CCC ETES CEE Er ï Amants enice SPP Zslises s::: 15i RRINERR HET ET DIRELETETET ETAETET Er : = OCT EAN " DATE REC rer LP TEE ET MEET DELL TENES 22552 snmss hit MÉCATÉEETS CNE CNE CHE EN CÉCERECEEEEE Znsi2 ÉCART ET Er CEE ETS FCECEEN Dre rer PCA E ES ELLES EE ENT Ut CEE CCE EL CELETErE Sr ES ÉOENITS Crerepirel SLÉCÉCHESTEE COS LE LIT EN RS Er etats 2152 212122 CCE Cr EEE re Pacs nie Er 2:52 CRETE EN CErEn CHRETIENS Sn 2232525 CEE TEE CETTE ere Riasasstse PTE Suns LEE AMEN Lies LH va Fo2 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. his © QQ u— 11° SESSION. — ANGERS 1845. CONGRES SCIENTIFIQUE FRANCE. — 2 000 — ONZIÈME SESSION, TENUE A ANGERS; EN SEPTEMBRE 1843. TOME PREMIER. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES. ANGERS, CHEZ TOUS LES LIBRAIRES DE LA VILLE. PARIS, CHEZ DERACHE , LIBRAIRE, RUE DU BOULOY, 2. MDCCCXXXXIHIT, 00 ANGERS: — IMPRIMÉRIE DE GOSNIER ET LACHÈSE. DR Re SCIENTIFIQUE DE FRANCE. “onzième sono dr dinseroeenin secececocorecscocecsee enanees ne rrenenere sg eee EXTRAIT DE L'ARRÊTÉ DU “CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE, PRIS LE 8 OCTOBRE 1842, * DANS SA DIXIÈME SESSION, TENUE A STRASBOURG. : ARTICLE. PREMIER. . «La onzième Session du Gongrès scientifique de France se tiendra à Angers en 1843. » Elle commencera ses tra- vaux du 1° au 15 septembre. Signé DE 'Casnour, Progdent G.-B. Hwrr, Secrétaire général. CIRCULAIRE DES SECRÉTAIRES HR RAUX. * Messieurs, . Le Congrès scientifique de France a choisi, pour sa onzième session , la ville d'Angers , point central de l'Ouest, ce beau pays où l’agriculture est en honneur, où la Loire et trois grandes rivières apportent la fécon- dité et appellent les progrès de l’industrie , où un vaste bassin houiller garantit ces progrès, en même temps qu’il offre au géologue et au naturaliste Les moyens d’y scruter les secrets les us intimes de la nature. Les Ardoisières , qui sont en possession. de fournir à l’Europe et aux colonies leurs atiles produits, pourront T. I, : 1 4 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE, ses grandes voies, ses municipalités , créalions vivaces , recouvertes longtemps par les ruines du moyen-âge , puis poussant en saison favorable leurs tiges vigoureuses sous la protection des institutions de saint Louis, de Louis XI et de Richelieu , pour devenir, en 1789 , la forme et la condition d’existence de la nation française. La période féodale , écrasant Sarrasins et Saxons , qui lui disputent le sein de la France, couvrant le sol de ses forteresses , envoyant de l’Anjou des Rois et des Reines à l'Angleterre et à la Palestine , bâtissant à Dieu les plus vastes et les plus merveilleux temples que l’homme ait consacrés , offre en Anjou ses grandes ruines pleines de souvenirs nationaux. C’est à ces divers points de vue , Messieurs , que les Secrétaires-Généraux de la onzième session du Congrès scientifique invitent les hommes spéciaux à se placer pour recueillir dans le pays tout ce qui est digne d’intérêt , tout ce qui peut jeter du jour sur les études historiques, hâter le progrès de la science , enrichir le domaine des découvertes utiles , et concourir à l’amélioration morale et physique de la condition humaine. C'est aussi dans ce but que le programme des questions que nous avons l’honneur de vous adresser a été élaboré. La session du Congrès scientifiqne où elles seront trai- tées s'ouvrira le 1* septembre. Nous venons demander votre adhésion à cette réunion qui établit entre tous les amis des sciences et des arts les rapports de sympathie et de collaboration qui distinguent notre époque. Nous vous prions d’agréer l'assurance de notre parfaite considération. Les Secrétatres-Généraux de La onzième session , Prancnenauzr , GuisLony aîné , Gopanp-FauLraren. ONZIÈME SESSION, | 5 PROGRAMME PAR LA COMMISSION CENTRALE DE LA ONZIÈME SESSION, X. Dispositions réglementaires. ArTicze 1%. La onzième session du Congrès scienti- fique de France s’ouvrira à Angers le 1° septembre 1843, à midi, dans la grande salle de l'Hôtel de la Préfecture. Arr. 2. Tous ceux qui s'intéressent au progrès des sciences , des lettres et des arts, et plus spécialement les personnes qui ont déjà fait partie du Congrès scientifique dans les sessions précédentes, sont invités à s’associer aux travaux de la onzième session. ( Ant. 3. Les Académies et les Sociétés savantes de France sont priées de communiquer au Gongrès la Statis- tique de leurs travaux , et de s’y faire représenter par un ou plusieurs de leurs membres. Ant. 4. Les travaux du Congrès sont répartis en six en ER 17° — Sciences naturelles. 2° — Agriculture et Industrie. 8° — Sciences médicales. 4° — Archéologie et Histoire. 5° — Littérature et Beaux-Arts. 6° — Sciences physiques et Mathématiques. Arr. 5. La durée de la session sera de dix à quinze jours. Arr. 6. À l’ouverture de la première séance, on nom- mera le Président et les trois Vice-Présidents du Congrès, 6 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE, qui, avec les Secrétaires-Généraux, formeront le Bureau central, Chaque Secrétaire inscrira dans sa Section tous ceux qui désireront en faire partie. On pourra se faire inscrire dans plusieurs Sections à la fois. Anr. 7. Chaque Section , le lendemain de l’ouverture du Congrès, nommera son Président ; ses deux Vice-Pré- sidents, et un ou deux Secrétaires-adjoints. Anr. 8. Les Sections s’assembleront chaque jour. Elles fixeront à la première réunion la durée de leurs séances. Elles pourront, dans l'intérêt de leurs travaux, se distri- buer en Sous-Sections. L'ordre d’ouverture des séances des Sections sera indiqué sur une carte particulière , qui sera remise à chaque membre du Congrès. Ant. 9. Chaque jour, à trois heures précises après- midi , il y aura assemblée générale de toutes les Sections. Un des Secrétaires-Généraux lira le procès-verbal de la séance de la veille ; les Secrétaires des Sections donne- ront lecture des procès-verbaux des séances particulières tenues dans la matinée. La lecture des procès-verbaux des Sous-Sections aura lieu dans les Sections dont elles dépen- dent. La séance de l’assemblée générale sera ensuite con- sacrée à des lectures de Mémoires et à des communica- tions verbales. Arr. 10. Nul ne pourra prendre la parole à une séance sans l’autorisation du Président. > Arr. 11, Aucune délibération ne sera prise , soit dans les Sections , soit en assernblée générale , à moins que le tiers des membres inscrits ne soit présent. Anr. 19. Toute discussion sur la religion ou la poli- tique est interdite. Ânr. 15. Aucun travail ne sera lu en séance générale qu'après qu’il aura été approuvé par la Section à laquelle il ressortit, Anr. 14. Les membres ont, outre le droit de commu- ONZIÈME SESSION. 7 niquer des travaux, celui de présenter des questions . autres que celles du Programme, mais ces questions de- vront être préalablement déposées sur le bureau en séance générale. Elles seront examinées le soir même par la commission permanente qui jugera si elles peuvent être admises. Le résultat de la délibération sera commu- niqué le lendemain aux Sections compétentes. Ant. 15. La commission permanente est composée des membres du Bureau central et des Présidents de chaque Section. Arr. 16. Des excursions scientifiques pourront avoir lieu pendant et après la tenue du Congrès. Ant. 17. Tous les membres régnicoles s’engagent à verser entre les mains du Trésorier une somme de dix francs , qui leur donne droit à un exemplaire du Cowprs- RENDU des travaux de la Session. Arr. 18. Ce CompTe-RENDu sera publié par les soins des Secrétaires - Généraux et des Secrétaires de chaque Section. Arr. 19. Les personnes empêchées de se rendre au Gongrès, pourront, de même que celles qui y assistent, présenter des Mémoires sur les diverses questions conte- nues dans le Programme , ou sur tout autre sujet relatif aux travaux de l’une des Sections, sauf, dans ce dernier cas, à se conformer à l’art. 14 ci-dessus. Arr. 20. Avant de se séparer, le Congrès fixera la date et le lieu de la douzième Session. Anr. 21, Toute difficulté non prévue par les présentes dispositions, sera soumise à la commission permanente. Ant. 22. Chaque membre du Congrès signera le. pré- sent Règlement en retirant sa carte d’entrée. (14 Les Secrétaires-Généraux , Signé PLancuenauzr , Guirrory aîné, . GopanD-FAULTRIER, GuiNoysEAU-JouBERT. 8 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. Ex. Administration et organisation, SECRÉTARIAT GÉNÉRAL. MM. Prancuewauzr, président du Tribunal civil et de la Société d'Agriculture , Sciences et Arts. Guizconx aîné , adjoint au maire de la ville d’An- gers, président de la Société industrielle. Gopanp-Faucraier , conservateur des Monuments et du Musée d’antiquités , et Membre des deux Sociétés académiques d'Angers. Guinoyseau - JouserT , négociant manufacturier , membre de la Société d'Agriculture, Sciences et Arts, trésorier-archiviste du Congrès. SECRÉTAIRES DES SECTIONS. re Section, — MM. Guérix , docteur-médecin , directeur de l'Ecole préparatoire de Méde- cine et de Pharmacie. — — B£nauD, conseiller à la Cour royale. sit sé Boreau , directeur du Jardin-des- Plantes. _— — Muxzer , secrétaire perpétuel de la Société d'Agriculture , Sciences et Arts, 2 Section, — MM. pe Braurecan» , président de cham- bre à la Cour royale et membre des deux Sociétés académiques d'Angers. — — GrmauD (Charles) , membre du con- seil-général. — — Comte DE Quarresanges, membre de la Société d'Agriculture, Sciences et Arts. 3° Section. — 4° Section. o° Seclion. . ONZIÈME SESSION. 9 + Bourron-Levêque , membre du con: seil d'arrondissement. — Sésiize-Aucer , président du Comice agricole et industriel de Saumur. Fes Juin (Théodore) ; avocat , membre de la Société industrielle, — MM. Mmaurr, docteur-médecin , profes- seur à l’École de Médecine. SE Casronxer, docteur-méd., professeur adjoint à l’École de Médecine. — Ouvrarp, docteur-médecin , profes- seur à l’École de Médecine, — Larocue-Tarsor, doct.-méd., profes- seur adjoint à l’École de Médecine. — MM. Mancuecay , archiviste du départe- ment. — DE Lens , professeur de philosophie au Coilége royal. 22 Cosnier (Léon), imprimeur, membre de la Société industrielle. —- MM, J, Soniw, proviseur du Collége royal, membre des deux Sociétés acadé- miques d'Angers. — Tazsor (Eugène) , substitut du pro- cureur du roi, — Marquis ne Senonnes, membre de la Sociélé d'Agriculture , Sciences et Arts. _ Pavre (Victor), imprimeur, membre de la Société d'Agriculture, Scien- ces et Arts. —- Rousseau , membre de la Société in- dustrielle. — PsAuGer, rédacteur en chef du Pré- curseur de l'Ouest. 10 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. 6° Section. — MM, Fournier , ingénieur de la Sarthe et .— —— de la Mayenne. Bayan, inspecteur de l’Académie, membre de la Société industrielle. Trougssan», professeur de physique, membre de la Société industrielle, Goprroi , professeur de chimie à l'École de Médecine, membre de la Société industrielle. À. Menière , membre de la Société industrielle. ee 0 09 —— ONZIÈME SESSION. 11 . QUESTIONS PROPOSÉES POUR CHAQUE SECTION. —— PREMIÈRE SECTION. SCIENCES NATURELLES, Géologie, Botanique et Zoologie. 19 Dans l’hypothèse d’une disposition linéaire des êtres organisés, doit-elle constituer une série unique partant de l’animal le plus par- fait pour descendre aux Zrfusoires et passant par les Chaodinées pour arriver aux Dicotylédones , ce qui ferait concorder la marche descendante de Cuvier avec le point de départ choisi par de Jussieu et Lamarck ? 20 Cetle série ne constituerait-elle pas plutôt deux lignes distinc- tes, ascendantes et divergentes, partant de points ou communs ou très rapprochés, et quelles données, à l’appui de cette dernière hy- pothèse, la géologie a-t-elle fournies, quant à la coexistence ou à la préexistence primitives des êtres inférieurs et aux évolutions et per- fectionnements des deux formes, animale et végétale ? 30 Les Congrès scientifiques ne rendraient-ils pas un éminent ser- vice aux sciences naturelles en discutant, posant et définissant les bases nouvelles sur lesquelles doivent désormais s'asseoir les carac : tères génériques, en ayant égard à leur valeur relative suivant les diverses classes et même selon les familles dans certaines classes? 49 Le syslême qui tend à isoler les êtres en multipliant indéfini- ment les genres, est-il plus favorable à l’élude ou plus conforme à la méthode naturelle que de larges coupes génériques ? 5° Existe-t-il des caractères à l’aide desquels on puisse distinguer d’une manière certaine l'espèce de la variété? } 60 Quelles sont les circonstances relatives au gisement des houilles dans l’Anjou ? 70 De quelle manière le calcaire marbre est-il associé dans le Maine et l’Aujou avec les couches de houille exploitées ? 80 Chercher Les moyens de reconnaître le développement annuel en grosseur des arbrisseaux et des arbres dans les sols variés, sans avoir recours à l'examen des couches intérieures. 12 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE, 90 Le phénomène connu sous le nom de Tige fasciée, résulte-t-il de la soudure de plusieurs axes en un seul, ou n'est-il dû qu'à une simple dilatation d’un seul axe ? 10° Donner un catalogue raisonné des mousses et jongermannes croissant sur les terrains schisteux , pour servir à la géographie bo- tanique. 11° Présenter l'histoire et la synonymie des espèces de rosiers qui eroissent spontanément sur le sol de la France. 120 Quels sont les moyens à employer pour obtenir la géographie zoologique de la France ? : Pour en faciliter l’étude, ne conviendrait-il pas d’en diviser le travail, soit par provinces, soit par départements, en tenant compte;: 1° de la nature du sol et de son influence ; 2° de la nature des eaux ; 30 de la lumière et de l'obscurité ; 4° de l'élévation des lieux com- parée au niveau de la mer; 5° de la température et de l'exposition; 60° des stations et des habitations; 7° des époques soit constantes, soit variables de séjour ou d'apparition des animaux, elc. 139 Quels rapports peuvent exister entre la géographie botanique et la géographie entomologique dans l'Ouest de la France? 140 Quels sont les rapports et les différences qui existent dans le mode de production des composés calcaires entre diverses classes d'animaux et spécialement dans les radiaires, mollusques, crustacés et vertébrés? Quels sont dans les mollusques les organes où s'opèrent les com- binaisons chimiques qui forment les sous-carbonate et phosphate et autres sels à base de chaux qui entrent dans la composition du test, etcomment s’opèrent ces combinaisons? La chimie animale a-t-elle, sous le rapport de la production de ces composés , signalé des différences notables dans les éléments des divers liquides et des tissus des mollusques nus et des mollusques testacés ? Comment peut-on expliquer dans les conchyfères la formation des tests lamelleux et surtout des tests fibreux et fibrolamelleux ? 15° Quel rôle dans la constitution géologique de l'écorce du globe a pu jouer le règne animal dans la production du calcaire, et à quels caractères, indépendamment de ceux tirés des dépouilles d'animaux fossiles et du gisement relatif, peut-on reconnaître avec certitude le calcaire formé par l'intermédiaire ou sans le concours des animaux? 169 Quel est l’état actuel des études, des travaux et des collections eh aux sciences naturelles dans le département de Maine et oire ? | ONZIÈME SESSION. 13 i DEUXIÈME SECTION. AGRICULTURE ET INDUSTRIE. Agriculture. 10 Quel serait en France, et particulièrement dans les départe- ments de l'Ouest, le meilleur mode de fermage pour hâter les pro- grès de F agriculture ? 20 Quels seraient les moyens d’attacher au sol les habitants des campagnes et de les détourner de cette propension qui les porte à abandonner l’agriculture, pour chercher dans les villes des profes- sions industrielles où ils ne trouvent souvent qu’une existence pré- çaire? 30 Quelles sont les espèces d'animaux domestiques qui pourraient être utilement importées en France? Quelles espèces sauvages pour- -raient être utilement rendues domestiques? 40 Quels ont été en Anjou les résultats de l'introduction des races étrangères de bétail, spécialement de la race suisse, soit de Berne, soit de Schwitz, de la race hollandaise et de la race anglaise de Durham ? 50 Jusqu’à quel point la nourriture et le régime peuvent-ils mo- difier les formes des animaux domestiques ? Les modifications nota- bles qui se manifestent dans les formes des chevaux, des bœufs et des autres animaux, par suite de changement d'habitation et de ré- gime, ne devraient-elles pas donner lieu à des études plus sérieu- ses que celles auquelles on s’est livré jusqu’à ce’jour (1) ? 6° Quelle influence le Dépôt d’étalons d'Angers a-t-il exercée sur l'amélioration de l'espèce chevaline depuis son organisation dans le département de Maine et Loire , et quels avantages l’éleveur peut-il retirer de l'emploi d’étalon pur sang? 79 Le prix d’achat de remonte est-il en rapport avec +) prix. de re- vient? is ea 8° Quelle est des deux races boviues indigènes de l’Anjou, arron- dissement de Beanpreau ou arrondissement de Segré, la préférable pour être engraissée dans les pâturages de Normandie: ? go Rechercher les moyens à l’aide desquels on pourrait encoura- ger l'élève des bestiaux sur les terrains de médiocre qualité, afin de Mine aux éleveurs une juste concurrence à l'égard de ceux qui ‘sont pure par un sol plus généreux. (1) Une Médaille d’argent sera décernée à celui qui aura le mieux traité la question par écrit on même verbalement dans le sein de la section d’agri- culture. 14 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. 100 Les tentatives de certains propriétaires à l'effet de remplacer dans nos contrées les bœufs par des chevaux, mules ou mulets, et de substituer les vaches aux bœufs , ont-elles cu et pourraient-elles avoir de bons résultats ? 119 Quelles sont les diverses races de bêtes, chevaline, asine, bovine, etc,, employées pour l’agriculture, le roulage, etc., dans les différents cantons de nos contrées occidentales? Quels sont les motifs de la préférence donnée à telle ou telle de ces races , en telle ou telle localité ? Ces motifs sont-ils bien fondés? 12° Quels sont les résultats obtenus par les diverses expériences de croisement de races que l’on a successiyement tentées ? 130 Chercher le moyen d'encourager le repeuplement des bois, de manière à ce que l'Etat et les propriétaires y trouvent également leur avantage. 149 Quels sont les moyens les plus sûrs de perfectionner sans per- turbation les méthodes de culture en usage , et d'augmenter ainsi la valeur du sol et la richesse du pays? 159 Quels seraient les meilleurs moyens à employer pour donner le plus de valeur possible aux terrains communaux livrés à la vaine pâture ? 16° Indiquer les meilleurs moyens de se procurer des engrais et déterminer leurs effets. 17° Par quelle modification dans la loi du fermage pourrait-on concilier les droits du propriétaire du sol et du cultivateur-fermier et lui donner sécurité , rétribution pour ses travaux d'amélioration ? 18° Quels sont les progrès de l’agriculture en Anjou depuis trente ans? 190 Quelles sont les différences de culture entre les divers arron- dissements du département de Maine et Loire, ct notamment quels sont les assolements usités dans ce pays ? 20° Quelles sont les cultures étrangères à l’Anjou qu'on pourrait y introduire avec succès , et en particulier celle du houblon ? 219 Quels sont les divers instruments aratoires employés dans le département de Maine et Loire , et quels sont les moyens d'amélio- ration qu'on pourrait y apporter ? 229 Quel est l’état de l'élève du bétail dans le département de . Maine et Loire? La race bovine s'est-elle améliorée? Dans quelle proportion s’est-elle accrue depuis dix ans? — Même question pour la race chevaline ? . 23° La pratique de la greffe sur les vignes prend-elle de l’exten- Sion en Anjou et dans les pays voisins ? a-t-elle procuré des béné- ONZIÈME SESSION. 45 fices notables aux propriétaires des vignes greffées, et amélioré sen- siblement la qualité des produits ? 240 Quels sont les faits observés en Anjou sur l'influence générale exercée par la nature du sol géologique sur la production des vi- gnes ? Et en particulier, quelles sont les qualités du vin récollé sur les schistes ardoisiers comparées à celles du vin récolté sur les cal- caires secondaires ou tertiaires ? Quelle influence l'accumulation des silex dans les terrains plantés en vigne exerce-t-elle sur la qualité des vins? La durée des ceps est-elle plus longue sur le terrain cal- caire que sur le terrain schisteux ? 250 Quels sont en Anjou les vins les plus riches en alcool ? Quelle est la nature des sols qui les produisent ? 26° L'emploi de la chaux comme engrais ou stimulant dans les vi- gnobles , est-il sans inconvénients ? 279 Quels seraientles moyens à employer pour faire cesser la souf- france vinicole? 280 Quels sont les moyens de perfectionner la culture da chanvre et autres plantes textiles dans le département de Maine et Loire? 290 Quel serait le meilleur procédé à suivre pour obtenir au moyen de semis, de nouvelles et bonnes variétés de fruits? Serait-ce en prenant les semences dans les fruits sauvages ou dans ceux qui sont déjà améliorés par la culture ? Les expériences faites jusqu’à ce jour sur d’autres végétaux indiquent-elles une préférence à donner à l’un de ces moyens? 30° L'éducation des abeilles, trop négligée dans le département de Maine et Loire et si peu dispendieuse , ne pourrait-elle pas offrir des résultats avantageux ? 310 Quel est en Anjou l'état de la culture du mûrier ? Quels sont les avantages qu’elle peut procurer ? 320 Y a-t-il une différence notable dans les produits d’un hectare de terre arable assis sur les schistes anciens et ceux d’un hectare de terre de même qualité assis sur les roches calcaires ? Industrie. 1° De l'utilité d'une statistique générale de la France et des moyens de l'obtenir. 20 Histoire de la domesticité dans les sociétés anciennes et mo- dernes. . Quels moyens de isorälisation , quels règlements administratifs comporte l'état actuel de la domesticité en France? . 30 Ne serait-il pas convenable que les droits et les obligations des domestiques fussent déterminés par un règlement de l'autorité pu- 16 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. blique, et notamment en ce qui concerne les livrets auxquels ils pourtaient être assujettis, ainsi que les ouvriers des manufactures? 40 Quels ont été l’origine et le régime des banques et le taux de l'intérêt dans le passé? Appliquer cette question à la France et aux états circonvoisins; quels perfectionnements immédials ce régime comporte-t-1l? 50 De l'utilité de l'établissement des banques agricoles en France et des moyens de les créer. 6° Par quels moyens pourrait-on parvenir à établir en Bretagne des colonies agricoles et donner ainsi à la culture de vastes landes restées incultes jusqu’à ce jour, faute de bras et de capitaux! 70 Quels ont été jusqu’à présent et quels seront probablement les principaux effets et conséquences de l'établissement et de la multi- plication des chemins de fer, des bateaux à vapeur, et en général, de l'amélioration des différents moyens de communication? Quels sont les principaux avantages procurés à l’agriculture, au commerce et à l'industrie par l’amélioration des voies de communication de toutes sortes ? 8° L'agriculture et l’industrie doivent-elles marcher sur deux li- goes parallèles, sans se réunir, où doivent-elles au contraire se combiner de manière à ce que certains ouvriers puissent s'appliquer alternativement à l’une et à l’autre ? Ù 90 Quels doivent être les résultats probables, pour les départe- ments de l'Ouest, de l’exécution du chemin de fer de Paris à l'Océan par Angers et Nantes? 10° Quels sont les avantages et les inconvénients du morcelle- ment de la propriété; et dans le cas où les inconvénients l’emporte- raient, quels moyens employer pour arrêter l'excès de ce morcelle- ment? 110 Indiquer quels pourraient être les meilleurs moyens d'aména- gement, de conservation, de conduite et de direction des eaux en général ; le tout dans l'intérêt de la navigation, de l’agriculture, da commerce et de l'industrie. 12° Quelle est l'importance relative des trois industries, agricole, commerciale, manufacturière dans Maine et Loire ? Combien cha- cune d'elles occupe-t-elle de bras ? Combien absorbe-t-elle de capi- taux? À quel taux en paye-t-elle l'intérêt moyen? 130 La législation des douanes sur l'introduction des bestiaux étrangers doit-elle être modifiée ? Dans le cas de modifications , quelles sont celles qui pourraient être admises, eu égard aux inté- rêts des populations , de l'agriculture et du commerce? Les droits d'octroi imposés sur les bestiaux doivent-ils être réduits ? PE TT STE cest Dont ne + + ONZIÈME SESSION. 17 140 L’insuffisance de la production indigène en chevaux de trou pe, rendant la France tributaire de l'étranger, en cos de guerre, une augmentalio” des tarifs suffirait-elle pour remédier à cette insuffi- sance ? , 15° Quelles seraient les meilleures mesures à prendre pour em- pêcher les fraudes si préjudiciables qui se commettent de la part des fabricants et marchands de noir-animal et autres stimulants ou en- grais d’un prix élevé ? 16° Trouver le moyen d'employer le bois blanc à la confection des barriques en le rendant imperméable à l’aide d'un enduit ; d'une injection; ou tout autre moyen. Il faudrait que cette préparation ne donnât aucun goût au vin et fût d’un prix assez modique pour qu'il y eût avantage à préférer le bois blanc au chêne ? TROISIÈME SECTION. SCIENCES MÉDICALES. L Hygiène publique et privée. 1° Les chances de maladies graves et de mortalité sont bien plus grandes pour les soldats en garnison que pour les hommes de même âge qui ne font pas partie des contingents. (D'après les comptes de l'administration de la guerre, session de 1825 , le chiffre de morta- lité pour les militaires est de 2,72 sur 100 par an; la proportion annuelle des décès chez les hommes de 20 à 30 ans dans la vie civile est de 1,25.) : Rechercher les causes de cette différence dans toutes les condi- tions hygiéniques du soldat en garnison : la qualité de l'alimentation et la distribution des repas, l'habillement , l'équipement, le caser- nement, les exercices, etc., ct surtout l'acclimatement du jeune soldat au régiment. 2° Rechercher les causes de l'épidémie de méningite cérébro-spi- nale qui, en 1840 et 1841, à régné dans plusieurs grandes villes de France, et à sévi plus particulièrement chez les jeunes soldats. . 3° Rechercher les moyens qui pourraient le plus concourir à l’amé- lioration physique de la race humaine. 4° Du régime connu sous le nom d'entrainement des hommes considéré dans les résultats pratiques qu’on en a obtenus en Angle- terre. — Comparer ce régime à celui des ancièns athlètes. 5° Quelles sont les causes et les moyens prophylactiques les plus ellicaces des scrophules ? 6° Le rouissage des chanvres qui à lieu chaque année dans une T, ÿ 2 18 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. grande étendue du département de Maine et Loire , donne-t-il lieu à des maladies ? 70 Quellés sont les affections endémiques da département? 80 Rechercher les causes de la grande fréquence de l'aliénation mentale dans le départemeni de Maine et Loire? 90 Quelles sont les causes de la grande mortalité des enfants dans le premier âge de la vie? — De l'alimentation, du vêtement , du coucher, de la sortie à la promenade des enfants du premier âge. 100 Quels sont les symptômes et les causes de lindigestion chez les enfants dans les premiers mois de leur existence ? Cette maladie né constitue-t-elle pas ce que l’on appelle dans divers localités , Ze mal de l'an, le mal de Saint-Séverin, ete... ? Quels sont les moyens préservatifs et curatifs ? A 119 De l'usage des corsets considéré dans ses résultats hygiéniques sur la santé des femmes et des enfants? 129 Le système d'enseignement adopté par l'Université dans les colléges, n’a-t-il pas le grave inconvénient , en multipliant trop les sujets d'étude , de nuire au développement du jugement et de l'intel- ligence des jeunes enfants ? 130 Déterminer la différence qui existe entre l'infection et la con- tagion. Les règlements sanitaires existant actuellement en France sont-ils d'accord avec l'observation médicale des faits ? 140 Quels sont les meilleurs moyens de préserver les équipagés des bâtiments de l'atteinte des maladies graves qui règuent à la côte d'Afrique ? Médecine. 1° Quelle est la meilleure classification des maladies connues au- trefois sous le nom de fièvres continues au point de vue actuel de l'observation médicale ? | 20 De la fièvre typhoïde, telle qu’elle S’est produite dans nos con- trées , et quel est le traitement qui à le mieux réussi ? 30 Quels sont les différents modes de propagation de l'inflamma- tion ? 49 Quelles sont aujourd'hui sur la médecine pratique les influen- ces favorables et nuisibles de la théorie généralement connue sous Je nom de médecine physiologique ? 5° Les vomitifs et les purgatifs peut-être abusivement employés dans le moyen-âge, ne sont-ils pas trop négligés dans nos temps modernes? abstraction faite des cas où les évacuants sont positive- ment indiqués , quelles sont Les maladies où leur administration peut offrir de grands avantages? Examiner isolément les vomitifs et les purgatifs, afin de donner une solution plus nette et plus positive, | ! | | het Car em 2 cé Mme 2: ONZIÈME SESSION. 19 60 Quelle est la meilleure théotie de l'infection purulente et quel est le meilleur traitement à opposer à cette affection ? 70 Quels sont les causes et le traitement de l° hépatite chronique? "8° À quelles lésions d’organe faut-il rapporter les symptômes qu’on observe dans la colique des peintres (affection saturnine ?) ‘90 Quelles sont les influences qui pioGMIEeNE le plus souvent la forme adynamique des maladies ? 10° De l'usage et de l’abus de la diète dans le traitement des ma- ladies. 119 Comment distinguer les troubles sympathiques du cerveau de ceux qui sont dus à une affection idiopathique de cet organe? 129 Quels sont les signes qui font distinguer au début la manie délirante aiguë , de la fièvre cérébrale maligne? 130 Quelle est la cause de l’intermittence dans certains phénomè- nés morbides , et notamment dans les fièvres. 140 Quelle est l'influence de la nuit sur l’état des malades dans les diverses maladies, et comment expliquer cette influence? 150 Quelles sont les diverses eauses qui produisent l’amaurose , et en quoi l’élude de ces causes peut-elle éclairer le traitement? 16° L'iode et ses préparations méritent-ils la confiance dont ils jouissent dans le traitement des scrophules ? 179 A quel état chimique existe le fer dans chacune des nombreu- ses préparations ferrugineuses préconisées de nos jours? Quel est le degré de stabilité de cet état? Quelle est la quantité relative de fer contenue dans chacune de ces préparations ! Quel est l'élat d'oxida- tion du fer qui convient le mieux pour être àbsorbé par nos 6r ganes, et pour son assimilation? 180 Le mercure est-il le meilleur moyeñ de trailement des symp- . tomes primitifs ét consécutifs de la syphilis? 