Drap. Localités méridionales. rain crétacé, grès tertiaire et calcaire d'eau douce)] et la région de ]Mon- treuil-Bellay (terrain jurassique) et du Puy-Notre-Dame (terrain crétacé) et qui s'étend : d'ime part, vers le Baugeois, avec une allure déjà sensi- blement différente, plus voisine d'une faune septentrionale; d'autre part et surtout A-ers Angers, dont elle comprend tous les environs malgré la différence de constitution des sols (terrain Silurien). Cette extension est marquée, entre Saumur et Angers, par une suite presque ininterrompue d'étapes : la Roche-Servière, à Beaulieu (Dévt)- nien); les rochers de Dieusie et du Pied-Martin, à Rochefort-sur-Loire (Porphyre quartzifère); les rochers de la Coulée de Serrant, dommant la ji L. GERMAIX. — LA FAUNE MALACOLOGIQUE VIVANTE ^^I ligne d' Angers à Nantes; enfin, les rochers de l'Etang Saint-Nicolas (Silu- rien) aux portes mêmes d'Angers. Cette fainiule est remarquablement caractérisée par son aspect méri- dional et il suffira, pour le prouver, d'en signaler quelques espèces : Siicciiiea Charpyi Baud., S. elegans Risso; Claiisilia creniilata Risso, Cl. diibia Drap.; Hyalinia intermissa Loc, H. apothecia Bg., H. mago- nensis Bg. ; Chondriis tridens [NIûll., C. qiiadridens MûlL; Piipa grani- formis Drap.; Hélix revelata Drap., H. montwaga West., H. variabilis Drap. var. Duvtalensis Germain, H. Canovasiana Serv., H. pilula Loc, H. lineata Olivi, H. Mendozœ Serv., etc.; — Limnœa siiccinea NUss.; etc., etc.. § m. — Famnila Choletina. — Cholet est le centre d'une région au relief bien plus heurté que le reste du département et où sont largement représentés les terrains primitifs : comme conséquence, toute cette partie de l'Anjou possède une faune très diftex-ente de celle que nous venons d'étudier le long de la Loire et aux environs d'Angers et de Sauniur. Les grands Acéphales sont rei)rcsentés par des formes parfois identiques, le plus souvent voisines de celles de la Haute-Loire aux environs de ^'ille- rest et de Balbigny; parmi les Gastropodes, on peut citer : Arion tenelliis Millet; Succinea parviila Baud., S. Mabillei Jouss.; H. limbata Drap.; Planorbis Crossei Bg. (C. C. dans le ]Moine, à Cholet), etc.. INIalheureuse- ment, cette faune est peu comiue. § IV. — Faiiniila Septenlrionalis. — Enfui, le nord du département, surtout l'arrondissement de Segré et le nord-est de l'arrondissement de Baugé, nourrit une famuile malacologique à peine comme, d'vm caractère plus septentrional, présentant quelques affinités avec celle du Choletais, et où ne se rencontrent plus les formes méridionales relativement si communes autour d'Angers et de Saumur. On peut citer notamment : Milax riisticus Millet; Claiisilia laminata Mont.; Cl. uigricans Pult.; hthmia iniiscoriun Drap.; Hclix virgiiltoiniin Bg., H. Moi-bihana Bg., H. pomatia L.; Limnœa corvifonnis Dup., L. viilnerata Kûst., L. peregra MùlL, L. pœcila Serv., etc.: Physa hypnoruni L., etc.. En résumé, il existe, en Maine-et-Loire, deux séries de faunes bien distinctes : l'une d'allure franchement méridionale et maritime, grâce à de nonilDreuses espèces introduites mais bien définitivement acclimatées, représentée par les Faunula Ligerica ci F. Salniiivina; l'autre moins riche, mais qui est néanmoins la vraie faune indigène, appartenant aux régions moyennes, enrichie de quelques types sep- tentrionaux, représentée par les Faunula Choletina et F. Septen- trion ali s. IV On peut, en dernière analyse, se demander quelle est, sinon la faune autochtone, du moins la faune indigène ancienne de l'Anjou. ^^3 ZOOLOGIE, ANAÏOMIE ET PHYSIOLOGIE En procédant par élimination, on est conduit à rechercher la liste des espèces qui sont venues s'y greffer par inti-oductions. Or, ces introductions sont de plusieurs ordres (i) : a). —7 Introductions d'espèces septentrionales ou de l'est. — Relalivc- meut peu nombreuses, quoique d'mlroduction déliuitive, on peut citer parmi ces espèces : Claiisilia laminata Mont. ; Succinea arenavia Bouc- Chant.; Hélix pomatia L. ; H. vnfescens Penn, ; Isthmia edentula Drap.; etc.. 3). Introductions par la vallée de la Loire. — Le grand fleuve qu'est la Loire entraîne avec lui, et souvent de fort loin, des espèces qui n'appar- tiennent pas à la faune régulière du pays ; beaucoup de ces formes se sont fixées et peu à peu acclimatées dans la contrée (Succinea parvula Baud. ; Hélix liberta West. ; H. pjgmœa Drap. ; H. obvoluta Drap. ; etc., Anodontes et Unios du Massif Central qui ont ensuite essaimé dans les^ affluents); d'autres n'y sont qu'aberrantes et se rencontrent dans les alluvions du lleuve qu'il serait bon d'étudier de très près. La Loire intro- duit d'ailleurs avec elle une série également intéressante de végétaux^ d'msectes, etc.... v). Introductions d'espèces pyrénéennes. — Elles sont, en réalité, peu nombreuses et, formant l'aj^port le moins important, ont remonté les côtes océaniques (Hélix cornea Draj». ; H. limbata Drap. ; Succinea sta- g'nalis Gass.). 3). Introductions d'espèces méridionales. — Cet apport est très impor- tant. La voie suiA'ie est celle du littoral océanique : un grand nombre de iVIollusques de Maine-et-Loire [Succinea dehilis Morel., S. sublongiscata Bg., S. eleg-ans Risso (douteux); Hyalinia interinissa Loc, etc.; Clausilia dubia Drap., Cl. crenulata Risso ; Cochlicella barbara L. ; Hélix variabilis Drap., H. lineata Olivi, H. pilula Loc, P. cyzicensis Gall. ; etc., etc...] appartiemient à la faune autochtone des régions méditerranéennes. C'est donc toute une faunule méridionale et maritime qui, suivant la chaîne des P^Ténées et gagnant de proche en proche, a, grâce à l'influence bien- faisante du Gulf-Stream, remonté le littoral océanique et essaimé dans le pays, se développant parallèlement à la faune indigène. s). Enfln il est (piekpies espèces, plus ou moins aberrantes, dont l'in- troduction est certainement due à des causes accidentelles et qui sont ajjpelées à disparaître dans un avenir prochain. Tels sont, très i)ri>bablc- ment : Succinea eleg-ans Risso et Clausilia crenulata Risso. Il reste donc ainsi, comme composant la faune autoclitone derAn- iou, les espèces des régions moyennes et des pays de plaines. Or. les types de cette faune indigène sont incontestablement originaires {\) ÉvidcmmonI jo ne parle pas ici seulemeni des iiitrodiiclioiis récentes, mais aussi des depIaeemeiUs anciens dont le cadre de celle ikiIc ne sanrail comporter une étude complète. L. GERMAIN. LA FAUNE MALACOLOGIQUE VIVANTE 7^3 du Centre Alpique (i), ou même de régions plus septentrionales de l'Europe. Ce n'est pas un mince intérêt de voir les conclusions d'une étude malacologique en parfaite communion d'idées avec les données les plus récentes de l'archéologie (2), de l'ethnographie (3) et de la préhistoire (4). Ceci permet d'entrevoir une remarquable unité dans le peuplement de nos pays du centre de l'Europe : sur une faune autochtone relativement très pauvre sont venues se greffer des séries entières d'espèces venant soit des régions hyper- boréennes, soit de l'Asie occidentale, mais surtout de l'Europe orien- tale (5), soit encore, et plus récemment, du sud de l'Europe et de l'Afrique du Nord, se déplaçant avec les peuples migrateurs, s'intro- duisant avec eux et, comme eux, se fixant définitivement dans le pays, en se fondant plus ou moins avec la faune primitive. EXPLICATION DE LA CARTE MALACOLOGIQUE DU DEPARTEMENT DE MAINE-ET-LOIRE Dans Fessai de carie malacolog'ique joint à cette note, je me suis efforcé de faire ressortir les ditîérentes faunules étudiées précédemment. Les temtes correspondent respectivement aux : Faunula Lig-erica (blanc) Faunula Salmurina (pointillé) Famiula Clioletma^ (hachures) Faunula Septentrionahs (hachures interrompues) Les ilèches indicpient la direction générale supposée des déplacements malacologiques. J'ai également indiqué les locaUtés habitées par certahies espèces spé- ciales. (Voir la légende.) (i) BouRGuiGNAT (J.-R.). Malacol. terr. fluv. Algérie; t. II, i864, p. 366. (a) Cf. Bertrand (Al.)- Arcliéologie celtique et gauloise ; 2= édit. , Paris, 1S89, in-S°. — Bertrand (AL). Nos origines : La. Gaule avant les Gaulois, 2= éd., Paris, i8gi, iii-8°. — Bertrand (Al.) et Reinach (Salomon). Les Celtes dans les vallées du Pô et du Danube; Paris, 1894, in-S-, (3) Cf. : Arbois de Jubainville (H. d'). Les premiers habitants de l'Europe, etc..., 2« éd., 1894, t. I et t. IL (4) Cf. : MoNTEHus (Oscar). Les temps préhistoriques en Suède et d. autr. pays Scan- dinaves ; éd. franc, par Reinach (Salomon) ; Paris, i8f)5, in-S". (5) Cf. Reinach (Salomon). Le mirage oriental, Paris, 1892, in-8"' et Revue Archéologique, 1892, I, p. 406. ^^4 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE M. Paul PELSENEER à Gand L'ACCLIMATATION DE CERTAINS MOLLUSQUES MARINS [5:5.2:5o4] — Séance du 6 août — La distribution géograpliique de quelques organismes habitant la terre ferme s'est souvent trouvée brusquement étendue sous l'in- fluence volontaire ou involontaire de l'industrie humaine et, si « l'homme fait le vide autour de lui » (de Sélys-Longchamps) , il arrive aussi à peupler assez uniformément des mêmes animaux utiles les divers points du monde où il s'établit. Plusieurs mollusques piilmonés se sont ainsi acclimatés dans des pays très éloignés de leur patrie première. Mais, pour les animaux marins, le phénomène est beaucoup moins fréquent et il est même très rare que des formes aient pu passer dune rive à l'autre d'un grand Océan, ou d'une mer dans une autre mer distante ou séparée. On a bien vu certaines es^Dèces s'adapter brusquement dans la même mer et sur la même rive , à quelque distance de son habitat normal : l'huître portugaise (Ostrea angulata Lamb.), dans l'em- bouchure de la Gironde ; d'autres organismes ont aussi pénétré d'une mer dans une mer voisine jointe à elle par un moyen artificiel, comme ce fut le cas pour le canal Empereur-Guillaume (entre la Baltique et la mer du Nord) (i) et pour le canal' de Suez (2); ce der- nier, notamment, a fait passer Solen vagina L. et Pholas dactyliis L., de la Méditerranée dans la mer Rouge et Mactra olarina Phil. Mj'tiliis variahilis Kr., Meleagrina Savignj'i Desch. et peut-être Murex tribiiliis L., en sens inverse. Parfois même, l'on a observé une acclimatation temporaire , comme celle de Mytilus crenatus Lam., venant de Bombay, à Portsmouth (3), vers le commencement du siècle passé. Mais les (i) Brandt. Das Vordriiig-cii mariner Tliit-re iu dcm Kaiser Wilhelm Canal, 1896. (2) Keller. Die Fauna im Suez-Kanal und die Diffusion der médit err. und crythraci- schen Thierwclt {Dcnksrhr Schw. Orsrllsch. f. die Gcs. Natarwiss., XXVIII, i883). (3) WiLLCOX. On the naturalisation in England of Mvtilus crenatus (Bcp. Brit. Ass. i883. p. PELSEXEER. — L ACCLIMATATION DE CERTAINS MOLLUSQUES MARINS 'JJO conditions thermiques très différentes (la température moyenne de l'eau étant inférieure à io° C à Portsmouth et supérieure à 25° à Bombay) s'opposent à ce que des animaux des mers tropicales se fixent définitivement dans des mers froides ; les invertébrés marins sont en effet moins eury thermes que les terrestres. An contraire, on a pu constater l'acclimatation définitive du vigneau ou pilot (Littoinna littorea L.j d'Europe, en Nouvelle Ecosse, vers 1857; il y a prospéré et s'est étendu vers le Sud du littoral oriental d'Amérique, jusqu'à New-Haven. Inversement, un Lamellibranche du littoral E. de l'Amérique du Nord a été observé la première fois à l'embouchure de l'Humber en 1864 et y a prospéré aussi : c'est Venus mercenaria L. Pour ces deux mollusques, l'acclimatation a été rendue possible par la similitude des conditions physiques d'existence (notamment de température) sur les deux côtés de l'Atlantique Nord et, si Venus mercenaria vit en Amérique jusqu'en Caroline du Sud (à la latitude du Maroc), c'est que, dans cette partie, à latitude égale, l'Atlantique d'Ouest est moins chaud qu'à l'Est. Un second Lamellibranche américain, ayant la même aire de dis- persion originelle que Venus mercenaria (depuis l'État de Massa- chusetts jusqu'à la Caroline du Sud) , vient de se fixer sur les rives occidentales du continent européen ; elle s'y étend même plus abon- damment et plus rapidement que Venus mercenaria : c'est Petricola pholadiformis Lam. Cette forme vit en très grande quantité sur la côte belge de la mer du Nord, depuis plusieurs années (aux envi- rons d'Ostende; elle n'existait pas avant 1900, ainsi que l'a constaté M. Vital Gilson, qui étudie avec zèle la faune malocologique de la mer du Nord) ; mais sur les côtes orientales d'Angleterre elle avait été signalée dès 1893 (i) et s'y trouve très abondante, notamment en face de la côte belge, dans le comté de Kent. Cette espèce semble avoir été importée en Europe avec des huîtres envoyées pour l'élevage. On connaît de nombreux cas de formes importées se substituant plus ou moins rapidement à des races indigènes. En Amérique, il parait que Littorina littorea d'Europe se substitue localement à Littorina palliata Say autochtone (2); en Angleterre, on a signalé la tendance de Venus mercenaria à disputer la place à Cardium edule L. (i) Proc. Malacol. Soc. t. I, 1893, p. 291. (2) Ganong. Is Littorina litorea introduced or iiidigenous? American Naturalist, t. XX, p. 93i). nn(3 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE Il n'est pas invraisemblable que Petricola pholadiforniis tende aussi à se sul)stituer à Pholas candida L., dont il a la taille, le genre de vie et même l'aspect et auquel il pourrait faire concurrence. Ces deux espèces offrent un exemple frappant de convergence par le même mode d'existence : elles sont toutes deux perforantes. M. J. COTTE Chef des travaux pratiques a l'École de Médecine de Marseille DES PHÉNOMÈNES DE LA NUTRITION CHEZ LES SPONGIAIRES [(Ji2.-3y:593.6J — Séance du 6 août — Il est vraisemblaljle que les Spongiaires se nourrissent en grande partie des particules solides, vivantes ou inertes, qui sont en sus- pension dans l'eau. J'ai pu constater que les Galcisponges ingèrent avec la plus grande facilité les bactéries {bacilhis meseiitericiis) ou les o-rains d'amidon de riz qui traversent leur système de canaux. L'ingestion est faite par les choanocytes, par un phénomène de véritable phagocytose , et les cellules actives parviennent à englober des proies dont le volume est supérieur à celui de la cellule active. Ce sont également les choanocytes qui s'emparent des particules de carmin et de charbon, aussi bien chez les Incalcaria que chez les Calcaria. Les substances ingérées, qui ne sont pas alimentaires sont reje- tées, par les choanocytes en grande partie. Un certain nombre d'entre elles, cependant, sont cédées aux cellules migratrices, surtout chez les Acalcaria, et sont transportées dans tout l'organisme. Celles qui sont alimentaires sont digérées. Mes expériences d'alimentation d'épongés calcaires, aux dépens de grains d'amidon ou de bactéries, m'ont montré que ces substances nutritives suivissent ultérieurement une attaque profonde à l'inté- rieur des cellules qui les ont eiiglobées : les grains d'amidon émoussent leurs angles, élargissent leur hile, font apparaître plus vives leurs stries concentriques; les bactéries sur lesquelles j'ai opéré, et qui avaient la propriété de se colorer en violet par la J. COTTE. — PHÉNOMÈiXES DE LA NUTRITION 777 méthode de Gram au violet de gentiane et à léosine, se coloraient en rouge lorsqu'elles avaient subi pendant un certain temps l'action des sucs intracellulaires. Il n'y a pas le moindre doute à conserver : chez les éponges calcaires la digestion se fait à l'intérieur des cellules à collerette. Chez les Acalcaria le faible volume des cellules à collerette semble leur interdire de jouer un rôle aussi actif; de plus, elles sont beaucoup moins nombreuses, par rapport aux cellules mésogléiques , que chez les éponges calcaires. En outre, chez les Acalcaria. les particules de carmin et de charbon sont cédées aux cellules migratrices après qu'elles ont été ingérées par les choano- cytes. Tous ces faits nous prouvent que chez les Acalcaria les cellules migratrices jouent un grand rôle dans la digestion des aliments. Je viens de dire, et je le souligne, que la digestion se fait à l'inté- rieur des cellules flagellées ou des cellules migratrices ; la digestion est, en effet, intracellulaire chez les Eponges. Elle semble môme être strictement intracellulaire; je ne crois pas qu'il y ait sécrétion de sucs digestifs en dehors des cellules. En effet . on voit sur les coupes que les grains amylacés et les bactéries restent intacts tant qu'ils sont en dehors des cellules ingérantes. En essayant de nourrir des éponges avec des fragments volumineux de fibrine de veau, je n'ai pas obtenu le moindre résultat. La fibrine aurait diminué de poids si des sucs digestifs avaient été sécrétés autour d'elle. Il est aisé de comprendre, d'ailleurs, qu'il ne peut guère en être autrement. Nous savons que les éponges sont traversées par un courant d'eau conti- nuel; ce courant est assez actif et, si l'on admettait qu'il y a émission continuelle de produits digestifs à l'intérieur de l'eau circulante, il faudrait admettre aussi qu'il existerait, en pure perte, une intensité de sécrétion qui excéderait de beaucoup celle cju'est en état de pro- duire un organisme vivant. Les sucs digestifs restent donc intracellulaires. Ils sont riches en diastases. J'ai étudié leur action, et pour cela j'ai employé des moyens différents : étude du suc obtenu par expression de l'animal, de l'extrait glycérine ou du précipité obtenu en ajoutant de l'alcool à du suc d'épongé. J'ai pu ainsi constater que les Spongiaires ren- ferment des diastases capables de coaguler le lait , d'hydrolyser les albuminoïcles : gélatine, ovaU:)umine, fibrine, caséine, gluten, de détruire et de liquéfier in vitro les bacilles du choléra, d'attaquer l'amidon, quelques sucres, la monobutyrine de la glycérine; j'ai pu déceler aussi la présence de la tyrosinase. Au sujet de la répartition des ferments actifs, j'ai constaté quelques différences suivant les 7"8 ZOOLOGIE, AXATOMIE ET PHYSIOLOGIE espèces que j'ai examinées. C'est ainsi, par exemple, que le suc de Spongelia ramosa et celui de Cj^doniiiDi g'ig'as ne coagulent pas le lait. Toutes, cependant, renferment un ferment attaquant les albu- minoïdes, ferment voisin de la trypsine, basophile comme. celle-ci et produisant comme elle de la tyrosine, mais ne donnant pas naissance à du trvptophane. Au sujet des cellules sphéruleuses. j'ai pu voir que ces cellules prennent naissance aux dépens des cellules mésogléiques des éponges. On voit apparaître à l'intérieur de ces derniers éléments des granu- lations qui , dans de nombreuses cellules , grossissent graduellement en prenant fréquemment une propriété nouvelle . celle de se colorer avec électivité sous rinfluence des colorants dits basiques. Lorsque toute la cellule s'est ainsi transformée , s'est ainsi lïourrée de splié- rules, elle est devenue cellule spliéruleuse. J'ai pu suivre son évolution. Je laisse de côté les cellules sphéru- leuses qui ont élaboré des lipochromes et que Sollas a désignées sous le nom de chromatocytes. Une fois parvenues à l'état adulte, les cellules sphéruleuses ordinaires se détruisent. Les unes s'émiettent à l'intérieur de la mésoglée, puis les sphérules sont réunies en amas dans la sul^stance fondamentale et lentement rejetées dans les canaux ; on \o\\ faire saillie sur la lumière de ceux-ci des cellules qui s'éliminent en bloc ou qui égrènent graduellement leurs sphé- rules. Cette dernière évolution de la cellule, cette élimination au au niveau des canaux a une très grande importance chez des éponges comme certaines Monaxonides de la famille des Chalinidœ ou de celle des Renieridœ, qui sécrètent avec abondance des produits vis- queux, muqueux, riches en mucine et qui sont formés aux dépens des cellules sphéruleuses. Passant à l'étude des j^roduits sécrétés, j"ai cherché à éclaircir quelle est la nature des lipochromes, corps qui sont encore si mal connus malgré leur grande diffusion chez les êtres vivants. J'ai pour- suivi les expériences de Krukenberg et je suis arrivé, comme lui, à cette conclusion que les lipochromes sont à base de cholestérine. On connaît mal quelle peut être pour les éponges l'utilité des lipo- chromes. Il ne m'a pas semblé que la coloration des lipochromes puisse avoir une importance quelconque dans la physiologie des Si^ongiaires , elle nous intéresse seulement en ce (pii concerne la caractérisation des espèces ; aussi je ne crois pas qu'on puisse classer ces corps parmi les pigments, en conservant ce nom de pigment aux seules substances pour lesquelles leur couleur est i-éellement une propriété physiologique fondamentale. Je les range parmi ces subs- J. COTTE. — PHENOMEXES DE LA NUTRITION 77g tances dont on peut dire seulement que ce sont des substances colo- rées et qui sont des pseudo-pigments. Il ne m'a pas été possible de voir dans ces substances des corps chargés de lutter contre les radiations lumineuses ou l'acide carbo- nique , ou d'absorber les radiations lumineuses et de décomposer l'acide carbonique, car on rencontre souvent des lipochromes dans les régions les plus profondes des Spongiaires. Je ne crois pas non plus qu'ils puissent se combiner directement avec certains poisons , pour donner naissance à des composés analogues aux lipocliromo- gènes de Krukenberg ; une des principales raisons est que l'existence de ces lipocliromogènes n'a pas été constatée chez les éponges. L'étude de la répartition de ces substances chez les Spongiaires m'a conduit à les regarder plutôt comme des sidDstances de réserve, comparables aux graisses. On trouve en abondance des lipochromes à la surface des éponges ou dans les gemmules, dans certaines larves, chez des éponges en pleine élaboration sexuelle (ceci est à rappro- cher d'autres faits bien connus, tels que l'abondance des lipochromes chez l'œuf de poule et les glandes génitales de nombreux Echino- dermes), c'est-à-dire au niveau des tissus à croissance active ou susceptible de subir, à un moment donné, un rapide accroissement. Ausssi m'a-t-il semblé que les lipochromes peuvent être i^approchés des graisses , surtout s'il est possible de démontrer qu'ils sont tous des éthers gras de la cholestérine. Les acides gras qui entreraient dans leur constitution seraient directement utilisés pour la nutrition des tissus, tandis que la cholestérine resterait comme résidu. J'ajouterai c|ue j'ai observé chez Reniera simiilans l'existence d'acide oléique et sans doute d'acide butyrique. Je ne ]puis préciser actuellement si ces acides gras étaient combinés à de la glycérine ou s'ils faisaient partie de la molécule des lipochromes. Au sujet des substances de réserve, je tiens à faù^e remarquer que je n'ai pas pu déceler la présence du glycogène ni celle de l'ami- don. L'amidon avait été cex^endant signalé bien des fois chez les éponges; je crois pouvoir admettre que les observateurs qui ont commis cette erreur, ainsi que je l'ai fait moi-même au début de mes recherches sur les Spongiaires, ont pris pour des grains d'amidon des sphérules de lipochrome qui s'étaient colorées en bleu sous l'action de l'iode. L'étude des produits d'excrétion a été faite sur les sucs obtenus par expression de l'animal. Je n'ai pu déceler chez les éponges m urée, ni acide urique, ni indol, ni scatol, ni indoxyle; ])av contre une certaine quantité de l'azote résidual est rejetée chez elles sous forme 780 ZOOLOGIE, AjVATOMIE ET PHYSIOLOGIE daniines qui interviennent en grande partie pour donner à certaines éponges leur odeur désagréable. Je n'ai pas observé de base choli- nique libre. M. P. STEPHAN Chef des travaux d'histologie à l'Ecole de Médecine de Marseille SPERMIES OLIGOPYRÉNES ET APYRËNES CHEZ LES PROSOBRANCHES [591.171] — Séance du 6 août — Les belles recherches de Meves sur la spermatogénèse de la Palu- dine et du papillon Pygœra biicephala ont mis à l'ordre du jour la question de l'existence , chez certains animaux , de deux modes de spermatogénèse. Voïnow chez Cybister et les Papillons, Bouin chez le Scolopendre ont fait connaître la présence de deux sortes d'élé- ments spermatiques. On sait qu'il existe, en dehovs de la Paludine , de nombreuses espèces de Prosobranches, chez lesquelles on a signalé deux formes de spermies. J'ai étudié leur développement chez quelques-unes de ces espèces. On sait que les deux modes de spermatogénèse diffèrent entre eux à des degrés divers suivant les animaux que Ion considère. Bouin chez la Scolopendre, Voïnow chez les Papillons, n'ont réussi à trouver que dq^ diflerences de grosseur des éléments cellulaires et de leurs noyaux. Meves chez la Paludine a trouvé la réduction du noyau de la spermatide à un seul chromosome, tandis que chez Pygœra, la destruction de la chromatine devient complète ; aux élé- ments à chromatine réduite, il donne le nom de spermies oligopy- rènes ; à ceux qui ont perdu toute leur chromatine. celui de spermies apyrènes; les spermies ordinaires sont eupyrènes. Dans les espèces que j'ai étudiées, les spermies de la forme aber- rante rentrent dans la catégorie apyrène, mais à des degrés divers. Les divisions de réduction sont difficiles à suivre. Chez Mnrex brandaris, les éléments qui doivent donner naissance aux spermies apyrènes se différencient de ceux de la série séminale ordinaire pen- dant le cours de la période d'accroissement. Leur différenciation ne p. STEPHAX. — SPERMIES OLIGOPTRÈNES ET APYRÈXES 781 consiste pas seulement dans le développement plus grand que prend leur corps cellulaire ; elle est remarquable aussi par la structure que le cytoplosma acquiert de bonne heure : il se produit une vacuolisa- tion considérable. On voit d'abord apparaître une vacuole volumi- neuse en rapport intime avec l'idiozome ; cette vacuole grandit et d'autres apparaissent; bientôt le processus a envahi toute la cellule, qui prend ainsi un aspect spumeux. A une faible distance du noyau, primitivement dans l'idiozome et, plus tard, dans une des travées protoplasmiques qui séparent les vacuoles les unes des autres, on distingue deux corpuscules centraux. Lorsque l'accroissement a pris fin, ces corpuscules centraux se divisent un certain nombre de fois , de façon à former deux petits amas de granulations ; en même temps, les chromosomes se différen- cient dans le noyau. Les deux groupes de corpuscules centraux se portent aux deux pôles opposés de l'élément; les chromosomes se dispersent, sans passer par une phase d'aster bien marquée, entre les différentes vacuoles contenues dans les travées protoplasmiques ; puis ils se rassemblent aux deux pôles et la division cellulaire s'achève par étranglement. Les spermatocytes de second ordre ainsi formés renferment plu- sieurs petits noyaux inégaux, provenant à la fois de ce que les chro- mosomes ne se sont pas tous réunis en un seul noyau et de ce que les noyaux formés peuvent se diviser directement ou bourgeonner. Ces spermatocytes vont se diviser une nouvelle fois, répartissant entre les deux groupes nouveaux de corpuscules centraux les petits noyaux peu modifiés. Chez Cerithîum viilgatiim, les éléments restant petits, je n'ai pas pu décomposer le petit amas centrosomatique qui se trouve aux pôles des éléments en division. Les chromosomes ne se disposent pas non plus en aster; ils se répartissent entre les deux cellules et m'ont semblé rester isolés les uns des autres. Dans les spermatides de Miwex hrandaris , les corpuscules cen- traux forment à la périphérie une petite plage et de chacun d'eux se développe un cil assez court ; ils s'appuient sur une sorte de coussi- net protoplasmique un peu plus colorable et homogène que le reste du cytoplasme. Bientôt chacun des corpuscules centraux s'étire vers l'intérieur de la cellule sous forme d'vme petite baguette renflée à ses deux extrémités ; ces baguettes s'accroissent en repoussant devant elles le protoplasme différencié ; pendant l'accroissement, les extrér mités internes se rapprochent et se fusionnent, de sorte que l'appa-r ^82 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE reil prend un aspect conique ; la pointe se mélange plus ou moins au protoplasma plus colorable, ce qui donne à cette région une teinte foncée. Le cône, en s'allongeant, rencontre la paroi opposée de la cel- lule et la repousse devant lui, faisant une saillie de plus en plus accentuée; pendant longtemps il restera étroit, jamais plus large que la plage des corpuscules centraux ; plus tard, il s'élargira rapide- ment beaucoup et chacune des fd^rilles qui le constituent sera située sous la surface de l'élément. Avec la maturité, les cils se flétrissent et disparaissent; les grains postérieurs deviennent indistincts et semblent plus ou moins se fusionner, de sorte que les fibrilles con- vergeraient à l'arrière comme à l'avant de la spermie. Les petits noyaux contenus dans les spermatides se fragmentent et disparaissent en subissant différents modes de dégénérescence, entre autres la caryolyse. Aucun fragment ne se met à aucun moment en rapport avec la partie antérieure du cône centrosomatique. Chez Murex triimiliis, lesp hénomènes que l'on observe sont à peu près analogues; mais il n'y a pas vacuolisation du cytoplosma; les éléments adultes sont très volumineux, très longs et très mobiles. Chez Triton nodifer, la spermiogénèse semble se rapprocher beau- coup, sauf l'absence de vacuolisation, de celle de il/. Braiidaris. J'en dirai autant de Nassa miitabilis, mais ici je n'ai pu arrivera décom- poser en corpuscules l'appareil centrosomatique, qui forme un anneau homogène. Un autre type nous est fourni j)ar Cerithium vulgatiim. Dans la spermatide nouvellement formée, on distingue, disséminés dans le protoplasma, les chromosomes provenant de la deiniière division de réduction; ils ne reconstituent pas un noyau. A ce stade je n'ai pas pu encore retrouver les corpuscules centraux. Mais bientôt on voit un petit amas de grains formés par ces derniers à la périphérie de l'élément. De ces corpuscules centraux partent des cils. Les chromo- somes dégénèrent très rapidement, sauf un seul. On distingue dans la cellule un idiozome cjui élabore un corpuscule plus colorable, comme chez les spei-matides du type normal. Un peu i)lus tard, le chromosome qui a persisté forme au devant du o-roupe des corpuscules centraux, une sorte de petit noyau clair, beaucoup moins distinct que chez la Paludine. L'idiozome se met en rai)port avec la partie antérieure de ce petit noyau. Si, d'autre part, on colore les mitochondries, on voit qu'elles forment à ce moment un amas autour de la base des cils , sous forme d'autant de grains volumineux qu'il y a de ces derniers. On trouve aussi, répandus dans la cellule, des grains colorables encore petits. p. STEPHAN. — SPERMIES OLIGOPYRÈNES ET APYRÈNES ^83 Les corpuscules centraux s'allongent alors pour former une sorte de cylindre fibrillaire; le petit noyau reste encore à la partie anté- rieure de cette formation ; il se montre un peu plus chromatique dans sa partie postérieure . mais il diminue cependant beaucoup de taille €t de netteté ; l'idiozome a perdu son contact avec lui et a diminué de volume. Le cylindre dérivé des corpuscules centraux, présente une teinte somLre, due peut-être à ce qu'il est imprégné de la substance des mitrocliondries. Les petits grains fortement colorables que nous avons signalés augmentent beaucoup de volume et de nombre, leur présence rendant même l'observation des autres parties plus diffi- cile. Je considère ces granulations comme des différenciations proto- plasmiques particulières, différentes des milochondries et des chro- mosomes dégénérés. Plus tard, toute trace de noyau a disparu; le cylindre axial, étiré en pointe à son extrémité antérieure, refoule la paroi de la sperma- tide; les grains colorables encore grossis, se rangent régulièrement autour de cette baguette fibrillaire. Pendant ce temps , le cytoplasma se rétracte de plus en plus , de façon à atteindre progressivement la forme conique allongée de la spermie adulte. Les grains colorables s'aplatissent alors de façon à former une couche régulière. Les granulations basilaires des cils perdent de leur netteté. Les spermies du Cerithe commencent donc à se former comme des spermies oligopyrènes de Paludine; puis, toute trace de substance nucléaire disparaissant, les éléments adultes deviennent tout à fait apyrènes. C'est comme éléments apyrènes cju'ils doivent se comijor- ter au point de vue physiologique. Mais, étant données les premières phases de leur évolution, nous pouvons les considérer comme formant une transition entre les s^Dermies oligopyrènes et les spermies lîlus parfaitement apyrènes de Murex brandavis ou de Nassa mutabilis. Celles-ci représentent le terme ultime de la série; ici les cils vibra- tiles n'existent plus que pendant une période transitoire, disparaissent dans l'élément mùr, alors qu'ils sont fonctionnels chez la Paludine et le Céritlie. Il ne fait aucun doute que les spermies oligopyrènes et apvrènes sont provenues phylogénétiquement d'éléments eu2:)yrènes. Dans cette série, les éléments oligopyi'ènes sont apparus les premiers, i»uis des éléments analogues à ceux du Céritlie ; enfin des spermies tout à fait apyrènes. ^84 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE M. Pierre FAUVEL Professeur à l'Université Calhdlique d'Angers LES PRÉTENDUS OTOCYSTES DES ALCIOPIENS (ANNËLIDES POLYCHÈTES) [612.858] — Sea7}ce du 6 août — C'est une histoire assez amusante que celle des organes auditifs des Alciopiens. Ces Polychètes pélagiques, remarquables par le orand développement et la structure compliquée de leur appareil oculaire, un des mieux difîérenciés parmi les invertébrés, se sont vu tour à tour et à différentes reprises , attril^uer , puis refuser des organes auditifs. Greeff, en 18^6, décrivit le premier les otocystes des Alciopiens comme deux vésicules accolées aux yeux et situées un peu au-dessous et en arrière de ceux-ci. Il reconnaît bien qu'à première vue chaque otocyste ressemble à une grosse cellule; néanmoins il y découvre une petite capsule ovoïde dont la paroi interne lui paraît revêtue de ijetites cellules, mais il n'en est pas bien certain; au centre se trouve un o-ros otolithe spliéric[ue renfermant lui-même de petits corpuscules. Il décrit même un nerf auditif. Herixo (1892) figure encore cet otocyste, qu'il a observé sur le vivant, mais sa description confirme seulement celle de Greeff sans rien y ajouter. Pourtant, dès 1886 , Kleixenberg avait relevé l'erreur de Greeff, en montrant que le prétendu otocyste n'est autre cju'une cellule glandu- laire géante, sécrétant le corps vitré de l'œil. BÉRANECK, dans un mémoire sur l'œil des Alciopides (1893 a, p. 67) confirma ro[)inion de Kleixenberg et montra que le prétendu nerf auditif de Greeff n'est qu'un faisceau de fibres musculaires disposées transversalement. Ainsi que jai pu m'en assurer moi-même, Greeff a [>i'is le noyau i)our l'otocyste et son gros nucléole sphériquepour rotolilhe. Malgré ce qu'aurait d'étrange la situation d'un otocyste ainsi accolé à l'œil, l'erreur est jusqu'à un certain point explicable car. à un examen superficiel, la paroi épaisse de cet énorme noyau simule une ca^^sule p. FAUVEL. — LES PRÉTENDUS OTOCYSTES DES ALCIOPIEXS ^85 dont le gros nucléole sphérique, bien isolé au centre, serait l'otolithe. L'espace séparant le nucléole de la paroi nucléaire est finement gra- nuleux. L'aspect de cette cellule géante rappelle surtout certaines grosses cellules nerveuses qui ont également un gros noyau à mem- brane épaisse et un volumineux nucléole s[)hérique fortement coloré ; mais entre les deux se trouvent des granulations chromatiques plus grosses et plus nettes et la taille du noyau est sensiblement moins forte. Après avoir ainsi contribué , avec Kleinexberg , à démontrer la non existence des prétendus otocystes de Greeff, Béraxeck crut néanmoins découvrir des organes auditifs chez les Alciopiens et il il consacra un mémoire (i8g3) à leur description. Chez les jeunes Alciopides « les organes auditifs ne sont pas « inclus dans la paroi du corps, mais se présentent sous forme « d'appendices de ce dernier. Ce sont de petits sacs, plus ou moins « ovoïdes. rattachés à la larve par de courts pédoncules (/?o-. 8,\. aud.) ; « ils dépendent du premier segment troncal. » Ces organes sont pleins, renfermant une masse plasmique. L'auteur décrit une paroi formée de deux couches , l'une externe hypodermique, l'autre interne, sensorielle, avec des glandes unicellu- laires qui profèrent des granulations chromophiles se déversant dans le milieu plasmique central, otolithes d'une nature spéciale, non calcaires, non réfringents et d'origine glandulaire. Chez YAsterope candida adulte, il existe quatre sacs auditifs, la première paire appendiculée au premier segment troncal et la deuxième au second segment. L'auteur décrit longuement et minutieusement la forme de ces organes , la structure de l'hypoderme , des cellules sensorielles , des îlots cellulaires formant des bourgeons de la paroi , au centre de la masse plasmique, et celle des prétendus otolithes. Aussi conclut-il, avec raison, que les otocystes, les Alciopides s'éloignent de ceux des autres formes animales par leur structure et leur situation. Ils seraient des organes secondaires , dérivant des cirres parapo- diaux transformés et non homologues aux otocystes de la trochos- phère et Béraneck construit là-dessus toute une théorie sur l'origine des otocystes des Annélides. Des organes aussi volumineux (leur taille atteint, chez l'adulte, celle de l'o'il lui-même) n'avaient cependant pu échapper entière- ment à l'attention des auteurs plus anciens. Béraxeck lui-même prend soin de nous informer que ces organes, 5o* ^86 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE déjà figurés par Claparède comme de simples cirres tentaculaires , ont été considérés par Greeff comme des réservoirs sperinatiques. S'il avait poussé plus loin ses recherches bibliographiques, il aurait appris que, dès 1860, Hering avait décrit ces réservoirs spermatiques. Ehlers {1864 , p- 1^0) reproduit ces observations et sio-nale ces n receptaciila seminis » au nombre de 2 ou de 4» suivant les espèces, chez les femelles à maturité. Claparède (18^0. p. 107), à qui l'opinion de Hering avait paru, à priori, improljable, déclare avoir « eu entre les mains (à Naples) « un grand nombre de femelles de Y Alciopa cantrainii et de Y Aste- « rope candida, qui présentaient leurs réceptacles extraordinaire- « ment distendus i^ar la semence ». Levinsex et Apsteix (18 g3) y ont également constaté la présence de spermatozoïdes. Un iDeu avant le mémoire de Béraneck, paraissait un nouveau mémoire de Hering, dans lequel cet auteur donne l'historique de la question et, reprenant ses observations de 1860, décrit longuement les poches séminales d'un certain nombre d'espèces. On trouve, en effet, toutes les transitions entre la simple boule de spermatozoïdes agglutinés, logée entre le pied et le cirre ventral qu'elle colle ensemble et que recouvre le large cirre dorsal, non modifié des Alciopa Cari, A. lepidota, A. Bartelsii ei\s.\év\iSih\e poche séminale de Y Asterope candida formée par le cirre dorsal profondément modifié. On voit qu'il n'y a plus de doute sur la nature de ces organes, qui ne sont pas des otocystes, mais des poches séminales, n'existant que sur les deux premières paires de parapodes de la femelle dont ils représentent les cirres dorsaux adaptés à cette fonction. Il est même étonnant que Béraneck n'ait pas remarqué que ses prétendus otocystes existaient seulement chez les femelles et man- quaient aux mâles, car ceux-ci semblent plus abondants. Sur une dizaine à! Asterope candida, provenant de la station zoologique de Naples, Je n'ai eu que trois femelles. Les descriptions de Hering ne donnant aucun détail histologique, j'ai fait un certain nombre de coupes en série dans les organes en question , afin de comparer mes résultats avec la description fausse- ment interprétée de Béraneck. Réservant les détails pour un travail plus comi>let en cours d'exé- cution, je ne résumerai ici que les points principaux. Les réceptacles séminaux de Y Asterope candida femelle et adulte, au nombre de deux paires, ont l'aspect d'une sj^ière pédonculée, p. FAUVEL. — LES PRETENDUS OTOCYSTES DES ALCIOPIENS 'jSj. portant un petit bouton mucroné ; ils sont formés par le cirre dorsal hypertrophié. Au-dessous, quelques soies représentent un rudiment de parapode; le cirre ventral, digitiforme, allongé, est assez déve- loppé. Le cirre globuleux est creux et communique avec l'extérieur par une petite ouverture ventrale et un peu postérieure. Les parois de sa cavité sont lobées , froncées , faisant hernie au centre , dans l'axe de l'ouverture. La cavité anfractueuse ainsi formée est bourrée de spermatozoïdes dont la tète et la queue sont très nettes ; ils sont agglomérés par du mucus. Suivant les régions par où sont menées les coupes, l'aspect est un peu différent. Sur une section transversale médiane, on voit l'épiderme alvéo- laire, à éléments cubiques peu distincts, au-dessous, dans une partie dorsale de l'organe, on trouve du pigment jaune dans une région fibreuse, irrégulière, creusée de vacuoles. La cavité de l'organe , irrégulière , lobée , est remplie de sj)erme agglutiné par du mucus éosinophile; au centre, un massif formant îlot est constitué par des cellules nettes, allongées, disposées en couche assez régulière, à noyau très foncé, à cytoplasme fibreux avec fines granulations éosinophiles. Les parties basilaires des cellules forment au centre un stroma. Les cellules du côté du pédoncule sont disposées en arcades ; elles sont allongées suivant le grand axe de l'organe et leurs prolonge- ments basilaires effilés forment les piliers des arcades et semljlent se terminer dans les paquets de muscles du pédoncule. Ce sont les prétendues cellules sensorielles de Béranegk, qui n'ont rien de nerveux et qui sécrètent le mucus agglutinant les spermato- zoïdes, Les cellules de l'extrémité opposée de l'organe sont analogues, mais forment une paroi plus dentelée ; le bord libre des cellules est saillant, lobé, déchiqueté, comme rongé; par endroits, il envoie dans la cavité centrale des prolongements irréguliers qui semblent y diflluer. Ces derniers caractères sont encore plus marqués dans les cellules qui bordent l'ouverture de la cavité interne. Dans la pointe nucronée, on rencontre quelques cellules sensorielles eu rapport avec un filet nerveux. Ce sont les spermatozoïdes, dont la tète ju-end une teinte très foncée avec les colorants nucléaires que Béraneck a pris pour des -88 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE otolitlies. Son pseudo-tissu de la masse plasmique est formé par les queues enchevêtrées des spermatozoïdes et par le mucus éosinophile qui les réunit. En résumé, les premiers organes décrits chez les Alciopiens comme otocystes, sont des glandes sécrétant le corps vitré de l'œil et ceux que BÉRAXECK a cru ensuite leur découvrir sont des réceptacles séminaux formés par les cirres dorsaux modifiés des premiers segments de la femelle et ks Alciopiens sont, en réalité, complètement dépourvus d'organes auditifs. Index bibliographique 1893 Apstein. Die Alciopiden der Berlmer Zoolog-ischen Sanimlung (Arch, f. Natiirgesch., LIX Jahr., p. 141-100). 1893 a BÉRANECK. Étude sur l'emlirvogéuie et sur rhistologie de l'œil des Alciopides. (Revue Suisse de Zoologie, vol, I, fasc. i.) 1893 b BÉRAXECK. L'organe auditif des Alciopides. (Revue Suisse de Zoologie, vol. I, fasc. 3, j). 4<^4'5oo, i pi.) 1870 Claparède. Les Annélides Chétopodes du golfe de Naples. (Genève, 18,70, 2" partie, suijplément, p. 107.) 1864 Ehlers. Die Borstenwùrmer. (Leipzig, 1 vol.) 1876 Greeff. Untersuchungen ueber die Alciopiden. (Nova acta d. K. Leop. Carol. Deutsch. Akad. d. Naturf., Bd. XXXIX, n° 2, p. 35- i32, pi. II-VII.) 1860 Hering. De Alcioparum partD:»us genitalilius orgauisque excretoriis. (Leipz.ig.) 1892 Herixg. Zur Keiuitniss der Alciopiden von Messuia. Sitzgsber. Kais. Akad. Wiss. Wien. Math. Nat. CL, I Abth., CI Bd., p. 714- 768, 0 pi.) 1886 Kleixexrerg. Die Entstehung des Annelids ans der Larve A^on Lopadorynchus. (Zeitschr. f. wiss. Zool., XLIV Bd., p. 1-227, 16 pi.) i885 Levinsex. Spolia atlantica — Om nogle pelagiska Annulata. Vid. Selsk. Ski\ (6) Nat. og. Math. Afd., vol. IH, 2^ part., p. 325-344.) L. ROULE. — LA STATION DE PISCICULTURE ET d'hYDROBIOLOGIE 789 M. Louis ROULE Professeur à la Faculté des Sciences et Directeur de la Station de Pisciculture de l'Université de Toulouse LA STATION DE PISCICULTURE ET D'HYDROBIOLOGIE DE L'UNIVERSITÉ DE TOULOUSE [(V3y (44.80)] — Séance du S août — L'Université de Toulouse possède, depuis le i^-" janvier igoS, un vaste établissement nommé : « Station de Pisciculture ». et qu'elle a affecté, non seulement à l'aquiculture seule, mais encore à l'étude de tous les problèmes relatifs à l'hydrobiologie régionale : lacs pyré- néens, bassins hydrographiques du versant océanien et du versant méditerranéen. Cet établissement est situé dans l'un des faubourgs de la ville. L'Université le doit à la généreuse hbéralité d'un négo- ciant toulousain, M. Antoine Labit. Il comprend un bâtiment et un vaste jardin creusé de bassins. Le bâtiment, élevé d'un étage sur rez-cle-chausssée , renferme à son tour , outre le logement des gens de service , plusieurs pièces à usage de laboratoires, des salles de collection et d'aquarium. Les laboratoires sont au nomlare de deux : l'un placé au rez-de-chaussée, est affecté plus spécialement aux recherches de physiologie et de pathologie piscicoles; l'autre, au premier étage, est destiné aux études de systématique, d'embryologie et d'alevinage. Les salles de collec- tion, situées au premier étage , sont également au nombre de deux. L'une, la plus grande, sert aussi de salle de conférences et peut contenir deux cents auditeurs ; elle renferme une riche collection d'engins de pêche, d'instruments de pisciculture, de modèles d'éta- blissements piscicoles , exécutés à l'échelle. La plus petite contient une collection complète des poissons des eaux douces de l'Europe occidentale et une collection déjà assez fournie des animaux et des A'égétaux qui habitent les eaux douces de la même région. L'aqua- rium renferme , dans ses trente-deux bacs , les principales espèces des poissons comestibles, indigènes ou acclimatés, et des animaux utiles ou nuisibles à la pisciculture. Le jardin contient onze bassins, alimentés par une dérivation du jgO ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE canal de Saint-Martory, fournissant trente litres à la seconde ; l'eau se décante au préalable dans un grand réservoir et se filtre dans un autre, plus petit. Ces bassins sont affectés à l'élevage des alevins, à l'entretien des rej)roducteurs, à la conduite d'expériences faites dans des conditions qui rappellent , d'aussi près que possible , celles de la nature ; enfin ils servent d'exemples et de modèles pour l'installation d'établissements de pisciculture. La station est ouverte au public à jours fixes, le premier et le troi- sième dimanches, le deuxième et le quatrième jeudis de chaque mois, dans l'après-midi. Tout s'y trouve ménagé pour que le visiteur, dans une seule promenade, s'éclaire sur ce qui concerne l'élevage pratique des poissons d'eau douce : étiquettes et indications diverses sont disposées à cet effet. En outre, la station est ouverte tous les jours aux personnes munies d'autorisations spéciales et à celles qui désirent étudier de près les questions de la pisciculture et de l'hy- drobiologie. Des leçons publiques de jjisciculture pratique y sont données pendant l'été ; elles furent suivies , cette année , par cent cinquante à cent soixante personnes. L'Université de Toulouse, dès l'acceptation par elle de cet établis- sement , lui a ouvert un budget suffisant pour lui permettre de com- mencer à fonctionner. Tout porte à penser que les départements de la région, directement intéressés à l'œuvre entreprise, augmenteront ces ressources encore restreintes et assureront le fonctionnement définitif. Cette station est appelée, en effet, à un réel avenir. La nature de son installation, sa situation auprès d'une grande ville qui est un important centre universitaire, lui procurent les moyens d'aider puissamment à développer et encourager l'industrie piscicole, comme à enseigner au public les méthodes pratiques de la piscicul- ture. De plus, ses laboratoires, ses collections, son aquarium, sa proximité des fleuves et des lacs lui permettent de donner aux natu- ralistes la facilité d'étudier aisément la biologie des eaux douces, soit au sujet de la science pure, soit en ce qui touche à l'aquiculture et au repeuplement des rivières. L. KOULE. — QUELQUES FORMES NOUVELLES DE CÉRIANTHAIRES 'ji)I M. Louis ROULE Professeur à la Faculté des Sciences de TUniversité de Toulouse NOTE PRÉLIMINAIRE SUR QUELQUES FORMES NOUVELLES DE CÈRIANTHAIRES — Séance du 8 août Les récents travaux publiés sur les Cériantliaires et, notamment, les excellentes recherches faites par Ed. van Beneclen (Les Antho- zoaires de la Plankton-Expédition, 1898; clans Ergehnisse derPlank- ton-Expediiion der Hnmboldt Stiftiing, Kiel et Leipsig) donnent un grand intérêt à la connaissance et à la description de formes nouvelles se rattachant à ce remarqualîle groupe des Anthozoaires. Il est curieux, en effet, de constater l'existence, dans le plankton superficiel et le plankton abyssal des mers , de types larvaires fort divers appartenant à des Cérianthes , alors que le nombre des espèces connues et l'étendue de leur aire géographique paraissent moins considérables. Ayant eu l'occasion d'étudier des échantillons, dont les uns sont pris dans les collections du prince de Monaco , et dont l'autre (car l'exemplaire est unique) est dû à l'obligeance de M. le Pro- fesseur J. Bell, du British Muséum, je puis décrire cleux espèces nouvelles et augmenter l'aire de distribution géographique accordée à une troisième déjà connue. Cette dernière est Cerianthiis Lloydii Gosse. On l'avait recueillie, jusqu'ici, sur les côtes de l'Angleterre, delà Belgique, de la Norvège, dans la Manche et la mer du Nord. Le prince de Monaco l'a draguée par 102 mètres de profondeur, dans une région plus septentrionale. Cette station de dragage porte le n° 997 dans la liste di-essée par le Prince; elle est située par ^S^aa' de lat. N. et i4°5o' de long. E., au delà du cercle polaire, non loin du Spitzberg. L'une des espèces nouvelles appartient, comme la précédente, aux collections du Prince de Monaco. On l'a récoltée un peu plus au Sud, vers les îles Lofoden et l'Est de l'Islande, mais à des profon- deurs plus considérables, 65o et ii85 mètres. Elle constitue donc, chose importante en l'état des documents acquis sur la distribution bathymétrique des larves de Cérianthaires, une forme abyssale du genre Cerianthus. Elle ne s'écarte pas trop par ses caractères spéci- ;J92 ZOOLOGIE, AXATOMIE ET PHYSIOLOGIE liques de C. Lloj'dii , mais offre plusieurs particularités qui auto- risent à l'en séparer. Etant données leurs dimensions, les individus que j'ai examinés avaient pris tout leur accroissement; ils ne possé- daient cependant, autour de leur actinopliarvnx, c'est-à-dire dans la région du corps où les cloisons se trouvent au complet, que 4i de ces dernières. L'état de contraction des exemplaires et des chutes probables, causées par les réactifs, empêchent de connaître avec exactitude le nombre des tentacules. Sur trois échantillons, les mieux conservés, les chiffres des tentacules marginaux furent i8, 22 et 38; ceux des tentacules labiaux furent 38, 4o et 44- Les quantités les plus élevées s'accordent sensiblement avec celles des cloisons. Parmi ces dernières, dix-neuf, plus longues que les autres, descendent jusqu'au milieu de la colonne; six s'y arrêtent et treize vont jusqu'à l'extré- mité aborale du corps. Cette espèce est hermaphrodite. Je la nomme C. Danielsseni. La seconde espèce nouvelle ne porte d'autre mention de prove- nance que la suivante : « Mer intérieure du Japon ». Elle se fait remarquer par de telles particularités qu'elle s'écarte de toutes les espèces de Gérianthes actuellement connues et qu'elle pourrait servir de type à un nouveau genre. Son allure trapue et massive, l'excessif développement de la colonne en largeur (24 à 27 miUi- niètrcs), par rapport à la longueur (80 millimètres), la distinguent tout d'abord. J'ai compté I23 tentacules marginaux, gros et courts, et 122 tentacules labiaux, presque aussi longs mais plus grêles. Le nombre des cloisons, au niveau de l'actinopharynx, est de 126. Ces cloisons se font remarquer par leur extrême brièveté ; la plupart descendent à ])eine à quelques millimètres au dessous de l'orifice interne du canal actinopharyngien ; il en résulte que la plus grande part de la paroi interne de la colonne est lisse , libre , privée de tout appendice septal. Les cloisons les plus longues sont placées dans la région ventrale de l'individu; elles correspondent à S^ de la termi- nologie proposée par Ed. van Beneden et sont pourvues d'aconties: toutes deux délimitent une bande qui prolonge vers l'extrémité aborale le sulcus (siphonoglyphe auct.) de l'actinopharynx. La paroi de la colonne est remarquable par sa consistance presque cartilagi- neuse et par sa grande épaisseur, plus forte de l^eaucoup que chez les Cerianthes connus. Cette épaisseur est de un millimètre environ au niveau de l'actinopharynx, de deux miUimètres dans les autres parties du corps. EHe est due. pour une part, à la couche mésogléale, mais elle est surtout occasionnée par l'excessif développement de la musculature longitudinale. Cette dernière disposition concorde avec p. FAUVEL. — UNE EXPÉRIENCE d'aLIMENTATION 798 la brièveté des cloisons; les contractions de l'individu dans le sens de la longueur ne sont point gênées par les insertions septales. En résumé, cette forme nouvelle offre un réel intérêt par la curieuse persistance de plusieurs dispositions larvaires, jointe à la grande épaisseur de la musculature. Elle constitue, parmi les Cérianthes, un type spécial, auquel je propose de donner le nom de Pach}'cerianfhiis. M. Pierre FAUYEL Professeur à TUiiiversité catholique d'Angers UNE EXPÉRIENCE D'ALIMENTATION [(ii3.26] — Séance du S août — Les magniliques résultats d'endurance physique obtenus par des personnes de ma connaissance et attribués par elles au régime végé- tarien ayant attiré mon attention sur ce mode d'alimentation, je dus bientôt reconnaître, en effet, que théoriquement, la chimie des ali- ments et les plus récentes conquêtes de la physiologie leur donnent pleinement raison. On ne peut, théoriquement, accorder aucune supériorité à la viande au point de vue alimentaire, même en attribuant à l'azote une importance imméritée. En effet, nomljre de produits végétaux contiennent plus d'azote que la viande et sont en outre plus riches en fer et en phosphates, sans renfermer, comme elle en abondance, des leucomaïnes, des ptomaïnes et autres toxines. On commence ainsi à revenir du préjugé de la valeur exagérée de l'azote. Une sage économie physiologique nous montre que l'azote doit servir uniquement à réparer les pertes des tissus; l'énergie : chaleur et mouvement devant être demandée aux hydrates de carbone et aux graisses. Il m'a paru intéressant de faire une expérience pratique et d'assez longue durée du régime végétarien, pour me rendre comj)te de ses effets. 794 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE L'expérience commencée en janvier 190a se continue encore; sa durée est donc actuellement de 19 mois. Le sujet, jusque-là habitué au régime plutôt Carnivore des restau- rants, doué d'une excellente santé, âgé de 35 ans, d'une taille de i^^ja, pesait au début de l'expérience 'ji k. 5oo gr. Son poids, qui depuis l'âge de 20 ans jusqu'à l'année précédente, s'était toujours maintenu entre 68 et 70 k., montrait depuis quelque temps une fâcheuse tendance à l'augmentation. MOIS 77 1 E m IV V VI "vn \m IX X AL \U 1 1 I9L 2- , • « 72- \ \ \ IS02 l 11- -~. ^ l ,1 / \ ' M ( 70- -- - •- 7- t i / ^ ~ - '^ / 1 ( ~ , / ~ ', . ; -i 69 — i » / 1 " / '/ ' / ' \ 1 ', / \ / 6ô — \ - 1 :- 1 ~ ' — ' — — \ / ^ ~^ '- --\ / . ; A7 \ » 1 '" , \ , — ' ' , ' 1 66-^ d , , __ _ _ __ En appliquant la formule de Gautrelet, le poids devait être théori- quement 68 k. 8 (172 X 0-4)- Il était donc dépassé de 3.700 gr. Je ne pense pas, en effet, cju'il y ait lieu d'appliquer la règle d'après laquelle on ajoute 2 k. à 34 ans; 3 k. à 36 ans, etc. A cet âge, chez un homme en bonne santé, prenant un exercice suffisant, le poids ne doit pas augmenter. Pour rendre l'expérience plus concluante, le changement de régime fut brusque, sans aucune transition et pendant plus d'un mois exclu- sivement végétarien , c'est-à-dire n'admettant ni lait, ni beurre, ni p. FAUVEL. — UNE EXPERIENCE D ALIMENTATION yQO fromage, ni œufs, aliments permis dans le régime végétarien suivi ensuite. Je n'ai pas besoin de rappeler que le mot végétarien a pour étymo- logie Qegetiis, fort, vigoureux; vegetare, croître, prendre de la force, et ne vient nullement de végétal comme on le croit souvent, à tort, par suite d'une consonance malheureuse. Les premiers jours furent franchement désagréables et, contraire- ment à ce qu'il en attendait, le gujet éprouva un peu de congestion et d'insomnie, ce qui ne lui arrivait jamais auparavant. Puis, lui qui ignorait complètement ce qu'est un mal d'estomac et qui digérait n'importe quel aliment, il sentait des pesanteurs d'estomac, accom- pagnées d'une sensation de faim ; en un mot, tous les symptômes des gens prétendant ne pouvoir- supporter le maigre qui les hoiirve sans les rassasier. En effet, le sujet, bien que prévenu, avait remplacé tous ses plats de viande par des plats de légumes, et il mangeait trop. Le remède était facile ; la ration fut fortement diminuée et aussitôt la gêne stomacale et la sensation de faim disparurent, le sommeil redevint calme et profond, un grand bien-être se fit sentir. On le voit , le remède est simple et , si les gens qui prétendent ne pouvoir supporter le maigre l'essayaient, ils verraient bientôt dispa- raître les mêmes symptômes ; mais allez donc persuader à des gens qui se croient morts de faim qu'en mangeant beaucoup moins, ils n'éprouveraient plus cette sensation qui n'est que le résultat dun estomac trop rempli ! ! ! Au moment où le sujet mangeait encore trop sa ration, d'après la moyenne de plusieurs déterminations faites à quelques jours d'inter- valle, était : ^> Albumiiioïdes 9.5 X 4-6 = 4^7 calories Graisses 4^ X 9-3 = 3^2 — Hydrates de carbone 55o X 4 • i = ^255 — Total 3o(34 — tandis que celle d'un témoin, conservant le régime mixte était : Albuminoïdes 122 X 4-6 = 061 calories Graisses 67X9.3= 628 — Hydrates de carbone 354 X 4-i ^= i45i — Total 2(535 — On voit que la ration du témoin correspond assez bien en calories à la ration de repos telle que la donne A. Gautier : 796 ZOOLOGIE, AXATOMIE ET PHYSIOLOGIE Albiiminoïdes 108 X 4>6 = 49" calories Graisses 49 X 9-3 = 455 — Hydrates de carbone 4t>3 X 4-i = i^Sa — Total 2604 — Celle du sujet est. en hydrates de carbone, égale à la ration de travail d'A. Gautier : Albumiuoïdes i5o X 4-6 =^ 690 calories Graisses 60 X 9-3 = 558 — Hydrates de carl^one 563 X 4 • i = 23o8 — Total 3556 — En albuminoïdes elle lui est très inférieure et inférieure aussi, de beaucoup, à la ration de repos. Comme nombre total de calories elle tient le milieu entre la ration de repos et la ration de travail. Nous avons vu que cette i^ation, trop considérahle , dut être for- tement diminuée. Depuis, je n'ai pas eu, malheureusement, la facilité de faire de nouveaux; dosages néanmoins je ne crois pas m'éloigner de la vérité en disant que la ration quotidienne d'all)uminoïdes ne dépasse pas 60 à 'jô gr (i). En tout cas nous sommes bien loin des 120 à i3o gr. admis par beaucoup d'auteurs encore classiques et contestés par Lapicque, Maurel. Pascault, etc. Depuis dix-neuf mois que dure ce régime , si peu azoté , la santé de mon sujet s'est maintenue plus excellente que jamais, sa résis- tance à la fatigue et sa souplesse musculaire se sont fortement accrues, le système nerveux est moins irritable et les migraines, seule infa*mité à laquelle il était sujet de temps à autre, ont complè- tement disparu. Nous allons examiner maintenant les variations du poids. En janvier 1902, le poids, supérieur de 3-oo gr. au poids théo- rique, est de 72 k. 5oo gr. Il ne varie guère pendant le premier mois, puis du 12 février au i^"" mars il tombe de 72 à 71 , puis à 70 vers le 16 mars et à 69 le 10 mars. Cette chute brusque semble surtout déterminée par la suppression du pain (80 gr.) au petit déjeuner du matin, qui se compose alors seulement d'une tasse de cacao à l'eau (cacao 10 gr., sucre i5 gr.). En 1903, nous verrons une modification analogue à présenter à la même époque sous l'influence de la même suppression temporaire. Nous sommes alors sensiblement au poids théorique (G8.8). Jus- (i) Le dosage de l'azole des excréta indique une consommation d'aibuminoïdes oscil- lant entre 60 à 70 gr., soit , sensiblement , i gr. par kilo et par 24 heures. p. FAUVEL. — UNE EXPERIENCE D ALIMENTATION -g y f qu'au commencement de juin le poids reste constant à 68 k. En juin la moyenne est de 67,7, puis en juillet, au moment des chaleurs, et sous l'influence de préoccupations, la courbe s'abaisse à 66 k. A ce moment, le poids primitivement supérieur de 3;oo gi\ au poids théorique lui est devenu inférieur de 2800 gr. La diminution totale est donc de G5oo gr. Mais en octobre le poids remonte à 70, chiffre qui se maintient jusqu'au ao décembre. Dans les dix derniers jours de ce mois la courbe remonte brusquement à 71 k. et le 4 janvier igoS le maximum est atteint avec 71.2 ; chiffre inférieur de i3oo gr. à celui de l'année précédente trop fort ainsi que nous l'avons déjà dit. Nous trouvons ensuite le 12 février : 71 k. ; le 25 : 70 k. ; le 25 mars : 69 k. ; soit exactement le même poids que l'année précé- dente à la même époque. Nous avons eu également une perte rapide de 2 k., qui semble due à la même cause ; mais cette année la courbe, après avoir atteint 68.5 le 3i mars, remonte à 70 le 27 avril, et ce chiffre se maintient jusqu'au 9 juin, puis redescend le 18 juin à 69, et ce chiffre se maintient constant jusqu'au 8 août, malgré la chaleur. C'est presqu'exactement le poids théorique. En 1908, la coui'be a été beaucoup plus uniforme : poids d'hiver aux environs de 71 k. ; chute brusque du printemps due à une cause spéciale, moyenne de 70 k., puis moyenne estivale de 69 k. La courbe oscille de 2 kilos environ. La quantité d'urée excrétée est naturellement faible , elle oscille entre 16 à 20 gr. par 24 heures. En admettant la moyenne de o.5 par kilo, pour un poids de 70 k. on devrait avoir 35 gr. par 24 heures. Mais déjà Bunge indiquait 67.2 chez un sujet nourri à la viande et 20 gr. seulement avec nourriture au pain , ce qui correspond bien à nos données. Le sujet ne présente plus jamais de dépôts d'uratcs, même après un exercice musculaire prolongé et intense. L'exercice choisi est la bicyclette. Le sujet fait ordinairement, et souvent plusieurs fois par semaine, entre 5 heures et 10 h. 1/2 du matin, une promenade de 80 à 110 kilomètres, à une allure moyenne de 20 kilomètres à l'heure, avec un seul arrêt d'une demi-heure au milieu de la promenade. Pour rendre les trajets aussi comparables que possible , il part avec le vent debout et revient vent arrière. Un tel exercice, sans avoir rien d'athlétique, représente néan- moins un travail musculaire assez important (i). Dans ces conditions , (i) Environ Soo.ooo kilogrammètres. •jqS zoologie, anatomie et physiologie il ne provoque ni essoufflement, ni courlDature, ni raideur muscu laire, ni fatigue sensible et permet au sujet de se livrer, comme d'ordinaire, au travail intellectuel, pendant l'après-midi et la soirée, sans se ressentir de sa course du matin. L'exercice étant fini d'assez bonne heure, il est possible d'effectuer la pesée quotidienne à l'heure habituelle (ii heures du matin), dans les mêmes conditions, et de constater ainsi les variations de poids dues à l'exercice. Dans ces conditions, pour un trajet de 9G kilomètres (moyenne de 12 sorties), nous trouvons une perte moyenne de 1670 gr. Le lende- main, le poids remonte de i5oo gr. et le surlendemain il est remonté de 1700 gr., soit 100 gr. de plus qu'avant la course. GeUe-ci semble donc donner un coup de fouet à l'assimilation, puis le poids redevient normal. Si deux courses se suivent deux jours de suite, les pertes de poids ne se cumulent pas et le lendemain de la dernière le poids initial est de nouveau atteint. La diminution de poids est surtout due à la transpiration, car elle varie beaucoup avec la température. Pour une série de sorties de 94 kilomètres, effectuées par temps frais, la chute de poids moyenne est de 1200 gr., tandis qu'une série de courses de 100 kilomètres par temps très chaud donne 2140 gr. de perte. Aussi, le lendemain, le surlendemain au plus tard, la perte est regagnée, et au delà, par l'ingestion un peu plus considérable de boisson, car le régime alimentaire ne varie pas. Si nous étudions les variations de l'urée par litre , nous avons : La veille i5 gr. °/oo Après la course 17 gr. °/oo Le lendemain 19 gr. °/oo Le surlendemain 14 gr. %« INIais l'augmentation n'est qu'apparente et vient de ce qu'après une forte transpiration l'urine est plus concentrée et, ainsi que nous nous en sommes assuré, la quantité totale d'urée par 24 lieures n'augmente X)as, les légères vai-iations trouvées parfois étant de l'ordre des variations quotidiennes. Il n'y a pas de surproduction sensiljle d'urée, ni durâtes, du fait du travail musculaire ; donc celui-ci n'est pas exagéré par rapport au régime alimentaire, qui est suffisant, malgré sa faillie teneur en azote. G. LANDRIEU. — LA QUESTION DE LA ROGUE "jgg En résumé, dans le cas considéré, le régime végétarien, loin d'affaiblir, comme on le croit à tort, augmente la souplesse et la vigueur, permet un travail musculaire intense, sans fatigue, sans courbature, sans dépôt d'urates, en maintenant le corps en parfait état de santé à son poids théorique. Les chiffres donnés ordinairement comme ration d'aUjuminoïdes sont beaucoup trop forts et peuvent être réduits d'un tiers, sinon de moitié. Si cette ration d'albuminoïdes était trop faible en 19 mois, notre sujet aurait depuis longtemps épuisé ses réserves et nous ne verrions pas son poids se maintenir , malgré un exercice musculaire intense , combiné avec le travail intellectuel, sa santé restant parfaite. Quand au printemps il se remet à faire 5o ou 60 kilomètres à bicy- clette dans l'après-midi, sans entraînement préalable , il n'éprouve plus ni raideur musculaire, ni courbature, ni production d'urates, contrairement à ce qui lui arrivait jadis, en pareil cas, avec le régime carné. M. Gustave LANDRIEU Commissaire de i" classe de la Marine, hors cadre LA QUESTION DE LA ROGUE — Séance du 10 août — Il ne semble pas, au premier abord, que cette question, en dépit de son actualité brûlante, soit au nombre de celles qui doivent retenir l'attention d'un Congrès réuni pour l'avancement des Sciences. Aussi avons-nous beaucoup hésité avant de nous décider à vous en entretenir. Mais, à la réflexion, il nous a paru que la pêche, longtemps considérée par un petit nomlDre comme un sport de vacances et par le plus grand comme un métier basé sur la rou- tine, tendait de plus en plus à devenir une science pour l'enseio-ne- ment de laquelle une heureuse initiative x^rivée a déjà commencé à créer des écoles. Historique. — Depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, et sauf de rares exceptions, la sardine a toujours été pochée au moyeu d'appât. 800 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE Les Romains eux-mêmes, s'il faut en croire Appien, se servaient d'im lilct flans lequel ils jetaient une pâte composée d'ers et de vin parfumé de myrrhe. D'après Léonides, ils se servaient aussi de feuilles de bettes dont Vodeiir plaisait beaucoup aux poissons. Jusqu'au xvii<= siècle, on employait en France la Gneldre, ou chevrette pilée et salée souvent mélangée à du frai de poisson. Ainsi que son nom l'indique, cet appât est originaire des Flandres. Bientôt parut la rogne de Norwège, qui fit à la gueldre une concurrence redoutable. C'est en i658 que le roi Frédéric III accorda à M. Preben d'Ahn le privilèg'e d'établir dans le Nordland, une compagnie pour pré- parer et recueillir la rogue. Quelques aimées après fut édictée l'ordomiance de Colbert de 1681. En son article 12, livre V, titre i", elle défend d'employer pour la pêche de la sardme de la résure ou rogue de mauvaise qualité. L'usage de la rogue se généralisant en France, une déclaration du roi, en date du 23 avril 1726, renouvelée le 24 déceml)re 172G, interdit la gueldre dans un but de protection du frai. Le contre-coup de cet acte était de liA'rer le marché aux Norwégiens. Dès 1773, un mémoire présenté aux États de Bretagne, insiste sur la nécessité de mettre un terme à l'élévation progressive et exagérée du prix des rognes. Il demande qu'on oblige les Danois à venir vendre eux- mêmes dans nos ports, qu'on leur lixe un prix maximum, qu'on achète sans intermédiaire au moyen d'un fonds provincial, et qu'on les empêche de rembarquer leur marchandise invendue (i). Il n'est pas Ijesoin d'insister pour faire comprendre l'impossibilité d'appliquer de sembla! )les mesures. Règleme/its en vigueur. — Les décrets du 5 juillet i853, qui réglemen- taient par arrondissement maritime la pêche en général, s'occupent acci- dentellement de la sardine. L'article i32 défend l'emploi de la gueldre et du frai de poisson; l'article 142 permet l'emidoi de la rogue « pourvu qu'elle soit de bonne qualité. Celle qui ne remplit pas cette condition est considérée comme appât prohibé et la destruction en est poursuivie ». Le prix toujours croissant de la rogue porta bientôt les pêcheurs et leurs armateurs à rechercher le moyen de capturer davantage de sardmes en employant moins d'appât. Pour atteindre ce but, il suffisait de perfec- tionner la forme du très simple filet en usage sous le nom de filet ordi- naire. Avec l'autorisation et l'appui du Département de la Marine, plusieurs engins furent expérimentés dans le Finistère. D'abord favo- rables, les rapports donnèrent bientôt des conclusions très prohibitives, poiir la raison que ces engins soi-disant flottants se transformaient, sous l'influence du jtoids du })oisson capturé ou des petits fonds, en filets traînants qui dévastaient les fonds sur lesquels ils passaient. Pour cette raison, le 10 octobre 1878, le Ministre de la Marine régle- menta par décret les divers engins en usage. Un premier article déclare permis en tout temps le filet ordinaire, sous résem-e qu'il ne dépassera pas 9 mètres de profondeur verticale sur 3o mètres de longueur. Les quatre suivants autorisent l'usage, du i5 octobre à la fin de la i)èche de la (i) L. DE Seilhac. La pcchc de la sai-dinc, Paris igo'i. G. LANDRIEU. — LA QUESTION DE LA ROGUE 8oi saitliiie, (le : la grande seine Belot, la petite seiiie Belot, le filet tournant et le filet Erraud, dont ils réglementent l'emploi. Enfin, le dernier inter- dit absolument l'usage des seines et filets autres. Ces prescriptions parm'ent bientôt insuffisantes et, le 4 avril 1882, sur la réclamation des pêcheurs, un décret déclara que : la grande et la petite seine Belot, ainsi que le filet Erraud, doivent être installés en filets flottants et quils sont défendus, à partir de minmt, du 3i décembre de chaque année à la reprise de la pèche. Toujours à la demande des pêcheurs, ces deux décrets, qui visaient la baie de Douarnenez, furent rendus applicables à celle d'Audierne, le 20 octobre 1882. Nous arrivons enfin au décret du 21 janvier 1888, qui concerne unique- ment la pêche de la sardine et tient tout entier dans deux articles : « Art. i^^ — Sur le littoral des quatre premiers arrondissements mari- times, en deçà de trois milles à partir de la laisse de basse mer et dans toute la baie de Douarnenez, la pèche de la sardine ne peut être prati- (piée qu'à l'aide de filets flottants à nappes exclusivement verticales connus sous le nom de rets ou filets à sardines, sardinières, etc.. » « Art. 2. — Ces engms ne sont assujettis à aucune dimension de maille. L'usage en est permis en tout temps ». Comment on pèche la sardine. - Pendant la pêche, le bateau (ou canot) est maintenu debout au vent ou au courant par deux hommes- de nao-e appelés teneurs, tpii pèsent sur les avirons, condition indisi^ensable sans laquelle le filet viendrait flotter horizontalement à la surface. Ce filet dont nous avons indi(£ué i)lus haut les dimensions, est d'nne ténuité remarquable; pour le rendre plus invisible encore, on le trempe dans mi bain de sulfate de fer qui lui donne une couleur sembla])le à celle des flots. Il est garni à son extrémité supérieure de petites rondelles de liège ([ui en assurent la flottabilité et se termhie par une ligne que tient de la main gauche le patron placé à l'arrière du bateau. Comme la sardine navigue et vit généralement entre deux eaux , à des profondeurs variables, il s'agit tout d'aljord de l'attirer vers la sm-face, dans les environs du filet, puis de la faire mailler, c'est-à-dire se prendre par les ouïes dans ime des mailles. Dans ce but le pêcheur lance, de sa main droite restée libre, des poignées d'appât de côté et d'autre du filet. Dès que les premières sardines signalent leur apparition par l'éclat argenté de leurs écailles, il redouble d'efTorls et de générosité. Le jet de l'appât ayant pour objet, non seulement de solliciter la vora- cité du poisson, mais aussi de troubler l'eau de telle façon que, ne dis- tinguant plus les mailles du filet, il se précipite en aveugle à sa perte, on conçoit dès lors que le meilleur appât sera celui qiu, tout en troublant l'eau suffisamment, ne coulera ni trop vite ni trop doucement. Il sem]>le que nous nous soyons un peu écarté de notre sujet. Il n'en est rien, car il résulte de ce qui précède que nos pêcheurs, pourvus de barques non pontées qui ne peuvent guère s'exposer en haute mer, munis de filets légers que la moindre brise ou le moindre courant empêche de se tend.re verticalement, sont presque olîligés de se can- tonner en dedans de 3 miUes et d'appâter le poisson de la façon la plus 5i* 8o2 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE sérieuse. Or, comme la gueldre demeure défendue, il ue leur reste que la rogue ou une conlrelaçon de ce produit. LA ROGUE Dune façon générale , on entend par rog-iie l'ensemble des œufs de n'importe quel poisson femelle , par opposition avec la laitance fécondante du mâle. Ces œufs sont contenus dans deux poches lon- situdinales formées chacune d'une membrane très légère. Dans la pratique et parmi les pécheurs de sardines , on désigne surtout, sous le nom de rogue, des œufs de morue saumurés. Bien que les Vendéens préfèrent de façon presque exclusive la rogue de maquereaux , plus fine , plus limitée comme production et par suite plus chèi-e (I franc le kilog), on peut allîrmer que la rogue de morue est généralement employée. Rogne de Norwèg-e. — Ainsi que nous l'avons vu, les Norwégiens furent les premiers à préparer cet appât, qui devait devenir pour eux une source de richesse ; ils y sont demeurés des maîtres incon- testés. Sur les lieux de pêche même, les morues sont délestées de leurs œufs, en ayant soin de n'en i)as crever l'enveloppe. Ces œufs, convenablement saumurés , sont mis en barils et expédiés le plus généralement à Bergen. Là, ils subissent une opération appelée repa- quage, qui consiste à les dépoter, à les laver à l'eau salée s'il y a lieu, puis à les remettre dans les barils plus propres avec du sel neuf. Très délicat, ce produit ainsi préparé n'est guère susceptible d'une bonne conservation au delà de deux ans. Il est soumis à deux causes de détérioration : d'abord il s'évente par les trous de respira- tion percés dans les barils, ce qui lui fait perdre de sa force, ensuite il s'échaulYe, ce qui le fait aigrir et le rend impropre à la pêche. Autrefois, du temps où les transports n'avaient lieu que par voi- liers, les pêcheurs ne pouvaient employer que de la rogue de l'année précédente. En effet, rendus à Bergen en juillet seulement, les barils n'étaient réexpédiés qu'en sej)tembre et parvenaient en France en octobre, quand la campagne de pêche était presque terminée. Aujourd'hui, au contraire, la rogue de l'année arrive à Bergen dès la fin de mars et se trouve transportée sur nos côtes bretonnes en mai ou juin. Bien ([ue l'usage s'en soit généralisé rapidement, un certain noml)re de vieux pêcheurs routiniers préfèrent la rogue ancienne au parfum de laquelle ils sont habitués, malgré les risques plus grands de la voir se détériorer avant d'avoir pu servir lors des fortes chaleurs. G. LAXDRIEU, — LA QUESTION DE LA ROGUE 8o3 L'opération du repaquage sert encore à trier les rognes et à les classer en trois catégories différentes, d'après la qualité, vendues Actuellement aux prix suivants par les Norwégiens : !■•« qualité, 90 fr, le baril de i3o kil. ; 2' qualité, 80 fr. ; 3^ qualité 70 fr. rendue en Bretagne. Rogne française. — Les o?ufs de morue sont également recueillis l)ar nos pêcheurs de Terre-Neuve et d'Islande et traités d'après le IH'océdé des Norwégiens. Mais, soit que le tour de main manque, soit que la méthode diffère, soit pour toute autre cause, le produit obtenu ne ]3eut pas soutenir la concurrence , en dépit de la prime d'importation de 20 fr. par 100 kil. accordée par l'État français. Bien qu'il soit de belle ax^parence, on lui reproche d'être trop léger et de ne pas couler assez vite. Il faut, en outre, tenir compte que le nombre des morues capturées par nos pêcheurs n'est pas assez important pour fournir une grosse quantité de rogne , que la plupart sont prises pendant la seconde pèche, à une époque où le poisson a déjà frayé, et qu'enfin nos morutiers ne rentrant qu'à la fin de l'été, leurs rognes ne sont pas utilisables avant l'année suivante, Rog-iie américaine. — Dès i853, quelques barils de rogne furent importés des États-Unis ; mais on leur reprocha une mauvaise pré- XDaration et des soins insuffisants. Plusieurs tentatives furent ainsi faites sans succès à des époques différentes. Actuellement les Amé- ricains semblent s'y être remis et ils font depuis deux ou trois ans de plus grands efforts, particulièrement à Glocester. Ils ont obtenu une rogne comparable à la Bergen de troisième qualité ; quant à la quantité, on estime que les États-Unis et le Canada réunis pourraient l^roduire, par an, de 4o à 5o.ooo barils. Reste la question de prix. Conditions économiques. — Autrefois, et jusqu'à ces dernières années, il n'y avait que deux facteurs en présence : d'un côté, l'offre de la Norwège; de l'autre, la demande de la Bretagne. La produc- tion étant normale, la question demeurait simple. Mais un facteur nouveau est venu s'introduire sur le marché, dans la personne de l'Espagne et du Portugal. Sans renoncer à l'emploi de leurs énormes filets qui nécessitent des bateaux plus grands , réunis par groupes et un personnel plus nombreux, les Espagnols et les Portugais — qui n'avaient jamais appâté — se sont mis . eux aussi , à solliciter la sardine au moyen de rogue de morue. De ce chef, la Norwège peut escompter une vente 8o4 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE annuelle de 7 à 10.000 barils. Or, précisément à la même époque, sa production s'est mise à baisser. Alors que la moyenne annuelle des vingt années , comprises entre 1880 et 1900 était de 4i-ooo barils, celle des quatre dernières années tombe à 28.000 barils environ, sur lesquels, en 1902, nous en avons acheté 20.000 revendus aux pêcheurs ii5, io.5 et 90 francs, suivant qualité. Par suite du manque de pêche d'une part, de la cherté de la rogue d'autre part, la demande de la Bretagne s'élève, pour cette année, à 6.000 barils seulement. Nous avons vu que la rogue américaine était comparable à la Bergen troisième qualité et qu'un écart de prix de 10 francs seule- ment la séparait de celle-ci. Cet écart peut-il être fortement abaissé comme il serait nécessaire? Nous en doutons. D'une part, l'élévation du fret du x^^ys de production en France est plus grande pour les Américains que pour les Norwégiens; de l'autre, les droits de douanes sont de o fr. 60 par cent kilogr. pour la rogue de Bergen et de o fr. 80 pour celle d'Amérique. En outre, il convient d'ajouter à cette dernière somme une surtaxe d'entrepôt de 3 fr. 80 par cent kilogr.. pour transit par un port anglais dans la plupart des cas, tandis que l'importation de Norvs^ège est directe. Dans ces conditions, il ne faut pas s'étonner que certains esprits, chercheurs se soient ingéniés à découvrir un autre appât. SIMILI-ROGUES Trouver un produit bon marché, obtenu à l'aide d'une matière première abondante, de fabrication facile, de bonne conservation, et qui se rapproche autant que possil^le de la rogue comme goût, odeur et apparence : tel est le problème. Procédé Caillo. — En 1818. un négociant du Croisic, qiù faisait la presse de la sardine, M. Caillo, posait comme principe certain « que la chair de tous les poissons autre que ceux dits à lard , convenable- ment préparée, devait donner un excellent appât pour la sar- dine (i). » La lettre suivante, que lui adressait le i5 décembre 1818 M. le comte Mole, Ministre de la Marine, nous indique sa fîiçon de pro- céder. (l) Caillo jciino. — ncchcrclirs sur la pcrhc de ht sardine en Brelaii^ne. jVuiites, i855. G. LAXDRIEU. — LA QUESTION DE LA ROGUE 8o5 « M. des Essarts, ordomiatem- de la marine à Lorient, m'a rendu compte des essais que , sur sa demande , vous avez faits au mois de sei)tembre dernier, d'un ap^iât qui pourrait être avantageusement sul^sti- tué à la rogue, pour la pèche de la sardine. « Je vois que c'est ce poisson qui fournit lui-même cet appât au moyen d'une préparation qui consiste, après l'avoir fait cuire, à la désosser et à la piler pour en faire une pâte et, quelque peu considéraljles qu'aient été les produits des deux essais auxquels il a été possDjle de vous livrer, attendu l'avancement de la saison, ils sont de natiu'e à vous engager à y donner suite, puisque les pécheurs avec la rogue n'ont pas obtenu de meilleurs résultats. « La lettre que vous avez écrite à M. des Essarts, qui me l'a commu- niquée, m'a démontré toute l'importance du bienfait de cette découverte potu" les pécheurs des côtes de Bretagne, si elle prouve les avantages qu'elle promet; je ne puis trop vous inviter à persister dans l'intention que vous annoncez de renouveler vos expériences l'amiée prochaine. « Je vous serai obligé, si vous voulez bien m'envoyer mie note indica- tive des procédés que vous avez employés poiu' la préparation et de ceux que vous croirez les plus convenables pour la consei-vation de cette nou- velle espèce de rogue et soyez Jjien sur que je ne jterdrai pas de vue que c'est vous, Monsieur, qui avez le premier, j)ar votre obligeance à vous prêter aux vues de M. l'Ordonnateur de la Marine, contril)ué à faire trouver à nos pêcheurs, dans leur pêche même, un moyen de l'exercer avec plus de bénélîce. Recevez, etc.. Dans sa brochure si documentée, M. Caillo jeune ajoute : « Il est certain que , chez les poissons , les organes du goût sont très peu développés; les sidjstances qui servent à leur nourriture, délayées dans l'eau, introduites dans la bouche, au milieu dmi bain continuel, doivent avoir peu de différence de saveur; mais, en revanche, l'odorat est extrêmement subtil et les preuves ne mancpenl pas pour le démon- trer: il est donc important que l'appât au moyen duquel on veut les séduire et les attirer ait les émanations qu'ils seml>lent préférer ; or, nous savons quelle est l'odeur forte des rogues et nous ne devons pas douter qu'elle n'entre poiu* beaucoup dans l'action de cette sul)stance sur le poisson. » Il y a là une indication qui relève de la science des biologistes. Quoi qu'il en soit , la baisse du prix de la rogue fit négliger la suite de cette x^i'emière expérience, où la vérité avait été frôlée de bien près, et qui ne tarda pas à tomber dans l'oubli Divers essais. — En i854, des pêcheurs se servaient avec un certain succès de sable trempé clans un mélange de rogue. Quelques années auparavant, un pharmacien du Lion-d'Angers avait tenté de broyer des tourteaux de graines de lin et de colza, 8o6 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE mais il se heurta à une résistance opiniâtre de la part des pêcheurs et les résultats de son expérience furent nuls. Successivement on vit essayer des pâtes dans lesquelles entraient des sauterelles ou des hannetons broyés. Mais, en général, toutes les substances dont on se servit pour obtenr un produit dit incliis- tt'iel, péchaient par deux points au moins : odeur désagréable, nom- breux principes de fermentation qui se développaient rapidement. Aussi ne voulons-nous retenir que les très rares qui le méritent réellement. Rogne hétérogène Ispa et mélange farineux Morvan. — MM. Mor- van et Delasalle avaient inventé vers 18^5 une rogue artificielle, dite de Douarnenez, qu'ils modifièrent l'année suivante en y faisant entrer des farines saumurées mélangées à une petite quantité de rogue de Bergen. Ce nouveau produit, baptisé du nom de mélange farineux Morvan, ne donna pas les brillants résultats qu'on en attendait; il se vendait 25 à 3o francs le baril de 120 à i3o kil. A la même époque, M. Ispa, fabricant de conserves à Douarnenez, fabriqua , sous le nom de rogue hétérogène , un appât composé de tourtaux de graines oléagineuses délayées dans de la saumure ou de l'eau de mer et mélangées à un quart de rogue deNorwcge. Le prix des 100 kil. était de 20 francs ; la faveur des pêcheurs en étendit rapidement la vente. Pour l'année i8;-6, il fut consommé 5ooo barils de rogue artificielle contre i5ooo de rogue de morue, soit un quart, dans lequel la rogue Ispa figure pour 3ooo barils et le mélange Morvan pour 1200. En constatant ce brillant résultat , le rapport au INIinistre de la Marine sur la statistique des pêches en 18^6 (i), le fait suivre de ces réflexions : « D'après ces chiffres , la rogue Ispa posséderait aux yeux des pêcheurs une supériorité marquée sur les autres rog-ues artilîcielles, quoique les expériences comparatives du cutter Moustique et les résultats o]>tenus par la maison Pellier, d'Audierne, tendent à montrer que cette supério- rité est toute de convention. « De ces comijaraisons se dégage un fait acquis, c'est que l'apparition de ces nouveaux api^àts sur les marchés a eu pour conséquence heureuse de peser sur les cours des rogues de morue qui nous viennent presque exclusivement de Norwège. L'abaissement du prix des rogues a rendu possible l'armement d'un certam nombre de bateaux qui seraient restés mactifs s'ils n'avaient pu se procurer l'appât qu'aux anciens prix. » (i) Revue maritime et eoloniale, iSjj. G. LAXDRIEU. — LA QUESTION DE LA ROGUE 807 Pourquoi la rogue Ispa fut-elle abandonnée comme les autres ? Nous le verrons bientôt car elle, du moins, ne [)érit pas tout entière, mais par la simplification qu'on en fit dans un l)ut d'économie. Moi'phirogue. — Sous ce nom est connu un appât, de provenance Rouennaise, dont l'odeur et le goût décèlent la présence du hareng, mais dans la composition duquel entrent des matières autres que le poisson. On le vendait naguère 35 francs le baril, mais les pécheurs n'en veulent plus. Procédé Bouvais. — En 1901 , M. Henri Bouvais, fabricant de conserves, reprenant — peut-être sans le savoir — l'idée de Caillo jeune, fabriqua dans son usine de l'Ile d'Yen, une rogue composée de débris de thon cuits, broyés et saumurés. Depuis cette époque il n'a cessé de distribuer gratuitement cet appât aux pêcheurs qui approvisionnent son usine. Nos essais. — En 190a. frappé de la nécessité où se trouvait le pêcheur de ne pas prodiguer la rogue en vue d'une capture que le manque de poisson rendait très aléatoire, nous avons voulu essayer de lui venir en aide. Connaissant de longue date son esprit de rou- tine, sa méfiance invétérée et son insouciance proverbiale, nous voulions mettre à sa portée le moyen de fabriquer lui-même, dans les meilleures conditions, un appât d'un prix absolument infime. Aussi nous sommes-nous attaché à travailler sous ses yeux à lui donner le produit ainsi obtenu et à obtenir pour nos expériences la publicité du Bulletin de la Marine marchande (i) dès que nous avons cru avoir obtenu un résultat satisfaisant. Il suffit de faire passer dans un hache-viande ordinaire, muni d'une vis sans fin, et semblable à celui dont se servent les charcutiers, les divers déchets de fabrication d'une usine de conserves de poissons. Cet appareil, qu'un enfant peut tourner à la main, se termine par une plaque démontable percée de trous de 4 à 5 millimètres de dia- mètre. A sa sortie, le produit est recueilli dans un baquet contenant un peu de saumure ayant servi à la fabrication et pétri jusqu'à ce qu'il forme une pâte aisément transportable. Cette \)kie se conserve très bien, son innocuité est absolue, son odeur saine et sa dissolution dans la mer instantanée. Elle coule avec la même rapidité que la rogue, laissant à la surface de l'eau ce graissin trouble nécessaire à la pêche. (i) Bévue maritime, novembre 1902. 8o8 Trois produits différents ont été obtenus ainsi, qui, tous trois, ont été expérimentés sous nos yeux avec succès : 1° Thon. — Opérant avec des déchets d'eniljoîtage de thon (poisson cuit), on obtient une pâte jaune, dont l'odeur se rapproche davan- tage de celle de la rogue. mais qui nabsorlje pas assez de sel et reste, par suite, trop légère dans l'eau. C'est la plus facile à tra- vailler. 2° Sardines et maquereaux. — Opérant avec les déchets d'ététage (poisson cru), on obtient une pâte brune, qui prend admirablement le sel, dont l'odeur se rapproche davantage de celle de la rogue. mais un peu trop lourde et trop grasse. D'un travail difficile, il faut y mélanger les recoupes d'emboîtage des mêmes poissons (poisson cuit) pour absorber l'excédent de liquide qui forme une bouillie dans l'appareil. 3° Mixte. — Ces deux résultats nous ont conduit naturellement à opérer dans l'appareil même un mélange du tout, qui donne le pro- duit le plus satisfaisant pour les raisons sus-énoncées. Il faut avoir soin de déboucher souvent l'appareil, en démontant la plaque, car les écailles et arêtes viennent, en s'agglomérant , faire obturateur et entraver la fabrication. Il est, du reste, évident que, dans le cas où on voudrait obtenir une grande production, il faudrait recourir à un appareil plus fort actionné au moyen de la vapeur, Nous pouvons aliirmer que chacun de ces trois produits fait lever la sardine et même la maintient à mailler dans le filet, le troisième surtout. Au pêcheur dépourvu de confiance, il reste toujours la res- source de jeter, de temps à autre, une poignée de vraie rogue ou d'en mélanger avec la pâte, ce qui n'en sera que meilleur pour le résultat de sa pêche. Il nous est donc aujourd'hui démontré qu'en utilisant tous les déchets de fabrication d'une usine de conserves de poisson (vieille saumure, débris d'ététage, déchets d'emboîtage, qui sont actuelle- ment jetés, donnés, ou vendus à vil prix pour faire de l'engrais) on peut obtenir un appât efficace et d'une innocuité parfaite. Il est préférable , quand on veut le conserver longtemps , de faire égoutter le plus possible les débris d'ététage et d'employer de la saumure ayant servi à la cuisson du thon, car le sang est un élément de fer- mentation très actif. Le procédé ci-dessus indiqué est actuellement employé par les G. LANDRIEU. — LA QUESTIOJV DE LA ROGUE 809 pêcheurs de rilc-d'Yeu et par un groupe de Sauzonnais (Belle-Ile). Il a été essayé avec succès par bon nombre de ceux de Concarneau . la Forêt et Douarnenez pendant notre séjom* dans ces localités. Farine d'arachide. — Nous avons dit que la rogue Ispa avait été abandonnée par suite de procédés siinplificatifs à l'excès. En effet, dans la composition de ce produit entrait une grande partie de toui'- teaux de graines oléagineuses broyés et un quart de rogue de Norwège. De diminutions en diminutions . en commençant par réduire , puis supprimer la quantité de vraie rogue, puis la saumure, on est ai>rivé au procédé économique trop généralement employé aujourd'hui et qui consiste à délayer dans un peu d'eau de mer de la farine d'ara- chide, qu'on jette ainsi en guise d'appât. Etant donné qu'un sac de 100 kilogr. de cette farine vaut i5 francs, on comprendra combien son emploi est tentant pour le marin. Ici se présente un nouvel élément de nature à intéresser les biolo- gistes. Des constatations auxquelles nous nous sommes livré sur divers points de la côte, il ressort qu'on trouve dans l'intestin de la sardine environ 90 0/0 de farine contre 10 0/0 de rogue. Or, cette farine, une fois ingurgitée par le poisson . fermente rapidement. Mal diluée et digérée, elle gonfle et produit une dilatation qui fait éclater le ventre de la sardine soit de suite, soit à la cuisson. En outre, par temps chaud ou pluvieux, les parties qui avoisinent le col prennent un goût amer des plus déplaisants. De ces inconvé- nients, cpi se révèlent après la vente, le pêcheur se soucie assez peu ; mais il en est un autre qui le touche de plus près et auquel il ferait bien de prendre garde. Par temps lourd et orageux, lorsque le calme plat oblige le Ijateau à rester plus longtemps en mer. ou bien encore lorsque les avirons viennent secouer les membrures sur lesquelles il repose, le poisson qui a absorbé de l'arachide s'abinie beaucoup plus vite que l'autre, par suite de la fermentation rapide de cette farine, d'où une forte diminution du prix de vente. Pour obvier en partie à ces inconvénients, certains industriels donnent aux pécheurs, soucieux de la qualité de leur poisson, les vieilles saumures ayant servi à la fabrication . alîn qu'ils puissent y délayer leur farine au moins 48 heures à l'avance. Trop rares, hélas! sont ceux c[ui veulent bien prendre cette petite peine. Pourtant, il suffît de maintenir en observation pendant quelque temps de la farine d'arachide délayée : i" dans de l'eau de mer; 2'' dans de la saumure, pour constater que la première se couvre rapidement de moisissm'e, 8lO ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE tandis que la seconde ne bouge pas. Encore resterait à démontrer — ce dont nous n'avons pu nous assurer — que le délayage préalable dans la saumure sulïit pour neutraliser les ferments de T arachide et la rendre inofïensive. Nous n'ajouterons aucune réilexion à ces considérations que nous nous sommes efforcé d'énoncer aussi brièvement que possible. Notre seul but, en vous les soumettant, est de tâcher de vulgariser une question dont l'importance capitale pour notre population maritime de l'Ouest et notre industrie nationale mérite de coaliser toutes les bonnes volontés en vue d'une solution prompte et décisive. M. Paul PELSENEER à Gand QUELQUES PROBLÈMES ZOOLOGIQUES DE L'ANTARCTIQUE — Séance du lo août — Parmi les problèmes de zoologie marine, relatifs à la région polaire australe, on peut signaler les points suivants : I" La limitation des faunes antarctique et subantarcti(:[ue ; a" La circumpolarité de ces faunes ; 3" La question — soulevée par la précédente — de relations géo- graphiques anciennes entre les diverses terres antarctiques ; 4" Les relations de la faune côtière antarctique avec la faune abyssale plus ou moins universelle ; 5° Les relations de la faune antarctique avec l'arctique (théorie de la « bipolarité »). * Ces diverses questions sont fort discutées et n'ont pas encore reçu de solution définitive ; et celles au sujet desquelles il reste le plus de doutes, paraissent être surtout la première et la troisième. I. — Les renseignements sur les faunes antarctiques étant encore assez fragmentaires, il est diflicile d'établir déjà, d'une façon précise, p. PELSENEER. PROBLEMES ZOOLOGIQUES DE L ANTARCTIQUE 8ll les limites dont il s'agit. Toutefois, la séparation des zones antarc- tique et subantarctique d'une part et des zones plus tropicales d'autre part, semble se trouver vers une latitude moyenne de 5o" S. — où la température superficielle minimum de l'Océan est d'environ + 4° G. et où de multiples changements notables s'observent dans les conditions géophysiques. Dans cette zone polaire australe serait « subantarctique » tout ce qui n'est pas continent antarctique probable ou îles immédiatement voisines. 2. — Malgré le peu d'étendue de nos connaissances fauniques. il est cependant déjà possible de reconnaître une certaine circumpola- rité dans la faune malacologique marine littorale de l'antarctique. L'expédition de la Southern Cross a donné , à ce point de vue , des résultats un peu plus nombreux que celle de la Belgica ; d'après les renseignements actuellement réunis, il y aurait une dizaine d'espèces communes au moins à un point de la région antarctique et à mi autre point, éloigné, de la région antarctique ou subantarctique. "C o "S > u u •u H X X X X X X X X X '•J o O X X 3 ^' 1 ô X 3 bc S c X X X X X c X X X X X X X 3 ^ c X X c ■7.^ < X Nacella amea Mart^ii Photimila expansa Sowerby . . . Pellilittorina setosa Smith .... — pellita von Martens. Cominella (Chlanidota) vestita von Martens . . . . XS XS.O Neobiicciniim Eatoni Smith. . . . Archidoris Kergiielensis Berg-h. . Yoldia Eig-htsii Coulhouy .... Cardita astavtoides von Martens. Anatina etlîptica King- Cette circumpolarité de la faune est encore accentuée si l'on con- sidère les formes génériques communes. 3. — L'étude des flores antarctiques (Hooker) et de la constitution minéralogique de certaines terres antarctiques (Kerguelen : A. F. 8l2 ZOOLOGIE, AXATOMIE ET PHYSIOLOGIE Renard) a depuis longtemps fait naître l'idée que les terres antarc- tiques étaient jadis plus étendues. Des essais de reconstitution car- tographique ont même été tentés (notamment par Forbes) ; mais il ne paraît pas probable que les trois pointes continentales S. aient été reliées récemment aux terres antarctiques proprement dites. Il est plus probable que Kerguelen et le Sud de l'Amérique aient été dans ce cas. L'examen des lignes isobathes montre que l'Afrique du Sud n'est pas attachée à l'Antarctique par des profondeurs moindres que 3ooo m. ; les profondeurs au sud des autres continents sont éga- leinent considérables , quoique moins importantes ; mais il y a appa- rence que les terres antarctiques ont subi un affaissement. 4- — La faune malacologique « côtière » de l'antarctique propre- ment dit ne renferme pas d'éléments côtiers subantarctiques (par exemple pas d'espèces côtières de l'Amérique méridionale : région magellanique). Les diverses espèces qui ne sont pas spéciales sont abyssables en d'autres points , même très éloignés (Nord Atlantique par exemple). La généralité des formes appartient à des genres abyssaux caractéristiques (récoltes de la Belgica). La faune abyssale . par suite de certaines analogies avec la faune cotière arctique, fut supposée autrefois avoir une origine polaire. Il est infiniment vraisemblable que c'est au contraire la faune abyssale — l^lus ou moins cosmopolite — qui a colonisé les deux districts cùtiers polaires, où régnent des conditions d'existence « abyssales». 5. — D'après la théoine de la bipolarité, il y aurait, dans les deux grandes régions polaires de la terre , de nombreuses formes — au moins génériques — identiques , à distribution géographique inter- rom])ue sous les tropiques. Les récoltes de la Belgica et de la Southern Cross n'ont pas montré d'espèces de Mollusques marins littoraux communs avec la faune polaire N. — L'étude des autres groupes a donné des résultats analogues ; seuls les Bryozoaires ont présenté j)lusieurs formes communes (qui seront peut-être reconnues cosmo- polites dans l'avenir). La « Ijipolarité » n'est nullement démontrée. D"" J.-P. BOUNHIOL. — RÉGIME RESPIRATOIRE DES POISSOXS MARINS 8l3 M. le D- Jean-Paul BOUNHIOL Docteur es Sciences Chef des Travaux Zoolog-iques à rÉcole préparatoire à rEnseig-nement supérieur des Sciences, à Alger RÉGIME RESPIRATOIRE DES POISSONS MARINS VIVANT EN CAPTIVITÉ [6II.2 : 5t);l — Séance du lo août — Quand on veut faire vivre des j)oissons marins en captivité , on se contente, en général, de les placer dans des bassins ou dans des bacs de capacité variable, où l'eau, renouvelée peu ou point, est aérée à l'aide de trompes imparfaites, dont l'effet, non mesuré, est quelconque et inconnu. C'est donc l'empirisme le plus complet qui a présidé jusqu'ici aux tentatives d'installation en captivité des poissons et de quantité d'autres animaux marins. De là des insuccès nombreux et fréquents, exception faite de quelques animaux d'une résistance et d'une plasti- cité spéciales. Je viens de faire , grâce à une subvention de l'Association fran- çaise pour l'Avancement des Sciences et aussi à de gros sacrifices personnels, toute une série d'expériences au Laboratoire de piscicul- ture annexé au Laboratoire maritime du Muséum à Saint- Vaast-la- Hougue. Je publierai prochainement le détail de ces expériences. Je me boi'iierai à indiquer aujourd'hui quelques-uns des résultats de ces recherches. J'ai étudié spécialement les phénomènes respira- toires présentés par les poissons captifs et voici les résultats géné- raux enregistrés après des mesures directes et des analyses nom- breuses : a) L'eau de mer des bassins, réservoirs, bacs où vivent des Turbots, des Barbues, Soles, Plies, des Brèmes, Colins, Congres, etc., etc., possède une oxygénation irrégulière mais toujours infé- rieure à l'oxygénation normale de l'eau de mer ordinaire. Et cela malgré vme certaine aération continue et un renouvellement de l'eau avec une vitesse d'écoulement variant de quatre litres environ par minute — grand bassin des Turbots — à un demi-litre par minute pour les autres bacs. h) L'activité respiratoire — mesurée par la consommation d'oxy- 8l4 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE gène ou l'excrétion carbonique par gramme-heure — des animaux vivant en captivité depuis des temps variables, est toujours inférieure à l'activité respiratoire normale mesurée comparativement sur des individus récemment capturés de même poids. Ces deux constatations expérimentales concordent parfaitement et se complètent l'une à l'autre. Elles montrent qu'il s'est établi entre la consommation respiratoire et le remplacement de l'oxygène dans l'eau où vivent ces animaux un régime permanent tel qu'une consommation respiratoire faible est seule possible. Les animaux sont forcés de restreindre leur absorption d'oxygène sous peine de voir l'eau s'appauvrir rapidement et ils sont voués ou bien à une asphyxie partielle permanente, ou bien à l'asphyxie totale rapide. Dans ces conditions, on conçoit qu'un gi-and nombre d'animaux, très sensibles à l'asphyxie, ne puissent pas s'adapter, restreindre leur activité respiratoire et qu'ils meurent au bout d'un temps plus ou moins long. On conçoit aussi que ceux mêmes dont la plasticité respiratoire est assez grande pour que l'existence leur soit pos- sible avec une respiration affaiblie , aient leur vitalité plus ou moins atteinte, soient la proie facile de maladies parasitaires ou suppura- tives et ne puissent pas se reproduh-e. Pour que leur respiration redevienne normale , il faut que le rem- placement de l'oxygène de l'eau aux dépens de l'air atmosphérique puisse se faire plus rapidement, aussi rapidement que sa disiiarition du fait de la respiration. L'un des moyens pratiques pouvant être emi)lovés dans ce but consiste , soit dans une introduction suffisante d'air très divisé dans la masse liquide, soit dans un brassage consi- dérable de l'eau, de manière à augmenter, à multiplier les surfaces de contact entre l'air et l'eau. LTn moyen simple de vérifier si ces procédés sont suffisants consiste à extraire et à analyser de temps en temps les gaz de l'eau du l^assin. Le but sera atteint si l'oxygéna- tion reste constante et identique, toutes choses égales d'ailleurs, à loxvsénation de l'eau de mer ordinaire. Les phénomènes respiratoires — malgré leur importance capitale ne rex^résentent que l'un des éléments du problème de la capti- vité. Ce problème est compliqué et difficile, certes, mais il ne me paraît pas insoluble. En introduisant un animal dans un volume limité d'eau de mer, on substitue au milieu naturel indéfini et partout identique à lui- même un milieu arliliciel confiné dont la composition va être rapidement modifiée par les échanges biologiques. Il faut donc : i'^ assurer à l'animal l'accomplissement régulier de ses fonctions D'' J.-P. BOUNHIOL. — LA RESPIRATION AQUATIQUE MARINE 8l5 végétatives (respiration, alimentation, excrétions diverses) ; i" main- tenir constante la composition de ce milieu. En ce qui concerne l'animal particulier qu'il s'agit de faire vivre, il faut avoir déjà des données précises sur la qualité et la quantité de sa nourriture habituelle , il faut connaître son activité respira- toii'e aux divers moments de son existence, c'est-à-dire posséder, construite une fois pour toutes , sa courbe respiratoire ; connaître la qualité et la quantité de ses excrétions (urinaires, cutanées, respira- tions, résidus digestifs, toxines, etc.), et, quand ces divers éléments seront connus pour un animal déterminé, on pourra, dans une masse d'eau de mer connue , grâce à une aération et à un renouvellement deau exactement calculés , à un brassage de la masse , grâce peut- être à l'association biologique de plantes ou d'animaux capables de consommer, de transformer, de détruire les excrétions et les toxines de l'animal étudié, maintenir la composition chimique de cette masse d'eau, très sensiblement constante. Les conditions physiques (tem- pérature, pression, lumière) sont faciles à reproduire artilîciellement en général. Tous les éléments du problème étant préalablement étudiés, mesu- rés et calculés , il deviendra possible — mais alors seulement — de tenter, avec quelques chances de succès, l'élevage et la reproduction en captivité des animaux marins. M. le D-^ Jean-Paul BOUNHIOL Docteur es Sciences Chef des Travaux Zoolog-iques à PÉcoIe préparatoire à rEnseig-nement supérieur des Sciences, à Alger DES CONDITIONS PHYSIQUES DE LA RESPIRATION AQUATIQUE MARINE [«11.2I — Séance du 10 août — L'eau de mer peut être considérée, pour une latitude et une ih*o- fondeur déterminées, comme un milieu chimique de composition sensiblement constante. Des animaux et des plantes vivent dans ce milieu et leur respiration tend à le modifier incessamment : 1° Par une consommation graduelle de l'oxygène dissous ; 8l6 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE 2° Par un a})port permanent d'anhyJride carbonique qui trans- forme en bicarbonates une proportion toujours phis grande des carbonates neutres déjà existants. Pour qu'un certain équilibre puisse se produire, il est nécessaire qu'un régime permanent s'établisse entre la consommation et la redissolution de l'oxygène d'une part, entre la production et la disso- ciation des bicarbonates d'autre part. Je vais examiner dans quelles conditions ce double régime per- manent peut s'établir dans l'eau de mer superficielle. Je considérerai comme constituant l'eau de surface toute la couche liquide oscillant sous l'influence des marées et brassée par les vagues, c'est-à-dire une couche de quinze mètres d'épaisseur environ. J'examinerai sépa- rément le cas de l'oxygène et celui de l'anhydride carbonique. I. OxYGÈXE. — L'oxygène existe dans l'eau de mer à l'état de simple dissolution physique. La quantité de ce gaz qui s'y trouve à un moment donné est donc simplement régie par les lois connues de la dissolution et de la diff'usion. Je négligerai volontairement, dans ces brèves considérations, la quantité d'oxygène fournie à l'eau de mer par les plantes vertes qui vivent sur les côtes dans la zone superficielle suflisamment éclairée (zostères, algues, etc.). Cet apport d'oxygène est faible. Il ne saurait d'ailleurs exister que dans la zone superficielle littorale et dispa- raît au large. Dans l'établissement du régime permanent qui aboutit à maintenir constante en dissolution une certaine quantité d'oxygène,, je n'envisagerai que deux facteurs principaux : sa consommation par les organismes vivants de tout ordre et sa redissolution aux dépens de l'air atmosphérique. Si dans le même temps la quantité consommée dépasse la quantité redissoute, le milieu s'appauvrit ; si l'inverse se produit, le milieu s'enrichit ; si ces deux quantités sont égales, l'équilibre n'est pas troublé et l'oxygénation de l'eau reste cons- tante. Dans la nature les deux premiers cas se réalisent rarement et dune manière toujours transitoire. Le troisième cas, au contraire, est le cas normal. La couche superficielle de la mer est en contact immédiat avec l'atmosphère et l'oxygène de celle-ci s'y dissout avec une vitesse qui varie avec la température, avec l'étendue de la surface de contact, avec la pression propre du gaz dans lair et dans l'eau. Si on suppose invarialjle la température , la surface de contact . la pression propre de l'oxygène de lair, on voit que sa vitesse de dissolution sera D'^ J.-P. BOUNHIOL. — LA RESPIRATION AQUATIQUE MARIXE 817 réglée par l'abaissement de sa pression propre dans l'eau, c'est-à-dire par la consommation respiratoire. Supposons maintenant constantes la température, la pression aérienne du gaz et la consommation respiratoire et faisons varier la surface de contact. La vitesse de dissolution variera comme cette surface et, pour une consommation déterminée, la seule surface libre de l'eau en équilibre se trouA era suffisante ou insuffisante pour assurer le remplacement de l'oxygène disparu, les autres facteurs ne changeant pas. Le premier cas se présente dans la nature , dans les bassins , les lacs, les étangs, les eaux stagnantes et même les cours d'eau de faible pente et de faible vitesse, c'est-à-dire, d'une manière assez générale, pom' le milieu aquatique d'eau douce. Ici, la surface libre suffit à alimenter la respiration des organismes qui y vivent. Le second cas est réalisé par le milieu aquatique marin, où la couche superficielle n'est jamais au repos. Les marées brassent cette eau, le vent et la vague la pulvérisent, y introduisent une véritable émulsion d'air et d'eau , multiplient et renouvellent à l'infini les sur- faces de contact et permettent le renouvellement rapide, presque instantané, de la moindre quantité d'oxygène perdue par le liquide. J'explique par ce fait pourquoi on trouve chez les animaux d'eau douce une activité respiratoire inférieure à celle des animaux marins les i)lus voisins. Il ne s'agit pas là d'une différence dans l'oxvaréna- tion de l'eau à un moment donné ; l'eau douce et l'eau de mer con- tiennent en effet sensiblement la même quantité d'oxygène; il s'agit du renouvellement de l'oxygène respiratoire disparu ; ce renouvelle- ment n'est possible que lentement dans le x^i'emier cas; il est, au contraire, possible rapidement dans le second. J'ex^îliquerai encore ainsi pourquoi les œufs flottants, les larves, certains poissons comme la sardine, le maquereau et tous les animaux pélagiques, ne peuvent pas être conservés vivants en captivité, c'est-à-dire dans une eau à renouvellement oxygéné lent. La consom- mation dépasse rapidement le remplacement, le taux de l'oxygéna- Ition baisse et les animaux, très sensibles à cette asphyxie partielle, leurent. IL Anhydride carbonique. — L'anhydride carbonique n'existe [pas dans l'eau de mer à l'état de simple dissolation. Il y existe [entièrement à l'état comjjiné sous forme de carbonates et de bicar- [bonates. La pompe à mercm-e à froid n'extrait point de gaz cai'bo- [iiique de l'eau de mer. Pour obtenir par le vide celui qui y existe à 52* 8l8 ZOOLOGIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE Tétat de bicarbonates, il faut chauiTer de manière à dissocier ceux-ci. La proportion de bicarbonates est variable, mais il est à remarquer que, dans l'eau de mer, il n'existe jamais assez de CO^ pour trans- former tous les carbonates neutres en bicarbonates. La fixation de l'acide carbonique sur les carbonates se produit suivant la réaction simple : ^^^\OH ^ ^'^XOM — ^ L \OH_ Acide carbonique Carh. neutre Bicarbonate M étant un élément monovalent et les équilibres relatifs à ces com- posés sont régis par les lois de la dissociation des carbonates et de la diffusion. Comme précédemment, je ne considérerai dans l'établissement du régime permanent relatif à l'anhydride carbonique, que sa produc- tion respiratoire par les organismes et la dissociation des bicarbo- nates, suivie de la diffusion dans l'atmosphère du CO^ en provenant. Je négligerai la consommation d'anhydride carbonique faite par les plantes vertes et par quelques animaux à certaines saisons pour la couche superficielle , et la production de CO^ par les fermentations diverses et les volcans sous-marins, dans les grandes profondeurs. La dissociation des bicarbonates dépend de la température, la dif- fusion du CO^ produit dépend de la tension propre de ce gaz dans l'air situé au-dessus de l'eau et de l'étendue de la surface diffusante de contact. Si donc, pour une température donnée, la tension de dissociation des bicarbonates est supérieure à la tension propre de l'anhydride carbonique dans l'air, une dissociation permanente se produira et elle sera d'autant plus rapide que la surface de contact sera plus grande. La production respiratoire de CO^ reforme inces- samment les bicarbonates dissociés et, si un obstacle s'oppose à la diffusion suflisamment rapide de l'anhydride carbonique de dissocia- tion (insuffisance de la surface de contact avec l'air), on comprend que le CO^ respiratoire s'unira avec les carbonates neutres et que la proportion des bicarbonates ira graduellement croissant, les carbo- nates neutres étant progressiA^ement transformés. Il pourra arriver même que, tous les carbonates ayant été transformés en bicarbonates l'anhydride carbonique respiratoire s'accumule dans l'eau à l'état de simple dissolution. Ce cas ne se présente presque jamais dans la nature. Il y a toujours dans l'eau de mer, sous toutes les latitudes et aux faibles profon- deurs , une proportion de carbonates neutres non transformés en D' J.-P. BOVXHIOL. — LA RESPIRATION AQUATIQUE MARINE 819 bicarbonates, capables, par conséquent, d'absorber chimiquement le CO" respiratoire pendant un temps plus ou moins long-. Il est remarquable, d'ailleurs, de constater expérimentalement que la présence de l'acide carbonique dans l'eau ne commence à devenir une gêne pour la plupart des animaux marins que lorsque les carbo- nates sont saturés et que le gaz commence à être retenu à l'état de dissolution simple. Les bicarbonates sont indifférents, l'anhydride carbonique libre peut devenir nuisible ou toxique. Comme tout à l'heure , pour la dissolution de l'oxygène , on voit que le départ de l'anhydride carbonique sera d'autant plus rapide que la surface diffusante sera plus considérable. Mais la présence dune certaine quantité de carbonates neutres toujours disponibles, pouvant absorber chimiquement le CO- respiratoire et le transfor- mer en composés indifférents, rendra les animaux insensLJDles à une rétention momentanée, souvent fort longue, de l'acide carbonique dans leau, tandis qu'ils seront très sensibles à un appauvrissement, même de peu de durée, de cette même eau en oxygène. Et j'expliquerai ainsi pourquoi les animaux marins sont, en général, beaucoup plus sensibles au manque d'oxygène qu'à l'accumulation de CO- dans le milieu respiratoire, à tel point c[u'on a pu dire, pour un certain nombre d'entre eux, que le facteur asphyxique unique, capable de déterminer la mort, était le manque d'oxygène. Tout ce qui précède s'applique à l'eau de mer de surface. Il est clair que, les couches profondes n'étant jamais mises au contact de l'atmosphère, les échanges gazeux entre celle-ci et celles-là, ne pour- ront jamais s'effectuer directement. Ces échanges se produisent de proche en proche par diffusion, diffusion descendante pour l'oxygène, diffusion ascendante pour l'anhydride carbonique ; mais le méca- nisme essentiel de ces échanges gazeux sera le même que dans le cas précédent. L'expérience montre que les animaux aquatiques peuvent possé- der, les uns, une activité respiratoire variable, les autres, une acti- vité respiratoire constante. Celle des premiers est capable de variations assez étendues et facultatives dans un temps relativement court. Ces animaux peuvent vivre et respirer indifféremment dans tous les milieux aquatiques, eau douce et eau salée, eau agitée et eau stagnante (quelques Crabes, un grantl nombre d'Annélides, des poissons tels que l'Anguille, le Saumon, etc., etc.). 820 ANTHROPOLOGIE Dans le cas des animaux à activité respiratoire constante , celle-ci peut être faible ou considérable et exiger, entre l'eau et l'air, des échanges gazeux lents ou rapides. Le premier cas sera celui des ani- maux d'eau douce, le second celui des animaux marins. Et si, pour les premiers, la sul^stitution du régime actif au régime lent peut ne pas avoir d'inconvénients, il n'en est pas de même pour les seconds. La substitution d'un régime ralenti à un régime intense amènera fatalement une asphyxie partielle, et c'est précisément le cas où l'on s'est placé jusqu'ici toutes les fois qu'on a voulu faire vivre des animaux marins en captivité. La captivité, inoffensive en général pour les animaux d'eau douce, sera presque toujoui's rapidement fâcheuse pour les animaux marins de surface. Est-ce à dire qu'il sera toujours impossible ou très difficile de faire vivre ces animaux en liquide confiné ? Je crois, au contraire, que, lorsque le problème de la captivité sera suffisamment étudié au triple point de vue respiratoire, alimentaire et excrétionnel, on pourra parfaitement réaliser artificiellement et d'une façon permanente, les divers milieux aquatiques naturels et y faire vivre, se développer et se reproduire tels animaux que l'on voudi^a. Il suffira pour cela de remplacer l'empirisme par l'expéri- mentation méthodique, de mesurer et de calculer, aussi exactement que possible, les divers éléments du problème. M. H. MULLER Bibliothécaire de TEcole de Médecine et de Pliarmacie de Grenoble DÉCOUVERTE ET FOUILLE D'UNE STATION NÉOLITHIQUE DANS LES GORGES D'ENGINS (ISÈRE) 15:i.2j — Séance du 5 août — De Sassenagv à Lans, la route pittoresque qui côtoie la i-ive droite du Fiiron contourne les pentes cultivées ou boisées qui la dominent. A partir du i^""" kilomètre (de Grenoble), à Eng-ins, la vallée, très | encaissée, serpente, ainsi que le torrent, entre de beaux escarpements calcaires, où parfois la route dispute sa place au Furon. H. MULLER. — DÉCOUVERTE ET FOUILLE d'uXE STATION NÉOLITHIQUE 8^1 Du i8'">^ au ao'"^ kilomètre, de nombreuses grottes et abris sous roche se montrent à diverses hauteurs, çà et là, dans les assises rocheuses. Quelques cents mètres avant le village de VOlette, deux corniches parallèles contournent les rochers des deux rives ; celle de gauche est la plus importante. Toutes deux sont dues à l'érosion, à l'effrite- ment d'une assise calcaire plus tendre que ses voisines et sur laquelle les charrois glaciaires et les intempéries ont eu plus d'action. Mon collaborateur, M. Flusin et moi, nous avons opéré des son- dages partout où ces corniches présentent des retraits accentués pouvant servir d'abris. Un seul point, situé à environ 200 mètres du moulin David, nous a donné quelques résultats. Cet abri, le plus important, domine le torrent d'environ i5 mètres; il mesure à peu près 20 mètres de long sur 3'",5o en son x^oint le plus large. Au bord de l'abri, la roche sur- plombe à 2™,5o et au fond elle n'est que de quelques décimètres au dessus du sol. Le rocher affleurait, vers le sud. tandis que vers le nord de l'abri, il était recouvert d'une épaisseur de terre de plus de o"%5o. Tout naturellement, la partie la plus commode et la mieux abritée de la station nous a donné le plus grand nombre d'objets; un certain nomlDre de silex ont été trouvés sur la roche même, épars au milieu de faibles traces de foyer. La couche stérile sous le gazon avait de 5 à i5 centimètres d'épaisseur. Voici le détail des silex exhumés : Une grande lame grossière, en silex gris, de I25 ■"/„ de long. ; i5 lames de 5o à 75 "/„ , iiTéguIières, en silex blanc, rouge, gris et noir ; 3o lames de 3o à 45 «"/^ de même facture ; i3o lames très petites ou fragments, de diverses couleurs, également de facture grossière ; 3 petits nuclei ; 26 gros éclats ou lames frustes dont 12 portent des traces manifestes d'usage ; 75 gros éclats de taille, environ 100 très petits et enfin une pomte lan- céolée, à talon façonné en grattou- convexe, de 60 ""/m de long; 7 grat- toirs (?) convexes; 2 grattoirs concaves et quelques os d'animaux. Deux des grattoirs convexes sont très réguliers ; le plus petit est remarquable par son exiguïté (17 X 20 m/m) et la régularité de ses courbes. Certaines lames montrent des crans accentués, témoins d'un emploi sérieux. 822 ANTHROPOLOGIE D'autres présentent à peine quelques minuscules éclats, provenant sans doute bien plus de leur contact avec des grains de sable et les graviers du sol. que dun usage réel. On peut, du reste, trancher les cuirs et les chairs maintes fois avec le même silex, sans l'ébré- cher; l'absence d'éclats sur une lame n'est pas une preuve de non emploi. Pour les silex qui nous occupent, le tiers environ des lames et des grands éclats présentent des traces manifestes d'usage. Les éclats de taille, relativement nombreux, indiquent que le silex employé était surtout local; on le rencontre, en effet, en abondance dans le pays, mais en général impropre à la taille. Les torrents ont fourni leur contingent de rognons siliceux, bien reconnaissables à la croûte craquelée, particulière aux silex roulés, que nous avons remarquée sur un certain nombre d'éclats de taille. Nous n'avons rencontré, au cours des fouilles, que deux percu- teurs bien nets, l'un calcaire, l'autre siliceux. Les débris d'animaux étaient surtout représentés par des os longs et des mâchoires de marmottes, dont nous avons recueilli 3i incisives inférieures, 27 supérieures (quelques-unes de forte taille). 12 frag- ments de mâchoires et 8 molaires. La marmotte a disparu depuis longtemps de la région, on retrouve fréquemment ses ossements avec ceux de l'ursus spelaeus dans les mêmes grottes. Les autres os , tous en miettes , de bovidés , de capridés et d'ovi- dés (?), étaient en très petit nombre ; le poids total des os recueillis s'élève à peine à 45o grammes. Nous n'avons pas trouvé de fragments de défenses de sangliers, ni de bois de cervidés. La terre contenant les silex (environ 8 m. c.) a été soigneusement tamisée. Deux boutons ornés, en cuivre (style Louis XVI), assemblés en jumelles par un anneau, sont les seuls objets intéressants rencon- trés dans les couches supérieures. CONCLUSIONS Il y a plusieurs indications à tirer de l'examen de cette petite station. C'est la première découverte de ce genre faite dans cette vallée , sur laquelle on possède peu de documents archéologiques au delà du moyen âge. Quoique cette immense faille, encaissée entre de hautes mon- tagnes, ait servi et serve encore de drain naturel aux eaux du CH. GUILLOX ET TOURMER. — GROTTE DE LA TESSOXMÈRE 823 massif qui l'entoure, on peut espérer rencontrer des habitats préhis- toriques dans les abris accessibles à quiconque venait des plateaux voisins plutôt que des bas fonds. A environ 4o kilomètres de là, plus au sud, toujours dans le Verco?\s', une deuxième station a été signalée près du tunnel de Bobaches. M. Flusin et moi nous l'avons déjà étudiée et comptons pouvoir la relier à celle de l'Olette; de plus, en tenant compte que les grands bois, surtout ceux de conifères, ce qui est le cas pour la région , sont d'un parcours facile ; on est en droit de compter sur de nouvelles découvertes échelonnées entre les deux. La caractéristique de la station de l'Olette est tout entière dans la pauvreté du mobilier; en effet, pas de haches, pas une seule X)ointe de flèche , aucun poinçon en os et pas de poterie , sauf trois fragments minuscules dont deux sont post-romains et le troisième probablement contemporain de cette période. Notre conviction est qu'il y a bien eu là une station néolithique , mais du début de cette période , avec une population peu développée à tous les points de vue , ayant suivi de près le retrait glaciaii*e. Il faut croire que les chasseurs de marmottes se rendaient sous l'abri fouillé pour y préparer leurs repas : le voisinage du torrent, jamais à sec, était précieux, comme aussi le facile accès de la sta- tion, soit par le haut, soit par le bas. Nous croyons, M. Flusin et moi, n'avoir trouvé là c[u'un abri tem- poraire, indice d'un habitat plus important que nous allons chercher, soit dans les grottes, soit sur les sommets des coteaux voisins. Cette fouille, qui a demandé quatre jours de travail avec trois hommes, a été menée à bonne fin, grâce à l'appui de l'Association. M. Charles &UILLON et M. l'abbé TOURNIER GROTTE DE LA TESSONIÈRE, A RAMASSE, CANTON DE CEYZÈRIAT (AIN) [575,81(44.4)1 — Séance du 5 août — La grotte de la Tessonnière est située sur le premier plateau du Jura qui s'allonge du nord au sud entre la rivière d'Ain et la plaine de la Bresse et qu'on appelle le Revermont. 824 AXTHROPOLOGIE C'est un pays de grottes et de cours d'eau souterrains. La rivière du Suran qui donne son nom à cette vallée haute se [lerd sur une grande i>artie de son cours moyen dans les fissures du Neocomien et du Jurassique supérieur et son lit de gravier et de cailloux impar- faitement roulés est souvent à sec pendant la saison chaude. Cette contrée a fourni depuis près de vingt ans des données impor- tantes à la géologie quaternaire et à l'archéologie préhistorique. Dans les iirêches des carrières de Ramasse et de Yillereverssure, on a trouvé des restes nombreux et intéressants de la faune glaciaire ; les abris sous roche ainsi que les rives du Suran ont été fréquentés par les chasseurs de rennes. La station de Châteauvieux est typique en ce genre et certaines grottes ont servi d'ossuaires aux popula- tions néolithiques. Il n'est pas rare de trouver à la surface des champs cultivés, tan- tôt une hachette polie, tantôt un silex éclaté al)andonné ou perdu à cette époque lointaine qu'on appelle l'âge de la pierre. La vallée du Suran fut occupée de bonne heure par l'homme qua- ternaire : le glacier du Rhône ne l'envahit jamais complètement, sa moraine frontale resta confinée dans la vallée de l'Ain et pendant ce temps le premier plateau vit se développer une riche faune qua- ternaire. Ainsi s'explique également la présence de silex moustériens, qui furent décrits et signalés par l'un de nous devant les membres de l'Association française au Congrès d'Angers. Ces notions préliminaires étaient nécessaires pour faire comprendre l'intérêt qui s'attache aux recherches que nous avons entreprises poin* établir d'une façon précise le séjour et l'habitat de l'homme primitif dans ce pays. La grotte de la Tessonière prohiet de fournir une page nouvelle et jusqu'à présent inédite à cette histoire. C'est pourquoi, après avoir exposé le but de nos recherches, couronnées de succès, sur d'autres points du département de l'Ain, notamment à la Grotte des Hoteaux et de la Ronne-Femme, puis encore sous les abris de Sous-Sac. nous n'hésitons pas à soumettre à la bienveillante attention de la section d'anthropologie les résultats obtenus dans la vallée du Suran après quelques journées de fouilles et les espérances qu'elles nous ont fait concevoir. La Grotte de la Tessonière est située géographiquemcnt sur la commune de Ramasse, canton de Ceyzéiùat. arrondissement de Rourg. Elle est appelée ainsi, sans doute, parce qu'elle servait de CH. GUILLON ET TOURMER. GROTTE DE LA TESSOXMERE 825 refuge aux Blaireaux, en patois « Tessons », particularité qu'elle partage avec la plupart des excavations de ce pays. Elle s'ouvre à 33o mètres d'altitude sur le flanc du Montion, petit promontoire du Jurassique supérieur qui sépare la Combe de Ramasse de la vallée proprement dite du Suran. Elle est orientée au nord, avec une petite ouverture cintrée, plus large que haute, qui donne accès dans une excavation de 4 n^- 90 àe largeur et dont la profondeur et la longueur totale n'ont pu être déterminées encore à cause des matériaux qui l'encombrent. Elle est remplie d'un terreau argileux noirâtre et jaunâtre entre- mêlé de fragments de stalactites , de blocs tombés de la voûte et de pierres apportées du dehors par les traqueurs de renards et de blai- reaux. Le tout repose sur un cailloutis jaunâtre quaternaire avec magmas formés, surtout contre les parois, par les infiltrations aqueuses et empâtant des débris osseux relativement rares. C'est à la partie supérieure de ce dernier niveau c|ue nous avons trouvé les silex figurés dans la photographie ci-jointe. I Cûiiai? 3un-anf CD LEGENDE Magma forme par la stalagmite, sorte de roche très dure à laquelle se trouvent comme cimentés des morceaux de pierres et quelques ossements. Terre noire mélangée de blocs calcaires de différentes grosseurs. ^^^M, Terre jaune mélangée de gravier calcaire. 826 ANTHROPOLOGIE Les fouilles sommaires que nous avons exécutées au commence- ment de juillet à l'entrée de l'excavation ne nous permettent pas de nous prononcer sur l'importance de cette station. Tout fait prévoir qu'imc exploration complète, soit en profondein", soit en longueur, donnerait des résultats importants , soit au point de vue de la faune quaternaire, soit au point de vue de l'homme préhistoi'ique ; mais, pour le moment, nous devons nous borner à exposer dune façon claire et précise les observations relevées et les trouvailles faites dans cette exploration préliminaire. Voici d'abord la coupe des terres de remplissage telle qu'elle résulte de la première tranchée poussée jusqu'à 2™3;o de profondeur, sur toute la largeur de la grotte : 1° Terrain argileux noirâtre entremêlé de l)locs calcaires tombés de la voûte ou ai^portés du dehors avec petits ossements de la l'aime actuelle et fragments de poterie noire mtérieurement etrougeâtre extérieurement. De plus un petit silex du gem^e lame à dos retouché , à la profondeur de 0^90 Épaisseur totale. . . i"'4o- 2° Terre argileuse jaunâtre mélangée de graviers calcaires avec magmas stalagmiteux empâtant des ossements quaternaires fragmentés et indé- terminables. Cette couche a fourni notamment une dizaine de silex avec quelques autres éclats de momdre importance. . . Epaisseur o'"8o. 3° Cailloutis jaunâtre formé uniquement des détritus de la voûte et des parois, d'épaisseur mconnue. Il a été exploité jusqu'à la profondeur de. . , o'"5o. D'après ces indications, on peut présumer que la Grotte de la Tessonière a servi de repaire aux carnassiers de l'époque quater- naire ; les fragments d'os trouvés dans le magma indiquent une piste qui i^eut conduire à un amas important probablement dans les par- ties reculées de la caverne. Ensuite elle a été visitée et habitée momentanément par l'homme de cette époque. Il serait intéressant de retrouver d'autres vestiges pour fixer l'âge des silex et déterminer s'ils appartiennent à l'âge de la Madeleine ou à l'âge du Moustier. Une telle exploration, étant donné le remplissage de la caverne, entraînera des frais considérables et nous serions heureux de voir les savants de l'Association française encourager nos travaux et s in- téresser à ces fouilles qui peuvent contribuer dune façon importante • à la reconnaissance du quaternaire et du préhistorique dans le dépar- tement de l'Ain. p. SÉBILLOT. — LES TRADITIONS POPULAIRES EX ANJOU 827 ABRIS DES BORDS DU SURAX Les abris et les grottes de Meyriat, autre localité du canton de Ceyzériat. sur les bords du Suran, ne nous ont livré que des vestiges relativement modernes et ne nous ont pas donné les résultats que nous attendions. Nous ne mentionnerons cjue pour mémoire des fragments de poterie grossière associés à des ossements de sangliers et de boucs dont la date moderne n'a pu être fixée. Dans ce pays, la rivière est à sec pendant tout l'été et certainement le manque d'eau fut le principal obstacle à l'établissement des hommes pi'éhisto- riques. M. Paul SEBILLOT à Paris LES TRADITIONS POPULAIRES EN ANJOU [398.3(44.i8)J ^ — Séance du 6 août — Il y a quelques années, l'éminent historien, Arthur de la Borderie, cpii s'était toujours vivement intéressé au mouvement traditionniste dans rOuest, me témoignait la surprise qu'il éprouvait en constatant que l'Anjou n'y prenait cju'une part très restreinte et il me demanda si vraiment ce beau pays , dont le rôle historique a été considéralile et qui présente , en même temps que des monuments remarquables , des accidents de terrain variés, devait être considéré comme dépourvu de contes, de chansons et de légendes. Je lui répondis c{ue je n'en croyais rien et que j'étais persuadé qu'un explorateur zélé et persé- vérant pourrait y faire de précieuses découvertes; et j'ajoutai que l'on avait recueilli dans cette région , à dilTérentes époques , des faits légendaires en assez grand nombre pour permettre d'affirmer qu'on y trouverait encore bien des choses intéressantes. Comme il pensait, avec grande raison, c[ue rien n'est plus suggestif que les exemples, il me pria de songer à écrire, pour la petite Bibliothèque bretonne, à laquelle je venais de donner trois volumes de légendes de la Haute- Bretagne, un ouvrage conçu sur le même plan que la Littérature orale de l' Auvergne, composée quelques années auparavant. Dans 8l28 ANTHUOPOLOGIE ce livre, formé surtout de morceaux déjà imprimés, mais dispersés dans cinquante puljlications, je montrais que le folk-lore de cette contrée montagneuse était très curieux, bien qu'on n'eût guère fait que l'effleurer, et que, là comme bien ailleurs, c'étaient les ouvriers qui avaient manqué à la moisson. Je me mis à l'œuvre et je pus, à l'aide d'une bibliograpliic angevine que j'avais préparée pour une Bibliographie générale de la Finance légendaire, arriver à réunir les éléments d'un volume; il n'était pas très gros à la vérité, mais démontrait l'existence en Anjou d'un folk-lore intéressant, et il constituait en somme un recueil de textes qui aurait pu servir de questionnaire en exemples et rendre plus facile la tâche de ceux qui auraient voulu entreprendre une enquête dans ce pays. La mort de M. de la Borderie, des occupations plus urgentes, m'empêchèrent de mettre la dernière main à ce petit livre. C'est à l'aide des documents, que j'avais réunis et classés pour le former, que je vais résumer ce qui a été fait; je tenterai ensuite, d'indiquer, d'après ce qui existe déjà et d'après la nature du pays, les divers points sur lesquels peut se poi'ter, avec quelque chance de succès, l'attention des chercheurs. LITTERATURE ORALE Sous le nom de Littérature orale que j'avais donné, en 1881, à un livre sur la Haute-Bretagne et qui, depuis, est devenu d'un usage courant, même à l'étranger, on comprend ce qui, pour le peuple qui ne lit jjas, renq^lace les productions littéraires de civilisés. Elle se compose en première ligne des contes, auxquels on peut ajouter les légendes, qu'il n'est pas toujours aisé d'en séparer. Les chansons et les mélodies populaires, les^ proverbes et les dictons satiriques du Blason, les formulettes et les conjurations, les devinettes forment encore d'autres grandes divisions. A l'exception des deux dernières catégories, toutes sont représen- tées en Anjou par un certain nombre de documents écrits, empruntés à la tradition orale. Dès le xvi^ siècle, on rencontre des contes populaires de source angevine. Un des personnages du Moyen de parvenir fait, en le localisant en Anjou, où il l'avait vraisemblablement recueilli, un récit qui appartient à un type assez répandu, que l'on peut désigner sous P, SEBILLOT. — LES TRADITIONS POPULAIRES EN ANJOU 829 le titre de : La besogne entreprise le matin qui, pour le bien ou pour le mal, se continue pendant toute la journée. La version de Béroalde de Verville tient environ quatre pages (123-126) dans l'édition de ses œuvres publiée dans la Bibliothèque Charpentier. En voici le résumé : Un saint personnage, se trouvant un soir à Baracé, près de Dure- tal. en Anjou, alla demander l'hospitalité pour la nuit à une femme riche , mais avaricieuse . qui la lui refusa en prétextant que son mari était chiche et grondeur. Il fut mieux reçu par une chambrière et, le lendemain , en la quittant, il lui dit , pour la remercier : « Je prie le bon Dieu qu'il lui plaise de vous bénir, si que la première besogne que vous ferez aujourd'hui lui soit tant agréable, que ne puissiez, de tout le jour, faire autre chose. » La bonne femme se fit apporter le linge de la lessive qu'elle avait étendue la veille et se mit à le plier, et plus elle pliait, j^lus il y en avait à plier, et il y en avait des monceaux de toutes sortes qui se multipliaient au touchement de ses mains. La femme avare, ayant eu connaissance de ce prodige, courut après le saint homme et le supplia de venir le soir prendre logis chez elle. Le lendemain, son hôte la remercia en faisant pour elle le même vœu que pour celle qui l'avait bien accueilli la veille. Dès que le saint homme eut les talons tournés, la femme avide ordonna à sa servante de lui apporter tout son linge pour le plier et, pour n'être pas dérangée , elle voulut prendre des précautions hygiéniques ; elle s'accroupit pour cela dans un coin de sa cour, mais, comme c'était la première action qu'elle faisait dans la journée, il lui fut impossible de l'interrompre et, jusqu'au soleil couchant elle arrosa le sol si copieusement qu'elle fit ce ruisseau qui passe au pied des Loo-es. Le même Béroalde de Verville. pp. 327-329. rapporte un autre conte qui appartient au genre comique et dont plusieurs versions ont été recueillies de nos jours. L^n cordelier va demander l'aumône à un seigneur angevin, réputé pour les tours qu'il jouait aux gens d'église; celui-ci lui dit qu'il la lui fera, à condition qu'il confesse un de ses vieux serviteurs. Le moine est conduit dans un grenier où un chien se mourait de vieillesse ; et, comme il refuse de le confesser, le seigneur- le fait fouetter. Le compagnon du religieux, plus avisé, demande un petit iDàton, qu'on lui donne en lui faisant promettre de ne pas l^attre le chien. Le moine, ayant fait retirer tous les gens, fend le bâton à peu près par la moitié , prend l'oreille du chien dans cette fente et se met à lui adresser des questions : « Or çà, ami chien, voulez-vous pas mourir en chien de bien? » Et lui j)ressant l'oreille, le chien huchait assez haut : Oiian . Oaan. Sa confession 8'3o ANTHROPOLOGIE continue, avec la demande du cordelier et la réponse du chien. Son maître ne peut sempèclier de rire et donne au moine avisé de l'argent et sa charge de blé. Jai publié, dans les Contes des Provinces de France, pp. 1^1-173, un conte recueilli aux environs du Lion-d'Angers par M. Queruau- Lamerie. Il se passe au temps où les fées descendaient par la cheminée , joour soigner les petits enfants . lorsque leurs parents les laissaient seuls. Lune d'elles se rendait même dans une chaumière où se trouvait un enfant nouveau-né et, sans s'inquiéter de la pré- sence de sa mère, qui, encore trop faible pour aller aux chamois, filait dans l'âtre, elle le pouponnait et le promenait en chantant pour apaiser ses cris. Sa femme, jalouse de la fée, qui lui inspirait aussi une cer- taine crainte . raconta à son mari ce qui se passait chaque jour après son départ. Il lui dit daller le lendemain aux champs k sa place et, quand approcha l'heure à laquelle la fée avait coutume d'arriver, il s'assit dans la cheminée, près du rouet de sa femme et se mit à filer. Lorsque la fée vint, elle s'aperçut qu'un homme avait pris la place de la femme qu elle voyait chaque jour. « Comment tappelles-tu? » demanda-t-elle. — « Personne, » répondit-il. Quand la fée s'éleva pour quitter la maison, dans la vaste cheminée, le paysan, qui guettait cet instant, lui lança aux jambes des charbons ardents. La pauvre fée poussa des cris de douleur qui firent accourir ses sœurs. « Qu'as-tu? » lui dirent-elles. — « Je suis cruellement brûlée, » répondit-elle. — « Mais, qui t'a fait cela? » — « C'est Personne, » répondit-elle. Ses sœurs se moquèrent d'elle et elle ne revint plus jamais dans la maison d'où elle avait été chassée avec tant de cruauté. Un petit récit que l'auteur, reconnaissable sous le pseudonyme de Tis tenait d'un vieux charpentier angevin, met en scène le diable d'une manière plaisante : Un jour que le diable était descendu sur terre, cherchant fortune, il aperçut dans un chantier des charpen- tiers en train de creuser une mortaise dans une pièce de bois, à l'aide de cet outil aiguisé des deux bouts, appelé bisaguë et dont est muni le saint Joseph de l'église d'Angers qui porte ce nom. Il lia conversation avec eux et bientôt en vint à prétendre les égaler en adresse. Il saisit la lùsaguë et voulut continuer leur ouvrage; mais, dans son inexpérience, ayant placé son pied fourchu justement sous la moi'taise qu'il voulait dresser, du premier coup il lui fit une profonde entaille et. retirant l'instrument avec force, il s'enfonça p. SÉBILLOT. — LES TRADITIONS POPULAIRES EN ANJOU 83l SOUS le menton la partie taillée en biseau. Fou de douleur, il rejeta l'outil avec colère et s'enfuit en jurant que jamais un charpentier n'entrerait en enfer. Il a, depuis lors, tenu parole, dit-on, et c'est en A'ain qu'on chercherait dans son empire un ouvrier de ce corps d'état. Ils vont tous en Paradis, après avoir sans doute séjourné quelque peu en Purgatoire. {Revue angecine, 1898, p. 392.) C'est aussi à la série plaisante que se rattache le conte qui suit; il est inédit, et il m'a été raconté, il y a vingt-cinq ans, par une de mes cuisinières originaire de Pouancé ; c'est une sorte de fabliau. Il y avait une fois uu Ijouhomme que sa femme envoya chercher une cruche à la ville. Sur son chemin, il rencontra un coquetier qui lui dit : — Ah! mon pauvre J)onhomnie, le curé est en train de fi'icoter chez toi. — Ce n'est pas vrai. — Que veux-tu parier? — — — Si tu as raison, je te domierai la récolte de blé qui est dans mon grenier. — Monte dans ma hotte et tu verras. Le coquetier arrive à la maison , dont il trouve la porte fermée , et il y frappe. — Qui est là? — C'est moi, le cocfuetier. — Ah! c'est vous, coquetier; venez avec nous, vous allez être de la fête. Et elle le fit asseoir à côté du cm^é. Quand ils eurent bien mangé, on convmt que chacun aurait cUt une histoire. Ce fut la lionne femme qui commença : J'ai envoyé mon mari A la fontaine devers midi, Chercher de l'eau pour me guérï Monsieur l'curé me guérira : Alléluia. Le coquetier chanta à son tour : J'ai un vieux coq dans mon panier Il y a longtemps qu'il n'a chanté Quand il chantera on s'étomiera : Alléluia. Le bonliomme , qui était dans la hotte , chanta aussi : Fermez les portes , tournez les clés ; Le coquetier a gagné son blé C'est le curé qui le paiera : Alléluia. 832 ANTHROPOLOGIE Quand le curé entendit cette voix, qui sortait on ne sait d'où, il s'écria . Yade, vade rétro, Satana. Ces cinq contes sont les seuls qui , à ma connaissance , aient été recueillis en Anjou, et c'est à cause de cela qu'au lieu de les citer simplement je les ai rapportés avec quelque détail. Les récits légendaires sont plus nombreux, et plusieurs se rattachent à une sorte de légende dorée : une comtesse d'Anjou, pour prouver son innocence, saute par une fenêtre, tomlje dans la rivière sans se faire aucun mal et est transportée par le courant jusqu'à l'endroit où. par reconnaissance, elle bâtit et dota l'abbaye de Notre-Dame d'Angers. Une chapelle, dédiée à saint Tibère, fut élevée au lieu même où l'on découvrit ses reliques sous un rocher qu'une brebis léchait au lieu de brouter l'herbe comme les autres. La Reçue des Traditions populaires (t. XIII, p. 6^4) a publié une longue légende sur l'antique abbaye de Montglonne, écrite dans le style à la mode de l'époque romantique, mais vraiseml^lablement d'origine populaire : saint Mauronce . un de ses abbés , averti qu'un serpent monstrueux ravageait tout le pays, cache une faux ])ien aiguisée sous des feuillages ; le serpent vient s'y eml^rocher et meurt au bout de son sang. Ce même saint homme, étant allé méditer dans une grotte connue de lui seul, s'y endormit et son sommeil, comme celui d'Épi- ménide, dura cent ans. Quand il se réveilla, il se rendit à son abbaye et y rétablit la discipline que ses successeurs avaient, sans succès, essayé d'y faire régner. Un ermite d'Avort, importuné par le chant des grenouilles et des canards, les « conjure » et, depuis, ceux qui se trouvent dans le ruisseau voisin de sa chapelle sont muets. Saint Lézin, le grand saint Martin, saint iNIartin de Yertou, saint Augustin de Cantorbéry font jaillir des fontaines en des lieux qui en étaient auparavant dépourvus. A Saint-Clément-de-la-Place , où une pierre présente la forme grossière d'un pied, on raconte que cette empreinte est due à saint Jean qui, soupçonné par son hôte de s'en aller sans payer, s'écria : « Il est aussi vrai que j'ai j)ayé qu'il est vrai que mon pied sera gravé sur ce rocher. » Plusieurs des héros de la légende française figurent dans la tradi- tion angevine ; bien que l'héroine d'un récit accueilli par M. Michel ne porte pas le nom de Mélusine , il se rattache à cette fée-scrpente et encore plus aux reines Pédauques : un seigneur du jNIas avait épousé à l'étranger une femme d'une merveilleuse beauté, à la con- dition qu'il ne chercherait jamais à voir ses pieds qu'elle cachait p. SEBILLOÏ. — LES TRADITIONS POPULAIBES EN ANJOU 833 SOUS une robe très longue. Un soir, au mépris de ses serments, il sema de la cendre sur lestrade du lit pendant que sa femme faisait sa toilette de nuit; un charbon allumé s'était égaré parmi les cendres et la dame se brûla cruellement ; son mari vit sur la cendre l'em- preinte de pieds d'oie , et elle maudit le seigneur et son château qui s'abîma sous la terre avec ses habitants et dont l'emplacement fut recouvert par une nappe d'eau. (Léo Desaivre, Notes sur la Mélusine, Poitiers, 1899, p. 28-29.) Gargantua semble moins connu en Anjou qu'en Touraine ; cepen- dant à Cliazé une borne milliaire est appelée Bâton de Gargantua , dénomination vraisemljlablement moderne (Paul Sébillot, Gargantua, p. 1G8). Sur les bords de l'Evre on montrait jadis sur un roc escarpé l'empreinte des fers du cheval de Roland qui, d'un saut, lui fit fran- chir la rivière (G. de Launay, Rev. des Trad. pop., t. XIII. p. 112). Le rôle des fées ne semble pas considérable en Anjou, probable- ment parce que l'on ne s'est guère occupé d'elles; elles figurent, ainsi qu'on l'a vu, dans un conte qui leur attrilme un rôle ]>ienfai- sant ; trois creux sur le dessus de la Table des fées , à Miré . sont les empreintes de la fée qui l'a apportée pour couvrir le dolmen. (L. Bousrez, L'Anjou aux âges de la piei^re, p. 99.) On n'a guère relevé non plus les gestes des lutins; cependant, l'un d'eux, qui se nomme Penette, est très connu dans les cantons de Candé et du Louroux, où il s'amuse à pénétrer dans les écuries pour tresser la crinière et la queue des chevaux. (G. de Launay. Rev. des Trad. pop., t. VIII, p. 95.) La croyance aux lavandières de nuit, bien que rarement constatée, n'est pas inconnue en Anjou : on entend près du Moulin-Moine, voisin de la ville de Beaupréau, un bruit de battoirs; il est produit par celui d'une fermière condamnée, ainsi que ses congénères de Bretagne, à continuer sans relâche son travail pour avoir lavé jadis le dimanche. (Albert Lemarchand, Une excursion dans le pajrs de Maug-e, p. 12.) Il est certain que l'on a chanté en Anjou, où une Grande Rihle des Noëls, parue en 1G02, a été réimpi-îmée en 1808 et où l'abbé Eugène Grimault a donné plus récemment les Noëls angeçins avec accom- pagnements et notes. Les chansons populaires proprement dites n'ont pas eu jusqu'ici la bonne fortune de trouver un collectionneur ; j'en connais à peine une demi-douzaine : une clianson sur « Guillery » , dans Ménière , 53* 834 ANTHROPOLOGIE Dictionnaire étymolog-iqiie, p. 207; la « Nourrice d'Isa », Reç. des Trad. pop., t. I, p. 235 (extraite des manuscrits de la bibliothèque nationale); « Le Rosier », de Lionel Bonnenière. Revue des Trad. pop., t. II, p. 145 ; « La fille du laboureur », ibid., t. III, p. 642; « La fille éveillée », par M'"^ G. C, ihid.. t. IV, p. io3; « La moit de l'àne », par Ch. de Sivry, ihid., t. lY, p. 449. Je n'ai pas eu connaissance de devinettes recueillies en Anjou., mais il y en a certainement dans ce pays où les paysans ont l'esprit aussi vif pour le moins que leurs voisins du Maine , du Poitou et de la Bretagne. Les proverbes sont représentés par centaines : Les proverbes et dictons rimes de l'Anjou, par A. de Soland, i858, ne sont angevins que pour une partie qui n'est pas toujours aisée à déterminer; ceux qui figurent dans le Dictionnaire étj'mologiqne angevin du D"" Ma- nière sont plus certainement de provenance locale , de même que ceux qui parsèment le roman de Rose Epoudrj^, de Léon Séché, dont l'action se passe en Maine-et-Loire et en Loire-Inférieure. On sait que l'on désigne sous le nom de Rlason populaire les appellations satiriques ou comiques qui s'attachent comme une sorte de devise moqueuse aux villes, aux bourgs et même aux villages. On ne s'en est guère préoccupé en Anjou ; le Blason populaire de la France, publié en 1884 par Henri Gaidoz et par moi, ne contenait que quinze de ces blasons; en rendant compte de notre livre, le regretté André Joùbert en donna à peu près autant (Revue de l'An- jou, 1884. pp. 189-204 et 369-373); mais il est vraisemblable que l'on pourrait considérablement allonger cette liste. II ETHNOGRAPHIE TRADITIONNELLE L'ethnographie traditionnelle comprend les coutumes, les supers- titions, la médecine populaire, les ustensiles et joujoux traditionnels, les costumes, etc., en un mot, tout ce qui, appartenant au domaine populaire, ne rentre pas dans la littérature orale. Les matéx'iaux, en ce qui concerne l'Anjou, en sont très dispersés; voici l'énumération, à laquelle les savants locaux feront sans doute des additions, de ceux dont j'ai eu connaissance. En 1816, La Réveil- lère-Lepeaux. J.-B. Leclerc et Urbain Pilastre faisaient une « Excur- sion dans le département de Maine-et-Loire », qui a paru dans le t. II des Mémoires de l'Académie Celtique, p. ijGet suiv.; ils y relevaient p. SÉBILLOT. — LES TRADITIONS POPULAIRES EN ANJOU 835 plusieurs circonstances intéressantes et signalaient comme pays avant conservé les vieilles traditions la région de Mauge. Soixante ans plus tard, M. ADaert Lemarcliand publia dans le t. II, 3^ série de la Reçue de V Anjou le récit d'une Excursion dans cette contrée, où il recueillit quelques légendes. ^Le Glossaire étj'mologique angeçin du D'' Charles Menière con- tient un assez grand nombre de notes sur les coutumes, les jeux, la médecine superstitieuse, etc. M. X. de la Perraudière a réuni sous le titre de Traditions locales et superstitions, notes prises au pays d'Anjou et du Maine, de curieuses observations faites dans ces deux anciennes provinces et rapportées avec précision (in-8'' de i6 p., Ext. des Mémoires de la Société d'Agriculture, etc., d'Angers, 1896); une courte monographie : « Quelques superstitions au pays de Segré », Revue Angevine, i^'' mai 1898. contient aussi des faits intéressants. La Revue des Traditions populaires a publié plusieurs articles sur l'ethnographie angevine : Traditions et coutumes popu- laires de l'Anjou, par Gontard de Launay. t. YIII, p. 93, t. XIII, p. III. 291 ; Superstitions du canton de Gennes, par Lionel Bonne- mère, t. y, p. 673; Coutumes heaugeoises , par G. Fraysse : « Le Mariage ». t. XYIl, p. 498; « La Naissance ». ihid.. p. 611; « La ]Mort ». t. XVIII, p. 169; Rites et usages funéraires, par G. de Launay, t. lY, p. 009; les Chaidvaris aux mariages, par le même, t. III, p. 456. La Médecine superstitieuse a été l'objet de quelques articles : Les empiriques angevins, par Eugène Bonnemère, Revue illustrée de Bretagne et d'Anjou, t. III. n°^ 2 et 3. La médecine superstitieuse en Anjou, par G. de Launay, Revue des traditions populaires, t. YI, p. 422; une note de l'abbé Grandet sur les Fontaines de V Anjou et leurs vertus guérissantes, a paru dans le Bulletin historique de l'Anjou, 1808, pp. 263-265. Des notes sur les objets populaires ont été publiées (avec gravures) par Lionel Bonnemère, dans la Vie Moderne, 24 juin 1881 et la Revue des traditions populaires en a signalé quelques-unes, t. YII, p. 457 et suiv. dans le compte rendu de la section des traditions |)opulaires à l'Exposition des Arts de la femme. Les exemples que j'ai cités et les indications bibliographiques o. — Les dolmens (l'Afrii[ue. Coii^iTès iulevnntionnl de /Snixelles iH--2. C. /■., p, ^^^i^. — Bhoca. Les i)euples blonds et les monuments mégali- thiques dans l'Afrique se])t., Ucc. .\nllinip. i8;(>, p. içil Die ellimologiscli-ethnogra- phische Bedeutung der inegalitischen (îrabbenten. Mittheil. des Anlliroi). Gesellsch. Wien 1900, II. — Giuii'iUDA-RicoiKHi. Le origini italiche, Jiei'ista di scienzc hiologiche, vol. II, n» 11-12. — Sergi. The Mediterran. Race. Londoii 1901. D'' GIUFFRIDA-RUGGIERI. — UNE QUESTION DE PALETJVOLOGIE RUSSE 84l Aées chez les auteurs des Kourgancs. Il a été l'ancêtre de ceux-ci (i). Zaborowski le démontre par des données anthropologiques (a). Les brachycépliales sont donc de date récente dans la Russie méridionale, mais non en Europe, puisque, suivant encore le même Zaborowski, « dès le début de l'époque néolithique (Revue scienti- fique, citée plus haut. p. 891, et Galtchas, Savoyai'ds, Sartes et Uzhiques. Bull. soc. d'Antli. Paris 1899, p. 700), des émigrants petits, brachycéphales, bruns, pénètrent à travers l'Europe conti- nentale et cheminent le long des vallées, jusqu'aux côtes du Dane- mark... Leur origine est sûrement asiatique. » Le passage par les confins orientaux de la Russie était pour eux diflicile à une époque où les surfaces occupées par les eaux étaient beaucoup plus étendues qu'aujourd'hui et la végétation trop exubérante et mouillée ; de sorte C|u'il était au moins nécessaire , pour venir en Europe , de passer par l'âpre chaîne du Caucase. L'archéologie confirme de tels faits, en montrant que, soit dans les régions plus orientales de la Russie, soit au Caucase, les monuments sont plus récents que ceux qui se trouvent dans la Russie méridionale. Donc, dit Zaborowski. les proto-caucasiens des célèbres nécropoles de Samthavro, de Koban, n'étaient pas des asiatiques en marche sur l'Europe, mais des descendants d'Européens arrêtés autrefois dans leur invasion en Asie. Pour venir en Europe, il ne restait aux asiatiques que la route de r Asie-Mineure et de la péninsule balkanique. Il se comprend que, une fois l'Europe gagnée, ils se sont peu à peu infiltrés dans la Russie méridionale. Alors la race dolichocéphale, qui, à l'époque néoli- thique, occupait le nord de la mer Noire (3), commence à l'épocjue des métaux à se mêler partiellement avec des brachycéphales. Mais ceux-ci ne prirent le dessus, comme cela a été dit, qu'à partir du xi« siècle de notre ère. Comme on le voit, les opinions sont controversées. Mais de telles controverses sont ignorées de beaucoup d'auteurs. Dans le même ouvrage La Russie, ouvrage dû à plusieurs collaborateurs, Yachon dit, p. 3i3 : « Les peuplades de race aryenne descendent de l'Altaï, entre les rampes de l'Oural et les rives de la mer Caspienne » et entrent par là en Russie. D'après Zaborowski, au contraire, pas d'Aryens venant de l'Asie, pas de passage entre l'Oural et la Caspienne. Un tel passage n'était (1) Zabohowski. Origine dos popiilalioiis ancicMincs et actuelles de la Russie méridio- nale et du Caucase, Rn-iie scientijiqiu', 28 sept. 1901. (2) Zaboroavski. Du Dniestre à la Caspienne, Bull. Soc. d'Anthr., Paris 181)9, II, p. 13^. (3) Zaborowski. Du Dniestre à la Caspienne. L. c, p. i38. 842 ANTHROPOLOGIE praticable qu'à une époque récente. Il ne faut pas oublier ceci, qu'à l'époque éloignée à laquelle il faut faire remonter la prétendue venue des Aryens, il ne s'agissait certes pas d'une expédition mili- taire, dont les chefs voulaient passer à tout prix et à travers n'importe quel obstacle. Il s'agissait de bandes barbares qui cher- chaient les chemins les plus faciles pour trouver des territoires meilleurs. Et de tels territoires, il n'y en avait ni au Caucase, ni dans la région marécageuse d'entre l'Oural et la Caspienne. Ainsi s'explique qu'on n'y trouve pas de traces archéologiques d'un pareil passage. A défaut de données archéologiques qui, en un tel cas. sont dune importance capitale, peut-on fournir d'autres données favorables à l'ancienne théorie qui fait venir les Aryens d'Asie? Des Ilots de cette invasion se répandent d'Orient en Occident. Ceux des Celtes sont donnés comme les plus anciens et ceux des Slaves justement comme les plus récents. Il n'est pas absurde alors de supposer que la mythologie slave devrait avoir des points de contact évidents avec la mythologie des Aryens de l'Orient. ]Mais ceux qui voudraient démontrer une telle assertion et prendraient comme guide le récent volume de Léger (Zrt Mythologie slave, Paris, 1901), qui traite justement de la mytho- logie slave, se trouveraient bien empêchés. Léger a renoncé à une pareille entreprise. Xon seulement les ressemblances font défaut, mais les mythes slaves sont extraordinairement grossiers et abondent en dieux polycéphales et en sacrifices humains. On s'y trouve en présence d'un produit psychologique primitif quoicjue postérieur, chronologiquement, à celui qui, plus fin, sest développé en Orient. Les études actuelles ont donc complètement retourné le problème des origines aryennes , depuis qu'on a fait intervenir un développe- ment autonome des Aryens en Europe et un courant etlmique qui , du centre de celle-ci, s'est porté en Orient. Par inie étude des lieux on pourrait peut-être réussir à retracer ce courant. La linguistique, qui fut la première à faire intervenir une invasion d'origine orientale et qui maintenant, au contraire, tend à détruire une telle hypothèse, puisque Salomon Reinach a pu dire que, dans l'état actuel, aucun linguiste sérieux ne l'admet, pourrait faire valoir ses titres à la solu- tion du problème en portant ses investigations précisément sur la direction probable ouest-est de la primitive population de l'ïlurope centrale. Une fois admis que les Aryens ne sont pas venus d'Asie, ne D'^ GIlFFRIDA-UrOGIERI. — VXE QUESTION DE PALETXOLOGIE RUSSE 843 seraient-elles pas au moins parties de l'Orient ces populations Fin- noises qui. jusque il y a peu de siècles, occupaient la plus grande partie de la Rvissie et que la marée slave a sans cesse davantage pressées vers le nord en les réduisant par l'assimilation? Seraient-elles au moins descendues de l'Altaï ? Ici surtout se révèlent la nouveauté • et la hardiesse des conceptions de Zaborowski. Ces Finnois qui. aujourd'hui, passent pour des brachycéphales altaïques, étaient à l'origine dolichocéphales, comme le démontrent les Kourganes du nord et du centre de la Russie (i). Ils ont appartenu à la même souche dolichocéphale cjue les Kourganes du sud dont il a été cjues- tion. et il n'est plus besoin de les faire venir d'Asie. Zaborowski a été continué dans une telle opinion par l'étude des Ostiaks qui, étant restés partiellement à l'abri des mélanges, sont considérés comme des Finnois primitifs. Sommier a prouvé en efTet que ces Ostiaks sont presque tous dolichocéphales (2) , comme le sont ceux mesurés par ZaboroAvski. Par les caractères du squelette facial, ils coïncident avec les dolichocéphales des Kourganes et par leur voûte, aux crânes de Cro-Magnon. « Ce qui distingue au plus haut degré la race de Cro-Magnon, dit Zaborowski. c'est la conformation vérita- ])lement singulière des orbites (orbites basses associées à une face peu haute), en contraste absolu avec ce qui se voit chez les asiatiques. Mais cette conformation, précisément, je l'ai .signalée avec insistance chez les blonds du nord. Et c'est elle surtout c{ui m'a permis de dis- tinguer les peuples d'origine européenne aux confins du nord-ouest de l'Asie (3). » La transformation du type finnois au nord-ouest de la Russie, s'explique, comme celle du type lithuanien, par l'action des Slaves et un peu des Lapons. Plus facilement encore furent submergés les Finnois disséminés dans les autres parties de la Russie. Et c'est pourquoi Zaborowski a recours, comme nous l'avons vu. à l'étude craniologique des Finnois d'Asie. Mais ceux d'Europe peuvent encore foin*nir des renseignements utiles, sinon par leurs crânes, du moins par leurs costumes et coutumes qui. malheureusement, se perdent sans cesse davantage et disparaissent. Je pense que l'ethno- graphie pourra donner quelques indications sur la vraie place anthro- pologique de ces populations prétendues altaïques d'Europe. Ainsi, il ne me paraît pas sans importance l'usage actuel des Tchérémisses de mettre une monnaie sur la poitrine du défunt, pour son usage dans (i) Zaborowski. Kourgranes de la Sibérie occidentale. Bii]l. Soc. d'AtUli.. Paris, i8<)8, p. 104. (2) Archivio pt'T' l'AntropoIog. e VEtnolog., iSS'i, p. 53o. (3) Zaborowski. La souche blonde en Europe. Biillct. Soc. Anlhrop. Paris, i8ç)8, p. 481. '44 ANTHROPOLOGIE l'autre vie (i), en vue des besoins autres que le manger et le boire, pratique connue de l'antiquité classique. La question paletlniologique que, pour la nouveauté de l'idée mise en avant, il m'a paru utile de résumer, est très complexe. Mon opi- nion personnelle est que beaucoup d'autres éléments sont à considé- rer avant de pouvoir aboutir à une synthèse. Pour mettre en avant un seul exemple , on peut poser la question de savoir si les dolichocéphales des Kourganes étaient blonds ou bruns. L'opinion de Zaborowski ne peut être douteuse ; eux et leurs ancêtres, les Cro-Magnon , étaient blonds. Les Ostiaks que Zabo- ro^vski regarde , nous l'avons dit, comme des descendants authen- tiques des dolichocéphales des Kourganes et des antiques Finnois , ont au contraire, pour Sommier qui les a visités, les yeux et les che- veux noirs foncés en grande majorité (2). Il n'y a pas à dire que cela est dû à ce qu'ils vivent au milieu de populations fortement pigmen- tées, puisque les Zyinanes leurs voisins présentent une prédomi- nance de blonds (3). D'autre part, le climat aurait dû faire diminuer plutôt qu'augmen- ter leur pigmentation. Il serait donc plus probable que même les dolichocéphales des Kourganes avaient les yeux et les cheveux fon- cés en grande majorité et ne doivent pas être considérés tous (mais quelques-uns peut-être) comme des prédécesseurs des Scandinaves bien connus qui ont fondé la Russie historique, mais bien plutôt comme des représentants d'une grande invasion des méditerranéens conformément à l'idée exprimée en premier lieu par Sei*gi (4)- La différence du reste ne serait pas grande , vu que l'unification (l'iden- tité fondamentale) anthropologique des doliehomésocéphales s'im- pose de plus en plus, quelle que puisse être l'opinion sur l'origine primitive des Eurafricains (5). (i) Rabot. .1 iroi'ers la Russie boi'cale. Paris, 1894, p. 80. — Xordenskiold. La TVg-n, Milan. 1882. V. I, p. 287. (a) Sommier, O. c, p. 5'3o. Leur laille plus petite ne s'accorde pas non plus avec les vues de Zaborowski. Ils ont pris la taille et la couleur de peau des Huns. (3) Zaborowski. A cet exposé si lucide, je me bornerai à ajouter que j'ai donné les Ostiaks comme des descendants des anciens Finnois, mais altérés eux aussi ]>ar Tex- trème vigueur de leur vie très particulière et une imprég-nation de sang- liiiiiiii([ue. Ils n'ont pas que les Zyrianes comme voisins. Ils ont les Samoyèdes au nord, des Turco- Mongols au sud et ils se mêlent aux uns et aux autres. D'autre part, lorsque des Médi- terranéens pénètrent dans la Russie méridionale, c'est par la présence de brachycé- phales, non de dolichocéphales nouveaux, que nous constatons leur arrivée. (4) Sehgi. Origine et diffusion de la raee méditerranéenne. Rome, iStp. A la vérité, nous devons dire que le type facial des Ostiaks figurés par Sommier, ii'out rien ni du type méililerranéi'U, ni du ly])e nordifjue. Si nous en parlons, c'est uiii(|ueinen1 à cause de l'importance que leur accorde Zaborowski dans la question de la ])alelhii()logie russe. (5) Cela est si vrai que Forrer (Uher Steinzeit Hockergràl>er, Strasbourg 1901), partisan de l'origine européenne, comprend dans la même race les antiques égyptiens (V. L'An- ZABORO^VSKI. — LE CHEVAL DOMESTIQUE EN EUROPE 84» En tout cas. il est utile de recueillir les résultats de faits et les hypothèses, sans parti pris. La science ne peut qu'en tirer avantage. Et c'est là le but de ce présent résumé. M. ZABOROWSKI Professeur-Adjoint à TÉcole d'Anthropologie, à Thiais LE CHEVAL DOMESTIQUE EN EUROPE ET LES PROTOARYENS [036.1 :5;2.c)iJ — Séance du 6 août — Les protoaryens (le peuple ancêtre qui parlait la langue plus ou moins unifiée d"où sont descendues les langues aryennes) ont connu le cheval. Cela résulte indubitablement des noms semblables ou parents qui servent à le désigner dans les dilTérents groupes linguis- tiques indo-européens. Ainsi le sanscrit açva, cheval, est identique au lithuanien «.s :^fP« et se retrouve dans l'irlandais ec/?, cheval, dans le vieux prusse aswinan, « lait de jument », et peut-être dans le gothique aihwa élément composant de différents mots. Il correspond aussi à l'avestique aspa, au grec tmzoz, au latin equiis, etc., de même sens. Dans le groupe slave, il n'y a pas de nom appartenant à cette série, sauf peut-être le vieux slave ehii , élément composant de diffé- rents mots. Ce n'est qu'un détail peut-être, mais ce détail d'abord a besoin d'être expliqué. Si minime que soit un fait, il est interdit de l'omettre. Un auteur a supposé que la série slave Kon' , Koni, vieux russe Komoni, tchèque Komon', avait son point de départ dans quelque nom non aryen, et par exemple finnois (Le Yogoul Kmetkâ, donne- rait l'impression de quelque filiation de ce genre). Mais nous avons dans le vieux slave, Kobj'la et le lithuanien Kumé des noms qui correspondent évidemment au grec y.v.t>u)lm, latin cabaUus, et ont iropoloffic, iÇ)o3, p. 2o3), tout comme Scrgi. partisan de Torig-ine africaine, comprend ans la même race les Scandinaves. Ce sont les laits mêmes qui ont suggéré necessai- llu dans rement et logit[uement cette extension. Il est besoin de dire après cela qu'elles étaient injustes et hâtives les critiques et les faciles sarcasmes qu'une telle unification a attirées à Sergi, si le l'ail de cette unité somatique tend à être admis universellement. 846 ANTHROPOLOGIE d'ailleurs le mémo sens. A'o^*/rt, en polonais, est encore employé en mauvaise part et les deux mots grecs et latins récents ont, en effet, le sens de « bète de somme » et, par corruption, de « rosse ». Or. le tchèque Komon' parent de Kiimé, l'est aussi sans doute de Kobj'la qui l'est lui-même de caballus. Il est donc possil)le que les noms slaves soient peu anciens et datent de l'introduction du cheval comme bête de labour par exemple. Les similitudes suivantes : vieux-haut-allem. stiiota, Anglo-Saxon, sto'd, vieux nordique sto'd. lithuanien stodas, vieux slave stado pour « troupe de chevaux », ne sont pas nécessairement en rapport avec le cheval domestique. Il en est autrement peut-être de 7rw).oç « poulain », correspondant au gothique /«/rt, irlandais (p) lair. Les deux mots grec et latin jt^tto; et eqiius sont le centre et la source de tout un vocabulaire. Cette prolifération, tout en marquant l'importance acquise par le cheval, ne démontre pas l'ancienneté de son usage comme bête de selle et de trait. Les mots comme n:Tiv.y.r,, fromage de lait de jument, et tTrn-molyoi, peuples qui se nourrissent de lait de jument, ne sont pas eux-mêmes nécessairement anciens, puisqu'ils ne se rapportaient sans doute pas aux Grecs. Et les noms comme iTZTzy.pyrr,;, chef de cava- lerie imrLKç^ statue éc|uestre , mmurpoç vétérinaire , mno^poiio; hippo- drome mno-Yiov. porte-manteau de cavalier, tK7T0T-c/.si;. etc. etc. appartiennent évidemment à la pleine époque historique , à la pleine civilisation grecque. Nous avons, en effet, des preuves historiques que l'emploi du cheval, pour le travail et le transport, est peu ancien en Europe. Mais, i>our ne laisser rien dans l'obscurité et réfuter jusque dans les plus petits détails l'hypothèse asiatique, nous devons envisager la possibilité d'un contact en Asie entre les protoaryens et les empires mésopotamiens, au point de vue de l'emploi du cheval. Les Éo'vptiens de l'ancien empire n'ont pas connu le cheval. Après les invasions des Hycsos, toutefois, et, en tout cas, dès le commen- cement de la xviii^ dynastie, ils employaient le cheval attelé. Des chars attelés de deux chevaux sont représentés sur les monuments de l'époque, et il y en a qui paraissent être sans mors. Les chevaux montés sont postérieurs d'environ deux siècles. Le cheval de trait était donc employé assez couramment en Egypte dès le XVIII® siècle environ et il avait été introduit de l'Asie. Cette introduction dans ces conditions et pour cette époque est une œuvre de civilisation. Les pasteurs à demi civilisés des régions voisines n'élevaient pas alors de chevaux , croit-on. « L'inventaire des ZABOUO^VSKI. — LE CHEVAL DOMESTIQUE EN EUROPE 847 richesses de Job. qui habitait le nord de l'Arabie vers le xiv<= siècle avant notre ère , indique 7000 brebis , 3ooo chameaux , 5oo paires de bœufs et 5oo ânesses, mais il n'v est pas question de chevaux, dit Gabriel de Mortillet f 0/7^7/? es de la Chasse, p. 390). Malheureuse- ment le livre de Job date de iii"^ siècle avant notre ère. Il me parait bien imi)Ossible de rapporter au xiv^ siècle les renseignements qu'il contient. Peu importe. Mais que les nomades de l'Arabie n'aient élevé des chevaux que tardivement, cela est conforme à ce que nous savons d'autre part. D'après la Bi]>le cependant, Salomon (x^ siècle avant Jésus-Christ) possédait 4o-<^oo chevaux pour les chars et 12.000 chevaux de selle. Le livre des rois où ce détail est donné n'est aussi que du i\^ ou iii"^ siècle avant Jésus-Christ. Mais ce détail se rapporte à son tour, non à l'élevage du cheval en Arabie, mais à l'ancienneté de sa domestication dans l'Asie antérieure. Les Assyriens semblent avoir possédé le cheval de tout temps. Leurs chars et attelages sont identiques à ceux des Egyptiens, sauf les ditTérences dues aux diiïé- rences d'exécution dans les gravures. On peut donc affirmer que dans l'Asie antérieure, l'usage des chars attelés de chevaux remonte au delà du xviir siècle avant notre ère. Le cheval, en Mésopotamie, a été introduit de l'Est ou du Nord-Est. Le nom qu'il porte dans les inscriptions cunéiformes de la Chaldée, tiré de celui de l'àne, pas, a le sens de : âne de la montagne ou de l'Est, pas-Kurra, parce que Kiirra entre dans la composition du nom du vent d'Est. Il est inu- tile, pour notre sujet, d'examiner ce côté de la question de plus près ou. du moins, d'aller plus loin pour l'origine du cheval. Si les Protoaryens avaient été aux confins de la Mésopotamie ou même au Nord-Est de celle-ci, vers 2.5oo avant notre ère, il est presque certain ou plus que probable qu'ils auraient connu le cheval comme animal de trait. Aussi, par précaution et sans aucune vérification, leur a-t-on attribué, en général, la connaissance, bien plus, l'em- ploi du cheval comme animal de trait et de selle. Voyons donc quel cheval ils ont connu et quels emplois de ce cheval. Tous les chevaux mésopotamiens sont de la grande race dite asiatique par Sanson. Ce sont donc ces chevaux que les pro- toaryens devraient avoir connus. Ils s'en seraient servis, disent les défenseurs de l'hypothèse asiatique, dès l'époque de l'unité (Piètre- ment, p. 192). Le sanscrit sadin, sadi, remarque Pictet, signifie « guerrier ». plus spécialement celui qui combat à cheval ou sur un char, de sad « sedere » par opposition au îaniRssin padaga. Mais dans les chars de gvierre on ne pouvait se tenir que debout. Les 848 ANTHROPOLOGIE guerriers, dans leurs chars, combattaient debout. D'après une énu- mération approximative, dit encore Pictet, le sanscrit n'a pas moins de cent quarante à cent cinquante noms pour le cheval, la jument et le poulain. Mais il ajoute lui-même : « La plus grande partie de ces noms est d'une origine relativement récente, et un petit nombre seulement d'entre eux peut être considéré comme aryen. » Pictet reconnaît pour le sanscrit ce que j'ai ailirmé pour le grec. Mais alors comment fonder sur ce vocabulaire l'existence d'une connaissance protoaryenne de l'emploi du cheval? En réalité, les ancêtres des Indo-iraniens et les habitants des steppes ont peut-être connu plutôt que les autres aryens l'usage du cheval monté. Mais les protoaryens, dans leur ensemble, ne l'ont pas connu. Nous n'avons pas, du moins chez eux, un seul indice de la connaissance de cet usage. Et, ce qui est pour nous encore le plus important pour le moment, ils n'ont certainement pas connu le grand cheval asiatique. En effet, s'ils l'avaient connu, dans l'hypothèse de l'origine asia- tique, ils l'auraient introduit en Europe 2.5oo ans avant notre ère. Nous trouverions donc, en Europe, ce cheval avant l'âge du bronze, puisqu'ils connaissaient à peine le métal et puisque le bronze d'ailleurs lui-même ne s'est pas répandu dans l'Europe cen- trale antérieurement au deuxième millénaire d'avant notre ère. Or , que trouvons-nous en Europe , pendant le néolithique et sur- tout à la fin? Pas la moindre trace du grand cheval asiatique, pas la moindre trace de l'emploi du cheval comme animal de trait' ou de selle, mais des traces de son utilisation comme animal de boucherie. Et on ne saurait pas dire avec assurance s'il était élevé en domes- ticité ou s'il était capturé à la chasse. On a beaucoup discuté la question de savoir si le cheval était déjà domestiqué à l'époque quaternaire. Lorsqu'on découvrit, par exemple, devant la station de Solutré, un magma formé d'ossements de cheval agglutinés, on pensa que, pour avoir pu réunir tant de se& restes, les habitants de la station avaient dû élever l'animal. Les restes des animaux tués à la chasse ne sont jamais au complet dans les foyers des cavernes, par exemple, certaines parties de l'animal étant généralement abandonnées sur le terrain. Dans le magma de Solutré, on trouvait toutes les parties du cheval, les os étant d'ailleurs fendus et raclés comme ceux des animaux tués à la chasse. Mais ces restes représenteraient-ils loo.ooo individus, comme on en a fait le calcul, cela ne serait pas très extraordinaire. Qu'une seule tribu de chasseurs ait vécu à Solutré pendant 3 ou ^oo ans, le temps ZABOROWSKI. — LE CHEVAL DOMESTIQUE EN EUROPE 849 d't'puiser les ressources du pays en gibier, et cela suflit à expliquer une pareille accumulation. Les chassevu^s capturaient des chevaux qui étaient des bêtes de petite taille à grosse tête ou les blessaient seulement pour les amener à proximité de leui' station, au lieu de les tuer sur place. Et ils choisissaient dans les troupeaux les bêtes adultes de 3 à 7 ans, laissant les jeunes grandir et les autres pour- voir à la reproduction. Ils n'avaient, en réalité, aucun moyen de l'aire plus, aucun moyen de les tenir à couvert, n'ayant eux-mêmes que des abris de rochers, ou de garder au dehors des troupeaux. Ils n'avaient, non plus, aucun intérêt à se charger de l'élevage de ces chevaux qui s'élevaient fort bien tout seuls, puisqu'ils ne les prenaient que pour les manger. Il ne peut donc pas être question de domestication à propos d'eux. Cependant, depuis la découverte des cavernes à parois couvertes de gravures, la question est revenue en discussion. M, Capitan a relevé, sur les parois de la grotte des Combarelles, des chevaux avec des traits sur le dos limitant une sm^face carrée , dans laquelle on a voulu voir une couverture, avec un trait sur le cou, dans lequel on pourrait voir un licol. Les auteurs de ces gravures ont fort bien pu représenter, en effet, des liens autour d'un animal pris au lasso de cuir, sans qu'on soit en droit d'en conclure à la domestica- tion. Et, d'ailleurs, les conditions de l'existence des habitants de ces cavernes étaient les mêmes que celles des habitants des abris de Solutré. Ils ont pu capturer des chevaux et les maintenir à l'attache. Les domestiquer , à supposer que cela leur ait été possible , ne pou- vait être pour eux qu'une peine inutile et un embarras. Personne assurément ne conteste aujourd'hui que nos populations quaternaires n'ont pas complètement disparu de notre sol avec cer- tains des animaux dont elles vivaient. Elles se sont perpétuées à l'époque néolithique, en subissant quelques légères modifications de caractères. Et leurs descendants, plus ou moins directs, sont encore en grand nombre parmi nous. Il en est de même pour le petit cheval quaternaire. Il fut. à l'époque néolithique, aussi abondant qu'auparavant. Il fit, d'ailleurs, alors partie de la faune des steppes de l'Europe centrale, détail à retenir. Or, nous savons pertinemment qu'il ne fut pas domestiqué encore, que son emploi comme animal de selle ou de trait est resté inconnu. Si, en effet, un tel emploi avait été connu, on en trouverait des traces dans les stations néoli- thiques, dans les stations lacustres en particulier, où tous les détails des mœurs de leurs constructeurs ont pu être si bien étudiés. Or, dans les villages lacustres, alors que les restes des animaux certaine- 54* 85o ANTHROPOLOGIE ment domestiqués comme le l^o'uf, la chèvre, le mouton, le chien, sont très abondants, ceux du cheval sont extrêmement rares, « si rares, a dit Rûtimeyer, qu'il me semble présumal^le que ceux trouvés à Robenhausen, Wauwyl, etc., doivent avoir été amenés du dehors dans les constructions sur pilotis à titi*e de proie ». Dupont est allé jusqu'à dire : Le cheval disparait complètement, comme aliment, à l'âge de la pierre polie, et cela paraît général. Il n y a pas de restes de cheval dans les villages lacustres de la haute Autriche. Il V en a dans les fonds de cal^ane de l'Italie, dans ceux des Abruzzes, notamment, qui, en raison de l'absence du chien et de la hache polie, ont passé pour être du commencement de l'âge néolithique. Il y en a dans la station de Yeyrier (Haute-Savoie), regardée comme j)lus ancienne que les palalittes , avec des restes de mouton , de porc , de petit boHif. (Rev. École (VAnthrop. 1904. p. i58.) Et de nouveau, pendant le plein et jusqu'après la fin du néolithique, il n'v en a plus de trace. Par exemple, on n'en a pas trouvé dans la caverne de Zachito, près Caggiano. province de Salerne (Sud de l'Italie). Cette grotte de Zachito, dont la faune a été fort bien étudiée par E. Regalia (Patroni : La grotta presistovica ciel Zachito. — Regalia : SiiUa faiina délie grotte di Frôla e Zachito, i br. gr. in-8°. Florence. 1908) . offre un intérêt exceptionnel. Elle a été habitée à la fin d'un néolithique probablement tout local, où le commerce du littoral introduisait déjà des outils de bronze. Les halîitants faisaient un peu de culture et avaient de nombreux animaux domestiques : deux races de porcs , deux ou trois races de bœufs , deux races de moutons et une de chèvres, trois races de chiens. Ils étaient sous ce rapport très avancés. Leurs poteries sont d'ailleurs d'une facture déjà supérieure. De plus, ils étaient certainement en relations avec l'orient de la Méditerranée , car, fait unique en son genre , parmi les restes de leurs animaux domestiques , on a trouvé des débris d'un chameau. Ce chameau aurait peut-être pu être amené d'Afrique. Il est bien plus vraisemblable qu'il a été transporté par mer de l'Asie, par les importateurs mêmes des outils de bronze. Eh bien! avec lui il n'y a pas de traces d'un cheval quelconque, ni du grand cheval asiatique, ni du petit cheval de l'Europe centrale. En Sicile, il y a bien déjà des chevaux, des chevaux importés, à Castelluccio. station de même âge que celle de Zachito. Il n'y en a pas dans le pur néolithique de Santinello {op. c. p. 17 et \ Anthropologie , t. YIII, 189;. p. i43). Ainsi, au commencement de l'âge du bronze et lorsque des rela- tions d'échange existaient sûrement et depuis un certain temps entre le littoral de l'Italie et celui de l'Asie . il n'y avait pas du tout de ZABOROWSKI. — LE CHEVAL DOMESTIQUE EX EUROPE 85l cheval dans l'Italie méridionale, car son absence à Zacliito a été constatée également dans d'autres grottes. Rien ne peut être plus décisif. Cependant, dans les fonds de cabane des Abruzzes, il y a des restes du petit cheval d'Europe, comme il y en a aussi un peu dans les lacustres. Quelle interprétation donner de ces circonstances? Nous n'éprouvons pour cela aucun embarras. Les auteurs des fonds de cabane italiens, par exemple, vivaient encore surtout de chasse. Cela a été prouvé. Ils avaient peu d'animaux domestiques. Donc, ils chassaient aussi et mangeaient le cheval. Mais, lorsque l'homme eut assez de troupeaux et lit assez de culture pour ne demander à la chasse qu'un faillie appoint, il n'y eut presque plus de restes de chevaux dans ses stations , et tel est le cas pour les stations lacustres de la Suisse. Lorsqu'enfin , il renonça presque tout-à-fait à la chasse en raison de la variété et de l'abondance de son bétail, les traces de chevaux disparurent de ces rejets de cuisine. Tel est le cas pour les lacustres delà haute Autriche, des cavernes de Zachito, de Petrosa, qui se correspondent pour 1 âge. Le cheval étant d'autant plus rare que les animaux domestiques sont plus abondants, la conséquence est claire. Il n'était pas lui-même domestiqué. A l'époque néolithique, le cheval n'était donc qu'un gibier. Et cela seul juge la question de la domestication à l'époque quaternaire. Si le cheval avait été domes- tiqué pendant le quaternaire, cette connaissance si simple ne se serait pas perdue par la suite. Mais, encore une fois, le cheval était l'animal le plus facile à chasser, ou l'un des plus faciles, et sa chasse n'offrait aucun risque. L'homme n'avait aucun intérêt quelconque à l'élever lui-même jusqu'au moment où il a voulu s'en servir comme animal de trait et de selle. A l'époque néolithique, je le répète, le cheval était néanmoins abondant. Et on a continué à le manger un peu partout. On a trouvé de ses restes dans des stations (V. par ex. Piètrement, Les chevaux, etc., p. 122.) disséminées de côté et d'autre. Mais ces stations appartiennent à des régions où la culture était peu dévelop- pée. C'était avant tout, d'ailleurs, un animal de steppe. Et il était sûrement peu commun dans les régions de hauteurs ou accidentées, où l'homme cherchait ses abris rocheux. Les Protoaryens ayant des mœurs correspondantes à celles de l'âge de la pierre polie , nous devons nous demander s'ils ont connu, pra- tiqué cet usage européen de manger le cheval. Eh bien! oui, ils l'ont connu , pratiqué , conservé même pour leurs descendants dispersés , chez lesquels nous le retrouvons en pleine histoire. Les Finnois Tchérémisses sacrifient encore le cheval à leurs dieux pour le manger. 852 ANTHROPOLOGIE L'existence de cet usage a été reconnue chez les Indiens védiques, les Iraniens, les tribus grecques, les Prusses ou Borusses, les Romains, les Germains, les Illyriens. « Que ce cheval, à la large croupe, est-il dit dans l'un des hymnes védiques, vienne heureusement combler l'espérance des dieux... O victime, c[uand de ton ventre cuit au feu d'Agni la broche vient à sortir, que rien ne tombe à terre sur le gazon... Si ceux qui voient le cheval cuit disent : « Il sent bon, cou- pez-en un morceau » , accueillez la demande de quiconque voudra de cette chair. Cependant, on a apporté les vases destinés à i^ecevoir le» chairs ou les sauces qui les arrosent, les marmites, les chaudrons, les plats, les instruments de cuisine, et on les place autour du cheval. La hache tranche les trente-quatre côtes du rapide cheval. Laissez entières les autres parties... Que la hache ne s'appesantisse pas long- temps sur ton corps... » La religion des Aryasvédiqucs n'a fait ainsi que consacrer la cou- tume hippophagique des protoaryens de l'âge de pierre, de ceux des- steppes en particulier. Les vieux Perses accomplissaient les mêmes sacrifices sur les hauteurs. Ils mangeaient d'ailleurs aussi le cheval, sans aucune cérémonie. Parlant d'eux : « Le jour de leur naissance, dit Hérodote (I, i33), les gens riches se font servir un cheval, un chameau, un âne ou un bœuf entier rôti... » Les Massagètes , qui sacrifiaient des chevaux au soleil , d'api^ès le même historien (I, 226), n'avaient aussi d'autre but que de les man- ger, comme les Scvthes. En Europe, les coutumes hippophagiques se sont conservées de l'âge de pierre jusqu'au moyen âge partout où le cheval vivait en troupes sauvages. Je disais qu'il avait cessé de faire partie de l'ali- mentation là où, le bétail étant abondant, on ne chassait plus ou on chassait peu. On ne le trouve pas, en conséquence, dans les centres de civilisation de la fin de la pierre polie. On le trouve rarement de même dans ceux du commencement du bronze. Les palafittes du lac Yarèse, au sud du lac Lugano, dont l'âge s'étend de la pierre au fer, ne renfermaient pas. semble-t-il, de restes de chevaux dans leurs assises inférieures, bien que les ani- maux de chasse y fussent encore nombreux. Mais, dans les palafittes de la Suisse appartenant à l'âge du bronze, il y en a constamment et bien plus qu'auparavant. Mais il y a aussi des mors entiers en bronze, des montants de mors en bronze ou en corne de cerf, qui nous prouvent que nous n'avons plus affaire là seulement au cheval chassé, mais en outre au cheval domestique et employé comme monture ou bête de trait. Des mors du même gem'e et d'époques ZABOROWSKI. — LE CHEVAL DOMESTIQUE EX EUROPE 853 correspondantes ou postérieures ont été trouvés très disséminés en fort petit nomljre en France, en Hongrie, en Grande-Bretagne, en Italie. Ils appartenaient surtout à des pacotilles de marchands ambu- lants d'o])jets en bronze, à des cachettes. Dans les villages de l'âge du bronze élevés au nord-est de l'Italie, dans l'Emilie particulière- ment, au milieu de marais artificiels, villages bien connus sous le nom de terramares, les restes de chevaux sont habituellement brisés comme ceux des autres animaux de boucherie. On n'avait donc pas cessé de les manger. On y a trouvé des montants de mors en corne de cerf, qui prouvent cependant que le cheval y était utilisé aussi pour le transport. Les Scythes nomades, intimes parents des Saces, des vieux Perses, des Massagètes, se nourrissaient surtout de viande de cheval, de fromage et de lait de jument. Nous avons sur ce point le témoignage d'Hérodote, que je viens de rappeler. Nous avons aussi celui de Strabon (L. YII, c. iv, 6). Les anciens Grecs mangeaient aussi de la viande de cheval et nous voyons encore, dans Homère, Achille immoler quatre superbes chevaux sur le bûcher de Patrocle, coutume générale chez les Scythes et qui s'est perpétuée jusqu'aux temps modernes, notamment chez les Lithuaniens. Le pape Zacharie (j^i-'jo'i), qui suivait attentivement l'œuvre de Boniface, apôtre de la Germanie, lui écrivait : Etiam et fihri, et lepoves et eqiii silvatici miilto ampliiis cifandi. — « La loutre, le lièvre et le cheval sauvage sont à éviter par-dessus tout. » Donc au milieu du xiii« siècle de notre ère, les Germains man- geaient encore du cheval et du cheval sauvage surtout. Je ne sais pas pourquoi le pape le proscrivait. Mais il est clair que c'est la religion chrétienne qui l'a fait disparaître de l'alimentation, puisqu'il ne s'y est maintenu jusqu'à nos jours que chez les Finnois païens. Quel était ce cheval sauvage mangé à l'époque néolithique et par les protoaryens et dont l'usage comme viande de boucherie a été transmis à tous les peuples aryens et s'est perpétué même chez les Germains jusqu'aux temps modernes? Quel était le cheval domes- tique à l'époque du bronze , dont on a des mors de provenances très diverses. Sur cela encore, nous sommes parfaitement renseignés. J'ai dit qu'à l'époque néolithique, c'est le petit cheval quaternaire qui survi- vait, trouvant dans les steppes du centre et de l'est, les mêmes con- ditions d'existence qu'autrefois. Des mors de l'âge du bronze, ceux de Corcelettes (Suisse, lac de Neuchàtel) indiquent par leurs dimensions qu'ils étaient fabi^qués pour des chevaux dont la bouche était moins large que chez nos 854 ANTHROPOLOGIE chevaux d'aujourd'hui (Mortillet, Origines de la chasse, p. 374)- Des ossements des chevaux des terramares ont été mesurés par Strobel et comparés à des os de nos chevaux de selle. Ils sont nota- blement plus petits. Ainsi les radius les plus longs avaient 345 mm., alors que les radius du cheval actuel ont 3^5 millim. Seulement cinq ou six crânes entiers de chevaux de l'âge du bronze, trouvés au fond du lac de Bienne, auraient été reconnus par Sanson pour appar- tenhvà la grande race asiatique. (Piètrement, p. 3"5). Les habitants de ces palafittes étaient eux-mêmes d'abord des émigrés de l'Asie. On a trouvé un très grand nombre de restes de chevaux dans le& Kourganes de la Russie méridionale. Jusqu'à l'époque où se montre la belle industrie grecque, peut-être même jusqu'à l'époque scythe, soit jusque vers le vi^ ou v« siècle avant notre ère . tous les chevaux appartiennent à la même petite race quaternaire du centre de l'Eu- rope (Eq. Cabalhis minoi\ de Woldrich), qui abonde aussi dans les cavernes de Cracovie. Dans un très vieux tombeau d'Uwisla (Galicie orientale), on a trouvé avec du bronze, des coquilles de la Méditerranée, une défense de sanglier, un jnoi^s enfer. Il se rapporte à ce même petit cheval. Les Scythes eux-mêmes montaient surtout ce petit cheval. Les mors en bronze et en fer des Kourganes scythes se rapportent à lui (De Baye. L' Anthropologie, 1895, p. 385). Ce sont-là des faits d'autant plus graves qu'aucun doute ne plane sur eux. Ils sont inconciliables absolument avec l'hypothèse asia- tique. Si les défenseurs de cette hypothèse s'étaient préoccupés de la démontrer, ils s'en seraient les premiers aperçus. Les ancêtres des peuples aryens de l'Europe étaient bien en Europe, suivant eux-mêmes , à l'époque du bronze. S'ils y étaient venus de l'Asie, nous verrions avec le bronze le grand cheval asia- tique s'imposer partout. Or, avec le bronze nous voyons bien, en effet, un cheval sûrement domestiqué ; mais c'est le petit cheval indi- gène de l'Europe que les indigènes mangeaient depuis les temps qua- ternaires. Dans les terramares de l'Érnihe, sûrement occupées par les ancêtres des Latins, c'est aussi ce petit cheval que nous trouvons. Nous l'y trouvons seul et il y est encore mangé. Il faudrait s'interdire le moindre raisonnement ]iour ne pas en conclure que les Aryens ne sont pas venus d'Asie . que les protoa- ryens habitaient l'Europe à l'âge de la pierre polie et que ce sont bien eux qui mangeaient des clievaux, comme l'indiquent les mœurs de la plupart de leurs descendants. L'histoire, s'il était besoin, nous fournirait dans ce sens les preuves ZABOROWSKI. — LE CHEVAL DOMESTIQUE EX EUROPE 855 les plus directes. Nous savons en effet par elle quels chevaux avaient les Thraces, les Germains, les Gaulois. Tous les anciens nous ont donné le cheval gaulois-celtique, germa- nique, comme très rustique, très résistant au froid et à la fatigue. Cest justement la caractéristique du petit cheval indigène de la steppe qui ne paie pas de mine. César, à propos des Suèves, dit (De bello gallico) : « Ils trafiquent plutôt pour vendre ce qu'ils ont pris à la guerre que pour acheter, sans être curieux de chevaux étran- gers, comme les Gaulois qui en donnent un prix excessif. Ils se servent de ceux du pays qui sont petits et sans grâces (parça et deformia. petits et difformes), mais deviennent bons pour le travail par un continuel exercice. Ils mettent souvent pied à terre dans les combats, puis remontent sur leurs chevaux, qui sont accoutumés à demeurer à leur place en les attendant. Ils n'ont ni selle ni aucun autre équipage et prennent cela pour une trop grande délicatesse. » Ainsi les chevaux indigènes en Gaule et en Germanie étaient petits, difformes. Les autres employés en Gaule étaient, encore au temps de César, connus pour être d'importation étrangère. Aucune équi- vocpie ne peut subsister sur ce point. Le véritable cheval des Aryens de l'Europe était encore en pleine histoire le descendant de nos petits chevaux quaternaires, de nos petits chevaux néolithiques. Si les Germains, les Gaulois étaient venus de l'Asie, des régions voi- sines des grands empires de la Mésopotamie, ils en auraient sûrement amené un autre qui aurait avantageusement concurrencé celui-là. Or les Aryens de l'Em^ope ont bien domestiqué et n'ont domestiqué que ce j)etit cheval européen. Homère appelle les Thraces des domp- tem's de chevaux (Iliade, XIII, 3). Or les Thraces, souche de tant de nations aryennes, habitaient justement au centre de l'Europe, à proximité de cette zone des steppes , patrie de prédilection de notre petit cheA'al. Nous tenons d'Hérodote même une description très exacte de ce cheval aryen. « On ne peut rien dire de certain, lit-on livre Y, par. 9 de son histoire , sur les peuples qui habitent au nord de la Thrace. Mais le pays au delà de l'Ister paraît désert et immense et n'est occupé, autant que j'ai pu l'apprendre, que parles Sigynnes. Leurs habits ressemblent à ceux des Mèdes. Leurs chevaux sont petits et camus ; leur poil est épais et long de cinq doigts ; ils nont pas assez de force pour porter les hommes; mais, attelés à un char, ils vont très vite , et c'est la raison qui engage ces peuples à faire usage des chariots. » Nous n'avons pas besoin , on le voit , de faire des efforts d'imàgi- L nation pour arriver à savoir pourquoi le chariot avait déjà tant 856 ANTHROPOLOGIE d'importance chez les protoaryens, Hérodote nous le dit. Ils ne con- naissaient pas Tusage du cheval monté. Ces soi-disant conquérants asiatiques qui seraient venus civiliser l'Europe a.Soo ans avant notre ère ne savaient même pas monter à cheval. Ils n'avaient rien de ce qui fait les conquérants ordinaires. Mais s'est-on demandé com- ment ils ont pu accomplir des conquêtes si étendues en n'ayant à leur service , pour parcourir leurs espaces , qu'un lourd et informe chariot grinçant? Les partisans de l'hypothèse asiatique sont restés à court d'explications sur ce point, comme sur jiresque tous les autres. Mais eux-mêmes n'ont pas contesté le fait. « Le cheval n'était pas monté', dit d'Arhois de Jubainville ; la langue indo- européenne n'avait pas de mot pour exprimer l'idée de l'équitation. Aucun des héros d'Homère ne. pratiquait encore, autrement que par exception, cet art resté inconnu aux dieux les plus anciens de la mythologie grecque et, bien plus tard, l'usage homérique du combat en char persiste dans la plus ancienne épopée de l'Irlande ! » Cela n'est pas fait pour nous embarrasser, nous. Bien au contraire. Nous n'avons eu recours aux cavalcades brillantes ni pour l'aryani- sation de l'Asie, ni pour celle de l'Europe. En Asie, les Indo-Iraniens, primitivement pasteurs nomades, se sont répandus le long des terri- toires occupés par les populations agricoles et sédentaires , presque sans eflbrts guerriers, comme aujourd'hui les Peuhls dans l'Afrique centrale, auxquels je les ai comparés. Les grandes conquêtes à leur profit n'ont eu lieu que sous Cyrus, sous Darius. En Europe, les protoaryens ayant été installés de tout temps dans le centre et vers la "Sione mitoyenne de l'Est . il n'y a eu de leur part qu'un graduel écoulement vers le sud et l'Ouest, des colonisations par étapes éche- lonnées , des migrations successives à travers des pays peu habités qui n'ont pris le caractère d'invasions véritables qu'à l'âge du fer. Le petit cheval aryen, bête rustique facile à manier, qu'Hérodote décrit si bien dans sa patrie au-delà de lister et que César signalait plus tard comme étant encore le seul employé de son temps en Germanie, le seul indigène en Gaule, F. Forster l'a vu encore sau- vage en Crimée, en Ukraine jusqu'en Asie, au xviii^ siècle. Il le décrivait dans une lettre adressée à Buffon sous le nom tartare de Tarpan qui lui est resté. « Il est toujours de petite taihe. disait-il, et la tête est à proportion plus grande que dans les chevaux domes- tiques. )) Déjà, les Saces l'avaient emmené avec eux dans le Turkestan et, sur des monnaies de rois Saces il est bien reconnaissal)le et facile à distinguer du grand cheval asiatique. Il n'a pas disparu et, encore ZABOROWSKI. — LE CHEVAL DOMESTIQUE EX EUROPE 807 au temps de Forster, Mongols et Cosaques « le tuaient à la chasse pour en manger la chair ». Les ancêtres des Grecs ont connu ce cheval, puisque dans leurs mœurs subsistaient des traces d'hippophagie. Mais, adapte au climat venteux et froid des steppes, il n a jamais vécu en Grèce. On ne l'y a pas trouvé à l'état fossile et les Grecs eux-mêmes ne l'ont pas vu chez eux à l'état sauvage. « Les Grecs n'ont point parlé des chevaux sauvages, dit Pline (XXVII, 45), parce que leurs contrées n'en jDro- duisaient point. » Une légende antique , trop souvent reproduite pour ne pas corres- pondre à un fait réel, veut que ce soit Neptune qui ait donné le cheval à la Grèce. Il est appelé tantôt dompteur, tantôt donateur du cheval, précieux à la g-uerre. Cela signifie indubitablement que le cheval monté a été introduit en Grèce par la mer. Et cela est conforme aux renseignements que nous avons sur l'ori- gine du cheval monté. Cette introduction a-t-elle eu lieu déjà du temps des Pélasges, comme l'admettent des auteurs {Piètrement. p. 3i3)? Peu importe, au fond, l'origine asiatique du grand cheval en question n'étant pas contestée. Les Pélasges nétaient pas aryens. Hérodote, au reste, le dit. Leur langue n'avait rien de commun avec celle des Grecs (I, 5-). Et j'ai montré, dans mon cours de l'hiver 1902-1903. en revenant sur l'opinion qui en faisait des méditerra- néens dolichocéphales, j'ai montré que les Pélasges devaient être surtout de ces brachycéphales de type appelé par moi médique , ou hétéen-mède-tadjik. de même souche que nos brachycéphales de l'époque du bronze. Ces derniers ont pénétré, par la presqu'île des Balkans et le centre de l'Eui'ope, jusqu'en Angleterre. Pourquoi ne se seraient-ils pas d'abord répandus en Grèce? Nous savons qu'ils y étaient établis avant même l'arrivée des Hellènes, par les mélanges que présentaient déjà les Grecs anciens, qui offrent dans leurs statues deux types différents, l'un blond à tête allongée, l'autre brun à tête aplatie postérieurement. Ce sont des immigrants asiatiques, bruns et brachycéphales, qui ont introduit le l^ronze en Europe. Or, dans des stations lacustres de l'âge du bronze, celles du lac de Bienne, nous l'avons vu, avec des olîjets prouvant que le cheval était alors domestiqué ; on a récolté des crânes de chevaux attribués, non à l'espèce indigène, mais à la grande espèce asiatique par Sanson. espèce devenue depuis si prédominante et qui est celle des chevaux du Parthénon, sculptés au milieu du v"= siècle avant notre ère. Ce n'est que dans lîn sens très général et par abréviation que j'ai 858 ANTHROPOLOGIE donné le nom de médiques aux introducteurs du bronze . le type des Mèdes nous étant connu. Dès une haute antiquité, cependant, la Médie fut un centre d'éle- vage du cheval. Strabon en a recueilli (XI, i3. ;) le témoignage : « La grande Médie, dit-il. comme T Arménie, du reste, est très favorable à l'élevage des chevaux. Elle contient notanmient . sous le nom (ïHippobotiim, une vaste prairie que traverse la grande route allant de la Perse et de la Babylonie aux Pyles Caspiennes et où paissaient, dit-on, au temps de la domination persane, jusqu'à 5o.ooo juments appartenant aux haras royaux. » C'est de là, c'est des Mèdes et des Perses qu'en pleine histoire les Grecs ont l'eçu les leçons qui en ont fait des écuyers. Il y a quelques traces de l'existence de courses de chevaux montés, aux jeux Olympiques, dès une époque assez reculée. Mais ce qu'on pratiquait habituellement, à ces jeux, c'étaient des courses de chars. A l'époque de la guerre de Troie, les Grecs savaient assuré- ment monter à cheval, d'après les dires d'Homère {Piétinement, 270). Mais la façon liabituclle d'utiliser les chevaux à la guerre était de les atteler à des chars et ils n'avaient pas d'autre emploi. « Homère ne montre pas un seul héros combattant à cheval sous les murs de Troie. Toute la cavalerie de V Iliade est montée sur des chars. » Et bien des siècles après, les chevaux montés n'étaient pas encore utiHsés. A la bataille de Platée, 479 avant notre ère. il n'y avait pas encoi'e de cavalerie. Comme l'a rappelé d'Arbois de Jubainville. cité tout à l'heure, l'usage de ne combattre qu'avec des chariots attelés était encore conservé seul dans l'Ile de Bretagne au temps de César. Celui-ci dit en effet de ses habitants : « Voici leur manière de combattre avec ces chariots. D'abord ils les font courir sur tous les points en lançant des traits et, par la seule crainte qu'inspirent les chevaux et le bruit des roues, ils parviennent souvent à rompre les rangs. Quand ils ont pénétré dans les escadrons, ils sautent à bas de leurs chariots et combattent à pied ; les conducteurs se retirent peu à peu de la mêlée... » En Asie, au contraire, l'usage des chars de guerre a été de bonne heure accompagné et suivi de celui du cheval monté. Le cheval a joué un très grand rôle dans les guerres des Assyriens. Et ce cheval est précisément, nous l'avons dit, le cheval asiatique introduit en Grèce dès l'origine et dont on a relevé la présence, pro- bablement exceptionnelle, dans les palafitfes du lac de Bienne. D'après les textes assyriens, les chars de guerre furent employés ZABOROWSKI. — LE CHEVAL DOAIESTIQUE EX EUROPE 85() par les rois d'Assyrie dès une époque inconnue. Ils le furent d'abord exclusivement peut-être, une inscription de Téglatli-Phalasar I" (xiii^ siècle avant notre ère) ne parlant pas de cavalerie. Mais un bas-relief de Babylone représentait déjà la grande Sémiramis à che- val. Des bas-reliefs représentent des archers assyriens à cheval. Sur un bas-relief, Assur-ban-abal (667-626) est figuré debout en aA^ant de deux chevaux de selle tenus par la bride. D'après une inscription de Assour-nasir-habal (923-899), les chevaux montés auraient été cou- ramment employés à la guerre, en Assyrie et dans les pays limi- trophes, dès le x"^ siècle avant notre ève. Dans les inscriptions posté- rieures, il est constamment question de tributs de chevaux, de prise de cavaliers et de leurs chevaux, de levées d'hommes montés. Les Mèdes connaissaient l'usage du cheval monté en même temps que les Assyriens, sinon avant eux. En tout cas, héritiers de la puis- sance assyrienne vaincue par eux, ils furent sûrement pour beaucoup dans l'abandon des chars de guerre au profit de la cavalerie. L'hiéroglyphe du cheval ne se rencontre en Egypte, avons-nous dit, que dans les inscriptions de la fin de la xvii^ dynastie, c'est-à- dire qu'au moment de la ruine de la domination des Hyksos. Le cheval joue ensuite un rôle considérable dans les guerres de la xviii^ dynas- tie et surtout dans celles des xix<^ et xx« dynasties; mais c'est comme moteur de chars de guerre. Les chars de guerre furent en grand honneur. La cavalerie resta presque inconnue. Les cavaliers repro- duits exceptionnellement sur les monuments sont, soit des étran- gers, soit des gens qui se sont jetés à l'improviste sur un cheval sans selle pour fuir ou porter une nouvelle. Il en résulterait que les pasteurs Hyksos, contrairement à ce qu'on aurait pu croire, n'ont pas envahi l'Egypte montés sur des chevaux. Ce détail a de l'impor- tance. Mais, dans une inscription d'Amenophis II de la xviir dynas- tie, les Kliétas ou Hittites, un instant redoutables pour l'Egypte et qui étaient aussi de la même souche que les Mèdes, sont signalés comme montant à cheval. Amenophis II lui-même prit de sa main sur l'Euphrate vingt-six chevaux et dix-huit hommes qui les mon- taient. L'usage du cheval monté peut donc bien avoir été connu dans l'Asie antérieure, dès l'origine de l'empire Assyrien, et même avant le xvîii" siècle avant notre ère, qui est l'époque de la xviii^ dynastie. Mais il ne l'a sans doute pas été beaucoup avant, les Hyksos, ancêtres des Hittites, ne l'ayant point connu, semble-t-il. Les Scythes, qui se sont rejetés sur le sud de la Russie, étaient des cavaliers. Ils avaient des chariots comme les Kvmris ou Celtes, 8()0 ANTHROPOLOGIE et c'étaient « leurs seules maisons », Comme le dit Hérodote (IV, 46), « ils étaient habiles à tirer de l'arc étant à cheval. » Leurs tombeaux se distinguent par la présence constante d'os de chevaux, le cheval étant sacrifié chez eux ordinairement sur la tombe de son cavalier. Avec les harnachements, on a trouvé de véritables selles, preuve, d'ailleurs superflue, que leurs chevaux étaient montés. Les Scythes, nous l'avons vu, montaient encore surtout le petit cheval de la steppe. Leurs congénères d'Asie, les Saces, montaient ce même petit cheval encore après notre ère. Il est figuré sur leurs monnaies, trapu, bas sur jambes, à longs poils, à col court (Ballet. 