î;îf!'|î;'^?^iï;-':''' mp^g, t'!;iiii ■:■: COMPTES RENDUS DES SÉANCES MÉMOIRES LUS A LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE PENDANT L'ANNEE 1869. Paris. — Imprimerie Cusset et C, rue Racine, 26. COMPTES RENDUS DES SÉANCES ET SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE. JT A VT •••■'^ /X '<^u l i e R A RYJ3cli f 0 h TOME PREMIER DE LA CINQUIÈME SÉRIE ANNÉE 1869 VINGT El UXIK.ME DE LA COLLECTION. AVEC G PLANCHES L I T HOG R A P H I É ES ET COLORIÉES PARIS Chez ADRIEN DELAHAYE, libraire-éditeur, Place de rÉcole-de-MéJecine. 870 LISTE DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE EN lSb9. COMPOSITION DU BUREAU. Président perpétuel. Vice-présidents. . . . Secrétaire générai. . Secrétaires ordinaires. Trésorier. , Arctiiviste M. Claude Bernard. M. Gubler. M. Vulpian. M. Dumontpallier. M. Bouchard. M. Hayem. M. Lépine. M. Magnan. M. Gallois. M. Laborde. MEMBRES HONORAIRES. MM. Andral. Becquerel. Bernard (Claude). Bouillaud. Chevreul. Coste, MM. Dumas. Littré. Milne Edwards, De Quatrefagcs, N... N... VI MEMBRES TITULAIRES-HONORAIRES (1868-69). MM. Balbiani. Bastien. Bernard (Charles). Berthelot. Blot. Bouchut. Bouley (Henri). Bourguignon. Broca. Brown-Séquard. Charcot. Chatin. Davaine. Depaul. Fournier (Eug.). Giraldès. Goubaux. Guillemin. Hillairet. Houel. MM. Jacquart (Henri). Laboulbène. Leblanc (C). Le Bret. Leconte. Le Gendre. Liégeois. Lorain. Luys. Marey. Martin-Magron. Michon. Moreau (Armand). Regnauld. Sappey. Soubeiran (.1. L.). Verneuil. Vidal. Vulpian. MEMBRES TITULAIRES. MM. Bail. Bergeron. Bert (Paul). Bouchard. Carville. Chalvel. Cornil. Duguet. Dumontpallier. Gallois. Gréhant. Gubler. Hardy. Hayem. Isambert. Jolyet. Sjishaber, MM. Laborde. Lancereaux. Legros. Lépine. Leven. Liouville. Magitot. Magnan. Milne Edwards (Alphonse) Ollivier. Pelvet. Rabuteau. Ranvier. Raymond . Robin (Charles). Trasbot. Vaillant. VII MEMBRES ASSOCIÉS. MM. Agassiz. Baer (de). Bennett (Hughes). Ehrenberg. Gurlt (Ernst-Friedrich). Huss (Magnus). Jones (Bence). Lebert(H.). Liebig (Justus). Mohl (Hugo von). MM. Owen (Richard). Paget (James). Pouchet père. Purkinje. Queteley. Schwann. Siebold. Sédillot. Valentin. MEMBRES CORRESPONDANTS NATIONAUX. MM. Beylard à Paris. Blondlot à Nancy. Chaussât à Aubusson. Chauveau à Lyon. Cotard à Gouers. Courty à Montpellier. Dareste à Lille. Desgranges à Lyon. Dufour (Gustave) à Rome. Dugès aîné au Mexique. Duplay à Paris. Ebrard à Bourg. Estor à Montpellier. Faivre (E.) à Lyon. Germain de Saint-Pierre., à Nice. Gosselin à Paris. Guérin (Jules) à Paris. Ehrmann à Strasbourg. Huette à Montargis. Lecadre au Havre. Leroy de Méricourt à Brest. Lespès à Marseille. Leudet (Emile) à Rouen. Martins (Charles) à Montpellier. Odier à Genève. Ollier à Lyon. Rouget à Montpellier. Saint -Pierre à Montpellier. Stoltz à Strasbourg. vin MEMBRES CORRESPONDANTS ÉTRANGERS. Grande-Bretagne. MM. Beale à Londres. Berkeley (M. J.) à Kings-Cliff. Bowman (W.) à Londres. ■ Carpenter (W. B.) à Londres. Grant (R. E.) à Londres. Jacob (A.) à Dublin. Jones (Wharton) à Londres. Maclise à Londres. Marcet à Londres. Nunneley à Leeds. Redfern à Aberdeen. Sharpey à Londres. Simon (John) à Londres. Simpson à Edimbourg. Thomson (Allen) à Glasgow. Toynbee à Londres. Waller à Londres. Williamson à Londres. , Allemagne. MM. BischolT à Munich. Briicke (Ernst) à Vienne. Carus (V.) à Leipzig. Dubois-Reymond à Berlin. Helmollz à Leipzig. Henle à Gœttingen. Hering à Stuttgardt. Hirschfeld (Ludovic) à Varsovie. Hoffmeister à Leipzig. Hyrtl à Vienne. Kœlliker à Wurzburg. Leuckart à Munich. Ludwig à Vienne. Luschka à Tubinge. Mayer à Bonn. Meckel (Albert) à Halle. Rokitansky à Vienne. Schallze à Bonn. IX MM. Slannius à Roslock. Stilling à Cassel. Virchow à Berlin. Weber (Wilhelm-Eduard). . à Leipzig. Weber (Ernst-Heinrich). . . à Leipzig. Belgique. MM, Gluge à Bruxelles. Spring à Liège. Tliiernesse à Bruxelles. Van-Beneden à Louvain. Danemark. M. Hannover à Copenhague. Suède. M. Santesson à Stockholm. nollando. MM. Donders à Utrecht. Hartig à Utrecht. Van der Hœven à Leyde. Suisse. .MM. Duby à Genève. Frey à Zurich. De la Harpe à Lausanne. Miescher , à Bàle. Vogt à Genève. Italie. MM. Lusana à Palerme. Martini. . . .' à Naples. Moleschott à Turin. Vella à Turin. Portugal . • M. De Mello , . à Lisbonne. États-Unis. MM. Bigelow (Henry J.) à Boston. Draper à New-York. Leidy (Joseph) à Philadelphie. Brésil. M. Abbott à Bahia. ISlLlBRARV' SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE. PRIX ERNEST GODARD ANNÉE 1869. RAPPORT AU IS^OM D'UNE COMMISSION- COMPOSÉE DE MM. BALBIANI, CHARGOT, GIRALDÈS , MOREÂU et VULPIAN, M. GIRALDÈS, rapporteur. Messieurs, Pour la troisième fois la Société de biologie décerne le prix fondé par notre aimé et regretté collègue Ernest Godard. Dans ce but, la Société de biologie a chargé une commission composée des cinq membres dont les noms précèdent, d'examiner les divers travaux envoyés pour ce concours. Les mémoires adressés à la compagnie pour le prix Godard sont au nombre de trois : 1° Un mémoire ayant pour titre : De la conicine, par M. le docteur Casaubon. 2° Un second mémoire : Éludes de tliérapeulique expérimentale de la méthode physiologique et thérapeutique, de ses applications à Vétude de la belladone, par M. le docteur Meuriût. 3* Un troisième mémoire : Recherches anatomiques et considéra- XII lions physiologiques sur la circulation veineuse du pied et de la jambe ^ par M. le docteur Ledentu. Chacun de ces mémoires a été préalablement soumis à l'examen spécial du membre de la commission dont les aptitudes et les travaux se trouvaient en harmonie avec le sujet traité; c'est ainsi que M. Bal- biani a été chargé de celui de M. Casaubon, M. Moreau du mémoire de M. Meuriot, et M. Giraldès de celui de M. Ledentu. Les trois rap- ports ont été ensuite examinés et discutés au sein de la commission. M, Balbiani, rapporteur du mémoire de M. Casaubon, s'exprime ainsi : « C'est un travail considérable, qui ne comprend pas moins de 200 pages, mais dont un bon tiers, je dois le dire dès l'abord, est consa- cré à l'histoire abrégée des travaux de ses devanciers touchant les caractères physico-chimiques et les propriétés physiologiques et thérapeutiques de la conicine. Le reste est fondé sur les recherches personnelles de l'auteur ; nous ne nous occuperons que de cette dernière partie. M Après Koelliker, Gutraann, Albers et autres, M. Casaubon a expé- rimenté l'action de la conicine sur les animaux. On sait que parmi les effets que cette substance exerce sur l'économie, le plus remar- quable est son action sur le système nerveux de la vie animale, dont elle détruit l'excitabilité en respectant la contractilité propre des muscles. Tous les auteurs sont unanimes à cet égard, et à raison de cemoded'actionqu'ellepartageavec un certain nombre d'autres sub- stances, mais surtout avec le curare, la plupart d'entre eux ont classé la conicine parmi les paralysants du système nerveux. M. Ca- saubon a également constaté dans ses expériences cette influence de la conicine sur la motricité nerveuse, mais il pense qu'il y a plutôt diminution qu'abolition complète de cette propriété, et qu'à ce point de vue il y a une différence entre l'alcaloïde des ciguës et le curare. Il fonde cette manière de voir sur ce qu'il a obtenu des mouvements dans le muscle lorsque l'un des pôles était appliqué sur celui-ci et l'autre sur le nerf, et que des contractions se manifestaient encore par action réflexe lorsqu'il électrisait les téguments dans une autre région du corps. Je pense que ces résultats doivent recevoir une autre interprétation que celle que leur donne M. Casaubon. On sait en effet, par les observations de M. Vulpian, que chez les animaux empoisonnés par le curare, principalement chez les mammifères, XIII un reste de motricité souvent très-prononcé survit encore dans les nerfs après la mort, mais qu'il suffit d'entretenir la circulation par la respiration artificielle pour voir disparaître jusqu'aux der- nières traces d'excitabilité. Cette question de la respiration artili- •cielle, dans la recherche des effets physiologiques des substances toxiques, est discutée dans le mémoire de M. Gasaubon. 11 conclut que, pour la conicine tout au moins, l'insuftlation est plutôt nuisible qu'utile parce que, au lieu de prolonger l'action du poison sur l'éco- nomie, elle facilite son élimination et empêche de nouveaux effets de se produire. Il était réservé à MM. Pélissard, Jolyet et Gahours de répondre à cette assertion de M. Gasaubon dans le travail tout récent qu'ils viennent de présenter à l'Académie des sciences. Ges expéri- mentateurs ont effectivement prouvé que lorsque la conicine est absorbée d'une manière lente et graduelle, comme cela a lieu à la suite de son introduction sous la peau, on observe le môme effet que pour le curare, c'est-à-dire que les animaux conservent encore après leur mort un reste d'excitabilité plus ou moins marqué dans leurs nerfs moteurs, mais qui disparaît lorsqu'on supplée par la res- piration artificielle à la paralysie des mouvements respiratoires. Ges résultats démontrent donc d'une manière évidente, d'une part, que l'insufflation n'a aucun des effets fâcheux que lui attribue M. Gasaubon, et d'autre part qu'il y a une similitude complète d'ac- tion entre la conicine et le curare relativement à la manière dont ceux-ci affectent les propriétés des nerfs moteurs puisqu'on obtient des effets entièrement comparables lorsqu'on se place dans des con- ditions identiques. « Les physiologistes qui attribuent l'action du curare sur les mus- cles volontaires à une paralysie des extrémités terminales des nerfs moteurs, devaient naturellement transporter aussi cette explication à la conicine qui produit des effets analogues (Koelliker, Gutmann). D'autres, au contraire, pensent avec M. Vulpian, Turke, etc., que ces nerfs conservent toute leur intégrité physiologique, et que l'abolition de la contractilité transmise est le résultat d'une modification qui se passe à l'union de la fibre musculaire avec la fibre nerveuse et quia pour effet de rompre les connexions entre ces deux éléments. M. Gasaubon n'adopie ni l'une ni l'autre de ces deux explications; il n'accorde à la conicine aucune action directe et élective^soit sur le nerf, soit sur une substance interposée entre celui-ci et le muscle. iivij L î s R A R Yi "^3 XIV Suivant lui, c'est le sang lui-même qui est directement modifié par le poison, d'une manière analogue à ce qui a lieu dans l'intoxication par l'oxyde de carbone, et il considère en conséquence toutes les perturbations fonctionnelles provoquées par la conicine comme les effets secondaires de cette altération primitive du liquide nourricier. Relativement à la nature et au siège de cette altération, l'auteur consacre plusieurs pages de son mémoire au développement d'une théorie par laquelle il cherche à établir que la conicine se détruit dans le sang et charge celui-ci d'un excès d'acide carbonique prove- nant du produit de la décomposition et que lui donne les pro- priétés du sang veineux. Ainsi saturé d'un gaz impropre à entrete- nir la vie, ce liquide agit à la fois en produisant des modifications locales dans les organes et les tissus et en exerçant d'autre part sur les centres nerveux des effets d'excitation ou de dépression qui se combinent avec ceux qui se passent à la périphérie. Cette manière d'envisager l'action du toxique ne permet pas de suivre facilement la marche des phénomènes, et l'auteur, dont le récit est parfois ob- scur et en contradiction avec lui-même, parait avoir quelque peine à se retrouver au miheu des effets complexes qu'il attribue à la co- nicine. Ajoutons que son interprétation du mode d'action de cette dernière est en opposition avec les observations de M. Bernard qui prouvent que le sang ne subit aucune modification dans ses proprié- tés chimiques sous l'influence des alcaloïdes végétaux, et qu'il n'ap- porte d'ailleurs, à l'appui de sa manière de voir, aucune démonstra- tion expérimentale, aucune analyse comparative du sang des animaux empoisonnés par cette substance. « Une différence plus réelle entre les effets de la conicine et ceux du curare que celle signalée plus haut, d'après M. Gasaubon, a été récemment indiquée par MM. Pélissard, Jolyet etCahours dans le tra- vail que j'ai déjà eu l'occasion de mentionner. D'après ces expérimen- tateurs, la conicine porterait d'abord son action sur les nerfs pneu- mo-gastriques agissant comme nerfs d'arrêt du cœur avant d'affecter les nerfs moteurs en rompant leurs communications avec les muscles volontaires. Dans leurs expériences faites sur le chien, cette in- fluence sur les pneumo-gastriques se manifestait par deux effets re- marquables, savoir : d'une part lïmpossibilité de produire le ralen- tissement des mouvements du cœur par l'excitation galvanique de ces nerf;=, et d'autre part la disparition de? intermittences que pré- XV sentent, dans l'état naturel, les battements de cet organe chez le chien. Ces battements présentaient un rhythme parfaitement régulier, comme cela a lieu après la section des nerfs pneumo-gastriques, d'a- près les expériences bien connues de M. Cl. Bernard. « L'accélération des mouvements cardiaques a été notée par M. Gasaubon chez tous les animaux en expérience comme un résul- tat constant de l'action de la conicine ; mais au lieu de l'expliquer par une influence locale et directe du poison sur les nerfs vagues, il n'y a vu qu'un phénomène secondaire dû à la paralysie du bulbe, et a négligé d'explorer par le galvanisme l'état de ces nerfs. C'est ainsi que par suite de l'idée qu'il s'est formée du mode d'action de la conicine, il a laissé à d'autres le soin de mettre en évidence la particularité la plus caractéristique de la manière d'agir de cette substance et qui en môme temps en différencie le mieux les effets avec ceux du curare. « Il serait trop long de suivre l'auteur dans le détail de ses obser- vations relatives à l'action qu'exerce la conicine sur chacun des différents systèmes organiques. On trouvera les résultats à cet égard résumés dans les conclusions placées à la fin de son travail ; mais il ne me paraît avoir ajouté aucun fait important nouveau à Ihistoire physiologique de cet alcaloïde. On ne peut cependant s'empêcher de reconnaître qu'il a apporté plus de précision que ses prédécesseurs dans la description de la marche des symptômes morbides, et qu'il a fait connaître plusieurs particularités intéressantes du mode d'ac- tion de cette substance qui avaient échappé aux auteurs précé- dents. » M, MoREAu, rapporteur du travail de M. Meuriot, dit : « Dans ce travail, l'auteur a réuni avec un grand soin ce qui a été fait en thérapeutique et en physiologie sur la belladone. « L'auteur a cherché à interpréter les faits qui existent dans la science et a fourni lui-même des expériences personnelles. « Parmi les expériences qu'il a faites, je citerai comme mayant paru les plus intéressantes celles dans lesquelles il montre, sur l'homme et sur le chien, que l'injection sous-cutanée de petites doses d'atropine détermine à la fois l'augmentation de la pression du sang et l'accélération des battements du cœur. « On doit regretter que des expériences comparatives ne soient pas XVI mises en regard pour montrer quel serait ielfet d une substance autre que l'atropine Injectée dans les mêmes conditions. « On peut regretter d'une manière générale, en lisant ce travail plein d'érudition, que les questions ne soient pas serrées davantage, que les faits ne soient pas établis avec des preuves assez rigoureuses ou des détails suffisants, et que les interprétations données par l'au- teur soient souvent difficiles à accepter. Enfin, dans les 22 conclu- sions finales, on doit regretter que l'auteur n'indique pas d'une ma- nière expresse ce qu'il considère comme établi par ses expériences soit tout à fait originales, soit venant confirmer d'autres expériences. « Il a paru à votre rapporteur impossible de juger si l'auteur con- sidère l'atropine comme agissant sur le tissu nerveux ou sur le tissu musculaire, ou bien sur tous les deux. « En effet, aux pages 39 et 40, il la regarde comme agissant sur l'ac- tion réflexe, par conséquent sur le tissu nerveux. A la page 43, en bas, et à la page 44, en bas, il la regarde comme agissant sur les fibres lisses des tuniques musculaires, dont l'excitabilité serait aug- mentée. a A la page 80, l'atropine détermine la paralysie des extrémités du pneumo-gastrique et l'augmentation de tonicité des muscles des vaisseaux. « A la page 138, ch. IV, la belladone agit sur les vaisseaux et sur l'innervation du cœur. « En résumé, la difficulté du sujet, les efforts de l'auteur peuvent engager la Société à lui donner encouragement. Mais je pense qu'elle ne doit couronner ce travail qu'en indiquant expressément que c'est à titre d'encouragement et sans lui reconnaître un mérite vraiment scientifique. » Le travail de M. Ledentu est spécialement consacré à un sujet d'anatomie descriptive : l'étude du système veineux, du pied et de la jambe. Dans cette étude, fruit de patientes recherches, l'auteur s'occupe avec un soin minutieux du système veineux superficiel et profond du pied et de la jambe. 11 décrit avec grande précision la position et la disposition des réseaux et troncs veineux sous-cutanés et sous-aponévrotiques. Les voies de communication entre le réseau superficiel et le réseau profond sont indiqués avec détail; lauteur insiste particulièrement sur la position cl le nombre des replis val- XVII vulaires qu'on rencontre dans l'un ou l'autre des deux systèmes, plus nombreux dans les veines sous-aponévrotiques que dans les veines Gous-cutanées. D'après la direction diflérente des replis valvu- laires dans les points de communication entre les systèmes de veines sous-cutanées et les veines sous-aponévi'otiques dans la région du pied et celle de lajombe, Tauteur établit que le courant sanguin, que la circulation veineuse dans la première de ces régions se fait des parties profondes vers les réseaux superficiels, et en sens in- verse dans la région de la jambe, c'est-à-dire de la partie superficielle vers les parties profondes. Cette déduction physiologique est le ré- sultat de la direction même des valvules veineuses. Le réseau vei- neux profond ou sous-aponévrotique, dont l'importance physiolo- gique et pathologique ne saurait être méconnue, est divisée par M. Ledentu en deux ordres de veines, à savoir : veines satellites et veines musculaires ; les premières, simples ou doubles, communiquant parfois entre elles tout le long de leur trajet, accompagnent toujours les artères; les secondes, veines musculaires, prennent naissance dans l'épaisseur des muscles par des radicules simples : M. Ledentu les désigne sous le nom de veines intramusculaires. « Depuis longtemps les anatomistes ont reconnu la différence de structure qui sépare les veines sous-cutanées et les veines sous- aponévrotiques. Cette différence a beaucoup occupé M. Ledentu, et il en donne une description très-exacte. « Dans l'étude minutieuse et patiente des veines du pied et de la jambe, l'auteur, tout en signalant la différence que présente le sys- tème aux diverses époques de la vie, n'insiste pas assez sur cette différence, dont la connaissance peut seule nous donner la clef des nombreuses modifications qu'on rencontre dans ce système, différen- ce qui permet de comprendre comment des veines, d'abord capil- laires, se développent par suite d'une évolution normale ou d'une cause physiologique, au point de se modifier complètement, créent des canaux nouveaux, des voies d'écoulement, des conduits de sûreté, véritables formations complémentaires prêtes à venir au secours d'une circulation en souffrance ou interrompue. « Dans l'étude des origines des veines superficielles et profondes, l'auteur laisse à l'écart ces magnifiques plexus qu'on rencontre au- tour des ongles, autour du talon, à la plante du pied, ainsi que celles qui proviennent du périoste, origines veineuses qui, à mon sens, b XVIII floivenl entrer pour une certaine mesure dans une étude complète de l;i circulation veineuse du pied et de la jambe. . I. — lODATES ET ACIUE lODIQUE. I. — lodates en général. Avant de faire connaître les résultats de mes expériences, je crois devoir indiquer brièvement les caractères distinctifs des iodates et les procédés que j'ai suivis dans mes recherches. Les iodates sont en général solubles, mais leur solubilité est faible, môme celle des iodates alcalins. L'iodate de magnésium échappe à cette règle, car il est déliquescent. Les iodates résistent à l'action de l'acide sulfurique concentré, de l'acide azotique et des oxydants en général. C'est ce que j'ai reconnu en traitant divers sels de ce genre par lacide sulfurique et le bioxyde de manganèse, l'acide sulfurique et le bichromate de potassium, le permanganate de potassium ; tous ces cor[)S n'exercent pas d'action sur les iodates. L'acide clilorliydrique n'agit pas sensible- ment à froid sur la dissolution d'un iodate, mais à chaud il la colore en jaune. Si l'on fait agir cet acide sur un iodate solide, il se dégage un gaz jaune ayant l'odeur de l'acide chloreux. Tous les iodates sont décompo- sés par la chaleur et donnent de l'oxygène et un iodurc ; le plus souvent une certaine quantité d'iode se dégage. Si les iodates et l'acide iodique résistent à l'action des oxydants, il n'en est pas de môme lorsqu'ils sont soumis à l'influence des réduc- teurs. En effet, l'acide sulfureux, l'hydrogène sulfuré, le protochlorure détain les détruisent avec la plus grande facilité en mettant l'iode en liberté. C'est sur cette propriété qu'est fondée la distinction des iodates et des iodures ; ceux-ci sont détruits par les oxydants, tels que le chlore, l'acide azotique, et ne sont pas altérés au contact des réduc- teurs; ils présentent donc des réactions exactement inverses de celles des iodates. Recherche des iodales. — Pour reconnaître la présence d'un iodate dans une liqueur, dans l'urine, par exemple, on ajoute à cette liqueur de l'eau d'amidon, puis on y verse goutte à goutte une solution d'acide sulfureux. Aussitôt l'amidon est coloré en bleu violet d'autant plus in- tense que l'iodate est en plus grande quantité. Mais il faut éviter d'ajou- ter un excès d'acide sulfureux, car la coloration bleue disparaît alors instantanément. Ce procédé est celui que j'ai suivi dans mes recherches. Avant de l'employer, j'ai étudié le degré de précision qu'il comporte et 4 les précautions qu'en exige l'emploi. Voici ce à quoi m'ont conduit ces recherches préliminaires : 1° Lorsqu'on verse trois à quatre gouttes d'une solution concentrée d'acide sulfureux dans 10 à 15 grammes d'une solution d'iodate de po- tassium à ■—, additionnée d'eau d'amidon, on obtient une coloration bleue très-intense. Cette coloration disparaît sous l'influence d'un assez grand excès d'acide sulfureux, probablement par suite du passage de l'iode libre à l'état d'acide iodhydrique. P + H^SO^ + IPO =: 2HI -f- H^SO^ 2° Dans une solution d'iodate de potassium à -j-^'^-^, la coloration est in- tense sous l'influence de trois ou quatre gouttes d'acide sulfureux, mais elle disparaît si l'on ajoute une fois autant de réactif. Si l'on veut qu'elle persiste, même lorsqu'on agite la liqueur, il ne faut employer qu'une solution très-faible d'acide sulfureux. 3° Lorsqu'on opère sur une solution à i^ ou à — j'„-^ , il faut verser seulement une goutte d'acide sulfureux très-dilué, et l'on observe un nuage bleu qui disparaît par le moindre excès de réactif. 4° Enfin, j'ai réussi à obtenir des stries bleues en portant avec une baguette de verre une goutte d'acide sulfureux très-dilué dans une so- lution à j^. Au lieu d'ajouter préalablement à la liqueur de l'eau d'amidon, on peut y verser quelques gouttes de sulfure de carbone qui s'empare de l'iode et se colore en violet magnifique. II. — loDATE DE POTASSIUM. L'iodate de potassium est un sel blanc, peu soluble dans l'eau. Sa solution concentrée présente une saveur presque nulle. D'après des recherches que j'ai commencées sur la solubilité de divers iodates, 100 grammes d'eau en dissolvent environ 8", 25, à la température de 100 degrés, et i^'J à la température de 50 degrés. Exp. I. —Le 6 novembre (1), à deux heures de laprès-midi, je prends 2*'', 5 d'iodate de potassium dissous dans 50 grammes d'eau. A deux heures dix minutes j'examine mon urine et ma salive; je ne puis rien déceler dans ces deux liquides, ni à l'aide du chlore, ni à l'aide de l'acide sulfureux, après y avoir ajouié préalablement quelques gouttes d'eau d'amidon. A deux heures vingt minutes, j'obtiens une coloration bleue à l'aide dés réactifs précédents dans l'urine et dans la (1) Toutes mes expériences sur les iodates et sur les bromates ont été faites à la fin de 1867 et dans les premiers mois de 1868. salive; ces liquides contiennent donc de Ciodale et de Ciodure de po- ?a55iMm. J'avais déjà la preuve que l'iodatede potassium se transforme en iodure dans l'organisme. De plus mon urine, qui était légèrement acide auparavant, était devenue neutre. J'examine plusieurs fois le même jour et le lendemain mon urine et ma salive, et j'y trouve constamment un mélange d iodate et d'iodure. Le 7, à cinq heures du soir, la coloration est encore intense sous l'in- fluence des réactifs, mais le lendemain, 8 novembre, je ne puis rien trouver dans ces deux liquides à partir de huit heures du matin. En résumé, 2^"', 5 d'iodatedo potassium se sont éliminés dans l'espace de trenle-six heures environ, à l'état d'iodate et d'iodure. Les deux sels se sont montrés et ont disparu simultanément dans l'urine et dans la salive. Les effets physiologiques ont été peu marqués ; je dirai seulement que la sécrétion salivairea été un peu plus activée, que j'ai éprouvé, même le lendemain de l'expérience, une certaine anxiété épigastrique, et que mon appétit était légèrement diminué; mais le 8 novembre, il était au contraire augmenté. Enfin, j'ai commencé, dès le 6 au soir, à éprou- ver à la gorge une sensation légère d'ardeur et de sécheresse, comme on en ressent lorsqu'on a pris de l'ioduro de potassium. Exp. IL — Le 20 novembre, à deux heures, j'absorbe 1 gramme d'io- date de potassium dissous dans 40 grammes d'eau. De la dixième à la vingtième minute après le début de l'expérience, je trouve de l'iodure dans mon urine et dans ma salive; il n'y a pas trace d'iodate dans ces deux liquides. L'urine, qui était acide auparavant, est devenue neutre comme dans l'expérience précédente. Le lendemain, à onze heures du soir, je trouve des traces d iodure dans l'urine et dans la salive; le 22 au matin, je ne puis plus rien y déceler à l'aide du chlore. Ainsi 1 gramme d'iodate de potassium s'est transformé complètement en iodure et a paru s'éliminer dans l'espace de trente-six heures (1). Les effets physiologiques ont été moins marqués que précédemment. Enfin je crois devoir mentionner une particuUiriié qui tient à l'action du potassium, nonàcelle de l'iodate. J'ai éprouvé quelques effets laxatifs à la dose de2^',5 de ce sel ; maisà la dose de 1 grammeje n'ai rien observé de semblable. Il est fâcheux que je n'aie pas examiné les matières fé- (1) On verra plus loin que les iodures mettent beaucoup plus de temps à s'éliminer. Il est infiniment probable que j'aurais trouvé de l'iode pendant plusieurs heures encore, si je m'étais servi de l'acide ni- trique au lieu du chlore, et surtout si j'avais évaporé préalablement les urines. 6 cales dans la première expérience, j'y aurais probablement trouvé une petite quantité d'iodure, car liodate, lors même qu'il aurait pénétré dans l'intestin, se serait transformé en iodure sous l'influence de l'hy- drogène sulfuré. Dans la seconde expérience, j'ai examiné les matières rendues et n'y ai pu découvrir aucune trace d'iodate ni d'iodure. Exp. III. — On aurait pu objecter que la métamorphose de l'iodate s'était opérée dans l'estomac sous l'influence de l'acide chlorhydrique libre du suc gastrique. Le fait, bien que peu probable d'après ce qui a été dit de l'action de l'acide chlorhydrique étendu, était possible. Pour répondre à l'objection, j'ai fait l'expérience suivante : Le 12 décembre, à deux heures, un mélange de 50 centigrammes d'iodate de potassium et de 50 centigrammes d'iodure de potassium, dissous dans 40 grammes d'eau, est injecté dans une veine d'une patte postérieure, chez une chienne de grande taille. L'animal ne paraît ab- solument rien éprouver. A deux heures un quart je puis recueillir de son urine, mais je n'y trouve ni iodate ni iodure. A trois heures moins un quart je ne trouve rien encore, mais je me rappelle que pareil fait s'est présenté dans l'expérience V que je lapporterai plus bas. Enfin, à cinq heures et demie je trouve de l'iodure en abondance dans l'urine et aucune trace d'iodate. Le 15 décembre, à trois heures, l'urine contient également de l'iodure; elle en renferme encore des traces lo lendemain matin, c'est-à-dire soixante-six heures après le début de l'expérience, mais je n'en trouve plus dans l'après-midi. Cette expérience m'a paru présenter de l'intérêt au point de vue de la lenteur de l'apparition de l'iodure dans l'urine, et de l'innocuité que présente un mélange d'iodate et d'iodure introduit dans le sang, tandis que ce même mélange introduit dans l'estomac produit de la douleur et des vomissements. Je traiterai plus tard ce sujet important. III. — Iodate de sodium. L'iodate de sodium présente à peu près les mêmes propriétés, la même solubilité que l'iodate de potassium, mais il est légèrement dé- liquescent. Exp. IV. — Le 16 novembre, à deux heures et demie, je prends 2*',5 d'iodate de sodium dissous dans 40 grammes d'eau. La saveur de ce sel est peu salée, fade, mais un peu moins désagréable que celle de l'iodate de potassium. A deux heures quarante minutes, je ne puis trouver ni iodate ni iodure dans ma salive ni dans mon urine, mais, à deux heures cin- quante minutes, ces deux liquides contiennent de l'iodure seulement. 7 Plusieurs fois, le môme jour et le lendemain, je décela dans ces mêmes liquides la présence seule de l'iodure, jamais je ne puis trouver une trace d'iodate. Le troisième jour après le début de l'expérience, à sept heures du matin, la coloration bleue de l'amidon sous l'influence du chlore est encore intense; à midi elle est faible, à quatre heures elle esta peine perceptible; enfin à partir de ce moment il m'est im- possible de reconnaître la présence de Tiodure de sodium. Il y avait cinquante heures que j'avais absorbé le sel. Le maximum de l'élimi- nation a eu lieu dans l'intervalle de la sixième à la quinzième heure. On voit, par cette expérience, que l'iodate de sodium s'est réduit plus facilement que l'iodate de potassium, puisque ce dernier sel, à la dose de 25',5, s'est éliminé partiellement à l'état d'iodure. Il y a dans ces faits une question de stabilité; or on sait que l'iodate de sodium est moins stable que l'iodate de potassium, de là sa réduction plus facile. Je ferai remarquer, en outre, que l'élimination de l'iodate de sodium à l'état d'iodure semble se faire moins rapidement que celle de l'iodate de potassium, sans doute parce que le premier sel est, par son métal, moins étranger à l'organisme. Le sodium existe en effet dans toutes les parties de l'organisme, tandis que le potassium est localisé et ne se trouve guère que dans les globules et dans les muscles, d'après les recherches de Schmidt de Dorpat. Il est un autre fait sur lequel j'appellerai également l'attention : c'est celui qui est relatif à la tolérance plus grande de l'iodate de sodium comparée à celle de l'iodate de potassium. Ce cas particulier dépend du fait général que les sels de sodium sont beaucoup moins toxiques à haute dose que les sels de potassium. On peut consulter à ce sujet ma thèse inaugurale [Etude expérimentale sur les effets physiologiques des fluorures et des composés métalliques en général. Paris, 1867). J'ai formulé dans ce travail la loi suivante, savoir : que les métaux sont d^autant plus actifs que leur poids atomique est plus élevé, ou, ce qui revient au même, que leur chaleur spécifique est plus faible. Or le poids atomique du sodium est 23, celui du potassium est 39. Exp. V. — Le 3 décembre, à deux heures, 80 centigrammes d'iodate de sodium, dissous dans 40 grammes d'eau, sont injectés chez un chien de belle taille, dans une veine d'une patte postérieure. Je n'observe aucun symptôme appréciable, si ce n'est que le soir ce chien mange avec un peu moins d'appétit. A quatre heures et demie je le sonde et je ne trouve dans son urine ni iodate ni iodure. Je ne savais quoi penser de ce fait singulier, car c'était la première injection d'un iodate que je faisais dans le sang, la troisième expérience que j'ai rapportée plus haut n'ayant été faite que plus tard. Mais le lendemain mon étonnement 8 cessa; je trouvai dans l'urine de ce chien une grande quantité d'io- dure et aucune trace d'iodate. La santé de l'animal était excellente. Le 5 décembre, à cinq heures du soir, l'urine indiquait, d'après la coloration de l'amidon, une quantité d'iodure plus grande que la veille. Le 6, la coloration de l'amidon était encore intense; enfin le 7, à deux heures du soir, c'est-à-dire quatre-vingt-seize heures après le début de l'expérience, il m'était encore possible de déceler la présence de traces d'iodure. Pendant tout ce temps l'appétit du chien a été considérable; il n'avait été diminué que dans les premières heures qui avaient suivi l'injection. Ainsi, 80 centigrammes d'iodate de sodium ayant été injectés dans les veines d'un chien n'ont été éliminés complètement à l'état d'iodure qu'après quatre jours, tandis que 2^"", 5 du même sel que j'avais pris s'étaient éliminés dans l'espace de cinquante heures. Je ne sais à quoi attribuer cette différence dans la rapidité de l'élimination. IV. — lonATE DE RUBIDIUM RblO^ Pour préparer ce sel, qu'on n'avait pas encore obtenu, j'ai transformé en sulfate, 2 grammes de chlorure de rubidium, puis j'ai fait bouillir, avec de l'iodate de baryum, la solution du sulfate neutre de rubidium, .l'ai obtenu ainsi un sel que j'ai vu cristalliser en prismes droits à base carrée, ou en octaèdres dérivés de ce prisme. L'iodate de rubidium se décompose par la chaleur, comme les autres iodates, et donne de l'io- dure de rubidium qui cristallise en cube comme les iodures de potas- sium et de sodium. Exp. VIL — Le 22 janvier 1868, à dix heures et demie du matin, e porte dans l'estomac d'un chien, à l'aide d'une sonde, 50 centigrammes d'iodate de rubidium dissous dans 50 grammes d'eau. A onze heures je sonde l'animal; son urine, qui était acide auparavant, est devenue neutre; elle contient déjà de l'iodure, mais je ne puis y découvrir de l'iodate. C'est à quatre heures du soir que l'élimination de l'iodure a paru être maximum. Le lendemain l'urine contenait ce sel en quantité notable, et le 25 janvier, à neuf heures du matin, c'est-à-dire soixante et onze heures après le début de l'expérience, je pouvais encore en déceler des traces manifestes. L'urine de ce chien n'a jamais contenu de l'albumine ni du sucre, non plus que toutes celles que j'ai exami- nées dans les expériences précédentes. Exp. VIII.— Le 1" février, à quatre heures du soir, je prends 25 cen- tigrammes d'iodate de rubidium dissous dans 50 grammes d'eau. La saveur de la solution est tout à fait particulière; je ne puis guère la 9 comparer à celle d'une solution métallique quelconque, je dirai seule- ment qu'elle est peu désagréable, A quatre heures cinq minutes, je ne trouve ni iodate ni iodure dans mon urine; elle était acide avant l'expérience, elle l'est encore. Je crois observer une coloration bleue à peine perceptible, en traitant par l'eau d'amidon et par l'acide azotique, ma salive recueillie pendant les cinq premières minutes. Je m'étais parfaitement rincé la bouche après l'absorption du sel. Quatre heures dix minutes, l'urine et la salive contiennent de l'io- dure en quantité notable; celte dernière paraît en renfermer davan- tage. Il n'y a pas d'iodate. L'urine est presque neutre. Quatre heures vingt minutes, urine tout à fait neutre; elle contient beaucoup plus d'iodure ainsi que la salive, car la coloration de l'ami- don est intense. La salive est encore plus colorée que l'urine. J'ai recherché plusieurs fois, le même jour, la présence de l'iodure dans l'urine, et l'ai trouvée constamment à l'exclusion de l'iodate. Mêmes résultats le 2 février. Le 3 février, à six heures du soir, je ne puis dé- celer dans mon urine ni dans ma salive la présence de l'iodure, mais ayant évaporé 100 grammes d'urine avec une très-petite quantité de potasse pure, incinéré le résidu, puis traité par l'eau d'amidon et par l'acide nitrique les quelques centimètres cubes provenant du la- vage des cendres, j'ai obtenu une coloration bleue. Le 4 février, à quatre heures du soir, j'évapore et traite de la même manière 225 centimètres cubes d'urine. Afin de recueillir l'iode qui pouvait être mis en liberté, j'ai traité les eaux de lavage par l'acide azotique et par le sulfure de carbone. Ce dernier réactif s'est coloré en violet, mais j'ai obtenu en premier lieu une coloration rouge brun (1). Le lende- main 5 février, je ne puis trouver aucune trace d'iodure. V. — Iodate d'ammOxNium Az H'' 10^. L'iodate d'ammonium ne se trouve pas dans le commerce. J'ai pré- paré une petite quantité de ce sel en versant de l'ammoniaque dans une solution concentrée d'acide iodique. Il m'a suffi de faire bouillir la liqueur pour chasser l'ammoniaque employée en excès, et il s'est dé- posé par le refroidissement une poudre blanche formée de beaux cris- taux cubiques discernables seulement au microscope. (1) C'était la première fois que j'observais pareille coloration de la masse du liquide et du sulfure de carbone. On verra plus tard qu'elle était due à la présence du brome que j'ai reconnu exister normale- ment dans l'organisme. 10 Exp. IX. — Le 25 décembre, à trois heures, 1 gramme d'iodate d'am- monium, dissous dans 40 grammes d'eau, est injecté dans les veines d'une chienne de grande taille. Les effets immédiats sont nuls. Vingt minutes après, la chienne mange avec avidité du pain qu'elle trouve à sa disposition, et le soir elle dîne comme d'ordinaire. Je ne puis recueillir de son urine qu'à cinq heures, car il m'est impossible do la sonder. Ce liquide bleuit fortement sous l'influence du chlore et de Tamidon ; il n'éprouve aucune modification lorsqu'on y verse de l'acide sulfureux. L'urine contient donc de l'iodure, mais elle ne renferme pas d'iodate. Le 26 décembre, à dix heures du matin, l'urine est rouge et acide; elle contient beaucoup d'iodure. Examinée au microscope, elle ne pré- sente pas de globules sanguins, mais quelques cellules épithéliales; la coloration rouge est donc due à la matière colorante de certains globules qui se sont détruits. L'animal parait néanmoins se porter par- faitement. A cinq heures du soir l'urine est moins rouge et présente les mêmes réactions. Le 27, à la même heure, c'est-à-dire cinquante heures après l'injection, l'urine bleuit encore fortement l'amidon sous l'influence du chlore et sa couleur est redevenue normale. La chienne mange avec appétit. Enfin le 28 décembre la coloration de l'urine est tout à fait normale. Je ne puis y déceler la présence de l'iodure. Elle n'a jamais renfermé ni iodate, ni albumine, ni sucre. En résumé, l'iodate d'ammonium ayant été injecté dans les veines à la dose de 1 gramme, s'est éliminé totalement à l'état d'iodure dans l'intervalle de plus de quarante-huit heures. VL — Iodate de strontium SrPO^. J'ai préparé moi-même le sel dont j'avais besoin on précipitant une solution d'azotate de strontium par l'iodate de potassium. J'ai obtenu ainsi une poudre blanche qui a été lavée à l'eau distillée bouillante. L'iodate de strontium est peu soluble; ainsi j'ai reconnu que 100 parties d'eau n'en dissolvent guère que 1 partie à la température de 100 degrés, et que le sel esta peine plus soluble à chaud qu'à froid, car il ne s'en dépose que des traces par le refroidissement de sa solu- tion aqueuse bouillante et concentrée. Exp. X, — Le 23 décembre, à une heure et demie, 50 centigrammes d'iodate de strontium, dissous dans 60 grammes d'eau, sont portés à l'aide d'une sonde dans l'estomac d'un chien à jeun depuis la veille à cinq heures. A deux heures, je le sonde et je ne trouve dans son urine ni iodate ni iodure; à quatre heures, mêmes résultats négatifs, maisà sept heures, 11 je trouve une grande quantité d'iodure, tandis que l'acide sulfureux n'indi(jue aucune trace d'iodate. Le soir, à onze heures, les résultats sont les mômes. Le lendemain j'examine l'urine plusieurs fois et je trouve constam- ment de l'iodure, à l'exclusion de Fiodate. Le 25 décembre, à dix heures du malin, la coloration de l'amidon sous l'influence du chlore est en- core manifeste; à deux heures de laprès-niidi, quarante-neuf heures après Tingestion de Tiodate, elle est à peine perceptible; enfin à cinq heures elle a cessé tout à fait. Pendant tout ce temps, la santé de l'a- nimal est demeurée parfaite. Ce qui frappe dans cotte expérience, c'est le retard qu'a mis le se! à passer dans l'urine. Il s'est produit peut-être une double décomposi- tion dans l'organisme par suite de laquelle il se serait formé du carbo- nate de strontium et de l'iodate, puis enfin de l'iodure de sodium qui se serait éliminé en nature. Malheureusement je n'ai pas recherché la présence du strontium dans l'urine. VIL — loDATE DE MAGNÉSIUM MgPO^ "f 4H-0. D'après Millon, liodate de magnésium se présenterait sous la forme de petits cristaux brillants, solubles dans 9,43 parties d'eau à 15 degrés et dans 3,04 parties d'eau à 100 degrés. J'ai préparé deux échantillons de ce sel par deux procédés différents : 1* en traitant l'acide iodique par la magnésie blanche; 1° en décompo- sant l'iodate de baryum par le sulfate de magnésium. J'ai obtenu, dans ces deux cas, des cristaux parfois assez volumineux, dont la forme cristalline était tout à fait semblable à celle du phosphate ammoniaco- magnésien, c'est-à-dire qu'ils appartenaient au système du prisme obli- que à base rhombe. Ces cristaux étaient légèrement déliquescents. Exp. XI. — Le 2 janvier, à trois heures et demie, j'injecte dans les veines d'une chienne 1 gramme d'iodate de magnésium anhydre dissous dans 40 grammes deau. Les effets immédiats sont nuls; malheureusement je ne puis recueillir de son urine que le lendemain à dix heures du matin. Cette urine est rouge, acide; elle contient de l'albumine, quelques globules sanguins extrêmement rares, des cellules épithéliales, et donne par évaporation quelques cristaux tout à fait semblables à ceux du phosphate ammo- niaco-magnésien. Ces cristaux étaient en réalité formés par ce sel, car je ne puis obtenir de coloration bleue de l'amidon sous l'influence de l'acide sulfureux. L'urine ne contient donc ni iodate ni iodure. La chienne parait un peu souffrante, d'ailleurs la nuit a été excessivement froide. Le soir, à cinq heures, mêmes résultats; l'urine est encore al- 1? bumineuse et rouge; elle ne colore pas l'amidon sous l'influence du chlore ni de l'acide sulfureux. Enfin, le 4 janvier, elle ne contient plus d'albumine, mais elle renferme de l'iodure dont je retrouve encore des traces le 5 janvier à neuf heures du matin, soixante-six heures après l'injection. Ce qui frappe dans cette expérience, c'est d'abord la lenteur de l'é- limination du sel, puis la coloration rouge de l'urine. J'ai déjà observé des différences semblables relatives à l'élimination dans des expérien- ces antérieures. Ainsi l'on a vu que l'iociate de sodium injecté dans les veines s'élimine plus lentement à l'état d'iodureque lorsqu'il a été porté dans l'estomac. Quant à la coloration rouge de l'urine, elle était due à la matière colorante des globules détruits. J'avais déjà observé des urines albumineuses et sanguinolentes après l'injection de l'iodate d'ammonium. Magendie avait vu qu'il suffit même d'injecter de l'eau dans les veines pour faire apparaître l'albumine dans l'urine et, de son côté, Kieruf {Uber den Einfluss de?' Blutverdûnniing auf die Sécré- tion des Hayons, ViKCHOvv's AucHiv. fUr patholog. Anat., t. XVII, p. 145) a observé également que la dilution du sang détermine le passage de l'albumine ilans l'urine, puis celle des globules rouges. Hermann a vu, au contraire, Talbumine et Ihématosine, non les globules rouges, ap- paraître simultanémentdans Turine. Mes observations s'accordent avec celles de ce dernier expérimentateur. Exp- XII. — Le 4 janvier, à deux heures, 1 gramme d'iodate de ma- gnésium cristallisé est dissous dans 30 grammes d'eau et porté dans l'estomac d'un chien à jeun depuis la veille au soir. A trois heures, l'urine est presque neutre ; elle ne contient ni iodate, ni iodure, ni sucre, ni albumine. A six heures et demie je trouve de l'iodure en grande quantité, pas d'iodate; l'urine est neutre. Le lende- main, à neuf heures du matin, elle est très-peu acide et contient, ainsi que le surlendemain, une quantité notable d'iodure; mais le soir du troisième jour elle n'en présente que des traces. Ainsi, 1 gramme d'io- date de magnésium s'est transformé en iodure qui a paru s'éliminer dans l'espace de cinquante six heures. Je ferai remarquer ici la lenteur avec laquelle l'iodure a apparu dans l'urine. J'ai déjà signalé la même particularité à propos de l'iodate de strontium. VIII. — Iodate de cuivre CuPO^. Lorsqu'on mélange la solution d'un iodate alcalin avec la solution d'un sel de cuivre, on obtient un précipité bleu clair cristallin. Ce précipité, lavé à plusieurs reprises, est de l'iodate de cuivre pur presque insoluble 13 dans l'eau. Tel est le procédé que j'ai suivi pour obtenir le sel dont j'avais besoin. Exp. Xni. — Le 15 janvier, à une heure et, demie, je fais avaler à une chienne 50 centigrammes d'iodate de cuivre mis en suspension dans 50 grammes d'eau. Cette chienne, que je croyais à jeun depuis la veille, avait mangé, à mon insu, avant l'expérience, quelques aliments qu'elle avait trouvés par hasard. A deux heures moins un quart elle vomit les aliments qu'elle avait pris, mais elle les absorbe de nouveau en tolalité ; je lui donne à boire et mets dans son eau un peu d'iodate; elle a donc conservé au moins 50 ceùligrammes de ce sel et peut-être plus. A quatre heures je puis recueillir de son urine. Ce liquide ne contient ni albumine, ni sucre, ni iodale, mais il contient manifestement de l'iodure d'après la colora- tion de l'amidon. Quelque temps après elle mange avec un appétit vorace. Le lendemain, à neuf heures du matin, je trouve également de l'io- dure dans l'urine, mais à cinq heures du soir je ne puis rien déceler. Le 17 janvier, môme résultat négatif. Pendant tout ce temps la santé de l'animal a été parfaite. Une partie de l'urine du 16 a été évaporée (175 grammes), le résidu incinéré et traité d'après les procédés ordinaires employés pour la re- cherche du cuivre ; je n'ai trouvé aucune trace d.e ce métal. Les fèces ont été également incinérées, malheureusement le résidu a été perdu. Exp. XIV. — Le 20 janvier, à une heure, je fais avaler à la même chienne 25 centigrammes d'iodate de cuivre, puis à quatre heures je lui en donne 35 centigrammes avec du lait. L'urine de quatre heures et demie renferme de l'iodure; elle est acide, ne contient ni sucre, ni albumine, ni iodate. Mêmes résultats le 21 janvier, à neuf heures du matin et à cinq heures du soir, mais l'iodure est en plus grande quantité. Il en est de même le lendemain. L'iodure diminue ensuite, néanmoins j'en trouve encore le 23, soixante-huit heures après le début de l'expérience. Afin de rechercher le cuivre, j'ai traité comme précédemment 190 grammes des urines du 20 et du 21, et 280 grammes de celles du 22 et du 23. Il m'a été impossible de déceler aucune trace de ce métal. Voilà donc un sel qui a subi dans l'économie une double métamor- phose; il a changé à la fois de genre et d'espèce, c'est-à-dire que l'io- date de cuivre s'est transformé en un iodure, probablement en iodure de sodium, et en un sel de cuivre, peut-être le carbonate, qui s'est fixé pour un temps plus ou moins long dans l'économie, ou bien s'est éliminé par l'intestin. 14 Je ferai remarquer que j ai trouvé de l'iode dans l'urine trois jours après la seconde expérience, tandis que dans la première je n'ai pu en trouver après vingt-quatre heures. IX, — loDATE d'argent. J'ai obtenu une petite quantité de ce sel en précipitant une solution d'azotate d'argent par Tiodate de potassium. J'avais esayé d'abord de le préparer en traitant par l'acide iodique l'oxyde d'argent hydraté, mais je n'ai pas obtenu de bons résultats; en efi'et, l'acide iodique dissout très-peu l'oxyde d'argent, sans doute parce que le sel formé est presque insoluble. Exv. XV. — Le 3 février, à deux heures, je fais avaler à un cliit-n 20 à 25 centigrammes d'iodate d'argent mis en suspension dans 5U gr. d'eau. A deux heures et demie l'urine renferme déjà des traces d'iodurc ; elle est acide, ne contient ni sucre ni albumine. A trois heures la colo- ration de l'amidon est très-nette. J'examine plusieurs fois, à différents intervalles, les urines de ce chien le même jour et le lendemain. C'est vers la vingtième heure qu'elles paraissent contenir le plus d'iodure; je n'en trouve plus le 5 février à neuf heures du matin. J'ai cherché l'argent dans les urines du 4, du 5 et du 6 et n'ai pas été plus heureux que dans la recherche du cuivre dans les expériences précédentes. Liodate d'argent avait donc changé aussi de genre et d'espèce. X. — loDATE MERCUREUX Hg^PO*'. Ce sel est blanc, insoluble. Il se présente sous l'aspect d'une poudre ressemblant à de la craie pulvérisée et ne possédant pas l'éclat du calomel. Traité par l'acide chlorhydrique, il donne lieu au dégage- ment d'un gaz ayant l'odeur du chlore ou plutôt de l'acide chloreux (1), Il est presque insoluble dans l'acide azotiqne. Telles étaient les pro- priétés du sel que j'ai obtenu en précipitant l'azotate mercureùx par un iodate alcalin. Exp. XVI. — J'ai prescrit quelques pilules d'iodales mercureùx à une personne que je traitais par le protoïodure de mercure. La métamor- phose s'est opérée comme précédemment, c'est-à-dire que j'ai trouvé un iodure dans l'urine. (1) La dissolution (jui se forme par l'addition de l'acide chlorhydrique contient du bichlorure de mercure ; elle donne un précipité jaune avec la potasse. 15 Les pilules que j'ai administrées avaient été préparées d'après mes indications; elles contenaient exactement la même quantité de mercure que les pilules de protoïodure de Ricord , c'est-à-dire 3""", 0581 Jen ai remis une certaine quantité entre les mains de M. Simonnet, chirurgien de l'hôpital du Midi ; je pense qu'elles ne sont pas appelées à remplacer les pilules de protoïodure, car j'ai remarqué qu'elles étaient moins bien tolérées que ces dernières. XI. — lOD.VTE DE QUININE QPO* -f xAq. J'ai préparé 3 à 4 grammes de ce sel en dissolvant la quinine dans son poids d'acide iodique. Il cristallise en aiguilles soyeuses pressées les unes contre les autres, et très-solubles dans l'eau à une température peu élevée. En effet, j'ai reconnu que si une partie de ce sel exige, pour se dissoudre, environ lU parties d'eau à la température de 10 à 15 degrés, sa solubilité devient considérable, même à la température de 30 à 40 degrés, de sorte qu'il paraît alois soluble en toute proportion dans l'eau. Exp, XVII. — Le 7 février, à trois heures, je fais avaler à une chienne 1 gramme d'iodate de quinine dissous dans 50 grammes d'eau. A cinq heures, je recueille de l'urine; elle ne contient ni iodate ni iodure; mais le lendemain je trouve de l'iode en abondance sous l'influence du chlore. Il en est de même le restant de la journée, mais, le 10, je ne puis trouver d'iode en traitant l'urine par l'amidon et le chlore ou l'a- cide azotique. J'en évapore alors 100 grammes avec un peu de potasse pure, et j'obtiens une belle coloration violette du sulfure de carbone. Ainsi, il m"a été possible de retrouver un iodure près de trois jours après l'administration de 1 gramme d'iodate de quinine. Il est probable que le sel s'est métamorphosé en iodhydrate de quinine ; car cette base a été retrouvée dans l'urine à l'aide du réactif de Bouchardat. XII. — Acide iodique ou iodate d'hydrogène HIO^. L'acide iodique est solide et cristallise en tables à six faces. Il se dis- sout facilement dans l'eau, et la solution possède une saveur acide non désagréable. Outre l'acide normal HIO^, qu'on écrit encore PO", H-0 suivant la notation dualistique, on connaît l'anhydride iodique l-O^ et un hydrate (PO'^)WO. Ce dernier composé se distingue des deux précédents en ce qu'il est à peine soluble dans l'alcool. De même que les autres iodates métalliques, l'iodate d'hydrogène est peu stable; les réducteurs et les hydracides le décomposent avec la plus grande facilité et mettent de l'iode en liberté. L'acide chlorhy- drique donne lieu, en outre, à un dégagement de chlore. 16 Exp. XVIII. — Le 31 décembre, à deux heures, je porte, à laide d'une sonde, dans l'estomac d'un chien à jeun, 50 centigrammes d'acide io- dique dissous dans 40 grammes d'eau. Les effets sont nuls. Dix minutes et vingt minutes après l'ingestion, je sonde ce chien; l'urine est acide, elle l'était d'ailleurs avant l'expérience; je ne puis trouver ni acide iodique ni iodure. Celle de (juatre heures colore lé- gèrement l'amidon sous l'influence du chlore, mais l'acide sulfureux ne produit rien; elle renferme donc un iodure, mais ni acide iodique ni iodate. Le lendemain, 1" janvier, l'urine contient toute la journée de lio- dure en plus grande quantité que la veille. Le 2, l'urine du malin en renferme encore, mais je ne puis rien trouver dans l'après-midi. En résumé, 50 centigrammes d"acide iodique, ayant été introduits dans l'estomac d'un chien, se sont éliminés à l'état d'iodure, probablement à l'état d'iodure de sodium, dans l'espace d'environ quarante-huit heures. J'aurais sans doute trouvé de l'iode quelques heures plus tard, si j'a- vais évaporé les urines, opération que je n'avais pas encore mise en pra- tique au moment où j'ai fait cette expérience. Enfln, je ferai remarquer la lenteur avec laquelle l'iode a apparu dans ce liquide. Tel est l'ensemble des recherches que j'ai faites sur les iodates. On a vu que tous les sels que j'ai étudiés se métamorphosent en iodures dans l'organisme. Toutefois, cette transformation est plus ou moins com- plète , suivant la dose employée et suivant la nature du principe électro-positif. En effet, tandis que l'iodate de sodium se change com- plètement en iodure à la dose de 2^', 5, l'iodate de potassium, à cette même dose, s'élimine partiellement en nature. Ce fait s'explique faci- lement, car on sait que l'iodate de potassium est plus stable que l'iodate de sodium. Il s'agit donc d'une simple affinité chimique. L'or- ganisme, avide d'oxygène, enlève ce gaz aux corps instables qui en contiennent pour le faire servir à d'autres combustions, de sorte que c'est même en vertu de ses propriétés oxydantes qu'il agit comme ré- ducteur. J'ai cherché à me rendre compte de ce processus. J'ai traité les iodates et l'acide iodique par diverses substances, mais je ne suis arrivé encore à rien de précis. J'ai constaté, il est vrai, la réduction de l'a- cide iodique sous l'influence de l'albumine, mais ce fait est connu de- puis longtemps, et l'on sait que d'autres substances produisent la même action. Serullas a même fondé un procédé de recherche de la morphine sur la propriété que possède cet alcalo'i'de de réduire l'a- cide iodique. La fibrine, la caséine, le gluten, la levure de bière se comportent de la même manière que l'albumine. On peut donc ad- 17 nicUre que les matières albumiiioïdes du sang jouent un certain rôle dans la réduction des iodates au sein de l'organisme. Toutefois, s'il est vrai que l'acide iodique soit réduit par ces matières, les iodates ne présentent pas cette propriété. En effet, ayant abandonné à lui-même, pendant des temps variables, un mélange d'iodate de potassium d'al- bumine et d'eau d'amidon, ce dernier ne s'est pas coloré. En lisant un mémoire de M. Melsens (1), alors que j'avais' déjà fait toutes les recherches précédentes, j'ai trouvé que cet observateur avait constaté la réduction de l'iodale de potasse chez des chiens qu'il avait soumis à l'action de ce sel. J'avais cru pendant longtemps être le premier qui eût constaté cette réduction; c'est à M. Melsens que re- vient la priorité de la découverte, mais seulement en ce qui touche le sel de potassium. Toutefois, tout en reconnaissant que les iodates ne sont pas aussi bien tolérés que les iodures, je ne puis reconnaître à ces sels, lorsqu'ils sont purs, les propriétés toxiques que M. Melsens attribue à l'iodate de potasse. Mon opinion résulte des expériences que j ai faites sur les animaux et sur moi-même, ainsi que d'observations recueillies par moi et par un confrère qui a prescrit l'iodale de sodium sur ma pro- position. Je pense que M. Melsens a dû employer un iodate de potasse renfermant une certaine quantité d'iodure; ainii s'expliqueraient les vomissements qu'il aurait observés chez les chiens, même après l'inges- tion de doses minimes d'iodate de potassium. Bu mélange des iodates et des iodures. J'arrive maintenant à une question qui présente un certain intérêt. Je me propose de démontrer que le mélange d'un iodate et d'un iodure, injecté dans le sang à faible dose, ne produit aucun effet morbide, tan- dis que ce môme mélange, introduit à la même dose dans le tube diges- tif, détermine des accidents dont l'explication n'avait pas encore été donnée. Exp. — J'injecte chez un chien, dans une veine d'une patte posté- rieure, un mélange de 50 centigrammes d'iodure de potassium et de 50 centigrammes d'iodate de potassium dissous dans 40 grammes d'eau distillée. L'animal n'éprouve aucun effet de cette injection. Il conserve ses allures et son appétit habituels. Je n'ai pas trouvé d'iodate dans ses urines, mais j'y ai trouvé de l'iodure de potassium pendant trois jours. Cette expérience ayant été répétée m'a donné les m'>mes résultats. Je prescris assez souvent l'iodure- de sodium à la place de l'iodure de potassium, et je reconnais à ce sel les mêmes propriétés que celles que possède l'iodure de potassium. N'est-ce pas d'ailleurs à l'état d'io- (1) Mémoire sur Ceinploi de C iodure de polassium, Bruxelles, 1865. C. R. 1SC9. 2 t8 dure de sodium que s'élimine l'iode absorbé en nature? Une fois, aprèâ l'ingestion d'un iodure de sodium non cristallisé, il se produisit des vomissements bilieux opiniâtres et des évacuations alvines. Le lende- main et le surlendemain, mêmes accidents. J'examinai alors l'iodure employé, et je reconnus qu'il renfermait une quantité notable d'iodate de sodium. Je prescrivis alors de l'iodure de sodium pur qui fut parfai- tement toléré. Voici maintenant comment on peut se rendre compte des acci- dents (1) : On sait que les iodates et les iodures résistent assez bien à l'ac- tion des acides étendus; on sait que les premiers résistent même à l'ac- tion de l'acide sulfurique concenlré. En d'autres termes, il est reconnu que les iodures seuls et les iodates seuls présentent une assez grande stabilité devant plusieurs acides, si l'on excepte toutefois l'acide azo- tique vis-à-vis les iodures. Mais il n'en est pas de même d'un mélange d'un iodure et d'un iodate. L'acide le plus faible, le plus dilué, agit sur ce mélange et met de l'iode en liberté. J'ai fait à ce sujet les expériences suivantes devant la Société de biologie. J'ai versé quelques gouttes d'acide chlorhydrique dans deux solutions très-étendues et séparées, l'une d'un iodate, lautre d'un iodure; l'acide ajouté n'a produit aucun changement dans l'aspect de chacune des deux dissolutions; mais, les ayant ensuite mélangées, il sest produit aussitôt un abondant dépôt d'iode. J'ai répété plus tard l'expérience en me servant de suc gastrique de chien, suivant lavis que m'en avait donné M. Cl. Bernard. On sait que l'acidité de ce liquide est due à la présence d'une petite quantité d'acide chlorhydrique libre. Du suc gastrique frais ayant été versé dans deux tubes contenant de l'eau d'amidon, et dont l'un renfermait quel- ques centigrammes diodure et l'autre quelques centigrammes d'iodate de potassium, il ne se produisit rien ; mais ayant mélangé le contenu de ces tubes, de l'iode fut mis en liberté, car l'amidon se colora en violet intense. Enfin j'ai expérimenté sur l'animal vivant. L'un de mes chiens venait de manger un petit morceau de pain. Je portai dans l'estomac de c0 chien, à l'aide d'une sonde, un mélange de 1 gramme d'iodure de po- tassium pur et de i décigramme d'iodate de potassium. Dix m.inutes après l'ingestion du mélange, il vomit le pain coloré en bleu violet foncé par l'iode qui avait été mis en liberté au contact de l'acide chlorhy- drique du suc gastrique. Ainsi s'expliquent les accidents qui suivent l'ingestion d'un iodure renfermant un iodate. Une certaine quantité d'iode se dégage du mé- (1) Gazette hebdomadaire du 21 février 1867 et du 5 février 1809, 19 lan2;e et irrite les parois stomacales; en d'autres termes es cnoèes se passent comme dans l'expérience faite par OrBla sur sa propre per- sonne, en absorbant de l'iode en nature (i), expérience dans laquelle se produisirent les mômes phénomènes morbides que ceux que j'avais observés, Chap. II. — Acide bromique et bromates. Bromates en général. Ces composés subissent également une réduction dans l'organisme, mais ils sont beaucoup plus stables que les iodates, de sorte que leurs métamorphoses ou bromures ne sont que partielles, à moins que la dose employée ne soit assez faible. Avant de faire connaître les résultats de mes expériences, je crois devoir donner quelques détails sur la manière dont j'ai opéré. liecherclic des bromates. — On ne possédait jusqu'ici aucun procédé simple et précis pour reconnaître les bromates dans une solution très- étendue. Les ouvrages spéciaux, tels que les chimies analytiques de Rose, de Fresenius, n'apprennent rien à ce sujet. J'ai imaginé alors un moyen fondé sur la propriété que possède l'acide sulfureux d'isoler le brome des bromates, et sur la propriété que possède le brome de dé- colorer inslanlanément la dissolution sulfurique d'indigo. Je colore fai- blement, avec celte dissolution, de Teau ou de l'acide bromique conte- nant un bromate, puis j'y verso une quantité suffisante d'une solution d'acide sulfureux; ce dernier acide agissant comme un réducteur puis- sant, met en liberté le brome qui décolore aussitôt la liqueur soumise à l'essai. Ce procédé est d'une délicatesse extrême et peut être rangé parmi les plus sensibles que possède la chimie. J'ai reconnu qu'il per- met de découvrir ;.„J„„„ de bromate de sodium dans l'eau ordinaire, cl par consiaucnl nnnnnn; '^^ brome. Toutefois, on sera moins étonné de ce fait, si l'on se rappelle qu'il suffit d'une quantité infiniment petite d'indigo pour communiquer à l'eau une coloration appréciable, et que p;u- suite il faut une quantité infiniment petite de brome pour produire la décoloration. On ne peut compter sur une aussi grande précision lorsque le bromate est dissous dans l'urine, mais on peut en déceler certainement ^^^„. Ce serait le moment de parler aussi de la recherche des bromures dans Turine; mais ce sujet sera traité plus loin au sujet de l'élimination de ce genre de sel. Je dirai seulement que pour reconnaître la présence d'une trace de bromure dans Turine, j'évapore ce liquide avec un peu de soude parfaitement pure, j'incinère le résidu et le traite ensuite par (1) Traité de loxicoiogic, V vol. 20 quelques cenlimèUos cubes d'eau distillée. La licjueur claire oblcuue après filtration est agitée dans un tube avec de lacide azotique et deux ou trois gouttes de sulfure de carbone, qui s'empare du brome mis en liberté et se colore en jaune orangé ou en rouge intense, suivant la quantité. I. — Acide bromique HBrO^ Cet acide se présente sous l'aspect d'un liquide incolore lorsqu'il est pur, et coloré en rouge brun, lorsqu'il renferme du brome libre. Pour le débarrasser de ce dernier, il suffit de le faire bouillir légèrement. L'acide du commerce que j"ai employé était très-faible; il ne contenait, d'après mes analyses,. que 5 pour lUO d'acide bromique normal HBrO^. Exp. XIX. — Le 14 janvier, je fais avaler à un chien 2 grammes de l'acide précédent, soit 10 centigrammes dacide bromique normal dis- sous dans 40 granunes d eau. Je le sonde une heure et demie après l'ab- sorption de l'acide, et plusieurs fois dans la journée, ainsi que le len- demain; jamais je ne puis déceler une trace de bromate; mais l'urine, traitée comme il a été dit plus liaut, indique la présence d'un bromure. Ce liquide a toujours été acide et n'a jamais renfermé de sucre ni d'al- bumine. Exp. XX. — Une quantité d'acide bromique, double de la précé- dente, est étendue également de 40 grammes d'eau et portée dans l'es- tomac de ce chien, le 29 mars à trois heures. Une heure et demie plus tard, j'examine son urine et trouve qu'elle décolore rapidement l'in- digo sous l'influence de l'acide sulfureux; elle est acide et ne contient non plus ni sucre ni albumine. Le 30 mars, au matin, elle ne décolore plus l'indigo et no contient par conséquent plus de bromate; mais en ayant évaporé 50 grammes, j'ai obtenu une coloration jaune orangé du sulfure de carbone, ce qui indiquait la présence d'un bromure. Exp. XXI. — Le lendemain l'urine contenait encore du bromure. Je fais avaler au môme chien , comme dans la première expérience , 2 grammes d'acide bromique étendus de 40 grammes d'eau. L'acide s'est éliminé complètement à l'état de bromure; car l'urine, examinée même une demi -heure après l'expérience, n'a jamais déco- loré l'indigo sous l'influence de l'acide sulfureux; mais Cayanl exami- née pendant seize jours de suite, j'ai trouvé qu'elle contenait encore du bromure. Ce fait, ainsi que plusieurs autres que je rapporterai, a été pour moi le point de départ de recherches nouvelles sur l'élimina- tion du bromure, et m'a conduit à la découverte du brome normal dans l'organisme. 21 II. — Bromate de sodium NaBrO'. Le sel du commerce n'est pas pur, il contient du bromure de sodium. J'ai eu soin d'en préparer moi-même une certaine quantité, et j'ai ob- tenu un bromate dune pureté absolue, cristallisé en beaux tétraèdres anhydres brillants. Exp. XXII.— Le 15 février, à deux heures, je prends 25 centigrammes de bromate de sodium dissous dans 40 grammes d'eau. La saveur de la solution est presque nulle. Pendant sept heures, à partir de la dixième minute, mon urine et ma salive contiennent du bromate, ensuite elles ne contiennent plus que du bromure. J'ai trouvé également du bromate dans le mucus nasal. Exp. XXIII. — Le lendemain, à la même heure, je prends 12,5 cent, du même sel, et cette fois, le bromate n'apparaît dans l'urine qu'en quantité inappréciable et tardivement. En effet, ce n'est que deux heures environ après le début de l'expérience que ce liquide en contient des traces manifestes, et enfin, quatre heures plus tard, il ne renferme plus que du bromure. La salive n'a jamais contenu de bromate, si ce n'est en quantité excessivement faible, quinze minutes après l'absorp- tion du sel. Exi». XXIV. — J'injecte dans l'estomac d'un chien, à jeun depuis vingt-deux heures, 50 centigrammes de bromate de sodium dissous dans 40 grammes d'eau. Un quart d'heure après je recueille de son urine; elle est acide, ne contient pas d'albumine et décolore l'indigo sous l'iu" fluence de l'acide sulfureux. Le lendemain elle ne renferme que du bromure. Le chien avait eu un vomissement de matières blanches et spumeuses deux heures après l'ingestion du sel. Exp. XXV. —Le 29 janvier, 20 centigrammes de bromate, dissous dans 20 grammes d eau, sont injectés dans l'estomac d'un lapin n'ayant rien mangédepuisseize heures. Aussitôt qu'il est remis dans sa cage, il mange avec appétit des feuilles de chou. Le sel s'est éliminé partiellement à l'état de bromate, car, deux heures après l'ingestion, l'urine du lapin en renferme des traces; mais le lendemain, et. pendant onze jours, je trouve un bromure en opérant sur le résidu de lévaporation de 150 grammes d'urine préalablement additionnée d'un peu de soude pure. Exp. XXVI. — Le 11 février, 10 centigrammes de bromate de sodium sont administrés ;iu même lapin et paraissent s'éliminer complètement à l'état de bromure que je retrouve facilement dans son urine. Dans ces deux expériences, l'urine du lapin n'a jamais contenu ni sucre ni albumine. 22 III. — Bromate de potassium KBrO^. Le sel du commerce n'est jamais exempt de bromure, dont il est d'ailleurs très-difficile de le débarrasser par cristallisations successives. J'ai néanmoins réussi à l'obtenir pur en traitant par l'acide azotique le mélange des deux sels, et recueillant le résidu formé uniquement de bromate. Exp. XXVII. — Cette expérience a été faite sur moi-même, et je dirai que c'est la première que j'aie faite sur les bromates, car l'ordre que je suis dans cet exposé n'est pas celui que j'ai suivi dans mes recherches. Le 29 novembredernier, à neuf heures du matin, je prends à jeun 1 gr. de bromate de potassium dissous dans 50 grammes d'eau. La saveur de la solution est nulle, A neuf heures dix minutes, je ne puis trouver aucune trace de bromate dans mon urine ; mais celle qui est recueillie de neuf heures dix minutes à neuf heures vingt minutes en contient une quan- tité notable. Ce n'est que vers neuf heures et demie que je puis déce- ler la présence de ce sel dans la salive et dans le mucus nasal. A dix heures, je commence à éprouver de la douleur au front et à l'occiput, puis bientôt après une certaine anxiété épigastrique. A ce moment je suis obligé de m'aliter, el j'éprouve un accablement considérable, des nausées et des vomissements séreux qui ne cessent que vers cinq heures de l'après-midi. Pendant tout ce temps /e pouls a été ralenti, si ce n'est au moment même des vomissements. Les nausées et la douleur stoma- cale étaient surtout fréquentes lorsque je restais couché sur le côté gauche. Enfin je dirai que le sel a produit aussi des effets purgatifs, des selles vertes, comme celles que [troduisent le calomel et la rhubarbe(l), et que les urines étaient rares, ce qui se conçoit, à cause des vomisse- ments répétés. Le thé n'a apfiorté aucune amélioration à mon état; le café très-froid et le sirop de groseille m'ont soulagé. Le lendemain malin j'étais rétabli, mais un peu faible; mon urine ne contenait plus de bromate, mais du bromure, Exp. XX'VIII. — J'ai fait un nouvel essai avec le bromure do potas- sium, mais celle fois sur un chien. J'ai fait avaler à cet animal 40 cen- tigrammes de bromate de potassium dissous dans 40 grammes d'eau. Son urine, examinée une demi-heure après le début de l'expérience, (1) Cette propriété a fait donner le nom de cholagogucs au calomel et à la rhubarbe; mais peut-être ne méritent-ils pas celle qualihcation, car on dit que la coloration verte était due soit à du sulfure de mercure, soit à la matière colorante de la rhubarbe. Le bromate de potassium serait au contraire un véntiiblc cholauu^ut. 23 contenait du bromate ; mais le lendemain elle ne renfermait plus que du bromure. Ce chien a eu un vomissement séreux une heure après l'ingestion du sel. Mélange de bromate et de bromure de potassium. — Exp. XXIX. Le 20 décembre, à une heure, je porte à l'aide d'une sonde dans l'estomac d'une chienne un mélange de 20 centigrammes de bromate et de 20 cen- tigrammes de bromure de potassium dissous dans 40 grammes d'eau. Cette chienne avait bu et mangé quelque temps auparavant, puis après l'ingestion, ayant trouvé de l'eau à sa disposition, elle en avait bu en- core. Néanmoins je m'attendais à observer des vomissements comme j'en avais remarqué après l'ingestion d'un iudate renfermant un iodure. Il n'en a rien été. A trois heures, je puis recueillir de l'urine de cet ani- mal et j'y trouve du bromate et du bromure ; le lendemain elle no con- tenait plus que ce dernier sel. Exp. XXX. — Plus tard, j'ai répété l'essai précédent en faisant avaler un mélange semblable à un chien à jeun depuis seize heures. Je n'ai pas observé de vomissements. 11 faut donc admettre que le mélange d'un bromate et d'un bromure est mieux toléré par l'estomac que le mélange d'un iodate et d'un iodure. IV. — BnoMATE d'argent AgBrO^ Le bromate d'argent est peu soluble. On le prépare facilement en précipitant une solution d'azotate d'argent par du bromate de sodium pur; le précipité est ensuite lavé à l'eau distillée et desséché. Tel est le procédé que j'ai suivi pour obtenir une petite quantité de ce sel. Exp. XXXL — Jinjecte à une heure, dans l'estomac d'un chien, 50 centigrammes de bromate d'argent mis en suspension dans 40 gr. d'eau. L'animal en rend une partie un quart d'heure après le début de l'expérience. A deux heures, je ne puis rien déceler dans son urine, mais, à trois heures et à cinq heures, ce liquide accuse la présence d'un bromate. Je trouve un bromure le lendemain, et pendant quatorze jours, en évaporant 150 grammes d'urine. Je n'ai cherché l'argent qu'une seule fois, le lendemain de l'expérience, et n'ai pu le re- trouver. Exp. XXXII. — J'ai répété cette expérience sur le même chien, en lui faisant avaler seulement 25 centigrammes de bromate d'argent mis en suspension dans 40 grammes d'eau distillée. Cette fois je n'ai trouvé dans l'urine que des traces à peine appréciables de bromate, et seule- ment trois heures après l'ingestion. 24 V. — Bromate de magnésium MgBr-0^ — 611^0. J'ai obtenu une petite quantité de ce sel en saturant l'acide bro- mique par l'hydrocarbonate de magnésium. Il est extrêmement solu- ble, néanmoins il cristallise facilement. Exp. XXXIII. — 15 centigrammes de bromate de magnésium, dis- sous dans 25 grammes d'eau ayant été portés, à l'aide d'une sonde, dans l'estomac d'un lapin, l'urine de cet animal n'a indiqué la présence d'au- cune trace de bromate. Ce sel s'est donc complètement transformé en bromure. Exp. XXXIV. — 18 centigrammes du même sel, dissous dans 30 gr. d'eau, ayant été injectés dans les veines d'un chien de grande taille, ont paru s'éliminer complètement à l'état de bromure, car la décolo- ration de l'indigo sous l'influence de l'acide sulfureux employé en quantité faible ou considérable, n'a jamais été instantanée. VI. — Bromate de plomb PbBr^O^ Le bromate de plomb est très-peu soUible dans l'eau. J'ai préparé une petite quantité de ce sel en faisant bouillir du bromate de potas- sium avec de l'acétate de plomb. Exp. XXXV. — A deux heures, 10 centigrammes de bromate de plomb mis en suspension dans 30 grammes d'eau distillée sont portés, à l'aide d'une sonde, dans l'estomac d'un lapin. Vers quatre heures les oreilles et le nez de cet animal sont un peu chauds, mais en somme il ne paraît guère souffrir, car il mange peu de temps après du chou avec appétit. Je recueille 107 grammes de son urine à huit heures du soir. Elle ne contient ni bromate, ni sucre, ni albumine. J'en évapore environ la moitié et je trouve un bromure dans le résidu. Était-ce du bromure de plomb? Le fait est probable, car j'ai trouvé également des traces de ce métal. Pendant cinq jours je trouve du brome malgré la faible dose du sel ingéré, mais le sixième jour je ne puis déceler ce métalloïiie, bien que j'évapore 300 grammes d'urine. On verra plus bas que 20 centigrammes d'acétate de plomb ont pro- voqué chez un chien de grande taille tous les symptômes d'une intoxi- cation saturnine aiguë. Si la dose de 10 centigrammes de bromate de plomb n"a paru lien produire chez un lapin, j'explique le fait par l'éli- mination du métal sous l'influence du bromure formé. J'ai proposé déjà les bromures alcalins comme étant peut-être les meilleurs médica- ments de l'intoxication saturnine. 2d VII. — Bromate de quinine QBrO^. On prépare ce sel en dissolvant la quinine dans l'acide bromique bouillant. Il cristallise, comme l'iodate de la môme base, en aiguilles soyeuses, très-solubles dans l'eau, surtout lorsque la température est un peu élevée. Exp. XXXVI. — Je fais avaler au lapin, qui avait pris du bromate de plomb un mois auparavant, 25 centigrammes de bromate de quinine dissous dans 40 grammes d'eau. La santé de cet animal ne me paraît pas altérée; le sel s'élimine complètement à l'état de bromure dont je re- trouve des traces pendant vingt-cinq jours. Il résulte de toutes ces expériences que les bromates, de même que les iodates, subissent dans l'organisme une réduction complète, lors- qu'ils sont employés à doses faibles, tandis qu'une partie s'élimine en nature lorsque la dose est élevée. Les bromates apparaissent rapide- ment dans l'urine, où l'on peut les retrouver de la dixième à la ving- tième minute et même quelquefois après un intervalle encore moindre. Ils semblent s'éliminer beaucoup plus rapidement que les iodates; en effet, ils ont toujours disparu dans l'urine vers la quinzième heure, tandis que l'on a vu que l'iodate de potassium, pris à la dose de 2 gr. et demi, s'était éliminé partiellement à l'état d'iodure, pendant trente- six heures. Il est probable que leurs métamorphoses seraient complètes s'ils séjournaient plus longtemps dans l'économie. Effets thérapeutiques. — Je n'ai trouvé jusqu'ici qu'une seule men- tion de l'emploi des bromates. (Voyez Gaz. méd., 1866, et Bull. gén. de THÉRAP., 1866, t. LXX.) Il s'agit du bromate de quinine, que M. Cour- tener a expérimenté dans les fièvres intermittentes et dans plusieurs maladies épidémiques, telles que la fièvre typhoïde, la diphthérite, la dyssenlerie. L'auteur n'a jamais observé d'effets désavantageux de l'emploi de ce médicament. La surdité et le bruit d'oreilles n'auraient été observés que fort rarement; mais il est vrai que 50 centigrammes de ce sel ont toujours paru être une dose suffisante. Appliqué au traite ment du choléra, c'est surtout comme remède prophylactique, dans la période d'incubation ou des prodromes de la maladie, que ce même sel présenterait, comme agent thérapeutique, un grand avantage sur les autres combinaic-ons de la quinine par sa solubilité dans l'eau. C'est ce même avantage que j'ai revendiqué en faveur de l'iodate de qui- nine, dont j'ai parlé précédemment en traitant des iodates. Enfin j'ajouterai que, suivant M. Courtener, d'après des expériences faites sur les animaux, le bromate de quinine est doué d'une action sé- dative supérieure à celle du sulfate de quinine, et, par conséquent, doit être donné à dose moins élevée. '26 N'ayant fait aucune application thérapeutique des bromates, je me bornerai à citer les conclusions qu'il est possible de déduire de l'en- semble de mes recherches. 1° L'acide bromique et les bromates sont plus difficilement réduits que les iodates dans l'organisme. 2° Les bromates s'éliminent rapidement par les reins et par les glandes salivaires; ils n'exercent, aux doses que j'ai employées, aucune in- fluence appréciable sur ces organes. Les urines ne contiennent jamais ni sucre ni albumine. 3° D'après l'expérience que j'ai faite sur moi-même, les bromates doi- vent être considérés comme dangereux, même à des doses assez faibles. — MM. Leguos et Onimus, poursuivant leurs recherches sur linfluence de la galvanisation du pneumogastrique sur les contractions intestinales, ont cherché à déterminer si l'arrêt do ces contractions était un phénor- mène direct ou réflexe. Pour cela, ils ont sectionné le pneumogastrique au cou. Or l'électrisation du bout inférieur ne donne pas do résultat sur l'inlestiii (on n'obtient que des contractions de resLomac). Au con- traire, en électrisant le bout supérieur, ils ont observé l'abaissement de la tension et l'arrêt des contractions de l'intestin (rien, dans ce cas, ne survient à l'eslomao). Si l'on électrise avec un courant d'induction, au-dessus ou au-dessous de l'ampoule introduite dans l'inlesLin, on ob- tient les mêmes résultats. D'une manière générale, toute excitation violente de l'intestin agit de même (pincement, etc.) ; on observe sur- le-champ un brusque abaissement de la tension suivi ultérieurement d'une élévation. Du RÔLE QUE JOUE LA. TRANSFORMATION VÉSICULEUSE DES NUCLÉOLES DANS LA DESQUAM.ATION DE LA PEAU ; par M. RanVIEU. D'après L'. Ranvier, les interprétations que l'on a jusqu'à présent données du mécanisme de la desquamation sont tout à fait insuffisantes. On a dit, par exemple, qu'elle était le résultat d'une néoformation abon- dante des cellules épilhéliales; mais une telle néoformation devrait au contraire, ainsi qu'on le voit pour l'icthyose, augmenter l'épaisseur de la couche épidermique, loin d'amener la desquamation. Rindfleisch ad- met que la néoformation est si rapide que les cellules n'ont pas le temps de se souder; mais ce n'est pas dans les couches profondes, c'est dans la couche superficielle que se fait la desquamation; ce n'est pas au m.o- ment de la néoformation , c'est plus tard. Les conditions de siège et de temps ne sont donc pas favorables à l'opinion de Rindfleisch. Or l'observation a montré à M. Ranvier que dans tous les cas ou trouve à la période où la desquamation se prépare la dilatation du nucléole des 27 cellules dentelées du corps muqueux de Malpighi; la circonférence de la vésicule constituée par le nucléole dilaté n'est pas parallèle à la cir- conférence du noyau ; elle lui est tangente en un point, probablement au niveau du canal découvert par M. Balbiani. Cette altération du nu- cléole amène une modification de la cellule (état muqueux) ; elle ne peut devenir cornée. Ainsi donc la desquamation est le résultat d'un certain mode de nutrition qui a son origine dans le corps muqueux de Malpighi. Cet état muqueux peut d'ailleurs exister en dehors de la desquamation proprement dite; ainsi dans la plaque muqueuse, par exemple, on ob- serve sur une coupe perpendiculaire qu'une portion plus ou moins considérable de cellules est atteinte de transformation muqueuse. Sur le maintien des variétés qui, en se perpétuant, forment les races; par M. Broca. Les végétaux se prêtant mieux que les animaux aux expériences sur ce sujet, M. Broca a entrepris depuis plusieurs années des expériences dont il communique sommairement les résultats. A Bicôtre il s'était formé dans un champ de bleuets des variétés; la plupart des bleuets étaient bleus, il y en avait de violets. M. Broca prit les plus clairs parmi ces derniers et les sema : il obtint des bleuets bleus, des violets et des roses dans la proportion d'un cinquième ; il prit alors des bleuets roses et les sema. L'année suivante il eut des bleuets roses en majorité, il en eut aussi des blancs, enfin des violets et des bleus. Les expériences suivantes furent plus précises; aux vacances de 1866, M. Broca observa, dans un champ de maïs qui lui appartenait, un épi brun. Par une enquête il acquit la certitude que depuis plus de soixante ans il n'y avait pas eu de maïs brun dans le pays. C'était là un exemple remarquable d'atavisme, car M. Broca n'est pas porté à ad- mettre qu'il s'agît dans ce cas d'une variété spontanée. Cet épi brun lui servit à faire, en 1867, des semailles à l'hôpital Saint-Antoine; il ob- tint 60 épis, dont 34 bruns et 35 blonds. C'était régalité. En 1868, il fit avec les épis provenant de la récolte précédente des semailles à la Sal- pêtrière, M. Magne en fit à Alfort et M. Périer à Bièvre. A la Salpêtrière, un carré fut ensemencé avec des épis bruns, un autre avec des é[)\s blonds. Les deux carrés étaient situés à 100 mètres de distance. Or voici les résultats : Le premier carré (carré brun) donne -^^ épis bruns et seulement ^, épis blonds, c'est-à-dire qu'à la troisième génération l'influence de la race blonde avait déchu. Le deuxième carré (carré blond) donna ^^ épis bruns seulement, tan- dis qu'il donna -^ épis blonds. Les résultats de M. Périer furent peu différents; le carré ensemencé avec des épis bj-uns lui fournit ^ épis 6/ond5 (tandis que M, Broca n'en avait eu que ^l, et le carré qu'il ensemença avec des épis blonds lui donne —^ épis bruns, tandis que M. Broca n'en avait eu que -^^ . M. Broca s'est demandé si dans la vie de l'être les variétés avaient autant de résistance que les types purs. Pour décider cette question, M. Broca avait semé dans chacun de ses carrés plus d'épis que le sol n'en pouvait nourrir; un certain nombre de pieds a donc été nécessai- rement stérile; or le nombre des pieds stériles n'a pas été notablement plus élevé dans un carré que dans l'autre; la fertilité a été à peine su- périeure dans le carré blond ; mais le nombre des épis arrivés à matu- rité fut dans le carré brun le quart seulement de ce qu'il fut dans le premier. Répondant à une question de M. Chatin, M. Broca dit que le rachis et les feuillles n'étaient pas plus colorés sur les pieds bruns que sur les pieds blonds; il a même été obligé de laisser de côté un grand nombre d'épis dont la coloration brime ne lui a pas paru suffisamment certaine. 11 n'a pas remarqué d'épis panachés. M. Broca observa ensuite que sur le môme pied, dans le carré brun, il n'y avait que des épis bruns, tandis que dans le carré blond, sur un pied brun il y avait des épis blonds (l sur 4 environ). Sur un pied de fleurs mâles, il y a quelquefois une ou deux fleurs her- maphrodites. M. Broca n"a observé ce fait que sur les pieds bruns. M. Bert fait remarquer le peu d'influence du milieu, puisque le ré- sultat était peu différent à la Salpêtrière ou chez M. Périer. 11 exprime le vœu que des expériences semblables soient instituées par une société, afin de pouvoir être poursuivis pendant un grand nombre de générations. M. MicHON répond à M. Bert que selon lui le milieu a une grande in- fluence; il cite l'exemple des bœufs de l'espèce de Durham. Transpor- tés dans un pays de montagnes les individus, à la troisième génération, reprennent une partie des caractères dès animaux des montagnes. M. Broca dit que M, Michon confond Tinfluence du milieu avec celle de la culture artificielle; il cite l'exemple des personnes qui, en An- gleterre notamment, font des races artificielles de pigeons en unissant des individus choisis. Dès que cette culture artificielle cesse, la race artificielle disparaît, égnlemenî. C'est le cas de la race de Durham. Pour M. Broca, rinfiuence de la race est de beaucoup l'innuonco prépondé- rante; des individus de même race, nourris différemment, sont néan- moins de même taille. M. Michon répond que la culture est un milieu, que la nourriture fait ?9 partie du milieu et qu'elle a plus d'importance que ne leur en attribue M. Broca. M. Bert pense que le milieu n'a qu'une influence restreinte, que les races actuelles répondent à des types antérieurs. — La Société procède à l'élection d'un membre titulaire. M. Liou- ville ayant réuni la majorité des suffrages, est proclamé membre de la Société de biologie. — La séance est levée à cinq heures et demie. Séance du 16 janvier. M. Brown-Séquard se propose d'ajouter quelques faits à ceux qu'il a déjà fait connaître dans plusieurs publications, à partir de l'année 1849, sur les attaques épileptiques déterminées chez les cochons d'Inde par des lésions de la moelle épinière. On ne sait pas encore quelles sont, dans la moelle, les parties dont la lésion amène la production de l'é- pilepsie. Les faits qui suivent n'élucident pas le problème, mais pour- ront servir à ceux qui en tenteraient l'élucidation complète. La simple mise à nu de la moelle ne suffit pas; une lésion nerveuse est nécessaire. Après l'hémitcction latérale de la moelle, c'eslseule- ment le côté de la face correspondant à la section dont l'irritation peut provoquer l'attaque. Après la section complète de la moelle, les deux côtés de la face ont cette propriété. Après la section de deux ou trois paires de racines an- térieures et postérieures, la moelle étant respectée, M. Brown-Séquard a vu l'affection se manifester. Cette lésion est donc suffisante; mais il faut noter qu'alors l'épilepsie survient rarement, tandis qu'elle est in- évitable quand on coupe la moelle. Après la section du nerf sciatique seul, M. Brown-Séquard a observé deux fois le développement de l'épilepsie. Les attaques étaient sponta- nées, M. Brown-Séquard ne sachant pas à cette époque comment les provoquer. Il en a été de môme après la lésion de la moelle allongée. M. Brown-Séquard insiste ensuite sur ce fait que dans le membre inférieur du côté de l'hémisection de la moelle, il n'y a pas de convul- sion lors des attaques, alors même que les mouvements volontaires sont complètement revenus. Il remarque à ce propos que le membre inférieur du côté opposé, c'est-à-dire le membre anesthésique, ne re- couvre jamais complètement sa sensibilité. Ces résultats différent donc de ceux que l'on observe après la sec- tion d'un nerf. On sait en effet que dans ce cas la sensibilité réappa- raît plutôt que le mouvement volontaire. Enfin il rappelle que l'irritation du train postérieur, après une sec- tion complète de la moelle, peut provoquer une attaque convulsive d'une grande violence dans ce train postérieur (épilepsie spinale). M. Laisorde dit que sur des animaux qu'il avait rendus épileptiques, il a essayé l'action du bromure de potassium à la dose deO^'.SO àl6',,50 qu'il administrait soit avec la sonde œsophagienne, soit à petites doses dans du lait. «Après un certain temps, M. Laborde a remarqué que ces animaux deviennent beaucoup moins sensibles aux provocations qui chez eux dé- terminaient sûrement l'accès. M. Charcot dit qu'il a retrouvé, chez des malades qui présentaient une sclérose des cordons postérieurs, les deux formes d'épilepsie spi- nale que M. Brown-Séquard a autrefois indiquées et que l'on peut dési- gner par les noms de tétanique et de saltatoire. La première est très- commune, la seconde, au contraire, fort rare; toutefois M. Charcot a pu en observer trois cas. Dans l'un d'eux, il suffisait de découvrir la malade pour qu'aussitôt ses membres inférieurs fussent pris de convulsions extrêmement violentes, involontaires et inconscientes. Les divers mé- dicaments que M. Charcot a essayés (belladone, bromure de potassium, seigle ergoté) n'ont pas diminué l'intensité de ces convulsions. M. Brown-Séquarb a vu chez les cochons d'Inde la même impuissance de la thérapeutique vis-à-vis de Tépilepsie spinale, tandis qu'au con- traire l'épilepsie ordinaire provoquée est influencée par certains trai- tements. Relativement aux deux /orme^ d'épilepsie spinale, il observe qu'elles sont quelquefois réunies chez le même animal. Quand la moelle a été coupée en entier, la forme tétanique est la règle, tandis que si la sec- tion a été incomplète, on aura la forme à laquelle M. Charcot a imposé la dénomination heureuse de saltatoire ; mais dans ce cas on pourra concurremment observer des roideurs convulsives passagères, — M. Prompt présente une pièce pathologique. Il s'agit d'un abcès dé- veloppé dans le lobe sphénoïdal du cerveau consécutivement à un ab- cès de l'oreille. La dure-mère est largement perforée. Il existe du pus dans la cavité arachnoïdienne. Le malade a présenté de l'agitation, une céjilialalgie limitée à la région temporo-masloïdienne. 11 ne paraît pas y avoir eu ni délire ni paralysie. — M. Bergeron a eu récemment à constater l'asphyxie de deux per- sonnes couchées dans une pièce paraissant dans d'excellentes con- ditions hygiéniques, mais situées au-dessous de l'atelier d'un apprèteur de chapeaux de paille; au milieu de cet atelier est une sorte de four- neau (réchauffoir) qui peut, au moment où Ton cesse le feu, exhaler de 31 grandes ciUantités d*oxyde de carbone qui, à cause de sa densité, forme la couche inférieure de l'atmosphère de Tatelier. Or M. Bergeron a pu s'assurer qu'il existait dans le plancher de cette pièce des fissures. L'oxyde de carbone se serait donc déversé par ces fissures dans la pièce située au-dessus et aurait ainsi amené pendant leur sommeil l'asphyxie des deux personnes couchées dans le lit qui se trouvait précisément au-dessous de ces fissures. M. Le Bret et M. Moreau citent chacun un cas qui présente de l'analo- gie avec celui de M. Bergeron. — M. BoucHEREAu met sous les yeux de la Société l'encéphale d'Un homme ayant succombé à une hémorrhagie cérébrale ; des anévrysmes miliaires ont élé trouvés dans les rétines de ce malade. — M. QuiNQUAUD présente un cœur offrant un kySte fibrineux; il exis- tait des infarctus dans les viscères. Fièvre typhoïde cdez un rhumatisant ; méningo-encéphalite aiguë, diffuse, superficielle; par M. Quinquaud. Le 4 janvier 1869, le nommé Godard Edmond entrait à la salle Sainte- Irénée, n° 35, service de M. le docteur Mesnet. 5 janvier. Notre excellent collègue et ami M. Thaon, interne du ser- vice, a bien voulu nous communiquer les renseignements suivants : Cet homme est sorti, il y a six semaines, du service de M. le docteur Gubler, où il avait été traité pour un rhumatisme articulaire aigu. De- puis cette époque, jusqu'à ces derniers jours, il était assez bien por- tant, bien qu'il conservât des douleurs dans la continuité des membres supérieurs et inférieurs. Depuis plusieurs jours il aurait eu des douleurs vagues beaucoup plus accusées, de la courbature, de l'inappétence; pas de céphalalgie. 5 et 6 janvier. Le malade accuse des douleurs articulaires et muscu- laires; la langue est large, abdominale, couverte d'un enduit blan- châtre épithélial; pas de désordres intestinaux; l'abdomen est normal, pas d'épistaxis. Sjanvier. Tout l'appareil symptomatique a changé, le malade éprouve des douleurs articulaires, il a des sueurs profuses, du délire; une érup- tion de taches bleues sur les deux cuisses. Purgatif. 11 janvier. Soubresauts des tendons, carphologie, délire, faciès animé, yeux brillants, pupilles égales, incontinence d'urine, pas de diarrhée^ abdomen plat, sueurs profuses; pouls, 130; langue humide, pas d'épistaxis; rêvasseries; subdelirium : il croit servir du vin, il est persécuté dans sa prison ; vésicatoires aux mollets, 12 janvier. Pouls, 156; température rectale, 40°, 8, 32 A la période d'agitation a succédé un moment de calme; l'abdomen est plat; éruption sudorale au front et à la poitrine; roideur extrême dans les muscles du cou; les yeux sont excavés; amaigrissement gé- néral. Le malade meurt à minuit. Autopsie. — A l'ouverture de la cavité abdominale on trouve les in- testins rouges, vascularisés; les ganglions mésentériques sont volu- mineux et offrent à la coupe un tissu blanchâtre ramolli. En ouvrant l'intestin grêle on remarque, vers la valvule de Bauhin, une dizaine de plaques de Peyer, qui présentent des tuméfactions, rougeâtres, non ulcérées, telles qu'on en voit dans la fièvre typhoïde; les lésions sont surtout accusées vers la valvuleiléo-cœcale. La rate est assez volumineuse, ramollie. Les reins sont congestionnés. Le foie est jaunâtre et paraît graisseux. Les poumons, congestionnés vers leurs bases surtout, présentent plu- sieurs noyaux apoplectiques situés dans la profondeur de l'organe, il n'en existe pas à la surface ; quelques caillots récents à ce niveau dans les divisions de l'artère pulmonaire. Le cœur est mou, flasque, un peu jaunâtre. La pie-mère est rouge, vascularisée, épaissie, adhérente légèrement aux circonvolutions, de telle sorte que la surface de ces dernières, après l'enlèvement de la pie-mère, offre un état velouté très-net. Sur le trajet des vaisseaux, on distingue des exsudats blanchâtres et, par places, une teinte diffuse ecchymotique. A la coupe, la substance grise apparaît rougeâtre, sillonnée de petits vaisseaux appréciables à la loupe; en même temps la partie la plus superficielle a diminué de con- sistance. La substance grise offre un piqueté assez abondant (hyper- émie). La séreuse de l'articulation du genou droit est rouge, recouverte d'un exsudât; léger épanchement, un peu trouble. Examen hisïologiqiie. — Une coupe de ganglions nous montre de nom- breux noyaux ovalaires nageant dans un liquide granuleux. De même, on constate, par l'analyse microscopique, que la tuméfac- tion des plaques de Peyer est constituée par des noyaux très-nombreux, que Ton voit très-bien en colorant la préparation par le carmin. L'épithélium des tubuli du rein est trouble, granuleux. Le tissu du foie est le siège d'une dégénérescence graisseuse. Le liquide de l'articulation du genou droit renferme un assez grand nombre de leucocytes. Sur une préparation de la séreuse on remarque de nombreux noyaux embryo-plastiques colorés par le carmin. 33 Le tissu de la pie-mère nous montre de nombreuses cellules em- bryonnaires, des corps granuleux, des éléments cellulaires assez volu- mineux, qui contiennent un ou plusieurs noyaux; les vaisseaux sont gorgés d'hématies et très-nombreux. La substance grise renferme de nombreux noyaux connectifs de la névroglie, des cellules nerveuses, granuleuses, avec leur noyau encore assez distinct. Les noyaux des capillaires sont très-nombreux; et sur le trajet de ces vaisseaux sont parsemés des granulations pigmentaires et quelques corps granuleux ; des corps de Gluge se montrent encore dans le champ de la préparation. La substance blanche n'est pas altérée; les noyaux de la névroglie sont normaux. Cette observation nous a paru intéressante à plusieurs points de vue. Le malade en question, dans la période d'invasion d'une fièvre ty- phoïde survenant chez un rhumatisant , présente le développement d'une méningo-encéphalile superficielle; or qu'est-il résulté, au point de vue des symptômes, de ce conflit de plusieurs maladies distinctes. Le résultat a été celui-ci : l'afi^ection- cérébrale a prédominé au point de vue de la sympiomatologie, de telle sorte que l'intoxication typhoïde n'a pu se traduire par des signes très-nets. Et cependant ces trois maladies existaient tellement bien que, 1° les douleurs articulaires ont été constatées comme signes, et qu'à l'autopsie la séreuse du genou droit était rouge, avec un léger exsudât et un épan- chement qui renfermait d'assez nombreux leucocytes; 2° que la fièvre typhoïde a été démontrée à l'autopsie : boursouflement, tuméfaction des plaques de Peyer avec hypertrophie des ganglions mésentériques; 3" que l'examen histologique de la pie-mère et de la couche grise des circonvolutions nous montre clairement qu'il s'agit d'une méningo- encéphalite. Comment donc expliquer celte triade pathologique? Il y a eu coïn- cidence du rhumatisme avec une fièvre typhoïde, et de ces deux fac- teurs, il en est survenu un produit (méningo-encéphalite). D'une part, qui ne sait combien le rhumatisme affectionne les séreuses, et d'autre part, combien la fièvre typho'ïde tend à la méningite? Au lieu d'une seule cause, nous en avons deux, et la méningite s'est développée rapidement; mais les connexions intimes de la pie-mère avec la substance grise, cette dernière s'est prise, et en dernière ana- lyse il en est résulté une méningo-encéphalite superficielle, diffuse. Maintenant voici le fait de pathologie générale que nous voulions signaler ; lorsque deux maladies ont les mêmes déterminations mor- c. i\. 18G9 3 34 bides locales et que ces deux affections viennent à se développer chez le même sujet, il en résuite que les localisations se produisent beau- coup plus sûrement que s'il n'y avait qu'une seule maladie. Je pourrais citer bien des faits cliniques à l'appui de cette proposition ; mais je me contente d'une observation que j'ai en ce moment sous les yeux. Il s'agit d'un alcoolique accompli, qui avait déjà eu un léger épan- chement pleurétique adroite il y a quelques années; ce malade est pris pour la première fois d'une attaque de rhumatisme articulaire aigu ; après plusieurs jours se montrent du délire, de l'agitation, un pouls lent et irrégulier, une respiration irrégulière ; le ventre est en bateau, il y a de la constipation opiniâtre; en même temps les dou- leurs articulaires avaient presque cessé au moment des accidents cé- rébraux. Cet état dure plusieurs jours, pendant lesquels apparaissent les signes d'une péricardite exsudative. Les symptômes céphaliques et péricardiques s'atténuent de plus en plus et finissent par -disparaître; il fut possible alors de distinguer les signes d'une endocardite; il existait en effet un souffle rude à la pointe et au premier temps, qui n'était pas un frottement péricardique. Puis apparaissent deux épanchements pleurétiques, qui disparais- sent lentement. Les douleurs articulaires qui , pendant ce laps de temps se montraient de temps à autre ont complètement disparu, tandis que les signes de l'endocardite et des pleurites existent encore. Voilà encore un malade alcoolique chez lequel il se développe une première attaque rhumatismale; ou bien si l'on admet une diathèse la- lente, un rhumatisant qui s'est intoxiqué chroniquement avec les liqueurs spiritueuses, et chez lequel le rhumatisme se localise pour la première fois. Chez un simple rhumatisant, exempt de toute autre ma- ladie, des accidents cérébraux peuvent bien se montrer, ainsi que des altérations des séreuses ; mais nous pensons, d'après les faits observés par nous, que ces manifestations locales se montrent beaucoup plus sûrement quand il y a coexistence de deux maladies qui ont les mêmes tendances localisatrices. Aussi nous expliquons-nous très-bien comment notre malade a été atteint successivement de méningite, de péricardite, d'endocardite et de pleurésie double. Ces faits nous ont paru dignes de l'attention de la Société au double point de vue de l'étiologie et du projiostic. Présentation d'un kyste fibrineux du coeur et d'infarctus de la rate ET des reins; par M. Quinquaud. Nourrice du service de M. le docteur Bucquoy. Caillot fibrineux ancien de la pointe du ventricule gauche ; caillot produit probable- 35 ment au moment de l'état puerpéral, et ayant déterminé secondaire- ment une adhérence à l'endocarde, qui existe encore à ce niveau, mais altéré dans sa structure histologique. Cet amas fibrineux a donné naissance à des infarctus multiples de la rate et des deux reins, plusieurs noyaux apoplectiques de la base des poumons n'étaient peut-être pas des infarctus. Accidents typhoïdes. Signes d'une insuffisance mitrale produits par un prolongement du caillot dans l'angle gauche de la valvule mi- trale : souffle au deuxième temps et à la pointe ; œdème des membres inférieurs avec un peu d'ascite. — La séance est levée à cinq heures et demie. Séance du 23 janvier. M. BoucHEREAu Complète la communication commencée dans la der- nière séance sur un cas d'hémorrhagie cérébrale chez un alcoolique. Alcoolisme coronique avec accès subaigu ; attaques ÉPiLEPTiFonMEs un an APRÈS l'entrée a l'asile; attaque apoplectiforme en dernier lieu ; autop- sie : iiÉMORRHAGiEs cérébrales; dilatations anévrysmales dans le cerveau ; HÉM0RRHAGIES RÉTIENNES AVEC ANÉVRYS3IES MILIAIRES DE LA RÉTINE; PACRYMÉ- NING1TE RACHIDIENNE ; par MM. MaGNAN et BOUCREREAU. V..., âgé de 58 ans, maréchal-ferrant, fait depuis des années des excès alcooliques : à la suite de conceptions délirantes multiples, il s'engage dans des procès absurbes avec des membres de sa famille, qui supportent ces ennuis; mais pris un jour de délire avec agitation violente dans un café, il cause un scandale public; on l'arrête alors et on l'envoie au bureau d'admission des asiles d'aliénés de la Seine, le 15 mai 1867. A son entrée, ce malade présente tous îe«; caractères d'un accès maniaque de nature alcoolique : trouble dans le» idées, désordres dans les actes, hallucinations terrifiantes de la vue et de l'ouïe. Le calme étant survenu quelques jours après, on fait l'examen des yeux à l'ophthalmoscope, et sur le trajet d'un vaisseau on aperçoit plusieurs petites granulations, dont le contour se continue d'une façon précise avec les parois artérielles. V... passeàSainte-Anne; on observe chez lui plusieurs attaques épilep- tiformes à des intervalles plus ou moins éloignés ; à la suite d'une attaque, il reste paralysé du côté droit ; revu, après plusieurs mois de séjour, on note de la faiblesse dans tout le côté droit, de la gêne dans la parole et de l'affaiblissement des facultés intellectuelles. Le 13 janvier 1869, il est frappé d'une attaque apoplectiforme ; i 36 s*affais5e sur lui-même et tombe au milieu du quartier dans lequel il se promenait. M. Lescure, interne, appelé, constate une résolution com- plète des membres. Le malade meurt au bout de quelques heures, sans avoir recouvré connaissance. L'autopsie montre les lésions suivantes : Les artères des méninges et du cerveau sont un peu athéromateuses ; l'encéphale enlevé, on trouve du sang fluide et noirâtre épanché à la base de la cavité crâ- nienne ; les circonvolutions de la base des hémisphères sont afFaisées, le sang épanché les a comprimées; des coupes de l'encéphale, pra- tiquées en commençant par la partie supérieure des hémisphères, permettent de reconnaître l'état des ventricules latéraux, qui sont rem- plis de sang noirâtre, à demi coagulé; la cloison interventriculaire est rompue, brisée. Co7'ps strié droit. Le corps strié du côté droit est le siège d'une déchirure profonde, dirigée de haut en bas, et occupant son tiers pos- térieur ; la déchirure se continue sur la couche optique et toute la paroi externe du ventricule, en suivant une direction horizontale; les bords de cette large fente sont irréguliers, fortement colorés en rouge par le sang qui les a imbibés ; dans le foyer hémorrhagique, on rencontre mélangés au sang des cellules et des tubes nerveux brisés ; des corps granuleux sont dissiminés dans la substance nerveuse voisine du foyer, plus particulièrement dans le corps strié ; dans cette région, les parois des capillaires examinées au microscope présentent des granulations graisseuses, les tuniques d'un certain nombre de vaisseaux offrent une multiplication de leurs noyaux ; un grand nombre de vaisseaux ont été étudiés, plusieurs sont uniformément développés; les autres bosselés et dilatés très-irrégulièrement. Le pédoncule cérébral droit, déchiré, s'est laissé traverser par le sang épanché. Dans le corps strié gauche, il existe un ancien foyer qui occupe sa partie externe et la substance blanche environnante; son aspect est celluleux; sa coloration varie, suivant les points, du jaune ocre au rouge foncé. La dure-mère rachidienne est épaisse ; vers la fin de la région dor- sale, elle est tapissée par une néo-membrane mince et rose; un petit foyer hémorrhagique s'est produit en cet endroit. A l'œil nu, les coupes de la moelle n'offrent rien de particulier. Au microscope, on aperçoit des corps granuleux dans les cordons posté- rieurs, et plus particulièrement vers la partie supérieure de la région dorsale; quelques corps granuleux dans les cordons latéraux de la môme région. OEiL gauche. Le névrilème du nerf optique est épaissi dans une 37 étendue de 2 centimètres environ avec une teinte rouge foncée ; on trouve même une petite collection sanguine au-dessous. Œil droit. Le névrilème est également épaissi ; au niveau de la sclérotique, il présente un bourrelet avec coloration rougeàtre. Ces lésions ont des caractères qui permettent de les rapproclier de la pachyméningite. Dans les rétines, on rencontre plusieurs foyers hémorrhagiques ; un certain nombre de vaisseaux étudiés au microscope apparaissent bosse- lés, irréguliers ; d'autres sont dilatés soit dans une portion de la périphé- rie, soit dans toute l'étendue du pourtour du vaisseau; quelques-uns se montrent avec les caractères très-nets des anévrysmes miliaires décrit? par MM. Charcot et Bouchard dans leurs travaux sur la pathogénie de l'hémorrhagie cérébrale ; les parois des vaisseaux sont épaissies, les noyaux de leurs tuniques ont subi une multiplication évidente. Ainsi, dans la rétine, on voit des hémorrhagies, des dilatations anévrysmales et des anévrysmes avec la forme miliaire. Pour les autres organes, le cœur, le foie, les reins, ils ont subi la dégénérescence graisseuse. Cette observation présente certaines particularités; au point de vue clinique, il faut signaler ce fait que, près d'un an après son entrée dans un asile, on a vu survenir chez un alcoolique chronique, sans nouveaux excès, des attaques épileptiformes. L'autopsie a révélé : des hémorrhagies inlraet extra cérébrales avec des anévrysmes; des hémorrhagies rétiniennes avec des anévrysmes miliaires de la rétine, de plus de la pachyméningite rachidienne et des néo-membranes de la gaîne des nerfs optiques avec épauchement san- guin; c'est-à-dire que dans des organes différents, mais possédant ^s mêmes éléments dans leur structure, on a rencontré des lésions offrant le même caractère et procédant de la même façon : d'une part ané- vrysmes et hémorrhagie ; d'autre part pachyméningite et hémorrhagie. Le malade chez qui toutes ces lésions se sont trouvées réunies était atteint d'alcoolisme chronique. Il est nécessaire d'ajouter que M. Sons (de Bordeaux) a pu observera l'ophthalmoscope un anévrysme de la rétine ; la tumeur offrait desbatte- ments très-appréciables (Annales doculistjque, année 1865). M. Léon Tripier (de Lyon), dans une observation (portant ladate de mai 1868), a reconnu à l'ophthalmoscope des anévrysmes de la rétine dans lesquels il n'a pu constater aucun battement, mais qui lui ont paru avoir le caractère d'anévrysmes miliaires; l'autopsie lui a montré qu'il s'agissait réellement d'anévrysmes saxiformes ou ampuUaires, de tout point comparables aux anévrysmes miliaires. M. Liouville, dans une observation de « diathèse anévrysmale généra- 88 lise, ou faits de coïncidence d'anévrysmes miliaires du cerveau avec des anévrysmes de calibre plus considérable existant sur des artères de systèmes différents, décrit en ces termes l'examen des yeux à l'au- topsie : La rétine offrait des vaisseaux très-apparents, très-gorgés de sang, flexueux, et sur leur trajet des dilatations arrondies, espacées, rappelant tout à fait des anévrysmes que Ton soupçonne d'abord, mais que Ion constate bien avec la loupe. » (Gazette médicale, octobre 1868.) M. GuBLER demande si l'on a noté l'état des urines. M. Magnai» répond que l'urine ne présentait pas d'albumine; que d'ailleurs elle n'a pas été examinée au moment des crises, mais qu'il est exceptionnel de rencontrer de l'albumine chez les alcooliques aigus. Relativement aux anévrysmes de la rétine, qn\ ont d'ailleurs été déjà constatés par plusieurs observateurs, M. Charcot observe que dans un cas on avait cru, sur le vivant, reconnaître par l'examen ophthalmosco- pique la présence d'un anévrysme rétinien, mais que l'autopsie a dé- montré qu'il s'agissait simplement d'une ecchymose. M. Hayeb dit que dans un cas d'hémorrhagie cérébelleuse observée par M. Hénocque, il existait deshémorrhagies rétiniennes; mais dans ce cas la présence d'anévrysme rétrnien n'a pas été constatée. M. Magnan, à l'occasion de la présentation faite par M. Boucbereau, rappelle qu'en 1865 M. Sons (de Bordeaux) a constaté, par l'examen ophlhulmoscopique, un anévrysme de la rétine dont il a pu observer très-netlement les battements. Les anévrysmes rétiniens ont aussi été observés, cette foisanatomiquement, par M. Liouville. (Voir l'observa- tion III de son travail Sur la diathèse anévrysmalique, présenté à la Société de Biologie, séance du 25 juillet 1868.) Infection purulente a marche chronique; abcès multiples de différents viscères; abcès du caeur; ostéo-périostite vertébrale; abcès par con- gestion; par M. QuiNQUAUD. Le 12décembre 1868, entrait à la salle Saint-Augustin, n" 9, le nommé Maury, garçon marchand de vin, âgé de 34 ans, et qui donne les rensei- gnements suivants : Pas d'antécédents syphilitiques ni scrofuleux. Il ne serait malade que depuis le 20 novembre 1868; auparavant il jouissait dune bonne santé; toutefois, depuis plusieurs jours il éprouvait do la fatigue, était comme courbaturé, était exposé à porter souvent de lourds fardeaux. Li; 20 novembre, H éprouva. à la région sacrée une dou- leur excessivement vive, pour laquelle un lui applicpui plusieurs sang- sues (jui paraissent avoir cainié la douleur. Depuis cette époque, et de teuijis à LiutFe il rcssiMitit des éluncemuuls ut des fuuriuilluweats dans 39 les membres inférieurs. L'amaigrissement a toujours été en croissant. Pas de frissons. Les urines étaient rouges, peu abondantes au début. A son entrée dans le service, son état général était satisfaisant; il avait un peu maigri, se trouvait faible pour marcher, et éprouvait des douleurs lombaires à la moindre fatigue; à cette époque, pas de troubles de la sécrétion urinaire. Mais, vers le 20 décembre 1868, le mouvement fébrile se déclare, la température s'élève à 39", 3 le soir; jusqu'au 1" janvier il y a un dés- accord entre le pouls et la température, car le 27 décembre nous trou- vons un pouls à 1 16 coexistant avec une température à 38*, 7. 1" janvier 1869; pouls 124; température rectale 38°, 8. État actuel. Teinte subictérique, amaigrissement, faciès cachec- tique, atrophie marquée des muscles des cuisses et des jambes ; contrac- ture légère des fléchisseurs de la cuisse sur la jambe. L'abdomen est lé- gèrement tendu (tympanite intestinale), un peu sensible à la pression, avec empâtement dans les deux flancs; pas de gargouillement dans la fosse iliaque gauche, qui paraît la plus tendue. Les jambes sont fléchies sur les cuisses, et celles-ci sur le bassin. Œdème périmalléolaire; une eschare commence à se développer à la région sacrée. Mais en exami- nant attentivement la région lombaire, on voit qu'elle est tendue, comme empâtée; cette tuméfaction diffuse, dont on apprécie très-mal les li- mites, s'observe des deux côtés de la colonne vertébrale; à ce niveau, pas d'œdème appréciable. Les battements cardiaques sont nets, sans bruits anormaux. Souflle à double courant à la région cervicale; les gencives sont décolorées. Au- cun bruit anormal dans la poitrine. L'auscultation ne peut être prati- quée en arrière, à cause de la roideur générale que l'on peut comparer à celle qui existe chez un tétanique, avec convulsions toniques de tous les muscles. Soir, température rectale, 39°, 6; soif vive; respiration, 36. 2 janvier. Pouls : 112; température rectale : 38%9. Diarrhée colli- quative; incontinence d'urine et des matières fécales. — Soir. Pouls : 112; température rectale : 39°, 4. 3 janvier. Pouls : 118; température rectale : 38%8. — Soir. Pouls : 112; température rectale : 39°, 3. 4 janvier. Pouls : 112; température rectale: 38°, 8. — Soir. Pouls : 108; température rectale : 39". 5 janvier. Pouls : 112; température rectale : 38°, 3. — Soir. Pouls : 108 ; température rectale : 39». 6 janvier. Pouls : 112: température rectale : 38°, 0. — Soir. Pouls : 120; température rectale : 39°. 40 7 janvier. Pouls : 106; température rectale : 38°. — Soir. Pouls : 108; température rectale : 38°, 7. 8 janvier : Pouls : 118; température rectale : 38°, 6. L'incontinence d'urine et des matières fécales a considérablement diminué; il y aune amélioration sensible de ce côté. — Soir. Pouls : 120 ; température rec- tale : 39°. 9 janvier. Pouls : 94 ; température rectale : 37°, 9. — Soir : Pouls • .104; température rectale : 38°, 9. 10 janvier. Pouls : 88; température rectale : 37°,8. Amélioration réelle. — Soir. Pouls : 112; température rectale : 38°, 9. Mange deux portions. 11 janvier. Pouls : 96; température rectale : 37°, 6. — Soir. Pouls : 112; température rectale : 38°, 3. 12 janvier. Pouls ; 100; température rectale : 38°. — Soir. Pouls : 104; température rectale : 38°, 5. 13 janvier. Pouls : 104; température rectale : 38°. — Soir. Pouls : 120; température rectale : 38°. 3. 14 janvier. Pouls : 95; température rectale : 37°, 5; température axil- laire : 37°, 5. — Soir. Pouls : 116; température rectale : 38°, 8. 15 janvier. Pouls : 102; température rectale : 38", 2. — Soir. Pouls : 120; température rectale : 38°, 6. 16 janvier. Pouls : 98; température rectale : 37°, 5. — Soir. Pouls : 120; température rectale : 38° ,2. Se plaint de douleurs vagues dans les membres inférieurs. 17 janvier. Pouls : 104; température rectale : 37°, 6. — Soir. Pouls : 112; température rectale : 38°, 4. 18 janvier. Pouls : 108; température axillaire : 37°, 4. Incontinence des matières fécales. 19 janvier. Pouls : 84; température rectale : 37°, 1. A neuf heures six minutes le malade est à l'agonie ; rétrécissement marqué des pu- pilles; respiration saccadée, superficielle; yeux fixes; les battements cardiaques se sentent à peine; gêne de la déglutition. A neuf heures un quart même température; râles trachéaux. Le ma- lade s'éteint après une lente agonie. La température monte à 38° peu avant la mort. Autopsie. A droite et à gauche de la colonne vertébrale, on constate que les deux muscles psoas sont tendus, gonflés, et l'on sent manifeste- ment des tumeurs fluctuantes à l'ouverture desquelles il s'échappe des flots de pus crémeux ; après avoir enlevé le liquide purulent on constate une membrane blanchâtre, qui par sa face externe adhère aux fibres musculaires du psoas et qui par sa face interne est recouverte de dé- pôts membraniforraes caséeux qui s'enlèvent facilement. 41 Ces deux poches symétriques s'étendent de la douzième vertèbre dor- sale à l'arcade de Poupart, A la partie antérieure du corps de la onzième vertèbre dorsale, nous voyons une dénudation de l'os à ce niveau ; il en existe encore vers la première lombaire, partie antérieure du corps de la vertèbre. Ces parties dénudées sont baignées par du pus et en communication avec les foyers purulents. Le tissu osseux est éburné. Après avoir enlevé la moelle épinière nous apercevons, au niveau de la septième vertèbre dorsale, une dénudation à la partie postérieure du corps de cet os; ce point malade est baigné par du pus qui se propage dans une étendue de 3 centimètres au-dessous de la dure-mère rachi- dienne, épaissie à ce niveau, rouge, vascularisée ; il paraît même y avoir eu un peu de compression de la moelle épinière à ce niveau. En examinant les vertèbres on trouve des indurations, des lames blanchâtres (ostéite condensante, ostéosclérose). A partir de la sixième vertèbre dorsale jusqu'à la troisième lombaire, on voit que le tissu os- seux des corps de ces os est rouge, vascularisé, très-friable, et sur plu- sieurs points nous trouvons des plaques jaunâtres (ostéite caséeuse). La moelle épinière est rouge, vascularisée ; mais à l'œil nu on ne dé- couvre point trace de dégénérescence secondaire. Les intestins sont revenus sur eux-mêmes ; le péritoine est sain. Le foie est jaunâtre, d'un moyen volume ; la vésicule biliaire est dis- tendue par de la bile, qui flue librement dans l'intestin quand on presse le réservoir biliaire. Les reins reposent sur les muscles psoas; ils sont parsemés de plu- sieurs petits abcès superficiels et profonds. La rate est le siège de trois indurations triangulaires, à base superfi- cielle et à sommet profond; la partie centrale est purulente. En ouvrant la cage thoracique nous trouvons une vaste poche puru- lente qui a envahi la presque totalité du poumon gauche, poche d'oii s'échappent deux litres de pus; les parois en sont constituées par une membrane blanchâtre de l'épaisseur d'un demi millimètre, sur laquelle repose une lame pulmonaire, variable d'épaisseur suivant les points où on la considère ; au sommet son épaisseur est de 4 centimètres, et ail- leurs de 2 centimètres environ ; la paroi est encore constituée par la plèvre pulmonaire, épaisse d'un millimètre et demi ; les deux feuillets pleuraux sont rendus adhérents par des fausses membranes assez ré- centes; le feuillet pariétal offre à peu près la même épaisseur. Ce foyer purulent n'est nulle part en communication avec une lésion vertébrale. Le poumon droit est le siège de deux noyaux caséeux. Nulle traco de granulations tuberculeuses, ni à droite ni à gauche, soit sur les plèvres, soit dans le parenchyme. 42 A la surface du péricarde existent plusieurs plaques laiteuses. Le cœur est revenu sur lui-même ; la paroi du ventricule gauche est épais- sie, la cavité est peu considérable. En prolongeant l'incision pour ouvrir l'orifice aortique, on met à nu un foyer purulent du volume d'une noix et qui est situé en avant de l'orifice aortique à égale distance de l'au- ricule gauche et de l'artère pulmonaire. Cet abcès a pour paroi une mem- brane blanchâtre d'un millimètre d'épaisseur; la poche est remplie d'un pus jaunâtre. Les oreillettes et le ventricule droit sont sains. Examen liisiologique. — Vertèbres. L'examen microscopique nous montre les lésions de l'ostéite raréfiante avec celles de l'ostéosclérose et de l'ostéite caséeuse par places. Une coupe mince du muscle psoas nous fait voir une prolifération considérable des noyaux du tissu interstitiel ; en même temps les fibres primitives ont diminué de volume et sont granulo-graisseuses sur plu- sieurs points, granuleuses sur d'autres; la strialion a disparu sur plu- sieurs d'entre elles. Le pus des difi"érents abcès des psoas, des reins, du poumon gauche, du cœur, de la rate, renferme des leucocytes à un ou plusieurs noyaux, rendus manifestes par l'acide acétique. Les deux membranes qui limitent les abcès du cœur et du poumon ont la môme texture; une coupe fine nous indique une substance fonda- mentale fibrillairo connective, qui contient dans ses mailles un grand nombre de cellules embryonnaires, dont les noyaux seuls sont très- apparents sur la coupe ; mais par la dilacération on voit distinctement que ce sont de véritables cellules. Ce tissu est d'autant moins embryon- naire que l'on se rapproche de la face externe de la membrane d'enve- loppe ; en ce point le nombre des cellules embryo-plastiques est très- restreint. Autour de ces abcès le tissu pulmonaire et le tissu cardiaque sont sains. La dure-mère est considérablement épaissie, rouge, injectée, surtout à sa face externe; ces lésions deviennent évidentes lorsqu'on la compare avec la dure-mère située au-dessus de l'altération des vertèbres. Histologiquement nous trouvons à sa face externe une couche de tissu connectif jeune, où abondent des cellules plasraatiques avec un très- grand nombre de noyaux allongés. En résumé, nous voyons un homme âgé de 34 ans, paraissant bien portant jusqu'au 20 novembre 1868, ressentira celle époque une dou- leur vive à la région lombaire, des élancements et des fourmillements dans les membres inférieurs; amaigrissement. Vers le 20 décembre, un mois après le début des accideûts, le malade, 43 qui jusque-là avait pu marcher, est obligé de garder le lit ; le mouve- ment fébrile est plus considérable ; la température s'élève et oscille d'une manière tout à fait irrégulière. Cette observation nous semble devoir fixer l'attention de la Société à plus d'un litre. I_ _ Au point do vue de l'anatomie pathologique, ce malade nous offre des abcès multiples, c'osL-à-dire les lésions de l'infection purulente. Quel avait donc été le point de départ de celte intoxication? Les deux vastes abcès du psoas ayant leur cause dans une altération vertébrale, nous rendent compte de l'origine de l'infection. Cette source de l'infection purulente doit être rare, car malgré des recherches multipliées nous ne trouvons pas de cas publiés. Bérard signale bien l'infection putride comme conséquence de la carie vertébrale, et Sédillot cite un cas de pyohémie à la suite d'un abcès par congestion ; mais les foyers purulents ont été ouverts et mis en commu- nication avec l'air extérieur. Le volume de l'abcès du poumon est aussi remarquable ; au premier abord on aurait pu croire à un épanchomenL purulent pleiirétique, tant il était vaste; or dans linfection purulente on signale la multiplicité et le petit volume des abcès; si la maladie dure huit à dix jours, le fait est vrai; mais si l'affection se prolonge pendant vingt et un à vingt-cinq jours, on pourra constater des abcès beaucoup plus volumineux. Dans un cas de ce genre observé à l'hôpilal Saint-Anloino, nous avons pu constater un abcès mélaslatique du foie du volume du poing; mais au- tour de cet abcès il en existait d'autres plus petits, dont quelques-uns se confondaient par un point de leur circonférence avec le foyer princi- pal; de telle sorte qu'il semble rationnel d'admettre que le grand foyer n'était qu'une agglomération de petits. De môme pour le cas présent, il est possible que ce vaste abcès pul- monaire se soit produit de celle manière. Comme conséquence il en ré- sulte que plus l'infection durera longtemps, plus les abcès seront volu- mineux. L'examen de ces foyers purulents nous montre bien que la maladie est déjà ancienne : d'abord le volume; mais autour des abcès du pou- mon et du cœur il existe déjà une membrane conneclive qui sépare le tissu siaia de la cavilé purulente. Malgré la suppuration ancienne et d'origiae osseuse, il n'y avait pas trace de dégénérescence amylo'ide dans le foie, la raie cl les reins. II. — La marche de cette afî'eclion doit aussi nous arrêler. C'est vers le 2U novembre que la lésion vertébrale s'est révélée pour la première fois; mais pendant un mois les abcès par congestion se i)réparenl eipa- r;iisseul être constitués le 20 décembre, époque à laquoUg rinfuctiun du sang commence à se faire et se traduit par une courbe irrégulière avec des oscillations diurnes dans le tracé graphique thermométrique ; celle du pouls suit les mêmes modifications. Nous tenons cependant à faire remarquer le désaccord de la tempé- rature et du pouls, ce dernier étant beaucoup plus fréquent qu'il ne de- vrait l'être; il est possible que l'abcès du cœur ait eu une influence dans cette rapidité du pouls. La chronicité de l'infection purulente ne nous semble pas avoir fixé suffisamment l'attention des chirurgiens; à peine en trouve-t-on quel- ques rares observations. Sédillot signale le cas d'un garçon âgé de 26 ans, qui succomba en un mois et quelques jours à une pyohémie chronique, consécutive à un abcès de l'avant-bras. Notre malade a vécu à peu près le même temps. in. — Au point de vue des symptômes, les abcès par congestion avaient été assez obscurs par leurs signes, l'abdomen étant tendu; la palpation n'avait indiqué qu'une douleur obscure au niveau des fosses iliaques ; mais la tension avec envahissement de la région lombaire nous avait fait penser ou à un abcès par congestion ou à un abcès périné- phrétique. L'abcès pulmonaire ne s'était révélé que par de lu matité à la partie externe du thorax, absence de vibrations; et cependant près de la colonne vertébrale il m'avait semblé entendre la respiration : ce qui se comprendrait assez bien, puisqu'il existait là encore du tissu pulmo- naire assez épais et crépitant; mais à aucune époque il n'a eu de cra- chats purulents. Les abcès des reins n'avaient point donné lieu à de l'al- buminurie. Ne pouvait-on pas se rendre un compte satisfaisant de cette roideur des membres inférieurs et de l'extrémité pelvienne du tronc par les al_ térations chroniques des méninges rachidiennes? Nous sommes assez porté à l'admettre, puisque malgré un examen histologique répété nous n'avons pu constater de sclérose secondaire, aucune altération de la moelle elle-même. SUR LA STRUCTURE DES TENDONS. M. Ranvier a examiné les tendons grêles de la queue des jeunes ani- maux (rat, taupe, chien, etc.), et, au lieu des corpuscules du tissu con- jonctif qui sont figurés par les auteurs sur la section longitudinale des tendons, il a vu dans les tendons des jeunes animaux des éléments do forme tubuleuso et qui se colorent fortement par le carmin. Ces élé- ments sont placés bout à bout et sont séparés par une substance qui se colore en rose et qui présente parfois un aspect grenu, de manière à constituer un cylindre qui a la longueur du tendon. Sous l'influence 45 d'une pression légère, on voit ce cylindre s'étaler, de telle sorte que les éléments qui avaient une forme tubuleuse en s'étalanl deviennent plats et présentent une largeur de 6 à 7 millièmes de millimètre. Sous l'influence de l'acide acétique, les plaques rouges se rétractent. M. Ran- vier les considère comme des noyaux, tandis que la substance qui les sépare représenterait le corps de la cellule. M. Ranvier insiste sur cette morphologie tout à fait nouvelle. Sur les animaux adultes, ces tubes cellulaires sont limités par une membrane propre, à l'aide d'irritation produite en injectant une solution de nitrate d'argent au millième dans les gaines tendineuses ; or, en les traversant par de petits sétons, M. Ran- vier a pu ramener les tendons des animaux adultes à la forme de ceux des jeunes animaux. M. Ranvier décrit ensuite la couche épithéliale continue qui recouvre les petits tendons et qui est analogue à celle qu'il a observée sur les travées du grand épiploon. Au-dessous de cette couche épithéliale existe une couche de tissu conjonctif ordinaire, dont les cellules ont été exactement représentées par V. Recklinghausen et qui prennent les caractères de l'état embryonnaire lorsque les tendons sont soumis à une irritation. Selon M. Ranvier, l'apparence d'un réseau anastomotique entre des corpuscules étoiles, apparence que l'on a sur une coupe transversale, tient à ce que la substance intermédiaire aux faisceaux se colore mieux que les faisceaux eux-mêmes. PHYSIOLOGIE DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. M. VuLPiAN rappelle que dans un mémoire publié dans la Gazette HEBDOMADAIRE (1861, p. 365-411) il a démontré qu'en interrompant le cours du sang dans la moelle, on voit les fonctions de la substance grise s'éteindre à peu près immédiatement; ainsi, au bout d'une minute en- viron on ne peut plus obtenir de mouvements réflexes. Il y a deux ans, M. Marcelin Duval a publié le récit d'expériences qu'il a pratiquées sur des suppliciés et dans lesquelles il a observé, une heure trois quarts après la mort, différents mouvements qui lui ont paru de nature réflexe. Or M. Robin, dans un mémoire publié dans le numéro de janvier de cette année d'un journal, a confirmé les faits de M. Marcelin Duval et décrit l'expérience suivante, qu'il a pratiquée une heure environ après l'exé- cution : « Le bras droit se trouvant étendu obliquement sur les côtés « du tronc, je grattais la peau de la poitrine avec la pointe d'un scal- « pel, au niveau de l'auréole du mamelon, sur une étendue de 10 à 11 « centimètres, sans exercer de pression sur les muscles sous-jacents. « Nous vîmes aussitôt le grand pectoral, puis le biceps, le brachial an- « térieur probablement et les muscles couvrant l'épitrochlée se con- n tracter successivement et rapidement. « Le résultat fut un mouvement de rapprochement de tout le bras « vers le tronc, avec rotation du bras en dedans et demi-flexion de tt l'avant-bras sur le bras, véritable mouvement de défense qui projette « la main du côté de la poitrine jusqu'au creux de l'estomac. « ... Cette expérience réussit quatre fois, mais à chacune d'elles, le « mouvement était moins étendu. » M. Vulpian dit que, bien que persuadé, par ses expériences anciennes et par celles d'un grand nombre de physiologistes, de l'inexactitude de l'interprétation donnée par MM. Marcellin Duval et Ch. Robin, il a voulu examiner encore les effets de la décapitation opérée sur les animaux. Or il a pu voir sur deux chiens adultes, décapités aussi rapidement que possible, que les mouvements réflexes des membres deviennent impos- sibles au bout de trois ou quatre minutes, quel que soit le mode d'exci- tation employé. Ainsi, chez les chiens adultes, trois ou quatre minutes après la décapitation, il n'est plus possible de déterminer des actions réflexes. M. Vulpian ajoute que sur les chiens qu'il a opérés récemment il s'est assuré que les nerfs des membres ont perdu leur motricité au bout d'une heure, et les racines de ces nerfs au bout de vingt minutes environ. En présence de ces résultats, conformes d'ailleurs à ceux qui ont été obtenus par tous les physiologistes et par lui-même ancienne- ment, M. Vulpian pense qu'il n'y a que deux appréciations à donner relatives aux assertions de MM. Marcellin Duval et Ch. Robin. Ou bien l'interprétation qu'ils ont donnée est inexacte, ou bien il y aurait une différence fondamentale entre l'homme et les mammifères supérieurs, différence telle qu'en l'absence d'irrigation sanguine artérielle, les fonctions de la moelle s'éteindraient en quatre minutes chez les mam- mifères supérieurs et persisteraient pendant une heure ou une heure trois quarts chez l'homme. M. Vulpian déclare que son choix est fait et qu'il ne peut admettre une différence semblable. Pour lui, les phéno- mènes observés par MM. Marcellin Duval et Ch. Robin seraient des phé- nomènes de contraction idio-musculaù-e, nom donné par M. Schiff à ces mouvements bien connus depuis longtemps de tous ceux qui s'oc- cupent de physiologie expérimentale. Dans le même article, M. Robin reproche à M. Vulpian d'avoir dit que l'injection de sang artériel dans les artères de la tête d'un homme sup- plicié, quelques instants après la mort, pourrait rétablir momentané- ment les fonctions cérébrales. M. Vulpian ayant parlé de la réalisation de cette expérience en des termes généraux, n'a pas dépassé la limite de ce qu'il est possible d'affirmer et n'accepte nullement la critique que M. Robin a faite de cette vue physiologique. 47 M. GuBLER pense avec M. Vulpian que les actes réflexes ne peuvent persister quelques instants après la mort, et que les faits relatés plus haut se rapportent à des phénomènes de contraction idio-musculaire. Il rappelle à cette occasion les expériences qu'il a soumises à la Société anatomique en 1846, et qui ont été faites sur un scrotum dont les fibres ont, sous l'influence de divers irritants, présenté des contractions pen- dant plus d'une heure. L'année suivante il a fait des expériences ana- logues sur les muscles d'un membre amputé. M. Charcot, à l'occasion de la communication de M. Vulpian, appuie les remarques qui ont été présentées sur la possibilité de confondre, dans certains cas, des mouvements réflexes avec des mouvements idio- musculaires. Il rappelle à ce sujet les phénomènes convulsifs observés sur des individus ayant succombé au choléra ou à la fièvre jaune par Bernet-Dowler, Brandt (thèse 1855, écrite sous l'inspiration de M. Brown-Séquard). Sur le vivant, chez certains malades atteints d'atrophie musculaire progressive, M. Charcot a vu un attouchement sur la face dorsale de l'avant-bras suffire, quelquefois pour déterminer des mouvements d'extension et de flexion de la main, qui peuvent se répéter jusqu'à quatre fois après une seule excitation. MM. Duchenne, Aran, ont aussi vu des mouvements fibrillaires donner naissance à des mouvements d'ensemble. M. LiouviLLE dit avoir observé pendant plus d'une heure, chez un cholérique, des convulsions et des mouvements d'ensemble des deux membres. M. Laborde, en pratiquant, il y a quelques années, l'acupuncture sur des animaux qui venaientde succomber, a été parfois très-frappé de constater la production de mouvements déterminés par les piqûres et qui étaient très-étendus. On aurait pu très-facilement les prendre pour des mouvements réflexes. Dans un autre cas, alors qu'un courant gal- vanique ne faisait plus contracter les muscles du mollet, il a vu une injection de chlorure de sodium dans les muscles eux-mêmes amener une contraction énergique. — M. Rabuteau met sous les yeux de la Société un chien auquel il a injecté il y a deux heures du séUniate de soude dans une des veines d'une des pattes postérieures. Or l'animal exhale actuellement l'odeur bien caractéristique de l'acide sélénique. Il y a donc eu réduction du sel dans l'organisme. — M. JoFFROY, interne des hôpitaux, présente l'encéphale et la moelle d'une femme morte dans le cours d'une sclérose en plaques, à la Sal- pêtrière, dans le service de M. Charcot. La première partie de cette observation se trouve consignée dans la thèse de M. Ordenstein (1). Et l'an dernier, pendant le semestre d'été, M. Charcot a présenté la malade à ses auditeurs, lors de ses leçons cli- niques. Dans ses leçons, M. Charcot distingue plusieurs formes de sclérose en plaques. Les plaques de sclérose, dans certains cas, occupent seulement la moelle, sans qu'on trouve aucune trace de travail sclérosique dans l'en- céphale. C'est la forme spinale ou inférieure. Dans d'autres cas, au contraire, on les trouve dans le cerveau, dans l'isthme de l'encéphale, quelquefois aussi dans la partie supérieure de la moelle : c'est la forme cérébrale ou supérieure. Enfin, dans un troisième ordre de faits, on trouve des plaques de sclé- rose à la fois dans toute l'étendue de l'encéphale et de la moelle. C'est la forme cere6ro-5pma/e, ayant débuté généralement par l'une ou l'autre des formes précédentes. Chez la femme V..., M. Charcot diagnostiqua la forme cérébrale, ou plutôt supérieure, car il annonça l'existence de plaques scléreuses dans l'encéphale et dans la portion cervicale de la moelle. L'autopsie confirma entièrement ce diagnostic. Voici le résumé de l'histoire de cette malade : Adélaïde V..., célibataire, sans profession, âgée de 30 ans, entre à l'infirmerie de la Salpêtrière, salle Saint-Luc, le 16 octobre 1867, Le début de son affection remonte à 1859. Il a été marqué par des étourdis- sements et de grands maux de tête. Dans le courant de Tannée d'autres symptômes surviennent : l'incertitude dans la marche, qui ressemblait à celle d'un individu ivre; la difficulté dans l'articulation des paroles; la boule hystérique et, au mois d'octobre, le tremblement dans la tête et le bras gauche. D'après le dire de la malade, l'état que nous voyons aujourd'hui se serait dessiné déjà tel à la fin de 1859. La malade va dans différents hôpitaux, subit les traitements les plus variés sans améliora- tion même passagère. Les diagnostics portés furent : hystérie convul- sive (M. Briquet), chorée rhythmique (Aran). La malade attribue sa maladie au chagrin éprouvé par suite des mauvais traitements d'une belle-mère. Elle entre à la Salpêtrière en 1S62. Élat actuel {i" novembre 1867). — La malade, couchée tranquille- ment dans son lit, ne présente à première vue rien qui la distingue d'une personne bien portante. Mais aussitôt qu'on lui adresse une question (1) Thèse de Paris, 1868. Ordenstein, Sur la paralysie agilanle et la sclérose en plaques généralisée. Ûbs. IV, page 78. 49 des troubles morbides commencent à se manlt'^•^ter, D'abord un nyslas;- mus très-prononcé, puis un tremblement rhythmique de la tète. Elle prononce d'une manière ppéciale, saccadée, faisant une pause après chaque svllabe. Le tremblement augmente quand la malade s'anime. Il est surtout prononcé dans le bras gauche, à tel point qu'elle ne peut boire de ce bras, parce que le tremblement devient si violent qu'elle renverse tout le liquide. La station est facile et ferme, mais les mouve- ments qu'elle fait pour se lever provoquent une agitation considérable, augmentant par la marche. Il y a alors exagération du tremblement, surtout à gauche et dans la tête, et il se manifeste une tendance mar- quée à tomber en arrière. La malade serre la main avec une force con- sidérable, seulement un peu plus faiblement du côté gauche; de même que la main de ce côté fait sentir, en pressant, qu'elle est agitée par des mouvements rhythmiques, La force des membres inférieurs est aussi parfaitement conservée. Les yeux fermés, elle n'a pas de perte de con- science musculaire. La sensibilité est intacte. La malade n'accuse de douleurs d'aucune sorte. L'intelligence est très-nette. Du côté des or- ganes digestifs une constipation assez opiniâtre. Enfin, depuis près de trois semaines, différents signes nous font soupçonner des tubercules pulmonaires. Les bruits du cœur sont normaux, • Depuis l'époque (1" novembre 1867) à laquelle cette note fut prise, Adéla'ide V... n'a pas présenté de changements importants dans les symptômes qui se rattachent à la sclérose en plaques. Mais la tubercu- lose pulmonaire a fait des progrès assez rapides. Une phlegmatia alba dolens se déclare dans le membre inférieur droit en décembre 1868, et la malade meurt en janvier 1869. A l'autopsie on trouve des plaques de sclérose ayant envahi le sep- tum lucidum, une portion du corps calleux et une grande partie de la substance blanche du centre ovale de Vieussens. En ce dernier point il existe dans chaque hémisphère une large plaque qui arrive jusqu'à la surface venlriculaire, où elle apparaît sous forme de taches grisâtres irrégulières. Ces plaques de sclérose s'avancent parfois jusqu'au voisi- nage de la substance grise que l'altération semble avoir respectée. Tout le long de l'aqueduc de Sylvius il existe une sorte de manchon de tissu sclérosé s'étendant à toute l'épaisseur de la protubérance, sur la coupe de laquelle la sclérose forme une figure irrégulière se prolon- geant en un point jusqu'à sa face inférieure. Là il existait une petite tache grisâtre que l'on avait reconnue en examinant le cerveau par sa base. Cette traînée de sclérose descendait dans le bulbe, dont toute la partie ventriculaire était envahie. L'une des olives était embrassée en grande partie par du tissu sclérosé. Dans la portion cervicale de la moelle on apercevait deux plaques superficielles, situées l'une à droite, c. R. 1869. 4 50 l'autre à gauche, en dehors des racines postérieures. La plus étendue de ces plaques se trouvait à gauche. Sur les coupes transversales on trouvait des taches qui leur correspondaient. Au-dessous du renflement brachial la moelle était complètement saine. Aucune altération n'a été découverte dans les nerfs crâniens et rachidiens. Les poumons étaient entièrement envahis par des tubercules, et il existait au sommet de grandes cavernes. Les autres viscères ne présentaient rien d'important à signaler. Les veines du membre intérieur droit étaient entièrement obstruées, le caillot s'arrêtait dans la veine iliaque. M. Charcot, à l'occasion de la présentation de M. Joffroy, dit que ce fait est bien de nature à prouver que le diagnostic exact de la sclérose en plaques est possible, que celte affection est donc entrée dans le do- maine de la clinique. Note sur quelques expériences concernant la régénération de cartilages COSTAUX réséqués; présentalio7i des pièces analomiques ; par His- MANN Peyraud, aucicn interne des hôpitaux, préparateur du cours de physiologie à l'École de médecine de Bordeaux, etc. Voulant étudier, il y a quelque temps, l'action du périchondre dans la régénération du tissu cartilagineux, je pratiquai sur des animaux (lapins et chiens) des résections sous-périchondriques de cartilages cos- taux, comme M. OUier (de Lyon) avait déjà pratiqué des résections sous-périostées. J'ai cru devoir vous présenter quelques-uns de ces faits, sans les faire suivre d'aucune conclusion. Mes études sur ce sujet sont loin d'être terminées; je continue mes expériences et me propose d'en faire connaître les résultats dans ma thèse inaugurale. RÉSECTION SOUS-PÉRICHONDRIQUE DE 4 CENTIMÈTRES d'uN CARTILAGE COSTAL, — Reproduction du cartilage après deux mois et demi. — Espace linéaire DE 2 millimètres SÉPARANT l'aNCIEN CARTILAGE DU NOUVEAU. Exp. L — Sur un jeune chien de 6 mois, le 5 octobre dernier, je ré- séquai 4 centimètres d'un cartilage costal du côté droit, en conservant le périchondre. Après l'expérience on apercevait au fond de la plaie un manchon fibreux aussi complet que possible. La plèvre avait été per- forée pendant l'opération. Je rapprochai p'ar une suture exacte les bords de la plaie. L'animal guérit en peu de jours, malgré l'accident que je viens de signaler et une suppuration très-longue due à l'introduction simultanée de corps étrangers sous le périoste de sa jambe droite. Cet animal sacrifié le 29 décembre dernier, j'examinais dans les pre- 51 miers jours de janvier les résultais de mon expérience ; voici ce que l'on pouvait constater (depuis, la macération dans l'alcool et les coupes qu'a néoessité l'examen microscopique rendent les points que je vais Bignaler un peu moins apparents) : Au niveau de la portion réséquée, s'était formé un tissu résistant, comme fibro-cartilagineux présentant dans plusieurs points des noyaux durs et élastiques. Ce tissu de nouvelle formation remplissait exacte- ment la solution de continuité et affectait une disposition légèrement sinueuse vers sa partie moyenne : on pouvait s'assurer de tous ces faits en examinant la pièce, surtout par sa face postérieure ou pleurétique; car à la face antérieure un tissu cicatriciel, qu'il était difficile d'enle- ver à cause de son adhérence, masquait le tissu reproduit. Ce dernier, quoique résistant, ne l'était pas assez pour maintenir la côte dans sa direction normale, et celle-ci retombait légèrement. Présentement on peut voir deux coupes : l'une transversale intéresse la pièce au niveau de sa partie moyenne; elle a servi à examiner, à Télat frais, la nature intime de la portion régénérée. M. Cornil, à qui je dois l'étude histologique de toutes ces pièces, y a trouvé du tissu car- tilagineux à l'état fœtal, caractérisé par une multitude de cellules allon- gées. Une autre coupe longitudinale a été pratiquée de la face posté- rieure du cartilage vers sa face antérieure. Elle sert à constater des faits importants et sur lesquels j'appelle l'attention : au niveau de la réunion du tissu nouveau avec l'extrémité externe du cartilage ancien, se trouve un espace linéaire oblique de dedans en dehors et de haut en bas, ayant environ 2 millimètres d'étendue. Il sépare complètement le cartilage ancien du nouveau; tandis que le périchondre qui recouvre l'ancien cartilage se continue, d'une façon manifeste, avec le tissu de nouvelle formation et se confond avec lui : on croirait avoir sous les yeux une sorte d'articulation dont les ligaments seraient représentés par le manchon périchondrique, et l'espace interarticulaire par le vide déjà signalé. Au bout interne de l'ancien cartilage, la séparation n'est pas aussi évidente, le cartilage ancien se termine en un cône. Le som- met en est libre, mais au pourtour de la base semble s'implanter du tissu de nouvelle formation. Le périchondre dans ce point, comme à l'extrémité externe, fait suite au nouveau tissu et se confond avec lui. L'étude anatomique et histologique de cette pièce a été faite avec soin dans plusieurs points de la surface des coupes. Les noyaux durs et élastiques, que j'ai signalés plus haut, étaient plus rapprochés de la circonférence que du centre de la pièce. Ils ont, du reste, une apparence hyaline plus prononcée que le reste du tissu, et se composent histolo- giquement de chondroplastes très-abondants et d'un peu de tissu fi- breux, tandis que le reste du tissu nouveau semble avoir une organi* 52 salion moins parfaite et se compose d'une plus grande quantité de tissu fibreux ou pullulent néanmoins des cellules cartilagineuses. RÉSECTION SOCS-PÉRICnO>DRIQCE DE 2 CENTIMÈTRES ET DEMI »'uN CARTILAGE COSTAL. — Reproduction du cartilage réséqué après deux mois et demi. — Séparation moins complète entre le ti~su nouveau et l'ancien que DANS le cas précédent. Exp. II. — Je ne cite cette expérience qu'à l'appui de la précédente : elle lui ressemble presque entièrementau point de vue de sa date, de ses résultats et du sujet sur lequel je l'ai pratiquée. Ici, le périchondre con- servé avait été dilacéré dans une certaine étendue, et je dois dire que c'est dans la crainte de n'avoir pas réussi que je fis, sur le même ani- mal et le même jour, l'expérience déjà décrite. Dans le fait que je cite maintenant, et dont voici la pièce analomique, je n'ai réséqué que 2 centimètres et demi de cartilage. J'ai obtenu à la place, malgré le délabrement du périchondre, un tissu de nouvelle formation, ayant la même apparence que le tissu régénéré de l'expérience précédente : peut-être est-il un peu moins résistant; il présente aussi des noyaux durs et élastiques (1). Une coupe longitudinale permet de l'examiner au niveau de sa réu- nion avec l'ancien : ici, les deux bouts du cartilage ancien affectent une forme conique, comme à l'extrémité interne de la pièce déjà dé- crite. Le sommet des cônes est libre, mais au pourtour de leur base s'implante, de chaque côté, le tissu nouveau. Celle substance de nouvelle formation est constituée histologique- ment par des chondroplastes en quantité considérable mélangés à du tissu fibreux. Ce tissu est plus rare dans les points mieux organisés et durs qu'on rencontre surtout à la circonférence de ce nouveau fibro- cartilage. Dans ces points, en effet, on ne trouve presque que des cel- lules cartilagineuses. Ici, comme précédemment, le périchondre se con- tinue manifestement avec la partie régénérée et se confond avec elle. M. CoRNiL, qui a pratiqué l'examen histologique de portions régé- nérées, dit que l'on y trouve un tissu cartilagineux embryonnaire. M. VuLPiAN observe que l'on voit la même chose quand on enlève, non pas un cartilage, mais une portion de côte. Il s'agit peut-être sim- plement de la production de chondroplaste dans un tissu isolé. M. Ranvier s'étonne des résultats négatifs de M. Peyraud quand le pé- richondre a été enlevé. Il a fait des greffes de cartilage sous la peau (1) L'étude de cette pièce, qui n'était pas complète lors de sa pré- sentation, a été complétée depuis. 53 d'un lapin adulte; or, ce qu'il a observé, c'est une prolifération du cartilage greffé. Il est donc extraordinaire que les bouts du cartilage costal n'aient pas proliféré. Infection purulente a marche lente, ayant son point de départ DANS UNE OSTÉITE VERTÉBRALE; par M. QuiNQUAUD. Maùry, âgé de 34 ans, est entré à la salle Saint-Augustin, n">9, ser- vice de M. le docteur Lorain. Empâtement; tension; pression douloureuse à la région lombaire, de chaque côté de la colonne vertébrale; fièvre; oscillations irrégulières de la température, dont les maxima ont été de 39°, 5 et les minima de 37°, 6; variations n'ayant aucun rapport avec le pouls qui est très- fréquent : moyenne, 120 pulsations. Jamais de frissons. Meurt avec une température de 37°, 1. Abcès multiples de différents viscères ; abcès occupant la presque totalité du poumon gauche; abcès du cœu?'; abcès multiples des deux reins. Abcès de la rate. Rien dans les articulations. Deux abcès par congestion s'étendant de chaque côté de la colonne vertébrale, à partir de la douzième vertèbre dorsale jusqu'aux muscles iliaques (partie supérieure des fosses iliaques). — M. JoFFROY met sous les yeux de la Société un poumon présentant dans son lobe inférieur une variété de pneumonie chronique à laquelle M. Charcot propose de donner le nom de trabéculaire pour la distin- guer de la pneumonie lobaire chronique. Antoinette F..., âgée de 60 ans, célibataire, entre à l'infirmerie de la Salpêlrière, salle Saint-Jacques, n" 14, dans le service de M. Charcot, le 9 janvier 1869. Elle a eu un léger frisson, n'a pas vomi, n'accuse pas de point de côté, a la langue humide et saburrale. La soif est très-vive. La percus- sion est normale; l'auscultation démontre l'existence de râles crépi- tants dans la fosse sous-épineuse. Le pouls est à 88. La température du rectum est 39 2/5. L'état général semble bon. Le 10 au matin, on trouve les mêmes signes que la veille, mais en outre de la matité aux points indiqués plus haut. Température rectale, 39 4/5. Le soir, pouls, 100; température rectale, 40. Même état. Le 11 matin, la malade a rendu sans efforts des crachats sommeux. 54 et l'on trouve, tant à la percussion qu'à l'auscultation, les signes de l'induration pulmonaire dans toute la moitié supérieure du poumon et tout le long de son bord externe. Pouls, 92. Température rectale, 39 2/5. Le soir, pouls, lôO; température rectale, 40 3/5. La malade a un peu de surexcitation. Le 12 matin, les crachats sont rouilles. Pouls, 100. Température rectale, 40 3/5. Le soir, pouls, 100; température rectale, 39 4/5. Toujours un peu d'agitation. Le 13 matin, pouls, 104; température rectale, 40. La malade est toujours assise sur son lit ; cependant, pour la première fois, son visage marque la fatigue et l'abattement. Les crachats sont rouilles, un peu sanguinolents. La respiration est presque silencieuse. La matité a gagné le lobe inférieur. Le soir, pouls, 110; température rectale, 39 4/5. L'affaissement est plus marqué. Le 14 matin, pouls, 100, très-irrégulier; température rectale, 39 2/5. L'affaissement a encore augmenté. Le soir, la malade est agonisante au moment de la visite, Elle a 44 inspirations à la minute avec de gros râles trachéaux. Le pouls est insensible. Température rectale, 39 4/5. La mort arrive vingt minutes après. Autopsie. Poumon droit. — Dans toute l'étendue de son lobe supé-- rieur, ce poumon présente l'altération décrite sous le nom d'hépatisa^ tion rouge, avec la coloration spéciale à cette période de l'inflammation aiguë du poumon. Dans le lobe moyen on note encore la même altération; mais tandis que dans le lobe supérieur elle s'est développée dans un parenchyme pulmonaire dont la structure n'était pas antérieurement modifiée, ici elle a envahi une portion de poumon qui avait subi les modifications connues sous le nom de pneumonie lobaire chronique. Ici, comme dans le lobe supérieur, le microscope montre les globules purulents rem- plissant les alvéoles pulmonaires; mais en plus il montre l'épaississe- ment des alvéoles, avec production de noyaux assez nombreux de tissu conjonctif dans l'épaisseur des parois de ces alvéoles, ainsi que dans le tissu interalvéolaire. La coloration du lobe inférieur est rosée, avec une teinte pâle; en certains points même, elle est comme décolorée, présentant une légère teinte jaune grisâtre. Cependant dans la portion de ce lobe qui avoi- sine le lobe moyen, on passe d'une manière graduée de la teinte gris foncé du lobe moyen à la teinte pâle rosée du lobe inférieur. Le tissu 55 est œdémateux; il est sillonné dans tous les sens par des traînées épaisses et nombreuses d'un tissu conjonctif blanchâtre, formant dans le parenchyme de grandes aréoles. Rien de sembable n'existe ni dans les autres portions de ce poumon ni dans celui du côté opposé. En certains points, il est bien visible que la prolifération conjonctive avoi- sine les bronches; mais cette disposition ne semble cependant pas gé- nérale, Dans l'intérieur des aréoles que limitent ces trabécules se trouve un tissu finement réticulé, dense, gagnant le fond de leau, et duquel s'é- coule par la pression un liquide très-abondant. L'examen microscopique de ce tissu nous a montré l'intérieur des alvéoles pulmonaires rempli de globules de pus au milieu d'une matière fibrineuse; mais les alvéoles étaient beaucoup moins distendues que dans le lobe supérieur. Quant aux parois alvéolaires et au tissu inter- alvéolaire , il ne nous a présenté les traces d'aucun travail de prolifé- ration. Le passage graduel qui existait, tant pour la coloration que pour les autres caractères, entre le lobe moyen et le lobe inférieur, nous sem- blerait établir ici une liaison entre les altérations qui ont envahi ces portions du poumon. Cela seul suffit à prouver qu'il s'agit bien, dans le lobe inférieur comme dans le lobe moyen, d'un même processus in- flammatoire. Il s'agirait donc ici, dans le lobe inférieur (indépendamment de la pneumonie aiguë qui a envahi tout le poumon), d'une sorte de pneu- monie chronique que l'on pourrait appeler trabéculaire. Cette forme de pneumonie nous a paru devoir être signalée. Il n'en est pas fait mention dans les ouvrages les plus complets que nous pos- sédions sur ce sujet, notamment dans la thèse d'agrégation de M. Char- cot. Séance du 30 janvier. CHIMIE PHYSIOLOGIQUE. DESVARIATieNS DE l'uRÉE SOUS l'iNFLUENCE DU BROMURE DE POTASSIUM; CONTRI- TRIBUTION A l'ÉTUDE DE l'ÉLIMINATION DE CE MÉDICAMENT ; DE l'eMPLOI BES BROMURES DANS l'iNTOXICATION SATURNINE ; APERÇU HISTORIQUE DES DIVERSES MÉDICATIONS PROPOSÉES CONTRE LES ACCIDENTS SATURNINS; parle dOCteur Rabuteau. Au mois de juillet dernier, j'ai annoncé à la Société de biologie que les iodures diminuaient l'urée , et plus tard , j'ai tiré de ce fait des dé- ductions thérapeutiques et indiqué la relation que cette propriété éta-. blissait physiologiquement entre l'iode et l'arsenic. 56 La première question qui se présentait naturellement après ces re- cherches était celle de savoir si les bromures diminuaient également l'urée. Le bromure de potassium étant un médicament inoffensif, même à des doses assez élevées, j'ai essayé, dans ce but, ce médicament sur moi-même. L'expérience que j'ai faite a été suffisamment prolongée pour qu'il me soit permis d'avancer dès aujourd'hui que le bromure de potassium ne produit qu'une faible variation en moins dans l'élimina- tion de ce principe. J'ai suivi pendant plusieurs jours un régime aussi identique que possible, et j'ai mesuré la quantité d'urée éliminée chaque jour pendant une semaine. Puis j'ai pris, pendant dix jours, 1 gramme de bromure de potassium pur chaque jour. J'ai continué le dosage de l'urée pen- dant cinq semaines après l'absorption de la dernière dose du médica- ment, c'est-à-dire jusqu'au moment où je ne pouvais plus trouver de bromure ni dans mon urine ni dans ma salive. Je parle ici du bromure administré, non du brome normal qu'on trouve toujours dans l'urine, lorsqu'on en évapore 300 à 400 grammes. (Voy. Gazette hebdomadaire du 11 septembre 1868.) C'est à huit heures du matin que je prenais à jeun le bromure dissous dans 40 à 50 grammes d'eau. Les urines étaient recueillies chaque jour de huit heures du matin au lendemain à la même heure. J'ai marqué d'un astérisque les jours où j'ai pris le médicament. Enfin, j'ai dosé les sulfates, ce que je n'avais pas fait dans mes recher- ches sur les iodures. J'ai opéré ce dosage, parce qu'on a dit que les sul- fates éprouvaient dans leur élimination des variations correspondantes à celles de l'urée (1). Les chiffres de dosage des sulfates seront fournis plus tard. (1) J'ai observé que les urines de mes chiens renfermaient moins de sulfates quand elles contenaient moins d'urée; mais la cause en était simple : je leur donnais moins à manger ces jours-là. Je n'ai vu dans ces faits que l'influence de l'alimentation, de sorte que je ne considère nul- lement comme démontrée une relation directe entre la diminution de l'urée et celle des sulfates. Il est infiniment probable que si l'on suivait un régime herbacé, on trouverait très-peu d'urée, et néanmoins une grande quantité de sulfates, surtout si les crucifères faisaient partie des aliments. Je reviendrai sur ce sujet plus tard. Sulfate .T • . . I de baryum Urée totale ^ ■ : ours. Urine des 24 heures. Uréfi pour t.OCO. éliminée dans les 24 heures. provenant de la précipitation Res iulfates naturels U d écombre. 825 24,72 21,88 12 1000 20,00 20,00 13 960 24,40 23.42 14 1070 19,50 20,86 15 — 830 23,06 19,14 16 — 855 24,40 20,87 M7 — 985 22,94 22,59 M8 — 860 22,05 18,96 M9 — 890 22.04 19,61 »20 — 1160 17,64 20,46 *2l — 2265 8,53 19,32 •22 — 774 25,00 19,35 »23 — 992 22,05 21,87 •24 — 970 24,90 24,15 •25 — 805 22,06 17,75 •26 — 1600 11,76 19,42 27 — 1170 16,18 18,92 28 — 962 18,53 17,83 29 — 980 22,92 22,46 30 — 834 26,47 22,08 p 31 — 940 25,88 24,33 • 1" janvier. 686 27,00 18,52 M 2 — 1132 15,60 19,65 D 3 — 967 18,83 18,21 B 4 — 772 24,40 18,84 B 5 — 650 28,40 18,46 > 6 — 735 27,94 20,54 B 7 — 772 27,00 20,84 B 8 — 858 23,00 19,73 » 9 — 91 a 22,94 21,00 » 10 — 945 26,47 25,00 » 11 - 815 28,20 22,98 B 12 — 845 27,65 23,36 » 13 — 870 25,30 22.00 B 14 — 782 25.00 19,55 » 15 — 898 23,57 21,17 » 16 — 685 22,60 20,00 » 17 a 18 — 912 23,22 22,00 19 — 914 23,52 21,50 20 — 1015 22,06 22,40 21 — 987 22,65 22,35 22 — 812 25,60 20,79 23 — 955 24,12 23,03 24 — 870 27,35 23,79 >S^OS A^o^< '^76 -^•^ LlBR^ i99",8l 19",98 143«',08 20«',44 144»',4I 20«',63 58 A l'inspection des chiffres de l'avant-dernière colonne, on s'aperçoit que l'urée n'a presque pas diminué sous l'influence du bromure de po- tassium. On remarque, il est vrai, le 24 décembre, une augmentation de ce principe; mais cette augmentation s'explique par un léger mou- vement fébrile que j'ai éprouvé, sans pouvoir l'attribuer à aucune cause. Afin de mieux mettre en évidence les résultats obtenus, j'ai calculé le poids de l'urée éliminée et les moyennes journalières correspondant à six périodes de l'expérience. Urée éliminée. Moyennes Journalières. Pendant la semaine qui a précédé l'ingestion du bromure (du 10 au 17 décembre inclusivement) 148'', 76 21", 25 Pendant les dix jours suivants sous l'influence du bromure Pendant la !'