19° Etablir une disüinction entre les blennorrhagies syphilitiques et celles qui ne le sont pas. — Y a-t-il identité entre le virus blen- norrhagique et le virus syphilitique ? 200 De l'emploi du nitrate d'argent dans les maladies du globe de l'œil et de ses dépendances. 210 La méthode abortive doit-elle être préférée à toute autre méthode dans le traitement des muqueuses de peu d'étendue? 229 De l’emploi de la strychnine dans les affections nerveuses. 230 Quels sont les usages de la rate? + 249 Quels sont les services que l’application du microscope a ren- dus à la médecine, et notamment à l’allaitement des enfants ? 20 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE, 250 L'étude de la phrénologie peut-elle conduire à reconnaître par l'inspection de la configuration du crâne, les qualités intellec- tuelles, morales et instinctives de l'homme? 26° Faire l'appréciation des théories et des traitements divers de la folie. ; 270 Le partage que les spécialités établissent entre les diverses branches de l’art de guérir, a-t-il été un avantage? 280 Quelle est aujourd'hui l'influence médicale théorique et pra- tique que la capitale exerce sur la province? — Quelle est la part d'influence de celle-ci ? 290 La statistique appliquée aux études médicales a-t-elle le de- gré d'importance qu'on a semblé lui reconnaître dans ces derniers temps? Chirurgie. 1° Du pronostic et du traitement des diverses espèces de cancer. 20 Du traitement comparatif des rétrécissements de l’urèthre par la dilatation et la cautérisation. — Quels sont les avantages et les inconvénients du cathétérisme forcé ? 30 Du traitement comparatif du calcul vésical par la taille et la lithotritie. 49 Les luxations congéniales et les luxations spontanées sont-elles susceptibles de réduction ? 50 Quels ont été les résultats obtenus de l’emploi du tartre stibié à haute dose dans le traitement de diverses affections chirurgicales ? 69 De l'emploi des irrigations d’eau froide en chirurgie : — pré- ciser l'opportunité de leur application, et indiquer les accidents auxquels elles peuvent donner lieu. 79 Quels sont les résultats obtenus de la myotomie, qui peuvent être considérés comme un véritable progrès de la chirurgie ? et en particulier faire connaître les diverses modifications qui peuvent survenir après l'opération du strabisme dans l'exercice de la vision. 8° Quels sont les résultats obtenus de l’antoplastie depuis le com- mencement du XIXe siècle, qui peuvent être regardés comme un vrai progrès de l’art ? Ë 9° Du choix de la méthode pour pratiquer l'opération de la ca- taracte, L'une des méthodes doit-elle être appliquée dans tous les cas à l'exclusion des autres, ou chacune d'elles n’a-t-elle pas ses applications particulières. 10° Du choix de la méthode et du procédé pour pratiquer la pu- pille artificielle. 119 Quelles sont les indications thérapeutiques que présentent les plaies pénétrantes des articulations ? ae. 5 —_——————Z ONZIÈME SESSION. 21 120 Quelles sont les lésions anatomiques qui constituent la ma- Jladie qu'on appelle tnmeur blanche? Quels sont les moyens de la combattre dont l'expérience a le mieux démontré l’éfficacité? 139 Du traitement des fractures des extrémités inférieures? 14° Du traitement de la tuineur et de la fistule lacrymales ? ï Médecine vétérinaire. 1° Quels sont les meilleurs moyens à employer pour produire l'amélioration des diverses races d'animaux domestiques suivant leur destination. 20 Faire connaître les principales épizooties qui ont régné dans le département de Maine et Loire , depuis vingt ans. 30 Dans l’empoisonnement des chevaux par le pain moisi , quelle est la substance vénéneuse ? 40 De la morve des chevaux , considérée dans son étiologie, dans ses symptômes, dans ses lésions M ce , dans son traitement et . dans sa contagion aux animaux et aux hommes. QUATRIÈME SECTION. HISTOIRE ET ARCHÉOLOGIE. Histoire. 19 Connaît-on des documents certains relatifs aux migrations des peuples anciens sur les côtes de la Bretagne et de la Vendée? 20 Quel est le lieu où Dumnacus fut défait par les Romains? 30 Quels ont été les résultats politiques de la domination romaine en Anjou ? 49 Existait-il des défenseurs des cités avant leur institution légale? + Dans le cas d'affirmative, à quelle époque peut-on faire remonter leur établissement? : 5° De quelle époque date l'introduction du christianisme en An- jou? Quels ont été les apôtres de la pravince? Dans quel lieu le christianisme a-t-il fondé son premier établissement? Dans quels lieux le paganisme a-t-il trouvé son dernier refuge ? Quelles ont été les dernières divinités païennes en Anjou ? 60 À quelle époque l'Anjou a-t-il été soumis à la domination des Francs? 7° Rechercher les principales traditions qui ont rapport à Roland, le roi Arthur, l’enchanteur Merlin et l'archevêque Turpin. Recher- cher l’origine historique de ces traditions et montrer leur influence sur la poésie du moyen-âge. 22 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE, 80 Examiner quelles furent pour la Bretagne les limites de l'in- vasion germanique; quelle fut l'influence de l'esprit, des habitudes , des institutions germaniques sur ce pays. — La féodalité est-elle née, s'est-elle développée en Bretagne d'après les mêmes causes , dans les mêmes circonstances que dans le reste de la France ? 90 Quelles ont été les conséquences de l'adjonction de l'Anjou au royaume d'Aquitaine, formé par Louis-le-Débonnaire, et détruit par Charles-le-Chauve ? 100 Quelle a été la part de l'Anjou dans la résistance qui a été op- posée aux Normands et dans les calamités qui ont été la conséquence de leur invasion ? 119 Déterminer les limites et la situation géographique de l’Anjou à l’époque de l’avénement des premiers Ingelgériens. 120 Comment la dynastie capetienne à son avénement fut-elle ac- cueillie en France, et notamment en Anjou? 130 Quelle a été la part de l’Anjou dans la conquête de l’Angle- terre, par Guillaume-le-Bâtard ? 140 Quelles ont été, sous Foulques-Nerra et Geoffroy-Martel , les relations de l'Anjou avec les provinces limitrophes? 150 Quels avantages a retirés PAnjou des mariages des comtes Ingelgériens ? 160 Quels furent les principaux promoteurs des croisades dans les provinces de l'Ouest de la France ? 170 Quelle part prit l’Anjou dans les guerres de la maison de Blois, contre celle de Montfort ? 180 Quel a élé le résultat des expéditions françaises en Italie, sous les ducs d'Anjou ? 190 Quelles sont les causes qui ont empêché les Anglais de s’éta- blir en France, quoiqu'ils aient gagné toutes les grandes batailles livrées dans les XIVe et XVe siècles ? 20° D'après quels faits peut-on établir d'une manière inattaquable que Jeanne d'Arc a sauvé la France ? 219 À quelle époque l'imprimerie a-t-elle été introduite en Anjou? Détails historiques à ce sujet. 220 Quelles sont les classes de la société qui ont embrassé avec le plus d'empressement les idées de la réforme , dans les provinces riveraines de la Loire? 230 Quelle a été la part de la politique dans les causes de {a Saint- Barthélemy ? 24° Quelles furent les principales causes de la destruction de la Ligue en Anjou, et spécialement quelle influence exerça sur ce fait le mariage de César de Vendôme avec la fille du duc de Mercœur? DR nniotnsr or ee ONZIÈME SESSION. 23 250 À quelles causes peut-on attribuer le grand nombre et l’im- portance des événements dont les bords de la boire ont été le théä- tre, depuis Philippe de Valois jusqu'à Louis X1V ? 260 Apprécier la valeur historique actuelle des œuvres de Ber- pier, voyageur Angevin du XVII® siècle. 270 Examiner l 2 ar des coutumes de Bretagne sur l’établis- sement des premiers règlements maritimes, et principalement sur ceux d'Oléron, si généralement adoptés au moyen-âge. 280 Indiquer les limites anciennes et modernes du pays Angevin , celles dn ressort de ses principales juridictions , et surtout de l’em- pire de sa coutume , particulièrement dans les derniers siècles , et à l’époque qui a précédé la réorganisation des tribunaux. 290 Détérminer les résultats que l'institution des parlements en France à pu avoir sur nos institutions. 30° Quelles sont les améliorations qui ont été prodnites par les États provinciaux, depuis Louis XI jusqu'à la Révolution fran- çaise ? 31° Quels sont les ordres monastiques qui on! fondé des établis- sements dans l’'archeyêché de Tours , et dans Ja portion du diocèse de Poitiers qui appartenait à l'Anjou ? Quel a été la part de chacun d'eux dans le développement de la civilisation ? 320 Quels ontété, en France et.en Angleterre, les diocèses dans lesquels les abbayes tuées en Aujou onteu des prieurés on autres dépendances ? ? Quelles sont les abbayes situées en dehors de l’Anjou qui ont possédé des maisons dans cette province ? 339 Quelies ont été les dépendances de Fontevrault dans les différents diocèses de la France , de l'Angleterre et de l'Espagne ? Quels sont les archives et les dépôts publics étrangers à l’Anjou daus lesquels on peut trouver des titres et des documents sur cette abbaye ? 349 Quelle a été la conduite du clergé envers les serfs de diffé- rentes Condilions ? 350 Etudier l'influence des Universités en général snr les affaires politiques et religieuses de l’Europe, et sur les progrès des lettres et des sciences, depuis le XIV® siècle jusqu’au temps de Louis XIV. 360 À quelle époque a-t-on conimencé à se servir de la langue vulgaire pour les actes publics dans les provinces de l'Ouest, ne raines de la Loire? Quels sont les caractères particuliers du dialecte de ces provinces? En quoi diffère-t-il on se rapproche-t-il des Jan- gues d’oi/ et d’oc proprement dites ? 370 Etudier l'influence des écrivains de l’Anjou et des provinces voisines , particulièrement de la Touraine , de l’Orléanais, du Blai- 24 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. sois, dn Vendômoïs et du pays Chartrain, sur la langue et la littéra- ture françaises aux XVe et XVIe siècles. 38° Quels sont les ouvrages les plus curieux en langue vulgaire composés dans ces provinces avant le XVe siècle ? 39° Rechercher les noms et les ouvrages des artistes Angevins qui se sont distingués, en Anjou ou ailleurs, dans l'architecture, la sculp- ture, la peinture et la gravure, ou de ceux qui , nés dans une autre province, ont exercé leur talent en Anjou. 40° Rechercher les usages particuliers aux corporations d'arts et métiers dans l’Anjou et dans les autres provinces dépendantes de la généralité de Tours. 419 Quelle était , avant 1789, la part de contribution des diffé- rents ordres aux charges de l’État? Expliquer la nature de ces con- tributions et leur mode de perception. 420 Quelle était l’organisation politique, judiciaire, financière et civile d’une province avant 1789? Quelle était la compétence des diverses aulorités et quelles relations existaient entr'elles ? 439 Faire ressortir l'élément démocratique contenu dans les mu- nicipalités, les consulats, les jurandes, les fabriques, avant 1789. 449 Tracer le plan d’une histoire particulière, telle que l'état actuel de la science le comporte. Parler spécialement des travaux auxquels on peut se livrer sur une province, une ville, une institu- tion, une famille, un établissement ou monument public. Dire quelles qualités chacune de ces monographies réclame. Citer les meilleurs modèles en ayant soin de les apprécier et de les critiquer. Archéologie. 19 Faire pour l’Anjou la statistique des monuments druidiques, romains et gallo-romains. On devra spécialement s'étendre sur les théâtres et sur les amphithéâtres. 2° Indiquer les moyens de dresser une carte monumentale de chacune des architectures qui se sont succédées sur notre sol? 39 À quelle époque l’art byzantin s’est-il introduit en Anjou? 49 En Anjou, dans les communes de Chambellay et du Plessis- Macé, l'on rencontre dans les bois d'énormes monceaux de mâche- fer, si bien qu'il est employé au mac-adam des routes. Il n'y a dans le pays aucun souvenir d'usine. À quelle époque donc remontent ces mâchefers et de quel genre d'usine proviennent-ils ? 5° Pourquoi trouve-t-on souvent dans un même lieu quantité de débris de vases romains? Quels sont généralement les sujets repré- sentés en relief sur ces vases , avec des inscriptions? héde.s ONZIÈME SESSION. 25 6° Trouve-t-on des voûtes ou des murs d'église dans lesquels sont placés des vases de terre? Quelle devait être la destination de ces vases? 7° Quelles sont les différences entre les fortifications romaines et celles du moyen-âge? 8° Quelles sont les sculptures qui peuvent être regardées comme symboliques dans les monuments romains de l'Aujou? .90 Comment expliquer l’emblême de la femme à queue de pois- son , tenant dans chaque main un poisson? 10° Quel symbole représente un personnage assis sur un nimbe croisé, ayant un autre personnage à genoux à ses pieds ? 11° À quelle époque a-t-on cessé de brûler les corps dans les Gau- les et particulièrement en Aujou ? Détails sur les sépultures. 129 À quelle époque remontent des tombeaux en granit situés à Price, près de Laval , et à Coron en Anjou, sur lesquels on remar- que des empreintes représentant des socs de charrue , des fuseaux , des quenouilles , des bourdons , des croix sculptées à la grecque? Comment expliquer ces signes ? 139 D'où vient la coutume jusqu’au XVIIE siècle, de placer des vases pleins de charbon dans l’intérieur de cerlains tombeaux? 140 Le culte des morts considéré sous le rapport de l'art a-t-il toujours suivi, dans certaines parties de la France , les progrès de la civilisation ? 15° Décrire du XIIe au XVe siècle inclusivement, les costumes d’hommes et de femmes dans les trois classes des villains, bourgeois et nobles ou seigneurs ; faire connaître aussi le costume des gens de guerre à la même époque ? ® - 16° Expliquer pourquoi l’on trouve assez fréquemment dans les lieux jadis occupés par les Romains, des vases pleins de leurs mé- dailles et monnaies ? 170 Histoire de la monnaie angevine depuis les comtes Ingelgé- riens, jusqu’à la mort du roi René. 180 Histoire de l'hôtel des Monnaies d'Angers. 190 Quelles mesures a-t-on prises depuis douze ans pour conser- ver les fragments d'architecture provenant d’anciens édifices ; don- per une stalistique des lieux de dépôt. Indiquer les monuments dignes d’être conservés , afin de prévenir leur destruction imminente? . 200 Quelles sont dans le département de Maine et Loire les col- leclions archéologiques les plus dignes d’être signalées ; en faire la descriplion autant que possible : s'étendre sur les tapisseries , ins- criplions, peintures. 26 CONGRÉS SCIENTIFIQUE DE FRANCE, CINQUIÈME SECTION. LITTÉRATURE ET PEAUX-ARTS. Morale et Philosophie. 19 Qu'est-ce qui constitue le beau esthétique? Y a-t-il une science du beau? Des conditions dans lesquelles on doit le chercher, et des règles qui s'imposent à ses réalisations dans les diverses branches de l'art humain? Quel est l’état de cette science ? 20 Rechercher quelles relations existent entre le beau et le bien, et examiner s’il est vrai qu’il y ait chez les peuples entre la moralité et le goût, une liaison tellement intime, que tous deux obéissent dans leur développement simultané à la même loi de progrès et de décadence ? 30 Quelle est la nomenclature vraie des genres liltéraires qu’af- fecte la poésie? Quelle est la valeur des nomenclatures suivies et enseignées jusqu'à présent? — Genre épique. — Genre lyrique. — Genre dramatique, etc... — Le genre tient-il à la forme qui lui est plus ou moins ordinaire, ou ne tient-il pas à l’idée même dont son inspiration procède ? 40 Les genres littéraires se produisent-ils simultanément , aux mêmes époques et à toutes les époques, ou se produisent-ils, prin- cipalement au moins , par voie successive et à dés époques spéciales. à chacun d'eux? Dans ce dernier cas, quel est l’ordre historique selon lequel ils se produisent, et quel est le genre dominant de l'époque actuelle? 5° Toutes les variétés de l’art humain, peinture , sculpture, ar- chitecture, musique, etc. peuvent-elles être comprises dans la nomenclature des genres esthétiques applicable à la poésie propre- ment dite, ou donnent-elles lieu à une nomenelature à part? Dans tous les cas, quel est l’ordre historique de développement de ces variétés de l’art? Se développent-elles à l’égard l’une de l’autre, si- multanément , aux mêmes époques, ou successivement à des épo- ques différentes et alternatives? 6° Quel est le genre littéraire de la Messiade de Klopstoch ? 79 Quelle serait l'influence , au point de vue littéraire , de l'étude des Pères de l'Eglise, introduite dans l'enseignement universitaire ? 8° Quelle est la valeur comparée des systèmes de philosophie de l'histoire de Vico et de Herder ? 90 Quelle est la valeur, comme méthode intellectuelle , du système historique de Niebuhr? ONZIÈME SESSION. | 27 10° Que penser de la méthode historique actuelle , qui veut re- fondre toute l'histoire des temps passés et révoque souvent en doute les faits qui avaient été jusqn’à présent généralemsnt adoptés comme vrais? L'esprit de doute qui domine cette méthode, ne peut-il pas nous égarer et contribuer à répandre le scepticisme en morale . ARRÊTÉ DE M. LE MAIRE DE LA VILLE D'ANGERS. Le Maire, Vu les propositions faites par la commission nommée par arrêté de cette Mairie, en: date du.21 juillet 1843 , pour l’organisation des fêtes votées par délibération: du conseil municipal du 16 juin dernier ,.en l’honneur du Congrès scientifique ; Arrête : Awr, 197, M. le préfet voulant bien mettre à la disposi- tionidu Congrès deux salles de son Hôtel, pour servir de centre de réunion aux membres du Congrès ainsi qu’à leurs dames, des mesures seront prises pour que ces sa- lons soient sarnis de mobilier, et pour-que les hôtes de la ville. y trouvent, pendant toute la durée du Gongrès, des rafraichissements et tout ce qui pourra leur être agréable. Des commissaires en feront les honneurs, Ant. 2. Le dimanche 3 septembre au soir, courses et joûtes sur l'eau , dans le bassin situé entre le vieux pont et le pont suspendu. Musique pendant leur durée. Les bateaux qui contiendront les musiciens el les canots des courses seront illuminés. À 8 heures, illumination du pont suspendu et des obé- lisques. Des places d’où l’on pourra jouir parfaitement de la vue de ce spectacle , seront réservées à MM. les membres du Congrès , sur les terrasses du Ghâteau que son comman- dant s’est empressé d'offrir. Anr. 5. Mardi 5, à 8 heures du soir , le Jardin bota- nique sera illuminé, et les deux musiques de la garnison et de la garde nationale s’y feront entendre. f : ONZIÈME SESSION. | 35 L'entrée n’en sera permisé qu’à MM. lés membres du Congrès, à leurs dames et aux dames présentées par eux. Fait et arrêté à l'Hôtel-de-Ville d'Angers , le 39 août 1843, À. GirAUD , maire, APERÇU DES PRINCIPAUX ÉTABLISSEMENTS, MONUMENTS EŸ COLLEC- " TIONS ACCESSIBLES À MM. LES MEMBRES DU CONGRËS.: Établissements publics. 1. Le Musée de peinture et sculpture et Ia galérie David, rue Courte , seront ouverts de 10 heures du matin à 4 heures du soir. (M. Mercier, directeur.) _2. Les Musées d’: antiquités , rue Courte et à Haneppiné: (M. Godard-Faultrier, directeur.) 5. Le Musée d’histoire naturelle, rue Courte. (Conser- vateur M. Boreau). 4. La Bibliothèque publique de la ville , au Muséum , rue Courte. (M. Grille, bibliothécaire: M. Blot- dier-Langlois,. bibliothécaire en second .) 5. Le Bd botanique , rue Botanique. (M. Boreau, directeur.) -6. Le Jardin fruitier, boulevard des Lices, sous la direc- tion de M. Millet. 7. Le Théâtre, place du’ Ralliéinent. 8. Le Dépôt royal d’Étalons ,, boulevard du Haras, (M. Bioche, directeur.) 9. Le Dépôt de Remonte , à l'Académie d'équitation : place de l’Académie. 10: L’Hôtel-Dieu , rue de l’ HE l’adminis- tration des hospices, parvis Saint-Maurice, 36 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE, 11. L’Hopital-Général, rue Lionnaise, 12. Le Dépôt de Mendicité, établissement communal, rue de l'Abbaye, à Saint-Nicolas, (M: Cherbonnier, directeur.) 13. Le Mont-de-Piété , cour des Tourelles , rue Beaure- paire. 14. L'École royale d’Arts et Métiers , rue du Godet, (M. Dauban, directeur.) 19. Le Collége royal, rue du Collége. (M. Sorin, provi- seur.) 16. Les Salles d’Asile, rue du Saint-Esprit, rue de Bouil- lou , faubourg Bressigny et à l’Hôtel-Dieu. . Les Prisons, au Château. Li SJ Monuments et curiosités d'architecture. La Cathédrale. Palais de l’Évêché. Hôtel de la Préfecture. Le Château. . L'ancienne Académie d’Équitation. L'église Saint-Serge. L'église de la Trinité, La chapelle de l’Esvière. L'hôtel de Pincé, rue Haute-du-Figuier. . L’Abattoir. SE muparax 1 COLLECTIONS PARTICULIÈRES ET ATELIERS D'ARTS. Collections de Tableaux. M. Bazin, place des Halles, M. Quelin, rue Basse-du-Figuier. Collections archéologiques et artistiques. M. Grille, bibliothécaire-honoraire de la ville , boule- vard du Haras. ONZIÈME SESSION. 37 M. Mordret, administrateur d'établissements de bien- faisance de la ville, rue Saint-Georges. Collections d'objets d'histoire naturelle. M. Millet , rue Saint-Blaise, M. Guitet , rue Beaurepaire. -M. de Baracé, rue Flore. ÉTABLISSEMENTS PARTICULIERS. Pépinières de M. André Leroy, rue Châteaugontier. — de MM. Leroy frères, chemin des Banchais. — de M*° veuve Lebreton et Lebreton jeune, - chemin de Terre. "es de M. Lebreton aîné, aussi chemin de Terre. Établissement Horticole de M. Vibert , route de Paris. — de M. Cachet, sur le Mail. = de M. Rousseau , sur lAvant- Mail. —— de M. Besnier , sur l’Avant- Mail. Extra-muros. Les Fours à chaux de M. Dugrez. Les Carrières à ardoises , dont les principales sont la Paperie , les Grands-Carreaux , les Petits-Carreaux , dans la commune de Trelazé. Promenades. Les Boulevards qui entourent la ville. Le Mail. Le Bout-du-Monde. La promenade des Fours à chaux. de la Baumette. 38 CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. PROGRAMME DE L’'EXCURSION A NANTES. Anrice 1%, L’embarquement des membres du Con- grès, aura lieu le samedi 9 septembre, sur le nouveau quai Ligny, à cinq heures et demie précises du matin, afin que les bateaux à vapeur puissent quitter Pembarca- dère à six heures précises. Arr. 2. Une seule escale sera faite à Saint-Florent-le- Vieil, Les membres du Congrès y visiteront le monument de Bonchamps et la chapelle gothique. : Anr. 5. À son arrivée à Nantes, le Congrès sera recu par la commission nantaise et conduit dans les salles des- tinées aux séances des sections. Ant. 4. À trois heures du soir le Congrès se réunira dans la salle de la Mairie en séance générale, Aur. 5. Le soir du même jour, la séance solennelle dans laquelle les quatre sociétés nantaises recevront le Congrès, aura lieu à la salle de Spectacle. Arr. 6. La matinée du 10 sera employée à des prome- nades arlistiques, archéologiques et industrielles, dans lesquelles les membres du Congrès seront guidés par les commissaires nantais. Anr. 7. L’après-midi du même jour, les membres ,du Congrès seront reçus à l’exposition archéologique, pré- parée pour lui, à la Société des Beaux-Arts. Angers, le 31 août 1843. Les secrétaires-généraux , Signé PLancuenauzr, Guizzory aîné, Gopar», SÉANCES ‘GÉNÉRALES. 39 ASSEMBLÉES GÉNÉRALES. OUVERTURE DE LA :ONZIÈME SESSION. Première séance générale, 1 septembre 1843, À trois heures et quart, les membres du Congrès étant réunis dans la grande salle de l'Hôtel de la Pré- fecture, M. Planchenault, secrétaire -général, ‘assisté de MM. Guillory aîné. Godard-Faultrier et Guinoyseau- Joübert, ses rellauas ouvre la séance et HR le discours suivant : « Messieurs, » Ce n’est pas:en présence d’une assemblée aussi nom- breusé et aussi honorable qu’il convient aujourd’hui de rechercher lutilité du Congrès scientifique de France : dix années l'ont vu grandir'et l’ont érigé à l’état d’insti- tution spontanée, vivant de ses propres moyens; il a par- tout été appelé avec enthousiasme, aux frontières du pays : . comme au centre , il a été accueilli par tous les rangs de * Jasociété et semble ouvrir une ère nouvelle pour l’histoire des sciences et des arts. Ce phénomène de notre époque, n'est point un produit du hasard ou du caprice : la voix * qui se fit entendre, il y a onze ans, au milieu de la Société normande , et qui a trouvé ses échos, sur des bords du Rhône et du Rhin , dans de Midi et dans le Nord , cette voix , à laquelle la savante Allemagne , lindustrieuse et 10 SÉANCES GÉNÉRALES. artiste Belgique , ont répondu avec élan , et qui a réuni sur un même point, il y a un an, plus de mille députés de la science et des arts, cette voix, Messieurs, exprimait un besoin de l’époque. En jetant les yeux sur les siècles pas- sés et en les reportant sur nos jours , nous reconnaissons qu’il est des périodes où l'esprit de l’homme, après avoir éprouvé les fortes commotions des grandes révolutions sociales, où, après s’être élancé dans la sphère d’indépen- dance plenière , conquise par de longs et généreux efforts dont la vigueur et l’énergie ont pu dépasser les limites du vrai, du beau, s'interroge, compare, étudie les faits et les systèmes , et se demande , pour ainsi dire , comment il réglera cette conquête, et quelle législation il lui deman- dera pour la conserver, l’embellir et la rendre justé autant qu’elle a été brillante. Isolé, il ne se suffit plus à lui-même, en présence des grands noms qui ont figuré dans la car- rière , au milieu des génies qui, dans leur sphère indivi- duelle, ont répandu la lumière , mais subi quelquefois des déclins ou des éclipses, quand ils se sont écartés du foyer de l’éternelle raison, les hommes d’étude et de science se groupent alors et se consultent. Permettez-nous , mes- sieurs, dans un si vaste aspect des travaux de l'esprit, de choisir une date , de la circonscrire, pour ainsi dire , à la contrée où nous nous trouvons réunis, et de la comparer rapidement avec la nôtre. Arrêtons nos regards sur la fin du XVI: siècle, dans le vieil Anjou rajeuni par la sève et la fécondité du règne de François Ir, » La liltérature, cette muse qui court devant toutes les autres, comme leur aimable précurseur, chargée de fleurs et de festons qu’elle jette à profusion , et que chacun cueille avec le plus d’attrait , avait préparé le développe- ment des facultés de l’âme. » La Germanie, qui autrefois avait arrêté les flots de la domination de la Rome des Césars, venait de se dresser, avec. une violence que nous n’avons point à juger ici , EL | SÉANCES GÉNÉRALES. 4 contre la puissance de la Rome d'Alexandre VI et de Jules II, et de proclamer le droit illimité d'examen dans Ja foi religieuse. + » Les arts, en dégageant la beauté morale des voiles im- pénétrables et mystiques dont la pensée religieuse l'avait couverte dans les siècles précédents , avaient réveillé en * France les inspirations sensuelles de l’antiquité. Une im- mense révolution morale était faite dans les esprits. » L’Anjou y prenait une grande part et à tous les points de vue. » L'art militaire , qui fut toujours en France un objet de culte et d'application , avait fait d’immenses progrès dans les guerres de Piémont et d’Italie, d’où il rapportait les chefs-d’œuvre des arts et quelque chose de plus pré- cieux pour la patrie, la tactique et l’institution libérale de l'infanterie qui devait faire plus tard notre gloire et notre salut. » Le premier des Brissac, celui- là que François I* s’ho- norait de faire boire à sa coupe comme il était fier de s’in- cliner sous l’épée du chevalier sans peur et sans reproche, avait, avec un dévouement sans borne , organisé cette force nationale inépuisable. » L’Anjou était alors représenté, non- RP sur les champs de bataille du Piémont, mais dans les conseils de . Rome. Cointreau, cardinal de Saint-Étienne , parti du bourg de Morannes, s’était élevé, par son propre mérite, à cette haute dignité , qui ne lui fit oublier ni sa patte ni sa famille. » Quelques années plus tard, dans la législation , , Un esprit patient, éclairé, mu par l’amour de son pays, qu’il n’oubliait point sur les siéges du parlement de Paris, René Chopin annotait sa Coutume et y portait cette vive lu- mière qui en éclaira bientôt la nouvelle rédaction. Cet acte de pur patriotisme fut dignement apprécié alors , et nos fastes municipaux, dans un décret que Ménage célèbre 42 SÉANCES GÉNÉRALES, comme digne de l’ancienne Rome , créèrent ce citoyen échevin perpétuel. » L'étude des lois est une des bases les plus solides du véritable patriotisme, elle apprend qu’elles seules peuvent fonder des libertés publiques et les conserver , en la pré- servant des envahissements du pouvoir et des attaques des partis. » Combien ces principes si chers à notre indépendance étaient étudiés avec ardeur à cetle époque d’émancipa- tion sociale ! Qu'’on lise la correspondance des hommes du droit , on les voit se transmettant leurs travaux , se consultant sur leurs jugements et sur leurs systèmes , cherchant dans ce Congrès épistolaire à les vérifier à l’aide des matériaux d’une immense érudition , dans la- quelle ils plaçaient une foi sans bornes, croyant , dans la naïveté de leur tâche , que la certitude n’était pas une trop grande récompense d’un si immense labeur, » Voyez Jean Bodin , ce précurseur de Montesquieu , qui semble avoir compilé dans les livres de la République tous les documents de l’esprit des lois, dans ces cinq livres traduits de la langue maternelle dans toutes les langues savantes de l’époque ; Bodin donnant la manière d’étu- dier l’histoire , et en déduisant dans la vie pratique les grands axiomes du droit public, proclamant aux États de Blois que le pouvoir des rois est limité en France, et fai- sant ressorlir les bienfaits du régime légal; Jean Bodin, le plus grand publiciste de sa date , l’homme politique , le diplomate à la cour d’Élisabeth , qui profita autant de son érudition variée , qu’elle se joua des prétentions du duc d'Alençon pour lequel notre compatriote dépensa vainement son esprit, Bodin finissant sa laborieuse et vaste carrière au siége de procureur du roi de Laon. » Et son illustre ami, Pierre Ayrault, ce magistrat si éminemment français , qui croyait profondément à la loi de Dieu et à celle du pays , qui it entendre à son siècle SÉANCES GÉNÉRALES. 