1898, p. 80 et 1899, p. 708), tel qu'Hérodote décrit le cheval du Danube. Dans certains Koui'ganes scythes figurent des restes du grand cheval asiatique. Celui-ci ne leur était donc pas inconnu, puisque d'ailleurs eux avaient A'écu pendant de longs siècles dans l'Asie centrale, au moins en par- tie. Mais, s'ils l'ont introduit en Europe, ce n'est qu'après le vi^ siècle avant notre ère, époque de leur invasion. Il est fort possible qu'ils aient pris en Asie l'habitude quils avaient de vivre à cheval, puisqu'ils avaient été en contact avec les régions médiques où l'usage de la cavalerie est ancien. Lorsque Hérodote raconte les plus anciennes guerres d'Asie mi- neure (I. 27) , il dit que les peuples s'y préparaient « en achetant de grandes quantités de chevaux ». Il dit en particulier des Lydiens (I. 79) : « Ils combattaient à cheval avec de longues piques et étaient excellents cavaliers. » Lorsque Cyrus voulut attaquer Crésus, la cavalerie de celui-ci l'inquiéta. Pour la disperser, il usa d'un strata- gème en faisant avancer des rangées de chameaux dont la vue effraya les chevaux (542). Cyrus lui-même, d'ailleurs, avait de la cavalerie, sans chars de guerre. Son aïeul, le Mède Cyaxare (635-595), avait déjà, suivant Hérodote (I, io3), constitué une cavalerie à pai*t, « en divisant les peuples d'Asie en différents corps de troupes, les piquiers, les archers, les cavaliers. » L'usage de la cavalerie était donc commun chez les Mèdes comme chez les Assyriens. Il en était encore à cette époque, tout autrement en Euroj^e et chez les Gi'ecs. Hérodote, énumérant tous les peuples qui fournirent des contingents à Xerxès (VII , 84) pour envahir la Grèce (48o), dit : « Toutes ces nations ont de la cavalerie, bien que toutes n'en eussent point amené. La cavalerie perse était armée comme l'infanterie... » Mais aucune, sauf les Indiens, n'avait de chars de guerre. L'usage des chars était donc alors abandonné pour celui du cheval monté. La cavalerie des Perses fit beaucoup de mal aux Grecs (Héro- dote, IX, 189, 48, 4i)' ^1)' avant la bataille de Platée (479)- L'usage ZABOROWSKl. — LE CHEVAL DOMESTIQUE EN EUROPE 86l du cheval monté ne leur était pas inconnu. Mais ils n'avaient pas de cavalerie {Hérod., IX, 29). Le mal que leur fit la cavalerie perse leur servit de leçon et c'est seulement alors qu'ils se mirent à élever et à dresser des chevaux de selle (i). Il est bien facile de comprendre après cela que l'usage du cheval monté ait été encore inconnu dans le centre de l'Europe du temps d'Hérodote et, dans la Bretagne, du temps de César. Dans notre première antiquité classique, en Grèce même, le cheval monté n'était encore qu'un animal de luxe, les nomades de la steppe mis à part. Le but de son dressage, sa destination presque unique, c'était la guerre. On voyait en lui un animal héroïque, on en admirait la vitesse et la fougue. Sa longue éducation faisait de lui un certain cheval qui, préféré à tous les autres, n'a cependant pas supplanté complètement les vieilles races indigènes. Celles-ci, grandies par leur mélange avec lui, ont conservé des formes lourdes, peu gra- cieuses, mais aussi plus de résistance aux travaux grossiers. Tout en développant son emploi à la guerre, on a donc de plus en plus assu- jetti le cheval aux besoins vulgaires de l'homme et, en changeant de destination, il a changé de nom. L'ancien hellator eqiius disparaissait et à ce nom A'equiis, si complètement lié à celui du cavalier, du guerrier, se substituaient ceux de crt&«//H.s", deparaverediis. CahaUiis a d'abord le sens de mauvais cheval ou de « cheval de travail », mais, quoique bien tard venu, il pénètre dans les langues gauloises pour désigner tous les chevaux (irl. capall, bret. caveL Kymr. cefj^ll) et il est l'ancêtre des noms du cheval dans les langues romanes ou ayant des éléments d'origine latine (franc, cheval, italien, cavallo, rou- . main, cal, albanais, Kal). Paraçerediis servait d'abord à désigner le cheval employé au service des postes sur les lignes frontières et, d'après O. Schvader, il aurait été usité seulement au temps d'Au- guste, les Romains l'ayant alors tiré du Gaulois ço-i^eidos, kymr. g'onvj'dd, gaël. ?'èda « voiture ». C'est seulement au vi*^ ou vu'' siècle qu'il apparaît dans le vieux haut allemand pferfvit, dans le bas sMe- nmnd péi'id. Ces mots, en raison de l'utilisation nouvelle du cheval, ont remplacé ses anciens noms indigènes. Et c'est d'eux que vient le nom allemand actuel du cheval en général, pferd. Ainsi des emplois du cheval qui nous paraissent primitifs , telle- ment ils nous sont familiers, n'ont été de pratique courante dans l'Europe du centre et du nord que vers le vi^ siècle de notre ère. (i) Pausanias : « Apres Fcxpédition du roi des Mèdes, Xerxès, dans la Grèce, les Lacé- démoniens furent de tous les Grecs ceux qui s'adonnèrent le plus à élever des chevaux... » 862 ANTHROPOLOGIE Il serait après cela tout-à-fait déraisonnable de supposer que le cheval a pu être utilisé autrement que comme animal de boucherie, à l'époque néolithique. Nous tenons pour certain cjue les habitants des palafittes de l'âge de pierre, en Suisse, n'ont vu en lui qu'un gibier. Les protoaryens ont certainement vu en lui aussi, et avant tout, un animal de rapport, estimé seulement pour sa viande et peut- être, au moins dans la steppe, pour son lait. Ils ont complètement ionoré le cheval monté, le hellator eqiiiis des Assyriens et des peuples de l'Asie Mineure que les Grecs eux-mêmes n'ont élevé que tai'divement. Ils ont connu aussi le chariot, il est vrai, et il est suppo- sable, en conséquence, qu'ils savaient atteler le cheval à leurs cha- riots, comme le faisaient leurs descendants sur le Danube encore au temps d'Hérodote. Cela est seulement sup})osable. Il est possible éoalement qu'ils aient attelé des bœufs. Les Scythes eux-mêmes, connaissant cependant le cheval monté, attelaient des bœufs (Hérodote, lY, 69). Et bœufs et chevaux leur rendaient des services du même genre. Après nous avoir décrit comment ils faisaient cuire les chairs désossées du bœuf dans le ventre de l'animal, au-dessus d'un feu allumé avec ses propres os, Hérodote nous dit : « Ils immolent aussi d'autres animaux et principalement des chevaux » (IV, 61). Ces mœurs sont indubitablement un reflet, une survivance de l'époque j)rotoaryenne. M. BIAILLE Pharmacien à Chemillé (Maine-cl-Loire) SILEX ET OSSEMENTS TROUVÉS AU CONFLUENT DE LA LOIRE ET DU LAYON — Scance du 6 août — L'existence d'une station préhistorique moustérienne aux con- fluents des rivières le Jeu. le Layon et la Loire, est un fait local i)assé inaperçu en dehors d'un nombre restreint de personnes. Le terrain joignant cette station est formé d'alluvions et peu élevé au dessus du niveau de la Loire , une faible crue le transforme en un lac de plus d'un kilomètre d'étendue. Il en est ainsi de nos jours pendant une partie de l'hiver, et cet état pouvait bien être perma- nent autrefois. DE CHAREXCEV. — l'oRIGLNE AMÉRICAINE DU « PHASEOLUS VULGARIS )) 863 En bordure de cette région s'étendent de vastes amas ou, pour mieux dire, de récits coralliens de l'époque dévonienne. Le calcaire, de couleur foncée par suite de la présence d'une petite quantité de bitume, tournit, après calcination. une chaux blanche, liante et estimée. C'est en aménageant un chemin d'exploitation pour une carrière dite de Roc-en-Paille que fut mise à jour la station qui nous occupe. Elle se composait, au dire des ouvriers qui y ont travaillé, d'une vaste caverne par devant lacpielle se trouvait une muraille d'osse- ments de forme demi-circulaire , mesurant trois mètres à la base sur deux de hauteur. Le tout était recouvert par du sable et de l'argile. Le bruit de cette découverte insolite parvint au D"" Farge , d'An- gers, qui s'y transporta et l'étudia de concert avec M. Gaignard, vétérinaire à Chalonnes, commune dont dépend Roc-en-Paille. Il y fut reconnu une molaire d'éléphant, des dents d'ours, la la presque totalité étant formée d'ossements de cheval et de bœuf brisés pour l'extraction de la moelle — sous l'abri et épars çà et là divers instruments de silex. — Pour construire le chemin on enleva la roche surplombante et le tout demeura recouvert sous une épaisse couche de déblais. C'est dans ces conditions que j'ai fait les recherches qui m'ont permis de présenter au Congrès d'Angers des dents de cheval et de bœuf, un calcanéum de cervidé et de nombreux outils et pointes moustériennes. A en juger par l'étendue occupée, la population pouvait être nom- breuse sur ce point, y trouvant à vivre de chasse et de pêche , le lac formé au moment des crues de la Loire étant encore particulière- ment poissonneux de nos jours. M. le Comte de CHARENCEY à Paris DE L'ORIGINE AMÉRICAINE DU PHASEOLUS VULGARIS [581.9:412] Séance du S août — Lors de la réunion, à Berlin, du Congrès des Américanistes , un savant allemand a fait, plusieurs d'entre vous, sans doute, se le rappellent, une conununication relative à l'origine américaine de gg/J ANTHROPOLOGIE diverses sortes de Phaseolas et notamment de notre Haricot ordi- naire, de la plante api)elée « fa vol » en langage populaire (i). Yoiei, en résumé, les raisons par lui alléguées pour soutenir sa manière de voir. Tout d'abord, on ne rencontre ce végétal ni dans les tombeaux éo-yptiens , ni dans les palafittes de la Suisse , qui nous ont conservé tant d'échantillons de la flore cultivée par les hommes des anciens temps. Les descriptions que nous ont laissées divers auteurs, grecs ou latins, des légumineuses utilisées à leur époque, ne sont pas très détaillées et peuvent s'appliquer aussi bien à des représentants du genre Dolichos qu'à ceux du genre Phaseoliis (2). Au contraire, dès les débuts du xvi'^ siècle, c'est-à-dire jusqu'au moment de la découverte du Nouveau-Monde, les narrateurs nous parlent de diverses sortes de haricots comme faisant l'objet d'une culture très répandue chez une foule de tribus , tant du Nord que du Sud de l'Amérique. Notre auteur cite à ce propos Oviédo, Garci- Lasso de la Yega, Cieza de Léon et beaucoup d'autres. Enfin, dans les collections botaniques ra[)portées jadis de ces régions par Reisset Staebel. les graines de haricots figurent en abondance. Elles se rapportent à des variétés nettement tranchées, ce qui indique qu'on cultivait cette plante depuis longtemps. Au contraire, jusque vers la fin du xvi<^ siècle, elle était encore peu l'épandue en Europe. M. AVittmack cite, à ce propos, l'envoi d'un plat de haricots fait en 1679, par Nathan Chryseus, à son compère Samuel Schœnemann (Caloander). A cette curiosité, l'en- voyeur avait joint une pièce de vers latins hexamètres, apprenant la manière de faire cuire les graines expédiées. Sans entrer dans un examen plus détaillé de la question, bornons- nous à faire remarquer que certaines considérations philologiques nous paraissent militer en faveur de la thèse soutenue par le savant allemand. Dans la i)lupart des idiomes de l'Europe , le nom de ce végétal est formé par voie de composition plutôt que de dérivation, comme c'est le cas pour les xilantes dont l'introduction est relativement récente, la pomme de terre, par exemple. (1) :\r. Wittmack, Die Nutzpflanzcn dcr allen penwner, p. 334 <"* suivantes clos pul)li- calioiis du Congrès international des Aniéricanistcs ; compte rendu de la ;' session (Berlin , i8S8). (2) Ouelques écrivains on! ])arlé de foraines de haricot, trouvées a Pompei. mais je ne saclie'pas qu'elles aient lait Toluet d'une étude approfondie. Peut-être s'agit-il simple- ment de graines de lupin qui Curent longtemps très recherchées en qualité de comestible. < DE CHARENCEY. — l'oRIGINE AMERICAINE DU « PHASEOLUS VULGARIS » 865 Ainsi, le Phaseohis viilg-aris s'appellera, en Allemand. Schinink- bohne ou « fève fardée » , à cause sans doute de la couleur plus ou moins vive de ses graines; en Anglais, Kidnej'-hean , litt. « fève- rognon » , en raison de sa forme la plus habituelle ; en Hollandais , KUnihooiii ou « fève-lierre », parce que c'est le plus souvent une plante grimpante, ou Snijhoom, litt. « fève taillée » et également Wittehoom, litt. « fève blanche ». Pour simplifier les choses, le Magyar donne à la fois au haricot et à la fève le nom de Bah, qui est le h. Jaba. D'autres appellations indiquent d'une façon plus frappante encore une origine non seulement exotique, mais encore américaine. Si l'Espagnol désigne ce végétal par le terme de Jiidia, litt. « La plante juive », si l'Allemand lui donne également le nom de Tiie?^- kische hohne, litt. « fève Turque », cela ne nous fait-il pas voir que ce végétal avait été emprunté à des populations non chrétiennes et réputées guères plus hétérodoxes que les Hébreux ou les Musul- mans? » Ce n'est pas la première fois que nous voyons l'épithète de Turk appliquée à des produits essentiellement américains. Rap- pelons, à cet égard, notre Maïs ou « Blé de Turquie », le Tiirkey Cock, litt. « Poulet Turk » ou Tiirkej' qui est, en Anglais, le Dindon. Qu'on n'oublie pas non plus le India baba ou « fève d'Inde » dési- gnant le haricot en basque. Pour les premiers explorateurs, l'Amé- rique faisait partie de l'Inde et les indigènes de cette région sont encore aujourd'hui dénommés Indiens. Voilà pourquoi nous quali- fions de « Dindon » ou « Coq d'Inde », le gallinacé originaire des Etats-Unis. Enfin, il n'est par jusqu'à notre terme de haricot pour désigner le Phaseohis viilgaris qui ne constitue un argument en faveur de sa provenance américaine. Dès le xiv« siècle, le terme haricot ou mieux héricaiit, indiquait spécialement, non un légume, mais bien le ragoût appelé aujourd'hui encore Haricot de mouton. Mais d'où vient ce terme? On a voulu, nous dit Littré, le regarder comme pris à l'Arabe Hali-gote, lequel aurait désigné le mets en question. Tou- tefois, ce mot ne parait point se retrouver dans le lexique arabe. D'autres ont songé au latin Aliqiiot, litt,, « une portion quelconque », mais cette manière de voir donnerait lieu à plus d'une objection. L'opinion la plus acceptable ne serait-elle pas encore celle qui consiste à y voir les deux termes Iléri coctiis, « cuit de la veille » « mis à la cuisson dès la veille ». On concevrait, à la rigueur, cette métaphore pour indiquer un plat exigeant une cuisson assez prolongée, bien qu'elle n'ait jamais, sans doute, été de 24 heures. 55* 866 ANTHROPOLOGIE Quoi qu'il en soit, ce serait, d'après Génin, dans le cours du XVII* siècle que nous commençons à trouver la locution « fève de haricot » employée pour désigner la graine de cette légumineuse. Jusqu'alors, suivant toute apparence, elle portait le nom de « fève ». Aujourd'hui encore, en Normandie, on Ail fèi>e ou mieux feiwe, pour haricot , et cela par opposition au terme Goiirgane , vraisemldable- ment pris au Bas-Breton qui désigne la fèA e de marais. Deux raisons ont pu introduire l'emploi de la locution « fève de haricot », plus tard simplifiée en haricot. N'est-il pas tout d'abord, à supposer qu'avant l'emploi de la pomme de terre comme aliment usuel, lequel ne date en France que de la fin du xviii*= siècle, c'était surtout avec des graines de Phaseolus qu'on accommodait le ragoût de mouton? Un autre motif, toutefois, nous paraît pouvoir être allégué, et celui-là d'ordre purement philologique. Ce serait la ressemblance phonétique de notre mot haricot avec le vocable Aj'acatl, traduit par Mohna, dans son dictionnaire mexicain-espagnol, par //7Soi grueso, lequel pourrait bien n'être cjue le Phaseolus multijloriis ou « Haricot d'EsjDagne ». Sans doute on pourra nous ffùre observer que la langue mexicaine ne connaît pas le son /• et il restera à se deman- der comment lejr de Ayacatl aurait pu devenir un liquide guttural en Français. A cela nous ferons observer que l'existence d'une forme ancienne ou locale Aracatl n'offrirait cependant rien de bien étrange. En définitive, si le /' ne se rencontre pas dans l'Aztèque tel qu'on le parle aujourd'hui à Mexico, il a bien pu exister, dès une époque ancienne, dans certains dialectes de cet idiome. M. le capi- taine Maler nous a signalé, dans une localité dont nous ne nous rap- pelons plus le nom, l'emploi àe Citara « Etoile » au lieu du classique Citlatl. D'ailleurs, la transformation du /• enj^ send^le de règle dans le sud de la Nouvelle-Espagne. C'est ainsi que le Car « poisson » du Quiche ou Guatémalien est devenu Caj- dans le Maya du Yucatan. Il se serait donc passé pour notre terme haricot quelque chose d'analogue à ce qui, comme le conjecture M. Witmack, se serait déjà produit pour Fayol ou fq)'ot, nom populaire, parmi nous, du haricot. Ce serait sa ressemblance avec le mot frijol, ou frizol, frisol, probablement de provenance américaine lui aussi, qui aura décidé nos compatriotes à rendre synonyme de haricot le latin Phaseolus désignant une espèce indéterminée de légumineuses. Résumons-nous en disant que, suivant toute apparence, il convient d'ajouter les Phaseolus vuJgaris et inuliijlorus à la liste déjà si longue des végétaux farineux empruntés au nouveau Monde. DE CHARENCEY. — LES NOMS DES POINTS DE l'eSPACE 867 M. le Comte DE CHARENCEY à Paris LES NOMS DES POINTS DE L'ESPAGNE CHEZ LES PEUPLES CELTO-ITALIQUES ET GERMAINS [412] Séance du 6 août — TABLEAU des noms des points de l'espace chez les peuples de souche Italo-Geltique EST SUD OUEST NORD ITALO-CELTIQUE (restitué) Pareiteros Deksivos, Deksteros, Dehsos Eperos Nertros ? p A X C E r. T I(J l- E (restitué) Aveiferos JJeksns, Deksivos, Toutâ %- ■r. Y. '< «S a ■< a \ / 1° Vieux Gaulois (restitué) Aj'eiteros Deksos Deksivos j Eeros Toutâ Vokliyà il ' 2" Gallois Divyrain Deheii DeJiau, De Gorllewjn Gogledd •A f 3° Bas -Breton ou \ Armoricain \ Sdo-heol Sével-héol Kreisteiz Kùz-héol Klézé Hanter-noz Stéren \ 1° Irlandais Oirthear Deas lar, iarthar Tuath, Fochla < i 2° Ecossais ou Gaé- [ liffiie d'Ecosse Sios 1 Dcos [ lar Tvath •Ti LATIX 0 riens Ausfer. Xotns jSIeridies poiu- Media die s Occidens Septentrio < 1° Italien Levante, Oriente Mezzodi, Austro,Xoto Ponente, Occidente Settentrione Traniontana 2° Roumain Esta, resai'itu Meda-di, Su dit Vestu, Occident, Oeste, Occidente Nord il, Septintrione 3° Espagnol Este, Oriente, Levante Sur, Sud Xorte, Septentrion 1 4" Portugais Este. Leste, Oriente Meia-dia, Sut Oeste, Occidente Occident Xorte, Septentriào < 5° Vieux Provençal Orien Orient ]}[edia, Meidia Septentrio i i 6° Français Est, Levant, Orient Sud, Midi Ouest, Occident Nord, Septentrion 868 ANTHROPOLOGIE SUR LES NOMS DES POINTS DE L ESPACE CHEZ LES PEUPLES DE SOUCHE CELTO-ITALIQUE C'est un fait aujourd'hui acquis à la science que les ancêtres des deux familles Italique et Celtique ont jadis formé un groupe spécial au sein du rameau Indo-Européen et parlé un dialecte à part que nous pouvons, en partie au moins, rétablir d'une façon, il est vrai, quelque peu conjecturale. Les Italo-Celtes semblent , tout comme les Aryus pi*imitifs, aussi bien que les populations parlant le sanscrit, avoir conservé dans leur langage un témoignage de la coutume où ils étaient de s'orienter vers le Levant, de façon à avoir l'Est devant eux, l'Ouest derrière, le Sud à leur droite et le Nord à leur gauche (i). Chez eux, en effet, le Levant s'appelait Pai'eiteros (2), c'est-à-dii*e « Plus en avant » , forme comparative d'une préposition Parei ; « Près, en avant » à rapprocher du latin prœ ; grec Trot^aî ; Lithua- nien, prë. Comparez à ce mot préceltique le Sanskrit, Prâtchi « Est » et « En avant, devant ». Le p Aryaque touillant régulièrement en Celtique, on a eu dans la langue Préceltique, aussi bien qu'en Gaulois, Areiteros, d'où l'Irlan- dais Oirthear « Est ». Les autres dialectes Celtiques, aussi bien que ceux du groupe Latin, emploient, pour désigner ce point de l'esx^ace^ des termes d'origine différente. On a, en Gallois, dwjTain, litt. « Le côté de l'aurore, de Dwj'r ; « Aurore » (3). Le. Gaélique d'Ecosse Sios, Shios rappellerait davantage, quant au sens, le vocable Irlan- dais puisqu'il est synonyme de « En face, à l'opposite ». Enfin, le Bas-Breton Sao-héol rappelle un peu le Latin Oriejis, puisqu'il est l'équivalent de « Montée, levée du soleil » ; Cf. Sao, Sav, Sa ; « Levée, montée, élévation, levée d'un corps céleste et Heol; « Soleil ». Le Sud est naturellement la région de droite. Les formes Précel- tique et Gauloise cleksos, dekswo-s, dekstero-s « Droite » et «Midi, le» nous présentent la même racine que le sanskrit Dakchind , d'où le nom de la région du Dékkan qui constitue le Sud de la péninsule Indostanique. Cf. le latin dextera « droite ». Grec 5£=to; « qui est à droite » pour un primitif SrÇt tôç; Lithuanien, deszinè ; « La droite »► (i) Lo même sysItMiK^ d'orientation existe clicz les Sémites, ainsi qu'il a déjà été vomarqiié. D'autres iieuplcs, au contraire, et entre autres les Bouryétes et Tong-ouses de l'Est Sibérien, s'orientaient sur le Midi (Voir Castren, Xordischc Itciscn iintl Forschucn- gen (Grammaires des lang-ues lîouryète et Tongfouse). (2) ^ï. Wuitley-Stokks, Vcrkcltischer Schpra.schatz, art. (p)ara et (p)cv. (3) O'Brien.n, Irish Diclionary, i' vol., p. i6i. DE CHARENCEY. — LES NOMS DES rOIXTS DE l'eSPACE 869 Gothique Taihsvii, « A droite ». En tout cas, c'est bien ce Deksos primitif que nous rencontrons dansllrlandais et Gaélique d'Ecosse deas, dess; « Midi, Sud ». Gallois, deheu, dehaii (même sens). Cor- nique, dj-ghow, dyow. Le Bas-Breton dehoii, déoii, déeaii est subs- tantiellement le même mot, mais ne se prend que dans le sens spé- cial de « droite », par opposition à « la gauche ». Le Bas-Breton Kresteiz- « Sud » signifie « milieu du jour », de Kreiz « média pars » et Deiz, « Dies ». Le nom de l'Ouest a dû être quelque chose comme Eperos en Pré- celtique. Ce mot signifiait proprement « Postérieur, tardif, en arrière ». Cf. Sanskrit Prâtichi; « En arrière ». Grâce à la chute normale du p Indo-Européen en Celtique, Eperos a dû devenir Eeros en vieux Gaulois, d'où le lar de l'Irlandais « Ouest » et aussi « noir, obscur » ainsi que larthar signifiant spécialement l'Ouest d'une région déterminée, la « partie occidentale ». Le Gallois Gorllewyn, pour Occident, semble formé d'un ^o/' dind- nutif et deLLewin; « lumière ». L'Ouest est donc, par excellence, la région de la lumière affaiblie, id est du soleil couchant. Bemarquons que le gor avec valeur diminutive se retrouve encore dans le Gallois Govj'iiys; « presqu'île » de Ynj-s; « île », en Bas-Breton Goiirenez (Enez) « île ». Le même Goj' apparaît encore comme péjoratif, par exemple dans Gordderch « concubine », litt. « qui est l'objet d'un mauvais amour de Serch « Amoi' ». Comme l'a fait ressortir M. Er- nault, ce Go?' n'a rien à faire étymologiquement avec son homophone Gor, Goiir augmentatif du Breton et du Gallois , lequel était Ver en vieux Gaulois, ainsi que le prouvent les noms propres Vercingétorix, Vergassilaunus, Veromandiii. Ajoutons enfin que le Ver en question n'est autre chose que le ivep du grec ; Super du latin, Ueher de l'Al- lemand. L'Armoricain désigne ce même point de l'espace par les mots Â'u-î- Héol, litt. « Cachette du soleil », Cf. Kuz ; « cachette, coucher d'un astre », l'antithèse de Sevel-Héol, nom de l'Orient ou Klézé dont l'origine reste obscure, peut-être apparenté au gallois Kled <( à gauche », mais non avec le Bas-Breton Klézé « Epée ». Reste le nom du Nord, dont la forme la plus archaïque est difiicile à déterminer. Laissons de côté le vieux gaulois Vo-KUj^â dont il va être question tout à l'heure. On a en Ombrien iVerfro ; « gauche, la » et Nertiikii; « Ad sinistram » à rapprocher, sans doute, du grec THiprspoi \ « Inférieur, situé plus bas » et, par extension, « Mort, défunt ». Or, ce terme Ombrien paraît bien se retrouver comme le fait ressortir M. Kluge dans l'Allemand Nord; « Septentrion, 870 ANTHROPOLOGIE nord (i) ». Mais, d'autre part, il est bien diflicilc que ce mot ait passé directement de l'Italie centrale en Germanie. Le plus sûr serait de supposer qu'il a dû y être porté par les Gaulois. Il aurait donc, à l'origine, été commun aux Celtes et aux Italietes. Au reste, cette assimilation du Nord et de la Gauche semble pour ainsi dire forcée chez des peuples qui s'orientaient sur le Soleil levant. Un autre terme pour le même point de l'espace dut être commun, jadis, au moins, à toutes les tribus de race Celtique. On le retrouve, en Irlandais, sous la forme fochla ; en Gallois, sous la forme Gogledd. Rapprochez-en le Bas-Breton Gwalern , « Septentrional » . d'où notre terme Galerne , « vent du Nord-Ouest » dont le diction- naire de Darmesteter déclare l'origine incertaine. Tout ceci suppose- rait un vieux gaulois Vo-Kliyâ; « Nord » litt. « Vers la Gauche » Cl. Irlandais, Clé; « Gauche la »; Vieux Gallois, Cled; Gallois moderne, Cledd; Bas-Breton, A7f/;.; Gaulois (hypothétique), Klij'o-s: « Laevus ». L'Armoricain Hanter-Nôz signifie litt. « Minuit »; Cf. Hanter, hanter, « Moitié » et Nôz « nuit ». Le Nord, dans cet idiome, c'est donc le « côté de la moitié de la nuit », de même que Kresteiz-, « l'Orient » Gb le « côté de la moitié du jour ». Un autre mot dési- gnant chez nos Bretons le même point de l'espace, c'est Stéren, Stérenn; « Étoile » et, spécialement, l'Etoile polaire. Passons maintenant à Tuât h, autre nom du Septentrion en Irlan- dais et en Gaélique d'Ecosse. Ce terme signifie également « La gauche ». Irlandais Tuaith; « au nord » et Tuathum; « à ma gauche ». L'origine première de ces termes reste assez obscure. Ils suppose- raient en Gaulois une forme Toiitâ qui devait déjà posséder le sens de « Peuple, tribu »: Cf. Gallois, Tùd\ « Terre »; Comique, Tus; Bas-Breton, Tud; « Nation, peuple », ainsi que l'Ombrien Toto; « Ville, Cité ». Osque, Tmitu; « Peuple »; Gothique. Thiuda; « Nation, peuplade ». On ne voit pas trop quelle relation aurait pu exister entre les idées de « Peuple » et de « Nord ». Préférera-t-on adopter comme conforme à la réalité des faits l'hypothèse émise par M. Whittey-Stokes . que ce Tuât h pourrait bien être apparenté au Gothique Thhith; « Dieu? » Le Nord serait donc le côté sacré par excellence. On sait que, d'après la mythologie Étrusque, le septentrion passait pour le séjour des dieux. Il faudrait convenir que, sur ce point, les Celtes se trouvaient à l'antipode des Sémites, pour lesquels (1) M. Kluge, Etymologisches Wœrterlnich ilrr Deutschrn Spraclw, Arb. Xord. DE CHARENCEY. — LES NOMS DES POINTS DE l'eSPACE 87I le Sud constituait la région favorable par excellence, comme le prouve le nom cl" Arabie-heureuse donnée à la portion la plus méri- dionale de la Péninsule Arabique, et cela par opposition à l'Orient, qui était le point sacré et consacré par la religion. Chez les peuples de race latine, le souvenir de l'orientation primi- tive ne semble pas s'être aussi fidèlement maintenu, du moins en ce qui concerne les noms des plages de l'Univers. Il n'y a guère que dans le nom de Nord que nous puissions en retrouver une réminis- cence. Encore s'agit-il ici.d'un terme visiblement pris au Germanique, et cela à une époque relativement assez moderne. Le latin O viens et Occidens signifient simplement l'endroit où le soleil se lève et se couche. Aiisfer, pris comme synonyme de « Sud, Midi », désignait primitivement le vent du Midi et dérive du Grec Auoj « sécher, souffler, dessécher ». C'est le vent brûlant ou plutôt qui apporte la sécheresse. Il est à remarquer que le vent, très humide dans l'archi- pel et une partie de la Grèce continentale, est, au contraire, fort sec dans le Latium. Un autre mot également d'origine Hellénique, servant à désigner le même point du Rhumb, c'est Notas qui, à l'ori- gine, s'appliquait spécialement au vent méridional. Reconnaissons-y le Grec Nôto? « Midi, vent du Midi », que l'on a voulu dériver de NoTt'ç « humidité ». Reste enfin le terme Septentrio pour le Nord. L'on est d'accord, aujourd'hui, pour y reconnaître un composé de Septeni triones ou mieux Septem Striones, litt. « les sept astres » (i), et cela par allu- sion aux sept étoiles de la Grande-Ourse située dans la portion boréale du firmament. L'opinion de Varron, étymologiste si sujet à caution, comme l'on sait, et qui traduisait Septentrio par les sept bœufs de labour, est reconnue aujourd'hui insoutenable. Les noms latins des points de l'espace ont passé dans les dialectes Romans. Quelques autres comme l'Italien et l'Espagnol Levante, litt. « l'endroit où le soleil se lève », l'Italien Ponente « Ouest », litt. « la place où se pose le soleil à son coucher »; Tramontana \)o\yv « Nord », litt. « la région d'au-delà des montagnes, de la chaîne des Alpes », sont encore d'origine latine. Peu avant le xii^ siècle, suivant toute apparence, les noms germaniques ont commencé à pénétrer dans le domaine Roman, et cela sans doute, par la langue d'Oil ou Français du Nord. Nous en étudierons tout à l'heure la signification (i) Th. MoMSSEN. Histoire romaine, trad. de :\I. de Guérie, t. I", chap. xiii, p. 236 (BruxeUes, i863). (2) M. Max MuELLER. Nouvelles leçons sur la science du Langage, trad. de MM. G. Har- ris et G. Perrot, II, Q" leçon, p. 6j (l?aris, 1867). 8^2 AXTHUOl'OLOGIE primitive. N'oublions pas qu'on ne rencontre pas encore ces termes exotiques dans le lexique du vieux Provençal, mais qu'ils ont passé jusque dans l'idiome Roumain, si séparé toutefois. géograi)liique- ment, de ses congénères. Enfin, le Portugais, Lest pour « Orient », nous offre un nouvel exemple de laccolement de l'article qui suit, tout comme l'Italien, Lordiira, pour La ordiira\ le Français Lierre du latin Illa hedera. II. — TABLEAU des noms des points de l'espace chez les peuples germaniques EST SUD OUEST yoRt» Vieux Haut-x\llemand Ôfitan Sandan Wcstan Aord Moyeu Haul-Alleuiaud Ôsten Siuiden ^^'esten \ort Allemand Osten Siied Siieden Westen Novden Ôst Sùth West Xoî'th Auffln-Saxon East Sùdh West North Aiifflciis East South West North Oosteii Zuid, Zuyd Ziiiden West Xooi'd Vipiix Norraiu Aiistr Sunnaii (au Sud) Vestr Noi'dr Suédois Oester Sœder, Sj-d ^'estel- yord, DOIT SUR LES XOMS DES POINTS DE LESPACE CHEZ LES PEUPLES GERMALNS L'Allemand Osten, tout comme notre mot Est qui lui est appa- renté, semble signifier simplement ï Aurore; Cf. L'Indo-Européen Aiisôs ; Sanskrit, Ushâs « Aurore » ; Latin, Aurorn poui- un archaïque Aiisosa, de même que Aiiriim « Or », pour une vieille forme sabine Ausiim, d'après Festus. Cf. le Grec Hwç « Aurore, aube, point du DE CHARENCEY. — LES NOMS DES POINTS DE l'eSPACE 8^3 jour », pour un primitif Hçôç ; Lithuanien, Aiizrà, de la racine Ush « briller, être ardent, brûlant ». Le terme Siied, Siieden, est pour un primitif ^M/îrfe/î. Le ii médial s'est conservé en vieux et moyen Haut-Allemand. Il a disparu, croit-on, de l'Allemand moderne, de T Anglo-Saxon et de l'Anglais, sous l'influence du Hollandais ou du Bas-Allemand. Encore s'est-il maintenu exceptionnellement jusqu'à ce jour, dans certains noms propres Allemands, par exemple Sundgaii, Siindheim. L'origine première du nom de ce point de l'horizon reste obscure. Ne convien- drait-il pas de lé rapprocher du Gothique Siinnô « Soleil »; litt. « le côté du soleil ». On hésite également, en ce qui concerne la provenance de Westen, <{ Ouest ». Pictet voudrait y voir un dérivé d'un terme signifiant le désert; Cf. Anglo-Saxon, Westen, Weste, West « desertum»; Vieux Haut- Allemand. ITo.s^/; Vieux Norrain, Vast, Fœs^ « pelagus » dont il conviendrait peut être de rapprocher le latin Vastiis, Vastiim, « dévasté, ravagé », aussi bien que Sanskrit Vas, Vast « Interficere, occidere », d'où Vasra, « Mors », Vasu, « sec, stérile » (i). Cette étymologie semble avoir été inspirée au savant Genevois par sa façon de voir relativement au berceau de la race Indo-Européenne. Il la plaçait, on le sait, dans les vallées de la Bactriane. Le séjour de nos premiers aïeux aurait donc été borné à l'Ouest par un désert de sables confinant à la Caspienne. Nous serions plus portés, je l'avoue, à nous ranger à lopinion de M. Kluge, lequel voit dans Westen, un mot à rapprocher du Grec kçnépx « soir, crépuscule » pour un ancien Eéçnspx, du latin Vesper, m. s. Il a été question plus haut de l'explication à donner pour Norden, le nom Allemand du septentrion et nous n'avons pas à y revenir ici. (i) A. Pictet. Les origines Indo-Eiiropéennes ou les Aiyas primitifs, t. I", cliap. v, p. 112 (Paris, iSSg). 874 ANTHROPOLOGIE M. A. LEDOUBLE à Tours A PROPOS DE DEUX CRÊTES OCCIPITALES EXTERNES APOPHYSAIRES HUMAINES [611.91] — Séance du S août — La crête médiane longitudinale qui s'étend de la protubérance occipitale externe à Topisthion peut faire entièrement ou partielle- ment défaut. En général elle est peu prononcée et toujom's moins en haut qu'en bas. Sur le crâne d"un Hindou qui m*a été donné par le docteur Orillard, de Richelieu, et qui provient de la collection phrénologique de Boussais. elle manque complètement. Je possède deux crânes très curieux que je décris succintement : I. Crâne asymétrique d'une phtisique, décédée en i8()5, à l'âg-e de 28 ans, à rhùpital général de Tours. Bosse frontale gauche et bosse occipitale droite très fortes; bosses pariétales presque effacées. Sutures crâniemies très apparentes. Suture incisiAC complètement sjTiostosée. Dia- mètre antéro-postéi'ieur maxinumi 179,9. Diamètre transverse 142,8. hidice cépha- Uque 79.3. Diamètre vertical ou basilo- bregmatique i32,i. Inchce vertical 73,4. Courbe frontale 17,4. Coiu-be pariétale 124,5. Courbe occipitale sous-iniaque 69,9. Largeur bizygoinalique i32.i. Lon- gvieur de la face 80,4- Indice facial 65,4- Indice orbitaire 89,1. L'occipital n'offïe rien d'anormal, sauf sa crête longitudinale postérieure (jui, peu marquée dans ses tleux tiers supé- rieurs, est formée, dans son tiers mfé- rieur, par une mince lamelle quadran- gulaire apophysaire. Des quatre bords , de cette lamelle, l'antérieur est curvi- igne (voy. le dessin ci-conlre); le postérieur vertical est renllé; le supé- rieur , obUque de haut en bas et d'avant en arrière et tranchant ; l'infé- rieur, rectiligne. Le bord antérieur adhérant au suroccipilal est séparé du bord postérieur lil)re par un iiUervalle de deux centimètres. FiG. I. A. LEDOUBLE. — CUÈTES OCCIPITALES EXTERXES APOPHYSAIRES 875 IL Crâne d'une femme adulte, dépourvu de maxillaire, provenant du cimetière désaffecté Saint-Jean-des-Couiis , à Tours. Ce crâne m'a été montré, le lo juillet 1908, par le docteur Bougrier, de Tours, mon ancien prosec- teur, auquel il appartient. La crête longitudiiiale postérieure de l'occipital, jieu accusée dans ses deux tiers supérieurs (voy. également le dessin ci- contre), est constituée dans son tiers infé- rieur par une éminence apophysaii'e apla- tie transversalement et triangulaire. Des trois bords de cette aj^ophyse, l'un anté- rieur est curviligne , l'autre postérieur est oblique de haut en bas et d'avant en arrière , le troisième inférieur est presque horizontal. Ce dernier mesure environ 2 centimètres 5 de longueur. Fig. 2. Un des arguments allégués en faveur de la théorie vertébrale du crâne est la transformation que subit d'une espèce dans une autre le suroccipital assimilé à la neurépine ou apophyse épineuse qui, avec les neurapophyses ou lame complète l'arc neural des vertèbres rachidiennes. Le suroccipital des Poissons est une crête verticale ne prenant aucune part à la formation de la cavité crânienne, tandis que le suroccipital de l'homme, représenté par une écaille plate, large , entre pour une grande part dans la composition de la voûte du crâne ; et cependant ces deux os sont rigoureusement homologues, au dire des partisans de la théorie vertébrale du crâne. Suivez le développement de plus en plus considérable de l'encéphale dans les vertébrés et examinez en même temps les modifications successives du suroccipital, vous verrez cet os d'abord réduit, remarquent-ils à l'état d'une simple crête verticale (Poissons), se dédoul^ler et s'étaler davantage (Reptiles, Oiseaux) et échanger son aspect apophyséal contre celui d'une large lame épanouie (Mammifères). Si, ajoutent- ils, cet os a pris chez les Mammifères et plus particulièrement chez l'homme la forme d'une large écaille, c'est pour s'adapter à l'aug- mentation de volume des organes nerveux sous-jacents qu'il protège. Pour continuer à jouer son rôle de protection à l'égard du neAa*axe, il devait se modifier comme il l'a fait et se mouler pour ainsi dire sm' le cervelet, qu'il protège à la façon d'une cuirasse. Au niveau de la colonne vertébrale, le nevraxe reste une tige cylindroïde relative- ment peu volumineuse, les lames vertébrales (neurapophyses) peuvent se réunir et couvrir la moelle en arrière ; le point d'ossifi- cation de l'apophyse épineuse (neurépine) est un point d'ossification 8-6 ANTHROPOLOGIE complémentaire qui n'apparaît que tardivement Au niveau du crâne, au contraire, le nevraxe se dilate énormément pour former l'encéphale; les lames de la vertèbre occipitale (ex-occipitaux) ne peuvent plus se rejoindre en arrière pour couvrir le nevraxe dorsa- lement, l'existence d'un nouvel os, large et adapté à la jonction, s'impose de bonne heure. Cet os, c'est le suroccipital. Les deux crânes sus-indiqués , pourvus d'une crête apophysaire rappelant celle des vertèbres rachidiennes , sont des pièces qui apportent un nouvel argument à cette thèse. D'un autre côté, il est évident que , si l'apophyse épineuse des vertèbres se développe aux dépens d'un seul point d'ossification — mais est-ce bien prouvé ? — elle ne peut être assimilée au surocipital qui est précédé par deux. M. DELORT Ancien Professeur à Cosne SÉPULTURE GAULOISE DES BOIS DE CELLES, PRÈS NEUSSARGUES (CANTAL), DANS LAQUELLE ON RETROUVE DES TRACES DE LA CIVILISATION DES NÉCROPOLES DE TIRYNTHE, HALLSTATT, ESTE ET LA TÈNE. [57i.3(44.8i)] — Séance du S août — « On soupçonnait, depuis longtemps, que rOrient possédait la clef de notre archéolo- gie préhistorique. » Matériaux, 1886. Les rivières, que l'on a comparées à des chemins qui marchent, nous représentent aussi des voies de pénétration au moyen desquelles les races primitives nous ont successivement apporté les bienfaits de la civilisation. Entre tous les cours d'eau de la Haute- Auvergne, celui d' Allagnon, qui débouche si heureusement dans la fertile Limagne, semble avoir été une voie de pénétration de premier ordre à tous les âges. C'est par la vallée d' Allagnon qu'ont dû arriver jusqu'à Neussargues les races esquimaudes qui, à l'époque du Renne, vinrent à l'abri de ses roches basaltiques, y établir leur première colonie connue dans le Cantal et y tailler l'outillage en silex recueilli en 1879 sur la rive gauche, au lieu dit les Ciizei's. DELOKT. — SÉPULTURE GAULOISE DES BOIS DE CELLES 8^7 C'est par la même vallée sans doute qu'arrivèrent les Gaulois de l'époque de la Tène , qui érigèrent sur la rive droite d'Allagnon ces imposantes mottes tumulaires dont l'une vient d'être l'objet de fouilles importantes de la part d'un habitant de Murât, qui sait utile- ment et agréablement faire usage des dons que dame Nature et la fortune lui ont départies. Cet heureux fouilleur, M. Pagès-Allary, était à la recherche des richesses minéralogiques de la vallée, lorsque sa bonne étoile l'a fait tomber sur une sépulture du plus haut intérêt pour l'étude de l'his- toire locale et de l'anthropologie en général. C'est un tumulus érigé sur une petite plate-forme morainique des bois de la commune de Celles, dominant la vallée et la gare de Neussargues. presque en face des Ciizers. Cette motte tumulaire, sm^ laquelle ont poussé toutes les essences constitutives de nos forêts cantaliennes , ne mesui^e pas moins de vingt mètres de diamètre. L'amoncellement fait, comme dans la plupart de ces antiques sépul- tures de terre et de pierres, avait pour base artificielle une sole cons- tituée par des pierres plates, sur lesquelles reposaient les restes de la crémation : terre noirâtre, mêlée de traces d'ossements, de charbons, de cendres et de minuscules débris de poterie. Ces restes ainsi accumulés avaient été soigneusement recouverts de grosses pierres liées entre elles , à leur partie supérieure, par une calotte d'argile, à laquelle adhéraient des pierres plates, disposition analogue à l'une des sépultm^es de Mons. Avec l'amoncellement de terre et de pierrailles qui terminait le cône, ces restes mortuaires étaient assurément à l'abri de la griffe des plus grands fauves. Malgré le lien de parenté que nous venons de constater entre cette sépulture et l'une des plus importantes de Mons, elles ne sont pas contemporaines. Celle de Mons, par sa belle coupe en bronze martelé et la bouteroUe de Tune de ses grandes épées (Voir : Dix années de fouilles en Auvergne, PL XXIV), appartient à l'époque gauloise de Hallstatt , première du fer, tandis que la sépulture des Bois de Celles, avec ses armes et son outillage en fer, nous paraît caractéristique de la Tène ou deuxième du fer, correspondant à notre époque marnienne. Ces lignes écrites, nous avons cru devoir consulter le Musée de Berne , héritier des trouvailles de la Tène ; voici ce qu'a bien voulu nous répondre le Directeur de ce Musée : 8^8 ANTIIUOPOLOGIE (c Berne, le i5 Juillet iique des urnes sorties des sépultures gauloises de Hallstatt, moins, bien entendu, les mamelons de la fin de l'âge du bronze. Ceux de nos compatriotes qu'intéressent les choses du passé trou- veront un terme de comparaison plus près d'eux. Qu'ils ouvrent Dix années de fouilles, à la planche XI, fig. 24. qu'ils allongent les côtés du cône tronqué que représente l'assielle provenant de la DELORT. — SÉPULTURE GAULOISE DES BOIS DE CELLES 8-9 villa Gallo-i'omaine de Roneyre-Yieillos et ils auront exactement la forme traditionnelle du vase de Celles. C'est la forme des urnes à cône reiwersé des nécropoles hallstattiennes si bien étudiées par M. Chantre. A la date du aS juin, M. Pages voulut bien nous annoncer un nou- veau succès. Il s'agissait de la restitution d'une nouvelle urne beau- coup plus grande. Jugez vous-mêmes de la splendeur de cette urne aux formes élancées des urnes estéennes de l'Italie atteignant gra- cieusement une hauteur de 5o cent, et ayant pour base un svelte quart de rond de i3 cent, de diamètre. Figurez-vous une céramique à pâte rouge recouverte de ces vieux motifs d'ornementation à cou- leur plus foncée, recouvrez le tout d'une sorte de vernis luisant et vous aurez une idée de l'urne magistrale de cette sépulture. La plupart de ces motifs d'ornementation en lignes parallèles ondulées nous ont paru d'inspiration grecque et ne pouvaient être comparés qu'à cette curieuse céramique dite de décoration géomé- trique, que Schliemann avait sortie des ruines du Tirynthe (Voir Matériaux, i885. p. 19-). Seule . la sépulture dolménique de Fraissinet avait présenté un tel luxe de céramique ; elle a donné les restes d'une vingtaine d'urnes ou vases différents. Toute cette céramique, petite ou grande, fine ou grossière, à Fraissinet comme à Celles, est à base de mica. Parmi les objets en terre cuite de cette dernière sépulture, il con- vient de citer une jolie fusaïole. Cet instrument de filature avait déjà été recueilli dans les tumulus de Liozargues et de Barret(Ande- lat). Quant aux objets en fer, rien de semblable n'avait été rencontré jusqu'ici dans nos antiques sépultures. En remuant celles de Mons, la première chose qui frappait les regards c'était les épées, et il n'était pas diflieile de conclure en faveur de tombeaux de guerriers. A Celles, l'observateur est tenu à plus de réserve. Il y a bien ici une tête de lance, un coutelas et quelques pointes qui ont pu servir d'armes d'hast (i), mais c'est tout. Parmi les outils c'est autre chose, la série en est longue et inté- ressante : marteau, petites pinces, scies, poinçons, foret, lime, râpe, mèches diverses, etc. Le tout en fer, confirmant ce passage de M. Chantre dans son étude des nécropoles hallstattiennes. « Le fer, qui n'y est représenté (dans les sépultures de la première époque de (i) Parmi ces pointes il en est une semblable à celle qui a été recueillie à Uxellodu- num et qui est réputée pointe de dard ou Jev de dard. (Voir Congr. archéol. Ageii et Toulouse, i8-5.) 88o ANTHROPOLOGIE ce métal) que x^ar un certain nombre de pièces, va devenir i^répon- dérant dans les outils usuels. » Quelques-uns de ces outils méi'itent toute l'attention; telles sont les deux scies à manche et de dimensions différentes. La petite est à dents excessivement fines. La seconde, une grande lame curviligne à double rangée de dents, a son bord aminci comme dans nos modernes scies à guichet. Nous croyons devoir citer ici l'appréciation d'un érudit sur la civi- lisation gauloise à cette époque : « La sculpture n'existait pas à pro- prement parler, chez les Gaulois, avant l'époque romaine. L'art monétaire est absolument barbare. Les instruments employés par les industries manuelles sont, au contraii^e, très près d'avoir atteint la perfection chez eux et c'est à peine si les ustensiles dont nous nous servons aujourd'hui présentent avec les leurs des différences sen- sibles. (Desjardins. Géog. hist. et administrât, de la Gaule romaine, tome II, p. 566.) Les petits anneaux en bronze, nombreux dans les sépultures de Mons , reparaissent dans celle de Celles , au nombre de deux , avec deux plaquettes du même métal. Au dire du docteur Much, de Vienne , la forme en anneaux paraît être la plus anciennement donnée à la monnaie. Ces anneaux, qu'un archéologue danois, S. Mûller, appelle anneaux de paiement, ont été recueillis en cinq endroits différents du terri- toire de l'ancienne Arvernie : 1° Dans la sépulture dolménique de Fraissinet; 2° Dans les tumulus de Mons; 3° Parmi les ruines de la villa gallo-romaine du Pré de Pâques (Faubourg de Saint-Flour) ; 4° Dans l'oppidum de Chastel-sur-]Murat; 5° Enfin dans la sépulture qui nous occupe. On sait que, parmi les signes symlooliques figurant sur les monnaies gauloises, Y anneau intervient très souvent, ainsi qu'on a pu le voir sur l'exemplaire de la médaille de Verga trouvé à Saint-Flour. Nous avons recueilli quatre de ces anneaux dans les grottes de l'Yonne. Les deux anneaux trouvés dans la nécropole de Pougues-les-Bains se trouvent avoir la même dimension que le plus grand de ceux de Mons : 25 millim. de diam. Le petit anneau du dolmen de Fraissinet et présenté parmi d'autres documents au Congrès de Montpellier, 1879, se trouva en parfaite DELORT. — SÉPULTURE GAULOISE DES BOIS DE CELLES 88l adaptation avec un des moules provenant des palafittes de la Suisse, exhibés alors par le D^ Goss, de Neuville, celui-là même à qui la science doit les importantes fouilles de la Tène. Cette corrélation entre la civilisation des peuplades gauloises de l'Helvétie et celles de l'Arvernie n'est pas un fait isolé, ainsi cjuon a pu sen convaincre dans l'étude de notre céramique. (Voyez art. Urne apode de Coltines). Pour en finir avec la c{uestion des anneaux monnaies, rappelons que le sens de richesse attribué à cette forme primitive de la mon- naie semble se retrouver dans, notre vieille locution : çie et bague sauve. L'étude attentive de la sépulture de Celles, les soins de toutes sortes que ses pieux constructeurs ont apportés à son érection, dé- notent un peuple qui a déjà pris ses cantonnements dans nos parages et dont rien nest venu troubler le paisible labeur. La découverte de la sépulture gauloise des bois de Celles vient ajouter un nouveau lustre à cette partie de l'ancienne Gaule , depuis quelque temps si féconde en découvertes du passé. Qui n'admirerait les précieux documents accumulés, comme à plaisir, par l'archéologie, sœur de l'histoire, autour de cette sépul- ture ! Jamais nouvelle épousée porta-t-elle sur son front pareille couronne ? Elle a pour fleurons principaux six stations remarquables, qui ne dépareraient nullement les fastes du Dictionnaire archéologique de l'ancienne Gaule; nous avons nommé Chastel, Chavagnac de Murât, Recoules, Sainte-Anastasie, Le Sailhant et Saint-Floui% toutes locali- tés qui ont donné des monnaies gauloises. Bibliographie. — Pour ce qui concerne ces six stations, consul- ter : Châteaux, Xoiwelles et Légendes d'Auvergne, x\urillac 1888. A travers le Cantal et la Lozère, Romans 1891. Dix années de fouilles en Auvergne, Lyon 1901. 56* 882 ANTHROPOLOGIE M. ZABOROWSKI Pi'ofessour-Atljoiiit a l'Ecole iVaiilliropologic, à Thiais COMMENT EST RÉSOLUE LA QUESTION D'ORIGINE DES PEUPLES ARYENS DE L'ASIE [372.891] — Séance ihi S août — Après une série d'études }jréalal)les, études principalement crânio- logiques, sur les populations anciennes et actuelles de la Russie méri- dionale, de la Sibérie occidentale, du Turkestan, dumassii'pamirien, du Caucase, j'ai pu, les premiers tâtonnements mis de côté, résoudre définitivement le problème si complexe des origines aryennes, en suivant d'aljord pas à pas l'aryanisation de l'Asie et en montrant comment et par qui elle a été ell'ectuée. Ça été l'olijet de mon cours de l'hiver dernier à l'École d'anthropologie. Je n'en ai publié que la leçon inaugurale, de sorte que, pour beau- coup, même pour la plupart de ceux que la question intéresse, l'œuvre accomplie est encore inexistante. Dans une polémique encore toute récente, j'ai vu invoquer mon témoignage en faveur même des opi- nions anciennes que j'ai peut-être le plus contribué à renverser. Des ouvrages parus depuis cet hiver, tout en mettant largement à profit mes mémoires spéciaux, ceux publiés dans les Bulletins de la Société d' Anthropologie en particulier, s'arrêtent eux-mêmes à mi-chemin des solutions , accommodent un peu mes travaux à leur manière de voir, ou interprètent mes opinions d'une manière parfois peu exacte. Ces circonstances me créent une situation un peu gênante. Bien que j'aie donné les conclusions que je prévoyais devoir s'imposer à moi, il y a déjà bien des années, j'ai un peu l'air d'attendre que les autres aient déblayé le terrain ou se soient prononcés, pour arrêter mon jugement. Je m'expose ainsi à me voir contester toute priorité dans les solutions définitiAes, qui vont se substituer maintenant à coup sur aux soli^tions traditionnelles, depuis longtemps rcjetécs hors du cadre des théories démontrables, des faits observables. Je tiens donc à dire ici que , si mon cours de l'hiver dernier n'est pas publié, c'est malgré moi. Et une des comnnniications qui m'ont été envoyées, celle de M. GiulTrida Ruggieri, est une bonne occasion pour donner au moins le canevas de ce que j'ai fait, montrer quelles ZABOROWSKI. — ORIGIXE DES PEUPLES ARYENS DE l'aSIE 883 voies j'ai suivies et à quoi par elles j'ai été fatalement conduit. Le point de départ de mes recherches, comme la fort exactement rap- pelé M. G. Ruggieri, est la constation faite par moi, qu'il n'y avait eu aucun passage de peuples asiatiques par la Russie méridionale avant l'invasion tout historique des Scythes, qui n'étaient j)as eux- mêmes de purs asiatiques. Pendant de longues années, on s'est obstiné à chercher dans l'Asie centrale le peuple protoaryen ou quelques-uns de ses plus purs représentants et à nous donner les Centre-Asiates comme des ancêtres communs à tous les peuples indo-européens, en particulier aux Hindous d'une part, aux Iraniens de l'autre. Or, ces recherches ont eu un résultat, et il est indéniable : c'est de prouver justement qu'il n'y a pas eu là, qu'il n'y a pas de peuple protoaryen. Les peuples du Centi-e-Asie, loin de présenter un point de départ commun pour la langue, ou un point de jonction et un lien entre deux ou plusieurs sections des groupes aryens , sont formés de restes de populations d'origines diverses et éloignées. Entre les deux groupes hindous et iraniens, on ne trouve nulle part peut-être de distinctions plus tranchées que dans le Centre- Asie. Les habitants aryens des vallées de IHindou-Kouch se rattachent presque exclusi- vement au groupe hindou par leurs caractères essentiels. Les habi- tants des vallées prépamiriennes se rattachent presque exclusive- ment au groupe iranien et persan. Toutes les influences observées dans la langue et les mœurs des uns et des autres sont modernes. Les plus anciennes ne peuvent pas être données comme de beaucoup antérieures à notre ère. Et comme, cex^endant, dans les vallées i)ré- j)amiricnnes , les caractères physiques des habitants se sont mieux conservés que dans les plaines, ils ne présentent pas toujours les transitions multiples qu'on observe entre les Persans, les Afghans et les Hindous. Les Prépamiriens sont en général plus distants des indigènes de l'Hindou-Kouch que les Persans le sont des Afghans, des Hindous. Ils sont presque exclusivement brachycéphales par exemple, alors que les indigènes de l'Hindou-Kouch sont exclusive- ment Dolichocéphales, de même que les Hindous. Et les uns et les autres relèvent ainsi, du moins pris en masse, des éléments préaryens des régions d'où dépendent leurs hautes vallées. Il y a chez eux tous un élément commun, ou des traces d'un même élément blond ; et on a jadis attaché une importance capitale à la présence de cet élément à coup sûr aryen de sang comme de langue. Moi-même, je me suis un instant attaché à rehausser son rôle. Mais la reconstitution de l'histoire du Turkestan, de la Sogdianc, de la Baktrianc et régions 884 ANTHROPOLOGIE limitrophes nous donne aujourd'hui la certitude que dans cet élé- ment il ne faut voir que des restes des Saces dispersés et refoulés par les invasions turco-mongoles à partir de 176 avant notre ère. Il n'y a dans le massif central de l'Asie que des réfugiés et des émigrés; et, si certains de leurs patois sont archaïques comme leurs caractères physiques , les plus anciens se rattachent à des langues historiques de la Perse. Les linguistes eux-mêmes , pour faire venir les Aryens de l'Asie centrale par migrations successives, n'ont donc en fait de documents positifs que le court texte du Vendidad (la x^artie peut-être la plus ancienne de Y Avesta), qu'on a pris pour l'énumération des conquêtes successives des Aryens en Asie. En tête de cette énumération vient Y Airyanem Vaejo, textuellement le germe aryen, le pays d'où les Aryens ont proliféré. « C'est le premier des lieux et pays excellents créés par Aliura Mazda. » Il est décrit en ces termes : Il y a là dix mois d'hiver, deux d'été. Et ces mois sont froids pour l'eau, froids pour la terre, froids pom* la plante. Là est le centre de l'hiver, là le cœur de l'hiver. Là le fond de l'hiver, là le père des fléaux. » Et immédiatement se trouvent mentionnés la Sogdiane , Merv , la Baktriane, Nisaya entre Merv et Baktres, Herat... On a supposé tout naturellement que cet ordre d'énumération était voulu et cor- respondait à un ordre de marche, de colonisation et de conquête. Et, en conséquence, Y Airj'anem Vaejo, considérée comme la patrie ori- o-inaire des Arvens et des Iraniens, a été localisée dans quelque froide vallée au nord de la Sogdiane. C'est sur cette base fragile que tous les ouvrages admettent, et que jai dû un instant admettre comme tout le monde, que des ancêtres communs des Hindous et des Perses avaient résidé sur le haut Oxus ou entre le haut Oxus et l'Yaxartes. Mais Darmesteter a démontré qu'il n'y avait pas d'ordre constant dans le chapitre en question du Vendidad. C'est un état descriptif des pays de l'Iran où était pratiquée la religion de Mazda , nommés pom^ partie absolument à tort et à travers. U Airyanem Vaejo est d'ail- leurs un paradis terrestre , un pays d'abondance, malgré les froids de l'hiver. Rien, par suite , ne correspond entre l'idée traditionnelle qui en a été conservée et les conditions climatériques des ingrates A'allées du massif central. Darmesteter a d'ailleurs établi aussi qu'il n'y a peut-être pas un texte de l'Avesta qu'on puisse intégralement faire remonter seule- ment jusqu'à l'époque achémenide. La religion avestécème était déjà à cette époque aux mains des mages, antagonistes des Perses. Et ce ZABOROWSKI. — ORIGINE DES PEUPLES ARYENS DE l'aSIE 885 sont les mages qui l'ont conservée, qui ont rédigé ou remanié VAçesta sous les Arsacides et intronisé le culte officiel du l'eu sous les Sassanides, au iii^ siècle de notre ère. S'il est une tradition authen- tique relativement à ces textes sacrés, c'est donc celle des mages, qui étaient seuls aies comprendre, la langue dans laquelle ils ont été écrits n'étant plus pai'lée par le peuple à l'époque de leur rédaction. Or, lorsque ces textes furent traduits et commentés en pehlvi, la langue vulgaire des Sassanides, leur sens fut précisé et développé dans leurs commentaires. Or, leur principal recueil des commen- taires de Y Açesta en pehlvi, le Biindehesh, place V Airyanem Vaejo près de YAzerhaidjan, dans la vallée de l'Araxe appelée le « jardin non* » , qui est extrêmement fertile, tout en ayant un hiver long et rigoureux. La vallée de l'Araxe, c'est la porte de sortie sur l'Asie de la vallée de la Koura, qui est la grande route de l'Europe en Asie par le grand Caucase et aussi de l'autre route suivie dès une époque reculée par les Scythes, le long des rives occidentales de la Caspienne. Conformément à cette tradition bien authentique, qu'aucune vue préconçue n'avait inspirée ou altérée, j'ai montré que la plus ancienne mention relative aux Perses (texte assyrien du milieu du ix^ siècle) place ceux-ci justement tout contre l'Azerbeidjan, un peu au sud du lac Ourmiah, sur les hauts affluents du Tigre. Ils se sont répandus de là graduellement, suivant la ligne des hauteurs qui limitent à l'Est la Mésopotamie, jusqu'au Farsistan actuel. Ils ont rompu la ligne des peuples apparentés par la langue et le sang aux Proto-Chaldéens, aux Anzanites, des Mèdes, Hettéens, etc., que refoulaient par le Sud, jusqu'aux pieds du Caucase, les Assyriens. J'ai montré, d'ailleurs, que les Mèdes avaient reçu parmi eux des pasteurs nomades de même race et de même langue que les Perses , Scytlies, Cimmériens aux purs noms aryens, et cela à diflerentes reprises. Et les Perses eux-mêmes furent d'abord subordonnés aux Mèdes. C'est dans ces relations tout à fait originaires entre Aryens émi- grés d'Europe et Mèdes qu'est le secret de cette dualité ethnique de tous les peuples indo-européens, les Hindous provisoirement mis à part. Car les Brachycéphales, qui ont colonisé une partie de l'Eu- rope à l'époque néolithique en y introduisant la culture et qui y ont afflué en si grand nombre à l'époque du bronze, étaient de même race et de même langue que les Mèdes. J'ai montré que ces Mèdes sont presque allés au devant des émi- grants aryens jusque dans le Caucase même, qu'ils ont été le premier élément modificateur du fond premier de la population caucasienne, 886 ANTHROPOLOGIE d'abord exclusivement blond dolichocéphale. Ce sont eux les premiers civilisateurs des Aryens de l'Asie, comme leurs congénères brachycéphales ont été les premiers civilisateurs de l'Europe , à part le littoral méditerranéen. Lorsqu'apparait l'aryanisme en Asie avec les Perses, se montre un tyj)e physique nouveau qui ny existait pas jusque-là, mises à part les rapides incursions cimmériennes de T Asie-Mineure et les rares tribus nomades du Turkestan. Jusque-là, tous les peuples de l'Asie antérieure relevaient du type des Proto-Chaldéens et Anzanites et du type sémitique si accusé chez les Assyriens. Avec les premiers Aryens se montrent des hommes à téguments clairs , de type euro- péen, que nous connaissons par les portraits gravés sur le rocher de Behistoun et en particulier par celui de Darius lui-même. Or, j'avais prouvé antérieurement que, jusqu'à l'époque qui corres- pond à l'entrée des Aryens en Asie, comprise entre i5oo et looo ans avant notre ère , la population de la Russie méridionale , où n'ont jamais été parlées que des langues aryennes jusqu'aux récentes inva- sions turco-mongoles, était composée exclusivement de grands blonds dolichocéphales. A partir du moment où les Perses , accrus en nombre , sont sur la scène, toute l'histoire témoigne d'un antagonisme de race violent entre eux et les Mèdes. (Cyrus, fds de femme mède, était traité de mulet.) Cet antagonisme, on le sait, s'est terminé par l'écrasement défi- nitif des Mèdes, sous la main de fer de Darius, de qui date seulement la complète aryanisation de l'Asie centrale. Or, j'ai montré, notam- ment encore avec le précieux monument de Behistoun. que les Mèdes avaient les caractères physiques des Anzanites , des Tadjiks actuels et Galtchas, de nos Celto-Slaves, et que leur langue était celle du second texte de Behistoun, langue agglutinative très étroitement parente de celle de Suze. Voilà des faits. Et ce sont des faits absolument décisifs. Ils sont encore corroborés par cette circonstance, également établie par moi, que les premiers occupants du Turkestan, où le plus ancien nom géographique, celui de lYaxartes, est aryen, furent aussi des blonds venus d'Europe. Les Saces, dont un débris de la langue subsiste dans un coin du Haut-Oxus. en descendaient et leurs caractères de blonds nous sont maintenant connus par un portrait de Behistoun et par des monnaies. L' aryanisation de l'Asie a donc été l'œuvre d'Européens, qui y ont pénétré en pastem^s nomades. Leur point de départ nous ramène DRIOTON, GRUÈRE & D'' GALIMARD. — FOUILLES DE ROCHE-CHÈVRE 887 vers la Russie méridionale. Il est impossible d'élever à cet égard la moindre contestation sans nier les faits les plus évidents. Or. à quoi ont abouti les linguistes qui ont cherché en Europe la primitive patrie aryenne, l'Urheimat? Les déplacements historiques des peuples indo-européens, les rapports de leurs langues plus ou moins étroits, le degré d'ancienneté de certaines, leur division primitive, l'étude des mœurs protoariennes par l'analyse des mots communs à toutes les langues de la famille, les conjectures qui en découlent sur les conditions de sol et de climat les ont conduits vers la Russie méridionale. Ceux-là même qui ont complètement ignoré, ou fait profession d'ignorer l'anthropologie et mes travaux en particulier, ont donc dû placer la patrie des Aryensdel'Europe, là-même où, par desrecherches d'une autre nature, j'ai dû placer le point de départ des Aryens de l'Asie. Cette coïncidence constitue une preuve et une preuve de premier ordre en faveur de la complète validité de mes conclusions. Je n'admets assurément pas une localisation étroite de la patrie aryenne et je ne peux pas limiter son étendue d'après celle dune région spéciale bien circonscrite. Il n'y a pas eu sans doute de patrie aryenne de ce genre. C'est du moins ce que j'aurai à examiner en étudiant les Aryens d'Europe. Mais je puis dire maintenant que la question d'origine est tranchée définitivement. Les inventeurs et les premiers propagateurs du sys- tème linguistique dont relèvent nos langues sont des indigènes de l'Europe. Ce sont des hommes aux téguments clairs, au visage ovale , au crâne allongé , dont il nous est possible de suivre la filia- tion, l'ascendance jusqu'à l'époque quaternaire. MM. Cl. DRIOTON, G. GRUERE et D' J. GALIMARD NOTE SUR DES FOUILLES EXÉCUTÉES DANS LA CAVERNE DE ROCHE-CHÉVRE A BARBIREY-SUR-OUCHE (COTE-D'OR) [5:i.8i(44.42)J — Séance du S août A I kilomètre au nord-ouest du village de Barbirey-sur-Ouche, au milieu des abrupts rocheux (bathonien moyen) couronnés par la forêt de Veluze, s'ouvre l'entrée d'une vaste caverne, qui ne mesure 888 ANTHROPOLOGIE pas moins de aS à 27 mètres de largem% 8 à 10 mètres de hauteur et 60 mètres de profondeur. Le sol en est incliné à 35°. Deux énormes blocs détachés de la voûte divisent cette caverne en deux salles. Des fouilles exécutées dans diverses parties de la caverne ont donné les résultats suivants (fig. i) : fitrit de Ve/uze Abrupts Calcaire compact % du bathonien moyen Fig. I. — Grotte de Roche-Chèvre, à Barbirey-sur-Ouchc, 24 juiUet l'joS. A Cuvette stalagiuitique remplie d'eau. Première salle. — A gauche de l'entrée, un foyer de 3 m. 5o de longueur et 25 à 35 centimètres d'épaisseur formé de terre, de cendres et de cailloutis a donné : De très nombreux fragments de poterie noire et brune bistrée dont beaucoup sont ornementés de dessins : stries , dents de loup , etc. ; de poterie grossière, de i)olerie gallo-r uiahie ; DRIOTON, GRUÈRE & D'' GALIMARD. — FOUILLES DE ROCHE-CHÈVRE 889 Une hachette en silex poli, une perle en ambre, une épingle en bronze, lin ciseau en os poli , un ijoinçon en corne , une monnaie romame fruste (grand bronze); Des ossements humams, des fragments de crâne, dont l'un très épais, mie vertèbre; Des ossements d'animaux, principalement de porc. Une fouille exécutée sur une plate-forme, en contre-])as de ce foyer, ne nous donna qu'un fragment de tuile à reboi'd. L'exploration des fissures qui existent entre les blocs de rochers qui occupent la paroi droite de la caverne amenèrent la découverte d'un coi de vase , d'une cruche plate à deux anses presque complète et du col d'une autre cruche. Ces poteries paraissent relativement récentes. Dans une autre fissure . l'un de nos ouA'riers recueillit la moitié d'un joli petit vase en terre noire lustrée qui. entier, devait mesurer 8 centimètres de hauteur et 9 centimètres de diamètre. Deuxième salle. — Le sol de la seconde salle est formé par d'énormes blocs détachés de la voûte formant un véritable chaos de 6 à 8 mètres d'épaisseur. Au milieu de la salle se dresse, dominant tous les autres , un bloc de 3 mètres d'épaisseur, formant une table de 8 mètres de longueur et 6 mètres de largeur. La partie sujîérieure de ce bloc est recou- verte d'une légère couche de terrain noirâtre, mélangée de charbon. Nous y avons recueilli de nombreux petits fragments de poterie noire lustrée , un petit couteau dont la lame est en fer et le manche FiG. 2. — Couteau en bronze découvert dans la Grotte de Roche-Chèvre, à Barbirey-sur-Ouçhe , le 24 juillet 1908 en os avec un aiguisoir de forme curieuse , un fragment de lame de silex blond. L'exploration et la fouille des éboulés remplissant les interstices laissés entre les blocs qui soutenaient la table de pierre dont il vient d'être question nous donna : Un fond de vase apode, de couleur brune, de pâte grossière mélangée de coquilles : épaisseur, i centimètre; diamètre du fragment, 22 centi- mètres; des rebords de gros vase en terre noire et rouge, des anses de vases en terre noire lustrée ; 890 ANTHROPOLOGIE Et, dans une (îssiu^c profonde, à l'angle N.-O. du gros bloc, au milieu de eailloutis, un beau couteau en bronze de 28 centimètres de longueur, de forme assez gracieuse et absolument intact (fig'. 2) ; Des fouilles exécutées dans le eailloutis qui remplit les fentes et les interstices des autres blocs qui occupent le fond de la caverne, fournirent des fragments de poteries de toutes les époques Gauloises-Gallo-romaine et même plus récentes. La caverne de Barbirey parait donc avoir été occupée comme habitation ou comme refuge par les populations locales dès l'âge de la pierre polie, à l'époque Gauloise-Gallo-romaine et même au moyen âge. A en juger par le nombre des foyers répartis un peu partout dans cette vaste caverne, elle dut former, à certains moments, un véri- table village troglodytique. M. Cl. DRIOTON Membre de la Commission des Antiquités de la Côte-d"Or à Dijon LES RETRANCHEMENTS CALCINES DU CHATEAU RENARD (GEVREY-CHAMBERTIN) ET DU BOIS-BRULÉ (PLOMBIÈRES LÈS-DIJON) [5;!. 91(44.42)] — Séance du 8 (loiit — Les 29 et 3o juillet igoS, nous avons fouillé les retranchements du château Renard, à Gevrey, à 10 kil. au sud de Dijon. Cette enceinte, qui appartient au type éperon barré, se compose dune levée de 65 mètres de longueur, i m. 60 à 2 m. 10 de hauteur et 12 à i5 mètres de largeur à la base, précédé d'un fossé taillé dans le roc. A 10 mètres en avant existe une autre petite levée très affaissée de o m. 4© de hauteur et 3 mètres de largeur, également précédée d'un fossé de 2 m. 3o de largeur , taillé dans le roc (fig"- i)- Cette double fortifica- tion isole du reste du plateau l'extrémité du promontoire situé entre les combes Lavaux et de la Bossière. A l'extrémité de l'éperon existe une série de fossés et de retranche- ments avec petite motte centrale. Cette fortification nous paraît relativement récente. Une tranchée, exécutée en travers de la levée de 65 mètres, nous CL. DRIOTOX. — RETRANCHEMENTS CALCINÉS DU CHATEAU RENARD 89I permit de reconnaître l'existence, à o m. ;jo au-dessous de la crête, de pierres calcinées et de chaux. La partie calcinée se compose, non pas d'une masse unique et compacte de chaux, comme dans les autres retranchements des environs de Dijon, fouillés par nous jus- qu'à ce jour, mais d'un agglomérat de chaux et de pierres plus ou moins calcinées, s'étendant sur une hauteur de i m. lo et une lar- geur de I mètre à i m. 4o h la base. ,.^^^ ,.-.... n ayant paW%,^ '"yjs Q&Kpf^''^ subi /'action du feu: Côté intérieu :>ol naturel Calcàîré' compact au bathonien moyen' '' ' '""' '■■'-'■■'-'■-■' oyt Combe de Lavaux. ■,■■^:::^\\v■^^•.\i Combe de la Bossière FiG. I. — Retranchement du château Renard (Gevrey). Fouilles des 29 et 3o juillet igoS. La partie calcinée est appuyée du côté extérieur du retranchement, sur des pierres plates, hautes de o m. 5o, placées de champ, avec une inclinaison de 70 à 75 degrés. A divers niveaux se trouvaient des foyers de cendres et de charbons reposant sur des pierres plates rubéfiées, indiquant nettement que la calcination avait été effectuée à plusieurs reprises. La couche de matériaux c[ui recouvre la partie calcinée n'a pas subi l'action du feu. Cette découverte se rapproche beaucoup de celle faite dans le retranchement du Bois-Brulé (commune de Plombières-lès-Dijon) {fig. 2) où des fouilles, exécutées par nous les 10 et 12 novembre 1898, ont amené la découverte d'un noyau central de chaux de I mètre de hauteur sur i m. 10 de largeur, appuyé du côté exté- rieur contre un mur en pierres sèches ayant subi l'action du feu sur 892 ANTHHOl'OLOGIE une épaisseur de o m. 80 (fig: 3). Au-dessous du massif de chaux, une épaisse couche de charbon indiquait que la calcination avait été effectuée sur place et le tout était recouvert de matériaux n'avant pas subi l'action du feu. FiG. 2. — Retranchement du Bois-Brûlé (Plombières) avec son noyau de chaux. Fouilles des 10 et 12 novembre iSi)8. Côté mtérieuP' rossé Sol naturel Ca/câ/re en p/sguettes du ùôthonien supérieur FiG. 3. — Retranchement du Bois-Brùle (Plombières). Fouilles des lo et la novembre 1898. d'' capitax. — l'industrie reutelo-mesvixienxe et les graviers 893 M. le D' GAPITAN Professeur à l'École d'Anthropologie de Paris L'INDUSTRIE REUTELO - MESVINIEtyiNE DANS LES SABLIÈRES DE CHELLES, SAINT-ACHEUL, MONTIÈRES, ET LES GRAVIERS DE LA HAUTE-SEINE ET DE L'OISE . [3:3.21(44.36)] — St'ancc du 10 août — Depuis quelques années. Rutot, le très distingué ingénieur, géologue, conservateur du Musée d'Histoire naturelle de Bruxelles, a affirmé que les instruments paléolithiques classiques, même les plus anciens, indiquaient un état d'évolution qui ne pouvait être originel, que l'homme avait nécessairement employé au début des outils bien plus grossiers ; d'autre part, que les pièces classiques ne pourraient pas suffire aux multiples usages industriels que devaient remplir les outils en pierre. D'où la nécessité de considérer comme devant être autres les véritables instruments en pierre primitifs. C'est ainsi qu'il a cherché et recueilli, en énormes quantités, l'industrie d'usage à laquelle il a donné le nom d'industrie reute- lienne et reutelo-mesvinienne. C'est, en somme, la systématisation de cette notion du silex simplement utilisé momentanément, puis abandonné presque aussitôt, l'outil de fortune de Salmon, dont nous avons longuement parlé dans notre travail sur le Campigny (Salmon, d'Ault du Mesnil et Capitan, Reçue de l'Ecole d'anthropologie , 1899). C'est ce que font, ou faisaient, nombre de sauvages actuels, c'est ce que recherchent en France dans le diluvium , depuis bien des années, Thieullen, Ballet et Leroy, ce que depuis plus de vingt ans j'ai recueilli, surtout au Grand-Pressigny et en quantités considé- rables, avec cette idée directrice. Rutot a eu le grand mérite de la systématiser et de montrer l'existence exclusive au début de la préhistoire de cette industrie toute spéciale, constituée par l'emploi de rognons de silex naturels ou bien encore éclatés sous les inlluences atmosphériques, ou brisés naturellement par l'usage, ou même volontairement, ou enfin débités intentionnellement. Les parties coupantes ou piquantes portent des traces nettes d'utilisation ou des retouches pour aviver les bords. Parfois, les 894 ANTHROPOLOGIE saillies du rognon de silex ont été abattues et la pièce nettement aménagée pour la pi'éliension. Il xii de soi que j'ai fait une étude minutieuse et spéciale de cette industrie depuis plus d'un an à Bruxelles . à trois reprises , avec Rutot au Musée d'histoire naturelle et sur place dans les gisements classiques belges, puis dans nos gisements français : Chelles, Saint- Acheul, Montières, Saint-Prest, Billancourt, le Pecq, etc. D'autre part, j'ai étudié comparativement les plages actuelles à galets de la Manche, les dépôts d'argile à silex, les gisements des terrasses quaternaires très anciennes de la vallée de l'Oise et de la Somme. Je crois ainsi être arrivé à pouvoir distinguer assez facilement les traces d'un travail voulu de celles produites par le roulis des pièces leur entrechoquement, leurs chutes, leur fracture par des causes naturelles (le rôle de toutes ces actions a d'ailleurs été fort exagéré). La distinction est souvent très facile, d'autres fois assez difficile et nécessite une certaine pratique ; parfois enfin elle est impossible. Je ne retiens guère que les pièces de la première catégorie. Dans ces conditions, qu'il est très malaisé de formuler théoriquement, le travail de retouches par lamelles parallèles, d'enlèvement de lames, de chocs répétés et localisés en un point, de façonnement d'un tranchant, d'une encoche, d'une pointe, permet d'établir un réel critérium. Il est donc possible de constituer des séries de ces pièces utilisées ou adaptées à un emploi déterminé et très momen- tané, véritables instruments d'usage (outils de fortune de Salmon) employés pendant quelques instants par l'homme primitif, puis rejetés et remplacés aussitôt, sans que la forme systématique entre jamais en ligne; l'usage et la meilleure façon de le réaliser dominant tout. Ceci pourrait expliquer leur abondance. Celle-ci n'est d'ailleurs pas aussi grande que certains critiques l'affirment. De tels instru- ments, quoique beaucoup plus fréquents que les pièces bien façon- nées, ne se trouvent pas en nombre excessif. Il faut les chercher et, si on en trouve dans la plupart des sablières deux à quatre par mètre cube, c'est déjà un joli total. Or, si on examine à ce point de vue les gisements classiques : Chelles, Saint-Acheul, Montières, pour prendre les jjIus typiques, comme aussi les alluvions de la Haute-Seine et de lOise (i), on constate facilement que ces pièces s'y rencontrent en certaine quan- (i) Pour CCS derniers .gisements, j"ai été extrêmement aidé pur M. Soyer, qui m'a recueilli un g'rand nombre de pièces. D'" CAPITAX. — l'industrie REUTELO-MESVINIENNE ET LES GRAVIERS 896 tité. On peut même, ainsi que je l'ai fait en vue spécialement de mon cours de Tannée prochaine, constituer des séries partant de l'instru- ment le plus grossier et arriver, en passant par une foule d'intermé- diaires, au type le plus classique. Tel est le fait pour le racloir; on peut partir dune plaquette de silex naturelle utilisée sur ses bords et portant une série d'enlèvements et de retouches systématiques, puis à côté on peut mettre une même plaquette dont les retouches sont plus larges , plus longues , et qui passe au type racloir et enfin arriver au vrai racloir façonné dans une plaquette ou avec un fragment de silex brisé, ou enfin avec un grand éclat portant un bulbe. Pour l'ensemble d'instruments que G. de Mortillet réunissait sous le nom de « coup de poing » , on peut faire même observation, en prenant comme guide les belles séries constituées par Rutot : c'est d'abord un rognon ovale dont la percussion a détaché un ou deux éclats plus ou moins longs à l'extrémité, c'est loutil piquant dont la pointe se façonne graduellement, se dégage du rognon pour arriver au type du coup de poing lancéolé. C'est, au contraire, un choc du bord du rognon enlevant un éclat plus large, formant une surface tranchante qui, aménagée peu à peu, finit par passer graduellement à « la langue de chat », ou à 1' « ovale » , ou au « cœur » de Saint- Acheul, et toujours l'outil bien façonné conservera la forme ovalaire primitive du rognon. Ces exemples pom-raient être considérablement multipliés. Ils montrent combien cette évolution industrielle est nette, rationnelle et conforme, aussi bien à l'observation des faits qu'aux comparaisons ethnographiques. Malheureusement, dans nos sablières, cette industrie reutelo- mesvinienne est en général mélangée à l'industrie classique et il est bien difficile de savoir si elles sont contemporaines ou si ce sont deux industries accidentellement associées dans les alluvions. Il ne faut pas oubHer, d'ailleurs, que cette industrie d'usage s'est perpétuée. On la retrouve — modifiée bien entendu dans sa mor- phologie générale (à cause du perfectionnement dans le travail du silex) — aussi bien au Moustier qu'à Laugerie-Haute ou à Lauo-erie- Basse, comme dans toutes les stations du quaternaire moven et supérieur. Elle se retrouve dans le néolithique, que ce soit à Campigny, dans l'Yonne ou au Grand-Pressigny ; elle y prend même un développement considérable, mais encore une fois elle se modifie du fait du perfectionnement de la taille. Cependant, à côté de très nombreux instruments d'usage fabriqués avec des lames portant le bulbe de percussion, il en est qui sont fabriqués avec des fragments SyO ANTHROPOLOGIE de silex brisés ou des rognons de silex (tels les pics façonnés dans des roanons de silex cvlindriques, aménagés par quelques coups seulement). En somme, cette industrie reutelo-mesvinienne, si spéciale dans sa morphologie, si particulière dans sa conception même et son inter- prétation si rationnelle, se retrouve largement représentée en France. Rutot l'avait d'ailleurs observée et signalée dans diverses sablières quaternaires : Gentilly et Cergy, par exemple. On voit qu'on la retrouve dans toutes les sablières où se rencontre l'industrie quaternaire et même aux autres époques. C'est un fait général, mais dont il faut aborder l'étude après une certaine préparation et sans aucune idée préconçue, sous peine ou de se tromper étrangement, ou d'être incapable de voir et de comprendre. M. Emile RIVIERE Directeur-adjoint de Laboratoire au Collège de France, à Paris LA LAMPE EN PIERREDE S A I N T - J U L i E N -M A U M 0 N T (CORRÈZE) — Séance du lo août — Il y a quatre ans, le 29 août 1899, je trouvais dans la grotte de La Mouthe, un curieux godet de pierre, creusé dans un galet de gix^s rouge du permo-houiller ou plus simplement du permien, roche qui se trouve abondamment dans le bassin des environs de Brive, à environ 4o Idlomètres , à vol d'oiseau, de Tayac (Dordogne), commune de laquelle dépend, comme on le sait, le hameau de la Mouthe (i). Ce godet, que je considérais immédiatement comme ayant servi de lampe aux habitants primitifs de cette grotte , opinion qui fut ulté- rieurement confirmée d'une façon absolue par les résultats de l'ana- lyse chimique que M. Berthelot voulut bien faire de la matière noire dont le fond était recouvert (2), avait été trouvé en plein foyer (1) Emile RiviÉiu:. — La Uinipc en grcs de la grotte de la Mouthe (Dordogrne). Extrait de* Bulletins de la Société d'Anthropologie de Paris, tome X, a." série, année i8t)g. (2) Emile RiviiiuE. — Deuxième note sur la lampe en grès de la Grotte de la Mouthe (Dordogne). Extrait des Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, tome II, 5= série, lyoï. EM. RIVIÈRE. — LA LAMPE EX PIERRE DE SAINT-JULIEN-MAUMONT 897 magdalénien, à quelques mètres de l'entrée de la grotte. Il était pourvu d'une sorte de manche rudimentaire, manche court (o m. o4 de longueur), épais, de forme triangulaire, ayant son extrémité arron- die. Ses dimensions étaient les suivantes : la partie creusée régu- lièrement mesurait o m. io6 dans sa plus grande longueur et o m. 104 dans son plus petit diamètre; sa hauteur était de o m. 045 et sa plus grande profondeur o m. o34; enfin, son bord, à peu près également épais, ne présentait aucune rigole. Je rappellerai aussi que ce qui a fait surtout le grand intérêt de cette lampe , c'est le dessin gravé sur sa face externe et représentant la tête, avec ses longues cornes, vue de profil, d'un bouquetin, absolument semblable, toutes proportions gardées , à celle du bouquetin figuré entier (tête, corps et membres) sur la paroi droite de la salle dite de la Hutte (grotte de la Mouthe). Jusqu'alors trois lampes préhistoriques en pierre, trois seulement à ma connaissance, avaient été découvertes dans les cavernes de France (i) : l'une en i865, par le docteur A. ïrémeau de Roche- brune, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle (2), dans la «rotte de Mouthier (Charente) ; elle appartient aux collections du Muséum de Paris; la seconde, de moindres dimensions cjue celle-ci. auprès de laquelle elle se trouvait dans le même gisement, recueiUie par M. Benoit, qui fouillait ladite grotte avec M. de Rochebrune; elle a été donnée par l'auteur de la trouvaille au Musée préhistorique de Bordeaux ; la troisième , enfin , en 1887, par M. Félix Bergougnoux (de Cahors) dans la grotte de Coual (Lot) , taillée aussi dans un bloc de grès comme celle de la grotte de la Mouthe. Mais aucune de ces trois lampes ne présentait de dessin gravé comme celle de la Mouthe, qui restait ainsi, sous ce point de vue, jusqu'à l'an dernier, une pièce unique. Aujourd'hui, il n'en est plus ainsi : en effet, M. Gustave Chauvet (de Ruffec) a présenté au Con- grès de Montauban, dans la séance du 9 août 1902, « une lampe en « grès trouvée au Bois du Roc, près Vilhonneur (Charente), station « de l'âge du bronze. Elle est analogue, dit-il, à celle recueillie dans « la grotte de la Mouthe (Dordogne) et porte un dessin à la partie « supérieure du manche (3). » us eu clans (1) Je citerai plus loin deux autres lampes préhistoriques également non plus pierre, mais eu terre gréseuse qui ont été trouvées, non dans des grottes mais cl des dolmens. - ' (2) A. Themeau de Rochebhuxe. IMémoires sur les restes d'industrie appartenant aux temps primordiaux, de la race humaine, recueillis dans le département de la Charente (Mémoires de la Société des Antiquaires de l'Ouest, année iS66>. (■J) G. Chauvet.— Une nouwlh- lampe préhistorique. Association française pour l'avan- cemcnt des sciences, compte rendu de la 3r session (Montauban), année i.)02, r- partie p. 234. - ^ ' 1 ) 57* 898 ANTHROPOLOGIE Empèclîé au derniei' moment, par suite d'accidents congestifs survenus la veille même de l'ouverture du Congrès de Montauban, de prendre part à ses travaux , je ne puis rien dire de cette lampe que je ne connais pas, à mon vif regret, car elle m'eût vivement intéressé, et sur laquelle l'auteur n'a puldié dans les comptes rendus des séances du dit Congrès, que les quelques lignes ci-dessus sous le titre de : Une nouvelle lampe préhistorique (i). Dans cette même session de Montaulîan, M. Granet, vice-président de la section d'Anthropologie, présentait en mon nom — vu mon absence — une note sur une nouvelle lampe préhistorique en pierre, trouvée au village de Chabans, dans la commune du Moustier (Dordogne), du moins d'après une lettre que m'adressait le 2 dé- cembre 1896. un habitant de Thenon, M. Albert Detrieux, ancien receveur des postes, qui venait de l'acquérir (2). Il s'agissait, disait-il. d'un godet en pierre de 8 à 10 centimètres de longueur, peu profond, ailectant la forme des lampes romaines en terre cuite et dont le bord, brûlé, témoignait de l'usage qui en avait été fait. Une devait très probablement porter aucun dessin, car M. Detrieux, dans ses lettres, est absolument muet à cet égard. Quant aux deux lampes préhistoriques trouvées dans la Vendée , il y a quarante ans environ, que mon confrère et ami, M. Marcel Baudouin, vient de me signaler, elles sont décrites dans un travail de M. Jules Piet, intitulé : Recherches archéologiques à Noinnoutiers et paru en 1864. dans l'Annuaire delà Société d'émulation de la Vendée (3). 1° L'une est une lampe sépulcrale de terre gréseuse , dont les deux frao^ments principaux présentent les dimensions suivantes : hauteur, y compris la base o m. oG, profondeur o m. ©4; diamètre extérieur, en haut o m. 07, diamètre extérieur à la partie inférieure, appuyant sur la base, o m. 04. Elle provient du dolmen de la Pointe de l'Herbaudière (commune deNoirmoutiers). M. Piet a trouvé, avec elle, des fragments de silex et des vases incinérés de même matière que la lam^ie. (t) Par une lettre récente (2; novembre l'ioS), M. G. Ghauvet a bien voulu JuVnvoyei- le renseignement suivant accompagné d'un croquis denii-grandcur , sur sa lampe, quoiqu"il ne Tail pas encore publiée : « elle a été trouvée à l'Abri sous l'ochc de \'illion- neur. Bois du Roc; elle a été fabriquée dans un morceau de grés cénomanien, d'aspect ronge. Elle i)rovient de la collection Fermond ». (2) Emile RiviEHiî. — Vnc Ininpc prchistoviquc cnpievrc, Irom'rc au Moiistirr (Dordogne), Association française pour l'avancement des sciences, compte rendu de la Sv session (Montauban). Année 1902, i" partie, p. 2(i<); a- partie, p. 921). (>) Dixième année, pp. 228-229. EM. RIVIÈRE. — LA LAMPE EX PIERRE DE SAINT-JL'LIEN-MAUMONT 899 2° Un fragment de petite lampe sépulcrale aussi, en terre gréseuse également, trouvée dans le dolmen de la Roclie-Groisard (commune de Noirmoutiers), avec de nombreux vases de même terre, identique par conséquent à la terre de la lampe de la Pointe de l'Herbaudière. II Le nouveau godet, ou mieux la nouvelle lampe (/F^-. i ), sur laquelle j'ai riionneur d'appeler l'attention de la Section d'Anthropologie, a été , non pas trouvée , mais recueillie il y a douze ou quinze ans par un archéologue de Brive, bien connu par ses intéressantes recherches, FiG. I. M. Philibert Lalande, qui, entre autres travaux, collabora autrefoi avec MM. Cartailhac et Éhe Massénat à la découverte de l'Homme de Laugerie (Dordogne). C'était en 1872, car la communication qui fut faite à ce sujet à l'Académie des Sciences par les auteurs de la découverte remonte à la fin du mois de mars ou au commence- ment d'avril de la même année, c'est-à-dire au moment même — 26 mars 1872 — où, de mon côté, étant en mission scientifique du Ministère de l'Instruction publique, je découvrais dans l'une des grottes des Baoussé-Roussé . en Italie , l'homme quaternaire (magda- lénien) dit Y Homme fossile de Menton. La lampe, dont voici le dessin (demi-grandeur), est un godet en pierre, présentant en un point de son bord une sorte de bec des plus rudimentaires pour la place de la mèche. Elle a été creusée peu profondément par la main de l'homme dans une roche volcanique, une téphrine analogue aux pierres de Volvic (Puy-de-Dôme). M. Ph. Lalande ayant eu l'amabilité de me l'envoyer en communi- cation au mois de mars dernier, m'autorisant même à en prendre un moulage, ce dont je liens vivement à le remercier ici ainsi goo ANTHROPOLOGIE que des détails qu'il a bien voulu me donner au sujet de sa trou- vaille, j'ai pu la soumettre à lexamen de mon ami, M. Stanislas Meunier, Professeur de géologie au Muséum d'histoire naturelle de Paris, qui a reconnu la nature minéralogique de la lampe. Elle aurait été trouvée dans la commune de Saint- Julien-Maumont, canton de Meyssac, arrondissement de Brive (Corrèze^, auprès de substructions gallo-romaines, mais non loin aussi d'une grotte creusée de main d'homme dite : lo rotso Poiitiroii (la grotte cham- pignon), grotte que M. Ph. Lalande décrit succintement par les lignes suivantes, dans son très intéressant mémoire sur les grottes des environs de Brive (i) : « elle est creusée dans le grès du trias^ « Ovale irrégulier de 9 mètres de longueur, 3 m. 80 et i m. 70 de « profondeur, i m. ^5 de hauteur. Un placard simple et un placard « à feuillure... Des vestiges de substructions romaines existent « encore à très peu de distance. » " Mais, si cette lampe, en raison du point où elle aurait été trouvée par un habitant du pays, pouvait appartenir à l'époque romaine, cependant M. Ph. Lalande la considère comme trop grossière pour ne pas remonter à une date .antérieure , voire aux temps préhisto- riques. Je dois ajouter pourtant que rien n'a été trouvé avec elle qui permette de la dater avec quelque certitude. Quoi qu'il en soit, la lampe de Saint- Julien-Maumont affecte la forme d'un godet régulier, au bord arrondi légèrement tranchant, dont le diamètre le plus grand (bec compris) mesure o m. i43 et le plus petit o m. i32. La hauteur totale du godet est de o m. o56 et sa profondeur au centre est de o m. 023. Enfin, sa face inférieure par laquelle il repose, régulièrement usée, est plane. Les lampes préhistoriques, dont je viens de rappeler la décou- verte, sont donc au nombre de neuf, si l'on compte celle de Saint- Julien-Maumont, ce qui paraît probable, sans pourtant qu'il me soit permis de l'alïii'mer, ou de huit seulement, si on la considère comme gauloise ou comme appartenant à l'époque gallo-romaine . ce qui ne nous paraît pas vraisemblable, à M. Philibei't Lalande non plus qu'à moi. (i) Philibert Lalande. — Les grollcx iirtiJicicUcs des ein-irons de Urhe (Corrczo), pp. 23 et 3i. (Mémoires de la Société de spéléologie, année 1897, n -.) PEYRONY. — STATIOXS PRÉHISTORIQUES DU PECH-DE-BERTROU 9OI M. PEYRONY STATIONS PRÉHISTORIQUES DU PECH-DE-BERTROU, PRÈS LES EYZIES (DORDOGNE) . [571.24(44.72)] — Séance du 10 août — Si, de la grotte à gravures de la Mouthe, on remonte le petit Talion de gauche qui se dirige vers l'Est, on arrive bientôt à un plateau de quatre Itectares environ de superficie , légèrement incliné vers le Sud et l'Ouest, et borné par les trois petits hameaux dits : Pech-de-Bertrou , Pech-de-Nissou, Pech-de-Madame. La majeure partie de ce plateau est formée de terres labourables ; le reste , de friches et de bois. A cet endroit, on se trouve à trois kilomètres environ des Eyzies, à une altitude d'environ 210 mètres et à i4o mètres environ au-dessus du niveau de la Yézère. En 1902, dans une excursion que je fis dans cette partie de la commune de Tayac, je fus frappé de l'exposition et de la nature sablonneuse du terrain. Je parcourus les champs cultivés et je recueillis quelques lames et quelques éclats avec bulbe de percussion bien caractérisé. D'autres visites me permirent de reconnaître que le principal centre des stations préhistoriques , à cet endroit , était certainement dans un champ et une vigne situés entre les deux pâtés de maisons formant le hameau du Pech-de-Bertrou, limités au Sud par un chemin. Là, sur une superficie d'environ soixante ares, j'ai recueilli un certain nombre d'objets qui m'ont prouvé que le plateau avait été occupé à deux époques différentes : à l'époque chelléenne et à l'époque néolithique. 1° Epoque chelléenne Comme industrie chelléenne, j'ai trouvé : 1° Une première haclie cordiforme, assez grossièrement taillée. Lon- gueur : 9 cent. ; largeur : 7 cent. ; 2" Une deuxième entière, mais phis petite et plus finement taiUéc. Longueur : 7 cent.; largeur : 5 cent. 1/2; 902 ANTHROPOLOGIE 3° Une troisième également entière, assez fme. Longueur : 5 cent.: largeur : 4 cent. ; 4° Une quatrième plus grande, mais cassée en partie, dans le sens de la longueur. Longueur : 9 cent. ; largeur : 5 cent. 1/2. 2° Epoque néolithique Comme industrie néolithique, j'ai ramassé : 1° Une magnifique hache entièrement polie, en silex marron, vemé, forme rectangulaire, avec ime seule extrémité aplatie et tranchante. Longueur : i4 cent. ; 2° Une deuxième hache, dont la moitié, du côté du tranchant, est seule poUe et le talon retaillé après le pohssage , alin de faciliter l'emmanche- ment; tranchant très arrondi. Longueur : 12 cent.; 3° Un morceau de hache pohe dont le tranchant est très hien conservé. L'instrument entier ayant été cassé transversalement, deux encoches latérales ont été faites sur la partie que j'ai recueillie pour permettre un emmanchement soUde. Longueur : ; cent. ; 4° Une pointe de flèche de forme amjgdaloïde , biconvexe et taillée sm- les deux faces. Longueur : 3 cent. ; 5° Un petit perçoir à pohite lînement retouchée. Longueur : 3 cent. ; 6° Dix grattoirs simples; 7° Une lame entière avec quelcpies retouches à la pomte. Longueur ; 9 cent. ; 8° Une vingtaine de morceaux de lames ou lames sans retouches ; 9'' Deux nucléus ; 10° Un percuteur; 11° Un galet ayant une forme grossière de hache polie; 12° Une cmquantame d'éclats divers avec bulbe de percussion. Le silex est, en général, gris clair ou très sombre; c'est celui qu'on rencontre ordinairement dans le voisinage. Quelques pièces sont recouvertes d'une mince couche de patine blanchâtre. La magnifique hache a été faite , avec un silex ressemblant à celui du Grand-Pressigny et qu'on ne trouve pas dans le pays. Fouille strati graphique Sur le conseil de mon maître et ami, le D^ Capitan, dans la vigne précitée j'ai fait ouvrir une tranchée de i m. 5o de long, sur o m. 8a de large et o m. 80 de profondeur, et voici les constatations que j'ai pu faire : La couche superficielle (couche végétale) de nature sablon- neuse, contenant le néolithique, a o m. 3o d'épaisseur. La couche immédiatement inférieure , qui contient le chelléen , est formée par un terrain argilo-siliceux d'un rouge sale et contient beaucoup de ÉD. FOURDRIGMER. — INSCRIPTIONS ET SYMBOLES ALPHABÉTIFORMES QoS rognons de silex, des morceaux de minerai de fer et quelques i^ierres calcaires. Je nai recueilli, dans cette fouille, qu'un mauvais éclat placé entre les deux couches. Tels sont les résultats de mes recherches et de mes fouilles au Pech-de-Bertrou. M. Edouard FOURDRIGNIER à Sèvres INSCRIPTIONS ET SYMBOLES ALPHABÉTIFORMES DES MOBILIERS FRANC ET MÉROVINGIEN [4"J — Séance du lo août — Les Francs, comme on l'a longtemps pensé, n'auraient été que des envahisseurs attirés, comme tant d'autres, à la curée de l'Empire romain qui s'effondrait. Si la renommée de leur valeur militaire se perpétuait, on leur méconnaissait d'avoir pu apporter avec eux aucune trace de civilisation. On leur refusait même jusqu'à une langue, et surtout une écritui'e propre. Les découvertes témoignant de leur longue occupation dans une vaste partie de l'Europe occidentale, allant de la Hollande, du Hanovre jusqu'en Bohême; sétendant en Suisse, en Bom'gogne, pour passer la Manche et comprendre encore la partie occidentale de l'Angleterre ; puis, l'unité de ce faciès particulier si reconnaissable dans tous ces mobiliers francs ; leui* nombre considérable , tout cet ensemble a démontré qu'il fallait revenir sur cette appellation de Barbares et que, parce que la civilisation romaine ne croyait pas en dehors de la sienne à d'autres, il en existait pourtant, toutes dif- férentes qu'elles soient, dont l'antiquité, autant que les avantages, ne pouvait être contestée. On comprend alors que, pour toutes les inscriptions si variées que l'on a rencontrées dans les mobiliers francs, on n'ait pu songer, sous ces auspices, à leui' attribuer une inspiration, une origine autre que l'épigraphie latine. Ces Barbares, étant illettrés, ne pouvaient avoir acquis de telles connaissances que par leurs rapports avec les peuples romanisés. no4 ANTUKOPOLOGIE Si, en effet , certaines de ces inscriptions sont foncièrement d'ori- gine latine, il en existe un groupe important dont les caractères ne peuvent s'y rapporter et dont la facture leur est étrangère. Quand on a été embarrassé pour les interpréter, on a pensé alors que ce ne pouvait être que quelques copies, quelques imitations tentées par des graveurs inhabiles , ne sachant pas ce qu'ils repro- duisaient. Cependant, à la suite de plusieurs observations, même assez récentes, faites dans des milieux positivement reconnus comme francs, on a constaté que plusieurs de ces inscriptions se compo- saient de caractères usités seulement vers la même époque, par les peuples du Nord de lEm'ope. Comme elles ont été lues et traduites, nous avons appris alors que cette épigraphie se rapportait aux jmnes primitives des contrées Scandinaves. f u th a r fi ,ff Cif H t I ^ i^ Y / h n i J(a) p -r s t^ M M r o A t b e m l ng o FiG. I. — Série des Runes primitives. Ces observations ont été faites un peu partout , dans toute la partie de l'Europe occidentale, où les Francs ont marqué leur séjour. On a signalé des inscriptions runiques en Allemagne, en Roumanie et aussi en Russie. En Angleterre où plusieurs ont une certaine célébrité, telle l'inscription du scramasaxe, trouve à Setting-Bourne, ÉD. FOURDRIGXIEK. — INSCRIPTIONS ET SYMROLES ALPHABETIFORMES goS dans le Kent, et une autre provenant du comté de Cumberland. En France, on peut citer la plaque fibule de Charnay près de Mâcon, en plein pays burgonde. En Belgique, une bague de la grotte de Menil-Favay ayant douze caractères gravés, puis le tombeau peint de Koningshcim conservé au musée diocésain de Liège, où égale- ment quelques runes sont figurées associées parmi des emblèmes chrétiens (i). Sans trop rechercher comment ces objets, supportant ces inscrip- tions, ont pu se trouver dans ces mobiliers francs et s'ils ne pouvaient faire partie d'une pacotille facilement transportable, ils prouvent tout au moins des relations avec les peuples de Scandi- navie. Une certaine détente alors s'est produite sur ce que l'on avait pensé de ces Barbares et l'on s'est demandé si, avant leur exode du fond de la Germanie, ils n'avaient pas été, eux aussi, initiés avec cette culture civilisatrice des Scandinaves dont ils étaient si proches voisins. Arrivés d'abord avec leur manière de vivre et leur langage incompris des peuples latins, pendant les premiers temps, ils conservèrent les liabitudes qu'ils avaient apportées. Ce n'est que par la suite, que peu à peu ils les abandonnèrent, pour prendre, en se fusionnant avec le reste de l'ancienne population, leurs mœurs, leurs coutumes, qui se modifièrent elles-mêmes avec les éléments nouveaux. Ces données générales, en conformité avec l'Histoire, trouvent une confirmation dans les inscriptions qui nous occupent. En effet, si dans les mobiliers les plus anciens de la première époque franque, on a rencontré plusieurs inscriptions franchement d'origine latine, on remarque que ce ne sont pas sur des produits francs, mais liien d'industrie romaine. Mais en même temps, c'est dans ces mobiliers de la première heure, qu'ont été observées des inscriptions en caractères Scandinaves bien établis. C'est principale- ment aussi dans ces milieux que l'on trouve toutes ces sortes de symboles alphabétiformes , de monogrammes énigmatiques pris souvent pour des ornements sans importance ou des copies inhabiles. Plus tard, ce dernier groupe devient de plus en plus rare et, au VF siècle, les caractères de toutes ces légendes bizarres ont nettement une allure latine , si , tout au moins , elles résistent à une interpréta- tion concluante. (i) Ed. FouRDKiGxiER. — Les caractères riiniqucs du tombeau de Koningshcim, Tongres, 1903. 006 ANTHROPOLOGIE A propos de ces symboles, que Ton a voulu souvent ne considérer que comme de simples traits, n'ayant aucune valeur scripturale, en dehors de l'épigraphie latine et de la série des runes primitives que l'on aurait cherché à imiter, quelques auteurs ont aussi attiré l'atten- tion sur un curieux système d'écriture, usité vers la même époque, en Irlande, en Ecosse et dans le sud de la Grande-Bretagne. J IL H ~i n — m — m — nnr B L Foi/V S N -^ — # — >w //// ///// M G N ST R' ' • • •,• • • • H tf n A O U(OU) E I FiG. 2. — Série alphabétique des Oghams. Ce sont les caractères ogh antique s. Ces symboles alphabétiques se composent, comme l'on sait, de traits placés au-dessus ou au-dessous et aussi en travers d'une ligne médiane. Ils forment des groupes, de un à cinq, de ces traits associés, qui représentent une série de lettres. Longtemps on les a considérés comme appartenant à une écriture secrète comme on l'avait fait du reste autrefois pour les jmnes. Mais, quoi qu'il en soit, j)our ce qu'étaient les Oghams, la proxi- mité des Iles Britanniques avec le Continent , les rapports fréquents qui existaient [alors, ne rendraient pas impossible que cette écriture n'ait été connue dans ces régions. Quoique les preuves de l'usage des D^ F. DELISLE. — LE PREHISTORIQUE 907 Oghams ne soient pas encore nombreuses, nous avons pensé qu'il fallait au moins les citer à titre de mémoire. S 0 t a c 6 £ i 0 c u m ù a m FiG. 3. — Stèle oghamique de Silchester. (Lire de bas en haut.) Traduction. — Ebicatos magni ^Mucoi (Tombeau de) Ebicatus fils de Muco Si nous n'avions craint d'être entraîné trop loin, nous aurions désiré présenter ici d'autres détails que ces généralités sur certains de ces symboles alphabétiformes et proposer plusieurs rapproche- ments significatifs avec d'autres symboles connus. Ce que nous avons cherché, c'était d'attirer à nouveau l'attention sur ces curieuses inscriptions, dont la solution de leur énigme ne peut être que profitable pour pénétrer plus avant vers les origines de ces peuples francs, c|ui nous touchent de si près. M. le D' Fernand DELISLE Préparateur au Muséum d'Histoire naturelle, à Paris LE PRÉHISTORIQUE DANS LES ARRONDISSEMENTS DE NÉRAC (LOT-ET-GARONNE ET DE CONDOM (GERS) [5ji(44.;6)l — Séance du 10 août — Nous avions été frappé, en examinant les quelques pièces pré- historiques qui figurent dans les collections du musée de la ville de Nérac, non de leur nombre, mais de la multiplicité de leur point <)o8 ANTHROPOLOGIE d'origine, du lieu où elles avaient été trouvées. Après avoir cherché à nous mettre en rapport avec quelques-uns des donateurs de cette région, ils n'étaient pas archéologues ou préhistoriens, force nous fut de marcher seul et sans plus amples renseignements, les pièces ainsi données au musée de Nérac ayant été trouvées, ren- contrées par hasard dans les champs et le plus souvent par des paysans. Le Conseil de l'Association Française m'accorda une subvention sur le Legs Girard , atin de pouvoir donner suite à mon programme de recherches. Parmi les pièces qui figurent au musée de Nérac, il faut établir une division. Les unes, le plus grand nombre, sont des haches polies (i5) trouvées dans les champs et quelques rares silex; les autres proviennent d'une fouille faite à l'allée couverte de Fargues, canton de Casteljaloux. Je n'ai pu avoir aucun renseignement sur la manière dont avait été fouillée cette allée couverte. On l'appelle dans le pays « Lit de Gargantua ». Les objets en provenant com- prennent : Un collier fait avec des canines de cerf et des perles en coquille . deux haches polies , quelques silex taillés . des fragments de cristal de roche, des débris de poterie et un os travaillé. Nous avions pu reconnaître, en parcourant cette partie du département, un certain nombre de monuments mégalithiques, menhirs, dol- mens, etc., plus ou moins bien conservés et déjà signalés par nos devanciers. Mais, par suite des recherches auxquelles nous nous sommes livré, nous avons été conduit à dépasser les limites du département du Lot-et-Garonne et à déborder dans celui du Gers. Nous avons entrepris de rechercher : i° Si les indications déjà anciennes données par certaines revues scientifiques de l'époque à l'occasion de certaines trouvailles, étaient bien exactes et non exagéi'ées ; 2° s'il y avait réellement des vraies stations préhistoriques , des grottes et abris sous-roche d'habitation ou de sépulture, des objets d'industrie et des instruments des différentes périodes de la pierre ; 3° étude des pièces ostéologiques crânes, squelettes de sujets humains de cette époque. Tout d'abord, le dernier point de notre programme n'a pu avoir de suite, n'ayant pas eu la bonne fortune de trouver de sépulture. Il semble, que ceux qui ont rendu compte , à des époques diverses dans des recueils périodiques de certaines trouvailles , ont donné un peu hâtivement au simple fait de trouver, en un point du terroir, un seul ou même un très petit nombre de pièces, silex, haches taillées D"" F. DELISLE. — LE PREHISTORIQUE go^ OU polies, la désignation un peu pompeuse de station; c'est une exagération manifeste faite pour induire en erreur. Tout le monde conviendra de cela. Nous avons visité attentivement certaines de ces soi-disant stations et elles ne sont pas des stations au vrai sens du mot. Une fouille faite sur place, avec criblage de la terre, ne nous a pas donné le moindre éclat. De nos recherches , il résulte cependant que toutes les phases de la grande période des industries lithiques sont largement représen- tées dans la région qui nous occupe. La période acheuléenne y a laissé des instruments très nombreux et dont la taille est très remarquable par le fait de sa grossièreté, bien que très nettement caractéristique, tantôt sur les deux faces, tantôt sur une seule ; parfois seulement une partie de la pierre a été dégrossie pour former la pointe d'un seul côté, tantôt sur les deux faces on reconnaît la trace du travail de l'homme, j)réhistorique , qui n'a fait que juste le travail nécessaire pour confectionner l'outil dont il avait besoin. Ces pierres taillées, du type acheuléen, semblent témoigner, vu leur aspect et le petit nombre des éclats enlevés, de la hâte de la fabrication tout autant que du peu d'habileté de l'ouvrier peu difficile peut-être. Les Roches les plus diverses ont été utilisées pour la confection de ces instruments acheuléens, quartzites, grès, silex de qualités variables, calcaire compact, diorite, etc. Il y a lieu de penser que la plupart des pièces préhistoriques, que nous avons pu voir et trouver, ont été faites avec des fragments de roches trouvés sur place, entraînés là par les eaux sauvages d'une époque antérieure, et ramassés par l'homme dans les champs ou dans le lit des cours d'eau, autrefois importants , qui traversent cette région. Toutes ces roches j)roviennent certainement de la chaîne pyrénéenne, sauf quelques échantillons spéciaux , qui auront pu être introduits dans cette région par voie d'échange ou de migration. Toutes ces pièces acheuléennes ont été trouvées à la surface du sol en plus ou moins grand nombre dans certaines communes, rarement les unes auprès des autres. C'est particulièrement dans les communes de Gondriij, de Montréal, de Courrensan (Gers), qu'il est assez fréquent d'en découvrir. On y trouve aussi de nombreux échantillons des périodes Moustié- rienne et Magdalénienne d'un joli travail, en particulier des grattoirs de formes et de dimensions variables, parfois très finement retaillés, des percuteurs, mais peu de lames, de couteaux ou d'autres types d'outils, et jamais en nombre au même point. 910 ANTHROPOLOGIE De la période solutréenne , seulement quelques rares échantillons de pointes, si toutefois notre appréciation est bien exacte. Il a été trouvé par des collectionneurs de Condom , dans les envi- rons de cette [ville, deux pointes de flèche en obsidienne qui doivent être très certainement rapportées à l'époque de la Pierre polie. La présence de ces deux objets, loin de toute région volcanique, ne peut s'expliquer que par l'arrivée d'un individu venant du Massif Central ou par le fait du commerce d'échange. Ce qui frappe le plus, quand on examine les petites collections réunies par les quelques personnes qui les ont rassemblées, c'est le nombre relativement considérable des haches i)olies, ciseaux et o-ouges faits en roches dures fort diverses, principalement dans l'arrondissement de Condom, c'est-à-dire dans le nord du départe- ment du Gers et en même temps l'absence d'autres pièces en pierre ou en silex employées comme outils et qui sont de petites dimensions. Nous pensons qu'ils ne doivent pas manquer, mais ils ne sont pas ramassés à cause de leur petit volume qui n'attire pas le regard. Cela conduit à penser que, dès cette époque, la densité de la population de cette partie de l'Aquitaine était relativement élevée, dans une réo-ion bien arrosée, assez favorable à son développement, à une certaine distance de la terre des Landes sablonneuses et maréca- geuses. Cependant la région des Landes, aussi bien dans celles du Lot-et- Garonne que du département des Landes, n'a pas été complètement désertée par les anciennes populations du Sud-Ouest de la France. On y trouve encore des mégalithes , généralement en assez mauvais état et encore assez nombreux. De plus, on sait que beaucoup d'autres ont été détruits à toutes les époques et même récemment. Nous avons pu reconnaître en place les restes de certains d'entre eux dans la lande qui s'avance jusqu'à la rive gauche de la Gélise aux environs de Nérac et de Barl^aste. Au cours de nos excursions, nous n'avons pu encore trouver une seule vraie station préhistorique, station de taille proprement dite ou station de groupement, d'habitat. Il ne faut pas conclure de cela " qu'il n'y en a j)as; ce serait juger prématurément. En éludiant la terminologie des noms de lieu dits actuels, on voit que certains d'entre eux peuvent avoir pu être appropriés à des stations de taille, par exemx)le, le Pej'rassa, « le lieu des pierres », près de Courrensan (Gers). En cet endi'oit, que je n'ai pu encore visiter, il a été trouvé plusieurs pièces de l'époque acheuléenne et de celle de Moustier. Nous avons réuni certaines indications qui se rapporteraient, selon D'' F. DELISLE. — LE PREHISTORIQUE 9II toute vraisemblance, à des stations d'habitat plutôt qu'à des stations de taille, qui nécessiteront des vérifications ultérieures. En examinant la nature des roches utilisées pour confectionner les haches polies, le plus souvent en roches très dures, auxquelles on donnait un poli admirable , on reconnaît que les matériaux ont été choisis avec le plus grand soin. C'est plus spécialement la collection de M. Pellisson, de Condom, qui fait bien ressortir ce fait. Il 2)ossède une série de j)lus de loo haches polies trouvées dans la région, les unes achevées, quelques-unes incomplètement polies, diorite, serpentine, jadéite, néphrite, grès siliceux, schiste, roches volcaniques (l)asalte, traehyte), etc. Or cette région ne présente pas, ainsi que nous l'avons dit plus haut, de roches anciennes en place qu'on puisse exploiter des calcaires et des grès exceptés. Il faut signaler en particulier des haches en silex absolument semlDlables à celles qu'on a trouvées en grand nombre dans la vallée de la Loire et de ses affluents méridionaux. Il nous semble que beaucoup de ces haches ont dû venir là, soit par le fait des migrations ou plus probablement par voie commerciale, le silex du i^ays étant de mauvaise qualité et se prêtant peu à la confection de pièces d'un certain volume. Ce qui tend à corroborer cette manière de voir, c'est que, jusqu'à ce jour, il n'a pas été découvert de polissoir. Il existe de très nombreuses grottes dans les assises épaisses du calcaire compact de cette région, particulièrement dans la vallée de la Gélise. Elles y présentent des caractères, en apparence diffé- rents . qui pointent à regarder les unes comme naturelles et les autres comme artificielles. Certaines grottes naturelles ont été modifiées, pour ainsi dire perfectionnées, à une époque de civilisation, alors que d'autres sont restées intactes. D'après certains indices, les unes ont pu servir d'habitation, tandis que plusieurs d'entre elles ont été utilisées comme grottes sépulcrales. Il nous a paru utile , pour compléter nos premières recherches , de consulter les collections régionales du Musée de la ville d'Agen. Il y a là des documents préhistoriques très intéressants, en particulier la trouvaille faite à la grotte de Dondas , canton de Beauville (Lot-et- Garonne), et de nombreuses haches taillées et polies, des silex magdaléniens et moustieriens , mais en petit nombre. De la grotte de Dondas, il a été retiré une voûte crânienne incomplète, qui ne permet pas de fixer le type ethnique de l'individu, et quelques fragments d'os longs, humérus, fémurs, tibias, qui paraissent se rapporter à des sujets robustes. Du reste, cette grotte aurait été fouillée de façon fort sommaire et incomplètement. QI2 ANTHROPOLOGIE Indépendamment des trouvailles se rapportant aux différentes périodes de l'âge de la pierre, il y a aussi de nombreux objets dindustrie , de la poterie , des haches de bronze en tout semblables aux types de cette industrie, exhumés dans les différentes régions de la France. M. DESMAZIERES Percepteur à Segré (Maine-et-Loire) NOTE SUR UNE STATUETTE PRÉHISTORIQUE EN GRÈS TROUVÉE A BLAISON (MAINE-ET-LOIRE) [071.73(44.18)] — St'ance du 10 août — Au fond d'une sorte de niche naturelle peu profonde , creusée suiv- ies parois d'un bloc de grès enfoncé profondément dans le sol et ne présentant -aucune apparence de monument mégalithique, sur le territoire de la commune de Blaison, entre les lieux dits Pissaiilt et les Landes, au Sud et à 200 mètres environ du chemin de grande communication de Saint-Rémy-la-Varenne , à Brissac, j'ai trouvé, en 1890, un rognon de grès représentant une tète humaine; long- temps, j'ai hésité à publier ma découverte. Quelques archéologues angevins, assez sceptiques, ne voyaient dans cet objet qu'une sculp- ture moderne faite par des ouvriers ou des enfants. Cependant, la physionomie toute particulière de la tète , diverses circonstances de la trouvaille, m'encouragèrent à poursuivre mes recherches sur le terrain d'abord, dans les musées et les biljliothèques ensuite. Dans une vigne appartenant à M. Choleau, maire de Blaison, à quelques mètres de l'emplacement de cette tête, j'ai recueilli trois lames en silex dit de Pressigny; M. Choleau m'a assuré en avoir souvent rencontré en labourant. Non loin de là, commune de Gohier,. j'ai ramassé une belle hache polie, en grès du pays. D'autre part, il est bon de noter que le dolmen d'Étiau, situé comnmne de Coutures^ n'est qu'à une distance de i.Soo mètres. Cet ensemble de circonstances tendait déjà à uttrilmor à ma trou- vaille une origine préhistorique. En 1892, j'eus connaissance des- DESMAZIÈRES. — NOTE SUR UNE STATUETTE PREHISTORIQUE EN GRÈS qi3 intéressantes recherches de M. labbé Hermet. dans l'Aveyron et le Tarn, sur les statues-menhirs; à Paris, en 1900. à l'Exposition, je pus faire un rapprochement entre la tète de Blaison et celles des statues-menhirs exposées, soit au Trocadéro, soit au Petit-Palais. Plus récemment encore. M. Louis Giraux puliliait. dans Y Homme préhistorique, un travail sur une statue -menhir découverte en Corse (i). La tète de cette statue, figurée dans ce journal, présente une grande analogie avec celle de Blaison. Il existe cependant, entre la statuette qui fait l'objet de notre communication et les statues-menhirs déjà signalées, une difterence importante. Tandis que la hauteur de la tète des statues-menhirs varie entre 5o et 80 centimètres, notre sculpture ne dépasse pas 8 cent. En voici la description détaillée. La tète est sculptée dans un petit- bloc de grès tertiaire très commun dans toute la région; ces grès sont connus sous le nom de grès à pavés. La tète proprement dite mesure o m. o5 de hauteur, sur o m. 048 de largeur, le cou atteint o m. o3. La partie supérieure de la tête est légèrement conique et présente à la hauteur du front une sorte de bourrelet circulaire très légèrement bombé, la partie inférieure est formée par un ovale assez régulier. Les yeux, le nez, la bouche sont fort bien indiqués et occupent exactement leurs places respectives, le nez a même dû, autrefois, présenter un certain relief disparu par l'usure , le menton est aplati comme l'ensemble de la face, la tête est fortement couchée en arrière, formant un angle assez prononcé avec le cou. Le corps de la statuette a-t-il quelquefois existé ? je crois plutôt que la tète seule a été figurée. Cette tète a-t-elle été taillée en plein bloc? j'estime que l'artiste a dû utiliser, sans doute, quelques-uns de ces rognons de grès qu'on trouve dans les formations gréseuses de la région. Ces rognons, formés par la dissolution des parties plus tendres autour d'un noyau plus dur, affectent souvent des formes se rapprochant grossièrement de l'ensemble de la tète en question; le sculpteur n'aurait eu qu'à modifier légèrement les contours du bloc. Cette statuette appartient-elle à une même époque, à une. même civilisation que les statues-menhirs de l'Aveyron , du Tarn et de la Corse? je suis tenté de le croire. Elle a tous les caractères de cet art étrange, présentant de grandes analogies avec certaines figurations dolméniques du néolithique. En terminant, je ferai remarquer qu'on a trouvé assez souvent (i) L'Homme préhi.slorique , n° 6, i" juin i9o3, pp. 174-1^'- 58* 9l4 SCIENCES MÉDICALES en Anjou des oljjets préhistoriques, haches polies ou silex taillés, placés dans les excavations des blocs de grès ou de granit. Je citerai notamment une belle lame trouvée dans les environs de Gennes par M. Bonemcre, une autre signalée par M. le D"^ Atgier dans le Choletais. M. le D^ Henri GUIPAT à Angers INFLUENCE DE LA GRIPPE SUR LA PRODUCTION ET L'ÉVOLUTION D'AUTRES MALADIES [(J16.938J — Séance du 5 août — Depuis que la Grippe domine toute la pathologie médicale, c'est- à-dire depuis la iîn de 1889, les maladies afTectent des formes moins franches, une marche plus insidieuse, une tendance plus grande à suppurer et, comme on disait autrefois, plus de malignité. De plus, un certain noml^re de maladies, qui sont ou la complication ou la forme anormale de la Grippe , sont devenues d'une fréquence autre- fois inconnue ; elles aflectent aussi une mo(^alité particulière. C'est ce que je vais essayer de prouver par quelques exemples. 1° Il a été reconnu de tout temps que le vestibule pharyngé est constamment atteint dans la Grippe. .En 1873, alors que j'avais l'honneur d'être, à l'Hôtel-Dieu de Paris, l'interne de M. le D' Hé- rard , ce clinicien éminent nous enseignait que le coryza est un des signes les plus constants de cette maladie dans la forme catarrhale qu'elle affectait alors presque exclusivement. C'est, en effet, dans les premières voies respiratoires que le bacille de Pfeiffer commence ses ravages; et si, connue il arrive souvent dans notre climat d'An- jou, il trouve là des conditions favorables à l'association avec les microbes qui sont les hôtes familiei's de l'arri ère-gorge, il y pullule et produit les dégâts extraordinaires. N'est-il pas évident que le nombre des adéuoïdiles aiguës est devenu considérable, que la nécessité du curetage de la gorge s'impose bien plus souvent ^qu'au- trefois ? N'est-il pas vrai également que l'infection microbienne se propage maintenant plus souvent et dune favon plus dangereuse à D'' II. GRIPAT. — INFLUENCE DE LA GRIPPE giS la trompe d'Eustaclie et à la caisse du tympan ? Le danger de cette complication est d'autant plus grand que, dans bon noml)re de cas, l'afTection évolue avec un caractère de virulence souvent impossible à prévoir, d'où, de[>uis lo ans, la suppuration si fréquente de la caisse et la nécessité de parer, par une paracentèse précoce du tym- pan, soit à sa perforation spontanée, soit à l'envahissement des cellules mastoïdiennes. Ainsi, du fait de la Grippe, les inflammations profondes de l'oreille sont devenues plus fréquentes et à marche plus grave ; il s'ensuit qu'au début de la Grippe on doit considérer comme une nécessité thérapeutique de premier ordre d'insister sur l'antisepsie du rhino-pharynx. 2" Bien souvent le microjje de la Grippe porte son eflbrt principal sur le tissu pulmonaire , et là encore il modifie l'allure des phéno- mènes pathologiques. Depuis lo ans, je ne crois pas avoir observé un seul cas de pneumonie franche chez l'adulte, avec ses caractères classiques, et particulièrement les crachats rouilles. Qu'est-ce à dire? N'y aurait-il plus de pneumonies ? Assurément il en existe encore , et de sérieuses ; mais elles ont une tout autre allure qu'autrefois. Ou bien ce sont des broncho-pneumonies avec crachats purulo-sangiants, ou bien ce sont des pleuro-pneumonies, ou bien l'inflammation com- binée des bronches, de la plèvre et du tissu pulmonaire d'un dépar- tement limité de l'arbre respiratoire; et, dans ce cas, il arrive bien souvent que la région ainsi affectée devient le siège d'une fonte puru- lente, d'un abcès avec formation d'une caverne. Plusieurs cas de ce genre sont restés gravés dans ma mémoire, en raison de leurs parti- cularités singulières. En voici trois, parmi les plus intéressants. En 1894, un patron charpentier, âgé de de 45 ans environ, habi- tuellement bien portant, fut atteint d'une suppuration d'origine grippale du sommet d'un poumon, avec caverne assez vaste jiour que l'expectoration quotidienne d'un pus horriblement fétide oscillât, pendant une quinzaine de jours, entre un demi-litre et un litre. Cette caverne se cicatrisa lentement mais complètement et le malade exerce encore sa profession avec activité. Vers le même temps, un jeune soldat se présentait à la visite régi- mentajre avec des symptômes généraux que le major prenait d'abord pour un simple embarras gastrique. Au bout de trois jours, on recon- naissait un point de pleurésie et, le lendemain, un noyau de pneu- monie. Huit jours plus tard, il s'était produit à la ]>ase du poumon droit une caverne avec expectoration purulente abondante, amai- grissement rapide et dépression générale simulant une tuberculose pulmonaire. La production si rapide de cette caverne au moment de qiÔ SCIENCES MÉDICALES la défervescencc me fit nier la tuberculose, aflirmer la Grippe, et l'examen bactériologique confirma ce diagnostic : il n'y avait que des bacilles de suppuration, des streptocoques, sans bacilles de Koch. Depuis longtemps le malade se porte bien et mène une vie très active. Il y a quelques années, un homme de 5o ans était pris dun acci- dent pareil, lironcho-pleuro-pneumonie de la base avec crachats sanglants, puis purulents, et petite caverne. Il passa Ihiver suivant dans le Midi et s'en trouva bien ; mais, l'hiver d'après, il était repris de même façon ; il est mort récemment d'une nouvelle atteinte de Grippe à forme myocardique foudroyante. C'était un emphyséma- teux dont le cœur avait faibli dans les derniers temps de sa vie. 3" Parmi les maladies que la Grippe a été accusée, non sans raison, à mon sens, d'avoir rendues plus fréquentes, l'appendicite est une des plus importantes. C'est depuis la communication faite le 24 mars 1899 à la Société médicale des hôpitaux par le D"^ Faisans, que l'influence de la Grippe sur la production de l'appendicite est devenue classique. Qu'il me soit permis de revendiquer en passant un droit de priorité. Le i3 mai 1896, en efl'et, j'ai présenté à la Société de médecine d'Angers une note ayant pour titre : Influenza, épidémie de famille, polymorphisme , où je citais, au milieu de plusieurs autres cas de Grippe à formes diverses, dans la même famille, un cas d'appendicite légère que j'attribuais expressément à la Grippe. Est-ce parce qu'on en fait mieux le diagnostic, que l'appendicite paraît plus fréquente, ou bien est-elle réellement plus commune parce que le bacille de Pfeiffer ajoute une action novice nouvelle à celles qui agissaient seules autrefois pour la produire , et alors faut-il faire de l'appendicite une des entités morbides sur la production desquelles la Grippe exerce une influence manifeste et dont elle a augmenté considérablement la fréquence? Je me range à cette seconde opinion. Assurément, si l'appendicite avait été aussi commune autrefois que maintenant, les cliniciens s'en seraient bien aperçus. Dira-t-on qu'on la connaît mieux parce qu'on l'opère plus volontiers et plus tôt? C'est là déplacer tout simplement la question. L'appendicite est plus fréquente et plus grave depuis que l'influence grippale domine la constitution médicale ; voilà le fait brutal et qui me seml^le com- porter cette déduction logique que la Grippe est une cause éloignée de l'appendicite. D'' H. GRIPAT. — INFLUENCE DE LA GRIPPE 917 Par quel mécanisme? Dans la Grippe, les troubles intestinaux pré- dominent souvent. « L'appendice est lésé au môme titre que les autres jiarties du tube digestif; mais sa réparation parait moins facile..., c'est un organe lymphoïde , comparable à l'amygdale ». dit le D' Roger (Maladies infectieuses, t. I, p. 35o, 1902); et il ajoute qu'il s'y produit des ulcérations rebelles, des adhérences, la formation d'une cavité à goulot rétréci, même une cavité clo_se, souvent un calcul, point de départ ultérieurement d'accidents suppuratifs ou gangreneux, sous linfluence adjointe d'une cause locale d'infection, telle que la consti- pation opiniâtre, ou d'une infection générale quelconque. Et voilà comment il me semble facile d'expliquer la corrélation entre le très grand nombre des cas d'appendicite des dernières années passées et l'actuelle endémie de Grippe. J'ajoute, comme argument complémentaire, que le plus grand nombre des cas d'appendicite a été de quelques années postérieur au début de l'épidémie actuelle de Grippe et que la fréquence de l'appen- dicite semble concorder avec celle des Grippes à formes graves; d'où cette conclusion que , si la Grippe redevenait plus rare , il en serait probablement de même pour l'appendicite. 4° Les voies biliaires ne sont pas moins exposées à servir de lieu de culture aux bacilles qui s'associent pendant la Grippe dans les voies digestives. Au Congrès de chirurgie de igo2 (p. 5oo), Téde- nat et Soubeyran. puis le professeur Berger, ont signalé des angio- cholites grippales plus ou moins graves, allant même jusqu'à la for- mation d'abcès du foie. L'infection étant moins intense, il se produit parfois des ictères catarrhaux dont j'ai eu l'occasion d'observer quelques cas sériés. Il se peut aussi que le trouble apporté à la sécré- tion biliaire se produise d'une façon latente et qu'il soit la cause première de la formation de calculs biliaires et de coliques hépa- tiques. Questionné pai* moi sur ce sujet, mon ami le D'' Cornillon. de Yichy, dont la compétence en la matière n'est pas douteuse, m'a fait la réponse typique que voici : « J'ai vu quelquefois des accès de « cohques hépatiques succéder nettement à la Grippe chez des gens « qui en avaient été exempts jusqu'alors, mais qui y étaient prédis- <( posés par hérédité. Ce que j'ai observé très souvent, c'est, à la « suite de la Grippe, un rappel de coliques, alors que les individus « se croyaient entièrement déljarrassés de leur affection du foie. « Dans ces cas, les crises sont habituellement répétées et violentes. « Chez les gens non guéris de leur lithiase biliaire , les coliques i^ro, « fitent ordinairement de l'apparition d'une Grippe pour évoluer 9l8 SCIENCES MÉDICALES « avec leur acuité ordinaii^e et parfois aussi arec un ensemble d acci- « (lents réflexes alarmants. Dans tous ces cas, le microbe de la « Grippe joue indubitalilement le rôle à' agent provocateur. » D"où il suit, évidemment, qu'un des préceptes de la thérapeutique de la Grippe est le nettoyage des voies digestives et leur antisepsie rigoureuse, pour empêcher dans l'avenir la production de la lithiase biliaire, comme aussi la prédisposition à l'appendicite. 5° Le D'^ Cornillon ajoute spontanément, dans sa lettre : « Il est « une autre maladie sur léclosion de laquelle la Grippe a une « influence décisive, c'est le diabète. J'ai vu fréquemment cette « maladie reconnaître pour cause unique la Grippe vulgaire. Nos « clients accusent les sirops absorbés en grande quantité, le séjour « à la chambre, au lit, les craintes qu'ils ont conçues. Je n'en crois « rien; cette étiologie me parait trop simple. Chez les obèses, la « Grippe parait jouir du triste privilège de bouleverser l'économie « tout entière, de jeter le désarroi dans les échanges nutritifs et de « les fau'e sortir de leur voie normale. Parfois c'est le diabète insi- « pide, plus souvent le diabète sucré A'éritable. qui en est le résultat, « avec son cortège symptomatique et sa marche habituels. » Et il conclut : « Si la gravité immédiate de la Grippe n'est pas ordinaire- « ment très grande, ses effets consécutifs, éloignés ou rapprochés, « sont quelquefois terribles. » C'est là une proposition à laquelle je souscris volontiers. 6° La Phlegmatia alba dolens est une autre maladie qui semble assez souvent succéder à la Grippe. Pour obtenir sur ce point des renseignements confirmatifs de mon observation personnelle, j'ai profité d'une récente occasion pour questionner verbalement le D'' A'aucher, médecin consultant de la station thermale où viennent échouer le plus grand nombre des i)hlébitiques imparfaitement guéris, c'est-à-dire Bagnoles de l'Orne, et j'ai eu le plaisir de recevoir presque en même temps de M. le D"" Hannequin. qui exerce à la même station, un très intéressant mémoire ayant pour titre : Mani- festations veineuses de la Grippe (extrait du Bulletin médical du i8 avril 1908) , contenant une vingtaine d'observations très intéres- santes. Or, nos confrères de Bagnoles s'accordent à reconnaître aux phlébites d'origine grippale, comme caractères principaux, d'être souvent doubles et d'être à rechutes. Pour ma part, j'ai observé récemment encore une malade qui, deux années de suite, a été atteinte d'une phlegmatia douille violente et rebelles d'origine grippale. 7° Pour terminer cette revue, très incomplète daiUcurs, des mala- dies et des syndi'omes que la Grippe a rendus i)lus fréquents ou plus D"" H. GRIPAT. — ÉPIDÉMIES FAMILIALES DE GRIPPE 9I9 graves, j'ajoute que jamais il n'y avait eu tant (Valbuminiu^es. Dii*a- t-on qu'actuellement on examine plus systématiquement les urines qu'autrefois? Mais il est bien des médecins dont c'est l'habitude depuis très longtemps et qui trouvent bien plus fréquent le syn- drome alliuminurie chez ceux qui ont été quelque temps auparavant atteints de la Grijipe; il en est de cela comme de l'appendicite. Il est clair que. du fait de l'élimination par les reins des toxines d'infection, l'épithélium rénal est altéré et que. s'il ne se répare pas rapidement et complètement, avant qu'une des causes banales de néphrite inter- vienne à nouveau, le rein redevient malade plus ou moins sérieuse- ment. D'où la nécessité reconnue par tous de prescrire le lait en abondance dès que la Grippe a envahi l'organisme. Voilà donc un certain nombre de syndromes ou de riialadies qui. du fait de la Grippe , ont à l'heure actuelle une modalité , une fré- quence ou une granité nouvelles; aussi j'estime cpi'il m'est permis de répéter, en terminant, que, depuis 1890. la Grippe a modifié la cons- titution médicale tout entière ; partout où il séjourne, le microbe de Pfeiffer est prêt à jouer le rôle à' agent provocateur. M. le D' Henri GRIPAT a Angers ÉPIDÉMIES FAMILIALES DE GRIPPE [fiiô.g^S — Séance du 3 août — L'air exph'é sert de véhicule au microbe de la Grippe ; il est donc naturel que ceux qui vivent dans le même milieu soient pris simul- tanément. Si les individus atteints présentent des conditions dif- férentes de réceptivité, s'ils n'ont pas le même point faible, on observe côte à côte les diverses formes communes de la maladie affectant soit l'appareil respiratoire, soit le tube digestif, soit le système nerveux. Si les individus agglomérés sont de même âge, hal^itent les mêmes locaux , vivent de la même vie . suivent une même règle, mangent la même nomn'iture, se présentent en un mot dans des conditions identiques de réceptivité . on observe des séries analogues. C'est un fait d'observation banale. 920 SCIENCES MEDICALES Ce qui est plus rare et plus intéressant, c'est de voir clans ces épidémies familiales d'une maison, d'un atelier, d'un régiment ou d'un collège, des séries de formes insolites. La chose peut alors passer aisément inaperçue quand l'attention de l'observateur n'a pas été attirée par avance sur la relation de causalité reliant à la Grippe ces états pathologiques qui, à première vue, en pourraient paraître éloignés. A en signaler quelques exemples, on peut espérer attirer sur eux l'attention et démontrer que ces formes insolites de la Grippe sont en réalité assez fréquentes, qu'elles se présentent souvent en épidémies familiales. Je donnerai quelques exemples sous deux vocables : Epidémies fainiliales homologues et épidémies polj'morphes. VouvIr discussion, je me vois obligé de reprendre les mêmes faits en les groupant différemment. 1° Epidémies homologues. — ■ En 189(3, j'étais appelé à soigner dans une même famille sept malades pris coup sur coup . à quelques jours d'intervalle, comme il arrive si souvent : deux jeunes enfants atteints de Grippe très normale et évidente à forme bi-onchique ; deux domestiques, de grippe également normale à forme intestinale; une jeune lille, de néphrite grave; le père, d'angiocliolite également' violente; un fils, enfin, d'appendicite. Or celui-ci, le premier en date de cette épidémie de famille, était un jeune dragon qui avait évidemment infecté la maison. Revenant de manœuvres, on lui avait permis de se faire soigner dans sa famille parce que l'état sanitaire de son régiment était mauvais : coup sur coup, dix de ses camarades avaient été pris à la caserne d'appendicite et étaient en traitement à l'hôpital. Cette coïncidence me parut singulièrement suggestive et m'amena à déclarer, d'accord avec mon regretté confrère le D'^ Dezanneau, que le jeune soldat, pris d'appendicite, avait été le trait d'union entre ses camarades du régiment et les meinbi*es de sa propre famille ; et . comme dans sa famille il y avait au moins quatre individus indubitablement grippés , il me paraissait presque certain que les autres cas de la maison (l'angiocholite et la néphrite), ainsi que les autres appendicites du régiment, devaient être des cas de Grippe à formes insolites. C'est à partir de ce jour que je m'apjdiquai à rechercher les cas isolés d'appendicite pouvant être attri]>ués à la Grippe et particulièrement ceux plus rares qui se présentaient en séries dans un même milieu. Or, deux ans plus tard, je soignais à Angers, dans sa famille, un jeune homme atteint d'appendicite, venant d'un collège d'une ville voisine, et j'apprenais que, dans le même établissement, il s'était D'' H. GRTPAT. — EPIDEMIES FAMILIALES DE GRIPPE 92I produit presque simultanément cinq ou six autres cas d'appendicite chez ses camarades. Ici, encore, se trouvaient réunies mêmes condi- tions d'âge . d'occupations, d'habitat , de nourriture ; il me parut évident que toutes ces appendicites sériées avaient eu pour cause un même microbe véhiculé très probablement par la voie aérienne, comme le microbe de la Grippe, les autres causes ordinaires de l'appendicite, telles que la constipation, venant probablement s'y ajouter. A défaut de preuve expérimentale , mon assertion pèche assuré- ment par quelque point ; mais il en est souvent ainsi en clinique , et bien souvent la conviction absolue ne se produit que plus tard, quand d'autres séries analogues sont fournies par d'autres observateurs, et c'est là ce que j'espère. A l'automne dernier, dans un collège dont je suis le médecin habi- tuel, j'ai observé, en l'espace de 20 jours, une série de douze ou treize cas d'ictères catarrhaux infectieux légers, tous identiques et sans gravité. Il s'en présenta d'abord les deux tiers dans la division des petits, puis le reste dans la division des moyens, celle des petits cessant alors d'en produire, comme il arrive d'ordinaire quand l'affection contagieuse est produite par un microbe véhiculé par la voie aérienne et non par ingestion alimentaire. Traités par la diète lactée, le calomel. puis les alcalins, tous ces ictériques guérirent rapidement. Mais un enfant, soigné dans sa famille, fut nourri trop tôt, mangea sans mesure et, ayant ingéré des huîtres dans un temps où elles furent incriminées en maints endroits de véhiculer le bacille d'Eberth. eut une fièvre typhoïde. Soit dit en passant, j'ai déjà observé plusieurs cas où le bacille de Pfeift'er semblait ouvrir la porte à celui d'Eberth. Pendant que j'observais cette épidémie d'ic- tères dans ledit collège, mon confrère M. le D' Legludic soignait en ville deux enfants d'une même famille également atteints d'ictère catarrhal. C'était à un moment où l'on observait déjà un certain nombre de cas de Grippe, et j'estime que ces ictères peuvent légiti- mement être attribués à l'influence de cette maladie. 2° E pidémies polymorphes. — J'ai eu l'occasion, je le répète, de voir à la fois dans une même maison, en même temps que quatre cas de Grippes vulgaires . deux à forme bronchique et deux à forme intestinale, trois autres cas que j'ai également rattachés à la même maladie, malgré leurs formes insolites, savoir une appendicite venant d'un régiment où il y en avait dix autres , une angiocholite grave et une néphrite grave ; jtour l'appendicite et pour langiocholite, l'infec- tion s'était faite par ascension du microbe et par sa fixation dans une g22 SCIENCES MEDICALES dépendance du tube digestif, ici par suite de la mauvaise hygiène alimentaire au cours de manœuvres , là par suite des préoccupations d'affaires et des fatigues de voyages répétés chez un père de famille, probablement atteint antérieurement de quelque tare du côté des voies biliaires. Quant à la néphrite, elle est fréquente dans la Grippe, le rein ne pouvant toujours résister impunément à l'élimination de toxines en trop grande quantité ; j'en ai observé un certain nombre de cas graves dans le cours de l'épidémie actuelle, particulièrement dans l'hiver de 1889- 1890 où la maladie avait un caractère de viru- lence très accentué. C'était bien une épidémie polymorphe de grippe. En résumé, je crois pouvoir déduire de ces quelques exemples que des cas anormaux de Grippe se présentent parfois en séries homo- logues ou polymorphes dans les collèges, les régiments ou les familles. M. le D- Marcel NATIEE, à Paris LA SURDITÉ CHEZ L'ENFANT. — SON DIAGNOSTIC PRÉCOCE ET SON TRAITEMENT AU MOYEN DES DIAPASONS. — ÉDUCATION PHYSIOLOGIQUE DE L'ENFANT (i) [6i:.8.oo87: 534.3] — Séance du 5 août L'insouciance prétendue des personnes atteintes, à un degré quelconque, de surdité, a, de tout temps, profondément désolé les otologistes. Ils n'ont cessé d'alléguer que les malades de cette caté- gorie, insuffisamment préoccupés de leur condition, songeaient, trop tard, à solliciter des soins ax^propriés. De là allirmait-on, géné- ralement, le peu d'efficacité ou même l'échec radical, en pareils cas, de toute thérapeutique. Mais, ces reproches sont-ils réellement fondés? Il faut bien avouer que, très souvent, les débuts de la surdité passent absolument ina- perçus. Et les malades sont entièrement de bonne foi, quand ils (I) Travail de l'Institut de Laryngologie et Orthophonie de Paris. D^ M. NATIER. — LA SURDITÉ CHEZ l'eNFANT 923 déclarent n'avoir observé que depuis peu de temps les premiers symptômes de cette affection. Semblable assertion parait, du reste, trouver sa justification dans ce fait, que les sujets les plus attentifs à l'état de leur santé — et les médecins eux-mêmes ou leur entourage immédiat n'échappent pas à la règle — offrent, communément, des défectuosités très accentuées de l'ouïe , dont ils n'ont pourtant pas la moindre notion. Une circonstance fortuite les conduira, seule, à cette constatation toujours pénible. C'est qu'alors s'établissent des sup- pléances entre les composantes de même note ou les notes voisines. Et ainsi se trouve plus ou moins masquée l'altération fonctionnelle de l'oreille jusqu'à ce que celle-ci, s'étendant en profondeur et en surface s'impose, de toute nécessité, à l'attention du patient. II La présente étude est exclusivement et intentionnellement limitée aux lacunes auditives chez l'enfant. Celles dont il va être question ont été révélées d'une façon indirecte. Les sujets qui en étaient por- teurs nous avaient tous été conduits pour des troubles du langage. Et c'est en les recherchant, de parti pris, qu'on a pu arriver à établir l'existence des défectuosités de l'oreille. Mais, à cet égard, quelques explications sont nécessaires. Il s'agit, en effet, d'une découverte récente. En voici l'origine : Au mois de décembre 1901 , M. l'abbé Rousselot entreprit l'édu- cation spéciale d'une fillette âgée d'une dizaine d'années. Elle était atteinte de bégaiement. En outre, elle zézayait fortement. Cette enfant, très intelligente et d'une famille appartenant à notre plus haut enseignement, n'avait, jusque-là, retiré aucun bénéfice des recommandations, pourtant singulièrement éclairées, qui lui avaient été prodiguées par les siens. Le mécanisme articulatoire del's fut vite appris. Mais, abandonnée à elle-même, l'élève retombait sans cesse dans son ancien défaut. Aux reproches qui lui furent adressés à cet effet, elle répondit qu'elle ne se rendait aucun compte des fautes qu'on l'accusait de commettre, car son oreille était toujours impressionnée de la même manière. On songea alors que, si elle n'émettait par correctement Vs, c'était, peut-être, sinon qu'elle ne l'entendait pas du tout, mais au moins d'une façon imparfaite. L'enquête auditive révéla l'existence de plusieurs points faibles : entre deux notes perçues normalement (4-224 6t 8.968 v. s.), Vuff, (4.096 V. s.) était entendu, de l'oreille droite, 5 secondes de moins 924 SCIEXCES MÉDICALES que par l'enquêteur, et, de l'oreille gauche, 8 secondes. Plusieurs autres notes présentaient aussi un aflaiblissement sensible : 704 (environjTâa dièze) accusait une diminution de 10 secondes. De même il y avait une réduction dans la durée de l'audition pour 520, 23G, loi, 69, 62.5, 60 et 47) la note 168 étant normalement perçue. Cette constatation établie, on procéda à l'éducation acoustique et, bientôt, les deux oreilles ayant été complètement corrigées, le zézaiement fut guéri d'une manière définitive. Il en fut ainsi pour un jeune homme de 18 ans qui, quelques jours plus tard, se présentait dans des conditions identiques. Depuis cette époque, et dans maintes circonstances, nous avons eu l'occasion de vérifier, régulièrement, l'existence de lacunes analogues chez tous les patients venus à VInstitiit de Laryngologie et Ortho- phonie, pour la correction de vices de prononciation. J'en A'ais, maintenant, rapporter des exemples. III Obs. I. — Garçon de i5 ans, lils de père nerveux. Il paraît avoir eu, vers l'âge de 4 à 5 ans, une attaque grave de niéniugisnie dont il est très bien guéri. Il n'a jamais pu prononcer correctement les s. L'enquête auditive a révélé une imperfection relative de l'oreille (voir fi g. i). Or, celle-ci, chose remarquable, a été guérie par le seul exercice de la parole correcte; plusieurs des lacunes reconiuies lors de la première enquête se sont trouvées comblées en quelques jours. Les notes ut^, si.^, la.^, soI.^,fa.^, ré,, ré-, étaient entendues normalement. Les autres avaient gagné : ré.,, i seconde (or. g.); — ré,., 10 (or. d.), 4 (or. g.); — ré~ 10 (or. d.), i3 (or. g.); — ré^, 25 (or. d.), i(3 (or. g.); — mi.^, 20 (or. d.). i3 (or. g.); — nt.^, 10 (or. d.) et 2; (or. g.). Le second examen domie 6" (or. d.), 8" (or. g.). A un troisième examen, ont été entendus nomnalement : ré-, ré^, iit^. Reste encore à gagner : réf^, 4"; ut,., 6" (or. d.), 2 (or. g.); Jiii.,, 6" (or. d.), 9" (or. g.); ut,, 11" (or. d.), 5 (or. g.). Obs. II. — Garçon de 10 ans, lîls de mère excessivement nerveuse. Tou- jours malingre, arrêté dans son développement physique et mtellectuel. Très en retard pour la parole. Il paraissait entendre fort bien : amsi demandait-on, en sa présence, quelque chose à sa sa^ir (ju'il courait le chercher. Il commet . en parlant, de fréquentes erreurs. Or, comme celles-ci atfectenl surloul la (.Uslmclion des sourdes et des sonores, l'examen acoustique a porté sm* les deux gammes de la voix humahie : ut, et «f., (voir fi g- . a). On remarquera que la dépression est proportionnellement i)lus grande [)our la première que pour la seconde; ainsi : pour so/j, sa i)erte est de 34 lo.*); poiu sot^ de iG/io5; soit, respectivement, d'environ i/4 et i/;. Aussi lenfant enten- dait-il moms bien la voix d'homme que la voix de femme. D"' M. NATIER. — LA SURDITE CHEZ L ENFANT 92a Après six semaines d'exercices respiratoires et trois d'exercices imique- meut vocaux, il était très amélioré pour la santé et pour la parole. L'examen acoustique, praticjué de nouveau, attestait un progrès considé- rable. L'audition était devenue normale de l'oreille droite pour si.2, sol^, fa.,, nii^, ré^; elle avait gagné pour si^, i3/i6; — pour /o, , 19/23; — ijoin- sol^.. 10/16; — pour /a, , 49/5"; — mais pour ut.^, seulement 5/ii; — pour ut^, 4/i5. Passons maintenant à l'examen du graphique ci-dessous relatif aux deux malades précédents. La colonne de chiffres à gauche indique , évaluée en secondes , la durée de l'audition des diapasons employés. La ligne brisée formée lio ut^ k ! ! 1 \2( 0 \ s ' 1 v\ Ji. Q_ t\\. £. 4 1 ^ ili 1 1 _i a Î . ! ; 1 i ' ' îiv: 1 h' ■'■ J"- / ■■ '- ..J ^ irit hiv -ii 0 ■ ■ J'^' i .., .. ^r^^ 1— 1 ^ ./>z ^ \\ ^^•■^ ^^M "■■ j; 0 « t ^ /^ ^ \Y'^ ^^ l -J iv;\\\^ x#- <*■■>• »-- ■ -JA 0 . iv^i \\^ n \\^ . J ^ ■^^ k^v! ^ — — ■f ■ u \^ H^ 1 ■ 1 — j\ 0 ^ :i^F 1 1 i. r - — fr ^- 1 U 1 — 1 v; 0 -— ttr '^sH - i -iJ-^' i 7^^ 1 -h 0 '^'i^ b^ 1 ! 1 /i - S ^ 1 1 K> iV ■■' 1 1 ^^. ~i II \ i 1 1 — i^ '~ i ; 1 r Tfi 1 1 h—, - 1 rj 1 l~ — Si 1 1 . — \ i 1 1 ^c " ai 1 ■ f^ î^ ; 1 1 4— ^-j 4( s^ 1 1 i 1 1 1 - — _ 1 c^ 1 " ! 1 1 1 1 j U. h • 1 ! 1 1 - ■ 1 ; 1 ' — 1-- 1 i 1 ! 1 ^^-^ liz 1 i jT" 1 >ù 1 j dû t 1 ! 1 K 1 r 1 ^ k 1 i ^1 r\ ■ — — — FiG. I (Del.). FiG. 2 (Gai.). g20 SCIENCES MEDICALES par des croix ( + + + ) figure un champ auditif normal. Quant au cliamp auditif du malade, il est limité à sa partie supérieure et, pour la première enquête, par le trait ( — ) inférieur de la portion ombrée (oreille droite), et par des pointillés ( ) (or. — g.). Lors de la deuxième enquête , les limites du champ auditif se sont trouvées agrandies chez chaque malade. Elles ont été reportées jusqu'à la partie supérieure de la portion ombrée. Et cette partie représente, exactement, les progrès effectués entre les deux enquêtes. Les progrès de l'oreille droite sont marqués en grisaille et ceux de l'oreille gauche figurés par les hachures, en diagonale. Les progrès à réaliser, pour que l'ouïe soit restaurée ad integrum , sont représentés par l'espace clair restant entre les limites supérieures de la partie omb^'ée et les croix. Exemples. La note ut.^ a été entendue par l'enquêteur laS secondes. Le malade (^fig- i) ne l'a perçue, lors de la première enquête, et de son oreille droite, que 96 secondes; d'où, pour cette oreille, un déficit de 29 secondes. De l'oreille gauche, il n'a entendu que 92 secondes, c'est-à-dire que le déficit a été de 33 secondes. Quant au second malade (ftg. 2), on remarque que, dès lapj^emière enquête, et de l'oreille gauche, il entendait mi;, d'une façon normale; aussi n'existe-t-il pas de hachures sur la figure. Mais l'oreille di-oite, ne percevant cette même note que 128 secondes, avait un déficit de 3; secondes. A la deuxième enquête, le trait inférieur, pour cette oreille, a été reporté exactement à la limite supérieure, où il est venu se confondre avec la ligne de croix. Le progrès était donc absolu. Et, ainsi de suite, pour la lecture de chaque note prise en particulier. Obs. III. — Garçon de 5 ans 1/2, lils de père alcooUtiue et de mère nerveuse. II n'a parlé que fort tard et s'exprime d'une façon mcompréhen- sible. Quoiqu'ayanl toujours paru I)ieii entendre, cet enl'anl ne posssède, cependant , qu'un champ auditif (voir fig. 3) assez hmité. Les notes aiguës sont moins touchées que les graves : les notes du médium sont particulièi-ement atteintes. Au bout de deux mois de traitement, l'oreille s'était améliorée dans des proportions notables. Elle avail gagné pour les notes déjà explorées : z/.^So — 7/i5 à droite, n/i" à gauche ut, - 3/8 fa.'^''"^ — 13/22 » 5/14 2.432 — i"/i9 » 4/10 ré., — 11/^3 » 3i/6o .sol, — 14/3; » 32/5; » » » » D' M. NATIER. — LA SUl /«4 — 3()/54 à c ro mil, — 56;85 » ut, — 54/65 )) Sh — 8/32 » la^ — 3o/57 » fa,^'"" — 2i/5o )) ut 3 — 38/55 )) la^ — 65/90 » mi. 2 — 61/100 » ré. — 1-/45 )) LA SURDITE CHEZ L ENFANT 927 Ut./'^'-^ 11/36 à gauche 15/48 » 17/51 » 4/36 » 2o/5o » 29/50 » 17/50 » 46/71 » 9/47 » 20/52 )) 12/57 » — 7I/II5 ^* FiG. 3 (TiL). qaS sciEXCES médicales La lecture du graphique ci-dessous permet de se r.udre un compte exact des progrès réalisés. Le champ auditif du malade, à l'époque de la première enquête (10 février 190 3), est indiqué par la partie claire située au-dessous de la partie ombrée. Les grisailles figurent les progrès qui avaient été réalisés lors de la deuxième enquête (5 mai) et les hachures ceux réalisés lors de la troisième enquête {u) mai). La partie claire, située au-dessus et jusqu'au croisillé, montre ce qui reste à acquérir pour que l'ouïe soit devenue tout à fait normale. Hachures et grisailles indicpient la somme des bénéfices acquis par les deux oreilles ensemble. Pour distinguer ceux relatifs à chacmie d'elles, il suffit, à la lecture, de se rappeler que les lignes pleines (— ), inscrites siu- le graphitjue, se réfèrent à l'oreille droite, alors que les lignes pointillées ( ) se réfèrent à l'oreille gauche, Obs. IV. — Garçon de 6 ans, opéré de division congénitale du voile du palais. Après plusieurs mois d'éducation phonétique , il ne pouvait pro- noncer ni le h, ni les voyelles nasales. L'enquête acoustique a révélé une diminution sensible de l'ouïe. Elle se tradidsait, respectivement, et pour chaque oreille, par les chiffres ci-dessous évalués en secondes : ut. — 4 à droite, 6 à gauche la^ — 5 » 5 » mi. — 5 » 4 » ut. — II )) 16 » la. — i"3 » 10 » mïg — II » 8 » ut. — 9 » 10 » mii — 7 » 9 » soli — 3 » 6 » uti — 6" » 10 » la. — II )) 8 » mi. — 9 » 6 » ré. — i5 » 8 » ut. • 16 » Du côté droit , le conduit était obstrué par un polype et le tympan cA SURDITÉ CHEZ l'eXFANT 929 II mai 12 mai i5 mai 20 mai 29 mai 4j uin or. d. or. g-. or. d or. g. or. d. or. g. or. d. or. g. or. d. or. g. or. d. or. g. lit, — 4 .5 5 3 3 2 0 0 0 0 0 0 re'; — i5 i3 9 10 r 4 0 0 0 0 0 0 0 ré, — 28 41 25 21 i3 10 5 6 0 2 0 0 "^, — : 9 6 7 0 r 4 0 0 0 0 0 0 ut, — 38 36 29 35 i: 12 8 2 5 0 0 0 ut, — 3o 42 2: 33 21 25 0 2 0 0 0 0 On peut, en effet, à la lecture, se faii-e d'abord une idée de l'étendue des lacunes auditives au moment de la première enquête (i 1 mai). On voit ensuite la marche des progrès de l'ouïe sous Tintluence des exercices acoustiques. Les chiffres en regard de chaque note indiquent, évalué en secondes, le temps pendant lequel l'enquêteur entendait les diapasons de j)lus que le malade. On constate que la diflérence est allée sans cesse en dimmuant ; et, au bout de vingt-trois jours, lors de la dernière enquête (^ juin), elle avait entièrement disparu. IV Conclusions. — Fréquemment les débuts de la smxlité passent entièrement inaperçus. Gela x)rovient, généralement, des suppléances fonctionnelles qui s'établissent, alors, entre les composantes de mêmes notes ou les notes voisines. Des lacunes auditives peuvent exister chez l'enfant, alors qu'on non avait pas le moindre soupçon. M^Tabbé Rousselot, le premier, a démontré 1" évidence du fait pour quantité de cas de troubles du langage. Aussi, aujom-d'hui, est-il assez disposé à formuler l'axiome suivant : La plupart des i'ices de prononciation d'origine fonction- nelle ont pour cause initiale une défectuosité de l'ouïe actuelle ou passée. Cette découverte montre tout l'intérêt pratique qu'il y am-ait à procéder à un examen très approfondi de l'ouïe, même chez des enfants qui ne présentent aucun trouble apparent de cet organe. Pour arriver à déterminer avec précision le champ auditif, il est de toute nécessité d'avoir à sa disposition une collection complète de diapasons embrassant toute la série des sons simples perceptibles pour l'oreille humaine , depuis 82 vil^rations simples jusqu'à environ 3o à 35.000. Grâce à ce procédé, on peut garantir la certitude du diagnostic. Le 59* 93o SCIENCES MÉDICALES champ auditif est-il simplement diminué, et cela d'une façon régulière, on est assuré que seul est en cause lorgane de transmis- sion. Mais , qu'il existe en outre des lacunes , c'est une preuve que le nerf auditif est aussi atteint. Dans l'un comme dans l'autre cas, le massage des muscles de l'oreille et l'excitation des cellules nerveuses s'opèrent, exactement, à l'aide des diapasons mêmes qui ont décelé le point faible. La pratique nous apprend que l'état général ne doit jamais être perdu de vue. Aussi, s'il y a lieu, comme c'est fréquemment le cas, les premiers soins devront-ils être diiùgés de ce côté. En résumé : nous sommes, aujourd'hui, en mesure de diagnosti- quer de bonne heure et très rigoureusement une surdité latente. Mieux encore, nous pouvons la guérir. Ces considérations devront toujours être présentes à la mémoire de tous ceux, parents ou maîtres, à qui incombe le devoir de s'occuper de l'éducation des enfants. M. le D^ Albert MALHERBE Directeui' de TEcole de Médecine de Nantes DE LA RÉSECTION TOTALE DES CORDONS SPERMATIQUES DANS LES HYPERTROPHIES DE LA PROSTATE [6i:.558.5] — Séance du 5 août — Je crois avoir été le premier à pratiquer en France la résection totale des cordons spermatiques pour combattre l'hypertrophie de la prostate. D'api'ès Monod et Yanverts, cette opération aurait été pratiquée en 1895, en Amérique, par Mears (i). Lorsque je communiquai mes quatre premières observations à la troisième session de l'Association française d'Urologie, en octobre 1898, j'ignorais les tentatives faites avant moi dans le même sens. Depuis lors, j'ai pu me rendre mieux compte des conditions dans lesquelles cette opération pouvait rendre des services et en perfec- (i) Annal, of mrg. iSii.") , t. XXI, p. 181. D"^ A. MALHERBE. — RÉSECTION TOTALE DES CORDONS SPERMATIQUES gSl tionner la technique clans le but d'éviter la nécrose du testicule, qui nest sans doute pas un accident très grave , le testicule s'éliminant peu à peu sous forme de petites masses nécrobiotiques , mais qui a rinconvénient de retarder beaucoup la guérison complète des opérés. Au mois d'octobre 1902, je communiquai à l'Association d'Uro- logie les résultats de onze opérations. On trouvera, dans les comptes rendus de la sixième session, ces onze observations, qui ont trait à des cas fort difl'érents les uns des autres et dont l'analyse permet de dii-e dans quelles conditions la résection totale des cordons peut donner de bons résultats. Je me propose aujourd'hui d'établir les indications de cette opéra- tion, puis de dire un mot de sa technique et des résultats obtenus. Mais d'abord il convient de distinguer la résection totale de quelques autres interventions, telles que la vasectomie et l'angio- neurectomie. Dans les deux oj)érations que nous venons de nommer, on ne sacrifie qu'une partie du cordon spermatique, le canal déférent dans la vasectomie, les vaisseaux et nerfs dans l'angio-neurectomie; dans cette dernière, on laisse le canal déférent, quelques vaisseaux et nécessairement quelques nerfs. Or, dans ces conditions, l'atrophie du testicule, que l'on poursuit et qui doit entraîner comme corollaire l'atrophie de la prostate, est loin d'être constante. C'est pourquoi je me suis demandé si le sacri- fice de tous les éléments du cordon ne donnerait pas de bons résultats. L'expérience m'a montré que la résection totale était, dans tous les cas que j'ai pu suivre assez longtemps, le point de départ de l'atrophie des testicules qui, après cinq ou six mois, se réduisent au volume d'une petite noisette. Malheureusement, l'atrophie de la j)rostate est loin de suivre toujours celle des testicules. Si l'on n'est pas sûr d'obtenir latrophie d'une grosse prostate, on peut du moins, sauf dans les cas de véritable néoplasme, compter qu'après la résection des cordons la prostate ne continuera pas à augmenter de volume ; on peut espérer aussi qu'elle se déconges- tionnera. C'est, en effet, ce que montre l'observation des opérés. Indications. — Etablir les indications d'une opération chirurgi- cale, c'est la comparer aux autres moyens thérapeutiques médicaux ou chirurgicaux qui peuvent être employés dans le même but. Nous devons donc comparer la résection des cordons aux divers moyens employés pour combattre les accidents de l'hypertrophie prosta- 932 SCIENCES MEDICALES tique. Ces moyens, inclcpendamment de l'hygiène et du régime que nous laisserons de côté, peuvent se diviser en plusieurs groupes : les uns sont purement palliatifs, comme le catliétérisme répété ou même la sonde à demeure; les autres, plus radicaux, consistent dans la création d'une voie de dérivation : telle est l'opération de Poncet. Enfin, les autres moyens ont pour objectif la suppression de l'obs- tacle, soit en s'attaquant directement à la prostate hypertrophiée comme la prostatectomie suspubienne ou périnéale, la prostatotomie par voie périnéale et l'opération de Bottini, soit en cherchant à obtenir indirectement l'atrophie de la prostate, comme la castration, la vasectomie, l'angio-neurectomie et enfin la funiculectomie ou résection totale des cordons. Le cathétérisme répété n'est convenable que s'il est facile, non douloureux, s'il ne détermine pas d'orchite ni d'infection de l'arbre urinaire. Nous connaissons tous des malades qui Advent depuis dix ou même vingt ans sans rendre une goutte d'urine autrement que par la sonde; mais tous les prostatiques ne sont malheureusement pas dans ce cas. Pour beaucoup d'entre eux , le cathétérisme obliga- toire est une source d'ennuis, de souffrances et même de dangers. La sonde à demeure convient, comme l'a montré le professeur Guvon, dans les cas d'infection et dans le cas d'accidents fébriles. Ce moyen est forcément temporaire et bien rares sont les cas où la miction se rétablit d'une manière suffisante après la sonde à demeure. L'opération de Poncet, qui consiste dans la création d'un méat hypogastrique , nous semlîle indiquée dans certains cas très graves où aucune intervention plus favorable n'est possible ; elle peut cer- tainement sauver la vie à certains prostatiques. Mais, bien que nous ayons pu obtenir un méat parfaitement conti- nent, ce méat hypogastrique est presque toujours une infirmité des plus choquantes ; aussi, pour nous comme pour la plupart des chirur- giens, l'opération de Poncet reste comme une ultima ratio à laquelle on ne doit recourir que quand on ne peut pas faire autrement. La prostatectomie périnéale est sans doute l'opération de l'avenir pour l'hypertrophie de la prostate ; mais , malgré les succès obtenus dans des cas favorables par de très habiles chirurgiens, la vérité nous oblige à dire que c'est là une opération très grave, surtout sur les sujets ayant dépassé ^o ans, La prostatectomie suspubienne nous paraît surtout indiquée comme le com[)lément de la taille suspubienne quand cette dernière opération montre un lobe médian facilement attaquable. En principe, elle ne vaut certainement pas la prostatectomie périnéale. Dr A. MALHERBE. — RÉSECTION TOTALE DES CORDONS SPERMATIQUES g33 La prostatotoniie périnéale ne donne aucun résultat. Quant à l'opération de Bottini, j'estime qu'elle mériterait de se répandre. Il me semble que c'est surtout la difficulté d'avoir un matériel con- venable qui a fait négliger cette opération par les chirurgiens français ; il n'y a guère, à ma connaissance, que M. Desnos qui l'ait pratiquée chez nous assez fréquemment et les résultats qu'il a obtenus sont loin d'être mauvais. Pourtant, cette opération donne encore une mortalité de 5 à lopour cent. J'arrive aux opérations par lesquelles on cherche à obtenir indirectement l'atrophie de la prostate. Parmi elles, il faut repousser la castration, qui compte i8 pour cent de mortalité, qui répugne à beaucoup de malades et qui ne donne pas toujours, tant s'en faut, le résultat thérapeutique cherché. La vasectomie et l'angioneurectomie ne déterminent que rarement l'atrophie prostatique. Reste la résection totale du cordon ou funiculectomie . Monod et Vanverts signalent cette opération sous le nom d'opé- ration de Mears et se bornent à dire qu'elle amène la grangrène du testicule. C'est la nécrobiose qu'il faudrait dire, et encore ne serait- on pas dans le vrai, car nous l'avons vue amener une simple atrophie des testicules , sans aucune espèce dé nécrose. De toutes les interventions qui ont pour but d'amener l'atrophie de la prostate comme conséquence de la suppression ou de l'atrophie des testicules , la funiculectomie est celle qui , tout en ayant le jAws de chances de réussir, reste beaucoup moins grave que la castration et à peine plus grave que la vasectomie ou l'angioneurectomie. Cette bénignité de la résection totale des cordons doit faire de pette intervention l'opération de choix, toutes les fois que le catlié- térisme se montre insulhsant et que la prostatectomie est contre- indiquée ou refusée par le malade. Les contre -indications de la résection des cordons sont : l'an- cienneté des lésions, la probabilité d'un néoplasme, l'état général trop grave du malade et enfin la volonté bien arrêtée du patient de ne pas sacrifier ce qui lui reste de virilité. C'est pourquoi la résection des cordons trouvera son indication bien nette chez les vieillards ayant atteint ou dépassé 70 ans, rétentionnistes depuis peu de temps et jugés incapables de subir la prostatectomie ou refusant cette opération. Des sujets plus jeunes, mais ayant déjà renoncé à l'usage de leurs organes génitaux, des malades chez qui le cathétérisme détermine 934 SCIENCES MÉDICALES des orchites douloureuses et répétées subiront aussi avec avantage la funiculectomie. Il convient, du reste, de remarquer qu'un malade ayant subi la résection des cordons, pourra plus tard subir la prostatectomie, si la première intervention a donné des résultats insuffisants. Technique. — Il peut seml)ler oiseux de s'occuper de la technique d'une opération aussi simple que la funiculectomie ; cependant , les bons résultats que l'on peut obtenir et surtout la rapidité de la guérison sont surbordonnés à quelques précautions qu'il me parait utile de signaler. Dans mes premières opérations, je me bornais, après avoir mis à nu le cordon et l'avoir chargé sur une sonde cannelée , à en réséquer, environ un centimètre entre deux ligatures au catgut. Je remarquai que, chez plusieurs malades, il restait d'un côté seulement une fistulette intarissable. J'ignore pourquoi cette suppu- ration suivie de trajet a presque toujours été unilatérale, mais c'est un fait presque constant. Je crus trouver l'explication de cette suppuration dans la per- sistance entre les deux moignons de cordon d'une cavité capable de se remplir d'exsudat et de se servir de milieu de culture aux germes pathogènes ; mais , malgré toutes mes précautions pour ne point laisser d'espace mort, je continuai d'observer cette suppuration unilatérale. Je pensai alors qu'elle était due à la nécrobiose du bout inférieur du cordon et, dans quelques cas, du testicule lui-même, qui s'élimi- minait par petits fragments, entretenant un trajet fistuleux pendant plusieurs mois. Voici à quelle technique je me suis arrêté, après avoir, sans bon résultat, laissé en dehors de ma ligature un petit groupe vascu- laire : Le malade étant préparé , je saisis le cordon de manière à le faire saillir sous la peau et je fais une incision de 3 à4 cent, parallèlement à sa direction. Le cordon étant dégagé et chargé sur une sonde cannelée ou une spatule, j'incise la gaine et je coupe successivement entre deux pinces tout les éléments saisis un à un. On peut, soit Uer les deux bouts du canal déférent, soit les traiter par destruction de la muqueuse avec la petite pointe du thermo-cautère. On pince et lie seulement ce qui saigne et l'on fait une suture de la ]>oau au crin en surjets ou à points séparés, ad libitum. On peut, si l'on veut mettre un petit drain et, par-dessus, on fait un pansement asei)tique. On D"^ A. MALHERBE. — RÉSECTION TOTALE DES CORDONS SPERMATIQUES qBS peut se borner à protéger la petite plaie avec un peu de coton et de collodion. L'anesthésie sera locale à la cocaïne ou générale au chloroforme, selon l'état du malade. La guérison est obtenue en huit jours, sauf le cas où il se produit un peu de suppuration avec petit trajet fistuleux. Ce trajet, comme nous l'avons dit plus haut, peut être long à se fermer. RÉSULTATS. — Nos ouzc premières opérations ayant été relatées dans les comptes rendus de l'Association d'Urologie, nous ne les reproduirons pas ici. Nous résumerons une douzième observation qui est encore inédite et qui nous semble donner une excellente idée des indications et de la valeur de la funiculectomie. Obs. — M. de S., âgé de 70 ans, n'a jamais eu de difficultés pour uriner et n'urine que deux ou trois fois au plus la nuit. Le 3o mai igoS, étant à Saiiite-Anne d' Auray, il fut pris , en descendant du train, de rétention d'urine. On essaya de le sonder et, ne pouvant y réussir, on lui lit ime ponction capillaire de la vessie qui ne donna qu'vm résultat insuflisant. Le lendemain, le D'^ Grias, de Pont-Aven, se trouvant à Sainte- Amie, essaya égalemeut le cathétérisme ; mais, n'ayant à sa disposition qu'mie sonde en caoutchouc rouge, il ne put parvenir dans la vessie. Une seconde ponction capillaire fut faite dans la nuit du 3i mai au i" juin, et M. de S. me fut adressé. Il arriva vers midi à la Clinique, rue du Lycée et je pus le sonder facilement avec une sonde coudée. Je laissai la sonde à demeure. Le troisième jour j'essayai d'enlever la sonde ; mais, le malade ne pou- vant uriner, je dus la remettre en place. Etant donnés l'âge et l'aiTaiblissement du malade, je ne parlai que pour le principe de la prostatectomie, qui fut du reste repoussée énergiquement. La résection des cordons est, au contraire, acceptée facilement. L'opération est pratiquée le 6 juin en suivant la technique indiquée plus haut. Deux petits drains sont mis dans les plaies. Suites apyrétiques. Le II juin, al^lation des deux petits drains. Le 16 juin, ablation des iils. Les plaies semblent parfaitement guéries. Cependant, le 18 jum, il se fait mi petit abcès au niveau de la plaie du cordon droit. Cet abcès se guérit com- plètement en 8 jours. Cependant la miction normale est encore impossible. J'apprends au malade à se sonder lui-même, ce à quoi il arrive après quelques jours d'exercice. La miction spontanée commence à revenir au moment où M. de S. quitte la Clinique. Il urine tout seul à peu près un demi-verre L'atrophie des testicules et celle de la prostate exigeant plusieurs mois, ce n'est qu'après un temps assez long que l'on pourra connaître les résultats thé- rapeutiques de cette intervention. Mais on peut déjà aflirmer que l'hyper- trophie de la prostate sera arrêtée dans son évolution, à moms qu'il ne 936 SCIENCES MÉDICALES s'agisse de néoplasme. On peut être sur que le cathétérisme restera facile et n'entraînera aucune complication ])ourvu qu'il soit fait i)roprement (i). Voici, maintenant, le résultat thérapeutique de nos onze premières funieulectomies, autant que nous avons pu le connaître : Obs. I. — St) ans . Prostatique si nerveux et si sensible qu'on ne peut ni le sonder facilement, ni même pratiquer le toucher rectal. Opéré le 3o novembre 1897. La miction ne se rétablit définitivement qu'après six mois. Mais elle est très satisfaisante. Il ne reste plus que i5 à 20 gr. d'urine résiduale. Succès. Obs. II. — Paysan de la ^■ endée, âgé de 55 ans environ. Première réten- tion. Opéré le 22 février 1898. Parti après i5 jours, pissant bien, mais ayant encore une listulette. J'ai eu de ses nouvelles trois ans après, en 1901. Il se j)ortait très bien. Succès. Obs. III. — Homme de 65 ans, opéré malgré de graves symptômes de néphrite, succoml)a dans le coma urémique six jours après l'opération. Insuccès. Obs. IY. — Le Commandant M., 59 ans, prostatique et pisseur de pus, attemt de pyélo-néphrite. Il ne peut urmer sans sonde et le cathétérisme détermine chez lui des orchiles répétées et interminables. Opéré le 26 juillet 1898. Lai an après l'opération, je constate que les testicules sont complètement atrophiés. La santé générale se rétablit assez pour que le commandant M. puisse reprendre son commandement dans l'armée territoriale. Il reste toutefois de la pj'élite et un peu d'urine résiduale. Demi-succès (2). Obs. y. — Homme de 5i ans, cafetier; un peu éthylicp^ie. Opéré le 14 mai 1899. Aucun accident opératoire, La vessie continue à mal se vider. Les sondages sont beaucouii plus faciles. Insuccès. Obs. VI. — Homme de 70 ans, accidents de prostatisme depuis 10 ans. Opéré à la cocaïne le 16 mai 1899. Guérison idéale des plaies malgré des accidents fébriles assez menaçants, dus probablement à l'état des rems. Le cathétérisme devient plus facile. L'urine reste purulente. Insuccès. Obs. ml — Homme de 60 ans, prostatique deijuis deux ans. Opéré le 9 juin 1899. Les testicules deviennent énormes et les bourses très rouges. Un peu de lîèATe les 3^, 4^ ^t 5^ jovirs. Il sort guéri de roi)ération le 3o jum. L'amélioration de la miction est très lente. L'atrophie des testi- cules et la miction à peu près normale sont oljtenus en 10 mois. Succès. Obs. mil — Cultivateur de Noirmoutier, âgé de 64 ans. Rétention d'urine il y a deux ans, après boire. Retour spontané de la miction après six heures de rétention. Il y a quhize jours, nouvelle rétention d'origine alcoolique. On ne peut le sonder et le malade aiTÎve dans mon service (i) J"ai eu, cette année 1904, des nouvelles de M. de S. Il est ])arfaitement bien portant ; mais on n'a pu me donner des détails précis sur l'étal de la miction. (2) En 1904, le commandant M. a été revu très bien portant. D'' A. ;V1ALHERBE. — RESECTION TOTALE DES CORDONS SPERMATIQUES 987 n'ayant pas pissé depuis trois jours. La sonde à demeure n'ayant pas donné de résultat, je coupe les deux cordons le ii juillet 1899. La sonde à demeure est dès lors parfaitement supportée. Dix jours après l'opéra- tion, le malade se remet à pisser tout seul et part complètement guéri. Succès complet. Obs. IX. — Cordomiier de O2 ans, prostatique atteint d'accidents très gi'aves, fièvre, langue sèche, phléJ^ite de la jambe gauche. Je lui fais presque in extremis l'opération de Poucet, méat hjpogastrique. Méat incontinent qui rend la vie insupportable. Le 17 novembre 1898, je coupe un premier cordon. Le i5 décembre, je coupe le second cordon. J'ai ime élimination nécrobiotique des testicules par de petites fistules. Le malade s'aft'aisse et succomlje le 8 avril 1900. Insuccès. Obs. X. — Menuisier de 60 ans, ne pisse qu'avec la sonde depuis trois ans environ. Résection des cordons le 12 jum 1900. Il quitte l'hôpital le 16 juillet sans aucmie amélioration. Le i5 novembre, .5 mois après, il m'écrit cfu'il vide à moitié sa vessie. Mais il souffre toujours beaucoui). Il succombe quelques mois après dans la cachexie ajjrès de grandes souffrances. Il s'agissait sans doute d'un néoplasme. Insuccès. Obs. XI. — Négociant de 66 ans, pris de rétention à Redon et atteint d'accidents fébriles avec déluge et état général des plus graves. Quatre ponctions ont été faites quand je vois le malade. Sonde à demeure. Amé- lioration de l'état général. Résection des cordons le 8 janvier 1901. Elimi- nation du bout mférieur du cordon et du testicule gauclie, le tout sans fièvre. Le sondage reste assez difficile. Néanmoms le malade se remet, engraisse et recouvre mie santé complète. Il se sondait encore quand je l'ai perdu de vue. En 1902, j'ai su ciu'il se jîortait très bien, mais je n'ai pas eu de détails sur la manière dont il urinait. Dans ce cas l'uitervention. a cerlamement sauvé la vie du malade. Succès. En résumé, la funiculectomie nous a donné, sur 12 cas, 7 succès plus ou moins complets et cinq insuccès. Ces douze opérations ont été faites un peu au hasard des cas qui se sont présentés. Nous avons opéré des rétentions de trois ou quatre et même de dix ans. Il est évident que dans ces cas, la seule chose que nous pouvions espérer, c'était la disparition des accidents de cathétérisme. ce qui est déjà quelque chose. L'expérience nous ayant montré dans quels cas nous pouvions espérer un succès complet , nous réserverons la résection totale des cordons aux cas encore récents et surtout aux sujets trop âgés poui' supporter la prostatectoniie. 938 SCIENCES MÉDICALES M. LADUREAU Ingénieur- Cliimiste, à Paris UN TRAITEMENT VÉGÉTAL DU RHUMATISME |(ii6.90i.3(o8)] — Séance du 6 août — On a rhaJîitiide aujourd'hui de traiter, avec un certain mépris, de remèdes de bonne femme l'emploi des plantes pour la guérison des maladies, et c'est souvent une erreur, car on obtient avec certaines plantes des résultats que l'on n'aurait pu avoir avec les drogues de la pharmacopée nouvelle. Tel est le cas du rhumatisme articulaire qui résiste souvent à toutes les médications employées pour le combattre et que l'on guérit très facilement et rapidement au moyen de la décoction alcaline d'une plante que Ion trouve abondamment dans toutes les parties de la France, soit dans les dunes et sur les falaises qui forment les rivages de la mer , soit sur le bord des chemins de nos routes qu'elle parait affectionner tout particulièrement, soit enfin dans tous les terrains secs, sablonneux et impropres à la culture. Cette plante, à laquelle on ne fait guère attention ordinairement, est hérissée de piquants, sa fleur n'est point jolie. Elle est vulgaire- ment connue sous le nom de Panicaut. Le Panicaut dont le nom scientifique est Eryngiwn appartient à la famille des ombellifères, tribu des Saniculées : ce nom s'applique à des plantes annuelles ou vivaces qui ont l'apparence de chardons. Les racines et les tiges de ces plantes figuraient autrefois sur la table des Grecs et des Romains qui en avaient probablement reconnu les vertus curatives. Dans certaines contrées, on mange encore aujourd'hui ses jeunes pousses préparées comme les asperges. On les emploie en médecine comme diurétiques à l'état de tisanes. C'est probablement cette propriété qui leur vaut leur eflîcacité contre le rhumatisme. La plante la plus connue et la plus employée c'est le Panicaut des champs (Erjnigiuin campestre), que l'on nomme aussi Chardon Roland ou roulant et chardon à cent têtes. Elle se compose d'une racine pivotante brune, grosse, très longue, d'une tige droite très K LADUREAU. — UN TRAITEMENT VÉGÉTAL DU RHUMATISME 939 rameuse haute d'environ o m. ao ko m. 3o cent.; ses rameaux latéraux sont terminés par des feuilles dures, épineuses, coriaces, d'un vert pâle , et des fleurs nombreuses rassemblées en une demi- sphère, entremêlées de paillettes épineuses et de couleur blanc verdàtre. Les autres variétés sont VErj-ngiiim maritimiim, qui croit abon- damment sur les côtes . dans les dunes du Nord et dans les rochers incultes de l'Océan ou de la Méditerranée ; je l'ai trouvé sur presque tout le littoral français ; puis YErynghim alpestvis, que l'on trouve assez abondamment disséminé en Suisse, dans certaines parties des Alpes, et enfin, Y Améthj'ste, dont les fleurs ont une jolie couleur violette. On peut se servir , pour faire la composition antirhumatismale , soit de la plante franchement coupée ou arrachée, après l'avoir lavée pour la débarrasser de la terre , des toiles d'araignée et autres matières étrangères qui la souillent, soit de la j)lante desséchée à l'air et que l'on a découpée en petits morceaux à l'aide de ciseaux très résistants, car la tige est dure à couper. On emploie indiflérem- ment l'E. campestre ou l'E. maritimum. On prend i5o grammes de plantes fraîches ou loo grammes de plantes sèches et on les fait bouillir durant une heure avec un litre d'eau, dans laquelle on ajoute 5o grammes de bicarbonate de soude et 20 grammes de borate de soude. Pour assurer la conservation de cette liqueur, il est bon d'y ajouter 3oo grammes de sucre blanc raffiné, par litre. On obtient après ce traitement une liqueur brune d'une odeur vireuse qui n'est point désagréable, mais dont le goût acre et fade n'a rien d'enchan- teur. C'est cette liqueur que Ton absorbe trois fois par jour à la dose de une cuillerée à soupe délayée dans un verre d'eau, que l'on peut sucrer ou aromatisçr avec du café, de la fleur d'oranger ou tout autre parfum, afin de masquer un peu le goût déplaisant de la liqueur. Si les douleurs ne cèdent pas à ce traitement dans l'espace de quatre ou cinq jours, il faut doubler la dose de liqueur et au besoin même la tripler. Elle ne renferme rien de contraire à l'estomac ni aux autres organes digestifs et elle est généralement bien supportée, même par les personnes les plus délicates. Outre notre expérience personnelle, nous avons déjà recommandé ce traitement à un grand nombre de personnes, qui n'ont eu qu'à s'applaudir de lavoir suivi, car il les a débarassées de douleurs parfois intolérables, et nous serions heureux de rendre service à quelques-uns de nos collègues en le leur faisant connaître. Il leur sera bien facile, avec ces 940 SCIENCES MÉDICALES indications, de se soigner eux-mêmes et de se guérir promptement d'une alîection pénible dont bien des médecins recherchent encore la véritable médication. M. le D^ M. BILHAUT Chirurg-ien de l'Hôpital iiitei'national de Paris DU GENU VALGUM CHEZ LES ENFANTS ATTEINTS DE PARALYSIE INFANTILE AU COTÉ OPPOSÉ [6i:.5831 — Séance du 6 août — Le genu yalgum, ou déviation en dedans de l'articulation du genou, est une aftection caractérisée soit par un allongement anormal des ligaments, soit par une modification dans le squelette de cette jointure. Le genu valgum ligamenteux se voit dans les faits de paralysie infantile; la forme osseuse se rattache au rachitisme, le plus ordi- nairement. Les faits de ce genre sont tellement nombreux qu'il semblerait qu'il n'y ait désormais plus rien à dire sur leur comjite. Maladie du jeune âge chez certains sujets, chez d'autres elle n'apparaît qu'au moment de la puberté et les partisans, à tout prix, du rachitisme, attriljuent la déviation à un rachitisme tardif, en acceptant toutefois que la profession peut, dans certaines limites, agir pour une certaine part dans l'étiologie. J'ai, depuis quinze ans, soigné de très nombreux malades atteints de genu valgum, mais, parmi eux j'ai relevé l'observation de cinq malades, jeunes encore, chez qui le genu valgum se présentait dans des conditions assez spéciales pour être rapportées. Mes cinq observations d'enfants de 5 à 8 ans, dont deux filles et trois garçons, ont trait à des cagnosités unilatérales, le memljre cagneux faisant pondant à un membre frappé de paralysie infantile. Ici, la genèse de la déviation n'est donc pas seulement à considérer comme liée au rachitisme. La déviation reconnaît comme facteur étiologique une perturbation dans la statique du sujet. Le membre atteint de paralysie se développe moins vite que le membre sain, il croît péniblement; il en résulte d'abord une inégalité D"^ M. BILHAUT. — DU GENU VALGUM CHEZ LES ENFAIS'TS ()l^l de long^ueur et instinctivement, sans doute, le petit malade tend à égaliser ses membres en imprimant une inflexion en dedans au membre sain. De plus , le membre sain supporte seul le poids du corps , à l'état de repos, dans la position debout. Or, si nous étudions comment la pesanteur se répai-tit sur les diflerents segments du membre sain, nous voyons qu'elle agit suivant deux lignes, l'une qui va de la cavité cotyloïde au centre des condyles du genou ; elle se dirige de haut en bas et de dehors en dedans; l'autre, au contraire, va du milieu des plateaux du tibia à l'articulation du cou de pied, c'est-à- dire de haut en bas et de dedans au dehors. Ces deux lignes d'axes forment donc un angle ouvert en dehors , que le poids progressif du corps tendra à diminuer avec l'âge : plus l'angle se ferme, plus la déviation auomente. Ainsi s'explique la déviation du genu valgum chez les sujets atteints en même temps de paralysie infantile du membre inférieur opposé. Je n'entends pas dire que ces malades ne puissent pas être atteints de rachitisme aussi bien que d'autres. Je sais parfaitement que la paralysie spinale infantile est consi- dérée aujourd'hui, par des cliniciens de grande valeur, comme le résultat d'une infection des centres nerveux et que la poliomvélite antérieure n'est pas pour eux une entité morbide . mais une affection secondaire. J'admets parfaitement, d'autre part, que le rachitisme est la conséquence habituelle de troubles intestinaux . d'un régime alimen- taire défectueux et que. partant, chez les malades dont je parle, il aurait pu exister de la paralysie d'un côté et de la cagnosité rachi- tique de l'autre. Mais je dois ajouter que chez mes cinq malades je n'ai trouvé aucun stigmate avéré de rachitisme, pas de chapelet chondro-sternal, pas de grosses articulations radiocarpiennes , pas d'incurvation des fémurs ni des tibias, pas de retard dans la marche. Chez l'une des filles, l'articulation du genou droit était tellement relâchée qu'elle prenait indifféremment, pendant la marche, la direction en varum ou en valgum. Je crois que, si le genu valgum alterne, chez un jeune sujet, avec un membre frappé de paralysie, on doit admettre comme causes de l'affection : 1° La tendance instinctive du malade à égaliser, par un effort personnel, les membres inégalement développés; 942 SCIENCES MÉDICALES 2° L'action de la pesanteur ; 3° Comme dernier factem*, le rachitisme, bien que chez mes malades je n'en aie pu avoir la démonstration certaine. 