• semaine suivante. — 2' — - .. — 3* — — . . » » — 4* — - .. 155s',86 22«',27 Dans le courant de la dernière semaine, je ne trouvais plus que des traces de bromure ingéré, et c'est à cette époque, comme on le voit, que le chiffre de l'urée s'est élevé à la valeur qu'il présentait avant l'absorption du médicament, valeur qu'il a même dépassée. On a répété ce que l'on avait dit des iodures, savoir que les bromures activaient la sécrétion urinaire. L'expérience prouve que le bromure de potassium n'est pas diurétique, du moins à la dose de 2 grammes par jour; et je citerai plus bas une observation où j'ai noté parfaitement qu'à des doses plus élevées ce médicament n'agissait pas davantage sur l'activité rénale. On trouve, il est vrai, parmi les chiffres que j'ai cités des nombres très-élevés représentant le poids de l'urine rendue du 20 au 21, du 25 au 26 décembre et du 16 au 17 janvier. Ces jours-là j'a- vais bu de la bière dans le but de voir si, comme on le croit parfois à lort, l'urée serait éliminée en plus grande proportion lorsque l'urine est rendue en plus grande quantité. On voit qu'il n'en a rien été. Je sais bien qu'une objection se présente ici : la bière renferme de l'alcool, mé- dicament d'épargne; mais je ferai remarquer qu'elle en contient très- peu , et que si l'alcool diminue d'une manière sensible la production de l'acide carbonique, il ne diminue presque pas la production de l'u- rée. Quant aux efforts physiologiques que j'ai observés sur moi, ils ont été ceux que l'on cite journellement : anesthésie du pharynx, effets 59 hypnotiques; mais ce n'est que pendant les derniers jours de l'inges- tion du bromure que j'ai observé plus de tendance au sommeil. Pas de salivation, pas de dérangement des fonctions digestives (l), appétit parfaitement conservé, même augmenté parfois. Je profiterai de cette occasion pour annoncer que les propriétés ana- phrodisiaques du bromure de potassium se révèlent chez le chien comme chez l'homme. Une fois, j'avais deux chiens et une chienne en chaleur. L'un de mes chiens, bien qu'il eût pris de l'arsénite de potas- sium, ne la laissait pas en repos; l'autre, au contraire, qui était égale- ment vigoureux, mais avait pris en deux jours 10 grammes de bromure de potasssium, restait complètement indifférent. Chez l'homme il ne faut pas craindre de donner des doses assez fortes de ce médicament pour que l'efTet soit marqué. Enfin je dirai que le bromure de sodium agit comme le bromure de potassium, et parfois mieux que ce dernier. Contribution a l'élimination des bromures, — J'ai fait connaître anté- rieurement les résultats de mes recherches sur l'élimination des bro- mures de potassium et de sodium. On a vu que ces médicaments appa- raissent dans l'urine et dans la salive de la cinquième à la dixième minute, el qu'on peut les retrouver dans ces liquides pendant trois se- maines, lorsqu'ils ont été pris à la dose de 1 gramme. Mes recherches m'ont en outre conduit à démontrer l'existence du brome normal dans l'organisme. Dès lors une difficulté se présentait. Comment distinguer les bromures administrés du bromure éliminé normalement? J'ai établi que toutes les fois qu'on évapore 300 à 400 grammes d'urine avec un peu de soude pure, on peut retrouver dans le résidu une petite quantité de brome, mais que si l'on évapore seulement 150 grammes de ce liquide, on ne réussit pas en général à en déceler la présence. Donc, toutes les fois qu'on trouvera du brome après avoir évaporé 100 gr. d'urine, on pourra affirmer que ce métallo'ide provient de la médication. J'ai donc analysé mes urines et ma salive, tous les cinq jours après l'ingestion de la dernière dose de bromure, en ayant soin d'évaporer chaque fois 100 grammes de ces deux liquides. Le 15 janvier, l'urine renfermait encore assez de bromure pour colo- rer le sulfuro de carbone en rouge intense, mais la salive en contenait des quantités moindres. Le 20 janvier, mômes résultats, mais moins, sensibles. Enfin, le 25 je ne puis déceler que des traces de brome pres- que inappréciables dans 100 grammes des deux liquides précédents. Ainsi, le bromure de potassium, après avoir été pris à la dose d& (1) A haute dose, le bromure de potassium, comme tous les sels d,e; pe métal, produit de la diarrhée. 60 2 grammes pendant dix jours, a paru pendant un mois dans les urines el dans la salive. Je rappellerai que précédemment j'avais pu retrouver ce médicament pendant près de trois semaines dans ces liquides, après en avoir pris seulement 1 gramme. Les bromures ne s'éliminent pas seulement par les urines et par la salive, mais encore par le mucus nasal et bronchique ; enfin, il est in- finiment probable qu'ils s'éliminent également par la sueur. Je me suis assuré qu'on en retrouve habituellement des traces dans les fèces, lorsqu'on en a absorbé même une faible quantité; mais s'il survient de la diarrhée, on en retrouve alors des quantités notables. De l'emploi des bromures dxns l'intoxication saturnine. — Au sujet d'une publication sur les bromates et sur l'élimination 'des bromures, j'ai annoncé dans une note (voy. Gaz. hebd. du 24 avril 1868) que je proposerais bientôt les bromures dans l'intoxication saturnine. Je venais de guérir instantanément un chien, d'accidents saturnins aigus, avec quelques grammes de bromure de potassium. Des recherches, que je poursuivais alors sur l'élimination et les métamorphoses de diverses substances introduites dans l'organisme, ne m'ont permis de parler de cette nouvelle médication que dans la Gazette hebd. du 11 sep- tembre, alors que je venais de terminer mes recherches sur le brome normal. J'ai raconté brièvement comment j'avais guéri mon chien, puis j'ai parlé d'un premier emploi du bromure de sodium pur, que j'avaispréparé moi-même, à l'hôpital des Cliniques, chez un malade atteint d'amaurose saturnine. Après avoir pris seulement 10 grammes de ce médicament, le malade percevait des phosphènes qui avaient disparu depuis long- temps. Enfin j'ai appelé l'attention de mes confrères sur les bromures alcalins que je regardais comme calmants et éliminateurs, en un mot comme les meilleurs médicaments de l'intoxication saturnine aiguë ou chronique et particulièrement dans les accidents cérébraux, tels que l'aniaurose et l'épilepsie saturnine. Cet appel a été entendu. M. Bucquoy, dans la dernière quinzaine de septembre, guérissait d'une manière sûre et rapide, à l'aide du bromure de potassium, un saturnin chez qui les traitements ordinaires avaient échoué. De retour à Paris, dans les premiers jours d'octobre, j'ai vu M. Bucquoy traiter à l'Hôtel-Dieu une colique saturnine par le bro- mure de potassium et j'ai pu suivre comparativement la guérison d'un autre malade atteint également de coliques et qui fut soumis au trai- tement de la Charité, Enfin, au mois de décembre, M. Sée, à l'hôpital de la Charité, me permit de traiter par le bromure un malade qui ve- nait d'entrer atteint d'arthralgie et de paralysie saturnines. Je rapporterai ultérieurement ce? trois observations. ftl — M. Bert, à loccasion d'une communication faite à l'Académie des sciences dans une de ses séances, par M. Bouley, sur le traitement du charbon par l'acide phénique, croit devoir communiquer le résultat de quelques expériences inédites qu'il a faites autrefois sur ce sujet. M. Bert a inoculé le sang de rate à un cochon d'Inde. Le jour de sa mort, qui est survenue en quarante-huit heures, il a inoculé à douze lapins le sang du premier animal. Six de ces lapins avaient absorbé, quelques heures avant l'inoculation, 30 à 40 centigrammes d'acide phé- nique et présentaient en conséquence, au moment de l'inoculation, des phénomènes de trémulation très-caractérisés. Trois autres furent sou- mis à cette médication aussitôt après l'inoculation. Le lendemain, la même dose d'acide phénique fut administrée aux neuf animaux. Enfin les trois lapins restant ne prirent pas d'acide phénique. Or les douze lapins moururent à peu près en même temps, ou plutôt les premiers qui succombèrent furent les animaux phéniqués. Au sujetdes phénomènes de trépidation que présentent lesanimaux em- poisonnésavec l'acide phénique, M. Bert dit qu'il a commencé avec M. Jo- lyet des recherches sur les phénomènes déterminés par l'acide phénique, et ils ont vu que les mouvements de trépidation que présentent les ani- maux dépendent de la moelle, car si l'on coupe le sciatique, le membre reste immobile. Sur la grenouille, si l'on fait la ligature de l'artère, le membre continue à être agité des mêmes convulsions que le membre sain du côté opposé. M. GiRALDÈs dit qu'il a essayé hier dans son service, chez une jeune fille de 14 ans atteinte d'infection purulente, l'usage à l'intérieur de l'acide phénique. Dans l'épidémie de scarlatine qui a ravagé Londres pendant ces dernières semaines les médecins anglais paraissent s'être bien trouvés de l'emploi de l'acide phénique à haute dose (environ 4 grammes dans les vingt-quatre heures). M. Bert trouve cette dose énorme, 3 grammes d'acide phénique en solution dans 60 grammes d'eau injectés dans l'estomac d'un chien de forte taille amènent très-rapidement la mort. M. Chalvet pense que c'est du phénol, et non de l'acide phénique cristallisé, qu'emploient les médecins anglais. M. GiRALDÈs maintient qu'il s'agit réellement d'acide phénique cris- tallisé. M. DuMONTPALLiER a BU l'occasion de constater l'action caustique d'une solution d'acide phénique. C'était sur une femme atteinte de couperose de la face, et qui était traitée par des applications d'une so- lution médiocrement concentrée; mais la malade avait négligé d'agiter la bouteille avant d'en faire usage, de telle sorte que les dernières por- 62 lions de la solution étaient très-concentrées. 11 en résulta une cautéri- sation des parties. — M. Chalvet dit que la communication à l'Académie des sciences dont il a été précédemment question présente une lacune : il n'y est pas dit que les bactéridies aient été constatées dans le sang des animaux vi- vants. Chez des malades atteints de fièvre typhoïde et de rage , M. Chalvet s'est assuré que le sang, pendant la vie, ne renfermait pas de bactéridies, tandis qu'après la mort, le sang, dans certaines par- ties du cadavre, en renfermait des quantités innombrables. M, VuLPiAN dit qu'il a eu déjà l'occasion, il y a quelques années, de constater, avec M. Signol , que , dans le sang des animaux atteints de charbon, les bactéridies sont beaucoup plus nombreuses quelque temps après la mort que dans les instants qui la précèdent. Il rappelle qu'en introduisant un fragment de cyclamine sous la peau d'une grenouille ou dans l'œsophage, on peut déterminer chez cet animal une infection du sang. Or on peut constater que la production de bactéridies se fait tout d'abord dans le point où a agi la cyclamine, et que de ce foyer d'infection les bactéridies pénètrent dans le sang. Le sang des animaux, ainsi intoxiqué peut , par inoculation , transmettre la même affection à d'autres grenouilles. (Vulpian, Ardu dephysioL, 1868.) M. Ra>vier rappelle qu'il a déjà signalé que certain liquide de l'or- ganisme humain, le liquide péricardique, par exemple, peut présenter après la mort, en été, un nombre assez considérable de bactéridies, alors que le sang n'en renfermait pas pendant la vie. COMPTE RENDU DES SÉANCES DE A r LA SOCIETE DE BIOLOGIE PENDANT LE MOIS DE FÉVRIER 1869. Par m. a. LÉPINE, secrétaire. PRÉSIDEÎ^CE DE M. CL. BERNARD. Séance du 6 février. M. Grehant s'est proposé de contrôler les recherches de Zalesky sur la production de l'urée dans le rein; et, tout d'abord, il a cherché un procédé de dosage de l'urée qui lui donnât des résultats rigoureux. Il s'est arrêté au procédé de Millon en y apportant la modification sui- vante; tandis que Millon ne dosait que l'acide carbonique, il dose à la fois ce gaz et l'azote. Ainsi modifié, le procédé de Millon lui paraît rigoureux, attendu que dans l'état actuel de la science, on ne connaît aucune substance organique autre que l'urée, qui, traitée par l'acide azoteux, donne des volumes égaux d'azote et d'acide carbonique. Les expériences de M. Grehant ont été faites sur des chiens à jeun et auesthésiés. Sur l'un de ces animaux, il a pratiqué la néphrotomie , sur l'autre la ligature des uretères près de la vessie. Immédiatement avant l'opération 30 grammes de sang élaienl extraits de l'artère fémo- rale; vingt-quatre heures après, on retirait du même vaisseau la même quantité de sang. Voici les résultats (le poids de l'urée est calculé d'après 100 gr. de sang): sang normal. 24 heures après. i" chien (néplirolomie) 0»',026 0,186 2* chien (ligature des uretères).. 0*^063 0,199 Ces résultats montrent que l'accumulation de l'urée dans le sang est sensiblement la même dans les deux cas. Ils sont donc en opposition avec les résultats de Zalesky qui, comme on sait, n'avait pas obtenu après le néphrotomie l'augmentation de lurée dans le sang. M. Claude Bernard fait remarquer qu'aussitôt après la néphrotomie l'urée peut ne pas s'accumuler dans le sang si l'animal résiste à l'opé- ration et parvient à éliminer l'urée par le tube digestif. Au bout d'un temps variable, suivant le degré de résistance de l'animal (de deux à quatre ou cinq jours), l'urée s'accumule dans le sang. M. GuBLERfait quelques réserves sur la rigueur du procédé de dosage de l'urée qu'emploie M. Grehant. Il résulte dune communication ver- bale que lui a faite M. Wurlz, que ce chimiste a constaté la présence dans le sang d'une substance qui présente un grand nombre de carac- tères de l'urée, mais qui en diffère par divers caractères, entre autres par ce fait qu'elle ne peut cristalliser. Cette substance existerait en quantité considérable dans le sang. "Vis-à-vis du réactif de Liebig, par exem[)le, cette substance se comporterait comme l'urée, de telle sorte que M. Gubler croit que le dosage du nitrate iCurée donnerait seul des résultats à l'abri de toute contestation. — M. Brown-Séquard rappelle que SchifT (Vierordt's Ancniv., 1854) a prétendu que la section du cordon latéral de la moelle entre l'origine de la deuxième et de la quatrième paire cervicales abolit les mouve- ments respiratoires du thorax et du diaphragme du côté correspondant, sans diminuer les mouvements volontaires. M. Brown Séquard n'a pas accepté l'opinion de SchifT. Il a vu nombre de fois, depuis plus de vingt ans, que les mouvements respiratoires continuent du côté correspondant à la section du cordon latéral au ni- veau de la deuxième vertèbre cervicale. Depuis 1859, il s'est assuré qu'au lieu d'être diminués, les mouvements des côtes ont plus d'ampli- tude, et que le diaphragme s'abaisse davantage après cette opération. De nombreuses observations cliniques, suivant M. Brown-Séquard , montrent que chez l'homme aussi le cordon latéral de la moelle épi- nière n'a pas la fonction que SchifT lui attribue. Ainsi , dans trois cas 65 de plaie de la moelle cervicale chez l'homme, il a compté que la res- piraiion était parfaite du côté de la section de la moelle, qui compre- nait cependant tout le cordon latéral, une partie du cordon antérieur, et qui avait même entamé la substance grise. M. Charcot a publié un fait très-intéressant de sclérose des cordons latéraux. Il n'y avait pas de troubles respiratoires. Enfin, M. Brown- Séquard pense que l'on peut encore invoquer les cas nombreux de dé- gén.'rescence secondaire du cordon latéral, consécutive à une lésion de rhiinisphère cérébral du côté opposé, dans lesquels on n'a pas constaté de troubles de la respiration. M. Bfown-Séquard est porté à admettre que l'erreur de Schifî pro- vient de ce qu'il aura lésé la substance grise et le cordon antérieur. Celte lésion diminue plus ou moins les mouvements respiratoires. Eu l'absence de lésion considérable des cordons antérieurs, on obtient le même résultat si la substance grise est lésée des deux côtés. M. Brown-Séquard pense donc que la substance grise et le cordon antérieur sont les voies qui servent à la transmission du principe des mouvements respiratoires. 11 met sous les yeux de la Société la moelle de quatre lapins, sur les- quels il avait opéré les sections suivantes : Premier lapin. Section entière du cordon latéral et très-incomplète du cordon antérieur. Deuxième lapin. Section parallèle des cordons antérieur et latéral. Troisième lapin. Section complète de ces deux cordons et d'une partie de la substance grise. Quatrième lapin. Section presque complète d'une moitié latérale de la moelle épinière. Chez les deux premiers, la respiration était aug- mentée; elle était diminuée chez les deux derniers. M. Brown-Séquard présente à la Société un cobaye sur lequel une attaque de l'affection qu'il a nommée épilepsie spinale (épilepsie du train postérieur après la section transversale complète de la moelle dorsale) peut être facilement provoquée. Cet animal a des mouve- ments volontaires et peut marcher. 11 montre aussi un autre cobaye at- teint d'épilepsie générale à la suite d'une hémi-section latérale de la moelle épinière. Il s'appuie sur ce qu'on peut voir chez cet animal , pour insister sur un fait dont il a récemment entretenu la Société, à sa- voir que, lors même qu'après une hémi-section latérale de la moelle épinière, les mouvements volontaires sont redevenus presque normaux dans le membre paralysé, ce membre, pendant un accès d'épilepsie générale, reste flasque. M. Brown-Séquard serait porté à admettre que les fibres de la moelle qui transmettent de l'encéphale aux mus- c. R. 1869. 5 66 clés la force nerveuse , donnant lieu aux convulsions , ne sont pas les mêmes que les fibres qui transmettent les ordres de la volonté aux muscles, et que les premières, sous le rapport de la difficulté de leur régénération, sont analogues aux fibres qui transmettent les impressions sensitives dans la moelle. On sait en effet que M. Brown- Séquard a publié des faits observés chez l'homme et chez des mam- mifères, montrant qu'après les lésions de la moelle épinière, la sensi- bilité revient beaucoup moins vite et à un degré beaucoup moindre que le mouvement volontaire, particularités à l'égard desquelles la moelle épinière diffère radicalement des nerfs. Recherches sur les métamorphoses et l'élijiination des azotites; par M. Rabuteau. Chez un chien, à la dose de 1 gramme, l'azotite de potassium se trans. forme complètement en azotate et s'élimine sous ce dernier état. Chez l'homme, à la dose de 1 gramme, le même processus se produit, mais si quelques heures après l'ingestion du sel on en prend de nouveau 1 gramme, on peut retrouver dans l'urine des traces d'azotite. Voici comment on peut reconnaître les azotites. Si l'on ajoute à leur solution un cristal d"iodure de potassium et de l'eau d'amidon, puis si l'on verse de l'eau acidulée par Tacide sulfurique, on voit aussitôt l'amidon se colorer en bleu violet d'autant plus intense que l'azotite est en grande quantité. On peut de celte manière reconnaître dans l'eau la présence d'un cent-millième d'azotite de potassium. D'après mes recherches, on ne peut guère reconnaître dans l'urine de l'homme que un vingt millième d'azotite de potassium ou de sodium. Lorsque l'urine ne renferme qu'un vingt-cinq millième de ces sels, on voit néanmoins apparaître un léger nuage violet au bout d'une demi- minute à une minute, à la partie supérieure du tube où l'on fait l'essai. — M. VuLPiA^- a introduit sous la peau de plusieurs grenouilles de l'extrait de douce-amere, et a constaté que le lendemain les grenouilles étaient mortes. L'irritabilité musculaire avait disparu très- vite. Ce ré- sultat est intéressant en ce qu'il montre une action que l'on n'aurait pas, à priori^ soupçonnée; mais il ne s'agit pas là d'une action toxique. En examinant les choses de plus près, M. "Vulpian a constaté qu'il s'était développé dans le sang des grenouilles de nombreux vibrions. La douce? amère est entrée en fermentation et a déterminé aussi la production de vibrions qui ont intoxiqué l'animal. Au contraire, l'extrait de datura qui est toxique, comme on sait, in- troduit sous la peau d'une grenouille, ne produit pas la mort de l'ani- 67 mal, parce que cette substance n'est pas susceptible de fermentation. Introduite sous la peau, l'extrait de douce amère agit donc sur la gre- nouille à la façon de la cyclamine (Arcdives de pnYsioLOGii:, 1868;. Dans l'œsophage, la douce-amère ne tue pas, probablement parce que l'intro- duction des vibrions dans le sang est moins facile par celte voie. M, Vulpian a constaté aussi que l'extrait de douce-amère appliquée autour de l'orbite dilate la pupille au bout de cinq à six heures. Séance du 13 février. Cicatrisation des parois de l'intestln grêle; par M. Legros. Une méthode spéciale de suture intestinale avait été pratiquée sur un chien par M. Péan; je n'ai pas à m'occuper ici du procédé qui donne de forts beaux résultats, je veux parler seulement de la cicatrice obte- nue par l'adossement des séreuses quinze jours après ropération. Sur la pièce congelée j'ai fait des coupes qui intéressaient à la fois la cicatrice et les parties voisines, et j'ai pu constater qu'entre les deux séreuses adossées s'était produit un véritable cône de tissu cicatriciel avec de nombreux vaisseaux. La muqueuse ne présentait plus de traces de division, elle formait une saillie assez considérable. Le tissu cellu- laire sous-inuqueux se continuait à travers la cicatrice, mais là on dis- tinguait la solution de continuité par l'aspect différent du tissu nouveau. Quant aux tuniques musculeuses longitudinale et circulaire, elles s'arrêtaient au niveau de la cicatrice; on les voyait diminuer d'épais- seur à mesure qu'on approchait des portions sectionnées et disparaître au sommet du cône cicatriciel. Cependant en cherchant dans la masse interposée aux surfaces d'adossement, j'ai trouvé quelques faisceaux de fibres lisses, mais elles ne partaient pas des portions musculaires coupées, elles venaient des points où commençait l'adossement, de sorte que ces faisceaux formaient la base d'un triangle dont les deux autres côtés étaient constitués par les anciens muscles. Ainsi au bout de quinze jours il y avait régénération de fibres lisses; le fait même d'une semblable régénération n'avait pas, je crois, été di- rectement constaté; en outre il est important de noLer la rapidité de cette reproduction. Pour les fibres striées il faut un temps bien plu:- long, en admettant qu'elles se régénèrent, ce qui pour moi est encor-,' douteux. 68 Séamce du 20 février. M. Laboulbène a examiné des gales développées sur des feuilles de chêne; il a constaté que pour que la gale détachée ou non ne se des- sèche pas, il est nécessaire que l'insecte qui Ihabite continue à vivre que si cet insecte est tué par un parasite, la gale se sèche. M. GuBLER pense que si la gale se dessèche, cela tient simplement à ce que la fermentation s'établit s'il y existe un trou, et que la vie de l'insecte importe peu quand le galon du chêne a reçu une blessure; il se dessèche, bien que l'insecte continue à y vivre. — M. Thaon, interne des hôpitaux, lit l'observation suivante : Transfusion du sang, faite à l'hôpital Saint-Antoine, par M. Lorain. Obs,— Le 4 février, entre à la salle Sainte-Cécile la nommée Gougeon (Angèle, âgée de 19 ans, passementière de profession, née à Ploërmel (Morbihan). Antécédents. — Pas de maladie antérieure, a encore ses parents qui sont bien portants. Réglée à 15 ans, se marie à 16. La menstruation a été toujours régulière et s'est montrée plutôt abondante. La malade ne paraît jamais avoir été hémaphyle. A un enfant à terme. L'accouche- ment avait eu lieu il y a un mois le jour de son entrée. Il a été prati- qué par une sage-femme. Des perles abondantes sont survenues immé- dialement après et n'ont pas cessé depuis. Sa faiblesse devenant extrême, elle est transportée à l'hôpital le 4 février, 5 février. A la visite du matin on constate au premier coup d'œil une anémie profonde; les pertes paraissent arrêtées. On prescrit des toni- ques, et la malade reste ainsi sans être observée jusqu'au 14 février; l'aspect de la malade éveille de nouveau l'attention ce jour-là. 14 février. Un liquide légèrement sanguinolent s'écoulait toujours du vagin. Au toucher vaginal, le col est fermé complètement et a repris sa rigidité. A la palpation abdominale, on réveille un peu de douleur à gauche; on constate que l'utérus ne déborde pas le pubis, et la crainte d'une rétention placentaire disparaît. La malade est dans le décubitus dorsal; elle ne fait aucun mouvement; la tête, mal retenue par les oreillers, retombe sur lépaule. De temps à autre elle est prise de pe- tites contractions involontaires dans les membres. Elle répond à peine aux questions qu'on lui adresse; celles-ci paraissent l'ennuyer et la fa- tiguer. Elle accuse des douleurs vagues et générales. La peau a une teinte de cire vieille; elle est très-sèche. 69 Les muqueuses sont livides; la langue est humide, mais un peu froide. Dans les premiers jours de son séjour à l'hôpital, la malade mangeait volontiers; mais depuis trois jours elle est prise de dégoût pour les ali- ments et vomit ceux qu'on parvient à lui faire prendre. La soif est con- servée ; elle est ardente et les boissons ne sont pas rejetées. Les selles sont fréquentes, diarrhéiques, et souvent les matières s'échappent in- volontairement. Mictions fréquentes, ur-ine chargée. Pas d'albumine, pas de sucre. L'urée n'est pas dosée. Le cœwr donne une impulsion très-énergique à la main dans toute son étendue. Les bruits sont voilés par un bruit de souffle qui se conti- nue jusqu'au grand silence. A la région sterno-mastoïdienne, soubre- saut isochrone à la pulsation du cœur, se faisant sentir encore au niveau des vaisseaux sous-claviers. Dans toute cette étendue, bruit de souffle intermittent, très-fort. Le Pouls est à 120, ample, mais très-dépressible. La température marque 38", 6. Les respirations sont au nombre de 40. M. Lorain pose la question de la transfusion, la renvoie au lendemain faute d'instruments sous la main, et prescrit 60 grammes de potion de Todd. 14 février, à cinq heures du soir. La malade est plus animée; elle est même agitée de mouvements désordonnés, repoussant par des cris ceux qui l'approchent, même son mari. Pouls 140. Respirations 40. Tempé- rature 39°, 6. Le sang, examiné au microscope, paraît contenir 60 héma- ties. 15 février, à neuf heures et demie. La malade est à l'agonie, la respi- ration est stertoreuse, les yeux sont fermés; le pouls à 160', la tempéra- ture à 40°, 8; malgré cet état désespéré, M. Lorain se décide à l'opéra- tion, assisté de MM. Desnos, Bucquoy, Besnier. Opération, — On se sert de l'instrument de M. Mathieu, que Ton fait légèrement chauffer dans de l'eau à 40°. M. Bielt, externe de Ihôpital, d'un tempérament robuste, s'offre pour fournir le sang. Il est couché sur un lit parallèle à celui de la malade; entre les deux se place l'opé- rateur. L'application du lac est faite comme dans la saignée; la dénu- dation de la médiane basilique effectuée, on pique la veine avec le fin trocart de l'appareil ; on retire la tige et l'issue de quelques gouttes d'un sang décoloré, ressemblant assez bien à des lochies, montre que l'on n'a pas fait de fausse route. On adapte le tube conducteur et on injecte j55 gr. de sang, recueillis dans la coupe placée sous le bras de la per- sonne qui fournit le sang. Le liquide passe d'une façon intermittente; •chaque coup de piston en introduit 5 grammes. L'opération avait duré 70 sept minutes. Dans les premiers instants de l'injection, le pouls était devenu tout d'un coup très-petit; au moment où 100 grammes venaient de passer, la malade fit une grande inspiration et entr'ouvrit les yeux. Après l'opération, à 9 heures 40 minutes, le pouls était à 140; la température à 40°, 5; les respirations à 30. 9 heures 47 minutes, pouls 144; respiration 30; tempéraluro 40", G 9 — 49 — — 140 — 30 — 40",8 9 — 5G — - 140 — 30 — 40%8 0 — 6 — — 144 — 38 — 40%4 0 — IG — - 144 — 38 — 40", 2 0 — 2G — - 150 — 40 .,_ 40",4 0 — 36 ' — - ICO — 44 — 40",G On ne peut plus compter le pouls, les pupilles se dilatent, T. 40°, 8, — Mort. Autopsie faite le lendemain de la mort, à onze heures du matin. Rien de particulier à l'extérieur. Légère ecchymose dans le tissu cellulaire entourant la veine. Celle-ci ne contient pas de caillots. En ouvrant les cavités viscérales, les muscles paraissent consistants, mais légèrement décolorés. Les vaisseaux de l'abdomen, ceux du mé- iiastin, laissent à peine sortir un demi-verre de sang. Poumons complètement exsangues, d'une coloration blanchâtre. Ils sont crépitants et no présentent pour toute lésion qu'une légère coH' gestion à la partie postéro-inférieure, tranchant par sa coloration rosée sur le reste de l'organe. Cœu7' petit, revenu sur lui-même, contenant à peine quelques cail- lots ayant la couleur et la consistance de la gelée de groseille au niveau des valvules. A la coupe le tissu du cœur a l'aspect chair d'anguille. Rate considérable. Poids, 260 grammes. Coloration normale. Foie sain, décoloré, pesant 1,900 grammes. Vésicule biliaire remplie de bile. Beins volumineux. Anémie de la surface. A la coupe parenchyme, ayant l'apparence graisseuse. Cerveau . Poids, 1,075 grammes. Coloration blanc mate. Utérus revenu sur lui-même. Muqueuse présentant quelques débris des vaisseaux utéro-placentaires. Rien pour expliquer les hémorrhagies pendant la vie. Conclusions. — 1* L'abaissement considérable du chiffre des glo- bules, la prostration extrême de la malade, le dégoût pour les ali- ments et la diarrhée survenus dans les derniers jours, l'absence des signes d'une diathèse quelconque, ont été regardés comme les princi- pales indications à l'opération. 71 2° A l'autopsie, tous les organes étaient sains ; l'opération était jus- tifiée. 3° Le retard a été funeste; la malade eût peut-être été sauvée un jour plus tôt. Pourquoi les instruments nécessaires ne figurent-ils pas dans les vitrines des hôpitaux , tout aussi bien que ceux destinés à d'autres opérations d'urgence, telles que la hernie étranglée, la tra- chéotomie? - . 4» Y a-t-il à tirer des contre-indications de cette notable élévation de la température 38°,6, 39°, 6, 40°,8? M. Brown-Séquard, à l'occasion de ce fait, désire insister sur quelques données physiologiques dont les médecins qui pratiquent des transfu- sions ne tiennent généralement pas suffisamment compte. En premier lieu, M. Brown-Séquard rappelle qu'il a démontré que le sang d'un animal de la môme espèce n'est pas nécessaire pour le succès de l'opération. Il a ranimé non-seulement temporairement, mais d'une manière définitive, des chiens exsangues, au moyen d'une injection de sang de batraciens, d'anguille, d'oiseau, etc. Sans doute il vaut mieux ne pas injecter à un animal des globules d'un diamètre supérieur à ce- lui de ses propres globules; mais il n'en est pas moins vrai qu'on peut réussir en employant le sang d'animaux d'espèces fort éloignées; à l'homme, il est inutile d'injecter du sang humain : du sang d'un mam- mifère tel que le mouton, par exemple, serait tout aussi convenable. En second lieu, il est indispensable d'injecter du sang défibriné. La conservation de la fibrine n'a aucun avantage et elle expose au danger sérieux de provoquer des embolies multiples dans les poumons de l'ani- mal injecté. Il ne faut donc pas. chez l'homme, pratiquer la transfusion de bras à bras, ainsi qu'on le fait en employant des appareils [)articu- liers, tel que celui de Mathieu, par exemple ; il est infiniment préférable de se servir d'une seringue ordinaire. En troisième lieu, il est inutile d'injecter du sang à la température normale; il n'y a aucun inconvénient à ce que sa température soit un peu inférieure. En quatrième lieu enfin, il est de règle d'injecter le plus loin possible du cœur (par exemple dans une veine du membre inférieur), et de pous- ser l'injection très- lentement, sinon on provoque des accidents car- diaques; on peut même faire l'opération en plusieurs temps. M. Bert dit n'avoir que peu de mots à ajouter à l'appui des préceptes qui viennent d'être formulés avec tant d'autorité par M. Brown-Sé- quard. Il repousse, comme lui, la transfusion de bras à bras par les rai- sons invoquées par M. Brown-Séquard, et parce qu'on injecte ainsi du sang veineux, tandis que le sang qui a subi le battage est chargé d'oxy-, gène. 72 5è Dans ses expériences, M. Bert a constaté que du sang dont la tempé- rature a été élevée à plus de 4° au-dessus de la température normale est devenu impropre à ranimer l'animal; s'il a été congelé, il amène plus rapidement la mort de l'animal : fait en harmonie avec ce que nous ont appris les travaux de Rollet et de M. Pouchet (de Rouen) sur la con- gélation du sang. Mais si ce liquide a été amené seulement à 0°, il peut être injecté sans inconvénient (après réchauffement), M. Bert indique un signe qui lui paraît précieux pour reconnaître si un chien que l'on soumet à une hémorrhagie doit fatalement succomber (en l'absence de transfusion). Ce signe est, l'animal étant couché sur le dos, la produc- tion de convulsions. Selon M. Bert, ce moyen est infaillible. Un chien couché sur le dos, qui, à la suite d'une perte de sang, est pris de con- vulsions des quatre membres, ne reviendra pas à la vie, à moins qu'on ne lui injecte du sang. En terminant, M. Bert demande à M. Brown-Sé- quard si la transfusion d'un herbivore à un Carnivore donne un résultat durable. M. Brovvn-Séquard répond qu'il a ranimé, en présence d'une commis- sion de l'Institut, un chien de forte taille avec du sang de pigeon, et que l'animal a vécu trois mois dans le laboratoire de M. Cl. Bernard. Les insuccès en pareil cas ne dépendent pas d'une différence d'espèce, mais bien d'autres causes que M. Brown-Séquard se propose d'exposer dans une prochaine communication. Relativement au signe indiqué par M. Bert, il rappelle que, selon Kussmaul et Tenner, la mort par hé- morrhagie est toujours précédée de convulsions. Selon ces auteurs, elles seraient dues uniquement à la moelle allongée, et l'anémie de la moelle serait absolument incapable de leur donner naissance. M. Brown-Sé- quard rappelle qu'il a démontré la fausseté de cette proposition. — M. LiouviLLE met sous les yeux de la Société le cœur d'un malade assez jeune, qui a succombé à un rhumatisme articulaire aigu, avec complications d'épanchements, dans le service de M. Marrolte (fé- vrier 1869). Les valvules mitrale (face venlriculo-aonique) et les sygmoïdes de l'aorte, sur leur face également ventriculaire, présen- tent une injection des plus notables, causée par une vascularisaiion très-évidente de ces valvules. On distingue très-bien, sur l'endocarde, de petits vaisseaux arborisés, les uns indépendants, d'autres formant un lascis avec des ramifications nombreuses. — M. JoFFROY présente à la Société les artères sylviennes d'une femme morte de pneumonie caséeuse, quatre mois après une attaque d'apo- plexie due à une oblitération par embolie de la sylvienne droite. Le caillot s'est organisé, est revenu sur lui-même, et la circulation s'est rétablie. Voici l'observation de la malade : 73 Douleurs rhumatismales; affection cardiaque; étourdissements; attaque d'apoplexie; hémiplégie CAucnE. Obs. — Marie-Caroline P..., âgée de 44 ans, entre à l'infirmerie de la Salpôlrière, dans le service de JM. Gharcot, le 6 novembre 1868. Depuis l'âge de 34 ans, elle a des douleurs névralgique dans la tête, et elle est sujette à des douleurs rhumatismales dans la plupart des join- tures. Ces douleurs seraient survenues pendant son habitation dans une chambre tellement humide que le papier était mouillé et qu'elle avait été obligée d'éloigner son lit du mur. Il y a trois ans elle a commencé à se plaindre de battements de cœur et de dyspnée. Le 19 octobre 1868, elle a eu une attaque d'apoplexie, et elle est entrée à la Salpêtrière le 6 novembre. 7 novembre 1868. La malade présente une hémiplégie gauche avec contracture commençante. La molilité est entièrement abolie au mem- bre supérieur, et permet à peine quelques légers mouvements au membre inférieur. La sensibilité est notablement diminuée , en parti- culier, la sensibilité à la température est presque abolie. Le côté gau- che de la face est paralysé. L'intelligence, la mémoire, la parole sont bien conservées. L'auscultation du cœur permet de reconnaître un rétrécissement mitral et une irrégularité assez grande des battements cardiaques. Dans le courant du mois de décembre, on a noté de l'induration aiguë dans les deux poumons. Ces symptômes ne se sont pas entière- ment dissipés, et jusqu'à sa mort la malade a présenté les signes géné- raux d'une tuberculisation pulmonaire subaiguë. En même temps de vastes et profondes eschares existaient au sa- crum, sur les fesses et au niveau des trochanters, plus larges et plus creuses du côté paralysé. La mort est survenue le 18 février. L'autopsie a été faite le len- demain. Autopsie. — Cavité crânienne. l\ n'y a rien à noter pour le cuir che- velu, le crâne ni la dure-mère. En incisant cette dernière on trouve au niveau de l'hémisphère cérébral droit un espace assez vaste rempli d'un liquide limpide et transparent qui s'en écoule, et montre que là cavité a été formée par laffaissemeut de la partu3 corros, ondante du cerveau. Cet affaissement, qui est considérable, est dû à une large pla- que jaune s'étendant à toute la troisième circonvolution frontale, à la plus grande partie de la seconde, à tout le lobule de linsula, à la moitié externe des deux circonvolutions marginales et à une partie des cir- convolutions du lobe sphéno'idal. Les circonvolutions sont à peine mar- 74 quées, ou même ont entièrement disparu au niveau de ce ramollissement superficiel, qui s'étend à la partie de substance blanche sous-jacente dans une épaisseur de 1/2 à 1 centimètre. Au niveau du lobule de l'in- sula, le ramollissement est plus accentué et plus profond et s'étend jus- qu'à la paroi ventriculaire, dans cette partie qui est supérieure au corps strié. Cependant la paroi ventriculaire est intacte et ce n'est qu'à la coupe qu'on s'aperçut de la profondeur de la lésion. Le corps strié et la couche optique sont entièrement sains. L'hémisphère cérébral gauche ne présente aucune lésion. Les péduncules cérébraux n'ont pas présenté de différence dans leur volume, On ne trouve également aucune trace d'atrophie ni dans la pro- tubérance ni dans le bulbe, du moins à l'œil nu. Dans le cervelet, on note d'abord une diminution considérale de l'hé- misphère gauche, par comparaison avec l'hémisphère droit. De plus on trouve à la partie inférieure et antérieure de cet hémisphère une perte de substance, ressemblant à une ulcération assez profonde dont les bords sont taillés à pic ; elle est arrondie, et de 2 centimètres de diamètre en- viron ; son fond est constitué par de la substance ramollie et comme gé- latineuse. Le pédoncule cérébelleux moyen de ce côté est beaucoup plus petit que celui du côté opposé. Les artères de la base ont été l'objet d'une dissection attentive; elles ne présentent pas la moindre altération athéromateuse. On n'a pas trouvé d'obstruction artérielle correspondant à la lésion du cer- velet. Les artères de l'hémisphère cérébral gauche étaient entièrement saines, et ne présentaient pas trace de caillot. Mais tout le long du tronc principal de l'artère sylvienne droite, et à l'origine de ses prin- cipales branches, on percevait facilement, en passant le doigt, des no- dosités indiquant la présence d'un caillot. Les divisions de cette artère qui se rendaient à la surface de la plaque jaune, étaient pleines d'un sang rouge et liquide, et si avec le doigt on pressait sur ces petits vais- seaux en sens inverse du cours du sang, on voyait ce liquide sortir par l'ouverture de section faite à l'origine de la sylvienne. C'est là une preuve irrécusable de la perméabilité de cette artère, qui avait été le siège d'une oblitération complète, comme le prouvent, d'une part, les nodosités que l'on sent avec le doigt, d'autre part, la lésion cérébrale si considérable qui existe dans cet hémisphère. Étendue sur une plaque de liège et ouverte suivant sa longueur, cette artère nous montre un caillot de couleur rouge pâle, ruhané, assez consistant, adhérant en grande partie à la paroi du vaisseau, et n'obli- térant certainement pas plus du tiers ou de la moitié de la lumière de lartère. L'examen microscopique a démontré qu'il s'agissait bien là d'un caillot sanguin, et de plus qu'il était ancien, car il était déjà 75 organisé, et Ion voyait sur les préparations des éléments cellulaires, fusiformes, ou même étoiles, présentant en général un noyau bien distinct, et anastomosés les uns avec les autres. Cavité tlioraciqiie. Le cœur d'un volume normal, présente un ré- trécissement mitral considérable, sans induration bien grande de la valvule qui porte quelques petites végétations. A l'orifice aortique dont les valvules jouaient encore bien leur rôle , on trouve égale- ment quelques petites végétations formant en un point un arc de guirlande. Les poumons sont le siège, dans leur lobe inférieur, d'une pneu- monie caséeuse, peu avancée, sans que l'examen à l'oeil nu permit de reconnaître des granulations tuberculeuses en aucun point de ces organes. Cavité abdominale. Le rein gauche présente une cicatrice d'in- farctus assez étendue. Il n'y a rien à noter pour les autres organes. En résumé il s'agit, dans cette observation, d'une femme encore jeune, chez qui successivement, des douleurs rhumatismales, de l'en- docardite et une embolie cérébrale sont survenues. L'artère sylvienne droite se trouve oblitérée par un caillot, et ce dernier s'organisant re- vient peu à peu sur lui-même, permettant ainsi le rétablissement de la circulation. Au bout de quatre mois le caillot n'oblitérait plus qu'une faible partie de la lumière du vaisseau. Au point de vue du rétablissement de la circulation, ce qui s'est passé dans ce cas ne présente rien d'exceptionnel. Il est rare que dans les anciens ramollissements, surtout par embolie, on retrouve encore le vaisseau oblitéré. Que le caillot obturateur se soit formé par embolie ou par thrombose, les choses ont de la tendance à se passer de la même manière. Et, du moins, dans l'encéphale, on peut poser pour les oblité- rations artérielles, cette loi générale : Organisation du caillot et ré- tablissement de la circulation. — M, Brown-Séquahd fait hommage à la Société de diverses bro- chures. A propos de l'une d'elles, il communique le fait suivant : Le bromure de potassium et le bromure d'ammonium produisent tous les deux du bromisme; mais si l'on administre simultanément à un animal les deux sels, chacun à une dose voisine de celle qui détermine des accidents lorsqu'il est administré isolément, on voit les accidents man- quer. Il y a donc là une action antagoniste. — M. JoLYET présente, au nom de M. Prévost, le résultat des expé- riences de M. Prévost et de celles qu'ils ont faites, eu commun sur les fonctions gustatives du lingual. 76 Note relative aux fonctions gustatives du nerf lingual; par M. le docleur J. L. Prévost (de Genève), membre correspondant. Quand je publiai, dans les premiers numéros des Archives de physio- logie, 1868, le résuUat de mes expériences relatives aux fonctions du ganglion sphéno-palatin, je ne connaissais pas les expériences que M. Schiff a faites sur cet organe et qu'il a récemment publiées dans ses Leçons sur lu physiologie de la digestion (1). Dans mes expériences, je dois le dire, mon attention a été peu portée sur le sens du goût, et en voyant le rôle important que, d'après M. Schiff, les fibres nerveuses qui traversent le ganglion sphéno-pala- tin jouent, relativement au sens du goût de la partie antérieure de la langue, je dus recourir à de nouvelles expériences pour constater ce fait. Ces expériences ont été pratiquées, les unes à Berlin, dans le labo- ratoire de M. du Bois-Raymond avec M. le professeur Rosenthal ; les autres à Paris, dans le laboratoire de physiologie du Muséum d'histoire naturelle avec le concours de M. le docteur Jolyet et grâce à l'obli- geance de M. Philippeaux. Ces expériences nous ont donné des résultats qui ne sont point d'ac- cord avec ceux qu'énonce M. Schiff; c'est là ce qui m'engage à les publier, espérant attirer l'attention de nouveaux expérimentateurs sur un point douteux de la physiologie. On sait que le nerf lingual, à son entrée dans la langue, contient toutes les fibres nerveuses qui président au sens du goût de cette partie de l'organe à laquelle il se distribue. On sait que cette partie de la langue perçoit, surtout les substances acides, tandis que la région où se distribue le glosso-pharyngien est surtout affecté à la perception des substances amères. Mais avant d'être définitivement constitué, le nerf lingual reçoit plusieurs anastomoses, dont la principale est formée par la corde du tympan. Les auteurs sont loin d'être d'accord sur les fonctions de ces divers nerfs, les uns donnant, relativement à la gustation, une grande im- portance à la corde du tympan et au facial; les autres, au contraire, attribuant aux fibres intrinsèques du nerf lingual la transmission des sensations gustatives de l'extrémité de la langue. (1) Leçons sur la physiologie de la digestion faites au Muséum d'his- toire naturelle de Florence, par M. Maurice Schiff, rédigées par le doc- teur E. Lévrier. Paris-Berlin, 1867. 77 Des expériences, des faits pathologiques contradictoires ont obscurci cette question loin de l'éclairer. Je n'ai pas l'intention de passer en revue les faits signalés par les au- teurs. M, Schiffl'a fait avec un grand soin dans son ouvrage, auquel je renverrai ceux que cette question peut intéresser 1). Je me contenterai de résumer les expériences et les opinions de M. Schiff sur cette question qui intéresse, comme on va le voir, la physiologie du ganglion sphéno-palatin. 1* Par des expériences nouvelles, faites simplement pour contrôler celles de ses devanciers, M. Schiff a observé que la section intracrâ- nienne du trijumeau ou simplement des seconde et troisième branches de ce nerf, faite au niveau du ganglion de Gasser, abolit le sens du goût dans les parties où se distribue le nerf lingual. Il n"a pu arriver à pratiquer la section isolée de la troisième branche sans léser le nerf grand pétreux superficiel. 2* La section du nerf lingual, faite au niveau de sa sortie de la base du crâne, et non pas immédiatement avant sa réunion dans la corde du tympan, n'abolit pas les fonctions gustatives du lingual qui sont dimi- nuées, il est vrai, par cette opération. 3° La section de la corde du tympan, faite dans l'oreille moyenne, amène une faible diminution du sens du goût de l'extrémité de la langue. 4° Une section longitudinale, faite en arrière du nerf lingual, depuis la base du crâne jusqu'au niveau de la réunion de ce nerf avec la corde du tympan comprise dans l'incision, détruit les principales anasto- moses du lingual et abolit souvent complètement ses fonctions gusta- tives. Celte expérience amène M. Schiff à déduire la conséquence sui- vante : « Les rameaux anaslomotiques qui se réunissent avec la « portion supérieure du lingual et du maxillaire inférieur, et qui lui « communiquent la sensibilité gustalive, ne sont pas contenus origi- t nairement dans la troisième branche du trijumeau.» (Schiff, I, p. 131.) Si la troisième branche du trijumeau ne contient pas originairement les fibres gustatives, elle doit les recevoir de ses anastomoses, puisque cette branche est la seule qui envoie directement ses filets à la langue. Les anastomoses sont constituées par la corde du tympan et par le petit nerf pétreux superficiel qui, parti du ganglion géniculé, se met en rapport avec la troisième branche du trijumeau par l'intermédiaire du ganglion otique. Ce serait donc le nerf facial qui, dans cette hypo- thèse, serait chargé de transmettre la sensation du goût. Certains au- ^1) Voyez aussi un article de M. Lussana, paru depuis la présentation de mes expériences à la Société de biologie. Arch. de physioL, 1869. 78 leurs ont, il est vrai, signalé des cas d'alléralions et do blessures du nerf facial, accompagnées de diminution ou de perte du sens du goût à l'extrémité de la langue. Mais si le sens du goût de l'extrémité de la langue était sous !a dépendance du nerf facial , comment la section intracranienne du trijumeau abolirait-elle cette fonction? « Ainsi, nous « dit M. Schiff, nous arrivons à la conclusion très-extraordinaire que « les filets gustatifs du tiers antérieur de la langue ne font que traver- « ser le facial pour se rendre des origines du trijumeau (seconde « branche) au nerf lingual. » (Schiff, t. I, p. 135.) Les seuls filets nerveux qui peuvent remplir la condition de mettre en rapport la seconde branche du trijumeau avec la troisième, tout en oifrant une connexion avec le nerf facial, sont les rameaux qui traver- sent le ganglion spliéno- palatin, c'est-à-dire le nerf vidien et un rameau direct décrit par Valenlin et désigné par lui sous le nom de rameau ré- current ou sphénoïdal. Désirant prouver cette induction par l'expérimentation, M. Schiff fit les expériences suivantes (t. I, p. 137) : a 1° Section de la seconde branche du trijumeau au-dessus de l'ori- « gine des rameaux qui se rendent au ganglion sphéno-palatin (chats); « 2° Section de quelques rameaux de communication entre la se- « conde branche et le ganglion indiqué, et c'était là l'opération la plus « difficile (chiens); « 3° Section des rameaux qui sortent postérieurement du ganglion Il sphéno-palatin, et qui forment le nerf vidien (chats, chiens); « 4° Enfin, section et extraction partielle du prolongement postérieur « du ganglion sphéno-palatin lui-même (chiens). » Dans toutes ces expériences, M. Schifï observa : « L'inlégritc parfaite de la sensibilité tactile el douloureuse , Vabo- « lition totale du goût » (dans la partie où se rend le nerf lingual). De plus, l'application de corps sapides sur l'extrémité de la langue ne donnait plus lieu à un écoulement de salive sous-maxillaire. De ces faits M. Schiff tire les conclusions générales suivantes (p. 140) : c Les nerfs gustatifs des parties antérieures de la langue quittent Ten- « céphale avec les racines du trijumeau, sortent du crâne avec la se- a conde branche de ce nerf, entrent dans le ganglion sphéno-palatin, « et de là se rendent, soit par le nerf sphénoïdal, directement à la troi- « sième branche (?), soit par les nerfs vidions au ganglion géniculé du « facial pour s'accoler ensuite au tronc du maxillaire inférieur au ni- « veau du ganglion otique, ou pour se jeter dans le nerf lingual avec « les filets compris sous le nom de corde du tympan. » Tels sont, en résumé, les faits avancés par M. Schiff qui m'ont engagé à répéter ses expériences. ■?9 Première série d'expériences faites en commun avec M. le professeur ROSENTHAL. Dans les expériences que nous avons faites, M. Rosenthal et moi, sur des chiens, nous avons toujours le soin d'examiner avec soin, avant l'opération, le sens du goût de l'exirémité de la langue, afin d'avoir ainsi un point de comparaison bien iripréciable. Nous nous sommes sur- tout servis dans cet examen d'une solution peu concentrée d'acide oxa- lique qui olTre l'avanlago de ne point affecter le sens de l'odorat. Nous avons complété l'épreuve avec de la poudre de qnassiaamara L'extrémité de la langue en effet, tout en étant moins sensible que la base à la S(3nsation de Vamara^ ne lui est cependant pas complètement indifférente. Une solution d'opium nous a donné aussi des résultats très-clairs, et l'animal en expérience manifestait des signes de dégoût quand on touchait l'extrémité de la langue avec un pinceau imprégné de cette substance. L'un de nous entr'ouvrait la gueule du chien , tandis que l'autre plaçait avec précaution sur les parties latérales de l'extrémité de la langue les substances en épreuve. Nous avions l'habitude, avant de nous servir de la substance sapide, de faire d'abord l'essai avec un pinceau chargé siraplem.ent d'eau ; sou- vent, en effet, le simple toucher de la langue avec le pinceau fait exé" cuter à l'animal des mouvements de la langue qui pourraient tromper dans l'appréciation du goût. Mais bientôt l'animal s'habiluant à cette épreuve faite avec de l'eau, reste en repos et n'exécute plus de mouvements de langue. C'est ce moment que nous choisissions pour remplacer l'eau par la substance sapide, ce qui nous permettait d'apprécier facilement la dif- férence de sensation. Après avoir fait ces épreuves sur deux chiens, nous avons enlevé à chacun de ces animaux l'un des ganglions sphéno-palatins. Ces organes ont été examinés au microscope et étaient enlevés en totalité. Le goût de la partie correspondante de la langue ne nous a point paru modifié par cette opération. Afin d'avoir un résultat plus certain encore et pour nous mettre à l'abri des sensations qui auraient pu être perçues par l'autre côté de la langue, nous avons coupé dans la région sous-maxillaire le nerf lingual, du côté opposé à celui où nous avons fait l'ablation du gan- glion sphéno-palatin. L'un des chiens ayant été trop fortement narcotisé par une injection de morphine dans les veines, a succombé. Quant à l'autre, les résultats 80 n'ont point été modifiés et l'animal percevait encore fort bien le goût de l'acide oxalique placé à l'extrémité de la langue du côté où. le gan- glion avait été enlevé. Voici ces deux expériences : Exp. I (faite avec M. le professeur Rosenthal). — Petit chien bas- set, adulte. Le 9 juin 1868 nous faisons l'examen du sens du goût et nous con- statons que l'animal ne réagit que fort peu quand on place du quassia amara sur l'extrémité de la langue; cette substance est au contraire très-bien perçue à la base de la langue. Si l'on place avec un pinceau une goutte d'eau sur les parties laté- rales de l'extrémité de la langue, l'animal remue souvent cet organe et le retire, mais souvent aussi il le laisse immobile. Dès qu'au con- traire on touche ces parties avec une solution d'acide oxalique, l'ani- mal se débat, il manifeste des signes de dégoût et salive. Nous faisons l'ablation du ganglion sphéno-palatin droit qui est exa- miné au microscope et nous parait être complet. Quelques jours après quand la plaie est en voie de cicatrisation et que l'on peut facilement ouvrir la gueule de l'animal sans occasionner de douleur, nous faisons les mêmes épreuves que nous avions faites avant l'expérience pour éprouver les fonctions gustalives de l'extré- mité de la langue, et nous obtenons les mêmes résultats; nous ne pou- vons apprécier de différence entre un côté et l'autre de la langue. Le 16 juin , nous coupons le nerf lingual gauche dans la région sous- maxillaire. Le chien narcotisé par une injection de morphine dans la veine ju- gulaire succombe quelques heures après l'opération. Nécropsie. — La dissection de la région ptérygo-maxillaire montre que le ganglion a été bien enlevé en totalité. On retrouve au fond de la région l'extrémité du nerf vidien, adhérente à du tissu cellulaire qui ne contient point de cellules ganglionnaires, comme nous le prouve l'examen microscopique de ce tissu. Exp. Il (faite avec M. le prof. Rosenthal). — Jeune chien terrier de petite taille. Le goût est examiné avec soin, ce qui est facile, car l'animal fort docile se prêle très-bien à ces épreuves. Quand on touche les deux parties latérales de l'extrémité de la langue avec de l'eau, l'animal reste immobile et ne fait aucun mou- vement de la langue. Une goutte de solution d'acide oxalique, pro- voque, au contraire, immédiatement des mouvements de la langue et des signes de dégoût. 81 Les deux côtés de la langue sont également sensibles à cet agent. La poudre de quassia amara est aussi perçue par l'extrémité de la langue, mais n'excite point les manifestations de dégoût qu'elle pro- duit quand on la place sur la baâe de l'organe. 20 juin 1868. Nous faisons l'ablation du ganglion sphéno-palatin gauche qui est examiné au microscope çt nous parait être complet. 2& juin. La plaie est en voie de cicatrisation; l'animal est gai, et se laisse ouvrir la gueule sans manifester de douleur ni de résistance. Le goût de la partie antérieure de la langue ne nous paraît point modifié depuis l'opéralion. Les deux côtés de la langue se comportent de la même façon. L'animal ne remue point la langue quand on la touche avec un pinceau imbibé d'eau, tandis qu'il manifeste des signes d'impatience et de dégoût quand on louche la langue avec une solu- tion d'acide oxalique. {"juillet. La plaie est complètement cicatrisée. Nous faisons dans la région sous-maxillaire la section du nerf lingual droit, dont nous réséquons 1 centimètre environ, au niveau où le nerf croise le nerf hypoglosse. 8 juillet. La plaie de la région sous-maxillaire est en voie de cica- trisation, la langue offre du côté droit de nombreuses traces de mor- sures. Du côté gauche, au contraire, elle est intacte. Des essais répétés du sens du goût nous montrent que l'extrémité gauche de la langue perçoit fort bien l'acide oxalique et le sel de cui- sine et faiblement le quassia amara. Du côté droit le sens du goût est aboli dans la partie antérieure de la langue. Notons de plus que, depuis l'ablation du ganglion nous avons re- marqué que l'extrémité de la narine gauche était sèche et se couvrait de croûtes et de poussière ; phénomène que nous n'avions pas remar- qué avant l'opération. Le chien est sacrifié par la section du bulbe. Nécropsie. Le nerf lingual est coupé un peu au-dessus du point où il croise l'hypoglosse. Son bout périphérique est dégénéré, le bout cen- tral sain. La région plérygo-maxillaire gauche est disséquée, et l'on retrouve accolée au nerf naso-palatin à l'endroit où se trouve le gan- glion sphéno-palatin, une accumulation de tissu cellulaire à la partie postérieure de laquelle aboutit un filet nerveux (nerf vidien). L'exam.en microscopique de ce tissu n'y fait découvrir aucune cel- lule ganglionnaire; on y trouve simplement des fibrilles de tissu con- nectif. Le nerf qui aboutit à ce lissu, et qui paraît par sa situation être le nerf vidien, contient un assez grand nombre de fibres nerveuses granuleuses dont la myéline est fragmentée; ce qui fait exception à.la règle habituelle, ce nerf ne dégénérant pas ordinairement à la suite de c. R. 18G9. 6 l'ablation du ganglion, {Vide mon mémoire sur le ganglion sphêno-pala- tin, loc. cil.) Nous avons cherché à découvrir le nerf vidien dans son trajet intra- cranien en coupant le rocher avec une pince de Liston ; mais cette opération n'a pas réussi, et nous n'avons malheureusement pas pu exa- miner le nerf vidien dans son trajet intracrânien. Les fosses nasales n'offraient pas d'altérations du côté opéré, elles avaient la même coloration que du côté sain. La sécheresse habituelle et l'altération légère de l'extrémité de la narine gauche observées pendant la vie étaient peut-être antérieures à l'opération. Ces deux résultats pouvaient paraître concluants; cependant, pen- sant que quelques branches nerveuses traversant le ganglion avaient pu échapper à la section et pouvaient transmettre les sensations gusta- tives, nous avons répété une troisième fois l'expérience en la modifiant et en enlevant, non-seulement le ganglion, mais encore toute la por- tion de la seconde branche du trijumeau qui traverse la fosse ptérygo- maxillaire en détruisant avec soin tous les rameaux nerveux que nous apercevons et en interrompant ainsi, à coup sûr, toutes les communica- tions qui pouvaient exister entre cette seconde branche et la troisième, par l'intermédiaire du ganglion sphéno-palatin. Nous avons de plus fait du côté opposé la section du nerf lingual dans la région sous-maxillaire. Nos résultats n'ont point été modifiés et l'ani- mal conserva le goût à l'extrémité de la langue du côté correspondant à l'ablation du ganglion sphéno-palatin. Voici cette expérience : Exp. III (faite avec M. le professeur Rosenthal). — Chien adulte de taille moyenne. Le goût est essayé avant l'opération ; le chien ne remue point la langue quand avec un pinceau on place de l'eau sur l'extrémité de la langue; quand au contraire on se sert d'une solution faible d'acide oxalique et surtout dune solution d'opium, il manifeste du dégoût, re- tire la langue et secoue la tête en signe de dégoût. 10 juillet. 1868. Nous faisons l'ablation du ganglion sphéno-palatin droit, puis nous enlevons en entier la seconde branche du trijumeau jusqu'au fond de la fosse ptérygo-maxillaire, en ayant soin de détruire tous les petits rameaux nerveux que nous pûmes apercevoir. L'artère maxillaire interne fut ménagée dans cette opération; cependant la sec- tion d'un de ses rameaux donnj lieu à une assez forte hémorrhagie. Le ganglion, examiné au microscope, se montre en entier avec les bran- ches avec lesquelles il est en rapport. Nous faisons la section du nerf lingual gauche dans la région soas- maxiiiaire 83 Cet animal a été examiné à plusieurs reprises depuis sa guérison, au moyen de substances sapides diverses, et il n'a pas été possible de constater de modifications dans le sens du goût de la partie antéri eure droite de la langue. La nécropsie a montré que l'opération avait été exécutée comme nous l'avions voulu. Je dois faire remarquer, en terminant cette série d'expériences, que si les opinions de M. Schiff étaient fondées, il est fort probable que les fibres nerveuses qui iraient à travers le ganglion et le nerf vidien de la seconde branche du trijumeau à la troisième devraient dégénérer après Pablation du ganglion. Or j'ai montré par mes expériences pré- cédentes (mém. cité) que ce nerf restait au contraire habituellement sain. L'expérience II fait, comme je l'ai dit, exception à cette règle, car nous avons trouvé dans l'extrémité du nerf vidien des fibres nerveuses dégénérées; nous n'avons malheureusement pas réussi à faire l'examen du nerf dans son trajet intracrânien. Dans ce cas, le ganglion avait été séparé du nerf vidien par arrachement; il est possible que les fibres dégénérées de l'extrémité du nerf vidien avaient été blessées dans celte opération. Deuxième série d'expériences faites en commun avec M. le docteur Jolvet. Pendant un séjour que je fis à Paris dans le mois de décembre 1868, j'ai complété et confirmé ces résultats par quelques expériences faites avec mon ami M. le docteur Jolyet, qui a bien voulu achever ces ex- périences après mon départ. Ce sont ces expériences que nous allons décrire. Exp. l. (26 décembre 1868). — Sur un jeune chien mâtin, dont l'exa- men du goût, fait avant l'expérience, paraît bien net des deux côtés de la langue, on fait, par le procédé ordinaire, l'ablation du ganglion «phéno-palatin du côté droit. L'ablation n'est probablement pas com- plète; il doit être resté l'extrémité du nerf vidien et une partie du ganglion attenant au nerf naso-palatin. Le nerf naso-palatin doit même avoir été laissé par erreur. On résèque une partie du nerf maxillaire supérieur. Exp. 11 (27 décembre 1868). — Jeune chien mâle griffon. L'examen du goût, fait avant l'expérience, est moins net que dans le cas précé- dent. Cependant, à des examens répétés faits avec de l'eau pure, l'a- cide oxalique dans l'eau et l'extrait d'opium, surtout en prenant la précaution de tiédir l eau, et les solutions sapides, on peut se con- vaincre que le goût est en réalité assez net des deux côtés de la lan- 84 gue : l'animal exécute des mouvements répétés de la langue quand on place sur ses bords les substances sapides, et la laisse au contraire le plus souvent immobile quand on y dépose doucement une gouttelette d'eau pure. On fait l'ablation du ganglion sphéno-palatin droit en en- tier : l'examen minutieux de ce ganglion est fait après l'extirpation, et il est très-complet. On fait la resection du nerf dentaire supérieur et du naso-palatin. Le 11 janvier 1869, les plaies, chez les deux chiens, sont bien cicatri- sées et ne sont point douloureuses. On fait l'examen du goût de l'un et l'autre côté de l'extrémité antérieure de la laugue avec les substances sapides qui avaient servi avant l'opération en comparaison avec l'eau pure, et il ne paraît pas y avoir de différence sensible entre le goût du côté droit de la langue et le goût du côté gauche. Cet examen est répété plusieurs fois dans le courant de janvier avec des résultats identiques. Le 7 février 1869, on fait sur le premier chien la section des deux nerfs glosso-pharyngiens et celle du nerf lingual du côté gauche. L'a- nimal meurt d'hémorrhagie dans la nuit. L'autopsie n'a pu être faite, le chien ayant été jeté par erreur. Sur le deuxième chien griffon, dont l'extirpation du ganglion sphéno- palatin avait été complète, on fait, le 9 février, la section du nerf lingual gauche avant son entrée dans la langue (on ne croit pas, crainte d'insuccès, devoir couper les glosso-pharyngiens). Les 14, 16 et 18 février, on fait, à diverses reprises, l'examen du goûi des deux côtés de la langue : l'animal perçoit très-bien la solu- tion d'acide oxalique et celle d'opium du côté droit; ces solutions ne sont pas perçues du côté gauche (lingual coupé). De ce côté la langue offre des traces de morsure. Autopsie. — L'examen de la face ptérygo-maxillaire, fait avec soin, montre que le ganglion sphéno-palatin a été bien enlevé, comme l'a- vait déjà prouvé l'examen de ce ganglion fait après l'opération. On re- trouve adhérentes au tissu cellulaire de la fosse les extrémités des nerfs qu'on avait sectionnés dans l'opération. Choléra sPORADiQUE sec; mort; autopsie: dégénérescence granulo-grais- SEUSE DES MUSCLES DE LA VIE DE RELATION ; QUELQUES MOTS SUR LES TRACÉS POLYGRAPHIQUES DES CRAMPES ; par M. QuiNQUAUD. La nommée Beauvais (Désirée), âgé de 69 ans, marchande des quatre saisons, entre le 15 février 1869 à la salle Sainte-Adélaïde, service de M. le docteur Lorain. Cette femme habitait au cinquième une chambre assez salubre, se 85 nourrissait bien, ne faisait point d'excès alcooliques et se portait ha- bituellement bien. Elle est malade depuis deux jours; l'affection a débuté par de la cé- phalalgie et des vomissements, qui ont persisté jusqu'à ce matin, alors se sont déclarés des crampes dans les jambes et des étouffements ; le tégument externe est recouvert d'une sueur froide, qui s'accompagne d'une sensation de froid aux extrémités. Le reste du corps est chaud, la langue est humide et froide. Crampes douloureuses dans les cuisses et les mollets. Rien à l'auscultation, plus de céphalalgie. Pouls, 108; respiration, 54; température vaginale, 38,3. 16 février matin, sept heures cinquante minutes, température vagi- nale, 38. A onze heures, teinte violacée du visage; langue humide et légèrement poisseuse. Les crampes occupent les membres supérieurs et inférieurs, qui sont le siège de secousses convulsives plus ou moins étendues ; l'agitation est, à certains moments, comparable aux mouvements de la paralysis agitans; on observe des convulsions cloniques des muscles de la cuisse, avec des mouvements d'ensemble des jambes. La malade est à la période de réaction. En essayant les urines par la chaleur et l'acide nitrique, on détermine un précipité albumineux, qui apparaît granuleux sous le champ du microscope. Pas de sucre dans les urines (liqueur de Bareswill). Pouls, 144; température buccale, 33,4; de la main, 32; de la cavité axillaire, 37,8; du vagin, 39,9. On prend à midi le tracé des crampes au moyen du polygraphe de Marey. Bouillon, potion alcoolique, friction avec le baume tranquille. Bain sinapisé. A une heure, température buccale, 33,5 ; de la main, 32,1. La malade reste une heure dans le bain, et immédiatement après, trois heures du soir, température buccale. 36,6; vaginale, 41,3. La température buccale monte en douze minutes à 37,2. En un quart d'heure, la température buccale est montée de 36,5 à 37,7. Après dix minutes, température axillaire, 39,8. Un quart d'heure plus tard, température de la main, 38,8; pouls, 142; respiration, 60. Le malade meurt à quatre heures un quart. Cinquante minutes après le décès, température buccale, 37,8; va- ginale, 40,8. En résumé, voilà une femme qui, sans cause connue (les renseigne- ments nous annoncent qu'il n'y a pas eu un seul cas de choléra dans le quartier où elle habite), est prise de céphalalgie, de vomissements qui durent vingt-quatre heures; puis surviennent des crampes d'estomac, des membres inférieurs; l'oppression se déclare; les extrémités se re- froidissetit. Il n'y a jamais eu de diarrhée; il s'agit donc d'un choléra sec. Le 16 février, là face est violacée, la langue est froide, la peau est poisseuse. La température de la main est à 32», celle de la cavité axil- laire est au-dessus de la normale; celle du vagin, qui la veille était de 38'',2, s'élève le matin à 39%9 ; cette élévation vaginale contraste avec l'abaissement de la température buccale et de la main, et se remarque surtout dans le choléra ; nous insistons spécialement sur ce fait, qui n'a pas assez attiré l'attention des pathologisles. L'urine est rare et forte^ ment albumineuse. La voix n'est pas éteinte. La malade s'agite et se débat dans un demi-état convulsif; les crampes sont des plus violentes et très-douloureuses. Elles consistent en : r Contractions toniques des mollets, 2" Secousses subites et irrégulières, 3° En une sorte de paralysis agitans continue. Après son bain sinapisé, la réaction déjà au début se fait, et les tem- pératures s'élèvent. La température de la main passe de 32° à 38°, 8, celle de la bouche de 33°, 4 à 37°, 7, et celle du vagin atteint 41°, 3. Jours. Vagin. i5 février 38,3 16 matin huit heures 38 16 onze heures. .. . 39,9 16 trois heures .... 41 ,3 Nécropsie le 18 février 1869. — La pie-mère est fortement injectée, surtout dans la partie postérieure du lobe droit où l'on voit une plaque d'apparence ecchymotique. A la coupe, la substance blanche montre un piqueté assez serré. Le poumon, légèrement congestionné, est le siège d'un emphysème, marqué surtout aux bords antérieurs. Anlhracosis marqué. Le cœur est mou, flasque; surcharge graisseuse péricardique ; aorte athéromateuse. La séreuse périlonéale apparaît injectée. Pas d'épanchement. Le foie est peu volumineux, graisseux sur certains points. La rate est normale. La vessie est vide, revenue sur elle-même. Le rein droit contient un vaste kyste séreux; le parenchyme des deux reins est vascularisé, d'un rouge foncé (hyperémie très-accusée). L'estomac est sain et renferme un demi-litre de liquide grisâtre. A la face interne de liléon on voit une psorenténe très-nette, et ouche. Aisselle. Main. rouis » " " 108 » )) » M 33,4 37,8 32 144 37,7 39,8 38,8 142 87 dans la dernière portion de cet intestin on peut enlever des fausses merabranes blanchâtres qui ressemblent aux exsudats des séreuses. Au-dessous, la muqueuse est très-injectée et contient un liquide muqueux. Le gros intestin et le cœcum contiennent des matières fécales dures. Les muscles de la vie animale sont un peu jaunâtres et se laissent déchirer assez facilement. Examen histologique. — Une coupe des fibres musculaires du cœur nous montre, outre les granulations pigmentaires, un état sablé qui pâlit beaucoup sous l'influence de l'acide acétique. A la face interne de l'intestin grêle, on voit une desquamation épi- théliale des plus abondantes. Les fausses membranes sont constituées par des filaments qui pour- raient faire croire à de la fibrine; ils englobent des éléments de forme et de volume variables, tantôt fusiformes, tantôt arrondis. Ils sont à peu près semblables aux leucocytes, mais plus volumineux; ce sont des éléments épithéliaux en voie de métamorphose. Si l'on ajoute de l'acide acétique, les fibrilles apparaissent plus net- tement et il se forme un ou plusieurs noyaux au centre de ces éléments il s'agit donc ici de mucine très-abondante qui forme des fausses mera- branes. Les canalicules rénaux sont tapissés par un épithélium à noyaux gra- nuleux. Ces canaux renferment beaucoup de granulations pigmentaires aunâtres; les vaisseaux sont gorgés d'hématies, et l'on voit sur leurs trajets de nombreuses granulations de pigment. Les fibres primitives des muscles striés sont nettement granulo- graisseuses (acide acétique et chloroforme); certaines fibres cependant sont moins altérées, tandis que dans les premiers la striation a disparu* elle s'observe encore dans les secondes. Cette observation nous a paru intéressante à plus d'un titre : et d'a- bord il s'agissait bien ici d"un véritable choléra sec sur lequel notre sa- vant maître, M. le docteur Lorain, vient encore d'attirer l'attention des c\\mc\ens. {Eludes de médecine clinique et de pliysiolog. pathol. 1868, p. 44.) En second lieu, nous désirons appeler l'attention sur les caractères des crampes dans ce cas particulier. Elles ont été prises, avec le polygraphe de M. Marey, au mollet gau- che, à la cuisse et au bras du même côté. Le mollet gauche est maintenu avec la main, afin qu'il n'exécute pas des mouvements trop étendus ; alors on voit que le muscle produit une série de secousses avec un léger arrêt, ce qui se traduit par une ligne encore tremblée plus horizontale; en un mot à intervalles assez régu- liers, le muscle est pris d'agitation fibrillaire, et l'amplitude des vibra- tions, qui au commencement de chaque secousse est peu considérable, s'accuse de plus en plus au milieu pour devenir moins ample à la fm de la série. Ces oscillations ne s'éloignent guère de l'abscisse. Les mouvements de la cuisse gauche sont rapides et irréguliers; les secousses sont assez nombreuses, petites, incomplètes pour que la ligne tracée par le levier du poiygraphe ne retombe sur l'abscisse que de temps à autre; ce qui donne parfois une ascension brusque assez ample avec deux ou trois secousses, un plateau avec petites oscillations et une ligne de descente plus ou moins irrégulière à plusieurs secousses. Ces oscillations de la cuisse gauche sont de 460 par minute. Pour le bras gauche, les vibrations musculaires sont à peine mar- quées, et forment une ligne qui suit la direction de l'abscisse; ce sont des secousses avortées, petites, qui sont incomplètes tant elles sont rapides. De temps à autre ces oscillations prennent une amplitude plus considérable, sans qu'il intervienne de régularité dans cette ampleur. En résumé, nous voyons^ qu'à peu près au même moment les se- cousses musculaires des crampes offrent des caractères très-divers, suivant la région où on les prend. Dans les cas où les vibrations ont peu d'amplitude, le muscle paraît immobile à la vue. Or, si maintenant nous analysons ce que les auteurs ont écrit sur les crampes; nous voyons que la plupart les regardent comme des con- tractions toujours toniques ; et par ce dernier mot l'on entend des mou- vements convulsifs qui offrent une roideur permanente; mais nous ve- nons d'établir que même alors que le muscle semble tendu sans mou- vement, néanmoins l'instrument enregistreur nous montre des oscilla- tions toujours très-manifestes, tantôt rapides, tantôt lentes. Il faut donc chercher d'autres distinctions des convulsions toniques et cloniques ; c'est ce que nous essayerons de faire dans un prochaintravail sur les caractères graphiques des contractions musculaires. Séance du 27 février. M. Davaine s'est proposé d'isoler le virus charbonneux (les bacté- ridies). Après de nombreuses tentatives, il y a réussi de la manière suivante : il délaye quelques gouttes de sang charbonneux desséché dans 50 centimètres cubes d'eau distillée contenue dans un vase très- étroit. Au bout de vingt-quatre heures, la plupart des bactéridies ont gagné le fond du vase; il en reste très-peu dans les couches supé- 89 rieures; il remplace l'eau formant la moitié supérieure par de l'eau nouvelle, afin de prévenir la putréfaction. La même opération est re- nouvelée à plusieurs reprises; alors, en examinant avec soin le li- quide, on constate qu'il est parfaitement transparent, sauf à la partie la plus inférieure ; or en inoculant à un cobaye une goutte de liquide prise à la partie supérieure, on ne produit rien, tandis qu'une ino- culation faite avec une goutte de la partie inférieure détermine la mort de l'animal. Dans une autre expérience, tous les animaux inoculés sont morts, mais la vie a été d'autant plus longue que la goutte inoculée apparte- nait à une partie plus élevée du liquide. Dans une expérience faite sur des lapins, l'injection sous-cutanée de 1/2 centimètre cube de solution [partie inférieure) causa la mort de l'animal en trente heures; 1 centimètre cube de la partie moyenne tue au bout de quarante-huit heures seulement; enfin 1 centimètre cube de la partie supérieure ne tue pas ranimai. M. VuLPiAN voudrait que M. Davaine inoculât le sang de ces cobayes à des animaux notoirement susceptibles de contracter le charbon; car on pourrait à la rigueur objecter à M. Davaine que dans les expériences dont il vient de parler, les animaux ne sont pas morts du charbon. M. Davaine répond que cette manière de voir ne lui paraît pas ad- missible pour les raisons suivantes : dans le sang de ces animaux il existe des bactéridies en nombre considérable, les corpusculs san- guins sont agglutinés; la rate présente un volume double de son vo- lume normal ; enfin les animaux ne succombent jamais avantia vingtième heure à partir de l'inoculation, tandis que l'inoculation de liquides pu- tréfiés peut déterminer une mort beaucoup plus rapide. Enfin les ani- maux en question ne paraissent pas malades plus de deux heures avant la mort ; à l'autopsie on trouve leur estomac rempli, tandis que les ani- maux qui meurent à la suite de l'injection de matières putréfiées sont malades un certain nombre d'heures avant la mort, ils ont le poil hé- rissé. A l'autopsie, leur estomac est vide. En terminant, M. Davaine affirme de nouveau que pour lui il n'est pas douteux que le charbon soit transmis par les bactéridies. Le nom- bre des animaux charbonneux dont il a examiné le sang dépasse le chif- fre de six cents. Répondant à une question de M. Balbiani, il dit qu'il est difficile de savoir ce que deviennent les bactéridies quand le sang se putréfie. L'examen est difficile à cause de la production abondante des bac- téries. Je crois que les bactéridies se fractionnent et qu'il se forme dans le tube des granulations graisseuses aux dépens de la matière qui y est normalement contenue. L 1 B R A R Y 1 ; 90 Méningo-myélite subaigûe; sclérose des cordons latéradx; contractdre DES MEMBRES INFÉRIEURS; observation par M. Auguste Voism , médecin de la Salpôtrière, Obs. — La nommée Copin, 36 ans, entre le 21 octobre 1868 dans le service de M. Baillarger que je remplaçais à cette époque. Elle raconte que son père est mort à 55 ans, après deux ans de ma- ladie; que sa mère est morte à 65 ans à Lille dans une maison d'alié- nées, que sa maladie est survenue à la suite d'une chute sur la tête. Une sœur est de bonne santé et a plusieurs enfants bien portants. Elle raconte, en outre, qu'elle a eu des convulsions depuis son plus bas âge jusqu'à 7 ans, qu'elle a été réglée à 11 ans. De 11 ans à 30 ans, bonne santé; elle a toujours eu peu de mé- moire. Il y a deux ans, à l'âge de 34 ans, elle est entrée à Lariboisière pour de violentes douleurs de tête qui lui arrachaient des cris et ont même nécessité qu'elle fût placée dans une salle à part. Elle est entrée trois fois en deux ans dans le même hôpital pour les mêmes douleurs. Enfin il y a deux mois, quelques jours après y avoir été placée, elle a tellement fait de bruit, qu'elle a été envoyée à la Salpêtrière comme aliénée. A ces renseignements qu'elle m'a fournis, et qui sont exacts, sa sœur a ajouté que depuis cinq ans elle a perdu de la solidité dans ses membres inférieurs et est même tombée plusieurs fois à terre, qu'elle se plaignait souvent de douleurs des jambes et des lombes; que depuis deux mois elle laissait aller sous elle, et qu'elle a un fils qui a eu des convulsions de 14 mois à 3 ans. Je constate d'abord à son entrée et pendant tout le temps qu'elle passa à la Salpêtrière, que cette femme n'étant pas aliénée, son esprit est resté très-lucide jusque une heure avant sa mort. Cette femme était d'un grand embonpoint, on constatait facilement une déviation à gauche et en haut delà lèvre supérieure, tandis que la pointe de la langue tirée hors de la bouche se portait à droite. La na- rine gauche était moins large que la droite. Sillon naso-labial gauche très-prononcé, tandis que le droit est presque effacé. Pas de strabisme. Pupilles contractiles, égales; la gauche seule se dilatait sous l'influence des pincements pratiqués sur les membres et le tronc, la droite restait complètement immobile. Rien de particulier dans la conformation extérieure des os du crâne, frjnt ordinaire, oreilles bien faites, cheveux épais, pas d'impétigo du cuir chevelu, pas de tuméfaction ganglionnaire du cou. 01 Vue, ouïe normales. Odorat normal ainsi que le goût. La malade pleurait lorsqu'on lui touchait les membres inférieurs et disait qu'elle y éprouvait alors de très-vives douleurs ainsi quau sacrum (où existaient deux vastes es- charres) lorsqu'on la déplaçait. La motilité était très-affaiblie dans le membre inférieur et un peu dans le supérieur droits, la sensibilité et la contractililité électro- mus- culaire étaient normales aux quatre membres. La sensibilité générale, sauf les douleurs, est intacte dans les quatre membres, le tronc, la tête et les parties externes des organes des sens. Température, poids, chatouillement sont perçus d'une façon normale. La pression sur les 3*, 4", 5* G'^ apophyses épineuses dorsales était trés-douloureuse; elle l'était moins dans la région lombaire. Les réponses étaient lentes, mais la malade nous a prouvé, parleur justesse, que son intelligence était intacte ; les renseignements quelle nous a donnés sur ses antécédents, sur sa famille ont été exacts, et elle n'a manifesté aucun symptôme d'alalie ni d'amnésie. Les réponses et les gestes étaient conformes à ce qu'on peut désirer. Son état général était des plus graves, cachectique au plus haut point. Pas de fièvre. Hauteur du cœur, 12 centimètres 1/2, à la pointe et à gauche, existait un souffle fort couvrant le deuxième claquement valvulaire. Sonorité de la poitrine normale. Respiration rude à gauche. Augmentation de volume du foie qui remonte jusqu'à un centimètre au-dessous d'une ligne horizontale passant par le sommet de l'aisselle. Ni albumine ni sucre dans l'urine. Le diagnostic que je portai fut : Mêningo-myélile siibaiguc. Hémi- plégie incomplète dans les membres supérieurs droits, liée à un infarc- tus du corps strié gauche, dépendant lui-même de Caffection valvu- laire du cœur. Le traitement prescrit fut : six cautères le long des troisième, qua- trième, cinquième, sixième vertèbres dorsales. Seigle ergoté, 2 gram- mes par jour. 1.0 novembre. Commencement d'eschare au talon droit; même état, du reste. 12. L'eschare du sacrum s'étend; il existe depuis hier autour de l'es- chare une bande érysipélateuse. A eu hier un violent frisson pendant trois heures, suivi de sueurs et de délire. Elle frissonne encore en ce moment. 120 pulsations, très-petites, régulières. Traitement : Sulfate de quinine, 1 gramme; une cuillerée de vin et de glace tous les quarts d'heure. 13. Pas de nouveau frisson, mais fièvre mtense. 92 La malade accuse depuis trois à quatre jours dans les deux membres inférieurs des douleurs accompagnées de flexion forcée des jambes sur les cuisses; ces douleurs se reproduisent très-souvent; elles sont très- vives aujourd'hui (elle n'en avait parlé jusqu'ici qu'à la sous-surveil- lante de la salle, parce qu'elles étaient tolérables) et sont accompa- gnées de mouvements de contraction des muscles des cuisses, mouvements qui repoussent les couvertures en haut. J'en compteun par minute. La sensibilité aux pincements est conservée aux membres inférieurs et au tronc. Un drap attaché par ses deux extrémités est passé sur les cuisses de la malade et maintient les membres inférieurs dans l'exten- sion. L'eschare est considérable; le sacrum est à nu. Même traitement. Pansement de l'eschare avec du coaltar. 16. N'a pas eu de nouveaux frissons. Mêmes souffrances dans les membres inférieurs; on ne peut toucher, même légèrement, les cuisses, les genoux, sans provoquer des douleurs, et des mouvements commu- niqués amènent des cris. Tendance persistante des pieds à se porter sous les cuisses correspondantes. Aucune rougeur sur les genoux ni aucune augmentation de chaleur appréciable à la main. Le drap a été maintenu en travers du lit pour empêcher la flexion des membres inférieurs. Pour peu que ce drap cesse d'être appliqué, on voit les pieds se por- ter peu à peu sous les cuisses, et l'exlension est alors très-douloureuse. Même état de l'eschare, même traitement. 17. Deux frissons de demi-heure chaque. Pour éviter la flexion des membres inférieurs et les douleurs que tout mouvement imprimé au lit produit à la malade, je fais meltre ces membres dans deux gouttières à fracture de cuisse. 18. Même état. 19. Moins de douleurs depuis le placement des membres inférieurs dans les gouttières. Persistance des secousses des membres inférieurs, qui sont aussi fréquentes et instantanées. 20. Un frisson pendant la nuit. Suppuration considérable de l'es- chare. Même traitement; le sulfate de quinine est porté à la dose de 60 cen- tigrammes. 21. Un peu de délire quinique; bourdonnements d'oreille. La dose de quinine est abaissée à 30 centigrammes. 23. Un frisson hier. Hyperesthésie musculaire et cutanée des membres inférieurs et du 93 tronc, jusqu'au niveau d'une ligne horizontale passant par les deux ré- gions mammaires. La malade a toute sa connaissance. Le traitement par le sulfate de quinine, le vin, la glace, des applications de coaltar sur leschare et le maintien dans les gouttières sont continués jusqu'au jour de la mort, 29 janvier dernier. Jusqu'à ce moment les symptômes n'ont pas varié dans les membres inférieurs et le tronc; mên:ies douleurs, même tendance à la contrac- ture. Conservation de Tintelligence jusque une heure avant la mort. Autopsie faite par M. Taurin, interne des hôpitaux, vingt-sept heures après la mort. Cœur, petit. La face ventriculaire des valvules aortiques présente des saillies verruqueuses dont plusieurs sont comme ulcérées, déchi- quetées. Il en est de même sur la valvule mitrale, La face interne de l'aorte présente de nombreuses plaques jaunâtres et des ulcérations. Au sommet de l'un des poumons est une cavité du diamètre d'une lentille demi-remplie d'une matière caséeuse, entourée d'un tissu ferme et moyennement vascularisée. Une artère du voisinage, qui se dirige vers cette cavité, est obstruée par un corps jaunâtre, irrégulier, qui est un athérome embolique. Pas de tubercules. Hématocèle latéro-utérine, d'origine tubaire, que j'ai présentée à la Société anatomique en janvier dernier. Moelle épinière ni atrophiée, ni état gris des racines antérieures et postérieures. Opacités de la presque totalité des méninges spinales, et surtout dans la* moitié postérieure de la moelle, où l'on aperçoit dans l'arachnoïde des surfaces entièrement blanches; déplus, cette membrane ainsi que la pie-mère sont doublées, dans un grand nombre de points, de couches celluleuses nouvelles. En outre il existe des adhérences nombreuses entre les deux feuillets arachnoïdiens. Au niveau de la première dorsale, une coupe transversale de la moelle permet de constater un état de diffluence et de teinte jaune rougeâtre des cordons antérieurs, état qui se continue jusqu'à 3 cen- timètres au-dessous, et est notablement plus marqué à droite qu'à gauche. De plus, à partir de 3 à 4 centimètres au-dessous de la première dorsale, les deux cordons latéraux, vus extérieurement, ont une teinte gris jaunâtre, une apparence gélatineuse et sont évidemment diminués de volume. Cette teinte se retrouve jusque près de la queue du cheval également des deux côtés. 94 On ne remarque aucune altération dans la queue de cheval. La moelle, sectionnée transversalement en plusieurs points, présente cette même teinte gris jaunâtre à partir du point où on la voit extérieure- ment. Cette teinte occupe les cordons latéraux seuls, mais elle ne les a pas envahis tous deux au même degré. A gauche, en effet, la lésion est plus étendue quoiqu'elle ne s'avance pas jusqu'à la substance grise centrale ni jusqu'aux cornes grises, et en reste éloignée de 1 milli- mètre à 1 millimètre et demi ; sa forme est un peu triangulaire, la base du triangle étant dirigée vers la surface ; les bords du triangle ne sont même pas réguliers, mais comme un peu déchiquetés, A droite la lésion est bien moins étendue et moins exactement délimitée. La portion cervicale de la moelle, le bulbe, la protubérance, les pé- doncules cérébraux ne présentent aucune lésion. Méninges cérébrales saines, sauf dans les ventricules où existe un peu de granité fin. Dans le noyau extraventriculaire du corps strié gauche est un ra- mollissement de teinte ocre de 2 centimètres de longueur et de 0,008 de largeur. Une portion des cordons latéraux de teinte grise examinée à l'état frais par H. Liouville présenie : des vaisseaux augmentés de volume, à parois épaissies et couvertes de globules de graisse jusque dans leurs subdivisions. Dans les parois de quelques vaisseaux existent des noyaux que colore le carmm, et par places la gaîne conjonctive est complètement opaque. Au lieu de tubes et cellules nerveuses, on trouve des amas de tissu fibrillaire irès-mince dont les fibres sont courtes et enchevêtrées sous forme d''îlots desquels émergent des conduits grêles, minces, assez longs que l'on reconnaît être des cylindres axis. Dans les parties voi- sines on retrouve quelques cellules normales. Beaucoup de corps amy- JoJides. La moelle a macéré dans une solution faible d'acide chromique, pendant près d'un mois. Des coupes minces peuvent alors être prati- quées et perroeltent de constater qu'une solution de carmin colore d'une couleur violette très-nette les portions de cordons latéraux at- teintes de sclérose, tandis que les autres parties de la mœlle, sauf la substance grise, ne sont pas teintées par le carmin. On voit ainsi que la sclérose est plus étendue dans la moitié infé- rieure de la portion dorsale, qu'elle occupe en plusieurs endroits et surtout à gauche toute la longueur des cordons latéraux sous forme d'un triangle irrégulier, tout en n'atteignant pas cependant la substance grise centrale et les cornes grises dont la sépare un espace sain très-ap- préciable, tandis que dans d'autres parties situées dans la moitié supé- rienre de la portion dorsale et dans la moelle lombaire, la lésion est réduite à une bandelette mince. Le mode de préparation fait voir aussi que la sclérose n'est pas symétrique et s'étend davantage à gauche, ainsi que l'avait déjà fait voir Texamen à l'état frais. Les coupes permettent enfin de constater l'augmentation considé- rable d'épaisseur de méningues, au niveau des points sclérosés et au ni- veau de la région postérieure, quoique l'on ne constate pas de sclérose évidente dans les cordons postérieurs. Les différents travaux de M. Charcot sur la sclérose bilatérale de la moelle et sur son influence sur la production de la contracture des membres m'ont fait penser que cette observation pouvait présenter quelque intérêt à plusieurs points de vue. Et d'abord, ainsi que l'a dit M. Charcot, il est rare de trouver des observations de sclérose où le côté clinique soit bien net, et où les symptômes de contracture aient pu être suffisamment vus pendant la vie. Une seule de ses observations, celle qu'il a publiée dans les Bulletins de la. Société médicale des hô- pitaux de Paris, est complète à cet égard. Mon observation m'a paru pouvoir présenter quelque intérêt, à ce point de vue que j'ai assisté à l'apparition de la contracture, et que n'ayant pas cessé d'observer la malade jusqu'à sa mort, j'ai pu savoir, pour ainsi dire, la date de la lésion. En second lieu, les symptômes et l'anatomie pathologique me parais- sent démontrer que la sclérose est bien primitive, née surplace, et est la conséquence d'une méningo-myélite subaiguë. Les symptômes ap- partenant à cette dernière affection étaient précisément ceux qu'offrait la malade à son entrée, et ce n'est qu'après trois semaines de séjour dans mon service, temps pendant lequel je l'ai examinée tous les jours, ce n'est qu'après ces trois semaines, que se sont montrés les phéno- mènes de contracture qu'il était très-facile de constater et qui ne pou- vaient échapper à un examen môme superficiel. En troisième lieu, la sclérose paraît ici bien évidemment dépendre d'un processus inflammatoire des méninges spinales et de la moelle, processus datant de deux mois et demi. Enfin, la lésion de la partie la plus supérieure de la portion dorsale de la moelle ap'puie singulièrement les opinions de Pourfour du Petit, de Bernard et Schiff, relatives à l'influence du centre cilio-spinal sur les mouvements de la pupille. Cette observation vient s'ajouter à celle d'une atrophie musculaire progressive que j'ai publiée en 1863 dans la Gazete hebdomadaire, et démontre cliniquement ce que les ex- périences de Cl. Bernard avaient fait voir sur les animaux, à savoir que les altérations profondes de la moelle dorsale à sa partie supérieure et celles des deux premières racines antérieures dorsales empêchent les 96 pupilles de se dilater sous l'influence des pincements et piqûres exer- cés sur les membres et le tronc. M. Charcot pense qu'en général, dans les scléroses rubanées pri- mitives (il n'est pas question ici des scléroses rubanées par dégéné- raiion secondaire, consécutives à une lésion cérébrale), la méningite vient après le sclérose; autrement on ne comprendrait pas bien sa dé- limitation. On comprend qu'une irritation se localise à un cordon qui est un organe isolé en quelque sorte des autres cordons, tandis que la bandelette de méninge qui le recouvre n'est pas un tout. M. GuBLER remarque que le décubitus peut expliquer la méningite postérieure indépendamment d'une altération des cordons postérieurs. M. Laborde dit que chez l'enfant on observe fréquemment avec des méningites généralisées des foyers locaux de sclérose des cordons, sans que le lien de causalité soit facile à trouver. M. Magnan remarque aussi que chez les paralytiques généraux , il a vu souvent avec des scléroses diffuses une méningite chronique avec soudure de la pie-mère. Il n'a pu saisir une relation intime entre le pro- duction de l'une et de l'autre de ces affections. COMPTE RENDU DES SÉANCES DE ^ F LA SOCIETE DE BIOLOGil pendant le mois de mars 1869; Par m. a. LÉPINE, secrétaire. PRÉSIDENCE DE M= CL. BERNARD. Séance du 6 mars. M. BoucHUT met sous les yeux de la Société des tubercules de la choroïde qu'il a rencontrés dans un cas de phthisie généralisée. M. LiouviLLE dit avoir vu dans un cas de ce genre la chambre anté- rieure remplie de pus ; il a pensé que la suppuration était la consé- quence des tubercules. — M. Bert présente à la Société des spécimens de graphiques. M. Le- gerot, élève de son laboratoire, a eu l'idée d'employer, au lieu du [_apier enfumé usité jusqu'à présent, le papier au ferrocyanure de potassium qui est employé pour le télégraphe de Morse. Le cylindre métallique est mis en rapport avec l'un des pôles, le style écrivant avec l'autre pôle. Les résultats obtenus sont satisfaisants quand le mouvement n'est pas trop rapide. C. R. 1869. 7 98 • ' M. Bërt appelle ratlenlion sur ce fait que, sur un lapin dont le spinal est arraché, la galvanisation dupneumo-gastrique du côlé opposé amène l'arrêt de la respiration dans la phase expiratrice, tandis que la galvanisation du pneumo-gastrique du côté où le spinal est arraché, l'animal étant bien chloroformé, ne produit rien. M. Bert en conclut que le spinal possède des fibres centripètes dont lexcitation produit l'arrêt de la respiration, A M. Brown-Sequaud a remarqué depuis longtemps que l'arrêt de \^ respiration consécutif à la galvanisation du pneumo-gastrique par un courant fort survient tantôt dans l'expiration , tantôt dans l'inspiration, selon que l'excitation surprend l'animal dans l'une ou dans l'autre de ces périodes. Dès 1853 il a entretenu la Société de ces faits et montré l'analogie que présente Télat de l'animal avec celui qui ré- sulte de la piqûre du nœud vital. 11 y a une sorte de syncope générale, une cessation des phénomènes vitaux ; le sang artériel n'est plus sus- ceptible de se transformer en sang veineux, alors même que le cœur continue à battre. M. Bert a noté que, chez le canard , les mouvements réflexes pro- voqués par l'attouchement du globe oculaire cessent de pouvoir être provoqués une demi-minute seulement après le début de la galva- nisation. M. VuLPiAN dit que Ton peut cependant entretenir les manifestations vitales au moyen de la respiration artificielle. M. Bert a vu que, chez le canard, l'influence de la respiration artifi- cielle en ce cas est nulle. M. Charcot demande quelles sont alors les modifications que pré- sente la température centrale. Il a, depuis deux ans environ, appelé l'attention sur ce fait que, dans l'apoplexie, la température centrale s'abaisse au moment de l'attaque de un ou de deux degrés. Mais cet abaissement ne survient que s'il y a une lésion brusque. Sinon, on ne l'observe pas. Ainsi, par exemple, l'apoplexie qu'il a signalée comme se produisant parfois dans le cours d'une pneumonie chez le vieillard, ne présente pas d'abaissement de la température. M. Brown-Séquard dit qu'en frappant un animal sur la tête, on provoque un état analogue à celui dont il était précédemment ques- tion. Le sang reste rouge, lirritabilité musculaire et l'excitabilité ner- veuse s'exagèrent. La température s'abaisse. Chez l'homme il en est de même à la suite d'une lésion de la moelle cervicale, et trois cas peuvent se présenter : 1° Ou bien à la suite de cet état syncopal, la température s'élève progressivement (elle peut arriver à 40°). 9"^ 2° Ou bien la réaction survient aussitôt; il y a asphyxie. Dans un cas Brodie a noté une température de 44°, 5 dans l'aisselle. 3" Ou bien enfin il y a un état syncopal pur et simple, la température s'abaisse de plus en plus. Cette forme est rare. M. Brown-Séquard l'a vue deux fois. M. Brown-Séquard insiste surtout sur ce fait, que dans l'état asphyxi- que, lors même que l'asphyxie dure longtemps (deux heures par exem- ple), il y a élévation continue de la température. M. LiouviLLE, à ce propos, dit qu'il a récemment constaté à la Pitié les températures suivantes chez un malade qui succomba : Température du rectum, 44°, 8; de l'aisselle, 44°, 6; de la bou- che, 44°. — M. Magnan met sous les yeux de la Société la moelle d'un ma- lade mort de paralysie générale au bureau d'admission des aliénés de la Seine. Les troubles de la motililé consistaient seulement en du tremblement. A l'autopsie on a trouvé une pachyméningite cérébro- spinale considérable, un épaississement notable de Tépendynie et une sclérose diffuse de la moelle avec des plaques disséminées dans les cordons antéro-latéraux. A une demande de M. Charcot, M. Wagnan répond que le tremblement n'avait, en ce cas, rien qui différât du trem- blement qui s'observe ordinairement dans la paralysie générale. — M. Bronw-Séquard présente une thèse inaugurale de M. Coste. Ca travail, déjà ancien (il date de 1851), présente un intérêt au point de vue de l'historique de la question du centre nerveux respiratoire ; d'après Tauteur qui a été guidé dans ses recherches par M. Brown- Séquard, ce centre serait dans l'encéphale lui-même, peut-être dans les lobes cérébraux. — M. JoFFROY présente à la Société un poumon atteint de pneumonie caséeuse lobulaire, recueilli à la Salpêtrière, dans le service de M. Char- cot, sur une femme de 75 ans, ayant succombé à une pneumonie lobaire aiguë qui a envahi toute la partie saine du tissu du poumon dans le- quel étaient disséminés de nombreux noyaux de pneumonie caséeuse, M. Joffroy donne en même temps le résultat détaillé de l'observation microscopique qu'il a faite de ce poumon, et met sous les yeux des mem- bres de la Société une aquarelle due à l'obligeance de son ami Pierret, et représentant les lésions à l'élat frais. Obs. — Marie C..., âgée de 75 ans, admise depuis vingt et un mois à la Salpêtrière pour son grand âge, vivait dans son dortoir sans présenter aucun symptôme frappant. Habituellement elle allait dans les cours; seulement, dans ces derniers temps, elle accusait un peu de faiblesse. Le 26 janvier, à cinq heures du soir, elle était assise sur sa chaise, 100 lorsque tout à coup elle tombe à terre et urine sous elle ; cependant elle ne perd pas entièrement connaissance. La malade est amenée à l'infirmerie, où je la vois presque aussitôt. La tête est portée dans la rotation à gauche d'une manière très-prononcée , toutefois sans déviation conjuguée des yeux. La malade a de plus une tendance irrésistible à se porter de ce côté, et à peine l'a-t-on quittée qu'elle tombe hors de son lit. Pour l'empêcher de tomber de nouveau, on est même obligé de mettre de ce côté une planche à son lit, contre laquelle elle va immédiatement s'appuyer. La tendance à la propulsion à gauche a disparu du jour au lendemain ; mais la rotation de la tête, avec contraction violente des muscles du cou de ce côté, a persisté jusqu'à la mort. La température actuelle est de 39° 4/5. On verra dans les réflexions qui suivent toute l'importance clinique qu'a eue ici l'observation de la température. Ni à l'auscultation ni à la percussion on ne trouve les signes d'une pneumonie. Ce n'est que le 29 janvier que nous en constatons les signes d'une manière évidente dans toute l'étendue du poumon gauche. Après s'être un peu amélioré, l'état de la malade devint de plus en plus mauvais, et la mort arriva dans la nuit du 5 au 6. Autopsie. — Il n'y a rien d'important à noter en dehors de l'état du poumon. En particulier, on n'a rien trouvé qui pût expliquer la rotation de la tête. On n'a découvert aucune lésion des centres nerveux, et les muscles du cou, du côté gauche, comparés à ceux du côté droit, n'ont pas présenté la moindre différence. Leur coloration et leur consistance étaient celles d'un muscle sain. Dans le poumon droit, il y avait de la congestion, mais pas de pneu- monie, pas de tubercules. Dans le poumon gauche, il existait une caverne de la grandeur d'une pe- tite noix dans l'épaisseur du sommet du lobe supérieur. Elle était entou- rée de tissu induré et paraissait ancienne. On n'apercevait pasde granula- tions tuberculeuses ni à la périphérie de cette caverne ni dans tout le reste de l'étendue de ce poumon. Sur une coupe faite dans le parenchyme pulmonaire qui partout présentait la résistance du poumon hépatisé, on voyait se détacher sur un fond rouge brun et granuleux de petits îlots assez nettement circonscrits de matière caséeuse. Les dimensions de ces petits îlots de matière caséeuse variaient entre celles d'un tout petit pois et celles d'une noisette. Ils existaient dans tout le poumon, mais surtout dans le lobe inférieur, se présentant partout sous forme de petites masses à bords irréguliers, mais nets, séparés par un tissu rouge brun, ne renfermant pas de granulations tuberculeuses visibles 101 à l'œil nu, et n'offrant d'autres altérations que celles de l'hépatisation rouge. La coupe des masses caséeuses était saillante et plus nettement granuleuse que celle du tissu rouge. Examen microscopique. — L'examen microscopique de ce poumon a été fait à l'état frais d'abord, puis sur le tissu durci par le séjour dans l'al- cool. Les coupes ont été pratiquées, les unes au niveau des noyaux de matière caséeuse , d'autres dans le tissu rouge intermédiaire à ces noyaux, d'autres enfin, partie dans les noyaux caséeux, partie dans le tissu rouge brun, de manière à pouvoir étudier les premières phases de la transformation caséeuse. Sur des coupes faites dans des points qui présentaient l'aspect de l'hépatisation rouge et en évitant d'approcher de trop près des noyaux ca- séeux, on voyait les lésions de la pneumonie fibrineuse, à savoir : épan- chement de fibrine dans les alvéoles englobant des leucocytes et des cellules épithéliales, mais point d'altération du tissu interalvéolaire. Sur des coupes comprenant seulement de la matière caséeuse , les éléments présentaient une dégénérescence graisseuse très-accusée en certains points, mais en général bien moindre qu'on n'aurait pu le sup- poser. On avait sous les yeux une couche de noyaux et de petites cel- lules arrondies, plus petites que les leucocytes. Tous ces éléments étaient pressés les uns contre les autres, surtout autour des vaisseaux qui alors paraissaient oblitérés, et autour des petites bronches qui sem- blaient être comprimées. En certains points ces éléments devenaient indistincts, et l'on n'avait plus guère sous les yeux qu'une masse gra- nuleuse. Comme on le voit, on avait sous les yeux la structure des gra- nulations tuberculeuses confluentes. Ces noyaux et cellules remplis- saient les alvéoles et existaient en très-grand nombre dans le tissu interalvéolaire, à tel point que le dessin des alvéoles ne semblait '^ue légèrement tracé sur ce fond d'élémens arrondis. Enfin, sur les coupes comprenant à la fois et du tissu caséeux et du tissu hépatisé, on avait, d'un côté, le parenchyme pulmonaire entière- ment envahi par les éléments dont nous venons de parler, de l'autre, ce même parenchyme présentant les lésions de la pneumonie fibrineuse, mais avec cette différence sur la première série de coupes dont nous avons parlé, c'est que le tissu interalvéolaire était épaissi et renfermait un grand nombre de noyaux analogues à ceux qui constituaient dans les masses caséeuses le tissu de la granulation tuberculeuse. Ces noyaux étaient assez uniformément répandus, ils ne présentaient pas, comme dans le tissu caséeux, de groupement particulier autour des vaisseaux et des bronches, et ils devenaient de moins en moins nombreux, à me- sure qu'on s'éloignait des foyers de matière caséeuse. En somme, on avait sous les yeux, dans ces points, les lésions de la pneumonie lo» 102 baire aiguë, pneumonie fibrineuse, et les lésions de la pneumonie in- terstitielle. Ce (jua nous voulons mettre en relief en terminant celte description des lésions histologiques, c'est qu'en certains points le tissu interalvéo- laire était normal; en d'autres points, il présentait les lésions de la pneumonie chronique, et enfin, au niveau des masses caséeuses, tout le parenchyme pulmonaire était envahi par un tissu en tout semblable à celui de la granulation tuberculeuse. Ces lésions étaient distribuées de telle façon qu'on passait insensiblement de l'une à l'autre, de sorte que les points tuberculeux peuvent être regardés ici comme un terme très-avancé de la pneumonie chronique. Dans cette manière de voir, l'altération caséeuse de ce poumon ne serait autre chose qu'une pneu- monie chronique lobulaire. Nous ne voulons pas terminer sans attirer l'attention sur les particu- larités qui ont marqué le début de la pneumonie lobaire. Lorsque, une heure environ après son attaque apoplectiforme, nous avons vu cette malade , la trouvant plongée dans un demi-coma, avec une rotation très- marquée de la tête et une flaccidité assez marquée des membres, nous crûmes tout d'abord à une aïTeclion cérébrale. Mais noire erreur ne fut pas de longue durée, et c'est ici que ressort l'importance clinique de l'étude de la température dans les maladies. Croyant à une attaque d'a- poplexie, nous nous attendions en effet à trouver, comme M. Charcot nous l'a enseigné, une température soit normale, soit [)lus basse que la normale. Contre notre attente, nous avons 39» 4/5, une heure après l'attaque apoplectiforme. Celle donnée était suffisante pour nous faire attribuer une valeur tout autre à cette attaque et la rapporter à l'in- vasion d'une pneumonie. Nous avions en effet réuni deux symptômes qui assez fréquemment mar(juent seuls le début de l'inflammation du poumon : d'aburd la teai[)éralure élevée dont la valeur est grande dans ces cas; en second lieu, l'attaque apoplectiforme qui peut parfois mar- quer, comme on sait, le début de la pneumonie. Séance du 13 mars. Dans une des précédentes séances, M, Joffroy présentait à la So- ciété l'encéphale d'une jeunw femme de 21 ans, morte à la Salpôlrière , dans le service de M. Ctiarcol. Il s'agissait dans ce cas d'une de ces lésions récemment étudiées par M. Cotard.dans sa thèse inaugurale, sous le titre (ï Atrophie parlk Lie du ccryeaw (Paris, 1868). 103 Aujourd'hui, M. Joffroy communique l'observation complète de celle malade, avec tous les détails fournis par l'examen microscopique qu'il a fait de la moelle et des muscles. KYSTES SYMÉTRIQUES DÉVELOPPÉS DANS LES HÉMISPHÈRES CÉRÉBRAUX. Obs. — Marie A... est entrée à la Salpêtrière le 2 juillet 1868. Elle était alors âgée de 21 ans. D'après les renseignements donnés par la mère, A... père était hy- pochondriaque, vivait dans l'isolementet répétait souvent qu'il se ferait mourir. En effet, il s'est noyé il y a treize ans. La mère, âgée de 52 ans, est assez intelligente; elle a toujours été domestique. D'une bonne santé habituelle, elle serait, dit-elle, su- jette, depuis quelques années seulement, à des accidents hystériques. Mariée à 27 ans, elle a eu trois enfants, dont le premier mourut à 4 mois et sur lequel la mère ne peut fournir aucun renseignement. Le second faille sujet de cette observation; enfin le troisième est actuellement âgé de 11 ans, ei se porte bien. Cette femme raconte que, pendant sa dernière grossesse, son mari ayant voulu la battre par jalousie, elle en éprouva une émotion très-vive. Vers l'âge de 2 ans survinrent des convulsions, qui se répétèrent pendant assez longtemps, et assez régulièrement, chaque semaine en- viron. A cet âge seulement la malade commença à parler ; mais jamai elle ne put marcher ou manger seule. Admise aux enfants assistés, vers l'âge de 4 ans, elle eut à souffrir de diverses affections scrofuleuses : ophthalmie, gourme, otorrhée,etc. Depuis cette époque jusqu'au moment de sa translation à la Salpy- trière, nous manquons absolument de renseignements sur la marche de son affection. Voici son état actuel, à la date du Sjuillet 1868. La maladtt est dans le décubilus dorsal, la face expressive et mobil», sans qu'il y ail rien de particulier à signaler dans la forme ou la position de la tête. Il n'existe aucun trouble du côté des yeux ; la malade parle bien, la mémoire semble normale, mais l'intelligence, quoique passablement dé- veloppée, a conservé un caractère infantile. Le tronc, légèrement courbé en avant, présente aussi une inclinai- son latérale droite assez marquée, pour réduire considérablement l'es- pace qui sépare le bord inférieur de la dernière côte de la crête iliaque. L'altitude des membres supérieurs est à peu près la même à droite 104 et à gauche ; le bras est rapproché du tronc, l'avant-bras fléchi sur le bras, par une rétraction considérable du biceps qui limite les mouve- ments de cette articulation huméro-cubitale, et ne permet pas l'exten- sion complète. Le poignet est fléchi à angle droit sur l'avant-bras. Les mouvements de cette articulation sont du reste également limités, et l'extension complète impossible. La main est dans la supination. Elle est bien faite, mais les doigts forment la griffe, les phalanges étant dans un état de flexion légère, mais irréductible, devenant complète par l'extension du poignet. Ces phénomènes de contracture sont sensiblement plus accentués à droite qu'à gauche dans les membres supérieurs. Aux membres supérieurs, nous retrouvons des symptômes du même genre. Ainsi, la cuisse est fortement fléchie sur le bassin, la jambe sur la cuisse; d'autre part, les muscles du mollet, fortement contractures, donnent au pied une position semblable à celle que l'on observe dans le pied bot varo-équin. Les quatre derniers orteils sont également dans une état de flexion assez prononcée. La contracture exagérée des muscles du jarret ne permet que des mouvements très-limités de l'articulation du genou; encore sont-ils très-douloureux et exigent-ils d'assez violents efforts. Les deux membres inférieurs étant légèrement portés dans l'adduc- tion, et comme la malade, en même temps qu'elle est dans le décubitus dorsal, repose sur la face externe de la cuisse droite, il s'ensuit que cette dernière supporte la cuisse gauche. Il n'y a pas de différence sensible de volume entre les membres du côté droit et ceux du côté gauche. Au sacrum existe une escharre peu étendue. Depuis le 8 juillet jusqu'au moment de sa mort qui est arrivée le 26 janvier 1869, des escharres nombreuses se sont montrées et ont ac- quis des dimensions considérables tant en superficie qu'en profon- deur. Au mois de janvier, il en existait au sacrum, sur les fesses, au niveau des grands trochanters, des omoplates, et enfin aux talons. Ce sont ces accidents qui ont emporté la malade. Autopsie (27 janvier 1869). Cavité enccphalique. Il n'existe aucune lésion du cuir chevelu, du crâne, ni de la dure mère. L'encéphale étant enlevé et dépouillé de ses enveloppes, les hémi- sphères cérébraux et cérébelleux sont alors pesés séparément. i05 Hémisphère cérébral droit 375 grammes. — gauche 425 — Hémisphère cérébelleux droit 48 — — gauche 35 — L'hémisphère cérébral gauche ne présente aucune altération à sa sur- face ; mais à l'hémisphère cérébral droit, on est frappé par la moindre longueur des circonvolutions frontales. Par cela même, les circonvolu- tions marginales de cet hémisphère se trouvent sur un plan antérieur aux circonvolutions marginales de l'hémisphère gauche. En arrière des circonvolutions marginales, on trouve le groupe des circonvolutions du lobe sphénoïdal, qui sont très-petites et atrophiées, et présentent un contraste frappant avec celles du côté opposé. En ce point et avant l'ablation de l'encéphale, la palpation faisait reconnaî- tre la présence d'une collection liquide limitée par une mince couche de substance nerveuse. Telles étaient les différences que présentaient les deux moitiés de l'encéphale considéré par sa surface convexe. Or il en existait à la base de plus accentuées encore. La bandelette optique et le pédoncule cérébral droits étaient pres- que de dimensions moitié moindres que les mêmes parties du côté op- posé. La protubérance, dans sa moitié droite, et la pyramide corres- pondante présentaient également une atrophie très-marquée. Outre cette asymétrie des pyramides, on doit signaler dans le bulbe une atrophie généralisée, qui lui donne des dimensions évidemment plus petites que celles d'un bulbe normal. Nous retrouverons, du reste, dans toute la moelle une diminution semblable dans les diverses dimen- sions. L'hémisphère cérébelleux droit était aussi moins volumineux que le gauche ; différence de volume concordant avec la différence de poids, puisque l'un pesait 48 grammes et l'autre 55. Signalons enfin, et toujours du côté droit, l'atrophie considérable de la couche optique et du corps strié. Les hémisphères cérébraux, considérés en masse, présentaient le même volume, bien que le gauche pesât 50 grammes de plus que le droit. Cette différence était due à l'existence, dans l'épaisseur de l'hé- misphère droit, d"une cavité remplie d'un liquide qui s'était écoulé, parce que, ainsi qu'on va le voir, la cavité s'ouvrait librement dans le ventricule. Situé en arrière du corps strié, respectant la partie antérieure du lobe frontal pour s'étendre dans les lobes sphénoïdal et occipital, ce kyste, d'un volume un peu moindre que celui du poing, n'était limité 106 en dehors que par une mince couche de substance nerveuse (0"',01 en- viron). En dedans, la partie antérieure de la cavité kystique était sé- parée de la cavité ventriculaire par le corps strié, la couche optique atrophiée et Tépendynie épaissi ; tandis qu'en arrière les deux cavités communiquaient librementparde larges ouvertures que laissaient entre eux des traclus rubanés, seuls restes de la paroi ventriculaire, qui semblait s'être rompue par distension. Les parois de ce kyste étaient régulières, arrondies et tapissées par une membrane de tissu conjonctif peu vasculaire. L'hémisphère cérébral gauche présentait l'aspect normal; mais la pression sur la paroi du ventricule latéral dénotait la présence d'un li- quide collecté dans l'épaisseur du lobe sphénoïdal. Une coupe transversale de cet hémisphère, au niveau de la queue du corps strié, démontrait en effet l'existence d'un kyste ovalaire, à parois lisses et tapissées par une mince membrane conjonctive. Cette cavité, du volume d'un œuf de pigeon, renfermait un liquide très-limpide analogue à celui qui s'est écoulé du ventricule latéral et du kyste de l'hémisphère droit. La différence de 50 grammes, signalée entre les deux hémisphères, a été obtenue en pesant l'hémisphère droit avec son kyste vide, l'hémi- sphère gauche avec son kyste encore rempli. On a vu, du reste, combien grande était la différence entre ces deux cavités, développées toutes deux dans l'épaisseur de la substance blan- che du centre ovale de Vieussens. La moelle, de môme que le bulbe, présente une atrophie générale; elle est évidemment plus petite qu'une moelle normale. La forme est également modifiée. Ainsi, le contour d'une coupe transversale est con- sidéré par six arc? de cercle inégaux, disposés symétriquement par rapport à Taxe antér(.-pO;téneur, se touchant par leurs extrémités et laissant eiUr'eux des sillons tres-uccusés. Chacun de ces arcs décrits correspond à un des faisceaux blancs de la moelle, faisceaux antérieurs, latéraux et postérieurs. A l'examen microscopique on trouve les éléments nerveux sans allé- ration, aussi bien dans la substance blanche que dans la substance grise, dont les cornes antérieures paraissent un peu raccourcies. En résumé, les éléments de la moelle, tubes nerveux, cellules ner- veuses, éléments de la névralgie, ne présentent aucune altération, si on les considère isolément. Mais un certain nombre de ces éléments semblent avoir disparu, d'où résulte celle atrophie généralu signalée dans la substance blanche comme dans la substance grise. Les nerfs périphériques ont été examinés à l'œil nu. Le nerf mé- dian était le siège d'une névrite interstitielle, qui avait notablement 1G7 augmenté son volume. En le comparant au même nerf pris chez une femme morte de pneumonie, on trouvait une différence très-marquée. II n'en était pas de même du sciati(|ue. Les muscles présentaient une coloration pâle. Au microscope on trouvait les fibres musculaires assez nettement striées , malgré un dépôt de granulations graisseuses qui masquaient partiellement les stries. Le volume des fibres était peu ou point diminué. Les viscères ne présentaient rien de particulier. Lorsqu'on se trouve vis-à-vis de lésions des centres nerveux, il est toujours intéressant : 1° d'examiner le processus de ces lésions; 2° de rapprocher les troubles fonctionnels des lésions organiques. Le premier de ces points a été étudié d'une façon remarquable par M. Cotard , qui a été à même d'observer comme nous, dans le service de M. Charcot, un certain nombre de cas, qu'il réunit et publia avec ceux déjà connus, sous le titre général d'atrophie partielle du cerveau. Cet auteur a cherché à démontrer que la plupart des lésions pro- fondes de l'encéphale, datant de la naissance ou des premières an- nées, devaient être rapportées, non à un arrêt de développement que rien ne prouve , mais bien aux modifications ultérieures d'une lésion primitive de nature variable, mais qu'il n est pas toujours impossible de déterminer. Cette manière de voir est pleinement justifiée par l'étude des modi- fications survenues dans les points du cerveau qui ont été le siège d'inflammations, spontanées ou traumatiques, d'hémorrhagie ou de ra- mollissement. Cette étude des lésions primitives modifiées par un travail secon- daire, nous montre qu'elles peuvent aboutir à un certain nombre de formes terminales, et que l'une quelconque de ces formes terminales peut être le résultat soit de l'une, soit de l'autre de ces affections pri- mitives. Une plaque jaune, par exemple, peut-être due soit à un ra- mollissement, soit à une encéphalite. Aussi comprendra-t-on qu'il est impossible dans nombre de cas de déterminer quelle a été la lésion primitive. La difficulté ira en augmentant à mesure que la lésion vieil- lira, et que ses modifications seront plus profondes. L'observation des transformations de ces lésions primitives, dans leurs différentes phases, a seule permis d'apercevoir le lien qui les réunit à ces lésions se- condaires. Quelle ressemblance, en effet, y a-t-il au premier abord en- tre un kyste et ua foyer de ramoUissemeqt , d'hémorrhagie ou d'en- céphalite? Dans notre observation Taffection remonte à la vie intra-utérine ou 108 aux premières années. Il est diflBcile et de peu d'importance, à notre point de vue, de décider cette question. La malade est morte à 22 ans, et un long intervalle, de vingt années au moins, s'est écoulé entre le moment où elle a été frappée par une affection cérébrale et celui où nous avons examiné son encéphale. Précisément à cause de ce long espace de temps, nous n'avons pu observer aucune particularité qui nous permît de préciser la nature de l'affection primitive. Nous pou- vons bien rejeter l'hypothèse d'une encéphalite traumalique à cause du siège des kystes dans la profondeur de la substance blanche, mais rien ne nous autorise à décider entre des foyers d'hémorrhagie, de ramollissement ou d'encéphalite spontanée, comme lésion originelle. On a pu être frappé par la grande étendue des cavités kystiques. Ce point mérite quelques détails. Lorsqu'un foyer, quelle qu'en soit la na- ture, s'est produit dans l'épaisseur de la substance nerveuse, il peut être considéré comme un centre d'irritation autour duquel se déve- loppe un travail inflammatoire caractérisé par la prolifération des élé- ments de la névralgie dans un réseau plus ou moins étendu. Ce tissu nouveau, sorte de tissu cicatriciel, jouit d'une puissance rétractile qui se manifestera d'une façon d'autant plus accusée que le travail inflam- matoire aura été plus actif et plus étendu. Tantôt ce retrait se fera vers le centre; c'est ainsi que dans les cas d'encéphalite superficielle ou d'hémorrhagie méningée, on a vu s'accumuler sous la dure-mère des quantités parfois considérables de liquide, dont la formation cor- respond à l'atrophie de la substance cérébrale. Dans d'autres circon- stances ce retrait se fera vers la périphérie, comme probablement dans notre cas, et le cerveau considéré en masse aura conservé son volume, malgré une perte considérable de substance. Enfin nous ferons remarquer l'atrophie des lobes cérébelleux et nous insisterons sur cette particularité que le lobe cérébelleux le plus atro- phié était celui de droite, et que c'est aussi dans l'hémisphère céré- bral droit que se trouvait la grande cavité kyste et qu'on remarquait une atrophie considérable du corps strié et de la couche optique. Quant à ce que nous avons observé dans la moelle, nous serions assez disposé à l'expliquer par la disparition des altérations secon- daires qui ont dû se développer consécutivement à l'affection primi- tive de l'encéphale. Cependant il nous faut ajouter que les dégénéra- tions secondaires de la moelle se montrent très-accentuées dans des cas très-anciens de ramollissement, et qu"il ne semble pas y avoir alors aucun travail de restauration ou de disparition. Si maintenant nous mettons en regard des lésions les symptômes que nous avons observés, nous trouverons plus d'un fait intéressant. Dans les lésions du cerveau les troubles fonctionnels se rapportent 109 à trois chefs principaux: l'intelligence, la motilité, la sensibilité. On pourrait en ajouter un quatrième, la nutrition générale des tissus, mais elle semble dévolue plus particulièrement à la moelle, et les symptômes d'atrophie semblent plutôt en rapport avec les modifications secon- daires qu'apportent dans la moelle les lésions de l'encéphale. L'intelligence était assez développée chez noire malade, et ce point est frappant quand on songe aux pertes considérables de substance qu'ont éprouvées les hémisphères cérébraux. Il est vrai que dans ce cas les lésions portaient plus spécialement sur la substance blanche et que l'on pourrait être tenté de rapporter cette conservation des fa- cultés intellectuelles à l'intégrité presque complète des circonvolutions, surtout dans les lobes frontaux. Mais il nous est facile d'opposer à cette théorie un certain nombre de faits de ramollissements superficiels et étendus sans trouble notable de l'intelligence. Nous préférons nous rattacher à une théorie que semble adopter M. Cotard. Il fait en effet remarquer que c'est surtout dans les cas de lésions remontant à la vie intra-utérine ou à la première enfance, que lintelligence a été con- servée. L'analyse de ces faits nous porte à croire que le nouveau-né ou l'enfant qui se trouve ainsi privé d'une partie de son encéphale, y supplée, autant que faire se peut, par l'éducation qu'il donne aux par- ties qui persistent et dont la puissance intellectuelle grandit alors, de la môme manière qu'un enfant privé de son bras droit apprendra à se servir adroitemeni de son bras gauche qui acquerra une grande force. Toujours est-il que jamais on ne trouve d'aphasie dans les lésions de l'hémisphère gauche datant de la première enfance. Les symptômes de paralysie ne présentent chez notre malade rien d'important à noter, sauf la contracture considérable qui s'est montrée des deux côtés du corps, et qui est en rapport avec une lésion double du cerveau. Ces cas sont rares, et M. Cotard n'en a trouvé qu'un seul rapporté par M. Cruveilhier dans son Anatomie 'pathologique. Il en cite un second : c'est une malade que iVl. Charcot lui a montrée dans son service à la Salpêtrière. C'est précisément son observation que nous venons de rapporter. Nous ne disons rien de la sensibilité, qui ne présentait rien d'anor- mal. Et nous terminerons en faisant remarquer qu'un dépôt peu abondant de granulations graisseuses était la seule lésion appréciable dans la fibre musculaire. Les membres étaient amaigris et non pas atrophiés. Nulle part on ne trouvait ces altérations des muscles décrites dans les cas d'atrophie musculaire progressive, oîi l'on a indiqué certaines lé- sions de la moelle. Nous avons vu d'ailleurs que dans celle de notre malade il n'existait aucune altération de cette espèce. 110 — M. Brown-Séquarw, depuis 1860, a eu l'occasion de remarquer qu'à la suite de lésion de la moelle allongée les cochons d'Inde présentaient des lésions des oreilles. Il pensa d'abord que ces lésions étaient des lésions traumaliques accidentelles consécutives à une anesthésie de ces parties; mais depuis cinq mois, il a eu l'occasion d'observer des faits qui ont modifié son interprétation. Il a vu notamment une gan- grène sèche des deux oreilles résulter d'une lésion des corps restifor- mes, près du calamus scriptoi^ius. Quand la piqûre est unilatérale, la lésion de l'oreille a lieu surtout du côté correspondant. De ce même côté, il existe de l'hyperesthésie pendant le premier jour après la lé- sion, tandis que du côté opposé c'est de l'anesthésie qui est observée. Mais après de vingt à trente heures, la première oreille devient encore plus anesthésique que la seconde. La lésion auriculaire consiste soit en une petite hémorrhagie, soit en une gangrène sèche. M. Brown-Sé- quard pense que ce fait démontre la possibilité de la production de t'hématome de l'oreille des aliénés, par une influence morbide du sys- lème nerveux, dans les cas où il est évident qu'il n'y a pas eu de vio- lence extérieure. M. Magnan pense qu'il faut faire jouer un rôle prépondérant au trau- matisme : dans six autopsies qu'il a faites, il a toujours vu le cartilage rompu, et non simplement usé ou perforé consécutivement à l'épanche- ment. M. Laborde est disposé à faire jouer un rôle au traumatisme; mais il n'en est pas moins exact que l'hématome se produit chez des malades parfaitement surveillés, ainsi qu'il en a cité des exemples. Il pense qu'il doit exister même dans les cas où le traumatisme est évident une prédisposition, attendu qu'il faut un traumatisme énorme pour rompre le cartilage de la conque chez un individu sain. Sur l'influence des courants continus par la quantité de l'urée DE l'urine; par M. Onimus. Un courant centrifuge fait diminuer la quantité. Sur lui-même, il a obtenu les chiffres suivants (la quantité d'urée est rapportée à 1,000 gr. d'urine) : Avant Après 14,62 13,8 Autre exp. 22,3 20,5 Id. 14,4 12,6 Le courant ascendant détermine un effet inverse. Avant Après 14,7 18,3 Autre exp. 11,7 13,2 111 Sur des lapins, une électrisation prolongée plus longtemps que chez l'homme a donné des résultats encore plus tranchés. Ainsi une galva- nisation ayant duré une demi-heure (courant descendant) : Avant Après 10.. 6,2 Après la galvanisation, le pouls diminue de fréquence (courant ascen- ëant) : 12,6 17 2,7 6,2 Après la galvanisation, le pouls augmente de fréquence. Si elle ne porte que sur un des membres inférieurs, la différence est moindre : 12,3 12,9 M. Onimus rappelle ensuite que dans certains cas de paralysie mus- culaire où le courant d'induction ne provoque pas de contraction, on en obtient par le courant continu. Il cite à ce sujet un cas de paralysie fa.ciale et un cas de paralysie saturnine qu'il a pu observer dans le service de M. Axenfeld. M. Charcot rappelle à ce propos les recherches d'Erb et de Ziemsseo, qui ont établi qu'il existe entre les deux courants un antagonisme d'ac- tion. Séance du 20 mars. M. Brown-Séquard a pratiqué sur cinq cobayes la section du sciati- que le 20 février dernier; ils sont devenus susceptibles de présenter une attaque complète d'épilepsie dès qu'on irrite la zone épileptogène; seulement, ils n'ont encore qu'une seule attaque, tandis que chez les animaux qui ont eu la moelle lésée (depuis plus de trois semaines à la vérité), on observe une séi^ie d'attaques après la même irritation. M. Brown-Séquard fait constater ensuite que la paroi abdominale est plus relâchée du côté de la section du sciatique que du côté opposé. C'est là un phénomène paralytique analogue à celui qu'on observe après une hémisection de la moelle. Cette paralysie après la section du scia- tique est un phénomène réflexe fort remarquable. En même temps on observe aussi de l'hyperesthésie de l'abdomen du même côté et un peu d'anesthésie du côté opposé. Enfin, il dit qu'au moment de la section du sciatique, de même qu'a- près l'hémisection de la moelle, on voit paraître des larmes dans l'œil correspondant. 112 L'étendue de la zone épileptogène paraît être exactement la même, qu'il y ait section du sciatique ou lésion médullaire. Les poux s'accumulent sur la peau de cette zone , lors même que l'animal peut avec son membre se gratter à ce point ; seulement il faut savoir que les poux n'existent pas sur les parties blanches de la peau, de telle sorte que si la zone épileptogène était uniquement formée de peau à poils blancs, il ne faudrait pas s'attendre à y trouver des poux. Répondant à une question de M. Gubler, M. Brown-Séquard dit qu'il a réuni vingt-sept ou vingt-huit observations d'épilepsie chez l'homme dans lesquelles il suffisait d'irriter un point limité du corps pour pro- duire l'attaque. Seulement le siège du point épileptogène est très-va- riable dans ces différents cas. De la forme des muscles pectoraux et du sternum des oiseaux dans LEURS RAPPORTS AVEC LA SURFACE DE l'aILE j par M. MaREY. On a cherché à déterminer le rapport de la surface des ailes avec le poids des oiseaux. Mais dans les mensurations qui ont été faites, il s'est trouvé des écarts singuliers. Certaines espèces d'oiseaux comparées à d'autres de poids égal n'avaient que la moitié ou le tiers de leur sur- face d'ailes. J'ai observé que les oiseaux les mieux pourvus de surfaces alaires n'exécutaient pendant le vol que des battements de peu d'amplitude, tandis que les autres rachètent par une grande étendue de parcours de leur aile la moindre résistance que l'air présente à leurs mouve- ments. Au point de vue dynamique, les deux oiseaux peuvent produire le même travail, mais sous deux formes bien différentes. On sait, en effet, qu'au point de vue du travail produit, l'élévation de 10 kilogrammes à 1 mètre ou de \ kilogramme à 10 mètres sont une égalité. Dans les deux cas, le travail à effectuer sera de 10 kilogrammes. En physiologie le même principe se retrouve, et l'on peut à l'avance, d'après le volume relatif de deux muscles, évaluer les rapports du travail qu'ils peuvent produire. Une même quantité de transformations chimi- ques, engendrées au sein de deux masses musculaires égales, engen- drera le même travail. Mais on sait, d'autre part, que l'effort statique qu'un membre est susceptible de déployer croît en raison du diamètre de ce muscle, tan- dis que l'étendue du raccourcissement que ce muscle peut subir croît en raison de sa longueur. Ce sera donc la forme du muscle qui réglera la manière dont le tra- vail sera produit. Deux muscles de même poids devront faire le même travail. Mais l'un, gros et court, pourra soulever un poids considérable 113 aune faible hauteur; l'autre, long et grêie, soulèvera un poids moin- dre, mais lui fera exécuterun long [parcours. Dans Tanatomie humaine, le deltoïde et le couturier fournissent deux types de cette réparlition, différente de la substance musculaire et des différences consécutives dans la manière dont s'effectue le travail. Les oiseaux, qui dans les mouvements de leurs ailes présentent ces différences d'amplitude que je viens de signaler, offrent un exemple frappant de la variation de la forme des muscles, suivant la manière dont s'exécute le travail musculaire. Deux oiseaux pourvus de surfaces d'ailes très-différentes, trouvant dans ] air des résistances proportionnel!e.< à ces surfaces, devront exer- cer un effet croissant en raison de ces surfaces. La section transversale des muscles moteurs de l'aile, c'est-à-dire des pectoraux, devra donc croître en raison de la surface alaire. Mais, avons-nous dit, les oiseaux à faible surface d'aile exécutent des mouvements d'une grande amplitude. Les pectoraux étroits de ces oiseaux devront donc avoir une grande longueur. En somme, la substance musculaire pourra être égale chez les oi- seaux munis de grandes ou de petites ailes; seulement elle sera diffé- remment répartie. J'ai pu, en disséquant un certain nombre d'oiseaux, constater l'exactitude de cette prévision. Les buses, les goélands ont les muscles pectoraux gros et courts en rapport avec une grande sur- face d'ailes. Les canards et les pingouins ont les pectoraux longs et grêles. Mais il n'est pas besoin de disséquer les muscles eux-mêmes pour s'assurer de la réalité de cette relation anatomique. Les squelettes d'oiseaux permettent, d'après la longueur du sternum, d'estimer la longueur des muscles pectoraux qui y prenaient leurs attaches. On sait, d'autre part, que chez les oiseaux dont les ailes sont grandes, c'est particulièrement du côté des os de l'avant-bras que prédomine le développement du squelette. On devra donc trouver le rapport sui- vant entre les pièces osseuses des différents squelettes d'oiseaux : Avant-bras très-long. Sternum très-court, large et profond. Avant-bras très-court. Sternum très-long et étroit. Sur un grand nombre de squelettes, j'ai pu vérifier la réalité de ce rapport. Note sur un cas de paralysie générale avec pachyméningite cérébro- spinale ; sclérose interstitielle difflse de la moelle et localisations PARTIELLES SOUS FORME d'ÎLOTS, DE SCLÉRO.SE OU DE PLAQUES IRRÉGULIÈRES ; par M. Magna N R... (Ernest), chapelier, âgé de 51 ans, entre le 26 septembre 1868 C. R. 1869. 8 114 au bureau d'admission (Sainte-Anne). Depuis plus de dix ans ce malade est bizarre, excentrique, se livre à des excès de tout genre, développe dans tout ce qu'il fait une activité désordonnée qui a abouti à sa ruine et à celle de sa famille. Depuis trois ans il est incapable de tout tra- vail, il présente un affaiblissement progressif des facultés intellec- tuelles avec du délire ambitieux et des alternatives d'agitation et de dépression. Depuis quelques jours il ne reste pas en place, il devient loquace, s'échappe de chez lui, vagabonde, prend des voitures qu'il ne peut payer et se fait arrêter. A son entrée, il présente un délire ambitieux très-incohérent; il distribue les millions, les pierreries à son entourage; il se dit grand seigneur, Dieu, roi, empereur; il va faire le bonheur de tout le monde, il est enchanté de se trouver à l'hôpital; tout est superbe; il a des cheveux de toute beauté, etc. Ses facultés sont notablement affaiblies, sa mémoire est peu précise, la parole est hésitante, les lèvres, la langue et les mains sont trem- blantes ; les pupilles restent égales. Pendant les mois d'octobre et de novembre l'agitation avec le délire ambitieux persistent, l'insomnie est presque constante. La parole s'em- barrasse de plus en plus ; les mains et les bras offrent un tremblement très'considérable. Épuisé par cette excitation continuelle, il meurt le 8 décembre 1868, sans présenter du côté de la mobilité des phénomènes différents de ceux qui ont été signalés. Autopsie* — ' La dure-mère cérébrale est recouverte à sa face interne par une néo-^membrane mince à la convexité, plus épaisse à la base du crâne et logeant dans son épaisseur de petits foyers hémorrhagiques. La dure-mère spinale présente, par places seulement, des couches minces de néo-membranes ; aucune d'elles n'est le siège d'hémorrha- gies. L'arachnoïde et la pie-mère cérébrale sont opalines, épaissies, et adhèrent dans quelques endroits à la couche corticale. Dans la moelle, les méninges sont épaisses, infiltrées de sérosité, et dans quelques en- droits on voit appendues à l'arachnoïde de petites écailles ossiformes, minces, dures, d un blanc nacré de 7 à 8 millimètres de diamètre. La couche corticale est d'un rouge violacé dans toute son étendue, la substance blanche est légèrement injectée, les ventricules latéraux sont dilatés et renferment 40 grammes environ de sérosité. Leur surface est d'un rouge violacé, un peu ramollie et chagrinée. Lépendyme est éga- lement épaissi et mou sur le quatrième ventricule. En examinant la moelle à l'extérieur, au niveau des racines de la cinquième paire cervi- cale, on aperçoit du côté droit, par transparence à travers la pie-mère, 1!5 une tache grisâtre de 2 centimètres 1/2 de hauteur, occupant dans son point maximum tout le cordon latéral et une partie du cordon antérieur. La racine antérieure droite de la cinquième paire est grisâtre et d'un volume deux fois moindre que celle du côté opposé. -Les racines anté- rieures de la quatrième et de la sixième paire cervicales ne présentent pas de changement notable. Une coupe pratiquée à ce niveau montre une atrophie du cordon antéro-latéral droit ; tout le cordon latéral a pris une teinte grisâtre gélatineuse ; le cordon antérieur, grisâtre dans la partie profonde, n'a plus qu'un reflet blanc grisâtre à sa périphérie. Le cordon postérieur du môme côté a une légère teinte grisâtre diffuse, d'autant plus apparente que le cordon postérieur gauche a sa teinte blanche à peu près normale. A 3 centimètres au-dessus de cette dernière coupe, on ne voit plus de coloration grise du cordon latéral droit, mais les cor- dons postérieurs offrent une teinte grisâtre assez marquée dans leur moitié antérieure. A la partie moyenne de la région dorsale, les cordons latéraux sont grisâtres dans le voisinage des cornes postérieures et à la partie interne des cordons postérieurs; à la fin de la région dorsale on aperçoit des reflets grisâtres sur les cordons latéraux et postérieurs, mais à un degré moindre que dans les régions précédentes, sauf toute- fois dans le prolongement de la corne postérieure du côté droit et de la portion avoisinante du cordon latéral, où la teinte grise gélatineuse est très-marquée. Examinées au microscope, les parcelles du tissu médullaire, prises au niveau des portions à teinte faiblement grisâtre, montrent des gra- nulations et des corps granuleux disséminés dans la préparation ; en outre, sur les parois des vaisseaux, les gouttelettes graisseuses forment de petits amas granuleux plus ou moins réguliers; en colorant par la liqueur ammoniacale de carmin, on aperçoitun nombre assez considé- rable de noyaux, la plupart arrondis, quelques-uns allongés. Une pré- paration provenant de l'îlot de sclérose de la région cervicale, montre un fond finement grenu, parsemé de noyaux arrondis et allongés, quel- ques granulations isolées et de rares corps granuleux. Dans une partie de la préparation se montrent des striations fines avec des noyaux allongés qui se dessinent plus nettement sous l'influence de l'acide acétique. Après le durcissement dans une solution très-étendue d''acide chro-» mique, les coupes minces font voir, d'une manière encore plus nette, ces diverses lésions. Une coupe de la région cervicale, au niveau du point le plus altéré, montre à un fiiible grossissement la sclérose com- plète du cordon latéral droit, la sclérose incomplète du cordon anté- rieur qui est atteint surtout dans ses parties profondes, présentant sur les limites une dentelure très-irrégulière, avec des prolongements plus 116 ou moins épais qui rampent à travers les groupes de tubes en les écar- tant les unes des autres. En dedans et au voisinage de la substance grise, la lésion dépasse la fissure antérieure, se propage à la partie in- terne et postérieure du cordon antérieur gauche, sous la forme d'un croissant dont la concavité, qui regarde en deiiors, donne naissance à de petits prolongements rameux qui s'étendent plus ou moins loin dans l'épaisseur de ce cordon. Du reste, le segment gauche de la coupe, en dehors môme de cette partie malade, n'est pas libre de toute altération, les cloisons interstitielles qui le sillonnent, notablement épaissies, sont l'indice du travail d'irritation chronique qui s'est emparé de l'organe dans toute son épaisseur. La substance grise elle-même est atteinte, les cornes antérieures et postérieures du côté droit sont atrophiées; les cellules nerveuses sont toutes le siège d'une infiltration granulo-grais- seuse et pigmentaire très-abondante; quelques-unes, fortement disten- dues, ont pris une forme globuleuse tout à fait arrondie, et leurs noyaux ne sont plus apparents. En arrière et à droite du canal épendymain , on trouve une lacune de désintégration granuleuse, analogue à celles que Lockhart Clarke a signalées dans les cas de tétanos et de paralysie gé- nérale et que nous avons déjà trouvées nous-même dans d'autres cas de ce genre. Les cornes du côté gauche ne paraissent pas avoir subi d'alté- ration. Au-dessous de ce point maximum et dans l'étendue de 7 à 8 mil- limètres, la plaque de sclérose persiste en conservant à peu près le même siège et la même intensité, puis elle s'arrête brusquement; au-dessus, au contraire, elle diminue bientôt et à mesure qu'elle disparaît, elle se limite à la partie externe du cordon latéral en affectant la forme d'un arc à convexité dirigée en dehors suivant le bord de la moelle. IVIais sur la coupe où elle se trouve réduite à une simple ligne et que l'on peut regarder comme la limite supérieure, on voit les cordons postérieurs devenir malades sur les parties profondes. Ces différentes localisations se dessinant très-nettement sur les préparations colorées par le carmin. Des coupes minces, pratiquées sur la région dorsale, montrent égale- ment une sclérose interstitielle diffuse avec des points plus altérés au niveau des cordons postérieurs et latéraux, dans le voisinage de la substance grise, mais sans présenter la moindre régularité et sans que l'examen d'une coupe quelcon lue, à une distance même très-rappro- chée, puisse faire prévoir, comme dans les cas de dégénérescence se- condaire, par exemple, le siège et le degré d'altération occupant la moelle soit au-dessus, soit au-dessous. En exammant à un grossissement de 300 diamètres la partie la plus altérée, on ne voit plus, comme à l'état frais, les granulations grais- seuses et les corps granuleux qui ont disparu sous l'influence de la ma- cération dans la solution étendue d'acide chromique; mais on retrouve H7 un fond finement granuleux, parsemé de noyaux arrondis et allongés et de cylindres d'axe, dépourvus de myéline. Les coupes de quelques cylindres d'axe dont le volume paraît augmenté pourraient, sans un examen attentif, être pris pour des noyaux arrondis. Partout les parois des vaisseaux sont épaissies et couvertes de noyaux. Dans les parties où l'altération est moins avancée, on aperçoit un développement no- table des cloisons interstitielles et par place des noyaux allongés; dans toute l'étendue de la moelle, du reste, le tissu interstitiel est hyper- trophié à un degré plus ou moins avancé. Dans le cerveau, on trouve à la couche corticale les éléments nu- cléaires et cellulaires très-granuleux, la paroi des vaisseaux épaissie et couverte de noyaux; dans les parties blanches, on voit de nom- breux noyaux parsemés entre les tubes; les parois vasculaires sont épaissies comme dans la couche corticale. Pendant la vie on n"a rien remarqué, du côté du bras droit, pouvant se rattacher à la plaque de sclérose et à l'atrophie de la racine anté- rieure droite de la sixième paire cervicale qui lui correspondait; mais il est possible qu'en raison de l'agitation du malade, quelque trouble partiel du mouvement (contracture, paralysie ou mouvements convul- sifs limités) ait échappé à l'examen ; de sorte que nous ne pouvons rien préciser sur ce point de physiologie pathologique. L'intérêt capital de celte observation, c'est de montrer de la ma- nière la plus évidente le mode de développement et de propagation de l'inflammation chronique interétilielle diffuse des centres nerveux dans la paralysie générale. Examinée au microscope, la moelle se montre malade dans toute son étend;. e; le tissu interstitiel hypertrophié forme des cloisons épaissies qui emprisonnent les tubes nerveux dans des mailles de plus en plus étroites, dont le resserrement aboutit à la pro- duction d'îlots partiels de sclérose. C'est ainsi que la plaque scléreuse que nous avons trouvée à la région cervicale, plus dense au niveau du cordon latéral droit, envoie de ce point, comme d'un centre, des irra- diations qui s'étendent de proche en proche, ne respectant en quelque sorte aucune limite. Nous voyons, en effet, du cordon latéral droit, la lésion gagner en avant le cordon antérieur droit, s'étendre vers la fis- sure antérieure, dépasser celle-ci, atteindre le cordon antérieur gau- che; de plus, en airière, la corne postérieure droite est elle-même comme engaînée dans une enveloppe de sclérose, et le cordon posté- rieur se trouve, lui aussi, modifié dans les parties externes, sur les confins de la substance grise. La lésion, nous l'avons vu, ne se termine pas brusquement sur les bords; elle off're des lignes dentelées d'où partent en tous sens des branches de plus en plus ténues qui s'insinuent à travers les faisceaux de tubes restés libres. Cette disposition rappelle. 118 de tous points, les larges cloisons avec les îlots de 'sclérose que pré- sente le foie affecté de cirrhose. Dans les deux cas on trouve une lésion s'étendant à tout l'organe avec des localisations plus marquées sur certains points. L'inégale distribution de la lésion sur les différents cordons, son mode irrégulier de propagation, l'absence de toute corré- lation entre elle et les lésions situées immédiatement au-dessus ou au- dessous, sont tout autant de preuves qu'il y a là une lésion diffuse avec des noyaux indépendants distribués sans règle fixe et sans aucune su- bordination à un système déterminé de fibres. Ce qui se passe ici pour la moelle arrive également pour le cerveau, dans quelques circon- stances où il se surajoute à l'encéphalite interstitielle diffuse des alté- rations plus prononcées sur quelques points. Dans le cas actuel, les analogies entre les lésions du cerveau et de la moelle ne se bornent pas aux modifications survenues dans les centres nerveux; les méninges elles-mêmes viennent démontrer que l'irritation chronique se propage des enveloppes cérébrales aux mé- ninges médullaires en conservant les mêmes caractères. Nous trouvons en effet la surface interne de la dure-mère spinale tapissée par des plaques de fausses membranes, comme la dure-mère cérébrale. Quoique le même travail morbide (inflammation chronique) ait pré- sidé au développement des altérations dans l'épaisseur des centres nerveux et dans les enveloppes, néanmoins la distribution des diverses localisations ne permet pas d'établir de relations directes entre elles, d'après le siège qu'elles atfeclent. Si dans quelques cas les méninges semblent pouvoir être mises en cause pour expliquer certaines locali- sations, le plus souvent les différents noyaux de sclérose, dans les faits de myélite interstitielle diffuse, se produisent indépendamment des membranes. D'ailleurs, dans la plupart des cas, c'est au voisinage de la substance grise et non à la périphérie que prédominent les alté- rations. RECHERCnES EXPÉRIMENTALES SUR LES DIVERS MÉCANISMES d'oCCLUSION DU larynx; par il. le docteur Krisdaber. L'occlusion du larynx comporte une division importante : 1° l'occlu- sion phonétique, 2° l'occlusion de l'effort. Dans la première, il y a chez l'homme, au moment où la phonation doit se produire, rapprochement complet des deux cordes vocales inférieures dans toute leur longueur; ce rapprocliement complet ne dure qu'un temps extrêmement court (une fraction de seconde), et aussitôt après les cordes vocales s'écar- tent un peu pour laisser passer l'air expiré pendant la phonation. La fente ainsi formée entre les lèvres de la glotte est très-variable, suivant H9 la hauteur, l'intensité et le registre de la voix. D'une manière générale les cordes vocales s'écartent pour former des notes aiguës dans la portion la plus rapprochée de l'attache antérieure, et la fente décrite ainsi a sensiblement une forme elliptique quand les sons sont très-éie- vés; à mesure que l'on descend la gamme, la fente prend la forme d'un fuseau; dans le médium, la portion antérieure des lèvres de la glotte est entièrement fermée, et lorsque alors on descend la gamme jusqu'aux notes les plus profondes , la glotte tend à prendre une forme triangu- laire à base postérieure. Cette dernière forme, en s'exagérant, devient celle de l'expiration muette; la glotte alors complètement ouverte af- ecte cette forme franchement triangulaire que l'on connaît. On voit les lèvres de la glotte vibrer franchement et très-distincte- ment pendant la phonation du registre de poitrine, excepté cependant dans les notes très-élevées. Je ne peux dire si la vibration des cordes vocales dans les notes très-élevées a lieu ou non; je me contente de constater que les vibrations ne peuvent alors être vues à l'examen la- ryngoscopique, fût-ce même à la lumière solaire. Pendant toute la durée de la phonation, les replis thyro-aryténoïdiens supérieurs s'écartent complètement; cet écartement devient de plus en plus considérable à mesure que le son monte : le vestibule du larynx devient par conséquent très-spacieux en ce moment. Le phénomène de ^occlusion du larynx est tout autre pendant le mécanisme de l'effort, qu'il s'agisse d'une occlusion produite par n'im- porte quelle cause: telles sont la toux, l'excrétion des matières fécales ou des urines, /'action de lever un fardeau et ainsi de suite. Dans tous ces cas il se forme un véritable sphincter accidentel qui produit non- seulement une occlusion, mais une constriction des parties sus-glot- tiques de la cavité du larynx : les replis thyro-aryténoïdiens supérieurs sont rapprochés complètement l'un de l'autre, la muqueuse des aryté- noïdes se joignant à celle qui recouvre les cartilages de Santorini, se plisse, repoussée en avant ; le bourrelet de l'épiglotte repoussé est au con- traire vers le plan postérieur; il se forme ainsi un rapprochement tel des parties qui constitue le plancher du vestibule que de ce mécanisme ré- sulte un véritable sphincter des voies aériennes. Les cordes vocales infé- rieures participent probablement à ce mécanisme; mais on ne peut les apercevoir, en ce moment au moins, sur l'homme. Sur le chien que je montre à la Société de biologie et sur lequel j'ai renversé le larynx au devant du cou, vous pourrez voir le double mécanisme dont je parle : quand je fais crier l'animal en le pinçant, il se produit l'occlusion phonétique (il ne pousse que des cris aigus) ; quand il fait, sans crier, des efforts pour fuir, il se produit nettement le mécanisme sus-glottique dont je viens de signaler les principaux détails, mais vous pouvez voir 120 aussi que sur le chien, dans ce dernier acte, les cordes vocales infé- rieures sont complètement rapprochées l'une de l'autre. Dans le mécanisme de l'effort on produit quelquefois un son particu- lièrement rauque et déchiré, sans valeur musicale : c'est le son de l'effort (1). Son mécanisme peut être observé au miroir du laryngo- scope; je l'ai étudié attentivement sur moi-même, et j'engage la Société de biologie à vouloir observer ce mécanisme, qui est très-visible sur moi. (M. Krishaber en fait la démonstration au moyen de l'auto-laryn- goscope.) Au moment où par le simulacre de l'effort je produis sur moi ce que j'appelle le sphincter des voies aériennes, je pousse ce cri parti- culier que l'on entend dans l'effort, et vous pouvez voir qu'il se forme presque au milieu de ce sphincter un orifice sensiblement arrondi, dont les bords entrent très-visiblement en vibration en engendrant le son dont je parle. La production de ce son pendant les grands efforts aune signification importante. En effet, l'air qui, dans les grandes et puis- santes actions de l'organisme, se trouve ainsi emprisonné dans les pou- mons par deux plans horizontaux, dont l'inférieur est le diaphragme thoraco-abdominal, et le supérieur n'est autre que le sphincter des voies aériennes que je viens de décrire, l'air est comprimé dans le tho- rax par l'action très-énergique de tous les muscles, dont une des inser- tions se fait sur la cage thoracique. C'est ainsi que l'effort amène des effets immédiats sur la circulation inlra pulmonaire et consécutivement sur le cœur. Or si, au moment du plus grand effort, le larynx s'ouvrait subitement et largement, il serait impossible qu'il ne survint pas en ce moment une perturbation plus ou moins sérieuse sur l'organe central de la circulation. Mais l'occlusion sus-glottique que nous avons mon- trée si complète qu'elle mérite le nom de sphincter des voies aériennes, ne laisse échapper l'air que lentement, successivement; et comme cet air s'échappe sous une très-forte pression, il se forme ce son particulier rauque, déchiré, qui est le son de l'effort. (Pour plus de détails, voir les mémoires de la Société de biologie.) Séance du 27 mars. M. VuLPiAN, à l'occasion du procès-verbal de la dernière séance, de- mande à M. Brov^rn-Sequard s'il a remarqué quelque trouble de la pu- pille après la section du sciatique; il se rappelle avoir constaté quel- (1) C'est ce son que profèrent les boulangers dans l'art de pétrir; c'est ce son que les femmes profèrent pendant les efforts de la parturi- tion ; toute espèce d'effort peut d'ailleurs le produire à un degré moindre. 121 que trouble pupillaire après la section du sciatique chez une grenouille. M. Brown-Séquard répond que quelquefois chez les cochons d'Inde ayant eu le sciatique coupé, il a trouvé la pupille dilatée, tandis que l'hémisection de la moelle produit, comme on sait, la contraction de la pupille, à moins cependant que cette héraiseclion soit faite loin du centre cilio-spinal (vers la première lombaire, par exemple), auquel cas on peut voir la pupille dilatée. Chez l'homme, après une irritation de l'intestin par des vers, il y a dilatation; la constrictioa de la pupille est l'exception. Sur un autre animal, M. Brown-Sequard a fait presque simultanément la section du sciatique et l'hémiseclion de la moelle du côté opposé. Or, chez cet animal il n'y a ici, après une douzaine de jours, que quel- ques-uns des premiers phénomènes de l'attaque, après l'irritation de la zone épileptogène du côté correspondant à celui de la section du sciatique. Faut-il conclure de ce fait que l'hémisection de la moelle du côté opposé diminue la tendance à la production de l'attaque? C'est ce que de nombreuses expériences démontreront. M. Brown-Séquard signale encore le fait suivant : une femelle qui a subi la section du sciatique a un commencement d'attaque. Or, du côté de la section, la sécrétion lactée est augmentée; elle est notablement diminuée du côté opposé. Après l'hémisection de la moelle, il y a aussi augmentation de cette sécrétion du côté correspondant, mais peut-être à un moindre degré. Les attaques peuvent être provoquées à partir du troisième jour après la section du sciatique; elles sont complètes quelquefois après huit jours, tandis qu'après l'hémisection de la moelle on ne voit guère ap- paraître d'attaques complètes qu'au bout de trois ou quatre semaines. M. Brown-Séquard signale l'intérêt que présentent ces recherches si l'on en compare les résultats avec ceux de la pathologie humaine. Ainsi il a pu réunirquaranteetuncas d'épilepsie survenue chezdes per- sonnes qui avaient eu une lésion traumatique ou une irritation de cause interne sur des nerfs lombaires, soit du sciatique ou des ramifications de ces nerfs. Répondant à une question de M. Liouville, il ajoute que sur ce nombre, il y avait quatre ou cinq amputés. Chez l'homme, il semble que les lésions des nerfs du membre inférieur exposent plus à l'épilepsie que celles des nerfs des membres inférieurs, M. VuLPiAN dit qu'il regrette d'avoir omis de mentionner dans la note qu'il a publiée dans les Archives de physiologie (tome II, page 297), que l'interprétation du fait avait été suggérée par M. Brown-Séquard. —M. Rouget met sous les yeux de la Société une série de graphiques qui lui paraissent prouver en faveur de sa théorie de la contraction m musculaire. Il s'appuie sur le fait que le tétanos se produit d'autant plus facilennent que la nutrition est moins active chez l'animal, sur cet autre fait qu'on obtient (lors même qu'on a sensibilisé le levier jusqu'à la limite du possible) une ligne droite pendant le tétanos au bout du même nombre de vibrations toutes choses égales d'ailleurs; sur ce fait enfin qu'en accroissant l'intensité du courant sans accélérer le nombre des excitations, on fait disparaître plutôt les oscillations de la ligne d'ascension. COMPTE RENDU DES SÉANCES DE ^ r LA SOCIETE DE BiOLOGÎE PENDANT LE MOIS D'âVRIL 1869 Par m. J. HAYEM, secrétaire. PRÉSIDENCE DE M. CL. BERNARD. Séance du 3 avril. Des courants dérivés et des courants de polarisation dans les tissus vivants, par MM. Legros et Onimus. En voulant étudier, à l'aide d'un appareil thermo-électrique, les mo- difications de température que détermine dans les tissus le passage des courants électriques, nous avons observé deux phénomènes importants, étrangers aux variations de température, mais qui se sont manifestés par le galvanomètre thermo-électrique. Ces deux phénomènes sont, l'un, les courants dérivés, et l'autre, les courants de polarisation qui se pro- duisent dans l'organisme sous l'influence de courants électriques. En plaçant dans deux membres opposés les aiguilles thermo-élec- triques, on obtient, enélectrisant undes membres, une déviation brus- que et considérable de l'aiguille du galvanomètre thermo-électrique. 