43 “des nobles plaintes d’un père auquel une corporation in- saisissable , n’ayant de nationalité nulle part , avait ravi son aîné sans que la loi ni l'autorité du roi pussent attein- dre ce rapt audacieux , qui toutefois devint un des chefs de l’accusation contre da société que la France -expulsa bientôt de son sein. » Tous ces hommes, messieurs, mettaient en commun leurs études, qui eurent aussitôt leurs grands jours dans les universités , comme aujourd’hui dans les Congrès et daäns'les communications qui en dérivent. » Après avoir indiqué si imparfaitement les bases de l’édifice scientifique de cette date , qu’il nous soit permis encore d’en admirer l’ornementation. Nos poètes et les littérateurs ne manquèrent pas à ce délicieux ouvrage, et dans la Pléiade du XVI: siècle ne voyons-nous pas briller le nom de Joachim du Bellay, ce gentilhomme dont la muse , sous les voiles mystiques du spiritualisme , révèle les formes antiques que la nature et l’imilation avaient développées. L’ami de Ronsard et de Dorat , leur émule heureux , inspiré quelquefois comme Horace , souvent comme Anacréon, et sous les cheveux RES duquel nais- saient ces vers : Voyez, amants, comment ce petit Dieu Traite nos cœurs; sur la fleur de mon âge, . Amour,tout seul régnait,en mon courage Et n’y avait la raison point de lieu; Puis quand cet âge, augmentant peu à peu, Vint sur ce point où l’homme est le plus sage, "D'autant qu’en moi croissait sens et usagé, D'autant aussi décroissait ce,doux feu; Ores.mes austtendant sur la vieillesse, (Voyez comment la raison nous délaisse), Plus que jamais je sens ce feu d'amour; * L'ombre au matin nous voyons ainsi croître, Sur le midi plus petite apparaître : Puis s’augmenter devers la fin du jour. 44 SÉANCES GÉNÉRALES, » Le grand siècle est venu polir ce style et modeler ces vers dans les formes savantes de l’art poétique, sans ajou- ter à sa fraîcheur et à son charme naïf, » Du Bellay avait foi dans l’avenir de la langue de son cher pays ; il a fait un traité de son illustration , et ses heureux essais ont puissamment recommandé ses pré- ceptes. » Je voudrais que les moments si rapides et si précieux du Congrès, me permissent de vous révéler toute sa sol- licitude dans ses communications littéraires avec ses sa- vants contemporains , à cette époque de recherche et de véritable progrès; mais je sens qu’il est temps que nous. nous repliions sur nous-mêmes pour nous retrouver dans des conditions analogues à peu près à celles de cette épo- que, qui cherchait aussi à constituer sa foi dans les scien- ces divines et humaines , à l’aide de l’examen , dans lequel toutefois l’érudition ne pôût laisser assez de temps et de place pour la critique ; époque affirmative sous les inspirations généreuses de l'esprit accoutumé à croire avec naïveté ce qui lui apparaissait vrai et moral, » Nous, messieurs, nous succédons à deux dates, dont l’une a tout nié sans nous apprendre bien exactement ce que nous devions croire , fors la liberté et l’égalité des hommes : l’autre qui n’a pu s’occuper que de ce qu’il fal- lait faire pour soutenir et défendre ces deux principes , qui, dans leur force expansive , ont soulevé le sol de l’Europe , aujourd’hui rassis et commencant à produire les fruits de cette vaste fermentation. » Aussi voyez-vous Les esprits effrayés des doutes et des dénégations du XVIII: siècle, chercher les faits constants et les traditions de ceux qui l’ont précédé , reprendre les principes constitutifs des sociétés, et guidés par ce sen- timent intime autant que naturel , qu’il n’existe pas que des vérités mathématiques, mais que la nature de l’homme et ses destinées sont sous l’empire d’inspirations et de sen- SÉANCES GÉNÉRALES. 45. timents unanimes qui font partie de son être et consti- _- tuent sa loi, réparer avec ardeur les brèches faites à cette £ organisation providentielle et rétablir son avenir. OEuyre de conciliation et gage de paix, auxquels, messieurs, vous donnez depuis dix ans dans les Congrès une généreuse et active coopération, les sciences exactes ne nous paraissent plus inconciliables avec la foi de Pascal. » Qu’on ne dise pas que leur direction imprimée aux intelligences les éloigne des hautes études morales et en amoïindrit la portée ; rien au contraire ne les élève, rien ne les rapproche davantage de l’auteur de toutes choses, que la contemplation de ses œuvres , la perception de ses secrets et les conquêtes sur les éléments dont le génie de l’homme fait autant de serviteurs de sa volonté et de ses besoins. | » N'est-ce pas ainsi que par l’agriculture il a dompté la famine , ce fléau des peuples , qui les décimait encore il y a moins d’un siècle , et là où était le désert et l’inon- dation , appelé la fécondité et les riches campagnes ? » N'est-ce pas ainsi que la vapeur a effacé les distances et prolongé les heures utiles , si précieuses pour notre rapide existence , en même temps qu’elle est venue en aide à notre faiblesse pour les travaux cyclopéens de notre époque ? » Oui, plus l’homme acquiert de force intelligente et pratique, et plus il se rapproche de celui sous la main puissante duquel les mondes lancés dans l’espace roulent avec harmonie , de celui par qui lès éléments sont animés pour produire dans l’univers la vie incessante, _ » Ne semble-t-il pas même que la Providence ait posé des limites que les sciences métaphysiques ont atteintes depuis bien des siècles , sans pouvoir les franchir, tandis que les études physiques étendent chaque jour leur hori- zon, et recoivent incessamment , de la nalure généreuse A6 __ SÉANCES GÉNÉRALES. et complaisante , des révélations d'autant plus utiles qu’el- les sont publiées à l’instant par toute la terre? n N'est-ce pas d’ailleurs par les communications des peuples entre eux que se propagent les doctrines civilisa- trices? La foi chrétienne n’est-elle pas abordée au Nou- veau-Monde sur les vaisseaux de Golomb ;.et la civilisation américaine n’a-t-elle pas été poussée miraculeusement à travers les forêts primitives de l'Amérique par la vapeur de Watt, vivifiéz par Fallon ? » Nous marchons, messieurs, dans un avenir de progrès pour tous, sans haine et sans envie. À ia génération qui suit, montrons les bonnes actions de celle qui précède, et avertissons-la de ses erreurs; admirons ceux qui ont brillé dans la marche si solennelle du genre humain. » L’hommage rendu aux talents et au génie est un de- voir pour les générations qu’ils illustrent : il produit aussi les génies et les talents éveillés par ses acclamations. » N’en soyons pas avares, 6 mes concitoyens. » Gélébrer la gloire de nos frères , c’est nous honorer, c’est avancer nos destinées, c’est courir à la têle du pro- grès civilisateur, et y marquer nos places par d’illustres noms. » À côté des fleurs variées que le printemps répand au- tour de nous et des festons splendides des fruits que l’au- tomne prodigue à nos contrées , cultivons aussi l’arbre antique et sacré dont le rameau couronne et féconde la têle du poëte, et ceint également le front du guerrier. Beaurepaire ; Desjardins, Delaage, défenseurs de la pa- trie; Béclard, Billard , nos amis et nos bienfaileurs , vous reposez sous son ombre tatélaire ! » La terre d’Afrique réclame une de ses palnies pour ce jeune et vaillant fils de Maine et Luire, dont l'épée veut être forte comme la France, et civilisatrice comme la pa- trie , gloire plus pure que celle de Rome qui traînait à son char l'esclavage et ses douleurs. SÉANCES GÉNÉRALES. 47 Le chantre d'André Chénier, n’a-t-il pas fait entendre au milieu de nous ces purs et généreux accents qui révè- lent que les cordes vibrantes du luth poëtique résonnent avec éclat sous une main habile et inspirée ; à lui aussi une palme , à: lui dont les chants patriotiques sont pour la vertu et les grandes infortunes. » Qui a répandu sur la France ce coloris si brillant , si varié , et pourtant si homogène qu’il semble caractériser, dans nos costumes, les enfants d’une même famille , et’ dans les flots duquel , riche et pauvre, peuvent étancher leur soif d'égalité ! qui a conquis pour l’avenir ces sabli- mes couleurs , qui, sous l’aiguille patiente et habile des Gobelins, transmet aux âges les plus reculés notre histoire et les reproductions des grands maîtres ? Sois fier, à mon pays ! Paris et Lyon l'ont nommé avec l’acclamation de millions de voix. ». La palette du peintre , dans ces contrées où la main royale de René l’avait chargée, au XVI: siècle, du trésor de Jean de Bruges, n’a point pâli parmi nous. Voyez-en sor- tir dans le grand paysage de Rome, la scène profondément religieuse de l’angelus du soir, qui vous pénètre de la pensée solennelle et du calme de la nature reconnaissante des bienfaits du jour et acceptant ceux du repos, sous les premiers voiles de là nuit. » Je ne vous ai pas encore nommé, vous qu'un rayon . si éclatant montre incessamment à-tous les yeux!, vous qui avez dit.à cette cité: tu.m'as adopté! je L’illustrerai à jamais ! mon amour pour Loi sera infini..Je:n’aurai pas un triomphe que l’objet ne t’en soit consacré. Ouvre , ouvre ton enceinte ! je la remplirai de mes œuvres ,.et la recon- . raissance fécondera à ce point mon ciseau. que la place lui manquera pour toutes.les gloires.qu’il se. plaît à im- . mortaliser. » M. Planchenault annonce ensuite qu’on va: procéder 48 SÉANCES GÉNÉRALES. à la nomination du président et des quatre vice- -prési- dents du Congrès pour la session actuelle, Plusieurs personnes demandent qu’on appel nominal ait lieu afin de faire connaître les noms des membres présents, pour qu'il soit plus facile de choisir des can- didats. Cette proposition mise aux voix, par assis et levé, n’est p2s adoptée. En conséquence, M. Guillory aîné, l’un des secré- taires-génèéraux, procède à l’appel nominal, et chacun des membres présents vient déposer son bulletin. L’appel et le réappel terminés, avant de procéder au dépouillement du scrutin, M. Planchenault annonce à l’assemblée que la société pour la conservation des mo- numents historiques de France, se réunira le soir, à six heures et demie, dans la grande salle du Congrès. Il fait ensuite connaître les heures des réunions pour chacune des sections. Après ces observations, on commence le dépouille- ment du scrutin qui donne pour résultat les nominations suivantes : Président : M. le comte de Las Cases, conseiller d'état, membre la chambre des députés. Vice-présidents : MM. de Caumont, correspondant de l’Institut, à Caen. le ch Bertini, président de la société Médico- Chirurgicale, et délégué de l’Académie et de la société d'Agriculture de Turin ( Sardaigne). Puvis, correspondant de l'Institut, à Bourg. Jullien, délèguë de la société Phylotechnique de Paris. La séance est levée à cinq heures trois quarts. SÉANCES GÉNÉRALES. 49 Deuxième séanee générale. 2 septembre 1843. A M. Planchenault, secrétaire-général, assisté de MM. Guillory, Godard-Faultrier et Guinoyseau, ses collègues, procède à l'installation du bureau. MM. de Las Cases, en qualité de président; de Gaumont, Bertini, Puvis et Jul- lien, comme vice-présidents, prennent place au bureau. M. de Las Cases remercie l’assemblée en ces termes: a Messreurs, » Le vote qui m'appelle à ce fauteuil est un honneur auquel je ne m'attendais pas. Si je ne sentais toute mon insuflisance , je vous parlerais, Messieurs, de l’émotion qu’à éprouvée mon cœur, du juste orgueil que doit inspi- rer un pareil suffrage , enfin de ma profonde reconnais- sance. Mais depuis que la carrière politique m’a occupé tout entier, j'ai dû presque abandonner cette délicieuse carrière des sciences, à laquelle je m’étais consacré, à laquelle je dois les plus heureux instants de ma vie, et toute modestie à part, je crois que tous les membres de cette assemblée si distinguée étaient plus dignes que moi d’être appelés à l'honneur de la présider. Aussi je me dirai qu’en m'appelant au fauteuil, vous avez particulièrement compté sur mon zèle; et en cela, Messieurs , vous ne vous serez pas trompés. Mon zèle et mon dévouement seront inaltérables et sans bornes. C’est de cette manière que je m'efforcerai de vous témoigner ma profonde reconnais- sance. » Ces paroles sont accueillies par de vifs applaudisse- ments. M. le président propose à l’assemblée de voter des remerciements à MM. les secrétaires-généraux. L’as- semblée s’empresse de faire droit à cette demande. GA 4 50 SÉANCES . GÉNÉRALES. Le procès-verbal est lur et adopté sans conteste. M. le secrétaire-général fait connaître à l’assemblée les sociétés et corporations savantes qui ont adhéré au Congrès. Il donne également communication de la cor- respondance qui témoigne des sympathies flatteuses de plusieurs d’entre elles, et des vœux qu'elles forment pour que la session d’Angers contribue au rapproche- ment des hommes d'étude des divers points de la France et des savants étrangers. Voici l'énumération de ces sociétés et l’indication des délégués chargés de les représenter dans cette solennité scientifique : Société française pour La conservation et la description des monuments historiques, à Caen. Délégués : M, Gau- GAIN, trésorier, — M. lPabbé LacuriEe, de Saintes. — M. E. Tuimaun, de Clermont (Puy-de-Dôme). Association normande séant à Caen, Délégués : M. le général marquis DE CrawerAY, inspecteur à Damville. — M. Gopgrroy, trésorier. — M. G. ne Vircers, de Bayeux. Société linnéenne de Normandie, à Caen. Délégués : M. Desronecnawrs, professeur à la faculté des sciences. M. pe LA CGuouquais , président de chambre à la cour royale. Société philomathique de Verdun, par son président, M. Buvicnrer. Société médicale d’Indre-et-Loire, par son secrétaire gé- néral, M. Axcrana, docteur médecin. Société royale d’émulation d’Abbeville, par son prési- dent, M. Boucner pe PErruess. : Société centrale d'agriculture de Rouen, par son secré- taire, M, pu Breui. Société libre d’émulation de Rouen, par son secrétaire, M. Léon Viver, | î | SÉANCES GÉNÉRALES. 51 Société d'agriculture, sciences et avis du Mans, par son président, M. Pazru. Délégués : M. Eroc-D£mazr, — M. Gauvin, directeur de l’Institut des provinces. Société pour la propagation de la science des comptes, à Paris, par son secrétaire, M. Corry. Société centrale d'agriculture, sciences et arts du dépar- tement du Nord, par son secrétaire, M. Brassann. .… Société centrale d'horticulture de Rouen, par son prési- dent , M. Toucann. Société de médecine de la Sarthe, représentée par M. Var- LéE, Vice-président , et M. Suxan», secrétaire. Société pharmaco-technologique du Palatinat, à Kai- serslautern (grand-duché de Bade), par son directeur, ‘ le docteur HerBERGER. Association bretonne, séant à Quimper, par son secré- taire général, M. Ducnareirren. — Société royale de l'Ain, à Bourg, par son président , M, Puvis , ancien député. Université de Pise (Toscane), par M. le professeur mar- quis Gosue Rinorrr. a Société médico-chirurgicale de Turin (royaume de Sar- daigne). Délégué : M. le Ch+ BeRTINI, son président. Institut agricole du Grand-J'ouan (Loire-Inférieure), par son directeur, M. Jures Rrerrec. Délégué : M. Gustave . Heuzé, sous-directeur. | Société d'horticulture de Mayence (Hesse-Darmstadt), par son président, M. Axroive Human. Comice agricole de Craon. Délégué : M. Eure Jamer, de . Ghâteaugontier. Société royale de médecine de Manbvithe Délégué : M. le docteur Roux, son ancien président. Société de statistique de Marseille. Délégué : M. le doc- teur Roux , son secrétaire perpétuel, 52 SÉANCES GÉNÉRALES. Société philotechnique de Paris. Délégué : M. Jus, de Paris. Société des antiquaires de Normandie. Délégués : M. En. Lampenr, directeur. — M. pe Ricy, directeur des do- maines, président central. — M. Genvais, vice-président. Société d'agriculture de Caen. Délégués : M, LesAuvAGE, président. —M. Lecerr, professeur en droit.—M, Lam, secrétaire. Société de médecine de Nimes, par son secrétaire général, M. Murnu. Académie impériale et royale des géorgophiles, à Flo- rence (grand-duché de Toscane): Délégué : M, le doc- teur V. Barocceni. Académie des sciences médicales de Palerme (Sicile), par M. le docteur Prccozo. Société industrielle de Saint-Etienne. Délégués : M. Pey- RET-LALLIER , ancien député, président. — M, Isiore Hp, trésorier. Société royale des antiquaires de Londres. Délégué : M. le docteur BRomEeT. Société royale académique de la Loire-Inférieure, par son président , M. E. Harcan. Société industrielle de Nantes , par son président , M. Pa- LOIS, Société d’horticulture de la Loire-Inférieure, par M. Ne- … veu-DenorRre, inspecteur d’agriculture, son secrétaire. Société des beaux-arts de Nantes, par son président, M. CuissanT. Institut historique de Paris. Délégué : M. »E Brière. Société archéologique de Touraine. Délégués : M. Cnaw- POISEAU , son vice-président. — M. BoïcreAu, conser- vateur du musée de Tours. Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de la Seine-Inférieure. Délégué : M. A. GAuLTiER, son vice- président , procureur-généra] à Rouen. | SÉANCES GÉNÉRALES. 53 Société des pharmaciens du Mans. Délégué : M. En, Gui- RANGER. Société agraire de Turin (royaume de Sardaigne). Délé- _gué : M. le chevalier Benrinr. | Académie royale d'agriculture de Turin. Délégué : M. le chevalier Berri. | Société académique d'agriculture, belles-lettres, sciences et arts de Poitiers, par son secrétaire archiviste, M. Ba- BAULT DE CHAUMONT. Société royale et centrale d'agriculture du Nord, à Douai, par M. ParmEeNTIER, secrétaire général. Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de Bordeaux ; par M. Vazapé-Gasez, son secrétaire gé- néral. - Société d'agriculture, sciences et arts d'A ngers. Délégués : M. Huwaucr pe La Pecrerte. —M. Henri DE NERBONN£. — M. Arrarp, capitaine d'état-major. Société industrielle d’Angers et du département de Maine et Loire, représentée par les membres de son conseil d'administration, MM. Guicrory, Bourrow , G. Bor- DILLON , F. BerGer , FRESLON, APPERT aîné, C. DE LA Touscue. Société de médecine d’ Angers. par son président, M.Vic- Tor LarocHE et son secrétaire , M, Daviens. Société des vétérinaires de l'Ouest, par M. Conroy, mé- decin vétérinaire au dépôt royal d’étalons, à Angers, . son président. M. Planchenault fait savoir qu’on a offert au Congrès : les Coutumes de Charrour, par M. de la Fontenelle ; Re- cherches sur deux voies romaines, par le même ; /dro- logia minerale degli stati Sardi, par Bernadino Bertini. M. Planchenaul! lit une lettre de M. le Préfet, par la- quelle ce dernier invite les membres du Congrès à passer la Soirée du 2 septembre à son hôtel. 54 SÉANCES GÉNÉRALES. Il communique ensuite l’organisation des sections. Ont été nommés : Dans la première section (cette section a été réunie à la sixième). Dans la deuxiéme section : Président : M. le C*'° de Quatrcbarbes, d'Angers. Vice-présidents : M, de la Fontenelle de Faudoré, de Poitiers. — M. Peyret-Lallier, de Saint-Etienne. — M. Sébille - Auger, de Saumur. — M. le Mis de Se- nonnes, d'Angers. Secrétaires : M. le V'° de Fallare d'Angers, — M. Ro- binet, de Paris. — M, P. de Sevret fl. d'Angers. — M. Gustave Heuzé, du Grand-Jouan. Dans la troisième section : Président : M. Roux , docteur en médecine , de Marseille, Vice-présidents : M. Mayor, docteur en médecine, de Lauzanne. — M. Lemercier, idem, de Mayenne. — M, Lachèse père, idem, d'Angers. — M. Gély, idem, de Nantes. Secrétaires : M. Mirault, docteur en médecine, d'Angers. — M, Castonnet, idem, idem. — M, Laroche-T albot, idem , idem. — M. Ouvrard, idem, idem. Vice-secrétaires : M. Daviers, docteur en médecine , d'Angers. — M. Bourjot-S'-Hilaire, idem, de Paris. Dans la quatrième section : Président : M. Cauvin, du Mans. Vice-présidents : M, de Beauregard, d'Angers. — M. Ri- chelet, du Mans. — M. l’abhé Lacurie, sS Saintes, — M. de la Sicotière, d’Alencon. Secrétaires : M, Marchegay, d'Angers, — M. de Lens, d'Angers. — M. Z, Cosnier, ne À SÉANCES GÉNÉRALES. 55 Dans la cinquième section : Président : M. Lecerf, de Caen. Vice-présidents : M. le V'° de Cussy, de Paris. —M. Tail. lard, de Beauvais. — M. Goyuel, de Strasbourg. — M. de la Porte, de Vendôme. ” Secrétaires : M. J. Sorin, d'Angers, — M. Eug. Talbot, idem. —M. Ÿ. Pavie, idem. — M. Rousseau, de Gen- nes. — M. Peauger, d'Angers. Dans les sixième et première sections réunies : Président : M. Robinet, de Paris. Vice-présidents : M. 4. Boreau, d'Angers. — M. Des- vaux, de Nantes. | Secrétaires : M. Wolski, d'Angers. — M, Trouessard , idem. — M. Beraud, idem, — M. de Brun, de la Ro- chelle. — M. Heuzé, du Grand-Jouan. — M. Godfroi, d'Angers. Le secrétaire de la première section donné lecturé du procès-verbal. Comme il ne s’élève aucun incident on passe à celle du procès-verbal de la sixième section. Son secrétaire demande à l’assemblée qu'il y ‘ait füsion des deux sections précitées. Troisième séance générale, 3 septembre 1843. M. de Las Cases, assislé de MM. de Caumont, Bertini, Puvis, Jullien, et de MM. les secrétaires-cénéraux, ouyre la séance. " Le procès-verbal est lu et adopté, M. Jullien prie le secrétaire de faire une rectification 56 SÉANCES GÉNÉRALES, relative à une proposition qu'il a faite à la précédente séance. Il en sera tenu compte. M. Heuzé donne lecture du procès-verbal des sections première et sixième réunies. M. Laroche (Edouard) lit le procès-verbal de la sec- tion des sciences médicales. M. Marchegay donne lecture du procès-verbal de la section d'histoire et archéologie. M. Peauger monte ensuite à la tribune et lit le procés- verbal de la section de littérature et beaux-arts. On appelle le secrétaire de la deuxième section , qui déclare n’avoir pas encore rédigé son procès-verbal, Un membre demande que les procès-verbaux des sec- tions ne soient lus à l’assemblée générale qu’après leur admission dans les sections. MM. Hunault et Richelet demandent l’ordre du jour. MM. Mirault et Planchenault font encore diverses observations , après quoi l’ordre du jour est adopté. M. le président invite les personnes qui veulent faire l’excursion de Nantes à se faire inscrire sur une liste spéciale. On passe à la correspondance qui fournit: Hommage des discours et compte-rendu des séances du Congrès historique de Paris. Pépinières de veuve Leroy et fils, école d’arbres frui- tiers, catalogue déposé par M. André Leroy. Prix proposé pour la fabrication des cidres , des poi- rés et des eaux-de-vie, hommage de la Société royale d'agriculture et de commerce de Caen. Note sur les tombeaux et les cryptes de Jouarre, par M. de Caumont, et déposé par lui. Grammaire française, par MM. Davau et Alix, insti- tuteurs à Angers. Statistique routière de Normandie, par M. de Cau- mont; routes de Caen à Cherbourg et de Caen à Rouen. SEANCES GÉNÉRALES. 57 Éloge du contre - amiral Dumont - d'Urville + par M. Hébére; de Caen. Statistique routière de Caen à Rouen, Kr M. de Cau- mont. Revue normande, rédigée sous la direction de M. de Caumont. Saint-Etienne ancien et moderne, par M. Isidore Hedde. Rapport sur le concours ouvert pour l’éloge du contre- amiral Dumont-d'Urville, par M. Th. Massot. Séances générales lenues en 1842 par la Société fran- çaise pour la conservation des monuments historiques , ouvrage déposé par M. de Caumont, Extrait des séances de la Société royale d'agriculture et de commerce de Caen, par M. Lemancel. Rapport sur le madia, fait à la Société royale d’agri- culture et de commerce de Caen , et déposé par M. Le- cerf (de Caen). Rapport verbal sur les Antiquités de Trèves et de Mayence, par M. de Caumont. Recherches anatomiques et physiologiques sur les ovaires dans l’espèce humaine, par M. le docteur Né- grier ; ouvrage mentionné honorablement par l’Acadé- mie des sciences. M. le président invite l’assemblée à voter des remer- . ciements aux corps académiques et aux personnes qui ont bien voulu faire présent de leurs ouvrages. . M.Mayor donne lecture d’un mémoireintitulé : Contre l'expérience. M. Heuzé fait la proposition suivante, dont M. le pré- - sident donne lecture : « Je demande que le Congrès scientifique de France mentionne dans ses procès-verbaux l’intérêt qu’il porte à la fondation du Congrès agricole breton, qui tiendra sa première session à Vannes, le 20 septembre 1843. » 58 SÉANCES GÉNÉRALES. M. de Caumont demande qu’il soit bien exprimé que le Congrès agronomique breton est dirigé par une sociélé permanente, qui réunit daps son sein les BFIDEIRAUE agro- nomes de la Bretagne. La proposition de M. Heuzé est favorablement ac- cueillie. M. Hedde , secrétaire de la Société industrielle de Saint-Étienne, lit une pièce de vers qui captive l'intérêt de assemblée. M. Heuzé déclare qu'il est prêt à lire le procès-verbal de la deuxième section. Après cette lecture, l’ordre du jour étant épuisé, la séance est levée. Quatrième séance générale. 4 septembre 1843. M. le comte de Las Cases, assisté des membres du bu- ! reau et des secrélaires-généraux , ouvre la séance. | M. Trouessard donne lecture du procès-verbal des sec- tions première et sixième. M. le vicomte de Falloux lit le procès-verbal de la deuxième section. M. Mirault donne lecture de celui de la troisième sec- tion. M. Marchegay lit le procès-verbal de la quatrième sec- tion. M. Daviers donne lecture du procès-verbal de la sous- section de la troisième section, après un vote de l’assem- blée à ce sujet. M. Pavie déclare qu’il n’est pas préparé à lire le pro- cès-verbal de la cinquième section, M. Planchenault fait part à l'assemblée d’une invita- # SÉANCES GÉNÉRALES. 59 tion de M. Giraud, maire, qui prie MM. les membres du Congrès de venir passer la soirée chez lui jeudi 7 sep- tembre. M. le secrétaire-général donne communication de la correspondance. … Gomme les années précédentes, de nombreuses lettres sont venues apporter au Congrès les témoignages de sympathie les plus flatteurs ; beaucoup de savants distin- _gués de la France et de l'étranger témoignent de vifs regrets de ne pouvoir assister à ces réunions, auxquelles tous applaudissent , comme à d’heureux efforts pour rapprocher les hommes sur le terrain commun des sciences et des lettres. si Ne pouvant enregistrer ici tous ces témoignages, nous allons seulement en citer quelques extraits. L’honcrable M. Hepp, professeur à la Faculté de droit de Strasbourg, au dévouement duquel la dixième ses- sion a dû tant d'éclat, écrivait, quelques mois avant l'ouverture du Congrès d'Angers: « J'ai été bien sensible , Messieurs, à l'honneur que vous voulez bien me faire de in’inviter à prendre part à la onzième session. L’en- thousiasme qui m’anime pour la cause du Congrès , le désir que ® j'aurais de répondre à votre bienveillant appel , et le bonhenr avec lequel je retrouverais à Angers les hommes distingués de l'Ouest qui ont honoré notre Congrès de leur présence , enfin la beauté et l'intérêt historique de vos beltes régions , sont des motifs extrême- ment puissants à l’action desquels j'aurais de la peine à résister, si la longueur de la distance ne venait s DHECpeR ee comme un obstaele bien réel. » M. Hepp , n'ayant pu assister au Congrès d'Angers, Donne mission de l’y représenter à M. E. Goguel , licen- cié ès-lettres , chef d'institution , et l’un des secrétaires de la dixiéme session. Voici la lettre dans laquelle l’ho- norable secrétaire-général de Strasbourg fait savoir au Congrès d'Angers à quel point en est l'impression du compte-rendu de la dixième session : 60 SÉANCES GÉNÉRALES. Strasbourg, le 25 août 1843, « Messieurs et très-honorés collègues, » Au milieu du vif et sérieux chagrin que j'éprouve d’être privé -du bonheur d'aller m’associer aux travaux de la onzième session , d’y former de précieuses liaisons et de cultiver des relations agréables et flatteuses avec les hommes distingués de vos contrées , qui sont venus honorer notre Congrès de leur présence , je trouve quelque dédommagement dans la pensée que M. Goguel, licencié es-lettres, chef d'institution dans notre ville, auquel me lient d'anciens et bien vifs sentiments d'affection et d'estime, se constituera auprès de vous, Messieurs , l'interprète de mes regrets et des vœux sincères que je forme pour le plein succès de la onzième session, succès si bien pré- paré par le remarquable programme que vous avez publié. » Le grand obstacle qui m’interdit de me faire le compagnon de route de M. Goguel , provient des travaux sas fin que me donne l'impression de notre compte-rendu , qui est une opération aussi laborieuse par l'excessive abondance des matières que par la lenteur impardonnable avec laquelle les documents des sections m'ont été fournis. — Il n'y a, certes, pas de ma faute si nos deux volumes ne paraissent que d'ici à un mois au plus tôt. — En attendant , pour n'autoriser aucun doute sur mon empressement à me couformer aux règlements et usages du Congrès , et pour prendre au moins date, auprès de la onzième session, des efforts faits jusqu'à ce moment, je preuds le parti de vous adresser les feuilles imprimées jusqu’à ce jour, savoir : » 10 Vingt-sept feuilles du premier volume, contenant , outre la partie préliminaire , les procès-verbaux des séances générales, et ceux des six premières sections. Ce volume atteindra trente-sept à trente-huit feuilles. » 20 Quatorze feuilles, impression très-compacte , du deuxième volume , renfermant les mémoires communiqués au Congrès. Ceux de trois sections sont seuls imprimés jusqu’à ce moment. Le volume aura probablement plus de feuilles que le précédent. » Veuillez agréer , Messieurs , et faire agréer au Congrès la mo- deste offrande , qu’à force de peines et de soucis je suis dans lé cas de vous faire au nom de la dixième session , dont les documents imprimés vous permettront d'apprécier la tendance et les travaux.» Après le secrétaire-général de Strasbourg, vient celui SÉANCES GÉNÉRALES, 61 de Lyon, non moins dévoué que son collègue. M. Comar- mond , directeur des musées archéologiques , écrit le 19 juin 1843 : « Je fais donc bien sincèrement les mêmes vœux pour le Congrès * d'Angers que pour ceux de Lyon et de Strasbourg où j'ai assisté ; je souhaite que cette œuvre grandisse et prospère chaque année ; assez . d'envieuxet d'esprits mal placés cherchent à dénigrer une institu- tion qni ne laisse après elle que d’heureux souvenirs et de bons ré- sultats. » Je tremble de ne pouvoir y aller, et cependant je m'en faisais une fête sous tous les rapports. » Je n’en resterai pas moins l’un des souscripteurs les plus zélés, et je joindrai au vif regret de ne pouvoir assister aux séances du Congrès, celui d’avoir perdu l'heureuse occasion de faire votre con- naissance. » ” Nous citons avec plaisir l’adhésion de MS l’évêque d'Angers: « Je viens de recevoir le programme de la onzième session du Congrès scientifique de France qui doit avoir lieu prochainement à Augers. » Je m'empresse de vous envoyer mon acte d'adhésion à cette réunion dont les résultats peuvent être si utiles , et je souscris bien volontiers au volume qui doit être publié pour rendre compte de ses travaux.» _ La Société d’agriculture de Turin, qui, organisée de- puis un an à peine, compte déjà plus de 2,000 associés, et publie un journal remarquable , donne la délégation suivante à M. le chevalier Bertini, l’un de ses membres - les plus distingués : « La direction de la Société d'agriculture de Turin s’est empressée » de profiter de l’occasion qui lui était offerte de se faire représenter . dans cetle réunion , à laquelle prendront part des hommes dont le savoir et le talent font accepter l'autorité hors de France comme en France même. » Le Président, » Mis ALFIEKI , conseiller d'état. » Turin, le 16 août 1843. » 62 SÉANCES GÉNÉRALES. Nous ne pouvons mieux faire comprendre l’impor- tance acquise par le Congrès scientifique , qu’en repro- duisant cette lettre du rédacteur en chef du Moniteur : Paris, le 25 août 1842. « Monsieur, » Depuis trois ans , le Moniteur rend compte des séances des Congrès scientifiques ; c’est une tradition que je désire continuer , après en avoir jeté les premiers fondements. Je viens donc mettre notre publicité à votre disposition , et vous offrir les mêmes rela- tions que j'ai eues avec les Congrès de Lyon et de Strasbourg. J'ai reçu jour par jour l'envoi du compte-rendu de chaque séance , et j'ai envoyé les numéros qui le contenaient en autant d'exemplaires qu'il y avait de sections au Congrès. Veuillez me faire savoir si cette marche vous convient : je serai charmé de faire tout ce qui dépen- dra de moi pour propager la connaissance des travaux de votre Congrès. » Agréez, Monsieur, l'assurance de mes sentiments les plus dis- tingués. » AL. GRÜN, rédacteur en chef.» Voici en quels termes une des principales sociétés de la capitale formule son adhésion : « La Société philotechnique voulant témoigner , autant qu'il est en elle, l'intérêt qu’elle prend à l’ivstilulion des Congrès scienti- fiques de France, à prié l’un de ses membres, M. Jullien (de Paris), qui a déjà été son délégué dans les trois dernières sessions des Con- grès , de la représenter au Congrès d'Angers , où il a l’intention de se rendre. » Le Président de la Société, » COFFINIÈRES. s Le Trésorier | Archiviste intérimaire , » ALBERT-MONTÉMONT. » Enfin , il est consolant de voir avec quelle persévé- rance d'intérêt les anciens secrétaires - généraux du Congrés en suivent les développements. Celui de la sép- tième session , le savant docteur Bonnet (de Besançon) s'exprime ainsi : SÉANCES GÉNÉRALES. 