11 faut déduire de ces faits qu'il est nécessaire de donner des soins assidus au membre paralysé, d'où l'utilité du massage, de l'élec- trothéraj)ie et de l'hygiène la plus étendue. Il faut maintenii' le membre paralysé au moyen d'appareils de poids légers, mais résistants. A ce titre, je n'ai qu'à me louer des appareils à tuteurs en aluminium. On évitera, de la sorte, le genu yalgum du côté opposé. Contre cette déviation, le chirurgien ne devra intervenir que dans les cas ou l'affection fait obstacle à la marche et constitue une réelle infirmité. M. le D'^ Stéphane LEDUC Professeur à TEcole de Médecine de Nantes ÉTUDES SUR LA CALORIFICATION [6i2.56i.6] — Séance du 6 août — A INI- le professeur Grasset de Montpellier revient le mérite d'avoir signalé le premier, d'une façon explicite, l'intérêt clinique de l'étude de la vitesse d'ascension du thermomètre, dans sa com- munication au Congrès de l'Association, Grenoble i885, sous le titre : De la vitesse d'ascension de la colonne thermométrique comme moyen d'apprécier le pouvoir émissif du corps (à l'état physiologique et pathologique) , l'intensité des comlîustions et ce que les anciens appelaient les qualités de la température. M. Grasset propose de diviser l'ascension du thermomètre pendant la première minute par l'ascension totale. Dans une autre communication faite à Lyon en 1894, M. Grasset propose une autre méthode : il faut un thermomètre dont la graduation porte de 20'' à 25^. L'intensité des combustions se mesure dans la méthode de M. le professeur Grasset, en ajoutant à la température axillaire finale la vitesse d'ascension, pendant la D' ST. LEDUC. — ÉTUDES SUR LA CALORIFICATION 943 l^-emière minute, de la colonne mercurielle partant de 20"; « (T + /,) dit M. Grasset donne une idée bien plus exacte de la chaleur produite que T seul ». Dans nos communications k l'Académie des Sciences, comptes rendus 25 mars 1901 et Congrès de l'Association, Ajaccio 1901, nous avons indiqué, pour comparer les combustions organiques, les calorifications, une méthode donnant des résultats plus précis et plus comparables que ceux donnés par M. Grasset. Cette méthode consiste à noter les températures axillaires de minute en minute, et à construire une courbe en prenant les temps pour abscisses et les températures pour ordonnées; on peut ainsi juger d'un coup d'œil tous les détails de l'ascension thermométrique et mesurer sa vitesse à toutes distances de la température finale. La seconde méthode de M. Grasset ne donne que des indications très approximatives, qui ne sauraient guère être utilisées; la vitesse d'ascension du premier degré dépend beaucoup plus de l'excès de la température finale sur la température initiale que du pouvoir émissif de la peau et, dès que les températures diffèrent, les résultats ne sont plus comparables. La première méthode de M. Grasset, en présentant de graves défectuosités, était cependant meilleure que la seconde; elle tenait compte de l'excès de la température finale sur la température initiale • mais elle mesurait le pouvoir émissif à des distances a ariables de la température finale, alors qu'il existait, entre la peau et le thermo- mètre en contact avec elle , une différence de température tout à fait anormale ; on mesure ainsi le pouvoir émissif de la peau placée dans des conditions exceptionnelles , très différentes des conditions ordi- naires dans lesquelles il doit être mesuré. Or, ainsi que le dit M. le professeur Grasset, « le pouvoir émissif dépend des diverses con- ditions de la surface cutanée, conditions parmi lesquelles l'état de la circulation périphérique et des vaso-moteurs joue le princi])al rôle ». Les différences de température influencent les vaso-moteurs et la circulation périphérique et, si l'on n'en tient pas compte, introduisent des causes d'erreur dans les mesures du pouvoir émissif et de la calorification. Ces causes d'erreur sont évitées en se servant, comme nous l'avons proposé, des vitesses d'ascension du dernier deo-ré pour comparer les calorifications. Toutes les vitesses se trouvent ainsi mesurées à la même distance de la température finale et dans des conditions voisines des conditions normales, alors que la diffé- 944 SCIENCES MÉDICALES rence de température entre la peau et le thermomètre est au plus d'un degré. Nous pi^enons donc pour valeur numérique des calorifîcations le quotient de l'unité par le temps d'ascension en minutes du dernier degré thermométrique et nous multiplions par cent , pour éviter les décimales. Pour que les résultats soient aljsolument comparables, les mesures doivent être faites avec le même thermomètre ou avec des thermomètres identiques et il y aura lieu, à cet égard, de fixer le type d'un thermomètre étalon. Toutefois les grands thermomètres médi- caux du commerce, divisés en dixièmes de degrés, donnent des résultats suffisamment comparables pour être utilisables ; c'est ainsi que, alors qu'à l'état patliologique on rencontre des différences de calorification variant entre trois et vingt-six , la calorification nor- male, déterminée par la moyenne obtenue sur un grand nombre de sujets différents par différents expérimentateurs n'employant pas le même thermomètre, a été trouvée par nous-même être égale à 8,5o ; par M. le D^ E. Baty à 8,53 ; par M. le D-" A. Bouchct à ;,55 ; par M. R. Gauducheau à 7,69. Ces quatre chiifres si voisins, obtenus avec des thermomètres diffé- rents sur des sujets n'ayant de commun que l'absence de maladie, font ressortir la valeur de la méthode. Il est nécessaire de recueillir un grand nombre d'observations pour juger de l'étendue des ser- vices que peut rendre cette méthode dont, avec nos élèves, nous poursuivons depuis plusieurs années l'application. Dans notre communication de mars 1901 à l'Académie des Sciences, nous signalions l'augmentation de l'intensité des combustions orga- niques chez les tuberculeux, nous donnions comme moyenne de la calorification dans soixante observations de tuberculose pulmonaire, le chiffre 16, x)rès de deux fois plus élevé que le chiffre normal 8,5. Ce fait de l'augmentation de l'intensité des combustions organiques chez les tuberculeux s'est trouvé confirmé par les recherches de nos élèves. M. le D' Baty a trouvé, comme chiffre moyen de 24 observa- tions, i5,47- Les tuberculeux de M. Baty avaient donc une calorifi- cation égale 1,85 fois la calorification normale, la calorification des nôtres était 1,78 fois la normale ; ces résultats ne diffèrent que de 0.07. C'est un accord extrêmement remarquable. Dans notre communi- cation d'Ajaccio, nous avons signale les services que la mesure de l'intensité des combustions organiques parle thermomètre pouvaient rendre pour le diagnostic des tuberculoses latentes. Dès nos premières puljlications nous avons signalé la diminution D'" ST. LEDUC. — ETUDES SUR LA CALORIFICATION 945 des combustions organiques chez les artliritiques et les goutteux, dont la moyenne de calorification est 5.5, soit 0,64 de la calorifîca- tion normale. La diniinution de l'intensité des coml)ustions est la mesure du degré darthritisme. M. le D' BatVj dans sa thèse : Etude sur la Caloriinétrie clinique, Paris 1902, a étudié l'influence du travail sur la calorification. Ses sujets avaient avant le travail une calorification de 9.96, après des travaux divers une calorification de i3.;;5, soit une élévation de 0,38 ou de plus d'un tiers de la calorification. Ce résultat fait ressortli* avec évidence l'influence du travail, favorable pour les goutteux, nuisible pour les tuberculeux, chez lescjuels d'ailleurs il est à supposer que la calorification doit s'élever bien davantage sous l'influence du travail. M. Baty a monti'é cpe chez les pleurétiques les pertes de chaleur sont augmentées du côté malade. Chez les hémiplégiques , les pertes de chaleur sont beaucoup plus grandes du côté paralysé c{ue du côté sain ; moyennes : i4 du côté paralysé ; 8,45 du côté sain, soit du côté paralysé une perte de cha- leur 1,65 de fois celle du côté sain. Les diflerences entre les pertes de chaleur des deux côtés du corps chez les hémiplégicjrues sont par- fois plus grandes encore; notre élève, M. Gauducheau, a trouvé dans un cas i5,38 du côté pai^alysé ; 7,69 du côté sain. Chez un malade ayant une hémiplégie droite depuis un an et demi , une hémiplégie gauche depuis cinq semaines, M. Gauducheau a trouvé des pertes de chaleur égales à 6,45 du côté droit, 11,76 du côté gauche. Ces faits tendent à montrer que la régulation des calorifications a son siège dans le cerveau. Une autre observation confirme cette opinion sur le siège de la régulation des pertes de chaleur, à la suite d'une syncope, c'est-à-dire d'un accès d'anémie cérébrale avec sus- pension de la fonction des hémisphères, M. Gauducheau a trouvé une calorification réduite à 3 ; c'est la plus faible qui ait été cons- tatée. Dans toutes ces observations, la température est beaucoup moins affectée que la calorification, ce qui montre cj[ue nous avons dans l'étude des calorifications un moyen d'investigation d'une bien plus grande sensibilité que l'étude de la température et susceptible, lorsqu'il sera suffisamment connu, de rendre plus de service. Nous avons appliqué notre méthode de mesure des calorifications à l'étude de la fièvre et nous avons fait sur ce sujet mie première communication, l'année dernière, au Congrès de Montauban. Nous avons constaté que la température du corps est une fonction de deux 60* g/|6 SCIENCES MÉDICALES variables indépendantes, la production P et la déperdition D de chaleur, et peut en conséquence être représentée par la formule : ^ _ Production Température = Constante V tt- t^t — ^ Déperdition Nous avons, dans les maladies fébriles, tracé simultanément les courbes de température et de calorification et constaté que si . habi- tuellement leurs variations sont parallèles, cependant la calorifica- tion est bien plus sensible à toutes les influences: c'est ainsi que. chez les malades atteints de fièvre typhoïde . les mouvements , les fatigues légères, lalimentation, etc., aflectent beaucoup plus la courbe des caloriûcations que celle des températures ; ces deux grandeurs . tem- pérature et calorification, peuvent d'ailleurs, ainsi que nous l'avons sisrnalé l'année dernière, varier en sens contraire. Un de nos élèves, M. le D'^ A. Bouchet. a fait, par cette méthode, une importante étude des effets de l'hydrothérapie; les résultats sont consignés dans sa thèse : Etude sut' une méthode nouvelle de calorimétrie clinique et son application à la recherche des influences de l'hj'drothérapie sur la calorification. Bordeaux 1903. Il a étudié l'influence immédiate et consécutive sur la calorification, de la douche et de difTérents bains à des températures variées; c'est la douclie simple qui exerce l'influence la plus puissante. Ces recherches, en renseignant exactement sur l'action qu'exercent les diverses pratiques hydrothérapiques sur la calorification, permettent de donner aux indications thérapeutiques une précision toute scientifique. Nous continuons les applications de cette méthode à l'étude des divers états morbides et des agents thérapeutiques; c'est ainsi que nous étudions en ce moment , à l'aide de thermomètres à réservoirs plats, l'influence des actions locales, agents révulsifs, etc., sur le pouvoir émissif de la peau. D'^ ST. LEDUC. — TRAITEMENT DE LA GRIPPE PAR LES INHALATIONS 947 M. le D' Stéphane LEDUC Professeur à l'École de Médecine de Nantes TRAITEMENT DE LA GRIPPE PAR LES INHALATIONS MÉDICAMENTEUSES PRÉSENTATION D'UN NOUVEL INHALATEUR [616.938 : 6i3.64J — Séance du 6 août — Dans la grippe, linflammation catarrhale débute habituellement par les parties supérieui'es de la muqueuse des voies respiratoires, fosses nasales, pharynx, larynx, trachée. Ce catarrhe des voies supérieures occasionne des symptômes très pénibles; c'est ainsi que la laryngite et la la trachéite dépriment souvent le malade par une toux ii'ritante et incessante qui le prive de repos et de sommeil. Il est donc important de combattre ces manifestations catarrhales au début ; on peut arrêter la maladie . empêcher sa propagation dans les parties profondes et prévenir les complications redoutables qui peuvent en résulter. Le malade apprécie avec raison le soulao-ement immédiat qu il éprouve ; la possibilité dobtenir du repos et du sommeil augmente sa résistance et ses chances de guérison. Il est illogique de comlDattre le catarrhe localisé par une médi- <;ation générale et, pom^ agir avec une certaine concentration du médicament sur la muqueuse enflammée, d'imprégner également de la substance médicamenteuse tous les organes ; on déprime ainsi le système nerveux et on diminue la résistance de l'organisme. Nous possédons actuellement des médicaments assez nombreux, antiseptiques et calmants . pom* pouvoir suivre le principe proclamé -au Caire par M. le professem* Bouchard et ^aj^pliquer . avec son maximum de concentration et detïet, la substance active sur la partie •malade. Nous avons déjà indiqué aux Congrès de l'Association Nantes 1898, et Ajaccio 1901. comment on pouvait aisément introduire profondément dans les voies respiratoires, les poudres et les liquides, en les faisant entraîner par le courant dair inspiré ; nous ne pouvons que confirmer les résultats que nous annoncions alors. Nous ne nous ■occupons aujourd'hui que des médicaments introduits à l'état de vapeur par inhalation. Si cette médication n'est pas plus appréciée ît plus généralement employée, cela tient à sa technique défectueuse, jette méthode n'a pas, que nous sachions, été l'objet d'une critique ît par suite des perfectionnements scientifiques dont elle est suscep- 948 SCIENCES MEDICALES tible. En chauffant une solution aqueuse et se plaçant au-dessus pour en respirer les vapeurs, celles-ci se dégagent à ioo° et l'on est très gêne par la chaleur ; d'autre part les vapeui's atteignent toutes les parties du visage et en particulier les yeux , ce qui interdit l'emploi de substances actives comme le menthol. Les inhalateurs formés d'un flacon à deux tubes , dont un plongeant , sont aussi très imparfaits ; l'air qui descend par le tube plongeant traverse le liquide rapidement et par bulles, n'ayant de contact avec lui que par une surface minima; l'évaporation en conséquence est faible, lair ne se charge que d'une petite qviantité de vapeurs et le traite- ment avec ces appareils ne saurait atteindre toute son efficacité . Si l'on augmente la quantité de liquide dans le flacon pour étendre et prolonger le contact, il faut vaincre la pression du liquide, l'aspiration ne peut être prolongée, car elle est fatigante et pénible. L'inhalateur à flacon est un appareil compliqué, comprenant des tubes, des bouchons et des joints ; pour que les inhalations ne soient pas pénibles, les tubes doivent avoir plus d'un centimètre de diamètre intérieur et il est très rare d'obtenir des joints bien faits. L'inhalateur que nous présentons, exempt des défectuosités signa- lées , donne à la méthode des inhalations médicamenteuses une sim- plicité, une perfection et une eflicacité qui doivent en généraliser l'emploi. Il se compose d'un entonnoir renversé, à bord échancré ; sur la partie tubulaire de cet entonnoir on fixe un tube de caoutchouc de 20 cent, environ de longueur, terminé par un embou- choir de verre. On met dans une soucoupe le li- quide à inhaler, froid, ou chaud si les inhalations doivent être faites chaudes; on place l'entonnoir ren- versé sur la soucoupe ; la quantité de liquide doit être telle qu'il s'élève un peu au-dessus du bord supérieur des échancrures de l'onlonnoir, c'est- à-dire qu'il faut une couche de liquide d'un centimètre au plus; on aspire par l'emliouchoir du tube de caoutchouc, l'air pénètre dans l'entonnoir en déprimant le liquide, par chacune des échancrures du bord inférieur; étant donnée l'étendue de la section de pénétra- tion, que l'on peut d'ailleurs augmenter avec la circonférence de Fk;. I. D^ V. DELBET. — CONTRIBUTION A l'ÉTUDE DE l'opÉRATION DE TALMA 949 rentonnoir, l'air ne pénètre que par une lame très mince qui rase la surface du liquide; en étendant horizontalement le bord de l'en- tonnoir, on peut prolonger autant que l'on veut le contact de la lame d'air avec la surface du liquide et ne faire inhaler que de l'air parfaitement saturé de vapeur. D'autre part, en raison de l'étendue de la section d'entrée et de la faible épaisseur du liquide, l'air circule sans résistance et l'inhalation se fait sans fatigue. L'ap- pareil sans flacon, sans bouchon et sans joint, est d'une très grande simplicité et, par conséquent, peut se faire à ti*ès bon marché. On peut d'ailleurs couder la partie tubulaire de l'entonnoir, l'aplatir à l'extrémité pour former l'embouchoir; on supprime ainsi le tube de caoutchouc et l'inhalateur est formé d'une seule pièce de verre. Les substances médicamenteuses antiseptiques et anesthésiques qui peuvent être utilisées en inhalations sont très nombreuses. Nous employons souvent une solution de phénol à 5/ioo et, à la dose nécessaire pour son inhalation , deux cuillerées à bouche environ , nous faisons ajouter cinq à vingt gouttes d'une solution alcoolique saturée de menthol et la même dose de salicylate de méthyle , subs- tance dont l'emploi en inhalations nous a donné dans la grippe d'excellents résultats. Dans les cas chroniques, nous faisons ajouter à la solution de phénol, par cuillerées à café, une solution de 5/ioo de monosulfure de sodium; nous réalisons ainsi, à domicile, un véritable humage d'hydrogène sulfuré. On peut employer avantageusement le gaïacol liquide, la créosote, les préparations d'eucalyptus, etc. Avec les perfectionnement que nous venons de décrire, la méthode des inhalations médicamenteuses constitue un des meilleurs traite- ments de la grippe. M. le D-^ Paul DELBET à Paris CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE L'OPÉRATION DE TALMA [ôiG.SSi.j] — Séance du 6 août — Obs. — Le lo janvier 1908 se présentait à ma consultation de la maison de santé Daviel-Larrey, à Saint-Quentin, une jeune fille de 18 ans se plai- gnant d'uu afTailjIissement de ses forces et d'un accroissement peu 9-30 SCIENCES MEDICALES marqué, mais insolite, du volume du ventre, le tout datant de 8 mois enAÙron. Voici ce que l'examen me permit de constater : Un ventre légèrement augmenté de volume, mais déformé surtout dans sa partie supérieure; les fausses côtes refoulées excentriquement, la taille effacée, les muqueuses et les téguments présentant une coloration légèrement subictérique. L'en- fant est d'mie manière générale mal développée, pâle et amaigrie; elle vaque cependant journellement aux soins du ménage. En explorant le ventre, on trouve partout de la sonorité, quelle que soit la position doiuiée à l'enfant; partout, sauf dans ime zone commençant un peu au-dessus de roml>iIic et à gauche et limitée à droite par une ligne se dirigeant vers la partie moyenne des fausses côtes droites; à gauche, par une ligne se dirigeant vers les limites du flanc et de l'h^-po- chondre. La sonorité gastrique occupe en haut et à droite sa zone nor- male, mais est moins étendue que d'ordinaire; en haut, en arrière et à gauche, la zone mate se perd dans l'hypochondre et le flanc. La matité hépatique est normale. Par la palpation, on constate que la paroi du ventre est dans son ensemble tendue : sauf cette disposition, rien d'anormal dans la partie mférieure ni dans la partie latérale droite du ventre. Aux limites de la zone mate, c'est-à-dire un peu au-dessus et à gauche de l'ombilic , on sent une série de bosselures ]>ien nettes : trois grosses, ayant le volume d'mi œuf de pigeon et deux plus petites situées mi peu plus haut. Au niveau de la zone mate, on sent vaguement un plan résistant; mais, étant domié cjue la paroi est fortement tendue, il est difficile de dire s'il y a derrière cette paroi ime masse anormale. Le foie ne déborde jîas les fausses côtes : les reins sont en place. Les i^arties anormales senties sont fermes sans être dures. J'ajoute que la malade n'a pas de fièvre , qu'elle ne présente aucun phénomène anor- mal en dehors de son affaiblissement et de l'augmentation du volume du venti'e; que rien dans ses antécédents persomiels ni héréditaires ne peut mettre sur la voie du diagnostic. Le cas était singulièrement épineux. Des cliniciens nombreux et expérimentés avaient vu la malade. Les diagnostics portés étaient : kyste hydatique, rate paludique, péritonite chronique. Pour ma part, je fis le diagnostic de péritonite tuberculeuse; je rejetai le diagnostic kyste hydatique, parce que la tumeur était ferme et non rénitente. le diagnostic de rate paludique parce qu'un interrogatoire attentif ne me permettait pas de retrouver le moindre antécédent palustre ; d'ailleurs, je ne retrouvai par la palpation aucun des caractères ordinaires de rate augmentée de volume. Au contraire, Taffaiblisse- ment progressif et les bosselures senties au voisinage de l'ombilic me paraissaient cadrer avec l'hypothèse d'une tuberculose caséeuse du grand épiploon. Pour le dire immédiatement, aucun de ces diagnostics n'était exact : D' P. DELBET. — CONTRIBUTION A L ETUDE DE L OPERATION DE TALMA Ç)Ol la laparatomie me montra que nous étions en présence d'un foie rétracté nettement oirrliotique. les nodosités senties appartenaient à l'extrémité de la rate, elle-même déformée et bosselée et la zone mate au corps de la rate que son hypertrophie avait abaissée. J'ai appris que, malgré son jeune âge, cette enfant était une alcoolique invétérée. Etant donné mon diagnostic, la laparatomie s'imposait. Je fis une inci- sion de quatre travers de doigt environ se termmant en face et un peu à gauche de rombilic. Je traversai la paroi, y compris le fascia ombiHcalis; mais, arrivé là, je rencontrai une zone feuilletée, puis graisseuse, par- courue par d'énormes veines dilatées et sinueuses. Je crus être en présence d'un épiploon adliérent, comme il s'en rencontre fréfjuemmcnt dans la péi'itonite bacillaire. Je décollai à droite, puis à gauche; je complétai mon incision pariétale par un débridement latéral droit de trois travers de doigt, de manière à obtenir une fente en L renversé; jiartout dans xme étendue de quatre travers de doigt environ je rencontrai la même dispo- sition : enfin j'incisai couche par couche, Hant les veines que je rencontrais, et (inis i>ar i^énétrer dans le ventre. Je m'aperçus alors que les tissus qui m'avaient arrêté n'étaient autres que la grande faux du péritoine, considé- rablement élargie, parcourue par d'énormes vemes, se continuant à plein canal avec des veines pariétales profondes également dilatées. Il y avait fort peu de liquide dans le ventre, pas trace de tuberculose; mais , comme je l'ai cUt , un foie rétracté nettement cirrhotique avec rate hypertrojthiée; en somme, nous étions en présence d'une cirrhose mixte. La malade guérit de l'intervention, mais, fait intéressant, peu après Fopération on put constater l'apparition de l'ascite et, au fur et à mesme que la cicatrisation , devenant plus complète , étouffait les troncs veineux, la quantité de liquide contenue . dans le ventre augmentait; actuellement le ventre fait une forte saillie en avant, saiUie parfaitement réguhère. Toutefois fétat général se maintient et la malade a repris sa vie antéi'ieure. Messieurs, ainsi que vous le voyez, ce cas est un succès opératoire et un échec thérapeutique. J'attribue le succès opératoire, obtenu malgré l'état précaire de ma malade, à la perfection de l'instal- lation que j'ai réalisée à Saint-Quentin. J'aurais pu passer sous silence l'échec thérapeutique, mais je sacrifie volontiers un vain amour-propre à un profond enseignement scientifique et, ainsi que vous allez le voir, mon observation présente à ce point de vue un grand intérêt. Vous n'ignorez pas que, dans ces dernières années. Talma et Morisson, presque simultanément ont proposé de combattre l'ascite des cirrhotiques en créant des adhérences entre les viscères abdomi- naux annexes du système porte et la paroi abdominale , de manière à créer pour la veine-porte des voies de décharge permettant au sang 902 SCIENCES MEDICALES qui l'obstrue de se frayer un chemin vers le cceur par rinlerniédiaire du système cave. La manière d'obtenir ces voies de dérivation varie avec les auteurs : Schiassi, Bunge ont fait une opération complexe et fixé à la paroi abdominale le fond de la vésicule, le grand épiploon et la rate. Le plus souvent, on ne fixe à la paroi que le grand épiploon seul, soit en l'engageant entre le foie et le diaphragme (Rolleston et Turner). soit en l'amenant sous la peau de l'abdomen après excision de l'ombilic (Pascale), entre le muscle et le péritoine (Schiassi, Yillar) à la face profonde du péritoine (Terrier, Alexandre). En bloc, ces opérations pratiquées une centaine de fois donnent 32 — de mort, 34 ^ de guérison et i8 -^ d'amélioration (statistique d'Alexandre). Mais, de même qu'il serait injuste de rejeter ces interventions en raison de leur mortalité élevée , de môme la guérison de l'ascite par l'intervention ne suflirait pas à les légitimer; il pourrait y avoir, en l'espèce, simple coïncidence; on peut admettre, en outre, que l'opé- ration agit d'une manière indirecte en modifiant le péritoine ou en facilitant la tiltration du liquide ascitique à travers la paroi (Fro- ment). En l'espèce, l'opération de Talma n'est défendable que si Ion démontre, d'une part, que l'ascite cirrhotique est la conséquence de la gène circulatoire créée par la cirrhose dans la veine porte ; d'autre part, que le mélange du sang porte avec le sang cave est sans inconvénient pour l'économie. Les auteurs ne sont pas d'accord sur la pathogénie de l'ascite dans la cirrhose. Chauffard et Froment attribuent l'ascite à une péritonite clii'onique; d'autres pensent qu'elle est la conséquence d'une toxé- mie. Certes, les examens d'Alexandre ont bien montré que le liquide ascitique n'a pas la composition d'un liquide ascitique; KouznetzofF, en liant la veine porte chez le chien, a déterminé l'apparition de la diarrhée et de l'ascite; mais aucun de ces faits n'a la valeur de mon observation. A ce point de vue, le fait que je vous ai rapporté a la valeur dune expérience absolument démonstrative. Voici une malade chez laquelle je vois le foie rétracté et cirrhose : grâce à un énorme développement des veines de la faux du péritoine , il existe un cou- rant veineux de dérivation, il n'y a pas d'ascite. Je sectionne une partie de ces veines au cours de mon opération , la rétraction cica- tricielle consécutive à la cicatrisation de la plaie opératoire étouffe les autres ; immédiatement l'ascite apparaît : et cependant la paroi a été réunie par première intention; il n'y eut de lièvre à aucun moment. On ne peut donc mettre en cause le péritoine ; on peut aflîrmer que D'" J. TÉTAU. — LA PRÉDISPOSITION A LA TUBERCULOSE PULMOXAIRE 953 lascite a eu pour cause l'obstruction veineuse. Ce fait suffit à justifier l'opération de Talma. Il faut montrer maintenant que cette opération est sans danger. On peut craindre, en effet, qu'après l'opération de Talma, le sang porte passant dans les veines caves ne vienne infecter ou intoxiquer l'éco- nomie. Déjà les expériences d'anastomose porto-cave de Eck et Tan- sini montrent que cette crainte est chimérique ; mais le fait appert plus clairement encore de mon observation. Voici une malade, chez laquelle existait une large voie de dérivation : sans être excellente, sa santé se maintenait tant bien que mal; j'interromps la communica- tion porte-cave, aussitôt les troubles apparaissent : il y a de l'affai- blissement, de l'oligurie, du subdélire, des épistaxis; celles-ci sont d'autant plus intéressantes , c|ue les expériences de Claude Bernard , de Roger et Castaigne, de Gilbert et Carnot, montrent qu'après la ligature de la veine-porte la pression baisse dans le système artériel et le système cave, par accumulation du sang dans les ramifications portes ; l'épistaxis doit donc être attribué à une altération du sang, Il est remarquable que celle-ci soit devenue considérable , précisément après l'interruption des communications porto-caves. Un dernier point pour terminer. Nous avons vu que l'épiploon avait été fixé sous la peau, sur le péritoine et contre la face profonde de ce dernier. Sur ma malade, je peux affirmer que la circulation col- latérale s'était développée dans le tissu sous-péritonéal : c'est donc là qu'il faut chercher à créer les anastomoses. A ce point de vue, les opérations de Schiassi , Villars et de Terrier- Alexandre sont infini- ment supérieures à l'opération de Pascale. M. le D'^ Josepli TETAU de Geste (Maine-el-Loire) DIAGNOSTIC PRATIQUE DE LA PRÉDISPOSITION A LA TUBERCULOSE PULMONAIRE [Iji6.9y5j — Séance du 6 août — INDICATION DU TRAITEMENT La vraie prophylaxie de la tuberculose sera celle qui consistera à reconnaître la tendance que présente un organisme à se laisser con- taminer. 9-54 SCIENCES MÉDICALES La tuberculose est une maladie parasitaire : Une dans son germe et dans sa production pathologique , elle est essentiellement indivi- duelle dans son évolution. L'observation clinique nous montre que tout individu peut devenir tuberculeux, mais elle nous montre aussi que certains organismes semblent y être plus spécialement prédisposés. Ce serait donc , suivant nous . une erreur de croire à l'existence d'un tempérament spécial exclusivement propre à la tubei*culose ; il ne saurait y avoir qu'une prédisposition individuelle plus ou moins grande au développement et à l'évolution du germe invalide : c'est ce qui nous a amené à chercher ailleurs que chez les tuberculeux les conditions du terrain de prédisposition. C'est en étudiant la nutri- tion de gens en apparence bien portants que nous sommes arrivé à nous rendre compte que nous avions chacun un mode de vie propre, correspondant à l'activité plus ou moins grande de nos réactions organiques. La nutrition, en effet, avec son double mouvement d'assimilation et de désassimilation , ne présente pas une rapidité et une intensité constamment égales. Il y a des variations normales, tantôt exagéra- tion, tantôt insuffisance et, si ces déviations sont persistantes, elles produisent chez l'individu un mode de vie spécial , un tempérament particulier à prédispositions morbides constantes dans leur nature, mais variables dans leur intensité. On a désigné, sous le nom d'arthritisme, les différents phénomènes pathologiques produits par un ralentissement de la nutrition. Mais , s'il y a une nutrition retardante , caractérisée par un ralen- tissement de combustions organiques, il existe un état diathésique inverse caractérisé par une augmentation de combustions et par des réactions organiques, chimiques et vitales exagérées : C'est cet état diathésique que nous désignons sous le nom de diathèse consomp- tive. La consomption est donc une maladie de la nutrition caractérisée par une suractivité de combustions organiques. Héréditaire, cette maladie peut exister à l'état latent quand l'apport suffit à réparer les pertes de l'organisme , ce dernier se consume lui- même en brûlant et éliminant de sa propre substance. La consomption se manifeste dès le début par des phénomènes de fatigue, lassitude, courbature, essouflement, sueur au moindre effort, besoin de s'asseoir, diminution dans l'appétit, uioindre résistance au travail physique , sensation de chaleur interne. La peau est chaude au toucher, les malades se disent atteints de lièvre minante : D'" J. TETAU. — LA PRÉDISPOSITION A LA TUBERCULOSE PULMONAIRE 055 ils se trouvent bien au lit et couchés sur une chaise lonuue. Les facultés intellectuelles sont intactes, même plus actives, mais rebelles à un travail soutenu. Le tout s'accompagne d'une déminéralisation intense, d'une élévation dans la température moyenne des individus et d'un amaigrissement lent mais progressif, tellement caractéris- tique que nous pouvons dire que tout amaigrissement progressif coïncidant avec une exagération de combustions organiques est un signe certain de consomption. On nous objectera peut-être que ces phénomènes sont dépendants d'une tuberculose latente. Nous ne le croyons pas, au moins dans tous les cas. En effet, certains sujets atteints de ces troubles incer- tains de la santé ne présentent aucun signe stéthoscopique de la tuber- culose au début ; de plus, la facilité relative avec laquelle on modifie cet état nous semble incomparable avec l'existence d'une tubercu- lose en voie d'évolution. Et, quand bien même cette exagération des combustions tiendrait à une tulDcrculose latente, elle n'en indiquerait pas moins une réaction spéciale du sujet, cest-à-dire du terrain, puisque deux individus soumis à la même épreuve ne réagissent pas de la même façon. Si nous observons les tuberculeux en général, nous voyons que la maladie a des modalités variables, même con- tradictoires. Ainsi les échanges respiratoires généralement exagérés sont parfois normaux et parfois ralentis et diminués (Albert Robin); la déminéralisation de l'organisme varie dans de notables propor- tions, suivant que l'on observe une tul^erculose aiguë ou chronique ; l'élévation thermique existe dans la plupart des cas, mais on trouve parfois des températures basses. Les combustions organiques peuvent être exagérées, normales ou garanties. Et pourtant, dans tous ces cas, c'est le même germe produisant la même lésion. Aussi émettons-nous cette proposition : La prédisposition à la réceptivité de la contagion tul^erculeuse et la marche de la maladie sont en raison directe de l'intensité des combustions organiques du sujet. C'est dans le diagnostic de la consomptivité qu'il faut faire et rechercher les phénomènes plus ou moins accusés que pi'ésente le sujet. En agissant ainsi nous serons à même, non seulement de lutter contre la tuberculose pulmonaire , mais de prémunir et de sairver ceux que guette la phtisie pulmonaire , la plus grave et la plus ter- rible des maladies. On recherchera donc les symptômes que nous avons décrits et, comme ces phénomènes sont en rapport avec l'activité de nos réac- tions chimiques et vitales, le diagnostic de la prédisposition indivi- 956 SCIENCES MÉDICALES duelle se fera en prenant la mesure de l'intensité des combustions organiques du sujet. La chaleur animale , étant la manifestation physique et palpable des réactions organiques qui caractérise notre vie, présentera des variations suivant que ces réactions seront plus ou moins actives ; d'une façon générale , l'intensité des combustions augmente avec la température. C'est donc à l'étude de ces phénomènes caloriques que nous demanderons ces renseignements et nous tiendrons, compte dans cette méthode de mesure de l'intensité des coml^ustions organiques par la thermométrie i° de la température du sujet 2° de son rayon- nement, c'est-à-dire de la vitesse avec laquelle il perd la chaleur qu'il produit. L'observation simultanée de ces deux phénomènes nous donnera une résultante absolument juste. Nous nous servons à cet eft'et d'une trousse spéciale composée d'un thermomètre et d'un thermoréomètre ; ces deux instruments sont gradués en dixièmes de degrés. fOn trouve ces instruments à Paris, chez M. Ghazal, 21, rue Monsieur-le-Prince). L'intensité des combustions organiques se mesurera en ajoutant à la température axillaire du sujet la vitesse d'ascension thermoi'éo- métrique partant de 20° exprimés en dixièmes de degrés par la hauteur de la colonne mercurielle atteinte dans l'unité de temps , la minute. Soit la formule. I = T + V Le technique opératoire est des plus simples : On place le thermo- mètre dans le creux axillaire et l'on note la température que l'on obtient quand le maximum est atteint, soit 36°,5. On place la surface plane du thermoréomètre perpendiculairement sur la fourchette du sternum (le sujet ayant la poitrine à découvert depuis une ou deux ndnutes), après avoir amené la colonne mercurielle à 20°, et l'on note à quelle hauteur est monté le mercure en une minute, soit 29°,5. Ce qui au-dessus de 20° fait une vitesse ascension- nelle de 95 dixièmes. Il suffit alors d'additionner : T 36% 5 -]- V 9",5 = I en tout 460 dixièmes Il faut, autant que possible, opérer dans une atmosphère extériem-e de iS" à 18". Cette méthode est extrêmement rapide, simple et à la portée de tout le monde, le résultat s'obtient en deux minutes. D"" J. TÉTAU. — LA PREDISPOSITION A LA TUBERCULOSE PULMONAIRE (p7 Or, tous ceux que nous avons examinés même avec les apparences de la santé qui présentaient un total supérieur à 460 dixièmes et plus avaient des signes évidents de fatigue, faiblesse musculaire, moindre résistance au travail physique, amaigrissement etc., en un mot présentaient tout ou partie des phénomènes de consomption que nous signalons plus haut. C'était donc tous des consomptifs et, parmi eux, à côté des gens surmenés se trouvaient presque tous les descendants de tuberculeux. Ceux, au contraire, qui présentaient une résultante inférieure à 45o dixièmes et moins avaient des ten- dances marquées vers l'arthritisme et les maladies par ralentissement de la nutrition. Les résultantes que l'on obtient par notre méthode doivent donc s'interpréter ainsi :. 460 et au-dessus, combustions exagérées, diathèse consomptive ; 45o à ^Go, combustions normales ; 45o et au-dessous, combustions ralenties, diathèse arthritique. En résumé, en face d'un malade soupçonné de tuberculose, voici notre manière de procéder. Nous faisons d'abord le diagnostic de la consomptivité du sujet en prenant, suivant notre méthode, la mesure de notre intensité de ses combustions. La résultante plus au moins élevée que nous obtenons nous montre, si elle est supérieure à 460, que le sujet est consomptif et vit avec des combustions exagérées ; si elle oscille entre 45o et 460, qu'il vit avec des combustions normales ; si elle est inférieure à 450, que le sujet vit avec des combustions ralenties. Nous connais- sons ainsi immédiatement sa vitalité et sa dépense organique, cette dernière augmentant proportionnellement à l'intensité des combus- tions. Alors nous cherchons les signes de tuberculose pulmonaire ou autre qui peuvent exister, et suivant les renseignements que donnent l'auscultation et la percussion : submatité, résonnance de la voix, augmentation des vibrations thoraciques, affaiblissement du mur- mure vésiculaire, obscurité, rudesse ou saccadement de la respira- tion, nous adoptons ou nous rejetons le diagnostic de tuberculose. Si nous l'admettons, nous soignons la tuberculose par la révulsion locale et les médicaments modificateurs de l'épithelium pulmonaire, et le sujet, en modifiant sa nutrition suivant le sens indiqué par le l)remier examen, de façon à le ramener ou à le maintenir dans le o-roupe des lymphoarthritiques suivant que c'est un tuberculeux consomptif, normal ou ralenti. Si, ne trouvant pas de tuberculose, nous constatons seulement une o58 SCIENCES MEDICALES exagération de l'intensité des combustions, nous considérons le malade comme consomptif prédisposé à la tuberculose et le soignons comme tel, en cherchant à diminuer ses combustions organiques par les modificateurs de la nutrition, les arsenicaux, les sels calcaires, les antinei'vins, le bromure de sodium et de camphre à dose continue, même progressive, et par lliygicne, le repos et la suralimentation : on arinve ainsi, en l'espace d'un ou deux mois, à ralentir ses combus- tions en même temps qu'on lui rend la santé. En un mot , nous nous guidons pour le diagnostic de la prédispo- sition individuelle à la tul>erculose et pour le traitement de cette affection sur les examens fournis par la mesure de l'intensité des coml^ustions organiques. En agissant ainsi, nous sommes arrivés à faire tomber la mortalité par tuberculose dans notre clientèle du 5« au I2« à peine des décès, c'est-à-dire qu'elle a diminué des deux tiers. M. le D' LEPAGE à Angers PROPHYLAXIE DE LA TUBERCULOSE A ANGERS. — CE QUI A ËTÉ FAIT CE QUE L'ON DOIT FAIRE [Oi4.545(44.i8)J — Séance du 6 août — La lutte contre la tuberculose est à l'ordre du jour de toutes les Sociétés savantes, rien de ce qui touche à cette question ne doit vous être étranger. Nous avons donc pensé qu'il y avait intérêt à vous communiquer l'état de la question à Angers. Un Comité d'initiative pour la formation d'une ligue antitubercu- leuse a été formé il y a plus d'un an. Les efforts de son bureau, à l'activité duc[uel je tiens à rendre hommage, n'ont encore al>ouli qu'à la publication d'un double rapport du D' Cerf et de moi. Les projets qui y sont exposés, simples, d'exécution facile et peu onéreux, seraient cependant pour notre ville un véritaljle Ijienfait. Heureusement que d'autres initiatives, sans attendre le fonctionne- ment de cette ligue, s'étaient mises à la besogne; c'est pourquoi nous pouvons vous i^ésenter aujourd'hui : 1° La Goutte de lait; T>^ LEPAGE. — PROPHYLAXIE DE LA TUBERCULOSE A ANGERS tpg 2- L'Œuvre des Colonies de vacances; 3"" L'organisation d'un service de tuberculeux à l'Hotel-Dieu; 4" L'Œuvre des Servantes des Pauvres, dites Sœurs du Père Leduc. Pour la Goutte de lait, son organisation à Angers ne présente rien de particulier ; une laiterie modèle installée au Dépôt de mendicité ; trois Dépôts de lait stérilisé placés dans les quartiers les plus popu- leux de la ville, dirigés par trois jeime confrères actifs, permettent la distribution de ce lait aux familles indigentes et même aux familles aisées avec une juste rémunération. Je n'insiste donc pas sur cette oîuvre, qui pour la lutte antituberculeuse sera un véritable auxiliaire, en nous permettant de soustraire l'enfant à l'allaitement d'une mère tuberculeuse et en rendant l'enfant plus réfractaire à toute contami- nation par la distribution d'une nourriture saine et appropriée à son âge. Je n'insisterai pas davantage sur l'œuvre de Colonies de vacances ; le D'' Jagot qui a pris cette question à cœur va vous l'exposer ici. Si le placement des enfants délicats dans les familles à la campagne a soulevé des objections comme traitement de la tuberculose, surtout de la tuberculose ouverte ; il mérite cependant tous nos encourage- ments comme moyen de fortifier les enfants pauvres de la ville, manquant du cube d'air sufiisant dans des appartements trop exio-us et trouvant au contraire à la campagne , avec une nourriture subs- tantielle, un air pur et viviiiant. Je veux principalement attirer votre attention sur le service des tuberculeux à l'Hôpital et spécialement sur l'installation d'une galerie de cure qui, grâce à la disposition de notre Hôtel-Dieu, pré- sente un intérêt tout particulier. Celui-ci est divisé en deux corps de bâtiments séparés par la cha- pelle et une allée centrale, d'un côté le service des hommes et l'hô- pital militaire, de l'autre les service des femmes et des enfants, la maternité et la pharmacie (fig. i). Ces corps de bâtiments font face au sud-est et dominent la Maine dont ils sont séparés par de vastes jardins. Du côté sud-est de cha- cune de ces constructions et par conséquent du côté de la Maine . se détachent quatre ailes qui forment ainsi trois cours vastes, aérées bien exposées et parfaitement ombragées. Les extrémités sud-est de ces ailes sont elles-mêmes réunies par des galeries couvertes et et bitumées qui ferment par conséquent les cours, servent de lu'o- o6o SCIENCES MEDICALES menoirs quand il pleut et font communiquer les dilTérents services. Les photographies que je vous présente vous permettront de vous rendre compte de cette disposition pour le coté des hommes. Sur mon initiative et sur un rapport du professeur Jagot , appuyé par la Société de Médecine d'Angers , l'Administration des Hospices a pu facilement, et à ^leu de frais, transformer lune de ces galeries couvertes en galerie de cure pour les tuberculeux. Il lui a suffi d'appliquer un plafond sous la toiture, pour atténuer la chaleur et le froid, de fermer par une cloison le côté nord-ouest, le côté des des cours et d'appliquer du côté sud des rideaux pour mettre à l'abri de la chaleur ou de la pluie. :x\N\\\;m-^y:v:E?s^--;^^^';iii--t;^ysi;-'j (/es Ma/ades c LEGENDE A . Cïbmei aes SurvciUsnts 'ù . Cebin:^! dea Infirrpiers C . Sd.'k S* André S. Cahmei duChefdeSerwce E . Sslk S'.E/o> F . W-C S . Sade 3 m^n^er H . Galerie ocur la cure d'air I . Salle S' Clément J . _ S 'Jean K. _ 5' Paul L . Cour et dardm m<^A^>^~:m^'^^V^':^f:f:fi^^i'i<^^i^^^ FiG. I. — Service des Tuberculeux. Cette galerie , longue de aS mètres, large de 5, contient aujour- d'hui i8 couchettes ou chaises longues, munies chacune d'une petite table pour déposer le crachoir et quelques objets. Elle est exposée en plein soleil, avec une vue agréable sur les jardins, sur la Maine et de là sur la ville ; par son orientation elle est à l'abri des vents du nord et du nord-ouest et des pluies de l'ouest, les plus fréquentes à Angers. Elle est en communication par une de ses extrémités avec une salle de service du D"^ Jagot, réservée mainte- nant aux tuberculeux. Une salle à manger la sépare de cette salle. Je ne vous décrirai pas l'aménagement et le fonctionnement du D' LEPAGE. — PROPHYLAXIE DE LA TUBERCULOSE A ANGERS q6l service; c'est celui de tous les sanatoria; du reste, le D"" JagotTalait ailleurs et sera très heureux de le faire visiter à ceux d'entre vous que cela peut intéresser. Ci-joint un plan du service qui vous en donnera une idée suffisante. Le prix de cette installation, grâce il est vrai à ce qui existait anté- rieurement, ne dépassera pas 3,5oo francs. L'aménagement, fabriqué, il faut le dire , à la maison même par les pensionnaires de l'hospice annexé à l'Hôtel-Dieu , ne revient pas à plus de 38 francs par cou- chette. Une chaise longue en bois, lo francs; un matelas deguinche, 8 francs; un oreiller, 5 francs; une couverture, 12 francs; une petite table. 3 francs. Cette disj)osition obtenue pour une galerie du service des hommes va être faite incessamment au service des femmes. Rien ne s'oppo- sera même à la transformation d'autres galeries , quand on en aura reconnu l'utilité et les avantages. En demandant pour l'Hôtel-Dieu l'installation de ces galeries de cure, je n'ai pas eu l'intention d'augmenter le nombre des guérisons ; je ne me fais sur ce point aucune illusion : les malades admis ne sont que très rarement au début de leur affection et quittent l'Hôpital trop tôt, c'est-à-dire dès qu'ils se sentent assez améliorés pour pouvoir travailler. Ce que j'ai voulu obtenir surtout, c'est une plus longue survie, un service spécial pour faire disparaître la contagion hospi- talière, un séjour plus agréable et plus hygiénique pour nos tuber- culeux pauvres, qui seront ainsi encouragés à venir en plus o-rand nombre et plus promptement à l'Hôpital, à y rester plus longtemps, à y faire enfin leur éducation médicale. Devant la perspective d'un traitement agréable et donnant l'espoir de guérir, ils quitteront avec moins de regret leurs logements où la promiscuité avec le reste de la famille est toujours trop grande; et, quand ils rentreront à leur foyer, ils sauront quelles précautions prendre pour n'être pas une cause de contagion. Dans le même ordre d'idée, je tiens à vous signaler les modifica- tions que j'ai pu introduire dans l'infirmerie d'une communauté hos- pitalière dont je suis le médecin avec le D"" Quintard. Les Servantes des Pauvre.s, fondées à Angers il y a vingt-cinq ans environ et déjà répandues dans plusieurs départements et surtout à Paris, ont pour mission exclusive de soigner les indigents à domicile sans aucune espèce de rémunération ; non seulement elles donnent des soins aux malades , mais de plus elles s'occupent des enfants et préparent les repas de la famille ; elles visitent ainsi un, deux ou trois 61* ()(>2 SCIENXES MEDICALES monades par joiir. riMilranl à la (^oinnuinautr poui- le repas et pour le eoueher. Mal instruites, les ^arde-mahules peuvent i'aeilenient èlr(> une eausi> Je contagion ou s»' eontagionner elle-même, d'autant plus quelles eommeneent assez jeunes leiu- mission et qu'elles sont assez souvent d'un tenq)érament ilélieat : aussi avons-nous trouvé chez elles la tubereulose assez fréquente, surtout à Angers, Maison- JNIère. où, dès qu'un sujet dune obédience est reconnu sérieusement atteint, il nous est envoyé aussitôt. Servi encore ici par la disposition des lieux, nous avons utilisé un pavillon placé sur une terrasse, lace au sud-ouest, à quarante mètres d'altitude, ayant devant lui un lu>rizon de huit à dix kilomètres, que bornent seules les collines d'Oulre-Maine et d'au-delà de la Loire. Du c»)té du nord-est. la chapelle et le bâtiment principal de la Comnnmauté, haut de plusieurs étages, met à l'abri des vents froids. Deux pièces en façade, parfaitement aérées, ont été aménagées en salle de lure. lune pour les tuberculoses au début, plus susceptibles d'anu'lioration. l'autre pour les tuberculoses avancées. Les prescrip- tions et les rcglenuMits des sanatoria y sont observés. Nous avons trouvé là non seulemenl un moyen heureux d'amé- liorer nos malades et de les isoler, nuiis aussi une véritable école d'instHu'tion pour les autres religieuses, ([ui utilisent chez leurs malades ce quelles ont vu faire chez elles: précautions pour leurs vêtements, désinfection des mains, des linges et des crachoirs; cra- choir de iH)che \)o\n' chaque Sœur qui tousse ou qui expectore, etc. Tant qu'aux projets de Jiotre lii^iie andfuber'culeiise , il serait fastidieux de vous en entretenir. Je tiens cependant à vous signaler, dans le rapport du D' Cerf et dans le mi(>n. deux jioints sur lesquels nous avons insisté. i'^ L'alliance d'hygiène sociale, connue l'a appelée si heureusement le Professeur Brouardel à la séance publique tenue le 5 mai derniei- sous la présidence de M. Casimir Périer. à l'occasion de la réunion à Paris du Bureau international i)our la lutte contre la tuberculose; 2" L'assistance à domicile par l'intermédiaire du Bureau de bien- faisance. Devançant en ellet le désir du professeur Brouardel. nous avons émis l'idée de la réunion dans un seul faisceau, de la concentration vers un n\ctnc but. de toutes les œuvres qui peuvent contribuer à la lutte antitid)erculeuse ou qui ont intérêt à voir ciilc hitli' s'organiser : il v aurait là luie économie de temps et d'argent bien précieuse et l'orientation vers un but utile de bien des bonnes volontés dont les elVorts demeurent certainement stériles. D' JAGOT. — (laVRE ANGEVINE DES COLONIES DE VACANCES cfii Enfin, pour VAasistance antituberculeuse à domicile, on a créé dans beaucoup de vdles des dispensaires spéciaux; nous avons pensé qu'à Angers on pourrait ne pas créer ce nouveau rouage exigeant de suite des dépenses assez considérables et tout un personnel nouveau ; nous avons cru que nous trouverions dans l'Administration du Bureau de bienfaisance toute la l)onne volonté désirable pour orga- niser avec elle rassistance à domicile, les économies qui seraient fiùtes par cette Administration sur les produits pharmaceutiques encore si souvent prescrits devant être plus utilement enqdoyés en bons de viande, en désinleclants, en crachoirs, en visites sanitaires par des inspecteurs spéciaux, etc. Je tenais à mettre en relief ces deux points d'organisation spéciaux de notre ligue ipii. ailleurs comme à Angers, pourrait trouver utile- ment leur application. M. le D- JAGOT Prorcssfiu" (le fliiii(|u<' nu'ilioak' ;i ri:c(>k' de Minlroiiic (rAiiçcrs ŒUVRE ANGEVINE DES COLONIES DE VACANCES [614.545(44.18)] — ^cancc du 6 août — Je nai pas à l'aire connaître ce qucsl une colonie scolaire de vacances. Vous n'ignorez pas que M. le P' Brouardel les place au premier rang des mesures prophylactiques contre la tuberculose, à la tête de celles qui visent la santé personnelle de l'enfant. Vous savez tous que M. le P' Landouzy soutient qu elles constituent comme la première ligne de défense contre l'implacable ennemi, la deuxième comprenant les sanatoria et la troisième les hôpitaux ; qu'il est incontestable que, de ces trois lignes de défense, la première est la plus forte et la plus im[)ortante, car il vaut mieux prévenir que guérir. De cette prophylaxie de la tuberculose dépendent la vie ou la mort d'un pays comme le nôtre, dans lequel hi question de la dépopulation est, et à si juste titre, à l'ordre du jour de nos assem- blées savantes et politiques. J'ai déjà, dans une autre enceinte, fait l'historique des Colonies de vacances, tant en France qu'à l'Étranger; j'ai montré combien C)64 SCIENCES MÉDICALES ces œuvres étaient riches, développées et prospères chez nos voisins ; mais j'ai fait voir aussi cpie les progrès quelles font dans notre pays sont tels qu'il y a tout lieu d'espérer et de croire qu'il ne tar- dera pas à conquérir sur ce terrain, comme sur tant d'autres, la place qui lui est due. Toutefois je voudrais a^ous rappeler comment ces œuvres sont nées d'œuvres analogues mais non similaires « Les A oyages scolaires ». Déjà préconisés sous la Convention par L. Portiez, député de l'Oise, comme un moyen de perfectionner l'éducation, les voyages scolaires ont été mis en pratique en l'an YIII et en l'an IX de la République pour les Écoles Centrales (lycées). L'exemple parfait de ces caravanes scolaires nous est donné par le grand éducateur genevois Rodolphe TôptYer dans ses Voyages en Ziz-Zag, au milieu des admirables sites des Alpes Yaudoises. En 1887, s'organisaient à Paris les premiers voyages scolaires accordés comme récompense aux enfants les plus méritants : y pre- naient pai'tles élèves du collège Chaptal, des écoles Turgot, Lavoi- sier, Colbert, J.-R. Say, etc., etc. Les œuvres des Colonies de vacances ont un but tout différent et, dès qu'elles furent instituées, elles parurent porter un coup fatal aux vovages scolaires et en ralentir considérablement le développe- ment. C'est qu'en eiïet ces œuvres ont un rôle plus étendu et une utilité plus immédiate. Il ne s'agit pas de récompenser des enfants qui ont mieux travaillé ou mieux réussi que leurs camarades. Il ne s'agit lias non plus de compléter l'éducation par la vue de nouveaux pavs et de spectacles différents ; ce qu'il faut . c'est faire vivre dans des conditions meilleures d'aération et d'hygiène des enfants d'ou- vriers sur lesquels ne peut s'exercer la surveillance* des parents iiendant les semaines de vacances et de leur donner de la santé pour l'année qui va suivre. Il s'agit aussi de lutter contre la i^rédisposition héréditaire ou acquise qu'ils peuvent avoir à contracter la tubercu- lose. Les résultats ont été si satisfaisants et parfois si inattendus que les œuvres se sont multipliées d'une façon extraordinaire et qu'au- jourd'hui c'est 18.000 à 20.000 enfants à qui elles procurent, tant à Paris qu'en province, les bienfaits des vacances au grand air de la campagne , de la montagne ou de la mer. Ce que je voudrais aujourd'hui, c'est vous faire connaître une œuvre nouvelle , née d'hier, et qui a pu envoyer ces jours-ci i25 enfants en vacances. Je voudrais aussi vous dire comment est née cette œuvre dans noire ville, comment elle est organisée, les moyens D"" JAGOT. — ŒUVRE ANGEVINE DES COLONIES DE VACANCES QÔS quelle a employés, i° pour sa propagande , 2° pour la création de son budget , 3'^ pour le choix des enfants et leur examen médical .. 4" pour leur envoi en placement familial après s'être assuré qu'ils étaient munis d'un trousseau suffisant. L'histoire de notre oeuvre est courte : Il y a deux ans . un de nos bienfaisants concitoyens, M. le Pasteur Audra, président de la sec- tion angevine de la Ligue de l'Enseignement, a reçu de cette asso- ciation une faillie subvention, avec prière de l'accroître par des dons de personnes généreuses de sa connaissance. Il devait en même temps chercher des nourriciers dans la campagne, autour d'Angers et se faire désigner des enfants dont l'état de santé indiquait le besoin d'un séjour à la campagne. Il réussit à lui seul à envoyer, pendant i5 jours aux champs, 3o enfants la première année et 60 enfants la seconde. n pensa cette année, pour des raisons spéciales et tout à fait propres à notre région, qu'il était utile et nécessaire pour son œuvre de s'effacer et de substituer à son action personnelle celle d'un Comité de dames qui dirigeraient l'Œuvre angevine des Colonies de vacances, dont il demeura seulement le dévoué Secrétaire général. Propagande. — Le Comité, une fois constitué avec une présidente, deux vice-présidentes, deux secrétaires et une trésorière, plus un secrétaire général, eut pour premier souci de s'occuper de la propa- gande. Il adressa à toutes les personnes qu'il jugeait susceptibles de seconder son œuvre une circulaire exposant son but et les invi- tant à s'inscrire comme membres de l'Œuvre , la cotisation minima étant de trois francs. En même temps, presque toute la presse locale prêtait à l'œuvre un généreux appui ; mais , bien que le Comité ait s^iécifié qu'il repoussait énergiquement toute préoccupation d'ordre religieux ou politique, il ne réussit pas à triompher de toutes les défiances. Néanmoins, en peu de temps, on réunit plus de 35o membres. Budget. — Il s'agissait alors de se créer un budget et les moyens que l'on employa furent multiples. On avait d'abord les souscrip- tions des membres de l'Œuvre qui donnèrent 1.719 francs. On fit ensuite des quêtes à domicile qui , grâce au zèle avec lequel elles furent faites, rapportèrent 1.223 fr. 65. Des cartes de collecte en faveur de l'œuvre furent mises entre les mains d'enfants et d'em- ployés des maisons de commerce et des établissements industriels ; chacune de ces cartes, divisées en 100 compartiments, chacun d'eux 966 SCIENCES MÉDICALES correspondant à une offrande de cinq centimes, représentait, rem- plie, la somme de cinq francs. Elles donnèrent la somme respectable de 465 francs. Des lettres furent adressées aux Sociétés de Secours mutuels dont le nombre dépasse à Angers ^5, et leur générosité ajouta loi francs au budget. Les Amicales d'Anciens élèves foui^nirent ^45 francs. Le Conseil municipal accorda également une subvention de 100 francs. La Ligue de l'Enseignement souscrivit pour une somme semblable. Enfin, et c'est là un point intéressant, les parents ont versé un droit d'inscription de i franc et ils ont été invités à collaborer, dans la mesure de leurs ressources, aux frais que nécessite le séjour de leurs enfants à la campagne. C'était une façon heureuse de déve- lopper l'idée de mutualité , si répandue aujourd'hui dans les milieux scolaires et dans les milieux ouvriers. Cette collalioration fournit une somme de 873 francs, y compris le droit d'inscription. Recrutement des enfants. — Il fallut alors opérer le recrutement des enfants à envoyer en colonies. Pour y arriver on envoya aux journaux, aux instituteurs, et on fit afficher dans les deux dispen- saires du Bureau de Bienfaisance , une circulaire où on indiquait les lieux, jours et heures d'inscriptions et toutes les autres conditions à remplir, telles que la déclaration de l'âge de l'enfant, le versement du droit d'inscription, la présentation de l'enfant à un examen médical, la composition du trousseau, etc., etc. Six dimanches consécutifs , le bureau se réunit dans une salle de la Mairie pour y recevoir les enfants. Dix médecins dévoués, MM. Allanic, Ganonne, Hodée, Lelièvre, A. Martin, Ch. Martin, Papin, Bivet, Boguet et Turlais voulurent liien se partager la besogne d'établir, pour chaque enfant, un bulletin médical conte- nant des renseignements sommaires sur l'hérédité de l'enfant, son état de santé antérieur et son état actuel et mesurer leur périmètre thoracique; le poids ne fut pris qu'à la veille du départ. Après leur examen, les médecins ont attribué, à chaque enfant, un classement différent et les ont placés dans trois catégories : 1° ceux qui avaient le plus urgent besoin de partir; 2" ceux dont la santé, relativement bonne, n'exigeait pas absolument la campagne; la troisième compre- nait les enfants atteints de maladies contagieuses, générales ou locales, telles que la tuberculose et la pelade par exemple. L'œuvre espère pouvoir un jour envoyer quelques tuberculeux dans les sana- toria d'enfants. . Les renseignements pris le jour de l'inscription par les dames du D'' JAGOT. — ŒUVRE ANGEVINE DES COLONIES DE VACANCES 967 bureau et le médecin traitant sont consignés sur une fiche indivi- duelle qui accompagne lenfant. Ils seront complétés par ceux que Ton pourra recueillir sur la position des parents, leur moralité, etc.. et, au retour de l'enfant, par la note du poids nouveau et du péri- mètre thoracique corrigé. I49 enfants sont ainsi venus se faire inscrire, accompagnés de leurs parents; 117 fréquentaient les écoles laïques et 32 les écoles congréganistes. Placement des enfants. — Les enfants recrutés, il s'est agi de les placer à la campagne. Deux modes de placement sont employés dans ces œuvres ; le placement en commun dans des maisons ou des établissements prêtés gracieusement , loués ou achetés , et le place- ment familial chez des paysans, des instituteurs, des propriétaires, par unités ou par petits groupes de 1 à 6. Le premier mode de placement était impossible. Il exige des frais considérables d'installation, de mobilier, de personnel chargé de la surveillance et de l'alimentation des enfants ; de plus, il est comme le prolongement de l'école et de l'internat. Le second mode de placement ou placement familial coûte moins cher; il laisse à l'enfant plus de liberté, le met davantage en présence de la vie réelle. Il a aussi plus de souplesse et se prête mieux à la solution des cas multii^les qui se présentent ; c'est celui-là qui a été adopté. Il semble difficile, au premier abord, de placer ainsi ia3 enfants et d'exercer ensuite sur evix une surveillance active. Ces difficultés ne sont pourtant pas invincibles et, bien que le prix de pension ne soit pas très élevé, o fr. 76 par jour et par enfant, il n'est pas difficile de trouvei' des fermiers qui , recevant quatre enfants par exemple , ne voient pas sans plaisir leur budget quotidien s'augmenter de 3 francs. Il faut songer que le lait, les œufs, les légumes se trouvent à la ferme sans bourse délier, et c'est là le principal. Il faut aussi trouver, dans chaque petite localité, une personne dévouée à l'œuvre et influente qui cherchera les nourriciers , grou- pera les enfants autour de sa demeure dans un rayon assez restreint, pour pouvoir exercer sur eux une surveillance effective pendant leur séjoui*. Ces personnes se sont trouvées et on a j)u faire ainsi un certain nomljre de groupements d'une sm^veillance possible. L'élasticité de ce mode de placement a permis aussi de faire un choix parmi les enfants de ceux pour lesquels un séjour au bord de 968 SCIENCES MÉDICALES la mer était particulièrement indiqué. Un groupe marin de quinze enfants a été orsranisé à Préfailles. Les enfants inscrits , les nourriciers choisis, la besogne n'est pas finie ; il faut trouver le moyen de faire parvenir les enfants chez leurs nourriciers sans que cela coûte troj) cher à l'œuvre. Ceux qui ne A ont pas dans un rayon trop éloigné de la ville ont été conduits dans des voitures prêtées généreusement par le directeur des Petites Voitures d'Angers et par M. Brard. pharmacien. Pour ceux dont l'envoi nécessitait l'usage du chemin de fer, des demandes de réduction de tarif ont été adressées aux Compagnies pour les enfants et pour les personnes qui les accompagneraient. L'Etat a accordé une réduction de 5o 0/0 ainsi que la Compagnie de l'Ouest : l'Orléans a fait la même faveur. Toutes ces précautions étant prises, les heures de départ réglées, il reste à choisir les enfants qui peuvent partir, étant donnée la somme dont on dispose , à éliminer ceux dont la santé ou la position des parents se trouvent être un peu moins dignes d'intérêt. Le placement se fera d'après certaines indications qui seront données ]»ar l'état de santé des enfants, le plus ou moins d'aisance, d'intelligence et de bonne volonté apparente des nourriciers. Il est évident , par exemple , que , si Ion a à placer une petite fille délicate et timide, on cherchera à la mettre chez des gens aisés et de culture sufïîsante pour qu'elle n'ait pas à soull'rir de son éloignement ; on n'hésitera ])as à confier un garçon bien portant et d'âge un peu avancé à des cultivateurs modestes et moins fortunés. Que reste-t-il à faire maintenant ? Il faut réunir les enfants qui doivent partir, leur faire subir un second examen médical destiné à s'assurer qu'ils ne sont pas atteints d'une maladie contagieuse (fiè^Te éruptive. maladie cutanée, etc.). Ils devront présenter leur trousseau de vacances dans un sac sur lequel sera inscrit leur nom. ainsi que le nom et l'adresse des parents nourriciers. Ce jour-là aussi doit être effectué le versement de la part contributive des parents. ŒiH're accessoire des vestiaires. — ^lais ce jour-là aussi fonctionne l'o'uvi'e, accessoire si l'on veut, mais indispensable des vestiaires. Il est bien entendu, en effet, que les enfants doivent avoir deux vête- ments complets et en bon état, et en double égal(>ment le linge de corps et les chaussures, sans compter un vêtement plus chaud 2)our les enfants qui vont au bord de la mer. Ils doivent être aussi munis des objets de toilette les plus indispensables. — Combien d'entre nos D"" JAGOT. — ŒUVRE ANGEVINE DES COLONIES DE VACANCES 969 colons ne sont pas assez riches pour avoir une telle garde-rolie. Il faut donc, ce jour-là, compléter ce qui manque, remplacer par du neuf des pièces trop usées et qui, certainement, ne feraient pas un service d'un mois. Les dépenses occasionnées par cette partie de l'œuvre se sont élevées à 3oo francs et il a été donné 'jo. paires de galoches, 54 paires d'espadrilles, 3^ paires de bas et chaussettes, ii jupons ou robes, 4o tabliers, 35 chemises. Enfin, le lendemain, tout le monde part et, s'il fait un beau soleil, si, comme cela s'est fait à Angers, on réunit tous les départs dans la même matinée et dans le même lieu, on est déjà récompensé de sa peine. La joie rayonne sur tous ces jeunes visages, quelques-uns, hélas, si maigres et si anémiés. Tous se groupent autour de leur conductrice munie, comme eux, d'une cocarde ditférente pour chaque groupe. J'en ai vu embrasser les mains des dames du Comité et oublier, dans leur joie de partir, d'embrasser leurs parents légère- ment attendris qui les avaient amenés. Déjà des lettres à grosse écriture, émaillées de plus d'une faute d'orthographe mais tou- chantes dans leur naïve reconnaissance , parviennent aux dames du Comité et les récompensent de leur zèle. Elles n'ont d'ailleurs rien'ou])lié : elles ont donné à chaque enfant un ou deux timbres-poste, pour qu'ils puissent donner de leurs nou- velles à leurs parents ; elles ont fait photogra[)hier les groupes au départ et, à leur retour, une belle carte postale illustrée leur rappel- lera ces joyeuses et saines vacances. Enfin elles se sont mises à l'abri des risques de responsabilité qu'elles pourraient encourir en cas d'accident survenu à un de leurs pupilles en souscrivant une police collective à une Compagnie d'assurances. L'œuvre n'abandonnera pas non plus ses enfants pendant leur séjour là-bas. Outre les personnes qui se chargent de les surveiller, il sera fait des visites inopinées chez les parents nourriciers par les dames du Comité et, à la rentrée, les enfants seront ramenés par des dames conductrices. Ils seront pesés et mesurés par les mêmes médecins qui les ont examinés au départ. Quels seront les résultats, ou du moins quels sont ceux que l'on peut espérer? L'expérience des autres, à défaut de la nôtre, est là pour nous l'apprendre : M. le D"" Mathieu, de Paris, a écrit : « Nous sommes heureux de constater les merveilleux résultats o]>tenus. le changement considérable survenu dans l'état de nos colons. Non seulement le temps passé à la campagne est prolitable à leur déve- loppement physique, mais encore il contribue à améliorer leur édu- cation intellectuelle et morale. » Dans une conférence présidée par 970 SCIENCES MEDICALES M. le P"" Brouardel. on a fait remarquer que, pour les enfants de lo à 12 ans, le gain pendant un séjour d'un mois à la campagne était, en poids, de deux livres en moyenne et que le tour de poitrine augmen- tait de deux à trois centimètres et que, chose plus importante encore, après une chute insignifiante au moment du retour dans leur famille, le développement de ces enfants placés de nouveau dans le milieu scolaire, continuait à s'accroître toute Tannée et se monti*ait très supérieur à celui de leurs camarades. Voilà, Messieurs, ce qu'est l'Œuvre des Colonies de vacances. Vous en connaissez les grandes lignes et, si je vous ai exposé assez longuement toutes les opérations successives qui précèdent la mise en route des enfants, c'est pour provoquer vos utiles critiques et aussi pour éviter à ceux qui voudront suivre cet encourageant exemple bien des diflicultés et Isien des ennuis. — Puissent ces œuvres prospérer et contribuer, dans la mesure de leurs moyens d'action, au si souhaitable succès de la lutte contre la tuberculose en France. M. le D' Cil. FAGUET Ancien chef de clinique cliirurgicale à l'Université de Bordeaux, chirurgien de rHùpital de Périgueux PSEUDO-COXALGIE PAR CORPS ÉTRANGER (FRAGMENT D'AIGUILLE); RADIOGRAPHIE, INTERVENTION CHIRURGICALE, GUÈRISON [6i;.58i :6ij.i46j — Séance du S août — L'observation suivante — que je crois unique — met en évidence, une fois de plus, ce qu'il y a de rigoureusement exact dans ces lignes de Louis, le célèbre secrétaire de l'Académie de chirurgie : « La science du diagnostic tient le premier rang entre toutes les parties de l'art et en est la plus utile et la plus difficile. » L'importance de cette observation, aussi intellectuelle que phy- sique, n'est plus à démontrer, et il est toujours utile de se rappeler la leçon d'ouverture du cours de clinique chirurgicale de La Charité, laite par M. le professeur S. Duplay, en 1890. « Il doit surtout être un diagnostic anatoiniqiie et arriver à localiser tout d'abord le D'" Cil. FAGUET. — PSEUDO-COXALGIE PAR CORPS ÉTRANGER 971 siège exact occupé pai' la lésion , ainsi qu'à déterminer les raj)ports de celle-ci avec les régions ou les organes voisins. Ce premier point acquis, il deviendra souvent facile d'établir la nature de la lésion par l'examen raisonné des signes physiques et fonctionnels. Il ne suffît pas, en effet, pour arriver au diagnostic, de recueillir par les sens un certain nombre de renseignements; il faut encore savoir les coordonner et attribuer à chacun d'eux leur véritable valeur. Le talent d'observation, qui permet de voir et de bien voir, la rectitude du jugement, d'autre part, qui donne l'appréciation exacte de ce qui a été constaté , sont donc des qualités indispensables pour le clinicien en quête du diagnostic. Ces qualités, que l'expérience peut fortifier et développer, ne s'acquièrent pas, lorsqu'on ne les possède pas tout d'abord, du moins dans une certaine mesure. Mais cela ne suffît pas; il faut encore compléter les données acquises par la recherche du diagnostic étiologique, c'est-à-dire par l'étude des causes générales qui ont pu avoir une influence plus ou moins directe sur la genèse de la maladie, influence qui souvent s'exerce sur la marche de celle-ci et dont parfois il faudra tenir compte dans le choix des moyens de traitement (i). » 11 faut donc pour arriver au but, c'est-à-dire à un diagnostic complet, avoir recours à toutes les ressources de l'exploration clinique et ne négliger aucun des moyens propres à nous éclairer. Dans le cas relaté ci-dessous , le diagnostic symptomatique de coxal- gie s'imposait; mais on verra que la radiographie nous a fourni les moyens de connaître l'étiologie précise des symptômes observés, ce qui a modifié le traitement et rendu un grand service à notre malade. Voici cette observation : Obs. — Le 22 septembre 1900, je reçus dans mon cabinet de consul- tation, M"« B... qui m'était adressée par un de mes confrères deNontron. Cette jeune lille , âgée de seize ans , ne présentait dans ses antécédents aucune tare héréditaire ou acquise : son père et sa mère sont en bonne santé ; elle a une sœur cpii n'a jamais été malade ; elle-même n'a jamais consulté de médecin avant le début des accidents actuels qui remontent à cinq ou six semaines. A cette époque, M"« B... se plaignait de douleurs dans la hanche gauche, douleurs spontanées, nulles ou très peti accusées, mais très vives dans la marche et les mouvements. Peu de temps après on vit apparaître de la claudication et des signes de coxalgie : flexion légère de la cuisse (1) S. DuPLAY, E. RocuARD et A. Demoulin, Manuel de diagnostic chirurgical, Paris 1895, page I. 972 SCIENCES MEDICALES sur le bassin, abduction et rotation du membre en dehors, etc. Toutefois, ces symptômes évoluèrent sans altération de l'état général et sans atrophie musculaire. La jeune malade me fut présentée à ce moment-là et , après un examen attentif, je n'eus pas de peine à reconnaître qu'elle présentait en effet les symptômes du début d'une coxalgie de la hanche gauche. Le dia- gnostic étiologique restait mcertain, parce que les accidents constatés ne paraissaient se rattacher ni à la tuberculose, ni à l'hystérie, dont on ne trouvait aucune trace dans le passé ni dans le présent. C'est alors que je jugeai nécessaire de faire faire mie radiographie avant de prendre mie détermination : elle fut exécutée, sur mes indications, par M. Dorsène, de Périgueux. L'épreuve très nette qui me fut remise et que je fais jjasser sous les yeux de mes collègues du Congrès, révéla la présence d'un fragment d'aiguille à coudre — la pointe — au niveau de l'articu- lation coxo-fémorale gauche, région externe. Ce corps étranger — comme on le voit — se trouvait placé tout à fait au contact de l'articulation, par conséquent dans la couche musculaire profonde ; sa présence en ce point jiaraissait exjjliquer tous les symptômes, d'une façon d'autant plus satis- faisante que la rathographie ne révélait aucune autre lésion. M"" B... se souvint alors que, cinq à six semâmes auparavant, préci- sément quelques jours avant l'apparition des premières douleurs, elle s'était assise un jour, par mégarde, sur un ouArage de l)roderie et s'était sentie piquée dans la région postéro-supérieure de la cuisse gauche. La douleur ayant été peu intense, elle ne regarda même pas le pomt lésé et n'y ajouta aucune importance; cependant, elle s'aperçut qu'une aiguille de son ouvrage était brisée et elle n'en retrouva qu'une partie , — celle adhérente au chas. Il était dès lors facile par les commémoratifs , l'ensemble des symp- tômes et la présence du corps étranger révélé par la radiographie, de faire le diagnostic étiologique et d'alfirmer qu'on se trouvait en présence d'une pseudo-coxalgie produite par le fragment d'aiguille. Ce fait nouveau imposait une théraj)eulique spéciale ; au lieu de proposer l'immobilisation clans une gouttière — comme on y avait songé avec raison en apparence — il fallait, tout d'aliord, enlever ce corps étranger. L'intervention chi- rurgicale fut accej^tée immédiatement ; elle fut pratiquée le lendemam matin, aS seiDtembre, avec l'assistance de MM. les docteurs Montané (de Périgueux) et Sarthe (de Thiviers), sous le chloroforme. Opération. — La malade est couchée sur le côté droit et, après toutes les précautions antisei^tiques d'usage, je pratique sur la région postéro- externe de la région fessière une incision de dix'à douze centimètres de longueur, parallèle aux fibres musculaires du grand fessier. Les fibres de ce muscle sont dissociées à l'aide de la sonde cannelée et des doigts et non sectionnées, ce qui permet d'éviter d'une façon absolue la pré- sence du sang. Les deux jjortions du muscle amsi divisé dans toute son épaisseur sont écartées et il est facile d'explorer la couche celluleuse qui le séi^are des muscles sous-jacents (moyen fessier et pyramidal). Au cours de ce tem])s o])ératoire, je touche l'une des extrémités de l'aiguille, qui paraît Jixée i)erpendiculairenient dans les libres du muscle pyramidal; aussitôt senti, le fragment d'aiguille fut extrait sans difli- p. LESAGE. — NOUVEAU MODÈLE DE l'hYGROMÈTRE RESPIRATOIRE Q-j'S cultes avec une pince à forcipressure : il représentait exactement le corps indiqué sur la radiographie. Aucun vaisseau n'ayant été lésé, l'hémostase se trouvant parfaite sans qu'il ait été nécessaire de faire mie seule ligature , la plaie fut suturée avec des crins de Florence. Tous les symptômes observés disparurent immédiatement, la plaie se réunit par première mtention et, dix jours après l'opération, M"'' B... pouvait marcher comme par le passé; depuis cette époque, — trois ans — sa santé s'est maintenue parfaite. Réflexions. — Cette observation constitue un fait clinique très instructif à divers points de vue : I'' Elle démontre — bien qu'il soit superflu de le répéter — qu'on doit toujours chercher à arriver à faire un diagnostic complet et ne pas se contenter d'un diagnostic symptomatique , forcément incomplet ; 2° Les indications thérapeutiques , rationnelles en apparence sont souvent erronées en réalité et peuvent être préjudiciables à la santé du malade , si on se contente d'un diagnostic symptomatique ; 3° Le terme « Coxalgie » est un mot qui doit servir à désigner exclusivement un ensemble de symptômes, — un syndrome — et non une entité morbide étiologiqueinent caractérisée, comme on a une fâcheuse tendance à le croire. M. Pierre LESAGrE Maître de conférences à la Faculté des Sciences Professeur suppléant à l'École de Médecine et de Ph.armacie de Rennes NOUVEAU MODÈLE DE L'HYGROMÈTRE RESPIRATOIRE DU DOCTEUR PIERRE LESAGE, EMPLOI EN MÉDECINE [6i2.25] — Séance du S août — On a les moyens de mesurer la tension de la vapeur d'eau dans l'air d'une salle en y plaçant une lame brillante dont on peut faire varier et mesurer à chaque instant la température. En effet, suppo- sons que la lame ait la même température que l'air et que celui-ci ne soit pas saturé ; dans ces conditions , la lame reste brillante ; alors il suffit d'abaisser progressivement la température de cette lame jus- qu'au moment où un léger nuage en ternit la surface; à ce moment. 9^4 SCIENCES MÉDICALES la températui'e de la lame est celle pour laquelle est maxima la tension actuelle de la Aapeur d'eau dans l'air considéré; en se repor- tant aux tables des forces élastiques maxima de la vapeur d'eau, on trouve, en face de la température observée, la valeur de la tension cherchée. Supposons que la lame ait une température plus basse que celle de l'air et qu'elle soit recouverte de buée; dans ces conditions nou- velles, on en élève progressivement la température, jusqu'au moment où cette buée disparaît; à ce moment, la température de la lame donnera encore la tension cherchée. Dans la pratique , on fait les deux opérations inverses et on prend la moyenne des températures observées pour obtenir une valeur plus exacte de la tension. C'est là le principe des hygromètres à condensation ordinaires avec lesquels on observe facilement la formation de la buée et dont on abaisse la température par l'évaporation de l'éther. Si on veut mesurer la tension de la vapeur d'eau dans l'air des voies respiratoires en y plaçant un hygromètre à condensation, on se trouve en présence de deux diflicultés principales qui tiennent à la conformation et aux dimensions de ces voies : Difficulté dans l'observation du début de la buée qui révèle la condensation de la vapeur d'eau; Difficulté dans l'application des moyens de faire varier la tempé- rature de la lame brillante. En effet, dune part, la paroi de ces voies n'étant pas transparente, il est difficile, sinon impossible, de voir directement l'apparition et la disparition de la buée; d'autre part, on ne peut plus employer l'éva- poration de l'éther pour faire varier convenablement la température de la lame brillante. Yoici ce que j'ai imaginé pour tourner ces difficultés : En premier lieu, jai prolongé vers l'extérieur la paroi des voies respiratoires, à l'aide dune paroi en verre, transparente i)ar consé- quent, et à laquelle on peut donner, avec un courant d'eau chaude, la température du corps humain pour éviter les condensations préalables. En second lieu, j'ai construit une lame brillante représentée par un tube de cuivre argenté extérieurement, placé à l'intérieur de la ])artie précédente et dans lequel on fait ariiver de l'eau chaude ou de l'eau froide, pour hausser ou baisser convenablement la tempéra- ture dont on suit les variations avec un thermomètre. p. LESAGE. — NOUVEAU MODELE DE L HYGROMETRE RESPIRATOIRE Q^O Tel est le principe des modifications apportées à l'hYgroniètre à condensateur ordinaire pour en faire riiYgroniètre respiratoire. Voyons cet hygi'omètre. J'ai construit successivement trois modèles que j'ai modifiés en recherchant la meilleure disposition pour établir le mieux possible la continuité entre les voies respiratoires et l'appareil et pour éviter les condensations préalables dans la région qui établit cette continuité. J'ai décrit le n° i en 1899 (i); il présentait plusieurs inconvénients parmi lesquels j'en citerai deux : celui de ne pas assurer complète- ment la continuité des voies respu*atoires lors de l'expiration par le FiG. I. nez; celui d'être tenu à la main et de présenter une instabilité très gênante. Le n" 2 a été le sujet d'une note à l'Académie des Sciences en mai 1903 (2): les deux inconvénients que je viens de signaler pour le (i) Pierre Lesage, De la possibilité de quelques mycoses dans la cadié respiratoire, basée sur l'hygrométrie de celte ca\:ilé (Thèse de la Fac. de Méd. de Paris, octobre 1899). (2) Pierre Lesage, Un hygromètre respiratoire (C. R. de l'Ac. des Sciences, 4 mai igoS). 9^6 SCIENCES MÉDICALES n" I y sont évités, au inoins en partie, par l'emploi d'un capuchon en verre et par la fixation de l'appareil sur un bâti très stable. Enfin, le n'' 3 diffère du n° 2 par des détails assez nombreux; il a été présenté à l'Académie de Médecine le 23 juin 1903 (i), mais sa description n"a pas été publiée. C'est cette description que je me propose de faire rapidement. Il comprend : Une pièce principale ; Un bâti sur lequel elle est fixée; Deux cuves en zinc, Tune à eau chaude, l'autre à eau froide, et reliées par des tubes de caoutchouc à la pièce principale : Voyons cette dernière avec quelques détails. D'après le pinncipe qui en a été donné, elle est formée de deux parties principales : 1° Un ensemble transparent destiné à prolonger les voies respira- toires et dans lequel on introduit l'hygromètre ; 2° L'hygromètre proprement dit. I, — La première partie est un cylindre creux, à double paroi, formant une cavité annulaire B , limitée latéralement par deux man- chons de verre d'inégal diamètre, mais d'égale longueur; en haut et en bas, par deux plaques de cuivre. Ces deux plaques, percées à leur centre d'un trou dont le diamètre est un peu inférieur au diamètre du plus petit manchon de verre, sont arrondies et munies de quatre oreillettes perforées. Elles rem- placent, dans le modèle n'' 3, les bouclions de liège annulaires, des modèles n'' i et n° 2 et servent à assembler les manchons de verre à l'aide d'écrous se vissant sur quatre tiges métalliques passées dans les oreillettes. Comme elles sont doublées d'une épaisse lame de caoutchouc, on peut les rapprocher suffisamment pour assurer une fermetm'e hermétique de la cavité B. En outre , la plaque inférieure présente trois trous : deux pour le passage des tubes a et d, par lesquels on fait arriver leau chaude ou l'eau froide des cuves; le troisième, pour recevoir un thermomètre /. La plaque supérieure est percée d'une ouverture en quartier de lune par laquelle la cavité B communique avec la cavité périphérique B' du capuchon e. Ce capuchon reçoit le nez et établit , autant que possible , la conti- (1) Pierre Lesage, Présentation (Vnpparcii pour mesurer la tension de la vapeur d'eau (Bull, de l'Ac. de Med., 23 juin ujoJ). p. LESAGE. — NOUVEAU MODELE DE L HYGROMETRE RESPIRATOIRE Q'J'] nuité des voies respiratoires avec le cylindre creux ; il est formé par deux lames métalliques convenablement moulées, soudées sur la plaque de cuivre supérieure et l'une à l'autre pour limiter la cavité périphérique B' destinée à recevoir de l'eau chaude afin d'éviter les condensations préalables. Dans le modèle n° 2, ce capuchon était formé par une seule lame de verre , celle du manchon de verre inté- rieur remaniée au chalumeau dans sa partie supérieure. De ce côté, le n° 3 réalise deux avantages sur le n° 2 : celui du meilleur fonc- tionnement de l'appareil et celui d'une plus grande facilité de fabri- cation. Cette première partie peut se fixer par les prolongements infé- rieurs des tiges d'assemblage, à l'aide d'écrous, sur la plate-forme d'un bâti en bois. II. — La deuxième partie est l'hygromètre proprement dit. C'est un cylindre de cuivre A, creux, à paroi mince, argenté et bruni extérieurement ; sa partie supérieure est complètement fermée ; sa partie inférieure est percée de trois trous : deux recevant les tubes b et c, par lesquels on fait arriver l'eau chaude et l'eau froide des cuves , le troisième donnant passage au thermomètre 7\ Cet hygromètre est introduit, par le bas, dans la cavité du man- chon de verre interne. Il y est maintenu horizontalement et verti- calement par huit ailettes minces, faisant ressort, soudées en deux groupes sur la longueur de A et par une petite barre transversale glissée dans des boucles convenablement soudées aux tubes & et c, a et d. Pour achever cette description rapide et préciser les rapports des pièces de tout l'appareil, il me suffit de dire que les tubes a et b sont reliés à la cuve à eau chaude, les tubes c et é? à la cuve à eau froide, à l'aide de tubes de caoutchouc munis de robinets. Quand l'ensemble est rempli d'eau, en plaçant les cuves à des niveaux différents convenables et maniant les robinets d'une manière concordante, on peut laire passer, soit dans A, soit dans B et B', un courant d'eau chaude pour en élever la température, ou un cou- rant d'eau froide pour l'abaisser. Pour mesurer, avec cet hygromètre, la tension de vapeur d'eau dans l'air expiré, on peut se trouver dans deux cas : 1° Une seule personne fait fonction d'opérateur et de sujet en observant ce qui se passe dans sa propre respiration ; 2° Il y a deux personnes faisant fonction, l'une d'opérateur, l'autre de sujet. ^ , 978 SCIENCES MÉDICALES Supposons le premier cas, celui dans lequel je me suis trouvé le plus souvent. On donne à B et B' la température 38" ou 4o", on introduit le nez dans le capuchon e, on respire et on regarde l'image du tube argenté A dans un miroir tenu à la main ou fixé sur un support convenablement placé. Si la température de A est suffisamment basse, on voit un nuage se former dans l'expiration et disparaître dans l'inspiration; en maniant convenablement cuves et robinets, on élève progressivement la température de A jusqu'au moment où le nuage ne se forme plus dans l'expiration. On note la température donnée par le thermomètre r. En faisant la manœuvre inverse, on abaisse la température jusqu'au moment où le nuage réapparaît et on lit, à nouveau, la température de r. On obtient ainsi deux valeurs dont on prend la moyenne; cette moyenne est la température pour laquelle est maxima la tension actuelle cherchée de la vapeur d'eau dans l'air expiré. On trouve cette tension dans les tables des forces élastiques maxima. Dans le second cas, le miroir devient inutile ; l'opérateur manœuvre les cuves, les robinets et observe directement le tube A; le sujet met son nez dans le capuchon e et n'a qu'à respirer sans autre préoccupation. A quoi peut servir cet instrument? Personnellement, j'en ai tiré des indications qui me paraissent très précieuses et que ne pouvaient me fournir les livres de physiologie. En etïet, on lit couramment que lair expiré sort saturé de vapeur d'eau à sa température, ou encore, saturé à 34°. Or, en fractionnant lair d'une expiration normale, en comparant l'air expiré normale- ment à l'air d'une expiration forcée, etc., j'ai pu me convaincre que les différentes tranches de l'air qui est expulsé dans l'expiration sont chargées de vapeur dont la tension n'est point la même et augmente de la première tranche expulsée à la dernière. Ceci précise et limite le rôle de mon hygromètre : par le mode d'emploi indiqué , celui-ci ne mesure que la plus haute tension dans la portion d'air explorée. En outre, j'ai pu constater que la tension de la vapeur d'eau dans l'air expiré varie dune manière appréciable quand on fait varier l'humidité de l'air inspiré (i). C'est ce qui m'a amené à penser d'abord et à vérifier ensuite, sur des oiseaux, que les variations (i) Pierre Lesage, Un hygromètre respiratoire (C. R. Ac. des Se, uiiii igoS). p. LESAGE. — NOUVEAU MODÈLE DE L HYGROMÈTRE RESPIRATOIRE 9^9 d'humidité de Tair extérieur peuvent déterminer des variations d'humidité de l'air des voies respiratoires suffisantes pour y influencer la germination de spores introduites dans ces voies et, comme conséquence, l'établissement de mycoses (i). Enfin, en mesurant la tension de la vapeur d'eau dans l'air expiré normalement d'un même sujet au repos et en pleine activité, je l'ai trouvée sensiblement plus élevée dans le second cas que dans le j)remier. Ces indications sont donc précieuses à plusieurs points de vue. Elles intéressent les physiologistes et les médecins, qui devront tenir un plus grand compte de l'hygrométrie des voies respiratoires ; les physiologistes qui ne considéreront plus l'air expiré comme saturé de vapeur d'eau à sa température ou saturé à 34° et qui, peut-être, seront tentés de rechercher les variations de la tension de la vapeur d'eau dans l'air expiré d'un même sujet à des états très différents, afin d'en tirer des conclusions utiles ; les médecins qui ne trouveront plus paradoxal qu'on puisse supposer que des spores ne germent X^as ou germent plus lentement dans les voies respiratoires que dans l'air saturé, parce qu'elles y rencontrent de la vapeur d'eau en quan- tité un peu trop faible , et qui voudront s'arrêter à la considération du régime hygrométrique dans l'étude des affections des voies respi- ratoires. En ce qui concerne ce régime , il est un emploi que l'on pourrait faire de l'hygromètre respiratoire et que je me permets de signaler en terminant. Nous venons de voir que, chez l'homme sain, la tension de la vapeur d'eau dans l'air expiré varie avec l'état du sujet; tout me • porte à croire qu'il en est de même chez l'homme malade. De plus, j'ai entendu dire quelquefois que la quantité de vapeur d'eau émise dans la respiration par certains malades peut devenir assez consi- dérable. N'y aurait-il pas intérêt à aï)précier cette quantité ou ces l variations pour suivre l'aggravation ou l'amélioration de l'état patho- logique. Malheureusement, nous ne possédons pas de méthode qui ■ permette de mesurer rapidement ces variations et nous ne pouvons les suivre. : Avec l'hygromètre respiratoire, on obtient, dans quelques minutes, 'Tine mesure moyenne de la plus haute tension de la vapeur d'eau dans l'air expiré normalement; ne serait-il pas possible de répéter iceite opération plusieurs fois par jour, d'obtenir, de cette manière, , (i) Pierre Lesage, Germination des spores de steregmatocystis nigra dana la Iruchce de quelques oiseaux (G. R. de l'Ac. des Se, 20 octobre 1902). q8o sciences médicales la marche de la transpiration pulmonaire et, par là, celle de la maladie ? Je livre à ceux qu'elle intéresse cette idée , que je ne puis pour- suivre parce qu'elle m'éloigne trop de mes études ordinaires sur la physiologie végétale, et je souhaite qu'elle devienne féconde. Je serai le premier à applaudir aux succès de ceux qui l'auront victorieuse- ment exploitée pour le plus grand bien de l'homme. M. le D^ A. DARIER Ancien Président de la Société d'Ophtalmologie de Paris IMPORTANCE DE LA THÉRAPEUTIQUE LOCALE DANS LES DIFFÉRENTES MALADIES OCULAIRES [615:617.7] — Séance du 8 août Plus nous avançons , plus nous devenons précis , plus nous cher- chons à appliquer le remède à l'organe malade lui-même, en limitant, autant cpie possible, la lutte du médicament contre l'agent patho- gène ou le foyer infectieux lui-même. La chose est facile quand la cause du mal est accessible et que sa destruction est possible sans nuire à l'organe malade. Mais, le plus souvent et pour l'œil surtout, il faut nous contenter de rendre le milieu ambiant impropre à la vie de l'élément pathogène, en irri- guant le territoire lymphatique circonvoisin avec tel antiseptique que nous savons le plus funeste à l'ennemi que nous combattons. Beaucoup d'affections du globe oculaire i^euvent être traitées ainsi localement, soit en injectant le médicament dans l'œil lui-même, comme l'a fait le premier M. Abadie, soit en injectant simplement le médicament sous la conjonctive, comme nous le recommandons depuis tantôt i5 ans. Les injections intra-oculaires ont leurs indications spéciales , elles s'adressent à ces cas très graves où tout peut être tenté pour sauver un œil que l'on croit absolument perdu. Elles ont malheureusement quelque lois des conséquences sérieuses qui font qu'on hésite à les appliquer couramment. Il n'en est pas de même avec les injections sous-conjonctivales qui D^ A. DARIER. — IMPORTANCE DE LA THÉRAPEUTIQUE LOCALE 981 ne peuvent avoir qu'une douleur un peu vive comme complication, sans jamais entraîner la perte de la vision. Elles agissent en irri- guant les espaces lymphatiques oculaires avec telle solution médi- camenteuse qui sera indiquée par la nature même du processus morbide à combattre. La thérapeutique locale que nous poursuivons depuis des années déjà (i) n'est pas basée seulement sur l'empirisme ; elle repose sur des lois anatomiques et physiologiques très importantes , ainsi que nous l'avons déjà fait ressortir dans une communication à la Société d'Oplitalmologie de Paris, en 1892. Nous insisterons encore ici sur quelques points. La thérapeutique locale est à l'ordre du jour, non seulement en ophtalmologie, mais dans toutes les branches de la médecine. Toutes les fois qu'il est possible d'atteindre au foyer morbide, le chirurgien réclame sa grosse part d'une quantité d'affections considérées autre- fois comme étant du domaine médical. En dermatologie, plus que partout, la thérapeutique locale s'im- pose de plus en plus et les grandes doctrines diathésiques sont peu à peu dépouillées de beaucoup de leurs attributs, au bénéfice des infections locales, relevant par conséquent surtout des médications topiques. Même les affections dépendant d'une maladie générale, telle que la sypliilis, la tuberculose, le rhumatisme, ont, à côté de leurs indica- tions générales, des indications locales de première importance. Si des manifestations morbides se présentent à la fois sur diffé- rents organes, c'est le traitement général qui est de première indica- tion. Si, au contraire, les accidents sont absolument localisés en un seul point, les applications locales devront s'imposer. Cette loi peut s'appHquer d'autant mieux aux maladies oculaires que souvent celles-ci se manifestent comme unique phénomène que notre routine nous fait parfois rattacher à un état général diathé- sique, plus ou moins problématique , parce que nous n'en connais- sons pas la pathogénie propre. L'idée qui nous a toujours guidé dans nos recherches est la sui- vante : (c Une infection primaire ou secondaire se localisant dans un organe aussi important que l'œil, il est de première nécessité denraj-er sur place, si possible, le processus infectieux », sans jamais pour cela perdre de vue les indications générales. Quand la chose est faisable chirurgicalement , par le fer ou par le feu, (1) A. Darier. De la lanoline hydrargyrique en thérapeutique oculaii'c. Bull, de la Soc. d'Opht. de Paris, 1888. 982 SCIENCES MÉDICALES le but est vite atteint ; mais, si les lésions ne sont pas superficielles ou intéressent des tissus qu'il est important de respecter, quels sont les moyens locaux qui nous restent ? Les instillations de sublimé dans le sac conjonctival, pratiquées par Scarpa, ont été remises en honneur récemment par Gallenga (i) qui a obtenu, par ce moyen, quatre guérisons d'ophtalmie sympa- thique. Injecter l'agent antiseptique dans le foyer infectieux lui-même ou dans ses alentours immédiats, de façon à irriguer, à aseptiser tout le territoire lymphatique dans lequel s'est cantonné le processus mor- bide, tel nous paraît devoir être le but de la thérapeutique de toutes les maladies infectieuses bien localisées. L'œil est dans des conditions admirables pour se prêter à cette thérapeutique locale, par la disposition même de son système Ij'-m- phatique, constitué i:)ar des espaces communiquant tous intimement entre eux. Il est bien connu que l'atropine, instillée même en solution très diluée dans le sac conjonctival, est résorbée par les lymphatiques oculaii^es et pénètre dans le liquide de la chambre antérieure. On peut, en effet, en instillant quelques gouttes de cette humeur aqueuse sur l'œil d'un autre animal, provoquer de la mydriase. Pflueger a fait aussi la preuve de l'absorption locale, en injectant sous la conjonctive une solution de fluorescéine , matière colorante d'une diffusibilité très grande. Il a pu observer que, non seulement l'humeur aqueuse se colorait, mais la cornée elle-même et le cris- tallin aussi. Bellarminoff", par de simples instillations conjonctivales, est arrivé également à colorer l'humeur aqueuse avec de la fluorescéine (2). Mais on a objecté que les sels de mercure formant avec les albu- minoïdes de l'organisme des composés insolubles ne pouvaient pas I)arvenir jusque dans les milieux oculaires. Pour le prouver, on a fait des injections sous-conjonctivales de sublimé ou de cyanm*e d'hydrargyre chez le lapin et quelques heures après on n'a pas pu trouver trace de mercure dans l'humeur aqueuse. Mais la recherche d'une réaction mercurielle dans une solution aussi diluée qu'elle doit l'être dans l'humeur aqueuse est chose (i) C. Gallenga. Atti reale Academia di medicina di Torino. 1887, (2) Von Hippel a même usé de ce moyen pour colorer la membrane de Descemet quand elle présente des altérations de son épitliélium. Nous savons aussi qu'une injection sous-coii.jonctivale d'eau oxygénée provoque l'apparition dans la chambre antérieure et entre les lames de la cornée de bulles de gaz. oxygène D'^ A. DARIER. — IMPORTANCE DE LA THÉRAPEUTIQUE LOCALE 983 encore au-dessus des forces de nos chimistes et micrographes actuels. Il en est de même pour l'atroi^ine, qu'on ne pourrait déceler dans l'humeur aqueuse par ses réactions chimiques, mais dont on peut constater l'évidence par sa réaction physiologique comme mydria- tique. Pour la lluorescéine , son pouvoir colorant de diffusibilité est si grand et son pouvoir colorant est si intense, qu'il suffira d'une par- celle infinitésimale pour provoquer la coloration de l'humeur aqueuse. Pour le mercure, la réaction chimique est impossible au-dessous de i/ioo.ooo; mais qui pourra jamais nous dire quelle fraction de miUionième suffit pour amener une réaction physiologique, thérapeu- tique, sur les tissus oculaires. Ne savons-nous pas que des gommes de l'iris fondent rapidement sous l'influence des frictions mercurielles ou des injections hypoder- miques, ou intraveineuses. Eh bien ! est-il jamais venu à l'idée d'aucun clinicien d'aller, quand la gomme disparaît, chercher si l'humeur aqueuse contient une quantité pondérable de mercure ? Quand cette réaction aura été fjiite par ces expérimentateurs, si sévères dans leurs observations sur le lapin, j'attacherai une valeur à leurs négations. Or, jamais des faits négatifs n'ont pu infirmer des faits positifs bien et dûment observés. Que diraient ces contradicteurs s'ils se trouvaient en présence d'un cas de ce genre : gomme de l'iris , de la grosseur d'un grain de blé ; trois injections sous-conjonctivales de deux gouttes d'une solution de sublimé au millième amènent une fonte complète de la gomme en six jours ; aucun autre traitement n'avait été appliqué. N'est-ce pas là une observation clinique qui vaut cent ex^iériences négatives faites sur le lapin? Et ce fait n'est pas le seul; j'ai observé de nombreux cas de ce genre, dont le dernier il y a un mois seulement. C'est au point que je suis arrivé à considérer ce traitement comme dangereux , par ce fait que, très souvent, le malade, si vite guéri de son accident local, cesse tout traitement, alors qu'il serait urgent de faire une cure mercu- rielle prolongée pour prévenir des accidents ultérieurs. Mieux encore : lorsque M. Mellinger publia ses premières critiques sur les injections sous-conjonctivales de sels mercuriels, prétendant que le chlorure de sodium agissait aussi bien que le sublimé, un syphilitique vint se présentera moi avec des foyers de choriorétinite ()84 SCIENCES MÉDICALES dans les deux maculas; je ne pouvais trouver un sujet de compa- raison plus favorable : sur Ta-il le moins malade, je pratiquai des injections de chlorure de sodium 4 o/o, et du côté de l'œil le plus gravement atteint, des injections de cyanure d'iiydrargyre à i o/oo. De ce dernier côté, la vision était redevenue normale après 5 injec- tions; de l'autre, non seulement la vision ne s'améliora pas sur l'influence du chlorure de sodium, mais le temps perdu par cette exi^érience rendit très difficile l'effet thérapeutique des injections mercurielles locales appliquées trop tard. Le traitement général par les injections hypodermiques de Cn Hg fut également sans effet. Il ne faut -pas oublier, comme vous le savez, que ce qui fait la gra- vite des lésions maculaires, c'est le temjDS écoulé depuis leur api^a- rition. Autant il est facile de rappeler à la vie les éléments rétiniens qui n'ont été que momentanément comprimés, autant il est difficile de ressusciter ceux qui sont complètement atrophiés. * En science, il ne faut pas faire œuvre de sectaire et ne voir qu'un côté de la question. M. Mellinger a relaté des observations fort intéressantes, où il note des améliorations très réelles, par de simples injections d'eau salée. Aussi me suis-je empressé d'employer des injections si simples et si anodines dans nombre de cas où le mercure n'était pas indiqué : telles les infiltrations cornéennes simples, les altérations choroïdiennes de la myopie, certains troubles du corps vitré, etc Mais, quand il s'agira d'enrayer une infection oculaire endogène ou ectogène, c'est toujours aux injections sous-conjonctivales de cyanure d'hydrargyre qu'il faudra avoir recours, de même que dans toutes les affections spécifiques de l'œil, superficielles ou profondes. L'idée des injections sous-conjonctivales est, du reste, déjà ancienne. Rothmund (i) (de Munich) avait pratiqué des injections sous-conjonctivales d'eau salée pour tâcher de dissoudre, par inhi- bition, certains Icucomes de la cornée. M. de Wecker a le premier vanté les injections sous-conjonctivales d'eau salée pour guérir le décollement de la rétine. Nous-mêmes, en 1888, nous avions pratiqué des injections sous- conjonctivales de mercure pur. D'autres ont peut-être, avant ou (i) RoTUMUxD, A7i7i. Monals. f. Aiigcnheilk., 1866. D"" A. DARIEU. — IMPORTANCE DE LA THÉRAPEUTIQUE LOCALE qSS après, fait des essais semblables, sans que leur nom soit parvenu jusqu'à nous pour des raisons diverses. « Nous ne revendiquons pas une priorité ; nous serons trop heu- « reux si, par nos recherches obstinées, nous réussissons à faire « comprendre les principales indications de la thérapeutique locale « par les injections sous-conjonctivales, dans beaucoup d'affections « oculaires contre lesquelles on n'avait jusqu'ici d'autres ressources « que les médications générales qui souvent dépassent le but et « quelquefois ne l'atteignent pas ou trop tard seulement. » Or, la thérapeutique locale est indiquée toute les fois qu'il faut agir avec promptitude et énerg-ie. Nous ne saurions trouver un exemple meilleur que celui de l'ophtalmie sympathique, dont l'unique thérapeutique consistait, jusqu'à ces derniers temps, dans l'énucléation et la cure mercurielle à saturation. Quelle que soit la théorie que l'on accepte, si le traitement mercu- riel général est efficace, son application locale le sera à plus forte raison; et le fait est déjà reconnu et prouvé par de nombreuses observations rapportées par Gallenga (i), Secondi (2), Raymond (3), Abadie (4), Rogman (5), Coppez (6), nous-même {']), et Sourdille (8). Les injections sous-conjonctivales n'eussent-elles fait que d'établir, dans certaines conditions, la curabilité de l'ophtalmie sympathique, constitueraient déjà une conquête des plus précieuses. Dans l'infection secondaire tardive, traumatique ou post-opéra- toire, se faisant à travers des cicatrices vicieuses, cicatrices filtrantes, les injections sous-conjonctivales nous ont donné des résultats que nous n'aurions jamais obtenus, avec autant de rapidité, par les trai- tements anciens. Nous avons publié de nombreux faits de ce genre qui, tous, viennent d'être confirmés à nouveau par divers auteurs. Ces faits constituent, en quelque sorte, l'expérience la plus pure et la plus concluante prouvant l'efficacité puissante des antiseptiques injectés sous la conjonctive, dans les infections bien localisées et non compliquées de phénomènes concomitants pouvant troubler l'observation. Si l'on fait abstraction des conjonctivites, contre lesquelles la thé- rapeutique locale a fait ses preuves sans qu'on songe encore à (i) C. Gallenga , loc. cit. (2) Secondi, ^4/în. di OttalmoL, t. XX. (3, 4, 5 et 6) Raymond, Abadie, Rogman, Soc. franc. d'Opht., 1890. (7) A. Darier, Ga:. des Hopit., 10 octobre 1891. (8) La Clinique Ophtalmologique, 1900. 986 SCIENCES MÉDICALES l'attribuer à une médication générale quelconque une influence pri- mordiale, l'infection la plus simple du globe oculaire lui-même est celle produite par une érosion cornéenne infectée. La forme la plus ordinaire est l'ulcère infectieux de la cornée. Dans nombre de cas que nous avons observés , nous avons toujours constaté que les injections sous-conjonctivales de Cn Hg, pratiquées pendant plusieurs jours, tout autour de la cornée, produisent l'anti- sepsie la plus sûre et la plus eflicace. Et ce n'est pas le fait de notre seule expérience ; Second! (i) (de Turin), Dufour (2) (de Lausanne), Van MoU (3) (de Rotterdam), Gepner (4) (de Varsovie), et tant d'autres ont obtenu par le même moyen des résultats admirables. Nous étudierons plus loin l'action du Na Cl... Avec le galvano-caiitère et les injections sous-conj onctivales d& Cn Hg ou de Na Cl, tout ulcère infectieux de la cornée, pris à temps, sera promptenient guéri, ce qui n'était pas le cas par les traitements anciens. Ce que nous avons dit pour l'infection traumatique tardive est encore plus vrai pour les blessures septiques de l'œil, où le phlegmon oculaire est imminent. Si la suppuration n'a pas encore gagné les parties profondes de l'œil, Tes injections sous-conjonctivales de cyanure de mercure, pra- tiquées larga manu et coup sur coup, permettront souvent d'éviter l'énucléation. Si nous envisageons les maladies essentielles des membranes pro- fondes de l'œil : iridochoroïdites, rétinites, névrites, etc., nous serons surpris de voir que, même dans ces aflections profondes, dont l'étio- logie est souvent fort obscure et où la syphilis, le rhumatisme et les auto-intoxications les plus variées jouent un rôle important, les injec- tions sous-conjonctivales ont , dans beaucoup de cas , donné des résultats que l'on peut sans crainte appeler surprenants. Aussi avons-nous été heureux d'entendre, dans un des derniers Congrès d'oplitalmologie, M. le professeur Pflueger (de Berne) con- firmer notre dire, en déclarant que, lui aussi, il avait constaté que les injections sous-conjonctivales avaient une action, pour ainsi dire, élective sur la choroïde. Nous avons relaté de nombreuses observations de choroidites, où (i) Secoxdi. Giorn. dclla R. Acad. di Mcd. di Torino, 1889. (2) Di'Forn. /?/(//. de la Soc. franc. d'Ophl., 1892. (3) Vax Moll. Klin. Mariais, f. Augenheilk., 1892. (4) Gepner. Centrallbl. f. jinifl. Augenheilk., 1892. D"^ A. DARIER. — IMPORTANCE DE LA THÉRAPEUTIQUE LOCALE 987 le traitement s'est montré efficace , alors que tous les autres traite- ments généraux avaient échoué, avaient épuisé leur effet (i). Dans les choriorétinites centrales ou choroïdites récentes et i)as trop xîi'ofondes, on peut étudier, pour ainsi dire mathématiquement, l'action vraiment remarqual^le des injections sous-conjonctivales. En effet, les échelles métriques nous permettent de contrôler exacte- ment l'amélioration progressive de l'acuité visuelle; d'un autre côté l'ophtalmoscope nous montre avec précision comment évolue et rétrograde la lésion anatomique. Nous sommes heureux d'avoir été les premiers à établir ce fait d'une manière indiscutable, car nous l'avions prévu théoriquement. Physiologiquement, la chose est facilement explicable, par la com- munication intime qui existe entre les espaces Ijnnphatiqiies choroï- diens et les espaces soiis-conj onctivaiix ou ténpniens. Nous croyons qu'il doit en être de même pour les maladies du nerf optique ; mais des considérations anatomiques , qu'il serait trop long d'exposer ici, nous préviennent qu'on ne peut espérer la resti- tution ad integnim quand un certain nombre de fibres nerveuses ont été atrophiées. On ne x^ourra donc attendre un effet thérapeu- tique certain, que dans les cas où les fibres optiques ont été seule- ment comprimées ou parésiées momentanément; en un mot on ne pourra espérer une guérison que dans les cas oii le processus inflammatoire infectieux sera de date récente, ou alors, quand il aura terminé son évolution progressive sans avoir entraîné l'atro- phie complète... Nos recherches sur ce sujet ont été très longues et très pénibles. Après une série de succès que nous avons obtenus dans certains cas de névrites rétrobull^aires infectieuses, nous avons recherché ce que l'on j)ourrait obtenir dans les différentes atrophies des nerfs^ optiques. Dans les atrophies grises, tabétiques, les résultats ont été nuls^ Dans les atrophies blanches, suites d'anciens processus inflamma- toires, quelquefois il nous est arrivé d'améliorer légèrement la vision mais seulement dans une très faible mesure. Dans les névrites optiques, symptomatiques d'une affection intra-crânienne grave, l'effet des injections sous-conjonctivales de sublimé a été parfois très (i) Darier. Des injections sous-conjonctivales dans les maladies du nerf optique. Soc. d'Opht. de Paris, 1892. (2) Grossmann (de Buda-Pest) rapporte deux cas de névrite rétrobulbaire guéris par- les injections sous-conjonctivales de sublimé. Allfc. Med. Zcit., 1894- (3) Darier. Névrite rétrobulbaire a frigore. La Clinique Ophtalmologique, avril 1896.. 988 SCIENCES MÉDICALES manifeste mais presque toujom's éphémère. Il eût fallu pouvoir sup- primer la cause du mal pour en détruire l'effet. Pour terminer la série des indications des injections sous-conjonc- tivales. il nous reste à parler des maladies de l'iris et du corps ciliaire. Nous avons vu que. dans les infections ectoc^ènes traumatiques, caractérisées par de lïritis, de Tirido-cyclite et même de l'iricho- roïdite, les effets obtenus par la thérapeutique locale étaient supé- rieurs à tout ce qu'avait pu nous offrir jusqu'à ce jour la théra- peutique générale de ces affections. Nous n'oserions pas dire qu'il en sera de même dans toutes les Infections d'origine endogène, relevant d'une diathèse ou plutôt d'une maladie infectieuse générale, telle que la syphilis, la tubercu- lose, le rhumatisme, etc., ou d'une infection répercutée ou métasta- tique comme dans la blennorragie, dans certaines métrites, etc.. Nos études sur ce point délicat sont loin d'être terminées; mais nous pouvons déjà affirmer que, dans nombre de ces affections, les injections sous-conjonctivales, si elles ne constituent pas, à elles seules, un traitement complet, sont le plus souvent un auxiliaire j)récieux de la thérapeutique générale. Dans les diverses manifestations de la syi)hilis sur l'iris et le corps ciliaire, on serait en droit d'attendre des merveilles des injections sous-conjonctivales de sublimé. Plusieurs iritis gommeuses, que nous avons traitées par ce moyen, ont guéri avec une grande rapidité ; il en a été de même de certaines iridochoroïdites anciennes ayant résisté à un traitement général longtemps prolongé ; mais poui' l'iritis syphilitique aiguë franche et violente, nous devons reconnaître que le traitement général est de première indication. Nous croyons , du reste , qu'il en est de même pour tous les pro- cessus inflammatoires aigus violents de l'iritis et du corps ciliaire, quelle que soit leur étiologie : syphilitique rhumatismale ou autre. Une observation clinique prolongée des faits de ce genre venant contrecarrer nos premières idées nous a amené à la conclusion que les injections sous-conjonctivales étaient contre-indiquées, momen- tanément du moins toutes les fois qu'une stase circulatoire rendait difficile ou impossible l'absorption du médicament par les voies lymphatiques obstruées. Le cyanure de mercure injecté sous la con- jonctive jouerait alors le rôle de corps irritant plus nuisible qu'utile, causant de vives douleurs ou un chémosis intense. Cette importante contre-indication une fois établie, nous avons pu D'' H. COMBES. — TRAITEMENT ÉLECTRIQUE d' AFFECTIONS UTÉRINES 989 fréquemment constater qu'en suivant avec soin les indications cli- niques et en choisissant le moment opportun , on pouvait , non seu- lement éviter les ennuis ci-dessus , mais encore obtenir des résultats très favorables. * * # M. le professeur Bouchard, au dernier congrès du Caire, a fait une communication du plus grand intérêt sur Timportance de la thé- rapeutique locale, même dans les maladies générales, quand elles ont une tendance à se localiser. Il a obtenu, par des injections périarticulaires de salicylate de soude , des guérisons remarquables de rhumatisme localisés à une ou plusieurs articulations. Par des injections locales d'iodure de potassium, il est également parvenu à faire disparaître des gommes volumineuses ayant résisté au traite- ment général. Depuis, la thérapeutique locale a fait de nouveaux adeptes et nombreux sont ceux qui en comprennent l'importance. La photo-thérapie et la radio-thérapie nous montrent enfin toute la puissance des appHcations thérapeutiques locales. M. le D-^ H. COMBES TRAITEMENT ÉLECTRIQUE DE CERTAINES AFFECTIONS UTÉRINES DANS LA CLIENTÈLE RURALE L6iS.i4:6i5.84| — Séance du 8 août — Nous n'avons pas la prétention, dans les quelques notes que nous avons l'honneur de soumettre au Congrès d'Angers, de présenter une médication nouvelle. Nous voulons simplement faire connaître les résultats que nous avons obtenus , depuis quinze ans , en traitant certaines affections utérines par l'électricité. Encore très peu connue , sinon complètement ignorée d'un grand nombre de j)raticiens, cette méthode, mise en lumière par les travaux de Tripier, d'Apostoli et de leurs élèves, a tout d'abord soulevé des polémiques nombreuses. Mais les découvertes récentes de ces der- nières années, la connaissance des lois qui régissent l'électricité, de <)90 SCIENCES MEDICALES son mode d'action sur l'organisme, son dosage mathématique, ont fait l'objet d'études nombreuses et c'est avec des indications nettes et j)récises que Ton peut désormais employer cet agent dont l'efïica- cité surpasse souvent les médications les plus actives. Aujourd'hui, on peut admettre comme démontré que l'électricité est appelée à rendre des services signalés en gynécologie; qu'elle peut guérir là ou d'autres traitements ont échoué. Mais, ce qui est moins démontré et ce qui se dégage des observations que nous avons recueillies, c'est que tout médecin, moyennant quelques connaissances faciles à acquérir, peut employer cette médication pour le plus grand Inen de ses malades. Après avoir décrit le matériel instrumental et le mode opératoire, nous passerons en revue les affections dans lesquelles nous avons pu intervenir avec le plus de succès. Pour chacune de ces affections, nous noterons les indications thérapeutiques spéciales et nous pro- duirons les observations à l'appui. OUTILLAGE ÉLECTRIQUE Les spécialistes emploient actuellement l'électricité sous les formes les plus variées : Courants continus-faradiques ; galvano-faradiques ; sinusoïdaux- ondulatoires de haute fréquence et statiques induits. L'action de ces derniers a surtout été mise en évidence par les remarquables travaux du professeur Leduc , de Nantes. Nous n'utilisons, actuellement, que les deux iDremiers. Nous obte- nons le courant continu à l'aide de trente éléments Leclanché, grand modèle. Ces éléments, renfermés dans un meuble à étagères et placés de façon à pouvoir être surveillés suivant le besoin, sont reliés à un collecteur à cadi'an permettant de prendre les éléments un à un sans déterminer aucune secousse appréciable. Un galvanomètre apériodique, marquant i5o milliampères, est fixé verticalement sur la tablette de façon à permettre de lire facilement les indications de l'aiguille à une certaine distance. Sur le même plan se trouve un renverseur de courant et un combinateur de Watteville, ce dernier instrument permettant d'uti- liser concurremment ou successivement le courant continu et le cou- rant induit. Pour ce dernier, nous nous servions principalement de l'appareil à chariot, de Gaiffe, à deux bobines induites. Les électrodes à employer sont de divers modèles et de calibres variés. Ce sont, pour le courant continu : les électrodes en charbon D'' H. COMBES. — TRAITEMENT ELECTRIQUE D AFFECTIONS UTERINES 99I OU en platine, celles en cuivre ou en argent. Pour l'induit, les électrodes unipolaires ou bipolaires, enfin les électrodes vaginales, qui varient suivant les inventeurs. Il est important d'avoir un assortiment assez complet de ces instru- ments pour les utiliser suivant le besoin. Nous confectionnons nous-mème les plaques destinées à fermer le circuit sur l'abdomen, et pour cela nous nous servons de feuilles d'étain très malléables, d'une surface de 200 centimètres carrés environ, que nous garnissons d'un côté d'une soixantaine de doubles de tarlatane. Tel est le matériel, très simple en résumé et qui peut suffire dans la plupart des cas. TECHNIQUE OPÉRATOIRE Le Manuel opératoire n'offre pas de difficultés sérieuses et exige seulement un peu de dextérité et des précautions antiseptiques aussi parfaites que possible. La patiente étant coucbée sur le fauteuil, les jambes très écartées, le spéculum est introduit et, à l'aide d'une longue pince à pansements munie d'un tampon d'ouate imbibé d'une solution de sublimé, nous pratiquons un nettoyage aussi complet que possible du col et du fond de la cavité vaginale. S'il existe un écoulement tant soit peu abondant, nous n'hésitons pas à faire un grand lavage. Ceci fait, l'électrode, préalablement bouillie et stérilisée dans une solution antiseptique, est introduite doucement et sans effort jusqu'au fond de la cavité utérine. Là est le côté délicat de la manœuvre. Souvent l'instrument pénètre d'emblée et sans arrêt; mais, si le canal est tortueux ou rétréci, l'on n'arrive qu'après des tâtonnements qui ne doivent être ni brusques ni douloureux. Nous ne nous contentons presque jamais d'une application pure- ment vaginale et, à l'encontre de l'opinion de certains auteurs, nous sommes convaincu du peu de résultat de ce procédé , qui doit être réservé pour certains cas de névralgie pelvienne. La durée des applications varie de cinq à quinze minutes pour le courant induit. Elle est de cinq minutes environ pour le courant continu. La fréquence et l'intensité varient suivant les cas et aussi suivant la susceptibilité des malades. Nous la notons pour chaque cas parti- culier. gga SCIENCES MÉDICALES INDICATIONS THERAPEUTIQUES Les principales afTections dans lesquelles nous avons obtenu les résultats les plus marqués sont : 1° La Dysménorrhée idiopatliique ; 2° La subinvolution , suite de couches, compliquée ou non de métrite et de périmétrite ; 3° Les Fil3romes. A. — Dj'sménovrhée idiopathiqiie. Dans la Dysménorrhée idiopathique, le courant faradique intra- utérin fait disparaître les crises douloureuses après deux ou trois séances pratiquées tous les mois quelques jours avant l'époque pré- sumée des règles. Nous nous servons de l'Électrode bi-polaire d'Ai^ostoli, afin de mieux localiser le courant sur l'utérus. Chez les filles vierges, chez lesquelles cet accident se rencontre si fréquemment, nous n'emi)loyons pas le spéculum. Nous nous contentons , suivant la méthode de Tri- pier, d'introduire l'Électrode bien stérilisée et enduite de vaseline boriquée en nous servant de l'index gauche comme conducteur. Obs. I. — M"^ B., i8 ans, très chlorotique. Règles irréguUèi-es et très douloureuses, la forçant de rester au lit pendant un ou deux jours. Les ferrugineux admmistrés depuis longtemps n'ont produit aucmi résultat. Nous la voyons pour la première fois le 3 septembre 1896 et ordonnons quatre capsules d'Apiol par jour, les deux premiers jours des règles. Résultat nul. Le 10 octobre, faradisation utérine de dix minutes, avec la bobine à fil simple. La bobme est engainée progressivement , jusqu'à ce que la malade sente bien les contractions sans éprouver de douleur. Les règles s'établissent le i4 et durent quatre jours : pendant les premiers vingt- quatre heures, quelques coliques très supportables. Le i""" et le 8 novembre, nouvelles séances. Les règles reviennent le 12, prescpie sans souffrance. Les deux mois suivants, même traitement et aux mêmes dates : M"^ B. n'a plus souffert dej^uis. Elle est mariée et a eu deux accouche- ments normaux. Obs. II. — M""® G., tempérament lymphatique à l'excès. Réglée à 16 ans, a toujours souffert au moment de ses époques. Les ferrugineux, l'apiol n'ont pu atténuer ses souffrances. Mariée au mois de mai 1898, voit ses règles devenir de plus en plus douloureuses. Le 25 juiUet et le 5 août , faradisation utérine pratiquée comme précé- D'' H. COMBES. — TRAITEMENT ÉLECTRIQUE d' AFFECTIONS UTÉRINES QqS demment. Les régies apparaissent le 8 et pour la première fois ne pro- voquent aucune colique. Nouvelles séances les 5 et lo septembre , le i^'' et lé 28 octobre, le 4 et le 12 novembre, le 5 et le 29 décembre. Les époques viemient toujours régulièrement et sans souffi'ance aucune. Dix séances ont suflî pour amener une guérison complète. Dans certains cas de dysménorrhée, l'écoulement menstruel est presque nul ; nous employons alors le courant continu , utilisant le pôle négatif comme pôle utérin. Obs. in. — M"^ i)., 19 ans, fortement constituée, soignée depuis 18 mois pour des accidents nerveux dus à une vive contrariété. Perver- sion du goût, névralgies, idées mélancoliques qui la poussent à ne plus voir persomie et à s'enfermer dans une chambre obscure. Les règles sont complètement supprimée depuis 6 mois. Traitement. — Ablutions froides le matin au lever. Bains statiques quotidiens suivis de la révulsion cutanée à l'aide de l'excitateur à boule. Vingt séances du 10 au 3o décembre 1900. L'état général s'améliore rapi- dement, mais les règles n'apparaissent toujours pas. Le 3o décembre, voltaïsation utérine négative. Intensité : 3o m. a. ; durée : cinq minutes, suivie d'une faradisation de dix minutes avec la bobine à iil lin, d'une intensité aussi forte que la malade peut la supj^orter. Un léger écoule- ment sanguin suit cette ajiplication. Le 27 janvier suivant, même traitement : le sang coule avec assez d'abondance pendant une journée. Les deux mois suivants : deux nouvelles applications suffisent pour ramener définitivement les règ-les. Nous avons revu M"^ B. il y a quelques semaines seulement (5 août 1903) sa santé s'est constamment maintenue. B. — Siihinvoliition utérine, suite de couches. La subinvolution utérine se rencontre fréquemment à la campagne, chez les femmes qui se lèvent trop tôt. L'utérus reste volumineux et très douloureux à la pression. Les culs-de-sac sont souvent effacés et œdémateux. Au toucher le doigt ne rencontre plus la souplesse caractéristique de l'état normal. Si, comme cela arrive fréquemment, aucune précaution antiseptique n'est prise, la métrite s'établit sous la forme subaiguë ou chronique. Les femmes reprennent leurs occupations, tout en continuant à souf- frir; mais leur état général ne tarde pas à devenir mauvais : appa- raissent alors des réflexes d'origine utérine : gastralgies, vomisse- ments, état nerveux plus ou moins accentué, etc. Dans la grande majorité des cas, l'électricité produit d'excellents résultats, mais il convient de la réserver pour les états subaigus ou chroniques, la période inflammatoire du début contre-indiquant for- mellement toute intervention de ce genre. 63* Oû^ SCIENCES MÉDICALES La faradisation doit être tout d'abord employée pour calmer la douleur ; le courant continu avec pôle positif intra-utérin complétera le traitement. Obs. IV. — M™* B., 32 ans, depuis son dernier accouchement remon- tant à cinq ans, a toujours souffert des reins et du bas-ventre. Les règles, assez régulières , sont précédées et suivies de coliques violentes. Malgré un embonpoint plutôt exagéré , état général mauvais. Neurasthénie. La malade ne fait plus anciui travail depuis quinze mois , elle est profondé- ment triste et ne prend aucun intérêt à son intérieur. A l'examen, utérus volumineux mais sans bosselures , très sensible au toucher. Le cathétérisme accuse neuf centimètres. Ulcération du col de la grandeur d'une pièce de deux francs. Leucorrhée abondante. Les culs- de-sacs sont effacés, l'antérieur principalement est le siège d'im engorge- ment douloureux. Diagnostic. — Méti-ite et périmétrite antérieure. Du 6 au lo septembre 1901, nous pratiquons, tous les jours, u^ne faradisation vitérine pendant dix minutes. Pôle positif à l'intérieur, négatif sur l'abdomen. La douleur s'atténue au bout de quelques jours. Le courant continu est alors substitué à l'induit et des applications sont faites tous les deux jours jusqu'au 3 octobre, époque à laquelle la venue des règles fait suspendre le traitement. Du 24 au 3o décembre, six nouvelles applications du courant voltaïque. Primitivement, la malade ne pouvait supporter qu'une intensité de 20 m. a. Dans les dei-nières séances, 40 m. a. étaient facilement tolérés. Sous l'hifluence de ce traitement, les douleurs ne tardent pas à dispa- raître ; les lésions locales se modilîent en même temps | que s'améliore l'état général, et la malade peut reprendre ses occupations. Obs. V. — M"^^ R., 29 ans. Deux enfants dont le dernier a trois ans.- Souffre depuis cette époque et a essayé en vain de nombreux traitements. Douleurs vives dans les reins et le bas-ventre. Etat nerveux des plus accentué. Crises gastralgiques. Vomissements fréquents. Amaigrissement considérable. A l'examen, utérus volumineux, très dur, en antéversion et d'ime sensi- bilité extrême au toucher. Les ovaires paraissent sains, bien que jla pression dans le flanc gauche provoque ime douleur assez vive. Leu- corrhée abondante. Cathétérisme : 8 centimètres. Diagnostic. — Sul)involution et métrite consécutive. Le 17 et4e 20 mai 1899, faradisation abdomino-utérhie et, tous les soii'S, pendant huit jours, introduction d'un ovule belladone. Le 2.5 mai, la sensibilité étant moindre , nous commençons la voltaïsa- tion utérine positive, 'qui sera pratiquée trois fois entre chaque éi)oque menstruelle avec vme intensité variant de 20 à 40 m. a. Une amélioration sensible se produit dès les premières séances. Les vomissements cèdent tout d'abord. Les crises gastralgiques deviennent de moins en moins fréquentes. Seules les douleurs lombaires et l'état, nerveux persistent plus longtemps et le traitement devra être continué pendant dix mois. Guérison complète. D'" H. COMBES. — TRAITEMENT ÉLECTRIQUE d'aFFECTIONS UTÉRINES QoS Au point de vue des suites éloignées, les femmes ainsi traitées lieuvent être divisées en deux catégories : celles chez qui le traite- ment électrique a amené une guérison définitive ; ce sont les jilus nombreuses ; les autres, au contraire, qui , tout en étant très amé- liorées, ont continué à souffrir de temps en temps et ont dû continuer le traitement pendant plusieurs années parfois, bien qu'à intervalles très espacés. C. — Fibromes. Des cas assez nombreux de fibromes que nous avons rencontrés, nous croyons pouvoir tirer cette conclusion: c'est que le traitement électrique échoue généralement chez les personnes jeunes présentant des fibromes hémorragiques à développement rapide. Il doit être réservé aux fibromes à marche lente et principalement chez les femmes qui approchent de la ménopause. Dans ce dernier cas, il fait disparaître les hémorragies et améliore considérablement l'état général. Le traitement devra être continué pendant des mois et par- fois même pendant des années. Obs, VI. — M"^^ D., 43 ans. Fibrome interstitiel de la grosseur d'une tête de fœtus. Gathétérisme 0,08. Hémorrag-ies abondantes durant au moins huit jours. Dyspeptique-névropathe traitée depuis trois ans par la méthode d'ApostoIi. ^^oltaïsation intra-utérine positive avec le rhéophore en charbon. Les six premiers mois , les séances ont lieu deux fois la semaine ; une seule fois les six mois suivants. La seconde année, deux séances par mois ; la troisième une seule tous les deux mois. L'intensité a fréquemment attemt 100 m. a. sans provo- quer de soutTrance trop vive. Les hémorragies ont peu à peu cessé et cela dès les premiers mois du traitement. Les règles sont actuellement normales comme dm'ée et comme quantité ; l'état général est redevenu excellent , bien que le fibrome n'ait ([ue très peu diminué de volume. Obs. VII. — M"^^ G., 34 ans, religieuse, présente depuis un an une para- plégie incomplète attribuée à une alléction de la moelle. Douleurs intolé- rables dans le bas-ventre et les reins. A recours d'une façon réguUère aux mjections de morphine. Règles très abondantes i^endant huit jours. A l'examen : Fibrome gros comme un œuf d'oie, développé aux dépens de la face antérieure et soulevant le cul-de-sac vésico-utérin. Utérus rétroverse. Hystérométrie o m. 09. Le traitement électrique est commencé le 27 août 1892 et continué jusqu'au 16 novembre. Dans cet mtervaUe, nous pratiquons 40 séances, alternant le courant induit et le courant continu. L'intensité n'a jamais dépassé 40 m. a. La malade, qui ne se tenait debout qu'apimyée aux meubles ou soutenue ggÔ SCIENCES MÉDICALES par une personne, a pu marcher seule. La paraplégie disparaît peu à peu et d'une façon définitive. Les douleurs utérines devenant très tolérables, permettent de cesser les injections de morphine. Cessation du traitement le i6 novembre 1892. La malade reprend ses travaux de lingerie. Il V a deux ans, les souffrances abdominales reparaissent très intenses mais la malade , ne pouvant , pour des raisons spéciales , quitter son éta- blissement et reprendre le traitement électrifjue, nous l'adressons au D'^ Brin, qui i)ratiquc l'énucléation abdominale du liljrome et le raccour- cissement des ligaments ronds. La malade guérit parfaitement, son utérus reste en place; elle se livre mamtenant à toutes sortes de travaux, les douleurs utérines et loiidjaii-es ayant complètement cessé. Nous pourrions continuer ces observations et en fournir de très intéressantes ; mais, devant nous limiter, nous espérons avoir prouvé que l'électincité en gynécologie est encore trop peu connue et qu'elle est appelée à rendre les plus grands services aux médecins qui sau- ront l'appliquer. M. le D- Charles BINET-SANGLE Professeur à l'École de Psychologie de Paris EXPÉRIENCES SUR LA TRANSMISSION DIRECTE DE LA PENSÉE [612.821.714.5] — Séance du S août — I TRANSMISSION DES SENSATIONS M... est une femme de 4^ ans environ, courte, trapue, d'apj^arence masculine. Les traits sont prononcés, le teint mat, la physionomie impassible. Elle semble étrangère à ce qui l'entoure et ne veiller que dans cette demi-veille qu'est la veille hystérique. Elle présenterait d'ailleurs divers symptômes d'hystérie. Je n'ai pu l'examiner à ce point de vue. O... est un homme de 35 ans environ, intelligent et nerveux. Dans les premiers jours de mars 1902, j'ai fait, à Angers, avec ces deux sujets, les expériences que je vais rapporter. Elles ont eu lieu de 9 heures à 11 heui'es du soir, dans un salon de 5 m. 20 sur 4 m. ^5, D"" CH. BINET-SANGLÉ. — LA TRANSMISSION DIRECTE DE LA PENSÉE 993 bien éclairé, que j'ai moi-même choisi, et dont je donne le plan ci-dessous, en i^résence du D'-Legludic, directeur de l'École de méde- cine d'Angers, et de six personnes sûres. Chaque assistant est repré- senté sur le p'an par un point (fig. i). FiG. I. — Plan de la pièce où ont eu lieu les expériences M. Le sujet M. — O. Le sujet O. — B.-S. Le D-^ Binet-Sanglé. — L. Le D- Legludic. /. M. J. — aaaaa. Les autres assistants. — A et B. Tables. — P. Piano. — C. Canapé, Je suis à une extrémité du salon, devant la table A avec O... M, est à l'autre extrémité, à une distance de 5 mètres, devant la table B, et suffisam- ment isolée des personnes présentes pour cpi'on ne puisse lui souffler. Elle s'est rapidement endormie sur un ordre de O... Elle a les yeux bandés avec un bandeau non truqué. Entre elle et O..., contre les mm*s du salon, sont rangés les assistants parfaitement silencieux et immobiles. Aucune communication normale, de quelque nature qu'elle soit, n'est possible directement ou mdirectement entre les deux sujets. J'ai devant moi, sur la table A, trois paquets contenant des poudres blanches d'aspect identique : le premier du bioxalate de potasse, le second du bromure d'ammonium, le troisième de la poudre de savon. Je suis le seul dans l'assistance à coiuiaître le contenu de ces paquets, que je puis distinguer à l'aide de signes de moi seuls comms et que j'ai fait préparer le jour même par un pharmacien qui ignore dans quel but et qui n'assiste pas aux expériences. A l'aide d'un rouleau de papier humide, je dépose sur la langue de O... mi peu de bioxalate de potasse. Instantanément, à l'autre extrémité de la pièce, la mimique de M... traduit , avec une exactitude parfaite , la sensation gustative provocpiée chez O... par cette substance. A plusieurs reprises ses joues se creusent, ses lèvres se projettent en avant : «Ça pique, dit-elle, ça serre la langue »; et elle se met à cracher. Je fais la même expérience avec le bromure d'ammonium. A peine O... a-t-il goûté ce sel que la mimifiue de M... traduit la sensation correspou dante. Elle crache encore et déclare : « C'est salé ». 99^ SCIENCES MÉDICALES L'expérience avec la poudre de savon n'est pas moins démonstrative * « C'est fade, dit M...: on dirait de la farine, de l'amidon. » Cette fois encore, la transmission s'est faite instantanément. Je dépose alors sur la langue de M... un peu de bromure d'ammonium et lui demande si elle reconnaît la substance dont elle a senti le goût en premier lieu. Elle me répond affirmativement. Il y a donc errem* de sa part. Je fais la même expérience avec la poudre de savon. Mais cette fois je pose la question de la manière suivante : « Est-ce là la substance dont vous avez senti le goût en premier lieu , en second lieu ou en troisième lieu? » — « C'est la troisième », me répond-elle, ce qui est exact. L'erreur commise pour le bromure d'ammonium peut être attribuée à l'analogie qui existe entre la saveur de cette substance et celle du bioxa- late de potasse. Interprétation. — Il est certain que quelque chose a passé du cerveau de O... ou du mien, au cerveau de M.,. Mais y a-t-il eu réellement transmission de sensations? On peut supposer en effet que O..., en goûtant le bioxalate de potasse par exemple, a pensé : « Ça pique, ça serre la langue » et que les images d'articulation verbale correspondantes à ces mots ont été transmises à M... Mais, dans ce cas, il faudrait admettre que celle-ci a traduit instantanément ces images d'articulation en sensation gustative , car sa mimique ne laissait aucun doute sur l'existence d'une hallucination. Je crois plutôt, et il est plus simple d'admettre qu'il y a eu transmis- sion immédiate de sensations. Une autre question se pose : M... a-t-elle réellement reconnu, en goûtant la poudre de savon, la substance qui avait provoqué chez elle la troisième hallucination gustative? Au moment où je lui demandais , en lui déposant cette poudre sur la langue : « Est-ce là la substance dont vous avez senti le goût en premier lieu, en second lieu ou en troisième lieu? » je savais et je pensais que c'était celle qui avait provoqué la troisième hallucination, et il se peut que j'aie transmis cette pensée au sujet. La question ne peut être résolue. II TRANSMISSION DES IMAGES VISUELLES Première expérience. — M..., toujours endormie et les yeux bandés, est assise devant la table B, face au nmr, qui est dépourvu de glaces, de telle sorte que, même sans bandeau, elle ne pourrait voir ce qui se passe dans la salle. O... est au2)rès de moi, devant la table A. Aucune commu- nication normale n'est possible entre les deux sujets. Je présente au D"" Legludic le premier volume des Poésies com/Aètes de I>^ CH. BINET-SANGLÉ. — LA TRANSMISSION DIRECTE DE LA PENSÉE 999 FiG. 2. Théophile Gautier, édition Charpentier, 1890, et un coupe-papier. II passe le coupe-papier dans le livre, qui s'ouvre à la page 196. Je prie alors M. J..., assis auprès du D'' Legludic, de souligner un mot quelconque sur cette page. Le mot souligné est vautour. Ce mot n'est pas prononcé, même à voix basse, et n'est lu des yeux que par M. J... et par moi. Jesquisse alors sur une feuille de papier un cou et une tête de vautour, et je prie O... de transmettre l'image à M... (Jig- 2). Au bout de quelques secondes, celle-ci dé- clare : « C'est un oiseau », puis : « C'est un drôle d'oiseau, il n'a pas d'ailes »; et enfin : « C'est un vautour. » La plirase : « C'est un drôle d'oiseau, il n'a pas d'ailes », prouve qu'il y a eu transmission de mon croquis, c'est-à-dire d'une image visuelle de O... à M... (C'est du reste, d'après O..., la transmission qu'il opère le plus aisément. Il tra- duit mentalement en images visuelles ce qu'il veut transmettre.) La phrase : « C'est un vau- tour » paraît prouver qu'il y a eu en même temps transmission d'une image d'articulation verbale, car mon crociuis ne suffisait guère à faire reconnaître un vautour. Deuxième expérience. — Je présente au D'' Legludic le deuxième volume des Con- templations de Victor Hugo, édition Hetzel Le livre s'ouvre à la page 253, le mot sou- ligné par M. J... est limace. J'esquisse une limace sur le papier et prie O... de trans- mettre l'image. M... commence par déclarer : « C'est une limande »; puis se reprenant : « Ça rampe, c'est gluant. » (Elle prononce ces mots avec une expression de dégoût.) Puis : « C'est une limace. » La phrase : « C'est une limande », prouve qu'il y a eu transmission d'une image d'articulation verbale, qui d'abord a été mal mterprétée. (Je répète qu'aucune com- munication, surtout par la voix, n'était pos- sible entre O... ou un autre assistant et M... De plus, les assistants placés du côté de M... ne pouvaient voir mon croquis). Les phrases : « Ça rampe , c'est gluant , c'est une limace », prouvent qu'il y a eu transmission d'une série d'images, probable- ment visuelles, se rapportant au mot limace. FiG. 3. FiG. 4. lOOO SCIENCES MEDICALES Troisième expérience. — La troisième expérience est faite avec les mêmes précautions que les précédentes. Le mot souligné est croix. J'exécute le croquis (fig. 3) que je donne ci-contre et prie O... de le faire reproduire par M... Celle-ci trace immédiatement, et coup sur coup, deux croix (fig. 4)- On remarquera qu'elles ne sont pas identiques à la mienne. Mais il faut tenir compte de ce que le sujet a dû les exécuter les yeux bandés. Dans ces trois expériences, il est probable que la transmission n'a pas été faite par O... seul, mais que le D"^ Legludic, M. J... et moi y avons inconsciemment collaboré. III TRANSMISSION DES IMAGES d'aRTICULATION VERBALE Première expérience. — Je présente au D'' Legludic le deuxième volume des Poésies complètes de Théophile Gautier, édition Charpentier, 1890, Le livre s'ouvre à la page 290 et M. J... souligne le vers suivant : Soufïle, bise ! Tombe à flots, pluie ! Je dis à O... de lire mentalement ce vers et de le faire répéter à haute voix par M... Celle-ci commence par prononcer nn certain nombre de syllabes commençant par S. Elle a des soubresauts, des éclats de voix indiquant l'efTort et elle ne parvient pas tout d'abord à prononcer le premier mot du vers. O... m'invite alors à le lire mentalement en même temps que lui : il a remarqué que la transmission se faisait plus aisément quand on se mettait à deux pour la faire. Nous nous y applicjuons. M... finit par dire : Souflle, et enfin Souflle , bise ! Elle ne va pas plus loin. Deuxième expérience. — Le D"" Legludic ouvre le même volume à la page 197, et M. J... souligne le vers suivant : Le Dieu ne viendra pas. L'Église est renversée. Après un tâtomiement moins long que dans la première expérience, M... prononce ces deux mots : Le Dieu puis brusquement, d'un seul jet : Le Dieu ne viendra pas. EUe n'achève pas le A'ers. i D"" CH. BINET-SANGLE. — LA TRANSMISSION DIRECTE DE LA PENSEE lOOI IV TRANSMISSION DE PENSÉES DIVERSES Première expérience. — Désirant savoir ce qu'il pouvait y avoir de vrai dans les phénomènes dits de double-vue, M. J... avait écrit l'avant- veille à un de ses amis de Bordeaux d'exécuter, au jour et à l'heure où les expériences devaient avoir lieu, c'est-à-dire à lo h- i/a du sou-, un acte quelconque et de lui écrire ensuite ce qu'il avait fait. Il est 10 heures 1/2. M. J... exprime le désir de savoir ce que fait en ce moment môme un de ses amis habitant Bordeaux. Il ne donne ni nom ni adresse. O... ordomie à M... de se transporter dans cette ville et de nous dire ce qu'elle voit. Je reproduis textuellement ses paroles : « Je vois un monsieur grand et brun, qui a l'air d'un journaliste. Il ne se croit pas rien (sic). Il est au café avec un monsieur blond, ils sortent et marchent très vite. Le monsieur brun quitte le monsieur blond et continue sa route vers la rue Porte-Dijeaux (il est à remartiuer que le sujet n'est jamais allé à Bordeaux). Il entre dans une grande mai- son. En bas il y a mie salle très éclairée. C'est un journal. Dans cette salle, il y a des dames et des jeunes lilles qui causent. Le monsieur ressort et revient vers le théâtre. Là, il s'arrête à causer. Je ne le vois plus. » M. J... demande alors à M... de revenir devant le journal et de lui dire ce qu'il y a en face, de l'autre côté de la rue. En i)osaut cette question, M. J... pensait à un magasin de coiffure. M... répond qu'elle voit mi magasin fermé. M. J... la prie de regarder à l'intérieur. Elle y voit, dit- elle, des antiquités. Or, chose remarquable, il y a un magasm d'antiquités à côté du magasm de coilfure. M. J... prie le sujet d'essayer de retrouver le monsieur brun dont elle a perdu la trace : « Il est, dit-elle, sur une grande place avec la persomie qui l'accompagnait tout à l'heure. Il la quitte et entre dans un café dont la façade est cmtrée et où l'on fait de la musique (il s'agit, selon M. J..., du Café anglais dans les allées de Tourny). Il va au téléphone, parle et s'en va. Il revient vers la rue Samte-Calherine et la rue Porte-Dijeaux et rentre au journal. Il monte au premier étage. Il parle très fort ; il est en colère. Il passe dans le bureau de transmission des dépèches et entre dans une pièce sur la porte de laquelle est écrit le mot Secrétariat, et où il y a une table couverte de papiers. Il lit des notes. Une lui fait plaisir ; il est content. Il reste là jusqu'à minuit, car il a beaucoup à travailler. » (Il est un peu plus de 10 h. 1/2 au moment où M... prononce cette der- nière phrase.) Le surlendemain, M. J... recevait une lettre de Bordeaux. Son ami n'était pas sorti de chez lui ce soir-là. Il n'avait donc pas exécuté les actes que M.... lui prêtait. Mais, dans le récit précédent, tout ce qui a trait au caractère et à la profession de celte persomie ainsi qu'à la description des lieux est rigoureusement exact. De plus , l'ensemble des actes prêtés à l'ami de M. J... constitue sa vie normale aux heures indiquées. 1002 SCIENCES MEDICALES Il semble résulter de cette expérience que M. J... a transmis à M... toute une série d'images ou d'idées, les unes conscientes, les autres subconscientes, se rapportant à la personne en question. Deuxième expérience. — Je demande à M... de me dire ce que fait à cette heure même mi de mes amis dont je donne le nom et l'adi'esse. O... ordonne au sujet de se transporter à l'adresse indiquée. Elle nous dit qu'elle passe |sous une grande porte cochcre et qu'elle voit un mon- sieur et une dame. Le monsieur s'occupe de recherches scientifiques et fréquente des savants. Je déclare que le sujet fait fausse route. M... se reprend alors et prononce rapidement les phrases suivantes, cpie je reproduis presque textuellement : « C'est joli ici. Il y a des meubles de cuir, des tableaux aux murs, un grand tableau incliné comme ça (elle fait le geste) sur mi chevalet. Oh ! ce monsieur, il a un mauvais caractère! Il n'est pas commode. Est-il grincheux! Il aime beaucoup la peinture. Il fréquente des architectes, des artistes. » — « Que fait-il en ce moment?» lui dis-je. — « Il est couché dans sa chambre. Il lit un livre à couverture jaime, des chefs-d'œuvre. 11 y a un grand tableau au mur. Le lit est dans le fond. Il l'a fait changer de place , parce qu'il s'est enrhume et qu'il était gêné par l'air et la lumière. » — « A quel étage se trouve sa chambre? » — « Au premier. » Tout ce qui a trait au caractère de mon ami, à sa profession et à la description de son appartement est exact. Mon ami, un jeune peintre de grand talent, mais certainement inconnu ANr uks lksioxs locales dont lks unes étaient peu « ou i'oint modifiées, parfois mk.me aggravées, tandis (ji:e d'autres résistaient invin- « cible.ment a la .médication maritime. « C'est ainsi que, d'une ])arl , nous voyions rarement s'améliorer, le plus souvent « s'exaspérer les l>lèphorites ehronii/ues et , en général . les maladies des yeux, les érup- « tions d'eczéma simple ou impeligineux, et que, d'autre part, les otorrées sans lésion « osseuse, les caries étendues, etc., restaient indéfiniment stationnaires. » G. LAF ARGUE. — GUÉRISON ET PROPHYLAXIE DE LA TUBERCULOSE IOo5 a s cp s >> ■d o Ci a en s -a o 05 cS O ioo6 SCIENCES MEDICALES a s- o 3 «■ Xi b < G. LAFARGUE. — GUERISON ET PROPHYLAXIE DE LA TUBERCULOSE IOO7 I J ci - -a 3 V tn V 'o a •s 3 ■fi b ^ eo a IOo8 SCIENCES MÉDICALES un établissement bien installé, sous une autre latitude et sui' une autre mer, les effets de ce traitement marin qui, dans le Pas-de- Calais, aboutissait déjà à de si nombreuses et si étonnantes guéri- sons. Je ne redirai pas ici comment je suis parvenu à réaliser, dès 1887- 1888. le plan que j'avais formé en 1886. Cet historique a fait l'objet d'un exposé que j'ai récemment publié en brochure (i). Il me suffira de rappeler que , construit au bord du golfe de Lion , sur la plage des Grandes-Elmes , à i kilomètre de Banyuls, dans un site admirable, entre mer et montagnes, et composé d'une série de grands pavillons contenant ensemble 200 lits, le sanatorium de Banyuls a été cédé par moi en 1888, au nom du département des Pyrénées-Orientales, à l'Œuvre des Hôpitaux marina, alors repré- sentée par son Président, léminent D"^ Jules Bergeron, le regretté secrétaire perpétuel de l'Académie de Médecine qui, après avoir tant contribué à l'éclosion de Berck, avait le premier, dès 1866, pro- voqué la création, sur nos côtes de France , du plus grand nombre possible d'hôpitaux et sanatoriums maritimes. Cette Société, reconnue aujourd'hui d'utilité publique, dirige et administre, depuis cette époque, le Sanatorium de Banyuls, avec autant de compétence que de sollicitude et de succès. Voici en effet , constatés à la fois par des statistiques rigoureuses et par la photographie, les principaux résultats obtenus dans cet éta- blissement au cours de ces quinze années. Comme il était facile de le prévoir, pour les raisons indiquées plus havit, ils dépassent notablement ceux déjà merveilleux de Berck. Je voudrais pouvoir faire passer sous vos yeux le tableau indi- quant les proportions de guérisons et d'améliorations obtenues dans chacune des catégories d'affections traitées à Banyuls. Vous y verriez d'abord que 12737 enfants ou jeunes gens des deux sexes de 2 à 16 ans sont entrés au Sanatorium, de septembre 1888 au 3i décembre 1901, atteints pour la plupart d'affections rachitiques et scrofulo-tubercideuscs des plus graves ou de prédispositions les plus menaçantes à la phtisie pulmonaire et que, sur" 11 89 qui en étaient sortis à cette date, on en comptait yç)8 complètement guéris, 1^4 améliorés, Ii4 repris ou rendus et 53 décédés; soit une proi)orlion de ^3,58 ojo guéris, 16,20 ô/o améliorés et une proportion totale de 8g,y8 0/0 guéris ou très améliorés. L'année 1902, qui n'est pas comprise dans ces chiffres, a donné (i) Naud, éditeur, Paris 1902. G. LAFARGUE. — GUERISON ET PROPHYLAXIE DE LA TUBERCULOSE IOO9 comme la précédente une proportion globale de plus de 90 0/0 , légè- rement supérieure à la moyenne des quatorze premières années. Les enfants de 2 à iG ans qui ont été soumis au traitement marin du Sanatorium de Banyuls, durant cette période de quinze années, se divisent d'abord en deux catégories principales : i'^ Les sujets atteints de rachitisme ou de tuberculose locale le plus souvent très grave ; 2^^ les sujets simplement menacés ou pré- tuberculeux, c'est-à-dire prédisposés, par voie d'hérédité ou autre- ment, à la tul^erculose en général et à la phtisie pulmonaire en par- ticuUer. De ce nombre sont les enfants issus d'alcooliques ou de tuberculeux, les faibles de constitution, les anémiés par surmenage ou par mauvaises conditions hygiéniques, etc. Dans la première catégorie, il y a eu beaucoup de guérisons tout à fait remarquables. Il y en a même eu un certain nombre qui tiennent du miracle, comme celle, obtenue en un an, de la fig. 2 (arthrite tuberculeuse du coude) et celle , obtenue en cinq ans , de la fio-. 3 (arthrites tidierculeuses aux deux poignets et aux deux genoux, état cachectique sans espoir). Mais, pour être moins sensationnelles , celles de la deuxième caté- gorie n'en ont pas moins d'importance. Elles en ont même bien davantage, au point de vue sociologique, parce que, d'une part, elles sont obtenues bien plus rapidement et à bien moindres frais — ce qui permet de soigner et de guérir un beaucoup plus grand nombre de sujets — parce que, d'autre part, au lieu de n'aboutir, sauf excep- tions, qu'à des prolongations d'existence de non-valeurs sociales, consommant sans produire, elles ont pour elTet de sauver de la ma- ladie et de la mort des multitudes d'enfants ou d'adolescents, cons- titués , ceux-là . pour vivre d'une vie normale et susceptibles d'être utiles, loin de leur être à charge, à leurs familles et au pays. Aussi suis-je d'accord avec M. le D' Leroux pour demander à l'Œuvre des Hôpitaux marins de restituer le plus possible à rétablis- sement de Banyuls le caractère de Sanatorium, qu'il avait àl'orio-ine en éliminant ou n'acceptant qu'en nombre très restreint les infirmes et les incurables. Entrons maintenant dans le détail et passons des résultats d'en- semble aux résultats particuliers de chaque groupe d'affections. La proportion des guéi'isons et le temps nécessaire à les obtenir varient beaucoup, suivant la nature et l'ancienneté des maladies. Les unes, comme les arthrites vertébrales , composées de cas très graves, de lésions ou de déformations profondes et déjà anciennes pour la plupart, ne guérissent que lentement et dans des proportions 64* lOIO SCIENCES MEDICALES relativement faibles, quoique très belles encore : 59,46 0/0 de guéri- sons proprement dites, 18,91 0/0 d'améliorations notal)les. Total : 78,37 0/0, aA^ec I an 1/2 à 12 ans, en moyenne, de traitement. D'autres, quoique très graA^es aussi et très invétérées, donnent des résultats encore plus satisfaisants que les précédents , mais avec des durées de traitement également élevées de i à 2 ans en moyenne. Ce sont : les tuberculoses osseuses — 71, 5o 0/0 de guérisons, 21,960/0 d'améliorations, total : 93,46 0/0 — ; le rachitisme — 76,22 0/0 de gué- risons, 21,67 0/0 d'améliorations, total : 97,89 0/0 — ; les scrofulides des muqueuses et de la peau, — 85,26 0/0 de guérisons, 11,57 W^ d'améliorations, total : 96,83 0/0. D'autres enfin, plus aisément modifiables, avec une durée de traitement bien inoindre, de 6 mois à i an, donnent des résultats meilleurs encore. Ce sont : V anémie et le Ij'mphatisuie, — 83,65 0/0 de guérisons, i4,54 0/0 d'améliorations, total ; 98,17 0/0 — ; enfin, /es engorgements ganglionnaires, — 89,65 0/0 de guérisons, io,35 0/0 d'améliorations, total : 100 0/0. Il seml)le, au premier abord, assez surprenant que les engorge- ments ganglionnaires, qui correspondent à un état pathologique généralement plus grave que l'anémie, le lymphatisme et les scrofu- lides, donnent à Banyuls une proportion de guérisons sensiblement supérieure à celles de ces diverses maladies. Mais cette anomalie apparente s'explique précisément par ce fait que, les engorgements ganglionnaires étant réputés plus graves et les modifications qui surviennent, en cours de traitement, étant aussi en général plus faciles à constater, on est moins tenté de reprendre, avant guérison définitive, les sujets qui en sont atteints. Il n'y a eu effectivement, à Banyuls, ni repris ni rendus dans cette catégorie. La durée moyenne du traitement a d'ailleurs été notable- ment plus élevée pour cette affection (391 jours) que pour l'anémie et le lymphatisme (244 jours seulement). En ce qui concerne le rachitisme , d'importantes observations sont à faire. Tous les petits malades de cette catégorie devraient guérir et guériraient complètement, en un temps assez court, à la condition d'êtx^e envoyés au Sanatorium, à l'âge où ils sont aisément guéris- sables, c'est-à-dire entre 2 et 4 ans. Si la proportion des guérisons totales n'est pas plus forte pour les rachitiques — 76,22 0/0, — et si la durée moyenne du traitement est si élevée , la plus élevée de toutes G71 jours — , cela tient à ce que la plupart d'entre eux sont envoyés trop tard au Sanatorium — à 5 ou 6 ans et même au- r G. LAFARGUE. — GUERISON ET PROPHYLAXIE DE LA TUBERCULOSE lOII dessus — , alors qu'ils sont atteints de déformations anciennes et profondes très difficilement modifiables. A Banyuls, comme à Saint-Trojan — le nouveau Sanatorium créé à l'île d'Oléron par l'œuvre des Hôpitaux marins, — existent des services de bébés , spécialement organisés pow les jeunes rachitiqiies de 2 h 4 ans. Chez ceux-là, comme je l'ai dit, point d'insuccès. lisse transforment tous avec une étonnante rapidité. Leur poids, leur taille , leur volume augmentent vite dans des proportions extra- ordinaires. De ces pauvres êtres rabougris, aux membres grêles et tordus , à la poitrine étriquée , à la tête et au ventre énormes , des- tinés à rester toujours difformes et misérables, la mer a bientôt fait des enfants redressés, vigoureux et normaux, capables de garder leur rang, sans infériorité ni défaillance, dans l'àpre lutte pour la vie. Dans cette catégorie d'affections — le rachitisme , — comme dans celles de l'anémie, du lympliatisme, des scrofulides et des engorge- ments ganglionnaires, on peut l'affirmer à coup sûr, les proportions de giiérisons complètes atteindraient 100 0/0 ou des chiffres tout voisins de 100 0/0, si les malades étaient, dès le début de leur maladie, dirigés sur le Sanatorium qui leur convient et n'en étaient pas intempestivement retirés avant la fin du traitement. Quant aux sujets atteints de phtisie déclarée ou de tuberculose ouverte, ils ne sont pas admis au Sanatorium de Banvuls, à cause du danger de contagiosité, le traitement marin ayant d'ailleurs surtout pour but et pour effet de prévenir, plutôt que de guérir, cette dangereuse maladie. Tous les ans, les résultats thérapeutiques sont analysés, avec autant de science que de conscience, par M. le D' Ch. Leroux, médecin en chef du Dispensaire Furtado- Heine, secrétaire du Conseil de l'Œuvre des Hôpitaux marins, et font de sa part l'objet d'un substantiel rapport. Tout en constatant l'excellence de ces résultats, le distingué rap- porteur insiste chaque année sur trois points, qu'il considère avec raison comme essentiels : 1° N'envoyer à la mer que les enfants atteints de maladies justi- ciables du traitement marin ; a" Les y envoyer dès le début de l'affection; 3'' Les y laisser jusqu'à complète guérison, et même un peu au- delà. I0I2 SCIENCES MÉDICALES J'ajoute qu'il faudrait une quatrième condition, pour que le traite- ment marin donnât, à Banyuls comme ailleurs, son maximum d'effet utile : c'est que les enfants et jeunes gens sortis guéris du Sanatorium . au lieu d'être replongés tout de suite dans les milieux urbains où leur mal a pris naissance , fussent soigneusement dirigé» vers des professions maritimes ou agricoles. On éviterait ainsi les récidives qui se produisent trop souvent. Pas aussi souvent toutefois qu'on aurait pu le craindre. Une enquête approfondie, à laquelle s'est livré récemment M. le D"" Cli. Leroux et qui a porté sur les plus atteints des anciens pensionnaires de Banyuls (tuberculoses articulaires ou osseuses bien nettes, coxal- gies, mal de Pott, tumeurs blanches diverses, etc.) a établi que y 3, 6 ojo sont restés définitivement guéris; — ce qui constitue une fort belle pro])oi'tion de guérisons définitives. Il convient d'ajouter que plusieurs, parmi ceux qui avaient rechuté^ ont guéri ultérieurement et que très jdcu — 4 o/o — sont morts ^ dans l'espace de dix années. Beaucoup de ces anciens malades, dit le D"^ Leroux, travaillent et gagnent leur vie. Parmi eux, plusieurs fillettes, devenues femmes, sont mariées aujourd'hui et ont des enfants sains et bien portants. Si les quatre conditions que je viens d'énumérer étaient remplies, il n'y aurait pour ainsi dire plus ni insuccès ni récidives au Sanato- rium de Banyuls. jNIais, tels quels, les résultats déjà obtenus, depuis i5 ans, n'en sont pas moins très remarquables et supérieurs, pour nombre d'affec- tions, à ceux qui avaient été constatés jusqu'ici. Non seulement, en effet, les proportions de guérison des maladies soio-nées à Berck et ailleurs, telles qii anémie, Ijnnphatisme , arthrites i>ertéhrales , engorgement s ganglionnaires, rachitisme ^ tuberculose des os, etc, ont été fort élevées, avec des cas très graves, mais en outre —, et c'est un point sur lequel je dois insister de façon particulière, x^^i'cc qu'il est tout à fait caractéristique — . un o-rand nombre d'affections, au traitement desquelles on a dû renoncer à Berck et dans d'autres stations maritimes de la Manche et de l'Océan, ont pu être traitées à Banyuls avec un plein succès. Ce sont, outre certaines bronchites, pleurésies et autres allections des voies respiratoires, les scrofuUdes de lapcau(ec^t'm«, impétigo)^ celles des muqueuses du nez. des oreilles et des yeux (otorrhées, blépharites , kérato- conjonctivites, etc.), lesquelles ont guéri à Banyuls dans la proportion àe pix^s de loo ojo, tandis qu'au témoi- o-nage des savants médecins spéciahstes Bergeron et Cazin et de G. LAFARGUE. — GUÉRISON ET PROPHYLAXIE DE LA TUBERCULOSE I0l3 l'Assistance publique de la Seine elles se seraient plutôt aggravées à Berck et sur bien d'autres plages (i). Ces faits, qu'il importait de signaler et de mettre en lumière, dans l'intérêt des malades, me semblent dus à trois causes principales : 1° Au climat de Banyuls vraiment exceptionnel, où les malades vivent dans un air chaud d'une absolue pureté, qui est à la fois celui de la montagne et celui de la mer et qui , comme l'a fait remarquer le savant D"^ Ludovic Martinet, est « éminemment favorable aux scrofuleux , aux lymphatiques , aux rhumatisants à tous les degrés » ; 2° A cette circonstance qu'au lieu d'être, comme à Berck et dans beaucoup d'autres stations maritimes, une plage à dunes et à sables très fins, dont les poussières , soulevées par les vents ou en suspen- sion dans l'atmosphère, irritent constamment des muqueuses déjà malades, la plage de Banyuls est composée mi-partie de galets, mi- partie de sables moins fins, plus consistants, mieux immergés, et se trouve par suite à l'abri de ce très grave inconvénient ; 3° Enfin, probablement aussi, à ce fait que la Méditerranée con- tient une quantité de principes salins beaucoup plus considérable que les autres mers, — 4^ »i*- 7^5 par litre. — tandis que l'Océan n'en ren- ferme que 38 gr. 727, même sur les points où il est le plus salé, et la Manche moins encore, 32 gr. 65^ seulement. Quoi qu'il en soit des causes, les faits sont là (2). (i) Le Bi-glcment du scrdcc intérieur de VhôpUal de Berck du 3o juin 1869 dispose en «ffet , dans son article 5, que : « Ne peuvent être admis à Tliôpital de Berclv les scrofu- leux atteints de kérato-conjonetii'ite aiguë ou clironique, de hlcpharite ciliairc, d'otorrhée, d'eczéma iinpétigineux aigu ou clironique et d'impétigo rodens. » En présence des échecs persistants constatés à cet ég-ard dans cette station mari- time, on avait d'abord cru pouvoir considérer ces afTections comme non justiciables du traitement marin; mais on n'avait pas tardé à soupçonner que ce devaient être plutôt des contre-indications locales, et l'Assistance publique avait elle-même pris soin d'ac- compagner ces exclusions des réflexions suivantes, insérées eu note au bas du règle- ment cle 1869 : « Les kérato-conjonctivites et les I)léphariles comptent parmi les manifestations les plus <( fréquentes de la diathèse scrofuleuse, et l'on serait d'autant plus fondé à s'étonner « de les voir exclues, qu'il semble résulter de faits observés dans quelques hôpitaux « maritimes installés sur les bords de l'Adriatique, que les ophtalmies scroluleuses y « sont très heureusement modifiées; mais S ans d'expérience ont appris qu'à Berck, au « contraire, les ophtalmies sont plutôt aggrawes qu'améliorées. On ne saurait expliquer <( des résultats aussi contradictoires que par une différence probable dans la nature <( des plages : falaises et galets d'un côté, dunes de l'autre; c'est-à-dire, dans ce clernier « cas, qui est celui de Berck, atmosphère presque constamment chargée de sable fin sou- « Ici'é par les iwits de mer. « Même observation i)Our l'olorrhée simple que pour les kérato-conjonctivites et les « blépharites. « Jusqu'à ce jour, les observations recueillies à Berck n'ont pas plaidé en faveur du « traitement maritime appliqué aux scrofulides de la peau , t>énignes ou malignes , Xt'lles « que Veczéma impétigineux et l'impétigo rodens; il semble même qu'elles aient été par- •« fois exagérées, soit par l'atmosphère maritime, soit plutôt par les sables qu'elle tient en « suspen.'iion. » Règlement du service intérieur de l'hôpilal de Berck. p. 4 <"t 5. (2) 11 existe, à vrai dire, à Banyuls, quelques contre-indications très restreintes, que je tiens à signaler aussi, en toute impartialité et bonne foi , dans l'intérêt des malades et de la vérité scientifique... à raison peut-être de la sécheresse de son atmosphère, ce 10l4 SCIENCES MÉDICALES S'il guérit merveilleusement, — comme on vient de le voir et comme en témoignent les j)hotographies prises à l'entrée et à la sortie , — les tuberculoses locales , même les plus graves , ainsi que les cas de rachitisme traités dès le début — entre 2 et 4 ans — , le traitement marin à Banyuls est plus efficace encore en ce qui con- cerne la prophjda.xie de la tuberculose proprement dite. La photo- graphie, qui rend d'une manière si frappante à nos yeux les guéri- sons de plaies et les redressements de membres déformés, est, il est vrai, impuissante à révéler complètement les transformations internes du grand nombre des pré tuberculeux, de ceux précisément qui retu'ent le meilleur profit du traitement marin. Mais nos statistiques y suppléent, en montrant que c'est précisé- ment dans cette catégorie de sanatoriés qu'on arrive aux plus beaux résultats : de 84 à go ojo de guérisons et de 10 à i5 ojo d'amé- liorations notables, qui, sans les retraits prématurés, deviendraient vite des guérisons complètes et définitives ; ce qui élèverait à 100 ajo le pourcentage de celles-ci. Comment, en effet, un agent thérapeutique, ou, pour mieux dire, hygiénique d'une telle puissance, qui produit de véritables résur- rections, comme celles cp'attestent les xihotographies ci-jointes, prises au hasard entre bien d'autres, rénovant des constitutions à ce point délabrées et refaisant des organismes déjà aux trois quarts détruits par la tuberculose, ne sutfirait-il pas à fortifier, k conso- lider, à mettre en état de résister victorieusement au bacille des constitutions simxîlement délicates et menacées ? C'est, d'ailleurs, ce que les faits démontrent de la façon la plus irrécusable. climat, malgré sa douceur relative, ne paraît pas convenir aux phtisiques à consti- tution excitable, à réaction fébrile, ni aux hémoplysiques, ni, d'une manière générale, aux phtisiques arrivés à la troisième période de leur maladie. Mais, les phtisiques n'étant point admis au Sanatorium de Banyuls, la direction de cet établissement n'a guère à s'en préoccuper. Ces contre-indications ne semblent d'ailleurs pas être particulières à Banyuls. D"" E. QUIXTARD. — UREOMETRIE CLINIQUE M. le D' E. QUINTARD à Angers ioi5 URÈOMËTRIE CUiNIQUE [612.461. 17] i — Séance du 10 août — J'appelle ui-éométrie clinique un procédé permettant le dosage de l'urée au lit du malade d'une façon aussi rapide que précise. Ce produit excrémentitiel, cendre du foyer qu'est notre organisme, varie nécessairement suivant l'activité de nos combustions. Un adulte, en bonne santé, en fabrique normalement de 20 à 25 grammes par litre. Dans l'état de maladie, toutes les fois que la température augmente, la production de l'urée s'accroît. C'est ce qu'on observe dans les affections aiguës accompagnées de fièvre , dans la pneumo- nie, la pleurésie, le rhumatisme articulaire, la fièvre typhoïde, etc. Dans les affections chroniques, où l'activité physiologique décline journellement, le taux de l'urée s'abaisse proportionnellement jus- qu'aux dernières limites, présage d'une fin prochaine. Sans que cela soit une dérogation à la règle, certaines affections se comportent , au regard de l'urée, d'une façon spéciale. Ainsi, dans l'épilepsie, tous les excréta urinaires sont augmentés après l'attaque, même quand l'attaque est une épilepsie partielle symptomatique ; au contraire, ils sont diminués après les attaques d'hystérie qui ralentissent la nutri- tion, même lorsqu'il s'agit d'une attaque convulsive réduite. De là un moyen précieux de diagnostic ditierentiel. Par ailleurs, chez les diabétiques, l'azoturie, résultat d'une désassimilation exagérée, atteint parfois le chiffre décourageant de 100 à i5o grammes d'urée en vingt-quatre heures! Dans les néphrites profondes, l'explosion des accidents ultimes est ordinairement précédée d'un abaissement de l'm^ée, indice qu'il est bon de connaître. Je n'insisterai donc pas sur l'intérêt considérable que présente, pour le clinicien soucieux de s'éclairer, la recherche du taux de l'urée. Depuis longtemps, les chimistes se sont mis à l'œuvre, afin de doter la science d'un appareil permettant d'obtenir un résultat précis. Aucun des nombreux appareils existants à ce jour, et je n'entends pas en critiquer la valeur, car luréomètre d'Yvon, pour I0l6 SCIENCES MÉEMCALES ne citer que celui-là, est aussi exact que possible, n'ont pu cependant déterminer le médecin à pratiquer d'une façon courante au lit du malade la recherche de l'urée; aucun d'eux, en effet, n'est clinique, c'est-à-dire simple, précis et rapide. Le praticien est resté désarmé. Le tube d'Esbach répondrait peut-être à ses besoins journaliers, si, avec une grande habitude des manipulations, il n'exigeait pas, malgré son apparente simplicité, l'emploi d'accessoires variés, tels que : cuve à eau, pipette graduée, pouce de caoutchouc, etc. Il est, de plus, dangereux, car, lorsqu'on élève le tube retourné à la hau- teur des yeux, pour se rendre compte de la réaction, on risque d'être aveuglé par un jet d'hypobromite, ce qui faillit m'arriver. Brouillé avec l'uréomètre d'Esbach, je résolus d'en fabriquer un de ma façon et, pour ne pas échanger un cheval borgne contre un aveugle, je m'appliquai à le rendre aussi simple, aussi pi'écis et, surtout, aussi expéditif que possible. Un bon dosage , i^ar décomposition de l'urée en ses éléments , doit satisfaire à deux exigences : dégagement de l'azote autant que faire se peut; mesure exacte du volume gazeux. Grâce aux travaux de Knop, d'Hûfner et d'Yvon, on possède dans l'hypobromite de soude un réactif qui dégage, à froid, d'une solution d'urée, 92 0/0 du chiffre théorique de l'azote. C'est un des meilleurs rendements qu'on ait obtenus. Aussi est-ce une solution de ce réactif que j'emj)loie. Pas plus que les autres, cette solution ne se conserve longtemps, alors même qu'elle est placée dans un endroit frais et obscur, car rhyi)o- bromite. [)ar absorption d'oxygène, se transforme assez rapidement en bromate alcalin. Il ne faut donc en préparer que de petites quan- tités à la fois. En ce qui concerne rap[)areil proprement dit, après quelques tâtonnements je m'arrêtai au dispositif suivant, qui présente le grand avantage de pouvoir être improvisé : Dans le col d'un flacon en verre, de volume quelconque, je fixe un obturateur de caoutchouc percé d'un trou central et, à travers ce trou, j'introduis à frottement doux, jusqu'au fond du vase, un tube de verre de quarante centi- mètres environ de longueur. Un point. C'est tout ! On a déjà compris que la solution d'hypobromite introduite dans le flacon, refoulée de bas en haut au moment du dégagement de l'azote, devra monter dans le tube à une hauteur correspondant au volume de gaz obtenu. Mais il importait , pour arriver à ce résultat d'une façon utile, de trouver le moyen de mettre le réactif et lurine en ])résence, sans favoriser la moindre déperdition d'azote. Or, l'efl'ervescence est tellement ra^nde que l'introduction de lurine dans lappareil ouvert. D"" E. QUINTARD. — UREOMETRIE CLINIQUE IOI7 si prompte qu'en soit la fermeture, est une faute. Pour résoudre le problème, j'eus l'inspiration de me servir de la seringue de Pravaz, qui non seulement me permettait d'opérer eflîcacement en vase clos à travers l'obturateur de caoutchouc , mais encore , du même coup , me dosait exactement le centimètre cube d'urine sur lequel je comp- tais agir. Mon appareil était trouvé ! Un mot maintenant sur la manière de procéder pour réussir un dosage d'urée avec ce dispositif. On remplit, à moitié, de solution d'hypobromite, le flacon, que l'on bouche avec l'obturateur, à travers lequel on fait glisser le tube jusqu'à affleurement du fond du vase. On fait monter la solution , en enfonçant plus ou moins le bouchon, au niveau de la première graduation du tube divisé en centimètres cubes et on pousse doucement l'injection à travers l'obturateur : je dis doucement, car il est nécessaire que l'eflervescence se produise à la surface de la solution pour qu'aucune bulle de gaz ne soit entraînée avec les couches inférieures refoulées. On agitera légère- ment pour terminer la réaction et, dès ce moment, on pourra lire le volume d'azote dégagé, car il est représenté dans le tube, par une quantité correspondante de solution déplacée, dont on aura soin de défalquer un centimètre cube, en raison de l'injection d'urine faite dans l'appareil. Pour avoir la teneur en urée par litre, sachant qu'un gramme d'urée produit environ 35o centimètres cubes d'azote, on multipliera par 1000 le volume de gaz obtenu et on divisera par 35o. Mais je m'empresse d'ajouter qu'avec une formule qui consiste à multiplier par 2,00 le volume d'azote dégagé on trouvera plus rapidement un produit plus exact. Voici pourquoi : Le procédé par l'hypobromite est moins un procédé de dosage de l'urée que des matières azotées de l'urine. De plus, au lieu de 3^0, chilVre théorique de l'azote, on n'obtient qu'un rendement variant autour de 35o centimètres pour un gramme d'urée. En outre, il faudrait tenir compte de la tempé- rature, de la pression barométrique et de celle exercée j)ar la colonne d'hypobromite sur le volume gazeux , quoique cependant cette der- nière soit négligeable si l'on a pris soin de graduer le tube préalable- ment en injectant avec la seringue de Pravaz autant de cylindrées d'air qu'on veut obtenir de divisions en centimètres cubes. Or. après avoir calculé la valeur approchée de ces diverses causes d'erreur, je crois pouvoir, à l'exenq^le d'Yvon, les compenser de façon que chaque centimètre cube d'azote (étant entendu que j'opère sur un centimètre cube d'urine) représente 2 gr. 5o d'urée par litre. J'ai sérieusement contrôlé, au moyen de solutions titrées d'urée et lOlS SCIE-VCES MÉDICALES par des expériences comparatives avec un appareil de laboratoire éprouvé, les l'ésultats fournis par mon uréomètre ; je puis assurer qu'ils sont aussi exacts que rapides. J'ose donc espérer qu'un a^^pareil qui permet de doser l'urée en quelques secondes et qui à des qualités sérieuses de j)récision joint l'avantage de pouvoir être improvisé, sera, pour la clinique, une bonne acquisition. M. le D' QUINTARD à Angers LE PAIN BROMURE ET DÈCHLORURÈ DANS LE TRAITEMENT DE L'ÉPILEPSIE ET DES DIVERSES AFFECTIONS NERVEUSES [fii6.853:6i5.582.2j — Séance du lo août — En novembre 1899, MM. Richet et Toulouse proposaient à l'Aca- démie des Sciences de combiner le traitement de l'Épilepsie, par les bromures alcalins, avec une alimentation aussi réduite que possible en chlorures. Le raisonnement qui les avait induits à cette conception thérapeutique était le suivant : L'action d'une substance médicamen- teuse sur la cellule organique doit être d'autant plus intense que cette cellule aura plus d'avidité pour cette substance. Or, cette avidité sera d'autant plus grande, pour les alcalins thérapeutiques par exemple, qu'elle n'aura pu s'exercer préalablement sur d'autres alca- lins alimentaires. C'est pourquoi, en déchlorurant le régime d'un épileptique , on aura des chances pour le voir devenir plus sensible à l'action du bromure. Cette vue de l'esprit était d'autant plus l'éali- sable que des expériences ont démontré que le chlore se substitue physiologiquement au brome et vice-versa. dans notre organisme. D'autre part, il semblait d'autant moins périlleux de diminuer chez un malade l'apport des chlorures alimentaires, que certaines peu- plades africaines ignorent l'usage du sel; que les naturels des îles Fidgi, en Océanie, ont pour le sel une telle aversion qu'ils vont jusqu'à faire dessaler le poisson de mer avant de le manger; et cependant, les uns et les autres n'en sont pas moins vigoui*eux et D"" E. QUIXTARD, — LE PAIX BROMURE ET DECHLORURE IO19 sains. Du reste, le résultat des expériences entreprises ne tarda pas à rassurer les auteurs de cette conception. L'un d'eux. Toulouse, dans la Revue de Psychiatine de janvier 1900. fournit bientôt les résultats très satisfaisants obtenus chez vingt sujets soumis au traitement nouveau , dont les accès avaient diminué de 92 0/0 ! A partir de cet encourageant succès, on expérimenta de tous côtés la méthode. A la Société de Médecine d'Angers, M. le D"" Baruk, médecin-adjoint de l'Asile de Sainte-Gemmes, l'ayant appliquée à ses épileptiques, trou- vait, dans plusieurs cas, que le résultat dépassait toutes les espé- rances. Je dois à la vérité d'ajouter que, dans des interventions ulté- rieures, les résultats n'ont pas été aussi brillants que les premiers essais pouvaient le faire espérer. Mais il est désormais admis que, si le traitement bromure, aidé par l'hypochloruration, n'est pas sou- verain — hélas ! combien en connaissons-nous? — il donne des résul- tats bien supérieurs aux autres traitements. Ce mode d'emploi du bromure peut donc être considéré comme une brillante et définitive conquête de l'art de guérir. Il restait à trouver cependant la formule agréable aux malades. Ceux-ci, en effet, dans les différents essais que j'ai dû faire, se montraient d'au- tant plus friands du sel dont on les privait , qu'ils étaient plus tou- chés par la névrose ! Telle l'appétence des alcooliques pour les liqueurs fortes quand les circonstances leur font une loi de s'en pri- ver. Suivant Toulouse , qui a serré de près la question , la ration ali- mentaire normale, en dehors du sel surajouté pour la satisfaction de notre palais ou le besoin de notre économie, contiendrait encore deux grammes de chlorure sodique. On n'a donc pas à craindre les effets d'une suppression radicale , dans un organisme habitué à l'im- prégnation de cet excitant. Aussi, le régime lacté mixte sera une excellente façon d'amorcer le traitement par l'hypochluration. Malheureusement, il arrive fréquemment que le malade, un peu déséquilibré, se décourage et refuse de le continuer, quelquefois, au moment où les bons effets commencent à s'en faire sentir. Bien supérieur donc serait un régime dont le malade ne se fatiguerait jamais et qu'à la rigueur il pourrait subir à son insu. Cette formule thérapeutique, je crois l'avoir trouvée pour l'épilepsie et les diverses affections nerveuses, par la substitution du bromure au chlorure de sodium dans le pain de froment ordinaire. Une difficulté de fabrica- tion se présentait ; elle a été tournée en mettant en œuvre la levure à la place du levain et, sans grand apprentissage, par un tour de main auquel il faut être initié, on obtient un pain doré, léger, un peu lade encore peut être pour les délicats, mais suffisamment savou- 1020 SCIENCES MEDICALES reux pour que, souvent, je sois parvenu à en faire manger sans que le palais de l'intéressé s'en aperçût. Les résultats que j'ai obtenus, grâce à l'emploi de ce pain, sont tout à fait concordants avec les résultats annoncés par les initiateurs de la nouvelle méthode et ne peuvent qu'encourager les médecins à l'employer, non seulement dans le traitement du mal comitial, mais encore dans celui de toutes les aftections nerveuses tributaires du bromure qui est, entre tous, l'agent modérateur du système nerveux le plus maniable. M. le D' FOVEAU DE COURMELLES à Paris INFLUENCE DES DIVERSES LUMIÈRES SUR LES MICROBES PATHOGÈNES f(ii0.o22i.2;4] — Séance du lo août — Désireux de constater s'il y a parallélisme entre le pouvoir photo- génique des sources lumineuses et leur pouvoir bactéricide , et après une étude comparative du premier pouvoir, communiquée par nous à l'Institut, le 21 juillet 1902, et au Congrès de Monlauban, en août suivant, nous avons soumis à l'action de diverses sources lumineuses, chaudes, froides ou refroidies, le micrococcus prodigiosus. Même sur ce bacille, ainsi que dès 1897, nous le faisions remarquer dans notre Traité de radiographie, les résultats sont contradictoires. Voici rapidement ceux des divers auteurs et notamment ceux de rinstitut photothérapique de Copenhague , en ce qui concerne l'infi- niment petit qui nous a servi expérimentalement : Le micro-organisme, dont la résistance a été essayée, était le « prodigiosus ». L'âge de la culture joue un certain rùle : les cul- tures jeunes sont beaucoup moins résistantes que les vieilles et il suffit de quelques heures de différence dans l'âge pour voir la résis- tance augmenter au point de nécessiter un temps d'exposition cinq à six fois plus long. La température a également son importance et les germes sont plus vites tués à 4^° qu'à 3o°, ce qui pourra avoir un résultat prati(|ue dans le traitement photothérapique des affections D'^ FOVEAU DE COURMELLES. — LES MICROBES PATHOGÈNES I02I cutanées. En résumé, le résultat d'un grand nombre d'expériences a été qu'avec une lumière d'une force connue et dans les conditions spéciales indiquées, les germes de « prodigiosus » d'une culture âgée de trois heures sont tués en soixante secondes. Si la culture est àgfée de dix à quatorze heures, le temps nécessaire est de trois à cinq minutes. A 45°, la stéi-ilisation est obtenue en trente secondes. Voici maintenant les résultats de nos expériences faites avec le D'^ P. Barlerin, bactériologiste. (Institut de France, 27 juillet 1903) (i) : Première expérience, le 3 juillet. 3 tubes ensemencés avec du micrococcus prodigiosus (date de la cul- ture le 2 juillet), culture jeune. Tube I. — Exposé 35 minutes à 5o cent, de lumière bleue, lAo. Pas de résultat, ni arrêt, ni retard. Tube 2. — Exposé 3o minutes à l'arc refroidi; radiateur Foveau-Noé, 5 ampères, retard. TuIjc 3. — Exposé 40 mmutes à 35 cent, de la lampe Nernst, 1/2 A; ni arrêt, ni retard. (Cette lampe à l'air hbre est plus photogénique que la lumière bleue.) Deuxième expérience, le 6 juillet. 2 tubes (micrococcus prodigiosus), culture jeime, de la veille. Tu]>e I. — 3o minutes à 20 cent, lumière bleue, température 3i°, retard. Tube 2. — 3o minutes à 7 cent, de lampe Nernst, température 37^, rien. Troisième expérience, le 11 juillet. I tube de prodigiosus, exposé 45 mimites à 10 cent, de lumière bleue, température 42", culture âgée, datant du 6 juillet, arrêt. Quatrième expérience, le 17 juillet. I tuloe prodigiosus, culture jeune, exposé 45 minutes à 10 cent, de lumière bleue, température 43°, pas d'arrêt, mais retard de 4 heures dans le développement. I tube exposé 45 minutes à i5 cent, de l'ampoule de Crookes (rayons X), pas de retard, ni d'arrêt. Cinquième expérience, le 23 juillet. I tube prodigiosus, culture âgée du 17 juillet, exposé 45 mùmtes à 10 cent, de lumière bleue, température 42", pas d'arrêt, mais retard de 3 heures. Nos conclusions (Barlerin et Foveau de Courmelles) pour le pro- dio:iosus sont donc : La lumière bleue donne un retard, l'arc aussi (celui-ci dans des expériences antérieures à plus fort ampérage a donné l'arrêt, c'est la source la plus puissante). (i) Les cultures étant placées dans des tubes de verre, il y avait bcaucoui) de rayons cnimiqucs absorbés, mais les résultats restent comparables. 1022 SCIENCES MEDICALES La lampe Nernst et les rayons X, non (ces deux sources lumineuses sont cependant très photogéniques). Le retard est plus accentué quand l'action de la lumière est combinée avec la chaleur; peut-être aussi avec làge des cultures et, dans ce cas, en contradiction avec les précédents observateurs. Ces recherches seront reprises avec des microbes pathogènes, dont on vérifiera, après traitement photogénique, la variation de nocivité par l'injec- tion aux animaux. Le parallélisme du pouvoir photogénique et du j^ouvoir bactéri- cide ne semble donc pas exister. La question de composition des verres déjà signalée par Marat en 1782. lors de ses expériences de lumière dans le vide barométrique, reprise par Radiguet en 1897, joue certainement un grand rôle, la perméabilité aux rayons chi- miques étant fortement influencée par cette composition. Le D"^ Kayser, de Vienne, après Minine, de Saint-Pétersbourg, a obtenu des noircissements photographiques et des neutralisations de culture à travers des dos de patients à des distances de 5 mètres pour une durée de 3o minutes. Ses lampes étant de 5o bougies, comme les nôtres, mais de construction spéciale non publiée, la divergence de nos résultats et des siens doit tenir à la composition de ses lampes. Voici encore, à titre documentaire, quelques récentes expériences de divers auteurs sur la question, à commencer par le professeur Finsen, de Copenhague. En répétant maintes fois l'expérience, Finsen a pu conclure que la lumière solaire concentrée était quinze fois plus active que l'autre et que l'arc voltaïque l'était plus encore. L'ultra-violet est trois cent soixante fois plus microbicide. La.bactéridie charbonneuse est détruite au bout de vingt-cinq à trente heures d'exposition au soleil; le bacille de Koch, celui de Lœffler perdent de leur virulence. Si on inocule à des cobayes le micobe de la tuberculose et qu'on en expose une partie à la lumière (soleil, arc, rayons X), les autres res- tant dans l'obscurité, les premiei's guérissent, les autres succombent. Le choléra et la lièvre typho'ide se comportent inversement , en cela d'accord avec les données cliniques, M. J. Rudis-Jicincky a fait diverses expériences bactéricides avec les ravons X. Des crachats de tuberculeux furent enfermés dans des vessies de poisson et on les exposa ensuite aux rayons X. On trouva, en oénéral, que l'action des rayons tuait le bacille de la tuberculose quand celui-ci se trouvait dans un milieu acide. On fit, après, une autre série d'expériences sur les lapins et les cobayes, qu'on exposait D' FOVEAU DE COURMELLES. — LES MICROBES PATHOGÈNES 1023 aux rayons. Dans le 4© o/o des animaux ainsi traités et tués après deux années, l'autopsie démontra que la cure (dans le véritable sens du mot) du processus tuljerculeux s'était produite. L'auteur com- pléta ses expériences en traitant avec les rayons X vingt cas de tuberculose pulmonaire. Entre ceux-ci, un seul malade succomba, dans l'espace de l'année, à cause de tuberculose des intestins; un autre se tua; quatre ne présentèrent d'amélioration de quelque sorte, pendant que tous les autres se portaient relativement bien à la date du rapport. Ces expériences ne sont pas concluantes, comme d'autres que nous aurons à envisager tout à l'heure. M. Bang a repris ses recherches sur l'influence, notamment de la lumière sur les microbes , de la lumière spéciale de sa lampe à arc de fer (1901). Mon radiateur chimique, le premier en date (1900) et le seul qvù se prête à toutes les transfoi-mations , m'a permis égale- ment de mettre un charbon positif à arc de fer, sans circulation d'eau; la température au point où doit être placé le malade est de 42° et brûle par conséquent; l'action microbienne n'est que super- ficielle et actuellement tous les observateurs , inventeurs ou utilisa- teurs des lampes photothérapiques, à électrodes de fer, sont d'accord (Bang, Chatin, Jansen). Ces j^hénomènes de destruction, à la « sur- face des cultures » sont rapides et nettes, mais profondément, il ne se produit plus rien; aussi faut-il rejeter l'emploi de ces appareils pour la cure des tuberculoses même peu profondes , alors qu'au con- traire l'arc et certaines lampes bleues agissent dans l'intimité des tissus (Minine, Kayser...). Selon les expériences de Kattenbracker, la lumière électi'ique incandescente pourrait, du reste, empêcher le développement des cultures bactériques, et ce, malgré le peu de rayons chimiques qu'elle donne, même si son filament est à l'air libre, comme dans la lampe Nernst, que j'ai essayée; les animaux, inoculés par la pustule maligne et avec la diphtérie, ne succombent pas lorsqu'ils sont tenus dans une caisse illuminée à l'intérieur par des lampes électriques, chacune de la force de quinze chandelles normales. M. Drigalski, cependant, a trouvé que les animaux inoculés avec le B. anthracis mouraient après 4^ à 60 hernies, lorsqu'on faisait tomber sur eux chaque jour, pendant une heure, les rayons électriques, et après 5o à 60 heures, si cette application durait une demi-heure par jour. Les animaux de contrôle mouraient seulement après 70 à ^6 heures. Les animaux infectés présentaient, après deux à quatre minutes, ime forte transpiration; selon lui, c'est l'épuisement provoqué par la transpiration profuse qui amène la mort. I024 SCIENCES MEDICALES Ces expériences, d'aspects parfois contradictoires, se complètent des expériences de pénétration de la lumière dans l'organisme, à travers la main, dans les cavités... (Onimus, Solucka, Gebhard, Pflûger, Casenave. Ratier, Jurie, Fonssagrives, Aubinois...) Ainsi le D"^ Dobrjanski, directeur de l'Institut Phototliérapique, aurait obtenu avec le radiateur chimique Foveau-Noé , à travers le crâne à l'autopsie, et à travers l'abdomen, chez une vivante, avec du papier positif, des photographies du cerveau et du vagin. Il m'a envoyé des photographies dont une des photogravures est jointe à la pré- sente communication. La pénétration profonde de la lumière étant FiG. I. — Cerveau photograpliié à travers le tomponal (papier sensible {glissé entre l'os et le cerveau chez le cadavre). D' Dobrjanski avec le radiateur Foveau démontrée d'une part, et de l'autre l'action bactéricide, l'action thé- rapeutique de la lumière dans les alTections microbiennnes en découle forcément. Et l'électricité — depuis que jai transformé complètement la technique et l'outillage de Finsen — étant un mode simple et peu coûteux de production de la lumière thérapeutique, je complète cette communication par un autre mémoire sur la pho- tothéraphie. présenté à la section d'Electricité Médicale. D'^ EM. BRUMPT. — STATISTIQUE MEDICALE AFRICAINE 1025 M. le D'^ Emile BRUMPT Préparateur de parasitolog-ie à la Faculté de Médecine de Paris STATISTIQUE MÉDICALE FAITE DANS UN VOYAGE A TRAVERS L'AFRIQUE TROPICALE (NOTE PRÉLIMINAIRE) [<'itj(t):)J — Séance du ii août — Dans le voyage que nous avons accompli en qualité de médecin et de naturaliste de la Mission du Bourg de Bozas, nous avons eu l'occasion d'observer un grand nombre de races africaines. Nous allons passer rapidement en revue , dans ces notes , les maladies les plus fréquemment rencontrées et leur inlluence sur les différents peuples. Notre escorte se composait de Swahilis de Zanzibar, de Soudanais, de Somalis de Djibouti, enfin d'Abyssins et de Gallas; nous avons pu les étudier pendant longtemps. D'autre part, en parcourant en différents sens les pays Somalis, Gallas, Aljyssins, Cliankallas et Nilotiques, puis de l'Est à l'Ouest tout le Congo belge, de Doufilé, sui" le Nil, jusqu'à l'embouchure du grand fleuve, nous avons pu étudier la pathologie des races qui les habitent. Nous allons passer en revue les différentes maladies observées, «n suivant l'ordre habituellement suivi dans les ouvrages de patho- logie exotique. Paludisme. — Le paludisme se contracte dans toutes les régions d'Afrique où se trouvent des indigènes impaludés et où peuvent vivre les moustiques du genre Anophèles. Dans les régions désertes et malgré l'abondance de ces insectes, le paludisme ne se contracte pas. Nous n'avons jamais trouvé d'Anophèles au delà de 2000 mètres d'altitude; c'est à cette altitude que l'on cesse également de con- tracter les fièvres. Tous les indigènes de l'Afrique, sans exception, contractent les différents parasites du paludisme; ils sont sujets tout comme les Européens aux formes tierce, quarte, maligne, etc.; seulement, tandis que certaines races (Nilotiques, Bantous) résistent très bien à la maladie, d'autres races (Éthiopiens, Gallas, Somalis) y résistent 65* 1026 SCIENCES MÉDICALES fort mal et ne peuvent s'acclimater que très diflicilement clans les régions malsaines. Au Congo, par exemple, et sur les bords du Nil, le paludisme est fréquent chez les enfants et, malgré cela, les lésions cutanées et les hypertrophies de la rate sont rares, la mortalité très faible. Dans le pays somali, au contraire, chez les Djébertis et les Gallas, la mor- talité infantile dans les régions fiévreuses est très grande; presque tous les adultes sont atteints d'hypertrophie de la rate et sont sujets à toutes les complications du paludisme. Dans notre escorte, tous nos Somalis, Gallas et Abyssins ont eu des formes graves de fièvre ; les Soudanais et les Swahilis ont . au contraire , très bien résisté ; mais cela tient probablement à ce fait que les premiers contractaient la fièvre pour la première fois, tandis que les seconds étaient en quelque sorte immvmisés par les attaques qu'ils avaient dû avoir autrefois dans leur pays natal. Dysenterie. — La dysenterie se rencontre sporadiquement par- tout; elle semble liée, comme le paludisme, à la présence de l'homme ; nous avons toujours observé des cas, chez nos hommes, dès que nous arrivions dans des régions peux)lées. Cette maladie est commune au Congo, où malheureusement beaucoup d'européens lui payent tribut, ainsi qu'aux abcès du foie qui la compliquent fréquemment. Nous avons observé à l'autopsie un abcès du foie gros comme une tête d'enfant chez un nègre atteint de dysenterie chronique et de bilhar- ziose. On doit toujours faire l'examen microscopique des selles, pour distino'uer cette aftection des maladies produites par la Bilharzie ou l'Uncinaire, ou encore par diverses intoxications alimentaires pro- duites r)ar le Sorgho ou le Manioc. Ces diverses affections peuvent d'ailleurs servir de x^orte d'entrée à la dysenterie vraie, car, si nous admettons que celle-ci est produite par un Amibe spécifique qui se nourrit de globules rouges, les évacuations sanguines de toutes natures peuvent favoriser son développement et augmenter sa viru- lence, s'il se trouve à l'état latent dans l'organisme, comme cer- tains auteurs le prétendent. Goitre. — Nous avons rencontré le goitre kystique dans les hautes réo-ions montagneuses de l'Abyssinie et de ses contreforts méridionaux. Nous n'en avons pas vu au Congo; cependant le jy Zerbini en a observé un cas à Bazoko, pendant un séjour de trois ans qu'il a fait dans cette région. Les gens atteints de goitre b D"^ EM. BRUMPT. — STATISTIQUE MEDICALE AFRICAINE IO27 vivent en Abyssinie dans des montagnes d'origine volcanique et l)oivent leau des nombreuses sources qui ruissellent dans ces régions. Tuberculose. — Les nègres, qui deviennent si facilement tuber- culeux dans nos climats, semblent peu sujets à la tuberculose dans les régions tropicales, même dans les froides régions d' Abyssinie. Au point de vue clinique, nous avons observé deux ou trois cas, chez des Somalis et Abvssins, de bronchite ancienne localisée aux som- mets des poumons, qui auraient été considérés comme de la bacillose en Europe. L'examen des crachats ou des inoculations n'a malheu- reusement pu être fait. Les affections scrofuleuses sont par contre très répanclues, surtout en Abyssinie et dans les régions somalies pauvres. Pneumonie. — Cette maladie est très fréquente chez les Noirs; elle évolue avec une rapidité extraordinaire et se termine très fré- quemment par la mort. Nous l'avons observée quelquefois aussi comme complication de diverses infections intestinales. Elle m'a semblé plus fréquente au Congo qu'en AlDyssinie, où le climat est rude, mais, où les indigènes prennent plus de précautions hygié- niques. Rougeole ? — Il existe en Abyssinie une maladie curieuse nommée Couffig-ne par les indigènes ; certains prétendent la contracter d'une maladie similaire du bœuf. Elle présente certaines analogies avec la rougeole mais semble s'en écarter par la fréquence des accidents herpétiques buccaux. C'est une maladie bénigne. Variole. — Cette maladie frappe, sous forme d'épidémies plus ou moins meurtrières, suivant les cas, presque toutes les régions. Les Abvssins connaissent la variolisation. Maladies cutanées. Gale. — Cette maladie se rencontre sporadi- ([uement dans toute rAfric[ue. C'est en Abyssinie que nous l'avons rencontrée le plus souvent ; elle se guérit facilement par les frictions à la pommade soufrée. Chez les individus sales, elle est souvent accompagnée de lésions eczémateuses. Dans certaines régions de savanes, les indigènes sont atteints d'affections papuleuses prurigineuses produites par des plantes. Nous n'avons pu déterminer par quelles plantes ces lésions étaient pro- duites. La guérison s'obtient rapidement par des onctions grasses. 