124 Cette déviation a lieu dans un sens différent, selon que le courant est ascendant ou descendant. Si les pôles de la pile sont placés complètement en dehors des mem- bres dans lesquels plongent les aiguilles Ihermo-éleclriques, mais tou- jours dans le corps du même animal, par exemple dans les deux mem- bres antérieurs, on obtient encore une déviation de l'aiguille en élec- trisant une partie éloignée de l'animal, telle qu'une des pattes de derrière. On obtient les mêmes effets et même bien plus prononcés en em- ployant, au lieu du galvanomètre thermo-électrique, un galvanomètre ordinaire très-sensible. On n'obtient ces effets que lorsqu'on emploie des courants continus; il est impossible de les constater avec des couranis d'induction. C'est probablement à l'exislence de ces courants que sont dus les phénomènes de phosphènes, de bourdonnements d'oreille et de goût métallique qui se produisent chez l'homme quand on fait passer un courant continu dans les l'égions voisines de la tète. Ces courants dérivés peuvent également donner lieu à des erreurs sur la production des contractions réflexes. C'est ainsi que l'un de nous avait publié des expériences sur les contractions réflexes, déter- minées par les courants continus, et de nouvelles recherches ont démontré que ces contractions ne sont dues qu'à l'influence des cou- rants dérivés. Les courants dérivés n'ayant lieu que pendant le passage des courants électriques, nous avons cru pouvoir nous mettre à l'abri de cette erreur en détachant du galvanomètre un des fils conducteurs, pendant tout le temps que le membre était sous l'influence d'un courant électrique. Aussitôt après la cessation de l'électricité, nous mettions les aiguilles thermo-électriques en communication avec le galvanomètre, espérant ainsi obtenir les seuls changements produits par la modification de la température. Dans ces conditions, l'aiguille du galvanomètre est encore fortement déviée, mais en sens inverse de la direction obtenue pen- dant le passage du courant. Cette déviation est très-brusque et l'aiguille revient assez rapidement à zéro. Il se forme donc dans les tissus vivants, aussitôt après la cessation de l'électrisation, des courants qui ont lieu en sens inverse du courant primitif: ce sont des couranis de polarisa- tion. Ces phénomènes avaient déjà été découverts par iMatteucci; mais uniquement pour les fibres nerveuses, et ce savant avait cherché à ex- pliquer par la production de ces couranis, ïélat éleclro tonicjue. Nous avons vu que ces courants ont lieu dans tous les tissus vivants, chez les animaux à sang froid et chez ceux à sang chaud, lis existent chez l'homme, car nous avons remarqué qu'en électrisantla partie supérieure i25 de la moelle, on obtenait des phosphènes, surtout au moment de la fer- meture du courant ascendant, et à l'ouverture du courant descendant. Comme ce phénomène se produit surtout avec un courant ascendant, car celui-ci excite le mieux les centres nerveux, on doit admettre qu'au moment de la cessation de l'électrisation avec un courant descendant il se forme un courant en sens inverse, c'est-à-dire un courant as- cendant qui jouit des propriétés de celui-ci. Nous avons également fait l'expérience suivante : Nous avons tenu dans les deux mains les électrodes humides d'une batterie voltaïque, puis après nous être électrisés pendant un temps fort court, nous avons plongé nos mains dans des vases remplis d'eau et en communication avec un galvanomètre. Aussitôt l'aiguille était déviée, et toujours en sens inverse de la direction .iu courant primitif. De même que les courants dérivés, les courants de polarisation ne se produisent jamais sous l'influence des courants d'induction. M. KunNE (de Berlin), présent à la séance, fait remarquer, au sujet des faits exposés par M. Onimus, que dans Tétat actuel de nos con- naissances il est impossible de nier l'existence de l'électrotonus. On a démontré, en effet, que la vitesse du courant électro-tonique est la même que celle du courant nerveux. On ne peut donc pas, comme paraît l'avoir avancé M. Onimus, rapporter l'électrotonilité à l'électro- lyse. De plus, on se sert aujourd'hui d'appareils perfectionnés qui met- tent à l'abri de ces causes d'erreur, et les expériences de M. Dubois- Reymond conservent toute leur valeur. M. Onimus ne partage pas cette opinion : on observe avec les ap- pareils les plus parfaits des courants dérivés qui se forment dans l'épaisseur même des tissus, sous l'influence de réactions chimiques particulières. De l'aplatissement OD de l'affaissement des muscles de la CllOUPE QUI SE fait remarquer chez les femelles de «os grasds animaux domes- tiques, DANS les derniers TEMPS DE LA GESTATION; par M. GoUBAUX. Vers la fin de la gestation, à mesure que la femelle approche da- vantage de son terme, il se produit dans la région de la croupe une modification de forme qui n'échappe pas à l'observation, surtout des personnes qui ont l'habitude de vivre avec les animaux et de leur donner des soins journaliers. Ce phénomène très-appréciable à la vue, consiste en une déformation, un aplatissement ou un affaissement de la région de la croupe. Les cultivateurs le caractérisent en disant que la croupe se casse ou que la croupe est cassée. Pour eux , cette ex- pression ne signifie pas seulement que l'affaissement de la croupe est 126 en train de se produire ou s'est effectué : elle veut dire encore que la femelle qui en est l'objet approche du terme de la gestation. Ce phé- nomène est connu de tout le monde, et il a été noté dans presque tous les ouvrages des vétérinaires qui se sont occupés de faire connaître les particularités que l'on observe durant la gestation des grandes femelles de nos animaux domestiques. Il n'est pas sans intérêt, pour la suite de ce travail, de citer ici, en forme d'extraits, quelques-uns des ouvrages dont il vient d'être question : 1° J. B. HuzARD {Instruction sur C amélioration des chevaux en France^ destinée principalement aux cultivateurs. Paris, an X), dit en parlant de la gestation ou de la grossesse (page 220) : « Le pre- mier signe, le signe le plus naturel pour annoncer que la jument a conçu, ou qu'elle est pleine, c'est la cessation de la chaleur. Ceux qui lui succèdent sont, peu à peu, l'amplitude du ventre, qui descend et s'avale, en même temps que la partie supérieure des flancs se creuse; C affaissement des muscles qui forment les fesses {la croupe); affais- sement qui parait produire, en apparence , avec le creusement des flancs, plus de hauteur des hanches et du tronçon de la queue ; sur la fin le gonflement des mamelles et l'écartement des jambes de derrière , surtout quand la jument trotte... » 2° C. Barektin de MoNTcnAL {Traité sur les haras. Extrait de l'ouvrage italien de Jean Beugnone, etc. Paris, 1807. — Voir page 125). « Les premiers signes de la gestation se manifestent au bout de quatre ou cinq mois après la monte; on commence alors à s'apercevoir d'une augmentation de volume dans le ventre ; la croupe et les flancs se baissent, etc.. » 3° Delwart (De la pariurition des principales femelles domesti- ques, Bruxelles, 1839. — Voir Des signes qui annoncent la gestation, page 13). » Lorsque la gestation date de quelques mois, qu'elle est parvenue à mi-terme, le ventre prend plus d'ampleur, descend, s'avale, la partie supérieure des flancs se creuse, les muscles fessiers s'affais- sent , les hanches paraissent plus élevées , ainsi que le tronçon de la queue. » 4° Rainard {Traité complet de la pariurition des principales fe- melles domestiques, etc. Paris-Lyon, 1845. — Voir Diagnostic de la grossesse, tome 1", [tage 81). « Non-seulement le ventre grossit alors, mais encore il descend, ou, comme on dit, il s'avale; les flancs se creusent; les parties latérales de la croupe s"* affaissent, CQ qui fait que les hanches paraissent plus saillantes ainsi que la base de la queue. » 5° Magne {Hygiène vétérinaire appliquée. Paris, 1857). ~ Voir : 1* Tome 1", Gestation de la jument, page 548 : « Vers la fin de la 127 gestation tous les signes augmentent : les muscles de la croupe s'affais- sent, le poids du fœtus tire le vagin, l'anus et la vulve sont enfoncés dans le bassin, les tubérosités ischiales deviennent saillantes, etc. — 2° Tome II, Gestulion de la vache, page 356 : « A mesure que la gesta- tion avance vers son terme, les signes qui l'annoncent sont de plus en plus apparents. Le fœtus, devenu volumineux, se porte en avant et pèse sur les parois inférieures de l'abdomen; le ventre est avalé, l'anus enfoncé, les flancs sont creux; l^s tubérosités des ischions écartées (I), etc.. » Comme il a été dit plus haut, le phénomène dont il est ici question est connu de tout le monde; mais ce que tout le monde ne sait pas, c'est d'abord quelle en est la cause, et ensuite quelle en est l'utilité et quel en est le but. Ce sont là les divers points qui seront examinés dans ce travail, et ce sont là divers points dont aucun auteur, paraît-il, ne s'est occupé jusqu'à présent. Les observations sur lesquelles reposent les faits qui seront bientôt exposés ont pour base des examens anatomiques qui ont été répétés plusieurs fois, soit sur des femelles qui étaient sur le point de mettre bas, soit sur des femelles qui avaient mis bas depuis peu de temps ou qui étaient mortes durant le travail de la parturition. Ces femelles ap- partenaient à l'espèce chevaline, à l'espèce bovine et à l'espèce ca- prine. Il ne sera pas question ici des examens qui ont été faits sur des chiennes parce qu'ils ont été moins nombreux que les premiers. Cepen- dant il est certain que les mêmes phénomènes se font remarquer chez les chiennes, que ce sont les mêmes causes qui les produisent, et qu'ils ont lieu dans le même but que chez les femelles plus nombreuses dont la désignation de l'espèce a été faite plus haut. On a vu que ce phénomène consiste, à l'extérieur, en un aplatisse- ment ou affaissement de la croupe qui constitue en quelque sorte une déformation de la région. Quelle en est la cause? C'est là le premier point qui doit être examiné. Lorsqu'on dissèque une femelle dans les conditions dont il est ques- tion, — c'est-à-dire à une époque rapprochée du terme de la gesta- tion, — on remarque une infiltration séreuse, jaunâtre, assez abon- dante, dans l'épaisseur des muscles de la croupe, dans le tissu cellulaire qui leur est intermédiaire, et dans celui qui est placé entre ces mus- (1) C'est là une assertion qu'il serait impossible de justifier, car il est certain qu'il n'y a pas de différence dans le degré d'écartement de ces tubérosités. Cet écartement ne varie pas suivant les conditions phy- siologiques, la gestation ou la non-gestation , mais il varie suivant les individus. 128 clés et la face externe du ligament sacro-sciatique. Il en est de même du tissu cellulaire intrapelvien. 11 n'est pas douteux que cette infiltra- tion existe aussi dans l'épaisseur du ligament sacro-scialique lui-même, car il est certain que ce ligament est plus long que dans les conditions ordinaires. En effet, il y a une mobilité beaucoup plus grande des deux coxaux sur les articulations sacro-iliaques, et il est possible d'écarter le plancher du plafond du bassin dans une plus grande proportion que dans les conditions ordinaires. Enfin, il est évident encore que ce liga- ment, au lieu d'êlre dirigé obliquementde haut en bas et de dedans en dehors (du bord latéral du sacrum au bord ischiatique de l'ilium et au bord externe de l'ischium) est assez fortement concave sur sa face su- perficielle ou externe, et que son bord postérieur esl devenu aussi olus long qu'il n'était précédemment on dans les conditions ordinaires (1). Des faits anatomiques qui viennent d'êlre indiqués et que Lafosse avait déjà notés, mais d'une manière incomplète (2), on peut tirer main- tenant l'explication de l'affaissement ou de l'aplatissement de la croupe qui survient vers le terme de la gestation. N'est-il pas évident, et ne sera-t-il pas évident pour tout le monde que : 1* de cette augmentation de longueur du ligament sacro-sciatique (du bord supérieur au bord inférieur), et 2» du changement de direction de la surface externe de ce ligament, qui de rectiligne qu'elle était est devenue concave, résulte un moindre soutien pour la face interne ou profonde des muscles de la croupe, et, par suite, que la déformation ou l'affaissement de la région de la croupe est la conséquence de la modi- fication qu'a subie le ligament sacro-sciatique dans sa direction? "Voyons maintenant quelle est l'utilité du phénomène complexe dont il vient d'êlre question. L'explication qui peut être donnée de son uti- lité est facile, ainsi qu'on va le voir. ^1) Quand ces modiûcalions du ligament sacro-sciatique se sont pro- duites une fois, ce ligament ne revient pas à l'état où il était d'abord. En effet, les femelles qui ont porté plusieurs fois ont le ligament sacro- sciatique un peu plus long, moins tendu que dans les conditions pre- mières, et par conséquent la cavité pelvienne est plus facilement dila- table que chez les femelles primipares. Celte conclusion est le résultat d'observations cadavériques. (2) Voyez dans : Observations et découvertes d'hippiatrique, lues dans plusieurs assemblées savantes par le cil. Lafosse, hippiatre, mem- bre associé de l'Institut national, etc., Paris, an IX, le mémoire qui a pour titre : Observations sur l'accouchement de la jument^ lues à l'A- cadémie ci-devant royale des sciences, le 27 juillet 1788, et déposées au secrétariat. 129 Vers la fin de la gestation, toutes les parties doivent se disposer de manière à rendre l'expulsion du jeune sujet aussi facile et aussi prompte que possible. Or c'est dans ce but que se produit l'infiltration séreuse des diverses parties dont l'énumération a été faite précédemment. N'est-il pas évident que l'augmentation de longueur (du bord supérieur au bord inférieur) du ligament sacro-sciatique a pour but de permettre l'augmentation de la cavité du bassin suivant deux de ses diamètres : 1» suivant son diamètre transversal, en permettant aux deux ligaments sacro-sciatiques de s'écarter l'un de l'autre, ou chacun de la ligne mé- diane, et 2° d'un autre côté, en permettant au plancher du bassin, — par le mouvement de bascule de haut en bas que les deux coxaux peu- vent exécuter sur les articulations sacro-iliaques, — de s'éloigner du plafond, d'augmenter dans une très-nolable proportion l'étendue du diamètre vertical ? Cet écartement, d'après les remarques très-judi- cieuses de Lafosse, peut être porté à sa limite extrême en portant les deux membres postérieurs en avant et la queue en haut (l). Il y a dans les faits qui viennent d'être rapportés plusieurs choses intéressantes, dont l'enchaînement est remarquable, et qui peuvent être résumées par les propositions suivantes : 1° L'aplatissement ou l'affaissement de la croupe, que l'on observe dans les derniers temps de la gestation, est la conséquence du relâ'- chement ou de l'allongement des ligaments sacro-sciatiques qui n'of- frent plus alors le même soutie aux muscles de la région de la croupe que dans les conditions ordinaires. 2° Le relâchement des ligaments sacro-sciatiques est la conséquence d'une infiltration séreuse de ces ligaments et des parties diverses qui les avoisinent. Ce relâchement est le moyen qu'emploie la nature pour faciliter la mise bas, en augmentant la dilatation possible du bassin suivant ses diamètres vertical et transversal. En d'autres termes, le relâchement des ligaments sacro-sciatiques est le moyen que la nature emploie pour arriver au but, qui est l'ex- pulsion plus facile du fœtus, — M. LiouviLLE met sous les yeux des membres de la Société le cœur d'un homme de 44 ans, dans lequel il a trouvé plusieurs lésions inté- ressantes. L'orifice aortique ne possède que deux valvules sigmoïdes et offre une insuffisance bien caractérisée. Le ventricule gauche dilaté est le siège (1) Voir le mémoire intitulé : Observations sur l'accouchement de ta jument {loc. cit.). c. R. 18Ô&. \'0 130 d'un anévrj'sme paiiétal peu volumineux. De plus on a trouvé chez le môme sujet une oblitération de l'aorte dans son trajet thoracique. Cette oblitération siégt( au-dessous de la naissance de l'artère sous- clavière gauche et un peu au-dessous du canal artériel. Celui-ci éga- lement oblitéré est à l'état normal. Au-dessus du point rétréci on con- state, comme dans les cas de ce genre, une dilatation plus ou moins considérable des artères; les mammaires internes notamment attei- gnent le diamètre d'une artère humérale. M. Peyraud montre le résultai de quelques expériences sur la re- production des cartilages costaux. Après avoir, sur un chien, réséqué une assez grande partie d'un ou de plusieurs cartilages costaux et en même temps d'une ou de plusieurs extrémités osseuses en ayant soin de laisser le périchondre et le périoste, il a vu se reproduire de l'os et du cartilage, bien que les animaux en expérience aient été placés dans d'assez mauvaises conditions. D'autres expériences analogues faites sur diverses espèces de cartilage lont amené à conclure que le périchondre reforme du cartilage aussi bien et de la même façon que le périoste reproduit du tissu osseux. M. Peyraud montre en même temps sur des pièces qui lui appartien- nent une fracture d'un cartilage costal chez l'homme dans laquelle on voit un cal osseux. Ce dernier fait lui a été communiqué par M. Liou- ville. M. Rouget donne à l'appui de son opinion sur la structure des fibres musculaires quelques développements nouveaux, et il met en même temps sous les yeux des membres de la Société quelques photo- graphies faites d'aitrès ses préparations anatomiques. Cet observa- teur croit que les fibres musculaires ou faisceaux primitifs sont composés de fibrilles. Celles-ci d'ailleurs avaient déjà été, comme on le sait, isolées par Sohwann et un grand nombre dhistologistes. L'o- pinion de Bowmann, acceptée actuellement par la plupart des obser- vateurs, est pour lui sans fondement. Déjà à l'état frais l'existence de ces fibrillesest parfaitement appréciable, et il suffit pour les mieux ob- server d'ajouter un peu d'eau à la préparation. La démonstration de cette disposition est rendue très facile chez les insectes, parce que les ondulations qui donnent lieu aux stries transversales sont beaucoup moins serrées que chez les vertébrés. Chez les crabes en particulier, l'isolement des fibrilles est très-fa- cile ; chez les vertébrés, la préparation doit se faire au moment de la riaidité cadavérique. Chez ces derniers animaux les fibrilles sont ex- trêmement minces; elles oOient des stries: mais celles-ci sont bien pluB serrées que cuUes du faisceau primitif. M. Rouget affirme qu'il 131 esL impossible de décomposer ces fibrilles an sur cous de mens. En effet, l'étude des fibrilles isolées chez les insectes montrent que ces élé- ments représentent très-exactement une spirale. Si l'on écarte deux disques d'une fibrille, on voit qu'il y a continuité de la substance con- tractile et que celle-ci est contournée exactement comme un ressort à boudin. W. KuHNE, sans vouloir entrer dans une longue discussion des faits exposés par M. Rouget, présente à cette théorie quelques objections. " Il ne croit pas d'abord que les fibrilles isolées que l'on obtient faci- lement chez certains insectes, chez l'hydrophile, par exemple, sont les véritables éléments musculaires. On ne peut, en effet, parvenir à les faire contracter. D'ailleurs, lorsque la fibre primitive est fraîche et se contracte bien, les fibrilles ne sont pas apparentes. Elles ne le deviennent que lors- qu'on ajoute de l'eau à la préiiaration. D'autre part, lorsqu'on examine, comme l'a fait M. Rouget, les fibres jaunes des insectes où les fibrilles s'isolent facilement parce qu'elles ne sont pas contenues dans une gaîne, on ne trouve également dans C3s éléments aucune trace de con- traction. Dans un travail récent, Hensen a cru trouver chez les abeilles des fibrilles isolées contractiles ; mais M. Kiihne a pu s'assurer que ces prétendues fibrilles sont, en réalité, des fibres musculaires extrêmement minces. Ce genre de fibres existe peut-être chez beaucoup d'autres in sectes. M. Rouget repousse complètement ces objections. Les fibrilles se crèvent à l'état frais, sans préparation; leaii ne les rend que plus nettes. Elles ne sont pas dues, comme le croit M. Kiihne, à un phéno- mène de coagulation ; et la non-excilabilité de ces petits éléments n'au- rait, d'après iM. Rouget, qu'une valeur peu importante, pusquon voit sur les insectes ces fibrilles disposées à la façon des muscles et remplir les fonctions de ces organes. M. KuHNE a également vu les fibrilles sans l'emploi des réactifs; mais contrairement à l'opinion de M. Rouget, il ne saurait, d'après ses propres études, considérer les fibrilles comme le dernier élément musculaire. M. Ramvier fait observer que M. Rouget s'est appuyé, pour admettre l'existence de la disposition en spirale, sur l'obliquité des stries offertes par les fibrilles. D'après lui il y a un certain nombre de causes d'erreur qu'il est important de connaîire, et il se propose de faire voir, à l'aide de préparations, que les faits observés par M. Rouget peuvent recevoir une autre interprétation. La suite de la discussion est remise à une autre séance. La séance est levée à cinq heures trois quartSi 132 Séance du 10 avril. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. — M. Gréhant expose les principaux résultats de ses recherches sur les effets produits par la néphrolomie et la ligature des uretères chez les chiens. Il a employé, pour doser l'urée dans le sang, une modifica- tion du procédé de Millon, et il a pu trouver ainsi une augmentation très notable de l'urée pendant les premières vingt-quatre heures qui suivent l'opération. 11 a établi, de plus, que la ligature des uretères produit exactement le même effet que la néphrotomie. Les conclusions de ses recherches, qui prouvent que dès les premières heures qui sui- vent l'une ou l'autre de ces opérations il y a une accumulation durée dans le sang, sont donc tout à fait opposées à celles du travail de Zalesky. M. VuLPiAN demande à M. Gréhant s'il a tenu compte dans ses expé- riences des modifications apportées dans le sang par le fait même des opérations que Ton est obligé de faire subir aux animaux. La fièvre traumatique s'accompagne, en effet, d'une augmentation considérable d'urée; il ne faut donc pas perdre de vue, dans les recherches de ce genre, cette cause importante d'erreur. — M. JoFFROY présente, au nom de M. Coarcot et au sien, les pièces pathologiques provenant d'une femme morte à l'infirmerie de la Salpê- trière (service de M. Charcot), le 11 février dernier. Cette femme était atteinte depuis quatre ans et demi d'atrophie musculaire progressive et de paralysie labio-glosso-pharyngée, avec atrophie des muscles des lèvres et de la langue. Elle présentait en outre des symptômes qui avaient fait porter le diagnostic de sclérose des cordons latéraux à M. Charcot qui en fit le sujet d'une de ses conférences cliniques. M. Joffroy présente la face et le cou, un membre supérieur et un membre inférieur de cette femme. Les muscles et les nerfs ont été disséqués afin de montrer le degré et la distribution des altérations musculaires, et le changement de couleur survenu dans certains nerfs. "Voici le résumé de l'observation (1) : (1) "Voir pour l'observation complète le mémoire de UU. Charcot et .loffroy m AhcHivËs de physiologie, 1869, p. 356. 133 ATROPHIE MUSCULAIRE PROGRESSIVE MARQUÉE SURTOUT AUX MEMBRES SUPÉRIEURS; ATROPHIE DES MUSCLES DE LA LANGUE ET DE l'orBICULAIRE DES LÈVRES j PA- RALYSIE AVEC RIGIDITÉ DES MEMBRES INFÉRIEURS ; ATROPHIE OU DISPARITION DES CELLULES ^ERVEUSES DES CORNES ANTÉRIEURES AUX RÉGIONS CERVICALE ET dorsale; au bulbe, ATROPHIE ET DESTRUCTION DES CELLULES NERVEUSES DU KOVAU DE l'hYPOGLOSSE ; ATROPHIE DES RACINES SPINALES ANTÉRIEURES , DES RACINES DE l'hYPOGLOSSE ET DU FACIAL; SCLÉROSE RUBANÉE, SYMÉTRIQUE DES CORDONS LATÉRAUX. Catherine Aubel fait remonter le début de son affection au mois de septembre 1864. A la suite d'un accouchement, ses jambes devinrent faibles progressivement, mais d'une manière assez rapide pour que le 11 octobre, elle ait été obligée de se rendre en voiture à l'hôpital Saint- Antoine. Elle entre à la Salpêlrière au mois de juin 1865, présentante un degré déjà très-marqué les symptômes de la paralysie labio-glosso- pharyngée avec atrophie de la langue et des lèvres. Les membres supérieurs, excessivement affaiblis, sont aussi fort atro- phiés : elle ne peut plus s'en servir pour faire quoi que ce soit. Les membres inférieurs, amaigris, mais ne présentant pas comme les supérieurs les déformations dues à l'atrophie des masses muscu- laires, sont partiellement paralysés. La malade peut marcher lorsqu'elle est soutenue par deux personnes. En outre on constate aux membres inférieurs un certain degré de contracture marqué surtout aux genoux. Il n'existe aucun trouble de la sensibilité. Les contractions fibrillaires se produisent soit spontanément, soit artificiellement sous l'influence d'un choc léger dans un grand nombre de muscles des membres supérieurs, du cou et du tronc; mais il ne s'en produit pas dans les muscles des membres inférieurs. Ces symptômes se sont aggravés, mais l'atrophie n'a pas gagné de nouveaux groupes musculaires, en particulier les membres inférieurs n'ont pas été atteints. La paralysie et la contracture se sont accentuées. Enfin la malade est morte le 11 février au soir, succombant à des accidents asphyxiques. La rigidité cadavérique a été complète chez cette femme, et elle existait encore d'une manière très-manifeste le 13 au matin lorsqu'on fit son autopsie. Rien dans le cœur ni les poumons n'explique l'asphyxie qui a pro- duit la mort de Catherine, Les lésions alrophiques, visibles à l'œil nu, sont réparties sur les muscles de la partie inférieure de la face, de la région sus-hyoïdienne, de l'épaule, des deux membres supérieurs et de la région dorso-lom- baire. 134 Alix membres inférieurs on note de l'amaigrissement, mais pas d'a- trophie. Les muscles sont rouges et leur tissu semble sain. Dans le système nerveux, à l'œil nu, on est frappé par l'atrophie et la coloration grisâtre spéciale des racines antérieures aux régions cer- vicale et dorsale. Rien de semblable ne s'est produit dans les racines postérieures. Le facitil et l'hypoglosse présenlent la même teinte grise que les ra- cines antérieures cervicales, mais sans diminution de volume. L'examen de l'encéphale et de la moelle n'offre rien d'important à noter. A ïexanien microscopique des muscles on notait dans les muscles de la main, c'est-à-dire là cii les lésions étaient le plus accusées : 1° une diminution de volume dans la masse musculaire; 2" une coloration jaune pâle des muscles ; 3° une consistance plus grande du muscle rap- pelant celle du tissu conjonctif; 4" une altération granulo-graisseuse peu marquée pour certaines fibres, très-accentuée pour d'auties; 5° la division en fragments de la substance musculaire; 6° latrophie de cer- taines fibres musculaires simple et indépendante de toute dégénéres- cence graisseuse ou cireuse ; 1° la prolifération du tissu conjonctif mter- fibrillaire. Aux membres inférieurs, les fibres musculaires ne sont pas atro- phiées, à peine un certain nombre d'entre elles sont-elles chargées de quelques granulations graisseuses. Dans les racines antérieures^ Le facial, l hypoglosse, les denxnerfs phréniqius, le médian et le cubital, on trouve à 1 examen microsco- pique un nombre plus ou moms considérable de tubes nerveux atro- phiés. Sur la moelle durcie et sur des coupes colorées par le carmin, on observe dans toute la longueur de l'axe spinal une sclérose symé- trique limitée aux cordons latéraux. On remarque en outre la disparition ou l'atrophie du plus grand nombre des cellules nerveuses des cornes antérieures dans la région cervicale et dans les deux tiers supérieurs de la région dorsale. Dans le bulbe, on note la disparition du plus grand nombre des cellules '.nerveuses du noyau de l'hypoglosse. C'est à peine si sur chaque coupe on remarque trois ou quatre cellules au plus qui aient conservé leurs caractères normaux. M. Hayem demande si l'examen des muscles atrophiés a été fait avec soin. C'est là un point important pour plusieurs raisons. Cette étude fait voir en effet, au moins dans certains cas, que des muscles qui avaient paru atrophiés pendant la vie sont tout simplement amaigris, et qu'en conséquence leur impuissance motrice ne peut être rapportée à !35 l'atrophie. De plus, l'état des muscles variable suivant les cas montre que les lésions de la moelle peuvent produire dans ces organes diverses espèces de troubles de la nutrition; et il est très-regrettable que l'on se soit si peu inquiété, particulièrement dans les faits publiés par L. Clarke, de l'état de la fibre musculaire. M. Hayem rappelle à ce propos que dans un fait qu'il vient de publier, les muscles atrophiés n'étaient point graisseux, comme cela existe si souvent; mais que les faisceaux primitifs, considérdblement amaigris, offraient d'abondants noyaux indiquant un certain travail d'irritaton, M. Charcot n'a pas fait une étude minutieuse des muscles altérés; mais il a trouvé un grand nombre de fibres primitives non grais- seuses, extrêmement grêles, et possédant encore cependant une stria- tion manifeste. M. Havem en s'appuyant sur ce fait, que dans les maladies de la moelle avec paraplégie ou dans les sections expérimentales faites sur les nerfs, on n'observe pas dans les muscles les mêmes altérations que dans l'atiophie musculaire, pense que dans ce dernier cas l'influence de la moelle a un cariictère particulier, variable suivant les cas, mais dont le résultat est toujours un trouble notable dans la nutrition des fibres musculaires. Il ne faut donc pas oublier de rechercher avec soin, dans tous les faits de ce genre, les rapports anatomiques qui existent entre le mode et l'étendue des lésions médullaires et les dé- générescences des muscles. M, Laborde rappelle que la diminution pure et simple du diamè- tre des fibres musculaires a été observée déjà par plusieurs auteurs dans des circonstances diverses. Il l'a noté plusieurs fois dans la pa- ralysie infantile, et M. Gubler l'a indiqué dans la paralysie des con- valescents. Comme il existe dans la paralysie de l'enfance des lésions de la moelle, il y a donc entrs cette maladie et l'atrophie musculaire progressive quelques traits communs importants à connaître au point de vue de la nutrition des muscles. — M. VuLPiAN, a communiqué dans une précédente séance les ré- sultats de ses expériences sur l'extrait de douce-araère. Il a annoncé que cette substance amène une dilatation de la pupille. Plusieurs essais tentés sur des malades ou des personnes bien portantes à l'aide de la solanine, n'ont produit sous ce rapport aucun résultat. On doit donc en conclure que dans l'extrait de douce-amère il existe une substance autre que la solanine et encore inconnue à laquelle on doit rapporter la dilatation pupillaire. — M. Rabuteau expose le résultat de ses recherches sur le per- chlorate de potasse. 11 a pu à l'aide de ce médicament guérir une fièvre 136 intermittente, et il rappelle qu'un médecin américain est arrivé, de son côté, à un résultat semblable. De plus, il a constaté sur lui-même que cette substance produit les mêmes effets que le sulfate de quinine. Mais il fnut pour cela que le perchlorate soit parfaitement pur. M. Rabuieau annonce ensuite, qu'en continuant ses recherches sur l'absorption cutanée, il est arrivé à celle conclusion, que la peau n'absorbe que les substances gazeuses ou sensiblement volatiles, tan- dis que l'absorption des substances solubles dans l'eau est nulle ou presque nulle. Le mercure, par exemple, serait absorbé par la peau à l'état de vapeur. M. Laboulbène demande à quelle dose on doit employer le perchlo- rate de potasse pour obtenir des effets médicamenteux analogues à ceux que produit le sulfate de quinine. D'après M. Rabuteau, 5 grammes de cette substance représenteraient 1 gramme de sulfate de quinine. M. GuBLER fait remarquer que, sans connaître les travaux de M. Rabu- teau sur ce sujet, il a développé les mêmes idées dans une leçon faite à la Faculté de médecine, le 5 avril 1869. En effet les dissol- vants des corps gras sont volatils. Les autres substances volatiles ren- contrent donc la même facilité à pénétrer dans la peau; parmi celles- ci, nous citerons les acides acétique, formique, valérianique, l'ammo- niaque, le camphre, le musc, le castoréum, l'iode (tout me porte à penser que dans l'expérience de M. Roussin de l'iode est mis en liberté et pénètre alors comme substance volatile), le mercure, les alcaloïdes organiques qui sont en partie des corps volatils. Mais le mécanisme de la pénétration des substances volatiles est dif- férent de celui que nous admettons pour les corps gras; tandis que pour ces derniers l'absorption se fait grâce à Timbibition des cellules épidermiques, les substances volatiles, au contraire, pénètrent à l'état de vapeur dans les orifices des canaux sudorifères. Cette explication nouvelle, que j'ai proposée pour l'absorption des sub- stances volatiles, repose sur le phénomène connu sous le nom de phé- noinènc de diffusion des gaz. On sait, en effet, que deux gaz mis en contact dans une atmosphère confinée se mélangent réciproquement, quelle que soit d'ailleurs leur nature, et qu'au bout d'un temps variable, on en trouve les mêmes pro- portions relatives dans tous les points de l'atmosphère confinée. Or les glandes sudoripares sécrètent des gaz : les uns proviennent du sang (c'est là une voie accessoire d'élimination gazeuse dans l'espèce hu- maine, qui, au contraire, dans les espèces animales inférieures acquiert une importance de premier ordre); les autres sont des acides volatils i37 qu'on rencontre normalement dans la sécrétion des glandes sudori- pares: tels sont les acides acétique, formique, etc. Il existe des conditions à peu près analogues pour le parenchyme pulmonaire. Des deux côtés, en effet, va dominer ce grand fait, la dif- fusion gazeuse. Dans le second cas, l'oxygène de l'air atmosphérique va remplacer l'acide carbonique qui a servi à la combustion, tandis que, dans le pre- mier, les substances volatiles mises en contact avec la périphérie cu- tanée vont d'abord pénétrer dans l'intérieur des canalicules des glandes sudoripares, se mélanger d'une manière intime avec les produits qui y sont contenus, puis ensuite subir les lois qui régissent le phénomène de l'endosmose gazeuse. Ainsi donc, de l'analogie des causes nous pou- vons encore ici conclure à l'analogie des effets. Je ferai remarquer en passant que cette pénétration dans le canal excréteur d'une glande sudorale serait interdite à une solution aqueuse : 1" parce quelle ne mouillerait pas les bords de l'onfice qui sont gras, 2° parce qu'aucune pression ne parviendrait à pousser de l'eau dans l'intérieur d'un tube capillaire rempli d'air ou de produits gazeux. Hémiplégie faciale; méningite tuberccleuse ; mort; autopsie; tubercules DU cerveau; par M. A. d'Espine, interne des hôpitaux. W. (Antoinette), âgée de 8 mois, est admise à l'hôpital Necker en novembre 1868. Antécédents . La mère donne les renseignements suivants : elle est d'une bonne santé; elle n'a pas eu de syphilis; elle est accouchée à terme de son enfant en mai 1868; l'accouchement a été normal et n'a pas né- cessité l'application du forceps. L'enfant était bien portante, vigoureuse, sans aucune déviation des traits; elle a été nourrie depuis lors par sa mère. A l'âge de 6 semaines, pendant que la mère était encore à l'hôpital, l'enfant fut atteinte d'un érysipele qui prit naissance autour d'une ex- coriation de l'anus. L'enfant guérit très-bien. C'est dans le mois d'octobre 1868, c'est-dire dans le sixième mois après la naissance, que la mère s'aperçoit que son enfant fait la grimace et que sa bouche est tordue ; depuis lors l'œil gauche ne s'est pas fermé ; la mère l'attribue à un coup de froid qu'aurait pris l'enfant. L'enfant est tombée à cette époque et a saigné du nez à plusieurs reprises. Etal actuel, le 2 janvier. Tête énorme, disproportionnée avec la gran- deur de l'enfant. Saillie en avant des frontaux; hydrocéphalie pro- bable. La paralysie faciale est complète ; la moitié gauche de la face est immo- 138 bile. La commissure labiale gau'îhe est abaissée et rapprochée de la ligne médiane; la commissure droite s'élève pendant que l'enfant crie; l'œil gauche est largement ouvert, et pendant que la paupière droite se ferme, la paupière gauche reste immobile, même en dormant. Epi- phora abondant de l'œil gauche. La luette n'est pas déviée. L'enfant a une otorrhée à droite depuis huit jours, pour laquelle on lui fait quotidiennement quelques injections d'eau de guimauve. Elle tette bien. Sirop de quinquina. Le 5 janvier, depuis deux jours l'enfant a des vomissements répétés, vomissements de lait, une ou deux heures après avoir teté. Elle a re- jeté de suite aujourd'hui la cuillerée de sirop de quinquina. Un peu de diarrhée verte depuis quatre ou six jours. Respiration puérile plus forte du côté droit. L'enfant et la mère sortent de l'hôpital vers la Gn du mois. Le 16 février, la mère rentre avec son enfant, parce que les vomis- sements sont devenus incessants et suivent presque toujours la letée. La mère 1 attribue à ce qu'elle est enceinte et que son lait est devenu mauvais. On constate en effet une grossesse de cinq mois. L'enfant est fortement constipée depuis quinze jours; ellea eu la fièvre, ditla mère. L'enfdnl a beaucoup maigri du corps. Le 21 février, la mère cesse de lui donner à leter; on h nourrit au biberon. Le 23 février, on s'aperçoit d'une petite ulcération sur la cornée gauche et d'une opacité à la surface, qui est comme flétrie. Depuis le 23 février, les vomissements ont cessé; mais, au dire de la mère, l'enfant a des convulsions fréquentes durant environ cinq mi- nutes. Le 25 février, nous constatons pour la première fois que les yeux sont tournés en haut, immobiles, avec quelques légers tremblements des mains et des pieds; en même temps, un peu de diarrhée. Depuis le 26, les convulsions sont plus accentuées, les membres sont contractures. Le 3 mars, l'enfant est en opisthotonos avec les membres supérieurs contractures, les doigts fortement fléchis, difficiles à étendre, et le pouce retourné en dedans de la paume de la main. La lésion de l'œil gauche a gagné en profondeur. La cornée est opa- que, flétrie; il y a du pus dans la chambre antérieure. Peu de stra- bisme. Pupilles contractdes. L'enfant est fort amaigrie; il n'y a pas d'albumine dans les urines. Le même état continue jusqu'à la mort qui arrive le 6 mars. Autopsie, trente-six heures après la mort. A l'ouverture des méninges, il s'échappe une quantité considérable 139 de liquide clair; les deux hémisphères sont extraordinairement dilatés par le liquide qui remplit les ventricules. La substance cérébrale est pâle, comme macérée, et se laisse déchirera la moindre traction. En faisant des coupes dans les diverses parties du cerveau, on trouve un certain nombre de gros tubercules, les uns crus, les autres en voie de ramollissement, soit dans la substance grise corticale, soit diins le corps strié, soit dans le cervelet, où le tubercule occupe exactement la place du corps rhomboïdal. La protubérance est asymétrique; la moitié gauche est une fois et demie plus grosse que l'autre. Par une coupe anléro-postérieure et une seconde coupe transversale, on reconnaît l'existence d'un gros tubercule cru formant le noyau dans la protubérance. M. Vulpian a bien voulu examiner la pièce. Le nerf facial semble rejeté en dehors dans la portion qui traverse le bulbe ; il contourne le tubercule et est comprimé surtout dans les points où il se trouve sous lépendyme du quatrième ventricule. Le nerf-trijumeau parait aussi rejeté en dehors de son trajet dans la protubérance et comprimé par la tumeur. Le nerf facial du côté gauche est très-dégénéré; les tubes nerveux n'ont plus de m.yéline, et leur contenu est rempli de granulations grais- seuses. Le nerf facial du côté droit est aussi altéré, mais à un degré moins avancé. La base de l'encéphale porte des traces évidentes de méningite tu- berculeuse. Le confluent inférieur est rempli d'un exsudât gélatiniforme verdâtre qui se continue en arrière sur la face inférieure de l'isthme et du bulbe, et sur les côtés, le long de la scissure de Sylvius. Il y a des granulations semi-transparentes en assez grande quantité, c'est dans les plexus cho- roïdes du quatrième ventricule qu'on les trouve en plus grand nombre. Les poumons sont farcis de granulations; on en trouve également dans toute l'étendue du péritoine formant un semis continu du dia- phragme au plancher du bassin. Rien d'autre à noter de spécial. Séance du 17 avril. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. — M. Balbiani a eu l'occasion d'étudier le développement des œufs du strongle géant, et il met la Société au courant des premiers résultats qu'il a obtenus. Les œufs trouvés chez une femelle qui vivait dans la cavité péritonéale dun chien en compagnie de deux mâles, furent pla- 140 ces les uns dans de l'eau pure, les autres dans du sable et de l'eau. A ce moment ils présentaient une coque épaisse percée de canaux et le vitellus offrait déjà une division indiquant un commencement de seg- mentation. Ils sont restés pendant cinq mois dans cet état, et ces jours derniers les phénomènes vitaux ont repris leur cours. Une partie des œufs avait été placée dans une chambre chauffée et a offert un déve- loppement plus précoce que celle restée dans un endroit frais. M. Bal- biani se propose de poursuivre celte étude. En raisonnant par analogie, il pense que l'éclosion n'aura pas lieu dans l'eau et qu'elle ne pourra se faire qu'à la condition d'introduire les œufs dans le corps de divers ani- maux. Il pense que c'est à l'anguille ou au brochet qu'il convient de s'adresser pour remplir ce but, et il espère qu'en faisant ensuite man- ger ces poissons à des chiens, il sera possible de savoir si c'est par l'in- termédiaire des poissons que ces parasites se transmettent aux mam- mifères. M. Vaillant demande pour quelle raison on ne chercherait pas à in- troduire les œufs directement dans l'espèce qui a fourni les strongles complètement développés. M. Balbiani croit qu'une tentative de ce genre resterait sans résultat. Il fait remarquer qu'il existe très- peu d'espèces de ces parasites ca- pables de se développer directement, et que Leuckart et M. Davaine ont échoué complètement dans des essais de ce genre. M. Brown-Séquaru donne à la Société quelques renseignements sur les cochons d'Inde auxquels il a pratiqué la section d'un des nerfs scialiques. Tous, sans exception, sont devenus épileptiques au bout d'un certain temps. Ayant pratiqué des sections du poplilé interne, le même observateur a pu rendre deux autres animaux épileptiques; la section du poplilé externe est restée sans résultat, et cependant celle-ci, chez quelques-uns des cochons d'Inde, est faite depuis quatre semaines. RI. Brown-Séquard croit devoir attribuer ces différences au nombre des fibres nerveuses coupées et par conséquent irritées; il se propose d'ail- leurs de revenir bientôt sur ce sujet. Note sur l'inégalité des pupilles dans les affections des poumons, ues GANGLIONS BRONCHIQUES ET DU PÉRICARDE ; par F. RoQUE, cxleme en médecine à l'hospice des Enfants-Assistés. (Note lue à la Société de biologie dans la séance du 17 avril 1869.) L'inégalité pupillaire est considérée comme un symptôme de la para- lysie générale (1) ; mais elle n'a pas été signalée, que je sache, dans les (1] C'est en 1653 que mon maître, M. Baillarger, indiqua le premier l'inégalité pupillaire dans la paralysie générale. 141 affections des poumons, des ganglions bronchiques et du péricarde. Plusieurs faits de phthisie pulmonaire, d'altérations tuberculeuses ou caséeuses des ganglions bronchiques, de pneumonie, pleurésie et péri- cardite, recueillis cette année dans le service de M. Parrot, à 1 hospice des Enfants-Assistés, démontrent, je crois, une relation entre ces états morbides et l'inégalité pupillaire, la pupille la plus large correspondant au côté de la lésion. Mon maître, M. Parrot, a bien voulu me communiquer les observa- tions des malades chez lesquels j'avais étudié cliniquement les particu- larités relatives à l'étal des pupilles. Dans ce travail j'ai omis à dessein les cas dans lesquels les lésions des organes thoraciques coïncidaient avec une altération du cerveau ou de la moelle. Obs. I. — Dejaeghère (Marie), née le 17 mars 1866, entre à l'infirme- rie le 19 mars 1869. Bronchite capillaire, gangrène de la vulve. 20 mars. Les pupilles sont excessivement dilatées, la gauche plus grande. Mort à une heure du soir. Autopsie le 22. L'inégalité pupillaire persiste. Pus dans les bronches des deux poumons. Les ganglions bronchiques du côté gauche sont tuberculeux, ainsi qu'un espace très-limité du parenchyme pulmonaire qui entoure ces ganglions. Obs. n. — Chérier (Marie), née le 19 novembre 1863, entre à l'infir- merie le 24 mars. Rougeole. 27 mars. Souffle à la base du poumon droit. Pupilles dilatées et iné- gales, la droite plus grande. Mort le 30 mars. Autopsie le 1" avril. L'inégalité pupillaire persiste. Altération ca- séeuse des ganglions bronchiques à droite. Obs. III. — Déchenette (Remy), né le 28 avril 1866, entre à l'infirme- rie le 8 mars. Diphthérie. 13 mars. Pneumonie à gauche ; pupilles dilatées et inégales, la gauche plus grande. 14. 15. Même état. 16 mars. Le souffle s'est étendu à gauche; râles muqueux à droite. Les pupilles sont dilatées et inégales, la droite plus grande. Mort le 17 mars. Autopsie le 18, Pupilles dilatées et inégales, la gauche plus grande. 142 Pleurésie avec fausses membranes et pus à droite; pneumonie à la base du poumon gauche. Dans cette observation, je ferai remarquer le changement de l'inéga- lité des pupilles et la double lésion pulmonaire. Obs. IV. — Magot (Louis), né le 12 avril 1859, entre à l'infirmerie le 6 mars. 6 mars. Malade depuis trois jours; pneumonie à droite; pupilles di- latées et inégales, la droite plus large. 8 mars. Les pupilles ne sont point dilatées; elles sont égales. Depuis le 9 mars et pendant le cours de la maladie, les pupilles ont été dilatées et inégales, la droite plus grande. Le 23 mars, il sort guéri (l'inégalité persistej. Obs. V. — Dubois (Mario), né le 2 février 1866, entre à l'infirmerie le 1" mars. Broncho-pneumonie des deux côtés. 17 mars. A la visite l'enfant asphyxie; les pupilles sont contractées et égales; au bout de quelques minutes, on voit les pupilles se dilater, la droite plus que la gauche. Mort le 18 mars. Autopsie le 19. Pupilles inégales, la droite plus grande. Poumon droit. Le sommet, la région voisine des bronches de ce côté et quelques points du lobe inférieur présentent de la pneumonie lobu- laire; dans le sommet, une masse jaune de la grosseur d'un grain de chènevis. Poumon gauche. Dans le lobe inférieur, au niveau de la racine des bronches, on trouve un amas de matière jaune puriforme, tout autour de laquelle existent des lobules remplis de substance grisâtre. Le 17 mars, les pupilles étaient d'abord contractées et égales; au bout de quelques minutes, elles se ddatèrent, et alors seulement on vit l'inégalité. Ce n'est point là un fait isolé, et les pupilles ne sont, en général, inégales que si elles sont dilatées. Ainsi, Magot (obs. IV), le 8 mars, eut les pupilles contractées et égales; une enfant couchée au n" 18, que M. Parrot considère comme atteinte de tuberculisation pulmonaire, présente une inégalité pupillaire constante depuis plus d'un mois; mais auparavant on remarquait souvent que les pupilles étaient égales. J'ai observé plusieurs cas analogues, surtout au début de l'af- fection. Obs. VI. — Garcio, âgé de 20 mois, entre à l'iiiûrmerie le 26 mars. 26 mars. Pneumonie à gaucheî pupilles dilatées et inégales, la gauche plus grande. 143 Mort le 27 mars. L'autopsie na pu être faite. Obs. VII. — Mongen, né le 24 mars 1869, entre à l'infirmerie le 28 mars. Pneumonie à droite; pupilles dilatées et inégales, la droite plus grande. Mort le 30 mars. Adtopsie, le 1" avril. L'inégalité pupillaire persiste. Poumon droit. Pneumonie. Poumon gauche. Sain. MM. A. Voisin etH.Liouville, auxquels j'avais fait part de mon travail, m'ont communiqué chacun une observation d'inégalité pupillaire où l'on trouve la pupille la plus large correspondante une lésion pulmo- naire du même côté. L'inégalité pupillaire persiste le plus souvent après la mort; voici quelques cas où je ne l'ai notée qu'à l'autopsie : Obs. VIII. — Desroches, âgée de 3 ans; pupilles inégales, la gauche plus grande. Poumon gauche. Tubercule et pleuro-pneumonie. Poumon droit. Sain, Obs. IX. — Simon, âgé de 3 ans. Pupilles inégales, la gauche plus grande. A gauche, pneumonie, scrofule bronchique. A droite, rien à noter. Obs. X. — Flamand, âgé de 4 ans. Pupilles inégales, la droite plus grande. Poumon droit. Pneumonie; quelques ganglions de ce côté présen- tent un état plâtreux. Poumon gauche. Pneumonie; les ganglions ne sont pas atteints. Obs. XL — (Hirsch); XII (Lejeime). Ces deux enfants, âgés de quel- ques mois, avaient les pupilles inégales; à la plus grande correspondait une pneumonie du même côté. Obs. XIII. — Hare, âgé de 25 jours. Pupilles inégales, la droite plus grande; pneumonie à droite; péri- cardite. Péiucardite. — Je n'ai que trois observations de péricardite. Obs. XIV. — Theurillal, âgé de 23 ans, à Bicêtre, dans le service de M. J. Falret. En octobre 1868, cet épileptique fut atteint d'un rhuma- tisme articulaire aigu et d'une péricardite consécutive. 144 Pendant le cours de la maladie et durant la convalescence, jusqu'à son transfert en Suisse à la fin de novembre, les pupilles étaient dila- tées et inégales, la gauche plus grande, Obs. XV. — Keft (Jules), né le 18 mars 1866, entre à l'infirmerie le 23 février 1869. M. Parrot diagnostique une péricardite. Du 23 février au 4 mars, époque à laquelle il a été rendu à sa famille en assez bonne santé, cet enfanta présenté une inégalité pupillaire, la pupille gauche étant la plus grande. Le troisième cas de péricardite fait le sujet de l'observation XIII. Conclusions. — Il résulte donc de ces faits que, dans les affections des poumons, des ganglions bronchiques et dans l'inflammation aiguë du péricarde : l'Dans un grand nombre de cas, on trouve une inégalité pupillaire. 2° La pupille la plus large correspond au côté malade. a. Si les deux côtés sont malades, la pupille la plus large correspond à l'inflammation aiguë. b. Si les ganglions bronchiques d'un côté sont atteints, c'est de ce côté que sera la pupille la plus large, quand bien même il y aurait une lésion du poumon opposé. c. S'il y a une péricardite et une lésion inflammatoire du poumon droit, la pupille droite sera la plus large. 3' L'inégalité pupillaire au début de l'affection n'est point continue, en général. J'ai, en effet, très-souvent remarqué que, au commencement de la maladie, les pupilles, généralement dilatées et inégales, sont quelque- fois égales et contractées. 4° L'inégalité n'existe généralement que si les pupilles sont dilatées. L'inégalité pupillaire s'observe fréquemment; dans l'espace d'un mois, dans le service de M. Parrot, j'en ai trouvé vingt-quatre cas; de- puis quelque temps je remarque plusieurs personnes de tout âge (et que je suppose être à l'état physiologique), et qui, -de temps à autre, ont les pupilles inégales. Pour expliquer la dilatation de la pupille correspondant à la lésion d'un organe ihoracique, je serais tenté d'admettre une excitation du grand sympathique de ce côté; mais la question n'est point facile. Dans un mémoire publié en 1857 (Union siédicale), M. Gubler établit que, dans un grand nombre de cas d affections inflammatoires du pou- mon, on trouve la pommette, du côté lésé, rouge et chaude. La tempé- rature axillàre de ce côté serait aussi plus élevée. 145 Or M. Claude Bernard (dont M. Gubler rapporte l'expérience pour es- sayer d'expliquer la rougeur de la pommette) en extirpant le ganglion cervical supérieur constate, dans le côté correspondant, une élévation de température dans la joue, et l'oreille cl l'aisselle, la contraction des muscles de la moitié de la face, la contraction de la pupille, la di- minution apparente du globe de l'œil. D'après ce fait la rougeur de la pommette et la dilatation de la pupille du même côté sont contradic- toires. Il est vrai que M. Gubler n'a point observé la rougeur de To- reille, la contraction des muscles de la face, la diminution du globe de l'œil. « Quant à l'état de la pupille, ajoute JVl. Gubler, je n'ai rien observé de remarquable, et quand l'œil ne se portait point en haut et en de- dans, la contraction ne m'a point paru sensible du côté affecté... Une fois même, j'ai cru voir une légère dilatation du côté correspondant à la maladie, mais je crains de m'être trompé. » La question de la rougeur de la pommette et de la température com- parative des côtés du corps dans les affections pulmonaires n'est point encore jugée. M. Lépine (Société de biologie, 1867) a trouvé la tempé- rature plus élevée tantôt dans l'aisselle du côté malade, tantôt dans l'autre, M. Charcot dit que l'on trouve la rougeur de la pommette et la chaleur plus élevée dans le côté du corps opposé à l'affection. Dans ce cas la rougeur de la pommelle et la largeur plus grande de la pu- pille du côté opposé s'accorderaient, d'après l'expérience de M. Ber- nard. A l'hopice des Enfants-Assistés, dans le service de M. Parrot, de- puis le 1" janvier, et sur un nombre considérable d'affections pulmo- naires, on n'a constaté qu'une seule fois la rougeur de la pommette ; de ce côté il y avait une pneumonie: la pupille correspondante était d'ailleurs plus large que l'autre. Quant à la température comparative des aisselles, je l'ai trouvée quelquefois, mais rarement, plus élevée dans l'aisselle du côté malade, dans les cas de pneumonie; dans les cas de tubercules, la température a toujours été égale dans les deux côtés; je n'ai point trouvé une seule fois la température plus élevée du côté opposé à l'affection. Dans cette note je n'ai parlé que des ganglions bronchiques, mais quelques faits me portent à penser que dans les affections des autres ganglions on trouvera la pupille la plus large correspondant au côté des ganglions lésés. Ce sera l'objet d'une prochaine communication. M. Lépine rappelle à ce propos que M. Galezowski a signalé une dila- tation des vaisseaux de la rétine du côié de la pneumonie. Dans un travail de M. Lépine, publié dans les bulletins de la Sociéié, il est fait mention de résultats thermiques se rattachant par quelques points c. R. 1869. 11 146 aux questions soulevées par M. Roques. On y trouve, entre autres, que plusieurs fois, chez des malades atteints de pneumonie, il existait une notable différence de température entre les deux aisselles. M. Browk-Séquard fait remarquer que depuis longtemps, à propos de la physiologie du grand sympathique il a proposé une explication de la rougeur des pommettes : il a admis que ce phénomène n'était pas dû à une influence exercée directement sur le grand sympathique, mais bien à une action réflexe. M. LiouviLLE, en étudiant la question des courbes thermométriques un des premiers en France, a eu fréquemment l'occasion d'observer des différences notables entre Us deux aisselles dans le cours de la pneu- monie. Dans ses recherches sur la rougeur des pommettes il a noté quelquefois une pâleur très-grande venant tout à coup remplacer la teinte rouge. M. Charcot a également étudié tous ces faits depuis longtemps. 11 a vu, outre les phénomènes décrits par M. Gubler, que la pommette n'est pas toujours le seul point qui s'échauffe. Ainsi l'on note assez fré- quemment dans la pneumonie une élévation de la température de la main et de celle du genou. Le plus souvent les phénomènes se mon- trent du côté malade; mais dans quelques cas exceptionnels c'est du côté opposé qu'on les observe. M. Gubler rapelle que dans son mémoire sur la rougeur des pom- mettes, il a établi que ce n'est pas la lésion anatomique qui est la cause de la production de chaleur. Dans un certain nombre de cas on voit en effet la rougeur et I élévation de la température survenir avant les phénomènes d'auscultation et annoncer en quelque sorte la pneu- monie. C'est qu'à ce moment il s'exécute un certain travail encore latent, et c'est à lui que l'on doit rapporter le phénomène en question. M. Brown-Séquard a observé des phénomènes de chaleur à la face dans d'autres cas que dans la pneumonie. En se servant de l'mstrument très-parfait de M. Lombard, il a noté que lorsqu'on pince le bras droit, par exemple, on voit les vaisseaux de la face se dilater adroite, et l'instrument accuse une élévation notable de température. Dans quel- ques cas l'augmentation de chaleur porte sur le côté opposé. Ce sont des faits d'ordre réflexe probablement analogues à ceux qui se mon- trent dans la pneumonie. M. Laborde a constaté à l'hôpital des Enfants que les phénomènes de rougeur des pommettes se montrent dans le jeune âge avec la même constance que chez l'adulte. M. Rabuteau annonce à la Société que comme conclusion de ses re- cherchés sur l'élimination des diverses substances, il croit pouvoir 147 formuler la loi suivante : une substance introduite dans l'économie s'élimine d'autant plus vite qu'elle est plus étrangère à l'orgatiisme. Cetle élimination se fait elle-même d'autant plus rapidement que la substance étrangère possède des propriétés médicamenteuses plus énergiques. Il montre de plus que chez un malade qui a pris plusieurs bains à l'iodure de potassium dans Tai pareil spécial de M. Encausse, il est facile de constater une quantité notable d'iode dans les urines. M. Onimus met sous les yeux de la Société trois chiens d'une même portée. Deux d'entre eux ont l'té électrisés chaque jour, le troisième a vécu sans être électrisé, dans les mêmes conditions; aussi, bien qu'au début de l'expérience son poids ait dépassé celui d'un des au- tres chiens, on peut aujourd'hui constater qu'il est notablement moins fort et moins pesant. M. Onimus croit que l'électricité a une influence heureuse sur le développement et la nutrition, et, d'après lui, le cou- rant ascendant aurait une action plus efficace que le courant descen- dant. M. Browin-Séquard fait remarquer que déjà, en 1849, il a cité des observations qui prouvent que la nutrition augmente rapidement sous l'influence du galvanisme. La séancfe est levée à cinq heures et demie*. Séance du 24 avril. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. GouBAux fait une communication sur l'anatomie comparée du nerf facial chez les grands animaux domestiques. Il indique de plus quelques particularités touchant la distiibution de certains muscles des extré- mités inférieures chez ces mêmes animaux. L'auteur remettra sur ces deux points une note détaillée. M. Bsown-Séquaud montre à la Société une femelle de cochon d'Inde sur laquelle il existe, à la suite d'une section de la moelle épinière, une augmentation de la sécrétion lactée, et une autre femelle sur laquelle on observe le même phénomène à la suite de la section du nerf sciatique droit. Chez ce même animal, on voit de plus au niveau du cou un trouble de la nutrition. En cet endroit la peau est devenue rouije, s'est en- flammée, et après avoir produit une croûte, elle oiire actuellement une sorte d'ulcération. On sait que M. Brown-Séquard a constaté le même fait à la suite d'une section d'une moitié latérale de la moelle. Il en conclut que la section 148 du nerf scialique entraîne les mêmes conséquences que celle de la moelle elle même. Chez un autre cochon dinde on a enfoncé dans le cerveau, peu de temps après la naissance, une épingle qui est restée dans lencéphale sans produire aucun phénomène appréciable. M. Ball présente deux échantillons d'une urine rendue par la même personne et offrant de? caractères tout à fait insolites. L'une de ces urines est d'un blanc laiteux, l'autre à une teinte ordinaire. Elles of- frent une réaction acide très-marquée. L'urine laiteuse ne contient pas d'éléments du sang; elle renferme une faible proportion de sels et une quantité assez grande de graisse. L'analyse faite par M. Chalvet va démontré la présence d'une faible quantité d'albumine et celle d'un acide volatil encore indéterminé. La personne qui rend ces urines est âgée de 60 ans; elle a toujours vécu à Paris et se porte bien. M. GuBLER, après avoir examiné ces urines, pense qu'elles ne ressem- blent ni à celles de l'hématurie ni à celles dites chyleuses; elles se rapprocheraient plutôt d'un groupe d'urines décrit par Rayer sous le nom d'urine grasse. La matière grasse qu'on y trouve ressemble à celle du chyle ou de la lymphe. Il s'agirait donc, dans ce cas, d'une sorte de lymphurie dans laquelle il n'y aurait qu'une simple filtration de la partie grasse de la lymphe. M. Bbown-Séquard fait remarquer à ce propos que l'hématurie de l'Ile de France ne mérite pas, à proprement parler, le nom de maladie. Elle est parfaitement compatible avec la santé et disparaît à l'époque de la puberté. Les jeunes filles présentent quelquefois celle accident jusqu'à l'établissement, des règles; mais c'est habituellement, comme on le sait, une maladie du sexe masculin. Dans quelques cas rares l'hématurie a persisté et a été suivie des lésions de la maladie de Bright. Chez quelques malades on voit un jour une urine sanglante, le lendemain une urine chyleuse, puis enfin une urine normale, et ces phénomènes se repro- duisent plusieurs fois dans le même ordre. C'est donc là un fait offrant quelques ressemblances éloignées avec celui dont M. Bail vient d'entre- tenir la Société. M. Chalvet croit, avec M. Gubler, qu'il s'agit d'une variété d'urine grasse; toutefois, comme on n'y trouve pas d'autres éléments de la lymphe, il est difficile peut-être d'y voir un exemple de lymphurie. Le point le plus difîicile à concevoir, pour M. Chidvet, consiste dans la présence simultanée de l'albumine cl de la graisse. W. GiiBLEu croit que, dans riiypothèse d'une lymphurie, il n'est pas très-embarrassant de comprendre les caractères ofierts par l'urine en question. 149 Ils sont liés, en effet, à la perméabilité plus ou moins grande des voies lymphatiques pour telle ou telle substance , et il est possible que des vaisseaux qui laissent passer de la graisse et une petite quantité d'albumine s'opposent néanmoins à l'issue de la plarmine ou d'autres parties. M. Chalvet avait d'abord pensé à la possibilité d'une pyarhémie; mais en raison des explications fournies par M. Gubler, il accepte l'idée d'une lymphurie et se propose de soumettre ces urines singulières à de nouvelles recherches chimiques. M. LiouviLLE présente à la Société le cerveau d'un homme qui a suc- combé à un attaque de tétanos. On peut voir en divers points des parties, grises des colorations d'un rouge plus ou moins foncé, sous forme de marbrure, tantôt d'une couleur vineuse, tantôt d'une teinte verdâlre ou jaunâtre. Dans un cas de chorée , observée avec son collègue M. Hallez, il existait dans l'encéphale des plaques disséminées d'une coloration analogue. M. Liouville montre de plus un rat blanc atteint de roulement de droite à gauche. On ne sait pas au juste si l'animal est devenu spon- tanément malade ou bien si les accidents que l'on observe sont sur- venus à la suite d'une inoculation de matière septique. Les yeux offrent une déviation correspondante au sens du roulement. L"œil droit fait une saillie plus considérable que le gauche, la pupille droite est dirigée en haut et en arrière, la gauche en bas. M. Legros a déjà eu l'occasion d'observer chez plusieurs rats des phénomènes analogues. Ils s'étaient développés spontanément et, dans tous les cas, on a trouvé un abcès à la base de l'encéphale. M. Liouville, dans un autre fait analogue, a rencontré une petite tu- meur au niveau de la glande pituitaire. M. Brown-Séquard fait observer que ce sont là les symptômes d'une lésion du pédoncule cérébelleux moyen. M. GRÉHA^T a fait sur les reins de nouvelles expériences qui confir- ment les résultats qu'il a déjà obtenus. Il a examiné d'abord le sang de la veine rénale et il y a trouvé moitié moins d'urée que dans celui de l'artère, résultat conforme à celui de M. Picard. En répétant cette expérience vingt-quatre heures après la ligature préalable des uretères, les deux sangs contiennent la même quantité d'urée. On voit ainsi que le rein, contrairement à l'opinion de Zalesky, ne fabrique pas d'urée. M. Gréhanl a attendu vingt-quatre heures pour faire l'analyse du sang parce qu'il faut ce laps de temps pour entraver la fonction du rein après la ligature de l'uretère. 150 M. Bert croit que la conclusion de cette expérience est un peu forcée et qu'on doit dire simplement qu'on empêche ainsi le rein de fabriquer de l'urée. Toutefois, M. Bert admet avec tout le monde la valeur des expériences de M. Picard. M. Onimos rend compte de quelques expériences qui tendent à démontrer, d'après lui, les générations spontanées des corpuscules de ferment. Les expériences ont été faites avec M. Leg;os et seront continuées par les deux observateurs. M. VuLPiAN fait remarquer à M. Onimus qu'il n« s'est pas mis, dans ses expériences, à l'abri des objections que l'on est en droit d'opposer à ce genre de recherches. L'imperméabilité des membranes employées pour fermer les tubes n'est pas démontrée ; et c'est là un point d'autant plus important que les corpuscules de ferment peuvent présenter quel- quefois, comme M. Balbiani a pu s'en assurer, des dimensions extraor- dinairement petites. MM. Onimus et Legros, après avoir soumis les membranes dont ils se servent à des épreuves nombreuses, croient pouvoir assurer qu'elles sont complètement imperméables et qu'elles ne peuvent être traver- sées que par des gaz. D'ailleurs ils se proposent de revenir prochaine- ment sur ce sujet. La séance est levée à cinq heures et demie. COMPTE RENDU DES SÉANCES DE ^ 1^ LA SOCIETE DE BIOLOGIE pendant le mois de mai 1869, Par m. J. HAYEM, secrétaire. PRÉSIDENCE DE M. CL. BEMARD. Séance du 1" mai. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Granché montre à la Société les lésions anatomiques trouvées à l'autopsie dune jeune fille atteinte de cliorée grave avec affection du cœur et embolies multiples. 11 y avait dans ce cas un ramollissement du côté droit de rencéphale avec hémiplégie gauche et aphasie. (Sera publié.) M. DtiMONTPALLiER fait remarquer l'importance de ce fait et la rareté du symptôme aphasie avec l'hémiftlégie du côté gauche. Il demande, de plus, si Ton a v;onsidéré ce cas de chorée comme un exemple de chorée rhumatismale. M. Lépine insiste sur la singularité de l'aphasie dans ce cas et met en doute la réalité de ce symptôme. 152 M. Granché dit que la malade semblait avoir conservé son intelligence, mais que cependant la langue présentait un certain degré de paralysie; la malade était incapable de lui faire dépasser le rebord des lèvres. Quant à la nature rhumatismale de l'affection du cœur, elle ne paraît pas douteuse. M. Laborde, s'appuyant sur l'état de la langue, rejette complètement l'hypothèse d'aphasie. Il pense que c'est par un abus de langage que l'on s'est servi plusieurs fois de cette expression dans des observations analogues. RECHERCHES SUR LA RESPIRATION DES POISSONS. La pompe à mercure que M. Gréhant emploie pour obtenir complète- ment les gaz qui proviennent de la décomposition de l'urée par l'acide azoteux permet aussi d'extraire les gaz qui sont simplement dissous dans un liquide ; c'est ainsi qu'elle a été utilisée avec succès par M. Ludwig et par ses élèves pour l'extraction des gaz du sang. Pour donner un exemple de la généralité d'emploi de cette machine pneumatique, M. Gréhant a repris l'étude de la respiration des poissons faite au commencement de ce siècle par de Humboldt et Provençal. Ces expérimentateurs chassaient les gaz de l'eau par l'ébullition dans un ballon, comme on le fait encore souvent aujourd'hui. Des tanches furent placées dans de l'eau de Seine pendant plusieurs heures, et l'analyse des gaz extraits de l'eau avant l'expérience et après que les poissons avaient respiré montra qu'il y avait absorption d'oxygène, production d'acide carbonique et même absorption d'un sixième du volume d'azote que l'eau contenait avant l'expérience : ce dernier ré- sultat est contradictoire avec ce que nous savons de la respiration des autres vertébrés qui n'absorbent point d'azote ou qui en exhalent môme une petite quantité d'après MM. Regnauld et Reiset. La condition nécessaire pour chasser complètement les gaz de l'eau, c'est de maintenir l'ébullition pendant un temps suffisant et de renou- veler le vide, ce que l'on fait facilement avec la pompe à mercure. En expérimentant sur des tanches et sur des cyprms dorés, M. Gréhant a reconnu que l'eau, après que les poissons ont respiré et consommé tout l'oxygène dissous, contient autant d'azote qu'auparavant; ainsi les poissons n'absorbent pas d'azote. 'Voici un tableau des résultats com- paratifs : 400 gr. eau avant l'expérience 400 gr. eau après l'expérience contenaient : contenaient : 13,2 acide carbonique. 18,3 Co*. 3,3 oxygène. 0 oxygène. 6,6 azote. 6,6 azote. 153 D'après Humboldt et Provençal : 2',582 eau avant l'expérience 2\582 eau après l'expérience contenaient : contenaient : 2,1 acide carbonique. 15,3 Co^. 15.6 oxygène. 1 oxygène. 34.7 azote. 28,9 azote. — M. Brown-Séquard rappelle en quelques mots les expériences de MM. Cohnheim et Frankel sur la production de la tuberculose chez les cochons d'Inde. Ces auteurs admettent que celle-ci peut se développer à la suite d'abcès ou de simples incisions. Sur le nombre considérable d'animaux opérés par M. Brown-Séquard, cet observateur n'a jamais eu l'occasion de constater une tuberculisation secondaire. De plus, il a vu très-souvent des abcès considérables persister pendant longtemps sans amener ce résultat. Ce défaut de concordance entre les expériences de MM. Sanderson, Fox, Cohnheim et Frankel, et celles de M. Brown- Séquard, tiendrait d'après ce dernier aux conditions hygiéniques dans lesquelles les animaux en expériences sont placés, et particulièrement à l'alimentation. C'est ainsi que M. Brown-Séquard a vu dépérir rapi- dement les cochons d'Inde sur lesquels il fait des recherches, depuis que ces animaux sont nourris aux frais de l'Ecole pratique. M. LiouviLLE, en faisant diverses inoculations chez des cochons d'Inde, a eu également Toccasion de remarquer l'influence de l'alimen- tation sur les résultats obtenus dans ces sortes de recherches. M. Laborde insiste encore sur cette hypothèse et ajoute que le lieu dans lequel vivent les animaux en expérience peut également faire va- rier les conséquences des opérations. M. Brown-Séquard montre à la Société un lapin sur lequel il a arraché le facial il y a déjà quelques semaines. On peut voir une contracture permanente des muscles du côté lésé et un tremblement qui augmente lorsque la respiration est gênée et qui se fait d'une manière rhy thmique. M. 'VuLPiAN fait remarquer que dans cette expérience le côté paralysé fait pendant les premiers jours une saillie en avant, tandis qu'ici et comme conséquence de la contracture, c'est le contraire que l'on ob- serve, c'est-à-dire que c'est le côté non paralysé qui est en saillie. Lorsque l'animal meurt, tout change et la face reprend alors l'aspect qu'elle avait au moment de l'arrachement du facial. Chez les animaux opérés par M. Vulpian, il existait aussi une oscillation continuelle des poils, des moustaches surtout, qui ne suivait pas un rhythme bien dé- terminé et semblait dû à de petites contractions des muscles qui en- tourent le bulbe pileux. M. Brown-Séqdard dit que les phénomènes qu'il a observés sont par- _ L\BRARVj 154 faitement conformes à ceux que M. Vulpian vient de rappeler. Il pense de plus, qu'un certain nombre d'entre eux sont liés à une paralysie des vaisseaux; ce qui tendrait à prouver que le nerf facial est un nerf vasculaire. * — M. Carville lit la note suivante : MOUVEMENTS CHORÉÎFORMES, RHYTHMIQUES GÉNÉRALISÉS CHEZ UN CHIEN, PERSIS- TANT DANS TOUT LE CORPS APRÈS LA SECTION DE LA MOELLE A LA RÉGION DORSALE. Le 13 avril 1869 je dus, pour le cours de physiologie de la Faculté de médecine, ouvrir le rachis d'un chien et mettre à nu la moelle et ses racines. En faisant cette opération, pour laquelle je pris un chien jeune, faible et maigre, mais acclimaté à l'Ecole pratique, où il se trouvait depuis près de deux mois, servant à des expériences sur la reproduction des cartilages, je remarquai que cet animal était agité de mouvements choréiformes, rhythmiques, généralisés, incessants. Le girçon de la- boratoire me déclara qu'il avait toujours vu ce chien aussi agité. N'ayant pas d'autre sujet à ma disposition en ce moment, je passai outre, et malgré les secousses continuelles du patient je parvins, sans hémorrhagie, sans ouvrir les méninges, à découvrir 12 centimètres de moelle dans la région dorso-lombaire. L'animal, détaché, but et se reposa trois heures au moins : les mou- vements choréiformes persistaient sans être plus intenses qu'avant l'o- pération. A trois heures de l'après-midi, M. le professeur Longet, en présence de M. Vulpian et des élèves des laboratoires de physiologie et d'ana- tomie pathologique, procéda à ses expériences. Avant tout on con?tata les mouvements ciioréiformes de l'animal : les quatre membres étaient plusieurs fois par mmute excités comme par une décharge électrique, simultanément, et exécutaient un mou- vement limité d extension ; les muscles de la face présentaient le même tressaillement. M. Longet, après avoir ouvert les méninges, enleva dans une cer- taine longueur les cordons postérieurs, puis fit une section complète de la moelle au milieu de la région dorsale; il relève ensuite le bout caudal de la moelle, en détache les cordons latéraux et l'axe gris, coupe toutes les racines antérieures et postérieures, et ne laisse ainsi que les cordons antérieurs isolés dans une longueur de 8 centimètres à peu près; il excite alors par la compression le bout supérieur de ces cordons antérieurs de la portion caudale et obtient des mouvements 155 d'ensemble du train postérieur du chien ; ces mouvements provoqués étaient parfaitement distincts des mouvements choréiformes. J'ai déjà dit, en effet, que malgré le repos accordé au chien après l'ouverture du rachis, le train postérieur affaibli, paralysé même de la motilité volontaire, était resté agité de secousses choréiformes; après la section de la moelle, ces mêmes secousses rhylhmiques persistent non-seulement dans ce train postérieur, mais encore dans tout le reste du corps. c"est-à-dire dans les membres antérieurs et la face, avec un isochronisme parfait. Je nai point toutefois remarqué que ces mouve- ments aient augmenté d'intensité dans les membres postérieurs après la section de la moelle. L'expérience dure au moins 15 minutes. Les diverses parties de la moelle possèdent leur névrilité; lexamen à l'œil nu ne fait découvrir aucune altération des méninges dans la région ouverte. Enfin le chien est mis à mort par la section du bulbe ; l'examen mi- croscopique de la moelle n'a pas été pratiqué. Ce fait doit être rapproché de celui publié par M. Chauveau, qui a vu aussi une chorée rhythmique généralisée chez un chien persister dans le tronc et la tête après la section de la moelle dans l'espace atloïdo- axoïdien, et qui a cru pouvoir en tirer la conclusion suivante ; « La chorée n'est qu'une manifestation morbide du pouvoir réflexe de l'axe médullaire (I). » M. Bert, à propos du fait très-intéressant observé par M. Carville, apprend à la Société qu'il a réussi à enregistrer le mouvement rhyth- mique désigné sous le nom de tic et qu'il ne croit pas dans ce cas qu'il y ait une exagération du pouvoir réflexe de la moelle. Si l'on vient, en effet, à faire une section des racines sensitives de la moelle, on voit le mouvement persister avec le même type. M. Carville ne croit pas non plus que son observation puisse servir à démontrer dans la chorée du chien une exagération du pouvoir réflexe de la moelle. Il pense qu'elle vient à l'appui de l'opinion de M. Chauveau qui dit simplement qu'il devait y avoir une maladie de l'axe gris mé- dullaire. M. Legros a cherché par de nouvelles expériences à réfuter les objections soulevées à propos de sa dernière communication avec M. Onimus. Il croit que le papier-parchemin employé par eux ne peut être tra- versé ni par la poudre de carmin ni par celle de bleu d'aniline. Une nouvelle discussion sur laquelle on doit revenir s'engage à ce (1) Gaz. mf.d. de Lyon, 1864, p. 194, 456 propos, et plusieurs des membres de la Société ne pensent pas que l'on soit autorisé à conclure à l'imperméabilité du papier parchemin qui a servi aux expériences de MM. Legros et Onimus. M, LiouviLLE a trouvé chez le rat, présenté dans la dernière séance, un abcès situé dans le côté gauche du bulbe et portant en même temps sur une partie de la protubérance. De plus, depuis la dernière séance, un second rat, vivant dans les mêmes conditions que le premier, est tombé spontanément malade et offre un roulement de gauche à droite; l'autopsie en sera faite prochainement. M. Legros montre également un rat atteint de la même maladie, mais ne présentant qu'un simple mouvement de manège. La séance est levée à cinq heures et demie. Séance du 8 mai. Le procès-verbal est lu et adopté. — M. Legros présente, en son nom et celui de M. Onimus, plusieurs cochons d'Inde chez lesquels il a pratiqué une section transversale complète de la moelle épinière vers la fin de la région dorsale. Ces ani- . maux ont des attaques d'épilepsie quand on les irrite ; mais la zone habituelle n'est pas capable de déterminer l'attaque ; il faut, pour pro- duire cet effet, pincer la partie postérieure du cou ou du dos. Si, au moment de l'accès, on fait passer de la tête au train postérieur de l'a- nimal un courant continu, on fait cesser immédiatement les convul- sions. D'autre part, si, pendant que les animaux sont soumis à l'élec- tricité, on cherche à provoquer une attaque, on n'obtient que quelques mouvements convulsifs de peu de durée. M. Brown-Séquard fait observer que lorsque les animaux opérés com- mencent à devenir épileptiques, la zone épileptogène peut siéger pen- dant un certain temps à l'endroit indiqué par M. Legros, dans le cas où la section de la moelle est complète. Lorsqu'au contraire la section est unilatérale, la zone épileptogène, telle que cet observateur l'a indi- quée, est constante. De plus, pour obtenir de véritables accès d'épilep- sie, il faut que les animaux soient bien nourris, et ceux de M. Legros paraissent être dans un état de faiblesse trop considérable pour réagir vigoureusement quand on les irrite. M. Laborde, en enlevant une partie de la moelle lombaire, a eu l'oc- casion de remarquer aussi qu'au début la zone épileptogène n'était pas bien délimitée et que les accès ne survenaient que lorsqu'on excitait l'animal dans le voisinage de la plaie. 157 — M. LiouviLLE met sous les yeux de la Société les pièces auato- miques recueillies sur les rats qui présentaient les phénomènes de rou- lement dont il a parlé plusieurs fois. Chez le premier rat il existait, outre l'abcès du bulbe, des foyers purulents dans les os de la base du crâne. Chez le deuxième on a trouvé également, outre un abcès céré- bral, une suppuration des deux oreilles internes ; l'oreille droite était plus atteinte que l'autre. Dans des faits de ce genre, on doit se deman- der si les phénomènes observés pendant la vie se rapportent exclusive- ment à la lésion cérébrale ou à celle de l'oreille interne. M. Magnan a observé chez l'homme deux faits de giration, et il s'agis- sait dans les deux cas d'une tumeur située à la base du crâne. M. Laborde, d'après les faits qu'il a lus ou observés chez l'homme, pense que les symptômes de tournoiement ou de giration sont plutôt en rapport avec la tumeur cérébrale qu'avec les lésions de l'oreille, à moins que celles-ci ne portent sur les canaux semi-circulaires. M. Brown-Séquard rappelle qu'un grand nombre de faits expérimen- taux et cliniques démontrent que l'ébranlement du nerf auditif peut facilement produire les phénomènes du roulement ou du tournoiement. Chez l'homme, les faits ne sont pas encore très-nombreux. Le duc de Wellington en a offert un exemple bien remarquable. Traité par un charlatan qui lui fit des injections irritantes dans l'oreille, il fut pris à plusieurs reprises d'un tournoiement très-intense. Il a trouvé que la piqûre du nerf auditif pratiquée chez les mammifères donne lieu au roulement; l'arrachement du facial, en ébranlant le nerf auditif, peut produire le même phénomène; enfin la section des canaux semi-circulaires, qu'il est impossible de pratiquer sans ébranler le nerf auditif, produit également le roulement. Si la section des divers canaux est suivie d'effets différents, surtout chez les oiseaux, il ne faut pas oublier que des piqûres dans des points divers du nerf auditif ne sont pas toujours suivies, non plus, des mêmes effets. M. Laborde a également observé, à la suite d'une injection faite avec une certaine force dans l'oreille d'un enfant, un mouvement de gira- tion. M. Brown-Séquard fait observer que la simple injection d'eau bien froide dans l'oreille peut produire une sorte de titubation ou d'ivresse. M. Ollivier présente un cœur sur lequel on peut voir des ulcéra- tions de l'endocarde. Ces lésions portent presque exclusivement sur le cœur droit; on n'observe qu'une seule ulcération à gauche sur une des valvules sigmo'ides. Il existait dans ce cas des infarctus du poumon et de la rate. M. Brown-Skquard communique le résultat de quelques-unes de ses 158 recherches sur l'aura épileptique. 11 a d'abord remarqué que chez les cochons d'Inde rendus épileptiques il sufBt quelquefois de cautériser la zone épileplogène pour guérir Tépilepsie. En coupant, à l'aide d'une longue incision, la plupart des filets nerveux qui se rendent à la peau de cette zone, on ne peut plus provoquer les attaques, du moins pen- dant un certain temps. Chez les animaux qui ont eu le nerf sciatique coupé, on voit alors disparaître l'ulcération de la patte qui se forme probablement par les frottements dus aux attaques épi'eptiques. Ces faits expérimentaux, en démontrant .ainsi les résultats favorables des plaies et des cautérisations de la zone épileptogène, ont conduit M. Brown-Séquard à faire l'étude des moyens révulsifs divers appliqués chez l'homme sur le point de départ de l'aura. Dans sa pratique privée et dans les consultations qu'il a données en grand nombre à l'hôpital des épileptiques de Londres, il a vu plusieurs fois des moyens révul- sifs, appliqués sur le siège de l'aura, produire des effets très-remar- quables. Chez une jeune fille qui avait plusieurs fois par jour des attaques d'épilepsie, il suffisait d'un pincement plus ou moins violent au moment oii elle était prise d'accès pour faire avorter l'attaque. M. Brown-Séquard admet dans l'épilepsie une irritation qui part de la périphérie et qui provoque une attaque, parce que le centre ner- veux où elle se modifie est lui-même irrité d'une certaine façon. Un vésicatoire, une cautérisation, une irritation périphérique quelconque, pour agir sur l'attaque d'épilepsie, doit donc modifier d'une certaine manière la nutrition de l'encéphale, changer à la fois l'état de la péri- phérie et celui du centre. Cette hypothèse très importante sera déve- loppée plus tard avec les détails qu'elle mérite. M. VuLPiAx a fait dans l'ataxie locomotrice progressive quelques ob- servations physiologiques qui se rapprochent à certains égards des faits observés par M. Brown-Séquard. On sait, en efifet, que dans l'ataxie locomotrice il existe des douleurs d'une intensité quelquefois atroce, et dont le siège paraît être à la périphérie. Or on peut faire cesser ces douleurs à l'aide de diverses irritations locales. M, Vulpian emploie le plus souvent des compresses chloroformées, qui n'agissent pas comme anesthésiques, mais bien comme irritants; les mêmes effets sont obtenus à l'aide des sinapi^mes. 11 est permis de supposer ici que, sous cette influence locale, il se produit une certaine modification dans les centres nerveux et la moelle en particulier. C est en effet sous l'in- fluence d'un accès d'irritation de la moelle que les douleurs prennent naissance, et c'estpar erreur que les malades en rapportent le siège à la périphérie. M. Brown-Séquard partage complètement ces idées, et il en a déjà de- 159 puis longtemps fait l'application à la théorie des douleurs et des cram- pes, que l'on observe dans la myélite chronique. Ces considérations physiologiques prouvent qu'il y a encore beaucoup de recherches à enirepren Ire au point de vue du traitement des maladies de la moelle. A côté de la théorie physiologique de ces phénomènes douloureux, on peut placer les faits rapportés par M. Brown-Séquard, d'arrêt de con- vulsions sous l'influence dune irritation périphérique, et à un point de vue plus général il y a là ([uelque analogie avec ce que l'on désigne sous le nom de phénomènes d'arrêt. On sait que M. Rouget ad- met que l'irritation d'un nerf peut changer les conditions moléculaires des cellules ganglionnaires auxquelles il aboutit et qu'elle suspend ainsi leur action physiologique. Cette théorie serait applicable, par exemple, à l'explication de hi dilatation pupillaire. Toutefois ce dernier phénomène est complexe, et M. Brown-Séquard pense que la dilatation pupillaire peut être due, dans certains cas, à la contraction des vaisseaux de l'iris. M. Legros rappelle que les artères qui se rendent à l'iris traversent le muscle de Biucke, tandis que les veines passent en dehors de ce muscle. La contraction de celui-ci pourrait donc comprimer les artères et agir ainsi dans la production des changements de diamètre de la pupille. M. VcLPiAN se souvient que Waller ayant examiné directement les vaisseaux de liris pendant l'action de la belladone, a pu s'assurer ainsi qu'il n'y avait aucun changement dans leur diamètre. Ces faits ont été communiqués à l'Académie des sciences. M. Bert rappelle aussi qu'on peut voir la pupille se dilater chez des jeunes animaux auxquels on a enlevé le cœur, et par conséquent sans l'intervention des vaisseaux, M, Brovvn-Séquard sait parfaitement que l'iris peut se contracter sans l'intermédiaire de la circulation; mais cela ne prouve pas que dans certains cas celle-ci ne puisse jouer un rôle important dans la production de ce phénomène. M. GiRALDÈs rappelle que la circulation intra-oculaire est très-com- plexe et qu'il est difficile de se rendre un compte exact du rôle qu'elle joue dans les phénomènes oculo-pupillaires. Dans des expériences nou- velles sur ce sujet, Becker a vu un gonflement alternatif des procès ci- liaires pendant la contraction et la dilatation pupillaires; il existait en même temps des changements correspondants dans la circulation de l'iris. — ÎMi QtiNftuAUD présente à la Société le cerveau d'un fœlus mort- 160 né, d'environ 6 mois, dans lequel on voit deux foyers d'hémorrhagie intracérébrale. Ce fœtus présentait une rétraction de tous les muscles fléchisseurs des membres supérieurs et inférieurs, et une courbure latérale droite de la colonne vertébrale. Les foyers d'hémorrhagie contenaient, outre une quantité considérable de globules du sang, un certain nombre de corps granuleux; de sorte que ces hémorrhagies avaient eu lieu cer- tainement plusieurs jours avant la fausse couche. — La séance est levée à cinq heures et demie. Séance du 15 mai. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. Rupture de l'attache du fléchisseur superficiel des phalanges a l ex- trémité SUPÉRIEURE et EXTERNE DU CALCANÉUH; RUPTURE DU LIGAMENT SÉSAMOÏDIEN supérieur; AUTOPSIE; obscrvation recueillie sur un cheval, par M, Am. Goubaux. Le sujet de cette observation est un cheval hongre, de race arabe, propre au trait léger, sous poil gris pommelé, portant des cicatrices anciennes en écharpe, par suite de l'application du collier, à la partie inférieure de l'encolure et un peu sur le bord antérieur des épaules, âgé de 14 ans environ. Il servait pour les examens des cours pratiques des opérations chirurgicales le lundi 29 juillet 1867. J'étais placé depuis quelque temps à une certaine distance de ce cheval et derrière lui, lorsque je remarquai quelque chose d'anormal dans la situation de la corde du jarret du côlé droit. Alternativement cette corde tendineuse se déplaçait en dehors et reprenait sa place or- dinaire. Cette observation me fit examiner le cheval plus attentivement, et je notai ce qui suit : Le jarret du côté droit a le même volume que celui du côté gauche, et il est normal. Il n'y a qu'une légère différence dans le degré de son ouverture : celui du côté droit est plus droit, plus ouvert que celui du côté gauche. Le canon du même côté est plus volumineux que celui du côté gau- che. Il est le siège d'un engorgement ancien dans sa partie postérieure, et cet engorgement embrasse en bas les parties supérieures et posté- rieures du boulet. Cette dernière région n'a pas sa situation normale; elle est abaissée, et le paiuron a une direction qui se rapproche de l'horizontale et diffère de celle de la région du membre postérieur gauche. 161 Quand le cheyalest libre et au repos, le membre postérieur droit est légèrement porté en avant et sert peu à l'appui. Le coude du jarret est à peu près droit, comme à l'ordinaire, et le sommet du calcanéum d^* la pointe du jarret n'est pas plus volumineux que dans le jarret du côté gauche. Si l'on force le cheval à s'appuyer sur le pied postérieur droit, le coude du jarret se déplace brusquement en dehors et devient alors, au lieu d'être à peu près parallèle au grand axe de la jambe, oblique de haut en bas et de dedans en dehors. Immédiatement après le déplace- ment de la corde tendineuse, on voit apparaître en dedans le sommet du calcanéum qui forme une saillie anormale. La peau qui recouvrait d'abord la pointe du jarret se porte en dehors ou plutôt se déplace en même temps que le tendon, et elle est alors flasque, dirigée en dehors du sommet du calcanéum. Le creux du jarret, en dehors, ne paraît éprouver aucune modification soit avant, soit après le déplacement du tendon dont il est question. Quand il y a un déplacement de tendon, le calcanéum paraît avoir environ le double du volume de celui du côté gauche. L'exploration m'a fait reconnaître que le tendon du pliphémore-cal- canéen ne change pas de direction, et qu'il n'a subi aucune modifica- tion de volume ni de direction, mais qu'il varie seulement dans ses rapports lorsque le déplacement du tendon a lieu. Or ce tendon qui se déplace est bien évidemment celui du fléchisseur superficiel des phalanges. On sent parfaitement bien qu'il se déplace et qu'il se replace suivant la position qu'on fait prendre au membre, et que son déplace- ment se fait toujours brusquement, soit, dans un sens soit dans l'autre. De ces diverses considérations, je conclus à la rupture de l'attache du tendon du fléchisseur superficiel des phalanges sur le côté infé- rieur de l'extrémité supérieure du calcanéum. Et de l'abaissement de la région du boulet et de l'engorgement du canon du membre, je conclus à l'existence d'une rupture ancienne du ligament sésamoïdien su- périeur. Je fis part de mon observation et de mes conclusions à mes collè- gues MM. Magne, Reynal, Colin o!, Raymond, et je résolus de vérifier par la dissection la justesse de mes cunc'"S!uns. Lorsque les opérations furent terminées, je fis enlever le membre postérieur droit de ce cheval, et on le transporta dans mon cabinet, où j'en fis la dissection quelque temps après, le môme jour. Voici ce que j'ai reconnu. Au-dessous de la peau qui recouvre le sommet du calcanéum (pomte du jarret), le tissu cellulaire est un peu infiltré; il est abondant, très- lâche et de couleur rougeâtre. Après avoir constaté que le tendon de C. R. 1869. It 162 fléchisseur superficiel était sain dans ce même endroit, je l'ai fendu de haut en bas et dans sa portion moyenne, afin de pénétrer directement et très-largement dans la gaîne tendineuse, qui facilite son glissement sur le calcanéum. J'en ai rabattu chacune des moitiés latérales : l'une en dehors et l'autre en dedans. Cette synoviale contenait très-peu de synovie ; les franges en étaient un peu rouges et assez développées. Les choses étant placées dans l'état qui vient d'être indiqué, j'ai reconnu que la partie du tendon du muscle fléchisseur superficiel des phalanges, qui s'attache sur le côté interne de l'extrémité supérieure du calca- néum, était rupture. Au niveau de la rupture, les fibres composant ce tendon étaient disposées en forme de pinceaux et avaient une consis- tance moindre qu'à l'état normal. Il n'y a pas de rougeur de ces fibres. La rupture mesure une longueur de près de 6 centimètres. En dedans du calcanéum et en dehors de la rupture, il y a une poche assez spa- cieuse, vide, qui s'est formée aux dépens des tissus cellulaires et fibres environnants. Dans la région du canon, j'ai constaté que les tendons du muscla fléchisseur superficiel et profond avaient tous leurs caractères normaux. Des coupures faites dans l'épaisseur et parallèlement à la longueur du ligament sésamoïdien supérieur, — qui était beaucoup plus épais que dans les circonstances ordinaires et entouré par du tissu fibreux de nouvelle formation, — ont fait reconnaître des altérations diverses. En effet, outre plusieurs ruptures partielles, il y avait une rupture transversale complète de ce ligament vers les trois quarts inférieurs de la longueur du canon. A ce point les fibres rompues étaient réunies par un tissu de nouvelle formation, ainsi qu'on le remarque d'ordinaire après l'opération de la ténotomie (1). Ces pièces seront conservées pour le cabinet des collections de l'Ecole d'Alfort. Mon diagnostic étant justifié par l'examen cadavérique, il me restera (1) Sous le titre de ; Déformation des angles métatarso-phalangiens chez un cheval, j'ai fait connaître une observation semblable en ce qui concerne la rupture du ligament sésamoïdien supérieur. Le sujet chez lequel j'ai recueilli cette observation avait les deux boulets postérieurs ramenés en arrière et paraissait beaucoup souffrir; il piétinait sans cesse. La douleur paraissait beaucoup plus forte lors- qu'on le forçait à s'appuyer sur un pied seulement. A la dissection des deux membres, j'ai constaté une rupture du ligament sésamoïdien supé- rieur en voie de cicatrisation. (Voir BuuEtiN d£ iA Société pe ^iùlogib, !'• série, t. V, année 1853, p. 121.) 163 à rechercher ultérieurement les circonstances dans lesquelles ces rup- tures ont pu se manifester, et à reproduire expérimentalement les mêmes symptômes que j'ai observés chez le cheval qui fait le sujet de cette observation (i). —M. Leven expose le résultat de ses recherches sur les effets de l'acide carbonique. Les expériences ont été faites sur différents animaux. M. Leven distingue trois phases dans l'asphyxie par l'acide carbo- nique. Dans la première phase on observe le ralentissement de la cir- culation et de la respiration. La deuxième phase ou période anesthé- sique est caractérisée par une sorte de coma. Dans la troisième, la cir- culation et la respiration s'arrêtent. En faisant l'analyse physiologique des phénomènes présentés par les différents animaux dans ces trois phases successives, l'auteur est arrivé aux conclusions suivantes : L'acide carbonique a une action stupéfiante sur le cœur. C'est un poison du cœur. 11 a une action aneslhésique très-puissante; sa présence en excès dans le sang abaisse la température et trouble les actions chimiques. Les causes de la mort sont complexes; elle se fait surtout par le cœur ; il faut y joindre la suppression des fonctions cérébrales, mais sans faire intervenir un état congestif qui n'existe pas. En général, les propriétés des divers tissus ne sont pas détruites; la moelle et les nerfs conservent leurs propriétés. Les fonctions cérébrales peuvent être réveillées par une seule inspiration d'oxygène, et la mort n'arrive que lorsque ce gaz n'a plus d'action sur le cœur. — M. Hallopeau, interne des hôpitaux, en présentant le cœur d'une malade, lit la note suivante: RÉTRÉCISSEMENT \ENTR1CULO-AORTIQUE ; RÉTRÉCISSEMENT MITRAL ; VASCULARISA- TIO.N DES SIGMOÏDES AORTIQUES; ACCIDENTS DANÉMIE CÉRÉBRALE. En l'espace de quelques mois, nous avons rencontré à la Salpêtrière, dans un grand nombre d'autopsies, la lésion récemment décrite par (1) Dans le courant du mois de septembre 1867, j'ai essayé sur le cadavre d'un cheval et par le procédé sous-cutané, de détruire, à l'aide du bistouri, l'attache du tendon du fléchisseur superficiel des pha- langes à la partie externe de l'extrémité supérieure du calcanéum. J'y ai réussi facilement. Il me fut possible, après cette opération, de dé- placer le tendon en dehors et de le mettre ensuite à sa place. II se pro- duisit dans cette condition tout ce que j'ai observé sur le cheval qui fait le sujet de cette observation. 164 M. Vulpian sous le nom de rétrécissement ventriculo-aortique (1): par sa fréquence, par les erreurs de diagnostic auxquelles peuvent donner lieu les bruits anormaux qu'elle produit, par l'explication sa- tisfaisante qu'elle fournit souvent de bruits de souffle difficiles à interpréter autrement, celte altération nous parait destinée à prendre une place importante dans la pathologie du cœur. Notre pièce en offre un nouvel exemple; elle présente en outre, ainsi que l'histoire de notre malade, plusieurs particularités qui nous semblent mériter l'at- tention. Résumé DE l'auscultation. — La nommée Bourgnet, entrée le 20 avril 1869, à l'âge de 69 ans, dans le service de M. Vulpian, salle Saint-Ma- thieu, 7. Elle n'a jamais eu de rhumatisme. Depuis quelques années, elle éprouve fréquemment des palpitations, elle tousse, elle a de la dyspnée, elle se plaint aussi de vertiges. Tout à coup elle se sent étourdie, il lui semble que la tête lui tourne, qu'elle va tomber; elle perd plus ou moins complètement connaissance pendant quelques instants; jamais elle n'a eu d'hydropisie. C'est un accès de dyspnée qui l'amène à l'in- firmerie : la face est pâle, le pouls petit et irrégulier, la respiration accélérée; on entend dans le thorax de nombreux râles de bronchite, le tracé sphygmographique est remarquable par le peu de hauteur des pulsations, leur irrégularité et l'obliquité marquée de la ligne ascen- dante; l'impulsion cardiaque est énergique; le choc est plus fort au niveau de la pointe et sur le bord droit du sternum. Auscultation. On entend à la pointe un bruit de souffle présystolique bien net; le deuxième bruit n'est pas très-bien frappé, mais il n'est pas réellement soufflant. A la base et sur le milieu du cœur, il existe au premier temps un bruit de souffle prolongé; ce bruit se prolonge sur le sternum jusqu'au cou, mais en s'affaiblissanl progressivement. M. Vulpian diagnostique un rétrécissement aortique et un rétrécis- sement mitral; Les jours suivants, les phénomènes thoraciques s'amendent, un symp- tôme nouveau se produit, c'est une tendance irrésistible au sommeil ; la malade est presque constamment assoupie; en l'excitant on la tire momentanément de cet état, elle répond alors avec intelligence aux questions qu'on lui pose, mais au bout d'un instant ses yeux se fer- ment malgré elle, elle retombe dans la somnolence. Chaque jour celle tendance au sommeil s'accusait davantage quand (l) Voir Vulpian, Archives de physiologie, 1868. — H. Liouville. Mé- moires de la Société de Biologie, 1868; Gazette médicale, 1869, n" 12. 165 le 9 mai, la malade s'affaisse tout à coup, pâlit, perd connaissance et meurt au bout de quelques instants, probablement de syncope. Résumé de l'autopsie. — Le diagnostic est pleinement confirmé : l'in- fundibulum aortique et l'orifice mitral sont notablement rétrécis. Rétrécissement venir iculo-aor tique. Pour en constater l'existence il importe d'explorer, avant d'ouvrir complètement le cœur, Torifice aortique et la cavité ventriculaire: introduisant donc par la pointe du ventricule l'index et le médius accolés, nous essayons de pénétrer dans l'aorte ; mais avant d'atteindre l'orifice, nous nous sentons arrêtés et nous pouvons nous convaincre que l'obstacle siège à 1 centimètre environ au-dessous des sigmoïdes et que plus haut, au niveau de l'ori- fice, la cavité s'élargit brusquement. Le ventricule ouvert, la cloison nous apparaît notablement hyper- trophiée , elle se renfle a sa partie supérieure de manière à former une sorte de bourrelet volumineux faisant saillie dans l'infundibulum aortique. D'autre part, la valve antérieure de la mitrale, qui limite en arrière et à gauche l'infundibulum, est le siège d'une altération sclé- reuse des plus avancéees ; elle est épaissie, rigide, très-peu mobile, notablement rétractée : c'est là , entre la saillie de la cloison et la yalve mitrale, que se trouve la partie la plus resserrée du canal ven- triculo-aortique; il y a là un véritable détroit que doit franchir le sang quand la contraction ventriculaire le chasse dans l'aorte. Ces condi- tions ne sont-elles pas éminemment favorables à la production d'un bruit de souffle? Pour nous, elles nous semblent fournir l'explication la plus rationnelle du bruit anormal qui existait chez notre malade, à la base et au milieu du cœur ; les orifices ne présentent d'ailleurs aucune altération qui puisse rendre compte de ce bruit, et il se différenciait suffisamment par son timbre des bruits anémiques. Des deux altérations que nous avons vues contribuer à la formation du rétrécissement ventriculo-aortique, la saillie de la cloison et la ré- traction de la mitrale, la première a pour cause l'hypertrophie du cœur, la deuxième l'endocardite chronique. L'hypertrophie du cœur, comme l'athérome artériel dont elle est fréquemment la conséquence, existe très-communément dans la vieillesse. Il en est de même de l'endo- cardite chronique : contrairement à ce qu'on lit dans les ouvrages les plus complets et les plus récents sur les maladies du cœur, cette af- fection, d'après les observations de M. Vulpian, est des plus fréquentes à cette période de la vie. Il est presque exceptionnel de trouver chez les individus âgés la mi- trale intacte ; dans la grande majorité des cas elle est indurée, épaissie, surtout près de son bord libre ; très-souvent elle est parsemée de pla- ques PcirTOu^e.N. d'ùrc^s, opacjr.e.-. hiaiîclu'urc.-; ; sur sa fjCt' vonlric'.!';i;r;', 166 et à son bord, on voit des saillies plus ou moins volumineuses, et l'on ne peut dire que ce soient là les reliquats de vieilles inflammations datant du jeune âge, car à côté de végétations dures, blanchâlres, déjà anciennes, il s'en trouve d'autres dont la demi-transparence, la couleur rougeâtre, souvent la vascularisation, indiquent l'origine toute récente. Il semble que, dans la vieillesse, l'endocarde des valvules et sur- tout celui de la mitrale soii très-généralement le siège d'une irritation formatrice lente, presque continue. Ce travail aboutit, par suite des transformations régressives que subissent les éléments de nouvelle for- mation et de l'atrophie des éléments normaux, à la rétraction de la valvule. On ne saurait donc s'étonner que l'infundibulum aortique soit fré- quemment rétréci chez les vieillards, et, pour peu qu'on examine le cœur avec les précautions voulues, on constate, dans un grand nombre de cas, l'existence de cette lésion. Dans quelle mesure est -elle compatible avec l'intégrité de la circulation? A quel degré doit-elle être portée pour qu'il en résulte des troubles syinptomatiques et des bruits anor- maux? C'est ce que des recherches uUérieures devront décider. Mais nous pouvons dire dès maintenant que chez un certain nombre de sujets, et entre autres chez celui dont nous rapportons l'observation, le rétrécissement nous a paru assez prononcé pour qu'on ne pût lui refuser une influence, sinon identique, du moins égale à celle que l'on accorde à un rétrécissement marqué de lorifice proprement dit. V ascularisalion des sigmoïdes. On voit courir à la base des valvules aorliques droite et postérieure un vaisseau relativement volumineux. De son bord supérieur émanent un grand nombre de ramifications fa- cilement visibles à l'œil nu, bien que très-fines; elles forment un beau réseau sur la face ventriculaire des valvules. Cette lésion a été long- temps regardée comme très-rare, faute peut-être d'un examen suffi- samment attentif; M. Vulpian en a observé dans ces dernières années un certain nombre de cas; il ne la considère pas comme exception- nelle (1). Rétrécissement de lorifice mitral. Il est assez serré pour que l'in- dex ne puisse le franchir, assez large pour admettre facilement le petit doigt. La valvule est très-malade; examinée par sa face auriculaire, elle offre un aspect singulier, rappelant celui du museau de tanche. L'orifice a la forme d'une fente semi-circulaire; la valve postérieure (1) Voir observation de Charcot et de H. Liouville, Société de biolo- gie (Comptes rendus, p. 174 et J77, année 1868). 167 n'est représentée que par une bande mince, suivant le contour de l'an- neau fibreux; la valve antérieure constitue un véritable diaphragme interposé entre les cavités gauches du cœur; elle est vascularisée; de fines végétations rougeâtres surmontent son bord libre. Vu par le ventricule, l'orifice a la forme d'une boutonnière; les cor- dages sont très-épaissis, rétractés, en. partie soudés entre eux; ils portent aussi des végétations rougeâtres très-délicates. La valve anté- rieure est peu mobile; il suffit néanmoins d'exercer sur sa face aorti- que une légère pression pour que l'orifice se trouve, par cela seul, parfaitement clos; il ne pouvait donc y avoir d'insuffisance. Troubles fonctionnels. En présence de tels obstacles au cours du sang, on peut être surpris que les troubles fonctionnels n'aient pas été plus accusés ; les poumons étaient un peu congestionnés, mais les phé- nomènes de stase manquaient dans la circulation générale. Le ventri- cule droit se contractait, il est vrai, avec énergie, comme en témoigne le choc intense que l'on percevait à droite du sternum; mais ses parois ne spfit pas hypertrophiées : à peine l'oreillette gauche est-elle épais- sie, près de l'orifice mitral. Peut-être dans la vieillesse, à mesure que l'activité de la nutrition se ralentit, la quantité de sang en circulation se réduit-elle proportionnellement; on pourrait comprendre ainsi com- ment un rétrécissement considérable peut se produire à l'un des ori- fices du cœur sans que la circulation veineuse se trouve entravée. L'influence des lésions cardiaques ne s'est guère fait sentir que sur la circulation artérielle; c'est dans l'encéphale surtout que les effets en ont été marqués. Dans cet organe, un nouvel obstacle venait s'opposer aucours du sang, les artères de la base étaient lesiéged'unedégénéres- cence scléro-athéromateuse avancée; les masses athéroraateuses fai- saient saillie dans leur cavité et, en beaucoup de points, réduisaient leur calibre. On s'explique que, dans ces conditions, il se soit produit des accidents d'anémie cérébrale, et nous n'hésitons pas à considérer comme tels les vertiges et le singulier état de somnolence que nous avons signalés. M. 'VuLPiAN appelle l'attention de la Société sur la signification du bruit de souffle présystolique. Comme on l'avait entendu dans ce cas avec la plus grande netteté, la théorie se serait trouvée tout à fait en défaut si l'autopsie n'avait révélé un rétrécissement mitral. A propos de la lésion aortique, M. Vulpian fait observer qu'il a déjà eu l'occasion de constater plusieurs cas du même genre et de recon- naître qu'un bon nombre de bruits de souffle au premier temps étaient dus à cette lésion. On doit remarquer encore que c'est l'altération de la valve interne de la valvule mitrale qui est la cause principale du rétrécissement sous-aortique. Enfin, on voit ici un nouvel exemple de 168 vascularisation des valvules sygmoïdes, état qui a déjà été signalé par M. Cliarcot et plusieurs autres observateurs. A propos de ce fait, M. Vulpian se demande si dans certaines mala- dies, comme dans la chlorose, les pyrexies, on ne pourrait pas ad- mettre, à cause de la dilatation passive du ventricule gauche, l'exis- tence d'un rétrécissement sous-aortique relatif et expliquer ainsi un certain nombre des bruits de souffle passagers au premier temps que l'on observe dans ces cas. M. LiouviLLE, qui a eu l'occasion d'étudier dans le service de M. Vul- pian quelques cas de rétrécissement sous-aortique, pense que c'est sur- tout l'altération du myocarde qui détermine le détroit sous-aortique. Dans les cœurs qu'il a examinés, la cloison était à ce niveau bombée en dos d'âne, et cette disposition combinée à l'épaississement de la valve correspondante de la mitrale, produisait le rétrécissement. Note sur un t^nia monstrueux de l'homme; par le docteur Léon Vaillant. Si les monstruosités chez l'homme et les animaux supérieurs ont donné lieu à un grand nombre d'importants travaux, il n'en est pas de même chez les êtres dégradés qui jusqu'ici n'ont guère été l'objet que d'observations isolées. Le fait que j'ai l'honneur de présenter aujour- d'hui à la Société viendra s'ajouter à ces dernières, qui permettront peut-être, étant reprises un jour, d'arriver à des résultats plus com- plets. L'animal qui en est l'objet m'a été remis par M. J. Chatin et prove- nait d'un malade venu en consultation à l'Hôtel-Dieu pour se faire dé- barrasser de cet hôte incommode. C'est un vers cestoïde se rapportant très-évidemment au genre lœnia et soit au tœniasolium, soit au taenia niediocaneUuta; mais vu l'état incomplet des pièces et la disposition anormale des anneaux, il est difficile de décider plus exactement à quelle espèce il appartient. Les fragments comprennent : 1° Une portion de chaîne de treize anneaux, plus un quatorzième di- visé en trois lanières; ils sont longs de 10 millimètres à 5 millimètres, larges de 8 millimètres; 2° Six anneaux, également réunis, plus allongés, la longueur étant de 14 millimètres, tandis que la largeur n'atteint que 6 millimètres. 3" Deux anneaux intermédiaires entre les précédents, mesurant 12 millimètres sur 8 millimètres, 4" Trois auneaux longs de 12 millimètres, larges seulement de 3 mil- limètres; 5° Deux anneaxix ayant à peu près les dimensions de ceux sous le n" 3, l'un fendu en trois lanières; 169 6* Un groupe de trois anneaux, un long, un moyen large et un très- court 4 millimètres de long) réunis de telle sorte qu'ils semblent par- tir d'un centre, au lieu d'être disposés en série ; 7° Quatre anneaux isolés. Sur tous ses fragments, sauf peul-èlre celui compris sous le n° 4 dont l'alcool avait fort contracté les anneaux, on observe une forme très- insolite qui a beaucoup frappé tous ceux qui ont bien voulu examiner ces échantillons. Au lieu d'être simplement plat, l'anneau présente sur l'une de ses faces un prolongement parlant de son milieu, égal à la moitié de la largeur de l'anneau, de même épaisseur, de même aspect, en sorte que sur une coupe perpendiculaire à l'axe de l'animal, on ob- tient une figure en étoile à trois branches. Les pores génitaux, bien visibles sur chaque article, sont irrégulièrement alternes sur le bord de chacune des lames sans distinction. Sur lanneau long faisant partie du groupe placé sous le n* 6, on voit deux pores sur deux des lames, la troisième n'en présentant pas ; c'est le seul point où j'aie pu décou- vrir cette particularité. En recherchant dans les auteurs des faits analogues, on trouve qu'un cas presque identique est signalé et figuré par M. Kuchenmeisler (1), sur un taenia qui lui avait été envoyé du cap de Bonne-Espérance par M. le docteur Rose; il n'avait reçu également qu'une portion du stro- bile sans le scolex. Mais le même auteur rapporte avoir eu en sa pos- session un exemplaire du ixnia cœnurus offrant la particularité d'avoir un corps triangulaire, un des angles simulant une crête; sur cet échan- tillon, le scolex présentait une autre anomalie non moins curieuse, à savoir six ventouses au lieu de quatre. Ces observations conduisent à conclure qu'il faut voir dans ces faits une monstruosité, déduction à laquelle avait déjà été amené l'auteur que je viens de citer. En ayant égard au nombre anormal des ventouses dans un des cas de M. Kuchenmeisler, à la présence de deux orifices génitaux sur un seul anneau, comme dans le fait qui est l'objet de la présente note, on doit admettre que celte monstruosité est produite par l'accolement et la pénétration partielle de deux individus; que de plus l'anomalie semble dépendre d'une malformation primitive du scolex. M. J. Chatin a bien voulu offrir ce curieux échantillon à la collection du Muséum d'histoire naturelle. — M. Ranvier présente des préparations histologiques dans lesquelles (1) Die in und an clemKoerpers des lebenden menscken vorkomrnen- den parusiten. i^' part., p. 93, pi. III, fig. 14-16, 1855. 170 on peut étudier des coupes transversales de tendons et compléter ainsi la communication qu'il a faite il y a quelque temps sur ce sujet. On peut voir sur ces coupes des espaces stellaires ayant des prolongements anaslomosés d'une façon régulière. Ils sont le résultat de la juxtaposi- tion des faisceaux coupés transversalement. Dans ces espaces il n'existe aucune cellule plasmatique; tous les éléments cellulaires sont placés dans les tubes et non entre eux. Ces études ont conduit M. Ranvier à rechercher si les cellules plas- matiques de tissu conjonctif existent réellement, et il a pu se con- vaincre que c'est par suite d'une série d'erreurs d'observation que l'on a été conduit à admettre l'existence de ces cellules. L'auteur a employé dans ces recherches divers procédés dont le plus important consiste à injecter dans le tissu cellulaire de la gélatine avec ou sans nitrate d'ar- gent, de façon à obtenir une masse pouvant se prêter à l'action du ra- soir. Sur les coupes ainsi obtenues il est facile de se rendre compte de la disposition des éléments. On voit d'abord, comme Henle l'a dit de- puis longtemps, qu'il existe des faisceaux de fibres très-longues qui se divisent à de rares intervalles, mais qu'on ne trouve ni lames ni cri- bles. Entre les faisceaux de fibres on observe des cellules abondantes. Aplaties, possédant un noyau volumineux et constamment un ou deux nucléoles, elles ont les caractères des cellules épithéliales. Lorsqu'on a mélangé à la gélatine du nitrate d'argent, les cellules sont fixées dans leurs formes et leurs rapports. On peut s'assurer ainsi qu'elles fournissent un revêtement discontinu aux faisceaux de fibres. — M. Browx-Séquard montre à la Société deux jeunes lapins aux- quels il a arraché le nerf facial d'un côté. On observe d'abord une con- traction pupillaire correspondant au côté opéré. Mais l'expérience n'a pas été faite pour démontrer ce phénomène déjà indiqué depuis long- temps par M. Brown-Séquard. Sur un des lapins la cloison des narines et de la lèvre supérieure est intacte, et l'on peut voir dans le côté paralysé des contractions dans l'aile de la narine. Chez le second ani- mal on a fait une section médiane de la cloison du nez et de la lèvre supérieure, et l'on a oi)tenu ainsi une immobilité complète de la narine et de la lèvre supérieure du côté qui correspond à l'arrachement du facial. On peut conclure de cette expérience qu'il existe des filets du facial qui passent de l'autre côté de la ligne médiane et se distribuent aux colonnes musculaires de la cloison du nez et de la lèvre supé- rieure. M. Brown-Séquard montre ensuite un cochon d"Inde chez lequel il a pratiqué une section des nerfs du bras dans la région axillaire. Il n'existe chez cet animal aucun trouble de la nutrition dans la patte 171 correspondante, tandis que lorsqu'on pratique la section d'un seul nerf, on donne lieu à une ulcération plus ou moins profonde qui se dé- veloppe à l'extrémité du membre. Celte différence est due très-proba- blement à ce que dans le premier cas l'animal ne peut plus exécuter aucun mouvement, tandis que dans le second il peut encore frotter l'extrémité du membre ou l'excorier avec ses dents. Séance du 22 mai. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. Note sur un cas de rétrécissement et d'insuffisance aortiques, accompagné d'insuffisance mitrale, terminé par la mort subite; par M. Duguet, chef de clinique. Lorsqu'on étudie les affections dites organiques du cœur, on est frappé, d'une part, de l'isolement fréquent du rétrécissement ou de l'insuffi- sance à l'orifice aorlique, et d'autre part, de la coexistence presque constante du rétrécissement et de l'insuffisance lorsqu'il s'agit de l'o- rifice mitral. Le fait que nous relatons ici mérite de fixer l'attention par une disposition inverse. De plus, il n'est pas sans intérêt de signa- ler les circonstances particulières qui ont précédé la mort subite par syncope. rétrécissement et insuffisance aortiques; hypertrophie du coeur avec dilatation; insuffisance secondaire de la valvule mitrale; dyssysto- lie; mort subite; autopsie. C. .., âgé de 22 ans, menuisier, né en Savoie, entré le 13 mai 1869, salle Saint-Paul, n" 21, dans le service de M, Peter (clinique médi- cale). Il raconte qu'il n'a jamais eu de rhumatisme, qu'il n'en existe pas dans sa famille. Il est parti assez jeune de son pays, a fait plusieurs voyages sur mer, et en particulier pour aller dans l'Amérique du Nord ; il partait en qualité de menuisier dans les navires. Etant en Amérique il y a quelques années, il eut pendant plusieurs mois des accès de fièvre intermittente parfaitement déterminés, se montrant d'abord tous les jours, puis tous les deux jours, puis tous les trois ou quatre jours, puis enfin tous les huit jours. Il ne peut dire exactement quels sont les mé- dicaments qui lui furent donnés. Toujours est-il que sa fièvre dura long- temps, l'affaiblit très-sensiblement, et que de son chef, se basant sur le dicton du pays, il se jeta plusieurs fois à la rivière pour couper sa fièvre, comme il dit, par le saisissement de l'eau. 172 Ajoutons qu'il avoue des libations copieuses d'assez longue date et souvent répétées. D'ailleurs il était marié et ignorait où était passée sa femme, ce qui lui causait un grand chagrin. Il se plaint de palpitations depuis ces dernières années; sa fièvre a toutefois disparu. Depuis quelques jours seulement, voyant ses jambes enfler, il se présente au Parvis, où il est reçu par M. Peter pour la Pitié. A son entrée, voici ce que l'on constate : Cet homme, d'une taille au-dessus de la moyenne, offre une dyspnée très-intense, les jambes enflées et une teinte un peu cyanosée répan- due sur tout le corps. Rien dans les urines. On sent à la région précor- diale un léger frémissement vibratoire coïncidant avec le choc car- diaque; la pointe battait dans le septième espace intercostal et sous la huitième côte, en dehors du mamelon. La matité précordiale est considérable; elle indique manifestement une hypertrophie ou tout au moins une dilatation cardiaque. La matité de l'aorte au-dessus du cœur mesure un peu plus de deux travers de doigt transversalement sans soulèvement. Il existe à la pointe un souffle au premier temps, systolique, très-net, quoique sans rudesse (insuffisance raitrale). A l'origine de l'aorte se trouve aussi un souffle systolique d'une rudesse très-marquée, se propageant le long de la crosse et non vers la pointe sternaie (rétrécissement aortique). On perçoit le second temps assez nettement, et il est impossible d'y constater un bruit de souffle , soit à l'orifice aortique, soit vers la pointe sternaie. D'ailleurs, le pouls est assez perceptible, mais très-irrégulier, sans intermittence et n'offrant pas les caractères du pouls de Corrigan. Dans le tracé sphymographique, on constate des irrégularités très-marquées et une sorte de plateau as- cendant systolique. Vers les poumons, matité évidente en arrière, des deux côtés; point de souffle d'aucun genre, ni à droite ni à gauche; faiblesse très-grande de la respiration avec râles crépitants et sous-crépitants assez nom- breux dans les deux poumons, surtout en bas et en arrière. Les vibra- tions thoraciques sont faibles des deux côtés. Le foie déborde les fausses côtes; il est douloureux à la pression. La rate semble un peu plus volumineuse qu'à l'état normal et légèrement 173 douloureuse à la pression dans riiypochondre gauche. Les urines sont rendues en quantité ordinaire; pas de douleurs à la région rénale. La manière dont le malade répond aux questions indique une certaine obtusion de son intelligence plutôt qu'une gêne véritable dans le lan- gage. Les fonctions digestives sont conservées; depuis quelques jours il existe avec la dyspnée une toux assez fréquente, sans expectoration caractéristique. Le 14 mai, après avoir parfaitement dîné à quatre heures du soir, il fut pris subitement, vers cinq heures et demie, d'une suffocation avec syncope, pendant laquelle il sauta hors du lit, tomba sur le plancher de tout son long : il était mort. Le tout avait duré quelques secondes. Au moment de la chute il était les yeux grands ouverts, la figure rose; en moins d'une minute on le vit bleuir; sa figure devint noire. Des charbons ardents appliqués sur son thorax donnèrent deux ou trois mouvements inspiratoires. L'électrisation des nerfs phréniques ne pro- duisit que des mouvements musculaires partiels ; l'ouverture de la mé- diane céphalique ne donna que quelques gouttes de sang noir. D'ail- leurs, dès le moment de la chute, le cœur avait cessé de battre et le pouls était nul. Notons qu'il avait uriné abondamment pendant la syn- cope. Autopsie dix heures après la mort. I. Thorax. — A l'ouverture du thorax on trouve deux litres et demi de sérosité répandue à peu près également à droite et à gauche. Les poumons refoulés ne sont pas recouverts de fausses membranes (hydro- thorax double). Le tissu pulmonaire de chaque côté, sans traces de tubercules nulle part, sans emphysème, est d'un rouge assez intense, à peine crépitant, ferme et comme splénisé d'une façon générale. A la coupe cette splénisation est plus nette encore (affaissement avec con- gestion pulmonaire); il s'écoule une notable quantité de sérosité rou- geâtre. Le péricarde est considérablement distendu, non par de la sérosité (quelques cuillerées seulement), mais par le muscle cardiaque lui- même. Le cœur offre autant de largeur que de longueur. Le ventricule gauche est extrêmement développé, descendant beaucoup plus bas que le ven- tricule droit (plus de 1 centimètres). Il existe une petite plaque laiteuse en avant du ventricule droit. A l'ouverture on ne trouve rien dans le ventricule ni l'oreillette droite; ces deux cavités paraissent un peu grandes et la paroi du ventricule est sensiblement hypertrophiée; elle mesure 7 à 8 millimètres (hypertrophie avec dilatation). Rien aux ori- fices ni aux valvules, rien à l'artère pulmonaire ni dans les bronches. La cavité ventriculaire gauche est extrêmement distendue, allongée, 174 comme ce ventricule (13 centimèires) contenant un caillot cruorique peu volumineux maintenu dans les cordages de la mitrale. La paroi de ce ventricule, à moitié de la hauteur, est de 2 centimètres (hypertro- phie avec dilatation considérable). L'orifice mitral, au lieu de deux doigts, en accepte trois facilement (insuffisance mitrale par dilatation de l'orifice) ; mais les valves et les cordages n'ont subi aucune altéra- tion : elles sont rouges, injectées d'une façon sensible. Toute la face interne du ventricule est très-vascularisée. L'orifice aortique, vu par le ventricule, offre une dégénérescence calcaire très-dure, très-irrégulière ; il est impossible de distinguer les trois valvules, qui sont soudées et refoulées en haut sous la forme d'un diaphragme présentant au centre un orifice très-irrégulier râpeux, grenu, avec de gros grains calcaires. Cet orifice, dont les lèvres sont immobiles et béantes, est à peu près arrondi et il mesure environ 1 centimètre de diamètre. Vu du côté de l'aorte, l'orifice paraît occupé par une masse irrégulière, infundibuli- forme, à base plus large, tourné vers le ventricule, à sommet tronqué regardant dans l'aorte et offrant l'orifice béant en forme de cratère. Sur les parties latérales de ce diaphragme calcaire, irrégulier, se re- trouvent assez facilement les points d'insertion des trois valvules sous forme de brides ''rétrécissement et insufiisance aortique considérables;. Rien à noter dans le reste de l'aorte. L'oreillette gauche n'est pas très-dilatée, mais ses parois ont une épaisseur qui est au moins le double de celle de l'oreillette droite. Les artères coronaires sont parfaitement saines. Les fibres musculaires du cœur ont conservé leurs striations; quel- ques-unes seulement présentent un commencement de dégénérescence granulo-graisseuse. IL Abdomen. — L'estomac contient une grande quantitée d'aliments non digérés. Sa muqueuse est tuméfiée, d'un rouge vineux intense; elle semble enflammée chroniquement bien qu'il faille tenir compte de l'état actif de la digestion au moment de la mort. Le reste de l'intestin n'offre rien de remarquable. Le foie est un peu volumineux, muscade, sans cirrhose; la capsule de Glisson est cependant notablement épaissie. La rate mesure en longueur 14 centimètres; elle est ferme et volu- mineuse sans cirrhose appréciable ; la capsule fibreuse est épaissie et blanchâtre comme celle du foie. Les reins ont leur aspect habituel ; ils sont d'une fermeté rare. Rien autre chose à noter du côté de l'abdomen. IIL Encéphale. — Du côté de l'encéphale on a constaté des indura- tions en plaques avec épaississemeiit scléreux et un peu calcaire de la dure-mère, surtout au niveau des bosses pariétales, sans pachy-ménin- 175 gite appréciable. L'arachnoïde viscérale et surtout la pie-mère sous-ja- cente qui recouvre la face convexe^de deux hémisphères, offre dans une étendue qui dépasse la longueur de la main de chaque côté, un épaissis- sement avec opacité blanchâtre comme on les rencontre rarement. Les veines d'ailleurs contiennent une énorme quantité de sang en rapport avec l'asphyxie. Cette teinte opaline anormale s'étend un peu sur le reste de deux hémisphères. Notons que la substance cérébrale se dé- tache très-facilement des membranes et que à part une teinte rosée générale des centres, le cerveau n'offre aucune altération. Ainsi qu'on vient de le voir par le récit de l'observation, l'existence d'un bruit de souffle bien nettement constaté vers la pointe du cœur gauche ne permettait pas de méconnaître une insuffisance mitrale, et l'existence d'un autre bruit de souffle rude, également au premier temps, nettement perçu à la base du cœur, au niveau de i'orifie aor- tique, faisait affirmer le rétrécissement de cet orifice. Or qu'arrivons-nous à constater par l'autopsie? 1° Un rétrécissement considérable de l'orifice aortique. 2° L'absence de toute lésion appa- rente à la valvule mitrale. 3° Et contrairement à notre attente, une insuffisance aortique aussi indubitable que le rétrécissement, puisque la même lésion qui forme ce dernier donne forcément lieu à la pre- mière, les valvules sigmoïdes étant tellement soudées entre elles et transformées qu'elles constituent un anneau calcaire rigide offrant la même ouverture , qu'on le regarde par le ventricule ou par la crosse aortique. Il existait donc une insuflBsance aortique type qui ne s'est révélée ni au doigt par le pouls de Corrigan, ni à l'oreille par aucun bruit de souffle au second temps. D'ailleurs, si nos sens pouvaient être mis en doute, le sphygmographe devait au moins, par un tracé significatif, traduire et redreser notre erreur. Il n'en fut rien. Au contraire, le sphygmographe nous donna un tracé singulier, bizarre, incapable de nous éclairer dans aucun sens, si ce n'est qu'il indiquait un trouble profond inusité de la circulation, et c'était bien quelque chose. Ce tracé, en effet, était d'accord avec la gêne profonde de la respiration, gêne produite elle-même par la présence de 2 litres et demi de liquide répandu dans les deux côtés du thorax. Cette dyspnée, cette anhéla- tion remarquable du malade, cet œdème récent des jambes, phéno- mène rare dans les lésions aortiques, et tenant généralement aux com- plications du côté de l'orifice mitral, cette singularité du pouls, tout nous indiquait clairement, même en face de l'intégrité des fonc'tionS digestives, un état voisin de Vasystolie, la dyssystolie en un mot, dys- systolie qui précédait et préparait pour ainsi dire la syncope terminale 176 qui ne se fit d'ailleurs pas longtemps attendre. Quoi d'étonnant alors que le souffle du second temps à la base, souffle qui est toujours doux, ait réellement manqué dans notre investigation? Ce fait serait loin d'être isolé, et Ton sait que Beau attribuait en pareil cas à l'asystolie cette absence de bruit au second temps. Si la force qui ramenait le sang de l'aorte dans le ventricule n'était plus suffisante pour produire le bruit de souffle aspiratif du deuxième temps, il n'en était pas de même pour celle qui faisait passer le sang par lorifice aortique rétréci, ou par l'orifice mitral insuffisant. Le muscle cardiaque, en effet, sensiblement hypertrophié, avait conservé la striation parfaite de ses fibres, et il nous est facile d'interpréter la netteté de deux souffles qui faisaient affirmer durant la vie rexistence du rétrécissement aortique et de l'insuffisance mitrale. Nous avons vu jusqu'à quel degré l'orifice aortique était rétréci et de quelle nature était l'altération des valvules. Mais comment faire concorder ce souffle révélateur d'une insuffisance mitrale en présence de cette valvule, saine en apparence? Cette valvule est saine, il est vrai, mais lorifice qu'elle est destinée à fermer est distendu au point d'accepter facilement trois doigts, tan- dis qu'à l'état normal il n'en accepte généralement que deux. Il accepte donc trois doigts, aussi bien que la valvule tricuspide. La dilatation de l'orifice auriculo-ventriculaire gauche est le résultat direct de la dila- tation du ventricule gauche; et cette dilatation est secondaire elle- même par rapport à la lésion initiale, le rétrécissement aortique. Or cette dilatation de l'anneau fibreux n'a nullement entraîné l'ampliation des valves de la mitrale qui sont restées normales; il s'ensuit que cette valvule, faite pourobturer un orifice qui laisse passer deux doigts, devient incapable d'obturer un orifice qui en laisse passer trois. Joi- gnent à cela que par suite de la dilatation de la cavité les cordages vasculaires qui sont inextensibles sont devenus, eux aussi, d'une lon- gueur insuffisante pour permettre aux bords libres de la valvule d'arri- ver franchement au contact pendant la systole. Par conséquent insuf- fisance de la valvule, insuffisance des cordages qui règlent ses mouve- ments, telles sont les conditions anatomiques qui expliquent claire- ment, d'une part l'existence d'une insuffisance mitrale et par consé- quent d'un bruit de souffle au premier temps vers la pointe, et d'autre part la présence d'une insuffisance mitrale entièrement indépendante d'un rétrécissement de cet orifice. D'ailleurs, pourquoi n'observerait-on pas à l'orifice mitral, sous l'in- fluence de la dilatation du cœur gauche, ce que nous voyons assez souvent à l'orifice tricuspide, sous l'influence de la dilatation du cœur droit? Le mécanisme à invoquer ne diffère pas dans les deux cas. 177 Quand les malades atteints d'insuffisance aortique meurent subite- ment de syncope, ils sont généralement pâles. Dans le cas actuel, il en fut autrement. En effet, en sautant de son lit, le malade avait le visage rose plutôt que rouge, mais nullement pâle, et en moins d'une minute, nous vîmes tout son corps, et en particulier son visage, bleuir de la façon la plus remarquable. Il semblait que la circulation vei- neuse étant enrayée subitement, nous assistions au passage du sang des artères qui se vidaient dans les capillaires veineux. L'autopsie est venue confirmer cette idée en nous montrant les ventricules et les oreillettes vides de sang, à droite comme à gauche. Nul doute que l'épanchement thoracique exerçait à l'embouchure des deux veines caves une pression capable d'empêcher d'une façon absolue l'arrivée du sang veineux, alors que les artères, pleines de sang, continuaient à se vider. Telle est l'explication qui nous paraît la plus plausible. De ce fait nous croyons pouvoir conclure : 1° Que la systolie ou la dyssystoUe peut précéder la mort par la syncope dans l'insuffisance aortique; 2° Que l'insuffisance aortique peut en pareil cas, ainsi que Beau l'avait indiqué, ne pas se révéler par les signes qui lui sont habituels, 3° Enfin, qu'il peut exister à l'orifice mitral une insuffisance secon- daire, comme elle existe à l'orifice tricuspide, par suite de la dilata- tion du ventricule ; Conséquemment qu'une insuffisance miirale peut parfaitement se pro- duire en dehors de tout rétrécissement du même orifice. Note sur un cas de tvphlite phlegmoneuse survenue dans le couus d'une entérite tuberculeuse ; par M. Duguet, chef de clinique de la Faculté. Il n'y a pas longtemps encore que des auteurs fort recommandables ont étudié avec un soin scrupuleux le groupe si intéressant des phleg- mons iliaques. Dans ce groupe se trouvent généralement indiquées, lorsqu'il s'agit du flanc droit, deux affections bien distinctes, le phleg- mon iliaque proprement dit et la pérityphlite. Cette dernière, dans l'esprit même de ceux qui la décrivent, comprend englobées l'une avec l'autre, tant sont étroites leurs affinités, la pérityphlite et la typhlite proprement dite. Sans doute la pérityphlite est presque toujours la conséquence d'une typhlite; sans doute il est rare de voir l'inflammation née dans le cœ- cum ne pas se propager à l'atmosphère celluleuse qui enveloppe cet organe, et c'est ce qui justifie jusqu'à un certain point la confusion que M. Grisolle en particulier a faite de ces deux affections. Mais C. R. 1869. 12 178 en conçoit cependant qu'une cause étrangère au cœcunoi vienne en- flammer l'atmosphère celluleuse péricœcale; on conçoit également qu'une inflammation du cœcum ne s'étende pas au delà de ses mem- branes. On conçoit en un mot l'inflammation isolée du cœcum ou de son atmosphère celluleuse. Depuis quelques années cette question est pour ainsi dire à l'étude, et il faut rendre justice aux efforts qu'a faits M. le professeur Béhier pour établir le diagnostic différentiel de la typhlite et de la périty- phlite. Un de ses élèves, M. Blatin , s'inspirant d'une de ses clini- ques, en fit le sujet de ses recherches dana une thèse remarquable (Paris, 1868). La distinction nettement indiquée par M. Béhier et reproduite par M. Blatin , entre la typhlite et la pérityphlite, nous paraît corroborée par le fait suivant considéré au point de vue analomique et au point de vue symptomotologique. De plus, on y verra une forme particulière de lésion peu ou point signalée jusqu'à présent et qui vient démontrer, une fois de plus, combien les affections du cœcum méritent presque au même titre que celles de l'estomac, une description spéciale. TCBERCULISATION CHRONIQUE DES PODMONS ET DE l'iNTESTIN; TYPHLITE PHLEGMONEUSE ; MORT; AUTOPSIE. P... (Marie), âgée de 34 ans, lingère, entrée le 30 mars 1869, salle Saint Charles, à la Pitié, service de M. Peter (clinique médicale). Point de tubercules du côté des parents. Née à Melun, elle est ve- nue de bonne heure à Paris pour y travailler dans un atelier. Point d'enfants ni de fausses couches. Depuis six ans elle tousse, crache, maigrit et perd ses forces. Il y a trois ans. P.. . a craché un peu de sang. Il y a dix mois, péritonite sans cause étrangère appréciable , mais forçant la malade à garder le lit pendant trois mois. Depuis cette époque, P... n'a plus d'appétit, est prise fréquemment de diarrhée ou de vomissements; enfin depuis cinq mois les règles ont cessé de paraître. Des sueurs abondantes et nocturnes se montrent depuis trois semaines. A son entrée, P... offre un aspect très-cachectique : maigreur ex- trême, ongles hippocratiques; points douloureux disséminés en diverses régions du thorax, qui est déformé, aplati; la pression exagère les douleurs. Expectoration abondante avec crachats purulents , déchi- quetés, striés de sang. Matité complète dans les deux fosses sus-épi- neuses, et dans la fosse sous-épineuse gauche. Souffle intense, caver- neux dans la moitié supérieure du poumon gauche ; craquements humides à droite. La diarrhée continue. A la date du 16 avril, cette diarrhée est tellement abondante qu'elle 179 amène des syncopes; cependant le ventre reste assez souple et non douloureux. Le 17, frisson violent le matin; suivi de fièvre. Le lendemain amé- lioration, la diarrhée semble s'apaiser notablement. A partir du 25 avril les frissons reparaissent, violents, chaque jour, à des heures variables. Sueurs profuses. A la date du 9 mai, légère amélioration; mais le 11, à la visite du matin, nouveau frisson très-inlense. P... claque des dents et tremble de tous ses membres. Pouls 125, température 40°. Les phénomènes pulmonaires n'ont pas changé, mais le ventre de- vient ù'ès-douloureux, principalement dans le flanc droit : il est im- possible, en raison de la douleur excessive, d'explorer profondément cette région. En même temps se montrent des vomissements ; la diar- rhée ne reparait pas. Cataplasmes laudanisés sur le ventre. La fièvre hectique continue à se montrer comme les jouis précé- dents. Cet état continue les jours suivants ; mômes douleurs vives, mêmes vomissements. Le 14 elle rend par l'anus des matières striées de sang et piiri formes. La mort a lieu le 15. Autopsie le 16 mai. L — Thorax. — Il existe dans le poumon gauche principalement une grande quantité de tubercules à tous degrés de développement; il existe surtout un grand nombre de cavernes qui en sillonnent la partie supérieure et sont la conséquence d'une fonte rapide des poumons, A droite mômes lésions, mais beaucoup moins avancées. Peu de chose à noter vers les plèvres. Le cœur est petit, avec une légère prédominance du cœur droit, qui est dilaté. Rien aux valvules. Les fibres musculaires du cœur ont presque toutes conservé leur striation, et sont peu ou point gra- nuleuses. II. — Abdomen. Le foie est entièrement transformé en graisse; il est d'un jaune docre. Rien de particulier du côté de la rate et des veines. — Un peu de liquide puriforrae dans le petit bassin, citrin dans le reste de la cavité péritonéale. Le gros et le petit intestin contiennent au voisinage delà valvule iléo- cœcale des ulcérations tuberculeuses rappelant entièrement les ulcé- rations de la fièvre typhoïde; il existe de plus des tubercules miliaires sous-muqueux assez nombreux et dessiminés dans les mêmes points. Dans la fosse iliaque droite, le cœcura forme une véritable tumeur d'un rouge vif et par place vineux; le péritoine qui le recouvre est dépoli, couvert de fausses membranes chagrmées, récentes, et au- 180 dessous, se voient par transparence des héniorrhagies sous-péritonéales ressemblant à une sorte de purpura. Le cœcum en ce point paraît distendu et comme rempli d'une matière assez ferme. Son aspect est l^leuâtre d'une façon générale, et à la pression , il ne s'affaisse pas; la 'onsistance est mollasse, semi-fluctuante, il forme une véritable tu- /neur phlegmoneuse. v A Touverture du cœcum on constate que, s'il n'est pas extrême- ment distendu extérieurement , sa lumière est presque entièrement effacée par le boursouflement et le soulèvement interne de la mu- queuse cœcale. D'ailleurs il est facile de voir, par une incision longi- tudinale, qu'il existe en effet entre la muqueuse et la musculeuse, et étendu en nappe dans toute la hauteur et dans tout le pourtour du cœcum, une so^-te de phlegmon suppuré ou diffus, présentant des tractus celluleux très-trachés, contenant dans leurs mailles une grande quantité de liquide puriforme, jaune verdâtre et soulevant par place la muqueuse, surtout au niveau des plis, jusqu'à l'éloigner de plus d'un centimètre de la musculeuse. D'ailleurs la muqueuse elle-même offre une teinte verdâtre très-prononcée qui s'étend comme la nappe phlegmoneuse jusqu'à cinq travers de doigt en hauteur pour le cœ- cum. Au niveau des points où elle est le plus soulevée, elle est d'un rouge vineux, de plus excessivement mince, facile à déchirer, et pré- sente des ulcérations plus ou moins étendues, plus ou moins irrégu- lières par lesquelles le pus s'écoule dans l'intestin, évidemment de même nature que les ulcérations tuberculeuses trouvées dans le reste du cœcum. L'appendice iléo-cœcal offre au niveau de son orifice une de ces ulcérations très-profondes, ayant détruit presque toutes ses tuniques. L'inflammation phlegmoneuse s'étend à cet appendice jusqu'à 2 centimètres de sa terminaison. Il est replié en arrière du cœcum. En un point, il sufiil d'une légère traction pour y produire une perforation au niveau de laquelle existent des fausses membranes récentes avec du purpura à la surface; mais il est impossible d'y trouver la moindre trace de corps étranger. La perforation siège vers le milieu de sa hauteur. La valvule de Bauhin offre une muqueuse très -boursouflée qui per- met à peine l'introduction du bout du petit doigt par l'intérieur du cœcum. La tuméfaction, la teinte verte et le soulèvement de la mu- queuse cœcale s'étendent par cet orifice jusque dans l'intestin grêle, mais à partir de 1 à 2 centimètres, cette muqueuse reprend ses carac- tères normaux, comme d'ailleurs pour le cœcum à l'origine du colon ascendant. Notons qu'il existe également sur la muqueuse de l'intestin grêle, à partir de la valvule en question, des ulcérations à bords taillés à pic, faites comme à l'emporte-pièce, étendues les unes comme une 181 lentille, d'autres dépassant 1 centimètre en diamètre, contenant pour la plupart du sang infiltré dans leur fond, A côté se voient des tuber- cules sous-muqueux évidents, et surtout des follicules étalés volumi- nineux, tuméfiés, sur le point de s'ulcérer. Le mésentère, qui s'insère au cœcum malade, est lui-môme considé- rablement tuméfié : on y trouve des ganglions très-développés d'un rouge vineux, et les lames au mésentère présentent également une nappe phlegmoneuse assez épaisse qui, partant du cœcum, s'étend à cinq ou six travers de doigt au-dessus pour finir insensiblement ; cette nappe phlegmoneuse est évidemment l'extension de la typhlite phleg- moneuse au mésentère. , Au microscope on voit que le liquide jaune verdâtre qui s'échappe des mailles formées par la tunique celluleuse du cœcum est constitué par une grande quantité de granulations graisseuses isolées et un nombre considérable de corpuscules de pus, le plus grand nombre remplis de granulations graisseuses réfiiugenles. Point de tubercules aux organes génitaux. Notons un kyste de l'ovaire multiloculaire du côté droit, gros comme un œuf de canard. S'il est vrai, d'après les auteurs que nous avons cités, que la typli- lile s'amionce par des phénomènes gastriques, par un empâtement extrêmement douloureux dans le flanc droit, et enfin, par un frisson pouvant se répéter à des intervalles plus ou moins éloignés et marquant toujours le début de la maladie, ces différents symptômes permettant d'exclure au moins dans les premiers jours, lapérityphlite, voyons ce que nous donne le fait rapporté ci-dessus, lequel est resté jusqu'à la fin entièrement exempt de pérityphlite. On y trouve un frisson violent au début, un frisson plusieurs fois répété les jours suivants et à intervalles irréguliers; on y trouve une douleur extrêmement vive avec un empâtement dans le flanc droit, et enfin des vomissements. IVI. Blalin indique bien une forme particulière à cet empâtement de la fosse iliaque droite; cet empâtement rappellerait assez la forme de l'intestin malade et ne permettrait pas de le rapporter à une péri- typhlite; mais est-il possible, dans tous les cas au moins, avec une telle douleur, de pousser les recherches assez profondément pour recon- naître à la tumeur la forme du gros intestin? Dans le cas actuel, la douleur empêcha cette exploration, qui n'eût certainement pas manqué de donner des résultats positifs, ainsi que l'autopsie est venue le dé- montier. D'un autre côté, l'ouverture de la typhlite phlegmoneuse dans l'in- 182 testin s'est révélée par la sortie de matières puriformes et striées de sang par l'anus. En ajoutant ce fait à ceux qui ont servi de base à la leçon de M. Bé- hier et à la monographie de M. Blatin, nous croyons pouvoir affirmer, après ces auteurs, l'existence parfaitement indépendante de la typhlite et aussi la valeur des moyens qu'ils ont donnés pour la reconnaître. Enfin il n'est pas sans intérêt de faire remarquer ici la nature nette- ment phlegmoneuse de la typhlite, rinïlammalion s'étant propagée de la muqueuse ulcérée à la tunique cellulaire du cœcum. C'est en vain que nous avons cherché dans la thèse de M. Blatin, au chapitre de l'anato- mie pathologique, la relation de lésions semblables permettant d'éta- blir analomiquement l'existence d'une typhlite phlegmoneuse. Le fait que nous rapportons est donc, à ce point de vue, capable d'enrichir encore l'histoire des inflammations du cœcum. D'ailleurs, en l'absence de tout corps étranger soit dans le cœcum , soit dans l'appendice vermiculaire, nous devons reconnaître pour point de départ à cette typhlite phlegmoneuse les ulcérations tuberculeuses siégeant sur le gros et le petit intestin, au voisinage de la valvule de Bauhin, où elles seraient plus profondes et plus nombreuses. Il faut noter aussi qu'il n'existe aucun foyer de suppuration chez cette malade qui puisse faire admettre une infection purulente : de toute nécessité nous devons rapprocher cette lésion de celles de la gastrite phlegmo- neuse, bien que celle-ci reconnaisse habituellement des causes entiè- rement différentes. De ce fait il est donc permis de conclure : 1° que la typhlite peut se présenter avec des caractères anatomiques et symptomatiques dis- tincts de ceux qui appartiennent à la pérityphlite; 2° que la typh- lite phlegmoneuse existe comme forme anatomique parfaitement dé^ montrée. Dégénérescence graisseuse du coeur chez un cheval; mort presque subite; autopsie; poids extraordinaire du cœur; lésions; examen microscopique ET ANALYSK CHIMIQUE DU ^TISSU MUSCULAIRE DU COEUR ; par M. ArM. GoU- BAUX. Sujet : Cheval hongre, de race percheronne, propre au gros trait, sous poil gris pommelé, de la taille de l^jGS environ et âgé de 10 ans, appartenant à Dumesnil, demeurant rue de Vanves, n°91,à Paris. Cet animal a été conduit aux hôpitaux de l'École d'Alfort, le 16 mars 1864, pour une affection du pied antérieur droit. A l'examen de ce pied, on constate un décollement de la sole et une plaie qui a été faite par un maréchal. Cette affection ne paraît pas grave, et il y a tout lieu de 183 croire que, après une petite opération qu'il conviendra de ftiire pro- chainement, l'animal se rétablira promptement et reprendra son ser- vice habit»el. Le lendemain, 17 mars, l'animal fut couché sur un lit de paille; le pied antérieur droit fut maintenu dans une situation convenable, et l'on pratiqua l'opération. Pendant l'opération, l'animal manifesta, par de violents mouvements, les vives douleurs qu'il ressentait. Il avait été couché sur le côté gau- che. On jugea que le pansement serait plus facile à faire lorsque l'ani- mal serait debout, et il fut relevé immédiatement. Lorsque le panse- ment fut terminé, l'animal fut rentré à l'écurie, où il se mit de suite à manger avec une avidité remarquable. On lui présenta un seau d'eau ; il y plongea la moitié inférieure de sa tête, mais n'en prit nullement et recommença à manger. Au bout de quelques instants il tomba sur la litière comme s'il était foudroyé, et mourut. Cette mort, si subite, donna lieu à plusieurs conjectures, et l'on s'ar- rêta surtout, pour en trouver l'explication, à la rupture d'un gros vais- seau sanguin ou à celle d'un organe tel que le foie par exemple. Autopsie faite immédiatement après la mort. Cavité abdominale. Tous les organes que cette cavité renferme ont été trouvés sains. Cavité ihoracique. A l'ouverture de cette cavité, on est frappé d'a- bord du volume du cœur, quoiqu'il soit encore recouvert par le péri- carde. Examinons d'abord les poumons; nous étudierons ensuite le cœur qui présente de très- remarquables altérations. 1° Les poumons sont un peu emphysémateux, et à peu près partout. Les bronches, l'artère pulmonaire et ses divisions, les veines pulmo- naires ont été trouvées saines. 2* Cœur (1). Il est énorme; il mesure 0'°,720 à sa base, immédiate- ment au-dessous du sillon horizontal qui sépare la masse auriculaire de la masse ventriculaire. Notons de suite, pour n'avoir pas à y revenir, alors que ce serait moins à propos, que la circonférence de la base de l'avant-bras du côté droit est de Û°',610. Pour ceux des vétérinaires qui croient à un rapport constant entre la circonférenee de la base de masse ventriculaire et celle de Tavant-bras (ce que nous ne croyons (1) L'ànîinal qui fait !e sujet de cette observation est mort dans le service de M. Bouley. Mon collègue a bien voulu me faire remettre des notes sur les antécédents de ce cheval, et les pièces anatomiques dont je vais donner la description. 184 pas), il ••* évident que la base du cœur est de ©^,110 pluf- volumi- neuse que celle de l'avant-bras. La hauteur du cœur, mesurée de la pointe à la base ou à l'origine du sillon vertical du côté gauche, est, en ligne droite, de 0'°,255. L'épaisseur des parois ventriculaires fendues longitudinalement et de haut en bas, mesurée vers la partie moyenne de la hauteur du cœur, est : Pour le ventricule gauche de O^iOSS et pour le ventricule droit de 0'",021 Enfin, le poids du cœur est de 6", 565 Surface extérieure du cœur. — Une couche abondante de tissu graisseux remplit les sillons horizontal et verticaux du cœur. Les vais- seaux qui rampent dans ces sillons sont libres. A la surface extérieure des deux ventricules, on observe une mul- titude de taches blanches, très-variables pour la forme et l'étendue, plus ou moins nombreuses et rapprochées les unes des autres, et don- nant l'aspet de vergetures à la surface sur laquelle elles sont dissémi- nées. Tout d'abord, on pouvait croire que ces taches blanches font relief ou saillie à la surface du cœur, mais il n'en est rien. Quand on passe le doigt sur cette surface, on éprouve la sensation de petils corps résistants dans les points correspondant à ces taches, et cela est sur- tout remarquable pour le ventricule droit. La sensation différente qu'on éprouve suivant les endroits ou l'on passe le doigt est peut-être due uniquement à ce que les taches dont il est question n'ont pas toutes la même situation, ou en d'autres termes, à ce que les unes sont plus superficielles que les autres. A la surface extérieure des oreillettes, les taches dont nous venons de parler sont beaucoup nombreuses, mais elles le sont cependant plus pour celle du côté gauche que pour celle du côté droit. Du reste, elles présentent les mêmes caractères que nous avons signalés pour celles des ventricules. La surface intérieure du ventricule gauche présente de très-nom- breuses taches blanches dans toute son étendue, semblables à celles qui ont été signalées à l'extérieur, mais elles sont beaucoup plus rap- prochées les unes des autres vers la base que dans les autres parties. Il y a aussi, à la base de ce ventricule, une certaine coloration en rouge qu'on ne remarque nulle part ailleurs. L'état de la surface interne de l'oreillette gauche est le même que celui du ventricule correspondant. Les taches blanches sont beaucoup plus nombreuses à la face interne du ventricule droit qu'à celle du ventricule gauche, et surtout vers la 185 partie moyenne de la hauteur de chacune de ses deux parois. L'endo- carde est soulevé dans plusieurs points par une infiltration séreuse, de couleur citrine. Quant à la face interne de l'oreillette droite, elle offre les mêmes particularités, relativement aux taches blanches, que celle du ventri- cule droit. La valvule triglochine présente aussi des taches semblables dans son épaisseur, et vers sa base ou près de son bord adhérent. Les valvules auriculo-ventriculaires, les valvules sigmoïdes, quant à leur nombre, leur disposition et leur développement, n'offrent rien de particulier. Il en est de même du tronc aortique, en ce qui concerne l'épaisseur de ses parois. Sur les coupes qui ont été faites verticalement dans les deux oreil- lettes et dans les deux ventricules et dans l'épaisseur de la cloison interventriculaire, on remarque encore un très-grand nombre de taches blanches : les unes sont superficielles et les autres profondes. Nature de ces tuclies blanches. — Nous avons fait plusieurs exa- mens microscopiques dans le but de reconnaître quelle est la nature de ces taches blanches que nous avons observées à la surface et dans la profondeur des oreillettes et des ventricules, et voici ce que nous avons constaté : Dans les endroits où se trouvent les taches blanches, les faisceaux musculaires sont lisses, et, dans aucun cas, nous n'avons pu recon- naître les stries transversales que nous apercevions dans les endroits où ces taches n'existaient pas. De plus, nous avons vu un très-grand nombre de très-fines vésicules graisseu&es disséminées soit dans la profondeur, soit à la superficie des coupes que nous avons soumises à l'examen. Ces détails ont été observés à l'aide d'un grossissement de 280 diamètres (oculaire n° 2 et objectif n" 3 de Nachei). Comme nous avions l'intention de conserver cet énorme cœur pour le placer au cabinet des collections de l'Ecole, nous l'avions placé dans un seau d'eau pour le faire dégorger, lorsque nous eûmes l'idée d'en faire analyser une fraction dans le but de connaître la proportion de graisse relativement aux autres parties composantes du cœur. A cet effet, nous détachâmes un petit morceau du cœur le lendemain, et nous en fîmes la remise à M. Clément, chef de service de chimie. Voici les résultats de l'analyse : Eau 798,575 Matière grasse 20,227 Fibre musculaire et sels. . ,. 181,198 Total 1000,000 186 Les analyses du cœur du cheval font encore aujourd'hui complète- ment défaut; aussi ne pouvons-nous reproduire ici que celles du cœur du bœuf, qui très- probablement ne doivent pas différer beaucoup de celles que fournirait le même organe chez le cheval. Deux chimistes se sont occupés de faire ces analyses, et les résultats quelque peu différents qu'ils ont obtenus ne seront pas sans quelque utilité pour bien faire voir la différence de composition que présentait le cœur du sujet de cette observation. ANALYSES DU TISSU MUSCULAIRE DU COEUR CHEZ LE BOEUF. Noms des auteurs : BRACONNOT. SCHULTZ. Eau 77,03 77,50 Fibrine.. (Tissu cellulaire,. ] vaisseaux. \ 18,18 15,00 Gélatine. 'Nerfs. ) Albumine et matière colorante du sang 2,70 4,30 Extrait, alcoolique et sels 1,94 1,32 Extrait aqueux et sels 0,15 1,80 Phosphate de chaux » » Graisse » 0,08 Total 100,00 100,00 La comparaison des résultats obtenus par M. Clément à ceux qui sont exposés dans le tableau précédent, nous fournit des données in- téressantes, à savoir que dans les conditions ordinaires, normales, le tissu du cœur ne contient pas de graisse ou n'en contient qu'une très- faible proportion, tandis que chez le sujet de notre observation la quan- tité en est considérable. Quant à la très-grande proportion d'eau que M. Clément a rencontrée dans le morceau de cœur qu'il a analysé, elle contraste singulièrement avec celle qu'ont notée MM. Braconnot et Schultz; peut-être faut-il l'attribuer à l'imbibition qui s'est opérée par suite du séjour du cœur dans l'eau. Quelle qu'en soit la cause, cette différence ne saurait avoir aucune influence sur le résultat principal de la comparaison de ces diverses analyses. Une dégénérescence graisseuse du cœur aussi remarquable que celle que présentait cet animal, nous faisait vivement désirer d'avoir des renseignements sur l'état antérieur de ce cheval. Nous avons eu ces renseignements du propriétaire lui-même : ils sont fort importants, bien qu'ils n'éclairent en rien ni l'étiologie ni la marche de la maladie. Ce cheval ne paraissait pas être poussif; il travaillait sans paraître 187 essoufflé et il n'a jamais rien présenté d'anormal. Aucune maladie an- térieure, aucune manifestation extérieure quelconque ne pouvait faire croire à la lésion d'un organe principal. Recherches sur l'élimination de l'eau par les voies crinaires. l'élimi- nation DE l'urée et des sulfates EST, A l'ÉTAT NORMAL, INDÉPENDANTE DE la masse des urines; par M. Rabuteau. On admet généralement, et je l'ai cru moi-même sur la foi des au- teurs, que l'urine est sécrétée normalement en plus grande quantité l'hiver que l'été. Ceux qui se sont occupés de cette question, soit dans des traités spéciaux, soit dans les traités d'hygiène, admettent tous ce principe établi sans doute, comme bien d'autres, sur des considérations que l'expérience directe n'a pas appuyées. Ainsi Golding Bird (1) avance que la sécrétion urinaire est en général plus active dans les saisons froides que dans les saisons chaudes. Beale partage également cette opinion. Becquerel (2) dit de même que les urines « sont plus abondantes l'hiver que Télé , et dans les pays froids que dans les pays chauds. » N'ayant pas à ma disposition les éléments qui me permettent de vérifier ou d'infirmer la seconde partie de cette dernière proposition, je me propose seulement de con- tester l'exactitude de la première partie , savoir que l'urine n'est pas sécrétée en plus grande quantité l'hiver que l'été. C'est par le hasard que je suis arrivé à modifier mes idées à ce sujet. Depuis deux ans j'ai mis à contribution dans mes expériences, non-seu- lement mes animaux, mais ma propre personne. J'ai dû, par suite de la direction de mes recherches, mesurer un grand nombre de fois mes urines et souvent plus d'un mois de suite. Ces dosages sont actuelle- ment au nombre de plus de deux cent cinquante, mais, comme je de- vais nécessairement rayer nuls ceux que j'avais faits lorsque j'étais sous l'influence des substances sur lesquelles portaient mes recher- ches, le nombre de ceux que j'ai obtenus à l'état normal s'est restreint considérablement. Voici le relevé pris dans les tableaux qui accom- pagnent des expériences presque toutes publiées soitdans les comptes rendus de la Société de biologie, soit dans la Gazette hebdomadaire : (1) De C urine el des dépôts urinaires. (2^ Traité d'hygiène, 3° édition, p. 790. 188 ombre des dosages de 1 urine éliminée dans les 24 heures. Quantités moyennes Décembre 1867 3 945 cent, cubes. Mai 1868 13 963 grammes. Juin — 13 1,037"^ - Juillet... — 19 877 — Octobre.. - 10 1,025 — Novembre — 10 901 — Décembre — 11 932 — Janvier.. 