63 _« Croyez. monsieur le secrétaire-général , que j'aurai un regret sincère si je ne puis pas aller partager vos travaux. Il y a tant à gagner en rapport avec les savants qui se dévouent aux sciences et aux léttres, qu'il faudra des raisons majeures pour me retenir. J'en- gage et j'engagerai , d'ici au moment du départ, toutes les per- sounes de ma connaissance à faire le voyage dans la patrie des du Bellay, des Bodin, Gilles Ménage, etc. » Mais il faut s'arrêter dans les extraits de cette volu- mineuse correspondance , et nous mentionnerons seule- ment les regrets et les noms de MM. de Longpérier , premier employé au département des médailles de la ‘Bibliothèque royale ; Duchesne aîné, conservateur de la bibliothèque du Roi; V. Simon, secrétaire-général de la cinquième session, à Metz; À. Humann, président de la _ Socièté d’ bot ulthré de Mayence ; Schmuts , banquier à Fribourg (Suisse) ; le marquis de Ridolfi, drés dent du Congrès scientifique de Florence , professeur d’agricul- ture à l'Université impériale de Pise (grand-duché de Toscane); Berthold, professeur de médecine à Gættingue. La correspondance fournit encore les ouvrages sui- vants : 1° Le macarismie ou tfaïté des moyens que l’homme doit employer pour se rendre. aussi heureux que le _permeitent les bornes de ses facultés > par M. Benoni de : Brun. 2° Solution dela huitième question dela Linguistique, cinquième section du programme de là onzième session, par M. Ménard. 3° Réponse à cette question proposée par, la dixième session du Congrès scientifique de France : « Quelles » sont, indépendamment des formes du style, les diffé- k .» rences essentielles qui séparent le romantisme du cla- » Cissisme? » par le baron Émile dela Cour. 4° 1} Éducation, poème, par M. Boyer. | 5° Manuel de morale pratique et religieuse, à l'usage des écoles, par Émile Loubens. 64 SÉANCES GÉNÉRALES. 6° Exposé de la méthode d'éducation de Pestallozzi , telle qu’elle a été suivie et pratiquée sous sa direction de 1806 à 1816, par M. Marc-Antoine Jullien (de Paris). 7° Essai général d'éducation physique, morale et in- tellectuelle , suivi d’un plan d'éducation pratique , par M. Jullien. | 8e Œuvres complètes de Me la princesse Constance de Salm , 4 vol. offert de la part de l’auteur par les mains de M. Jullien. M. le docteur Bourgeot Saint-Hilaire (de Paris) lit une pièce de vers qu’il a déposée sur le bureau. M. Pavie lit un mémoire sur le maréchal de Gié. M. Freslon demande l'impression du travail , qui est adoptée avec un très-vif empressement. M. Isidore Hedde donne lecture d’une pièce de vers. L'ordre du jour étant épuisé , la séance est levée. Cinquième séance générale. 5 septembre 1843. M. le comte de Las Cases, assisté des membres du bu- reau et des secrêtaires-généraux, ouvre la séance. Le procès-verbal est lu et adopté. Un membre lit le procés-verbal de la première et de la sixième sections réunies. M. de Sevret fils donne lecture du procès-verbal de la deuxième section. M. Castonnet lit le procès-verbal de la section des sciences médicales. M, L. Cosnier donne lecture du procès-verbal de la section d'histoire et d'archéologie. | SÉANCES GÉNÉRALES. 65 M. E. Taïbot déclare n’être pas préparé à lire le pro- cès-verbal de la cinquième section. M. Guillory, l’un des secrétaires-généraux , donne lec- ture de la correspondance qui fournit : 4° Onze numéros des Annales forestières, années 1842 et 1843. 2° Mémoire concernant les diablintes, par M. Etoc- Demazi, du Mans. 3° babes musicale ou téléphonie, inventée par M. Sudre. M. le président fait part à l’assemblée idee invitation du président de la Société industrielle, à l’effet d'engager MM. les membres du Congrès à assister à la distribution des récompenses, qui aura lieu jeudi à onze heures, par suite de l’exposition d'industrie. M. Jullien lit l'exposé suivant sur la langue musicale et la téléphonie, inventée par M. Sudre, approuvée par l’Institut de France et par deux commissions spéciale- ment nommées par les ministres de la guerre et de la marine. « Messieurs, » Les inventions essentiellement utiles et pratiques sont les hommages les plus dignes de l’attention bienveillante des Congrès scientifiques. Elles ont surtout droit d’être accueillies avec une prédilection marquée, quand leur bonté et leur importance ont déjà été vérifiées par des expériences souvent renouvelées et consacrées par lap- probation unanime des juges les plus compétents. » Lorsqu'une invention , fruit de vingt années de mé- In ditations, de recherches et de travaux persévérants , a pour objet spécial de procurer aux homanes des moyens nouveaux de conanyniquer leurs pensées par l'emploi habilement combiné de signes plus simples et plus uni- Te-f. 5 66 SÉANCES GÉNÉRALES, versels que ceux qui sont jusqu'ici en usage chez les dif- férents peuples , alors cette invention paraît mériter lat- tention la plus sérieuse d’un Congrès scientifique, puisque l'institution des Congrès n’est elle-même qu’une heureuse innovation destinée à fournir tous les ans aux hommes instruits et amis du bien public l’occasion de se rappro- cher et de s’éclairer par des communications mutuelles, » Parmi ces motifs , Messieurs , la méthode nouvelle dont j'ai à vous entrelenir Lrès-sommairement et dont l'inventeur m'a prié de vous offrir en son nom et de dé- poser sur voire bureau l'exposé analytique, avec les rap- poris des corps savants el ces commissions qui en ont fait à plusieurs reprises des examens approfondis , obliendra , sans aucun doute, votre bienveillant intérêt. » La LANGur musicaze et la rÉLÉPHoNIE , inventées par M. Sue , l’un des membres de ce Congrès, qui est venu exprès à Angers avec une de ses élèves pour vous mettre à même de voir de vos propres yeux l'application de sa méthode , et d'apprécier les divers emplois dont elle est susceptible, n'étaient point de nature à être envoyées à l’une ou à l’autre des sections particulières dont le Con- grès se compose; car leur caractère d’universalité fait qu’elles participent également à plusieurs ordres de sciences. » Elles appartiennent aux setences physiques et mathé- matiques, puisqu'elles offrent à homme une télégraphie acoustique perfectionnée , qui peut même réaliser l’inap- préciable avantage d’établir des rapports faciles entre les aveugles et les sourds-muets, ces deux classes intéressantes de la société que leur organisation imparfaite semblait de- voir rendre presqu’étrangères l’une à l’autre par le défaut de moyen de communication. » Les sciences philosophiques et métaphysiques voient, dans celle méthode , une solution d’un grand et impor- tant problème, la création d’une langue universelle, objet o + — SÉANCES GÉNÉRALES. 67 des vœux et.des recherches de plusieurs philosophes qui ont. reconnu que l'esprit humain est tout entier dans l'artifice du langage (1), et qui ont voulu, avec Lersnirz, que les membres épars de la grande famille humaine , doués des mêmes organes , des mêmes besoins , pussent avoir un moyen commun et facile de se communiquer leurs idées , comme ils ont déjà des instincts , des senti- ments et des intérêts communs, .».Gette méthode enfin pourrait appartenir aussi à notre section de litiérature et beaux-arts, puisqu'elle emprunte à la musique les sept notes de la gamme pour remplacer, dans la nouvelle langue qu’elle crée , le nombre infiui d’intonations que les divers peuples donnent à leurs in- nombrables syllabes ; car M. Sudre convertit la percep- tion des sons en un langage articulé aussi exact, aussi par- fait que le langage ordinaire, avec ceite différencé que sept syllabes, Ut, ré, ani, fa, sol, la, si, remplacent les 25 lettres et les 95 syllabes de notre al- phabet. » Gette méthode simple, naturelle, féconde, qui le alé les trois qualités essentielles de Poriginalité , de la simpli- cité, de la précision , paraît appelée à exercer une salu- taire influence dans le monde social. Les sept signes, dont elle fait une application ingénieuse , suffisent pour transmeltre et pour faire comprendre aux personnes même qui ne connaissent que leur langue maternelle, des phrases prononcées en anglais , en latin, en grec, même en arabe, en hébreu, en chinois et dans d’autres idiômes. *» La TÉLÉPHONIE qui, avec trois sons seulement, uf, mi, sol ; et au moyen des claïrons qu’on entend à de “eg distances , et portent les sons rendus très-intelligibles , à une et même à deux lieues, devient un he auxiliaire Ü (8 La RoMIGUTÈRE, 68 SÉANCES GÉNÉRALES. pour la transmission de commandements, soit à la guerre, soit sur mer, sans que la nuit ni les brouillards puissent gêner les communications , et sans que les personnes pla- cées entre ceux qui ont besoin de correspondre puissent en comprendre le sens. e » Trois commissions formées, l’une au sein de Institut et composée de membres des cinq Académies, les deux au- tres nommées par les ministres de la guerre et de la ma- rine, ont été unanimes dans le jugement qu’elles ont posé séparément sur la langue musicale et la téléphonie, » Qu'il me soit permis, Messieurs, en terminant ce ra- pide exposé, de vous citer deux passages extraits des rap- ports de ces commissions : « La commission de l’Institut a pensé qu’offrir aux » hommes un nouveau moyen de se communiquer leurs »idées, dese les transmettre à des distances éloignées, et » dans l'obscurité la plus profonde, est un véritable service » rendre à la société, et que, surtout dans Part de la » guerre, l'emploi de ce langage pourrait, en certains cas, » devenir très-utile et servir de télégraphe nocturne dans »les circonstances où souvent les corps militaires ne peu- » vent se communiquer les ordres nécessaires à l’exécution » de tels ou tels mouvements. » » Les expressions employées par la commission nom- mée par le ministre de la guerre sont encore plus précises, et donnent une idée plus complète des utiles applications dont la téléphonie est susceptible, « M. Sudre, disent les commissaires, a su assimiler ce »moyen de communication au lélégraphe du gouver- » nement , en lui donnant la faculté d'exprimer toutes les » idées, y compris les noms propres et les noms des villes, » Dans cette télégraphie acoustique, de même que dans » la télégraphie visuelle, sauf les signaux réglementaires, » les clairons stationnaires n’ont aucune connaissance de » la valeur des sons qu’ils transmettent, ce qui garantit la SÉANCES GÉNÉRALES. 69 » sûreté dans la transmission. Enfin, la faculté de pouvoir »changer à volonté la clé des signes , garantit également » le secret des dépêches. » Après un examen approfondi ; la commission recon- » naît que ce systême de correspondance peut être utilisé »avantageusement dans le service ordinaire des troupes, “comme dans les opérations d’une armée en campagne. » Elle conseille aussi d’en faire l’application dans la réu- »nion des troupes en cantonnement , comme dans les » camps où se font les grandes manœuvres. » En conséquence, la commission demande : » 1° Que le service de correspondance , inventé par » M. Sudre, soit pratiqué pour le service de l’armée; » 2° Qu’une école de téléphonie soit créée sous la direc- »tion de M. Sudre; » 3° Enfin, qu’il soit accordé à l’honorable savant et » artiste qui, pendant de longues années , a consacré son »temps, sa vie entière et le restant de son patrimoine »pour perfectionner une invention dont la France doit »s’honorer, une récompense analogue à celles qui sont » accordées aux auteurs des découvertes importantes pour » la cession qu'ils en font au gouvernement (1). » M. Jullien propose de renvoyer l’examen de ce sys- tème à l’une des sections du Congrès. M. de Falloux monte à la tribune; avant de lire un mémoire très-remarquable sur la Saint-Barthélemy, il adresse quelques mots à l’assemblée qui sont accueillis avec une faveur marquée. Sa nolice est entendue avec non moins d'intérêt. Il termine par des considérations verbales d’un ordre très-élevé. (1) La commission formée par le ministre de la marine, après avoir assisté à de consciencieuses expériences faites dans la rade de Toulon, et même en dehors et en pleine mer, a fait un rapport en- tièrement favorable sur la £é/éphonie. 70 SÉANCES GÉNÉRALES, M. Guinoyseau père lit un mémoire sur le même su- jet, concluant avec le précédent mémoire que la religion n’est entrée pour rien dans la Saint-Barthélemy. Une partie de l’ordre du jour est remise à demain. M. le président indique à l’assemblée que l'exposition de fleurs du comice horticole, sera ouverte demain, sous les auspices de la Société royale d'agriculture, sciences et arts d'Angers. La séance est levée. Sixième séance générale. 6 septembre 1843. M. de Las Cases, assisté des membres du bureau et des secrétaires-généraux, ouvre la séance. Le procès-verbal est lu et adopté, La correspondance fournit : | 4° Statistique du département de Maine et Loire, pu- bliée sous les auspices de la Société d’agriculture, scien- ces et arts, offerte par M. de Beauregard ; 2° Quatre numéros d’un travail intitulé : la Parole, ou recueil périodique de tous les chefs-d’œuvre de la littérature ancienne et moderne , par M. A. de Roos- malen , qui accompagne cet hommage de la lettre sui- vante : A Monsieur le président du Congrès scientifique de France , à Angers. Paris, le 3 septembre 1843. « Monsieur, » J'ai l'honneur d'adresser les numéros du journal a Parole , qui ont paru jusqu’aujourd'hui. Si le Congrès veut bien agréer cette publication , j'enverrai successivement les autres numéros à la bibliothèque de la ville. SÉANCES GENÉRALES. 71. » Si vous vouliez avoir la bonté de me faire connaître lerésultat des travaux de ce Congrès, auquel, à mon grand regrel, je n'ai pu assister, j ’en rendrai compte dans mon prochain numéro. » Je suis, Monsieur, avec le plus profond respect, » Votre très-hnmble et dévoué serviteur, » À. DE ROOSMALEN. + À Paris, rue du Cimetière-Saint-André, 15. » . M, Wolski lit le procès-verbal de la première et de la sixième sections réunies. M. de Sevret fils donne lecture du procès-verbal de la deuxième section. M. Bourgeot- Saint-Hilaire lit le procès-verbal de la troisième section, M. Crépon , conseiller à la Cour royale, lit le procès- verbal de la réunion supplémentaire de la quatrième section. M. de Lens lit le procès-verbal de la quatrième sec- tion, M. Eugène Talbot donne lecture du procès-verbal de la cinquième section (séance du 3 septembre). M. de Caumont invite l’assemblée à assister ce soir (7 heures) à la séance qui sera tenue par l’Institut des - provinces. * Le bureau propose au Congrès de décider : . 1° Que demain, à l'heure d'ouverture de la séance générale, il se rende en corps à l'Hôtel-de-Ville, pour y visiter le modéle en plâtre de la statue du bon roi René, due au ciseau de David. et pour l’érection de laquelle l’un des membres de ce Congrès se propose de présenter un projet de souscription. 2° Que la séance générale se tiendra dans la grande salle de l’Hôtel-de-Ville où Ja statue est exposée, afin de ménager les moments du Congrès. 72 SEANCES GÉNÉRALES, M. de Ja Saussaye lit un mémoire relatif à la Saint- Barthélemy , ayant pour but de combattre , sur divers points, celui de M. de Falloux ; il conclut qu'il y a eu préméditation dans l'événement de la Saint-Barthélemy. M. Trouessard prend également la parole contre les conclusions de M. de Falloux ; il fait observer avec beau- coup de convenance que la religion est évidemment hors de cause, car, assure-t-il, l’on peut dire des catholiques qui ont trempé dans le massacre , qu’ils se sont , par là même, éloignés de la véritable voie chrétienne. Il cite quelques passages tendant à prouver que la papauté ne fut pas entièrement étrangère à la Saint-Bar- thélemy : divers textes sont cités à cette occasion. M. de Falloux improvise une réponse que nous n’en- treprendrons point d’analyser , dans la crainte de la décolorer. Il nous suffira de dire qu’elle a pour but de démontrer qu’il n’est pas certain qu’il y ait eu prémédi- tation dans le massacre de la Saint- Barthélemy , et il indique divers passages de Hume et de Capefigue, à l’ap- pui de son dire. M. de Falloux ajoute que divers docu- ments relatifs au massacre sont entièrement controuvés ; et il cite comme exemple , une lettre de Thomasseau de Cursay, qui a paru fausse à M. Marchegay, archiviste du département de Maine et Loire. Il termine en disant que beaucoup de faits relatifs au XVI: siècle , sont trés-con- troversables, attendu que certains écrivains du XVIIT° siècle ont altéré quelquefois la vérité. L’improvisation de l’orateur, vive et chaleureuse, est couverte d’applaudissements. M. Freslon prend ensuite la parole, et aprés des con- sidérations générales d’un ordre très-élevé , il cite le noble exemple de saint Ambroise contre l’auteur du massacre de Thessalonique , et il se demande si la pa- pauté du XVI: siècle a suivi le bel exemple d’Ambroise? Il lit plusieurs textes tendant à prouver la négative. SÉANCES GÉNÉRALES. 73 M. Freslon termine par un parallèle entre le massacre de la Saint-Barthélemy et ceux de 1793. Ce discours est applaudi par l’assemblée. - La séance se termine par une protestation de M. de Falloux, qui déclare que M. Freslon, en portant la dis- cussion sur le dogme , s’est écarté de la question. Il prie l'assemblée de se rappeler que ce n’étaient pas seulement des hérétiques qui se trouvaient en présence du pouvoir à cette époque, mais bien encore des sujets rebelles qui élevaient leurs coups jusqu’à lui. —— Septième séance générale. 7 septembre 1843. Ce jour, une double solennité avait été préparée pour MM. les membres du Congrés. Le matin, distribution des récompenses décernées par suite de l'exposition industrielle, tenue à Angers au mois de juin dernier. L’après-midi , visite à la statue du roi René, exposée dans la grande salle de la Mairie. Les comptes-rendus de ces deux solennités forment le procès-verbal des travaux de cette journée, ainsi qu'il suit : La première a eu lieu à l’hôtel de la Préfecture, dans la grande salle des séances générales de la onzième ses- sion du Congrès scientifique de France , en présence d’un nombreux concours de membres du Congrès, de mem- bres de la Société industrielle et d’exposants. M. Guillory aîné, président de la Société industrielle, qui occupait le fauteuil de la présidence , avait près de lui , comme présidents honoraires, M. Bellon , préfet de 74 SÉANCES GÉNÉRALES, Maine et Loire , M. À. Giraud , maire de la ville d’An- gers, et M. le comte de Las Cases, président du Congrès scientifique de France. Le bureau était en outre composé de MM. de Caumont, vice-président ; Planchenault, Godard, Guinoyseau , secrétaires-généraux dudit Con- grès ; Boutton-Levêque, vice-président, et Berger, secré- taire de la Société industrielle. En face du bureau , avaient été placés des fauteuils pour MM. les principaux fonctionnaires publics , qui avaient été invités à cette solennité , ainsi que MM. les membres du conseil - général de Maine et Loire, et MM. les membres du conseil municipal de la ville d’An- gers. À onze heures précises, M. le président Guillory ouvre la séance. M. le préfet prend immédiatement la parole , et fait ressortir les avantages qui doivent résulter pour notre contrée des expositions appelées à faire connaître et apprécier les améliorations enfantées journellement par notre industrie. M. le comte de Las Cases, président du Congrès scien- tifique, prenant à son tour Ja parole, s'exprime ainsi : « Messreurs, . » Îl me reste peu à dire après le discours que vous ve- nez d’entendre. Cependant, depuis quelques années , de- venu , et j’en suis fier, à demi Angevin par l’industrie, puis-je rester muet et insensible au milieu d’une fête in- dustrielle si touchante ? Oui, Messieurs , de pareilles fêtes émeuvent le cœur. Involontairement elles reportent l’es- prit sur le passé, et font sentir la différence des temps. Autrefois l’industrie était dédaignée, méprisée, elle faisait déroger ; aujourd’hui on comprend qu’elle fait la princi- pale force d’une nation; l'industriel oceupe dans le pays SÉANCES GÉNÉRALES. 75 le rang qui luiest dû , il y jouit de sa juste part d'influence dans le maniement des affaires , et son travail est honoré. De pareils changements sociaux remplissent de reconnais- _ sance pour le présent et d’espérance pour l'avenir. C’est là le bon et sage progrès que nous devons toujours cher- cher, qui nous promet le bonheur de notre chère patrie. » La fête que nous célébrons aujourd’hui nous prouve qu'Angers et les départements qui l’environnent ne sont pas en arrière du reste de la France. Que dis-je , en ar- rière? n’ont-ils pas tout ce qui peut appeler un pays à une haule prospérité ? Les personnes qui se sont occupées d'industrie ont depuis longtemps remarqué que toute pros- périté industrielle était fondée sur trois bases principales, le fer, la houille et la facilité des transports. Nos départe- ments possèdent en abondance le fer et la houille, et quant aux transports , voyez la Maine , le Loir, la Mayenne et tous leurs affluents venir s’empresser de porter le tribut de deurs eaux à cette belle Loire qui traverse dans son cours près de la moitié-de la France. » Pendant longtemps , il est vrai, nos départements de l'Ouest avaient été loin d’être aussi favorisés que ceux de PEst, et nous n’étions pas tout à fait au niveau des Flan- dres industrieuses et de la féconde Alsace, mais c’était leffet des circonstances. Nos départements de l’Est étant continuellement exposés aux ravages de la guerre , ont vu se multiplier dans leur sein les routes de toute espèce, et ce qui avait été d’abord concu pour la destruction , est devenu un élément de création. Après chaque guerre, on s’empressait de réparer les désastres , et le phénix rehais- sait pour ainsi dire de ses cendres. Mais ce que l’art mi- litaire a fait depuis longtemps pour les provinces de l'Est, les progrès de la civilisation le font faire aujourd’hui pour les départements de l'Ouest. Voyez tout ce qu’on a fait depuis douze ans pour les routes , pour les voies de com- * munication de toute espèce. Aussi , n’en doutez pas , Mes- 76 SÉANCES GÉNÉRALES. sieurs , le moment n’est pas loin où, après avoir rempli les marchés intérieurs , les produits de l'Ouest cherche- ront d’autres mondes. Voyez le génie de l’industrie vous indiquer du doigt Nantes, et son port, et le vaste Océan, el tous les pays dont il baigne les rivages. Oui , Messieurs, c’est dans cette voie que le destin appelle les provinces de POuest. Leur position géographique , les productions de son sol, l’industrie de ses habitants , tout leur promet une haute prospérité future. C’est à vous, Messieurs , à être égaux à votre destinés; vous le serez, car ce que vous avez déjà fait est un sûr garant de ce que 7. pourrez faire un jour. » M. Guillory, président de la Société industrielle, adresse également à l’assemblée le discours suivant : « Messreurs, » Les expositions publiques des produits de l’industrie n’ont pas cessé depuis leur création d’exercer une heu- reuse influence sur les progrès des arts. Chacune d’elles a été marquée par de beaux et utiles résultats; les efforts que font les hommes industrieux pour y paraître d’une manière qui les mette en honneur, ont souvent produit d'importantes découvertes ou des perfectionnements avan- tageux, Chacun comparant ses produits et ses moyens d'exécution avec ceux de ses concurrents, sent mieux ce qui lui manque, et de tous les moyens employés pour répandre dans la classe manufacturière les plus utiles ou les meilleurs procédés , c’est sans doute celui qui a donné les plus prompts et les plus heureux résultats. » Il ne faut pas remonter bien haut dans notre histoire, Messieurs , pour trouver l’origine de ces fécondes institu- tions. Il n’y a pas longtemps encore, l’industrie enchaînée osait à peine livrer au jour le fruit de ses méditations et de ses recherches ; des règlements désastreux , des corpo- SÉANCES GÉNÉRALES. 77% rations privilégiées, des entraves de toute nature, arré- taient le plus souvent les élans du génie, et le plus souvent aussi, les plus nobles créations ne paryenaient au succès _que par la force même qu’elles trouvaient en elles pour s'affranchir des liens dont on les entourait. » La grande régénération de 89 , en commençant pour la France, et je dirai presque pour ie monde, une vie nouvelle et riche d’avenir, n’a point oublié les droits de l’industrie : toute injuste oppression a dû disparaître par elle, et l’on a vu tomber aussitôt les entraves sous les- quelles l’industrie gémissait. Elle prit alors un rapide es- sor : la première exposition publique vint sous le Direc- toire lui donner un élan nouveau; et depuis cette époque, de plus en plus forte , de plus en plus protégée par nos lois qui défendent les intérêts de tous, l’industrie a grandi avec la hberté. » Lorsque nous avons vu, Messieurs , les bienfaits des grandes expositions nationales, qui sont une des gloires de la France , nous avons pensé qu’il pouvait être ulile de provoquer, par des moyens analogues, l’émulation et le zèle des industriels de nos localités, Déjà d’autres con- trées que la nôtre en avaient recueilli les fruits et reconnu l'avantage ; il y a huit ans à peine la Société industrielle d'Angers voulut doter le pays de l’une de ces institutions : libérales et fécondes ; elle fit une double exposition pour l’industrie et les beaux-arts; plus tard, voulant couvrir d’une même protection les différentes industries qui font la richesse des peuples , elle fonda à la fois en 1838 quatre expositions distinctes; les vastes salles de la Préfecture suflirent à peine à contenir les:produits industriels; la Mairie s’ouvrit pour les arts; l’horticulture vint étaler au Jardin fruitier ses nombreuses et ravissantes productions, et l’exposition agricole trouva place au Musée , dans la galerie David , alors inachevée. + » Ge fut à cette époque que la réunion de tant de ri- 78 SÉANCES GÉNÉRALES. chesses dut frapper les esprits; le souvenir vous en est encore présent, Messieurs , comme à nous-même, et c’est sous l'impression qu’elle en avait ressenlie que notre So- ciété décida qu’elle renouvellerait tous les cinq ans ces imposantes et fécondes solennités. » Suffisait-il en effet d’avoir créé des institutions utiles, et ne fallait-il pas leur assurer dans l’avenir une existence qui permit d’en obtenir les heureux fruits qu’elles devaient produire ? » Tel fut, Messieurs, Pesprit qui anima la Société in- dustrielle , lorsque ces sages prévisions assurèrent la durée du bien qu’elle avait commencé, et cette institution qui doit contribuer si puissamment à développer en ce pays les sources de la richesse , et par conséquent du bien-être, peut-elle manquer d’être l’un des plus beaux titres de la Société qui l’a fondée ? » Comment s'est-il fait cependant que l’œuvre que nous avions conçue et si complétement exécutée semble se dé- membrer aujourd’hui ? Pourquoi la quadruple exposition ne s’est-elle pas renouvelée cette année , lorsqu’elle s’était montrée si florissante dans son ensemble, il y a cinq ans? » Permettez-nous, Messieurs, de vous rendre compte des causes qui ont produit ce résullat, et soyez convaincus à l'avance que ce n’est ni le défaut de zèle, ni l'absence des ressources qui ont fait que la seule exposition indus- trielle se soit reproduite cette année à sa période natu- relle. Il a fallu nécessairement obéir à la loi des besoins particuliers observés pour chacune des quatre parties de l’ensemble; et, les uns plus impérieux, les autres moins exigeants, nous ont forcés de les séparer, sans toutefois que les intérêts d'aucun dussent avoir à souflrir de cet isolement, » Comment eussions-nous pu, par exemple , sans mé- connaître leur zèle et leur merveilleuse habileté, ajourner à cinq ans les nombreux horticulteurs de 1838? Chaque > | | | SÉANCES GÉNÉRALES, 79 mois, pour ainsi dire , est marqué par une conquête nou- velle dans cette industrie, et tel est l’attrait de [a nou- _veaulé, tel est aussi l’avide besom qu’elle excite, qu’au bout de cinq années sans doute, nous eussions regardé comme déjà surannés des produits obtenus depuis la der- nière exposition. Aussi nous avons dû, pour satisfaire aux besoins de cette industrie, rendre annuelles, et parfois plus fréquentes encore, les occasions que nous lui don- nions de se produire aux yeux de tous. L’une de ces fêtes, si pleines d’intérêt , vient d’avoir lieu au Jardin botanique d’Angérs , et vous avez pu voir, Messieurs , que l’industrie horticole, loin de démériter de ses récents triomphes, poursuit au milieu de nous, avec constance, ses persévé- rants succès. » L'agriculture ne peut offrir, on le concoit, des élé- ments aussi variés; les instruments qu’elle emploie ne peuvent ni se modifier profondément, ni se multiplier d'une manière suffisante en quelques années, et l'intérêt des expositions agricoles menacerait sans doute de dé- croître, si elles devaient se renouveler trop souvent. Je laisse au surplus à M. le rapporteur de la première section du jury le soin de développer les motifs qui nous ont for- cés de confondre les éléments que nous cHrait l’agriculture avec les produits généraux de l’industrie, , » Quant à l’exposition des beaux-arts, il nous eût été facile de la reproduire aujourd’hui , après une période de cinq années ; mais les idées heureuses sont promptement adoptées ; et nous avons , avec une satisfaction sincère, vu nôtre mise en honneur par nos émules eux-mêmes : la Société d'agriculture, sciences et arts d’Angers n’a pas Voulu nous laisser tous les soins et tous les travaux que nous imposait notre œuvre complète, telle que nous l’a- vions conçue et d’abord exécutée; et,s ’emparant l’année dernière de l’un des éléments de cette œuvre, elle a réa- lisé pour elle l’un de nos anciens triomphes , en détachant 80 SÉANCES GÉNÉRALES, de notre couronne le brillant fleuron des beaux-arts. Nous n'avons pas voulu lui reprendre celle année l’enfant de nos efforts-qu’elle a si généreusement adopté; nous la fé- licitons avec joie du succès dont il Jui a été l’occasion, et nous la remercions aussi de s’être chargée de faire valoir et briller aux yeux de tous une pensée qu’elle a bien voulu prendre au milieu de nous. » Telles sont, Messieurs, les raisons générales qui ont amené des modifications dans notre institution première; tous les éléments qui la composaient ont dû se diviser, il est vrai, mais tous existent, tous ont en eux une vitalité certaine, tous ont leurs fruits assurés et nombreux. » Permettez-moi donc , Messieurs, de vous ramener à l’objet spécial de notre réunion d’aujourd’hui , el de vous soumettre quelques aperçus généraux sur l’exposition in- dustrielle qui vient de se produire au milieu de vous. » Gette solennité a recu, Messieurs, plus d’un encou- ragement auquel nous devons rendre hommage. Le con- seil général de Maine et Loire et le conseil municipal d'Angers ont compris que le département et la ville de- vaient principalement recueillir les fruits de cette fête de l’industrie , et tous les deux par les subventions qu’ils ont accordées , ont témoigné l'intérêt puissant qu’ils portaient à son succès. » M. le préfet , à son tour, s’est associé aux eflorts qui devaient produire un si désirable résultat; nous devons le remercier ici d’avoir bien voulu mettre sans réserve à no- tre disposition les vastes salles de la Préfecture, qui seules pouvaient permettre aux produits exposés de paraître dans tout leur avantage. » Neuf des départements de l’Ouest, Messieurs, ont pris part à l’exposition dont nous avons à vous entretenir; ces départements sont ceux de la Loire-Inférieure , d’Ille-et- Vilaine , de la Mayenne, de la Sarthe, d’Indre-et-Loire, de la Vienne , des Deux-Sèvres, de la Vendée et de Maine SÉANCES GÉNÉRALES. 