1028 SCIENCES MÉDICALES Craw-Craw. — Nous avons rencontré cette aftection pour la première fois, d'une façon bien nette, aux abords du Nil. Elle abonde partout dans la région congolaise. Chez les indigènes, on dirait une gale invétérée croûteuse, mais les sièges, l'élection, ne sont pas les mêmes. C'est une sorte de pyodermite qui se transmet par le grattage. Nous n'avons jamais trouvé dans les petites pustules les filaires qu'y ont décrit certains auteurs. Comme les plaies qui se produisent par le grattage se guérissent difficilement, elles servent quelquefois d'entrée aux bacilles du phagédénisme ; il en résulte alors des ulcères les uns à bords taillés à pic , les autres bourgeon- nants en voie de guérison. Certains auteurs ont décrit ces ulcéra- tions comme caractéristiques du craw^-craw; il n'en est rien; ce sont simplement des complications accidentelles ; ce sont des ulcères phagédéniques. Nous avons mis en bonne voie de guérison plusieurs cas de craw- ci^aw par des pansements à l'acide picrique en solution à saturation dans l'alcool à 45°. Psoriasis. — Nous avons vu deux cas de psoriasis à grandes plaques chez des indigènes Mobengué, au poste de Bouta (Congo belge). Herpès circiné. — Depuis Djibouti jusqu'au Nil, les Bœufs sont fréquemment atteints d'une Teigne produisant des placards arrondis, grands quelquefois comme la paume de la main. Le champignon qui la produit vit à l'intérieur des poils et non à la surface, comme le font en général les parasites des autres teignes animales. Ce champignon est contracté par l'homme et donne des amas con- centriques comparable à l'herpès circiné de nos j^ays, mais beaucoup moins squameux. Nous avons observé une seule fois à Ibembo, sur l'Itimbu'i (Congo belge), sur la tête d'un enfant indigène, des plaques d'un blanc grisâtre, circulaires, produites par une tondante ressemblant beaucoup à la teigne à petites spores de nos pays. D'après cet entant, la maladie serait assez commune dans la mission où il avait été élevé et où il avait contracté cette affection. Une teigne qui, cliniquement, semble identique à la teigne à grosses spores, de Sabouraud, est très répandue partout depuis la Mer Rouge jusqu'à l'Atlantique. Nous n'avons jamais observé le fa vus, qui est par contre si commun dans l'Afrique septentrionale. I D^' ÉM. BUUMPT. — STATISTIQUE MEDICALE AFRICAINE IO29 Mycétome a GRAINS NOIRS. — Nous avons observé plusieurs cas de cette curieuse alTection dans le pays Somali et au sud du pays Galla-Aroussi. Nons avons eu la lionne fortune de montrer que cette maladie peut se guérir spontanément chez les noirs. Cette guérison spontanée, qui n'avait jamais été observée dans Tlnde, est peut-être due à la facilité plus grande que possède la race noire de faire des tissus de sclérose. Mycétome a grains blancs. — Nous avons observé un seul cas à Robabouta au sud des pays Galla-Aroussi. Cette maladie est pro- duite par un champignon bien différent du précédent et qui se rap- proche beaucoup de celui qui produit Tactinomycose. LÈPRE. — Cette maladie existe partout, mais est assez rare. La forme tuberculeuse est la plus commune. Nous avons été frappé de son peu de contagiosité, étant donnée la promiscuité absolue dans laquelle vivent les indigènes. La lèpre nerveuse est assez commune au Congo. Syphilis. — Tous les Noirs peuvent contracter la syphilis. Cette maladie, rare dans les régions où les gens mènent une vie nomade, est extrêmement répandue dans les autres contrées, surtout en Abyssi- nie et au Congo. D'une façon générale, on peut dire que les nègres supportent mieux la syphilis que les blancs, car, parmi les centaines de cas que nous avons pu observer, nous n'avons vu que très peu de lésions tertiaires. Nous n'avons jamais observé non plus de formes nerveuses tardives. Pian ou Frambœsia. — Cette curieuse maladie tropicale, qui sur tant de points simule la syphilis, est très répandue au Congo et dans le bassin du Nil. Nous ne l'avons jamais observée dans notre voyage avant d'arriver dans le pays Choulli, qui se trouve à environ 3oo kilo- mètres à l'Est du Nil. Nous avons vu un grand nombre de cas de cette affection et, pour notre part, nous croyons qu'un grand nombre d'exostoses, de tor- sions osseuses tardives, d'ulcérations nasales, doivent leur être rattachées, car nous les avons observées dans des cas où la syphilis semblait pouvoir être éliminée. Nous avons cultivé sur manioc et sur patate douce un microcoque que nous n'avons pas réussi à inoculer à l'homme. Cette maladie n'inspire aucune frayeur aux indigènes , qui la considèrent comme devant plus on moins fatalement les atteindre un jour ou l'autre. lO'io SCIENCES MÉDICALES Les pansements à l'acide picrique et l'iodure de potassium pris à l'intérieiir produisent des cures très rapides. Dans certaines régions, cette maladie porte un nom spécial; dans d'autres, plus rares, les indigènes lui donnent le même nom qu'à la syphilis, bien qu'ils les considèrent comme deux maladies diflerentes. Ulcère phagédénique. — L'ulct're phagédénique se rencontre l)artout, mais il est surtout fréquent sur le littoral de la Mer rouge; il se complique fréquemment de Myase ; les larves de mouches se développent très bien en effet dans le j)us qu'il produit. Éléphantiasis. — L'Éléphantiasis des Arabes est disséminé par- tout, mais il est en somme assez rare. Nous l'avons observé au scro- tum, à la vulve et aux jambes. C'est une affection résultant d'une lymphangite chronique. Les Pilaires nocturnes jouent peut-être un rôle important dans sa formation dans certains pays, mais nos obser- vations nous donnent la conviction que leur présence n'est pas indis- pensable. MALADIES D'ORIGINE ALIMENTAIRE Laïhyrisme. — Nous avons rencontré un certain nombre de cas de cette maladie dans la province du Choa (Abyssinie), chez des gens qui se nourrissent trop exclusivement de pois. Cette affection, ainsi que le pois qui la produit , se nomment « Goiya » en Abyssin et enOalla. Elle est incurable. Béribéri. — Nous avons eu l'occasion de voir plusieurs cas de béribéri chez des nègres du Congo. Il m'a été dilTicile de savoir dans les cas que j'ai observés si le début coïncidait avec une alimentation insuffisante ou avariée. Entérite. — Le manioc cru ou trop macéré dans l'eau donne lieu à une intoxication accompagnée de maux de tète assez violents et de selles dysentériques. La maladie cesse rapidement avec une modification du régime alimentaire. Le Sorglio vert donne des symptômes analogues chez les gens qui ne sont pas habitués à le consommer. MALADIES NERA EUSES Hystérie. — L'hystérie convulsive est répandue chez tous les nègres d'Afrique. Nous avons pu faire cesser des crises, rapidement, D"^ ÉM. BRUMPT. — STATISTIQUE MÉDICALE AFRICAINE Io3l ï)ar la compression des ovaires ou des testicules. Nous avons observé en Abyssinie quelques cas d'épilepsie vraie. Atrophie musculaire progressive. — Nous en avons observé trois cas : un dans le pays Somali, un dans le pays Choulli, avant d'arriver au Nil, le troisième dans le moyen Congo. Cette maladie pi'ésente les mêmes symptômes que chez les blancs, elle évolue assez rapidement. Paraplégies. — Nous avons observé, un peu partout, des paraplé- gies d'origines diverses, dues soit à l'alcoolisme, soit au paludisme ou encore au mal de Pott lombaire. Idiotie. — Cette maladie est assez répandue; dans certains cas, l'alcoolisme des parents semble entrer en jeu; mais nous l'avons observée chez des nomades où aucune maladie des ascendants ne semlîlait pouvoir être incriminée. ANIMAUX PARASITES Les maladies produites par les animaux parasites sont fréquentes en Afrique. Nous avons déjà parlé des parasites du paludisme, mais il en existe un grand nombre d'autres. FiLAiRES DU SANG. — Lcs filaircs du sang semblent ne pas exister chez les indigènes Somalis, Gallas, Abyssins et Nilotiques. Nous avons observé les premiers cas en arrivant dans le bassin du Congo. Nous avons trouvé partout la Filaria perstans de Manson et une espèce plus petite; nous avons trouvé également une tilaire de dimensions analogues à la Filaria diiirna Manson , mais s'en sépa- rant par plusieurs caractères anatomiques , ainsi que par son absence de périodicité. Nous avons proposé de désigner cette espèce sous le nom de Filaria Boiirgi, en l'honneur de notre chef de mission (i). Ces diverses Pilaires se rencontrent dans une proportion de 5o à 60 0/0 de la totalité de la population dans certains villages et ne semblent avoir aucune action pathogène. Les gens qui vivent au bord des fleuves sont atteints de petites tumeurs ganglionnaires dans lesquelles vivent des quantités de Fila- ria çoUmlus, mâles et femelles. Les embryons dépourvus de gaine (i) Des éludes ultérieures nous ont permis d'identifier Filaria Bourgi avec la Filaria diurna et de considérer celte dernière comme la forme embryonnaire de la Filaria loa Guyot. (Avril 1904). 1032 SCIENCES MÉDICALES sont déversés dans le système lymphatique et prol)a])lemcnt de là dans le torrent circulatoire. Trypanosomes. — On trouve également dans le sang des parasites plus petits appartenant au groupe des infusoires flagellés. Le Trypanosoma gamhiense Dutton, dont nous avons signalé le troisième cas chez un européen, donne des fièvres irrégulières résis- tant à la quinine ; nous avons émis l'hypothèse que la mouche Tsé-tsé est presque certainement l'agent qui assure la transmission de cette maladie de l'homme malade à l'homme sain. Un autre Trypanosome du sang, que l'on trouve également dans le liquide céphalo-rachidien." le Tiypanosoina Ugandense Cast., est d'aj)rès Castellani, la cause de la maladie du sommeil. Comme pour la maladie précédente, nous avons de solides raisons pour croire que la mouche Tsé-tsé doit être également incriminée dans la trans- mission de cette maladie. Les recherches de Castellani. confirmées bientôt par celles de Bruce , semblent avoir démontré que , dans l'Afrique orientale tout au moins, la maladie du sommeil est causée par un Trypanosome. En attendant que de nouvelles confirmations soient données à cette découverte par des recherches plus étendues en Afrique, nous croyons utile de signaler les relations étroites qui existent entre la distribution de cette maladie et celle de la Glossine. Si nous admettons que cet insecte est l'agent naturel de l'infection, nous pourrons expliquer avec une grande satisfaction toute l'épidémio- logie de la maladie. Nous allons donner en résumé les arguments en faveur de cette hypothèse : 1° La maladie du sommeil se rencontre dans des territoires envahis par la mouche Tsé-tsé ; 2° Partout où cette mouche existe, la maladie peut s'acclimater. La maladie, connue autrefois dans le bas Congo seulement, s'observe maintenant sur le haut fleuve et sur ses aiïluents, en des points où les indigènes ignoraient la maladie il y a quelques années. C'est ainsi qu'elle a remonté le Kassaï. Elle a fait son apparition dans le Manyéma et de là semble s'être répandue dans l'Ouganda où les auteurs précités ont fait leurs recherches ; 3" Dans les régions où cette mouche est absente, la maladie n'a pu s'acclimater. On sait, en effet, que de nombreux cas ont été observés aux Antilles et en divers autres points d'Améric[ue au moment de la traite des noirs. Malgré l'abondance des insectes piqueurs qui vivent D'' ÉM. BRUMPT. — STATISTIQUE MEDICALE AFRICAINE Io3'3 en Amérique (Taons, Simulies, Moustiques, Tiques, etc.), aucun n'a pu assurer la transmission du parasite. Au Congo, tous ces insectes existent également, mais de plus, nous avons la mouche Tsé-tsé; il est donc permis de la mettre en première ligne ; 4° Dans une région donnée, les individus qui vivent sur le bord des rivières ou des fleuves où les Mouches abondent et qui sont, par conséquent, très exposés aux piqûres, sont également très exposés à la maladie, tandis que les gens qui vivent éloignés de la rivière dans la même région sont respectés. Nous avons recueilli des pères de Skeute, au Congo belge, des renseignements très nets à ce sujet. A Banamia, près de Coquilha- A'ille, existe une mission des pères Trappistes, à environ vingt minutes du Congo. Au bord du fleuve vivaient, il y a quelques années, environ 3.ooo pêcheurs Lolo. Actuellement, on pourrait à l^eine en trouver 3oo ; tous les autres ont été décimés par la maladie du sommeil. Tout à côté de la mission, se trouve un village de cultivateurs ; ces indigènes ne vont que rarement au fleuve et boivent l'eau de quelques petites sources. La maladie n'y foit que rarement des victimes. Les exemples de ce genre seraient faciles à multiplier. A M'Pakou, existe une autre mission installée à une cer- taine distance du fleuve , en plein pays endémique ; les enfants de la mission, qui proviennent de villages décimés ne se livrent plus à la pêche , ils s'occupent de culture et vont rarement au fleuve ; la maladie a presque entièrement disparu. Devant des faits aussi nets, il est difllcile de nier les rapports intimes qui semblent exister entre la présence de la mouche Tsé-tsé et l'existence de la maladie. Comme j'ai eu l'occasion de le démontrer, la Glossina j)ond ses embryons vivants sur des matières en putréfaction ou sur la terre riche en humus (i). La larve, qui est volumineuse, semble ne pas avoir besoin de se nourrir pour se transformer en pupe. Deux ou trois jours suflisent pour cette transformation et l'éclosion a lieu au bout de six semaines. En l'absence d'animaux sauvages ou domestiques, la mouche se nourrit sur l'homme, ce qu'elle est obligée de fah^e dans beaucoup de régions du Congo où le bétail manque absolument. Comme elle semble peu s'éloigner du lieu de sa naissance, il sera relativement facile de prendre des mesures prophylactiques contre elle dans le cas où son rôle pathogène pour l'homme viendrait à être vérifié. (i) Blanchako. Correspondance, Bull, de VAcad. de méd., i; mars igaS. Io34 SCIENCES MÉDICALES BiLHARziosE. — On trouve également dans le sang des Nègres, en nomlïre plus ou moins considérable, suivant les cas, des Bilharzies. Ces vers se rencontrent dans la veine cave principalement ; ils lancent, dans le système circulatoii*e, des œufs pourvus d'un éperon, qui occasionnent des troubles intestinaux ou vésicaux graves. Nous en avons trouvé dans trois autopsies faites au Congo. FiLATRE DE Médixe. — Nous avons rencontré ces vers pour la première fois en abordant les régions nilotiques. Dans certains villages, 25 à 3o o/o des individus en sont porteurs. Nous n'en avons pas rencontré de cas dans le bassin du Congo. J'ai réussi à infecter, expérimentalement, des crustacés du genre Cyclops avec des embryons de cette espèce de filaire. Comme certains Cyclops s'in- fectent énormément, tandis que d'autres ne prennent pas de para- sites, je suis porté à croire que l'homme s'infecte en avalant direc- tement ces petits crustacés. Cela permet d'expliquer, en effet, la pluralité des Pilaires qui se développent simultanément chez un même individu qui n'a fait que passer dans une région endémique. Nous avons débarrassé plusieurs individus de leurs Filaires par le procédé d'Emily modifié. Nous injections toujours la solution de sublimé dans le ver lui-même, après avoir maintenu celui-ci au bord de la plaie par une ligature. Parasites intestinaux. — Ces animaux sont communs en Afrique. Le Ver solitaire inerme se rencontre dans le pays Somali et dans toute l'Abyssinie. Presque tous les Abyssins, grands mangeurs de viande crue , en sont affectés ; il en est de même de presque tous les indigènes riverains du lac Rodolphe que nous avons eu l'occasion d'examiner. Au Congo, ce ver est beaucoup plus rare. Les Ascarides sont communs partout et produisent des troubles stomacaux variés qui cèdent rapidement après l'ingestion de quelques doses de santonine. Nous avons décelé la présence de Trichocéphales par l'examen des selles ou dans des autopsies dans une forte majorité d'indigènes. Un parasite beaucoup plus redoutable que les précédents est rUncinaire duodénal, spécialement fréquent au Congo; il y pro- duit une pseudo-dysenterie qui doit servir de porte d'entrée à la véritable dans bien des cas. Les indiaènes se cachectisent et meurent très rapidement si leur nourriture est insufFisante. Dans une autopsie, nous avons trouvé un nouveau parasite de l'homme appartenant au genre Sclérostome. Les formes agames de D'' ÉM. BRUMPT. — STATISTIQUE MÉDICALE AFRICAINE Io35 ce parasite vivent dans des tumeurs de grosseur variable, se trouvant dans la paroi conjonctive du gros intestin. EcTOPARAsiTES. — Lcs ectoparasitcs de lliomme sont en nombre variable, suivant les régions. Les Poux du corps et de la tète sont fréquents partout; nous n'avons jamais rencontré ceux du pubis. Les Puces sont une véritable plaie en Abyssinie, elles sont beaucoup plus rares au Congo ; par contre , la Puce chique y fait son appari- tion et, par les conq)lications qu'elle peut amener, est beaucoup plus à redouter. Nous n'avons pas trouvé de Punaises dans les régions que nous avons traversées; elles sont avantageusement rem- placées par des Ixodes et des Argas de diverses espèces , dont la piqûre ne laisse pas d'être fort désagréable, sinon dangereuse. Les moustiques des genres Culex et Anophèles se rencontrent dans toutes les régions humides; nous n'avons jamais trouvé des Anophèles à une altitude dépassant 2.000 mètres, tandis que les Culex se trouvent même à 3. 000 mètres. Les Taons, les Simulies et les Stomoxes, se rencontrent partout au bord des fleuves et des marais. Les mouches Tsé-tsé se rencontrent dans le pays Somali (Ogaden) ; elles appartiennent à l'espèce Glossina longipalpis Corti. Nous avons trouvé une autre espèce G. palpalis Rob. Des. sur le fleuve Omo et ses affluents voisins du lac Rodolphe, puis au Nil. Depuis le Nil nous l'avons toujours trouvée, bien qu'avec plus ou moins d'abondance, le long des fleuves et des marais jusqu'à Matadi, à l'embouchure du Congo. Tous ces diptères s'attaquent à l'homme et leur rôle pathogène augmente chaque jour. Nos connaissances s'accroissent rapidement au sujet de ces insectes, qui étaient considérés autrefois comme simplement incommodes. Il nous est permis d'espérer que, pour des régions localisées tout au moins, leur destruction partielle par de rigoureuses mesures prophylactiques pourra s'effectuer. 1036 SCIENCES MÉDICALES M. le D' SAQUET à Nantes GYMNASTIQUE OU MASSAGE EN THÉRAPEUTIQUE |6i5-82] — Séance du il août — En Suède, la patrie de la gymnastique médicale, on n'emploie jamais le massage seul; il est toujours accompagné de mouvements libres ou à résistance manuelle. Bailleurs, chez les Suédois, le massage, qui n'était pas avant 1870 dénommé sous une appellation synthétique, est regardé par eux comme une minime partie de la gymnastique médicale, il en est une des parties passives. Il faut s'entendre comme terminologie, car en France on appelle tout massage ; c'est un abus de termes qu'il faut éviter. La gymnas- tique médicale est constituée par les mouvements actifs du sujet. Le massage comprend ceux que le patient reçoit : frictions, vibra- tions, etc. et même, si l'on veut, les mouvements communiqués ou passifs cjue les Suédois classent dans la gymnastique. Ceci posé, quel est le meillem' des deux procédés : gymnastique ou massage? ou bien, lequel donne les meilleurs résultats en France? Nous allons donner le résultat de 12 ans d'expérience sur cette matière. Il faut d'abord faire une distinction suivant les affections que l'on peut traiter. Occupons-nous pour commencer des neurasthéniques et séparons- les en deux groupes classiquement admis actuellement : les neuras- théniques cérébraux ou excités et les neurasthéniques médullaires ou myasthéniques. D'après ce que nous avons observé, les neurasthéniques cérébraux sont moins nombreux que les autres, la proportion est d'environ I sur 10. Il existe un type, moyen, cérébro-médullaire, mais l'ex- périence m'a appris^ qu'il devait être traité comme médullaù'e. Ces derniers , les plus nombreux , comme nous venons de le du'c , supportent très mal l'exercice; quelque soin que l'on mette à le doser, on se trompe longtemps sur la dose exacte, même une fois D"^ SAQUET. — GYMNASTIQUE OU MASSAGE EN THERAPEUTIQUE 1087 prévenu. En effet, rien ne vous avertit généralement que vous avez dépassé le but. Si les exercices sont très doux, courts, le malade ne se sent pas fatigué. Vous croyez voir la guérison approcher, il n'en est rien ; parce que le neurasthénique médullaire ne ressent pas la fatigue comme un normal ; elle ne se manifestera chez lui que par un retard de la guérison. La patience du malade s'épuise et il cesse souvent le traitement. En Suède on est plus patient , parce que c'est un fait admis par tous que la gymnastique est un moyen curatif puissant et l'on ne s'étonne pas de voir l'échéance de la guérison plus ou moins lointaine. Il n'en est pas de même chez nous. Les malades veulent bien croire à la vertu curative de l'exercice, mais ils désirent en voir les effets immédiats ou presque. Si adirés quelques semaines rien ne vient, le traitement est suspendu. C'est que la gymnastique suédoise, qui est constituée par des mou- vements localisés, sans mise en scène frappante, courbature faci- lement même des normaux et d'ordinaire ne donne pas lieu à une réaction de fatigue chez les neurasthéniques médullaires , si on leur a ménagé l'exercice. Cette fatigue n'est pas due à la mauvaise exécution des mouve- ments, car j'ai toujours pris soin de veiller à ce que le patient res- pire librement pendant l'exercice , afin d'éviter de transformer en exercice général ce qui doit être uniquement local, comme les Sué- dois nous l'ont appris , la règle étant celle-ci : tout mouvement pour être local doit être exécuté pendant l'expiration. La courbature ou surmenage , accusé ou non , tient donc bien au mouvement localisé lui-même, qui demande, non seulement un effort musculaire plus ou moins grand , mais encore un effort intellectuel d'attention pour créer un centre devant devenir automatique plus tard, comme les dernières recherches physiologiques l'ont démontré. Au début de ma pratique, j'employais le massage seul; c'est ce qui m'a permis de comparer et de réfléchir. Ayant appris postérieu- rement la gymnastic|ue suédoise, je l'ai utilisée avec le massage, pen- sant obtenir des succès plus rapides. Dans la majorité des cas les résultats ont trompé mon attente et, malgré mon obstination à vouloir adjuger à la gymnastique suédoise un rôle curatif puissant, j'ai dû y renoncer dans la plupart des cas, puisque je voyais la o-ué- rison traîner ou même manquer tout à fait. Est-ce une question de race? Je ne le crois pas. J'ai démontré au Congrès de l'Association Française pour l'avancement des Sciences , à Boulogne, en 1899, qu'il n'en était rien non plus pour le massao-e. lo'JS SCIENCES iMEDICALES C'est certainemont la même chose pour le mouvement. Je me rappelle avoir vu en Suède des patients peu atteints et dont la cure traînait ; je suis persviadé , maintenant cpie je suis mieux informé, qu'ils fai- saient trop d'exercice. Voici des exemples : Un jeune homme de 32 ans, dyspeptique neurasthénique non alité et remuant comme tout le monde , fit pen- dant quarante jours une cure de gymnastique et massage avec un bon ffvmnaste suédois. Ce jeune homme, atteint en outre de consti- pation, ne vit aucune modification de ce côté. Il continua seul à faire de la gymnastique abdominale et autres mouvements indiqués pen- dant six mois. La durée des exercices était dune heure avec inter- valles de repos et il n'éprouvait aucune fatigue. Sa santé générale était assez bonne, à part sa dyspepsie, et il était fier d'avoir gagné deux centimètres de tour de poitrine. Malgré tout, dyspepsie et constipation persistaient. Il vint me trouver. Je pensai que la gymnastique pouvait être un obstacle à la gué- rison et je lui fis cesser tout mouvement médical. Voici quelle fut la suite : la première évacuation spontanée eut lieu au bout de quatre séances de massage et, après vingt autres, ce jeune homme était totalement guéri. La guérison s'est maintenue depuis plusieurs années. La guérison serait peut-être arrivée quand l'entraînement gym- nastique obtenu aurait permis de voir les effets curatifs se mani- fester; on doit voir de ces résultats en Suède mais je n'en ai jamais observé. J'ai essayé nombre de fois les mouvements des muscles abdomi- naux contre la constipation recommandés par les Suédois; je les ai essayés même souvent chez des personnes non neurasthéniques; je n'ai jamais réussi. Quelques praticiens disent pourtant les avoir employés avec succès; c'est possible, mais cela ne m'est jamais arrivé. Ces mêmes mouvements, employés avec le massage, m'ont presque toujours paru retarder la guérison. Aussi je ne les emploie guère que chez les ol)èses et après avoir obtenu auparavant quelques résultats aA'ec le massage. Cependant les exercices sont indispensables et supérieurs au mas- sage, qui n'est qu'un adjuvant dans le traitement de la scoliose. Dans ce cas, c'est la gymnastique manuelle qui est la meilleure. Ni à l'Institut central de Stockholm ni à l'Institut Arvidson, qui donnent seuls l'enseignement complet reconnu par l'Ltat, ni à l'Institut Orthopédique, on ne se sert de machines pour les mouvements à D"" SAQUET. — GYMNASTIQUE OU MASSAGE EN THERAPEUTIQUE Io39 opposition. La main suffît à tout et est un moteur plus intelligent que n'importe quelle machine; elle doit être en certains cas aidée d'appareils d'appui au besoin. (Judet, Rev. d'orthopédie, 1903.) Le principe de la gymnastique suédoise est d'ailleurs de ne point avoir d'appareils. Il est évident que la gymnastique manuelle est plus fatigante pour le médecin que la macliinotliérapie , mais, les résultats étant meilleurs, on doit s'incliner. En gynécologie, la Kinésithérapie, rendue scientifique par Stapi'er, comprend gymnastique et massage. Ces deux méthodes, qui se com- plètent, ne peuvent guère se dissocier, sous peine d'obtenir de moins bons résultats. Ainsi en a-t-il été en Allemagne, en Amérique et en France d'après Stapfer. Il y a quelques exceptions, évidemment, comme à toute règle. Ainsi, par exemple, certaines aménorrhées et encore certaines métrorragies peuvent se traiter au moyen de la seule gymnastique. Les mouvements sont bien entendu différents; je n'ai point à les étudier ici. Pour les affections chirurgicales justiciables de la Idnésithérapie , nous avons trouvé le massage plus avantageux que la gymnastique. Soit un cas de raideur articulaire. Beaucoup de cas de cette affec- tion peuvent être guéris rapidement et par le massage seul. Il est clair que l'on ne laissera pas à la raideur le temps de s'établir si le mal qui la détermine est traité dès le début par le massage. Il y a longtemps que tous les masseurs sont d'accord là-dessus et Fège, de Paris , dans sa thèse sur l'utilité du massage précoce dans les acci- dents, a établi scienfiquement la pratique française. Supposons maintenant une raideur articulaire datant de quelques mois. Si la raideui^ est peu accentuée, le massage suffit généralement à tout et l'articulation se mobilisera facilement d'eUe-même, sans gymnastique spéciale. Nous avons vu bien des fois de fausses ankyloses de ce genre , où les adhérences sont très lâches , guérir sans mouvements provoqués. Si la raideur est plus serrée, il faudra alors employer, avec le massage, la mobilisation forcée plus ou moins progressive, avec ou sans chloroforme , selon la résistance du patient à la douleur et selon la réaction. Quant à la mobilisation lente, progressive, avec mouvements pas- sifs lents, vingt à la minute pendant une heure et plus , elle ne peut être utile que dans le premier cas de raideur légère, et encore le massage la dépasse en rapidité. Si l'articulation est tant soit peu raide, on n'en obtient absolument I040 SCIENCES MÉDICALES rien; du moins je n'en ai jamais rien tiré et cependant je l'ai cherché pendant plusieurs années. Je l'ai recommandé à quelques confrères atteints d'ankylose serrée; j'étais sûr que la méthode était employée et que les malades avaient envie de guérir ; ils n'ont rien obtenu ; la cause me paraît jugée. Les chirurgiens ont à peu près abandonné la mobilisation forcée, parce qu'elle est douloureuse et donne lieu à une réaction inflamma- toire qu'ils ne peuvent calmer que par l'immobilisation qui réan- kylose. Le massage est alors intervenu pour calmer l'inflammation consé- cutive, permettre d'éviter l'immobilisation absolue et, de cette façon, les résultats peuvent être excellents. En résumé, le massage, d'après notre expérience et celle des mas- seurs français : Rizet, Elleaume, Lebàtard, Henry de Navenne, Mervy, Dagron, Championnière , est supérieur aux mouvements spéciaux dans les raideurs articulaires. Et en France depuis 1847, où ce massage a débuté, on n'a employé que lui et on guérissait rapidement les cas curables. On n'avait pas attendu INIezger, qui n'a commencé qu'en 1870, ni les Suédois qui pratiquaient surtout le massage médical. Car il faut rendre justice à chacun, tandis qu'en France, habi- tuellement on goûte exclusivement ce qui est exotique , même si ce n'est pas juste. C'est encore l'École française, par Lucas Championnière, qui a institué la mobilisation et le massage dans les fractures. Ce qu'il y a de phénoménal, c'est de voir nier les faits. Au Congrès international de Moscou 1897, en effet, Zabludowski, professeur de massage à l'Institut physiologique de Berlin, a prétendu qu'avec le massage léger ce n'était j)as possible. Je crois qu'après cela il faut tirer l'é- chelle. Dans les atrophies musculaires, dites d'origine articulaire, que je ne crois pas du tout réflexes , mais bien causées par défaut d'usage , le massage agit en quelques semaines trois à six en moyenne, la o-vmnastique spéciale est moins importante et surtout moins rapide, employée seule. Mais, entendons-nous bien, le massage, dans ce cas, permet duli- liser les mouvements normaux et ce sont eux qui complètent la cure. Un exemple, encore, de l'inconvénient des mouvements spécialisés même peu nombreux , m'a été fourni récemment par un confi-ère de la campagne, nullement neurasthénique, soigné par moi pour une D'^ SAQUET. — TRAITEMENT DU VAGINISME PAR LE MASSAGE lO^l arthrite chronique du genou avec atrophie du quadriceps. Après quelque temps de massage la douleur avait disparu; pour essayer de hâter le traitement, je lui conseillai de faire, sur cette jambe, trois accroupissements j^ar jour. Les fois suivantes ce médecin se plaignit des douleurs qui étaient revenues dans le genou. Je lui dis : ce sont vos trois mouvements, cessez-les. Il ne pouvait me croire; il les cessa cependant et la douleur disparut aussitôt. Dans les paralysies chez les enfants, j'ai trouvé le massage beau- coup plus rapide sur une centaine de cas soignés. Les résultats sont moins nets chez les vieillards. D'après ce qui précède, on comprendra que le massage va plus vite chez les ataxiques que la rééducation. Quant à l'électricité elle est beaucoup trop lente , n'agit que par suggestion quand elle agit dans tous les cas susdits et je ne m'en sers jamais. De cette étude il ressortira, je pense, que le massage est de beau- coup supérieur en général à la gymnastique même manuelle , sauf dans un petit nombre de cas. Mais il est absolument nécessaire, sous peine de résultat nul ou médiocre et de discrédit de la méthode, que le massage soit employé par un médecin. Les gymnastes suédois, qui sont les meilleurs, n'ont après tout que dix-huit mois d'études gymnastico-médicales et ne peuvent réussir que dans les cas faciles, faute de connaissances suffisantes. M. le J)' SAQUET à Nantes TRAITEMENT DU VAGINISME PAR LE MASSAGE SUÉDOIS (PROCÉDÉ DE THURE BRANDT) [6i8.i5:6i3.82l — Séance du ii août — Le vaginisme est une affection fréquente et rebelle pour laquelle on a tout employé : médecine et chirurgie avec plus ou moins de succès. Cette affection n'existe que chez les névropathes et aussi bien chez m* 1042 SCIENCES MÉDICALES les filles que chez les femmes mariées, ce qui est iacile à comprendre si l'on admet que c'est un stigmate d'hystérie. Le vaginisme est rarement accusé spontanément, soit que les femmes ne se rendent pas compte de ce qu'elles éprouvent, soit qu'elles n'osent l'avouer. C'est souvent la raison de certains célibats. Cela peut encore expliquer quelques cas de féminisme du beau sexe et être assez fré- quemment une cause de désunion des ménages. Nous ne croyons pas les cas moins nombreux en France qu'en Amérique où ils pullulent; mais les Françaises sont peut-être moins expansives à ce sujet. Il me semble que les cas de pénis captivas, fréquents surtout en Allemagne, d'après les auteurs, peuvent s'expliquer par cette alîec- tion. Nous n'avons pas à la décrire. Thui^e Brandt, l'inventeur de la gymnastique gynécologique revisée scientifiquement par Stapfer, classait ainsi la maladie : Hypéres- thésie de l'orifice vaginal et contracture des muscles du plancher pelvien. C'est sur cette conception qu'il a l^asé son traitement. Je crois que dans les cas légers son action est surtout suggestive. Or, l'on sait que pour toute suggestion il faut quelque chose de tan- gible représenté ici par le toucher vaginal. Au début, la moindre lésion des organes génitaux chez les prédis- posés peut provoquer une attention expectante, comme disent les Anglais, qui crée un centre de défense fonctionnant plus tard auto- matiquement au moindre contact des parties sensibles. Dans une trentaine de cas , chez des vierges ou des femmes déflo- rées, je n'ai pas trouvé de lésion externe pouvant paraître la cause de l'afl'ection. Ce qui m'a mis sur la voie du diagnostic chez les per- sonnes non mariées a été, soit une difficulté accusée par elles d'intro- duire une petite canule à injection, soit une constipation spasmodique accompagnant souvent la maladie chez les hystériques , d'après mon expérience. Dans ces cas, le toucher rectal, bien que sensible, l'est beaucoup moins que le vaginal et arrive plus rapidement à être indo- lore. Voici maintenant la technique de Thure Brandt : « Je considère comme capital, dit-il. de persuader à la malade avant tout qu'on n'exercera aucune violence. « On sait combien est grande la sensibilité dans cette aflection, La malade étant demi-couchée. jambes pliées, j'applique le doigt enduit de vaseline sur l'une puis sur l'auti'c des grandes lèvres, très I D-^ SAQUET. — TRAITEMENT DU VAGIIVISME PAR LE MASSAGE SUÉDOIS Io43 légèrement pour commencer et en demandant si cela fait mal. Puis j'applique le doigt sur d'autres points, très doucement et en posant toujours la même question. '< Le lendemain et les jours suivants je continue de même façon, approchant par degrés de roritîce vaginal. Graduellement j'arrive à mettre le doigt à l'entrée de l'orifice vulvo-vaginal, puis je le retire sans, pour ainsi dire, que la malade s'en aperçoive. La séance est terminée. A la suivante je pénètre un peu, très peu, laissant le doigt cheminer par son propre poids et j'exerce une très légère compres- sion à droite et à gauche. En allant ainsi par degrés et en exerçant toujours cette comi^ression, on réussit en quelques jours à introduire l'index entier. » Traduction Stapfer, p. 544, Traité de Kinésithé- rapie gynécol., chez Maloine, Paris, 1897. J'ajouterai que, comme dans le massage gynécologique ordinaire, le doigt intérieur est immobile ; quand il y a lieu de masser, c'est la main externe qui agit seule, le doigt interne n'est là que comme l^oint d'appui. Je ferai remarquer en outre que Th. Brandt touchait dune façon spéciale en introduisant la main au-dessous de la cuisse et en évitant de termer les doigts dans la paume, comme Aran l'avait déjà recom- mandé jadis, et en n'introduisant jamais qu'un seul doigt. Par ce procédé, Thure Brandt est arrivé en quelques semaines, parfois en quinze jours, dans les cas les plus favorables, à guérir les malades. En réalité il s'agit d'un procédé de dilatation [)rogressive doublé de suggestion. Th. Brandt. qui atteignait i^^So de taille au moins, avait une véritable main succulente. Cette main était très grosse, mais non très lono-ue; l'index ne dépassait pas 10 cent, de longueur et les autres doiots en proportion ; Brandt était dans la dernière année de son existence où je le vis atteint d'un tremblement professionnel de la main. Ce véritable mouvement vibratoire, existant même au repos, était analogue au tremblement de la paralysie agitante et produisait une vibration apte à combattre spasme et contracture. La manière d'agir de Brandt dans le vaginisme est un véritable procédé de douceur et de persuasion, qui influe sur le psychisme des malades et arrive à guérir dans les cas légers. Pour nous, les diflerents procédés chirurgicaux n'agissent pas autrement que par suggestion dans le vaginisme. Stapfer attribue la cause des cas graves à de la cellulite pelvienne ou œdème du tissu cellulaire périgénital. J'ai observé plusieurs faits 1044 SCIENCES MÉDICALES confirmatifs de cette opinion. On doit employer alors la Kinésithé- rapie gynécologique dans son intégralité. Il est possible que dans les cas légers la cellulite soit trop peu accentuée pour être diagnosti- quée. Par analogie j'ai soigné, chez une dame d'une trentaine d'années, une fissure anale très douloureuse. Le palper-massage du ventre me fit découvrir en même temps de la cellulite des annexes. La Kinési- thérapie me permit de guérir la malade en trois semaines, et la gué- rison s'est maintenue depuis six ans. J'ai vu aussi une personne chez laquelle le vaginisme avait résisté à un accouchement. Le procédé de Th. Brandt décrit plus haut fut employé et, aidé de la Kinésithérapie gynécologique, réussit à débar- rasser la malade de son affection. J'ai revu la patiente plusieurs années après; elle n'était plus incom- modée par le spasme vaginal. J'ai observé plusieurs cas de vaginisme chez des filles hystériques, vaginisme qui a été dissipé de la même manière quand le traitement a été suffisamment prolongé. Dans certains cas, le nervosisme concomitant s'est trouvé amélioré ou dissipé , alors qu'il avait résisté de longues années à différentes méthodes; mais on ne s'était jamais occupé du vaginisme qui était resté insoupçonné. En somme ce procédé, sans danger, qui m'a toujours donné d'excel- lents résultats , est à recommander. M. le D' PETON de Saumur LE VIN AU POINT DE VUE MËDICAL ET HYGIÉNIQUE — Séance du ii août — Lorsque j'ai vu dans le bulletin de l'Association française pour l'avancement des sciences que le vin était une question proposée à la discussion des membres du Congrès d'Angers, je me suis réjoui de venir écouter siu* ce sujet l'opinion des maîtres dont la parole fait autorité. C'est donc simplement en auditeur désireux de s'ins- truire que je comptais être ici aujourd'hui. Mais, lorsque j'ai su D"" PETON. — LE VIN AU POINT DE VUE MÉDICAL ET HYGIÉNIQUE 1045 qu'aucune communication n'était annoncée sur le vin au point de vue médical et hygiénique, j'ai cru devoir rédiger une note som- maire, qui, à défaut d'autre mérite, peut avoir l'avantage de susciter des observations, des réponses, des contradictions, de telle sorte que le Congrès ne se sépare ])SiS sans avoii*, un instant, fixé son attention et donné son avis sur le rôle du vin en médecine et en hygiène. Tout d'abord il convient d'écarter du débat l'alcoolisme, qui n'a rien à voir dans ce que nous allons dire. Il s'agit simplement de savoir si le vin. à dose modérée, peut être recommandé par l'hygiéniste et dans quels cas le médecin doit l'interdire, le tolérer ou le conseiller. Il est bien entendu que les quantités de vin qui, absorbées journellement, mènent à l'alcoolisme sont et demeurent interdites et réprouvées par l'hygiène et la médecine comme par le bon sens. En face de l'usage immodéré du vin, dont les buveurs de profession et les dipsomanes donnent le triste spectacle, il y a l'usage raisonnable, encore très répandu, du vin mélangé d'eau, comme boisson de table, ou du vin pur en petite quantité, dont beaucoup de gens font usage sans inconvénients apparents et plutôt avec avantage jusqu'à un âge avancé. Il y a, en outre, l'emploi du vin comme agent thérapeutique pres- crit par le médecin. Le sujet est vaste ; nous nous bornerons à esquisser un plan d'étude. I. — Nous reconnaissons, avant d'aller plus loin, que le vin doit être, dans certains cas, absolument interdit : 1° Aux jeunes enfants; a° Aux gastralgiques ; 3° Dans la gastrite ulcéreuse ; 4° Dans la dyspepsie acide et douloureuse ; 5" Dans la lithiase biliaire et dans la cirrhose ; 6° Dans la gravelle et dans la néphrite aiguë ou chronique ; 7° Chez les excités cérébraux, les aliénés et les épileptiques ; 8° Chez les cardiaques dont le foie ou les reins sont touchés ; 9° Pendant les hémoptysies ; lo" Pendant les poussées aiguës d'eczéma. En dehors de ces états maladifs . l'interdiction absolue du vin est rarement justifiée. II. — Nous croyons qu'il ne faut permettre le vin qu'à petite dose : i" Aux rhumatisants ; 2° Aux migraineux ; Io46 SCIENCES MÉDICALES 3'^ Aux goutteux ; 4" Aux nerveux ; 5° Aux dyspeptiques. Nous entendons par « petite dose » un ou deux verres à Bordeaux à chaque repas. Cette dose ne peut être du reste qu'une moyenne susceptible d'augmentation ou de diminution suivant l'âge, le sexe, la taille, la profession et suivant aussi, ce qui est très important, le degré alcoolique. Il n'y a, en effet, aucune parité à établir entre deux quantités égales de vin de Bourgogne d'un grand cru et de vin de Sologne ou du pays nantais. III. — Nous pensons qu'il faut recommander l'usage quotidien du vin à la dose minimum d'un demi-litre par jour : 1° Aux anémiques; 2° Aux scrofuleux; 3° Aux convalescents; 4° Aux paludéens ; 5° Aux diabétiques; 6° Aux tuberculeux ; 7° Aux surmenés; 8° A certains dyspeptiques; 9" A certains névropathes; io° Aux cachectiques. Il nous reste à exposer pourquoi nous croyons le vin utile et recominandable entre toutes les autres boissons. C'est un fait d'observation que l'alcoolisme, les affections scrofu- leuses et tuberculeuses sont plus rares dans les pays où l'on récolte du vin que dans les autres. Le vin est un apéritif et un digestif pour les gens bien portants. Il excite la sécrétion de la salive et du suc gastrique. Il facilite l'excré- tion des mucosités bronchiques. Il apporte à la nutrition générale de l'alcool à petite dose, des acides végétaux, de la glycérine, des sulfates et des phosphates de potasse et de chaux, du tannin, des chlorures. C'est une sorte de lymphe végétale, un sérum, dont l'action remontante et tonique est si remarquable qu'il faudrait l'in- venter comme agent thérapeutique s'il n'existait comme boisson courante . L'action tonicjue du vin rouge, l'action stimulante du vin blanc, l'action digestive du vin mousseux ne sont pas niables. Et, du reste, si l'on défend le vin comme une boisson malsaine ou sujette à inconvénients, que nous proposera-t-on comme boisson D"" A. BÉCLÈRE. — NOUVEAU CYLINDRE COMPRESSEUR Io47 parfaite et à l'abri de tout reproche? Ce n'est pas l'eau, qu'il est à l'heure actuelle si difficile de se procurer irréprochable ; ce n'est pas l'eau, qui est manifestement convaincue d'être le véhicule de la fièvre typhoïde, de la dysenterie, du choléra et de plusieurs autres maladies virulentes ou contagieuses. Ce n'est pas le cidre, boisson froide, qui porte à boire en abon- dance et qui, comme on le voit en Bretagne et en Normandie, est loin de garantir les populations contre les dangers de l'alcoolisme. Ce n'est pas la bière , qui a les mêmes inconvénients que le cidre et qu'on accusait dernièrement de favoriser le développement du cancer. Le vin nous semble donc devoir rester la boisson de choix que les hygiénistes autorisés préférèrent de tout temps. Nous souhaitons que le corps médical ne lui témoigne pas une hostilité absolue et injustifiée. M. le D' A. BECLERE Médecin de l'Hôpital Saint -Antoine , à Paris L'EMPLOI DES CYLINDRES -COMPRESSEURS EN RADIOGRAPHIE ET LE NOUVEAU CYLINDRE-COMPRESSEUR AJUSTABLE AU PORTE-AMPOULE-DIAPHRAGME-IRIS [77.833] — Séance du 5 août - Les images radioscopiques et radiographiques présenteraient tou- jours des contours nettement tranchés s'il n'y avait pour agir sur l'écran fluorescent et sur les plaques sensibles que les rayons émis par le focus anti-cathodique ou rayons focaux. Mais , en dehors des rayons focaux , seuls utiles , l'écran fluores- cent et les plaques sensibles sont encore soumis à l'action de beau- coup d'autres rayons, provenant d'un très grand nombre de points de l'espace et qui tous nuisent à la netteté des images. Malgré la diversité de leur origine, on peut les confondre sous le nom de rayona parasites. Les rayons parasites proviennent, pour une part, de la paroi même de l'ampoule. Ils sont produits principalement par le choc des rayons cathodiques diffusés (Villard) contre cette paroi de verre. De tous I048 ÉLECTRICITÉ MÉDICALE les points fluorescents de l'ampoule partent, dans toutes les direc- tions, des rayons de Rontgon, dont les propriétés ne dilfèrent guère de celles des rayons focaux. On peut les appeler des vayoïiH parié- taux. Les rayons parasites proviennent d'autre part, sous le nom de rayons secondaires (Sagnac), de toutes les particules matérielles rencontrées sur leur trajet par les rayons primaires, focaux ou pariétaux. Les rayons secondaires, qui partent, dans toutes les direc- tions, de chacune de ces particules matérielles, gazeuses, liquides ou solides, ne dilTèrent des rayons primaires dont ils sont issus que \yAv leur moindre pouvoir de pénétration. Ils prennent naissance princi- X)aleinent à l'intérieur même des organes soumis à l'exploration radiologique et sont, par conséquent, d'autant plus nombreux et d'autant plus nuisibles que l'épaisseur des organes explorés est plus grande. S'il est impossible d'éviter complètement les rayons parasites , on peut au moins en restreindre très notalilement les effets nuisibles à l'aide de deux procédés diflerents qui se prêtent un mutuel secours. Le premier procédé consiste dans l'abaissement du pouvoir de péné- tration des rayons employés à la recherche. Le second procédé con- ,siste dans la limitation de la masse de ces rayons divergents en tous sens à un faisceau étroit, au faisceau strictement indispensable à l'exploration dune région du corps très circonscrite. Les rayons de Rontgen doivent être limités surtout en deux points de leur trajet : à leur sortie de l'ampoule et à leur entrée dans la peau. La limitation du rayonnement à l'entrée de la peau a pour but de restreindre la production des rayons secondaires provenant des tissus sous-jacents. Elle s'effectue au mieux à laide d'un diaphragme de plomb. Le modèle le plus simple est une mince feuille de ploml), percée d'une ouverture dont la forme et les dimensions correspondent à celles de la région explorée, sans dépasser i5 centimètres environ dans son plus grand diamètre. Il suffit de poser cette feuille souple de plomb sur la surface cutanée en interposant un tissu de laine ou de soie, destiné à prévenir la production, entre le métal et la peau, de petites décharges électriques, désagréables pour le patient. La limitation du rayonnement à la sortie de l'ampoule a pour but décarter le plus grand nombre des rayons pariétaux , si nuisibles à la netteté des images. Pour mieux écarter les rayons pariétaux, on peut s'opposer à lem* production à l'aide d'ampoules spécialement construites dans ce but D' BECLERE. NOUVEAU CYLINDRE COMPRESSEUR io49 L'ampoule Yillard à anticathode conique n'émet qu'un cône étroit de rayons.de Rontgen, ne présente à sa surface qu'une petite plage cir- culaire de fluorescence, au lieu d'un hémisphère tout entier, connne les autres ampoules, et donne, on le sait, des images remarquable- ment nettes. Récemment, M. Chabaud a construit une nouvelle ampoule qu'on a pu voir fonctionner à la dernière séance de Pâques de la Société de Physique : entre autres avantages encore inédits, «lie présente celui d'avoir une paroi formée de deux sortes de verre différents, lun contenant du plomb et l'autre exempt de plomb : ce dernier, en forme de petit segment circulaire, est enchâssé dans le précédent comme la cornée dans la sclérotique, il est placé en regard de l'anticathode et demeure seul perméable aux rayons de Rontgen. Pour éviter les rayons pariétaux produits par une ampoule du modèle le plus répandu, c'est-à-dire par une ampoule à anticathode plane et à paroi de verre homogène, le dispositif le plus simple est un diaphragme de plomb placé à proximité. Mais, comme la bien FiG. I. — Marche des rayons avec diaphragme de plomb /)/(/;(. a a , Rayons centraux ; b b , Rayons pariétaux. démontré le D"' Albers-Schonberg (de Hambourg), un diax^hragme de plomb , de forme cylindrique , atteint le but beaucoup plus com- plètement qu'un diaphragme plan. Les figures i et 2 en témoignent avec évidence. lOOO ELECTRICITE MEDICALE Partant de ce principe, le D" Albers-Schônberg a imaginé, au cours de Tan dernier, un appareil nouveau, prinutivement destiné à la recherche radiographique des calculs du rein fi). La i»ièce essentielle de cet ax^pareil est un cylindre creux, intérieurement doublé de plomb, qui forme sur le trajet des rayons, entre lampoule et la paroi abdominale du patient couché, un véritable tunnel. Ce tunnel de plomb arrête au passage plus complètement que la simple ouver- ture des diaphragmes plans les rayons parasites provenant de la paroi de l'ampoule; son ouverture supérieure est, d'ailleurs, munie elle-même d'un petit diaphragme plan, percé d'une ouverture de 3 centimètres au plus de diamètre. De plus, il s'enfonce verticale- FiG. 2. — Marche des rayons avec diaphragme de plomb cylindrique, a a , Rayons centraux ; b b , Rayons pariétaux. ment ou obhquement, par son bord inférieur, garni de caoutchouc durci, dans la paroi abdominale qu'il déprime et, de cette manière, diminue de 5 à lo centimètres environ l'épaisseur des i)arties molles interjîosées au devant de la plaque. Il restreint ainsi la production des rayons secondaires provenant des tissus traversés et donne, avec la possibilité d'emi^loyer des rayons relativement peu péné- (i) ALnERS-ScnoNHERG, Einc kompressionsblende zur Nachweis von Nierensteineu (Fortschrilte au/ dem Gebieté dcr liôntgcnsirahin. Band V, Ilcft 3, 2; juin i()02). D' A. BECLERE. — NOUVEAU CYLINDRE COMPRESSEUR lOOI trants. celle crobtenii* sur Timage radiographique. avec des contour& plus nets, un contraste plus accentué des teintes. Le cylindre-compresseur du D"" Albers-Schônberg fait partie d'une sorte de pont-levis qu'on redresse pour permettre au malade de s'étendre sur la table d'opération et qu'on rabat ensuite, au-dessus de lui, sur trois piliers métalliques qui émergent verticalement d'un socle résistant. Un bras de levier transmet au cylindre les mouve- ments qui servent à l'enfoncer dans l'abdomen et à le relever après la pose terminée. Cet appareil était primitivement construit pour l'exploration du rein, mais son inventeur fut si satisfait de ses divers et multiples avantages qu'il le considère aujourd'hui comme vm instrument uni- versel et le préconise dans son récent Manuel de technique, sauf en quelques cas où les vues d'ensemble sont nécessaires pour la radio- graphie de toutes les parties du corps (i). Bien entendu, le cylindre ne peut déprimer le crâne et les diverses articulations comme il déprime la paroi abdominale, mais la légère compression qu'il exerce par l'intermédiaire d'une plaque de feutre , sur la région explorée . quelle qu'elle soit, en assure, mieux que tout autre dispositif, la parfaite immobilité. Deux cylindres, de dimensions dilférentes, servent à la radiographie simple des diverses régions ; tous deux ont une longueur de 22 centimètres, mais l'un a 10 centimètres et l'autre i3 centimètres de diamètre; avec le premier on emploie seulement des plaques de format i3 X 18 et avec le second des plaques 18 X 24- Un troisième cylindre, plus compliqué que les deux autres, sert spé- cialement à la radiographie stéréoscopique. Tous les trois 3»adaptent. tour à tour, au même statif en forme de pont-levis. L'appareil, très bien imaginé, est habilement et solidement cons- truit : j'ai pu m'assurer qu'il donne d'excellents résultats; il ne peut cependant échapper au reproche d'être pesant, coûteux et encom- brant. Pour obvier à ces inconvénients, tout en conservant le principe de la limitation des rayons à un faisceau étroit, je n'ai gardé de l'appareil compliqué d'Albers-Schonberg que le simple cylindre inté- rieurement doublé de plomb; j'en ai même réduit la longuem' à i5 centimètres et, tel quel, je l'ai muni de deux crochets latéraux qui permettent de l'ajuster, en un cHn d'oeil, au devant du diaphragme- iris de mon châssis porte-ampoule. Le châssis porte-ampoule en question est construit, je le rappelle, pour faciliter l'examen radioscopique et la radiographie, simple ou (i) Albers-Schônbekg. Die Rôntgentcchnik, Hambourg, ii)o3. loSa ÉLECTRICITÉ MÉDICALE stéréoscopique , cVuii malade debout, assis ou couché, et x>our per- mettre, dans ces diverses positions, l'emploi du diaphragme-iris (i). Rien n'esi désormais si facile, dans toutes ces positions, que d'y joindre l'usage du cyUndre-comxîresseur et d'en retirer, particulière- FiG. 3. - Le porto-ampoule diaphragme-iris muni d'un eylindro-comprcssour amovible et disposé pour la radiographie, simple ou stéréoscopique, de la région rénale gauche. (I) A. BÉCLÉHE. Les instruments auxiliaires de l'emploi médical des rayons de Rônt- gen (Arch. d'clectr. niéd., n° 102, i5 juin 1901). , _ . , L'emploi du diaphragme-iris en radioscopie (Archh'. (Vclrclr. mcd., n» 94, u oct. igoo^ D'' A. BÉCLÈRE. — NOUVEAU CYLINDRE COMPRESSEUR Io55 ment dans le décubitus dorsal, tous les avantages inhérents à cet instrument. La figure 3 représente ce châssis porte-ampoule muni du cylindre- compresseur que je lui ai ajouté et disposé pour la radiographie de la région lombaire gauche. Entre les deux montants d'un châssis rectangulaire très stable, un cadre de bois, verticalement placé, est maintenu en équilibre par l'in- termédiaire de cordes et de poulies de renvoi, au moyen d'un contre- poids. Une poignée, fixée au contre-poids, donne à l'opérateur tou,te facilité pour élever ou abaisser à volonté ce cadre, à l'intérieur duquel glisse transversalement, à gauche et à droite, un cadre plus petit qui porte Tampoule. Le grand cadre n'est pas seulement mobile dans le sens vertical. Deux articulations à pivot , placées au milieu de ses bords latéraux, lui permettent de devenir horizontal, en tournant de 90 degrés, de part et d'autre de sa position primitive. On peut donc, à volonté, diriger en haut ou en bas chacune de ses faces, suivant que l'ampoule est destinée à être placée au-dessus ou au-dessous du malade hori- zontalement étendu. Deux petits freins servent à l'immobiliser tem- porairement, à la haviteur et dans la position voulues. Le diaphragme-iris fait corps avec le petit cadre mobile qui porte l'ampoule ; on peut très facilement régler sa position, de manière à ce que le foyer d'émission des rayons de Rôntgen soit toujours placé exactement en regard du centre de son ouverture. C'est au-devant du diaphragme-iris que s'ajuste, à l'aide de deux crochets, le cylindre- compresseur. L'ouverture supérieure de ce dernier est rétrécie à volonté par le diaphragme-iris ou, mieux, munie d'un petit dia- phragme plan percé d'une étroite ouverture circulaire. D'après la description très brièvement résumée du porte-ampoule- diaphragme-iris, il est vraisemblable que les médecins déjà en posses- sion de cet instrument préféreront le munir, à peu de frais, d'un simple cylindre facilement amovible, plutôt que de s'encombrer d'un nouvel appareil très coûteux. Le nouveau cylindre-compresseur, ajustable au porte-ampoule- diaphragme-iris, n'est d'ailleurs pas inférieur à l'appareil imaginé par le D"" Albers-Schonberg et possède même, en comparaison, quelques avantages. On peut, en effet, l'employer pour l'exploration radioscopique ou radiographique, aussi bien lorsque le sujet examiné est en position verticale, debout ou assis, que lorsqu'il est horizontalement étendu. Enfin, dans cette dernière position, si le malade est couché sur un I054 ÉLECTRICITÉ MEDICALE cadre à tond de toile, ou peut au besoin placer le cylindrcrcompres- seur au-dessous de lui et la plaque au-dessus , ce qui favorise , par exemple, la recherche des calculs biliaires ou la radiographie du cœur, tandis que l'appareil d'Albers-Schônberg permet seulement l'application du cylindre au-dessus du malade en position horizon- tale. De plus, le porte -ampoule -diaphragme -iris permet de faire à volonté, avec le même cylindre, la radiographie simple ou stéréos- copique d'un organe quelconque, tandis que l'appareil d'AUiers- Schônberg exige, pour la stéréo-radiographie, un cylindre spécial de construction compliquée et très coûteux. En faveur des cylindres-compresseurs d'Albers-Schônberg, on peut invoquer qu'ils sont capables de s'écarter quelque peu de la verticale et de s'incliner dans tous les sens, ce qui facilite l'adapta- tion de leur extrémité inférieure aux courbures plus ou moins irré- gulières des surfaces sur lesquelles ils reposent; mais en revanche leur axe cesse en pareil cas d'être perpendiculaire à la plaque. Il n'en est pas de même du nouveau cylindre-compresseur ajustable au porte-ampoule-diaphragme-iris. Son axe demeure toujours per- pendiculaire à la plaque et son extrémité inférieure ne s'adapte jias moins bien aux courbures h-régulières des diverses régions ; car elle est formée, dans le dernier modèle que j"ai fait construire, dune sorte d'anneau mobile en tous sens sur le corps même du cyhndre, auquel elle est rattachée par une suspension à la Cardan. On peut, avec mon châssis porte-ampoule, se servir aussi, suivant les besoins, de deux cvlindres de dimensions différentes, l'un de lo et l'autre de i3 centimètres de diamètre; l'avantage ici est que tous deux peuvent servù- indifféremment à la radiographie simple ou à la radiographie stéréoscopique. Quelles que soient, d'ailleurs, la simplicité, la commodité et l'utilité du nouveau cyhndre, c'est au promoteur de l'emploi «les cyhndres-compresseurs en radiographie, au D' Albers-Schùnberg. qu'en revient légitimement tout le mérite. I D' LAQUERRIÈRE. — RÉTRÉCISSEMENTS DU CAXAL UTÉRIX Io55 M. le D^ LAQUERRIÈRE Directeur de la Clinique Apostoli, à Paris A PROPOS DU TRAITEMENT ÉLECTRIQUE DES RÉTRÉCISSEMENTS DU CANAL UTÉRIN [617.558.4.00343:615.849] — Séance du 5 août — Il peut être utile de compléter sur un point le très intéressant rap- port de M. Roques en ce qui concerne les sténoses de l'utérus. Il nous dit en effet que « la littérature médicale est d'une pauvreté absolue sur ce sujet. » Or, Tripier a non seulement utilisé ce procédé, comme le croit l'auteur, mais, dans ses leçons cliniques sur les maladies des femmes (1882), il consacre une moitié de son douzième chapitre, soit environ i3 pages, aux indications, dans les obstructions, de la galvano caus- tique chimique par rapport à l'incision, à la dilatation, à la cautéri- sation ; il s'étend longuement sur les divers détails comme on j)eut s'en assurer par l'extrait suivant du sommaire : Manuel. — Durée. — Intensité. — Vainations suivant les cas. — Cas de l'occlusion complète : indication possible de la cautérisation tabulaire. — Soins consécutifs. En somme, on trouve là la discussion et la technique d'un procédé qui a été appliqué depuis par tous les électrothérajîeutes gynéco- logues à peu près sans modification. D'ailleurs, ce procédé n'a jamais été abandonné et on le trouve j)artout cité. Apostoli écrit à propos du fibrome en 1884 dans la thèse Carlet : (Discussions des objections : Tout utérus non perméable contre- indique l'opération). « C'est au contraire une circonstance qui commande l'intervention parce qu'elle est souvent la cause d'accidents multiples; c'est alors qu'une gahano caustique négative ou une galvano puncture s'im- pose pour restituer au canal son calibre normal. » Brivois, dans son manuel d'électrothérapie gynécologique, en 1890, écrit un chapitre intitulé : « Rétrécissement du canal cervical. — Atrésie du canal utérin », qui n'ajoute rien à ce qu'avait j^ublié Tri- pier. De même, à l'étranger, nous trouvons Orthmann (Beitrag zur I056 ÉLECTRICITÉ MÉDICALE Electrotherapie und der Gynaekologie. — Berliner Klinisch Wochen- sclirift, 1889, n" 21), qui a soigné seize cas de dysménorrhée liée à une sténose, que les méthodes ordinaires de traitement, dilatation, curetage, etc., avaient été impuissantes à modifier et qui obtient six guérisons complètes et des améliorations dans les autres cas, Brœse (Deutsche medicinische Wochenschrift , 1889), qui conseille l'emploi du pôle négatif contre les sténoses. Conrad (Thèse de la Faculté de Leipsig, 1891), qui fait la même prescription d'accord avec Frienkel. Arendt (Deutsche medicinische Wochenschrift, décembre 1891)^ qui tire de ses observations la « conviction que ce procédé , employé à propos, est destiné à remplacer comj)lètenient la discision. » Je passe sur cette bibliographie qui deviendrait fastidieuse pour arriver à des travaux plus récents. Apostoli, en 1899, dans le chapitre gynécologique du livre d'Athaus (The value of electrical treatment), parle plusieurs fois de la dilata- tion produite par le pôle négatif : c'est ainsi qu'il dit qu'en certaine forme de métrite, avec atrésie, il sera bon parfois de faire des- séances avec la cathode pour assurer le drainage de la cavité. Personnellement, dans « Études cliniques sur le traitement des fibromes utérins par la méthode d' Apostoli (1900) », entre diverses autres citations de ce procédé, j'écrivis : « C'est au pôle négatif qu'il faudra recourir dans les cas ou, par suite d'une atrésie quelconque, on ne pourrait faire pénétrer l'hystéromètre. » En somme, depuis le chapitre de Tripier, presque tous les auteui^s qui ont pubUé des travaux sur F électrothérapie gynécologique (je demande pardon à ceux, et ils sont innombrables, que je n'ai pas. cités, mais je voulais ici non pas faire une bibliographie complète, mais simplement montrer que la tradition ne s'en était jamais per- due), ont parlé avec éloge de ce procédé. Seulement, comme dès le début il n'y avait rien à ajouter à ce qu'avait dit Tripier et qu'on ne pouvait que confirmer ses assertions , il en est résulté que personne n'a beaucoup insisté sur un fait considéré comme acquis et il ne faut pas trouver étonnant que les très nombreux, souvent très rapides passages qui lui sont consacrés, puissent passer inaperçus, perdus au miUeu des innovations plus ou moins personnelles que chaque écrivain croit devoir mettre en lumière. Aussi était-il intéressant de rappeler que, comme pour le traitement électrique des rétrécissements de l'urèthre, c'est au « Père de lélec- trothérapie gynécologique » que revient le mérite d'avoir formulé une méthode qui a conservé encore aujourd'hui toute sa valeur. D"" M. BILHAUT. — DIAGNOSTIC PRÉCOCE DES TUMEURS BLANCHES lÙDj M. le D^ M. BILHAUT CJiirurgien de THôpital international de Paris DU DIAGNOSTIC PRÉCOCE DES TUMEURS BLANCHES AU MOYEN DES RAYONS X [616.006:615.849] — Séance du 3 août — De tous temps, les chirurgiens se sont préoccupés de la fragilité des os dans les cas d'ostéo-arthrites chroniques dénommés par eux : tumeurs blanches, coxalgie, mal vertébral, etc.. Quand un chirurgien se trouvait dans la nécessité de pratiquer l'amputation ou la désarticulation d'un membre, il pouvait constater combien les os étaient devenus mous dans toute l'étendue du squelette sous-jacente à la lésion. J'ai entendu, au cours de mes études , le professeur Tillaux nous dire cpie son maître Nélaton ne manquait jamais, après une amputation de cuisse, pour tumem' blanche du genou, de montrer à ses élèves avec quelle facilité la pointe du couteau à amputation pénètre dans le tibia, dans le péroné, dans les os du tarse et même dans les métatarsiens. C'est en se basant sm'ces faits, que l'on recommande, dans les cas de déviation des membres inférieurs par suite de coxalgie, de ne procéder à la correction de la mauvaise attitude, qu'avec les plus grandes précautions. On a noté souvent, au cours de manœuvres brusques, la production de fractures de cuisse. Mais, jusqu'à ce jour, on n'a eu en vue que des cas dans lesquels la maladie est confirmée, c'est-à-dire établie depuis un laps de temps plus ou moins long. L'intervention précoce, les résections hâtives, dans les tumeurs blanches, n'ont pas jeté grande lumière sur cette question et, bien que des chirurgiens disent qu'ils n'ont jamais regretté d'avoir résé- qué des malades atteints d'ostéo-arthrite bacillaire, parce que tou- jours les lésions trouvées étaient plus avancées qu'ils n'eussent pu le supposer, nous n'avons pas été mieux fixés sur les désordres de A'oisinage qui ont dû être trouvés. L'abandon de la méthode des résections précoces est une chose à retenir. En coordonnant ces diverses indications, je me suis demandé si ce rejet des résections n'était pas dû à la diffusion d'une lésion que 6f Io58 ÉLECTRICITÉ MEDICALE l'on avait pu supposer circoncrite. Je me suis demandé si, dès le début d'une tumeur blanche, il n'existe j)as déjà une modification de résistance du squelette du voisinage, si l'infection bacillaire n'a pas besoin, pour sa fixation, son évolution, d'un terrain tout spéciale- ment préparé ? De là, à demander à la radioscopie, à la radiographie, d'éclairer ces points restés obscurs, il n'y avait qu'un pas. La fragilité du sque- lette des membres atteints de tumeurs blanches était surabondam- ment établie par la clinique. Je crois que cela devait dépendre d'un degré plus ou moins caractérisé de décalcification. L'écran, l'épreuve radiographique devaient donc donner de précieuses indications. Je dirigeai mes recherches dans ce sens et je ne tardai pas à en avoir une confirmation péremptoire. J'examinai successivement , avec la plus grande attention et sans parti pris, toutes les tumeurs blanches qui se présentèrent à ma consultation de l'hôpital international de Paris. Mal de Pott, tumeurs blanches du genou, du cou-de-pied, scapulalgie, tumeurs blanches du coude, du poignet, ostéites chroniques tuberculeuses des os du carpe, du métacarpe, furent mirés à l'écran, puis radiographiés. La coxalgie ne fut que radiographiée, en raison de l'insuflisance de l'exa- men à l'écran. Or, invariablement, j'ai trouvé dans deux articulations de même nom, l'une saine, l'autre malade, des différences suffisamment tran- chées x^our pouvoir affirmer l'existence d'un degré dostéoporose, de raréfaction de la substance calcaire autour de la jointure incrimi- née. Dans les cas les plus récents qu'il m'a été possible de mirer à l'écran ou de radiographier, il existe déjà une déminéralisation appréciable et j'en suis actuellement à me demander si, en persévé- rant dans ces recherches, je n'arriverai pas à trouver qu'il existe dans les tumeurs blanches une période prémonitoire, pendant laquelle les éléments minéraux sont résorbés et à la faveur de laquelle la fixation des bacilles devient possible. Déjà pour le traitement de diverses formes de tuberculose , on pres- crit à l'intérieur les phosphates terreux, parce que l'on considère que ces sels sont en diminution dans les tissus. Mais, à côté de la médi- cation générale, il existe pour chaque tumeur blanche un traitement, soit par rimmol)ilisation, soit par l'extension continue. On a ainsi en vue de guérir, non seulement avec le moins de désordres pos- sibles, mais en conservant la plus somme de fonctions physiolo- giques. D'" M. BILHAUT. — DIAGNOSTIC PRECOCE DES TUMEURS BLANCHES loSo En nous maintenant strictement dans le domaine chirurgical, il y a le plus grand intérêt, pour le pronostic, à appliquer de bonne heure le traitement approprié. Il est donc de la plus haute importance de donner au diagnostic toute la précision possible. Armés de nouveaux moyens indiqués par le professeur Plielps, de New-York, au Congrès des Sciences médicales de Paris, en 1900, nous pouvons, grâce aux injections intra-osseuses d'acide phénique pur, venir puissamment en aide à ces malades et, comme l'ont prouvé les travaux de Mencière (de Reims), hâter la guérison et con- quérir des résultats pour ainsi dire parfaits. Au lieu de l'ankylose anciennement considérée comme un excellent résultat , c'est la gué- rison avec retour des mouvements que nous sommes en droit de convoiter. Dans ces lésions, j'ai toujours vu le squelette situé au-dessous de la lésion, et même dans une étendue considérable, au-dessus d'eUe, présenter des signes manifestes de décalcification. Dans la coxalgie, par exemple , l'os des îles correspondant à l'articulation malade est lui-même décalcifié. Cela nous explique comment le mal s'éternise après la résection de la hanche; la tête fémorale est sacrifiée, l'os des îles reste infecté. Je suis heureux, Messieui-s, de parler de ces choses devant vous et de vous inviter à contrôler j)ar vous-mêmes mes recherches. Voici mes conclusions : Le diagnostic précoce des tumeurs blanches, coxalgie, mal de Pott, etc., est habituellement dillicile à préciser. C'est seulement quand la contracture musculaire a produit l'attitude vicieuse que le diagnostic devient certain. Or, il est de la plus grande importance de ne pas attendre l'appa- rition de la déviation , si l'on veut obtenir une guérison à la suite de laquelle les conditions physiologiques normales se retrouveront dans l'articulation frappée. Il est de toute évidence que le traitement sera d'autant plus utile que le mal aura été coml^attu de bonne hernie et par de bons moyens. Or, puisque dans tous les faits anciens d'ostéo-arthrite bacillaire chronique on constate une diminution de la substance calcaire, cela devait porter naturellement les chirurgiens à demander aux rayons X des renseignements spéciaux. Pour mon compte, j'ai toujours trouvé, •dans les phases du début des affections auxquelles je fais allusion, une différence marquée entre l'image donnée à l'écran fluorescent, ou à la radiographie, du squelette du membre sain et de celui du membre malade. I06o ÉLECTRICITÉ MÉDICALE La décalcification précède peut-être l'invasion tuberculeuse ; ceci reste à vérifier; en tout cas, elles sont au moins concomittantes. De sorte que, chez tout malade suspect de tuberculose osseuse articulaire, j'estime qu'il est du plus haut intérêt et surtout extrême- ment utile, de procéder à l'examen aux rayons X. pour fixer immé- diatement et exactement le diagnostic et établir sans hésitation, sans retard, le traitement dans toute sa rigueur. M. le D' Stéphane LEDUC Professeur à TÉcole de ^Médecine de Nantes ÉTUDE SUR LES COURANTS INTERMITTENTS DE BASSE TENSION [615.844.2] — Séance du 5 août — Les courants intermittents de basse tension peuvent rendre plus de services qu'aucun des autres courants électriques employés en médecine : ils doivent, dans toutes les applications, remplacer les courants induits ; ils peuvent, avec plus de perfection , faire tout ce que font ces derniers et ils peuvent accomplir beaucoup d'opéra- tions pour lesquelles les courants induits sont inefiicaces. Ce sont les courants les mieux adaptés à l'électro-diagnostic, parce qu'ils représentent l'excitateur électrique le plus susceptible de mesure. C'est le but constant et le plus ardemment poursuivi de félectricité médicale de déterminer la caractéristique électrique de l'excitation, c'est-à-dire de x)réciser en grandeur et en caractère l'ex- citant électrique produisant un effet déterminé, MM. Dubois Rey- mond d'Arsonval, Hoorweg, Zanietowsky, Dubois de Berne, G. AVeis, M. Wertheim-Salomonson ont consacré à cette question d'importants travaux. La caractéristique d'excitation est, en réalité, la mesure de toutes les grandeurs qui interviennent dans fexcitation. Le courant induit, l'excitant par excellence des nerfs et des muscles, ne permet aucune mesure ; toutes les tentatives dans cette voie ont échoué. Le courant intermittent de basse tension, excitant supérieur au courant induit, permet de mesurer avec une grande facilité l'intensité et la tension du courant excitateur et, par conséquent, de connaître à chaque D"^ ST. LEDUC. — COURANTS INTERMITTENTS DE BASSE TENSION I061 instant la résistance du sujet. Quoique des perfectionnements à cet égard soient nécessaires, on peut, avec ces courants, compter le nombre des passages et des intermittences à la seconde. Enfin, ces courants permettent de régler et de mesurer avec simplicité , facilité et perfection, le temps de passage du courant pendant chaque période, grandeur dont l'importance paraît capitale, aussi bien pour la thérapeutique que pour rélectro-diagnostic. Ce temps n'a été considéré et mesuré que dans des expériences dilliciles de labora- toire et par des moyens ne comportant qu'une précision relative. Avec les courants intermittents de ijasse tension, cette mesure est la Xjlus facile et la plus précise de l'électricité médicale et cette gran- deur se révèle comme une des plus intéressantes à considérer, car, dans le phénomène de l'excitation, toutes les autres grandeurs élec- triques lui semblent subordonnées. Pour produire les courants intermittents de basse tension , il faut : 1° Une source de courant constant, piles, accumulateurs, canalisa- tion urbaine de courant continu, etc. ; 2" Un dispositif jîour faire varier très graduellement la tension dans le circuit, collecteur, réducteur de potentiel, etc. ; 3° Un interrupteur, produisant des interruptions régulièrement espacées, dont il est avantageux de pouvoir faire varier le nombre dans des limites aussi étendues que possible et pourvu d'un dispo- sitif permettant de faire varier de zéro à un les durées relatives de passage et d'interruption. Dans le cours de nos études, nous avons employé divers interrup- teurs. Celui que nous utilisons actuellement, construit par la maison GaifFe , spécialement pour la production de ces courants , donne les meilleurs résultats ; c'est un interrupteur du type Contremoulin- Gaiffe. Sur un axe entraîné par une petite dynamo est monté un disque isolant, portant des pièces métalliques sur lesquelles frottent deux ]>alais, dont un mobile ; le circuit est fermé par l'arma- ture métallique entre les deux balais ; si le contact avec chaque armature s'établit' et cesse simultanément pour chaque balai, le courant n'est interrompu que pendant les temps très courts pendant lesquels les balais franchissent les espaces isolants qui séparent chaque armature ; par le déplacement du balai mobile , on peut arri- ver à ne fermer le circuit que lorsque l'un des balais a déjà effectué la moitié, les 3/4, les 99/100, ou une fraction quelconque de son par- cours sur l'armure, de sorte que le courant ne passe plus que pen- dant la moitié , le quart , le centième ou une fraction quelconque de la période. I062 ÉLECTRICITÉ MÉDICALE Un rhéostat tians le circuit de la dynamo permet de régler la vitesse et, en même temps, le nombre des interruptions propor- tionnel à cette vitesse. Le nombre des interruptions peut se déduire de la vitesse de rotation ou se déterminer directement à l'aide d'un signal de Deprez et d'un diapason. Un voltmètre, en dérivation sur les deux électrodes, permet de lire à chaque instant la différence de potentiel que l'on établit entre elles. Un milliampéremètre apériodique, placé dans le circuit, donne l'intensité du courant. Il y a à considérer l'intensité indiquée par l'ampèremètre, pour le courant intermittent, et l'intensité absolue du courant lorsque le circuit est fermé ; cette dernière intensité se déduit de la première lorsqu'on connaît la durée du passage du courant pen- dant chaque période. Si l'on désigne par mille la période, c'est-à-dire le temps entre chaque intermittence, le courant pourra passer pendant un millième, un dix-millième, un cent-millième, etc., de la période et être interrompu pendant le reste du temps. Comme la période d'oscillation de l'ampèremètre est beaucoup plus grande que celle du courant, ses déviations restent exactement proportionnelles aux quantités d'électricité qui le traversent. Si donc le courant passe pendant un milHème de période, l'intensité marquée à l'ampèremètre sera le millième de l'intensité totale; pendant dix millièmes de période elle sera dix fois le millième de l'intensité totale; d'une façon géné- rale, si i est l'intensité du courant intermittent donné par l'ampère- mètre, I l'intensité du courant lorsque le circuit est fermé, looo la période, n la durée de passage du courant en millièmes de période , on a : ni ■ iooo i d ou 1 = looo n C'est à l'aide du milliampéremètre apériodique que l'on règle la fraction de période pendant laquelle on veut faire passer le courant. On ferme le circuit sur une résistance non polarisable, on élève la tension jusqu'à ce que l'ampèremètre marque par exemple dix milli- am^ières, on met en route l'interrupteur et on déplace le balai mobile jusqu'à ce que l'intensité du courant intermittent soit un milliamx^ère ; c'est qu'alors le courant passe pendant un dixième , ou cent millièmes, de la période. Veut-on établir un passage beaucoup plus court, pendant un millième de période par exemple, on diminue la résistance placée dans le circuit jusqu'à ce que l'intensité du cou- rant intermittent ait passé d'un milliampère à cenl milliampères, puis on ramène cette intensité à un milliampère par le déplacement D'^ ST. LEDUC. — COURANTS INTERMITTENTS DE BASSE TENSION I063 du balai mobile ; le courant passe alors pendant un millième de la période. D'une façon générale, looo étant la durée totale de la période, I est la déviation de l'ampèremètre dans le circuit fermé, i dans le circuit intermittent, n la durée de passage du courant; on a : i n ,. , looo / d ou n = — î — I lOOO Il faut bien remarquer que, lorsqu'on utilise une variation de résistance dans le circuit pour régler la fi-action de période du pas- sage, il faut en tenir compte dans la mesure de i. Lorsque, j)ar exemple, par la diminution de la résistance, on porte la déviation de I à loo, chaque division ne représente plus qu'un centième de milliampère. D'ailleurs, dans la pratique, il sera avantageux d'avoir une gradua- tion indiquant, par la position du balai mobile, la fi'action de période pendant laquelle passe le courant. Connaissant le nombre des intermittences dans l'unité de temps et la fraction de période pendant laquelle passe le courant, on peut en déduire la durée absolue de chaque passage, c'est-à-dire le temps de chacune des fermetures du circuit. Supposons par exemple qu'il y ait cent intermittences par seconde et que le com^ant passe pendant un millième de la période, il en résulte qu'il passe pendant un cent millième de seconde. Si N est le nombre des intermittences par seconde. la fraction de période pendant laquelle loasse le cou- lOOO ^ rant, D le temps de chaque passage, on a : D= " looo N IN On arrive ainsi à mesurer avec précision , par une déviation gal- vanométrique parfaitement stable , les fractions de temps extrême- ment petites ; nous avons mesuré des durées de passage d'un trois cent millième de seconde. Connaissant la durée absolue t de chacun des passages et l'inten- sité du courant I à circuit fermé, on connaît ainsi la quantité d'élec- tricité Q = It, qui traverse le circuit, et la quantité d'énergie corres- pondante Elf, pour chaque passage du courant. La durée de chacun des passages du courant, dont les actions s'ad- ditionnent pour produire l'excitation neuromusculaire, n'a pu jusqu'ici être mesurée dans la pratique de l'électricité médicale; et, cependant, nous lavons dit déjà, son influence sur les actions des courants io64 ELECTUICITE MEDICALE paraît dominante. Un courant ayant cent intermittences par seconde et passant pendant cent millièmes de la période, c'est-à-dire pendant un millième de seconde, nous a donné le seuil de l'excitation du nerf cubital au coude avec une tension de sept volts. Dans ces conditions, les limites des variations du voltage faisant Classer d'une excitation nulle à un tétanos insupportable ne dépassent pas un volt. Si l'on fait varier cette durée de passage depuis un millième jusqu'à 900 millièmes de période, on obtient le seuil de l'excitation. Temps de passag'c du courant en seconde Pour de période avec 22 volts 1000 ^ 10 0,00001 1000 20 1000 3o 1000 1000 5o 1000 60 1000 j o 1000 1000 100 1000 200 1000 3oo 1000 400 1000 5oo 1000 600 1000 700 1000 800 1000 900 1000 i5v 0,00010 i3v5 0,00020 I2V o,ooo3o 11^5 0,00040 iov5 o,ooo5o 9V 5 0,00060 9" 0,00070 8v5 0,00090 r 0,00100 7V 5 0,002 8v o,oo3 8,5 0,004 9^ a,oo5 9' 5 0,006 lov 0,007 nv 0,008 12» 0,009 D^' ST. LEDUC. — COURANTS INTERMITTENTS DE BASSE TENSION loGS Les résultats exprimés numériquement dans le tableau se trouvent graphiquement représentés par la courbe, figure i. .Ahcis cU lâ^caLu-ia B 1Q 2a. 30 ka so .££ _. .. 1000 T»5a IQOO lOOO 100C -IQÛO 1000 liJOO '.OOQ jDOQ o 0 o z 2 r\- m 5^ 22, 21 20 19 19 17 16 15 14 13 12 11 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 Âbcisses de la-courie A _aa- -22_ '00 'l.'àno -^rtnn -ii-iy^n A . Co«-i''be complète des voltages pour les passages de un rnilliéme à 900 n-iillièmes de période. B. Courbe des voltages pour les passages de i millième a 100 millièmes de période avec les abcisses 5 fois plus grandes que pour la courbe A - lao -iOOO 1000 700 •1000 ~8oo loop IV^V IWVU IWVW I WV II.WW IVVW IWVW .WH^ ABOI SS ES: Térlodes j le ru^rriéroUeu,r ea^prime la. durée de passade ^ _ le ddiLomonojteii^, la- durée iotaZe de la- J^ëriod^ 900 1000 FiG. I. On voit que la durée de chacun des passages du courant a la plus grande influence sur le voltage nécessaire pour obtenir le seuil de l'excitation, puisque ces voltages varient de 22 à 7 ; on voit, d'autre part que les tensions nécessaires pour conduire au seuil de l'excita- tion passent par un minima 7 volts, pour le courant passant pen- dant cent millièmes de la période, représentant dans ce cas un millième de seconde. Pour des durées plus courtes du courant, le Aoltage s'élève rapidement suivant une ligne courbe de 7 à 22 volts ; pour des durées plus longues, il s'élève très lentement au contraire, suivant qoo » • 1 une ligne presque droite, jusqu a 12^, pour -^ — -de période ou 0,009 millièmes de seconde pour chaque durée de passage du courant. Dans I066 ÉLECTRICITÉ MEDICALE l'étude de rinhiljition respiratioire, que nous avons faite en collabo- ration avec M. le professeur Rouxeau, nous avons constaté le même phénomène, plus marc[ué encore, puisque la différence s'étendait de lo à 60 volts. Quelle est la circonstance qui détermine ce minimum du voltage nécessaire pour produire une excitation donnée ? Est-ce le rapport entre les temps de passage et d'interruption du courant pendant chaque période? ou est-ce la valeur absolue de la durée du passage? Pour résoudre cette question, nous avons tracé la courbe des voltages nécessaires à l'excitation minima, avec un courant de trois cents intermittences par seconde et nous avons trouvé que le minimum de 1 T 1 100 . 3oo ^ . , , . voltage ne correspond plus au mais au de période, c est-a- ^^ ^ ^ 1000 1000 ^ dire qu'il continue à coïncider avec une durée d'un millième de seconde de passage du courant. D'autre part , la courbe des mêmes voltages avec 40 intermittences par seconde montre que le minimum se déplace vers les fractions de périodes plus courtes. Il semble donc bien cjue le voltage nécessaire pour produire une excitation donnée dépend de la durée absolue de chacun des passages du courant et que le minimum de voltage correspond à une durée de passage d'un millième de seconde. Tout ce que nous savons actuellement sur l'excitation neuro-mus- culaire à l'état pathologic[ue fait présumer que nous avons, dans la mesure des durées de chacun des passages du courant intermittent, un moyen d'apprécier l'état pathologic|ue des nerfs et des muscles, car, à mesure que progresse la dégénérescence d'un organe neuro- musculaire, il faut des durées de passage de plus en plus longues pour en provoquer l'excitation ; mais on n'avait jusqu'ici aucun moyen d'apprécier ces durées. Il est certainement inutile d'insister pour faire ressortir combien la mesure facile et précise des durées de passage du courant intermittent doit contribuer au progrès de l'électrodiagnostic. On aurait sans doute le moyen d'apprécier à toute époque le degré de dégénérescence par la durée du courant nécessaire à l'excitation. Une expérience bien simple permet de donner une démonstration directe de l'influence des durées de passage du courant sur les phé- nomènes d'excitation. L'expérience étant disposée pour enregistrer les contractions de l'adducteur du pouce produites par l'excitation du cubital au coude, un métronome dans le circuit donne un passage du courant par seconde, la force électromotrice étant réglée d'avance pour donner la contraction maxima pour une durée de passage d'un D'" ST. LEDUC. — COURANTS INTERMITTENTS DE BASSE TENSION 1067 millième de seconde, on ferme le circuit de l'interrupteur pour la mise en route et l'on obtient le graphique figure 2, sur lequel on voit les longs passages, correspondant aux faibles vitesses, donner les premières contractions avec de faibles amplitudes, à gauche de J uVlA^JVvJN. FiG. 2. la figure ; à mesure que la vitesse augmente et que les temps de passage diminuent, l'amplitude des contractions croît, puis passe par un maximum, malgré que les temps de passage varient toujours dans le même sens , en diminuant de plus en plus à mesure que la vitesse augmente; enfin, pour les très grandes vitesses et très courtes durées de passage, on voit que l'excitation a presque entièrement disparu. Cette expérience , dans laquelle le rapport entre les durées de passage et d'interruption reste invariable, démontre bien que l'excitation dépend des durées absolues des passages. On peut obtenir une démonstration semblable à l'arrêt de l'inter- rupteur. Dans ces expériences, le nombre des intermittences varie en même temps que les durées de passage , mais les expériences précé- dentes, dans lesquelles le nombre des intermittences restait inva- FiG. 3. io68 ELECTRICITE MEDICALE riable , tendent à démontrer que le voltage nécessaire à une excita- tion donnée dépend de la durée de passage et que, par conséquent, pour un voltage donné, l'action excitatrice dépend aussi du temps de passage. On peut, d'ailleurs, obtenir une démonstration directe de l'in- fluence des durées de passage sans variation du nomljre des inter- mittences, en déj^laçant aussi régulièrement que possible le balai mobile pendant le passage du courant. La figure 3 représente le graphique ainsi obtenu ; les premières contractions à gauche corres- pondent aux très courts passages, les dernières à droite aux plus longs. On voit l'excitation s'élever rapidement lorsque la durée du passage s'accroît et diminuer ensuite lorsqu'elle devient très longue. Si le balai était déplacé mécaniquement, d'un mouvement bien uniforme , la ligne unissant les sommets des amplitudes de contrac- tion représenterait la courbe des actions excitatrices du courant pour les diverses durées de passage. La figure 3 montre des difl'érences dans la forme de la courbe de contraction aux diverses parties du graphique, les dernières courbes ont des abscisses beaucoup plus courtes, une ascension et une chute presque verticale; ce ne sont plus les courbes d'un courant tétani- sant comme le courant faradique , mais de simples secousses muscu- laires comme celles produites par la fermeture d'un courant continu. En d'autres termes, et c'est la constatation d'un fait physiologique nouveau dont nous croyons devoir souligner l'intérêt , malgré que le nombre des intermittences, c'est-à-dire des secousses excitati'ices FiG. 4. soit toujours le même, lorsque la durée des interruptions du courant devient très courte, le courant intermittent acquiert les propriétés physiologiques du courant continu. D'^ ST. LEDUC. — COURANTS IXTERMITTEÎVTS DE BASSE TENSION 1069 Ce n'est pas la longue durée du passage du courant qui influence ainsi le caractère de l'excitation, car, lorsque l'on prolonge le passage en ralentissant les interruptions , on n'obtient aucune modification semblable, parce que la dm*ée d'interruption est également prolongée. C'est donc bien à la courte durée de chaque interruption qu'est due la modification du caractère de l'excitation. Nous avons contrôlé ce fait par des expériences nombreuses; les figures 4 et 5 représentent, avec plus d'amplitude que la précédente, les contractions produites par un même courant intermittent avec des interruptions de 9 mi- liènies de seconde pour la figure 4 et de 0,26 millièmes de seconde pour la figure 5. fuJ ^^N^ FiG. 5. M f |J K M r FiG. 6. r r r r lO-O ÉLECTRICITÉ MÉDICALE Entre les contractions tétaniques et les secousses, on voit sur la figure 5 des contractions intermédiaires, auxquelles paraissent correspondre deux excitations pour chaque passage du courant intermittent. C'est lorsque l'interruption entre chaque passage est d'environ de seconde gue le phénomène est le plus marqué. La figure 6 lOOO ^ représente cette forme de contraction pour des interruptions de de seconde. On voit que dans cette période intermédiaire les lOOO contractions tétaniques et les secousses se trouvent réunies ; à la fer- metm'e du circuit, il se produit d'abord une secousse et ce n'est que pendant la chute de celle-ci que se produit la contraction tétanique. Inutile d'ajouter que nous nous sommes assurés que les phénomènes, consécutifs à chaque fermeture du circuit étaient absolument indé- j)endants de l'ouverture. Nos expériences montrent qu'à mesure que diminue la durée de chaque passage du courant . la tension nécessaire à l'excitation du courant s'élève; si ce phénomène continue dans le même sens, on voit que, pour des passages infiniment courts, de très hautes tensions ne produiront plus aucune excitation des muscles et des nerfs. Les courants de haute fréquence se trouvent ainsi prendre place dans notre courbe d'excitation des courants intermittents, courbe qui unit tous les courants depuis la haute fréquence aux courants continus, et subordonne toutes leurs autres grandeurs à une seule grandeur, la durée de chacun des passages. Dans nos études antéi'ieures sur ces courants , nous avions cons- taté que, pour une même action superficielle, l'action excitatrice pénétrait d'autant plus profondément que leur tension était moindre. Il résulte de nos expériences actuelles que ces propriétés sont égale- ment subordonnées aux dm'ées de passage dont alors nous ne pou- vions tenir compte, et la plus grande pénétration de l'action excita- trice s'obtient avec le minimum de tension correspondant à une durée de passage d'un millième de seconde. Dans nos expériences sur l'inhibition cérébrale, nous avions reconnu, sans pouvoir préciser d'ailleurs . que les eflets du courant intermittent variaient suivant les positions relatives de l'animal et de l'interrupteur dans le circuit. Les actions d'un courant électrique ne sont les mêmes dans tous les points de son circuit que pendant sa constance ; dès que l'on fait varier le courant il s'étabHt. suivant les positions relatives du point do variation, de l'électrode active, des D"^ ST. LEDUC. — COURANTS INTERMITTENTS DE BASSE TENSION IO7I résistances, des capacités, des self-inductions, des sections du cir- cuit, etc., des différences entre les différents points d'un circuit, dif- férences jusqu'ici complètement méconnues et qui s'imposent à l'étude des physiologistes et des médecins, car elles influencent toutes les actions physiologiques de l'électricité. Considérons par exemple , figure 7 , une électrode active i en rap- j)ort avec le pôle, d'une source à grand débit, c'est-à-dire avec un ■ 5 5 volt s + 55 volts I SOT^ KH FiG. 7. point à potentiel bien constant. S est le sujet dans le circuit, R est une résistance, l'électrode indifférente 2 est, par l'intermédiaire de la résistance , mise en rapport avec le pôle positif de la source que nous supposons avoir une force électromotrice de iio volts. Le cir- cuit étant ouvert en A, le potentiel de l'électrode active ne varie pas, et cependant le nerf est excité par un courant qui s'établit en raison de l'élévation du potentiel sous l'électrode indifférente. On peut donc exciter un nerf à potentiel constant. Si le circuit était ouA^ert en B, l'électrode active i serait au potentiel de -|- 55 volts ; au moment de la fermeture elle passerait à — 55 volts et subirait ainsi une varia- tion de iio volts ; le courant, d'ailleurs, serait exactement le même. Nous avions cru d'aliord que le courant seul excitait le nerf et que, pour un môme courant, on avait une même excitation à potentiel constant et à potentiel variable. L'axpérience nous a montré qu'il en était autrement et que , soit par action excitatrice plus grande , soit par modification de l'excitabilité , l'excitation neuromusculaire pro- duite par un courant donné est d'autant plus grande que la variation de i^otentiel au point excité est plus grande. Nous avons, pour ces expériences, employé le combinateur repré- senté figure 8. La pièce P mobile supporte quatre bornes , deux sur le trajet du fd positif, deux sur le trajet du fd négatif; ces bornes ont des l>rolongements métalliques plongeant dans des godets et cuvettes à mercure. On voit que, dans la position P, l'interrupteur est entre le 1072 ELECTRICITE MEDICALE sujet et le pôle négatif de la source et que, dans la position P', il se trouve au contraire entre le sujet et le pôle positif de la source. Il suffit donc d'un déplacement instantané de la pièce mobile j)our changer la position de l'interrupteur, ou d'un organe quelconque du circuit par rapport au corps. En procédant ainsi, on trouve que les ^JnterrcipUur {>~Ji255i FiG. 8. phénomènes d'excitation sous l'électrode active sont toujours plus marqués lorsque l'interruption se fait entre elle et la source que lorsqu'elle se fait entre l'électrode indifférente et la source. La figure 9 représente un graphique obtenu dans l'expérience décrite; les grandes amplitudes de contraction correspondent aux excitations à potentiel variable de 11 o volts, les petites amplitudes aux excita- tions par le même courant à potentiel constant. FiG. 9. D'' ST. LEDUC. — COURANTS INTERMITTENTS DE BAS!^ TENSION 10^3 CONCLUSIONS Les courants intermittents de basse tension permettent de régler et de mesurer avec j^récision la durée de chacun des passages du courant. Dans les actions physiologiques du courant, les grandeurs élec- triques, potentiel, intensité, sont subordonnées à la durée de chacun des passages du courant et peuvent être représentées par une courbe dont les abcisses sont proportionnelles à la durée de passage et les ordonnées à la grandeur électrique considérée. La force électromotrice nécessaire pour produire une excitation donnée passe par un minima correspondant à une durée de passage d'un millième de seconde. La durée des interruptions du courant influence surtout la forme des contractions ; elle doit avoir une certaine grandeur pour donner des contractions tétaniques; si elle est très courte, la fermeture donne une secousse comme le courant continu; pour les durées intermédiaires on a pour chaque fermeture du circuit deux excita- tions, d'abord une secousse et, pendant la chute de celle-ci, une contraction tétanique. Les actions excitatrices des courants électiques ne sont pas les mêmes aux différents points d'un même circuit; si l'électrode active est en rapport direct avec la source et que l'interruption se fasse entre l'électrode indifférente et la source, le potentiel de l'électrode active reste constant et l'excitation se fait à potentiel invariable. Lorsqu'au contraire l'interruption se fait entre l'électrode active et la source, l'excitation se fait à potentiel variable et elle est toujours plus forte que dans le premier cas. C8* I0~4 ELECTRICITE MEDICALE M. WERTHEIM-SALOMONSON Professeur à TUniversité d'Amsterdam COURANTS DE HAUTE FRÉQUENCE NON AMORTIS [(•)i3.846] — Séance du 6 août — Dans une communication antérieure faite au Congrès de Berne, j'ai appelé l'attention sur l'arc chantant de Duddell comme un moyen très commode pour produire des courants sinusoïdaux d'une fré- quence extrêmement élevée. L'appareil consiste en une lampe à arc, par préférence avec régula- tion à shunt, dont on a relié les deux charbons — qu'on devra prendi-e homogènes tous les deux — avec un condensateur. Aussitôt que le circuit du condensateur est fermé, un sifflement se produit dans l'arc : c'est le phénomène de l'arc chantant. Oîi constate alors la présence d'un courant alternatif énergique dans le circuit du condensateur. Si l'on avait pris la précaution d'intercaler le primaire d'un appa- reil d'induction dans ce circuit , on peut transformer le courant sinusoïdal et on retire du secondaire un courant sinusoïdal d'un voltage convenable non superposé sur un courant continu. Depuis que j'ai décrit l'appareil, je l'ai employé pour plusieurs recherches. J'avais déjà constaté que la formule ordinaire pour la fréquence des alternations d'une décharge de condensateur ne saurait être admise, parce 'que l'intensité du courant continu exerce une influence notable sur la fréquence des alternations. C'est pour cela que j'ai étudié systématiquement cette influence. Les résultats de ces recherches ont été publiés dans une communication de l'Académie royale des Sciences, à Amsterdam, dans la session du 20 novembre 1902. J'emprunte à cette étude seulement le fait qu'on peut approxima- tivement représenter la variation dans le nombre des périodes par la formule : log. P 1= rt + bl, où P est le nombre des périodes complètes , I l'intensité du courant continu et a et & sont deux constantes. ■\VERTHEIM-SALOMOXSON. — GOURANTS DE HAUTE FRÉQUENCE 10^5 Le nombre des périodes par seconde peut être extrêmement élevé : j'ai atteint au moins 3oo.oooo vibrations complètes par seconde. J'ai déjà insisté, dans une communication antérieure, que l'on ne devait pas se servir d'un noyau de fer, qui s'échauffe très vite et qui cause une diminution notable de la fréquence et de l'intensité du courant pris des bornes du secondaire. Je puis ajouter, mainte- nant, que j'ai suivi la prescription de M. Braun, qui s'est servi d'un noyau construit en fer réduit par l'hydrogène mélangé avec un isolant liquide, j)ar exemple la paraffine liquide, et enfermé dans un tube de verre. Mais M. Braun a employé ses noyaux avec des décharges amorties : avec les courants de Duddell, ces noyaux se chauffent comme les autres et offrent absolument les mêmes inconvénients. Je suis revenu avec une certaine satisfaction à mon premier dispositif, qui a encore l'avantage de ne pas déformer les courants sinusoïdaux. Enfin mes expériences ont porté sur les qualités de ces courants comme agents excitateurs des muscles et des nerfs. A mon grand regret, je ne peux pas encore parler de ces expériences à ce moment- ci : elles ne sont pas terminées et les résultats m'ont tellement étonné, que je n'ose pas les exposer sans les avoir répétées sous des conditions plus stringentes et des précautions plus sévères. Pourtant elles m'ont donné un petit résultat assez intéressant. Vous savez tous, depuis les belles recherches de MM. d'Ai'sonval, Bernstein, Wedensky et autres, qu'en général les courants alterna- tifs dune certaine fréquence ont une force excitatrice maxima. Lors- qu'on augmente la fréquence, on n'a plus toujours un tétanos complet, mais, avec les très hautes fréquences, 2,000- 14,000 par seconde, on obtient facilement des secousses de fermeture et quel- quefois des secousses d"ouvertui*e aussi. Comme les courants de Duddell nous offrent des fréquences 10 et 20 fois plus grandes et des intensités énormes, on A'oit tous ces effets très facilement et alors on constate qu'il ne s'agit jjas d'un phéno- mène physiologique, mais d'un effet purement physique. On voit, en fermant ou en ouvrant le courant secondaire, qu'il se produit une série de toutes petites étincelles presque microsco- piques entre les points de contact, et c'est pendant que ces étincelles jaillissent qu'on voit apparaître la secousse d'ouverture ou de ferme- ture. Lorsqu'on ouvre les contacts très lentement, on peut facilement changer les secousses d'ouverture en tétanos d'ouverture. Lorsqu'on fait l'expérience sur soi-même, on remarque aussi que l'intensité du courant est beaucoup plus grande quand une petite étincelle de quelques dixièmes de millimètre est intercalée dans le 1076 ÉLECTRICITÉ MÉDICALE circuit secondaire. L'intensité du courant baisse notablement aussitôt qu'on ferme le circuit complètement. L'explication est très simple. Chaque bobine a, outre une self- induction assez élevée, une petite capacité, dont on ne parle pas, mais qui entre dans toute théorie quelque peu complète de l'appareil d'induction. Quand on ouvre le circuit, l'action de cette capacité devient mani- feste et il s'établit un courant assez fort même, causé par la réso- nance du circuit secondaire avec le circuit primaire. Mais, aussitôt qu'on ferme le circuit secondaire, on diminue la capacité. Alors intervient l'action du self, qui, cette fois, n'est pas neutralisé par la capacité. Par conséquent, le courant peut notablement diminuer en fermant un circuit et en rapprochant deux points entre lesquels éclate une étincelle. Je dois ajouter que je ne crois pas avoir donné une explication pour tous les cas de secousse de fermeture ou d'ouverture : je nai voulu que signaler une cause purement physique et je m'abstiens d'indiquer d'autres causes cpii existent. M. le D' MESNARD à Paris DIAGNOSTIC ET TRAITEMENTS PHYSIQUES ET MÉCANIQUES DE LA PARALYSIE INFANTILE [616.849J — Séance du 6 août — La paralysie infantile, décrite en i85i par Rilliet, sous le nom de paralysie essentielle, le fut, quatre années plus tard, par Duchenne. de Boulogne, sous le nom de paralysie atrophique graineuse. Laborde et Cornil, en 1864 et 1866, mirent en lumière l'atrophie des cordons antéro-latéraux de la moelle épinière ; enfin Vulpian . intéressé par cette découverte, continua cette étude et découvrit que la lésion intéressait les cornes antérieures. C'est depuis cette époque que la paralysie infantile est considérée comme une myélite systématique des cornes grises antérieures de la moelle. D'^ MESXARD. — LA PARALYSIE INFANTILE 10;7 Ne voulant pas écourter un travailint éressant en ne nous occupant que de la question diag-iiostic , nous croyons devoir réunir, aussi brièvement que possible, sur l'étiologie de la maladie qui nous occrupe, de même que sur Tanatomie pathologique et les symptômes. Étiologie. — La paralysie atrophique est presque exclusivement observée dans la première enfance ; c'est ce qui lui vaut la dénomi- nation, vague mais courante, de paralysie infantile. Elle est fréquente dans les deux premières années de la vie. Elle devient rare après la quatrième année. Exceptionnellement on en a observé quelques cas dans la péi;iode de l'adolescence. On a beaucoup incriminé la dentition, qui semblait, pour quelques- uns, jouer un certain rôle pathogénique ; mais il n'y a là rien de fondé ; ce qui pourrait être plus admissible, comme causes prédispo- santes, ce seraient certaines maladies infectieuses, parmi lesquelles on doit citer : la fièvre typhoïde . la scarlatine et même la rougeole. Medin, de Stockholm (dans les Archiçes de Médecine des Enfants, juin 1898), parle d'une épidémie de fièvres infectieuses qui produisit des paralysies atrophiques. Faut-il conclure (avec Cordier, dans le L)'on médical, janvier et février 1888). à la contagiosité du mal, parce que, sur une population de 1400 habitants, i3 cas de paralysie infantile survinrent simultanément ? Nous n'oserions répondre par latUrmative. Ce qui est bien certain, c'est que, fréquemment, des enfants suc- combent pendant des convulsions, sans qu'on ait le temps de diag- nostiquer la paralysie atrophique. Anatomie pathologique. — En ce qui concerne l'anatomie patho- logiciue, rappelons que Damaschino et Roger indiquent la formation, dans l'une des cornes grises , de foyers de myélite avec ramollisse- ment rouge. Ces foyers de myélite, suivant la localisation et l'étendue de la paralysie, sont en nombre variable. Dans la Revue des Mala- dies de VEnfance (année i883), Archambault et Damaschino font remarquer que ces foyers, sur un enfant mort au 26'^ jour, formaient — sur des coupes — des taches parfaitement visibles à l'œil nu. Lorsqu'il s'agit d'ulcérations anciennes, les cellules sont le siège dune atrophie scléreuse ; les racines antérieures et les cordons blancs sont atrophiés. On tend à croire que l'inflammation commence par la névroglie et les vaisseaux; les cellules sont prises ensuite. Charcot, cependant, 1078 • ÉLECTRICITÉ MÉDICALE fut d'avis que c'était sur la substance grise et les cellules motrices que débutait l'inflammation. Il est rare de voir siéger les lésions au niveau du renflement cer- vical; on les trouve pi^esque toujours — unilatérales ou bilatérales — au niveau du renflement lombaire. Les muscles ne sont, parfois, qu'un peu diminués de volume, mais il est des cas où le muscle disparait et se trouve remplacé par sa gaine aponévrotiqne. Parfois sa couleur reste normale, mais il peut devenir graisseux et jaune. Dans tous les cas, rien de constant dans cette atrophie, comme on a pu le croire. Les os, eux-mêmes, subissent un arrêt d'accroissement de plusieurs centimètres du côté malade, alors que les membres sains continuent à évoluer normalement. Au niveau des épiphyses leur volume diminue et il y a une altération marquée des surfaces articulaires. Symptômes. — Il est exceptionnel que le début de la paralysie infantile ne soit précédé ni de fièvre ni de convulsions. La fièvre peut être rémittente ou continue, très courte, éphémère même, mais elle peut, aussi, durer pendant toute une semaine. Certains enfants accusent des douleurs dorsales; plus rarement, des fourmillements dans les membres. Ce qui est très remarquable, c'est que la paralysie est d'abord très étendue — (elle peut même être générale) et qu'elle se limite , ensuite , à un membre ; mais cela n'a lieu qu'après une dizaine de jours, ou, tout au moins, après cinq ou six jours. Il y a abolition ou diminution des réflexes. La sensibi- lité est conservée. L'émission des urines et des matières fécales s'ef- fectue normalement. L'hémiplégie est rare; on observe plutôt de la paraplégie, avec prédominance d'un côté. On peut aussi constater la paralysie d'une jambe et celle du bras opposé. C'est la forme croisée. De même, on voit la paralysie infantile limitée à un seul muscle ou à un groupe de muscles. Le côté droit est plus souvent atteint que le côté gauche. Il est à remarquer que, lorsque la paralysie frappe un enfant qui n'a pas encore marché, il y a immobilité absolue du membre paralysé. S'il s'agit d'un enfant qui a marché, la marche devient diflicile ; il y a claudication. Il traîne la jambe. Lorsque la maladie compte déjà cinq ou six semaines de durée, les extrémités des membres paralysés, surtout les pieds, deviennent froids et sont quelquefois œdémateux. Il résulte de l'atrophie de certains muscles, que ne contreba- Dr MESNARD. — LA PARALYSIE INFANTILE 107g lancent plus les antagonistes, des déformations parmi lesquelles nous citerons le pied bot, qui peut être valgiis ou variis équin. Nous nous contenterons de ce très bref aperçu des symptômes de la paralysie atroplnque pour nous occuper , avec plus de développe- ment, de la question de diagnostic et de traitements. Diagnostic et électro-diagnostic . — Il est impossible, disons-le, à la 2)hase aiguë, de reconnaître la paralysie. Il est trop naturel de songer, à ce moment, à une méningite ou, même au début, à une fièvre infectieuse. Le diagnostic est de beaucoup plus aisé à la phase de paralysie et d'atrophie. Lorsque c'est la forme hémiplégique qui est observée, la paralysie est d'origine cérébrale; elle débute d'emblée, intéresse la face et n'est pas accompagnée d'atrophie. La résistance électrique se trouve, de façon très sensible, augmentée au niveau des muscles paralysés. Il est facile de constater ce fait par la simple abservation du mil- liampéremètre placé dans le circuit. — Lorsque V électrode active est placée sur le côté sain et quand on la pose sur le côté paralysé, on note une diminution, très appréciable, de Vintensité. Ce qui prouve, évidemment, que la résistance est augmentée. On distinguera facile- ment les états paralytiques du rachitisme, de la diphtérie, du mal de Pott, l'atrophie musculaire, des arthropathies, de la paralysie infan- tile. La paralysie obstétricale des nouveau-nés, lorsqu'elle guérit, est assez facile aussi à distinouer. Il est des cas où elle est suivie d'atro- phie musculaire. Il faut insister, alors, sur les commémoratifs , et le doute cessera si elle siège aux membres supérieurs. Pas d'erreur de diagnostic possible, non plus, avec l'atrophie mus- culaire progressive qui s'établit petit à petit, progressivement et qui est chronique. Traitements pliysiques et mécaniques. — On a dit, on a cru, que les traitements de la paralysie infantile n'étaient que des palliatifs, et beaucoup de traités de médecine déclarent que cette maladie est incurable. Évidemment, il y avait du vrai dans ces assertions lorsque l'électrothérapie n'était qu'à la période des essais, La révulsion locale par les ventouses, les pointes de feu, les vési- catoires, augmentaient les souffrances des malades et ne les guéris- saient pas. Tout au plus y avait-il accalmies. Les purgatifs, la strych- nine, l'ergotine, sont souvent, trop souvent, demeurés lettre morte 1080 ÉLECTRICITÉ RIÉDICALE comme indications thérapeutiques, de même que les bains salés et sulfureux. Il n'en est plus de même avec le traitement électrique, et nous proclamons hautement que l'électrothérapie, sagement con- duite, appliquée longtemps avec la forme qui convient à chaque cas, peut , ou guérir la paralysie , si elle est légère , ou singulièrement Taméliorer; c'esi-à-dire que Ton constatera une diminution de l'atro- phie du membre paralysé, une réguh^tion thermique à peu près nor- male des muscles paralysés, une difformité beaucoup moindre du pied ou de la main et la marche se rapprochera beaucoup de la marche normale. N'est-ce pas déjà un énorme progrès, cela? Evidemment, nous n'avons ])as la prétention d'émettre qu'en principe toutes les paralysies infantiles sont tributaires d'un traite- ment par l'électricité; mais, ainsi que nous venons de le dire, nous aflirmons qu'elle peut, toujours, produire une amélioration sen- sible. L'essentiel est de savoir comment doit être appliqué le traitement. Lorsqu'on se trouve en présence d'un enfant atteint de paralysie atrophique graisseuse et que le diagnostic est nettement établi, on devra d'abord rechercher les réactions électro-musculaires. L'examen électrique permettra au praticien de se prononcer relativement à la gravité de la paralysie. Nous avons donné, plus haut, la marche à suivre pour cet électro- diagnostic. Les réactions musculaires que l'on constatera, dans la poliomyé- lite antérieure, peuvent être divisées en trois classes, et à chacune corres^jond un pronostic de gravité différente : a) Certains muscles du membre paralysé ne présenteront qu'une diminution de l'excitabilité faradique. une égalité de catliode et d'anode à la fermeture. Soyez assurés que ces muscles reviendront à l'état normal à la suite d'un traitement bien conduit et approprié. C'est une lésion des cellules des cornes antérieures peu profonde qui cause leur para- lysie. Ces cas sont rares, malheureusement. h) Chez le même enfant on peut aussi trouver la réaction de Duchenne de Boulogne (c'est-à-dire l'abolition de l'excitation fara- dique) et celle d'Erb. avec une remarquable lenteur des secousses. Si l'on porte, alors, l'excitateur sur le tendon des muscles observés, on constatera, en troisième lieu, la réaction de Remak Doumer. Il est aisé de comprendre alors que, dans ce cas, le pronostic est grave. Cependant, on doit instituer le traitement électrique, puisque I D' MESXAKD. — LA PARALYSIE INFANTILE I081 les muscles ne se trouvent pas complètement isolés de leurs centres trop hi que s. c) On trouvera, enfin, des muscles chez lesquels existera la réaction de Duclienne de Boulogne sans que l'on puisse constater la contractilité galvanique d'Erb. Seule, la réaction de Remak-Doumer persistera. Plus grave encore sera le pronostic dans cette forme. Nous aurons la déformation du membre et l'atrophie musculaire. Quoi qu'il en soit et quelle que soit la nature des réactions mus- culaires, on devra se servir du courant galvanique. On préludera par la galvanisation continue : 1° Electrode de loo centimètres carrés sur la colonne au niveau de la région correspondant au siège des cellules lésées ; 2° Electrode de plus petite surface . et de forme appropriée à celle du groupe musculaire à traiter, appliquée sur les muscles para- Ivsés ; 3" On reliera cette électrode active au pôle positif. Au bout de fort peu de temps, on constatera que la température du membre paralysé égalera celle du côté sain. Conclusion. — La nutrition du muscle paralysé est favorisée par le courant. La durée des séances d'électrisations sera de dix minutes, pas plus, pour chaque groupe musculaire. L'intensité, pour une surface active, sera portée de 60 centimètres carrés à la valeur de i5 à 20 M. A. On continuera ainsi pendant huit ou dix jours, et les petits malades supporteront parfaitement ses séances. Puis on en viendra à l'excita- tion de la fibre masculaire, toujours avec le courant galvanique, excepté lorsque le degré de la lésion n'entraînera pas la réaction d'Erb, auquel cas il faudrait recourir au courant faradique rythmé. Lorsque l'électro-diagnostic aura révélé l'existence des trois réac- tions (de Duclienne de Boulogne, d'Erb. de Remak), on se servira du courant galvanique rythmé, ou de l'appareil de Truchot. Durée des applications : trois à cinq minutes pour chaque groupe de muscles. Séances tous les deux jours. Le traitement électrique, pour être vraiment efficace, doit être institué dès que la paralysie a été constatée. Pourquoi, en effet, ainsi que l'on a eu, parfois, l'habitude de le faire, attendre deux ou trois semaines? — C'est du temps perdu bénévolement. Ce qu'il importe de posséder pour traiter avec succès les petits loSa ÉLECTRICITÉ MÉDICALE paralysés, c'est de la patience. Celle-ci, nous le savons, se rencon- trera toujours chez le médecin, mais il lui sera plus difficile de trouver cette docilité, cette constance, chez les parents qui, sans réfléchir et sans connaître la profondeur des lésions, voudraient voir obtenir une guérison au bout d'un mois à peine ! Il faut donc que tout médecin qui s'intitule électricien inspire aux parents des enfants qu'il a à traiter de la confiance, de la foi, si non en la guérison complète, totale, du moins en l'amélioration qui per- met d'espérer, encore, davantage. Les malades doivent être soumis, pendant longtemps, à l'action du courant. Et, par longtemps, nous n'entendons pas dire cincf ou six mois, mais, bien tt'ois ou quatre ans. Il est bien entendu que, si au début, les séances sont renouvelées tous les deux jours, on peut, au bout d'un certain temps, laisser quelque répit aux malades, mais jamais, pendant plus de huit ou dix jours. Pour être plus précis, disons que le traitement doit être suivi, pendant trois mois, avec la plus grande régularité. On espace les séances, ensuite en en faisant deux par semaine, pendant trois mois, encore. Puis on ne fait plus qu'une séance par semaine. — C'est, du reste, au médecin à reconnaître à quel moment il doit cesser son intervention. Le traitement électrique agit, très probablement, sur les fonctions trophiques de la moelle. Les résultats qu'il donne méritent que l'on s'obstine à l'appliquer. Nous ne conseillons pas de lui adjoindre le massage, à aucun moment; mais nous sommes assez pai^tisan, comme corollaire, du traitement électrique des frictions sèches, ou à l'alcoo- lat de lavande et, dès que les enfants peuvent le supporter, certains mouvements de la gymnastique suédoise, qui, depuis quelques années, tend à s'acclimater en France, nous ont toujours semblé aider à l'amélioration à l'acheminement vers une guérison, lorsqu'elle est possible. D"" MONDAIN. — UN CAS DE CANCER GUÉRI PAR LES RAYONS X Io83 M. le D-^ MONDAIN au Havre fc UN CAS DE CANCER GUÉRI PAR LES RAYONS X f6i5.84Q: [615.849:616.0046] — Séance du 6 août Obs. — La malade qui fait l'objet de cette communication est âgée de cinquante-six ans; elle appartient à ime famille d'arthritiques (grand- père, père, frères) goutteux; sa mère est morte d'un cancer utérin à cin- quante-cinq ans. Comme antécédents personnels, on peut noter un coryza chronique débutant à douze ans, mie lièvre tjv'phoïde à vingt ans; à trente-cinq ans, une péritonite et de fréquents accès d'asthme accompagnés de bron- chites. Deux fois mariée, deux enfants, deux fausses couches; toujours très bien réglée; elle a eu son retour d'âge à cinquante-trois ans. C'est à ce moment, en 1900, qu'elle s'aperçoit que son sem gauche augmente légère- ment de volume et devient plus dur que le droit ; mie petite dépression apparaît à gauche du mamelon. Étant alors à Saint-Dié , elle consulte un médecin, qm pose le diagnostic de mastite chronique et lui donne mie pommade avec de bomies paroles. En 1901, léger suintement du mamelon; on continue la pommade en toute sécurité. Au commencement de 1902, la malade vient habiter Le Havre. En juin, apparaît une rougeur au-dessus du mamelon, suivie bientôt d'une ulcéra- tion qui laisse suinter un liquide d'mie odeur douceâtre. Bien que la malade ne souffre pas, elle consulte un chirurgien, qui juge l'opération impossible et fait des applications de baume du Commandeur. Deux nouvelles ulcérations apparaissent et, (piand, au mois d'août, on consulte le professeur Troisier, celui-ci déclare au mari qu'il s'agit d'une affection incurable devant amener la mort dans quelques mois. On contmue les apiilications de baume du Commandeur. Cependant l'ulcération fait des progrès rapides et, en octobre, les dou- leurs commencent en même temps que suinte un pus fétide. Je fus appelé pour voir la malade le 18 janvier 1903. A cette époque, l'ulcère nous offre la forme d'un ovale ayant un grand diamètre transversal de 12 centimètres et un petit de 8 centimètres, d'une profondeur de 5 millimètres environ. Les bords sont festonnés, rougeàtres, et, au centre, on voit le mamelon sphacélé et noirâtre. Il en coule une sanie infecte; de nombreux vaisseaux s'irradient du côté du cou et de l'aisselle; on trouve des ganglions sus-claA'iculaires et axillaires. La ma- lade a légèrement maigri; son teint est jaune; cependant, l'état général I084 ÉLECTRICITÉ MÉDICALE reste assez bon; les douleurs, surtout fréquentes la nuit, sont encore sup- portal)les. Pendant deux mois, j'essaie en vain tous les moyens possibles de déso- doriser ce foyer putride. Je conseille alors l'application des rayons X. Un radiothérapeute, le D"" Marion, venait de s'installer au Havre; j'allai le voir pour lui demander de traiter ma malade. Apres quelques hésitations, car il n'avait jamais ni traité, ni vu traiter de cancer, il consentit à commencer les applications de rayons sous le couvert de ma responsabilité. Le matériel de mon collègue se compose d'une bobine de 35 centimètres d'étincelle fonctioimant sur courant alternatif, avec soupape de Nodon et interrupteur Ducretet. L'ampoule dont nous nous sommes servis était à régénérateur à potasse, neuve et, par conséquent, molle. Cette ampoule a servi à toutes les séances. Pas de spintermètre , pas de radiochromoinètre , instruments dont j'ai pu ap})récier depuis la nécessité; pas de i)récautions prises pour garantir le visage, le thorax ni l'abdomen de la malade. Le traitement est commencé le ii mars : 11 murs. — Durée de rapplication, - minutes. Distance de Tanipoule, o°'3o 12 maj's. — — 9 — — o"25 i3 inar.s. — — lo — — o"'2o i4 mars. — — lo — — o°'2o 10 mars. — — lo — — o"20 76' mars. — — lo — — o°20 Pendant ces six premières séances, on observe mie dimimition progres- sive, puis une cessation complète de la douleur. L'aspect général de l'ulcère est meilleur; un commencement de cicatri- sation apparaît sur les bords, l'écoulement sanieux diminue. La malade ne fait plus son pansement que trois fois par jour au lieu de a ingt. Du ly au 22 mars, on continue des ap])lications de dix minutes à 18 centimètres de l'ampoule. Au l)out de ces six nouvelles séances, l'ulcère se comble de l^ourgeons, le champignon central, formé par le mamelon, est en voie de résorption, le suintement est presque nul et d'mie odeur très supportable. Du 2/f mars au 2'^'' avril inclus, on fait encore neuf séances de dix minutes et à 20 centimètres. L'ulcère a un très lion aspect bourgeonnant. La cavité est coml>lée et, sur les bords on a gagné 8 millimètres ; il n'existe plus ni sanie ni odeur; mais un érAthème intéressant la région pectorale, le cou, la face et le bras gauche, api^araît soudain et la malade se plamt de perdre ses cheveux. Malgré tout (les débutants ont seuls de ces audaces) on continue les séances, toutefois, le temps d'exposition aux rayons n'étant plus que de six mmutes, mais toujours à 20 centimètres du tube. Au bout de sept séances, i3 avril, vingt -huitième jour du traitement, l'ulcère a gagné 2 milHmètres sur ses bords, le champignon central est considérai )lement diminué. Le .2^ avril, après six nouvelles séances, trente-quatrième jour du traitement, on voit apparaître, au-dessous de l'ulcère, une magnilique D"" II. BORDIER. — INFLUENCE DE LA GALVANISATION PRIMITIVE Io85 flore de l>iilles phlycténulaires, qui laissent suinter une sérosité abondante, en même temps que renaissent de cuisantes douleurs. Mon collègue juge lion d'interrompre le traitement. Cei^endant, au bout de quelques jours, le liquide prend une odeur sanieuse. On recommence les applications des rayons X le ^ mai. La malade est à ^o centimètres du tube et les séances durent huit minutes. Au bout de deux jours, il n'y a plus de sérosité et, le o5 mai, trente-neuvième application, sa cicatrisation est presque complète: l'ulcère est recouvert d'une peau fine, avec quelques écailles mélicé- riques. ' Depuis, nous avons fait quelques séances complémentaires en juin et juillet, d'al>ord deux fois par semaine, puis une seule, le tube toujours à 40 centimètres, et pendant cinq minutes seulement. A l'heure actuelle, l'ulcère est remplacé par une peau rose de bon aloi; les ganglions axil- laires et sus-claviculaires n'existent plus; la malade a repris sa gaieté et sa vie ordinaire. Je suis loin de penser que les rayons X doivent, dans tous les cas, guérir les cancers; mais je puis conclure, après bien d'autres d'ailleurs plus compétents que moi en cette matière, cfue c'est, à l'heure actuelle, la méthode de choix pour le traitement de cette terrible maladie. Je crois, d'ailleurs, qu'en ayant soin de n'employer que des rayons d'un degré de pénétration déterminée, toujours le même pour chac[ue malade et en protégeant le sujet d'un écran de plomb, on peut employer cet agent thérapeutique avec des chances sérieuses de succès, et sans danger. M. le D' H. BORDIER Agrégé à la Faculté de Médecine de Lyon INFLUENCE DE LA GALVANISATION PRIMITIVE D'UN MEMBRE SUR CELLE DU MEMBRE OPPOSÉ [6i5.843j — Séance du 6 août — Il arrive, dans certains cas, c[ue l'on est obligé d'appliquer le cou- rant galvanique successivement aux deux bras ou aux deux jambes cVun malade : de soumettre par exemple le bras droit, de l'épaule à la main, à l'action du courant, puis de faire la même opération pour le bras gauche. I086 ÉLECTRICITÉ MÉDICALE C'est pendant une série d'applications de ce genre que nous avons observé le i)hénomène que nous allons décrire. Supposons un malade sur lequel on va procéder à la galvanisation du bras droit, en appliquant derrière l'épaule droite une électrode de loo cent, carrés, pendant que son avant-bras plonge dans un bain d'eau chaude à 38", où se trouve une lame de charbon reliée à la source galvanique ; de plus employons un réducteur de potentiel afin de nous mettre à l'abri des variations de résistance qui poui'- raient se produire dans un rhéostat à liquide. Si nous portons l'intensité du couinant à 20 mA par exemple , nous observerons une ascension progressive qui cessera au bout de 10 à i5 minutes. Notons l'augmentation de l'intensité au-dessus de 20 mA. Procédons alors à la galvanisation du bras gauche en suivant exactement la même technique que tout à l'heure, l'eau étant de nouveau reportée à 38-. L'électrode de 100 cq. est maintenant der- rière l'épaule gauche. Après avoir porté le courant à 20 mA avec le réducteur de poten- tiel comme précédemment , on constatera encore une ascension pro- gressive de l'intensité; mais celle-ci sera beaucoup plus marquée que dans le premier cas ; elle sera deux ou trois fois plus considé- rable. Tel est le fait que nous avons observé sur un malade atteint de phénomènes névritiques des deux côtés. Nous avons voulu savoir si la même inégalité d'ascension galvano- métrique s'observerait sur un sujet sain et nous avons vu, en effet, que dans la galvanisation du bras gauche, avec 20 mA comme inten- sité initiale, l'ascension après un quart d'heure était de 4ni A, tandis que dans la galvanisation du bras droit, faite aussitôt après et dans les mêmes conditions, l'ascension était de 10 mA; c'est-à-dire que dans le premier cas le milliampèremètre marquait 24 niA et dans le second 3o mA. Nous nous sommes demandé quelle pouvait être la cause d'une telle différence entre les deux côtés électrisés ainsi successivement; pourquoi l'intensité monte-t-elle davantage du côté qui est électrisé en second lieu? Nous avons pour cela cherché à voir si la résistance électrique ne subissait pas, du fait d'une première galvanisation, une dnninu- tion du côté op^iosé. Nous avons employé, pour ces mesures, la méthode clinique du professeur Bergonié avec l'appareil à fil rectiligne que nous avons décrit ailleurs (Société médicale des Hôpitaux de Lyon, mai i9o3). \ D^ H. BORDIER. — INFLUENCE DE LA GALVANISATION PRIMITIVE Io8;7 Nous avons appliqué une électrode neuve de loo cent, carrés derrière l'épaule droite d'un sujet, pendant que sa main plongeait jusqu'au poignet dans de l'eau à 35°. Dans ces conditions, en défal- quant la résistance des électrodes , nous avons trouvé une résistance de 3854^ 80. Nous avons alors soumis ce même côté droit à la galva- nisation avec 20 niA, exactement comme dans les cas précédemment rapj)ortés. Après i5 minutes de cette électrisation, nous avons pro- cédé à la mesure de la résistance du côté gauche. Cette fois, la résistance a été trouvée égale à 2962^40» au lieu de 3854.8; il y a donc eu, après la galvanisation du côté droit, une diminution de 892^40 dans la résistance du côté opposé. Chez un second sujet, nous avons effectué les mêmes mesures et la même expérience en électrisant d'abord le côté gauche : la résis- tance, de l'épaule à la main, de ce côté, fut trouvée égale à 3923^-80. Après galvanisation, avec 20 niA, du bras gauche, la résistance de l'épaule à la main du côté opposé (droit), la résistance était tombée à 3486^^80, d'où une diminution de 437 ohms. Il résulte de ces mesures et cela d'une façon très nette, que la première galvanisation a pour effet de diminuer la résistance élec- trique des autres régions symétriques du corps; cette diminution permet alors de se rendre compte de la plus grande valeur de l'ascen- sion galvanométrique du côté galvanisé en second lieu. La première galvanisation a pour ainsi dire préparé le terrain et favorisé les con- ditions de l'application du courant sur le côté symétrique et opposé. Comment maintenant expliquer cette influence d'une première électrisation? Il ne paraît pas douteux qu'il faille chercher ailleurs que du côté des centres nerveux vaso-moteurs : ces centres se trouvent, on le sait, dans l'axe bulbo-médullaire et dans les ganglions du sympathique. Or, les lignes de flux du courant appliqué en premier lieu ont produit sur ces centres une excitation qui s'est manifestée par une vaso-dilatation dans les régions dépendant des centres touchés. Il y a eu, par la première application, mise en branle pour ainsi dire de ces actions vasomotrices par l'excitation des centres, si bien qu'iiprès cette première application de courant, la résistance électrique du côté opposé se trouve diminuée par suite de la vasodi- latation produite. Si donc on galvanise ce côté-là, l'intensité s'élèvera rapidement et atteindra une valeur plus considérable que lors de l'électrisation première, parce qu'en plus de la vasodilatation générale que celle-ci vient de produire il y aura une vasodilatation intense sous les élec- io88 ELECTRICITE MEDICALE trodes et avec d'autant plus de facilité que les nerfs vasodilatateurs ont été placés dans des conditions tout-à-fait favorables à leur exci- tation. M. le D' H. BORDIER Agrégé à la Faculté de Médecine de Lyon APPAREIL POUR LA MESURE DES RÉSISTANCES ÉLECTRIQUES DES TISSUS CHEZ L'HOMME [.li3.84l.:]: — Séance dn 6 août — Le principe sur lequel repose cet appareil a été indiqué par le professeur Bergonié ; mais la sensibilité de son dispositif est beau- coup moins grande que celle de l'appareil que nous avons construit nous-même au laboratoire de physique et que nous présentons à la Section. Sur une prise de courant continu à iio volts, par exemple, plaçons : 1° un fil de ferro-nickel APBA' (fig- i), ayant une résistance de 5o olims exactement, à la température ordinaire; '2° une lampe L de 5o volts; 3° un rhéostat R; 4" un ampèremètre sensil^le et vérifié. liO volts coi 50.000 mmmmmmsmmmmmLK TJ.yVy. Fig. I. D'' H. BORDIER. — LA MESURE DES RÉSISTANCES ÉLECTRIQUES I089 En agissant sur le rhéostat, il sera facile de donner à l'intensité du courant la valeur de i ampère : à ce moment-là on a, d'après la loi d'Ohm (I =:^j. E jamp. 00''^ ' d'où E = 5o volts: ce qui \ç\\l dire qu'il existe, dans ces conditions, entre les deux extrémités du fil de ferro-nickel. une différence de potentiel de 5o volts. EtabHssons maintenant un circuit dérivé en prenant le courant à l'une des extrémités A du fil résistant, d'une part, et, d'autre part, à un curseur C pouvant se déplacer le long du fil; dans ce circuit, plaçons : i'^ le sujet dont la résistance électrique doit être mesurée et sur lequel deux électrodes EE' bien humectées sont appliquées; 2<^ un milliampèremètre sensible. Quand le curseur C est éloigné de l'extrémité du fil, la différence de potentiel , qui est la cause du courant dans le circuit dérivé , va en augmentant, et l'on peut ainsi donner à ce courant dérivé l'inten- sité de I mA. Soit, à ce moment-là. / la longueur du fil résistant jusqu'au curseur; appelons L sa longueur total; il y a entre la diffé- rence de potentiel e, qui correspond au circuit dérivé, et la diffé- rence de potentiel, 5o volts , qui existe entre les deux bouts du fil de ferro-nickel, la relation : e _ l 5o "~ L ' d'où 00 D'autre part, lorsque l'intensité du courant dérivé est égale à Qamp.Qoj QYi ^ en désignant par .v la résistance du circuit. on tire de là : e Qamp.QQj -- — . .V A' = = 1,000 X e o.ooi ^^ Si l'on remplace e par sa valeur précédemment calculée, il vient : 00.000 , .V = ï X l 69* lOqO ÉLECTRICITÉ MEDICALE La résistance .y est. par suite, obtenue en multipliant le terme constant - — par la distance / à laquelle le curseur a été placé, Pour avoir la résistance des. tissus, il suffît d'appliquer les deux électrodes lune contre l'autre et avec la même pression que celle avec laquelle elles étaient fixées sur la peau ; leur résistance mesurée avec la même technique que précédemment est alors retranchée de la résistance totale x. Dans notre appareil (Jig'. s), le quotient — r — est égal à ^,6 ; par conséquent, chaque millimètre parcouru par le curseur fait varier la résistance de ^,6 ohms; pratiquement donc, la valeur de la résis- tance à mesurer s'obtient en multipliant la longueur l par 4,<3. FlG. 2. Comme on le voit sur la figure 2, tous les instruments nécessaires aux mesures sont fixés sur la même planche ; les deux bornes de gauche servent à fixer les fils de la prise de courant à iio volts ; les deux bornes de droite sont destinées aux fils allant aux électrodes. Le fil de ferro-nickel est tendu sur une plaque de marbre de la façon suivante : deux segments de fil de i mètre de longueur sont tendus entre des bornes fixes, et ces segments sont reliés entre eux à l'extrémité droite ; le reste du fîl, qui est inutile pour les mesures, est enroulé sur un cylindre de fibre. Sur chacun des segments peut se déplacer un curseur qui est fixé sur une lame de laiton graduée en millimètres : ces deux lames peuvent être reliées au circuit dérivé à laide d'un commutateur bavarois placé à droite de la plaque de marbre. Pour procéder à une mesure , on commence par donner au cou- rant principal l'intensité d'un ampère, en agissant sur un rhéostat placé en dehors de l'appareil. Puis, les électrodes étant en place, on met la llche du commuta- D'" H. BORDIER. — LA MESURE DES RÉSISTANCES ÉLECTRIQUES IO9I teur dans le trou inférieur , de façon à relier la lame de laiton du premier curseur à l'une des électrodes. On agit alors sur ce curseur jusqu'à ce que le milliampèremètre indique l'intensité, un milliain- père. On lit le nombre de millimètres correspondant au curseur à ce moment-là. Il n'y a plus qu'à multiplier ce nombre par 4»6 ; si le curseur est en face de la division 872. la résistance cherchée est 872 X 4»6 = 4'Oii ohms. Il peut arriver que l'intensité du courant dérivé n'atteigne pas I niA., quoique le premier curseur soit poussé jusqu'à sa position extrême à droite ; on enlève alors la fiche du commutateur pour la mettre dans le trou supérieur. On fait ainsi communiquer la seconde lame de laiton avec les électrodes. Il ne reste plus qu'à agir sur le second curseur, que l'on pousse de droite à gauche jusqu'à ce que l'intensité du courant dérivé soit égale à i niA. Le nombre relevé en face du second curseur doit être augmenté de 1,000 pour donner la longueur / du fil. Supposons que le deuxième curseur soit en face de la division 204 quand l'intensité est de i m A. ; la résistance cherchée «est égale à (255 -|- 1,000) X 4'^ = 5,^68 ohms. Comme on le voit, la technique est très simple et la sensibilité de l'appareil très suffisamment grande, puisqu'un déplacement du cur- seur de I millimètre correspond à une variation de résistance de 4,0 ohms. Il convient de faire remarquer que les actions vasomotrices pro- duites par le courant sous les électrodes acquièrent ici une valeur presque nulle à cause de la très petite intensité, i mA., qui passe dans le corps du sujet ; c'est là un grand avantage de cette méthode, imaginée, comme nous favons dit, par M. Bergonié, car ces actions vasomotrices , quand elles sont un peu intenses , constituent une cause de perturbations très notables dans la. mesure des résistances des tissus vivants. Enfin, la rapidité des mesures rend cet appareil très précieux pour les recherches cliniques ; en outre . sa sensibilité permet de s'en servir pour les mesures de résistances autres que celles des tissus vivants ; les résultats qu'il fournit sont les mêmes que ceux obtenus à l'aide des méthodes classiques (résistance d'une bobine, d'une lampe à incandescence, etc.). Nous indiquerons ultérieurement des résultats très intéressants concernant des malades atteints d'atlections diverses. I092 ELECTRICITE MEDICALE M. le D^ MORIN de Nantes PRÉSENTATION DE DEUX RÉDUCTEURS DE POTENTIEL LIQUIDES [«i3.84i.7l — Séance du 6 août — Voici les raisons qui m'ont amené à la construction de réducteurs liquides : i° la résistance n'y étant pas divisée par parties plus ou moins grandes, la variation du courant doit s'y produire d'une façon absolument progressive ; la courbe représentative de cette variation, serait une ligne continue, ne présentant pas d'échelons comme il arriverait, par exemple, avec les collecteurs; 2° l'appareil peut s'a- dapter instantanément aux différents potentiels des courants de secteurs; il suffit pour cela d'augmenter ou de diminuer la conduc- tibilité du liquide. Enfin, la construction en est simple et tout médecin électricien peut y arriver lui-même. A côté de ces avantages, il faut noter un inconvénient qui m'a arrêté assez longtemps : je veux parler de la polarisation du liquide conducteur. Le premier modèle réalisé est basé sur le principe du pont de Wheatstone. Soient en effet deux résistances égales branchées en déri- vation, comme l'indique la figure i : un galvanomètre ayant ses. points de contact en leur milieu n'éprouvera aucune déviation, les quatre branches du pont étant égales ; mais le courant y passera et — M M' + FiG. I. 3 FiG. 2. augmentera graduellement, si l'on déplace ces points dans le sens indiqué par les flèches. Dans mon appareil, les branches du pont sont constituées par quatre colonnes liquides d'égale section, donc d'égale résistance si le liquide qui les compose est bien homogène. Il comj)rend quatre cellules, que la figure 2 représente vues d'en haut. D'' MORIX. — DEUX REDUCTEURS DE POTENTIEL LIQUIDES IOqS Deux des cellules contiennent les électrodes fixes , reliées au secteur de courant continu et désignées par leurs signes; les deux autres contiennent les électrodes mobiles , M M', pôles du circuit d'utilisa- tion, reliées au malade. En voici le schéma figure 3. Pour le comprendi^e, supposer raj)pa- reil fendu suivant une ligne dédouljlant une des quatre cloisons représentées figure 2, puis développé, un peu à la manière d'un por- tefeuille, de manière à ce que les quatre cellules soient sur un même l)lan. (Il serait impossible de le représenter autrement ; les cellules se superposeraient deux à deux, et plusieurs lignes seraient perpen- diculaires au plan du dessin. Il est bien entendu que ce développe- ment, purement fictif, serait impossible dans la pratique ; qu'il n'est qu'une simple tentative d'explication.) Sur ce schéma, on trouve donc à gauche, en i, une moitié de cette cloison supposée dédoublée, «liant jusqu'au haut de l'appareil et commençant à une petite dis- tance du fond; la seconde moitié i', figurée à droite, se superpose- rait à celle-ci en supposant l'appareil refermé comme il l'est sur la figure 2. La deuxième cloison, ainsi que la quatrième, est soudée au fond, mais n'atteint pas le haut; elle est dépassée par le niveau du licjuide. La troisième, comme la première, va jusqu'au haut sans atteindre le bas. Sur la figure 2, les cloisons d'ordre pair ou d'ordre impair se continuent en ligne droite : i , 3 , représentées par une ligne forte, vont jusqu'au haut de l'instrument et s'arrêtent à une j)etite distance du fond; 2, 4, représentées par une ligne plus faible, sont dépassées par le liquide et sont soudées au fond. Revenons à la figure 3, où les électrodes fixes sont également dési- gnées par leurs signes, les é. mobiles par les mêmes lettres, et sui- vons les lignes de flux dessinées en pointillé. Le courant parti de -f se divise en deux parties, l'une passant sous la cloison 3, puis con- tournant en haut la cloison 4, pour aller rejoindre le pôle — ; l'autre contournant en haut 2 , puis passant sous i , pour rejoindre égale- ment — (l'appareil refermé, les deux lignes interrompues ici se con- tinueraient). Ces deux lignes de flux sont d'égale longueur et le milieu de chacune d'elles se trouve précisément au haut des cellules occupées par les électrodes M et M', à l'endroit même où sont pla- cées ces électrodes, dessinées ici en haut de leur course. Les deux électrodes mobiles se trouvent donc bien au potentiel o. En descen- dant verticalement dans leurs cellules respectives , elles deviendront l'une positive, l'autre négative, la difl'érence de potentiel montant entre elles aussi lentement qu'on peut le désirer. Le malade, relié sans interposition d'aucune résistance aux élec- 1094 ELECTRICITE MEDICALE trodes mobiles, n'est jamais soumis, du moins pour un faible courant^ qu'à un potentiel minimum; en aucun cas, il n'est en contact avec un des pôles de la source, ce qui a son intérêt lorsque cette source est de 220 volts. Je ferai remarquer de plus que, les é mobiles étant au haut de leur course, la résistance interposée entre elles est maxima et diminue à mesure de leur abaissement et en sens inverse de l'in- tensité. Ce détail est important, ou du moins il en résulte une grande sécurité , au point de vue par exemple de la galvano-faradisation. M +■ M' i' m\ m M' A / - ^^ 1 / '* ' ;1 ,''"'•. i; ç ^ 0 + m 1 t^^ *! '1 1 1 FiG. 3. Cet avantage n'existe plus dans un second modèle qui, par contre, en possède un autre, celui de pouvoir fournir, sous un volume moitié moindre, une double intensité de courant. L'appareil ne comprend plus que deux cellules, dont chacune contient alors deux électrodes, une fixe et une mobile, ayant respectivement la même des- tination que dans le premier. C'est un simple réducteur de potentiel. Les pôles du courant sont placés aux deux extrémités d'une colonne liquide repliée ainsi que l'indique la figure 4» 1^ courant devant contourner une cloison médiane ne s'élevant à peu près que jusqu'au milieu de la hauteur. J'ai été amené, en effet, à recouper peu à peu la cloison, de manière à laisser au-dessus de l'éperon une assez grande épaisseur de liquide; les lignes de flux s'étalent, quoique avec une densité moindre, dans toute la partie supérieure, et les é . mobiles conservent toujours entre elles une petite diflerence de potentiel qui s'est ainsi trouvée abaissée à environ o,o5 de volt. D'' MORIX. — DEUX RÉDUCTEURS DE POTENTIEL LIQUIDES IOqS valeur encore réduite par l'addition d'un bout de cloison coupant les lignes de flux supérieures. Ce qui, avec cet appareil, ma donné d'abord quelques surprises pendant des applications galvano-faradiques, c'est la variation de résistance entre les e' . mobiles. En supposant sur la figure M et M' à diflerentes hauteurs, on peut voir cette résistance devenir rapide- ment très faible, si les électrodes viennent à se trouver à la même hauteur au-dessus de la cloison. Il sullit de connaître cet incon- vénient, pour l'éviter et même pour en tirer parti, en variant en sens inverse chacun des courants superposés. D'ailleurs j'avais eu surtout pour but d'établir un appareil transportable. Mesurant 3o centimètres de hauteur et 4 d'épaisseur, le mien peut aisément déjà passer pour transportable, mais on peut en réduire encore le volume et réaliser ainsi un véritable appareil de poche. Voici sur quoi est basée cette possibilité : Je ferai remarquer d'abord que, étant donnée une composition identique de liquide, la résistance de mes deux appareils est sensible- ment la même. Le second a une section moitié moindre, mais la hauteur de la colonne liquide est aussi environ moitié moindre. Chaque cellule a la forme d'un carré de 35 millimètres de côté , soit 12 centimètres carrés. Par cette section, il passe le courant utilisé, plus le courant circulant toujours dans le réducteur. Or, le courant utilisé atteignant aSo milliampères. le courant total atteint un peu moins de 0,7 ampères, ce qui nous donne une densité de 5o milli- ampères par centimètre carré , valeur maxima au-delà de laquelle la polarisation rend toute application impossible. Ces cliiffï-es n'ont rien d'absolu et varient notamment avec la composition du liquide; peut-être avec certains liquides la densité pourrait-elle devenir beaucoup plus élevée. Je les prends néanmoins comme base pour calculer des dimensions moindres de réducteurs ; mon second appa- reil donnant une intensité utile plus élevée (je suis monté jus- qu'à 5oo), les résultats n'auront rien d'exagéré. Supposons qu'on veuille se contenter d'un instrument donnant couramment 5o milliampères , avec un maximum de 80. Cet instru- ment étant construit d'après les mêmes proportions, ses dimensions devraient être divisées par 3; sa hauteur serait de 10 centimètres, la section de la colonne liquide 4 centimètres carrés ou 2 centimètres de côté. Mais, ainsi compris, il serait peu maniable et il y am*ait tout intérêt à en augmenter un peu le volume : en divisant par exemple par 2 les dimensions primitives, la hauteur deviendrait i5 centimètres, la section 6 centimètres carrés, soit 25 millimètres 1096 ÉLECTRICITÉ MÉDICALE de côté, la largeur environ 6 centimètres. L'instrument, qui ne sau- rait encore passer pour encombrant, atteindrait facilement ia5 milli- ampères. (Raisons qui me font préférer le réducteur à un rhéostat : f. é. m. variable à circuit ouvert; excitation sous un potentiel minimum: utilisation des décharges de condensateur, en faisant varier dune façon continue le potentiel de charge.) Le liquide employé est actuellement de l'eau distillée ou non, très faiblement additionnée d'acide sulfurique, la dose d'acide étant dans mon installation très facilement réglée d'après l'aspect d'une lampe en tension. Ce liquide tend constamment à s'appauvrir, et il faut rajouter de temps à autre quelques gouttes d'eau acidulée. Les électrodes fixes sont constituées par du plomb ordinaire en feuilles ou en fil, et doivent avoir le plus possible de surface utile; elles sont reliées au secteur soit à travers le fond, soit par l'intérieur même de l'appareil, par un fil de plomb isolé sur le reste de son parcours. Ces électrodes sont rapidement formées, supprimant ainsi la majeure partie des dégagements gazeux, qui ne se produisent plus qu'au niveau des électrodes mobiles. Ces dernières ont un peu plus varié ; j'emploie maintenant à peu près indifféremment des électrodes en ploml) non formable. prove- nant de queues d'accumulateurs, ou d'autres découpées dans une lame de charbon de cornue et soudées au plomb à la tige centrale (cette tige est formée d'un fil de cuivre suffisamment long . qu'il est doublement indispensable d'isoler sur le reste de son parcours, n'en laissant dépasser en haut que la longueur nécessaire au contact. Rien de plus simple : on l'engaîne d'un mince tube de verre dans lequel on coule de la paraffine); les premières ont l'inconvénient, par leur sulfatation, de changer plus rapidement la résistance et. en réa- lité, elles se forment à la longue ; mais elles sont plus faciles à cons- truire. J'ai fait aussi des électrodes en XX.. (fil de i millimètre enroulé comme un ressort à boudin . celui-ci étant ensuite serré en hélice), espérant qu'elles ne seraient pas attaquées par les ions acides. Il m'a fallu y renoncer, à cause de leur attaque, très lente il est vrai, mais qui avait l'inconvénient de remplir d'alumine le fond du récipient. Il ne se crée pas ainsi de soupape Nodon et ces élec- trodes sont certainement les plus pratiques pour un appareil trans- portable dont le liquide est rejeté après chaque séance , ce liquide étant alors simplement de l'eau ordinaire plus ou moins salée, qui m'a donné de bons résultats. Voici enfin quelques électrodes à ne pas employer : 1° les e' mobiles en plomb formable qui se sulfatent à l'excès sur les parties moins D^" ST. LEDUC. — CICATRISATION d'UX CAXCROIDE IO97 actives et donnent un accumulateur fonctionnant en sens inverse après l'ouverture du courant; 2° les quatre électrodes en Cii, dans la solution de sulfate : on obtient, du moins sur 220 v., une polarisa- tion extrêmement rapide. Pour terminer, quelques détails sur la fabrication de l'instrument. J'ai employé la gutta-percha laminée en feuille de 2 millimètres. Après l'avoir découpée de façon convenable, replier cette feuille de manière à l'amener à la forme voulue, puis la souder partout où il est nécessaire ; il faut même apporter toute son attention à ces sou- dures, afin d'avoir un appareil bien étanche et surtout pour ne pas risquer en certains points de faire un Wehnelt. Pour le pliage en vue duquel on s'est procuré une règle carrée que j'ai prise de 35 mil- limètres de côté, on peut procéder de deux façons : i'' en trempant la feuille entière dans de l'eau amenée à une température voisine de 60'' ; 2" en ne chauflant que la partie qu'il est utile de plier, ce qui est à la fois plus élégant et plus propre. Dans ce but, il suffit de coller sur un carton épais une bande de papier d'étain de 5 millimètres de large et d'y faire passer le courant de deux accumulateurs ; la gutta, étant pressée entre cette bande et un des bords de la règle, ne tarde pas à acquérir la souplesse nécessaire. Les soudures se font ensuite au fer à souder ordinaire , en utilisant les recoupes ; il faut encore une fois y apporter beaucoup de soin et, du reste, avoir toujours présente à l'esprit rinflammabilité de la gutta. En dernier lieu elles sont renforcées, en dedans surtout, en v coulant des couclies succès- sives de solution dans le chloroforme. M. le D' Stéphane LEDUC Professeur à l'Ecole de Médecine de TS'anles CICATRISATION D'UN CANCROIDE DE L'AILE DU NEZ DATANT DE CINQ ANNÉES APRÈS UNE SEULE SÉANCE D'INTRODUCTION ÉLECTROLYTIQUE DE L'ION ZINC [537.33:616.0046] — Séance du (i août — Obs. — Le 12 mai dernier, un malade se présente à nous avec un can- croïde de l'aile gauche du nez, intéressant toute l'épaissem*, s'étendant du bord inférieur vers la racme du nez, sur une longuem' de 16 millimètres et mae largeur de 6 à 8 millimètres. Il existe une ulcération s'étendant sur 1098 ÉLECTRICITÉ MÉDICALE les faces externes et internes de l'aile du nez, recouverte, par place, de croûtes noirâtres. Cette ulcération, malgré des traitements incessants, pansements divers, grattages, cautérisations, progresse régulièrement depuis cinti ans. Nous appliquons , sur toute la surface de l'ulcère, un tampon de coton hydrophile imprégné d'une solution de chlorure de zinc à i 0/0, ce tam- l»on pénètre dans l'intérieur des fosses nasales et est fixé au moyen d'une pince dont une branche pénètre dans la fosse nasale, et dont l'autre In-anche serre le tampon sur la face externe. Cette pince est mise en rapport avec le pôle positif d'une pile dont le pôle négatif est unie à une grande électrode indiftérente applicpiée en un point quelconque du corps. Nous faisons passer, pendant douze minutes , un courant de huit milli- ampères, (jui ne cause aucune douleur, nous faisons ai)pliquer simi)le- ment ensuite de la vaseline boriquée. Les croûtes se détachent immédia- tement après la séance, mettant cà nu une plaie légèrement saignante. Dix jours après, la cicatrisation est complète et de très bonne nature. L'effet produit par ce traitement nous a paru extrêmement remarquable. Nous avons revu le malade le 28 juillet, la cicatrice reste parfaite; il existe seulement mie petite récidive de deux millimètres environ de dia- mètre à l'extrémité antérieure du bord de l'aile du nez, récidive à laquelle nous appliquons un traitement identique. Ce résultat est à rapprocher de ceux ol)tenus en Amérique par M. Betton-Massey au moyen de l'électrolyse avec des anodes formées cVaiguilles de zinc enfoncées dans les tissus. M. le D- Stéphane LEDUC Professeur à l'École de ^Médecine de Nantes INFLUENCE DE L'ION ZINC SUR LA POUSSE DES POILS l,VÎ-.33: 616.594] — Séance du S août — Sur chaque flanc d'un lapin nous avons tondu ras une large sur- face d'environ 10 centimètres sur 6 centimètres, nous appliquons de chaque côté une petite électrode de 10 centimètres carrés, formée d'une épaisse couche de coton hydrophile imprégnée dune solution de chlorure de zinc au centième, recouvert d'une [tetite plaque métallique ; ces électrodes sont bien appliquées et serrées avec une ceinture élastique. D'' FOVEATJ DE COUUMELLES. — RESULTATS PHOTOTHERAPIQUES 1099 Le 10 juillet, nous faisons passer pendant quarante minutes, un courant de dix milliampères de Tune à l'autre électrode. Du côté de la cathode, le courant ne laisse aucune trace; sous Tanode on voit de petits cercles anémiés montrant la pénétration de l'ion zinc dans la peau. Les jours suivants les petits cercles anémiés se dessèchent ,^ et après huit à dix jours se desquament. A partir du 20 juillet les poils, sur l'emplacement de l'électrode, croissent manifestement plus vite que sur les autres parties de la surface tondue , le 3 août , ils avaient 5 à 6 millimètres de longueur et le 7 août 8 à 10 milli- mètres , alors que sur toutes les autres parties de la surface rasée et du côté de la cathode la pousse est insensible. La surface où l'on a introduit l'ion zinc est nettement marquée par une épaisse touffe de poils gris se détachant fortement sur une surface glabre. M. le D^ FOVEAU DE COURMELLES à Paris NOUVEAUX RÉSULTATS PHOTOTHERAPIQUES [6i5.83i] — Séance du 8 août — J'ai continué pendant l'année 1902-1903 mes recherches physiques et thérapeutiques sur la lumière que, pour la seconde fois, l'Associa- tion a bien voulu subventionner. Voici mes résultats nouveaux. Mais, avant de parler de ceux qui sont propres à mon radiateur chi- mique de 1900, je tiens à signaler les cures ou tout au moins le sou- lagement notable et la survie qu'obtiennent certains malades inopé- rables, par l'emploi des rayons X. L'Académie de Médecine de Paris, en mai, juin et juillet, a retenti de brillantes communications sur la cure du cancer, du cancer externe comme du cancer profond. Je dirai que cela n'est pas nouveau, que mon Traité de Radiogra- phie, paru en mai 1897 et préfacé par M. d'Arsonval. parlait déjà d'essais encourageants. Le D'' M. Bilhaut en V Actualité Médicale, du i5 juillet dernier, le rappelait aussi et disait : « Aux faits déjà connus, il peut ajouter celui d'une malade que je lui ai confiée, et qui, atteinte d'un néoplasme de la paroi postérieure IIOO ELECTRICITE MEDICALE de la vessie et du corps de l'utérus, a vu disparaître, en quelques séances, hématuries et métrorrliagies , tandis que s'atténuaient les douleurs qui font cortège à un mal de cette importance et de cette nature... » J'ajouterai que cette malade qui ne pouvait pas garder d'urine, qui n'arrivait pas à en retenir 5o grammes, est arrivée à en garder jusqu'à i5o grammes, que ses parois vésicales épaissies et indurées sont aujourd'hui très réduites et souples. Sans vouloir remplacer la chirurgie, l'électricité et la photothéra- pie peuvent la compléter, et surtout, quand les malades sont inopé- rables, arriver à les soulager. Les chirurgiens proclamant qu'ils n'ont pas vu de guérison — parce qu'ils n'ont pas tenté d'en voir — sont imprudents scientifiquement et même médicalement, car ils préparent ainsi, par réaction naturelle à l'esprit humain, les malades à se réfugier chez les empiriques prometteurs. Le cas que m'a confié le D^ Bilhaut n'est pas unique pour moi en ce moment. Jai un autre cancer, cancer du sein diagnostiqué et déclaré inopérable par le professeur Tillaux. L'aisselle est prise et le bras très douloureux était immobilisé par cette douleur même. Dès la cinquième séance de i5 minutes, à 5 ampères, d'un tube de Crookes dur, la patiente bougeait facilement son bras et la douleur avait complètement disparu. La tumeur, à la quinzième séance, était moins dure et certainement diminuée. Je ne veux pas proclamer ces résultats comme définitifs, mais ils corroborent des résultats déjà anciens pour moi. où la tumeur a paru s'enkyster, ain*êter son évolu- tion et laisser une existence supportable aux patients. D'ailleurs, le chirurgien allemand Perthes, au dernier (32*^) Congrès de la Société allemande de chirurgie (3-6 juin i9o3), disait avoir relevé trente-cinq auteurs ayant publié des cas de cures de cancer, et cer- tains de ces auteurs, américains pour la plupart, ont de trente, qua- rante, cinquante cas traités. Il en est qui préconisent les rayons X, même après l'opération et pour empêcher les récidives. Cela est, on l'avouera, déjà un joli ensemble, un faisceau important de résultats, qui doivent faire réfléchir même les plus sceptiques chirurgiens. A ce propos, je rappellerai le cas de névralgie faciale que je me suis borné à citer l'an dernier, et je n'y reviens que devant l'actualité donnée aux rayons X thérapeutiques. On y verra l'action analgé- sique puissante de la lumière — point sur lequel j'ai insisté à maintes reprises — et cette action s'applique à toutes les lumières, variant bien entendu avec la nature et l'intensité. 11 s'agit donc d'une malade D"" FOVEAU de COURMELLES. — RESULTATS PHOTOTHERAPIQUES IIOI opérée deux fois, inutilement ou à peu près, en 1882 et 1884. et qui eut alors les honneurs de 1" Académie de Médecine (M. Marc Sée). Cette malade eut moins d'amélioration après la seconde opération qu'après la première, mais elle se borna, non plus à recourir à la chirurgie , mais à tous les calmants possibles , avec des succès tout à fait relatifs. C'est le jeudi 9 novembre 1899 qu'elle vient me con- sulter. La découverte des rayons X lui a fait supposer qu'elle en pourrait, au moins au point de vue du diagnostic, tirer quelque bénéfice. Son dentiste, M. Boisgontier, de Versailles, consulté, ne trouvant du reste rien qui ressortisse à son domaine, la confirme dans son opinion. Je procède à cet examen dans les conditions sui- vantes : je place une ampoule spéciale à cathode externe et anode reliée au sol, dans la bouche de la patiente; — c'est là la méthode endodiascopiqiie, absolument sans danger et sans risque d'étincelles pour l'opéré. — On évite ainsi, en le cas actuel du maxillaire à radio- graphier, la superposition des maxillaires et, d'autre part, la dis- tance des rayons X à l'objet qui doit laisser son impression sur la plaque sensible est minimum. Une pellicule photographique enve- loppée de papier noir fut placée sur la joue malade. La durée de pose fut de 5 minutes. Je fus mécontent de cette épreuve et fit revenir la patiente le mardi i4 novembre, nouvelle pose de 6 minutes ; je ne voyais rien dans le système osseux d'anormal, à part les dents manquantes bien entendu, mais pas déminéralisation. Je recom- mençai pour acc[uit de conscience le 16 novembre, 7 minutes, sans autre résultat qu'une épreuve plus nette, mais ne me renseignant pas mieux sur le diagnostic. Quelques jours après, la malade m'écri- vait ne plus souffrir du tout, « être dans le paradis, relativement à ses douleurs passées », et cet état s'est absolument maintenu depuis lors, sauf l'hiver dernier; mais il y eut donc pendant plus de trois ans un résultat absolu, total. L'hiver et l'année actuels étant particulièrement humides et chan- geants, cette récidive, d'ailleurs anodine, comparée au passé, n'a rien d'étonnant, d'autant plus que la malade, à part les cachets que je lui ai prescrits, d'iodure et de bromure de potassium et de camphre, n'a fait nul autre traitement. Ce cas n'est pas isolé dans mes observations, mais je dois recon- naître qu'il fut le x>lus net et le plus rapide. J'ajouterai que, dans d'autres cas de névralgies diverses, faciales, intercostales, scia- tiques, j'ai toujours approché très près le tube de Crookes de la région à traiter et cela sans avoir jamais d'accident, grâce à une 1I02 ELECTRICITE MEDICALE plaque d'aluminium, non simplement tenue par le patient sur le parquet ciré et isolant du laboratoire de l'électrothérapeute, mais en même tenqis reliée au vrai sol , à l'extérieur , à un tuyau de gaz , une govittière... La lumière ultra-violette, les effluves de haute fréquence, sont, comme les rayons X, de puissants anesthésiques de la douleur, d'énergiques sédatifs du système nerveux. Ainsi, avec le radiateur chimique Foveau, qui fut le premier appareil simplifiant la technique et la méthode de Finsen (présentation de M. Lippmann, à l'Institut de France, le 24 décembre 1900), j'ai vu, chez une petite lupique de sept ans, atteinte de coqueluche, à quintes fréquentes, j'ai vu, dis- le, ses quintes céder pendant la séance de rayons ultra- violets et la cessation persister deux et trois heures après. L'action antispasmo- dique est donc, là, très nette. D'autre part, un cas de névralgie faciale du trijumeau gauche, supra et infra- orbital, chez un homme de 60 ans , opéré , comme ma malade , deux fois sans succès, a été rapidement guéri en un Institut photothérapique de Berlin (observation du D' Curchod, de Bàle). Dans un cas de névralgie faciale que je traitai par la lumière colorée bleue, je vis la douleur devenir paroxystique et, appliquant immédiatement mon radiateur chimique, je vis immédiatement la douleur s'amoindrir, puis dispa- raître au l)out de quelques minutes ; cette malade , qui avait fait l'année pi'écédente une vingtaine de séances de rayons X et qui ne cessait jamais de souffrir de sa névralgie, avait aussi été très amé- liorée plusieurs mois; elle aussi, à la suite de l'hiver de 1902-1903, avait été reprise; les rayons ultra-violets lui rendirent rapidement (17 séances) le calme et le repos. . A part la nature des cicatrices, différant selon que l'on emploie les rayons X ou les rayons ultra-violets , épaisses , blanchâtres , appa- rentes pour les premiers, invisibles pour les seconds, les phéno- mènes curatifs sont les mêmes. Mon radiateur chimique donnant les mêmes résultats que l'appareil de Finsen, j'ai continué cette année les cures de lupus communiquées l'an dernier, avec photogravures à l'appui, à l'Association. J'y ajouterai quelques épithéliomas ]dont voici un exemple : M. B..., 55 ans, sans intécédents, parents morts âgés; lui est un homme solide, sanguin, large d'épaules. Rien dans les organes. Pré- sente sur la joue gauche, près de l'oreille, une tumeur large de trois centimètres sur deux centimètres de longueur et environ un centi- mètre d'épaisseur extérieure et qui commence à suppurer au centre. Les applications de lumière de l'arc voltaïque refroidi du radia- D'' FOVEAU DE COURMELLES. — RESULTATS PHOTOTHERAPIQUES IIo3 teur Foveau. modèle Noé, durent une demi-heure, avec 8 ampères et sont renouvelées tous les deux jours. En 35 séances la tumeur a entièrement disparu. Je fais les dernières séances avec un compres- seur plus large pour agir même sur le pourtour d'accès absolument sain et ainsi être bien assuré d'avoir détruit tout le tissu morbide. Je ne suis pas seul à obtenir des résultats avec mon radiateur et, en septembre 1902. le D' Michaut (de Dijon) confirmait par son «xpérience personnelle et pour le lupus, au deuxième Congrès d'Electrologie et de Radiologie Médicales, les résultats que j'y communiquai et qui l'avaient été préalablement à l'Association. Voici maintenant des faits que m'écrivait en juin et en juillet dernier le D' Dobrjanski. directeur de l'Institut photothérapique de Saint- Pétersbourg- : (( Je me sers de votre radiateur depuis sept mois et je me dépêche de vous informer que j'ai obtenu les résultats radiothé- rapeutiques éclatants. Entre autres, j'ai guéri un ulcus molle, en six séances d'une demi-heure chaque, mais le plus probant résultat est le suivant : le 20 avril (style russe), vient chez moi une dame veuve, 7.5 ans. habitant Saint-Péterslîourg. avant une tumeur du larvnx avec une respiration prolongée , la tête redressée en arrière ne pou- _ Tant ni avaler, ni manger, température 3ç)°, circonférence du cou 54 centimètres. Tout de suite je m'aperçus que c'était un cas d'an- gine Ludovici avec un abcès quelconque. La malade avait déjà été <^hez quatre médecins , dont un qui voulait immédiatement lui faire subir une opération, sans vouloir répondre du résultat. Voilà pour- quoi elle a refusé de se laisser opérer. « Je dois vous avouer que moi-même je n'avais aucun espoir de réussir avec la photothérapie, et je n'y eus recours que grâce à l'in- sistance de la malade même, laquelle me dit vouloir encore essayer, avant de mourir, le dernier remède, c'est-à-dh^e la photothérapie. La j)remière séance avec votre radiateur a déjà donné un résultat ; le lendemain matin la malade venait et disait se trouver un peu mieux, elle a dormi quelques heures et pris un verre de lait malgré la dou- leur qui existe encore, mais pas si forte. Température, le matin, 38°37, circonférence du cou, 5a centimètres. La malade a l'espérance d'être guérie par la photothérapie et insiste pour prendre une séance deux fois par jour, ensemble une heure. Le 27 avril, température 36"7, circonférence du cou 36 centimètres; elle se trouve tout à fait guérie, malgré une petite induration sous le larynx, de la grosseur d'une noix et avec lequel elle est partie à la campagne. « Je dois encore ici ajouter que, à part la photothérapie, aucun traitement n'a été suivi, aucune compresse n'a été appliquée. L'abcès < ELECTRICITE MEDICALE II04 n'a pas percé, mais est disparu grâce au traitement de la lumière par laquelle les microbes ont été tués. « Je crois pouvoir admettre que la tumeur, c'est-à-dire l'angine Ludovici s'est développée tout de suite après le typhus. « En conséquence , cet exemple de malade est un grand triomphe pour la photothérapie et nous donne la preuve que la lumière agit assez profondément; mais ce sont justement les rayons ultra-violets qui seulement ont agi. bactériologiquement, mais aussi antiphlogis- tiquement... » La lumière pénètre en effet profondément et je le démontre en mon mémoire à la Section des Sciences Médicales , avec photogravures du même D"" Dobrjanski qui, à propos d'une des pliotographies qu'il m'a adressées, écrit encore : « Ma photographie de vagin donne la preuve que la lumière passe profondément dans le corps et qu'on peut s'en servir pour le traitement de toutes les maladies des femmes et de tumeur utérine. En effet, je me suis servi de votre radiateur pour le traitement de la métrite aiguë et une seule séance de 5o mi- nutes a suffi pour que la maladie et de grandes douleurs au bas de r abdomen aient tout à fait disparu; l'utérus était succulent, augmente de la grandeur d'une poire ; dans le vagin j'ai senti la pulsation et la chaleur. Le lendemain la malade m'annonçait qu'elle se trouvait très bien, seulement pendant la nuit tout son lit avait été mouillé par « l'eau » qui avait coulé du vagin — liquide séreux. Enfin, j'ai acquis la certitude que la lumière passe profondément dans le corps et que le sang n'empêche pas cet action... » La douleur est donc calmée par toutes les variations de lumière; dès 1890, je montrai le bleu déprimant, calmant, et le rouge ^ tonique et excitant. Il n'y a cependant là rien d'absolu, puisque nous avons vu , plus haut ,, le bleu amener au paroxysme une douleur de névralgie faciale, cette hypérexcitabilité produite par le bleu s'est produite, d'ailleurs, plusieurs fois, et elle confirme ces faits que m'écrivait le D' A.-V. Minine, chirurgien en chef de l'hôpital Nicolas, de Saint-Pétersbourg, conseiller d'Etat, et qui a fait une étude approfondie de la lumière bleue : « Il faut se munir d'une lampe électrique ayant l'intensité de 5o bougies Edison de New-York, à verre bleu. Tenir le verre à distance de manière que le foyer de lumière tombe sur l'endroit qui doit être opéré, 10 ou 12 minutes avant l'opération et durant l'opé- ration entière. « Il est à observer les symptômes divers qui se produisent en employant comme remède ancsthésiquc la lumière électrique bleue : D"" TH. GUILLOZ. — l'ÉCLAIRAGE EX PHOTOGIIAPIIIE ENDOSCOPIQUE- IIo5 « a) En l'appliquant partiellement à des parties anatomiques d'hommes âgés, elle peut produire une congestion de sang sur les tissus cérébraux; « h) Pour les femmes sujettes aux hystéries, elle peut donner lieu à une attaque de nerfs , même le lendemain de la séance ; « c) Parfois, elle produit une transpiration avec sueur sur le corps tout entier; « cl) Pour illuminer les ulcères prévenant d'un cancer, elle produit au malade une grande faiblesse qui dure parfois deux heures. Cette faiblesse peut aussi se prolonger pendant i4-i5 jours, selon la quan- tité de séances que vous emploierez pour l'éclairation du goitre... » Cette même lumière bleue, que mon élève le D'' Hellion, sur les conseils de M. Richard-Chauvin et les miens, a appliquée à l'art den- taire, lui a donné, dans les Jluxions de ce domaine, les meilleurs résultats. (Thèse de la Faculté de Médecine de Paris, du i5 juillet igoB), faisant résoudre rapidement des exsudats, des abcès... Nous avons également essayé , le D'' Hellion et moi . avec mon radiateur chimique, deux cas d'avulsion dentaire ; l'un a été concluant pour l'anesthésie et l'autre nul. Il y a donc lieu de poursuivre ces recherches. Ces résultats, en divers sens, de la photothérapie, sont encoura- geants ; il en est de mathématiques comme les cures de lupus , dépithéliomas. et de diverses manifestations cutanées. Pour les résultats profonds, ils peuvent paraître, pour quelques-uns, empi- riques, mais ils n'en sont pas moins réels et obtenus, comme le sont au début, par tâtonnements, tous les faits thérapeutiques. On ne peut donc plus scientifiquement les rejeter, ni les nier, et il faut au contraire les multiplier, les coordonner et les classer. M. le D^ Th. GUILLOZ Professeur ag^régé à la Fuciillé de Médecine de jVancv DE L'ÉCLAIRAGE EN PHOTOGRAPHIE ENDOSCOPIQUE [616.0721] — Séance du S août — Une des difficultés que l'on rencontre dans l'éclairage des cavités naturelles, lorsqu'il s'agit de les observer ou de les photographier, 70* II06 ÉLECTRICITÉ MEDICALE consiste à faire coïncider le champ d'éclairage et le champ d'observa- tion. On sait que, dans l'observation directe des cavités précédées d'une ouverture ou d'un canal étroit, on emploie un miroir percé d'un trou par lequel regarde l'observateur. Les rayons d'une source lumineuse latérale, convenablement placée, sont renvoyés dans l'in- térieur de la cavité, comme s'ils émanaient du trou du miroir ou de la pupille de l'observateur, ce qui fait que le champ d'éclairage recouvre le champ d'observation. L'emploi du miroir, quand il est étamé et percé d'un trou, pré- sente des inconvénients dans l'éclairage utilisé en photographie endoscopique, car la surface utilisée de l'objectif est restreinte par les dimensions du trou. De plus , les bords du trou du miroir envoient de la lumière diffusée dans lobjectit. L'emploi comme surface réfléchissante de lames de verre superpo- sées et inclinées, disposées devant l'objectif, ne donne pas pratique- ment de bons résultats par suite de la diff'usion de la lumière sur les surfaces de séparation. Cette lumière dilTusée voile l'image photo- graphique, d'autant plus qu'elle est très actinique comparativement à celle plus ou moins rougeâtre qui est renvoyée de la cavité photo- graphiée. Pour ces motifs auxquels on pourrait en ajouter d'autres, telle que la diminution d'actinisme produite par la réflexion, il semble préfé- rable d'utiliser une lumière directe placée latéralement à côté de l'objectif que l'on protège des rayons directement émis. Il n'y a, dans ces conditions, superposition satisfaisante du champ d'éclairage et du champ d'observation que si l'ouverture de la cavité est relativement large, ce qui restreint beaucoup l'emploi de la méthode et semble la limiter pratiquement à la photographie de la bouche et du col utérin. Les deux procédés d'éclairage que je vais indiquer permettent d'a- border pratiquement le problème de la photogi'aphîe endoscopique instantanée à lumière externe des cavités mêmes étroites ou précé- dées d'un canal étroit. La plus grande difficulté à résoudre est peut- être, ainsi qu'ont pu s'en convaincre ceux qui se sont occupés de ])hotographie endoscopique, l'éclairage complet et uniforme du champ. On n'a plus dans ces deux méthodes à se préoccuper des conditions d'éclairage, qui sont toujours réalisées automatiquement, ce qui simplifie et abrège les manipulations. D"" TH. GUILLOZ. — L ECLAIRAGE EN PHOTOGRAPHIE ENDOSCOPIQUE IIO7 PREMIER PROCEDE Lumière devant l'objectif. — Si la source lumineuse est de petit volume, elle peut être placée immédiatement devant l'objectif, à condition que celui-ci soit protégé des rayons directement émis par la source par un écran convenablement noirci extérieurement et ne permettant l'eiwoi de la lumière que dans la direction de la cavité. Si cet écran est suffisamment rapproché de l'objectif pour que son image diffuse et noire recouvre toute la surface utilisée de la plaque, l'appareil d'éclairage ne manifestera pas sa présence sur l'épreuAC. Cette condition est en particulier toujours remplie quand on utilise comme objectif un ménisque convergent et que l'appareil d'éclairage est situé en avant près du plan principal antérieur, là où se placent les diaphragmes. Si la source d'éclairage est placée au milieu de l'objectif, le champ sera toujours uniformément éclairé et l'objectif travaillera, sauf dans la région située immédiatement derrière la source, pour donner l'image du fond de la cavité. L'emploi du filament de la lampe Nernst , qui condense la lumière sous un très petit volume, donne la réalisation facile du procédé. Je détache le filament et je le place dans un petit tube creux de fer ou de nickel de quelques millimètres de diamètre percé d'une fente recti- ligne pour la sortie des rayons lumineux. Les extrémités du fila- ment sont reliées aux prises de courant isolées du tube protecteur par un petit scellement au plâtre ou à la magnésie. C'est ce petit tube enfumé qui prend place devant l'objectif. Après établissement du voltage convenable, le filament est porté à l'incandescence en dirigeant sur lui, par l'ouverture ménagée dans le tube, le fin dard d'un chalumeau. Ce procédé permet la photographie instantanée : on établit l'éclai- rement sous le voltage ordinaire pour la mise au point; puis, par survoltage brusque, on fait éclater le filament au moment de la prise de la photographie. DEUXIÈME PROCÉDÉ Lumière entourant l'objectif. — Lorsque la cavité n'est pas l)récédée d'un canal étroit on peut employer très avantageusement cette disposition pour la photographie instantanée. En avant de l'objectif, on monte un tube cyHndrique' noirci exté- rieurement ayant le diamètre de la surface utilisée de l'objectif et ayant même axe que lui. En arrière de ce tube est soudé un disque 1I08 ÉLECTRICITÉ MÉDICALE de métal servant de réflecteur pour la lumière et de protecteur pour l'appareil. On entoure le tube métallique d'un petit anneau de coton poudre saupoudré de magnésium. En avant du tube, se place un jjelit disque de mica empêchant l'éclair magnésique de fuser devant l'ouverture de l'objectif. J'emploie, comme en 1898, lors de recherches sur la photographie rétinienne, luie chambre photogra- phique, modifiée de façon à pouvoir tirer dès que la mise au point est effectuée. Un miroir de verre étamé, incliné à 45° sur l'horizon, forme obturateur devant la plaque découverte et renvoie les rayons sur un verre dépoli horizontal , symétrique de la plaque par rapport au mii'oir, sur lequel on met au point. L'éclairage pour la mise au point s'effectue au moyen d'une petite lampe placée au voisinage de l'objectif et de la cavité. Il suffit de faire coïncider limage du centre du fond de la cavité avec le milieu de la plaque photographique pour avoir un éclairement uniforme lors de la prise de la photographie instantanée. Cet éclairement uniforme est inutile à rechercher avec la lumière accessoire servant à la mise au point. Lorsque celle-ci est effectuée, on enlève la source lumineuse qui a servi à mettre au point, on relève le miroir et on fait partir l'éclair magnésique. Il est facile d'établir pour ces deux méthodes les conditions qui donnent le champ d'égale clarté et permettent le maximum d'utili- sation de la lumière. Ces considérations feront l'objet d'un mémoire plus étendu. MM. les D- LAQUERRIERE et DELHERM à Paris ESSAI DE SYNTHÈSE DES INDICATIONS DES DIVERSES MODALITÉS ÉLECTRIQUES CONTRE LA CONSTIPATION [6i5.84:fii:-34i.oo831 — Séance du 8 août — Les procédés électriques les plus divers ont été préconisés contre le svmptômç constipation : tous ont donné des succès mais tous aussi comptent une proportion d'insuccès si notable que, semblait-il, aucune méthode ne pouvait être considérée comme un traitement" vraiment recommandable. D^^ LAQUERRIÈRE ET DELHERM. — CONSTIPATION HOC) D'une expérience qui porte à l'heure actuelle sur plus de deux cents malades étudiés spécialement au point de vue intestinal , nous croyons pouvoir conclure que l'électricité est une des méthodes les plus efficaces pour lutter contre la constipation et la cohte muco- membraneuse. Mais, si l'on veut obtenir des résultats constants ou au moins aussi constants qu'on peut les observer en clinique , il est indispensable de poser un premier principe : « c'est qu'il n'y a pas une mais des constipations » ; d'où découle le corollaire suivant : « im traitement uniforme ne saurait convenir dans tous les cas ». I. Constipation habituelle Forme légère. — Elle comprend les malades qui ont de temps à autre des selles spontanées et s'exonèrent facilement les autres jours avec un laxatif ou un lavement. Elle se rencontre surtout chez les sédentaires, les neurasthéniques, les arthritiques, les obèses, etc. La Franklinisation, qui calme le système nerveux, active la circula- tion et probablement aussi augmente les sécrétions, est très souvent suffisante dans cette forme, et son emploi est particulièrement bril- lant chez les neurasthéniques. Le bain pourra être complété par l'application d'étincelles ou de souffle sur l'abdomen, l'étincelle étant plus particulièrement indi- quée dans les formes atoniques, le souffle dans les formes spasmo- diques où tout traumatisme peut être nuisil^le Chez les arthritiques francs on retirera également des effets très satisfaisants des applications générales des hautes fréquences. D'ailleurs, d'une façon générale, il y a lieu de traiter presque tou- jours l'état général d'un constipé. — Si on est en présence d'une forme de constipation légère le traitement général seul suffira; si, au contraire, on se trouve devant une forme grave, ce traitement général sera un adjuvant extrêmement utile au traitement local. Formes grâces. — Contrairement à l'opinion anciennement répan- due qui faisait du mot constipation le synonime d'atonie de l'intestin, on admet aujourd'hui, depuis les travaux de Fleiner, que la contrac-- ture de l'intestin est la cause la plus fréquente de la constipation. D'ailleurs, à l'heure actuelle, M. Mathieu admet que très fréquem- ment il y a association de spasme et de parésie , mais la présence du spasme même comme phénomène associé comporte au moins la même prudence thérapeutique que l'existence isolée du spasme. II 10 ELECTRICITE MEDICALE Constipation atoniqiie. — Se rencontre surtout chez les sujets âgés, qui présentent alors une paroi flasque et inerte. Le gros intestin, facilement perçu par la palpitation, offre l'aspect de grosse masse , le malade ne perçoit pas de douleurs , tout au plus éprouve- t-il une sensation de pesanteur. Les matières sont rendues sous forme de blocs volumineux. Les procédés thérapeutiques les plus usités sont surtout les pur- gatifs musculaires, la rlmbarbe, le nerprun, le séné. etc. Le massage donne également de bons résultats ; mais , si ces pro- cédés ont épuisé leur action, à quelle forme d'électricité doit-on recourir ? C'est dans ces cas qu'à notre avis il faut employer les pro- cédés les plus û'équemment préconisés jusqu'ici : la fai'adisation intense, la galvanisation avec renversements fréquents, les courants de Morton (Benedikt, Duchenne, Erb, Bordier, Weill, etc.), toutes ayant pour but de provoquer des contractions de la paroi et, par voie réflexe des mouvements des masses viscérales ou même par l'introduction d'une électrode rectale, de réveiller directement le péristaltisme de l'organe. Tous ces j)rocédés donnent dans cette forme des résultats satisfai- sants ; il est inutile d'insister sur leurs bons effets , qui sont généra- lement admis et, s'ils ne réussissent pas dans toutes les constipations, c'est qu'il y a à considérer une forme absolument opposée. Forme spasniodiqiie. — Se rencontre surtout chez les individus jeunes, névropathes, hyponcondriaques , neurasthéniques, etc. Leur ventre globuleux est souvent difficile à déprimer. L'examen révèle un gros intestin douloureux contracture, dont le volume peut ne pas dépasser le diamètre du petit doigt et qui roule sur le plan résistant formé par la fosse iliaque. Les matières sont fréquemment rubanées, aplaties, comme pas- sées à la filière ; elles peuvent n'avoir que le diamètre d'une plume d'oie souvent sectionnée en petites billes. La thérapeutique médicamenteuse n'utilise dans cette forme que des moyens de douceur, huile de ricin à dose minime, belladone, etc., ou encore les moyens physiques, lavements d'huile, lavages à faible pression, etc. Nous avons pensé qu'il y avait lieu, en électrothérapie également, de substituer pour cette forme les procédés de douceur aux procédés de force , parce que tout choc était capable , et nous avons eu l'occasion de vérifier plusieurs fois la réalisation de cette opinion, d'augmenter le spasme. Nous avons utilisé dans ce but la galvano-faradisation , que Brrose et Erb avaient déjà préconisée du D""" LAQUERRIERE ET DELHERM. — CONSTIPATION IIII reste . mais avec des détails de dispositif qui en faisaient dans leurs mains vlw procédé de force et que nous avons modifiée de façon à en faire un pj^océdé de douceur. Nous utilisons de hautes intensités galvaniques de Xvbs faibles intensités faradiques , le courant de la bobine à fil fin en séances de lo minutes, le circuit étant fermé par deux larges plaques couvrant l'une l'abdomen, l'autre les reins. Dans un relevé fait en avril dernier et ne comprenant que des cas graves de constipations spasmodiques rebelles aux médications clas- siques, nous trouvons 4i malades qui nous donnent : 2, insuccès francs, 3 traités insuffisamment; 36 sujets ont obtenu au cours du traitement au minimum aS selles spontanées par mois. Sur ces derniers, 29 avaient été revus en des temps allant jusqu'à dix-huit mois après la cessation des séances; chez 26, les résultats étaient intégralement maintenus. II. Colite muco-:membraxeuse Nous n'entrerons pas dans les descriptions cliniques ; disons seulement que les divers symptômes peuvent s'associer de façons différentes, dont chacune exige une thérapeutique particulière. Nous employons la méthode de Doumer surtout dans les colites non douloureuses où la constipation prédomine. Dans les formes douloureuses, avec crises entéralgiques , nous employons soit la galvano-faradisation avec le dispositif décrit plus haut; soit, surtout si les plexus sympatiques sont le siège d'algies, la galvanisation pure et simple à très hautes doses (100, i5o, 200 niA. durant i5 à 45 minutes) avec 2 terres glaises d'Apostoli placées l'une sur l'abdomen, l'autre aux lombes. Dans le relevé déjà cité, nous avons trouvé 29 cas portant sur des cas également rebelles aux traitements classiques : 5 nous ont donné des insuccès ; 24 ont eu , au cours du traitement , 26 à 3o selles spon- tanées par mois, avec disparition des peaux et des glaires et dispa- rition des crises de diarrhées quand il y en avait. 