1869 21 860 — Mars — 6 880 — Avril.... — 23 988 cent, cubes. 129 Le premier et le dernier dosage sont exprimés en centimètres cubes, les autres étant exprimés en grammes. Mais il est facile de passer d'une expression à l'autre, en multipliant les volumes par la densité moyenne des urines, densité que j'ai trouvée, pour ma part, très-rapprochée de celle que cite Rayer, c'est-à-dire 1018. Le chiffre le plus bas correspond au mois"de juillet 1867, alors qu'il faisait très chaud ; mais le mois précédent j'ai trouvé 1037 et au mois de mars 1869, mois très-froid, je n'ai obtenu que le nombre 880. En somme l'examen des chiffres que j'ai rapportés vient prouver la pro- position suivante : Citez iindividu à Celui normal^ suivant un régime régulier^ L'urine nest pas sécrétée en plus grande quantité Ifiioer que l'été. Ce n'est que chez les buveurs que la proposition inverse est vraie. D'ailleurs n'est-ce pas ainsi que les choses doivent se passer? L'eau absorbée s'élimine par les reins, par les voies respiratoires et par la peau. Les reins sont plongés dans la profondeur de l'organisme, ils sont traversés par un sang que la nature tend à maintenir identique à lui-même, comme le prouvent les analyses chimiques. La peau, se trouvant au contraire en contact avec un milieu extérieur essentiel- lement variable, fonctionne différemment suivant la température et l'état hygrométrique de l'air; elle élimine une quantité d'eau d'autant plus grande que la température est plus élevée et que l'état hygromé- trique de l'air est plus bas. L'exhalation pulmonaire varie également suivant l'état hygromé- trique de l'air et suivant sa température. C'est pourquoi, pendant les saisons chaudes, la soif se fait sentir lorsque l'organisme réclame l'eau qu'il a perdue. Ainsi, voilà trois organes d'élimination de l'eau : les uns, centraux 189 traversés par un liquide dont la constitution est presque toujours iden- tique, les autres exposés aux modificateurs extérieurs. D'un autre côté, nous voyons l'organisme traversé par des quantités d"eau très-variables, suivant la température ; mais il est permis de dire qu'au milieu de toutes ces variations, il existe une lunile qui est constante, savoir^ C élimi- nation de Ceaîi par les voies urinaires; l élimination de ce liquide ■par les voies pulmonaires et par la peau, étant seule variable. J'arrive maintenant à une autre question sur laquelle mon opinion est encore différente de celle qui est généralement admise. On dit que plus la quantité des urines est grande, plus la quantité absolue de l'u- rée éliminée est considérable. Si l'on veut bien se reporter aux chiffres que j'ai cités dans la Ga- zette MÉDICALE du 10 octobre 1868, au sujet des variations de l'urée sous l'influence des iodures,et dans la Gazette hebdomadaire du 19 mars 1869, sur les variations de Furée sous l'influence des bromures, on verra qu'il n'existe aucune relation entre la quantité totale d'urine rendue et la quantité d'urée éliminée en un jour. J'ai fait récemment une ex- périence encore inédite ayant pour objet les variations de l'urée sous l'influence du sel marin. Comme je savais que je serais obligé de boire plus d'eau que de coutume sous l'influence d'un régime plus salé que d'ordinaire, j'ai voulu vérifier une seconde fois si, à l'état normal, l'u- rée serait sécrétée en même quantité sous l'influence d'un régime iden- tique, lorsque je boirais peu ou beaucoup d'eau. Parmi les quatre pé- riodes de cette expérience, je ne citerai que la première période, pen- dant laquelle j'ai dosé l'urée éliminée chaque jour sous l'influence d'un régime aussi identique que possible, à cela près que j'ai bu pendant trois jours 600 à 700 grammes d'eau de plus qu'à l'ordinaire. Urine des 24 heures. Urée totale. Du 8 au 9 mars 850^'.... 19^97 9 10 - 9406'.... 20*^45 10 11 — 925^'.... 20^',18 11 12 - l,200^^... 2l8',60 12 13 — 1,415"'.... 19^98 13 14 - 1,254^'-.... 19^81 14 15 — 900=' 2Û«',2l 15 16 - 878^'.... 20^66 17 17 - 782«'.... 19»',32 La quantité absolue des sulfates naturels éliminés chaque jour sous l'influence d'un régime aussi identique que possible n'augmente pas non plus avec la quantité des urines. Je renvoie à ce sujet à mes re- cherches sur l'élimination de l'urée sous l'influence du bromure de po- 190 tassium, recherches où j'ai également dosé les sulfates pendant une partie de l'expérience. On verra qu'il n'y a aucune relation entre la masse des urines et le poids des sulfates, en un mot que le poids de ceux-ci est complètement indépendant de la masse des urines. — M. Hayem, en étudiant la suppuration, a été amené à vérifier par de nouvelles expériences les faits annoncés par M. Cohnheim, tant sur l'extravasation des globules blancs du sang à travers les parois vascu- laires que sur celle des globules rouges, particulièrement à la suite de la stase veineuse. (Voir Mémoires, p. 35.) M. Legros demande si, après l'étude de la suppuration du mésentère, M. Hayem a pu étudier l'épithélium des vaisseaux. M. Hayem n'a pas pu injecter les vaisseaux du mésentère parce que, dans la plupart des cas qu'il a observés, ceux-ci étaient à la fin de l'expérience plus ou moins complètement oblitérés; mais en traitant le mésentère par une solution de nitrate d'argent, il a pu s'assurer que l'épithélium y persistait presque partout à la surface de la séreuse avec les caractères normaux. — M. Brown-Séquard présenteles pièces anatomiques recueillies chez un cochon d'Inde auquel il avait pratiqué l'amputation de la jambe. On trouve dans différents viscères des abcès métastatiques, mais pas de tubercules. Quelque temps avant la mort, en excitant chez cet ani- mal le côté opposé à l'amputation, on fit naître des accès convul- sifs; mais ceux-ci n'étaient pas le résultat de l'amputation du mem- bre; ils étaient liés aux lésions de la pyhémie. M. Brown-Séquard a fait de plus des expériences nouvelles pour déterminer le sens suivant lequel l'excitation qui part des nerfs lésés se transmet à l'encéphale. Chez un premier cochon d'Inde il a prati- qué une. section de la moitié droite de la moelle épinière et en même temps une section du nerf scialique du côté opposé. Cet animal est devenu rapidement épileptique. Chez un second cochon d'Inde, après la section de la moelle épi* nière à droite, il a fait la section du nerf sciatique du même côté. Or tandis que cette dernière opération pratiquée seule rend les animaux épilepliques au bout d'environ quinze jours, ce second cochon d'Inde n'est pas encore devenu épileptique, bien que l'opération remonte déjà à vingt-sept jours. On peut donc dire que l'excitation qui part des nerfs lésés pour se rendre à l'encéphale passe dans la moelle par le même côté que celui de la section. — M. Landrieux présente à la Société un ganglion iliaque recueilli sur un malade mort de gangrène sèche, dans le service de M. Gubler. On 191 peut voir une pigmentation récente du ganglion qui serait due, d'après M, Gubler, à la résorption par les lymphatiques de la matière colo- rante du sang épanché dans les tissus frappés de sphacèle. Voici l'observation : PIGMENTATION DES GANGLIONS LYMPHATIQUES CONSÉCUTIVE A LA GANGRÈNE SÈCHE. Le 1 1 janvier 1869 entrait à l'hôpital Beaujon, dans le service de M. le professeur Gubler, un malade âgé de 40 ans, atteint d'affection car- diaque et présentant les signes initiaux d'une gangrène de l'extrémité antérieure du pied gauche, de nature embolique. Peu à peu le sphacèle envahit les deux tiers antérieurs du pied, et cette partie sphaceléeprit l'apparence de la gangrène dite sèche. Durant ce travail d'élimination survinrent à plusieurs reprises des poussées de lymphangite tout le long de la partie interne du membre correspondant, et consécutive- ment une tuméfaction très-notable de plusieurs ganglions lymphatiques de la région inguinale. En présence de ce fait, M. Gubler émit l'opinion qu'il devait se faire dans ces ganglions inguinaux un travail de pigmentation analogue à celui que l'on observe dans les ganglions axillaires des individus qui portent sur le membre supérieur des marques de tatouage. Le malade, à la suite d'embolies multiples dans divers organes (pou- mons, reins, etc.), succombe le 19 mai, et à l'autopsie il fut facile de vérifier le fait annoncé par M. Gubler. Un des ganglions de la région inguinale, situé vers l'angle inférieur du triangle de Scarpa, dont le plus grand diamètre correspondait à la direction verticale, recevant par conséquent les lymphatiques émanant de l'extrémité périphérique du membre, présentait le volume d'un œuf de pigeon. Plusieurs sections pratiquées sur ce ganglion permettent de voir une matière noirâtre, pigmentaire, réunie par îlots assez irré- gulièrement. Les ganglions, au contraire, dirigés dans le sens transver- sal ou bien situés supérieurement, ne présentaient nulle trace de pig- mentation ; il en était de même du reste pour les ganglions du membre opposé; analogues à celui que nous signalons, ils étaient complètement indemnes de pigmentation. M. le professeur Gubler ât lui-même l'examen histologique de cette substance. Mise sur le porte-objet du microscope, cette matière noire se présentait sous l'aspect de granulations foncées amorphes, complè- tement dégagées de tout élément cellulaire, de dimension variable. Traitée successivement par l'acide chlorhydrique, puis par l'acide ni- trique et simultanément par ces deux acides réunis (eau régale), cette matière ne disparut aucunement, au contraire même, prit une teinte plus sombre. 192 Il est donc évident que cette matière pigmenlaire est constituée par du charbon résultant des transformations ultimes des matières ani- males qui, soumises désormais au seul empire des lois physico-chi- miques, ont subi les métamorphoses observées dans les substances ternaires qui, dans le sol, passent à l'état d'ulmate, de tourbe, de lignite et de charbon. Il nous a semblé que cette cause de pigmentation, qui n'avait pas en- core été indiquée, méritait d'être rapportée devant les membres de la Société. La séance est levée à quatre heures et demie. Séance du 29 mai. !■■' — M. Laborde expose, au nom de M. Leven et au sien, les résultats de leurs recherches sur la fève de Calabar. Voici les conclusions prin- cipales de ce travail : L'action physiologique de l'ésérine se traduit par un phénomène ca- pital, essentiel : le iremblenient musculaire à tous les degrés. Tous les muscles, tant de la vie organique que de la vie végétative, peuvent être atteints à leur manière, et avec une intensité variable, de ce tremblement, qui se traduit ainsi tantôt par de la ïj'emM/rtiiow, rfif tremblement fibrillaire ou des contractions saccadées (membres, tronc, tête), tantôt par des mouvements oscillatoires (nystagmus, alter- natives de contraction ou de dilatation de la pupille) , tremblement, ataxie des mouvements du cœur, etc. Une parésie plus ou moins marquée accompagne ou suit le tremble- ment. Ce phénomène paraît dû à l'influence' directe de l'ésérine sur le centre médullaire. Lorsque l'action porte uniquement sur la partie supérieure de la moelle, on n'observe que des phénomènes pupil- laires. Dans la période avancée de l'intoxication les muscles peuvent être à leur tour directement irrités, puisque les muscles séparés de la moelle sont pris alors de tremblement. L'asphyxie est le dernier terme de l'intoxication ; elle est liée soit à l'état des muscles respiratoires, soit à l'effet direct de l'ésérine sur la région bulbaire de la moelle. Enfin l'ésérine laisse à peu près intacts la sensibilité, la motricité ner- veuse et le pouvoir excito-moteur. M. Leven ajoute à cette communication ce détail important, à savoir 193 que le sang d'un animal empoisonné par l'ésérine tue un autre animal après avoir produit les mêmes phénomènes d'intoxication. M. VuLPiAN fait remarquer que c'est là une exception à la règle géné- rale. Le plus ordinairement, en effet, et M. Vulpian a pu s'en assurer plusieurs fois par la strychnine, le sang ne contient pas une dose suffi- sante de poison pour po?séder des propriétés toxiques. Le poison, à un moment donné, ne se rencontre dans le sang qu'à dose infinitési- male, car au fur et à mesure de son absorption il est éliminé par les glandes ou pénètre par imbibition dans certains éléments anato- raiques, peut-être dans une proportion variable, suivant l'affinité plus ou moins grande de tels ou tels éléments pour la substance toxique. C'est pourquoi dans l'empoisonnement par la strychnine, tandis que le sang n'est habituellement pas toxique, il est possible, en faisant un extrait à l'aide de l'urine, d'obtenir une quantité suffisante de poison pour agir sur des grenouilles. M. Browm-Séquard a fait à ce sujet des observations qui concordent très-bien avec les résultats énoncés par M. Vulpian. Cependant dans un cas d'empoisonnement par la strychnine, il a pu, à laide du sang, empoisonner une grenouille. Mais c'est là une grande exception, tandis qu'au contraire le suc de l'estomac, comme le savent très-bien les mé- decins légistes, recèle toujours une quantité abondante de poison. M. Laborde croit que l'ésérine ne fait pas seule exception à la règle indiquée par MM. Vulpian et Brown-Séquard, et que l'atropine et la bel- ladone se retrouvent aussi dans le sang en quantité suffisante pour pro- duire expérimentalement des phénomènes toxiques. M. Vulpian fait observer que, dans tous ces cas, il y a évidemment une certaine quantité de poison dans le sang , mais que le plus ordi- nairement à cause des éliminations incessantes qui débarrassent ce liquide de l'agent toxique, cette quantité est insuffisante pour produire des effets. Mais ce qui est vrai pour la strychnine n'a pas lieu pour tous les poisons, et pour la belladone par exemple ; des expériences ont dé- montré que le sang d'un animal empoisonné par cette substance peut agir à la façon de la belladone sur d'autres animaux. M Laborde ajoute qu'un chimiste a bien voulu expérimenter sur lui- même le sang du foie d'un animal empoisonné par l'ésérine, et qu'il a obtenu ainsi une contraction pupillaire. M. GuBLER fait observer qu'il faut ici se mettre à l'abri dune cause d'erreur qui consiste à prendre pour une contraction spéciale le res- serrement pupillaire dû à l'irritation locale qui suit l'introduction d'un corps étranger (luclcoiuiue dans l'œil. M. Gubler a expérimenté l'ésé- rine au point dv. vue ihérjpeutique, et il a trouvé que ses elfels physio- logiques étaient (l'une intensité peu considérable. Sous ce rappor^ C. R. 18b9. 13 194 l'ésérine pourrait prendre rang à côté de la morphine. D'ailleurs c'est là une question qui mérite d'être étudiée. M. Laborde croit, ;^u contraire, que l'ésérine est une substance très- active, puisque 1 ou 2 centigrammes suffisent pour tuer rapidement un rat. M. Trasbot montre à la Société un chat qui présente du côté gauche une zone épileplogène. Il suffit de pincer l'animal au cou ou près de l'épaule de ce côté pour lui donner un accès convulsif. L'animal boite du membre postérieur gauche et présente à ce niveau une atrophie mus- culaire. On doit supposer qu'il existe une affection de la moelle ou du nerf sciatique. Ce fait offre donc la plus grande analogie avec ceux pré- sentés par M. Brown-Séquard. M. LouviLLE observe depuis quelque temps un chat épileptique, et ses accès, qui paraissent spontanément, seraient survenus à la suite de coups reçus l'année dernière sur la colonne vertébrale. M. Brown-Séqcard, à propos du fait présenté par M. Trasbot, dit qu'il n"a pu produire l'épilepsie chez le chat, à la suite de l'action unilatérale de la moelle que dans un seul cas. M. Brown-Séquard montre ensuite un cochon d'Inde épileptique chez lequel il a coupé le grand sympathique des deux côtés et qui n"a plus actuellement que des attaques sans perte de connaissance. De plus, l'attaque est très-difficile à produire. Quelquefois encore, dans ce cas. il y aune légère perte de connaissance; mais celle-ci ne se montre plus jamais quand on a eu soin d'enlever le ganglion cervical supé- rieur. La paralysie des vaso-moteurs a donc une influence décisive sur la perte de connaissance. C'est là un sujet à explorer. Recherches sur l'action physiologique de l'acide phénique; par MM. Paul Bert et Jolyet. Voici les principales conclusions de ce travail : 1* L'acide phénique, injecté dans l'estomac en dissolution au 30% à dose mortelle (3 ou 4 grammes pour des chiens de moyenne taille), donne des convulsions avec trépidations irrégulières qui sont dues à une excitation des cellules sensibles de la moelle épinière; elles dispa- raissent, en effet, par la section des nerfs moteurs ou l'emploi du chlo- roforme. 2* La mort est la conséquence de cette excitation exagérée; elle a pour mécanisme prochain une diminution des mouvements respiratoires et de la pression ca:!iiai]ue, tjui tombe à 2 ou 3 centimètres. Apr/>s la mort, les ncri's molon.rs et les muscles conservent leurs propriétés; 195 mais la rigidité cadavérique survient très-vite, par suite des contrac- tions musculaires exagérées. 3' A dose plus forte (6 ou 7 grammes), l'acide phénique tue subi- tement, sans convulsions, par arrêt des ventricules du cœur. Le sang est rouge dans les cavités gauches. 4" A la dose-limite (2 ou 3 grammes), les animaux, après des con- vulsions qui durent trois ou quatre heures, reviennent à eux, et re- prennent les apparences de la santé parfaite; mais fréquemment, au bout de quelques jours, surviennent des pneumonies et des kérato- conjonctivites, l'œil se ride et l'animal meurt. 5° Les doses faibles (1 gramme) peuvent être, sans aucun incon- nient. administrées pendant plusieurs mois. 6* Il se fait une accoutumance manifeste à l'action de l'acide phé- nique, mais cette accoutumance ne permet pas de dépasser beaucoup la dose mortelle; nous n'avons pu aller, chez les chiens, au delà de 6 et 7 grammes. • M. Brown-Séqdard rappelle que la picrotoxine et le chlorure de ba- ryum produisent également des tremblements, mais avec cette diffé- rence que les substances paraissent agir à la fois sur les muscles, les nerfs et la moelle, et que la section du nerf scialique n'abolit pas le tremblement du membre correspondant. M. VuLPiAN fait remarquer que l'arrêt du ventricule avant celui de l'oreillette rentre dans la règle générale, et que tous les poisons du cœur produisent cet efifet. — La séance est levée à cinq heures et demie. COMPTE RENDU DES SÉANCES DE p- r LA SOCIETE DE BIOLOGIE pendant le mois de juin 1869, Par m. J. HAYEM, secrétaire. PRÉSIDENCE DE M. CL. BERNARD. Séance du 5 juin. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. A propos du procès-verbal, M. Brown-Séquard attire de nouveau l'at- tention sur les propriétés du sang des animaux empoisonnés. Il rappelle d'abord que les recherches de Pikford relativement à l'empoisonnement par la strychnine sont en harmonie avec les faits observés par M. Vul- pian, et cependant il lui paraît difficile d'admettre l'explication pro- posée par ce dernier. M. Vulpian pense en effet, comme cela a été ex- posé dans la dernière séance , que chez les animaux empoisonnés par la strychnine, le poison ne reste pas dans le sang en quantité suflBsante pour être décelé par son action sur une grenouille. Et cependant, comme l'a montré parfaitement Marshall-Hall, il sufifit de l ou 2 cen- tièmes de milligramme pour impressionner une grenouille. Aussi , vu 198 cette susceptibilité remarquable de la grenouille, M. Brown-Séquard ne comprend pas comment, lorsque la mort du mammifère a été presque soudaine, on n'observe pas cependant d'action toxique du sang. Il pense que l'on pourrait admettre peut-être dans ce cas une sorte de neutralisation du poison par le sang. On sait, ajoute M. Brown-Séquard, qu'Addison et Morgan, en faisant passer le sang d'un chien empoisonné dans le corps d'un second chien, ont pu produire la mort de ce der- nier animal; mais comme il y avait dans leurs expériences quelques causes d'erreur, il serait nécessaire de faire sur ce sujet de nouvelles recherches. M. Gréham prie M. Brown-Séquard d'indiquer quelle est la méthode qui a été suivie pour faire l'essai des propriétés toxiques du sang. Le procédé lui paraît, en effet, offrir de l'importance. Comme il ne peut y avoir qu'une quantité très-faible de poison, il serait utile de préparer un extrait alcoolique du sang, de reprendre ensuite, après l'évapora- lion, le résidu par une petite quantité d'eau et d'injecter le liquide ainsi obtenu sous la peau d'une grenouille. M. Gréhant fait remarquer de plus que l'extrait d'urine normale produit, comme plusieurs physiolo- gistes l'ont démontré, des convulsions sur les grenouilles, et que par conséquent on doit tenir compte de cette cause d'erreur dans les cas où le sang n'a donné que des résultats négatifs, tandis que l'urine, au contraire, a produit des effets toxiques. M. Brown-Séquard, dans les expériences qu'il a faites, plonge une grenouille, à laquelle on a fait plusieurs plaies cutanées, dans le sang de l'animal récemment empoisonné. Or, tandis que dans ces circon- stances on n'obtient pas de résultat positif, la grenouille est au con- traire rapidement intoxiquée lorsqu'on la plonge dans du sang auquel on a mêlé préalablement une certaine dose de strychnine. M, VuLPiAN, dans ses propres expériences, a suivi le procédé recom- mandé par M. Gréhant. C'est donc à l'aide de l'extrait du sang qu'il a obtenu les résultats négatifs rappelés précédemment. Aussi lui pa- raît-il parfaitement logique d'admettre que le poison, dont l'absorption se fait à dose très-minime à la fois, se perd en quelque sorte au fur et à mesure qu'il pénètre dans le sang pour aller imbiber les dififérents tissus de l'économie. Mais évidemment le poison passe dans le sang, et à ce propos on peut citer les expériences intéressantes de M. Bert sur la soudure des rats. Lorsque après cette soudure des deux animaux on empoisonne un des rats, le second ne tarde pas à manifester des phénomènes d'empoisonnement qui ne peuvent être dus qu'aux com- munications vasculaires établies entre les deux animaux. M. Bhown-Séqoard objecte contre cette explication que lorsqu'on injecta le poison directement dans le sang et qu'on produit ainsi une 199 mort rapide, on ne trouve pourtant pas plus de poison dans le sang que lorsque l'absorption s'est produite, comme le dit M. Vulpian, d'une manière progressive et en quelque sorte infinitésimale. Il lui paraît, quant à présent, impossible de comprendre ces phénomènes sans ad- mettre, comme il vient de le dire, une action spéciale du sang sur le poison, une sorte de neutralisation dont la cause nous échappe, mais qui résulte peut-être de la composition si complexe du liquide sanguin. — M. BROWN-SÉQnARD fait une communication sur l'anatomie des poissons pleuronectes et montre à l'appui des pièces analomiques. Il existe en arrière des yeux, chez ces poissons, une poche musculaire très-développée qui ne se rencontre chez les autres poissons qu'à l'état rudimentaire. Cette poche est considérable du côté blanc de l'animal, tandis que du côté noir elle n'est pas plus manifeste que chez les autres poissons. A l'intérieur, cette poche renferme un liquide sé- reux qui tient en suspension des globules de lymphe , mais qui reste enkysté dans celte poche, ce qui prouve que celle-ci n'est pas compa- rable à un cœur lymphatique. Sur la paroi interne on peut voir, après avoir fendu celte poche, un certain nombre de cordages tendineux di- versement disposés. Par sa partie antérieure la poche s'ouvre dans l'orbite et maintient la facH postérieure de l'œil. Il est très-probable qu'au point de vue physiologique elle doit avoir une importance très-grande sur les-mou- vemenls des yeux. Les recherches de M. Brown-Séquard ont porté particulièrement sur le flétan; mais la disposition anatomique en ques- tion est la même chez tous les pleuronectes. Sur les pièces analomi- ques préparées par M. Brown-Séquard, on peut voir dans la jugulaire interne les cloisons tendineuses et musculaires qui ont été décrites dans les sinus veineux des poissons. M. Brown-Séqdard a de plus étudié le cerveau du flétan ; our voir si la disposition asymétrique, signalée par quelques auteurs chez les pleuronectes, existe réellement. Il n'a jamais trouvé de différences ap- préciables dans la disposition et le volume des couches optiques des deux côtés, et il pense, d'après ses recherches, que les naturalistes qui ont trouvé au contraire un manque de symétrie dans ces parties, ont peut-être fait leurs études sur des individus diS'érents de ceux qu'il a examinés. M. Vaillant fait observer que la poche musculaire étudiée par M. Brown-Séquard doit jo,uer un rôle important dans la projection des yeux en avant, phénomène que l'on observe très-bien chez ceux de ces poissons qui vivaient dans les aquarium. M. VuLPUN a étudié avec M. Philipeaux un très-grand nombre de 200 cerveaux depleuronectes, et il est persuadé qu'il n'existe jamais chez eux d'asymétrie appréciable des lobes optiques ni des lobes céré- braux. Les naturalistes qui ont décrit une semblable disposition se sont évidemment mépris, M. Carville revient sur la communication qu'il a faite antérieure- ment, sur les oscillations de la tension artérielle, produites par l'exci- tation de divers nerfs, et il tiendra compte dans sa noie des légères modificalions que de nouvelles expériences imposent aux opinions qu'il a émises. M. Marey montre à la Société les nouveaux appareils enregistreurs qu'il a fait exécuter en vue d'étudier le vol des oiseaux, et il explique comment il est parvenu ainbi à obtenir un tracé graphique de i'exlré- milé de l'aile inscrivant le parcours exécuté par l'aile dans l'espace et comment on pourra, à l'aide de ces données nouvelles, calculer ma- thématiquement le travail exécuté par l'oiseau pendant le vol. — MM. Legros et Onimus ont fait un certain nombre de recherches sur les modifications apportées par l'action de l'électricité dans les phénomènes d'endosmose. Porret et Dutrochet ont les premiers re- connu que l'électricité augmentait le pouvoir endosmotique du côté du pôle négatif. MM. Legros et Onimus ont varié les expériences de façon à obtenir quelques résultats nouveaux. En disposant les appareils comme on le fait d'ordinaire, c'est-à-dire en plaçant le liquide le plus dense dans rendosmomètre et le moins dense en dehors, on trouve une élévation du liquide dans l'endosmo- mètre qui est en rapport avec le pôle négatif et un abaissement dans l'endosmomèlre qui reçoit le pôle positif. En plaçant des liquides de la môme densité dans l'endosmomèlre et dans le vase extérieur, les effets sont semblables. Si l'on met dans l'endosmomètre le liquide le moins dense, au lieu d'avoir un abaissement, on obtient une élévation du côté du pôle négatif et un abaissement du côté du pôle positif. L'espèce de courant employé a une grande influence. Il faut pour obtenir de grands effets se servir de piles disposées en tension. Avec les courants d'induction on n'obtient rien. Si les courants interrompus sont orientés, les résultats sont à peine sensibles. On voit donc qu'ici comme en beaucoup d'autres circonstances les courants continus diffèrent complètement des courants interrompus et qu'ils ne peuvent en aucun cas être assimilés aux courants inter- rompus faibles. D'après ces expériences, MM. Legros et Onimus concluent que les courants conlmus ont une influence marquée sur la nutrition, non- 201 seulement en agissant sur la circulation, mais en favorisant l'endos- mose et l'exosmose, et par suite les phénomènes moléculaires. De plus, dans l'application de l'électricité à la thérapeutique, pour débarrasser les malades de tumeurs liquides, ainsi qu'on l'a tenté, on ne doit pas oublier que les liquides se dirigent vers le pôle négatif et que le pôle positif doit être placé du côté où l'on a intérêt à faire dimi- nuer la quantité de liquide. — M. RAJtviERa fait une étude du cal osseux en répétant l'expérience de Schrœder von der Kolk, et il remettra une note sur ce sujet. M. VuLPiANfait observer à propos de cette communication que le cal, chez les animaux, est quelquefois cartilagineux, mais qu'il est rare cependant de le trouver tel dans toute son étendue; le cal fibreux est la règle. Dans les recherches nombreuses qu'il a faites avec M. Phili- peaurau muséum, il ne se rappelle pas avoir vu un cal entièrement car- tilagineux. La production de cartilage paraît dépendre d'ailleurs de l'a- nimal sur lequel on fait l'expérience; c est aussi par là que les lapins présentent des parties cartilagineuses dans le cal plus fréquemment que les chiens. La séance est levée à cinq heures et demie. Séance du 12 juin. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. Le docteur le Roy de Méricourt, membre correspondant de la So- ciété, appelle l'attention sur une maladie particulière aux races co- lorées qui a été, pour la première fois, signalée au Brésil par le docteur da Silva Lima, médecin à l'hôpital de la Charité, à Bahia. Le mémoire de ce médecin a pour titre : Étude sur /'ainhum, maladie jusqu'alors non décrite, particulière à la race éthiopienne et affectant les petits doigts des pieds. 11 a été publié, en portugais, dans la Gazeta medica de Lisboa (numéros du 28 juin, des 13 et 28 juillet 1867), M. de Méricourt en a inséré la traduction dans les Archives de médecine navale (numéros d'août et septembre 1867). Celte affeclion, bien qu'extraordinaire sous un certain rapport, n'a pas d'influence sur la santé générale du sujet qui en est atteint ; ses effets ne s'étendent pas au delà de l'organe envahi , c'est-à-dire du petit doigt du pied. Les nègres, au Brésil, l'appellent ainfium. Elle paraît consister dans une dégénérescence graisseuse lente et progres- sive de presque tous les éléments anatomiques des petits doigts, s'é- tendanl à la face dorsale, à la face digito-plantaire de ces organes et 202 produisant, inévitablement, la chute de l'orteil au bout d'un temps plus ou moins long. Cette affection est assez fréquente, au Brésil, chez les nègres. La transformation envahit exclusivement les petits doigts et uniquement ceux des pieds. Elle est plus fréquente chez les noirs que chez les négresses. Les causes en sont tout à fait inconnues. L'ainhum commence par une légère dépression , un peu moins que demi-circulaire, occupant les faces internes et inférieures de la racine du doigt, coïncidant exactement avec le sillon digito-plantaire sans ul- cération permanente, sans douleurs internes, sans phénomènes inflam- matoires. L'organe augmente peu à peu de volume à mesure que le sillon s'étend vers la face dorsale et plus tard vers la face externe, de sorte qu'à la fin l'extrémité du doigt a acquis deux ou trois fois son volume ordinaire. Le sillon circulaire se recouvre au point que le mince pédi- cule qui relie l'orteil au pied malade n'est visible que lorsque, en im- primant des mouvements de latéralité, on écarte les surfaces opposées du sillon. L'orteil, en s'arrondissant irrégulièrement, prend les formes d'une petite patate. Quand le sillon circulaire est très-profond, l'orteil acquiert une très-grande mobilité, se laissant incliner dans tous les sens; on peut aller jusqu'à lui imprimer un mouvement complet de ro- tation. A cette période de la maladie, la première phalange a complètement disparu au niveau du sillon circulaire, et l'organe, en s'inclinant au- dessous, embarrasse la marche en raison des chocs excessivement dou- loureux auxquels il est exposé. C'est alors que les malades réclament l'amputation comme unique moyen de soulagement. La marche de la maladie est toujours lente et graduelle; il s'écoule ordinairement un à deux ans jusqu'au moment de la plus grande mo- bilité de l'orteil. M. le docteur Wacheres (de Bahia) a donné le résultat de son examen microscopique; il a conclu à l'augmentation du tissu adipeux sous-cutané aux dépens des tendons, des os et autres tissus du doigt; on y rencontre à peine des traces de tissu conjonctif. Les cavités de la substance spongieuse des os sont plus grandes qu'à l'état normal, aux dépens des lamelles concentriques qui entourent les canaux de Havers et se trouvent remplis de gros globules graisseux de couleur jaune. La maladie, suivant le docteur Wacheres, paraît consister en une atrophie ou dégénérescence graisseuse des parties par défaut de nutrition. M. le docteur Collas, ancien médecin en chef de Pondichery, a si- gnalé la présence de l'ainhum chez les individus de la race hindoue (Archives de médecine navale, t. VIII, p. 358]. M. Leroy de Méricourt a remis à M. le docteur Cornil un exemple 203 de cette altération pour en faire l'étude analomique, et celui-ci ex- pose à la Société le résultat de se? recherches. Sur des sections qui comprennent toute l'épaisseur des parties ma- lades, on voit dabord une hypertrophie considérable de la couche papillaire et de l'épiderrae qui la recouvre ; au-dessous le derme n'offre aucune hypertrophie, le tissu cellulo-adipeux acquiert un développe- ment considérable; mais il est normal. La disposition rappelle celle du tissu des lipomes; les glandes sont normales; mais le tissu osseux lui- môme est devenu très-graisseux. Au niveau du sillon le corps muqueux est très-mince; les papilles sont considérablement atrophiées; mais les éléments anatomiques eux-mêmes ne paraissent pas altérés d'une manière spéciale. M. GuBLER pense que l'on pourrait peut-être rapprocher cette sin- gulière affection des amputations spontanées que l'on observe chez les fœtus. M. Brown-Séquard demande si l'on a décrit de véritables amputa- tions spontanées chez le fœtus, sans qu'il y ait eu action trauma- tique soit par le cordon, soit par un autre mécanisme. M. GuBLER fait allusion, non à l'amputation des membres, mais à ces sortes de malformations dans lesquelles les appendices ne sont en rap- port avec les extrémités que par un pédicule très-étroit. M. Leven présente des extraits obtenus à l'aide du sang et du foie d'un chat empoisonné par l'acide carbonique. Ces liquides contiennent du sucre, tandis que ceux qui proviennent d'un animal sain n'en offrent pas trace. M. Leven pense que la présence du sucre provient d'un travail spécial qui se fait dans toute l'économie. Cet observateur revient de plus sur un point important de l'empoi- sonnement par l'acide carbonique, à savoir que la mort ne s'accom- pagne jamais de convulsions. Les battements du cœur et la respiration se ralentissent immédiate- ment, l'animal tombe dans une sorte de sommeil avec perte complète de la sensibilité et meurt sans qu'il y ait de période d'excitation. Dans l'asphyxie on a donc mis sur le compte de l'acide carbonique des phénomènes qui ne lui appartiennent pas, et d'ailleurs dans un grand nombre de cas d'asphyxie produite par pendaison ou strangu- lation, le mécanisme de la mort est tout diiiérent de celui que cause l'acide carbonique. Dans ce dernier cas, il y action sur le cœur, une sorte de stupéfaction de cet organe dont la coloration est toujours noire, tandis que dans les cas cités plus haut, la mort a lieu presque toujours par syncope et le cœur conserve le plus souvent sa coloration normale. M. Leven conclut de ses expériences que l'acide carbonique î64 produit un genre spécial d'asphyxie dans lequel il n'y a aucune excita- tion du système nerveux. M. Browx-Séquard observe que les expériences de M. Leven pa- raissent établir un fait très-remarquable et nouveau, à savoir : que l'acide carbonique tue les animaux en produisant la syncope. Il ajoute que si la syncope a été remarquée chez un grand nombre de pendus, il est toutefois parfaitement connu que la mort, dans ce cas, a lieu souvent par fractures des vertèbres du cou avec compression du bulbe. Le mécanisme de la mort n'est donc pas ici le même que dans l'asphyxie par l'aeide carbonique ; mais il est inexact de prétendre, comme le pense M. Leven, que l'acide carbonique n'excite pas le sys- tème nerveux. C'est par excitation même sur les centres, qu'il y a arrêt du cœur et syncope. D'ailleurs l'action excitante de l'acide carbonique a été démontrée par M. Broow-Séquard à l'aide d'un très-grand nombre d'expériences. Il suffit de boire de l'eau de Seitz pour sentir sur les muqueuses l'ac- tion excitante de l'acide carbonique; l'injection de sang chargé d'acide carbonique dans une artère quelconque produit des phénomènes d'ex- citation considérable. Ainsi une pareille injection poussée vers la têtts fait naître des convulsions générales; lorsqu'on injecte de l'acidft carbonique dans le vagin à l'époque de la grossesse, on détermine des contractions violentes de lutérus, etc.; et dans toutes ces expériences, si l'on remplace l'acide carbonique par de l'oxygène, les excitations produites cessent. Sans nul doute l'acide carbonique doit être regardé comme un excitant très-énergique et des centres nerveux et des partie.? périphériques. M. Brown-Séquard se propose de plus de revenir prochainement sur le mécanisme de la syncope et d'exposer à la Société comment il a été conduit à y distinguer trois phénomènes principaux : l'arrêt du cœur, l'arrêt de la circulation et la suspension des échanges dans les vais- seaux. M. Leven croit que les faits qu'il a observés ne sont pas contredits par ceux que M. Brown-Séquard vient de rappeler. 11 a surtout cher- ché à se rendre compte du mécanisme de la mort dans le cas de res- piration d'acide carbonique; et alors il a noté une absence complète d'excitation. Les circonstances dans lesquelles se montre celle-ci sont tout autres; on ne peut pas conclure d'une action locale à une autre plus générale. Ainsi dans les conditions où M. Leven s'est placé lacide car- bonique est bien un stupéfiant. M. Brown-Séquard ne pense pas que dans les expériences de M. Le- ven, lacide carbonique au agi comme dans les cas dinjection dans les vaisseaux. En effet, l'acide carbonique produisant la syncope, son in- 205 troduction dans le sang derient alors impossible; c'est là le résultat in- téressant qui découle des faits observés par M. Leven; mais ce résultat prouve précisément que l'acide carbonique est un excitant énergique. La syncope elle-même n'est pas autre chose que l'effet d'une excitation, et au moment où elle se produit, l'acide carbonique ne pénétrant plus dans l'organisme, on ne peut plus voir apparaître d'autres phénomènes d'excitation. M. Leven ne considère pas les effets produits par l'acide carbonique comme caractérisant une syncope; au contraire, il a cherché à prouver que ce gaz détermine une asphyxie spéciale dans laquelle la mort n'a pas lieu par excitation du pneumo-gastrique comme dans la syncope, mais particulièrement par un effet direct sur le cœur lui-même. Pour M. Leven, l'asphyxie par le gaz acide carbonique diffère complètement de la syncope. M. Brown-Séquard ne veut pas prolonger cette discussion qui porte surtout sur les mots. Puisque, dit-il, M. Leven a constaté un arrêt du cœur et de la respiration, il y a syncope, et ce phénomène est bien cer- tainement le fait important observé par cet expérimentateur. M. GuBLER fait remarquer que la différence des résultats obtenus par les deux argumentateurs paraît dépendre bien évidemment du mode d'application de l'acide carbonique. Dans un cas, lorsqu'on fait une in- jection dans une artère, il y a une action topique, une excitation indé- niable; mais, dans les expériences de M. Leven, les conditions sont telles qu'il y a aneslhésie, collapsus musculaire, et cette voie d'intro- duction de l'acide carbonique enraye pour ainsi dire les phénomènes d'excitation qui résultent de l'action topique de ce corps. L'action du chloroforme offre un exemple du même genre. Appliqué localement, il excite; introduit par la respiration, il produit l'anesthésie. M. Lépine fait voir à la Société une préparation microscopique qui démontre que, dans un cas de congestion des méninges avec méningite, on trouve dans les gaines périvasculaires un très-grand nombre d'élé- ments. M. Lépine croit que ce sont des cellules produites par la gaîne, et il renvoie sur ce point au travail qu'il a publié dans les Archives dk PHYSIOLOGIE, n° 2, 1869. M. Labohde, dans des expériences entreprises avec M. Leven dans le but d'étudier l'intoxication chronique par l'ésérine, a trouvé chez un cochon d'Inde ainsi empoisonné plusieurs altérations anatomiques, parmi lesquelles un étranglement de l'intestin grêle a surtout fixé son attention. Les parois intestinales sont le siège d'une inflammation in- tense avec infiltration sanguine dans l'étendue de plusieurs centimètres. L'étranglement parait dû a un rétrécissement considérable de l'anse enflammée; au-dessus du point rétréci, l'intestin est considérablement 206 dilaté; au-dessous de l'obstacle, au contraire, le canal est vide et af- faissé. En outre, l'estomac était dilaté et rempli d'un liquide verdâtre. M. Laborde se propose de revenir plus tard sur l'interprétation que l'on doit donner à ces lésions, A cinq heures, la Société se forme en comité secret. — La séance est levée à cinq heures et demie. Séance du 19 juin. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. BocRNEviLLE présente à la Société plusieurs exemples de malfor- mation des mains et remettra une note à ce sujet. M. Laborde, à propos du cas dans lequel il existait une absence con- génitale des muscles de l'éminence thénar, fait observer que la science possède un certain nombre dexeinples analogues. Il a publié dans sa thèse sur la paralysie essentielle de lenfance des faits d'absence con- génitale de certains muscles des membres infi^rieurs, et il est persuadé que l'ensemble deces faits, qui doivent être plus communs qu'on ne le pense, offre un grand intérêt au point de vue du diagnostic de la pa- ralysie infantile, l'absence de muscles pouvant être prise pour une simple atrophie. — M. JoFFROY communique à la Société un fait que M. Charcot et lui ont observé deux fois cette année à la Salpêtrière : On sait que chez les individus morts d'hémorrhagie cérébrale, outre l'épanchement de sang dans l'encéphale, on trouve aussi en divers points de l'organisme des effusions sanguines sous forme de taches ecchymotiques plus ou moins étendues, plus ou moins foncées. C'est ainsi qu'en général, il y a dans ces cas des ecchymoses dans les mé- ninges au niveau des lobes cérébraux ou cérébelleux, dans l'épaisseur de l'aponévrose épicrânienne, dans les plèvres, dans les muqueuses stomacale et intestinale. Dans deux cas d'hémorrhagie cérébrale, MM. Charcot et Joffroy ont observé des taches ecchymotiques, analogues aux précédentes, sur l'endocarde du ventricule gauche. Dans le premier cas, ces taches existaient seulement au niveau des colonnes charnues. Elles étaient multiples, ovalaires, ne présentant guère comme étendue qu'un demi-centimètre carré. En faisant une incision à leur niveau, on voyait que ces taches dépassaient l'épais- seur de l'endocarde et pénétraient de quelques millimètres dans le muscle cardiaque. 207 Dans le second cas, outre ces ecchymoses de l'endocarde au niveau des colonnes charnues, il en existait deux autres très-foncées, petites, arrondies, de 3 à 4 millimètres de diamètre et siégeant dans la valvule mitrale qui avait conservé dans tout le reste de son étendue sa colo- ration blanc jaunâtre et sa demi-transparence. On ne peut pas évidemment songer à expliquer ces taches ecchymo- tiques par l'imbibition de l'endocarde, après la mort, au contact d'un caillot noir remplissant le ventricule. La petite étendue de ces taches, leur coloration spéciale, leur profondeur jusque dans l'épaisseur du muscle leur situation possible sur la valvule mitrale ne permettent pas de s'arrêtera cette explication. Il semble au contraire très-rationnel de rapprocher ces ecchymoses de l'endocarde de celles des méninges, de l'aponévrose épicrânienne de la muqueuse stomacale, etc., et de relier toutes ces sufFusions san- guines par une même explication. M. Charcot développe cette idée en montrant par divers exemples que sousPinfluence des lésions cérébrales, il se fait des actions neuro- paralytiques qui peuvent être le point de départ soit de simples con- gestions, soit d'inflammations. On peut expérimentalement, comme l'a montré SchifF, produire en lésant les couches optiques des altérations ecchymotiques de l'estomac et de l'intestin. Chez l'homme on peut observer les mêmes faits. M. Charcot a déjà eu l'occasion d'attirer sur ces faits l'atlention de la Société; il pense que les ecchymoses du cœur dont il vient d'être question font partie de la même série de phéno- mènes. D'ailleurs on sait aussi que les lésions cérébrales peuvent même donner lieu à des inflammations, que l'on voit souvent des pneumo- nies naître sous leur influence, comme lorsqu'on a coupé le pneumo- gastrique. M. GuBLER pense que ce dernier rapprochement n'est pas tout à fait exact. Ainsi les accidents dont vient de parler M. Charcot sont des hémorrhagies, des ruptures de vaisseaux, tandis que dans la section des nerfs pneumo-gastriques produit, non des hémorrhagies, mais des congestions et des inflammations. Aussi, au lieu d'invoquer une action neuro-paralytique pour expliquer les diverses ecchymoses ou suffu- sions sanguines des apoplectiques, il lui paraît plus logique d'admettre que la cause qui produit l'hémorrhagie cérébrale peut également dé- terminer des lésions hémorrhagiques dans d'autres organes. M. Charcot n'admet plus aujourd'hui l'idée ancienne du molimen hemorrhagicuni. Il croit avoir suffisamment établi que le point de dé- part de l'hémorrhagie cérébrale réside dans l'altération des vaisseaux du cerveau. M. GuBLER : Cette lésion des artères ne peut être considérée que 208 comme la prédisposition organique à l'hémorrhagie; il faut toujours admettre une cause occasionnelle, et celle-ci peut agir non-seulement sur un point, mais sur plusieurs à la fois. M. Oluvier fait remarquer que chez les leucémiques atteints d'hé- morrhagie cérébrale on a observé également des ecchymoses dans d'autres parties et qu'il serait intéressant de savoir si les malades de M. Charcot n'étaient pas atteints de leucémie. M. Charcot a vu des faits très-démonstratifs de l'influence neuro- paralytique mise par lui en avant. Il rappelle un cas dont il a déjà entretenu la Société et dans lequel il existait une vaste ecchy- mose sous le péricrâne placé du côté opposé à l'hémorrhagie cérébrale. M. Leven remarque que les expériences de Schiff prêtent leur appui à l'interprétation de M. Charcot, à tel point que ce physiologiste a été amené à conclure de ses recherches que les nerfs vaso-moteurs de l'estomac ont leur point de départ dans les couches optiques. M. An- dral avait aussi observé dans l'hémorrhagie cérébrale ces altérations ecchymotiques, et il les mentionne dans sa clinique médicale. M. Laborde croit que dans ces cas on trouve une explication satisfai- sante de ces lésions dans l'altération des vaisseaux. En effet, l'étude histologique y a démontré des altérations athéromateuses auxquelles on doit rapporter les suffusions sanguines. M. Charcot croit avoir établi avec M. Bouchard, dans leur travail sur Vhémorrhagie cérébrale, que c'est à tort que l'on a fait jouer à l'athérome un rôle important dans la production de l'hémorrhagie. M. Laborde ne partage pas celte opinion. L'affection athéromateuse des gros ou des petits vaisseaux est tellement fréquente, qu'elle ne saurait être, surtout chez les vieillards, considérée comme de peu d'im- portance. Aussi est-ce chez le vieillard que l'on trouve les lésions dé- crites par M. Charcot, et l'on n'est pas en droit de dire que l'athérome y est étranger. M. Charcot s'est appuyé pour établir son opinion sur les cas dans lesquels il n'existe pas du tout d'alhérome, et l'étude statistique à la- quelle il s'est livré avec M, Bouchard a même fait voir qu'il existe une sorte d'antagonisme entre l'athérome et l'hémorrhagie ou la lésion qui la produit. M. Laborde rappelle à l'appui de son opinion le rôle considérable que joue l'hémorrhagie capillaire dans le ramollissement sénile et pense que dans ce cas on ne peut nier 1 influence de l'athérome. M. Charcot fait remarquer que les considérations qu'il a émises pré- cédemment ne se rapportent qu'à la maladie hémorrhagie cérébrale. Quant à l'hémorrhagie capillaire, c'est là une lésion commune à di- 209 verses maladies cérébrales, et son histoire est tout à fait distincte de celle de l'hémorrhagie en foyer. CONTRIBOTION A l'ÉTCDE DD TOURNOIEMENT; par M. PaUL BeRT. Souffrant il y a quelques jours d'un otite extrême du côté gauche, je fis dans mon oreille une injection d'eau à la température de l'appar- tement. J'éprouvai une vive sensation de fraîcheur, puis imjnédiate- ment après l'injection, qui avait été très-modérément poussée, je fus pris d'un mouvement de rotation qui me fit tomber en tournant sur le flanc droit de gauche à droite ; par conséquent ma tête étant fixée, les objets qui m'entouraient paraissaient tourner rapidement de droite à gauche. La vue était du reste fort nette; personne n'étant auprès de moi, je ne sais rien de l'état de mes pupilles. Surviennent ensuite quelques nausées, puis une sueur assez abondante, et il ne me resta bientôt de l'accident qu'une lassitude extrême. Ce fait est, comme on le voit, fort analogue à d'autres faits qui oni été signalés ici même par M. Brown-Séquard. Quelques jours après, je pris un lapin et lui fit très-doucement, dans loreille gauche, une injection d'eau à 0°, environ 100 ce. Dès le début de l'injection, la respiration s'accélère, le cœur monte de 134 à 168, la pupille gauche se rétrécit un peu, puis se dilate énormément, l'œil paraissant en saillie. L'animal, remis à terre, tomba sur le flanc gauche, et commença à tourner ; mais il ne fit guère qu'un quart de tour, et se remit sur le flanc; excité à marcher, il ébauchait à nouveau un mouvement de tournoiement. Cela dura cinq ou six minutes ; puis tout rentra dans l'ordre. Ainsi le refroidissement des parties profondes de l'oreille produit, bien qu'à un moindre degré, les mêmes troubles que la section des canaux demi-circulaires, etc. C'est un exemple de plus des relations remarquables qui existent entre les mouvements et l'appareil de l'au- dition. J'insisterai, à propos de celte observation, sur un fait qui est très- probablement connu, mais que je n'ai vu indiqué nulle part dans les auteurs. La constriction ou la dilatation pupillaire, de même que ta fermeture de l'œil, quand on le menace ou le touche, sont chez les la- pins et, en général, chez les animaux à vision monoculaire, latérale, des phénomènes tout à fait indépendants, d'un œil à l'autre. On sait qu'il en est autrement chez l'homme, et qu'un faisceau de lumière qui tombe sur notre œil droit fait contracter nos deux pupilles. Cet efi'et se produit seulement chez les animaux à vision binoculaire, comme les singes et même les chiens. C. R. 1869. 14 210 M. LiooviLLE présente une tumeur cérébrale qui offre une structure analogue à celle du gliome et remettra une note à ce sujet. Il fait re- marquer que, dans ce cas, il existe dans l'intérieur des gaines péri- vasculaires de petits éléments nucléaires. D'après lui, quelques-uns de ces éléments auraient les caractères des leucocytes, et il pense que dans certains cas on pourrait admettre l'hypothèse du passage des globules blancs du sang dans les gaines sans rupture des parois vascu- laires, comme dans les expériences de M. Cohnheim. M, Hayem fait observer que dans les néoplasies cérébrales, il est de règle de trouver dans les gaines périvasculaires des éléments nom- breux, qui rappellent même quelquefois, comme dans les tubercules et les gliomes, les éléments propres de la tumeur. Dans certaines formes d'encéphalite, dans l'alcoolisme chronique ou dans la paralysie gé- nérale, on voit également dans les gaines des multiplications nucléaires abondantes. La présence de leucocytes dans les mêmes gaines, du moins en grand nombre, est un fait que M. Hayem a déjà signalé à deux re- prises différentes à la Société de biologie en 1866 et en 1867 dans cer- taines formes d'encéphalite et quelques cas de ramollissement céré- bral ; et depuis il a eu l'occasion de le constater, dans les lésions décrites à tort par Virchow sous le nom d'encéphalite congénitale. Après avoir répété et vérifié les expériences de Cohnheim , après avoir vu que la suppuration consiste dans tous les tissus qu'il a obser- vés jusqu'ici chez la grenouille en une extravasation des globules blancs du sang, M. Hayem s'est demandé si pareil phénomène ne pou- vait pas se produire dans le tissu nerveux, et il achève en ce moment quelques expériences qui démontrent que ce n'est pas là une simple hypothèse , mais un fait vrai. La séance est levée à cinq heures et demie. Séance du 26 juin. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. — M. Brown-Séqoard montre à la Société un lapin sur lequel il a en- levé, il y a quelque temps, le facial d'un côté. Il existait après cette opération des mouvements dans les muscles qui avoisinent la ligne médiane dans tout le côté paralysé. Celte persistance des mouvements sur la ligne médiane était connue depuis longtemps par les expériences faites par MM. Brown-Sêquard et Martin -Magron. M. Brown-Séquard pratiqua une section sur la ligne médiane, et, comme les membres de la Société ont déjà pu le voir, cette petite opération abolit immédiate- 211 ment les mouvements qui existaient encore du côté du facial arraché. Mais on peut constater aujourd'hui que peu de temps après cette sec- tion médiane les mouvements ont reparu. M. Brown-Séquard pense que quelques filets du facial passent du côté opposé et que la distri- bution du nerf ne s'arrête pas très-exactement à la ligne médiane. D'ailleurs il reviendra plus tard sur l'interpiétation applicable à ce phénomène. M. Ollivier pense que l'on peut invoquer en faveur de cette distri- bution des nerfs les particularités relatives à l'éruption connue sous le nom de zona. On sait, en effet, que celle-ci dépasse toujours de quel- ques millimètres la ligne médiane du corps. M. Havem a observé l'année dernière un cas d'hémiplégie hystérique dans lequel il existait une aneslhésie complète du côté gauche, et en recherchant avec grand soin la distribution des points insensibles, il a pu constater à plusieurs reprises sur la peau et les muqueuses que l'a- nesthésie suivait presque partout et très-régulièrement la ligne mé- diane du corps. Cette régularité était surtout irès-évidenle à la face. M. Charcot se propose d'étudier ces particularités sur une malade qu'il observe en ce moment à la Salpêtrière et qui est atteinte d'une ' hémiplégie hystérique, d'ailleurs incurable, ce qui est fort rare, et chez laquelle il existe une anesthésie très-nette limitée à un seul côté. M. Brown-Séquabd fait remarquer que la distribution de l'anesthésie chez les hystériques, bien que très-intéressante, ne pourrait fournir de données bien précises relativement à la distribution des nerfs cutanés, car il croit démontré que la perte de la sensibilité dans ces cas est liée à la circulation locale et non à un trouble des centres nerveux. M. Charcot a déjà attiré l'attention sur un fait dont M. Brown-Sé- quard a pu souvent se rendre compte par lui-même, à savoir que les surfaces anesthésiques sont presque complètement privées de circula- tion locale chez les hystériques. Dans ces circonstances, l'application de ventouses ou de sangsues sur la partie anesthésiée ne peut pas atti rer de sang, et lorsque la circulation se rétablit l'anesthésie cesse aus- sitôt. M. GuBLER montre depuis plusieurs années, aux élèves qui suivent son service, que chez les malades atteints d'anesthésie saturnine l'ap- plication d'un sinapisme suffit souvent à réveiller la sensibilité. Chez les hystériques il a plusieurs fois recherché la distribution de l'anes- thésie, et presque toujours il a vu qu'elle dépassait un peu la ligne médiane. — M. Brown-Séquard montre à la Société un cochon d'Inde chez le- quel il avait pu produire l'épilepsie en irritant mécaniquement le nerf 212 sciatique d'un côté. L'animal est aujourd'hui revenu complètement à rétat normal, et c'est pour la première fois que M. Brown-Séquard ob- tient par irritation d'un nerf sciatique une épilepsie, et pour la première fois aussi que celle-ci guérit ainsi spontanément. Cette expérience a une grande valeur. Elle montre, en effet, que ce n'est pas l'irritation que l'on produit au moment du traumatisme qui détermine l'épilepsie; c'est bien l'irritation qui lui succède, et lorsque cette irritation peut s'éteindre d'elle-même, l'épilepsie disparaît également. Aussi lors- que après avoir coupé un nerf sciatique, comme M. Brown-Séquard l'a déjà dit, on fait du côté correspondant une hémi-section de la moelle, l'épilepsie, au lieu d'apparaître rapidement comme après les sections du nerf sciatique, ne se montre que tardivement sous l'influence de l'irritation qui suit la dernière opération. D'autre part, dans les cas où l'on fait une section très-limitée de la moelle épinière, on observe tantôt des accès complets, tantôt des accès incomplets. Le cochon d'Inde que M. Brown-Séquard présente à la Société, après une lésion de ce genre, a présenté au bout de trois semaines des phénomènes convulsifs qui constituaient une attaque in- complète. Dans ces conditions, l'animal a guéri deux mois après l'opé- ration. Les accès incomplets qui succèdent à des lésions peu étendues de la moelle peuvent donc disparaître spontanément. — M. JoFFROY expose à la Société de biologie la relation d'un cas d'abcès biliaire du foie qu'il a eu l'occasion d'observer cette année à la Salpêtrière dans le service de M. Charcot. Depuis les travaux originaux de Monneret on ne peut citer comme ayant Irait à ce chapitre de la pathologie que l'enseignemeet clinique que fait M. Charcot à la Salpêtrière depuis plusieurs années, et la thèse toute récente de notre collègue le docteur Peutray. Mais si, grâce à ces travaux, le problème semble sur le point d'être résolu au point de vue de la clinique, il n'en est pas de même au point de vue de l'anatomie pathologique. M. Joffroy a étudié histologique- ment la structure de ces abcès biliaires chez sa malade, et il commu- nique le résultat de ses observations, essayant en même temps de ré- soudre la question de la genèse de ces abcès. OBLITÉRATION DU CANAL CHOLÉDOQUE PAR DEUX CALCULS BILIAIRES; PETITS ABCÈS BIUAIRES; RUPTURE DE l'uN d'eUX SITUÉ A LA SURFACE CONVEXE DU foie; épanchement de bile dans le péritoine; autopsie. La femme Périssel est entrée dans le service de M. Charcot le 25 fé- vrier 1869. 213 Cette malade a été envoyée à l'infirmerie, parce que depuis plusieurs jours elle a une diarrhée assez violente, à laquelle se trouve mêlée une certaine quantité de sang, comme nous pouvons le voir nous-même par l'examen des garde-robes. On constate le soir même de son entrée un léger mouvement fébrile. La température rectale est de 38° 3/5. Il existe un état saburral assez marqué et l'on fait prendre à la malade i gramme d'ipéca. On lui donne en outre des pilules de nitrate d'ar- gent. Sous l'influence de cette médication la diarrhée s'arrête rapide- ment et la malade semble recouvr-er la santé. Telle était la situation le 1" mars au matin. Mais à la visite du soir, nous apprenons que dans la journée la femme Périssel a été prise d'un frisson de médiocre intensité. Elle se plaint tout d'abord d'une douleur très-vive au niveau de l'hypocondre droit, douleur considérablement exaspérée par la moindre pression. Le faciès est altéré, la langue est sèche, la voix éteinte, la soif très-vive et la respiration fréquente. Le pouls bat 94 fois à la minute, sans présenter de caractères particuliers. La température rectale est de 39 1/5. Le 2 mars, l'état n'a pas changé, maison remarque une teinte icté- rique générale, très-légère, à peine accusée aux sclérotiques. La dou- leur à l'hypochondre droit est toujours très-vive, moins cependant qu'hier soir. Le pouls est devenu petit, filiforme. La température rec- tale est à 39°. Le soir, la malade est agonisante. Il y a un ronchus laryngo-tra- chéal très-bruyant. Le pouls est presque insensible. Elle succombe à onze heures du soir. L'autopsie est faite le 4 mars au matin. Les poumons sont très-congestionnés. La cavité pleurale renferme à droite et à gauche une certaine quantité de liquide. Le cœur ne présente rien de particulier. La face convexe du foie étant mise à découvert, on voit que la partie qui se trouve à droite du ligament suspenseur est le siège d'une péritonite circonscrite due, comme on va le voir, à la rupture d'un petit abcès biliaire. Le colon transverse énormément distendu par des gaz recouvre la partie inférieure de la face convexe du foie. Il a servi de limite à l'é- panchement biliaire et à la péritonite. Toute la partie de la face convexe du foie qui se trouve limitée à gauche par le ligament suspenseur, en bas par le colon transverse, est recouverte par des fausses membranes molles et faciles à ar- racher. Dans toute cette étendue il s'est épanché un liquide , co- loré par la bile, qui a respecté les limites que nous venons d'indi- 214 quer, et a donné à cette partie de la surface du foie une coloration verdâtre. Cependant cette teinte, due au liquide épanché, n'empêche pas d'apercevoir sur cette portion du foie une tache violacée, de coloration foncée, grande comme la paume de la main et assez net- tement limitée. Vers le centre de ce foyer de péritonite, on aperçoit sur la face con- vexe du foie une petite ulcération ayant à peine l'étendue d'une pièce de vingt centimes et remplie par un peu de muco-pus coloré par la bile. La petite cavité formée par cette ulcération est traversée de part en part par un petit canalicule qui se trouve disséqué par la fonte purulente du tissu hépatique qui l'entourait. Un examen attentif permet de re- connaître qu'il s'agit là d'un conduit oblitéré. Disons de suite que l'exa- men microscopique nous a ultérieurement démontré que ce conduit oblitéré était un vaisseau renfermant un caillot ancien et organisé. Tout à côté de cette petite ulcération, une coupe du foie démontre l'existence d'un petit abcès lenticulaire situé très-près de la surface, mais qui ne s'est par rompu comme le premier. Ces deux petits abcès sont assez nettement limités. Plus loin, lors- que nous parlerons de la dissection de l'artère hépatique, nous signa- lerons un foyer de ramollissement plus étendu et moins nettement limité, que nous regardons comme la première période de ces abcès biliaires. Le foie est enlevé et l'on procède à l'examen des conduits biliaires. Le canal cholédoque est dilaté; et près de son extrémité duodénale, il renferme deux calculs noirs, irréguliers, qui semblent formés de cho- lestérine. Le premier est du volume d'une grosse noisette; le second est un peu plus petit. La vésicule biliaire n'est pas dilatée, elle est remplie par de la bile et ne renferme pas de calculs. Sa muqueuse ne présente aucun carac- tère particulier et ne paraît pas enflammée. Les conduits biliaires, examinés au voisinage du hile , ne paraissent avoir subi aucune altération bien manifeste dans leur structure. Mais, dans ce point comme dans tout le reste de l'étendue de l'organe, ils sont manifestement dilatés. En faisant une coupe au niveau de la tache violacée dont nous avons remarqué la présence à la surface du foie, on voit que cette tache cor- respond à un infarctus considérable, présentant à la coupe une colora- tion rouge vineuse, foncée, qui de prime abord rappelle celle des tu- meurs érectiles du foie. On aperçoit aussi sur les contours de la tache la section transversale d'un rameau assez volumineux de l'artère hépa- tique, oblitéré par un caillot ancien. On dissèque alors le tronc de l'artère hépatique, et en suivant ses divisions, on trouve qu'au point où elle s'enfonce à droite dans le tissu 215 du foie, elle est oblitérée par un caillot ancien remplissant entièrement le calibre du vaisseau adhérant à sa paroi et déjà notablement décoloré. En poursuivant jusque dans l'épaisseur du foie cette artère oblitérée, on arrive jusque dans l'infarctus énorme que nous avons décrit. En outre, cette dissection de la branche droite oblitérée de l'artère hépatique nous a fait découvrir au milieu du lobe droit du foie un foyer sans limites précises, coloré par la bile en jaune brun, et formé à son centre par un tissu très-ramolli. En s'éloignant du centre, le ramollis- sement diminue, la coloration jaune brun est moins foncée et le paren- chyme hépatique reprend l'apparence qu'il a dans tout le reste de l'or- gane. C'est là, croyons-nous, un abcès biliaire en voie de formation. Nous avons complété l'examen du foie à l'œil nu, par la dissection de la veine porte et de ses premières divisions. Le tronc même de la veine porte était entièrement vide, ainsi que sa branche gauche de bifurcation et ses subdivisions. Mais en ouvrant la branche droite de bifurcation de la veine porte, on trouve qu'au moment où elle s'en- fonce dans le parenchyme hépatique, elle est en partie occupée par l'extrémité en bec de flûte d'un caillot ancien qui remplit une de ses principales divisions. Par la comparaison de ce caillot avec celui qui remplit la branche droite de Tarière hépatique, on est amené à penser, par les caractères extérieurs des caillots, que l'oblitération artérielle est plus ancienne que l'oblitération veineuse. La rate est volumineuse et notablement ramollie. Elle présente à l'une de ses extrémités, un infactus assez récent de la grosseur d'une petite pomiue. Tant dans l'épaisseur de l'infactus qu'à sa périphérie, les vaisseaux artériels et veineux sont oblitérés. Et en outre la coupe de l'infractus montre dans une partie de son étendue l'aspect connu pour le cerveau sous le nom d'hémorrhagie capillaire. V estomac et le tube intestinal étant enlevés, on remarque tout d'abord près du pylore, et dans toute l'étendue du duodénum, la présence d'une certaine quantité de bile non sanguinolente. On fait alors passer dans le tube intestinal un courant d'eau qui sort coloré en rouge foncé par du sang. Puis l'intestin est ouvert et étendu sur une table. On observe alors vers le milieu de l'intestin grêle une coloration rouge violacée se présentant sous la disposition de plaques. Ces sortes d'ecchymoses multiples, irrégulièrement ovalaires, affectent des situations et des directions qui ne permettent pas de supposer que les taches ecchymotiques que l'on a sous les yeux se soient pro- duites dans des plaques glandulaires. A mesure que l'on descend dans le tube intestinal , ces taches deviennent plus nombreuses , plus grandes, finissent par se confondre, et dans tout le tiers inférieur de l'intestin grêle la muqueuse fortement injectée apparaît avec une co- 2i6 loration générale rouge vineuse. Sa surface n'est qu'une vaste ec- chymose. La muqueuse du colon est légèrement injectée. Le mésentère^ surtout dans la partie correspondante à la moitié inférieure de Tintestin grêle, était vivement injectée. Les veines mésaraîques n'ont pas été examinées. Les autres organes ne présentent rien à noter. Examen microscopique. — L'étude microscopique du foie nous révèle des faits qui permettent de suivre jusque dans certaines limites le pro- cessus pathologique qui a abouti à la formation de ces abcès bi- liaires. a. Dans toutes les coupes que l'on examine, on est frappé par la coloration jaune ocreuse des cellules hépatiques. Elles sont en outre très-granuleuses, surtout au niveau des points les plus altérés à l'œil nu, de sorte qu'on ne distingue plus alors leur noyau. Dans le foyer de ramollissement mal limité que nous avons considéré comme un abcès en voie de formation, les cellules hépatiques très-allérées ou même déjà désorganisées se trouvaient mélangées sur la préparation avec quelques leucocytes. 6. Une autre altération que l'on retrouve aussi dans toute l'étendue du foie est celle qui frappe les parois des conduits biliaires de petit calibre. Partout elles apparaissent considérablement hypertrophiées. Les éléments qui entrent dans la structure des parois ainsi épaissies, sont pour la plupart des éléments fusiformes. Cependant la tunique externe présente en général un grand nombre d'éléments nucléaires. En outre, au voisinage des abcès biliaires, il n'est pas rare de trouver la paroi des canaux biliaires, considérablement hypertrophiée, presque exclusivement constituée par des éléments nucléaires. Les canaux bi- liaires semblent en môme temps distendus, mais leur lumière est rem- plie par une masse fortement colorée en brun noirâtre. Malgré cette teinte excessivement foncée, on parvient à distinguer au milieu d'une matière fibreuse , les cellules épithéliales cylindriques tapissant encore le conduit biliaire, ou bien détachées, quelques rares leuco- cytes, et des amas de pigment biliaire. Nulle part on ne trouve de petits calculs. c. Sur les coupes du foie, la plupart des vaisseaux de petit calibre montrent, comme les conduits biliaires, un épaisissement assez no- table de leurs parois. Dans un certain nombre de ces vaisseaux on trouve dans l'intérieur du canal un caillot organisé. A cause de la multiplication des éléments de la paroi, il est difficile de décider si les vaisseaux ainsi oblitérés sont de petites veines ou de petites artères. 217 d. Des coupes minces ont été faites au niveau des deux petits abcès superficiels qui ont été précédemment décrits. En outre, sur d'autres coupes faites çà et là dans le foie , on trouve , lors de l'examen microscopique , de petits abcès que l'on n'avait pas remarqués à l'œil nu. Les parois de ces abcès sont constituées par des éléments nu- cléaires, provenant de la prolifération du tissu conjonctif. En un mot, tout autour de l'abcès il s'est formé une hépatite interstitielle mal li- mitée. Dans certains points seulement, ces éléments nucléaires sont assez condensés pour former une sorte de membrane limitante. Peut-être aurait-on trouvé partout une membrane limitante, si la ma- lade n'avait pas été enlevée si rapidement. Dans l'intérieur de ces abcès, on trouve des granulations nombreuses, provenant évidemment de la désorganisation des éléments préexistants; on y trouve aussi un détritus d'éléments entièrement méconnais- sables, et des leucocytes. Le tout est plus ou moins coloré par la bile. Dans aucune préparation nous n'avons trouvé de cellules épithé- liales dans le contenu des petits abcès. e. Si maintenant nous étudions la position relative des diverses par- ties que nous venons d'examiner séparément, nous verrons que tou- jours le petit abcès biliaire est situé au milieu des cellules hépatiques, et en dehors des conduits de la bile. Tout autour de ce petit abcès existe une zone mal limitée d'hépatite interstitielle. Sur toutes les coupes d'un petit abcès libiaire, on trouve toujours en un point de sa périphérie, dans l'épaisseur de la zone d'hépatite interstitielle , la coupe transversale d'un conduit biliaire à parois hypertrophiées et dont la lumière est remplie par des produits d'in- flammation. Autour de ce conduit biliaire, on aperçoit la coupe trans- versale de plusieurs vaisseaux qui, dans notre cas, étaient en certain nombre oblitérés. En outre, il n'est pas rare de voir sur ces coupes une section longi- tudinale ou oblique d'un conduit biliaire qui semble se terminer dans le petit abcès. Mais, chose importante à noter au point de vue de la paihogénie de ces abcès, jamais les tuniques de ce conduit ne se continuent avec les bords de la cavité purulente. Guidés par la connaissance de tous ces détails d'anatomie patho- logique, essayons de saisir le mécanisme de la formation de ces petits abcès. Nous croyons qu'il importe beaucoup à la clarté du sujet de ne pas confondre sous une même dénomination les petits abcès biliaires que nous venons d'étudier, et les petits foyers purulents, colorés comme 218 les premiers en jaune brun, et qui siègent dans des dilatations am- puUaires des conduits de la bile. Il arrive fréquemment, en effet, que sous l'influence de la rétention de la bile par un obstacle à son cours, la distension générale des conduits biliaires intra hépatiques donne lieu à la production de ces dilatations ampuUaires. Dans tous ces cas de rétention de la bile, les canaux biliaires ne tardent pas à s'enflam- mer. Et il peut arriver que les produits de l'inflammation catarrhale de ces canaux remplissent ces dilatations ampuUaires qui se présentent alors sur une coupe du foie, avec l'apparence des véritables abcès biliaires. Mais si l'on examine au microscope une coupe faite au niveau d'un de ces foyers purulents intra-ampullaires, sa constitution anatomique sera bien différente de celle que nous décrivions tout à l'heure. En effet, ici le foyer sera limité par une paroi qui ne sera autre que la paroi dilatée du conduit biliaire. A sa face interne, on trouvera peut-être en- core de l'épithélium cylindrique. Mais en tous cas , on trouvera des cellules épithéliales en très-grand nombre dans le contenu du foyer. Nous pouvons présenter ici un tableau comparatif qui montrera bien toute la différence des deux foyers purulents : Abcès biliaire proprement dit, consécutif à la Foyer purulent intraampullaire , siégeant rupture d'un conduit biliaire. dans une dilatation ampullaire d'un canali- cule biliaire. a. A l'origine, pas de membrane limi- a. Membrane limitante formée par la paroi tante. dilatée d'un conduit biliaire. b. Quand il existe une membrane limi- b. En général la membrane limitante est tante, jamais elle n'est tapissée d'épithélium tapissée au moins en certains points par la cylindrique. couche d'épithélium cylindrique qui recouvre à l'état normal les canalicules biliaires. e. Le contenu de l'abcès ne renferme ja- c. Le contenu de l'abcès renferme tou- rnais de cellules épithéliales cylindriques. jours des cellules épithéliales cylindriques. d. Parfois au milieu de l'abcès biliaire on d. Jamais l'abcès ne renferme aucune trace reconnaîtra des cellules hépatiques en voie de de cellules hépatiques, désorganisation. En résumé l'abcès biliaire est un véritable abcès, consécutif à l'é- panchement de la bile dans l'intimité du tissu hépatique. Cet épan- chement est déterminé par la rupture d'un ou de plusieurs canalicules biliaires. La rupture des canalicules se fait sous l'influence de leur distension excessive, et elle est favorisée par la plus grande friabilité des canalicules, qui est une conséquence de leur inflammation. Quant aux foyers purulents intraampuUaires, nous ne croyons pas qu'on puisse leur conserver le nom d'abcès, sans détourner ce mot de sa véritable signification. Ce mécanisme que nous venons d'exposer, se retrouverait dans la formation de certains abcès glandulaires, du sein, par exemple. Telle 219 est du moins l'opinion de notre savant maître, M. le docteur Giraldès. On voit que nous nous séparons complètement de l'hypothèse d'après laquelle les abcès biliaires proprement dits auraient pourpoint de départ une dilatation ampuUaire, les parois de cette dilatation s'enflammantet l'inflammation se propageant au tissu hépatique voisin, qui s'abcèderait. Qu'un abcès en particulier ne puisse se produire de cette manière, nous ne voulons nullement le nier; mais alors ce sera un fait accidentel qui ne ruine nullement la théorie que nous propo- sons. En terminant, nous pourrions nous demander quelles sont les rela- tions qu'il y a entre les accidents de rétention de la bile que nous ve- nons d'étudier et la formation de caillots pendant la vie, dans l'artère hépatique, dans la veine porte et dans les vaisseaux de la rate. La compression des petits vaisseaux du foie par les conduits biliaires di- latés peut sans doute être invoquée, mais ce n'est qu'une hypothèse. Ce fait de la coagulation du sang dans les vaisseaux du foie est bien rare, comparativement à celui de la rétention de la bile. M. LiouviLLE fait observer que dans le fait relaté par M. Joffroy il existe deux lésions distinctes, des abcès dus probablement à la réten- tion de la bile dans les conduits biliaires et des infarctus. M. LE PROFESSEUR O'Leary, qui assiste à la séance, pense que les abcès dont il est question peuvent être dus à une rupture des voies biliaires. Il a eu l'occasion d'observer sur lui-même un abcès de ce genre, d'ori- gine traumatique. M. Gharcot pense également que ces petits abcès, qui depuis si long- temps préoccupent les anatomo-pathologistes, sont presque toujours le résultat de rupture des voies biliaires, par suite des obstructions si fréquentes, surtout chez les vieillards, des conduits de la bile. La séance est levée à cinq heures et demie. COMPTE RENDU DES SÉANCES DE ^ F LA SOCIETE DE BIOLOGIE pendant le mois de juillet 1869 , Par m. MAGNAN, secrétaire. PRÉSIDENCE DE M. CL. BERNARD. Séance du 3 juillet, Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. — M. Trasbot remet sous les yeux des membres de la Société un chat dont il a déjà été fait mention et qui offre, à la suite d'un traumatisme du nerf sciatique, des attaques épileptiques. Celles-ci sont provoquées, comme chez les cochons d'Inde opérés par M. Brown-Séquard, à l'aide de l'excitation d'une zone épileptogène tout à fait semblable à celle qui existe chez ces derniers animaux. On observe pendant l'attaque ou même pendant le grattement destiné à la produire une contraction de la pupille. M. Brown-Séqdard fait remarquer la longueur un peu anormale de l'attaque et pense que cette particularité est due à la difficulté de pro- voquer celle-ci, l'animal ayant eu déjà plusieurs accès il y a peu de temps. 222 M. Trasbot a en effet observé que plus il est difficile de provoquer les convulsions, plus celles-ci sont violentes et prolongées. — M. Leven rend compte de nouvelles expériences sur l'asphyxie. Si l'on applique une ligature sur la trachée d'un animal sans gêner sensiblement l'échange des gaz, lemécanieme respiratoire est immédia- tement modifié et le nombre des respirations ainsi que celui des pul- sations cardiaques diminue. Si on lie complètement et tout d'un coup la trachée, la respiration est arrêtée; la mort est instantanée et accompagnée de quelques mou- vements convulsifs. Ces phénomènes paraissent s'expliquer, d'après M. Leven, par l'exci- tation centripète du pneumo-gastrique. L'observateur en conclut qu'il y a deux espèces d'asphyxie : 1° celle qui a son point de départ dans une irritation du bulbe (pendaison, stran- gulation) ; son mécanisme se confond avec celui de la syncope; elle ne s'accompagne habituellement ni d'altération chimique du sang, ni de lésion appréciable de tissu; on peut l'appeler asphyxie simple; 2" l'as- phyxie complexe, produite par l'acide carbonique, sur laquelle M. Le- ven a appelé dernièrement l'attenfion et qui détermine des phénomènes qui viennent souvent s'ajouter à ceux de l'asphyxie simple. — M . Laborde présente un cochon d'Inde sur lequel il a coupé la grande branche du nerf sciatique droit. Deux mois après il existait une modi- fication de la peau des pattes, des points gangreneux à la suite desquels il s'est produit une sorte d'amputation presque complète des deux or- teils externes. M. Laborde croit avoir pu s'assurer que cette lésion ne provient pas de démangeaisons pendant lesquelles l'animal se mordrait les orteils, il admet plus volontiers un trouble de la nutrition sous l'influence de la lésion du nerf. Chez cet animal on peut produire des attaques convulsives, mais la zone épileptique n'occupe qu'un point très-limité difficile quelquefois à rencontrer, et les attaques sont in- complètes. M. Brown-Séquard pense que la difficulté de produire des attaques peut tenir à ce que les excitations faites sur la zone épileptogène n'ont pas été répétées assez souvent. On peut voir, en effet, survenir des attaques spontanées qui rendent difficile ou impossible la production des attaques provoquées. M. Brown-Séquard a observé deux cas de ce genre; mais jusqu'ici les sections du nerf sciatique ont toujours, sans exception, été suivies d'attaques . M. Brown-Séquard montre à la Société un second cochon d'Inde guéri de l'affection épileptiforme qui suit la section du nerf sciatique. Pen- dant que la guérison s'opérait chez ces deux animaux, on observait un 223 changement graduel dans la motilité et la sensibilité du côté du nerf coupé. Il existe donc, en même temps qu'une amélioration de la nutri- tion à la base de l'encéphale et dans la zone épileptogène, une amélio- ration dans l'état local du membre paralysé. C'est un fait de même ordre que ceux qui ont été relatés dernièrement par le même observa- teur. D'autre part, lorsqu'on produit une lésion de la zone épilepto- gène, il se fait aussi une amélioration dans la patte paralysée, qui re- couvre habituellement un peu de sensibilité. Il y a donc des relations bien évidentes entre la nutrition du nerf sciatique et la zone épilepto- gène. On observe chez l'homme des faits semblables. Il existe, en effet, une influence démontrée entre certaines parties de la peau animée par le nerf trijumeau et la névralgie sciatique. D'autre part, un fait observé par M. Dieulafoy prouve que chez un homme atteint de névralgie scia- tique l'excitation de la peau de la face peut donner lieu à une crise épileptiforme. On voit ainsi combien il serait intéressant de faire sur les malades des recherches pour établir les relations qui peuvent exister entre les nerfs du cou et les différents nerfs du corps, particulièrement le nerf scia- tique. — M. CoYNE présente les pièces analomiques relatives à un cas de sclé- rose des cordons latéraux étendue à toute la longueur de la moelle et remettra une observation détaillée. M. Charcot fait observer que la sclérose des cordons latéraux consti- tue actuellement une espèce pathologique bien distincte. Depuis le premier cas publié par lui, les faits se sont multipliés, les symptômes ont été étudiés avec soin et le diagnostic est devenu en quelque sorte facile. On trouve, en effet, le plus souvent une contracture des quatre membres et en même temps une grande fréquence de l'atrophie des membres supérieurs. La maladie est bien distincte et, dès le début, de l'ataxie locomotrice ou sclérose des cordons postérieurs; mais il existe aussi un ensemble de signes suffisants pour la distinguer de la sclérose en plaques cérébro-spinale. EtDDE SDR LA STRUCTURE DES POLYPES FIBREUX NASO-PHARYNGIENS ; par M. MuRON. L'étude anatomo-pathologique des polypes fibreux naso-pharyngiens ne laisse rien à désirer, en tant que description faite à l'œil nu. La nature réelle de ces tumeurs avait été parfaitement reconnue; leur point de départ dans le périoste lui-même est un fait absolument dé- montré et admis par tous les chirurgiens; l'aspect que présente la sur- face de leur coupe en a fait distinguer deux variétés par M. Cruveilhier : 224 i" des tumeurs fibreuses à fibres parallèles; 2° des tumeurs fibreuses à fibres tournoyantes, concentriques. Il est un caractère toutefois qui jusqu'à ce jour n'a nullement été interprété. Il s'agit des hémorrhagies nombreuses, réitérées, abondantes, que fournissent ces polypes. En considérant ces tumeurs une fois leur ablation opérée, en voyant cet aspect chatoyant, celte consistance si ferme, cette impossibilité de faire sortir du sang de leur épaisseur, on ne pouvait guère songer à la présence de vaisseaux. Et cependant on se trouvait en face d'un fait indéniable, l'hémorrhagie qui était sous leur dépendance. Un polype fibreux naso-pharyngien, qui nous a été remis par M. Verneuil, nous a permis d'étudier plus complètement leur structure. Disons d'abord que ce polype a été pris sur un enfant de 15 ans, que son insertion avait lieu sur l'apophyse basilaire, et qu'à l'œil nu il était en tout semblable à la description donnée par les auteurs. Par la dissociation seule, non-seulement il était impossible de con- naître la structure de ce polype ; mais on n'y constatait aucun vaisseau. Des faisceaux de tissu connectif et quelques noyaux, c'était là tout le bagage histologique, c'était ne rien dire de plus que ce que l'œil nu avait déjà fait prévoir. Faire des coupes sur du tissu fibreux à l'état frais n'est pas prati- cable, de sorte que nous avons fait durcir des portions de ce polype pour fixer dans leurs rapports tous leurs éléments constituants. Le liquide durcissant dont nous nous sommes servi est une solution con- centrée d'acide picrique. Les préparations histologiques et les dessins que nous avons l'hon- neur de présenter nous montrent les détails suivants. A un faible grossissement (20 diamètres), lorsqu'on ne considère que l'ensemble de la préparation, on est frappé par une multitude d'espaces parfaitement réguliers, les uns arrondis, représentant la coupe de vaisseaux, les autres allongés, se ramifiant de dislance en distance, et représentant les vaisseaux dans le sens de leur longueur. Ce sont de véritables lacunes creusées au milieu d'un tissu, mais des lacunes régulières, ayant une paroi, ce qui ne permet pas de supposer un instant qu'elles peuvent être le fait de hachures produites par le rasoir. Ces lacunes sont en nombre infiniment considérable, et il faut les voir par soi-même pour se représenter leur quantité. Si maintenant nous nous servons d'un grossissement plus fort, nous pourrons constater et la nature du tissu au milieu duquel se trouvent creusés ces vaisseaux, et la structure de ces vaisseaux. Tout le tissu qui forme le stroma de la tumeur est un tissu fibreux très-riche en éléments cellulaires. On y voit nombre de petits espaces à prolongements anastomotiques , renfermant dans leur intérieur une 225 ou deux cellules. Ces espaces sont très-rapprochés les uns des autres et semblent former un réseau anastomotique des plus riches. Dans leur intervalle se trouvent les faisceaux de tissu connectif. Ce sont ces espaces qui, désignés autrefois sous le nom d'espaces plasmatiques, viennent d'êire considérés depuis peu par M. Ranvier comme de simples espaces lacuneux. Ce tissu conjonctif entoure complètement les vaisseaux, et leur forme une sorte de paroi de soutien, car ils ont une structure embryonnaire pour la plupart. Les plus petits vaisseaux ne présentent en effet qu'une simple rangée d'éléments cellulaires légèrement fusiformes, éléments se touchant tous et constituant une véritable paroi, d'une fragilité extrême toutefois. D'autres vaisseaux offrent deux rangées d'éléments cellulaires ; d'autres en ont trois ou quatre. Telle est la structure de l'immense majorité des vaisseaux. Il en existe cependant quelques-uns, mais très-rares, qui ont une structure tout à fait organisée, qui offrent les trois tuniques ordinaires des vais- seaux. En résumé, nombre immense de vaisseaux, structure embryonnaire des parois de ces vaisseaux, telles sont les particularités qui distinguent ces fibromes, et qui expliquent d'une part l'abondance des hémorrha- gies, d'autre part leur facilité à apparaître. — M. JoFFROY communiquée la Société de biologie l'observation d'une femme morte à la SalpêLriere dans le service de M. Charcot. Ce cas est remarquable par l'abaissement considérable de la tem- pérature centrale et l'espace de temps assez long pendant lequel on a observé cet abaissement de température. HABITUDES ALCOOLIQUES ANCIENNES", CANCER DU FOIE; AUGMENTATION DU VOLUME DU foie; diarrhée; vomissements; ascite légère; amaigrissement consi- dérable; ABAISSEMENT DE LA TEMPÉRATURE CENTRALE PENDANT NEUF JOURS DESCENDANT jusqu'à 34°CENTIGR. ; AUTOPSIE. Adèle Bocquentin, âgée de 69 ans, est entrée à la Salpêtrière de- puis 1848. Elle y est entrée par protection sans avoir aucun motif réel d'admission dans cet hospice. Elle présente une déformation ra- chitique assez marquée des côtes et du sternum; néanmoins sa santé était bonne et lui permettait de travailler. Elle remplissait chez un médecin de la Salpêtrière les fonctions de femme de ménage. De tout temps, paraît-il, celte femme s'est adonnée à la boisson. Chaque jour elle allait plusieurs fois au marché de l'hospice pour boire du vin blanc de l'eau-de-vie et aussi de l'absinthe. Le soir elle se trouvait dans un état d'ivresse tel qu'elle déraisonnait C. R. 1869. 15 226 complètement. Elle avait alors l'habitude d'aller se coucher, et le lea- demain elle se trouvait en état de recommencer son travail. Dans le courant du mois de mai 1869, on remarqua qu'elle avait une diarrhée persistante et des vomissements fréquents. Cette femme s'amaigrit alors rapidement, arriva à un degré de fai- blesse extrême, et fut forcée de s'aliter. On l'amène à l'infirmerie des incurables dans le courant du mois de juin. Sa maigreur est squelettique, elle a les malléoles légèrement œdé- maliées, et le ventre gonflé par un épanchement abdominal peu abon- dant. Sa diarrhée a cessé depuis quelques jours, et se trouve rem- placée par de la constipation. Les vomissements persistent, ils sont composés de matières bilieuses et alimentaires. L'examen de l'abdomen démontre, outre l'existence de l'épanche- ment abdominal, un volume assez considérable du foie qui dépasse le rebord des fausses côtes de trois travers de doigt. On le sent très- facilement malgré le léger gonflement du ventre. Seulement ses bords paraissent nets et tranchants, et sa surface lisse. On verra à Vautopsie ce qu'il en était réellement. La région épigastrique et l'hypocondre droit sont douloureux à la pression. A l'auscultation des poumons , on entend quelques râles de bron- chite. Cette femme depuis longtemps ne mange pas de viande. Aujour- d'hui, malgré l'état de faiblesse extrême dans lequel elle se trouve, elle n'a pas de répugnance bien marquée pour les aliments. Elle mange des asperges, des fruits, de la pâtisserie, et boit son vin. Le 20 juin au matin , la malade s'affaiblit si rapidement que la mort semble très-prochaine. Le pouls est à 100, il est misérable. On prend sa température rectale, 36" 5/10. La surface de son corps est à une basse température, les extrémités sont froides. Le soir pas de changement, température rectale : 36" 5/10. Les jours suivants la malade se maintient dans cet état, continuant à boire chaque jour 18 centilitres de vin ordinaire et 12 centilitres de vin de Bagnols, mangeant des fruits et des gâteaux. Il n'y a pas de diarrhée et à peine quelques vomissements. Le 23 matin, température rectale : 34" 2/5. Soir, température rectale : 35° 3/5. Le 24 matin , température rectale : 35° 3/5. Le pouls est faible, pulsation 89. La peau des extrémités n'est pas particulièrement froide, mais il y a une coloration plombée des téguments et la maigreur est excessive. La langue est sèche. Il n'y a ni diarrhée ni vomissement. 227 On remarque un commencent d'escharre au sacrum. La malade conserve toute son intelligence. Le soir, température rectale : 3G° 2/5. Le 25 matin, température rectale : 34° 4/5; pulsations, 92. Soir, tempéraure rectale : 36° 3/5; pulsations, 100. Le 26 matin, température rectale : 34°. Soir, température rectale : 36° 7/10. Le décubitus est dorsal. La res- piration suspirieuse. La bouche est entre-ouverte. La langue complète- ment sèche. La malade est plongée dans le coma. Le 27 matin, température rectale : 36°; pulsations, 100. Soir, température rectale : 36° 3/10; pulsations, 96. La malade est toujours plongée dans le coma. Le 28 matin, température rectale : 34,4. La malade a repris entiè- rement connaissance ; elle parle; a demandé selon son habitude son café noir, et en a pris quelques cuillerées. L'escharre du sacrum a augmenté; il y a une large ulcération à bords violacés. Sur les genoux il y a une éruption de purpura. Soir, température rectale : 35° 7/10. La malade parle et semble avoir encore sa connaissance. La mort survient quelques instants après. Autopsie.— On ouvre l'abdomen, et il s'écoule de la cavité péritonéale une certaine quantité d'un liquide séreux. On constate alors que le foie dépasse de 6 centimètres environ le rebord des fausses côies, comme on l'avait constaté par la palpalion. Mais tandis qu'il avait semblé par ce mode d'exploration que la surface du foie était lisse et ses bords tranchants, on trouve des masses cancéreuses qui viennent f;iire saillie au niveau des bords et rendent très-sinueux le contour du foie, et sur la face convexe des tumeurs cancéreuses, dont les unes faisant saillie et les autres étant ombiliquées, rendent celle surface très-irrégulière. A la coupe on trouve que le foie, notablement augmenté de volume, est presque exclusivement constitué par des masses cancéreuses, irré- gulièrement arrondies, assez nettement limitées, de coloralion blanche, d'aspect Bbreux, et ne donnant pas de suc par la pression. Leur volume est très-variable; quelques-unes sont très-petites, d'autres ont le vo- lume du poing. L'une de ces tumeurs comprime le canal cystique, qui est oblitéré. La vésicule, dont les parois sont saines, est remplie d'une certaine quantité d'une bile très-épaisse, très-noire, sableuse. Les conduits biliaires intrahépaliques, le canal hépatique et le canal cho- lédoque sont libres et sains. 11 n'y a pas de compression du tronc de la veine porte. L'eslomac est très-pelit , sa muqueuse est ratatinée et couverte d'un piqueté ecchymotique général. Les taches ecchymotiques, petites, ar- rondies, sont assez clair-semées. 228 Les autres organes abdominaux ne présentent rien à signaler, sauf la muqueuse vésicale qui présente dans une grande partie de son étendue des taches ecchymotiques analogues à du purpura. Les poumons sont œdématiés et congestionnés. Le cœur est petit (170 grammes), sans lésions valvulaires; le muscle est flasque et jaunâtre. La graisse présente partout l'aspect gélatineux que l'on retrouve chez les phthisiques. A la face interne de la dure-mère il s'est épanché une couche mince de sang qui s'est coagulé sous forme de fausses membranes, mais pré- sente encore tous les caractères microscopiques d'un caillot récent. L'encéphale ne présente aucune lésion. L'algidité centrale est un phénomène qui ne se rencontre que très ■ rarement d'une manière permanente dans le cours d'une maladie; et parmi les cas rares dans lesquels on peut l'observer, on doit citer en première ligne les affections cancéreuses abdominales. Il est bon, à ce propos, de remarquer que l'abaissement de la tem- pérature observée chez ces malades doit être attribué, non à l'affection cancéreuse, mais au siège qu'elle occupe. C'est là un fait que peuvent nous permettre d'affirmer les observations thermométriques nombreu- ses que mon maître, M. Charcot et moi avons faites cette année dans le service des cancéreuses, à la Salpêtrière. Là nous avons pu prendre matin et soir, pendant huit ou dix jours de suite, la température rectale d'une trentaine de femmes atteintes, les unes de cancer du sein, d'au- tres de cancer de l'utérus, d'autres de cancroïdes très-étendus de la face, toutes malades affaiblies par une affection de longue durée et dont plusieurs sont mortes pendant les jours où nous faisions ces recherches. Chez aucune de ces malades, nous n'avons jamais observé le moindre abaissement de la température. Chez plusieurs nous avons observé une augmentation de 1 ou 2 de- grés. Chez la plupart nous avons remarqué que le soir il y avait une aug- mentation de 1/2 ou de 1 degré centigrade. En résumé, chez des malades atteintes depuis longtemps et à un de- gré fort avancé de cancer de l'utérus, de cancer du sein et de cancroïde de la face, nous avons toujours trouvé une. température centrale, soit normale, soit augmentée. Jamais nous n'avons trouvé d'abaissement, et cependant plusieurs malades ne pouvaient plus prendre de nourriture depuis plusieurs jours, vomissant rapidement tous les aliments qu'elles ingéraient. Mais par quel mécanisme le cancer du foie ou de l'estomac produit- il cet abaissement de la température centrale? Ce phénomène nous 229 semble dû principalement aux conditions d'inanition et de marasme que présentent spécialement les individus atteints de cancer du foie ou de l'estomac. Là, en effet, plus que dans aucune autre affection le malade se trouve dans des conditions déplorables pour continuer à se nourrir. D'une part, le dégoût pour la nourriture et surtout pour les aliments substantiels est des plus prononcé ; d'autre part l'affection cancéreuse qui frappe le tube digestif ou ses annexes vient encore entraver la digestion du peu d'aliments que prend le malade. Cette explication se trouve en partie justifiée par ce fait qu'un abais- sement de température a pu être observé, pendant une période de temps parfois assez longue, dans des affections autres que le cancer qui déter- minent, elles aussi, l'inanition et le marasme : par exemple, l'anémie profonde, le diabète et la phthisie dans certains cas. La même explica- tion peut également s'appliquer aux cas si extraordinaires d'abaisse- ment de la température, considérable et de longue durée, observés dans la folie chronique. Lœwenhardt de Lachfenberg a observé pendant plusieurs semaines les chiffres presque invraisemblables de 31°, 32°, 32°, 5. Quoi qu'il en soit des explications plus ou moins hypothétiques par lesquelles on cherche à expliquer ce phénomène, il nous a semblé in- téressant de rapporter notre observation. Si en effet les recherches nombreuses sur l'élévation de la température centrale ont pu conduire à des notions précieuses, il semble que l'on ait négligé l'étude du phé- nomène inverse. M. Charcot a fait sur ce point spécial une leçon que nous avons recueillie et publiée dans la Gazette hebdomadaire, 1869. M. Charcot attire l'attention sur l'intérêt que présente le fait rapporté par M. Joffroy. Il est très-rare, en effet, d'observer chez l'homme une température rectale aussi basse. Aussi, d'après ses propres recherches, il lui semble difficile de comprendre comment certains auteurs ont pu noter chez des aliénés une température très-basse pendant plusieurs jours. M. Magnan a fait lui-même des recherches sur la température chez les aliénés, et il n'a pas eu à noter d'abaissement considérable prolongé pendant quelque temps; toutefois il ne regarde pas ce fait comme im- possible, et de nouvelles études doivent être faites à ce sujet, d'autant mieux que dans certains cas on peut constater des températures tout à fait inattendues. Ainsi dans le service de la clinique à la Pitié, une femme ivre, qui était restée pendant^plusieurs heures exposée à un froid très- vif, a présenté au rectum et à l'aisselle une température de 26°, qui s'est élevée progressivement, de huit heures du matin à quatre heures 230 du soir, jusqu'à 37*, température normale. La malade, du reste, est sor- tie guérie de Ihôpilal. — M. JoFFKOY a eu l'occasion d'observer dernièrement un cas de gangrène de la jambe gauche. Il lui semble que ce fait doit être rap- porté à une embolie et non à une thrombose. Celte explication lui pa- raît ne pas devoir soulever d'objection en présence de l'histoire de la malade et de la relation de son aulopsie. Et comme les observations de gangrène des extrémités, due d'une manière certaine à une embolie, ne sont pas nombreuses, il communique ce fait à la Société de biologie, et présente les principales pièces recueillies à l'autopsie. RHUMATISME ARTICULAIRE AIGU ; AFFECTION CARDIAQUE; EMBOLIE CÉRÉBRALE; HÉMÉPLEGIE GAUCHE ; EMBOLIE DANS LES ARTÈRES DES MEMBRES INFÉRIEURS ; GANGRÈNE DE LA JAMBE GAUCHE ; AUTOPSIE; COAGULATIONS SANGUINES ANCIENNES DANS LAURICULE GaUCDE, RtTABLISSEMENT DE LA CIRCULATION CÉRÉBRALE PAR ORGANISATION ET RÉTRACTION DU CAILLOT EMBOLIQUE. Thuret (Marie), âgée de 49 ans, est entrée à la Salpêtrière, section des incurables, service de M. Charcol, le 28 janvier 1869. Il y a dix ans, elle a été atteinte d'un rhumatisme articulaire aigu avec endocardite. Elle a passé pour celte affection un temps assez long dans le service de M. Bouillaud. C'est la seule attaque de rhumatisme qu'elle signale. Le 10 janvier de cette année (1869) elle a eu une attaque d'apoplexie subite, avec perte de connaissance, ayant duré une ou deux heures. Il s'en est suivi une hémiplégie gauche complète; pas de troubles du côté de la parole ni de la mémoire. Le 15 juillet, on la fait entrer à l'infirmerie des incurables. Depuis trois jours elle est souffrante, garde le lit, se plaint de douleurs dans le côté paralysé, principalement dans la jambe. Depuis deux jours on a aussi remarqué le refroidissement du pied et de la jambe et l'apparition d'une coloration violacée. On ne peut pas avoir sur le début de rensei- gnements plus précis. A l'examen de la malade, voici ce que nous constatons : elle a une hémiplégie gauche avec contracture. Le pied et la jambe gauche sont entièrement refroidis, et présentent une coloration violacée caractéristique. L'insensibilité est complète dans les parties violacées; au-dessus, notamment au genou, le moindre mouvement, la moindre pression est excessivement douloureuse. La cuisse est refroidie, mais pas complètement. Aussi bien à droite qu'à gauche, les battements des artères crurales sont à peine perçus; on sent à la place de l'artère un cordon dur qui est déplacé à chaque pul- sation. Malgré l'absence ou la faiblesse des battements dans ces deux artères 23 1 crurales, la motilité est bien conservée cependant au membre inférieur droit, et il n'y a pas le moindre signe de gangrène. A la main gauche on trouve, dans la paume de la main et sur la face palmaire des doigts, des taches violacées. En même temps la main est très-douloureuse, refroidie, cyanosée, et l'on ne sent plus les batte- ments de la radiale. Les bruits du cœur sont très-faibles et sourds ; on ne distingue aucun bruit anormal. La malade a conservé son intelli- gence, seulement elle a un peu de surexcitation et de tendance au ver- biage. Dans la journée, elle est prise d'un délire d'abord peu marqué. Vers cinq heures du soir, ce délire devient très-bruyant, et un quart d'heure après, elle tombait très-rapidement dans un coma complet avec respi- ration pressée, suspirieuse; résolution générale, battements du cœur excessivement précipités et irréguliers. A six heures, la mort survenait. L'autopsie fut faite vingt-quatre heures après. Cavité thoracique. — Les poumons sont emphysémateux et conges- tionnés. Le cœur est petit, le muscle est jaune et flasque. Il n'y a aucune lésion de l'orifice ni des valvules aortiques; mais il y a un rétrécissement con- sidérable de l'orifice auriculo-ventriculaire gauche, n'admettant que la pulpe du doigt indicateur. L'oreillette gauche est très-dilatée. Sa contenance se trouve doublée, et ses parois sont évidemment hyper- trophiées; car, malgré cette distension énorme, leur épaisseur est en- core augmentée. Cette hypertrophie n'existe que sur l'oreillette gauche ; le cœur, considéré dans son ensemble, est plutôt petit. Il n'y a pas de lésions notables du cœur droit. L'auricule de l'oreillette gauche est distendue par un caillot assez volumineux adhérent et déjà très-décoloré. Du côté de l'oreillette, ce caillot se term.ine par une surface irrégulière et non par une surface arrondie et lisse. L'examen microscopique montre que ce caillot est e voie d'organisation. Vaisseaux. — L'aorte thoracique et abdominale est saine et nulle- ment athéromateuse. A la bifurcation de l'aorte, on trouve l'iliaque primitive droite, obli- térée à sa naissance par un caillot qui se continue dans les iliaques interne et externe et dans l'artère fémorale jusqu'au tiers supérieur environ du triangle de Scarpa. Le caillot sanguin n'est pas homogène dans toute sa longueur. A la partie supérieure de l'iliaque primitive droite, cette artère est oblitérée par un caillot ancien, décoloré, et que l'examen microscopique a démontré être en voie d'organisation. Ce caillot a fourni des prépa- rations semblables à celles faites avec le caillot du cœur. Il mesure ni environ 2 centimètres de longueur. Il est continué par un caillot dur, résistant, mais très-coloré en rouge brun, et qui est de date récente, n'étant pas encore organisé. Puis il est continué dans l'artère iliaque externe par un second caillot ancien analogue à celui de l'iliaque pri- mitive presque de même longueur, puis enfin le tronc artériel est rempli par un caillot relativement récent, coloré en rouge brun, et qui se ter- mine un peu au-dessus de l'origine de l'artère fémorale profonde. Au- dessous, les artères du membre inférieur droit sont saines et vides. A gauche l'iliaque primitive n'est pas oblitérée, non plus que l'iliaque nterne, mais on trouve dans l'iliaque externe un caillot qui se con- tinue dans la fémorale profonde, dans la poplitée, le tronc poplité et les branches qui en partent. Ce caillot, beaucoup plus long, comme on le voit, que celui du côté opposé, se compose également de parties qui sont anciennes, organisées et de parties qui sont beaucoup plus récentes, ne présentant pas encore les signes d'une organisation un peu avancée. Toute la portion du caillot, au-dessus de l'origine de la fémorale profonde, c'est-à-dire dans une longueur de près de 10 centimètres, est récente. A l'origine de la fémorale profonde on trouve un caillot an- cien qui oblitère à la fois la fémorale et la fémorale profonde. Ce caillot, peu étendu, de 2 centimètres de longueur à peine, est continué dans le reste de la fémorale, dans la poplitée, le tronc tibio péronier et ses branches, par un caillot récent, sauf cependant dans la partie inférieure de la libiale antérieure où l'on retrouve encore un caillot an- cien dans une longueur de 2 à 3 centimètres. Les artères du pied n'ont pas été examinées. Les parois des artères ne présentaient aucune altération notable. L'artère radiale gauche a été mise à nu et ouverte au niveau de la partie inférieure de l'avant-bras; elle était oblitérée. Cavité abdominale. — Le foie ne présente rien à noter. On remarque dans la rate un infarctus ancien peu volumineux. Dans les reins on trouve des cicatrices fibreuses qui témoignent d'an- ciens infarctus et de plus on en trouve plusieurs récents, petits, sur l'un et l'autre reins. On ne trouve rien de spécial dans l'examen du tube digestif. Cavité encépliuUque. — Les artères de la base de l'encéphale sont complètement saines et non athéromateuses. Le bulbe, la protubérance et le pédoncule cérébral droit sont le siège d'une dégénération secondaire très-accusée. Le cervelet est-sain. L'hémisphère cérébral gauche ne présente aucune lésion. L'hémisphère cérébral droit est le siège d'un ramollissement ancien, 233 très-étendu, avec atrophie marquée par une diminution de poids très- notable. Le ramollissement forme à la surface une large plaque jaune, au niveau de laquelle les méninges ne peuvent se détacher qu'en em- menant avec elles la substance cérébrale ramollie. Cette plaque comprend toute la partie de la convexité de l'hémi- sphère qui est en arrière des circonvolutions marginales. La circon- volution marginale postérieure est même en partie comprise dans le champ de la lésion. Ce ramollissement s'étend à toute l'épaisseur du centre ovalede Vieus- sens, à toute la queue du corps strié et à une portion de la couche op- tique. L'artère sylvienne droite et ses branches étaient entièrement per- méables. La dissection minutieuse de l'ouverture du canal de ces ar- tères nous a montré, dans la branche de division postérieure du tronc principal de la sylvienne, un caillot organisé de la longueur de l cen- timètre et demi environ. Ce caillot est adhérant par ses deux extrémi- tés, qui sont effilées et comme tendineuses. Sa partie moyenne est ren- flée et de coloration plus foncée. Ce caillot ne remplit certainement pas plus du tiers du calibre de l'artère. L'examen microscopique montre dans ce caillot un tissu fibrillaire renfermant de nombreux éléments cellulaires, allongés, parallèles, et dirigés suivant l'axe longitudinal du canal. Ces éléments renferment eux-mêmes un noyau allongé très-apparent par l'addition d'acide nitrique sur la préparation. L'artère était d'ailleurs complètement saine, à peine un peu épaissie au niveau du point anciennement oblitéré. Comme nous le disions en commençant, cette observation nous semble remarquable par sa grande netteté. Rhumatisme articulaire aigu, endo- cardite, embolies multiples et à différentes époques, voilà la succes- sion des faits cliniques. Dans la relation de l'autopsie, on trouve toutes les preuves à l'appui de cette façon de voir. Dans le cœur, les traces d'une endocardite ancienne et un caillot organisé remplissant une au- ricule. D'autre part, dans le système artériel il n'existe aucune altération athéromateuse. Dans l'artère sylvienne droite nous constatons un caillot ^organisé qui a permis le rétablissement de la circulation. Nous avons déjà, dans une précédente communication (13 février 1869), montré que c'était ce qui se passait, en règle générale, lors de l'obstruction d'une artère encéphalique d'un certain volume par un embolus. Le caillot s'or- ganise, se rétrécit et la circulation se rétablit. Il est vrai que nous avons également dit que, lors d'une obstruction artérielle par thrombose, les choses ont de la tendance à se passer de la même manière. Cela est vrai en ce sens que le caillot se rétrécit en s'organisant; mais alors il y a gé- 234 néralement un obstacle qui s'oppose au rétablissement de la circulation : c'est le rétrécissement du calibre artériel par l'épaisissement progressif de la paroi. Nous nous croyons donc en droit d'attribuer le ramollisse- ment cérébral à une embolie. Pource qui est de la gangrène du membre inférieur gauche, les choses ne nous semblent pas moins claires. La présence d'un caillot ancien et organisé dans le cœur, coïncidant avec l'obstruction des artères péri- phériques par des caillots qui présentent successivement dans leur lon- gueur tantôt l'aspect de caillots anciens, tantôt celui de caillots ré- cents, la similitude de structure de caillots anciens périphériques et du caillot cardiaque, enfin la présence d'infarctus multiples et récents dans les deux reins, nous semblent ne pas permettr&,le doute, en pré- sence surtout de Tintégrité des parois artérielles. — M. VuLPiAN appelle l'attention de la Société sur quelques faits qu'il a eu l'occasion d'observer dans son service; ces faits montrent que le bromure de potassium, employé à des doses assez élevées, n'est pas aussi inoffensif que le croient certains médecins; ils font même voir que ce médicament peut alors produire des accidents sérieux. Dans ces différents cas, le bromure de potassium avait été prescrit d'abord à la dose de 3, 4 ou 6 grammes, et la dose avait été, en quelques jours, portée à 8, 10 ou 12 grammes en vingt-quatre heures. Les malades chez lesquelles les accidents ont été produits étaient atteintes d'affections diverses du système nerveux, et les troubles graves que ces malades offraient au moment où le traitement avait été institué, avaient paru autoriser l'emploi du bromure de potassium à doses rapidement crois- santes. Dans un premier fait, il s'agit d'une névralgie des nerfs sciatique et crural d'un côté. Voici, réduite aux détails strictement nécessaires, l'histoire de la malade : Obs. l. — La nommée R..., salle Saint-Jean, 18, entrée le 3 avril 1869, est affectée, depuis une quinzaine de jours, de névralgie crurale et sciatique du membre gauche, avec zona sur le trajet du nerf crural. Douleurs spontanées extrêmement violentes qui privent la malade de repos et qui sont exaspérées par le moindre contact. Après avoir cher- ché si le séjour au lit et l'emploi des opiacés n'arriveraient pas à sou- lager progressivement la malade, voyant ces moyens n'avoir aucun ré- sultai, on prescrit 4 grammes de bromure de potassium le 19 avril ; puis, quelques jours après, 6 grammes. Il n'y a pas de soulagement le 30 avril, trois jours après qu'elle a commencé à prendre cette dose, l'éruption herpétique a disparu presque complètement. On donne alors 235 8 grammes de bromure. Le 5 mai, affaissement considérable; la malade ne peut plus se tenir debout, et ne peut demeurer assise que pendant quelques moments; elle a eu la veille de l'inconlinence des matières fécales. Elle avait aussi des douleurs de l'isthme du gosier, de la rou- geur de celte partie et de la difficulté de déglutition. On supprime le bromure de potassium. Ce n'est qu'au bout de quatre jours que la ma- lade reprend un peu de force, Les douleurs, qui étaient beaucoup moins vives le 5 mai que les jours précédents, diminuent de plus en plus et progressivement dans la dernière quinzaine du mois de juin, et la ma- lade sort en très-bon étal, n'ayant plus de douleurs, marchant comme avant sa maladie, le 15 juin 1869. Il faut ajouter qu'elle avait pris 5 milligrammes d'acétaiede strychnine chaque jour, en une pilule, de- puis le 5 mai jusqu'au 18 mai. On voit que, dans ce cas, les accidents n'ont paru que le jour où la malade a pris 8 grammes de bromure de potassium, et ces accidents ont consisté surtout en un affaiblissement considérable et en une inconti- nence des matières fécales. Il y a eu aussi d'autres symptômes de bro- misme se manifestant au niveau de l'isthme du gosier. Le médicament ayant été supprimé le jour même où ces phénomènes ont été signalés, le malade n'a recouvré ses forces que progressivement : peut-être l'a- cétate de strychnine a-t-il contribué à produire cet heureux résultat. Quant à la névralgie, elle a été guérie manifestement par le bromure de potassium. — Dans un second cas, le bromure de potassium a été employé dans l'espoir de diminuer l'intensité d'une chorée chronique des mieux ca- ractérisées. Obs. IL — La nommée L..., âgée de 63 ans, couchée au n" 9 de la salle Saint-Jean, atteinte de chorée chronique généralisée, très-intense, datant de dix ans au moins, pouvait encore marcher le 3 mars 1869, jour de son entrée à l'infirmerie, et elle a continué à marcher, bien qu'avec difficulté, pendant les premiers temps de son séjour. Le 15 mars, on prescrit 4 grammes de bromure de potassium dans une potion à prendre par petites gorgées de temps en temps, dans les vingt-quatre heures. Le 17 mars, la dose de bromure est portée à 6 grammes; le 19, à 8 grammes; le 21, à 10 grammes dans 250 grammes d'eau. Dès ce jour l'appétit diminue et la malade s'affaiblit; mais l'affaiblis- sement devient surtout marqué le 22 et le 23, jour où l'on nous prévient que cette femme ne peut plus se tenir debout et qu'elle est devenue gâ- teuse. Il y a eu cependant de la rétention d'urine pendant vingt-quatre heures. ?36 Les mouvements choréiques sont d'ailleurs moins violents que les jours précédents. On a prescrit le 16 juin 5 milligrammes d'acétate de strychnine en 1 pilule, puis on a augmenté les jours suivants la dose de strychine. 2 pilules le 26 juin ; 3 pilules le 30 juin ; 4 pilules (c'est-à-dire 2 centi- grammes en tout) le 2 juillet; le 5 juillet il y a une roideur passagère des membres inférieurs au moment où l'on essayait de lever la ma- lade. Il y une légère amélioration; la malade est un peu moins faible que lors des derniers jours du mois de juin ; mais il y a encore de l'incon- tinence des matières fécales. Les mouvements choiéiques n'ont subi aucune modification nouvelle. — Le bromure de potassium a été porté, chez cette malade, de 4 grammes, dose primitive, à 10 grammes, en sept jours. On a noté que, dès le lendemain du jour où elle a pris 10 grammes de bromure, il y a eu un affaiblissement des plus notables ; et cette femme a pré- senté aussi de l'incontinence des matières fécales, symptôme qui n'a pas encore disparu. Il y a un peu moins de faiblesse depuis qu'elle prend de la strychnine. Quant à la chorée, elle n'a été que peu mo- difiée. — Chez une autre malade atteinte d'hémiplégie douloureuse, le bro- mure de potassium a produit encore, dans les mêmes conditions d'ad- ministration, un affaiblissement très-notable. Obs. IIL — La nommée B..., âgée de 53 ans, entrée dans la salle Saint- Vincent, n° 11, le 16 avril 1869, est atteinte depuis deux ans d'hémi- plégie incomplète du côté droit. Au moment où elle entre à l'infirmerie, celte femme ressent depuis longtemps des douleurs extrêmement vives dans le côté affaibli. Ces douleurs, dont elle n'indique le caractère que d'une façon peu précise, paraissent être des sensations de brûlure pres- que continues dans le bras, le membre inférieur du côté droit, surtout dans le pied, et aussi dans la région intercostale inférieure. On prescrit, le 25 avril, 3 grammes de bromure de potassium, et quelques jours plus tard, 4 grammes. Le 1" juin, il n'y a aucune amé- lioration, on porte la dose à 6 grammes, et le 14 juin à 8 grammes. Aflai- blissement considérable constaté le 19 juin; la malade ne peut plus se lever ni se recoucher seule ; elle s'est même affaissée la veille dès qu'elle a mis les pieds à terre. On cesse l'administration du bromure le 19 juin. Il y a une diminu- tion très-notable des douleurs, et cet amendement favorable persiste les jours suivants ; peu à peu la malade recouvre ses forces perdues et quelques jours après elle se retrouve, sous ce rapport, dans l'état où elle était avant l'emploi du bromure de potassium. 237 Enfin, chez une jeune malade atteinte d'une grave affection des cen- tres nerveux (probablement une sclérosse diffuse de la moelle épinière et de l'isthme encéphalique), on a constaté encore des effets analogues déterminés par le bromure de potassium. Obs. IV. — La nommée V..,, âgée de 24 ans, couchée au n" 13 de la salle Saint-Matthieu, et entrée le 5 mai 1868, est atteinte d'une affection progressive de la moelle épinière s'étendant probablement aussi à quel- ques parties de l'isthme cérébral, affection qui est caractérisée, entre autres phénomènes, par une contracture avec flexion exagérée des membres inférieurs sur le bassin et des divers segments de ces mem- bres les uns sur les autres; il y a en même temps, au moment où l'on donne du bromure de potassium, une contracture avec extension con- tinue du membre supérieur droit. La peau de ces diverses parties a perdu la sensibilité sous tous ses modes. De plus encore, depuis près d'un mois il y a un tremblement conti- nuel des membres atteints et souvent du corps tout entier, tremblement interrompu de temps en temps par de violents mouvements involon- taires d'écartement des deux membres inférieurs, puis de rapproche- ment brusque, avec douleurs profondes et vives produites par la per- cussion ainsi déterminée d'un des genoux sur l'autre. Différents moyens, entre autres le nitrate d'argent, les narcotiques, les injections hypo- dermiques, les aspersions d'éther sur la colonne vertébrale, étaient de- meurés sans résultat. Le 21 juin, on prescrit deux lavements contenant chacun 3 grammes de bromure de potassium. On est obligé de recourir à ce mode d'ad- ministration, parce que la malade, depuis les premiers temps de son affection, vomit tout ce qu'elle prend; le lait seul n'est vomi qu'en partie, et l'alimentation se fait exclusivement à l'aide de ce liquide. Le 25 juin, on porte le bromure à la dose de 10 grammes en deux lavements. Le 30 juin, la dose est portée à 12 grammes en trois lavements. Le 2 juillet, on constate qu'il y a de l'incontinence complète d'uri- nes depuis deux jours, et le 6 juillet, cette incontinence d'urine existe en- core. En même temps il y aurait un peu d'affaiblissement. Le tremble- ment continu et les mouvements involontaires et successifs d'écartement et de rapprochement brusque, phénomènes que l'on avait espéré voii disparaître sous l'influence du bromure, n'ont pas été modifiés d'une façon bien appréciable. M. Vulpian, après avoir indiqué ces faits, dit qu'ils l'ont d'autant plus frappé que, dans son service, le bromure de potassium n'a été employé à hautes doses que chez ces quatre malades. Il ressort du rapproche- 238 ment de ces observations que le bromure de potassium , lorsqu'il est employé à doses rapidement croissantes, et lorsque l'on en est ainsi arrivé, au bout de quelques jours, à en prescrire 8, 10 ou 12 grammes, peut déterminer des accidents assez graves, surtout de l'afFaiblissement général et de l'incontinence des matières fécale? ou de l'urine. Il y a donc là l'indice d'une action assez énergique produite par le bromure sur les centres nerveux, en particulier sur la moelle épinière; et il est bon d'être averti que celte action peut, tout en n'amenant pas toujours la disparition de symptômes qui paraissent avoir leur point de départ dans des modifications de cette partie des centres nerveux, aggraver sous certains rapports l'état des malades. M. Vulpian a de plus remarqué qu'il était peu avantageux pour com- battre les phénomènes douloureux liés aux affections de la moelle, mais qu'il réussit bien dans la céphalalgie. M. Charcot rappelle que les médecins américains ont également si- gnalé des accidents produits par le bromure de potassium. M. Ollivier a fait mourir un chien, en 1863, en lui administrant 10 grammes de bromure de potassium. Depuis, il a traité une malade atteinte de névralgie épileptiforme à l'aide de ce médicament, et en ayant soin d'élever graduellement la dose, il a pu arriver jusqu'à 9 grammes sans produire d'accident. M. Brown-Séquard a eu maintes fois l'occasion de constater l'influence paralysante du bromure de potassium. Chez les épileptiqnes, qu'il a soignés en si grand nombre, il a produit de l'affaiblissement sans dé- passer la dose de 4 grammes par jour. Dans certains cas d'insomnie, le médicament a été mieux supporté, et il a pu atteindre la dose de 12 grammes sans occasionner aucun effet fâcheux. Dans ces circon- stances, cette substance a une efficacité très- grande. Lorsqu'on redoute les effets paralytiques si bien mis en lumière par les observations de M. Vulpian, on doit associer, comme le fait M. Brown-Séquard, le bromure à la strychnine ou à l'arsenic. La quinine est aussi, en quelque sorte, un antidote du bromure. Ce sont là des particularités qu'il ne faut pas oublier dans le traitement de l'épilepsie. M. Vulpian ajoute que chez sa première malade, soit la choréique, il a administré depuis quelque temps de la strychnine, et que, sous cette influence, son état s'est amélioré. M. Ollivier rapproche des effets du bromure ceux de l'iodure de po- tassium. Dans un cas de paraplégie d'origine syphilitique, en donnant des doses croissantes de cette dernière substance, il est survenu, à 7 grammes, une aphasie qui a duré cinq à six jours. La séance est levée à cinq heures un quart. t89 Séance du 10 juillet. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. A l'occasion du procès- verbal, M. Laborde rapporte quelques faits tendant à démontrer la nocuité du bromure de potassium. M. Brown Séquard revient sur un fait qu'il a déjà signalé relative- ment à l'influence dos sections nerveuses sur les parties où se distri- buent les nerfs coupés. Les plaies des extrémités des membres dépen- dent d'une cause traumalique extérieure, et non pas du nouvel état du nerf après la section. En prenant certaines précautions, on ne voit pas les lésions se produire. On les évite en effet en plaçant les animaux, lapins ou cochons d'Inde, sur de la paille hachée en petits morceaux ou sur du son, et en enveloppant avec soin l'extrémité du membre qui a été opéré. D'après M. Brown-Séquard, les plaies des pattes se produisent de la manière suivante : au moment de l'attaque, pendant les secousses con- vulsives, l'animal porte sous les dents l'extrémité du membre abdomi- nal, il se mord les ongles; du sang s'écoule, et aussitôt que la crise est finie, l'animal mange les parties saignantes, et avec d'autant plus d'en- train que la partie est complètement ou presque complètement insen- sible; toutefois, dans quelques cas, la voracité l'emporte sur la douleur et la bête continue à se mordre tout en poussant de petits cris. A ce traumatisme succède très-souvent un gonflement assez considérable du membre. Quand on coupe la moitié latérale de la moelle épinière, l'altération fait défaut, parce que la paralysie du membre empêche la patte d'être portée jusqu'à la bouche, si la section de la moelle n'atteint que le cordon postérieur, le membre n'étant pas paralysé du mouvement, la lésion se produit. Enfin chez les femelles pleines depuis un mois ou plus, si l'on coupe le sciatique, le ventre empêchant la patte d'arriver à la bouche, l'alté- ration n'arrive que lorsque l'animal a mis bas. Il montre deux cochons d'Inde sur lesquels la section du sciatique a été faite, et qui ne présentent pas d'altération, grâce aux précautions qui ont été prises. Un troisième, chez lequel a eu lieu la section du plexus brachial, n'offre qu'une très-légère desquammation cutanée sur la patte du côté lésé, quoique l'animal ait été laissé complètement libre sans aucune précaution. M. Leven demande pourquoi k patte inférieure seule est mangée et non la patte supérieure. 240 M. Brown-Séquard rappelle l'explication déjà donnée ".pendant l'atta- que, l'animal porte la patte postérieure sous la dent, il y a une goutte de sang et puis morsure; le membre antérieur restant éloigné des dents pendant les convulsions, ne se blesse point, et par suite le sang ne vient pas allécher la voracité de l'animal qui ne touche pas à sa patte, M. Laborde déclare que ses propres recherches tendraient à lui dé- montrer que la section nerveuse seule est capable de produire la lésion de l'extrémité du membre, en dehors de toute morsure ou de toute autre cause traumatique; malgré les plus grandes précautions, il a vu survenir cette altération dans la patte d'un animal qu'il a opéré. M. Brown-Séquard ajoute que les nombreux faits qu'il a observés lui donnent des résultats tout différents, ainsi qu'il l'a déjà démontré. M. Charcot faisant remarquer la fréquence de lésions cutanées, telles que le zona, à la suite d'altérations nerveuses, pense qu'en outre de la lésion du nerf, il doit y avoir, dans ces cas, quelque chose de spécial qui se surajoute, et demande à M. Brown-Séquard si ses re- cherches ne lui ont rien fait voir de particulier à ce sujet. M. Brown-Séqdard établit une distinction radicale entre la simple section et la destruction avec irritation d'un nerf. Dans la simple sec- tion le nerf est complètement mort, il ne peut plus rien. Qaund, au con- traire, il y a irritation, le membre devient malade dans toute son étendue et non pas seulement à son extrémité. Comme affections cuta- tanées on peut tout observer, depuis la papule et la vésicule jusqu'à la pustule et la phlyclène la plus étendue. Chez une malade atteinte pro- bablement de névrite, le membre malade était énormément tuméfié, la peau s'en allait en écailles, il y avait un refroidi;-sement considérable de cette partie et danger de gangrène. Ces accidents se sont amendés à la suite d'application déglace; l'aneslhésie a cessé, puis la température s'est élevée et a dépassé même celle du côté opposé; en ce moment tout est rentré à l'état normal. La névrite est difficile à déterminer chez les animaux; l'irritation produite tend rapidement à guérir; toutefois des altérations pourraient peut-être se montrer au moment de la réunion des deux bouts section- nés; il y a alors un état morbide particulier du nerf qui accompagne la cicatrisation.. Il y aurait lieu de distinguer : r L'état du nerf accompagnant la section incomplète; 2° L'altération des fibres nerveuses après la section; 3° La section simple du nerf. Toute section nerveuse doit s'accompagner de phénomènes com- plexes, puisque le nerf lui-môme n'est pas dévolu exclusivement à une seule fonction ; il est moteur des muscles, mais il est aussi moteur des 241 vaisseaux, et l'on trouve consécutivement à la section l'atrophie non- seulement des muscles, mais encore des os, des nerfs et de toutes les autres parties. Il y a accumulation de sang et élévation de température ; ces modifications de nutrition durent plus longtemps quand les nerfs sont irrités. M. VuLPiAN signale également les altérations de nutrition à la suite des sections nerveuses, d'après ses propres recherches, mais il n'a pas encore, dit-il, complété cette étude. Cliniquement, beaucoup de lésions trouvent leur source dans les ir- ritations centripètes. Chez les ataxiques, on voit des éruptions sous l'influence des lésions médullaires. Le zona dépend fréquemment d'une lésion centrale, ainsi que Von Barensprung et d'autres auteurs l'ont déjà signalé. La plupart des névralgies sont centrales, même quand elles parais- sent périphériques, comme certaines névralgies des ataxiques. En résumé : cause centrale plus souvent, ou tout au moins renfonce- ment dans les centres nerveux. M. Charcot dit que le zona peut dépendre d'une lésion des ganglions intervertébraux. Dans un cas de maladie de la colonne vertébrale, les vertèbres cer- vicales en s'affaissant avaient comprimé les nerfs, produit une névrite, et consécutivement était survenu un zona. A l'autopsie, une différence notable existait dans l'aspect des ganglions intervertébraux entre le côté droit et gauche. Ceux du côté correspondant au zona étaient très- rouges, infiltrés, et quoiqu'il n'y eût rien de bien tranché histologi- quement, ils différaient visiblement de ceux du côté opposé. M. Brown-Séquaud a déjà fait remarquer depuis longtemps que dans les fractures de la colonne vertébrale, les bulles et les phlyctènes étaient dues à l'irritation des nerfs par cause centrale, et non pas aux pressions continues de certaines parties des membres paralysés. Ces bulles, en effet, peuvent se montrer douze ou quinze heures après l'accident, apparition bien prématurée si la cause était une pres- sion. De plus, elles se montrent dans des points où ne s'exerce aucune pression, et malgré les pressions continues, on voit d'autre pan les eschares guérir quand la lésion médullaire elle-même tend à la gué- rison. M. VuLPiAN : Les sections des nerfs produisent des actions centripètes et des actions centrifuges, ainsi que i\L Brown-Séquard l'a déjà indi- qué. Après les amputations, la moitié correspondante de la moelle di- minue notablement de volume. Sur deux lapins, la section du nerf crural et du nerf sciatique a été suivie, au bout de cinquante jours, d'une diminution dans le volume C. R. 1869. 16 242 de la moelle. La section ayant été faite à droite, on trouvait dans le même côté de la moelle, à la région lombaire, une diminution de vo- lume de la corne postérieure et du cordon postérieur. M. Brown-Séquard ajoute qu'après les sections, le nerf s'atrophiant dans son bout supérieur est évidemment dans un état d'irritation qu se transmet à la zone épileptogène. Les fibres des cordons postérieurs agissent de la périphérie au centre suivant deux modes d'irritation, soit par le pincement de la peau, soit par l'irritation directe du nerf. M. Hayem' fait remarquer, à propos de la diminution d'une partie de la moelle à la suite des sections nerveuses ou des amputations, qu'il y a sans doute, dans ces cas, atrophie simple de la moelle, et non pas quelque chose d'analogue aux lésions secondaires, ainsi qu'il a pu le constater d'après les faits de M. Vulpian, Par suite du défaut de foBC- tions, les tubes nerveux diminuent de volume, mais sans qu'il y ait augmentation du tissu interstitiel. Processus différents des dégénéres- cences secondaires. M. O'Leary rapporte que le sous-carbonate de bismuth a été très- efficace dans douze cas de psoriasis succédant à une irritation gastrique, et dans deux cas de pityriasis. Les accidents cutanés ont disparu assez rapidement. La Société se forme en comité secret à cinq heures un quart. Séance du 17 juillet. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Vulpian, à l'occasion du procès-verbal, ajoute que ses expériences sur les sections nerveuses ayant été faites sur de jeunes lapins, la di- minution de volume de la moelle dans le côté correspondant à la sec- tion des nerfs crural et sciatique était due probablement à un arrêt de développement; ce serait donc un fait d'agénésie plutôt qu'une atro- phie ascendante. M. Brown-Séquard. 11 faut, en effet, distinguer s'il y a simple défaut de croissance ou altération; dans les deux cas le fait n'en est pas moins nouveau et plein d'intérêt. Il avait vu lui-même l'altération du bout central du nerf à la suite des sections, et dans un cas il avait remarqué la diminution de volume du côté correspondant de la moelle, mais il ne signale ce cas qu'à titre d'addition sans autre prétention. M. Bert annonce qu'il a pratiqué la désarticulation de la cuisse sur plusieurs jeunes lapins, que l'un d'eux ayant survécu, il en examinera 243 la moelle et fera part à la Société du résultat de ses recherches dans ce cas où tous les nerfs du membre ont été coupés. M. Laborue rappelle qu'il a, à plusieurs reprises, appelé l'attention de la Société sur les accidents véritablement graves que peuvent pro- duire les hautes doses de bromure de potassium ; et ce sont ces acci- dents, observés sur lui-même, qui sont devenus le point de départ de ses expériences sur le bromure de potassium. — M. LiouviLLE lit la note suivante : Chat épileptique âgé de 11 ans (couleur grise, assez forte taille); épilepsie remontant a un an environ, et paraissant avoir été occa- sionnée par des coups reçus sur la colonne vertébrale, et cela dans LA RÉGION OU SEMBLE SE TROUVER CHEZ CE CBAT LA ZONE DONT l'eXCITA- TION DÉTERMINE LE PLUS SOUVENT LES PHÉNOMÈNES TRÈS-NETS d'aTTAQUES ÉPILEPTIFORMES VIOLENTES. Né il y a onze ans, dans une écurie, d'une mère de bonne santé apparente, très-aclive; très-féconde et ne paraissant avoir jamais eu d'attaques. Le chat actuellement présenté à la Société est resté dix ans près des mêmes personnes, dans un des services de l'hôpital la Pitié (salle Saint- Athanase), où il était presque constamment en observation. Il était très-vigoureux, très-intelligent, très-animé; il grossissait normalement et n'avait été malade" que dans le courant de l'année 1867, où il eut (peut-être à la suite de traumatisme?) un gros abcès vers le cou, à droite (abcès descendant jusqu'au devant de la poitrine). Il fut soigné six semaines, et il sortit du pus en grande quantité. Jamais il n'a eu d'abcès véritable au dos ni sur la colonne vertébrale. Mais il porte cependant dans différents points du cou, en arrière, sur le dos et sur la région lombaire, des croûtes, restes d'excoriations de grandeur différente; mais depuis un an au moins, en 1868, il est pris de véritables attaques nerveuses, violentes, d'une durée de près d'une minute, presque toutes les mêmes, avec un cri initial, tremblements de tout le corps; convulsions cloniques et toniques; émission violente d'urine lors des secousses très-vives qu'il présente. Pendant quelques secondes il reste inerte, puis se relève un peu, se lèche les pattes; cherche autour de lui d'un air vague, et de lui-même retourne chaque fois à l'endroit de la salle où l'on a l'habitude de le mettre de suite après les attaques. Ces attaques épileptiformes, res- semblant tout à fait aux phénomènes physiques qu'on observe dans les véritables attaques d'épilepsie constatées chez l'homme, sont de plus en plus fréquentes. '244 Elles étaient rares au début, mais elles sont devenues de plus en plus fréquentes. Il y avait des intervalles de quelques semaines. Maintenant deux à trois jours à peine se passent sans qu'il y ait d'accès. Les accès sont souvent de cinq ou six par jour, et quelquefois on eii a noté trois ou quatre la nuit. Ces attaques apparaissent parfois spon- tanées. M. Brown-Sëquard, en excitant chez ce chat la zone épileplogène qui répond aux sections médullaires, fait remarquer linsensibililé de l'a- nimal qui supporte sans réagir un pincement assez fort des deux côtés du cou. Puis il excite directement par des frictions la région dorsale, à partir de la sixième vertèbre, en se dirigeant vers la partie inférieure. Après une courte excilalion, l'animal crie, tombe, présente des con- vulsions toniques, puis cloniques, pendant lesquelles un jet d'urine est projeté avec force. Au bout d'une minute environ, le chat lève la tête, se lèche deux ou trois fois, se redresse sur les pattes et s'enfuit. M. Brown-Séquard fait remarquer qu'à la suite des sections médul- laires, vers la sixième vertèbre dorsale, l'irritation au voisinage du nez peut produire l'attaque épileptique ; ce qui n'a pas lieu sur ce chat, chez lequel il n'y a pas de lésion circonscrite, mais probablement une lésion diffuse consécutive aux violences dont il a été l'objet. Il ajoute que la cautérisation avec le cautère actuel au niveau de la zone épileptogène, c'est-à-dire ici vers la sixième vertèbre dorsale, pourrait sur cet animal faire cesser non-seulement les attaques provo- quées, mais encore celles qui surviennent spontanément. ScR l'influence prétendue de l'élkctrisation avec des courants continus SUR LE développement DES ANIMAUX ; par M. Paul Bert. On a soutenu, à plusieurs reprises, que l'électricité, appliquée sous diverses formes [électricité de tension, courants galvaniques, continus ou interrompus, courants induits), pouvait agir sur la nutrition des par- ties et même sur le développement des êtres vivants. Récemment, ici même, MM. Legros et Onimus ont cru pouvoir con- clure à la réalité d'une action semblable de l'électricité à courants con- tinus, en se basant sur l'observation de jeunes chiens d'une même por- tée, dont l'un avait été électrisé un quart d'heure par jour, l'autre non. (V. séance du 17 avril 1869.) Je fis remarquer alors que le chien est un animal fort mal choisi pour de semblables expériences, surtout lorsque (et c'était précisément le cas dans l'observation de MM. Legros et Onimus) on n'avait aucun renseignement sur le père ou les pères de la portée déjeunes chiens sur lesquels on opérait. Comme cette question se lie à un ensemble de travaux que je pour- suis depuis longtemps sur l'influence de certains agents physiques sur 245 les êtres vivants, et que, d'autre part, les résultats de MM. Legros et Onimus sont en contradiction avec certains faits que j'avais observés à Bordeaux sur des chats, j'ai repris l'expérience en employant des lapins et des cochons dinde. Je ne rapporterai ici que les résultats de l'expé- rience faite sur ces derniers animaux. Le 14 juin on sépare de leur mère cinq jeunes cochons dinde, pe- sant : n" 1, 95 gr.; n" 2, 87 gr.; n° 3, 80 gr.; n" 4, 75 gr.; n" 5, 68 gr.; fort semblables, du reste, les uns aux autres. Le n" 1 et le n» 5 sont chaque jour soumis à l'action du courant électrique fourni par quatre éléments Daniell modifiés par RhumkorfF, courant dirigé de l'anus à la bouche. Ce courant est très-sensible, mais supportable à la langue; son emploi prolongé pendant plus d'un mois n'a amené aucune cautérisation aux muqueuses. Le n° 1 reçoit ce courant pendant dix minutes, le n° 2 pendant cinq minutes chaque jour. Au n" 3 on fait subir l'influence d'un courant induit très-sensible à la langue. Aux n" 2 et 4, rien. Tous ces animaux sont placés dans une même grande cage et reçoivent le matin la même nourriture. A midi, on enlève ce qui reste d'aliments dans la cage ; à quatre ou cinq heures du soir, on galvanise et l'on opère les animaux, puis on leur donne à manger de nouveau. Or le développement de ces cinq animaux a marché avec la même régularité, et ils conservent aujourd'hui, 16 juillet, leurs rangs respec- tifs. Le n" 1, qui pesait 95^% pèse 245^' 2, 87 240 3, 80 225 4, 75 217 5, 68 195 L'expérience faite sur les lapins, bien que rendue très-incomplète par la maladie et la mort prématurée de deux de nos quatre animaux, dépose dans le même sens que la précédente. On peut donc conclure de ces faits que l'électricité appliquée dans les conditions mentionnées ci-dessus n'a eu aucune influence sur le développement des animaux. Quand on examine les tableaux graphiques qui représentent les ré- sultats des pesées dans leurs rapports avec les jours où ces pesées ont été faites, on est frappé d'une apparence singulière. L'accroissement du poids n'a pas lieu régulièremeni de jour en jour, mais bien avec des oscillations qui font souvent qu'à un jour donné le poids est moindre que la veille, pour redevenir beaucoup plus fort le lendemain. Puis, chose curieuse, ces oscillations sont tout à fait simultanées pour les 246 quatre animaux, dont les courbes montent et descendent toutes en- semble. Les chutes d'un jour à l'autre ont pu être de 20 grammes, c'est-à-dire un dixième du poids du corps. Or tous les jours les animaux placés dans la même cage recevaient une nourriture sensiblement identique. C'est là un fait curieux, mais un fait brut, qui demandera à être étudié de très-près. Je crois devoir annoncer à la Société que des expériences en voie d'exécution me permettront probablement de voir si l'électrisation par des courants galvaniques appliqués d'une manière continue, a quelque nfluence sur le développement. Ces expériences portent à la fois sur des œufs de batraciens, sur des œufs d'oiseaux et sur des ehrysalides de vers à soie. Pour celles-ci, sachant d'après les recherches de M. Gi- rard que l'enveloppe des chrysalides est un corps parfaitement isolant (ce qui est vrai, du reste, ainsi que je l'ai constaté de la peau même du ver à soie à l'état de larve), j'insinue des aiguilles fines à travers cette peau, opération que supportent fort bien les chrysalides. Il va sans dire que toutes ces expériences sont faites comparativement. M. MoREAu fait remarquer que les oscillations irrégulieres de 25 grammes en plus ou en moins qui ont été constatées, auraient pu avoir pour cause les évacuations excrémentitielles ayant précédé ou suivi les pesées. M. Legros pense que l'action de l'électricité aura été entravée dans ces cas par la cautérisation des muqueuses sur lesquelles les excita- teurs ont été placés. Quoique iVI. Bert n'ait employé que quatre éléments de la pile de Rhumkorff, il croit nécessaire de tenir compte de celte action locale, puisque avec 6 piles de Remak on peut, au bout d'un quart d'heure, obtenir une cautérisation sensible. M. Lépine, en examinant les tracés de M. Bert, fait observer que les oscillations en plus ou en moins dans le poids se montrent pour tous les animaux en expérience le même jour et dans le même sens; il ne croit donc pas que ces dififérences dépendent de conditions indivi- duelles, mais il rattacherait plus volontiers ces changements à une cause hygiénique commune à tous les animaux, telle, par exemple, qu'un changement de nourriture. Chez les enfants, en effet, les oscillations dans le poids peuvent se présenter dans les huit premiers jours de la naissance, mais ensuite, dès que l'alimentation est devenue régulière, on note un gain progressif dans le poids du corps sans oscillations dans le sens de la perte. 247 Sur la visibilité des divers rayons du spectre pour les animaux , par M. Paul Bert. Tous les animaux voient-ils les rayons que nous appelons lumineux dans le spectre ? En voient-ils que nous ne voyions pas? S'il y a iden- tité dans l'étendue de la perception du spectre lumineux pour eux et pour nous, y a-t-il aussi identité dans l'énergie relative des sensations visuelles dans les régions diverses de ce spectre? Ces questions, qui ont jusqu'ici beaucoup plus préoccupé les phi- losophes que les physiologistes, n'ont jamais été étudiées par la voie expérimentale. Et cependant elles présentent un intérêt non douteux pour la philosophie naturelle. Ne pouvant expérimenter sur des ani- maux appartenant à toutes les classes du règne animal, j'en ai choisi, du moins, d'aussi éloignés de nous que possible, et par leur constitu- tion générale et par la structure de leur œil. Les dapfmies -puces, petits crustacés presque microscopiques, si communs dans nos eaux douces, sont très-sensibles à la lumière, et, pendant la nuit, s'approchent vivement d'un flambeau qu'on leur pré- sente. J'ai mis à profit cette particularité. Un certain nombre de ces animaux sont placés dans un vase obscur où la lumière ne peut pénétrer qu'à travers une fente étroite. Si l'on fait tomber sur cette fente une région quelconque du spectre fourni par la lumière électrique, on voit des petites daphnis qui, jusque-là, nageaient indifféremment dans tous les points du liquide, se rassem- bler en foule dans la direction de la fente rendue par nous lumineuse. On les fait ainsi accourir, qu'on leur envoie les rayons rouges, ou les rayons violets, ou la série intermédiaire. Ainsi, premier point établi, ces animaux perçoivent à l'état lumineux tous les rayons que nous voyons nous-mêmes. Quand on amène sur la fente la région ultra violette du spectre, si sa lueur est assez faible pour que nous n'en éprouvions pas (condi- tions ordinaires, prisme de flint-glass) de sensation bien nette, les daphnies paraissent y être tout à fait inditïérentes. Mais la chose est bien plus saisissante à l'autre extrémité du spectre. Dans le rouge extrême, là où nous percevons très-bien la lumière, les daphnis s'agitent et s'empressent; mais à peine a-t-on, en fai- sant tourner le prisme, amené sur la fente la région obscure moins réfrangible, qu'immédiatement elles se détournent et se dispersent dans le vase tout entier; cette région si riche en rayons non visibles par nous, n'est donc pas aperçue par elles. Donc, second point établi, ces animaux ne perçoivent à l'état lumineux aucun des rayons que nous ne voyons pas nous-mêmes. y 248 En examinant l'action successive des régions diversement colorées du spectre, il est facile de constater que les animaux arrivent d'autant plus vile que la région en expérience nous paraît plus brillante Ainsi, le jaune, le rouge, le vert les attirent beaucoup plus vite que le bleu et surtout le violet. Mais le résultat est beaucoup plus saisissant lors- qu'on fait agir le spectre lumineux tout entier. Dans utie cuve à glaces parallèles, peuplée d'une grande quantité de daphnies, on fait s'étaler le spectre dont l'étendue visible occupe environ la moitié de la lon- gueur de la cuve. Aussitôt tous les petits animaux se mettent en mou- vement; l'immense majorité se groupe dans les rayons de la région moyenne, de l'orangé au vert; on en voit encore un certain nombre dans le rouge; il y en a beaucoup moins dans le bleu; ils deviennent de plus en plus rares à mesure qu'on s'avance vers l'extrémité la plus réfrangible, et l'on n'en voit presque pas au delà du rouge et dans l'ul- traviolet. Ainsi les rayons dont l'intensité lumineuse est pour eux la plus grande, sont aussi ceux qui pour nous sont les plus éclairants : les rayons jaunes tiennent la tête. Donc, troisième point établi, l'énergie relative des sensations visuelles dans les régions diverses du spectre est la même chez ces animaux et chez nous. Si maintenant nous considérons, d'une part, la structure de nos yeux et celle si différente de l'œil unique des daphnies (œil composé sans facettes), d'autre part la distance énorme qui sépare les types zoolo- giques, nous sommes jusqu'à un certain point autorisés à généraliser les conclusions précédentes et à admettre, jusqu'à preuve contraire, que tous les animaux, dans la série entière, voient les mêmes rayons, et qu'ils les voient avec la même intensité relative; en d'autres termes, qu'il y a, entre la nature de la matière nerveuse envisagée d'un côté dans certaines terminaisons périphériques, d'un autre côté dans cer- tains centres ganglionnaires, et la force vive des vibrations éthérées dont la longueur d'onde est comprise environ entre huit cents et trois cents millionnièmes de millimètre, des relations telles que chez tous les animaux cette force vive puisse se transformer en une impression et donner naissance à une sensation et même à une perception identiques pour chaque rayon pris en particulier. Sur les mouvements de la sensitive [Mimosa pudica) ; par Paul Bert. Deuxième note. (Voir Bulletin de la Société de biologie, 1867, p. 99.) Mouvements spontanés. — Je présente à la Société les résultats de l'observation des mouvements des pétioles primaires, continuée pen- 249 danl dix-sept jours et dix-sept nuits chez deux sensitives. Comme dans ma première note, j'ai exprimé par des mouvements, par des graphiques où les abcisses représentent les temps, et les ordonnées les valeurs va- riables de l'angle que fait par en bas le pétiole primaire avec la tige. Ces deux plantes ont été d'abord observées dans des conditions nor- males pendant quatre jours et quatre nuits; à la cinquième nuit, l'une (A) fut placée dans un placard, à l'obscurité; l'autre (B) fut soumise à l'action de quatre lampes. Dès le lendemain, des troubles se produisirent dans les mouvements des pétioles. lis peuvent se résumer en ceci : que les pétioles tendirent à l'immobilité; les oscillations quotidiennes devinrent de moins en moins amples. Pour A, la position des pétioles fut l'abaissement; pour B, l'élévation continue. Sur les trois feuilles de A en observation, deux moururent ; l'autre restant immobile avec une valeur d"angle de 60" en- viron, je remis la plante dans des conditions normales (cinq jours d'obscurité), et les mouvements reparurent aussi réguliers dès le se- cond jour. B, au contraire, se portait très-bien, et malgré leur immobi- lité, ses pétioles étaient entièrement sensibles; les mouvements régu- liers revinrent également quand, après six nuits, on éteignit les lampes. La lumière continuelle augmente donc la teneur du renflement mo- teur, l'absence de lumière la diminue. En plaçant un certain nombre de sensitives dans des lanternes en verres de couleurs, on voit les pétioles s'abaisser et les folioles s'é- taler dans les lanternes violette, bleue et même verte ; il y a au con- traire redressement exagéré et demi -fermeture dans les lanternes jaune et rouge. En mettant la nuit, un certain nombre de petites sensitives dans les rayons d'un spectre électique, on voit se dresser rapidement les pétioles de celles qui sont dans le jaune et le rouge. Si, la nuit, on fait tomber pendant quelque temps sur une sensitive endormie une lumière très-vive, la sensitive se réveille alors même que la lumière est déjà éloignée et que la plante se trouve dans l'obscu- rité. L'action de la lumière demande du temps et est durable. Je n'ai pas encore pu voir quels sont les rayons qui réveillent ainsi, la nuit , les sensitives. Mais si l'on coupe des pétioles secondaires ap- partenant à des feuilles de même âge, et qu'on les place dans des con- ditions égales dans des verres de couleur, on voit se rouvrir les folioles sous le verre violet aussi vite, encore plus que sous le verre blanc; vient ensuite le verre bleu ; dans le rouge et le vert , les folioles s'en- tr'ouvrent un peu, mais ne s'étalent pas; dans le noir, elles restent fermées; pour les verres jaunes, comme ils sont généralement très- clairs, les folioles s'y ouvrent un peu plus que dans le rouge. 250 Si l'on alterne ensuite la position des feuilles, on a les phénomènes inverses. Quand une sensitive est placée dans une lanterne qui lui amène de deux côtés opposés, en quantité à peu près égale (jugée avec l'œil), de la lumière de différentes couleurs, elle tourne toujours ses folioles vers le violet et le bleu ; entre le rouge et le vert , elle choisit le vert. En un mot, elle se dirige vers la région la plus réfrangible du spectre; mais si Ton éclaire très-inégalement, on peut renverser la situation. Si l'on examine à l'aide d'éléments thermo-électriques suffisamment sensibles la température du renflement moteur des pétioles primaires, on voit qu'elle est notablement plus basse que celle de la tige ou de l'air ambiant. Les différences ont été jusqu'à 22° du galvanomètre. II semble qu'elles soient plus fortes le jour, et surtout dans l'après-midi, que la nuit et le matin. Si l'on groupe tous ces phénomènes, on arrive à penser que sous l'influence des rayons lumineux, il se passe, dans le renflement moteur, des modifications chimiques de Tordre des réductions qui ont pour résultat de donner naissance à une matière très-osmotique, laquelle se détruit à l'obscurité. Cette matière fabriquée pendant le jour attire l'eau qui, durant la période nocturne, gonfle les renflements; puis, pendant la nuit, elle s'épuise, et le pétiole s'abaisse dès le début du jour. Je dis que ces transformations chimiques sont vraisemblablement de l'ordre des réductions : 1° parce qu'elles consomment beaucoup de chaleur; 2" parce qu'elles sont surtout favorisées par les rayons rouge-vert du spectre, lesquels, précisément, opèrent la réduction de I acide carbonique par les plantes. Mouvements provoqués. — La rapidité de leur transmission n'est pas telle que l'aurait indiqué Dutrochet, dont les assertions ont été répé- tées par tout le monde. Il n'avait pas fait la part de l'énergie de l'exci- tant, et croyait que le mouvement du renflement lui-même met tou- jours le même temps à s'exécuter. Des mesures prises avec soin m'ont fait voir que l'excitation se transmet dans les pétioles secondaires, à raison de 2 à 4 millim. par seconde, dans les pétioles primaires de 4 à 5 centimètres par seconde, dans la tige un peu moins, tandis que le mouvement du renflement s'opère quelquefois cinq ou six secondes après l'arrivée de l'excitation, et parfois ne se décide à se manifester qu'après plus d'une minute. Ces différences sont en rapport avec la sensibilité môme du renflement d'une part, et, d'autre part, avec l'in- tensité de l'excitation. Quand la pile thermo-électrique est en rapport avec le renflement 251 moteur, et que celui-ci entre en jeu, l'aiguille rétrograde de 2 à 4 degrés du galvanomètre, et s'y fixe pendant une demi-heure environ. Je me suis assuré que ce mouvement n'est dû ni à la force vive de la feuille qui tombe, ni au frottement, ni à un courant électrique formé dans le renflement; il est dû à un développement de chaleur qui est concomi • tant avec le mouvement. J'ai signalé dans ma première note ce fait que l'éther, en rendant une sensitive insensible, ne l'empêche pas d'exécuter ses mouvements quotidiens spontanés. Dans les observations faites sur les pétioles des sensitives soumises soit à la lumière soit à l'obscurité continue, j'ai vu, inversement, les oscillations quotidiennes disparaître, alors que la sen- sibilité persistait. Je me refuse donc de plus en plus à identifier, comme on continue à le faire en Allemagne, la nature intime de ces deux ordres de phénomènes. Il est remarquable que les mouvements spontanés et les mouve- ments provoqués continuent à avoir lieu dans des folioles attenantes à des fragments de pétioles secondaires, fendus dans le sens de la lon- gueur et immergés sous leau. L'eau ne suffit donc pas pour que la tension du renflement soit changée, il faut qu'il se soit formé dans les cellules des matières osmotiques qui attirent plus ou moins cette eau extérieure. L'étude de ces faits est poursuivie par moi avec assiduité. Note scr l'influence de certains rayons lumineux sur l'étiolkmest DES animaux; par M. Paul Bert. Les expériences ont été faites sur des têtards d'axolotl. Ceux qui ont été élevés sous des verres orangés ont été étiolés comme ceux qui ont été élevés dans l'obscurité, et leur pâleur, due à l'absence de pigment dans les cellules de la peau, contrastait d'une manière singulière avec la teinte gris foncé de ceux qui avaient été élevés sous des verres blancs. Or les verres orangés laissent passer toute la moitié la moins réfran- gible du spectre solaire (vert, jaune, orangé, rouge). L'étiolement est donc dû à l'absence des rayons bleus, violets et ultra violets. La séance est levée à cinq heures et demie. Séance du 24 juillet. — M. JoFFROY communique à la Société de biologie, au nom de M. Charcot et au sien, l'observation d'une femme morte à la Salpê- ^52 trière (service de M. Charcol). Cette femme était atteinte d'atrophie musculaire progressive et de sclérose des cordons latéraux. Les lé- sions intéressantes trouvées dans la moelle présentent, malgré leur complexité, une certaine analogie avec celles trouvées dans un fait communiqué antérieurement à la Société (observation de Catherine Aubel, communication du 20 février et du 10 juillet 1869), du moins pour ce qui est de la sclérose des cordons latéraux et de l'altération des cellules des cornes antérieures. Voici le résumé de l'observation (1). ATROPHIE MUSCULAIRE PROGRESSIVE MARQUÉE SURTOUT AUX MEMBRES SUPÉRIEURS; DOULEURS YIVES DANS LES MEMBRES REVENANT PAR ACCÈS , ANESTUÉSIE DANS CERTAINS POINTS DU CORPS ; PARALYSIE AVEC RIGIDITÉ DES MEMBRES INFÉRIEURS; LÉSIONS DES CELLULES NERVEUSES DES CORNES ANTÉRIEURES DE LA SUBSTANCE grise; FOYERS DE DÉSINTÉGRATION GRANULEUSE, OCCUPANT LES CORNES POSTÉ- RIEURES; SCLÉROSE RUBANÉE, SYMÉTRIQUE DES CORDONS LATÉRAUX; ÉPAISSIS- SEMENT CONSIDÉRABLE DE LA DURE-MÈRE ET DE LA PIE-MÈRE SPINALES , AU NIVEAU DU RENFLEMENT CERVICAL DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. A. C. exerçait une profession peu pénible; son occupation habituelle consistait à vendre des oranges et des sucreries en plein vent. D'une bonne constitution, elle eut des accidents hystériques depuis l'âge de 12 ans jusqu'à 29 ans. Nous empruntons aux Leçons cliniques de M. Jaccoud (1867, page 32^) les détails concernant les premières phases de l'affection. Le 15 août 1865, A. C. resta exposée pendant toute la journée au froid et à la pluie. Le lendemain elle fut prise de frissons qui se sont répétés pendant trente- six ou quarante-huit heures, et immédiatement après des douleurs sont apparues dans les membre^ du côté droit. Ces douleurs étaient apyrétiques et se rapprochaient par plusieurs de leurs caractères des douleurs fulgurantes de l'ataxie. Au mois de septembre suivant ces douleurs envahissaient le côté gauche. Au com- mencement d'octobre apparurent des mouvements fibrillaires du côté droit au membre supérieur. Une ou deux semaines après la paralysie et l'atrophie étaient évidentes. En avril 1866, la malade était complètement infirme. L'atrophie avait ' fait des progrès considérables. La contractilité électrique est affaiblie. La sensibilité explorée dans (1) Voir pour l'observation complète le mémoire de MM. Charcot et Joffroy in Archives de physiologii:, 1869, p. 637. 