81 et Loire. La réunion des industriels de ces diverses con- trées a produit un ensemble imposant; en 1838, trois ‘seulement des salles de la Préfecture étaient occupées par Pexposition; il nous a fallu cette année consacrer cinq . galeries , au lieu de trois, aux nombreux et intéressants produits qui nous ont été présentés. » Il faut donc le proclamer, Messieurs , notre institution est toujours en faveur, et porte ses fruits de plus en plus heureux; vous le reconnaîtrez mieux encore lorsque vous _ aurez entendu les rapports qui vont vous être faits , et vous direz avec nous que l’exposition industrielle de 1843 s’est élevée au-dessus des résultats de celle de 1838 , où nous avions déjà vu développés si heureusement les germes fé- conds de la première exposition de 1835. - » Voulez-vous , Messieurs, une autre preuve de cette supériorité que nous vous signalons ? Comptez avec nous combien de branches diverses de l’industrie nous ont montré en 1843 les notables progrès conquis depuis cinq années. » Les ardoisières sont depuis longtemps une des riches- ses du pays; dans cette dernière période de cinq ans, elles ont multiplié leurs produits , en introduisant des amélio- rations et des changements dans le mode d’exploitation. “Elles ont emprunté les galeries couvertes aux carrières schisteuses des Ardennes, et l’emploi plus généralement répandu des moteurs à la vapeur a rendu plus féconde encore cette source inépuisable de travail et de richesses. ‘» L'extraction de la houille vient encore de prendre un Mippeñient nouveau , au moyen de la plus ingénieuse application de principes depuis longtemps connus. L’air convenablement comprimé dans le puits d’une mine per- met désormais d’aller au-dessous du lit même de la Loire chercher une richesse minérale jusqu’alors inexploitée. * » Le puissant encouragement donné par nous à la fa- à : à À 6 82 SÉANCES GÉNÉRALES, brication des vins d’Anjou champanisés a également porté ses fruits, et la consommation qu’il a provoquée, a fait surgir plusieurs nouveaux établissements soit en notre département, soit en celui d’'Indre-et-Loire , notre voisin, » Deux industries nouvelles pour nos contrées sont ve- nues aussi s'établir parmi nous , et les avantages qu’elles nous assurent nous semblent avoir une incalculable por- tée. Nous voulons parler des deux établissements de fila- ture pour le chanvre et pour le lin, dus à la courageuse et patriotique persévérance de deux de nos compatriotes, Ces industries, Messieurs, sont capitales pour notre pays : espérons que le gouvernement voudra les protéger, el qu’en leur assurant, par des lois protectrices , les bénéfices qui sont nécessaires à leur existence , il rendra durable et complète la conquête ainsi commencée sur une industrie étrangère, par laquelle nous étions opprimés, Gombien de fois n’avons-nous pas formé un vœu que nous verrions ainsi réalisé? et quelle source immense de richesse pour la France entière et pour l’agriculture de notre pays en particulier, si, par l’abaissement du prix de fabrication, les chanvres et les lins pouvaient un jour, pour une con- sommation incalculable, remplacer le coton qui, chaque année, nous force de porter d'immenses capilaux à l’é- irapger. » Une récente ordonnance élève à 25 p. 7, le droit d'importation sur les fils et les toiles de chanvre et de lin; ainsi fit jadis l'Angleterre , qui dès 1689 frappait les mêmes produits, étrangers à son sol, d’un droit de 40 à Go p. L’Angleierre devint par ce moyen maîtresse de celte branche d'industrie, et nous avons été sous ce rapport longtemps ses tributaires, Aujourd’hui le courage de nos industriels se relève sous la mesure protectrice qui vient d’être prise en leur faveur ; si quelques-uns pensent qu’elle est encore insuflisante , ils doivent croire du moins qu’une fois entré dans cette voie d'amélioration , le gouvernement SÉANCES GÉNÉRALES. 83 français ne s’arrêtera pas avant d’avoir complété l’œuvre de régénération qu’il a commencée. ». Une industrie nouvelle encore s’est également révélée depuis peu dans notre département; c’est la fabrication des pointes et des fils métalliques. Elle nous semble mar- cher vers un succès assuré; » Ne dois-je pas mentionner aussi les continuels progrès et les nombreuses améliorations obtenues dans nos belles filatures de laines , dans nos manufactures de toiles à voi- les, et surtout dans nos fabriques de cordages en chanvre, dont quelques-unes ont en même temps adopté les câbles en fil de fer. » Proclamons enfin avec quelle stidié nous voyons grandir chaque jour parmi nous un établissement modèle, dont l'influence pour l’éducation professionnelle sera im- mense dans la France et surtout dans nos départements de l'Ouest. L'École royale d’arts et métiers, Messieurs, a un ayenir dans lequel nous avons foi, et pour lequel chacune de nos expositions nous a sans cesse apporté de nouvelles et plus nombreuses garanties, » Voilà, Messieurs, quelques-uns des principaux pro- grès que nous avons eu le bonheur de conslater après cinq ans. Tous les efforts se sont soutenus; nulle part le zèle n’a fait défaut, et le pays devra recueillir, sans nul doute, les avantages produits par ce continuel açcroisse- ment de l’industrie. ; .» Un regret, un seul nous reste en ce moment; pour- quoi faut-il que nous ayons à l’exprimer ! Une des villes les plus industrieuses de notre département n’a pris qu’une faible part à l'exposition de cette année; son importance, ses anciens succès , sa renommée du passé comme ses in- térêts de l'avenir, tout semblait lui faire une loi de se pro- “duire aujourd’hui d’une manière brillante; qui donc a pu ‘arrêter ses nombreux fabricants, et les faire renoncer à un triomphe qui n’eût pas été sans profit ?.., 84 SÉANCES GÉNÉRALES. » Nous n’avons pas pu nous expliquer cet oubli de leurs propres intérêts; la concurrence intelligente et féconde se fait au grand jour, et de cette manière seulement ap- porte ses avantages à ceux qui produisent, comme à ceux qui consomment. Espérons qu’à l’avenir la ville de Cholet saura mieux comprendre cette vérité libérale , et n’ou- blions pas de louer ici de l’avoir comprise, ceux de ses fabricants qui sont venus apporter leurs riches et utiles produits. » En reportant nos souvenirs sur les richesses que pré- sentait notre exposition , en appréciant les efforts, le zèle et le talent qu’elles accusent de toutes parts, nous regret- terions peut-être , Messieurs, de n’avoir pu nous montrer plus prodigues de récompenses et d’encouragements : au- jourd’hui surtout que, par la présence dans cette assem- blée de tant d’hommes renommés pour leur science et leur noble caractère, ces distinctions vont prendre un relief nouveau pour ceux qui les vont obtenir. Mais dans le con- cours où ils ont triomphé, nous avons reconnu bien des mérites que nous sommes obligés de taire; l'avenir, sans doute, et un avenir prochain, viendra mettre à son tour en honneur le fruit de travaux si intelligents et si pleins de persévérance. c » Pour nous, Messieurs, qui, réunis en une société jeune encore, mais pleine de zèle , ne recherchons par nos eflorts que la gloire et le bien-être de notre patrie, nous serions heureux , à notre tour, et récompensés au-delà de nos espérances, si vous accordiez à nos travaux le témoi- gnage de la sympathie d'hommes aussi éminents , et l’ap- probation d’une assemblée aussi distinguée. » MM. Frédéric Gaultier, Bayan, A. Menière , Troues- sard , E. Daviers , Chauvin et A. Boreau , rapporteurs des diverses sections du jury de l’exposition industrielle et de celui de l’exposition horticole, viennent successive- SÉANCES GÉNÉRALES. 85 ment occuper la tribune et rendre compte de l’examen . auquel s'étaient livrées ces sections. * MF. Berger. secrétaire de la Société industrielle, pro- clame ensuite les noms des industriels jugés dignes de recevoir des récompenses qui leur sont remises par M. le président de la Société industrielle, À deux heures et demie, la séance est suspendue. Le bureau se transporte + Suivi des membres du Con- grès, à la Mairie , où la septième séance se continue à l’occasion de l’exposition de la statue du roi René , que M. le comte de Quatrebarbes a bien voulu présenter au Congrès. Cette magnifique statue, au costume chevaleresque, à la noble stature , est encore l’œuvre de notre illustre David. M. de Las Cases, assisté des membres du bureau et des secrétaires-généraux + ouvre la séance et donne la parole à M. de Quatrebarbes, qui lit un fragment de la préface de son beau travail sur les œuvres inédites de René. Il fait observer à l’assemblée que le produit prove- nant de la vente de cet ouvrage est destiné à l’érection d'une slatue en bronze faite sur le modèle qu’il expose. M. de Quatrebarbes nous fait passer en revue les habi- tudes et les mœurs de la chevalerie. Rien n’est aussi gracieux que le fragment qu’il lit des amours de Regnault et de Jeanneton , poème composé par René lui-même et que la bibliothèque impériale de Saint-Pétersbourg possédait seule, avant que M. de Qua- trebarbes, par l'entremise de M. Ghampollion , n’en eût fait venir une précieuse copie. : M. de la Sicotière prend la parole : 86 SÉANCES GÉNÉRALES. » Messigurs, LA » Cette solennité n’est pas une fête seulement pour la ville d'Angers , c’est une fête aussi pour nous tous, étran- gers à ses murs, mais NON pas aux généreux sentiments qui l’animent. Rien ne pouvait plus dignement consacrer le souvenir du Congrès scientifique que l’inauguration de la statue du bon roi René. Le roi René eût été heureux et fier de nous voir groupés autour de lui. Soyons heureux, soyons fiers d’assister à sa résurrection glorieuse au milieu de cette ville qu’il aima , de cette ville à laquelle il a légué son amoür pour les sciences et les arts. René, d’ailleurs, appartient à la France tout entière. Il est à nous tous par sa bonté pour ses peuples, les services qu’il a rendus aux lettres , les ouvrages qu’il a composés , la loyauté chéva- leresque de son caractère, la gloiré douce et püre qui rayonne autour de son nom. » C’est une noble et patriotique pensée que celle de publier ses ouvrages inédits ou devenus introuvables; tous offrent un grand intérêt pour l'histoire des mœurs , des arts , de la littérature du XV° siècle. Les parties déjà ter- minées avec tant de soin et d'éclat, ce que vous venez d’entendre et d’applaudir, prouvent que l’exécution y ré- pondra pleinement, Le projet de consacrer le produit de cette publication à l’érection de la statue de René en est le digne complément. Son image manquait à votre cité, Messieurs , à votre cité que l’immortel ciseau de David a peuplé de tant et si glorieuses figures. Grâce à la généro- sité de M. de Quatrebarbes, au concours empressé de votre grand arliste, à celui de tous ceux qui aiment l’étude et les arts, bientôt il s’élèvera de bronze sur une de vos places. M. de Quatrebarbes n’aura pas seulement enrichi votre ville d’un monument précieux, il lui aura rendu un grand souvenir; il lui aura légué une bonne action. C’est, permeltez-moi de vous le dire, s’associer à la gloire de * : SÉANCES GÉNÉRALES. 87 ceux qui furent bons, que perpétuer la mémoire de leurs exploits et de leurs vertus. » Pour nous, Messieurs , nous garderons de cette jour- née un profond souvenir, Si divers que soient les lieux de notre naissance, si opposées que puissent être nos idées sur certains points, nous n’avons tous qu’un même senti- ment pour aimer, pour admirer ce qui est bon , ce qui est bien, ce qui honore le pays. Tous , nous aimons la vieille gloire de. votre vieux roi; tous, nous savons qu’elle ne pouvait être mieux comprise que par le noble cœur et la noble intelligence de M. de Quatrebarbes; qu’elle ne pou- vail mieux être traduite en traits vivants que par le ciseau de votre David. Tous, nous félicitons une ville qui peut se slorifier de pareils souvenirs, de pareilles veruus , de pareils actés et de parcils Bhdÿtds: » M. de Quatrebarbes se lève aussitôt et dit : « Messieurs, » Sous l’émotion inspirée par les éloquentes paroles de M, de la Sicotière, je ne puis que fui exprimer ma pro- fonde reconnaissance, et vous supplier tous de reporter sur là têle du bon roi René des éloges que je ne mérite pas, un hôémmage que je ne puis accepter? ici, au pied du monument élevé par le génie au courage malheureux, _à la bonté et à la gloire, il ne peut y avoir que deux éou- ronnes ,— la première pour Pexcellent prince dont le sou- venir conservé dans le cœur des peuples qu’il avait tant aimés , est venu jusqu’à nous, comme l’expression tou- chante des vertus chevaleresques ; comme le derniér écho de la nationalité angevine et le dernier soupir de la harpe du troubadour ; — la seconde, pour le grand statuaire qui élernise sur 1e bronze et le marbre toutes les gloires de la patrie. Grâces soient rendues à ce noble cœur dont le généreux dévouement n’est égalé que par son amour 88 SÉANCES GÉNÉRALES. pour la terre natale. Un rayon de l’immortelle couronne des grands hommes reproduits par son ciseau est depuis longtemps descendu sur son front, » Ces paroles sont vivement applaudies. M. le président met ensuite à l’ordre du jour la ving- tième question d'histoire, relative à Jeanne d’Arc. MM. Guinoyseau père et Goguel prennent part à la discussion. Ils s'attachent à prouver que Jeanne d’Arc fut vraiment inspirée. Pourrait-il en être autrement ? Une simple villageoise sans ressources , sans autorité , sans éducation, eüt-elle donc pu sauver la patrie ? M. Goguel entre dans des-détails historiques d’un haut intérêt. « Charles VIT, ajoute-t-il , ne faisait rien, la » France était abattue , les grands se divisaient, une » partie du clergé, lui-même, traitait l'héroïne de sor- » cière ; mille obstacles naïssent sous ses pas, et cepen- » dant elle sauve la France : ce triomphe n'est-il pas » divin? ne prouve-t-il pas sa mission surhumaine ? » Il cite diverses paroles de Jeanne elle-même, qui mon- trent la simplicité , la douceur et les vertus de Jeanne d'Arc. M. Cellier du Fayel, professeur à l’Athénée de Paris, monte à la tribune et entre dans certains détails qui ten- dent également à prouver son inspiration, mais jusqu’au sacre de Rheiïms seulement; car, dit-il, après cet évène- ment , l’orgueil l’a gagnée, et depuis lors ses succès ont disparu. Il ajoute que Jeanne d’Arc n'est pas l’unique femme qui ait eu de l'influence sur les peuples. Il con- clut même que les femmes ont été inséparables du bien- être de la France. Sa manière piquante de traiter la question est vivement applaudie. La séance est levée. SÉANCES GÉNÉRALES. 89: Huitième séance générale. 8 septembre 1843. M. de Caumont, remplissant les fonctions de président en l’absence de M. de Las Cases, ouvre la séance. Le procès-verbal est lu et adopté. La correspondance fournit : 1° Visites pastorales d'Odon Rigault, archevèque de Rouen, par M. de Caumont. 2 Encore un mot sur le remboursement et la conver- ” sion des 5 p. *, consolidés, offert par M. Hunault. 3° Sur la vaine pâture et sur les biens communaux, par M. de la Chauvinière, directeur du journal le Culti- vateur, à Paris. 4 Statistique horticole de Maine et Loire, publiée sous les auspices de la société d'Agriculture, sciences et arts d'Angers. 5° Mémotres de la société Philanthropique de Verdun, {. IL. d 6° Origine commune de la littérature et de la législa- tion chez tous les peuples, par M. Cellier du Fayel. . M. Planchenault, l’un des secrétaires-généraux, donne lecture du programme du voyage de Nantes. PROGBAMME DU VOYAGE À NANTES, Demain 9 septembre, départ à six heures précises, sur le Courrier n° 1°, disposé exclusivement pour les membres du Congrès. Le bateau sera pavoisé aux couleurs des nations re- - présentées au Congrès. L'ordre des travaux du Congrès ne sera point inter- rompu , et les sections tiendront leurs séances dans les deux salons du Courrier. 90 SÉANCÉS GÉNÉRALES. A l’arrivée à Nantes et après la réception, les mem- bres du Congrès prendront possession du local de leurs réunions en section, puis en assemblée générale à trois heures, d’après le règlement. A sept heures le Congrès recevra à Nantes les hon- neurs d’une séance solennelle des sociétés académiques de cette ville. Le lendemain 10, les travaux du Congrès continue- ront, seulement la section des lettres et des beaux-arts sera reportée de neuf à onze pour faire place de une à trois heures à la visite de l'exposition d’antiquités, pré- parée par la société des Beaux-Arts et à laquelle succé- dera la séance générale, Le lendemain 11, retour à Angers, chacun pourvoira à son retour. Le Congrès sera clos le 12. M. Libaudière, médecin à Nantes, invite les membres qui feront le voyage. à visiter son cabinet d’anatomie, M. Bourjot-Saint-Hilaire appuie cette demande. L'assemblée y fait droit en remerciant M. Libaudière. Un membre donne lecture du procès-verbal de la pre- mière et de la sixième sections. M. de Falloux lit le procès-verbal de la deuxième section. M. Castonnet donne lecture du pocenauttie) de la troisième section. M. Marchegay lit celui de la quatrième section. M. Sorin déclare qu’il est prêt à lire le procès-verbal de la cinquième section, mais comme il a été entendu dans cette section. à laquelle assistaient la plupart des membres de l'assemblée, il pense qu'il est ioutile d’en renouveler la lecture. M: Pavie lit un procès-verbal arriéré de la cinquième section. SÉANCES GÉNÉRALES. 94 La parole est à M. Lambron de Lignim, qui fait hom- mage à la ville d'Angers d’un tabléau armorial des maires d'Angers. "M. Jullien, l’un des vice-présidents, rappelle que ce | sôir, à sept heures et demie, M. Sudre donnera une Séance de Téléphonie. On entendra également quelques Morceaux chantés par M'e Hugot. M. Libaudière donne lecture d’an mémoire relatif à Panatomie mise à la portée des gens du monde. M. de la Sicotière prend la parole sur la neuvième question intitulée : De l'influence des fermes sur les beaux-arts. M. de la Sicotière étend la question en appliquant leur influence sur la culture des lettres. Leur influence est directe, lorsqu’elles-mêmes s’en oc- cupent. Elle est indirecte autant qu’elles donnent l’impulsion. Les femmes, dit-il, en général, n’ont pas eu à un degré très-élevé l’influence directe, et il en attribue les causes à cette charmante insouciance qui est pour ainsi dire un des attributs de leurs grâces; il pense même que les fem- mes les plus remarquables n’ont que très-péu influé sur les lettres. Elles ne prennent pas généralement l'initiative dans les hauteurs sublimes de l'intelligence ; leur in- fluence ne lui paraît être que de second ordre, elles ont beaucoup plus de délicatesse exquise que de grandeur et de génie ; elles marchent après l’homme. M. de la Sicotière transporte les mêmes considérations dans le domaine de l’art. Quel est le genre musical . dit- il, qu’elles aient créé? aucun; elles exécutent mais n’in- ventent pas; aux femmes le sentiment, à l’homme la pensée. Quant à l'influence indirecte, elle estimmense à ses yeux ; cette influence est due au christianisme, qui a moralement doublé l'humanité en élevant la femme à la hauteur de l’homme, ce qui n’avait pas existé dans 92 SEANCES GÉNÉRALES. les civilisations antiques, où la femme n’était guère qu’une esclave destinée à ses plaisirs. M. de la Sicotière appuie ses propositions en citant divers exemples pris dans l’histoire, Par l'élévation des femmes au niveau de l’homme, elles ont acquis une in- fluence personnelle dont il a fait son profit, et c’est en cela que leur influence indirecte a été grande dans les lettres et dans les arts. M. Guinoyseau père fait quelques observations sur celte matière. M. de Falloux prie M. le président de mettre à l’ordre du jour pour mardi prochain la question des parlements. M. le président annonce que M. du Fayel fera des con- férences spéciales, mercredi. jeudi et vendredi prochain, à trois heures de l’après-midi, sur l’influence des fem- mes; il invite les membres de l’assemblée à y assister. re À EXCURSION DU CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE À NANTES, LE 9 SEPTEMBRE 1843. Le Congrès scientifique de France, ayant à sa tête sou président , ses quatre vice-présidents et ses quatre secrétaires-généraux , de même que la majeure partie des présidents et secrétaires des sections, a quitté Angers à six heures du matin , pour faire sa visite à la ville de Nantes, qui partage toujours avec tant de sympathie les mêmes pensées et les mêmes affections. ÿ SÉANCES GÉNÉRALES. 93 Le bateau à vapeur le Courrier n° 1, gréé spéciale- ment et pavoisé des couleurs des diverses nations repré- sentées au Congrés, portait la savante tribu. Un arc-en- ciel brillant s'élevait à l’horizon , et le ciel , chargé de nuages qui s’accumulaient , srésagesit un orage qui n’a pas tardé à éclater solennellement. Déjà les sections du Congrés étaient en séance , et leurs travaux se sont continués au milieu des flots qui les portaient à Nantes. Arrivé à la hauteur de Saint-Florent, le Courrier s’est arrêté, et une heure a été donnée au pélerinage sur le plateau où le christianisme planta pour la première fois dans nos contrées la croix sous laquelle, en 1793 un de ses enfants, s’absolvant des guerres civiles par l’héroïsme qui pardonne à ses ennemis , mourut en criant: Grâce aux prisonniers ! L’immense horizon au milieu duquel coule majestueu- sement le fleuve a fait une grande impression sur les savants voyageurs , et c’est avec un recueillement pro- fond qu’ils ont rendu hommage aux mânes de Bonchamps et au génie de l’artiste qui a reproduit les traits du géné- ral vendéen, et les a élevés à l'expression de son immor- telle agonie. A dix heures, le voyage s’est continué vers Nantes, où le Gongrés a abordé à une heure , et a été reçu par des délégués de la Société royale académique, de la Société industrielle, de celle des beaux-arts et dela Société d'hor- ticulture, Conduites à l’Hôtel-de-Ville, les sections s’y sont ins- tallées, et ont continué leurs travaux. 94 SÉANCES GÉNÉRALES, 7 Neuvième séance générale, 9 septembre 1843, TENUE À NANTES, À TROIS HEURES DE L'APRÈS-MIDI, DANS LA GRANDE SALLE DE L'HÔT£L-DE-VILLE. M. de Las Cases, assisté de MM. Halgan, Palois, Cuis- sart et Neveu-Dérotrie , présidents des Sociétés acadé- miques de Nantes , ainsi que des secrétaires-généraux, ouvre la séance. Le procès-verbal est lu et adopté. M. Ferdinand Favre, maire de Nantes, sur l'invitation du président, prend place au bureau. La lecture des procès-verbaux dessectionsest remise, La correspondance fournit : 1° Antiquités scandinaves, par Pierre Victor, 4 vol. suivi d’un appendice. 2° Essai sur la statistique agricole de la Loire-Infé- rieure, 1843. 3° Statistique des os au point de vue de Ja chimie, des arts et de l’agriculture, par M. J. Bertin, chimiste de Nantes. 4 Du régime cellulaire préventif, ete., par M. Dou- blet de Bois-Thibault, ouvrage couronné par la Socièlé de la morale chrétienne. 5° Agriculture de l'Ouest de la France, revue trimes- trielle , par M. Jules Rieffel , tome 2 , janvier , février. mars 1843. Idem. Mois d'avril, mai et juin. 6° Agriculture de l'Ouest de la France, tome 3, par M. Jules Rieffel. 7° Weillées villageoises où Entretiens de l’agriculture moderne, par M. E.-J.-A. Neveu-Dérotrie. 8 Essai historique et statistique de la commune de SÉANCES GÉNÉRALES. 95 Sautron, canton de la Chapelle-sur-Erdre, arrondisse- ment de Nantes, 1843, par M. Philippe Beaulieu. 9° Dissertation sur les jardins anglais et sur l’inven- tion réclamée par l'Italie , tradait de l'italien d'Hippo- _Jyte Piodamonte, par M. Philippe Beaulieu. M. Puvis lit un mémoire tendant à ce qu’un ministère spécial d'agriculture soit créé en France. . Gette lecture est entendue avee beaucoup d'intérêt. M. Jullien (de Paris) déclare adhérer aux observa- . tions de M. Puvis, et s'attache à prouver qu'il serait heureux que le Congrès prit, dans la ville de Nantes même. l'initiative auprès de qui de droit , d’un vœu tendant à la création d’un ministère spécial d’agricul- ture. La proposition est adoptée à l’unanimité, sur les obser- yations de MM. Jullien et de Sevret fils. Diverses questions qui avaient été posées par des membres des académies de Nantes sont à l’ordre du jour. Mais comme personne ne se présente pour les dis- cuter, elles sont remises à demain, sur f’observation de M. Richelet. M, Charies Ernoult entre en matière sur la 21° ques- tion, section des beaux-arts. « Le daguerréotype, dit-il, est une admirable inven- tion, mais quel que soit son mérite, il lui paraît encore . être le premier mot d’une science , qui ne peut manquer d'être féconde en bons résultats,» Puis examinant successivement les inventions qui ont . pour but la reproduction des sculptures et des statues, il mentionne les progrès obtenus depuis Le tour à portraits … jusqu’à la machine de M, Achille Colas. À l’aide de cette ingénieuse machine, on est arrivé à reproduire fidèlement les plus beaux modèles de la sculp- ture antique , notamment la Vénus de Milo, Il fait judi- cieusement observer que ces reproductions ne sont pas 96 SÉANCES GÉNÉRALES, de l’art proprement dit, mais il en signale l'utilité pour répandre de beaux modèles dans les salons les plus mo- destes: le goût , le bon goût régnerait davantage. Cette improvisation est très-favorablement accueillie. Nous regrettons de ne pouvoir en reproduire tous les développements. M. Robinet , aux judicieuses observations de M, Er- noult, ajoute que M. Colas emploie des femmes dans ses travaux, ce qui sous ce rapport est un acte continuel de philanthropie. M. Ernoult fait une proposition qui sera soumise au bureau central avant d’être mise aux voix ; elle est ainsi conçue : « Le Congrès a entendu avec intérêt l’exposé du pro- cèdé de M. Achille Colas, pour la reproduction des sta- tues , et il s’associe à l’opinion émise par M. Ernoult sur le mérite de cette invention. » M. Goguel prend la parole sur la 14° question, 5° sec- tion (linguistique). Il nous apprend qu’en Allemagne on n’admet généra- lement pas l’internat, mais il existe en Italie. En France, la question de l’internat est résolue. Ce mode d'éducation est général ; les collèges épiscopaux admettent également le régime de l’internat. On a admis la liberté de l’enseignement dans les écoles d'instruction primaire , et tout porte à croire qu'il en sera de même pour l'instruction secondaire , suivant les promesses faites en juillet 1830. Cependant l’État doit conserver sa prérogative et ne pas abandonner l’enseignement ; mais dans quelles li- mites doit-il placer la liberté de l’enseignement ? ici naît la difficulté ; il faut distinguer l’éducation et l’instruc- tion. L'Université remplit-elle les devoirs exigés dans ces deux conditions ? SÉANCES GÉNÉRALES. JA 1 Jés'avis sent partagés. 7 © M. Goguel pense qu’il faut pesticat accorder à la. famille , et ses conclusions sont favorables à l’établisse- ment ds externats; par Ce moyen, l'éducation reste aux . mains des pères FA famille et l'instruction demeure à VUniversité. * Il entre dans quelques détails sur Université Dapo- léonienne qui avait mission de faire uniquement des _ citoyens: l'unité militaire avait besoin alors de ce geure d'éducation , mais il n’en est plus ainsi de nos jours. Nos häbitudes pacifiques s’en éloignent . et voilà pour- quoi la liberté de l’enseignement est réclamée de toutes parts. ‘Cette improvisation est couverte d’applaudissements. "M. Lecerf partage l'opinion de M. Goguel sur divers points, mais il craint de voir des mécomples dans la sup- pression des internats. I craint aussi de voir tomber l'instruction dans le domaine de la spéculation, si l’on admet la liberté des pensionnats particuliers, et il pense que les collèges uni- versitaires n’ont pas cet inconvémient FL même degré du moins. M. Legeard monte à la tribune et énonce ot idées en émettant le vœu que l'instruction religieuse soil ME davantage dans les collèges. Le secrétaire donne lecture de l'arrêté suivant : "« La commission permanente , réunie, a décidé que He sections des sciences naturelles, physiques et mathé- natiques , se joïndront à la section d'agriculture et À trie” afin de n’en former qu’une seule. En consé- … quence, M. de la Fontenelle a été chargé de la prési- _deñce et M. Robinet d2 la vice-présidence. » "mr: Halgan renouvelle l invitation faite au Congrès de sérendre, à sept heures, ce soir, à la salle Graslin, où il sera Ce par les quatre académies nantaises. Ensuite u I. 7 ‘ 98 SÉANCES GÉNÉRALES. il établit l’ordre du jour du lendemain qui sera affiché à la porte, La séance est levée. <>" © © © —— SÉANCE DE RÉCEPTION DU CONGRÈS SCIENTIFIQUE A NANTES. Le conseil municipal de Nantes, sur la proposition de M. le maire, ayant mis avec empressement à la disposi- tion de la Société académique les fonds nécessaires pour solenniser dignement le séjour du Congrès à Nantes ; dans ce même but, la Société des beaux-arts, la Société indus- trielle et la Sociètè d’horticulture , ayant réuni leurs efforts à ceux de la Société académique , une séance solennelle de réception avait élé préparée à la salle Graslin. hés ‘ Le samedi 9 novembre, à sept heures du soir, le théâtre, transformé en un magnifique salon, resplen- dissait de lumière, et un immense et riche bureau y était préparé, Une société d'élite remplissait le parterre et les loges : toutes les classes de la ville de Nantes y étaient représentées. Bientôt MM. les délégués des socié- tés nantaises, suivis des membres du bureau central du Congrès, et accompagnés de M. le président de la cour d'assises , de M. le maréchal-de-camp commandant le département, de M. le maire de Nantes et d’autres fonc- tionnaires , ont pris place, et une musique militaire, remarquable par son inspiration et l'exécution la plus parfaite, a fait entendre les airs de nos grands maîtres. M.Halgan, président de la Société royale académique, ayant à sa droite M. le comte de Las Cases, président du Congrès scientifique, a ouvert la séance par le discours suivant : l a SÉANCES GÉNÉRALES. 