16 de ces malades ont été revus en des périodes s'étendant jusqu'à seize mois après la cessation du traitement, deux ont eu une rechute complète , trois une rechute partielle immédiatement guérie par quelques séances ; les autres ont conservé intégralement les bénéfices acquis II 12 ELECTRICITE MEDICALE III. Constipations symptomatiques et constipations associées A d'autres affections II est quelquefois difïicile de préciser, en voyant un malade, quel est parmi les divers troubles qu'il présente celui qui s'est manifesté le premier et qui a été la cause des autres ; c'est poui-quoi nous ran- geons dans un même chapitre les constipations qui produisent ou aggravent d'autres affections et celles qui sont au contraire sympto- matique. Chapitre forcément incomplet, du reste, puisque la clinique ne nous donne trop souvent que des indications insuffisantes. a) Constipation avec dyspepsie. — Il est extrêmement fréquent de voir les deux affections associées. — Dans la majorité des cas, nous avons vu, une fois que le régime des selles quotidiennes a été obtenu, les troubles gastriques s'amender et disparaître. Dans quelques cas, ils se sont améliorés avant qu'il y ait des modifications du fonctionnement intestinal, ce qui permettrait de penser que nos méthodes électriques peuvent avoir une action sur l'estomac; mais il y aura certainement des cas où on ne guérira le malade que lors- qu'on dirigera une thérapeutique soit électrique, soit médicamen- teuse contre les troubles gastriques. h) Constipation avec affections gynécologiques. Nous avons rap- porté au Congrès de Berne une série de vingt-huit cas de ce genre, dans lesc[uels le traitement électrique gynécologique employé seul avait eu dans 5o o/o au moins des observations un résultat satisfai- sant contre la constipation. Nous continuons depuis à traiter d'abord l'utérus, nous réservant, après un certain nombre de séances si l'a- mélioration intestinale n'est pas suffisante, soit d'associer les deux thérapeutiques, soit de recourir au traitement du tube digestif seul. c) Constipations et aftections anales. La constipation d'une part et, d'autre part, les hémorrhoïdes ou la fissure sont des affections qui s'aggravent réciproquement; nous sommes d'avis de commencer par le traitement local de l'anus par les hautes fréquences ainsi que l'a indiqué Doumer, et d'y associer ensuite, si besoin, le traitement intestinal approprié. IV. Obstruction, occlusion Lorsqu'un malade n'arrive plus à s'exonérer, il faut le faire aller à la selle à tous prix; dans ce cas. le lavement électrique de Boudet est le procédé de choix. De même, il donne d'excellents résultats D^' G. PERRIER. — PRÉPARATION DE MOUTS DE POMMES STÉRILES II l3 comme Gaillard Ta signalé et comme l'un de nous a été à même de le constater deux fois, et contre la constipation et contre la douleur dans la colique de plomb. Mais il faut savoir que le lavement de Boudet ne doit être le plus souvent considéré que comme une médication d'urgence : chez des spasmodiques nous l'avons vu être ineflicace , même momentané- ment, alors que des procédés de douceur réussissaient ; et en tous cas, nous avons des observations qui démontrent manifestement qu'il peut exagérer le spasme. Aussi est-il bon de ne pas en faire un pro- cédé de traitement et de renoncer à son usage, une fois l'exonération obtenue, pour recourir à des procédés destinés à lutter contre la constipation, afin d'empêcher la reproduction de l'obstruction. En résumé, nous croyons pouvoir tirer de nos observations cette conclusion que l'électrisation peut guérir souvent la constipation quand toutes les thérapeutiques ont échoué, mais qu'il importe abso- lument de varier les modalités d'applications suivant les diverses modalités pathologiques en face desquelles on se trouve. M. le D' G. PERRIER Maître de Conférences à la Faculté des Sciences Directeur du Laboratoire municipal de Rennes SUR UN MODE DE PRËPARATION DE IVIOUTS DE POMMES STÉRILES [ SOUS rinflueiice des divers traitements qu'on doit leur faire subir pour les stériliser, j"ai songé à tourner la diirieulté en stérilisant les fruits avant leur broyage, les différents ferments se trouvant à leur surface. Je dirai immédiatement que mes expériences ont pleinement con- firmé mes prévisions. Comme agent de stérilisation, j'ai employé Ir formaldéhj'de , que l'industrie prépare en solution dans l'eau à /\o o/o sous le nom de foj^mol. Ce produit, gazeux et très soluble dans l'eau est d'élimination facile; c'est un antiseptique des plus puissants; de faibles doses suffisent pour détruire les ferments, avantage très appréciable au point de vue économique. Voici le détail des expériences que j'ai entreprises cette année. Quatre moûts de pomme ont été préparés de la manière suivante, chacun avec i kilogramme de pommes aussi semblables c{ue possible. Le premier, fait par la méthode habituelle, constituait le moût témoin. Le second (moût A) provenait de l'expression de pommes non lavées placées pendant 24 heures sous une cloche remplie de vapeurs d'aldéhyde forinique. Le tj^oisième (moût B) provenait de fexpression de pommes lavées pla- cées dans les mêmes conditions que les précédentes et pendant le même temps. Le quatrième (moût C) provenait de l'expression de pommes lavées et abandonnées pendant 24 heures clans de feau formolée à 4 °°/oo- Pour la pi^éparation de ces trois derniers moûts, le broyeur et la presse avaient été lavés soigneusement à feau bouillante. Les quatre moûts ont été abandonnés à eux-mêmes à la température de 200 environ, le 28 janvier igo3, dans des bouteilles stérilisées. Les 3 moûts ABC renfermaient des traces de formol. Dès le quatrième jour, toute une colonie de mucors s'était développée sur le Témoin (j'ai retrouvé ce mucor sur les pommes que j'avais employées). Le sixième jour, le témoin est entré en fermentation; cette fermentation s'est poursuivie régulièrement et 25 jours après son début, j'ai mis le cidre en bouteille. Les trois autres moûts sont restés intacts. Seules les traces d'aldéhyde formique qu'ils renfermaient au moment de leur préparation avaient dis- paru au bout de deux mois environ. Le premier juillet iQoS, c'est-à-dire 5 mois après leur préparation, ils ne présentaient encore aucune trace de fermentation ni de moisissure. On peut donc les considérer comme absolument stériles. Le moût C a été alors ensemencé avec une levure de pomme sélec- tionnée , mise gracieusement à ma disposition par M. le D'" Bodm , pro- IIl6 AGRONOMIE fesseur de bactériologie à l'École de Médecine de Remies. Huit joiirs après, une fermentation régulière s'est établie et a fourni un cidre présen- tant les mêmes qualités que le témoin. Quant aux moûts A et B ils ont été conservés tels quels. Il ressort nettement de ces expériences que le formol permet une stérilisation complète des fruits et, par suite, l'obtention de moûts pratiquement stériles, surtout au point de vue des levures. Le mode d'emploi le plus pratique est certainement le séjour des pommes dans l'eau formolée. Il me reste a déterminer la dose minima de formol à employer pour obtenir une stérilisation par un court séjour dans le liquide, une longue macération avant pour inconvénient l'absorption x^ar osmose d'une certaine quantité d'eau, abaissant ultérieurement la densité du moût. Le principal avantage de ce mode de stérilisation est la non alté- ration du jus et son application facile même dans les fermes. Au point de vue hygiénique, le formol est bien un des antisep- tiques prohibés; mais je ferai remarquer que le cidi^e obtenu avec les moûts de pommes formolées ne peut en contenir, car les levures ne sont aptes à se développer et à produire la fermentation qu'en l'absence d'aldéhyde formique. En possession de ce nouveau procédé, le cidiner est maître de la fermentation, il peut ensemencer son moût avec telle ou telle levure qu'il préfère, et obtenir avec un même moût des cidres différents ; de plus, il peut, à n'importe quel époque de l'année, fournir à ses chents une boisson fraîchement préparée. Il peut conserver des moûts d'une année sur l'autre en prévision d'une disette de pommes. Il peut enfin, et c'est peut-être là un des avantages le plus à considé- rer, expédier au loin des moûts en franchise de douane , moûts que l'acheteur peut utiliser en nature après les avoir rendus gazeux par l'acide carbonique, comme cela se pratique en Suisse, ou à l'état de cidre, après les avoir fait fermenter sur place. Le procédé que je viens d'indiquer peut évidemment s'appliquer à la stérilisation des moûts de poires et de raisins ; c'est une étude que je poursuis. MALLET. — ANIMAUX TUBERCULEUX m" M. MALLET Médecin vétérinaire à Angers DES INDEMNITÉS ACCORDÉES AUX PROPRIÉTAIRES D'ANIMAUX TUBERCULEUX [«514.31] — Séance du S août — Depuis plusieurs années, considérant avec inquiétude les progrès incessants de la tuberculose des bovidés, on s'est préoccupé de trouver les moyens les plus propres à enrayer le mal, à diminuer les chances de contamination. Parmi ces moyens, il en était un que l'on ne pouvait négliger parce qu'il avait fait ses preuves dans la lutte engagée contre une autre maladie contagieuse, la péripneumonie. Grâce aux encouragements distribués sous forme d'indemnités, la péripneumonie n'est plus signalée que très rarement en France. Il était naturel de penser que la même méthode appliquée à la lutte contre la tuberculose pouvait donner des résultats heureux. Nous allons examiner rapidement ce qui fut fait dans ce sens et voir si les «{forts du législateur ont été couronnés de succès. D'après l'article oa de la loi de finances du 21 juin 1898, des indem- nités sont accordées dans les cas de saisie de viande pour cause de tuberculose aux propriétaires qui se seront conformés aux prescrip- tions des lois et règlements sur la police sanitaire. L'indemnité est basée sur la valeiu' de la viande saisie : elle est de la moitié de cette valeur lorsque la tuberculose est généralisée , des trois quarts lors de tuberculose localisée. Les prescriptions sanitaires que devaient respecter les proprié- taires d'animaux pour avoir droit à l'indemnité étaient les suivantes : la déclaration, cette base de toute intervention sanitah*e, l'isolement et la séquestration des malades, l'obligation de ne s'en dessaisir que pour la boucherie, l'interdiction de vendre leur lait et enfin la désin- fection des locaux. Un crédit de giS.ooo fr. avait été voté; on distribua 103.924 fr. Pourquoi? M. le sénateur Darbot répondait à cette question en ces termes : « La vérité est qu'il a été mis un rigorisme et une exigence dans les formalités à remplir qui ont annulé pour partie les bonnes intentions du législateur et amoindri les légitimes espérances des intéressés. » IIl8 AGRONOMIE Il faut bien reconnaître que ces intéressés constituèrent souvent des dossiers incomplets et irréguliers et oa peut ajouter qu'une plus longue pratique de l'indemnisation, même sur cette base, aurait amené une dépense plus considérable et une distribution plus abon- dante. Un inconvénient était signalé déjà : le propriétaire d'une vaclie laitière tuberculeuse faisait un très gros sacrifice en livrant cet animal à la boucherie et recevait, à titre d'indemnité, une somme dérisoire. M. Viger en signala un autre : selon lui, les propriétaires d'ani- maux atteints de tuberculose localisée étaient moins favorisés que ceux dont les animaux présentaient des lésions indiquant une géné- ralisation de la maladie. Et, dans son esprit, il fallait au contraire accorder une plus grosse indemnité aux premiers, qui se débarras- saient plus tôt de leurs malades. Si l'intention était louable, le raisonnement n'était pas très juste, car il aurait fallu démontrer d'abord qu'il est toujours facile de distinguer, du vivant de l'animal, entre la tuberculose localisée et la tuberculose généralisée. Quoi qu'il en soit , tout le monde se plaignant et le Ministre lui- même trouvant mal faite la loi de 1898, on la remplaça par celle de 1899, qui est encore appliquée à l'heure actuelle. Les indemnités sont réglées ainsi qu'il suit : 1° Au tiers de la valeur qu'avait l'animal au moment de l'abatage, lorsque la tuberculose est généralisée ; 2° Aux trois quarts de cette valeur lorsque la maladie est loca- lisée ; 3° A la totalité de la valeur de l'animal abattu par mesure admi- nistrative, s'il résulte de l'abatage que cet animal n'était pas atteint de la tuberculose. Dans tous les cas, la valeur de la viande et des dépouilles ven- dues par les soins des propriétaires, sous le contrôle du maire, sera déduite de l'indemnité prévue. Cette indemnité ne pourra être supérieure à 200 francs pour le tiers de la valeur et à ^5o francs pour les trois quarts. Cette nouvelle loi remédiait -elle aux inconvénients que nous si2:nalons i)lus haut? Pas du tout. Une circulaire ayant x^i'escrit de n'estimer les animaux que d'après la valeur pour la boucherie, les propriétaires de vaches laitières n'étaient encore point encouragés à faire la déclaration. D'autre part, l'observation de ce qui se passe chaque jour montre MALLET. — ANIMAUX TUBERCULEUX Hig que la loi de 1899 est encore moins favorable à Féleveur que celle de 1898 pour les cas de tuberculose localisée. Enfin, de nouvelles difficultés surgirent, relatives à la A^ente des viandes et dépouilles et à la déduction qui devait en être faite. En 1902, considérant que la tuberculose peut passer complètement inaj)erçue aux yeux du propriétaire le plus clairvoyant et n'être qu'une surprise d'autopsie, on décida que les indemnités prévues par la loi de finances du 3o mars 1899 seraient allouées au proprié- taire de tout animal sacrifié dans un abattoir public , dont la viande aurait été l'objet d'une saisie totale ou partielle, pour cause de tuberculose, de la part du vétérinaire chargé de l'inspection de l'abattoir. Encore une fois, on fit intervenir une prescription qui diminua, dans une proportion notable, le cliilîre des indemnités à accorder en exigeant que les animaux fussent vendus directement en vue de la boucherie. De sorte que, à l'heure actuelle et bien que les propriétaires se soient habitués à ces formalités et constituent des dossiers réguliers, bien que la progression du mal soit constante , bien que le bénéfice des dispositions de la loi de 1889 ait été étendu par la loi de 1902, le chiffre des indemnités distribuées dans cette dernière année ne s'élevait encore qu'à 6i4-570 francs. C'est évidemment pour l'Etat un sacrifice déjà considérable, surtout si l'on considèi'e les résultats acquis , en ce qui concerne la prophylaxie de la tuberculose. L'indemnisation devrait engager le propriétaire à faire disparaître de son étable la tuberculose et réduire ainsi le nombre des foyers d'infection. Dans la pratique, c'est le contraire qui a lieu. Grâce aux dispositions inconq^lètes du décret de 1888, qui vise seulement les animaux atteints sans se préoccuper des contaminés, le cultivateur, après une saisie pour tuberculose et même après avoir reçu June indemnité , n"a qu'une préoccupation : vendre les animaux qui pourraient être atteints de la tuberculose dans son étable. Il multiplie ainsi les foyers d'infection et le taux de l'indemnité en même temps que le mode d'évaluation ne sauraient l'encourager à procéder autrement, tandis que les pres- cini)tions légales sont insuffisantes pour s'opposer à cette spéculation regrettable. Encore une fois nous nous trouvons en présence d'un mécontente- ment parfaitement justifié, et de la part des cultivateurs qui éprouvent de réelles difticultés à se faire payer les indemnités auxquelles la loi leur donne droit, et de la part de l'Etat qui consent en pure perte de II 20 ■ AGRONOMIE o-ros sacrifices pécuniaires. Un remaniement de la loi de 1899 s'im- pose. Dans cet ordre d'idées, MM. Mougeot et Rouvier ont préparé un nouveau projet dont voici le texte : « L'article 4i de la loi de finances du 3o mai 1899 et l'article 82 de la loi de finances du 3i mars 1902, accordant des indemnités dans le cas de saisie de viande et d'abatage d'animaux pour cause de tuber- culose, sont remplacés par les dispositions suivantes : « Dans le cas de saisie de viande pour cause de tuberculose , des indemnités seront accordées : « i'^ Aux propriétaires qui se seront conformés aux lois et règle- ments sur la police sanitaire ; « 1" Aux propriétaires qui auront envoyé directement leurs ani- maux dans un abattoir public ou dans un abattoir privé placé sous la surveillance d'un vétérinaire agréé par le Préfet du département. « Ces indemnités sont réglées au tiers de la valeur qu'avait l'animal au moment de l'abatage, et elles ne peuvent être supérieures à 200 fr. pour chaque bète. « Le produit de la vente de la viande et des dépouilles appartient au i)ropriétaire ; mais, s'il est supérieur aux 2/3 complémentaires de la valeur de l'animal, l'indemnité due ï)ar l'Etat est réduite de l'excé- dent. (( Dans le cas d'abatage, par mesure administrative, pour cause de tuberculose, d'un animal reconnu non tuberculeux après l'abatage, il est accordé une indemnité égale à la totalité de la valeur de l'ani- mal, de laquelle est déduit le produit retiré de la vente de la viande et des dépouilles. » Ce r)rojet est-il de nature à faire disparaître tous les inconvénients que nous avons relevés dans les lois de 1898, 1899 et 1902. On ne peut le croire. Pour qu'il soit vraiment eflicace au point de vue de la prophylaxie, il est nécessaire que les prescriptions de la loi du 21 juin 1898 et du décret du 28 juillet 1888 soient complétées par des mesures appli- cables aux animaux contaminés : tuberculinisation et séquestration des bovins qui auront réagi. Pour éviter les dilïïcultés relatives à l'envoi direct aux abattoirs publics ou privés, il vaudrait mieux accorder l'indemnité aux pro- priétaires de bonne foi, dont les animaux vendus en vue de la bou- cherie ont fait l'olijot de saisies partielles ou totales. Si l'on veut provoquer la déclaration lorsqu'il s'agit de vaches laitières tuberculeuses, les plus dangereuses pour la transmission de L. LA VALLEE. — ENSILAGE DES FOURRAGES VERTS II2I la maladie à l'espèce humaine, restimation doit être faite d'après la valeur réelle de l'animal considéré dans ses diverses aptitudes éco- nomiques et non pas au seul point de vue de la boucherie. Dans cette hypothèse, il est naturel de laisser au propriétaire le produit des dépouilles en adoptant le taux d'indemnité fixé par le projet, mais, pour éviter que l'État soit grugé, on devrait ajouter la disposi- tion suivante : Les viandes et dépouilles seront vendues sous le con- trôle du maire et du vétéi'inaire sanitaire, qui pourront, pour cette vente, se substituer au propriétaire, si celui-ci ne leur paraît pas tirer le meilleur parti possible des produits laissés à sa disposition. Si, au contraire, on ne doit estimer les animaux que d'après leur valeur pour la boucherie, il serait plus simple de revenir aux dispo- sitions de la loi de 1898 et d'accorder une indemnité basée sur la valeur de la partie saisie. Enfin, ce qui semble également utile, c'est de simplifier autant que possible les formalités administratives, de réduire au minimum le nombre des pièces à fournir et de faire régler dans le plus bref délai les indemnités accordées. L'indemnité doit être un encouragement pour le propriétaire à lutter de son mieux contre le fléau redoutable pour notre élevage qu'est la tuberculose bovine. Pour que cette prime sanitaire soit véritablement elficace , il faut qu elle soit aussi élevée que possible et loyalement distribuée ; il importe aussi que le propriétaire prenne, de son côté, des mesures sérieuses pour éviter la propagation du mal. M. P. LAVALLÉE Ingénieur agi'onome, Directeur de la Station expérimentale agricole d'Avrillé ( Maine-et-Loire ) CONSIDÉRATIONS SUR L'ENSILAGE DES FOURRAGES VERTS [ti3i.85:636.i32.31 — Séance du lo août — L'ensilage, c'est-à-dire la conservation des fourrages à l'état vez*t, n'est pas un sujet nouveau; depuis une vingtaine d'années on en parle et, malgré les avantages qu'il présente, il est loin d'être devenu d'un usage courant. H22 AGRONOMIE Gela tient à la lenteur avec laquelle le progrès pénètre dans nos campagnes , à la suspicion qu'éprouvent les vieux cultivateurs pour les méthodes nouvelles et, en troisième lieu, aux insuccès de la px-emière heure, insuccès dus au manque de connaissances des expé- rimentateurs. Il est cependant des fourrages qui ne peuvent être conservés autre- ment, tels par exemple le maïs, ou encore les choux, dans les régions à hiver rigoureux. Les regains des prairies et les dernières coupes de luzerne, sous les climats froids et humides, sont trop souvent soumis aux caprices de la saison automnale pour qu'on n'eût pas recours à l'ensilage pour leur conservation. Enfin, les feuilles et les collets de certaines plantes, comme la betterave, les navets, la carotte et le rutabaga, fournissent, au moment de l'arrachage, une matière alimentaire qu'on laisse bien souvent perdre parce qu'on ne connaît pas le parti que l'on peut en tirer, en les conservant en silos. L'ensilage est donc une question extrêmement importante; nous allons l'envisager et voir les conditions dans lesquelles on peut le réaliser pour chaque fourrage que nous venons de citer. D'une manière générale, l'ensilage consiste à entasser par couches successives les matières à conserver (fourrages à l'état vert ou déchets d'industrie) et à les maintenir par une pression continue à l'abri de l'air et de la lumière. Ce résultat peut être obtenu dans des silos creusés dans le sol, dans des silos maçonnés, dans les granges, ou encore par la com- pression en plein air. Silos creusés dans le sol. — Ces silos sont les plus anciens, les moins coûteux et par conséquent les plus employés dans la petite et la moyenne culture. Ils sont d'un usage courant dans les départements de culture industrielle pour conserver, seules ou en mélange, les pulpes de betteraves ou de pommes de terre destinées à l'alimentation et à l'engraissement hivernal du nombreux bétail qui peuple les étables des fermes de ces régions. On les emploie également à la conserva- tion des fourrages verts, maïs, choux, etc. Les silos creusés dans le sol sont constitués par une fosse à section trapézoïdale, ayant le plus souvent 2 mètres de large à la base et 2 m. 40 à 2 m. 5o au niveau du sol. La terre extraite devant servir à la compression et de couver- ture aux aliments ensilés , la profondeur du silo varie avec la nature et l'état de ces derniers. Pour les pulpes, on dépasse rarement p. LAVALLÉE. — ENSILAGE DES FOURRAGES VERTS II23 o m. 80 de xîi-ofondeur, mais pour les fourrages verts on va jusqu'à un mètre et plus. La longueur est en raison directe de la quantité d'aliments à conserver. La hauteur, dans la majorité des cas, dé- passe rarement 2 m. 4© ou 2 m. 5o. Avant de les remplir, on garnit le fond d'une couche de paille, sur laquelle on dispose ensuite les fourrages par couches successives, en les foulant énergiquement avec les pieds. On augmente la pression sur les côtés , afin d'éliminer le plus possible l'air, cet ennemi des bonnes conservations. Lorsque la fosse est ainsi remplie, on continue d'entasser le fourrage par couches régulières , en diminuant progressivement la largeur, de manière à former hors de terre une section rectangulaire à sommet arrondi. Voilà le silo terminé; pour le couvrir, on dispose sur la partie exposée à l'air, une couche de menue paille de quelques centi- mètres d'épaisseur, puis on recouvre de o m. 5o à o m. 60 de terre que l'on tasse fortement pour empêcher tout accès de l'air à l'intérieur de la masse. La partie externe de cette couverture est lissée avec de la terre délayée dans de la bouse de vache, afin d'en assuier l'imperméabi- lité. Pour les pulpes de betteraves ou de pommes de terre , une épais- seur de o m. o5 à o m. 10 de terre argileuse est largement suffisante. La conservation dans ce type de silo est parfaite et peut se pro- longer sans crainte plusieurs années, à condition que le sol s'égoutte bien et qu'on ait soin de boucher les fissures au fur et à mesure qu'elles apparaissent dans la couverture par suite de la diminution de volume de la masse ensilée. Si le sous-sol n'est pas assez filtrant, il faut le drainer; jamais les eaux ne doivent séjourner dans le silo. Lorsque l'ensilage ne doit pas être consommé de suite, il est bon de disposer le silo dans un endroit ombragé, afin de le soustraire aux ardeurs du soleil. Dans le cas de terrains imperméables ou de situations en contre- bas où la présence d'eau stagnante serait à redouter, on établit le silo directement sur la surface du sol, que l'on recouvre d'une léo-ère couche de paille. La terre qui fera pression et couverture étant prise de chaque côté du silo, on forme ainsi des fossés latéraux qui servent à l'assainissement et à l'écoulement des eaux. Cette nouvelle disposition donne également d'excellents résultats , mais elle réclame plus de soins dans la disposition des couches de fourrages pour arriver à un équilibre parfait. Malgré leur simplicité, 1124 AGRONOMIE ces deux systèmes de silos demandent beaucoup d'habileté de la part des ouvriers pour que la masse reste bien d'aplomb au fur et à mesure quelle se tasse et, quels que soient les soins apportés, il y a toujours un déchet plus ou moins élevé provenant du contact des fourrages avec la terre qui forme paroi. C'est pour remédier à ces inconvénients qu'on a maçonné les silos dans les fermes où l'ensilage est de pratique courante. On économise les frais de main-d'œuvre dans leur construction^ en profitant des accidents de terrain et en rejetant, d'un seul côté, la terre extraite. Le remplissage est ainsi plus facile et la vidange s'opère sans aucune difficulté. (Quelques agriculteurs surmontent les silos d'une toiture, d'autres n'en voient pas la nécessité; cela dépend de la nature des aliments à conserver. Pour les déchets de sucrerie et de féculerie, dont la con- servation est des plus faciles, la présence d'une couverture spéciale n'est pas chose indispensable; mais il n'en est plus de même pour les fourrages verts proprement dits. D'après ces données, on voit qu'à défaut de bâtiments spéciaux, les granges conviennent parfaitement à la conservation des subs- tances fourragères à l'état vert , à condition de réaliser sur la masse la pression nécessaire. Quelle que soit la disposition adoptée , les fourrages doivent tou- jours être disposés ]}ar couches horizontales et bien tassés, surtout sur les bords. On doit les couper un peu avant la floraison efr les apporter immédiatement au silo. Lorsqu'ils ont sul^i un commence- ment de dessiccation, ils n'obéissent plus à la compression; il devient impossible de les conserver seuls. La confection d'un silo peut durer de dix à quinze jours sans inconvénient; mais on n'attendra jamais plus de trois à quatre jours l^our faire de nouveaux apports. La quantité de fourrage ensilée dans une journée doit représenter une hauteur de o m. 5o à o m. 60 au minimum. Dans l'ensilage trop rapide, on utilise mal les constructions, car il se forme à la partie supérieure un vide qui peut atteindre jusqu'à la moitié du cube total. Lorsque le silo est terminé, on le recouvre de balles de céréales ou de menues pailles, sur lesqxielles on applique sans tarder les maté- riaux lourds destinés à la compression. Pour le maïs haché et les autres fourrages, une pression de 3oo à 400 kil. i)ar mètre carré est suffisante; si le maïs est entier, il faut au moins une pression double. p. LAVALLÉE. — ENSILAGE DES FOURRAGES VERTS 1120 Lorsque les fourrages sont très tendres ou chargés d'eau, nous conseillons de les alterner avec des couches de menues pailles. L'addition du sel n'est pas indispensahle, mais, au point de vue de l'hygiène du bétail, nous nous sommes toujours bien trouvé d'en répandre quelques poignées sur chaque couche de fourrage. Ensilage à Vair libi'e. — Nous ne parlerons pas de l'ensilage à l'air libre, qui consiste à entasser les fourrages verts à conserver sur une surface plane , de manière à former un tas à parois verticales , sur lequel on réalise une pression de i.ooo à 1.200 kilos par mètre carré. Cette pression ne pouvant se faire sentir énergiquement sur les bords , on éprouve de ce fait , sur les quatre côtés du silo et à la partie supérieure , un déchet considérable ; le tiers , parfois même la moitié du fourrage, se trouve perdu. Les plus ardents partisans de l'ensilage à l'air libre, entres autres M. G. Cormouls Houles, l'agriculteur bien connu du département du Tarn, dont les essais se sont poursuivis de 1882 à 1895, reconnaissent que ce procédé n'est ni pratique, ni économique. Des matières qu'on peut ensiler. — Le maïs est la plante type de l'ensilage; on peut l'ensiler entier, mais il est préférable de le couper en petits tronçons de un à deux centimètres de longueur. Ainsi divisé, il occupe un moins grand volume, se tasse et se conserve mieux ; il est ensuite utilisé d'une manière plus parfaite par les diffé- rents animaux de la ferme. Un autre avantage non moins appréciable réside dans l'économie des bâtiments. D'après les expériences de M. CofTart, à Burtin, il résulte que le mètre cube de maïs, à l'état naturel, pesait de 3io à 820 kilos, tandis qu'après hachage en frag- ments de un centimètre de longueur, il arrivait à peser 700 kilos. Le millet et le sorgho peuvent s'ensiler comme le maïs. Parmi les autres céréales, le seigle, coupé en vert, mérite d'attirer spécialement l'attention : il fournit au printemps une abondante récolte de fourrage vert qui permet, par l'ensilage, d'entretenir le bétail en bon état dans les fermes où les sécheresses estivales sont surtout à redouter. Les légumineuses, notamment le trèfle incarnat, la luzerne et la minette, donnent d'excellents produits lorsqu'ils sont ensilés au moment de la floraison ; avant ou après cette époque , la réussite est moins assurée. Les pois et les vesces demandent à être mélangés à des balles ou à de la menue paille. Le sarrasin ne se conserve bien que s'il est mélangé avec d'autres fom'rages. 1126 AGRONOMIE Enfin, les foins et les regains de prairies naturelles ou artificielles •se conservent sans diflicultés lorsqu'ils sont ensilés à fétat frais; mais, s'ils ont subi un commencement de dessication, et c'est souvent le cas, il faut les entasser par couches alternatives avec des four- rages nouvellement coupés. Enfin, les choux fourragers et le colza, dont la culture occupe une si grande place dans l'élevage et l'engraissement du bétail de la région de l'Ouest, sont tout indiqués pour former des réserves de fourrages verts. Des modifications et des pertes de four j'age pendant la conserva- tion. — L'ensilage modifie physiquement et chimiquement les ma- tières qui y sont soumises. Les modifications physiques portent sur la coloration, l'odeur, le volume et le degré de consistance des aliments ensilés. Chacune de ces propriétés est plus ou moins modifiée suivant la nature des fourrages et la manière dont l'ensilage est conduit. Lorsque le silo a été fait en peu de temps et les fourrages disposés par couches régulières, la coloration change peu; le maïs, le seigle, les choux, le regain conservent leur couleur verte, mais elle brunit vite au contact de l'air. L'odeur d'ensilage peut être alcoolique ou butyrique ; la première est celle que les animaux préfèrent; on l'obtient en faisant durer la confection du silo plusieurs jours. L'odeur butyrique caractérise l'ensilage mené avec célérité et fait dans un temps très court; lorsque le bétail y est habitué, il le con- somme avec la même avidité que l'autre. Les réactions chimiques qui ont lieu à l'intérieur des silos entraînent une perte de principes nutritifs ; mais la matière sèche subit de ce fait des transformations qui la rendent plus assimilable, en sorte que. sous un moindre volume, elle est plus nourrissante. p. LA VALLEE. — ENGRAIS MlNÉllAUX 112^ M. P. LAVALLÉE Ingénieur agronome, Directeur de la station expérimentale agricole d'Avrillé (Maine-et-Loire) AMÉLIORATION DES PRAIRIES PAR LES ENGRAIS MINÉRAUX [63i.6| — Scaucc (la lo août — De tout temps on a reconnu que le foin de certains prés était plus nourrissant, entretenait le bétail en meilleur état que celui des prai- ries Voisines. Aujourd'luii nous savons que le bon foin doit ses qualités aux plantes qui le constituent. Celles-ci font partie de deux familles bota- niques bien distinctes, la famille des graminées et celle des légumi- neuses, qui comprennent toutes deux un grand nombre d'espèces de qualités inégales. Les plantes qui appartiennent à d'autres familles sont inutiles ou nuisibles ; elles amoindrissent toujours la valeur alimentaire du foin. Faire disparaître ces dernières, favoriser le développement des bonnes es^ièces, tel doit être l'objectif du prati- cien soucieux d'améliorer sa production fourragère. Ax^rès l'assai- nissement du sol, l'emploi raisonné des engrais chimiques nous paraît le moyen le plus pratique pour arriver à ce résultat. Chaque fois que nous ferons usage de chaux, d'acide x^hospho- rique ou de potasse , nous favoriserons le développement des légu- mineuses; au contraire, les graminées sont plus sensibles à l'action des engrais azotés. Enfin, si nous ap[)liquons judicieusement à la fois ces divers éléments de fertilité, nous maintiendrons en équilibre la proportion nécessaire entre ces différentes plantes. S'il est vrai que dans certains cas on a dépassé la limite cherchée, en provoquant par des apports exclusifs d'engrais phosphatés l'en- vahissement de prairies par une légumineuse secondaire , la luzerne ^ac/ieé" (medicago-maculata), vulgairement connue sous le nom de roulée, nous pouvons affirmer qu'on augmente la valeur alimentaire d'un fourrage par l'emploi raisonné des superphosphates ou des scories de déphosphoration. Quant à la roulée, qui fait le désespoir des cultivateurs ayant abusé de ces engrais, nous leur disons, avec non moins de certitude , que cette plante disparaît rapidement sous l'influence des fumures azotées. II28 AGRONOMIE Pour bien mettre ces faits en évidence , nous avons établi à notre ferme expérimentale d'Avrillé des parcelles de démonstration sur une prairie de plus de trois hectares, où dominaient surtout les mau- vaises espèces fourragères. Le foin, comme celui de la plupart de nos hei'liages, était mal constitué au point de vue botani([ue comme au point de vue chimique ; à lui seul il était incapable d'entretenir le bétail en bon état. Après application de superphosphate, à raison de 4oo kil. à l'hec- tare en 1901, la qualité de l'herbe s'améliora lui peu; mais ce ne fut qu'après un apport de 800 kil. de scories Thomas, en 1902, complété par des composts, que le caractère de la végétation changea. Le trèfle des prés, le trèfle hybride et le trèfle blanc apparurent nettement; les bonnes graminées, comme les paturins. les fétuques, les ray-grass, l'avoine élevée, la fléole, le dactyle, etc. disputèrent victorieusement la place aux graminées secondaires et surtout aux mauvaises plantes : « centaurée des prés, aigremoine, rhinante. plantain, achillé , menthe pouillot, renoncule acre, grande marguerite, etc. » Deux parties situées à des points extrêmes de la prairie, où le trèfle faisait totalement défaut, ne reçurent, en 1902, que des scories et là on porta la dose à i.ooo kilos à fhectare. Sous l'action de cette forte fumm-e, la luzerne tachée — (la roulée) — prit un tel développement que toute autre plante disparut bientôt sons fcxuljérance de son feuillage. L'on fut obligé, en juin de la même année, de faire consommer l'herbe en vert, sous peine de la voir pourrir sur place, la température étant trop humide pour en opérer le fanage. C'est sur ces deux surfaces ainsi envahies par la roulée qu'a porté une partie des recherches de cette année. Chacune de ces surfaces fut divisée en trois parcelles égales : l'une servant de témom, les deux autres recevant ou du sulfate d'ammoniaque ou du mtrate de soude, représen- tant inie même dépense de 48 francs à l'hectare, frais d'épandage non compris, soit dans un cas i5o kilos de sulfate d'ammoniaque à 32 francs les 100 kilos, dans l'autre 200 kilos de nitrate de soude à 24 francs. Le sulfate d'ammoniaque a été appliqué en une seule fois, le 11 février dernier , le nitrate de soude en deux fois , moitié à la date précédente , le reste le 7 avril. Qiûnze jours après l'application de ces engrais on observait déjà une diffëi-ence très grande entre la nature et la vigueur de végétation des par- celles : les graminées prenaient mi vigoureux essor dans celles (jui avaient reçu des engrais azotés; dans les parcelles témoins, au contraire, la végétation était peu vigoureuse. Plus tard, la lutte pour la vie s'accen- tuant, la roulée a succombé sous la force de végétation des graminées et des légunmieuses de bonne qualité, tantlis qu'elle a continué avec les plantes de i)eu de valeur à occuper les parcelles témoins. Cet état de chose est resté nettement apparent jnsciu'à la récolte. Par suite du mauvais temps qui caractérisa les deux premières décades de p. LAVALLEE. — ENGRAIS MINERAUX II29 juin dernier, nous avons attendu au 23 du même mois pour couper l'herbe. La dessiccation s'est opérée dans les meilleures conditions et quatre jours après, c'est-à-dire le 27 juin, nous relevions les cliillres suivants comme production de foin sec à l'hectare dans chacune des deux séries d'expé- riences. 1'^ SÉRIE Rendement en foin Enjjrais à Thectare à l'hectare Pai"celle n" i 200 kil. de nitrate de soude 6.3i5 kil. — n" 2 sans engrais 5 200 — n° 3 i5o kil. de sulfate d'ammoniaque . . . 6..5oo IP SÉRIE Parcelle n" i'">'- 200 kil. de nitrate de soude 6 5oo kil. — n" 2 '"••>■ sans engrais 4-55o — n" S'^'*' i5o kil. de sulfate d'ammoniaque . . . 6.3i.5 En résumé, la production moyeime à l'hectare est de : 6.410 kil. j)our les parcelles avec nitrate, 4.87.5 kil. pour les — avec témoins, 6.325 kil. pour les — avec sulfate d'ammoniaque DISCUSSION DES RESULTATS Il y a sensiblement égalité de production dans les deux séries d'expériences entre les parcelles avec nitrate de soude et les parcelles avec sulfate d'ammoniaque. Etant donné que ce dernier est d'une conservation plus facile et peut s'épandre en une seule fois, nous pensons qu'à égalité de prix du kilogr. d'azote son emploi serait plus économique que celui du nitrate. Ajoutons que de nouveaux essais sont nécessaires pour confirmer cette manière de voir. L'efficacité incontestable de l'azote, soit sous forme de nitrate de soude, soit sous celle de sulfate d'ammoniaque, démontre, contrai- rement à ce qui est admis pour la plupart des auteurs , que les prai- ries fauchées ojit de réels besoins en azote assimilable. Il y a là des faits d'ordre scientifique nouveaux que nous signalons tout spécia- lement à l'attention des congressistes de cette section. Ils appellent de nouvelles recherches. Conséquences économiques. — En faisant la moyenne des rende- ments des parcelles avec engrais, nous trouvons pour ces dernières une production de 6.3(37 ^^i^- ^^ l'hectare;, les parcelles sans engrais Il3o AGRONOMIE donnant 4-^75 kil-? 1^ diflerence en faveur des engrais est de 1.492 kiL à l'hectare, soit une augmentation de plus de 3o 0/0. Si nous attril:>uons au loin des parcelles avec engrais une valeur de 5o francs les i.ooo kil., nous resterons au-dessous de la réalité en estimant à 4© francs celui des parcelles témoins qui est de qualité inférieure. Dans ces conditions, la production moyenne des parcelles avec engrais se chiffre à 3i8 francs celle des parcelles sans engrais. . . 196 » Différence en faveur des engrais . . la'S » La dépense en engrais correspondant à 48 francs, le bénéfice net à l'hectare est de (i23 — 4^) =^ Z^ francs. EXPERTEXCES AVEC LES ENGRAIS PHOSPHATÉS ET LA CHAUX Les essais avec chaux et acide phosphorique sont non moins inté- ressants. La chaux a été apportée sous forme de plâtre cuit, à raison de 600 kil. à l'hectare ; soit une dépense de 21 francs; L'acide phospliorique sous forme de scories de déphosphoration ou de super2)hosphate à raison de 725 kil. de scories à Ihectare contre 600 kil. de superphosphate, soit une même dépense de 43 fr. 5o. Les scories, marque Thomas Etoile, titraient, comme le superphos- phate, 14/16 0/0 d'acide phosphorique. Enfin, dans une autre série d'expériences, la dose de plâtre que nous venons d'indiquer fut mélangée avec les engrais phosphatés. Ces différents engrais ont été épandus le i4 mars 1902. Le 3o juin suivant, la récolte en foin sec fut passée à la bascule ; quant au regain il fut consommé sur place par des bètes bovines. Cette année (1903) nous n'avons fait aucun apport dengrais ; mais, ayant observé des différences sensibles dans la végétation des diffé- rentes parcelles, nous avons pesé, le 28 juin, la première coupe de foin sec donné par chacune d'elles. Les rendements en poids des deux années, comparativement à ceux des parcelles témoins, sont consignés ci-dessous, sous forme de tableau : p. LA VALLEE. — ENGRAIS MINERAUX ll3l RÉCOLTE DE 1902 RÉCOLTE DE IQ03 NOS v^^- -ii^ --^-i^- RENDEMENT DIFFÉRENCE des par- celles FUMURE A L'HECTARE Rende- ment en foin à riiectare Supplé- ment de produc- tion en faveur des engrais Rende- ment en foin à l'hectare Supplé- ment de produc- tion en faveur des engrais gSo" total des deux années totale de production en faveur des engrais I Ooo kil. de plâtre cuit G.IIjS'' 675" 5.560" 11.735^ 1.025^ 2 ;25 kil. scories Thomas . . . 6.63o i.i3o 5.36o :5o 11.990 1.880 3 6oo kil. superphosphate... 6.535 i.o35 5.100 490 11.635 1.525 t 4 « Témoin sans eng-rais ». . 5.500 » 4610 » 10.110 » 5 6oo kil. de plâtre J25 kil. de scories Thomas e.gSo 1.450 5.55o 940 12.500 2.390 " 6oo kil. de plâtre 6oo kil. de superphosphate 6.850 1.350 5.450 84o 12.300 2.190 Si nous chiftrons ces résultats au point de vue argent, en fixant comme précédemment et pour les mêmes raisons à 5o fr. le prix de la tonne de foin des parcelles avec engrais et à 40 fr- celui des par- celles n'ayant reçu aucune fumure, nous obtenons le tableau sui- vant : NOS des par- celles FUMURE L' H E C T A R E 600 kil. plâtre cuit 625 kil. scories Thomas 600 kil. superphosphate Terrain sans engrais.. 600 kil. plâtre cuit VALEUR de la Récolte à l'hectare en 1Q02 en 1903 3o8f 75 33i 5o 326 ^5 220 » ( 725 kil. scories Thomas i ■•' "^° 600 kil. |)làtre cuit ( o, ^ 600 kil. superphosphate) ^ " 278' » 268 » 255 » 184 40 277 5o 2'-2 5o SUPPLEMENT de production à l'hectare dû à l'engrais 88' ;5 III 5o 106 75 » 127 5o 122 .5o en 1903 93' 60 83 60 -o 60 93 10 88 10 Total 182' 35 195 10 177 35 » 220 00 210 00 DEPENSES en engrais à l'hectare 21' » 43 5o 43 5o » 64 5i) 64 5o BENEFICE brut à l'hectare 16135 151 60 133 85 » 150 10 146 10 Le bénéfice brut à l'hectare représente la différence entre la plus- value totale de la production et le prix d'achat des engrais. Pour avoir le bénéfice net, il faudrait faire entrer en lignes de compte les frais d'épandage des engrais et le supplément des frais de récolte. Ceux-ci étant variables d'une ferme à l'autre , nous laissons au lec- teur le soin de les établir. Il32 AGRONOMIE COXCLUSIOXS Les conclusions qui découlent de cette deuxième série d'expériences sont bien nettes. Nous constatons en premier lieu que cette année la récolte de foin a été moins abondante dans notre région que l'an dernier ; le déficit est de i6 o/o. 1" La chaux et les engrais phosphatés (scories ou superphosphate) produisent d'heureux etrets sur la végétation des prairies au moins pendant 2 ans ; 3'^' Le plâtre a produit une augmentation de récolte plus sensiljle la seconde année que la première ; nous relevons en effet une pro- gression de 635 kil. en 1902, contre gSo kil. en 1903. Ceci tient à la manière d'agir de cet engrais : il a surtout favorisé la végétation des légumineuses, dont le développement ne fut complet que la deuxième année de son application ; 4*^ Les engrais phosphatés — scories de déphosphoration ou super- phosphate — ont fait sentir leur action dune manière très efficace sur les deux récoltes successives. L'excédent total de production est de 1880 kil. de foin sec à l'hectare pour la parcelle avec scories et de i525 kil. pour celle avec superphosphate. Si les scories, surtout en deuxième année, se montrent un peu supérieures au superphosphate, cela tient à ce que, pour la même somme d'argent, on s'est procuré avec le premier de ces engrais un stock plus considérable d'acide phosphorique et de chaux, éléments utiles au même degré dans notre sol. Il est probable que l'inverse se produirait dans les terres riches en calcaire. 5° L'efficacité des engrais phosphatés est plus accentuée, toutes choses égales d'ailleurs, sur la récolte qui suit leur^pandage que sur celle qui vient ensuite. 6° Il y a une très grande analogie entre les rendements des par- celles ayant reçu comme fumure un mélange de plâtre et d'engrais phosphaté. Les excédents de production sont considérables et sensi- blement égaux chaque année. Ils s'élèvent à 2390 kil. pour le mélange plâtre et scories et à 2190 kil. pour le mélange plâtre et superphos- phate ; 7° Au point de vue économique, nous relevons dans notre tableau que le plâtre a laissé un bénéfice brut de 161 fr. 25 à l'hectare ; Les scories ont laissé un bénéfice brut de i5i fr. 60 à l'hectare; Le superphosphate un bénéfice brut de i33 fr. 85 à l'hectare ; Le mélange plâtre et scories un bénéfice brut de i50 fr. 10 à l'hec- tare; CH. LE GENDRE. — CARTES AGRONOMIQUES COMMUNALES Il33 Le mélange plâtre-superphosphate un bénéfice brut de 146 i'r. 10 à l'hectare. Nous n'avons pas fait d'essais personnels avec les engrais potas- siques, mais nous connaissons bon nombre de propriétaires qui, tous les ans, emploient avec succès, notamment sur prairies calcaires, 600 kil. de kaïnite alliée au superphosphate. Les excédents de pro- duction dus à l'apport de potasse se chiffrent en moyenne de 60 à 80 fr. l'hectare. Enfin, si nous rappelons que les engrais azotés ont laissé un béné- fice de yS fr. l'hectare, il nous sera permis de conclure que l'emploi judicieux des engrais et amendements minéraui appliqués à l'en- semble de nos prairies se traduirait annuellement par plusieurs millions de francs. C'est ce chiffre que nous livrons à la méditation des personnes qui s'intéressent à la prospéi'ité de l'agriculture nationale. M. Ch. LE GENDRE Directeur de la Rei'uc Scientijiqiic du Limousin, à Limoges CARTES AGRONOMIQUES COMMUNALES [63i.i5] — Séance du 10 août — La carte agronomique de la commune de Condat (Haute -Vienne) n'est pas aussi avancée que je l'espérais. Je ne savais pas, au moment où j'escomptais l'avenir, que Limoges serait — en 1903 — le siège d'une exposition et que les circonstances conduiraient la Société Botanique et d'Etudes scientifiques du Limousin à prendre une large part à cette exposition. J'ai dû présider à l'organisation d'une section ayant cent mètres carrés de surface et — aujourd'hui encore — je suis contraint d'aller chaque jour surveiller nos collections. Cette exposition scientifique sera, du reste, l'objet d'un compte rendu général, que je me propose de soumettre à l'Association Fran- çaise dans sa session de 1904. ^lalgré ces travaux imprévus, je n'ai pas perdu de vue notre carte agronomique et, si l'on n'avait pas mis un retard regrettable à me ii34 AGRONOMIE fournir le calque de la carte d'ensemble de la commune, je serais dès aujourd'hui en mesure de présenter un x^remier croquis. Il a été fait douze analyses de terre. En voici les résultats : y. a o a U Sur Leptyniic. — Terrain cultivé n'ayant jamais reçu que du fu- mier de ferme. 1. - Sol 2. — Sous-sol Sur Leptynite. — Même nature de terrain. 3. — Sol Sur Leptynite. — Pré haut non fumé. 4. — Sol Sur Leptynite. — Terre à seigle n'ayant toujours reçu que du furàier de ferme. — Terrain léger. 5. — Sol 6. — Sous-sol. Sur Gneiss. — Terre forte sim- plement fumée. :. — Sol 8. — Sous-sol Sur Gneiss. — Terre sablonneuse. g.-Soi Sur Leptynite. — Prairie au bord de la Briance. — Terrain d'allu- vion. 10. — Sol. Sur Granit fcnei.ssique. — Terrain planté en bois, ne recevant aucun engrais. II. — Sol Sur Porphyre quartzifère. — Pâ- ture ne "recevant aucune façon culturale. 12. — Sol. gr. 48 i32 32 33 i5i Ô6S 67 30 120 270 38o 90 a; gr. gr 157 795 ^47! 72/ i64 180 i62 198 /7/ 0 o co s; &0 368 8o3 787 656 476 735 799 588 337 gr. 03 ce gr. 640 282 448< 459 ni tfi 3 ic a a *i) a U 'ci .- o. gr. ! gr. gr. gr. gr. gr 245 373 495 632 546 280 367 6i3 349 839 130 4i3 5o9 358 558. 3 fi 738 472 618 563 33o 333 412 87 80 6 5o » 98 i I 20 » 96 3 25 4 05 »34\»56\»93 220 6 37 » 36 i 17 )) q5 1 3 23 î I 66 18 3o » 65 I 46 i i5,3 97 34 3 55 » 65 » 96,1 18 2 i3 29 I3l\»4i » 90 108 122 8 75 » 82 / 13 4 »i » 74 27 14 33 » 90 2 43 I 82 3 87 33 18 » » 92 2 96 I 98 3 09 I 22 » 97 » 81 »89 2 25 4 89 337 22 12 ))S) 61 I O9I1 o3:2 04 386 I I9|i3 » » 56 I 21 I 46 3 42 Les trois premières colonnes de ce tableau donnent la quantité de cailloux, de graviers et de terre fine contenue dans un kilogramme de terre complète. Dans les colonnes suivantes, la proportion de chaque corps est calculée par rapport à un kilogramme de terre fine. CH. LE GENDRE. — CARTES AGRONOMIQUES COMMUNALES Il35 Ces analyses, faites sur des échantillons de terre pris au centre et aux extrémités de la commune, sur les quatre espèces de roches qui s'y rencontrent, permettent dentrevoir le résultat final. Bien que les analyses chimiques présentent des différences assez importantes, on peut dire que généralement ces terres sont riches en potasse , assez bien pourvues en acide phosphorique et en azote, mais qu'elles manquent presque complètement de chaux. Si nous négligeons le sous-sol, nous remarquons : Que la plus forte proportion d'azote a été trouvée dans une prairie sur terrain d'alluvion et la plus faible sur les terres légères, qu'on appelle en Limousin terres à seigle. Ces dernières terres auraient certainement besoin d'un fort apport d'engrais chimiques. Que la plus forte proportion d'acide phosphorique a été trouvée dans la môme prairie et la plus faible (0,95 à 0,97) sur des terres cultivées, qui paraissent bonnes, mais où les réserves s'épuisent parce qu'on n'emploie jamais de phosphates. Voici des champs qu'il sera facile d'améliorer si le propriétaire exige de son fermier qu'il renonce aux vieilles méthodes. Que la plus forte proportion de potasse a été trouvée dans un pré haut, fumé, assez bien pourvu, du reste, d'azote et dacide phospho- rique, et la plus faible sur un sol planté en bois (2.04) et dans une terre à seigle (2.1 3). Si l'on voulait cultiver des pommes de terre dans ce dernier terrain, il serait donc utile d'employer des sels potassiques. Alors on aurait certainement un très bon rendement. En ce qui concerne l'analyse physique, on constate que, sur cer- tains points, il n'y a pas assez d'argile et que les cailloux et les gra- viers occupent trop de place. Nous n'avons donc pas toujours ce que les agriculteurs appellent une terre franche. D'un autre côté, presque partout le sol est assez profond. Malheu- reusement la charrue descend rarement au-dessous de quinze centi- mètres. Si l'on employait des charrues plus fortes, il n'est pas dou- teux que, dans la plupart des terres de la commune de Condat, le rendement dépasserait de beaucoup ce qu'il est actuellement. Quand notre carte sera terminée, nous rédigerons une brochure, dans laquelle nous donnerons aux cultivateurs des conseils se rap- portant aux erreurs de culture que nous aurons constatées. Nous ferons imprimer cette lirochure, qui sera distribuée aux personnes intéressées. II 36 AGRONOMIE M. le D' F. HEIM Professeur à rÉcolc Nationale Supérieure d'AyTieulturc coloniale ET M. aÉNEAU Licencié es Sciences CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES FOURRAGES DE GRAMINÉES DES PAYS TROPICAUX — Séance du lo août — Nos connaissances concernant les i^lantes fourragères des i^ays trox^icaux sont des plus insuffisantes. Nous ne possédons de tableaux de leur composition chimique que pour un très petit noml^re d'entre elles. A l'heure où la mise en valeur agricole de nos colonies s'im- pose à l'attention de tous, cette lacune mérite d'être comblée. C'est pour y contribuer que nous avons entrepris une série de recherches sur la composition des fourrages des pays tropicaux ; nous donnons ici les premiers résultats de ces recherches ; ils sont relatifs à des Graminées de nos Antilles Françaises, dont les échantillons nous ont été fournis par le R. P. DusS. Professeur à la Basse-Terre (Guade- loupe), auteur connu de la flore des Antilles. Toutes les espèces étudiées ont été fauchées au moment de la floraison; les analyses ont porté sur l'ensemble des parties aériennes de la plante; les identifications spécifiques, certaines en raison de l'état très complet des échantillons, ont été vérifiées par le mono- graphe autorisé des Graminées : le D-^ Hackel, de San Poelten. Il est nécessaire d'indiquer sommairement la marche .analytique adoptée, les résultats donnés x^ar les diflérents auteurs relativement à la composition des fourrages étant très variables selon les méthodes analytiques mises en œuvre. Les principaux constituants ont été dosés comme suit : L'humidité, après dessiccation à iio°. Les cendres par calcination à basse température, lixiviation à l'eau acidulée pour enlever les cldorures et calcination au rouge pour détermi- nant le quantum de charbon ayant résisté à la première incinération (V. pour détails Grandeau, Traité d'analyse des matières agricoles, § 4'3o). La cellulose par épuisement successifàracidechloihydriquc au —, puis à la notasse à —, la uialirrc résiduelle est comptée comme celhilose (Gran- ^ ' lo deau, § 'î3o). F. HEIM & GÉNEAU. — FOURRAGES DES PAYS TROPICAUX Il3^ Les graisses par évaluation du quanlum d'extrait étheré (toutes les autres substances, solubles dans Téther, telle la chlorophylle, sont donc conventionnellement comptées comme graisses). Les matières azotées, par dosage de l'azote total par la méthode de Kjedahl, en admettant que tout l'azote est à l'état d'albumine (Grandeau, /. c, § 43o). Les matières autres que celles ci-dessus dénoncées sont conventionnel- lement comptées comme matières hydrocarbonées, en confondant sous cette dénomination, aussi bien les pentosanes que les amylacés propre- ment dits (Y. Grandeau, méthode de \N'eende). dont la présence est au moins douteuse dans les pailles de Graminées (par analogie avec ce que nous savons des pailles indigènes). Nous donnerons ultérieurement les résultats d'essais de digestibilité in vitro. Nous ne disposions pas d'une quantité sulfisante de fourrages pour déterminer expérimentalement sur le bétail le degré d'assimi- labilité de ces Graminées fourragères. Le tableau de leur composition chimique présente néanmoins un élément sérieux d'appréciation. Le total des unités fourragères a été évalué en attribuant, comme il est d'usage pour les fourrages d'Europe, un coefficient nutritif de 5 aux matières protéicj[ues et un coefficient de 2,5 à la somme de& matières grasses. La relation nutritive a été établie en faisant le quotient des matières protéiques par la somme des hydrates de carbone et des matières grasses, ces dernières affectées des coefficients 2,4. A. Première série de déterminations sur les Graminées fourragères de la Guadeloupe Nous réunissons en un tableau les résultats fournis par l'étude de cinq graminées communes à la Guadeloupe. 7i X X cj II «a il X X — a 0 Matières grasses ■s. X w "5 9* Relation nutritive Paspahiin notât uni.. I2.,") iS.i 5.89 23.7 40 5 2.35 35.3 0.14 Panicnm Icucophœum 9.8 i'3.9 6.25 28.9 37.1 4.i3 41.5 o.i3 Ccnchrus tribuloïdcs. 8.7 16.0 ::i 28.0 36.9 2.73 45.5 0.17 Cynodon dactilon 12.- i^i» fi. rv3 23.2 41.0 2.69 394 o.i3 Setaria glauca 12..") 11 . 1 3.98 27.5 43.4 I.,)2 23.7 0.07 D'une manière générale, la composition de ces foins de Grami- nées, comparée à celle des foins d'Europe (d'après les tables de AVolff), est celle de foins plutôt de bonne qualité. 72* II 38 AGUONOMIE Paspalinn notatinn Flugg (Vulg-. m Ilorbe sûre femelle ») est une Gra- minée glaïKjue, à stolons très longs, qni ne pousse que dans les terrains humides. On la trouve aux basses altitudes, le long- des rivières, canaux, mares; le nom de « Herbe à Moulons », sous lequel on la désigne à la Martini(iue, indique qu'on a remarqué depuis longtemps sa valeur four- ragère. Bien que l'on manque totalement à cet égard de données pré- cises, divers Paspalum des pays tropicaux sont d'ailleurs réputés fournir des foins, dont la qualité ne le céderait en rien à celle des foins d'Europe ; tels les : P. conipositnm (Oplisnieniis compositus Beauv.) commun dans le sud de l'Asie, l'Australie, la Polynésie, qui fournit un fourrage tendre et possède la précieuse faculté de pousser sous les ombrages peu épais; — P. dilatatum Pom. (Millet bâtard) de l'Amérique du Sud, à foin plus médiocre, nuiis qui, de tous les fourrages introduits, supporte le mieux la sécheresse dans les pays tropicaux, en raison de l'extrême profondeiu- de ses racines. Panicuni lericophœnmïî. B. et Kth. (P. Diichassaing-ii Ste^d, P. lanatum RoTTB. Tricholœna insnlaris Ghiseb (Vulg. a Herbe à blé »), aljonde dans les régions basse et infra-moyenne de la Guadeloupe et de la Martinique. Cenchrus tribiiloîdes L. abonde dans toutes les savanes antillaires des basse et infra-moyemie régions. C'est un fourrage des lieux secs, mais, avant de le cultiver, il y aurait lieu de bien tenir compte de ce fait que ses fruits mûrs s'attachent à la toison des animaux, au moyen des pointes dont est muni l'involucre, ce qui peut nuire au bétail et rendre dilTicile à carder la toison des bêtes labiières. On pourra s'étomier de voir figurer dans une liste de fourrages tropi- caux deux Graminées de la flore européenne : Setaria giaiica P. Beauv. et Cynodon dactj'lon Pers. Ce sont en elfet des Grammées introduites aux Antilles, mais qui s'y sont naturalisées, au point de s'y trouver en abondance dans presque toutes les localités. La Sétaire à feuillage glauque, hôte des lieux sablonneux et chauds d'Europe, abonde dans les basse et infra-moyenne régions de nos colo- nies antillaises : c'est « l'herbe-salon », « herbe à bouquets » des créoles , recherchée par le bétail. Quant au vulgaire Chiendent, il abonde le long des cliemins, sur les vieux murs des basse et moyeiuie régions de toutes les Antilles et refoule, en maintes localités les Graminées autochtones, fait constaté d'ailleurs dans la plupart des pays tropicaux (en particulier à Tahiti et en Nouvelle-Calédonie, où, en moins d'un (juart de siècle, il s'est substitué à la végétation primitive (Raoul). Partout où le sol est siliceux, ou tout au niohis mélangé de sable et de gravier, le Chiendent prospère, aussi bien dans les plaines brûlantes qu'à des altitudes de 2.000 mètres, comme on le i)eut constater dans l'Inde; il oflre, d'autre part, le très grand avantage de pousser sous les ombrages, à la condition qu'ils ne soient pas trop épais : c'est ainsi qu'il vient sous les Cocotiers, dans les stations exposées aux brises marines où aucune autre Graminée lourrai^-ère ne peut s'implanter. Sous le climat européen, propice aux plantes fourra- gères, le foin de Chiendent est peu apprécié; mais, dans les pays tropi- caux, à pluies rares ou irrégulières, il y a là une précieuse ressource, comme l'ont établi les essais faits dans les stations les [»lus sèches du F. HEIM & GENEAU. — FOURRAGES DES PAYS TROPICAUX Il39 littoral australien ; dans la zone équatoriale, l'expérience classe le Chien- dent parmi les fourrages riches, dont le foin, avantage appréciable, sèche en deux ou trois jours. Le peu d'im])ortance attribué, au point de vue fourrager, en Europe à Cijirodon dactylon et Setaria gldiica, a fait négliger l'étude de leur composition chimique; aussi n'avons-nons pu comparer les chinVes obtenus sur ces plantes poussées dans la zone tropicale avec ceux que les agro- nomes auraient pu obtenir par l'analyse des mêmes plantes croissant dans nos climats , comparaison qui n'aurait pas été dépourvue d'mtérêt au point de vue de l'étude générale de l'influence du climat sur la compo- sition des plantes fourragères. B. Sur deux Graminées fourragèi^es , le ce Fantaka » et le « Vero », de Madagascar Aux premières données relatives aux Graminées antillaises, nous joignons celles acquises par l'un de nous, en commun avec M. L. Dupont, relativement à deux Graminées du sud de Mada- gascar : le « Fantaka » et le « Vero ». La détermination Ijotanique exacte de ces Graminées a pu être faite , grâce à la présence , dans les lots reçus, de quelques inflorescences fructifiécs : l'une, le « Fan- taka », l'autre le « Vero », lots reçus de M. Garenne, colon à Faryahira, près de Fort-Dauphin. Composition centésimale des fourrages de Fantaka et de Véro séchés à Vair ESPECES Fantaka (Panicum maxi- mum) Véro (Panicum débile) . Eau II. 2- 10.48 •44 3.78 8.53 8.52 24.46 ^ V X — ' ; 20.02 23 . 3o 22 . 69 s s. 1 . 20 1.68 o 0.409 0.210 Chaux 0.34: o.io5 c s ^ ^ ? (36. 0.36 0.38 Composition centésimale des fourrages d'herbe de Guinée et d'herbe de Para {d'après Boname) ESPÈCES Eau Cendres Matières azotées X Matières non azotées Total des unités fourragères UERUE \)V. GUINÉK : A rétat vert A rétat sec l3.20 l3.20 :i.34 11.34 2.49 6.22 1.4- 3.0- 4.5o I.(Î0 4.11 10.9: 2-.:5 l3.22 33.0.5 11.28 23.20 12.00 3(1.11 0.34 0.85 0.3: 0 . 92 4: .35 .52.3 HERBE DE r.\R.A : A l'état vert A l'état sec 1 1^0 AGRONOMIE Le « Fantaka » est Paniciim mascimum Tacq, le « Vero » est Panicinn débile Dest., variété difficilement identifiable sur les échan- tillons en notre possession, mais distincte du type par le grand nombre des épis de l'inflorescence. On sait que Paniciun maximum est Therbe de Guinée, cultivée aujour- d'hui dans la plupart des régions chaudes du globe et dont raccliniatation a été tentée avec quelques succès dans le bassm de la Méditerranée et, en France, juscpi'au sud de la Loire. Cette Graminée est réputée l'un des meilleurs fourrages à consommer en vert; le « Fantaka » (prononcez « Fataka ») forme, dans la vallée du Farvahira, des toulîes dont la hauteur atteint i'",5o à 2'" et le diamètre 1 à 3 centimètres; une môme touffe comprend une vingtaine de chaumes, durcissant assez rapidement avec l'âge et dont le diamètre à la base atteint 5 à 10 millimètres. A l'état jeune, c'est un fourrage recherché des l^œufs , qui le dédaignent lorsqu'il devient dur (il est à noter que l'échan- tillon soumis à l'analyse renfermait des chaumes déjà fortement lignifiés,, supportant des innorescences fructifères). Le « Yéro » (prononcez « Vérou »), Graminée cosmopolite, est l'herbe dominante dans presque tous les pâturages naturels du S.-O. de Mada- o-ascar. Ses charnues sont terminés par des inflorescences atteignant une hauteur de l'^jSo à 2™ et un diamètre à la base de i ou 2 millimètres ; ses rhizomes émettent aussi des chaumes plus grêles, n'ayant pas plus de 3o à 40 centimètres de hauteur, qui ne fleurissent pas et fournissent une herbe très tendre, dont les bestiaux sont très friands: ceux-ci recherchent également le sommet des inflorescences jiortant grauies ; au dire des indigènes, le « Véro » serait le meilleur fom-rage de toute la réo-ion pour les bêtes à cornes; il est, d'ailleurs, extrêmement abon- dant (l'échantillon analysé avait été fauché au moment de la fructifica- tion). Nous donnons, à titi'e de documents comparatifs, les chiffres four- nis par BoNAME pour l'hei'be de Guinée et l'herbe du Para (Paniciim molle SW.). (Les chiffres donnés par cet auteur se rapportant aux fourrages verts, nous avons ramené leur composition centésimale au taux qu'elle atteindrait pour des fourrages supposés au même état de dessiccation que les fourrages par nous étudiés; le total des unités fourrao-ères et la relation nutritive ont été déduits des chiffres mômes de Box AME.) Les différences, somme toute minimes, entre nos chiffres et ceux de BoNAME, relativement à l'herbe de Guinée, s'expliquent sans doute par la différence des sols où croissaient les plantes analysées et surtout par l'âge dilTérent des échantillons étudiés. Si nous comparons la composition de nos deux fourrages malgaches à celle des principales graminées fourragères d'Europe (d'après les L, DANGUY. — ASSURANCE CONTRE LA MORTALITÉ DU BETAIL Il4l données de Stebler, nous constatons qu'elles possèdent la composi- tion d'un foin de graminées de moyenne qualité (i). M. Garenne, avant éprouvé quelques mécomptes dans l'élevage des bouvillons, supposa que la minéralisation de ses élèves laissait quelque peu à désirer, du fait d'une trop faible teneur des fourrages en chaux et en acide pliosphorique (supposition justifiée, à priori, par la nature granitique du sol de la région du Faryahira et la pauvreté presque générale des terres de la grande île en chaux et en phos- phore) ; c'est pour fournir une indication sur ce point que ces deux éléments minéraux ont été dosés dans le « Fantaka » et le « Véro ». Les données ci-dessus ne sont que les premières indications four- nies par l'étude d'ensemble que nous poursuivons et comptons étendre aux principaux types de fourrages de nos possessions tropi- cales ; les colons seront ainsi munis des éléments désirables pour le calcul des rations alimentaires de leur bétail, en raison même de la fréquence des affections des voies digestives, des causes nombreuses de débilitation générale ; l'alimentation rationnelle des animaux doit être une des plus sérieuses préoccupations de l'agronome établi dans la zone tropicale. M. L. DANGUY Professeur départemental cfagriculture , à Nantes LES SOCIÉTÉS D'ASSURANCE MUTUELLE CONTRE LA MORTALITÉ DU BÉTAIL [368.5J — Séance du lo août — La culture, plus que toute autre industrie, est soumise aux influences extérieures favorables ou mauvaises. Diverses causes de (i) Si Ton so reporte au grand travail publié par MM. A. Mùntz et E. Ruisseaux sur la valeur agricole des tej^res de Madagascar (Bullet. du Ministère de l'Agriculture, igo.j, n» 5, pp. 17(1-17;), nous trouvons justement une analyse de la terre de la vallée du Faryaliira qui nous fixe sur la constitution du sol où prospèrent les herbages spon- tanés par nous examinés. Ce sol reiilerine pour 1000 de terre : Terre fine 770 Cailloux • . 2'3o (siliceux) 1000 de terre contiennent : Terre fine Terre brune Azote 2.i5 1.6(5 Acide phosphorique 3.82 2.94 Potasse 0.76 0.09 Carbonate de chaux o.So o.(32 Cette terre, qui offre un bon fonds de fertilité, est très riche en humus, en azote, eu acide phosphorique , et contient sensiblement de potasse et un peu de chaux. 1 142 AGRONOMIE ruine menacent les récoltes. Ce sont tantôt des périodes de séche- resse trop longues qui viennent compromettre le travail de toute une année; d'autres fois, des froids rigoureux et intempestifs sont la cause de l'anéantissement des récoltes. A cela le travailleur le plus prévoyant ne peut rien , sinon peu de chose; mais, s'il se trouve presque complètement désarmé en face de ces conditions défavorables et d'autres encore qui n'entrent pas dans le domaine des prévisions humaines, il doit néanmoins s'eftbrcer de profiter de toutes les circonstances de nature à donner à son travail si pénible une sécurité aussi grande que possible. Le cultivateur prudent doit donc envisager la possibilité de réparer ses pertes en bétail : le plus souvent, il tentera d'atteindre ce but à l'aide d'une sage épargne ; mais qu'un sinistre survienne , si cette épargne se trouve isolée en face des pertes à couvrir, elle sera bien souvent impuissante à réparer celles-ci. Le cultivateur est alors obligé d'acheter du bétail à crédit, pour reconstituer incomplètement • son étable. Il atteindra plus facilement le but que sa prévoyance lui impose en donnant à son épargne le caractère d'une assurance, destination spéciale mieux appropriée à l'objet qu'il se propose ; l'assurance ainsi comprise ne sera autre chose que l'organisation de la pré- voyance, en vue de remédier à la destruction du bétail par une cause fortuite ; le cultivateur trouvera dans la mutualité l'instru- ment qui lui permettra de réaliser cette organisation. L'assurance a pour but la réparation pécuniaire d'un dommage éventuel qui , lorsqu'il se produit , est bien souvent une cause , sinon de ruine, du moins de gêne profonde, pour celui qui est seul à le supporter; la réunion d'un grand nombre de cultivateurs soumis à un risque de même nature atténue au contraire, dans la mesure du possible, la répercussion que la réalisation du risque peut exercer sur le budget d'un cultivateur; l'association lui viendra en aide en mettant à son service une force puissante, la solidarité profession- nelle et, le jour où le sort lui fera subir une perte, il sera assuré de trouver une compensation certaine de sa perte. Les cultivateurs seront ainsi leurs propres assureurs. Toute idée de spéculation se trouve écartée. Les cultivateurs n'ayant pas, comme dans certaines vSociétés, de capitaux à rémunérer, les déboursés seront réduits au strict nécessaire. Si toutes les charges se répartissent sur les mêmes têtes, tous les avantages s'y trouvent réunis également. C'est en vue de soustraire autant que possible le bétail, capital DE MONTRICHER. — UNIOX DES SYNDICATS AGRICOLES Il43 productif, aux si nombreux risques auxquels il se trouve exposé, que l'organisation de la mutualité s'impose. Or. le département de Maine-et-Loire semble être resté jusqu'à présent en dehors du mouvement si intéressant qui a provoqué, surtout depuis le vote de la loi du 4 juillet 1900, la création de tant de Caisses de secours contre la mortalité du bétail. Maine-et-Loire compte seulement huit Sociétés comprenant quelques centaines d'adhérents. Et cependant ce ne sont pas les exemples encoura- geants qui manquent autour de lui, La Sarthe comprend, en outre de l'Union des Sociétés de Secours mutuels (bétail) du Mans, présidée par M. le sénateur Legludic, (6,175 membres. Capital assuré : 6,096,772 fr.) cent dix Sociétés qui exercent leur action bienfaisante sur un pareil nombre de communes, La Vendée, qui est dans l'Ouest le véritable berceau des mutuelles- bétail, possède, d'après un remarquable rapport de M, Biquet, Professeur départemental d'Agriculture, qui s'est fait l'actif propa- gandiste des idées de mutualité, cent vingt-deux Sociétés : le nombre total de leurs adhérents atteint 12,700 et la valeur de l'ensemble du bétail assuré est de 12.735,000 francs, La Loire-Inférieure comprend cinquante Sociétés en plein fonction- nement et une douzaine en formation : à l'heure actuelle, 4-5oo cultiva- teurs possédant pour plus de 6.000.000 francs de bétail sont assurés. Ainsi donc, les exemples encourageants ne manquent pas aux Angevins, qui sauront profiter bientôt, nous l'espérons du moins, de tous les bienfaits de la mutualité. M. DE MONTRIGÏÏER Président du Groiipt' départemental des Associations coopératives du Crédit Agricole, à ^larseille UNION DES SYNDICATS AGRICOLES DES ALPES ET DE PROVENCE ET ASSOCIATIONS COOPÉRATIVES DE CRÉDIT AGRICOLE [Wo.tiin — Séance du 10 août — L'Union des Syndicats agricoles des Alpes et de Provence a été créée le i" mai 1890 par un Comité d'organisation dont les membres sont restés à sa tête comme fondateurs de l'institution ; elle est cons- tituée par ces derniers et les délégués des syndicats adhérents. II ^/{ AGRONOMIE L'Union comprend actuellement 40.000 membres répartis entre 144 syndicats unis des départements des Basses-Alpes, Hautes- Alpes, Alpes-Maritimes, Ardèche, Bouclies-du-Rliùne, Drôme", Gard, Yau- cluse et Yar. Son siège social est à Marseille; elle publie un Bulletin mensuel. L'Union a pour but de créer entre les Syndicats un lien utile et pratique ; de provoquer la création de Syndicats dans tous les centres agricoles; de répandre et vulgariser l'enseignement agri- cole technique et pratique, d'aider au développement de l'idée syn- dicale et coopérative dans toutes les classes agricoles , de propager les notions de solidarité et de prévoyance sociales, d'instituer le crédit rural et enfin de contrilmer, par tous les moyens en son pou- voir, aux progrès de l'agriculture et au bien-être des classes rurales. Ses moyens d'action sont : la publicité, les congrès et les concours annuels avec récompenses, médailles, etc., des tournées de confé- rences, des fêtes locales, des banquets, et l'assemblée générale annuelle qui se tient à Marseille dans le courant de décembre. Le septième Congrès de l'Union doit se tenir à Alais en septemljre prochain. La plupart des associations qui composent l'Union sont commu- nales ; quelques-unes s'étendent dans le canton ou l'arrondissement (Draguignan et Brignoles) ; une seule est départementale (Alpes- Maritimes). Chaque Syndicat paye à l'Union une cotisation proportionnée au nombre de ses membres. L'Union a créé sept Coopératives de pro- duction et deux Coopératives de consommation. La Coopérative Agricole des Alpes et de Provence a été instituée parallèlement à l'Union pour traiter les affaires des Syndicats et notamment les achats en commun, outils, matières premières, etc. ; elle ne s'est pas encore sufiîsamment organisée pour aborder en grand la vente des produits agricoles. Quelques Syndicats de l'Union se sont groupés pour recourir à la coopération de production et de vente. Ces groupes peuvent se diviser en deux catégories : i'' Celles qui se bornent à chercher, à titre d'intermédiaire, des débouchés nouveaux pour leurs adhérents, à étudier les questions d'emballage et de transport, de tarifs de Chemin de Fer, etc. Tels sont les Svndicats du Comtat. des Producteurs d'Hyères, etc. ; t. ' " -1" Les associations qui vendent elles-mêmes les produits mis en commun de leurs adhérents après leur avoir fait subir une prépara- DE MONTRICHER. — UNION DES SYNDICATS AGRICOLES 1x45 tion industrielle. Tels sont les Syndicats de Ciiges pour les câpres ; de Roquevaire pour les conserves d'abricot ; d'Istres pour les huiles d'olive, etc. C'est à l'initiative et à l'heureuse propagande de l'Union et au concours matériel de la Caisse d'Epargne des Bouches-du-Rhône qu'est due l'organisation du Crédit agricole dans la région. Tel qu'il fonctionne dans le rayon d'action de l'Union des Syndicats de Provence, fondé sur la coopération solidaire de tous, le Crédit agricole a pour but et résultat social la juste restitution dune par- celle des fruits de l'épargne locale au travail local. A l'exemple de ce qui se pratique en Italie, où fonctionnent et prospèrent les banques populaires, dans lesquelles chaque mutualiste répond individuellement et solidairement de la totalité des dettes des autres mutualistes, la Caisse d'Epargne des Bouches-du-Rhùne a pris l'initiative d'un essai de prêts à l'Agriculture. Ainsi que l'y autorise l'article lo de la loi du 20 décembre 1896 sur l'emploi des fonds des Caisses d'Epargne, elle est parvenue, par assignation sur des prélèvements autorisés sur le disponible du boni et sur sa fortune personnelle, à susciter dans les Syndicats l'épargne rurale en vue du Crédit Mutuel. Des conférences furent organisées par l'Union dans les principaux centres agricoles , véritable enseignement de Crédit Mutuel pratique jusqu'alors inconnu et qui porta ses fruits. Les cultivateurs comprirent d'autant mieux l'utilité d'une bonne organisation de crédit que les divers modes de culture, autrefois simples et peu coûteux, se sont avec le temps et le progrès de la chimie industrielle et agricole profondément modifiés et compliqués. Autrefois la culture n'exigeait que peu d'avances, elle comportait de simples assolements et des fumures à long terme ; il en va aujour- d'hui tout autrement ; mais , si les rendements sont plus élevés , l'industrie agricole nécessite une mise de fonds d'importance relative, que ne peut fournir en général l'ancienne classe des fermiers et métayers et des petits propriétaires cultivateurs dont l'avoir n'excède guère le fonds de terre qu'ils exploitent. Mais l'aide matériel, les avances ou, en un mot, le crédit qu'un cultivateur ne saui'ait trouver individuellement , une association de cultivateurs d'une même localité peut l'obtenir en s'engageant soli- dairement envers leur prêteur. Le Crédit agricole est ainsi constitué par des caisses locales, que font prospérer sans frais les propriétaires intéressés à rendre autour II 46 AGRONOMIE d'eux l'exploitation fructueuse. Au surplus, la responsabilité qui résulte de rengagement solidaire est toujours limitée. Les statuts des caisses locales portent, en effet, obligatoirement ([ue : 1° Les engagements sociaux ne peuvent dépasser un cbiffre fixé d'avance ; 2'' Le maximum éventuel des prêts est établi dès le début ; 3' Il est exigé des cautions pour les sommes dépassant un chiffre déterminé ; 4° Les caisses n'accordent de crédit qu'aux associés et ])our des besoins déterminés et contrôlés. Les associations de crédit agricole forment ainsi de véritables familles , dont tous les membres se connaissent , s'estiment et exercent les uns sur les autres une surveillance active et bienveil- lante. De la sorte, les chances de pertes sont minimes et, s'en produi- rait-il, que les bénéfices accumulés dans le fonds de réserve auraient bientôt suffi à les couvrir. Pour la mise de fonds initiale, la Caisse d'Épargne des Bouches- du-Rhône intervient et fait les avances nécessaires (a à 3.ooo francs par caisse) au taux de a fr. yS o/o. C'est ainsi que i;; Caisses agricoles furent fondées , comportant , depuis leur création , un ensemble d'opérations montant, au 3i décembre 1902, à 354.710 fr. 5o. Ces Caisses sont affiliées au Centre fédéradf du Crédit populaire en France, agence centrale ayant pour objet de concentrer les ren- seignements, de publier un Bulletin de statistique périodique, de fournir des modèles de statuts, etc., etc. Mais cette institution s'étend sur la France entière et l'Union, d'accord avec la Caisse d'Epargne, a été heureusement inspirée en suscitant, dans son rayon d'action, des Fédérations régionales. C'est ainsi que s'est constitué, sous l'empire de la loi de 1901 sur les Associationns, le groupe départemental des Associations coopé- ratives de Crédit agricole. En vertu de ses statuts, cette institution a poiu* objet : 1° Poursuivre l'étude en commun des questions concernant l'orga- nisation, le fonctionnement et le rôle des Sociétés coopératives de Crédit agricole et leurs relations entre elles ; 2° Propager et favoriser, par tous les moyens en son pouvoir, la diffusion et le développement des Sociétés coopératives locales de Crédit agricole; 3° Poursuivre la création, dans son ressort territorial, d'une Caisse régionale de Crédit agricole, conformément à la loi du 3i mai 1899; DE MONTRICHER. — UXIOX DES SYNDICATS AGRICOLES Il47 4° Reprt'senter les Sociétés affiliées pour soutenir leurs intérêts auprès des pouvoirs publics, des administrations publiques ou pri- vées, etc. 5° Seconder l'action propagatrice, créatrice et fédérative du centre fédératif du crédit populaire en France; 6^ Organiser l'inspection des Sociétés coopératives locales de crédit agricole adhérentes au groupe départemental ou qui la demanderaient ; ^° Dresser chaque année un rapport et une statistique d'ensemble de l'activité des Sociétés de Crédit adhérentes. Le patrimoine du groupe départemental se compose des cotisations annuelles des membres adhérents à titre individuel, des Sociétés adhérentes et des membres honoraires. Le programme du groupe des Associations coopératives de crédit agricolea été pleinement réalisé et très heureusement complété j^ar la création de la Caisse régionale, établie à Aix, prévue au § 3 ci-dessus, avec subvention de l'État et avances gratuites de la Banque de France. La Caisse d'Épargne doit borner son action à l'impulsion initiale ; après quoi les coopérateurs doivent puiser dans leur propre fond et trouver, dans le jeu normal des organes mutualistes, les forces nécessaires pour leur marche en avant. Le principe de la Caisse régionale est encore la mutualité; le capi- tal est souscrit par les coopérateurs et complété par les avances de la Banque de France. La Caisse régionale centralise les opérations des Caisses locales: elle assure la régularité de leur fonctionnement, reçoit en dépôt leurs fonds disponibles, ou, au besoin, leur fait des avances et réescompte les effets endossés par elles. Elle constitue, en somme, "avec les Caisses locales, un ensemble de rouages qui s'adaptent et s'emboîtent exactement au mieux des intérêts de tous. Par une telle organisation économique et sociale, l'agriculture, désormais affranchie du joug de la finance et des dîmes et charges sans nombre qui pesaient sur elle, sera mieux à même de remplir son véritable rôle, celui de principal facteur de la richesse et de la vie nationales. Il48 GÉOGRAPHIE M. Léon DUFOUR Directeur-adjoint du Laboratoire de Biolog-ie vég'étale de Fontainebleau APERÇU ÉCONOMIQUE ET GÉOGRAPHIQUE SUR L'APICULTURE FRANÇAISE [6'î8(44)J — Scance du 0 août — I. REVENU^ DE L APICULTURE EX FRANCE Les produits de l'apiculture ne jouent évidemment t{u"un rôle bien modeste dans l'ensemble de la production agricole française. Nous entre- rons plus loin dans quelques détails à ce sujet ; disons pour l'instant qu'on peut évaluer à i5 ou 20 millions la valeur moyenne annuelle de la cire et du miel produits en France. C'est peu vis-à-vis de la valeur du blé , des vLns , etc. Mais ce n'est pas une raison pour négliger cette source de prolits. Ce sont surtout les petits cultivateurs qui, dans les conditions actuelles de l'agriculture, ont le iilus de dilïicultés à vaincre; ce sont eux qui, par conséquent, doivent faire flèche de tout bois; ce sont eux, surtout, qui devraient toujours avoir un rucher amiexé à leui* modeste exploitation, comme une source de petits profits accessoires, mais non négligeables, obtenus sans grand travail. C'est d'ailleurs un peu ce qui existe. Le nomljre des grands apicul- teurs, qui possèdent plusieurs centaines de ruches et font de l'apiculture une vérital)le industrie autonome, est très restrehit et les ruches sont en général éparpillées chez un grand nombre de cultivateurs, chacmi n'en possédant que peu. Mais mallieureusement il est beaucoup trop de culti- vateurs qui n'ont aucmie ruche. Citons un exemple d'un rucher modeste mais bien conditionné, bien conduit, pour montrer ce que l'on peut tirer de la culture des abeilles. L'apiculteur, ou plutôt l'apicultrice à laquelle appartient ce rucher, a commencé avec trois ruches seulement et est arrivée au l)out de cmq ans à en posséder vingt-trois ; elle a progressivement étendu son mstal- lation, achetant chaque année quelques essaims, ou recueillant ceux que ses propres colonies lui domiaient, augmentant à mesure son matériel apicole. Son exploitation peut être, financièrement parlant, résumée de la façon suivante : Dépenses Recettes i''^ année 35o ' » 3of 60 2^ — 2;o » 208 40 3« — 208 » 598 40 4e _ 5i3 10 499 "5 5« — 3ô; 25 996 65 Total. 1 . 708 f 35 2.333 f 80 L. DLFOUR. — APICULTURE FRANÇAISE II49 On voit qu'au bout de cinq ans la somme des recettes dépasse la somme des dépenses. Assurément le matériel éjirouve progressivement ime cer- taine moins-value. Mais remarquons qu'une ruche bien conditionnée peut durer vingt ans et même plus; que, dans le cas qui nous occupé, le matériel a été acheté progressivement; il est donc encore, en grande partie, presque neuf à la lîn de la cinquième année. Ajoutons que dans les dépenses de la première année on a compté la construction d'un hangar en maçonnerie qui vivra longtemps et, dans toute propriété, peut servir à une foule d'usages si l'on abandonne l'apiculture. Nous n'avons pas pu , dans les dépenses , faire le départ complet de ce qui est frais d'installation et frais d'entretien et d'exploitation. Mais il nous semble raisonnable d'évaluer à i.ooo francs le capital d'installation. Si à partir de la cinquième amiée on ne veut plus augmenter son rucher, on n'a plus à faire que les dépenses amiuelles d'exploitation. Nous croyons être très près de la vérité en les évaluant à 200 francs par an, y compris la moins-value du matériel. D'autre part, disons que la recette d'environ i.ooo francs de la dernière année nous semble dépasser la moyenne à espérer avec 20 ou 25 ruches. Mettons 600 francs de recettes moyemies par an. Recettes nettes 400 francs. Un capital de i.ooo francs prochiit 400 francs de revenu net; c'est du 40 0/0. Est-il beaucoup de capitaux employés en agriculture qui raj^portent autant? Nous avons donc bien raison de dire qu'en amiexant un modeste rucher à son exploitation, un petit cultivateur trouverait dans la cultm-e des abeilles mi revenu très appréciable. Nous ajoutons facile à acquérir, car une vingtame de ruches ne domient pas grande besogne. Ce travail peut très aisément être fait par la femme du fermier, comme elle s'occupe des soins du ménage, de la basse-cour, etc. La crainte des piqiires ne doit pas effrayer. Avec un peu d'habitude, on n'est piqué que rarement et d'ailleurs la vaccination a lieu promptement. Quant aux grands apiculteurs, ils sont à la tête d'une véritable exploi- tation de ruches; ils en ont des centaines, réparties généralement en plusieurs ruchers, car il ne faut pas réunir, en un seul endroit, un trop grand nombre de colonies d'abeilles. Ils obtiennent du miel et de la cire qu'ils vendent en gros. Dans certains pays, clans l'Yoïnie en particulier, on fait ce qui s'aj^pelle de l'élevage, c'est-à-dire que l'on vend des ruches l»euplées d'abeilles. Au lieu d'avoir des ruches modernes, grandes, essai- mant peu, on a des ruches à panier ordhiaires de faible volume total et l)roduisant des essaims. Ce sont ces essaims que les apiculteurs de l'Yonne vendent aux apiculteurs du Gâtinais , un peu avant la floraison du sainfoin. Un apiciUteur, mort depuis peu, avait plus d'un millier de ruches et vendait, chaque année, jusqu'à 4 Pt 5oo essaims. Le prix étant de 10 à i5 francs, le revenu n'était assurément pas négligeable. Quelques apiculteurs font aussi le commerce de renies d'abeilles. On les envoie aisément avec mi groupe d'abeilles et des jjrovisions pour le voyage. Au moyen de précautions suflisantes, on en a envoyé ainsi jusqu'à Mada- gascar, à la Réunion, etc. L'exjjloitation des abeilles présente donc une variété que l'on ignore Il5o GEOGRAPHIE généralement ; mais les deux principales sources de profil sont évidem- ment le miel et la cife. Il V a pour chacun de ces produits de très grandes variations dans la production annuelle, suivant les conditions climatériques des diverses années. Les données statistiques que l'on possède, et qui ne méritent pas évidemment une conliance alîsolue, fixent à environ i.(3oo.ooo le nombre des ruches en activité; la production moyeiuie serait de 8 millions de kilogrammes de miel et 2 millions et demi de kilogrammes de cire. En fixant à I franc le prix du kilogramme de miel et 3 Irancs celui du kilo- gramme de cire, on arrive à une valeur de 8 millions pour le miel et de •] 1/2 pour la cire. La valeur de la production apicole française est donc de i5 à 16 mil- lions. Ce chiffre nous semble plutôt trop faible. On pourrait augmenter dans de larges proportions cette production : une immense quantité de nectar, que nous fournissent gratuitement les fleurs, est perdue, parce que nous n'avons pas assez d'abeilles pour la recueillir. On pourrait , en France , décupler le uomlire des ruches exis- tantes. 2. MIEL Usages du miel Un préjugé trop répandu en France, c'est que le miel ne doit être consommé que quand on est malade. On ne le voit qu'accompagné de boîtes de pastilles , de tasses de tisane , utilisé par des personnes qui toussent et qui crachent. 11 est regrettable que sur ce point nous n'imitions pas nos voisins d'Allemagne et de Suisse surtout. Dans les hôtels de ce pays, on sert du miel au petit déjeuner du matin et comme dessert à tous les repas; la consommation en est considé- rable. Rien n'est plus naturel et plus sain que le miel. C'est assurément supérieur à une foule de confitures frelatées et il y aurait avantage à faire paraître sur nos tables un nouveau mets sucré, excellent à tous égards. Diverses liqueurs fines, chartreuse, etc., sont sucrées au miel. On commence à faire divers bonbons, diverses x^àtisseries au miel. Si la médecine humaine emploie le miel pour fabriquer certains sirops, sucrer des tisanes, la médecine vétérinaire s'en sert davan- tage encore ; on mélange le miel à divers médicaments pour les faire avaler plus facilement au bétail, aux chevaux. Un usage important du miel, c'est de servir à la fabrication du pain d'épices. Cette industrie exige un miel spécial, le miel de sarra- sin, qui fait mieux lever la pâte que les autres miels. C'est au miel de sarrasin que le pain d'épices doit son goût particulier. L. DUFOUR. — APICULTURE FRANÇAISE Il5l Signalons enfin un emploi du miel qui commence à se répandre , c'est la fabrication de l'hydromel. L'hydromel ou vin de miel est obtenu par la fermentation pure et simple du miel dans de l'eau. Loin de nous la prétention de dire que l'hydromel est destiné à détrôner le vin. Mais nous pensons qu'il devrait entrer, surtout dans les pays qui ne produisent pas de vin, concurremment avec le cidre et la bière, dans la consommation courante. En Bretagne, il serait avantageux d'en consommer, surtout les années où les pommiers produisent peu et où les pommes sont chères. Déjà, dans certains coins de la Bretagne, nous avons trouvé cette boisson très appré- ciée et ce que nous avons vu boire était bien inférieur à ce qui peut être obtenu par une fabrication plus soignée. Suivant la quantité de miel que l'on emploie, on peut faire : i° un hydromel léger, à consommer immédiatement, rapidement fait; 1" un hydromel plus fort, plus long à se faire et à se clarifier, de toute conservation, s'améliorant en vieillissant, pouvant entrer dans la consommation courante si on l'additionne d'eau, comme on le fait pour le vin dans tant de ménages, ou bien constituant une sorte de vin de demi-luxe ; 3" un hydromel liquoreux, conservant une certaine quantité de miel non transformée en alcool, et par suite ayant un goût sucré, constituant une véritable liqueur pour dames. Nous connaissons un apiculteur qui n'est nullement embarrassé pour vendre 2 francs la bouteille cet hydromel fort dont nous parlons en second lieu , un an ou deux après qu'il est complètement sec et clah*. On voit, d'après tout cela, que les usages du miel sont multiples, variés, et que son emploi est susceptible de prendre une grande extension. Il est à désirer qu'en France on apprenne à mieux con- naître , mieux apprécier le miel et que son usage comme dessert se répande beaucoup. Commerce du miel Pour le miel, notre situation commerciale peut être résumée de la façon suivante : Nos exportations dépassent de beaucoup nos importations. Ainsi, en 1901 , nous avons exporté gSi.ooo kilogrammes de miel, et importé 869.000 seulement. * Les pays qui nous demandent le plus de miel sont la Belgique et la Hollande, qui entrent pour les trois quarts dans notre exportation totale. Dans ces pays, en Belgique surtout, l'industrie du pain Il52 GÉOGRAPHIE d'épices est très florissante et la région ne peut produire qu'en très faible quantité le miel de sarrasin nécessaire à cette fabrication. C'est siirtout la Bretagne qui exporte ce miel ; le débouché est cer- tain, il n'y a lieu que de travailler à l'accroître. Quant au miel importé, c'est surtout le Chili qui nous le fournit ; nous lui demandons à peu près la moitié du total de notre importa- tion. Dans ces dernières années le prix des miels a notablement baissé , et beaucoup d'apiculteurs se plaignent de ne pas trouver l'écoulement de leur production. 11 existe donc une question de la méçente des miels. Et, alors, lamentations amères, regards jetés du côté de l'État, instantes prières : « Sauvez-nous. Seigneur, nous périssons », c'est-à-dire, en bon français : « Augmentez les droits de douane sur les miels. » Et, de fait, une proposition de loi a été déposée par plusieurs députés pour demander que le droit de douane soit porté de i5 à 5o francs les loo kilogrammes. Notre avis est que les apiculteurs font fausse route en réclamant une mesure qui maintiendra le miel à un prix plus élevé qu'il ne le serait sans cette mesure. Il serait très utile pour tout le monde, avons-nous dit plus haut , que le miel entrât davantage dans la consommation courante. Voilà le véritable but que les apiculteurs doivent se pro- poser d'atteindre. Mais ils n'y arriveront pas si un droit de douane maintient un prix trop élevé pour le consommateur. Il y a au contraire avantage à ce que les prix baissent encore et que le miel arrive à la portée d'une pkis nombreuse couche d'acheteurs. C'est donc à augmenter encore leur production que les apiculteurs doivent viser, ce qui permettra d'abaisser les prix. A eux aussi de déployer plus d'activité, plus d'initiative, de se grouper, de former des Syndicats pour diminuer leurs frais généraux, aller chercher la clientèle, créer des débouchés, etc., etc. Telle est la seule voie de salut x^our l'apiculture française. 3. Cire Usages de la cire Les usages de la cire sont connus : fabrication des vernis, des encaustiques, des cierges, cirage des parquets. Il existe un procédé de moulage de statues ou autres objets de grande dimension, dans lequel on emploie de la cire. Dans certains cas, les cires minérales et végétales peuvent être L, DUFOUR. — APICULTURE FRANÇAISE Il53 utilisées; souvent même on fraude la cire d'abeilles en y introdui- sant une certaine quantité de ces cires de valeur intérieure. Mais il est d'autres usages pour lesquels la cire d'abeilles pure a seule les qualités nécessaires. Telle est la fabrication de moules pour certains clichés. Il entre de la cire, et il faut que ce soit de la cire pure d'abeilles, dans les cartouches Lebel. Commerce de la cire Au point de vue commercial, notre situation est l'inverse de ce qu'elle est pour le miel; nous importons plus de cire que nous n'en exportons. La production française ne suffit pas à la consommation. En 1901 notre importation s'est élevée à 4i5.ooo kilogrammes et notre exportation à 142.000 seulement. Nous en envoyons surtout en Allemagne, en Angleterre, en Belgique. Nous en recevons surtout d'Italie, du Maroc, du Japon, de Haïti. L'Algérie, la Tunisie, Mada- gascar nous en fournissent aussi une très grande quantité. Ce serait trop technique d'entrer dans des détails montrant que l'on pourrait modifier la culture des abeilles de façon à obtenir, moins de miel peut-être , mais plus de cire. D'ailleurs ce problème n'est point entièrement résolu: il n'est pas de nature exclusivement apicole ; son côté le plus important est le point de vue économique, et il y aurait lieu d'étudier de près si la valeur de la cire obtenue en plus compenserait la perte due à la diminution du miel. Il n'y a pas lieu de craindre une mévente de la cire. Mais ce qui est hors de doute, nous l'avons déjà dit plus haut, c'est que l'on pourrait augmenter beaucoup le nombre des ruches en Activité et, par suite, obtenir à la fois et plus de miel et plus de cire. Ce que l'on doit dire aussi, nous l'avons fait ressortir dans une brochure sur l'Apiculture dans les Colonies françaises, c'est que l'apiculture devrait être développée dans nos colonies. N'est-il pas étrange de voir le Maroc nous envoyer plus de cire que l'Algérie, Haïti plus que les Antilles françaises? Ne pourrions-nous pas obtenir à moins de frais de la cire de l'Indo-Chine que du Japon ? \\ y a donc, au point de vue a)>icole, beaucoup à faire dans nos colonies. Nous avons vu qu'en France également l'apiculture pour- rait prendre une bien plus grande extension. Il serait à désirer qu'il en fût ainsi ; cela aurait pour elTet d'augmenter le budget des recettes des cultivateurs français. il 54 GÉOGRAPHIE 4. Les régions apicoles de la France Les raisons qui permettent de diviser la France en diverses régions apicoles, ayant chacune ses caractères propres, sont essentiellement de nature botanique et agricole. La chose se comprend aisément puisque le travail des abeilles est lié à Tépanouissement des fleurs des plantes productrices de nectar. En général une région est caractérisée par une plante de grande culture qui est très mellifère et qui occupe dans la région une grande surface. Le nectar de cette espèce donne au miel son caractère spécial ; en outre , les opérations apicoles doivent être réglées sur la floraison de cette plante , période qui correspond au travail maxi- mum des abeilles et produit ce que l'on appelle la grande miellée. L'apiculteur ne conduit pas son rucher de la même manière dans le Gàtinais où la grande miellée est due au sainfoin, qui fleurit à la fin de mai et au commencement de juin, et dans la Bresse où cette miellée est produite par le sarrasin dont la floraison commence seu- lement à la fin de juillet et dure à peu près tout le mois d'août. Cependant, dans certains cas, ce n'est pas essentiellement une plante unique qui caractérise une région apicole. Il existe par exemple, en France, une région botanique bien définie; c'est ce que l'on appelle la région méditerranéenne , comprenant le littoral de la jNIéditerranée et remontant dans la vallée du Rhône à peu près jusqu'à Valence. Cette région est non moins bien définie au point de vue apicole. C'est elle qui donne le miel tout à fait spécial, d'un goût très aromatique, dont le type est le miel dit « de Narbonne ». Elle ne possède cependant aucune grande culture mellifère. Mais un grand nombre de plantes , soit sauvages , soit cultivées sur des sur- faces relativement peu étendues, forment par leur ensemble une llore très mellifère. Si nous voulons remonter plus avant dans l'étude des causes qui produisent les divers types de miel français et d'apiculture française, nous trouverons les causes qui interviennent dans la répartition des grandes cultures et dans la formation de i'égions botaniques, c'est-à- dire des causes géologiques, géographiques, climatologiques. En Lorraine comme en Brie, par exemple, le sainfoin est la principale plante mellifère : les conditions de climat permettent cependant de considérer comme régions apicoles diflerentes l'est de la France et la région parisienne. Les conditions de nature du sol qui font qu'en Auvergne comme en Bretagne le sarrasin est très cultivé L. DUFOUR. — APICULTURE FRANÇAISE IIOO rapprochent ces deux régions qui. à d'autres égards, méritent d'être distinguées. D'ailleurs il ne faudrait pas croire qu'une même sorte de cause, quelle que soit son importance, doive toujours être prédominante. Ainsi une région géologiquement bien définie est ce que l'on appelle le massif primaire armoricain et on pourrait trouver logique de considérer le massif tout entier comme constituant une région api- cole. Mais, si nous considérons que la Loire, dans sa partie inférieure, d'Angers à la mer , constitue une limite botanique précise à laquelle s'arrêtent exactement un certain nombre d'espèces de plantes, abon- dantes au sud et que l'on ne trouve jamais au nord; si nous remar- quons en outre qu'au sud de la Loire le Sarrasin est beaucoup moins cultivé qu'au nord, nous serons amené à ne pas placer dans la région apicole bretonne toute la partie du massif armoricain située au sud de la Loire. C'est en faisant entrer en ligne de compte les diverses causes qui influent sur la répartition des plantes (nature du sol, latitude, alti- tude, climat, etc.) que nous pourrons esquisser brièvement une géo- graphie apicole de la France. Au point de vue de la production et de la récolte du nectar, on peut distinguer deux sortes de pays ayant des caractères bien tranchés, les pays de montagnes et les pays de plaines. Sans vouloir donner à un nomJ^re une signification trop absolue, nous appelons régions montagneuses celles dont l'altitude est supérieure à 5oo mètres. C'est à peu près à cette hauteur que la flore commence à prendre, au point de vue de l'aspect et du mode de végétation des plantes , comme des associations d'espèces, un caractère bien différent de celui qu'elle possède dans les plaines. Pays de montagnes. — Dans une région montagneuse, une même fleur se développe souvent entre deux limites d'altitude assez éten- dues et, dans ces limites, l'époque de la floraison varie avec l'alti- tude. 11 n'est pas rare de trouver une différence d'une quinzaine de jours entre les dates de floraison d'une même plante à sa limite inférieure et à sa limite supérieure. Comme les diverses espèces de fleurs mellifères ont des époques de floraison diftcrentes, il en résulte une production de nectar assez continue et assez constante pendant toute la durée de la saison des fleurs. D'autre part, les abeilles peuvent s'éloigner à une assez grande distance de leur rucher (2 kilomètres et même jusqu'à 3); alors, pen- Il56 GÉOGRAPHIE dant toute la l^elle saison, elles ont presque toujours du nectar à leur disposition. Dès lors les causes cjui influenceront les récoltes, ce seront surtout les conditions météorologiques quotidiennes. Quelques jours plu- vieux, qui empêcheront les abeilles de sortir, seront perdus pour la récolte. Mais, sauf des années exceptionnelles, les journées défavo- raliles se produiront, tantôt à un moment de la saison de travail, tantôt à un autre, mais seront en nombre assez constant, de sorte que la récolte des butineuses ne variera elle-même que dans des limites peu étendues. La caractéristique des pays de montagnes est donc une assez grande constance dans la production du nectar par les fleurs, du miel par les abeilles. Ajoutons cpie la durée totale de la végétation annuelle est courte et, par suite, courte aussi la saison de travail des abeilles, longue la saison de consommation. Ce dernier caractère des pays de montagnes est d'autant plus accentué qu'il s'agit d'altitudes plus élevées. Pays de plaines. — Dans les pays de plaines, c'est généralement une seule plante qui donne la principale miellée, celle dont la flo- raison permet aux abeilles de récolter presque tout leur miel de l'année. Or, sans parler des années accidentelles où une gelée, par exemple , peut anéantir toutes les fleurs , on peut dire que, suivant les conditions climatériques de l'année , la floraison de cette plante nectarifère principale peut être un peu avancée ou retardée, peut être i^iis ou moins abondante; mais sa floraison dure toujours sen- siblement le même temps. Que peut-il se produire alors ? Si pendant cette floraison le temps est beau, pas trop sec, la plante produit son maximum de nectar et les abeilles se trouvent dans les meilleures conditions pour obtenir leur maximum de récolte. Mais, que pendant cette floraison une série de jours pluvieux empêchent les abeilles de sortir, voilà la récolte réduite dans une énorme proportion, parfois presque tota- lement compromise. Dans le Gâtinais, par exemple, le sainfoin est presque la seule fleur mellifère. Que le temps soit favorable pendant la floraison de cette plante, on constatera des récoltes quotidiennes de 5, 6. kilo- grammes par jour et même davantage; qu'il pleuve, les abeilles restent casernées chez elles et la récolte est presque nulle. En quinze jours ou trois semaines ces insectes doivent faire leur récolte L. DUFOUR. APICULTURE FRANÇAISE Il57 de l'année. Si cette période ne peut être utilisée, c'est une année désastreuse. Nous venons de nous placer dans un cas extrême ; en général les •choses ne se passent pas tout à fait de la sorte. Il y a bien une plante spécialement mellifère et c'est d'elle surtout que dépend le résultat de l'année: mais elle n'est pas la seule. Diverses autres espèces peuvent fournir une compensation au moins partielle. Dans la région M X ^ f' M.diy I ^*^:\ .*^,;- '^ \ ^ ,n : / 1.,,^ y-^ ^% ■ >l /?R^ - • -v. ..Vf-> ' 7^<>Jt't "^^f^M^mû^. "• *'. ' ■•^ Framcè:. CARTE DE LA FRANCE APICOLE Il58 GÉOGRAPHIE parisienne, par exemple, diverses fleurs sauvages, la Vipérine, la Sauge, le Mélilot. etc. fournissent un appoint qui n'est pas à dédai- gner. Parfois aussi il y a plusieurs miellées possibles. Le Sainfoin, par exemple, fournit souvent deux coupes. La première est de beau- coup la plus mellifère ; mais, si elle n'a rien fourni, la seconde, quand le temps s'y prête, vient un peu atténuer les pertes de l'api- culteur. Dans divers pays, la Bruyère fournit une miellée d'automne fort appréciable. Mais, malgré cela, on peut caractériser les pays de plaines en disant que la récolte de miel y est aléatoire, soumise à de nombreuses causes de variations, et oscille entre des limites étendues. Dans les régions de montagnes nous distinguerons : I les Alpes ; II les Pyrénées; III le Plateau central; IV le Jura; V les Vosges. Dans les pays de plaines nous distinguerons : VI le Nord; VII l'Ouest; VIII la région parisienne; IX l'Est; X le Sud-Ouest; XI la vallée de la Saône et du Rhône ; XII la région méditerranéenne. A. Pays de montagnes I. Alpes La riche flore des prairies alpestres, naturelles ou artificielles, principalement le Sainfoin, fournit d'excellent miel. Dans les régions les moins élevées , la plus forte miellée commence dans la seconde quinzaine de mai et, si l'on veut un produit de choix, il faut faire la récolte un mois après, car c'est vers le 25 juin que le châtaignier commence à fleurir, et on doit éviter de mélanger son miel, qui est de qualité inférieure, avec le miel de printemps. Ce miel de Châtai- gnier, on le laisse aux abeilles pour levu' consommation hivernale. Sur certains points, cantons d'Annecy et de Rumilly. par exemple, on cultive un peu le sarrasin et. ayant cette ressource en vue, on peut enlever aux abeilles une quantité un peu plus forte de bon miel. Le miel des endroits où fleurissent le Thym, le Myrtille. l'As- trantie , les Rhododendrons, est particulièrement parfumé et estimé ; le type de miel des Alpes est le miel dit « de Chamonix ». Parmi les localités qui pi'oduisent du miel supérieur citons : Sallanche, La Roche, Vallorsine , Chamonix, Saint-Gervais , Saint-Nicolas. La partie sud de la région des Alpes appartient en même temps par sa flore à la région méditerranéenne et, au point de vue apicole, réunit les avantages de l'une et de l'autre de ces régions. L'apiculture est très en honneur dans les Alpes, surtout en Savoie, L. DUFOUR. — APICULTURE FRANÇAISE II09 OÙ des Sociétés apicoles se sont fondées et ont beaucoup contribué à propager les méthodes modernes et les ruches à cadres. Dans larrondissement de Bonneville , par exemple , sur un nombre total de 5 à 6.000 ruches, il y a eiiA'iron 1.200 ruches à cadres. Dans l'ensemble des deux cantons de Seyssel et de Frangy il existe à peu 23rès 600 ruches fixes et 800 ruches à cachées. Les possesseurs de ruches fixes ne font leur récolte qu'à l'automne, quelquefois même en janvier ou mars seulement. Ils ne peuvent donc éviter le mélange des miels des diverses qualités ni obtenir les miels de choix que l'on récolte en juin si facilement avec les ruches à cadres. Bien qu'il reste encore de nombreux progrès à réaliser, nous pou- vons dh*e que la région des Alpes est à la fois lune des plus propices à l'élevage des abeilles et lune de celles où l'on sait le mieux tirer j)arti des ressources naturelles. II. Pyrénées La ]flore apicole pyrénéenne présente les mêmes caractères géné- raux que la flore apicole alpine. Notons cependant une différence intéressante. Beaucoup de vallées des Alpes sont orientées de façon à présenter un versant sud et un versant nord. Cette disposition est très favorable à la production et à la récolte du nectar. Elle prolonge €11 effet la durée de floraison des plantes mellifères, cette floraison étant plus précoce sur le versant sud que sur le versant nord. Les abeilles volent en général assez loin pour pouvoir passer d'un ver- sant sur un autre. Installées' le plus souvent de façon à être expo- sées au sud, elles butinent d'abord sur la pente où elles sont placées, puis plus tard la même espèce leur offre des ressources sur le versant opposé ! Dans les Pyrénées françaises au contraire, la plupart des vallées s'étendent dans le sens nord-sud et. par conséquent, possèdent un versant est et un versant ouest , entre lesquels il n'y a pas de dilfé- rence sensible au point de vue de l'épanouissement des fleurs. A cet égard donc, les Pyrénées sont moins favorisées que les Alpes. D'autre part, une petite partie des Pyrénées-Orientales réunit les avantages des pays de montagnes et ceux de la flore méditerra- néenne et présente donc, comme certaines régions des Alpes, les conditions qui, de toutes, sont les plus utiles aux abeilles. Ajoutons que, d'une façon générale, l'apiculture progressiste est moins répandue dans les Pyrénées que dans les Alpes. Il6o GÉOGRAPHIE III. Plateau central La région apicole que nous désignons ainsi est formée principa- lement par l'unité géologique si bien caractérisée à laquelle on donne ce même nom de Plateau central. Nous y ajoutons au sud (du côté de Millau et de Saint-Affrique) une portion constituée par des terrains jurassiques dont l'altitude nécessite cette adjonction ; nous y rattachons pour la même raison les Cévennes et la Montagne Noire, Le Morvan y est également adjoint. Chacun sait qu'il y a de nombreux points de ressemblance entre l'Auvergne ou le Limousin et la Bretagne (population, nature du sol, etc.). En particulier, au point de vue qui nous occupe, un point très important à signaler est la culture du sarrasin dans une grande partie de l'Auvergne et des régions avoisinantes ; on en trouve beau- coup aussi dans le Morvan. C'est donc cette plante qui caractérise l'apiculture du Plateau central. L'apiculture est encore assez arriérée dans bien des parties du Plateau central ; cependant on peut dire qu'elle est en progrès. IV. Jura Dans le Jura, le Sainfoin, le Trèfle blanc, la Luzerne et l'Acacia, là où il existe en assez grande quantité , sont les principales plantes donnant du miel de première qualité ; dans quelques endroits on trouve du Colza, ressource très appréciable au printemps. Les Pins, Sapins, Mélèzes, Épicéas fournissent un miel inférieur. Le Pissenlit, la Jacée, la Chicorée sauvage, le Bleuet sont des plaiites assez répandues et mellifères. L'apiculture perfectionnée est en progrès et la région compte deux Sociétés d'Apiculture. Mais, dans beaucoup d'endroits, on pratique encore, pour enlever le miel des ruches fixes, l'opération de la taille, qui consiste à retourner la ruche et à aller couper au sommet de cette ruche, par conséquent en traversant tout le groupe d'abeilles, les portions de rayons les plus riches en miel. Le miel coule de tous côtés, les abeilles sont furieuses, beaucoup s'engluent et périssent; cet accident peut arriver à la reine et dès lors la ruclie devient orphe- line ; c'est une opération apicole à la disparition de laquelle il faut s'employer activement. L. DUFOUR. — APICULTURE FRANÇAISE Il6ï V. Vosg-es La région montagneuse des Vosges est peu étendue : elle comprend les environs de Saint-Dié et de Remiremont (terrains granitiques ou grès de Trias). Elle n"a donc qu'un rôle apicole eft'acé, d'autant plus que l'on n'y trouve aucune grande culture mellifère : pas de Sainfoin, pas de Luzerne, à peine de Sarrasin. Dans les prairies naturelles, les pâturages et les bois, il y a des fleurs mellifères variées qui ali- mentent les abeilles : Centaurée, Pissenlit, Scabieuse, Mélilot, Fram- boisier sauvage, Ronce, ^lyrtille, etc. La Bruyère, très répandue, fournit une miellée d'automne abondante. B. Pays de plaines VI. Nord La région du Nord comprend la Flandre française et l'Artois. Ce qui caractérise cette région au point de vue apicole, c'est qu'elle est très peu favorable à l'apiculture. Les grandes surfaces cultivées en céréales et en betteraves ne sont à aucun degré melli- fères. Un coin un peu plus favorable est le Boulonnais, qui constitue au point de vue apicole, comme au point de vue géographique et géologique, une petite région bien définie. Les environs d'Avesnes, beaucoup plus mellifères que l'ensemble de la région, doivent être rattachés à la région de l'Est. VIL Ouest La région bretonne est formée par la partie du massif primaire armoricain située au Nord de la Loire. Elle comprend le Cotentin, une portion du Maine et la plus grande partie de la Bretagne. Elle est limitée par une ligne qui part à peu près de l'embouchure de la Vire, se dirige au sud-est jusqu'à Séez, entre Alençon et Argentan, puis prend la direction du sud-ouest jusqu'à la Loire, un peu en amont d'Angers. Le cours de la Loire forme la limite sud. Nous avons expliqué plus haut les raisons de cette limite méridionale. Dans la région bretonne, la principale culture mellifère est le Sarrasin. Cette plante produit presque tout le miel du pays, miel tout spécial, brun foncé, ayant un goût particulier qu'il communique au pain d'épice.; car c'est le miel de Sarrasin, à l'exclusion de tout autre, qui entre dans la fabrication de ce produit. Cet emploi assure IlOa GÉOGRAPHIE au miel breton un déljouché important et durable en Belgique et eu Hollande. La miellée de Sarrasin dure assez longtemps, parce que l'épanouis- sement des fleurs de chaque pied est successif et que les semis sont assez échelonnés, depuis le début de juin jusqu'en juillet. Cette miellée dure de 5 à 6 semaines et conq^rend les derniers jours de juillet, le mois d'août et, parfois, le commencement de septembre. Ce qui est à redouter pour le Sarrasin, c'est la trop grande séche- resse, qui diminue la taille de linflorescence, le nombre des fleurs et, dans chaque fleur, la production du nectar. En outre, dans les pays de landes, la Bruyère fournit beaucoup de miel; c'est, comme le Sarrasin, une plante donnant une miellée tardive ; moins foncé que le miel de Sarrasin, le miel de Bruyère est cependant roux et ne fait pas partie des miels fins. Le Colza, là où il est assez répandu, peut donner du miel blanc, mais , sauf des cas exceptionnels, on n'en obtient pas assez pour en faire une récolte régulière, surtout avec les procédés d'exploitation encore très primi- tifs employés en Bretagne. Dans le pays, en efl'et, d'une manière générale, on a encore recours à l'étoufl'age des abeilles pour recueillir le miel. Nous ne ferons pas de sentimentalité à cet égai'd, mais nous dirons que c'est la méthode d'exploitation la moins avantageuse, puisque l'on détruit ainsi une partie de son capital. L'adoption de la ruche à calotte, sans réaliser le maximum du progrès possible, serait un pas en avant, car ce sys- tème conserve la vie aux abeilles et fournit un revenu annuel régu- lier. Vin. Région parisienne La région parisienne est limitée : à l'ouest, par la région bretonne jusqu'à la Loire, puis un peu la Loire et le cours de la Vienne; au sud, par le plateau central, auquel nous rattachons naturellement le Morvan; à l'est, par les terrains jurassiques de la Lorraine, c'est-à- dire la ligne qui sépare les aflleurements crétacés des affleurements jurassiques. Cette ligne, partant à peu près d'Auxerre, laisse du côté de l'est Tonnerre. Bar-sur-Seine, Bar-sur- Aube, Bar-le-Duc. La limite serait ensuite l'Argonne, puis une ligne à concavité tournée vers l'est de façon à laisser en dehors de la région parisienne une partie du Réthelois et les terrains primaires des envù^ons d'Avesnes. Au nord, la région painsienne est bornée par ce que nous avons appelé la région du Nord. Au point de vue apicole, ce qui caractérise le mieux l'ensemble L. DUFOUR. — APICULTURE FRANÇAISE Il63 de la région , c'est la culture du Sainfoin ; c'est essentiellement cette plante qui fournit la grande miellée. Sans vouloir tracer une ligne de démarcation trop précise, on peut dire que le Sainfoin est extrêmement répandu dans toute la partie de cette région qui se rattache au bassin de la Seine et l'est moins dans celle qui appar- tient au bassin de la Loire. Le Gâtinais est le i^ays qui présente au plus haut degré le carac- tère spécial de l'apiculture liée à la culture du Sainfoin et le « miel du Gâtinais » est le type du meilleur miel de la France septentrio- nale. La région parisienne est assez vaste pour renfermer des pays bien différents, mais nous ne pouvons entrer dans le détail des sous- régions que l'on pourrait y distinguer. Disons seulement que les grandes prairies naturelles de la plaine de Gaen , de la Basse-Seine , formées essentiellement de graminées, sont peu favorables à la culture des abeilles. Plus la proportion de diverses plantes melli- fères, de la famille des Légumineuses comme la Minette ou de la famille des Composées comme la Centaurée Jacée, est restreinte dans ces prairies, moins elles sont mellifères. Certaines parties de la Somme , de l'Oise , de l'Aisne , où la Bette- rave est cultivée en grand, de la Brie ou de la Beauce où les céréales dominent, sont également moins propres à la culture des al^eilles que là où domine le Sainfoin. Au point de vue du mode d'exploitation des ruches, la région pari- sienne est une de celles où les procédés apicoles modernes sont le plus employés. Des Sociétés d'apiculture à Paris, en Champagne, dans la Haute-Bourgogne, dans la Beauce, dans la Somme, dans l'Aisne, sont les agents efficaces des progrès apicoles faits durant ces vingt dernières années. IX. Est La région de l'Est, séparée de la région parisienne par la ligne que nous avons indiquée plus haut, comprend la partie haute du cours de la Seine et de quelques-uns de ses affluents, directs ou indi- rects (Armançon, Aube, Ornain, etc.), ainsi que les pays arrosés par la Meuse, la Meurthe et la Moselle, abstraction faite de hi portion des Vosges que son altitude fait classer dans les pays di; montagnes. Géologiquement parlant, cette région de l'Est est constituée essentiellement par la plaine jurassique de Lorraine et, dans sa partie nord, par les terrains primaires qui se rattachent à l'Ardenne. Il64 GÉOGRAPHIE Le pays est en général très favorable à l'apiculture. C'est le Sain- foin qui donne la principale récolte du miel ; mais, en outre , dans l'Est, la Luzerne est généralement plus mellifère que dans le bassin parisien : les prairies naturelles contiennent une assez grande quan- tité de plantes à nectar. La Minette, le Lotier. la Centaure jacée, le Mélilot jaune, qui pousse fréquemment dans les Avoines, le Bleuet, qui vient dans les Blés, fournissent un appoint important. Les environs d'Avesnes présentent une particularité intéressante. Une plante mellifère qui généralement ne se trouve qvie çà et là dans l'herbe, le long des chemins, y est cultivée sur de grands espaces et joue un rôle important clans la production de miel du pays; c'est le Trèfle blanc. L'apiculture progressiste est très en honneur dans l'Est : cela est dû. surtout, à l'action des Sociétés d'apiculture de la Meuse et de l'Est. X. Sud-Ouest La région du Sud-Ouest est limitée par la Loire et la Vienne , puis par le plateau central et les hauteurs qui séparent l'Ariège de l'Aude, et enfin par la région pyrénéenne étudiée précédemment. Elle com- prend essentiellement la Vendée, la plus grande partie du Poitou, la région des Charentes, la vallée de la Garonne et les Landes. Dans le Poitou et les Charentes, c'est le Sainfoin qui domine, dans la vallée de la Garonne, c'est surtout la Luzerne ; ces plantes donnent un miel de couleur toujours assez pâle et excellent de goût. La prin- cipale plante nectarifère des Landes est la Bruyère. L'ensemble de la région est très favorable à l'apiculture et relative- ment moins bien exploité que d'autres régions du pays. XL Vallées de la Saône et du Rhône Cette région est limitée au nord par la région de l'Est; à l'ouest, par la ligne des hauteurs qui bordent la rive droite de la Saône et du Rhône, depuis les collines de la Côte-d'Or jusqu'aux Cévennes; à l'est, par le Jura et les Alpes ; au sud, par la région méditerranéenne. Elle s'arrête donc sensiblement aux environs de Valence et ne com- prend pas la basse vallée du Rhône. Cette région , dans son ensemble , est une des moins mellifères de Erance ; les parties plantées en vignes sont dépourvues de toute valeur mellifère. Sainfoin et Luzerne sont les plantes mellifères lea plus précieuses, mais elles sont loin d'occuper une surface relative- L. DUFOUR. — APICULTURE FRANÇAISE Il()5 ment aussi grande que dans plusieurs des régions étudiées précé- demment. Dans la Bresse, le Sarrasin joue un rôle important et le miel qu'il produit trouve un déljouclié dans la fabrication du pain d'épices de Dijon. XII. Région inéditevranéenne La région méditerranéenne est caractérisée par une Flore toute spéciale, dont l'Olivier est un des principaux représentants. Elle comprend la bordure de la Méditerranée jusqu'à une certaine dis- tance dans l'intérieur des terres. Précisons davantage. La ligne qui la limite part de la frontière italienne au nord de Menton et se dirige vers l'ouest jusque près de Carpentras, tout en ayant formé une sorte de golfe en remontant un peu le long de la vallée de la Durance. Cette ligne se dirige ensuite vers le nord jusque près de Die, tra- verse le Rhône en aval de Valence , suit les Cévennes , comprend Carcassonne dans les régions méditerranéennes , contourne un con- trefort avancé des Pyrénées et vient finir près de Port -Tendres. Ajoutons c|ue la Corse doit être considérée comme faisant natu- rellement partie de la région méditerranéenne. Il est facile de reconnaître, d'après le tracé que nous venons de donner, que la région méditerranéenne empiète un peu sur la région des Alpes, définie comme nous l'avons fait par la ligne d'altitude de 5oo mètres. La partie commune aux deux zones réunit les diverses causes de grande production meUifère, et c'est peut-être de toute la France la partie la plus favorable à la culture des abeilles. Nous avons déjà dit incidemment que la région méditerranéenne ne présente pas de plante unique de grande culture donnant son caractère au miel de la région ; mais elle possède un grand nomlore d'espèces spéciales dont beaucoup de la famille des Labiées (Thym , Lavande, Sauge, Romarin, etc.). Ces plantes sont très riches en nec- tar et fournissent un miel d'un govit très fort qui, à cause de cela, est loin de plaire toujours aux habitants de la France septentrionale, tandis qu'en sens inverse les palais des Méridionaux trouvent très fade le miel du Gàtinais à l'arôme si fin. Le miel de Narbonne est le type du miel du Midi. Il y a quelques grands apiculteurs dans la région, mais d'une façon générale les procédés apicoles perfectionnés y sont moins généralement connus et pratiqués que dans l'est de la France. On peut conclure de cette esquisse rapide que la France possède , au point de vue apicole , les ressources les plus grandes et les plus Il66 GEOGRAPHIE variées. Avec ses divers miels, elle peut satisfaire à tous les goûts, à tous les besoins, non seulement en France, mais à l'étranger. Depuis une vingtaine d'années, des progrès très réels et très impor- tants ont été réalisés , mais il reste encore beaucoup à faire : Propager les méthodes perfectionnées de l'apiculture moderne là où elles sont encore trop peu pratiquées ; Répandre le goiit du miel qui, riche en sucre, est un aliment natu- rel, hygiénique, nourrissant, agréable; faire connaître l'hydromel; Augmenter beaucoup la production et faire abaisser le prix du miel pour en étendre la consommation dans le pays et ouvrir un champ plus vaste à notre exportation à laquelle les débouchés ne manquent pas ; Augmenter surtout la production de la cire que nous ne produi- sons pas actuellement en quantité suffisante pour notre consomma- tion ; Adapter au commerce de miel l'idée féconde d'Association en oro-anisant des groupements syndicaux d'apiculteurs , dont le fonc- tionnement sera également utile aux productem^s et aux consomma- teurs; Tels sont les buts que doivent poursuivre les Sociétés d'Apiculture qui ont déjà rendu tant de services. C'est à elles, aux hommes dévoués qui sont à leur tête, d'étendre leur rôle et d'inaugurer une nouvelle phase de progrès apicole. M. Joseph JOUBERT à Angers LES SOMALIS ET LE SOMALILAND [96:-:] — Séance du 8 août — Les expéditions coloniales que les Anglais ont dû diriger depuis quelques années contre le INIahdi Mohammed ben Abdallah, the niad MuUah, qui se donne comme « le Khalife » pour le Somaliland, ont attiré l'attention publique sur ce pays de l'Afi'ique orientale, encore exploré imparfaitement, assez sauvage, presque inculte, dont les habitants jouissent d'une réputation de férocité et de fanatisme .T. JOiIbEUT. — LES SOMALIS ET LE SOMALILAND II67 musulman en aucune façon usurpée, quoi qu'en dise Vivien de Saint- Martin dans sa notice, assurément très savante et documentée, mais au cours de laquelle l'érudit géographe paraît presque enclin à l'in- dulgence envers ces tribus aux instincts sanguinaires et pillards, comme le fait ressortir avec sa grande compétence M. Gabriel Ferrand, vice-consul de France, dans son récent ouvrage, Les Comalis. Et, d'abord, qu'entend-on par Somaliland ou pays des Somalis ? Voici comment cette contrée est décrite par M. Ferrand, qui la visita lui-même au cours d'une remarquable exploration (i882-i883). « Le j)ays habité par les Africains orientaux de langue çomalie « forme à peu près un triangle rectangle dont les trois sommets « sont : le cap Guardafui, Djibouti, dans le golfe de Tadjourah, et « l'embouchure du Djoubb sur l'Océan indien; Djibouti est le som- « met de l'angle droit, et le côté de la mer des Indes l'hypoténuse « du triangle. » A l'intérieur, les frontières sont vagues, variables, suivant que les Somalis dans leiu's luttes continues contre les voisins Gallas ou Abyssins du Harrar empiètent sur des territoires limitrophes des leurs ou au contraire en sont repoussés. D'après M. Levasseur, l'immense triangle qui représente l'aire du Somaliland mesurerait approximativement 712.000 kilom. carrés, superficie équivalente au tiers de celle de la France, Uhinterland est occupé par un immense plateau d'une altitude moyenne de 12 à i5oo mètres, jalonné de pitons, de chaînes et de massifs qui, dit Elisée Reclus, « interrompent la monotonie des « plaines à l'intérieur ». Au pied de ces escarpements qui viennent aboutir aux falaises, granitiques ou calcaires, coupées de ravins et de cluses, s'espace la plaine maritime où coulent des oiiadis, desséchés une grande partie de l'année, débordant pendant la saison des pluies. L'hydrographie, elle aussi, est insuffisamment connue en dehors du Chébéli ou fleuve de la Panthère, qui ofli^e ce curieux phénomène de ne pouvoir, malgré son importance , traverser la langue de sable qui le sépare de l'océan indien ; puis du Vogal, que Burton identifiait avec le Toug-Dehr ; du Darror, auquel Georges Révoil a attaché son nom par son bel ouvrage, La Vallée du Darror, et surtout du Djoubb, Djouba ou Djeb, qui marque la limite méridionale du Soma- liland. C'est le roi des cours d'eau de la contrée c[ue ce fleuve au cours Il68 GÉOGRAPHIE majestueux de i.ooo kilomètres, issu du i»ays Gallti, tributaire de l'Océan Indien, où en i845, Van der Deken lit naufrage dans les rapides, après avoir réussi le pvemiev à en franchir la barre, que l'Américain Cbaillé-Long remonta en 1873, jusqu'à 3oo kilomètres du littoral et dont les Italiens Ferrandi, Bottego et Ruspoli ont vaine- ment tenté de découvrir les sources. Quant aux côtes du Somaliland, elles forment, par le littoral du o-olfe d'Aden (i.ioo kil.) et celui de l'Océan Indien (2.200 kil.), les deux côtés de l'immense triangle désertique, vaste « corne » géogra- phique, dont l'extrémité est figurée par le cap Guardafui, le cap « des Aromates », des Anciens, le Ras Asir des Somalis, qui s'enfonce comme un coin dans la mer, dressant presque à pic au-dessus des flots coiu'roucés sa formidable falaise de 238 mètres, cap rocheux très redouté des navigateurs, trop fréquenté par les corsaires. Significatifs sont les noms que liortent les diverses parties du litto- ral, sur l'Océan Indien, à partir de la presqu'île quadrangulaire du ras Hafoun. à 10 milles au sud du cap Guardafui, et, lui, le promon- toire le plus avancé à Test, dans la mer des Indes : c'est le Barr-el- Khazaïn, ou Pays des Rochers, avec ses falaises coupées de ravins; c'est le Sif-el-Taouïl ou Plage longue, aride et pierreuse pendant 25o kilomètres , à laquelle succède une côte à falaises sablonneuses jusqu'à l'embouchure du Djoubb; c'est le Barr-el-Benadir ou Pays des Ports, ainsi dénommé pour la succession des petites villes mari- times qu'on y rencontre : Ouarchek, Magadoxo, fondé par les Arabes au ix^ siècle, qui avait atteint un haut degré de prospérité et se trouve souvent cité dans les glorieuses annales de l'épopée des Descohridores illustres du Poi^tugal, Merka, Braoua et Kismayo, principal débouché du fleuve Djouba. Dans la région septentrionale, sur le golfe d'Aden, les villes mari- times sont à la fois , en général , plus peuplées et plus importantes comme trafic. D'abord nous trouvons, en territoire français, Djibouti, sur la côte méridionale de la baie de Tadjourah, il y a 20 ans simple entrepôt ' pour les caravanes du Ilarrar et du Ghoa, qui, en 1897, n'était encore qu'un grand village indigène, mais aujourd'hui devenue ville de 12.000 habitants, sur lesquels i.ooo Européens, avec de beaux édi- fices publics, des communications télégraphiques et téléphoniques, tète de ligne du chemin de fer du Harrar, qui a supplanté sa voisine Obock comme chef-lieu de notre colonie et seml^le appelé à un grand avenir commercial. Le capitaine russe Arnoldi, qui a visité la ville naissante, il y a quelques années, a déclaré que Djibouti a une J. JOÙBEKT. — LES SOMALIS ET LE SOMALILAND II69 importance stratégique bien supérieure à Aden et à Périm, mais à condition de la fortifier, et un correspondant anglais, parcourant l'Afrique orientale, disait récemment que Djibouti, avec son port éclairé à l'électricité , est en train d'éclipser Aden comme escale et station maritime. Tandis que Djibouti est de création récente, Zeïla, en territoire britannique, représente le plus ancien des ports somalis. C'est l'an- tique Aûa>trv!ç, pex/îèv éumpiov du Périple de la Mer Erythrée et des Ptolémées , le Zâlegh dont parlent les auteurs arabes ; loi'sque M. Ferrand visita la ville en i88'3, pendant l'occupation égyptienne, elle comptait alors 4-ooo habitants; elle manque d'eau; quant aux mouillages, « elle a deux ports, dit Elisée Reclus, l'un que fréquentent « les barques, mais où ne peuvent mouiller les navires, l'autre où « les bâtiments trouvent un abri parfaitement sûr; mais ce havre « est assez étroit. » Un peu plus loin, on rencontre Doungareïta, petit port longtemps objet de litige entre la France et l'Angleterre, mais que la convention franco-anglaise de 1887 a abandonné à la Grande-Bretagne. Boulhar, au pied du mont Elmes, est un marché fréquenté, mais d'un mouillage dangereux. Berbera, ancienne cité arabe, munie par le gouvernement égyptien d'un phare et dun wharf, a été reconstruite sous l'occupation anglaise après un incendie qui l'avait détruite en 1888; sa foire à ime grande importance et la population s'élève à 3o.ooo habitants. Il n'y a plus guère à citer que Merayah, petite ville commerçante, €t Bender-Aloula. au centre d'un pays de pirates et résidence de prédilection du sultan des Medjourtines. Les deux seules villes de l'intérieur dignes de ce nom sont : Barderû, centre religieux très important à 3oo kilomètres de l'em- bouchure du Djouba, et Logh, 70 kilomètres plus au nord. Le baron van der Deken paya de sa vie, en i865, sa curiosité de visiter la mystérieuse Barderù. Que dire de la faune et de la flore du Somaliland? L'une et l'autre sont pauvres , le sol étant pierreux et manquant de terre végétale et d'eau. Sur les monts de la Medjourtine on trouve beaucoup d'aca- cias, d'euphorbes, d'arbres à gomme et à encens; par-ci par-là se rencontrent quelques bouquets de dattiers et de palmiers cloinn. Dans les fissures des roches nues on découvre aussi parfois Voliba- niiin ou boswellia, dont les racines adhèrent avec la ténacité du lierre. Dans l'intérieur, les animaux domestiques forment la princi- pale ressource des tribus nomades. L'éléphant, lui, se montre sur les pentes escarpées du mont Gan Libach ou encore sur les rives -A* 1 1 70 GÉOGRAPHIE de rOuébi; on entend le rugissement du lion à travers les steppes de rOgaden; la hyène, le léopard, le chacal et autres félins abondent dans les brousses; les gazelles et les antilopes passent rapides sur les hauts plateaux, tandis qu'alertes comme des écureuils les inacrocclides , cpie Révoil appelle « des rats à trompe », courent sur les rochers. Pour un aussi vaste pays, le commerce est assez limité; il se fait svirtout dans les ports de la partie septentrionale par l'intermé- diaire des trafiquants arabes ou banians et consiste en gomme, myrrhe, encens, nacre, perles, écaille, plumes d'autruche, un peu d'ivoire, de l'indigo ou ellan, qu'apportent aux doiikans ou comp- toirs de la côte les caravanes de l'intérieur. Comment donner, même approximativement, le chilïre de la popu- lation de tribus nomades, flottantes, disséminées sur d'immenses espaces? Vivien de Saint-Martin indiquait, sous toute réserve, le chiffre de i.ooo.ooo d'indigènes tandis que Révoil, lui, n'estime le nombre des habitants peuplant maigrement les contrées qu'il a visitées qu'à 3o.ooo. Quant à l'anthropologie, les opinions sont fort diverses et on serait tenté de répondre, avec Vivien de Saint-Martin, négativement à la question fort intéressante que pose ce géographe : « Existe-t-il un type somali ? » jMetchikof dit que l'unité ethnique des Somalis est très relative ; Elisée Reclus déclare qu'il n'y a point de types communs à tous les Somalis et Révoil constate que c'est chez les Medjoui^tines, au sud du cap Guardafui. que se trouve le type le plus pur de la race somali. Paulitschke ne voit dans les Somalis que des Gallas fortement mélangés de sang arabe, peut-être même nègre. M. Deniker, lui, dans son ouvrage les Races et les Peuples de la Terre, classe les Somalis dans le groupe éthiopien ou Koiichito- Khamite, dont les Gallas représentent le type le plus pur. Les Somalis se divisent et se subdivisent en nombreux clans, rer on fakida; toutefois, M. Ferrand estime qu'on peut partager toutes les tribus en quatre groupes : I. Les Somalis du Nord, parmi lesquels on remarque surtout les Issas, très adonnés à la razzia et comprenant, dit Burton, loo.ooo guerriers, mais tous fantassins; ensuite les Dolhobantes, au contraire, excellents cavaliers; puis les Medjourtines qui, d'après le colonel Graver, réunissent loo.ooo indigènes répandus sur un territoire de lOO.ooo kilomètres carrés, dont la région du nord est le pays aro-, matique par excellence. J. JOObERT. — LES SOMALIS ET LE SOMALILAND II7I Les Medjourtines sont gouvernés par une monarchie héréditaire, dont le sultan porte le nom de hoghor. II. Deuxième groupe : Somalis du Harrar, dont la principale tribu celle des Guerri, compte o.ooo guerriers et possède i5o villages. III. Les Somalis de l'Ogaden ou de YHinterland, qui comprennent les Miraouàl et les Mekaboul. dont le fanatisme et la barbarie sont extrêmes. IV. Les Somalis du Sud ou de la côte des Benadir, qui se com- posent de deux groupes : les Haouya et les Rahanouin ou Sab , sub- divisés en nombreux clans. M. Ferrand a tracé un curieux portrait de l'indigène du Somali- land. « Pasteur, dit-il, chamelier, ])andit. chasseur à ses heures et <( suivant les saisons, le Somali vieillit, considéré, s'il a de nombreux « fils, illustre, s'il a tué de nombreux hommes. Il devient, dans ce <( dernier cas, un des chefs du clan, puis un des conseils de la tribu. » Les Somalis se marient, en général, dans leur tribu; la future épouse s'achète et le prix varie de 5o à 3.ooo francs, capital repré- senté par un certain nombre de chamelles ou de chèvres. La poly- gamie est considérée comme un luxe qui est réservé aux riches. La stérilité est regardée comme une tare ; la naissance d'une fille passe inaperçue; à l'âge de huit ans la future femme est circoncise et sou- mise aux cruelles pratiques de Yinfibiilation. Naît-il un fils dans la famille, on célèbre au contraire ce joyeux événement par de copieux festins et des danses prolongées? Jusqu'à l'âge de la puberté, le garçon va nu partout. « Au camp, dit M. de « Poncins, il apprend la liste des ancêtres, regarde l'homme qui « forge un fer de lance ou un couteau avec des pierres plates. «... Vers quinze ans il commence à porter une lance , un couteau , « un bouclier, à mesure qu'il peut se les procurer. » Le jeune homme est alors tenu d'établir sa qualité en tuant un éléphant ou plutôt un lion et surtout un homme d'une tribu ennemie. Quand il revient ayant accompli son meurtre, on entonne des chants en son honneur ; il reçoit de la pai't des femmes une ovation enthou- siaste. « C'est, a écrit avec indignation M. Ferrand, l'apothéose du a. guet-apens et du crime le plus barbare et le plus odieux ! » Après la mort du guerrier et du chef de clan, des pierres sur sa tombe indiquent le nombre des ennemis qu'il a tués; c'est là son titre de gloire aux yeux de la postérité ! Les Somalis ont la passion des chants et des danses, auxquelles ils se livrent avec ardeur le soir dans leurs campements. Leurs com- position poétiques, que Paulitschke a étudiées dans son ouvrage IIJ-2 GEOGRAPHIE Ethnographie Nordost Africa's, die g-eistige CiiUur der Danâhil, Galla iind Somâl, ainsi que Fred. Hiinter dans son volume A graminav of the Soinali language , comprennent des romances sen- timentales, des chœurs à l'unisson, des chants de danses, des chan- sons erotiques, des lamentations, des sortes d'élégies farouches et très carastéristiqvies. Quant au costume des Somalis. il a, d'après Révoil, une singulière analogie avec le sagiim des Grecs et des Romains. Hommes et femmes se drapent dans une sorte de pagne de cotonnade ; pour les nomades ce vêtement est en peau agrémenté de franges ; il s'appelle keiran pour l'homme et don pour la femme. Le guerrier a comme principale parure un petit sachet de cuir, makaoïiï . renfermant une amulette en ambre, puis une bague cachet ou katoiin , des peignes en bois, fidin , des plumes d'autruche dans les cheveux, bâi. Pour les femmes les principaux bijoux sont : les peignes, sakafa, des boucles d'oreilles, sélansil et konred, le grand collier d'argent, djilbet, enfin des bracelets de poignet, bindjiri ou de coude, soii- noiid. Les Somalis sont essentiellement nomades, habitude qui tient à la fois à la nature même de la contrée , couverte de vastes steppes plus ou moins incultes et à leur caractère ethnique, les indigènes d'une paresse innée ayant un profond mépris pour tout travail manuel et n'aimant que la chasse et la guerre ou plutôt la razzia. Révoil cite des nomades qui vivaient, à l'instar de troglodytes, à l'abri de rochers fermés par des amas de branches. — Au cours de son voyage dans l'Ogaden, le prince Ruspoli, destiné à une fin tra- gique, écrivait : « La plus grande partie de la population est nomade, adonnée à « l'élevage des bestiaux ; les villages des sédentaires sont rares. » Passons-nous à la géographie politique : trois puissances euro- péennes ont fait acte de souveraineté territoriale au Somaliland : la France, l'Angleterre et l'Italie. Le traité du ii mars 1862 avait déjà donné Obock à la France, qui en 1888 prenait possession de Djil^outi. Le traité du 2 février 1888 fixa les frontières des territoires coloniaux des gouvernements de la République fi-ançaise et de la Grande-Rretagne qui, elle, dès que rÉ<'-ypte eut retiré ses troupes des ports somalis du golfe d'Aden, avait placé des garnisons anglaises, en 1884, à Zeila et à Rerbera. Quant à l'Italie, elle déljuta par la côte haouya et le drapeau de la Maison de Savoie fut d'abord arboré à Obl)ia en 1888 ; puis le pro- tectorat du royaume fut successivement étendu à Kismajo, Ouar- J. JoObEKT. — LES SOMALIS ET LE SOMALILAND 11^3 cliekh, Braoua, Marka et Magadoxo. Les splières d'influence des deux puissances, l'Angleterre et l'Italie, furent fixées par les conven- tions des 24 mars et i5 avril 1891 et du 5 mars 1894; enfin, le traité anglo-éthiopien du 28 juillet 1897 détermina les limites des posses- sions anglaises et des territoires dépendant du Négus d'Abyssinie au Somaliland. En résumé, la France ne détient qu'une petite partie du Somali- land; l'Angleterre, elle, a proclamé sa souveraineté sur la côte d'Aden de la frontière française jusqu'au 47^ méridien, et la domina- tion italienne s'étend des limites des territoires britanniques sur une l)ande de terrain de 200 kilom. de large jusqu'à l'embouchure du fleuve Djouba, dont elle suit le cours jusqu'à Logh dans l'intérieur. La France, l'Angleterre et l'Italie ont reconnu le reste des terri- toires somalis connue dépendance de l'Empire du Négus. L'espace nous manque pour faire l'intéressant historique des explo- rations au Somal, que les anciens Égyptiens a[»pelaient pays de Poiint et dont les premières notions ont été fournies par les curieux bas-reliefs décorant les murailles de Deïr-el-Baharri à Thèbes et relatives à l'expédition maritime envoyée sous ïhoutmès III (xviii^ dynastie) par la régente Hatchopsitou. Laissant de côté les missions hydrographiques des capitaines de la marine anglaise Owen et Buttler, en 1823. et du lieutenant Crutten- den, en i844-4^, sur la côte des Medjourtines, il n'est que juste de reconnaître que l'iionneur des premières explorations fructueuses sur le littoral somali revient à un Français, le capitaine Guillain, commandant le brick le Diicoiiëdic, qui visita, 1846-48, les baies au nord et au sud de ras H'afoun et dont les renseignements très cons- ciencieux sont consignés dans son ouvrage intitulé : Documents sur l'histoire, la géographie et le commerce de l'Afrique orientale. En 1861, le capitaine Fleuriot de Langle, commandant la Cordelière, compléta les utiles indications relevées par son prédécesseur, notre compatriote. En i855, Bui^ton, le camarade de Speke, a consigné ses observa- tions sur le Somaliland dans son ouvrage : First footsteps in east Africa or an exploration of Harrar. Citerons-nous encore le lieute- nant Speke, dont le journal de route est à consulter (i854-55), Heu- glin (1857), 1^ ^Gve Léon des Avranchers, le baron Van der Decken {i8G4-65), qui essaya courageusement de pénétrer dans l'Hinterland en remontant le cours du Djouba et périt victime de son audace d'explorateur. Nommons encore le capitaine Miles (1871) , le botaniste Hildebrandt (1875), Haggenmacher (1874), qui s'aventurèi*ent dans II 74 GÉOGRAPHIE le pays îles Ouarsanguélis et dans l'Ogaden; le colonel aniéi'icain Chaillé-Loiig qui. lui. a pu reiuonter le cours du Djoul)a. jusqu'à 280 kilomètres environ de son embouchure. Mais assurément, le voyageur dont les travaux oi)iniàtres et si courageux ont le plus contribué à nous faire connaître la contrée est Georges Révoil. qui a effectué au Somaliland trois explorations : d'abord en 1877-^8, une seconde l'ois en 18-8, puis en 1880, visitant les ports tant du golfe d'Aden que ceux au sud du cap Guardafui et même poussant des pointes hardies dans l'intérieur. G. Révoil a relaté les résultats de ses l)elles explorations dans trois ouvrages : Vo}'ag-e au cap des Aromates, la Vallée du Darvor et Faune et flore des pays somalis. En i883, un négociant italien, Sanoni, tentait de visiter l'Ogaden; en i885, Paulitschke, à la suite de son voyage de Zeila au Harrar, écrivait son savant ouvrage : Reise nach Harrar und in die nordli- chen Galla-Lânder. James a pu])lié, en 1888, le récit d'une explo- ration dans l'Ogaden sous le titre pittoresque : The unknown horn of Africa, curg. à la suite de son voyage de Berbéra jusqu'à l'Ogaden. a fait paraître le récit très intéressant intitulé : Wanderungen in Ost- Africa. Le Somaliland , somme toute , n'est encore connu que dune façon incomplète et insuflisante, et cela tient au caractère farouche et au fanatisme exalté de ses habitants, qui ont massacré tant de voyageurs, Cruellement longue, en effet, est la liste de ces audacieux explorateurs , tels que Burton . van der Decken et ses compagnons , Kinzelbacli. Haggenmacher. Sacconi . Peri-o-Ligata et les autres p. LABBE. — LES PORTS RUSSES EX EXTREME-ORIENT H'D membres de sa mission, Talmonc, le général Cecchi et son état- major, le résident italien de Marka, Trévis, (sans parler de notre agent consulaire à Aden, Lambei't, tué en rade de ce port en 1869 ), tous nobles yictinies, la plupart de la science, tombées au champ d'honneur, pour étendre l'horizon de nos connaissances sur cette « corne de l'Afrique » déjà teinte du sang- de tant d'héroïques mar- tyrs de la Géographie ! M. Paul LABBE Explorateur, à Paris LES PORTS RUSSES EN EXTREIÏIE-ORIENT — Séance du S août — Sauf Port-Arthur et Dalny, tous les ports russes d'Extrême-Orient sont situés dans la Province Maritime. Cette province est immense, elle a une superficie à peu près égale à trois fois celle de la France : 1,562.400 verstes carrées. Son chef-lieu est Vladivostok, ville où réside le gouverneur. Le gouverneur général des trois provinces de l'Amour hal^ite Khabarovsk, au confluent même du fleuve Amour et de rOussouri. La province peut se diviser géographiquement en deux parties distinctes : 1° le bassin de l'Amour inférieur; 2° la région du Kamt- chatka et de la mer d'Oldiotsk. Dans la première partie s'étend, séparant l'Oussouri de la mer, la chaîne de Sikhété-Aline dont le pic jirincipal ne dépasse ]Das i.ioo mètres. Les montagnes forment des contreforts escarpés et des falaises abruptes le long de la mer et les torrents qui en descendent tombent en larges et profonds estuaires sur la côte déchiquetée. Quelques-unes des baies, formées par les torrents, sont d'accès assez facile et ofl'rent aux bateaux d'excellents abris et de tranquilles refuges; des navires, même de fort tonnage, X^euvent mouiller dans les baies de Sainte-Olga, de Port-Impérial et de Castries. Il existe un service de bateaux, en été, entre Vladivostok et le Kamtchatka : les bateaux qui appartiennent à la Compagnie russe dite : « de Mandchourie », font escale dans la baie de Sainte-Olga, 11^6 GÉOGRAPHIE puis devant le poste de Korsakov, au sud de l'ile de Sakhaline; ils s'arrêtent ensuite sur le continent, dans la baie de Port-Impérial, qui n'a d'impérial que le nom, puis à Alexandrovsk. ville principale de l'île de Sakhaline. et enfin sur le continent, dans la baie de Castries. à Nikolaïevsk , dans l'estuaire de l'Amour et dans les ports de la mer d'Okhotsk et du Kamtchatka. Deux fois par an, un bateau de la Hotte volontaire, le plus souvent le laroslav ou parfois le Nijni-Novgorod, amènent jusc[u"à Alexan- drovsk les forçats de la Russie d'Europe. Des bateaux japonais vont chercher, dans les ports qui viennent d'être cités, des chargements de poisson et des bateaux norvégiens sont affectés au transport du charbon. Malheureusement la mer est souvent mauvaise et dangereuse , le& cartes sont insuffisantes , les côtes parsemées d'écueils et nombreux sont les bateaux qui ont sombré. J'en ai vu quelques-uns qui, désem- parés, étaient couchés sur les rochers sur lesquels ils étaient venus se briser. En été, des vents violents soufflent, les brouillards sont intenses et les courants nombreux. J'en ai fait l'expérience et un capitaine me racontait qu'au mois de septembre dernier, il voyagea plus d'une semaine sans rien voir, enveloppé dans un épais bi*ouillard> entre Vladivostok et Pétropavlosk. L'hiver, le détroit de Tartarie, qui sépare Sakhaline du continent, est pris par les glaces et, pendant plusieurs mois, on ne le peut traverser qu'en traîneaux attelés de chiens. L'entrée du port de Vla- divostok est alors pénible, mais non pas impraticable, grâce à un puissant bateau brise-glaces qui travaille constamment. La population de la province est de o.l^'i.i^o individus, dont 137.872 Russes, 43.100 (?) Aborigènes, 25.655 Coréens, 88.809 Chi- nois, 2.168 Japonais, 536 Européens. Il y a presque autant de Japo- naises que de Japonais dans la Province Maritime, mais cette égalité n'existe pas pour tous, car il n'y a sur 100 Russes que 82.7 femmes pour 67,2 hommes, et pour 100 Chinois, 0,9 femmes pour 99, i hommes. La population des ports principaux augmente tous les ans. Vladivostok. . 3o.847 habitants Nicolaïcoskri . 5 . 322 — Pétropavlovsk. 401 - Okhotsk . . . 2;3 - Le commerce maritime se développe très rapidement. En 1891, les marchandises furent apportées à Vladivostok par i53 navires; il en p. I.ABBE. — LES PORTS RUSSES EJV EXTREME-ORIENT ll'j" vint 267 en 1896. 299 en 1898 et près de 4^0 en 1902. La ville s'as^randit et s'embellit de jour en jour; je l'ai visitée en 1899 et. eii 1901, en deux ans elle avait pris un aspect vraiment imposant : le port, vaste, bien abrité, est formidablement défendu et la ville s'élève en amphithéâtre dans un site admirable. Il est entré, l'an dernier, près de 19 millions de ponds de marchan- dises : il n'y en eut que 7 millions en 1891 et moins d'un million en 1888. Ces chiffres montrent la progression constante et l'importation actuelle du commerce à Vladivostok. Je rappelle qu'un pond est égal à 16 kil. On a publié une statistique très triste pour nous, qui répartit ainsi les marchandises importées : Russie d'Europe .... 32,5 % Allemagne 28,9 °/o Norvège 17 °/o Angleterre 10,6 % Japon 6,6 % Amérique 2,2 % Danemark i % Autriche 0,9 % Corée 0,2 % Cette statistique — la dernière publiée de ce genre — date déjà de 1899 et je crois que depuis la part de l'Amérique et celle du Japon ont sensiblement augmenté; mais ce qui est grave, c'est que la France n'y figure pas. On ne voit jamais un bâtiment français dans les ports russes d'Extrême-Orient et un employé du port me demandait l'an dernier, malicieusement peut-être, quelles étaient les coulevirs du pavillon français. Il ne faut d'ailleurs presque jamais prendre au pied de la lettre les statistiques les plus rationnellement établies. Si l'on visite les maga- sins de Vladivostok, on s'aperçoit qu'on y peut trouver un certain nombre de produits français, des vins, des liqueurs et de la parfu- merie ; les statistiques ont donné à ces marchandises la nationalité du bateau qui les apportait. Malheureusement, trop souvent, les étiquettes en langue française cachent des produits de contrefaçon russe, allemande, américaine ou même japonaise, qui sont vendus très cher, qui sont mauvais et qui compromettent notre commei^ce en Extrême-Orient. Les Français qui s'intéressent à notre commerce d'Extrême-Orient avaient espéré que les Messageries maritimes, bien inspirées cette fois, se décideraient à ouvrir une agence à Vladivostok : les bateaux 11^8 GÉOGRAPHIE li'ançais eussent trouvé là des passagers et des marchandises, car ils sont à tous points de vue meilleurs que les bâtiments de la Flotte volontaire. Il serait peut-être déjà trop tard pour créer cette agence. Actuellement, notre situation dans l'Extrême-Orient russe est déplo- ral)le ; on n'a pas même à compter avec nous, nous n'existons pas et, dans le pays voisin, au Japon , nous ne comptons plus guère : nom- breux sont ceux qui croient au Japon, en Corée et même en Extrême- Sibérie , que la France n'est plus qu'une nation de second ordre et on ne s'est pas toujours gêné pour me le répétef. Dernièrement encore, un journal de Vladivostok donnait la preuve qu'on n'avait plus guère confiance en nous. Il relatait les efforts que je faisais pour faire comprendre aux maisons françaises l'intérêt qu'elles auraient à travailler en Silîérie : j'avais dit que j'espérais que notre situation s'améliorerait enfin et le journal concluait : « M. Labbé a l'espoir robuste, ou Jjien il tient à se payer d'illu- sions ! » Pourtant, une grande maison française d'importation et d'expor- tation vient d'ouvrir des comptoirs en Extrême-Orient russe : un essai fait à Irkoutsk, et qui avait réussi, la décidée à établir des succursales à Port-Artliur et à Vladivostok. En outre , un voyageur connu est en ce moment à Kharljine et , muni de gros capitaux, veut y fonder une importante affaire. C'est une joie de constater enfin que des hommes intelligents et travailleurs vont rendre à notre commerce son vieux renom d'honnêteté et de bon goût, que lui avaient lait perdre en Asie des voyageurs de commerce peu scrupuleux. Un Français avait voulu fonder une grande fabrique de conserves au Kamtchatka, il est mort accidentellement, mais son idée sera peut-être reprise et perfectionnée ; c'est un Français qui va devenir l'intermédiaire entre les pêcheurs russes du bassin de l'Amour et les marchands japonais. C'est à Nikolaievsk qu'il fera ses achats. Il y a eu, l'an dernier, près de loo bateaux dans ce port où environ 3 millions de pouds de marchandises ont été importées. L'expor- tation n'est pas ce qu'elle devrait être; les richesses poissonnières sont très grandes dans la région, mais inférieures pourtant encore à celles du Kamtchatka et de l'île Sakhaline. Il n'entre guère pourtant à Okhotsk et à Petropavlovsk que 20 bateaux par an. Ils trans- portent du charbon, chargent du poisson et des fourrures; c'est, en effet, dans ces parages que les zibelines sont les plus belles et que vivent les loutres marines les plus réputées. La pêche à la baleine est faite par les Japonais et par les Américains. Les baleines ne sont p. LABBÉ. — LES PORTS RUSSES EN EXTRÊME-ORIENT II 79 généralement pas très grosses, mais elles sont noml^reuses. A Sahkaline, par exemple, j'en ai vu à chacun de mes passages dans la haie de Korsakov. Plusieurs lianes de bateaux réunissent Vladivostok et Port- Arthur. La flotte volontaire, dont les bateaux partent d'Odessa, va d'une ville à l'autre avec escale à Nagasaki ; les bateaux dits du chemin de fer de Mandchourie, car ils ont été créés pour apporter les maté- riaux de constructions, vont eux aussi d'un port à l'autre, en sarrê- tant à Gensane, à Fousane, à Nagasaki, à Tchemoulpo, à Tchéfou et à Changhai ; la Compagnie japonaise de Nippon Yusen Kaisha fait escale dans les mêmes ports que les précédents. La Russie a maintenant, au sud de la Mandchourie, deux ports auxquels vient aboutir la ligne magistrale d'Asie : Dalny, la ville de commerce, et Port-Arthur, le port de guerre. L'emplacement de Dalny se trouve au bord du vaste golfe de Talienvan, à labri des vents violents et des tempêtes. La ville est loin d'être conq)lètement construite; elle est divisée en trois quar- tiers : le quartier administratif, le quartier commercial européen, le quartier commercial chinois. Le premier, seul, est à peu près ter- miné : les rues sont macadamisées, une canalisation a été établie à grands frais; les maisons, en pierres, sont entourées de jardinets. Pour les autres quartiers , le nivellement est à peine achevé , mais, quelle que soit l'imjiortance du travail dans la ville même, il n'est rien en comparaison de celui qu'on a entrepris dans le port. Le port de Dalny, quand les travaux entrepris seront finis, occuj)era une étendue égale à celui du port d'Odessa. Dans sa plus grande partie, le bassin sera approfondi au moyen de dragues et on lui donnera une profondeur de 28 pieds à marée basse, ce qui est suffisant pour les très gros bateaux; le reste du l>assin aura 18 pieds de profondeur, ainsi qu'il convient pour les bateaux de cabotage. Au moment du départ de M. Vitte, — car je prends ces chiffres dans son rapport — les dragues avaient déjà fait la moitié de leur travail : les mêdes étaient assez grands pour permettre à huit grands vapeurs et à quinze caboteurs d'accoster. « C'est dans un an, dit le ministre, que Dalny possédera toutes conditions voulues pour que la vie du port et celle de la ville puissent commencer. » Pour approvisionner le port, on va faciliter l'importation à Dalny de la houille provenant des gisements de la Mandchourie du sud. Certains industriels avaient voulu v envoyer du- charbon de l'île Il80 GÉOGRAPHIE Sakhaline; mais celui-ci est, quoiqu'on en dise, de qualité inférieure, il flambe plutôt ([uil ne brûle et a causé, notamment au bateau SoiuiûriH. des accidents et des incendies. On a vendu des lots de terrains à des particuliers, afin d'attirer le plus grand nombre de commerçants possil)le. Enfin . dans leur ensemble, les dépenses occasionnées par la création de Dalny s'é- lèvent à près de 19.000.000 de roubles: mais, d'après M. Yitte. qui ne peut s'y tromper, elles dépasseront de beaucoup ce cliilfre. On a d'ailleurs, en Mandchourie, toujours dépensé sans compter : on espère pourtant que les ventes de terrains viendront amoindrir nota- blement les dépenses. Au mois de novembre, on a vendu aux enchères /^lô.oi'j roubles de terrains, à ^5 roubles la sagène carrée. On se propose d'en vendre encore et, si le prix de la sagène restait à 25 roubles, ce qui est un minimum, le produit de la vente nou- velle dépasserait i5 millions de roubles. Or, l'étendue des terrains désignés pour la vente prochaine représente seulement le quart du territoire qui sera vendu par la suite. On peut donc dire que Dalny, ville créée de toutes pièces par la Russie, est appelée à devenir le grand port du commerce russe dExtrême-Orient. Elle a sur Vladivostok deux avantages : elle est placée plus au sud que sa rivale et n'est jamais encombrée par les glaces. La ville de Vladivostok s'est émue de tout ce qu'on faisait pour Dalny et elle avait de bonnes raisons pour s'émouvoir. Les commer- çants ont pensé qu'ils seraient vite ruinés par ceux de Dalny, surtout maintenant que Aladivostok a cessé d'être port franc. M. Vitte s'est occupé de cette question; maison sent que, quel que soit son désir de rester impartial, il est tout acquis à Dalny. Il pense pourtant, et avec raison, que l'avenir économique et commercial de la Russie est en Extrême-Orient et que, dans les vastes pos- sessions russes, baignées par le Pacifique et les mers qui en sont tri- l)utaires, il y a place pour plusieurs ports importants. Vladivostok ne pouvait suffire aux besoins et aux ambitions de la métropole ; la ville est trop loin des mers de Chine , près desquelles doivent s'éta- blir les nations européennes désireuses de jouer un rôle en Extrême- Orient. Le ministre, dailleurs, est plein de mépris pour les critiques trop intéressées et pour les rivalités de clocher : ce sont là des choses temporaires et partant secondaires, « car, dit-il, l'histoire compte par siècles et non par années ». Port-Artluir n'est pas très loin de Dalny : le voyageur qui y arrive p. LABBÉ. — LES PORTS RUSSES EN EXTRÊME-ORIENT II81 est un peu déçu tout d'abord; on parle tant du port de guerre russe, qu'on s'attend à quelque chose de formidable, et à vrai dire Port- Arthur ne semble pas être encore la forteresse inexpugnable dont on a tant parlé. La ville est sale et malsaine et les Chinois et les Euro- péens y vivent dans des conditions d'hygiène déplorables. On y tra- vaille beaucoup et en silence, et sur ce point le rapport de M. Yitte est presque muet et n'a rien révélé. Quand je suis passé en Mand- chourie en mars 1902 , les travaux du port n'étaient pas terminés, loin de là, et il me fut facile de comprendre coml)icn était naturelle et justifiée l'émotion causée dans les milieux russes bien renseignés jiar l'alliance anglo-japonaise. Cette émotion régnait aussi bien dans le haut commandement de Mandchourie que dans les sphères officielles •de Saint-Pétersbourg; on ne se sentait pas prêt et l'on craignait une démonstration japonaise qui retardât de quelques années ou com- promit peut-être même l'œuvre entreprise par la Russie. La grande majorité des Russes, la presque unanimité des Russes, ne partageait pas cette émotion et s'en serait étonnée si elle l'avait remarquée. Le Russe ne connaît pas son voisin et le Japonais lui semble être un enfant qu'il sera facile de corriger à la première occasion. La Russie répondit à l'alliance anglo-japonaise par la convention russo-chinoisCj qui fut faite pour gagner du temps. Elle est restée fidèle à ses projets et toute sa politique d'Extrême-Orient est admi- rable de hardiesse et admirable de logique. Elle sait que le temps travaille pour elle et elle travaille avec le temps. Les Japonais, qui ont accueilli comme une victoire la convention russo-chinoise, commencent peut-être à changer d'avis. Ils pourraient d'ailleurs apprendre de leurs amis les Anglais, qui occupent toujours l'Egypte, quelle est la valeur diplomatique d'une promesse d'éva- cuation. IlSa ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE M. J. CURIE Liciitenant-ColoïK'l du Génie vu retraite , à Versailles REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE. — COMPARAISON ENTRE LA PROPOSITION DE LOI RÉDIGÉE EN AVRIL 1903 PAR LA LIGUE POUR LA REPRÉSENTATION PROPOR- TIONNELLE ET LA SOLUTION PROPOSÉE DEPUIS 1888. — Séance du 6 août — Pour être en mesure d'apprécier la proposition de loi arrêtée en avril 1903 par la Ligue pour la Représentation Proportionnelle, je commence par résumer ma solution, qui est rigoureuse et complète , ce qui me permettra, par comparaison, de reconnaître les imperfec- tions de la solution pi^oposée par la Ligue. Ces imperfections résultent forcément surtout de ce qu'elle pro- pose le maintien de l'article 2 de la loi du 16 juin i885. qui fixe le nombre de députés dans chaque département à un pour 70.000 habi- tants et tient compte de tout nombre inférieur à 70.000. On verra plus loin les conséquences de cette disposition défectueuse. J'expose d'abord ma solution qui évite cette dilficulté. IDÉE d'ensemble DE MA SOLUTION Au lieu de fixer à l'avance, comme on le fait d'ordinaire, le nombre de sièo-es à assigner à chaque circonscription, on fixe à l'avance, et une fois pour toutes, le nombre de voix que devra rénnir un candidat pour être élu. Entre le nombre N de sièges, le nombre e de voix à réunir pour être élu et le nombre E des électeurs , il y a la relation N X ^ = E. D'ailleurs, comme il sera dit plus loin, E := o,3io88 P, P représentant la population. Ainsi N et e sont fonctions l'un de l'autre. On est donc libre de fixer l'un ou l'autre. Ce chiffre e pourra d'ailleurs toujours être augmenté ou diminué ultérieurement de manière que le nombre total des élus soit main- tenu dans des limites convenables. On profite de la simplification qui résulte de la fixation à l'avance de ce chiffre d'élection, pour compléter la solution, de manière à rendre la représentation rigoureusement proportionnelle dans le pays tout entier. J. CURIE. — REPRÉSEXTATION PROPORTIONNELLE Il83- A cet effet, sans rien changer au système des circonscriptions existantes, je pose deux autres principes : 1° Celui du rattachement des listes entre elles pour Tutilisation des voix perdues ; 2° Le principe qui permet de reporter les voix perdues des scru- tins locaux de manière à les utiliser d'abord au recensement dépar- temental et ensuite au recensement général. On vote pour une liste de noms classés par ordre de préférence , qui a été déposée à la préfecture, un nombre déterminé de jours avant le vote. On peut porter, en outre, sur les bulletins, en tête de liste, un nom quelconque. En déposant les listes à la Préfecture , on a dû indiquer à quelles autres listes la liste déposée sera rattachée pour l'utilisation des voix perdues, et dans quel ordre elle le sera. J'emprunte à mon travail de 1894 quelques-uns des exemples le& plus compliqués : La liste m'" des radicaux , dans la troisième circonscription du dépar- tement rattachée 1° aux socialistes, 2'' aux républicains modérés, 3'' aux industriels, porte : Marcel Marc Le scrutin a donné : Marcel, liste m" So.ooo voix Marc, liste m'" 8.000 38. 000 voix Il en résulte : Marcel, liste m ' 20.000 -j- 10.000 à reporter sur Marc, Uste m". Marcel est Élu. On a ensuite : Marc , liste m!" 8.000 (Marcel) liste ni'" 10.000 Liste m"' 18.000 à reporter au recensement général. Au recensement général, on trouve : Liste m"' 18.000 Liste m^' 2.000 Liste m'" 20.000 Marc qui reste premier de la liste m'" est Élu. An rattachement des partis entre eux , on trouve ce qui suit ; La liste a'", républicains modérés IIP circonscription, Il8^ ÉCONOMIE POI.ITIQLE ET STATISTIQUE Rattachée : Antoine Le scrutin a donné : i" Aux radicaux l Ambroise .\ntonin. liste a". . . 5o.o«}^ a" \ux industriels ' est Anselme Antoine, liste a".,. io.o<^) 3 Aux sociaUstes ) ï Anthime Liste a" 38 . o«m. Antonin 2 n Sont déjà élus dans la IIP circonscription, Antonin. Antoine, Amljroise et Anselme : et 18.000 voix de la liste à" sont à reporter d'abord au recen- sement o^énéral. puis au rattachement des divers partis entre eux. On classe les restes, ainsi reportés par ordre décroissant. Liste a" ) Répuljlicains : 18.000 rattachés à niiv, j, m^ ; t rattachés à à", ml^', ni^-. Liste i) Industriels : 14.000 | plus Isidore 3.ooo voix, f en tout ij.ooo. Liste m.^ Socialistes : 5.ooo rattachés à mX^', a". i\. Liste ml^> Radicaux : 4-ooo rattachés à a", i, m^. On complète à 20.000 les chiffres les plus forts au moyen des plus faibles en ayant égard aux conditions du rattachement. Ainsi la liste des républicains modérés peut profiter des voix obtenues par les radicaux. Républicains 18.000 Radicaux. . . 2.ooo -f- 4-<^<^ "^'*^i^ Perdues 20.000 Isidore Élu. Les électeui's qui ne veulent pas que leurs voix puissent être trans- férées dun candidat sur un autre portent sur leur l>ullelin la men- tion : fians transfert. En réalité, le vote est uninominal, et ne peut être ainsi compté qu'à un seul candidat. Mais, s'il ne peut contribuer à faire élire le candidat dont l'électeur a porté lui-même le nom en tète de son r J. CURIE. — RZPRÉSENTATIOX PROPORTIONNELLE 1x85 bulletin, il comptera au premier nom de la liste, ou. s'il ne peut lui être utile, au nom suivant et ainsi de suite. Enfin, sil ne peut contri- buer à lélection d'un candidat de la liste, il pourra être compté à un candidat d'une autre liste rattachée à la première (i). Si l'on votait poiu" un nom seul, il ai'riverait inévitablement, par suite d'une ti*op grande concentration ou dispersion des voix que beaucoup de votes seraient définitivement perdus. On réalise, par le système de vote indiqué ci-dessus, sans rien changer aux lieux de vote actuels, l'unité de circonscription électorale, impossible dans le système d'Hondt, où le noml^re des votes nécessaires pour être élu vaine d."une ch'conscription à une autre. Le vote pour une liste seidement simplifierait beaucoup les opéra- tions ; mais le vote pour un nom et poui- une liste est préférable au point de vue de la liberté de choix de l'électeur. Il vote poui' le can- didat qu'il connaît et qu'il préfère et , si ce candidat ne peut profiter de son vote, la liste qu'il a choisie, ou une des listes qui y sont rattachées, profitera de ce vote qui. ainsi, ne sera pas peixiu. Au dépouillement, il faut compter d'abord les votes poui' un nom seul, afin d'é^-iter autant que possible qu'ils soient perdus: puis les votes pour un nom avec liste, afin d'avoir égard aux préférences des électeurs: et enfin les votes de listes qui sont les plus faciles à grou- per. TRAVAIL PRÉPARATOIRE Pour que le système de vote proposé donne des résultats entière- ment satisfaisants, il faut que le travail préparatoire qui aboutit à la formation des listes où les noms sont classés par ordre de préférence soit bien fait. a) Ce travail peut être préparé par un homme très en vue, opérant comme il l'entendra, ou pai* un Comité inspirant toute confiance aux électeurs : mais il vaut mieux éviter d'accorder trop d'importance , soit à un personnage influent, soit à un Comité. C'est aux électeurs qu'il appartient de juger s'ils veulent voter pour une Hste ainsi faite ou pour une autre préparée par l'un des moyens indiqués ci-après. b) On peut encore opérer au scrutin de liste ordinaire, à condition que ce soit dans des réunions d'électeurs aussi multipliées et nom- breuses que possible, dont tous les inembi'es auraient à peu pr-ès les (i) Un vote ne peut être attribué à un candidat, si ce candidat n'est pas éligible; ou si ce candidat a déjà obtenu le nombre de voix voulu pour être élu: ou si. avec les bulletins qui pourront lui être attribués, il ne peut atteindre le chiffre voulu, etc. Il86 ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE mêmes opinions, le résultat de tous ces scrutins locaux étant centra- lisé au chef-lieu. On sait en effet que le scrutin de liste donne toujours des nom& classés par nombres de votes décroissants, ou, ce qui revient au même, par ordre de préférence. c) Enfin, on peut appliquer le système de vote proposé, qui n'exige pas que tous les votants soient de la même opinion; le dépouillement pour la formation des listes se fait par noms successifs : daJjord le nom qui a réuni le plus de voix, puis, le premier nom étant supprimé, celui qui a le plus de voix parmi ceux qui restent et qui est alors le deuxième, et ainsi de suite. OPÉRATIONS OFFICIELLES Les opérations oftîcielles comprennent d'abord le dépôt des listes sur lesquelles on devra voter; puis, le vote et le dépouillement du scrutin; ensuite, le recensement général avec le rattachement entre elles des listes de même nuance des diverses circonscriptions ; enfin, le rattachement des divers partis entre eux. Les bulletins de vote comptés à un même nom peuvent être piqués, traversés, puis réunis par un fil, et séparés par centaines et par mille, au moyen de cartons de couleur, pour qu'il soit facile d'en vérifier le compte en tout temps. Les extrémités du fil peuvent être attachées ensemble et scellées. La vérification des pouvoirs n'offre ainsi aucune diflîculté. SUPPLÉANTS Je n'avais pas, jusqu'à présent, traité le cas où il s'agit de rem- placer un élu décédé ou démissionnaire. La solution de la question est très simple. Il suffit de supprimer, sur les votes qui ont été attribués à l'élu à remplacer, le nom de cet élu et de le remplacer par le nom de la liste le premier à prendre. Si je considère les exemples ci-dessus, je vois que Marcel (liste m'"), élu par 20.000 voix données à son nom et à cette liste, devrait être remplacé par le premier candidat à prendi'e sur la liste m'". Comme Marc a été élu au recensement général et comme la liste est ainsi épuisée, on voit la nécessité de faire des listes suffisamment longues. Quant à Isidore, élu par 3. 000 voix à son nom seul, 14.000 voix à son nom et à la liste /. et par 3. 000 voix de radicaux et do socialistes J. CURIE. — REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE I187 rattachés aux industriels, il devra être remplacé par le premier nom à prendre sur la liste /, c'est-à-dire par Irénée. De cette manière, l'élu h remplacer est nommé par les mêmes votants que lui. L'opé- ration n'offre aucune dilliculté. THEORIE MATHÉMATIQUE La théorie mathématique de cette solution se réduit à ceci : que, si tout député est nommé par 20.000 votants, autant de fois un parti aura réuni 20.000 votants, autant il comptera d'élus, et il résulte de la manière d'opérer qui a été exposée qu'à 20.000 élec- teurs correspondra un élu. Ce rapport de i à 20.000, du nomlire des élus à celui des électeurs qui ont voté pour eux, étant constant, la représentation sera réalisée proportionnellement au rapport de i à 20.000. Dans ces conditions, les partis en présence peuvent être généralement réduits à deux, en ce qui concerne les élections, par le rattachement des listes entre elles ; chacun de ces deux partis irré- conciliables ne pourra avoir qu'un nombre de voix perdues, infé- rieur à 20.000, si tout le monde a coté régiilièrement. Le nombre total de voix perdues aura ainsi pour limite supérieure 40.000 sur 12.000.000 d'électeurs, soit ^ — • C'est la mesure du degré d'approxi- mation qu'atteint ma solution. La théorie de M. Rouyer n'est pas applicable au procédé que je propose, ni même au système d'Hondt considéré comme portant sur plusieurs départements. Elle n'envisage que le cas d'une circonscrip- tion prise isolément. DISCUSSION DE LA PROPOSITION DE LA LOI DE LA LIGUE Je signalerai d'abord, dans la critique du scrutin d'arrondissement et du scrutin de liste, une omission grave des arguments principaux qui doivent faire abandonner ces deux modes de scrutin et adopter la représentation projjortionnelle. Ces arguments sont les suivants : 1° Par suite du hasard de la répartition des opinions dans les diverses circonscriptions, il peut arriver, soit avec le scrutin d'arron- dissement, soit avec le scrutin de liste, qu'une majorité qui ne devrait être que 334 sur G02 élus (voir ma brochure de 1888 extraite du Signal de M. Réveillaud) soit seule représentée par 602 élus, à l'exclusion des minorités. C'est un déni de justice envers ces minorités. 2'' Mais il peut arriver une chose bien plus injuste et plus absurde Il88 ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE encore, avec l'un et l'autre modes de scrutin, par l'effet d'un hasard contraire : c'est qu'une majorité qui devrait être de 344 -^^i' 602 puisse . par un retour de fortune , être réduite à une minorité de 91 sur 602 et écrasée par une majorité de 5ii élus des minorités. De tels arguments ne doivent pas être passés sous silence, après avoir été signalés depuis i5 ans. Il n'est pas permis, au xx<^ siècle, qu'une part aussi large puisse être faite au HASARD dans notre législation. Je passe à l'examen des articles de la proposition de loi. L'art. -2 maintient l'art. 2 de la loi du i(5 juin i885, d'après lequel on doit élire un dé[)uté par yo.ooo habitants, et il doit être tenu compte de toute fraction inférieure à 70.000. Dans un pays où il y a 38. 000. 000 d'habitants correspondant à 12.000.000 d'électeurs, une population de 70.000 habitants correspond à 22.000 électeurs. C'est donc à 22.000 électeurs que correspond un député (i). Mais la disposition voulant qu'il soit tenu compte de toute portion de la population inférieure à 70.000 a pour conséquence que 70.001 habitants auraient droit à deux députés, ce qui ferait 11.000 électeurs par député. De fait, le territoire de Belfort, dont la population est de 88.047 habitants, a droit à deux députés et , comme cette population corres- pond à environ 27.372 électeurs, cela fera par député i3.686 élec- teurs. Cette disposition de la loi fait donc que le nombre d'électeurs voulu par député peut varier de 22.000 à i3.ooo et 11.000, ce qui rend impossil^le une représentation exactement proportionnelle. Pourquoi donc ne pas proposer aux chambres d'interpréter la loi du (i) La tablo de mortalité de la population générale de la France, d'après les neuf der- niers recensements ({uinquennaux (Annuaire du Bureau des Longitudes de 1900. p. ^Cyc,), donne pour les survivants sur Ôoo naissances d'hommes, à 20 ans '3'5o, a 'io ans 'Soi, d'où à 21 ans 327: et si l'on admet qu'à 5oo naissances du sexe masculin correspondent 5oo naissances du sexe féminin, les hommes survivants âgés de 21 ans et plus, c'est-a- dire les électeurs, seront les o,3io88 de la population, car la somme ci-après dont les termes sont les nombres d'hommes survivants de 10 en 10 ans, de 21 ans et plus sur 5oo naissances d'hommes ou i.ocm) naissances des deux sexes qui ont eu lieu chaque année depuis cent ans, représente le nombre des électeurs pour le total de ces naissances : (5oo) » + '32; + 3oi -|- 2^2 + 238 -|- 191 -f i23 + 43 -f 5 = i5oo De même, pour la population correspondante, on a : mon -{- :o- -f 0;o + &i- + 556 + 49^ + 4o3 + 269 + 99 -|- 12 = ^H-2Ô. Le rapport du nombre des électeurs à la population est donc : i5oo : 4825 = 0,3 1088, cecpii, pour une population de 38.5t-.9;5 (recensement de 1896), donne ii.974-4*'8 électeurs, et i)oMr une i)()i)uhition de 70.000 liabitants, 21.761 électeurs. J. CUKIE. — REPRESEXTATIOX PROPOUTIO.XNELLE I189 16 juin i885 en ce sens qu'un déi)uté correspondant à 70.000 habi- tants doit correspondre, ce qui revient au même, à 122.000 électeurs, ou, pour arrondir ce chiffre et tenir compte des abstentions, à 20.000 votants. Lart. 4, qui n'admet qu'un tour de scrutin, est indispensable à la Représentation Proportionnelle. Les art. 6, 7 et 8 ont pour objet le système d'Hondt modifié par la Ligue. L'art. i5 porte qu'aucune liste ne peut contenir un nombre de can- didats supérieur à celui des députés à élh'e. Dans mon système, j'admets des listes indéfinies, qu'il suffirait de raccourcir d'après des considérations d'ordre secondaire. Dans le système de la Ligue , peut-être vaudrait-il mieux qu'il en fût de même, pour laisser plus de liberté au votant dans le choix des noms à souligner. On pourrait, par exemple, limiter les listes à 20 ou 3o noms, ou même plus, dans certains cas; ou encore à trois ou quatre fois le nombre de sièges disponibles. Cela n'aurait aucun effet sur le nombre d'élus à attribuer à la liste, mais donnerait x^lus de liberté au votant, en ce qui concerne le choix des élus. Il y a d'ailleurs cette différence que, dans mon système, il n'y a à écrire sur les bulletins qu'un nom et le titre de la liste, tandis que dans le système de la Ligue tous les noms des candidats du parti devront être imprimés sur les bulletins. L'art. 25 relatif aux suppléants me i)araît défectueux. La condition à réaliser devrait être que le suppléant qui remplace un titulaire fût élu par les électeurs mêmes qui ont élu ce titulaire. Or, en les pre- nant à la suite, on choisit des noms qui ont été soulignés par d'autres votants que ceux qui ont souligné le nom du titulaire. J'aime mieux le système belge, où les suppléants sont élus à part par un vote sur les mêmes bulletins ; mais il prête aussi à des objec- tions, car il ne remplit pas exactement la condition ci-dessus. Dans ma solution, où le vote est, en réalité, uninominal, il est facile de faire servir à l'élection d'un suiipléant les votes mêmes qui avaient été attribués à l'élu qu'il s'agit de remplacer, en rayant sur les listes le nom de cet élu et en mettant à sa place le premier nom restant sur la liste qui a obtenu le plus de suffrages. L'article 22 indique le calcul de M. d'Hondt pour arriver au divi- seur électoral par lequel on fixe les nombres de sièges à attribuer aux différents partis. Pour Paris qui. d'après le recensement de 1896, compte 2.536.834 IigO ECONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE liabitants. ce qui, à raison dun député poui* 70.000 habitants ferait 37 députés correspondant à 20.000 X ^7 ou 740.000 votants, si l'on suppose que ces votants ne se soient répartis que sur 4 listes : 3oo.ooo, 200.000, 180.000, (îo.ooo, le système d'Hondt exigerait 37 divisions successives par les nombres 1,2. i5. Il serait préférable d'appliquer le procédé de M. Hagenbach- Bischoff, qui détermine le quotient absolu par une division unique du total 740.000 des votants par 37 + i , c'est-à-dire par le nombre de députés à élire augmenté d'une unité. Cette division donne : 740.000 =r 38 X i9-47^ ~)~ 2G. Le quotient absolu 19.473 dilïère un peu du diviseur électoral 20.000 que donne le calcul de M. d'Hondt; mais les deux calculs donnent pour les nombres de sièges à attribuer respectivement aux 4 listes ci-dessus : i5 10 9 3 Le quotient aljsolu de M. Hagenbach ne donne jamais un nond^re d'élus trop fort; toutefois, il peut donner un nombre trop faible; mais on trouve facilement le vrai nomljre en rentrant dans le système d'Hondt, sans passer par les calculs intermédiaires. A cet effet, on augmente d'une unité chacun des nombres de sièges trouvés au moyen du quotient absolu pris comme diviseur pom' les différentes listes. On divise par ces nombres, comme dans le système d'Hondt, les chiffres électoraux des partis en présence et on prend le ou les plus forts quotients . de manière qu'au dernier corresponde le nombre de sièges voulu. CONCLUSION La proposition de loi de la Ligue pour la lUqirésentatiuu Propor- tionnelle donnera exactement la solution dans chaque département séparément, mais non dans le pays tout entier, [)uisque d'un dépar- tement à un autre le nombre de voix voulu pour l'élection d'un député variera de 20.000 à 11.000 tliéoriquement, mais l'éellement de 20.000 à 12.000, le teritoire de Belfort étant le seul département qui ait moins de 140.000 hal)itants. Avec la solution proposée , on évitera donc , ce qui est possible tant avec le scrutin de liste par département qu'avec \e scrutin J. CURIE. — REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE II9I uninominatif par arrondissement , que tous les élus appartiennent à la majorité, ou qu'au contraire la majorité des électeurs dans le Xîays ne soit représentée à la Chambre que par une infime minorité. Ce résultat est assurément considérable, mais il est néanmoins assez éloigné de la perfection. Un autre défaut que cette solution présente, c'est le grand nombre de voix perdues. Si Ton admet qu'il y ait en moyenne 7 députés par département élus par un nombre de votants variant de 7 X 20.000, ou 140.000 électeurs à 159.999, étant donné que si l'on augmentait le nombre 140.000 de 20.000, cette augmentation de 20.000 donnerait droit à un député de plus ; en divisant ces deux nombres par 7 + 1 ou 8, on aura le quotient absolu de M. Hagenbach-Bischolf corres- 2)ondant, soit 17.500 et 19.999. Les nombres de voix utiles pour l'élection sont alors 17.000 X 7 ou 122.000 et 19.999 X : ou 139.993. Les nombres de voix perdues sont donc : 140.000 — 122. 5oo = 17. 000 et 169.999 — 139.993 = 20.oo(} moyenne — X 37.5oG ou 18.7.53 Il y aura donc moyennement 18.753 voix perdues par départe- ment, et pour 86 départements i. 612. 758, soit 1.600,000 voix perdues sur 12.000.000 d'électeurs (i). Dans ce calcul il est implicitement supposé que, dans chaque département, il n'y ait qu'une seule liste présentée. S'il y en a plusieurs, le nombre de voix perdues augmentera en conséquence. Avec ma solution, tout député est élu par 20.000 voix dans toute la France (2). Quant au nombre de voix perdues, si tout le monde a voté régu- lièrement et si, par le rattachement des listes entre elles, les partis peuvent être considérés comme ramenés pour les élections à 2 par- tis irréconciliables, le nombre de voix perdues ne devra pas dépasser 20.000 pour chacun, soit en tout 40.000. (i) Ces chiffres supposent 12.000.000 de votants. Si le nombre en était réduit, comme aux dernières élections, à 8.5oo.ooo, ils devraient être diminués dans le rappo/t de ces nombres de votants, qui est 0,-1, ce qui ramènerait le nombre de voix perdues à i.iSo.ooo. Mais il faudrait y ajouter 3.5oo.ooo abstentions. Or, avec la représentation pro- portionnelle, le nombre des abstentions devra évidemment diminuer, d'autant plus que le système adopté sera plus exact. (2) Cette solution aurait pour effet, si elle était adoptée, qu'à 100.000 abstentions cor- respondraient cinq élus de moins. Il y a donc là une prime à la non-abstention. II92 ÉCOXOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE Plus tard, quand l'apaisement sera fait suffisamment en France pour que le rattachement des partis en vue de l'utilisation des voix perdues puisse s'étendre à tout les partis, la limite svipérieure du nombre des voix perdues serait ramenée à 20,000. On voit que ma solution réalise beaucoup plus exactement la représentation proportionnelle que la proposition de loi de la Ligue. M. Edmond MAILLET Ingénieur des Ponts et Chaussées, à Boui\:<-la-Reine (Seine) SUR L'HOMME DE GÉNIE, DE M. LOMBROSO, ET LA FACULTÉ INVENTIVE [iSi.ro I Dans 1" « Homme de génie (i) », M. Cesare Lombroso a soutenu que le génie était une « psychose dégénérative du groupe épilep- tique (2) » , en se basant en particulier sur de nombreuses analogies qui existeraient entre les aliénés et les hommes de génie et sur le caractère spécial de l'inspiration. M. Ch. Richet, dans la préface de l'ouvrage de M. Lombroso. insiste sur certaines analogies qui existeraient entre l'aliéné et l'homme de génie. Il admet chez tout homme adonné aux œuvres de l'esprit deux lorces distinctes : la force créatrice ou puissance d'in- vention et la foi^ce critique ou puissance de jugement, qui tempère la première; la seconde manquerait aux fous. Nous adoptons pi'ovi- soirement cette distinction. Pour M. Richet, les conceptions du génie sont étranges, bizarres, imprévues. Eh bien, nous pensons absolument le contraire pour les sciences (3) : une fois la découverte faite , il arrive bien souvent que l'on s'étonne de n'y avoir pas songé plus tôt. C'est l'histoire de l'œuf de Colomb ; ce sera le cas des rayons Rœntgen , de la photographie . (i) Traduction Colonna d'Islria. désignée jdus loin jiar IIG 1880, pour l'édition de i88ç), Paris (Alean) et IIG K)a'3 pour celle de Ufoi, Paris (Reiinvald). Nous ne visons pas ici la troisième partie de l'ouvrage de Lombroso, partie spéciale aux aliénés. (2) HG 1903, p. 557. (3) Comp. en général Max Nordau, Psychophysiologie du génie et du talent, trad. Dietrich, Alcan, 1898. ED. MAILLET. — SUR l'hOMME DE GÉNIE, DE M. LOMBROSO IIqS de la coulisse de Stephenson, de la chaudière tubulaire de Marc Séguin, etc. Enfin nous pensons , avec Buffon , que le génie scientifique est une longue patience, au moins dans la plupart des cas (Pasteur, par exemple). Même chez les génies précoces, les découvertes ont été précédées de longues études, d'une longue pi^éparation , d'essais infructueux (Ampère, quadrature du cercle) : les cas contraires, exceptionnels d'après nous, se rapporteront souvent à des décou- vertes dues à un hasard heureux. Pour nous, l'homme de génie ou de talent est un prég-énéré (i). Il a une conscience ou une connaissance relative de phénomènes dont Ihumanité n'aura une connaissance ou une conscience plus ou moins complète que grâce à lui ou plus tard. Si, sur un point, le jugement, la force critique du génial n'est pas à la hauteur de sa faculté inven- tive (soit pour le raisonnement, soit pour l'observation), il pourra mal expliquer ces phénomènes; ses disciples ou ses commentateurs pourront ne pas bien comprendre ; la langue dont il dispose pourra même être impuissante à traduire les manifestations de ces phéno- mènes perçues par l'homme de génie. Il y a plus : c'est une condition inhérente à la science de procéder seulement par appi'oximations successives. Les erreurs, au moins partielles, y sont inévitables à chaque instant, et il doit s'en produire une certaine quantité ; beaucoup d'entre elles aident au progrès scientifique en pi^ovoquant des réfutations ou des corrections basées sur des expériences ou des raisonnements nouveaux et contribuant à la manifestation de la vérité. Dès lors , j)our juger un homme de génie scientifique au point de vue de ses erreurs, il faut absolument nous placer à l'époque où il vivait et dans son milieu, et savoir si ces erreurs n'ont pas été utiles, ou même partagées par ses contemporains. C'est ce que ne fait pas toujours M. Lombroso (comp. plus loin, p. 1204. note (2)). Nous allons essayer ici de présenter quelques résultats de statis- tiques ou des observations qui viennent , croyons-nous , à l'encontre de la théorie de M. Lombroso, au moins en ce qui concerne les hommes de science, et surtout les mathématiciens (mathématiciens purs, physiciens, astronomes, ingénieurs, etc.). Nous ne pouvons guère développer toutes nos idées , le temps nous manquant actuel- lement : nous espérons y revenir plus en détail ultérieurement. (i) M. Richet (HG 1908, p. 8 de la préface) l'appelle un progénéré. II94 ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE Les conclusions de notre étude seront les suivantes : I" La génialité, en France, est en rapport direct avec le déve- loppement local de l'instruction primaire et de la haute instruction scientifique ; 2" La prétendue psychose du génie de M. Lombroso n'est autre, chez les hommes de science , que la faculté inventive qui se retrouve avec plus ou moins d'intensité et de variété chez beaucoup d'hommes instruits, en particulier chez ceux qui ont une sérieuse instruction mathématique (|)oly techniciens , etc.); 3° Le savant, même de génie, est sujet aux mêmes infirmités à peu près de toute nature que les autres. Gela, joint aux lois connues du hasard, suffit à expliquer presque tous les faits mentionnés dans r « Homme de génie », de M. Loml^roso. II SUR LA RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DE LA GÉNIALITÉ EN FRANCE (l) Le génie dans les sciences est un cas particulier de la faculté inventive. Un homme qui fait une ou plusieurs découvertes très importantes est un homme de génie : on pourra encore l'appeler de ce nom ou dire qu'il a plus ou moins de talent s'il fait un nombre assez grand de découvertes d'une certaine importance. Une découverte importante peut être le résultat d'une série d'in- ventions moins importantes . même d'un grand nombre de petites inventions : le g-énie peut donc être collectif. Bien plus , il est rare qu'une découverte importante ait donné lieu à des applications étendues sans beaucoup de perfectionnements importants ou accessoires dus à de nombreux concours : le génie est donc soiwent en partie impersonnel ; il est susceptible de divi- sion. Ex : applications de l'électricité et de la vapeui', travaux publics, etc. (i) Jacoby (Etude sur la sélection, Paris, Germain-Baillière, 1881) avait déjà trouvé, dans une étude détaillée et très scientifique, un rapport entre la génialité, la densité de la population et la proportion de population urbaine. Nous nous en occuperons ulté- rieurement en reraar([uaut, dés à présent, que le mode d'argumentation dont il lait usage n'est employé, dans les mathématiques élémentaires, contrairement a ce qu'il afjinne (p. 455) que i)our montrer la fausseté d'une hypothèse et non son exactitude. Jacol)y peut étal)lir nettement que le développement de la génialité et celui de certaines afl'ections mentales sont à la lois des conséquences du progrés de la civilisation. Mais cela ne prouve rexistence d'aucun rapport direct entre la génialité et ces affections qui peuvent être dues à des causes distinctes. Il faudrait mettre d'ailleurs en regard les conséquences favorables et j^rédonii liantes de la civilisation (progrés île l'hygiène et de la santé publique par exemple). (a) Comp. HG igoS, p. 166 et suivantes. ED. MAILLET. — SUR l'hOMME DE GÉNIE, DE M. LOMBROSO II()0 La faculté inventive se présente dès lors chez beaucoup d'indi- vidus avec tous les degrés possibles de puissance. Les mêmes carac- tères de cette faculté, plus ou moins accentués, se retrouveront parmi eux. Cette faculté ne pouvant guère se développer et s'exercer que grâce à une forte instruction, et, réciproquement, la seconde ne pou- vant en général s'acquérir sans que la première existe plus ou moins, toutes deux se rencontreront en même temps. 11 y aura entre les hommes instruits ou les hommes de génie ou de talent certains caractères communs. La génialité et le talent seront d'autant plus développés chez une race quelle sera plus instruite. C'est là un lieu commun, quand on considère, par exemple, de grandes nations. La même loi devra exister dans les diverses fractions dune race ou d'une nation : nous allons le vérifier suffisamment pour la France. Nous donnons ci-dessous un tableau (tableau i) indiquant : 1° La classification des départements français d'après le nomljre de Polytechniciens qu'ils ont produit de 1795 à 1891 (i) ; En regard : 2° La proportion 0/0 des conscrits sachant lire et écrire en 1878 (2); 3° Le numéro d'ordre assigné par M. Lombroso, d'après Jacoby (loc. cit.), au département, suivant le nombre d'hommes de génie en 100 ans, et une idée approximative de ce nombre (3). (i) Extrait de la statistique de M. F. de Montessus de Ballore, Journal de l'École Pplyt. ■63« cahier, 1893. Nous aurions bien voulu posséder une statistique analogue pour l'Ecole normale, l'École centrale et la licence es sciences par exemple ; à défaut, nous avons dû nous contenter de celle des Polytechniciens, qui paraît suffire à notre but, (2) Annuaire statistique de la France (1878) ou la France illustrée de M. V. A. Malte- Brun (statistique morale). (3) HG 1903, p. 183 et pi. VIII, XI et XII. II96 ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE rj^ S!^ z 0 H ^^^ < 0 CQ > a OS 4> u •i-i ty^ 0 ca •IH 0 a 0 « (osoaqra oq) *> >> suB 001 lia Q r-^ es A Q 0 0 0 0 0 0 0 0 ,^ 0 C<1 m c ire ire 0 00 c 0 ^ siuB}TqBii,p ooo-ooo-i jBcI a.iquiou oo ap »? 0 »re 0 0 iC h- ^H s^i 7 Cl CN r^ ^ 8 A A>^ aATjBuiixoaddB 1— 1 CP5 •;3 MOIXaOdOHd d . to „ — --■ ■fï 0 (» (oso.uiuio^) Q) 0) ^naiB^ ap no auiaS ap ^H 0 ' ^-v h- 1 0 r^ iO xre vt C «:: 0 0 Ci en vrf fO 0 s a saniraoqjp aaqraou si •^3- c^ CT ro fo -H t-H -« Vf cuit Fra sajcÏBtP Q> d ^ S /»^ /-s . r^ '^ "^^ '^ ^ ^ ' r-^ « Cl tO iC w M V? m" - ' -" - ^ Cl 1- Q ■vr w +» .2 !X. c; 00 GO Ci C^ Ci Oi o-^ i-^ Cï c; OD et •i-i +j 0/0 KOIXHOdOHd .2 si ' el ^^ ^ a 1— 1 1— 1 (u a> S}iiBiiqBq 000-001 .iBcI -d TS (Ui8i-S«:iJ VI '^ r-v r^ c^i ^1 ic vr r^ CN C C C: X 00 _CT_ 0 Z ï c; r>. i^ '-C w ^ w îO vr vr vr vr 0 V siiaioraqoa^ifiod sap pH S anaiMOK d ^r Cfj iî a • A 0 • 1— 1 'S 4J 0 d OJ • » (Q 'fi t. > • • d t Ô c; &^ M ^ •i-i . 'S d •r-l d os Q = i: ■« (M •o ?i — c; vrr 00 if; X t"^ v-r r^ en LO ►- vr in v-l- VT es o Oj .'v^ ^^^ . -H h^ X 00 0 L-* l^ r^ C^X X 00 X Cv r^ X ?-. O osoicmfO"^ c:x es «o r>» Cï M X vr es •-C eo vr- fr^ rNCj;i>.xxxx iSt-. co en X r% r^ r^ r^ vr vr vr Vf vr o »n m in o fn J^^ f. r^ o O m m >n m vr vrvrvrvrvrvrvrvrvrvr cocococococneocoeocn *— I as o :, 2.^0 ■ es O •^ r^ X es o rt i M ^ hrH 2 a; es I o bjj u o s =! o fl cS u O aj es s o =3 -: eu O *^ 0; Ô ï) O C - 'è '3 .ï S es "m mor^XCiO '-l'^ifn vt" >'*' ^i esescscsoiro eorôrnror^r^ ^^ X C ro vr S, o - es V- vr II98 ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE ( 0 s 0 .1 q ni 0 T ) SUT! 001 IM -^ — ^ ^ SïUB-nqBq.p ooo-ooo-i _ 0) i.o 1.0 0 c 10 ira 0 C M 0 ira ira ^ 0 ira ira Cl 0 ira ira r^ jBd 9jqniou 9D ap ^-' V 0 C iO 0 à c ira ira t^ ira ira ira v/ c^i V ira es V ira ô cq ira a.vi^BuiixojddB XLOIXHOdOHd (osoaqtno7) • ïiiaiEI ap no siuaS ap saxntuoq.p aaqraou o\ ri ce 0 « GO vi- -x- vr OC' ""5 X r-. vr sa.ulB.p anaao.a "M gigi ua aaijaa ^a a.iii uiBqaBS sîijosuoa sap 0/0 x[oixaodoad n Cl vr v-i- r-v f^ Ca r^ 00 r^ f<> VI- c-N ira r^ vt ira oc ira ira *o o X '>c X 1^ X t^ i^ ira c^ 0 i>> o r^ Cl c; v-r r-v Cl r^XX oc'MraO'iDOOD s'tUBjiqBq ooo'ooi JBd (1681-S6C1) „ suapiTiqoa^iioj sap '~ aaaiMOM Cl Cl Cl - - s c ce fO CD ro co m CD Cl CiX X X X r-. r-. -o -0 0 Cl d es Cl Cl Cl d Cl Cl a 0; û I ^ - - ^ î^ •'"- = .' r. w ci C r^ V— ira :c r^ X C. C — ci V— V— vr vr vr vr v— ira ira ira ira ira 1; --T l^ X ira ira ira o - ^ u ;:; S o ED. MAILLET. — SUR LHOMME DE GÉNIE, DE M. LOMBROSO IIt)9 w o ^ o o o o .g O 5 0 o i-O r> r^ ic .? o m ic c^ V PI CT PI PI iX PI PI V'à VV rt X o 5j IC ÎC' iO 'Pl Q V3- T> Pl Pl V- Pl l^ --C VT Pl _^^ '"— r>.X "^:g T. O r" « S < 75 0/ 00 vr c» r^ C; r^ xi O X^ CA f^ pf V— Ci "1 "^ X r» m w Pl m r-. c-nX X X _C5 o ÇA X ift M Pl ^ Ci •o O (S ift m m o p^ fo PI Pl 01 Pl Pl Pl PlPl" -<--XXXXOI>>«0»0 PlPlPq PlpqhHW-1-HM/-IWM »0 VT p^ Pl r>, o M Pl '^ >«' W '1 MBN ^ i ■i'f I ï = ;; 72 -< 'i5 -< C S ^ VT o -o r^ X Ci C w ^2 %2 te '-C ;C t^ O S < V. xn c 1 T o ^ X ^ ■r OS CJ **- — ^ < /^^ X o X X J -.î^ U u ^ M Pl p^ VT n "sO r-. X Ci O i~> i^ r^ r~^ i>> r^ r> r> i^ Xi c O — Pl X X 9 •>. ii ri o r^ v-r X X o I rj _^ rt — X 1200 ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE Dans un autre tal>leau (tableau II) , nous donnons les moyennes arithmétiques pour chaque groupe de lo départements du tableau I. Elle sont moins exactes que des moyennes géométriques, mais elles donnent néanmoins déjà des résultats assez voisins. Les moyennes ont l'avantage de faire disparaître les anomalies qui peuvent être dues à des causes locales (ou des erreurs de détail). Tableau II donnant les moyennes arithmétiques pour chaque groupe de 10 départements du tableau I (I) (2) (3) (4) I-IO 80,3 91,28 i5,4 II-20 49.0 84,00 21,2 2i-3o 43,4 81,81 28,8 3i-4o 35,7 80, o3 38,8 4i-5o 3i,3 74.22 47'2 5i-6o 27.3 74,58 56,2 61-70 23,3 75,14 57,5 71-80 1:^9 73.22 55,1 8 1-85 12,2 68,18 jj ri ao 70 \ 1 \ 30 * •-> \ 4v \ W. \ zo 10 r* - C 10 20 38 <0 50 60 70 80 Polytechn/e/ens Fio. I. — Relation graphique entre les colonnes 2 et 4 tin tableau. Ce tableau II et le graphique annexé montrent immédiatement le rapport intime et très net qui existe entre le nombre de Polytechni- I ED. MAILLET. — SUR L HOMME DE GENIE, DE M. LOMBROSO 1201 ciens et le rang de génialité décroissante : plus ce nombre est faible et plus le rang est élevé. Il y a mieux : examinons la colonne 5. Les 19 premiers départements ont au moins 5o hommes de génie par 1. 000. 000 d'habitants, les 42 premiers au moins aS ; les seuls dépar- tements qui aient plus de 200, i.5o, 100, ^5, 5o génies sont dans les ï'j, 28, 4o» 74' 79 pi'emiers (sur 85 départements classés). Mieux encore : lexamen des colonnes (2) et (5) montre qu'en moyenne il doit y avoir presque proportionnalité entre le nombre de Polytech- niciens et le nombre de génies. Il existe un rapport en partie analogue dans la moyenne entre le génie et l'instruction primaire. Ces résultats sont importants : d'abord ils vérifient notre théorie antérieure et tendent même à établir un rapport entre le génie et l'instruction primaire : un département produit d'autant plus d'hommes possédant une haute instruction que l'instruction , même primaire, y est plus répandue ; et , comme les hommes de génie dans les sciences se recrutent parmi ceux qui ont une haute instruction, il n'est pas étonnant que la génialité soit fonction croissante de l'ins- truction primaire (i). Mais ce n'est pas tout : M. Lombroso, après Jacoby, a étudié cer- tains rappoi'ts qu'il pouvait y avoir en France entre la génialité et diverses circonstances géographiques ou politiques : altitude et nature géologiqvie du sol, tendances républicaines. Sans entrer dans le détail, on peut affirmer que les mêmes rapports existeront entre ces circons- tances et le développement de l'instruction primaire ou supérieure. Dès lors, la relation établie par M. Lombroso entre la taille et la génialité pour la France (HG 1903, p. 187) subsiste; mais le prétendu rapport entre la dégénérescence et la taille, qui devrait s'étendre à la haute instruction et même à l'instruction primaire, nous parait une alfirmation bien hasardée ; ce serait plutôt le contraire qui serait vrai ; à moins qu'on ne soutienne que l'instruction est en général une cause ou une manifestation de dégénérescence. Nous ne pensons pas qu'on puisse le faire : il sufiira de remarquer que les progrès de l'instruction ont été accompagnés de progrès considérables de l'hy- giène et de la diminution de la mortalité, (i) Au surplus riiivcnlion est une forme particulière et très marquée de riniliativc que rinstruction, même primaire, développe: par exemple, celte dernière exerce el. Inrliiie le jug-cmenl qui intervient dans l'initiative et l'invention. (D'après M. Max jVordau, loc. cit., p. i4!), 1<' .ju.y:cment joue un rôle capital dans le génie scicntilïque : c'est la force critique de !M. t:ii. Riclict.) Mentionnons encore l'inlliience nette des centres intellectuels d'instruction supé- rieure : tous les dèparlements (sauf le Nord) où se trouve une ville île Facultés ont une j^éuialilc sui)èrieure a celle des dcparlements voisins. ■j6* 1202 ECONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE III SUR LE PHÉNOMÈNE DE BUFFON Quand un mathématicien , petit ou grand . cherche à résoudre un problème ou une partie de problème, quelle que soit sa difllculté; cruand un élève de mathématiques spéciales ou un polytechnicien se trouve, au cours d'un examen, en présence d'une « colle » de l'exami- nateur, au moment où la solution apparaît, la faculté inventive fonc- tionne Ijrusquement, sous l'influence du désir intense de trouver: une véritable décharge psychique se produit, accompagnée d'une commotion mentale plus ou moins vague ou im}>erceptible ; c'est le trait de lumière. Suivant l'importance du résultat, la peine que l'on s'est donnée pour le trouver, le tempérament de chacun, le phéno- mène sei*a plus ou moins net. C'est, pensons-nous, le phénomène mentionné par Buffon (ï) (RG 1908, p. 487). C'est encore, avec la dillérence qui peut séparer les mathématiques pures des mathéma- tiques appliquées ou des sciences d'observation, la sensation, ou mieux le sentiment vif qui se manifeste au moment de la conception d'une découverte (HG igo'i, p. 4'2). IV INFLUENCE DES PHÉNOMÈNES MÉTÉOROLOGTQUES SUR LA FACULTÉ INVENTIVE (2) M. Lombroso a rapproché l'influence qu'ont ces phénomènes sur l'inspiration du génie et sur les accès des aliénés. Pourquoi ne j)as se demander x^lus en détail si la même influence n'existe pas pour tout le travail intellectuel, peut-être, par conséquent, pour toute une série de phénomènes psychologiques et probablement physiologiques du cerveau? Auquel cas, le rapprochement fait par M. Lond)roso n'a plus rien qui doive nous surprendre, puisqu'il peut être fait pour tout le monde. C'est un fait bien connu que le travail intellectuel, même chez les (t) Nous ne Irouvcrons, croyons-nous, d'analog^ie que dans les phénomènes de l'amour charnel auxquels M. Lonihroso ne paraît pas avoir pensé, qui exisleni chez tout le monde et sont, tout comme les inventions, des actes de ^:énéralion créant tout un monde de pensées, puiscpi'ils créent des hommes. Peut-être pourrait-on trouver là encore une analogie avec un phénomène dont parle de Goncoiirl (Hd i<|(>3, p. 487). (2) Comp. HG 1903, 2« partie, chap. 1", p. i43. C'est, croyons-nous, un des passages- les plus curieux ci les plus intéressants de l'ouvrage. ED. MAILLET, — SUR l'hOMAIE DE GÉNIE, DE M. LOMBROSO I203 écoliers, exige toute une série de conditions spéciales, par exemple un silence suffisant, la tranquillité, une température modérée : il s'accommode mal du froid et de la chaleur, comme M. Lombroso le dit lui-même (H. G. iG3). Nous croyons que la faculté inventive (peut-être aussi la mémoire qui laide) y est encore plus sensible ; ainsi, prenons notre exemple personnel : au-dessous de 15" et au-dessus de ^"j environ, cette faculté fonctionne difticilement chez nous (i), quand nous sommes assis. Le froid, toutefois, l'arrête plus que la chaleur, l'incommodité qu'il nous produit étant plus grande; mais l'ellét d'une température élevée subsiste un certain temps après sa cessation. Quand nous marchons, les deux limites de température sont naturellement abaissées. I^lles sont moins resserrées pour le travail intellectuel exigeant moins d'invention, et surtout de l'expé- rience (examens par exemple). Admettons qu'il y ait dans une même région ou une même nation une température moyenne t particulièrement fovorable à la faculté inventive et que celle-ci fonctionne d'autant mieux à chaque instant que l'on est plus voisin de cette température. Pour une valeur con- venable de t, on arrive à voir que la faculté inventive doit mieux fonctionner vers avril-mai et septembre, comme l'indique M. Lom- broso (HG 1903, p. 145 et pi. VI). Mais on aura des conclusions analogues pour le travail intellectuel, quel qu'il soit. Nous pensons encore que les influences du vent, de la j)ression, de l'humidité, ne sont pas spéciales aux génies et aux aliénés. Finalement, ici encore comme pour les §§ II et III, tout ce qui s'applique au génie s'applique dans de larges limites à tout travail intellectuel. SUR UNE PARTIE DE LA METHODE DE M. LOMBROSO Dans une partie de son œuvre (2""^ et 4""® partie de HG 1908 par exemple), M. Lombroso procède de la manière suivante : il énumère les hommes de génie qui ont eu un défaut, une maladie, une infir- mité, une faiblesse, une tare à un moment quelconque de leur existence; des faits analogues se retrouvant chez certains aliénés, il conclut à un rapprochement. La science ne permet j)as, à notre avis, cette conclusion, application exagérée du principe des coïnci- (i) Les moyens arliiiciels pour établii-, dans les appartements, une température con- venable, sont souvent plus ou moins imiiarlaits. 12o4 ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE dences, attendu que ces faits se rencontrent aussi cliez tout le monde, et probablement avec une fréquence comparable (cas de Darwin, par ex., HG iQoS, p. 555). Un grand savant, au point de vue physiologique, et même au point de vue psychologique pour ce qui ne touche pas à sa science , est un homme comme les autres , ou tout au moins un homme semblable à tout ceux qui ont une carrière libérale d'ordre scientifique. Si c'est un homme de cabi- net, il aura sur beaucoup de points une vie semblable à celle des employés de bureau. A priori on doit donc retrouver chez le génial une série d'infirmités inhérentes aux carrières libérales, aux emi)loyés de bureau et même à tout le monde. Si l'on prenait une catégorie quelconque d'individus, les professeurs, les ingénieurs, ou même les pâtissiers, par exemple, et leurs employés, on trouverait aussi bien des analogies avec les aliénés. La plus grande partie de l'ouvrage de M. Lombroso prouy^e exclusivement une chose au point de vue scientifique : l'homme de génie n'échappe pas aux maux communs à l'humanité ou à des catégories très étendues d'individus (carrières libérales). Quels que soient les faits cités, la méthode énumérative de M. Lombroso ne peut prouver davantage. D'ailleurs, l)eaucoup de ces faits sont sans doute exagérés et demanderaient à être contrôlés d'un peu plus près ou discutés (i), ou encore ils pourraient être jugés autrement. L'humanité est en général beaucoup plus indulgente que M. Lombroso dans ses appré- ciations et, à cet égard, c'est, nous semble-t-il, l'opinion commune qui fait loi , parce qu'elle représente le bon sens (2). (i) Ain^i, quand il file \n\ auteur, est-il bien toujours tenu compte des a))us ou des imperfections de la t'oraie littéraire et des ligures de rbélorique, hyperbole, méta- phore, style familier, etc. (2) En terminant, nous mentionnerons comme très contestables, au moins an point de Aue de la forme où ils sont présentés ou des conclusions qui en sont tirées, un certain nombre de faits relatifs aux hommes de science. HG 1903, p. %, Erreurs scientiliqucs de Bacon, Galilée, Biot, Darwin ; j). 40, Rêves mathématiques de Newton et même peut-être de Cardan; p. 49 et IIG 1SS9 p. 40, passion malheureuse d'Ampère, joies d'Archiméde, Xewton, Gay-Lussac, Davy : HG \\y\i. ]>. 55, distractions de Newton, Ampère, Babinet (comp. Bt\'ue de l'hypnolisiuc de Ih'-rilh>n. i5« année, i«oi, pp. 219, 270. 36.5): HG 1889, p. 3(1, idées d'Aristote sur la lisne droite, (pii nous paraissent coniiiréhensibles : HG 1903. ]). 64. Ecritures et parai)lies: HG 1903. p. ;)8, lon"-évilé: HG u,)t)3. ]>. 