253 tous ses modes est intacte. Du côté malade il y a un abaissement no- table de la température. Cinq mois plus tard, en septembre 1866, c'est-à-dire un an après le début, A. C. présentait une conlracluve non douteuse des fléchisseurs de la main gauche et des fléchisseurs des jambes. Cette contracture a cessé d'exister vers la fin du mois d'octobre. Le 5 janvier 1868, la malade entre à la Salpôtrière ; elle est alors âgée de 43 ans (service de M. Charcot, division des Incurables). La malade est complètement infirme ne pouvant faire aucun usage de ses membres. A peine lui est-il possible de soulever légèrement la tête au-dessus de l'oreiller. L'intelligence et la mémoire sont con- servées. La vue est bonne, mais il existe une dilatation elliptique très- marquée de la pupille droite. Aux membres supérieurs, l'atrophie porte sur la presque totalité des muscles. La main droite offre la forme d'une griffe. Le biceps est contracture, mais plus encore le muscle pectoral. Le membre supérieur gauche est dans la flaccidité la plus complète. Les membres inférieurs sont dans la demi-flexion, habituellement un peu rigides, contractures. De temps à autre surviennent des accès douloureux pendant lesquels la contracture augmente. Les mouve- ments volontaires sont abolis. Abolition presque complète de la sensibilité au membre supérieur droit; conservation ou même exagération de la sensibilité au membre supérieur gauche. Il en est de même, mais à un moindre degré, pour les membres inférieurs. On observe dans la main gauche, soit spontanément, soit sous l'in- fluence d'excitation, des mouvements fibrillaires. La contractilité électro-musculaire a persisté en général, mais fort affaiblie. Pendant le cours du mois d'avril , A. C. a accusé, à plusieurs re- prises, des douleurs vives siégeant à la partie postérieure du cou, au niveau des dernières vertèbres cervicales et des premières dorsales, sirradiant sur la partie antéro-supérieure du thorax et jusque dans la main gauche. Il existe une eschare considérable sur la fesse droite. La malade succombe, avec des accidents thoraciques, le 1" juin, à dix heures du soir. L'autopsie est faite le 3 juin 1868. Les principales lésions sont celles de la moelle. A la région cervicale, la dure-mère et la pie-mère étaient considé- rablement épaissies en arrière, au point de former une véritable tu- meur. 254 Pour ce qui est de lamoelle elle-même, elle présentait une sorte de myélite diffuse dans toute la région cervicale avec prédominance dans les cordons latéraux. On trouvait en outre dans cette même région des foyers multiples de désintégration granuleuse. L'un d'eux, le plus grand, pouvait être suivi jusqu'au niveau du tiers inférieur de la région dorsale. Dans la plus grande partie de son trajet, il occupait la corne grise postérieure, ou, pour mieux dire, il s'était substitué à cette corne grise dont les divers éléments avaient disparu. Enfin, dans toute la longueur de la moelle, on notait une sclérose symétrique des cordons latéraux. Nous avons dit qu'à la région cervi- cale, où la sclérose était diffuse, elle prédominait d'une manière frap- pante dans les cordons latéraux. En raison du haut degré d'altération que présentent les éléments de la névroglie, il est remarquable de voir que beaucoup de cellules ner- veuses, dans les cornes antérieures, ont conservé la plupart de leurs caractères normaux. Dans la région lombaire, la substance grise (né- vroglie et cellules nerveuses) n'a présenté aucune altération appré- ciable. Les altérations musculaires étaient plus marquées du côté gauche que du côté droit, plus marquées également aux membres supérieurs qu'aux membres inférieurs. Les altérations microscopiques des muscles étaient celles que l'on rencontre ordinairement dans l'atrophie musculaire progressive. Cer- taines fibres étaient seulement atrophiées, ayant, du reste, conservé leur striation. D'autres avaient complètement perdu cette striation, ou du moins elle était à peine appréciable, et renfermait des granulations probablement graisseuses. D'autres, enfin, étaient complètement trans- parentes comme des cylindres hyalins, et renfermaient des granula- tions en général peu nombreuses. Dans l'intervalle des faisceaux mus- culaires, on trouvait accumulées çà et là d'énormes gouttelettes hui- leuses portant quelquefois sur un point de leur surface des houppes cristallisées. — MM. Charcot et Joffroy ont déjà communiqué cette année à la Société de biologie un cas d'atrophie musculaire progressive compli- qué de sclérose des cordons latéraux. Le diagnostic avait été porté pendant la vie. M. Joffroy vient entretenir la Société d'un second cas. 11 s'agit également d'une malade atteinte d'atrophie musculaire pro- gressive, et chez laquelle M. Charcot a aussi diagnostiqué une sclérose des cordons latéraux. Ces deux faits ont été observés à la Salpêtrière, dans le service de M. Charcot, M. Joffroy n'insiste pas sur les symptômes présentés pendant la vie. ?55 Celle observation fait d'ailleurs partie d'une note en voie de publica- tion dans les Archives de physiologie. Il désire seulement décrire les lésions de la moelle, et en montrer quelques préparations microsco- piques. Après avoir ouvert le canal rachidien, on est frappé par l'augmenta- tion considérable du volume de la moelle au niveau du renflement cer- vical. La dure-mère, fortement adhérente à la moelle, s'est épaissie au point de former une véritable tumeur. Cet épaississement commence à la partie supérieure de la région cer- vicale; il augmente jusqu'au milieu de cette région, puis il diminue au point de disparaître vers la partie supérieure de la région dorsale. De sorte que dans toute la région cervicale la dure-mère est intimement adhérente à la moelle et que, considérée dans son ensemble, la moelle cervicale a la forme d'un fuseau. Il y a une sclérose des faisceaux latéraux dans toute la longueur de la moelle, située au lieu d'élection, c'est-à-dire dans l'espace triangu- laire compris entre la corne postérieure et la périphérie des faisceaux latéraux. Dans la substance grise on observe une sclérose consistant dans une production abondante de noyaux de tissu conjonctif. Celte lésion s'ob- serve à la région cervicale et à la région dorsale. Il n'y a pas d'altéra- tion de la substance grise à la région lombaire. A la région cervicale cette sclérose est plus intense qu'à la région dorsale, elle sort des li- mites de la substance grise et se propage dans la plus grande étendue des faisceaux blancs, surtout des faisceaux antérieurs. Dans ce tissu sclérosé, il existe des foyers de désintégration multiples, siégeant prin- cipalement dans la substance grise; parfois ils sont situés en partie dans la substance grise, en partie dans la substance blanche; l'un d'eux esl exclusivement situé dans la substance blanche. Le principal de ces foyers de désintégration correspond à peu près à la corne postérieure du côté gauche qu'il détruit presque entièrement. Il s'étend sous forme d'un canal depuis la partie supérieure de la région cervicale jusqu'au tiers inférieur de la région dorsale; ses dimensions maximum corres- pondent au tiers supéçieur de la région dorsale. A ce niveau, le foyer de désintégration a seulement la forme d'un triangle dont le sommet serait dirigé en arrière et la base en avant. La base égale 3°"°,375 La distance de la base au sommet égale. 3°"°, 750 Tous ces foyers de désintégration sont limités par une sorte de paroi résistante formée par l'accumulation de noyaux de tissu conjonctif. Leur contenu est constitué par une matière finement granuleuse ren- 256 fermant des éléments arrondis relativement rares, et rappelant jusqu'à un certain point les leucocytes. Voilà, d'une façon sommaire, les lésions étendues que présentait cette moelle, c'est-à-dire : 1° la tumeur formée à la région cervicale par l'épaississement de la dure-mère; 2° la sclérose des cordons laté- raux; 3° des foyers de désintégration présentant des dimensions énormes. M. Magnan fait remarquer, en examinant les coupes de la moelle pré- sentées par M. Joffroy, que l'altération paraît plus étendue qu'elle n'est en réalité. En comparant, en effet, la corne postérieure du côté sain à celle qui est le siège de l'altération, on voit que l'espace laissé vide dépasse de beaucoup la portion de substance qui manquerait à la corne postérieure altérée pour égaler celle du côté sain; il y a eu pro- bablement, au moment de la préparation, écartement mécanique entre les deux parois du foyer. Ces espaces vides ont beaucoup d'analogie avec les aréoles de dés- intégration granuleuse ou fluide, trouvées dans quelques cas de téta- nos et dans un cas de paralysie générale par M. Lochhart Clarke et dans un cas de paralysie générale chez un malade de Sainte-Anne, qui a été communiqué par M. Magnan à la Société de biologie. M. Hayem fait observer que si ces espaces vides représentaient exactement l'étendue de l'altération, on les verrait, sans doute, tra- versés par des vaisseaux à parois plus ou moins épaissies et la lacune elle-même renfermerait les détritus des éléments détruits, comme on le voit habituellement dans les lacunes de désintégration. — M. Hayem fait une communication sur une altération mitsculaire consécutive aune paralysie infantile. Elle a été observée chez un jeune homme de 24 ans mort de phthi- sie pulmonaire, et atteint depuis l'âge de 2 ans, à la suite de convul- sions, d'une paralysie presque complète des deux membres inférieurs. Ceux-ci étaient atrophiés, contractures, et le malade marchait avec des béquilles depuis l'âge de 4 ans. A l'autopsie, la plupart des muscles étaient atrophiés, quelques-uns à un degré très-prononcé. Les plus malades avaient une teinte rose ou brunâtre analogue, soit à celle des muscles de grenouille, soit à celle de la chair du saumon. L'aspect fascicule avait presque complètement disparu dans certains points ; mais la plupart des muscles étaient constitués encore par des faisceaux grêles et pâles. Les altérations microscopiques portaient sur le périmysium et les fibres elles-mêmes. 257 Congestion considérable jusque dans les plus fins capillaires. Epais- sissement du tissu conjonctif avec multiplication des noyaux. Dans quelques endroits, cloisons cellulo-adipeuses très-épaisses séparant les faisceaux altérés. Dans les fibres musculaires : amincissement et pâleur des faisceaux primitifs, même des plus normaux, sous le rapport de la striation. La distribution des noyaux à l'intérieur des fibres est soumise à de grandes variétés. On en voit déjà quelques-uns dans les fibres encore normalement striées, mais ils sont surtout abondants dans les fibres granuleuses, tantôt en petits amas de cinq, huit, dix, quinze, etc., tantôt au contraire excessivement abondants au point de ne pouvoir être comptés, et de distendre la gaîne musculaire. Us ne possèdent pas de nucléole, se gonflent un peu sans chani;er notablement d'aspect par l'acide acétique, et off'rent une ressemblance assez grande avec les petits noyaux, pressés les uns contre les autres que l'on trouve dans les produits caséeux de nature tuberculeuse ou inflammatoire, et que l'on avait désignés autrefois sous le nom de cor- puscules tuberculeux. Un examen attentif des divers degrés d'altération des fibres muscu- laires démontre que ces éléments sont bien réellement des noyaux pro- duits sans doute par la multiplication des noyaux musculaires; mais dans de mauvaises conditions de développement et de nutrition, M. Hayem a d'ailleurs trouvé des productions nucléaires semblables dans la myosite parenchymaieuse des fièvres et des cachexies d;ins les cas où elle se termine par la formation de foyers caséeux. On doit conclure de ce fait que les noyaux musculaires produits par prolifération peuvent offrir quelquefois un aspect particulier, une sorte d'état caséeux qui, au premier abord, les rend difficiles à reconnaître. De plus, l'ensemble de la lésion musculaire ne saurait porter le nom d'atrophie simple. Les caractères histologiques indiqués ici se rapportent à une irrita- tion chronique, parenchymateuse; et comme il existe sans doute une lésion de la moelle, l'altération musculaire en question rentre dans les faits déjà si nombreux de troubles de la nutrition sous la dépendance d'une lésion du système nerveux. Il sera intéressant de déterminer plus tard exactement l'état de la moelle et des racines ; mais M. Hayem se borne actuellement à attirer l'attention sur l'altération spéciale des fibres musculaires. Grand nombre de fibres musculaires irrégulièrement striées, et parmi celles-ci quelques-unes off'rent un aspect tout spécial : superposition de larges bandes grisâtres bien plus épaisses que les espaces qui sépa- rent habituellement les stries transversales; chacune de ces bandes sé- C. R. 1869. 17 ^58 parées de la voisine par un espace clair ; dans quelques fibres, outre les fentes qui existent entre chaque bande transversale, il existe des fentes longitudinales qui donnent aussi naissance à des blocs cubiques bien plus volumineux que les éléments normaux sarceux. Les fibres les plus atrophiées ont perdu leur striation; elles sont irrégulières, ici très-étroites, là encore larges et distendues; la plupart contiennent des granulations protéiques et quelques granulations grais- seuses; quelques-unes renferment, en outre, un grand nombre de gra- nulations pigmentaires. Le point le plus important que M. Hayem tient à signaler, c'est la présence dans ces fibres atrophiées de petits noyaux ayant ici des ca- ractères particuliers. Ce sont de petits éléments pressés les uns contre les autres, irrégu- liers, plus petits ou à peine aussi gros que des globules rouges du sang. Leurs bords sont un peu anguleux, leur contour net, leur aspect gri- sâtre, brillant; leur réfringence paraît considérable. Nouvel appareil pour la respiration artificielle; par N, Gréhant, aide-naturaliste au Muséum. L'indication de faire la respiration artificielle chez l'homme se pré- sente dans une foule de circonstances, dans tous les cas d'asphyxie de cause si diverse, et dans l'empoisonnement par les gaz ou les vapeurs délétères absorbés par les poumons. Je crois utile de faire connaître un appareil que j'ai fait construire par M. Vérick, et qui permet de faire la respiration artificielle chez l'homme ou chez les animaux pendant un temps indéfini. Le mouvement direct de rapprochement et de l'éloignement des bran- ches d'un soufflet, qui devient si fatigantau bout de quelques minutes, est obtenu dans mon appareil à l'aide dun mouvement de rotation que l'on peut maintenir longtemps sans fatigue. Un axe horizontal mobile dans deux coussinets se termine d'un côlé par une manivelle, de l'autre par une coulisse imitée de la coulisse de Siephenson. Dans celte coulisse on peut fixer à l'aide d'une vis et d'un écrou mo- bile l'une des extrémités d'une bielle dont l'autre extrémité est unie par une articulation à genou avec Tune des branches d'un fort soufflet dont la seconde branche est fixée d'une manière invariable. Lorsqu'on fait tourner la manivelle, k- point de la bielle fixé à la coulisse décrit une circonférence dont on change à volonté le rayon en approchant ou en éloignant ce point du centre de l'axe de rotation; on donne ainsi au mouvement du soufflet l'amplitude que l'on désire, 259 et par suite on est maître de son débit; rien n'est plus facile aussi que de régler la vitesse du mouvement. Des poulies fixées sur l'axe peuvent recevoir le mouvement d'un moteur quelconque. La tuyère du soufflet porte un tube de caoutchouc qui se termine par un renflement en forme de poire; j'attache une grande importance à l'usage de cet embout spécial, chez l'homme aussi bien que chez les animaux que l'on soumet à la respiration artificielle. L'introduction d'une sonde dans le larynx exige de l'habitude et peut produire des contusions graves, tandis que cette ampoule de caoutchouc s'intro- duit facilement dans la bouche, se prêle à la forme de la cavité ; puis on maintient la bouche fermée à l'aide d'un lien passé sous le menton et noué sur le sommet de la tête. On ne peut obtenir ainsi, il est vrai, qu'une occlusion imparfaite des voies aériennes, car l'air peut passer entre l'ampoule et les parois buccales, puis par les fosses nasales qui sont ouvertes. Mais on réglera l'amplitude de mouvement du souf- flet de manière que l'air insufflé pénètre en quantité suffisante pour dila- ter les poumons, produire l'inspiration et s'échapper en même temps par les voies ouvertes ; l'expiration se fait par l'élasticité des poumons à travers les fosses nasales. Lorsque les parois musculaires de l'œsophage ont perdu leur tonicité, l'air msufflé, on le reconnaît par l'expérience, pénètre avec la plus grande facilité dans l'estomac; cela n'offre pas d'inconvénient, car des pressions exercées sur cet organe chassent l'air qui le distend. Les pressions intermittentes sur l'abdomen pendant que se pra- tique la respiration artificielle ont encore un autre avantage: on ob- serve chez des animaux qui ont été sacrifiés, que des pressions faites sur l'abdomen de la partie périphérique vers la partie centrale font affluer le sang dans la veine cave inférieure et par suite dans le cœur droit; on aide ainsi puissamment au rétablissement de la circulation. Il y a un fait certain : les manœuvres de la respiration artificielle peuvent donner au sang qui remplit les poumons de l'oxygène et lui enlever de l'acide carbonique ; mais si le sang reste immobile, la vie ne peut revenir dans les tissus; il faut donc s'efforcer de faire circuler le sang oxygéné, de le faire revenir au cœur gauche où il excite de nouveau les contractions de l'oreillette. Je crois qu'il est rationnel de pratiquer des pressions intermittentes sur l'abdomen, chez l'homme asphyxié que l'on soumet à la respira- tion artificielle. M. Krishaber fait ressortir les avantages de l'appareil de M. Gréhant, mais il y trouve certains desiderata. 11 a cherché lui-même à construire un appareil permettant de déterminer d'une façon précise le degré de 2C0 tension et le volume d'une colonne d'air poussée dans une direction donnée. Il aurait eu besoin de celte détermination exacte pour la solu- tion de problèmes relatifs à la physiologie de la voix. Ainsi en dirigeant par la trachée dans le larynx une colonne d'air à volume et à tension déterminée; d'autre part, en agissant avec une force donnée sur les muscles du larynx à l'aide de l'appareil de Dubois-Raymond on obtien- drait un son déterminé que l'on ferait varier à volonté et que l'on pour- rait mesurer en graduant successivement les forces employées; dans les expériences de ce genre, il sectionne préalablement les récurrents afin de s'affranchir de la volonté de l'animal, dont l'intervention trou- blerait l'expérience. M. VuLPiAN, tout en reconnaissant que l'appareil de M. Gréhant peut recevoir de bonnes applications, ajoute toutefois que l'appareil le plus simple est le soufflet : la tuyère est introduite dans la trachée, l'air s'échappe facilement entre la tuyère et les parois de la trachée pendant l'expiration, et l'opération peut être continuée ainsi pendant fort long- temps. D'autre part, il est possible pendant deux ou trois heures d'in- suffler soi-même de l'air dans la poitrine d'un animal, directement à l'aide d'un tube, sans l'intermédiaire du soufflet. C'est là encore le pro- cédé le plus simple, celui qu'il conseillerait toutes les fois qu'on pour- rait l'appliquer. M. Laborde, invoquant les difficultés que l'on éprouve à pratiquer pendant un temps suffisamment long la respiration artificielle dans cer- tains cas d'asphyxie et plus particulièrement à la suite de la trachéo- tomie, pense que l'appareil de M. Gréhant pourrait rendre de grands services en pareille circonstance. Sur un siège de prédilection de l'endocardite; par R. Lépine, interne des hôpitaux. Dans un nombre assez considérable d'autopsies j'ai noté que les lé- sions caractéristiques de l'endocardite (coloration jaune, épaississe- ment très-notable de l'endocarde) siégeaient non-seulement sur la val- vule mitrale, mais sur une partie spéciale de l'oreillette gauche, la paroi postéro-externe. Celte localisation me semble pouvoir être ex- pliquée par une action mécanique par un tiraillement que subirait celte portion de l'endocarde auriculaire à chaque contraction du cœur, et voici comment j'en conçois le mécanisme : Comme on sait, le sillon auriculo-ventriculaire s'abaisse au moment de la systole des ventricules; c'est une conséquence nécessaire du recul. (On ne comprendrait pas d'ailleurs que cet abaissement fît défaut quand on remarque qu'au moment de la systole l'axe longi- 261 tudinale des ventricules se raccourcit et que cependant la pointe ne se porte pas en haut et en arrière.) On sait, de plus, qu'au même instant se produit un léger mouvement par lequel le ventricule gau- che devient plus antérieur en même temps que la pointe se porte un peu à droite. Mais, d'autre part, on peut se convaincre sur le cadavre que le point où les veines pulmonaires viennent déboucher dans l'oreillelte est doué de très-peu de mobilité. On peut le considérer comme un point fixe. 11 en résulte qu'à chaque systole des ventricules la paroi posté' rieur et gauche (ou externe) de l'oreillette gauche est légèrement allongée. Elle subit donc un léger tiraillement qui peut la prédisposer à devenir le siège d'une inflammation, de môme que la crosse aortique, au niveau de sa courbure, est un siège de prédilection de l'alhérome. Inaction de la strychnine consécutivement a l'empoisonnement par l'acide phénique; par, Paul Bert. Un chien, dont les deux nerfs pneumo-gastriques venaient d'être coupés, reçut dans l'estomac une dose mortelle d"acide phénique. Comme son agonie se prolongeait plus qu'il n'était nécessaire, je vou- lus en finir et lui injectai sous la peau en deux endroits 6 centigrammes de sulfate de strychnine dissous dans 3 grammes d'eau. C'était environ six fois la dose mortelle, et l'animal aurait dû être foudroyé. Au mo- ment oîi fut faite l'injection, le chien présentait depuis une heure et demie les convulsions dues à l'acide phénique. (Voyez plus haut, séance du 29 mai 1869.) La température n'avait pas sensiblement baissé, mais la pression cardiaque était tombée à 6 centimètres cubes de mercure. Nonobstant cet état d'abaissement, il est certain que la strychnine eût foudroyé l'animal sans la présence de l'acide phénique. Or, malgré cette dose énorme, l'animal, qui mourut environ trois quarts d'heure après, ne présenta aucune des convulsions cloniques de la strychnine, ni spontanées ni excitables, et seulement quelques roideurs lorsqu'on voulait replier un membre étendu. On pouvait supposer que l'acide phénique avait agi dans -e sang ai- rectement sur la strychnine, pour ralentir son absorption par les élé- ments anatomiques. J'ai montré, en effet, que toute la strychnine d'une dissolution en est séparée et mise sous forme insoluble par l'agitation avec quelques gouttes d'acide phénique. On pouvait penser aussi, et même avec plus de vraisemblance, que la strychnine n'avait pas pro- duit son action sur les cellules sensibles de la moelle épinière, à cause de l'épuisement dans lequel elles se trouvaient à la suite de l'empoi- sonnement par l'acide phénique. .....v; 262 Cette dernière explication s'est trouvée être la vraie. En effet, le lendemain on administre à un autre chien une dose mor- telle d'acide phénique. Cinq minutes après le début des accidents con- vulsifs, et à une époque où le sang contenait beaucoup d'acide phé- nique, mais où la moelle n'était pas épuisée, on injecte sous la peau 4 centigrammes de sulfate de strychnine. Environ deux minutes après arrive une violente convulsion, et l'animal meurt cinq minutes après l'ingestion, c'est-à-dire, à peu près comme s'il n'avait pas eu d'acide phénique. Voici encore ramené à sa véritable valeur un fait qu'on aurait pu pré- senter comme pouvant prendre place parmi tant d'exemples donnés à tort de prétendus antagonismes entre certains poisons. M. Leven pense que cette tolérance est plus apparente que réelle. Lorsque l'on administre de la strychnine à des animaux arrivés à un certain degré d'asphyxie, on les tue quelquefois, d'autres fois, au con- traire, le poison parait inerte. La cause de cette différence d'action est mécanique d'après M. Leven, Il y a gêne circulatoire ou gêne dans l'absorption, et le poison arrivant à faible dose jusqu'aux centres ner- veux produit peu d'accidents. Le système nerveux reste toujours sensible aux diverses substances pourvu qu'elles arrivent jusqu'à lui. M. Bert ne partage pas cette opinion. Il n'existait point chez les ani- maux de troubles appréciables dans l'absorption ou la circulation quand la strychnine a été employée, et néanmoins les accidents ont fait défaut. Il en est de même, du reste, pour l'électricité, dont l'action serait moins bien sentie au bout de quelque temps d'application. M. DuMONTPALLiER pensB qu'il faut tenir gra^d compte des différents états physiologiques ou pathologiques des centres nerveux dans l'ad- ministration des poisons ou des médicaments. La clinique enseigne que, dans certaines affections douloureuses, des doses énormes d'opium sont tolérées par les malades, mais que la névralgie, que le tic dou- loureux par exemple viennent à disparaître, il faut aussitôt cesser l'em- ploi du médicament, si l'on ne veut pas voir survenir des accidents. Ainsi tolérance très-grande pendant les douleurs; action normale et par suite accidents avec une dose trop forte, dès que les douleurs ont cessé. M. Dumontpallier donne plusieurs exemples et signale en parti- culier le fait d'un brossier observé par Trousseau, qui, atteint de né- vralgie, avait pu impunément avaler 750 grammes de laudanum de Sy- denham. M. VuLPiAN demande à M. Bert de quelles préparations de strychnine il s'est servi. Quand on emploie la strychnine, les accidents ne se 2li3 montrent quelquefois qu'au bout d'une demi-heure, ils apparaissent, au contraire, promptement quand on fait usage du sulfate de strych- nine. Note sur la résistance considérable que présentent les animaux nouveau- nés A l'action de certains poisons; par Paul Bert. 1" Un chien âgé de 8 ou 10 jours, pesant 650 grammes, reçoit sous la peau de la cuisse 2 milligrammes de sulfate de strychnine dissous dans 1^',3 d'eau. Injection à quatre heures trente-cinq minutes; pre- mière convulsion à quatre heures quarante-deux minutes; vivait en- core à neuf heures trente minutes du soir, après avoir présenté des attaques convulsives parfaitement régulières. On le tue alors. Or 1 centigramme du sel employé eût tué en quatorze minutes un chien pesant 5", 750; cela correspondrait pour un chien pesant 650 grammes à P^l de poison. Cette dose, voisine de celle qui a été ad- ministrée, n'a donc par tué l'animal, comme on eût pu s'y attendre. 2° Chien de la même portée, pesant 625 grammes. A quatre heures vingt-cinq minutes du soir, injection de 7"^, 7 de sulfate de strychnine. Attaques convulsives régulières, survenant très-rapidement. Le lende- main, à quatre heures du soir, l'animal, dans la trachée duquel un tube avait été placé, n'est pas encore mort, ei présente toujours des convul- sions. Cette dose représenterait, pour un chien de 5'',750, 7"',1 de sel, c'est-à-dire sept fois la dose rapidement mortelle. 3° Chien de la même portée, pesant 610 grammes. Sous la peau, in- jection à trois heures vingt et une minutes de 4 milligr. de sulfate de strychnine, puisa quatre heures quarante-sept minutes, de 11 milli- grammes. Convulsions régulières, mort à six heures quinze minutes. La dose, si l'on ne prend que 11 milligrammes, correspondait à 3°^,77 pour un chien de b^\lbO, et si l'on prend 15 milligrammes à 14''^,14, en d'autres termes, quatorze fois la dose mortelle. Or la mort n'est survenue qu'après une heure et demie. Dernier exemple : un chat âgé de 5 à 6 jours, pesant 175 grammes, a reçu 7°'«,7 de sulfate de strychnine sous la peau; il n'est mort qu'a- près dix-sept minutes. Cette dose correspondrait pour un gros chat adulte pesant 3", 500 à 15''%4 de sel, dose énormément supérieure à la dose immédiatement mortelle. J'ai observé avec la digitaline des faits analogues. Ainsi un chat de la même portée que le précédent, pesant 200 grammes, n'est mort qu'une heure un quart après l'administration sous la peau de 1 milligramme de digitaline dans l'eau. Ces faits pourraient peut-être recevoir quelques applications en mé- 264 decine. Il est probable que les enfants, dans les premiers jours qui sui- , vent leur naissance, ne se comportent pas, par rapport aux médica- ments, comme ils le font quand ils sont âgés de quelques semaines ou de quelques mois. Aussi, dans un cas d'empoisonnement par de la strychnine, par exemple, administrée à la mère et à un enfant né la veille, il est probable que l'enfant survivrait à la mère, si énorme que fût la dose qu'on lui aurait fait prendre. En un mot, les mêmes questions en physiologie, en thérapeutique, en médecine légale paraissent être soulevées pour certains poisons, pour la strychnine au moins, comme pour l'asphyxie: la résistance des nouveau-nés, semble être tout aussi extraordinaire dans les deux cas, et durera autant que dure la persistance singulière que présen- tent aussi les propriétés (neurilité, contractilité) de leurs éléments ana- tomiques. M. Leven a constaté chez l'enfant des résultats différents de ceux observés chez les jeunes animaux. Dans un cas, en particulier, une cuillerée de sirop diacode aurait suffi pour plonger pendant trente- huit heures un enfant de 6 jours dans un sommeil tellement profond que des excitations multipliées n'étaient suivies d'aucune réaction ; toutefois les coups portés sur la région fessière avaient le privilège de provoquer de faibles cris. La séance est levée à cinq heures et demie. Séance du 31 juillet. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Krishaber, à l'occasion du procès-verbal, s'exprime en ces termes : « Comme il entre dans la pensée de M. Gréhant d'appliquer son ap- pareil de respiration artificielle sur l'homme dans les cas d'asphyxie de tous genres et des empoisonnements, où la respiration artificielle trouve son indication, il importe d'examiner attentivement le procédé qu'il propose. H Faut-il qu'une sonde ou un conduit quelconque soit introduit di- rectement dans le larynx ou dans la trachée pour entretenir la respira- tion, ou sufSt-il de conduire l'air dans la cavité bucco-pharyngée? M. Gréhant est partisan de ce dernier mode d'agir; je ne saurais en cela, mais en cela seulement, accepter sans réserves les conseils de notre collègue. <( Quand on veut pratiquer l'msufflation artificielle par la bouche sur des individus qui ne respirent plus, on remarque que la langue a une 265 tendance marquée à tomber en arrière; l'épiglotle se trouve le plus souvent renversée sur l'ouverture du larynx; et en supposant alors la piession d'un courant d'air un peu fort pendant l'insufflation, l'épi- glotte doit, suivant moi, tendre, comme dans l'arrivée des liquides, à obturer, quoique incomplètement, l'entrée du larynx. « M. Gréhant a expérimenté sur des animaux en pleine vie, pouvant faire mouvoir les muscles sous l'influence de la volonté et dilater l'ouverture du larynx; mais l'homme qui asphyxie ne se trouve pas dans les mêmes conditions. En admettant même que l'animal n'ait point de mouvements spontanés, comme cela arrive quand il est cu- rare, les muscles n'en ont pas moins gardé leur tonicité normale. Quand il s'agit de l'homme qui asphyxie, une ampoule introduite dans la bouche, si elle n'est pas assez volumineuse pour relever le voile du palais, fera revenir une certaine quantité d'air par les arrière-narines, et comme le pharynx est largement ouvert, l'air pénétrera en beaucoup plus grande quantité dans le pharynx que dans le larynx. Or, si inno- cente que soit la présence de l'air dans l'estomac, c'est cependant dans le poumon qu'il s'agit de le conduire. L'ampoule est-elle volumineuse au contraire, l'air s'échappera alors difficilement pendant l'expiration; on s'expose à produire de l'emphysème pulmonaire et, de toute façon, une respiration incomplète. C'est ainsi que la respiration de bouche à bouche donne rarement les résultats favorables que l'on obtient par l'insufflation à travers un tube laryngé. J'ai eu moi-même l'occasion de pratiquer les deux procédés, et j'ai gardé la conviction que ce n'est qu'à défaut de mieux qu'il faut recourir à l'insufflation de l'air dans la bouche. M. Cl. Bernard a montré dans son cours du semestre dernier, un petit appareil de Marcey qui me semble très-bien s'approprier à l'insufflation laryngée directe, et qui, uni à l'appareil de M. Gréhant, moins l'ampoule, constituerait un moyen de secours très-sérieux en même temps qu'un excellent instrument d'application physiologique. « Dans la boîte aux secours, et là j'exprime un desideratum, l'appa- reil de M. Gréhant, à modèle réduit, pourrait remplacer avec un avan- tage très-marqué certains engins plutôt embarrassants qu'utiles. » M. Gréhant rappelle une expérience faite sur un chien avec l'am- poule buccale; la respiration artificielle s'est très-bien effectuée. II ignore si chez l'homme il obtiendrait le même succès. Par l'emploi de l'ampoule buccale il avait surtout en vue d'éviter la sonde laryngienne. Lésions cérébrales, cérébelleuses et des canaux semi-circulaires produites EXPÉRIMENTALEMENT SUR DES PIGEONS; par M. CaRVILLE. Exp. L — 19 avril 1869. — Ablation des lobes cérébraux sur un pigeon fort et vigoureux. .-fj ^-m 266 Aussitôt après l'opération le pigeon vomit, puis reste immobile, ne peut ou ne sait se soustraire aux coups qu'on lui porte, ni se défendre; cependant il lève et replie sous lui celle de ses pattes qu'on vient de frapper. Il élernue et gratte son bec quand on lui fait respirer de l'ammo- niiique; il ne paraît pas distinguer la lueur d'une bougie rapprochée de ses yeux, toutefois ses pupilles se contractent; il ne voit pas les doigts dirigés vers ses yeux. Quand on le force à marcher il se heurte aux obstacles, et quand il arrive au bord de la table il tombe à terre. Ce pigeon survit pendant sept jours restant à peu près dans le même état, si ce n'est qu'au bout de trois jours il commençait à faire quelques pas spontanément et à lisser ses plumes. Jamais il n'a pu manger ni boire seul, mais quand on le gave il déglutit très-bien. 25 avril. — Le pigeon est trouvé mort dans sa cage; on peut soup- çonner qu'il n'a pas été nourri avec soin, le jabot et l'estomac sont vides. Examen de la tète. — Les lobes cérébraux sont complètement enlevés et remplacés par un caillot déjà un peu décoloré. Exp. II et III. — 25 mai et 1" juin 1869. — Même expérience sur deux pigeons adultes, mômes phénomènes observés» Ils ne survivent que deux ou trois jours chacun. On peut constater que lablation des lobes cérébraux a été complète. Exp. IV. — 24 juin 1869. — J'ai pratiqué l'ablation des hémisphères cérébraux sur le pigeon que je présente aujourd'hui après une survie de trente-sept jours. Pendant dix ou douze jours ce pigeon a présenté les phénomènes décrits dans la première expérience; j'ajouterai qu'il paraissait sen- sible à la saveur amère et que la décoction de coloquinte placée à la base de sa langue lui faisait faire des efforts de régurgitation et sem- blait lui donner une sensation désagréable. La détonation d'un pistolet lorsque le pigeon, placé sur un support fixe, était somnolent et avait les yeux fermés, lui faisait faife un mou- vement brusque de réveil et ouvrir les paupières. Peu à peu les mouvements spontanés sont revenus; aujourd'hui le pigeon ne peut encore ni boire ni manger seul, mais il se promène len- tement, lisse ses plumes, détourne la tête quand on rapproche vive- ment la main de ses yeux. A-t-il conservé la vision? Un objet placé lentement près de ses yeux ne lui fait faire aucun mouvement de recul, mais ceci peut s'observer môme dans l'état normal. 267 Il essaye un peu de se défendre quand on le contrarie, mais il ne sait pas fuir. Il parcourt la table sur laquelle on l'a posé ; arrivé sur les bords il paraît avoir conscience du vide et s'arrête, puis revient sur ses pas, se dirigeant même du côté de la personne qui le frappe. Si l'on persiste à le frapper il pousse quelques cris, et je l'ai vu deux ou trois fois battre des ailes et se soulever au-dessus de la table, mais sans en perdre le contact; de l'extrémité de ses pattes il la touchait, l'effleu- rait, pendant que ses ailes le soutenaient dans lair. A l'état de repos, c'est-à-dire en dehors des excitations, il reste immobile, les paupières habituellement fermées. L'examen du cerveau sera fait pour vérifier quelles sont les lésions opérées. Exp. V. — 24 juin 1869. — Sur un pigeon fort, au moyen d'un cau- tère actuel chauffé à blanc, lésion du cervelet, sur la ligne médiane avec la précaution de ne pas atteindre les canaux semi-circulaires. Immédiatement le pigeon est comme paralysé, ne peut se tenir sur ses pattes ni voler, mais le soir même (quatre heures après l'opération) ataxie très-complète des mouvements. Cette ataxie est fort prononcée dans les pattes, pas de paraplégie; les deux ailes battent simultanément, pas d'hémiplégie ni de paralysie, La vue est conservée ainsi que l'odorat et le goût. Au bout de huit du dix jours les phénomènes diminuent d'intensité, l'animal boit et mange seul. Aujourd'hui, trente-sept jours après l'opération, au repos le pigeon ne présente rien d'insolite. Quand il marche il appuie fortement sur la plante des pattes et fait un certain bruit avec ses pattes lancées avec force sur le sol; de plus les jambes paraissent moins dans l'extension que celles d'autres pigeons examinés comparativement. Il y a de la titubation dans la démarche, surtout quand on l'excite. Jamais il n'y a eu de mouvement de rotation ni de manège; la tête n'a jamais été agitée. Exp. VI. — 28 juin 1869. — Les canaux semi-circulaires sont mis à nu du côté droit de la tête d'un pigeon, sans pénétrer dans le crâne. Je pratique d'abord la section du canal horizontal droit, puis des ca- naux verticaux supérieur et inférieur (selon la dénomination adoptée par Flourensj droits et enfin du canal horizontal gauche. De suite, après l'opération la tête est agitée de mouvements les plus incohérents en avant, en arrière, de côté; puis peu à peu et au bout de trois jours les mouvements désordonnés se fondent en un mouve- ment de 8 de chiffre. 268 Aussitôt qu'on excite le pigeon ce mouvement devient très-fort ; quand il est au repos il cesse, et alors l'animal prend une position fort curieuse, déjà observée du reste par les physiologistes. La tête s'incline à droite, se recourbe jusqu'à ce que l'occiput vienne s'appuyer sur le sol, le bec étant à gauche et dirigé en haut : de cette façon le pigeon a trois points d'appui, les deux pattes et la tête. Cette posture lui est si ordinaire depuis un mois qu'il s'est formé une petite callosité sur le sommet de la tête; du reste pas de troubles dans les mouvements des ailes et des pattes. Le pigeon voit, sent, déguste; on est obligé de le nourrir à cause des mouvements ou de l'ataxie de sa tête. Aussitôt qu'il a lissé, nettoyé ses plumes, agité par conséquent sa tête, il s'appuie sur le sol comme pour reprendre son équilibre. La démarche est normale quand l'oiseau n'est pas excité et qu'il porte la tête haute; au contraire, si on l'effraye, il prend un point d'appui sur son occiput et l'on peut le voir marcher de côté ou même à reculons, mais ce n'est que momentané. Depuis trois semaines que ces phénomènes ont été réglés, et pour ainsi dire organisés, l'état du pigeon n'a pas changé ; il l y a pas eu de diminution ni d'atténuation des mouvements. L'ouïe ne paraît pas détruite, la détonation d'un pistol L i. it incliner la tête du pigeon à droite et lui fait prendre la position (' jà décrite. A aucune époque je n'ai vu de rotation ni de manège chez cet oiseau, pas plus qu'il ne m'a été donné d'en voir chez des lapins lors de trois arrachements de facial que j'ai faites ces jours derniers et qui avaient été très-complètes, ainsi que me l'ont démontré l'examen du nerf ar- raché et les phénomènes consécutifs. L'examen de ce pigeon sera fait ultérieurement. Quant à l'explication de ces phénomènes, les théories deMM. Flou- rens, Brown-Séquard, Lussana ne paraissent pas satisfaisantes. Les faits pathologiques de MM. Burggraeve, Brigth, Waller, Hinten, Me- nière, Vulpian, Hillairet, Lussana, etc., ne peuvent non plus être éclai- rés que par la physiologie expérimentale. Les expériences que je tente dans ce moment seront soumises à la Société de biologie. — M. JoFFROY présente les pièces pathologiques d'une malade morte à la suite d'une sclérose en plaques de forme cérébro-spinale. — M. LiouviLLE a vu un cas de sclérose en plaques, dans lequel les nerfs partant de la moelle étaient envahis par la sclérose en plaques. M. PoucHET : Je désire communiquer à la Société de biologie quel- ques expériences qui me semblent démontrer de la manière la plus 269 nette que les larves de Muscidées privées d'yeux ont cependant une perception très-nette de la lumière et de la direction suivant laquelle elle les frappe. Ces expériences ont été faites sur une table rectan- gulaire dans un appartement éclairé par une seule fenêtre étroite. Un certain nombre de larves de mouche (ce sont ordinairement des asti- cots du commerce) sont placées sous une petite cloche opaque, que l'on dispose en un point de la table, puis on la lève, et l'on voit aussitôt les larves prendre une direction opposée à celle de la fenêtre. L'ex- périence est encore plus concluante quand au lieu de la lumière du jour on emploie la lumière artificielle d'une lampe. Quand on lève la cloche opaque , sous laquelle sont les asticots, on les voit toujours prendre une direction parallèle à la marche des rayons lumineux qui tombent sur eux, en s'éloignant de la lampe. Si alors on change la lampe de place, et qu'on la porte subitement de l'autre côté de la table, on voit tous les asticots se retourner comme un escadron qui accomplirait une conversion, et reprendre leur marche en sens in- verse, tournant toujours l'extrémité postérieure du corps à la lu- mière. Ces expériences peuvent être variées à l'infini, et j'ai toujours pu constater que les larves fuyaient d'une manière constante la lumière, et qu'elles avaient par conséquent la perception très-exacte de la di- rection dans laquelle celle-ci tombait sur eux. Il ne peut donc pas s'agir ici d'une sensation vague de la lumière qui s'expliquerait par une plus ou moins grande somme de bien-être ressenti ; il y a percep- tion instantanée et option rapide. J'ai essayé de vérifier si tous les rayons colorés avaient la même in- fluence, mais ces expériences faites par les procédés fort insuffisants dont j'ai pu seulement disposer jusqu'à ce jour, ne m'ont donné aucun résultat décisif. J'ai aussi répété les mêmes expériences sur des larves à'Ei^istolis tenax qui ont été décrites à tort par les zoologistes comme ayant des « yeux assez gros. » Les organes qu'ils ont pris pour des yeux sont des dépendances du système trachéen, et n'ont aucun rapport avec des organes de vision. Il fallait rechercher quel était le siège des sensations qui donnaient ainsi a l'asticot la perception exacte du sens dans lequel la lumière le frappait. La larve porte en avant du premier segment, ou segment cé- phalique deux paires d'organes sensitifs décrits par Weismann comme représentant, l'une les antennes et l'autre les palpes maxillaires. Ils re- çoivent des nerfs volumineux, et sont bien évidemment des organes sensitifs. Pour m'assurer qu'ils n'étaient point le siège de la sensation lumineuse, j'en fis l'ablation sur un certain nombre de larves, et après les avoir laissées en repos neuf heures, je pus vérifier que la sensation 270 de la lumière était restée intacte chez elle. Le siège de cette sensation était donc probablement le bourgeon d'où se développera plus tard l'œil à facette de l'adulte. Mon attention se porta dès lors sur la struc- ture et le développement de celui-ci. Sur l'asticot parvenu à toute sa taille, la surface du bourgeon oculaire est formée de prismes dont cha- cun plus tard deviendra un des organes dont l'ensemble formera l'œil composé. Ces prismes formant par leur extrémité la surface sphé- rique du bourgeon oculaire ont tous, par conséquent une direction différente. On conçoit qu'ils soient influencés différemment par les rayons parallèles émanant d'une source de lumière unique, et qu'ils permettent ainsi d'en apprécier la direction. En étudiant de plus près les prismes du bourgeon oculaire, on voit qu'ils sont formés de petits noyaux ovoïdes, à prolongements assez semblables aux noyaux ovoïdes de la rétine. On ne trouve aucune trace de cristallin de l'œil de l'insecte adulte. On peut s'assurer qu'au mo- ment de la vie de l'insecte, chaque organe simple dont l'ensemble doit constituer l'œil n'est en aucune façon un appareil dioptrique. De sorte que si la larve des Muscidés perçoit nettement, comme mes expé- riences semblent le démontrer, la direction et l'intensité des rayons lumineux, elle ne perçoit point d'images semblables à celles que recueille l'appareil visuel des vertébrés. — Je me réserve d'étudier, dans une communication ultérieure, ces expériences sur la vision des larves de Muscidés, en rapport avec la théorie de Miiller sur l'œil com- posé des insectes. La séance est levée à cinq heures trois quarts. COMPTE RENDU DES SÉANCES DE f- r LA SOCIËTË DE BIOLOGIE PENDANT LE MOIS D'AOUT 1869 Par m. MAGNAN, secrétaire. PRÉSIDENCE DE M. CL. BERNARD. Séance du 7 août. Note sur un fait de sclérose diffuse de la moelle avec lacune au centre de cet organe, altékatlon de la substance grise et atrophie musculaire; par M. Hallopeau. En dehors des scléroses fasciculées et de la sclérose en plaques dis- séminées, il existe une forme de myélite interstitielle dans laquelle la lésion porte sur l'ensemble de la trame conjonctive sans affecter de distribution régulière. Nous la désignons, avec M. Magnan, qui l'a étu- diée dans la paralysie générale, sous le nom de sclérose diffuse. Notre observation et celle qu'a publiée Founmann en 1865 en établissent l'existence comme affection idiopathique. L'histoire en est encore in- complètement connue. Les deux faits que nous venons de citer, rap- prochés des cas analogues connus dans la science, nous ont conduit à formuler les propositions suivantes : 272 1" La sclérose diffuse peut reconnaître des causes très-diverses : elle semble pouvoir se produire chaque fois que la moelle subit d'une façon persistante l'action d'une cause irritante. Elle peut, en particulier, avoir pour point de départ l'irritation provoquée par la présence dans la moelle ou dans le bulbe d'un foyer hémorrhagique ou névrosique. 2° Elle peut donner lieu, pendant la vie, à des troubles de motilité, de sensibilité et de nutrition. La distribution irrégulière de ces symp- tômes est en rapport avec celle des lésions. 3" Il peut se former dans la moelle des cavités anormales ; elles nous paraissent résulter des pertes de substance que subit le tissu morbide probablement à la suite de métamorphoses régressives. C'est ainsi, selon nous, qu'il faut interpréter la plupart des faits dans lesquels on a signalé la présence de grandes lacunes au centre de la moelle. 4° L'atrophie de la substance nerveuse peut être portée à un haut degré. (Dans notre fait, la substance grise avait en grande partie dis- paru dans une étendue considérable de l'axe médullaire. Les racines et les nerfs qui émanaient de ces parties étaient altérés.) 5* Il peut se produire dans la sclérose diffuse de la moelle des lésions atrophiques des muscles; elles semblent être en relation avec les al- térations des cornes antérieures. Les fibres des muscles atrophiés sont en partie détruites; celles qui restent renferment une quantité anor- male de noyaux et l'atrophie musculaire est donc liée dans ce cas à un processus irritatif. M. Carville présente les pièces pathologiques et les dessins relatifs aux lésions cérébrales qu'il avait déterminées chez les pigeons et dont les phénomènes physiologiques ont été exposés dans une précédente séance (31 juillet). M. Krishaber fait remarquer à propos des expériences de M. Carville que l'on ne peut pas dire avec certitude, si les phénomènes observés sont l'effet immédiat de l'absence de la portion enlevée des centres nerveux , ou bien s'ils dépendent des modifications survenues sous l'influence du traumatisme dans les parties conservées. Les animaux meurent d'accidents convulsifs dont on ignore la cause précise. Chez certains animaux on peut enlever des portions assez étendues des centres nerveux sans modifier la motilité ; ainsi chez les poissons l'ablation du cervelet ne change rien aux mouvements. Il serait né- cessaire d'étendre le champ d'observation pour ces recherches phy- siologiques, et ne pas se borner aux expériences faites sur les oiseaux. Dans ces expériences, il cautérise au fer rouge de manière à éviter les accidents produits par une hémorrhagie- trop abondante. M. VuLPiAN fait remarquer que l'expérimentation à l'aide du fer rouge peut, à son tour, produire des phénomènes particuliers, et que 273 le mode le plus simple est celui qui consiste à enlever i'écaille céré- brale et à agir ensuite avec une spatule fine ou une rugine. Observation de sclérose e,\ plaques cérébro-spinale an-ec atrophie PAPILLAIRE DES DEUX YEUXj par M. MaG.NAN. s... Marie, âgée de 34 ans, est entrée au bureau d'examen (Sainte-Anne) le 6 juillet 1869. A 13 ans, Marie est atteinte de fièvre typhoïde et garde le lit six semaines. Pendant la convalescence la vue s'affaiblit, et très-rapidement survient une cécité complète. La santé générale reste bonne, l'intelligence assez nette jusqu'au commence- ment de 1867. A cette époque, on s'aperçoit d'un tremblement des bras et des mains apparent dès que la malade cherche à faire un mou- vement d'une certaine précision. Ce tremblement, pendant l'exercice musculaire, d'abord limité aux membres supérieurs, augmente et s'étend aux jambes; depuis huit mois, la malade marche avec peine, devient incapable de porter les aliments à la bouche; on est obligé de la faire manger et de la laisser presque constamment assise. A ces troubles moteurs s'ajoutent des phénomènes du côté de la sensibilité; des dou- leurs apparaissent sur différentes parties du corps, mais plus particu- lièrement dans le côté droit. Actuellement, quand la malade est assise, et sans la moindre idée de déplacement, elle reste immobile dans une attitude naturelle; mais dès qu'on l'interpelle, qu'elle se tourne pour répondre, qu'elle soulève la tête, celle-ci devient le siège d'un trem- blement irrégulier, saccadé, et il se produit du nystagmus; on voit, en même temps, de petites secousses dans le tronc, isolées ou multiples et successives, un tremblement saccadé des bras et des mains empêchant de porter un verre à la bouche sans projection du liquide de tous côtés. Debout, ou dès que la malade essaye de marcher, les jambes tremblent à leur tour, présentent des contractions brusques, inégales, irrégu- lières, qui, gagnant aussi les membres du tronc, impriment à tout le corps de brusques secousses; la parole est traînante, embarrassée, légèrement empâtée. Des douleurs fulgurantes et des crampes se mon- trent aux jambes, plus particulièrement du côté droit; quelquefois elles s'étendent au dos et dans les bras. La joue droite est le siège de dou- leurs vives, dans la direction des branches du trijumeau et plus parti- culièrement vers le nerf dentaire inférieur et le nerf frontal. Il survient encore quelquefois une sensation de brûlure très-désagréable à la joue et aux pieds, et des picotements le long du dos. A plusieurs re- prises, la malade a accusé une sensation de chaleur au ventre, et dans les dernirs jours, elle a eu brusquement une tympanite qui tend à diminuer. L'intelligence est afl'aiblie, mais sans délire particulier. C. R. 18b9. 18 274 La vision est complètement abolie; l'examen par l'ophilialmoscope fait voir, à droite, une papille ovale, d'un blanc nacré avec des vais- seaux très-grêles; à gauche, la papille est blanche, le contour net, les vaisseaux artériels et veineux sont d'une notable ténuité. L'existence de la sclérose sur les nerfs optiques, plusieurs années avant l'apparition de la sclérose en plaques cérébro-spinale, nous paraît, en dehors même de Fallération probable du trijumeau, donner à cette observation un intérêt particulier. Quand les faits de ce genre seront plus nombreux, lorsque, d'autre part, on aura vu plus souvent les portions périphériques et les centres être envahis simultanément par la môme altération, ou bien encore la lésion gagner les nerfs après avoir été centrale, on saisira mieux les relations intimes qui unissent ces diverses localisations. Dans la sclérose diffuse, comme dans la sclérose en plaques, le fait principal est cette disposition générale des centres nerveux à un mode particulier d'irritation qui préside à toutes les localisations sans dis- tinction de siège, et c'est ainsi que l'on comprend l'existence de lésions périphériques de même nature, soit avant, soit pendant, soit après le développement des lésions des centres. De la propagation dd cancer et du tubercule a la surface de la séreuse PLEURALE, ET PARTICULIÈREMENT A LA PLÈVRE DIAPHRAGMATIQUE; par M. LÉPINE, interne des hôpitaux. Dans son Traité des tumeurs, M. Virchow signale la possibilité d'une propagation à la surface des feuillets d'une séreuse : « Quand il existe, « par exemple, primitivement un cancer de l'estomac qui s'étend jus- « qu'à la séreuse, il n'est pas rare de voir le péritoine devenir le siège « d'une éruption cancéreuse multiple, mais non uniforme ; au contraire, « en des points souvent très-éloignés et précisément disposés de Liçon « à être contaminés pas les substances qui glissent le long de la sur- « face pèntonéale de la paroi abdominale, par exemple dans les envi- « rons des ligaments latéraux de la vessie, dans l'excavation recto- « vésicale, recto-utérine ou utéro-vésicale. Dans ces points se forment « de nouveaux petits îlots de tumeurs, une seconde génération de no- ie dosités, absolument comme si l'on eût ré|)andu une semence qui au- « rait germé çà et là où elle serait tombée (1). » C'est là tout ce-qui a été dit, à ma connaissance, sur ce mode si in- téressant de propagation des tumeurs. Or, j'ai observé sur la séreuse (1) Virchow, Palliol. des liimei s, trad. frunç., 1, p. 52. / 275 pleurale des faits du même ordre, et qui me paraissent mériter d'être signalés. Dans trois cas de cancer du sein du côté gauche, ne s'accompagnant pas de généralisation, mais ayant envahi par propagation directe le feuillet pariétal de la plèvre sous-jacente, j'ai constaté à la surface de la plèvre l'existence de nombreuses nodosités de dimension variable et isolées les unes des autres. Ces nodosités étaient plus abondantes sur la plèvre diaphragmatique où elles formaient par leur confluence une sorte de plaque large de plusieurs centimètres. La plèvre droite était saine. Les poumons et les autres organes étaient, ainsi que je l'ai dit plus haut, absolument indemnes de cancer. Chez de jeunes sujets qui n'étaient pas (Tailleurs atteints de tuber- culose miliaire généralisée, mais dont les poumons présentaient des lésions tuberculeuses s'étendant jusqu'à la plèvre viscérale, j'ai plu- sieurs fois observé que des granulations existaient sur le point de la plèvre pariétale correspondant à la lésion de la plèvre viscérale, le reste de la plèvre étant sain. Il n'y avait pas d'adhérences entre les deux feuillets pleuraux. Dans ces cas, après un examen attentif, il m'a éié impossible d'expliquer l'affection localisée de la plèvre pariétale autrement qu'en admettant une contagion qui se serait opérée par contiguïté. Dans un bon nombre de cas, les lésions de la plèvre pariétale pré- sentent une localisation remarquable : c'est sur la plèvre diaphragma- tique, tout autour du foliole fibreux du diaphragme, à l'endroit où cessent les fibres musculaires, que l'on voit siéger les granulations. Elles sont disposées circulairement. Tantôt elles reposent sur une même fausse membrane, tantôt ou n'en voit pas trace. Quelquefois elles sont peu nombreuses, d'autres fois leur nombre est extrêmement considérable; mais, même dans ce cas, elles respectent généralement la partie de la plèvre qui correspond au foliole fibreux et forment, par leur agglomération à sa périphérie, une couronne assez régulière. Il est probable que cette localisation est sous la dépendance de dis- positions anatomiques spéciales, et que l'on trouvera la raison de cette susceptibilité plus grande de cette région de la plèvre. Peut-être tient- elle à une richesse plus grande de lymphatiques en ce point; mais la connaissance que nous possédons sur la structure de la plèvre diaphrag-j matique de l'homme ne sont pas assez précises pour qu'on puisse être afErmatif ; et les travaux récents, par exemple celui de Dybkowsky ainsi que ceux de Ludwig et Schwegger-Seidel, ne nous renseignent pas sur ce point. Je remarquerai en terminant que, dans deux des faits que j'ai ob- servés, la lésion qui avait été l'origine des granulations n'était pas tu- 276 berculeuse; c'était un noyau de pneumonie caséeuse. Il est intéressant de noter qu'une affection de cette nature a pu donner naissance cfune manière ininiédiale ^ à de vrais tubercules. Les produits caséeux, d'a- près Buhl, produisent la tuberculose; mais alors ils sont d'abord in- troduits dans la circulation, ce qui n'avait pas eu lieu dans les deux cas que j'ai vus. N'y aurait-il pas là une raison d'admettre une parenté de nature entre la pneumonie caséeuse et la tuberculose? Sur un cas de coloration noire de la langue; par M. Gallois. On n'a pas souvent l'occasion d'observer la coloration noire plus ou moins étendue de la langue ; c'est ce qui m'engage à rapporter briève- ment un cas que j'ai eu à examiner récemment. La personne qui fait le sujet de l'observation est âgée de 65 ans, et jouit d'une très-bonne santé, seulement elle se plaint d'avoir par moments et le malin en par- ticulier, la langue épaisse et pâteuse, sans toutefois cesser de percevoir le goût des aliments. Si l'on examine la langue, on remarque à sa base une tache de forme losangique, qui s'avance jusqu'à la moitié de l'organe environ, qui ne fait point de saillie appréciable, quoique ses bords soient assez nette- ment dessinés, et qui offre une couleur noire cachou très-remar- quable. Cette tache s'était montrée l'année dernière et avait disparu d'elle-même. Cette année, elle existe depuis deux mois déjà, et tend plutôt à s'étendre qu'à s'effacer spontanément. Quand on la racle avec le bord tranchant d'une spatule, on en détache difficilement de petits fragments, qui, étalés sur du papier blanc ressemblent à des poils de barbe détachés par le rasoir. Au bout de douze jours de traitement, la matière noire se détache beaucoup plus facilement, et l'on enlève des poils de 3 millimètres environ, qui sont recueillis et conservés dans l'eau alcoolisée. L'examen microscopique démontre que chaque filament noir est constitué par de l'épilhélium condensé et agglutiné, de manière à former un véritable poil. C'est donc une hypersécrétion de l'épilhé- lium , qui produit des étuis allongés, filiformes, implantés sur les pa- pilles linguales. En outre, au milieu de ces^oils, on trouve un assez grand nombre de filaments de leplolhrix, qui, il est vrai, se rencontrent à l'état nor- mal, en quantité plus ou moins considérable. Quant à la coloration noire de la plaque, eileestdue, selon toute apparence, aux aliments et au vin. En effet , une cellule vivante ne se colore point au contact des aliments, mais les filaments épilhéliaux qui sont privés de la vie peu- vent être teints par ces derniers. 277 Dans un cas de coloration noire de la langue présenté récemment à la Société médicale des hôpitaux, M. le docteur Raynaud avait trouvé au milieu de l'épithélium une masse considérable de spores, paraissant appartenir à un parasite qui n'aurait point encore été dé- crit, et qui se rapprochait beaucoup du genre trychophyton. M. Bal- biani, qui a bien voulu examiner la matière noire que je lui ai re- mise, n'y a point trouvé de spores semblables à celles qu'il avait vues dans l'échantillon qui lui avait été soumis par M. le docteur Raynaud. Pour faire disparaître la tache noire de la langue, j'ai conseillé de la toucher tous les jours trois ou quatre fois, avec un pinceau trempé dans la solution suivante : chlorate de potasse, 5 grammes; eau dis- tillée, 30 grammes. Au bout d'une douzaine de jours, la tache avait pâli, la langue était moins pâteuse, et l'on détachait beaucoup plus fa- cilement la matière noire : j'ai prescrit de continuer les lotions avec une solution contenant, pour 30 grammes d'eau distillée, 5 grammes de chlorate de potasse et 5 grammes de bicarbonate de soude. M. GcBLER rapporte que, dans un cas qu'il a eu l'occasion d'observer, il n'a pas trouvé davantage des spores ou du mycélium pouvant faire songer à un nouveau parasite. La question étiologique reste tout entière à résoudre ; M. Gubler ne pense point que la coloration noire dépende de l'action des aliments; celle-ci s'est montrée, en effet, dans les cas où il avait écarté les sels de fer et loule substance tannante ou colorante. Cette modification dans la couleur dépend sans doute d'un changement dans la nutrition même des éléments. M. Laborde a eu aussi l'occasion de voir un cas de coloration noire de la langue, et il n'a rien trouvé qui pût être rattaché à un nouveau champignon. La séance est levée à cinq heures un quart. COMPTE RENDU DES SÉANCES DE ^ ^ LA SOCIETE DE BIOLOGIE PENDANT LE MOIS d'OCTOBRE 1869 , Par m. MAGNAN, secrétaire. PRÉSIDENCE DE M. CL. BERNARD. Séance du 16 octobre. M. Brown-Séqcard, en présentant à la Société un lapin chez lequel il a arraché le facial du côté droit, fait remarquer les mouvements spasmodiques qui se passent dans la narine correspondante, dès q,ue la respiration devient un peu gênée. Ces mouvements se produiraient grâce à la présence des branches du facial du côté sain qui, dépassant la ligne médiane, donneraient une innervation accessoire au côté op- posé. Dans des recherchés faites depuis très-longtemps sur ce sujet avec M. Martin-Magron, M. Brown-Séquard avait déjà noté que la gal- vanisation du* facial d'un côté était suivie de mouvements dans les deux côtés de la face. On observe, après l'ablation du facial, quelques phénomènes analo- gues à ceux qui suivent l'ablation du sympathique, tels que des phé- nomènes vaso-moteurs, le resserrement de la pupille, etc. M. VuLPiAN rappelle qu'ayant sectionné sur un animal le lingual et 280 l'hypoglosse d'un côté il a fait ensuite des coupes minces de la langue qu'il a examinées au microscope; dans ces préparations, il a trouvé des fibres nerveuses altérées du côté correspondant à la section et non point de l'autre côté, ce qui paraît démontrer qu'il n'y a point de com- munication d'un côté à l'autre dans ce cas. Recherches expérimentales sur les altérations de nutrition qui se pro- duisent DANS LES divers TISSUS A LA" STJITE DE LA SECTION ET DE LA LIGATURE DES NERFS, ET DE LA SECTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE ; par leS dOCteUrS Laborde et Leven. laésions de nutrition à la suite de la section d'nn nerf mixte, nerf sciatique. Afin de rendre cet exposé plus facile et plus compréhensible, nous établirons dès le début la division suivante : Nous considérerons d'un côté les tissus autres que le tissu muscu- laire ; L'état des muscles sera étudié à part, et nous donnerons à cette étude capitale, dans l'espèce, tous les développements qu'elle mérite; Enfin, nous ferons connaître en dernier lieu les résultats de nos recherches sur les modiûcations expérimentales de ce tissu nerveux lui-même. Section du nerf. {J I". — Température. L'étude des modifications de la température dans les altérations de nutrition est des plus importantes, et nous ne l'avons point négligée. Toutefois nous n'avons pu pousser cette étude aussi loin que nous l'eussions désiré faute d'un instrument parfaitement approprié qui, selon nous, manque encore à la physiologie expérimentale : nous espérons pouvoir bientôt combler ces desiderata ; mais en attendant, nous avons obtenu quelques résultats qui, tout imparfaits qu'ils sont, ne sont pas sans intérêt et méritent en tous cas d'être relatés. Section du sciatique droit chez un cochon d'Inde adulte vigoureux, le 9 mai 1869 : Température avant la section. . . 36° C. au sein des muscles. Immédiatement après la section. 36° C. idem. Huit jours après la section, le 16 mai : Côté malade (droit) 38° C. dans les muscles de la cuisse. Côté sain (gauche) 37° C. idem. 281 Vingt et un jours après, le 30 mai : Côté malade (droit). . . 36°,8 C. Côté sain (gauche) 37°, 6 C. Trente jours après, le 10 juin : Côté malade 36°, 3 C. Un coup d'œil jeté sur ce tableau suffit pour montrer les modifica- tions successives de la température à partir du moment de la section du nerf. ^ Plus tard nous tirerons de ces données l'enseignement qu'elles ap- portent dans l'étude de la lésion expérimentale dont il s'agit. g II. — Examen des tissus aiilres que les vuiscles comprenant la peau et ses annexes, les vaisseaux, les os, etc. — A. Peau en général. Une des premières modifications qui se produit à la suite de la section du nerf sciatique est celle qu'il est permis et facile de constater à la peau de la plante du pied correspondant à ladite section; cette modification consiste essentiellement : D'abord en un changement de coloration : pâleur relative plus ou moins accentuée ; Puis sécheresse, rugosités et formation de squames à écailles que l'on détache facilement par un léger grattage. Les écailles se détachent aussi spontanément et laissent à nu de petites excoriations saignantes. Bientôt nous verrons un véritable état ulcératif succéder à ces pre- mières modifications superficielles. C'est en moyenne du sixième au huitième jour, a partir du moment de la section, que ces altérations deviennent manifestes. Un œil habi- tué peut les constater dès le cinquième jour. A. Poils^ tissus cornés. — Ave-c ces modifications du côté de la peau coïncident des altérations des poils qui ne diffèrent pas sensiblement de celles observées et décrites par M. Brown-Séquard. Les poils de l'extrémité de la patte perdent leur poli, leur luisant ; ils deviennent cassants, offrent même des cassures spontanées qui se font de l'extrémité vers l'implantation, et le réduisent peu à peu sans le faire disparaître, tandis que d'autres poils tombent intégralement, ce qui amène la dénudation, par plaques, du tégument. Les bulbes pileux offrent des altérations auxquelles se rattachent, sans doute, intimement la destruction spontanée des poils; nous y re- viendrons à propos des altérations des couches profondes de la peau et des vaisseaux; et d'ailleurs, nous devons déclarer que nous n'avons encore pu déterminer ces lésions des bulbes pileux d'une manière assez satisfaisante. 282 L'ongle, à son tour, disparaît à partir de son extrémité : cette des- truction est continue et moléculaire ; le tissu corné est devenu comme les poils, très-cassant, et il suffit d'un léger grattage à la surface de section spontanée, qui est toujours à l'extrémité de l'ongle pour enle- ver des parcelles de tissu. L'ongle arrive peu à peu à disparaître complètement (1), et l'ulcéra- tion du tégument qui lui succède se produit alors circulairement et avec une plus ou moins grande rapidité. Nous donnerons tout a l'heure des époques précises. B. Ensuite les os des phalanges se dénudent, et bientôt on n'a plus sous les yeux que le squelette de la patte de l'animal ; cette patte prend, particulièrement chez le lapin, l'aspect d'une griffe crochue. Le lapin que nous vous présentons en a offert un type, ainsi qu'il est encore permis de s'en assurer. Les os ne sont pas seulement dénudés; ils subissent aussi comme une sorte de travail uLcéralif ascendant, qui n'est autre qu'une nécrose sèche moléculaire, avec destruction partielle du tissu osseux. C. Les vaisseaux du membre affecté participent à ce travail morbide qui, par sa nature réelle, rentre évidemment dans ce genre d'altéra- tions dites nécrobiotiques; les vaisseaux, disons-nous, y participent de deux façons : en premier lieu, ils subissent parallèlement à la peau un travail d'ulcération ascendante qui est le point de départ de petites hémorrhagies à la surface de la plaie, mais hémorrhagies qui durent peu et se montrent surtout à la période initiale de l'altération. En second lieu, un peu au-dessus du point où doit s'arrêter la lésion et où la cicatrisation définitive doit se faire, les vaisseaux disséqués et étudiés avec soin présentent une oblitération complète de leur lu- mière, soit par des coagula plus ou moins anciens, soit par une ad- hérence de leurs parois qui semble témoigner d'un certain travail irri- tatif antérieur. Nous donnerons d'ailleurs, plus tard, dans notre mé- moire complet, tous les développements que méritent ces particulari- tés, et que nous ne faisons ici que présenter à grands traits. Nous ajouterons, relativement aux vaisseaux, que dans les cas de section nerveuse, les hémorrhagies provoquées sont excessivement faciles et partant très-graves. Le lapin dont il a été déjà question, et sur lequel une artériole a été coupée par mégarde, au-dessus du jar- (1) Dans certains cas, au lieu de subir ce travail de destruction par- tielle, l'ongle tombe d'emblée, ainsi que cela a eu lieu chez le lapin que j'ai déjà montré à la Société, et sur lequel la section du sciatique a été pratiquée par M. Brown-Séquard. 283 ret, en prenant un lambeau de muscle pour en faire l'examen, serait mort véritablement d'hémorrhagie si nous n'avions pratiqué rapide- ment la ligature du vaisseau. Ajoutons que les altérations vasculaires portent tant sur les vais- seaux qui rampent dans le tissu des muscles que sur ceux qui sont accolés aux divisions du nerf sectionné : ces altérations, d'ailleurs, sur lesquelles nous aurons à revenir, en détail, sont, pour le dire par an- ticipation, caractérisées par la dégénérescence granulo-graisseuse de la paroi. L'évolution de ce travail morbide accomplie (nous allons voir dans quelles limites), la cicatrisation commence : très-imparfaite d'abord, difiBcile, elle finit, après de grands efforts et de nombreuses péripé- ties, par s'accomplir. Fait important et qui, d'ailleurs, s'explique de soi : l'époque de la cicatrisation définitive coïncide avec la manifestation des phénomènes suivants : retour partiel de la sensibilité dans le membre affecté ; période de réparation du tissu musculaire et nerveux; cessation des accès épilepti formes, quand il y en a. Voyons maintenant les époques marquantes des principales phases des altérations que nous venons de passer en revue. Le début, avons-nous dit, se manifeste clairement du cinquième au huitième jour en moyenne. Chez un cochon d'Inde, la section du sciatique ayant été faite le 9 mai, le travail nécrobiotique général était complet le 3 juillet, époque à laquelle nous l'avons montré à la Société; mais l'altération était déjà très-prononcée dans la seconde quinzaine du mois de juin. La cicatrisation, qui tendait à se faire dès le mois d'août, était com- plète le 18 septembre. Ainsi la période entière a été, dans ce cas, de quatre mois. Le lapin de M. Brown-Séquard a eu le sciatique coupé le 25 février 1869. Le 7 août, époque à laquelle il nous a été remis , nous constations des modifications très-apparentes du système cutané et pileux, et de plus un commencement d'encoche à l'extrémité du gros orteil. Le 22 août, amputation complète du gros orteil ; le petit orteil est atteint, l'ongle en est presque détruit; ulcération interdigitale. Le 11 septembre, dénudation de tous les doigts; squelette à nu; nécrose osseuse; ulcération circulaire et ascendante. Plaie facilement saignante. Le 20 septembre, véritable griffe ; les premières phalanges sont dé- truites. 284 A partir d'octobre, efforts de cicatrisation ; celle-ci marche bien en ce moment. Donc, cliez cet animal nous avons aperçu l'altération après le qua- trième mois; mais elle avait dû débuter, selon nous, auparavant; elle était à son apogée dans le courant du sixième mois, en train de cica- trisation le septième. Il y a une différence réelle de temps avec les cochons dinde ; mais elle s'explique facilement par la dissemblance entre la force et la vi- gueur de constitution de ces animaux. Dans une prochaine note, nous étudierons comparativement les mêmes altérations dans les cas de ligature du même nerf et de sec- tion de la moelle épinière. M. Ranvier demande si les altérations produites après les sections nerveuses en sont le résultat direct, immédiat. Il croit plutôt à Faction d'une cause extérieure, le frottement, les souillures, etc., à la suite d'une fracture, c'est à ce niveau que se produisent les altérations. M. Laborde répond que toutes les précautions ont été prises pour em- pêcher l'action des causes extérieures; que les altérations de nutrition ne sont pas bornées à la peau et aux os; que les muscles et les autres tissus participent à cette altération. Il reviendra, du reste, sur ce sujet en complétant cette étude. En outre, pour répondre à l'observa- tion de M. Brown-Séquard qui déclare que, pour sa part, il n'attribue point ces altérations à l'action immédiate de la section, mais bien à une influence extérieure, M. Laborde rappelle quelques-uns des faits déjà énoncés, et il ajoute qu'une des preuves de la relation qui existerait entre la section nerveuse et l'apparition de ces altérations, c'est la marche même de la lésion qui disparaît au moment où la sensibilité et le mouvement reviennent, c'est-à-dire quand les fonctions nerveuses se rétablissent. Note sur une observation de méningite tuberculeuse cérébro-spinale; par M. Magnan. H... (Joseph), âgé de 43 ans, bronzier, souffrait de la poitrine depuis plusieurs années ; il a craché du sang pour la première fois il y a sept ans ; depuis cette époque, il a eu plusieurs hémoptysies. Il a fait en outre, de temps à autre, des excès de boissons. Il y a trois mois, il a encore été soigné à l'Hôtel-Dieu pour sa maladie de poitrine. Depuis quelques jours il ne pouvait plus travailler, comprenait mal ce qu'on lui disait, s'assoupissait fréquemment, se plaignait de douleurs de tête, gémissait quelquefois; il était pris en outre, par moments, de vomisse- ments. 285 Le 30 septembre dernier il sort de chez lui, marche au hasard, se perd et est trouvé errant dans les rues, ne pouvant indiquer son do- micile. Il est amené au bureau d'admission (Sainte-Anne) le 1" oc- tobre 1869, dans l'après-midi. A son entrée, il présente de l'hébétude, il ne peut répondre aux questions, il marmotte des paroles incohérentes. La nuit se passe sans sommeil, il parle seul, rejette ses couvertures, remue dans tous les sens d'une façon inconsciente. Le 2 octobre, le délire est continu, les lèvres tremblottantes laissent échapper des paroles inintelligibles; par in- stants, gémissements, petits cris; oscillations irrégulieres des muscles de la face; nystagmus; regard éteint, sans expression, pupilles dilatées, tremblement des mains avec petites secousses dans les doigts; carpho- logie , contractions musculaires inégales, irrégulières, avec frémisse- ments aux bras et aux jambes, appréciables à la vue et au toucher; roideur du cou et du tronc ; sensibilité conservée ; langue humide, rosée ; ventre déprimé en bateau: selles rares jaunâtres diarrhéïques ; peau modérément chaude; température rectale 38° 3/5; pouls petit, inégal, irrégulier; au sommet gauche submatité avec souffle caverneux, râles sibilants et quelques râles muqueux dans le reste de la poitrine. Il survient dans la journée des attaques épileptiformes, faibles et de très-courte durée, avec roideur et secousses convulsives dans le bras et la jambe du côté gauche, déviation de la bouche, légère rotation de la tête. Les autres symptômes continuent avec les mômes caractères. La respiration s'embarrasse de plus en plus et la mort survient dans la nuit du 2 au 3 octobre. Autopsie. Méninges cérébrales légèrement œdémateuses, parsemées de granulations miliaires, surtout vers les scissures de Sylvius et sur les portions de pie-mère qui plongent dans les anfractuosités des cir- convolutions. Les membranes s'enlèvent partout avec facilité. Au fond de la scissure sylvienne gauche, les méninges jaunâtres présentent une infiltration séro-purulente. Dans le lobe droit du cervelet à la face su- périeure, se trouve un tubercule du volume d'un petit pois, jaunâtre, occupant la couche corticale qu'il dépasse un peu à la partie profonde. Les coupes du cerveau ne montrent rien de particulier. Les ventricules latéraux renferment une cuillerée de sérosité ; tout le cerveau est pâle, sans injection. Les méninges rachidiennes sont légèrement infiltrées; après avoir incisé la dure-mère, on aperçoit par transparence au-des- sous du feuillet arachnoïdien quelques rares granulations miliaires; en soulevant l'arachnoïde, on voit ces granulations à la surface de la pie-mère. L'examen histologique de la pje-mère avec ses granulations, au cer- veau et à la moelle, donne des résultais identiques; on trouve, dans 286 les deux cas, les caractères assignés aux granulations miliaires consi- dérées en elles-mêmes et dans leurs rapports avec les vaisseaux. Le sommet du poumon gauche est le siège de trois cavernes du vo- lume d'une amende à celui d'une noix ; il est en outre infilté de granu- lations tuberculeuses de môme que le lobe moyen, le lobe inférieur est engoué et ne présente que quelques rares granulations. Le poumon droit est farci de granulations dans toute son étendue. Le péritoine n'offre rien de particulier. Les reins, jaunâtres au niveau de la couche corticale, sont injectés à leurs parties centrales. Le foie est la rate sont à l'état normal. En examinant le fond de l'œil on voit une légère infiltration autour de la papille, surtout à gauche; la choroïde- n'offre rien de particulier d'aucun côté. Dans cette observation, les troubles de la motilité (tremblements, contracture, secousses, frémissements) du côté des bras et des jambes; la roideur du cou et du tronc ne pouvant pas bien s'expliquer par une lésion exclusivement cérébrale, faisaient songer à l'existence conco- mitante d'une altération médullaire; l'anatomie pathologique, en effet, a démontré que les méninges spinales étaient le siège d'une lésion ana- gue à celle qui avait envahi les méninges cérébrale.s. Ces faits doivent être plus fréquents qu'on ne pourrait le penser d'après le silence des auteurs sur la participation des enveloppes médullaires à la méningite tuberculeuse, localisée jusqu'ici au cerveau. Pour ma part, j'avoue qu'ayant eu l'occasion fréquente à l'hôpital des Enfants de faire des autopsies de méningite tuberculeuse, je me suis borné à l'examen du cerveau, de sorte que je ne puis rien dire, dans ces cas, sur l'état de la moelle ; toutefois , les symptômes présentés par certains malades permettent de penser que chez eux la méningite tuberculeuse s'était aussi propagée vers la moelle. Ces faits, si l'examen anatomique vient en confirmer l'existence, seront une preuve de plus de l'unité et de la solidarité des lésions cérébrales et médullaires; de la nécessité, conséquemment, de com- pléter, dans la plupart des cas, l'étude des unes par celle des autres. M. LiouviLLE rapporte deux cas analogues, l'un chez un enfant, l'au- tre chez un adulte, M. Rabuteau montre sur un rat l'action du bromoforme qui agit d'une manière analogue au chloroforme. D'autre part, l'iodoforme aurait, d'après M. Rabuteau, une action beaucoup plus énergique; 6 grammes suffiraient pour tuer un chien. Une note sera remise sur ce sujet. 287 M. LiouviLLE signale une dégénérescence graisseuse de tous les or- ganes avec existence de gouttes huileuses dans le sang chez une ma- lade âgée de 73 ans. L'observation doit être remise. M. GuBLER rappelle qu'il a vu dans ses autopsies de la Salpêtrière des faits analogues. Il a constaté, dans quelques cas, l'existence des matières grasses dans les urines. Cette recherche est difficile parce que ces produits ne se présentent pas sous la forme de gouttes hui- leuses ; on parvient, toutefois, avec 1 éther à en déceler la présence. Séance du 23 octobre. A l'occasion du procès-verbal de la dernière séance, M. Hayem re- late les deux cas suivants de méningite tuberculeuse cérébro-spinale chez deux femmes âgées, l'une de 23 ans, l'autre de 29 ans : Toutes les deux ont offert de Thyperesthésie et une rachiaigie in- tense. Les lésions se sont montrées à la moelle tout aussi intenses qu'au cerveau. Note sur deux cas de méningite spinale tuberculeuse liée A LA TUBERCULOSE MILLAIRE GÉNÉRALISÉE; par G. HaYEM. v Les auteurs qui ont traité de la tuberculose généralisée aiguë ne parlent en aucune façon de la présence réelle ou possible de tuber- cules miliaires dans les enveloppes de la moelle, et le silence qui a ré- gné jusqu'à présent sur ce fait n'est sans doute que la preuve de l'ou- bli de sa recherche dans les autopsies. En effet, mon attention s'étant portée cette année sur ce point d'a- natomie pathologique, éveillée qu'elle était par quelques symptômes cliniques mal expliqués, je rencontrai facilement deux cas de ménin- gite tuberculeuse spinale chez des adultes atteints de tuberculose mi- liaire généralisée. Ce sont ces deux faits dont je présente ici les ob- servations résumées. Obs. L —Fille X, 25 ans, domestique, accouchée au n" 17 de la salle Sainte-Martine de l'Hôtel-Dieu : entrée le 4 mars 1869. Cette femme, cherchant à cacher une grossesse, arrive à Paris et y accouche d'un enfant mort, dans des conditions de misère déplorables ; malgré un étal physique et moral aussi défectueux, les suites de cou- ches furent régulières : on ne constata à cette époque qu'un affaiblis- sement, général prononcé, un dégoût marqué des aliments, un mu- tisme allant toujours en augmentant, de sorte qu'on pensa a un état 288 mental qui du reste était réel. Un examen réitéré plusieurs fois ne fit constater aucune lésion organique. 1" avril. Toux et signes de bronchite; matité au sommet droit; on soupçonne une tuberculose. Les jours suivants, la tristesse et le mutisme augmentent; la fai- blesse est progressive; malaise, douleurs vagues; ni strabisme ni cé- phalalgie; fièvre continue; constipation, ventre insensible, pas de taches rosées. 4, 5 avril. Fièvre plus vive ; délire et agitation, surtout la nuit; douleurs vives quand on remue la malade. Au sommet droit, souffle et matité; râles de bronchite dans le reste des poumons; rétention d'u- rine. A ce moment, je soupçonne une tuberculose aiguë. 6 avril. Agitation considérable ; hypereslhésie générale de la peau et des articulations; sensibilité extrêmement vive de toute la région ra- chidienne, remarquable par sa violence. Pouls à 120, misérable. 7 avril. Mort à neuf heures du matin. Autopsie faite le 8. Poumons. A droite : caverne de la grosseur d'une noix au sommet; adhérences pleurales fibrineuses à droite, celluleuses à gauche. Le pa- renchyme des deux poumons est criblé de granulations tuberculeuses miliaires ; cependant, le tissu crépite, flotte sur l'eau, il n'offre pas de congestion notable. Rien à noter au cœur. Rate grosse, molle, diffluente; tubercules miliaires à la surface; hypertrophie des corpuscules de Malpighi. Foie pâle ; exsudats fibrineux à la surface ; granulations tubercu- leuses à la surface et sur les coupes. Reins. Tubercules miliaires nombreux à la surface et dans la sub- stance corticale. Cerveau. Coloration pâle des couches corticales; à la base, on trouve les espaces sous-arachnoïdiens remplis d'une sérosité louche et de fausses membranes qui se prolongent le long des vaisseaux, dans la scissure de Sylvius, et sur les circonvolutions qui bordent la grande fente cérébrale de Bichat. Des granulations tuberculeuses nombreuses sont répandues dans les mêmes points. Ces tubercules sont encore plus abondants autour de la protubérance du cervelet, et surtout le long des vaisseaux. Sérosité louche dans les ventricules; œdème du trigone et de la substance blanche des hémisphères. Moelle. Il y a des adhérences faibles entre la dure-mère spinale et l'arachnoïde; le tissu sous-arachnoïdien, les mailles de la pie-mère sont infiltrés d'exsudats fibrineux contenant de nombreuses granula- tions tuberculeuses qui forment des amas assez gros à la face posté- 289 rieur de la moelle, et surtout le long des racines postérieures. Les lé- sions aussi nettes de méningite tuberculeuse siègent particulièrement à la région dorsale et au niveau de la queue de cheval. J'examinai de suite au microscope la pie-mèro spinale; je trouvai de nombreuses granulations tuberculeuses, englobant et oblitérant les vaisseaux en certains points, offrant tous les caractères des granula- tions qui siègent dans les méninges cérébrales. La moelle fut conservée et sera examinée après durcissement. Obs. il — Femme de 29 ans, entrée le 9 septembre 1869 au n" 22 de la salle Saint-Landry à THôtel-Dieu. Je dois cette noie à l'obligeance de mon collègue et ami M. Fou- cault. Cette femme entre dans un état d'abattement physique et moral qui ne lui permet de donner que de très vagues renseignements. D'une bonne santé antérieure, elle se plaint d'un malaise remontant à trois mois, sans rien préciser. Depuis trois semaines, céphalée intense, continue, limitée au côté gauche de la région frontale; pression dou- loureuse sur le trou sus-orbilaire; hyperesthésie de la région et pho- tophobie légère. Un mouvement fébrile assez marqué accompagne ces phénomènes locaux. Peau chaude; pouls à 100; langue saburrale, inappétence, constipation. 13 septembre. Les phénomènes d'embarras gastrique ont disparu; les autres persistent. Le 18, la Oèvre diminue; la céphalée augmente ; somnolence conti- nuelle; on a peine à arracher une réponse. Le 19, abaissement de la paupière supérieure du côté gauche; dila- tation de la pupille de ce côté; strabisme divergent; nystagmus de l'œil gauche. Rétention d'urine par paralysie de la vessie; écoulement vaginal peu abondant. La malade, interrogée alors sur des antécédents syphilitiques possi- bles, les nie absolument. Le 20, même état, et de plus résolution totale, hyperesthésie géné- rale. La malade tousse un peu, mais la percussion est normale; l'aus- cultation fait constater quelques rà!os sibilants. Pouls à 100. Tempéra- ture 39". Peau sèche. Le 22, même état. Le 23, demi-coma; plaintes méningitiques; douleurs vives dans la région lombaire ; décubitus sur le côté ; ventre ballonné ; pas de selles ; albumine dans l'urine. Pouls à 120. Température 39°, 4. Le 24, coma; contracture légère des bras. C. R. 1869. 19 290 Le même état se continue jusqu'à la mort, qui arrive le 26 dans la matinée. J'assistai à l'autopsie, qui donna les résultats suivants : Congestion intense des méninges cérébrales. A la base, l'arachnoïde est épaissie; le tissu sous-arachnoïdien dense, infiltré, surtout autour des artères et des nerfs de la base; nombreuses granulations tubercu- leuses, soit dans les exsudais, soit le long de la scissure de Sylvius. Consistance normale de la substance corticale: ramollissement œdé- mateux de la voûte à trois piliers et des surfaces ventriculaires. On trouve dans la pulpe cérébrale deux ou trois petits tubercules gros comme de grosses têtes d'épingles. La moelle étant enlevée et la dure-mère incisée, on découvre un très-grand nombre de granulations tuberculeuses miliaires, siégeant dans l'épaisseur d'une exsudation abondante dans toute la longueur de l'enveloppe méningée spinale, particulièrement à la face postérieure de la région dorso-lombaire. La moelle sera examinée plus tard au mi- croscope. Granulations miliaires dans les plèvres, les poumons, sur la surface convexe du foie, dans les deux substances des reins; la rate en est couverte comme d'une éruption confluente, et son parencliyme con- tient une agglomération de granulations grises, demi-transparentes, d'une confluence remarquable. Il paraît résulter de ces deux faits, recueillis en quelques mois chez l'adulte, que la méningite tuberculeuse rachidienne n'est pas une lé- sion rare dans la tuberculose généralisée; si, en effet, je l'ai trouvée dans les deux occasions que j'ai eues d'examiner la moelle d'individus morts de tuberculose aiguë, avec symptômes cérébro-spinaux, il est évident qu'il y a de fortes présomptions pour croire à l'existence fré- quente de granulations miliaires dans les méninges rachidiennes, lors- qu'elles existent dans la plupart des organes de l'économie. Aussi est-il très-probable que l'on trouvera des lésions identiques chez l'adulte, et plus encore chez les enfants, lorsqu'on aura Taltçulion éveillée sur ce point. — M. Brown-Siîquard présente à la Société un cochon d'Inde chez le- quel il a sectionné la substance grise, les cordons antéro-latéraux et une partie des cordons postérieurs. La perte de la sensibilité et du mouvement a été la conséquence immédiate de la section. Puis le mou- vement est revenu peu à peu, mais la sensibilité est restée nulle; les pattes de l'animal, plongées dans l'eau glacée, paraissent insensibles. Chez l'homme, il est rare d'observer des phénomènes analogues à ceux qu'a présentés ce cochon d'Inde. 291 Sur un second animal, M. Brown-Séquard fait remarquer la perte complète de la sensibilité avec persistance du mouvement volontaire, mais il ne peut indiquer exactement la lésion qui a été produite. Dans un troisième cas, il y a perte de la sensibilité et conservation du mouvement, mais à un degré très-faible. Sur ce dernier animal, une ulcération existe à la patte, mais elle est le résultat d'une morsure et non de la section nerveuse. Sur l'absorption des corps solides déposés dans les tissus; par M. C. Davaine. La possibilité de l'absorption des corps solides déposés dans les tis- sus des animaux n'est plus en question depuis que notre regretté col- lègue Follin a montré que des parcelles de vermillon et de charbon in- troduites dans la peau par la pratique du tatouage, peuvent, après un certain temps, se retrouver dans les ganglions lymphatiques voisins. {Comptes 7-endus de la Société de biologie^ t. I, p. 79, 1849.) Ce fait a été confirmé par une observation récente de M. Robin, qui a vu chez un supplicié les ganglions de l'aisselle du côté droit colorés en noir par des parcelles de charbon, parcelles qui provenaient d'un tatouage de l'avant-bras. (Journ. de l'anat. et de la phys., 1869, p. 465.) Notre collègue M. Charcot a observé aussi un cas du même genre qu'il n'a pas publié. Mais dans ces cas il s'agit de phénomènes en quelque sorte locaux, du transport à petite distance de parcelles solides par les vaisseaux lymphatiques exclusivement. Les faits que je vais exposer sont d'un ordre difiérent : il s'agit de l'absorption de corps solides d'un volume notable qui sont portés avec le sang dans tous les organes. La Société se rappellera peut-être que, dans le courant de Tannée 1860, j'ai mis sous ses yeux des figures de spores que j'avais observées à diverses reprises dans le sang de plusieurs animaux herbivores. Ces spores composées, fusiformes ou coniques, provenaient des champi- gnons parasites des plantes dont se nourrissent ces animaux. On con- çoit que des spores pointues puissent s'introduire dans les vaisseaux sanguins à travers la membrane muqueuse des intestins. Jai cherché à vérifier ce fait expérimentalement; mais n'ayant pu me procurer un nombre suffisamment grand de spores fusiformes ou coniques, je fis avaler à deux cobayes, pendant plusieurs jours, de grandes quantités de spores de la carie du ma'ïs {uslilago maïdis), qui sont sphériques„ Malgré de minutieuses recherches, je ne retrouvai aucune spore dans les organes ou dans le sang de ces deux animaux. Je me proposais de répéter ces expériences avec des spores d'une in autre forme, à la première occasion; mais avant de l'avoir trouvée, des faits d'un autre genre me firent revenir sur cette question. Dans le courant de l'année dernière, en étudiant l'action du sang putréfié chez les animaux, je trouvai, peu de temps après l'injection de ce sang sous la peau, des vibrions très-longs dans les veines des parties voisines. Un examen attentif de plusieurs cas semblables me porta à croire que ces longs vibrions ne s'étaient point formés en si peu de temps dans le sang des veines, mais qu'ils y avaient pénétré par absorption ou par les capillaires déchirés par l'injection. Pour acquérir sur ce sujet une certitude, il fallait injecter dans les tissus des corps qui ne peuvent s'y propager et qui ont des caractères précis au moyen desquels on peut toujours les reconnaître facilement. Les spores des champignons réunissent ces conditions. Elles sont uniformes dans chaque espèce ; elles sont pourvues d'un tégument rigide qui empêche qu'elles ne se déforment; elles ne s'altèrent qu'après beaucoup de temps; elles sont en nombre immense; enfin, suivant les espèces, leur volume est très- variable. Mes premières expériences furent faites avec des spores très-petites, celles d'un pénicillium, qui ont au plus 0""",005 de diamètre. J'en re- trouvai dans tous les organes ; mais ces spores sphériques, plus petites que les corpuscules du sang, n'ayant point de caractères particuliers, pouvaient donner lieu à une méprise, car elles ressemblaient sous plu- sieurs rapports à des globules graisseux. Dans l'une de ces expériences, un abcès s'étant formé dans l'endroit où l'injection avait été faite, un grand nombre de leucocytes renfer- maient une, deux ou trois et jusqu'à quatre spore^ du pénicillium in- jecté. La pénétration de corps étrangers dans les leucocytes a déjà été signalée par M. Virchcw. M. Robin a constaté aussi la pénétration de particules de charbon dans les leucocytes qui se trouvent dans certains crachats [Ltçons sur les humeurs, p. 458, Paris, 1867, et Dict. encycL, art. Leucocyte, p. 277); mais le cas actuel me paraît néanmoins inté- ressant par la netteté du résultat; en traitant ces leucocytes par l'acide acétique ou par la potasse, on dégageait les spores qui restaient in- tactes, et leur inclusion était rendue manifeste par la transparence qu'acquérait d'abord le leucocyte sous l'action du réactif. Ces expériences furent répétées avec des spores de diverses gros- seurs, provenant de champignons d'espèces différentes. Je ne parlerai aujourd hui que de celles qui ont été faites avec la carie du maïs (usliLugo muïdis). Les spores de ce champignon sont noirâtres, sphériques, rigides, et la surface est chagrinée. L'ensemble de ces caractères les rend parfaitement distinctes dans les tissus ou dans le sang dos animaux. Elles peuvent y séjourner deux mois sans s'altérer notablement. Enfin elles ont un centième de millimèlre de dia- mètre, ce qui leur donne un volume égal à celui des globules blancs du sang et bien supérieur à celui des corpuscules rouges. Le 15 août 1868, j'injectai avec la seringue de Pravaz, dans l'épaisseur de la paroi abdominale d'un jeune cobaye, quatre gouttes d'eau chargée d'un grand nombre de spores de Vusliktgo maïdis. L'animal ayant été tué six jours après, offrit des spores de cet ustilago dans le poumon, le foie, mais surtout dans le cerveau. On les trouva en très-grand nombre dans la substance grise principalement. Il y en avait quelques- unes à l'intérieur de l'œil. Le 24 août 1868, j'injectai de la même manière, dans la paroi abdo- minale d'un très-jeune cobaye, trois gouttes d'eau fortement chargées de spores de Vustilago du maïs. Les organes ayant été examinés cinq jours après, je trouvai un grand nombre de spores dans le sang du cœur et dans le poumon, un petit nombre dans le cerveau et dans le foie, quelques-unes dans la rate, les capsules surrénales et le rein. J'ai confirmé récemment ces résultats par de nouvelles expériences que je communiquerai à la Société lorsqu'elles seront terminées. Je dirai seulement aujourd'hui que j'ai obtenu le transport des spores de la carie du maïs chez le cobaye environ une fois sur deux. Comme on pouvait s'y attendre, c'est le poumon qui en offre d'abord. Chez un de ces animaux injecté depuis environ six semaines, le poumon n'en con- tenait aucune, mais on en retrouvait en grand nombre dans le cerveau. M. Charcot rappelle, à propos de cette communication, que les faits de tatouage avec transport des matières colorantes dans les ganglions sont très-nombreux. 11 rapporte entre autres le fait d'une vieille femme dont le ventre avait été orné d'une inscription sans doute commémo- rative. A l'autopsie, M. Charcot a trouvé les ganglions de l'aine forte- ment colorés. M. Leven demande si l'on peut considérer ces cas comme des faits d'absorption, puisqu'il y a traumatisme. Les substances peuvent passer à travers les orifices produits par l'agent extérieur. M. Davaise répond que dans ses expériences sur le charbon, il avait d'abord cherché à faire des inoculations avec le bistouri sans obtenir de résultats ; plus tard, au contraire, en ayant recours à la seringue de Pravaz, ses inoculations ont été suivies de succès. Pour répondre à une demande de M. Baibiani sur les mouvements que présenteraient les bactéridies sous l'influence de l'élévation de la température, M. Davaine ajoute que beaucoup de végétaux présentent des mouvements. Î94 M. Robin indique un caractère distinciif très-tranché entre les vi- brions et les végétaux. Les vibrions sont liquéfiés avec l'ammoniaque, tandis que les végétaux ne se dissolvent pas; les leptotrix conséquem- ment ne sont pas dissous. — M. Laborde expose de nouveau les précautions prises pour éviter les altérations des extrémités des membres, consécutives aux sections nerveuses. Il présente ensuite un cochon d'Inde chez lequel l'ablation du lobe cérébral droit a été suivie de la fonte de l'œil correspondant. Il place, en outre, sous les yeux des membres de la Société, les pièces pathologiques provenant d'une poule atteinte d'ascite et qui a succombé à la suite d'une tuberculose abdominale. M. Brown-Séquard rappelle qu'après la section d'une moitié latérale de la moelle suivie de la section du sciatique, on ne trouve pas l'al- tération de la patte, parce que la patle n'étant pas portée à la bouche il n'y a pas de morsure, et en second lieu parce que la patte restant sensible se trouve par ce seul fait protégée. On peut voir sur les animaux toutes les variétés d'altérations de ce genre. M. Legros présente un dessin montrant la circulation dans un cor- puscule de Paccini. Il a injecté le mésentère d'un chat et il s'est ainsi jssuré que l'intérieur du bulbe et l'enveloppe du corpuscule de Paccini sont dépourvus de vaisseaux. La circulation s'y fait par l'intermédiaire d'une branche vasculaire qui vient se ramifier à la base du bulbe, mais sans le dépasser. M. Brown-Séquard, à l'aide d'un appareil thermo -électrique (de M. Lombard) permettant d'apprécier les changements de température d'un dix -millième de degré, a cherché les variations subies par la zone épileptogène après la section du sciatique, sous l'influence des excitations. En pinçant la peau, il a obtenu une élévation de tempé- rature dans le côté excité, un abaissement dans le côté opposé. Par le pincement des jambes, la température s'abaisse dans la zone épileptogène; il en est de même en pinçant le doigt resté sensible grâce au crural. 11 a remarqué, en outre, que la température de l'oreille était dif- férente de celle du cou et de la face. Ainsi, après le pincement, élé- vation de la température à l'oreille, diminution au cou et à la face. Deux effets différents en rapport, le premier avec la dilatation des vais- seaux de l'oreille, le deuxième avec la contraction des vaisseaux du cou et de la face. La section du nerf sympathique est suivie d'une aug- mentation des phénomènes qui conservent les mêmes rapports. 295 — M. Despine communique deux faits d'expectoration abondante, sé- reuse et albiimineuse dans la pleurésie. M. Charcot a observé dans un cas une expectoration très-abondante survenue rapidement et qui a été suivie de la disparition de l'épan- chement; il ignore si Tespectoration était albumineuse. Dans deux autres cas il a vu une expectoration abondante coïncider avec la dis- parition d'une pleurésie. M. DoMONTPALLiER, daus les cas d'épanchements pleurétiques qu'il a eu l'occasion d'observer, a trouvé le plus souvent à la suite de la tho- racentèse de la matité et non de la résonnance comme dans le fait de M. Despine. Quant aux caractères fournis par l'expectoration, Van Swieten avait déjà remarqué l'état des crachats dans les inflammations de la plèvre, puisqu'il parle de pleurésies sèches ou humides d'après les quantités de l'expectoration. Dans un cas M. Dumontpallier a vu une crise par les urines : c'était chez un militaire dont l'épanchement a disparu au moment oijles urines sont devenues abondantes et albumi- neuses. Ce malade est sorti assez rapidement de l'hôpital, complètement guéri et n'offrant plus de traces d'albumine dans les urines. M. Charcot indique la coïncidence entre la disparition de l'épanche- ment et l'écoulement considérable des vésicatoires; on applique quel- quefois sur la poitrine d'un pleurétique successivement quatre ou cinq vésicatoires dont la sécrétion est peu abondante, puis un sixième vé- sicatoire vient provoquer un écoulement considérable de sérosité, et l'épanchement diminue. M. LiouviLLE signale un fait analogue observé dans le service de M. Marrotte. L'application d'un troisième vésicatoire fut suivie d'une exhalation très-abondante et d'une diminution de la pleurésie. Dans un deuxième cas il y aurait en une crise par l'expectoration. Chez un malade atteint d'épanchement, la thoracentèse ayant donné issue à deux cuvettes de sang, une expectoration sanglante très-abon- dante aurait ensuite marqué la complète guérison. M. Odier parle d'un fait observé à Genève dans lequel une diarrhée abondante ayant été brusquement supprimée par le bismuth, il avait vu se produire avec rapidité un épanchement dans les plèvres, qui a disparu à son tour avec la nouvelle apparition de la diarrhée. La séance est levée à cinq heures et demie. 29B Séance du 30 octobre. Faits de mémngites cérébro-spinales tuberculeuses ; par Henry Liouville, interne des hôpitaux de Paris. Les faits que nous nous proposons de décrire ont pour objet de con- tribuer à montrer combien est fréquente (pour ne pas encore dire constante) lextension des lésions tuberculeuses rencontrées dans les enveloppes et la substance cérébrale aux enveloppes et à la substance médullaire. C'est, en effet, en nous basant sur un grand nombre 5'observations recueillies depuis deux ans (18C8), chez l'adulte et chez l'enfant, que nous pensons aider ainsi à établir définitivement la réalité de la mé- ningite cérébro-spinale tuberculeuse, comme aussi de Vencéphalo-myé- lite de môme nature. ' La fréquence de ces lésions multiples n'indiquera pas une aggrava- tion de nouvelle importation dans la maladie redoutable déjà si bien étudiée à tous âges (la méningite cérébrale tuberculeuse). Elle nous pa- raît constater seulement une recherche plus complète d'anatomie pa- thologique; de plus, comme les lésions rencontrées du côté des mé- ninges rachidiennes et de la moelle même répondront assurément mieux à quelques phénomènes spinaux bien constatés pendant la vie {troubles de la motilité et de la sensibilité, raideur du cou et du tronc, contrac- tures, secousses, tressaillements, accès létaniformes et paralysies fonc- tionnelles), ce ne sera plus aux seules altérations encéphaliques que ces désordres 'Seront rapportés désormais, comme ils l'étaient à tort autrefois. Par là cesseront donc bien des contradictions; par là aussi la sollicitude du médecin devra être plus particulièrement appelée vers la possibilité de pareilles lésions, se propageant partout, par la nature du processus lui-môme {tuberculose généralisée), et se reliant les unes aux autres d'une façon si naturelle dans la région spéciale des centres encéphalo-rachidiens, par l'identité des terrains et la connexité des rapports. Nous avons dit qu'il nous avait été donné d'observer cette maladie aux âges les plus différents (adultes et enfants). C'est un point impor- tant sur lequel nous reviendrons. Pour procéder avec ordre, nous allons d abord exposer quelques faits rencontrés chez des adultes. 297 Première série. — Observations recueillies chez des adultes. Pierre H..., âgé de 25 ans, cocher, entré à la Pitié, dans le service de M. le docteur Marrotte, le 18 octobre, mort le 25 octobre 1869. Ce malade, d'assez vigoureuse constitution apparente, de teint foncé, de cheveux noirs, est admis à la consultation sur la présentation d'une lettre du docteur Chapotel, médecin à Choisy, constatant qu'il est atteint d'une méningite. A première vue son habitus rappelle beaucoup aussi celui de certaines formes de la fièvre typhoïde; toutefois le soir' il pousse des cris perçants par suite de violentes douleurs de tête, et c'est de ce côté que l'on est principalement appelé à porter les re- cherches. Le malade dit de lui-même et à tout instant, surtout quand on veut l'interroger et que pour cela on examine l'abdomen ou qu'on ausculte ou percute la poitrine, qu'i7 rCa que mat à la tète; que cette céphalal- gie est plutôt frontale, mais de deux côtés ; qu'elle enserre les tempes, qu'elle est très-douloureuse. Ses yeux ne peuvent supporter la lumière. De plus, il y a une grande faiblesse générale. Quoique l'auscultation soit difficile et qu'elle ne révèle pas de notables lésions, on croit pour- tant distinguer quelques craquements fins, disséminée dans différents points des deux poumons. Nulle part il n'y a de soufllf, 19 octobre. Le malade souffre beaucoup de la tête, surtout le soir, il semble qu'il y ait, d'après ce qu'il dit, des retours périodiques. L'opium avait paru hier soir calmer les douleurs. Le matin, le malade ne pousse point ou peu de cris. La langue est sèche et blanchâtre, et le pouls est cependant peu développé. Le ventre est ballonné; il y a du gargouillement, de la douleur aux fosses iliaques, surtout à la fosse iliaque droite. Aussi a-t-on pu un instant croire au début d'une fièvre continue avec une très-forte névralgie interne, comme complication. Toutefois il n'y a pas de taches rosées sur le corps, mais une tendance à une vascula- risation superficielle, rapidement facile. Le pouls est assez dur; il n'est pas dicrote. A cause de la périodicité des accès du soir, on commence par 1 gramme de sulfate de quinine, opium le soir, bouillon. La température était hier soir: 40", 7; 80 pulsations; 26 respirations. Ce malin : 39", 6; 60 et 80 pulsations; 16 respirations. L'intelligence est le plus souvent parfaitement conservée; il entend bien ; il parle bien, quand il ne souffre pas. 20 octobre. La température se maintient très-élevée, quoique le pouls soit à peu près normal. Hier il a poussé moins de cris. 298 Il ne peut uriner et il faut le sonder. Il y a toujours en même temps état paralytique de l'intestin, qui est volumineux et très-tendu. On remarque quelques mouvements convulsifs aux bras et aux mains. L'œil gauche e?t à demi fermé. Le malade ne va pas à la garde-robe. 30 grammes huile de ricin, continuation du reste de la prescription. 21 octobre. Hier soir il a eu un fort délire; on a dû l'attacher pres- que toute la nuit. L'huile de ricin est restée sans effet, de même qu'un lavement qui lui avait été donné quelque temps après. Le malade continue à ne pas uriner, et l'on note de plus en plus des mouvements convulsifs. Le cou est roide et l'œil gauche presque fermé. La figure a pris, par ce fait, une expression singulière et assez caracté- ristique. Il ne vomit pas. Température : hier soir 40°, 84 pulsations: ce matin 38°, 7, 80 pulsations. Deux lavements froids et vinaigrés. Suppression du sulfate de qui- nine. Julep de 200 gr. avec 1^%50 musc. Bouillons. Lotions froides gé- nérales. 22 octobre. Les phénomènes du côté des yeux s'accentuent davan- tage. La pupille gauche a 0,006 de diamètre, la droite n'en a que 0,003. Le strabisme externe, la chute de la paupière supérieure, l'inégalité pupillaire font croire à une paralysie persistante des nerfs de la troi- sième paire. La tête est inclinée fortement à gauche. La roideur du cou devient des plus notables, et elle semble gagner beaucoup plus bas. Quand on le lève, il est plié en arc et se plaint de douleurs vives aux reins. Il y a des points douloureux le long de la colonne vertébrale; ces points sont augmentés par la pression. Hypereslhésie de la peau. Roideur des doigts fléchis et difficiles à relever. Le malade ne peut serrer avec ses mains. On note des intermittences du pouls. Tempéra- ture : hier soir, 40", 84 pulsations; ce matin, 39", 72 pulsations. Le diagnostic de méningite tend de plus en plus à se confirmer. Il es' à croire qu'à la méningite cérébrale se joint une manifestation spi- nale, car il faut penser à quelque cause paralysante agissant du côté des intestins, le ventre étant toujours ballonné et douloureux, la vessie toujours pleine d'urine. De plus, il y a une dyspnée qui va en augmen- tant, une vive gêne respiratoire et par moments surtout des sortes d'accès asphyxiques. Suppression du muscle; julep avec 4 grammes iodure de potassium; vésicatoire appliqué à nu sur la tète et le long de l'épine dorsale. 23 octobre. Le vésicatoire a bien pris ; hier soir la température qui, les autres soirs était de 40 degrés, n'était que de 38. Il y eut à un mo- ment com.me une sorte de rémission ; mais passagère, car l'œil droit 299 semble atteint aussi; la pupille se dilate; les paupières paraissent des deux côtés se paralyser un peu. II y a toujours des intermittences dans le pouls, et des phénomjènes de contracture s'observent; parfois ce sont des tremblements, de petites secousses que Ton remarque surtout. Hier soir, 84 pulsations; ce matin, 90 pulsations. Toujours hyper- esthésie de la peau. L'urine, examinée par la chaleur et l'acide nitrique, contient de l'albumine. 25 octobre. Les accès asphyxiques vont en augmentant en même temps que l'agitation, les désordres du mouvement et de la sensibilité, la gêne des fonctions , et c'est dans ces conditions qu'arrive la mort à six heures du matin. Examinés une heure après la mort, on voit que les membres sont souples; il n'y a plus ni roideur ni contracture d'aucun côté. Les deux pupilles sont redevenues égales, peu dilatées, 0,003 à peine. La congestion des sclérotiques est moins forte que pendant la vie. La tête est toujours un peu portée vers le côté gauche, mais il n'y a pas toutefois la même roideur dans le cou. Température axillaire droite, 37°; température rectale, 39°, 8. Cette température s'est ainsi maintenue pendant deux heures que ce cadavre est resté sur le lit. Au moment de la mort, le malade a eu par la verge une émission de liquide gluant qui est trouvé vers le méat et sur la face interne de la cuisse, partie supérieure. On s'assure, par l'exa- men micrographique, qu'il s'agit d'une éjaculation spermatique. Autopsie faite le 26 octobre. — Roideur très-grande du cou et des bras. La pupille gauche est restée plus dilatée que la droite qui , du reste, lest aussi. Cavité thoracique. — Les deux poumons sont, dans toute leur étendue, le siège dune très-considérable évolution de granulations tuberculeuses par grappes. Dans quelques points, on trouve des masses plus considé- rables grosses comme un pois, très-peu caséeuses, se laissant facilement entamer au scalpel. On voit aussi quelques amas puriformes, et au mi- lieu, de véritables tubercules qui sont grisâtres, fins , de la grosseur d'une tête d'épingle, et qui ne sont nullement amollis. Cœur. Rien de particulier. Cavité abdominale. — Intestins. Le péritoine est dans toute son éten- due fortement injecté; toutefois, il n'y a pas de plaques de Peyer ni aucune lésion rappelant la fièvre typho'i'de. Reins. Ils sont très-congesliomiés, et au point qu'on ne distingue pas les deux substances qui sont d'un brun foncé. Une grande quantité de liquide s'écoule à leur incision. La vessie, très-distendue, était pleine d'une urine un peu foncée. Bâte encore assez dure, sang noir foncé s'échappant à la coupe. 30Ù Tous ces organes sont fortement congestionnés, et le sang qui s'é- coule est partout noirâtre, poisseux. L'état du cadavre ressemble tout à fait à celui des sujets qui sont morts d'ASPHvxiE. Cavités crânienne et rachidienne. — 1° Cerveau. Il s'écoule du sang en quantité notable de la section du péricrâne; ce sang est noirâtre, épais; la dure-mère est fortement tendue et très-hyperémiée. A la base de l'encéphale, hyperémie, vascularisation considérable. Cette hyperémie est très-grande sur les lobes antérieurs et sur les nerfs optiques. A partir de ce df.rnier point, on commence à voir des traînées jaunâtres puriformes ; ces traînées vont en augmentant et de suite beau- coup jusqu'à O^iOl en avant du chiasma des nerfs optiques. A cet en- droit, la toile méningée a pris une grande épaisseur; elle oppose plus de résistance et elle est tranformée en une nappe puriforme vert jau- nâtre. Au milieu de cette masse, on voit surgir à peine les deux nerfs optiques dont le chiasma est empoicré par la plaque puriforme et ap- pliqué contre la face cérébrale. Celte plaque se continue jusqu'au bulbe en recouvrant de sa masse plus ou moins épaisse et en aplatissant toute la protubérance. Les nerfs de la base du crâne sont également, par la néo-formation, pour ainsi dire empoicrés; ceux du côté gauche davantage; du reste, la plaque puriforme est plus épaisse de ce côté. La coupe des deux artères caro- tides montre que ces vaisseaux sont également comprimés, ainsi que les vaisseaux qui rampent sur la protubérance et le bulbe. Toutes les par- ties comprises entre le chiasma et la protubérance sont recouvertes par les méninges épaissies et devenues verdâtres et d'aspect puriforrpe. Dans la scissure de Sylvius la toile méningée est aussi épaisse, sur- tout à gauche. Il s'échappe de cette toile un liquide séreux, jaunâtre, qui ressemble à une sérosité louche, puriforme. Sur la face externe des lobes moyens au milieu d'une grande vascu- larisation, se trouvent de petites ganulaiions de teinte gris blanchâtre, grosses comme une tête d'épingle, disséminées, quelques-unes agglo- mérées, suivant toutes le trajet des vaisseaux. Elles sont plus nom- breuses le long de la scissure de Sylvius et on les trouve abondantes à la face inférieure du cervelet ou la vascularisation est également très- grande. Ce sont de véritables granulations tuberculeuses. Les méninges s'enlèvent difficilement, il n'y a pas ulcération de la substance grise, mais celle-ci est un peu ramollie et présente un aspect rosé (injection notable). La substance blanche olïre peu de consistance et se déchire avec facilité dans quelques endroits (quelques points même sont ramollis, vers le ventricule et la voûte à quatre piliers). 301 Il y a une grande quantité de liquide séreux dans les ventricules. 2° Moetle épinière. — Les deux côlés présentent après la section de la dure-mère une injection très-vive de la face interne de cette membrane dans la partie recouverte par le feuillet pariétal de l'arach- noïde. Du côté du feuillet viscéral de l'arachnoïde, on a un aspect jaunâtre puriforme par places, avec des masses d'exsudation sous- arachnoïdiennes qui soulèvent les méninges d'un façon irrégulière. On voit par endroits des amas de matière semi-solide gris jaune- verdâtre, comme puriforme, et des épaississements œdémateux. Sur ces méninges ainsi modifiées, on voit courir une vascularisation très- grande. Dans quelques endroits on distingue de petites granulations grises (tubercules), grosses comme une tête d'épingle; leur siège d'élec- tion est surtout la ligne médiane, le sillon et les vaisseaux nombreux qui de plus sont très-dilatés. '' Il y avait des adhérences entre la face interne de la dure-mère et ces lésions des deux autres méninges (pie-mère et arachnoïde). Toutes ces altérations sont plus considérables à la ^ace "posltrieure de la moelle. La face interne de la dure-mère offrait un aspect rugueux, granulé, comme une peau chagrinée. En effet, au milieu des petits vaisseaux hyperémiés et des tractus résultant de la séparation des méninges ag- glutinées, on distinguait de petites saillies, résistantes, grisâtres, qui furent confirmées être de petits produits tuberculeux. Dans la région lombaire, au milieu des nerfs de la queue de cheval, les granulations tuberculeuses sont plus nombreuses et à la face interne de la dure-mère on trouVe une masse assez considérable de matière jaune verdâtre, semi-élastique, puriforme, et ressemblant aux pro- duits que l'on rencontre dans les plèvres ou le péritoine dans les cas de pleurésie ou de péritonite tuberculeuse. C'est toujours égale- ment pour ces points sur le trajet des vaisseaux que sont placés les tubercules. L'examen micrographique que nous avons fait de suite, a confirmé la nature tuberculeuse de ces petites granulations et il nous a permis de suivre le développement de ce processus pathologique dans le tissu connectif, et dans les parois des vaisseaux, qui pénètrent par les sil- lons de la moelle. Il se passe là ce qui se passe pour le cerveau, dans lequel on suit d'une façon analogue le même travail pathologique, soit dans les fentes, les anfractuosités, soit surtout les scissures de Sylvius. Ici c'est surtout le sillon postérieur qui pour la moelle renferme les parties qui ont subi l'atteinte la plus notable de la prolifération tuber- culeuse. Il y a par ce fait une sorte de ceinture morbide autour de la moelle constituée par les méninges altérées qui l'enserrent ainsi, et ce cercle 302 a son épaisseur plus grande dans la partie postérieure et dans les points latéraux. De plus, à l'état frais, en faisant des coupes à différentes hauteurs de la moelle, on constate une sorte de sclérose au début dans une grande partie de l'écorce, sclérose incomplète qui pénètre en quelques endroits jusque dans la substance blanche {cordons antéro-latéraux et cordons postérieurs) ; au milieu de ces parties on note quelques îlots de substance blanche restée saine. Dans d'autres points, la vascu- larisation de la substance blanche est si grande qu'elle a pris son aspect tout à fait rosé. C'est dans les portions d'aspect scléreux que se remarquent de pe- tites masses fines, à peu près arrondies, blanc grisâtre, que l'on con- state déjà à l'œil nu et avec la loupe, et qui examinées au microscope laissent voir des amas arrondis placés tout près ou autour d'un vais- seau; elles sont composées de petits éléments (cellules ou noyaux, en grande prolifération) parsemés ou séparés; de fines granulations graisseuses s'y voient disséminées, plus nombreuses au centre, et ces mêmes granulations recouvrent parfois des places considérables du conduit lui-même. Ce vaisseau, ainsi recouvert, en est parfois obscurci. Ces petites masses ont donc la constitution de véritables gramdations grises tuberculeuses. Vers la région dorsale, partie inférieure, dans le cordon antéro-la- téral droit, une de celle-ci, arrondie, composée de petits éléments (cellules ou noyaux) plus ou moins granulés, mais en très-grande proli- fération, a pu être isolée et dessinée. Elle est placée autour d'un vais- seau, et semble développée dans ses parois externes. Elle a un volume qui est relativement sept à huit fois plus considérable que le con- duit vasculaire. Le sang paraît encore pouvoir circuler dans le vaisseau, mais celui-ci est toutefois couvert de petites granulations gris noi- râtre qui soulèvent et déforment sa membrane externe, et qui, parfois, engaînent, pour ainsi dire, toute son étendue. Cette petite masse, en elle-même et dans ses rapports avec le vais- seau, ressemble donc tout à fait aux masses grises, semi-transparentes, résistantes, aux véritables granulations tuberculeuses, constatées si nettement dans ce cas dans les méninges cérébrales et spinales, comme aussi dans les poumons. 11 y avait donc, dans ce cas, méningite cérébro-spinale tubercu- leuse et mtningo-rmjéiile de même nature, avec commencement de tu- bercules dans La moelle même, de plus, comme conséquence de ces altérations, sorte à'état scléreux du pourtour de la moelle se présen- tant seulement encore dans quelques parties et sous une forme diffuse. Ces lésions si intéressantes, rencontrées dans ces différents points, 303 étaient, comme nous l'avons dit, les unes facilement constatables à la simple vue, tandis que les autres nécessitaient l'emploi du microscope. Mais dans les deux cas, les résultats étaient identiquement les mêmes pour les méninges cérébrales et pour les méninges spinales. Au point de vue de l'anatomie pathologique, ces altérations indi- quaient donc bien l'extension si naturelle, si malheureusement facile du même processus morbide à des organes de texture analogue, et qui, bien qu'éloignés, se relient les uns aux autres, et se commandent par tant de faces. Au point de vue clinique, ces lésions multiples rendaient compte, d'une façon plus complète et plus satisfaisante, des phénomènes mul- tiples aussi (cérébraux et spinaux), dont le développement suivi pen- dant la vie avait paru de plus aussi, consécutif. Enfin, l'étude complète de Taxe encéphalo-rachidien, si nécessaire dans ces cas, empêchait ainsi d'attribuer uniquement aux seules alté- rations méningo-céphaliques, ce qu'il est plus vrai de rapporter égale- ment, pour leur part au moins, aux lésions méningo-spinales. — M. Carville indique les résultats obtenus dans quelques recherches sur le chloral, dans lesquelles il a fait usage de l'appareil enregistreur pour noter exactement les modiûcations survenues dans la circulation, sous l'influence des excitations, chez les animaux soumis à l'action de cette substance. Le tracé conserve une régularité parfaite sauf un peu moins de tension , pendant l'application d'un courant continu sur le nerf scialique mis à nu. Cette expérience donne la démonstration écrite de l'action anesthésique du chloral. M. Carville ajoute que dans ses ex- périences, il a eu l'occasion de noter des différences considérables dans les effets physiologiques de cet agent suivant sa provenance. M. Krishaber fait observer que l'anesthésie avait été notée par la plupart des expérimentateurs; dans ses recherches avec M. Dieulafoy, ils ont constaté cette insensibilité en agissant directement sur le nerf laryngé supérieur. Avant le stade anesthésique, il y avait une certaine excitabilité qui a été niée, mais qu'il est facile d'apprécier quand on donne de faibles doses de poison. Il signale en outre un abaissement de la température. Chez un chien la température s'est abaissée jus- qu'à 32° et même 29° 1/2 un peu avant la mort. M. Krishaber trouve beaucoup de relations entre le mode d'action des hautes doses d'alcool et celui du chloral. Les applications thérapeutiques qu'il en a déjà faites, ne lui permet- tent pas encore de donner des appréciations définitives; toutefois, il au- rait obtenu des résultats satisfaisants, entre autres dans la sciatique, la chorée, dans un cas de toux opiniâtre. 304 M. LiouviLLE signale une diflerence dans l'intensité et le développe- ment des accidents suivant que la voie d'absorption mise en jeu est l'estomac ou le tissu cellulaire sous-cutané ; le chloral , d'après ses recherche?, agirait plus rapidement et plus fortement lorsqu'il est in- troduit dans l'estomac. Pour répondre à une demande de M. Magnan rappelant que, dans des expériences sur l'alcool et certaines essences, le tissu cellulaire sous-cutané s'était toujours montré plus favorable à la rapidité de l'absorption, M. Liouville ajoute, qu'en ce qui concerne le chloral, l'es- tomac paraît être une voie d'absorption plus rapide que le tissu cellu- laire sous-cutané. M. Krishaber fait remarquer que le degré d'activité de l'absorption dans le tissu cellulaire sous-cutané est subordonné à des conditions diverses telles que les doses, le degré de concentration de la sub- stance, le lieu d'application, le nombre dépeints injectés, etc., qui peuvent entraîner des différences considérables dans l'activité et l'in- tensité des phénomènes. Il ajoute, relativement aux phénomènes physiologiques, qu'il a pu noter chez l'homme un abaissement de température de 1/2 degré avec une diminution des battements du cœur. M. Legros a noté de la lenteur dans l'absorption par l'injection sous- cutanée, mais le chloral employé était acide. Quand l'absorption se fait par les poumons, l'action doit être plus rapide et plus énergique, puisque par le seul fait de l'application du poison à la surface pulmo- naire, l'animal perd la voie d'élimination la plus puissante. Il ajoute que l'animal en expérience était anesthésié ; en comprimant la queue il n'y avait point de réaction. M. Laborde fait remarquer que la véritable anesthésié est celle qui s'accompagne de l'abolition des divers modes de sensibilité, résultat que l'on obtient par le chloroforme, l'éther. Quant à l'anesthésie lo- cale, c'est un phénomène tout différent. M. 'VuLPiAN attire l'attention sur l'action locale du chloral sur les tissus. C'est probablement à des coagulations qu'il faut attribuer le retard dans la production des accidents à !a suite des injections veineuses; l'action sur les poumons est plus rapide ; la mort est arrivée instantanément par l'injection dans la trachée. M. DuMONTPALLiER iosistc pour que tous ces accidents soient signalés avec le plus grand soin, afin de prévenir dans la pratique les fâcheux résultats qui seraient la conséquence d'une mauvaise administration du médicament. M. Legros a vu survenir des escharres dans toutes les injections sous-cutanées qu'il a faites. 305 M. Magnan, à l'appui de ce qui vient d'être rapporté sur l'action locale irritative du chloral, communique le résultat d'une de ses expé- riences. Il a injecté, dans l'estomac d'un chien vigoureux, 10 grammes de chloral anhydre provenant de la pharmacie centrale des hôpitaux. L'injection a été faite en deux fois par doses égales à demi-heure d'in- tervalle. L'animal, dès la première injection, a fait de fréquents efforts de vomissements; dix minutes après la seconde injection, le chien marchait en titubant; par moments il poussait des gémissements, s'al- longeait à terre, traînait et frottait le ventre sur le sol, paraissait éprouver de vives douleurs. Les efforts de vomissements continuaient, mais on l'empêchait de vomir en le maintenant redressé sur ses pattes de derrière. A part les efforts de vomissements, un abaissement de la température de 1" 1/4 et la légère titubation, on n"a pas noté d'autres phénomènes. Au bout de deux heures, l'animal est resté couché pous- sant sans cesse de petits cris. Il est mort quatre heures après l'injection. A l'autopsie, on trouve la surface externe de l'estomac sillonnée par des vaisseaux injectés, et d'autant plus nombreux qu'on se rapproche de la grande courbure; à ce niveau l'on voit une plaque d'un rouge noirâtre de l'étendue d'une pièce de 5 francs; à côté une deuxième plaque un peu plus petite et tout autour des vaisseaux tortueux, for- mant comme une couronne. La cavité de l'estomac renferme 250 gram. environ d'un liquide rouge foncé composé surtout de sang. La mu- queuse stomacale est d'un rouge lie de vin dans toute son étendue, elle devient noirâtre, boursouflée au niveau de la grande courbure. La première portion de l'intestin grêle est injectée et la muqueuse est recouverte d'un liquide rougeâtre. Les veines caves, les cavités droites du cœur sont remplies de sang noirâtre; on ne voit ni injection ni hé- raorrhagie sur le péiicarde ni sur l'endocarde. Les méninges cérébrales sont un peu injectées ; en deux ou trois points do la base, elles offrent une légère inliltration sanguine; les coupes pratiquées sur lé cerveau ne montrent rien dans les parties centrales. Les reins sont injectés, rouges, sans hémorrhagie. c. lî. !8f:0. ÎU COMPTE RENDU DES SÉANCES DE ^ ^ LA SOGÏËTË DE BIOLOGIE pendant le mois de novembre 1869, Par m. MAGNAN, secrétaire. PRÉSIDENCE DE M. CL. BERNARD. Séance du 6 novembre. M. LiocviLLE, à propos du procès-verbal, rend compte de nouvelles expériences, dans lesquelles l'action irritative du chloral sur les tissus est des plus manifestes; il présente une poche purulente survenue 60US la peau d'un ciiien à la suite d'une injection faite avec du chloral hydraté au cinquième. Pour répondre à une observation de M. La- borde, il répèle que dans ses expériences Vestomac s'est montré une voie plus active à l'absorption que le tissu cellulaire sous-cutané, et qu'il en serait du chloral comme d'autres substances irritantes telles que le nitrate d'argent, dont rinjeotion sous-cutanée ne serait point suivie d'absorption; il se propose du reste de répéter ces diverses expériences. M. Laborde insiste sur ce fait que, d'une manière générale, l'injec- tion sous-cutanée est suivie d'une absorption plus rapide que linjec- tion dans l'estomac. Relativement au chloral, ses expériences Un ont 308 démonlré que l'injeclion sous-cutanée était aussi plus active; d'autre part, les injections sous la peau avec diverses substances irritantes, avec le nitrate d'argent môme, sont suivies, malgré leur action locale sur les tissus, d'efl'eîs physiologiques assez rapides, et dans tous les cas plus rapides qu'après l'introduction de ces substances dans l'esto- mac. Il pense donc que les résultats obtenus par M. Liouville sont dus , à quelque circonstance accessoire qui n'est point déterminée. — M. Legkos communique a la Société ses recherches relatives au ■volume acquis par les muscles striés à la suite de la contraction. On pensait que les muscles en se contractant augmentaient de volume; une expérience de M. Legros démontre le contraire. Il place dans un tlacon les masses musculaires d'un rat qu'il vient de sacrifier. Il fait plonger au milieu de ces débris musculaires les deux réophores d'une pile, passés à travers un bouchon qui ferme herméti- quement le flacon ; à ce bouchon se trouve adapté un tube en verre qui s'ouvre dans le flacon et qui, d'autre part, communique, par l'intermé- diaire d'un tube en caoutchouc et d'un second tube en verre avec un deuxième flacon rempli à moitié d'un liquide coloré et auquel se trouve adapté un manomètre. En enfonçant le bouchon dans le premier flacon on presse sur lair qu'il renferme, et cette pression se transmettant au deuxième flacon, le liquide coloré s'élève dans la branche du mano- mètre. L'appareil ainsi disposé permet d'établir, d'après les mouve- ments de la colonne de liquide coloré dans la branche du manomètre, les diverses oscillations que subit le volume d'air contenu dans le pre- mier flacon renfermant les muscles. Cette quantité d'air augmente ou diminue suivant les changements de volume que la contraction fait subir aux masses musculaires ; or, pendant l'application du courant électrique, on voit les muscles se contracter et la colonne de liquide baisser dans le tube du manomètre ; elle reprend ensuite son premier niveau dès que les muscles sont ramenés au repos; dans le premier cas la quantité d'air renfermée dans le flacon était devenue plus grande grâce au volume moindre des muscles en contraction ; dans le deuxième cas, la quantité d'air avait diminué, les muscles au repos ayant repris leur premier volume. M. Legros poursuivra ses recherches pour déterminer l'état des muscles lisses pendant leur contraction. — M. Brown-Séquard cite le fait de la disparition d'un kyste séreux du cou chez un malade à la suite de l'apparition d'un abcès gingival. Il relate, en outre, l'observation d'un enfant atteint d'hydrocéphalie considérable chez lequel le volume du crâne avait dimmué au moment de l'apparition d'une anosarquc ; plus tard, Fanasarque ayant disparu. 309 l'iiydrocéphalie î-'éiait rotironuilc et. le cârie avait reuris son volume Il normal. On compte de mombrciix fait;; rie disparition d'une collection liquide dans une partie de l'économie à la suite de l'application d'un vésicatoire à la surface cutanée. Le mécanisme de cette disparition ne dépend point de la nécessité pour le sang d'aller puiser au sein de la collection de liquide pathologique les éléments que lui auraient fait perdre l'exha- lation du vésicatoire ; il y a autre chose : l'irritation sufïit pour produire ce résultat. L'irritation des extrémités des nerfs cutanés retentit sur la moelle, et la résorption du liquide épanché se produit. Dans le cas de gingivite ayant amené la disparition du kyste séreux, ce n'est pas à la production d'un peu de pus dans l'épaisseur de la gencive qu'on doit la résorption du kyste, mais bien à laction nerveuse. — M. JoLTET communique à la Société !es résultais qu'il a obtenus dans ses expérieucss sur la conine. Chez un chien soumis a l'action du poison, il excite le pneurao-gaslrique et il voit le cœur se contracter; d'autre part, l'excitation du nerf sciatique ne donne aucun mouvement dans la patte; mais celte excitation retentit sur la circulation, et un manomètre adapté sur l'artère crurale du côté opposé montre une augmentation de tension; la colonne indicative s'élève de 4 à 5 cen- lim.ètres. Dans une seconde communication, M. Jolyet se propose de répondre à cette question : le sang d'un animal empoisonné par la strychnine tst-il toxique? Il empoisonne une grenouille avec la strychnine, et pendant les con- vulsions il lui tire, avec la seringue de Pravaz, une certaine quantité rie sang qu'il injecte à une seconde grenouille spoliée préalablement d'une partie de son sang; après la transfusion, il a vu survenir des accidents convulsifs chez cette seconde grenouille; toutefois les se- cousses se sont montrées très-faibies. M. Brown-Séql'ard rappelle qu'il a répété la même expérience sur le lapin sans rien produire; le résultat différent dépend, sans doute, de l'espèce animale mise en expérience. M. Bert indique les résultats obtenus avec la belladone ; il fait man- ger le foie d'un rat empoisonné par la belladone a un second rat, cher, lequel il ne tarde pas à noter la dilatation des pupilles. D'autre part, il a empoisonné un petit chat très-jeune avec la strychnine; Panimal est mort très-lentement; son sang, son sérum, injectés sur les gre- nouilles, n'ont point produit d'accidents slrychnic^ues. M. LioL'TiLLE, dans ses expériences avec le docteur Voisin, n obtenu, chez un petit animal, des acridonls curariqncs à la suite de l'injection 310 de sang provenant d'un animal plus gros empoisonné par lo curare. M. VoLPiAN a injecté, sans résultats, chez un animal, le sang d'un autre animal empoisonné par la strychnine; la recherche de ce poison dans le sang par la chaux et l'alcool n'en a pas non plus décelé la présence. Les résultats obtenus par M. Jolyet pourraient peut-être s'expliquer par la facile imbibition du tissu cellulaire de la grenouille qui rend possible la pénétration d'une plus grande quantité de poison; du reste, les accidents obtenus sont toujours très-faibles, ce qui fait penser à la présence d'une dose minime dagent toxique. M. Brown-Séqcard rappelle que des physiologistes ont avancé qu'un dix-millième de grain de strychnine suffisait pour provoquer des acci- dents chez les grenouilles ; les injections qu'il a faites avec le sang d'un chien empoisonné, sur le cochon d'Inde, n'ont point donné de résultat; il avait déûbriné le sang, et par suite le poison avait été peut-être re- tenu dans la fibrine. On sait que pour la belladone les résultats sont différents. On a donc à tenir compte, dans les expériences de ce genre, de l'espèce d'animal iur lequel on opère et de la substance que l'on emploie. M. Laborde insiste sur celte dernière conclusion de M. Brown-Sé- quard; il rappelle en outre le fait de M. Bert, de greffe de deux rats, chez lesquels il suffisait d'injecter une substance chez l'un pour pro- duire les accidents sur les deux, il est vrai qu'il y avait communica- tion directe entre les deux systèmes circulatoires. Il rappelle des ex- périences faites avec l'ésérine. Un rat ayant été empoisonné par cette substance, son sang fut injecté sur un deuxième rat qui présenta les mêmes accidents mais à un degré moindre. De plus, du sang du pre- mier rat, instillé dans l'œil d'un homme adulte, aurait amené la con- traction de la pupille. M. Laborde n'a pas été témoin du fait, mais le ■ujet de l'expérience le lui a rapporté lui-même. M. Krishaber rapporte qu'ayant injecté sous la peau d'un lapin 60 cen- tigrammes d'atropine, il avait sacrifié l'animal au bout d'une heure et avait fait manger son foie et ses muscles à un chien, sans provoquer le moindre accident. L'atropine et la belladone n'auraient pas, d'après les faits dont on a parlé, la même transmissibililé par le sang. Sur trois jeunes chiens, M. Krishaber a injecté G centigrammes de strychnine j la mort n'est arrivée qu'au bout de sept heures environ, mais ces animaux continuaient à présenter des convulsions tétaniques, malgré l'arrêt du cœur ; l'immobilité de cet organe ne cessait point sous l'influence de l'excitation produite par l'introduction d'une épingle. II. Bert a observé des mouvements réflexes sur des animaux empoi- 311 sonnés par la strychnine, deux heures après la cessation dos battements du cœur. Chez un chien qu'il avait abandonné sur une table, croyant la mort très-proche, il a pu, vingt-quatre heures après, constater encore de petites secousses dans les muscles ; le corps était refroidi, mais cepen- dant le cœur battait encore. M. Balbuni fait une communication sur le développement du strongle géant. Ayant trouvé trois de ces helminthes sur un chien, il en a fait avaler des fragments à trois chiens qu'il a sacrifiés, deux au bout de quatre mois et le troisième au bout de cinq mois, sans qu'il ait pu con- stater dans le tube digestif, dans les reins ou ailleurs, des traces de ces entozoaires. D'autre part, comme on a trouvé chez les poissons des larves de strongle géant et qu'il existe peut-être un état intermédiaire entre l'œuf et l'animal développé, M. Balbiani a institué de nouvelles expériences sur les poissons. 11 a fait manger des œufs de strongle à des brochets sans rien trouver ensuite. D'autres expériences faites sur des crusta- cés n'or.t pas été suivies non plus de succès. M. Balbiani met sous les yeux des membres de la Société un jeurie strongle qui a éclos dans l'eau; on le voit sous le champ du micro- scope présenter de petites oscillations. Tout mouvement s'arrête dès que l'animal est plongé dans un milieu très-froid. M. Laborde propose à ses collègues de la Société qui se sont occupés du même sujet et qui ont observé les mêmes résultats de vouloir bien se joindre à lui pour rédiger une note collective, dans le but de faire con- naître les inconvénients et même les dangers de l'administration du chloral. Cette proposition n'est pas acceptée. Séance du 13 novembre. M. Bert, à propos du proces-verbal , rappelle que l'opinion dé M. Legros sur l'augmentation de volume des muscles striés pendant la contraction, avait déjà été avancée par divers auteurs. M. "Vierordt l'indique dans les recueils de Slole^chott. D'autre part, Erman a signalé le même fait. M. Longet, dans sa nouvelle édition, l'indique également. Valentin évalue à r^oô l'augmentation du muscle en contraction. En appréciant d'une façon approximative ce que donne Toscillation 312 de la colonne de liquide coloré dans l'appareil de M. Legro?, on peut penser que c'est à peu près le chiffre signalé par Valentin. M. BROWN-SÉQUAno signale des causes d'erreur dans l'expérience pratiquée par M. Legros devant la Société dans la séance précédente. M. Legros avait placé dans le, flacon des muscles et des portions d'intestin ; or ceux-ci renferment des gaz dont le volume peut changer sous l'influence de l'éleclricilé. Les vaisseaux sanguins contenaient aussi de l'air. Il est probable que dans les expériences faites dans son laboratoire d'une façon plus minutieuse, M. Legros aura cherché à éviter ces causes d'erreur. M. B-.LBiANi ajoute, relativement à sa dernière communication, que le strongle qu'il a présenté à la Société a pu vivre quarante-huit heures dans Talbumine où il l'avait placé; la plaque de verre avait été lutée avec de la cire, la mort aura été sans doute occasionnée par l'asphyxie. — M. Charcot communique à la Société, en son nom et au nom de M. Joffroy, une observation de paralysie infantile s'accompagnant d'une altération des cornes antérieures de la substance grise de la moelle. M. Charcot ajoute que la malade V..., à l'âge de 7 ans, a été prise a l'école de paralysie subite des membres et de perte passagère de la parole. La faiblesse a persisté dans les quatre membres; le bras gauche a présenté une paralysie plus marquée. La malade est morte de phthisie pulmonaire à 32 ans. A l'autopsie, on troyve dans toute l'étendue de la moelle une altéra- tion notable des cornes antérieures, avec intégrité des cordons anlé- Fieurs. Les cornes atrophiées ont subi une sorte de transformation fibroïde, un développement exagéré de la névroglie avec destruction de la plupart des cellules dites motrices; mais dans la région cervi- cale, la corne antérieure gauche présente une altération beaucoup plus considérable que la corne du côté opposé, et parallèlement le membre supérieur gauche est le siège d'une paralysie et d'une atrophie plus complètes; il y a donc concordance entre les lésions centrales et périphériques, et il semble naturel de raliacher à l'altération des centres nerveux les lésions musculaires; celles-ci n'existent pas dans la totalité des muscles, ni, pour chaque muscle, dans toute son étendue, des fibres musculaires conservent leur état normal au milieu des muscles malades. Dans un cas d'atrophie musculaire de MAI. Vulpian et Prévost, les lésions médullaires offraient le môme siège et les mêmes caractères. Iti. Claïka a ég.ilemenl observé un fait de ce cenre. Avec des altéra- 313 lions musculaires on trouve donc habiluellenienl des lésions des cornes amérieures. 11 y aurait ainsi un rapport entre la paralysie infantile et l'atrophie musculaire progressive; la différence résiderait dans le mode d'évolution de la lésion; la destruction des cellules serait rapide dans le premier cas, elle serait au conlraire lente dans les atrophies mus- culaires progressives. M. Laborde, tout en reconnaissant le grand intérêt que présente l'ob- servation de MM. Charcot et Joffroy, croit devoir faire les restric- tions suivantes relativement à sa signification nosologique. 1* Parmi les renseignements commémoratifs, la perte de la parole, au moment de l'attaque, est un symptôme qui n'appartient pas à la série des phénomènes initiaux de la paralysie infantile; le symptôme est de ceux qui caractérisent le début des affections d'origine céré- brale. La paralysie des quatre membrps à la fois est bien l'un des princi- paux attributs de la paralysie de l'enfance, lorsqu'elle éclate brusque- ment; mais, seule, cette manifestation ne saurait nosologifiuement ca- ractériser la maladie, et c'est surtout dans les modifications que subit la paraplégie peu après le début, et consécutivement que résident les caractères diagnostiques qui lui appartiennent. Or, quelques efï'orls de mémoire qu'eûtpu faire la malade dont il s'agit, il est difficile d'admettre qu'elle ait pu donner des renseignements précis sur les modifications qui, d'ailleurs, échappent même souvent à plus d'un médecin qui a sous les yeux le malade : une de ces modiQcations, par exemple, qui est presque une règle, c'est que la paralysie abandonne complètement le bras pour se fixer aux membres inférieurs. 2° Lâge de sept ans, auquel paraît avoir débuté la maladie, serait, dans l'espèce, un âge tout exceptionnel. La statistique portant sur une trentaine de cas parfaitement authentiques, et dans lesquels l'âge de l'enfance est très-exactement noié, montre, en réalité, que c'est entre un et trois ans qu'a lieu le maximuin de fréquence de l'affection; à ■4 ans, les cas en sont plus rares, et, au delà, ce ne sont plus que des exceptions. 3° L'état fébrile, qui fait rarement défaut au début de la maladie, n'est point noté dans l'observation de M. Charcot ; c'est une lacune qui a bien son importance. Mais, même en n'insistant point sur ces exceptions ou ces deside- rata, en supposant que la perte de la parole ait fait, dans ce cas unique, partie des symptômes initiaux de la maladie; en admettant que la paralysie des quatre membres relève d'un renseignement exact ; en accordant enfin que l'âge si exceptionnel do 7 ans ne fait rien à la chose; eh bien! même avec toutes ces concessions, le fuit rapporté 314 par M. Charchot doit encore être rejeté hors du cadre de la paralysie infantile à cause de l'état morbide consécutif et des résultats de l'autop- sie; en effet : Ao Une des caractéristiques de la maladie dont il s'agit, c'est, dans toute l'acception du mot, une localisation àé&a\i\\'e dans un très-petit nombre de muscles d'élection ; cette localisation a principalement pour siège les membres inférieurs, aux membres inférieurs, les jambes, et aux jambes, plutôt une seule que les deux. Lorsqu'elle se localise aux membres supérieurs, ce qui est rare, c'est, on peut dire, toujours dans lin seul mnvibre. Un auteur suffisamment aulorisé a écrit à ce su- jet : Nous ne connaissons pas un seul cas de paralysie siégeant si- viulUmémcnt et avec une persiatence définitive aux membres supé- rieurs. Comment M. Charcot fera-t-il accorder ces vérités cliniques indis- cutables avec la généralisation com!)lèle, dans toutes les parties du cor[)S, des altérations des muscles chez sa malade? Il faut ajouter, à ce propos, qu'une fois la période active de la ma- ladie passée (et cette période dure à peine un mois à partir du début), elle s'arrête définitivement dans ses manifestations essentielles; et si elle progresse, ce n'est plus que dans les parties en général très-res- treintes, où elle s'est définitivement localisée et implantée. (Voir page 63 de notre thèse inaugurale.) Au contraire, dans le cas de M. Charcot, l'idée, la réalité d'une marche ascendante et progressive durant de longues années, résulte immédiatement du récit de l'observation. 5" Enfin, les résultats de l'autopsie et,la nature des altérations dé- crites viennent s'ajouter aux caractères négatifs déjà mentionnés pour faire rejeter définitivement du cadre nosologique où l'on voudrait la placer la maladie dont il s'agit. Du côté des centres nerveux, le siège et même la nature des altéra- tions ne sont nullement ceux qui, d'après des faits authentiques, irré- futables, paraissent caractériser anatomiquement la vraie paralysie de l'enfance; et du côté des muscles, le résultat des recherches micro- graphiques ne donne pas non plus la lésion et le processus caractéris- tiques, d'après les mômes faits authentiques, des altérations muscu- laires. En résumé, le fait de M. Charcot a sa signification propre que, pour notre compte, nous croyons facile de définir et de qualifier, si on le dé- sire; mais il ne saurait en aucune manière être mêlé, sans erreur, aux faits réels de paralysie infantile. M. Charcot, après avoir remarqué combien sont peu précises les al- térations de la substance grise signalées par M. Laborde dans sa thèso 315 inaugurale, fait observer que dans le cas qu'il vient de rapporter, la perte de la parole a duré quelques heures seulement; on ne peut pas, en outre, considérer l'âge de 7 ans comme un fuit absolument excep- tionnel. M. Charcot conclut pour son, cas à une paralysie infantile, se ba- sant sur les faits essentiels du développement subit des accidents de la paralysie consécutive, de l'atrophie des muscles avec déformation des membre?. II ajoute que l'aUéralion musculaire lui paraît dt^voir être rattachée à la lésion de la moelle qu'il fait résider, pour sa part, dans les cornes antérieures, regardant comme subordonnée à celle- ci la lésion de la substance blanche quand elle existe. — M. Bert communique à la Société les résultats des expériences qu'il a faites avec M. Jolyet, relatives à l'absorption vésicale. Ils ont injecté de la strychnine et de l'iodure de potassium dans la vessie de chiens et de chats. Les animaux sur lesquels la strychnine a été injectée ont éprouvé des accidents au bout de dix minutes environ ; les autres ont fourni des traces d'iode dans leurs sécrétions, au bout d'un temps également assez court. Ces expériences, d'accord avec celles de M. Ségalas père, démontrent d'une manière très-manifeste l'absorption parla muqueuse vésicale. Ce fait est d'autant plus important à signaler que l'opinion contraire avait fourni matière à des considérations générales ayant pour but de démontrer les avantages du défaut d'absorption de la mu- queuse vésicale, qui mettait ainsi l'organisme à l'abri de l'intoxica- tion urémique. il. Buown-Séquard rappelle que depuis longtemps les médecins ont eu l'idée de mettre à contribution la muqueuse vésicale pour faire ab- sorber des substances médicamenteuses. En Italie, en Allemagne, en Russie, on a employé pour le traitement du choléra des injections dans la vessie. Il a eu lui-même l'occasion de les appliquer dans des cas nombreux de choléra. Toutes les fois que la sécrétion urinaire était peu abondante, il injectait dans la vessie des carbonates alcalins et de l'o- pium. Au bout d'une demi-heure, l'absorption s'était prodtiite; on pouvait noter des phénomènes se rattachant à l'action de l'opium. D'autre part, le seul fait de l'état de concentration des urines du ma- lin, notablement plus chargées que celles de la journée, est une preuve de l'absorption des parties aqueuses; mais en outre, l'analyse chi- mique démontre qu'une partie des carbonates alcalins a été absorbée. L'eau, les substances médicamenteuses sont donc également absor- bées; il serait important de connaître si, parmi les voies d'absorption, il eo est qui soient plus favorables au passage de certaines substance*, 31f> en daulres termes, s'il existe un lieu d'élection pour l'absorption des différents médicaments. M. Gubler ajoute que le fait de l'absorption par la muqueuse vési- cale est incontestable, mais il faudrait chercher ce degré d'absorption qui doit être moindre par la muqueuse vésicale que par les autres muqueuses et le tissu cellulaire sous-cutané. La nature de la substance doit aussi modifier le degré d'absorption; l'urée, par exemple, doit être difficilement absorbée. M. KnisHABER signale des expériences faites en 1836 par KôUiker, Ekart et d'autres médecins allemands. Des injections de curare dans la vessie n'ont produit aucun résultat chez le chien. M. Bert rappelle que M. Demarquay ayant fait ses expériences sur des vessies malades, a dû trouver l'absorption plus difficile. M. Claude Bernard, en injectant du curare dans la vessie d'un lapin, obtenait des accidents au bout de dix minutes. M. Brown-Séquard pense également que l'absorption est plus lente par la vessie; toutefois, il est des circonstances où cette voie d'absorp- tion peut rendre de grands services. Ainsi, dans le choléra, la muqueuse digestive est peu disposée à l'absorption, d'abord à cause de la ten- dance aux vomissements et à la diarrhée, et aussi à cause de l'hyper- sécrétion dont elle est le siège; ce qui devient une condition très-défa- vorable à l'absorption. M. Bert communique à la Société des expériences de physiologie végétale, relatives au développement variable des sensitives suivant la nature des rayons lumineux qu'elles reçoivent. M. Bert place dans des lanternes à verres diversement colorés des sensitives provenant d'un même semis. Les sensitives placées dans une lanterne noire ont perdu leur sensibilité au bout de huit jours et sont mortes bientôt après. Les sensitives placées dans les lanternes vertes sont mortes quatre jours après les premières, ayant aussi perdu d'abord leur sensibilité. Les sensitives placées dans les lanternes violette.*, bleues, rouges, jaunes, continuent à vivre et restent sensibles; celles qui sont placées dans la lanterne rouge présentent même un léger ac- croissement, mais leurs tiges restent grêles. Les sensitives placées dans une lanterne blanche se développent régulièrement, mais leur transport dans une lanterne noire ou verte amène les changements déjà signalés. Pourquoi les sensitives perdent-elles la sensibilité et la vie sous l'in- fluence des rayons verts? La causp est difficile à déterminer. Sauf les verres rouges, tous les autres laissent passer des rayons colorés de di- verse nature. Le violet, le bleu laissent passer tous les rayons ; ceux-ci 317 Jonl toutefois Irès-alLénués. Le vert n'est pas rigoureusement mono- chromalique, il laisse passer un peu de jaune. L'influence de ces divers rayons est peut être en rapport avec la ca- pacité calorique, variable suivant les différents rayons du spectre. Dans les forêts on trouve peu de végétation sur le sol, dans les tail- lis, non pas seulement à cause de la privation d'air ou de lumière, mais peut-être à cause de la coloration verte du feuillage. On sait que, sous l'influence de cette couleur, le dégagement d'acide carbonique par les plantes est entravé ; ce qui peut entraîner leur étio- lemenl. M. Balbiani fait observer qu'il serait intéressant de déterminer ce qui se passe au point de vue de l'exhalation dans les plantes à feuilles rouges, comparées aux plantes à feuillage vert. M. LiouviLLE communique à la Société un nouveau cas de méningite tuberculeuse cérébro-spinale, survenue chez un sujet de 38 ans. Les granulations miliaires étaient généralisées; on en trouvait aussi sur la choro'ïde. La séance est levée à cinij heures. Séance du 20 novembre. M. Laborde : A propos du proces-verbal, je saisis de nouveau l'occa- sion qui m'est offerte de revenir en quelques mots sur la détermination nosologique bien précise de la paralysie infantile, et de montrer que les faits observés dans ces derniers temps a la Salpêtrière et attribués à celte maladie, ne lui appartiennent en aucune manière. Je crois l'a- voir suffisamment démontré pour ce qui est de l'observation récemment communiquée à la Société par MM. Charcot et Geoffroy; je n'y revien- drai pas; mais ce (jue je vais dire ap[)ortera un nouveau poids à ces premières preuves. Depuis mes premières publications sur ce sujet, je n'ai pas cessé de m'en occuper et d'observer attentivement les faits, en très-grand nom- bre et encore inédits, que j'ai eu l'occdsion de rencontrer et que j'ai môme cherchés. Or cette étude constante et approfondie a confirmé de tous points l'histoire clinique que j'avais donnée de la maladie dont il s'agit; mais elle a fait ressortir à mes yeux une erreur qui d'ailleurs n'est pas de moi, et que j'ai eu, je l'avoue, la trop facile complaisance d'admettre à cause du nom qui la couvrait. Cette erreur est d'avoir admis, non pas sans réserves toutefois, la dégénérescence ou la substitution graisseuse comme pouvant nppartenir à !a paralysie infantile. C'était si bien la cor- 318 viclion de M. Duchenne qu'il en avait déduit la dénomination de l'af- fection : paralysie atrophiqiie graisseuse de l'enfance. Eh bien! non, ce mode d'altération musculaire n'est pas celui de la paralysie de l'en- fance; j'ai décrit tout au long dans ma thèse la lésion musculaire qui appartient en propre à cette maladie, et qui suffit, à elle seule, à la ca- ractériser (1). Or, que trouvons-nous à ce sujet dans les faits publiés par MM. Char- cot, Vulpian ou leurs élèves? Dans tous les cas, celui qui vient de nous être communiqué par M. Charcot, celui qui a été publié par M. Cornil dans nos Bulletins de 1863-64 (p. 187), et sur lequel j'ai déjà fait de fortes réserves dans ma thèse (p. 129). Enûn, dans celui de MM. Vul- pian et Prévost, imprimé dans nos Bulletins de 1865-66 (p. 215), dans tous les cas, dis-je, se trouve expressément notée et décrite la dégé- nérescence graisseuse des muscles; motif déjà suffisant pour rendre ces faits suspects de n'avoir pas été placés dans le cadre nosologique qui leur convient. Mais ce motif est loin d'être le seul ; qu'il me suffise d'en relever encore quelques-uns. Dans l'observation relatée par M. Cornil, il est dit : " La malade fut prise, à l'âge de 2 ans, de paralysie des membres inférieurs; cette pa- ralysie s'' étendit progressivement et fut très-longue à s amender... » Or ce n'est point ici, personne ne doit l'ignorer aujourd'hui, le proces- sus de la paralysie infantile; loin de s'étendre et de progresser, elle a pour caractère essentiel de diminuer rapidement et de se localiser. Ce n'est pas tout; mais pourquoi insister lorsque l'erreur est si claire? Bien plus claire est l'erreur de MM. Vulpian et Prévost. Il s'agit, dans leurs observations, d'une femme de 78 ans; elle était en démence sé- niîe, il est vrai, mais elle affirmait néanmoins n'avoir jamais eu de convulsions dans son enfance, et prétendait que ta déformalion de son pied gauche ne datait que de la ménopause. Malgré cela, M. Vulpian persista à considérer toujours celte déformation comme datant de l'en- fance, comme un exemple de paralxjsie infantile. Sur quoi donc se fondait M. Vulpian pour émettre cette assertion envers et contre lo dire de la malade? Sur l'existence de la déformation du pied gauche, imiquement; cette déformation, d'ailleurs, n'est pas dénommée, mais elle est suffisanmient caractérisée par la description-: « La malade en marchant appuie à terre le talon, qui présente, à ce niveau, un fort (1) Cette particularité d'anatomie morbide est d'ailleurs en parfait accord avec les résultats de l'expérimentation : les muscles séparés de )a moelle par ia section même du nerf moteur ou par la section de !a înoeile ne subissent pas la dégénérescence graisseuse. 319 ëpaississetiienl de ta peaii.h b'agissait donc d'un pied bol-talus; or le pied bot-talus simple est tellement rare et excepliounel dans la para- lysie infantile, qu'on est autorisé à le dire étranger à cette maladia ("V. ma thèse). En résumé, aucun de ces faits ne saurait être attribué, avec quel- que certitude, à la paralysie infantile; et il est au moins permis de s'é- tonner que leurs auteurs n'aient pas apporté quelques réserves dans un diagnostic rétrospectif qui n'est pas sans difficultés. Je n'entends pas dire que des cas légitimes de paralysie infantile ne puissent se ren- contrer à la Salpêtrière, mais ce n'est point ma faute si on ne les y a pas encore trouvés, et si l'on a pris pour tels des faits qui n'en sont pas. En terminant, je demande à faire une remarque : c'est surtout la page 107 de ma thèse et non pas seulement la page 114, où nous avons cru devoir faire quelques réserves, qu'il faut consulter pour se convaincre du soin que nous avons apporté à l'étude des altérations anatomiques des centres nerveux dans la paralysie inf.mlile : après avoir décrit minutieusement ces altérations et les procédés qui ont présidé à nos recherches, jai ajouté comme expression négative : « Les cellules neî-veuses à prolongemenls mulliples de la substance grise des cornes antérieures étaient parfaitement saines; il en était de même des éléments anaiomiques des cordons postérieurs, etc., etc. Or si, l'ayant si bien cherchée, l'altération de ces parties ne s'est pas montrée à mes yeux armés du microscopique, c'est qu'elle n'existait pas. — M. Brown-Séouard met .-ous les yeux de la Société une femelle de cochon d'Inde chez laquelle la section du nerf sciatiquo du côté gauche paraît avoir eu pour conséquence une hypersécrétion de la ma- melle du même cùlé. On constate, en effet, que de ce côté seulement la mamelle est augmentée de volume et laisse écouler sous la pression une notable quantité de lait. — M. Hayem a eu l'occasion d'observer une altération graisseuse musculaire dans un cas de vanole rapidement mortelle. Il montre des pièces anatomn|ues qui présrnient dans les faisceaux musculaires une stéatose aiguë. — -M. CnAHBON dépose sur le bureau un mémoire qui a pour titre : Description d'M?i moiisirc cclosomien. Séance du 27 novoDibi'8. Le proces-verbal est lu et adopté. W. BRO'.vN-SÉQUAnt). à l 'occnsion du procès-Terhal, dit qu-î lors inéms 320 que les faits annoncés par M. Legros seraient exacts, la diminution d« volume des muscles en contraction ne serait pas inadmissible. En effet, pendant la contraction la substance musculaire se modifie, elle se trans- forme en partie, môme sans combustion par de l'oxygène libre, et donna de l'acide carbonique qui, se dissolvant dans l'eau, n'en augmente pas le volume, tandis que le muscle par celte perte de matière doit avoir di- minué de volume. Observation de greffe de la rate; par M. Philipeaox, M. VuLPiAx présente à la Société, de la part de M. Philipeaux,un rat albinos sur lequel il a obtenu une greffe de la rate. Le rat avait 1 an lorsque l'expérience a été faite. M. Philipeaux, à cette époque, le. 10 août 1869, a introduit dans l'abdomen de l'animal la rate d'un jeune rat âgé de 25 jours. L'organe introduit avait, quand il a été introduit, 12 millimètres de longueur, 4 de largeur et S d'épaisseur. Le rat sur lequel on a tenté cette greffe est mort le 26 novembre 1869, c'est-à-dire trois mois et six jours après l'expérience; à l'ou- verture de l'abdomen , on voit que la greffe a réussi ; la rate insérée dans l'abdomen est greffée près de la rate normale. Elle a 12 milli- mètres de longueur, 9 millimètres de largeur et 4 millimètres d'épais- seur. Son volume a donc notablement augmenté , et surtout en lar- geur. Elle a absolument la même couleur et le même aspect que la rate propre à l'animal ; on constate dans un point de la face pro- fonde de la rate transplantée de très-petits vaisseaux qui en sortent ou y pénètrent. Là rate propre à l'animal paraît avoir ses dimensions normales; il y a de plus une petite rate surnuméraire. Les ganglions lymphatiques voisins de la rate sont, surtout dans leur zone périphérique, colorés en rouge brunâtre, et l'on reconnaît à l'aide du microscope qu'ils contiennent dans cette zone une grande quantité de granulations de pigment sanguin. Cette observation de greffe de la rate reproduit, comme on le voit , les principaux détails publiés déjà par M. Philipeaux à l'occasion d'ex- périences semblables. M. Brown-Séouard a vu un ganglion tuberculeux de cochon d'Inde, greffé chez un autre cochon d'Inde, continuer à végéter. — M. CiiAMBON place sous les yeux de la Société une tumeur fibreuse avec parties ossifiées développée dans le ccscum d'un cheval. Une note est remise par If [>rést'ntateur. 