99 ETS NP TRIER 4 pente € Messieurs, » Deux lois parallèles l’une à Pantre gouvernent le monde : l’une d’elles est la loi de concentration , l’autre la loi d'expansion. 15 Ges lois sont reconnues par le chiiisie et le niatura- liste, dans la composition des corps; elles sont écrites en traits de feu dans la voûte céleste , où la force enéore in- calculée qui pousse les astres dans l’espace , ést balancée * par lattraction qui les retient dans le même orbite sans cesse parcouru. ‘» Cette double loi se reproduit dans les phénomènes de Ja vie; chaque soufile qui sort de notre poitrine, cha- que battement de notre cœur en apporte avec lui une nou- velle preuve. "» Et si nous nous élevons jusqu’à l'examen de l’homme considéré comine intelligence, nous verrons cetle dopli- cité se reproduire ; F RUE a recu, én effet, du créateur de son être deux dons principaux : la pensée et l’action. » Il a semblé jusqu’à présent que chacun ait voulu prendre sa part distincte dans cet héritage commun de F humanité : à l’homme d'état, au guerrier, à l'industriel enfin , semblait appartenir tout ce qui est mouvement , résultat actuel, action extérieure d’un homme sur les au- FA A l’ami de la science étaient réservées la réflexion solitaire, la contemplation du vrai en lui-même, et quel- quefois ces illuminations soudaines qui en sont la plus sublime récompense, ces découvertes d’un seul esprit qui honorent le genre humain tout entier, et qui imrmortali- sent] le nom de leur auteur, _» Plus nous remontons à travers les âges , plus n nous voyons cette séparation marquée entre les hommes de science et les hommes d’action, Qu’était , en effet , la Science dans les premiers temps historiques ? Des débris 100 SÉANCES GÉNÉRALES. plus ou moins confus des traditions primitives, conservés au fond des sanctuaires , et révélés seulement à quelques élus , sous le sceau des épreuves de l'initiation et sous l'engagement d’un silence absolu. Il en était de même chez nos ancêtres : les monuments de la science druidi- que consistaient en de longs poëmes qu’il n’était permis de confier qu’à la mémoire seule des aspirants au minis- tère sacré. » Puis, en nous rapprochant de nos temps, nous voyons la science se mêler de plus en plus aux affaires et au mou- vement du monde extérieur. La statue d’Isis cesse d’être éternellement voilée ; la même main manie tour à tour Pépée et la plume; et enfin, aujourd’hui plus que jamais, la science et l’action tendent à se réunir , j'allais presque dire à se confondre. Tous les arts utiles, même les plus humbles, se pratiquent maintenant non d’après une aveugle routine , mais d’après des théories habilement calculées ; la science, de son côté, est avide de faits et de réalisation , elle est surtout avide de communicalion. Celui qui a eu le bonheur de lui faire faire quelques pas , de découvrir quelque vérité nouvelle, croirait n’avoir rien fait , s’il se complaisait solitairement dans son œuvre. Dans le champ de la science, du moins, l'esprit de frater- nité règne : rien n’est à un seul , tout est à tous. » C’est vous surtout , Messieurs, qni donnez une noble preuve de celte vérité : vous avez des occupations habi- tuelles et douces , vous les avez abandonnées ; votre fa- mille , vos amis, vous pressaient sans doute de demeurer au foyer accoutumé, vous avez résislé à leurs instances ; vous avez dit un adieu non moins pénible à ces livres souvent relus et compagnons si chers de vos éludes et de vos veilles, empressés que vous étiez de faire jouir les au- tres du fruit de ces veilles et de ces études, En donnant, ilest vrai, vous recevrez, et chacun a apporté son tribut à ce trésor commun où tous viennent s'enrichir ; admi- SEANCES GÉNÉRALES. 401 rable échange d'intelligence à intelligence auquel vous vous êtes livrés avec l’activité du commerçant qui , dans Vardeur du gain , ne s'arrête ni devant les distances ni devant les fatigues, | + : Que l'institution des Congrès scientifiques soit appré- _ ciée par ceux qui en profitent directement , cela ne peut _élonnér personne ; mais il n’en est pas seulement ainsi : votre présence est considérée par les populations comme un événement de haute importance. Les pays que vous devez traverser en les étudiant , s’émeuvent et. se préoc- cupent ; ils sentent qu'ils ont quelque chose à gagner à être mieux connus , et je n’en voudrais d’autres preuves que ce qui s’est passé parmi nous. Votre session était fixée à Angers , ville d'intérieur, ville d’études calmes et sé- rieuses ; votre session eût été incomplète , si vous n’eus- siez pas visilé la capitale commerciale de l’ouest de la France, la ville de Nantes, sœur industrieuse de la savante ville d'Angers. Nous, membres de la Société royale aca- démique ; en vous conviant à venir dans nos murs , nous nous sommes portés fort , hardiment , pour nos conci- Loyens. L’empressement de nos concitoyens a répondu à . notre atlente : la libéralité intelligente de notre adminis- tration municipale a pourvu en même temps aux hon- neurs à rendre aux princes de la famille qui gouverne l'État , et à la réception à faire aux princes de la science. Les sociétés de notre ville, qui se réunissent dans des buts différents, mais tous utiles, se sont empressées autour de nous , et successivement vont nous entretenir de leurs travaux : ainsi, la Société industrielle va vous dire quels ont élé ses efforts et ses succès pour l'amélioration de la classe ouvrière; la Société des beaux-arts vous apprendra quelle influence artistique ses réunions ont eue dans notre pays , elle vous conticra à une exposition préparée par ses soins pour solenniser votre présence dans nos murs ; enfin la Société d’horticulture appellera votre attention 102 SÉANCES GÉNÉRALES, sur une des branches de l’histoire naturelle de nos con- trées qui-excite le plus sûrement l'intérêt de tous. » C'était un vœu depuis longtemps émis par quelques- uns d’entre nous , de voir ces sociétés diverses se réunir un jour dans une séance unique , et former ane sorte d’Anstitut nantais ; voire présence ici, Messieurs, a amené la réalisation de ce désir, et ce rapprochement, que nous désirons voir se renouveler, ne peut que maintenir entre nos sociétés une union bien désirable , et donnera sans doute une nouvelle Rap aux études dont chacune d’elles s’occupe. » D'honorables organes vont s’empresser de meltre suc- cessivement sous vos yeux le but et la direction des tra- vaux Ge ces réunions diverses. » La Société académique est la première appelée à l’ac- complissement de ce devoir : fondée en 1798 , sous le titre d’Institut départemental , elle a toujours continué ses travaux , sauf une assez courle interruption, due à une perséculion mesquine; elle a, dis-je. toujours conti- nué ses travaux dans un esprit de noble indépendance également éloignée de la servilité et de la sédition. » Dans son organisation actuelle , elle est divisée en trois seclions. » La première a pour triple objet de ses recherches et de ses études l’agriculture, le commerce et l’industrie : tout ce qui peut contribuer à la prospérité et à la richesse du pays, rentre donc dans ses attributions. De nombreux mémoires , la créalion de la ferme-modèle de Grand- Jouan , de nombreuses améliorations pratiques ; dont on ne pourrait bien reconnaître l'importance qu’en visitant tous les points de notre département , témoignent haute- ment du soin intelligent avec lequel nos collègues de celte section étudient les diverses parties de la science agricole : par leurs soins , les portions de ce pays si heureusement disposées pour toute espèce de culture , acquièrent une SÉANCES GÉNÉRALES. 103 valeur nouvelle ; et en même temps ces landes nom- breuses , qui faisaient à côté des terres cultivées une & choquante disparate ; se métamorphosent chaque jour, et viennent prouver qu’il n’y a de terres ingrates que pour * les mains inhabiles, Le commerce et l’industrie attirent en même temps et à un degré égal les préoccupations de nos collègues ; ce n’est pas sans raison : Nantes a tou- jours vécu par le commerce ; le plus ancien monument que vous apercevrez dans notre ville , est une inscrip- tion volive au nom de nos marchands et de nos naviga- teurs. » Nantes doit donc son origine comme son existence au commerce, En 1789 , celui de la riche colonie de Saint- Domingue lui était-presque exclusivement dévolu. Depuis 1814 , elle prend une part principale dans la navigation française au-delà du cap de Bonne-Espérance, à Bourbon et dans l'Inde, Toutefois Nantes, subissant la loi du mou- vement actuel, tend à devenir industriel en même temps que commerçant; et qui peut prévoir jusqu’à quel point va se porter ce développement au moment où notre ville va se trouver placée à la tête de cette grande transversale . destinée à unir, par une voie rapide , l’est à l’ouest de la France, et qui, se prolongeant près des bords de la Loire, jusqu’à Saint-Nazaire , se terminera là par un vaste port Ouvert aux communications transatlantiques ? » Cetexposé rapide vous indique assez quel vaste champ est ouvert aux méditations de nos collègues de la première section de la Société académique. » Les études auxquelles se livrent les membres de notre seconde section, sont Loutés spéciales (1); leur objet est (1) La Section de médecine de notre Société avait déjà provoqué la tenue à Nantes d’un Cougrès scientifique , sur une question dans . le domaine de ses études habituelles, Cette question, du plus’haut in- térêt pratique, tenait les esprits divisés. En 1835, la Section invita toutes les Sociétés de médecine et tous les médecins de France à se 104 SÉANCES GÉNÉRALES. la médecine et les sciences accessoires qui s’y rattachent. Si partout la nature humaine est en proie à la souffrance, partout aussi une lutte énergique s'établit entre cette souf- france et la science qui se voue à la combattre. Nantes, par des circonstances diverses , et notamment par ses communications maritimes, offre à l’attention des méde- cins un vaste champ d’observations. Une école primaire de médecine est établie dans ses:murs , et de nombreux élèves suivent avec succès le cours de savants professeurs, que nous comptons tous parmi nos collègues. » L’Hôtel-Dieu de notre ville laisse à désirer, quant à la disposition des localités; mais cet inconvénient grave, auquel remède sera porté un jour, est combattu, du moins autant que possible , par les soins éclairés donnés aux malades, Nous appellerons, d’un autre côlé, avec un juste orgueil , vos regards sur le monument que nous avons élevé, aux portes de notre ville , à l’humanité souffrante : l'asile des vieillards et des aliénés, dit l’Hôpital-Général. Nous aimerons à vous faire parcourir ces constructions grandioses, ces salles si propres et si bien aérées ; et, par dessus Lout, à vous faire remarquer cetle sagesse de direc- tion qui semble là tout animer, et qui , sans terreur et sans contrainte, dirige toutes les actions de ces pauvres déshérités de l'intelligence que des efforts prudents et long- temps prolongés rendent chaque jour à leurs familles et à la vie intellectuelle. faire représenter en un Congrès, soit par des délégués, soît par des mémoires sur l’objet en discussion. Cet appel fut entendu : un Con- grès, dont les longues séances se contiuuèrent pendant cinq jowrs, fut ouvert à Nantes, dans le mois de juillet, et la Section eut l’hon- _neur et le mérite de décider l'opinion dans le sens «le ses propres con- victions. Toujours active et persévérante, elle publie, depuis dix-huit ans, un journal exclusivement alimenté par ses membres. On y trou- vera un jour de précieux documents pour la statistique medicale de notre ville. te SÉANCES GÉNÉRALES. 105 » Notre troisième section est celle dite des Lettres , Sciences et Arts: Son domaine est vaste et sa part est grande. Ainsi, dans cette circonstance , si notre première et notre seconde section se trouvent en relation d’objets d’études avec la deuxième.et la troisième section du Con- grès ;, c’est dans cette section des lettres , sciences et arts de notre Société que tous les autres membres du Congrès trouveront cette sympathie que tend à établir la confor- mité des études habituelles. » Quelques-uns d’entre nous feront connaître aux mem- bres de votre première section les richesses minéralogiques de notre Musée d’histoire naturelle et les collections par- ticulières ouvertes à leurs intelligentes investigations. D’autres s’empareront des membres de votre section d'histoire , et les conduiront sous les voûtes de notre an- cienne cathédrale , auprès du tombeau de notre dernier duc, et dans les murs de notre vieux château. Geux d’entre vous qui sé sont inscrits dans la section de litté- _rature et-beaux-arts, seront eniraînés et vers notre Bibliothèque et vers notre Musée de peinture. » Enfin un observatoire nautique pourra attirer l’atten- tion des savants membres dé votre sixième seclion , et ils aimeront à étudier cette application si utile de la science astronomique , la navigation , art indispensable pour les communications lointaines , et qui, comme par un su- blime symbole, enseigne à l’homme que c’est en regar- dant le ciel qu'il peut apprendre à bien diriger sa route sur la terre. …» Tel.est, Messieurs , l’ensemble de nos études : il ne m'appartient pas de vous prouver combien nous cher- chons à remplir la tâche que nous nous sommes imposée, en. vous citant les travaux et les noms des membres qui peuvent assister à celte séance : léur modestie s’y oppo- serait, et m'imposerait la loi du silence ; mais du moms la liste des membres que la mort nous a enlevés ne m'est 106 SÉANCES GÉNÉRALES. point interdite, et, en y prenant au hasard quelques noms, parmi d’autres non moins recommandables, je rappellerai aux théologiens le nom de notre illustre évêque ; M. Du- voisin ; aux philosophes et économistes, ceux de Richer, Sicard , Bigot de Morogues, Daru , Athénas, Dobrée, Thomine , Soubzmain et Louis Say; aux jurisconsultes, ceux dé Gédouin , Auguste Lorieux , Saulnier dé la Pine- lais et Boulay-Paty ; les mathématiciens , les médecins , trouveront sur ces mêmes listes les noms de Fourcroy, Monge, Le Boyer, Bacqua, Freteau, Laënnec et Esquirol ; enfin les antiquaires , les littérateurs , les artistes , y ren- conireront des auteurs souvent relus ou consultés par eux : de Penhouët , Richard jeune , Dejoux , Kerivalant , Blanchard de la Musse, Francais (de Nantes), Alexandre Duval, Parny, Le Cadre, Élisa Mercœur, Mosneron , Pec- cot, Lemot et Gacault. » Voilà, Messieurs, quelques-uns des écrivains où hom- mes illustres que la Société royale académique de la Loire- Inférieure s’honore d’avoir comptés dans son sein. Hélas! pourquoi faut-il qu’un événement récent et déplorable me donne le droit d'ajouter un nom de plus à cette liste de noms regrettés ? Il y a un mois à peine que nous comp- tions parmi nous un de ces hommes dont l’activité inces- sante suflit pour animer une société tout entière , dont l'intelligence est assez vaste pour ne rester étrangère à la science sous aucun de ses aspects , et dont le cœur, plus grand encore , répandait sans cesse autour de lui une affection qu’il savait si bien inspirer. L’un des fondateurs du Lycée armoricain ; lun des créateurs de la Société industrielle , il terminait la série de ses nombreux et im- porlants ouvrages par un livre qui restera comme le monu- ment le plus complet de notre histoire locale : {& Com- mune et la Milice de Nantes. Aujourd’hui, cet homme si respecté, ce collègue si instruit, et surtout cet ami si cher a disparu... Pardonnez-nous , Messieurs, si, dans une = | SÉANCES GÉNÉRALES, 127 séance. où. nous ne devrions ressentir que la satisfaction que nous inspiré l’intérêt que vous voulez bien) prendre à nos travaux ; pardonnez-nous si nous venons mêler à de tels,sentiments des impressions bien pénibles, et si le nom de Game Mezxiner vient se placer sur nos lèvres et émouvoir des cœurs pénétrés, encore d’une récente dou- leur.; mais ce nom devait trouver ici sa place. Mellinet , toujours l’un des premiers pour toute bonne inspiration , “avait. été l’un des provocateurs de l’invitation qui vous à élé adressée de visiter notre cité; il-avait été parmi nous l'un des premiers adhérents au Congrès : que son nom reste donc placé, sur vos listes; il les honorera, Messiears, et qu’à son défaut , ses ouvrages vous servent de guide pour acquérir la connaissance d'un pays qu'ilavait étudié avec une persistance si intelligente et si dévouée. » Quelques regrets pourtant que nous inspire le passé, qu ils ne nous dE nbE né point de porter nos regards vers l'avenir; l’avenir pour nous est obscur sans dont 1 comme pour tout homme mortel , mais. .cetie ;obscurité semble s’éclairer, de quelques rayons d’espérance. Les : rapports d'homme à homme: se facilitent ; et l’extrémité de. l’Europe est moins éloignée-de nous que les frontières * de la France ne l’étaient peut-être il y a un siècle. La connaissance mutuelle des langues vivantes se répand et . devient dans tous les pays une dd conditions nécessaires de toute: éducation forte ; et sk, sous ce rapport, nous, Français, sommes moins avancés que les habitants de cer- taines autres contrées ; la faute en est peut-être moins à nous qu’à la prééminence conquise par notre langue ; qui esbrdevenue la langue commune ‘de. la diplomatie , du _ commerce et de la science. Lesraces diverses de l’huma- nilé ont peut-être aujourd’hui plus que jamais le senti- . ment de leur commune origine ; et s’élancent l’une vers Vautre, non plus pour s’entre-déchirer, mais pour se ser- rer d’un embrassement fraternel etifaire des échanges de 108 SEANCES GÉNÉRALES. bien-être et de savoir. Et que l’on ne dise pas pour cela que le patriotisme s'éteint ; loin de là, Messieurs, il s’é- claire : la morale pour les nations n’est pas autre que pour les individus , et elles aussi sont soumises à cette grande loi philosophique et évangélique d’unir toujours Vamour des autres à amour de soi-même. » Un seul exemple, Messieurs, suffira pour vous démon- trer les progrès immenses faits depuis peu d’années par les peuples dans cette voie sainte et sublime de l’union : et le savant président que vous avez placé à la tête du Congrès, a vu ses jeunes années aflligées du spectacle déplorable du plus grand homme de nos âges modernes , retenu prisonnier après la guerre finie et contre la foi de l'hospitalité ; il Pa vu livré à des tortures lentement et froidement infligées , dont la mort seule fut le terme : et c’est alors que le nom qu’il porte devint de nouveau illustre par le plus noble des dévouements , comme il l'était déjà par la science. Eh bien ! Messieurs, quelques années à peine se sont écoulées, et le souvenir de ce grand altentat contre le droit des gens est maudit en Aseb- terre non moins qu’en France; les restes du grand exilé ont cessé de reposer dans la terre étrangère , et aujour- d’hui même la reine de la Grande-Bretagne traverse la mer pour venir presser d’une main amie la main de notre roi, pour effacer autant que possible ces souvenirs d’hos- tilité héréditaire qui, comme un vieux levain, fermentent parfois encore au fond des cœurs. » À vous, Messieurs, est réservée une grande part dans ce travail d’unité qui se manifeste de tous côtés : de même que , dans les âges de foi, les pèlerins , réunis en troupes nombreuses, allaient, suivis des bénédictions des nations, à la conquête du pays où la vérité éternelle était naguère apparue ; de même aujourd’hui , pèlerins de la science , vous vous réunissez pour marcher à la conquête de la vérité scientifique. Que les encouragements ne vous man- SÉANCES GÉNÉRALES. 109 quent pas dans cette œuvre difficile , et que le jour où vous passez dans nos villes, soit pour elles un jour mémo- rable et glorieux. » M. le docteur Palois, vice-président de la Société in- dustrielle de Nantes , a retracé ainsi l’origine et les pro- grès de cette institution : « Messieurs, . » L'association que j'ai l’honneur de représenter dans cette solennité , est une œuvre de biénfaisance ayant pour but l’amélioration physique, intellectuelle et morale de la classe ouvrière. — La Société industrielle, en se pré- sentant devant une réunion imposante de savants distin- gués , d'hommes graves et éclairés , soumet à leur appré- ciation la tendance, les moyens et les résultats de son institution, en même temps qu’elle fait un appel moral à la sympathie naturelle aux cœurs généreux pour les souf- frances de l’humanité. » C’est à ce double titre, Messieurs , que je sollicite de mon respectable auditoire quelques moments d’attention pour Îe sujet que je me propose de traiter, et une indul- -gence bienveillante pour les imperfections de mon travail. * » La situation précaire des classes laborienses , dans les diverses phases de leur existence, avait depuis déjà longtemps appelé la sollicitude des amis de l’humanité , et fait le sujet des recherches et des études des économistes les plus distingués. Les faits nombreux que l'expérience - leur a révélés, assignent plusieurs causes à la misère des ouvriers. Ils placent au premier rang, l'ignorance, l’ab- sence ou l'oubli des principes religieux , la dissipation et l'intempérance. Les causes qui sont indépendantes de la volonté des malheureux, et à l’action desquelles ils ne peuvent que difficilement se soustraire, comprennent les interruptions forcées du travail , soit par l'effet des intem- 110 SÉANCES GÉNÉRALES. péries des saisons , soit par suite de l’éxcès dé la produc- tion sur les moyens d'écoulement des produits ; la cherté des objets de première nécessité, comparée à la quotité des salaires; enfin les accidents et les maladies ordinaires où dépendants de l’exercicé de certaines professions. : » Dans toutes les cités populeuses , et à Nantes en par- ticulier, la sollicitude paternelle du gouvernement , des autorilés du département et de la commune; les asso- ciations de bienfaisance tant civiles que religieuses, ont donné, depuis quelques années surtout, une extension considérable à Pinstrüction gratuite destinée aux enfants pauvres el aux ouvriers adultes. » Mais, depuis déjà longtemps, plusieurs enfants étaient relirés des écoles par leurs parents, bien avant d’avoir terminé la première partie de leurs études , ef sans avoir recu l'instruction morale et religieuse, Livrés ensuite à eux-mêmes , ou placés de bonne heure, sans guide, dans les fabriques ou en apprentissage chez des maîtres , ils ne recevaient plus aucune instruction, et étaient exposés, par la contagion des mauvais exémples, à contracter des habitudes vicieuses et à se dépraver complétement. » Get état, si fâcheux pour l’avenir des enfants pauvres de notre ville , avait justement alarmé des hommes bien- faisants et éclairés. Ils formèrent le projet d’une associa- tion , sous le titre de Société industrielle. » Ce projet fut adopté avec chaleur par un grand nom- bre d'hommes recommandables. La première pensée de cetle instilution élait d'encourager à Nantes les arts in- dustriels dans tous les genres, de faire connaître et de propager les découvertes et les bonnes méthodes, de venir au secours des ouvriers malheureux , et de répandre le bienfait de l'instruction sur eux et particulièrement sur leurs enfants. — La Société nouvelle commencait à peine à se constituer, qu’elle fut forcée de réduire le but et la SÉANCES GÉNÉRALES, 414 _ lettre de son programme; pour s'occuper uniquement à soulager les besoins pressants des classes laborieuses , qui étaient menacées d’une grande détresse par le manque d'ouvrage et la cherté des subsistances , à l’entrée de la saison rigoureuse. Elle dut appliquer à cette œuvre pie le’produit de souscriptions volontaires et les allocations considérables accordées par l'administration municipale , . ainsi-que les secours donnés à cet effet par le ministère, à la sollicitation d’un de nos fondateurs , M. Robineau de Bougon , qui a été longtemps président de la Société , alors à Paris. | » En 1851, la Société industriellé put s’occuper de Pinstruction des enfants pauvres. Elle en maintint un grand nombre par des secours dans les écoles primaires : des professeurs à titre gratuit s’associèrent à ses vues de bienfaisance ; mais ce ne fut qu'au commencement de 1852 que fut établi régulièrement le système général de Pinstitution. » La première commission de la Socicté industrielle se charge de chercher dans les écoles gratuites des enfants a el studieux, de les y maintenir, pour empêcher qu’ Is D ’en sortent trop tôt. » La deuxième commission a pour objet de placer des enfants en apprentissage chez des maîtres, au sortir des x écoles et après leur première ceommunion;.de les admet- ; tre, après un examen de capacité, dans une école spé- ciale qu'elle a créée ,: où ils reçoivent une instruction D professionnelle. » L’ enseignement de cette école se compose de leçons d'écriture, ‘d’arithmétique , de géométrie appliquée, de dessin linéaire et. de grammaire francaise. — Dans la Marine année, deux professeurs étrangers à l’école, M. Leborgne et Patissier donnent ; à titre bienveillant et gratuit, Hh lecons de tenue des (rar qui complètent 14 : . SÉANCES GÉNÉRALES, l'instruction. Ges cours ont lieu pendant deux heures, dès le matin, avec le consentement obligé des maîtres d'apprentissage. — La Société industrielle, par l'organe de sa seconde commission , surveille ses élèves à l’école et chez les maîtres , s’assure de leur moralité, et fait exé- cuter sévèrement les clauses du contrat. Elle leur donne des secours en subsistances et quelquefois en vêtements , et de plus une allocation mensuelle de 3 francs, sous la condition que la moitié de cette somme sera placée par l'élève lui-même à la caisse d’épargnes. »_À la fin de chaque année scolaire, en séance publique et solennelle, à l'Hôtel-de-Ville, en présence des autorités civiles et militaires , de M.gr l’évêque , des membres du clergé et d’un nombreux concours d’autres personnes re- commandables , la Société décerne des prix à ceux de ses élèves qui se sont distingués par leur bonne conduite, leur assiduité aux cours et leurs progrès. — À certaines années , elle a offert à l’assemblée le tableau des actes de vertu et de dévouement qui avaient été exercés, soit dans la ville, soit dans les diverses communes du département, pour attirer à leurs auteurs la rémunération morale qu'ils méritaient; elle a eu plusieurs fois le bonheur d’appliquer à récompenser ces actes recommandables la médaille d’or, à l’efligie de Sa Majesté, qu’elle tenait, ainsi que nombre d’autres bienfaits, de la munificence de S. A. R. M.gr le duc d'Orléans, son auguste protecteur et prési- dent honoraire , dont elle déplore la perte, — C’est aussi dans cette solennité que la Société industrielle décerne aux ouvriers sortis de son école et ayant travaillé pendant trois ans dans les ateliers, et pouvant justifier de la pos- session de 30 francs au moins placés à la caisse d’épar- gnes, un diplôme spécial, qui atteste, dans des termes honorables , la probité, la bonne conduite de ces ou- vriers, tant à l’école que dans les ateliers; les progrès qu’ils ont faits et leur habileté dans leur profession. — SÉANCES GÉNÉRALES. 113 Cette pièce officielle leur a toujours servi d’une honorable recommandalion dans leurs voyages. ..» Gomme il arrive au plus grand nombre des institu- tions nouvelles et encore peu connues, l’école des ap- prentis, à son début, a élé accusée de EE donner à ses-élèves une instruction {trop étendue, capable d’exciter chez eux une vanité précoce qui leur ferait désirer d’en- trer dans une carrière plus élevée que celle où les place tout naturellement la condition sociale de leurs parents ; mais le vénérable instituteur qui avait créé cette école et la dirigeait depuis sa fondation avec un zèle éclairé et une persévérance admirable, avait, ainsi que son honorable successeur, bien senti que l’enseignement destiné à des ouvriers , ne devait pas leur inspirer des prétentions pro- pres à les détourner des professions mécaniques : ils se sont particulièrement attachés à leur inspirer le goût et l'amour du travail, qui est la grande loi de lindividu , de la famille et de l’association ; la modération et la tempé- rance, — Îl est sorti de l’école d’apprentis un grand nom- bre d'ouvriers , dont plusieurs sont devenus habiles et se sont fait tous remarquer par leur bonne conduite , leur attachement à leurs familles , leurs principes religieux, et par leur reconnaissance pour l'institution. — Aussi sont- ils généralement recherchés par les chefs d’industrie. — Notre école a été visitée avec un vif intérêt, dans ses dé- tails et aux heures des classes, par M.gr l'évêque et des membres du clergé, M. le préfet du département , M. le _ maire de Nantes et ses adjoints , @lusieurs étrangers de . marque, et notamment par des inspecteurs et des chefs de l'instruction publique. Le respectable directeur a reçu | de ces juges compétents des témoignages unanimes de - salisfaction sur l’enseignement et sa direction. Des écri- 20 ARR IEEE dont les ouvrages ont été couron- és par l’académie des sciences tolé de l'institut, ont Dis 8 114 SÉANCES GÉNÉRALES, donné à notre école des éloges mag As dans des notices bien étendues (1). ; » L imprévoyance d’un grand nombre d'ouvriers est un fait notoire qui porte ses fruits. L'homme de travail, s'il vitau jour le.jour, sans plan, sans règle et sans calcul, se prépare infailliblement la détresse: car, ne s’occuper que du présent , c’est le moyen de perdre l’avenir, — En général, les ouvriers se reposent sur la ressource dés hô- pitaux et des hospices , pour le temps où, devenus vieux, ils ne pourront plus travailler pour gagner lear vie. Cette décourageante perspective produit encore un effet bien fâcheux, car elle semble dégager les enfants de Pobliga- tion de nourrir leurs parents dans leurs vieux jours, et tend ainsi à détruire un des devoirs les plus saints impo- sés à l’homme par la religion et la nature : à la vérité, les chômages forcés et l’abaissement des salaires , à certaines époques , sont trop malheureusement des obstacles à l’é- conomie, qui serait si nécessaire aux ouvriers; mais l’en- nemi le plus direct et le plus implacable dont ils ent à se défendre, c’est l’intempérance et surtout l’ivrognerie , à laquelle quelques-uns se livrent sans mesure, el qui les plonge dans un ‘état presque continuel d’abrutissement. Dans les grandes villes manufacturières , ce vice dégradant est la cause la plus directe du malheur des familles : il crée des habitudes de dépense , amène la suspension et l'incapacité du travail , la parrsse , et par suite une misère affreuse et coupable. Si les maladies causées par l’excès du travail, et quelqufois par l’intempérance, viennent assaillir l’ouvrier, elles ajoutent à sa misère et l’accrois- sent inévitablement. — S'il vit seul , il a la ressource des hôpitaux , et trouve, dans ces asiles inslitués par une piété (1) Eugène Buret : de la Misére des classes ouvrières en Frante vien Angleterre. — M, Frégier: des Classes dangereuses dans les grandes villes. + SÉANCES GÉNÉRALES. 