4;i, prétendues absurdités folles de Newton, Ampère et Pascal; HG 1903, p. 48^. chap. m : rins])iralion a été interprétée autrement plus haut: ce cha- pitre ne vise <'//W7(Vi7;ic/i/ (|ue el ilc Paris PRÉFACE A L'ÉTUDE DU PROBLÈME DE LA REPOPULATION — Séance du S août — L'opinion publique aime les formules toutes faites ; elle les accepte sans les examiner de très près ; on se les passe de bouche en bouche et la conversation s'encombre ainsi de lieux communs qui n'ont pas toujours commencé par signifier quelque chose et qui finissent par ne plus rien vouloir dire du tout. C'est ainsi que depuis quelques années on parle beaucoup de dépopulation. Qu'est-ce à dire? Que la France se dépeuple ? Non point ; chaque dénombrement révèle un excédent de population sur le précédent. Alors, de quoi se plaint-on? De ce que cette augmentation de la population est chez nous moindre que chez les peuples qui nous entourent. C'est exact. Mais y a-t-il lieu de le déplorer ? Il nous semble qu'il y a, dans cette préoccupation du nombre, un symptôme d'une maladie qui restera une des marques caractéris- tiques de notre époque : la manie du record. On veut atteindre le chiffre pour lui-même, pour l'orgueil de l'étaler aux yeux des voisins humiliés. C'est là un sentiment qui nous fait sourire quand nous le découvrons chez le sportsman ; que les statisticiens et les écono- mistes , gens graves s'il en fut, fassent leur examen de conscience : ils n'en sont pas exempts. D y a autre chose dans l'esprit de repopulationniste, il y a un sen- timent plus respectable à coup sûr , mais dont nous ne croyons pas qu'il serve de lien indispensable entre la cause avouée et le but désiré. Nous voulons parler du souci de la défense nationale. Chez beaucoup, il glisse vers l'hypnotisme de la grandeur guerrière qui conduit à la folie des gros bataillons. Si c'est pour édifier l'empire des conquérants, pour cueillir les lauriers d'un moissonneur de gloire sanglante que vous voulez des hommes, nous serons toujours trop; si c'est jjour défendre l'intégrité de notre territoire, de nos traditions, de notre liberté, nous sommes assez. La force n'est pas uniquement dans le nombre, elle est chez les mieux armés pour la lutte : l'expérience est faite ; il serait temps d'en profiter. I206 ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE Les mieux armés pour la lutte, ce sont ceux qui traînent après eux le moindre déchet, qui ne s'encombrent pas de non-valeurs, ceux qui ne connaissent pas les bouches inutiles ; ce soiit les robustes, les bien nourris, les bien vêtus; ce sont les peuples qui agissent dans leur économie sociale comme le bon père de famille dans son économie domestique ; ceux qui proportionnent leurs dépenses à leurs recettes, leurs charges à leurs revenus, leur développement numéiique à leur développement économique . Combien de fois n'entend-on pas les gens se plaindre de l'encom- brement qui se produit dans toutes les professions? A côté de la ruée aux emplois, il ne faut pas perdi'e de vue l'excédent de bras que le machinisme industriel ne permet plus d'utiliser ; si les campagnes se dépeuplent, c'est que la main-d'œuvre humaine y est plus que suffi- sante; les colonies reçoivent au moins autant de colons que leur état actuel leur permet d'en faire vivre. Où donc manque-t-on d'hommes? Le sort des peuples à natalité intense n'a rien d'enviable : il y a plus de bouches que de pain, les parts sont trop petites, la misère devient endémique et . somme toute , la proportion entre les chilTres de la natalité et l'accroissement de la population révèle une grosse perte. Nous perdons 3o o/o de nos enfants avant ao ans. Des peuples dont les chiftres de natalité sont supérieurs aux nôtres en perdent 4o o/o. Et chez nous, ce déchet de 4" o/o est celui des classes pauvres les plus prolifiques. La bourgeoisie conduit 80 0/0 de ses enfants à l'âge d'homme; mais aussi, quand on s'y olfre ce qu'un poète a a ap})elé « le luxe d'un enfant », c'est qu'on a tout prévu et c'est qu'au lieu de jeter dans la vie une larve vouée aux pires hasards, on a préparé l'existence d'un être auquel on attribue une valeur. Le laboureur d'autrefois semait à la volée : poussait qui pouvait; les méthodes rationnelles assurent plus de récolte avec moins de graine. La récolte utile, la moisson qu'il faut désirer, c'est celle d'hommes faits, bien portants, lîien édiiqués. bien armés pour la vie : ceux-là ne sont pas le fruit d'une semaille prodigue, ils sont le produit d'une sélection. Mais nous sommes tranquille, car nous avons vu l'inutilité de l'effort des partisans de la repopulation à outrance. C'est qu'en effet ils commettent avec ensemble une erreur dont il faudra bien qu'ils reviennent, c'est qu'ils s'attaquent à cet élément mystérieux, intan- gible, essentiellement libre, la génération. Tout système ayant pour but d'influer directement sur la natalité est destiné à se lieurter à des impossibilités ou à tomber dans le ridicule. Quels sont les moyens proposés? Les uns i)rétendenl. ])ai' des lois L. GUIFFARD. — ETUDE DU PROBLEME DE LA REPOPULATION' I2O7 fiscales, surcharger les célibataires, les ménages insuffisamment prolifiques, et les obliger ainsi à une multiplication forcée, dont le produit ne paraît point voué à un sort envialile. Mais, outre qu'il n'y a pas toujours de la faute des gens, quel gouvernement oserait Imposer à ses sujets une contribution assez forte pour dépasser la <îliarge que serait pour eux un nombre d'enfants déterminé? Cette façon de demander aux gens « la bourse ou la vie » a été la première en date des propositions repopulationnistes : son procès est clos depuis longtemps. Quant au système du dégrèvement proportionnel inscrit dans le projet d'impôt sur le revenu qui sera présenté aux Chambres pour 1904, il est inspiré par un esprit d'équité qui n'a rien -de commun avec celui des promoteurs de la fécondité forcée. D'autres, dont il est difficile de saisir le raisonnement, parce quil pèche par la base, ont proposé ce que l'on a très improprement appelé « le rétablissement du droit d'aînesse » — ce fameux droit d'aînesse ayant disparu depuis les temps obscurs de Jacob et d'Esaû — et ce qui n'est autre que la liberté de tester. Si le législateur a limité le droit de tester, en cas d'existence de descendants, s'il a Toulu assurer à chacun des enfants un minimum de la succession des parents, c'est qu'il lui a semblé qu'après avoir imposé la vie à des êtres qui ne la demandaient pas, il serait monstrueux de leur refuser, de propos délibéré, les quelques avantages correspondants. Il lui a semblé que les parents devaient racheter l'imprudence qu'ils avaient commise en procréant des enfants, par l'égale distribution entre eux du bien, tout aléatoire, qu'eux-mêmes avaient pu retirer de la vie. La liberté de tester, bien qu'elle doive être limitée par le sentiment de justice qui a protégé l'héritier réservataire, semble cependant soutenable en soi et paraît devoir faire partie du faisceau des libertés auxquelles a droit tout citoyen; mais nous ne voyons j)as quel pourrait être son effet au point de vue du relèvement de la natalité. On dit et l'on répète que le bourgeois ne veut pas avoir beaucoup d'enfants, afin d'assurer à chacun la part plus grosse — ce qui est souvent vrai — et l'on pense que, s'il avait la liberté de tout donner à l'un et rien aux autres, il en procréerait, de ces autres, tant qu'on ne saurait plus où les mettre! C'est avoir une bonne opinion du sentiment paternel ! L'indignation générale repous- serait une semblable proposition, si jamais elle prenait corps devanl une assemblée délibérante. Il reste un dernier moyen, tout nouveau et déjà usé par l'emploi qu'en ont fait les humoristes de la plume et du crayon et les auteurs de revues de fin d'année : la décoration des mères de familles nom- I2o8 ÉCONOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE breuses, l'Ordre du Mérite Maternel. S'il est vrai que les Finançais, ont l'amour des décorations, encore doit-on leur rendre cette justice qu'ils ne les apprécient qu'à la condition de les avoir obtenues par le minimum d'efforts. On a pu voir cependant des gens s'occuper d'agri- culture pour obtenir le Mérite agricole; d'autres a[)prendre l'ortho- graphe pour être dignes des Palmes académiques; d'autres se con- duire en héros pour mériter la Croix d'honneur : si l'on instituait l'ordre du mérite des mères de famille, on courrait grand risque de ne le décerner qu'à celles qui ne l'auraient pas fait exprès. Il faut en prendre son parti ; non seulement on ne saurait relever la natalité par une intervention législative quelconque, mais encore la natalité est destinée à baisser. C'est le résultat d'une loi naturelle qui a été observée dans toute l'échelle animale : plus les espèces sont perfectionnées, moins elles sont prolifiques ; c'est qu'aussi elles sont plus résistantes et la conservation de l'espèce s'assure ainsi, chez les animaux supérieurs , non plus par le nombre , mais par la qualité. Conduisons-nous en animaux supérieurs et soignons notre résistance avec notre qualité. C'est là qu'est la solution du grand problème de la repopulation : naître peu, vivre beaucoup, diminuer la })roportion trop forte de ceux qui ne font qu'apparaître, de ceux dont le passage est court, de ceux dont le séjour est inutile. La protection de l'enfance, l'hygiène de la jeunesse, la prévoyance pour l'âge mùr, tels sont les moyens cpii nous semblent le plus efficacement destinés à augmenter la popu- lation, non par la procréation en masse de ceux qui ne sont pas, mais par la conservation de ceux qui sont, les seuls qui ont droit à la vie et qui ont droit à la vie la meilleure possible. Il nous semble que tout effort tenté dans une autre direction est frappé d'avance de stérilité. Nous n'avons voulu faire qu'une préface, indiquant les éléments qui nous semblaient devoir être éliminés. Quant au reste, nous lais- sons le sujet à traiter aux hommes compétents dans chacune des branches intéressées à la question. D'^ COURJON & L. GRANDVILLIERS. — ACCROISSEMENT DE LA POPULATION I20() M. le D^ COURJON Directeur de rÉlablissement médical de Meyzieux ET M. Louis GRANDVILLIERS Directeur de rannexe Médico-Pédag-ogique de lÉtablissemciit médical de Meyzieux DES PROJETS AYANT POUR BUT D'ACCROITRE LA POPULATION ET DE L'INTERVENTION DU LEGISLATEUR [6i4i] — Séance du 8 août — Avant que soit abordée l'étude de ce sujet tout d'actualité : « Les projets ayant pour but d'accroître la population et de l'intervention du législateur », nous demandons la permission de soulever une question préjudicielle. Avant de songer à accroître le chiffre de la population de notre bien-aimée Patrie — ce qui nous paraît urgent — on pourrait se demander si, dans l'état social actuel, toutes les forces vives de la nation sont mises en pleine valeur. Nous pouvons, à cette question, répondre par la négative. En 1901 , au Congrès d'Ajaccio, nous avions l'honneur de vous entretenir des enfants anormaux. Nous désirons revenir sur le sort fait à ces malheureux. Nous tenons, devant vous savants, devant vous philanthropes, à venir dire que, tant que la France n'aura pas su ou pu assurer à tous ses enfants existants l'intégral développe- ment de leurs facultés productrices, elle n'aura pas plus à se préoc- cuper d'accroître son capital-hommes qu'un citoyen riche, posses- seur de capitaux improductifs, n'aurait besoin de chercher à augmen- ter sa fortune. Il existe un grand nombre de non-valeurs sociales , d'intelligences en friche , pour lesquelles nous demandons les moyens de se déve- lopper et de devenir des valeurs , des intelligences cultivées , venant augmenter le capital social. Restera-t-on longtemps encore sourd à notre appel? Nous ne le croyons pas, car déjà cet appel com- mence à être entendu et compris. Déjà il s'est trouvé des Fran- çais, des patriotes conscients qui, comme nous, jugent que c'est une honte pour la France de se laisser distancer sur le terrain de l'assis- I2IO ECO.XOMIE POLITIQUE ET STATISTIQUE tanee et de l'éducation des enfants anormaux; c'est une honte et une maladresse ; c'est une mauvaise action de ne pas porter secours à ceux qui peuvent être sauvés ; c'est un mauvais calcul de ne pas utiliser toutes les forces vives de la nation. On nous objectera que les budgets d'assistance sont limités, que leur élasticité a des bornes et qu'on va au plus pressé , ne pouvant subvenir à tous les besoins. Soit. Mais ne serait-ce pas un acte de bonne gestion des deniers des pauvres que de faire donner l'éducation pendant quelques années à des anormaux indigents et, suivant l'admirable programme tracé par Séguin : « De les rendre capables de devenir des hommes utiles, fût-ce « dans les positions les plus humbles, dans les emplois les plus « modestes et les plus simples ; de leur donner la capacité de faire « un travail dont le produit compense leur consommation. » Cela vaudrait mieux, au strict point de vue économique. |C{ue de les assister leur vie durant ; cela vaudrait mieux que d'imposer aux contribuables les charges qui incombent aux budgets des tribunaux et des maisons de répression par suite des écarts de conduite de ces malades ; cela vaudrait mieux que de laisser ceux-ci compromettre la sécurité sociale en les abandonnant à des impulsions perverses auxquelles ils pourraient être mis en état de résister. Nous ne voulons pas abuser de votre bienveillante attention ; à tous ceux d'entre vous que ces quelques paroles auraient frappés, nous nous ferons un plaisir d'adresser sur leur demande les bro- chures dans lesquelles nous avons traité tout au long la question que nous nous sommes bornés aujourd'hui à soulever, à poser. A tous ceux qui voudront bien nous faire l'honneur d'une visite, nous ferons constater de visu les résultats qu'on peut obtenir avec les anormaux. Et, pour conclure, nous vous demanderons de reprendre une fois de plus les vœux que divers Congrès ont déjà émis sur notre demande : Le Congrès émet le vœu : 1° Que l'éducation et l'assistance des anormaux soient rendues obligatoires ; 2° Que les pouvoirs publics votent les crédits utiles pour la fonda- tion dasiles-écoles interdépai'tementaux ; 3° Que, transitoirement, l'Etat, les départements et les communes inscrivent à leur budget les sommes nécessaires pour placer les en- fants anormaux peu fortunés dans les asiles-écoles privés existants. J.-B.-U. CASTAIGNEÏ. — ENSEIGNEMENT DE LA DECORATION 121 1 M. J.-B.-U. CASTAIGNET Artiste Peintre a Bordeaux L'ENSEIGNEMENT DE LA DÉCORATION AUX COURS D'ADULTES DE LA SOCIÉTÉ PHILOMATHIQUE DE BORDEAUX (CLASSE DES FEMMES) :45J Sèniice du S aoùl — Le décor est né avec l'homme. Il a été la pi^emière forme de l'Art. Placé au milieu de cette nature si belle, frappé par tant de mer- veilles, riionnne a vu partout autour de lui des éléments décoratifs. Irrésistiblement il s'en est emparé . il les a imités pour orner sa per- sonne, sa compagne, son habitation. Aujourd'hui plus que jamais l'Art .est devenu un besoin; plus que jamais la décoration pénètre dans nos demeures et devient un art domestique et familier. Pour favoriser cette entrée amicale de l'Art dans notre intimité, un intermédiaire précieux et charmant est là, près de nous, qui veut que notre intérieur plaise et qui nous le ménage plein de sourires et de douces pensées une fée dont le tact et le cœur opèrent des miracles d'ordre, d'élégance et de grâce : nous avons nommé la femme. A ce titre, entre tant d'autres, l'Art est essentiellement apaisant et moralisateur. Il est la poésie du foyer et nous devons lui faciliter l'accès de notre logis, lui en ouvrir les portes toutes grandes. La femme a le goût inné. Il éclate sur sa personne et dans sa parure ; il rayonne dans sa maison. Eh! bien, la femme à qui son état permet d'exercer cette faculté native, considérera comme un devoir pieux et doux de crée/' des embellissements, de composer elle-même des ornements, qui rem- j)liront son habitation dune atmosphère de charme et de paix : on ne saurait trop l'inciter à diriger vers cette noble occupation son sentiment du Beau. Sans doute elle devra faire l'étude nécessaire au développement, au perfectionnement de son goût; elle devra l'épurer, l'affiner. Sans doute, il lui faudra faire vaillamment et patiemment l'effort per- sonnel. Et que ne le ferait-elle? S'entourer d'objets, de bibelots, de riens exquis, décorés de sa iai2 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT main, quelquefois avec une science modeste, toujours avec son esprit et son cœur; vivre clans ce parfum d'art intime, familial, où flottera comme une émanation d'elle-même : quel rêve! quelle saine volupté!.,. Il en résultera toujours pour son àme délicate, tendre, élevée, des jouissances insoupçonnées, incomparables, et souvent la révélation d'un talent qui ne demandait qu'une occasion pour éclore et se manifester * Notre classe de jeunes filles, à la Société Philomathique de Bor- deaux, a justement pour objet de développer le goût par l'étude de la décoration domestique, introduction naturelle d'ailleurs aux études plus savantes de l'Art industriel proprement dit et qui y prépare normalement celles que d'incontestables dispositions autorisent à suivre cette voie. Les élèves y apprennent que l'Art a pour but l'expression du Beau, que le Beau est autom* de nous; qu'il s'agit de le découvrir, de le po?V et de le distinguer de ce qui n'est pas le Beau; qu'on y parvient par l'observation attentive et logique de la nature, cette source iné- puisable de beauté et de grâce et que l'artiste peut faire siennes cette grâce et cette beauté, en les transportant dans ses ouvrages, en marquant ceux-ci d'une note originale, d'un accent personnel. Tel est l'esprit de ce cours dont nous allons, en quelques mots, exposer le i»rogramme, en l'accompagnant des règles générales qui président à l'éducation de l'œil, qui est appelé à la délicate mission de diriger la main et aux exercices de la main qui a le devoir d'obéir à son guide avec soumission et avec confiance. Le programme de notre cours de peinture décorative est limité à l'étude de la plante (vivante. Notre enseignement comprend deux parties distinctes se faisant suite, deux degrés se complétant l'un l'autre : 1° Etudes d'après nature de la plante proprement dite; 2" Exercices de composition. * I. ÉTUDE DE LA PLANTE VIVANTE Formes; valeurs; couleur. — Éducation de Tieil; manière de regarder. — Genres; procédés. — Lois d'exécution. — Recherche du caractère dccoratit. Nous regardons une rose. Nous la trouvons belle. Par ce seul fait nous pouvons affirmer qu'elle contient des éléments de beauté. Ce J.-B.-U. CASTAIGNET. — ENSEIGNEMENT DE LA DECORATION I2l'3 sont ces éléments soupçonnés, devinés, que nous devons chercher à découvrir, pour les traduire et les révéler à ceux qui n'ont point aperçu notre beauté. Trois choses concourent à la rendre tangible : la forme, les i^leiirs, la couleur. Il y a deux sortes de formes : la forme réelle; la forme apparente. a) La forme réelle, c'est-à-dire la forme physique, ou de construc- tion, celle que voit un aveugle par le toucher, en suivant avec ses doigts les contours et les reliefs. Cette forme est une et invariable. C'est à elle que nous demanderons le secret de la constitution, de la structure de notre fleur. C'est d'elle que nous apprendrons com- ment les pétales s'attachent au calice, comment les feuilles s'insèrent dans la tige. C'est elle encore qui nous dira comment croît et se modifie chaque espèce et qui nous révélera la puissance vitale des tiges, des feuilles, des corolles, depuis la naissance du bourgeon jusqu'à son éclosion et à son conq)let épanouissement ; toutes choses expliquant la vie matérielle de la plante et dont la connaissance nous est nécessaire pour notre instruction artistique et nous ménage d'ailleurs les plus intéressantes surprises. h) La forme apparente, c'est-à-dire l'aspect spécial de la plante placée en un point déterminé et aperçue d'un autre point déterminé. Contrairement à la première, cette forme est essentiellement variable. Elle se modifie chaque fois que l'objet change de place par rapport au spectateur, et réciproquement. Le nombre des formes apparentes, ou aspects, est donc illimité. C'est cette infinité de formes, c'est cette mine inépuisable que nous avons à notre disposition pour y chercher la beauté. C'est là que nous choisirons les attitudes gracieuses, les élégantes souplesses, les mouvements simples , aimables , exprimant à la fois la vie et les physionomies caractéristiques et décoratives de notre modèle. C'est à cette source que nous puiserons nos idées et nos inventions. Mais, prenons bien garde! A notre insu, une lutte va s'engager entre notre onl qui voit la fleur telle qu'elle apparaît sous l'aspect spécial que nous avons choisi et notre esprit qui, ayant plutôt conscience de la forme réelle, tend à lui donner la prépondérance. Tout en constatant que la forme apparente qu'il voit est une con- séquence de la forme réelle, l'œil doit bien se convaincre qu'il voit exclusivement une des formes apparentes et nullement la forme réelle que la pensée ou le toucher seuls peuvent percevoir. Qu'il ne se laisse donc pas aveugler, ou, plutôt, qu'il voie par lui- j2l4 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT même, et non par lintermédiaire du cerveau. Tandis que la forme réelle lui présente des pétales identiques, il doit se rendre compte que ces pétales, construits semblablement par la nature, présentent néanmoins des aspects très divers, par suite de leurs positions respectives. L'un paraît dans toute sa longueur, l'autre ramassé sur lui-même par l'effet du raccourci; tel est infléchi ou replié; tel autre se tord en hélice, ou se roule en cornet; je vois celui-ci large suivant sa face, celui-là mince suivant son profil; cet autre, vu de trois quarts, présente une forme inattendue, innommable, variété infinie découlant d'une forme invainable, la forme réelle, qu'on doit toujours pouvoir deviner dans la multitude des aspects, sans que cette variété en soit diminuée. Quand l'œil sera suflisamment renseigné sur le sujet, qu'il l'aura observé . qu'il le saura et sera sûr de le voir par lui-même et par lui seid, la main pourra, ous sa direction, tracer l'image du modèle,, son apparence actuelle. Qu'il considère alors l'ensemble simi)lement, pour que la main traduise simplement ; qu'il néglige tout ce qui n'appartient pas à la beauté de la forme, pour que la main exprime cette beauté, sans être influencée par tel accessoire qui ne mérite pas l'attention, par tel détail que l'œil ne voit que s'il le fixe isolément; accessoire et détail qui ne sauraient concourir à la mise en relief de la beauté. C'est ainsi que la main tracera les grandes lignes déterminant l'emplacement de l'image, pour y indiquer, à leurs places respec- tives, et avec leur importance relative, les parties principales et, traduisant succinctement, mais fidèlement, ce qui distingue l'aspect actuel de tous les autres. Ce premier travail, sans lequel aucun dessin n'est possible, cons- titue l'esquisse, c'est-à-dire le canevas, la silhouette d'ensemble. * La lumière venant frapper notre modèle suivant une direction déterminée , nous constaterons la présence de parties plus ou moins éclairées, d'autres parties plus ou moins dans l'ombre, suivant l'im- portance des reliefs et des creux de la forme réelle, en un mot des degrés d'intensité très divers. Ces degrés d'intensité se nomment çaleurs. Les valeurs se divisent en lumières, ou valeurs claires, en ombres, J.-B.-U. CASTAIGNET. — ENSEIGNEMENT DE LA DÉCORATION I2l5 OU valeurs foncées, et enfin en demi-teintes, ou valeurs intermé- diaires. Mais il ne suffît pas de savoir que les valeurs sont multiples, il faut savoir les regarder et les comparer entre elles , pour attribuer à chacune son rang exact d'intensité. C'est en comparant les valeurs entre elles que nous les jugerons équitalîlement. Quand on veut comparer deux étoffes, on les rap- proche l'une de l'autre. Pouvons-nous rapprocher toutes les valeurs que présente un objet? — Oui, en les regardant toutes à la fois, en ne les fixant pas individuellement. Si nous fixions l'objet successive- ment dans toutes ses parties, nous distinguerions les détails presque aussi bien dans l'ombre que dans la lumière. Le contraste entre la lumière la plus claire et l'ombre la plus foncée serait très notable- ment amoindri et toute notre gamme serait fausse. C'est donc encore en embrassant le tout d'un seul regard, sans rien fixer, comme dans l'esquisse, que nous percevrons les valeurs avec justesse et qu'entre les deux extrêmes nous pourrons classer tous les desfrés intermédiaires. Nous remarquerons entre autres choses qu'une valeur, claire par elle-même, paraîtra, par opposition, plus claire encore à côté d'une valeur foncée et, réciproquement, qu'une valeur foncée gagnera en intensité par le voisinage d'une valeur claire. Par contre, nous ver- rons qu'une seule touche plus claire dans une partie déjà lumineuse en augmente sensiblement l'éclat et qu'une touche plus intense dans une ombre ajoute à l'intensité de cette ombre. Le tout sans préjudice de l'infiuence directe du clair sur le foncé dans certaines circons- tances de voisinage et se manifestant par des reflets. Les valeurs étant subordonnées, d'un côté, à la direction de la lumière, d'un autre côté aux reliefs et aux creux plus ou moins pro- noncés du modèle, si nous reproduisons ces mêmes valeurs à leurs places respectives, avec leur forme et leur importance relative d'in- tensité et d'étendue, nous obtiendrons l'efTet, c'est-à-dire la représen- tation de celle des formes apparentes qui nous intéresse, l'aspect choisi par nous, son image actuelle parfaitement fidèle. Voilà pour l'hai^monie des valeurs. Reste à examiner la couleur. Il y a danger en peinture à conserver présent à l'esprit, d'une façon trop exclusive, le nom qu'on donne à une couleur dans le lan- gage ordinaire. I2l(> PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT Les nuances étant multiples sur un même objet qualilic roiig-e, une fleur par exemple, il s'agit de ne pas s'en tenir à l'appellation de rouge pour cliaeune de ces nuances. On serait exposé à croire cette fleur du même ton dans toutes ses parties et à l'exprimer avec une couleur de la palette pointant le même nom, purement et simplement. Or, outi-e que les points éclairés et les parties dans l'ombre ne peuvent pas être également rouges, ces tons sont tous difl'érents des matières rouges qui sont sur la palette. Il ne faudrait donc pas admettre non plus que celles-ci, plus ou moins additionnées de blanc ou de noir, suflîsent, sous le prétexte qu'on les nomme rouges, pour traduire les lumières et les ombres de notre fleur. Les tons ainsi obtenus, si justes qu'ils puissent être en tant que valeurs, seraient d'une crudité toute matérielle et d'une monotonie banale, qui exprimeraient, non pas une fleur rouge, mais une matière rouffe en forme de fleur. C'est mieux que la crudité et la monotonie qu'il nous faut : il nous faut la distinction et l'harmonie ; il nous faut la représentation de la matière spéciale, du tissu dont notre fleur est faite, avec sa couleur, mais aussi et surtout avec sa finesse, son velouté, sa souplesse, c'est- à-dire sa vie. Il nous faut cette unité qui semble l'envelopper d'une même lumière, tout en laissant à chaque détail son caractère spécial, avec l'accent ou la sourdine qui lui convient. Dans les valeurs clauses, la couleur sera plus perceptible, plus pal- pable, plus incontestable; elle méritera davantage son nom. Elle deviendra de plus en plus incertaine, de plus en plus neutre, de plus en plus innommable, au fur et à mesure qu'elle passera dans les ombres. Le rouge dans lombre n'est donc pas simplement du rouge plus foncé que celui qui est dans la lumière : il est surtout plus neutre, c'est-à-dire modifié par des nuances étrangères au rouge. Pour se défendre de la tendance à faire une rose rouge exclusive- mont avec cette couleur plus ou moins atténuée ou accentuée par du blanc ou du noir, le mieux est de rechercher, par comparaison, tout ce qui, dans cette rose, n'est justement i)as rouge à proprement parler. Il en résultera la constatation d'un grand nombre de tonalités nécessitant un mélange, c'est-à-dire la modification du rouge au moyen de couleurs autres. Le mélange des couleurs ! Terreur des commençants, qui s'in- quiètent de savoir ce qu'ils vont bien pouvoir mélanger. J.-B.-U. CASTAIGNET. — ENSEIGNEMENT DE LA DECORATION 1217 Ne VOUS préoccupez pas outre mesure du mélange. Songez avant tout à instruire votre œil. Plus il s'exercera, plus il verra la véritable qualité des tons et leurs nuances relatives : et c'est lui qui se char- gera d'indiquer à votre main quelles couleurs de la palette paraissent avoir une parenté avec ces nuances. C'est lui qui fixera le dosage et les proportions. Par l'observation, l'œil appréciera l'inlluence des tons les uns sur les autres : d'un côté , accentuation du contraste de deux tons oppo- sés par le seul fait de leur voisinage ; d'un autre côté , augmentation d'intensité d'une valeur claire ou d'une valeur foncée par l'adjonction sur le chanqi de cette valeur, d'une simple touche plus lumineuse ou plus sombre; enfin, modifications produites par l'action des reflets. Ce sont ces divers phénomènes qui constituent l'harmonie. Parfois l'harmonie, bien établie dans l'ébauche, semble faiblir. Tel ton qui était juste tout à l'heure, nous parait faux maintenant, sans que cependant votre pinceau lait modifié. C'est que vous avez détruit l'harmonie en modifiant les valeurs voisines; votre ton n'est plus au rang qui lui convient. Rétablissez la relation première et il redeviendra juste. L'expérience nous montrera aussi la part d'influence qu'exerce l'œil lui-même sur l'harmonie , quand , impressionné par les divers tons d'un sujet, qu'il embrasse, qu'il envelo[)pe d'un seul regard, il transporte inconsciemment un peu de chacun d'eux sur tous les autres. Et c'est encore par un regard d'ensemble que l'œil jugera norma- lement des relations des tons entre eux et du rôle exact de chacun •dans l'harmonie. * Nous avons parlé des formes, des valeurs, de la couleur et du moyen — toujours le même — de les percevoir normalement. Parlons maintenant des genres, des moyens d'exécution, et des lois qui les régissent. Les genres et les procédés d'exécution sont subordonnés au goût, aux moyens, au mécanisme de chacun. Tel maniera de préférence le crayon; tel autre la peinture à l'huile. L'aquarelle sera plus accessible à tel autre; un quatrième réussira mieux le pastel, ou le fusain. De même, plusieurs exécutants dans le même genre présenteront autant de factures, à^ écritures diflerentes, comme plusieurs musiciens, sur le même instrument et pour la même mélodie , auront autant d'expres- sions et de jeux [)articuliers. 77* 1:21 8 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT Ce qu'il importe de préciser, ce sont les lois d'exécution qui sont les mêmes pour tous les genres, et quel que soit le procédé employé. L'artiste devra, au préalable, observer longuement son modèle, et s'étudier à en synthétiser le caractère. C'est ainsi qu'il apprendra à écrire le trait franchement, sans hésitation et sans précipitation, avec le calme et l'assurance de celui qui a mesuré le chemin à par- courir et calculé la fac^-on la meilleure povir lui de le parcourir. Le trait devra obéir aux mouvements du modèle et rester conforme à sa physionomie. On évitera d'arrondir les angles; on les accentuera au contraire. A cet eft'et. bien se rendre compte du cintre des courbes, qu'on a la tendance à exagérer, à tourmenter et, par consé- quent, à conq)liquer. Expliquons au lieu d'embrouiller; que la sim- plicité des moyens soit l'objet de notre constante application. Une fois le trait indiqué , mettons exactement à leurs i)laces res- pectives les valeurs d'ensemble, c'est-à-dire un ton dans le champ de la lumière, un ton pour l'ombre, un troisième pour la demi-teinte. Puis, faisant marcher le tout de front, recherchons dans ces valeurs principales les nuances qui, sans sortir de l'effet d'ensemble, con- courent à l'intérêt, au caractère, et donnons à cliaque valeur, en même temps que son rang légitime, son degré exact de fermeté ou de moelleux. La fermeté prodiguée deviendrait de la dureté; trop de moelleux se traduirait par de la mollesse. Estomper les ombres pour rendre leur transparence et le peu de relief qu" elles laissent voir; écrire plus lisiblement au fur et à mesure qu'on arrive aux demi-teintes, et surtout aux tons de la lumière. De même si nous passons à la couleur. Prenons, par exemple, la peinture à l'huile. Nous opérerons dans les ombres au moyen de frottis légers ; dans la lumière, au contraire, et surtout pour les accents, nous procéderons au moyen de demi- pàtes, de touches alertes et vives, en évitant toutefois les empâte- ments exagérés, qui seraient un aveu d'impuissance. Demander à des épaisseurs de matière de vouloir bien accrocher brutalement au passage le jour qui éclaire notre toile serait déclarer ne pouvoir imiter sans subterfuge la lumière qui éclaire le modèle. Le subter- fuo-e n'atteindrait d'ailleurs pas le but. Il procurerait un effet lourd et raboteux, alors que tout dans la nature semble enveloppé et comme caressé par un doux voile de mousseline (i). (i) Ces indications ne s'appliquent, bien entendu, qu'à la peinture à riuiile. 11 ne sau- rait t'-tre question de frottis, et surtout d'empâtements, pour l'aquarelle, où l'on ])rooéde par transparence et sMi)erpositions de tons sans épaisseur et où les accents lumineux s'obtiennent en réservani provlsnireiuent le i)apier blanc à la place convenable, sauf a niettre ensuite au point la froide blanclicur des parties réservées. J.-B.-U. CASTAIGNEÏ. — ENSEIGNEMENT DE LA DÉCORATION I219 En résumé : variété de formes, de valeurs, de couleur; variété dans la fermeté et dans le moelleux ; le tout exprimé au moyen de touches variées elles-mêmes, différentes de taille, de direction, de groupement, d'écartement ou de rapprochement, toutes en rapport avec la manière d'être de l'objet dans ses diverses parties relative- ment à l'ensemble, et constituant le modelé. Et, quand nous parlons de variété, nous ne voulons pas dire qu'il faut multiplier les touches sous prétexte àe finir. Finir, c'est simpli- fier le travail matériel, c'est dissimuler les coups de pinceau en réduisant avec esprit la facture à sa plus simple expression, au point de l'annuler en apparence. Nous voici renseignés sur la manière de voir la nature et sur les lois d'exécution. Prenons maintenant notre Heur à la main, cette fleur que nous trouvons si belle. Observons-la attentivement, mais sans esprit d'analyse, pour en dégager les grandes lignes. Elle nous apparaîtra bientôt sous un aspect décoratif, accentué par la mise à néant de tout ce qui n'est pas l'allure, le sens, le type de notre fleur. Étudions la souplesse de sa tige, suivons le mouvement de ses pétales, pénétrons la délicatesse de ses nuances et, peu à peu nous découvrirons la raison de sa beauté, le secret de sa grâce. Ils résident surtout dans la simplicité avec laquelle nous l'aurons regardée — et c'est pourquoi la simplification raisonnée de la facture s'impose. — Remarquons telle attitude plus particulièrement séduisante, tel aspect mis en évidence par un heureux effet de lumière ; choisissons celles de ces apparences qui nous paraîtront mériter le plus notre admiration; traduisons tout cela avec notre âme, sans oublier la forme, mais de manière quelle soit principalement l'expression juste de la souplesse, de l'allure du modèle et, de la fleur la plus modeste, de la plante la plus humble , naîtront sous nos doigts, encore que mal assurés, les formes les plus charmantes, les nuances les plus fines. Et aussitôt dans notre pensée surgira le rêve, ])ien défini cette fois, d'orner un objet de notre choix avec ces éléments de beauté. Nous recueillerons toute cette moisson pour l'en enrichir, nous réu- nirons tous ces organes pour l'animer du mouvement et des palpita- tions de la vie. Nous ferons un tout pittoresque, ingénieux, imprévu, qui sera devenu nôtre par l'intervention de notre âme et dont la vue désormais et la possession nous procureront la plus suave , la plus légitime jouissance. 1220 PEDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT II. — Etudes de composition Consultation des œnvres des maîtres ; lois établies \n\v eux. — Style. — Initiative ; faculté eréatrice. — Conclusion. Par la foi en la beauté, constatée dans la nature, et la possibilité de la pénétrer et de la traduire au moyen de l'observation et de l'étude, nous aurons été amenés tout naturellement à la décoration. L'idée de lart nous aura conduits à celle de la création artistique. Ces deux idées sont, en effet, inséjjarables. L'homme, avons-nous dit, a vu dans la nature une source intaris- sable d'éléments de décor. La civilisation lui a fait produire, à travers les siècles, des chefs-d'œuvre qui provoquent notre admiration. Aussi, pour guider notre goût et favoriser son éducation , devrons-nous consulter, en même temps que la nature et les lui comparer, le plus grand nombre possible d'ouvrages des maîtres, non point, certes, pour les copier, mais pour étudier et nous assimiler les méthodes et les lois de création. Nous y verrons que le bons sens , le sentiment de la mesure et de l'ordre v régnent souverainement. Ils nous apprendront que toute oeuvre d'art comporte nécessairement des contrastes se faisant valoir mutuellement, en même temps qu'une harmonie et une unité par- faites ; contrastes et harmonie de lignes, de valeurs , de couleur. En ce qui concerne la décoration proprement dite, ces œuvres nous révéleront les lois de pondération et de proportion, en Aei'tu desquelles les éléments d'un décor doivent, au moyen d'un heureux balancement de lignes, remplir sulfisammcnt, sans l'encombrer, la place qui leur est destinée ; le tout sans confusion et de telle sorte que l'intention y soit clairement indiquée par le voulu et la franchise de l'exécution. Ces ouvrages des maîtres nous diront qu'il faut adapter le modèle à sa fin ; que le décor doit être en parfaite har- monie avec la forme, la nature et la destination de l'objet qu'il est appelé à embellir ; que tel décor ne saurait s'appliquer à une forme ou à une destination autres, bien que, pour un même oljjet, la déco- ration puisse être variée à l'infini. Nous aurons alors l'idée du stj'le, qui n'est autre chose que la juste appropriation d'un ornement à un objet et au rôle qu'il doit jouer ; kniuel ornement, dicté par le goni, l'instinct, voire même par la fan- taisie, doit toujours satisfaire aux règles d'orck'e, de mesure, d'unité, de simi)licité. qui sont les lois fondamentales de la beauté. — Nous aurons la clef de VArt décoratif. J.-B.-U. CASTAIGNET. — ENSEIGNEMENT DE LA DECORATION 11221 Nous nous souviendrons que chaque époque a eu son style, que chaque pays a les siens, c'est-à-dire des éléments de décor d'un caractère spécial à chaque époque, à chaque pays, originalement interprétés, les uns tirés de la nature, les autres empruntés à la géo- métrie, d'autres enfin, — comme dans le style appelé « ai-t nouveau » — inventés par le caprice et la fantaisie. Nous n'imiterons de parti pris aucun de ces styles ; mais nous pourrons puiser, dans une idée déjà exprimée, une idée nouvelle , provoquée par notre initiative. * * L'initiative : telle est, la faculté qu'il est urgent de développer désormais, pour acquérir la faculté créatrice et nous élever au-dessus de la copie. La copie, l'imitation servile sont contraires à la fécondité de l'art. La décadence dans l'art a toujours eu povir cause l'imitation des chefs-d'œuvre , dont l'existence a quelquefois poussé l'homme à les admirer, non pour en inventer de nouveaux, mais pour les repro- duire servilement. Or, comment acquérir la faculté créatrice ? — Au moyen de l'effort personnel ; en évitant les redites, les compilations, les formules con- venues ; en oubliant la lettre du déjà vu ; en s'exerçant à des arran- gements inédits, à la recherche de dispositions originales faisant valoir les éléments de décor à utiliser ; en adaptant ces éléments à la chose à orner, de manière à ce qu'ils fassent corps avec elle, sans que leur nature essentielle en soit altérée. Pas n'est besoin, en effet, pour composer, de déformer la nature au point d'altérer la vérité. Il faut, au contraire, épurer cette vérité, et rejeter bien loin l'étrangeté, les exceptions grotesques, les diffor- mités et, en général, tout ce qui ne saurait concourir à un embellis- sement et satisfaire au plaisir des yeux. On pourra, pour cela, utiliser : soit la nature proprement dite, entrevue normalement, et interprétée avec esprit et originalité ; soit la nature modifiée, transformée, la nature stylisée — non tourmen- tée, ni altérée — ; le tout en raison de l'objet au caractère duquel nous lui demandons de se plier pour l'embellir. Pour frapper l'imagination et la vue de nos élèves, pour aider leur mémoire et meubler leur cerveau , nous leur faisons des explications orales, accompagnées de figures et de croquis au tableau noir, sur les principes de traduction, d'interprétation, de styhsation de la 1222 PEDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT plante et sur les multiples applications que l'on peut faire, les partis divers qu'on peut tirer d'un modèle unique. Nous mentionnons également cette autre source d'ornements, les premiers employés par l'homme : la ligne et ses dérivés, tels que les entrelacs, les postes on Jlots, les écailles, les grecques, etc. Ces divers systèmes peuvent être employés séparément ou cond:)inés, à la condition, comme nous le disons plus haut, que l'idée de l'artiste sorte claire et précise de la com]>inaison. que la com[)o- sition soit explicite et intentionnelle et qu'au résultat l'ensemble reste homooène, harmonieux, asfréable à voir. En d'autres termes on pourra, suivant le cas ou rinsi)ii'ation : soit rechercher une composition pittoresque, non symétrique, conte- nant le « beau désordre » du poète; soit utiliser la syméti'ie, la répétition, V alternance, le raisonnement , la gTadation; soit enfin manier adroitement ces divers modes, avec ou sans le concours de l'ornement purement géométrique. * L'initiative développée donnera la confiance en soi, la conviction indispensable pour faire une œuvre d'art, si sim})le qu'elle soit et quelque modeste que puisse être l'objet auquel on l'applique ; confiance et conviction qu'on devra surveiller et régler pour rester dans l'ordre et dans l'esprit de la loi. On acquerra par le travail, en même temps que la connaissance des lois de création, les moyens permettant le maniement de l'ou- tillage et des matières nécessaires, au point de s'en servir, pour ainsi dire, sans penser qu'on s'en sert . comme on tient une plume pour écrire, comme on met une jambe devant l'autre pour marcher. On s'élèvera peu à peu au-dessus de la matière ; on se mettra en communion intime avec la beauté et on affrontera avec un intérêt toujours croissant les études techniques relatives à la décoration industrielle. Et, si cette carrière paraît à la jeune fille trop pleine d'aléas, le bénéfice de ses efforts ne sera pas perdu : elle ti'availlera pour elle- mêijie, pour son chez soi; elle égaiera la maison de ses mélodies gracieuses; elle sera la muse du foyer, où chaque décor nouveau apportera un attrait, une vibration de plus, qui deviendra uu sanc- tuaire d'un prix inestimable, dont elle seia la prêtresse, sur les joyaux duquel seront inscrits par elle-uième quelques-uns des instants les plus doux de sa vie de jeune fille et le récit des circons- tances gaies, quelquefois tristes, hélas! — t(»ujours chères — tpii AL. GOURHAN. — l'eXSEIGNEMENT DE LA SCIENCE DU COMMERCE 12123 auront entouré l'exécution de chacun de ses ouvrages. Quelques-uns de ceux-ci auront été porter à des compagnes préférées le gage de l'amitié, de lairection; et tous ces souvenirs seront pour elle le meilleur de son existence. L'art, qui l'aura charmée naguère, quand «lie en étudiait les lois et qu'elle en pénétrait les secrets, la charmera encore par l'évocation des heures exquises consacrées à le cultiver. M. Alexis GOURHAN à Bordeaux L'ENSEIGNEMENT DE LA SCIENCE DU COMMERCE |3:o.38û| — Séance du lo août — On conteste souvent que le commerce soit une science spéciale, distincte des autres, et l'on semble croire qu'il est plutôt un ensemble de connaissances générales, une sorte de mélange de notions dispa- rates. On serait tenté, à première vue, de donner raison aux détracteurs de cette science, car un examen superficiel des faits semble démon- trer qu'elle emprunte toutes ses théories aux autres sciences : au Droit, celles qui sont relatives aux obligations et prérogatives des commerçants, aux contrats de sociétés, de ventes, de transports, d'assurances maritimes, de change; à l'Économie politique, celles qui ont trait à la production des richesses, à la circulation, au crédit; à la Géographie, celles qui concernent la puissance productive de tous les pays, leurs moyens de communication, leurs ports; aux Mathématiques, ses procédés de calcul ; mais il en est de la science du commerce comme de ces composés chimiques constitués par la combinaison de plusieurs corps simples qui ont perdu, en se combi- nant, leurs caractères particuliers pour devenir un corps nouveau ayant un aspect et des propriétés distinctes ; elle est formée par la synthèse de plusieurs connaissances diverses, mais constitue une science spéciale ayant ses règles et sa technique propres. Ainsi le Droit, en matières de ventes, nous apprend quelles sont les prérogatives et les obhgations des parties ; il nous donne la solu-: tion des difficultés qui peuvent surgir lors de l'exécution de ce con-" 1224 l'ÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT trat; le commerce nous fait connaître, sur le même sujet, les usages des places, les monnaies, poids et mesures des différents i)ays, le& documents qui constatent les opérations d'échange ; son champ d'ac- tion est donc parfaitement distinct de celui du Di'oit. Le commerce est la science de l'administration des capitaux des entreprises créées en vue de l'échange et du transport des produits ; il est, pour employer une expression plus usuelle, la science des affaires. L'enseignement du commerce doit être à la fois théoiùque et pra- tique. L'enseignement théorique du commerce comprend trois parties principales que l'on peut ainsi distinguer : i''^ partie. — Opérations commerciales. 2"= partie. — Mathématiques commerciales. S*" partie. — Comptabilité. La première partie a surtout pour objet l'étude des capitaux,, moyens d'actions des entreprises ; de leur division en capitaux immo- bilisés, disponibles, engagés ; des difféi^ents aspects sous lesquels ils se présentent généralement : matériel, espèces, marchandises, consi- gnations, prêts ; des mouvements qui leur sont imprimés par les administrateurs; des éléments constitutifs de leurs prix de revient; elle comprend aussi l'étude des documents commerciaux. La deuxième partie traite des méthodes de calcul rapide , des opé- rations de bourse et de change, de l'établissement des comptes-cou- rants et d'intérêts, des opérations financières à long terme. La troisième partie comprend l'étude de la comptabilité, qui a pour objet l'enregistrement méthodique sur des comptes et des livres des mouvements imprimés aux capitaux, dans le but de les contrôler et d'en connaître les résultats. L'idée maîtresse de ce programme et l'objectif de l'enseignement théorique du commerce doit être de former des administrateurs de capitaux, et il est peut être intéressant de rechercher comment l'étude des mathématiques commerciales et de la comptabilité peuvent, aussi bien que celles des opérations commerciales, contri- buer à ce résultat. On s'imagine difficilement un commerçant inapte au calcul mental ou aux procédés de calcul rapide , car concevoir une affaire , c'est la cliiffrer aussi rapidement que possible ; c'est supputer le bénéfice présumé ; la promptitude dans la conception aussi bien que dans la réalisation d'une affaire est souvent la condition sine qiia non du succès. AL. GOURHAN. — L ENSEIGNEMENT DE LA SCIENCE DU COMMERCE I220 Les opérations de bourse et de change portent sur l'achat et la vente des fonds pul^lics, des valeurs mobilières, des changes ; elles se rattachent aux mathématiques parce qu'elles donnent lieu à des calculs un peu plus compliqués que les opérations usuelles du com- merce ; mais les capitaux du capitaliste et souvent aussi ceux du commerçant revêtent la forme de valeurs mobilières, les mouve- ments effectués sur ces valeurs de placement ou de spéculation sont considérables ; aussi l'étude de leur administration présente-t-elle un intérêt tout particulier. L'étude de la comptabilité est aussi intimement liée à celle de l'ad- ministration des capitaux ; car comptabiliser, c'est enregistrer métho- diquement les mouvements qui leur sont imprimés ; le gérant d'une entreprise, eonnaissant bien les opérations qu'il a conçues, est, à cause de cela, plus apte à organiser et à tenir les comptes de sa ges- tion ; c'est pour cette raison qu'il est souvent appelé le comptable d'origine. Pour comptabiliser correctement des opérations il faut en con- naître le véritable sens et la portée ; aussi n'est-il pas possible d'en- seigner les matières du programme de comptabilité sans enseigner simultanément celles des opérations commerciales ; ces deux ensei- gnements se complètent et contribuent l'un et l'autre à former des administrateurs de capitaux. L'enseignement pratique du Commerce est appelé Bureau com- mercial. Le Bureau commercial a pour but d'initier les élèves aux travaux pratiques d'une maison de commerce. Avant d'examiner quels sont les différents modes d'enseignement du Bureau commercial, il convient de déterminer si les opérations choisies pour servir de thème aux exercices pratiques doivent être réelles ou simulées , si elles doivent être quelconques ou conformes aux réalités de la pratique des affaires. On a essayé de donner cet enseignement pratique dans des maga- sins réellement achalandés; mais ces exercices, bien que profitables, sont cependant insuflisants, parce que le commerce de détail ou de demi-gros, sur un article spécial, ne constitue pas tout le commerce et qu'il est également nécessaire de pratiquer les opérations du commerce de gros et du commerce de banque que l'on ne peut pas, cela se conçoit, réaliser à l'école. Il faut donc renoncer à cette chimère, mais cependant s'efforcer de conformer les opérations simulées aux réalités de la pratique, sinon en mouvementant des capitaux réels , du moins en tenant compte le plus possible , dans les l-2-2(} PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT opérations siumlées, des prix exacts des marchandises ainsi que des taux de prêt, des tarifs de chemin de fer et, surtout, des cou- rants commerciaux et des usages des places; il est important, à cet effet, de s'entourer de divei's éléments d'information, tels que cote des changes, mercuriales, revues de marchés, etc. Le mode le plus ancien d'enseignement du bureau commercial consiste dans la comptabilisation faite, par les élèves, d'opérations arrêtées d'avance par le professeur, qui les dicte dans leur ordre chronologique, en les commentant s'il y a lieu. Ce mode d'enseigne- ment a l'inconvénient de ne laisser aucune place à rinitiative des élèves, car aucune opération ne doit avoir lieu en dehors du texte prévu, auquel il ne faut rien ajouter ni retrancher; il enlève toute j)réoccupation de gérance des capitaux , ne permet pas de faire sulli- saniment ressortir les rapports qui existent entre la gestion d'une entreprise et la com[)tabilité ; il est plutôt un mode imparfait d'en- seignement de la comptabilité qu'un mode d'enseignement du bureau commercial. Un autre mode d'enseignement, antithèse du précédent, consiste à considérer chaque élève comme le gérant d'une entreprise dont il doit lui-même imaginer et comptabiliser les opérations simulées ; chaque élève a, dans cette organisation, un rôle spécial; il y a les élèves marchands, les élèves commissionnaires, les élèves banquiers, courtiers, agents, et des relations s'établissent entre eux, comme cela a lieu ordinairement entre commerçants. Ce mode d'enseignement a l'avantage de provoquer chez les élèves la réflexion, d'aiguiser leur imagination, de faire appel à leur espnùt d'initiative et, cependant, les résultats ainsi obtenus sont plutôt médiocres, parce qu'il est i*are de trouver, même parmi les meilleurs, des élèves capables d'imaginer et de conduire des opéra- tions ayant l'apparence de la vérité; c'est là, assurément, leur demander de faire preuve dune instruction théorique et d'une expé- rience qu'ils ne peuvent pas posséder, de sorte que c'est le profes- seur lui-même qui est obligé de conduire et de surveiller ces multiples opérations; il ne peut pas suflîre à la tache. Le cours ainsi professé dégénère en leçons particulières forcément très courtes; beaucoup d'élèves, arrêtés par une difficulté, restent oisifs en attendant leur tour de consultation; c'est là un immense écueil au point de vue pédagogique. Le dernier mode d'enseignement du Bureau commercial , sorte de terme moyen entre les deux précé- «lents, est de nature à donner de meilleurs résultats. Il consiste à considérer les élèves et le professeur comme les AL. GOURHAN. — L'ENSEIGNEMENT DE LA SCIENCE DU COMMEUCE 122J gérants collectiis tVune entreprise qu'ils administrent en commun; au début du cours, ils jettent les bases de l'opération, déterminent sa nature, ses moyens d'action; ils supputent la somme de frais géné- raux probables, évaluent le chiffre d'affaires qu'il serait nécessaire d'atteindre pour les couvrir; ils fixent le quantum des bénéfices. Aucun plan n'est arrêté d'avance, de sorte que les élèves, stimulés par leur professeur, souvent interrogés à cet effet, peuvent prendre beaucoup d'initiative; les élèves doivent, à tour de rôle, imaginer des opérations, indiquer à haute voix les écritures auxquelles elles donnent lieu, faire la correspondance; tout cela sous la direction du professeur qui rectifie les fautes commises. Le contrôle de la comp- tabilité est alors très facile, car il doit y avoir concordance entre les cahiers et les comptes tenus par les élèves. Si la durée des études le permet, on peut ainsi organiser des exercices se rapportant à différents genres d'affaires de commerce et de banque ; les élèves se forment ainsi un recueil d'idées précises et exactes sur l'administration des capitaux de ces diverses entreprises. Le professeui- n'ayant qu'à surveiller la marche d'une seule opéra- tion, peut en suivre facilement tous les détails; il peut prendre texte de tous les incidents que l'inexpérience des élèves aura fait naître ou qu'il aura provoqués lui-même pour entrer dans des développe- ments dont toute la classe fera son profit; ce cours perd le caractère individuel qu'il avait précédemment et il devient une revision sous une forme palpable et vivante du cours théorique de commerce. De cette courte étude, il ressort que ni l'enseignement de la comp- tabilité ni celui des opérations commerciales ou de mathématiques financières considérés isolément, ne constituent l'enseignement de la science du commerce; celui-ci résulte de la combinaison (si l'on peut s'exprimer ainsi) de ces trois enseignements dans une proportion que les professeurs sont appelés à déterminer. Il ne faut pas, en effet, que l'aboutissement de cet enseignement soit de former seule- ment des professionnels de la comptabilité , pas plus d'ailleurs que des commis exclusivement bons vendeurs ou des financiers ; il faut qu'il forme des commerçants tout à la fois comptables, vendeurs, financiers, c'est-à-dire admirablement instruits dans la science de l'administration des capitaux des entreprises 1228 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT M. T. LANG Directeur de Ui Société d'Enseignement professionnel du Riiùne, à Lyon ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DE LA SOCIÉTÉ D'ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL DU RHONE. ~ PRINCIPES DIRIGEANTS DE CETTE INSTITUTION [3-9(44.58)] — Séance du lo août — FONDATION. — BUT ET MOYENS La Société a été fondée en 1864 et reconnue comme établissement d'utilité publique en 1878. Son but est l'instruction des adultes des deux sexes. Les moyens mis en œuvre sont des cours, des bibliothèques et des conférences. Des conférences ont été faites chaque dimanche de l'hiver, de 1864 à 1873, devant un public de i.ooo à 1.200 personnes, par des profes- seurs, des savants ou des hommes de lettres de Paris, Lyon. Mont- pellier. Genève, etc. sur des sujets scientifiques, littéraires ou éco- nomiques, destinés à élargir et à étendre l'instruction donnée dans les cours. La bibhothèque de la Société, avec ses succursales, compte 6.000 volumes. ORGANISATION DES COURS Les cours ont Heu le soir, de 8 heures à 10 heures, et le dimanche matin. Chaque cours a deux ou trois leçons par semaine, suivant les cas, et dure pendant le semestre d'hiver, d'octobre à avril. Cela fait de 5o à 75 leçons, dont la durée varie entre une heure et deux hem*es. Sur la demande des élèves , on prolonge un certain nombre de ces cours, le tiers environ, pendant un trimestre d'été. Un cours doit com[)ter vingt élèves au moins. Tout cours où le nombre des élèves présents tombe au dessous de vingt peut être suspendu par décision du Conseil d'administration. Il n'est admis d'exception à cette règle que pour quelques très rares cours profes- sionnels d'une importance spéciale et dont il s'agit de faire pénétrer peu à peu lutililé dans l'esprit des intéressés. C'est sur la demande des élèves que presque tous les cours exis- T. LANfi. — SOCIÉTÉ d'eNSEIGNEMENT PROFESSIOIVNEL DU RHÔNE I229 tants ont été ouverts. Le Conseil d'administration ouvre quelquefois spontanément de nouveaux cours, mais il est rare que l'initiative ne vienne pas des élèves eux-mêmes. MATIÈRES ENSEIGNÉES. PROGRAMMES. RECRUTEMENT DES PROFESSEURS. Les matières enseig-uées sont actuellement les suivantes : Écriture. Grammaire. Littérature élémentaire. Histoire et Géographie. Calcul. Mathématiques élémentaires. Matliématiques appliquées. Mécanique appliquée. Géométrie descripiive et Coupe des piérides. Résistance des matériaux. Constructions civiles. Pliysique. Chimie minérale. Chimie industrielle. Electricité industrielle ; éclairage et traction électriques. Photographie. Comptabilité. Droit connnercial prati(iuc. Procédure et droit civil élémentaire. Sténographie et Dactylographie. Langues anghiise, allemande, italienne, espagnole. Es|)éraulo. Perspective pratique. Dessin d'ornement et dessin de ligure. Dessin linéaire. Dessin de machines. Dessin appliqué à la menuiserie ; tracés au cordeau, modelage en bois. Dessin, appliqué à la serrurerie. Ornement repoussé au marteau \io\iv les serru- riers. Dessin appplicjué à la ccwrosserie. Dessin et coui»e pour les tapis- siers. Dessin pour les ferblantiers-:ing-ueurs. Théorie du tissag-e. Tissage pratique. Elude de filés. Coupe pour les tailleurs. Coupe pour les cor- donniers. Soltège. Couture (pour les élèves dames). Coupe et Confection; réduction des patrons; essajrig-e. Modes et nouveautés. Économie ména- gère et préi)aration des aliments. Dessin pour la broderie. Broderie blanche. Broderie artistique. Peinture. Ces matières comprennent, comme on le voit, les connaissances primaires, des connaissances complémentaires, surtout scientifiques, l'enseignement commercial et l'enseignement technique spécialisé pour chaque profession. Les programmes des cours ne varient pas seulement avec la nature de ces cours. Entre deux cours de même nature, par exemple deux cours de calcul, ils varient suivant le quartier, les professions des élèves qui fréquentent plus spécialement ce cours , la force de ces élèves, etc. Il faut mettre l'enseignement à la portée des auditeurs suivant leur degré d'instruction et suivant leurs besoins. La plus grande latitude est laissée pour cela aux professeurs des différents cours, auxquels on n'impose ni un programme déterminé, ni une méthode spéciale d'enseignement. Ces professeurs sont recrutés avec le plus grand soin j)arini les membres les plus distingués du corps enseignant à Lyon et, j^our les cours pratiques, parmi les spécialistes les plus réputés dans leurs professions respectives. C'est d'autant plus nécessaire que les cours I23o PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT d'adultes présentent évideininent plus de difllcultés qu'une classe d'école primaire, de collège ou d'école professionnelle quelconque, en ce sens qu'on s'adresse à des ouvriers ou à des enqjloyés fatigués d'une journée de travail manuel, qu'on ne dispose d'autre moyen d'actio4i que de l'envie qu'ont les jeunes gens de s'instruire et que des notions scientifiques souvent très diflîciles , comme la géométrie descriptive, par exemple, doivent être mises à la portée d'ouvriers manquant complètement d'instruction première. La Société n'accepte donc un professeur qu'après s'être entourée des garanties les plus sérieuses. Ceci fait, et sous le contrôle de l'inspection, on le laisse absolument juge de sa méthode et des moyens qu'il croit les plus propres à la réussite de son cours. Si les élèves sont assidus et per- sévérants, s'ils s'intéressent au cours, s'ils y travaillent et, par suite, y font des progrès . le cours est bon. Si , au contraire , le professeur n'enseigne pas bien, au moins pour le milieu dans lequel il professe, la diminution du nombre des élèves dans le courant de l'année sco- laire ne manque jamais de l'indiquer, lors même que les inspections ne le constateraient pas. Dans ce cas, on n'hésite pas à changer le professeur. NOMBRE DES COURS. NOMBRE DES ELEVES. Le nombre des cours de la Société est actuellement de i5(5, répar- tis dans tous les quartiers de la ville et de la banlieue, suivant les besoins. Le nombre des élèves des deux sexes est de 7.200. Ne sont comptés comme inscrits que les élèves ayant suivi au moins dix leçons ; les autres sont censés ne pas exister. NATURE DES COURS. ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL ET APPRENTISSAGE. Primitivement, la Société a été obligée d'ouvrir beaucoup de coui's primaires, en raison de l'insuffisance de l'instruction des jeunes gens. Aujourd'hui, les adultes étant plus instruits, ces cours pri- maires ont été supprimés peu à peu et presque tous les cours sont des cours professionnels, tant pour hommes que pour dames. Un grand noml)re des cours professionnels d'hommes sont con- centrés dans un immeuble construit à leur intention , avec salles et agencements spéciaux pour chaque profession, menuisiers, char[)en tiers, serruriers, ferblantiers, carrossiers, mécaniciens, tailleurs, cordonniers, etc. Ces agenccmenls constituent un ensemble comme T. LANG. — SOCIETE D ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL DU RHÔNE I23l il n'en existe peut-être nulle part, au moins pour des cours d'adultes. COURS PROFESSIOXXELS A propo.s de ces cours professionnels et en présence surtout des divergences qui se sont produites dans notre pays et qui se pro- duisent encore sur la direction à donner à cet enseignement , il est utile d'expliquer comment la Société entend ces mots : « Enseigne- ment professionnel. » Pour lieaucoup de personnes, qui dit « Ensei- gnement professionnel » dit « travaux manuels », apprentissage plus ou moins complet de la profession. La Société ne l'entend pas ainsi. Il n'y a chez elle ni apprentissage, ni travaux manuels. Ou, du moins, il n'y a de travaux manuels que ceux qui sont une application directe de l'enseignement donné dans les cours. C'est ainsi que les menui- siers font du modelage en bois comme application de leur cours de dessin, les serruriers de l'ornement repoussé au marteau comme complément du cours de dessin de sei^rurerie , les tailleurs de pierre et les architectes des voûtes en plâtre en exécution des épures faites au cours. Mais l'apprentissage proprement dit n'existe nulle part dans les cours de la Société. Elle appelle « Enseignement jn^ofes- sionnel » non l'apprentissage d'une profession, mais, pour chaque profession, l'enseignement des connaissances théoriques nécessaires à l'exercice intelligent de cette profession. Quant à l'apprentissage lui-même, elle estime qu'il doit être fait à l'atelier et non dans les cours. Un exemple particulier précisera nettement cette distinction entre l'enseignement professionnel et l'apprentissage. La Société a des cours de théorie de tissage où les tisseurs travaillant pour la fabrique lyonnaise viennent apprendre la constitution des étoffes et le mode théorique de fabrication de ces étoffes. On ne tisse point dans ces cours, qui s'adressent à des jeunes gens sachant tisser ou apprenant à le faire à l'atelier, mais ne connaissant de l'étoffe que sa confection matérielle. Au contraire, il y a un cours de tissage pratique où l'on apprend à tisser réellement à des employés de fabrique qui con- naissent déjà la théorie, dont le métier n'est pas de tisser personnel- lement, mais qui ont besoin de connaître du tissage ce qu'il faut pour être en état de suivre et de contrôler le travail des ouvriers, de con- naître la cause et les conséquences des accidents de tissage, de savoir comment doit s'organiser le métier dans chaque cas , de juger de l'effet pratique que produira une conception théorique quelconque. 1232 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT de faire un prix de revient, etc. Voilà le véritable enseignement pro- fessionnel, au sens où la Société l'entend. Il n'est pas besoin de dire après cela qu'on ne voit jamais, dans les cours de la Société, des jeunes gens se consacrer, pendant des mois entiers, à la confection d'un chef-d'œuvre de menuiserie, d'ébé- nisterie ou de serrurerie, qui coûte, sans profit réel, beaucoup de temps et même beaucoup d'argent. Ces genres de travaux produisent o-énéralement grand effet dans les expositions, mais c'est leur seule utilité. Tout au plus servent-ils aux élèves, soit à perfectionner leur habileté manuelle, habileté qui est du domaine de l'atelier et non pas de l'école, soit surtout à démontrer qu'ils possèdent cette habi- leté. Mais, à côté de ce mince avantage, ils ont l'inconvénient de les détourner de leur véritable travail des cours, celui qui consiste à y puiser des connaissances que l'atelier ne peut pas leur donner. Du reste, la pratique ordinaire d'une profession manuelle ne comportant pas l'exécution de ces chefs-d'oîuvre, on peut être un ouvrier accom- pli sans en avoir fait, à condition de posséder tous les secrets de son métier, les secrets manuels et surtout les secrets intellectuels et, réciproquement, on peut être capable de faire un travail de ce genre sans avoir pour cela ce qu'il faut pour exercer sa profession avec intelligence, et à plus forte raison pour être capable de s'élever, à l'occasion, au-dessus de cette profession. ASSIDUITÉ DES ÉLÈVES Ce qu'il y a de plus remarquable dans les cours de la Société, c'est l'assiduité des élèves. 6i à 64 o/o du nombre total des élèves inscrits sont encore présents dans les cours le dernier mois. C'est une pro- portion énorme, qui ne se rencontre nulle part ailleurs dans des cours d'adultes. Depuis 1874? une mention dite d' assiduité est accordée à tout élève n'ayant manqué à aucune des leçons de son com's, pour quelque motif que ce soit. En 190a, il a été délivré 1.426 mentions d'assiduité, plus de 20 0/0 du nombre total des inscrits. Il est aisé de se rendre compte de ce que les élèves doivent dépenser de persévérance et d'énergie, pour que, dans des cours qui comptent jusqu'à jo leçons, un cinquième d'entre eux assistent par tous les temps, avec toutes les intempéries de l'hiver, à toutes les leçons, sans qu'il soit admis aucune excuse, pour cause de maladie, par exemple, ou de service ndlitaire, ou pour tout autre motif. T. LANG. — SOCIÉTÉ d'eNSEIGXEMENT PROFESSIONNEL DU RHÔNE 1233 CAUSES DE L ASSIDUITE DES ELEVES Cette assiduité qui est, comme on sait, la pierre d'achoppement des cours d'adultes, s'obtient dans les cours de la Société grâce aux mesures suivantes : a) — Le recrutement soigné des professeurs. Ces professeurs ne se contentent pas d'enseigner; ils s'attachent à entrer en contact intime avec les élèves et à esTercer sur eux la plus grande action morale possible. h) — La mention d'assiduité, qui a eu un très heureux effet, parce que les élèves y tiennent beaucoup, quoiqu'elle n'ait d'autre valeur que celle d'un certificat authentique. Elle a une valeur morale consi- dérable entre les mains d'un ouvrier ou d'un employé qui se présente à un patron, parce quelle prouve, chez celui qui en est pourvu, une persévérance remarquable dans les efforts qu'il fait pour améliorer son niveau intellectuel. Pour accentuer l'effet produit par la mention d'assiduité, on donne, depuis 1880, un prix spécial d'assiduité à tout élève ayant obtenu au moins six mentions d'assiduité, dans une ou plusieurs années. Il est délivré, chaque année, de 60 à 90 de ces prix d'assiduité. c) — Le paiement d'un droit d'inscription de la part de tout élève qui désire suivre un cours. La gratuité absolue est une cause d'insuc- cès pour les cours d'adultes. Aussi, les cours de la Société ne sont pas i)urement gratuits. Il est payé un droit d'inscription, qui est généralement de 3 francs pour tout le semestre, droit dont sont dis- pensés seulement ceux qui ne peuvent pas le payer. L'expérience et une observation sérieuse des résultats obtenus dans les différents cours , où les cotisations sont plus ou moins régulièrement payées, ont montré que cette cotisation est absolument nécessaire dans l'in- térêt même de l'élève. Les élèves qui ont payé suivent ordinairement le cours avec assiduité et y travaillent. De plus, cette cotisation, si faible qu'elle soit, les intéresse à l'œuvre tout entière et sauveo-arde leur dignité, en éloignant deux toute idée d'aumône. Ceux, au con- traire, qui n'ont pas payé, viennent plus irrégulièrement et profitent moins du cours ; le plus souvent même ils le désertent complètement. Chaque élève, en payant son droit d'inscription, reçoit une carte per- sonnelle, qu'il est tenu de présenter au besoin. d) — Les inspections faites régulièrement dans les cours par les membres du Conseil d'administration. e) — L'institution des Commissaires. 78* 1234 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT INSTITUTION DES COMMISSAIRES Le bon fonctionnement des cours est assuré i>av des commissaires. Ces commissaires sont des élèves désignés à l'élection par leurs camarades, au nombre de un jiar dix élèves et de quatre au maxi- mum dans un cours. Leurs fonctions peuvent se résumer de la manière suivante : 1° Tenir et relever le registre des présences existant dans chaque cours, registre sur lequel chaque élève doit signer à chaque leçon ; 2° Adresser des lettres aux élèves qui s'absentent ; s'informer des motifs de leur absence et chercher à les faire revenir au cours , en allant les voir, au besoin, à leur domicile ; 3" Percevoir les cotisations des élèves ; 4" Assurer l'ordre dans les cours; avertir et expulser, au besoin, d'accord avec le professeur, les élèves qui troubleraient les leçons ; 5'^ Adresser à la fin de chaque mois, au secrétariat de la Société, un bulletin contenant le nombre des élèves présents à chaque leçon du mois, les cotisations payées, les demandes présentées dans linté- rêt du cours, les observations relatives à tout ce qui s'est passé dans le cours pendant la durée du mois, etc. ; 6° Faire le service de la Caisse d'Épargne scolaire qui a été établie dans les cours de la Société ; -;o Être les intermédiaires, soit entre les élèves et le professeur, soit entre les élèves et l' Aministration , pour tout ce qui touche aux demandes et réclamations des élèves, aux besoins des cours, etc. Réciproquement. l'Administration communique avec les élèves, sur- tout par l'intermédiaire des commissaires. Les commissaires de tous les cours se réunissent une fois par mois sur la convocation du Conseil, pour discuter, de concert avec r Administration, tout ce qui intéresse les cours. Pour ces réunions, comme jiour toutes les questions qui se rapportent à l'intérêt géné- ral des élèves . les commissaires ont un Bureau élu par eux-mêmes . dans leur sein. Les Commissaires des deux sexes ont droit de vote aux Assem- blées générales de la Société, comme les sociétaires et les profes- seurs. Ces notes succinctes sur l'institution des commissaires ne peuvent donner qu'une idée inconqîlète de son importance. Cette institution rend d'immenses services dans les cours, parce qu'elle relève la di«-nité des élèves et les amène à s'intéresser énergiquement au bon T. LANG. — SOCIÉTÉ DEXSEIGNEMENT PROFESSIONNEL DU RHÔNE I2"35 fonctionnement de la Société, en leur donnant une part dans son administration. Aucune mesure de discipline n"est prise dans les cours en dehors de l'action des commissaires et ils s'en acquittent avec une conscience qui n'est pas un des moindres élémentsde succès des cours de la Société. INSPECTION DES COURS Outre que les BnUethis mensuels renseignent constamment le Conseil d'administration sur l'état de tous les cours, ces cours sont inspectés rés^ulièrement par les membres du Conseil eux-mêmes. Ces derniers rendent compte, aux séances du Conseil, de l'enseio-nement des professeurs, du nombre des élèves présents, des modifications à introduire, etc. Grâce à ces inspections et surtout à la façon dont les élèves s'intéressent à la bonne marche des cours, les résultats obte- nus au point de vue de l'ordre, de la discipline, du bon esprit, du travail, de l'assiduité, sont extrêmement remarquables. Les élèves ont un très grand respect pour leurs professeurs ; le silence le plus parfait règne dans dès cours qui réunissent quelquefois plus de cent auditeurs ; j)resque tous prennent des notes et font des devoirs chez eux. BUDGET. — RECETTES ET DÉPENSES Les ressources financières de la Société d'Enseignement profes- sionnel du Rhône consistent en subventions du Ministère du Com- merce et du Ministère de l'Instruction publique; subventions du Conseil municipal de Lyon, du Conseil général du Rhône et de la Chambre de Commerce de Lyon, cotisations et dons divers des membres de la Société; droits d'inscription des élèves, etc. Les dépenses de la Société, dépenses dont la plus grosse part con- siste dans les traitements du personnel enseignant, s'élèvent annuelle- ment à 90.000 francs environ. SERVICES RENDUS PAR LA SOCIÉTÉ; Il est difficile de définir exactement en peu de mots les services rendus par la Société d'Enseignement professionnel du Rhône, depuis sa création. Il faut, pour s'en faire une idée précise, connaître l'état matériel, intellectuel et moral de la classe ouvrière à Lvon, voir fonctionner les cours et examiner ce que sont les ouvriers après avoir fréquenté ces cours et ce qu'ils étaient auparavant. Une foule de ces adultes ouvriers sont devenus patrons, ou au moins contremaîtres, grâce aux connaissances acquises dans les 1236 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT cours. De même, la i»lu|)art des employés de commerce qui viennent apprendre la comptabilité, les langues vivantes, la théorie de fabrique, etc., ont vu leur situation notablement agrandie. Beaucoup de maisons de commerce et d'industrie s'adressent à la Société pour le recrutement de leur personnel. Une certaine quantité d'élèves de l'un et de l'autre sexe réussissent chaque année dans des examens de différentes natures, qu'il n'est cependant pas facile à des ouvriers peu lettrés de préparer, en utilisant uniquement les heures que laisse disponibles le travail quotidien. Ce qui est plus remarquable encore, c'est qu'un nombre assez considérable des cours de la Société sont actuellement dirigés par d'anciens élèves. Mais tous ces résultats, d'ordre matériel et intellectuel, sont peut- être la partie la moins intéressante des effets produits par la Société sur les classes laborieuses de Lyon. Les résultats moraux sont encore bien plus considérables et on peut dire que ceux-ci ont dépassé de beaucoup toutes les espérances. Ces résultats moraux consistent surtout dans les habitudes d'ordre, de discipline, de bon sens, de dignité personnelle, de respect d'eux- mêmes et des autres, de bonne camaraderie, que les élèves contractent au contact de leurs professeurs et surtout au contact les uns des autres, les anciens se faisant à leur insu les moniteurs des nouveaux. Il est curieux d'observer la transformation dans ce sens qui se ])vo- duit en quelques mois chez les adultes qui viennent pour la première fois dans les cours. A côté des relations d'intimité qui se forment entre tous ces jeunes gens sur un terrain éminemment moral , celui de l'étude, il convient de signaler qu'ils n'ont pas seulement du respect, mais une véritable affection pour leurs professeurs. Ils ont surtout une affection très vive pour cet êti'e impersonnel qui s'appelle la Société elle-même. Cette affection, qu'ils traduisent en répétant toujours que la Société est une véritable famille, se manifeste dans toutes les circonstances. Elle s'explique, soit par les contacts intimes qui existent constam- ment entre l'Administration, les professeurs et les élèves, soit par le fait que ces derniers, en raison de la part considérable d'influence qu'ils possèdent, considèrent la Société comme leur chose. En un mot, le Conseil d'Administration, tout en n'abandonnant rien, bien entendu, de la direction générale de l'institution, seflace dans la vie de chaque jour, de manière à laisser aux élèves une part aussi importante que possible et la somme la plus large de responsabilité. C'est là évidemment le secret de leur excellent esprit et de l'énorme action morale que la Société exerce sur eux. T. LAXG. — SOCIÉTÉ d'eNSEIGNEMENT PROFESSIONNEL DU RHÔNE IsSj Une preuve, entre autres, de Taltection des élèves pour la Société, se trouve dans ce fait que la plupart d'entre eux, quand ils ont commencé à assister à des cours , continuent presque indéfiniment à en suivre. Ils suivent d'abord les cours qui leur sont utiles au point de vue professionnel. Puis, ayant pris l'habitude du travail et le goût de l'instruction, ils suivent d'autres cours, simplement en vue de s'instruire. Puis, enfin, ne pouvant et ne voulant pas se désac- coutumer de la fréquentation des cours, ils en suivent, on peut dire, uniquement pour en suivre, ou bien ils imaginent des cours nou- veaux qui n'existent pas et qu'on crée à leur intention, bien entendu quand le Conseil d'administration les reconnaît utiles. Cet excellent esprit des élèves, l'intimité et la cohésion affectueuse entre tous les éléments de la Société, la bonne tenue des auditeurs dans les cours , les remarquables résultats produits pai^ l'institution des commissaires, voilà ce qui frappe surtout les personnes étran- gères à la Société qui visitent ces cours. Et c'est là surtout ce c{u"on a cherché à copier dans les nombreuses institutions analogues qui se sont créées à l'imitation de la Société d'Enseignement profes- sionnel, soit en France, soit à l'étranger, particulièrement en Suisse, en Belgique et en Italie. ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES Les élèves de la Société , pour conserver et resserrer les liens de bonne camaraderie contractés dans les cours, ont fondé, en 1880, une Association des anciens élèves , qui sert une pension de retraite à ses membres, à l'âge de 55 ans. composition des membres de la societe et du conseil d'administration Les sociétaires se recrutent dans toutes les classes de la population lyonnaise. Lés membres du Conseil d'administration appartiennent aux milieux sociaux et aux opinions politiques et religieuses les plus divers et tout le monde s'entend sans peine sur ce terrain neutre de l'instruction et de l'amélioration intellectuelle et morale des masses. distribution DES PRIX Il y a, chaque année, une Distribution de i^rix, où les récompenses sont très recherchées, où l'on voit souvent le père et le fils, ou la mère et la fille, récompensés dans le même coui'S. Ces solennités 1238 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT annuelles sont présidées par les hommes les plus éminonts de France dans la science, les lettres ou la politique, des Minisires, des INIembres de l'Académie française ou de l'Institut, des Inspecteurs généraux de l'Enseignement, etc. PARTICIPATION DE LA SOCIÉTÉ AUX EXPOSITIONS La Société a figuré aux Expositions universelles de 1867, 18-8, 1889 et 1900. Elle a obtenu en i8(3j une médaille de bronze, en 1878 une médaille d'or et en 1889 le Grand Prix. En 1900. elle était hors concours, parce que son Directeur était membre du jury interna- tional des récompenses. PASSÉ ET AVENIR DE LA SOCIÉTÉ. — CONCLUSION En résumé, la Société d'Enseignement professionnel du Rhône poursuit énergiquement le but qu'elle s'est tracé à l'origine et qui se dessine de plus en plus nettement à mesure que son importance augmente : Mettre l'enseignement à la poi-tée de tous et faire en sorte que pas un seul ouvrier ou employé de commerce , à Lyon , ne néglige d'acquérir l'instruction professionnelle ou d'augmenter celle qu'il possède, faute d'avoir à sa portée des cours appropriés à sa profession. Il a été fait beaucoup dans ce sens, mais il reste encore beaucoup plus à faire. Les résultats obtenus déjà, la multiplicité des besoins qui se manifestent sous forme de demandes de cours nou- veaux, la persévérance des élèves à suivre les cours plusieurs années de suite, en commençant par les cours élémentaires pour s'élever par degrés aux cours supérieurs, les perfectionnements que l'expérience indique chaque année dans l'organisation et le fonc- tionnement des cours, tout porte à croire que l'avenu" fournira un champ d'action bien plus considérable encore que le passé. Une remarque intéressante à faire à ce sujet se trouve dans l'âge moyen des élèves des cours. Cet âge moyen tend à devenir de plus en plus faible. C'est un fait qui s'explique ainsi : Dans les premières années de l'existence de la Société, tous les adultes plus ou moins âgés qui désiraient s'instruire sont venus chercher dans les cours nouvellement créés une instruction qui n'était point auparavant à leur portée. Aujourd'hui, plus de la moitié des auditeurs des cours sont des élèves jeunes qui s'habituent à prendre le chemin de ces cours sitôt après leur sortie de l'école. Ils y trouvent le moyen de revoir et de jîerfectionner ce qu'ils ont appris et, de plus, de com- pléter leur instruction primaire par une instruction professionnelle AL. OFFRET. — LES PROGRÈS DE l'eSPÉRANTO DAXS LE MONDE laSg qu'ils ne peuvent trouver à l'école. Ce sont ces élèves qui doivent former la très grande majorité des futurs auditeurs des cours; commençant plus jeunes, ils auront plus de facilité à appi-endre et j3lus de temps devant eux pour suivre un enseignement de plus en plus élevé. Tel est le passé de la Société d'Enseignement professionnel du Rhône, son présent, et aussi son avenir. Elle continuera à appeler à elle tous ceux qui ne savent pas , pour s'instruire , et tous ceux qui savent, pour aider les autres à s'instruire. C'est ainsi quelle obéira au vœu si fécond de ses fondateurs : Réunir dans une pensée com- mune tous ceux qui croient que l'instruction est le levier nécessaire de toute amélioration sociale. M. Albert OFFRET Professeur de Minéralogie théorique et appliquée à la Faculté des Sciences de rUniversité de Lyon Vice-Président de la Société française de Minéralogie LES PROGRÈS DE L'ESPÉRANTO DANS LE MONDE UoS-g] — Séance du ii août — Le 3 aoiit 1900, lors du Congrès de Paris de l'Association française pour l'avancement des Sciences, M. L. de Beaufront, président de la Société française pour la propagation de l'Espéranto, communiquait au Congrès un travail intitulé : Essence et Avenir de l'idée d'une langue internationale ; et ce travail, excellente démonstration de la valeur de l'Espéranto, trouvait place dans le volume des Comptes rendus de l'Association française pour 1900 (i). Le même jour, M. Leau, docteur es Siences, secrétaire de la Délé- gation pour le choix d'une langue internationale, émettait le vœu que l'Association française pour l'avancement des Sciences voulût bien adhérer au programme de la Délégation. Et un vote, émis à Yunani- mité]iav les Sections réunies, donnait satisfaction à ce vœu en même temps que par le choix de ses délégués, M. le général Sébert, (i) L. DE Beaufront. Essence et avenir de l'idée d'une langue internationale. Association française pour l'Ai'ancement des Sciences : 3i' Session. (Paris 1900, t. II, p. io3;.) 124o PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT membre de l'Institut; M. Gariel, professeur;! la Faculté de Médecine de Paris; M. Laisant. examinateur à l'École Polytechnique; M. le commandant Cugnin . l'Association française donnait au programme de la Délégation la meilleure preuve d'intérêt en confiant à des Savants aussi réputés le soin de le défendre en 1904, à Londres, devant le Congrès international des Académies auquel il doit être soumis. Depuis cette époc[ue, les événements ont marché. Le programme de la délégation a reçu l'adhésion de près de deux cents Sociétés françaises ou étrangères, ainsi que les approbations individuelles (les seules qui soient sollicitées) de nombreux Académiciens ou profes- seurs d'Université du monde entier. Et, d'autre part, l'Espéranto a fait, en Finance et à l'étranger, des progrès que l'on peut qualifier à bon droit de considérables. La rapidité véritablement foudroyante avec laquelle des Groupes Espérantistes se sont multipliés en France depuis deux ans est trop connue pour qu'il soit bien nécessaire de la rappeler ici. Mais qu'est devenu l'Espéranto à l'étranger pendant cette même période? La chose est moins connue! Sommes-nous seuls dans le monde à apprendre l'Espéranto comme beaucoup de gens le proclament, avec une sérénité d'autant plus grande qu'ils n'en savent" absolument rien, ou bien, au contraire, notre mouvement espérantiste français est-il accompagné de mouve- ments espérantistes parallèles dans les autres pays? La question est des plus intéressantes et des plus urgentes à éluci- der, car il est bien évident que, si l'Espéranto devait uniquement nous servir à converser entre nous, le mieux serait d'arrêter immé- diatement toute campagne en faveur de l'Espéranto. Le groupe Espérantiste de Lyon, un des plus importants parmi les groupes de province et qui a à sa tête, soit dit en passant, un des savants les plus réputés de cette ville, M. le professeur Lépine, membre correspondant de l'Institut, a tenu à le savoir et à le savoir de première main. Une Commission d'enquête, comprenant à la fois des hommes d'affaires de premier ordre et des savants réputés, a été constituée l)ixv les soins de son Comité. En voici la composition : M. L. Clédat, doyen de la Faculté des Lettres de l'Université de Lyon, professeur de philologie romaine à la dite Faculté, et dii-ectcui' de la Bévue de philologie française. AL. OFFRET. — LES PROGRÈS DE l'eSPÉRANTO DANS LE MONDE I24l M. le D'^ Dor, père, médecin-oculiste; professeur honoraire de l'Univer- sité de Berne. M. Drudin, associé d'agent de change. M. Ferrouillat, directeur du Lyon-Républicain. M. Legouis , professeur de langue et littérature anglaise à la Faculté des Lettres de l'Université de Lvon ; membre du Jury d'agrégation pour l'enseignement des langes vivantes. M. Offret, professeur de Minéralogie théoricjue à la Faculté des Sciences de l'Université de Lyon, vice-président de la Société française de Minéralogie, secrétaire général du groupe Espérantiste de Lyon. M. Patricot, directeur d'Assurances. M. Quinson, fabricant de soieries. M. Soulier, professeur de thérapeutifjue à la Faculté de Médecme de l'Université de Lyon. M. Touchebeuf , ancien fabricant de soiries. Une circulaire fut rédigée en Espéranto et expédiée, par les soins de la Commission d'enquête, dans toutes les parties du monde à des espérantistes étrangers, complètement inconnus, du reste, et dont les noms avaient été fournis par l'Adresaro (Recueil d'adresses) du docteur Zamenhof, l'inventeur de l'Espéranto. Depuis quelques mois, près de 600 réponses, cartes postales ou lettres, des lettres surtout et souvent de très longues lettres, toutes, bien entendu, rédigées en Espéranto, n'ont cessé d'affluer à Lyon. Ces réponses sont déposées à la bibliothèque du groupe , à la dis- position des membres de la Société, pour leur instruction person- nelle et leur propagande. Elles seront l'objet, dans quelques mois, d'une exposition publique. Leur lecture a suggéré à la Commission d'enquête un certain nombre de conclusions qu'elle a cru bon de réunir dans le rapport suivant, autour duquel elle se propose de faire une publicité aussi large que possible. Elle espère que les Membres de l'Association française pour l'avancement des Sciences qui, dès le premier jour, a bien voulu donner à l'idée d'une langue internationale et à sa solution par l'Espéranto un si puissant appui, trouveront cjuelque intérêt à la lecture de ce document. RAPPORT 1° Un premier fait est indéniable. L'Espéranto est actiieUement diffusé dans la majeure partie des pa)^s de langue européenne. Sa principale région de diffusion est naturellement l'Europe ; mais 1242 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT TEspéranto s'est légèrement dilTusé également dans les autres parties du monde et nous avons reçu des réponses de ^2 pays différents appartenant à lEurope. l'Asie, l'Afrique, l'Amérique et l'Océanie. En ce qui concerne l'Europe, notre groupe a reçu des lettres d'Espérantistes étrangers parlant 19 langues différentes correspon- dantes aux aS pays étrangers suivants : 1° Allemagne, Autriche et Suisse allemande; 2'^ Angleterre , avec l'Ecosse et l'Irlande; 3° Belgique et Suisse française; 4° Belgique flamande; 5° Bulgarie; 6° Bohème; -" Danemark, Islande et Nor- wège; 8- Esthonie ; 9- Espagne avec les Canaries; 10" Finlande; II" Hollande; 12° Hongrie; i3° Italie avec la Sicile; i4' Moravie; 15" Pologne; 16" Portugal; 17- Russie; 18" Suède; 19" Turquie. Seuls , en Europe , quelques petits états des Balkans semblent ne point renfermer d'Espérantistes. Il est vrai qu'ils ont d'autres dis- tractions pour le moment. En Asie, l'Espéranto s'est étendu jusqu'à l'Inde anglaise, l'Indo- Chine et le Japon d'une part, et, d'autre part, jusqu'aux confins de l'Asie Russe , aussi bien du côté du Pacifique et de la Chine que du côté du Turkestan et de la Transcaucasie, voire même en Perse. En Afrique, nous avons reçu des réponses de l'Algérie, de la Tunisie , de la Guinée et du Transvaal. En Amérique , nous avons trouvé des coi'respondants aux États- Unis et au Canada pour l'Amérique du Nord; et au Brésil, au Pérou et dans l'Uruguay pour l'Amérique du Sud. Enfin, il n'est point jusqu'en Océanie où nous n'ayons rencontré des Espérantistes. Des réponses nous sont parvenues des Indes Néerlandaises , des Iles Philippines et de la Nouvelle-Calédonie. Ajoutons que des correspondants anglais nous ont affirmé avoir également des correspondants à Shanghaï et à laCôte-d'Or, enAfi'ique, mais personnellement nous n'avons point reçu de lettres de ces pays. 2° En grande majorité, les Espérantistes étrangers sont isolés les uns des autres. Un article de journal, la lettre d'un ami leur a fait connaître l'Espéranto. En très peu de temps ils ont appris la langue, grâce aux manuels qui existent dans presque toutes les langues d'origine européenne ; puis ils se sont mis à correspondre aux quatre coins de l'univers avec des inconnus dont ils avaient pris les noms dans l'Adresaro. Souvent môme, ils se sont liés d'amitié avec ces gens qu'ils n'ont jamais vus et qu'ils ne verront sans doute jamais. AL. OFFUET. — LES PROCHES DE l'eSPÉRANTO DANS LE MONDE 1243 Émerveillés du pouvoir surprenant qu'ils possédaient de corres- pondre sans effort a^ec l'univers entier, ils ont essayé de faire de la propagande autour deux. Le plus souvent, ils n'y ont point réussi. On n'a pas voulu exami- ner leur affaire, on s'est moqué d'eux, on les a traités d'utopistes, oubliant que l'utopie d'aujourd'hui est souvent la réalité de demain. On leur a parlé du volapuk d'un air compétent. On letir a demandé à quoi leur servait l'Espéranto ; et, comme il ne leur faisait gagner ni des cents ni des mille, on les a pris en pitié. Les plus aimables leur ont promis d'apprendre l'Espéranto quand tout le monde le saurait! L'indilTérence et la moquerie ne les ont point ébranlés dans leur conviction. Ils persévèrent dans leur incessante propagande, espé- rant des jours meilleurs, sûrs que l'avenir leur donnera raison. Pour nous, ce sont des jalons d'attente disséminés, nous ne crai- gnons pas de l'affirmer, dans plusieurs milliers de localités. Mais parfois leiw apostolat a en g-ain de cause. Ils ont réussi à convaincre quelques connaissances qui. à leur tour, ont fait la boule de neige. Quelques pays étrangers sont particulièrement intéressants pour le moment, à cause de la rapidité extraordinaire avec laquelle des groupes espérantistes s'y multiplient présentement. En Angleterre, que l'on présageait réfractaire et où la campagne est menée par la revue Concord et par Reçieiv of Reviews, seize groupes espérantistes sont nés en six mois à Londres, Edimbourg, Glascow, Dublin, Bradford, Leeds, Wakefield, Bournemouth, Ports- mouth, Plymouth, Huddersfield, Surbiton, Wandsworth. Keighley, Liverpool et Manchester. Il y faut ajouter les groupes de Bombay et de Colombo dans l'Ile de Ceylan. Et les lettres de nos correspondants anglais nous font présager la création prochaine de plusieurs autres groupes. Il y a six mois, il n'existait qu'un groupe espérantiste anglais, celui de Keighley. En Bnlgarie, on peut dire qu'il n'existe plus actuellement une seule ville un peu importante qui n'ait son groupe espérantiste. Il y en a six déjà en fonctionnement, à Sofia, Philippopoli , Roust- chouck, Kazanlick, Tirnova et Silistrie ; huit autres sont en voie d'organisation à Burgaz, Starazagora, Pleven, Sliven, Kjustaudil, Trojan. Svistor, Lom. Nous n'en finirions pas si nous continuions à énumérer successive- ment tous les groupes espérantistes qui, en dehors de ceux d'Angle- 1244 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT terre et de Bulgarie, se sont fondés en Allemagne, en Autriche, en Espagne , en Italie . en Suisse , en Belgique , en Hollande , en Suède , en Russie d'Europe, en Russie d'Asie et au Canada. Il y a actuellement dans le monde gS groupes espéranlistes. C'est dix fois plus qu'il y a deux ans et. presque chaque semaine , nous apprenons la naissance quelque part dans le monde d'un nouveau groupe espérantiste. 3° Quelle est la condition sociale des Espéranlistes? Les réponses faites à notre questionnaire nous permettent dallir- mer que rien n'est plus varié que le monde espérantiste. Des savants, des négociants, des banquiers, des petits commer- çants, des industriels, des ingénieurs, des professeurs de tout ordre, depuis le professeur d'Université jusqu'à l'instituteur de village, des hommes de loi de toutes catégories, des militaires, depuis des géné- raux jusqu'à de simples soldats, des prêtres, des médecins, des pharmaciens, des architectes, des chimistes, des journalistes, des employés de commerce, des agents des postes, des télégrai)hes et des chemins de fer, des étudiants, des collégiens et jusqu'à de simples ouvriers, bref des gens de toutes les catégories sociales constituent le personnel espérantiste réparti dans l'univers. Les hommes sont en majorité, en grande majorité, mais les femmes espérantistes ne sont point une rareté et elles témoignent dans leurs lettres d'une conviction et d'une ardeur en tous points comparables à celles des hommes. 4° Quel est le degré de facilité d'acquisition de V Espéranto par les étrangers ? Cette facilité est inouïe, en tous points comparable à celle que nous ressentons nous-mêmes, et cela, quelle que soit la langue mater- nelle et le degré d'instruction générale ou linguistique de l'Espéran- tiste. Aucuiï doute ne peut subsister sur ce point quand on a lu les six cents lettres reçues par le groupe espérantiste de Lyon. La commission d'enquête avait pris, en rédigeant son question- naire, toutes les précautions désirables pour que les réponses de ses correspondants fussent probantes, relativement au degré de facilité d'acquisition de l'Espéranto. Pour cela, en même temps qu'elle demandait à ses correspondants leur profession, elle les priait de lui indiquer, non seulement leur langue maternelle, mais aussi les noms des langues vivantes ou mortes qu'ils possédaient. Or, de tous les coins de l'univers, le même avis formel nous est AL. OFFRET. — LES PROGRÈS DE l'eSPÉRAIVTO DANS LE MONDE 1245 parvenu : Oui, TEspcranto est facile, prodigieusement facile pour tous! Pour tous les Espérantistes, possesseurs préalables de langues mortes ou de langues vivantes, plus ou moins bien sues, l'acquisi- tion (le l'Espéranto n'a été qu'un jeu. Et cela est bien naturel, si on réfléchit que, grâce au choix des racines de mots si judicieusement fait par Zamenhof, on possède pour ainsi dire en puissance l'Espéranto quand on connaît d'une part tant soit peu d'allemand ou d'une lang-ue germanique quel- conque (allemand, suédois, norwégien, danois, hollandais, anglais, pour une partie de son vocabulaire) et, d'autre part, tant soit peu de latin ou d'une lang-ue quelconque déricée da latin, français, italien, espagnol, portugais, roumain et anglais, pour l'autre partie de son vocabulaire. Or. quel est l'homme, en situation d'avoir des relations interna- tionales, qui ne possède au moins ce minimum de connaissances linguistiques ? On peut aflirmer que ce tyj)e d'homme n'existe plus. Or, d'erce faible ensemble de connaissances linguistiques, insufli- sant pour lui en permettre l'utilisation, l'homme qui s'adonne à l'étude de l'Espéranto tire un merveilleux parti. Il en extrait, avec un effort en quelque sorte négligeable , une langue vivante capable de lui être utile dans ses relations avec l'univers entier. Et, en écri- vant cette remarque, nous n'apportons pas là une simple apprécia- tion personnelle ; nous ne faisons que répéter la pensée exprimée par les six cents espérantistes répandus sur toute la surface du globe qui ont fait au groupe espérantiste de Lyon l'honneur de réjîondre au questionnaire de la commission d'enquête. Mais ce n'est point tout encore ! Un certain nombre de nos correspondants nous ont déclaré ne connaître aucune langue étrangère, vivante ou morte, et avoir pour- tant appris l'Espéranto avec une rapidité inconcevable. Avaient-ils au moins une culture générale fortement développée ? Pas nécessairement ! C'est ainsi que nous possédons à ce point de vue des lettres extrê- mement démonstratives de simples ouvriers allemands, anglais, esthoniens. moraves, suédois, russes et tchèques. Leur déclaration est formelle : ils ont appris l'Espéranto, seuls généralement, et avec une extrême facilité. Et leurs lettres sont là pour prouver qu'ils le savent. Ce n'est pas ici le lieu de rechercher les causes de ce résultat en 1246 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT apparence invraisemblable pour qui connaît les difficultés normales d'acquisition d'une langue vivante ordinaire. Il faudrait pour cela expliquer en détail le mécanisme de l'Espé- ranto. Or dune part , cette explication nous entraînerait trop loin , et, d'autre part, elle ne convaincrait probablement personne, car, comme dit la Sagesse des Nations : Il faut le voir pour le croire. La Commission d'enquête du groupe Espérantiste de Lyon a vu et elle croit. Ses conclusions sont fort nettes ! Oui , l'Espéranto est bien ce que son auteur a voulu qu'il fût et ce que ses propagateurs ont déclaré qu'il était : Une langue riche , harmonieuse, souple , flexible , dune acquisi- sition extrêmement facile pour tous les peuples ciçilisés et suscep- tible de rendre dans la vie internationale les services les plus étendus et les plus précieux. 5^ Et maintenant se pose une nouvelle et dernière question. Ces services. l'Espéranto les rend-il dès maintenant? Oui et non. — Oui, dans des cas particuliers. Non, d'une manière générale ! A quoi cela tient-il ? Uniquement au nombre encore relativement minime des Espérantistes , car, toutes les fois que les circonstances ont permis à ceux-ci d'entrer en relations d'une façon ou d'une autre,^ l'Espéranto leur a rendu tous les services qu'ils en attendaient. C'est ainsi que, à n'en pas douter, l'Espéranto en voyage est actuellement d'une utilité encore restreinte. Et pourtant des Espérantistes ont pu entreprendre leur tour d'Europe en se servant uniquement de l'Espéranto. Ils allaient d'es- pérantistes en espérantistes et ils en trouvaient tout le long du chemin. Plusieurs des lettres que nous avons reçues provenaient d'Espé- rantistes à qui semblable aventure était arrivée et ils en étaient restés enthousiasmés. Il leur avait fallu prévenir de leur passage; le procédé est compliqué, inférieur à celui des billets Cooks, mais patience, et on trouvera bientôt partout des Espérantistes au lieu d'être obligé d'en chercher. Au point de vue scientifique et littéraire, l'Espéranto ne joue encore qu'un rôle des j)lus modestes , mais la preuve est faite qu'il est en état d'en jouer un des plus considérables. Des traductions admirables d'onivres classiques comme l'Iliade, AL. OFFHET. — LES PROGRES DE L ESPERANTO DANS LE MONDE 124^ la Monadologie de Lei|)nitz. THamlet de Shakespeare, ont prouvé que l'Espéranto était capable de fournir des expressions aux nuances les plus délicates de la pensée. Et un de nos correspondants anglais, homme instruit et cultivé, nous a aflirmé que la lecture de l'admirable traduction espérantiste d'Hamlet par Zamenhof, éditée récemment par la maison Hachette, lui avait révélé des nuances que le texte anglais ne lui avait pas permis de comprendre. Au point de vue scientifique, quel progrès ne serait pas réalisé le jour où les auteurs de travaux scientifiques quelconques croiraient de leur devoir de faire suivre les mémoires qu'ils publient dans leur langue maternelle de courts résumés en Espéranto que pourraient ensuite réunir des revues spéciales. Ils donneraient ainsi à leur pen- sée une vie véritablement internationale, car notre expérience nous permet d'affirmer que personne dans le monde n'éprouverait la moindre difficulté à lire de semblables résumés (i). Quelques articles scientifiques, rédigés en Espéranto, ont déjà eu, du reste, l'occasion de paraître dans différentes revues. Nous n'en citerons qu'un seul, mais il suffira ! C'est l'article rédigé en Espéranto, qu'a bien voulu écrire spécia- lement pour le numéro de mai 1908 de la Revue espérantiste hon- groise, la Lingço Internicia, relativement à la guérison de la tuber- culose, l'éminent professeur Brouardel, Doyen honoraire de la Faculté de Médecine de Paris. L'adhésion d'un homme de cette valeur à la campagne menée en faveur de l'adoption de l'Espéranto devrait suffire à avertir Jes incrédules que leur scepticisme commence à ne plus être que de l'aveuglement rétrograde. Au point de vue commercial , le rôle de l'Espéranto ne cesse de grandir. Tous les espérantistes savent que les annonces en Espé- ranto de produits commerciaux divers se multiplient sur les couver- tures de nos revues espérantistes et que les anciennes se répètent, en même temps que les prospectus commerciaux rédigés en Esi^éranto se répandent. Ce genre de publicité rapporte donc des bénéfices palpables à (t) Un bureau de traductions espérantistes,' destiné à favoriser ladoption de cette mesure, vient i)récisément d'être fondé à Paris par la Société de Relations internatio- nales par l'Espéranto, dont M. Paul Fruictier, 27, Ijouk'vard Arag-o, Paris, est le repré- sentant pour la France. Un bureau analog-ue, quoique plus spécialement destiné à la traduction de corres- pondances commerciales espérantistes, s'ouvrira aussi i)rochainemcnt dans les bureaux du Syndicat d'iidtiative de la ville de Lyon, place Le Vistc. I2/J8 PÉDAGOGIE ET ENSEIGNEMENT ses auteurs, car il n'est point dusage dans le commerce de conti- nuer une publicité qui ne rapporte rien. Le fait n"a rien de surprenant, étant donnée la solidarité incontes- table qui unit pi'ésentement les espérantistes du Monde entier et, d'autre part, les facilités qu'une langue commune leur donne pour correspondre. Nous pourrions, du reste, citer les noms de deux industriels lyon- nais auxquels l'Espéranto a valu des relations commerciales avec l'étranger. Ajoutons de plus qu'un grand nombre de lettres reçues par notre groupe émanent de commerçants et négociants étrangers qui. naturellement, profitent de l'occasion pour nous indiquer leur désir d'entrer en relations commerciales avec notre ville. Pour faciliter le développement de cette tendance d'utilisation de l'Espéranto au point de vue du commerce international, un certain nombre de revues espérantistes ou même non espérantistes publient, o-ratuitement du reste, depuis quelque temps, des listes de Com- merçants acceptant l'usage de l'Espéranto pour leurs correspon- dances internationales. Citons la Lingvo Internacia, éditée en Hongrie, \sl Belga Sonoi^ila (Belo-ique). la Holanda Pionivo (Hollande) et enfin la grande revue anglaise Reçiew of Reçiews. Le bureau des traductions commerciales espérantistes. que notre groupe Espérantiste se propose d'ouvrir prochainement dans les bureaux du Syndicat d'initiative de la ville de Lyon, place Le Yiste, ne pourra évidemment que faciliter l'utilisation de l'Espérantiste dans le milieu commercial lyonnais. Nous espérons d'ailleurs fermement que l'existence de ce bureau ne sera qu'éphémère, la diffusion de la connaissance de l'Espéranto dans notre ville devant le rendi-e rapidement inutile. Si, du reste, nous nous attachons dès maintenant à faciliter par cet organisme la correspondance espérantiste, c'est parce que nous avons la conviction que c'est par la correspondance que l'Espéranto rendra tout d'abord des services d'ordre général. Il suffit de perfectionner ce qui existe déjà, la correspondance entre espérantistes, en la rendant utilitaire. Quiconque a goûté de la correspondance espérantiste ne veut plus, ne peut plus s'en passer. Elle lie connaît pas de renégat. C'est que les jouissances qu'elle procure sont extraordinaires. Dans les pre- miers moments, l'étonnement prédomine, et c'est presqu'avec émo- tion que l'on lit, avec une aisance extrême, ces lettres que vous envoient des quatre coins de l'univers des inconnus, desquels lab- AL. OFFRET. — LES PROGRÈS DE l'eSPÉRANTO DANS LE MONDE I2^q sence dune langue vivante commune vous séparait jadis d'une façon absolue. Cette émotion est même d'une intensité extraordinaire chez «eux que l'ignorance de toute langue vivante séj^arait pour ainsi dire du reste du monde. Ils rêvent dune vie élargie, meilleure. Rien n'est touchant comme la joie dont témoignent leurs lettres. Puis l'accoutumance vient, on s'habitue si vite à ce qui est com- mode , on trouve cela tout naturel ; mais malheur alors à la lettre ou à la circulaire en langue étrangère qui vient parfois se mêler à votre correspondance espérantiste. C'est de l'étonnement. presque de la répulsion, qu'inspire sa lec- ture plus ou moins hérissée de difficultés. On traite de barbare en retard son corresx>ondant. ouljliant que ce soi-disant barbare, c'est actuellement l'humanité presque tout entière, péchant le plus sou- vent par ignorance et parfois par scepticisme, et que l'élite à laquelle on appartient est encore bien peu nombreuse. Le désir de la propagande s'empare de vous. On se demande ])ourquoi : Si l'Espéranto ]»eut servir à tout, à causer en voyage, à j^ublier des travaux scientifiques de tout ordre, à échanger des corresj)on- dances commerciales ou privées avec l'étranger, même à se marier, car l'une de nos correspondantes d'origine suédoise nous a déclaré avoir fait la connaissance , grâce à l'Espéranto , de son futur mari , Tin jeune Russe, pendant un voyage que ce jeune homme faisait en Suède, alors pourquoi ne l'apprendrions-nous pas tous? Nous l'apprendrons quand tout le monde le saura ! Oh la pitoyable réponse faite de préjugés et de scepticisme stérile! Ne faut-il donc plus semer avant de récolter? Sachons attendre . mais en même temps sachons agir ! L'Espéranto a maintenant trop d'adeptes dans le monde et trop «d'adeptes enthousiastes, sérieux et convaincus, pour ne pas continuer à grandir et à s'imposer de plus en plus. Ces premiers Espérantistes sont un peu maintenant dans la situa- tion des premiers alionnés au téléphone. Ils attendent les abonne- ments des autres ; ne les laissez pas s'impatienter ! Donnez à l'Espéranto la seule chose qui lui manque, la force du nombre. Faites comme nous, apprenez l'Espéranto et faites-vous inscrire comme membres de notre Société française pour la propagation de l'Espéranto (lo. place de la Bourse, Paris), à moins que vous ne préfériez la Société des Relations internationales ])ar l'Espéranto 27, boulevard Arago, Paris. En tout cas, n'hésitez qu'entre ces deux solutions. 79* ' I2aO HYGIENE ET MKDECINE PUBLIQUE Ne restez pas indifférents ! Tel est le vœu et le conseil de la Commission d'enquête du Groupe Espérantiste de Lyon. M. H. de MONTRICHER Ingénieur civil des ^lines, à Marseille HYGIÈNE ET DÉMOGRAPHIE DE LA VILLE DE MARSEILLE [614.12(44.91)] — Sàanct' du 5 août — L'assainissement de la ville de Marseille comporte un réseau complet dégoûts, reliés par branchements aux tuyaux de chute, et par bouches d'eau à la voie publique, et pourvus de chasses automa- tiques. Le développement total du réseau est de 225 kilomètres, et il aboutit à un collecteur émissaire de lo kilomètres de longueur, déboiichant au-delà d'un vaste promontoire, au pied de falaises inha- bitées. Inaugurés le 8 octobre 1891 , en présence des corps élus de la ville et du département et de plusieurs ministres, les travaux furent poussés activement. En 1896, le gros œuvre était achevé; il restait à raccorder au réseau les tuyaux de chute; l'opération, que l'opposition ou tout au moins l'inertie des propriétaires d'immeubles rendit labo- rieuse , sera prochainement terminée ; il est donc possible d'appré- cier, dès aujourd'hui, les résultats de l'entreprise. D'après le recensement de 1901 , la commune de Marseille com- porte une population totale de 491 -i^i halntants. dans laquelle la population municipale compte 474-23G habitants, répartie en 38,356 maisons et 136.924 ménages, chiffres qui correspondent à 12,4 habi- tants et 3,5 ménages par maison. Cette population couvre une surface de 28.195 hectares, mais- l'ao-glomération composée de 896. o33 habitants occupe environ 2.000 hectares; sa densité est de 198 habitants par hectare, à raison de i5,8 habitants et de 3,2 ménages par maison. H. DE MONTRICHER. — HYGIÈNE ET DÉMOGRAPHIE I25l L" agglomération compte aS.ooo maisons environ; le service de l'assainissement comprend 20.341 immeubles, soumis à l'obligation du raccord à l'égoût ; il resterait donc environ 4.700 immeubles considérés comme non assainissables. Le nombre de raccords exécutés est, au 3o juin iqoS, de 16. 365, d'après la répartition annuelle suivante : 1896 iio 1897 1.233 1898 4.298 1899 5.004 i9f>o 3.100 M)oi I 202 1902 577 1903 (un semestre) . . 861 Nombre total des raccords. i6.365 Il resterait donc environ 4-ooo maisons à raccorder, soit environ 1/5 du nomljre total pour compléter les travaux d'assainissement de la ville de Marseille, au point de vue de l'évacuation des matières usées (i). Pour apprécier les résultats de cette grande entreprise, dont la dépense incombant à la caisse municipale seule a atteint 34 millions, il y a Heu de foire l'étude comparative de l'état sanitaire de l'agglo- mération marseillaise, antérieurement et au cours des travaux et, à cet effet, d'en dresser le bilan démographique, tant pour les nais- sances que pour les décès; le taux de la natalité est. en effet, au point de vue de l'état général d'une population, une indication utile ; on a remarqué, d'ailleurs, que les décès et les naissances progressent presque partout dans le même sens et que si, par suite des amélio- rations dues à une meilleure hygiène privée et collective et à de judicieux travaux d'assainissement technique, la mortalité à fléchi notablement dans tous les pays civilisés , la natalité a suivi sensible- ment le même mouvement. (i) L'assainissement, en tant que nettoiement de la voie publique et traitement des gadoues, est résolu depuis iHSj par l'emploi intégral de ces matières à la fertilisation des plaines de la Crau d'Arles. ia.y2 HYGIKXE ET MEDECINE PUBLIQUE Natalité et mortalité générales de la Commune de Marseille de 1891 à 1902 Années 1891 1892 1893 1895 1890 1898 1899 1900 1901 1902 Population 406.916 447.344 491. 161 Taux moyen de la période déc'*' précédente Taux moyen de la période 1891-1901 . . . Taux moyen de la période 1891-1896 . . . Taux moyen de la période 1896-1901 . . . Natalité par i.ooo habitants 28,4 27,8 27,2 26,4 26,2 26,8 25,3 ■ 24,8 24,6 2'3.6 2'3,5 23,9 28,72 25,62 26,90 24,40 Mortalité par i.ooo habitants 28,1 27.9 28,7 26,7 26,5 26,6 24,2 22,3 26,6 25,4 23,6 22,2 3i,4o 25,55 27,50 24,50 La période 1896-1901 est celle au cours de laquelle les raccords aux égouts ont été exécutés ; la diminution du taux de la mortalité y est sensible; la natalité suit, de son coté, une marche descendante, quoique moins rapide; il faut donc, dans l'accroissement considé- rable de la population générale, faire une petite part au croît physio- logique. Mais les chiffres ci-dessus ne sont que des moyennes globales et, lorsqu'on fait l'analyse de leurs éléments disparates, on en dégage des résultats variables et inattendus. La commune de Marseille est divisée en 12 cantons (8 cantons avant le recensement de 1901). La population des i''% 2% 3% 4% 8« et ije cantons est exclusivement agglomérée; celle des 5% 6"^ 7^ gt 9« cantons, qui comprennent des faubourgs disséminés et s'étendent au loin dans la campagne, ne l'est que partiellement et sa densité est partout peu élevée; enfin la population du 12'^ canton, qui couvre plus de 10.000 hectares, est exclusivement éparse. Nos observations ne porteront que sur les cantons désignes dans le dernier recensement comme ayant une population exclusivement agglomérée; dans les autres cantons, les délimitations administra- tives ont varié à diverses reprises (le plus souvent suivant les besoins du fisc) et les indications que l'on en tire sont quelque peu confuses 1 H. DE MONTRICIIER. — HYGIÈNE ET DÉMOGRAPHIE 1253 et parfois anormales. Nous les laisserons donc de côté pour le moment, faute d'éléments suffisamment contrôlés, sauf à y revenir dans une prochaine étude. Notons seulement que dans le ri'' canton, où la population de 13.395 habitants, d'une densité de i,25 par hectare, est répartie à raison de 5,4 habitants par maison et de 4,1 habitants par ménage, les taux moyens par mille de la natalité et de la mortalité ont été respectivement, pendant la dernière période décennale, de ^'j,6 et de 61,5. Nous avons donc établi, comme base d'études démographiques de l'agglomération de Marseille, un tableau donnant, par canton, la population (1901), sa densité, le taux de son accroissement, le taux d'encombrement, enfin les taux de natalité et de mortalité générales. Ce tableau donne lieu à de nombreuses observations. On y cons- tate, en premier lieu, le parallélisme de la natalité et de la mortalité, avec quelques oscillations. Sauf dans les S^ et ii« cantons, où la population s'est notablement accrue et où des terrains vagues se sont couverts de constructions neuves, l'exécution des travaux d'assainissement ne paraît pas avoir amené un abaissement très sensible de la mortalité. Dans le premier canton (vieux quartiers) où la densité et l'encom- brement de la population atteignent des chiffres inconnus ailleurs, même dans les quartiers les plus populeux de Paris, la mortalité est excessive (43 0/00), mais néanmoins inférieure à la natalité. Dans le 2<^ canton, habité par le haut commerce et où régnent la richesse et le bien-être, l'abaissement de la mortalité a été peu sen- sible. Dans les 3« et ^^ cantons, quartiers des Ports neufs, des gares industrielles et des grandes usines, la mortalité s'est au contraire accrue. 1254 HYGIENE ET MEDECINE PUBLIQUE Q < o Q H H 'H H }^ u Q H M -rj ce H ;ii en o: O H "<. oc' es '<. < -ex X r. en O < Vf Cl i^ M :r- X « vr ^' iC ^ vr 7\ T^ M X fO ^. M -y-s 0) V— VT es r^ 01 »n i^ vr 01 1^2 fO 01 vr V-T cr yr. c^ vr 01 01 X i*^ HM X l^ vS- X Ci vr vi- 'O ■* 01 ol f^ X X X vr 01 X VP r>> vr 01 T^ 01 01 o X i^ 01 r^ ^ 01 HM4 - 01 es vr 01 vr 01 VT 01 vt o^ vr 01 v^ 01 T. U X 01 01 X X VT 01 X VT vr CH. MOROT. — PROCÉDÉS d'iNSPECTION SANITAIRE DES ANIMAUX 1255 M. Gh. MOROT Vétérinaire-Inspecteur de l'Aliattoir de Troyes -LES DIVERS PROCÉDÉS D'INSPECTION SANITAIRE DES ANIMAUX SACRIFIÉS DANS LES ABATTOIRS PUBLICS POUR L'ALIMENTATION DE L'HOMME [6i4.3iJ — Séance du 5 août — La salubrité des viandes n'est réellement garantie que par le con- trôle minutieux, détaillé et méthodique, du bétail, avant et après Tabatage. Ce résultat n'est pas général, car beaucoup de bêtes d'abattoirs sont tuées sans visite préalable et l'autopsie en est souvent rudimen- taii'e. Un tel état de choses changerait aisément si les pouvoirs publics consentaient à faire tout leur devoir, en prescrivant au commerce de l'alimentation de subordonner sa technique professionnelle à la technique sanitaire. Cette subordination s'imposerait sans inconvénient aux intéressés exerçant loyalement leur métier. La préparation commei'ciale des viandes doit subir quelques modi- ■9 ... fications pour répondre aux nécessités de la nécropsie sanitaire. Il importe de voir disparaître des coutumes défectueuses , notam- ment celles consistant : i° à sortir de l'abattoir des animaux simple- ment saignés, non dépouillés de leur peau, nullement ou à peine éventrés, encore munis de la totalité ou d'une partie des viscères ; 2° à ouvrir incomplètement la poitrine, l'abdomen et le bassin ; 3° à laisser indivise la région cervico-dorso-lombaire du gros bétail et des porcs ; etc. L'insutïisance de l'inspection sommaire, dépendant de ces habitudes surannées, empêche la constatation de beaucoup de maladies infec- tieuses ou parasitaires, de lésions traumatiques , de néoplasies. etc. Il est indispensable d'y remédier par la pratique courante d'une inspection étendue, portant post morteni sur toute la surface du tissu sous-cutané, à la face interne de la bouche, des cavités nasales, de la poitrine et du ventre ainsi que sur le poumon, le cœur, le dia- phragme, la rate, le foie, le pancréas, les reins, les estomacs, les intestins et les ganglions lymphatiques viscéraux. 1256 HYGIÈXE ET MÉDECINE PUBLIQUE Il y a lieu d'appliquer aux ani^uaux suspects ou malades l'inspec- tion intégrale, portant sur tous les organe?, ganglions, cavités et par- ties autres que les points ï)réeités , avec ou sans entailles explora- trices selon l'exigence des cas. Des incisions révélatrices sont même nécessaires sur certains ani- maux non douteux en apparence, mais dont les tissus profonds sont susceptibles de renfermer des lésions cachées. Elles sont à recom- mander : i'^ pour les porcs et les bœufs, parce que la ladrerie passe souvent inaperçue à vm examen superficiel de leurs corps ; 2° pour les chevaux à robe grise ou blanche qui constituent un terrain d'élec- tion des tumeurs mélaniques, etc. L'examen microscopique des tissus ou liquides organiques s'impose pour les animaux qui semblent atteints ou suspects de maladies parasitaires, microbiennes, etc. L'emploi de tous ces procédés n'est pas toujours facile, car le commerce de l'alimentation s'obstine souvent dans ses anciens erre- ments opposés aux pratiques d'une inspection rationnelle. Certains intéressés abandonnent parfois leurs viandes, plutôt que de les sou- mettre aux investigations des innovateurs, et intentent à ceux-ci des actions en dommages-intérêts. A un inspecteur ainsi assigné en 1902 devant le Tribunal civil de Troyes, les juges ont donné gain de cause dans les termes suivants : « Le Directeur de l'abattoir a le droit de soumettre les animaux « abattus à une inspection minutieuse , que les bouchers sont tenus « eux-mêmes de lui faciliter ; ainsi, dans le cas où iî juge utile de « porter ses investigations sur un organe particulier , les bouchers « n'ont qu'à se soumettre à ses prescriptions et sont obligés de pré- ce parer l'animal de manière à rendre possible et même à faciliter les^ « constatations du service sanitaire... » Le droit de contrôle rationnel des viandes alimentaires a été hau- tement reconnu dans ce jugement. Il importe qu'il soit consacré par l'État et que les inspecteurs puissent l'exercer librement, sans crainte de se voir intenter des procès onéreux. A cet effet, j'émets le vœu : « Que le Gouvernement impose à bref délai , par un décret . une « réglementation des principaux procédés d'inspection des viandes « et laisse aux vétérinaires-inspecteurs l'initiative rationnelle néces- « saire pour tous les cas non prévus. » DOCUMENTS Les extraits suivants des règlements municipaux de diverses villes indiquent d'une part l'existence de certains usages défectueux , CH. MOROT. — PROCEDES D INSPECTION SANITAIRE DES ANIMAUX 120-J d'autre part celle de quelques prescriptions destinées à faciliter l'onivre hygjiénique et sanitaire des vétérinaires-inspecteurs. 1. Règ-lement des abattoirs du Mans (Sarthe). 19 sci)lembre i856. Les l^œufs, vaches, veaux dits casse-seaux et moutons sont « entière- ment dépouillés de leur peau ». Les veaux de lait et les jeunes agneaux ne le sont qu'à l'extrémité des quartiers pour l'estampillag-e (art. 3i). 2. Règlement d'abattoir de Blois (Loir-et-Cher). 8 septembre 1871. « Les veaux laissés en peau » sont dépouillés dans les parties à estam- piller (art. i3). — Les intéressés doivent se prêter aux investigations que l'inspecteur juge nécessaires pour les besoins du service (art. Sa). 3. Règlement de police de Dôle (Jura). (3 novembre 1873. Art. 141. « Les veaux, moutons, brebis ou chèvres, sont enlevés lorscjue le sang est entièrement écoulé et que les intestms ont été retii"és. — Les veaux et agneaux peuvent sortir non dépouillés, mais ouverts et débar- rassés de leurs issues. » 4. Règlement d'abattoir de Parthenay (Deux-Sèvres). 23 décembre i8~3. Les préposés de l'aliattoir examinent attentivement les animaux intro- duits « et, pour faciliter cet examen, ils ont le droit de les faii"e attacher ou de les faire marcher sous leurs yeux, aussi longtemps qu'ils le jugent nécessaire » (art. 11). 5. Règlement d'abattoir de Chambéry (Savoie). 12 juin 1874- Après l'abatage, les porcs, veaux, moutons, clièvres et chevreaux sortent en moitiés ou entiers, dépouillés ou dans leur peau, au gré des bouchers ou charcutiers; les boeufs et les vaches sont transportés par quartiers (art. Sa). 6. Règlement d'abattoir de Saigon (Cochinchiiie). i" décembre 1875. Les viscères et intestins doivent rester aux côtés des animaux abattus, sinon la viande est enfouie (art. 5). 7. Règlement d'abattoir de Cannes (Alpes-Maritimes). i5 février 1878. Tous les animaux aballns restent « entiers avec leurs viscères, à l'ex- ception des intestins », jusqu'à l'inspection (art. 10). — Les taureaux, bœufs ou vaches, peuvent sortir en quartiers , les porcs et veaux en moi- tiés, les moutons, chevreaux et agneaux entiers (art. 18). 8. Règlement d'abattoir de Béthnne (Pas-de-Calais). a6 juin 1878, Jusqu'à l'inspection, les animaux abattus restent non dépecés et « les mtestins sont laissés dans le corps sans qu'aucmie ijartie en soit détachée, sauf le sac et les boyaux » (art. 12). 9. Règlement de boucherie de Saint-Etienne (Loire). lO mai 1880. L'art. 30 est reproduit par l'art. 3i de Montpellier, 1886, n° 16. 10. Règlement d'abattoir de Pontoise (Oise). 24 novembre 1881. Les assujettis doivent se conformer aux instructions de l'inspecteur pour faciliter l'mspection (art. 17). 11. Règlement d'abattoir d'Arras (Pas-de-Calais). 5 novembre 1884. Les bouchers et les charcutiers « laissent jusqu'après l'inspection les 1258 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE viscères dans le corps des animaux sans en soustraire aucune partie » (art. 35). 12. Règlement d'abattoir de Besançon (Donbs). a) i" octobre 1878 ; b) aj janvier i885. Les veaux, agneaux et chevreaux peuvent sortir non dépouillés, mais après avoir été ouverts et débarrassés de leurs issues. Toutefois cette facilité i^eut être retirée en cas d'inconvénient pom- la perception des droits d'octroi (art. 61 a et b) (i). i3. Règlement d'abattoir de Mo?itpellier (Hérault). 3o mars i885. Les art 17 et 36 sont reproduits par les art. 16 et 3i de Montpellier 1886, n° 16. L'art i5i exige la présence d'un inspecteur à l'ouverture et au dépeçage de tous les animaux. 14. Règlement d'abattoir d'Albertville (Savoie). 3i mars i885. L'art. 54 reproduit l'art 52 de Chambéry, 1874? n° 5. i5. Règlement d'abattoir de Fontenay-le-Comte (Vendée). 6 août i885. Le vétérmaire peut faire attacher les animaux ou les faire marcher sous ses yeux aussi longtemps qu'il le juge nécessaire; il exige toujours qu'ils soient conduits à pied au hangar ou à la halle d'abatage (art. i3). 16. Règlement d'abattoir de Montpellier (Hérault). 10 juin 1886. Défense d'emporter les viscères des grands animaux avant l'inspection (art. 16). — Les solipèdes abattus sortent en moitiés ou quartiers avec la tête , après ouverture préalable des cavités nasales et examen minutieux du poumon , afin de permettre une appréciation complète de leur état de santé (art. 3i). — Les. animaux suspects ne sont ouverts et dépecés qu'en présence tl'un inspecteur (art. i4o). 17. Règlement d'abattoir de Montauban (Tarn-et-Garonne). 22 sep- tembre i88(). Les viscères des grands animaux ne sont pas emportés avant l'inspec- tion et les poumons restent adhérents à un quartier de devant (art. 12). 18. Règlement d'abattoir de Toulon (Var). 8 mars 1887. « Les abatis de cochon, sang, mou, foie, intestins, etc., etc., ne peuvent, sous aucun prétexte, être enlevés avant la visite » (art. 10). 19. Règlement d'abattoir de Bolbec (Seine-Inférieure), i*""' octobre 1887. Les poumon, cœur, foie restent aux échaudoirs respectifs jusqu'à l'ins- pection (art. 21). 20. Règlement d'abattoir de Tonnerre (Yonne). 1^'' mars 1888. Sauf les cochons qui sont grillés ou échaudés , tous les animaux tués sont entièrement dépouillés de leur peau (art. 24). 21. Règlement d'abattoir de Carcassonne (Aude). 10 septembre 1888. La tête — avec les cavités nasales ouvertes — et les poumons de chaque solipède abattu sont examinés avec sohi » (art. 24). (i) Celte prescription est reproduite : i' par les Règlements de l'ab itloir de Dijon du 29 novembre iS58, art. '34, et du 25 avril 1884, art. 8i, moins les mots : « et les (■//civeaH.v » ; 2» par le Règ-lemenl de l'abattoir de Beaune du 29 juillet 18S4, art. 45, moins la seconde phrase. CH. MOKOT. — PHOCÉDÉS d'iNSPECTIOX SANITAIRE DES ANIMAUX IQOQ 22. Règlement d'abattoir d'Antibes (Alpes-Maritimes). 20 octobre 1888. Les animaux alialtus « sont laissés entiers avec leurs viscères, à l'ex- ception des intestins », jusqu'à l'inspection (art. 9). 2'3. Règlement d'abattoir de Nîmes (Gard). 3i octol>re 1888. Les viscères ne sont détachés des grands animaux qu'après l'inspec- tion (art. i()). — Les agneaux de camp ou de lait sortent de l'aliattoir « avec le poumon, le cœur, le foie et la rate dans le thorax » (art. 29). — Les agneaux de lait sortent avec la tète adhérente (art. 3o). 24. Règlement d'abattoir de Castres (Tarn). 12 mars 1889. Tout animal tué est inspecté entier avec poumon et foie adhérents (art. 19). 25. Règlement d'abattoir de Limoges (Haute-Vienne). 7 novembre 1889. Les animaux tués sont inspectés complètement habillés et fendus (art. 10). — Défense d'emporter avant l'insjjection aucun organe ou vis- cère, notamment le ijoumon, le foie, et de gratter, racler ou enlever quoi cfue ce soit de la face interne de la poitrme et du ventre (art. 11). — En toutes circonstances, le vétérùiaire directeur peut exiger toutes coupes ou manipulations qu'il juge nécessaires, pour s'assurer de l'état réel des viandes, ou prélever des échantillons indispensables pour un examen microscopirpie (art. 25). 26. Règlement de boucherie de Xantes (Loire-Inférieure). 23 octobre 1889, L'art. 20 est re[)roduit à peu près par l'art. 25 de Limoges 1889, n" 25. 27. Règlement d'abattoir de Narbonne (Aude). 27 décembre 1889. Avant l'inspection, aucun organe ou partie d'organe, les viscères, pou- mon, foie, rate, les séreuses thoracique et abdominale ne doivent être détachés des animaux tués (art. 19). — La tète des solipèdes abattus est conservée et les cavités nasales sont mises à nu, ainsi (pie la pituitaire, pour assurer qu'il n'existe aucune trace de maladie ancienne (art. 39). 28. Règlement d'abattoir de Chambéry (Savoie). 3o avril 1890. Les art. 47 et 57 sont reproduits par les art. 4^ et 58 d'Annecy 1897, n*^ 4^» moins les mots : « la rate et la panse » de l'ai't. 45. 29. Règlement d'abattoir de la Flèche (Sarthe). 10 décembre 1890. Le poumon et le foie doivent être inspectés ; les bœufs et vaches s'en- lèvent entiers ou en quartiers, mais les autres animaux sortent non dépe- cés (art. i()). — Les bœufs, vaches, vean.x et moutons sont entièrement déijouillés de leur peau, mais les veaux de lait et les jeunes agneaux ne le sont qu'aux extrémités de chaque quartier afin d'être marqués (art. 28). 30. Règlement d'abattoir de Mourmelon-le-Grand (Marne). 14 octobre 1891. Les art. 12 et i3 rei)roduisent l'art. 48 de Vitry-le-Francois 1893, 11° 32, mouis les mots : « entièrement habillés ». 3i. Règlement d'abattoir de Rive-de-Gier (Loire), i^'' novembre 1891. Les animaux abattus restent au pendoir jusqu'à l'inspection, les rognons intacts (reins et enveloppe graisseuse), le poumon adhérent aux côtés, les séreuses pariétales ni enlevées , ni grattées , sans enlèvement ni net- toyage d'aucune partie des chairs, smon la marchandise est déclarée I2(k) HYGIÈNE ET MEDECINE PUBLIQUE impropre à la consommation de la ville (art. 71). — Défense denlever les issues et abats avant l'inspection, sous peine de refus de la marchandise pour l'alimentation (art. 72). — Le vétérinaire assiste à Tabatage des che- vaux, puis il examine « les viandes et tous les ^■iscères » après rhabillage en vue dune appréciation complète (art. '--'S). — Les charcutiers pré- sentent à l'mspection les viscères thoracicpies et al)dominaux, « ainsi que la séreuse intacte sur les côtés » (art. 90). — Le vétérinaire assiste à l'aba- tage des animaux suspects, en suit rhabillage et en fait Tautopsie (art. 62). 32. Règlement d'abattoir de Vitry- le -François (Marne). i.5 mars 1893. Les animaux tués sont inspectés entièrement habillés avec « les viscères fixés naturellement en place, les plèvres et le péritoine encore adhérents et non grattés » (art. 4-5). 32'"'s. Règlement des abattoirs de Calais (Pas-de-Calais). 20 juillet 1893. Les poumons, le cœur et le foie restent à Tabattoir jusqu'à l'inspection (art. 3;). — Les animaux suspects sont abattus en présence des inspec- teurs ou conservent les organes et viscères adhérents (art. 36). 33. Règlement d'abattoir d'Agen (Lot-et-Garonne). 20 juillet 1893. Les animaux al)attus sont inspectés « en entier, les viscères adhérents, le péritoine et la plè^Te non grattés » (art. 20). 33ft's. Règlement d'abattoir de Meliin (Seine-et-Marne). 3i janvier 1894. Défense de soustraire les panses, intestins, organes à l'inspection (art. 2(5). 34. Règlement d'abattoir de Mézières (Ardennes). 21 février 1894. « Les poumons et le foie restent attachés à l'animal abattu jusqu'après rinsfiection » (art. 18). 35. Vérification des viandes à Cherbourg (Manche). Règlement du i3 mars 1894. Les introducteurs de viandes foraines « doivent, sur l'indication de l'inspecteur, faire telle coupe de débit qui lui paraîtrait utile et, au besoin, des entailles pour permettre de percevoir l'odeur et la coloration, celles- ci ne pouvant être connues qu'au moj^en de coupes fraîches » (art. 4)- 3(). Règlement d'abattoir de la Rochelle (Charente-Inférieure). 26 no- vembre 1894. Les veaux et agneaux conservent leur peau , mais les bœufs . vaches et moutons en sont entièrement dépouillés (art. 23). 3;. Règlement d'abattoir de Troyes (Aube). 29 décembre 1894. Les animaux sont inspectés entièrement hal)illés, après fente complète des bœufs, taureau.x, K'aches , porcs, chei'au.x . mulets. Aucmi organe ou partie d'organe, les viscères, le poumon « en particulier », ne sont enlevés de l'échaudoir avant l'inspection (art. 61). — Les viandes et abats sont placés selon les instructions du service, sans soustraction ni substitution (art. O2). — Les assujettis sont tenus de faciliter l'inspection des animaux ^•ivants, des viandes et abats « qui leur apijartiennent, qu'ils sont chargés de jiréparer ou dont ils ont la garde » (art, 63). — « Les parties altérées, dont l'habillage nécessite l'enlèvement, doivent être conservées pour être CH. MOROT. — PROCÉDÉS d'IXSPECTION SAXITAIRE DES AXLMAUX I26l présentées à l'inspection. Défense de faire un épluchage étendu sans auto- risation, d'enlever a^ant la visite les traces de lésions des chairs et abats, les cysticerques des viandes ladres, la plèvre et le péritoine en grattant et pelant totalement ou partiellement l'intérieiu- de la poitrine et du ventre (art. (i4). — Si l'inspection d'un porc ne révèle cpi' un grain de ladre, les épavUes sont détachées et examinées soigneusement, en présence du propriétaii-e. Si cet examen ne fait décou^-rir aucun autre grain, le décou- page n'est pas contmué : s'il n'est retrouvé qu'mi ou deux grains, le porc est découpé eu morceaux convenalîles à la vente eu vue de la recherche d'autres cysticerques (art. Ik») (i). — Les cavités nasales des solipèdes abattus sont ouvertes chaque fois cjue cette opération est reconnue néces- saire (art. -6). 38. Règlement d'abattoir de Xevers (Nièvre). 3o janvier 1896. Les animaux sortent de l'abattoir dépouillés, ouverts et vidés, entiers ou par quartiers, mais les veaux « peuvent être enlevés dans leur peau » avec les extrémités dépouillées sur ime surface suftîsante pom' l'estam- pillage. « à moins ciue l'inspecteur n'en décide autrement pour procéder à mie vérification plus minutieuse » (art. Sg). 39. Règlement d'abattoir de Gap (Hantes-Alpes). 12 juin 1896. Les art. 22 et 26 sont reproduits par les ai't. 45 et 58 d'Annecy, 1897, n" 4^7 moins les parties en itaUques et avec la substitution des mots « pourra être enfouie » au mot u enfouie » de l'art. 45. 40. Règlement d'abattoir de Castelnaudary (Aude). 10 septeml^re 1890. Les art. 11 et 3i reproduisent les art. 19 et 39 de Narbonne (Aude), 1889, n^ 2-. 41. Règlement sanitaire vétérinaire de Saint-Etienne (Loire). 10 mars 189;. Les inspecteurs peuvent pratiquer ou ordonner les entailles et décou- pures nécessaù"es à leurs constatations (ai*t. 119). Les issues, notanuuent le pomuon, ne sont pas emportés et la plèvre n'est ni arrachée ni déta- chée avant l'inspection (art. 1-20). Le gros bétail est enlevé par moitiés ou quartiers, les veaux et porcs entiers ou par moitiés, les ovins et caprins entiers (art. i36). L'estampillage est ditféré au lendemain quand l'état de salubrité dune viande ne peut être détermmé séance tenante et sans un examen plus approfondi (art. 126). 42. Règlement d'abattoir de Muret (Haute-Garonne). 27 mai 1897. Les issues doivent rester adhérentes à l'un des quartiers, a afin que l'identité en soit régulièrement établie et qu'aucune substitution ne puisse se produire » (art. 8). 43. Règletiient d'abattoir d'Annecy (Haute-Savoie). i5 novemljre 1897. « Les pomnons, la rate, le foie et la panse des bœufs, vaches, taureaux et génisses, la tète des porcs restent adhérents, et avant tout partage, à l'animal abattu », jusqu'à l'inspection, sans c£ue quoi que ce soit puisse (1) Cft article (Vj est la reproduction île Tarticle 9 du Règlement d'abattoir de Troyes du 5 avril 1S8S, de Fart. 21 du Règlement d'abattoir de Sainte-Savine (Aube), du 2; dé- cembre 1SS8. et de l'art. 10 du Règlement d'abattoir de Pont-a-Mousson du 2 février 1892. 1262 HYGIÈNE ET MEDECINE PUBLIQUE être gratté, raclé ou enlevé à la face interne de la poitrine on du ventre, sinon la viande sera refusée et enfouie. « Toutefois, si les parties ci-dessus désignées avaient été enlevées par accident et que la viande de ranimai soit saine, le Maire pourra, sur le rapport écrit et motivé de l'Inspecteur, autoriser la mise en vente de cette viande » (art. ^h). — a Les animaux entiers peuvent être transportés dépouillés dans leur peau y> (art. 58). 44. Règlement d'abattoir de La Mure (Isère). i5 octobre 1898. Le vétérinaire visite les parties intérieures du corps, il peut faire les entailles nécessaires et j^rélevcr toutes les parties utiles pour s'assurer de l'état des viandes (art. 12). 45. Règlement d'abattoir de Roubaix (Nord), a) 11 décembre 1891, art. 8; b) 23 octobre 1894, art. 8; c^ 20 juillet 1898, art. i5. Inspection des viscères, notamment du poumon des espèces bovine et ovine. 46. Règlement d'abattoir de Roanne (Loire), a) 3i janvier 1889, art. 66; b) 10 décembre 1898, art. 61. Sous aucun prétexte, le poumon et le foie ne peuvent être utilisés ou supprimés avant l'inspection. 47. Règlement d'abattoir de Montbrison (Ivoire). 19 décembre 1898. Les art. 35 et 3^ sont la reproduction des art. 120 et 126 de Saint- Étienne, 1897, n° 41 • 48. Règlement d'abattoir de Cognac (Charente). 22 mars 1899. Les art. 107, 108, 109 et 114 reproduisent — moins les i^arties italicjues — les art. 61, 64 et 69 de Troyes. 1894, n" "ij. 49. Règlement d'abattoir de Chdlons-sur-Marne. 16 juin 1899, Défense d'emporter avant l'inspection des animaux abattus : 1° les panses et intestins (art. 21 et 3o), aucun organe ou partie d'organe, les viscères, poumon, foie (ai-t. 55, § 3). L'Inspecteur peut faire pratiquer, sans préjudice pour les intéressés, les entailles nécessaires à la constata- tion de l'état réel des viandes (art. 55, § 4)- Tout animal signalé aux inté- ressés comme douteux est saisi d'office en cas d'enlèvement des viscères avant la visite (art. 56). 50. Règlement d'abattoir de Tarare (Rhône). 18 avril 1900. « Les poumons des animaux sains ou malsains ne sont détachés des bœufs, taureaux, vaches, génisses, moutons, brebis ouchevraux » qu'après l'mspection (art. 6). Les viscères de ceux tués « en dehors des heures réglementaires » restent à l'abattoir jusqu'à la visite (art. 7). 5i. Règlement d'abattoir de RomiUy-sur-Seine (Aube). i5 octobre 1900. Les art. 38, 39 (§ i et 2), 40, ^i, 47 ^t 53 reproduisent respectivement les art. 61, 62, 63, 64, 69 et 76 de Troyes 1894, 11° 37, avec l'addition suivante du § 3 dudit art. 39 : Les intéressés transportent immédiatement à la salle d'autopsie, sur les indications du service, les viandes offrant des lésions quelconques suscejjtibles de motiver une saisie totale ou jjartielle. 52. Règlement d'abattoir d'Hyères (Var). i4 décembre 1900. Le foie, le poumon, la rate, le cœur, recouverts de Tépiploon, et la tête restent adhérents aux agneaux et chevreaux (art. 59). — Les proprié- CH. MOROT. — PROCÉDÉS d'iNSPECTION SAKITAIRE DES ANIMAUX 1263 taires, abatteurs ou g-arçons, sont tenus de faciliter la visite des animaux vivants , des viandes et abats (art. 62). — L'inspecteur pratique ou fait pratiquer dans les organes suspects les coupes ou manii)ulations néces- saii"es (art. 64). — Défense d'enlever, par épluchaye ou grattage, des lésions morbides des chairs ou abats (art. 65). — Saisie d'office de tout animal signalé douteux au propriétaire et dont les viscères ont disparu (art. 66). — L'art. 77 est semblable à l'art. 126 de Saint-Étienne 1897, no 41. — Les gros bovins sont enlevés par quartiers; les veaux et porcs, par moitiés; les ovins et capi^ins,- entiers (art. iio). 53. Règlement d'abattoir de Béz-iers (Hérault). 21 mars 1901. « Jusqu'après la marque et sous peine de saisie , les animaux abattus ne peuvent être dégarnis de leurs organes viscéraux et de leurs gan- glions lymphatiques » (art. 18). — « La tête — avec les cavités nasales ouvertes, — les poumons, le foie et la rate de chaque solipède abattu sont examinés avec soin » (art. 28). .54. Règlement d'abattoir d'Avallon (Yonne). 20 mai 1901. Les tripiers n'enlèvent « les dedans (foie, rate, poumon) qu'après la marque des viandes » (art. 16). 55. Règlement d'abattoir d'Hénin-Liétard (Pas-de-Calais). 10 mai 1902. L'art. 48 reproduit l'art. 35 d'Arras 1884, n» 11. 56. Règlement d'abattoir de Langres (Haute-Marne). 6 juin 1902. Les poumon, cœur, foie, rate ne peuvent être emportés qu'après l'ins- pection (art. 46). — « Les bouchers et charcutiers ne pourront en aucun cas se refuser à pratiquer ou à laisser pratiquer les coupes à travers la chair musculaire, les ablations ou incisions d'organes que l'inspecteur jugera nécessaires pour l'éclairer dans son diagnostic. — Les refus seront constatés par un {jrocès-verbal, transmis immédiatement à l'auto- rité et la viande demeurera séquestrée jusqu'à ce qu'il ait été statué » (art. 5o). 57. Règlement d'abattoir de Troyes (Aube). 22 août 1902. Les art. 76, 77, 78, 79, 81, 88 reproduisent les art. 61, 62, 63, 64, 69 et 76 de Troyes 1894, n° 37, avec les additions suivantes : Les chaudins peuvent, après autorisation, être emportés avant la fente complète des porcs (art. 76). — L'inspection se fait toujours au pendoir (art. 78). 58. Règlement d'abattoir de Saint-Nazaire (Loire-Inférieure). 29 jan- vier 1903. Les viscères restent à l'échaudoir et la peau adhère à la tète jusqu'à l'inspection (art. 32). ANNEXES Les règlements d'abattoirs ci-dessous contiemient les prescrij^tions sui- vantes : Les viandes et issues sont visitées : à Bordeau.x, 10 mars 1864 (art. 10); à Ao-de (Hérault), i5 décembre 1866 (art. 11); à Alais (Gard) i*"'' jan- vier 1880 (art. 19); à Poitiers, i4 janvier i885(art. 22); à Verdun (Meuse), 27 avril i885 et 3 novembre 1888 (inspection art. 6); à Joinville (Haute- J264 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE Marne), 4 noveml)rc 1891 (arl. 4 cl 26): à Saiiiniir, -Jij dLCciiibre 18912 (art. i;); à Bau,-iù'rt's-de-Big-orre, 26 juillet i8<)4 (art. 4); à Dax, i^'' avril i88q et 10 juin 1894 (arl. 12); à Castelnaiidary. 10 septembre 1896 (art. 5). Les parties intérieures du corps sont visitées à Grenoble, 10 décembre i88"3 (arl. 20): à Valence (Drame), 4 juillet 1895 et 4 avril 1898 (art. 20): à Privait (Ardéche), i" octobre 1897 (art. 8). Délense d'emporter avant l'inspection aucun organe ou partie d'organe, les viscères, le poumon en particulier : à Dijon, 5 janvier 1888 (art. 18) et 16 avril 1892 (art. 68); à Otdéans, 20 septembre 1888 (art. 7); au Havi^e , 25 juin 1891 (art. 2'3 et 56); à Bourges, i" octobre 1893 (arl. ;2); k Meliin, 3i janvier 1894 (arl. 65) ; à Vier:-on-Ville (Cher), i5 février 1895 (art. 69); à Firminy (Loire), 24 août 1895 et 17 mai 1896 (art. 5); à Nevers, 3o jan- vier 1896 (art. 65); à Vierzon-Villag-e (Cher), 18 mars 1896 (art. 16); à Chaïunont (Hante-Marne), 20 juin 1896 (art. 45); à Lang-res (Haute- Marne). 29 août 1897 et II février 1901 (art. 45); à Ang'ers, 1 5 février 1903 (art. 86). Défense de soustraire des viandes et abats ou viscères à l'inspection à Troyes, 20 août i885 (art. 4) et 5 avril 1888 (art 6); à Épinal, 5 août 1888 (art. II); à Sainte-Savine (Aube), 26 décembre 1888 (arl. 16); à Foix (Arièg-e), 4 janvier 1890 (art. 5); à Vej^tus (Manie), 19 juin 1891 (art. 36); à Chalons-sur-Marne, -26 août i8t)i (aH. 12); à Vitry-le-François, i5 mars 1893 (art. 48); à Caen, i" août 1897 (art. 64); à Sermaize-les-Bains (Marne), i3 noveml)re 1902 (art. 32). Défense d'emporter avant l'inspection : i" les viscères à Carcassonne, 10 septembre 1888 (art 12) (grands animaux); k Marseille, i*^»- octobre 1894 (arl. 27); à Amiens, i4 décembre 1899 (art. i); à Hyères, i4décembre 1900 (art. 61); 2° les viscères des grands animaux, le poumon en particulier, à Saint-ÉUeunne (Loire), 16 mai 1880 (art. 9); à Antibes (Alpes-Maritimes), 29 août 1895 (arl. 2). Les animaux sont inspectés entièrement habillés : à Chalons-sur-Marne, 26 août 1891 (art. 11), à Caen, i" août 1897 (art. 63). A cette condition s'ajoute la fente complète : 1° des animaux, à Orléans, 20 septembre 1888 (art. 7); II" tles bœufs, vaches, porcs, chevaux, mulets, à Troyes, 20 août i885 (art. 2) et 5 avril 1888 (art. 5); IH" «les bœufs, taureaux, vaches, porcs, chevaux, ânes et mulets à Saint-Diz-ier (Haute-Marne), 20 avril 1887, (arl. 5); IV" des bœufs, taureaux, vaches, chevaux, ânes, mulets à Sainte-Sa<^ine (Aube), 26 décembre 188S (art. 10); V" des bœufs, taureaux, vaches, porcs, veaux, moutons, chevaux k Epinal, 5 août 1888 (art. 10); YL des bœuifs, taureaux, vaches â Foix, 4 janvier 1890 (art 4). Les animaux abattus doivent sortir de l'abattoir « dépouillés, ouverts et vidés » : à Tours, 11 janvier 18G2 (art. 8); à Bourges, 3o avril i8()4 (art. 34) et i5 mai 1891 (arl. 32) (entiers ou par <[uarliers); à Pau, i5 jan- vier 1872 (art. 24); à Dax, i^' avril 1889 et 11 juin 1894 (art. 27) Les entailles ou découpures nécessaires à la constatation de l'état réel des viandes peuvent être pratiquées ou ordonnées par l'inspecteur : à Troyes (dans un local spécial), 20 août i885 (art. 5); à Saint-Dizier (Haute-Marne), -20 avril 1887 (arl. 7). L'inspecteur peut les i)rati(pier : à Grenoble (Isère), 10 décembre i8S3 (art. 20); à Valence (Drônie), 4 juillet 1895 cl 4 avril 1898 (art. 20), à Privas (Ardèche), i"' octobre 1897 (art. 8). D"" PIGNET. — DU COEFFICIENT DE ROBUSTICITÉ 1265 Il peut les ordonner : i° à Caen, i" août 1897 (art. 64) ; 2° sans préjudice pour les assujettis : à Trojes, 5 avrU 1888 (art. 6); à Épinal (Vosges), 5 août 1888 (art. 11); à Foix (Ariège), 4 janvier 1890 (art. 0); à Vertus (Marne), 19 juin 1891 (art. 36); à ChdIons-siir-Marne, 26 août 1891 (art. 12); à Vitrj-le-François, i5 mars 1893 (art. ^S), k Sermaize-les-Bains (Marne), i3 novembre 1902 (art. 32). Défense d'enlever, gratter ou racler les séreuses des parois thoraciques et abdominales :kTrojes, 5 avril 1888 (art. 6); kÉpinal,5 aoûti888(art. 11); à Orléans, 20 septembre 1888 (art. 7); à Sainte-Savine (Aube), 26 décembre 1888 (art. 16); à Vertus (Marne), 19 juin 1891 (art. 36); à Châlons-sur- Marne, 26 août 1891 (art. 12); à Vitry-le-François, i5 mars 1893 (art. 48); à Caen, i" août 1897 (art. 64); à Sermaize-les-Baim (Marne), i3 novembre 1902 (art. 32): Défense de faire disparaître les traces d'une maladie quelconcpie à Epinal, 5 août 1888 (art. 11); à Chdlons-sur-Marne, 26 août 1891 (art. 12); à Vitry-le-François, i5 mars 1893 (art. 48). M. le W PIGNET Médecin -Major de 2= classe DU COEFFICIENT DE ROBUSTICITÉ. — NOUVEAU MODE D'APPRÉCIATION DE LA FORCE PHYSIQUE DE L'HOMME AU MOYEN D'UN « INDICE NUMÉRIQUE » TIRÉ DES TROIS MENSURATIONS : TAILLE, PÉRIMÈTRE ET POIDS. [5.73.6J — Séance du 6 août — En 1897, M. le D'" Granjux, dans son mémoire sur la tuberculose dans larmée (i), préconisait, parmi les moyens de défense contre l'envaliissement de la phtisie, l'éloignement des sujets qui, par la faiblesse de leur constitution, semblent prédisposés à la maladie. Pour arriver à ce résultat, il serait utile, disait-il, « de déterminer au moyen des rapports du périmètre et du poids avec la taille , un minimum de robusticité et d'ajourner tous les conscrits qui ne rem- pliraient pas ces conditions. » L'année suivante, le médecin-major de i"^^ classe Mackiewicz cher- chait , au moyen des dimensions du corps , à établir ce minimum de robusticité (2). Après avoir montré l'inutilité des mesures moyennes (i) Revue de la Tuberculose. (2) Bulletin médical, i" mai 1898. 80* 1266 HYGIÈJJE ET MEDECINE PUBLIQUE du périmètre et du poids, il en arrivait à déterminer les mesure» minima au-dessous desquelles une recrue se trouve toujours à un deo-ré de robusticité insuffisant. Par ces travaux la voie était ouverte; nous avons essayé à notre tour de la suivre. Avant eu l'occasion, comme jeune aide-major, de faire seul la visite d'incorporation au 35« régiment d'artillerie, en 1896, nous avions relevé avec le plus grand soin et conservé dans nos notes personnelles la taille, le poids et le ijéi'imètre des 5io hommes qui composaient le contingent de la classe 1895. Retrouvant ces notes quelques années plus tard, nous avons cherché à tirer de ces mesures l'indication de la force physique. Nous savions déjà que chacune des mensurations prise à part est incapable de donner la solution cherchée ; mais il nous semblait qu'on devait pouvoir les comljiner en une formule simple et en extraire un chiffre qui . à lui seul, exprimerait la valeur physiolo- gique de l'individu; ce serait son coefficient de robusticité. Tel était le problème que nous cherchions à résoudre. Nous pen- sons avoir atteint ce but et voici comment nous y avons été amené. I. De l'ixdice numérique Chez l'individu normal, le périmètre égale au moins la moitié de la taille , il augmente donc avec elle ; de même le poids dans les organismes normaux doit s'accroître en même temps que la taille. Ces trois quantités, ayant une marche parallèle, devaient, nous send^le-t-il , conserver entre elles une différence constante chez les individus normaux, quelle que fût leur taille. Nous eûmes alors l'idée d'additionner le périmètre et le poids et de soustraire de la taille la somme ainsi obtenue. Soit un total de i"^54 (i54 centimètres) dont le périmètre thoracique est de 78 centimètres et le poids 54 kilos. Nous faisons la somme de ce périmètre et de ce poids : 78 -f- ^4 = i32. Cette somme est ensuite soustraite de la taille : i54 — i32 =: 22. Recommençant la même opération pour un homme normal de grande taille, i'^'j'2 par exemple, avec un périmètre de 86 centimètres et un de 64 kilos, nous avions : 86 + 64 == i5o, somme qui, soustraite de la taille, donne encore 22 comme reste (172 — 100 = 22^. La constatation de ces premiers résultats nous amena à faire le même calcul pour toutes les tailles, en prenant, pour chacune d'elles, le périmètre moyen et le poids moyen calculé d'après les données de M. le Médecin Major Marty. Nous devions avoir, pour toutes les opérations, un reste à peu près constant et le résultat, en effet. D"" PIGNET, — DU COEFFICIENT DE KOBUSTICITÉ I267 répondit à notre attente. Il est facile de s'en rendre compte en exa- minant le tableau suivant : i54 -(:8 + 54) i32 = 22 u6o -(81 + 57) i38 — 22 i65 — (83 + 60) 143 = 22 170 — (86 + 62) 148 = 22 175 — (88,5 -(- 64,5) i53 =z 22 180 — (91 -|- 67) i58 ^ 22 etc. Puisque, pour toutes les tailles, dans les cas moyens, le reste de notre soustraction était sensiblement le même, nous nous sommes demandé si ce reste, qui devait nécessairement varier avec les indi- vidus, ne pouvait pas traduire la force physique de l'homme. Dans cet ordre d'idées nous avons, pour les 5io hommes composant le contingent de 1896 , retranché de la taille la somme du périmètre et du poids ; nous avons obtenu ainsi , suivant les cas , un reste variant de o à 37. Nous avons alors pris le registre d'incorporation et mis en regard du chiffi'e du reste de la soustraction la cote physiologique portée sur le registre. Nous avons constaté une concordance parfaite : l'homme était d'autant plus fort que le reste de la soustraction était plus petit; d'autant plus faible, au contraire, que le reste de la soustraction était plus grand. Voici, en eiïet, ce que nous avons relevé. Reste inférieur à 10 = Constitution très forte. Reste de II à i5 inclus =: Constitution forte. Reste de 16 à 20 — ^ — bonne. Reste de 21 à 25 — = — bomie (moyenne) Reste de 26 à 3o — = — faible Reste de 3i à 35 — = — très faible Au-dessus de 35 — = — très médiocre. Nous appuyant sur cette constatation, nous avons donné au Reste de la soustraction, entre la taille et la somme du périmètre et du poids, le nom de Indice numérique ou Valeur numérique de l'homme. Notre calcul, simple et rapidement fait, s'exprime par la formule suivante : Indice numérique = Taille — (Périmètre -\- Poids) On peut se rendre compte, par les exemples qui précèdent que le chiffre de l'indice numérique est d'autant plus grand que la consti- 1268 IIVGIÈNE ET MEDECINE PUBLIQUE tution est moins bonne; d'autant plus petit, au conti-aire, que la force physiologique est plus grande. Ainsi, le simple énoncé de l'indice numérique nous semble pou- voir indiquer la force physiologique d'un homme. L'indice 22 indique une constitution bonne moyenne; si le chiffre est plus élevé, la constitution est moins bonne ; s'il est moins élevé , elle se trouve meilleure. Nous pouvons classer les indices numériques par groupes de cinq , correspondant aux constitutions , comme nous venons de le voir. Un cas spécial peut se présenter dans la recherche de l'indice numérique. La somme du périmètre et du poids peut parfois égaler la taille ou même la surpasser. On peut avoir, par exemple, pour une taille de i m. 70, un périmètre de 95 cent, et un poids de 75 kilos, dont la somme sera 170. Un tel homme aura naturellement un indice numérique égal à zéro : 170 — (95 -)- 7.5) 172 =10. Taille — (Périmètre -|- Poids) Somme = I. N. Il peut arriver même qu'avec une taille de i m. 67, un homme ait un périmètre de 95 cent, et un poids de 77 kilos. 11 donnera alors la formule suivante : 167 — (9.5 + 77) 172 = + 5 Taille — (Pcrim. + Poids) Somme = I. N. Dans ce cas, nous indiquons le résultat en faisant précéder l'indice numérique du signe -\-. En réalité, le résultat d'une telle opération arithmétique devrait être précédé du signe — ; cependant, nous préférons mettre le signe -]-. pour bien indiquer qu'il s'agit d'un homme auquel il ne manque rien et dont la somme du périmètre et du poids est même supérieure au chiftre de la taille. Le fait, du reste, est assez rare ; nous avons rencontré dix fois seulement un indice numérique supérieur à zéro et cinq fois égal à zéro, dans 5io mensu- rations. Dans ces cas, il s'agissait d'hommes très bien constitués et non atteints d'obésité. II. Indice numérique de l'homme eï morbidité La valeur de l'indice numérique , en tant que mode d'appréciation de la force physique de l'homme , avait trouvé sa vérification dans les jugements des constitutions inscrits sur le registre au moment de D"" PIGNET. — DU COEFFICIENT DE ROBUSTICITÉ I269 l'incorporation. Cette première vérification de l'exactitude du nou- veau moyen que nous préconisons pour déterminer la valeur physio- logique de l'individu ne nous a pas suffi. Nous avons voulu faire, pour ainsi dire, la preuve par la pathologie. Pour cela, nous avons cherché s'il existait une relation entre l'indice numérique du soldat et la résistance qu'il présente à la maladie. Les hommes dont l'indice numérique est très bon sont-ils moins souvent malades que ceux dont l'indice numérique est faillie, ou n'existe-t-il aucun rapport entre ces deux données : indice numérique et morbidité? Pour élucider ce point, notre étude a porté encore sur les 5io hommes de la classe iSgS, incorporés au 35^^ régiment d'artillerie. Les 5io hommes de ce contingent se divisaient, au point de vue de l'indice numérique , de la façon suivante : ! Zéro ou supérieur à -|- i = i5 hommes de là 5 inckis = 28 » KH 1 ^ 1 ^ 1 de 6 à 10 de II à i5 » = O2 = 104 de i6 à 20 » = i3o » w 1 de 21 à 2.5 » ^ 95 r> a f de 26 à 3o » = 5i » 3 de 3i à 35 » = 20 » -^ l inférieur à 35 Total. )) 1-^ » 5io hommes Voyons ce que sont devenus ces hommes pendant leur séjour au régiment, ce qu'ils ont fourni d'entrées à l'hôpital et à l'infirmerie, le nombre de jom^nées de traitement, et rapprochons ces données de l'indice numérique. Pour l'hôpital le nombre des entrées comme fiévreux et comme blessés s'élève à 104. Quelle est la répartition de ces entrées par rapport à l'indice numérique des hommes ? A ce point de vue , les blessés intéressent peu, puisque les accidents sont indépendants de la valeur des organismes. Pourtant nous avons constaté que le noml^re d'entrées de blessés va en diminuant, à mesure que l'indice numérique est moins bon. Cela tient sans doute à ce que les hommes dont l'indice numérique est faible sont, en général, des ouvriers : cordonniers, tailleurs, bourreliers, menuisiers, etc.. qui, ti-avail- lant la plupart du temps dans les ateliers, sont moins exposés que les autres aux traumatismes. C'est ainsi que, sur les vingt-cinq hommes qui ont un indice numérique inférieur à 3o, dix-sept sont ouvriers et par conséquent ne font guère de service actif. Au con- 1270 HYGIENE ET MEDECINE PUBLIQUE trah*e, le nombre d'entrées de fiévreux est d'autant plus grand que l'indice numérique est plus faible. Le tableau ci-dessous met ces faits en évidence. GROUPES d'indices numériques Nombre de blessés Nombre de fiévreux Nombre d'hommes dans chaque groupe Quantité pour cent de blessés Quantité pour cent de fiévreux OBSERVATIONS -|- (le I et 0 )) 1(1) i5 » (),(3(i (I) Oreillons. I à 5 inclus 3 5(2) 28 10.71 17,85 (2) Oreillons. 6 à 10 )) 8 6 62 12,90 ().(38 II à i5 » 10 12 104 9'6i 11,54 i6 à 20 » II i5 i3o 8,46 11,54 21 à 25 » 5 i5 95 5,26 i5,9' 26 à 3o » 2 6 5i '^,92 ii,7<> 3i à 35 » I 4 20 5,00 20,00 A l'aide de ce tableau on peut établir la courbe suivante (Jig. i) qui montre encore plus clairement l'exactitude de ce que nous avançons : Mombre de jours de maladie pour 1000 Groupes des Valeurs Numériques i la 5 6 a 10 Il à 15 I6é20 2laî5 i6a30 31 a 35 10 S 8 7 6 5 k ï 1 / / f^ / / /^^ \^^ ^-^^ -y _J ^v / i i 1 1 i FiG. I. Pom' le groupe d'indices numériques de i à 5 nous avons un chiffre de 1^,85 0/0, qui est très fort, mais ce chiffre est donné par cinq entrées fournies par un groupe de 28 hommes seulement, et trois de D'' PIGNET. DU COEFFICIENT DE ROBUSTICITE 1271 ces malades ont été atteints d'oreillons. C'est donc un cas excep- tionnel, et nous allons voir, du reste, que le nombre de journées passées à l'hôpital pour cette classe d'indices numériques de i à 5 est peu considérable. Le temps passé à l'hôpital ou en convalescence peut ne pas être proportionnel au nombre des entrées ; il doit fournir aussi un rensei- gnement précieux. De plus, en étudiant le nombre des entrées, nous n'avons pas pu tenir compte de la durée de présence des hommes au régiment. Or, parmi les soldats du contingent dont nous nous occupons, beaucoup sont partis au bout d'un an comme dis- pensés, beaucoup au bout de deux ans, une batterie ayant alors quitté le régiment. Afin d'éviter cette cause d'erreur, nous avons relevé le temps de présence pour chaque homme. Nous sommes arrivé à savoir, par exemple, que les hommes d'indice numérique supérieur à l'unité, au nombre de quinze, ont, à eux tous, fourni un total d'années de service égal à 35 ans, soit 12.775 jours. Pour chaque groupe de cinq indices numériques nous avons établi ainsi la dm^ée de présence au régiment. Nous avons fait ensuite le relevé du nombre de journées passées soit à l'hôpital, soit en convalescence, et nous avons ainsi obtenu un total de journées de maladies pour chacun de nos groupes de cinq indices numériques. Nous ne nous sommes occupé ici absolument que des fiévreux. Comparant le temps de maladie avec le temps de présence, il est facile de savoir combien de journées pour i.ooo ont été passées à l'hôpital ou en convalescence relativement, toujours, à l'indice numérique des hommes. Les résultats de cette recherche sont consignés dans le tableau suivant : GROUPES d'indices numériques I à 5 iiickis, 6 à 10 » II à i5 » 16 à 20 » 21 à 25 » 26 à 3o » 3i à 35 » NOMBRE de journées de maladie 65 286 612 35o 334 182 NOMBRE de journées de présence 20 . 440 44.895 81 . 760 102. 565 77.380 40. i5o 16.060 NOMBRE de journées de maladie pour i.ooo jours de présence ■3,18 %„ 6,37 7oo 4,94 «/oo 5.97 Voo 4,52 o/„„ 8,3i o/oo 8,21 o/„„ 12^2 HYGIÈNE ET MEDECINE PUBLIQUE A l'aide de ce tableau, on peut établir la courbe suivante (fi g- 2) Nombre d'entrées pour cent ^ Groupes des Va eurs Numériques Observations làS 6 à 10 Il à 15 16 à 20 ?laî5 26à30 31 a 35 20 15 10 5 1 iD Trois cas d'oreillons 0 .' /*y j / ^t^'^' \-J / / S V xf V ■^_,, FiG. 2. D'après ce qui précède, l'homme est donc d'autant plus sujet aux maladies que son indice numérique est plus faible. Nous avons fait pour l'infirmerie le même travail que pour l'hô- pital, au point de vue du nombre d'entrées et du temps passé à l'in- firmerie. Les résultats obtenus ont été absolument concordants avec ceux de l'hôpital. H evit été intéressant de voir la relation qui existe entre l'indice nu- mérique et les sorties définitives de l'armée par réforme, retraite, etc., ou les décès. Le contingent que nous étudions a donné lieu à six réformes, il a présenté deux décès ; ce n'est pas avec des points de comparaison aussi minimes qu'on peut arriver à des conclusions précises. Il y a tout lieu de croire, du reste, que, puisque la morbi- dité est grandement influencée par l'indice numérique, la mortalité et les réformes doivent suivre la même marche. IIL Applications de l'indice numérique L'étude qui précède sur la morbidité par rapport à l'indice numé- rique nous démontre bien que cet indice représente exactement la valeur physiologique de l'homme. Cette donnée peut trouver son application dans les corps de troupe et, à ce propos, nous ne pou" D^ PIGNET. — DU COEFFICIEXT DE ROBUSTICITÉ 127'^ vons mieux faire que de citer les conclusions d'un très long mémoire de M. le D'^ Butza, médecin chef de l'hôpital militaire « Regina Elisa- beth », à Bucarest, mémoire paru dans la Revista Sanitara mUitara, en mai 1902, et d'un mémoire de 1903 portant sur 816 observations. « Nous avons acquis la conviction, dit l'auteur, que la constitution physique de l'individu est très justement exprimée par le coefficient de robusticité Pignet. Ainsi, nous sommes arrivé aux conclusions suivantes : « Tout homme ayant l'indice Pignet au-dessus de 10, et par consé- quent une constitution faible, très faible ou très médiocre, d'après le tableau de M. le D'' Pignet, peut être exempté du service mili- taire , mais seulement après avoir passé deux fois devant le conseil de révision et avoir été ajourné; en procédant autrement, la morbi- dité et la mortalité dans l'armée seraient augmentées. « Au moyen de l'indice numérique pris dans les corps de troupe à certains intervalles, nous pouvons nous faire une idée juste de l'état de santé d'un homme ; si l'indice grandit, nous devons faire un examen médical complet et prendre des mesures en conséquence. » Nous avons tenu à reproduire quelques-unes des conclusions de ce mémoire, j)arce que les recherches qui ont amené M. le D"" Butza et les médecins qui se sont occupés avec lui de cette question ont porté sur un très grand nombre d'hommes. Nous sommes bien persuadé, pour notre compte personnel, que l'indice numérique pris dans les corps de troupes de temps en temps, tous les six mois par exemple, serait un moyen de surveillance effi- cace et certain de la santé des hommes et un moyen de surveillance auquel personne ne pourrait échapper. C'est là, croyons-nous, le plus grand service que peut rendre l'indice numérique, et nous l'uti- liserons ainsi nous-même avec beaucoup de profit. Dans tout ce qui précède, nous avons vu l'indice numérique appli- qué à des hommes de 20 à 20 ans. Il peut être applicable à tous les âges , aux jeunes gens , par exemple , dont il permettra de suivre le développement. Dans ce dernier cas, le chinVo moyen ne sera plus 22. il faudrait, pour ainsi dire, transposer l'échelle. Un enfant de i4 à i5 ans, de force moyenne, aura, sans doute, un indice numérique aux environs de 3o. De nombreuses recherches seraient encore à faire sur ce point. L'indice numérique donne une cote physiologique précise qui . forcément, ne peut j)as varier avec les expérimentateurs et qui. dans bien des circonstances, pourrait fournir un élément d'appré- ciation fixe, une base solide pour des statistiques. Il pourrait, 12^4 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE peut-être, trouver une application utile dans les cas d'assurances sur la vie. Nous espérons pouvoir poursuivre nous-mêmes nos travaux sur ces questions; mais nous serions heureux de voir des expérimenta- teurs s'intéresser à notre indice numérique et nous aider dans nos recherches. Avant de terminer, il nous reste à mentionner un appareil à calculer spécial que nous avons inventé et qui nous permet de trouver l'indice numérique avec une très grande rapidité et sans erreur possible. Le maniement en est extrêmement simple et on peut faire facilement les calculs pour 200 hommes, en une heure, a^ec un peu d'habitude. M. le D> H. HENROT Directeur de l'Ecole de Médecine de Reims DE LA NÉCESSITE DE COMPLËTER LA LOI SANITAIRE DU 15 FÉVRIER 1902 [6i4(o9)J — Séance du 6 août — Lorsque la discussion de la loi sanitaire a été portée à l'ordre du jour de notre section, personne ne demandant la parole sur ce sujet, M. Heni'ot a demandé la permission de soumettre quelques réflexions à ses collègues. La nouvelle loi sanitaire , si elle est méthodiquement et scrupu- leusement appliquée , pourra rendre les plus grands services à l'hy- giène; la déclaration oljligatoire des maladies contagieuses, la désin- fection, la vaccine obligatoire, l'amélioration des logements, la sur- veillance de l'adduction des eaux constituent des progrès très réels et très sérieux; cependant telle qu'elle est rédigée, en laissant aux Préfets et aux Conseils généraux le soin d'organiser, dans le dépar- tement, la direction des services sanitaires, la loi risque d'être mal appliquée ou de ne pas l'être du tout. Nous savons par expérience combien est difficile l'application d'une loi sanitaire ; il est impossible de faire de l'hygiène sans léser des D"^ H. HEXKOT. — LA NÉCESSITÉ DE COMPLÉTEll LA LOI SANITAIRE 12^5 intérêts particuliers de toute nature ; de là l'hésitation des autorités administratives et la crainte de mécontenter des électeurs influents. Pour ne citer qu'un exemple, la loi de i8;4 pour la protection de la première enfance, la loi Roussel comme on l'appelle si justement, est promulguée depuis près de trente années ; elle n'est pas encore appliquée dans tous les départements ; nous pourrions citer beau- coup d'autres exemples. Les deux rapporteurs de la loi de 1902 au Sénat et à la Chambre des députés, les D" Cornil et Langlet , avaient compris la nécessité d'une organisation méthodique. Pour ne pas créer un nouveau fonc- tionnaire dans chaque département, on a laissé aux Préfets la faculté d'organiser ce service, au lieu d'en imposer l'obligation ; c'est une faute grave ; tout le monde sait que les Préfets sont essentiellement des personnages politiques ; les Sous-Préfets , directement sous la surveillance de leur chef, n'ont aucune initiative ; les maires enfin , en contact direct avec leurs concitoyens, s'efforcent d'éviter de prendre des mesures qu'ils savent de prime abord devoir être mal accueillies. La personne chargée de faire appliquer la loi doit avoir, vis-à-vis du corps électoral, une complète indépendance ; depuis plus de vingt ans nous réclamons la création d'un chef du bureau d'hygiène départemental qui ferait pour le département ce que fait le chef du Bureau d'hygiène municipal pour la commune ; nous réclamions non pas un inspecteur chargé de faire des rapports qui vont s'entasser dans des dossiers qu'on ne lit pas, mais un fonction- naire technique , responsable , dirigeant effectivement tous les ser- vices de l'hygiène, comme l'ingénieur en chef dirige le service des Ponts et Chaussées. Ce directeur, au lieu d'être un agent du Préfet, eût été directement placé sous la surveillance du Directeur général de l'hygiène publique au Ministère de l'Intérieur et du Conseil d'hy- giène départemental. Sans ce véritable chef de service, réunissant les qualités d'un savant et d'un administrateur, il est à craindre que, comme la loi Roussel , dans 3o ans la loi sanitaire ne soit pas appli- quée. Le choix de ce chef de service est très important; on avait voulu confier cette direction à un fonctionnaire c[ui existe déjà, l'inspecteur des enfants assistés; mais le rôle modeste de cet inspecteur, chargé de vérifier si les enfants soumis à son contrôle sont bien soignés , là où ils sont placés, n'est pas du tout celui qui convient au Dii-ecteur de la santé publique ; il faut un véritable homme de science, un doc- teur en médecine ayant fait un stage à l'Institut Pasteur ; il fiiut un hygiéniste et en même temps un bactériologiste habile, capabU' de 12^6 • HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE faire des analyses microbiennes des substances alimentaires et des eaux potables; sans cela le service sera mal assuré, la loi ne sera ]3as appliquée. Devant la nécessité pour l'État de faire des économies, nous avons pensé que ces idées, depuis longtemps émises et défendues par nous, pourraient être simplifiées et modifiées ainsi qu'il suit. L'Administration départementale a été admirablement organisée par ses créateurs ; elle répondait très bien aux idées de centralisation qui s'imposaient il y a un siècle, alors qu'il y avait peu de routes, pas de chemins de fer , pas de télégraphes et pas de téléphones ; aujourd'hui, cette vieille organisation n'a pas sa raison d'être ; elle est très coûteuse et elle ne rend de service qu'au point de vue poli- tique. Les sous-préfets sont des rouages inutiles entre les maires et le préfet; évidemment on en reviendra aux groupements analogues, à ceux qui constituaient autrefois les anciennes provinces. Du reste, pour l'armée, pour linstruction supérieure, pour les cultes, la France est divisée en un certain nombre de régions ayant pour centre une grande ville ; pourquoi n'en serait-il pas de même pour l'hygiène. Dans l'Est, par exemple, Paris, Lille. Nancy, Reims, Dijon, villes possédant des Facultés ou des Ecoles de Médecine, des laboratoires de physique, de chimie, de bactériologie, deviendraient le centre de la direction des services de la santé publique ; on trou- verait facilement des professeurs d'hygiène , des directeurs de lalio- ratoires de bactériologie qui, renonçant à l'exercice de la médecine, se consacreraient exclusivement au rôle important de directeurs régionaux de la santé publique. Tout ce qui concerne l'hygiène serait centralisé dans leurs mains, ces directeurs dépendraient direc- tement du directeur général de l'hygiène publique au Ministère de l'Intérieur et du Comité consultatif d'hygiène publique de France. Il serait homogène, complètement placé en dehors des influences politiques et des influences locales, ayant une direction unique, et sous la direction du corps le plus autorisé et le plus compétent qui réunit tous les hommes qui, en France, se sont distingués dans cette science spéciale, ce service pourrait alors veiller à l'application de cette loi sanitaire et accomplir de grandes améliorations que les Anglais et les Américains ont su réaliser. Un exemple seulement fera bien comprendre toute l'importance d'un service d'hygiène bien organisé. Tant que l'île de Cuba était sous la dépendance de l'Espagne, dont le service sanitaire était mal organisé, la fièvre jaune faisait de ter- Dr AD. LOIR. — l'iNSTITUT PASTEUR EN RHODÉSIE I277 ribles ravages ; tous les ans , des centaines de malades succomljaient à cette terrible maladie. Sous la direction savante et vigoureuse des États-Unis, qui ont appliqué et fait exécuter les mesm^es nécessaii-es, on a enregistré seulement une dizaine de cas l'année dernière et pas un seul cas cette année. Nous, les compatriotes de Pasteur, ne nous laissons pas constam- ment devancer par les peuples jeunes qui nous prennent nos plus belles conquêtes scientifiques , non seulement pour les admirer, mais pour les appliquer efficacement en vue du plus grand bien des popu- lations et on peut dire de l'humanité ; à notre tour imitons leur har- diesse et leur résolution. A la suite de cette communication et après discussion , la section émet le vœu suivant , voté à l'unanimité : Pom* assurer le bon fonctionnement de la loi sanitaire , la section émet le vœu qu'il soit créé dans les différentes parties de la France , autant que possible dans les centres qui possèdent déjà des labora- toires de bactériologie, des directeurs techniques responsables, chargés, sous la dii-ection du directeur général de l'hygiène publique, d'assurer l'exécution méthodique et complète de la loi sanitaire du i5 février 1902. M. le D^ Adrien LOIR Ancien Préparateur de M. Pasteur Professeur d'hygiène à l'École Nationale supérieure d'Agriculture coloniale L'INSTITUT PASTEUR EN RHODÉSIE — SéaJice du 8 août — Le 6 septembre 1902, l'Institut Pasteur recevait une dépèche venant de Londres, de la Chartered Compagnie de l'Afrique du Sud, deman- dant le départ immédiat d'un expert pour la Rhodésie. Il s'agissait de traiter les cas de rage et de prendre les mesures nécessaires pour ai'rêter l'épidémie qui venait d'apparaître entre le Zambèze et le Transvaal. Mes maîtres voulurent bien me proposer de me charger de cette mission. Le but principal de mon voyage était donc d'organiser la lutte 12^8 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE contre la l'age; mais, dès rinstallation do l'Institut Pasteur de Bula- wayo, on vint de tous les côtés me soumettre des problèmes dont on me demandait de chercher la solution; c'est ainsi que j'ai été amené à faire les études qui font l'objet de la présente communication. LA RAGE DANS L AFRIQUE DU SUD Dans tous les livres mentionnant les maladies épidémiques de l'Afrique du Sud. il est aftlrmé que cette contrée est exempte de rage. En 1892 et 1893, à Port-Elisabeth, dans la colonie du Cap, il y eut une épidémie de rage, importée d'Angleterre par un chien sur lequel on ne remarqua les premiers symptômes qu'après son débar- quement. Le premier cas eut lieu en août 1892 et le dernier en août 1893. Il y eut dans la ville environ i5o chiens reconnus enragés; on a tué jusqu'à 12 chiens et un chat enragés en quinze jours; on a trouvé sur le bord de la mer plus de 5o cadavres de chiens pendant l'épidé- mie; probablement une partie de ces animaux étaient morts de rage. Grâce aux mesures prises (destruction des chiens errants et des chiens mordus , muselière imposée à tous les chiens de la ville pen- dant 7 mois environ) l'épidémie a complètement disparu. On a tué 1.840 chiens. Pendant toute cette épidémie, pas un cas de rage n'au- rait été signalé en dehors de la ville et, le jour où l'hydrophobie a disparu de celle-ci, elle n'aurait plus existé dans l'Afrique du Sud. Ceci est bien extraordinaire : un chien enragé ne reste pas ainsi dans le lieu où il a été mordu. La maladie se manifeste, dès le début, par un besoin de mouvement; c'est un des premiers symptômes. L'ani- mal fuit l'endroit où il vit d'ordinaire. Il est donc vraisemblable que la maladie a été répandue aux alentours de Port-Elisabeth et, lors- qu'elle s'est arrêtée de sévir dans la ville, elle a dû continuer dans la campagne; mais, comme dans beaucoup de pays, les cas ont été méconnus jusqu'au jour où une épidémie s'est développée dans une contrée voisine, sous une influence quelconque, La population euro- péenne est très clairsemée dans l'Afrique du Sud. Pendant la guerre des Boërs, il a été difficile de se rendre compte des maladies dont souffraient les animaux, peut-être même les hommes. Puis, dans beau- coup de pays chauds, n'a-t-on pas nié, pendant longtemps, l'exis- tence de la rage? En Palestine, à Constantinople, en Egypte, en Tunisie et en Algérie par exemple, il y a, je crois, à cela une raison, c'est que, dans les pays chauds, si la rage mue n'est pas plus fréquente que dans les pays tempérés, la période pendant laquelle le chien est D'" AD. LOIR. — l'institut PASTEUR EN RHODÉSIE 12^9 furieux est, on le croirait, beaucoup plus courte. Il n'est pas rare de voir en Europe un chien furieux pendant trois ou quatre jours. Il mord pendant toute cette période ; beaucoup de personnes voient ce chien et il n'est pas possible de méconnaître l'existence de la rage. Dans les pays chauds, la période de fureur me semble plus courte. J'ai vu à Bula>vayo un chien qui, à midi, avait des symptômes sus- pects, mais, à moins d'être exercé à reconnaître la maladie, on ne pouvait en reconnaître l'existence. Il était tenu en laisse par un nègre qui traversait la ville. Un peu après trois heures, il fut pris d'un accès de fureur et à six heures du soir il était mort. Ces courtes périodes pendant lesquelles on remarque des accès me semblent fréquentes dans les pays chauds, où il est rare de voir un chien furieux. J'avais déjà remarqué des faits analogues en Tunisie. On comprend donc comment la rage peut être méconnue pendant de nombreuses années jusqu'au jour où un cas bien avéré est observé par une personne jcompétente. Quoi qu'il en soit, la rage n'a pas été signalée dans l'Afrique du Sud jusqu'au mois d'août 1902. A cette époque, une maladie nouvelle faisait son apparition en Rhodésie, entre le Zambèze et le Transvaal ; elle prit de suite les allures d'une épidémie ; les uns déclaraient que l'on se trouvait en présence de la rage, d'autres niaient l'existence de cette maladie. Pour trancher la question, le Gouvernement de la Chartered Compagnie, qui administre ce ï)ays, s'adressa à l'Institut Pasteur de Paris en demandant l'envoi immédiat d'un expert à Bula- wayo pour y édicter les mesures de police sanitaire et installer un laboratoire antirabique. INIes maîtres m'offrirent de me charger de cette mission et, le 10 octobre j'arrivais en Rhodésie avec tout un matériel de laboratoire. Voici les faits qui me permirent d'établir l'existence de la rage dans le pays. 1° Le 20 octobre , un lapin pris de rage paralytique me fut apporté au laboratoire. En voici l'histoire. Au commencement de septembre, un chien ayant des symptômes étranges se jette sur un cheval qu'il mord. Comme à cette épocfue la rage était inconnue dans le pays , on tua le chien et on mit le cheval en observation pour voir ce qui allait advenir. Le 21"^ jour après la morsure, le cheval pi-ésenta des symptômes de rage ; il était si excité qu'on le tua le 22 septembre ; avec son cerveau le docteur Clarlv de Bulawayo inocula dans l'œil le lapin qui nie fut apporté au laboratoire le 20 octobre. Celui-ci était paralysé depuis le 19 et mourut le 22 octobre. Je fis son autopsie et, avec son bulbe, j'moculai un autre lapin, qui fut pris de rage quinze jours après. Nous avons là dillérents cas de rage en série ; les animaux ineurent avec des symptômes rabiqucs , le cheval 21 jours après sa morsure, le laiim 22 jours après l'inoculation du cheval I28o HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE malade, le second lapin i5 jours après linoculation ; c'est presque une expérience de laboratoire qui démontre l'existence de la rage. 2° Le 25 octobre M. Taylor, chef commissaire des indigènes me prie do venir voir son chien, un grand et superbe danois qui paraissait malade: la veille au soir il avait de la bave aux commissures des lèvres et avait l'air mquiet. Le lendemain il se jetait sur tous les objets qu'il rencontrait pour les mordre. On venait de rattacher par une forte chaîne et il allait et venait d'un bout à l'autre du lien qui le retenait captif; il aboyait de temps en temps sans raison et ces cris étaient laboiement caratéristique de la rage , il n y avait pas à s'y tromper. Environ deux mois auparavant, M. Taylor avait entendu la nuit ime bataille de chiens sur la vérandah. Étant venu au secours de son chien, il en avait vu un autre s'enfuir; il n'avait pas remarqué de morsure sur son danois. Ce dernier a été abattu d'uii coup de fusil. Le cadavre m'a été apporté au laboratoire: j'ai trouvé des corps étrangers dans l'estomac. Avec le buUje j'inocule un lai^in qui est pris de rage paral\-tique le ; no- vembre. 3° L'un des indigènes ayant subi le traitement au commencement de novembre avait été mordu par mi chien à trois mois d'intervalle, dans les circonstances suivantes : Ce nègre était au service de M. Weir, de Bulawayo. Le chien de ce dernier qui a mordu le nègre donnait des signes manifestes de changement de caractère, depuis deux jours il n'obéissait plus, il avait fui la maison et c'est en revenant deux jours après son départ, c'est-à-dire quatre jom-s après le début de la maladie, qu'il mordit le domestique. Ce chien cherchait à mordre dans le vide, se jetant sur tous les objets et les personnes sans pouvoir réussir à serrer les dents. On le tua. Il avait été , nous dit son maître, mordu par un chien qui s'était introduit dans son chenil pendant la nuit mi mois avant; après s'être battu avec lui l'animal étranger s'était sauvé sans qu'on l'ait jamais vu. Le lendemain, M. Weir trouva son chien avec une morsure assez profonde à l'oreille. Après la mort de la bète , le vétéi*maire à qui l'on parla de ce cas attril)ua la maladie à des convulsions en disant que la rage n'existait pas dans le pays. Ce serait le premier cas de rage qui ait été signalé. Ces faits se passaient dans la première quinzaine du mois d'août. Cette relation faite par une personne qui ne comiait pas les symptômes de la rage semble être cakiuée sur ime observation d'im chien ral)i(:pie. 4° Nous avons avec le D^ Clark, chiinu-gien de l'hôpital de Bulawayo, fait l'autopsie d'un indigène qui avait été mordu à la main depuis un mois et demi par un chien ciu'on soupçonnait atteint de rage. Rien à l'examen post mortem ne pouvait expliquer la mort et les sjTuptômes présentés par cet homme de son vivant étaient ceux de la rage. Malheureusement l'état de putréfaction du cadavre ne nous a pas permis de faire des inoculations. Tous ces faits, et je pourrais en ajouter d'autres, m'ont j)ermis de conclure que la rage existait en llliodésie. Elle peut certainement être venue du Nord du Zambèze , mais elle peut aussi, je crois, avoir été apportée du sud; ainsi, répidcmie de D'' AD. LOIR. — l'i.NSTITCT PASTEUR EX RHODÉSIE I281 Port-Elisabeth a très bien pu s'étendre et couver en quelque sorte pendant plusieui's années. Je sais bien qu'on prétend suivre la rage depuis le Zaml^èze jusqu'à Bulawayo, mais le premier cas ainsi importé coïncide avec une période où l'épidémie de rage semble battre son plein. Un chien peut apporter la rage dans une région, mais il faut plusieui's mois pour von* se développer une grosse épi- démie. Ici. au contraire, on voit tout à coup un très grand nombre de chiens, de chats, d'ànes. de mulets, etc., développer la maladie. On a l'impression qu'elle existe là déjà depuis assez longtemps. On dit que les indigènes d'un certain âge se souviennent d'une maladie semJilable qui existait en Rhodésie il y a environ trente ans; puis elle aurait disparu. Dans tous les cas , la rage sévit depuis plus de deux ans dans le Barotseland au Nord du ZamJîèze. Lovanika. roi du Barotseland. pendant le cours de 1901, un peu avant son départ pour l'Angleterre, où il allait assister au couronnement d'Edouard YII. a fait tuer tous les chiens de ses sujets. Ils étaient malades, dit-on. D'un autre côté, la rage serait inconnue dans le Congo français : existerait-elle dans le Congo belge, cjui touche au Barotseland? Si non. comment est- elle arrivée au Nord du Zambèze, par le Xord de rAfiùc[ue, ou paille Sud? En Rhodésie . les mesures de police sanitaire prises par le gouver- nement pour lutter contre la rage dès son apparition ont été cal- quées sur celles qui sont en vigueur dans les autres jaays; mais elles ont été complétées, le ^3 octobre, par les mesures suivantes : Tout propriétaire ou gardien de chien ou d'un animal pouvant avoir la rage doit, au premier signe de la maladie, détruire cet animal ou le mettre dans l'impossibilité de nuh*e ; Tout chien doit être à la chaîne ou muselé ; Tout chien trouvé non muselé sera détruit ; Toute persoiuie qui vient de tuer un animal enragé doit le brûler ou l'enterrer de suite dans un lait de chaux à une profondeur de 4 jiieds. Une amende de i.2.5o francs et 3 mois de prison avec tra- vaux forcés sont infligés à toutes personnes qui ne se conformeraient pas à ces mesures. Jusqu'à ce jour, on a détruit plus de 80.000 chiens: 5. 000 muse- lières, à 6 francs l'une, ont été vendues par le Gouvernement aux indigènes, qui se conforment à la loi volontiers, car ils comprennent l'importance de ces mesures pour lutter contre l'épidémie. Il n'a pas toujours été aussi facile d'imposer à ces nègres d'origine zouloue des mesm^es de police sanitaire. En 1896, lors de l'épidémie 8r 1282 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE de peste bovine, les anglais voulm^ent tuer tous les bovidés qui se trouvaient dans les districts infectés ; les noirs , ne comprenant pas l'utilité de ces hécatombes, se révoltèrent et profitèrent de l'absence de la police , qui avait été emmenée par le docteur Jameson pour l'aider à accomplir son fameux raid contre le Transvaal, et les anglais eurent beaucoup de peine à rétablir l'ordre. Cette fois, les mesures de police sanitaire ayant été acceptées volontiers, il est à prévoir que l'épidémie de rage ne tardera pas à diminuer ; mais je crois qu'il sera bien difficile de la faire disparaître de ce continent où il y a de nombreux fauves et où la population est encore très clairsemée. Au moment de mon départ, j'ai demandé, à la requête de la Chambre des Mines, un adoucissement aux mesures édictées. La majeure partie des chiens errants a été tuée, si bien que les chiens qui sont pris à l'heure actuelle sont souvent des chiens de luxe^ partis de chez leur maître sans muselière ou ayant i)erdu celle qu'ils portaient : j'ai proposé la création d'une fourrière où les chiens pris sur la voie publique seraient conservés pendant 24 heures, pour permettre à leur maître de venir les y rechercher en payant une amende: c'est, en elVot. la mesure adoptée dans tous les pays où la rage existe. Dans un journal de Bulawayo qui m'a été envoyé, j'ai lu, à la date du 3i janvier, que tout chien portant la plaque de la Municipalité, mais trouvé sans muselière, pourra être rendu à son propriétaire après paiement d'une amende de 26 francs. Les chiens n'ayant pas la plaque municipale continueront à être détruits immédiatement après leur capture. J'ai dirigé l'Institut Pasteur de BulaAvayo jusqu'au 10 janvier 1908, où j'ai remis le service au docteur Dogson, que je venais de mettre au courant du traitement antiral>ique. J'ai appliqué, en Rhodésie, la méthode de Pasteur, avec la modilîcation si commode du docteur Calmette, c'est-à-dù^e en ne faisant que trois ou quatre lapins pas mois et en conservant les moelles atténuées dans la glycérine. Jus- qu'à ce jour, pas une des personnes traitées n'est morte de la rage. Le rapport annuel de la British South Africa Company, sur l'administration du gouvernement de la Rhodésie , vient de paraître le i5 juillet dernier; il signale l'apparition de la rage dans le pays et s'exprime ainsi : « Une autre maladie, la rage, a fait son apparition en Rhodésie au mois de septembre 1902. Des dispositions ont été prises immédiate- ment pour obtenir l'établissement d'un laboratoire antiralîique à D"" AD. LOIR. — l'institut PASTEUR EN RHODÉSIE ia83 Bulawayo. Le docteur A. Loir fut désigné par l'Institut Pasteur de Paris ; grâce à son énergie et à son habileté , l'épidémie a été promptement arrêtée et de nombreuses vies furent sauvées. » LA DESTRUCTION DES TERMITES On trouve en Rhodésie de nombreuses espèces de termites. Ces insectes, connus sous le nom de fourmis blanches, sont les adver- saires les plus acharnés de la colonisation dans ce pays. Je fus invité par le gouvernement à étudier les moyens de destruction de cette peste. Les termitières ont 4 à 5 mètres de haut; ces monticules sont creusés d'une grande galerie , qui se continue sous la terre par une série de tunels plus petits, mais qui ont souvent plusieurs décimètres de diamètre et descendent à x^lus d'un mètre de profondeur, jusqu'à la cellule de la reine chargée de pondre les œufs. Les armées de ter- mites sortent de ces nids pour opérer leur œuvre de destruction. On compte qu'il faut planter cinquante arbres dans le parc de Bulawayo pour en avoir un. En quelques heures on voit disparaître la chair des cadavres des animaux abandonnés sur le sol. Les livres, les papiers, les habits, les souliers sont dévorés, le bois des char- pentes est rongé, si bien que la solidité des habitations est compro- mise ; à Bulawayo les dégâts sont estimés à plus de 260.000 francs par an. On paye une prime de 5 francs par reine détruite; comme il n'y a qu'une reine par termitière, la pullulation est retardée, mais la reine est bientôt remplacée. Pour combattre ces ennemis, on s'est servi de la dynamite, du sulfure de carbone. Après avoir examiné la disposition intérieure des termitières, j'eus l'idée de faire circuler dans ces galeries le gaz sulfureux dont on se sert aujourd'hui, pour détruire les rats et la vermine à Ijord des bateaux. On place un des tuyaux de l'appareil Clayton dans l'ouvertui'e de la termitière. Ce tuyau, grâce au venti- lateur , lance le gaz sulfureux ; on pratique un trou à quelques mètres plus loin afin de j^lacer le second tuyau d'aspiration dans les prolon- gements de la termitière. L'air des galeries est aspii-é, il passe dans le four où brûle le soufre , se charge des vapeurs asphyxiantes et est lancé dans la termitière qui, en moins d'une heure, est inondée de gaz. Les expériences sont en ce moment continuées par M. Pease, mon préparateur, et donnent de très bons résultats. Les fourmillières se rempHssent facilement de gaz, qui tue tous les insectes, les œufs et 1284 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE les larves. C'est un procédé peu coûteux, qui pourra rendre des ser- vices dans nos colonies des tropiques, où les ravages faits par les termites s'élèvent à plusieurs millions. Au point de vue de l'hygiène, la question de la destruction des termites est importante; ces insectes sont en contact avec toutes les matières organiques en voie de décomposition, qu'ils font dispa- raître de la surface du sol, et, comme ces termites reviennent ensuite dans les maisons, qu'on les retrouve jusque sur les lits, on voit de là les causes de contagion possibles. Le problème, tel qu'il vient d'être résolu, a été posé il y a bien des années par le savant naturaliste de Quatrefages. Celui-ci, dans une étude sur les termites, avait émis l'opinion que. pour parvenir à les détruire, il était nécessaire d'avoir à sa disposition un gaz doué d'une force de pénétration suffisante pour s'introduire en peu d'instants dans tous les recoins de la cité des insectes. De Quatrefages cite le chlore comme susceptible de remplir ces conditions, mais il en indique les inconvénients : la pression très liasse du chlore permet aux termites de se soustraire au danger; le parasite, ayant le temps de se murer dans sa demeure, empêche ainsi l'arrivée du gaz et son action mortelle ne peut pas s'exercer. Le gaz Clayton répond abso- lument aux desiderata de M. de Quatrefages. ALIMENTATION ET MALADIE SPÉCIALE AUX INDIGÈNES DE LA RHODÉSIE DANS LES MINES d'oR. LA BIERE DES C APRES A la requête de la Chambre des Mines, le gouvernement de la Rhodésie me demanda d'étudier l'hygiène des indigènes travaillant dans les mines. Ces nègres sont très rapidement sujets, après leur arrivée, à des maladies que la plupart des médecins anglais attri- buent à une alimentation défectueuse. Tantôt ce sont les symptômes du scorbut, tantôt ceux du béri-béri qui apparaissent. Ceux d'entre eux qui n'abandonnent pas leur campement ne sont jamais malades. J'ai eu dans mon laboratoire à Bulawayo, pendant plus de trois semaines, trente-quatre femmes, qui m'avaient été amenées pour me peinnettre d'étudier la façon de fabriquer une sorte de bière, leur boisson de prédilection, faite avec du maïs, du sorgho et du millet. Jai iiu ainsi suivre la façon dont ces indigènes s'alimentent; leur régime est extrêmement varié et se compose en général de ])Ouillies faites avec du grain; les femmes mangeaient des viandes fraîches, des courges, des épinards sauvages et des patates cuites dans la o-raisse. Les bouillies étaient servies dans un grand plat, où chacune D'' AD. LOIR. — l'institut PASTEUR EX RIIODÉSIE 1285 d'elles en prenait une certaine quantité avec l'extrémité de ses doigts ; avant de la porter à sa bouche, elle la roulait en boule dans la paume de sa main et la trempait dans de la graisse chaude ou la mélangeait avec des graines d'arachides grillées. Le lait caillé est aussi très en faveur. Enfin, elles boivent cette bière, qu'elles fabriquent en faisant fermenter la farine de maïs provenant de grains qui ont été d'abord soumis au maltage. Quelques semaines après que j'eus fait cette étude sur la bière cafre, on m'envoyait onze indigènes dans un état de maigreur effrayante, présentant des symptômes attribués soit au scorbut, soit au béri-béri. On me remit en même temps les provisions que le gou- vernement leur avait données. Ces dernières se composaient d'un sac de grain de millet et de quelques boites de corned-beef. Ils devaient chaque jour, avec ce millet, composer un brouet, sans aucun condi- ment destiné à être leur unique aliment. Quant aux boites de corned- beef, elles devaient leur être distribuées une fois par semaine. Voilà le régime auquel on soumettait ces êtres humains dans les mines. Mais, chose bien plus extraordinaire encore, quelques jours plus tard, un fourgon militaire amenait à mon laboratoire trois individus ayant encore à peine l'apparence humaine. Ils faisaient partie d'un groupe de quatorze cents arabes amenés d'Aden un an auparavant pour travailler dans les mines. Ces arabes avaient été soumis au même régime alimentaire que les nègres du pays et comme eux étaient devenus malades, privés de leur alimentation habituelle. Ils avaient refusé de travailler et s'étaient enfin trouvés sans argent pour se procurer qvielques-uns des aliments auxquels ils étaient habitués. L'un de ces noirs avait, [)ar hasard, habité autrefois l'Al- gérie et le premier mot qu'il arriva à me fah^e comprendre fut celui de Smen, c'est-à-dire beurre fondu, que ces indigènes sont accou- tumés à manger sur du pain. Quelques semaines d'une nourriture plus appropriée à leurs habitudes furent sulTisantes pour les mettre en voie de guérison. Ces trois arabes repoussaient avec dégovit la bière cafre qu.i, au contraire, était fort goûtée par les nègres du pays. Ces brèves remarques, résumé d'une étude beaucoup plus longue, prouvent qu'il est nécessaire de se rendre un compte exact du régime alimentaire des indigènes que l'on emi)loie, de la néces- sité de varier leur nourriture et de l'importance de ne point sou- mettre au même régime ceux dont l'alimentation habituelle est diffé- rente. 