321 Tumeur SITUÉE AU niveau de l'orifice qui établit la communication entre le COECUM ET LE GROS COLON ; EXAMEN MICROSCOPIQUE; observation recueillie sur un cheval par M. Edm. Chambon. Je dois à l'obligeance de M. Goubaux la pièce pathologique que j'ai l'honneur de présenter à la 5odefe de biologie. Elle a été recueillie sur un vieux cheval qui a été sacrifié pour les travaux anatomiques à l'Ecole impériale d'Alfort, le lundi 22 de ce mois. Cette pièce est une tumeur qui avait son siège dans la partie supé- rieure de la cavité du cœcum au côté droit de l'arc de cette portion de l'intestin, près de l'origine du colon replié et sur la partie anté- rieure et inférieure de l'orifice qui fait communiquer le cœcum avec la première portion du colon. Cette tumeur est allongée d'avant en arrière, ressemble à un ovoïde irrégulier dont la grosse extrémité serait dirigée en avant; elle est échancrée à son bord supérieur au point correspondant à l'orifice d'o- rigine du colon replié; elle mesure dans son grand diamètre O^.llO et sur son diamètre vertical 0",070 dans la partie antérieure et 0",05l dans la partie postérieure; elle était presque complètement en saillie dans la cavité du cœcum. Cette tumeur est mamelonnée, bosselée à surface très-irrégulière ; elle est dure au toucher dans toute son étendue et presque partout elle a une consistance pierreuse. Elle s'est développée primitivement entre la membrane charnue et la membrane muqueuse, car toute sa périphérie est recouverte par la tunique interne de l'intestin; dans les anfractuosités que présente la surface, on trouve encore des traces de celle-ci. Dans les points les plus saillants, la membrane muqueuse a disparu; elle a été détruite très-probablement par le passage des matières ali- mentaires. Sur ces parties mises à nu, la tumeur est rugueuse; elle donne à la main la sensation du grès, et l'on voit à l'œil nu de petits grains semblables à des grains de sable agglutinés par une matière muqueuse. Les restes de la membrane muqueuse qui recouvrent la périphérie de la tumeur sont durs, blanchâtres et crient légèrement sous le scal- pel de la même façon que les tissus qui sont le siège de l'inflamma- tion chronique ; les portions de la muqueuse qui tapissent les cavités de la surface de la tumeur sont très-faciles à déchirer; elles se dissocient très-facilement, et s'enlèvent par lambeaux. J'ai pratiqué dans la tumeur plusieurs coupes verticales pour en étudier l'intérieur : son aspect général est gris jaunâtre; dans plu- sieurs points il y a des espèces de stries, de piliers de couleur ardoi- c. R. 1869. 21 322 sée, un grand nombre de concrétions calcaires dont j'indiquerai la nature plus loin, et plusieurs foyers purulents. La base de cette tumeur me paraît être constituée par des tissus la- mineux, le tissu sous muqueux du cœcum en voie de prolifération, et c'est entre les piliers formés par ce tissu qui est dur, criant sous l'in- strument tranchant, d'aspect lardacé, que se trouvent les loges puru- lentes. Celles-ci renferment du pus de nature variable, suivant les points: en effet, dans quelques-unes, il est blanc, blanc jaunâtre, cré- meux, exhale une mauvaise odeur; dans d'autres, il a une consistance caséeuse. Les dépôts de matières calcaires donnent à la tumeur sa consistance ; ils sont irrégulièrement disséminés dans la masse ; partout où ils exis- tent, il y a une très-grande vascularisation. J'ai pratiqué dans ces masses concrètes des coupes minces dans le but de les soumettre à l'a- nalyse microscopique. J'ai constaté très-netlement, sur plusieurs prépa- rations que j''ai faites, que ces masses calcaires sont constituées par du tissu osseux. Dans certains points, les cellules osseuses sont très-nombreuses, communiquent les unes avec les autres par des canalicules osseux fort nombreux aussi. Les ostéoplastes sont dans quelques points disposés en zones con- centriques; j'en ai vu un, deux et trois rangs autour d'un canalicule vasculaire; dans beaucoup d'endroits, les cellules osseuses paraissent être disposées irrégulièrement et sans connexion directe avec les ca- nalicules vasculaires. J'ai soumis à M. le professeur Goubaux les coupes que j'ai prépa- rées, et il y a reconnu l'existence des ostéoplastes. Il existe à l'origine du colon replié trois autres tumeurs plus petites du volume d'une petite noix recouverte par la muqueuse; elles sont dures, résistantes, leur surface est bosselée. Le tissu lamineux sous- muqueux est très-sensiblement induré; la tunique musculaire du cœ- cum au point correspondant à la tumeur et celle de l'origine du colon replié sont très-épaissies, elles sont blanchâtres, dures et crient sous l'instrument tranchant; le tissu conjonclif sous-séreux est aussi le siège d'une inflammation chronique. Une question importante, au point de vue physiologique, est celle de savoir si cette tumeur placée à l'orifice du colon replié n'apportait pas obstacle au cours des matières alimentaires. J'ai mesuré comparativement le diamètre de l'orifice du colon replié sur la pièce pathologique et sur le même organe sain, et je suis arrivé à ce résultat ; que sur la première le diamètre de l'orifice est de O^jOSô, tandis que sur la seconde il est de 0",025. 323 L'ouverture présente donc un diamètre double de ce qu'il est à l'état sain. Conséquemment, il n'y avait pas là un obstaclo au passage des ma- tières alimentaires, du cœcum dans le colon replié. * Sur deux faits d'oblitération artérielle ; disparition rapide des accidents , GUÉRisoN ; par H. Hallopeau, interne des hôpitaux. Nous avons observé cette année, à la Salpêtrière, dans le service de U. Vulpian, cliez deux de nos malades, des accidents tout à fait sem- blables ù ceux que provoquent dans les membres les oblitérations ar- térielles; dans les deux cas, le cours du sang s'est rétabli au bout de quelques heures, et le membre atfecté es^ revenu en peu de temps à son état normal. C'est particulièrement sur ces faits que je désire ap- peler l'attention; mais je rapporterai d'abord, à titre de rapproche- ment, 1 histoire d'une malade qui a succombé après avoir présenté \s mêmes accidents, et chez laquelle Jious avons pu constatera l'autopsie l'oblitération vasculaire. Ob. I. — Résumé. — La nommée Baile (Marie), âgée de "/U ans, était, depuis le 3 novembre, au n° 23 de la salle Saint-Jean; elle avait une bronchite intense, avec emphysème pulmonaire. Le 20 novembre, à six heures du soir, elle est prise brusquement dans le pied et la jambe gauches de douleurs très-vives avec sensation de froid ; ces douleurs persistent [tendant toute la nuit. Le 21 novembre à neuf heures, nous la trouvons dans l'état suivant : la partie inférieure du membre abdominal gauche offre une teinte violacée; la coloration commence au-dessous de la tubérosilé antérieure du tibia, et s'étend, en augmentant d'intensité, jusqu'à l'exlrémilé du pied ; les veines sont gonflées, leurs rameaux finement injectés ; quand on en chasse le sang, il revient plus lentement que d'habitude. On ne sent ni les battements de la pédieuse, ni ceux de la poplitée; ceux de la fémorale sont perceptibles au pli de l'aine. Le membre ma- lade, laissé à découvert, se refroidit beaucoup plus vite que l'autre. La sensibilité tactile est abolie au pied, diminuée à la jambe; les sen- sations douloureuses sont perçues moins vivement que de l'autre côté. Les douleurs spontanées persistent; la palpation, les mouvements com- muniqués les exaspèrent; les mouvements volontaires sont également douloureux ; ils sont d'ailleurs très-restreints ; la malade peut à peine imprimer quelques légers mouvements de flexion et d'extension aux orteils et au pied. On pratique dans la journée trois frictions avec l'huile de cumoniille camphrée. 354 22 novembre. Le membre est dans le même élal; nous constatons qu'au-dessus du genou'il est plus chaud que son congénère. Même trai- tement. 23. Le refroidissement est plus marqué, l'analgésie plus complète ; la malade ne sent plus que les forts pincements; les douleurs sponta- nées sont toujours vives: les mouvements volontaires sont presque complètement abolis. 24. Des phlyctènes se sont formées à la partie antérieure de la jambe ; autour d'elles et sur les malléoles, on voit des taches noirâtres; les veines se sont affaissées; la coloration violacée a disparu, le membre est maintenant décoloré, livide, complètement insensible; les douleurs se font toujours sentir. La malade semble un peu affaiblie ; il n'y a pas de phénomène d'algidité. La nuit suivante, vers une heure du matin, elle est piise de délire avec agitation; elle meurt vers cinq heures du matin. Autopsie. — Les poumons renferment plusieurs infarctus anciens; les branches correspondantes de l'artère pulmonaire sont obturées par des caillots ramollis, décolorés, adhérents, d'origine évidemment ancienne. En outre, on trouve dans le poumon gauche un infarctus ré- duit; il atteint le volume d'une orange; la branche inférieure de l'ar- tère pulmonaire est complètement oblitérée par un caillot décoloré en quelques points, un peu adhérent à la paroi et, par conséquent, anté- rieur à la mort. Aorte. — Cette artère est le siège d'une altération athéromateuse avancée, surtout dans sa portion abdominale; la membrane interne est ulcérée en plusieurs points; une coagulation fibrineuse ancienne adhère à l'une de ces ulcérations au niveau de la bifurcation; l'artère est presque entièrement obstruée par un caillot jaunâtre, adhérent ramolli au centre; ce caillot se prolonge dans les iliaques primitives. L'iliaque droite n'est pas complètement oblitérée; un filet d'eau la tra- verse facilement. L'obstruction est plus complète à gauche; car, de ce côté, l'eau versée dans l'aorte ne coule que goutte à goutte. Toutes les artères du membre inférieur gauche sont oblitérées; dans l'iliaque primitive, le caillot est ancien et présente les mêmes carac- tères que le caillot aortique. L'iliaque externe, la fémorale sont rem- plis de caillots beaucoup plus récents, mais cependant légèrement gre- nus et un peu adhérents. Dans l'artère poplitée, on trouve, dans une longueur d'environ 2 centimètres, un caillot ancien à contenu puri- forrhe. La tibiale postérieure renferme des caillots semblables à ceux que nous avons signalés dans la fémorale. Enfin, la partie terminale de la tibiale postérieure est complètement obstuée par une production dure, allongée, qui s'est évidemment formée aux dépens de la paroi 325 dans laquelle elle est d'ailleurs contenue. Les veines tibiales et la par- tie inférieure de la veine fémorale contiennent des caillots d origine peu ancienne, mais cependant déjà grenus, décolorés et ramollis par place ; ces caillots ont été très-probablement l'origine de Tembolie pulmonaire qui semble avoir provoqué les accidents ultirnes. Nous avons vu que les caillots contenus dans les artères ne remon- taient pas tous à la même époque; les uns dataient de quelques jours, les autres étaient manifestement d'origine beaucoup plus ancienne; la circulation n"a donc pas été brusquement interrompue; depuis long- temps les caillots contenus dans l'aorte et l'iliaque primitive, le caillot de la poplilée, les altérations des parois entravaient le cours du sang; ce n'est qu'au moment où l'action combinée de ces obstacles a provo- qué la formation de caillots dans la tibiale postérieure que se sont ma- nifestés les symptômes d'obstruction artérielle. On voit donc que, mal- gré le début soudain des troubles fonctionnels, les lésions se sont développées lentement, et que les symptômes d'oblitération n'ont mar- qué que la phase ultime d'un travail pathologique ancien. Les deux faits que nous allons rapporter maintenant présentent, au point de vue symptomatique, une frappante analogie avec l'observation précédente. Obs. il — Potain (Marie-Madeleine), 73 ans. Cette malade est dans le service pour de l'embarras gastrique et des vertiges. Le 7 juin, à six heures et demie du matin, elle est prise de douleurs vives dans le membre supérieur droit, et y éprouve une sensation de froid. A neuf heures et demie, lavant-bras et la main sont pâles; les battements de la radiale droite ne sont pas perceptibles; on sent au coude les pulsa- tions de l'humérale. Quand on chasse des veines le sang qu'elles con- tiennent, elles se remplissent beaucoup moins vite qu'à l'état normal, au moment où l'on cesse la compression. Les contacts, les piqûres sont sentis, mais moins nettement que de l'autre coté. Les douleurs spon- tanées sont vives; la motilité est affaiblie à la main et à l'avant-bras, pourtant la malade serre encore avec une certaine force. Le soir, après une friction avec l'huile de camomille, la malade éprouve tout à coup une sensation de chaleur dans le membre affecté ; elle peut le remuer librement. Le lendemain, à la visite, nous consta- tons que les battements de la radiale ont reparu et que le membre est revenu à son état normal ; il est cependant encore un peu pâle, et la circulation veineuse s'y fait moins rapidement que dans le membre opposé. 326 La malade meurt le 16 août suivant de ramollissement cérébral. Le cœur gauche est le siège d'un anévrysme partiel chronique. L'aorte est très-alhéromateuse. L'artère radiale droite est rigide; ses parois sont en partie calcifiées. La tunique interne ne présente aucune alté- ration ; il n'y a pas trace de caillots. Obs. IIL — Huet (C;irolin;^), 69 ans. Cette malade, entrée dans le ser- vice avec les signes d'une affection organique du cœur, avait été prise d'accidents adynamiques, de frissons répétés, de dypsnée ; ses traits s'étaient promplement altérés, la face avait une teinte subictérique. Nous pensions à des ulcérations de l'endocarde, avec embolies multi- ples. Elle allait un peu mieux quand, le 16 juin, à huit heures trois quarts, elle est prise soudainement dans le membre inférieur gauche de douleurs violentes, ayant le caractère de crampes. Il lui semble que ce membre est mort; elle ne peut le soulever qu'à grand'peine, et le sou- lève difficilement au-dessus du plan du lit. Le membre est plus pâle et plus froid que l'autre. On voit autour du genou des plaques livides, des vergetures violacées. On ne sent battre ni la pedieuse ni la popli- tée; les pulsations de la crurale sont perceptibles au pli de l'aine. A neuf heures et demie, tout le membre inférieur est froid jusqu'au pli de faine. Il présente dans toute son étendue des marbrures viola- cées. Les mouvements volontaires sont impossibles; les chatouille- ments, le pincement, ne sont pas perçus et ne provoquent pas de mou- vements réflexes; la sensibilité à la douleur est abolie au pied, extrêmement obtuse dans le reste du membre ; les douleurs sponta- nées sont violentes; la pression est douloureuse sur le trajet de l'ar- tère crurale, dans la moitié inférieure de la cuisse. A dix heures et demie, sous nos yeux, les marbrures disparaissent à la cuisse; les téguments y prennent en quelques instants une colora- lion rosée presque rouge ; on dirait qu'on a poussé dcns l'artère une in- jection de sang artériel; la chaleur revient en même temps; elle dé- passe bientôt celle du membre opposé; la sensibilité reparaît, bien qu'obtuse encore. Un instant après, la malade a un petit frisson qui dure plusieurs minutes; bientôt elle peut imprimer à ses orteils quel- ques mouvements de flexion. A dix heures trente-cinq, elle peut sou- lever le membre. Les battements de la pedieuse sont perceptibles, bien qu'extrême- ment faibles. Onze heures et demie, La sensibilité est maintenant normale; les douleurs spontanées ont cessé; la jambe et le pied sont toujours froids. Six heures. Le membre est chaud partout; les téguments sont encore moins colorés que du côté opposé. 327 On constate les jours suivants que les battements de la pédieuse gauche restent excessivement faibles. Tous les phénomènes d'isché- mie ont disparu. Il ne nous parait pas contestable que les accidents observés chez ces deux malades aient eu pour cause l'oblitération momentanée de l'une des principales artères du membre affecté; la suspension des battements artériels à l'extrémité du membre, leur persistance à la base suffiraient à le démontrer; or en l'absence de toute cause de com- pression, l'obstruction ne peut s'expliquer que par la formation d'une thrombose ou d'une embolie. La disparition rapide des phénomènes d'ischémie, le retour des battements artériels indiquent que le coagu- lum n'a bouché que pendant quelques heures la lumière du vaisseau et que probablement il s'est dissocié sous l'effet de lai pression san- guine ; dans l'un des cas, en effet, nous avons pu constater de visu que la cavité de la radiale et celle de l'humérale étaient entièrement libres. Il semble qu'il existe une différence notable au point de vue de la marche ultérieure des accidents entre les obstructions par embolies et celles qui résultent d'une thrombose. Dans le cas d'embolie, le vais- seau n'est oblitéré au début qu'en un point de son trajet; le coagu- lum, ordinairement formé de fibrine ramollie, de consistance pulpeuse, offre peu de résistance; on conçoit que la pression du sang puisse facilement triompher d'un tel obstacle; que le bouchon fibrineux cède en un seul point, le courant sanguin qui s'établit immédiatement aura bientôt entraîné, molécule à molécule, toute la masse oblitérante; c'est ainsi probablement que les choses se sont passées chez nos ma- lades; les frictions énergiques qui ont été pratiquées ont pu aider à la désagrégation du caillot; le petit frisson qui a été noté dans la troi- sième observation a sans doute eu pour cause la pénétration dans le courant sanguin des parcelles dissociées du coagulum. Dans le cas de thrombose, au contraire, l'obstruction résulte de lé- sions anciennes et multiples; les rugosités des parois, leurs inflexions, leur rigidité, les altérations de la membrane interne ont amené la for- mation de dépôts fibrineux qui depuis longtemps réduisaient le calibre du vaisseau; l'oblitération n'est plus alors accidentelle comme dans le cas d'embolie, elle est le dernier terme d'un travail morbide com- mencé de longue date. Les mêmes causes qui ont produit la coagula- tion s'opposent au rétablissement du courant sanguin, etsi la circula- tion collatérale ne se développe pas rapidement dans des proportions suffisantes, les parties ischémiées sont bientôt frappées de gangrène ; c'est ce qui s'est produit chez la première malade dont nous donnons l'observation. 328 Nous croyons pouvoir tirer des faits que nous venons d'exposer, et des considérations qui précèdent, les conclusions suivantes : 1° Un coagulum capable de suspendre complètement le cours du sang dans une artère volumineuse, peut se dissocier au bout de quel- ques heures, et permettre ainsi le rétablissement presque instantané de la circulation artérielle, on peut s'expliquer ainsi comment certaines hémiplégies disparaissent au bout de peu de temps sans laisser de traces. 2° Le pronostic des oblitérations par thrombose est plus grave à cet égard que celui des oblitérations emboliques. 3° Il est indiqué, quand l'obstacle siège sur une artère périphérique, de pratiquer des frictions énergiques sur le trajet du vaisseau, dans l'espoir que ces manœuvres amèneront mécaniquement le morcelle- ment du caillot, et faciliteront ainsi le retour du sang. 4° On cherchera en tous cas à mettre en jeu, par l'excitation des tégu- ments, l'activité des vaso-moteurs , et à provoquer ainsi les contrac- tions des parois vasculaires, en même temps que l'on s'efforcera, par l'usage des stimulants diffusibles , d'augmenter l'énergie des contrac- tions cardiaques et, par suite, la pression que la colonne sanguine exerce sur l'obstacle. M. Charcot ayant demandé si les muscles du membre malade avaient présenté de la rigidité pendant la vie et sur la réponse négative du présentateur, rappelle des communications antérieures faites par lui à la Société sur ces rigidités comme cadavériques observées par lui sur le vivant dans les muscles des membres où la circulation arté- rielle interrompue doit amener la gangrène. 11 ajoute, sans pouvoir l'expliquer, que cette rigidité n'a jamais été rencontrée qu'au membre supérieur. —M. Carville montre un énorme calcul de carbonate de chaux et de phosphate ammoniaco-magnésien trouvé dans la vessie d'un chien. Ces calculs, qui ne sont pas très-rares, endommagent la vessie. C'est une cause d'erreur dont il serait bon de tenir compte quand on fait des expériences sur l'absorption de la muqueuse vésicale. M. GouBAux dit qu'en effet les calculs vésicaux ne sont pas très- rares, mais qu'ils sont loin d'être très-fréquents. — M. Carville fait une seconde communication sur les relations de la tension du sang artériel et de la fréquence du pouls à la suite des saignées. Sur un chien, la tension normale prise à l'aide de l'hémodynarao- 329 mètre donne 120 millimètres de mercure et 160 pulsations à la minute. On fait une saignée de 320 grammes. La tension tombe à 70, le pouls à 140. Puis la tension descend à 30, le pouls à 120. La tension arrive à 24, le pouls est à 80. Ces résultats sont en contradiction avec la loi de M. Marey touchant Tinvariabilitédu travail cardiaque. Chez un autre chien la tension est de 144, le pouls est à 96. On fait une saignée de 645 grammes. La tension tombe à 103, le pouls monte à 192. Deux heures après la tension est à 114, le pouls à 280. On voit qu'il n'y a pas lieu de légi- férer, et qu'il faut tenir compte d'autre chose que des changements mécaniques de la circulation. Les modifications de l'innervation du cœur peuvent influencer directement les rapports de la tension du sang avec la fréquence du pouls. M. Charcot n'est pas surpris de ces résultats, dans ses lectures il avait remarqué que la loi de M. Marey n'était pas absolue, même il l'avait vue formulée en sens inverse par plusieurs pathologistes alle- mands. M. Leven s'associe aux réserves de M. Carville. Il ne faut pas voir dans l'ensemble des vaisseaux un système de tubes inertes comme de tubes de caoutchouc. Il faut tenir compte d'un élément important , le système nerveux qui, suivant le moyen employé, peut-être influencé de façons différentes et perturber les relations qui existent habituel- lement entre la tension du sang et la fréquence des battements du cœur. M. GouBAUx appelle l'attention sur une cause d'erreur dans l'emploi de l'hémodynamomètre. Ce sont les abaissements de tension qu'il in- dique qu'on observe quand on élève l'appareil, ce qui arrive infaillible- ment quand on le tient à la main. M. Carville connaît cette cause d'erreur et en a tenu compte. M. MoREAu signale le passage de l'acide formique ou au moins d'uo formiate dans les urines à la suite de l'ingestion du formiate de potasse dans l'estomac. —M. Gréhant fait la description d'un nouvel appareil pour l'extraction et le dosage des gaz contenus dans les liquides, et remet une note re- lative à la description et à l'emploi de cet appareil. Il communique ensuite les résultats qu'il a obtenus à Taide de cet appareil dans l'étude de la respiration des poissons. Chez les poissons privés de vessie natatoire, l'eau confinée peut être 330 complètement privée d'oxygène par l'animal. Elle contient ensuite un peu plus d'azote et beaucoup plus d'acide carbonique libre ou combiné. L'exhalation d'acide carbonique n'est pas en rapport avec l'absorp- tion de l'oxygène. La séance est levée à cinq heures quarante-cinq minutes. RECnERCHES SDR LA RESPIRATION DES POISSONS; par M. PaUL BeRT. Avec cet appareil qui permet d'extraire si complètement les gaz libres dissous dans l'eau, j'ai pu reprendre quelques recherches sur la respiration des poissons. Trois tanches du poids de 1 ,042 grammes furent placées dans 5 kilo- grammes d'eau de Seine; après une heure un quart do séjour, les gaz de l'eau après la respiration furent dégagés et l'analyse donna les ré- résuUals suivants : 1 litre d'eau de Seine 1 litre d'eau ordinaire donne : après la rcspiratrfin. Oxygène 7", 5 0",4 Azote lfy,0 15'%6 Acide carbonique 37' %i 53",6 Ainsi, l'oxygène fut absorbé presque complélement, le volume d'a- cide carbonique exhalé est plus grand que celui de l'oxygène absorbé; il y eut une absorption légère d'azote, m lis beaucoup moindre que celle qui fut constatée par Humboldt et Prcvençal dans une expérience ou sept tanches furent placées dans 2 litres 1/2 d'eau pondant huit heures. Respiration d'un poisson privé de la vessie natatoire. Chez une tanche l'ablation de la vessie natatoire fut faite obligeamment par mon ami M. le docteur Moreau ; quatre jours après l'opération, le poisson qui est resté très-vigoureux est placé dans une cloche contenant 3 lilxes et demi d'eau de Seine, où il est laissé pendant trois heures. Au bout de ce temps, or, fait pénétrer dans l'appareil d'extraction vide une par- tie de l'eau respirée par le poisson; cet animal, quoique languissant, se met à nager aussitôt qu'il est replacé dans l'aquarium. L'eau de Seine ordinaire est ensuite soumise à l'exlraclion. Dans les deux cas, après l'extraction la plus complète possible de l'acide carbonique libre, et probablement aussi d'une certaine quan- tité d'acide carbonique combiné à l'état de bicarbonate de chaux, on fit passer dans l'appareil de l'acide chlorhydrique pur pour rendre libre tout l'acide carbonique combiné à la chaux et pour obtenir ainsi avec U plus grande certitude tout l'acide carbonique fourni par le poisson. 531 I lit. d'eau de Seine l' lit. d'eau de Seine fournit après la respiration. Oxygène 7", 43 Azote... ]6-,14 i6-%23 Acide carbonique libre 17'%28 22"',4 Acide carbonique combiné . . 70", 14 75", 4 Acide carbonique total 87", 42 97", 44 Ainsi le poisson privé de sa vessie natatoire absorba tout l'oygène, exbahi un volume d'acide carbonique plus grand que celui de 1 oxy- gène absorbé; l'absorption d'azote fut nulle. Si, comme de Humboldt et Provençal l'ont reconnu, les poissons munis de leur vessie nata- toire placés longtemps dans l'eau confinée absorbent de l'azote, cela tient ti'ès-probablement à ce qu'ils exhalent une certaine quantité de ce gaz dans la vessie natatoire, ce qui pourrait être démontré direc- tement. Autre ex-péricnce, La même tanche, huit jours après l'ablation de la vessie natatoire fut placée dans l'eau distillée afin d'éviter cette grande quantité d'acide carbonique, libre ou combiné, que contient l'eau de Seine. Pour bien aérer l'eau distillée, on la fit traverser par le courant d'air d'une trompe pendant une demi-heure. Le poisson fut placé dans une cloche renfermant 3'"', 600 d'eau distillée et y séjourna pen- dant deux heures cinquante minutes. L'analyse des gaz recueillis fournit les résultats suivants : i litre. Eau distillée 1 lit. Eau distillée non respirée. après la respiration. Oxygène 8", 14 3", 17 Azote 15",G0 14", 97 COMibre 2",7 9",27 Co'' combiné l'M4 2-%91 Co'' total 3", 8-1 12'-,18 Ainsi le poisson n'absorba point d'azote; le volume d'oxygène ab- sorbé fut 4", 97 et le volume d'acide carbonique produit 8", 34. La tanche pesait 95 grammes si l'on calcule d'après les résultais de l'ex- périence les poids d'oxygène absorbé et d'acide carbonique exhalé par le poisson, et par kilogramme et par heure, on trouve G", 093 pour l'oxygène et 0'',215 pour l'acide carbonique. Je dois observer toutefois que le poisson n'était pas placé dans les conditions d'une respiration toulà fait normale et qu'avant de placer les résultats dans le tableau si instructif qui résume les recherches de MM. Regniult et Reiset sur la respiration, il serait nécessaire d'étudier la respiration des poissons en renouvelant convenablement l'eau qui vient au contact des bran- chies. COMPTE RENDU DES SÉANCES DE r f LA SOCIËTË DE BIOLOGIE i pendant le mois de decembre 1869; Par m. MAGNAN, secrétaire. PRÉSIDENCE DE M. CL. BERNARD. Séance du 4 décembre. Le procès-verbal est lu et adopté. M. Bert dit à l'occasion du procès-verbal qu'il n'a jamais rencontré de calculs vésicaux chez le chien. Il pense en conséquence que cette altération doit être rare. M. GuBLER dit également, à l'occasion du procès-verbal, que lorsque M. Marey a formulé sa loi relative à l'invariabilité du travail car- diaque, il a fait déjà des réserves et que depuis il a souvent constaté à l'aide du sphygmographe des exceptions à cette loi. — M. Leven montre des cristaux bleus extraits de l'urine sanglante et albuminée d'un enfant scarlatineux. M, GoBLER : Il serait à désirer que M. Leven pût récoller ces cristaux 334 en grande abondance, ce qui est possible en les précipitant à l'aide de l'acide azotique en petite quantité. On peut avoir du jour au lendemain à la surface des urines une couche miroitante de ces cristaux qu'on en- lève facilement à l'aide de papier. Ce papier, chauffé au fond d'un long tube, émet des vapeurs pourpres qui se condensent dans les parties su- périeures en cristaux aiguillés. Mais malgré ces analogies avec l'indigo, cette substance en diffère en ce qu'une goutte d'acide nitrique déco- lore immédiatement l'indigo et reste sans action sur elle. Dans la série des matières colorantes bleues, on pourrait placer aui deux extrêmes le tournesol d'une part et l'indigose urinairo de l'autre. — M. HAYEJifait unecommunication relative à la pathogénie de cer- taines hémorrhagies musculaires des fièvres graves. M. Cruveilhieu avait déjà remarqué les hémorrhagies des muscles, il en a publié six exemples dans son atlas; il les attribue à des phlé- bites hémorrhagiques capillaires. Depuis M. Rokitansky a montré leurs rapports avec le typhus. M. Virchow, se basant sur sept cas observés dans le muscle grand droit, a attribué l'hémorrhagie à des altérations musculaires qui amènent des déchirures du tissu musculaire d'oii hé- morrhagie. M. Zenker, qui a étudié les altérations des muscles dans la fièvre typhoïde, a 'vu qu'elles se compliquaient quelquefois d'hémor- rhagie. Ces hémorrhagies ne se rencontrent pas seulement dans le grand droit j'en ai vu jusque dans la paroi intervenlriculaire du cœur. On suppose généralement que l'hémorrhagie résulte d'une rupture du muscle altéré, rupture qui surviendrait à l'occasion d'une contrac- tion ou même d'une convulsion, comme dans le tétanos où les muscles sont souvent altérés. M. Havem présente un cas d'hémorrliagie des deux muscles droits de l'abdomen. Autour du fojer on voit des faisceaux musculaires jaunâ- tres et des vaisseaux oblitérés. Les faisceaux musculaires, examinés au microscoue, sont vitreux. Les vaisseaux montrent une prolifération de l'adventice et quelquefois de la membrane interne. Cette dernière peut être épaissie au point d'obsLruer la lumière du vaisseau. Ces obli- térations peuvent se voir même sur de gros vaisseaux. Souvent à l'al- tération de la membrane interne se joignent des thrombus fibrineux ou dans les petits vaisseaux des bouchons formés presque exclusive- ment de globules blancs. Dans les grosses artères, l'altération de la membrane interne est comme végétante, villeuse. Ces oblitérations vasculaires produisent des infarctus, les points jaunes sont des infarctus caséeux : là les fibres musculaires ont complètement disparu, on ne trouve que des 335 éléments conjonctifs, des leucocytes et de grosses cellules granuleuses. Ailleurs il y a infarctus hémorrhagique. Tout dernièrement M. Hayem a vu la même altération dans le muscle droit d'un phthisique. Cette altération vasculaire et les hémorrhagies qui en résultent diffèrent de ce que M. Hayem a indiqué récemment pour la variole grave. M. LiouviLLE, sans contester les résultats annoncés par iM. Hayem, déclare n'avoir pas rencontré cet état végétant des artères dans un cas d'hémorrhagie du muscle droit chez un malade atteint de fièvre typhoïde. M. Ranvier : Je ne conteste pas les faits observés par M. Hayem, je conteste la rigueur de ses conclusions. Il y a dans ces cas ob- struction artérielle par artérite; ce n'est pas impossible. Mais qu'est- ce qui est primitif? Est-ce la rupture musculaire, puis Thémorrhagie qui irrite les vaisseaux? Est-ce l'altération vasculaire qui produit la rupture? L'altération musculaire avec friabilité pouvant produire la rupture, on la rencontre sans hémorrhagie dans la fièvre lypho'ide, dans la variole grave, etc. Ces altérations, ces ruptures ne sont donc pas consécutives à l'infarctus. L'endartérile, au contraire, peut très-bien être consécutive. Elle se produit quelquefois avec une grande rapi- dité. Au surplus, qu'est-ce que cette endarlérite? Est-ce réellement le tissu de la membrane interne en prolifération? Est-ce l'organisation des leucocytes renfermés dans le caillot? D'après de récents travaux poursuivis dans le laboratoire de M. Recklinghausen, il faudrait penser que ce n'est qu'une prolifération de 1 épithélium. Enfin, suivant une autre théorie, le bouchon serait bien produit par des amas de leuco- cytes, mais ce seraient réellement des globules de pus qui, venant d'une surface suppurante, pourraient, grâce à leurs mouvements ami- boïdes, pénétrer jusque dans les vaisseaux. Ce fait au moins a été bien constaté pour les veines. Quand on met du vermillon sur une plaie, les leucocytes du thrombus veineux contiennent des grains de ver- millon. Dans le cas de M. Hayem, je ne veux rien conclure touchant le mode d'oblitération des artères; mais je suis tenté de croire que l'altération artérielle est secondaire, consécutive à la rupture mus- culaire qui a produit l'apoplexie et non pas cause de l'infarctus. A propos du mot infarctus, M. Charcot désirerait qu'on ne nous' imposât pas la signification que peuvent lui donner les Allemands et qu'on ne traduise pas de l'allemand en français un mot français qui avait et doit garder un sens défini, sens que Laennec a bien précisé quand il a étudié l'infarctus hémoploïque. Cette manière a le tort 336 grave de tout brouiller en mélangeant à nos idées les idées que les Allemands attachent à des choses différentes auxquelles ils donnent à tort le même nom que nous donnions à d'autres. Ce qui arrive pour l'infarctus n'est-il pas arrivé déjà pour la diphthérie ! La Société procède à l'élection d'un membre titulaire. M. Jolyet obtient la majorité des suffrages. Séance du 11 décembre. Greffe d'une dent incisive de cochon d Inde dans la crête d'un coq ; par M. J. M. Philipeaux. M. Vulpian présente à la Société, de la part de M. i. M. Philipeaux, un exemple de greffe d'une dent dans la crête d'un coq. Cet exemple se trouve déjà mentionné dans la thèse de M, P. Bert sur la greffe ani- male ; mais M. Philipeaux a pensé que l'examen de la pièce en question pourrait intéresser les membres de la Société. 'Voici en quelques mots la relation de l'expérience. Le 13 janvier 1853, M. Philipeaux, après avoir fait une incision dans la crête d'un jeune coq, y introduit une dent incisive d'un cochon d'Inde né depuis quelques heures. La dent, bien complète, est mu- nie de son bulbe, et elle est placée dans la crête de telle sorte que le bulbe soit dans la profondeur de la plaie et l'extrémité libre vers l'extérieur. Cette dent avait, le jour de l'expérience, 8 millimètres de longueur sur 2 millimètres de diamètre. Le coq a été tué dix mois après l'opération. La dent qui, le jour où elle avait été insérée dans la crête, était entièrement cachée dans la plaie, faisait, au moment de la mort, une saillie de 5 millimètres de longueur. M. Philipeaux a mis à nu, sur la pièce préparée, la partie de la dent cachée et greffée dans la crête, et il a pu constater que cette dent, dans sa longueur totale, me- surait 13 millimètres : elle s'était donc accrue de 5 millimètres en lon- gueur. C'est un résultat à rapprocher de ceux qui ont été obtenus de- puis longtemps déjà par J. Hunter et par A. Cooper; et ce qui fait l'intérêt majeur de ces résultats, c'est qu'il s'agit dans ces cas de la greffe d'un organe de mammifère sur un oiseau, c'est-à-dire sur un animal d'une classe zooLogique différente. Expériences relatives a la pathogénie du tétanos; par MM. Arloing et Léo.n Tripier. Quiconque a recherché, au point de vue Chimique, les conditions dans lesquelles survient le tétanos, est arrivé à des résultats bien différents; 337 ce qui semble indiquer que les causes qui peuvent produire celte affec- tion sont multiples ou qu'on ne connaît encore aucune d'elles. Cepen- dant, on ne saurait nier le caractère épidémique qu'offre parfois l'affec- tion qui nous occupe. On voit assez souvent le tétanos en ville; toute- fois, il est incomparablement plus fréquent dans les hôpitaux. En outre, il n'est pas rare de l'observer sur deux ou trois malades occupant le même point d'une salle. Enfin, on peut rencontrer successivement plu- sieurs cas de tétanos dans un service, sans qu'il soit donné d'en ob- server un seul dans les autres services du même hôpital. Le tétanos dit spontané, bien que très-rare dans nos pays, ne saurait être mis en doute; les journaux de médecine en publient au moins un ou deux cas chaque année. Le tétanos traumatique est incomparable- ment plus fréquent; tantôt il survient dans le premier septénaire, tan- tôt, beaucoup plus tard, et alors que l'affection chirurgicale pour la- quelle les malades sont entrés à l'hôpital est en partie, sinon complè- tement guérie. Alors, on apprend parfois qu'une fenêtre est restée ouverte pendant la nuit; si l'on consulte l'état de la température, il faisait froid ou chaud, le temps était humide ou sec. Le tétanos est plus particulièrement fréquent à la suite des blessures des extrémités des membres, et surtout des plaies par écrasement des doigts et des orteils ; il est exceptionnel de voir cette complication après des blessures de la tête et du tronc. Le plus souvent, les malades commencent à ressentir des douleurs limitées à la région qui est le siège du traumatisme. Bientôt ces dou- leurs s'étendent et remontent plus ou moins haut du côté de la racine du membre, en suivant tantôt la partie antérieure, tantôt la partie pos- térieure, tantôt les parties latérales. Ces douleurs, que les malades comparent à des piqûres ou à des brûlures, reviennent par accès et s'accompagnent de mouvements de flexion, d'extension, de rota- tion, etc., etc. L'affection peut rester bornée à ces symptômes (cram- pes tétaniformes des opérés) ; d'autres fois, les muscles des mâchoires se prennent (trismus); enfin, l'affection peut se généraliser davantage et gagner les muscles du tronc (tétanos proprement dit). Relativement au mode de production du tétanos, il existe deux théo- ries principales en rapport avec la nature elle-même des causes qui viennent d'être énumérées : ce sont la théorie humorale et la théorie nerveuse. Dans la première, on admet une infection préalable du sang par une substance pyogène ou autre; dans la seconde, on pense que l'irritation nerveuse est primitive et se fait sans l'intermédiaire du sang. Si l'on se rattache à l'hypothèse des humoristes, on peut supposer qu'en inoculant à un animal des matières prises sur la plaie d'un ma- C. R. 1869. 22 338 lade atteint de tétanos, ou encore en faisant la transfusion du sang, on provoquera la même affection. C'est pour vérifier ce premier point que nous avons fait la double expérience (injection de pus et de sang), 1° sur des lapins, 2° sur des chiens. Nos résultats ont été négatifs dans les deux cas; la température rectale n'a pas sensiblement varié. A vrai dire, cet insuccès démontre que le tétanos ne se développe pas par inoculation de l'homme aux lapins et aux chiens; mais il ne renverse pas l'hypothèse des humoristes. Pour être probante, l'inocu- lation devrait être faite sur l'homme (condition assez difficile à réaliser), ou, ce qui revient au même, d'un animal tétanique à un autre animal de môme espèce; c'est précisément ce qu'il nous a été possible de faire. Il s'agissait d'un cheval percheron, très-vigoureux, atteint de tétanos spontané généralisé; on recueille environ 200 grammes de son sang à l'aide d'une ouverture pratiquée à la veine jugulaire ; on reçoit ce sang dans un vase convenablement chauffé, et on le vide immédiatement dans un entonnoir à injection placé dans la veine jugulaire d'un autre cheval. La température rectale de ce dernier animal , prise avant l'ex- périence, était de 38 degrés environ; elle n'a augmenté que vers le deuxième jour de 2 à 3 cinquièmes de degré, et cette augmentation ne s'est maintenue que pendant trente-six heures. Absence complète de contractions cloniques ou toniques. Ce dernier résultat est très-impor- tant, et bien qu'il soit unique, nous croyons pouvoir dire qu'il ne s'agit pas dans le tétanos d'un processus infectieux avec altération primitive du sang, comme le supposent encore en Allemagne Roser, Billroth, etc. Restait l'hypothèse des névristes. Depuis longtemps, on a cherché à piquer, broyer les nerfs périphériques dans le but de déterminer le tétanos. Laurent Descot, dans son livre, rapporte un certain nombre d'expériences de ce genre. Dernièrement, M. Legros nous disait qu'il avait essayé d'agir par constriction à l'aide de la ligature. Toutes ces tentatives sont restées infructueuses. Nous avons répété ces expériences et, de plus, nous avons produit des écrasements de la patte sur les grenouilles et sur les lapins. Ces divers animaux sont morts à des époques variables sans jamais mon- trer de signes de tétanos. Au moment de l'expérience, on constatait bien des contractions énergiques de la patte irritée; il y avait môme un peu de roideur; mais ces phénomènes duraient tout au plus quel- ques secondes à une minute, une minute et demie. Toujours les lapins ont succombé plus vite que les grenouilles. Nous avons également irrité les nerfs des membres chez les chiens. Nous agissions avec les pinces à trois ou quatre reprises diff-érentes et cela deux ou trois fois par jour. Ici encore, contractions passagères qui cessaient bien vite après l'irritation ; la température rectale ne 339 variait guère. Toutefois, ces animaux supportaient mieux l'expé- rience que les précédents. A l'autopsie, nous avons constamment trouvé une périnévrite plus ou moins étendue, suivant la longueur sur laquelle avait porté l'irritation; la moelle était tout à fait nor- male. En présence de ces résultats, il était permis de se demander si les grenouilles, les lapins et les chiens n'étaient pas réfractaires au tétanos, et, en fait, on n"a peut être jamais observé bien nettement l'affection qui nous occupe sur ces animaux. C'est ce qui nous a poussés à expérimenter sur le cheval , chez lequel le tétanos est relativement fréquent après la castration. Si nous avons hésité longtemps à entrer dans cette voie, c'est qu'on est obligé de coucher l'animal, et l'expérience est rendue par cela môme très-difficile. Tout d'abord nous irritâmes, avec des pinces, les nerfs plantaires dans leur trajet métacarpien ; il survenait des secousses très-fortes, les animaux s'agitaient violemment, et cependant pas de contractions durables ; la température rectale augmentait tout au plus de 2 à 3 cin- quièmes de degré. Dans un cas, la colonne mercurielle était montée rapidement jusqu'à 42° et déjà nous espérions atteindre le but , lorsque nous aperçûmes une tumeur fluctuante énorme siégeant au niveau de la hanche du côté où Ion couchait l'animal. Il n'y avait plus de doute, nous étions en présence d'un abcès. L'autopsie nous montra qu'il s'agissait d'un vaste épanchement sanguin s'étendant profondément jusque dans le bassin. Il n'y avait pas de traces de pus; mais les tissus périphériques étaient épaissis, indurés, et formaient une espèt;e de coque à la collection san- guine. Cette infiltration à la fois séreuse et plastique, indice d'un pro- cessus inflammatoire, suffisait donc pour expliquer l'augmentation con- sidérable de température que nous avions constatée. Désespérant de réussir à l'aide des irritations mécaniques, nous em- ployâmes dès lors les courants continus. Au début, nous passions un fil au travers du nerf métacarpien du cheval ; mais ce procédé est mauvais, et si l'on réussit durant les premières séances , au bout du deuxième ou du troisième jour, le nerf est tellement altéré que l'irritation n'est plus suffisante. C'est pour obvier à cet inconvénient que nous avons imaginé de petites plaques coudées à angle droit et rétrécies au niveau de leur inflexion; l'une des lames est introduite au-dessous de la peau et repose sur le nerf, tandis que l'autre fait saillie entre les lèvres de la plaie qu'on a soin de réunir à l'aide de points de suture, ce qui coHtribue d'autant mieux à assurer le contact avec le nerf et à fixer l'appareil. Les réo- 340 phores sont accrochés chaque fois à de petites ouvertures qu'on a eu soin de pratiquer aux lames extérieures. Nos deux plaques étant placées, Tune en bas, l'autre en haut du nerf plantaire, nous avons tour à tour fait passer à travers ce nerf le courant fourni par deux ou quatre éléments de Bunsen. Dans ce dernier cas, les douleurs étaient insupportables; l'animal se dressait sur ses membres postérieurs et men;içait de tomber. Avec deux éléments, les douleurs étaient moins vives, supportables; mais de temps en temps, il se produisait des con- tractions très-fortes dans l'avant-bras et jusque dans l'épaule du mem- bre irrité; l'animal était inquiet, faisait de profondes inspirations, et enfin tout son corps ne tardait pas à se couvrir de sueurs abondantes. Dans ces conditions, la température rectale ne s'est jamais élevée au- dessus d'un degré. Tels sont les résultats auxquels nous sommes arrivés en agissant directement sur les nerfs au moyen d'irritants mécaniques et galva- niques. Mais de ce que nous n'avons pas réussi, il ne s'ensuit pas qu'on doive abandonner l'hypothèse des névristes ; nous croyons, au contraire, qu'il faut persévérer dans cette voie; toutefois on devra chercher d'autres agents d'irritation et peut-être se placer dans des conditions différentes comme milieu. Avant' de terminer, messieurs, qu'il nous soit pcmis de vous com- muniquer quelques remarques nouvelles relativement au pronostic et au traitement de la même affection. On croit généralement que les températures élevées, dans le tétanos, dépendentdes contractions musculaires. Nous sommes d'un avis entière- ment opposé : et d'abord, ces températures élevées ne sont pas la règle; en outre il est des cas de tétanos subaigu ou chronique dans lesquels les contractions musculaires sont très-étendues, et pourtanton note tout au plus 38°, 1 ou 38°, 2. Chose remarquable, si l'on examine la température avant et après le spasme, souvent on ne note pas de différence, ou bien la colonne mercurielle est montée de 1/5 de degré. Ce qui semble in- diquer que l'élévation de la température, quand elle existe, ne doit pas être rapportée à la contraction musculaire. La véritable cause est ailleurs, et nous ne serions pas éloignés de la rapporter à une lésion des centres nerveux. En effet, les températuies élevées se rencon- trent dans les cas les plus graves, qu'il y ait ou non des contractions étendues, qu'il s'agisse d'une forme aiguë ou chronique; et si, dans la forme aiguë, les températures élevées sont la règle, c'est que précisé- ment ces cas sont presque fatalemeni. mortels. Pour ce qui est de la lésion elle-même, nous disons seulement qUe nous avons pu constater maintes fois du côté de la moelle une hy- perhémie très-marquée et aussi une prolifération nucléaire évidente. 34i M. Bouchard a notamment vérifié ces résultats dans deux circon- stances, et il s'agissait justement de tétanos suraigus, ce qui vient à rencontre du principe établi par M. Rokitanski , à savoir, qu'on rencontre ce résultat seulement dans les cas où l'affection a duré un certain temps. Au surplus, ne trouverait-on pas toujours dalléralion appréciable à nos moyens actuels d'investig ilion, on ne serait pas en droit de conclure qu'il n'existe pas de lésions. Pour nous l'affection débute par une irritation des nerfs périphériques, irritation qui peut rester limitée ou, au contraire, se propager aux centres nerveux. Si cette irritation est peu intense, les centres nerveux seront simplement excités, il y aura peu d'élévation de température et le malade pourra guérir; si elle est forte, à l'excitation se joindra une altération véri- table; l'élévation de la température sera rapidement considérable, et le malade courra grand risque de mourir. Au point de vue thérapeutique, nous croyons que la névrotomie est encore le moyen le plus rationnel qu'on puisse employer. Toutefois, il faudra y recourir le plutôt possible. En outre, la seclion ne devra pas porter sur un seul nerf, comme cela a été conseillé depuis long- temps, mais sur tous les nerfs du membre, attendu que, ainsi que nos recherches expérimentales sur les sections des nerfs périphériques l'ont établi d'une façon péremptoire, tant qu'il reste un nerf intact dans le membre, la transmission continue de se faire. Dans une des notes que nous avons présentées l'année dernière à l'Institut, nous citons l'ob- servation d'un malade qui , a la suite d'une plaie par arme à feu de la racine du pouce, ressentit peu à peu dans tout le membre des crampes s'accompagnant de flexion exagérée de la main sur l'avant-bras et de celui-ci sur le bras ; au bout de quelques jours il survint du trismus. On pratique la section du nerf médian à la partie moyenne du bras, mais loin de s'amender l'affection continue, les muscles du tronc, li- bres jusque-là, se prennent, et la défervescence n'arrive que plusieurs jours après. Le malade a guéri; nous supposons bien que personne ne mettra cette heureuse issue sur le compte de la section du nerf médian. Notons en passant que, dans ce cas, la température, qui a été prise avec beaucoup de soin, est restée s"ensiblement la même durant tout le cours de J'affection, c'est-à-dire relativement peu élevée, ce qui vient à l'appui de l'opinion que nous venons d'émettre. Tout récem- ment M. Ollier nous a transmis un autre fait qui plaide également en faveur de notre manière de voir. Il s'agit, comme dans le cas précé- dent, d'une plaie par arme à feu du pouce. Ce malade qui était à peu près guéri a demandé à faire une petite promenade; à peine rentré, il est pris de crampes douloureuses dans le menubre; un peu plus tard 342 il survint du trismus. M. Ollier, qui fut appelé vers le sixième jour à partir du début des accidents, pratiqua immédiatement la section du nerf médian; comme les douleurs persistaient, il sectionna quelques heures après le nerf cubital ; les douleurs n'ayant point disparu, il se décida le même jour à couper le nerf radial. Dès lors, le malade ne se plaignit plus de son membre; une amélioration notable semblait même s'être produite, lorsqu'il fut emporté au milieu d'accidents que M. Ollier compare à une espèce de manie aiguë. On ne peut pas dire ce qui serait arrivé si la section complète de tous les nerfs avait été faite dès le début de l'affection. Quoi qu'il en soit, l'opération que nous préconisons est relativement peu grave, puisqu'au bout de quelques mois, il se fait une récupération complète de la sensibilité et des mouvements; elle est à coup sûr incomparablement moins grave et remplit le même but que l'amputation proposée par Larrey; à condition toutefois qu'on prati- quera les sections le plus près possible de la racine des membres, afin d'éviter plus sûrement les anastomoses. — M. Onimus montre un lapin affecté de mouvements de tournoie- ment et de manège, chez lequel ces symptômes se sont manifestés à la suite de l'application de courants induits puis de courants continus, l'un des pôles étant appliqué sur le grand sympathique au cou, l'autre sur l'oreille. M. Onimus complétera sa présentation après l'autopsie de l'animal. M. Laborde annonce qu'il a produit chez un cochon d'Inde un état de malaise voisin de l'asphyxie qu'on n'aurait pas prolongé sans provo- quer la mort et qui a été déterminé en plaçant l'animal sous une cloche où l'air pouvait pénétrer et où l'on faisait arriver des vapeurs de chloral. M. Grebant fait observer que si Ton ne fait pas une injection d'aii', les animaux s'asphyxient sous une cloche même non close par le fait seul de la viciation de l'air. M, Laborde affirme que, dans son expérience, cette explication serait nadmissible. M. GuBLER demande si l'on a recherché qu'elle était la nature de ces vapeurs délétères, si c'était par exemple l'acide chlorhydrique qui se dégage si souvent du chloral. xM. Krishaber désirerait que cette expérience fût reprise en l'entou- rant de soins et en y apportant la précision d'observation qu'exige une expérimentation vraiment physiologique et qui fait défaut dans le fait raconté par M. Laborde. 343 Séance du 18 décembre. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. Hayem fait une communication sur l'état de l'épiihélium des vais- seaux du mésentère après l'irritation de cette membrane. Dans un travail précédent cet observateur a vérifié et confirmé les résultats annoncés par Cohnheim touchant le passage des globules blancs du sang à travers les parois vasculaires dans les cas d'irritation artificielle de divers tissus de la grenouille. Déjà à cette époque, il a constaté pour le mésentère que l'épithélium de la séreuse reste intact ou subit des altérations très-peu importantes pendant les premières heures qui suivent l'exposition de cette membrane à l'air libre. Il était intéressant, comme l'a fait remarquer un des membres de la Société, de voir ce que devenait l'épithélium vasculaire après le passage d'un cer- tain nombre de globules blancs et de globules rouges. Après avoir maintenu à l'air libre un mésentère de grenouille pendant vingt-quatre heures et avoir constaté l'extravasation d'un nombre assez considé- rable d'éléments du sang et particulièrement de leucocytes, M. Hayem a injecté par le bulbe aortique d'abord une certaine quantité d'eau distillée, puis une solution de nitrate d'argent. Sur la préparation qui est montrée aux membres de la Société on voit que dans tous les vais- seaux où l'injection a pu pénétrer l'épithélium forme partout une couche continue, soit dans les artères, les veines et les capillaires, et que les éléments ne paraissent pas être altérés. L'expérience répétée plusieurs fois, en hiver, dans les mêmes conditions a toujours donné les mêmes résultats. Cependant dans quelques points on voit entre les cellules épilhéliales de petits espaces arrondis donnant aux bords des éléments l'apparence de chapelets. Ces apparences sont plus mar- quées lorsque le mésentère a été exposé à l'air pendant plus de vingt- quatre heures, ou lorsque l'expérience a été faite par une température relativement élevée. D'après ces études, M. Hayem pense que les glo- bules du sang peuvent sortir des vaisseaux en se frayant une voie entre les cellules épithéliales et sans qu'il en résulte au moins au dé- but du processus d'altération notable des parois vasculaires. M. Ranvier croit que les faits observés par M. Hayem ne se passent pas chez les animaux à sang chaud de la même manière que chez la grenouille, et que par conséquent il ne faudrait pas tirer de ces expé- riences des conclusions applicables à toute la série animale. M. Brown-Séquard fait voir à la Société un cochon d'Inde qui, à la suite d'une section de la moelle épinière, a été atteint de myélite et 3^4 chez lequel il est survenu sous cette dernière influence, des escarres et une atrophie extrême des membres inférieurs. Les points gangrenés ont le même siège d'élection que chez l'homme atteint de myélite, soit au pourtour de l'anus el au niveau des saillies trochantériennes. Or, on ne peut pas ici invoquer l'influence de la compression à laquelle on fait jouer chez l'homme un rôle trop important. Il s'agit pour M. Brown- Séquard de troubles de la nutrition de nature irritalive sous l'influence de l'mflammaliou de la moelle. M. Ball présente un malade qui offre un exemple d'absence congé- nitale du médius. L'annulaire a un volume considérable, on compte cinq métacarpiens, et ce dernier doigt hypertrophié semble s'articuler à la fois avec le deuxième et le troisième. La main a une forme de pince tout à fait caractéristique. M. GiHALDÈs se souvient très-bien qu'il existe d'autres exemples ana- logues dans la science. Présentation et description anatomique des altérations survenues chez UN LAPIN a la suite DE LA SECTION DU NERF SC1ATIQUE, DATANT DE DIX mois; par M. Laborde. Le lapin dont il s'agit est déjà connu de la plupart de mes collègues. Ils ont vu et conslalé sur lui les remarquables altérations de nutri- lion qui se sont produites à l'exlrémiié du membre correspomiant à la section du nerf sciatique, secùon pratiquée par M. le professeur Brown-Séquard le 25 février 1869. L'animal étant mort, je viens mon- trer les résultats de mes premières investigations cadavériques. L'autopsie, faite avec le plus grand soin, a montré tout d'abord que des raplus hémorrhugiqucs multiples, et spécialement dans les deux poumons, ont été la cause prochaine de la mort. Une question intéres- sante pourrait être soulevée à ce sujet, et il y aurait assurément lieu de se demander si les oblitérations vasculaires qui s'étaient formées depuis longtemps dans le memljre inférieur affecté n'ont pas été le premier départ des accidents terminaux et des altérations que présen- tent plusieurs organes. Mais ce n'est pas là le fait principal dans le cas dont il s'agit, et, pour le moment, nous ne nous occuperons que cle l'état des parties qui sont imuiédiatemenl sous l'influence des lésions expérimentales qui ont été faites sur cet animal. Les deux membres inférieurs ont été, comme on le voit, comparati- vement disséqués : ce qui frappe tout d'al/ord en les examinant, el à part la complète destruction du pied; ce qui frappe, disons-nous, c'est la différence de volume et de coloration des muscles des deux pattes, 345 ceux du membre gauche présentant, à peu de clioso piés, leurs atiri- S)uts physiques normaux, tandis que ceux de la patte et de la cuisse droites sont non-seulement grêles et amincis, mais encore très-décolo- rés : ces modifications portent sur tous les muscles jusqu'à l'extrémité inférieure de la cuisse; les muscles de la hanche, et notamment ceux qui entourent l'articulation coxo-fémorale , sont aussi visiblement atteints, quoique à un moindre degré. Ce qui est particulièrement intéressant sur cette pièce, c'est l'état du nerf sciatique : on peut le suivre dans toute son étendue, avec ses branches et divisions, jusqu'à son insertion dans la moelle épinière; il est facile de constater que la section a été faite à sa partie supérieure, un peu avant son entrée sous l'arcade crurale; le tronc nerveux pré- sente à cet endroit un renflement particulier, d'apparence gélatineuse et qui masque entièrement le lieu de la soudure des deux bouts du nerf divisé; ce renflement avait le volume d'un gros pois allongé sur la pièce fraîche, il est aujourd'hui sensiblement réduit. La partie du nerf correspondante à l'extrémité du bout inférieur est aussi un peu renflée dans l'étendue de 1 ou î centimètres; la même modification ne s'ob- serve pas sur le bout supérieur ou central ; mais ce bout est notable- ment plus grêle que la partie correspondante du nerf du côté opposé, particularité déjà indiquée par le professeur Brown-Séquard ; les divi- sions terminales, visibles à l'œil nu, sont évidemment plus grêles que celles du côté opposé, où le nerf similaire, parallèlement mis à nu, pré- sente, dans toute son étendue, ses attributs normaux. Enfin il est fa- cile de constater que, du côté affecté, les vaisseaux sanguins, et en particulier les vaisseaux veineux sont sensiblement réduits de volume, quoique remplis par un coagulum continu; il en est probablement de même des os, c'est ce que nous aurons à examiner plus tard, lorsque nous nous occuperons de l'étude partielle et micrographique de toutes les parties; étude dont les résultats seront ultérieurement donnés à la Société. M. VuLPiAN, à propos de cette communication, dit quelques mots d'une objection qui a été opposée aux conclusions des recherches qu'il a faites en commun avec M. Philipeaux sur la régénération autogénique des nerfs. On a dit que la régénération autogénique ne s'observait guère que dans le nerf hypoglosse et dans le nerf lingual, et que, par conséquent, il ne s'agissait pas là d'un fait absolument général. M. Vul- pian rappelle que cette régénération a été observée dans différents autres nerfs, entre autres dans le nerf facial, les nerfs du bras, le nerf sciatique. Dans ces derniers temps, il a revu avec M. Philipeaux plu- sieurs cas de régénération très-nolte dans le bout périphérique du ner sciatique tout à fait isolé des ccnlros nerveux, chez des rats, c. R. iSCiO 23 346 M, Vulpian allire de plus laltenlion sur un fait nouveau. Habituel- lement les vaisseaux du nerf, dans le bout périphérique, ne subissent pas d'altération appréciable, du moins chez le chien et le lapin. Chez le rat, ils se recouvrent de corps granuleux, et deviennent tout à fait semblables à ceux des centres nerveux atteints de sclérose. Ordonez, qui avait très-bien vu cette altération des vaisseaux dans l'ataxie locomotrice, pensait qu'elle était primitive. Dans les faits obser- vés par M. Vulpian, elle est certainement la conséquence de la lésion du nerf, et il y a lieu, par conséquent, de se demander s'il n'en est pas de même dans les cas de sclérose de la moelle. M. Vulpian ajoute enfin qu'il a constaté, comme l'avait indiqué M. Brown-Séquard dans une séance précédente, que le bout central d'un nerf coupé est un peu moins volumineux, après quelques semai- nes, que la partie correspondante du nerf homologue du côté opposé. 11 a vu, de plus, chez de très-jeunes rats, que, dans ce bout, les fibres nerveuses ont, d'une façon générale, un diamètre un peu plus petit que le diamètre des fibres du nerf correspondant du côté opposé. M. Brown-Séquard, à propos d'un des faits communiqués par M. Vul- pian, demande si les vaisseaux reviennent à l'état normal quand les nerfs se régénèrent. M. Vulpian n'a pas encore de renseignements à donner à cet égard. M. Bergeron fait voir, sur le crâne d'un enfant de 9 ans, des enfon- cements d'une forme particulière produits par l'extrémité d'une pioche, et il en conclut, au point de vue médico-légal, que la forme d'une plaie osseuse peut, dans certains cas, tenir à la détermination de la nature de l'instrument. Sur un cas d'hémiplégie survenue dans le cours d'une pneumonie ; par R. Lépine. Plusieurs médecins ont vu chez des vieillards, dans le cours d'une pneumonie, se développer des accidents comateux et quelquefois une hémiplégie véritable, sans qu'on pût, à l'autopsie, reconnaître une lésion appréciable de l'encéphale. J'ai observé dans le service de M. Charcot trois faits de ce genre; mais, dans l'un d'eux, j'ai trouvé un rétrécissement athéromateux de l'artère sylvienne du côté opposé à l'hémiplégie. Un petit caillot fibrineux, paraissant dater de quelques jours (beaucoup plus désistant que les caillots fibrineux de l'agonie qui existent fréquemment dans le sinus longitudinal supérieur), contri- buait à rétrécir la lumière de l'artère sylvienne. Dans toute la zone correspondant à la distribution de cette artère, la pie-mère était no- tablement plus pâle que celle du côté opposé ; le tissu nerveux lui- 347 même quant à sa coloration, à sa consistance, etc., paraissait partout à l'état normal. Ce cas m'a semblé digne d'être rapporté ; car il peut servir en quel- que sorte de trait d'union entre les hémiplégies qui sont sous la dé- pendance d'une lésion organique et quelques-unes au moins des hé- miplégies sans lésions apparentes que l'on observe parfois chez le vieillard atteint de pneumonie. Ici', en effet , si le caillot avait pris un accroissement un peu plus grand, et qu'il fût arrivé à oblitérer complètement le vaisseau , un ramollissement eût été à peu près inévitable. Pour les cas où l'on ne peut acquérir, comme dans celui-ci , la cer- titude de l'existence d'une ischémie, l'interprétation de l'hémiplégia est difficile. Peut-être convient-il d'admettre qu'une action réQexa venue du poumon peut jouer un certain rôle. J'ai, il y a deux ans, attiré l'attention de la Société sur les troubles vaso-moteurs des mem- bres qui ne sont pas rares dans la pneumonie des vieillards et que l'on observe aussi parfois dans celle de l'adulte et dans la phthisio pulmonaire. Si la pneumonie est capable de causer par action réflexe une hémiplégie vaso-motrice, et cela me paraît démontré, on conçoit à la rigueur qu'elle puisse, de la môme manière, amener une paralysia plus ou moins complète de la motilité. — M. MiLLOT lit une note sur la dioptro-organoscopie et la dioptro- somatoscopie, et fait à ce sujet des expériences devant les membres de la Société. (Renvoi à une commission.) Le secrétaire, Macnan. Addition à une séance précédente, Faits de méningites cérébro-spinales tuberculeuses ; par Henry Liouville, Interne des hôpitaux de Paris. Première série. — Observations recueillies chez des adultes (l). Henri B..., âgé de 36 ans, parquetier, entré à la Pitié dans le ser- vice de M. le docteur Marrotte, le 3 novembre 1869, mort le 9 no- vembre 1869. 4 novembre. Depuis deux ans, le malade nous dit qu'il toussait sans cesse et suait beaucoup pendant son sommeil, mais qu'il n'aurait jamais craché de sang. (1) Voy. Comptes rendis, p. ^96. 348 Depuis un mois, il a la tièvre dans les après-midi ; il y a une quin- zaine de jours il a eu des douleurs assez vives des deux côtés, il a été depuis ce temps très-oppressé et affaibli; le corps était comme cour- baturé. II a eu ces jours derniers, chez lui, àesviaux de têle violents; il ne crache presque plus depuis quinze jours. Il s'est décidé à entrer hier à l'hôpital. Le faciès est abattu, fatigué. Il offre Fapparence d'une prostration considérable. A l'auscultation on trouve, des deux côtés et disséminées dans les poumons, des traces nombreuses de tuberculisation aiguë; à droite, la respiration est obscure, au sommet gauche elle est rude et soufflante. Dès qu'on le touche, on est frappé d'un symptôme très-manifeste, c'est une hyperesthésie de la peau, qui est des plus considérables : au contact, au pincement, au frôlement superficiel, naturellement la per- cussion est également chez lui très-douloureuse. Le ventre paraît très-sensible, même douloureux; il est un peu ballonné. La rate semble assez volumineuse ; elle déborde de beaucoup les côtes gauches. La langue est sèche et très-chargée. Il y a une grande dyspnée. La chaleur de la peau nous a paru très- notable. Le pauvre malade ne sait quelle position prendre dans son lit; il ne peut rester ni assis ni couché; à tous instants il se remue, s'agite et paraît en proie à des souffrances vives et qui, à certains intervalles, s'exacci'bent. Les nuits sont mauvaises, il ne peut dormir. Il est pris dun frisson jtous les jours, vers trois ou quatre heures du soir. A notre demande, il dit qu'il a senti quelques troubles de la vue, de l'obscurcissement et certaines manifestations douloureuses vers les globules oculaires, dans les yeux même, comme il dit. Il ne vomit pas. '' Bouillon et potages. lodure de potassium, 4 grammes. Voici deux jours qu'il prend le médicament à cette dose. 5 novembre. Le malade n'a pas eu de délire; la nuit a même été bonne, il a bien dormi. On lui ordonne un lavement purgatif. On remarque quelques soubresauts de tendons; ses mains et ses pieds font des mouvements convulsifs et involontaires, plus manifestes à de certains moments; il y a parfois, dans les membres mférieurs des Fériés de petites secousse? qui se prolongent longtemps. Il éprouve dans les reins et surtout dans les mollets des douleurs comma des crampes; elles sont vives, et la face exprime à ces moments, par des grimaces et l'aspect de la souffrance, ce qu'il ressent ainsi de pénible. Cela arrive aussi par instant comme des secousses. Il a eu le frisson hier. Hier soir 39° (aisselle), 92 pulsatiffns, 32 respirations. Ce malin 39 (aisselle), 90 id. 29 id. lodure de potassium, 5 grammes. 6 novembre. Le malade a vomi hier pour la première fois, lexci- tation qui avait paru dominer dans ces derniers temps a fait place à une sorte d'abattement; il est plus calme, mais c'est un calme qui semble lourd et non réparateur. Il dort, ou semble plongé dans une sorte d'alourdissement dont on le sort difficilement. De temps en temps apparaissent des soubresauts des tendons ; ils s'exaspèrent dès qu'on le touche ou qu'on le réveille. Quand il se remue de lui-même et qu'il cherche à boire ou à porter quelque chose à sa bouche, on note des tremblements des mains. Les pupilles sont à peu près égales, la gauche est peut-être un peu plus dilatée que la droite. Les yeux prennent l'apparence petite; il semble craindre la lumière un peu vive. La paupière inférieure gauche est abaissée depuis quatre jours et le globe du même œil un peu poussé vers le côté externe ; il y a évi- demment là, par ce strabisme, déjà des signes de manifestations mor- bides du côté de quelques-uns des nerfs de la bare de l'encéphale. On notait hier soir 84 pulsations 38', 4 (température axillaire), 40 respirations. Ce matin, 72 pulsations 38', 8 (aisselle) 35. lodure de potas- sium, 5 grammes. Le cathétérisme devient parfois nécessaire, par suite de la rétention d'urine qui se prolonge. Il y a des douleurs souvent, dans ce cathété- risme, rendu difficile à de certains moments surtout par une sorte d'état spasmodique. 7 novembre. Hier soir, 84 pulsations, 38%4 (température axillaire), 40 respirations. Ce malin, 84 pulsations; 40 respirations 38*, 6 (tem- pérature axillaire). Lavement purgatif, iodure de potassium, 5 grammes. L'altitude du malade est toujours la même; couché sur le dos, le plus souvent, paraissant absorbé, calme en apparence, indifférent à ce qui se passe autour de lui, il semble dormir, et par moment, ce- pendant, soit des secousses générales, soit quelques soubresauts de tendons, lui font faire quelques mouvements. Mais il ne sort pas d« cet état de tranquillité trompeuse qui se rapproche beaucoup du coma. Si on le réveille, il tend les mains en l'air; même il ne parle presque plus et obscurément. 350 8 novembre. De temps en temps aussi il semble chercher quelque objet qu'il ne paraît pas pouvoir saisir (sorte de carplwlogié), puis ses membres retombent à moitié lourdement. Hier après son lavement, il a été sous lui sans s'en apercevoir. L'hyperesthésie de la peau est un peu diminuée sur les membres su- périeurs et sur les membres inférieurs, ainsi que sur le ventre. Il y a le plus souvent, coloration rouge de la face très-manifeste. Parfois il y a eu des sortes de bouffées. Les deux côtés de la face ex- priment ces différentes manifestations, toutefois les phénomènes sont plus prononcés à gauche. Le pouls intermittent, aujourd'hui, d'une façon très-nette, avait déjà paru assez modifié les jours précédents ; il était aussi irrégulier. Ce matin 92 pulsations; 32 respirations; 39° (température axillaire). L'urination est toujours difficile; il y a par moment une rétention d'urine qui oblige à le sonder. Le cathétérisme est difficile et quelquefois douloureux , comme par des spasmes. Lavement purgatif; iodure de potassium, 5 grammes. 9 novembre. 11 existe une différence de température très -nette entre les deux oreilles ; la gauche est plus chaude. La différence est d'un degré environ. Nous notons encore les autres manifestations céphaliques plus intenses à gauche. Ainsi il existe une rougeur sur le côté gauche de la face du cou, qui accompagne la chaleur. Le pouls est difficile à compter, faibla et intermittent. Il est devenu plus vite, d'une rapité même étonnante. A un moment on croit pouvoir compter 16G pulsations. Iodure de potassium, 5 grammes. Hier soir, 132 pulsations, 46 respirations, 39°. Ce matin, 166 - _ _ 39°,4. Le malade, le plus souvent alourdi , dans une sorte de coma , dont on ne le tire que de plus en plus difficilement, et pour lui arracher seulement quelques plaintes , ne parle plus, ne répond plus, et ne ma- nifeste sa volonté par aucun acte quelconque. Le 10 novembre, il succombe à une heure et demie du soir. L'autopsie, que nous avons faite le 12 novembre (1), nous a permis de noter les points suivants dont nous donnons un résumé. Cavité thoracique. — Les plèvres sont parsemées de petites masses granulées, saillantes, arrondies, de la grosseur d'un grain de mil, agglomérées par îlots ou isolées, non régulières, groupées et donnant '1) A cette autopsie assistaient également MM. Meiiard et RebifTé. 3r,l i'aspectd'un peau chagrinée. Les surfaces pleurales sont injectées, et il existe du liquide séreux avec membranes unes, un peu jaunu grisûtre de nouvelle formation. Les poumons, des deux côtés, offrent une rougeur intense, une con- gestion des plus manifestes; le sang qui en sort est noir, poissant; sur ce fond hyperémié apparaissent des groupes de petites granula- tions grisâtres, un peu plus volumineuses que celles de la plèvre, plus agglomérées en masses de la grandeur d'une pièce de 2 francs ou ù& 5 francs, en argent; elles forment ainsi des sortes de vAds de granu- lations ; celles-ci n'ont, du reste, que le volume d'un grain de mil, ou celui d'un grosse tête d'épingle; elles sont grises, semi-transpa- rentes, dures, saillantes sur le tissu pulmonaire; elles se groupent, toutes rapprochées des vaisseaux ou des bronches. Il en existe des deux côtés. Elles sont aussi intenses dans un lobe que dans l'autre. Elles se rencontrent aux différentes coupes et à des profondeurs va- riées; toutefois, c'est de préférence vers la périphérie qu'elles se constatent. Il serait impossible de dire leur nombre. C'est le plus sou- vent par îlots, par sortes de grappes qu'on les constate. Il y a des zones où l'on note une hyperémié plus grande soit autour de chaque granulation , soit autour de chaque îlot. Dans les lobes supérieurs, il y avait des productions tuberculeuses plus anciennes; masses jaunâtres, semi-friables, de la grosseur d'une cerise et d'un pois; autour d'elles, légères pneumonies chroniques, mais il n'y avait pas de cavernes véritables. On ne distingue rien de spécial dans les bronches. Tous les vaisseaux ne donnent pas issue à du sang. Il semble y avoir des petites branches vasculaires, assez nombreuses, oblitérées. Le coeîcr, à l'examen fait à l'amphithéâtre, n'offrait rien de notable. Cavité abdominale. — Le péritoine est hyperémié, et offre une alté- ration analogue comme granulations et productions nouvelles, à celle constatée sur. les plèvres. Des coupes du foie donnent de petites zones, à teinte grisâtre, de la grandeur d'une tête d'épingle, au milieu d'un titsu hépatique, d'ap- parence saine, quoiqu'un peu friable; ce sont de petites productions tuberculeuses dans la glande môme. Dans la rate, existent deux masses, blanches, grisâtres, de la gros- seur d'un pois environ l'une, et l'autre plus grosse, de consistance un peu caséeuse, et près d'elles de petites granulations qui semblent éga- lement des produits tuberculeux. Les reins, l'un et l'autre, sont également atteints. Mais c'est en fai- sant des coupes, ou en les ayant décortiqués, que l'on remarque surtout de très-nombreuses granulations, des points p.riondis. jiiunâties, blanc 3r;î £;ri!»àtre foncé, de grandeur variant d'un grain de poudre à un grain (ie nnil, existant dans les deux substances qui sont ti'ès-liyperémiées. Le sang qui s'écoulait de ces organes était noirâtre, épais, comme poisseux, très-foncé. La congestion intense se retrouvait également tout le long des calices, des bassinets, des uretères; et à l'origine de l'uretère, du côté des reins, il y avait des teintes rouges, bleuâtres, hématiques, ou des arborisations; dans deux points, une infiltration de sang, une hémorrhagie sous la muqueuse, dans les parois de l'uretère du côté droit. (Sorte d'infiltration sanguine, en nappe, très-considérable.) Dans les parois de l'uretère gauche il y avait aussi des points hémor- rhagiques. La prostate contenait deux masses jaunâtres, semi-friables, ca- séeuses, l'une de la grosseur d'un haricot, l'autre plus petite, du vo- lume d'un pois (productions tuberculeuses). Cavité crânienne. — La coupe des parties du cuir chevelu donne issue à du sang épais, noirâtre, poisseux (remarque qu'on a pu déjà faire, du reste et d'une façon signalée, pour les autres parties du corps, muscles ou viscères). Il semble que ce sang ait quelque chose de spécial : Par bien des points et par ses qualités extérieures, superficiellement appréciées du reste, il se rapproche beaucoup du sang de certains asphyxiés. Le crâne n'offre rien de spécial. Du sang séchappe de sa face in- terne. La dure-mère est fortement congestionnée. Les vaisseaux sont très-dislendus, soit par du sang liquide, soit par des coagulations de teintes différentes, de consistances variées aussi. Au-dessous d'elle, le cerveau, recouvert de ses autres méninges, apparaît fortement hyperémié ; par places, existent des arborisations vasculaires, qui, parlant des troncs plus volumineux des sillons, en- tourent des circonvolutions, et leur donnent un aspect de congestion des plus nettes. Les veines sont, parmi eux, très-congestionnées et fortement dilatées. Leur teinte est bleu noirâtre. C'est surtout vers les parties latérales, non loin des scissures de Sylvius et un peu au-dessous que se portent ces plaques hyperémiées. Par places, on peut distinguer de petites granulations isolées, de la grosseur d'un grain de mil, qui paraissent suivre les parois d'un vais- seau ou d'une bifurcation de deux branches. Dans cette direction, près des sillons, le long de ces vaisseaux, on distingue les méninges épaissies, d'un volume très-augmenté, conte- nant des produits de nouvelle formation, soit sous forme de granula- tions arrondies, isolés ou agglomérés, granulations grisâtres, mais très- ^ OSù vasculaires tout autour, soit sous forme de sortes de matière semi- fluide, semi-liquide, d"aspect puriforme, de consistance parfois commo élastique, mais laissant suinter une sérosité trouble. C'est également sous forme de plaques, de bandelettes irrégulières suivant les vais- seaux comme des gaines, que se remarquent ces masses d'épaississe- ments qui rappelleraient tout à fait le pus àans les méningites fran- chement suppurées; mais on s'assure qu'il ne s'agit pas de pus (par les réactifs à l'emploi du microscope), et, de plus, il y a des productions granulées, isolées ou agglomérées, et qui, parfois, sont comme ensei- rées dans cette gangue de produits de néoformation. Sur les parties latérales, le long des scissures de Sylvius surtout, on notait également cette production d'aspect puriforme, et on la trouve plus considérable encore, et pour ainsi dire plus organisée, plus épaisse, en allant vers la base de l'encéphale, d'abord au niveau des nerfs optiques, des vaisseaux carotidiens, des branches de l'hexagone et de l'espace interpédonculaire, puis en contournant les pédoncules dans les sillons semi-circulaires, et en les suivant, dn voit que ces alté- rations persistent plus ou moins considérables dans les méninges qui vont pénétrer dans les parties centrales du cerveau. Elles sont aussi retrouvées dans les ventricules, le troisième et les ventricules moyens; il y a là également de nouvelles agglomérations de produits granulés à forme congestive intense, et ces agglomérations sont parfois considérables, faisant pour ainsi dire une sorte de masse oblitérante. Ces régions, du reste, fortement hyperémiées dans leurs vascularisa- tions superficielles et profondes, sont ramollies, et l'on retrouve dans les parois mêmes une difiluence plus considérable que celle observée sur la pulpe grise du cerveau qui cependant était déjà notable. Il y a un véritable ramollissement des piliers de la voûte, et un com- mencement de difiluence du cor'ps calleux. Du liquide existait dans les ventricules en notable quantité. Il ne paraissait pas y avoir de sang dans cette sérosité toutefois un peu louche et de teinte trouble. Les vaisseaux et nerfs de la protubérance, du bulbe, sont, soit sur les parties médianes, soit sur les parties latérales, enserrées également dans les méninges aussi altérées, et l'on voit par places des nerfs crâ- niens, pour ainsi dire emprisonnés, enipoicrés dans une gangue mor- bide de nouvelle formation, où l'on ne retrouve pas la composition du pus. On arrive ainsi aux enveloppes de la moelle épinière, enveloppes méningées qui vont traduire une altération tout à fait analogue et aussi considérable que celles qui avaient été notées du côté de l'en- céphale tout entier et surtout vers les grands sillons de la baeteuus que par une pointe à la paroi vas- culaire. On vient ainsi d'assister à l'issue d'un globule rouge du sang à travers la paroi du vaisseau, issue lente, pénible, comme si rélément avait été passé à la filière, mais complète. Les vaisseaux qui donnent ainsi passage à des globules rouges sont des capillaires ou des vei- nules dans lesquels le sang s'est arrêté; mais quelquefois il arrive que pendant qu'un certain nombre de globules sont engagés, la pres- sion intra-vasculaire diminue, les globules moins pressés les uns contre les autres deviennent distincts, puis se mettent en mouve- ment. La circulation se rétablit d'une manière plus ou moins active, et pendant un temps variable. On peut alors profiter de cette dissolution du tbrombus pour exa- miner les globules engagés dans la paroi vasculaire. Us se présentent sous une forme de sablier ou de double bouton. La saillie interne, lorsque le globule est à peine engagé, contient le noyau et offre une forme elliptique; elle adhère par un fila peine visible à la paroi vas- culaire , et souvent agitée ou étirée par le courant sanguin, elle prend l'aspect d'un petit pendule; quelquefois le globule se déchire au ni- veau de la partie étranglée, s'ampute, et le bouton externe devient libre ou reste adhérent à la paroi vasculaire, tant est délié l'orifice par lequel il s'est engagé. Quand ou observe la disposition que je viens de décrire au moment où le bouton externe est devenu ellip- tique et contient alors le noyau, c'est la saillie interne qui présente la forme arrondie. La portion engagée dans la paroi est toujours excessivement étroite, filiforme, et les meilleurs objectifs ne permettent pas de voir un ori- fice à l'endroit de cet étranglement. On aperçoit nettement entre les deux boutons le double contour de la paroi vasculaire. Lorsque la circulation s'est rétablie plus ou moins complètement dans la branche que l'on observe, les globules étranglés restent presque indéfiniment, à moins de segmentation par le courant sanguin, au point où le ré- tablissement du cours du sang les a surpris. L'issue complète des globules ne se fait que dans les vaisseaux où il y a stase. On ne tarde pas à voir alors autour des capillaires et de quelqiies petites veines un grand nombre de globules extravasés, disposé? çà et l sous forme de petits amas, et possédant tous les caractères de glo bules rouges complets. 56 Ainsi, au bout de vingt à vingt-quatre heures, la membrane inter- digitale est tuméfiée, épaissie, d'une coloration rougeàtre, ponctuée, et le microscope montre autour des vaisseaux un grand nombre de petites hémorrhagies. La circulation est alors arrêtée presque par- tout; elle se fait encore dans quelques-uns des plus gros vaisseaux; mais dans tous les points où il y a stase complète, la dilatation vas- culaire est manifeste. Si maintenant on détache le fil qui a été posé à la fois sur la veine et les fibres musculaires voisines, on voit peu à peu renaître la circulation; les veinules se déblayent, puis à leur suite les capil- laires, et l'on assiste à un spectacle fort intéressant qui n'est d'ail- leurs qu'un degré plus avancé de la disposition que nous avons déjà décrite. En effet, la circulation se rétablit peu à peu, même dans les vaisseaux qui sont entourés comme par un manchon de globules rouges. Lorsqu'on regarde avec soin leur paroi interne, on y trouve toute une série de globules arrondis ou ovoïdes tellement nombreux en certains points, qu'ils se touchent presque. Dans un cas où la ligature était restée trente heures et où les ecchymoses étaient devenues très-étendues, la circulation a pu encore se rétablir dans un bon nombre de capillaires, et leur paroi interne était presque littéralement couverte de petites élevures rouges. Cette seconde partie de l'expérience prouve nettement que les vais- seaux qui avaient donné passage à ces globules rouges complets n'ont subi aucune déchirure, aucune rupture dans le sens propre du mot; car au moment où la circulation se rétablit, la tension vascu- laire est encore grande, les globules se meuvent lentement, s'ar- rêtent même souvent, et viennent pour ainsi dire buter contre les saillies globuleuses qui se montrent dans la zone transparente, sans qu'on puisse apercevoir ni fente, ni boutonnière, ni fissure. Il convient donc maintenant d'examiner comment l'issue des glo- bules rouges est possible dans ces conditions. Si l'on a soin d'empêcher le dessèchement de la membrane inter- digitale et son irritation, soit par des piqûres trop nombreuses, soit par le contact de corps étrangers, la ligature posée sur la veine n'a- mène qu'un seul trouble dans la circulation : c'est une augmenta- tion considérable de tension. C'est sous l'influence de l'augmentation de pression que se produisent les autres phénomènes décrits. Il suffit, eu effet, de lier l'artère crurale ou l'iliaque externe au lieu 57 de la veine pour voir une série toute différente de phénomènes. La circulation s'arrête presque immédiatement, les globules restent immobiles sans s'empiler fortement, et même, au bout de plusieurs heures, on n'observe aucune tendance àl'extravasation des éléments. Après la ligature de la veine, l'observation directe prouve que les globules rouges sortent en nature et complètement à travers la paroi vasculaire, et cela quelquefois au bout d'une demi-heure ou d'une heure. On ne peut donc pas invoquer une altération de ces éléments. Mais les propriétés physiologiques des globules rouges nous apprennent qu'ils peuvent, sans s'altérer, traverser des ori- 'fices étroits. Leur malléabilité est très-évidente; lorsqu'on examine la circulation dans les conditions les plus normales, on les voit se rétrécir, s'incurver, s'étirer, soit pour pénétrer dans un tube étroit, soit pour passer à travers d'autres éléments. Le noyau que possèdent les globules des batraciens n'oppose aucun obstacle aux changements de forme que peuvent subir les éléments, et M. Vulpian, par des expériences directes, a pu se rendre compte de la malléabi- lité de cette partie de l'élément (1). Toutefois, je dois ajouter quil m'a toujours paru dans l'extravasation des globules rouges, soit sous l'influence de l'inflammation, soit simplement sous celle de la stase, que le noyau était toujours la partie la plus rebelle à s'engager par la filière étroite qui lui donne passage. Si les propriétés physiologiques des globules rouges, et cela indé- pendamment de toute contractilité, permettent de comprendre leur passage plus ou moins facile à travers des orifices très-étroits sous l'influence de l'augmentation de la pression intra-vasculaire; il reste encore à savoir si ces orifices existent réellement et en quoi ils con- sistent. C'est là le point qui a le plus divisé, soit les anatomistes qui ont étudié la stucture des vaisseaux, soit aussi les observateurs déjà assez nombreux qui ont été témoins de l'issue des globules en na- ture. On sait depuis quelques années qu'il existe à la surface interne de tout le système vasculaire et jusque dans les plus fins vaisseaux un revêtement épithélial continu. Cette disposition, parfaitement démontrée à l'aide des injections au nitrate d'argent, apprenti qu'il faut rapporter à ces cellules épilhéliales les noyaux des capillaires (1) Cours de la Faculté, 1869. 58 connus et décrits depuis longtemps. Malgré sa continuité, l'épithé- lium des vaisseaux sanguins présente de distance en distance de petits espaces parfaitement semblables à ceux qui ont été vus antérieurement sur les capillaires lymphatiques, et qui, sur ces derniers vaisseaux, ont été considérés par de Recklinghausen, qui les a le premier 'léciitf:, coinrne des stomates ou de petites ouver- tures qui communiqueraient avec le système plasmatique.Eberth, dans son dernier travail sur l'épithélium des vaisseaux sanguins, après avoir indiqué celte disposition, n'admet pas cette interpréta- tion. Il se range à l'opinion d'Auerbach, qui regarde les prétendus stomates comme des prolongements cellulaires ou des fragments de cellules enclavés par les éléments voisins. Dans un travail plus ré- cent, M. Legros admet que ces apparences sont dues à la présence de noyaux de petites cellules en voie de formation au milieu des cellules anciennes. Ainsi donc, l'existence des stomates dans la paroi interne des vais- seaux sanguins n'est pas encore un fait complètement établi. Néan- moins Gohnheim, s'empressant de l'accepter, lui fait jouer un rôle important dans l'issue des globules. Ce serait, grâce à la présence de ces orifices situés de distance en distance, entre les cellules épithéliales que le revêtement cellulaire commun dont il vient d'être question ne serait plus un obstacle sé- rieux aux globules, et la paroi vasculaire pourrait ainsi être traverr sée sans rupture. Je ne sais si l'on doit admettre ou rejeter l'existence de stomates dans l'épithélium vasculaire. Mais je dois faire observer que si leur présence était réellement un fait anatomique incontestable, il serait insuffisant à expliquer les phénomènes de l'extravasation des glo- bules. Plusieurs raisons qui me paraissent sérieuses conduisent, en effet, à proposer une autre hypothèse. Si nous reprenons les détails de lïssue des globules rouges, on voit que ces éléments traversent la paroi vasculaire par un orifice si étroit qu'il est complètement invi- sible, et que de plus la partie étranglée du globule est d'une finesse telle qu'on ne peut l'apercevoir nettement avec les meilleurs objec- tifs. Les apparences qui ont été décrites comme stomates n'ont pas des dimensions aussi exiguës; si elles constituaient la porte de sor- tie des globules, ceux-ci n'auraient souvent qu'une peine fort mé- 59 diocre à la franchir. Il n'en est pas ainsi; c'est, comme il est dit phis haut, avec lenteur, p(^niblement que le globule est contraint de passer à travers la filière extrêmement petite qui lui livre passage. D'auti e part, les auteurs qui ont admis les stomates les ont décrits comme étant situés de distance en distance à la rencontre de plusieurs cel- lules épithéliales. Jamais ces orifices n'ont été regardés comme très- nombreux , et il est permis de se demander comment ils pourraient suffire à l'issue de tous les globules qui, à un moment donné de l'ex- périence, sont engagés dans la paroi vasculaire. C'est surtout lorsque le courant sanguin d'abord interrompu se rétablit, que la valeur de ce dernier argument nous frappe d'une manière évidente. Les globules en bouton de chemise, retenus dans la paroi vascu- laire, sont si nombreux eu quelques points, qu'ils se touchent, se superposent et pourraient se compter par douze, vingt et plus dan.^ un espace où l'on n'estimerait le nombre des stomates qu'à deux ou trois au plus. Ainsi, ni le nombre de ces prétendus orifices, ni leurs dimensions ne sont en rapport avec les phénomènes d'extravasation des globu- les. On est ainsi conduit, même en admettant leur existence, à Us regarder comme de peu d'importance dans le mécanisme en discus- sion. Reste donc une autre hypothèse à substituer à celle do Gohnheim ou une démonstration rigoureuse à fournir. J, squ'à présent il m'e.-t impossible de répondre à cette dernière exigence. De nouvelles ex- périences sont nécessaires à cet égard; mais celle de toutes les hy- pothèses qui me paraît la plus probable, c'est que les globules blan( s et rouges traversent la couche épithéliale dans les interstices des cellules. Les cellules épithéliales ne paraissent pas suffisamment molles et contractiles pour qu'on puisse supposer qu'au contact de?; globules rouges elles puissent se creuser, s'écarter et devenir pour ainsi dire poreuses. Les propriétés physiologiques des globules rap- pelées plus haut ne permettraient pas de comprendre comment une substance molle et ductile percerait une substance jouissant de propriétés analogues. Une des deux matières résiste, l'une des deux sert de filière; à coup-siîr cette seconde doit être plus dure, moins malléable, et ce ne peut être très-évidemment que l'épithélium . Mais si le corps de la cellule offre une barrière infranchissable, en est-il de même des bords de l'élément? 60 On sait que les cellules sont juxtaposées d'une manière si étroite qu'il est très-probable qu'il n'existe presque pas de matière uni- sante entre elles. Mais il suffit de la moindre élasticité des cellules pour qu'un effort exercé entre deux éléments détermine une petite fente, un petit orifice quelque petit qu'il soit; et c'est là précisé- ment la seule disposition nécessaire pour qu'un globule rouge s'y étrangle. D'ailleurs les globules n'ont probablement aucun effort à exercer pour écarter les cellules épithéliales. L'augmentation de la pression sanguine, en dilatant les vaisseaux d'une façon très- notable, doit suffire à produire ce résultat; il est même possible qu'en certains points les cellules épithéliales moins élastiques que la membrane qui les supporte puissent laisser entre elles un in- tervalle assez grand pour qu'un certain nombre de globules ne soient plus retenus alors que par cette membrane. Que la pression intra vasculaire redevienne normale, que la dila- tation vasculaire cesse, les cellules épithéliales en se rapprochant vont étrangler les éléments qui se sont insinués entre elles, et alors se montrera surtout la disposition en double bouton. C'est ainsi que l'obstacle de l'épithélium me parait être franchi. Celui que pourrait offrir la membrane hyaline qui lui sert de soutien dans les capillaires ne saurait être sérieux; d'ailleurs l'existence de cette membrane n'est pas démontrée. De même dans les veinules les élé- ments situés en dehors de l'épithélium réunis par une matière pro- toplasmique ne paraissent pas offrir une résistance réelle à l'issue des globules. En tout cas, quelle que soit encore l'incertitude des explications, le fait du passage des globules rouges à travers les parois vasculaires est réel, facile à observer. Il a lieu sans aucun désordre, sans aucune altération appréciables de la paroi vasculaire et constitue ainsi un phénomène bien différent de Thémorrhagie par rupture des vaisseaux. On ne saurait donc se refuser à reconnaître l'existence de Vhémorrhagie par diapédèse admise déjà par les anciens. Mes expériences conduisent donc au même résultat que celui énoncé par Cohnheim, soit que l'augmentation de pression dans des vais- seaux d'ailleurs sains et indépendamment de toute autre altération est une condition suffisante pour la production de la diapédèse. D'autre part, on a vu que dans les expériences sur la suppuration, particulièrement celles du poumon, il se produisait aussi, dans des 61 conditions différentes de celles de la simple stase, une extravasation plus ou moins abondante de globules rouges. Eulin Prussak a mon- tré en faisant des injections salines dans les sacs lymphatiques de la grenouille, qu'il se formait ainsi des hémorrhagies par diapédèse in- dépendantes de la pression sanguine. Il est donc établi que non- seulement la diapédèse est possible et existe, mais qu'elle peut se rencontrer dans des circonstances multiples. Aussi d'après les con- sidérations précédentes , serait-il facile de faire au point de vue patho- logique un grand nombre de déductions importantes. La structure des vaisseaux est effectivement la même chez l'homme que chez la grenouille et les globules rouges de l'homme étant beau- coup plus petits q;ie ceux de ce batracien et sans noyau démontré, on doit admettre maintenant l'issue facile de ces éléments à travers les parois vasculaires. Cette diapédèse se produira particulièrement sous l'influence de toutes les causes capables de déterminer une tension vasculaire exa- gérée et une stase plus ou moins prolongée dans les petits vais- saux. Le même phénomène prendra également naissance dans les cas où des vaissaux capillaires jeunes, en voie de formation, n'offriront qu'un foible obstacle au passage des globules, comme dans les néo- membranes inflammatoires, oii l'on voit pour quelques-unes d'en- tre elles les hémorrhagies se faire au fur et à mesure de leur for- mation. Il est encore permis de supposer que certains états du sang et certaines modifications des parois vasculaires faciliteront dans quel- ques cas le phénomène. Enfin les exsudations hémorrhagiques de certaines inflammations, les crachats si connus de la pneumonie par exemple, les urines san- guinolentes de la néphrite aiguë seront susceptibles également d'être interprétées par la diapédèse. Celle-ci doit donc être regardée comme la source d'un très-grand nombre d'hémorrhagies dans lesquelles la rupture vasculaire n'était qu'une supposition gratuite , fondée surtout sur une fin de non- recevoir. Mais il estdiflicilede tirer actuellement de ces faits de physiologie pathologique, encore à l'élude, toutes les déductions dont la patho- logie pourra bientôt s'enrichir. De nouvelles expériences me pa- 6? raissent eu cote uécessaires pour montrer avec plus d'évidence rim- portance pratique de ces faits. Eu tout cas, les résultats déjà obtenus ont paru suffisamment nets à M. Vulpian (1), témoin de ces expériences, pour l'autoriser à ex- poser dans son cours toutes les particularités de l'hémorrhagie par diapédèse, et faire pressentir, par des exemples analogues aux pré- cédents, l'importance pratique de cette question. Si maintenant nous revenons au processus inflammatoire, à l'ir- ritation locale qui conduit à la suppuration, nous y trouvons la réa- liFatiou à un faible degré des phénomènes de la stase veineuse. En effet, le sang est arrêté dans un certain nombre de capillaires, soumis de part et d'autre à un excès de pression , les globules sont fortement pressés contre les parois vasculaires, et ces conditions suf- fisent à expliquer l'émigration des globules rouges. Dans la stase veineuse la circulation est complètement arrêtée dans un certain nombre de troncs vasculaires, et le sang soumis à une augmentation considérable de pression ne peut laisser passer qu'une partie de son plasma et des globules rouges. Au contraire, dans la suppuration les phénomènes de stase sont moins développés, la circulation est gênée, mais non interrompue, et ce sont là les conditions qui permettent l'accumulation des globules blancs et leur issue. Mais en tenant compte de ces différences très-importantes nous voyons que dans les deux processus c'est en vertu des mêmes pro- priétés des parois vasculaires et des globules que l'émigration de ces derniers est rendue possible. C'est ainsi que l'expérience de la stase veineuse, indépendamment de son importance au point de vue de rhémorrhagie par diapédèse, jette un certain jour sur le mécanisme de la suppuration. (1) Cours de la Faculté, 1869. RECHERCHES EXPÉRIMENTALES SUR L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DE L'ÉSÉRINE ALCALOÏDE DE LA FÈVE DU CALABAR (PHYSOSTIGMA VENENOSUM) Mémoire présenté à la Société de Biologie, le 29 mars 1869, PAR MM. LEVEN ET LABORDE. Bien que de nombreux et très-importanls travaux se soient pro- duits, dans ces dernières années, sur les effets physiologiques de la fève du Calabar (physostigma venenosum) ou de ses principes connus, ce sujet est loin d'avoir été épuisé, et son étude nous a paru offrir des desiderata qui laissaient place à des recherches dont les résultats pourraient n'être pas sans intérêt ni peut-être sans quelque utilité. Nos recherches portent spécialement sur le principe cristallisable de la semence de fève du Calabar récemment isolé et étudié par M. le docteur A. Vée sous le nom à'ésérine (1). Ce choix serait suffisamment justifié par ce que l'on sait aujourd'hui des avantages qu'il y a à faire intervenir autant que possible, en physiologie expérimentale, les principes immédiats, si, d'un autre côté, un véritable intérêt ne s'at- tachait à la connaissance de l'action propre de cette substance. L'é- (1) Bêcher ches chimiques et physiologiques sur la fève du Calabar, par le docteur A. Vée, in-8°. Paris, 1865. A. Delahaye, éditeur. 64 tude qui a déjà été faite de cette action par MM. Yée et Leven, dans le travail cité plus haut, n'a eu guère d'autre résultat que celui de mettre en lumière la similitudiJ de l'influence de l'ésérine sur la pu- pille avec celle de l'extrait même du pliysostigma venenosum , et de confirmer ainsi un fait déjà connu ; toutefois, certaines particularités de ce fait sur lesquelles nous aurons à insister plus loin n'ont pas échappé à ces observateurs. Mais en réalité, ils semblent s'être plus particulièrement appliqués, de même que la plupart de leurs prédé- cesseurs, à noter la succession des phénomènes, en les considérant surtout au point de vue toxique, sans se préoccuper ni de l'inter- prétation physiologique de ces phénomènes, ni du lieu et du mode d'action de la substance à l'étude ; nous avons essayé dans ce travail de combler ces lacunes. Fidèles à la méthode que nous croyons la meilleure dans ce genre de recherches, nous commencerons par l'exposé expérimental des phénomènes caractéristiques par lesquels se traduit l'action de l'a- gent chimique, et nous essayerons ensuite, à l'aide de l'analyse ex- périmentale, l'interprétation de ces phénomènes. Voyons d'abord comment se comporte un animal inférieur auquel on administre de l'ésérine. Exp. I. — Chez une grenouille verte vigoureuse, nous plaçons sur la membrane interdigitale, bien étalée de chacune des pattes postérieures, un demi centigramme d'ésérine en imprégnant les cristaux de deux ou trois gouttes d'acide acétique ; l'absorption paraît s'effectuer, et cepen- dant aucun phénomène appréciable ne s'est encore montré après un quart d'heure. Nous introduisons alors la même quantité d'ésérine sous la peau du dos à la région coccygienne. Dix minutes après, subitement, les battements du flanc s'arrêtent; l'animal exécute sur place le mou- vement natatoire avec les pattes postérieures, mais sans pouvoir réa- liser le saut; ces pattes restent, dès ce moment, allongées, inertes et flaccides; le collapsus devient complet et l'animal reste affaissé sur son ventre sans exécuter le moindre mouvement spontané ; des trému- lations fibrillaires sous-cutanées se manifestent cependant au niveau des masses musculaires, et elles sont surtout évidentes lorsque les muscles sont dénudés. L'animal réagit, quoique à un faible degré aux excitations périphé- riques, même quand cette excitation porte sur les pattes postérieures. Aux paupières , les manifestations réflexes conservent toute leur vi- vacité. C5 Dès le début des accidents, la pupille subit un rétrécissement très- appréciable qui va en augmentant et qui, à la fin, arrive à constituer, particulièrement du côté gauche, une fente imperceptible. Le nerf sciatique mis à nu et direclemenl excité provoque des con- tractions musculaires très-manfestes , mciis faibles ; il se fatigue rapi- dement sous les excitations, et reste bientôt muet. La contractilité musculaire propre est également conservée, car elle donne des signes non douteux sous l'influence d'un très-petit fragment de potasse caustique, mis en contact direct avec les fibres musculaires, tout filet nerveux étant soigneusement écarté. La poitrine étant ouverte, le cœur continue ses battements, mais avec une certaine irrégularité et une atténuation croissante de leur nombre. Finalement la décapitation de l'animal donne lieu à de vifs tressail- lements dans toutes les parties musculaires; et de plus des contrac- tions comme tétaniques énergiques à la suite de la piqûre de la moelle dans son canal, témoignent de la conservation de l'excitabilité propre de cet organe. Répétée chez des animaux de la même espèce que le précédent, celle expérience donne des résultats constants et identiques, les- quels peuvent être résumés dans les points principaux suivants: État de parésie paraissant affecter d'une manière prédominante le train postérieur; Contraction et rétrécissement extrêmes de la pupille; Conservation, mais avec un certain degré d'atténuation de la sen- sibilité et du pouvoir réflexe , Intégrité de la motricité nerveuse et de la contractilité musculaire qui se manifeste spontanément par des trémiilalions fibriUaires spé- ciales ; Persistance, mais avec une modification dans la régularité et dans le nombre, des battements du cœur; Enfin conservation de l'excitabilité propre de la moelle épinière. Ces phénomènes qui, déjà, peuvent donner une idée de lintluence de l'ésérine sur les diverses fonctions de l'organisme, s'accentuent davantage lorsqu'on les provoque chez un animal supérieur : la net- teté avec laquelle ils se manifestent chez le chien, en particulier, confère, au début de cette étude, une haute importance à l'expé- rience suivante, que, pour ce motif, nous croyons devoir relater dans tous ses détails : MÉM. 18(i9. 5 6b Ëxp. II. — A un chien jeune, mais vigoureux, nous injectons sous la peau de l'aine un centigramme d'ésérine dissoute dans une petite quantité d'eau à la faveur de quelques gouttes d'acide acétique. Dix minutes environ, après l'injection, l'animal devient triste, pousse quelques cris plaintifs, cherche lobscurité et va se blottir derrière un poêle. Il est pris ensuite de bâllements réitérés, tire la langue hors de la bouche, et porte ses pattes vers le museau comme pour retirer un corps étranger de la cavité buccale. En examinant de près la tête et les mâchoires, on voit distinctement les poils et la peau ôtre agités comme par de légers frissons. B.eniôt le frissonnement se généralise et en même temps augmente d'intensité; il devient un véritable tremblement continu affectant toute la surface du corps, les quatre membres et la tête. L'animal ne tarde pas à s'affaisser sur son train postérieur d'abord, puis sur ses quatre pattes, et paraît être dans l'impossibilité de se mou- voir. En effet, pour autant qu'on l'excite, il ne peut se transporter à la plus petite distance. De rares mouvements spontanés ont lieu sur place, et il semble que cette impossibilité motrice est particulièrement due à l'étal de trémulaiion continue qui s'est emparé de tout le corps de l'animal et qui le tient en un tremblement perpétuel et irrésistible. La respiration devient de plus en plus difficul tueuse; les mouve- ments du flanc sont comme saccadés et participent évidemment au tremblement général qui paraît s'être emparé également des muscles du thorax, et très- probablement du diaphragme, si l'on en juge par l'espèce de striction qui existe au niveau delà région diaphragmatique. Aussi les phénomènes asphyxiques font-il des progrès rapides, et se traduisent par des efforts dyspnéiques d'une intensité croissante, par la tuméfaction et la sortie de la langue dont les muscles sont le siège de trèmulations fibrillaires; enfin par l'écoulement continu d'une écume gluante très-abondante. Le tremblement de la têle qui se fait surtout dans le sens de la flexion donne lieu au frappement du menton contre le sol, et par suite au frappement des dents les unes contre les autres; ce claquement est incessant. La pupille attentivement observée à toutes les périodes de l'in- toxication a offert les modifications suivantes : 1° Au début des accidents il sest produit tout d'abord une dilatation anormale très-manifeste; mais bientôt le rétrécissement a succédé à la dilatation, puis la dilatation s'est montrée de nouveau, et nous avons assisté pendant un certain temps à cette alternative des deux états oOQlraires; on eût dit que le muscle pupillaire participait, lui aussi, au tremblement si remarquable de toutes les ? '^^tres parties du corps tremblement qui paraît constituer le phénomène capital de Tactiou physiologique de Tésérine. 2' A une période [)lus avancée et qui peut être appelée la période d'état, le réirécissement tend de plus en plus à dominer et finit par s'é- tablir d'une manière permanente; ce rétr:^cissement est porté à un de- gré extrême. 3" Enfin, la pupille se dilale de nouveau, lorsque l'animal a suc- combé. Interrogée aux diverses périodes et dans les diverses parties, la sen- sibi ité paraît conservée, bien que manifestement atténuée aux extré- mités, surtout à une période un peu avancée de l'asphyxie. Cependant la persistance des actes réflexes se traduit jusqu'à la fin soit par l'aug- mentation du tremblement diins le membre excité, soit et surloul par un clignement énergique, lorsqu'on louche à peine la cornée. Quelques minutes avant la mort, qui survient une demi-heure envi^ ron après le début des accidents, le tremblement abandonne presque complètement le train postérieur pour se fixer au thorax et à la tête; finalement il se localise dans celte dernière jusqu'au dernier soupir. A Vaulopsie, pratiquée immédiatement, les poumons sont trouvés très-congestionnés el parsemés à leur surface sous-pleurale de plaques vineuses en très- grand nombre; de grosses bulles emphysémateuses existent à leur bord tranchant, et les tuyaux bronchiques sont remplis d'écume spumeuse. Le cœur comme gonflé est cependant mollasse au loucher; le tissu noirâtre et d'aspect congeslionné est, en effet, infilîré dune grande quanlilé de sang noir qui, après des incisions, s'écoule sous la pression comme d'une éponge. Le ventricule droit contient un caillot dii'fluent; les autres cavités ne renferment qu'un peu de sang liquide. A l'ouvertv^re de la cavité abdominale nous sommes frappés de l'état des iniestins ; l'intestin grêle est comme revenu sur lui-même et en état de conlraclioii ; il présente, par places, des strictions circulaires, — comme s'il avait été soumis à des ligatures, -- autrement dit des nœuds. Le gros intestin, au contraire, est très-distendu et rempli de matières fécales, qui semblent s'y être accumulées sous Pinfluence des mouvements périsialtiques continus développés par l'action de l'agent toxique (1). (1) L'animal, en effet, a eu deux évacuations durant l'expérience ; on entendait de nombreux borborygmes, et il nous a été possible et môme facile de percevoir à travers la paroi abdominale les mouvements de contraction de l'intestin. Les parois de la vessie sont, également rigides et. comme contractées; sa cavité est, d'ailleurs, absolument vide; l'animal a eu plusieurs éva- cuations d'urine avant la mort. Le foie, comme le cœur et les poumons, présente les signes d'un vio- lent rapius congesiif; le réservoir et les conduits biliaires n'offrent rien de particulier à noter. Le système nerveux n'a pas été examiné dans ce cas, mais le résultat négatif de nos autres autopsies donne à cette omission une très-minime importance. L'examen histologique des muscles, tant de la vie organique que de la vie de relation, fait avec grand soin, ne nous a révélé aucune modi- fication appréciable dans leur structure. Les fibres musculaires du cœur présentaient, à la vérité, une assez grande quantité d'éléments réfrin- gents, mais c'était là assurément un état normal, ou du moins étranger à l'influence du poison. Parmi les phénomènes mis en relief par la précédente expérience, il en est un qui domine tous les autres, et auquel ceux-ci semblent être subordonnés : c'est le désordre particulier dont le système mus- culaire est le siège. Pour la plupart des observateurs qui ont expé- rimenté sur la fève du Calabar, ce désordre constitue un état con- vulsif; c'est du moins pnr cette appellation qu'ils le désignent. Or une description exacte puisée dans l'observation attentive du phé- nomène, et telle que nous avons essayé de la donner dans la relation de nos expériences, montre bien qu'il ne s'agit point là, à propre- ment parler, de convulsions, mais d'un véritable tremblement se pro- duisant à tous les degrés d'intensité, depuis la plus légère trémula- tion fibrillaire jusqu'au mouvement continu et saccadé dune ou de plusieurs parties du corps (membres, tronc, tête) ou du corps tout entier. MM. Vée et Leven, dans leurs expériences sur l'ésérine, n'ont pas même échappé à cette ctmfusion, du moins complètement; car il est juste de dire que le mot ircniblemcnt, expression de la réalité, se rencontre dans la relation de quelques-uns des faits expérimen- taux qu'ils ont ooservés. Loi'sque l'on suit attentivement l'évolution du phénomène et que l'on cherche à saisir .'^es premières manifestations, on aperçoit d'a- bord comme un frissorwcmeni léger de la peau avec hérissement du poil; cette trémulation est perceptible au toucher, alors niêrae qu'il n'est pas encore possible de la constater par la vue; elle paraît com- mencer par la tête (et c'est aussi à la tête qu'on la voit persister en 69 dernier lieu); puis elle s'étend de proche en proche à tout le corps, prend une intensité croissante et devient un véritable tremblement, très-assimilable ii celui de la paralysis agitans. Ce n'est que dans quelques cas trè--rares, et sous lintluence de fortes doses ayant pro- duit rapidement la mort et comme une sidération de l'animal, que nous avons vu le tremblement prendre les caractères de convulsions; et encore ces convulsions étaient-elles très-peu étendues et très- passagères : deux ou trois secousses dans le train postérieur, et tout était dit. Il importe d'ailleurs de faire remarquer, à ce propos, que ces manifestations convulsives ne peuvent avoir, dans l'espèce, quel- que signification qu'autant qu'elles se produisent avant les phéno- mènes asphyxiques, et indépendamment de ces phénomènes qui, comme on a pu le voir et comme nous le montrerons de nouveau, ont une extrême intensité et constituent indubitablement le mode de léthalité de la substance dont il s'agit. Tous les muscles et organes musculaires de la vie organique et inorgaiiique participent à ce tremblement, et bien qu'il se manifeste surtout avec ses caractères les plus palpables dans les muscles de la vie de relation, il n'en est pas moins permis, avec quelque atten- tion, de le constater jusque dans les muscles viscéraux : ainsi, à la période active de 1 intoxication, il est facile, à l'aide de la palpation, de sentir à travers la paroi thorarique un frémissement particulier et continu du cœur, dont l'extrait suivant de Tune de nos expé- riences peut donner une idée : a II s'agit d'un jeune cochoti d'Inde auquel ont été injectés 2 centi- grammes d'ésérine : « Lorsijue les phénomènes habituels, notamment le tremblement, sont en pleine activiié, la main appliquée à plat sur la région précordiale, perçoit très- bien les battements du cœur, et constate qu'ils sont rapides, irréguiiers, tumultueux; il semble que le cœur a perdu son rliythme fonctionnel et qu'il est agité d'une sone de tremblement qui s'accentue d'autant plus (\ne les accidents progres- sent ; bientôt en ne distingue qu'un vague frémissement, et puis on ne perçoit plus rien ; à ce moment l'asphyxie est à son comble, et la mort est imminente. » Cette agitation trômulatoire du cœur se retrouve, d'ailleurs, et peut être constatée de visu dans la poitrine ouverte de l'animal, à la période extrême de liotoxicatiou et mémo dans l'état de mort appa rente. ,'Voy. ex p. III.) 76 Le môme phéDomène s'observe dans l'intestin, dans l'intestin grêle en particulier, dont les mouvements continus développés par l'action de l'Ésérine se traduisent par des évacuations réitérées, par l'existence de nombreux boiborygmes, et — ce qui est plus caracté- ristique, — peuvent être directement perçus à travers la paroi ab- dominale, ainsi qu'en fait foi l'expérience 11. D'ailleurs Vùlnipost mortem deâ parois intestinales qui présentent comme des nœuds, c'est-à-dire des constriclions circulaires partielles, cet état, disons- nous, témoigne également de l'influence réelle de l'agent toxique sur l'élément musculaire de l'intestin. Le muscle vésical n'est pas non plus à l'abri de cette influence, puisqu'il oITre constamment après la mort un état de contracture et de rigidité avec letrait des parois, et que, d'un autre côté, il est sollicité plusieurs fois à agir et à fonctionner durant la période ac- tive de linfluence de YÉsérine sur l'organisme. Les modifications éprouvées par le muscle pupillaire méritent sur- tout de fixer l'attention, bien qu'elles ne soient pas les seules, on vient de le voir, que revendique l'action de lÉsérine. Ces modifications sont assurément du même ordre que celles qui ont été précédemment mentionnées et décrites; elles appartiennent, en un mot, au phéno- mène tremblement. En efTet„ une observation attentive et continue, à toutes les périodes de l'action de la substance, montre des alter- natiics pins ou moins longues, selon la rapidité des accidents, de dilataiion et de coniraclion piipillaires ; et ce n'est qu'à ta fin de ces oscillations qui constituent, selon nous, pour l'organe dont il s'agit, un mode de tremblement, que le rétrécissement se fixe et devient permanent; mais ceux qui n ont vu que le rétrécissement ont laissé échapper les phénomènes qui le précèdent, et n'ont anerçu que la phase extrême de leur manifestation. Ce rétrécissement terminal se produit, d ailleurs, très-rapidement dans le cas oii lÉsérine admi- nistrée à haute dos^ amène promptement la mort. Quoi qu'il en soit, le rétr cissement pupillaire n'est en définitive que la contracture musculaire terminale que nous avons observée dans les autres organes, le cœur, l'intestin, la vessie. Ce que nous venons de dire des moilifications du muscle pupillaire n'a pas seulement la signification d'un fait d'observation rétabli dans sa réalité; il acquiert en outre une haute importance au point de vue des applications, ainsi que nous aurons l'occasion de le montrer. 71 Nous devons enfin mentionner ici le rôle que joue le phénomène qui nous occupe, c'est-à-dire le tremblement musculaire dans les ac- cidents axphyxiques promptement mortels, par limplication des muscles thomciques et du diaphrngme lui-même. Nous aurons d'ail- leurs à examiner plus tard l'asphyxie en elle-même. Ti'l est le phénomène considéré en lui-même et que Ion pourrait appeler le tremblement Èaérîqiie : sa nature bien déterminée ne saurait laisser le moindre doute relativement à son siège dans le système musculaire; mais cette notion ne suflit pas pour la solution complète du problème physiologique que nous poursuivons : Gomment et pourquoi se produit ce tremblement? Est-il dû à une modification directe éprouvée par la contractiiité musculaire? Est-il, au contraire, sous la déyiendance immédiate du système nerveux influencé lui-même par lÉsérine? Ou bien doit-il êti'e attribué à une action simultanément exercé* sur le système nerveux et sur le système musculaire? Telles sont les questions que nous avons à aborder, et autant que possible à résoudre. Dans l'examen de ces divers points, nous nous attacherons, pour plus de clarté, à séparer ce qui concerne les muscles en général, no- tamment le système musculaire locomoteur, de ce qui appartient en propre au muscle pupillaire. Dans le fait suivant, le prof^edé expérimental est destiné à donner ta solution de la première partie du problème. Exp. III. — Sur un jeune cochon d'Inde, nous détruisons radicale- ment la moelle épinière dans son tiers posiérieur, en enlevant complè- tement la portion correspondante du rachis avec son contenu. Il s'é- coule une assez grande quantité de sang en nappe; lanimal s'affaiblit un peu, mais il reste néanmoins dans de bonnes conditions de vitalité : la respiration, en particulier, ne paraît point troublée d'une manière notable. Les pattes et Le train postérieurs sont totalement paralysés. Un ceniigramme environ d ésérine, dissous dans un peu deau à la faveur de quelques gouttes d'acide acétique, est alors introduit sous la peau du dos, du côté gauche. Par suite d'un mouvement de l'animal, une très-petite quantité de la solution s'écoule &ur la plaie dorsale, et le contact direct de la substance avec les muscles dénudés détermine presque immédiatement dans ces parties nn tremblement fibrillaire qui persiste longtemps avant toute autre manifestation de l'intoxication gé- nérale. Celle-ci lanie à se produire^ soit à cause de la déperdition d'une certiiine quantité de la solution injectée, soit peut-être à cause des dif- ficiilt('s de l'absorption dues aux désordres occasionnés par l'opération préalable. Ce n'est qu'au bout de douze minutes que nous voyons se montrer quelques phénomènes avant-coureurs des effets physiologiques de l'é- sérine : éclairs rapides de contractions à la peau de la tête et du cou; puis quelques secousses plus fortes étendues à toute la partie antérieure du tronc, avec ir émulations superficielles et passagères; agitations et déplacements d'ailleurs très-limités de Tanimal qui semble chercher l'air pour respirer. L'asphyxie, en effet, fait de rapides progrès. Le tremblement augmente et devient continu dans toutes les parties du train antérieur, tandis que les pattes postérieures ne présentent pas trace de manifestation semblable. Les excitations périphériques sont parfaitement senties dans toute la partie antérieure du tronc; car elles provoquent des mouvements réac- tionnels très-vifs en môme temps quun accroissement momentané du tremblement. L'état de la pupille n'a pu être exactement apprécié en raison de la couleur noire uniforme des yeux de l'animal. Huit minutes environ se sont écoulées depuis les premières manifes- tations toxiques, l'asphyxie est à sa période extrême, et l'animal est dans l'état de mort a[)parente. Néanmoins, les phénomènes du tremble- ment persistent et se produisent simultanément ou alternativement dans les diverses parties de la surface du co'ps; mais, de plus, ces phéno- mènes se montrent, pour la première fois, d'une façon appréciable dans le train postérieur complètement paralysé, comme on le sait, par l'en- lèvement dune portion de la moelle lombaire, et qui n'avait offert au- cune manifestation de ce genre durant la vie de l'animal. Ces trémula- tiOMS posthumes sont rendues plus intenses par des excitations di- rectes; elles persistent durant vingt minutes après la mort apparente de l'animal. Pratiquant à ce moment l'ouverture du thorax, nous trouvons le cœur exécutant, avec une es[!èce d'état convulsif, des contractions auriculo-ventriculaires paifaitement rhythmiques. quoiqu'un {seu lentes. Cela dure environ un quart d'heure encore, puis le ventricule s'ar- rête pendant que roreilletie est encore agitée de quelques mouvements partiels. Le cœur, en cet étal d'arrêt, est rigide, et ses parois sont infiltrées de sang noir. Les poumons présentent de nombreuses sugiliations sous-pleurales. 73 Les intestins, particulièrement l'intestin grêle, sont rétrécis par places, comme si des ligatures multiples avaient été apposées sur leurs parois Enlin, la vessie offre cet état de rigidité globuleuse que nous avons déjà signalée. Le résultat essentiel de l'expérience qui précède est de montrer que le iremblement provoqué par l'action de l'ésérine est primiti- vement sous riiifluence immédiate de la moelle épinière modifiée dans ses propriétés fonctionnelles par l'actioti de l'agent chimique; mais que, néanmoins, la contractililé musculaire propre est à son tour et consécutivement modiliée de façon adonner, même après la mort, des manifestations anormales (tremblement), et à pouvoir être mise en jeu plus longtemps que dans l'état sain. Cette moditication de la contractilité musculaire se traduit, d'ail- leurs, raanit'eslement, à la suite du contact direct de l'ésérine avec le tissu musculaire, ainsi que le montre un incident de l'expérience précédente, et ainsi qu'il est facile de s'en convaincre en répétant l'expérience dans ce but particulier; mais ce qui nous importe sur- tout ici, ce sont les effets physiologiques consécutifs à l'absorption générale de la substance à l'étude (1). Le résultat remarquable qui vient de nous être fourni, à cet égard, a trouvé une nouvelle confirmation non-seulement en ce qui con- cerne le système musculaire locomoteur, mais aussi en ce qui tou- che l'appareil pupillaire, dans les deux expériences suivantes : Exp. IV — Sur une grenouille verte, petite mais vivace, nous enle- vons complètement le canal vertébral avec la moelle, dans son tiers inférieur, c'est-à-dire depuis le coccyx jusqu'à la moitié de la région dorsale. ïtès-peu de sang est perdu, et l'animal reste encore assez alerte; mais il est totalement paralysé du train postérieur. L'état de la pupille a été soigneusement observé et mesuré avant toute expérimentation. Cela fait, nous insérons sous la peau de la région lombaire , de cha- que côté, un centigramme et demi environ é'ésérine en ajoutant sur place une goutte ou deux d'acide acétique pour faciliter la dissolution de la 6ub. CAVITÉ ABDOMINALE, a. Paroi inférieure de l'abdomen. — Il y a un arrêt de développe- ment de la paroi inférieure de l'abdomen. En effet, elle présente une ouverture à travers laquelle le péritoine fait hernie. La peau s'arrête brusquement et nettement sur le contour de cette ouverture, et paraît se continuer cependant avec la surface extérieure de la poche her- niaire. Cette ouverture mesure d'avant en arrière une longueur égale à O^jlSO sur une largeur de 0"", 120. En s'échappant à travers celte ou- verture, le péritoine constitue une poche, par suite du refoulement en dehors que lui font éprouver les organes contenus dans la cavité abdo- minale. Au sommet ou à la partie inférieure de cette poche aboutissent les vaisseaux ombilicaux. Cette sorte d'éventration correspond donc à l'anneau ombilical dont les dimensions sont beaucoup plus considérables que dans les condi- tions ordinaires., b. Organes contenus dans la cavité abdominale . V estomac ebl unique; il est composé de quatre compartiments : le rumen, le réseau, le feuillet et la caillette. Il n'offre rien de particulier dans sa forme et dans ses dimensions. L'intestin grêle est unique ou simple dans la plus grande partie de son étendue ; mais, à O^jTO en avant du gros intestin, il se termine en deux branches, et chacune d'elles vient aboutir à un cœcum. 92 Il y a deux cœcmns, deux colons formant chacun une masse bien dis- tincte de l'autre, deux rectums et enfin deux anus. Ainsi, l'intestin qui était simple d'abord devient ensuite double : la division commence à quelque distance en avant de la terminaison de l'intestin grêle, et à partir de cette division, l'intestin devient tout à fait double jusqu'à l'extrémité postérieure. La i^ate, le pancréas et le foie ne présentent rien de particulier. Le foie reçoit une seule veine ombilicale. Il y a deux reins, l'un du côté gauche et l'autre du côté droit; ils sont lobules comme dans l'état normal. De chacun de ces reins part un uretère qui se rend à la vessie correspondante, car il y a deux vessies, l'une pour le sujet du côté gauche, et l'autre pour le sujet du côté droit. Chacune de ces vessies est très-longue et longée par une seule artère ombilicale (1). Je crois devoir insister sur ce fait que, chez le monstre que j étudie le cordon ombilical est simple, c'est-à-dire qu'il se compose de deux artères ombilicales et d'une seule veine ombilicale. SYSTÈME NERVEUX. La partie centrale du système nerveux n'a pas été exammée, parce que, je l'ai déjà dit plus haut, je tenais à conserver aussi intact que possible le squelette de ce monstre pour le placer au cabinet des col- lections de l'Ecole. Il est porté depuis longtemps déjà au catalogue des collections anatomiques (salle E, pièce n° 146). Le monstre qui est le sujet de ce mémoire avait plusieurs dis- positions anatomiques qui s'opposaient absolument à ce qu'il pût vivre de la vie extra-utérine, et qu'il importe de rappeler. Ces dis- positions sont les suivantes : r L'origine de l'artère pulmonaire et du tronc aorlique à la base du ventricule droit ; (1) Chez le animaux de l'espèce bovine, les artères ombilicales n'ont pas la même origine que chez les solipèdes. Chez les animaux de l'es- pèce bovine, les artères ombilicales paraissent être le prolongement ou la continuation de l'extrémité terminale de l'aorte postérieure; elles se trouvent placées entre les deux troncs iliaques internes. Le fait dont je viens de parler, et qui motive ce renvoi, est anomal. Je l'ai déjà constaté une fois sur un monstre hydrocéphale de la même espèce. Il n'y avait qu'une seule artère ombilicale au lieu de deux ; elle était très- volumineuse, et naissait à l'endroit que j'ai indiqué plus haut. 93 2° Une communication anomale entre les deux ventricules du cœur : elle était située à la partie inférieure du septum inter- ventriculaire ; 3° La fusion de l'appareil respiratoire et de l'appareil digestif. 11 existait, en effet, une fusion de l'œsophage avec chacun des larynx et avec chacune des trachées. Il n'est pas nécessaire d'insister sur la gravité de ces anomalies : on en comprendra facilement toute l'importance. Ces anomalies justifient pleinement ce que j'ai avancé, à savoir que la vie extra- utérine était absolument impossible. Mais ce sont là des anomalies qui peuvent se faire remarquer, non pas seulement dans cette monstruosité en particulier : elles ont été constatées dans d'autres. Or, en l'absence de ces anomalies, le monstre aurait pu vivre, et de quelles observations physiologiques curieuses n'aurait-il pas pu être le sujet? Au milieu de ce désordre apparent que cette monstruosité repré- sente au premier abord, mais dans laquelle tout est cependant réglé, coordonné d'une manière extrêmement remarquable, l'analyse nous a fait reconnaître ici la duplicité ; là, l'unité ou une tendance à son retour; plus loin enfin, et de nouveau, la duplicité. Tous ces faits donnent matière à bien des réflexions. On recherche la théorie de ces fusions, et une foule d'hypothèses se présentent à l'esprit pour en fournir l'explication. M. Serres a fait sur ce sujet de beaux travaux, qu'il sera bon de reprendre un jour pour les contrôler, car je crois que quelques-unes de ses conclusions ne peu- vent pas être considérées comme absolument vraies. Ce n'est pas ici le moment d'aborder un pareil sujet ; je voudrais être à même de m'en occuper, mais les observations me font encore défaut. Il faut savoir attendre ! g IV. Quelle place devra occuper et quel nom devra porter, dans la classification générale des monstruosités, le monstre que je viens de décrire? Ce sont là deux questions qu'il faut maintenant exa- miner. Il n'est pas besoin de reproduire ici toutes les considérations sur lesquelles M. Isidore Geoffroy-Saint-Hilaire a établi la classification des monstres doubles; mais il importe de rechercher dans celle-ci 94 les considérations qui sont nécessaires pour arriver à la solution des deux questions posées. M. Isidore Geoffroy-Saint-Hilaire a établi deux ordres dans les monstres doubles. Il a formé le premier des monstres qu'il a appelé autosilaires et le second des monstres parasitaires. Dans les monstres autositaires, les deux individus composants sont sensiblement égaux dans leur développement. Le monstre dont je viens de faire l'étude est un monstre autositaire. Les monstres autositaires composent deux tribus. Danp la pre- mière tribu, qui comprend trois familles, les deux individus com- posants sont à ombilics distincts ou normaux ou eusompluUiens. Dans la seconde tribu, il n'y a qu'un seul ombilic, et les monstres sont dits monomphaliens. C'est le cas du monstre qui est le sujet de ce travail. Ainsi, c'est un monstre double, autositaire, monompha- lien. Voyons maintenant quels sont les divers genres des monstres dou- bles autositaires monompbaliens. M. Isidore Geoffroy-Sait-Hilaire a reconnu deux sections dans cette tribu, et il a donné les noms suivants aux différents genres dont elle se compose. A. Union sous- ombilicale. 1° Deux individus à ombilic commun réunis dans la région hypo- gastrique, genre 1. Ischiopage. B. Union sus-ombilicale. T Deux individus réunis de l'extrémité inférieure du sternum à l'ombilic commun. 11. Xiphopage. 3" Deux individus à ombilic commun, réunis face à face sur toute l'étendue du thorax. 111. Sternopage. 4''*Deux individus à ombilic commun, réunis latéralement sur toute l'étendue du thorax. IV. Ectopage. .5" Deux individus à ombilic commun, réunis latéralement sur toute l'étendue du thorax et du cou et jusque par les mâchoires. V. Hémipage. Le monstre dont je m'occupe ne peut être rangé dans aucun de ces genres, et il ne peut être classé dans aucun des genres établis dans la classification de M. Isidore Geoffroy-Saint-Hilaire. C'est, je 95 crois, un exemple d'un genre nouveau qu'il faut établir après tous ceux qui ont été dénommés plus haut. M. Isidore Geoffroy-Saint-Hilaire a tracé un cadre complet des monstruosités qui avaient été observées jusqu'au moment où il s'occupait de la rédaction de son bel ouvrage ; mais il n'a pas eu l'idée que toutes les observations qui seraient faites à l'avenir de- vraient nécessairement et absolument se ranger parmi les genres de sa classification, tout au contraire, son génie lui a fait prévoir qu'on découvrirait des genres nouveaux qui ne changeraient en rien sa classification, mais qui s'ajouteraient simplement aux genres déter- nés, et viendraient en augmenter le nombre. La prévision de M. Isidore Geoffroy-Saint Hilaire s'est trouvée déjà réalisée plusieurs fois. En effet, l'observation a permis d'établir des genres nouveaux, mais je ne sache pas que ces genres nouveaux aient en rien changé ou modifié la belle classification imaginée par ce savant. Le monstre qui est le sujet de ce mémoire est une sorte de trait d'union entre des monstres très-différents, et le nom que désignera le genre dont il continuera le type devra être composé pour le carac- tériser tout d'abord et le distinguer de tous les autres. Poursuivons donc nos recherches dans le livre de M. Isidore Geof- froy Sainl-Hilaire, et tâchons de résoudre les questions qui ont été posées au commencement de ce paragraphe. En combinant les noms de deux monstres, dont l'un appartient aux monstres doubles sysomiens et au genre dérodyme, et dont l'au- tre appartient aux monstres doubles autositaires monomphaliens, je crois que le monstre que j'étudie pourra être nommé; mais il est évident qu'il devra être classé à part. On pourrait appeler ce monstre dérodymO'thoradelphe. Ce nom, je n'eu doute pas, paraîtra très-singulier; mais on con- viendra que le fait est assez embarrassant. Quoi qu'il en soit, je dé- clare que j'abandonnerai très-volontiers et très-facilement le nom que je propose, si quelqu'un veut bien m'en faire connaître un qui lui soit préférable. Arrêtons-nous un peu sur les noms que nous empruntons à la clas- sification de M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire. A. Les monstres doubles sysomiens sont ceux qui ont le corps con- fondu. 96 Le troisième genre de ces monstres a reçu le nom de dérodyme, parce qu'il a deux cous. Le genre dérodyme a les caractères sui- vants : « Corps unique, à une seule poitrine, dont le sternum est opposé « à deux colonnes vertébrales; deux cous; membres thoraciques, « aussi bien que les membres pelviens , au nombre de deux , quel- « quefois avec les rudiments d'un troisième. » B. Les monstres doubles monomphaliens présentent une tête d'ap- parence unitaireetla fusion de deux troncs toujours réunis, au moins jusqu'à l'ombilic et quelquefois beaucoup au delà. Ils ont été divisés en deux sections. La première section renferme des monstres dont les troncs sont séparés dans la région pelvienne. Le second genre de cette section, qui est connu sous le nom de thoradelphe , a lep caractères sui- vants : ^< Troncs séparés au-dessous de l'ombilic, réunis au-dessus, et réu- « nis même en un tronc en apparence simple dans sa portion supé- « rieure; deux membres thoraciques seulement; une seule tête, Il sans aucune partie surnuméraire. » Le monstre dont je m'occupe n'est certainement ni un dérodyme ni un thoradelphe, mais il se rapproche de chacun d'eux par quel- ques-uns de ses caractères, et il s'en éloigne par d'autres. La réunion des deux noms, ou celui de dérodymo-tlwradelphe^ pourra servir à montrer à la fois la relation et la différence que ce monstre présente relativement à ces deux genres de monstruosités. Ce monstre, qui ne peut être placé dans aucune des familles éta- blies par M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, en constitue une nouvelle qui tout à la fois s'éloigne et se rapproche de celles déjà connues. En effet, voici la caractéristique de cette famille : Monstre double, autositaire^ monomphalien; double dans la partie antérieure du tronc (deux têtes , deux cous) ; simple dans la partie moyenne (une seule poitrine et deux membres thoraciques) ; double dans la partie postérieure du tronc (deux bassins, quatre membres postérieurs). Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de descendre dans les détails anatomiques; car l'énuméralion de ces caractères est suffisante pour qu'on puisse facilement distinguer celte famille tératologique nou- velle de toutes les autres. 97 Cette famille renfermerait un genre unique représenté par le sujet dont j'ai fait la description, et auquel j'ai donné le nom de dirodymo- tfioradelphe. Je termine en disant qui si ce monstre ne doit pas constituer une nouvelle famille tératologique, il devra tout au moins faire l'objet d'une section nouvelle dans la famille desmonomphaliens, et dans tous les cas constituer un genre nouveau. MÉM. 18tJ9. OBSERVATION POUR SERVIR A L'HISTOIRE CLINIQUE DBS ABCÈS DU CERVEAU CONSÉCUTIFS AUX OTORRHÉES Ine à la Société de Biologie PAR LE Docteur Auguste OLLIVIER. (Voyez planche II.)' La difficulté du diagnostic clinique des abcès intra-crâniens, — qu'ils soient primitifs ou consécutifs à un coup, à une chute, à une lésion du rocher, etc., — est universellement admise. Aussi doit-on recueillir avec soin tous les faits qui peuvent éclairer ce point en- core obscur de leur histoire. Pour ce motif, permettez-moi de vous soumettre robservation suivante que j'ai eu l'occasion de recueillir dans le service de mon cher et vénéré maître le professeur Grisolle, alors que je remplis- sais auprès de lui les fonctions de chef de clinique. Elle vous montrera que parfois il est possible, non-seulement de soupçonner, mais encore d'affirmer l'existence d'un abcès du cerveau. Il s'agit d'un jeune homme qui avait depuis longtemps un écou- lement de l'oreille en apparence bénin, et qui soudainement fut pris d'accidents cérébraux graves terminés rapidement par la mort. 100 Chercher dans les cas de ce genre à faire un diagnostic précis n'est point satisfaire une vaine curiosité, car le grand art du médecin est aussi de prévoir l'avenir, alors même qu'il est impuissant à le conjurer. Voici cette observation : Obs. — Le nommé Crin (Emile), dessinateur, est admis le 8 mai 1866 à l'Hôtel-Dieu, salle Sainte-Jeanne, n° 13, dans le service de M. le pro- fesseur Grisolle, Il est âgé de 19 ans, mais paraît beaucoup plus jeune à cause de sa petite taille et de sa chétive constitution. Ses antécédents héréditaires sont mauvais, car sa mère est morte phthisique à un âge peu avancé. Au point de vue de l'hygiène, il a toujours été dans de bonnes con- ditions : nourriture suffisante, logement salubre, aucun excès. Jusqu'à ce jour il n'a jamais eu de maladies graves, mais il s'enrhu- mait assez facilement et toussait une partie de l'hiver, sans toutefois être obligé de garder le lit. Vers l'âge de 7 ans, il eut un écoulement de l'oreille gauche qui de- puis lors n'a pour ainsi dire pas discontinué jusqu'à ces derniers temps. Il nous a été impossible de savoir si jamais il était sorti de l'oreille quelques fragments d'os carié. Il y a un an, l'oreille droite devint aussi le siège d'un écoulement qui disparut, puis reparut à différentes reprises, mais dont il n'existe au- cune trace aujourd'hui. Malgré son écoulement d'oreille, ce jeune garçon travaillait assidû- ment à son atelier, et il n'est entré à l'hôpital que pour se faire soigner de douleurs très-vives survenues dans l'oreille gauche il y a quinze jours environ. Ces douleurs avaient coïncidé avec l'apparition, au niveau de la région mastoïdienne correspondante, d'une petite tumeur dont le volume avait graduellement augmenté. Il est à noter que l'écoulement de l'oreille s'était en même temps supprimé. Voici dans quel état nous trouvons le malade le 9 mai au matin : Faciès hébété, exprimant la souffrance; surdité complète à gauche, légère à droite; pupilles normales des deux côtés; pas de strabisme, pas de déviation des traits, pas d'affaiblissement musculaire des mem- bres; aucun trouble de la sensibilité générale. Le malade se plaint de douleurs vives dans l'oreille gauche, derrière laquelle on découvre un abcès de la grosseur d'une noix. Une in- cision pratiquée immédiatement laisse écouler un pus fétide, mais non sanieux. En explorant le fond de l'abcès avec un stylet, on reconnaît que Ion est sur l'apophyse mastoïde dénudée. iOl L'oreille gauche exhale également une odeur fétide; on en extrait un peu de pus concret. Quant à l'oreille droite, elle n'est le siège d'au- cune altération apparente. La peau est brûlante; le pouls à 110 pulsations. La langue est sèche et recouverte d'un enduit grisâtre épais. Il existe une soif très-vive et un dégoût absolu pour les aliments. Pas de nausées ni de vomissements; garde-robes régulières. Le lendemain, 10 mai, l'état général est bien meilleur; la fièvre est tombée, la langue est humide et blanche, et le malade demande à man- ger. L'abcès n'a pas discontinué de fournir du pus et en assez grande quantité. L'écoulement de l'oreille gauche a reparu. Le 12, la fièvre, qui avait cessé depuis deux jours, se montre de nou- veau. On remarque, en outre, un certain degré de somnolence. Le 13, la fièvre est un peu moindre, mais la somnolence est plus grande. On a de la peine à éveiller le malade, et l'expression de son visage est devenue atone, hébétée, insensible. A un examen attentif on s'aperçoit que la paupière supérieure gau- che recouvre à moitié le globe oculaire et qu'en même temps il existe de ce côté un léger strabisme divergent et une légère dilatation de la pupille qui de plus est immobile. La découverte de ces phénomènes nous fait redoubler d'attention et nous recherchons avec soin si le malade ne présente pas d'autres symptômes d'origine cérébrale. A cet effet, on le pince, espérant amener quelques contractions des muscles.de son visage, et l'on peut alors constater que la commissure des lèvres est fortement déviée a' gauche. Ce résultat était assez inattendu, car nous pensions plutôt voir la commissure déviée à droite et observer une paralysie affectant du même côté les nerfs de la troisième et de la septième paire. Or nous avions là, au contraire, un exemple évident de paralysie croisée, le nerf oculo-moleur commun du côté gauche et le nerf facial du côté droit se trouvant simultanément paralysés. Dans le courant de la journée, en poursuivant l'examen du malade, on constata de plus qu'il existait un affaiblissement considérable de tout le côté droit du corps : le bras surtout, quand on le soulevait, re- tombait comme une masse inerte. La sensibilité était également très-affaiblie du côté droit : ainsi, lors- que de ce côté, on venait à pincer fortement le malade, il le sentait à peine. Mais il semblait souffrir de la tête, — sans qu'il s'en plaignît néanmoins, — car ses voisins avaient remarqué qu'il portait souvent la main à son front. 102 Ajoutons enfin comme autres symptômes que, pour la première fois, il rendit involontairement ses urines dans la matinée et que depuis deux jours seulement il avait de la constipation. Vers six heures de l'après-midi il eut quelques convulsions épilepti- formes, tomba dans un coma profond et mourut deux heures après. M. Grisolle, qui avait vu ce jeune homme le 13 au matin et dans la journée, se proposait d'en faire le lendemain l'objet de sa leçon cli- nique. Le lendemain matin, en arrivant à l'hôpital, il apprit que le ma- lade avait succombé la veille. Décidé cependant à faire une leçon sur un cas aussi fertile en enseignements cliniques, il crut devoir persister dans sa résolution, et, sans attendre que l'autopsie ait confirmé son jugement, il n'hésita point à discuter la valeur des divers symptômes qui s'étaient si rapidement déroulés devant nous, et à formuler un diagnostic précis. Il ne sera pas sans intérêt, je pense, de rapporter ici la partie de la leçon qui fut consacrée à ce diagnostic : « En présence de tels symptômes, nous ne pouvons douter qu'il n'y ait là une affection cérébrale, conséquence des progrès de l'alté- ration du rocher. Il s'agit donc de savoir si l'inflammation s'est pro- pagée seulement aux méninges ou au cerveau; en d'autres termes, si notre malade a succombé à une méningite diffuse ou à une lésion cérébrale, et en particuUer à un abcès. « Je ne crois pas à l'existence d'une méningite, car nous n'avons ob- servé ni céphalalgie vive, ni vomissements, ni constipation opiniâ- tre, ni délire. Ce qui nous a frappé dès le début, ce sont des symp- tômes de paralysie, hémiplégie incomplète, paralysie de la troisième et de la septième paire. Or ces symptômes dépendent évidemment bien moins d'une méningite que d'une lésion cérébrale. «Mais, ce premier point établi, quelle est cette lésion, et où siége- t-elle? Si l'on se rappelle les rapports du rocher avec le cerveau, il est permis d'admettre qu'une partie du lobe moyen gauche est infil- trée de pus, ramollie et très-probablement creusée d'un fuyer pu- rulent. Ce foyer purulent, cet abcès, développé selon toute appa- rence depuis peu de temps, rend très-bien compte de l'hémiplégie et de la paralysie faciale du côté opposé, c'est-à-dire du côté droit. Quant à la paralysie de la troisième paire, du côté même de la lé- sion, il me semble qu'on peut l'expliquer par ce fait que le tronc de 103 l'oculo-moteur commun, accolé à la partie interoe du lobe moyen dans une partie de sou trajet intracrânieu, a subi un certain degré de compression, et peut-être même d'altération. Ce tronc nerveux étant paralysé, sa branche supérieure qui se perd dans le muscle re- leveur de la paupière supérieure, son rameau externe qui fournit la courte racine du ganglion oplithalmique, son rameau interne qui se rend au droit interne, toutes ses branches sont paralysées; de là : prolapsus de la paupière supérieure, dilatation et immobilité de la pupille. Mais cela se comprend de soi, et je n'avais guère be- soin d'insister sur ces détails d'anatomie descriptive qui doivent vous être familiers. Quant à la relation de l'otorrhée et de l'abcès du cerveau, est-il be- soin de dire que toujours l'inflammation se propageant de l'oreille au cerveau, nous n'admettons plus, comme au temps de Morgagni, que les propriét(''S du pus soient assez corrosives pour qu'un abcès du cerveau s'ouvre par les oreilles? Du reste, vous trouverez dans la quatrième lettre sur l'encéphale du professeur Lallemand cette ques- tion discutée et résolue mieux que je ne pourrais le faire ici. » L'autopsie fut faite trente-six heures après la mort, et nous ré- véla l'existence des lésions suivantes : Crâne. La dure-mère se détache facilement des os du crâne; ses veines sont très-développées, surtout à gairche. Le siHiis longitudinal supérieur renferme un caillot noirâtre. Les si- nus longitudinal inférieur droit, transverse et coronaire ne présentent rien de particulier à signaler. Il en e&t de même de tous les sinus du côté droit. A gauche, la portion du sinus latéral qui correspond au temporal et le sinus pélreux inférieur sont perforés en plusieurs poin-ts, de plus ils sont remplis par un liquide puriforme. La face adhérente ou base de la portion mastoïdienne du sinus latéral a complètement disparu el l'os est mis à nu : il n'est pas sensiblement ramolli, car on ne peut y faire pénétrer la pointe d'un stylet. (Voy. pi. II, fig. B). Les sinus pétreux supérieur, caverneux et occipital postérieur sont distendus par du sang noirâtre coagulé. La fosso sphcnoïdale gauche est tapissée dans toute son étendue par une couche pseudo-membraneuse qui a 2 ou 3 millimètres d'épaisseur : elle a une coloration blanc grisâtre et »e ééchire facilemen'C. Au moment où le cerveau' fut entevé, on vit s'écouler du bord ex- terne de son lobe moyen deux ou trois cuillerées de pus roussâtre. 104 couleur chocolat. En même temps une certaine quantité de substance cérébrale resta adhérente à la dure-mère. Sur la plus grande partie du lobe postérieur gauche, principalement à sa partie antérieure, la pie-mère est épaissie et offre le long des vais- seaux des traînées de coloration blanchâtre. En incisant l'arachnoïde à ce niveau, on constate que ces traînées sont formées par un liquide purulent. Une incision longitudinale du lobe postérieur de l'hémisphère gauche fait découvrir dans sa portion sphénoïdale ou lobe moyen une vaste ex- cavation remplie de pus, dont le contenu s'était en partie écoulé lors- qu'on avait enlevé le cerveau. Elle mesure 10 centimètres de long, 5 de large et 3 de hauteur ; ses parois ne sont pas tapissées par une membrane kystique, elles sontau^contraire constituées par la substance cérébrale qui est molle, pulpeuse, de couleur noirâtre dans certains points, rougeâtre ou blanchâtre dans d'autres. Cet énorme abcès est à peine distant de 1 centimètre de la surface du lobe moyen. Son extension en avant, en bas et en dedans devait manifestement amener une compression du nerf oculo-moteur com- mun correspondant. Il ne présente aucune communication avec le ventricule latéral, dont il n'est séparé que par une mince cloison de substance cérébrale, mais il intéresse un peu la partie latérale et pos- térieure du corps strié et de la couche optique : ce qui permet d'ex- pliquer l'hémiplégie du côté opposé soit par lésion directe, soit par compression du corps opto-strié. Le ventricule latéral gauche contient environ une cuillerée de séro- sité trouble ; le ventricule fatéral droit est vide. Le nerf oculo-moteur commun gauche n'offre à l'œil nu aucune alté- ration appréciable. Le facial semble aussi parfaitement normal à son entrée dans le ro- cher et à sa sortie du trou stylo-mastoïdien. Voici maintenant ce que l'on trouve du côté du temporal: Toute la partie de la face externe de la portion mastoïdienne qui est située au-dessus des insertions des muscles slerno-mastoïdien, sple- nius et digastrique est dénudée, extrêmement rugueuse, friable : en outre elle est parsemée, surtout en avant et en haut, immédiatement en arrière du conduit auditif externe, de nombreux trous de diamètre variable qui établissent une communication entre l'abcès mastoïdien et la partie correspondante du sinus latéral. (Voy. pi. II, fig. A.) La portion cartilagineuse du conduit auditif externe présente dans sa moitié postérieure un orifice par lequel on voit sourdre du pus. En introduisant un stylet dans cet orifice, on arrive par un trajet fistuleux à l'un des trous dont est percée l'apophyse mastoïde. 105 Il n'existe donc point de communication directe entre l'oreille ex- terne et le sinus latéral. Nous avons dit plus haut que la portion mastoïdienne du sinus laté- ral était très-inégale, érodée, mais non friable. L'examen du rocher montre : 1° Que la membrane du tympan est détruite; 2° Qu'il existe une carie de l'oreille moyenne; 3° Enfin que le reste du rocher n'offre à l'œil nu aucune altération apparente. Quant aux organes thoraciques et abdominaux, ils ne présentaient rien de particulier. Faisons remarquer cependant qu'on ne put décou- vrir dans les poumons aucune trace de granulation tuberculeuse. Comme on le voit, l'autopsie a pleinement confirmé le diagnostic porté pendant la vie. Ce résultat, du reste, ne surprendra pas ceux qui ont suivi l'enseignement clinique du professeur Grisolle, et qui se rappellent combien ce maître éminent apportait de précision dans ses diagnostics. M. Grisolle, en effet, joignait à sa vaste expérience un jugement sévère. Fidèle aux principes de la méthode, il savait garder une sage réserve dans ses conclusions; et, lorsqu'il affirmait, les faits accep- tés par lui ne laissaient plus de place à Terreur. NOUVELLE OBSERVATION DÉTAILLÉE SCLÉROSE EN ILOTS MULTIPLES ET DISSÉMINÉS DU CERVEAU , DE LA MOELLE ET DES NERFS RACHIDIENS lue à la Société de Biologie M. HENRY LIOUVILLE Interne des hôpitaux de Paris, lauréat de la Faculté de médecine et de l'Institut. Dans une discussion sur \r sclérose enp[aques,qm eut lieu devant la Société de biologie en juillet 1869, je rappelais que j'avais vu dans dans le couraut de la même année (mai 1869) un fait que mon col- lègue M. Fontaine et moi, avions observé et étudié ensemble dans le service de M. le docteur Rernutz, alors médecin de la Pitié, fait dans lequel, avec la forme cérébro-spinale la plus nettement com- plète, de la sclérose en îlots, il m'avait été donné de constater de plus, à l'autopsie des lésions scléreuses, analogues comme aspect et comme texture (coloration, atrophie, dureté caractéristiques), existant le long des nerfs qui émergent de la moelle. Ces lésions également multiples, également irrégulières et dans leur étendue et dans leur profondeur, se rencontraient des deux côtés, sur la face antérieure et sur la face postérieure; elles exis- 108 taient dans les trois régions, mais elles semblaient prédominer sur la face antérieure et vers la région cervico-dorsale. Ce fait, dont l'importance apparaît de suite, nous avait aussi sem- blé curieux par sa rareté, puisque nous ne le trouvions alors (1) relaté dans aucune observation antérieure à celle-ci. Comme il venait s'ajouter à d'autres constatations également in- structives faites en examinant avec soin le nouvel exemple de cette entité morbide si intéressante, nous avons cru devoir relater encore cette observation avec les nombreux détails cliniques et anatomo- pathologiques qui l'accompagnent, persuadé que dans les questions à l'étude, ce sont les faits complets, beaucoup plus que les brillan- tes théories, qui, à cette période, sont pour la science d'une utilité véritable. Nous devons à M. le docteur Bernutz et à notre ami le docteur Fontaine, nos sincères remercîments pour nous avoir permis d'étu- dier complètement ce nouveau cas intéressant et de l'ajouter ainsi aux deux observations à peu près pareilles de scléroses en îlots, que l'an dernier (1868) nous avons recueillies dans le service de M. Vul- pian à la Salpêtriêre (2). Par bien des points, comme on le verra, ces trois faits se ressem- blent ; par d'autres, ils se complètent. Ils peuvent donc ainsi con- tribuer à approfondir l'étude que mérite de plus en plus cette cu- rieuse maladie, dont les exemples seront certainement trouvés plus fréquents encore à mesure que l'attention des médecins sera plus vrvement appelée sur elle. Déjà, à notre connaissance, un nombre relativement notable de cas, que l'on eût autrefois confondus et désignés sous le nom un peu trop général de « myélites chroniques, » sont actuellement diagnos- tiqués dans différents services des hôpitaux de Paris, et nul ne peut dire que cette séparation plus nette et plus vraie ne soit utile qu'à la seule description scientifique, et ne serve point finalement l'inté- rêt des malades : Obs.— LouiseJ..., âgée de 25 ans, casquettièrè, néeàBlaise (Indre), (1) Depuis, en juillet 1869, MM. Charcot et Jeffrey constatèrent le même fait dans une observation très-intéressante de sclérose en pla- ques, recueillie à la Salpêtriêre et présentée à la Société de biologie. (2) Mémoires de la Société de biologie (1868). 109 entrée le 21 août 1867, à la Pitié, salle Saint-Eugénie, n° 22, service de M. le docteur Bernutz. La femme qui fait l'objet cette observation est pâle, de cheveux châtains; elle est assez bien constituée, et, d'habitude, sa santé était assez bonne avant sa maladie. Son père est mort d'accident; sa mère, d'assez bonne santé, a suc- combé à 51 ans, à une affection indéterminée; elle a perdu une sœur d'une maladie qu'elle ne peut indiquer. A 12 ans elle fut atteinte de scarlatine. Vers 15 ans les règles ap- parurent; elles furent accompagnées de douleurs. Bientôt après, la menstruation devint régulière; elle était assez souvent accompagnée de flueurs blanches. A 22 ans la malade accoucha d'un enfant à terme : Les suites de couches, bien que normales, la forcèrent à rester vingt jours au lit. Les règles reparurent un mois après l'accouchement. Plus tard elle fut tourmentée de douleurs épigastriques, de gastralgie, qui la firent souffrir pendant près de trois mois. Elle ne pouvait rien man- ger sans être prise de vomissements. Le diagnostic porté fut : gastrite nerveuse. Les boissons étaient aussi rejelées. Cet état eut pour con- séquence un amaigrissement prononcé. Plus tard les forces se rele- vèrent. La malade put travaillera nouveau pendant une dizaine de mois. C'est le 6 août 1866, au dire de la malade, que l'affection se serait déclarée par des vomissements de matières bilieuses, qui se prolon- gèrent pendant dix à quinze jours. Puis, peu de temps après, les quatre membres commencèrent à trembler. Les mouvements devinrent moins précis. Durant une année elle put, malgré le désordre des mouvements, faire œuvre de ses mains en confectionnant quelques petits ouvrages qui demandaient l'emploi de l'aiguille. Elle dut ensuite se borner à des soins plus grossiers du ménage. Sa maladresse, dès lors, ne fit qu'augmenter : involontairement, elle cassait en voulant les toucher un grand nombre d'objets de vaisselle. La marche ne tarda pas a être entravée, et neuf mois après le début de son mal, elle fut obligée de se mettre au lit. Elle fut à cette époque soignée par plusieurs médecins. M. Peter, qui l'examina, fut surtout frappé de sa paraplégie, arrivée dans les circonstances indiquées par la malade, parap/é^fie qui parut améliorée par des révulsifs appliqués le long de la moelle. M. Peter nota égale- ment que le tremblement ne s'était point développé symétriquement. Il y eut du nystagmus, puis successivement du tremblement d'un côté, enfin d'un autre (1). (1) En 1869, M. Peter, chargé comme agrégé du cours de clinique médicale à la Pitié, fit à propos de cette malade une de ses leçons. 