115 bienfaisante , des secours dont le prive son dénûment ; mais il arrive trop souvent que , même dans les villes po- puleuses le mieux pourvues d’établissements charitables, il est impossible de recevoir tous les indigents malades , et - qu’on est forcé d’en refuser ou d’en ajourner un grand nombre. Parmi les vieillards et les infirmes; plusieurs n'obtiennent l’adinission dans les hospices qu'après de longs délais et presque à:la fin de leur carrière, — Toutes ces considérations donnent une grande valeur à l’inetitu- tion des secours à domicile et des sociétés de secours mutuels pour l’ouyrier vivant parmi ses parents, — L’ex- périence a démontré combien il est'utile et même néces- saire , dans l’exereice de la bienfaisance , de respecter Îes liens de la famille. La vie domestique est appelée à jouer un rôle important dans les destinées de l’homme. C’est au sein d’une famille qu’il trouve de frégnentes oceasions d’exercer les devoirs pour l’accomplissement desquels Dieu l’a placé dans ce monde, et de pratiquer la vertu par laf- fection et.le respect des enfants pour leurs parents ; par la tendresse active et surveillante des parents pour leurs enfants. — La puissance paternelle confère à l’homme, qui en comprend l’origine et le but , une dignité naturelle et simple; elle lui impose l’obligation de servir de modèle à ceux qu’il a la mission de gaider. — Le respect filial inspire de bonne heure et sans efforts , aux enfants, les - dispositions à l’obéissance , et leur en fait contracter faci- - lement l'habitude. La notion de l'autorité , cette garantie si nécessaire à l’ordre moral dans fa société humaine , et que tant de causes tendent à affaiblir au temps actuel, se montre dans toute sa puissance , lorsqu’elle est fortifiée par? amour, he confiance et la gratitude. » #1 |eAIssE DE SECOURS MUTUELS. 4 € La Sariué industrielle a créé une caisse dé: secours mutuels qu’elle patronise et subventionne. 116! SÉANCES GÉNÉRALES. » Les essais d'association appliqués au soulagement de la misère, sont reconnus par l’expérience comme le moyen le plus efficace pour améliorer le sort des classes läborieuses. L'esprit d’association prend sa source dans le christianisme , et se révèle dans les sociétés de pré- voyance et de secours mutuels, Elles sont conformes, par leur institution , au véritable esprit de charité fraternelle ; elles ne sont pas seulement utiles, en secourant leurs membres, mais encore en leur faisant contracter des ha- bitudes d'ordre et d'économie. Se suflire à soi-même est un privilége refusé au plus grand nombre : l’homme qui a besoin d’un appui le cherche dans son semblable, et recoit sans rougir, comme une part qui lui appartient , le secours de l’association dans laquelle il a contribué, de ses économies , au bien de tous. La Société de prévoyance constitue une sorte de confraternité; c’est un lien qui rapproche les hommes , qui confond leurs intérêts et les rend solidaires les uns pour les autres. L'assistance mu- tuelle est un exercice de mutuelle bienveillance; la por- tion de secours dont un sociétaire n’a pas besoin, profite à ses associés, Ces associations sont dignes, par leur but, d’inspirer de l'intérêt ; elles ont quelques droits à la pro- tection et aux éncouragements que les lois accordent à toutes les institutions utiles. » L'esprit d’association-est encore un ressort puissant, un moyen d'action dont on peu tirer un grand parti pour éclairer et moraliser les masses; c’est surtout au moment où les intérêts matériels tendent à usurper le premier rang dans les idées qu’on se forme du bonheur de l’homme sur la terre, où règne cette soif d’ambition et de vanité, celte avidité des richesses , ce besoin des jouissances sen- suelles, dont la contagion menace de gagner toutes les classes de la société humaine, qu’il est désirable de voir se former des associations d'hommes recommandables qui se proposent d'éclairer les hommes de travail sur leurs SÉANCES GÉNÉRALES. 117 devoirs , d'améliorer leur sort en même singe que leur condilion. 5 » Elles auraient aussi la midsionsalatäiré d’éloigner de _lapensée des ouvriers les illusions qui pourraient les agi- ter sans fruit et les dégoûter de leur: modeste destinée ; “telles s’attacheraient à leur faire connaître, non ce qui leur-manque , mais ce qu’ils peuvent espérer de posséder par le travail , par l’ordre et l’économie. » Les chefs d’atelier sont aussi appelés , par leur posi- tion, à exercer sur leurs ouvriers une bien heureuse in- fluence : leur bon esprit leur fera facilement concevoir que leur propre intérêtest identifié avec celui des hommes dont:ils emploient et utilisent le concours ; qu'ils doivent se montrer bienveillants et toujours équitables envers leurs ouvriers, et que, dans toutes les occasions, ils leur donnent de bons exemples. En établissant un régime sage dans leurs ateliers , ils seront conduits, par de hautes pensées morales , à remplir l'obligation qui leur est impo- sée, de servir de guides. à ceux de leurs semblables qui sont placés temporairement dans leur dépendance. -» Ilexiste à Nantes plusieurs sociétés de prévoyance et de secours mutuels , créées et instituées sous des condi- tions diverses. Celle que la Société industrielle a formée et qu’elle patronise, accueille des ouvriers de toutes les . professions. Elle leur procure , dans les cas de maladies, les:soins du médecin et les médicaments ; une: subvention d’un franc par jour, aux conditions, fixées par son règle- ment particulier : en cas de décès, elle fait les frais d’inhumation, : , * » L'association se compose : 7 vil dati 2° De souscriptéurs bienveillants et désintéressés ; .».2° D'ouvriers payant une cotisation mensuelle déter- ‘née ; el, profitant des secours, elle reçoit en outre une subvention annuelle de la Société industrielle , des secours du conseil général et du conseil municipal. La caisse de 118 SÉANCES GÉNÉRALES. secours mutuels est régie par un conseil formé de trois membres de la Société industrielle et de deux nf teurs bienveillants,. » Notre honorable collègue, M. Dechaille, qui la dirigée depuis sa fondation ; à laquelle il a paniisipé continue d’y apporter une vigilance active et toute paternelle; il y entretient un ordre admirable, A la fin de chaque année et en séance publique , à l’Hôtel-de-Ville , à laquelle as- sistent au bureau M. le préfet et M. le maire, et devant une assemblée nombreuse de souscripteurs et d'ouvriers sociétaires ; le conseil rend compte de sa gestion pendant lPannée, et présente à l’assemblée des réflexions em- preintes d’une haute morale et des principes d’une sage et fructueuse économie. Un des médecins de l'institution présente le tableau raisonné des maladies qui ont atteint les ouvriers sociélairés, avec des observations sur leurs causes générales et individuelles, sur leur durée et leurs terminaisons , en indiquant les précautions à prendre, les règles d'hygiène à observer pour s’en garantir, pour en abréger la durée, et prévenir les récidives. Notre asso- ciation de secours muluels a été appréciée et jugée favo- räblement par une des hautes illustrations littéraires et économistes; feu M, le baron de Gérando, dans son Traité de la Bienfaisance publique , s’exprime en ces termes : « Parmi les services nombreux que rend à fa classe ouvrière la Société industrielle de Nantes, et qui lai mé- rilent tant de reconnaissance, figure la création d’une caisse de secours mutuels dont son administration publie annuellement les comptes : un tel patronage mérite-d’être cité pour modèle. » 4 Messieurs , l’année courante a été fatale à da Société industrielle , par la perte qu’elle a faite de deux membres bien recommandables, Notre vénérable directeur de l’école d’apprentis a terminé sa longue et honorable carrière. M. Camille Mellinet nous a été ravi jeune encore, Tous SÉANCES GÉNÉRALES. 119 deux étaient fondateurs de notre école, et s’en étaient ” occupés avec ün zèle et une persévérance qui ne se sont jamais démentis : nous en conserverons un souveuir plein dereconnaissance et de regrels, 1» En terminant cet exposé bien imparfait et peut-être trop élendu , je dois le craindre, je ne puis résister au besoin qui me presse d'exprimer hautement notre vive et respectueuse gratitude pour les bienfaits que continuent de verser sur notre institution MM. les ministres de Pagri- cullure et du commerce, de instruction publique, de ‘la marine et des colonies ; pour les allocations généreuses du conseil général et du conseil municipal. Nous prions nos souscripteurs de nous conserver leur obligeant con- cours, et d’agréer nos bien sincères remerciments, * » Nous sommes en instance près le gouvérnement du oi, pour obtenir lé titre ét la protection qu’il accorde aüx établissements d’utilité publique, ce qui nous per- mettra de recevoir des donations et des legs. : et de pos- séder à perpétuité. » M. Pitre Guissart, secrétaire de la Sotiatis ds beaux- arts, a pris la parole en ces termes: . # ce Messieurs, Ts à -» À l aspect. de votre illustre réunion , je ne puis me Dore d’une vive et profonde émotion. L’élévation et “ Mppprtiance de vos desseins impriment a cette solennité TA? » 4 Dot de la gravité el " Ja portée 1 a de mes paroles ; ; et, si je me sens fier de l’ honorable délégation de mes collègues, j j'éprouve en même temps un sentiment d’embarras et d’hésitation puisé dans les difficultés de la position , peut-être exceptionnelle , que j'oécupe devant _ ous. En effet, loin de vous présenter ici la solution d’une 120 SÉANCES GÉNÉRALES. question’scientifique encore douteuse, loin de vous faire entendre les graves développements d’une théorie poli- tique ou morale , je viens solliciter la suspension de vos sérieuses pensées , et vous soumettre le simple et rapide historique d’une société dont l'unique but est la culture des beaux-arts. » Cependant, Messieurs , je me rassure à l’idée que, quelle que soit la modestie de notre spécialité , vous re- connaîlrez que nos efforis n’ont pas été étrangers ou inu- iles au progrès intellectuel de notre ville , et qu’en pre- nant part au grand mouvement qui se révèle en France, nous avons laissé dans la carrière que nous avons parcou- rue , quelque trace lumineuse de notre marche artistique. Puissé-je, en vous faisant considérer, sous le rapport du bien général , l'institution que j’ai l’honneur de représen- ter, en faire ressortir un principe social et civilisateur, et, par ce moyen, rapprocher son importance du but scien- tifique que vous vous êtes proposé en vous réunissant dans celte enceinte. » Sans vouloir, Messieurs, vous faire ici l’histoire com- plète de l’art à Nantes, je regarde cependant comme indis- pensable de jeter un rapide coup-d’æil sur les premiers essais qui furent tentés dans notre province , à différentes époques ; heureux, si je parvenais à détruire près de vous quelques erreurs avancées et propagées par certains écri- vains que d’inexplicables préventions ont trop souvent éloignés de la justice et de la vérité. » J'aurai souvent recours , pour cet apercu , à l’excel- lent ouvrage sur la musique, de M. Mellinet, qu’une mort prématurée vient d’enlever à laffection de tous ses conci- toyens. Si nous l’avions encore au milieu de nous, si son intelligence , aussi pure qu’élevée, ne nous avait quittés pour toujours , je le sens, Messieurs, soutenu par son in. dulgente amitié , éclairé par ses conseils dans cette ques- tion qu’il connaissait si bien, je trouverais aujourd'hui SÉANCES GÉNÉRALES. 121 plus de force et de courage dans l’accomplissement du devoir qui m’est imposé. » de fais trève, Messieurs, à ces pénibles pensées, à ces regrets qui trouvent ici tant de tristes sympathies , et j'arrive à l’objet principal que je me suis proposé dans ce travail, pour lequel le temps et les documents m'ont trop _ souvent manqué. Mon intention, d’ailleurs, n’est pas de al q P suivre la musique dans ses diverses transformations et par dates trop rapprochées. La crainte d’abuser de vos mo- ments m'interdil les longs développements et m’impose des limites tracées par la convenance et la discrétion. » L'histoire de nos premiers siècles nous apprend que la musique était en grand honneur en Bretagne ; la supé- riorité de nos bardes, successeurs des bardes gaulois, n’é- lait pas conteslée, et leurs chants, admirés par le peuple, célébraient les louanges de l’Éternel et les victoires de nos aïeux. Une loi de ce temps exigeait même qu’un musicien ‘fit partie de la maison du roi, qui souvent pla- çait sur son manteau brodé par les belles vierges des îles sacrées de la Loire , la musique et les sciences avec leurs attributs. La charte de Hoël prescrivait aux barons d’avoir une harpe avant toute chose ; l’homme libre devait avoir une cithare. De quelle importance était donc la musique, puisqu'elle devenait l’objet de la sollicitude et des pres- criptions de la loi ! Plus tard , au milieu des VII° et VIII: siècles , la musique apparaissait encore comme le seul art "qui fût cultivé dans notre province. Abeilard, deux siècles après , effaça , dit-on , par ses mélodies, les chants des bardes, qui commencaient à être oubliés ou du moins peu recherchés à cetle époque. Ainsi que le dit M. Mellinet, déjà la mythologie du passé avait perdu sa poésie sur la terre même de son origine. no La musique, aux XIV° et XV° siècles , obtint une éclatante protection du clergé ; cet exemple fut suivi par la noblesse ; et toutes les maisons ducales en Bretagne 122 SÉANCES GÉNÉRALES, voulurent avoir leurs musiciens particuliers, En 1499, Josquin Desprez , le plus grand artiste de son temps et le maitre de tous ceux qui se distinguèrent dans la suite, vint chanter à Nantes , lors de la célébration du mariage de Louis XII avec Anne de Bretagne ; l'enthousiasme qu’il causa fut immense si l’on s’en rapporte à un écri- vain du temps , qui, dans son langage figuré , appelait divine harpe tombée du ciel entre les mains de David. La musique, dès-lors , devint partie obligée de toutes les fêtes et solennités. On la retrouve au passage de Marie Stuart, en 1548; aux fêtes données, en 1558, pendant le séjour de François It" et de la reine Claude à Nantes. A cette occasion, des théâtres où l’on entendit les meil- leures chanteuses de la ville , furent dressés aux carre- fours Saint-Nicolas, des Changes, du Pilori et de Saint- Denis. On y joua des pièces imitées de celles composées par Marguerite de Valois, la sœur même du roi. Des fêtes musicales accueillirent également Charles IX ; Henri IV et Louis XIIT , lors de leur passage dans notre ville. Ce fut à cette dernière époque qu'on tenta vainement d’éta- blir à Nantes une académie régulière de musique, à Pimi- tation de celle que Baïf avait créée à Paris , un siècle auparavant. Ge projet ne reçut vraiment son exécution qu’en 1727. Le seigneur de Brou, lieutenant-général pour le roi, y donna son approbation , comme méritant pro- toction et donnant divertissement honnête aux habitants de Nantes. Cette réunion musicale , qui , je crois , n’eut pas une longue durée , fut remplacée , en 1742, par une nouvelle société qui s'établit à l'hôtel de la Bourse , et ne fut dissoute qu’en 1768 , à la démolition de cet édifice. Où y exécutait de la musique de concert; on s’éleva même , circonstance remarquable à cette époqne où l’art était encore peu développé , jusqu’à la représentation de plusieurs opéras : le Jaloux corrigé, opéra bouffon; Almazis ; avec chant et chœur d’Indiennes ; les Fêtes SÉANCES GÉNÉRALES. 123 grecques et romaines , el rs autres , serres une nombreuse foule. :: ù » Bientôt MM. Ars frères Pen une sésion d'amateurs , qui fit place , en 1778 , au concert de la rue du Moulin , qui compta jusqu’à deux cents abonnés. Une première chanteuse mandée de Paris y recut des appoin- tements de 1,500 francs: les artistes y étaient également | rétribués pour les-parties d'instruments que ne pouvaient remplir les amateurs. Ge fut un véritable progrès , et il existe encore plusieurs personnes qui sr de cës con- éerts avec un vif enthousiasme. : » Je crois que c’est à cette époque joclenii ct qu ’on éssaya de faire entendre quelques morceaux de musique _ italienne; cette tentative obtint peu de succès. Guglielmi ét Paiesiello durent bientôt se retirer devant Grétry, Mon- _ signy et Dezaide , dont les faciles mélodies étaient alors . chantées partout le monde, :» Gelte société donna naissance à : DS cmd, autres. qui se succédèrent presque sans interruption jusqu’ en 1790, ‘sous les dénominations de concert de la Rotonde, concert Dugué et concert Fridzery. Les événements de la Révo- . lution les firent suspendre. Elles ne reparurent , en 1,96, que pour cesser complétement pendant les guerres du consulat et de l’empire. | | …» L'art musical ne se réveilla qu’en 1826 , lors de la création de la Société philharmonique , qui bientôt fut suivie de celle de la Société Marivaux ; consacrée exclu- sivement à l'exécution de la musique instrumentale. Au début de ces deux sociétés , les hommes de talent qui les avaient fondées , sortant avec courage des proportions mesquines auxquelles on avait constamment asservi la musique de concert, parvinrent définitivement à faire ladmirér les grandes et dramatiques partitions des maîtres "allemands et italiens. L'art acquit aussitôt un degré d’im- portance qu’il n'avait jamais éu dans notre ville, Pour la 124 SÉANCES GÉNÉRALES. première fois , la musique instrumentale nous révéla le charme et la puissante majesté de la symphonie ; et, pour la première fois peut-être aussi, on rencontra des chan- teurs qui s'étaient appliqués, au moyen de l’étude sérieuse du mécanisme et‘de la pose de la voix , à se créer une méthode raisonnée. Enfin , à l’aide du chef habile qui conduisait l’orchestre et dirigeait les chœurs, on exécuta avec un ensemble inconnu jusqu'alors les chefs-d'œuvre : d’Haydn, de Beethoven, de Rossini et de Mozart. » Mais à côté de ces brillants succès de l’art musical, je suis forcé d’avouer avec chagrin que les annales de la peinture nous offrent peu de faits intéressants. Cette es- pèce de nullité ne peut guère s’expliquer que par l’injuste prévention qui s’était attachée avec une funeste constance à ceux qui cultivaient ce bel art, dont les modestes tradi- tions ne remontent pas au-delà de soixante ans. » La première impulsion qu’il recut à cette époque , est due à une circonstance presque fortuite. En 1783, M. Crucy, notre célèbre architecte , après avoir reconnu que la restauration de notre salle de spectacle nécessitait un degré de talent qu’il ne pouvait rencontrer à Nantes, se décida à confier ce travail à MM. Costes, Bougon et Lamarie , jeunes artistes qui déjà s'étaient fait un nom à Paris, La présence de ces hommes distingués éveilla an moment le goût de la peinture; cependant, peu comprise encore , elle se retira dans quelques ateliers particuliers, où plus tard MM. Bedert , Dubouix et de Chateaubourg allèrent la chercher , pour lui vouer également un culte tellement discret, que l’heureux privilége de visiter leurs cabinets n’était accordé qu'avec la plus extrême réserve. » Toutefois , je ne dois pas oublier de mentionner une exposition de peinture qui eut lieu, en 1825, dans la salle de notre Bibliothèque. Entièrement étranger à cet art, il ne m'apparlient pas de juger du mérite des tableaux qui furent exposés ; je sais seulement qu’à cette occasion une SÉANCES GÉNÉRALES, 125 brochure où régnait la critique la plus amère, fut répan- due dans le public, et découragea , par ses malveillantes plaisanteries , les personnes qui auraient été tentées de renouveler un essai du même genre. » Tels étaient, en 1830, la situation des arts et le rang qu’ils occupaient à Nantes. Jusqu'à cette époque, consi- _ dérés comme un simple délassement, on les abandonnait aux hommes de loisir ou futiles, Personne n’avait élevé la voix pour revendiquer la part qui leur appartient dans les _ études de l’homme sérieux. On n’apercevait pas, du moins assez clairement, le rôle qu’ils sont appelés à jouer comme agents civilisateurs ; ou bien cette vérité, apparue seule- ment sous une forme théorique , avait été retardée dans son application par l'opinion publique , qui lui était con- traire, et surtout par d’anciens préjugés, encore e plus diffi- ciles à détruire et à surmonter. » À cette époque, une grande révolution ue éclata en France ; et le choc violent des vives passions de ce moment, ranimant les divisions qui paraissaient éteintes, brisa , même au sein des familles les plus unies , d’an- . ciennes et affectueuses relations que rien ne semblait de- voir détruire. .-» Devant cet aflligeant spectacle, M. Mellinet crut l’ins- . tant favorable pour exécuter une pensée qu’il nourrissait depuis longtemps. Déjà dans ses conversations intimes , : si pleines d'intérêt pour ses amis , il avait à plusieurs re- prises manifesté le regret que les arts, ce levier si puissant de sociabilité , n’entrassent pas dans l’enseignement de nos écoles gratuites ; et ne devinssent pas , surtout , le centre d’une grande et féconde réunion où tous les hom- mes de cœur , sans exceplion de parti, viendraient abdi- quer leurs irritantes discussions et se confondre dans la noble passion des beaux-arts. Cette idée, que les difficul- tés politiques pouvaient faire considérer comme purement spéculative , lui parut à lui une vérité pratique d’une 126 SÉANCES GÉNÉRALES. actualité incontestable et d’une application que seul il regarda comme immédiatement possible. . » Il y crut, y fit croire , et la société des beaux-arts fut fondée, mais fondée avec. toute la défiance que pouvait inspirer un essai dont le succès n’était rien moins que certain. Cependant, sans trop les chercher peut-être, on avait réuni deux puissantes conditions de durée , qui tou- jours avaient manqué aux autres sociélés d’art : le con- cours de la peinture et la permanence des réunions, » La peinture et la musique , appelées à s'inspirer, à se poéliser mutuellement, ne doivent jamais être séparées ; l'exclusion de la première fut toujours une atteinte fu- neste portée aux progrès de la seconde, dont ellene peut cesser d’être sœur, Et pourquoi, par un caprice bizarre, se priver de la présence d’hommes capables et insiruils; pourquoi proscrire du sanctuaire un art, par cela même qu'il est peu répandu , et lui faire subir la peine de la modestie de sa position? La sociélé des beaux-arts ne commik pas celle faute, et sa première pensée fut de l’as- socier à la musique dans loutes ses espérances d'avenir, » Ensuite, par la permanence des réunions, on évita les dangers , les éventualités d’une organisation presque se- mestrielle ; on rattacha, au moyen des distractions d’un cercle ordinaire , les époques fixées pour les travaux ; on s’efforca , en un mot, de combler le vide de ces inter- valles fâcheux qui toujours avaient été la première cause de la dissolution des sociétés établies antérieurement à la nôtre. Enfin l'expérience nous démontra prompiement que le contact quotidien avait fait naîlre parmi nos socié- taires, d’opinions politiques si différentes , des relations d’où l’on bannit sans peine tout ce qui pouvait ayoir trait aux passions du moment , et qu’en ableignant le but con- ciliateur, auquel tendaient tous nos efforts , nous avions désormais assuré la perpétuité de notre association, » Le public nous comprit définitivement , et‘bientôt SÉANCES GÉNÉRALES. 127 nous vimes notre phalange se grossir d’une manière telle- ment inespérée , qu’il fallut penser à Hg le modeste local qui nous avait servi de berceau. :» Noire Société acquit par ce changement un dévelop- pement que nous avions à peine osé rêver; la musique sortit des proportions restreintes auxquelles nous l’avions forcément condamnée par la faiblesse de nos moyens; il nous fut enfin permis, sans craindre de rougir, d'ouvrir | nos portes äux artistes les plus célèbres de la capitale, Nous. pouvions dès cet instant leur présenter une puis- sance d’exéculion qui n ’avail pas élé alteinte dans notre ville, et des talents solistes, qui, sans les égaler sans doute, pouvaient cependant prétendre à leurs applaudis- sements; et, sur notre drapeau , que nous commencions à déployer avec quelque orgueil, nous vimes bientôt bril- der les noms de Me: Lienagé et Vigand, des Tamburini, des Ernst, des Franchomme, des Prudent, dé tous ces grands maîtres de l’art musical. |» Gependant, Messieurs, la peinture, que nous avons laissée il y a quinze ans sans aïeux et presque. sans anté- cédents , n’était pas restée en arrière de l’élan qui venait , d’être imprimé à la musique; par d’énergiques efforts, _ elle avait acquis une place non moitis élevée et plus dif- fieile à conquérir, On remarque chez elle une plus grande correction de dessin, une observation exacte et raisonnée de la nature, une entente remarquable des effets de la lumière ; enfin des études sérieuses avaient été faîtes ; et, _ Sans être arrêté por les déceptions souvent répétées de l'insuccès, ni dégoûté par les ennuis inséparables d’un travail long et Rtinue, nos artistes entrèrent dans une “voie de slievts qui ne s’est pas interrompue fusqu’à ce . Puis, afin d’ étendre les bienfaits de ce progrès, nous mis nos. moyens d'étude, souvent fort coûteux , à la portée des jeunes gens qui se destinent à la peinture. Deux cours, l’une Pr bosse et l’autre de modèle vivant, 128 _ SÉANCES GÉNÉRALES, ont été fondés simultanément et placés sous l’active direc- tion de nos habiles professeurs , qui , avec un dévouement tout artistique, ont offert le concours de leurs lumières et de leur expérience. Cette pensée, l’une des plus fécondes de notre Société, a secondé bien de jeunes dispositions, qui, sans cette utile admission à nos travaux , MS élé peut-être à jamais perdues pour Part, Il restait à organiser notre section d'archéologie, pres- crite par nos slatuts, et condamnée depuis trop Dusarnps à l’état de projet. Gette omission dans l’exécution de no- tre règlement ne devait plus nous être reprochée; el cette étude est trop intimement liée à toutes les questions d’art qui se débattent chaque jour dans notre sein ; pour que nous n’ayons pas fait un appel à tous nos hommes de science, pour combler une lacune contre laquelle tant de voix s’élevaient pour réclamer. Cet appel a été entendu, et la section d’archéologie est devenue l’une des plus ac- tives de notre Société. C’est à ses soins que nous sommes redevables de l’intéressante exposition à l’examen de la- quelle nous ayons eu l’honneur de vous inviter pour demain. » Tels sont les faits, Messieurs, que j’ai cru devoir vous soumettre , et si je vous ai parlé un pen longuement du passé, c’est que j'ai dû le considérer comme la pré- face, comme l'introduction du présent. En lui attribuant la juste part qui lui revient, j'ai voulu y rattacher aotre œuvre, qui n’en est que le progrès naturel et presque le complément. Loin de moi la pensée, cependant , que notre mission soit terminée , et que nous ayons alteint les der- nières bornes de la perfectibilité : non, Messieurs , je le sais, il nous reste encore une longue et pénible route à parcourir, route également semée de déceptions et de succès. Quel que soit l’éloignement de la limite, j'ai la confiance que notre zèle ne faillira pas en chemin. » Mais, pour parvenir sûrement à ce noble but, vers SÉANCES GÉNÉRALES. 