11286 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE LA MALARIA BOVINE, « TEXAS EEVER )) OU « REDWATEK )) DANS LA RHODÉSIE La Tristeza ou malaria bovine est connue en Rhodésie sous le nom de Redwater et vient de sévir sous la forme d'une véritable épidémie (1901 et 1902). Pendant ces dix dernières années, on a signalé des cas de Texas fever ; de temps en temps, les routes, les villes et tout le pays a été peu à peu et graduellement infecté et , comme la tique (Rhipicephalus Decoloratiis) se trouve en grand nombre dans ce pays, tout a été réuni pour disséminer la maladie. Il est probable que l'infection a été apportée par les bêtes servant aux transports et venant du Natal et du Transvaal où la maladie existe depuis longtemps. Les ravages de la malaria bovine furent retardés en Rhodésie par ce fait qu'une grande partie du bétail a été décimé depuis 1894 par la rinderpest, les tiques ne trouvant plus ou presque plus de bétail, ne pouvaient s'infecter ni infecter de nouvelles bètes par conséquent. L'attention des éleveurs a été surtout attirée sur les dangers de cette épizootie par ce fait que, en 1901. sur plus de 800 bètes importées d'Australie pour repeupler le pays des animaux que la peste bovine avait fait mourir, trois seulement étaient vivantes au bout de quelques semaines. Cette mortalité énorme fut suivie d'une véritable épidémie l'an d'après sur le bétail. Pendant ma mission en Rhodésie, j'ai eu à examiner plusieurs bêtes mortes de la Redwater, les organismes se montraient dans au moins 80 à 90 pour cent, des globules rouges, la forme caractéristique en poire était peu abondante ; les bêtes mouraient rapidement de la maladie, souvent sans présenter les symptômes principaux, comme le pissement du sang. En 1901, à l'Institut Pasteur de Tunis, nous avons examiné avec M. Duclaux de nombreuses préparations de sang de bêtes, tuni- siennes mourant de la maladie; on trouvait des organismes dans chaque champ du microscope, mais en petit nombre , tandis que sur les animaux autopsiés en Rhodésie, ils étaient très nombreux. En Tunisie, les bêtes que nous avons examinées étaient venues au labo- ratoire et mouraient très lentement après plusieurs jours de mala- die. En Rhodésie, il vient d'y avoir une véritable épidémie fou- droyante et dans le sang on trouve une grande quantité d'orga- nismes microscopiques. Les préparations de sang que j'ai faites en Rhodésie ont été examinées par M. le professeur Laveran et, le D'" AD. LOIR. — l'institut PASTEUR EN RHODÉSIE I287 16 mars 1903, il a pul^lié à rAcadémie des Sciences une description des formes trouvées dans ces préparations. On rencontre des élé- ments allongés, baciliformes, droits ou recourbés, au nombre de i à 4 dans une hématie, des petits éléments sphériques ressemblant à des microcoques souvent au nondjre de 2 ou 4 dans une hématie. Dans une même hématie, on rencontre souvent des pseudo-micro- coques et des pseudo-bacilles. Les formes tj-piques du Piroplasma higeminum sont, en général, rares dans les préparations; on les rencontre toujours en même temps que les formes atypiques. Les formes atypiques de Piroplasma higeminum ont été signalées déjà par quelques observateurs et il est à noter que, dans tous les ■cas, il s'agissait d'épizooties africaines. On cherche , comme mesure prophylactique contre cette maladie , à détruire les tiques qui infestent les bêtes; pour cela, on vient de faire construire de nombreux « Dipping Tanks » ; ce sont de grandes piscines où les bovidés sont précipités au moyen d'une planche à bascule sur laquelle on les fait avancer; ils nagent en traversant le bain et sortent de l'autre côté. Chaque bête reste environ dans l'eau une minute. L'eau du bain est chauffée à une température d'en- viron 38 à 39° centigrades. Le bain contient : fi livres d'arsenic 24 Uvres de savon jaune commun 24 Uvres de cristaux de soude 20 litres de goudron de Norvège 1600 Litres d'eau Ce liquide est porté à l'ébullition pendant six heures. Pour cela, on se sert à Bulawayo de deux réservoirs en fer d'une capacité de 1600 litres. On met 1200 litres de liquide seulement dans chacun d'eux et on ajoute 3oo litres lorsque l'ébullition a été continuée pen- dant cinq heures. Si on emplit les réservoirs de suite, le liquide coule au dehors en bouillant. Il faut que tout le liquide soit soumis à l'ébullition, ce que l'on fait en emplissant plusieurs fois les réservoirs, car le bain contient environ i4ooo litres, il est couvert, de façon à ce que la pluie ne puisse pas y entrer. On se sert constamment du même bain, en se contentant d'ajouter du liquide frais pour remplacer celui que chaque bête emporte en sortant de l'eau; on compte que la perte ainsi pro- duite est d'environ moins de 4 litres par tête. 1288 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE Les vaches très infectées ressentent quelquefois l'eftet du premier bain, mais, au bout d'un jour ou deux, elles reviennent en bonne santé. Les vaches laitières perdent quelquefois leur lait pour un jour ou deux, mais ensuite ce lait revient en plus grande quantité qu'avant. Les tiques ne tombant pas avant quatre à cinq jours après le bain, le résultat est décourageant au début , car ils paraissent aussi nom- breux qu'avant; mais, en les examinant, on les trouve morts ou mourants et ils tombent après le quatrième ou cinquième jour. Les vaches pleines, celles qui sont très maigres, peuvent être bai- gnées impunément. En l^aignant les veaux, il faut mettre une corde qui permettra de maintenir la tête hors de l'eau; sans cela ils plongent deux et trois fois et boivent trop de liquide. PÉRIPNEUMONIE CONTAGIEUSE DES BÊTES A CORNE J'ai eu l'occasion de faire, aux environs de Bulawayo, l'autopsie d'une vache morte de péripneumonie ; du reste , cette maladie existe paraît-il d'une façon très considérable au nord du Zambèze. Comme moyen préventif, on se sert de la méthode de AVillems, au moyen du virus péripneumonique que l'on inocule à la queue; mais ce qui manque le plus, c'est une provision de virus nécessaire lors- qu'on veut faire l'opération. J'ai constaté que l'Institut bactériologique de Grahamstown livre aux propriétaires des tubes de virus préparés selon la méthode que nous avons mise en œuvre de 1889 à 1892 en Australie, lors de notre séjom^ à la direction de l'Institut Pasteur Australien. L'élevage des bêtes à cornes se fait en grand en Austrahe . dans les régions éloignées de la côte. Lorsqu'on veut amener les bovidés dans les i)orts de mer où se fait l'embarquement de ces ani- maux dans les frigorifiques qui les conduisent en Europe, on est obligé de faire parcourir à ces bêtes des distances énormes de plu- sieurs centaines de kilomètres. Ces exodes se font sur des routes spécialement réservées à cet usage , routes qui sont infectées par la péripneumonie. Ces voyages durent deux et trois mois et les bêtes qui nont pas la péripneumonie dans les pays d'élevage où elle n'existe pas la gagnent pendant le voyage , d'où des pertes de 35 et 40 0/0. Lorsque le premier cas se présente , il est en effet trop tard déjà pour mettre le reste du troupeau à l'abri de la maladie par l'inoculation préventive selon la méthode de Willems. Les Australiens, qui connaissent l'efficacité de l'inoculation du virus D'" AD. LOIR. — L INSTITUT PASTEUR EN RHODÉSIE I28c^ péripneiimonique à la queue pour prévenir la maladie, désiraient obtenir une culture in vitro de la maladie, pour s'en servir avant le départ des animaux pour les marchés du Sud. Ainsi posé, nous savions le problème insoluble, connaissant les efforts tentés par tous les bactériologistes pour isoler le microbe spécifique. Mais nous connaissions les exxîériences de M. Pasteur, qui inoculait les animaux dans une région autre que la queue (région défendue sous peine de mort de Bouley) et obtenait ainsi un œdème contenant une grande quantité de virus. Nous démontrâmes que ce virus était aussi viru- lent que le liquide de la péripneumonie pris dans la cavité des plèvres, qu'on pouvait avec ce virus obtenir des passages par des animaux qui offraient une source suffisante de liquide ; que ce liquide donnait l'immunité, aussi bien que le virus du poumon, et que même il avait l'avantage d'être un peu atténué ou tout au moins plus pm* et, partant, d'entraîner moins souvent la perte de la queue de l'animal inoculé. Nous avons indiqué, après plusieurs mois, les conditions à remplir poiu* obtenir à coup sûr de bons résultats avecde jeunes veaux. A la suite de ces recherches, qui ont été récompensées par le Gouverne- ment d'un prix de aS.ooo francs, nous avons installé une station où l'on entretient constamment une source de ce virus, qu'on recueille dans des tubes effilés, qui sont ensuite envoyés aux propriétaires qui en font la demande et permettent d'inoculer les bêtes avant le départ sur les routes qui mènent sur les grands marchés du Sud. Cette inoculation préventive évite, de l'aveu des intéressés, une perte annuelle de plus de seize millions de francs en Australie. C'est cette méthode qui est mise en ce moment en pratique dans l'Afrique du Sud et qui donne de bons résultats entre les mains du D' Edington. directeur de l'Institut Bactériologique de Grahamstown. Je terminerai cet exposé des études que j'ai faites pendant les trois mois de mon séjour à Bulawayo en publiant cette lettre qui m'a été écrite par le chef du Gouvernement de la Bhodésie au moment de mon départ; elle est datée du 9 janvier igoS. Cher Monsieur, je désire vous témoigner avant votre départ de la Rhodésie les plus cordiaux remerciements de ce g-ouvcrnement pour les importants services que vous venez de nous rendre en établissant un Institut Pasteur à Bulawayo pour lutter contre la rage. Quoique ce gouvernement vous ait seulement invité à venir en Rhodésie pour vous occuper de la rage , je constate avec recomiaissance l'intérêt que vous avez pris à l'étude de la majeure partie des maladies et des fléaux contre lesquels nous avons à lutter, particulièrement la lièvre du 1290 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE Texas, la péripneumonie, le scorl)ut et la peste des fourmis blanches. Je suis certain que vos recherches et vos avis auront l'effet le plus heui'eux. Votre brochure mtitulée : Notes sur la Rhodésie au point de vue bacté- riologique forme une additon instructive à nos connaissances et sera lue avec intérêt par toute la communauté. J'espère que votre courte visite en Rhodésie aura été agréable pour vous et je puis vous assurer cju'elle a ajouté au profond sentiment ]de gra- titude que l'on témoigne dans le monde entier à l'Institut cjue vous repré- sentez et à son grand fondateur. Veuillez, etc. Signé : H. Milton. M. Paul DELBET à Paris SUR LA DÉPOPULATION \&^-^ — Séance du 10 août — J'ai étudié déjà l'année dernière, au Congrès de Montauban, la question de la dépopulation de la France. Les idées que j'ai exposées ont reçu un bienveillant accueil et les membres de la Section ont bien voulu m'encourager à continuer l'étude de cette question. C'est pourcjuoi je vous demande la permission de prendre à nouveau la parole sur le même sujet. J'ai posé en principe, au Congrès de Montauban, que la dépopula- tion , au moins relative , de la France résulte de la diminution de la natalité et que cette diminution de la natalité est intentionnelle et volontaire. Mon opinion sur ce point n'a pas changé. L'enquête que j'ai poursuivie cette année et que ma situation de médecin rend par- ticulièrement aisée m'a démontré de la manière la plus évidente que la famille française serait, sur son sol national, au moins aussi proli- fique c{ue sur le sol canadien, si les Français eux-mêmes n'interve- naient souvent, même d'une manière criminelle, pour enrayer la natalité. Je ne dirai pas c{ue cette conduite est immorale : nous ne faisons pas ici de morale et le mot parait pi'udhommesque au scepticisme contemporain; je dirai simplement c{u'elle est maladroite. La doc- p. DELBET. — SUR LA DEPOPULATION I29I trine de l'intérêt personnel règne en maîtresse : or, la diminution volontaire de la natalité, cherchée et voulue comme le moyen d'aug- menter la fortune de l'individu et de la famille, va précisément contre le but poursuivi. Tous les législateurs s'accordent à reconnaître que la diminution du chiffre de la population a pour corollaire une diminution de force , de puissance et de richesse de la nation. La diffusion des connais- sances et de l'instruction, les publications et les conférences de philo- sophes et d'hommes d'État que l'on doit saluer comme de véritables bienfaiteurs de l'humanité, ont rendu l'éventualité d'une guerre euro- péenne de moins en moins probable; mais, pour être placées aujour- d'hui sur le terrain économique , les luttes internationales n'en sont pas moins âpres. Il faut à un pays des bras pour produire, des cerveaux pour imaginer et ordonner : diminuer la natalité c'est affaiblir les sources de production, en diminuant le nombre des producteurs et en faisant disparaître entre les nationaux une indispensable émulation. En même temps qu'il fait tort à l'État, l'individu qui restreint la natalité dans sa famille se fait tort à lui-même ; placé dans un pays moins riche, il tire de l'emploi de ses facultés une rémunération moins avantageuse; il se prive de l'ajjpui que se donnent, en raison d'affinités puisées dans leur parité d'origine, dans leur similitude d'éducation, les hommes de même race. On a pu ci'aindre que la population de la France, augmentant sans cesse , ne trouvât plus bientôt sur le sol natal ses moyens de subsis- tance. Cette crainte est justifiée, mais en partie seulement. En même temps que la popidation d'un pays se développe, les sources de la richesse se mvdtiplient. A côté de l'agriculture apparaissent, puis se développent l'industrie, les arts, le commerce. Dans une étude forte- ment charpentée et extrêmement intéressante, M. Coste a récemment montré le développement des villes multipliant les sources de la for- tune pulilique et privée. La France, d'ailleurs, n'est plus aujourd'hui réduite à son seul territoire. Elle possède des colonies vastes et salubres, qu'elle peut, qu'elle doit peupler. En dehors de toute considération théorique, c'est un bien mauvais calcul de la part du français de restreindre la natalité dans l'espoir d'enrichir l'individu par la diminution du nombre des copartageants. La France n'est pas une île escarpée et inaccessible, isolée en Europe, c'est un pays largement en contact avec ses voisins : par une loi d'équilibre bien connue, quand entre deux pays voisins la popula- tion de l'un devient plus dense, l'excès de population reflue sur le pays dont la population est moins considérable. Moins bruyamment 1202 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE qu'aux périodes historiques, mais d'une manière bien plus redou- table et plus efiicaee, la France est aujourd'hui envahie par des élé- ments étrangers dont l'assimilation escomptée par certains écono- mistes est purement fictive. Aux étrangers qui, en France et aux colonies, vivent de la France, notre intérêt est de substituer des nationaux qui, faisant à chacun de nous la même concurrence que les étrangers, la feront du moins au profit de la Nation. Redoutable dans la collectivité, la dépopulation n'est pas moins désavantageuse au point de vue familial. Auguste Comte a démontré que l'accroissement de la famille était pour cette dernière une source de force et de puissance , en exaltant l'activité du chef de famille et en créant pour les enfants une source d'émulation. On peut ajouter que les meml^res d'une même famille s'étayent les uns les autres, même involontairement et d'une manière inconsciente. Maurras, dont je suis loin de partager toutes les idées, a écrit dans mi livre qui veut être un pamphlet : « Que peut faire un français quand il solli- cite une place en même temps qu'un Monod; le français est sevd, les Monod sont -i^o. Tout le monde connaît les Monod. » J'ajoute- rai c'est justice. Le français restreint la natalité dans l'espérance d'élever le niveau social de la famille. : cette idée est essentiellement erronée; l'expérience nous démontre chaque jour que les familles à faible natalité tombent progressivement, le travail diminuant en même temps que les membres deviennent moins nombreux. On croit les familles riches plus puissantes que les familles pauvres. C'est une faute de jugement : l'intelligence comme autrefois domine et mène la matière. Une famille n'est puissante que par son intelligence. Intelli- gente, la famille s'enrichit par surcroît et l'on prend l'efTet pour la cause. La richesse n'est une puissance que si elle est la conséquence de l'elTort dirigé par la réflexion. J'ai essayé de démontrer que, tant au point de vue social qu'au point de vue individuel, c'est une faute de restreindre la natalité. Je n'espère point convaincre immédiatement les français, mais je pense avoir établi les avantages de l'accroissement de la population suflisamment pour donner au législateur le droit d'intervenir. Ce droit doit être exercé avec prudence et ne i^as devenir attentatoire à la lil>erté individuelle. Pour moi, je l'ai dit l'année dernière, mais je le répète, car ce que j'ai vu et aj)pris n'a fait que me confii'iner dans mon opinion ; il n'y a qu'un moyen d'enrayer la dépopulation : com- battre énergiquement la prostitution, protéger la jeune iille. J'ai dit que les lois destinées à favoriser le repeuplement ne devraient jamais être attentatoires à la liberté et je conseille de p. DELBET. — SUU LA DÉPOPULATION lagS combattre la prostitution. Ce n'est point contradictoire. Il ne me viendrait pas à l'esprit de défendre la prostitution. Une femme est libre de se choisir la vie qu'elle préfère ; mais nous avons le droit €t le devoir de soumettre l'exercice de . cette profession à des régies restrictives, car la prostitution est un danger permanent, par les maladies qu'elle propage, l'argent qu'elle détourne, le célibat improductif qu'elle encourage. Or, tandis que toutes les professions sont accablées d'impôts, soumises à des lois de police, la prostitution seule échappe à toute contrainte et s'étale impudemment. On ne permet pas à un marchand de solliciter le passant à tout moment en pleine rue; la prostituée ne fait pas autre chose. Il est intoléralîle de voir en France les plus hautes situations occupées, au moins pécu- niairement, par les femmes les moins recommandables. En un mot, que toute femme ait le droit si elle le désire de se livrer à la i)rosti- tution, mais que tout racolage, toute manifestation extérieure sur la voie publique soit sévèrement interdit ; en diminuant dans des pro- portions considérables le bénéfice de la profession, ces moyens en entraveront rapidement le recrutement. On a écrit que la prostituée avait un rôle social, corrélatif du célibat de l'homme. Je n'ai jamais compris ce rapport. Le céli]>at est nécessaire, je le reconnais et je n'admettrais pas un impôt sur les célibataires. Il est des œuvres nécessitant un effort considérable, un déploiement de force , une concentration d'intelligence tels que les individus c[ui s'y adonnent doivent s'y consacrer exclusivement, renonçant au mariage et à l'éducation des enfants. L'individu a le droit d'éviter les charges de la famille , à la condition de donner en échange un travail utile à la communauté. Le célibat est utile, mais à la condition d'être effectif. C'est ce c[u'avait admiraljlement com- pris le christianisme en créant les ordres monastiques et en leur imposant la chasteté. L'Etat peut agir de même. Il n'y a donc aucune raison de laisser subsister la prostitution. On en empêchera en grande partie le recrutement en protégeant la jeune fille. La jeune fille n'a pas le goût de la débauche ; elle s'y livre parce quelle n'a pu se marier ou a été séduite. En empêchant l'étalage de la prostitution, on diminuera la tendance de l'homme à la vie licencieuse; les jeunes filles trouveront parmi ceux cpii auront ainsi échappé à la contagion des occasions plus nombreuses de se marier. D'autre part, si les séductions demeurent plus fréquentes, elles seront sans grand inconvénient parce qu'elles aboutiront à la constitution d'une ûnnille et qu'elles ne jetteront pas pour toujours hors de la vie régulière des jeunes filles dont la responsabilité est 1294 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE toujours limitée. En somme, pour combattre la dépopulation, il existe une série de moyens connexes , mais tous , aboutissent au même but, la création de nouveaux foyers familiaux. M. G. LAFARGUE Ancien Préfet, à Paris L'ORGANISATION DE LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE [614.542] — Séance du 10 août — Devant le péril grandissant de la tuberculose, aujourd'hui mieux connue et considérée, à juste titre, comme le plus terrible des fléaux, nous voyons s'émouvoir enfin non seulement les professionnels du corps médical tout entier, mais les pouvoirs publics eux-mêmes, les esprits éclairés et jusqu'aux couches profondes de la population dans les pays civilisés. Dès lors, toute contribution à l'œuvre commune de défense natio- nale et de défense humaine doit être la bienvenue. C'est ce qui m'enhardit à jDi'ésenter ici quelques indications et quelques vues sur l'importance du rôle des sanatoriums maritimes pour la guérison et, plus encore, pour la prophylaxie de la tubercu- lose, ainsi que sur le plan général d'organisation de la lutte contre la tuberculose qu'à mon sens il conviendrait d'adopter. Plus de 40 ans d'expériences, poursuivies scientifiquement à Berck d'aboi'd, puis à Banyuls, ainsi que dans les autres stations mari- times des mers et des latitudes les plus diverses, ont établi, et l'Aca- démie de Médecine de Paris proclamait unanimement, le 28 juin 1898, que « le rachitisme , la scrofule, la plupart des manifestations de la tuberculose, surtout pendant l'enfance et l'adolescence, gué- rissent au bord de la mer. (( Il ne s'agit plus là, ajoutait solennellement cette docte assem- blée, d'un sujet en litige, mais d'une sorte de dogme au-dessus des contestations. » Comme l'a dit, en d'autres termes, un illustre savant, le professeur Jaccoud, secrétaire perpétuel de l'Académie de médecine, qui, sur ce G. LaFARGUE. — LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE ISQ.S point, nest pas moins explicite que son éminent prédécesseur, M. J. Bergeron et que l'Académie elle-même, le plus sûr moyen de mettre à l'abri de la tuberculose les sujets entachés de scrofule, c'est de les guérir de la maladie scrofuleuse ; et c'est surtout, d'après lui, l'hydrothérapie et l'aérothérapie maritimes qui doivent faire les frais de cette médecine préventive. Partout les proportions de guérisons obtenues dans les sanato- riums maritimes, quand la durée du séjour est suffisante, sont con- sidérables et provoquent l'étonnement. Mais elles ne sont pas partout les mômes. Telle affection, qui non seulement ne guérirait pas mais s'exaspérerait sur des plages à dunes et à sables mouvants, à cause des poussières de sables en sus- pension dans l'atmosphère , guérira au contraire rapidement sur des plages à galets ou à sables bien immergés. Telle autre, qui risque- rait de s'aggraver sur les plages du Nord au climat rigoureux, gué- rira aussi ou s'améliorera notablement sur des plages méridionales et d'un climat plus doux. En revanche , certaines constitutions torpides et molles se trou- veront peut-être mieux de l'air vif, de la mer du Nord, de la Manche ou de l'Océan, que des climats chauds du Midi. Il importe donc que des établissements d'Assistance maritime soient partout créés, au Nord comme au Midi, et qu'ils le soient en très grand nombre, pour agir efficacement sur la masse des tuberculeux et des prétubercu- leux que le traitement marin peut encore, en les transformant, sauver de la phtisie pulmonaire et de la mort. Pénétré de cette pensée, j'ai, de 1886 à 1888, étant Préfet des Pyré- nées Orientales, fondé à Banjyiils. sur la Méditerranée, pour le compte du département dont l'administration m'était confiée, un vaste sanatorium maritime de 200 lits, que dirige, depuis i5 ans, \ Œuvre des Hôpitaux marins, à qui je l'ai cédé, en juin 1888, au nom de ce département. Les plus merveilleux résultats, attestés à la fois par la statistique et par la photographie, y ont été obtenus, durant cette j)ériode de i5 années. Non seulement, sous l' influence du traitement marin, plus d'un millier d'enfants de 2 à i5 ans, atteints de rachitisme, de tuberculoses locales, même les plus graves, d'engorgements ganglionnaires, etc., des anémiés, des lymphatiques, des prétuberculeux de toutes sortes, y ont guéri ou s'y sont très notablement améliorés, dans des propor- tions variant de y 8 à 100 ojo; mais beaucoup d'autres maladies très répandues, — certaines affections des voies respiratoires, les J2q6 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE scrofulides de la peau, celles des muqueuses du nez, des yeux, des oreilles , etc. , — qui se seraient mal trouvées des plages du Nord et qu'on a même renoncé à soigner, à cause des poussières de sables, dans plusieurs stations maritimes très importantes, — ont été traitées à Banvuls avec un plein succès, guérissant ou s'améliorant dans des proportions très voisines de loo o/o. LE PLAN BERGEROX En présence de résultats pareils et de ceux, plus parfaits encore, qu'on pourrait obtenir, si certaines conditions, que jindique ailleurs, étaient mieux observées , comment ne pas regretter que ce qui a pu être réalisé par un simple Préfet, de sa seule initiative et à ses risques et périls, pour la guérison et la prophylaxie sociale de la tuberculose, n'ait pas été fait depuis longtemps, par mesure administrative géné- rale, dans les autres départements? C'était le plan grandiose, conçu et proposé, il y a près de 4o ans, par léminent D' Jules Bergeron. Dans son mémorable rapport du i5 juillet 1866 — qu'on ne saurait trop rappeler, car il a non seule- ment servi de base à la construction du grand établissement de Berck, mais encore inspiré tout ce qui s'est fait en France et à létranger depuis cette époque — M. le D-- Bergeron, élevant son sujet à la hau- teur dune grande question nationale et sociale, avait magistralement exposé tout un programme et développé tout un plan de campagne contre la scrofulo-tuberculose, le terrible ennemi destructeur de notre armée et de notre jeunesse. Ce plan consistait à utiliser, pour la guérison et la suppression de la diathèse scrofiileiise et, par voie de conséquence, pour la prophy- laxie de la tuberculose proprement dite , limmense étendue de nos côtes maritimes, ainsi cpie les sources deaux minérales sulfureuses et chlorurées sodiques disséminées dans lintérieur des terres. Après avoir, d'après les statistiques du Ministère de la Guerre, exposé l'inégale répai'tition géographique de la diathèse strumeuse en France et les épouvantables ravages qu'elle exerce , à des degrés divers, sur tout le territoire , le D' Bergeron montrait' que, pour le relèvement de la race , dans le double intérêt de la défense et de la prospérité nationales, cette alarmante situation appelait un prompt remède. « On ne saurait, disait-il, faire trop d'ellorts aujourd'hui pour neutraliser, au moins en partie , les fâcheuses conséquences de cet état de choses ; et c'est ici que la médecine pourra prêter à l'éco- nomie sociale son utile concours, en lui indiquant les moyens non G. LAF ARGUE. — LA LUTTE CONTRE LA TURERCULOSE I297 seulement de remédier au mal présent, mais encore de pi'éparer pour l'avenir les bases d'une sérieuse prophylaxie. Je me borne à indiquer ici le problème que, tôt ou tard, l'hygiène publique sera mise eii demeure de résoudre. » « Les médecins, ajoutait-il, peuvent différer d'avis sur la nature de la maladie scrofulcuse , sur sa pathogénie , sur la valeur relative des divers agents de la matière médicale usitée pour la combattre , mais ils sont unanimes à reconnaître l'heureuse et puissante action qu'exercent sur elle les eaux salines chloro-hromiirées-sodiqiies , parmi lesquelles l'eau de mer occupe l'un des premiers rangs (i). » Partant de cette donnée déjà incontestable, mais singulièrement accrue et fortifiée, depuis cette époque, en ce qui concerne les effets du traitement marin, tenant compte aussi de ce qu'il pourrait être difficile ou trop coûteux aux départements très éloignés de la mer d'y envoyer leurs malades, il dressait l'inventaire des ressources minérales de chaque région pouvant convenir à ceux-ci et adjurait tous les départements d'imiter l'exemple donné par celui de la Seine, en utilisant, soit les longues étendues de nos côtes maritimes, soit, à défaut, les stations salines ou sulfureuses de l'intérieur des terres existantes ou à créer. « Il ne s'agit plus seulement de la disparition des manifestations actuelles de la scrofule, s'écriait-il, en appuyant son autorité de celle de son collègue le D' Marjolin, chirurgien à l'hôpital Sainte-Eugénie, mais de la suppression de la diathèse scrofuleiise elle-même. « Il ne s'agit de rien moins que d'étouffer, à l'état de germe, ou au moins d'arrêter dans son développement un mal qui laisse trop sou- vent infirmes, défigurés ou difformes les sujets qu'il n'a pas fait mourir ; un mal qui, se transmettant par l'hérédité, affaiblit graduel- lement les générations qui se succèdent clans une même famille et finit même par éteindre les lignées qui ne se sont pas régénérées par des croisements heureux. « Que, par d'autres voies, l'économie sociale se propose d'atteindre (i) Après les expériences décisives du sanatorium de Banjnils, le D' Berg-eron n'eîit pas hésité à écrire le premier rang. Il eût aussi attribué à l'action de l'air marin une importance plus grande encore que celle qu'il lui reconnaît déjà dans son rapport de 1866. L'aérotbérajiir marine contribue en eirci plus puissamment encore que Yhrdrothc- rtipie marine à la sui)ériorilc du trailement marin. — Cette supériorité, M. le D' Bcrgcron l'a d'ailleurs formellement iiroclamée lui-même, en bien des circonstances, depuis iStiti, et encore tout récemment (1900), dans sa Xote .snr les Sanalorinms maritis, à la Commis- sion de la Tuberculose : « On peut altîrmcr, dit-il, que le traitement marin, dont les éléments variés se combinent et se complètent, est de tous celui qui, non seulement a le plus rapidement et le plus sûrement raison des manifestations anatomo-physiolo- g-iques de la scrofule, mais encore relève et tronsforme assez profondément l'org-ànisrae pour le mettre à l'abri des récidives. » La propagation de In liilieretilase , Paris, Masson, 1900. 82* 1298 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE le même but, je ne le conteste pas, et j'admettrai même, si on veut, que, livrée à ses ressources, elle pourrait bien, par la suite des siècles, arriver au succès ; mais je ne crains pas de trop m'avancer en affirmant que la médecine indique une voie et plus courte et plus sûre. Aussi bien, je ne veux pas opposer Tune à l'autre, car, pour une pareille œuvre, ce n'est pas trop de leur mutuel concours. Que l'économie sociale, cet indispensable collaborateur de l'hygiène géné- rale, prenne donc sa part de la tâche, la médecine saura bien accom- plir celle qui lui incombe, quelque large qu'elle soit... « Je ne sache pas qu'il y ait de plus beau sujet d'étude pour les médecins hygiénistes que ces questions de prophylaxie sociale , et j'ajoute que, parmi celles qui méritent d'appeler leur attention, il n'en est peut-être pas une dont l'importance soit comparable à celle delà prophylaxie des scrofules. » Après avoir exposé en détail les remarquables résultats déjà obtenus au petit hôpital en bois de Berck. de 1861 à i865, M. le D^ Bergeron ajoutait : « Mais, si des individus déjà en puissance de scrofule peuvent être à ce point modifiés, que ne devrait-on pas attendre de la médication saline, si on pouvait soumettre à son action vivifiante les enfants chez lesquels des antécédents héréditaires sus- pects, certains états morbides aigus ou suljaigus et l'ensemble de l'habitude extérieure autorisent à soupçonner l'existence de la dia- thèse strumeuse et l'imminence de quelqu'une de ses manifesta- tions ! . . . » Et il montrait ce qu'on pouvait espérer de la généralisation du traitement marin . à la fois curatif et préventif , sur toutes nos côtes de France. « Lorsqu'on aura construit Berck, disait-il, et qu'autour de cet hôpital modèle seront venus se grouper des établissements privés fondés sur les mêmes principes, pourra-t-on dire qu'on a fait beau- coup pour la régénération de l'espèce ? — Non , sans doute . si l'hô- pital de Berck reste seul; mais oui, assurément, s'il devient le point de départ d'un caste sj^stème embrassant toute Vétendue du terri- toire. « Évidemment, si on veut arriver à de grands résultats, il faut qu'on provoque dans tous les départements l'organisation de mesures analogues à celles dont V administration de l'Assistance publique aura pris l'initiative pour le département de la Seine... « Cet établissement, concluait-il, parlant du grand hôpital projeté, doit donc présenter ce double et immense avantage, d'abord de répondre à une nécessité pressante, celle de hâter la mise en traite- G. LAFARGUE. — LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE I299 ment des scrofuleux de Paris, puis d'ouvrir la voie à des entreprises de même oindre, dont la généralisation sur divers points du terri- toire constituerait certainement l'une des œuvres les plus utiles, les plus fécondes de notre temps. « Quel sort l'avenir réservera-t-il à cette œuvre de progrès ? Je lignore, mais je ne puis me résigner à croire qu'elle soit destinée à rester indéfiniment à l'état de projet. » Dans ce remarquable exposé , il semble que son auteur ait tout prévu : le prodigieux développement de Berck, où il n'y avait, à côté de quelques pauvres cabanes de pécheurs, que le petit hôpital en bois et qui est aujourd'hui le plus grand centre d'assistance mari- time du monde entier (i), et cette mise en valeur de toutes les res- sources thérapeutiques de la terre et des mers , qui est devenue de nos jours une absolue nécessité, dans la lutte héroïque et désespérée qu'il nous faut engager contre ce menaçant fiéau de la scrofulo- tulierculose. Bien que , sur certains points , les doctrines médicales qui avaient cours en 1866 aient été profondément modifiées, depuis lors, ni le plan tracé par M. Bergeron, ni les considérations sur lesquelles il l'appuyait ne s'en trouvent ébranlés. Tout au contraire. Ils ont reçu des progrès de la science, avec une éclatante confirmation, un sur- croît considérable de force et d'autorité. Les indications, quant au traitement marin, sont restées les mêmes. Elles se sont même éten- dues à un plus grand nombre de cas, en ce qui concerne la cure de la tuberculose , et à tous ou presque tous les cas , pour sa pro- ph)'laxie. Comme l'a fait observer M. le D"" Van Merris, la dé- couverte des bacilles de la tuberculose n'a fait que consolider la doctrine de la spécificité de l'air marin contre la scrofulo-tubercu- lose, en faisant voir que cet air arrête la pullulation des bacilles, les raréfie dans les tissus et les organes envahis et finit par les y anéantir (2). On tend même de plus en plus, sous l'influence des théories et des observations nouvelles, à se demander si la cure marine, avec climat approprié, n'est pas en définitive, dans la généralité des cas, (i) Successivement, on a vu s'édifier à Berclv, indépendamment du grand liôpital de 600 lits, les deux maisons Cornu de 3oo lits, l'une pour les garçons, l'autre pour les iilles, et les maisons Bouville-Baillet et Malingre-Rivet, qui, toutes les quatre, re(;uiv<'nt des enfants assistés, sous la direction de l'Assistance publique de la Seine ; puis l'hôpital Rothschild de 55 lits — ion aujourd'hui — pour les enfants Israélites, et, à côté de ces établissements, des multitudes de maisons de santé particulières, de villas et de chalets, qui attestent la vogue grandissante de cette ville d'eau. (2) D' Vax ^Ierris. Action Ihcrnpi'uliqitc du si'-Jonr à la mer ^/««.s In luhcrciilosf. Paris, Masson, 1890. l300 HYGIÈ\E ET MÉDECIXE PUBLIQUE le genre de médication ({ui convient le mieux , tout au moins au premier et au second degré de la tuberculose pulmonaire. Ce que préconisait, avec tant de force, M. Bergeron, en 186G, était donc l)ien ce qu'il était urgent de faire, et c'était bien par là qu'il fallait commencer, en complétant cette vaste organisation d'assis- tance et de prophylaxie par toutes les améliorations d'hygiène pul)lique et d'économie sociale susceptibles d" arrêter le développe- ment des causes génératrices de la tuberculose. On ne le comprit point. Ceux qui alors détenaient le pouvoir objectèrent l'impossibilité ou la dil'tîculté financière. J'ai démontré, par un exemple concluant qu'ils étaient dans l'erreur la plus complète et qu'en réalité c'eût été une grande économie — économie de vies humaines, économie d'argent aussi — non seule- ment pour les familles et le pays, mais pour l'Etat, les villes et les départements eux-mêmes, à qui auraient principalement incombé les frais d'installation et d'entretien de ces étalilissements sauveurs. Je lai démontré en créant de toutes pièces, sans aucune subven- tion de rp]tat. dans le département que j'administrais, de 1886 à 1888. le Sanatoriiwi maritime de Danj'uls, construit pour recevoir 200 malades, oii sont soignés et guéris, depuis i5 ans, les petits scrofuleux-tuberculeux et prétuberculeux des Pyrénées-Orientales, ainsi que d'un grand nombre d'autres départements voisins ou éloignés. Non seulement cette fondation n'a pas. comme on le prétendait, ruiné les finances des Pyrénées-Orientales, pourtant très compro- mises alors par le phylloxéra, non seulement elle n'a, en définitive, rien coûté au budget départemental, mais elle est devenue pour celui-ci une source de bénéfices annuels indéfinis dune trentaine de mille francs au moins. Pourquoi ce que j'ai pu mener à bien, dans des circonstances cependant défavorables, à beaucoup d'égards, avec le concours de quelques généreux philanthropes, d'un Conseil d'hygiène et d'un Conseil crénéi^al intelligents et éclairés, aurait-il été inexécutable dans les autres départements'?... Les hommes avisés, bien intentionnés et dévoués ne manquent nulle part. Eût-il dû en coûter quelque chose aux budgets des départements, des villes et de l'État lui-même, il n'y avait pas à hésiter. C'était le devoir et l'intérêt bien compris, dans tous les cas. Avec un minimum de dépenses, on aurait obtenu un maximum d'efficacité. D'une part, en efict, la journée d'entretien, dans les sanatoriums G. LAFARGUE. — LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE l3oi OU hôpitaux maritimes, ne dépasse pas en général 2 francs (dans ceux de l'Œuvre des Hôpitaux marins elle n'est même, pour les enfants secourus, que de i fr. 70), au lieu de 4 à 6 francs, si ce n'est plus . dans les autres établissements de tuberculeux. D'autre part, l'exemple du petit hôpital en bois de Berck, où, pendant 4o ans, ont été obtenus les meilleurs résultats, et celui du sanatorium en pierre de Banyuls, où les résultats sont encore plus satisfaisants, montrent bien qu'à la mer le lit d'assisté peut, dans d'excellentes conditions, être obtenu au prix de mille à quinze cents francs, au lieu des trois à six ou même dix mille francs qu'il coûte dans les hôpitaux urbains et dans les sanatoriums de campagne ou d'altitude organisés jusqu'à ce jour. Et, quant aux résultats utiles, ils ne sauraient être comparés, puisque, dans le premier cas, c'est la guérison presque assurée, ou. ce qui vaut mieux encore, la prophylaxie cei-taine, tandis que, dans le second , c'est à peine s'il y a l'espoir d'une amélioration ou d'une guérison problématiques. ESQUISSE d'un plan GÉNÉRAL d'oRGANISATION DE LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOLE Que n'a-t-on, dès 1866, appliqué, dans la France entière, le plan si bien conçu du D'' Bergeron!... Nous n'en serions pas où nous en sommes aujourd'hui. Les épou- vantables ravages du fléau meurtrier de la tuberculose, qui sévit en France plus qu'ailleurs, auraient été considérablement atténués et notre pays se trouverait, à cet égard, contrairement à ce qui est, dans une situation plus favorable que tous les autres. La sage et prévoyante initiative de notre illustre compatriote , — à laquelle il n'a peut-être pas été assez rendu hommage, — si elle avait été sutïïsamment comprise et entendue des pouvoirs publics, nous aurait valu, en 4© ans, une avance énorme sur les autres pays, qui ne sont i^as en général favorisés d'une pareille proportion de côtes maritimes. Sans doute, ce puissant moyen de guérison et de prophylaxie sociale, le traitement marin, n'eût pas suffi, à lui tout seul, à faire disparaître cette lèpre moderne de la tuljerculose ; et d'autres éléments de succès sont à considérer dans la lutte qui s'organise. Les conditions de procréation, par exemple, sont bien souvent défectueuses, dans notre pauvre espèce humaine qui, si elle a poussé l302 HYGIÈNE ET MÉDECINE PUBLIQUE très loin l'art de la reproduction des végétaux et des animaux, qu'elle exploite à son profit, a vraiment par trop négligé jusqu'ici l'intérêt, autrement grave, et qui se double du plus impérieux devoir, des soins à donner à sa propre reproduction. C'est, en eflet. des condi- tions dans lesquelles s'opère celle-ci que dépend le plus incontesta- blement la santé des enfants et des futui's hommes. L'insalubrité des logements, des écoles, des usines, des ateliers, des éta])lissements de toutes sortes, où s'entassent un si grand nombre de ces humains, respirant jour et nuit des poussières ou un air vicié et pathogène, vient ajouter bientôt une nouvelle cause mor- bide, non moins funeste, aux tenues héréditaires. Enfin, les tares acquises, résultant des maladies contagieuses ou autres, mais principalement de l'inoculation et de l'action destructive de certains virus infectieux, ne tardent pas, avec l'alcoolisme, les surmenages de toutes sortes et la tuberculose, qui se greffe finale- ment sur ces états morbides, à déterminer chez ces malheureux, et par contagionnement, sur beaucoup de ceux qui les approchent, la dégénérescence et la mort. C'est donc contre toutes ces causes génératrices de tuberculose qu'il faut agir en même temps, pour résoudre ce grand problème d'hygiène i)ublique et sociale : le refoulement et la disparition pro- gressive, sinon rapide, de cet épouvantable fléau des temps modernes. Aussi. V enseignement de l'hygiène étendu, comme le voudrait M. le P' Pinard, jusqu'à la science de la puériculture, la plus néces- saire de toutes, et celle que l'on connaît le moins ou dont on mécon- naît le plus les lois ; La désinfection et V assainissement des logements et locaux insa- lubres de toutes sortes, des écoles, des internats, des casernes, des théâtres, des usines, des ateliers, de tous les lieux pul)li(S ou collec- tifs, des moyens de transport en commun, etc., réclamés et pour- suivis, avec tant d'esprit j)i'atique et de persévérance, par M. le D'' A.-J. Martin, ainsi que par les dévoués promoteurs des Sociétés d'habitations ouvrières à bon mai^ché : La multiplication sur tout le territoire de colonies de vacances , si utiles pour réparer les forces épuisées des pauvres écoliers et ouvriers surmenés des deux sexes et pour les préserver des diverses formes de la tuberculose, toujours prête à les assaillir, en les soustrayant, pendant quelques semaines ou quelques mois, à l'air malsain des villes et leur faisant respirer l'air vivifiant de la campagne, des montagnes ou de la mer ; G. LAFARGUE. — LA LUTTE CONTRE LA TUBERCULOSE l3o3 Les Sociétés de tempérance et les efforts de toute nature tentés contre cet autre redoutable générateur de la tuberculose, l'alcoo- lisme, qui fait, chez nous connue partout, des iDrogrès bien alarmants pour l'avenir de notre espèce ; L'établissement, dans les villes , de dispensaires antituberculeux conformes ou analogues au type créé à Lille , avec tant d'ingéniosité €t de succès, par M. le D- Calmette. en vue de rechercher les tuber- culeux et les prétuberculeux , de leur donner des soins et de les diriger sur les sanatoriums ou hôpitaux qui conviennent à leur état ; L'amélioration ou la transformation des hôpitaux des villes, l'isolement des phtisiques on tuberculeux contagieux et le tranfert à la campagne des tuberculeux curables ; Enfin, la création à cet effet, comme le demandent MM. les D^^ Brouardel, Landouzy, LetuUe. Sersiron et bien d'autres, du plus grand noml>re possible d'asiles ou de Sanatoriums spéciaux , où ils seront recueillis et soignés par les moyens reconnus les plus effi- caces ; Sont autant d'éléments appelés à concourir puissamment au salut final de l'espèce humaine. J'ai cru devoir m'occuper ici, surtout, du Sanatorium maritime ou traitement marin, parce qu'il me paraît avoir une importance vrai- ment prédominante , dans la lutte engagée , présentant ce quadruple ou quintuple avantage d'être à la fois : 1° Curatif, dans tous les cas ou dans presque tous, des états mor- bides aussi variés que nombreux , qu'on peut appeler d'un mot la Prétuberculose ; 2° Curatif, en bien des cas, de la tuberculose elle-même, surtout ■dans ses manifestations locales non pulmonaires ; 3° Prophjdactique, à la plus haute puissance, de la phtisie ou tuberculose proprement dite, puisqu'il en préserve les prétubercu- leux, qu'il guérit dans la proportion de 98 à 100 0/0 — c'est-à-dire ceux dont les ascendants étaient eux-mêmes atteints de tubercu- lose ou d'alcoohsme, ou de quelque autre tare prédisposante, ou qui, pour un motif quelconque, appartiennent à l'immense catégorie de ceux que le professeur Landouzy a si bien dénommés des candidats à la tuberculose; 4° D'une efficacité , sur tout ces points, non pas problématique, mais certaine, non pas exceptionnelle, mais générale, comme il appert des résultats incontestables constatés, depuis i5 ans, au Sana- torium de Banyuls-sur-Mer, par la photographie et par la statis- tique ; l3o4 ARCHÉOLOGIE 5" Enfin, tout à fait pratique et à la portée de tous, — État, dépar- tements, grandes et petites villes, communes, hôpitaux et hospices, bureaux de bienfaisance , patronages, sociétés charitables, sociétés de secours mutuels , simples particuliers , — parce que très écono- mique les frais n'atteignant guère que le tiers de ceux des Sanato- riums et Hôpitaux de tuberculeux proprement dits. Mais tout exclusivisme serait fatal, et il convient, à mon avis, de- développer harmoniquement ces divers moyens de résistance à l'action meurtrière du plus terrible ennemi de l'humanité. M. Louis DE FARGY à Angers LA CROIX D'ANJOU [220.93(44.18)]; — Séance du 5 août Si dans un parterre chaque fleur a son parfum, si dans un orchestre chaque instrument a son timl^re, on ];)eut dire qu'il en était en quelque sorte de même de nos anciennes provinces. Chacune d'elles se distinguait par certaines particularités, L'Anjou s'enorgueillissait à bon droit de l'affabilité de ses habi- tants, de la douceur du climat, de la fertilité du sol, de la beauté des sites, d'un type spécial d'architecture, auquel on a donné depuis un demi-siècle le nom de st}de Plantagenet, de la science de l'Univer- sité d'Angers, de l'éclat unique de la Procession du Sacre (à laquelle plusieurs rois de France eurent la curiosité d'assister) et de bien d'autres choses encore. A la gerbe de ces souvenirs qu'il me soit permis d'ajouter un épi, glané dans le champ de l'Archéologie. Je viens devant vous revendiquer pour notre ancienne province le nom de Croix d'Anjou pour la croix à double traverse, appelée vulgaire- ment Croix de Lorraine. Ce n'est pas sans quelque scrupule que je vais contredire un savant aussi compétent et aussi aimable que M. Léon Germain, de Nancy : il m'en excusera avec sa courtoisie bien connue. Comme point de départ à cette notice, voici la conclusion de son article sur VOriffine de la Croix de Lorraine, donné en i885 dans la Revue de L. DE FARCY. — LA CROIX d'aNJOU i3o5 l'Ai^t Chrétien et repris avec quelques modifications en 1890 dans V Annuaire de sa province : « La Croix de Lorraine n'est autre, écrit-il, que la Croix de Hon- « grie, altérée par des modifications successives. Apportée à la Lor- « raine par le roi René, qui l'avait adoptée comme héritier des « prétentions de la première maison d'Anjou, elle devint, depuis le « règne glorieux de René II (i473-i5o8), l'emblème spécial de la mai- « son souveraine et de la nation (i). » La comparaison des croix à double traverse, frappées sur les monnaies d'Anjou et de René II de Lorraine, de celle du bas-relief de Longwy (pages 21, 26 et 27 de l'article de M. Germain) avec la Croix de Hongrie, dont les extrémités sont pattées et le pied est fiché, c'est-à-dire terminé par une pointe aiguë (2), me conduit à rechercher une autre solution, car la forme des branches en est absolument différente. Si, au contraire, des croix dont je viens de parler je rapproche celle de la clef de volite principale de la chapelle du château d'An- gers, terminée en i4ii (3), les étendards tissés vers iS^y sur la tapis- serie de l'Apocalypse, commandée à Nicolas Bataille par Louis l''^^^, enfin la relique delà Vraie-Croix, transférée en iSSg de l'abbaye de la Boissière dans la cliax^elle ducale (5), je suis frappé de l'analogie. Dans les unes et les autres, les extrémités sont rectangulaires. A part la longueur de la hampe, les proportions de la croix sculptée de Longwy sont les mêmes que celles de la Vraie-Croix , composée en entier de trois grandes pièces du bois sacré. Quant à la couleur de la double croix, elle a été tissée en noir sur les tentures de l'Apocalypse : en noir, elle fut brodée sur les lambre- quins des chevaliers, combattant en i465 aux côtés de Jean, duc de Calabre (6); je la trouve tracée à l'encre d'une main défaillante par Louis I^^ avant sa signature, à la fin de son testament de i383, jDeinte en noir au cou des aigles servant de support aux armes du roi René, enfin en noir toujours sur les marges de son livre d'heures (1) Origine de la Croix de Lorraine, par Léon Germain, Nancy, iSgS, p. 28. (2) Ibidem. Sceau d'Agnès, épouse d'André III, roi de Hongrie, i326. (3) Bei'uc de l'Art chrétien , iinWet 1902. (4) Monographie de la Cathédrale d'Angers, par L. de FarcJ^ Volume du Mobilier, p. 116, photographies n°» 47 ^t ^i- (5) Revue de l'Art chrétien, v livraison, igoS. (6) Origine de la Croix de Lorraine, par Léon Germain, p. 10. Cowmentarins lathariensis de Chifflet, imprimé en 1649 : « ... Observavit enim Joannes de Haynin, Eqiies Ilanno- nius, in pugna montis Hericii, cui presens aderat anno M.CD.LXV. Ducis calabriae cataphractos équités gestasse bandas seu ta-nias albas, NIGRIS CRN'CIBVS GEMINATIS, acu pictas ». l3uG ARCHEOLOGIE à.droite et à gauche de son écusson, dans la chapelle « de Monsieur saiiict Morice », à la cathédrale d'Angers, ou encore sur l'armouMî aux reliques de la chapelle de saint Bernardin, aux Cordeliers... Tax)issier, brodeur, i^eintres, tous ces artistes ont eu évidennnent, en agissant ainsi, l'intention d'imiter le bois de la Vraie-Croix, d'une teinte si foncée, qu'il semble presque noir. Ainsi, forme des extrémités, proportions et couleur correspondent exactement à la Croix de la Boissière, objet de la vénération des ducs Louis P', Louis II et de René lui-même, dans le sanctuaire du château d'Angers, d'où elle sortit en i456 pour retourner délinitive- ment dans la sainte chapelle de l'abbaye, construite en son hon- neur (i). Louis P'' prodigua les témoignages de sa vénération pour cette pré- cieuse relique. Il fonde un Ordre de la Croix et s'en proclame chef; il fait tisser, en 1877, vis-à-vis des armes d'Anjou, les couleurs de son Ordre (de sinople, à la croix double de sable , entourée d'un filet d'or) sur l'Apocalypse ; il fait peindre par Jean Belin, en iS^S, douze écussons à ses armes et à celle de la duchesse pour les atta- cher à des cierges qui doivent brûler devant la Vraie-Croix (2); il fait représenter la Cî'oix Double, semhlahle en façon et couleur à la Vraie-Croix, dont il a encommencé et prins l'Ordre, sur son grand tabernacle d'or, sur son faudesteuil de vermeil ou trône, sur un bacinet d'acier (3); enfin il demande dans son testament du 26 septembre i383, pour assurer à ses successeurs la possession de cet inestimable trésor, que l'abbaye de la Boissière soit transportée dans sa capitale. « dans l'hôtel du sire de Craôn » et qu'elle prenne désormais le nom d'abhaj-e de Sainte-Croix d'Angers. Son fils. Louis II, ne fut pas moins dévot à la Vraie-Croix de la Boissière : comme son père, il la fit placer en 1399 sur l'autel de la chapelle du château d'Angers et, le 18 juin 1407, il se proclama chief-frère de lafrairie en l'honneur et référence de la sainte Vi'aic- Croix (4) : celle-ci était une association pieuse, distincte de Y Ordre de la Croix. Au moment de la reconstruction de la chapelle du Château par Yolande d'Aragon, la clef de voûte située au-dessus de l'autel est (1) Cet (■■(lilice remarquable existe encore; j'en ai donné le plan, rélévaliun et la coupe dans la Jic^'uc âc l'Art rhrélicn, Juillet 1902. La voûte, à nervures entrecroisées d'une travée à l'autre, est ])articulièremenl intéressante. (2) lYoïiwlh's A7-cIm\'s de l'Art français , 1878, p. i6(i. Documents recueillis et annotés par M. Guiffrey. (■5) J]il)li()tlirijiic lie l'École des Chartes, 1901 , p. 208, 210 et 221. (4) Xutiee historique de la Vraie-Croix de Baugé , par l'abbé Ban-au, p. 6y. L. DE FARCY. — LA CROIX D' ANJOU l3o7 ornée de la croix à double traverse, qui brillait depuis la lin du du xiV' siècle au sommet du clocher central de la cathédrale établi entre les deux flèches. Elle y fut replacée en i54o après sa recons- truction en pierre et nous l'y verrions encore sans l'incendie de i83i. Il est vrai que, dès le xviii'' siècle, on en avait perdu la signification. C'était, d'après les écrivains du temps, le signe de l'exemption du cliapitre, relevant directement de l'archevêque de Tours... Mauvaise explication, puisque cette attribution de la croix à double traverse comme signe héraldique du pouvoir archiépiscopal est relativement récente. Aussi ne faut-il pas s'étonner qu'après la reconstruction de la tour, à la suite de l'orage de i83i, elle n'ait pas été rétablie. Aujourd'hui que l'origine en est connue, il serait à désirer qu'on la plaçât de nouveau à son poste d'honneur. Mais, dira-t-on, qui vous autorise à donner à la Vraie-Croix de la Boissière le nom de Croix d'Anjou'? Dans son testament, Louis I"' n'emploie pas ce terme, il est vrai : il parle de la Croix de son Ordre , sans autre désignation et demande que labliaye transférée dans sa capitale prenne le nom d'abbaye de Sainte Croix d'Angers. Le nom de Croix d'Anjou ne ressort-il pas pour ainsi dire de cette disposition? Admettons que non : j'ai beau- coup mieux à vous offrir, puisque je le trouve textuellement dans trois documents plus récents, tout en faisant remarquer qu'il put être employé dans le langage ordinaire longtemps auparavant. Le premier de ces textes remonte au mois de septembre 1480 : il s'agit de la décoration du drap mortuaire , commandé par Jeanne de Laval pour le roi René (i) : « A Arnoullet. brodeur, quarante-trois florins, quatre gros pour <( quatre grans escusçons faiz aux armes de feu Monseigneur et une « double Croix, mys sur le drap de parement de feu Monseigneur... « A Arnoullet. brodeur, six florins, huit gros, poui* reste de « paiement des un escusçons et une croix d'Aniou, qu'il a fais pour <( mettre sur le drap de feu Monseigneur... ». Ces deux articles du compte de Simon Brehier, argentier de la reine, se complètent : double croix et croix d'Anjou sont évidem- ment dans la pensée et sous la plume du scribe une seule et même chose. Le procès-verbal des funérailles du roi René, en date du 26 octobre 1481, me fournit le second (2) : ce En la grant église açoit au (i) Archives des Douches-du-Rhône , séi'ie B, ii" 25io, loi. 66 verso et 77 verso. (2) Le Roi René . par Lecoy de la Marche, t. 11, p. 389. l3o8 ARCHÉOLOGIE miUieu du ciieiir une chapelle ardente, moult belle et niagidfique, à quatre croisées et à XVI Croix doubles d'Anjou » de tous les quartiers. Enllii, je relève dans Tinventaire des joyaux de Jeanne de Laval ^ dressé le i6 septembre i486 (i) (. Celui-ci avait encore dans son trésor une burette de vermeil, en forme d'aigle. « au col duquel pendoit un escuçon de Y Ordre de la Croix, et la dicte aigle était couronnée et avait une fleur de lis de quatre fleurons sur sa tète » (i). Il me paraît impossible de terminer cette note sans ajouter quelques mots au sujet de la Croix de la Boissière, conservée aujour- Incurables de Baugé. Formée de trois pièces du bois de la Vraie-Croix, elle est, d'après M. Rohault de Fleury (2), la troisième de France et la douzième de rUnivers entier, comme importance. La tige mesure 0^29 de long, o™02 de large et o™oi3 d'épaisseur. La grande traverse a 0^^092 de long, la petite ©'"ojS. Louis F'' enrichit cette croix de deux crucifix d'or et de fleurons • semés de perles, de saphirs et de rubis en i364; il y ajouta un pié- destal de vermeil, pour en faciliter l'exposition aux j^èlerins. Mais d'où venait cette croix renommée ? Des actes authentiques, qu'on peut voir aux Incurables de Baugé (3). nous donnent la réponse. D'après une charte de 1244, Jean d'AUuye. seigneur de Châteaux et de Saint-Christophe, ayant conservé aux chrétiens l'ile de Crète et vaillamment combattu les Sarrazins , reçut la relique en récompense de ses exploits, au moment de son départ pour l'Occi- dent, de Thomas, évêque d'Hiérapétra et d'Arcadie. Celui-ci en avait été gratifié autrefois par Gervais, patriarche de Constanti- nople, qui la lui avait donnée comme étant celle que portait Emma- nuel Commène, quand il combattait les ennemis de la Croix. De retour en France, Jean d'Alluye céda la précieuse relique aux religieux de la Boissière, qui construisirent une charmante chapelle en dehors de leur enclos, pour y exposer la Vraie-Croix à la vénéra- tion des pèlerins. Cet édifice (remarquable spécimen de l'architecture en style Plantagenet) existe encore ; j'en ai donné la description et les plans dans la Revue de l'Art chrétien (4). La Vraie-Croix v serait toujours restée sans les incursions des Tard-Venus, unis aux Anglais, qui, après avoir dévasté l'abbaye du Loroux, menaçaient celle de la Boissière. Les religieux, redoutant le sort de leurs voisins, transpor- (i) Inventaire des Joj'aux de Louis I, n" 494- IN'ote empruntée :i rarlicle do M. ^Moran- villé. Bibliothèque de l'Ecole des Charles, 1901, p. 620, note i. (2) Mémoires sur les Instruments de la Passion , p. laS, 124 et 3o3. (■)) Xotiee historique de la M-aie-Croix de Baugé, par Tabbé Barrau, iS;4 , p. 3i et suivantes. (4) Revue de VArl eltrclirn , iyo3, 2' livraison. l3lO ARCHÉOLOGIE tcrent à Angers leur Yraie-Croix et la confièreril à Louis P'', qui la fit déposer dans la chapelle du château, en i359, où elle fut vénérée près d'un siècle. M. A. LADUREAU à Paris LES FRESQUES DE BOSCO-REALE [joi] — Séance du 6 août — • Sur les flancs du Vésuve, à peu de distance de Pompéi, s'élevaient autrefois, avant la célèbre éruption du volcan qui réduisit en cendres cette ville et sa voisine Herculanuni , c'est-à-dire avant l'an 79 de notre ère, de nombreuses villas de plaisance où les nobles romains venaient chercher le calme, la tranquillité, la douceur du climat et la satisfaction des yeux que leur procurait ce paysage unique au monde. Sur les ruines de ces villas, on a construit une petite ville formée d'une agglomération de maisons entourées de jardins et à laquelle on a donné le nom de Bosco-Reale. En faisant des fouilles dans le sol de cet endroit charmant, on y a découvert de nombreux vestiges des habitations d'autrefois, qui ont été recouvertes par les cendres brûlantes vomies par le Vésuve. De même qu'à Pompéi. le bois et toutes les matières organiques ont été détruits par l'incendie allumé par cette pluie de feu, mais les murailles des habitations, les colonnes, les statues, en un mot tout ce qui était incombustible a résisté et c'est grâce à cela que nous avons pu retrouver, il y a quelques années, cette ville ancienne com- plètement enfouie sous la cendre et que le gouvernement italien a remise au jour, Pompéi ! C'est également grâce à cette cendre poreuse et légère que l'on doit la conservation des peintures à fresque qui ornaient les murailles de toutes ces villas en les protégeant contre les détériorations que leur auraient causées les pluies qui, quoique rares, sont parfois très vio- lentes dans ce i)ays. Alisorbée par les couches supérieures de cendre qui recouvrent les anciennes habitations, l'eau pluviale n'a pu arriver jusqu'aux murailles et y détruire les peintures. A. LADUREAU. — LES FRESQUES DE BOSCO-REALE l3ll On sait que les procédés de peinture des anciens étaient de deux natures diderentes, à la détrempe ou à l'encaustique, car ils ii,^no- raient les propriétés siccatives de Thuile de lin; la peinture à la détrempe, qui est le procédé employé à Bosco Reale, consistait à délayer des pigments minéraux, ocres diverses, terres colorées, cinabre finement pulvérisé etc., dans une solution d'albumine d'œufs, ou autrement dit de blancs d'œufs , ou parfois aussi de colle forte (gélatine) extraite des peaux ou des os des animaux. L'action des eaux du ciel sur ces peintures aurait été terriblement néfaste, elle les aurait enlevées complètement. Quant au procédé à l'encaustique, il consistait dans le mélange très intime des substances minérales colorées avec la cire d'abeilles, que l'on ramollissait par la chaleur pour l'appliquer sur les surfaces à peindre. On croit aussi que certains artistes y mélangeaient de la résine semi-fluide des pins, de la térébenthine brute; les anciens ignoraient l'essence de térébenthine et ne pouvaient par conséquent songer à utiliser ses propriétés dissolvantes de la cire. Un certain nombre de peintures murales trouvées à Pompéï ont été effectuées par cette méthode et se sont ainsi mieux conservées que celles en détrempe. Ces quelques explications étaient nécessaires pour faire com- prendre à nos lecteurs comment des peintures effectuées il y a dix-neuf siècles avaient pu parvenir jusqu'à nous sans subir les injures du temps et des éléments. Voici maintenant dans quelles circonstances les fresques admi- rables qui font l'objet de cet article ont été mises au jour : Depuis plusieurs années, M. Vincenzo de Prisco, député de Bosco-Reale, a entrepins des fouilles dans les abords d'une villa moderne qu'il y possède, la Pisanella. On avait déjà trouvé dans des villas voisines, débarrassées de leur couche de cendres, des objets forts intéressants et, entre autres, de la vaisselle d'argent, que le baron Edmond de Rothschild a acquise pour l'offrir à notre musée du Louvre, un important trésor de deniers d'or renfermant de superbes pièces des règnes de Galba. d'Othon et de Vitellius et un riche mobilier acquis par le musée de Berlin; mais c'est dans la villa découverte par M. de Prisco qu'on a trouvé les peintures les plus intéressantes. On peut même afGrmer que les fresques qu'il a ainsi remises au jour sont les pkis remarquables au point de vue artistique de toutes celles que nous a léguées l'antiquité. La pureté du dessin, l'observation exacte des lois de la perspective, l'harmonie des couleurs, leur habile dis- position en font des pièces artistiques dignes en tout point de nos l3l2 ARCHÉOLOGIE meilleurs peintres. Malgré des difficultés très grandes, provenant de la résistance de ladministration des Beaux- Arts d'Italie , ces admi- rables fresques ont été enlevées à grands frais des nmrailles qui les portaient et amenées à Paris, où on peut les voir en ce moment chez MM. Canessa, à l'exception d'une que le musée du Louvre a accjuise et où on va l'installer prochainement et d'une autre achetée par un riche amateur pour l'offinr au musée de Bruxelles. D'après les documents retrouvés depuis par les archéologues qui ont étudié l'histoire de Bosco-Reale, la villa dans laquelle se trouvaient ces fresques aurait été construite en l'an i de notre ère, puis vendue aux enchères publiques le 9 mai de l'an 12. On sait que son architecte s'appelait Mario, car on a trouvé sur une tablette en pierre cachée sous le plâtre la mention MARIO STRYCÏOR accompagnée de la truelle symbolique. En outre, on a retrouvé une mesure de capacité portant le nom de P. Fannius Syniston et un cachet de bronze qui se trouvait dans une des chambres et portait la suscription L-HERFLO , ce qui fait supposer que le propriétaire de cette villa , au moment de l'éruption de 79, s'appelait Lucius Herenius Florus. Au moment de la catastrophe, la maison était en répai*ation , elle avait probablement souffert du tremblement de terre de 63 qui ût tant de déscàts : on refaisait la salle des bains et on transformait la chambre à coucher; seule la cilla riistica (maison du jardinier) était habitée. Partout ailleurs on avait enlevé meubles et menus objets. On a retrouvé dans le péristyle un socle de marbre dépourvu de sa statue. On croit que les peintures en question ont dû être faites à deux époques différentes ; les plus anciennes, architecture sévère, imitation de marbres précieux, panneaux à grandes figures dateraient des premières années de notre ère ; les autres , en style rococo et un peu trop chargées, seraient postérieures à la vente du 9 mai de l'an 12. Leur étude permet de se rendre un compte exact de l'état d'avance- ment de la peinture chez les Romains , au moment précis où le paga- nisme, expirant allait céder la place au nouveau dogme, au Christia- nisme qui a conquis le monde et sous linrtuence duquel l'homme a perfectionné ses connaissanc s, a développé ses goûts artistiques, a enfin acquis la science sur laquelle repose toute la société moderne. Les fresques de Bosco-Reale marquent donc l'étape parcourue par Ihumanité au moment de la plus importante transformation qu'elle ait subie dans le cours des siècles et c'est un des points de vue aux- quels elles nous ont semblé le plus particulièrement intéressantes. G. FLEURY. — PORTAIL OCCIDENTAL DE LA CATHÉDRALE d'aNGERS i3i3 M. G. FLEURY à Mamers (Sartlic) LE PORTAIL OCCIDENTAL DE LA CATHÉDRALE D'ANGERS (i) [726.6(44.18)] — Séance du 6 août — Le portail occidental de la cathédrale Saint-Maurice d'Anjrers a beaucoup perdu de son ancien charme. Le linteau de la porte a été remplacé par une disgracieuse arcature du xvii« siècle ; le trumeau a disparu ; des restaurations de diverses époques ont modifié quelques détails. Malgré cela, si l'on veut bien examiner attentivement ce j)ortail, tant dans son ensemble que dans ses multiples ornements, on le trouvera digne du plus grand intérêt et l'on partagera certai- nement l'opinion de Prosper Mérimée, qui écrivait à son sujet, en i836 : « Je ne me lassais pas surtout de considérer les draperies gra- cieusement ajustées, couvertes de longs plis serrés et arrondis, char- gés de pierreries et de broderies de toute espèce (2). » Dans l'état actuel, le portail occidental de la cathédrale Saint- Maurice d'Angers se compose d'une archivolte, à quatre voussures, en arc brisé surhaussé, encadrant un tympan resté intact avec le Christ assis en Majesté, dans une auréole elliptique, au milieu des quatre symboles des Évangélistes. La première voussure de l'archi- volte, au-dessus du tympan, est ornée de dix anges posés de profil, chacun à mi-corps au-dessus d'un petit nuage ; ces anges sont affron- tés au milieu de la voussure qui n'a point de clef; la deuxième vous- sure supporte également dix anges semblables à ceux de la première, €t en plus un ange, posé de face, qui forme clef; dans chacune des troisième et quatrième voussures , douze vieillards assis tiennent un vase de la main droite et un instrument de musique de la main gauche; à la clef de la troisième voussure, deux petits anges sup- portent une couronne ; la quatrième voussure n'a pas de clef, mais deux anges placés de chaque côté, au sommet de l'arc brisé et affron- tés, occupent le milieu de la scène. Enfin, l'archivolte est encadrée (i) Cette note est extraite cruuc étude générale, que nous préparons sur les portails imagés du xii« siècle, en France, et sur leur iconographie. (2) Notes d'un voyage dans l'ouest de la France. Paris, i833, p. Sa'J. 83* l3l4 ARCHÉOLOGIE extérieurement par une moulure cliargée d'une série de rinceaux de i'euillagcs. au milieu desquels sont sculptées de jfînes têtes plates. Dans chacune des deux premières voussures, à l'imposte, sur la hauteur du linteau disparu, un personnage est assis de chaque côté sous une arcature en j)lcin cintre, tète nue, pieds nus, tenant un livre dans ses mains. Un ange debout, portant dans ses mains un chandelier, est également placé dans chacune des deux autres vous- sures. La présence des deux personnages assis de chaque côté sous une arcature dans les deux premières voussures nous amène à croire que le linteau, aujourd'hui disparu, mais qui jadis supportait le tym- pan, devait être orné de huit personnages de même nature avec arcatures, comme à Saint-Loup de Naud, et que la réunion des per- sonnages du linteau et du bas des deux premières voussures consti- tuait le groupe des douze apôtres, ainsi qu'à Bourges, à Charlieu et au Mans, où nous trouvons des statuettes à poses identiques. Pour appuyer cette hypothèse, nous ferons d'abord remarquer que, si l'on divise la longueur du linteau en huit parties, on obtient ainsi des fractions égales à chacune des arcatures sculptées sur les sommiers des deux premières voussures; d'autre part, un rapport de sculpteurs experts, rédigé après l'incendie du aS mai 161;;, mentionne la des- truction de trois figures d'apôtres dans le tympan ; il s'agit évidem- ment des personnages qui devaient orner le linteau. Quatre personnages debout, de chaque côté de la porte, sont adossés aux colonnes , sans dais , qui garnissent les angles rentrants des jambages; dans le jambage droit, le permier personnage est une femme, tandis que c'est un homme dans le jambage gauche. Les statues reposent sur de petits socles, bas mais larges, chargés de sculptures; des chapiteaux à lai'ges feuilles d'acanthe terminent les colonnes. Le soubassement, quoique de la même époque que le por- tail, n'accuse pas les angles rentrants comme dans la plupart des portails du xii^ siècle. Il se compose dans chaque jambage d'un entablement rectiligne , sur lequel se dressent les statues et qui est supporté par cinq colonnettes engagées, à chapiteaux ornés de feuilles plates et dont les bases reposent sur un socle unique mou- luré. Les statues de ce portail ont subi des réparations à diverses époques; des restaurations nombreuses y ont été faites, notamment en 1629, ainsi que des peintures pour faire disparaître les traces des dégâts causés ]3ar l'incendie des tours, arrivé quelques années avant cette date, de même qu'en i83o, où le sculpteur Dantan a retouché G. FLEURY. — PORTAIL OCCIDENTAL DE LA CATHÉDRALE d' ANGERS l3l5 assez malheiii*eiiseinent des statues dont il a dénaturé les figures et les mains. C'est ainsi que furent refaits, au xvii<" siècle, le lion et l'ange encadrant le côté gauche du Christ, dont la tête et la main droite furent restaurées. Ces parties, aujourd'hui en bon état de conservation, étaient, dans le rapport de 1617. mentionnées comme détruites; nous y lisons, en effet : « Qu'au devant, sous la voûte des dits clochers , y avait une Trinité eslevée en bosse avec les Évangé- listes et Apôtres, où il manque trois figures d'apôtres, un lion, un ange, et la tète et une main de la figure de la dite Trinité, et qu'il est besoin refaire l'architecture pareille à celle de l'opposite. » Ces réparations ont bien été exécutées ainsi que le demandaient les experts; on les reconnaît facilement encore aujourd'hui en exami- nant les parties décrites dans ce rapport; car l'ange, qui ne tient plus le livre qu'il possède toujours dans les tympans du xii^ siècle, n'a pas conservé sa pose traditionnelle, sui'tout pour l'aile qui se déploie ordinairement à droite au-dessus de la tète; de même les ailes du lion n'ont pas lem' développement habituel et ne sont pas symétriques avec celles du bœuf; la tète du Christ n'a pas non plus conservé la physionomie qu'on est accoutumé à rencontrer dans les autres portails du nord de la France à cette époque, quoique dans ces diverses représentations du Christ on relève de nombreuses variantes quant aux petits détails; ainsi, à Bourges, la barbe et les cheveux sont courts, plaqués ; au Mans, la moustache est forte et les cheveux longs, x^lats, en grosses mèches raides; dans le tympan d'Issy, le Christ a les cheveux divisés sur le front et tombant sur les épaules en lourdes tresses ondulées, les moustaches sont fortes, la barbe courte et formant colher. La tête du Christ d'Angers se rap- proche davantage de celles de Chartres et de Saint-Loujî-de-Naud , où le bas de la figure est couvert par une barbe divisée en plusieurs parties, ainsi que les cheveux, dont chacune des mèches se termine par une boucle. Sous la réserve de ces retouches de détails , les statues du portail de Saint-Maurice d'Angers sont bien toutes de l'époque de la consr truction et par ce fait composent un ensemble intéressant comme ceux du Mans, de Senlis, et de Saint-Loup de Naud. Car il est bon de faii*e remarquer que peu de portails du xii« siècle sont conservés dans leur état primitif de construction; la plupart ont subi des modifications et des adaptations, comme ceux d'Étampes, de Bourges et surtout de Chartres, dont les statues proviennent d'au moins trois portails de dates et d'origines différentes. S'il nous est facile d'expliquer les scènes du tympan du portail l3l6 ARCHÉOLOGIE d'Angers par la vision de saint Jean transcrite dans l'Apocalypse, nous nous heurtons au contraire à plusieurs énigmes dans les jambages. Il faut remarquer d'abord que les statues de femmes y sont au nondjre de trois; on en compterait facilement quatre, poussé par la symétrie, si l'on n'examinait avec le plus grand soin la première figure du jand^age gauche, qui a été restaurée et sur laquelle le côté gauche seulement porte les traces d'une légère moustache et d'un collier de barbe coupée court ; les longs cheveux ondulés, les draperies larges du manteau relevées sur le bras et simulant des manches, la ceinture retombant sur le devant de la robe peuvent contribuer encore à induire en erreur. Ce nombre de trois statues de femmes s'explique diflicilement, car dans les autres portails de la même époque on ne constate en général que la pré- sence de deux femmes , comme à Bourges , au Mans . à Saint-Ayoul de Provins , à Notre-Dame d'Etampes , et même d'une seule à Saint- Loup de Naud ; nous ne parlons pas du triple portail occidental de Chartres , parce que les statues qui y sont groupées n'y figurent pas dans leur ordre naturel et primitif. Aussi cette exception d'Angers rend-elle encore plus difficile l'attribution des personnages. Parmi les huit statues qui ornent les deux jambages du portail de Saint- Maurice nous ne retrouvons pas celles de saint Pierre et de saint Paul, que l'on rencontre presque partout ; nous remarquons seule- ment quatre personnages figurant sur plusieurs portails du nord de la France au xii'' siècle; la première statue, à droite en avant, repré- sente Moïse avec les Tables de la loi et la tête couverte d'une coiffure caracté*nstique ronde, à côtes parallèles longitudinales; nous le trou- vons ainsi représenté à Bourges , à Étampes , à Saint-Loup de Naud et à Chartres deux fois ; la seconde statue du jambage gauche est le roi David jouant de la harpe; il est ainsi figuré au Mans; la reine de Saba se trouve à droite près de la porte; elle tient un sceptre de la main droite ; on peut voir , dans le premier personnage en avant du jambage gauche, la représentation de Salomon, qui est ainsi figuré au Mans, où le doute n'est pas possible, puisque son nom est peint sur le phylactère que le personnage tient entre les mains. Pour les autres personnages, nous n'avons aucune identification personnelle à proposer, n'ayant pas trouvé d'équivalents dans les autres portails que nous avons pu étudier jusqu'à ce jour, surtout pour les femmes. Des noms ont été proposés maintes fois, mais nous ne les rappelle- rons pas ici, parce que ces hypothèses ne sont appuyées daucune preuve et laissent toujours le champ libre à l'imagination, ces statues n'étant caractérisées par aucun signe symbolique ou conventionnel. G. FLEURY. — PORTAIL OCCIDENTAL DE LA CATHÉDRALE d'ANGERS i3i7 Après Texamen de tous ces détails, une question se présente natu- rellement à l'esprit : quelle date peut-on attacher à la construction de ce portail? La réponse est très délicate, car les documents font défaut à Angers comme dans beaucoup d'autres monuments de cette époque ; la plus grande incertitude règne encore sur l'âge précis de beaucoup d'églises; bien des dates, que l'on trouve répétées partout et que l'on considère comme certaines, sont en réalité fort suspectes et n'ont jamais fait l'objet d'un examen vraiment critique. Cherchons donc dans les monuments similaires quelques éléments de compa- raison qui nous permettent, par déduction, de proposer une date approximative pour la décoration du portail de Saint-Maurice d'An- gers. Les portails imagés dans le nord de la France nous paraissent avoir conservé le tracé en plein cintre pour leurs tympans et leurs archivoltes durant toute la première moitié du xii« siècle ; tels sont les portails d'Avallon , Bourges , Le Mans , Vermanton ; dans la seconde moitié du xiF siècle au contraire le tracé en ai-c brisé se rencontre généralement comme on le voit à Saint- Ayoul-de-Provins, à Saint-Loup-de-Naud, à Senlis, à Chartres, à Étampes. Nous adop- tons cette première division, parce que nous ne pensons pas qu'on puisse citer un seul exemple de j)ortail imagé , à arc brisé , antérieur à ii5o. Le savant archéologue allemand, Wilhelm Yôge, dans son important travail sur les origines de la sculpture française au moyen âge (i) a bien, il est vrai, attribué au portail royal de Chartres la date de ii45; mais cette appréciation, purement technique, tombe d'elle-même aujourd'hui, car cet auteur faisait dériver la sculpture de ce portail de celle de Saint-Trophime d'Arles ; or M. de Lasteyrie a prouvé depuis , d'une laçon irréfutable (2) que le portail d'Arles est de la fin du xii« siècle (3) ; par conséquent Wilhelm Vôge perd , par ce fait même , l'unique appui qu'il possédait pour attribuer au portail royal de Chartres une date antérieure à la seconde moitié du xii« siècle. M. de Lasteyrie, en continuant l'étude de ce portail de Chartres, est même arrivé comme conclusion à proposer le troisième quart du xii^ siècle pour la date de l'exécution des sculptures du portail royal de Chartres. Ces conclusions ont, à notre avis, une grande portée pour le portail de Saint-Maurice d'Angers, car, par l'examen des sculptures de ce portail, nous avons cru remarquer de (i) Die Arifàngi' des moniirnciilali'n Stiles im Mittelalter. Slrassburg, 1S94. (2) Eludes sur la sculpture française au moyen âge. Paris, 1902. (3) ]M. Marig-iuui a même voulu l'attribuci" au commcnccnn-nt du xiii° siècle. Etude sur la sculpture en Provence. l3l8 ARCHÉOLOGIE grands ]ioints de concordance entre la sculpture du tympan centi'al de Chartres et celle d'Angers. Ainsi nous voyons, à Angers comme à Chartres, dans la première voussure intérieure, les anges de profil à mi-corps au-dessus dune petite nuée ; cette disposition typique ne se rencontre dans aucun autre portail du Nord ; nous ne l'avons retrouvée, pour le xii'' siècle, qu'à Saint-Trophime d'Arles ; dans les deux portails de Chartres et d'Angers nous trouvons également à la clef de la troisième voussure, au milieu des vieillards de l'Apoca- lypse, deux anges de face supportant une couronne ; le gracieux encadrement de l'archivolte avec ses rinceaux de feuillage ])ossède, dans l'un comme dans l'autre portail, un heureux mélange de têtes aux fines expressions. Ce sont là de trop nombreuses concordances pour y voir l'eftet d'un simple hasard et elles sont assez évidentes pour prouver l'influence du portail de Chartres sur l'exécution du portail d'Angers et pour permettre d'attril)uer à ce dernier luie date tout au plus contemporaine, sinon plus jeune. Telle est la con- clusion que nous tirons de l'étude du tympan et de l'archivolte ; mais, si nous continuons notre comparaison entre les jaml)ages du portail d'Angers et ceux d'autres portails, nous n'hésitons plus pour pré- ciser davantage la date de construction et nous acquérons la certi- tude d'une construction postérieure. Voici sur quelles observations nous nous appuyons : Le soubassement ne présente plus les ressauts rectangulaires que nous trouvons dans les autres portails du xii^ siècle, mais l'ébrasement est rectiligne comme dans les portails latéraux de Bourges remaniés au xiii^ siècle; les statues colonnes ont pris du développement en lai'geur et ne sont plus réduites à garnir le fond seulement des angles rentrants, elles ressortentmême sui" les angles saillants ; les colonnes sur lesquelles elles sont accolées sont à peine visililes et les chapiteaux qui les surmontent ont leurs bouts de feuilles fort retournés , de façon à presque former vm cro- chet à chaque extrémité ; de plus , le soubassement représente une grande fraction de la hauteur totale du jamliage. la statue est ainsi plus élevée au-dessus du sol ; le jtortail d'Angers pour cette partie s'éloigne bien visiblement du portail de Chartres et se rapproche davantage du ])ortail occidental de Notre-Dame-de-la-Couture. au Mans qui, lui, appartient sans conteste au xiii"^ siècle. Tels sont les motifs qui nous incitent à croire que le portail de Saint-Maurice d'Angers est une œuvre du dernier tiers , nous dirons même volon- tiers du dernier quart du xii^ siècle. Du reste, un autre monument d'Angers nous fournit encore un argument; dans le chœur de la vieille église jadis délaissée de Saint- G. FLEURY. — PORTAIL OCCIDEJVTAL DE LA CATHÉDRALE d'aXGERS iSiQ Martin, se trouvent cV anciennes statues qui, parle/«7>e se rapprochent beaucoup de celles du portail de Saint-Maurice , surtout si Ton com- j)are la statue de Moïse du portail avec celle du fond de Tabside placée à gauche de la Vierge ; or ces statues , comme celles du chœur de la €outure du Mans , sont de la fin du xii"^ siècle, sinon du commence- ment du xiii^. A propos de cette église de Saint-Martin, je crois bon de répondre à une accusation fondée jadis, mais erronée aujourd'hui, formulée par Wilhelm Vôge (i), qui accusait les Angevins de cacher et de délaisser un trésor archéologique de la valeur de Tégiise Saint-Martin S'il venait aujourd'hui visiter Angers, il constaterait avec plaisir que le monument est maintenant estimé à sa juste valeur et que de dis- crètes restaurations vont assurer sa conservation. Un porche fut élevé postérieurement devant le portail; il a été •détruit en 1806; les traces de son existence sont rares; elles con- sistent seulement en colonnes élancées, encadrant le portail, et en formerets, arasés sur le mur, qui nous donnent au moins les dimen- sions principales de cette construction. Quelques dessins de ce porche ont été conservés, entre autres celui de la collection Gaignières ; mais les dessins de Gaignières sont presque toujours d'une exactitude fort suspecte dans les détails et, quand on examine celui du x^orche d'Angers, on consentirait volontiers à accepter pour sa construction la date de i336, qui a été donnée par erreur, en attribuant à Foulques ■de Mathefelon la création de ce porche. Nous devons à une aimable communication de M. de Farcy la connaissance d'un autre dessin, exécuté en 1628, certainement beaucoup plus exact et qui permet de faire remonter à la moitié du xiii« siècle cette importante construc- tion; mais nous ne voulons pas ici empiéter sur le domaine de M. de Farcy, à qui revient le di'oitde faire connaître le résultat des fouilles et des recherches qu'il a faites à ce sujet, ainsi que les restitutions documentées qu'il a élaborées pour sa belle monographie de la cathé- drale d'Angers. (i) Die Anfànge des moniunentalen Stiles..., p. 259. l320 ARCHEOLOGIE M. le D^ QUINTARD à Angers UNE BAGUE ROMAINE [391.7(36)] — Séance du 6 août — Après les mécomptes occasionnés par la tiare de Saïtapliarnès, il laut avoir un certain courage pour présenter devant un aréopage de savants, en lui attribuant une haute valeur, un bijou dépourvu d'état-civil. J'aurai cependant ce courage, car la bague romaine que j'ai l'honneur de soumettre à votre examen offre des caractères d'authenticité qu'il est facile de mettre en lumière. Mais, avant d'en- treprendre cette démonstration, il n'est peut-être pas inutile de vous déclarer qu'en venant chercher près de vous une sorte de garantie d'origine, je n'ai aucune arrière-pensée mercantile. Cette bague n'est pas à vendre. Elle est depuis longtemps dans ma famille, longtemps encore elle y restera ! Ami d'une science pleine d'intérêt, mon unique but, en apportant ma modeste pierre à l'édifice que vous construisez, est surtout de vous être agréable. Une description de cette curieuse bague s'impose tout d'abord. FlG. I. C'est un anneau en or vierge, du poids de 26 grammes, affectant une forme ovalaire à grand diamètre latéro-latéral et présentant un jonc renflé en avant, de façon à former un chaton dans lequel est sertie D^ QUINT ARD. — UNE BAGUE ROMAINE l32I une émeraude finement intaillée. Je reviendrai tout à l'heure sur les différentes particulaintés que je viens d'indiquer, mais je dois, aupa- ravant, vous dire en quelques mots où et comment ce bijou a été trouvé. Il y a environ cinquante ans, on érigeait à Poitiers, au lieu dit \e pré l'Abbesse, le collège Saint-Joseph. Des ouvriers, en prati- quant des fouilles, mirent au jour plusieurs sarcophages gallo- romains, dans lesquels, parmi des débris humains, ils découvrirent cette bague qu'acheta, au poids de l'or, c'est-à-dire pour une somme relativement insignifiante, un antiquaire distingué, M. Benjamin Deniau. dont je suis heureux de rappeler ici la mémoire, car je lui dois mes premières jouissances archéologiques. Ce maître fureteur qui professait pour ce bijou, unique en son genre, une sincère admi- ration, le conserva religieusement toute sa vie. Il est, aujoui'd'hui. la propriété d'une de ses nièces qui , ayant hérité de son oncle le goût des choses anciennes, le garde avec un soin non moins jaloux, mais cependant a bien voulu me j^ermettre, à l'occasion du Congrès, d'en régaler les yeux des amateurs d'antiquités. Les conditions dans lesquelles une trouvaille est effectuée sont de précieux jalons pour arriver à déterminer l'origine de l'objet décou- vert. Au milieu de débris gallo-romains, on a des chances de ren- contrer des curiosités remontant à une époque plutôt antérieure, ce que n'ignorent pas Messieurs les faussaires . qui ne manquent jamais, en présentant un objet truqué, de citer les circonstances de lieu dans lesquelles le hasard, ou d'intelligentes recherches l'auraient fait rencontrer. Aussi, les savants sérieux ont-ils l'iiabitude de ne détei-miner leur jugement que d'après les caractères objectifs qu'ils peuvent apprécier eux-mêmes. Ne songeant pas à soustraire mon bijou à un nécessaire contrôle, je vais devant vous et avec vous, chercher à établir les signes qui permettent d'en faire remonter l'origine à la période romaine. Mais, auparavant, une question préjudicielle se pose. Les Romains avaient-ils le goût de ce genre de parure? S'il s'agissait d'un peuple asiatique , voire même du peuple grec , la réponse ne serait pas dou- teuse. Mais ce peuple de laboureurs et de soldats qu'étaient les descendants de Romulus devait mépriser les vains ornements? Pour régler ce point important, je n'ai qu'à faire appel à vos souve- nirs classiques. Les anciens Romains — je ne parle pas de ceux de la décadence — méprisaient si peu les bijoux que, sur le champ de bataille de Cannes, les Carthaginois ramassèrent des boisseaux de bagues ayant appartenu aux chevaliers vaincus! Cette parure était donc déjà fort en honneur au temps de Scipion. Les bagues qui, à l32a ARCHÉOLOGIE cette époque, étaient en fer, ne tardèrent pas à être en or et à devenir si à la mode que les esclaves eux-mêmes, imitant leurs maîtres, jugeaient heureux de recouvrir d"or Tanneau de fer qu'ils étaient astreints à porter en signe de servitude. Ce n'est pas, par conséquent, courir au devant d'une erreur que de chercher à atti'i- huer à une bague, évidemment fabriquée pour un doigt masculin, l'épithète de romaine. Je vais donc énumérer les principaux caractères qui militent pour elle en faveur d'une origine latine. Considérons tout d'abord la nature du métal dont cette bague est formée. Cest de l'or sans alliage, de l'or vierge, un or qui n'est plus dans le commerce, mais que les anciens utilisaient souvent. De ce fait, nous avons déjà une présomption du grand âge de notre relique. Notons maintenant sa forme ovalaire, modelée sur celle du doigt, qui se trouve ainsi plus étroitement épousé. Cette forme très judicieuse, surtout pour les bagues un peu lourdes, se rencontre fréquemment à la période gallo-romaine. A elle seule, elle ne saurait être une marque de fabrication transalpine ; mais, si l'on tient compte, en même temps, de l'éti'oitesse de l'anneau, on sera amené à lui assigner une lointaine extraction. Essayez, en effet, de la faire pénétrer dans votre médius, vous n'y parviendrez pas. Or, suivant Pline, les Gaulois portaient de préférence leurs bagues à ce doigt, tandis que les Romains s'en passaient jusqu'à trois dans le petit! Si notre bague, que nous avons déjà démontré être ancienne, ne peut être gauloise, il faut donc qu'elle soit romaine! Elle l'est encore de par son poids et son volume. Les peuples de la vieille Italie, ne pouvant ou ne jugeant pas à propos de faire un luxe de la ciselure . mettaient leur contentement plus volontiers dans l'énormité du bijou. De même que leur belles poteries se distin- guaient par l'extrême minceur de leurs parois, leurs beaux bijoux n'allaient pas sans quelque épaisseur. Cette épaisseur variait même suivant les saisons; car, si l'on en ci^oit les satiriques, il y avait des anneaux plus légers pour l'été. Le nôtre était évidemment un anneau d" hiver ! J'en arrive maintenant à la pierre enchatonnée dans le jonc. Cette émeraude, sur laquelle on aperçoit un génie ailé dune finesse et d'un galbe admirables, pourrait, à qui ignorerait que les anciens étaient passés maîtres dans lart de graver les pierres dures, inspirer quelque doute sur le berceau que j" attribue à notre bague. Après les Égyptiens et les Grecs, les Romains eux-mêmes, qui ne se piquaient pourtant pas d'être artistes, produisaient, au moyen d'instruments D'^ QUINTARD. — UNE BAGUE ROMAINE l323 assez rudinientaires, de merveilleux chefs-d'œuvre de glyptique. Avec un toiiret ils mettaient en mouvement un petit rond de fer émoussé, ferriim retiiswn, servant à user la pierre et, pour en aider l'action, se servaient du grès rouge du Levant qu'ils nom- maient naxium. Us donnaient le dernier poli avec Yostracite ou os de sèche. On gravait sur les anneaux ou la tête d'un dieu, ou celle d'un grand homme, ou quelque animal symbolique. Pompée avait sur le sien un lion, César une Ténus, Auguste un sphinx. Dans l'impossibilité où je suis de déterminer quelle est la figurine gravée sur la bague dont je vous entretiens, je me contente, en raison des ailes dont elle est ornée, de la qualifier de génie... sans éiùthète. Ce génie, néanmoins, me permet d'assimiler cet anneau aux célèbres anneaux historiques dont je viens de citer les maîtres illustres et je me trouve ainsi de plus en plus autorisé à déclarer que notre bijou est au moins contemporain des x^remiers Césars. Il reste à établir — soyons complet autant que possible — si la bague qui nous occupe était un de ces anneaux sigillaires dont on se servait à Rome pour sceller les écrits , garantir les contrats , clore les olijets qui devaient être exactement fermés. Il me semble naturel d'admettre qu'un anneau offrant une pierre soigneusement gravée pouvait, devait même être employé dans ce but et ce qui, surtout, m'induirait à penser qu'il était destiné à aflu^mer la personnalité de son propriétaire, c'est qu'après le trépas d'icelui, il continua à jouer ce rôle en le suivant dans la tombe. Je crois être plus rapproché de la vérité en attribuant à ce bijou la fonction de cachet qu'en suppo- sant qu'il symbolisait une mission, comme d'aucuns ont pu le croire. Un proconsul, envoyé dans les Gaules pour pacifier une province, partait en toute hâte et ne perdait pas un temps précieux à faire graver un emblème de la charge qui lui était octroyée. En tout cas il n'aurait pas songé à faire déposer dans sa bière un objet assez impersonnel, pas plus qu'un préfet de nos jours n'amlntionne d'être inhumé avec le sceau du département qu'il administre. En terminant, il serait sans doute intéressant de tlxer au juste à quelle période de la civilisation romaine remonte le bijou au sujet duquel j'ai peut-être abusé de votre attention; mais je craindrais, en voulant serrer de trop près la question, de devenir oiseux. Je me contente de présumer qu'il est de l'époque où Rome envoyait des gouverneurs dans les Gaules et cette peu savante supposition sera un gage de ma sincérité quand j'affirmerai que cet anneau, encore qu il paraisse fruste, est aussi rare que précieux; car aucun Musée de France — si je m'en rapporte aux catalogues — ne peut se flatter l324 ARCHEOLOGIE d'en posséder de semblable. Il n'aurait, paraît-il, (pi'un rival dans un musée de Berlin, où vous aurez peut-être, un jour, le loisir d'aller promener votre curiosité. Mais : « Non cnivis homini contingit adiré Corinthum ». Je vous invite donc à satisfaire ici même, en examinant cette bague romaine que je vais faire circuler, votre goût légitime pour les mani- festations de l'art ancien. Et je vous préviens charitablement de ne pas la passer dans un doigt dont vous ne pourriez la retirer, car, foi de médecin, je n'hésiterais pas, dans ce cas, à sacrifier plutôt le doigt que l'anneau! M. Emile KIVIÈRE Directeur-adjoint de laboratoire au Collège de France , à Paris Président de la Société préhistorique de France DÉCOUVERTE D'UNE NÉCROPOLE GALLO-ROMAINE A PARIS [593.1 (%)[ — Séance reux spécimens. De 1894 à la fin de 1901 , n'habitant plus Paris, j'ai été forcé d'en interrompre l'étude, et c'est seulement depuis le mois d'avril 1902 que, réinstallé dans la Capitale, j'ai pu reprendre mes recherches, dans les sablières de Boulogne-sur-Seine, notamment dans la partie de cette commune, plus connue sous le nom de Billancourt. De plus, ayant appris, par hasard, au mois de décembre de l'année dernière (1902), l'existence de deux sablières dans Paris même, dans le quinzième ai'rondissement , sablières dont l'une venait d'être récemment ouverte à l'exploitation, je me hâtai d'en entreprendre aussi l'étude. Je ne parlerai pas ici, en détail, des résultats paléontologiques de mes recherches dans les sablières de la banlieue parisienne — j'ai traité cette question avant-hier dans la section de géologie — je me bornerai à les résumer en quelques mots. Ces recherches ont été faites dans onze sablières de Bouloane-Bil- lancourt. mais trois d'entre elles surtout, situées boulevard de Strasl)ourg, rue de Billancourt et rue de Silly, mont donné d'inté- ressants et nombreux documents, comme faune et comme industrie. A. Faune Les animaux que j'y ai surtout rencontrés sont : 1° Des Equidés, dont les restes sont représentés surtout par des dents, quelques ossements, notamment ceux des extrémités antérieures et posté- rieures ; 2" Des Bovidés, dont les dents trouvées sont plus rares que les ossements (os des membres et vertèbres); 8" Des Cei'vidês, presque exclusivement représentés par le Renne (Tarandus rang'ifev), et encore ces restes (dents, os et bois) sont-ils fort j)eu nombreux; 4° Un Proboscidien : VElephas priniig-enius, dont j'ai recueilli plusieurs molaires, entières ou brisées . et quelques os ; 5'^ Un Pachyderme : le Rhinocéros iichorhiniis, représenté par un cer- tam nombre de dents; de plus, certain jom* du mois de décembre 1902, mie tête entière avec ses maxillah-es supérieur et inférieur a été mise à découvert à trois mètx-es au-dessous de la surface du sol; malheiueuse- ment, je suis arrivé quelques instants après que, sous les eflbrts de dégagement entrepris par les ouvriers dé la sablière, elle leur avait échappé et était tombée d'mie hauteur de cmq mètres envu-on. J'en ai fait i-ecueillir et en ai recueilli moi-même les débrfe avec le plus grand soin; mais les os étaient tellement brisés que j'ai dû les abandon- ner; par contre, les dents ramassées avec la plus grande attention ont pu être jîar moi, pour la plupart, reconstituées. . 6° Je ne dois pas omettre de citer, d'autant plus que ses restes sont très l326 ARCHÉOLOGIE rarement rencontrés dans les sablières de la banliene parisienne, YUrsus spclœtiii, dont j"ai pu avoir deux dents molaires, ainsi que deux fragments de tibia (i). B. Industrie Quant à l'industrie elle est exclusivement représentée — une pièce exceptée — par des silex taillés, depuis les pièces les plus rudimentaires du type dit rutélo-mesvinien jusqu'aux instruments les mieux faits et les mieux retouchés, appartenant tous à l'époque paléolithique. La pièce exceptée, pièce exceptionnelle pour ces sablières, est un bel instrument en os (fi g', i), long de o™ii8, entier et intact; il a été trouvé FiG. I. — 1/2 grandeur. dans une sablière de la rue de Billancourt, à plusieurs mètres de profon- deur. Je me bornerai à signaler, en outre, quelques coquillages (gemmes Pec- tuncuhis, Xatica, etc., de nombreux petits Spongiaires connus sous le nom de Coscinopora globularis ou de Tragos perforés, amsi que des petites pierres percées, ayant jîu servir les uns et les autres d'objets de parure et être portés suspendus comme bijoux ou amulettes. C. Flore Il s'agit de nombreux échantillons de bois fossiles, dont l'étude sera faite ultérieurement, comme celle que j'ai publiée en 188G-1887, siu* les bois que j'avais recueillis quelque temps auparavant , dans diverses carrières de sable des environs de Paris (2). Tels sont, brièvement résumés, les résultats de dix-huit mois de recherches minterrompues à Boulogne-Billancourt. Quant aux deux sablières exploitées actuellement dans Paris même, je les ignorais, je l'avoue, lorsque j'appris par hasard, dans une de mes courses à Boulogne, en décembre dernier (1902), l'ouver- ture, dans le quinzième arrondissement, au mois d'octobre précé- dent, d'une carrière sise rue du Hameau, n° 8 (quartier Saint-Lam- bert). Je m'empressai d'y aller et d'en suivre les travaux, d'autant (i) Depuis la lecture de ce travail, j'ai eu la bonne fortune de recueillir une mandibule piH'sque entière d'Hrœna spelœa, espèce animale des plus rares aussi dans ces sablières. Elle a été trouvée rue de Silly. (2) Éuvilc Rivière. — Bois fossiles tmiicrs dans Irs terrains quniernnirrs du bassin parisien (Congrès de Nancy, 1SS6; Association frainjaise Y>itar rAvancemenl îles Sciences). ÉM. RIVIÈRE. — DÉCOUVERTE d'uNE NÉCROPOLE GALLO-ROMAINE iSaj plus que personne encore (g-éologues et préhistoriens) ne la connais- sait. J"ai d'autant lieu de m'en applaudir que j'y ai fait les très curieuses découvertes qui sont l'objet de cette communication. La seconde sablière de Paris, que j'étudie aussi et qui m'a fourni quelques bons documents paléontologiques et géologiques, est située à l'extrémité de la rue Lecourbe, non loin des fortifications. II La Sablière du Hameau, — c'est ainsi que j'ai cru devoir la dési- gner, d'après le nom de la rue où elle se trouve, ou mieux le terrain où elle est maintenant en pleine exploitation, pour son sable, ses cailloux et son gravier — a été achetée à la fin de l'été 1902, pour son propre compte , par M. Biabaud , directeur de l'exploitation de plusieurs autres sablières sises à Billancourt. Le terrain, d'une superficie de 7.800 mètres environ, était alors occupé par un maraîcher, qui y avait son habitation en bordure de la rue du Hameau. Sur les trois autres côtés — ce terrain a la forme d'un grand quadrilatère irrégulier — il est entouré de terrains exploités aussi j)our la culture potagère. Il paraît n'avoir été défoncé pom* ladite culture que sur une épaisseur peu considérable , c'est-à- dire sur o'^ôo à 0^70, tandis que la véritable couche sableuse aiipa- rait à i""4o environ. Lorsque j'y allai pour la première fois, au mois de décembre 1002, les travaux d'extraction étaient peu avancés; c'étaient plutôt des travaux d'appropriation pour faciliter l'accès, à la carrière, des tom- bereaux devant emporter plus tard sable, cailloux et gravier, que que des travaux d'exploitation véritable. Néanmoins, dès cette époque, je m'y rendais de temps à autre pour le cas où, par hasard, quelques ossements ou silex v seraient trouvés, bien que la pioche des ouvriers n'arrivât pas encore à la couche dans laquelle on a chance surtout de les rencontrer. Cependant, depuis la fin du mois de janvier de cette année (iqo3). je n'y avait fait aucune apparition, lorsque, le lundi 23 février, étant allé voir où en étaient les travaux, j'appris, par le chef du chantier, que r avant-veille, c'est-à-dire le samedi 21 février, les ouvriers avaient mis à découvert et entièrement vidé une sorte de grande j)Oche — en réalité une véritable fosse — creusée jusque dans le sable et contenant un certain nombre de fragments de poteries romaines, les unes noires, les autres rouges, des morceaux de tegiila et, pièce principale, un vase funéraire entier rempli d'osse- l328 ARCHÉOLOGIE meiits humains craquelés et brûlés, mêlés à des matières charbon- neuses. Comme les ouvriers avaient eu soin , conformément à mes instruc- tions et avec l'autorisation du propriétaire du terrain, de mettre de côté, à mon intention, tout ce qu'ils avaient trouvé, je pus recon- naître immédiatement qu'il s'agissait d'une tombe gallo-romaine, d'une sépulture à incinération. Pensant bien que cette fosse n'était pas unique, je donnai des indi- cations précises pour le cas où de nouvelles découvertes auraient lieu et je retournai à la Sablière du Hameau, le surlendemain 25 février. Bien m'en prit, une nouvelle fosse avait été trouvée la veille et vidée immédiatement de tout ce qu'elle renfermait , lequel tout m'avait été réservé également. La semaine suivante, une troisième fosse — celle-ci beaucoup plus petite — fut mise à découvert. Elle ne renfermait, par exception, que fort peu de chose. L'existence d'une quatrième fosse ayant été reconnue c[uelques jours plus tard par les ouvriers, j'obtins qu'elle ne fût ouverte qu'en ma présence, atin de pouvoir me rendre un compte absolument exact de sa disposition et de ce que j'appellerai son mobilier. J'y tenais d'autant plus cfue certains objets, trouvés dans les pre- mières fosses, m'avaient quelque peu étonné. Ils avaient paru aussi à MM. Héron de Yillefosse et Salomon Reinacli, à qui je les avais soumis le i3 mars, constituer un fait très curieux, voire même abso- lument nouveau, en tous cas qui n'avait jamais été signalé aupara- vant : je veux parler, pour le dire tout de suite, de la découverte d'os d' animaux graçés de chiffres romains. Cette quatrième fosse, reconnue le 17 mars, fut ouverte le lende- main 18. Des pièces analogues y furent trouvées et recueillies en place par moi-même. Leur présence dans un sol non remanié, depuis l'époque où elles y avaient été placées, vint confirmer l'authenticité des premières trouvailles. C'est alors que je fis à l'Académie des Inscriptions et Belles- Lettres, dans la séance du 28 mars, ma première connnunication sur la découverte que je venais de faire d'une Nécropole gallo-romaine par incinération dans Paris (i). J'étais vivement désireux de con- naître l'opinion des savants les plus compétents en la matière ; je (i) Comptes rendus des séances de V Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, année igoS, p. 142 cl suivantes. EM. RIVIÈRE. — DÉCOUVERTE d'uNE NÉCROPOLE GALLO-ROMAINE iSsQ tenais aussi à prendre date pour cette découverte en vue des travaux que j'allais poursuivre au Hameau. Enfin, le 9 avril, les ouvriers mettaient à découvert une cinquième fosse à peine creusée dans le sable, analogue par ses faibles dimen- sions et par sa pauvreté à la fosse n" 3, ainsi que j'ai pu le constater de visu le lendemain 10. Cinq fosses, toutes creusées dans le sable, furent donc découvertes et fouillées, du 21 février 1903, date de la première trouvaille, au 9 avril, ainsi que, pour le dire dès maintenant, deux j)etites poches, funéraires aussi, qui se distinguaient des fosses véritables, non seu- lement par leurs dimensions beaucoup moindres, mais encore parce qu'elles étaient creusées seulement dans la terre, non pas dans la terre arable proprement dite, dont l'épaisseur moyenne est de o""jO, mais dans la couche qui lui est sous-jacente et qui parait constituer le sol gallo-romain. Les dites poches renfermaient également, l'une et l'autre, comme les fosses susdites, des ossements humains plus ou moins brûlés et craquelés. Mais, tandis que dans l'espace de moins de sept semaines — exac- tement quarante-sept jours — sept fosses ou poches étaient ainsi successivement découvertes dans la sablière du Hameau, à partir du 10 avril jusqu'au 3i juillet — ma dernière visite à ladite sablière ayant eu lieu samedi dernier i<'' août — c'est-à-dire dans l'espace de 2)lus de trois mois et demi, trois poches funéraires seulement auraient été mises à découvert, tout au moins à ma connaissance. Je ne compte pas dans ce nombre une sorte de puits ou grande fosse de décharge dont je parlerai tout à l'heure. Et encore ces trouvailles ont-elles eu lieu entre le 10 avril et le 21 juillet (i). Soit donc en tout, du 21 février à ce jour, dix fosses ou poches funéraires (2) plus une fosse de décharge , qui m'ont été signalées, dont j'ai constaté l'existence, qui ont été entièrement vidées de leur contenu et qu'il me reste maintenant à décrire avec le mobilier de chacune d'elles. (i) J'ajoute aujourcrhui, 20 février 1904, que depuis ma communication au Congrès d'Ang'ers, plus rien n'aurait été troiwé, en tous cas plus rien ne m'a été sijjrnalé ,pas un objet intéressant ne m'a été remis, à l'exception d'une brique et de deux os {gravés de chifires. Et à mes visites, (pi'elles soient ]'éi)élées ou éloignées, les ouvriers m? répondent invariablement qu'on ne IroinH' plus 7-/(Vi. . . , quoi([u'ils sachent très bien (|ue je n'en crois pas un mot, en raison des procédés de certaines i)ersonnalités sur lesquelles j'ai été forcé, à |)lusi<'urs reprises, d'appeler l'attention de M. le Préfet de la Seine, procédés et personnalités que je me réserve de faire connaître au momei'.t voulu. (2) Cinq fosses et cin([ poches : la dernière de cejles-ci remonte au 21 juillet i9o3, c'est-à-dire à il y a une quinzaine de jours. i33o AKCHÉOLOGIE J'ajoute — pour \c dire tout de suite — que, en dehors de ces cavi- tés et non loin des dernières reconnues, deux squelettes humains ont été trouvés, non plus dans le sable, mais dans la terre surmontant la couche sableuse. III FOSSES ET POCHES FUNERAIRES .4.. — Fosses Ces fosses sont donc au nombre de cinq et, pour leur description, je les désignerai par les numéros i, 2, 3, 4 et 5, non pas d'après leur situation dans la sablière, mais bien d'après Tordre dans lequel elles ont été trouvées. Elles sont de formes et de dimensions différentes. ^4^, — La fosse 11° i, la première trouvée, est la pkxs éloignée de l'entrée de la carrière (96 mètres environ). Sa longueur est de i"^70, sa largeiu' de o'" 82 ; elle a été creusée dans le sable sur une profondeur de o'" 5o. Le fond de la fosse, sur lequel reposait l'objet principal qui y a été décou- vert, se trouve, par suite, à i">90 de la surface du sol, l'épaisseur des terres cpii recouvrent la couche sableuse étant en moyemie de i™4o- Cet objet principal est un beau vase funéraire gallo-romam (7?g'- 2) en terre noire assez fine, haut de o'^ia, dont l'ouverture mesure o™20 de FiG. 2. — 1/4 de grandeur. diamètre et le fond o'" 07. Il était rempli d'ossements humains très menus et ])lus ou moins l)riilés, connue le démontrent les noml)reuses craque- lures de certains d'entre eux. Néanmoùis il m'a été facile encore de recon- naître parmi eux un certain nombre de fragments du crâne, mie partie ÉM. RIVIÈRE. — DÉCOUVERTE D'UNE iVÉCROPOLE GALLO-ROMAINE l33l de l'un des orI)ites, l'exlrémité inférieure d'un petit cubitus avec son apophyse styloïde, des fragments de côtes, etc., toutes pièces osseuses pro- venant d'un jeune sujet et mêlées à de la cendre , à des matières char- bonneuses et à une terre sableuse de teinte gris brun foncé et très fine. Un petit morceau de la voûte crânienne offre, sur sa face externe, une coloration verte très prononcée, comme s'il avait été longtemps en contact avec du cuivre ou du bronze. Cependant aucune pièce de monnaie, aucun objet de métal n'ont été trouvés dans cette fosse, ni dans le vase qu'elle renfermait, du moins d'après ce que les ouvriers de la carrière m'ont aflirmé. Je dois ajouter que plusieurs des petits ossements humains présentent des traits plus ou moins nomltreux qui, au premier abord, i)ourraient être pris pour des gravures. Mais un examen quelque peu attentif conduit tout de suite à considérer ces pseudo-entailles connue une sorte de cra- quelage protluit par laclion du feu, c'est-à-dire l'incinération. Si j'insiste sur ce fait, c'est en raison même de la série d'ossements réellement gravés , intentionnellement ceux-là, pai- la main de l'homme, tous ossements d'animaux divers qui constituent la i)artie vraiment curieuse, vraiment originale, des découvertes faites dans la sablière de la rue du Hameau. Ce vase funéraire , que les ouvriers ont malheureusement brisé en de nombreux morceaux, en le découvrant, mais que je suis parvenu à recons- tituer presque en son entier, reposait immédiatement sur le sol et était recouvert par une pierre i>late rectangulaire de grandes dimensions. Une seconde pierre, plate aussi, mais beaucoup moins grande, a été rencontrée un peu plus loin dans cette même fosse n° i. Enfin dans la terre mélangée d'un sable très fin et très abondant, surtout dans la partie la plus profonde, qui remplissait la fosse, les ouvriers ont trouvé et m'ont remis : 1° Des morceaux d'autres poteries romaines , notamment : a) la moitié d'une jolie petite coupe cassée dans son temj3s. d'un très beau rouge, (poterie dite sainienne), sans aucune ornementation, mais avec et à l'intérieur sa mar- que de potier PVGNIM. Elle mesure o"'o36 de hauteur ; b) un fragment de vase en poterie également rouge et très fine, poterie sainienne aussi, mais d'assez grandes dimensions et dont la face externe est ornée de dessins en relief, qui représentent des personnages séparés les uns des autres par des pal- miers, lesquels sont surmon- tés de petits médaillons avec une sorte de cigogne au centre (fig. 3). l'io- 5- - 1/2 grandeur. i332 ARCHEOLOGIE FiG. 2° Plusieurs morceaux de teg-iila romaines brisées, sans aucune marque. 3" Quelques os d'animaux brisés, trouvés çà et là, que j'avais emportés à seule lin de déterminer les espèces dont ils proviennent. Or, quelle ne fut pas ma surprise, lorsque, après les avoir lavés, j'aperçus, sur ti-oin d'entre eux, des traits gravés aii- trefois très distinctement et repré- sentant des vhijfres romains (i). Le premiei- est rapo|)liyse Irans- verse d'une vertèbre lombaire de Bovidé (fig'. 4) poi'lant deux cbilTres ,5, sur la même lace de l'os, l'un droit (V), l'autre renver- sé (\), Le second, sur lequel on lit le chitli-e 6 (VI), est un fragment de côte de Ruminant (fi g. o)\ le troisième (fig'. (>) est un métatar- sien de jeune Porcin (Sus scrufa), i{\\\ présente aussi des chitlres sur deux de ses trois faces : sur la face B, des chiffres dits en miroir (IIIY), c'est-à-dire renversés, don- nant le noml>re hnit ; sur la face A , des chiffres représentant le nombre ving-t (XX). On sait que les chiffres dits eji miroir sont ainsi nommés parce qu'ils sont représentés tels qu'on les verrait par réflexion dans une glace ou miroir. Ils ont été signa- lés pour la première fois, si je ne me trompe, par l'abbé Baudry, en 1873, non pas sur des os, — car ceux de notre nécropole sont jusqu'à présent un fait unique — mais seulement sur des poteries provenant des puits funéraires du Ber- nard, dans la Vendée (2). B. — La seconde fosse a été recomiue et fouillée le 24 février, soit trois jours après l'ouverture de la première. Elle est située à 6'" 90 en avant de la fosse n" i et à droite. Sa fonue est irrégulièrement oblongue, sa lon- gueur est de 2'^^2o, sa largeur de i"^20 et sa profondeur dans le sable île o"8o. Elle était remplie, comme la précédente, d'un mélange de terre et de sable fin. I^es ouvriers v ont ramassé : Fig. Fig. 6. (1) Los dossiiis (rosseinonls ([ni accompagiioiit la notice de rAulciir ne sont pas dos rcprodiK'lioiis des os oux-niômcs. avec leurs caractcri's aiiatoiniqiies . mais bien i)lulôl des schémas ayant pour but de montrer seulement les chill'res ou les lettres dojil ils «ul été gravés à l'époque romaine. (2) Baudry et Bai.leheau. — Puits fancraircs gallo-romains du Bernard (W'ndée). La Roclie-sur-Yon , 1873. ÉM. RIVIÈRE. — DÉCOUVERTE d'UNE NÉCROPOLE GALLO-ROMAINE l333 i^ De nonil)reux morceaux de poteries romaines noires et trois mor- ceaux de poteries rouges, sans caractère particulier; 2'' Un curieux vase de la même époque, dont la couverte, seule, est noire; il est malheureusement brisé en un grand nombre de morceaux et affecte la forme d'une bouteille, dont la hauteur ne devait pas être moiiulre de ^5 à 5o centimètres; je n'ai pu la reconstituer cpi'en partie et avec de grandes difficultés, vu le noml>re des morceaux perdus et broyés dans le travail des fouilles. Le col de ladite bouteille est de o'^ao de longueur — et il n'est pas entier; — son diamètre le plus petit est de o"o5 ; quant au fond — entier — son diamètre est de o"'09 ; 3° Une })etite coupe en terre noire presque entière Cfig-. j)\ le bord, à i^eu près seul, fait défaut; son plus grand diamètre mesure ii centimètres; 4 " Quatre fonds de vase en terre de même couleur, plus un certain nombre de bords d'autres p o t e rie s , toutes noires aussi; 5° Des morceaux de tegiila romaines brisées (i), sans aucune manpie de potier; mais l'une d'elles (fig. 8) porte le chiffre dix , très bien gravé (X): sur un morceau de brique de la même épO({ue se trouve le chiffre cinq (\), déjà signalé sur certains ossements de la fosse n" i ; 6" Enfin, dans cette même fosse n" 2. ou dans la terre sableuse l'environnant, plu- sieurs os gravés de chiffres romains ont été trouvés, à savoir : a) L'extrémité inférieure d'un tibia de Chevreuil (Cer- vus capreolus) (fig. g) avec une partie de sa diaphyse, sur laquelle on aperçoit deux chiffres qui, n'étant la dis- FiG. ;. — 1/2 grandeur. Fig. 8. — i/3 grandeur. Fig. (). — 1/2 grandeur. Fig. to. tance qui les sépare, signilieraient le nombre quarante (XL); b) Un fragment de côte de Ruminant (fig 10), long de o'"io3, portant le chiffre cinq (V) ; (I) Je n'en ai jamais trouvé une seule qui fût entière, du moins jusqu'à présent, dans la nécropole du Hameau. i33/; ARCHEOLOGIE c) Un second fragment de cote d"nn auln> animal indélerminal)le, snr leqnel on retrouve le eliiUïe dix (X); d) Un fragment de diaphyse osseuse, fendue longiludinalement, sur laquelle (Jjif. ii) <»n reconnaît d'abord le nombre six (VI), puis, comme gralliti, une sorte de cro- FlG. II. FiG. 12. cliet mal fait; e) Un fragment de côte de Ru- minant (fi g", m), sur lequel ou voit le nombre deux (II). C. — La troisième fosse a été mise à découAeil dans les pre- miers jours du mois de mars. N'en ayant j)as été prévenu, je n'ai pu assister à la fouille ([ui y a été pratiquée. Située à 6™4o en avant et à droite aussi de la fosse n" i , elle se trouve en arrière de la fosse n" 2, dont elle est distante de o™5o environ. Elle est toute petite relativement aux deux premières, mesurant seulement i"^o5 de longueur, sur o™5o à peine de largeur. Elle est creusée très peu profondénu>nt (o™28). Cette fosse n'a donné ({ue quelques bouts d'os brûlés, des morceaux de poteries noires, deux petits morceaux de poteries rouges et (pielques fragments de tuiles romaines; aucun de ces objets ne présentait la moindre particularité intéi'essante. D. — Quant à la quatrième fosse , elle a été pour moi la plus im|)or- tante, en ce sens que, averti assez à temps de sa découverte, comme je l'ai dit en commençant, j'ai pu assister à sa fouille complète. Elle a été creusée, à droite et à 10'" 80 de la fosse n' i, à tlroite aussi et à 10'" '30 lie la fosse n" 3, soit à 96 uièlres de l'entrée de la carrière, comme la fosse n" i. Sa l'orme est presque rectangulaire, ses dimensions sont de i'^58 de longueur, sur i"i43 de largeur; enfin, sa profondeur dans le sable est de o'"4i- Elle était remi)lie, comme les trois premières, d'un mélange de terre et de sable de même aspect que dans celles-ci. Ici, de même que dans les fosses 2 et 3, pas de vase funéraire renfer- mant des ossements humains plus ou moins incinérés, bien que j'y aie trouvé deux pierres plates en calcaire grossier, analogues, quoique ])lus p(Miles, à celle qui recouvrait le vase funéi-aire de la fosse n' i. Le seul dé])ris humain (jue j'y aie rencontré est la partie moyenne d'un cul)ilus, mesu- rant o'"i2 de longueur et plus voisin de la tête de l'os que de son extré- mité inférieiun^, ayant appartenu à un sujet adulte. 11 n'avait pas subi l'action du feu, il ne i)résentait aucune trace de ces craciiu-lages (|ue j'ai constatés sur les os brûlés du vase funéraire de la première fosse et sur ceux des petites poches dont je j>arlerai plus loin. Je n'ai trouvé ici, non plus, aucun vase romain rouge ou noir, même brisé, mais seulement quelques petits IVagments de poteries gallo- romaines. Par contre, j'y ai recueilli nuji-mème et cii place, tle '.elle sorte (jue je ÉM. RIVIÈRE. — DÉCOUVERTE b'UNE XÉCROPOLE GALLO-ROMAINE l335 FiG. i3. FlG. i4- ne saurais avoir de doute sur leur ancienneté, c'est-à-dire sur leur contem- poranéité avec les poteries et les tegiila romaines, les objets suivants : 1° L'extrémité supérieure d'un tibia droit (avec son extrémité articulaire soudée au corps de l'os), mesurant o'"o85 de longueur, de jemie che%Teuil (Cervus capreolus), |)roibndément gravé Cfig: i3) sur l'une des faces de l'os , du chiffre dix (X) ; 2'^ Un fragment de diaphyse os- seuse en partie fendu par un trait de scie longitudinal, long de o^oq? et portant gravés sur sa face externe, non plus des chiffres, comme les autres os que je viens de décrire, mais des traits en zigzag, formant des chevrons irréguliers un peu frustes, qui occupent pres([ue toute la lon- gueur de l'os. Ils présentent une cer- taine analogie avec quelques gra- vures préhistoriques sur os ; 3- Deux petits fragments de bri- ques rouges (fi g. i4 ^t i5), longs tous les deux de o™o5 et tous deux aussi portant la même marque, les mêmes chiffres, très profondément gravés et représentant le nombre 7ieiif ou le nombre onze, selon le sens dans lequel on les regarde (IX— XI); 4'' Un certam nomlire de morceaux de tegiila; sur l'un d'eux, j'ai trouvé gravé, assez superficiellement et tout l^rès du rebord (fig. i6) non plus mi chifTre , comme sur les briques ci-dessus, mais une lettre A. Je ne saurais la considérer comme une marque de potier — car elle est pos- térieure à la fabrication de la tegiila — quoiqu'il ne me soit pas possible d'en donner la signification. Tel était le contenu de la fosse 11° 4, qui a été, je le répète, entière- ment vidée en ma présence, avec le jilus grand soin et dont la terre sa- bleuse a été revue et examinée par moi, avec la plus grande attention, après son extraction. E. — La cinquième fosse est située à o™5o en avant et un peu à droite de la fosse n° 4, c'est-à-dire à 94 mètres environ de la porte de la sablière. Elle est de forme à peu près circidaire ; sa profondeur dans le sable est de o'"3o au centre, son diamètre mesure 0^45 à ©■"So. Elle a été recoimue et Fig. i5. FiG. 16. l336 ARCHÉOLOGIE fouillée le 9 avril 1903, mais les trouvailles qui y ont été faites sont à peu près nulles : pas de vase fiméraire entier ou brisé, pas d'ossements humains, mais seulement quelques os d'animaux sans la moindre marque, qvielques fragments de poteries romaines et des morceaux de tegnla sans chilTre aucun, ni lettre. Quant à la fosse ou puits de décharge , elle a été mise à découvert le 23 aA'ril et vidée en partie par les ouvriers, mais sa profondeiu- déliassait la couche de sable qu'ils débarrassaient de la terre la recouvrant, pour la préjjaration du terrain à exploiter: ils la remblayèrent j^rovisoirement le 5 mai. pour ne ])as entraver les travaux de la carrière, et c'est dans le courant du mois de juin seulement (pi'ils la vidèrent complètement (i). Cette fosse n'avait rien de funéraire, mais, véiitable puits de décharge, elle a été creusée profondément dans le sable, à une époque que je ne saurais indiquer, contrairement à ce que j'avais cru tout d'abord et dit dans une de mes premières communications sur la nécropole du Hameau (2). Plus large à l'ouverture c[ue dans le fond et irrégulièrement circulaire, ses dimensions 'étaient les suivantes dans la partie primitive- ment fouillée : ouverture, diamètre le plus grand 2'" 10, diamètre le jilus petit i™8.5; diamètre du fond l'^^o; hauteur ou profondeur 3'" 10. Sa dis- tance de l'entrée de la carrière est de 77™ 5o. Cette fosse, dans la partie que j'ai piochée moi-même à plusieurs repi'ises, c'est-à-dire à l'oritice pour ainsi dire, ne renfermait absolument cfue des morceaux de tegiila, généralement de petites dimensions et en si grand nombre cpie la terre dans laquelle ils se trouvaient en était comme pétrie , morceaux accompagnés de quelques débris de vases noii's gallo- romains plus ou moins épais, d'un petit morceau de poterie rouge samienne et de cailloux roulés de diverses grosseurs. Je n'y ai pas trouvé, non plus que les ouvriers, soit dans leurs premières fouilles, soit dans celles du mois de juin, d'ossements humains ni d'os d'animaux (3). Quant aux morceaux de tegiila aussi nombreux dans la partie supé- rieure qu'ils étaient rares au-dessous, plusieurs étaient gravés de chiffres romains, analogues à ceux dont j'ai déjà parlé et parmi lescpiels prédo- minent le V et X. • Les fouilles reprises au mois de juin dans cette fosse (4) ont donné, en outre de quelques tegiila brisées , de pierres meulières et autres : 1° Deux grandes pierres prismatiques, à cpatre pans, ayant la forme de bornes plates, l'une haute de o'"()4, large à sa l)ase de o'"42 et épaisse de o'°io; l'autre, haute de 0^69, large de o™33 et d'une épaisseur maxi- mum de o"^ 1 3 : (i) Ou, du moins, ils crurent être parvenus au fond ; mais ils se sont aperçu, au mois de décembre dernier (1908) , dans les travaux de la sablière, qu'elle descendait plus profondément. (2) Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, \e série, t. IV, p. 2i)3, année 1908. (3) C'est au mois de décembre seulement et dans la partie la plus profonde, que des ossements ont été trouvés, notamment plusieurs crânes, en partie brisés, de Bovidés. (4) Quelques coups de pioche y furent donnés, le 8 mai, en présence de deux de mes collègues de la Société des Amis des Monuments parisiens : MM. Auge de Lassus et Davoust, que j'avais invités à venir visiter la nécropole du Hameau. EM. RIVIERE. DECOUVERTE D UNE NECROPOLE GALLO-ROMAINE l337 FiG. I- 2° Une très belle meule romaine en pierre mexilière, percée au centre d'un trou qui la traverse complètement; son diamètre est de o'"48> son éi3aisseur est de o'^'oq. Elle est en parfait état de conservation; elle a été trouvée le 23 juin ; 3° Un poids de bateau ou de filet en i)ierre de forme prismatique, haut de o"" 22 et percé à son sommet d'un trou de suspension ; 4" Un bronze romain (fig. ij) à l'efligie de l'empereur Adrien (HADRIANUS), qui régnait, comme on le sait, de 112 à i38. Il me permet, sinon de dater exactement la nécro- pole du Hameau , tout au moins de dire qu'elle n'est pas antérieure au deuxième siècle. En plus des cinq /bs.ses fu- néraires et du puits de dé- charge, cinq jOGc/jes, comme je l'ai dit en commençant, funéraires aussi, ont été trouvées dans la sablière du Hameau. Les deux premières ont été découvertes le 17 mars et reconnues par moi le lendemain 18. elles n'étaient jias creusées dans le sable, quelles n'ont pas entamé, mais dans la terre seule, ou mieux dans le sol gallo- romain. Funéraires toutes deux, comme les fosses proprement dites, dont elles se distinguent surtout et par leurs dimensions beaucoup plus petites et par le milieu dans lequel elles ont été creusées, elles renfermaient, ainsi cfue j'ai pu le constater de visu, un petit amas d'os humains extrêmement menus, craquelés et lirûlés comme ceux qui étaient contenus dans le vase funéraire de la fosse n' i. Mais ils se trouvaient à même le sol et mêlés à quelques matières charbonneuses, c'est-à-dire en dehors du vase dans lequel ils avaient dû être enfermés , car leur amas en reproduisait le moule intérieur. Quant aux vases eux-mêmes, je n'en ai retrouvé aucime trace, ils avaient disparu. Cliacun de ces amas était recouvert : l'un, ^iine pierre plate, sorte de dalle de grandes dimensions (o"\63 de longueur, sur o'",42 de largeur et o'",i3 d'épaisseur); l'autre, de deux pierres plus petites, mais plates aussi. Dans ces deux poches, situées à 3"\5o environ Tune de l'autre et qui se trouvaient aussi, l'une à 3 mètres, l'autre à 2"%90 de la fosse n'^ 4' ^^^^ fragments de poteries rouges et noires, tous très petits, ont été rencontrés ainsi que des morceaux de te- F'«- '^- " ^/^ grandeur. giila. Sur l'un de ces derniers (fig. 18) on ai)erçoit, gravés près du rebord de la tuile, un nouveau cliill're en mii-oir , un cinq renversé (^\^), i338 ARCHEOLOGIE à moins que ce ne soit la lettre A, mal faite, sans que je puisse cepen- dant l'allirmer, tant elle est fruste et effacée, puis la lettre P, celle-ci droite et bien gravée. La troisième poche a été trouvée le i6 avril; elle est située à 19 "",40 en avant et à droite de la fosse n° 2 et à i3™,5o également en avant de la fosse n" 5. Elle ne renfermait aucun vase , mais seulement des morceaux de pote- ries, dont un petit fragment noir en terre fine avec dessins en relief. Elle contenait aussi des ossements humains, les mis brûlés, les autres sim- plement noircis par l'action du feu, dont une portion d'occipital. Ces restes humams, comme dans les deux premières poches, formaieiît mie sorte d'amas de même couleur que le luiUeu où ils se trouvaient, mais plus dur et plus compact et recouvert par une grosse pierre plate. Quant à la poche n" 4, elle a été reconnue et fouillée dans la matmée du i3 mai. Creusée à un peu plus d'un mètre au-dessous du niveau du sol. elle contenait un vase funéraire en poterie grossière, à pâte siliceuse, analogue à certains vases gaulois, olïrant même quelcpie analogie avec des vases préhistoriques. Il renfermait, au milieu d'mi mélange de terre et de sable, de nombreux ossements humains brûlés. Il fut maladroi- tement brisé dans la découverte, comme les précédents, en un grand nombre de fragments, cjue je me suis efforcé de recueillir pour, si possible, le reconstituer. Malheureusement trop de morceaux me manquaient pour y parvenir (i). Enfin, le 21 juillet, mie cinquième poche dans laquelle se trouvait un vase, gaulois comme celui de la poche n" 4, niais de plus grandes dimensions, était mise à décou- vert non loin de cette poche. Ce vase , qui tombait également en morceaux pendant qu'on cherchait à l'enlever, contenait aussi des ossements humains brûlés et cra- quelés. Sa pâte est non moins grossière (jue celle du vase de la poche n" 4 ; elle est également siH- ceuse, épaisse: quant aux mor- ceaux brisés moms menus , ils m'ont permis de refaire le vase, sinon en son entier, du moms en assez grande partie pour en re- connaître la forme, le bord excep- té dont aucun fragment n'a pu être retrouvé f/7g-. ig). Il mesure, tel qu'il est (c'est-à-dire incom- /TA - n FiG. If). — 1/4 grandeur. son ouverture a o"\20 de diamètre et le fond ])let), o'",2i de hauteur o™,i3. (i) C'est à cette découverte que M. Cliarles Sellier a fait allusion dans la séance du 14 mai de la Commission du Vieux Paris (Bulletin iminicipal officiel du mercredi 29 juillet i9o3). EM. RIVIERE. — DECOUVERTE D UNE NECROPOLE GALLO-ROMAINE i339 Deux os gravés, dont un métacarpien d'Équidé , presque entier, sur lequel on aperçoit le chiffre dix (X), ont été trouvés à côté du dit vase, ainsi qu'un morceau de teg-ula et quelques autres os d'animaux, mais ceux-ci déjîourvus de toute marque ou gravure (i). Je dois ajouter que, en dehors des dix/bsses et jooc/ies qui renfermaient les ossements incinérés de plusieurs sujets et que je viens de décrire, deux squelettes luimains, en assez mauvais état d'ailleurs, brisés qu'ils ont été par la pioche des ouvriers , et dont j'ai essayé de sauver le plus de débris possible pour les reconstituer prochainement, en partie bien entendu, vu le nomlire de pièces osseuses manquant, ont été trouvés, non plus dans le sable, mais dans la terre même et au-dessus de la couclie gallo-iomame. Les os n'ont en rien subi l'action du feu. De plus, aucun objet, quel qu'il soit, n'a été trouvé, soit avec les squelettes, soit dans leur voisinage im- médiat, permettant de dater l'époque à laquelle vivaient les indiAddus dont ils sont les restes. Quant à leur élude, au point de vue anatomique, leur découverte est trop récente \io\\v que j'aie pu m'y livrer encore. Telles sont les découvertes que j'ai faites du 21 février 1908 à ce jour 3 août, ou mieux au 3i juillet, jour de ma dernière exploration à la Sablière du Hameau, en ce qui concerne les fosses, poches et squelettes humains, c'est-à-dire en l'espace de cinq mois. Mais, en dehors de ces tombes, si je peux m'exprimer ainsi, en dehors aussi du puits ou fosse de décharge, différents objets ont été trouvés par les ouvriers dans les travaux de terrassement nécessités pour la mise à découvert des sables quaternaires exploités, objets que je ne dois pas omettre de signaler, les uns appartenant aussi à l'époque gallo-romaine, les autres à des époques beaucoup moins anciennes. A. Epoque gallo-romaine. — Ceux-ci ont été rencontrés, soit en deliors des fosses ou des poches, soit dans le sol gallo-romain, voire même dans la terre végé- tale à une assez grande profondeur; ce sont plusieurs os d'animaux autres que ceux que j'ai déjà décrits et. comme eux, gravés de chiffres. Je citerai notamment : 1° Un os iliaque droit de Chevreuil (Ceivus capreolus) portant sur la face externe de la cavité cotyloïde , d'aJjord les chiffres cinq et nn , puis ]>his loin un autre un, soit donc le FiG. 20. (i) Cette cinquième poche est la dernirrc trouvée clans la sablière du Hameau, du moins à ma connaisaance. Il en est de même des vases ou fragments de vases g-allo- romains ou jjaulois. Açiitrgula et des os u'/7;r<'.s' décrits ci-dessus. Aucune autre trouvaille, m'a-t-f>n al'tirmé, n'aurait été faite, f[uoique les travaux de déblais et de fouilles n'aient pas été interrompus un seul Jour depuis le '3i juillet jusqu'à ce joui-. .T'avoue que le fait me parait plus que bizarre; jjour ne pas dire davantage et pour va une , surtout en raison de certains agissements sur lesquels je ne veux pas insister ici. (Bulletin n)uni- cipal officiel de février 1904. — Commission du Vieux Paris, séance du jeudi 12 novembre i9o3.) i34o ARCHÉOLOGIE iioihI)ic six (\I) on le noiul)re sept (VII). L'oulil. en gravant le cinq, a même perloré l'os, d'ailleurs très mince, en cet endroit, et pénétré dans la cavité cotyloïde, cavité d'articulation du fémur avec l'os du bassin (Ji^: -jo): 2" V:ar M. Frédéric Moreau dans une sépulture yaul«)ise, dans une fosse à incinération, sise à i'"5o de profondeur. Cette sépulture dépendait de la Nécropole de Caranda, célèbre par les iiuiombrables découvertes qui y ont été faites et située au lieu dit rilommée, sur le territoire de Cierges, à lo kilomètres de la ville de Fère-en-ïardenois (Aisne). Sous le nom de passoire, le fragment de vase de M. F. Moreau a été figuré sur la planche XXXIX de son Album de Caranda. Il est en terre grossière, gris jaimâtre, très épaisse; ses trous sont beaucoup plus larges et plus espacés aussi que ceux de la passoire du Hameau. La fosse à inci- nération, qui le renfermait, contenait deux anses de vases gaulois, un fragment de cuiller et un très petit vase en terre également et de même teinte que la passoire. 9° Plusieurs vases — tous incomplets, plus ou moins brisés — en poterie noire, généralement fine, et de nombreux fragments, dont quelques-uns sont ornés de dessins. Ces morceaux (bords, fonds de vases et autres) se rapportant à ime cinquantaine au moins de pots différents, mais tous appartenant à la même épocfue; 10° Un certain nombre d'autres morceaux de poteries différentes, tels que des fragments d'amphores et autres ; 11° De très nombreux fragments de tegiila, dont plusieurs sont marqués aussi de chiffres romains. Mais certains chiffres, après lavage, paraissaient tellement frais qu'ils semblaient gravés de la veille; plusieurs ossements m'ont présenté cette même particularité. B. Époques diverses. — Parmi les objets n'appartenant pas |à l'épociue romaine, mais trouvés dans la couche arable, je citerai : 1° Des morceaux de poteries, les unes — les plus noml^reuses — en grès, décorées de flammées rouges, droites ou parfois entrecroisées (xiii^ siècle) ; les autres , vernissées , dont quekpies-unes avec ornements en relief (xv*' siècle) ; 2° Un petit godet ou lamjje en grès, entier et intact (Jjg. 2 6), du xiv® ou xv^ siècle ; 3° Une jolie coupe, assez fine, en grès, également entière aussi (Jig. 2 y) et de la même époque ; 4° Plusieiu-s pièces de monnaies et jetons frappés sous les règnes de Louis XIII, Louis XIV, Louis XT, etc. C. Epoque quaternaire. — Quant aux couches quaternaires de la Sa- blière, elles ne m'ont donné jusqu'à ])résent — et j'en suis d'autant plus surjjris {[ue les ouvriers ont com- mencé à attaquer, dans leiu's travaux d'exploitation, la couche où, dans luie carrière voisine, on rencontre de noml^reux os d'animaux et silex quaternaires — elles ne m'ont donné, dis-je, qu'une très belle hache moustérienne , quelques rares silex taiUés, im bois de Cervidé, quelques FiG. 26. — 1/2 grandeur. FiG. 27. — 1/2 grandeur. ÉM. RIVIÈRE. — DÉCOUVERTE d'UNE NÉCROPOLE GALLO-ROMAINE l3^3 fragments osseux et une cocjuille de Pectiinciihis percée d'un trou au niveau de sa charnière, pour être portée suspendue comme bijou ou amulette. En résumé, les découvertes appartenant à l'époque gallo-romaine, qui ont été faites dans la Nécropole par incinération du Hameau, consistent en : 1° Cinq fosses et cinq poches funéraires avec vases et ossements humains brûlés ; 2° Une trentaine d'os d'animaux (Cheval, Porc ou Sanglier, Bœuf et Chevreuil) gravés de chiffres romains. Les nombres représentés sont I, II, III, IV, V, VI, VII, VIII, X, XI, XX, XL; les plus souvent gravés sont le V et le X; enfin, quelques-uns d'entre eux sont des nombj^es en miroir; 3° Deux morceaux de brique rouge marqués des nombres IX et XI; 4° Quarante-et-un morceaux de tegiila gravés, dont trente-cinq marqués de chiffres romains certainement anciens, 4 de chiffres ^'apparence fraîche, récente, et i marqués de lettres : l'une de la lettre A, l'autre des deux lettres A et P séparées par un certain intervalle. Enfin, les nombres représentés sur ces tegiila sont : II, III. V, VI. X, et XI, parmi lesquels le V est représenté neuf fois et le nombre X, vingt-trois fois. Tels sont les résultats de mes recherches dans la Nécropole gallo- romaine du Hameau, du 21 février au 3i juillet igoS, que je désirais présenter aux sections réunies d'Anthropologie et d'Archéologie. J'appellerai surtout votre attention, en terminant, sur les tegiila et plus particulièrement encore sur les ossements d'animaux gravés de chiffres romains. Ils constituent un fait unique jusqu'à présent, une découverte absolument nouvelle, si j'en crois les nombreux savants que j'ai consultés à cet égard, et notamment les membres de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, auxquels, les premiers, je les ai soumis dès leur découverte, dès les premiers jours du mois de mars dernier, et plus parti culièi^ement lors de ma lecture à l'Institut, le 27 mars dernier. Quelle interprétation peut-on leur donner? Ces os gravés ser- vaient-ils à marquer les tombes à incinération? je ne le crois pas; étaient-ils les pièces d'un jeu quelconque — comparable aux jeux d'osselets usités chez les Romains — comme l'hypothèse en a été (i) La saljlioro Mnnmaut, située rue Lacourbe 35i , c'est-à-dire à 4oo mètres au plus de la sablière du Hameau. l3/C4 ARCHÉOLOGIE émise, mais avec des points d'interrogation, notamment par M. Salomon Reinach (i)? En tous cas, je le répète, en appelant vivement l'attention de mes collègues de l'Association française pour l'avancement des sciences, il s'agit d'un fait qui n'avait pas encore été signalé avant la découverte que j'en ai faite dans la nécropole gallo-romaine du Hameau (2). Je dois ajouter cej)endant que je possède dans ma collection de poteries parisiennes un poids romain en terre cuite, trouvé il y a plus de trente ans dans le sol de Paris, non loin du Luxembourg, qui présente, sur ù^ois de ses quatre faces latérales, des marques ou des chiffres, soit I, soit II, et sur sa face supérieure ou sommet, le cliiff're ou la lettre X. J'ai vu, d'ailleurs, dans certains musées, des poids romains analogues, sur lesquels on remarque des chiff'res sem- blables. Avant de terminer, je rappellerai que, lors de la construction du Chemin de fer de Ceinture de Paris, vers i865 ou 1866, on mit à découvert dans les travaux de terrassements eff"ectués tout près de la rue du Hameau, entre celle-ci et la rue Desnouettes, c'est-à-dire en prolongement de la sablière dont je m'occupe ici, plusieurs tombes dans lesquelles on trouva des restes humains et des poteries romaines. S'agissait-il, comme ici, de tombes par incinération et celles-ci faisaient-elles partie de la nécropole gallo-romaine ? Je ne saurais le dire actuellement, les renseignements que j'ai recueillis à cet égard n'étant pas suffisants pour me prononcer. Mais je vais reprendre mon enquête dès mon retour à Paris, au mois de novembre prochain, et j'en communiquerai les résultats au prochain Congrès de l'Association française pour l'avancement des Sciences. (i) Voir le compte rendu de la séance de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres du 27 mars igoS, dans le journal Le Petit Parisien du surlendemain 29 mars. (2) Les chiffres signalés dans Touvragc de MM. Baudry et Ballereau étaient gravés sur des vases seulement. p. PETRUCCI. — LA MUSIQUE EN ANJOU AU XV^ SIÈCLE l3^5 M. Paul PETRUCCI Avocat à Paris LA MUSIQUE EN ANJOU AU XV SIÈCLE — Scancc du S août — I Le roi René. — Situation de l'Anjou favorable au développement des Arts. — Comment le roi René favorisa la Renaissance ang-evine. — Pourquoi la musique en Anjou est restée plus réputée que les autres arts. II MUSIQUE INSTRUMENTALE Existence de la musique instrumentale au xv" siècle. — Son caractère. — Le bréviaire du roi René. — Différents instruments de la cour du roi René (à percussion, à vent, à cordes). — Viole angevine ou guiterne. Bien que la musique instrumentale nait une existence sérieuse que depuis le xvi^ siècle , les instruments de musique les plus diffé- rents existent depuis les temps les plus anciens. De la lyre d'Orphée au violon de Stradivarius, bien des siècle se passent, pendant lesquels les essais les plus variés sont tentés. — Les monuments du xiii^, du xiv^ et du xv^ siècles sont couverts de sculptures représentant des instruments de musique; c'est que, pendant ces trois siècles, la musique instrumentale se prépare. Elle existe du jour où la viole remplace le rebec et la vielle ; elle se perfectionne quand la viole devient le violon. Il ne faut cependant pas croire que tous les instruments qui ont précédé le xvi'' siècle n'ont été que des instruments d'essai sans aucune utilité pratique. La confrérie Saint- Julien des ménestriers nous jjrouve le contraire et, si l'art musical instrumental n'existait pas, la musique pratique instrumentale était déjà trouvée. On n'entendait pas encore des combinaisons instrumentales et il n'exis- tait pas encore des virtuoses capables d'intéresser par leur seule science instrumentale, mais le rebec et la vielle faisaient déjà danser, le cor et la trompette donnaient déjà la cadence aux hommes d'armes. 85* l346. ARCHEOLOGIE La musique instrumentale n'arrivait pas encore à l'idée musicale mais elle était déjà suffisante pour le signal musical. En ce qui concerne les instruments de musique angevins, nous connaissons leurs noms par l'inventaire des meubles du roi René et nous les voyons dans le bréviaire de ce prince. Conservé à la bibliothèque d'Angers et à celle de l'Arsenal, le bréviaire du roi René renferme de véritables chefs-d'teuvre de pein- ture pouvant égaler les plus belles oeuvres du moyen âge. La ])remière page, représentant « ceulx. celles qui ont fait le psaultier», montre ces personnages avec les instruments qu'ils jouaient. — D'autres gravures de cérémonies soit religieuses, soit militaires nous font également connaître les instruments en usage dans ces diffé- rentes circonstances. Grâce à ces indications, on peut, à défaut de renseignements précis, se faire une idée de la nmsique sous le roi René. La plupart de ces instruments sont ceux connus en France au xv^ siècle et même aux époques antérieures. On peut les classer en trois catéo-ories : instruments à percussion, instruments à vent et ins- truments à cordes. Les deux instruments à percussion en faveur à la cour du roi René sont les cymbales et surtout le tambourin. Ce der- nier, très plat et ressemblant à nos caisses claii^es modernes, mais de dimensions un peu plus grandes, se place devant l'exécutant comme une o-rosse caisse, avec cette différence qu'au lieu de n'être frappé que du côté droit il est frappé également à gauche. — Au lieu de se servir d'une masse, le joueur de tambourin tient dans chaque main une baouette allongée, un peu dans le genre de celles des timbaliers. Cet instrument est certainement la timbale du xv siècle et, d'après la gravure du psautier du roi René, il doit être employé, comme la timbale, x)our soutenir les tromx^ettes. — Il est, en effet,, sur la gravure placé à côté d'une trompette qu'il sert certainement à accompagner. Le groupe des instruments à vent est représenté par le cor, la flûte, la trompette et l'orgue. — Cette classe est celle qui comprend le plus d'unités, ce qvii est très compréhensible, les instruments à vent étant les plus anciens après ceux à percussion ; mais en Anjou ils n'ont rien de particulier : ce sont des instruments connus bien avant le xv« siècle. L'orgue est le petit orgue portatif connu dès le XIII'' siècle et le cor et la flûte sont des descendants de l'olifant carlo- vinoien. — La flûte que le bréviaire du roi René nous montre entre les mains dune instrumentiste du temps est à pavillon connue une clarinette et le son devait en être plutôt grave. — La trompette, très p. PETRUCCI. — LA MUSIQUE EN ANJOU AU XV^ SIÈCLE 134^ allongée et très mince, dans le genre des célèbres trompettes d'Aïda. est celle qu'à tous les siècles nous voyons attribuée aux anoes et aux renommées. Sous le roi René, ces trompettes appartiennent à l'armée; ce sont elles qui annoncent les tournois et précèdent le roi de Sicile, dont elles font connaître l'arrivée. Elles sont alors ornées dans toute leur longueur d'un étendard aux couleurs de René d'Anjou, mais le bréviaire du roi René nous les représente aussi sans aucun ornement à côté d'autres instruments joués en chambre ce qui pourrait indiquer quelles avaient aussi un rôle symphonique. Si les instruments à vent de la cour du roi René sont bien anté- rieurs au xv^ siècle, ils sont également, mais un peu modifiés, les instruments des siècles suivants, car la flûte à bec, qui précède notre flûte moderne, est la flûte du xv^ siècle, mais à pavillon rétréci. Tout au contraire, les instruments à cordes, moins nombreux, montrent un grand progrès dans la facture instrumentale. Fait assez curieux, au xv« siècle les instruments à cordes peuvent déjà se partager en instruments à cordes pincées, instruments à cordes frappées et instruments à cordes frottées. La harpe semble être le plus en faveur des instruments à corde ftincées , elle cesse à cette époque, d'être une variation de la lyre, pour devenir l'instru- ment moderne que nous connaissons. Ses dimensions plus grandes obligent à la jouer assis; l'exécutant, la posant sur ses genoux et l'appuyant contre son épaule, a déjà la position du harpiste moderne et son instrument doit déjà avoir une certaine ampleur de son. Le psaltérion, sorte de timpanon triangulaire, est l'ancêtre de notre piano et son usage est très fréquent en Anjou comme partout, car il se trouve sur tous les dessins et sur toutes les sculptures du moven âge. C'est avec la classe des instruments à cordes frottées que nous arrivons aux instruments nouveaux du xv siècle ou premiers instru- ments de la renaissance musicale. Au rebec du moyen âge succède un instrument plus sonore nommé vielle. La vielle désigne alors tout instrument à cordes frottées et ce nom s'applique aussi bien à la chifonie ancêtre de la vielle moderne qu'à la viole du xiv^ et du xv« siècle. En Anjou, la vielle que l'on trouve à la cour du Roi-René est différente des autres vielles françaises. Celles que nous représentent les sculptures et les peintures du temps étaient généralement carrées ou ovales, mais toutes à éclisses droites. La vielle du roi René est au contraire à édisses échancrées et sa forme est déjà celle de la viole du siècle suivant, sinon celle du violon. En effet, l'exécutant, no cherchant pas l348 ARCHÉOLOGIE encore à obtenir des notes aiguës, n'avait pas encore besoin du rétré- cissement de la table près du manche, que l'on remarque aux violes, pour obtenir les notes aiguës ; rétrécissement supprimé au violon quand on prit l'habitude du démanché. A côté de cette grande ressemblance de la viole angevine avec le violon, on remarque des différences capitales, peut-être dues à l'inexactitude des dessins du bréviaire du roi René, mais différences pouvant cependant s'expliquer. 1° Le cordier, qui se remarque sur les rebecs et sur les vielles, n'existe plus sur la viole angevine, où les cordes sont attachées à la table comme pour la guitare. 2" Le chevalet est également absent. Telle qu'elle est représentée, cette viole serait injouable et l'on est obligé, pour la reconstituer, de faire plusieurs hypothèses. Peut-êtx*e le cordier a-t-il été oublié par le dessinateur, ou bien a-t-il été confondu avec le chevalet; mais, peut-être, ce qui est fort possible, a-t-il été supprimé dans cet instrument. Soit pour rendre plus facile la position de l'instrument sous le menton, soit pour ol)te- nir plus de sonorité, on a fixé les cordes à la table, comme Chanot en a eu l'idée pour son violon. L'attache des cordes à la table serait alors exacte et il manquerait le chevalet. Près du manche , nous apercevons sur le dessin un petit trait qui pourrait être le chevalet (beaucoup de dessinateurs ayant commis l'erreur grossière de figurer le passage de l'archet entre le cordier et le chevalet), mais ce petit trait peut également figurer la terminaison d'une touche très courte et le chevalet doit manquer. Peut-être, en l'absence d'un chevalet, la viole du roi René possédait- elle un cordier-chevalet dans le genre de la guitare, mais recourbé, pour permettre à l'archet de toucher chaque corde séparément. Cette hypothèse serait peut-être la plus vraisemljlable , mais cette viole, donnant l'accord de notre alto, doit avoir la même longueur de cordes de ce dernier. Ce chevalet-cordier ne se trouvant pas au milieu de la taldo, il faudrait, pour obtenir la longueur des cordes de l'alto, avoir un manche très court et, le dessin représentant au contraire un manche assez long, on est amené à conclure qu'il y avait au milieu de la table un chevalet donnant aux cordes la lon- gueur de celles de l'alto. Ce qui est certain, de même qu'on désignait en France sous le nom de vielle la vielle à roue ou la vielle à archet, il y avait, en Anjou, confusion avec la vielle et la guitare. Peut-être les dessina- teurs prenaient-ils la guitare pour la vielle et par erreur en faisaient- p. PETRUCCI. — LA MUSIQUE EN ANJOU AU XV« SIÈCLE l349 ils un instrument à archet; mais, peut-être aussi, ce qui est très croyable, l'instrument du bréviaire du roi René était bien un instru- ment à archet. L'échancrure des éclisses n'avait sa raison d'être que pour le passage de l'archet, mais, probablement, c'est cette viole qui doit être désignée dans l'inventaire du mobilier du roi René sous le nom de gui terne. De même qu'il y avait la vielle à roue et la vielle à archet, il y avait, peut-être, la guiterne à archet et la guiterne à cordes pincées, que l'on confondait toutes deux ; mais les illustrations du temps ne nous montrent que la guiterne à archet qui était déjà la viole. FiG. I. — Viole angevine du xv» siècle reconstituée par M. Chureau. III MUSIQUE VOCALE Institution de la chapelle du roi René. — Les chanteurs qui la composaient. — Rétributions de ces chanteurs. — Passaj>e de la chaijelle de René d'Anjou en Touraine. — Œuvres vocales interpi'étées. A côté d'un art instrumental naissant, mais très rudimentaire , l'art vocal était beaucoup plus sérieux en Anjou. Les Archives de V Anjou nous donnent les renseignements les j)lus précis sur la cha- pelle du roi René, institution d'une importance considérable dans l'histoire de l'art musical français. Ce fut en i448 que Jeanne de Lorraine fit abandon de l'impôt des tabliers de Provence pour la fondation de la chapelle du roi de Sicile. René d'Anjou, par une lettre patente de i449' établit défini- tivement cette institution et Jean Racional , d'Aix , fut chargé de percevoir les tabliers (impôt sur les marchandises de Provence) pour, chaque année, fournir en Anjou les fonds nécessaires aux chanteurs angevins. l350 ARCHÉOLOGIE Les chanteurs du roi de Sicile étaient habillés de roljes rouges doublées de fourrures grises. Il y a^ait parmi eux des solistes venant d'Italie, où la renaissance musicale était plus avancée qu'en France, et Ion appelait tabourins ces chanteurs, napolitains pour la plupart. Un des plus célèbres fut Tassin d'Aversa. D'après les comptes de la chapelle du roi de Sicile, nous savons que cette société chorale du xv^ siècle débuta en mai i449» iinssitùt après la lettre patente du prince établissant sa fondation. Nous avons, de plus, les noms des premiers chanteurs qui en firent partie et nous savons ce c{u'ils étaient payés. En effet, d'après ces comptes, il fut donné : « à Bertrand Féragus, Phelippe Boutillat, Jehan Lescaudet, « Pierre de Monade, Ondet Garin et Arnault Sperty, chantres, « quatre vings quatre escuz neufs, c'est assavoir à chascun d'eux « six escuz qui sont trente six escuz, pour cause de leurs gaiges du « moys de may mil quatre cens quarante et neuf qui est le comman- « cément de leur ordonnance. — Plus à chascun d'eux huit escuz « pour une robe aux dessus nommés chantres la somme de trente « six escuz d'or neufs à raison de six escuz par moys. » Même traitement fut attribué à Nicolas Michon, Estienne de Saint-Germain, Jean Louvet. — D'après ces documents très intéres- sants . les chantres ordinaires du roi René recevaient un traitement fixe de six écus par mois, mais ils recevaient , de plus . une robe par saison. Ils devaient encore être logés et nourris à la maison du roi, car nous saA^ons que l'organiste Girardin et le clerc de la chapelle Jean Néron étaient entretenus dans l'hôtel royal, sur le même pied que plusieurs olliciers , ce qui fait supposer que les chantres ordi- naires avaient les mômes avantages, mais avec moins d'honneurs. Les bons ténors, déjà rares au xv« siècle, étaient payés huit écus et, en plus de ces traitements fixes , les chanteurs recevaient encore quelques gratifications spéciales. Roullin, l'un d'entre eux, en plus de ses appointements, touchait un écu comme copiste ei ses conû'ères étaient également récompensés lorsqu'ils augmentaient la chapelle angevine de chanteurs qu'ils faisaient venir de Paris, de Picardie ou de Bretagne. Parmi ces gratifications, nous relevons les suivantes : « A messire Estienne, chapellain de Bretaigne. la somme de (£uatre « livres deux solz six deniers tournoys à lui ordonnez pour ses « despens et sallaire d'avoh^ esté pour amener et faire venir ung « chantre et estre tenneur (ténor) en ladicte chapelle ; « A Arnault Sperty l'un des dictz chantres la somme de trois « escuz, oultre et pardessus ses dictz gaiges en récompense des des- p. PETRUCCI. — LA MUSIQUE EN ANJOU AU XX" SIÈCLE l33l <( pens et voyaiges que le dict Sperty avoit fait de Saumur à Paris <( pour amener un tenneur (ténor) ; « A Chassin de Hautresse, tenneur, la somme de vingt-quatre « escuz en don pour une foiz oultre des gaiges, en rescompense d'un <( \oyaige qu'il a fait en Picardie à faille venir des chantres. » En plus de ces gratifications pour services rendus, les cliantres recevaient encore des sup])léments de traitement. Un des plus favo- risés fut Boutillat. Engagé aux appointements de six écus par mois il est bientôt augmenté de deux écus, puis il reçoit une première gra- tification de dix écus pour « aydcr à ses menuez affaires ». Enfin, en mil quatre cent cinquante-deux, il reçoit « trente escuz pour une foiz «. oultre des gaiges pour aidier à ses nécessitez et affaires et soy plus « honnestement maintenir au service du dict seigneur René d'An- <( jou ». Tous ces chanteurs étaient sous la dh-ection de l'évêque d'Orange qui recevait, par an. comme maître de chapelle, vingt écus neufs reportés en deux termes. Souvent la chapelle suivait le roi de Sicile dans ses voyages et, en mil quatre cent cinquante-six, son transport à la Roche-sur-Yon coûta cent cinquante livres au trésor de l'Anjou. Parfois des musiciens de princes étrangers étaient reçus par la chapelle angevine, car de son château de Beaufort, où il était en villé- giature, le roi René fit donner un écu à Jehan Gasnot « pour fes- « toyer un chantre de Monseigneur d'Orléans ». A la mort de René d'Anjou, sa chapelle passa en Touraine, à la cour de Louis XI, et fut alors dirigée par Okeghem, maître de chapelle de Notre-Dame de Paris, puis plus tard par son élève, Josquin des Prés. Quelles étaient les œuvres interprétées par la chapelle du roi René ? Elles étaient certainement nombreuses, tant en musique reli- gieuse qu'en musique profane. D'abord, d'après les mémoires du temps, il est certain que le roi René, dont nous avons conservé toutes les œuvres littérah'es, entre autres de très spirituelles poésies, composait des messes pour sa chapelle, et il est probable que l'évêque d'Orange en écrivait égale- ment. Les siècles précédents avaient laissé avec le déchant des œuvres profanes et religieuses composant un assez grand répertoire et, si la première moitié du xv« siècle ne donnait pas naissance en France à des œuvres remarquables. René d'Anjou devait vrai- semblablement avec ses solistes italiens faire venir en Anjou les chefs-d'œuvre des contrapontistes de Rome, de Venise et de l352 ARCHÉOLOGIE Florence. Quand, dans la deuxième moitié du siècle, la chapelle de René d'Anjou devint celle de Louis XI, ce fut elle qui eut llionnem' d'interpréter pour la j)remière fois les chefs-d'œuvre de Josquin des^ Prés. lY MUSIQUE DRAMATIQUE Mystères. — Leur représentation. — Leur musique A côté de l'art vocal classique et de la chapelle du roi de Sicile . il faut mentionner un essai d'art populaire ou dramatique. Les mys- tères comprenaient une partie musicale très accessoire, il est vrai, mais cependant indispensable. La représentation du mystère de la Passion de Jean Michel durait plusieurs jours et une tétralogie Wagnérienne ne peut donner qu'une faible idée d'une représentation dramatique sous René d'Anjou. Pour éviter l'encombrement des spectateurs . les portes de la ville étaient fermées, à l'exception d'une seule et, par ordre du comité d'hygiène de l'époque, on dut, lors de la première représentation du mystère de la Passion, refuser l'entrée d'Angers aux habitants de Brissac, où il y avait la peste. Pendant toute une semaine, une représentation préoccupait toute une province ; quant à la préparation d'un tel évé- nement elle durait plusieurs mois. Si nous voyons dans le manuscrit de Jean ^Michel les parties du drame qui étaient mises en musique, nous ignorons quelle était cette musique. Très probablement on adaptait des airs populaires très anciens, ce qui était très fréquent. La chapelle du Roi n'était pas chargée de cette exécution confiée à de simples habitants de la ville et ces derniers n'avaient pas l'éducation musicale suflisante pom' exécuter un simple déchant. Il fallait une musique très simple pour les parties chantées de la Passion; les artistes impi^ovisés ne pouvaient qu'adapter des chants populaires appris dans leur enfance. Influence de la Renaissance musicale angevine sur la Renaissance musicale française Si l'Anjou au xv« siècle n'a pas vu naître des œuvres musicales méritant l'immortalité, son iniluence sur la renaissance musicale française est cependant incontestable. Grâce à son caractère voyageur, l'angevin a toujours su amener chez lui les chefs-d'œuvre L. DE FARCT. — LES TAPISSERIES DE LA CATHÉDRALE d' ANGERS l353 des autres contrées pour embellir son pays et pour s'instruire. Le roi René, type de l'angevin, a donc su faire profiter sa capitale des travaux de la renaissance italienne ; grâce à lui, c'est par l'Ouest que la renaissance musicale a pénétré en France. Sa chapelle, pouvant rivaliser avec les meilleures phalanges italiennes , a fourni à Josquin des Prés, notre premier contrapontiste de valeur, des interprètes dignes de lui, et ce fut plus tard la guiterne, ou viole échancrée d'Anjou, qui devint la viole du premier quatuor à cordes de la musique instrumentale. Toutes ces considérations justifient la renommée du roi René et, si de nos jours la ville d'Angers tient à favoriser les arts, elle garde la tradition du xv= siècle et du vieux duc d'Anjou. M. Louis DE F ARC Y à Anarers LES TAPISSERIES DE LA CATHÉDRALE D'ANGERS [:4(3: ;2(i.(H44i2)) — Séance du lo août — I. La Cathédrale d'Angers est d'abord décorée de tentures DE SOIE Avant l'introduction de la Tapisserie en Europe, du xi® au xii« siècle (i), au cours du mouvement artistique provoqué par les Croi- sades, nos grandes églises étaient ornées, les jours de fête, de ten- tures de soie, tissées d'or, quelquefois même brodées à l'aiguille « acii pictœ ». Ces précieuses étoffes venaient de l'Orient, de Bagdad, par exemple (d'où le nom de Baiideqiiin), de la Syrie , de l'Archipel ou de la Sicile (2), Sans doute, elles charmaient nos ancêtres par l'heureux mélange de l'or et des couleurs, mais c'était surtout leur caractère exotique et la composition du dessin qu'ils appréciaient. Très accentué a toujours été en France le goût pour les productions (i) L'art de la tapisserie s'introduisit et s'acclimata en Allemagne plus tôt qu'en France. On en voit une à Saint-Géréon , de Colog'ne , qui remonte au xi» siècle : celles d'Halberstadt appartiennent au xxi" et celles de Queldimbourg' au xiir'. — La Tapisserie, par Muntz, p. o'î, gS et 102. (2) Recherches sur les Etoffes de soie , d'or et d'argent, par Francisque Michel, t. I de la p. 21 à la p. 29. l354 AUCHÉOLOGIE étrangères : aussi combien A'it-on d'artistes du moyen âge s'ingénier, dans nos pays, à copier les coffrets d'ivoire rapportés d'Oulre-Mer. les bourses sarrazinoises et jusqu'à des inscriptions arabes dont ils ignoraient le sens. N'avons-nous pas vu l'industrie moderne repro- duire elle aussi à satiété les porcelaines et les laques de Chine , dans un tout autre ordre d'idées, les bijoux Campana et bien d'autres objets, dont les types étaient empruntés aux pays étrangers ou encore à des époques très reculées de nous ? Au moyen âge , on était tellement frappé de l'excellent effet pro- duit par les tentures dans les églises qu'on en a figuré quelquefois en sculpture ou q\\ peinture sur leurs parois. Le grand portail de la cathédrale de Reims, celui de Saint-Jean-des-Yignes. à Soissons, la porte rouge de Notre-Dame de Paris et le triforium de la cathé- drale de Metz (i) nous en offrent des exemples. M. Ramé (2) cite sous le porche de celle de Dol, élevé au xiv^ siècle par l'évêcpie Henri Cœur, une di^aperie peinte rappelant assez bien le riche pour- [loint de Charles de Rlois. Enfin, chacun connaît les tentures peintes sous les fenêtres de la sainte Chapelle de Paris; j'en pourrais donner d'auti^es types. Les anciens inventaires de la cathédralt; d'Angers nous font con- naître un très grand noml^re de tentures de soie , désignées sous les noms de paelles. haudequins , draps de l'Arest, courtes-pointes, sarges, draps de parement , etc. Nous les voyons figurer dans le mobilier de la fabrique, jusqu'à la fin du xv^ siècle, remplacées peu à peu par les tapisseries. En 1218, l'évèquc Guillaume de Beaumont constate que les orne- ments et les tapis ou tentures sont déchirés, que les livres de chœur sont effacés, en un mot que tout le mobilier est bon à renouveler; il prend des mesures en conséquence (3). Il mourut en 1240. après avoir reconstruit la Croisée et le Transept nord et comblé sa cathé- drale de présents, entre autres de précieuses tentures ce... ecclesiœ fahricam pj'œclaro opère instructam, preciosis ornamentis etpalliis palliaçit x> (4) lisons-nous dans son éloge funèbre. A ce généreux ]>ienfaiteur, qui avait suivi la croisade, il faut attribuer une bonne partie des culcitrœ pinctœ , dont les 93 meilleures faisaient, d'après l'inventaire de 1297, tout le tour de l'église. (i) Manuel dWrchcologie française , par Camillo EnlaiH , t. I , p. 346. (a) Bulletin de V Association bretonne , iSaa, ]>. aji à aôt). (S) Iiil)liolliè(jiu' d'Angers, ms. n° 6icS, 1. III, p. 2'3i verso. (4) Ibidem, ms. ii° G'36 , p. 179. L. DE FARCY. — LES TAPISSERIES DE LA CATHÉDRALE d' ANGERS l355 Ce même document nous révèle l'existence dans les armoires du chœur de dix-sept paelles antiques (de qiiibiis diiii est ecclesia con- siieçit parai^i). Non seulement, une sorte de litre, composée de tentures juxtapo- sées et fixées au mur avec des clous, décorait les parois du monu- ment ; on en suspendait encore sous la châsse de saint Maurille, au devant du jubé, au dossier des stalles, à la chaire de l'évèque et à celle du chantre, à des cordes tendues entre le sanctuaire et les stalles, enfin aux côtés de l'autel, si bien qu'on peut se demander où il n'y en avait pas. La description de chacun des XXXIII haudeqiiins donnée dans l'inventaire de 1297 et des LIX de celui de 1391 m'entraînerait trop loin : on la trouvera dans ma Monographie de la Cathédrale d'An- gers (Volume du Mohiliev, p. II et suivantes). Ces brillants tissus, la plupart d'origine orientale, représentaient les uns des lions, des léopards, des paons, des griffons ou des animaux fantastiques, le plus souvent inscrits dans des médaillons circulaires « in rondellis », les autres des figures humaines ou des blasons. Trente-deux « panni novi », acquis par le chanoine fabriqueur Nicolas d'Evron, en i'334, remplacent les anciens, déteints, fanés ou usés. Ils semblent plutôt de fabrication occidentale, à en juger par les aigles à deux têtes, les faucons, les feuilles de chêne et les Agnus Dei dont ils sont semés. Une pareille collection aurait actuellement un intérêt considérable au point de vue textile : il n'en reste que la description, donnée dans nos anciens inventaires. Ce souvenir est précieux quand même pour l'histoire de la liturgie, de l'art industriel et de la décoration ; aussi ai-je cru devoir l'évoquer devant vous. Tel était l'usage général au moyen âge, jusqu'au moment où les tapisseries historiées remplacèrent avantageusement ces draps de parement, dont on trouve la description dans les inventaires des cathédrales de Bayeux, de Cambrai, du Mans, de Quimper, de Vannes et de bien d'autres villes. II. Les tapisseries succèdent aux tentures de soie La première tapisserie de la cathédrale d'Angers lui fut donnée pai' le roi Charles VII le 7 octobre 1428 (i). Divisée en quatre pièces, (i) Bibliothcquc d'Angers , ms. 11° 055, p. 2o5. l356 ARCHÉOLOGIE assez longues pour couvrir presqu'en entier le chœur et le chevet (environ cinquante mètres), elle représentait un grand nombre de scènes « ab initio miindi iisqiie ad diem judicii ». Ai»rès avoir énu- méré les vingt-trois premiers sujets, qui débutaient yj^r la chute des maiwais anges et la création da monde, le secrétaire du chapitre semble perdre patience et ajoute qu'il en avait encore beaucoup d'autres tirés de V Ancien et du Nouveau Testament. C'était d'ailleurs le nom sous lequel était connue cette tapisserie « valde preciosa » (i), faite à fil d'or, d'argent, de laine et de soie, estimée So.ooo livres en i533 (2). Le nom du peintre des cartons et celui du tapissier sont inconnus. L'élan était donné : les haudequins, les draps de soie et les sarges aux motifs indéfiniment répétés et de simple décoration perdent leur ancienne faveur. Ils semblent bientôt monotones , démodés et dispa- raissent successivement. Le chanoine Hugues Fresneau commande en 1409 à Paris chez Jean Despain g pour 200 escus (3) (auxquels le chapitre en ajoute 4» l'année suivante) (4) , une tenture en laine rehaussée de soie , de la Vie de saint Maurice et de ses compagnons, destinée au dossier des stalles. Elle se composait de six pièces sur lesquelles on remarquait quatre écussons aux armes du donateur. Les patrons, peints sur toile, couvraient habituellement la boiserie (5) et les jours de fête ils étaient remplacés par la tapisserie elle-même. Comme complément, le chapitre fait marché, en 1460, moyennant 120 écus, avec un tapissier de Paris, pour trois pièces « de la vie de saint Maurille y) (6) qu'on suspendait au parapet du jubé, du côté du chœur. En 1874» il nie fut donné d'en découvrir dans un grenier un fragment assez important, mais en fort mauvais état. La fabrique le fit aussitôt restaurer. C'est un témoin qui fait vivement regretter la perte du reste de la tapisserie. Presque en même temps, les chanoines reçurent une pièce dite « de la Résurrection », qu'ils faisaient placer sous le grand Crucifix d'ar- (i) Inventaire de i53g. « Magna tapiceria in quatuor pociis continons historias a mundi creationc usque ad Asccnsionem Doraini nostri , contexta Jilis aiireis et serico , valde preciosa ...» (2) Arehives de Maine-et-Loire , série G., n» 264, art. 325. (3) Bibliothèque d'Angers, ms. n° 658, p. 49- (4) Fabrique, t. I, p. 71, « Quia dictus Despaing- asscruit , ([uod omiscrat plus quam LV scuta, data sibi fuit summa XXXX scutorum. — Item Jtiluumi Bourgeois, pro t'aciendo IV scussonas, ubi sunt arma De Hugonis Fresneau, sexaginta solides. (5) Fat)rique , t. IV, p. 3v)8. Le 26 mai i543, Pierre Lagout, peintre, reçoit viii s. « pour avoir a))illé les rideaux des grandes orgues avecques les patrons de la tapisserie du chœur et avoir fourni de latte pour empêcher les rats ». (6) Bibliothèque d'Angers, ms. n" 658, p. 49- L, DE FARCY. — LES TAPISSERIES DE LA CATHÉDRALE d'aNGERS i357 gent du Jubé, du côté de la nef. Elle figure dans l'inventaire de 1467, mais j'en ignore le donateur et la provenance. Là s'arrêta le zèle des chanoines. Enfermés pour leurs oflîces de jour et de nuit dans l'enceinte formée par les stalles et le jubé, au centre de l'église, ils avaient sous les yeux, les jours de fête, le chevet et le chœur, parés de l'Ancien et du Nouveau Testament , le dossier des stalles et l'appui du jubé, également tendus des tapisseries dont je viens de parler. Il semble qu'ils se soient désintéressés des tran- septs ;et de la nef, sans doute faute de ressources. En tout cas, la fabrique y fit suspendre, jusqu'en 1480, les haudequins et les draps de soie : ceux-ci disparurent définitivement alors , remplacés par la célèbre tapisserie de l'Apocalj^pse, dont la majeure partie existe encore et fait aujourd'hui la gloire de la cathédi'ale d'Angers. René, duc d'Anjou, insigne bienfaiteur de l'église de « monsieur saint Maurice », après avoir reçu, en 1442, de sa mère Yolande d'Aragon, la tapisserie de V Apocalypse et s'en être servi personnel- lement, soit au château d'Angers, soit à Baugé, en disposa ainsi par testament le 22 juillet 14^4 • << Item donne et laisse à j'-celle église la belle tapisserie, sur laquelle sont contenues toutes les figures et çisions de VApocalice. » Toutefois il en conserva la jouissance jus- qu'à sa mort. En 1480, la fabrique reçut six pièces de la tapisserie ; la septième, étant restée, je ne sais pour quel motif, entre les mains d'Anne de Bourbon, lui fut remise par cette princesse le aS mai 1490. Ce don magnifique compléta la décoration de l'intérieur de l'église sauf une lacune peu importante. Primitivement, Y Apocalypse se composait de sept pièces ou mor- ceaux, assez grands pour couvrir « les longueurs de la nàif et des croisées (i) » ou transepts. Quatre pièces suffisaient pour la nef, deux à droite, deux à gauche. L'ensemble avait une longueur de i44 mètres environ. La plupart des pièces avaient vingt aunes de cours. Telles étaient la i"', 4^' 5*^, 6^ et 7«, tandis que la seconde et la troisième, à elles deux, avaient une étendue semblable à celle de chacune des autres. Pourquoi cette différence? Évidemment, en vue de l'emplacement pour lequel la tapisserie avait été commandée. L'examen attentif du texte de V Apocalypse nous fait connaître que le nombre des tableaux était jadis de 90 : il en reste 71 seulement aujourd'hui. La longueur totale était de i44 nictres; la hauteur d'environ (i) Archh-cs de Maine-cl-Loirc , série G, u" 264, art. 324. l358 ARCHÉOLOGIE 5 m. 5o (t). soit ])rès de 800 mètres carrés. Paut-il s'étonner que l'Apocalypse ait été estimée 200.000 livres en i533? (2). On peut se demander si jamais on a tissé une tapisserie aussi importante. Elle a malheureusement subi de graves mutilations : j'en dirai quelque chose. Actuellement, malgré de très intelligentes restaurations, elle est fort incomplète et bien déchue de son antique s^îlendeur. Quoi qu'il en soit, c'est la plus ancienne et la plus considérable tapisserie française que l'on connaisse. Elle fait encore grand honneur à Louis P', qui l'entreprit en iS^^, au dessinateur des cartons, enfin au tapissier chargé de l'exécuter. A chacun d'eux nous allons consa- crer une courte notice. Louis I^'' , frère du roi Charles V et de Jean, duc de Berri, avait, comme ce dernier, un goût très vif pour les Beaux-Arts. La descrip- tion de ses joyaux, des pierreries de sa très noble et très riche cou- ronne, l'inventaire, dont M. Moranvillé vient de donner des extraits dans la Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, déconcertent vraiment l'imagination. Quelle recherche, quel raffinement dans le luxe! Ce prince avait une véritable passion pour l'orfèvrerie, les émaux, les perles et les pierreries. On croît rêver en lisant la description de certaines pièces, de sa couronne, de son grand tabernacle d'or, de son faudesteuil ou trône d'apparat, etc. ; aussi ne faut-il pas s'étonner de voir Louis P"' possesseur, dès i364 (alors qu'elles devaient être encore peu nombreuses) de 78 tapisseries, entreprendre en 1877 celle de VApocalj'pse. Il serait intéi*essantde savoir à quelle occasion et pour quel endroit notre duc fit une commande aussi considérable. Vainement j'ai cherché la réponse à cette question dans des documents contempo- rains. Voici la solution que je propose : elle est basée sur l'examen de la tapisserie elle-même. Tandis que chacune des pièces i, 4, 5, 6 et 7 se composaient (quand elles étaient entières) de i5 tableaux, dont le premier prenait toute la (i) Baïute (le ciel, o'-So. — ^Moulure en grisaille, o»'2o. — Tableau, i-^Sa. — Moulure, cio. — Létfi'iule, o""??. — ^Moulure, o^iS. — Tableau, i^Sa. — Moulure, o-^iS. — Légende, o-^SS. — Moulure, o°'2o. — Bande de terre, o"3o. Total : 5°4o à S-oo. (2) Ai-chk-cs de Mainc-el-Loirc , série G, n» 264, art. 824. « Item les doyen et chapitre en la dite église ont une belle, grande et notable tapisserie entre les tapisseries de ce royauhne, historiée des hystoires de l'Apocalypse, qui se tent aux festes solenipnelles eu la naif et chappelle, qui couvre les longueurs de la nef et des croisées dicclle dounée l)ar le l'eu Roy de Sicile, estimée valloir deux cens mil livres qui depuis le temps de trente ansf[ue ledit de Rohawa esté evesque s'est grandement endonimaigée et ne saurait être mise en sullisaTitc réparacion pour la somme de six mille livres tournois et a cousté néanmoins depuis letlit temps à réparer mil livres tournois. » L. DE FARCY. — LES TAPISSERIES DE LA CATHÉDRALE d'aNGERS iSSg» hauteur de la tapisserie, les i4 suivants alignés sur deux rangs, la i^ et la troisième pièce étaient disposées tout autrement. La 2*^ débute par le grand tableau ; elle nous montre ensuite quatre sujets au rang supérieur et deux seulement à la partie inférieure. La 3^ comprend six tableaux, trois en haut, trois en bas. Il y a donc un vide, une interruption dans la tenture d'une hauteur d'environ 2 m. 75 et d'une longueur de 5 à 6 mètres, mais seulement à la partie INFÉRIEURE. A quoi bon cette lacune , prévue par le dessinateur des cartons et le tapissier ? Évidemment , pai'ce qu'il y avait là , quand la tapissei'ie était tendue, un obstacle quelconque, un objet qu'il ne fallait pas couvrir. Dans ma pensée, ce ne pouvait être autre chose que Y autel de la chapelle ou la cheminée de la grande salle du château d'Angers. Une autre considération milite , il me semble . en faveur de l'une ou l'autre hypothèse. On remarque, à la place d'honneur, au sommet des six grands tabernacles d'architecture, ouvrant chacune des pièces, des anges tenant des bannières flottantes. Celles de gauche sont aux armes d'Anjou ; celles de droite nous donnent le blason de Y Ordre de la Croix (de sinople à la double croix ou croix d'Anjou de sable, entourée d'un filet d'or), auquel Louis L"^ fait trois fois allusion dans son inventaire, publié en partie par M. Moranvillé (i). Or, le 12 juillet i359, la Vraie-Croix de la Boissière fut apportée dans la chapelle du château pour être mise en sûreté et y resta près d'un siècle l'objet de la vénération des ducs d'Anjou et de nombreux pèlerins. Un Ordre de la Croix y fut établi par Louis I^"", en l'honneur de l'insigne relique. Il est donc tout naturel de supposer que Y Apo- calypse, poi'tant en face des armes d'Anjou celles de YOrdre, ait été tissée pour l'ornement de la chapelle du château. Mais, dira quelqu'un, l'ancienne chapelle était-elle assez vaste pour qu'on pût y susx^endre une pareille tapisserie ? Pourquoi pas , si on juge pai' l'édifice actuel construit par Yolande d'Aragon et terminé en i4ii? Si la découverte ultérieure de quelque document, aujourd'hui inconnu, permettait d'affirmer qu'il était impossible de tendre l'Apocalypse faute d'un espace suffisant dans la chapelle, j'admettrais qu'elle aurait été tissée pour la A^aste salle du château, en grande partie écroulée aujourd'hui, dans laquelle auraient pu avoir lieu les (i) Bihliolhrqiic de l'École des Chartes, t. LXIÎ, année igoi. j360 ARCHEOLOGIE cérémonies de rOrdre(i). Alors l'interruption, signalée plus haut, aurait été prévue pour la cheminée. En tous cas, que la tapisserie ait été commandée pour la chapelle , sur lautel de laquelle reposait la Vraie-Croix, ou pour la grande salle, à l'occasion des réceptions des chevaliers de l'Ordre, on ne saurait méconnaître lintention de Louis 1*=' de rendre un hommage de plus à la Vraie-Croix, en j faisant tisser la Ci^oix de son Ordre, en face des armes d'Anjou. C'est un détail sur lequel il ma paru nécessaire d'insister. Parlons maintenant de l'auteur des Cartons. Jean de Bandol, vulgairement nommé Hennequin de Bruges « peintre du Roy » exécuta les pourtraictiires et patrons (2). Pour s'aider dans cet immense travail, il eut entre les mains plusieurs commentaires de X Apocalypse , abondamment pourvus de minia- tures, dont la plupart furent simplement agrandies à la dimension voulue. aU Apocalice en français, toute fi guidée et historiée et en pj'ose » de la bibliothèque de Charles V, lui fut certainement iirêtée. Une note, datée de i38o, en marge de l'inventaire de i373 en donne la certitude : « le Rojy Va baillée à AI. d'Anjou pour faire son tapis ». On écrit encore, en i4ii5 cette autre annnotation : « lequel livre feu le Roj' Charles bailla à M. d'Anjou pour faire son beau tapis (3) ». Ce précieux manuscrit appartient aujourd'hui à la biblio- thèque nationale ; il vient d'être reproduit en phototypie par la Société des Anciens Textes, avec une savante dissertation de M. Delisle (4). L'artiste imita certainement aussi des miniatures, empruntées à d'autres manuscrits, notamment à ceux de la biljliothèque de Cambrai (5) et du Petit Séminaire de Namur (6). Chacune des six grandes pièces débute par un personnage plongé dans une profonde méditation (7), peut-être Louis I^"^ (fig- i)- H est assis sous un tabernacle d'architecture, dont la composition (i) Cette vaste salle avait 12 m. 3o de large et plus de 40 mètres de long. (2) Jean de Bandol, par B. Prost. Gazette des Beaux-Arts , 1892. (3) Ce beau manuscrit resta en Flandre plus de cent ans et revint au Louvre avec la bibliothèque de Louis de Bruges, seigneur de la Gruthuyze, en 1492. (4) L'Apocalypse en Français au xin= siècle. (Bib. Nat. Fr. 403). publiée i)ar AHL L. Delisle et P. Mever, Paris, Firmin Didot, 1901. Un volume in-8' et un album in-f. (5) Ms. n» 482. M. Delisle en donne une analyse p. lxxvwi. (6) M. Hell)ig, directeur de la Revue de l'Art Chrétien, Ta décrit dans le Beffroi, de Bruges, t. III , p. 33i-33.S. (-) Le costume i-l surtout la coiffure des grandes ligures est à ra|)pi-()(lu'r ocalypse, si abandonnée quelques années auparavant, devint l'objet de la curiosité et de l'enthousiasme des amateurs. On la tendit sur les cloîtres pour les processions mensuelles du Saint Sacrement. En i858, M. l'abbé Barbier de Montault en donna la description dans une brochure intitulée : Les Tapisseries du Sacre d'Angers. L. DE FARCY. — LES TAPISSERIES DE LA CATHÉDRALE d' ANGERS l36y A cette occasion, Ms'' Angebault écrivit à ce savant auteur (i) : « . . . C'est avec grand plaisir que je verrai votre travail sur nos précieuses tapisseries. Je les ai sauvées du naufrage. Après les avoir rachetées , je les ai données à la Cathédrale. Mais il faut j^endre justice à M. l'abbé Joubert ; sans lui, ce pauvre Moïse aurait été étouffé. Il en a pris soin comme la princesse égyptienne, et lui a sauvé la vie. Il vous appartient maintenant de le montrer au peuple de Dieu et de l'entourer des prodiges de la science. y> Voici une des lettres de l'ablié Joubert à M. Godard-Faultrier (F archéologue angevin bien connu et l'éminent directeur du Musée Saint- Jean pendant de longues années). Elle peint son auteur sur le vif. Il l'écrivit le 5 juin i858 : Monsieur , L'intérêt que vous portez à nos tapisseries m'eng-ag-e à vous prier : 1° De venir encore voii* une fois les 89 tableaux de l'Apocalji^se (exposés sous les cloîtres), avant que je les enlève pour les remplacer par les N'-^ !^o à 76. Qp De parcourir chaque numéro i à Sy, la notice à la main, puis de relire chez vous quelques pages de la préface que Bossuet a mise en tête de son beau commentaire sur l'Apocahiise... 3"^ De faire connaître dans im article ad hoc comment du xiv au XV® siècle on a su rendre avec lidéUté les visions de l'apôtre samt Jean... Ce faisant, vous aurez aidé à la restauration... En 1864. M. de Joannis publia un album de 78 planches in-f", intitulé : ce Les Tapisseries de V Apocalypse ». C'était plus qu'il n'en fallait pour attirer l'attention des amateurs, qui purent en admirer des spécimens aux expositions successives de Paris. Enfin, en 18-0, M. l'abbé Joubert eut la joie de voir Y Apocalypse reprendre sa place d'honneur dans la nef et les transepts de la cathédrale, où elle figura pour la première fois le jour de l'entrée solennelle de M^'" Freppel. Classée au nombre des Monuments historiques de l'État, V Apo- calypse, après un rapport de M. de Guilhermy et une visite de M. Darcel, a été restaurée ; une allocation de 4-000 fr. fut accordée dans ce but. Enfin la fabrique y a largement contribué par une subvention de 5oo fr. pendant une trentaine d'années. Actuellement, la tapisserie comprend 71 tableaux entiers : il en manque 19, qu'il serait facile de refaire en agrandissant les minia- (i) Répertoire archéologique de l'Anjou, il-Co, p. 371 l368 ARCHÉOLOGIE tures du manuscrit de Cambrai. Pour rétal^lir V Apocalypse dans son état primitif, il faudrait encore tisser toutes les inscriptions aujourd'hui détruites. C'est assurément une coûteuse entreprise, mais aussi le complément de l'œuvre du chanoine Joubert est le seul moyen de rendre à l'Apocalypse ses dimensions et son antique splendeur. S'il ne m'est x)as donné d'entreprendre ce travail, je puis toujours exprimer ici le vœu qu'il soit exécuté plus tard. Y. Autres tapisseries acquises depuis 1849 Le zèle de M. l'abbé Jouljert ne se borna pas à la mise en état de Y Apocalypse . Il sut habilement profiter de lignorance de ses contemporains pour acquérir à vil prix et à pleins tombereaux une énorme quantité de tapisseries, qui passaient entre les mains des revendeurs sans trouver alors d'autre amateur que lui. Il recueillit ainsi les épaves de plusieurs séries remarquables, ayant jadis appartenu aux églises d'Angers ou des environs : la vie de saint Jean-Baptiste (xv siècle), la tapisserie de la Passion {com- mencement du xvi^ siècle) . les Anges portant les instruments de la Passion (fi g: jf) et M'"^ de Rohan jouant de l'orgue (fi g. 5), pro- venant du château du Verger, la vie de saint Saturnin, datée de loi'j, l'histoire de Tobie, celle de Samson, (travail de Bruxelles), l'inven- tion de la Vraie-Croix (i6i5), la vie de saint Maurille (1616). une autre vie de saint Saturnin de 1649. enfin un grand nombre de tapisseries d'Aubusson du xviii« siècle (sujets religieux, chasses ou simples verdures). Une tenture de saint Jean-Baptiste et de saint Jean l'Évangéhste, donnée vers 1760 par le chanoine Cassin à l'hospice Saint-Jean d'Angers, ayant été mise en vente par l'administration des Hospices en 1870, fut encore acquise par la fabrique. M. l'abbé Mâchefer avait remplacé l'abbé Joubert : il marcha sur ses traces et poursuivit avec zèle l'œuvre de son prédécesseur. J'eus la bonne fortune de le seconder, comme membre du conseil de fabrique, et dessinai en 1872 le carton du neuvième tableau de l'Apo- calypse, dans lequel il manquait un mètre carré, refait avec succès : il en fut de même du n° 86. En 1874 , lît fabrique fit restaurer avec le plus grand soin deux scènes de la vie de saint Maurille, de i4<>i, découvertes dans un grenier, à demi rongées des rats. La notice de M^'^ Barbier de Montaidt étant épuisée, j'en fis L. DE FARCY. — LES TAPISSERIES DE LA CATHÉDRALE d'aNGERS î36g imprimer une autre en 1875, plus détaillée : plus tard, deux autres plus complètes encore et illustrées de planches. Signalons quatre pièces, dignes d'intérêt, acquises en 1887 et années suivantes, La première, du xv*^ siècle, représente Notre-Sei- FiG. 4. FiG. gneur devant Pila(c\ la seconde, du commencement du xvi'' siècle, a 'pour sujet Isaac bénissant Jacob, la troisième comprend deux scènes de la i>ie de saint Florent, de iSa;^ ; enfin la quatrième, datée l3jO ARCHÉOLOGIE de 1619, paraît être la copie d'un tableau, La Madeleine aux pieds de Notre-Seigiieiir. Aujourd'hui le temps est passé pour faire des acquisitions de ce genre : il n'y faut plus penser. VI. Conclusion Les tapisseries de la cathédrale sont divisées en deux catégories. Les plus précieuses, réservées à l' intérieur du monument, y sont suspendues au niveau de la galerie du mois de mai au mois de novembre chaque année. Les autres servent à décorer à l'extérieur les murs de l'église pour les processions de la Fête-Dieu. Leur ensemble forme une collection pour ainsi dire unique, incom- parable, dit M. Guitïrey, pour l'étude de la haute lice. Elle permet de constater la transformation successive et la décadence de l'art de la Tapisserie du xiv« siècle jusqu'à la fin du xviii«. En effet, les personnages de l'Apocalypse se détachent merveilleu- sement de leur fond bleu ou rouge, comme ceux d'un vitrail. Les accessoires (arbres, plantes, meubles) sont traités sommairement, d'une façon plutôt conventionnelle . sans recherche de l'imitation de la nature, pour ne pas distraire le spectateur de l'action rendue par les personnages. Même parti pris que dans les peintures murales, les miniatures ou les verrières contemporaines. Le programme tracé à l'artiste est de décorer une surface plane : il reste dans le vrai et ne cherche pas autre chose. Trois ou quatre teintes lui suffisent par couleur pour rendre le mouvement des plis; grâce à des hachures s' avançant d'une teinte sur l'autre, il obtient un modelé suffisant dans ses draperies et un effet très satisfaisant. Il sépare les couleurs différentes par un trait noir ou brun très ferme, produisant la même netteté que les ploml)s d'un vitrail. Au xv^ siècle, l'amour du détail l'emporte sur la préoccupation de faire saisir avant tout l'action des personnages. On s'efforce d'intro- duire la perspective. Volontiers on s'ingénie à rendre l'intérieur d'un appartement, le paysage dans lequel se passe la scène historique, les lointaines perspectives. Nous en avons des spécimens dans la tapisserie de Notre-Seigneur devant Pilate , dans celles de saint Maurille, de saint Martin et de saint Jean-Baptiste. Au XV16 siècle, cette recherche des détails s'accentue encore ; on multi])lie les personnages dont les costumes sont chamarrés des cou- leurs les plus variées, à ce point qu'ils produisent une confusion ÉM. GILLES DEPERRIÈRE. — UTILISATION DE LA TOUR SAINT-AURIN iS^I insupportable, comme dans la tapisserie de la Passion. Le dessin se perfectionne sous Ihabile direction de certains maîtres, comme dans Yhistoire de saint Saturnin, dont les cartons ont été peints par un artiste florentin du nom de Polastron ; mais la tapisserie perd son véritable caractère et devient tableau. Au xvii« siècle, le coloris est souvent fade et monotone. Le jaune, le gris, le rose éclairé par du jaune dominent; à peine si le bleu vient ici ou là enrichir les vêtements des personnages : la tapisserie de Y Invention de la Vraie-Croix, de la vie de saint Saturnin nous montrent la décadence sous ce rapport. Quelle confusion aussi dans ces belles pièces de Bruxelles représentant F histoire de Sanison. Sous la direction de Lebrun, voici venir le style classique, tous les personnages sont costumés à la grecque ou à la romaine. Adieu les jolis détails de costume, de mobilier, darmures, qui faisaient des pièces de tapisserie du moyen âge et même de la Renaissance une mine si féconde de renseignements au point de vue archéologique. On ne se donne pas toujours la peine de faire des cai-tons spéciaux pour les tapisseries ; on se contente de copier des tableaux de Jou- venet ou autre maître de l'époque. En somme, il n'est pas étonnant qu'à la fm du xviii'^ siècle on se soit désaffectionné des tapisseries, qu'on reléguait, nous dit Mercier dans son tableau de Paris, dans les galetas : elles avaient perdu insensilîlement leurs qualités primi- tives, dont il est si facile d'apprécier le charme, quand on étudie sans parti pris la collection des tapisseries de la Cathédrale d'Angers. M. Emile GILLES DEPERRIÈRE à La Graiiji:o, commune de La Possonnière (Maine-et-Loire) UTILISATION DE LA TOUR SAINT-AUBIN A UN SERVICE PUBLIC PAR LA VILLE [:29.able aux « innombrables maraîchers, horticulteurs et agriculteurs dont les exploi- « tations avoisinent Angers. » Pei'sonne ne voudrait mettre en doute la science et l'habileté des ingénieurs qui seraient chargés de construire le réservoir et le Conseil d'arrondissement d'Angers, pas plus que l'auteur de cette note, encore moins que qui que ce soit. Les questions de solidité, d'agencement du réservoir carré, rond ou annulaire, pour permettre à l'industriel fabricant de plomb de chasse installé en ce moment dans la Tour de continuer sa fabri- cation, la tuyauterie, la robinetterie, la machine élévatoire destinée à monter l'eau pour remplir le bassin, la canalisation des eaux d'une ville, la vidange de trop-plein, rien de ces objets ne peut être mis en discussion; nul doute qu'entre les mains de nos maîtres en l'art de bâtir que sont nos ingénieurs tout serait parfait et ne permettrait pas le moindre critique. Mais, l'énumération même de tout cet appareil ne vous effraie-t-il pas? Un monument tout d'élégance, malgré la puissance de ses formes, et sa robuste solidité, est-il fait pour un pareil service? Une cage dorée convient-elle à un objet vulgaire? Un édifice ancien, dont rien ne pouvait réparer la perte ou même guérir la moindre blessure grave reçue, peut-il être inconsidérément exposé à des risques ? Une autre solution serait préférable, mais, si l'on tient à utiliser un monument déjà construit, n'a-t-on pas, à une différence de niveau insignifiante et à courte distance, une tour du vieux château à sa disposition? Là, pas d'objection relative à la solidité. Pas d'élégances auxquelles rien puisse nuire, un monument construit pour la guerre, pour rece- voir des chocs ou des instruments pour en produire. EM. GILLES DEPERRIERE. — UTILISATION DE LA TOUR SAINT-AURIN l373 Les anciens mâchicoulis, aujourd'hui détruits, n'étaient-ils pas prévus pour vomir les pierres, la poix brûlante et le reste, amassé dans les flancs de l'édifice ? N'avait-on j^as, dans les couverts intérieurs, les marmites, le combustible pour chauffer les matières de combat ? Les créneaux n'abritaient-ils pas pierres et pesants débris et, plus tard, canons et lourdes coulevrines ? Eh bien, là où se trouvaient, dans un édifice construit à cet office, de lourds et dangereux matériaux destinés à répandre la mort, ne peut-on aujourd'hui disposer un matériel ni plus ni moins lourd, moins dangereux, mais destiné à donner la vie en facilitant l'appli- cation des prescriptions de l'hygiène? ce qui aurait en plus le mérite, une destination éminemment utilitaire étant trouvée au monu- ment, d'en assurer la conservation. On ne peut que frémir en pensant aux conséquences de l'installa- tion d'un réservoir dans la Tour Saint-Aubin; car, si cette installa- tion peut être imaginée parfaite , il est des chances de dégradation et de destruction auxquelles il ne pourrait être paré dans les condi- tions qui se présenteraient. En effet, les effets de la gelée, auxquels on doit ajouter ceux de l'évaporation de l'eau du réservoir dans une salle voûtée, aérée sans doute par des fenêtres , mais des fenêtres qu'il ne serait que vulo-ai- rement prudent de clore pour ne les ouvrir qu'en temps utile, ceux de la condensation de la vapeur d'eau atmosphérique sur toutes les parois , tant celles du bassin lui-même que des murs sur leurs faces intérieures, demeurent inévitables. Sans doute que le bassin pourrait être recouvert entièrement de j)laques de liège , pour éviter le résultat de l'eau à la moindre varia- tion de température, mais ces plaques de liège recouvrant les parois extérieures du bassin, dissimuleraient sa surface propre et permet- traient à telles misères destructives de la matière utilisée à sa cons- truction de se produire d'une manière occulte, pour, à un moment donné , permettre un cataclysme dont nos neveux ne nous pardon- neraient pas d'être les trop légers auteurs ! Est-il utile que je mette en comparaison le service météorologique avec celui des eaux? je ne le crois pas. L'un n'utilise que des objets incapables de faire courir le moindre danger à un édifice quelconque , il ne nécessite la présence d'aucun ouvrier armé de matières lourdes ou dangereuses comme celles employées par les plombiers qui ne peuvent travailler qu'en ayant à leur disposition feu. acides, sels sensibles à l'humidité, etc., etc. l374 ARCHÉOLOGIE Puis, avec le service météorologique, la fa])rication du plomb de chasse en ce moment installé dans la tour peut se continuer sans l'ombre d'une difficulté. Il suffirait de laisser subsister le cylindre de clmte au travers de la salle voûtée. Je clos, messieurs, en vous sollicitant de demander l'application de la loi sagement édictée pour sauver les monuments historiques de la destruction et vous priant de faire vôtre le vœu du Conseil d'Arrondissement d'Angers. M. Emile GILLES DEPEMIERE à La Grange, commune de La Possonnière (Maine-et-Loire) MODIFICATION D'UNE PARTIE DU PLAN DE LA VILLE D'ANGERS — Scance du lo août — J'ai l'honneur de mettre sous les yeux du Congrès un plan que les circonstances m'ont permis d'étudier et de présenter à M. le Maire d'Angers, en mars dernier 1908, à la suite d'un long entretien auquel M. le Maire m'avait convié, pour lui donner mon avis, en ma qualité de président de la Société des Amis des Arts d'Angers, sur l'utilisation des bâtiments dont la ville peut disposer. Ce plan a été soumis, le i3 avril 1908, à l'examen de la Commission de A^oirie, qui m'a fait appeler et a bien voulu m'entendre. Il sera, je l'espère, l'objet de nouvelles études. Aujourd'hui même, ce matin, durant que je parle dans cette enceinte, MM. les ingénieur» procédant à des relevés rue Talot, je viens, à l'instant, de m'entre- tenir avec eux et je ne désespère pas du succès prochain, au moins de quelques-unes de mes propositions, surtout si vous voulez bien leur faille bon accueil, leur donner la notoriété en publiant mon plan avec cette note dans le livre qui sera destiné à conserver la trace des travaux du Congrès. Deux points ont fixé mon attention dans l'établissement de mon l)rojet. I'' Il me semble acquis que la Compagnie des chemins de fer d'Orléans, procédant, d'une part, en ce moment, à d'importante acquisition de terrains aux abords de la caserne du Génie et, de l'autre, étudiant la reconstruction de son hall des messageries, ne EM. GILLES DEPERRIERE. PLAX DE LA VILLE D ANGERS 1375 modifiera pas l'emplacement du rayon actuel connu sous le nom de gare Saint-Laud. 2° J'estime qu'une ville peut utilement avoir des vues d'ensemble et des projets de longue haleine, dont la complète exécution doit nécessiter des années; je croirais lamentable d'engager l'avenir en adoptant des plans incomplets , susceptibles , par des impossibilités fâcheusement créées, d'arrêter le mouvement des améliorations réa- lisables avec le temps. Le souvenir des Girault et des Montrieux auxquels Angers doit le Mail, la place de Lorraine, la place du Ral- liement, la rue d'Alsace, etc., etc., tous projets grandioses, qui sont exécutés et font honneur à ceux qui les ont conçus comme à ceux qui les ont adoptés, est vivant parmi nous. Mon plan comprend : Le prolongement en droite ligne de la rue des Lices jusqu'à la gare des marcliandises (fig- i) ; '/////////i irs IS03 \-la^ de i3 Viftç 0-/7 FiG. 2. donnant quand même satisfaction à l'esthétique et faisant entrer Angers dans une voie ingénieuse et nouvelle, en adoptant les con- ceptions originales d'un jeune maître qui voit les boulevards de l'avenir avec une partie des habitations en bordure laissant la vue complète de leur architecture , alternant avec des groupes d'arbres. Aux deux plans i et 2, j'ajoute la reproduction mécanique de trois photographies prises très habilement du haut de la ïour Saint- Aubin par M. Cauville. et qui font la preuve de la rigoureuse exactitude 8;* iSjS ARCHÉOLOGIE des alignements que je donne, pour les prolongements du Mail de la Préfecture et de la rue des Lices . comme de la possibilité de la con- servation de l'ancienne église Saint-Eloi et de l'ancien pont qui relie cette dernière aux bâtiments des Musée et de la Bibliotlièque. La photographie donnant la rue des Lices englobe une partie suffi- sante du jardin fruitier et espaces avoisinant à l'ouest, pour qu'il soit permis à son aspect de se rendre compte de ce que deviendrait l'ensemble des monuments que je crois pouvoir désigner sous le nom d'Acropole artistique d'Angers. A observer que. s'il était heureusement donné suite au projet, par l'adoption du plan n" i comme du plan n" 2. notamment pour les rues de la Gare et Hoche à transformer en boulevards et la place de la Visitation à planter, une occasion serait offerte à l'initiative privée de doter notre ville d'immeul)les particuliers vraiment modernes, comme elle n'en possède pas encore, avec vastes escaliers et ascen- ceurs. desservant des appartements chauilés et éclairés comme cela se pratique partout aujourd'hui. Cette heureuse résolution, devenue un fait accompli, arriverait d'autant mieux à son heure, que ce quartier va se trouver abandonné par le petit commerce qui entoure les casernes et dont elles sont la vie, qui émigrera fatalement avec elles. Il y aura donc à pourvoir à une nouvelle utilisation de ces immeubles al^andonné et des terrains libres, afin de les approprier pour des besoins nouveaux, comme le permettent mes deux projets. M. le Chanoine F. POTTIER Président de la Société Archéologique de Tani-et-Garonne, à Montauban FOUILLES ENTREPRISES EN 1902-1903 DANS L'ÉGLISE ABBATIALE DE SAINT-PIERRE-DE-MOISSAC fgiSj — Séance du lo août — L'Association française pour l'Avancement des Sciences a bien voulu contribuer aux dépenses faites pour les fouilles de Saint -Pierre- de-Moissac (i). Chargé de la direction des recherches, je dois au Con- grès un compte-rendu que je m'efforcerai de rendre rapide. (i) Ces fouilles avaient été entreprises grâce à un secours accordé par le Ministre de rinstructiou publique et des Beaux-Arts. F. rOTTIEU. — EGLISE ABBATIALE DE SAIXT-PIERRE-DE-MOISSAC i379 A'isitOe par les membres du Congrès en 1902, l'abbaye de Saint- Pierre-de-Moissac (Tarn-et-Garoiine) est incontestablement l'un des monuments les plus remarquables du midi de la France. Son cloître de l'an iioo, remanié au xiii^ siècle, est debout et, à l'est, des galeries, des chapelles, la salle capitulaire. la sacristie sont conservées. Mais l'édifice important est l'église aux vastes proportions. Eglise du xv<= siècle. Église à coupole. Piliers et murs dé- couverts en 1903. i^ r-1 bl a M t-= FiG. I. — Plan de réglise abbatiale de Moissac. Son porche à deux étages est célèbre par les sculptures de son portail et les dispositions de ses voûtes. Elevé probablement de 1095 à iii5. il présente des marbres bien antérieurs et, en particu- lier, le superbe linteau orné de rosaces. En pénétrant dans la nef, on voit encore un puissant arc-doulîleau, le départ d'autres arcs seml^lables et de pendentifs destinés à sup- porter des coupoles, en file, comme il en est à l'ancienne cathédrale de Périgueux, à Cahors, à Souillac et bien ailleurs. Les murs con- temporains de cette église existent latéralement dans le bas; ils furent percés de fenêtres en plein cintre murées aujoui'dhui. l380 ARCHÉOLOGIE La nef, divisée en travées , le chœui" et le chevet ont été refaits au xv^ siècle et ont des voûtes d'ogive. Tel est l'aspect de l'église actuelle; il restait à recherclier sous le pavé les traces que pouvaient avoir laissés les édifices antérieurs et quelle était la disposition du chœur de l'église à coupole. L'histoire nous apprend, en effet, que, sous Louis le Débonnaire dans le monastère fondé, au dire de la tradition locale, par le roi Glovis et ravagé par les Sarrasins, une église fut réédifiée en 835. Elle s'écroula en io3o et fut remplacée par celle dont la date de consécration (io63) est indiquée par une inscription. Voici le résultat des fouilles non encore complètement terminées. Il a existé une église romane antérieure à l'église à coupole (qui probablement n'a jamais été terminée dans les données périgour- dines) : les bases de forts piliers de 2"%8o ont été mises à découvert au nombre de neuf jusqu'à présent, elles indiquent trois nefs; quatre d'entre elles devaient, à la croisée du transept, porter un clocher dont il est souvent fait mention dans les archives (fig- i). Les piles sont séparées par un espace de sept mètres environ et les collatéraux étaient d'une grande étroitesse. Au chevet , sous le sol du passage qui règne entre le mur à pans coupés, du xv^ siècle, et l'élégante clôture du sanctuaire élevée au commencement du xvii^ siècle, nous avons découvert une sorte de couloir formé de deux murs semi-circulaires. Ce déand)ulatoire rappelle celui qui a été découvert par M. de Farcy dans les fouilles si heui^eusement entreprises et si haljilement conduites dans le sous-sol de la cathédrale d'Angers. M. de Lasteyrie a pensé avec raison que ce couloir étroit avait pu conduire à une confession dont nous n'avons, toutefois, point retrouvé la trace. L'appareil, épais et de forme allongée, semble indiquer que cette partie de l'édifice remonte à l'église carlovingienne. Les fouilles n'ont amené la découverte d'aucune sépulture impor- tante ni d'aucun objet de valeur; seulement des carrelages émaillés du xiii« siècle , des dallages en marbre noir de forme octogonale et quelques fragments de sculpture, soit sur marbre blanc, soit sur pierre , par exemple des entrelacs en méplat , et , de plus , substruc- tions gallo-romaines. Il restera à s'assurer de rinq)orlance des transepts, à constater si ces absidioles ne s'ouvraient pas au levant et si une confession n'existait pas au chevet. CH. COTTE. — U>E FOSSE BUCHER DU DÉPARTEMENT DE VAUCLUSE l38l M. Gh. COTTE à Marseille SUR UNE FOSSE BUCHER DU DÉPARTEMENT DE VAUCLUSE — Sààjirc du lo août — On signale fréquemment des fosses renfermant des cendres ou d'autres traces de foyers, de destinations et dâg^es très divers. Aussi, m'occupant d'études préhistoriques, j'eus, en 1902, la curiosité de fouiller une fosse de ce genre située dans le Yaucluse. Mes recherches m'ont prouvé que les restes étudiés sont relative- ment récents; néanmoins, il me parait intéressant de faire à ce sujet une communication au Congrès. En suivant la petite route de Saint-Martin de la Brasque à la Tour d'Aiguës et à 200 mètres du premier village, on pouvait remarquer , dans le talus soutenant une vigne , une large zone grise ou blanchâtre comprise entre deux murailles qui s'enfonçaient sous le champ, suivant une direction oblique à la route. Cette fosse avait été découverte lors de l'élargissement de la route qui en a fait disparaître une partie. Auparavant, elle était dissimulée par un mur de soutènement. Les ouvriers avaient trouvé vers la base des couches archéologiques quelques ossements et un fragment d'instrument qu'ils comparaient à un gril ; il était composé de lames de fer parallèles entre elles, fixées à une autre lame perpendiculaire. Cet objet a été égaré. Grâce à l'amabilité de M. Névière, propriétaire du champ, j'ai pu étudier ce gisement. J'ai fouillé la fosse, couche par couche, sur une aire de 2 m. 4© de longueur sous la vigne et une largeur de 3 m. 90 comprise entre les deux murailles; en outre, j'ai prolongé cette fouille par une galerie de 3 m, 80 de longueur en suivant la muraille N.