110 La malade entra à la Pitié un an et douze jours après l'apparition des premiers accidents. Elle y fut soignée par M. le docteur Bernutz, qui, après l'avoir observée avec soin, porta définitivement le diag- nostic de sclérose en plaques généralisées et dirigea dans ce sens un traitement actif et suivi. Élat dans lequel nous trouvons la malade au début de Cannée 1869 (1). Le décubitus dorsal est la position habituelle de la malade. Tout le corps est absolument immobile quand l'attention de la patiente n'est point éveillée. La face présente une légère désharmonie des traits : effacement et aplatissement de la joue; disparition du pli naso- labial; abaissement de la commissure dès lèvres: tout cela du côté droit. Notons aussi un strabisme divergent assez marqué. L'aspect change totalement lorsqu'on interroge la malade et qu'on l'engage à exécuter quelque mouvement. Les yeux deviennent incertains, un peu hagards ; ils sont agités de mouvements oscillatoires; il y a du nystagmus. La tête est prise de suite d'un tremblement très-net, irrégulier, d'en- semble; bientôt après, on constate quelques tremblements des fibres musculaires de la face. La langue, tirée, oscille également. Aussitôt que la malade cherche à faire un mouvement avec les pieds ou les mains, ou lorsqu'on vient à soulever les membres supérieurs ou inférieurs un peu au-dessus du plan du lit, on voit ces parties agitées de secousses irrégulières, désordonnées, que la volonté ne peut maîtriser, mais qui cessent avec le calme. Ce résultat est plus frap- pant pour les membres supérieurs que pour les inférieurs. Les oscil- lations des premiers ressemblent aux mouvements irréguliers, incer- tains, qu'on produirait avec des battants de fl.éau mal tenu. Les fléchisseurs de l'avant-bras semblent prédominer sur les exten- seurs. Ceux-ci agissent surtout quand la main est fermée et que l'avant- bias est serré et maintenu fortement. Abandonné à lui-même, l'avant-bras, soulevé, retombe, malgré la malade, sur le plan du lit, non pas lourdement, comme un membre paralysé, mais en s'abaissant par saccades jusqu'à ce qu'il rencontre (1) Lorsque en janvier 1869, nous prîmes cette observation, mon ami M. Fontaine et moi, nous fûmes frappés de la ressemblance, pres- que trait pour trait, qui existait entre les symptômes que nous con- stations, et ceux publiés comme caractérisant la forme cérébro-spi- nale de la sclérose en ilols. Le diagnostic, à cette époque, s'imposait, pour ainsi dire, de suite à l'observateur. 111 le plan du lit. Alors, presque instantanément et sauf de très -lé- gères secousses dans les doigts, ce membre reprend sa fixité, s'il est en repos. Les deux membres supérieurs présentent les mêmes particularités, avec celte restriction, toutefois, que les phénomènes sont plus accen- tués du côté droit. Par un effort de volonté, la malade peut, pendant quelques se- condes (cinq à six) tenir en l'air la main droite dans une immobilité re- lative assez grande. Mais bientôt la main oscille légèrement, se fatigue, vacille davantage : le tremblement du bras et de l'avant-bras aug- mente, et, en moins d'une minute, après quelques mouvements sac- cadés, la main retombe sur le plan du lit pour redevenir immobile. Mêmes phénomènes pour les membres inférieurs; seulement ils sont moins marqués. Ici encore, les troubles prédominent du côté droit. Après avoir fl.chi le pied à angle droit sur la jambe, nous avons obtenu de petits tremblements très - manifestes , d'abord fibrillaires, puis généralisés. Localisés au début vers le cou-de-pied, ils se pro- pagèrent à la jambe, à la cuisse, devinrent de plus en plus forts, irré- guliers, jusqu'au moment où l'on fit reposer le membre inférieur sur le plan du lit. La malade déclare, à plusieurs reprises, que les tremblements n'exis- tent que lorsqu'elle cherche à exécuter quelques mouvements. Le contact , l'accomplissement des mouvements, déterminent des douleurs, surtout dans les membres inférieurs. Ces douleurs manque- raient pour les membres supérieurs, n'était l'énergie des oscillations : la malade, en voulant porter un objet à la bouche, se heurte souvent la poitrine, le cou ou la face. Actuellement elle ne pourrait tenir en l'air aucun objet sans le laisser tomber. Sur le plan du lit, elle peut encore serrer assez fortement des deux mains; l'effort, il est vrai, est peu soutenu. Pour ce qui est des mem- bres inférieurs, la malade n'a pu se lever ^n lit depuis le 21 août 1867. La sensibilité est conservée et, dans certains cas, exagérée. Elle est mise enjeu par la piqûre, par le chatouillement (de la plante des pieds, de la paume de la main, de la superficie de l'épiderme), par le contact d'objets froids ou chauds. Aux membres inférieurs surtout, on trouve des points d'hyperesthésie; il suffit d'un frottement léger (à rebrousse-poils) pour provoquer la douleur. Par moments, la malade se plaint de douleurs qui lui traversent les jambes de haut en bas, et qui lui font pousser des gémissements. Des douleurs analogues se montrent quelquefois du côté des bras et du tronc. 112 Les facultés intellectuelles nous paraissent saines : les idées s'en- chaînent assez facilement dans la conversation ; le jugement paraît droit. La malade regrette à différentes reprises de n'avoir plus la mé- moire aussi bonne qu'autrefois, et invoque volontiers l'assistance de sa voisine pour lui rappeler quelques faits dont elle n'a plus qu'un souvenir confus. La sensibilité morale est assez vive chez elle : elle s'attriste sou- vent de la position malheureuse à laquelle elle est réduite, reprend un peu de gaieté quand elle croit son mal en voie d'amélioration, et elle est reconnaissante des soins que lui prodiguent ses voisines, etc. La plupart des fonctions organiques s'exécutent assez bien. Cependant la mastication et la déglutition sont depuis assez longtemps troublées par la gêne que la malade éprouve à mettre en jeu d'une manière régulière les muscles qui sont nécessaires à l'ac- complissement de ces actes. On est forcé de lui « hacher menu » ses aliments, de crainte de la voir asphyxier. Un voisine est obligée de lui donner à manger. Les boissons passent assez difficilement aussi; il faut la faire boire à l'aide d'une sorte de biberon, pour lui épargner des accès de toux qui lui arrivent souvent quand elle déglutit des liquides; ce qui faisait supposer que les muscles de Vœsophage ou du larynx, ou ces deux organes participent aux troubles du mouvement. La diges- tion se fait assez bien; la malade vomit rarement. Garde-robes assez régulières ; la malade gâte elurine sous elle. Respiration lenie, régulière; pas de toux ni d'expectoration. Mur- mure vésiculaire; dans toute la hauteur, sonorité normale. Circulation : battements du cœur bien frappés; pouls à 76-80, petit, faible. Elle U7nne sous elle involontairement; peau froide, surtout aux ex- trémités. La malade a maigri beaucoup depuis le début des accidents, a perdu une grande partie de ses forces. La vue, actuellement assez bonne, a été, au dire de la malade, ti'ou- blée il y a quelques mois; elle aurait eu de la diplopie. La parole est lente, traînée; les mots sont scandés, comme décomposés en plu- sieurs syllabes. Les réponses sont assez précises. La malade est soumise à un régime tonique et aux pilules de phos- phure de zinc (7 par jour). 2 février. Dans les premiers jours de février on lui a posé des ven- touses à la nuque, à cause des douleurs vives qu'elle y ressentait. 8 février. Douleurs dans la jambe gauche, surtout dans l'état de re- pos, et surtout quand elle essaye de remuer le pied. 18 mars. Hier accès d'étouffement au moment du repas; le bol ali- 113 mentaire volumineux, qui causait la suffocation, a été retiré avec peine. L'asphyxie, mécaniquement causée par ce fait, a cessé ensuite. 23 mars. L'état de tremblement est toujours très-manifeste, toutefois la malade tient plus facilement son bras droit dans une certaine immo- bilité qu'elle ne l'avait fait jusqu'ici. 4 avril. Le bras droit, levé, est tenu sans osciller presque pendant une demi-minute environ. 20 avril. Toujours à peu près le même état. 12 mai. La malade est plus tranquille, moins agitée; les mouve- ments des bras sont plus calmes que d'habitude. 19 mai. Les mouvements volontaires sont presque impossibles; il y a une sorte de résolution des membres, que la malade meut difificile- ment et avec beaucoup de peine. Peau chaude; pouls assez fréquent. 20 mai. Le nystagmus paraît un peu plus marqué quand la malade veut regarder attentivement. Strabisme divergent, à peu près au même degré. Sensibilité de contact, de la température et de la douleur, con- servée dans les quatre membres, mais un peu obtuse, ou plutôt moins vive que précédemment. Les paroles sont moins faciles, moins scan- dées. Les idées sont assez précises, l'ouïe assez bien conservée des deux côtés; la vision monoculaire est assez bonne; la vision binoculaire n'est plus, comme par le passé, troublée par la présence d'une double image (ce qui tient probablement à ce que la malade a fini, avec l'habi- tude, par faire abstraction de l'image la plus faible, comme cela se voit dans la plupart des strabismes, où la paralysie des muscles subsis- tant, on voit cependant la diplopie aller sans cesse en diminuant?). 21 mai. Aussitôt qu'on soulève le pied droit, tremblement, oscilla- tions qu'on n'a pas en soulevant la jambe gauche. Sensibilité obtuse, mais non perdue. Le chatouillement de la plante des pieds détermine à peine quelques légers mouvements, qui n'apparaissent qu'assez long- temps après l'excitation. Le membre supérieur droit peut encore être tenu un peu en l'air. Celui du côté gauche, élevé et abandonné à lui- même, retombe inerte sur le plan du lit. La peau est chaude, la soif assez marquée; la langue rouge, un peu sèche, le pouls s'élève à 120; la respiration paraît normale en avant; en arrière, un peu de rudesse, léger soufûe, submatité du côté droit. Comme la malade a pris une assez grande quantité de phosphure de zinc, M. Bernulz se demande si le phosphore absorbé ne serait pas pour quelque chose dans l'apparition de ces phénomènes : il a fait cesser la médication depuis quelques jours et prescrit : Essence de térébenthine 12 capsules d'un demi-gramme par jour. 21 mai soir. Chaleur marquée de la peau qui est sèche; sensibilité assez vive quand on tire très-légèrement les poils des jambes. La ma- MÉM. 1869. 8 m lade distingue très-bien les corps chauds de ceux qui spnl froids. La piqûre avec l'épingle lui cau^e une douleur assez manifeste, surtoyt à droite. Depuis assez longtemps la malade se plaint d'une céphalalgie in- tense qui la tourmente beaucoup. Les idées restent toujours assez nettes. Pâleur du visage. On fait sentir à la malade différents objets (prange, flacons d'odeur, musc, essence de térébenthine, éther, etc.) qu'elle ne reconnaît pan. Sur la langue, préalablement humectée, on dépose tour à tour du jus de citron, du sucre, du poiré (ce qui la fait tousser) qu'elle ne distingue pas. Le sel de cuisine lui donne une sensation de fraîcheur qu'elle accuse aussitôt. Le chatouillement des pieds est suivi de mouvements des membres inférieurs. La déglutition est plus gênée qu'auparavant : quintes de toux fré- quentes quand la malade mange ou boit. Les garde-robes sont toujours involontaires ; la malade n'éprouve pas le besoin d'aller à la selle. Diarrhée depuis plusieurs jp\irs. Urines rendues involontairement. Pas de menstruation depuis son séjour à l'hôpital. 22 mai. Commissure droite un peu abaissée ; peau chaude; pas d'ex- pectoration; quelques râles sous-crépilants disséminés, à droite sur- tout. Souffle mieux marqué; matité plus nette. Intelligence agse?: bonne ; pouls petit, faible, senti difficilement, à 124. Du 23 au 25 mai, la malade va sans cesse s'affaiblissant ; le pouls s'élève à 130 pulsations. Les bras sont presque inertes ; le tremblement a presque cessé ; elle boit difficilement. Dans ces conditions, arrive la mort le 28 mai 1869. Autopsie faite le 30 mai 1869 par jMM. Fontaine et Liouville (1). Nous ne relaterons ici que l'exaraen complet des parties encépha- lorachidiennes et de leurs enveloppes, examen qui intéresse plus directement le point sur lequel nous appelons spécialepaent l'atteu- tiou. Cavité crânienne, — Le crânp est moyennement dur. Le cerveau est relativement un peu mou dans quelques points des parties grises infé- rieures et latérales, quoique les circonvolutions paraissent le plus sou- vent plutôt dures, rétractées, comme atrophiées, et par ce fait elles se (1) Nous avons été assistés dans cette autopsie par M. Ménard, que nous remercions de sa grande complaisance. 115 dessinent très-nettement, bien plus petites. Les méninges paraissent assez injectées; elles étaient infiltrées de sérosité incolore en grande quantité; elles se détachent sans déchirer la substance. Les artères ne sont pas athéromateuses. A la face inférieure du cerveau on note un état de ramollissement des parties antérieures des nerfs olfactifs. Les nerfs optiques sont envelop- pés de méninges épaissies et d'un lascis vasculaire assez considérable qui, une fois enlevés, laissent voir des plaques de sclérose, irrégulières dans leur forme et leur distribution, le long de l'un et de l'autre de ces nerfs. La coupe des deux nerfs optiques montre une teinte grisâtre sclé- reuse dans presque toute leur étendue; mais elle est aussi irrégulière- ment distribuée ; dans un point de la grosseur d'une tête d'épingle on trouve une zone blanche qui paraît être du tissu nerveux resté sain. L'altération paraît surtout notable à partir du chiasma : il y a comme une ligne de démarcation nette entre les parties blanches et les par- ties scléreuses grises et roses. Le nerf optique du côté gauche paraît plus grêle, plus aplati, plus gris rosé que celui du côté droit. Les tu- bercules mamillaires offrent une teinte grise qui paraît scléreuse; quelques petits points blanchâtres de substance saine se voient sur celui du côté gauche ; ces points sont rares. Au contraire, sur celui du côté droit il y a une zone irrégulière, mais plus large de substance blan- châtre qui tranche d'une façon notable sur l'altération scléreuse. La substance interpédonculaire, qui est placée derrière les tubercules ma- millaires, est gris rougeâtre et comme scléreuse. De cette partie émer- gent les moteurs oculaires communs qui sont durs, un peu grisâtres, principalement celui de gauche {altérés également par la sclérose). Au devant de la protubérance se trouve de la méningite un peu an- cienne; de plus, à ces niveaux il existe une sorte de rétraction assez notable , la substance nerveuse étant un peu irrégulière, comme atro- phiée, et relativement dure. De suite on soupçonne une altération sclé- reuse très-avancée. En effet, lorsque ces parties sont enlevées, on voit nettement les lésions les plus complètes de la sclérose en plaques disséminées et en îlots profonds, c'est-à-dire des zones considérables de substance d'ap- parence gris rosé, empiétant plus ou moins sur la substance blanche, y traçant, sous forme de dépressions indurées, des dessins irréguliers. Ces altérations prédominaient plus du côté gauche, où se trouve une plaque scléreuse qui occupe les trois quarts postérieurs et inférieurs de la protubérance. Ces plaques sont un peu comme déprimées , les parties blanches paraissant faire une légère saillie au-dessus d'elles. Elles sont si nombreuses que les parties blanches sont quelquefois iso- lées au milieu des zones des plaques gris rosé scléreuses. 116 Sur la ligne médiane, au milieu des parties blanches, on voit une petite plaque de sclérose de la grosseur d'un grain de rail. Le nom de plaques conviendrait bien à ces modifications, si elles n'é- taient que superficielles; mais elles ont une profondeur parfois très- considérable qui nous fait encore préférer pour elles, dans ce cas, la désignation d'îlots. En effet , en faisant une coupe transversale de la protubérance, on peut se rendre compte de l'étendue, en profondeur, de ces blocs scléreus, et, par exemple, du côté gauche, sur les parois latérales, on voit que tout en étant également irrégulière dans sa dis- tribution de haut en bas, la dégénération scléreuse que nous avions constatée sur la protubérance, s'y enfonce dans quelques points d'une épaisseur qui peut être estimée à 1/4 et jusqu'à 1/2 centimètre au moins. Pour le côté droit , la profondeur ne nous a point paru atteindre ces dimensions considérables. L'altération scléreuse est moins avancée également sur les pédon- cules cérébelleux du culé droit que sur ceux du côté gauche. Le trijumeau du côté gauche présente une particularité à signaler et une différence dans sa racine, qui tout entière émerge pour ainsi dire d'une large plaque scléreuse; c'est que sa moitié, c'est-à-dire la partie antérieure, dans toute son étendue, offre des zones nerveuses restées intactes, tandis que son autre moitié, c est-à-dire sa partie postérieure, offre au contraire une plaque scléreuse à son origine, plaque scléreuse qui remonte, dans un espace de 0,005 millimètres, sur le nerf lui-même, en s'y enfonçant au moins dans la moitié également de son épaisseur. De sorte que le nerf est ainsi altéré dans une très-notable moitié de ses parties constituantes; là encore se distingue ïaspect superficiel de plaque et l'existence réelle dun ilôt profond. Sur les pédoncules cérébraux on distingue mal à première vue de vé- ritables plaques scléreuses; mais les fibres semblent un peu plus écar- tées, et ces espaces présentent parfois des reflets grisâtres ressem- blant tout à fait à ceux que donnent à l'état frais les plaques de sclé- rose. Du côté gauche, l'origine apparente du nerf de la septième paire est complètement scléreuse dans un espace de 0,003 millimètres ; puis, après cela, apparaît la teinte blanchâtre nerveuse normale. Il émergeait, du reste, d'une plaque absolument scléreuse qui, se trouvant à la partie qui unit la protubérance, contourne la partie postérieure pour arriver jus- que dans la fossette sus-olivaire. Uolive, du côté droit tout entière, apparaît dégénérée en sclérose, sauf les fibres arciformes qui passent au devant d'elle, et qui tran- chent par leur blancheur mate, sur la face bombée de la région, qui 117 a pris une teinte gris rose, un peu translucide, et une dureté des plus considérables. Sur le pédoncule cérébelleux moyen du côté gauche, tout près du cervelet se trouve une plaque très-nette de sclérose, d'aspect losangi- que, de la grosseur d'une petite lentille, et qui se détache très-nette- ment sur la substance blanche. Des plaques de sclérose très -évidente se voient également sur les couches optiques des deux côtés, dans les parties ventriculaires. Ce sont de grandes plaques irrégulières, grisâtres et rosées au mi- lieu desquelles se trouvent de temps en temps de petits îlots de sub- stance blanche. On retrouve dans les ventricules latéraux , dans la partie externe de la corne antérieure, des plaques de sclérose qui mesurent une épaisseur de 0,006 millimètres, avec une induration considérable et toute spéciale. On en retrouve dans la voûte du ventricule latéral gauche (partie réQéchie). Au milieu, près de ces plaques et les traversant souvent, on voit des vaisseaux très-nets dont le calibre semble même aug- menté. Dans la substance blanche du lobe occipital droit on trouve une grande plaque grisâtre, allongée, irrégulière, parsemée de petits points rouges, nombreux, disséminés, plaque scléreuse d'une épaisseur de i centimètre et d'une longueur de 4 centimètres. De même on retrouve de la sclérose dans la voûte. Dans une coupe du cervelet, plaque scléreuse, également très-évi- dente tout près du corps rhomboïdal, et s'étendant jusqu'à cette région qu'elle gagne un peu. Des plaques de sclérose, de véritables îlots par leur profondeur, de taille et d'épaisseur variées, se eonstatent dans différents points des parties blanches de l'encéphale des deux côtés, en avant et en arrière, et les zones altérées sont quelquefois si rapprochées que l'on pourrait noter en ces endroits les parties complètement restées saines. Pour la substance grise des circonvolutions l'altération est moins étendue; là quelques rares parties sont notées atteintes véritablement par la lésion. Cependant, quand on la rencontre, elle est nette, et par sa dureté, son état d'atrophie, sa coloration qui tranche avec la teinte normale de l'écorce cérébrale. L'aspect des vaisseaux y est aussi très-différent. Mais pour ce qui concerne les corps striés, il y a une atteinte sclé- reuse manifeste et très-avancée. / C'est également sous forme d'îlots irréguliers qu'elle traduit son 118 envahissement. Leur profondeur est plus ou moins considérable. Elle s'accuse encore ici par son irrégularité locale et par son asymétrie , si l'on compare les mêmes régions des deux lobes cérébraux. Cavité rachidienne. — On ne note rien de spécial en enlevant les os du rachis. La colonne vertébrale ne paraît point avoir été le siège autrefois d'une fracture ou d'une modification pathologique. . Moelle épinière. — Examinée d'abord par les parties extérieures et du côté de ses enveloppes, la moelle n'offre qu'un état de ménin- gite peu considérable, quoiqu'il ne soit pas toutefois possible de dire qu'il n'en existe pas (1). Mais de suite apparaissent, et même par transparence, de nombreuses plaques scléreuses, grandes, allongées, comme enrubanées , existant des deux côtés de la moelle. Toutefois, principalement à la face anté- rieure, elles se montrent plus irrégulièrement disséminées ; de plus elles paraissent prédominer sur la substance blanche périphérique des cordons antérieurs et antéro-latéraux. A chacune des coupes de la moelle on est frappé de son état de dureté considérable et d'atrophie relative. Les cordons postérieurs, comme cela se voyait déjà du reste sur la face postérieure, semblent relativement très-peu pris eu égard aux cordons antérieurs. Les lé- sions sont surtout très-prononcées dans la région cervicale et dans la première partie de la région dorsale. Dans la deuxième partie de la région dorsale on ne trouve dans un point qu'un seul endroit de la moelle qui soit devenu scléreux ; c'est le cordon antéro-latéral du côté droit. Il est complètement scléreux. Plus bas, à 5 centimètres, l'altération occupe de nouveau toute la partie antérieure de la moelle des deux côtés ; mais c'est encore le (1) Depuis ce fait, il m'a été donné d'examiner deux nouveaux cas de sclérose en flots généralisés (forme cérébro-spinale) , et dans ces deux cas, dont l'un concernait un homme, j'ai pu constater à l'état frais, d'une façon très-nette, une plus notable altération des méninges spinales, en même temps que la modification spéciale des parties su- perficielles et profondes de la moelle même. Je crois donc qu'il y a des exemples où il est possible de rencon- trer, comme celui-ci , une myélite scléreuse simple , ou au moins accompagnée d'un état de méningite peu prononcée, et d'autres cas, comme ceux auxquels je fais allusion , où l'affection est plus com- pliquée, et qu'on doit dénommer de véritables méningo -myélites scléreuses. It9 côté droit qui est le plais scléreux. Toute la partie postérieure (cor- dons postérieurs) de la moelle paraît ici encore absolument intacte. Dans la région lombaire altérations très-prononcées , irrégulières avec des îlots de substance blanche au milieu des parties grises qui occupent le cordon antérieur gauche et un peu le cordon latéral, le cordon antéro-latéral droit tout entier. Enfin la sclérose paraît en- vahir un peu les cordons postérieurs, mais d'une façon faible dans le point avoisinant le sillon postérieur. Le cordon antérieur droit est au contraire absolument intact. 3 centimètres plus bas l'altération n'a respecté que le cordon antéro- latéral droit et un peu le cordon latéral gauche, mais tout le reste (cordons antérieurs et postérieurs) est pris ; toutefois l'altération des cordons antérieurs l'emporte encore ici. 2 centimètres plus bas, ce sont au contraire les cordons antéro-laté- raux des deux côtés qui sont pris et le reste est intact (eordons anté- rieurs et postérieurs). On voit donc que ces différentes coupes, faites à diverses hauteurs, montrent dans toutes les régions une altération scléreuse; que cette altération est plus ou moins étendue et plus ou moins profonde ; ainsi la région cervicale serait peut-être moins dégénérée que la région dorsale où l'altération domine ici dans quelques parties. Enfin on voit que la modification est inégalement répartie et qu'elle a irrégulière- ment envahi des cordons hétérologues. Une vascularisation assez notable se trouve dans les mailles des méninges de la face postérieure. Des plaques de sclérose se distinguent le long des nerfs qui émer- gent de la moelle (des deux côtés, face antérieure et face postérieure), mais surtout face antérieure (région cervico-dorsale). A côté de ces zones ainsi altérées, se voient des zones saines, ayant conservé leur apparence ordinaire. C'est encore sous la forme de plaques et d'îlots qu'a lieu la modification scléro-nerveuse, qui ainsi n'est pas complète pour toute la longueur ou l'épaisseur d'un nerf, et n'occupe que des places isolées et paraissant irrégulièrement choisies. Il se passe donc ainsi pour les nerfs rachidiens ce qui se passe pour les nerfs crâniens, dont la plupart, ainsi que nous l'avons vu et constaté, soit dans ce cas, soit dans nos précédentes observations (1), peuvent être le siège de dégénérations scléreuses analogues {nerfs ol- factifs, optiques, moteurs oculaires communs, trijumeaux, etc.) Examen micrographique, — C'est dabord à l'état frais que nous avons examiné avec le microscope les lésions d'aspect scléreux rencontrées (1) Mémoires de la Société de biologie. 1868. 120 soit dans le cerveau, le cervelet, soit dans la moelle épinière et les ra- cines nerveuses. Et partout, nous pouvons le dire de suite, cet examen nous a donné les mêmes renseignements, tous confirmant la dégénération scléreuse la plus manifeste. Il n'y avait que de très-légères particularités, qui serviraient à dif- férencier plutôt des degrés que des formes de cette altération patho' logique. Partout les vaisseaux nous ont paru très-modifiés : Ils sont considérablement augmentés de volume ; c'est surtout sur les parois que portent les épaississements. Le tissu conjonctif de ces parois constitue une gaîne d'une épaisseur notable, et l'on y voit beaucoup de noyaux dans différentes directions. Ces noyaux sont le plus souvent allongés. Sur ces mêmes vaisseaux, il y a des points où l'on ne distingue pas de graisse ni de dégénérescence granulo-graisseuse, mais seulement un épaississement conjonctif des plus considérables ; tandis qu'à côté, au contraire, il y a des points où le vaisseau toujours volumineux, mais déformé, n'offre plus qu'un amas de granulations graisseuses noirâtres, rapprochées les unes des autres, et constituant comme un véritable manchon noirâtre sombre. Parfois ces granulations d'aspect noirâtre sont dans la gaîne externe seule, qu'elles ont distendue irrégulièrement en offrant des boursou- flements variés. D'autres fois elles semblent occuper tout le vaisseau, qui paraît alors presque absolument dégénéré. Près de lui, on voit encore des tubes nerveux sains, mais ils sont rares. Quelques autres tubes sont variqueux; d'autres, qui paraissent sains, sont très-rapprochés par le fait d'un épaississement du tissu cel- lulaire interposé entre les faisceaux, et ces tubes parfois semblent comme étouffés dans la gangue nouvelle, d'aspect conjonctif. Une plaque scléreuse, que nous traitons avec la fuchsine, nous laisse voir au bout de quelques minutes : Une trame de tissu connectif très-fin, à petites fibrilles intriquées et enchevêtrées les unes dans les autres, formant une sorte de feutrage serré, paraissant solide, et de cette sorte de chevelu conjonctif, on voit émerger, en de certains points, des filaments allongés, beaucoup plus gros que les fibrilles si déliées, si minces, de la fine trame conjonctive. Ces prolongements sont de plus un peu aplatis, bien délimités, pres- que réguliers; ils semblent flottants par leur extrémité libre, l'autre étant emprisonnée dans la gangue. Ils sont plus ou moins allongés. Ils se teintent un peu par la fuchsine. 121 Ce semblent bien être des cylînder-axis, qui sont tout à fait isolés dans la partie que nous avons appelée libre, partie qui a ainsi pu ré- sister à une certaine action. De plus, dans la trame même, on distingue des noyaux de tissu con- nectif très-visibles, fortement colorés, et se présentant en amas plus ou moins considérables; parfois il y a une véritable agglomération. De distance en distance se rencontrent des corps arrondis, volumi- neux relativement aux autres éléments, à reflet tout particulier, et se colorant facilement et spécialement (réaction iodée). Ils semblent solides, ne disparaissent point et se fondent, se sec- tionnent plutôt que de se détruire complètement. Ce sont des corps amyloïdes. Leur nombre est quelquefois très-grand, et ils se voient par groupes, mais ils sont vus également isolés. Les vaisseaux, dans ces zones à dégénération scléreuse déjà avancée, sont plus volumineux, à parois très-épaissies. On dirait que leur gaîne a doublé ou triplé. Cela apparaît de chaque côté. C'est alors la prolifération conjonctive poussée très-loin, qui se re- marque dans les enveloppes des conduits vasculaires, et leur lumière peut être, par ce fait, très-déformée, soit augmentée dans quelques points moins atteints , soit diminuée dans les endroits où la gaîne est le plus modifiée. Il y a encore des globules rouges dans un grand nombre de vais- seaux. La racine apparente du nerf trijumeau a été examinée dans sa partie qui nous semblait scléreuse et nous y avons constaté un stroma composé surtout de fibrilles minces, fines, assez disséminées, allon- gées, uniformes, sans ramifications, sans noyaux apparents. Cela nous , paraissait être des cylindres axiles tout à fait dépourvus de leur gaîne. Au milieu d'eux des corps irréguliers, à double contour, de gran- deurs différentes, comme brisés et ratatinés, reportant la lumière en teinte grisâtre. Quelques-uns en forme de varices petites, d'autres effi- lés d'un bout, et de l'autre bout plus larges, mais variqueux sur leurs bords, sans ramifications, sans noyaux; ils paraissent brisés dans leur trajet, mais restent ainsi comme se suivant et sont placés comme bout à bout. Cela nous paraît être des tubes nerveux, des enveloppes nerveuses brisées et devenues comme mortifiées. De nombreux noyaux libres, arrondis (tissu conjonctif) se voyaient agglomérés par places. Des vaisseaux fins, jeunes, effilés, avec des soyaux rapprochés très-visibles ; ils se ramifiaient. Des vaisseaux an- niens, boursouflés, à gaînes énormes, à enveloppes granulo-grais- ceuses, couvertes de granulations sombres, fines, noirâtres, agglomé- m sées, et formant dés élèviïfél éxxt leà jiJlrois vascûlaires. Dafis leur gaine externe, des amas granuleux, noirâtres, encellulés. Enfin, des corps de Gluge, libres ou encellulés, isolés ou rapprochés, très-nombreux dans quelques points. Quelques masses arrondies, à réaction iodée spéciale, s'y voient aussi (corps amyloïdes). On voit donc, comme nous l'annoncions plus haut (en nous ba- sant sur les cas antérieurs dont, l'an dernier, nous avons donné des examens tout à fait analogues), que Cétat scléreux était partout irré- cusable, et que là où la simple inspection montrait de suite une dif- férence avec le tissu sain, le microscope faisait saisir l'altération dans toute sa réalité. De plus, on se rend compte de Vunité de la manifestation patholo- gique. Sans doute il y a des nuances suivant les dispositions des régions; sans doute il y a des degrés, et ils sont plus ou moins ac- cusés, mais le début, mais l'état intermédiaire, mais le résultat du processus morbide, semblent partout presque toujours identiques. NOUVELLE NOTE SUR L'ENDOCARDITE ET L'HÉMIPLÉGIE PUERPÉRALES lue à la Société de Biologie PAR M. LE Docteur Auguste OLLIVIER. Dans une précédente note (1), j'ai cherché à établir que sous l'in- fluence de l'état puerpéral il peut se développer des endocardites subaiguës, souvent même latentes, point de départ de lésions valvu- (1) Ollivier (Auguste), Note sur une cause peu connue des maladies organiques du cœur et sur la pathogénie de l'hémiplégie puerpérale. (Comptes rendus des séances et mémoires de la Société de biologie, 1868, 4' série, t. V, p. 195.) Depuis la présentation de cette note à la Société de biologie, deux auteurs, MM, Bucquoy et Decornière, ont fait mention de la variété d'endocardite puerpérale sur laquelle je me suis efforcé d'attirer l'at- tention. Voici en quels termes M. Bucquoy s'exprime à propos des lésions valvulaires dans les intéressantes leçons cliniques qu'il a publiées sur les maladies du cœur : « Il faut que vous sachiez bien que, en dehors du rhumatisme proprement dit, dans sa forme classique, c'est-à-dire en dehors du rhumatisme articulaire aigu ou subaigu, il y a d'autres affections très-voisines, quelques-unes peut-être de môme nature, ca- pables d'exercer sur le cœur une action fâcheuse. Ce sera, par 124 laires chroniques, et qu'il faut aujourd'hui, par conséquent, ranger l'état puerpéral parmi les causes des maladies organiques du cœur, au même titre que le rhumatisme, l'alcoolisme, etc. En outre, m'appuyant sur la connaissance de ce fait important, j'ai signalé comme une cause fréquente de l'hémiplégie qui survient chez les femmes enceintes ou pendant l'allaitement, le transport d'un dépôt fibrineux, d'une végétation valvulaire dans une des ar- tères de la base du cerveau. Dans le courant de cette année, j'ai pu recueillir, tant à l'hôpital Lariboisière qu'au Bureau central, de nouvelles observations d'en- docardite chronique puerpérale, et vérifier ainsi l'exactitude de ce que j'avais avancé. Ces faits nouveaux, qui sont au nombre de huit, ont servi de base à ce travail. exemple, la scarlatine, dont le professeur Trousseau a si bien étudié les complications cardiaques, ou encore la chorée, qui a, avec le rhu- matisme, des affinités aujourd'hui parfaitement établies, comme j'ai pu vous le démontrer moi-même dans une autre conférence. J'y ajouterai aussi l'état puerpéral, que je considère comme une cause puissante d'endocardite valvulaire, ainsi que vous avez pu l'observer vous-même dans les cas relativement assez nombreux que nous en avons rencon- trés dans notre service de crèche. Souvent, en effet, des affections du cœur chez des femmes jeunes encore ne reconnaissent d'autre cause que des grossesses répétées suivies elles-mêmes d'allaitements prolon- gés, ce qui permet, jusqu'à un certain point, de rapprocher ces faits de ceux rapportés récemment par mon savant collègue et ami le docteur Lorain, à l'appui des idées extrêmement ingénieuses qu'il a dévelop- pées devant la Société médicale des hôpitaux, sur le rhumatisme puer- péral. « (J. Bucquoy, Leçons cliniques sur les maladies du cœur, in Union médicale, 1869, 3* série, t. VII, p. 114.) Quant à M. Decornière, qui, dans sa dissertation inaugurale soute- nue le 27 juillet 1869, a rassemblé la plupart des faits relatifs à l'en- docardite puerpérale, il ne s'occupe guère que « de la forme presque toujours constante qu'elle revêt, » c'est-à-dire de l'endocardite sur- aiguë, ulcéreuse ou végétante. Or, d'après les faits que j'ai observés, la forme subaiguë, latente, est loin d'être rare, et, de plus, elle mérite au plus haut point de fixer l'attention des médecins, puisqu'elle peut devenir l'origine de lésions valvulaires chroniques, 125 FEMME DE 21 ANS; BONNE HÏGIÈNE; NULS ANTÉCÉDENTS PATHOLOGIQUES; GROS- SESSE A l'aGE DE 16 ans; INSUFFISANCE MURALE; AUGMENTATION DU VOLUME DO coeur; HÉMIPLÉGIE DU COTÉ DROIT. Obs. I. — La nommée Ch. Marie, âgée de 21 ans, brossière, est ad- mise le 1" juin 1869 à l'hôpital Lariboisière , salle Sainte-Joséphine, n»7. Ses parents vivent encore et jouissent d'une excellente santé. Au point de vue de l'hygiène elle a toujours été dans de bonnes con- ditions : habitation salubre, nourriture saine, point d'excès de travail, jamais d'habitudes alcooliques. Ses antécédents pathologiques se réduisent à quelques indisposi- tions légères. Mariée à l'âge de 1 5 ans, elle devint presque aussitôt enceinte. Dans les derniers mois de sa grossesse, elle commença à ressentir des palpita- tions qui depuis n'ont pour ainsi dire plus cessé. L'accouchement eut lieu en février 1864 et se fit sans aucun accident. Bientôt l'état de la malade s'aggrava sensiblement : elle était prise d'essoufflement à la moindre course, au moindre exercice un peu violent. Il lui était im- possible de monter de suite deux étages, sans devenir aussitôt hale- tante. Il est à noter qu'elle ne toussait point et ne présentait du reste aucun phénomène qui pût se rapporter à une affection pulmonaire. Tel était l'état de sa santé en avril 1868, lorsque subitement, sans aucun prodrome, elle fut frappée d'hémiplégie pendant la nuit. Le len- demain matin on la trouva absolument sans connaissance , paralysée de la moitié droite du corps, de la face aussi bien que du bras et de la jambe. Lorsqu'elle reprit ses sens, elle ne pouvait plus parler : cet état dura ainsi plus ou moins complètement pendant un mois. Il nous a été im- possible de savoir si, à cette époque, la motilité de la langue était ou non troublée. L'hémiplégie diminua graduellement et cinq mois après la malade, quoique non guérie, était en état de retourner à son travail. Depuis quelque temps, elle a été prise de contracture des doigts et de douleurs dans le côté paralysé. Ne pouvant plus travailler, elle s'est décidée à entrer à l'hôpital. A son entrée je constatai les symptômes suivants : Symétrie parfaite des deux moitiés du visage. Hémiplégie incomplète de la motilité à droite : la malade remue bien son membre supérieur, mais elle a peu de force dans la main ; elle marche sans appui, mais en traînant fortement la jambe. Il n'y a pas de contracture. 126 Du même côté, notable dimipution des différentes espèces de sen- sibilité (tact, douleur, température et chatouillement). En même temps, fourmillements continuels des doigts et des orteils. Aucun trouble des sens spéciaux. Réponses nettes, intelligentes même; toutefois affaiblissement de la mémoire. Pas de céphalalgie. Excitabilité très-grande, nervosisme, mais non hystérie vraie. Cœur volumineux ; choc violent de la pointe à 2 centimètres en dehors du mamelon; souffle systolique très-rude à la pointe. Ce souffle s'entend très-bien en arrière, au niveau de l'angle inférieur de l'omo- plate. A la base, nul bruit morbide. Pouls petit, régulier, parfois intermittent. Pas de souffle vasculaire au cou. Respiration calme pendant le repos, essoufflement très-rapide sous l'influence de la marche. Intégrité complète des fonctions digestives. Urines normales. Men- struation régulière, un peu de leucorrhée. La malade prit pendant une quinzaine de jours 1 gramme de bromure de potassium : au bout de ce temps les fourmillements avaient disparu et elle partait pour le Vésinet. L'hémiplégie semblait un peu moins prononcée que le jour de l'entrée. FEMME DE 40 ANS ; PAS DE MALADIES GRAVES, PAS DEXCÈS ALCOOLIQUES; TROIS FAUSSES COUCHES CAUSÉES PAR DIVERS ACCIDENTS; A DATER DE LA DERNIÈRE GROSSESSE, PALPITATIONS, ESSOUFFLEMENT ETC.; A l'eNTRÉE A l'hÔPITAL : ASYSTOLIE TRÈS-PRONONCÉE , C8EDÈME DES MEMBRES INFÉRIEURS; A LA POINTE DU COEUR, BRUITS DE SOUFFLE STSTOLIQUE ET LÉGER ROULEMENT DIASTO- LIQUE. — mort; A l'aUTOPSIE : HYPERTROPHIE DU VENTRICULE GAUCHE, ÉPAIS- SISSEMENT ET INDURATION DE LA VALVULE MITRALE PRODUISANT UNE INSUF- FISANCE AVEC RÉTRÉCISSEMENT DE l'ORIFICE ; CIRRHOSE. Obs. n. — La nommée K. , âgée de 40 ans, est admise le 1 4 août 1869 à l'hôpital Lariboisière, salle Sainte-Joséphine, n° 23. Cette femme ne peut fournir de renseignements précis sur l'état de santé de ses parents. Depuis vingt ans elle habite Asnières, où elle occupe un logement très-salubre. Elle n'a jamais subi de privations ni fait d'excès alcoo- liques. Dans ses antécédents pathologiques, on ne trouve aucune maladie sérieuse; elle n'a eu ni scarlatine, ni chorée, ni rhumatisme, ni syphilis, ni affection pulmonaire ou pleurale. Elle se maria à l'âge de 26 ans. Quatre mois après, première fausse couche provoquée par un effort violent qu'elle fit pour soulever un lourd fardeau. 127 L'ai>née suivante, seconde fausse couche survenue dans des condi- tions à peu près semblables. Enfin, il y a six ans, troisième fausse couche de cinq mois à la suite d'une chute dans un escalier. A dater de cette dernière grossesse, la femme K... se plaignit de pal- pitations, qui augmentèrent graduellement d'intensité et finirent par amener une gêne presque continuelle de la respiration. Il y a un an, ses jambes commencèrent à enfler le soir : l'œdème, léger et de courte durée d'abord, ne tarda pas à devenir permanent. Peu de temps après, le ventre grossit d'une façon notable, alors que l'œdème des membres inférieurs n'était pas encore bien prononcé. Il n'était le siège d'aucune douleur. L'état de la malade s'aggravant de plus en plus, elle fut transportée à l'hôpital. Voici ce que l'on constata le lendemain de son arrivée : Décubitus sur le côté droit. Cyanose très-prononcée; refroidissement des extrémités. Dyspnée très-grande. Amaigrissement du tronc et des membres supérieurs. CEdème considérable des membres inférieurs, des grandes lèvres et de la moitié droite des parois abdominales. Expectoration séreuse, aérée. Abolition des vibrations thoraciques, matité, souffle, égophonie à la partie postérieure du poumon droit; râles sous-crépitants à la partie antérieure du même poumon et dans toute l'étendue du poumon gauche. Impulsion vive de la pointe du cœur en dehors du mamelon ; matité précordiale très-étendue ; battements du cœur tumultueux, irréguliers ; au niveau de la pointe, souffle systolique très-net, léger roulement diastolique. Épanchement intrapéritonéal donnant à l'abdomen la forme d'un ventre de batracien ; développement très-accusé des veines sous-cuta- nées abdominales ; foie peu volumineux ; rate au contraire très-grosse. Urines foncées, non albumineuses. Malgré une médication très-énergique (digitale, drastiques, diuréti- ques, ventouses sèches, vésicatoires), la malade succomba quatre jours après son entrée. Résultats fournis par l'autopsie : Hydrothorax à droite; congestion et œdème considérables des deux poumons. A peine quelques cuillerées de sérosité dans le péricarde ; aucune trace de phlegmasie ; cœur volumineux ; hypertrophie portant presque 128 exclusivement sur le ventricule gauche; intégrité des orifices aortique, pulmonaire et bicuspide. Orifice auriculo-ventriculaire gauche telle- ment rétréci par la soudure d'une partie des deux moitiés de la val- vule mitrale, qu'on ne peut y introduire que l'extrémité du petit doigt. La valvule mitrale est notablement épaissie; elle présente les carac- tères anatomiques ordinaires de l'endocardite chronique. Pas d'athérome de l'aorte. A l'ouverture de la cavité abdominale, écoulement d'une grande quantité de sérosité verdâtre. Épaississement de la capsule de Glisson et adhérences partielles avec le diaphragme. Foie petit, globuleux, granulé à sa surface. A la coupe il est dur, résistant, et présente des granulations semblables à celles de la surface. L'examen microscopique fait constater que les groupes de cellules hépatiques sont séparés par une couche épaisse de tissu connectif déjà ancien (1). (1) Ce sont là, sans nul doute, les vrais caractères delà cirrhose. Il reste maintenant à déterminer sous quelle influence cette maladie s'est développée. Nous avons vu qu'il était impossible, dans le cas actuel, de la rattacher à aucune des causes ordinaires de la cirrhose (alcoolisme, syphilis, impaludisme). Il semble donc rationnel, au pre- mier abord, de considérer les altérations du foie observées chez notre malade comme une simple conséquence de l'affection cardiaque dont elle souffrait déjà depuis longtemps. Il y a vingt ans une pareille interpré- tation eût été acceptée sans conteste ; mais aujourd'hui des recherches plus rigoureuses ont montré que Becquerel [Recherches anatomo- pathologiques sur la cirrhose du foie, Arch. gén. de méd.. 1840, 3* sé- rie, t. VII, p. 397 et t. VIII, p. 40) a singulièrement exagéré l'influence des maladies du cœur sur le développement de la cirrhose. » On a maintes fois accusé, dit Frerichs, les troubles de la circulation qui se produisent dans le foie à la suite d'une lésion du cœur, de causer la cirrhose. Becquerel, dans quarante-deux cas de cette affection, a trouvé vingt et une fois le cœur malade ; dans treize de ces cas, il est vrai, existait simplement l'état que Becquerel nomme cirrhose du premier degré, et qui est inoffensif ou ne produit que des troubles insignifiants. Cet état, comme nous l'avons vu plus haut, est essentiellement diffé- rent de l'induration cirrhotique, aussi le résumé des observations de Becquerel est pour nous d'une médiocre valeur. Il est certain que des lésions du cœur peuvent coïncider avec la cirrhose : j'ai vu cette coïn- cidence exister quatre fois sur trente-six cas; seulement ces lésions ne nous représentent pas le point de départ de la dégénérescence cir- 129 Rate presque triplée de volume. Le péritoine n'est le siège d'aucune altération, si ce n'est au niveau de la face convexe du foie, où s'observent quelques adhérences fibreuses. , Rien de particulier dans l'estomac et l'intestin. rhotique, ce sont des complications qui hâtent l'issue funeste de l'affec- tion, et modifient l'ensemble de ses symptômes.» {Traité pratique des maladies du foie et des voies biliaires, traduction française par Du- ménil et Pelligot. Deuxième édition. Paris, 1866, p. 303.) Ayant voulu, de mon côté, étudier cette question, j'ai pu recueillir six observations d'affection cardiaque compliquée de cirrhose : dans quatre cas les reins présentaient en même temps, à divers degrés, tous les caractères de la maladie de Bright. Aucun de mes malades (5 hommes et 1 femme) n'avait eu antérieurement de rhumatisme arti- culaire, mais, par contre, tous avaient commis de nombreux excès alcooliques. Il est évident que dans ces cas la cirrhose, pas plus que la maladie de Bright, n'était consécutive à l'affection du cœur, mais que ces trois maladies ne reconnaissaient qu'une seule et même cause, V alcoolisme . Chez les sujets atteints de lésions organiques du cœur d'origine rhu- matismale, ce n'est pas la véritable cirrhose que l'on a occasion de rencontrer, mais bien cet état particulier du foie qui a été désigné sous le nom de foie muscade^ et qui résulte de la stase sanguine longtemps prolongée dans la glande hépatique. Comme on le voit, il serait impossible de rattacher à aucune des causes signalées par les auteurs la cirrhose constatée chez la malade dont l'histoire est rapportée dans l'observation II. D'un autre côté, si l'on se rappelle que cette femme avait eu plusieurs enfants, on pour- rait, ce me semble, invoquer ici l'influence des grossesses répétées ou plutôt de l'état puerpéral. Depuis cinq ans, j'ai pu observer, chez des femmes indemnes de toute autre affection organique, trois cas de cir- rhose de cause complètement inconnue; mais, particularité commune à chacune d'elles, ces trois malades avaient eu un grand nombre d'en- fants. Frappé de l'existence de ce fait, je recherchai s'il n'avait pas été déjà mentionné dans les divers travaux que nous possédons sur la cirrhose. Aucun auteur n'en parle, si ce n'est Becquerel : « Une des femmes atteintes, dit-il, avait eu quatorze enfants. Ces quatorze grossesses ont-elles eu une influence sur la production de la maladie, en détermi- nant une gêne de la circulation veineuse de l'abdomen? C'est ce que MÉM. 1869. ^ 9 130 Congestion des reins. Utérus normal. Plusieurs petits kystes séreux dans chaque ovaire. FEMME DE 38 ANS ; BONNE SANTÉ ANTÉRIEURE, PAS d'eXCÈS ALCOOLIQjaES ; PRESQUE SUCCESSIVEMENT SIX GROSSESSES RÉGULIÈRES ; QUELQUES ANNÉES PLUS TARD, SEPTIÈME GROSSESSE, AVORTEMENT LE SIXIÈME MOIS A LA SUITE d'uN ACCIDENT. A DATER DE CE MOMENT, PALPITATIONS, ESSOUFFLEMENT, ETC.; HYPERTROPHIE DU CŒUR, INSUFFISANCE MITRALE. Obs. III. — Le 14 septembre 1869, est admise à l'hôpital Lariboisière, salle Sainte-Joséphine, n° 27, la nommée Charlotte G..., âgée de 38 ans, journalière. Cette femme ne peut fournir aucun renseignement sur son père qui est mort depuis longtemps. Sa mère vit encore et se porte bien. nous ne pouvons décider. » (Mém. cité, in arch. de méd,, 3* série, T. VIII, p. 57.) Quinze ans plus tard, le même auteur avait complètement oublié les lignes qui précèdent, car dans des leçons qu'il fit à cette époque sur la cirrhose, il ne dit mot de l'influence des grossesses répétées sur le développement de cette maladie (Becquerel , ÏLeçons sur La cirrhose, etc. , in Moniteur DES HÔPITAUX, 1855, t. III, p. 913). Aux faits que je viens de signaler, il faut joindre les observations IV et VIII, dans lesquelles l'autopsie n'a pas été pratiquée. Je crois en effet, malgré l'absence de cette lacune, pouvoir rapporter à la cirrhose plusieurs des phénomènes observés pendant la vie. Ainsi donc, toules ces observations tendent à démontrer que la cirrhose peut se développer sous l'influence de la grossesse. Or si l'on réfléchit que la cirrhose, quoique plus fréquente chez l'homme que chez la femme, est cependant assez commune chez cette dernière (16 sur 36 cas ou 4 sur 9 d'après Frerichs, 63 sur 223 cas ou 2 sur 5 d'après la statistique médicale des hôpitaux de Paris pour 1861, 1862 et 1863), et si d'autre part on se souvient que l'alcoolisme est infiniment plus rare dans le sexe féminin, on arrive à conclure qu'il faut attribuer la fréquence re- lative de la cirrhose chez la femme à une cause encore inconnue, ou qui du moins n'a pas encore attiré l'attention des observateurs. Cette cause, je crois l'avoir saisie, c'est Vétat puerpéral qui vient rempla- cer en quelque sorte l'influence des excès alcooliques chez le sexe oîi ils sont moins habituels, et l'on peut accorder à la puerpéralité une place à côté de l'alcoolisme, de l'impaludisme et de la syphilis, parmi les causes qui exercent une influence manifeste sur le développement de la cirrhose. 131 De bonne heure, elle fut occupée aux rudes travaux des champs, qu'elle supporta facilement. Elle était convenablement nourrie, et ha- bitait un logement salubre. Enfin elle ne commit jamais d'excès alcoo- lique. Dans son enfance, elle a eu l'impétigo du cuir chevelu et des maux d'yeux assez tenaces. Ce sont là les seules affections que l'on puisse trouver dans son passé. A l'âge de 20 ans, elle se maria et eut six enfants presque consécu- tivement. Trois de ces enfants sont vivants et bien portants. Les six grossesses furent très-régulières, et se terminèrent sans le moindre accident. ' En 1867, la femme G... devint enceinte pour la septième fois. Elle était parvenue au sixième mois de sa grossesse lorsque, à la suite d'un mouvement brusque, elle fut prise de douleurs utérines, et ne tarda pas à faire une fausse couche. C'est à partir de ce moment que, sans autre cause appréciable, elle ressentit des palpitations qui sont toujours allées en augmentant d'intensité. L'année suivante, elle entra dans le service de M. Lorain, à l'hôpital Saint-Antoine. On la traita, nous dit-elle, pour une maladie du cœur, et on lui prescrivit de la digitale. Elle en sortit au bout de vingt jours, et reprit son travail habituel. Il y a deux mois, elle remarqua que, !e soir, elle avait le bas des jambes enflé; en même temps elle devenait promptement essoufflée lorsqu'elle marchait ou montait un escalier. Cet état s'étant aggravé, elle vint demander un lit à l'hôpital Lariboisière, où je la trouvai dans l'état suivant, le lendemain de son admission : Dyspnée qui oblige la malade à rester presque assise dans son lit. Cyanose considérable de la face et des extrémités. Légère teinte ictérique des conjonctives. Saillie des veines jugulaires. Œdème' des membres inférieurs, des grandes lèvres et des parois abdominales ; un peu de liquide dans le péritoine. Impulsion énergique de la pointe du cœur dans le sixième espace intercostal, à 3 centimètres en dehors du mamelon; matité précordiale s'étendant de la troisième à la septième côte ; soufûe systolique très- intense, en jet de vapeur, à la pointe; aucun bruit péricardique. Pouls petit, irrégulier, intermittent. Toux et expectoration rares; râles sous-crépitants disséminés à la partie postérieure et inférieure des deux poumons. Fonctions digestives presque normales. Foie mesurant 12 à 13 cen- timètres verticalement au niveau' de la ligne mamelonnaire. Rate assez grosse. . , 13Î Urine chargée, sans albumine ni sucre ; règles supprimées depuis plusieurs mois ; aucun signe de grossesse. Étourdissements fréquents, lourdeur de tête, léger affaiblissement de la vue. Sous l'influence de la digitale, des purgatifs répétés et des diuréti- ques, l'hydropisie disparut, les symptômes cardiaques s'amendèrent peu à peu, et vers le milieu du mois de décembre, la malade put sor- tir de l'hôpital. Le bruit de souffle du cœur offrait toujours la même intensité. FEMME DE 38 ANS ; BONNES CONDITIONS HYGIÉNIQUES; PAS DE MALADIES ANTÉ- RIEURES; HUIT GROSSESSES A TERME OU FAUSSES COUCHES; A DATER DE LA QUATRIÈME GROSSESSE, PALPITATIONS, ESSOUFFLEMENT, ETC. A l'eNTRÉE A l'hôpital : ASYSTOLIE, OEDÈME DES MEMBRES INFÉRIEURS, INSUFFISANCE ET RÉTRÉCISSEMENT DE l'oRIFICE MITRAL ; ASCITE, FOIE PETIT, RATE VOLUMI- NEUSE, CIRRHOSE probable; mort; AUTOPSIE NON FAITE, Obs. IV. — La nommée B..., âgée de 38 ans, journalière, entre le 16 septembre 1869 à l'hôpital Lariboisière, salle Sainte-Joséphine, n" 19. Son père est mort à l'âge de 43 ans, d'une fièvre typhoïde. Sa mère vit encore et se porte bien. Hygiène toujours satisfaisante : nourriture saine, logement salubre, pas d'habitudes d'ivrognerie. Santé antérieure presque constamment bonne : ni fièvres éruptives, ni chorée, ni rhumatisme, ni syphilis, ni affection pulmonaire. La femme B... se maria à l'âge de 17 ans. L'année suivante, elle fit une fausse couche de trois mois à la suite d'une vive frayeur. A 19 ans, nouvelle grossesse, accouchement normal. L'enfant mou- rut un mois après et la mère se plaça comme nourrice. A 21 ans, troisième grossesse, accouchement aussi normal que le précédent, enfant vivant. A 24 ans, quatrième grossesse menée à bon terme, vers le milieu de laquelle palpitations qui n'ont pas cessé depuis et n'ont fait que s'ac- croître jusqu'à ce jour. Enfant mort au bout de quelques jours. Après son accouchement, la femme B... se plaça de nouveau comme nourrice. A 30 ans, cinquième grossesse, accouchement régulier sans accident. Enfant bien portant. A 32 ans, sixième grossesse, accouchement également régulier. En- fant mort de rougeole. A 33 ans, septième grossesse menée à terme, pendant le cours de laquelle la malade contracte une bronchite intense. A partir de ce moment, la respiration, gênée déjà, le devient de plus en plus. 133 Enfin cette année, huitième grossesse qui, au bout de quatre mois, se termine par un avortement. Il importe de noter que, pendant les deux dernières grossesses, les jambes avaient présenté, à plusieurs reprises, un certain degré d'œdème. Bientôt cet œdème s'établit d'une façon permanente et fit de tels progrès que la malade dut entrer à l'hôpital. Le lendemain je la trouvai dans l'état suivant : cyanose et boufiis- sure de la face ; œdème des membres inférieurs, de la vulve, des pa- rois abdominales antérieures et de la région lombaire; ascite assez considérable ; dyspnée très-grande ; râles sous-crépitants disséminés dans toute la hauteur des deux poumons; battements du cœur tumul- tueux et désordonnés, au point de rendre impossible l'auscultation. (Digitale, purgatif drastique, diurétiques.) Quelques jours plus tard, la dyspnée devient de plus en plus forte par suite de l'augmentation de l'ascite; je fis la paracentèse abdomi- nale, qui fournit 11 litres de sérosité citrine. Il me fut alors possible de compléter mon examen. Le choc de la pointe du cœur avait lieu dans le cinquième espace in- tercostal, à 1 centimètre en dehors du mamelon; la matité précordiale était notablement accrue. L'auscultation fit constater à la base un souffle anémique; à la pointe, un souffle systolique de moyenne inten- sité et un léger roulement diastolique. Le pouls était filiforme, irrégu- lier, intermittent. L'état des organes respiratoires était resté à peu près le même. Le foie mesurait seulement 8 centimètres dans son diamètre vertical. La rate était volumineuse. Les urines ne contenaient pas d'albumine. Les jours suivants, l'œdème diminua un peu et la malade put même se lever et aller jusqu'auprès du calorifère. Le 6 novembre au matin^ on la trouva morte dans son lit. L'autopsie ne put malheureusement être faite. FEMME DE 34 ANS ; PAS DE PRIVATIONS; PAS d'eXCÈS ; BONNE SANTÉ ANTÉRIEURE ; QUATRE GROSSESSES PRESQUE SUCCESSIVES. A DATER DE LA DERNIÈRE GROSSESSE, PALPITATIONS ET ESSOUFFLEMENT, ETC. A l'eNTRÉE A l'hÔPITAL : CYANOSE, ASYSTOLIE, OEDÈME DES MEMBRES INFÉRIEURS, AUGMENTATION DU VOLUME DU COEUR, INSUFFISANCE MITRALE. Obs. V. — La nommée Clémence B..., âgée de 34 ans, est admise le 21 septembre 1869 à l'hôpital Lariboisière , salle Sainte-José- phine, n" 14. Sa mère est morte en état de démence à l'âge de 62 ans. Son père 134 vit encore et se porte bien. Elle a trois frères et deux sœurs qui jouis- sent tous d'une excellente santé. Elle a toujours vécu à l'abri de la misère et n'a jamais commis d'ex- cès. Disons cependant que depuis quatre mois elle servait dans un restaurant et qu'elle y était surmenée. Antérieurement elle n'a eu ni fièvres éruptives, ni chorée, ni rhuma- tisme, ni syphilis, ni affection pulmonaire. Elle fut réglée pour la première fois à l'âge de 17 ans ; la menstruation ne s'établit chez elle d'une manière régulière que très-difficilement. Elle a toujours été très-impressionnable et parfois même elle a eu de légères attaques d'hystérie. Mariée à l'âge de 20 ans, elle eut quatre enfants presque successive- ment. Les deux premiers sont morts, l'un en nourrice, l'autre quelques jours après sa naissance. Les deux derniers sont vivants et bien por- tants. Dès les premiers mois de sa quatrième grossesse et sans aucune cause apparente, elle fut prise de palpitations qui, pour ainsi dire, n'ont plus discontinué. A partir de cette époque sa santé fut toujours chancelante. Dans le courant de février 1868, elle s'aperçut pour la première fois que ses jambes enflaient le soir : elle se fit alors admettre à l'Hôtel-Dieu, dans le service de M. Hérard, où elle resta pendant trois mois. On la traita, dit-elle, pour une affection mitrale et une déviation utérine. Lorsqu'elle sortit de l'hôpital, l'œdème avait complètement disparu, les palpitations avaient aussi notablement diminué. En mai 1869, elle se crut assez forte pour entrer comme servante chez un restaurateur; mais sous l'influence du travail pénible auquel elle était obligée de se livrer, l'œdème des jambes reparut : en même temps les palpitations et l'essoufflement devinrent tels qu'on dut la transporter à l'hôpital Lariboisière. Voici dans quel état je la trouvai à la visite du 22 septembre: face cyanosée, orthopnée, œdème des membres inférieurs. Pouls petit, très-irrégulier et très-intermittent. Battements du cœur tumultueux et désordonnés, au point de rendre impossible l'ausculta- tion de cet organe. Nombreux râles sous- crépitants dans les deux poumons, principale- ment en arrière. Foie et rate volumineux. Pas d'ascite. Urines très-colorées, non al- bumineuses. L'emploi de la digitale et des diurétiques amène, au bout de quel- ques jours, une diminution notable de tous ces phénomènes d'asystolie', et l'examen du cœur put alors être fait. On constata nettement l'exis- 135 tence d'une notable augmentation du volume de cet organe, avec in- suffisance mi traie. Sous l'influence du repos et de la médication, les battements du cœur reprirent un peu de régularité, bien que le souffle conservât son carac- tère, et rhydropisie disparut. La malade quitta l'hôpital le 30 octobre. FEMME DE 36 ANS; PREMIÈRE GROSSESSE A l'aGE DE 20 ANS ; FAUSSE COUCHE A LA SUITE d'un ACCIDENT : DEPUIS LORS, CINQ AUTRES GROSSESSES TRÈS-RÉGULIÈRES. IL Y A DEUX ANS, ATTAQUE SOUDAINE d'hÉMIPLÉGIE DU COTÉ GAUCHE AVEC APHASIE PROBABLE. A l'eNTRÉE A l'hÔPITAL I EN MÊME TEMPS QUE LHÉMIPLÉGIE, AUGMENTATION DU VOLUME DU COEUR, INSUFFISANCE AORTIQUE ET INSUFFISANCE MITRALE DEJA ANCIENNES. Obs. VI. — La nommée P... (Sophie), âgée de 36 ans, femme de mé- nage, entre le 23 septembre 1869 à l'hôpital Lariboisière, salle Sainte- Joséphine, n° 27. Ses parents sont parvenus à un âge déjà fort avancé sans aucune maladie sérieuse ; le père, cependant, a souffert autrefois d'une sciati- que rebelle, consécutive à un refroidissement. La femme P... demeure depuis sa naissance aux environs de Paris. Elle s'est toujours convenablement nourrie, et n'a jamais habité de lo- gement humide; en outre, elle n'a jamais fait abus des boissons alcoo- liques. Les maladies qu'elle a eues antérieurement sont : la rougeole, la co- queluche, la fièvre typhoïde, d'assez fréquentes attaques d'hystérie et récemment une pleurésie du côté gauche. Elle a toujours été très-régulièrement menstruée. A l'âge de 19 ans, elle se maria. L'année suivante, elle fait une fausse couche à la suite d'une chute. Depuis lors elle a eu, à deux ans d'intervalle environ, cinq enfants qu'elle a tous allaités. Ces enfants sont vivants et bien portants. Dans le courant de juin 1867, au milieu d'une époque menstruelle, elle fut réveillée vers deux heures du matin par un violent mal de tête. Elle s'aperçut alors qu'elle était paralysée du bras et de la jambe gau- ches. Cette triste découverte lui fit une telle impression qu'elle fut im- médiatement prise d'une série d'attaques de nerfs. Ce ne fut qu'à midi qu'elle devint calme et reconnut les personnes qui l'environnaient. Elle voulut parler, mais ses efforts furent inutiles : elle bredouillait, dit- elle, et ne pouvait se faire comprendre. Les traits du visage étaient déviés du côté gauche, c'est-à-dire du côté paralysé. 136 La vue n'était point troublée, et les paupières avaient conservé leur immobilité. L'ouïe était également intacte. La paralysie du mouvement était complète à gauche, mais la sensi- bilité n'y était pas altérée. Voici ce que je notai quelques jours après l'admission de la malade à l'hôpital : Il n'existe plus aucune trace de paralysie faciale. Le membre supérieur gauche est peu mobile. Les doigts sont forte- ment fléchis, et il est difficile de les ramener complètement dans l'ex- tension. Cette contracture paraît ne s'être développée que peu à peu. Le membre inférieur gauche est bien plus mobile que le supérieur. La malade peut faire exécuter à sa jambe des mouvements assez éten- dus, mais son pied reste constamment dans un certain degré d'exten- sion; aussi n'est-ce que sa moitié antérieure qui, dans la marche, sup- porte le poids du corps. Il n'existe aucune différence entre le volume des deux membres su- périeurs ; il n'en est pas de même pour les membres inférieurs : la circonférence de la jambe gauche mesure 1 centimètre de moins que celle de la jambe droite. La sensibilité générale est intacte dans ses diverses modalités, aussi bien du côté droit que du côté gauche. Seulement la malade ressent depuis plusieurs mois des douleurs le long du membre supérieur gauche. La vue, le goût, l'odorat ne sont point altérés. Quant à l'ouïe, elle est un peu affaiblie à gauche. La parole est toujours un peu embarrassée, bien que la langue sem ble parfaitement mobile. Enfin la mémoire a subi un affaiblissement assez marqué. L'examen du cœur permet de constater : 1° Que la pointe bat dans une étendue de 3 centimètres et en dehors du mamelon; 2" Que la matité précordiale est notablement augmentée ; 3° Qu'il existe à la base un bruit de souffle diastolique, rioux et pro- longé (insuffisance aortique), et à la pointe un souffle systolique de moyenne intensité (insufiisance mitrale). Les autres organes ne présentent rien qui mérite d'être signalé. Jusqu'à ce jour, il n'a jamais été observé d'œdème aux membres in- férieurs. Après un court séjour à l'hôpital, la malade Jut rappelée chez elle. Comme elle nous l'avait promis, elle revint deux mois après à la consultation. Son état s'était un peu amélioré, et le jour même, elle avait pu faire une lieue à pied. 137 FEMME DE 26 ANS ; PARENTS BIEN PORTANTS; BONNE HYGIÈNE; PEU DE MALADIES ANTÉRIEURES ; CINQ GROSSESSES SUCCESSIVES. A DATER DE LA DERNIÈRE, PALPITATIONS, VERTIGES, ETC., AUGMENTATION DU VOLUME DU CœUR , INSUF- FISANCE AORTIQUE ET INSUFFISANCE MITRALE, Obs. VII. — J'ai eu l'occasion d'observer, le 2 octobre 1869, à la consultation du Bureau central, où j'étais de service, une femme âgée de 26 ans, qui se plaignait de violentes palpitations et de fréquents vertiges. Elle était remarquablement pâle. Ses jambes n'offraient au- cune trace d'oedème. Voici ce que je constatai à l'examen de l'appareil circulatoire : Voussure précordiale très-manifeste par suite du peu de volume des seins; choc assez fort dç la pointe du cœur dans le sixième espace in- tercostal, à 1 centimètre 1/2 en dehors du mamelon; léger frémisse- ment cataire; matité considérable; à la base, bruit de souffle dias- tolique doux et prolongé; à la pointe, bruit de souffle systolique assez intense. Souffle continu anémique dans les vaisseaux du cou, surtout à gauche. Pouls assez large, dépressible, régulier. Les autres appareils ne présentaient rien de particulier à signaler. J'obtins de cette jeune femme les renseignements suivants sur ses antécédents héréditaires, hygiéniques et pathologiques : Ses parents vivent encore et se portent très-bien. Elle n'a jamais fait d'excès alcoolique. Sa nourriture a toujours été bonne et son logement salubre. Elle est couturière et travaille chez elle. Enfin elle ne se rappelle point avoir jamais souffert du froid. Sa santé a presque toujours été bonne jusqu'en 1866; elle n'a eu ni fièvres éruptives, ni chorée, ni rhumatisme, ni syphilis, ni phlegmasie pulmonaire ou pleurale. Mariée à l'âge de 18 ans, elle a eu cinq enfants qu'elle n'a pas al- laités elle-même. Ses deux premières grossesses ont été régulières. Il n'en a pas été de même de la troisième qui a été pénible, et pendant le cours de laquelle, en 1866, elle fut prise de palpitations qui, depuis lors, n'ont pour ainsi dire plus discontinué, La malade dit spontanément, sans qu'on attire son attention sur ce point, que ses battements de cœur proviennent de sa troisième couche. Les deux dernières grossesses ont été aussi très-pénibles. Aucun de ces cinq accouchements ne se compliqua d'arthropathie puerpérale. 138 FEMME DE 44 ANS ; BONNE HYGIÈNE; JAMAIS D EXCÈS ALCOOLIQUES; PAS DE TdALADlES GRAVES antérieures; dix GROSSESSES DANS l'E'^PACE DE QUINZE ANS ; A DATER DE LA DERNIÈRE (iL Y A DIX ANs), PALPITATIONS, ESSOUFFLEMENT, ETC., A l'eN- TRÉE A l'hôpital ASYSTOLIE, INSUFFISANCE MITRALE; ASCITE, CIRRHOSE PRO- BABLE ; MORT ; AUTOPSIE NON FAITE. Obs. VIII. — La nommée B. (Marie), âgé de 44 ans, femme de ménage, est admise le 10 octobre à l'hôpital Lariboisière, salle Sainte-Eugénie n° 3, dans le service de M. Millard. Les parents de cette femme sont morts à un âge avancé et ne se sont jamais plaints de battements de cœur. Elle a toujours vécu dans de bonnes conditions hygiéniques et n'a jamais fait d'excès alcooliques. Elle n'a eu ni la scarlatine ni la chorée; à aucune époque, elle n'a eu de douleurs rhumatismales ni présenté de symptômes de syphilis; enfin elle n'a jamais eu d'affection pulmonaire ou pleurale. Mariée à l'âge de 18 ans, elle a eu dix enfants qu'elle a tous allaités pendant plusieurs mois. Le plus jeune est né il y a dix ans. Or c'est à partir de cette époque qu'elle a commencé à ressentir des palpita- tions qui depuis n'ont point cessé et se sont accompagnées peu à peu d'une gêne graduellement croissante de la respiration. Voici dans quel état je la trouvai le 25 octobre: Maigreur très-grande du thorax et des membres qui contraste avec le volume considérable de l'abdomen. Pas d'ictère. Nombreuses varices des membres inférieurs. Matité précordiale mesurant 10 centimètres en tous sens. Choc de la pointe du cœur dans le cinquième espace intercostal, à 1 centi- mètre en dehors du mamelon. Souffle systolique rude à la pointe; bruits normaux à la base. Dyspnée sans toux ni expectoration. Pas de râles dans la poitrine, seulement respiration un peu soufflante et prolongée au sommet du poumon droit. Appétit conservé, digestion assez facile; alternative de diarrhée et. de constipation ;ascit6 considérable. Veines sous-cutanées abdominales très-d«veloppées. Le foie déborde les fausses côtes de 2 centimètres environ, mais son augmentation de volume n'est pas aussi grande qu'on pourrait le croire au premier abord, car la limite supérieure de cet organe est distante du mamelon de trois à quatre travers de doigt. La raie mesure 12 centimètres dans son diamètre vertical. Les urines sont très-foncées ; elles ne contiennent ni albumine ni sucre. 139 Le 15 novembre, l'épanchement abdominal a tellement augmenté que la ponction est devenue nécessaire. On retire 6 litres de sérosité citrine. Le 20 décembre, nouvelle ponction et évacuation de 8 litres de liquide. Quelques jours après la malade fut prise d'un érysipèle de la face et du cuir chevelu qui l'enleva rapidement. Il ne fut malheureusement pas possible de faire l'autopsie. I Il ne saurait, ce me semble, exister de doute sur la véritable ori- gine de l'endocardite constatée chez les huit malades dont je viens de rapporter l'observation. L'interrogatoire le plus minutieux ne révéla chez elles, comme on a pu le voir, aucune des causes jus- qu'ici bien connues des affections organiques du cœur (rhumatisme, alcoolisme, maladie de Bright, fièvres éruptives, etc.) (1). D'un autre côté, presque toutes les malades avaient eu plusieurs enfants, et c'était pendant le cours ou à la suite d'une grossesse qu'étaient apparus les premiers symptômes de la lésion valvulaire qui les amenait à l'hôpital. En présence de ces deux ordres de faits, toujours les mêmes, — grossesses répétées, endocardite concomitante ou consécutive, — n'est-il pas logique d'admettre entre eux un enchaînement, une re- lation de cause à effet, et de considérer ici l'état puerpéral comme le véritable et seul point de départ des altérations observées du côté de l'endocarde? Il me reste maintenant à étudier les caractères anatomiques et cliniques de l'espèce particulière d'endocardite dont je crois avoir suffisamment démontré l'existence. Les lésions que l'on rencontre dans la forme subaiguë de Tendo- cardite puerpuérale ne paraissent pas différer beaucoup de celles qui caractérisent l'endocardite rhumatismale la plus commune. Dans (1) Je n'ai pas voulu rapporter dans cette note deux autres observa- tions d'endocardite, d'origine probablement puerpérale, recueillies chez des femmes âgées de plus de 50 ans, afin qu'on ne pût invoquer l'in- fluence de la sénilité qui, comme on le sait, prédispose aux lésion? athéromateuses de l'endocardite. 140 l'un comme dans l'autre cas, les valvules sont le siégé d'un processus inflammatoire peu actif, n'ayant dès le principe aucune tendance à l'ulcération et qui, s'il ne rétrocède pas, aboutit à l'endocardite chronique : il diffère essentiellement du processus de l'endocardite suraiguë, soit puerpérale, soit rhumatismale. Ce dernier consiste d'abord en une formation très-abondante de cellules embryonnaires; puis il se produit bientôt de petites ulcérations à la surface des- quelles vient se déposer la fibrine sous forme de granulations (1). Gomme on le voit, il n'y a peint ici de spécificité dans les lésions : la difiFérence existe seulement dans la marche du processus morbide. Les diverses endocardites ne sont probablement que des variétés eiiologiques et non des variétés analoniiques. Le siège de la lésion mérite d'être signalé. Dans presque tous les faits rapportés précédemment, c'est la valvule mitrale qui était ma- lade : sept fois sur sept dans mon premier mémoire, j'ai noté l'exis- tence d'une lésion mitrale; dans les huit cas qui font la base de ce nouveau travail, il en est six oti la lésion porte exclusivement sur la valvule mitrale, et deux autres, où elle affecte simultanément les deux orifices du cœur gauche (insuffisance aortique et mitrale). C'est donc l'orifice mitral qui subit le plus souvent les atteintes de l'état puer- péral. Ce caractère constitue un nouveau rapprochement entre l'endo- cardite puerpérale et l'endocardite rhumatismale, tout en établis- sant une différence entre les lésions de cet ordre et celles qui ré- sultent de la séniUté : ces dernières, comme on le sait, occupent dans le plus grand nombre des cas l'orifice aortique. Les symptômes qui traduisent au dehors les lésions de l'endo- cardite puerpérale subaiguë sont les suivants. Le début est à peine marqué; on observe seulement quelques palpitations, un peu d'anxiété précordiale qu'on est naturellement disposé à attribuer soit à la chlorose, soit à l'état de grossesse, soit enfin aux fatigues causées par l'allaitement. Voilà poui quoi, dans la majorité des cas, l'affection passe inaperçue. Aussi doit-on souvent interroger le cœur (1) Ce processus a été fort bien étudié par MM. Cornil etRanvier dans le mémoire qu'ils viennent de publier sous ce titre : Contributions à Vfiistologie normale et pathologique de la tunique interne des artères et de Cendocarde (Archives de physiologie normale et pathologique, t. II. 1869, p. 569). 141 pendant toute la durée de la période puerpérale, car il serait peut- être possible, en intervenant dès les premiers symptômes, d'arrêter la maladie, comme on le lait quelquefois dans les cas d'endocardite rhumatismale. Quelle différence avec l'endocardite suraiguë! Ici nous voyons au contraire les symptômes suivre une évolution rapide : bruit de souffle facile à reconnaître, souvent déjà intense au bout de quel- ques jours, palpitations violentes, anxiété, dyspnée, enfin des symptômes généraux proraptement graves ; en voilà bien assez pour montrer la différence qui sépare ces deux degrés de la même maladie. Une telle diversité dans les symptômes s'explique par une différence profonde dans les lésions : dans la forme subaiguë, le tra- vail morbide est lent et ne présente tout d'abord aucune tendance à l'ulcération. Dans la forme suraiguë, au contraire, le processus est bien autrement actif et aboutit rapidement à l'ulcération, .qui déverse dans le sang des substances étrangères : de là sur divers points des embolies qui donnent naissance à de nouveaux symp- tômes. Cette seconde variété de l'endocardite puerpérale est tou- jours mortelle, tandis que la subaiguë, si elle ne rétrocède pas, se transforme en une affection chronique de durée très-variable. Dans deux cas suivis d'autopsie, elle avait été de six ans (obs, II) et de dix ans (obs. VIII). Quant à la terminaison , elle est la même que celle des autres ma- ladies du cœur, qui finissent toujours par amener l'asystohe, si la mort n'a pas été déterminée par une complication quelconque ou par un accident imprévu. Après l'exposition des faits, la question qui se présente le plus naturellement à l'esprit est la suivante : Gomment agit l'état puer- péral? Par quel mécanisme parvient-il à développer ces endocar- dites si diverses par la forme, et qui doivent évidemment recon- naître une commune origine? C'est là un problème difficile, mais qui n'en est pas moins digne d'être étudié. Si les observations pré- cédentes ne suffisent pas pour le résoudre, elles permettent au moins d'approcher beaucoup de la vérité en circonscrivant le champ des hypothèses possibles. Il est certain que l'épuisement qu'entraîne si souvent à sa suite un allaitement prolongé ne peut être considéré comme la cause es- sentielle, efficiente de l'endocardite, puisque plusieurs de mes ma- 142 lades n'avaient allaité aucun de leurs enfants ou même n'avaient conduit à terme aucune de leurs grossesses. On ne saurait invoquer non plus d'une manière exclusive l'in- lluence de ces arthropathies que l'on voit quelquefois se développer soit pendant la grossesse, soit immédiatement après raccouche- ment, soit enfin au cours de l'allaitement, et dont on a fait une va- riété particulière de rhumatisme désignée sous le nom de rhuma- tisme puerpéral (1). En effet, dans aucun des cas rapportés plus haut il n'a existé de semblables accidents. Enfin ne pourrait-on pas invoquer les altérations qu éprouve le sang chez les femmes en état de gestation et sur lesquelles Simpson s'est appuyé pour établir la pathogénie de la forme ulcé- reuse de l'endocardite qu'il avait si bien décrite (2) ? Suivant cet observateur célèbre, le sang présente alors des caractères sembla- bles à ceux qu'on observe dans le rhumatisme articulaire aigu et la maladie de Bright : il y aurait un excès de fibrine avec diminu- tion des globules rouges, augmentation du sérum et accumulation de l'urée et de l'acide lactique. C'est là sans doute un rapproche- ment d'une grande importance, mais l'état de nos connaissances en hématologie ne permet guère d'émettre des assertions bien posi- tives à cet égard. Quoi qu'il en soit , ni V allaitement, ni le rhumatisme puerpéral, ni les altérations du sang ne suffisent pour expliquer l'endocardite des femmes grosses. Cette affection, de même que plusieurs autres maladies, reconnaît une cause d'un ordre plus élevé : c'est là une manière de voir que je me propose de développer dans une commu- nication ultérieure. II. Gomme je l'ai montré dans une première note, la connaissance (1) Cette variété de rhumatisme a été particulièrement étudiée dans ces derniers temps par MM. Lorain et Vaille. Lorain , Bulletins et mémoires de la Société médicale des hôpitaux , 2" série, t. III, p. 295 et 320. Vaille (Olidat), Du rhumatisme "puerpéral, thèse de doctorat, Paris, 1867. (2) Simpson (J.), Theobstetric, Memoirs and contributions, Edinburgh, 1856, vol. II, p. 69. 143 de la forme subaiguë, insidieuse de l'endocardite puerpérale peut servir à expliquer le mécanisme des hémiplégies dites puerpé- rales. Par le seul fait de la marche progressive de la maladie, des dépôts fibrineux, des végétations valvulaires peuvent donner nais- sance à des embolies cérébrales par suite de la gêne circulatoire que détermine l'utérus gravide. Cet accident est commun aux deux formes d'endocardite puerpérale, mais dans les cas chroniques, c'est une simple compUcation : dans l'endocardite suraiguë, au contraire, c'est pour ainsi dire un des symptômes de la maladie, tant les em- bolies viscérales sont fréquentes. De nouveaux exemples d'hémiplégie puerpérale ne se sont pas offerts à mon observation dans le cours de cette année;; mais dans deux des cas rapportés quelques pages plus haut (obs. I et IV), les malades présentaient une hémiplégie en même temps qu'une lésion valvulaire d'origine manifestement puerpérale. Or il est très-vrai- semblable que la paralysie, bien qu'elle fût survenue, dans l'un comme dans l'autre cas, en dehors de la gestation, reconnaissait pour unique cause une embolie cérébrale. L'hémiplégie qui survient durant la période puerpérale se pro- duit le plus souvent Tpav le mécanisme que j'ai indiqué; seulement l'affection cardiaque ne reconnaît pas toujours pour cause la gra- vidité. En effet, si déjà il existe avant la fécondation une ancienne maladie du cœur, la gêne circulatoire qui succède toujours à l'am- pliation de l'utérus, peut très-bien provoquer le détachement d'une végétation valvulaire et produire ainsi Toblitération d'une des bran- ches artérielles de la base du cerveau. C'est ce que j'ai pu observer chez deux jeunes femmes qui avaient eu autrefois une attaque de rhumatisme polyarticulaire aigu, compliquée dendocardite. L'hémi- plégie survint chez la première au sixième mois de la grossesse et au huitième chez la seconde. NOTE SUR UN CAS DE SCLÉROSE EN PLAQUES DISSÉMINÉES Lue à la Société de Biologie le 31 juillet et le 6 novembre 1869 PAR A. JOFFROY. Les cas de sclérose en plaques disséminées se multiplient rapide- ment. L'interprétation de ce fait tient, non pas probablement à une plus grande fréquence de la maladie, mais sans doute, à une con- naissance clinique beaucoup plus parfaite, qui rend presque tou- jours possible le diagnostic. Bien des questions sont cependant en- core à résoudre : c'est ce qui nous détermine à publier dans tous ses détails l'observation suivante. Nous attirerons en particulier l'attention du lecteur sur la distri- bution des plaques de sclérose dans le bulbe, et le rapport que nous croyons exister entre les troubles de la parole, ceux de la molilité de la langue et des lèvres, constituant une sorte de paralysie labio- glossique, symptomatique, et la présence de plaques de sclérose envahissant le quatrième ventricule et englobant les noyaux de l'hypoglosse et du facial> dont les éléments essentiels (cellules ner- veuses), présentent des modifications évidentes dans leur structure. MËM. 1869. 10 146 SCLÉROSE EN" PLAQUES A FORME CÉRÉBRO-SPINALE. — ATTAQUES APOPLECTI- FORMES. — ABSENCE DE NYSTAGMUS. - — TREMBLEMENT DE LA TÊTE TRÈS- PEU MARQUÉ. TROUBLES CONSIDÉRABLES DE LA PRONONCIATION. TREM- BLEMENT CHORÉIFORME DES MEMBRES SUPÉRIEURS. — DOULEURS SPÉCIALES DANS LES JOINTURES. PARALYSIE ET CONTRACTURE DES MEMBRES INFÉ- RIEURS. — PLAQUES DE SCLÉROSE DISSÉMINÉES A LA SURFACE DES VENTRI- CULES ET DANS l'épaisseur DE LA SUBSTANCE BLANCHE CÉRÉBRALE ET CÉRÉ- BELLEUSE. PLAQUES ÉTENDUES ET NOMBREUSES SUR LA PROTUBÉRANCE, LE BULBE ET LA MOELLE. — PLAQUES DE SCLÉROSE SUR LES RACINES DES NERFS, N (Julie) est entrée à la Salpêtrière le 7 octobre 1868, âgée de 38 ans. Ses parents, ses frères et sœurs, au nombre de huit, n'ont jamais présenté de symptômes pouvant être rattachés à une affection ner- veuse. Il n'y a rien à noter dans ses antécédents, si ce n'est qu'ayant passé cinq ans dans une famille comme cuisinière, elle habita, pendant les deux dernières années, une chambre humide. Elle sortit de cette mai- son à l'âge de 25 ans pour exercer la profession de modiste^ Peu de temps après, elle eut un enfant qui est mort de la rougeole. En 1858, elle fut atteinte du choléra, et à la suite de cette maladie, elle conserva dans les jambes, une faiblesse qui ne disparut jamais. Quelques mois plus tard, elle eut une seconde grossesse qui se termina par une fau^se couche. Enfin, peu de temps après, elle eut, dit-elle, la fièvre typhoïde. A partir de ce moment, la faiblesse des jambes fait des progrès, d'une façon lente mais continue, à tel point que bientôt elle est obligée de se servir d'une canne. La malade raconte qu'elle n'avait pas alors de tremblement continuel, mais que parfois, lorsqu'elle voulait saisir un objet, il lui arrivait d'avoir dans les membres supérieurs un tremblement passager, qui disparais- sait dès qu'elle cessait d'agir. C'est vers cette époque (N avait environ 30 ans) qu'elle eut, à peu d'intervalle, deux attaques caractérisées par une faiblesse bien plus grande des membres inférieurs, par une augmentation considérable dans le tremblement des membres supérieurs et par un embarras très- notable de la parole. Ces deux « faiblesses » ne se sont accompagnées, dit la malade, ni de perte de connaissance ni d'élourdissement. Mais elle fut obligée, après chacune de ces attaques, de garder le lit un jour ou deux. Vers l'âge de 32 ans, la malade se fit mettre, d'après les conseils d'un médeoa), deux cautères à la région lombaire. C'est à ce moment 147 qu'apparurent des douleurs en ceinture, dont elle no peut jréciser la durée. Elles auraient persisté jusqu'à la suppression des cautères. La faiblesse dans les jambes faisant toujours des progrès, elle se fit électriser. Elle se rendait pour cela chez un médecin ; mais pour y aller il lui fallait l'aide d'une personne. Pendant les quatre dernières années qu'elle passa chez elle sans sor- tir, elle fut obligée d'avoir une femme pour la servir. Le tremblement dans les membres supérieurs l'empêchait, en effet, de se livrer aux soins de son ménage. Elle ne pouvait toucher à la vaisselle, non pas qu'elle cassât beaucoup, mais elle renversait, à cause de son tremble- ment, les liquides contyenus dans un verre, dans une tasse, etc. Cinq ans avant son entrée à la Salpêtrière, elle fut prise de douleurs dans le pli du coude gauche. Ces douleurs se sont montrées depuis dans les pieds et dans l'épaule droite, où elles durent encore, s'accompa- gnant d'une sensation de chaleur, et revenant de jour en jour d'une façon subite. Depuis son entrée à la Salpèlrière (octobre 1868) jusqu'au mois de janvier 1869, la malade est resiée sensiblement dans le même état. Elle était obligée de garder le lit. A l'état de repos, elle n'avait pas le moindre tremblement dans aucune partie du corps. Lorsqu'on l'asseyait sur son lit et qu'on lui faisait mouvoir la tête, on ne remarquait non plus ni tremblement ni mouvements saccadés. L'examen des yeux, maintes fois répété dans ces conditions, n'a jamais permis de voir se produire du nystagmus. Si on lui faisait tirer la langue, on n'observait pas de tremblement, mais on remarquait une grande lenteur dans les mouvements, qui étaient très-limités. Et si alors on la faisait parler, on était frappé de la façon dont elle traînait sur les mots. En même temps elle scandait les syllabes. Ces deux derniers symptômes existaient à un degré très-exceptionnel. Du côté des membres supérieurs, on n'obser- vait pas de tremblement proprement dit, lorsqu'elle faisait un mouve- ment pour saisir un objet, par exemple pour prendre un verre et le porter à sa bouche, mais cependant on pouvait remarquer quelque chose de brusque et d'un peu irrégulier, rappelant ce qui s'observe tout à fait au début de la chorée. Cet ordre de symptômes n'était d'ailleurs que fort peu développé du côté des membres suj)érieurs, et pour s'apercevoir de ce signe peu marqué, il fallait y fixer tout spécia- lement son attention et même souvent faire recommencer plusieurs fois l'épreuve à la malade. On notait, en outre, dans les membres supé- rieurs, de la lenteur dans les mouvements, sans affaiblissement muscu- laire appréciable. Quant aux membres inférieurs, ils étaient étendus, complètement paralysés, la malade ne pouvant produire que quelques mouvements à peine perceptibles de rextrémité des orteils. On obser- 148 vait aussi dans ces derniers quelques mouvements réflexes. Il existait, en outre, dans les membres inférieurs, une rigidité facile à apprécier, quoique peu considérable, mais qui ne se montrait que d'une manière passaj^ère. La sensibilité était intacte aux membres supérieurs et infé- rieurs. Depuis quelque temps, la malade gâtait, tout en conservant la conscience de la sortie des matières qu'elle ne pouvait retenir. Il n'y avait aucun trouble de la mémoire, ni de l'intelligence. Cependant N... commençait à s'inquiéter de lissue de sa maladie, et pleurait très-faci- lement. Le 4 janvier 1869, à la suite de quelques contrariétés légères, la malade fut prise d'une attaque apoplectiforme. Le matin, vers sept heures, couchée dans son lit, elle parlait à ses voisines comme à l'ordi- naire. Vers dix heures, on s'aperçut qu'il était survenu quelque chan- gement dans son état. Elle appela l'infirmière par son nom, d'une voix affable. Puis au bout de quelques secondes, il lui fut impossible de parler. Elle tomba dans une sorte de coma, dont cependant on pouvait la tirer en l'iigilant fortement. Elle entendait alors, et comprenait bien ce qu'on lui disait, mais elle était dans l'impossibilité de parler, malgré les efforts et les mouvements des lèvres qu'elle faisait pour cela. Elle avait, en un mot, delà mussilation. Elle ne pouvait, ni avaler les liquides mis dans sa bouche avec une cuiller, ni amener la pointe de sa langue au delà de ses lèvres, ni soulever ses bras au-dessus de son lit, mais elle pouvait leur imprimer quelques mouvements de glissements peu éner- giques. Les deux membres inférieurs, légèrement fléchis, étaient dans la rigidité. Depuis la veille au soir, elle avait une diarrhée abondante et fétide qu'elle laissait continuellement partir sous elle. On n'obser- vait, quant à l'intensité des symptômes, rien de plus marqué à droite qu'à gauche. A une heure, le pouls était à 120, la température rectale à 40" 3/10. Après avoir passé dans cet état toute la journée du 4, elle était revenue le lendemain matin à son état ordinaire, et la tempéra- ture marquait un chiffre sensiblement normal. A partir du mois de février, la malade fut prise de plus en plus fréquemment d'accès de rigidité dans les membres inférieurs. Tantôt, et le plus généralement, ils étaient plus ou moins fléchis, la cuisse se rapprochant de l'abdomen, et la jambe se fléchissant sur la cuisse. Parfois cette flexion était portée au point de mettre au contact les fesses et les talons. D'autres fois, la rigidité existait sans flexion bien considérable; mais en tous cas, elle s'accompagnait de douleurs suraiguës, arrachant des cris à la malade. Ces accès très-fréquents et très-longs ne lui laissaient que quelques rares moments de repos, pen- dant lesquels les membres inférieurs devenaient flasques et indo- lents. 149 Vers la fin de sa maladie, le 20 juillet, N. . . . était dans l'état suivant : il n'existe pas de tremblementde la tête, mais une observation très-atten- tive permet de remarquer quelques mouvements un peu brusques. Pas de nystagmus. Depuis plusieurs semaines, la pupille gauche est moitié moins grande que la droite. L'examen du fond de l'œil à l'oph- thalmoscope ne montre aucune altération. Troubles considérables de la parole, comme il a déjà été noté, avec affaiblissement de la voix. Du cûlé, des membres supérieurs, il existe actuellement un tremblement cho- réiforme, ne se manifestant qu'au moment de l'action. Ainsi, plaçant un verre sur une table, à proximité de la malade, et lui demandant de le prendre et de le porter à ses lèvres, on la voit exécuter ce mou- vement très-lentement, avec des déviations assez nombreuses, qui n'em- pêchent pas l'accomplissement de l'acte, mais rappellent ce qui s'ob- serve au début de la chorée. Si l'on fait répéter l'épreuve à la malade plus rapidement, on a alors sous les yeux des mouvements choréifor- mes, bien caractérisés. En somme, cet ordre de symptôme se ratta- chant aux troubles de la motilité dans les membres supérieurs, et qui n'existait qu'à peine au mois de janvier 1869, sans être considérable au mois de juillet, a cependant pris assez de développement pour être très-facilement observé. Aux membres inférieurs, la rigidité avec flexion et douleur est devenue permanente depuis deux mois, et sou- vent la malade a des accès, caractérisés par un redoublement dans l'énergie de la flexion et de la roideur. On ne peut étendre les mem- bres par la force, et toute tentative est très-douloureuse. La sensibilité est intacte aux membres supérieurs et aux membres inférieurs. Il n'y a pas d'escharre aux fesses, mais la peau est généralement rouge au ni- veau du sacrum et des grands trochanters, ce qui rend nécessaires des changements fréquents dans la position de la malade. Elle continue à gâter, en conservant le sentiment du besoin de la défécation et la con- science de la sortie des matières. La malade s'affaiblit très-rapidement. Depuis quelque temps déjà, elle présente des signes locaux de tubercu= lisation pulmonaire. Le 26 juillet, des ulcérations se faisaient au sacrum, et du muguet couvrait presque toute la langue. Cet état de faiblesse devint extrême, et la mort arriva le 29 juillet, à cinq heures du soir. Jusqu'au dernier moment la respiration a été calme. Le pouls était toujours fréquent et faible. Enfin il faut noter, que la rigidité des mem- bres inférieurs, arrivée à un haut degré, a cédé partiellement dans les derniers jours. Néanmoins la cuisse était encore sensiblement fléchie sur l'abdomen, et la flexion de la jambe sur la cuisse allait presque jusqu'à l'angle droit. 150 Pendant les vingt-quatre heures qui âesont écoulées entre la mort et l'autopsie, la rigidité cadavérique a été l'objet d'un examen très-at- tentif dont voici le résultat : A huit heures du soir, c'est-à-dire trois heures après la mort, la ri- gidité cadavérique était complète dans tous les membres. Dans les membres supérieurs, il ne s'est pas produit, depuis lors, de modification jusqu'au moment de l'autopsie; la rigidité existait encore complète à ce moments Dans les membres inférieurs, les choses se sont passées autrement. Complète trois heures après la mort (huit heures du soir), la rigidité présente déjà une légère diminution cinq heures et demie après la mort (dix heures et demie du soir). La diminution dans l'intensité'de la rigidité cadavérique est beaucoup plus notable huit heures après la mort (une heure du matin). Elle est encore moins forte, quoique faci- lement appréciable, dix-sept heures après la mort (dix heures du matin), et elle a presque totalement disparu au moment de l'autopsie, vingt-quatre heures après la mort. A l'autopsie, nous n'avons rien de particulier à signaler dans les vis- cères Ihoraco-abdominaux, sauf des lésions profondes de pneumonie caséeuse avec cavernes, et de tuberculisation des deux poumons. Il n'y a rien à noter pour l'état des méninges, soit cérébrales, soit s pinales. Le cerveau ne présente rien de particulier à la surface des circonvo- lutions, non plus que le cervelet. La protubérance, au contraire, présente, ainsi que les pédoncules cé- rébraux, quelques taches grises, superficielles, irrégulières et peu étendues. Le quatrième ventricule présente cette même teinte grise d'une fa- çon presque générale. A peine remarque-t-on quelques petits îlots pré- sentant Taspect ordinaire, et n'étant pas envahis par le travail de sclé- rose. Les corps rectiformes présentent quelques taches peu étendues à leur surface. L'olive droite est presque totalement dégénérée. On vient d'examiner l'encéphale à sa surface. Si maintenant on ouvre le cerveau, on voit dans les ventricules, à droite et à gauche, des ta- ches larges, irrégulières, recouvrant la plus grande partie de la surface des ventricules. Faisant alors des coupes transversales des hémisphè- res cérébraux, on trouve que ces taches correspondent à des points indurés, s'enfonçant plus ou moins irrégulièrement dans l'épaisseur de la substance cérébrale. Au milieu du centre ovale de Vieussens, on trouve des plaques isolées qui se sont développées dans la substance 151 blanche. Et enfin, tant dans le corps strié qu'au voisinage des circon- volutions, on voit des plaques de sclérose qui s'étendent dans la pro- fondeur du tissu de la substance grise. Des coupes faites dans lesiobes cérébelleux montrent la même dis- position. Un certain nombre de taches irrégulières, à bords nets, de dimensions variables, se trouvent disséminées sur une coupe transver- sale. En particulier, le corps olivaire du côté droit est envahi par la sclérose. Au niveau du bulbe et de la protubérance, les coupes transversales font voir que la dégénérescence grise qui a envahi à peu près entière- ment la surface du quatrième ventricule, correspond à des foyers pro- fonds, qui, pour la protubérance, vont jusqu'à la traverser de part en part. Dans le bulbe, ces taches s'enfoncent également à une certaine profondeur, et l'on peut apprécier, rien que par l'examen à l'œil nu, que les noyaux d'origine des nerfs qui partent du voisinage du quatrième ventricule sont envahis probablement dans la totalité de leur étendue. Dans la moelle, des taches nombreuses, irrégulières, de dimensions variables, à contours nets, sont distribuées irrégulièrement, tant sur la face antérieure que sur la face postérieure. Une description minu- tieuse de la situation des points altérés et de leur étendue serait beau- coup trop longue; mais on peut dire qu'il serait difficile de faire une seule coupe sur laquelle on ne découvre pas quelques points malades. Quelques coupes, en particulier, sont sclérosées dans presque toute leur surface. On en peut citer deux plus spécialement: l'une située au niveau de la cinquième dorsale, dans laquelle on ne distingue plus de tissu sain que dans le cordon antéro-latéral gauche ; l'autre, au niveau de la onzième dorsale, présente la même disposition eu sens inverse, c'est-à-dire que la petite surface restée saine fait partie du cordon an- téro-latéral droit. Enfin, on peut ajouter que, d'une manière générale, les plaques de sclérose sont beaucoup plus nombreuses et plus étendues, et corres- pondent à des foyers plus profonds dans la région lombaire et dorsale inférieure que dans la portion cervicale de la moelle. Outre ces plaques situées sur la moelle et sur l'encéphale, on en voyait manifestement deux, distinctes, isolées, situées, lunesur la ra- cine antérieure droite, au niveau de la première paire dorsale, et l'autre, sur la racine antérieure gauche au niveau de la troisième paire dorsale. Examen microscopique. — Les recherches histologiques ont été faites sur la moelle et le bulbe durcis dans l'acide chromique, et le cerveau conservé dans l'alcool. A. Êncépfta/e.— Des coupes, faites au niveau deplaquessituéesimmé- 152 diatement au-dessous de la couche de substance i^rise, montraient cette dernière intacte, tandis que la'substance blanclie présentait une plaque de sclérose caractérisée à son centre par une production anor- male et très-abondante de tissu conjonctif très-finement fibrillaire, au milieu des fibres duquel on distinguait très-nettement des cylindres d'axe l'crsistant. Dans ce tissu morbide, les vaisseaux avaient des pa- rois fort épaissies, et. dans toute l'étendue du tissu malade il existait en grand nombre, des corpuscules amyloïdes. On passait insensiblement du tissu malade au tissu sain. B Bulbe. — Envisagées d'une manière générale, les lésions du bulbe consistaient en plaques de sclérose qui, sur les pièces colorées par le carmin, se présentaient à l'œil nu, sous l'aspect de taches foncées uni- formément rouges. A un faible grossissement, ces taches présentaient presque dans tous les points de leur circonférence, un contour net que l'on aurait pu limiter par une ligne. A un grossissement beaucoup plus fort, l'étude des bords des plaques de sclérose, démontrait que leur limite était moins précise qu'elle ne semblait tout à l'heure, et que la plaque de sclérose était en réalité en- vironnée par une zone, tantôt très-étroite, d'autres fois s'étendant très- loin, dans laquelle on retrouvait à tous les degrés les altérations carac- térisant la sclérose trabéculaire, c'est-à-dire l'épaississement des tra- bécules, avec l'amaigrissement des tubes nerveux comprimés, cette lésion des tubes nerveux étant d'autant plus accusée, que la sclérose était elle-même plus considérable. Étudiées au point de vue de leur siège précis, les altérations du bulbe présentaient dans ce cas un intérêt tout spécial. On a vu, en effet, qu'examiné à l'œil nu, le quatrième ventricule pré- sentait une teinte grise particulière, caractéristique de la transforma- tion scléreuse, et s'étendantà presque toute l'étendue de sa superficie. Or, on sait que c'est là que se trouvent placés très-superficiellement les noyaux d'origine de la plupart des nerfs crâniens. Pour peu que la lé- sion, presque générale à la surface du quatrième ventricule, ait pé- nétré dans l'épaisseur du bulbe, ceux-ci devaient se trouver plus ou moins profondément atteints. C'est ce que devaient apprendre des coupes faites dans cette région. Par ce mode d'examen, on voit que les plaques de sclérose pénè- trent assez profondément et que les noyaux d'origine des nerfs se trou- vent presque complètement envahis par la sclérose. Les noyaux de l'hypoglosse en particulier, tant à droite qu'à gauche, sont atteints dans toute leur hauteur. De plus, la lésion s'avance à droite hors du noyau de l'hypoglosse, dans h profondeur du bulbe, et 153 enveloppe ainsi dans une certaine étendue les racines nerveuses du nerf hypoglosse, dans une partie de l'espace qui s'étend entre le noyau d'origine de ce nerf et l'olive du même côté. En s'éloignant de la ligne médiane, l'altération rencontre les noyaux du facial et du pneumo-gaslrique; mais ceux-ci sont moins profondé- ment dégénérés que les précédents. A la portion supérieure du bulbe, on trouve que sur les coupes les plus altérées, les noyaux de l'auditif sont compris dans la même plaque de sclérose qui a atteint les noyaux précédents. L'olivedroite est, dans une partie de sahauleur, envahie par une plaque de sclérose. Autour de l'olive gauche il existe bien des lésions, mais elles sont à leur début, ne présentent pas de foyers de localisation, et n'ont pas encore amené d'altération profonde dans la structure des cel- lules et des tubes nerveux. Dans le bulbe, les cellules nerveuses qui se trouvent au milieu des plaques de sclérose ont subi une altération particulière désignée par M. Charcot sous le nom de dégénération jaune, et qui ne diffère pas de celle que nous avons nous-même rencontrée et décrite dans l'examen do la moelle d'un enfant mort dix-huit mois après une fracture de la colonne vertébrale (1). L'altération des cellules est, du reste, celle que nous allons trouver dans la moelle ; seulement ici elle est un peu moins accusée. C, Moelle. — On voyait à l'œil nu, dans la moelle, que les plaques de sclérose étaient limitées par un contour bien net, du moins pour leur portion siégeant dans la substance blanche. A l'examen microscopique (fait sur des coupes transversales et lon- gitudinales), on trouve que sur les préparations colorées par le carmin, les points les plus altérés ont l'aspect d'une tache rouge foncé, consti- tuée par un tissu à fibres, mais surtout à noyaux très-abondants, au milieu desquels persistent encore des cylindres d'axe peu nombreux, du moins en apparence. Ces derniers, en effet, deviennent d'autant plus difficiles à voir, que le travail de sclérose est plus avancé, de sorte qu'il ne faudrait pas conclure à la disparition d'un certain nombre d'entre eux, d'après ce seul mode d'examen. Dans la moelle, plus encore que dans le bulbe, ces foyers de sclérose sont entourés par une zone très-irrégulière de sclérose trabéculaire. Certaines plaques sont uniquement composées par un petit foyer à contours définis, dans lequel les trabécules se sont épaissies entre les tubes nerveux qui, pour la plupart, ont conservé presque tous leurs caractères normaux. (1) In Archives de physiologie, 1868, p. 740. L I e R A R y; ::o[i '^4- ^-T^- 154 Il résulterait do celte description, que les points de sclérose les plus anciens , c'est-à-dire ceux qui apparaissent sous forme d'une plaque rouge uniforme, ne seraient que de la sclérose Lrabéculaire à un degré très-avancé de développement, et ayant amené la résorption complète de la myéline des tubes nerveux. D'un autre côté, l'observation dé- montre, que dans les plaques de sclérose, c'est le centre qui présente cette transformation scléreuse de la manière la plus accusée. On est peut-être en droit de conclure, d'après ce fait, quune plaque de sclérose une fois formée, s'agrandit par sa périphérie. Dans la substance grise de la moelle, des plaques de sclérose ont été examinées spécialement au niveau des cornes antérieures. La substance grise altérée était constituée par un nombre considérable de noyaux formant le fond de la préparation. Les cylindres d'axe avaient persisté et se voyaient très-nettement. Cependant les cellules nerveuses, com- prises dans la plaque de sclérose, étaient presque toutes altérées à un degré fort avancé. Leurs prolongements avaient disparu ou étaient très- courts. Elles présentaient toutes, un amas considérable de matière pig- mentaire pouvant aller jusqu'à cacher le noyau de la cellule. Un certain nombre de ces cellules étaient manifestement atrophiées, quelques-unes se trouvaient réduites à un amas de pigment et à leur noyau, le proto- plasma semblant s'être résorbé. Peut-être quelques cellules avaient-elles entièrement disparu. Cela devient fort probable quand on songe que quelques-unes d'entre elles ne sont plus représentées que par un petit amas irrégulier de pigment et le noyau central. Mais, en tout cas, il est certain que, saines ou altérées, le plus grand nombre de cellules a per- sisté. Dans tous les points malades, les vaisseaux ont toujours présenté un épaississement notable de leurs parois. On ne rencontre pas dans les préparations du bulbe et de la moelle les corps amyloïdes signalés dans les plaques de l'encéphale. Mais il est bon d'observer à ce sujet, que l'encéphale n'a pas été, comme le reste des centres nerveux, conservé dans l'acide chromique, qui, comme on le sait, fait parfois disparaître ces éléments pathologiques. La même remarque s'applique aux accumulations de granulations grais- seuses et de corps granuleux que l'on a décrits, à l'état frais, dans la gaîne périvasculaire. Après avoir donné les détails de cette observation, nous désirons revenir sur plusieurs points. Chez Julie N..., les premiers symptômes pouvant être rattachés à la maladie se sont montrés en 1858. Atteinte du choléra à cette épo- 155 que (c'est-à-dire onze ans avant sa mort), elle conserva depuis lors une faiblesse qui ne disparut jamais. La malade raconte que peu de temps après, elle avait parfois, dans les membres supérieurs, un tremblement temporaire qui se mani- festait lorsqu'elle voulait saisir un objet et qui disparaissait dès qu'elle cessait d'agir. Plus tard, ce tremblement des membres su- périeurs augmenta, au point qu'il nécessita à la malade l'aide d'une femme de ménage pendant quatre années. Cependant, au mois de janvier 1869, un examen très-minutieux permet à peine de recon- naître dans les membres supérieurs un peu d'irrégularité dans les mouvements. Il s'était donc produit là une rémission, et elle était antérieure à l'entrée de la malade à la Salpêtrière (octobre 1868). Quelques-mois plus tard, le tremblement redevint manifeste, sans être toutefois considérable. Une semblable rémission s'est produite dans un certain nombre des cas que l'on connaît, et sur vingt observations qui forment la base d'un excellent travail de M. le docteur Guérard (1^ ce phé- nomène se trouve signalé dans six observations; mais comme le fait remarquer l'auteur, c'est surtout au début de l'atfection qu'on remarque une semblable rémission, qu'elle soit ou non complète. On peut rapprocher cette disparition du tremblement dans les membres supérieurs, de la disparition des symptômes (ce qui con- stitue la guérison) que l'on observe dans certaines paraplégies. Nous faisons allusion, en ce moment, à un fait que nous avons observé à la Salpêtrière, dans le service de notre maître M. Charcot, qui avait déjà lui-même, -vu plusieurs cas semblables. Chez une malade at- teinte de mal de Pott scrofuleux, et complètement paraplégique, la paralysie a disparu entièrement, au bout de quelques mois, à la suite d'un traitement consistant dans la cautérisation au fer rouge faite au niveau de la gibbosité et plusieurs fois répétée. A l'autopsie de malades ainsi guéris et mourant d'une autre affection, M. Charcot a pu constaterdans la moelle, les lésions bien connues qui se produi- sent quand elle est comprimée. Cette persistance des lésions aux- quelles on a coutume de rapporter la paralysie, permet de faire un rapprochement entre ces cas de guérison de paraplégie et les cas (1) Essai sur la sclérose en plaques dissémines. Thèse de Paris, • 1869. 156 de sclérose en plaques dans lesquels le tremblement disparaît pen- dant un temps plus ou moins long, sans que vraisemblablement les plaques de sclérose aient diminué d'étendue. On ignore encore quellessontlesmodificationsqui se produisent dans ces circonstaTices. Outre celte rémission, le tremblement présente ici des particula- rités importantes à signaler. Le nystagmus, pendant toute la durée de la maladie, a complètement fait défaut. Le tremblement de la tête ne se manifestait que par une irrégularité, une brusquerie des mou- vaments à peine appréciable, et qui n'est survenue que dans les derniers mois. Pour ce qui est du nystagmus, dont la physiologie pathologique est encore à faire, on peut remarquer que son absence complète est assez singulière, d'apiès les idées que l'on se fait généralement sur son mode de production, si l'on se reporte à la description des lé- sions considéi'ablcs qui occupaient le bulbe, la protubérance et les pédoncules cérébraux. La môme remarque s'applique au tremblement de la tête, dont le peu d'intensité et lapparilion si tardive ne sont guère en rapport avec les altérations si étendues que nous avons trouvées dans toute la partie supérieure des centres nerveux. Après ces quelques réflexions sur le tremblement et la rémission particulière qu'il a présentée chez cette malade, les trois attaques apoplecliformes qui sont consignées dans l'observation doivent être signalées avec cette remarque que, dans l'une de ces attaques très- nettement caractérisée, la température, observée peu de temps après le début, a montré une élévation notable sur le chiffre de la tempé- rature UQrmale. A ce point de vue, on voit la différence qui existe entre l'attaque d'apoplexie vraie (1), qui est caractérisée par un (1) Nous désignons ici par attaque d'apoplexie vraie celle qui est symplomatique d'un foyer dliémorrhagie ou de ramollissement en voio de formation, et sous la dénomination ù' attaques apoplecliformes nous comprenons celles qui, présentant une grande analogie avec les pre- mières, se produisent dans des conditions différentes, sans qu'on ail pu jusqu'à présent les rattachera la production d'une lésion déterminée. Ces attaques apoplecliformes s'observent fréquemment dans les eus d'hémiplégie anciennne, sans qu'il se forme aucun foyer nouveau. On les a notées également, dans un certain nombre des observations de sclérose en plaques, etc. 157 abaissement de la température au début, et l'attaque apoplectiforme de la sclérose en plaques. Ainsi se trouve vérifiée, pour la sclérose en plaques disséminées, la loi portée par M. Charcot, que dans l'at- taque d'apoplexie il y a abaissement de température, et que dans l'attaque apoplectiforme, il y a en général une élévation plus ou moins considérable, mais jamais d'abaissement au-dessous du taux normal. La distribution des lésions dans le bulbe donne aussi lieu à plu- sieurs considérations. En premier lieu on peut faire observer que les plaques do sclérose qui, déprime abord, semblent être dispersées sans ordre, ont des points de prédilection où l'on peut être sûr de les rencontrer. On ne saurait faire une autopsie de sclérose en plaques à forme cérébrale, sans trouver des plaques fort étendues à la surface des ventricules latéraux. Le quatrième ventricule est également lésé dans tous ces cas. Cette prédisposition à la sclérose de certains points du système nerveux, et qui tient sans doute à la plus grande vascularisatiou de ces points, est importante à signaler, parce que ces localisations, toujours les mêmes, donnant lieu aux mêmes symptômes, il s'en- suit que l'affection suit une marche clinique plus uniforme, ou tout au moins qu'il est des symptômes dont l'existence devient presque nécessaire pour porter le diagnostic. L'altération du quatrième ven- tricule ne peut, en effet, s'étendre en profondeur, sans atteindre les noyaux d'origine des nerfs qui se trouvent placés, eu ce point, très- superficiellement. Ces noyaux ?ont ceux de l'hypoglosse, du facial et du pneumo-gastrique, et c'est sans doute à leur altération, que l'on doit rattacher certains symptômes. C'est ainsi que l'on pourrait ex- pliquer les troubles de la parole par l'envahissement du noyau de l'hypoglosse par la sclérose. Peut-être aussi est-il permis de rappro- cher l'accélération et l'affaiblissement du pouls à la même lésion du noyau du pneumo-gastrique. Les détails cliniques et aoatomo-patho- logiques du fait que nous venons de rapporter viennent à l'appui de cette interprétation (1). i (1) Tout en proposant celte explication, nous ferons remarquer que raccélération du pouls, dans la sclérose en plaques disséminées, pour- rail bien reconnaître la même cause que dans l'ataxie locomotrice. Or 158 On a pu remarquer, en lisaiil l'observatioa de N..., que parmi les symptômes les mieux caractérisés de sa maladie, les troubles de la parole étaient signalés tout particulièrement. Il n'a pas été observé de tremblement dans la langue, ni dans les lèvres, on a seulement noté la paresse des mouvements, moins étendus qu'à l'état normal, et la façon spéciale dont elle articulait les mots, caractérisée par la lenteur de la prononciation et la séparation de chaque syllabe. On retrouve dans cette courte énumération de symptômes les caractèren principaux de la paralysie de la langue et des lèvres. C'est ce qu'il importait de constater, afin de rendre plus frappante l'analogie qui existe entre les lésions trouvées dans ce cas et celles qui sem- blent, d'après plusieurs faits récents, caractériser la paralysie labio- glosso-laryngée (1). On voit en effet que, dans le bulbe, une plaque de sclérose a en- vahi les noyaux d'origine des nerfs qui se trouvent au-dessous de la surface du quatrième ventricule. Dans ces points, la névroglie est altérée, il s'est produit nue multiplication manifeste de ses éléments, et les parois des vaisseaux sont fort épaissies. Mais en même temps on voit que si les cellules nerveuses ont persisté, pas une seule ne se présente à l'œil de l'observateur avec ses caractères normaux. Presque toujours les prolongements ont disparu. Le plus souvent le nous ne pensons pas que, dans cette dernière affection, on puisse la placer dans une altération des noyaux d'origine des pneumo-gastri- ques, analogue, soit à celle que nous venons de décrire, soit à celle qui a été signalée dans la paralysie labio-glosso-laryngée. En tous cas, nous pouvons dire que semblable altération n'a pas été signalée jus- qu'à ce jour dans l'ataxie locomotrice. (1) Trois cas de paralysie labio-glosso-laryngée , à ma connais- sance, ont été étudiés dans ces derniers temps : le premier par MM. Charcol et Joffroy {in Archives de physiologie, 1869, pages 366-67); le deuxième par M. Charcot dans le même journal, 1870, page 247; le troisième par MM. Duchenne (de Boulogne) et Joffroy, qui sera publié incessamment. Dans ces trois cas, le noyau de l'hypoglosse était pro- fondément altéré, et la lésion consistait essentiellement dans Tatrophie et la disparition des cellules nerveuses. La même altération se retrou- vait également, quoique à un degré beaucoup moins considérable, dans les noyaux d'origine du facial et du pneumo-gastrique. 159 volume de la cellule a diminué, et dans l'épaisseur de la substance protoplasmatique, il s'est fait un dépôt anormal et considérable de granulations pigmentaires. Il existe donc, dans ce cas, une altération des cellules nerveuses des noyaux d'origine de l'hypoglosse, du facial et du pneumo-gas- trique. Ainsi l'analogie qui existait entre certains symptômes (trou- bles de la prononciation et de la motilité de la langue) observés dans ce cas de sclérose en plaques, et ceux qui sont le propre de la para- lysie labio-glosso-laryngée, cette analogie, disons-nous, persiste lorsqu'on vient à comparer les altérations anatomiques, puisque dans les deux affections on rencontre des modifications dans la struc- ture et dans le volume des cellules nerveuses du noyau de l'hypo- glosse et des noyaux voisins. D'après ce qu'on vient de lire, on comprend qu'une sorte de para- lysie labio-glossique doit généralement exister, à titre de symp- tômes, dans les cas de sclérose en plaques à forme cérébrale. 11 etit été intéressant d'examiner si cette lésion du noyau de l'hypo- glosse avait donné lieu à des altérations secondaires sur les troncs nerveux qui en partent, et sur les muscles qui reçoivent de là leur innervation. Nous ne pouvons qu'exprimer notre regret de ne l'a- voir pas fait. L'examen des nerfs hypoglosses aurait eu un intérêt tout particulier. On se rappelle qu'en effet, l'un de ces nerfs, dans l'épaisseur du bulbe, était compris, pendant une assez grande partie de son trajet intra-bulbaire, dans l'aire d'une plaque de sclérose, et se trouvait ainsi séparé de son noyau d'origine, tandis que rien de semblable n'existait du côté opposé. Le même motif, qui pourrait pousser à l'examen minutieux des muscles de la langue dans un cas semblable, devrait aussi faire étu- dier les muscles du tronc et des membres et leurs troncs nerveux. Il y avait en effet, dans le cas actuel, des cellules nerveuses altérées très-profondément dans les portions de la moelle où la substance grise était envahie par la sclérose, et même un certain nombre étaient fort atrophiées. Or, s'il est vrai que, dans certaines maladies nervoso-musculaires (atrophie musculaire progressive, paralysie spinale de lenfence, paralysie labio-glosso-laryngée), la lésion pri- mitive frappant la cellule nerveuse, les autres altérations qui se pro- duisent sur les nerfs et les muscles ne soient que secondaires et sous la dépendance de l'altération de la cellule, on devait sans doute, 160 dans ce cas, trouver quelques lubes nerveux dégénérés et des fibreê musculaires altérées. De semblables altérations, frappant le système nerveux périphé- rique et les fibres musculaires, ne doivent, si toutefois elles exis- tent, se rencontrer que dans les cas de sclérose en plaques où cette altération des cellules s'est produite avec assez d'intensité. On doit remarquer en outre que, dans les affections nerveuses qui viennent d'être signalées, il existe une sorte de parallélisme entre les lésions nerveuses centrales (primitives) et les lésions pliériphériques des nerfs et des muscles (secondaires). Aussi dans un cas de sclérose en plaques, où l'on trouverait dans la moelle quelques cellules ner- veuses assez profondément altérées, mais peu nombreuses, et très- disséminées, on ne devrait pas s'attendre à trouver des muscles entiers en voie d'atrophie, ni des lésions bien considérables du côté des nerfs. Ces dernières ne devraient effectivement porter que sur quelques tubes nerveux et sur quelques faisceaux musculaires. Encore faudrait-il avoir soin de chercher ces altérations dans des points correspondant aux cellules malades, dans les muscles de la jambe par exemple, si les cellules nerveuses altérées siégeaient au renflement lombaire. Peut-être ne doit-on pas séparer des altérations périphériques possibles, dont il vient d'être question, les lésions profondes qui s'ob- servent dans les poumons de presque tous les malades qui succom- bent à l'affection dont il s'agit ici. On ne saurait croire, en effet, que le séjour au lit, seul, suffit pour expliquer ce fait. En particulier, on pourrait citer comme venant à rencontre d'une semblable façon de voir, ce que l'on observe dans beaucoup de cas de fracture de la colonne vertébrale, donnant lieu à une paraplégie complète sans amener rapidement la mort. Ces malades, confinés au lit, peuvent vivre pendant longtemps et mourir sans présenter aucune altération des poumons, pouvant être rattachée soit à la pneumonie caséeuse, soit au tubercule. Il devient donc nécessaire d'mvoquer, pour la production de ces altérations pulmonaires, une prédisposition spé- ciale. Chez des malades atteints de mal de Pott scrofuleux, cette prédisposition pourra être mise sur le compte de la constitution spéciale des sujets; mais chez les malades atteints de sclérose en plaques généralisées, et qui le plus souvent ne sont pas scrofuleux, on pourrait peut-être invoquer des troubles de nutrition qui exer- 161 ceraient leur action sur les poumons sous l'influence des lésions profondes de Taxe cérébro-spinal. Ainsi se trouveraient expliquées ces lésions viscérales que l'on rencontre à un degré d'intensité plus ou moins fort chez tous les malades qui succombent à une période avancée de la sclérose en plaques. Mais avant d'accepter une sem- blable théorie, il faudrait pouvoir rattacher la lésion pulmonaire à une altération localisée des centres nerveux. Il n'est peut-être pas sans intérêt de rappeler, en terminant cette note, que l'examen microscopique de la moelle, du bulbe et de l'en- céphale, conduit à rapprocher le travail morbide de la sclérose en plaques dans la substance blanche de celui qui se fait dans les cas de sclérose rubanée, primitive ou secondaire. Dans tous ces cas, il se produirait un épaississement des trabécules, doîi résulterait l'atrophie des tubes nerveux. Dans la sclérose en plaques, en par- ticulier, cette atrophie du tube nerveux peut aller jusqu'à la ré- sorption de la myéline dans toute l'étendue d'une plaque de sclé- rose ; mais on sait que la résorption complète de la myéline peut aussi bien s'observer dans la sclérose rubanée; seulement ce phé- nomène ne présente pas alors les localisations remarquables que l'on trouve dans la sclérose en plaques disséminées, et l'on ne voit pas, comme dans cette dernière affection, la myéline disparaître de tous les tubes nerveux situés en un point donné. Mais à part cette différence dans ie mode de distribution des tubes nerveux atro- phiés, le phénomène est le même, c'est-à-dire que le cybndre d'axe persiste toujours comme dernier vestige du tube disparu. MKM. ism. il DE LA DIOPTRO-ORGANO ET SOMATOSCOPIE Note lue à la Société de Biologie PAR LE Docteur B. MILLIOT. Parmi Ifts méthodes d'exploration des malades, il en est deux qui avec le temps seront, dans certains cas, d'une grande utilité : l'apto-organoscopie et la dioptro-organoscopie. La première, c'est- à-dire l'exploration de certains organes au moyen d'empreintes re- çues sur les parties non dilatables de vessies en caoutchouc et in- duites de matières emplastiques, a été l'objet d'une communication h l'Académie de médecine; je n'y reviendrai pas. Quant à la seconde, je me permets de l'exposer à la Société de biologie par la raison qu'elle pourra être aussi bien appliquée aux recherches physiologiques que pathologiques. Avant d'entrer en matière, j'observerai à la Société que l'exploration photoscopique peut être actuellement divisée en ca- toptrique (spéculum de l'utérus, de l'oreille, etc.)etdioptrique, et qu'il y a lieu d'établir une distinction entre les mots transparent et trans- lucide. Jusqu'à présent on applique, dans le langage ordinaire, in- différemment l'un ou l'autre de ces deux mots, soit aux corps en- tièrement diaphanes , ?oit à ceux qui laissent passer une partie seulement fie la lumière qu'ils rcç>ivent et ne laissent di^tingLIe^ îii leur couleur, ni l\:t;it oj leur suifa:e, ni leur aisli'ice, c"est-y- dire aux corp.s trunslacid's. Pour ma part, j aJo,jle:ai doréiiavaiit le mot transparent comme synonyme de diaphane {tLia-f^-^-i\:.) et lais- !Ô4 serai à celui de translucide ((/m-caço;) la signification inentionnée. Pour éclairer les animaux et le corps humain, je me suis servi de deux sources lumineuses intenses : la lumière électrique et la lu- mière oxy-hydrique. Pour avoir la première, j'ai fait coustruire des appareils électriques, à pile de Grove et de Bunzen, pareils à ceux de feu Middeldorpf, mais plus commodes et surtout plus portatifs. Pour avoir la seconde, je me suis adressé à la Société oxy-hydnque de Paris qui a bien voulu me prêter son bienveillant concours. L'appareil électro-dynamique portatif consiste en une boite en bois à deux compartiments; ces derniers contiennent des cavités carrées ou rondes en gutta, caoutchouc durci ou verre, et munies d'un couvercle qui sert à les fermer presque hermétiquement. Les couvercles possèdent des trous servant à l'introduclion des liquides excitateurs : l'acide nitrique à 40 pour 100 et la solution d'acide sul- furique contenant 6 pour 100 d'acide. Aux zincs et aux platines sont soudés des rubans étroits de cuivre ou d'argent aboutissant aux extrémités de l'appareil. Afin de préserver les couvercles et les cu- vettes de l'action délétère de l'acide nitrique, il faut ^ les induire d'une composition de bitume et de caoutchouc dissous dans de la benzine. L'appareil oxy-hydrique consiste en une lampe munie de deux petits conduits en cuivre qui sont reliés au, moyen de tubes en caoutchouc avec des sacs, également en caoutchouc, remplis d'hy- drogène et d'oxygène; au moyen des deux robinets de ces conduits en lâche les gaz et, une fois l'hydrogène allumé, on régularise leur marche dans l'intérieur de la lampe où se trouve un morceau de chaux ou de zircone, contre lequel viennent butter les deux gaz et qui devient incandescent. Les dioptro-organoscopes sont composés de doubles tubes en verre dont l'extérieur a une seule ouverture et l'intérieur une double. Dans le tube intérieur se trouve une spirale en platine qui vient s'adapter à deux fils de cuivre que soutiennent dans le tube des pe- tits morceaux d'ivoire, et qui aboutissent à un manche creux dans l'intérieur duquel on peut, au moyen d'un bouton placé extérieure- ment, fermer ou interrompre le courant électrique. Pour obtenir des dioptro-organoscopes à réflecteur ou dioptro-somatoscopes, c'est- à-dire des instruments à éclairage externe, par exemple de l'abdo- men, etc.. il suffit d'adapter aux instruments susmentionnés des ré- 165 flecteurs de différentes formes etdirueusions. Le dioplio-gastruscope est une longue tige en caoutchouc contenant deux fils de cuivre isolés et deux tubes minces en caoutchouc; les fils, ainsi que les tubes, sont plus longs que la tige, et se terminent d'un côté par une spirale en platine, de l'autre, elles communiquent avec les électro- des ; au bout de la tige, du côté de la spirale, s'adapte une vessie eu caoutchouc dans l'intérieur de laquelle viennent se loger la spirale et les bouts des tubes, également en caoutchouc, qui servent à y in- troduire l'air et à la gonfler. Après avoir introduit l'appareil au moyen d'un tube en verre ou d'une sonde œsophagienne dans l'es- tomac, on n'a qu'à gonfler la vessie et fermer le courant pour obte- nir la translucidité de la région épigastrique. Le même appareil, mais de plus petite dimension, peut être introduit dans la vessie uriuaire, et servir à éclairer la région bypogastrique. La chaleur dé- veloppée dans les dioptro-organoscopes peut être supportée par les animaux et l'homme, d'une manière générale, d'un quart à une mi- nute. Pour les explorations d'une plus longue durée, il faut recourir au refroidissement des dioptro-organoscopes, soit, comme l'a pro- posé M. Bruck, par des courants d'eau, soit par des courants d'air, en prenant la précaution d'interrompre, lors de la ventilation, le courant électrique. Après de longues recherches sur la dioptro-organoscopie et soma- toscopie, je suis arrivé à deux notions importantes, à savoir : 1° que tout le corps humain est translucide, et que sa translucidité est en raison directe de la lumière employée à l'éclairer; et en m'ex primant ainsi, je n'entends pas affirmer une proposition mathématique; et 2° que la lumière dioptrique est apte à fournir lïmage de l'état phy- siologique et pathologique de l'intérieur de certains organes, par exemple de l'esiomac, etc. J'ai dit que tout le corps humain est translucide, et si je n'ai pu jusqu'à présent rendre telles, à cause de leur épaisseur, certaines de ses parties, par exemple la poitrine, les cuisses, etc., c'est que la lumière dont j'ai disposé jusqu'ici a été in- suffisante pour les éclairer. Ainsi j'ai essayé en vain, au mois de juillet de l'année dernière, d'éclairer avec de la lumière du phare électrique d'Odessa, de la force de 380 lampes Garcel, qu'ont bien voulu mettre à ma disposition MM. Zaroudni etlllin, la poitrine d'un enfant maigre de 4 à 5 ans. Aussi j'ai dû, pour rendre translucide la cavité abdominale, l'amincir, pour ainsi dire, en introduisant dans 166 l'esfomac et la vessie urinaire des vessies en caoutchouc dila- table. Si après avoir introduit, soit dans l'intérieur de la cavité splaii- chnique du cadavre, soit dans celui des animaux ou de l'homme un dioptro-organoscope quelconque, on examine les parties éclairées, on voit qu'à côté de celles qui sont translucides, par exemple la paroi abdominale, il en est d'autres qui, en raison de leur épaisseur, par exemple la matrice, îe foie, etc., ne le sont pas et qui se pré- sentent comme corps opaques. Si dans cette même cavité se trouvent des corps étrangers opaques relativement aux téguments de l'abdo- men, ils se dessinent également. Ainsi les balles, les matières fé- cales dures, et les tumeurs laissent voir leur configuration, à la con- dition cependant que la lumière ne soit pas trop intense, car alors cette dernière pénètre jusque dans la partie des téguments qui se trouvent au-dessus de ces corps et ne les laissent pas voir; c'est ce qui avait fait dire à Dupuytren que, dans l'hydrocèle éclairée les rayons lumineux s'inclinent autour du testicule pour converger en- suite vers Tœil de l'observateur. Il n'entre pas dans mon programme d'exposer à la Société en dé- tail, dans cette communication déjà un peu longue, les résultats ob- tenus, au moyen de l'exploration dioptrique, sur les animaux et les malades. Je me bornerai à dire qu'on peut voir chez les chats et les chiens la position du foie, des corps étrangers introduits dans l'es- tomac, des reins flottants et des fœtus (chez les chattes). Chez les malades, les kystes et les tumeurs translucides laissent passer la lu- mière lorsqu'ils ne sont pas de trop grande dimension; chez cer- taines femmes, la configuration de l'utérus se dessine très-bien et ici je me fais un plaisir de citer le travail intitulé Diaplianoscopie, Karnow, 1868, de M. le docteur Lazarewitch, professeur à l'U- Diversité de Karnow, qui a appliqué sur une grande échelle l'ex- ploration dioptrique à l'étude des maladies de l'utérus. Je ne ferai éi;alempnt que mentionner le fait de la possibilité d'éclairer l'abdo- m'Mi des animaux sans l'introduction du dioptro-gastroscope : il suf- fit fiuur cela d'introduire dans l'estomac une vessie en caoutchouc, de la dilatiM", d'appliquer extérieurement contre la paroi abJomi- nale un puissant réfiecteur ou bien la lampe oxy-hydrique, et d'exa- miner le côté opposé au réflecteur ou à la lampe. J'ai dit Uue lu :_;:uère réfractée peut être employée pour l'examen 167 direct de eertaiius organes. Ea effet, si en même temps qu'on projette sur leurs parois externes une lumière assez intense on examine l'intérieur de l'estomac ou de la vessie urinaire en cire qui tous les deux sont translucides, on voit les ulcères et les corps étrangers, que jai fait simuler par M. Vasseur. Un dernier mot sur la question de priorité. Lorsque je fis ma pre- mière communication sur la splanchnoscopie par translucidité au Congrès international de Paris {Compte rendu du Congrès médical in- ternational de 1867. Jaccoud. Paris, 1868), je citais M. Fonssagrives {Éclairage artificiel des cavités du corps à Caide des tubes lumineux. Comptes rendus de l'Académie des sciences du 23 janvier 1860) et Bruck [le Siomatoscope. Breslau, 1865), comme ayant eu les premiers l'idée d'éclairer le corps humain par translucidité. Je dois dire cepen- dant que lorsque je fis, pour la première fois, mes recherches diop- triques, j'ignorais les travaux de ces deux auteurs. En 1863, j'étais alors chef de clinique à l'Université de Kiew, en procédant à l'exa- men laryngoscopique de quelques malades, je vis la région laryn- gienne devenir translucide, fait qui avait été déjà signalé en 1860 par le docteur Czermak (Der Kehlskopfspiegel und seine Verwerthung fur Physiologie und Medicin. Leipzig, 1860). Dès lors je songeai à éclairer le reste de l'organisme humain. J'entrepris des expériences, sur des lapins, qui restèrent infructueuses. Je vins en 1866 à Paris et ipe mis de nouveau à l'œuvre; je fis de nouvelles expériences sur des chiens, des chats et des cadavres, et communiquai les résultats de mes recherches au Congrès international de Paris. La même an- née, c'est-à-dire en 1867, mais après le Congrès, du moins je n'en ai eu connaissance qu'alors, M. Bruck publiait son nouvel ouvrage: Dus Urethroscop und Stomatoscop durcfi galvaniscfies GliMicht. Breslau, 1867. Depuis je continuai mes travaux et en fis part, le 1" février 1868, à la Société des médecins russes à Saint-Péters- bourg, et le 16 juillet de la même année, à la Société médicale cau- casienne à Tiflis. De son côté, M. Lazarewitch publiait presque simul- tanément sou travail mentionné, dans lequel il consigna les résultats de ses recherches dioplriques, principalement sur l'utérus. Ainsi, on le voit ici comme ailleurs, il est diflicile d'établir la question de priorité, et ce n'est pas sans raison que je disais en 1867 au Congrès international que lorsqu'une idée germe dans l'atmosphère du pro- grès, tout le monde la respire. Partis presque en même temps, mais 168 de points de vue différents, et guidés les uns par le hasard, moi par l'idée de pousser nos moyens d'exploration jusque dans l'intérieur de l'homme et d'y entrer résolument, nous avons abouti au même but. Toutefois, il faut bien le reconnaître, c'est M. Bruck qui fit le premier des tentatives sérieuses pour éclairer par translucidité l'or- ganisme humain. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA SCLEROSE DIFFUSE PÉRI-ÉPENDYMAIRE Mémoire communiqué à la Société de Biologie, dans sa séance du 7 août 1869, H. HALLOPEAU Interne des hôpitaux. DaQ3 la moelle, comme dans tous les organes, le tissu interstitiel peut s'enflammer chaque fois qu'il est soumis d'une façon persistante à l'action d'une cause irritante. Souvent l'irritation semble siéger primitivement dans les éléments nerveux et n'intéresser la névroglie que consécutivement (1) ; affectant alors la même distribution que ces éléments, elle se limite exactement, dans toute la hauteur de la moelle, tantôt à une partie des faisceaux blancs, tantôt à une partie de la substance grise : ainsi s'expliquent les scléroses posté- rieures, les scléroses primitives des cordons latéraux (2), les sclé- roses secondaires ascendantes ou descendantes (loi de de Tiirck) ; c'est également ainsi quïl faut comprendre sans doute la sclérose des cornes antérieures signalée par M. Hayem (3) dans l'atrophie (1) M. Yulpian a soutenu cette opinion dans les leçons qu'il a pro- fessées à la Faculté en 1868. (2)J. M. Charcot, Sclérose des cordons latéraux, etc.. Union médi- cale, 1865. (3) Hayem, I^ote sur un cas d'atropiiic musculaire progressive., .A.RCH. PE PHYSIOLOC, 1869. ter t>j u\9H 170 musculaire progressive. D autres fois rinflammation parait se propa- ger irrégulièreoient, de proclie en proclie, dans le tissu interstitiel ; la sclérose envahit alors indifféremment les diverses parties de la moelle; elle passe des cordons postérieurs dans les latéraux, de la substance blanche dans la substance grise, elle progresse d'avant en arrière aussi bien que de haut en bas et inversement; elle mérite, en un mot, le nom de diffuse. On peut distinguer, au point de vue anatomique, plusieurs varié- tés de sclérose diffuse (1) : tantôt l'on trouve un certain nombre de foyers isolés, disséminés dans toute l'étendue de l'axe cérébro-spi- nal : c'est la sclérose en plaques,/affection idiopalhique comparable par la netteté de ses caractères auatomiques et cliniques à l'ataxie locomotrice progressive (2); tantôt les lésions sont limitées à la pé- riphérie d'un foyer ou d'une tumeur; rarement l'altération porte également sur toute l'étendue de la trame interstitielle; elle affecte d'habitude plus spécialement telle ou telle partie de Torgane, et l'on peut distinguer à ce point de vue la sclérose annulaire consti- tuée par l'épaississementde la couche corticale (3), la sclérose par- tielle ou générale de la substance blanche (4), la sclérose de la substance grise, et enfin la sclérose péri-épendymaire, dans la- quelle les lésions portent principalement sur le tissu conuectif situé à la périphérie du canal central. L'étiologie et la pathogénie de la sclérose diffuse sont encore obscures; on sait cependant que cette affection peut se développer sous l'influence de causes très-diverses; on l'a observée dans l'al- (l)Dans son Traité des paraplégies (1864) et dans ses Leçons de clinique médicale (1866), M. Jaccoud a décrit surtout, sous le nom de sclérose diffuse, la variété dans laquelle les lésions sont limitées à un certain nombre de foyers isolés; je suis contraint, faute d'une autre expression, de donner ici à l'épilhète diffuse une signification un peu différente. (2) Voyez les travaux connus de MM. Jaccoud, Charcot, Vulpian, Or- denstein, Bourneville. (3) Vulpian, Sur un cas de sclérose annulaire. Auch. de physiol. (1869). (4) Frommann, Vnter sucli. ub. noiin. u. pathol. a:;at. d. Ri-ckk.n- MABKEs ([en. 1865). -- Hillau-et et Luys, G.\z. .mkh., 185^. 171 coolisme (1), dans la paralysie générale (2),; elle peut être provoquée par une méniugite chronique (3), par des tumeurs développées daus la moelle ou les méninges et particulièrement par des tubercules (faits de H. Liouville); d'autres fois elle a pour point de départ une sclérose fasciculée, primitive ou secondaire (sclérose annulaire dans des cas de dégénération secondaire (Hallopeau); propagation aux cordons latéraux, de scléroses fasciculées postérieures); assez fré- quemment enfin elle est idiopathique et paraît se développer sous l'influence de causes acidentelles. Si l'on fait abstraction de la variété connue sous le nom de sclé- rose eu plaques, on peut dire que la myélite diffuse a peu attiré jus- qu'ici l'attention des observateurs. En 1865, M. Bouchard l'a séparée des scléroses fasciculées (4) ; le remarquable travail de Frommann eu a fait connaître les lésions histologiques; MM. Magnan, Hayem (5) et Westphal l'ont bien étudiée chez les aliénés paralytiques; M. Du- chenne (de Boulogne) (6) nous parait en avoir décrit les principales formes cliniques sous le titre de paralysies générales spinales; mais ces divers travaux ne fournissent, malgré l'intérêt qu'ils pré- sentent, que des notions fort incomplètes sur cet état morbide ; le fait dont nous rapportons l'observation pourra peut-être jeter un cer- tain jour sur l'une de ses formes les plus remarquables, la sclérose péri-épendymaire. Observation (7), — La nommée Rosalie L. .. entre à l'infirmerie de la Salpêtrière, dans le service de M. Vulpian, le 26 avril 1862. Elle (1) Lancereaux, Dictionnaire encyclopédique des sciences média., art. Alcoolisme. (2jWesl pliai, Ueber Erkrankungen des Bûckenmarks bel der allgem- cinen progressivcn Pai-alyse der Irren. ViRcnov's Arch., 1867. — Magnan, De la lésion anatomiqiie de la paralysie générale. Thèse de Paris, 1866. f3) Koehier, Monogr. der Meningitis spinalis. Leipzig, 1861. (4) Ch. Bouchard, Mémoire lu au congrès médical de Lyon. Lvon, 1865. (5) Magnan et Rayera, Journal de physiologie, de Robin, 1866. !()) Duchenne (de Boulogne) , De Célectrisalion localisée, Paris , 2« édition, 1861. (7) La première partie de l'observation a été rédigée d'après le? notes recueillier en 1862 par M. Lemoine, interne de M. Vulpian. est âgée de 62 ans; elle a le genou droit ankylosé depuis une clmte qu'elle a faite à l'âge de 4 ans. Sa santé paraît avoir été bonne jusqu'à 1846. A cette époque elle a eu, à la suite d'une émotion vive, une perte de connaissance. Quand elle est revenue à elle, elle était affaiblie du côté droit; elle a remar- qué qu'elle entendait moins de l'oreille correspondante. L'année suivante elle entre à la Salpêtrière; elle pouvait encore, à cette époque, se servir de ses doigts; un an après les doigts de la main droite étaient devenus rigides; ils étaient étendus sur la main, et la roideur était telle qu'on ne pouvait les fléchir. Depuis une dizaine d'années la malade éprouve fréquemment des douleurs de tête, parfois sous forme d'accès douloureux; elles se font sentir surtout du côté droit, et s'accompagnent de bourdonnements et d'élancements dans l'oreille du même côté. Rosalie L... est venue plu- sieurs fois à l'infirmerie pour ces accès de céphalalgie. Depuis quelques jours elle a de l'inappétence, une teinte subictérique. Elle est actuellement dans l'état suivant : 11 n'y a pas de déviation de la face. L'ouverture palpébrale est plus petite du côté droit; l'œil droit se dévie légèrement en dedans; la vision est affaiblie de ce côté. Si la malade regarde à droite, il se pro- duit dans les deux yeux un nystagmus très-prononcé ; il consiste ex- clusivement en des oscillations transversales. La pupille droite est un peu resserrée. MoTiLrrÉ. — Membre supérieur droit. — Dans l'attitude ordinaire de la main, les doigts sont à demi étendus sur le métacarpe, les pha- langes sont étendues les unes sur les autres, la malade peut imprimer aux doigts de légers mouvements de flexion et d'extension sur les mé- tacarpiens. On peut fléchir les phalanges les unes sur les autres, mais la malade ne peut pas faire spontanément ces mouvements. Les masses thénar et hypothénar sont diminuées de volume. Par la faradisation pratiquée à l'aide de l'appareil de Breton, on n'obtient aucune contrac- tion dans ces muscles non plus que dans les interosseux ; les fléchis- seurs des doigts se contractent faiblement; les extenseurs et les pronateurs ont conservé leur excitabilité normale. Membre supérieur gauche. — La main présente la déformation en grifie; les phalanges sont fléchies les unes sur les autres, et ne peu- vent être étendues complètement. Tous les muscles de la main sont diminués de volume ; ils se contractent sous l'influence de l'électricité, mais faiblement. La motilité est affaiblie dans le membre inférieur droit. Pourtant, malgré l'ankylose du genou gauche, la malade peut marcher en s'ai- danl d'une béquille. IT5 La srnsibilit(^ est affaiblie aux deux mains. En 1863 M. Vulpian revoit la malade dans son dortoir; elle est alors dans le même état que l'année précédente. Elle ne revient à l'infirmerie qu'en 1869, pour de la diarrhée et de la bronchite. Elle est très-affaiblie; depuis trois ans environ elle ne peut plus marcher; c'est à peine si elle peut se tenir assise dans uu fauteuil. Dernièrement elle a été prise, par deux fois, pendant plu- sieurs heures, d'un tremblement convulsif de la tête et des membres ■ supérieurs, avec sensation de froid. La face est très-amaigrie, les joues sont excavées. Le thorax présente à droite une énorme gibbo- sité; la pression sur tes côtes est douloureuse à ce niveau; cette dé- formation ne date que de quelques années. La peau des mains est lisse, luisante. L'attitude des membres supérieurs est la même qu'en 1862; l'état des muscles paraît s'y être peu modifié ; du côté gauche pour- tant l'atrophie semble avoir fait des progrès; on n'obtient par la fara- disation que de faibles contractions dans les muscles de l'éminence Ihénar; ceux de l'éminence hypothénar sont complètement inexci- tables; à droite, tous les muscles de la main ont perdu leur contrac- tilité électrique; à ravant-bras,on constate une diminution de volume de la masse épilrochléenne; les fléchisseurs ne se contractent pas sous l'influence de l'électricité. Au membre inférieur droit la motilité est affaiblie ; on parvient aisément à fléchir la jambe sur la cuisse malgré ia résistance de la malade; les muscles de la région plantaire se con- tractent faiblement par l'électricité. La sensibilité est très-affaiblie, dans ses divers modes, à la main droite; à l'avant-bras du même côté, et dans tout le membre supérieur gauche, elle est conservée. La sensi- bilité au contact est presque nulle dans tout le membre inférieur droit; la sensibilité à la douleur y est affaiblie. Les mouvements réflexes pro- duits dans ce membre par le chatouillement de la plante du pied ont une énergie inaccoutumée et persistent pendant quelques instants. La malade éprouve fréquemment une sensation pénible de froid dans les extrémités des membres. Elle souffre souvent de céphalalgie, de douleurs lombaires. 24 mars. Les forces de la malade ont encore baissé; elle tousse beau- coup, elle a de la fièvre. Elle meurt le 27 mars sans qu'il se soit produit de nouveaux acci- dents. L'adtopsie est pratiquée le 29 mars 18G9. Il n'existe aucune lésion du crâne ni de la dure-mère. Les artères de la base sont saines; seule la carotide offre un léger épaississement pcléreux à son extrémité terminale. Les nerfs crâniens ne paraissent pas altérés. Les vaisseaux dp la pie-mère sont injectés. 174 Les hémisphères cérébraux, la protubérance, le cervelet n'offrent aucune lésion appréciable à l'œil nu. Sur le plancher du quatrième ven- tricule, les barbes du calamus ne sont représentées de chaque côté que par un traclus assez grêle. Le bulbe présente des altérations remarquables; il est creusé à droite, vers sa partie moyenne, d'une cavité dont la paroi antérieure répond d'abord à Folive pour se porter ensuite obliquement en arrière et en dedans jusqu'au plancher qu'elle atteint près de la ligne mé- diane; à l'exception d'une petite partie du corps restiforme, toute la partie du bulbe située en arrière de cette limite a disparu; le faisceau intermédiaire et le corps restiforme sont donc, à ce niveau, presque en- tièrement détruits. A sa partie supérieure, la cavité se rétrécit peu à peu, il ne reste plus qu'une lacune située derrière l'olive; elle est cloisonnée par des filaments celluleux, et offre l'aspect d'un foyer de ramollissement; elle remonte jusqu'au tiers inférieur environ du plan- cher ventriculaire. Au-dessous de la cavité, on voit dans le corps restiforme, sur les différentes coupes, jusqu'au milieu de l'entre-croi- sement des pyramides, une plaque grise triangulaire à base périphé- rique. Dans la moitié gauche du bulbe, on dislingue à l'œil nu, en plu- sieurs points, des teintes grisâtres anormales. L'arachnoïde spinale contient, dans son épaisseur, quelques plaques dures; la moelle est molle, aplatie d'avant en arrière. Après l'avoir divisée en un certain nombre de fragments de 2 à 3 centimètres de largeur, on y constate les lésions suivantes : Dans la région cervicale, il existe au centre de l'organe une cavité qui mesure transversalement près de 1 centimètre; la substance grise paraît avoir en grande partie disparu; la moelle a subi une atrophie considérable, surtout dans ses parties antérieures. Les mêmes lésions se retrouvent sur les différentes coupes pratiquées dans la région dorsale; la lacune centrale diminue d'étendue ; on voit des plaques grisâtres dans les faisceaux latéraux. La moelle ne reprend son aspect normal qu'au niveau du renflement lombaire. Les racines antérieures des nerfs cervicaux et dorsaux sont en par- tie atrophiées. Dans chacune d'elles, un certain nombre de filets radicu- laires sont grêles, grisâtres, beaucoup plus petits qu'à l'état normal; c'est surtout à la région dorsale que la lésion est prononcée. Les ra- cines postérieures ont également subi dans ces régions une atrophie partielle; elles sont pourtant moins altérées que les antérieures. Ces lésions sont marquées surtout dans la région cervicale du côté droit. Muscles. — Tous les muscles de la main droite, une partie de ceux de la main gauche et des deux avant-bras sont atrophiés. Le volume de plusieurs d'entre eux, entre autres du cubital antérieur droit, ne ITf. dépasse pas celui du nerf'sciatique. Leur coloration est très-pâle, grise, à peine rosée; leur tissu n'a plus laspect musculaire, on dirait du tissu fibreux. L'altération porte à droite sur le cubital antérieur, les fléchis- seurs superficiel et profond des doigts, le fléchisseur propre du pouce et tous les muscles de la main ; à gauche, sur le cubital antérieur, le cubital postérieur, le grand palmaire, le rond pronateur, les muscles de l'éminence hypolhénar, les interosseux dorsaux, l'adducteur du pouce et les deux premiers interosseux palmaires. Le poumon droit présente les lésions de la phlegmasie chronique. Les deux feuillets du péricarde sont unis dans toute leur étendue par des adhérences anciennes. Examen microscopique (pratiqué sous la direction et avec le concours de M. Vulpian). — Muscles. — Le muscle adducteur du pouce (main gauche), un muscle de l'éminence ihénar, un des interosseux et le cu- bital antérieur sont examinés. Les préparations microscopiques mon- trent que les fibres musculaires existent encore en assez grand nombre, mais très-atrophiées. Elles n'ont pour la plupart que de 20 à 30 micra de diamètre (1) ; quelques-unes sont un peu plus grosses; il n'y en a peut-être pas qui ait conservé son diamètre normal ; toutes ont perdu leur striation ; plusieurs contiennent encore des granulations pigmentaires, aucune ne paraît en renfermer plus qu'à l'état normal. Dans la plupart des fibres, il y a une multiplication très-considéra- ble des noyaux musculaires (V. planche, fig. VI). Ces noyaux sont géné- ralement agglomérés de manière à former des groupes allongés sui- vant la direction de la fibre; dans certains points ils sont disposés en séries linéaires; leur forme est arrondie ou légèrement elliptique; quelques-uns semblent avoir été comprimés, et ont pris une forme po- lyédrique. Us sont presque tous pourvus d'un nucléole. Leur diamètre mesure de 8 à 10 niicra. Un petit nombre de fibres renferme en outre des granulations grais- seuses qui, en certains points, sont extrêmement abondantes et oc- cupent, sur une longueur quelquefois considérable, toute l'épaisseur de l'élément musculaire. Les noyaux du tissu interstitiel ne sont pas multipliés; les vaisseaux des muscles malades n'offrent aucune altération. Dans quelques pré- parations, on voit des amas de dix à quinze noyaux semblables à ceux que nous avons signalés dans les éléments musculaires; sans doute ils ont la même origine et sont devenus libres par suite de la destruction I 4. . . (1) Nous nous conformons à l'usage qui tend à prévaloir en nous ser- vant du mot micra pour désigner les millièmes de millimètre. 176 de la fibre où ils s'étaient développés; on voit aussi quelques corps gra- nuleux; Nerfs. — Les filets nerveux attenant aux muscles atrophiés contien- nent un plus ou moins grand nombre de fibres nerveuses saines, mais ces fibres sont séparées les unes des autres par un tissu d'apparence fibrillaire assez abondant, paraissant être formé par des gaines vides. De plus, çà et là, en quelques points seulement, on voit de petits amas de fines granulations graisseuses, dernier vestige sans doute de la myéline de quelques fibres détruites. Les noyaux ne sont pas multi- pliés. Dans un filet nerveux qui se rendait à la peau de la région dorsale de la main droite, on trouve au milieu de nombreuses fibres saines quelques fibres un peu grêles et des gaines vides; les altérations pa- raissent moins prononcées que dans les filets musculaires. Le ganglion cervical supérieur, les filets nerveux qui en émanent ou y arrivent et les ganglions du plexus solaire paraissent sains. Dans les racines atrophiées des nerfs rachidiens, on ne voit que des gaines vides et un très-petit nombre de fibres nerveuses qui elles- mêmes sont altérées. Moelle épinière. — Placée d'abord dans l'alcool à 90 degrés, puis dans une solution d'acide chromique relativement un peu forte, la moelle durcit rapidement; nous avons vu qu'elle avait été divisée en segments d'environ 3 centimètres de long; nous les dislinguerons numériquement d'après leur ordre de superposition, le premier représentant la partie supérieure du renflement cervical; nous devons dire qu'il manquait à l'extrémité supérieure de la moelle un fragment d'environ 4 centimètres de longueur; cette partie, extraite tardivement, avait subi des altéra- tions qui n'en ont pas permis l'examen. Nous avons pratiqué dans chaque segment des coupes transversales qui ont été, suivant la méthode généralement suivie par M. Vulpian, traitées successivement par le carmin, l'alcool absolu, l'essence de térébenthine, et enfin placées dans le baume de Canada. Nous allons passer en revue les diverses lésions que nous avons pu constater dans les préparations ainsi obtenues. Fragment 8. — La moelle n'est pas altérée; le canal central mesure 0,7 dans son diamètre transversal, étendue qu'il atteint quelquefois à l'état normal pour peu qu'il soit aplati d'avant en arrière. Sa cavité est entièrement remplie d'éléments cellulaires, comme c'est la règle chez les vieillards. Fragment 7 (partie inférieure de la région dorsale). — La pie-mère est un peu épaissie; la couche sous-jacente, connue sous le nom de couche corticale, a dans certains points une épaisseur de 110 micra, 177 tandis qu'à l'état normal elle en mesure tout au plus 60; fortement colorée par le carmin, elle forme tout autour de la moelle une sorte d'anneau qui, par sa circonférence interne, envoie dans la substance blanche une grande quantité de prolongements plus volumineux qu'à l'état normal ; c'est au niveau des cordons latéraux que cette couche atteint ses proportions les plus considérables; on n'y distingue pas de fibres conjonctives; elle est formée d'un réticulum à mailles très-ser- rées, dans lequel on aperçoit une grande quantité de granulations et un petit nombre de noyaux. (V. planche, fig. V.) Les nombreux tractus émanés de cette couche s'entre-croisent en tous sens, de manière à former un réseau à mailles d'inégales di- mensions; les plus fines entourent les tubes nerveux, dont un certain nombre semble atrophié, bien qu'il soit diSicile de s'en rendre compte, puisqu'à l'état normal le diamètre de ces éléments varie dans des li- mites étendues; c'est surtout près de la périphérie, dans les cordons latéraux, que l'hyperplasie de ces tractus connectifs est facile à appré- cier. Ils ne présentent pas tous une structure identique ; on peut en distinguer deux variétés : les uns renferment un vaisseau qui part de la périphérie de la moelle, accompagné par un prolongement de la pie-mère qui forme une première enveloppe, tandis que la couche cor- ticale lui en fournit une seconde; on trouve ainsi dans chacun d'eux, en les examinant avec attention, au centre un vaisseau, puis une pre- mière couche formée de fibres de tissu conjonctif que l'on peut faci- lement suivre jusque dans la pie-mère, et enfin une couche de tissu finement réticulée qui se continue avec la névroglie des parties voi- sines; les autres tractus émanent directement de la couche corticale; formés exclusivement par le réticulum dont ils constituent un simple épaississement, ils ne renferment ni vaisseaux, ni faisceaux conjonc- tifs. Le sillon antérieur est élargi, rempli d'un tissu de nouvelle forma- tion, identique par sa structure à celui de la zone corticale; il ren- ferme aussi un grand nombre de vaisseaux. Au centre de la moelle se trouve une lacune qui mesure transversalement 2""', 8; elle se prolonge latéralement dans la substance grise qui réunit les cornes antérieures et postérieures; le groupe de cellules que l'on trouve normalement en celte région (colonne de Clarke) est en partie détruit; une couche peu épaisse de tissu scléreux réticulé entoure la lacune; le canal épendy- maire et les commissures ont complètement disparu; les cordons anté- rieurs sont moins volumineux qu'à l'état normal, de sorte que la moelle paraît aplatie d'avant en arrière. Fragment 6. — La lacune centrale est irrégulièrement arrondie ; son diamètre est d'environ l'",2; elle envoie en avant et à droite un pro- MÉM. 1869. 12 178 longement qui atteint presque la périphérie de la moelle au niveau de l'émergence des racines antérieures. Elle est entourée d'une couche de tissu de nouvelle formation, analogue par sa structure à celui que l'on trouve normalement autour de l'épendyme dans les commissures; il est formé de Iractusfibrillaires extrêmement fins, qui s'entre-croisent en diverses directions, de manière à intercepter des mailles de di- mensions variables ; ce réticulum est parsemé de noyaux d'environ 5 micra de diamètre ; quelques-uns sont entourés d'un corps cellu- laire ramifié; sur plusieurs préparations nous avons vu nettement ces prolongements cellulaires se continuer avec les fibrilles du réti- culum (V. planche, fig. iv). Ce tissu, que nous désignerons pour la commodité du langage sous le nom de tissu scléreux réticulé, forme une couche qui mesure en général 0'"°',25; de sa périphérie éma- nent des prolongements qui sont nombreux, surtout vers la partie antérieure des cordons latéraux ; comme ils tendent à diverger à mesure qu'ils s'approchent de la périphérie, ils forment de chaque côté des plaques trapézoïdes, mal limitées, plus larges à leur partie externe Ces plaques étaient représentées à l'état frais par les ta- ches grisâtres que nous avons signalées dans les cordons latéraux; elles se sont fortement colorées par le carmin et se détachent nette- ment sur les préparations. On aurait pu se demander au premier abord si elles ne représentaient pas des faisceaux en voie de désagrégation secondaire ; il n'en est rien, car les tubes nerveux compris entre les tractus hypertrophiés de la névroglie ont ici conservé pour la plupart leurs dimensions et leur aspect normaux, tandis que dans la dégénéra- tion secondaire l'atrophie des tubes est l'élément essentiel. L'épaissis- sement de la couche corticale (sclérose annulaire) est plus marqué au niveau de ces plaques : il est également très-prononcé sur les côtés du sillon antérieur. La moitié antérieure de la moelle a subi une atrophie considéra- ble; le cordon antérieur droit n'est plus représenté que par une mince bandelette comprise entre le tissu scléreux qui borde le sillon an- térieur et celui qui entoure le diverticulum antérieur de la lacune centrale. La substance grise a en partie disparu; à droite, il n'y a plus de corne anlériepre ni de tractus intermédiaire ; la corne posté- rieure est diminuée de volume; à gauche la corne postérieure est in- tacte, mais on ne voit pkis dans la corne antérieure qu'un seul groupe de cellules. Les noyaux de la névroglie sont beaucoup plus nombreux qu'à l'état normal, surtout dans les parties qui environnent la lacune centrale. De nombreux corps amyloïdes sont disséminés dans les différentes parties de la moelle. Les parois des vaisseaux sont très-épaissies, surtout (ians 179 les parties où la sclérose est le plus prononcée, La tunique moyenne paraît formée d'un grand nombre de couches dans lesquelles on voit des noyaux conjonctifs allongés transversalement. Dans les parties de la moelle qui nous restent à étudier, nous allons retrouver des lésions analogues à celles que nous venons de signaler ; un peu moins avancées peut-être dans les fragments 5, 4 et 3, elles atteignent dans la région cervicale leur plus haut degré de développe- ment. Fragment 5 (V. planche, fig. i). — La lacune centrale a 1,8 de lon- gueur. La couche scléreuse qui l'entoure atteint 0,25 d'épaisseur. On y voit, au devant de la lacune, un amas de cellules polyédriques, plus volumineuses que les éléments de la névroglie, semblables à celles qui souvent, chez les sujets avancés en âge, remplissent complètement la cavité du canal; la sclérose annulaire (H) est moins marquée que dans les fragments précédents; par contre, les plaques scléreuses (G) que nous avons signalées dans la partie moyenne des cordons latéraux, sont plus apparentes et plus étendues. Le sillon médian antérieur est très- large, il mesure à sa partie antérieure 0"',63. Le sillon postérieur est représenté par un tractus assez épais. L'atrophie des cordons antérieurs est très-prononcée ; il n'existe plus de substance blanche entre le sillon médian et la corne antérieure droite. Les cellules antérieures ont en partie disparu ; celles qui res- tent sont relativement petites, elles renferment des granulations jaunâ- tres, elles se sont mal colorées par le carmin. Fragment 4. — La lacune centrale mesure 2 millimètres sur 0,6; presque partout ses parois sont formées par le tissu scléreux; on voit au devant d'elle, comme dans le fragment 5, un amas de cellules sem- blables à celles de l'épendyme, la cavité est bordée dans une petite partie de son étendue par des éléments de même nature. Fragments (partie supérieure de la région dorsale) (V. planche, fig. ii). — Les lésions sont ici un peu différentes; nous nous y arrêterons quel- ques instants, car elles nous fourniront d'utiles indications sur la na- ture réelle du processus qui a amené l'atrophie de la moelle et la for- mation de cette énorme lacune à sa partie centrale. Ici il n'y a plus de lacune. Une masse conjonctive (B) mesurant 3'"^\Q sur 0,6, occupe la partie centrale de la moelle ; dans sa partie périphéri- que, elle s'est fortement colorée par le carmin, le réticulum y est serré, il contient beaucoup de noyaux ; mais bientôt, si l'on déplace peu à peu la préparation de manière à examiner la masse scléreuse de sa partie externe vers sa partie centrale, on voit que les mailles du réticulum deviennent plus larges, les noyaux moins nombreux; le tissu se raré- fie (B) ; il y a tendance à la formation de lacunes, par places même il 180 existe des vides ; tout à fait au centre, à la place qu'il occupe habituelle- ment, se trouve le canal central (A); ses dimensions sont de 1 mill. sur 0,4; il estdonc un peu dilaté. Une couche d'épithélium cylindrique en tapisse régulièrement la circonférence; les cellules ont leur aspect normal; leur noyau est très-apparent. Le canal est en quelque sorte isolé de la couche scléreuse qui l'entoure par une membrane plissée d'apparence fibrillaire. Ces détails se voient très-nettement sur une photographie agrandie que M. Duchenne (de Boulogne) a pu obtenir malgré les difficultés d'exécution. Il ne reste plus de chaque côté dans les cornes antérieures qu'un pe- tit nombre de cellules ; il n'est pas possible de reconnaître à quel groupe elles appartiennent. Fragment 1 (V. planche, fig. m). — L'atrophie atteint ici ses plus grandes proportions; elle porte inégalement sur les différentes parties de la moelle , de sorte que l'organe a perdu sa configuration normale; le diamètre antéropostérieur étant le plus réduit, il semble que la moelle ait été aplatie d'avant en arrière, mais il n'en est rien, car la déformation a été constatée au moment de l'autopsie, et il a été reconnu qu'elle n'avait pas été produite artificiellement. La lacune centrale atteint 8°"°, 5 dans le stns transversal sur 6 d'a- vant en arrière; elle a sa plus grande largeur à son extrémité droite où elle envoie un prolongement vers le point d'émergence des racines an- térieures. Elle est limitée dans une partie de son étendue par la même membrane fibreuse que nous avons déjà signalée dans le fragment n* 3 ; cette membrane est tapissée sur une longueur peu considérable par une couche d'épithélium cylindrique; en un point on voit un amas de cellules semblables à celles de l'épendyme; contenu dans la paroi an- térieure de la lacune, il fait saillie dans la cavité. La couche scléreuse qui entoure la lacune a 2 millimètres d'épaisseur et même plus en quel- ques points; à droite, elle se confond insensiblement avec une plaque scléreuse analogue à celles que nous avons étudiées plus haut, mais plus étendue; l'altération y est plus avancée, on n'y trouve plus qu'une petite quantité de tubes nerveux; elle occupe la plus grande partie du cordon latéral ; un grand nombre de prolongements volumineux s'en détachent pour gagner la couche corticale; à gauche, on voit une plaque semblable, mais de moindres dimensions. La sclérose annulaire est peu prononcée; dans toutes les parties altérées, on trouve un grand nombre de vaisseaux à parois épaissies; les vaisseaux de la sub- stance blanche offrent également les marques d'une phlegmasie chro- nique; ils sont entourés d'une couche assez épaisse de tissu scléreux réticulé. La moitié droite de la lacune n'est séparée en avant de la périphérie 181 de la moelle que par une couche de tissu épaisse de 2''",5; le cordon antérieur droit a donc presque entièrement disparu; par suite il n'y a plus en avant de sillon médian; les cordons postérieurs sont séparés par un large interstice dans lequel on voit des vaisseaux et du tissu scléreux réticulé. La substance grise est en grande partie détruite ; il n'en reste rien dans la partie droite de la moelle; à gauche, les cornes antérieure et postérieure ne sont représentées que par un petit nombre de cel- lules offrant les mêmes altérations que nous avons signalées plus haut. (V. fragment 4.) Bulbe. —Partie inférieure, région de l'entre-croisement des pyramides. — Nous avons vu que l'on distinguait à l'œil nu dans cette partie du bulbe une plaque grisâtre ayant l'aspect d'une cicatrice. Nous en avons indiqué la forme et la situation. Elle est formée par le même tissu ré- ticulé riche en noyaux que nous avons étudié dans la moelle. La lésion a détruit une partie du corps restiforme et des pyramides postérieures et le noyau de substance grise qui représente dans le bulbe la corne postérieure. Cette altération n'est pas la seule que présente le bulbe à ce niveau; dans cet organe, comme dans la moelle, on trouve les signes dune inflammation diffuse de la névroglie ; la couche corticale est no- tablement épaissie, surtout à gauche, où elle atteint 0°'",16 ; les prolon- gements qu'elle envoie dans le bulbe sont nombreux et volumineux; les pyramides postérieures sont en parties transformées en tissu sclé- reux ; autour du canal central, on voit une couche de tissu finement granulé, parsemé de nombreux noyaux; elle atteint en arrière sa plus grande épaisseur et se continue avec la plaque scléreuse que nous avons signalée. Le canal central mesure 0°"°,5 de diamètre; sa cavité est limitée dans une partie seulement de sa circonférence par des cel- lules cylindriques régulièrement disposées. Les parois vasculaires sont presque partout épaissies ; on trouve dans les parties altérées une grande quantité de corps amyloïdes. Au niveau du calamus la plaque scléreuse est remplacée par la cavité dont nous avons plus haut indiqué la disposition et les limites. Cette cavité est entourée dans une partie de son étendue par un réti- culum à mailles larges, pauvre en noyaux. Dans plusieurs préparations nous y avons trouvé des cristaux d'hémaloïdine. En d'autres points la paroi est formée par la substance nerveuse ; en dehors, la cavité est séparée de la pie-mère par une couche de tissu conjonctif nettement fibrillaire, épaisse de 1,13. A la partie supérieure du bulbe, on ne trouve plus qu'une cicatrice presque linéaire séparant du reste de l'organe la partie postero-externe du corps restiforme. 182 Quelle signification faut-il attribuer aux diverses lésions que nous venons de décrire? Quelle en est la nature? quelle en a été l'évolu- tion? quels liens existent entre elles? Les éléments nous font dé- faut pour répondre à ces questions eu toute certitude; nous croyons pouvoir cependant nous rattacher à l'interprétation suivante comme à la plus vraisemblable et la plus satisfaisante en tous poin ts : la lésion initiale a été le ramollissement nècrosique d'une partie du bulbe , Cir- j-ita lion provoquée par le foyer s^est étendue de proche enproche à la partie inférieure du bulbe, puis à la moelle ; elle a provoqué le dé- veloppement d'une myélite interstitielle diffuse; C inflammation a porté plus particulièrement sur la substance conjonctive qui entoure le canal épendymaire; une masse considérable de tissu morbide s''est formée au centre de la moelle; plus tard ce tissu a subi des méta- morphoses régressives qui en ont amené la destruction partielle : telle est l'origine de la lacune que nous avons décrite; la dilatation du canal épendymaire n'a contribué que très-accessoirement à la consti- tuer. Par leffet de la sclérose la moelle s'est atrophiée; les graves altérations qu'ont subies les cornes antérieures ont eu pour résultat Catrophie secondaire d'une partie des racines, des nerfs qui leur font suite et des muscles correspondants. Il nous reste à développer ces diverses propositiops, à les justifier et à réfuter les interprétations différentes qu'on pourrait leur op- poser. 1* La lésion initiale a été le ramollissement nècrosique d'une partie du bulbe. Nous avons vu plus haut qu'en examinant le bulbe à l'état frais, notre première impression avait été qu'il s'agissait d'un foyer de ramollissement; la lésion en avait tous les caractères objectifs; nos recherches ultérieures n'ont fait que nous confirmer dans cette opinion; comme dans les foyers anciens, nous avons trouvé une cavité traversée par des tractus celluleux, des parois conjonctives renfermant des cristaux hématiques, en trop petit nombre cepen- dant pour que l'on pût penser à un foyer apoplectique. On peut se demander si la cavité bulbaire n'a pas eu pour cause, comme la la- cune centrale de la moelle, la régression et la destruction partielle d'un tissu de nouvelle formation. Cette hypothèse ne nous parait pas soutenable, car les lésions scléreuses sont en général peu déve- loppées dans le bulbe; nulle part on n'y trouve, comme dans la moelle, d'ilôts de tissu morbide capables de donner lieu par leur des- 183 truction à la formation d'une cavité anormale. L'apparition brusque de l'hémiplégie est encore une circoDstance favorable à notre interprétation; elle s'explique par la lésion soudaine du faisceau latéral qui contribue à la transmission des incitations motrices. 2* Vb'ritaiion ■provo(Juée par le foyer s est étendue de proche en proche à lu partie inféîHeiire du bulbe, puis à la moellr. L'iutlamma- tion diffuse de la névroglie n'apparaît dans le bulbe qu'au niveau de la cavité anormale; c'est là que la couche corticale commence à s'épaissir, que ses prolongements se multiplient, que l'on voit apparaître autour du canal central une quantité anormale de tissu conjonctif ; ces altérations sont beaucoup plus marquées dans les parties qui environnent le foyer ; toutes les parties de l'encé- phale situées plus haut sont indemnes; au-dessous les lésions Be continuent sans interruption jusqu'au renflement lombaire. On peut donc rapporter avec vraisemblance le développement de la sclérose à l'irritation déterminée par la présence du foyer. L'his- toire de la malade confirme cette manière de voir; 1 hémiplégie est l'accident primitif ; puis peu à peu il se produit de la contracture dans les membres, puis apparaissent des troubles diffus de la moti- lité et de la sensibilité; les symptômes spinaux ont donc succédé aux symptômes de foyer, comme s'il avait existé entre eux un lien étio- logique. Les auteurs rapportent quelques faits analogues. Chez le nommé Pineau, qui avait présenté des signes non équivoques de myé- lite, M. Cruveilhier (1) a trouvé en même temps que de la méningite spinale et un état difflueut de la moelle, une tumeur qui intéressait la queue de cheval. Dans un fait de Landau (2), la partie inférieure du rejîflement cervical renfermait une tumeur du volume d'une noisette; au-dessous, la moelle était creusée d'un canal rempli de sé- rosité citrine. Dans un autre cas, publié par M. Hutin (3), la partie supérieure de la moelle était infiltrée d'un Uquide séreux, la sub- stance nerveuse était en partie détruite à ce niveau ; un peu au- dessous la moelle était ramollie autour d'un tubercule, origine pro- bable, suivant cet auteur, du travail morbide. Nous ne mention- nons pas le foyer hémorrhagique que renfermait la moelle dans (1) Cruveilhier, Atlas d'anatoniie pathologique. (2; Landau, in Ollivier d'Angers, Traité de la moelle épinière. 1837. (3) Hutin, Nouvelle bibliothèque médicale, 1828. 184 l'observation connue de M. Nonat (1), parce qu'il faut le considérer, croyons-nous, comme une lésion secondaire, dépendant de la myé- lite. Eu somme les différents faits que nous venons de citer ne sau- raient avoir qu'une valeur relative, car dans aucun d'eux l'examen histologique n'a été pratiqué, et l'on ne peut avoir la certitude entière qu'il se soit agi de véritables myélites. Notre observation offre donc à cet égard un certain intérêt en établissant qu'wn foyer de ramol- lissement développé dans le bulbe peut être Corigine d'une myélite diffuse généralisée. 3° Elle a amené le développement d'une myélite interstitielle diffuse. L'exactitude de cette proposition ressort trop clairement de notre description pour qu'il soit utile d'y insister longtemps; la proliféra- tion cellulaire et la multiplication des vaisseaux ne laissent pas de doute sur la nature inflammatoire des lésions. La sclérose périphé- rique, l'épaississement des tractus connectifs dans les faisceaux blancs, la multiplication des éléments de la névroglie dans la sub- stance grise, montrent bien que les altérations sont étendues à toute l'épaisseur de la moelle, que leur distribution n'offre aucun rapport avec celle des éléments nerveux à rencontre de ce que l'on observe le plus souvent; nous ne saurions, à ce point de vue, attacher d'im- portance aux plaques que nous avons signalées dans les cordons la- téraux; on y trouve les mêmes lésions que dans les autres parties de la moelle, l'épaississement de la névroglie y est seulement plus con- sidérable ; ces plaques sont mal limitées, leur situation varie dans les différentes parties de la moelle; à la région cervicale, il en existe deux dans le cordon latéral droit ; rien n'autorise donc à admettre une lésion systématique des cordons latéraux comparable à celle qui existait dans les observations de M. Gharcot. Nous avons vu que le tissu morbide était partout constitué par un réticulum très-fin et des noyaux quelquefois entourés d'un corps cellulaire; ce tissu offre donc les mêmes caractères que la plu- part des auteurs attribuent à la névroglie. On a très-sérieusement contesté l'existence de ce réticulum; malgré l'autorité de From- man, de M. Schultze, de KôUiker qui en admettent la réalité, la science n'est pas fixée sur ce point. D'après certains auteurs, Henle (1) Nonat, Recherches sur le développement accidentel dun canal rempli de sérosité dans le centre de la moelle (X^cn. de méd. , 1838). 185 surtout , la substance interstitielle de la moelle serait amorphe à l'état normal, et l'apparence réticulée ne serait due qu'à l'action des réactifs ; notre observation ne peut guère servir à élucider cette question, car le tissu morbide n'a pas été examiné à l'état frais; nous avons pourtant constaté bien nettement la continuité des prolongements émis par les cellules de nouvelles formations avec les fibrilles du réticulum, fait qui ne s'expliquerait guère si le réticulum était un produit artificiel ; on pourrait même, dans notre cas, admettre, sans invraisemblance, que ce réticulum est exclusi- vement constitué parles anastomoses des prolongements cellulaires. Henle conteste également que la trame interstitielle de la moelle soit de nature conjonctive; notre observation n'est pas sans intérêt à ce point de vue; nous avons décrit dans plusieurs préparations, autour de la lacune centrale, une membrane épaisse, fibreuse, formant de nombreux replis perpendiculaires à la circonférence de la cavité; cette membrane est constituée par des faisceaux de tissu fibreux, elle renferme des cellules fusiformes ; c'est, sans aucun doute, de la substance conjonctive; elle est en continuité par sa face externe avec le tissu réticulé; il paraît à peu près certain qu'elle n'en est qu'une transformation , soit que le tissu de nouvelle for- mation ait été refoulé excentriquement par le liquide qui proba- blement remplissait le canal, soit qu'au moment où les parties centrales du néoplasme ont été frappées de nécrobiose, un travail d'inflammation et élimination se soit développé dans les parties qui limitaient la perte de substance; d'autre part, le tissu réticulé offre une structure analogue à celle de la névroglie, il en est évidemment dérivé; si l'on considère que c'est une propriété des différents types de substance conjonctive de se suppléer et de s'engendrer mutuelle- ment à l'état pathologique, on trouve dans le fait que nous venons de signaler un argument en faveur de l'opinion qui range la névro- glie dans la catégorie des substances conjonctives. 4° JJ inflammation a porté plus particulièrement sur la substance conjonctive qui entoure le canal épendymaire. C'est en effet au centre de la moelle que les lésions sont le plus avancées; l'épaisseur de la couche de tissu morbide qui entoure le canal central, la quantité de cellules qu'elle renferme, la multiplicité de ses vaisseaux, mon- trent que cette partie de l'organe a été le siège principal du pro- cessus inflammatoire ; la myélite a été surtout centrale. Cette forme 186 est assez rare; souvent elle se termine par nécrobiose; d'autres fois, au contraire, le tissu morbide s'indure,et l'on trouve au centre de la moelle uu cordon résistant; c'est dans ce sens qu'il faut interpré- ter, selon toute vraisemblance, le fait suivant que M. Lancereaux a publié sous le titre à.' Oblitération du canal central de la moelle (1) : Le malade avait présenté, à la suite de refroidissements et de fatigues, des symptômes de myélite tels que des paralysies dissé- minées de la sensibilité et du mouvement, des contractures, des convulsions et enfin des eschares. 1 l'autopsie, M. Lancereaux trouve au centre de la moelle un cordon grisâtre, cylindrique, ferme et résistant, du volume d'un manche de plume; ce cordon s'étend de la partie supérieure de la région cervicale à quelques centimètres de l'extrémité inférieure de la moelle. Il contient dans son épaisseur un foyer hémorrhagique récent et deux kystes remplis de sérosité que M. Lancereaux considère également comme d'anciens foyers sanguins (?). Au microscope on voit qu'il est composé d'une sub- stance amorphe légèrement granuleuse, de granulations molécu- laires, de fibres de tissu conjonctif et de nombreux vaisseaux. La substance grise est très-altérée. La nature des symptômes, la prolifération conjonctive, la multi- plication des vaisseaux nous autorisent à admettre qu'il s'est agi dans ce cas d'une forme particulière et peu commune de myélite chronique. 5° Une masse considérable de tissu morbide s''est formée au centre de la moelle; plus tard ce tissu a subi des métamorphoses régres- sives qui en ont amené la destruction partielle \ telle est C origine de la lacune que nous avons décrite ; la dilatation du canal épendy maire n'a contribué que très-accessoirement à la constituer. Quelle est l'origine du trou dont est creusée la moelle? Cette question est la première que soulève la lecture de notre observation. Les auteurs qui ont observé des faits analogues se sont rattachées à des inter- prétations très -diverses. Pour M. Nonat, ces lacunes ont pour cause la destruction partielle de la substance grise par des épanchements sanguins; d'autres les rapportent à une distension du canal central (1) Lancereaux, Mém. de la Société de biologie, 1.S6I. (Voir dans l'original l'observation dont nous ne donnons ici qu'un court résumé.) 187 par un épanchement séreux; d'autres enfin (1) admettent une perte de substance due à la métamorphose régressive des éléments ner- veux et du tissu morbide. Hâtons-nous de dire que ces lacunes ne fecotmaissent pas toujours le même mécanisme et que les diverses explications que nous venons d'énumérer peuvent être justes dans certains cas. Pour ce qui est de notre observation, il est une prépa- ration, parmi celles que nous avons décrites, qui nous semble tran- cher la question (V. planche, fig. ii). On y voit en effet, au centre, le canal épendymaire garni de son épithélium ; autour une masse épaisse de tissu scléreux réticulé; dans ses couches externes, le réticulum est dense, serré, ses mailles sont étroites; à mesure qu'on se rapproche du centre, les mailles s'agrandissent, la préparation de- vient plus claire; autour du canal épendymaire il n'y a plus qu'une trame celluleuse des plus lâches, formée par des fibrilles éparses et de rares cellules ramifiées; en certains points, elle est creusée de lacunes ; on voit donc, de dehors en dedans, une partie sombre, for- tement colorée par le carmin, puis une partie claire et enfin le canal central ; la partie claire a sensiblement les mêmes dimensions que présente la lacune daas les autres fragments. Sur une autre prépara- tion prise à peu de distance de la pyécédeute, le canal central n'est pas complet, mais le rayon de la partie qui en reste indique suffisam- ment quelles devaient être ses dimensions; puis à côté on voit une lacune plus grande que la cavité du canal, limitée par le même réti- culum lâche que nous venons de décrire. 11 nous parait incontestable, d'après ces faits, que la lacune s'est formée principalement aux dé- pens du tissu morbide; pour ce qui est du processus qui a amené la perte de substance, nous aurions tendance à admettre, plutôt qu'une mortification véritable, une sorte d'atrophie dont on pourrait peut- être trouver la cause dans l'obstacle que l'épaississementdes parois vasculaires devait opposer aux échanges nutritifs (2). Dans la préparation dont nous venons de parler, le canal central mesure 1"'" sur 0,4; il est donc un peu dilaté; dans les autres (1) Rokilansky, Lehrbuch der patliolog. anat., 2 auflage. — Albers, Beobwlitungen auf d. Geb. der Palh.. Bonn, 1836. (2) Rindfleisch (Virchow's arch., 1863) a fait remarquer déjà que, dans la sclérose de la moelle, l'épaississement des parois vasculaires pouvait être la cause' de troubles nutritifs. 188 fragments , il disparaît complètement. Dans quelques préparations seulement, les parois de la lacune sont tapissées, dans une petite partie de leur étendue, par des cellules épithéliales cylindriques qui représentent évidemment les débris du canal épendymaire. En d'autres points, on voit dans la cavité, ou au milieu de ses parois, des amas de cellules polyédriques semblables à celles qui souvent remplissent le canal. La présence de ces éléments semble d'abord en faveur de l'opinion qui verrait dans la dilatation du canal épendy- maire l'origine de la lacune; il nous suffira de préciser quelques points d'anatomie pour montrer que les faits sont susceptibles d'une autre interprétation. On voit à l'état normal, autour du canal central, un amas de cellules arrondies ou irrégulièrement polygonales, sans noyau apparent, mesurant environ 8 micra, pressées les unes contre les autres de manière à former une sorte de mosaïque : ce sont les éléments de l'épendyme considérés par les uns comme des cellules nerveuses, par d'autres comme des cellules conjonctives, à coup sûr distincts des cellules de la névrogiie; souvent, et l'on peut dire que c'est la règle chez les sujets âgés, ils remplissent la ca- vité du canal. En outre, si l'on examine attentivement la commis- sure postérieure, on y trouve presque constamment des éléments semblables réunis en petites masses isolées ; ils se distinguent des noyaux de la névrogiie par leurs dimensions un peu plus considé- rables, par la forte coloration qu'ils prennent lorsqu'on les traite par le carmin; il est douteux qu'il y ait entre eux une substance intercellulaire ; ils forment, soit au devant, soit sur les côtés du canal épendymaire, des groupes dont le grand axe parallèle au dia- mètre transversal de la moelle peut mesurer plus de 0,15. Ces particularités, que les auteurs négligent généralement de men- tionner, bien qu'elles aient été vues déjà par Schilling (1) et par Stilling (2), nous paraissent de nature à faciliter l'intelligence des phénomènes morbides dans notre cas et dans plusieurs des faits analogues que nous rapportons plus loin. On conçoit aisément que le travail irritatif dont la névrogiie a été le siège chez notre malade se soit étendu aux éléments épendymaires enclavés dans le tissu glieux et en ait amené la prolifération ; on s'explique ainsi la pré- Ci) Schilling, De medullBs spinalis textura, 1852. Dorpat. (2) Stilling, Baudes Rûckenmarks, 1859. Cassel. 189 sence des amas de cellules que nous avons signalés dans l'intérieur et dans les parois de la lacune; il n'est donc nullement nécessaire d'admettre, pour s'en rendre compte, Une dilatation du canal central. Ce n'est pas à dire que la sérosité accumulée dans ce conduit n'ait pu lui faire subir un certain degré de distension. Nous ferons re- marquer cependant que dans les points où le canal central a persisté au milieu du tissu morbide, il est à peine dilaté, et que ses cellules cylindriques ont conservé leur aspect normal. M. 0. Schûppel (1), dans un cas tout à fait analogue au nôtre, s'est rattaché à une autre interprétation. Voici le résumé de son obser- vation : Le nommé X... entre en août 1862 à l'hôpital de Leipzig; il est malade depuis 1856; l'affection débute à cette époque par l'affaiblis- sement des doigts de la main gauche; bientôt les muscles de l'avant- bras, puis ceux du bras et de l'épaule correspondants diminuent de volume, peu après la main droite s'affaiblit à sou tour. A partir de 1860, le malade ne peut plus imprimer aucun mouvement à la main gau- che; en 1861, la marche devient difficile; dès le début de la maladie, des mouvements convulsifs se sont produits dans les parties paraly- sées. Au moment de son entrée à l'hôpital, le malade est dans l'état suivant : les avant-bras sont amaigris, surtout le gauche ; les doigts sont dans la flexion; le malade se sert très-faiblement de la main gauche; les troubles de motilité sont peu prononcés dans les mem- bres inférieurs; la sensibilité est partout conservée; les muscles des membres supérieurs sont le siège, à intervalles plus ou moins éloi- gnés, de contractions involontaires ; la contractilité électrique y est affaiblie. Quand le malade est assis, des mouvements involontaires se produisent dans les muscles du tronc. M. Schûppel porte le diag- nostic : atrophie musculaire progressive. Le malade meurt eu mars 1863, d'une lièvre typhoïde. Autopsie (résumé). — Muscles. Les muscles des avant-bras sont pour la plupart atrophiés; leurs faisceaux sont constitués dans les quatre cinquièmes de leur épaisseur par du tissu conjonctif; les fibres qui ont persisté n'ont plus que la moitié, le tiers, ou même le sixième de leurs dimensions normales; à côté l'on trouve des gaines de 5 à 6 micra, dans lesquelles on voit une masse finement granulée, (1) 0. Schûppel, Archiv. t. Heilkunde, 1865. Fait von Hydromyelie, i90 quelques granulations graisseuses et de nombreux noyaux; ces noyaux ont en moyenne 3 micra; les uns sont arrondis ou ovales, les autres polyédriques; plus ils sont nombreux dans un tube, moins on y trouve de granulations graisseuses. Ces lésions sont celles de la myosite parenchymateuse. Moelle. La pie-mère est injectée ; la portion cervicale de la moelle est très-plate, presque rubanée. Au moment où l'on sectionne la moelle, il s'écoule du liquide; sur les différentes coupes, depuis le trou occipital jusqu'à la 12" dorsale, on constate l'existence d'une cavité anormale; au centre de l'organe la consistance de la substance blancbe parait un peu augmentée. La moelle ayant été partagée en fragments de 2 centimètres, on voit que la lacune commence entre les fragments 2 et 3; c'est d'abord une fente étroite qui s'étend trans- versalement jusqu'à la limite externe de la substance grise; dans le fragment 3, elle s'agrandit, se prolonge en arrière jusqu'à l'émer- gence des racines postérieures et sépare ainsi les cordons latéraux des postérieurs; ce prolongement de la cavité centrale renferme un tissu riche en éléments cellulaires — (fragment 4) : il n'y a plus de sub- stance grise autour du canal, les faisceaux blancs sont atrophiés; — (fragmenta): la lacune est plus large; l'atrophie porte surtout sur le faisceau antéro-latéral gauche, dont l'épaisseur n'est plus au niveau de l'émergence des racines que de 1 millimètre ; le canal est tapissé par une membrane épaisse de 100 à 200 micra. Dans le fragment 18, la cavité est beaucoup plus étroite; au-dessous la moelle reprend son aspect normal. Quelle a été la pathogénie de ces lésions? M. 0. Schûppel, après avoir éliminé l'idée d'un épauchement sanguin dans la partie cen- trale de la moelle, et repoussé l'hypothèse d'une myélite, se pro- nonce en faveur d'une hydropisie du canal épendymaire. Il croit trouver dans la structure des parois qui limitent la cavité anormale des arguments décisifs en faveur de cette opinion. Dans le fragment 19, le canal épendymaire, garni de son épithé- lium. a son aspect habituel; il est large de 2 millimètres ; la couche de tissu qui l'entoure a le double de son épaisseur normale. Dans le fragment 18, on trouve à la périphérie de la cavité, en plusieurs points, des amas de cellules épilhéliales plus petites que les cellules cylindriques de l'épendyme, et de forme irrégulièrement cubique; les parois sont formées dans le reste de leur étendue par un tissu fi- 191 brillaire qui renferme des noyaux de 0,007 de diamètre; çà et là s'élèvent des saillies semblables à des papilles; la plupart sont recouvertes de cellules cylindriques ; d'autres sont formées de tissu conjonctif; on y voit des vaisseaux dont les parois sont épais- sies. Fragments 17-15. Les amas de cellules épithéliales sont peu nom- breux et peu étendus. Au-dessus du fragment 9, on ne voit plus d'épithélium dans la cavité anormale; dans le fragment 3, on aper- çoit au devant de la lacune^ derrière le sillon antérieur, une fente large de 0,2, tapissée d''épit hélium cylindrique; elle représente évi- demment le canal épendymaire, M. Schiippel, se fondant sur la présence d'amas de cellules épithé- lioïdes à la périphérie de la cavité, admet qu'au-dessous du frag- ment 9 il n'y a qu'une simple dilatation du canal épendymaire; au- dessus, le liquide qui distendait le canal se serait frayé un passage à travers ses parois, et trouvant peu de résistance dans la substance grise, il s'y serait creusé une cavité; la lacune que l'on voit dans le fragment 3, en arrière du canal épendymaire, ne serait ainsi qu'un diverticulum de ce même canal dilaté plus bas. Cette hypothèse nous parait peu satisfaisante. On ne voit dans aucun organe les épanchements séreux acquérir assez de tension pour écarter les éléments des tissus et se creuser une cavité à leurs dépens. Dans les hydrocéphalies les plus abondantes, le liquide reste enfermé dans les cavités ventriculaires. Nous ne saurions admettre d'ailleurs que, chez un adulte, sans troubles de circulation, sans cause appréciable, le canal épendymaire devienne le siège d'une hydropisie en quelque sorte essentielle. Il est reconnu que dans le cerveau, les hydropisies non congénitales sont toujours symptomatiques ; il en est très-vrai- semblablemeut de même pour la moelle. Il est vrai que M. Scliiippel considère la lésion comme congénitale; mais l'histoire de son malade est en opposition avec cette manière de voir, et, selon toute proba- bilité, dans cette observation comme dans celle de GuU que nous rapportons plus loiu, le début de l'atfection spinale ne remonte pas beaucoup plus loin que l'apparition des symptômes d'atrophie musculaire. D'autre part les éléments épithélioïdes que renfermait la cavité ressemblent beaucoup, u'après la description qu'en donne M. Schiippel, aux cellules de l'épendyme, et par conséquent, d'après ce que nous avons dit plus haut, leur présence ne prouve nullement 192 que la cavité anormale se soit exclusivement formée aux dépens du canal. ' Ainsi l'hypothèse d'une hydromyélie n'est pas nécessaire à l'in- telligence des faits; elle est insuffisante à les expliquer ; pour nous- méme la présence dans la région cervicale du canal épendymaire intact au devant de la lacune l'exclut absolument; nous hésitons d'autant moins à la repousser que la myélite interstitielle diffuse dont les détails de l'observation nous dénotent l'existence, nous^ fournit une explication plausible de tous les phénomènes observés. M. Schûppel dit en effet qu'en différents points de la substance blanche le tissu interstitiel était épaissi; qu'une partie des tubes nerveux avait disparu ; que dans la substance grise l'élément con- jonctif était très-augmenté; que les noyaux de la névroglie y étaient beaucoup plus nombreux qu'à l'état normal; que les parois vascu- laires étaient épaissies ; que la cavité anormale était limitée dans les points où l'épithélium manquait par un tissu fibrillaire renfer- mant des noyaux ; que la membrane par laquelle la cavité anormale était fermée au niveau des racines postérieures était composée de vaisseaux très-fins à parois épaisses. Ces lésions sont celles de la myélite interstitielle; c'est à elles, selon nous, qu'il faut attribuer le premier rôle dans l'évolution des phénomènes morbides; en en- travant la nutrition des éléments nerveux, elles en ont amené l'atro- phie; l'altération de la substance grise a eu pour conséquence celle des racines antérieures et des muscles correspondant aux parties lésées (V. plus bas). La formation de la cavité anormale a eu pour causes principales l'atrophie de la substance grise et la régression des produits morbides; la prolifération des cellules épendymaires a pu y contribuer, mais comme élément tout à fait accessoire. M. Schtippel invoque contre l'existence d'une myélite l'absence des symptômes habituels de cette affection ; nous ferons remarquer à cet égard que la lésion a porté principalement sur la substance grise, que cette partie de la moelle n'est pas excitable, que les impressions sensitives et les incitations volontaires continuent à être transmises tant qu'elle n'est pas détruite en totalité ; il n'y a donc pas lieu de s'étonner si le plus souvent ses lésions ne se traduisent pas par les troubles fonctionnels que l'on observe habituellement dans les myé- lites périphériques; mais elles ne restent pas pour cela silencieuses, un certain nombre de faits bien observés permettent aujourd'hui 193 d'affirmer que les muscles sont troublés dans leur nutrition et s'atro- pbient toutes les fois que les cellules des cornes antérieures sont al- térées; or, chez le malade de M. Schûppel, il existait depuis sept ans des paralysies et des atrophies musculaires; l'argument tombe ainsi de lui-même. Nous croyons pouvoir, après cette discussion, rapprocher, au point de vue de l'anatomie pathologique, cette observation de la nôtre, et rapporter, dans les deux cas, la formation de la lacune à l'existence d'une myélite centrale, ou, pour mieux spécifier, péri-épendymaire. Les observations dans lesquelles on a constaté la présence de ca- vités anormales au centre de la moelle peuvent être partagées en deux groupes : dans les unes, la lésion est le résultat d'une inflam- mation ; dans les autres elle dépend d'une hydropisie congénitale du canal central, d'une hydromyélie tout à fait analogue à l'hydrocé- phalie et due probablement comme elle à une anomalie de dévelop- pement. Quelques faits, ceux de Morgagni, de Portai, de Rochetti, de Sénac sont rapportés avec trop peu de détails pour qu'on puisse les classer. Parmi les cas de simple hydropisie, on doit ranger d'abord tous ceux dans lesquels on a constaté un dédoublement du canal central (i), car cette lésion a été trouvée à l'autopsie d'individus qui n'avaient présenté aucun symptôme (2) d'affection médullaire et qui, pour la plupart, étaient atteints simultanément d'hydrocéphalie. Tels sont les faits de M. Galmeil (3), deFriedreich (4j, de Cyon (5), de Brenner (6), d'Ammon (7), de J. Wagner (8), de M. Jolyet (9). Les faits dhydromyélie simple, dans lesquels il n'y avait au centre de la moelle qu'un seul canal plus ou moins dilaté, sont moins nombreux; nous (1) Voy. Nonat, loc. cit. (2) Il faut en excepter cependant une observation de Friedreich. (3) Calmeil, Journal des progrès des sciences médicales. (4) Friedreich, (Virah. Arch., XXVI). (5) Cyon, Communication orale. (6) Brenner, Misceil. nat. Curios., déc. III ann. (.7) Gall et Spurzheim, Anat. et phys. du système nerveux. Paris, 1810. (8) Wagner, Reicqertu. Dubois-Raymond Arch. 18G1. (9) Jolyet, Gaz. méd., 1866. MÉM. 1869. 13 194 citerons seulement ceux de Bonet, de Frommann (1), de Schtippel (2). Nous comprenons dans notre premier groupe, outre l'observation de M. Schtippel et la nôtre, celles de MM. Nonat, Koehler, Andral, Lan- dau, RuUier, Duchenne (de Boulogne) et GuU. Une courte analyse de ces différents faits suffira, croyons-nous, pour justifier notre manière de voir, bien qu'on ne puisse avoir à cet égard de certitude absolue, en l'absence d'examen histologique. FAIT DE M. NONAT (RÉSUMÉ). X entre à l'Hôtel-Dieu en septembre 1836, à l'âge de 34 ans; il présente depuis un an les symptômes d'une myélite chronique ; il est paraplégique ; les membres inférieurs sont le siège de crampes et de mouvements spasmodiques ; la sensibilité y est abolie ; le rectum et la vessie sont paralysés, les membres inférieurs œdématiés; des eschares se sont formées à la région sacrée. Le malade meurt en oc- tobre 1836. A l'autopsie on constate l'injection des vaisseaux super- ficiels de la moelle; de la quatrième cervicale à la troisième dorsalie l'organe est tuméfié, il remplit tout le canal médullaire ; son tissu est ramolli, grisâtre, demi-transparent ; c'est à peine si l'on y peut dis- tinguer quelques vestiges de la substance grise ; des vaisseaux dé- liés s'y ramifient ; au centre, on ne voit plus qu'une trame celluleuse dont les mailles sont infiltrées de sérosité ; au niveau de la cinquième cervicale, on trouve au milieu de la substance ramollie un foyer apoplectique ; enfin le centre de la moelle est creusé, depuis la hui- tième dorsale jusqu'au-dessus du calamus, d'un canal qui laisse échapper au moment oii on l'incise un liquide séreux; cette cavité est cloisonnée par les brides celluleuses et tapissée par une mem- brane d'aspect fibreux qui mesure environ 1 ligne et demie d'épais- seur; vers son extrémité droite, elle s'élargit et s'avance dans le cordon latéral; au cou, elle est séparée par une cloison du foyer apoplectique. M. Nonat considère la cavité anormale comme un foyer hémorrha- gique dont le contenu se serait résorbé. Rien n'empêche en théorie d'admettre cette pathogénie : Levier (3) cite deux faits dans lesquels (1) Frommann, loc. cit. (2) Schuppel, Arch. der Heilkunde, 1864. (3) Levier, Beitrage z. Pathol. Ruckenmarks apoplexie Bern, 1864. 195 on a trouvé la partie centrale de la moelle occupée dans la plus grande partie de sa hauteur par un épanchement sanguin ; mais la description de M. Nonat ne nous semble pas en rapport avec une semblable hypothèse ; on connaît bien les caractères objectifs des anciens foyers apoplectiques dans les centres nerveux ; les maté- riaux hématiques ne se résorbent pas complètement, les parois du foyer conservent d'habitude indéfiniment une coloration plus ou moins intense ; il est très-douteux que dans l'encéphale les foyers hémorrhagiques soient susceptibles de se transformer en de simples kystes séreux; rien n'autorise à admettre qu'il en soit autrement dans la moelle. D'autre part, la multiplication des vaisseaux, la pré- sence dans la cavité de cloisons celluleuses ne peuvent laisser de doute sur la nature phlegmasique des lésions ; nous croyons donc pouvoir, tout en faisant les réserves que nécessite l'absence de détails histologiques, considérer l'hémorrhagie comme secondaire et ranger cette observation à côté de la nôtre parmi les cas de myélite cen- trale. FAIT DE K(EHLER(1). Cas de myélo-méningite, cavité anormale au centre de la moelle. C.K..., âgé de 38 ans, éprouve d'abord des douleurs intenses dans le bras droit, puis dans les membres du côté gauche; bientôt la sensi- bilité et la motilité s'affaiblissent dans ces parties, les membres in- férieurs maigrissent et s'infiltrent, des eschares se forment au sa- crum, et, quelques mois après le début des accidents, le malade suc- combe. Autopsie. L'arachnoïde adhère à la pie-mère dans la région cer- vicale. La moelle est augmentée de volume, elle remplit presque complètement le canal;; sa consistance est amoindrie. Le sillon an- térieur est plus large qu'à l'état normal. Sur des coupes transver- sales on voit que la moelle n'est plus représentée que par un an- neau de substance blanche ; au centre il s'est fait, surtout aux dépens de la substance grise, une perte de substance; la lacune s'étend du bulbe à la septième dorsale; elle est entourée de tissu con- jonctif. (1) Kœhler, toc. cit. 196 FAIT DE M. ANDRAL (1). Le malade éprouve en 1818 une sensation d'engourdissement et de froid de l'index gauche, puis dans toute la main; bientôt tout le mem- bre s'affaiblit; il en est de même ensuite et successivement du mem- bre supérieur droit et des membres inférieurs. Eu 1826, les quatre membres sont contractures; la sensibilité y est obtuse. Il se forme des eschares au sacrum; le malade meurt. Autopsie. — En enlevant la pie-mère qui recouvre le sillon anté- rieur, on pénètre dans un canal contenant une notable quantité de sérosité ; ce liquide est infiltré dans les mailles d'un tissu cellulaire grisâtre. Le canal règne dans toute l'étendue de la moelle; il a ses plus grandes dimensions à la région cervicale. On ne voit plus trace de substance grise , de sorte que la moelle forme un long canal ré- sultant du rapprochement des faisceaux blancs. Les cordons anté- rieurs et postérieurs de chaque côté ne sont pas séparés par un sil- lon latéral ; seulement, à leur point de jonction, la substance ner- veuse forme une couche peu épaisse, presque transparente qui laisse voir le liquide infiltré dans l'intérieur de la moelle. FAIT DE M. LANDAU (2). Le malade a eu pendant plusieurs années de la paralysie avec aneslhésie des membres inférieurs. Autopsie. — La substance grise est détruite dans toute son éten- due; une tumeur du volume d'un œuf de pigeon, de forme ovoïde, rougeâtre, occupe le centre de la partie inférieure du renflement cervical. Cette tumeur est enveloppée, ainsi que la substance grise ramollie qui l'entoure, par une couche mince de substance blanche. A partir de cette région jusqu'en bas, la moelle est creusée dans sa partie centrale d'un canal rempli d'une sérosité citrine sans trace de substance nerveuse; les nerfs sacrés et lombaires sont atrophiés. FAIT DE RULLIER (3). Le malade a eu dans son enfance une déviation du rachis. A 34 ans, (1) OUivier, loc. cit. (2) Olivier, loc. cit. (3) Ollivier, loc. cit. 197 il éprouve de la gêne dans les mouvements des bras, des douleurs rachidiennes ; peu après survient brusquement une paralysie des membres supérieurs, puis une contracture des muscles fléchis- seurs de la main, le rachis se dévie. La mort survient sept ans après. La moelle n'est pas comprimée par la déviation; elle pré- sente, depuis la quatrième cervicale jusqu'au tiers moyen de la région dorsale, des lésions importantes; sa consistance est amoin- drie; il s'écoule, quand on la sectionne, une certaine quantité de liquide rougeâtre; elle est creusée au centre d'une cavité traversée par une grande quantité de filaments celluleux qui contiennent des vaisseaux ténus; au-dessous de la quatrième dorsale, la partie centrale conserve jusqu'à une certaine distance cette apparence cel- luleuse qui rappelle celle de certains foyers encéphaliques. Les ra- cines antérieures sont atrophiées dans toute la partie lésée. La multiplication des vaisseaux et la prolifération conjonctive suf- fisent à établir qu'il s'est agi dans ce cas d'une lésion inflamma- toire. FAIT DE M. DUCHENNE (dE BOULOGNE) (1). En 1847 était couché au n' 6 de la salle Saint-Félix un homme âgé de 38 ans, vigneron, atteint depuis sept ans d'une chorée générale avec afi'aiblissement musculaire. Cette affection était survenue sans cause connue et avait été précédée de douleurs rachidiennes très- vives. Malgré le traitement le plus énergique, la maladie n'a fait qu'empirer progressivement depuis le début, et a réduit le malade à l'état suivant : l'amaigrissement n'est pas très-considérable, les muscles oifrent partout des reliefs assez prononcés; dans la po- sition verticale, la tête et le corps sont tellement agités que la sta- tion est impossible; dans la position horizontale, le moindre effort musculaire, soit des membres supérieurs, soit des membres infé- rieurs, excite un tremblement général. Quand le malade veut pren- dre quelque chose, ses bras décrivent des arcs de cercle et se dirigent du côté opposé; l'affaiblissement musculaire est considérable, le malade marche à peine à l'aide d'un bras, il ne peut serrer la main. La voix est saccadée par les secousses convulsives du dia- phragme ; pas d'anesthésie cutanée ; état général satisfaisant. La con- (1) Duchenne (de Boulogne), De lélectrisation localisée. 198 tractilité électro-musculaire a été trouvée normale dans tous les muscles. Plusieurs mois après, l'autopsie est faite par M. Racle. On trouve la moelle amincie dans une étendue de 4 à 5 centimètres ; coupée en travers, elle ne présente que de la substance blanche; la substance grise a complètement disparu; la place de cette substance ne présente qu'une coloration rosée; un canal manifeste existe dans chacune des moitiés de l'organe, et l'on peut y introduire sans elTort un stylet de 2 millimètres de diamètre. M. Duchenne (de Boulogne), qui a bien voulu nous communiquer cette observation, avait examiné la moelle avec M. Racle. D'après ses souvenirs, qui sont très-précis, la lésion offrait exactement le même aspect que dans notre cas ; la lacune occupait le centre de la moelle; dirigée transversalement, elle s'agrandissait dans ses parties laté- térales ; elle était entourée d'une couche de tissu analogue à la couche scléreuse qui dans nos préparations limite la perte de substance. La description symptomatique complète que contient cette observation, lui donnerait une grande valeur si l'examen histologique ne taisait pas défaut; on ne voyait rien à l'œil nu dans la substance blanche , mais cela ne prouve pas qu'il n'y eût pas de lésions ; plusieurs fois déjà nous avons constaté par l'examen microscopique des altérations importantes dans des moelles qui, à l'œil nu, avaient paru saines ; nous ne serions donc pas en droit de rapporter à la myélite centrale les singuliers troubles de motilité qui ont été notés chez ce malade. Nous ne tirerons qu'une conclusion de l'histoire clinique rap- portée plus haut : c'est que très-probablement la substance grise n'était pas complètement détruite, et que les cornes antérieures étaient en grande partie conservées , puisqu'il est expressément indiqué que les muscles offraient partout des reliefs assez pro- noncés. FAIT DE GULL (1). X. s'aperçoit qu'il ne peut plus mouvoir les cinquième et quatrième doigts de la main droite ; il éprouve dans cette extrémité une sensa- tion de froid ; onze mois plus tard, le médius s'affaiblit ; cinq semaines après le médius de la main gauche s'affaiblit à son tour et se fléchit ; (1) Wil. Gull, GuTs Hosp. RKP., 1862. 199 les mains diminuent rapidement de volume. Le malade entre à l'hô- pital quatorze mois après le début de la maladie ; la main droite est froide; la sensibilité y est amoindrie; les deuxième et troisième phalanges sont immobiles, légèrement fléchies; les espaces interos- seux sont déprimés, les éminences Ihénar sont effacées, surtout à droite. La courbure normale de la partie supérieure du rachis n'existe plus; la pression sur les apophyses épineuses provoque de la douleur. Autopsie. — La moelle est aplatie au cou ; ses dimensions trans- versales sont augmentées dans cette région. Les faisceaux blancs sont intacts. Le canal central est élargi depuis la cinquième ver- tèbre cervicale jusqu'à l'origine des troisième et quatrième paires dorsales. Sur une section transversale pratiquée au niveau de la septième paire cervicale, on voit une cavité quadrangulaire dont les angles répandent aux extrémités des cornes grises ; dans ce qui reste de substance grise, une petite partie des cornes antérieures, les cellules multipolaires ont conservé leur aspect et leur volume nor- maux. Les tubes sont sains, séparés seulement çà et là par des corps granuleux. Autour de la cavité, on voit une couche mince, grisâtre, que sa consistance permet de détacher comme une membrane. Sa surface interne est recouverte dans une partie seulement de son étendue par des noyaux que l'auteur tend à considérer comme épi- théliaux, sans rien aflirmer cependant. L'examen des muscles n'a pas été fait et l'on ne peut avoir l'entière certitude qu'ils étaient réellement atrophiés ; il faut reconnaître cependant que les détails de l'observation ne laissent guère de doute à cet égard. Pour ce qui est des lésions médullaires, l'insuffisance de la description histolo- gique en rend l'interprétation difficile. Nous croyons cependant pou- voir rejeter, pour les mêmes raisons que nous avons développées plus haut, l'hypothèse d'une hydromyélie chronique. Ce fait et ceux que nous avons rapportés précédemment présen- tent, au point de vue des lésions, une analogie incontestable avec le nôtre et celui de M. Schûppel; ce sont également, nous croyons l'avoir établi pour la plupart d'entre eux, des cas de myélite; ils viennent confirmer l'assertion émise en 1857 par Rokitansky (1) : • L'inflammation de la substance grise s'étend fréquemment à une (1) Rokitansky, loc. cit. 200 grande partie de l'axe médullaire ; elle peut laisser après elle, au centre de la moelle, une cavité cloisonnée par des tractus conjonc- tifs et remplie d'un liquide séreux. » Il nous reste à développer la dernière de nos conclusions : 6° Par l'effet de la sclérose, la moelle s^est atrophiée; les graves altérations qiCont subies les cornes antérieures ont eu pour résultat Catrophie d'une partie des racines, celle des nerfs qui leur font suite et des muscles correspondants. Nous^avons vu que l'atrophie des muscles est survenue chez notre malade peu de temps après l'apparition des troubles de la sensibilité et de la motilité , c'est-à-dire peu de temps après le début de l'affeô- tion médullaire; que les filets nerveux attenant aux muscles mala- des étaient altérés; que les muscles les plus atrophiés étaient préci- sément ceux dont les nerfs moteurs émanaient des parties les plus altérées de la moelle ; ces diverses particularités suffiraient à faire rejeter l'idée d'une simple coïncidence entre les lésions des muscles et celles de la moelle : on ne peut douter qu'il existe entre elles une relation de cause à effet, si l'on compare les observations d'atrophie musculaire dans lesquelles la moelle a été examinée avec les pré- cautions nécessaires; en effet, dans un cas d'atrophie musculaire pro- gressive, M. Hayem (1) a constaté la disparition d'un grand nombre de cellules des cornes antérieures; dès 1860, M. Luys avait sigoalé dans un fait analogue la destruction des mêmes éléments ; dans des observations de Valentiner (2), de Virchow (3), de Frommann (4), de Thudicum et Glarke (5), de Leubuscher (6), de MM. Charcot et Jof- froy (7), des atrophies musculaires sont venues s'ajouter à d'autres (1) Hayem, loc. cit. (2) Valentiner, Bayer, Vierteuahr., 1855, cités par M. Hayem. (3) Virchow^, Ar^ihiv., 1855. (4) Fromraan, Deutsche Klinik, 1859. (5) Thudicum et Clarke, Beale's Archive of med,, 1863. Dans ce fait on a noté, en même temps que le ramollissement des faisceaux blancs, la présence au centre de la moelle d'une masse sombre, formée d'élé- ments celluleux et de fibres déliées. La substance grise était altérée. Au point de vue clinique, l'observation offre beaucoup d'analogie avec celles de MM. Schuppel et Gull. (6) Leubuscher, Dectsche Klinik, 1857. (7) Charcot et Joffroy, Arch. de physiol. , 1869. ?ot symptômes de myélite et l'on a trouvé à l'autopsie des lésions de la substance grise; dans un cas d'hématomyélie, publié par Levier(J). la moelle était ramollie dans une hauteur de 20 centimètres en même temps que les muscles des parties paralysées étaient atrophiés; M. Prévost (2) a trouvé chez un individu atteint de paralysie infantile une atrophie des cornes antérieures; nous avons vu enfin dans les cas de Gull et de Schûppel (3) l'atrophie musculaire constituer la seule manifestation apparente d'une altération de la moelle qui avait abouti àla destruction partielle de cet organe et particulièrement de la substance grise. Notre fait vient s'ajouter à ceux que nous venons d'énumérer pour prouver que les altérations des cornes antérieures, et plus spécialement de leurs cellules motrices, déterminent dans les muscles, ainsi que l'a établi M. Hayem (4), des troubles de nu- trition qui aboutissent à l'atrophie. Notons en passant que dans notre observation comme dans celles de MM. 0. Schûppel et Hayem, les muscles n'étaient pas simplement atrophiés, que leurs noyaux étaient multipliés comme dans la myo- site parenchymateuse ; l'atrophie de ces organes ne peut donc être considérée dans ces différents cas comme une lésion purement pas- sive due à la suppression de l'influence trophique que la substance grise exercerait sur leur nutrition; elle est liée à un processus irri- tatif dont le point de départ doit être cherché dans la moelle, siège des lésions initiales; dans les trois observations auxquelles nous fai- sons allusion il existait, en effet, des signes de myélite interstitielle; (V. Hayem, loc. cit. — Vulpian, Cow^s de la Faculté.) La découverte de la corrélation entre les atrophies musculaires et les altérations des cornes antérieuresn'estpas seulement intéressante au point de vue de la physiologie pathologique; elle constitue un progrès important dans l'histoire clinique des affections médullaires , car elle peut permettre jusqu'à un certain point de locahser la lé- sion, de telle sorte qu'aujourd'hui , si l'on voit survenir chez un individu présentant les signes d'une myélite chronique l'atrophie d'un certain nombre de muscles, on peut dire, avec une certitude (1) Levier, loc. cit. (2) Prévost, Mém. de la Soc. de biologie, 1865. (3) C. Schtippel, Gull, (oc. cit. (4) Hayem, loc. cit. 202 presque entière, que la substance grise est atteinte; il n'y aurait qu'une chance d'erreur; dans le cas où la contractilité électrique serait abolie, l'atrophie musculaire pourrait dépendre d'une lésion concomitante des troncs nerveux (1); mais alors la distribution des lésions trophiques correspondrait exactement à celle des nerfs, et ce seul fait permettait d'établir le diagnostic. Les observations que nous avons réunies dans ce travail montrent qu'il existe une forme de myélite dans laquelle les lésions portent principalement sur l'épendyme et le tissu connectif des commis- sures. Elle est anatomiquement caractérisée par la présence au cen- tre de la moelle d'une masse de tissu réticulé, riche en éléments nucléaires, offrant dans sa structure une grande analogie avec la névroglie dont il est manifestement dérivé et renfermant de nombreux vaisseaux dont les parois, le plus souvent sclérosées, peuvent se rompre et donner lieu ainsi à de petites hémorrhagies (faits de Lancereaux et de Nonat). Au bout d'un certain temps, le tissu morbide subit diverses transformations; tantôt il s'indure, et l'on trouve alors au centre de la moelle un cordon solide, de con- sistance fibreuse; tantôt ses éléments s'atrophient et se détruisent en partie; la moelle se creuse de cavités que cloisonnent souvent des filaments celluleux; la présence à leur périphérie d'une cou- che scléreuse indique habituellement leur origine inflammatoire; le canal épendymaire subsiste quelquefois au milieu du tissu de nouvelle formation ; d'autres fois il disparaît complètement; les élé- ments de l'épendyme peuvent se multiplier et constituer des amas cellulaires plus ou moins considérables; souvent il existe en même temps, dans les autres parties de la moelle les lésions d'une sclérose diffuse plus ou moins avancée. La substance grise s'atrophie en partie ou en totalité. Les observations de myélite périépendymaire sont trop peu nom- breuses pour qu'on puisse dès aujourd hui tracer l'histoire clinique de cette affection; les histoires de malades que nous avons rapportées offrent cependant un certain nombre de traits communs dont la réu- nion pourrait faire reconnaître la nature de la lésion. Dans les faits (1) V. Jaccoud, Leçons de clinique médicale; 1867, De Calropliie nerveuse progressive. 208 de Schtippel, de Gull, de Thudicura, de Mayer (1), la maladie débute brusquement par l'apparition de paralysies disséminées ; elles frap- pent d'abord isolément quelques muscles dans l'un des membres, ordinairement dans l'une des extrémités supérieures, puis dans le membre opposé, puis dans les membres inférieurs; quelquefois les muscles affectés sont le siège de mouvemens involontaires ; bientôt ils perdent la contractilité électrique; au bout d'un certain temps ils s'atrophient, souvent avec une grande rapidité ; on observe alors les mêmes déformations, les mêmes attitudes vicieuses que dans l'atrophie musculaire progressive. On a vu la paralysie s'étendre à la plus grande partie du système musculaire et les malades succomber à l'asphyxie causée par la paralysie des muscles inspira- teurs (fait de Thudicum). Ces troubles de motilité sont, pour ainsi dire, les seuls symptômes que l'on ait observés dans les cas où la myélite centrale existait seule, sans complication de sclérose péri- phérique. Dans l'un d'eux, cependant, on a noté des anesthésies par- tielles, mais dans aucun on n'a observé dans la sphère de la sensi- bilité les graves désordres que l'on a considérés comme un des si- gnes caractéristiques de la myélite centrale aiguë (2). C'est que dans cette dernière affection, tout l'organe est malade; ou ne saurait ad- mettre qu'une phlegmasie intense se produise dans le centre de la moelle sans qu'il y ait en même temps dans la substance blanche des troubles de vascularisation ; l'interprétation physiologique des symptô- mes se trouve ainsi entourée de sérieuses difficultés et l'on court le ris- que de rapporter à la myélite centrale des symptômes liés aux alté- rations périphériques. L'expérimentation physiologique a montré que la conservation d'une petite partie de la substance grise suffi- sait à assurer la transmission des impressions sensitives; c'est ce qui explique comment dans la sclérose centrale, qui généralement n'at- teint pas la totalité de la substance grise, les troubles de la sensibi- lité n'ont habituellement qu'une importance secondaire. Les incita- tions motrices continuent également à être transmises, excepté aux nerfs dont les noyaux spinaux se trouvent détruits. (1) L. Mayer, Ein Fall von allgemeiner progressiven muskelatro- phie. ViRCHOw's Archiv. B. 26. (2) Engelken, Beit z. Palh. d. aculen Myelitis. Zurich, 1867.— Sachse ueber Myelitis, Berlin, 1867. 204 M. Ducheune (de Boulogne) a décrit avec une remarquable préci- sion ce complexus symptomatique sous le nom de paralysie générale spinale subaiguë (1). Il a montré que cette affection se distinguait nettement de l'atrophie musculaire progressive, par la brusquerie du début, par l'abolition de la contractilité électrique, par l'ordre de succession des symptômes, par le pronostic, beaucoup plus grave dans l'atrophie musculaire progressive. La paralysie infantile offre plus de ressemblance avec la myélite centrale; elle s'en distingue néanmoins par sa marche; elle débute en effet brusquement par la paralysie de tout un membre, pour se localiser ensuite à certains muscles; dans le sclérose centrale, au contraire, les paralysies sont dès l'abord limitées à certains groupes de muscles; la paralysie infantile tend, au bout d'un certain temps, à la guérison, tandis que dans tous les faits de myélite centrale que nous avons pu réunir, la marche de la maladie a été progressive. En résumé on voit, par la description qui précède, que la myéUte chronique centrale est une affection aussi nettement définie par ses caractères cliniques que par ses lésions et qu'elle mérite une place dans le cadre nosologique. Les observations de GuU, de Mayer, de Thudicum, de Schûppel, montrent qu'elle peut exister seule, indé- pendamment de toute complication. Plus souvent les lésions inflam- matoires envahissent également soit primitivement, soit consécuti- vement la substance blanche; le tableau est alors plus complexe: aux paralysies et aux symptômes d'atrophie musculaire viennent s'ajouter des signes de myélite diffuse périphérique, des contrac- tures si les altérations occupent surtout les cordons latéraux, de l'ataxie des mouvements et des troubles de la sensibilité ; si elles intéressent les cordons postérieurs et les prolongements spinaux des racines sensitives(2). (1) Duchenne (de Boulogne), Traité de C éleclrisation localisée. Deuxième édition, observation XXXV. (2) On peut distinguer au point de vue clinique trois variétés prin- cipales de sclérose diffuse : la sclérose périphérique, la sclérose cen- trale ou péri-épendymaire et la sclérose mixte, dans laquelle les carac- tères propres aux deux variétés précédentes se touvent réunis. Ce sont très-probablement les mêmes affections que M. Duchenne (de Bou- logne a décrites sous le nom de paralysies générales spinales. 205 Oa peut se.demander alors si riuflammation a porté d'abord sur la périphérie de la moelle pour se propager ensuite à la substance grise, ou si c'est, au contraire, une myélite centrale qui s'est étendue de proche en proche aux faisceaux blancs ; la marche des accidents pourrait, dans certains cas, éclairer le diagnostic: si les atrophies musculaires avaient marqué le début de la maladie, les probabilités seraient eu faveur d'une altération primitive du tissu conneclif cen- tral; si, au contraire, elles avaient été précédées de contractures, d'hypéresthésies, de phénomènes ataxiques, on devrait admettre plutôt la propagation à la substance grise d'une myélite périphé- rique. Dans les cas où les lésions restent limitées au pourtour del'épendyme sans s'étendre aux cornes antérieures, elles demeurent probablement silencieuses ; c'est du moins la conclusion que l'on peut tirer des observations de Gull et de Schûppel, dans lesquelles les paralysies et les atrophies musculaires, c'est-à-dire les symptômes dus aux al- térations des cornes antérieures, ont été les premières manifesta- tions de la maladie, alors que probablement il existait, depuis un certain temps, des lésions centrales. Les parois du canal central n'auraient donc pas la propriété que l'épendyme encéphalique par- tage avec les méninges de réagir vivement contre les excitations et de provoquer par action réflexe des contractures et des convulsions sous l'influence de lésions quelquefois peu considérables. Telles sont les données que la comparaison du petit nombre de faits connus dans la science nous fournit sur les lésions, l'évolution et les caractères cliniques de la sclérose péripendymaire ; nous es- pérons qu'elles présenteront assez d'intérêt pour attirer l'attention sur cette forme peu connue jusqu'ici de myélite chronique. SUR LA TEMPÉRATURE DES NOUVEAU-NÉS Note présentée à la Société de Biologie PAR M. LE Docteur R. LÉPINE. Les recherches qui sont la base de cette note ont été faites à l'hôpital Saint-Antoine dans le service de mon excellent maître M. Lorain. Elles ont porté sur plus de cent enfants qui ont été observés avec soin pendant les huit premiers jours de la vie extra- utérine. La température de ces enfants était prise au moins deux fois par jour dans le rectum, toujours avec le même thermomètre dont la graduation a été vérifiée. L'instrument, dont le réservoir avait une forme allongée, était enfoncé à une profondeur suffisante et maintenu quelques minutes en place. Dans plus de dix cas, la température a pu être prise à l'instant même de la naissance. Or, dans tous les cas, elle était supérieure de 2 dixièmes de degré centigrade (et quelquefois un peu plus), à la température du vagin ou du rectum de la mère qui atteignait gé- néralement 37°, 5. Ces résultats s'accordent avec ceux que divers observateurs ont (1) Monatschrift fur Geburtskunde, 1862, Bel, 20, s. 413. 208 publiés dans ces dernières années. Ils tendraient à confirmer l'opi- pion de Bœrensprung (i) que le fœtus est plus chaud que l'utérus dans lequel il est contenu. Si, en effet, on se fie aux chiffres qui d'après quelques auteurs et notamment d'après Schrœder (2), ex- priment l'écart de température qui existe entre le vagin et l'utérus gravide, on voit que cet écart ne dépasse pas et n'atteint même pas 2 dixièmes de degré. Mais en accordant pour un instant que la tem- pérature du fœtus puisse être plus élevée que celle de l'utérus, ou ne prétend pas dire, ainsi que l'ont avancé quelques physiologistes, que le fœtus produise plus de chaleur que l'adulte. Il faut tenir compte de ce fait que, dans la cavité utérine, il n'a pas à supporter la déperdition considérable de calorique à laquelle est soumis l'ani- mal qui vit dans un milieu à température relativement basse. En résumé, rien ne prouve que le fœtus produise plus de chaleur que l'adulte et il n'est même pas rigoureusement démontré qu'il soit plus chaud que l'utérus dans lequel il est contenu. Aussitôt après la naissance la température de l'enfant baisse, ainsi qu'on le sait depuis longtemps, avec une grande rapidité, si la tem- pérature du milieu ambiant est peu élevée (2); mais j'ai remarqué à cet égard une différence des plus tranchées entre les enfants ro- bustes et les enfants débiles. Lavés avec de l'eau peu chaude, ou bien abandonnés une demi-heure à la température de la salle d'ac- couchements (15° à 17°) avant d'être vêtus d'une manière suffisante (ce qui arrivait forcément lorsque plusieurs enfants naissaient en même temps), les seconds présentaient une température de 33°, tan- dis que les premiers conservaient une température presque normale ou peu inférieure à 36°. Cet abaissement, de la température chez les enfants débiles n'est d'ailleurs que passager, peu d'heures suffi- sent pour qu'elle soit revenue entre 36° et 37°. Il est tout à fait ex- ceptionnel qu'au bout de vingt-quatre heures ce chiffre ne soit pas atteint. J'arrive maintenant au sujet que j'ai spécialement étudié, la tem- pérature de l'enfant pendant les huit premiers jours ; mais je désire tout d'abord faire observer que les enfants sur lesquels j'ai fait mes recherches ne peuvent être considérés comme se trouvant dans des (1) ViRCHOw's Archiv., XXXV, s. 264. (2) Voy. H. Roger, Archiv. générales de médecine, 1844. 209 coiidilions parfailement normales. La plupart étaient mal nourris par leur mère, plusieurs allaités artificiellement : peut-être aussi étaient-ils couverts dans leur berceau d'une manière insuffisante ; car ils avaient souvent les pieds froids. Les résultats qui suivent n'ont donc aucune valeur absolue. Us nous renseignent seulement sur la température des enfants nés à l'hôpital et élevés dans des conditions défavorables. Ces réserves faites sur la signification des chiffres suivants, voici en résumé ce que j"ai constaté. En premier lieu, c'est une différence assez notable entre la tem- pérature moyenne des enfants d'un gros volume et celle des en- fants de petit volume. Elle est d'au moins 2 à 3 dixièmes de degré. Afin d'être bien assuré de la réalité de ce fait, j'ai apporté le plus (rrand soin à la composition de deux groupes d'enfants qui ne dif- féraient que par le poids. Le poids moyen (à la naissance) des en- fants du premier groupe était 3\890, et la température 36°, 85; celui (les enfants du deuxième groupe était 2'', 760 et leur température était 36°,63. On sait qu'aussitôt après la naissance le poids des enfants di- minue pendant quelques jours (deux ou trois jours généralement). A l'hôpital cette période de perte de poids dure généralement da- vantage, et l'accroissement qui lui succède est ordinairem.ent assez lent pour que, au huitième jour, la plupart des enfants n'aient pas encore recouvré leur poids primitif; quelques-uns au huitième jour continuaient à perdre en poids ou tout au moins ne gagnaient pa.s d"une manière notable. Or j'ai voulu comparer sous le rapport de la température moyenne les enfants dont le poids du cinquième au huitième jour était graduellement croissant avec ceux dont le poids n'augmentait pas. J'ai, dans ce but, fait deux catégories, chacune de douze enfants, d'où étaient exclus les plus gros et les plus petits, afin (lue chacune d'elles fiit composée d'éléments homogènes. Dans la première (enfants gagnant en poids), la température moyenne était 36°, 83; dans la deuxième, 36", 62. Ces résultats sont conformes à ceux qui ont été signalés par M. Martins, lequel a fait ses observations sur deux bandes de ca- nards dont l'une recevait une nourriture plus abondante que l'au- tre M). ;'l] Journal DE i.A riivsioLOGiE. I, 1S5S. MF.M. 1«G9. 14 210 En terminant je ferai remarquer, mais sans vouloir y insister, que les enfants dont le nombril est rouge, induré et suppure au moment de la chute du cordon, ont, toutes choses égales, une tempé- rature généralement supérieure à ceux dont le cordon se détache sans suppuration ni inflammation. On trouvera peut-être les chiffres qui précèdent généralement trop peu élevés. 3 ai prévenu que les enfants que j'ai observés étaient dans des conditions particulières; encore ai-je pris soin de laisser rigoureusement de côté tous ceux qui paraissaient malade?, même à un faible degré. DESCRIPTION d'un MONSTRE GÉLOSOMIEN SUIVIE DK QUELQUES CONSIDÉRATIONS SUR LA PARTURITION Mémoire lu à la Société de Siologie M. EDMOND CHAMBON Médecin vétérinaire. Le monstre dont je vais avoir l'honneur de faire la description à îa Société de biologie appartient à la famille des Célosoraiens (clas- sification de M. Isidore-Geoiïroy Saint-Hilaire); il provient d'une vache, à l'autopsie de laquelle il a été recueilli, le 20 mai 1869, par M, Savary, vétérinaire, à Gros-Bois. Ce sujet monstrueux a été apporté à l'École impériale d'Alfort et déposé au service d'anatomie. M. le professeur Goubaux a eu l'o- bligeance de m'en offrir la dissection et de me guider dans l'étude de cet être anormal. Je disséquai ce monstre pendant les derniers jours du moi de mai, alors que j'achevais ma quatrième année d'études à lÉcole d'Al- fort. Je diviserai ce mémoire en deux parties : la première comprendra létude du sujet au point de vue de l'anatomie; dans la seconde j'entrerai dans quelques considérations sur la parturition. '212 {" CoNFOUiMATlON EXTÉRIEURE DE l'|.M>1V1DU MONSTRUEUX. Le sujet appartient à l'espèce bovine et est du sexe masculin. Il provient d'une vache cotentine, de forte taille, âgée de 3 à 4 ans, et d'un taureau de môme race, âgé de 5 à 6 ans; il était au terme de la gestation quand le travail de la parturition voulut s'opérer, mais en raison de sa conformation anormale il ne put franchir les détroits du bassin, malgré tous les efforts tentés par M. Savary, qui, jugeant l'ac- couchement impossible, conseilla au propriétaire de l'animal de le faire sacrifier pour la boucherie. A l'autopsie, on retira de la matrice de la vache le veau monstrueux dont je vais vous faire la description ; j'ajouterai, que, d'après les renseignements communiqués à M. Gou- l)aux par M. Savary, la mère de ce fœtus s'est toujours bien portée, qu'on n'a remarqué pendant la gestation ni chute ni frayeur, que la seule chose qu'on ait observée, c'est que vers le septième mois de la gestation, on craignit pendant plusieurs jours un avortement; il y a eu à cette époque un peu de congestion sur les organes génitaux et les mamelles, et la sécrétion lactée avait augmenté. Pour décrire ce monstre, je le placerai dans la position qu'il occu- pait dans la matrice de sa mère, c'est-à-dire reposant par sa face ven- trale sur la paroi inférieure de l'utérus, le grand axe antéro-posté- rieur et la tête dirigés en avant; je lui considérerai pour la clarté de la description, une face inférieure, une face supérieure et deux faces latérales, l'une droite, l'autre gauche. 11 importe de considérer ce monstre dans la position qu'il devrait occuper s'il était soutenu nor- malem.ent par ses membres afin de se rendre compte de l'inversion qu'ont subie la colonne vertébrale et le bassin, et le changement de direction qu'ont éprouvé les membres postérieurs. La tête est normale dans sa conformation extérieure, les lèvres sont régulièrement conformées; en écartant les mâchoires l'une de l'autre, on s'aperçoit que le palais est le siège d'une fissure longitudi- nale à laquelle participe le voile du palais; on voit par cette fissure palatine l'intérieur des cavités nasales et surtout les cornets et le bord inférieur du vomer. Je reviendrai sur la disposition de cette fissure palatine que je décrirai complètement en indiquant le résultat de la dissection de la tête. J'indiquerai ici les dimensions de cette partie du corps de ranimai, et ces quelques chiffres auront leur importance pour la deuxième partie de ce travail, où j'entrerai dans quelques détails relativement à la parturition de ce monstre et de quelques cas de monstruosités se rapprochant de celui-là. Hauteur au niveau du front, la tête reposant sur un plan par le bord inférieur de sa mâchoire O^jISO ?13 Largeur du front au niveau des orbites 0",130 Largeur de la tête au niveau de la base des oreilles. . . . 0",190 L'encolure ne présente aucune disposition anormale. Le tronc est le siège d'anomalies très-curieuses qui portent : a. Sur une inversion complète de la région spinale ; b. Sur un cnangement de position du bassin; c. Sur la projection des côtes en avant et en dehors ; d. Sur une éventration complète à laquelle participent la presque totalité du thorax, l'abdomen et le bassin. Le tronc, rectiligne dans sa partie antérieure, depuis le garrot jus- qu'à la partie postérieure de la région dorsale, subit en ce point une inversion de bas en haut d'abord, puis d'arrière en avant en décrivant une courbe à convexité postérieure et à concavité antérieure, de telle façon que la région des lombes et la croupe viennent se super- poser à la région dorsale et la recouvrent jusqu'au niveau du bord postérieur des épaules ou jusqu'à la partie postérieure du garrot; la queue est ramenée en avant et vient flotter sur le garrot et l'enco- lure. Le bassin, en raison de l'inversion qu'a éprouvée la colonne verté- brale, a subi un changement complet dans sa position et dans sa di- rection ; en effet, sa face supérieure est devenue inférieure, si nous considérons le sujet dans la position que j'ai indiquée, c'est-à-dire reposant sur un plan par sa face ventrale, et réciproquement la face inférieure est devenue supérieure et regarde en haut. Le bord pos- térieur du bassin ou la partie postérieure du bassin est dirigée en avant, et la partie antérieure, le détroit antérieur, est dirigée en ar- rière. Celte disposition anormale du bassin entraîne une anomalie dans la position des membres postérieurs; ceux-ci, en effet, n'occu- pent pas leur position normale : les cavités cotyloïdes des coxaux étant tournées en haut, il y a changement considérable dans la dis- positions des membres abdominaux, changement que je ne crois de- voir indiquer qu'après avoir décrit la position des membres thora- ciques, afin de pouvoir examiner la position qu'affectent les précédents relativement à ceux-ci. Les membres antérieurs sont bien conformés dans leur position normale et sont, sur ce sujet, dans l'extrême extension; lépaule est très-fortement inclinée sur le thorax, l'humérus est étendu sur le scapulum, et les autres rayons osseux de ces membres sont dans l'extension; ils ont leur extrémité antérieure dirigée en avant, ils re- posent sur le sol par le bord postérieur et reposaient par ce même bord sur la paroi inférieure de la matrice. Ils sont p'acés de chaque côto> de la léte, l'un à droite, l'autre à gauche, et se raeltent par leur face interne en rapport avec ia faeer latérale correspondante de la tête. Les membres postérieurs ont subi dans leur position un cliau- gement très- remarquable : leur face externe est tournée vers la ligne médiane (je rappelle encore ici qu'en disant face externe, je veux dire la face qui serait tournée du côté externe, si l'animal était nor- malement conformé) et, leur face interne, au contraire, est tournée en dehors; c'est là une disposition très-singulière qui tient à ce que le bassin a éprouvé une fissure sur sa symphyse, et si nous supposions l'animal placé dans l'attitude qu'il devrait avoir s'il n'existait pas une inversion du rachis, nous pourrions voir que les membres posté- rieurs seraient Irès-écartés l'un de l'autre par leur extrémité inférieure ; ils seraient chacun très-fortement obliques en dehors et en bas. Le bord postérieur des membres abdominaux est devenu supérieur et le bord antérieur est devenu inférieur, de telle façon que la face postérieure des onglons est tournée en haut et légèrement dirigée en avant. Chacun des membres abdominaux est placé en dehors du membre thoracique correspondant, et se met par sa face externe en rapport de contact avec ia face analogue du membre correspondant au bipède latéral. La position des membres abdominaux est une conséquence de l'in- version du bassin qui, présentant par- en haut sa face inférieure et présentant par en haut aussi et légèrement en dehors les cavités co- tyloïdes des coxaux, impliquait nécessairement une projection des membres en dehors, en bas et en avant en les inclinant vers la ligne médiane par leur face externe, tandis que leur face interne devrait être dirigée en haut et en dehors. Le thorax est le siège d'unefissure partielle intéressant la plus grande partie de sa région postérieure ; celle fissure a lieu parce que le ster- num est très-raccourci d'avant en arrière; mais toutes les côtes prennent leur appui ou sur le sternum ou les unes sur les autres, et la fissure thoracique existe plutôt en raison de la projection et du ren- versement que les côtes ont subis en dehors et en avant. En raison de cette disposition, la cavité thoracique, pourvue d'un sternum rudimeniaire dans sa partie antérieure, est largement ou- verte en arrière, et 1© poumon et le cœur sont flottants pour ainsi dire ; toutefois la face inférieure du thorax est fermée par une mem- brane filireuse, sur la disposition de laquelle je reviendrai en parlant du tégument extérieur de ce sujet monstrueux. Vabdumen est le siège d'une éventralion antéro-postérieure com- plète, grâce à laquelle les viscères abdominaux sont flottants à l'exté- rieur. Cette éventralion portait sur ses parties latérales les restes 215 aune membrane fibreuse sur laquelle je reviendrai un peu plus loin. La symphyse pelvienne est le siège d'une fissure anléro-poslérieure que je décrirai en faisant l'examen du squelette. Le tégument qui revêt ce sujet présente une disposition remar- quable. Il y a des régions où il présente les caractères de la peau par- faitement normale, et d'autres où il est constitué par une membrane de nature fibreuse, et au niveau du bassin, vis-à-vis le détroit anté- rieur de cette région, c'est la vessie qui est le siège d'une vaste fissure médiane qui, par chacune de ses moitiés latérales, se renverse en dehors et s'étend latéralement en avant et en arrière pour consti- tuer le tégument. Je parlerai plus longuement do cette particularité anatomique en décrivant l'appareil urinaire. J'ai dit plus haut que dans certaines régions la peau était parfaite- ment normale; en effet, elle se montre dans ces points avec une épais- seur normale, elle est revêtue de poils bien développés. La tête, l'encolure, la région du dos, des lombes, la croupe, la queue, les membres antérieurs et une partie des membres postérieurs sont revêtus de cette peau normale; sur la région dorsale, cette peau subit, comme les parties qu'elle tapisse, une inversion; elle se replie €t se met en contact avec elle-même par sa surface externe. La face ventrale de ce sujet monstrueux n'est pas revêtue par la peau, depuis le point correspondant à l'extrémité antérieure du ster- num, jusqu'à 2 centimètres au-dessous de l'anus. De chaque côté la peau s'étend, de la partie antérieure du sternum, en arrière en enveloppant le coude, puis elle suit la courbure décrite par l'extrémité inférieure des côtes; de là elle remonte jusqu'à quelques centimètres au-dessus des articulations fémoro-tibiales, et, en suivant le bord postérieur de la cuisse, elle va se terminer à 2 cen^ timètres au-dessus de l'anus. Toute la partie inférieure du thorax, l'abdomen et la face inférieure du bassin devenus supérieure, ainsi que la face interne des cuisses devenue externe, ne sont pas recou- verts par la peau, mais ont un tégument particulier se coritinuant avec la peau. La continuité de ce tégument anormal avec la peau n'a pas lieu sans transition; au point où finit ce tégument et où com- mence la peau, celle-ci se termine nettement comme si elle avait, été coupée avec un instrument très-trancharit. La paroi inférieure du thorax est fermée par une membrane fibreuse qui, par sa face supérieure, donne attache aux plèvres; cette mem- brane se continue et de chaque côté avec lu peau ; en arrière, elle se continue par une membrane de même nature, mais sur l'abdomen cette membrane n'existe que sur les parties latérales, car au milieu elle ^!0 n'existe pas. Mai?; dans ce point, les borils de la partie membranense' qui existe de chaque côté ne sont pas coupés régulièrement, ils sont au contraire déchirés et montrent des lambeaux, ce qui porte à croira que l'abdomen était clos à une certaine époque par une membranei fibreuse qui constituait un sac enveloppant les intestins. Plus en arrière, c'est la vessie qui sert de tégument à la face infé- rieure du bassin devenue supérieure par l'inversion de la colonne ver- tébrale, latéralement, l'expansion formée par la vessie se continue par une membrane fibreuse à la face interne des cuisses. Si maintenant je considère à ce sujet monstrueux une face supé- rieure, une face inférieure et deux faces latérales, et que j'examine, dans Tordre où ils se présentent d'avant en arrière les détails qu'on re- marque sur chacune de ces faces, voici ce qu'on observe. Sur la face supérieure : la tête, l'encolure, le garrot, la partie an- térieure du dos, et sur ces trois régions, la queue, puis la face infé- rieure du bassin avec l'anus, et postérieurement la partie postérieure de la région lombaire recouverte par la vessie séparée en deux moitiés symétriques et étendue en membrane. Sur la face inférieure : la face inférieure de la tête et de l'encolure, la fissure thoracique recouverte pas le tégument anormal qui sert de paroi inférieure à la poitrine, l'éventration de l'abdomen et les organes abdominaux. De chaque côté, les deux membres de chacun des bipèdes latéraux dans la position que j'ai indiquée plus haut. J'indiquerai ici, en vue de la question de parturition de ces monstres, quelques dimensions que j'ai prises sur le cadavre du sujet mons- trueux qui nous occupe, dimensions que je crois utile de gignalerpour tirer quelques conclusion au point de vue pratique. Longueur du sujet du bout du nez à la base de la queue 1°',16Q Longueur du tronc replié, mesuré depuis le bout du nez jusqu'au point de l'inversion de la colonne vertébrale 0'°,7.5& Longueur mesurée depuis le point de l'inversion de la colonne ver- tébrale jusqu'à l'extrémité inférieure des membres antérieurs, ceux- ci tendus en avant, le sujet reposant sur un plan par sa face ven- trale 0",880 Hauteur du sujet mesurée au garrot O^jTGO Largeur du tronc au garrot , 0"',22O Largeur au niveau des articulations fémoro-tibiales 0°',380 Hauteur au garrot mesurée depuis le sternum O^.IBO Hauteur de la croupe C™,230 Le poias total du sujet était de 28 kilogrammes 200 grammes. •217 11. Anatomie. A. SQUELETTE. Télé. — La tête n'offre rien à noter dans la conformation extérieure du crâne; la région de la face présente une particularité : il existe une fissure palatine complète établissant une large communication entre les cavités nasales proprement dites et la cavité buccale ; je reviendrai plus loin sur cette disposition anatomique en indiquant les notes que j'ai prises à la dissection du sujet. Colonise vertébrale. — A. Bégion cervicale. — La région cervicale présente sept vertèbres dont la disposition, les dimensions et les détails anatomiques sont parfaitement en rapport avec les os nor- maux. B. Région dorsale. — La région dorsale se compose de treize ver- tèbres, rien d'anormal par conséquent quant au nombre. De la première à la cinquième inclusivement, le rachis est recti- ligne d'avant en arrière, mais à partir de la sixième, il décrit une double courbure: l'une horizontale, à concavité tournée du côté gauche d'abord, puis à droite ensuite, l'autre verticale, s'effectuant de bas en haut et de dessous en dessus, commençant à la sixième vertèbre dorsale; elle est continuée par le reste de la région dorsale, les lombes et le sacrum. Eu raison de cette inversion, la région spi- nale décrit une courbure à convexité tournée en arrière et à concavité tournée en avant. J'ai indiqué plus haut que la région dorsale avait subi un change- ment de direction dans le sens horizontal; en effet, elle décrit dans ce sens, une double courbure; elle décrit de la sixième vertèbre in- clusivement à la neuvième, une courbure à laquelle participent les sixième, septième, huitième et neuvième vertèbres dorsales, courbure dont la concavité est tournée vers le côté gauche ; à partir de la neu- vième vertèbre dorsale jusqu'à la treizième, la région décrit une cour- bure latérale en sens inverse de la précédente, c'est-à-dire à concavité tournée du côté droit. La région dorsale est donc le siège tout à la fois, d'une inflexion longitudinale et d'une courbure latérale en deux sens différents. En raison du changement de direction dans l'axe du rachis, la face inférieure du corps des vertèbres est devenue postérieure. De. même, la face supérieure de la région annulaire devient antérieure.. Les apophyses épineuses des premières, deuxième, troisième et qua- trième vertèbres dorsales ne présentent point d'anomalie, mais à la cinquième commence une déformation qui va croissant dans les autres et qui est la conséquence du changement dans la direction de l'axe du rachis. 2IS L'apophyse épineuse de la cinquième vertèbre dorsale, au lieu d'être oblique de haut en bas et d'arrière en avant, comme cela se remarque à l'état normal, est à peu près perpendiculaire et décrit une légère courbe à concavité tournée en avant. La sixième présente cette même courbure suivant son grand axe, et de plus elle est soudée par son bord antérieur avec le bord postérieur de l'apophyse épineuse de la cinquième. Les apophyses épineuses des autres vertèbres sont soudées par leurs bords et forment dans leur ensemble une crête antéro-postérieure, si- nueuse, parallèle à celle décrite par le corps des vertèbres; on voit que sous l'influence de l'inflexion qu'a subie la colonne vertébrale, les dernières apophyses épineuses n'ont pas acquis leur développement. C. Bégion lombaire. — La région lombaire se compose de six ver- tèbres; elle a une direction légèrement oblique en haut et à droite; elle suit le mouvement d'inflexion commencé par la [région dorsale; elle éprouve de la première à la troisième vertèbre une incurvation à gauche en décrivant une courbure à concavité tournée vers le côté droit. Par suite de la courbure selon le grand axe de la région, la face su- périeure des première, deuxième, troisième vertèbres lombaires est devenue antérieure, et la face inférieure est devenue postérieure; dans les quatrième, cinquième, sixième vertèbres, la face supérieure est de- venue inférieure et la face inférieure est devenue supérieure. La portion annulaire des vertèbres porte chez les trois premières une apophyse épineuse bien conformée; chez les trois autres, au contraire, les deux parties latérales de la portion spinale, au lieu de se souder sur le plan médian, au niveau de la base de l'apophyse épineuse, por- tent chacune un prolongement épineux qui se met en contact, par son extrémité supérieure, avec la partie correspondante du prolongement épineux du côté opposé. Dans ce point, le canal rachidien a un dia- mètre exagéré, et il présente une forme triangulaire très-nettement évidente. La première vertèbre lombaire présente du côté droit une apophyse transverse qui, au lieu d'avoir une conformation en rapport avec celle des apophyses analogues de la même région, ressemble aux apophyses transverses de la région dorsale, et présente une surface articulaire qui se met en rapport de contigu'ité avec une côlo surnuméraire anormale- ment développée qui s''articule avec la treizièm.e vertèbre dorsale et la première lombaire. Les apophyses Iransverscs des autres vertèbres sont bien confor- mées. Le corps de la troisième vertèbre est le siège, tout près de son ex- 219 trêmitu antérieure et dans une certaine étendue de sa partie inférieure, d'une fracture qui est le résultat des manœuvres qu'a exécutées le pra- ticien appelé pour aider la mère de ce sujet dans le travail de la par- turition. Cette fracture intéresse une partie seulement du corps de la troisième vertèbre lombaire; dans la partie supérieure, c'est le liga- ment ou le fibro-cartilage intervertébral |qui a été rupture. Cette solu- tion de continuité opérée dans la région lombaire aurait pu être mise à profit pour opérer la parturition. Je reviendrai sur ce point en traitant la seconde partie de ce travail. Cales et sternum. — Les côtes sont le siège d'une déformation très- complète; elles ont subi un changement considérable dans leur direc- tion. Comme elles ne présentent pas la même disposition du côté droit et du côté gauche, je les examinerai successivement sur chacun des plans latéraux du thorax. a. Côté gauche. — Les côtes sont au nombre de treize; elles s'ar- ticulent par leur tête avec le corps des vertèbres qui leur correspon- dent; elles ont toutes subi un changement dans la direction de leur grand axe, car au lieu d'être obliques de haut en bas et d'avant en ar- rière, elles sont obliques de haut en bas et d'arrière en avant; le plan latéral du thorax, au lieu de décrire dans son ensemble, par sa face externe, une courbure antéro-postérieure, à concavité interne, décrit, au contraire, une courbure à concavité externe, tandis que le plan in- terne est convexe d'avant en arrière. Dans le sens vertical, la face externe de la paroi est concave, sa face interne est légèrement convexe. Si maintenant on considère les côtes isolément, voilà les détails qu'on observe : La première, la deuxième et la troisième sont, sauf une légère obli- quité en avant, normalement conformées. De la quatrième à la neuvième inclusivement, les côtes prennent naissance isolément, ou plutôt sont distinctes par leur extrémité supé- rieure qui est grêle, puis elles se soudent les unes aux autres par leurs bords correspondants au niveau de l'angle de la côte ; celte soudure se prolonge plus ou moins loin ; elle est complète entre la sixième et la septième côte, en raison de leur soudure ; les côtes forment de la qua- trième à la neuvième une pièce osseuse aplatie, ressemblant assez bien à un éventail. La dixième, la onzième, la douzième et la treizième décrivent, en s'inclinant en avant et en bas, une double courbure à concavité tour- née en haut et en dehors. Cette direction est la conséquence de l'inver- sion de la colonne vertébrale, car la face interne dans ces quatre der- nières côtes est devenui^ postérieure. Î2() b. Côlé droit. — Il y a qualorzft eûtes du côté droit; elles ont, comme celles du côlé gauche, subi une déformation générale, et !a paroi thoracique droite est très-incurvée sur elle-même dans le sens antéro-poslérieur, très-fortement concave par sa face externe, très- convexe par sa face interne. L'incurvation de la paroi thoracique est telle que la treizième côie vient se mettre au niveau (par sa face externe qui est tournée vers la ligne médiane) de la tête de la deuxième côte. Les côtes circonscrivent par leur face externe une cavité de forme conoïde dont le sommet cor- respondrait à la onzième et à la douzième côte, tandis que la base serait circonscrite, en avant, par le bord antérieur de la première côte et dans le reste de l'étendue par la courbe que décrivent les côtes par leur extrémité inférieure. La première, la deuxième et la troisième côte ne présentent rien de remarquable, si ce n'est toutefois qu'elles sont Ires-fortement obliques en avant et en bas. La quatrième, la cinquième et la sixième s'écarient de la ligne mé- diane par leur extrémité inférieure; dans la sixième, la face externe tend à devenir antérieure. La septième, la huitième sont très-déjetées en dehors par leur extré- mité inférieure. A partir de la neuvième, elles se rapprochent de la ligne médiane, mais elles ne sont plus obliques en avant et en bas, elles tendent à de- venir horizontales. Dans la neuvième, la dixième et la onzième côte, on observe que leur face interne qui est devenue postérieure par l'inversion est légè- rement concave suivant le grand axe, tandis que la face externe qui est devenue antéro-intense est légèrement convexe dans le même sens ; il résulte d'une telle disposition que ces côtes ainsi que celles que j'ai citées du côté gauche ont en principe une conformation normale, et que la position normale qu'elles occupent est le résultat de l'inversion du rachis par en haut. Les cartilages des côtes ont une di:-position commandée par l'ano- malie qui existe dans les parois costales. Il est très-difBcile de pouvoir fixer combien, de chaque côté, il y a de cartilages appartenant aux côtes sternales et combien il y en a qui appartiennent aux côtes aster- nales, parce que ces cartilages sont complètement soudés par leurs bords correspondants. Il y a lieu de croire que les cartilages appartenant aux côtes ster- nales sont au nombre de six ou sept du côlé gauche et au nombre de quatre du côlé droit. Les cartilages des côtes asternale? prennent d'arrière en avant appui les uns sur les autres par leur exlréniilé inférieure et décrivent une courbe non semblable de chaque côté. Du côté gauche la courbe est beaucoup plus surbaissée que du côté droit où elle est plus brève et remonte plus haut que du côté gauche, car, ainsi que je l'ai dit anté- rieurement, du côté droit la treizième côte vient se mettre au niveau de la tête de la deuxième côte par son extrémité inférieure. Le sternum est représenté par quelques noyaux osseux soudés en- semble et enveloppés de cartilage; la gangue qui enveloppe ces pièces est en continuité directe avec les cartilages costaux. Cet organe a été divisé dans sa partie postérieure, car on remarque dans le cercle cartilagineux auquel se terminent les côtes du côté droit, deux noyaux osseux placés bien au niveau de l'extrémité infé- rieure de la quatrième côte et l'autre à l'extrémité de la cinquième. Ces noyaux sont les représentants de la partie postérieure du sternum séparé sur la ligne médiane par une fissure antéro-postérieure. Bassin. — Le bassin a subi un changement complet, il est renversé de dessous en dessus, il continue en avant, en haut et à droite l'inver- sion de la colonne vertébrale. Tel qu'il se présente sur ce sujet, il est placé de telle façon que son grand diamètre est oblique de haut en bas d'avant en arrière et de droite à gauche, que le bord antérieur de chacun des iléons est dirigé en arrière et en bas, et que le bord pos- térieur des ischions est dirigé en avant et en haut; Que le sacrum est sur un plan déclive par rapport à la cavi;é du bassin, dont il se trouve ainsi être le plancher au lieu d'en constituer le plafond; Que le détroit antérieur est tourné en arrière et en bas au lieu d'être dirigé en avant. Quant au détroit postérieur, il n'existe pas; les deux pubis et les deux ischions ne se rejoignent pas sur la ligne médiane. Il y a donc un renversement complet du bassin de dessous en des- sus, ce qui devait être, la région inférieure étant devenue région su- périeure et réciproquement. Le sacrum est placé à la partie inférieure, sa face inférieure regarde par en haut, il est composé par cinq vertèbres; il s'articule en avant avant la dernière vertèbre lombaire et latéralement avec les iliums. Les deux coxaux sont articulés chacun avec Fangle antérieur cor- respondant du sacrum; ils sont complètement indépendants l'un de l'autre et ne se rejoignent pas par en bas pour constituer une sym- physe par les bords correspondants des pubis et des ischions. Le bassin présente une disposion très-semblable, mais un peu exagérée cepen- dant, au bassin des oiseaux. Le coxal est le siège, au niveau du col de l'iliiun, d'une lo'sion qui s'osl excculéo de bas (.Ml li;v,iL cl lit! dedans en dehors, lorsion en verlu de laquelle le bord inlerne du pubis et le bord analogue de rischium ont décrit un arc de cercle de bas en haut, de dedans en dehors. Il est résulté d'un tel mouvement que la face inférieure du pubis et de i'ischiura est devenue supérieure, qu'il y a eu un effet contraire pour la face supérieure, que le bord interne do i'ischium et le bord interne du pubis sont devenus externes et que le bord externe de I'ischium est devenu inlerne. Voilà l'anomalie que présentent chacun des coxaux quand on les considère indépendamment de l'inversion qu'ils ont subie. Si maintenant on envisage le coxal eu égard à sa position sur le squelette, on verra qu'en raison de l'inversion de l'axe du rachis, la face supérieure de l'ischmm est tournée en haut et que la face infé- rieure est dirigée en bas, et l'on ne peut pas expliquer comment il se fait que les faces de I'ischium soient dans leur position normale rela- tivement à l'axe du bassin sur ce sujet sans en attribuer la cause à l'in- version complète du rachis, car il est cerlain que si le bassin, avec la conformation particulière qu'il possède, était en continuité avec une région lombaire bien constituée et n'ayant pas subi d'inversion, la face supérieure do I'ischium serait devenue inférieure et réciproquement pour la face inférieure. B. DISSECTION. La Tête. — J'ai constaté en disséquant cette région que le crâne n'é- tait le siège d'aucune conformation anormale, mais que la face présen- tait une particularité notable et peu rare dans les monstres céloso- miens. Il existait une communication très-étendue entre la cavité de la bouche et les cavités nasales, 'établie par une fissure antéro-posté- rieure, portant à la fois, et d'une manière complète, sur le palais et le voile du palais. Cette fissure palatine et staphiline est longitudinale et s'étend d'avant en arrière depuis le point occupé par Torgane de Jacobson, jusqu'au bord libre du voile du palais; elle est longue de O",! 60, de forme elliptique très-allongée, mesurant, un peu en avant de la première molaire, point où elle a le plus de largeur, une étendue transversale de 0"',033;elle se rétrécit ensuite graduellement d'avant on arrière, présente une largeur de O^jOSO au niveau du bord adhérent du voile du palais et O^jOlô au bord postérieur de cet organe. Les bords latéraux de la fissure palatine sont nets, arrondis, lisses, et au bord libre du voile du palais, ils se continuent, après avoir fait Une légère saillie, avec les piliers postérieurs de ce dernier. Cette fissure palatine établit, ainsi que je l'ai dit plus haut, une com- munication assez vaste entre la cavilé de la bouche et les cavités na- sales et laisse voir sur la ligne médiane le bord inférieur du vomer el de chaque chaque côté les cornais. La fissure qui partage, sur la ligne médiane, le voile du palais permet de voir très-nettement l'intérieur du pharynx et l'oriûce supérieur du larynx; on peut voir, en abaissant légèrement les cartilages aryténoïdes, l'orifice œsophagien. La langue, le pharynx, le larynx ne présentent rien de remarquable. La mâchoire inférieure est pourvue de huit incisives formant une arcade régulière, présentant les caractères que l'on remarque chez les fœtus à terme de l'espèce bovine, Chacune des mâchoires porte en outre trois molaires de chaque côté; rien d'anormal, par conséquent, sous ce rapport. J'ai placé Vanimal sur le dos pour disséquer la région cervicale in- férieure; la trachée et l'œsophage ne présentent rien d'anormal dans leur organisation, il en est de même des vaisseaux et des nerfs qui accompagnent ces deux organes dans cette partie de l'encolure ; la seule chose anormale que je constatai fut la présence dans la région (■ervicale du thymus remontant assez haut; en décrivant cet organe dans la cavité thoracique, j'indiquerai la disposition qu'il présentait sur ce sujet. ORGANES CONTENUS DANS LA CAVITÉ THORACIQUE. Je n'insiste pas ici sur la conformation de la poitrine que j'ai indi- quée en décrivant le squelette, je ne parle pas non plus de la mem- brane qui ferme la partie inférieure de la poitrine, -je n'entrerai que dans les détails relatifs aux organes contenus dans la cavité thoracique- Thymus. — Le thymus existe, mais il a un développement considé- rable et a subi un déplacement très-marqué. Si je fais la description du thymus en même temps que celle des organes contenus dans la ca- vité thoracique, c'est uniquement parce que cet organe a son siège normalement dans cette cavité, car dans ce cas particulier, il est presque entièrement placé dans la région cervicale inférieure ; en eflèt, sa portion thoracique est représentée par quelques granulations glan- duleuses placées à la partie antérieure de la poitrine, noyées dans une grande quantité de lobules graisseux; il est placé sur le plan médian et tapissé en arrière par la plèvre. Le thymus est constitué en avant par deux lobules très-longs, s'é- tendant dans la partie inférieure du cou, et placés i'un à droite", l'autre à gauche. La portion droite est allongée dans le sensantéro-postérieur, de forme eilipso'ide, longue de i20 centimètres, large de 3 centimè- tres, épaisse de 1 centimètre. La portion gauche, plus longue que la précédente, mesure en longueur 170 millimètres; la largeur et l'épais- hTur diffèrent peu de l'autre partie; elle remonte jusqu'au niveau du "z4 norps df 1 hyoïde. Cliacuu de ces lobules foimûs par le lliymus esl Je couleur grise, légèrement rosée, ressemblant beaucoup objectivement à la glande maxillaire; tous deux affectent par leur face interne des rapports de contiguïté avec la trachée, la carotide, le cordon formé par le grand sympathique et le pneumo-gastrique, la jugulaire, et dans la partie inférieure avec l'origine de la veine cave antérieure. Le poids total du thymus, détaché des organes avec lesquels il était en rapport était de 60 grammes. Plèvres. — Les parois de la poitrine sont tapissées par des plèvres; en dehors de ces feuillets séreux il existe beaucoup de graisse. Dans la partie antérieure et gauche de la cavité thoracique, les plè- vres s'adossent et forment un médiastin antérieur dont la direction antéro-postérieure est de gauche à droite; le bord inférieur adhère, iJans toute son "étendue, à la face supérieure de la membrane qui clôt par en bas la cavité thoracique; son bord antérieur est fixé à la face interne de la cinquième et de la sixième côle du côté gauche. Les plè- vres enveloppent par leur feuillet viscéral le poumon et le péricarde ainsi que les vaisseaux de la poitrine, la portion thoracique de l'œso- phage et la portion thoracique de la trachée. De la partie postérieure du poumon droit les plèvres s'adossent en arrière de cet organe pour lormer une lame qui va s'attacher, en figu- rant une sorte de médiastin postérieur ou un lien séreux spécial, sur la face supérieure de la membrane thoracique inférieure dont j'ai déjà parlé. Poumons. — a. Poumon droit. Ce lobe pulmonaire ne présente ab- solument rien d'anormal; il présente en avant un lobule supplémen- taire pourvu d'une division bronchique longue de 2 centimètres et s'insérant sur la trachée entre le sixième et le septième cerceau qui précèdent la division de la trachée pour former les bronches. b. Le poumon droit est bien conformé. Péricarde. — Le péricarde enveloppe le cœur comme on le remarque chez les sujets bien conformés; il se fixe par son extrémité inférieure dans une étendue de 40 millimètres sur la face supérieure de la membrane qui sert de plancher à la cavité thoracique. Le cœur est placé un peu en arrière de la position qu'il devrait occu- per normalement ; il est bien conformé. La masse auriculaire est à droite, son poids est de 320 grammes; l'oreillette droite et Toreillette gauche communiquent par le trou de Botal largement ouvert, présen- tant une valvule constituée par des filaments très-déliés composant une espèce de treillage à mailles serrées et irrégulières. L'aorte primitive et Tarière pulmonaire sont normales dans leur con- formation. 225 Le canal artériel est largement perforé. L'aorte antérieure et la veine cave antérieure sont très-longues en raison du déplacement en arrière que le cœur a subi. Les divisions que fournit l'aorte antérieure sont normales ainsi que les divisions veineuses du bras et du cou qui viennent se dégorger dans la veine cave antérieure. Le diaphragme manque complètement, il y a une vnste communica- tion établie entre la cavité abdominale et la cavité thoracique. ORGANES CONTENUS DANS LA CAVITÉ ABDOMINALE. Les organes abdominaux sont flottants à l'intérieur; il y a sur la périphérie de la cavité de l'abdomen des vestiges d'une membrane séro-fibreuse qui devait compléter par en bas la cavité, mais on no peut affirmer par l'examen du cadavre, si, sur ce sujet, la cavité abdo- minale était close par en bas. Organes digestifs. — Vesiomac occupe la position normale; après l'avoir séparé de la masse des intestins, je l'ai insufflé pour voir s'il ne présentait pas d'anomalie dans sa forme ; il était parfaitement con- formé. Il portait un repli du péritoine, vestige ou reste du sac que forme, chez les ruminants, la séreuse de l'abdomen ; il est probable que chez cet individu, le sac existait et enveloppait les intestins comme on le remarque chez les animaux normalement conformés. Je n'ai pas constaté la présence de ce sac, parce que lorsqu'on m'a remis le monstre, les intestins étaient complètement séparés du corps. L'intestin est normal : Tintestin grêle a une longueur de 11", 74, le cœcum est long de 18 centimètres et le colon présente une longueur de i",55. La longueur totale de l'intestin est de 13"", 46. Le foie pèse 278 grammes, il est normal dans sa conformation exté- rieure; il porte à son extrémité gauche un kyste renfermant 0''', 2 d'un liquide clair, de couleur jaune ambré. L'aorte postérieure suit la courbure décrite par le rachis; à partir de la dixième vertèbre dorsale elle se recourbe par en haut, en décrivant une courbe à concavité antérieure, et conserve ses rapports de conti- guïté avec le corps des vertèbres dorsales et celui des vertèbres lom- baires. En suivant ce trajet, l'aorte subit une inversion comme la ré- gion spinale; sa face supérieure devient inférieure et réciproquement; elle se divise en troncs iliaques externes et internes partaitement sy- métriques de chaque côté, et chacun de ces troncs se divise et se termine normalement. Appareil urinaire. — J'ai constaté la présence de deux reins qui avaient été séparés du tronc en m^me temps que la masse intestinale; MKM. 1869. 15 22G ces deux organes ne préseiUaient rien de notable sous le rapport .le leur développement et de leur formation extérieure. Chacun de ces reins communiquait avec la vessie par un uretère sur le mode de ter- minaison duquel je reviendrai tout à l'heure. Li vessie, par suite de l'inversion de la colonne vertébrale, occupe le plan supérieur du bassin. (Nous savons, par la description du sque- lette, que le bassin n'est pas fermé par en bas, et que le plancher de cet organe, c'est-à-dire la face supérieure des ischiums, forme le plan supérieur de la cavité.) Le réservoir de l'urine est le siège, sur la ligne médiane, d'une fis- sure antéro-postérieure qui intéresse toute sa partie antérieure, infé- rieure et postérieure. (Je donne le nom de face inférieure à la face qui devrait occuper cette position si le sujet était normalement con- stitué.) La vessie est complètement ouverte sur la ligne médiane, et chacune des parties latérales s'étend de chaque côté pour servir de tégument à la face interne des cuisses qui, comme nous le savons par ee qui a été dit antérieurement, est tournée en haut et en dehors. Cette expansion membraneuse, constituée par la vessie, se continue en avant avec la membrane fibreuse dont j'ai parlé précédemment; latéralement et en arrière, elle se continue avec la peau. La vessie ainsi divisée occupe le plan superficiel et est complètement en rapport avec le monde extérieur par sa surface interne qui est de- venue externe; elle est, par sa face externe qui est devenue profonde, en rapport avec les canaux déférents, les vésicules séminales, les ure- tères et le plan inférieur du rectum qui est devenu supérieur. Elle reçoit sur cette même face et de chaque côté plusieurs divisions four- nies par l'artère vésico-prostatique; de chaque côté existe une artère ombilicale qui vient se terminer dans le tissu cellulaire sous-jacent, à la face profonde de la vessie; l'extrémité de chacune de ces artères est noyée dans le tissu lamineux, et en énucléant ce tissu, on met à découvert l'orifice béant de l'artère. A 1 centimètre en arrière de l'arcade ischiale, la vessie présente un infundibulum mesurant à l'ouverture 15 millimètres, se continuant par un canal d'un diamètre de 10, millimètres se dirigeant horizon- talement d'arrière en avant- Ce conduit, qui est le canal de lurèthre, se continue dans cette direction sur une longueur de 40 millimètres et se termine brusque- ment en cul-de-sac : il est enveloppé par le muscle périnéo-uréthral. L'infundibulura que porte la vessie, en arrière de l'arcade ischiale, présente en arrière deux petites saillies papilliformes placées de chaque côté de la ligne médiane, se touchant à leur base, et ayant chacune unii!- longueur de Û°',003. 'La partie déclive du canal de l'urèlhre porte une crête médiane; cette partie déclive serait la face supérieure du canal de l'urèthre, s'il n'existait pas d'anomalie. En avant de l'arcade ischiale se trouve sur la ligne médiane un rudi- ment de pénis long de 13 centimètres, présentant un diamètre de 8 millimètres; cet organe se dirige en avant en décrivant quelques flexuosités, et se termine en pointe; il est pourvu d'un canal qui per- met l'introduction d'une aiguille à tricoter dans toute l'étendue du pé- nis. Cet organe est pourvu d'une valvule de 6 millimètres. Ce pénis est maintenu dans sa partie antérieure dans un fourreau à l'état de ves- tige, mesurant une longueur de 3 centimètres. Il existe des ligaments suspenseurs et rétracteurs de la verge sous forme de cordons blancs arrondis. J'ai indiqué précédemment que la face profonde de la vessie était en rapport avec les vésicules séminales, les canaux déférents et les uretères. Les uretères présentent la même disposition de chaque côté, ainsi que les vésicules séminales et les canaux déférents. L'uretère, placé immédiatement au-dessous de la membrane de la vessie, se dirige en arrière et du côté de la ligne médiane ; placé à quel- que distance, au côté interne du canal déférent du même côté, ils se joignent tous deux à angle aigu au niveau de l'infundibulum vésical dont j'ai parlé précédemment; ils marchent en s'accolant et en affec- tant des rapports do contiguïté seulement sur une longueur de 10 mil- mètres : le canal déférent placé au côté externe, l'uretère placé du côté interne. Ils se trouvent tous deux placés sous la vésicule sémi- nale du côté correspondant et la face profonde de la vessie. Ces deux conduits viennent s'ouvrir en commun dans la papille correspondante dont j'ai signalé l'existence en parlant de l'infundibulum que porte la vessie. L'uretère et le canal déférent du côté droit s'ouvrent en commun dans la papille du même côté, qui se trouve percée dans toute sa lon- gueur d'un conduit qui donne passage à une aiguille à tricoter assez fine. Une disposition identique se remarque pour le côté gauche. Je crois qu'il est utile d'entrer dans quelques considérations re- latives à la parturition des monstres célosomiens, afin de tirer de cette observation un parti utile au point de vue de la pratique de l'obstétrique vétérinaire. Ce genre d'anomalies est très-fréquent; M. Isidore-GeofTroy Saint- 228 Hilaire, dans son Histoire générale et particulière des anomalies de l'homme et des animaux, parle de nombreux monstres célosomiens qu'il a ob-^ervés, et cite un assez grand nombre d'observations faites antérieurement par divers auteurs; il en est même qui remontent jusqu'à SténoD. Les célosomiens se rencontrent fréquemment dans l'une de nos espèces domestiques, l'espèce bovine, et je citerai plus loin un cer- tain nombre d'observations faites par des vétérinaires qui ont, ou disséqué des sujets monstrueux appartenant à cette famille, ou aidé la parturition d'individus de ce genre. J'ai fait quelques recherches sur cette sorte d'anomalies observées eu vétérinaire; j'ai pu me rendre compte qu'elles étaient nom- breuses, mais j'ai remarqué aussi qu'on avait très-peu essayé d'en tirer quelque enseignement au point de vue chirurgical. Cependant c'est une question digne d'attirer Taitention et qui mérite d'être étudiée. Je ne doute pas que si la plupart des praticiens étaient éclairés sur ces monstruosités, il pourrait en résulter pour eux deux avan- tages essentiels : celui, d'abord, de pouvoir aider sans beaucoup de peine des parturitions très-laborieuses ; En outre de préserver de la mort beaucoup de femelles arrivées au terme ou à une époque voisine du terme de la gestation, et de sauvegarder ainsi dans d'assez grandes limites les intérêts des pro- priétaires. En conséquence, je me propose: l" de parcourir rapidement la liste de quelques auteurs qui ont observé ce genre d'anomalies; 2° d'examiner ensuite ce que plusieurs vétérinaires ont dit, qui ont écrit sur la parturition de ces monstres; 3' d'essayer d'exposer un moyen très-simple à l'aide duquel on peut opérer la parturition dans des cas semblables. 1° M. le docteur Numan, directeur et professeur à l'École vétéri- nire d"Utrecht, dans son mémoire sur les vaches stériles, connues sous le nom d'hermaphrodites, comparées à d'autres animaux por- tant des vices de conformation de l'appareil sexuel (Journal veté- KîNAiRE ET AGRICOLE DE BELGIQUE, 1844), indique que ce genre d'a- aomalies est très-commun dans l'espèce bovine, «îl ne se passe pas d'année que 1 École vétérinaire d'Utrecht ne 229 reçoive des individus de l'espèce; tous, jusqu'à présent, ont éii fournis par la vache. » Le professeur U.-F. Hausmanu (Hanovre, 1840) a observé cette anomalie, et il a môme interprété sa cause et son mode de déve- loppement. Le professeur F. T. Gurlt (Berlin, 1832) décrit et figure ce vice de conformation sous la dénomination de scisiosoimts 7'cflcxus ou disjonction des parois abdominales avec incurvation de la colonne vertébrale. Il dit en connaître treize exemples, tous ont dos veaux pour objet. M. le professeur Goubaux (d'Âlfort) à eu l'occasion de di^^séquer quatre monstres de cette famille; l'un, entre autres, a été l'objet d'une communication à la Société de biologie. M. Colin a communiqué à l'Institut la description de la dissection d'un monstre célosomien. Plusieurs squelettes de célosomes et un sujet conservé dans l'ai- cool figurent au cabinet des collections de l'École impériale d'Al- fort. 2° Les vétérinaires qui ont écrit sur la parturition ont peu in- sisté sur ce genre d'anomalies. Un auteur anglais, E. Skellett (A practical irealise on tlie partu- rition of the cow, etc., London, 1811), figure un fœtus tout à fait semblable à celui qui fait l'objet de cette communication. Il ra- conte les détails de la parturition, et ce ne fut qu'après quatre heures d'eflbrts, de tractions énergiques qu'il parvint à extraire la partie antérieure d'abord, puis le train postérieur ensuite. Les efforts tentés par lui et ses aides avaient désarticulé ou rompu la colonne vertébrale dans la région lombaire. Le docteur Christian Jœry (Leipsig 1818) a figuré dans un ouvrage sur la parturition une planche extraite de Skellett et qui représente le monstre célosomien dont parle ce dernier auteur, mais il n'en parle à nul autre titre qu'à celui de citation. M. Delwart [De la parturition des principales femelles domes- tiques, 1839) ne parle nullement des célosomes. Gellé [Pathologie bovine, 1841, page 643, t. III) rapporte que Maillet a opéré en 1839 la parturition d'un monstre de la famille des célosomien?. Les détails de tératologie sont fort incomplets; 230 mais on reconnaît cependant qu'il a été en présence d'un monstre de ce genre. La femelle montrait les signes de l'avortement; elle resta huit jours dans cet état, et ce n'est qu'après des efforts très- énergiques qu'on parvint à extraire le fœtus en plusieurs pièces. Rainard [Traité complet de la parturilion des principales femelles domestiques, t. I, page 487) rapporte le cas de Maillet cité par Gellé; il cite en outre le travail de M. Numan et les observations de Haus- mann. Il parle ensuite d'un cas semblable recueilli par M. Courjon de Meyzieux, 1843. Le fœtus célosomien fut extrait avec la plus grande difficulté; la mère fut en proie à un accès fébrile assez violent, mais il ne dit pas si elle guérit des suites de la parturition. J'ai parcouru dans le cinquième volume des Mémoires de la So- ciété IMPÉRIALE ET CENTRALE DE MÉDECINE VÉTÉRINAIRE, 1861, leS travaux de MM. Domariex, Parturition des grandes femelles; Diete- richs, Obstétrique vétérinaire ; Lecomte, Obstétrique vétérinaire. Je n'ai rien trouvé dans ces trois mémoires qui ont trait à la par- turition des moustres célosomiens. 3° Le manuel de la parturition dans le cas où le fœtus est un célosome me paraît assez simple. Avant d'aborder ce sujet, je me mettrai en garde contre une ob- jection qui pourrait m'être faite. Dans la plupart des cas de monstruosité, le fœtus est mis bas avant le terme de la gestation ; il y a avortement, et l'on peut ne pas avoir besoin de la présence de l'opérateur. Je ne discute pas ce fait, mais il importe d'établir une dis- tinction : l'avortement peut avoir lieu à une époque éloignée du terme de la gestation, et dans ce cas le fœtus n'ayant acquis que peu de développement, l'expulsion peut en être facile; mais si l'avortement a lieu à une époque voisine du terme de la gestation, ou si la parturition s'annonce à terme, la présence du chirurgien devient indispensable. Je suppose maintenant qu'un praticien soit mis en présence d'un fœtus célosomien au terme de la gestation. Le chirurgien peut se ren- dre compte de la conformation du sujet monstrueux par l'explora- tion vaginale, à la condition toutefois qu'il ait une connaissance des m monstres de la famille des célosomiens (notion qui manque le plus souvent). Si la présentation est postérieure, la main rencontre les viscères abdominaux et thoraciques qu'on peut extraire d'abord ; la main introduite de nouveau vient se mettre en contact avec la colonne vertébrale infléchie par en haut; on sent alors le corps des vertèbres lombaires. Quand l'exploration est soigneusement faite, le praticien peut s'armer d'un bistouri à serpette à lame cachée dans le genre de celui qu'emploie M. Charlier pour la castration des femelles do- mestiques, et il peut à l'aide d'une incision désarticuler la co- lonne vertébrale ou fracturer celle-ci, puis continuer la solution de continuité dans les muscles, et enfin terminer par la section de la peau. Si maintenant il llxe un lien au train postérieur, il peut, à l'aide de tractions modérées, les mains guidant cette partie du corps de l'animal, extraire cette première portion. Il ne reste plus qu'à amener la seconde partie, et ce deuxième temps de l'opération rentre dans le cas d'une parturition ordinaire; on peut l'elfectuer en fixant un lien et tirant à l'extérieur et em- ployant une force en rapport avec la résistance. Je crois même que dans beaucoup de cas cette deuxième partie pourrait être expulsée spontanément. D'ailleurs ce que j'indique semble avoir été en voie d'exécution sur le sujet que j'ai décrit. Les tractions dont il a été l'objet pen- dant très-longtemps avaient déterminé une rupture de la colonne vertébrale dans la région lombaire. Dans les quelques observations recueillies en vétérinaire, ce n'est qu'après des efforts inouïs qu'on est parvenue à extraire le fœtus. Le cas devant lequel s'est trouvé M. Maillet a été très-fatigant ; ce n'est qu'après des tractions longtemps exercées à l'aide de cro- chets qu'on est parvenu à amener le sujet à l'extérieur. M. Courjon (de Meyzieux) a eu beaucoup de peine aussi à prati- quer l'extraction du fœtus. Skellett, en 1801, a lutté pendant quatre heures pour extraire le jeune sujet. Dans le cas qui nous occupe, M. Savary dit dans une lettre où il a donné à M. Goubaux les détails des cfforls qui! a 232 tentés : u Après avoir lutté pendant plusieurs heures contre tous ces obstacles, je me déclarai vaincu. » Ce ne fut qu'à l'autopsie qu'il recueillit le fœtus. Dans le cas où la présentation serait antérieure, le même manuel opératoire pourrait être suivi, car le praticien pourrait introduire la main assez profondément'pour aller inciser le tronc du fœtus, et il extrairait la partie antérieure d'abord, puis en second lieu le train postérieur. Je ne crois pas devoir insister sur les précautions à prendre pour ne pas blesser la muqueuse utérine et la muqueuse vaginale, car dans ce cas comme dans toutes les parturitions, c'est un soin qu'il faut prendre en sérieuse considération. Je crois qu'il serait intéressant et utile d'étudier cette question très-minutieusement, car son éclaircissement aurait pour but d'évi- ter au vétérinaire beaucoup de manœuvres fatigantes et soustrai- rait la femelle aux souffrances qu'elle doit endurer quand plusieurs hommes exercent des tractions souvent violentes sur un lien fixé au fœtus. NOTE UNE NOUVELLE ESPÈCE DE TiENIA Becaeillie à Mayotte (Comores) Par M. le Docteur GRENET Médecin de première classe (1) ; DE L'EXAMEN MICROSCOPIQUE DE CE T^NIA Par M. le Docteur DAVAINE Membre de l'Académie de médecine. (Voy. planche 'VI.) « Monsieur et très-honoré confrère, M. 1869, 16 EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE I. LOPilTHAl.MOSCOPIE APPLIQUÉE AU DIAGNOSTIC DES MALADIES DE LA MOELLE ÉPINIEKE. (Mémoires, page 5.) FiG. 1. — M. P..., âgé de 45 ans. — Myélite clironique. — Infiltration séreuse rougeàtre de la papille cachant priucipalemenl le cùté externe du nerf optique qui est peu visible. — Obs. V. FiG. 2. — Julie Ledreu, âgée de 12 ans, affectée de myélite chronique. — Ilyperémie de la papille du nerf optique portée au point d'effacer pretque entièrement l'expansion du nerf optique. — Obs. IX. FiG. 3. — Marie Coulon, àsée de lit ans, affectée de myélite chronique. — Demi-atrophie de la papille du nerf optique. — Ces. X. FiG. 4. — M. X..., âgé de 62 ans, à l'infirmerie de Bicêtre (service de M. Léger). — Ataxie locomotrice avec atrophie de la papille du nerf optique. FiG. 5. — Fille X..., âgée de 3 ans, atteinte de myélite chronique. — Papille hyperémiée sur son côté externe devenue presque seniblalile par sa teinte et celle de la choroïde. — Plaque d'atrophie choroïdienne entourée d'un amas irrégulier de cellules pigmentaires. FiG. fi. — Nathalie Brasfort, âgée de 7 ans, affectée de myélite chronique avec infiltration grisâtre du nerf optique cacliant la papille et masquant en partie les vaisseaux. — Obs. XI. F. T^n,„:h,,t de! „/, Hec^.uei PLANCHE II. ARCF.S DU CERVEAU CONSÉCUTIFS AUX OTORUHÉES. (Mémoires, page 99.) F(G. A Face externe ou culanée du rocher gauclie à FéLat sec aprè> macération. En avant et en haut de l'apophyse mastoïde et, immMiatement en arrière du con- duit auditif externe se remarquent plusieurs orifices de divers diamètres, par l'inter- médiaire desquels l'extrémité antérieure du sinus latéral communiquait à la fois avec le tissu cellulaire sous-culané de la région mastoïdienne et avec le conduit auditif ex- terne. Cette dernière communication avait lieu à travers la portion cartilagineuse de ce conduit non représentée ici. Le sinus latéral eoramiiniquait aussi et tout naturellement par suite de la destruction de sa paroi osseuse avec la caisse du tympan, mais cette communication n'a pu être figurée. FiG. B. Face interne ou cérébrale du même rocher. La paroi osseuse de l'extrémité antérieure du sinus latéral est érodée, irrégulière. On y voit le principal orilice de communication entre ce sinus et l'extérieur du crâne. VL U A î ar ety ad nat. del , -L ackerta^er Ktk. Jinp .J?ecffuet,P<îris , PLANCHE Iir. FAITS \)E MENINGITES CEHI' RRO-SPINALES TUBEUCIJLESES Par Henry Liouville. (Voy. Comptes rendus, pages 296 et 547.) FiG, 1. — Hyperémie de la pie-mère et du cerveau. Aspect opaque de la pie-mère au ni- veau de la scissure de Sylvius, du chiasma des nerfs optiques, do la protu- bérauce annulaire, et des origines apparentes des nerfs crâniens, avec dé- pôts tuberculeux. a. Arborisations vasculaires au niveau des nerfs olfactifs. />. Chiasma des nerfs optiques recouvert de dépôts blanc- jaunâtres pseudo mem- braneux. il. Scissure de Sylvius avec dépôts de couleur cendrée. r, f et h. Dépôts cendrés avec hyperémie vasculaire. e. Tronc basilaire recouvert de pseudo-membranes. gt. Granulations tuberculeuses de la grosseur d'un grain de millet, de la lêt.'^ d'une grosse épingle. FiG 2. — a. Partie antérieure. Région cervicale. I>. Petites hémorrhagies. c. Sillon postérieur. li. Lacunes. e. Commissure et canal centra!'. gt. Granulations tuberculeuses. FiG. 3. — Région dorsale de la moelle. a. Partie antérieure. b. Partie postérieure. /. Tubercule déformant la commissure et la coriie antérreure dioite. Via. A. — V. Vaisseaux dilatés et remplis de sang. //. Hémorrhagie rétinienne. p. Papille du nerf optique. m. Tache jaune. FiG. 5. — gl. Granulations tuberculeuses de grosseur variable, isolées ou réunies, d'un.- tonleur blanc grisâtre, situées au-dessous de la rétine dans les deui yeux. p. Papille. PLANCHE ÏV. Ft(j. I, 2 et 3. — Face postérieure de la moelle. Hyperémie de la moelle et de ses enve- loppes, avec dépôts pseudo-membraneiii et tuberculeux au niveau des ré- gions cervicale, dorsale et lombaire. ttv. Arborisations vasculaires et pseudo-membranes grisâtres. (//. Granulations tuberculeuses agglomérées et néo-membranes. pf. Granulations tuberculeuses isolées sur l'arachnoïde de la luoelle et des ra- cines. n ui 1'! IV Fin' I '-" à( t î^ i '<4 f^' lub-v PLANCHE V. SCLÉROSE DIFFUSE l'EUl-EPENDYMAlRE. ' (Mémoires, page 169.) FiG. I. Coupe transversale de la moelle (région dorsale). A. Lacune centrale. B. Couche scléreuse. C. Cornes antérieures atrophiées. , ^ D. Corne postérieure gauche. E. Cellules nerveuses. F. Vaisseaux. 6. Plaque scléreuse. H. Couche corticale épaissie. Fie. II. Coupe transversale pratiquée dans la région dorsale ii 6 ceiii. au-dessus de la précédente. A. Canal opendy maire. B. Couche scléreuse rarotiée en B'. FiG. ni. Coupe transversale pratiquée à la partie moyenne de la ré- gion cervicale. A. Lacune centrale limitée dans une partie de son étendue par une luem- hrane fibreuse B. /C. Couche scléreuse. D. Cordon antérieur très-atrophié. E. Substance grise atrophiée. E'. Corne postérieure droite. F. Plaque scléreuse. G. Vaisseaux. FiG. IV. Demi-schématique. Tissu scléreux réticulé. A. Noyaux. B. Cellules dont quelques prolongements se continuent avec les fibrilles du réticulum. Ou a figuré plus de cellules ramifiées qu'on n'eu voyait dans les pré- parations. FiG. V. Demi-schématique. Couche corticale et traetus coujonctifs épaissis. FiG. VI. Faisceau musculaiic atrophié. Fibres primitives con.sideraiilenicnt réduites de volume, ii^yaiii multiplier. Tl9.ll Il§. I. Plg. III. PL. 5. X :-^ -^ Hallopeau etXetoucKer adcsLm.luc.del. Î.Xackerbauer litk. Jmp.J^ecaaet, Paris . l PLANCHE VL NOUVELLE ESPÈCE DE TvEMA. EXAMEN MICROSCOPIQUE. (Mémoires, page 253.) EXPLICATIOr» DES FIGURES. Fig. I- Tœnia de grandeur uaUirelle. — a. Fragment le plus rapproché de la tète et le moins développé. — b. Fragment composé d'articles murs. — c- Fragments détachés o\i proglottis. Fig. 2. Pénis grossi 350 fois. Fig. 3. Le même, vu de face Fig. 4. Derniers anneaux du fragment la grossis 12 fois et rendus transparents par une solution de potasse. Fig. S. Proglottis récemment libre, au même grossissement. Fig. 6. Fragment de ce même proglottis plus fortement grossi. Fig. 7. Capsules ovariennes grossies 60 fois. Dans le nucléus central opaque sont contenus les œufs. Fig. 8. Portion de la même capsule ovarienne grossie 350 fois. Elle montre une partie du nucléus renfermant les œufs et quatre corpuscules calcaires. Fig. 9. Granulations moléculaires du nucléus. Fig. 10. Trois ovules grossis 350 fois. Fig. U. Tégument d'un proglottis. Fig. )î. Fibres entre-croisées du parcnciiymc. 1 ^^8- ^ Hé. 4. Efî.2. P1.G Tié. 10. ii#î,V-»>^>^*' -"^tf^'-^'SS^ n^. Hé. 3. N -^"1 Li Tlp. U. Ïiç5 1^ o ^ ( *"l 'Fixi.l2. ô M^ Tié 6 î!.^" pï:V- DTDavaine adual.del ]!1P. /. ExameTimicroscopaue d'im Tcenia recueilli à Mayotte. •t * TA.BLE DES MEMOIRES DE LA SOCIÉTIÎ DE BIOLOGIE. Pages 1. L'oplillialinosfopie appliquée au diagnostic des maladies de la moelle epi- riière; par M. E. Boucliut. iVoy. planche I.) 3 2. Note sur la suppuration étudiée sur le mésentère, la langue et le poumon de la grenouille; par M. Georges Uayem 35 3. Note sur les phénomènes consécutifs à la stase veineuse, observés sur la memhrane natatoire de la grenouille, et la possibilité de l'hémorrhagie par diapedése; par M. Georges Hayem 53 i. Recherches expérimentales sur l'action physiologique de l'ésérine, alca- loïde de la fève de Calabar {physostigma venenosum) ; par MM. Leven et Laborde 63 5. Mémoire sur un monstre double autosilaire, monomphalien, que l'on pro- pose de nommer d<'rof/i/mti-//(o?-ade/pAe ; par M. Armand Goubaux. ... 81 6. Observation pour servir à l'histoire clinique des abcès du cerveau, consé- cutifs aux otorrhées; par M, Auguste Ollivier. (Voy. planche II.) 99 7. Nouvelle observation détaillée de sclérose en îlots multiples et disséminés, du cerveau, de la moelle et des nerfs rachidiens ; par M. Henry Liouville i07 8. Nouvelle noie sur l'endocardite et l'hémiplégie puerpérales; par M. Au- guste Ollivier. 123 9. Note sur un cas de sclérose en plaques disséminées ; par M. A. JofTroy. . . i45 10. De la dioptro-organo et scniatoscopie ; par M. B. Milliot i63 11. Contribution à l'étude de la sclérose diffuse péri-épendymaire ; par M. H. liallopeau. (Voy. planche V.) 169 12. Sur la température des nouveau-nés ; par M. R. Lépine. 207 13. Description d'un monstre célosomien, suivie de quelques considérations sur la parturilion; par M. Edmond Clianibon 2ii M. Note sur une nouvelle espèce de l;enia recueillie à Mayotte (Comores); par M. Grenet, suivie de l'examen microscopique de ce lœnia, par M. Da- vainc. (Voy. planche VI.) 23.5 l'L\ DE ]..\ TAlfLE HES MKMOIUE.S. 254 C. R, atrophie papillaire des deux yeux dans un cas de sclérose en plaques cérébro-spinale; par M. Magnan 573 Azotite» (Métamorphoses et éliminations desj : par M. Rabuleau. . . . 6G B Baotëridies (DitTerences de quantité des) dans le sang avant et après la mort; par M. Vulpian 62 Bromure de potassium (Influence du) sur les variations de l'uree; par M. Rabuteau 55 — (Élude sur l'action toxique dui à haute dose; par M. Vulpian ... 234 C Calculs vésicaux chez le chien modifiant les conditions d'absorption de la muqueuse vésicale; par M. Carville. 328 Cancer et tubercule par propagation A la surface de la séreuse pleurale; par M. Lépine j74 Cartilages costaux (Régénération des); par M. Peyraud 50 et 130 Cerveau (Tubercules du) avec hémiplégie faciale; par M. d'Espine. . i37 — (Hémorrhagies du; cbez un fœtus de 6 mois; par M Quinquaud. , . iâu Cbloral (Démonstration graphique de l'action aneslhésique du^; par M. Carville. .... 303 — (Action irritalive du); par M. Magnan 3o5 — ld.;par M. Liouville 307 Chlorate de potasse (Effets du) analogues à ceux du sulfate de quinine; par M. Rabuteau 135 Choléra sporadique sec ; par M. Quinquaud 84 Chorée, hémiplégie et aphasie; par M. Granchê. . , I5i — rhylhmique généralisée chez un chien après la section de la moelle dorsale; par M. Carville. 154 Cicatrisation des parois de l'intestin grêle par adossement des séreuses (Examen histologique); par M. Legros 67 Cœur. Lésions valvulaires et rétrécissement ventriculo-aortique; par M. Hallopeau 163 Conine (action physiologique de la) ; par M. Jolyet 309 Contraction musculaire' Augmentation du volume des muscles pendant la); par M. Legros ... 308 — Id. ; par M. Sert 3u Contracture et tremblement de quelques muscles de la face après l'arrachement du facial ; par M. Brown-Séquard 153 Courants dérivés et courants de polarisalioti dans les tissus vivants; par MM. Legros et Onimus i23 Croupe (aplatissement des muscles rie la) chez nos grands animaux do- mestiques à la (in de la gestation; par M Goubaux 125 D Desquamation de la peau i,de la traiisforrtialion \é.sicule»8e des rm- cléoles dans la'; par .M. Hanvier 26 Diarrhée criii(|ue dans le cas d'cpanchement pleural; par M. Odier. . 29j Diotro-organo cl somato.scopii! ; par M. Milliot i63 255 E i; K £cchyinoses des mutjueuses dans les cas d'béiuorrliagie cérébrale; par M. JolTroy 20c Electricité (Influence de 1') sur îe développement et la nutrition; par M. Onimus i47 — (Action de 1') sur l'attaque épileptiforme ; par MM. Legros et Oniraus. 156 Encéphale et canaux semi-circulaires (Lésions de 1'); par M. Carville. 265 et 272 Endocarde (Ulcérations de 1') du cœur droit; par M. Ollivier 157 Endocardite ulcéreuse avec anévrysme des valvules de l'aorte; parle docteur Jossic t — vaWulaire aorlique; par M. Liouville 72 — et hémiplégie puerpérales ; par M. Ollivier ■ — (Siège de prédilection de 1') dans l'oreillette gauche; par M. Lépine. 260 Sndosmose (De l'influence de l'électricité sur 1'); par MM. Legros et Onimus 200 Épilepsie délcrmihéepar les lésions de la moelle épiniére; par M Brown- Séquard 29 — spinale; par M. Brown-Séquard 65 — par leciion du nerf sciatique; par M. Brown-Séquard lu — à la suite des lés'ons des nerfs des membres inférieurs chez l'homme ; par M. Brown-Séquard 121 — par irritation du sciatique; par M. Brown-Séquard 211 — (Guérison de 1') produite par la section du nerf sciatique. — Id. ; par lésion de la zone épileptogéne; par M. Brown-Séquard 222 — par traumatisme chez un chat; par M. Liouville 243 Épileptogéne (Zone chez un chat épileplique ; par M. Trasbot. ... 194 Epitbélium des vaisseaux du mésentère irrité; par M. flayem. . . . 343 Ésérine (Recherches expérimentales sur l'action physiologique de 1'); par MM. Léven et Laborde " — (Effets physiologiques de 1'); par MM. Laborde et Leven )92 F Facial (Ânatomie comparée du) chez les grands animaux domestiques; par M. Goubaux J47 Fièvre typhoïde chez un rhumatisant 3i Foie (Genèse des abcès du) par oblitération du canal cholédoque; par M. Joflroy 212 G Galvanisation du pneumogastrique; par MM. Legros et Onimus. . . 26 Ganglions lymphatiques (Pigmentation des) consécutive à la gangrène sèche; par M. Landrieux isi Gangrène sèche des oreilles à la suite d'une lésion des corps resti- formes, prés du ca^arwMs «crip^oria*; par M. Brown-Séquard. ... 110 — de la jambe par embolie; par M. JolTroy 230 Gaz contenus dans les liquides (nouvel appareil pour l'exlraclion et le dosage des); par M. Gréhant 32y Graisseuse (Dégénérescence) du cœur chez le cheval et mort presque subite; par M. Goubaux . . ih2 Graphique (Démonstration) de l'action anesthésite d'un coq; par M. Pliilipeaux 336 » H Héniiplé;îie dans le cours d'une pneumonie; par M. Lépine » 346 Hémorrhag-ie par diapédèse; par M. Hayem ■> 53 Hémorrhagies musculaires (Wathogénie des) dans les fièvres graves par M. Hayem. 334 » — musculaires (Palhogénie des) dans les maladies graves ; par M. Ran- vier 335 » I Infection purulente à marche chronique; par M. Quinquaud. .... 38 » lodures et bromures introduits dans l'organisme (Du rôle des); par M. Rabuleau. 3 » K Kyste librineux du cœur; par M. Quinquaud 34 » Kystes symétriques développés dans les hémisphères cérébraux; par M Joffroy. . • lOS » L ïiarynx (Divers mécanismes d'occlusion); par M. Krishaber. . . . . 118 » ïiingual (Fonctions gastriques du); par MM. Jolyet et Prévost. ... 76 » Ijumière (Perception de la) chez les larves de muscidées; par M. Pou- chel 268 « M Maintien des variétés qui, en se perpétuant, forment les races; par M. Broca 27 » Médication contre les accidents saturnins; par M. Rabuteau .55 » mCéning-ite tuberculeuse cérébro-spinale; par M. Magnan 284 » — par M. Hayem , 287 » — et sclérose de la moelle; par M. A. Voisin 90 « JVIéDing'ites cérébro-spinales tuberculeuses; par M. Liouville. . 29c, 3i7, 347 .1 Métamorphoses et mode d'élimination de diverses substances intro- duites dans l'organisme; par M. Rabuleau 3 » Moelle (Section du cordon latéral de la ), son influence sur les mouve- vemonts respiratoires du côté correspondant; par M.'Rrown-Séquard. 64 >• — épiniére (Ophibalmoscopie appliquée au diagnostic des maladies de la); par M. Bouchut « S — épiniére (Konctions de la substance grise de la); par M. Vulpian. . . 45 « Monstre céiosomien de l'espèce bovine; par M. Chambon » an — dérodyiiio-lhoradelphe (Mémoire sur un); par M. Goubaux .... » 8( Mort suhiie par syncope dans un cas de rétrécissement ol d'insulTi- saiice aoiiiiiues et d'insuffisance mitralo; par M. Duguet 171 » Muscles pectoraux et du sternum des oiseaux dans leurs rapports avec la surface de l'aile (De la forme des); par M. Marey 112 » Musculaire ((Graphique de la contraction); par M. Rouget. . . 121 et 130 » 257 C. R. Myélite par seclion lie la moelle (.'pinière; par M. IJrown-Sequard. . . 343 IN Nutrition (Lcsion-s île) consécudve à la section du nerf sciatique; par M. Laborde 222 — par M. Brown-Séquard. 23!) — (Action de l'éieclrlcilé sur la); par M. Bert 244 — (Altérations) à la suite de la seclion et de la ligature des nerfs et delà moelle épiniére; par MM. Laborde et Leven 280 o Ophthahnoscopie appliquée au diagnostic des maladies de la moelle épiniére; par .M. Boucliul « P Paralysie infantile avec altération des cornes antérieures de la moelle ; par MM. Charcot et JofTroy 312 — infantile (Détermination nosologique de la); par M. Laborde. . . . 3i7 Phénique (Action physiologique de l'acide); par MM. Bert et Jolyet I9i — I Action neutralisante préventive de l'acide) dans les cas d'intoxica- tion par la strychnine; par M. Bert 261 Pneumonie caséeusc lobulaire ; par M. Joffroy S9 — trabéculaire; par M. Joffroy 53 Poche musculaire orbitaire des poissons pleuronectes (AnatomieJ; par M. Brown-Séquard 199 3?olypes naso-pharyngiens (Études sur la structure des); par M.Muron. 223 Pupille (Trouble de la) après la section du sciatique; par M. Yulpian. . i2o — par M. Brown-Sé(|uard 121 Pupiiles (Inégalité des) dans les affections des poumons, des ganglions bronchiques et du péricarde; par M. Roijue i4o R Rayons lumineux (Iniluence de certains) sur l'étiolement des animaux; par M. Bert 251 Remarques sur l'appareil de respiration artificielle de M. Gréhant; par M. Krishaber 264 Résistance des animaux nouveau-nés à l'action de certains poisons; par M. Bert 263 Respiration des poissons (Recherches sur la); par M. Gréhant 152 — artiflcielle (Nouvel appareil pour la), par M. Gréhant 253 — des poissons (Recherches sur la); par M. Bert 330 Rétablissement de la circulation cérébrale à travers l'artère sylvienne siège d'une embolie; par M. Joffroy 72 Rétine (Dilatation des vaisseaux de la) du côté de Ja pneumonie; par M. Galezowski 145 Roulement (Mouvement de) par abcès de la base de l'encéphale; par M. Liouville 149 — Par M. Legros i4y Rupture de l'attache du llcchisseur superficiel, etc., etc., chez le che- val; par M. Goubaux 160 JIÉ.M. 18G0. 17 ?5S 1 ,S J c. B. sr Sang- (Conditions toxiques du) injecté dans les veines ou dans le tissu cellulaire d'un autre animal; par M. Brown-Séquard i&8 ■> ^ — Par M. Bert 309 . | — Par MM. Liouville et Voisin 310 » ! — et du foie (Analj se du) chez les animaux empoisonnés par l'acide car- bonl(jue. 203 » , SciaVique (Description analomique des ulcérations survenues chez un | lapin à la suite de la section du nerf); par M. Laborde 344 » ' Sclérose en plaques de l'encéphale et de la moelle; par M. Joffroy. . . 47 » J — en plaques disséminées; par Bî. Joffroy. . ' » i-îS — (De la) diiTuse de la moelle et pachy-méningile cérébro-spinale dans ' la paralysie générale; par M. Magnan ii3 » — diffuse péri-épendymaire; par M. Hallopeau -• 169 — diffuse de la moelle avec lacune, ulcération de la substance grise et atrophie musculaire; par M. Hallopeau 271 » ' — en îlots du cerveau, de la moelle et des nerfs rachidiens; par M. Liouville - » 107 Sécrétion lactée augmentée après la section du scialique; par ; M. Brown-Séquard 121 » Séléniale (réduction du) de soude dans l'organisme; par M. Rabuleau. 47 » ! Sensitive (Mouvements de la); par M. Bert 248 o - : Sensitives (Développement visible des) suivant la nature des rayons lu- ; mincux qu'elles reçoivent; par M. Bert 316 , Stase veineuse (Etudes sur la); par M. Hayem » 53 i Stéatosa aiguë des muscles dans la variole; par M. Hayem 319 » Strongie géant (Développement des œufs du) ; par M. Balbiani 139 » Suppuration (De la) étudiée sur le mésentère, la langue el le poumon de la grenouille; par M. Hayem » 35 \ I T i Tœnia madagascariensis; par MM. Davaine et Grenet » 233 '] — monstrueux (Note sur un) de l'homme; par M. Vaillant 368 » 'j Température des nouveau-nés; par M. Lépine » 207 j — (Abaissement de la) dans un cas de cancer du foie; par M. Joiîroy. . . 225 » j Tendons (Structure des); par Ranvier * 44 el 169 » Tension du sang artériel et fréquence du pouls à la suite des saignées; par M. Carville 328 » J Tétanos (Pathogénie du); par MM. Arloing et L. Tripier 336 » Tic (Enregistrement des mouvements rhylhmiques du); par M. Bert. . . 155 » Tournoiement (Contribution à l'étude du); par M. Bert 209 » — et de manège (Mouvements de) déterminés par l'électrisalion; par M. Onimus. . . . v 342 » \ Transfusion du sang (Remarques sur la) ; par M. Brown-Séquard. ... 71 » i — Par M. Bert îl »• | — du sang. Observations par M. Thaon. 68 » I Tuberculose chez les cochons d'Inde (Conditions multiples de la pro- duction de la); par M. Brown-Séquard l'aS » \ Tumeur située à la réunion du cœeum et du colon ; par M. Chambon. . 32i » ^ Typhlite phlegraoncuse; par M. Duguet 177 '" ; u <:. s. M, ^ Urée (Accumulation de 1) dans le sang sensiblement la même après la ; nephrotoraie ou après la ligature des uretères; parM.Gréhaut. . 64,i3S;etj49 » — Influence des courants coniinus sur la quantité de l'urée de l'urine; par M. Onimus lio » 'Orinaires (Elimination de l'eau par les voies); par M. Rabuteau 187 » Urine laiteuse (Sécrétion intermittente d'); par M. Bail 14S » ; — (Matières colorantes bleues des); par MM. Gubler et Leven 333 » Urines critiques dans la pleurésie avec épancheraent; par M. Dumont- ; pallier. . . . , 295 » ,] V 1 ( Valvules de l'aorte (Anomalie des) chez un homme 44 ans ; par M. Liou- 1 ville 129 » ' 'Vaso-moteurs (Action des) sur la perte de connaissance dans l'épi- "1 lepsie; par M. Brown-Séquard 194 » ] Vibrions (Développement de) dans le sang après l'injection de l'extrait j de douce-amère sous la peau des grenouilles; par M. Vulpian 66 » 1 Virus charbonneux; par M, Davaine 88 » ) Visibilité des divers rayons du spectre pour les animaux; par ; M. Bert 247 » 1 i Z Zone épileptogéiie (Remarques sur la température de la); par I M. Brown-Séquard 294 » j — epiléptogéne (Etude sur la); par M. Brown-Séquard 157 » ] FLN' DE LA TABLE ANALYTIOL'E- TxVBLE DES MATIÈRES PAR NOMS D'AUTEURS. Arloing et Tripier. Expériences relatives à la pathogénie du tétanos. . . 338 B Balbiani CEufsdu strongle géant (Développement des). . i39,3U Ball Absence congénitale du médius 344 — Urine laiteuse (sécrétion intermittente d') 148 BerGeron Asphyxie par l'oxyde de carbone 3t Bert Action de l'acide phénique sur la moelle 61 — Nutrition (Action de l'électricité sur la) .... 244 — Résistance des animaux nouveau-nés à l'action de certains poisons 263 — Rayons lumineux (Influence de certains) sur l'étio- lement des animaux 251 — Respiration des poissons (Recherches sur la). . . . 3îo — Sensitive (Mouvements de la) 248 — Sensilives (Développement variable des), suivant la nature des rayons lumineux qu'elles reçoivent. . 316 — Inaction de la strychnine consécutivement à l'empoi- sonnement par l'acide phénique 261 — Tic (Enregistrement du mouvement rhythmique du). 155 — Tournoiement (Contribution à l'élude du) 209 — Remarques sur la transfusion du sang 7i — Visibilité des divers rayons du spectre pour les animaux 247 Bert et JoLYET. . . Action physiologique de l'acide phénique i94 — Absorption vésicale (Expériences sur 1') 315 BoucHEREAU Anévrysmes miliaires de la rétine coexistant avec les anévrysmes miliaires du cerveau 35 BoucHUT Ophthalmoscopie appliquée au diagnostic des mala- dies de la moelle épiniére » Bboca Sur le maintien des variétés qui, en se perpétuant, forment les races 27 562 BnowN-SÉyUARD. . Conlraclion et tremblement des muscles de la lace après l'arrachemeiu du facial. . . 153, i70,2io et 299 — Épilepsie par lésions de la moelle épinière. ... 29 — Épilepsie spinale 65 — Épilepsie par lésion du nerf sciatique iu,140 — Épilepsie chez des hommes dont les nerfs des mem- bres inférieurs avaient été lésés 121 — Épilepsie par irritation du nerf sciatique 2ti — Épilepsie (Guérison spontanée) sciatique. — Épilepsie (guérison déterminée par la lésionde la zone épi- leptogène) 222 — Action des vaso-moteurs sur la perte de connaissance dans l'épilepsie 194 — Études sur la zone épileptogéne 1.57 — De la gangrène sèche des oreilles à la suite d'une lésion des corps restiformes iiO — Myélite par section de la moelle épinière. . . . 343 — Des lésions de nutrition consécutives à la section du nerf sciatique (Interprétation) 239 — De la poche musculaire orbitaire des poissons plea- ronectes ij9 — Dilatation de la pupille après la section du sciatique. 121 — De l'influence de la section du cordon latéral de la moelle sur la respiration G4 — Augmentation de la sécrétion du lait chez le cobaje après la section du nerf sciatique. . . . I2i,i47,îi9 — Des conditions toxiques du sang injecté dans les veines ou dans le tissu cellulaire d'un autre animal. . . 198 — Remarques sur la transfusion du sang 71 — Production delà tuberculose chez les cochons d'Inde. 1 .'iS — Température de la zone épileptogéne (Remarques sur la). . 294 C CAnviLLK Mouvements clioréiformes, rhylhmiques généralisés chez un chien après la section de la moelle à la région dorsale i54 — Calculs vésicaux (Fréquence des) chez le chien pou- vant modiCer les conditions d'absorption de la vessie 328 — Lésions cérébrales, cérébelleuses, et des canaux se- mi-circulaires produites expérimentalement sur des pigeons. . . . ^ 2G5 et 272 — Démonstration graphique de l'action anesthésique du chloral 303 — Tension du sang artériel et fréquence du pouls à la suite des saignées 328 Cbambon Iv'onstre célosoraien de l'espèce bovine • — Tumeur située à la réunion du cœcum et du colon. 321 ?63 CHAr.cOT et JoriP.OY. Aiioplue lausciiljire el sclérose des cordons laté- raux de îa moelle 252 — Paralysie infantile avec alléralion des cornes anté- rieures de la moelle 3i2 D Davaine Virus charbonneux 88 — el Grenet. . . . Tœnia madap;ascariensis 233 Davaine Absorption des corps solides déposés dans les lis- sus 291 . . . Tubercules du cerveau avec hémiplégie faciale. . 137 . . . Note sur un cas de rétrécissement et insuffisance aortiques, avec insuffisance mitrale, terminé par la mort subite i~t — Typhlite phlegnioneusé dans le cours d'une entérite tuberculeuse 177 DuHOSTPALi.iF.R. . . Urincs critiqucs dans la plcurésic avec épanchemeut. 295 D'ESPINE. DUGUET. . Galézowski. GOUBAUX. . . GaANCHË. Gréhast. Gl'ELEK. . Dilatation des vaisseaux de la rétine du côté de la pneumonie 145 . Monstre dérodymo-tboradelphe de l'espèce bovine (.Mémoire sur un) = - Anatomie comparée du nerf facial chez les grands animaux domestiques 147 ■ Dégénérescence graisseuse du cœur chez un cheval. Mort presque subite 182 - De l'aplatissement des muscles de la croupe chez les femelles de nos grands animaux domestiques à la fin de la gestation 125 • Rupture de l'attache du fléchisseur superficiel, etc., etc. chez le cheval 160 Chorée, hémiplégie et aphasie, avec affection cardia- que et embolies multiples lôi . Accumulation de l'urée dans le sang sensiblement le même après la nephrotomie ou après la ligature des uretères 6i, 132 et HO - Recherches sur la respiration des poissons. . . . 152 - Nouvel appareil par la respiration artificielle. . ; . 25a • Nouvel appareil pour l'extraction et le dosage des gaz contenus dans les liquides 329 , Absorption cutanée (Remarques sur 1") i36 Hai.lopeai . . Rétrécissement ventriculo-aortique; rétrécissement mitral; vascularisation des sigmoïdes aortitjueSi- accidenIs d'anémie cérébrale 163 — Oblitération artérielle des membres ; disparition ra- pide di's accidents; giiérisnn. ....... 323 2'64 C. R. IIallopeau. .... Sclérose diffuse péri-épemlymaire » — vSclérose diffuse de la moelle avec lacune au centre j de cet organe; altération de la substance grise et atrophie musculaire 27i Hayem Suppuration (Note sur la) étudiée sur le mésentère, la langue et le poumon de la grenouille. ... » — Stase veineuse (Note sur les phénomènes consécu- tifs à la) observés sur les membranes natatoires de la grenouille et la possibilité de l'hémorrhagie par diapédèsc >> — Altération musculaire consécutive à la paralysie in- fantile 256 — État de l'épithélium des vaisseaux du mésentère ir- rité. 343 — Hémorrhagies musculaires (Pathogénie des) dans les lièvres graves 334 — Méningite cérébro-spinale tuberculeuse 287 — Stéatose aiguë des muscles dans la variole. . . . 3i9 JOFFROY Atrophie musculaire progressive et paralysie labio- glosso-laryngée. — Atrophie des cellules nerveuses de la moelle, du noyau de l'hypoglosse, des racines de l'hypoglosse, du facial, des racines spinales an- térieures de la moelle, sclérose rubanée des cor- dons latéraux. . 133 — Embolie sylvienne à la suite d'endocardite rhuma- tismale; rétablissement de la circulation cérébrale. 72 — Foie (Genèse des abcès du) par oblitération du canal cholédoque 212 — Gangrène du membre inférieur par embolie. . . . 230 — Ecchymoses des muqueuses dans les cas d'hémor- rhagie cérébrale . 206 — Kystes symétriques cérébraux J03 — Pneumonie chronique trabéculaire 53 — Pneumonie caséeuse iobulaire 9o — Sclérose en plaques de l'encéphale et de la moelle. 47 — Sclérose en plaques disséminées » — Abaissement de température (Élude sur 1') dans un cas de cancer du foie 225 JOLYET Action physiologi{|ue de la conine 309 — et Prévost . . . Fonctions gustalives du lingual 76 Jossic Endocardite ulcéreuse avec anévrysine des valvules de l'aorte i K Krishaber Des divers mécanismes d'occlusion du larynx. . . lis 265 Laborde Descripiion anatomique des altëralions survenues chez un lapin à la suite de la section du nerf scia- tique 344 » — Des lésions de nutrition consécutives à la section du nerf scialique 222 » — Paralysie infantile (Détermination nosologique de la). 317 » — et Leven Ell'ets physiologiques de l'ésérine 192 » — Nutrition (Altération de) à la suite de la section et de la ligature des nerfs et de la moelle épiniére. 2S0 ■■ Landkieux Pigmenlation des ganglions lymphatiques consécu- tive à la gangrène sèche 191 .. Legp.os Cicatrisation des parois de l'intestin grêle. ... 67 » — Étude sur l'augmentation du volume des muscles striés pendant leur contraction 308 » — et Onihus Action de l'électricité sur l'attaque épilepliforme. . ibe » — Endosmose (De l'influence de l'électricité sur 1'). . 200 » — Galvanisation du pneurao-gastrique 26 » — Courants dérivés et des courants de polarisation dans les tissus vivants 123 » Lépime Propagation du cancer et du tubercule a la surface de la séreuse pleurale 274 » — Endocardite dans l'oreillette gauche (Siège de prédi- lection de V) 260 ). — Hémiplégie dans le cours de la pneumonie. ... 346 » — Température des nouveau-nés « 207 Le Roy de Méricolrt. Ainhum (Étude sur I') , . 201 » Leven Acide carbonique (Effets de 1') sur différents ani- maui , 163 » — Analyse du sang et du foie des animaux empoison- nes par l'acide carbonique 203 i> — et GuBLEU Matières colorantes bleues des urines 333 » — et Laborde. . . Esérine (Recherches expérimentales sur 1'). ... » 63 LiouviLLE Anomalie des valvules de l'aorte 129 » — Action irritative du chloral 307 - — Endocardite valvulaire 72 » — Épilepsie traumatique chez un chat 243 » — .Méningites cérébro-spinales tuberculeuses. 2y6, 317, 347 « — Mouvement de roulement chez le rat par lésion de la base de l'encéphale 149, 156, I57 » — Sclérose en îlots du cerveau, de la moelle et des nerfs rachidiens » 107 M Magnan Action irritative du chloral 305 >< — Méningite tuberculeuse cérébro-spinale 284 » — Paralysie générale des aliénés avec pachyméningite cérébro-spinale; sclérose diffuse delà moelle. . 113 » — Sclérose en plaques cérébro-spinale avec atrophie papillaire des deux yeux 273 « 2GG C. R. M. Mauey De la forme des muscles pectoraux et du sternum des oiseaux dans leurs rapport avec la surface de l'aile 112 » MiLLiOT Dioptro-organo et somatoscopie 163 » MuRON Polypes naso-pharyngiens (Étude sur la structure des) 223 » 0 Odier Diarrhée critique dans le cas d'épanchement pleural. 295 » Oluvier Abcès du cerveau (Observation pour servir à l'his- toire clinique des) consécutifs aux otorrhées. . . >• 99 — Endocardite et hémiplégie puerpérales » 123 — Ulcérations de l'endocarde du cœur droit 157 » Oniuus Influence des courants continus sur la quantité de l'urée de l'urine. UO » — Influence de l'électricité sur le développement et la nutrition i47 » — Mouvements de tournoiement et de manège déter- minés par l'électrisation 342 » Peyraud (Hismann). Régénération des cartilages costaux 50 et «30 PniLiPEAL'x Greffe de la raie 320 — Greffe d'une dent incisive de cochon d'Inde dans la crête d'un coq 336 PoiiciiET Perception delà lumière chez les larves de muscidées. 268 Prompt Abcès du cerveau consécutif à un abcès de l'oreille. . 30 Q QuiNQUAUD Choléra sporadiquc sec 84 — Fièvre typhoïde c'jez un rhumatisant 31 — Hémorrhagies cérébrales chez un fœtus de 6 mois. . i59 — Infection purulente à marche chronique 38 — Kyste lîbrineux du cœur 34 R RAnuTEAU. .... Influence du bromure de potassium sur les varia- tions de l'urée 55 — Action du chlorate de potasse analogue à celle du sulfate de «[uinine 13S — De l'élimination des iodatcs et des bromates intro- duits dans l'organisme 3 — Métamorphoses et mode d'élimination de certaines substances introduites dans l'organisme 3 — Métamorphoses et élimination des azotiles. ... 66 — Elimination de l'eau, de i'urée et des sulfates par les voies urinaires 187 — Accidents saturnins (Médication des) 55 — Piéduction du séloniate de soude dans l'organisme. . 47 267 C. T.. Ranvier Transformation des nucléoles dans la desquamation de la peau 26 — Structure des tendons 44 et 169 — Hémorrliagies musculaires (Pathogénie des) dans les maladies graves 335 Roque Inégalité des pupilles dans les afTections des pou- mons, des ganglions thoraciques et du péricarde. 140 Rouget Graphiques de la contraction musculaire. ... 121 et 130 TuAON Observation de transfusion du sang 68 Trasbot Zone épileptogène chez un chat épileplique. . i9i et 221 V Vaillant Note sur un tœnia monstrueux de l'homme .... I68 ^oisiN (A.) Méningite et sclérose 90 VcLPiAN Différence de quantité des bactéridies dans le sang avant et après la mort 62 — Bromure de potassium à haute dose (Étude sur l'ac- tion toxique du) 234 — Physiologie de la moelle épinière; fonctions de la substance grise éteintes par l'interruption du cours du sang dans la moelle 45 — Trouble de la pupille après la section du sciatiquc chez la grenouille 120 — Développements de vibrions dans le sang après l'in- jection de l'extrait de douce-amére sous la peau des grenouilles 66 FIN DES T.MtLF.S. LISTE DES OUVRAGES OFFERT!^ A I.A SOCIETE DE BlOI^OGIE. t I B R A R Y^ f^: B Beut Mouvements respiratoires chez les reptiles. — L'observation anatomique et Texpérimenta- tion. — Physiologie générale et ses progrès. BiGELOw. Maladies de la ha'nche. Bulletin de l'Académie royale de médecine de Belgique. Bulletin de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux- arts de Belgique. Bulletin de l'Académie des sciences de Paris. Bulletin de la Société médicale de l'Aube. Bulletins et mémoires de la Société d'anthropologie de Paris. Bulletin de la Société médicale d'Angers. Bulletin médical de l'Aisne. Bulletin de la Société botanique de France. Bulletin de la Société médicale d'émulation, envoyé par M. le ministre de l'instruction publique. Bulletin de la Société impériale de médecine de Marseille, envoyé par M. le ministre de l'instruction publique. Bulletin médical du nord de la France. Bulletin de la Société des sciences médicales de Lyon. Bulletin de la Société royale de Londres. Bulletin de la Société des sciences médicales de l'arrondissement do Gannat (Allier). Bulletin de la Société médico-chirurgicale des hôpitaux et hospices de Bordeaux. Bulletin de la Société médicale de Poitiers. Bulletin de la Société des hôpitaux de Paris. 270 BuUeliii de la Société des naturalistes de Moscou. Bulletin de la Société royale des sciences de la Saxe. Bulletin de la Société médicale du Havre. Bulletin do la Société de chirurgie de Paris. Bulletin et mémoires de l'Institut égyptien. Bulletins de l'Institut national genevois. Bulletin de l'Association médicale de Loir-et-Cher. Bulletin de la Société médicale de la Sarlhe, Bulletin de la Société médicale de Nancy. Bulletin de la Revue d'hydrologie médicale de Strasbourg. Bulletin de l'Académie des sciences naturelles de Philadelphie. Bulletin de la Société Smithsonienne. Bulletin de la commission sanitaire des États-Unis. Bulletin et Mémoires de l'Académie royale de Stockholm. C CosTE (Thèse.) Étude sur le centre respiratoire. D Da Costa Alvarenga. . . Études sur les perforations cardiaques et sur la fièvre jaune. Dally De la place de l'homme dans la nature, par Huxley. — Remarques sur un cas d'éclampsie. — Du transformisme. — Du langage. — Amérique, par Daily et Guillard. — Atavisme. — Races indigènes et archéologie du Mexique. — Recherches sur les mariages consanguins et sur les races pures. — Remarques sur les aliénés et les criminelï^, au point de vue de la responsabilité morale et légale. — Compte rendu analytique ries travaux de la Société d'anthropologie de Paris pour 1863-64. . — De l'état présent des doctrmes médicales dans leur rapport avec la philosophie et les sciences. — De l'hygiène de ronfanci'. 271 G Grkhant Manuel de piiysique médicale. H Huxley De la place de l'homme dans la nature; tra- duction de M. Daily. K Krishaber. ....... Du laryngoscope et de son emploi. — Larynx, pathologie chirurgicale. — Larynx, pathologie médicale. M Magiïot L'homme et les singes anthropomorphes. — De Facide chromique et de son emploi dans quelques affections de la bouche. — Études d'anatomie topographique et chirur- gicale sur la bouche. — Pathogénie des kystes et des abcès des mâ- choires. P Prévost Note relative aux fonctions des nerfs de la première paire crânienne. V Vaillant Anatomie de deux espèces du genre Perichaeta, et essai de classification des annélides lom- briciens. ERRATA. Comptes rendus, p. 2, note, dernière ligne, au Lieu de Senhouse- Kirlhes, lisez Senhouse-Kirkes. FIN.