-O. au niveau du sol de la fosse. Sauf pour les couches superficielles, j'ai tamisé soigneusement toute la terre extraite. Voici quelle est la disposition de cette fosse : Un grès (aafre), assez compact dans les couches profondes, plus tendre dans les couches superficielles , forme à cet endroit les flancs l382 ARCHÉOLOGIE du coteau ; son pendage est vers le ravin ; il est recouvert par une épaisseur variable de terre arable. C'est dans la terre, le grès tendre et le grès compact, qu'une fosse a été creusée ; elle mesurait : 3 m. 90 de largeur. 1 m. 3o de profondeur moyenne, et 8 m. 5o de longueur au minimum, y compris la partie détruite lors de l'élargissement de la route. Au niveau de la terre et du grès tendre on a élevé des murailles repo- sant sur le grès compact ; les pai'ois au niveau de ce grès ont été taillées très irrégulièrement, de sorte que cette roche tantôt forme saillie dans la fosse, tantôt se dérobe presque sous la muraille. Le fond de la fosse est incliné d'une façon générale de l'angle S. à l'angle N. ; il forme dos d'âne dans le sens de la longueur et ménage pi-ès des parois deux rigoles ; celle de la paroi N. -O. est la plus profondément marquée. Dans l'angle O. de la fosse le fond se relève brusquement sur une hauteur de o m. 3o environ et forme une sorte de terrasse de i m. 80 de longueur. Sur cette partie en rehaut étaient placées de nombreuses pierres posées de délit paral- lèlement à la muraille N.-O. et si étroitement juxtaposées que la terre n'avait pu s'insinuer entre certaines d'entre elles. La plus grosse de ces pierres pèse une quarantaine de kilogrammes. Les murailles de la fosse sont très inégales. La muraille S. E. a une épaisseur moyenne de o m. 3(3 ; elle est d'une construction très défectueuse. La muraille N.-O., d'une épaisseur moyenne de om. 45, plus soignée que la précédente , présente , vers la partie supérieure , quelques assises dont la régularité rappelle, de loin il est vrai, l'appareil romain. Ces murailles ont été bâties avec de la boue. Au sommet de la muraille N.-O., une pierre, demeurée seule d'une assise disparue, atteste que la fosse est demeurée longtenq)s ouverte ou qu'elle a été comblée et rouverte à diverses reprises ; au reste des pierres assez nombreuses, qui se trouvent à divers niveaux dans la fosse, outre les pierres de l'angle O. déjà indiquées, sont situées principalement près d^ murailles dont elles semblent avoir été détachées. Dans la plus grande partie de la fosse, sauf dans l'angle O. où se trouvent les pierres juxtaposées , une couche de cendres peu épaisse repose immédiatement sur le fond de grès ; ce dernier est fortement calciné. Au-dessus se trouvent alternés des lits de terre grise, de cendres et de matières charbonneuses. Ces lits régnent jusqu'au niveau du sommet des murailles, soit sur une hauteur moyenne de 2 m. 3o. L'épaisseur totale des couches de cendres pures est d'en- viron o m. 5o; l'une d'entre elles, à elle seule, a une épaisseur de CH. COTTE. — UXE FOSSE BUCHER DU DÉPARTEMENT DE VAUCLUSE l383 o m. 20. La terre grisâtre surmonte la dernière couche de cendres. Il est à observer que la couleur grise de la terre est d'autant plus iwononcée que Ton considère un lit plus élevé. Il semblerait qu'à chaque nouveau foyer on enlevait la terre recouvi-ant les restes du bûcher précédent pour les rejeter ensuite sur les cendres du nouveau; et ainsi, la terre étant toujours extraite avec des portions du bûcher antérieur, devenait de plus en plus grise. Les lits de cendres vont en se relevant près des murailles et sétendent sur toute la surface de la fosse pour s'arrêter cependant à o m. 20 environ des parois. Les couches inférieures se relèvent surtout dans r angle O. pour recouvrir directement les pierres juxtaposées citées plus haut. Malgré le tamisage soigneux des terres, je n'ai pu recueillir qu'un très petit nombre de débris. Les couches superficielles , remuées par la culture , renfermaient des fragments de poterie actuelle. Dans les couches immédiatement sous-jacentes, j'ai ramassé un fragment de poterie d'aspect franchement néolithique et un morceau de fine lame en silex blond. Ces terres proviennent évidemment des parties supérieures du coteau lentement éboulées. Dans la fosse j'ai recueilli. : des débris de briques ; des fragments de poteries à vernis variés, spécialement à vernis jaune avec taches brunes ayant un reflet métallique ; des ossements non caractérisables d'animaux présentant souvent des traces de calcination ; des coquilles d'amandes et quelques objets en fer. Ces objets sont : trois clous forgés de diverses grosseurs , une moitié de fer à cheval , une sorte de petite boucle que l'oxydation m'a empêché d'étudier et une pointe de trait. Cette pointe est l'objet le plus intéressant; c'est une sorte de carreau d'arbalète, mais sa tète trapue est triangulaire; sa longueur totale est de o m. o55 (fig- i)- FiG. I. Citons pour mémoire un tibia de mouton coupé et arrondi aux deux extrémités qui a pu servir de manche et une partie d'un galet l)lat qui présentait comme un godet large et peu protond dont il serait téméraire, je crois, d'affirmer l'origine naturelle ou industrielle. l384 ODONTOLOGIE Conclusions. — Il me paraît dilîicile d'indiquer la destination de cette fosse. Les résultats me conduisent plutôt à exclure quelques hypothèses qu'à en former. Le .soin apporté à la construction, la faible quantité de débris trouvés, la régularité des foyers empêchent d'v voir une fosse à ordures. L'époque récente des objets recueillis empêche également de croire à des bûchers funèbres ou religieux. Tout au plus puis-je trouver des rapprochements avec d'autres amas de cendres, moins importants, déjà signalés. La fosse étudiée se trouve au pied du Castellas , mamelon dominé par les ruines d'un château qui dut être dans sa splendeur au xi'= siècle. Sur les flancs de ce coteau existent encore un certain nombre de grottes artifi- cielles creusées dans le safre, datant proba]>lement du moyen âge et à l'entrée desquelles on trouve des poteries vernies semblables à celles de la fossç que je viens de décrire. Il semble donc possible de rapprocher cette fosse de l'amas de cendres des grottes de Calés (Bouches-du-Rhùne), cité par Saurel lors du Congrès Archéologique de France de 1882 (p. i32 s.). Ces grottes sont aussi creusées dans le safre ; on y a trouvé des monnaies de toutes les époques. Rappelons en passant qu'au même Congrès on a signalé dans le Vaucluse des silos avec cendres au fond. M. le D^ GODON Directeur de l'École dentaire de Paris L'ENSEIGNEMENT PRÉPARATOIRE DE L'ETUDIANT EN CHIRURGIE DENTAIRE CONSIDÈRE COMME PREMIÈRE ANNÉE D'ETUDES DANS LES ECOLES DENTAIRES [6i--6(o:)] — Séance du 5 août — LE P. C. N. DENTAIRE Tous ceux qui s'occupent d'enseignement dentaire ont été amenés à i^econnaître qu'il y aurait avantage à augmenter d'une manière spéciale, en même temps que l'habileté manuelle, les connaissances scientifiques préliminaires que l'étudiant en chirurgie dentaire doit posséder en physique , en chimie, en histoire naturelle; à systéma- tiser, en un mot, l'enseignement préparatoire du chirurgien-dentiste. D"" GODO'V. — l'Étudiant en chirurgie dentaire i385 Le certificat d'études dit P. C. N. (physique, chimie, histoire natu- relle), institué en France dans les Facultés des Sciences pour les étudiants en médecine, nous avait semblé de nature à donner satis- faction à ce desideratum, d'autant plus que le certificat d'études primaires supérieures permet Fadmission aux études du P. C. N. , comme nous l'indiquions dans une communication précédente (i). Mais le programme de cet enseignement est très scientifique, parce qu'il prépare également à la licence ès-sciences ; par suite il n'est pas assez spécial, même pour les étudiants en médecine, dit-on ; de plus, il y manque les travaux pratiques techniques reconnus néces- saires pour l'étudiant en dentisterie. Enfin, nous avons pu nou& convaincre qu'il ne serait pas jiossible d'obtenir de l'Administration de l'instruction publique qu'il fût suffisamment modifié pour donner satisfaction aux desiderata de la profession dentaire. Aussi nous nous sommes demandé si f on n'obtiendrait pas un meilleur résultat en créant, pour les étudiants en chirurgie dentaire, un véritable P. C. N. spécial, comprenant une partie scientifique spéciale et aussi une partie technique, soit un P. C N. dentaire, ou P. C. N. à l'Ecole dentaire. Il suffirait pour cela de transformer la première année scolaire dans les écoles qui ont adopté la scolarité de quatre années en une véritable année préparatoire de P. C. N. dentaire, organisée spécia- lement pour les dentistes avec la partie scientifique complétée par une partie artistique et manuelle d'après le programme exposé ci-dessous. Le Congrès dentaire international de Paris 1900 a indiqué dan& un de ses vœux ce que devrait être l'éducation préhminaire du chirurgien-dentiste : « Une instruction littéraire avec la connaissance de deux langues vivantes ; « Une instruction scientificpie ; « Une instruction artistique et manuelle (2). » La Fédération dentaire nationale française a adopté le même vœu dans la séance du 24 "^^i 1902, dans les termes suivants : « L'instruction générale nécessaire à fétudiant en dentisterie, avant d'être admis à suivre l'enseignement professionnel, doit com- prendre : (i) Voir communication au Congrès des sciences médicales de Madrid, ujoî, sur l'enseignement dentaire. (2) Voir I" volume du III» Congrès dentaire international de Paris en 1900. l386 ODONTOLOGIE « 1° Une instruction littéraire avec la connaissance de deux langues vivantes ; « 2° Une instruction scientifique élémentaire; « 3° Une instruction artistique et manuelle (i). » ' La Fédération dentaire internationale, dans le programme d'en- seignement qu'elle a adopté dans ses trois sessions de Cambridge, Stockholm et Madrid, a indiqué à peu près les mêmes obligations (2). Il nous semble inutile de revenir sur les arguments que l'on a fait valoir pour démontrer la nécessité dune éducation artistique et manuelle préparatoire pour le chirurgien-dentiste. La cause paraît depuis longtemps entendue sur ce point dans tous les pays, comme nous l'avons montré dans les communications pré- cédentes. Rappelons pourtant l'intéressante communication du Pr. Guilford à la session de Stockholm en 1901. (Voir L'Odontologie, iQoS.) On aurait souhaité que l'éducation préliminaire spéciale tout entière de l'étudiant chirurgien-dentiste pût se faire au point de vue artistique et manuel, comme au point de vue scientifique, soit pen- dant ses études classiques, soit après, mais avant son entrée à l'École dentaire, comme cela avait lieu anciennement avec l'appren- tissage. Il y a à cela de telles diflîcultés résultant du temps que prennent les études classiques et les nécessités de cette prépara- tion sont si spéciales qu'après avoir envisagé les divers procédés nous avons été amené à proposer la transformation de la première année des Écoles dentaires en année d'enseignement préparatoire •spécial, ce qui nous paraît être conforme à l'évolution actuelle des idées et d'une réalisation plus pratique! Il n'en restera pas moins très utile pour l'élève qui désire devenir un bon chirurgien-dentiste de commencer, lorsque cela est possible, sa préparation artistique et manuelle pendant ses études classiques . s'il doit les terminer à 18 ans, ou s'il doit les terminer à i(5 ans, entre la fin de ces études et son entrée à l'École. Nous allons indiquer sommairement comment les choses se passeraient dans ces condi- tions. (Voir tableau ci-après page i3g5.) (i) Voir compte rendu de la Fédération dentaire nationale (session de Paris) looa. (2) Voir compte rendu de la Fédération dentaire internationale (session de Madrid lyo'i, D' Roy, L'Odontologie, i9o3.) D'' GODON. — l/ÉTUDIANT EN CHIRURGIE DENTAIRE l'iS^ ÉDUCATION PRÉPARATOIRE DU CIIIRURGIExX- DENTISTE PENDANT SES ÉTUDES CLASSIQUES TERMINÉES A i8 ANS. (Travail iiiaiiuel au Lycée.) Nous devons constater que les réformes apportées récemment dans renseignement secondaire en France viennent appuyer singu- lièrement notre thèse et faciliter la mise en pratique des vœux du Congrès de 1900. Ainsi, au point de vue littéraire et scientifique, la réforme du baccalauréat en quatre catégories permet la préparation rationnelle du chirurgien -dentiste. Il lui suffît de se préparer au baccalauréat sciences et langues vivantes pour réaliser la i'« et la i2« partie du vœu en question (i). Quant à la partie du vœu relative à renseignement artistique et manuel, elle trouve déjà son appHcation dans l'enseignement pri- maire supérieur, où les élèves sont initiés aux travaux manuels; il va bientôt en être de même dans renseignement secondaire, comme nous le montre le rapport suivant (2) que nous vous proposons d'appuyer et qui a été déposé par le Vice-Recteur de l'Université de Paris, M. Liard. au Conseil supérieur de l'Instruction publique à la session de juillet 1903. Je vous en cite quelques extraits. (1) Voir rapport de M. Papot, à ^routaiiban. Bulletin de la F. D. N., n° 3, p. 22. (2) La Si'ftion (rOdontolog-ie de TA. F. A. S. et la Fédération dentaire nationale ont adopté, à la suite de cette coninmnication, le vœu suivant : VŒU SUR l'enseignement manuel La Section d'Odontolog^ie de l'Association française pour l'Avancement des Sciences dans sa séance du 5 août ioo3, session d'Ang-ers ; Considérant : 1° Que M. le Vice-Recteur de l'Académie de Paris vient de déposer au Conseil supérieur de Flnslructiou publique un rapport tendant à l'organisation du travail manuel dans les lycées et collèges ; 2» Que les études dentaires nécessitent de la part de l'étudiant en dentisterie un grand développement de son habileté manuelle qui ne saurait être commencé de trop bonne heui'e ; 3° Qu'un enseignement artistique et manuel a été constamment réclamé dans le pro- gramme des études préliminaires de l'étudiant en dentisterie (voir vœu n» : du Congrès dentaire international de Paris , 1900) ; Félicite M. le Vice-Recteur de l'Université de Paris d'avoir proposé d'acl.joindre un programme d'enseignement manuel au programme d'enseignement secondaire ; Émet le vœu que cet enseignement manuel soil organisé le plus tôt possible dans les lycées et collèges et que l'attention des .jeunes gens qui se destinent aux études dentaires soit appelée sur l'utilité plus spéciale pour eux de cet enseignement manuel ; Prie M. le Président de l'Association de transmettre le présent ordre du jour à M. Liard, Vice-Recteur de l'Académie de Paris. (Ce vœu, n'ayant pas été transmis au Conseil, n'a pu être soumis au vote de l'Assemblée générale.) [Note du Secrétariat]. l388 • ODONTOLOGIE Le traçail manuel au îj'cée a La nueslion de rorganisatiou du travail manuel dans les lycées et « coUèg-es est en bonne voie d'aboutissement. « Le Vice-Recteur de l'Académie de Paris vient d'adresser au ministre « de l'Instruction j^ublique son avis nettement favorable. « Rai>pelons que l'année dernière, déjà, plusieurs meni])res du Conseil « supérieur de l'Instruction publi(iue avaient déposé l'important vœu que « voici , relatif à l'organisation du travail manuel : « Considérant que l'adresse du corps et la finesse des sens ne sont pas « des o])jets négligeables dans une éducation vraiment complète; « Que non seulement ces qualités ont mie importance pratique de pre- « mier ordre dans la vie et dans nombre de professions , même libérales : « mais que, d'après de nombreuses observations psychologiques précises, a elles vont de pair avec le développement de l'intelligence ; « Qu'en effet les travaux manuels exercent les facultés d'observation, « d'imagination et d'invention, de combinaison et de réflexion; « Que , plus particulièrement , ils familiarisent l'esprit avec nombre de « lois géométriques, mécaniques ou physiques élémentaires et que l'ins- « truction ainsi acquise est mie utile préparation et une ]>ase presque « nécessaire de l'enseignement scientifique proprement dit : « Que, indépendanmient de ces différents avantages pratiques ou intel- « lectuels , il n'est peut-être pas sans quelque intérêt moral de prénumir « les jeunes gens, par la pratique du travail manuel, contre des préjugés « encore trop réi>andus qui le déconsidèrent au profit trop exclusif de la « vie purement inteUectuelle ; « Que, enfin, la pratique des travaux de ce genre peut fournir à nos « élèves ime distraction à la fois hygiénique et intelligente, qu'ils seraient « heureux de trouver pour varier leurs récréations; « Emettent le vœu que l'administration veuille bien étudier, favoriser « et provoquer l'organisation, par les proviseurs et principaux, dans « tous les cas où cela sera possible, d'ateliers de travail manuel où les « élèves de leurs étal>lissements auraient accès sous des conditions déter- « minées. » La section permanente du Conseil supérieur ayant émis l'avis qu'il y avait lieu de mettre la question à l'étude , le ministre pria le Vice- Recteur de l'Académie d'en saisir les assemblées des professeurs des lycées et collèges du ressort et de lui adresser, avec son avis per- sonnel, un résumé des délibérations de ces assemblées. C'est ce rapport que vient d'achever ]NL Liard. II est évident que, dans les pays où cela est dans les usages, comme aux États-Unis dans les Mamial Trainings, le développement de l'habileté artistique et manuelle des jeunes gens par le dessin, le modelage et les travaux pratiques sur le bois et le ier, en même temps que ces jeunes gens reçoivent l'éducation générale, est une D"" GODON. — L ETUDIANT EX CHIRURGIE DENTAIRE iSSq excellente chose qui serait des plus utiles à rétudiaiit cliirurgien- dentiste; malheureusement ce procédé déducation est peu répandu, jiar suite encore peu pratique ; mais il doit être recommandé chaque fois qu'il peut être appliqué. C'est ce qu'ont fait souvent, sur nos conseils, plusieurs pères de famille. Mais les préparations résultant de ces réformes, lorsqu'elles seront appliquées d'une manière générale, ne pourront composer qu'une éducation préliminaire, artistique et manuelle, très sommaire du chirurgien-dentiste, on le comprend ; il restera toujours place pour une année d'études préparatoires spéciales telle que nous proposons de l'organiser, analogue à celle de l'étudiant en médecine avec le P. C. N. EDUCATION rilELmiXAIRE DU CHIRURGIEN-DENTISTE ENTRE LA FIN DE SES ÉTUDES TERMINÉES A l6 ANS ET SON ENTRÉE A l'ÉCOLE DEN- TAIRE. L'enseignement artistique et manuel de l'étudiant chirurgien- dentiste avant son entrée à l'École dentaire est actuellement donné sous difterentes formes dans les conditions suivantes : I'' Dans les ateliers de divers métiers aj^ant certains rapports avec la prothèse dentaire : 2.° Par un apprentissage dans le laboratoire d'un dentiste avant l'entrée à l'Ecole dentaire, comme en Angleteri^e ou en Allemagne ; 3° Dans les cours préparatoires spéciaux comme l'Institute of dental technology de Londres. Le premier procédé a l'avantage de pouvoir être employé partout, parce que partout on trouvera des menuisiers, des serruriers, des bijoutiers, pour faire faire à l'étudiant une ou deux heures par jour de travaux pratiques sur le bois , le fer et les métaux précieux , le reste du temps pouvant être employé aux cours scientifiques et litté- raires destinés à compléter l'éducation générale de l'élève et aux cours de dessin et de modelage. L'a[)prentissage chez le dentiste est en Angleterre et en Allemagne et a été longtemps en France le procédé d'éducation manuelle de l'élève dentiste pour l'étude de la prothèse pratique au laboratoire. Il offre de nombreux inconvénients, tenant notamment aux aptitudes souvent insuffisantes du patron à l'enseignement ; de plus il ne com- prend aucun enseignement scientifique théorique complémentaire. Du reste, la Commission internationale d'enseignement l'a défini- tivement condamné dans sa réunion de Madrid 1903. 1 3()0 ODONTOLOGIE L'École de technologie, ou cours spécial avant l'entrée à l'École dentaire, send^lait réaliser le mieux ledit enseignement, comme r avait compris le D' Georges Cunningham en créant son Institut de technologie dentaire . parce que le programme était à peu près com- plet au point de vue scientifique comme au point de vue technique ; malheureusement le succès n'a pas récompensé ses efforts. Peut-être cette création pourra être reprise utilement dans les villes où existent des centres impoi-tants d'enseignement dentaire. En attendant, pour les étudiants qui terminent à i6 ou 17 ans leurs études classiques par l'obtention du certificat d'études primaires supérieures ou du certificat d'études secondaires, l'apprentissage reste encore provisoirement, comme nous l'avons dit plus haut, un moyen pratique de compléter leur éducation artistique et manuelle avant leur entrée à l'École dentaire, qui ne devrait avoir lieu norma- lement qu'à l'âge de 18 ans. A cet apprentissage, formant l'enseigne- ment manuel, peuvent être adjoints des cours scientifiques et litté- raires choisis xiar l'étudiant pour compléter son éducation générale, suivant les principes indiqués ci-dessus, et des cours de dessin et de modelage comme nous l'indiquons plus haut. PROGRAMME DE LEXSEIGNEMENT PREPARATOIRE SPÉCIAL DE l'ÉTU- diant en chirurgie dentaire considéré comme premiere année d'Études dans les écoles dentaires ou p. c. n. dentaire. Lorsque l'étudiant en dentisterie se sera préparé à ses études den- taires proprement dites par fun des divers procédés à sa disposition que nous venons d'examiner plus haut, il n'en aura pas moins une préparation bien incomplète pour les besoins du nouvel enseigne- ment professionnel qu'il va aborder et la nécessité d'une année de P. C. N. dentaire reste aussi justifiée pour lui que le P. C. N. pom* l'étudiant en médecine. Le programme de cette année de P. C. N. dentaire peut être établi sur les bases suivantes : La moitié de la journée doit être consacrée aux études et travaux pratiques scientifiques, l'autre moitié (au moins quatre heures par jour), aux études et travaux pratiques de l'enseignement artistique et manuel technique, sans que les étudiants soient admis à l'opérer sur le malade. (Voir le tableau ci-après, page i3g5.) D'' GODON. — l'Étudiant en chirurgie dentaire i3qi Programme scientifique Le programme scientifique comprend des cours théoriques sur la physique et la mécanique, la chimie et la métallurgie, dans leurs a[)plications à l'art dentaire, Fanatomie et la physiologie humaine comparées; ces cours théoriques sont complétés par des travaux pratiques de laboratoire. Dans cet ordre d'idées, l'enseignement pratique de l'anatomie com- parée a grandement progressé cette année à l'École dentaire de Paris par l'organisation des cours pratiques de dissection sur le chien et les animaux. Je laisse à M. le professeur Julien, qui a eu Ihonnevir de les orga- niser et de les diriger , le soin de vous en faire connaître l'utilité et les résultats (i). Je n'insiste pas sur le programme des cours de physique, chi- mie, etc. qui existent déjà dans la plupart des écoles, et j'aborde tout de suite le programme technique. Programme technique Le programme technique comprend des cours théoriques et des travaux pratiques. Les cours théoriques portent sur les éléments d'anatomie dentaire, de pathologie dentaire, de thérapeutique spé- ciale, de dentisterie opératoire et de prothèse. Les travaux pratiques portent sur la prothèse au laboratoire et sur la dentisterie opératoire, sur V appareil fantôme . ENSEIGNEMENT PREPARATOIRE DE LA PROTHESE Le programme d'enseignement pratique élémentaire de la pro- thèse peut ainsi être divisé : Dessin et travaux sur le bois ; Dessin et travaux sur le fer ; Modelages et travaux sur métaux précieux (or, argent, etc.); Modelages et travaux de prothèse élémentaire. Le programme de la prothèse ci-dessus est ap[)liqué à peu près ainsi à l'Ecole dentaire de Paris sous la direction du professeur, M. Martinier, aidé de son chef des travaux, M. L. Cecconi. Je n'in- (i) Voir Rapport sur Vi'nxci^'ncmcni de la dissection sur le chien, par le D' Julien. Communicaliou ù la SecliDii d'OduiiLolog'ie de l'Association française pour TAvance- luent des Sciences, Angers, i9o'3. iSga ODONTOLOGIE sisterai pas autrement qu'en signalant l'utilité d'y introduire pour les commençants le dessin et le modelage, que nous avons ajoutés à ce programme. ENSEIGNEMENT PRÉPARATOIRE THÉORIQUE ET PRATIQUE DE LA DENTISTERIE L'enseignement préparatoire de la dentisterie opératoire, que nous avons eu riionneur d'organiser, il y a quelques années, à l'Ecole den- taire de Paris, avec l'excellent concours des chefs de clinique, M. Blatter pour la partie pratique, MM. de Croës, Malié, Audy, Pauline et Devoucoux pour la partie théorique, et que nous avons déjà présentés en 1902 à la Fédération dentaire nationale à Paris, au Congrès des Dentistes allemands de Munich, au Congrès de la Société dentaire américaine d'Europe à Stockholm et au Congrès des sciences médicales à Madrid cette année, a sa place ici dans l'enseignement préparatoire nécessaire à l'étudiant en dentisterie et rentre ainsi dans le programme de l'éducation artistique et manuelle. En effet, on peut estimer qu'il fait partie intégrante du programme de la première année préparatoire à l'enseignement dentaire pra- tique proprement dit, c'est-à-dire l'enseignement clinicjue sur le malade. C'est ainsi qu'on le considère dans la plupart des écoles qui l'ont adopté. Ce programme comprend trois grandes divisions, réparties chacune sur cinq semaines de cours , soit quinze semaines , représentant environ quatre-vingt-dix leçons ijratiques de deux heures chacune , spécialement réservées aux démonstrations du démonstrateur et aux exercices pratiques de l'étudiant. i^'^ division : Démonstrations, exercices et travaux pratiques de den- tisterie opératoire au lal^oratoire, sans le tour, sur des dents artificielles en caoutchouc blanc vulcanisé , en bois ou en ivoire , implantées dans des blocs de plâtre (caries des i^'' et 2^ degrés). a^ division : Démonstrations, exercices et travaux pratiques de chh'urgie dentaire et de dentisterie opératoire au fauteuil doi)éralions sur l'appareil « fantôme » avec emploi du tour, sur dents naturelles implantées dans des blocs de plâtre (caries des 3* et 4*^ degrés). 3^ division : Exercices d'ablation du tartre, de nettoyage des dents ou d'extraction sur l'appareil « fantôme » ou le squelette (tixés sur le fauteuil d'opérations). Nous nous bornons à déposer sur le bureau . à la suite de cette communication, le programme détaillé qui a déjà paru dans les com- munications précédentes avec les quelques modifications qui y ont D' GODON. — l'Étudiant en chirurgie dentaire iSgS été apportées dans la dernière année. Nous nous contenterons d'appeler votre attention sur quelques-unes de ces modifications que nous avons appliquées à nos travaux pratiques dans le but d'en faciliter Texécution. M. Blatter a signalé ces modifications à Paris à la session de la Fédération dentaire nationale en avril ;• je les ai signalées moi-même à Madrid, en présentant les travaux pratiques exécutés par les élèves, dont nous vous présentons les principaux spécimens. Ces modifications sont : 1° Des moules en cuivre pour l'exécution des dents de caoutchouc nécessaires pour l'étudiant après qu'il a terminé ses dessins ; nous aA^onspu, grâce au concours- de M. Delair, faire faire des moules qui nous permettent d'obtenir en quantité suffisante et avec assez d'exactitude et de rapidité les dents artificielles dont nous avons besoin, alors que les élèves sont encore dépourvus de fhabileté nécessaire pour les exécuter eux-mêmes dans des conditions accep- tables ; 2° Des cahiers de dessins, suivant la méthode employée par le 2:»rofesseur Guilford au Philadelphia Dental Collège ; ils sont préfé- rables aux fiches ou feuilles volantes qui peuvent se perdre ; de plus, ils permettent de juger yàus facilement des progrès de l'élève ; 3° Les pieds en bois destinés à supporter l'appareil « fantôme » et qui ont l'avantage de mieux représenter le malade comme volume et par suite quant aux positions que doit prendre l'élève ; 4' L'emploi des « Diimnij' Jaws » , ou modèles en caoutchouc mou , dans lesquels on insère des dents naturelles qui facilitent la démonstration de diverses opérations , comme le nettoyage dans la pyorrhée, la pose de la digue, l'écartement des dents, les manœuvres Âe l'extraction, etc ; 5° Notre classification des 22 caries , contenant les divers types de caries que l'on rencontre dans la bouche le plus généralement, avec leur lieu d'élection et leur mode de préparation ; 6° La cavité type avec ses faces, ses parois et ses angles et ses bords ; 7° L'extension de l'enseignement sur le fantôme aux trois pre- mières années d'études, afin que l'élève exécute toujours toute nouvelle opération sur le « fantôme » avant de l'exécuter sur le malade, suivant le principe indiqué au début de cette communi- cation, le « fantôme » étant considéré comme le « malade prépara- toire », le « malade d'attente », le « malade d'essai ». Il est éffalement considéré comme le a malade de réserve » destiné à fom'nir à l'élève inoccupé, faute de patient, l'occasion d'exécuter 88* l394 ODONTOLOGIE un nombre d'oj)érations plus grand que celui qu'il trouve au dispen- saire, de façon à pouvoir ainsi satisfaire aux exigences du règlement sur les travaux pratiques. Avec cette conception il est possible d'augmenter considérable- ment le nombre d'opérations diverses (obturations, aurifications ,. couronnes, bridges, etc.) qu'on demande à chaque élève pendant ses trois ou quatre années d'études, et de mieux graduer les difficultés des travaux à exécuter suivant la force des élèves et aussi de mieux les leur démontrer. Il est ainsi possible de remédier à l'insuffisance des malades dans les écoles qui ont beaucoup d'élèves et surtout de réserver dans la mesure du possible le plus grand nombre des malades aux étudiants plus instruits — ceux de quatrième année, qui ont obtenu le droit de pratique légale, ce qui est également plus conforme aux principes d'humanité. Avec le développement qu'est appelé à prendre ce nouvel ensei- gnement, il conviendrait de créer dans les Écoles dentah'es un laboratoire spécial de dentisterie opératoire distinct du dispensaire réservé aux malades , distinct aussi du laboratoire de prothèse et spécialement aménagé pour le but proposé , comme nous a enons de le faire à l'Ecole dentaire de Paris (i). (i) Voir la nouvelle salle de dentisterie opératoire de i'« année à l'École dentaire de Paris (Odontologie i9o3>. D'' GODON. L ETUDIANT EN CHIRURGIE DENTAIRE 1395 « 0 O) "H H A t-^ < H g n 0 H l-« C5 (tï & pc; HH S M u < m s M kl H Ce; i-i & EH kj ■w 0 h1 0 ■k M *^ Q rr; kj Eh ■<^ g g M > S tq N Q •-4 H n H P H o l-H H O < H n < cq Q Ul ce z bJ Q O u -bl 11 < -I Ul o (A (0 Ul U. O ce a UJ S Ul z O Ul (A Z Ul •W z-y. c 05 H 5 g .. •J2-aj s "2 ^=;i:ô-5 C "K 0 0 0 r tJ W ^^ 3 :^ rt "C Xi. ^ . "?■£ ^ ff ;:^ ^ • '^ 5-53 ^ m *- « "â" ^ y. Oi 4i — o ■1) ^ w -w ~ ^ — < a «j ~ s s rf. ^ o o.- O; 5i „,, rt T* ^ ■- a Ï-' S" -i ='«3 .Si; ;, c "~ • "S - 5 cj a K - = 1. 5 p a^ï S3-- << , sSS le— - O 7: ^ V 3 s d a Ci G .*. W H C c/: ■S .2 ? 4; St = 2 ai r =^ ca o ' u i^ r3 C 3 o g I I gS .S S OH o « 2 -S D s * es— S ïa.£ •^ ^ -G i« > — ?■• rt O «J t, i, CHPh Ul 4J E Q. Ul S Ul Z o Ul (A - Cl 3 4i ai i^ J. i^^ S 5 3 .^S'.îl 0 y: \l ? o 3 —' '/î '/■; .ti ^^ '/■•■ ni ô '-. 3 '■'• * ^ '- ^ ^^"•^31)00 = ^ -"3 3^-5 « aj S - :^^ o 3 dj — ij " — i-i 3 i»j w o 2^ s ■- « -3 c« ni «5 3 în a: 3 3^^ Sx 3.3 'S a w •3 o ^ 3 ^ *î-l tn ,3 o o Jj o 2-3;. « ■ Qj ai 3-0 «1 • ai"S '-' 3-=* 3 o > a o • en aj !h -0.2 a; "3 ■2-3 2rt iSqG odontologie M. Alexis JULIEN Professeur à l'École dentaire de Paris ORGANISATION DES TRAVAUX PRATIQUES D'ANATOMIE A L'ÉCOLE DENTAIRE DE PARIS ['i"-o;] — Séance du 5 août — Dès i883, alors qu elle sortait à peine du berceau, l'Ecole dentaire de Paris, sentant la nécessité des études pratiques d'anatomie, obligeait ses élcA^es à disséquer le lapin, la tête et les principaux viscères du mouton (i). Cette initiative fut sanctionnée par un décret du 3i décembre 1894, qui astreignit les Écoles dentaires à disposer d'une salle de dissection. Le législateur ayant gardé le silence sur l'animal à disséquer, nous eussions pu conserver le régime anatomique institué depuis plus de dix ans et dont les résultats n'avaient pas été à dédaigner Mais , peu de temps après la promulgation de ce décret . sur la demande purement spontanée de notre Ecole , un traité , passé avec l'Assistance publique de Paris , donnait à nos élèves des 2« et 3^ an- nées l'autorisation de disséquer à l'ampliithéâtre des hôpitaux. C'est ainsi que, le i^"^ décembre 1895, la dissection de l'homme remplaça celle du lapin et du mouton. * * * En 1901-1902, l'année même qui suivit sa majorité, notre Ecole, qui, comme toute corporation vraiment vivante, c'est-à-dire libre et autonome, est à la recherche continue du progrès, décida que les élèves disséqueraient pendant les deux premières années et que, durant la troisième année, ils prendi'aient part à des travaux pratiques d'histologie. C'est alors que je fus chai'gé de faire, sur les systèmes squelettique et musculaire, un cours en trente leçons, ayant pour but de préparer les élèves de la 1'^'= année à la dissection (2). (i) Depuis quelques années, plusieurs séances des travaux pratiques du P. C. N , que M. Henri Fistiunn dirige avec autant de dévouement que de succès, sont consacrées à la dissection du cœur et de la tête du mouton. (a) Pour ijue ce cours donnât les meilleurs résultats, il laudrait qu"il 1)111 être lermiué avant la première séance de dissection. AL. JULIEN. — l'École dentaire de paris 1397 Mais, étant donnée rinsulfisance du nombre des cadavres qui arrivent aux pavillons de dissection, étant donné surtout que le nombre, déjà considérable, des élèves (plus de 60 par série), que dirige un répétiteur unique , eût été augmenté dans des proportions réellement nuisibles aux études, rampliithéàtre des hôpitaux ne [)ut pas recevoir nos élèves de la i'^^ année. L'École se vit donc obligée de revenir, en partie du moins, à son premier régime anatomique. * Afin de permettre aux élèves d'acquérir rapidement des notions générales sur tous les systèmes anatomiques (gastro-pulmonaire, uro-génital, nerveux, etc.), la dissection totale du chien fut préférée aux dissections totale du lapin et partielle du mouton. Le choix du chien s'imposait , en raison de sa taille et de la modi- cité de son prix d'achat. Quant à sa dissection dans un local particu- Her, elle ne saurait être gênée par l'ordonnance concernant les amphithéâtres d'anatomie, ordonnance qui vise seulement la dissec- tion de l'homme. On ne saurait trop insister sur ce fait que , les ressemblances ana- tomiques qui rapprochent le chien de l'homme étant bien supérieures aux différences qui l'en éloignent, les élèves pouront passer facile- ment de l'étude du premier à celle du second. Est-il nécessaire d'ajouter que la dissection de chiens tués en pleine santé est au moins aussi peu dangereuse que celle des cadavres que les hôpitaux et hospices fournissent aux amphithéâtres de Clamart et de la Faculté ? * * * La dissection du chien avait été décidée le 24 mars 1908. Huit jours plus tard (i'^'^ avril), la première séance de dissection avait lien dans une salle de l'École, empruntée au service de la prothèse. Cette installation hâtive, et forcément défectueuse, ne dura qu'une semaine. Le 20 avril suivant, au lendemain des vacances de Pâques, grâce à la diligence de l'Administration, le service des travaux anatomiques se trouvait transféré au n" i5 de la rue Bréda , dans un local, sans doute peu luxueux, mais vaste, aussi bien éclairé qu'aéré, et dans lequel les élèves ont travaillé à leur aise jusqu'au 9 juillet. Les exercices pratiques ont été suivis par cinquante-six élèves, divisés en deux séries , ayant droit chacune à trente-six séances de trois heures (en tout 108 heures de travail pour chaque élève). iBgS ODONTOLOGIE Le nombre total des présences a été de i.44o> ^6 qui donne une moyenne de vingt présences pour chacune des soixante-douze séances (i). * Le nombre des chiens disséqués a été de quarante-cinq. Les trente-six premiers avaient été injectés à la glycérine phéni- quée. Pour les neuf derniers , la substitution du formol au phénol nous donna de meilleurs résultats. L'injection, que Ion x^'atique par l'aorte abdominale, est dirigée successivement vers la tête et vers la queue, de façon quelle pénètre ésralement dans l'un et l'autre train. La plupart des sujets ne sont livrés à la dissection qu'après avoir été préalablement dépecés et éviscérés. Pour permettre au liquide conservateur d'imprégner à fond tous les tissus, le dépècement et Y éçiscération n'ont lieu qu'une semaine après l'injection. Grâce à cette précaution, absolument élémentaire, mais parfois négligée des médecins embaumeurs , les corps de nos chiens sont tenus à l'abri de la décomj)osition cadavérique. Des cuves munies d'un double fond, dont l'un grillagé, nous ont été de la plus grande utilité pour la conservation des pièces en cours de dissection. Le fond grillagé sert de support aux préparations, tandis que le second fond reçoit de l'alcool dénaturé. Les vapeurs d'alcool, qui se dégagent d'une façon continue, conservent aux organes leur forme, leur volume, leur couleur et une souplesse suffisante. Des essais, entrepris le lo juillet, nous font espérer que nous pourrons dorénavant livrer aux élèves des sujets entièrement épilés. Nous éviterons ainsi le seul désagrément que présente la dissection du chien. Au début de chaque séance a eu lieu une démonstration , aussi courte que suljstantielle , sur des pièces que les élèves ont ensuite étudiées avec soin, avant de se mettre à la dissection. La plupart de ces démonstrations ont été faites sur le chien ou sur l'homme. Mais, pour quelques-unes, nous avons dû faire appel à d'autres animaux. C'est ainsi que nous avons eu recours : au bœuf pour le globe oculaire ; (I) L'expérience que nous avons acquise au cours de ces soixante-douze séances nous a prouvé qu'un démonstrateur d'anatomie n'est réellement utile à chacun des élèves qu'il dirige que si le nombre de ceux-ci n"esl pas supérieur à vingt. AL. JULIEN. — l'École DEXTAIRE DE PARIS l399 au fœtus du bœuf pour le trou de Botal et le canal artériel ; au fœtus du mouton pour le thymus et le cercle tympanal ; a un poisson, le colin, pour le cartilage de Meckel, qui, transitoire chez l'homme , est permanent chez les poissons osseux, etc. Cette incursion dans les domaines de l'anatomie comparée et de l'embryologie ne visait point une vaine satisfaction de dilettantisme anatomique, mais elle avait pour but, essentiel et unique, de mieux faire comprendre, apprendre et retenir par nos élèves l'anatomie de l'homme adulte. Après avoir introduit, par exemple, ainsi que chacun d'eux l'a fait, une sonde cannelée, ou bien le petit doigt, dans le trou de Botal et le canal artériel, oublieront-ils jamais la signifi- cation et la situation de la fosse ovale et du ligament aortico- pulmonaire ? * * Lorsque le Conseil de l'École me demanda d'organiser les travaux anatomiques, j'acceptai avec joie la tâche délicate qui m'était offerte. Pour la première fois , depuis trente ans (octobre 18^3), que j'ensei- gnais l'anatomie, je trouvais enfin l'occasion d'enseigner les éléments de la science qui m'est chère, comme j'eusse voulu qu'ils me fussent enseisrnés à moi-même au début de mes études. Lisez peu, voyez beaucoup, disaient Yauquelix et Fourcroy aux trois cents élèves qui , par ordre de la Convention , furent appelés à Paris , x^our y suivre les cours de l'École de santé , devenue plus tard la Faculté de médecine. C'est qu'en effet, pour être vraiment utile à des débutants, l'enseignement d'une science, quelle qu'elle soit, doit se borner à l'exposition des phénomènes fondamentaux , à leur coor- dination rationnelle et surtout à leur démonstration méthodique. L'anatomie, en particulier , ne se raconte pas, elle se démontre, et la vue d'une pièce anatomique est mille fois plus instructive que celle du dessin le plus exact (i). Yoilà pourquoi chacune de nos séances a été précédée d'une démonstration. C'est ainsi que nous avons mis en pratique ce principe, qui fut toujours le nôtre : que l'enseignement est d'autant plus utile qu'il diminue davantage l'effort stérile de l'élève. * (i) Qu'on n'aille pas croire que nous condamnions les illustrations qui ornent la plupart de nos traités d'analomie. Nous sommes convaincus, au contraire, que l'utilité de ces ouvrages est en raison directe du nombre et de l'exactitude des dessins qu'i s renferment. Mais, pour que l'étude de ces tig-ures soit réellement fructueuse, il faut ■qu'elles rappellent a l'esprit l'image de choses déjà vues. l^OO ODONTOLOGIE Le but de notre enseignement n'est certes point d'augmenter le nombre des anatoinistes de carrière, mais de préparer nos futurs dentistes à lintelligence des phénomènes anatomiques et surtout à celle des rapports généraux qui les relient les uns aux autres, car il n'est'de science que celle du g'énéral. Ce n'est pourtant pas sans une légitime fierté que nous avons vu l'un des élèves les plus assidus à la dissection, M. Gatin, découvrir, sur le chien, un organe constant, le muscle mandibulo-auricu- laire (i), qui n'est encore décrit ni figuré dans aucun livre clas- sique. Un autre de nos élèves, M. Paillotin, vient de commencer, d'après nos conseils, sur la morphologie de l'atlas et de l'axis, un travail qui nous fait espérer les conclusions les plus intéressantes. Un homme qui a consacré sa vie entière au progrès et à l'ensei- gnement de l'anatomie, un Maître dont nous avons suivi, pendant de nombreuses années, les leçons aussi brillantes qu'instructives, notre excellent ami, M. le x^i'ofesseur Mathias-Duval, nous a offert généreusement, pour l'instruction de nos élèves, une trentaine de pièces anatomiques préparées par lui-même , alors qu'il était prosec- teur danatomie à Strasbourg. Nous sommes heureux de lui témoi- gner puliliquement de notre gratitude, pom' ce nouvel et signalé service, ajouté à tant d'autres. * * * Comme on ne sort point des sentiers battus sans rencontrer des obstacles, nos débuts furent assez j)énibles et même quelque peu accidentés. Mais, grâce à l'énergie de MM. Godon, Martixier, Papot, Roy. Blatter et d'une grande partie du corps enseignant, grâce au bon sens des délégués de la i-^-^ année, MM. Paillotin et Monin, grâce à la bonne volonté des cinquante-six élèves qui s'étaient librement inscrits, toutes les difficultés furent bientôt vaincues et l'enseigne- ment pratique de l'anatomie à l'École dentaire de Paris se trouva rapidement établi sur des bases solides. (i) Ce muscle relie le pavillon de lorcilk- au bord postérieur de la branche montante du maxillaire inférieur. D'' SIFFRE. — DENT DE SIX ANS ET DENT DE SAGESSE l4oi M. le D' SIFFRE Pi'olesseur à TÉcole dentaire , à Paris DENT DE SIX ANS ET DENT DE SAGESSE [6ii.3i] — Séance du 6 août — Les arguments que les partisans de la conservation quand même de la dent de six ans opposent à ceux qui veulent la sacrifier pour donner la possibilité à la dent de sagesse de faire son évolution et son éruption normales et participer utilement à la mastication , ces arguments, dis-je, peuvent se grouper ainsi. 1° La dent de six ans peut toujours se soigner et peut être conservée avec le traitement que nous possédons ; 2° La dent de sagesse peut manquer, c'est un organe qui disparait dans les races humaines supérieures ; 3° Les accidents dus à l'éruption de la dent de sagesse sont quan- tité négligeable. Je ne veux m'occuper que de la deuxième proposition , laissant de côté les première et troisième pour y revenir à mon heure. J'ai dit et je redis qu'actuellement il est impossible d'émettre cette proposition : « La dent de sagesse disparait dans la race civilisée , c'est une dent dont la présence est absolument problématique (i). » Cette affii-mation, publiée et colportée dans les milieux dentaires, résulte simplement de l'ignorance, très pardonnable, qu'ont de l'histoire de l'homme ceux qui s'en servent. C'est qu'en effet ils voient dans un accident d'ordre purement pathologique (hypotrophie par hérédité ou acquise) une manifesta- tion évolutive et le fait de manquer de dent de sagesse est pour eux un signe d'évolution, alors que c'est seulement un symptôme d'un état particulier qui a mis le sujet dans l'impossibilité de laisser sortir ses organes parfaitement développés mais restés inclus; et de ne pas voir dans la bouche une couronne émergeant de la gencive ne (i) Dcpxiis le Congrès d'Angers, un traité d'anatomie dentaire, par Choquet , profes- seur de l'École dentaire de Paris, contient cette aflirmation que je voudrais voir établie par des faits : C'est une dent (la dent de sagesse) absolument dégénérée que l'on ne cite que pour mémoire (p. 10). l402 ODONTOLOGIE donne pas le droit de supposer même que la dent, propriétaire de cette couronne, n'existe pas parce que : évolution de race. Chez les anthropomorphes, chez l'homme le plus civilisé, mais indemnes de toutes tares hypotrophiantes, en passant par les êtres les plus inférieurs de l'échelle humaine, on trouve les documents irréfutables, desquels on tire la preuve de la persistance de la troi- sième molaire. Et, c'est en passant en revue cette histoire de l'homme et de ses fondements qu'on peut seulement se faire une opinion vraie, presque scientifiquej Ainsi donc, devra-t-on rschercher les modes de formation des individus et de leurs organes, pour arriver à en pouvoir déduire qu'après une série de transformations évolutives, un organe primitif de telle forme s'est modifié dans le temps et dans l'espace, sous l'in- fluence de circonstances biologiques universelles , et que cet organe se modifie encore actuellement. Mais cependant, se modifiant suivant les lois qui , après avoir régi son évolution, régiront sa répression, sa modification même. C'est ce que la jialéontologie. l'anthropologie, l'anatomie compa- rée, etc, nous enseignent. C'est ce que j'ai essayé de résumer en montrant le simple cône dentaire primitif restant simple cône chez les premiers mammifères et, à mesure qu'on s'éloigne des périodes anciennes, en montant la multiplication des cônes, d'abord du côté de la couronne, ce sera nos cuspides coronaires, ensuite du côté de la racine et de la dent simplement conique, du crocodile, par exemple, nous verrons naître , par augmentation méthodique régu- lière du volume et du nombre des cônes , les dents les plus compli- quées. De la canine semldant rester le type du cône, la troisième molaire du pithecus antiquus portant sept tubercules coronaires, nous aurons la période d'évolution par augmentation de ces cônes, pris de cet aïeul si éloigné à l'anthropoïde actuel : Gibbon, Orang, Chimpanzé. Nous verrons la transformation par moyens inverses et la troisième molaire perdre un, puis deux cuspides et se présenter telle qu'elle est aujourd'hui à cinq cuspides. Puis passant chez l'homme néolithique resté avec cinq cuspides et être encore chez un individu d'une race quelconque , mais exempte de tares pathologiques . une dent à cinq cuspides , et souvent d'un volume plus considérable que celle de son aïeul, de l'âge de pierre, do même que des civilisés actuels ont des molaires de sagesse, supé- D*" SIFFRE. — DENT DE SIX ANS ET DENT DE SAGESSE l4o3 rieures à celles des hommes sauvages. En résumé ce n'est pas la dent qui diminue, et j'en ap^Jorte la preuve. Ce c{ui diminue c'est la masse osseuse de la mandiljule. Chez l'anthropomorphe, chez le néolithique, chez les très anciens historiques, chez les races sauvages et chez les civilisés actuels purs, la troisième molaire est en avant du bord antérieur de la branche montante, ou maxillaire inférieure. Il n'est point ainsi chez les sujets très civilisés (sujets tarés le plus souvent) ; le volume des dents reste celui qu'il aurait été chez un sauvage ou chez un gaulois par exemple, mais, alors que chez eux l'os eût été très développé, chez le très civilisé ou taré cet os est hypotrophié ; de cela résulte une arcade enclavée dans les branches maxillaires, le bord de la coronoïde avançant plus ou moins pour être quelquefois en rapport avec la première molaire. Voici, du reste, des poids comparables qui donnent bien la preuve de ce que je viens de dire : POIDS du maxil. iuler. de la 2» mol. de la 5' mol. Gorille Sjo gr. " 6 gr. 5 ^ gr. 5 Orany 3i5 gr. ^ gr. 'j 3 gr. o Chimpanzé i5o gr. 9 gr. o i gr. 6 Morvandais (i). . . 118 gr. 2 gr. 2 2 gr. o — 85 gr. I gr. - I gr. 7 E f — 60 gr. 2 gr. o I gr. 9 On peut donc voir par les poids que les rapports du tissu osseux mandibulaire avec la troisième molaire affirment la proposition : •diminution de la mandibule tandis que cette troisième molaire reste invariable. Le tableau ci-dessus montre, en effet, que chez : Le gorille, la mandibule est 82 fois plus lourde que la 3^ mol. L'orang, — lOD — Le chimpanzé, — 75 — i^'' morvandais, — ^9 — 2^ morvandais. — 5o — 3'' morvandais, — 3o — s o n D'où l'on peut déduire que l'insuffisance osseuse ne permet pas à la dent de sagesse : i" de se bien développer ; 2° de sortir et d'être utilisable ; 3° de sortir sans entraîner, ipso facto, des accidents. (i) Trois maxiU. anciens, Éc. anthrop., Paris. l4o4 ODONTOLOGIE Pour toutes ces raisons n'est-il pas logique de se débarrasser de la première molaire cariée pour permettre à la troisième de prendi*e une part active dans la mastication, et cela en un point de la mandi- bule où l'ampleur du tissu osseux ne permettra pas à cette troisième molaire de déterminer les accidents que nous connaissons (i). M. P. MARTINIER Professeur à TEcole Dentaire de Paris ORTHODONTIE;— DU CHOIX D'UN APPAREIL EXTENSEUR POUR REMÉDIER A L'ATRÈSIE DE L'ARCADE DENTAIRE SUPERIEURE — Séance du 6 août — Les appareils imaginés pour remédier aux irrégularités des ano- malies des maxillaires sont maintenant assez nombreux et chaque jour apporte une contribution nouvelle au traitement de ces anoma- lies. Cependant l'époque où l'on niait leur action, surtout au point de vue de la durée des résultats, n'est pas éloignée. Il est heureusement acquis désormais qu'il est parfaitement possible et qu'il est souvent facile d'augmenter, ou de diminuer, l'étendue des arcades dentaires et d'en modifier la forme ; nous avons chaque jour la preuve que les résultats obtenus peuvent être maintenus définiti- vement si l'on prend les précautions indispensables. Mais, si le nombre des appareils est déjà assez élevé pour permettre de faire un choix, il n'est pas toujours simple de le faire selon les indications formelles du cas qui se présente, tout en tenant compte de certaines considérations secondaires qui, cependant, jouent souvent un rôle important, dans la façon d'appliquer le traitement prothétique. C'est pour cette raison que j'ai pris, parmi les appareils extenseurs les plus connus, celui d'entre eux qui me paraît devoir être adopté dans la grande majorité des cas, en indiquant les motifs qui m'ont décidé à faire ce choix. (i) Voir pour la communication in extenso, la Reçue Odonlologique de mai et sep- tembre 1904. Doin, éditeur, qui n'a pu paraître dans le présent volume. — D' Sikfke. p. MARTINIER. — ORTHODONTIE l4o5 Je ne m'occuperai aujourd'hui que de latrésie du maxillaire supé- rieur Tout le monde sait que le terme d'atrésie signifie conventionnelle- ment en oi-tliodontie un rétrécissement du diamètre transversal dune ou de deux arcades dentaires, diminution qui peut porter, soit sui* la partie antérieure, soit sur la partie postérieure. Elle peut porter aussi sur les deux côtés à la fois ou n'atteindre qu'un seul. Elle entraîne dans ce cas une asymétrie de l'arcade. Cette anomalie est souvent accompagnée de vice d'articulation, de malformation palatine et de prognathisme du maxillaire supérieur et presque tou- jours d'insuffisance de la respiration nasale et de végétations adé- noïdes qui déterminent une série de troubles fonctionnels et phy- siques. Le traitement prothétique consiste dans l'augmentation du diamètre transversal de la voûte palatine , surtout au niveau de la partie la plus serrée, de manière à faire gagner aux interstices dentaires un espace plus considérable, permettant ensuite de ramener à leur place régulière sur l'arcade les dents mal placées. Examinons maintenant les appareils les plus couramment employés pour remplir ce but. C'est à un dentiste finançais, Lefoulon, que l'on doit le premier appareil extenseur des maxillaires. Il date de 1839. mais ce n'est guère que depuis 1881 , époque où un dentiste anglais. Coffin, décri- vit son appareil, que l'on connut ce genre de régularisation et qu'un certain nombre de praticiens l'appliquèrent communément. APPAREIL DE COFFLV L'appareil de Coffîn a eu le grand mérite, outre ses qualités réelles, d'utiliser pour la première fois eu orthodontie le fil dacier de piano, qui nous rend de si précieux et de si nombreux services poui- confectionner des ressorts. On peut se procurer ce fil de différentes grosseurs, selon la pression que Ton veut exercer. Mais celui auquel on a le plus souvent recours a un diamètre de 810 de niilHinètre et correspond au n' 16 de notre jauge. On doit l'employer sans le recuire, autrement il perdrait ses quaUtés d'élasticité et de résistance. L'appareil extenseur de Coffîn est constitué pour la mâchoire supérieure, par une simple plaque de caoutchouc recouvrant ou non les niolah-es selon le cas. Au miUeu de cette plaque se trouve un ressort en fil de piano tourné en forme dim M à branches égales et dont les extrémités sont noyées dans le caoutchouc. Une section de la plaque dans toute sa longueur est faite dans le sens antéro-postérieur, au moyen de la scie, la divisant ainsi en deux et permettant au ressort d'agh- par opposition contre les deux arcades. l4o6 ODONTOLOGIE Dans certains cas, la section pourra être faite sur l'un des cotés de la ligne médiane si l'on veut faire agir plus spécialement la force contre un groupe de dents. FiG. I. — Appareil de Coffin. Cet appai^eil a, comme qualités principales, son efficacité incontestable, sa simplicité et son peu de volume , mais il a comme unique mais réel défaut sa difficulté d'application, surtout en ce qui concerne l'écartement des deux ailes de caoutchouc qui doivent s'éloigner parallèlement. Pour cette manœuvre en effet , il est préférable de ne se servir que des doigts et il suffît d'exagérer un peu cet écartement ou de fausser légè- rement le ressort pour que l'appareil ne tienne plus en place. Sans cet inconvénient, l'aj^pareil de Coffin remplirait toutes les conditions pom* être utilisé fréciuemment , et c'est vraiment un appareil de grande valeur. Pour chercher à remédier à cette cUfficulté , ïalbot a modifié la forme du ressort de Coffin en l'enroulant autour d'un mandrin et en l'utilisant avec ou sans placjue du vulcanite. Cependant cette modiflcation a complifjué l'appareil et l'a rendu encombrant si on utilise la plaque du vulcanite. Si l'on emploie le ressort seul, il n'agit que sur les dents à redresser, ristpiant ainsi de le faire dévier, puisque la i)ression est exercée seulement siu- la couromie des dents. Il ne nous parait donc pas supérieur à l'appareil de Coffin. FiG. 2. — Modification du ressort de Coffin par Talbot. APPAREIL DE KINGSLEY L'appareil de Kingsley en caoutchouc, combmé avec les vis de Jack, est recommandable. Il est composé, comme celui de Coiïin, de deux ailes de caoutchouc, dont le centre se trouve muni d'un écrou; une double vis permet d'en graduer l'écartement avec autant de précision qu'il est néces- p. MARTIMER. ORTHODONTIE 1407 saire. L'écartement peut être gradué avec précision et, si le vérin est placé vers la partie antérieure de l'appareil, il n'est pas trop encombrant. FiG. 3. — Appareil de Kingslej-. AA plaque de vulcanite. — B double vis de Jack. — C ligature en fil de soie 1)D écrous de la vis fixés dans la plaque. — E perforation destinée au réglage des vis. Cependant il a aussi ses inconvénients : en le nettoyant, l'appareil peut se dérégler et il jieut en résulter soit l'impossilîilité pour le patient de le remettre en place, soit une diminution de son action permettant aux dents de revenir sur elles-mêmes. Pour éviter cet inconvénient, il est bon de perforer les deux ailes de caoutchouc à la partie postérieure voisine de la ligne de séparation des deux ailes et de les réunir à l'aide d'un fil de soie non serré , qui empêchera les ailes de tourner autour de la vis, en s' opposant ainsi au déréglage de l'appareil; le séjom* prolongé de la vis en acier nickelé dans la cavité buccale a comme inconvénient l'oxydation de celle-ci sous l'mlluence des acides de la salive, oxydation qui aboutit à son non-fonctionnement, ainsi que permet de le contrôler mi des appa- reils que je vous présente. Enfin, et c'est là son principal défaut, on peut constater, lorsque l'appa- reil a été porté quelque temps et qu'il a exercé son action, un manque de rigidité et une mobilité plus ou moins grande des deux valves. Cet inconvénient se produit au moment où les vis ont parcouru une certaine étendue de leur course dans les écrous. Les filets restés engagés dans ces derniers, fatigués par les mouvements d'oscillation des ailes, ne sont plus suffisants pour assurer la fixité de l'appareil qui peut se dérégler dans la bouche même du patient. APPAREIL D ARGENT M. d'Argent a modifié l'appareil de Kingsley dans le but d'augmenter l'étendue et la puissance de son action et même d'exagérer à volonté la force agissante soit à la partie antérieure de la plaque, soit à sa partie postérieure. Le dispositif qu'il a imaginé permet en outre de se servir plus longtemps du même appareil, qui conserve toute son action et toute sa ri'>idité pendant la course de la double vis de Jack. Cette rigidité supprime complètement les oscillations de l'appareil et, par suite, l'usure des filets de la vis, qui i)cut être employée jusqu'au bout sans se déré- gler. i4o8 ODONTOLOGIE La modification consiste dans l'adjonction à la vis d'extension de deux coulisseaux parallèles à la vis. Ces coulisseaux sont composés d'un tulic cylindrique et d'une tige à frottement lisse plus ou moins serré, suivant l'effet à obtenir. Le tvibe a ses extrémités partagées en trois ou quatre segments, recourbés en dehors et insérés dans le caoutchouc. Lorsqu'on partage l'appareil en deux, le trait de scie divise également en deux les tubes et l'on insère ensuite ainsi les tiges dans ces derniers. Si l'on veut obtenir un écartement plus accentué à l'avant qu'à l'arrière, FiG. 4- — Appareil de Kingsley modifié par d'Argent. OU réciproquement, on n'emploie qu'un seul coulisseau à tige plus ou moins libre, susceptil>le même de se courber et qu'on place à l'endroit qui ne doit être que peu dilaté, ce vérin étant fixé dans l'axe de la i^artie qui doit être le plus élargie. Ces perfectionnements apportés à l'appareil Kingsley sont vraiment heureux; toutefois, ils ont un inconvénient, celui de rendre rapi:)areil ])lus encombrant qu'il n'était avec la vis seulement , les coulisseaux et le vérin constituant une sorte de plancher gênant considérablement la langue et causant des troubles passagers dans la phonation et la prononciation. APPAREILS DE FRANCIS JEAN Il se compose d'ime plaque de vulcanite séparée en deux après la cuis- son. L'écartement se fait à l'aide de deux tiges métalliques parallèles introduites chacune dans un fourreau également métallique et accolées sur leur longueur. A l'extrémité de chacune d'elles est soudé lui crampon solide , dans le but d'avoir une lixité parfaite dans la plaque de caout- chouc. Les deux parties peuvent être complètement séparées et le nettoyage peut être fait minutieusement et parfaitement. Le point de fixation de la force est combiné suivant la direction du déplacement à opérer. Si l'on ne veut agir que sur un groupe de dents, la plaque de caout- chouc peut être plus petite. L'appareil est mis en action par des fils métalliques enroulés autour des tiges. Cet appareil a été imaginé pour faciliter considérablement le réglage de l'appareil et son grand avantage réside dans la possibilité de p. MARTIIVIER. — ORTHODONTIE 1/^09 graduer tVune façon i^récise et sans danger de déplacement l'écartement des deux ailes de caoutchouc, par l'adjonction, tous les trois ou six jours, d'un ou plusieiu-s fils, selon la résistance rencontrée. De plus, la simijlicilé FiG. 5. — Appareil Francis Jean. est réelle. Pourtant, on peut lui objecter, comme aux appareils précédents, d'être encombrant pour la langue et la mastication par les barrettes qui traversent la voûte palatine. En outre, sa force, au lieu d'être continue, est intermittente, ce qui est un désavantage, surtout au point de vue de sa rétention. Les appareils de Kingsley, de D'Argent et de Francis Jean sont des appareils extenseurs agissant d'mie manière intermittente. Ils ont les défauts de tous les appareils de ce genre : Ils n'exercent leur action que pendant un laps de temps très court après lem- mise en place et ils déter- minent de la douleur chez le patient au moment de cette mise en place , par le fait que leur écartement a Ueu en dehors de la Ijouche. De jjlus, le nombre de séances qu'ils nécessitent est ijlus grand et ces séances sont aussi plus rapprochées qu'avec les appareils à force continue. APPAREIL DE CECCONI L'appareil que je conseille de choisir a été imaginé par M. Cecconi il possède les mêmes avantages que l'appareil de Goflîn. Il lui est même à mon avis nettement supériem% parce qu'il permet d'écarter j^rogressi- vement et facilement le ressort , sans crainte de nuire à sa rétention celui-ci pouvant se retirer et se remettre rapidement et sa forme étant très simplifiée. Il est constitué par une plaque palatine en métal ou en caoutchouc, divisée à sa partie médiane par un Irait de scie ; les deux parties sont reliées entre elles à l'aide de rivets lixés à la partie postériem-e de la Iliaque par une i)laquette métallique à glissière, permettant l'écartement des deux parties surtout à la partie antériem-e de l'arcade. L'écartement progressif et continu des deux parties de la plaque est obtenu au moyen d'un ressort en fil de piano , auquel il domie une forme qui lui permet à la fois d'être très peu gênant et d'être très efficace. Sa supériorité sur celui de Cofiîn consiste dans la possibifité d'être retiré pour être modifié et être remis en place ensuite très facilement. Cette amovilîilité du ressort est obtenue par l'introduction des deux extrémités du ressort dans deux gaines placées à cet effet dans chacune des ailes 89» i4io ODONTOLOGIE deux petites anses métalliques placées à la partie postérieure du ressort le maintiennent en place contre la plafjue. FiG. 6. — Appareil Cecconi, appareil avec ressort vu par la face linguale. FiG. 7. — Appareil Cecconi, appareil vu par la face palatine. Les perfectiomiements apportés j^ar M. Cecconi à son appareil sont constitués : 1° Par mie bande de digue tendue qui est fixée à la plaque dans un emplacement préalablement préparé à cet effet à la face palatine de l'ap- pareil, de manière à s'opposer à l'envahissement par la mufpieuse de l'espace vide entre les deux parties de l'appareil que produit l'écarte- ment ; 2° Par la forme que M. Cecconi a donnée à son ressort, qui permet à ce dernier d'être accolé à la plaque dans presque toute son étendue, d'être très facilement écarté et d'avoir malgré cela mie grande efficacité ; 3 " Par un dispositif à glissière placé à la partie postérieure de l'appa- reil, miissant constamment les deux ailes , les empêchant de se déplacer et de se fausser, et permettant à la pression de s'exercer plus particuliè- rement à la partie antérieure de la plaque au niveau de la première pré- molaire. Le premier de ces trois perfectiomiements est contestable au point de vue de l'utilité, car nous n'avons pas encore eu l'occasion de constater les désordres niuqueux qu'il a pour but de fah-e disparaître. Il n'en est pas de même des deux autres, qui constituent à notre avis de sérieux progrès sur l'appareil Coffm. Nous tenons comme un avantage très appréciable la possibilité cpi'il assure de pouvoir retirer le ressort pour l'écarter et de le remettre rapidement et solidement en place sans crainte de le fausser. Enlîn, le dispositif à glissière, maintenant toujours les ailes bien parallèles entre elles, donne la certitude d'une boime réten- tion et d'mie action constante de l'appareil au point où la force doit être appliquée. La gêne que causent les vis, coulisseaux ou tiges, n'existe plus avec cet appareil et son action est au moins aussi ptussante. p. MARTINIER. — ORTHODONTIE l4ll APPAREIL D ANGLE Enfin mentioimons ég-alement l'appareil imaginé par Angle et qui a pour caractéristique de ne pas comporter de plaque et d'être inamovible. Il est constiiué. en effet, par mie série de colliers de métal qui entourent un certain nombre de prémolaires et de molaires. Chatpie bande est sou- dée à im tu])e destiné au passage de deux tiges métallicpies latérales pla- cées à la face linguale des dents à écarter. Des colliers ou anneaux sont également soudés aux tiges, de manière à placer les vis d'écartement aux différents points siu- lescpiels on veut plus particulièrement agir. FiG. 8. — Appareil d'Angle pour expansion du maxillaire supérieur. Les avantages de cet appareil sont constitués par la suppression de la placpie, par son inamovibilité. Faisons remarcpier que le premier de ces avantages constitue à notre avis mi inconvénient en ne faisant porter l'effort que siu- la couromie des dents et en ne permettant pas à la platfue d'apporter sa force adjuvante à la pression, que l'on exerce sm- le bord alvéolake. La vis cjui traverse la voûte palatine est aussi gênante, quoique moins volumineuse, que dans les appareils de Kingsley et de Francis Jean, puisqu'elle cUnimue l'espace Hbre laissé à la langue. Je dois, pour être complet, mentionner un nouvel appareil extenseur qu'a imaginé et préconisé récemment M. Pierre Robin. Cette appareil tire son originalité de la quaHté qu'on lui donne de pouvoir dilater à la fois le maxillaii-e supérieur et inférieur. Il se compose d'ime masse très volumi- neuse de caoutchouc vulcanisé, se moulant exactement sur la surface lin- guale de la cavité buccale fermée, sauf le plancher de la bouche et qui peut, à l'aide de petits vérins ou vis de Jack, disposées à cet effet, se dilater, entramant dans son expansion les parties squelettitpies et les dents. C'est cet appareil, que notre confrère Sauvez a quaUfié de mono- bloc et qui, d'après son auteur, est en effet un monobloc dilatateur cpii agit d'ime manière tout à fait intermittente. l4l2 ODONTOLOGIE Je n'ai pas encore eu (roccasion favorable d'essayer cet appareil ; je ne j)uis conséquemmenl me prononcer nettement sur son efficacité et sur sa valeur, mais théoricpiemenl U ne me semble pas appelé à un grand avenir. A l'heure où Ton recherche surtout les appareils fixes, peu encombrants et le moins gênants possible pour le i)atienl, cette énorme masse de vul- canite introduite dans la cavité buccale me semble de nature à justifier rhitolérance absolue du patient. Cette courte étude des appareils terminée , il convient d'examiner les considérations qui doivent guider dans le choix d'un appareil. Elles sont de deux sortes : Les indications formelles essentielles ; Les indications secondaires. Les indications formelles sont celles qu'otfre l'état de la bouche au point de vue de l'anomalie à corriger, qu'elle soit simple ou com- plexe. On aura à envisager le but que l'on se propose et le résultat que l'on est en droit d'attendre. Le choix de l'appareil à employer devra donc porter en premier lieu sur celui qui , par sa combinaison , par la possibilité d'apporter les modifications nécessaires pendant le cours du traitement, per- mettra d'ari'iver le plus facilement, sinon au résultat définitif, du moins de mener à bien l'une des phrases que comporte tout redresse- ment. Les indications qui viennent à la suite de celles-ci et qui inter- viennent dans le choix de l'appareil d'une façon essentielle sont celles qui ont pour base l'application du traitement sans occasionner de douleur et avec le minimum de gêne pour le sujet. Les indications secondaires sont celles qui ont trait à la situation sociale des parents, à la tolérance plus ou moins grande de l'enfant, à la pusillanimité des parents chargés la plupart du temps de la surveillance du port de l'appareil et qui expriment souvent des craintes au sujet de la douleur que les appareils peuvent provoquer ou des troubles fonc- tionnels c[ui peuvent compromettre la santé de leur enfant, la possi- bilité pour ces derniers de continuer leurs études sans interruption; enfin cette fameuse question de resthétic{ue, qui devra faire aban- donner les appareils extra-buccaux chaque fois qu'il sera possible de le faire. Telles sont les diflicultés qui surgissent dans le traitement des irrégularités des dents et des maxillaires. Si l'on y ajoute le manque de sévérité et de contrôle de la plupart des parents en ce qui con- cerne le port régulier de l'appareil et l'application des princi})es dune hygiène particulièrement rigoureuse, sur laquelle le dentiste p. MARTINIER. — ORTHODONTIE l^l3 ne devra pas transiger, mais qu'il aura beaucoup de peine à obtenir, nous am^ons je crois examiné toutes les difficultés. L'appareil que je préconise m'a permis de les surmonter et m'a donné chaque fois des résultats tels, que j'ai cru devoir éclairer mes confrères sur sa valeur et leur faire connaître les raisons qui me l'ont fait adopter. J'ai employé les différents appareils extensem^s et aucun ne m'a permis d'atteindre aussi facilement et aussi sûrement le résultat recherché, quoique tous ceux que j'ai passés en revue aient une valeur réelle. L'appareil de Coffin a contre lui la difficulté décarter le ressort; celui de Talbot lui est nettement inférieur ; l'appareil de Kingsley nécessite des visites nomJ^reuses et à de très courtes distances ; la rouille de la vis, que l'on ne peut empêcher dans certaines bouches, son manque de rigidité par suite de l'usure rapide des filets des vis lorsque l'appareil est en pleine action constituent des inconvénients sérieux. Ceux de MM. d'Argent et de Francis Jean sont gênants pour la prononciation et de rétention difficile au bout de quelque temps. Celui d'Angle est non moins gênant et le scellement des anneaux nécessite la séparation des dents sur lesquelles ils sont pla- cés, séparation qu'il vaut mieux éviter. L'appareil de Cecconi ne j)ossède aucun de ces inconvénients de construction, d'application et de modification faciles, il permet à l'enfant de parler, de manger, voire même de chanter avec la même aisance qu'avant sa pose dès le lendemain de son application. Il peut être confectionné en métal ou en caoutchouc ce qui est avan- tageux. Enfin son efficacité est telle que, dans l'un des cas que je vous présente, l'appareil n'étant porté que quelques heures par jour, j'ai pu obtenir plusieurs millimètres d'écartement. Je vous présente à l'appui de ma communication, que je crois utile pour éviter l'ennui d'un choix judicieux à certains de nos confrères qui n'entreprennent qu'avec crainte ce genre de traitement, une série de modèles de différents tjqies d'atrésie du maxillaire supé- rieur, avant et après le traitement extenseur. Ils sont accompagnés de schémas indiquant d'une façon exacte l'extension obtenue. Observations. — Les modèles S. P. représentent la bouche d'un jeune homme de i8 ans. Le port de l'appareil a duré deux mois, mais la mauvaise volonté du sujet était telle que l'appareil n'était en place que quelques heures par jour et quelquefois par semaine. Cela explique que nous n'avons obtenu qu'un écart de deux milM- i4i4 ODONTOLOGIE mètres au niveau de la première prémolaire et de un millimètre au niveau de la seconde. Fui.çt . — S. P. Le modèle D. E. appartient à un jeune homme de 17 ans. L'appa- reil a été porté deux mois et je ne voyais mon malade que tous les huit jours. Lécartement obtenu a été de neuf millimètres au niveau de la première prémolaire et de cinq millimètres au niveau de la FiG. 10. — D. E. p. MARTINIER. — ORTHODONTIE I/îl5 seconde. Dans cette bouche l'écartement a porté principalement sur la partie antérieure en permettant aux dents en rotation sur l'axe de pouvoir être régularisées. Le modèle P. reproduit la bouche d'un jeune homme de i4 ans. L'appareil a été porté trois mois avec une visite hebdomadaire. FiG. II. — P- i4i6 ODONTOLOGIE écartement obtenu au niveau de la deuxième prémolaire, quatre millimètres. Le modèle Dan. est celui de la bouche d'une jeune fille de i5 ans. L'appareil a été porté trois mois, mais je n'ai vu la malade que deux FiG. 12. — DAN. DAN fois Jpar [mois] et [quelquefois moins. L'écartement obtenu a étéjjde cinq millimètres au niveau de la première prémolaire et de cpiatre millimètres au niveau de la seconde. Le modèle Dub. concerne une jeune fille de i3 ans. L'appareil' a été porté trois mois et la malade ne venait le faire modifier qu'une FiG. i3. — DUB. p. MARTIXIER. — ORTHODONTIE 14^7 fois par mois. L'écartenient obtenu a été de cinq millimètres au niveau de la première prémolaire et de quatre millimètres au niveavi de la seconde. J'ajoute que, si javais voulu, j'aurais pu obtenir les mêmes résul- tats beaucoup plus rapidement; mais il y aurait eu dans ce cas imprudence et, si je me prononce pour la méthode qui fait agir la force continue, je tiens essentiellement à ce que cette force agisse très lentement. Les conclusions que je voudrais tirer de ces observations sont de deux ordres : 1° La netteté des résultats témoigne irréfutablement en faveur du procédé dit d'extension, puisque pour les uns il a constitué le seul temps du redressement et que pour les autres il m'a permis de corriger des irrégularités complexes , en faisant le moins de sacrifice possible ; 2° Ces résultats ont été atteints avec le même appareil, qui répond aux indications de l'immense majorité des cas de rétrécissement de l'arcade dentaire supérieure et ipii fonctionne sans occasionner ni gêne, ni troubles fonctionnels, ni douleur. Je souhaiterais que chacun apportât dans nos congrès et dans nos réunions professionnelles ses observations sur les appareils de redressement employés, avec les résultats obtenus, de manière à pouvoir vulgariser rapidement les appareils les meilleurs, qui sont souvent les plus simples. Cette vulgarisation ferait ainsi faire de grands progrès à l'orthodontie, cette science qui est encore méconnue et qui cependant doit être à l'heure actuelle une des branches les plus importantes et les plus intéressantes de l'odontologie. l4l8 ODONTOLOGIE M. J. D'AR&ENT A Paris CONTRIBUTION A L'ORTHOPÉDIE DES MAXILLAIRES- L'ORTHODONTIE LIÉE A L'ORTHO- PÉDIE DES MAXILLAIRES. CORRECTION DE L'ATRÉSIE BUCCALE ET NASALE [6ii.j2:6ii.;5:6i^.3| — Sôance dii 6 août — La série d'opérations ou de manœuvres orthopédiques , tendant à rectifier les rapports et la confirmation des mâchoires , ainsi que les dents fi'appées d'anomalies de disposition , est encore généralement désignée et surtout connue du public, sous la dénomination de redressement des dents. Cela provient de ce que l'on confond volontiers, pour plus de simplicité ou par manque de distinction, les incorrections des maxillaires et celles des dents; cela tient sui'tout à ce que ce sont ces dernières qui se remarquent le plus et que c'est à l'intei'vention du dentiste qu'on a recours pour remédier à ces irrégularités. Cette confusion n'existe heureusement plus dans l'esprit des praticiens et nos auteurs contemporains ont su établir un classe- ment judicieux entre les différents cas et entre les divers modes de traitement. Le traité le plus jeune en date est celui de notre très compétent collègue Martinier, dont c'est la deuxième édition, et il peut être considéré comme un document très complet, mis au point avec ordre et méthode. Il serait à désirer qu'un plus grand nombre de dentistes, que tous les dentistes, sinspirassent des méthodes contenues dans cet ouvrage, pour se livrer à ces importantes opérations qui tendent à corriger les anomalies des maxillaires et les irrégularités de position des dents. La bonne renommée de l'ortho- pédie dentaire y gagnerait et il ne faut pas nous dissimuler que les sceptiques sont encore nombreux, parmi le public et même parmi nos confrères, en matière de redressement. Beaucoup de praticiens, en effet, se sont heurtés à des difficultés réelles, non seulement pour procéder à l'arrangement des dents déviées, mais aussi, et surtout, pour conserver, dans l'avenir, les résultats acquis et les familles où les insuccès se sont produits en ont le souvenir cons- tant, sont plus qu'hésitantes à recourir au redressement pour d'autres J. d'argent. — CONTRIBUTION A l'ORTHOPÉDIE DES MAXILLAIRES l4l9 ■enfants mal partagés et portent le découragement et lincrédulité parmi leurs connaissances ou dans leurs relations. Ce fâcheux état de choses est la conséquence, en grande partie, •de la confusion qui est faite, par un trop grand nombre de praticiens, entre l'orthopédie dentaire et l'orthopédie des maxillaires; cela provient aussi de ce qu'ils ne distinguent pas les anomalies des maxillaires liées aux anomalies dentaires de ces dernières seules et, en général, de ce que Ton n'agit que sur reffet sans supprimer la cause, au lieu de modifier la cause avant ou pendant qu'on rectifie l'effet. Il en résulte que la plupart des redressements sont tentés directe- ment, en un seul temps, alors que bon nombre devraient être exécutés en deux et quelquefois en trois temps. Ainsi, dans la majorité des cas de prognathisme . le premier temps doit consister à rehausser l'articulation et, dans un grand nombre d'autres exemples d'antéversion, de rétroversion, de latéro version, de rotation sur l'axe, c'est par l'élargissement de l'arcade dentaire qu'il faudrait commencer. Vouloir, dans ces cas, régulariser d'emblée la position des dents, c'est se livrer à un travail difficile et le plus souvent inutile, puisque, la cause n'étant pas supprimée, le retour au type primitif est presque fatal et le résultat en tout cas imparfait. L'objet de notre travail est d'apporter une modeste contribution à cette première phase si importante dans l'orthodontie : l'expansion des maxillaires. L'extension des maxillaires a pour but de remédier à l'étroitesse ou atrésie des mâchoires. L'atrésie peut exister à tous les degrés depuis la forme la plus simple, s'éloignant fort peu du type normal, jusqu'à la plus complète, entraînant un rétrécissement considéral)le des cavités buccale et nasale. Nous ne nous étendrons pas plus longuement sur les considéra- tions qui militent en faveur de la préférence qu'il faut donner à la méthode du redressement des dents lié à l'expansion des maxillaires ; cette méthode tomlDc sous le sens et elle a déjà donné lieu à des discussions et à des publications aussi nombreuses qu'intéressantes et surtout probantes, et nous vous demanderons d'étendre un peu le débat et d'envisager plus particulièrement un cas spécial, bien qu'il se rencontre encore assez fréquemment. Chacun de nous, en effet, est souvent mis en présence de jeunes enfants ou d'adolescents qui présentent un habitus extérieur qui nous est connu. L'enfant est failsle de constitution et peu développé , il est pâle , maigre , triste , l420 ODONTOLOGIE inquiet et s'essoiifïle facilement; il nasonne, chante mal. est apathique, peu éveillé; mais ce qui, surtout, attire notre attention, c'est son faciès et Tétat de sa bouche. Les joues sont amincies, creuses; la face est anguleuse, le nez est petit et ses orifices, souvent bordes de mucosités séchées , sont rétrécis ; la lèvre supérieure est plus ou moins portée en avant par les incisives, qui se réunissent sur la ligne médiane en formant un angle aigu. Si la cavité buccale est ouverte, les arcades dentaires apparaissent très étroites, en ogive, plus ou moins accentuée , et la voûte palatine [)réscnte une élévation anormale, également ogivale ou comme enfoncée d'un coup de pouce. Cette disposition de l'apophyse palatine du maxillaire supé- rieur et de la lame horizontale du palatin crée une protubérance correspondante sur le plancher des fosses nasales et diminue d'au- tant la capacité du méat inférieur et, si nous ajoutons que les apo- physes montantes des maxillaires supérieurs sont plus rapprochées, entraînant les cornets moyens et inférievu-s près de la cloison médiane, nous nous rendrons compte du rétrécissement de la ca^àté nasale chez les sujets frappés de cette anomalie. Des symptômes fonctionnels et physiques se manifestent de bonne heure, et ceux-ci s'accentuent encore, si, comme il arrive le plus souvent, il se produit des végétations ou des tumeurs adénoïdes. Le conduit naso-pharyngien répond, en effet, aux deux fonctions de la respiration et de la phonation, et son rétrécissement ou son obsti'uction , même partielle, doivent en entraver l'accomplissement. Par suite de cette obstruction, la respiration nasale étant incom- plète , le malade y supplée par une respiration buccale proportion- nelle qui, n'étant pas physiologique, produit des désordi^es. A l'état normal, la respiration nasale a pour mission d'élever la température de l'air inspiré et de le saturer de vapeur d'eau ; de plus, le passage de l'air à travers les méandres et les nombreux replis de cette cavité, a pour conséquence de le débarrasser de toutes les impuretés qu'il peut contenir (poussières, débris orga- niques, etc.); mais, une fois cette respiration nasale supprimée ou rendue très imparfaite, la respiration buccale expose le petit malade à tous les inconvénients d'un air froid , sec . impur. La cavité nasale privée de son rôle physiologique devient le siège de rhinites chroniques, bientôt accompagnées d'hyperplasies ou de néoplasies adénoïdes, envahissant l'oritice naso-pharyngien et se propageant surtout dans le méat inférieur, qui est quelquefois totalement obstrué. Des maladies graves guettent ces enfants, qui sont des candidats à J. d'argent. — CONTRIBUTION A L ORTHOPEDIE DES MAXILLAIRES l42I la diphtérie, à la bronchite, à la tuberculose, au cancer; et qui deviennent un déchet social par leur inaptitude aux travaux intellec- tuels, aux professions manuelles et même à la collaboration à la défense nationale. Mais il n'entre pas dans le cadre de cette communication de retracer le tableau clinique qui résulte d'une pareille situation et nous pensons que notre court exposé expliquera suflisamment l'apparence chétive et maladive de ces déshérités et justifiera les efforts tentés pour y porter remède. Ajoutons cependant, à l'encontre de ce qui a déjà été exprimé, que nous pensons que l'atrésie des maxillaires supérieurs, du reste congénitale, nous paraît être la cause primordiale de tous les désordres qui se produisent dans la région nasale, au lieu d'en être la conséquence , mais que les productions adénoïdes qui surviennent peuvent influer à leur tour sur cette malformation pour l'accentuer, par des pressions latérales de chaque côté de la cloison médiane, dans le méat inférieur et accroître l'ogivalité de la voûte palatine. Les appareils imaginés et préconisés pour corriger cette grave malformation des maxillaires procèdent presque tous du même principe. Ils sont formés d'une plaque en caoutchouc dui'ci ou en métal, moulée sur la voûte palatine et partagée en deux longitudinalement. Ces deux segments sont réunis soit par des ressorts (tels les appa- reils de Coffin (1881), de Talbot, de Cecconi, etc.), soit par des tiges parallèles glissant à frottement doux dans des fourreaux appropriés, sous l'impulsion de fils enroulés autour des tiges (Francis Jean) ; soit par une double vis de Jack placée au point où doit être produit l'effort principal (tel est l'appareil de Kingsley). Si nous passons sous silence le travail publié par M. Robin sur cette question, c'est que les appareils qu'il préconise nous paraissent relever de la théorie plutôt que de la pratique et nous croyons en voir une preuve dans le soin qu'il met à leur refuser leur sortie du laboratoire. Ayant successivement fait appel à tous ces systèmes , depuis plu- sieurs années, c'est, en définitive, à l'appareil de Kingsley que nous avons donné la préférence , parce qu'il nous a paru posséder la plus grande précision dans la graduation ou dans l'arrêt de l'effort. Sa construction est simple, facile, rapide et peu coûteuse. Mais, si son principe est excellent, sa combinaison laisse pourtant à désirer et nous n'avons pas tardé à nous en apercevoir. Réunies par une double vis de Jack , sans autre soutien , les deux valves ne sont parfaitement rigides qu'au début, lorsque les vis sont 1^22 ODONTOLOGIE totalement engagées dans les écrous, et elles acquièrent une mobilité de jslus en plus grande, au fur et à mesure de la sortie des vis. Cette mobilité elle-même fatigue le fdet des vis , qui se disloquent telle- ment, que les enfants peuvent les mettre en mouvement avec la langue, naturellement dans le sens qui diminue la pression. Ce résultat se produit encore bien plus tôt, lorsque le mécanicien, sous prétexte de livrer un travail bien fini , a soigneusement poli au tour la vis avec ses filets. C'est pour remédier à cet état de choses que nous avons apporté à l'appareil de Kingsley des modifications qui en ont fait , à notre sens , un engin aussi parfait que possible pour obtenir l'extension du maxillaire supérieur. Ces modifications , reproduites dans le dernier traité de clinique de prothèse de Martinier , ont pour but d'augmenter l'étendue et la puissance de son action et même d'exagérer à volonté la force agis- sante, soit à la partie antérieure de la plaque , soit à la partie posté- rieure. Notre nouveau dispositif permet en outre de se servir plus long- temps du même appareil, qui conserve toute son action et toute sa rigidité pendant toute la course de la vis de Jack. Cette rigidité sup- prime complètement les oscillations de l'appareil et, par suite, l'usure des filets de la vis, qui peut être employée jusqu'au bout sans se dérégler et qui résiste aux sollicitations de la langue. L'appareil peut même servir temporairement à la contention des résultats acquis Notre modification consiste dans l'adjonction à la vis d'extension de deux coulisseaux parallèles à la vis. Ces coulisseaux sont com- posés d'un tube cylindrique et d'une tige à frottement lisse, plus ou moins serrée, suivant l'effet à obtenir. Le tube a ses extrémités par- tao-ées en trois ou quatre segments, recourbés en dehors et insérés dans le caoutchouc. Lorsqu'on partage l'appareil en deux, le trait de scie divise également en deux les deux tubes et l'on insère ensuite les tiges dans ces derniers. Si l'on veut obtenir un écartement ])\vls accentué à l'avant qu'à l'arrière, ou réciproquement, on n'emploie qu'un seul coulisseau. à tio"e plus ou moins libre , susceptible môme de se courber et qu'on place à l'endi-oit qui ne doit être que peu dilaté et où il joue, en quelque sorte . le rôle de charnière , le vérin étant fixé dans l'axe de la x)artie qui doit être la plus élargie. Permettez-nous, à présent que nous nous croyons pourvu d'un appareil fort, rigide, indéréglable, d'examiner ce qui se passe lorsque les deux ailes de cet ai)pareil s'éloignent l'une de l'autre, sous l'in- fluence de la pression de la vis convenablement actionnée. J. d'argent. — CONTRIBUTION A l'oRTHOPÉDIE DES MAXILLAIRES l423 Dans leurs grandes lignes, les résultats sont les suivants : toute la masse des maxillaires supérieurs subit lentement un déplacement latéral, qui se fait même sentir au niveau de l'apophyse zygomatique et dont l'importance atteint son maximum au point d'application de la force agissante, pour décroître et finalement s'éteindre, au fur et à mesure qu'on s'en éloigne. Ce déplacement a certainement un retentissement sur les os voisins, auxquels les maxillaires supérieurs sont suturés. De plus, et le phénomène a été constaté et signalé par les différents auteurs qui se sont occupés de la question, l'apophyse palatine et la lame horizontale de l'os palatin sont l'objet d'un léger abaissement. Il en résulte que la capacité de la cavité nasale augmente dans deux sens, la hauteur et la largeur. Maintenant, serrons la question de plus près et suivons l'action progressive de l'appareil en tension. Nous avons une voûte palatine en ogive , sur laquelle une solide base en caoutchouc durci a été étroitement moulée, depuis le sommet jusqu'au bord alvéolaire. Si nous exerçons simultanément une double poussée latérale, ou bien elle tendra à écarter l'une de l'autre les apophyses palatines des maxillaires inférieurs et les lames horizon- tales des palatins et à rompre la suture médiane, ou bien la suture cédera lentement par production de tissu nouveau. Le premier cas serait désastreux et le second aurait pour résultat d'accentuer le rétrécissement des méats inférieurs. Mais, soyons sans inquiétude ; dans la pratique, la suture résiste parfaitement et c'est l'appareil, dont la rétention cède le pas à l'effort de la vis. qui glisse et s'abaisse légèrement. Cette déviation minime est inaperçue, quoique appréciable au niveau des dents. Dès lors, la pression n'est plus complète au sommet de la voûte et elle s'exerce surtout sur ses parties latérales. Toutefois, la résistance sera encore plus ou moins grande, et elle retardera les résultats si elle n'y met un complet obstacle. Il nous a paru paradoxal que l'on emploie , pour favoriser l'abais- sement du plancher nasal, un appareil construit comme s'il devait au contraire lui servir de soutien et lui éviter toute dé[)ression et nous avons modifié notre appareil de telle sorte qu'il favorise cet abaissement, au lieu de lui résister. Nous avons, en conséquence , supprimé tout contact avec le som- met de la voûte palatine, en confectionnant l'appareil sur un modèle en plâtre dont cette région a subi, par une addition de stéarine, une rectification de courbure convenable. 1^24 ODONTOLOGIE Avec notre appareil à voûte abaissée, récartement latéral est plus rapide, par suite de la suppression de certaines résistances et il est quelquefois si actif qu'une malade, âgée de i4 ans, accusait, au bout de quinze jours, une sensation douloureuse sur toute l'étendue du sommet jjalatin, au pourtour de l'os nasal et jusque vers l'apophyse zygomatique. Le but de cette communication est donc de vous montrer notre nouvel appareil extenseur et abaisseur de la voûte palatine et quel- ques résultats acquis. Bien que les deux opérations aient des liens étroits et soient même souvent inséparables, nous n'aborderons pas la question d'élargisse- ment du maxillaire inférieur, ce qui nous entraînerait au-delà des limites de temps accordées pour une communication. Disons cependant que nous avons également construit, pour élar- gii' le maxillaire inférieur, des appareils à action et à l'igidité obtenus à l'aide des vis de Jack et de coulisseaux. Nous avons l'honneur de vous en soumettre deux spécimens, pour prendre date, en vous pro- mettant une communication à ce sujet à la rentrée de la Société d'Odontologie de Paris. M. Julien VICHOT A Lvon PROTHÈSE VÉLO-PALATINE DANS UN CAS DE DISPARITION TOTALE DE LA DENTITION AU MAXILLAIRE SUPÉRIEUR [61j.928.6J — Séance du 6 août — En 1901, au Congrès d'Ajaccio, je fus vivement intéressé par le nouvel appareil Delair et par son ingénieux mécanisme. Quelques mois après, en avril 1902, lors des assises annuelles de la Fédération dentaire nationale, j'eus l'occasion, dans une séance de démonstrations de la Société d'Odontologie de Paris, de voir fonc- tionner cet appareil. Cette démonstration faite sur une malade me permit de comprendre la théorie de l'appareil, son fonctionnement et d'en apprécier les résultats obtenus. Au Congrès de Montauban, mon attention fut attirée par la méthode phonétique, que vous avez entendue et dont vous avez pu J. VICHOT. — LA DENTITIOM DU MAXILLAIRE SUPÉRIEUR 1/^20 lire l'exposé dans les comptes rendus de cette session. Cette méthode rend possible une phonation normale plus rapide que quand le sujet est livré à lui-même. Je décidai donc, le cas échéant, d'employer l'ajjpareil et la méthode Delair. Il y a quelques mois, la malade faisant l'objet de cette communi- cation se présente à mon cabinet avec un cas tout particulier. Cette malade, jeune fille de 19 ans, est porteur d'une lésion con- génitale très vaste : absence totale de voile et fissure palatine de deux centimètres environ de large, de forme rectangulaire, s'éten- dant en avant jusqu'à environ un centimètre de la crête alvéolaire sans trace de bec-de-lièvre; elle a vu disparaître j)rogressivement toutes ses dents de la mâchoire supérieure. Dents et racines ont été extraites il y a environ deux ans et la malade porte, depuis cette époque, un appareil ordinaire composé d'une pièce palatine de res- tauration dentaire munie d'un prolongement en caoutchouc mou. Ce prolongement descend très bas et rétrécit la cavité naso-pharyn- gienne; la malade parle mal et l'appareil ne tient pas en place; il n'est maintenu que par les muscles de la langue, des joues et des lèvres. Dans ce cas, l'appareil Delair est tout indiqué, mais je me pose alors cette question : pourra-t-il fonctionner? comment le faire tenir? La malade . faute de temps , ne se résoud pas à faire extraire les mauvaises dents et racines qu'elle a au maxillaire inférieur et par conséquent la rétention au moyen de ressorts est impossible. Les cornets et la cloison étant d'un volume normal comme on peut le voir sur le moulage, je ne pouvais songer à combler les fosses nasales comme l'indique le D'^ Martin dans un cas de gueule de loup avec atrophie des cornets et de la cloison. J'eus un moment l'idée d'appliquer le procédé de Brandt de Berlin, c'est-à-dire une poche en caoutchouc mou gonflée après la mise en place de l'appareil — procédé inauguré, d'ailleui's, récem- ment par mon ami le D"" Pont pour la rétention d'un appareil de prothèse restauratrice du maxillaire supérieur — ; mais, pas plus que le procédé du D"" Martin, je ne pouvais l'employer, car il aurait obstrué les fosses nasales et diminué le volume d'air qui doit v passer. J'eus alors l'idée de faire au dos de l'appareil un prolono-ement horizontal en caoutchouc mou des fausses nuupieuses. Ce prolonge- ment fait tout le tour de la fissure, et s'y insinue. Je fis d'abord une plaque d'essai. En la plaçant dans la bouche 90* I/J26 ODONTOLOGIE les deux prolongements latéraux cèdent facilement sous la pression , se rejoignent pour pénétrer dans la fissure, puis s'écartent et reprennent leur position première en s' appuyant sur les bords internes de la fissure. J'essai cette plaque, le résultat fut parfait. Il ne me restait alors, ayant un moyen de rétention, quà faire l'appareil définitif; le voile a été fait d'après le procédé Delair, c'est-à-dire en caoutchouc rose ordinaire, cuit d'une façon spéciale pour lui conserver sa souplesse. Pour faire cet appareil, une empreinte de la voûte palatine seule- ment est suffisante et il n'est pas nécessaire d'avoir l'empreinte totale de la cavité naso-pharyngienne ; cette empreinte est souvent difficile à prendre et je n'ai pris celle-ci que pour vous montrer l'étendue de cette lésion, la cavité naso-pharyngienne, les cornets et la cloison. Une fois rap[)areil définitif mis en place, la voix de ma malade est immédiatement modifiée. Selon la théorie émise par Delair, en avril dernier, à Madrid, le clapet, muni de son tuteur, augmente à volonté la cavité de résonnance buccale et par conséquent l'acoustique. En même temps, la résonnance dans la caverne pharyngo-nasale est diminuée par suite de l'interception du passage de la colonne d'air expiré du larynx lorsque se produit l'éclatement du son, avant que par la volonté le sujet le transforme en parole par l'entrée en action des organes essentiels et accessoires de la parole. Ce cas peu ordinaire de disparition totale du système dentaire à la mâchoire supérieure alliée à une fissure palatine de cette importance, surtout sur un sujet de cet âge, ma permis d'a[)pliquer l'appareil et la méthode Delair en employant ce moyen do rétention bien simple et qui, je crois, n'a pas été encore employé. M. le D' GODON Directeur de TEcole dentaire de Paris REDRESSEMENTS TARDIFS [ ani'il — J'ai eu l'honneur de présenter au premier Congrès dentaire inler national de Paris, 1889, une communication sur ce sujet, qui se ter minait par la conclusion suivante : D^ GODON. — REDRESSEMENTS TARDIFS 1427 1° Le redressement des dents peut être entrepris sur des adultes, mais la durée du traitement est en raison directe de Vâge du sujet, ainsi que le maintien de l'appareil de contention. Obs. I. — La personne qui faisait Tol^jet de cette communication était une jeune artiste âgée de 26 ans, qui présentait à la mâchoire supérieure une série d'anomalies d'arrangement des dents de la bouche, comme vous le verrez par le modèle n" i, en date du mois de décembre i885. Cette patiente était assez incrédule sur la possibilité du redressement de ses dents en raison de son âge et de l'avis négatif cpie lui avaient doiuié les dentistes qu'elle avait déjà consultés à Vienne et à Paris. Malgré tout, je la décidai à entreprendre le traitement. Je pratiquai l'extraction des premières bicuspides supérieures droite et gauche alin de faire de la place, puis je lui appliquai mi appareil de redressement ordùiaire destiné à agir sur les dents antérieures en les repoussant en avant , en lui recommandant de revenir me voir réguliè- rement deux fois par semaine. Je ne la revis que huit ou dix mois après €t alors que je croyais quelle avait renoncé au traitement. Elle avait pourtant porté l'appareil qui avait projeté les dents en avant en les écar- tant ; néanmoins je pus les ramener dans une position relativement réguUère, comme vous le verrez i)ar le modèle n" 2 en date de février 1887. Je plaçai un appareil de contention, je soignai pendant quelque temps cette malade un peu irrégulière, puis je ne la revis plus pendant plu- siem's amiées, lorsqu'en 1900, c'est-à-dire quatorze ans après, elle revint me consulter pour quelques dents cariées. J'examinai sa boviche avec un certain intérêt, pour me rendre compte des suites de mon redressement, et je fus heureux de constater que les résultats obtenus quatorze années auparavant s'étaient maintenus intégralement, comme vous pomez le voir par le modèle n" 3 en date du 19 septembre 1900. Il m'a paru intéressant de vous communiquer cette observation, étant donné qu'il s'agit d'un redressement tardif sur la possibilité duquel à cette époque on avait émis des doutes, doutes qui portaient etites molaires. J'ai dû, du côté gauche, afin de rétablir l'articulation, appliquer deux couronnes sur la deuxième petite molaire et la première grosse molaire mférieure qui étaient très cariées. Comme vous le voyez par le modèle n^ 5 pris le 20 juillet 1903, les résultats sont très satisfaisants. Ils ont été obtenus en un peu plus d'une année, malgré les difficultés très grandes du cas, grâce au concours que m'a prêté la patiente, qui comprenait toute l'importance et les diffi- cultés du traitement. On peut dire que les résultats se conserveront par suite de la présence des molaires et des conditions nouvelles de l'engrène- ment des dents antérieures et de celui résultant de l'allongement des dents et de la présence des couronnes. De ces divers redressements, il résulte certaines observations inté- ressantes : i" La persistance des résultats obtenus après quatorze ans chez une patiente âgée de 26 ans; 2° Le redressement par le procédé des fils chez des patientes de 35 et de 38 ans et le maintien des résultats obtenus; 3" Le redressement d'vm prognathisme apparent chez une malade de 42 ans; 4° L'allongement apparent des dents pendant le cours du traitement. Il m'a paru bon de vous signaler ces diverses observations, qui sont moins rares aujourd'hui depuis les travaux de Younger, mais qui n'en olTrent pas moins quelques particularités intéressantes. I/î3o ODONTOLOGIE M. J. DE GROËS Professeur suppléant à l'École dentaire de Paris ANOMALIES DENTAIRES ACQUISES [f>^'jM\ — Séance (lu S août — Les anomalies congénitales ayant été suflisamment étudiées et classées de façon magistrale en de maints travaux , pour que ce ne soit pas de ce côté, que notre observation ait été dirigée, nous avons été attiré au contraire vers les anomalies dentaires acquises, qui, jusqu'ici, tout au moins à notre connaissance, n'avaient été l'objet d'aucun travail. Elles sont pourtant nombreuses, importantes, puis- qu'elles impriment dans presque toutes les bouches quelles frappent l'accident pathologique ou physiologique que notre profession nous donne le devoir de réparer ; nous voyons donc la nécessité qu'il y a de définir et de classer ces anomalies pour pouvoir les enseigner avec méthode à nos élèves. Définition. — Nous entendons par anomaUes dentaires acquises : les déformations, les déviations et les déplacements que peuvent prendre après l'évolution dentaire complète les dents et les maxillaires sous l'influence de différents états anormaux, locaux ou généi'aux. Les causes de ces anomalies sont nombreuses et peuvent varier à l'infini ; mais, comme il est indispensable de les classer, nous pouvons dire qu'elles se i-ésument en trois ordres : i^' Causes d'ordre physiologique 2® — — pathologi(jue 3^ — ^ opératoire 1° Causes d'oj^dre phjsiologiqiie. —CeWes-ci sont fréquentes, puis- qu'elles sont occasionnées par une sénilité précoce qui provoque les déviations, les élongations et la chute prématurée des dents. a° Causes pathologiques. — Les causes pathologiques peuvent être divisées en deux catégories : les causes locales, parmi lesquelles il faut ranger les traumatismes non chirurgicaux, les gingivites, les stomatites, les ostéites et les nécroses; — les causes générales qui J. DE CUOËS. — ANOMALIES DENTAIRES ACQUISES l43l comprennent les intoxications, le diabète, la syphilis, T albuminurie, le tabès dorsalis et d'autres états généraux. 3° Causes opératoires. — Ces dernières sont encore plus nom- breuses ; elles sont du domaine de la chirurgie générale : opérations exécutées sur les maxillaires ; ou du domaine de la chirurgie FiG. I. l432 ODONTOLOGIE dentaire : extraction des dents. L'extraction d'une ou de plusieurs dents amène , en efTet , le déplacement des dents voisines , soit par la tendance que celles-ci ont toujours à se desserrer, soit par l'élon- gation de la dent antagoniste qui ne se trouve plus soutenue par l'articulation. Classification. — Les diverses causes que nous venons d'énoncer produisant sur les maxillaires l'articulation et les dents des effets multiples, nécessitant des soins différents, il était de toute impor- tance que nous les divisions en catégories spéciales, qui nous donnent la classification suivante : A — Anomalies des l A — de forme maxillaires ^ B — de dimensions / A — par iml)rication B. — AnomaLies d'ar- j B — par béance ticulation dentaire. ^ C — par opisthognathisme ( D — par prog-natliisme ;' A — par déplacement. Siège C — Anomalies des dents ] B — par projection. antéroversion rétroversion latéroA^ersion rotation sur l'axe A. Anomalies des maxillaires. — L'extraction ou la chute des dents provoquent dans l' architecture des mâchoires des variations de forme et de dimensions ; ces variations ont pour cause l'ostéite raréfiante qui provoque une résorption plus on moins accentuée du bord alvéolaire. Un maxillaire partiellement dépourvu de dents présente des encoches de profondeur variable aux endroits où les dents manquent : l'arcade dentaire peut prendre une forme très irré- gulière, capable de rendre dillicile sa restauration prothétique (fig. 1-2). Quand le maxillaire est totalement dépourvu de dents, l'arcade se trouve diminuée, à tel point que les joues et les lèvres n'ont plus de soutien (fig- 3). B. Anomalies d'articulation. — Elles peuvent succéder aux ano- maUes des maxillaires que nous venons de décrire ; ou bien elles ])euvent être seulement sous la dépendance de déviations dentaires ; du reste, en les passant successivement en revue, nous étudierons leurs causes • J, DE CROËS. — ANOMALIES DENTAIRES ACQUISES 1433 a). Imbrication. — L'imbrication est l'anomalie constituée par l'écrasement de l'articulation ; elle a pour cause l'absence de dents i cette absence peut être totale ou partielle. S'il Y a absence totale de dents, les crêtes alvéolaires tendent à se rapprocher jusqu'à ce qu'il y ait contact. La rencontre des bords FiG. 2. alvéolaires amène dans les muscles masticateurs, dans les muscles peauciers de la face, dans l'articulation temporo-maxillaire elle- même, des modifications considérables; elle ï)rovoque aussi une diminution de hauteur dans le diamètre vertical de la face, diminu- tion qui enlève l'harmonie de l'esthétique faciale (fîg\ 4)- L'absence partielle de certaines dents peut provoquer l'anomalie que nous appelons imbrication. Lorsque les molaires manquent, ou 1434 ODONTOLOGIE même lorsqu'elles ne se rencontrent plus, liniln-ication peut se pro- duire : les dents antérieures ne sont pas capables de s'opposer à la production de l'abaissement de l'articulation, car les supérieures^ sont chassées par les inférieures, ces dernières ollrant à lalfaisse- ment une résistance formée par la connexité de leur courbure dans le sens de l'effort (fig. 0-6). Il n'est même pas nécessaire que toutes les molaires restante» n'aipnt pas d'antagonistes ; l'imbrication peut se produire s'il reste deux ou plusieurs molaires se rencontrant; certains muscles masti- cateurs amènent alors une rotation de l'articulation sur ces molaires restantes et cette rotation a pour résultat un écrasement dans les rapports des dents antérieures, supérieures et inférieures (fig. 8). B. Béance. — La béance acquise est constituée par mi manque d'occlusion entre les dents antérieures, inférieures et supérieures; entre les dents, les mâchoires fermées, il existe un vide. Ce manque d'occlusion peut avoir deux causes : 1° Il peut être dû soit à une élongation physiologique de molaires séniles, qui rehaussent l'articulation ; 2° Soit encore à la projection en avant des incisives, sous l'influence de la même cause atteignant primitivement ces dernières. Opisthognathisme . — Quant un maxillaire seul est dépourvu de toutes ses dents ou du moins des antérieures, la résorption alvéo- laire reporte en arrière de sa place primitive le bord alvéolaire et la mâchoire opposée prend alors l'apparence d' opisthognathisme (fig. 4-6). Prognathisme. — Cette déformation est produite par la projection en avant des dents antérieures d'un maxillaire, généraleuient le supé- rieur, par les dents antérieures inférieures lorsque les molaires n'ont pas d'antagonistes ou lorsqu'elles n'existent plus (fig. "j-S). C. Anomalie des dents. — Les dents subissent isolément, sous l'influence d'élongation, d'engrènement mauvais ou, par suite de la disparition de dents voisines , des phénomènes de déviations dans leurs positions régulières. Elles peuvent être complètement déplacées et prendre par exemple la place d'une dent voisine extraite. C'est alors une anomalie de siège acquise. Nous en voyons un exemple dans l'extraction de la dent de 6 ans, dont la dent de 12 ans vient prendre la place lors de son évolution. Les exemples de ces déplacements acquis sont nombreux ; nous ne J. DE CROËS. — ANOMAI>IES DENTAIRES ACQUISES l435 croyons pas utile de les énumérer en détail; nos figures en contiennent quelques types intéressants Les dents peuvent être complètement déplacées; elles subissent des déviations sur leur axe d'implantation; leur couronne est pro- jetée dans une direction quelconque, soit en dehors, soit en dedans de l'arcade, à gauche ou à droite de leur place primitive. Elles peuvent subir aussi des phénomènes de rotation toujours liés aux anomalies de projection (fig'. j , Q, lo, 1 1, 12, i3, 14^ i5, 16). Toutes les anomalies acquises des dents et des maxilllaires que nous venons d'étudier et qui rappellent les anomalies congénitales s'accompagnent de déformations plus ou moins apparentes, toujours nuisibles à l'esthétique faciale. Ces déformations esthétiques sont dentaires ou faciales. Les déformations faciales sont les plus visibles, car elles sont plus apparentes généralement pendant la mastication et l'élocution. Celles qui provoquent les plus grands changements sont les ano- malies d'articulation par imbrication, surtout celles dues à l'absence totale ou partielle des dents. Le manque total des dents sur le maxillaire supérieur amène de roj)isthognathisme de ce maxillaire; la lèvre supérieure est en retrait et elle ijeut être plus ou moins couverte x^ar les dents inférieures. Si c'est le maxillaire inférieur qui est totalement dépourvu de dents, le menton est fortement saillant en avant. IV. Déformations qu'elles provoquent. — Le manque partiel des dents peut porter sur un seul côté des maxillaires ; ce côté de la face se trouve alors considérablement diminué. Les déformations des dents détruisent d'une façon moins appa- rente l'esthétique faciale; elles sont cependant appréciables et pro- voquent une gêne notable, lorsque l'individu fait usage de la parole. L'élongatiori des dents antérieures, jjar exemple, s'accompagne du soulèvement de la lèvre supérieure et ce soulèvement découvre, lorsque l'individu parle, les changements survenus dans la disposi- tion régulière des arcades dentaires. Ces déformations dentaires, auxquelles s'habituent ceux qui les possèdent, contribuent à leur faire jjerdre leur caractère de force, de jeunesse et de santé. Aussi est-il indispensable de remplacer rapidement les pertes de substance , de rétablir les articulations anormales et d'harmoniser l'aspect général des dents, absentes ou déviées, avec les divers moyens que la pro- thèse met à notre disposition. l436 ODONTOLOGIE M. le D^ DALBAN A Paris SUR L'INFUENCE DES DISPOSITIONS ANATOMIQUES DANS LA MARCHE DES ABCÈS DENTAIRES [(ii:.23:6i:.6] — Séance du S août — Les abcès dentaires peuvent se diviser en deux grandes classes : ceux qui évoluent à l'intérieur de la cavité buccale, ceux, au con- traire, qui se font jour au dehors, c'est-à-dire les abcès cutanés. Parmi les premiers , les abcès vestibulaires sont les plus fréquents ; ce sont eux, d'ailleurs, qui forment la majorité des abcès d'origine dentaire. Il nous a paru intéressant de rechercher les causes qui favorisent ces deux localisations du pus, soit dans le sillon gingivo-labial, soit à la j)eau, car, si les abcès vestibulaires évoluent souvent sans grand dommage, il n'en est pas de même des abcès cutanés qui, avec leurs fusées lointaines dans les régions cervicales, thoraciques ou céré- brales, ont à leur actif des accidents mortels. Cette prédominance des abcès vestiljulaires n'a pas été sans frapper les observateurs et différentes raisons ont été données pour l'expliquer. On a invoqué l'influence de la pesanteur, qui favoriserait au maxil- laire inférieur la formation d'abcès cutanés, le pus. par son propre poids, ayant tendance à évoluer en dessous du sillon gingivo-labial. Cette raison n'est pas exacte. On constate, en effet, souvent, des abcès dentaires ayant une marche ascendante, évoluant de bas en haut, loin du foyer initial. Dans l'économie, d'ailleurs, ce fait n'est pas rare et l'on voit des collections purulentes volumineuses qui n'obéissent nullement, dans leur évolution, aux lois de la pesanteur. On a prétendu également à tort que , suivant la localisation de la périostite au sommet, ou sur les côtés de la racine, on avait soit une ouverture cutanée, soit une ouverture gingivale. Or, il n'y a pas de périostite latérale sans périostite du sommet, saui dans la pyorrhée, l^om-tant, et cette affection n'est pas celle qui engendre le plus sou- vent des abcès dentaires. Dans la périostite, complication du qua- trième degré de la carie, l'infection ayant suivi la voie apicale, le T)^ DALBAN. — LA MARCHE DES ABCÈS DENTAIRES l/^'i'J lïérioste va s'enflammer à ce niveau et de là gagner les parties laté- rales; mais le maximum d'infection d'intensité des phénomènes se trouvera toujours au sommet de la racine. On pourrait plus vraisemblablement invoquer la différence d'épaisseur des maxillaires dans leur portion alvéolaire, permettant la perforation au point le plus faible. Le plus souvent, cette perfora- tion se fait au niveau de l'extrémité radiculaire , point de départ de l'infection alvéolaire. La grande raison invoquée par tous les auteurs est la différence de longueur entre les racines et le sillon gingivo-labiàl : des racines plus courtes que le sillon donneraient des abcès gingivaux, des racines plus longues des abcès cutanés. Or, comme les racines sont normalement plus courtes que le sillon, ainsi s'explique la fréquence des abcès vestibulaires. Cette raison séduisante ne doit être admise que si on la complète par la suivante qui, à notre avis, doit dominer toutes les autres. L'ouverture de l'abcès, soit à la gencive, soit à la peau, est déterminée par le rapport des extrémités radiculaires avec les insertions muscu- laires du rebord alvéolaire. Or, les muscles de la joue s'insèrent précisément aux maxillaires, à \)eu près au niveau du fond du sillon gingivo-labial. On a pu dire ainsi que la différence de longueur entre le sillon et les racines jouait le principal rôle dans la marche du pus; mais en réalité ce rôle n'est qu'apparent. L'influence musculaire est toute naturelle. C'est une règle de pathologie générale, en effet, que le pus, dans son évolution, obéisse aux plans musculaires et aponévrotiques : il ne peut en être autre- ment pour les abcès dentaires. Les rebords alvéolaires sont sertis par une série d'insertions mus- culaires, parmi lesquelles celles du buccinateur , en dehors , sont les plus importantes. Les insertions osseuses de ce muscle se trouvent au niveau des trois grosses molaires et des deux prémolaires. Le buccinateur est renforcé par d'autres muscles , dont les inser- tions, tout en étant plus éloignées du rebord alvéolaire, ont néan- moins une influence sur la marche dvi pus. Au maxillaire inférieur ce sont les attaches osseuses des muscles masséter, triangulaire des lèvres, carré du menton. Au maxillaire supérieur ce sont les muscles canin, myrtiforme, les deux élévateurs et les deux zygomatiques. Si les extrémités des racines sont situées sur un plan supérieur à ces insertions musculaires (nous parlons, en ce moment-ci, du maxil- laire supérieur), l'abcès évoluera forcément hors de la cavité buccale, I/J38 ODONTOLOGIE les muscles formant une barrière entre le pus et la bouche. Au con- traire, si les extrémité radiculaires sont en dessous des insertions, l'abcès sera gingival, évoluera dans le vestibule. Si nous n'admettions comme influence sur la marche du pus que la différence de longueur entre les racines et le sillon, dans les cas de racines plus longues que le sillon, l'abcès devrait toujours évoluer à la peau. Or, il n'en est rien et nous avons constaté maintes fois des exceptions ; c'est que précisément les insertions musculaires du rebord alvéolaire ne correspondent pas forcément au fond du sillon €t qu'une racine plus longue que le sillon peut fort bien avoir, malgré cela, son extrémité radiculaire au dessous de l'insertion du buccinateur. par exemple, au maxillaire supérieur. Un autre fait va nous prouver également que les dispositions musculaires ont une influence primordiale et presque exclusive sur la marche du j)us. Nous avons effectué une série de mensurations de sillons gingivo- labiaux. Nous avons étaljli des moyennes, donné des longueurs minima et maxima et, en comparant ces longueurs avec celles des racines des dents, d'après les tableaux de Black dans son anatomie dentaire, nous sommes arrivé aux conclusions suivantes. Normale- ment les racines sont plus courtes que le sillon, sauf pourtant au maxillaire inférieur, au niveau des grosses moUaires. Les trois grosses molaires inférieures, la dent de sagesse surtout, ont leurs racines plus longues que le sillon. Le sillon ginvivo-labial est plus profond au maxillaire supérieur qu'au maxillaire inférieur. Il atteint son maximum au niveau des canines , son minimum au niveau des dents de sagesse. Puisque les grosses molaires inférieures ont leurs racines plus longues que le sillon à ce niveau, tous les abcès qu'elles engendre- raient devraient forcément évoluer à la peau. Or, il n'en est rien et cela précisément parce que les insertions du buccinateur sont sou- vent sur un plan notablement inférieur au fond du sillon. De même, la fi'équencc des abcès cutanés dus à ces dents s'explique également, le buccinatem* formant souvent une barrière entre le pus et la cavité buccale. Cette influence musculaire est encore démontrée par les considé- rations suivantes. Le buccinateur, dont l'action est la plus immé- diate, n'exerce pas son influence au delà des prémolaires, point où finit son insertion osseuse. Plus avant ce sont les autres muscles décrits, triangvdaire des lèvres, carré du menton, qui agissent. Or, il existe un petit espace de deux à trois centimètres, entre le bord D"" DALBAN. — "LA MARCHE DES ABCÈS DENTAIRES 1489 nntérieur du masséter et le bord postérieur du trianjçulaire , espace dans lequel ne se trouve aucune insertion. A ce niveau, le pus, n'étant plus gêné dans son évolution par une barrière musculaire, pourra fuser au loin ; ou au contraire un abcès, primitivement situé au dessous du sillon ginoivo-labial , pourra néanmoins revenir fatre saillie dans le vestibule de la bouche, aucune barrière ne se trouvant entre lui et la cavité buccale. L'influence des dispositions anatomiques que nous venons de signaler pour les abcès vestibulaires s'applique également aux abcès évoluant du côté des faces internes des maxillaires supérieur et inférieur. Sur la face interne du maxillaire inférieur se trouve un muscle puissant transversalement étendu, le mylo-hyoïdien, qui établit une distinction très nette entre les abcès qui se développent soit au-dessus, soit au-dessous de lui. Les premiers vont évoluer vers le plancher de la bouche, les seconds vers la région sus-hyoïdienne. Si le pus contenu dans l'alvéole perfore celle-ci au-dessus du mylo- liyoïdien, nous aurons un abcès sub-lingual, au-dessous un abcès sus-hyoïdien. Ces abcès sont relativement rares, par suite de la disposition des racines et de l'épaisseur moindre des maxillaires en dehors. Dans les abcès palatins, le pus n'obéira aux dispositions muscu- laires que si l'on est en présence d'un abcès du voile du palais. Là, f. — LA MARCHE DES ABCÈS DENTAIRES l44l pus s'échappe par une voie toute ti'acée, au niveau d'un point faible, véritable fontanelle ? Ne voyons-nous pas au crâne les méningocèles, les encéphaloeèles faire saillie à l'extérieur par les sutures des divers os du crâne? Ajoutons aussi que cette soudure intermaxillaire est beaucoup plus nette à la face palatine qu'au plancher des fosses nasales. Si nous considérons maintenant l'incisive latérale sur un maxillaire d'adulte , nous voyons que sa racine est beaucoup moins perceptible sur la face externe de l'os que les racines de l'incisive centrale et surtout de la canine. Cette situation profonde rapproche donc cette dent d'une ouverture palatine. Cette situation postérieure est peut- être due également à une notion embryogénique. On sait que les dents permanentes naissent d'un bourgeonnement du cordon primitif qui a servi à former les dents temporaires ; or , ce bourgeon prend naissance en arrière et les dents permanentes une fois formées se trouvent placées à la face postérieure des dents temporaires. Au moment de l'éruption des dents permanentes les incisives laté- rales ne viennent qu'après les incisives centrales, qui par leur volume ont déjà occupé une grande partie de l'espace destiné aux incisives latérales ; de plus , quand l'incisive latérale fait son appari- tion, la canine de lait, qui ne tombe que plus tard, est encore en place. Donc la dent est gênée à la fois des deux côtés; c'est peut-être pour cela qu'elle garde cette direction postérieure qui , par suite de la disposition spéciale de l'os intermaxillaire, favorisera encore, pour cette dent, la formation de fistules palatines. Telles sont les diverses influences qui paraissent exercer une action sur la marche des abcès dentaires. Ce sont les dispositions anatomiques qui jouent le principal rôle, en particulier la situation des plans musculaires et aponévrotiques de la région. Ce sont eux qui guident le pus dans son évolution et qui favorisent la formation soit d'abcès vestibulaires ou sub-linguaux , soit d'abcès cutanés. Pour les abcès palatin le pus est guidé par la disposition spéciale de la mnqueuse et du périoste dans cette région, 91* TABLE ANALYTIQUE Dans cette table, les nombres qni sont placés après la lettre p se rapportent aux pages de la première partie, ceux placés après l'asté- risque î se rapi^ortent à celles de la deuxième partie. Abattoirs publics, p. 4ii, - i255. privés, p. 4i2. Abaques, p. 112, - i3o. Abbaye de Moissac, p. 420. Abbaye Saint-Aubin d'Angers, p. 423. Abcès dentaires, p. 433, - 1486. Abdomen, p. 272, Abris sous roches, p. 232, 235, 245. Accidents du trai'ail, p. 270. Acclimatation des pommiers, p. 208. des mollusques marins , p. 223 , Accouchement, p. 237. Acide sulfureux, p. 416, - 1277. Acier au nickel, p. 116. Actinique (Intensité) de la lumière, p. 171, 4i4- Actinomycose, p. 429. Actinomyxidies, p. 228. Adrénaline, p. 32i, 429, 434* Adultes (Cours d'), p. 407. Afrique occidentale, p. 218, 384, 388, *736. Afrique du Sud, p. 4ifi, - 1277. Afrique tropicale, p. 273, 2 i025. Agriculture, p. 388, 409. Agronomie, p. 371, £ iii3. au Congrès de Berlin, p. 377. Ain, p. 235, - 823. Alhe (Loi de 1'), p. i83. Albert-Weill (D' E.). — Paralysie infantile, p. 323. Discussion sur le cancer, p. 34o. Albuminuries, p. 273. Alcool, p. 375, 378. Alcyopiens, p. 224. Algérie, p. 200. p. 208. p. 240. Alignements, p. 238. Alimentation, p. 226, - 793. de l'homme, p. 411, * 1200. minérale, p. 212, £ 720. ' des indigènes de la Rhodésie, p. 416, £ 1277. Allagnon, p. 244, - 876. Allard (Arboretum de M.). — P. 209. Arbres exotiques plantés dans les villes, p. 2i5. Allemagne, i>. 194, 377, * 670. Allui>ions quaternaires, p. 244, 893. Alpes, p. 382, £ 1143. françaises, p. 201, £ 6o3. maritimes, p. 492. Alphabets, p. 245, £ 903. Ambayrac. — Phénomènes volca- niques en 1902, p. 202. Amélioration des prairies, p. 379, 38o, £ 1127. Ampélopsis hederacea, p. 212, £ 708. Amplificateur en photographie, p. i65. £ 347. Analyse de bronzes anciens, p. 23r. Analyse chimique rapide de Teau. p. 416. Anatomie, p. 220, 2 749. 1444 TABLE ANALYTIQUE Analomie dentaire, p. f^aS, 4291 - l'^D*»- André (E.)- — Horticulture angevine, p. 36. Anesthésie , p. 428, 429- Anévrisme difTus de la fesse, p. 270. Ang-ers, p. 36, 67, 72, 127, i45, 258, 259 4ai, 423, 426, 4Go, 463, 53o, * 958, 963 i3o4, 1345. Angiomes de la fesse, p. 271. Animaux articulés , p. 229. tuberculeux , p. 376. Anjou, p. 36, 127, 145, 207, 208, 422, 423, 235 , 663, 388, 390, 420, 421, 673, 827, i3o4, 1345. Annam, p. 237. Anomalie magnétique dxiVny-de-Dome, p. 190 , - 479- • dentaires acquises, p. 432, * i43o. Anosmie traumatique , p. 363. Antarctique, p. 229, 2 810. Antennes de transmission, p. 170, 172, ï 407, 435. Anthropologie, p. 23i, î 820. Apiculture française, i>, 364,- "48. Apigné, p. 2o5, î 656. Appareil Clayton, p. 4i6, î 1277. Appareil pour l'eau chaude, p. 429- Appareils enregistreurs , p. 116, î 220. Apjiareil extenseur, p. 43o, ï 1404. Appareillage radio graphique trans- portable, p. 353. Apprentissage dans l'industrie du mo- bilier, p. 4o3. Arhoretum de M. AUard, p. 209. Arbres exotiques, p. 210. Ar\-ade dentaire supérieure, p. 43o, £ 1404. Archéologie, p. i, 420, - i3o4. Ardoisières, p. 127, 53o. Argent , p. 162, * 3o5. Argent (J- d'). — Orthopédie des maxillaires, p. 43o, * i4i8. 1 1 1 , ï 65 , Arithmétique graphique, p. 89. Armorique. p. 220, £ 749, 700. Arnodin (Ponts à transbordeurs sys- tème), p. 127. Arnoux (G.). — Modules composés, p. m, - 65, 89. Arthrite, p. 254 Arts décoratifs, p. 4oi, ^o3, £ 1211. Arjens, p. 237, 238, £ 845, 882. Asie, p. 238, £882. Asie russe, p. 52i. Assèchement des vallées , p. 201 , £ 609. Associations coopératives, p. 382, £ 443. Assurances mutuelles, p. 382, £ Ii4i. Astronomie , p. 109, £ i. Atliènes , p. i. Atmosphère de la Lune, p. 114, Atrésie]dc l'arcade dentaire supérieure, p. 430, £ i4o4- buccale, p. 43o, £ 1418. Auric. — Thermodynamique , p £ 38o. Différents états des corps, 174. 236. m. plateaux , 274. 224. l'Octroi p. 201, 203, 205, 268, 4i7i - ioo3, 169, 169,, £ 387. Automobiles , p. 129, Ai'cugles, p. 404 Axiomes géométriques , p. Azay-le-Rideau, i>. 524. Azotate de ctiaux, p. 378. Babeau. — Limons des p. 200. Bacilles acido-résistants, p. Bactériologie de la Grippe, p. 257. Bactériologie dentaire, p. 433. De Baer (loi de), p. 187. Bague romaine, p. 422, £ i320. Baie du Mont-Saint-Michel, p. Baldet. — Suppression de d'Angers, 463. Balédent (Abbé). — Tornades des en- virons de Senlis, p. 190. Banlieue parisienne, £639. Banyuls-sur-Mer, p. 1294. Barbier. — Discussion sur les ports maritimes, p. i3i. Barbizey-sur-Ouche, p. 239, - 887. Bardié (J). — Apprentissage dans l'in- dustrie du mobilier, p. 4r>3. Barisien (le G' E.-N.). — Points remar- quables d'une conique, p. 112, £ 121. Barot (D'). — Afrique occidentale française, p. 388. Bassin de la Neste d'Aure, p. 389. de Paris, p. 2o5. de la Tafora, p. 200. Battandier. — Flore de l'Algérie , p. 208. Baudouin (D' M.). — Nécropole de Troussepoil, p. 23i. Fouilles au Bernard, p. 240. Beaulard. — Hystérésis diélectrique, p. 160. Béclère (D' A.). — Calculs urinaires^ p. 302. Cylindre compresseur à radio- graphie, p. 3i8, £ 1047. discussion sur la résistance d'un tube de Crookcs, p. 3i8. Bégaiement, p. 253. Beleze (M"" M.). — Lichens de la forêt de Rambouillet, p. 210. Plantes rares des environs de Montforl-l'Amaury, p. 210. Plantes adventices de la forêt de Rambouillet, p. 210. Criblures des feuilles, p. 210. TABLE ANALYTIQUE 1^5 Beleze (M'" M.)-— Champignons, p. 210. Cyclone de Montfort-l'Amaury , p. 187. Mimétisme chez les animaux, p. 23o. Belgique, p. 475- Belloc (É.). — Sondages en eau pro- fonde, p. 116. Limites apparentes de l'ancien glacier de la Garonne, p. 2o5. Faune aquatique, p. 220. Bassin de la Neste d'Aure, p. 889. Bergonié (D' J.). — Discussion siu* les calculs urinaires, p. 317. Résistance d'un tube de Crookes, p. 3i8. Discussion siu' l'électrisation cé- rébrale, p. 319. sur les tumciu's blanches. p. 320. sur les coui-anls intermit- tents , p. 322. siu* la paralysie infantile, p. 339. (Ohmmètre clinique de), p. 34i. Discussion sur la photothérapie, p. 343. sur de nouveaux réduc- teurs liquides, p. 343. sur l'eczéma aigu, j). 353. sur la i)hotographie endos- copique, p. 365. Paralysie faciale, p. 366. Discussion sur les manifestations articulaires et nerveuses, p. 367. sur la méralgie paresthé- sique, p. 368. Berlin, p. 377. Bernard (Le), p. 240. Bessonnecni (Manufacture), p. 528. Bétail (Mortalité), p. 382, £ 1141. Betterave, p. 375. Biaille. — Silex et ossements, p. 287, * 861. Bigeard. — Discussion sur les câbles, p. 126. sur les ports maritimes , p. i3i. Bigot (A.). — Assèchement des régions calcaires, p. 201, î 609. Favine des sables jux'assiques , p. 2o3. Grès à sabalites de Saint-Satur- nin et Trélazé, j). 204, * 624. Discussion sur les mers de la période crétacée, p. 2o5. Stations néolithiques, p. 247. Bile, p. 263. Bilhaut {\y M.). — Discussion sur le prolapsus utérin, p. 248. du genu A'algum , p. 255, î 940. Bilhaut (D' M.). — Diagnostic des tu- meurs blanches, p. 319, 820, 82 1 , £ 1057. Billancourt, p. 248, - 1824. Binet-Sanglé (D' H.). — Transmission de la pensée, ji. 264, - 996. Blaison, p. 247, - 912. Blatter. — Anesthésie par le chlorure d'éthyle, p. 429. Blayac. — Stations préhistoriques de Djebel sidi Rgheiss, p. 240. Bleu de ciel (Expérience de) obtenu au diploscope, p. 268. Blocii (D). — Discussion sur le can- cer, p. 340. Traitement de l'eczéma aigu , p. 352. de la constipation, p. 867. des hémorroïdes , p. 368 , 869. Blois (C" de). — Discussion sur la cid- ture de la betterave, p. 872, 878. Blondel (A.). — Discussion sur les ondes électriques, p. i58. Nouveau dispositif de radiateiu", p. i63, - 827. Coupes thermo-électriques dans la télégraphie sans lil , p. 164, - 383. Nouveau dispositif de radiatem-, p. 166, £ 374. Les bobines de RuhmkorfT, p. 170, *4o5. Antennes de transmission, p. -. 172, ï 407. Puissance mise en jeu dans les antennes de transmission, p. 172, *43:. Blondin. — Discussion sur les ondes électriques, p. i58. Bobines de Bnlimkorff, p. 170, £ 4o5. d'induction, p. 170, ï 4o5 Bois-Brùlé, p. 289, £ 890 Bontou. — Enseignement de la cuisine ménagère, p. 4oi- Boquel (D'). — Opération césarienne d'urgence, p. 270. Bordeaux, 4o8, £ 121 1. Bordier (D' H.). — Fluorescence, p. 171, 172, £ 418, 422. Discussion sur les courants de haute fréquence, p. 323. sur le cancer, p. 340. Influence de la galvanisation pri- mitive, p. 841, £ io85. L'ohnimètre clinique du profes- seur Bergonié, p. 84. Discussion sur la photothérapie, p. 842. sur l'orthodiagraphiCjp. 85i. — sur l'eczéma aigu, p. 352, 353. 1446 TABLE ANALYTIQUE Bordier (D' H.). — Discussion sur la résistance des électrolytes, p. 354. . sur l'anosmie traumatique, p. 364- Traitement de la constipation habituelle, p. 367. . de la méralgie paresthé- sique, p. 368. Interrupteur rhéostatique, p. 369. Paralysie de la langue, p. 369. Névrite brachiale, p. Sjo. lia, 218. Borelly (plomète), p. Bosco-Réale , p. 421, - i3io. Botanique, p. 206, - 663. Bouche, p. 430, - 1418. Bouches-du-Rhône, p. 412, î i25o. Bouchet. — Ion adrénaline, p. 32i. Bouffé (D'). — De l'orchidase, p. 254- Bouhier. — Allocution, p. 32. Boulawayo, p. 416, * 1277. Boulogne-sur-Mer, p. 240. Bounhiol (D' J.). — Respiration aqua- tique marine, p. 229, - 8i3. ■ Régime respiratoire de poissons vivant en captivité, p. 229, - 810. Bouquet de la Qrye. — Régime des cours d'eau, p. i85. Bouturage d'été, p. 2i3, - 726. Bouvet (G.). — Rubus de l'Anjou , p. 208, - 673. « Muscinées du département de Maine-et-Loire, p. 216. . Prothèse restauratrice, q. 428. I.- Fractures du maxillaire inférieur, p. 433. Braun (E.). — Dispositif de télégra- phie sans iil, p. 166, - 370. Brèche (vallée de la), p. 244- Brenton (Chaudron du), p. 186, - 5o6. Bretagne, p. 238. Brevetabilité des inventions, p. 890. Briant. (D'). — Anosmie traumatique, p. 363. Discussion de l'amélioration des prairies, p. 374. Brichet. — Présentation des haches polies, p. 247. Bridon. — Fluorescence, p. 171, 172, î 418, 422. Brillouin. — Courbui-es du géoïde , p. i83. Brin (H.). — Prolapsus utérin complet chez la vierge, p. 428. Phlegmon ligneux, p. 272. Broca (D' Andi-é). — Courants triques de haute fréquence, p élec- 172, L'orthoformc en - 435. Brodhurst (U.-E.). — art dentaire, p. 43i. Bronzes anciens, p. 23i. JJrouillard, p. 182, 190, - 479, 534. Brumpt CD' E.). — Statistique médi- cale de l'Afrique tropicale, p. 278, * 1025. Brume, p. 190. Brunhes (B.). — Discussion sur les ondes électriques, p. i58. Dégradation du lit des cours d'eau, p. i85, - 487. Tourbillons aériens et tourbil- lons des coiu'S d'eau, p. 188. Anomalie magnétique au Puy- de-Dôme, p. 195. Discussion siu* la Tour Eiffel, P- 19:- sur 168. l'observation de& orages, p. Tourbillons aériens et tourbil- lons des covu's d'eau, p. i85, - 487. Brunhes (J.). — Géographie humaine comparée, p. 386. Brunissure des végétaux, p. 211, - 697. Bruyant (C). — Les seiches du lac Pavin, p. 189, - 624. Végétation du lac Pavin, p. 219, Î747- Buisson (H). — Réflexion dans le quartz sur l'argent, p. 162, * 3o5. Bureau. — Plateaux des environs du Havre, p. 247. Câbles métalliques et câbles en tex- tiles, p. 119. Cadoux (G.). — L'octroi de Paris, p. 492. Caen (Environs de), p. 201, £ 609. Caillaud. — Discussion sur une pseudo-coxalgie, p. 261. Calcaire, p. 201, - 609. Calculs urinaires, p. 3o2. Calendrier perpétuel, p. iio, - 214. Calorijication, p. 255, - 942. Calvados, p. 201, 2o3, - 609. Cames, p. i47, - 249. Camus (F.). — Discussion sur les Ulex, p. 207. Cancer, p. 340, - io83. primitij des voies biliaires, p. 263. Cancroïde du nez, p. 353, - 1097. Cantal, p. 208. p. 232, 233, 235, 238, î 876. p. 217. Caoutchouc, p. 434- Capitan (D' L.). — Stations préhisto- riques du Djebel-Sidi-Rgheiss, p. 240. Fonds de cabane de Wimereux, p. 241. de la Manche à Saint- Valery-sur-Somme, p. 242. Sablières de Chelles, p 893. 243, de Billancourt, p. 243, - 893. TABLE ANALYTIQUE 1447 Capitan (D' L.). — Vallée de la Brèche, p. 244. Eolithes du Piiy-Coiirny, p. 246. Captage des eaux, p. 889. Carpentier (J.)- — Discussion sur les représentations graphiques, p. i5o. • sur la tour Eiffel, p. 198. Carrés p^inniagiques, p. 112, î i3o. magique? p. I12, - 142. Carrières, p. 129, * 228. Cartes agronomiques communales , p. 38o, î ii33. Cartes ostréicoles, p. 227. Casalonga (Feu D.-A.). — Pendule de Foucault, p. ii3. Transformation de la chaleur au travail, p. 160. Brevetabilité des inventions , p. 390, Caserne (Cuisine à la), p. 4oi- Castaignet (J.-B.-U.). — Notes d'art décoi'atif, p. 4o3, ï 1211. Catalogue des discomycètes chaTnus, p. 207, * 563. - des plantes rares, p. 210. Cathédrale d'Angers , p. 421 > 423 , £ i353. Cavalié (G.). — Influence d'un anes- thésique général, p. 429. Caverne de Roche-Chèvre, p. 289, - 887. de la Mouthe, p. 240. Cavernes p. 2i3, - 722. Cayla. — Octi-oi de Saint -Amand, p. 461. Celles, p. 232, 238, î 876. Celto-italiques, p. 287, - 867. Centralisation des minutes notariées, p. 424. Centres nerveux , p. 429. Céréales, p. 214, * 73i. Cérianfhaires , p. 226, - 791. Cerveau , p. 319, 429. Cervelet , p. 429. Cervico-faciale (Actinomycose), p. 429. Césarienne (opération) , jî. 270. Chaix du Bois (E.), Le Pont-des-Oules, p. 187, - 5io. Chaleur, T^. 160, 164, 169, 173, - 333, 38o. 440. Chalonnes, p. 028. Champ de cristallisation, p. 162, * 3o2. Champignons, p. 207, 210, £ 663. Charencey (Comte de). — Phaséolus vidgaris, p. 287, - 863. Points de l'Espace , p. 287 , £ 867. Charente, p. 281. Chargnole , p. 288. Chasselas , p. 212 , * 708. Château d'Angers, p. 428. Châteaugontier , p. 628. Château de Langeais , p. 425. Château de Montsoreau , p. 427. Château-Renaud, p. 289, * 890. Château de Serrant , p. 528. Chaudron de Brenton, p. 186, £ 5o6. Chauvet (G.), Bronzes anciens, p. 23i. Chelles , p. 248 , * 898. Chemins de fer, p. 118, 146, £ 225, 245. Chemins de fer de Paris à Orléans, p. 2o3 , * 689. Cher, p. 460. Chervin (D' A.). — Discussion de la surdité chez l'enfant , p. 253. Le bégaiement en France, p. 253. Chevaux domestiqués , p. 287, £ 845. Chinon, p. 524. Chirurgie dentaire , p. 427 , 428 , £ 1884. Chloroforme , p. 429. Chlorure d'éthyle , p. 428, 429. Chrétien (H.). — Etude des Etoiles filantes, p. ii5, £ 189. Quadratiu'e des taches solaires , p. ii5, £ 207. Monographie delà sj)hère, p. ii5. Chromoblastes , p. 221. Cicatrisation d'un cancroïde du nez, p. 358, £ 1097. Cinématique, p. 112, £ 128. Cinématographie des mouvements at- mosphériques, p. 198. Circuit primaire des bobines d'induc- tion, p. 170, £ 4o5. Clayton (appareil), p. 416, £ 1277. Clergeau. — Eolithes du Puy-Courny, p. 246. Clermont-sur-V Oise , p. 244, £ 898. Clichés photographiques, p. i65, £847. Clos (D' D.). — Amélioration des prai- ries naturelles, p. 880. Cluzet (D' J.). — Renversement des actions polaires dans les syndromes de dégénérescence, p. 355. Cocaïne, p. 428, 429. Coccoz (le C V.). — Carrés magiques, p. 112, £ 142. Coefficient de robusticité, p. 412, £ 1265. Cœur, p. 228. Coëvrons, p. 220, £ 750. Cohérence, p. 159, 168, 166, 168, 192, 287, 820, 861. Cohéreurs, p. 159, 168, 166, 168, 192, £ 281, 287, 820, 36i, 896. Collargol, p. 434- Collignon (Ed.). — Problèmes de géo- métrie, p. 109, £ I. Colonie, p. 5o4. Colonies, p. i. Colonisation, p. 890. Combes (D' H.). — Affections utérines, p. 268, £ 989. Combinateur liquide, p. 370. Combustion, p. 2. 1448 TABLE ANALYTIQUE Comète Borelly, p. ii5, - 218. Commerce, p. 388. p. 4(>3, 406, 408, * 1223. français, p. 23. Commission des météores, p. iiT), - 189. Composées, p. 214. - 733. Compte rendu moral, p. 98. financier, p. 104. Condom, p. 240, * 907. Conférences faites à Angers, p. 5o4, 021. Congrès de JJerlin, p. 377. Conique, p. 112, - 121. (^OJisen'dlinn des denrées .ilimentaires, p. 41^. (]onstantiiie, p. 240. Constipation, p. 367, 368, £ 1108. Conslrv.ctinns métalli, - G26. Crêtes occipitales apophysaires liu- luaines, p. 23H, 247, - 874. Cril)lures des leuilles , p. 210. Cristallisation, p. iG2,£3o2. Cristallogénie , p. 162, - 3o2. Croës (J.-L. de). — Anomalies den- taires ac(piisis, p. 432, - i43o. Croix d'Anjou, p. 420, - i3o4. Croi.x de Lorraine , p. 420, 2 i3o4. Crookes (Tubes de) , p. 3i8, Cuénot. — Traverses de chemins de fer , p, i46. Cuisine, p. 401 • Culture de la betterave, p. 37;). Cure des rétrécissements, p. 278. Curie (J.). — llepréscntation propor- tionnelle, p. 393, - 1182. Cyclone, p. 187, lyo, 191, 194,2 538, .175. Cylindre conqu'csseur en radiographie, p. 3i8, - 1047. Cytisine, p. 208, - 690. Cytisus laburnum , p. 208, - 690. Caroan (1)' P.). Marche des abcès dentaires, p. 433, - i436. Dal-Piaz (î)' (i.). — Les marmites du Mas , p. I1S7. Danguy (b.). — Discussion de la cul- ture de la betterave, p. 373. Assurance contre la mortalité du l)étail , p. 382. Daniel (L.). — Greffe de quelques (Composées , p. 214 , * 733. Darier (D). — Thérai)eutique locale dans les allections oculaires, p. 263, £ 980. Dauphin (V.). — Un aIcux monument angevin , p. 421. David. — ()l)servations d'orages au Puy-de-Dôme, p. 168, 192. Roulement du brouillard, p. 182, - 479- Décharges électriques , p. 378. Décoration, p. 401, 4^3, - 1211. Déformation , p. 146, - 245. Delair. — Voiles du palais arliliciels, p. 434. Dégénérescence , p. 355. Dégradation du lit des cours d'au, Delbet (D' P.). — Discussion sur le l)rolapsus, j). 249. Opération de Tahiia, j). 4o8, £ 1211. professionnel de l'agricultiu-e , TABLE ANALYTIQUE p. 402. post-scolaire, p. 4o3. aux aveugles, p. 4o4- commercial, p. 406. de la comptabilité, p. 407. professionnel du Rhône (Société d'), P- 409. - 1228. de l'Espéranto, p. 409, - laSg. professionnel, p. 409- de la chirurgie dentaire, p. 427, ï i384. pratique de l'anatomie, p. 428, ï 1896. Ensilage des fourrages verts, p. 879, £ 1121. Entera - colite muco - membraneuse , p. 867. Entomologie armoricaine, p 220, £ 749. Eolithes du Fuy-Gourny, p. 246. Epandage des engrais, p. 879, £ 1127. Epidémies familiales, p. 249, 25i, £ 919. Epilepsie, p. 270, £ 1018. Epreuve (Poison d'), p. 884. Erosion i)ar l'eau courante, p. i85, 186, 187, 188, £ 487, 5o6, 5io, Eruptions de volcans , p. 202. Espéranto, p, 409, - 1289. Este, p. 288, £876. Etage redonien , p. 2o5 , £ 656. Etalon photométriqne , p. 161 , - 292. Etangs de Saint-Nicolas , p. 21 5. Etats différents des corps, p. 169, £887. Ethyle, p. 428, 429. Etoiles , p. 169. Etoiles fdantes , p. ii5, £ 189. Etudes géologiques , p. 208 , 689. Etudiants en chirurgie dentaire, p. 427, 428, £ 1884. Euclide, p. m. Evolution des animaux articulés, p. 229. Evraud (Tours d'), p. 428. Evrault, p. 427. Excursion botanique , p. 209. Excursions aux Etangs de Saint-Nico- las, p. 2l5. Excursions géologiques, p. 204, £624. Excursions à Chàtcaugonticr, p. 523. à Chalonnes, p. 523. finale à Saumur , p. 024. Expertises , p. 270. Extrême-Orient, p. 888, 1170. Eyzies (Les), p. 245 , £ 901. Fabre (L.-A.). — Loi de Bœr, p. 187. Fabry (Ch.). — Spectroscope autocol- limateur, p. 149. Discussion sur les représenta- tions graphiques, p. i5o. Etalon photouiétrique , p. 161 , £ 292. Intensité hmiineuse du soleil et des étoiles , p. 169. Factorielles , p. iio. Faculté inventive , p. 898, - 1192. Faguet (D' Ch.). — Pseudo-coxalgie, p. 261, S 970. Farcy (L. de). — La Croix d'Anjou, p. 420, £ 1804. Tapisseries de la cathédrale d'Angers, p. 428, £ i858. Deux taiîisseries du château de Langeais , p. 425. Faune aquatique , p. 220. Faune entomologique armoricaine , p. 220, £ 749. orthoptérique des Coëvrons , p. 220, £ 750. Faune malacologique , p. 2o5, £ 656. p. 222, £ 764. Faune des sables jurassiques, p. 208. Fauvei (P.). — Nouvel oligochète des puits , p. 221 , £ 754. Prétendus autocystes des alcyo- piens , p. 224 , £ 784- Expérience d'alimentation, p. 226, £ 793. Fémur, p. 265. Fer, p. 169, £ 892. Ferment antialcoolique, p. 878. Ferry (E.). — Enseignement commer- cial , p. 4*^6. Fesse, p. 270. Feuilles des végétaux , p. 210. Fibres cardiaques , p. 228. Fiches orthogonales du D'^ Guilleminot, p. 35 1. Filature Bessonneau, p. 528. Finances de l'Association, p. 104. TABLE ANALYTIQUE l45l Fleurs anomales, p. 2i3, - 728. Fleury (Cr.). — Portail occidental de la cathédrale d'Angers, p. 421, - i3i3. Flore adventice , p. 218. fie l'Algérie, p. 208. de Jura, p. 214. Fluorure de sodium, p. 4i4' Flux d'électricité entre les nuages et le sol, p. 193. Foie, p. 263. Folklore, p. 235, î 827. Fonds de Cabane, p. 241, 242. Fontaneau (E.). — Préliminaires d'hy- draulique, p. iio, £ 33. Fontevraud, p. 423. Fontevrault, p. 627. Fonvielle (W. de). — Protestation contre la démolition de la Tour Eiffel, p. 196. Force physique de l'homme, p. ^12, - 1265. Forêt de Rambouillet, p. 210. Forêts, p. 386. Fosse-bûcher, p. 425. Fosses sépulcrales Gallo - romaine , p. 240. Foucault (Pendule de), p. ii3. Foucher. — Les octrois à Angers , p. 460. Fouillaron (Poulies), p. 129, Fouilles à Delphes, p. i. à Troussepoil, p. 23i. 236. de la Tourille, p. 232. du Puits-Lepage, p. 233. dans un viUage en pierres sèches, p. 234. d'une station néotithique, p. 234- à Siu'an, p. 235. dans l'ai'rondissement de Murât, p. 235. de la Roche-Chèvre, p. 239, * 887. au Bernard, p. 240. à la Mouthe, p. 240. au Puits-Rousseau, p. 245. au Pech-de-Bertrou, p. dans l'église de Moissac , p. 420, 245, S 901. * 1379. Fournial La sténographie , (A.) p. 4o3. Fournier de Flaix. — Réformes des octrois à Lyon, p. 453. Fourrages verts, p. 379, - 1121. Fourrages, p. 38 1, - 11 36. Foveau de Courmelles (D'), Action de la lumière sur les microbes patho- gènes, p. 271, - 1020. Nouveaux résultats photothéra- piques, p. 365, - 1099. Fractures du m.axillaire inférieur , p. 433. Fraises, p. 211, £ 693. Francs, p. 245, î 9o3. Fresques de Bosco-Réale. p. 421, - i3io. Freycinet (Ch. de). — Axiomes géo- métriques, p. III. Friches de la Chargnole, p. 238. Friteau. — Anesthésie générale par le chloroforme, p. 429. Gaillard (Feu). — Discomycètes char- nus, p. 207, - 663. Qalante (E.). — Les finances de l'asso- ciation, p. 104. Qalimard (D' J.). — Fouilles à la caverne de Roche -Chèvre, p. 239, Î887. Gallo-romains, p. 23i, 240. Galvanisation primitive d'un membre, p. 341, - io85. Galvano faradisation, p. 367. Gardés (L.-G.-F.). — Calendrier i)er- pétuel, p. ii5, - 214. Garonne, p. 2o5. (Haute), p. 214, 225, - 73i, 789. Qarrigou-Lagrange (P.). — Cinéma- tographie des mouvements atmos- phériques, p. 193. Gastrotomie, p. 274. Gelées blanches, p. 190. Géneau. — Fourrages des pays tropi- caux, p. 38i, - ii36. Géneau de Lamarlière (Vew). — Mus- cinées cavernicoles, p. 21 3, - 722. Génie civil et militaire, p. 116, - 220. Genre Lepadogaster, p. 228. Gentil (A.). — Rubus Fruticosus , p. 2l3. Gentil (L.). — Bassin de la Tafna , p. 200. Genu-valgum, p. 255, * 940. Géodésie, p. 109, - i. Géographie, p. 384, - ii48. humaine comparée, p. 386. Géog/'ap/iJ^rie (Distribution) du bégaie- ment en France, p. 253. Géoïde (Courbures du), p. i83. Géologie, p. 200, ï 6o3. Géométrie, p. 109, m, - i. cinématique, p. 112, * 128. Germain (L.). — Faune malacologique de Maine-et-Loire, p. 222, * 764. Germains, p. 237, - 867. Gers, p. 245, - 907. Genm (Hybrides des), p. 212, - 710. Gcvrey-C hambei'tin , p. 239, - 890. Giard. — Discussion sur les pigeons voyageurs, p. 222. sur les autocystes des Alcyopiens, p. 224. sur les pêcheries, p. 225. sur les stations de piscicul- ture, p. 225. l452 TABLE ANALYTIQUE Giard. — Discussions sur les cartes ostréicoles, p. 227. sur les sardines, p. 229. Gilles Deperrière (E.)- — Utilisation de la tour Saint-Aubin, p. 424^ - iS^i modilieation du plan d'Angers, p. 424, î 13:4. Empreintes de sceaux, p. 420. Oirault (A.). — Etudes appliquées aux arts décoratifs, p. 401. Gironde, p. 4o3, - 1211. Gisement de silice, p. 217. Qiuffrida-Ruggieri. — Palethnologie russe, p. 236, - rides des vignes, p. 212, - 708. Discussion sur les plantations dans les Ailles, p. 216. Gripat (D' H.) — La grippe, p. 249, Î914. Epidémies familiales de grippe, p. 252, * 919. Gripat (D' IL). — Influence de la grippe sur l'évolution des autres maladies, p. 252. . Discussion sur le traitement de la grippe, p. 256. sur la bactériologie de la grippe, p. 257. sur une pseudo coxalgie, p. 262. Grippe, p. 249, 252, 256, 257, î 914, 919, Grisson (Engrenages a caïues de), p. 147, î 249. Grosseron (Th.). — Conservation des denrées alimentaires, p. (\i(\. Grotte de la Mouthe, p. 202, 240. de la Tassonnière, p. 235, - 828. de Roche-Chèvre, p 289, î 890. Groupe espérantiste de Lyon, p. 4o9> * 1289. Gruère (C ) — Fouilles à la caverne de Roche-Chèvre, p. 289, - 887. Guérin (J.). — Cartes ostréicoles, p. 227. GuÊffard (L.). — Repopulation, p. 894, - 1209. Hygiène militaire, p. 4io. Guilbert (G.). — Prévision du temps, p. 184, ï 481. Brume et brouillard, p. 190,2 534. • Rosée et gelée blanche, p. 190. Guillaume (Ch.-Ed). — Variation de rélectricité du fer, p. 169, î 892. Guilieminot (D^ H.). — Discussion sur le cancer, p. 34o. L'orthodiagraphie, p. 343, 35i. Réducteurs de potentiels écono- miques, p. 364. Discussion sur la goutte et le rhumatisme , p. 867. Guillon (Ch.). — La grotte de la Tas- sonnière , p. 285 , 828. Guilloz (D Th.). — Photographie en- doscopique, p. 865, - iio5. Guitel (F.). — Variation du rein dans le genre Lepadogaster , 228. Guyot (D' J.). — Ostéosyphilose héré- ditaire , p. 264- Ostéontyélite aigiie des vertèbres, p. 265. Ostéomvélite aiguë de l'extré- mité supérieure du fémur, p. 265. Discussion sur le traitement des tumeurs, p. 2(57. Anévrisme diffus de la fesse, p. 270. Angiomes de la face, p. 271. Gymnastique médicale suédoise, p. 278, "* 1086. Haches polies, p. 247- TABLE ANALYTIOUE 1453 HaUsfaff, p. 288, ! 876. Hameau (Nécropole Gallo-romaine du), p. 422, - 1324. Hautc-Chaine (Tour de la), p. 421. Hante-Seine , p. 243 , - 893. Havre (Le), p. 200, 247. Heim (D' F.), — Fourrages des pays tropicaux, p. 38i, - ii36. Hémorroïdes, p. 3G8. Henriet (J.). — Discussion sur les ponts à transbordeurs, p. 128. Les ports maritimes, p. i3o, 182. Discussion sur la Loire navi- gable, p. 144, 145. Ports francs, p. 392. Les libérés et leur reclassement, p. 398. Enseignements professionnels , p. 409. Henrot (D' H.). — Discussion sur la tuberculose , p. 259. Bacilles acido-résistantes, p. 274. La nouvelle loi sanitaire, p. 4i5, - 1274. Herbier, p. 209. Herborisation , p. 2i5. Hei'tz (Ondes hertziennes), p. loi, i63, 164, 166, 170, 172, * 327, 333, 337, 36i, 370, 374, 4o5, 435, 4^7 Hervé (D'). — Crânes négroïdes, p. 238. Histoire de l'ovule et de la graine, p. 214. Homme de génie de M. Lombrose, p. 393, î 1192. Homolle. — Fouilles à Delphes, p. i. Horticnlture angevine, p. 36. Hôtel-Dieu d'Angers , p. 426. Hôtel des Pénitentes d'Angers, p. 426. Hôtel Pincé, p. 428. Houlbert. — Faune orthoptérique des Cocvrons, p. 220, î 750. Hy (l'abbé F.). — Les Ulex, p. 206. Plantes adventices de la vallée de la Loire, p. 216. Hybrides de vignes, p. 212, î 708. de Geum, p. 212, * 710. Hjdnocystis piligera , p. 2i3, î 780. Hydraulique, p. iio, 33. Hydrobiologie , p. 225, î 789. Hygiène, p. 4io. * ï25o. ■ militaire, p. 4io- Hygromètre respiratoire, p. 262, - 973. Hypertrophie, p. 264. de la prostate, p. 253, - 980. Hypo gastrique , p. 270. Hystérésis diélectrique , p. 160. Ule-et-V Haine , p. 2o5 , 656. Impôts (Nécessité du vote des) destinés à faire face aux dépenses, p. 894. Incendies à bord, p. 172, î 428. Incandescence , p. 161 , 2 292. Indenmités aux propriétaires , p. 876. Indicateurs , p. 116, ï 220. Indice numérique de la force physique de l'homme, p. 412, - 1260. Irutigènes de la Rhodésie, p, 416, ï 1277. Indre-et-Loire, p. 218, 524. Induction, p. 170, - 4o5. Industrie, p. 888. du mobilier, p. 408. Industries préhistoriques p. 287. reutclo-mesvinienne, p. 248, 246. reutelienne, p. 244, - 898. néolithique, p. 247, * 820. du sucre et de l'alcool, p. 875. Infection syphilitique, p. 274. Injlammabilité, p. 178, î 440. Inhalations médicamenteuses, p. 256, *- 947- Inscriptions alphabéti formes , p. 245, * 903. Inspection sanitaire des animaux, p. 4", - 1255. Institut Pasteur de Bulawayo, p. 416, - 1277. Intensité actinique de la lumière, p. 171, - h^\- Interrupteur rhéostatique rythmique unii'ersel, p. 869. Intervention électrique, p. 271. Inventions, p. 890, 398, î 1192. Ion adrénaline, p. 821. Ion zinc, p. 353, 863, î 1097, 1098. Ions à actions thérapeutiques, p. 867. Irrigation, p. 386. Isère, 13. 284, - 820. Italie, p. 421, - i3io. Jagot (D-^ L.). — Discussion sur l'opé- ration du Talma, p. 256. sur la tuberculose pulmo- naire, p. 257. Lutte contre la tuberculose à Angers, p. 259, î 968. Java, p. 386. Jobert (C). — Corpuscules colorés, p. 221. Joûbert (J.). — Les Somalis, p. 385, ï 1166. Joubin (L.). — Faune entomologique armoricaine, jj. 220, ï 749. Pêcheries de la baie du Mont- Saint-Michel, p. 224. Cartes ostréicoles, p. 227. Julien (1)'). — Enseignement pratique de l'anatomie, p. 428, - 1896. Jura (Flore du), p. 214. Jurassii, î 292. Mouthe (Goutte de la), p. 202, 240. Moûts de pommes , p. 3^3, ï ii3. Mouvements atmosphériques, p. 193. ■ planétaires, p. m, - ii5. 3Ioyen-Age , p. 242. MiillerlH.).— Station néolithique dans les gorges d'Engin, p. 234, î 820. Mulot (M' ■= L.). — Sa méthode pour les aveugles, p. 4o4- Murât, p. 207. p. 232, 233. Muscinées , p. 216. Muscinées cavernicoles , p. 2i3, ï 722. Musée archéologique de Saint-Jean d'Angers, p. 42<>. Musique en Anjou au xv' siècle, p. 423, * 1345. Mutuelle médicale française de re- traites, p. 275. Mycologie, p. 207, 210, 663. MyticuUnre , 11. 227. Navigation, p. 116, 172, 220, 428. Navires, p. 171 , - 428. Natier (D' N.). — Surdité chez l'enfant, p. 252, - 922. Nécropoles gallo-romaine, p. 421,- i324. ■ de Troussepoil, p. 23i. de Tyrinthe, p. 238, ï 876. Nelumbinm, p. 214. Néolitfiique, p. 234, 237, 238, 820. Nérac, p. 245, î 907. Nerfs, p. 270, 367, 429, - 1018. Neste d'Aure, p. 384. Nettoyage par le vide, p. 4ï5. Neussargues, p. 238, - 876. Névrite brachiale, p. 370. Nez, p. 353, 43o, £ 1097. Nice, p. 492. Nickel, p. 116. Nicolaïdi. — Le zool, p. 377. Nivet (A.). — Discussion sur les enre- gistreurs, p. 127. . sur un type de voie étroite, p. 118. Poulies extensibles Fouillaron, Nivet (A.). — Discussion sur les voies navigables, p. i3i. sur la Loire navigable, p. i44- sur les engrenages, p. 148. Transmission de mouvement. Nogier. — Intensité actinique de la lumière, p. 171, * 4i4- Nomographie, p. 114, Ii5, £ 180. Nuages, p. 182, 190, 193. Nutrition chez les spongiaires, p. 224, î 776. Objets mobiliers de l'Anjou, p. 422. ' Observation d'orages au Puy-de-Dôme, p. 168, 192. d'Ocagne (M.). — La Nomographie, p. 114, - 180. Octroi municipal, p. ^36. de Saint-Junien, p. ^^o. en France, p. 447- (Réforme de 1') à Lyon, p. 453. d'Angers, p. 4^0, 463. de Saint-Amand, p. 461. en Belgique, p. 475. de Nice, 492- de Paris, p. 492- Octroi (Suppression de 1'), p. 398 Odontologie, p. 18, 427. Offret (A.). — Les progrès de l'Espé- ranto dans le inonde, p. 409, £ 1239. Ohmmètre clinique du P' Bergonné, p. 341, £ 1088. Oise, p. 190, 243, 244, £ 893. Oligochète des puits, p. 221, £ 754. Ondes électriques, p. i5o, i58, 164, 166, 170, 172, £ 337, 36i, 370, 374, 4o5, 435, 437. hertziennes, p. 166, 170, 172, 36i, 370, 374, 4o5. 435, 437- Opération césarienne, p. 270. de Talma, p. 256, £ 949. de la Coxalgie, p. 261, £ 970. du Ptosis, p. 263. Optique, p. 149, 161, 162, 169, £292.298, 3o5. Orages, p. 166, 168, 191, 192, I93, £ 538. Oran (Département d'), p. 200. Orchidase, p. 254- Oreille, p. 252, £ 922. Or/ic dn Midi, p. ii4, - i74- Picamal. — La pelade et les affections dentaires, p. 484- Pierre polie , p. 247. Pigeons voyageurs , p. 222, £ 760. Pignet (D' M.). — Coefiicient de robus- ticité de l'homme, p. 412, - 1265. Analyse chimique de l'eau, p. 4i6. Pisciculture, p. 225, £ 789. Plages de la Manche, p. 242. PUm d'Angers, p. 424» - ^'^%- Planètes, p. m, £ ii5. Plantations dans les villes, p. 2x5. Plantes adventices, 210. p. 2x6. p. 218. Plateaux des environs du Havre, p. 200. Plomhiéreslez-Dijon, p. 289, £ 890. Poids de l'homme, p. 412, £ I265. Poils, p. 368, £ UK)8. Points de l'Espace, p. 287, £ 867. Poirault (A.). — Bouturage d'été, p. 2i3, £ 72(). Fleurs anomales de Theodora, p. 2x3, £ 728. TABLE ANALYTIQUE 1459 Poirault (A.). — Le genre Hydnocystis, p. ai3, î 728, 7'5o. Poisons frépt^euves, p. 218, 3S4, ï 786. Poisson (J.). — Discussion sur les Ilex, p. 207. sur le bouturage d'été, P 2l3. - Matériaux 229, des pour servir à l'his- toire de l'ovule, p. 214. Poissons vivant en captivité ; p. * 81 3. Polignac (C. de). — Divisibilité factorielles, p. iio. Pommes, p. 873, î iii3. Pommiers, p. 208. Pont (D). — Appareil jjour l'eau chaude, p. 429. • Actinomycose, p. 429. Ponts à tra7isbonleu/'s, p. 127. Ponts-de-Cé, p. 528. Pont-des-Oules, p. 187, î 5io. Port (E.). —Entrée du port de Saint- rsazaire, p. 884. Port de Saint-Nazaire, p, 384- Pointait occidental de la cathédi-ale d'Angers, p. 42, - i3i8. Porte ampoule diaphragme iris, p. 3i8, - 1047. Ports francs, p. 892. maritimes, p. i3o. russes, p. 388, - 11 76. Postulat d'Enclide, p. m. Potentiel (Réducteurs de) économique, p. 864. Pottier (le chanoine F.). — Fouilles dans l'église de Moissac, p. 420, * 1879. Poulies extensibles, p. 129, Poussée des poils, p. 368, • Poussières, p. 4iô. Prairies, p. 874. p. 379, 880, î 1127. Préaubert. — Flux d'électricité entre les nuages et le sol, p. ig8, - 557. Dessication rapide des plantes, p. 209. Préfecture d'Arïgers, p. 428. Préliistorique de Lot-et-Garonne et du Gers, p. 245. - 907. (Statuette), p. 247, - 912. ï 236. i 1098. Prévision des orages, p. 166, 192. * 896. 588. (Il temps, p. 182, 402, 474, 481, 588. ï84, 168, 191, 191. 192, Prieur. — Exploitation des carrières, p. 129, * 228. Problèmes zoologiques de l'xVntarc- tique, p. 229, - 8iu. Prolapsus utérin, p. 248. Proplïylaxie de la tuberculose, p. 258, 209, î 908, 968. Prosobrnnches, p. 224, - 780. Prostate, p. 253, î 980. Protlièse restauratrice médiate, p. ï 1424. restauratrice, p. 428. A'élo-palatine, p. 480, 43o, î 1424. Provence, p Protoarjens, p. 287, î 845. p. 287, 288, * 845, 882. 882, î 1143. Prunet (A.). — Rouille des céréales, p. 214, * 781. Pseudo coxalgie, p. 261, î 970. Psoriasis, p. 254. Ptosis, p. 268. Puissances, p ni, * 65, 89. l^uits (Oligochète des), p. 221, * 754 Puits funéraires de Troussenoil. 11. de Lffage, p oussepoil, p. 281. 288. Puy de Dôme, p. 168, 192. p i83, 195, * 479. 245. Rousseau, p. Courny, p 246. Pylore, p. 274. Pyrénées orientales, p. 417, * 1294 p. 268, î ioo3. Quadrature, p. ii5, ï 207. Quartz, p. 162, î 3o5. Quaternaire, p. 287. 244, î 898. Quénisset. — Lumière zodiacale, p. ii5, - 216 Comète Rorelly, p. ii5, * 218. Quintard (D' E.). — Uréométrie cli- nique, p. 270, i loio. Traitement de l'épilepsie, p. 270, £ 1018. Lîne bague romaine, p. 422, î 1820. Raciot (Abbé). — Prévision du temps, p. 182, î 474. Radiateur, p. i63, 166, î 827, 874. Radiguet. — Fiches orthogonales du D' Guilleminot, p. 85i. Radiodiagnoslic, p. 802. Radiograpliie, p. 255, 261, 818, 353, - 940' 9:0, 1047. Radioscopie, p. 819, ï 1057. Raffalovich (A). — Discussion sur la suppression des octrois, p. 440, 461. Ramasse, p. 235, î 8i3. Rambouillet (Forêt de), p. 210. Ramond (G.). — Etudes géologiques, p. 2o3, - 689. Ramsay, p. 162, î 812. Rappin (D G.). — Ractériologie de la grippe, p. 257. Discussion sur la tul)erculose, p. 259. Bacilles acido-résislants, p. 274. Rapport à la section du Génie civil (câbles), 11. 119. (Loire navigable) , p. 182. i46o TABLE ANALYTIQUE Raitpnvt à la section du Génie civil. — (Engrenag-cs à Cames), p. i47. * 249- sur l'utilisation des ondes élec- lri(|ues, p. i5i. Raulin (D' J.-M.). — Massifs forestiers du Sud de Madagascar, p. 386. Rayons X, p. Si»), 34o, * 1067, io83. Héccpfion des signaux dans la télégra- phie sans lil, p. 164, - 333, 337. accordée pour la télégraphie sans lil, p. 166. î 36i. lii'classeinent des libérés, p. SgS. Redon, p. 2o5, - 656. Redressement des images photogra- phiques, p. i65, - 347. Redressements tardifs, p. ^3i. Redresseur en photographie, p. i65, * 347. Réducleiirs de potentiel économiques, p. 364. liquides, p. 343, 370, î 1092. Réflexion sur l'argent, p. 162, î 3o5. Régime des cours d'eau, p. i85. respiratoire des poissons vivant en captivité, p. 229, - 8i3. Regnault ( D). —Morphogénie osseuse, p. 235. Rein, p. 228. Rémy (D'). — Expérience du bleu de ciel ol)tcnu au diploscope, p. 263. altération de la vision binocu- laire, p. 268. Rennes, p. 2o5, - 656. Rem-'crsement des actions polaires, p. 355. Représentations graphiques simpli - liées, p. 149. - 260. proportionnelle, p. 393, - 1182. Repopulation, p. 390, 394, i2o5, î 1209. Réseclinn des cordons spermatiques, p. 253, - 930. Résistance électrique des tissus chez l'homme, p. 34i, ï 1088. des Electrolytes, p. 354. Résisti\ilé de l'urine humaine, p. i5o, S 271. Respiration, p. 227, i 8i3, 81 5. Respiration aquatique marine, p. 229, 8i5. Retraites p. 275. Retranchements calcinés, p. 239, - 890. Rétrécissements, p. 278. Rey-Pailhade (J. de). — Division dé- cimale du <[uart de cercle, p. 25o. Rhodes. — Fouilles dans un village en pierres sèches, p. 234. Rhorlésie, j). 4i6, - 1277. Rliône, p, 409, - 1228, 1239. Rhumatisme, p. 254, - 938. p. 367. Rivière (E.). — Sablières de la ban- lieue parisienne, p. 201. Grotte de la Mouthe, p. 202. Lampe préhistorique, p. 234, * 896. Gravures de la Moutlie, p. 240. La nécropole Gallo-romajne du Hameau, p. 422, î i324. Rii'ières, j). 189, ï 487- Robusticité, p. 412, - I265. Rochefort. — Réception accordée pour la télégraphie par ondes Hertziennes, p. 166. ï36i. Roche-Chèvre, p. 238, ! 887. Rocques (D' C.). — Cure des rétrécis- sements, p. 378. Roda-PIius. — Représentations gra- phiques, p. 149, - 265. Rogée (D' L.). — Discussion sur une pseudo-coxalgie, p. 262. Quinze observations de Laparo- tomie, p, 262. Gastrotomie pour Sténose du pylore , p. 274. Rogne, p. 228, ï 799. Rolland. — Anesthésie par le Sœm- noforme, p. 428. Inlluence d'un anesthésique géné- ral sur les centres nerveux, p. 429- Rosée, p. 190. Rouille des céréales, p. 214, 73i. Roule (L.). — Station de pisciculture de l'Université de Toulouse, p. 225, 789- Formes nouvelles thaires, p. 226, i 791. de Cérian- 181, 479- Roulement du brouillard, p Roulis, p. ii5, - 2i5. Roy. — Suppurations d'origine den taire, p. 43o. Rubus de VAnjou, p. 208, * 673, fruticosus, p. 2i3. 170, £ 4o5. de la Cyti- Ruhmkorff (Bobines de), p Russel (W.). — Migration sine, p. 208, - 690. Russie , p. 236, - 839. p. 388, î 1175. Sables jurassiques , ]). 2o3. Sablières, p. 201. p. 243 , 893. Sagnier (H.). — Discussion sur les moûts de pommes, p. 373. Sur l'industrie du sucre, p. 375. Saint-Acheul, p. 243, * 893. Saint-Amand, 461. Saint-Aubin, abbaye d'Angers, p. 423. (Tour), p. 423, 424, £ 1371. Saint-Georges, p. 523. Saint-Julien de Maumont, \>. 234, - 896. Saint-Jnnien, p. 440- TABLE ANALYTIQUE 1461 Saint-Martin d'Angers, p. 423. Saint-Micliel-MontUiéry, p. 2o3, ï 639. Saint-Pierre de Moissac, p. 420, - iS^g. Saint-Vazaire, p. 384- Saint-Xieolas, p. 2i5. Saint-Sntnrnin, 204, î 624. Sainf-Serffe, p. 426. Saint-Valer'y- sar-Sonime, p. 242. Salaii'es, p. 390. Salariat, p. 81. Sanatoria, p. 417. - 1294. Sanatoj^ium de BanyiUs-sur-Mer, p. 268, î ioo3. .Sfl/i,^ r/'im syphilitique, p. 274. Saquet (D"). — Massage et gymnas- tique médicale suédoise , p. 273 , î io36. — Traitement du vaginisme, p. 273, - 1041, Sardines, p. 229. Saugrain (E.). — Des lois engageant les dépenses, p. 394. Saumiir, p. 524. Sceaux (Empreintes de), p. 420. Science du commerce, j). 408, 1223. Sciences économiques, p 371, - iii3. médicales, p. 248, - 914. naturelles, p 200, - 6o3. Scopa, p. i65, - 347. Séance générale, p. 436. Sebillot (L.). — Traditions populaires en Anjou, p. 235, - 827. Secteurs électriques des villes, p. 864. Seiches du lac Pavin, p. 189, - 524. Sein, p. 340, * io83. Seine, p. 201, 2o3, 2o5, 243, î 689, 893. Seine-Inférieure, p 200, 247. Seine-et-Oise, p. 2o3, 210, î 689. Séismes, p. ii3, 202, ï i.-)7. Sentis, p. 190. Senouque (A.). — Roulis et tangage, p. iiô, - 21 5. Sépulture gauloise, p. 238, - 876. Serrant, p. 523. Shields, p. 162, - 812. Sibérie, p. 28. Siffre (D). — Dentition, p. 18. Anesthésie par le chlorure d'Ethyle, p. 428. Dent de six ans et dent de sagesse, p. 429, - i4oi. Silex, p. 287, 243, 244, 245, 246, 247, Î861. Silice, p. 2i3, ï 722. p. 217. Sinistres maritimes, p. 172, - 428. Sociétés d'assurance mutuelle, p. 882, î 1141. Société astronomique de France, p. ii5, £ 189. Société philomathique , de Bordeaux, p. 4o3, - 121 r. Sodium, p. 4i4- Sœmnoforme, 428, 429. Soleil, p. ii5, £ 907. p. 169. Somaliland, p. 885, * 1166. Somalis, p. 385, S 1166. Somme, p. 242, 248. Sondag-es, p. 116. Speciroscope autocollimateur, p. 149. Spennies chez les Prosobranches, p. 224, ï 780. Sphère, p. ii5. Spongiaires, p. 224. 2 776. Squinabol. — Chaudrons du Brenton, p. 186, î 5o6 Station néolithique, p. 284, 287, 288, 247, - 820. de pisciculture, p. 225, 2 789. Stations préhistoriques, p. 240, 24», 246, 247, - 820, 861, 876, 901, 907, 9t2i Statistique, ]). 890. médicale de l'Afrique tropicale, p. 278, £ 1020. sur la descendance des pigeons voyageurs, p. 222, - 7()0. Statuette préhistorique, p. 247, - 912. Sténose du pylore, p. 274. Stéphan. — Spcrmies chez les Proso- branches, p. 224, - 780. Sterigmatocystis nigra, p. 212, - 720. Stratigraphie, p. 248, - 898. Strauss. — Octrois en Belgique, p. 475. Sucre, p. 875. Suède, p. 278, - 1086. Suppression complète de l'octroi, p. 3g8. Suppuration d'origine dentaire, i>. 43o. Suran (Le), p. 280. Surdité ctiez l'enfant, p. 252, 2 922. Symboles cdphnbétiformes, p. 2^5, - 908. Syndicats agricoles, p. 882. ii43. Syndromes de dégénérescence , p. 855. Syphilis, p. 264, 274. Table des puissances, p. m, 2 65, 89. Taches solaires, p. ii5. 2 207. Tafna, p. 200. Taille de l'homme, p. 412, 2 1265. Talma (Opération de), p. 256, 2 943. Tangage, p. ii5, 2 210. Tangentes, p. 109, 2 i. Tapisseries de la cathédrale d'Angers, p. 428, 2 i853. du château de Langeais, p. 425. Tarn et-Garonne, p. 425, - 1879. Tarry (Ci.). — Carrés pannuigiques, p. 112, 2 i3o. Tassilly. — Eclairage par combustion. p. 2. Tassonnière, p. 235, - 823. 7'rtH.v fies salaires, p. 890. l462 TABLE ANALYTIQUE Taxes de remplacement des octrois , p. 43(5, 440, 492. Tégument des Truites, p. 221. Télégraphie sans fil, p. i5i, i63, 164, 166, * 827, 333, 337, 36i, 370, 374. p. 172, î 4o5, 435, 437. Températures d'innaiiimabilité, p. 178, *44o. Tempêtes, p. 190, 191, 194, î 075. Temps (Prévision dn), p. 182, 184, 192, î 402, 474, 481, 538. Terrains siliceux, p. 2i3, 722. Terminologie des étages tertiaires. Tertiaire, p. 200. Tesson (D' R.). — Discussion sur l"li yperthrophie de la prostate, p. 254- Cancer primitif des voies bi- liaires. Discussion sur le pheginon li- gneux, p. 272. Tétau (D'). — Tuberculose pulmo- naire, p. 208. Theodora angustifolia, p. 2i3, - 728. Théorie électrodynamiqne du monde, p. 194, î 575. Thérapeutique locale dans les affec- tions oculaires, p. 268, ï 980. Thermoélectriques (Couples), p. 164, * 333. Tliermodynamicpie, p. 169, ï 38o. Théorie la plus générale de la nomo- graphie, p. ii4, - 180. Thure-Branclt (Procédé de), p. 278, - 1041. Tirjnthe, p. 288,2876. Tissot (C). — Discussion sur les ondes électriques, p. iô8. Durée du pliénomème de cohé- rence, p. 159, - 287. Appareils détecteurs de mesures, p. 164, - 887. Tornade, p. 166, 187, 190, 191, 194, - 538, 575. Touchet. — Photomètre astronomique, p. ii5, - 210. Discussion sur la Tour Eiffel, P- 197- Toulouse, p. 214, - 781. ■ (Université de), p. 225, ï 789. Tour Eiffel, p. 196, 197, 198. d'Evraud, p. 428. de la Haute-C haine, p. 421. Saint-Aubin, p. 428. 424» - 1871. Tourbillons, p. i85, 188, î 487. Touritle (alsris sur les roches de la), p. 282. Tourlet. — Flore adventice du dépar- tement d'Indre-et-Loire, p. 218. Tournier (abbé). — La grotte de la Tassonnière, p. 285, - 828. Trabut. — Flore de l'Algérie , p. 208. Traditions popidaires, p. 235, - 827. Traitement de la paralysie infantile, p. 828, 889, - 1076. de l'Eczéma, p. 352. de la goutte et du rhumatisme, p. 867. de la constipation, p. 867, 368, * 1108. de la méralgie paresthésique , p. 368. des hémorroïdes, p. 368. de la paralysie, p. 869. de la névrite brachiale, p. 870. de la surdité, p. 252, î 922. de l'Hypertrophie de la prostate, p. 258. de l'arthrite, p. 254. du rliumatisme, p. 255, 988. de la grippe, p. 206, £ 947. de la tuberculose, p. 258, 259, 268, ï 958, 968, ioo3. électrique des affections utérines, 268, £ 989- des tumeurs, p. 266. de répilepsie, p. 270, - 1018. du vaginisme, p. 278, ï 1041. des rétrécissements, p. 278, 819, - io55. électrique des vignes phylloxé- rées, p. 876. Transbordeurs F. Arnodin, p. 127. Transformation de la chaleur, p. 160. Trcmsmission par poulies extensibles, p. 129, - 286. non réversible, p. i48. de la pensée, p. 264, - 976- en télégraphie sans lil. p. 172, * 4o5, 435, 437- Transsibérien, p. 28. Trauma, p. 363. TruK'ail, p. 160. Traverses de chemins de fer, p. 146, * 245. Traversée des passes maritimes, p. 127. Trélat (E.). — Discussion sur la Tour EitTel, p. 198. Trélazé, p. 204, - 624. Ti-emblements de terre, p. 118, 202, ï 157. Trépanation, p. 264. Trichodriloïdes intermedius , p. 221, Trinité d'Angers, p. 426. Tropique, p. 38i, - ii36. Troussepoil, p. 281. Truite, p. 221. Trusts, p. 2. Tube de CrooUes, p. 3i8. Tuberculose, p. 252, 257, 258, 2.59, 262, 268, 3i8, 3-6, 417, £ 914, 9Ô3, . 4^0, 434, * 1424. Vœu présenté à la cinquième section, p. 174. Vœux de la 9' section, p. 219. de la 10° section, p. 280. de la i3' section, p. 870. de la i4° section, p. 383. présentés par la 5° Section d'ar- chéologie, p. 426. Volcans, p. ii3, - 157. p. 202. Voltmètre, }). 3i8. Voyage à travers l'Asie russe, ji. 021. Vue, p. 268, 268, ï 980. Wallon (E.). — Photographie du mou- vement, p. 23. Wertheim-Salomonson (D ). — Dis- cussion sur les calculs urinaires, p. 817. Sur la résistance d'un tube de Crookes, j). 818. Sur le diagnostic des tu- meurs blanches, j). 820. Sur les coui'ants intermit- tents, p. 822. Courants de haute fréquence. p. 828, £ 1074. Discussion sur le cancer ulcéré du sein, p. 841. Sur l'ohmmètre clinique du D' Bergonié, p. 34i. Wildeman (E. de). — Poisons d'épreu- ves, p. 218, 884, - 786. 1464 TABLE ANALYTIQUE Wiinereiix, p. 240. Winter. — Discussion sur la résistance des électrolytes, p. 355. Yeux, p. 26'3, 268, - 980. Yves Quyot. — Discussion sur la sup- pression des octrois, p. 446- Zaborowski. — Discussion sur la palelhologie russe, p. 236. Zaborowskî. — Chevaux domestiqués, p. 237, *845. Origine des Aryens, p. 238, î 882. Zenger (Ch. V.). — Théorie électrody- naniique du monde, p. 194, - «">7â. Zodiacale (Liunièrc), p. ii5, î 216. Zool, p. 377. Zoologie, p. 220, - 749. TABLE DES MATIÈRES SECONDE PARTIE NOTES ET MÉMOIRES Pages [M' 3 i] CoLLiGNON (Ed.). — Problème de f^éométrie i [S 2] FoN'TANEAU (E.). — Prcliiuinaires d'Iiydraulique 33 [I 3] Arnoux (G.). — Construction des tal)les de puissances des modules composés 65 [13] — — Tables de puissances des modules A« et 2 n , leur construction pratiijue 89 [U 1] Lkcornu (L.). — Sur les mouvements planétaires ii5 [M' 3 j] Bakisien (le G' E.-N.). — Sur certains l'oints remarquables d'une coni([ue 121 [O 4 d] Mannheim (le G" A.). — Note de géométrie cinématique 128 [J i] Tarry (G.). — Carrés panmagiqiu^s de base 3/1 i3o [J i] Goc(^oz (le C). — Carrés magi([ues 1^2. [525.14.551:2-1-2] Lallemani) (Cli.). — Relations des volcans et trem- blements de terre avec la ligure du globe 107 [77.8:526.9] Laussedat (le G" A.). — Les progrès de la métroplioto- graphie 168 [523.35] Marcuand (E.). — Observations physiques de la lune tendant à contirmer l'existence d'un faible atuiosi)hère, laites au Pic-du-^Iitli (altitude 2860 mètres) de 1897 à 1903 I74 [X 3 a] D'OcAGXE (M.). — Coup d'œil sur la théorie la plus générale de la nomograi)hie 180 [523.52] CuRÉTiEN (IL). — L'étude systématique des étoiles lilantes et les travaux de la Commission des météores de de la Société astronomiqiu? de France. . . . 189 [523.72:513.18] — — La quadrature mécanique des taches solaires. 207 [535.24:520] TorcuET (Em.). — Photométrie astronomique 210 [529. 5J Gardés (L.-F.-J.). — Calendrier perpétuel 214 Senouque (A.). — Sur l'enregistrement photograpliique du roulis et du tangage des navires 21» [523.59:78.83] QuÉNissET. — Piiotograpliie de la lumière zodiacale . . . 216 [523.61:77.83] — — Photograpiiies de la comète liorrelly it)o3 C. 21H. [581.778] Vaudrey (P.). — Sur les appareils indicateurs et enregistreurs .dans leurs applications aux Sciences et à l'Industrie 22» l466 TABLE DES MATIÈRES [625.6] Dhuart et Lkroy. — Détermination du type de voie étroite ai)pelce à rendre le plus de services 225 [622.2] Prikur. — De l'Industrie des carrières 228 [531.84] NivET. — Poulies extensibles système Fouillaron 286 [538.85] Dri'LAN (L.). — La distribution électrique à Angers 2^2 [625.1:439.4] Cuknot. — Recherche de la courbe de déformation des traverses de chemin de fer 2C^^ [621.83] MocoMBLE (de). — Engrenages à cames « de Grisson » 249 [585.322] Faiîry (Ch.). — Comparaison de la lumière du soleil avec celle des étoiles. Recherciies de photométrie solaire et stellaire 255 Lala (U.) et Roda-Plus (J.). — Représentations géographiques simpliliées ^65 [537.34:611.46] Dkmerliac. — Recherches sur la résistivité de l'urine humaine ^^i [538.562] ^NIavrain (Ch.). — Sur les cohéreurs à diélectrique solide ... 281 [538.562] TissoT (C). — Sur la durée du phénomène de « cohérence ». . 287 [537.832 : 535.24] Fabry (Ch.). — Emploi de la lampe électrique à incan- descence comme étalon photométrique 292 [77.05] Leduc (le D'^ S.). — Photographie pour moulage transparent ... 298 [548.5] — — Champs de cristallisation et cristallogénie . . 3o2 [535.312] Macé de Lépinay et Buisson (H.). — Sur les changements de marche par réllexion normale dans le quartz sur l'argent 3o5 [532.66] Mathias. — Remarques à propos du mémoire de W. Ramsay et Shields 3i2 [538.562] TuRPAiN (A.). — Sur le fonctionnement de cohéreiu's associés. 820 [538.562] Blondel. — Nouveau dispositif de radiateur pour la télégra- phie sans lil ^27 [537.323:538.56] — Sur l'application des couples thermoélectriques à la réception des signaux de télégraphie sans lil 333 [538.562] TissoT (C). — Appareils détecteurs de mesures pour la récep- tion des ondes électriques. Influence du détecteur sur les phénomènes de réception en télégraphie sans lil 337 [77.035] l)n AI (A.). — Nouvel appareil de photomicrographie 34o [77.813] Pasqueau (A.). — Redressement des clichés photographiques par le « Scopa » amplilicateur, redresseur automatique universel . . . 34? [538.562] RociiEEOHT (O.). — Réception accordée par cohéreur conden- sateur et résonnateur Oudin bipolaire 36i [538.561] Braun (F.). — Télégraphie sans fil 370 [538.562] Blondel (A.). — Nouveau système de radiateurs pour la télé- graphie sans lil ^74 [536,7] Aurk: (A.). — Note sur la thermodynamique 38o — — Note sur les divers étals des corps 887 Guillaume (Ch.-Ed.). — Sur la variation du module d'élasti- cité du fer aux températures élevées 892 TuRPAiN (A.). — Les phénomènes d'électricité atmosphérique obser^■és au moyen du cohéreur 896 [538.562:551.55] Turpain (A.) et David (P.). — Enregistrement d'orages par le cohéreur à l'observatoire du Puy-de-Dôme durant l'été 1908 ... i\03 [537.51] Turpain (A.). — Sur l'interruption du circuit primaire des bobines d'induction 4^5 Blondel (A.). — Quelques remarques sur les effets des antennes de transmission 4^7 [537.23] N0GIER. —Variations de l'intensité actinique de la lumière avec l'altitude M [535.37] BoRDiER (II.) et Bridon. — Phénomènes de fluorescence d'ori- gine mécanique 4i8 [535.37] — — Sur quelques phénomènes de fluo- rescence d'origine chimique . . . 422 [614.84:359] Deville (R.). — Incendies à bord des navires 428 [538.56] Broca (A.) et TuucuiNi. — Mesure des courants de haute fré- auence ^^^ TABLE DES MATIÈRES 14^7 [537.562] Blondel (A.). —Sur raugmentation de la puissance mise en jeu dans les antennes de transmission 4^7 GoY. — Sur un nouvel appareil de mesure des temi^ératures d'innamniahilité 44^ [54:6.52] TnoMAs (Y.) et Le Gorgeu. — Sur les halogénures thalliques. . 44^ [542.6] Dauvé. — Sur la vitesse d'attaque des métaux par les solutions salines ^02 [542.2.2.3:547.25] Taboiry (F.). — Action du soufre et du sélénium sur quelques composés organomagnésiens de la série aromatique . . . 456 ScHMiTT (le D' Ch.). — Sur quelques dérivés des éthers acyl- cyanaeétiques 4^3 [634.153.1] liroAST (J.). — Sur les principales variétés d'olives d'Algérie. 467 [615.9] ScuMiTT (D' Ch.). Toxicité du cacodylate de strychnine 47i [551.5:44.33] Raclot (l'Abbé). — Résumé des règles pratiques de la précision du temps à courte échéance sur le plateau de Langres .... 474 [551.57: (44.59)] David. — Rovdement du brouillard observé dans le ravin S.-W. du Puy-de-Dôme 479 [551.5] GuiLBERT (G.). — De la prévision du temps par la prévision des variations barométriques 4^1 [551.35] BuuNHEs (R.) et Bruxues (J.). — Les analogies des tourbillons athmosphériques et des tourbillons des cours d'eau et la c^uestion de la déviation des rivières vers la droite 4^7 [551.35] SyuiNABOL (S.). — Les chaudrons du Brenton 5o6 [551.35] Chaix-Dibois (E.). — Le i^ont des Oulles, phénomènes d'érosion par les eaux courantes • 5io [551.35] Fabre (L.-A.). — Sur la dissymctrie des vallées et la loi dite : de de Baër 5i5 [525.66] Bruyant (C). — Les seiches du lac Pavin 624 GuiLBERT (G.). — Brume et brouillard 534 [551.55] Durand-Gréa'illk. — Prévision, cpielques heures à l'avance du passage d'un grain de vent avec orage i^robable et tornade jjossible , en un lieu donné, à une heure déterminée 538 [537.41] GoGKEL (D' A.). — Sur la vai-iation diurne de la déperdition de l'électricité dans l'atmosphère 548 [537.41] Préaubert. — Sur l'électricité atmosphérique en temps d'orage. 55? Marchand (E.). — Nouvelles études sur les altitudes, vitesses et structures des nuages inférieurs. et supérieurs, faites à l'Observatoire du Pic-du-Midi SSg [551.54:914.34] Maillet (E.). — Hydrologie du Rhin allemand; les crues et leur prévision 564 [551.55:537.5] Zenger (Ch.-V.). — La théorie électrodynamique du monde et la période luni-solaire des tempêtes 575 [538:711(44)] Mathias (E.). — Sur la loi de distribution régulière de la force totale du magnétisme terrestre en France au i" janvier 1896 . . . 692 [551.76:96] Kilian (W.). — Note sur le Jurassique moyen dans les Alpes françaises. 6o3 [551.48: (44.22)] Bigot (A.). — Sur l'assèchement des régions calcaires des environs de Caen 609 — _ Sur l'âge des grès à Sal)alites de Saint- Saturnin (Maine-et-Loire) 624 [564:551.77(44)] Cossmann. — Observations sur quelques coquilles crétaeiques recueillies en France 620 DoLLFUs (G.-F.) et Ramond (G.). — Etudes géologiques dans Paris et sa banlieue. — IV. Le chemin de fer de Paris à Orléans aux abords de Saint-Michel-Monthéry (Seinc-et-Oise). 639 DoLLFus (G.-F.). — Faune malacologique du miocène supérieur de Rennes (étage redonien, gîte d'Apigné) (lUe-et-Vilaine). . 656 Feu Gaillard (A.). — Catalogue raisonné des discomycètes charnus (morilles, pelvelles et pézizes), observées dans le département de Maine-et-Loire pendant les années 1899-1902. 663 Bouvet (G.). — Les rulnis de l'Anjou, résumé des faits acquis. 673 l468 TABLE DES MATIÈRES [583.32] RussEL (W.). — Sur les migrations de la Cytisine chez les Cyti- siis laburnuiu 690 [582.22:635.196] Ducomet (V.). — Influence de la fécondation sur le dcvcloiipenient des annexes du fruit à propos d'une malforma- tion de fraises. 69? [632] — — La l)runissure des végétaux et sa signification physiologique . . . 697 [634:.644] Gkille (M.). — Sur mes hybrides de vigne et mon hybride vrai de chasselas par vigne vierge 708 DuTAiLLY (G.). — Nouvelles recherches sur les Geiini et leurs hybrides 7^^ Coupix (H.). — Sur l'alimentation minérale d'une moississure très commune (Sterigmatocystis nigra) 720 Feu GÉNEAU iJE Lam ARLiÈRE et J. Maheu. — Sur quelques mus- cinées cavernicoles des terrains siliceux 722 [635.14] PoiRAULT (G.). — Sur le bouturage d'été 726 — — Sur des anomalies des fleurs de Théodora augustifolia E. Meyer 728 — — Sur l'hydnocystis piligera tul 73o Prunet (A.). — La rouille des céréales dans la région toiUou- saine en 1908 7^* Daxiel (L.). — Observations sur la grefl"e de quelques compo- sées 733 [615.97 : 67.2] De Wildeman (E.). — A propos de poisons d'épreuves de l'Afrique occidentale 7^6 [581.91(44.59)] Bruyant (C). — Limite inférieure de la végétation macropliytique au lac Pavin 747 [591.9(44)] JoriJiN. — Eaune entomologique armoricaine 749 [591.9:595.72] Hoiliîert (C). — Première observation sur la faune orthoptérique des Coëvrons 75o Faivel (P.). — Un nouvel oligochète des puits (Trichodri- loïdes intermedius) 7^4 [575.1 : 598.3] Loisel (D' G.). — Recherches de statistique sur la descen- dance des pigeons voyageurs 760 [594(44.18)] Germain (L.). — Considérations générales sur la faune malacologi TABLE DES MATIÈRES I469 [398.3144.18) Skuillot (P.). Les traditions popiilaires en Anjou . . . 827 [569.599-9(47)] GiUFFiiinA-RrcGiRRi (le D). — Etat actuel d'une ques- tion de palethnologie russe 889 [636.1:572.91] Z.viîorowski. — Le cheval domestique en Em-ope et les Protoaryens 845 BiAiLLK. — Silex et ossements trouvés au confluent de la Loire et du Layon 862 [581.9 :412] Charencky (G'" de). — De l'origine américaine du Phaseohis Vul^aris 863 [412] — — Les noms des points de l'Espace chez les peuples Celto-italiques et Ger- mains 867 [611.91] Ledoible (A.). — A propos de deux crêtes occipitales externes apophysaires humaines 874 [571.3(44.81)] Dklort, — Sépulture Gauloise des bois de Celles, près Neussargues (Cantal), dans laquelle on retrouA'e des traces de la civili- sation des Nécropoles de Tirynthe, Halltatt, Este et la Tène 876 [572.891] Zaborowski. — Comment est résolue la question d'origine des peuples aryens de l'Asie 882 [571.81(44.42)] Drioton (Cl.), Grukre (G.) et Galimard (le D' J.). — Note sur des fouilles exécutées dans la caverne de Roche-Chèvre à Bai-birey-sur-Ouche (Cùtes-d'Or) 887 [571.91(44.42)] Drioton (Cl.). — Les retranchements calcinés du Château-Renard (Gevrey-Chambertin) et du Bord-Brîdé (Clambières-les- Dijon) 890 [573.21(44.35)] Capitax (le D'). — L'industrie reutelo-mesvinienne dans les sablières de Chelles , Saint-Acheul , Montières , et les graviers de la Haute-Seine et de l'Oise 898 Rivière (E.). — La lampe en pierre de Saint-Julien-Maumont (Corrèze) 896 [571.24(44.72)] Peyrony. — Stations préhistoriques du Pech-de- Bertrou, près les Eyzies (Dordogne) goi [411] ForRimiGNiER (Ed.). — Inscriptions et symboles alphabétiformes des mobiliers franc et mérovingien gjo3 [571(44.76)] Delisle (D' F.). — Le préhistorique dans les arrondisse- ments de Nérac (Lot-et-Garonne) et de Condom (Gers) QQ^ [571.73(44.18)]' Desmazikres. — Note sur une statuette préhistorique en grès trouvée à Blaison (Maine-et-Loire) gi2 [616.938] Ghipat (D' H.). — Influence de la grippe sur la i^roduction et l'évolution d'autres maladies gi/j — — Epidémies familiales de grippe 910 [617.8.0087:534.3] Natier (D^ M.). — La surdité chez l'enfant. — Son diagnostic précoce et son traitement au moyen des diapasons. Education physiologique de l'enfant 022 [617.558.5] Malherbe (le D' A.). — De la résection totale des cordons spermatiques dans les hypertrophies de la prostate q3o [616.901.3(08)] Ladureau. — Un traitement végétal du rhumatisme. . gSS [617.583] BiLHALT (le D' M.). — Du genu valgum chez les enfants atteints de paralysie infantile au côté opposé 040 [612.561.6] Leduc (le D'^ S.). — Etudes sur la calorilication g42 [616.938:615.64] — — Traitement de la grii)pe par les inhala- tions médicamenteuses présentation d'un nouvel inhalateur 947 [616.381.7] Delbet (le D' P.). — Contribution à l'étude de l'opération de Talma g^g [616.995] Tktau (D' J.). — Diagnostic pratique de la prédisposition à la Tul>erculose pidmonaire 053 €14.545(44.18)] Lepage (le D'). — Prophylaxie de la Tuberculose à Angers. — Ce qui a été fait et ce que l'on doit faire ■ . . , 968 [614.545(44.18)] Jagot (le D'). — Œuvre angcAine des colonies de vacances n63 I/J^O TABLE DES MATIERES [617.581:617.146] Facuet (le D' Cli.). — Pseiulo-coxalg-ie par corps ctranj^cr (fragiueiil d'aiguille). Radùjgraphie, intervention chirurgicale, guérison 9:70 [612.25] Lesage (le D' P.). — Nouveau modèle de l'hygromètre respira- toire du D' Pierre Lesage , emploi en médecine 973 [615:617.7] Darikh (D' A.). — Importance de la thérapeutique locale dans les diil'érentes maladies oculaires 980 [618.14:615.84] Comiu;s (D' H.). — Traitement électrique de certaines airections utérines dans la clientèle rurale 989 [612.821.714.5] Binet-Sanglé (D" Cli.). — Expériences sur la transmis- sion directe de la pensée 996 [614.545(44.89)] Lafargue (G.). — La guérison de la i)rophylaxie de la tuberculose au sanatorium de Banyuls-sur-Mer ioo3 [612.461.17] Qtimari) (D' E.). — Uréomètre clinique I0i5 [616.853:615.582.2] — — La pain bronuiré et dichloruré dans le ti-aitement de l'épilepsie et des diverses affections nerveuses. .... 1018 [616.0221.274] Foveau de Courmelles (U'). — Influence des diverses lumières sur les microbes pathogènes 1020 [616(67)] Brimpt (D' E.). — Statistique médicale faite dans un voyage à travers l'Afrique Tropicale. (Xote préliminaire) I025 [615.82] Saqvet (D'). — Gymnastique ou massage en thérapeutique. . . io36 [618.15:615.82] Saqiet (1)'). — Traitement du Aaginisme par le mas- sage suédois. (Procédé de Thure Brandt) 1041 Peton (D'). — Le vin au point de vue médical et hygiénique. io44 [77.833] BÉr.LÈRE (D' A.). — L'emploi des cylindres compresseurs en radiographie et le nouveau cylindre compresseur ajustable au porte- ampoule-diaphragme-iris 1047 [617.558.00.343 : 615.849] Laqueruière (D'). — A propos du traitement électricpie des rétrécissements du canal utérin io55 [616.006:615.849] Biluaut (D' M.). — Du diagnostic précoce des tunuurs blanches au moyens des rayons X 10.57 [615.844.2] Leduc (D' St.). — Etude sur les courants intermittents de basse tension 1060 [615.846] Wertheim-Salomonson. — Courants de haute fréquence non amortis 1074 [616.849] Mesnard (D'). — Diagnostic et traitements physiques et niécani [615.84:617.341.0083] Laquerrière (D') et Deluerm D). — Essai de synthèse îles indications des diverses modalités électriques contre la constipation 1108 [634.151.2:663.1] Perrier (D' G.). — Sur un mode de préparation de moùls de pommes stériles iii3 TABLE DES MATIÈRES l47I [61-4.31] Mallet. — Des indeiimités accordées aux propriétaires d'ani- niaiix tuberculeux 1117 [631.85:636.123.3] Lavallkk (P.). — Considératious sur l'ensilage des fourrages verts 1121 [631.6] — — Auu>lioration des prairies par les engrais minéraux 1127 [631.15] Le Gendre (Cil.). — Cartes agronomiques communales ii33 [633.4] Heim (F.) et Géneau. — Contribution à l'étude des fourrages des pays tropicaux ii36 [368.5] Danguy (L.). — Les Sociétés d'Assurance Mutuelle contre la mortalité du bétail • ■ ii4i [360.630] De Moxïriciier. — Union des Syndicats agricoles des Alpes et de Provence , et Associations coopératives du Crédit agricole. . . . ii43 [(638)44] DuFOUR (L.). — Aperçu économique et géographique sur l'apiculture française ii48 [967.7] JoHBERT (J). — Le Somalis et leSomaliland. . nC6 Labiîé (P.). — Les Ports russes en Extrême-Orient ii^S Curie (J). — Représentation proportionnelle. Comparaison entre la proposition de loi rédigée en avril itjoS par la ligue, pour la représentation proportionnelle et la solution pro- l)osée depuis 1888 1182 [151.1] INIaillet (Ed.). — Sur l'homme de génie, de M. Lombroso, et la facidté inventive 1192 GuiFFARi> (L.). — Préface à l'étude du problème de la repopulation i2o5 [614.1] CouRJON (D') et Granvilliers (L.). — Des projets ayant pour but d'accroître la population et de l'intervention du législateur 1209 [745] Castaignet (J.-B.-N.). — L'enseignenu-ut de la décoration aux cours d'adultes de la Société Philomatique de Bordeaux (classe des femmes). 121 1 [370.380] CiOURHAN. — L'enseignement de la Science du Commerce . . 1228 [379(44.58)] Lang (T). — Organisation et fonctionnenuMit de la Société d'enseignement professionnel du Rhône. Principes dirigeants de cette institution 1228 [408.9] Offret (A.). — Les progrès de .l'Espéranto dans le monde . . . . 1289 [614.12(44-91)] DE MoNTRicHER (H.). — Hygiène et démographie de la ville de Marseille i25o [614.31] MoROT (Ch.). — Les divers procédés d'inspection sanitaire des animaux sacrifiés dans les abattoirs publics pour l'alimentation de l'homme * ^^^^ [5.73.6] PiGNET (le D'). — Du coellicient de robusticité. Nouveau mode d'appréciation de la force pliysique de l'hoanne au moyen d'un « indice numérique » tiré des trois mensurations : taille , périmètre et poids . . 1266 [614(09)] Hexrot (D' IL). — De la nécessité de conniléter la loi sanitaire du là lévrier 1902 1274 Loir (D' A.). — L'institut Pasteur en Rhodésie 1277 [614.1] Delbet (D' P.). — Sur la dépopulation 1290 [614.542] Lafargue (G.). — L'organisation de la lutte contre la tuber- cules.- 1294 [220.93(44.18)] Farcy (L. de). —La Croix d'Anjou i3o4 [751] Ladireau (A.). — Les fresques de Bosco-Reale iSio [726.6(44.18)] Fleury (G.). — Le portail occidental de la cathédrale d'Angers • i3l3 [391.7(36)1 QuiNTARD (D). — Une bague romaine icJ20 1593 1(36)] RiviiîRE (Eni.). — Découverte d'une nécropole gallo-romaine à Paris ï324 Pktricci (P.). — La musique en Anjou au xv' siècle i345 [746:726.6(44.12)] Farcy (L. de). — Les tapisseries de la cathédrale d'Angers ^353 1729.6(44.18)] Gilles-Dkperrière (E.) — Utilisation de la tour Saint- Aubin à un service public par la Ville 1371 I/:72 TABLE DES MATIERES [729.6(44.18)] C.ili.ks Dkpiîkrièke (E.). — Modilication d'une partie ^" # ¥ 10 12 14 15 Clichés el rhototypie &ohier, Clisir{tignT-s.-)I%ri>e. 6 13 17 -\ï. COSSMAXN. coquilles crétaciqTzes recueillies en France Association Française T. XXXII. PI. III ^lll^^ Clicliés «l Photolypio Sohior et C", Cliampigny-s -Mami-. M. COSSMANN; coquilles crétaciques recueillies en France Association Française T. XXXII PI V Aasiner', à&ô .B&rictnd/, H^. G. DUTAILLY- LE STYLE GYNOBASIQUE DE CERTAINS GEUM