129 lequel , en toutes choses, l'esprit humain est slorieuse- ment entraîné, il nous faut un concours plus puissant encore de cette opinion publique dont la voix imposante dopne la vie ou la mort. Que la musique , que [a peinture, qui demandent autant d’esprit que de cœur, que ces arts divins cessent d’être taxés d’inutiles futilités : que l’homme _ sérieux les étudie, les comprenne, et notre marche de- viendra alors aussi rapide qu’assurée. » Et vous, Messieurs, qui venez étendre jusque dans notre pays, votre noble et pacifique propagande , donnez- nous une part de votre puissante influence. Que notre ville , à son tour, devienne le centre de votre scientifique fédération; que la Bretagne , quelquefois méconnue , ne reste plus déshéritée du bienfait spécial de votre présence. Je ne sais si je suis abusé dans ce moment par l’amour qu’elle sut toujours inspirer à ses enfants; mais je crois qu'elle renferme des intelligences dignes de s’unir à vous dans l’accomplissement de vos généreuses pensées : n’en doutez pas , Messieurs , votre voix trouvera de l'écho dans nos poétiques bruyères, sur cette terre qui toujours s’est émue à toutes les idées grandes et utiles. » Déjà ne voyez-vous pas près de vous la science, la bienfaisance, les arts, accourir à voire appel, se con- fondre dans le sentiment du bien ,; du vrai, dans le désir d'éclairer, de soulager ? Ah ! oui, ce pays est noble, dont l'enfant , traîné sur l’échafaud par un farouche proconsul, exhalait son âme d’artiste dans ces mots douloureux : Ne me tuez pas, malheureux; un jour, un jour encore pour finir mon chef-d'œuvre ! » * M. Neveu-Dérotrie , secrétaire de la Société d’horti- cullure de Nantes , a entretenu le Congrès des travaux de cette Société : d « Messieurs, } » Prononcer devant vous le mot horticulture , c’est ap- T. I, 9 130 SÉANCES GÉNÉRALES, peler vos souvenirs et vos pensées sur l’un dés arts qui offrent à l’homme les joies les plus pures, les délasse- ments les plus agréables; c’est fixer votre attention sur une branche de l’industrie humaine dont l'importance ; au point de vue économique , ne le cède en rien aux autres travaux dignes d’occuper les hommes sérieux. » La science horticole n’a pas seulement pour objet la culture des fleurs, source inépuisable de plaisirs, mais elle embrasse dans son immense étendue tous les genres de production , depuis la plante la plus modeste jusqu’à l'arbre le plus majestueux. Et peu d’hommes la possèdent dans toule sa perfection, parce que ses applications va: rient à l'infini, comme les objets auxquels elle se rapporte. » Est-il un sujet d’étude plus attrayant que la décou- verte des secrets admirables de la nature , pour la repro- duction et l’acclimatation des végétaux de tous les pays? Est-il un spectacle plus merveilleux que cet assemblage de tant de produits du sol différant par la couleur et le goût, par une élévation prodigieuse ou une petitesse ex- trême. Un horticulteur intelligent et habile peut , dans un cercle , quelquefois assez rétréci , réunir les richesses vé- gélales du monde entier : il sait, par une ingénieuse dis- position de son terrain , associer la végétation tropicale à celle des régions glacées du Nord; et l'habitant de l'Inde comme celui des rives du Danube peuvent se croire un instant transportés aux lieux qui leur donnèrent le jour ; charmante illusion que lhorticulture seule peut produire. Aussi a-t-elle de tout temps occupé un rang honorable dans les sciences; et les hommes le plus haut placés dans la hiérarchie sociale n’ont pas dédaigné de lui consacrer leurs plus doux loisirs. » Le goût de l’horticulture a depuis quelques années pris dans le département de la Loire: Inférieure un déve- loppement immense. À Nantes seulement, les jardins oc- cupéñil ün espace d'environ 183 hectares, lorsqu'il était SÉANCES GÉNÉRALES 131 à peine de 50 hectares , il y a moins dé 20 ans. Cet ac- croissement remonte à 1828 , époque à laquelle s’est for- mée [a Société nantaise d’horticulture. La pensée de cette organisation est due à l’un dé nos plus honorables ci- toyens, dont nous avons eu celle annéé à déplorer la perte: Nous sommes heureux dé pouvoir, en celte occa- sion solennelle, payer au digne fondateur de la Société d’horticulture , à M: Le Cadre, un juste tribut d’éloges et de regreis, et nous croyons être l'interprète dés senti- ments de toute la population nantaise, qui conservera le souvenir du zèle généreux que M, Le Cadre a déployé dans sa longue carrière. » Placer les jardiniers sous un patronage utile, encou- rager et récompenser leurs efforts pour l’amélioration de la culture ; favoriser l’importation dés plantes nôuvelles ét le développement du commerce horticole, tel a été le but que s’est proposé la Société dont ; j'ai l'honneur d’être en ce moment l’organe; tellé est la mission qu’elle s’est efforcée d'accomplir. Cette tâche , vous lé comprénez, Messieurs , l’a constamment tenué en dehors des discus- sions auxquelles donné si fréquemment lieu l'étude des _ sciences naturelles. Sans adopter aveuglément, comme sans repousser d’une manière absolue, les hautes théories sur lesquelles tant d'hommes illustres émettent des opi- pions opposées , la Société d’horticuliure a dû se bornér à des travaux plus modestes. Dans ses relations journaliè- rés , elle s’adresse le plus souvént à des hommes simples : elle devait être simple comme eux. Laïissänt à d’autres le mérite de soulever le voile qui enveloppe les mystères de la nature, elle $’attathé spécialément à marcher dans la voie d’une pratique raisonnée et progressive, intérrogeant le passé pour donner à l'avenir un éclat plus assuré, » Une question dont s’est préocéupée la Société d’hor- ticulture, et que l’un de sés membres dont elle s’honore le plus à étudiée avec un soin particulier, est l’acclima- 132 SÉANCES GÉNÉRALES, tation de certains végétaux, par semis successifs. Nous devons à M. Ferdinand Favre d'importants travaux entre- pris dans ce but pour les camélias. Après avoir introduit à grands frais dans notre département les premiers de ces arbrisseaux remarquables que l’Angleterre possédait avant nous, M. Favre s’est pénétré de la pensée que le moyen le plus sûr de les naturaliser sur notre sol, consistait à faire des semis successifs laissés à l’air libre. Le succès a couronné sa longue persévérance, et M. Favre est arrivé à ce résultat satisfaisant , que ses camélias demeurent ex- posés actuellement, sans en souffrir, à toutes les varialions atmosphériques , el que plusieurs variétés, notamment celle nommée anemone flora, conservent leurs fleurs aussi longtemps que les autres. C’est encore par sa mé- thode qu'il est arrivé à produire des variétés précieuses, dont s’est enrichie l’horticulture française; il n’est pas un amateur de jardins qui ne connaisse les charmants camé- lias linneata et Henri-Fawre. » M. Hectot, l’un de nos collègues , qu’une grave mala- die tient en ce moment éloigné de nous, a fait aussi des découvertes intéressantes pour la science : botaniste d’une haute distinction , ses observations sur la nature physio- logique d’un grand nombre de plantes ont été accueillies comme des révélations précieuses de son génie. C’est ainsi qu'il a démontré que le changement de climat exerce une grande influence sur le développement des végétaux : des plantes qui, sur les Alpes, atteignent à peine quelques centimètres de hauteur, se sont élevées à près d’un mètre sous notre température plus douce. La première induc- tion à tirer de cette expérience est que certains végélaux du Nord pourront acquérir d’autant plus de vigueur qu’on les rapprochera graduellement d’un sol plus échauflé par - les rayons du soleil; lorsque , au contraire, ceux du Midi, transportés dans le Nord, perdraient une partie de leur taille, et se dépouilleraient de ce port majestueux que SÉANCES GÉNÉRALES. 133 nous admirons. Si nous jetons , en effet, un coup d'œil sur quelques plantes congénères dans notre pays et dans les régions tropicales, nous reconnaissons que celles qui croissent sous le soleil brûlant de l’Inde, ont, avec les mêmes caractères généraux, des proportions gigantesques qui nous étonnent , et nous les font apparaître comme à travers un microscope ; tandis que celles que l’on importe sous notre zone tempérée, sortent à peine de l’état d’ar- bustes , privées qu’elles sont d’une somme nécessaire de chaleur vivifiante. » Je ne vous parlerai pas , Messieurs , des remarques importantes de M. Hectot sur la greffe, sur les précau- tions à prendre pour tailler quelques arbres, sur la fé- condation , qui fait aujourd’hui l’objet d’une controverse entre les savants; je craindrais de me laisser entraîner au-delà des bornes d’un simple compte-rendu; mais per- mettez-moi de revendiquer, pour notre honorable collè- gue , l'honneur d’une découverte qui lui appartient tout entière : c’est celle de la nature du virus des abeilles, qu'avant lui personne n’avait soupconnée. Je n’en par- lerais pas, si je ne savais que le mérite en a été attribué à d’autres. » Nous venons de vous dire, Messieurs , que la Société d’horticulture s’était plus particulièrement attachée aux développements à donner à la partie pratique de l’art : lun de ses premiers soins devait être de fonder un marché aux fleurs qui, à des intervalles périodiques, pût offrir aux ämateurs un choix varié des plus jolies plantes de chaque saison. Secondée par la bienveillance de Padmi- nistration municipale , qui ne lui a jamais failli, la Société d'horticulture a obtenu que , tous les dimanches, la pro- menade de la Bourse recût les plantes apportées par les jardiniers , et livrées à la vente. » Chaque année , une exposition brillante et de plus en plus nombreuse atteste les progrès de l’industrie horti- 134 SÉANCES GÉNÉRALES. cole dans notre cité. Des fêtes florales ont été instituées; et, en appelant l'élite de la population à venir prendre part à ces soleunilés, et applaudir aux récompenses dé- cernées en raison des eflorts faits par les jardiniers, la Société d’horticulture a voulu qu’ils comprissent tout l'in- térêt qu’elle porte à leurs travaux. Le zèle des jardiniers a répondu à son attente : des semis nombreux ont été faits; des collections se sont formées ou complétées; des variétés ou des espèces nouvelles ont été obtenues ou im- portées. Aujourd’hui, Messieurs, l’horticulture nantaise a le droit d’être fière de se dire l’émule et non la rivale de: lhorticulture angevine , son aînée dans la carrière, » Il restait encore à la Société d’horticulture une tâche à remplir, c'était de porter le flambeau de l’instruction au milieu de cette jeunesse des rangs de laquelle doivent sortir un jour des jardiniers dignes de mériter à leur tour des éloges et des encouragements, Grâce au bienveillant et généreux dévouement de M, le docteur Écorchard , un cours de botanique appliqué à l’herticulture a été insti- tué, et est suivi par les élèves jardiniers avec un louable empressement. » Nous avons prononcé un nom qui nous est cher à tous, Messieurs, c’est celui de l’honorable magistrat qui, pour la cinquième fois, est appelé à présider aux desti- nées de notre cilé. M. Ferdinand Favre n’est pas seule- ment un horticulteur distingué, il est, avant tout, le maire de Nantes. Digne de la confiance du gouvernement, il a su obtenir l’affection et l'estime de tous ses conci- toyens. » J'ai tracé, Messieurs, l’aperçu rapide des tendances de la Société nantaise d’horticulture, Un auguste patro- nage, en l’honorant , ajoute encore à son influence, Li- vrée , je dois le redire encore, à la pratique de l’art, bien plus qu’à l’étude des hautes théories de la science , si elle a peu de droits aux suflrages de cette assemblée, dans SÉANCES GÉNÉRALES. 135 laquelle les talents de l’ordre le plus relevé se sont donné rendez-vous de tous les points de la France, elle a l’es- poir du moins d’avoir pu gagner votre eslime par ses ef- forts pour contribuer à l’amélioration sociale , unique objet de tous ses vœux. M. Puységur, membre de la Société royale acadé- mique, a lu les vers suivants: LE GÉNIE. De l’étoile an ciel bleu scintillait la lumière , D'une blanche clarté le bois s’enveloppait; Et du lac, agité par la brise légère, Le cristal lumineux tremblait, Dans ce calme vibrait une douce harmonie, Qui du cœur enivré retrempait les ressorts ; Et ma pensée, au fond de mon âme ravie, Retrouvait de nouveaux accords, Devant moi se dressait l’arbre de la science, De ses bras étendus embrassant Punivers; La Croix qui du génie animait la puissance, - Et du monde brisait les fers, Sur ce trône divin, je voyais Dieu lui-même, De sa puissante voix j’entendais les éclats : « Viens, dit-il au Génie , à mon ordre suprême, » Que tout renaisse sous Les pas. » Tu vois ce corps usé; de sa lente agonie » À toi l’ auguste soin de dissiper l'horreur, » De raviver en lui les sources de la vie: » À toi de ranimer son cœur. » Phalanges immortelles, » Guidez son noble essor; 136 SEANCES GÉNÉRALES, » Que des clartés nouvelles » Pour tous luisent encor; » Que vos ailes brûlantes » Le portent en tout lieu , » Et que vos voix tonnantes » Parlent au nom de Dieu. » La masse des états sur sa base chancelle; » Entends ces cris de guerre et ces rauques accents ; » Partout la flamme brille et le fer étincelle, » Tout sert mes secrets jugements, » Tout s’écroule aux accents d’une voix prophétique ; » La reine des cités , la fière république , » Entend sur ses remparts rugir les fils du Nord. » Fuis ces scènes de deuil, fuis la ville coupable; » Dans le sein de la Croix, asile inviolable, » Tu lutteras contre la Mort. » Quand de la Vérité retentira la foudre ; » Quand Fidole , inclinant sa tête dans la poudre, » Gachera dans la fange un front audacieux, » Qu’un temple soit conçu par la pensée ardente : » Grave sur le granit l'empreinte rayonnante » Du sublime cachet des cieux. » Une injuste tyrannie » Aflige l'humanité : » Que la femme dans la vie » Reprenne un rang mérité; » Qu’il cesse cet esclavage » Qui pour tous est un outrage, » Et dont s’afilige le cœur; » Que l’orgueil humain s’abaisse ; » Car l’homme , dans sa tendresse , » Trouve génie et bonheur. SÉANCES GÉNÉRALES, 137 » À la vaste intelligence » Ouvrant un large chemin, » Du séjour de la souffrance » Brise les portes d’airain; » Le Dante... À ce nom sublime » Que les gouffres de l’abime » Entr'ouvrent leurs profondeurs ; » Et que sa lyre inspirée » Sente la flamme acérée » Des éternelles douleurs. » Que la toile frémissante » S’anime sous le pinceau, » Et que la pierre vivante » Respire sous le ciseau. » De la vierge blanche et pure » Qui sourit à la nature, » Forme les traits ravissants : » Donne la vie à l’Archange; » Raphaël et Michel-Ange » Palpitent à tes accents. » Combats avec Galilée, » Et couronne ses efforts ; » Dans son âme consolée » Verse tes riches trésors : » Vainement le despotisme » Et l’absurbe fanatisme » L’enchaînent dans leurs cachots : » Perçant ces voûtes funèbres, » Brille au milieu des ténèbres : » Brise leurs affreux tombeaux. » Quand jeune encor, courbé sous la hache cruelle ; » Le poëte expirant chante la liberté, 138 SÉANCES GÉNÉRALES, » Fais luire à ses regards, dans la nuit éternelle , » Un éclair d’immortalité. » À l’active industrie » Offre un nouveau moteur: » Que de l'onde asservie » Bouillonne la vapeur. » Dompte la mer rebelle » Et ses flots inconstants: » Fais glisser la nacelle » Sur l’aile des autans » Ainsi dit le Seigneur : de ses ailes bruyantes Le Génie a touché les sphères éclatantes, Et le monde renaît sous de nouvelles lois. Une vierge aussitôt s’élance sur sa trace , Et des chœurs immortels les suivant dans l'espace J’entendais les célestes voix : « Salut à belle terre ! » Pour toi s’ouvrent les cieux; » La divine lumière » T’inonde de ses feux. » Que nos chants d'harmonie » Réveillent ta fierté : » Pour tes fils le génie, » Pour eux la liberté. » M. de Las Cases, président du Congrès, a répondu aux discours qui venaient d’être prononcés par lallocution suivante : « Messieurs, » C’est avec une profonde émotion que le Congrès scientifique de France reçoit les expressions flalteuses que vous avez bien voulu prononcer. Pour ce qui in’est per- sonnel, je le conserve au fond de mon cœur arec un senti- SÉANCES GÉNÉRALES, 139 ment de sincère et douce reconnaissance. Mais en ce mo- ment , je ne dois m'occuper que de ce qui concerne le Congrès scientifique. Acceptez l’expression de sa vive gralitude ; il est d’autant plus touché de votre accueil bienveillant et de vos éloges , qu’il sait qu’en fait de ques- tions de science , Messieurs , vous êtes bons juges. Tout l’atteste , et vos nombreux travaux et.les fruits qu’ils ont portés , le bien que vous avez fait à votre ville et aux dé- partements voisins, et surtout la haute estime que vous pôrtent vos concitoyens. » Oui, Monsieur le président de la Société royale aca- démique, ainsi que vous l’avez dit ; c’est un beau spectacle que cetle réunion d'hommes graves, qui viennent de tous les points de la France , sans être mus par d’autre senti: ment que celui du bien public , que celui de se communi- quer leurs lumières , et qui sont reçus par leurs savants concitoyens avec une telle bienveillance, une telle cordia- lité. Voyez, Messieurs , comme cette fête scientifique parle à tous les cœurs. Reconnaissons ici le bon et sage progrès de la civilisation , un effet du développement de nos belles institutions libérales , un don de ce génie bien- faisant de la liberté qui plane sur la France et la protège. À une telle vue, rendons (les actions .de grâces pour le présent et espérons pour l’avenir. » Jadis, Messieurs, la France étendit ses conquêtes par les armes, son aigle plana sur les peuples et son diadême fut la pierre précieuse: de, l'univers ; aujourd’hui , elle poursuit un genre de gloire, peut-être moins brillant, mais dont les résultats seront peut-être aussi plus dura- bles; le pavillon aux trois couleurs était alors un météore resplendissant , quelquefois terrible ; il est aujourd’hui pour l’Europe l’arc-en-ciel ‘pacifique, du, sage progrès. C’est par sa littérature, ses sciences!; ses beaux-arts, que la France pénètre parmi. les nations , s'empare de leur esprit, de leur intelligence , et gagne leurs sympathies. 140 _ SÉANCES GÉNÉRALES. Voilà les conquêtes auxquelles elle se livre , celles qui se- ront à jamais indestructibles. » Dans cette lutte pacifique, si utile à l'humanité, vous prenez une large part , Messieurs, et vous méritez ainsi la reconnaissance de vos concitoyens et du monde ; aussi c’est l’unanimité du Congrès scientifique de France qui s’écrie par ma voix : Honneur, honneur aux sociétés scientifiques de Nantes ! » M. Halgan se lève une seconde fois et dit en terminant cette fête solennelle, qu’il avait si bien présidée : « Votre visite, Messieurs , aura d’heureux résultats, celui surtout de resserrer, s’il est possible , les liens de profonde affection qui nous unissent à notre sœur, la bonne et hospitalière ville d'Angers. » Ces paroles sont suivies d’acclamations prolongées. Des morceaux d'harmonie exécutés par la musique du 11° régiment léger, sous l’habile direction de M. Beer, ont entremèêlé agréablement les lectures de cette longue et imposante séance. Dixième séance générale. 10 septembre 1843, à Nantes. M. de Las Cases , assisté de MM. Halgan , Cuissard , Palois , Neveu-Dérotrie , de M. le président de la cour d’assises, de M. le maire et d’un secrétaire-général, ouvre la séance. Le procès-verbal est lu et adopté. La correspondance fournit : 1° Une lettre de MM. Charpentier pére, fils et compa- gnie, qui offrent au Congrès un exemplaire des Vues de la Rochelle , de Pornic, etc., et un Album du baigneur. SEANCES . GÉNÉRALES. 141 20, Notice sur Le Sage, écrivain breton, par M. Priou; docteur-médecin. : 30 Notice sur Théophile-Malo de la Fepareren Corret, par M. Priou. 4 Notice historique sur Broussais, par le même. 5° Tableau chronelogique de l’histoire de France, par M. Fourmond (de Nantes). M. Heuzé lit le procès-verbal de la section d’agricul- ture. M. de Caumont renouvelle à l’assemblée l'invitation qu’il a déjà faite d'engager le Congrès à assister le soir, sept heures, à une séance de la Société archéologique. M. Charles Ernoult rend compte de la promenade artistique du Congrès dans la ville de Nantes le matin. 4° Visite à la chapelle collégiale , dont il déplore la ruine (XVI: siècle). 2° Au château, dont quelques parties font déjà pres- sentir la Renaissance (XV: siècle). « 3° À la cathédrale, où l’on admire l’œuvre magnifique de Michel Colomb, c’est-à-dire le tombeau de François IT et de Marguerite de Foix (XVI: siècle). 4° A l'atelier de M. Suc, artiste du plus grand mérite, et dont la statue de {a Mélancolie égale les plus belles productions de l’école contemporaine. 5° Au passage Pommeraye, qui.est d’une grande ma- gnificence , mais qui présente peut-être quelques dispa- rates dans l'emploi de la combinaison des couleurs sur les rampes, Ce copmapler -rendu est vivement anni On s’occupe ensuite des banques agricoles. M. de la Fontenelle rédige une proposition à ce sujet qui est ainsi conçue : « Le Congrès, après avoir pris connaissance du projet de banques agricoles, rédigé par M. Neveu-Dérotrie, et discuté dans le sein de la Société académique de Nantes, 142 SÉANCES GÉNÉRALES, recommände aux méditations du gouvernement cet im- portant projet, en faisant remarquer que l'établissement de ces banques serait un des moyens les plus propres pour faire arriver l’agriculture francaise aux dévelop- pements dont elle est susceptible; » Elle est adoptée par l’assemblée, M. Olivier (de Tigné) lit une pièce de vers sur la Bre- tagne, entendue avec beaucoup d'intérêt. M. Fourmond lit un mémoire sur les antiquités orien: tales; il prouve par certains faits qu’il n’y a eu qu’une seule espèce humaine , mais plusieurs variétés. M. de la Sicotière rend compte de sa visite: 1° Au cabinet de M. Libaudière , composé de pièces anatomiques en carton, d’après la découverte de M. Au- ZOUX, F M. Lecerf fait observer que M. Améliot pourrait avoir autant de droits à cette invention que M. Auzoux sur la priorité. 2° A la Bibliothèque publique, où l’on voit les Zeures d'Anne de Bretagne et un manuscrit de 1371, de la Cüé de Dieu , de Saint-Augustin (traduction française du XIV: siècle). 3° A l'atelier de M. Suc. M. de la Sicotière parle de divers morceaux de ce sculpteur, et notamment du buste de M. Mellinet. 4° A l'exposition de la galerie des beaux-arts, dont la salle est élégamment parée de belles peintures. M. de la Sicotière signale entr’autres tableaux : ut portrait d’évéque de Rubens et un Christ attribué à Léo- nard de Vinci. La Force protégeant la Vertu ; une Téte de vieille femme , attribuée à Van Dick ; des J’ues de Venise, de Canaletto. La collection d'objets d’arts renferme un musée égyp- tien tout entier, qui est dû aux soins de M. Caillault. SÉANCES GÉNÉRALES. 143 M: dé la Sicotière cite des moules dé poteries ro- mines. Puis apparaît Je moyen-àge avec Ses meubles, ses vasés ; ses éristaux , enfin l’art ‘arrive jusqu’à nos jours , en traversant cent objets curieux. Mais ce qu'il y a de remarquable, c’est le cœur d'Anne de Bretagne, qui porte une inscription pleine d'intérêt. Il signalé aussi extrême complaisance de M. Caillault, qui à bien voulu faire l’autopsie d’une momie devant tous les membres du Congrès. On sait que le nom de M. Cäïllault se rat- tache d’une façon toute spéciale à l'Égypte. M. de la Sicotière termine en justifiant l'utilité des musées. L’assemblée applaudit cette improvisation. M. Ernoult fait l’observation qu’à l’atelier si curieux de M. Suc, l’on peut joindre ceux de MM. Ménard, Tho- mas Louis et Groters: Le temps voulu manque pour visiter ces établisse- ments. M. Freslon prend la parole sur la 11° question de mo- rale et de philosophie , relative à la valeur de l’éclec- tisme sur les méthodes philosophiques. Il pense que l’auteur de la question a voulu parler de l’éclectisme considéré comme école , école que l’on peut déclarer fondée par M. Victor Cousin, d’après les enseignements divers de MM. La Romiguière et Royer- Collard. M. Cousin s’est dit , il y a quatre systèmes : le sensua- lisme , l’idéalisme , le scepticisme et le mysticisme, tous ont des avantages et peuvent être perfectionnés , de là l’éclectisme. M. Jouffroy appartient également à cette école, mais il n’a pas conclu ; {a philosophie, suivant lui, doit étre une science crpanises, mais elle n’en est pas encore unc. M, Freslon pense que l’état de la question ne permet pas facilement une réponse. 144 SÉANCES GÉNÉRALES. La philosophie de M. Cousin est en quelque façon la statistique de la situation sociale , qui, en effet, n’a plus d'autre unité que celle de cette fraternité négative qui réunit les hommes dans les cercles, dans les sociétés sa- vantes et dans les Congrès. Peut-être un jour une philosophie, rattachant l’éclec- tisme à la tradition de Descartes, viendra-t-elle raviver une plus profonde unité dans les peuples ; il faut attendre et non pas désespérer. M. de la Fontenelle devait être entendu sur la 27° ques- tion relative à l’histoire, mais l’heure avancée ne Jui a pas permis de prendre la parole. La séance est levée. Onzième séance générale. 11 septembre 1843. La séance est ouverte à trois heures et demie. En l’absence des autres membres du bureau, qui n’é- taient pas encore arrivés de Nantes, M. Guillory, l’un des secrétaires-généraux , occupe le fauteuil de la prési- dence, il désigne comme secrétaire M. Marchegay. M. le président donne connaissance à l’assemblée de la lettre suivante qui vient de parvenir au secrétariat : Strasbourg, le 28 août 1843. Le Secrétaire-général de lu dixième session à Messieurs Les Secrétaires-généraux de la onzième session du Congrès scientifique de France , à Angers. « Messieurs et très-honorés collègues, » M, le professeur Ehrmann , président de la commission perma- nente créée par la section de médecine de la dixième session du Congrès, vient de me remettre, avec prière de vous l’adresser, por SÉANCES GÉNÉRALES. 145 étreremis à M. le président de la section de médecine de la onzième session, le rapport de cette commission , relatif au mandat qu’elle avail reçu el qu'elle dépose entre les mains de la section de médecine du Congrès d'Angers. — En même temps, M. Ehrmann s empresse d'informer MM. Rs membres de la section de médecine qu’en dépo- sant ses pouvoirs généraux, -la commission permanente s’empressera de reprendre , comme comité départemental pour le Bas-Rhin, sa coopération à l’œuvre importante dont le succès intéresse tout le corps médical de France. » En vous priaut, Messieurs et très-honorés collègues, de vouloir bien vous charger de cette communication , je m’empresse de vous réitérer l'expression de ma haute considération. » Le Secrétaire-général de la dixième session, » G.-P, HEpPe. » Le Congrès décide que communication immédiate de ce rapport sera faite à la commission permanente nom- mée par la seciion de médecine de la présente session , dans sa séance du 4 de ce mois, et qui est composée de MM. Bigot, Mirault, Mame, Castonnet et Ridard , doc- teurs en médecine, et Roujou, pharmacien, M. le président appelle à la tribune ceux de MM. les secrétaires qui ont des procès-verbaux à lire. M. L. Cosnier lit le procès-verbal rédigé par M. Cré- pon, de la séance de la quatrième section , tenue le ven- dredi soir à six heures. M. de Falloux lit le procès-verbal de la deuxième sec- tion, de vendredi. M. L. Cosnier lit ensuite le procès-verbal de la séance de la quatrième section, tenue le samedi, dans la salle de l’arrière du bateau à vapeur. M. le président met ensuite successivement à l’ordre du jour les questions 16° et 17° de la sixième section, réservées pour l’assemblée générale. Aucun des membres présents n’ayant demandé la pa- T. 1, 10 146 SÉANCES GÉNÉRALES, role, il invite les membres à dire s’ils auraient quelques communications à faire sur des questions non encore discutées. Sur la négative, M. le président lève la séance qui , à la demande générale, est renvoyée à sept heures du soir, Douzième séance générale, 11 septembre 1843, TENUE À ANGERS, SUR LES SEPT HEURES ET DEMIE DU SOIR. M. de Caumont , assisté de MM. les secrétaires- généraux , de MM. Bertini et de la Sicotière , ouvre la séance. Le procès-verbal est lu et adopté. M. Guillory , l’un des secrétaires-généraux, dépouille la correspondance qui présente la lettre suivante adres- sée à M. le comte de Las Cases. président du Congrès : « Monsieur le Président, » Avant de quitter nos belles provinces de l'Ouest, permettez-moi de vous adresser une prière. » Enfant de l'Alsace, je me suis présenté au Congrès d'Angers avec un vif désir de profiter des intéressants travaux de cette réunion scientifique, éminemment nationale, éminemment française. » L'accueil qui m'a été fait a été si affable, si bienveillant, que j'emporte au foyer domestique des souvenirs touchants et précieux. »Je viens vous prier, Monsieur le Président, d'être auprès de MM. les membres du Congrès, et en particulier, auprès de MM. les membres de la cinquième section, qui ont bien voulu me faire l'hon- neur de m'appeler à la vice-présidence, l'interprète de toute ma gratitude et des vœux bien sincères et bien ardents que je fais pour la prospérité d'une institution qui honore mon pays. » Paisse cette instilution si belle croître de jour en jour et réunir SÉANCES GÉNÉRALES. 147 bientôt en un puissant faisceau toutes les provinces de la patrie, tous les cœurs vraiment français. » Agréez, je vous prie, Monsieur le Président, l'assurance du pro- fond respect, avec lequel j'ai l'honneur € ‘être 7 » Votre Po AN TN bre a »E. GOGUEL. » Nantes, 10 septembre 1843. M. Guéranger présente verbalement des notes rela- tives à la section d'agriculture, en attendant qu'elles soient consignées par procès-verbal. M. Lemarchand donne lecture. du procès-verbal de la section de médecine , rédigé à bord.du bateau à vapeur. M. de la Sicotière lit le compte-rendu de la visite faite à plusieurs cabinets curieux de la ville d'Angers. M. Guinoyseau lit un mémoire communiqué par M. Pazos , sur un projet. de bateau à vapeur à établir sur le Mec des Amazones. Des remerciements sont adressés à M. Pazos. M. Lecerf, comme délégué de la Société d'agriculture et de commerce de Gaen, rend compte des travaux de cette Société, fondée dans le dernier siècle, abandonnée pendant la révolution et rétablie eml’am VIH. Il entre dans d’intéressants détails sur l’introduction dans le Calvados de vingt-deux espèces de froment, ainsi que sur l’amélioration des diverses races d’animaux et notamment des chevaux , que par les soïns de la Société Von est arrivé à faire habituellement castrer avant l’âge de deux ans. Sous le rapport commercial ; Caen s’est également amélioré par des travaux faits à la rivière d'Orne, qui facilitent la navigation. M. Lecérf ajoute en son nom personnel que les lettres y sont aussi cultivées avec beau- coup de soin, et trouvent un centre actif dans le sein de l'Académie des sciences et lettres de Caen. 148 SÉANCES GÉNÉRALES. M. de la Sicotière demande que le Congrès émette le vœu suivant. savoir : « Que les grandes collections de livres ou d’objets d'art et de curiosité, si précieuses pour l’art et pour l’histoire , et qui tendent à se disperser depuis quelques années , puissent être conservées , soit par le gouverne- ment , soit par les administrations locales , soit par les riches particuliers. » | Après une discussion à laquelle prennent part MN. Le- cerf, de la Sicotiére, de Senonnes et Richelet , la propo- sition est adoptée sous cette nouvelle forme proposée par M. de Lens: « Le Congrès émet le vœu que le gouvernement et les administrations locales acquièrent autant que possible les grandes collections spéciales formées par des ama- teurs intelligents, et à leur défaut , il signale aux riches particuliers l’intérêt puissant que présentent ces collec- tions toutes faites. » La séance est levée à neuf heures. Treizième séance générale. 12 septembre 1843. M. de Caumont, assisté de M. Puvis et de deux secré- taires-généraux , ouvre la séance , et communique une lettre de M. de Las Cases, qui, retenu malade à Nantes, témoigne son vif regret de ne pouvoir présider la séance de clôture , ce qui le prive d'autant plus, qu'il se pro- posait de payer un digne et juste tribut d’éloges à l’au- teur d’une institution si utile et qui portera d’excellents fruits. M. de Caumont nous apprend que M. le maire de ——_—— ———— "EE SÉANCES GÉNÉRALES. ‘149 Nantes vient d'adresser, au nom de la ville qu’il admi- nistre , un drapeau qu'il prie le Congrès d’accepter comme souvenir de son séjour à Nantes. Le procès-verbal est lu et adopté. M. Jullien donne lecture d’un travail qui à pour but -de faire connaître le projet de M. Pazos, relatif à l’éta- blissement de vaisseaux sur le fleuve des Amazones "* « Un honorable étranger , naturel Indien , descendant des Incas, consul-général de la Bolivie en Angleterre, don Vincent Pazos, est venu apporter à notre Congrès un pro- jet fécond en résultats et qui intéresse le monde civilisé tout entier. Il s’agit de réaliser une prédiction que nous trouvons imprimée à Lima, au Pérou, dans le Mercure Péruvien, numéro du 29 septembre 1791. Ce recueil a été apporté en Europe et offert au roi de Prusse par le célèbre et savant voyageur Alexandre de Humboldt , comme l’un des monuments les plus curieux de l’activité intellectuelle dans une partie reculée de l'Amérique du Sud. » Après avoir mentionné , avec des développements très intéressants, l’exploration des rivières de Maragnon ou des Amazones et d'Ucayali jusqu’à l’établissement de la mission de Manoa par deux missionnaires apostoliques, dans l’année 1590 , le journaliste du Pérou ajoute ces mots : « Qui pourrait calculer les avantages qui résulte- » raient pour l’État et la religion (ou la civilisation) de » l'introduction du commerce et de Ja navigation dans » ces grandes rivières (dont l’une a un cours de plus de » neuf cents lieues et traverse les plus riches contrées de » l’Amérique du Sud) ? La découverte de l'Amérique a _ » causé une révolution générale dans le systême poli- .» tique de l’Europe et dans le monde des arts et des sciences. La richesse merveilleuse et la félicité du poé- tique et fabuleux Eldorado ne donneraient encore LS > > 150 SEANCES GENERALES. » qu’une faible idée des admirables résultats promis par » l'Amérique du Sud à l'humanité, L’établissement de » missions de Saint-Joachim d'Omaguas , situé au con- » fluent des rivières d’'Ucayali et de Maragnon , dont la » réunion forme le fleuve géant des Amazones , fera re- » vivre l’ancienne ville de Tyr, avec sa magique pros- » périlé, où tous les navires des peuples commercants » viendront apporter leurs tributs. Par le Maragnon, » monteront les navires de l’Amérique septentrionale, de » l’Europe , de l'Afrique et de l'Asie. Par la rivière Pas- » taza , viendront les productions de Quito (Équateur). » Par les rivières Huallaga et Mayro , arriveront les pro- » duits de Lima. Par l’Apurimac , viendront les produits » et les sucres de CGusco ét l’or de Carabaya. Par le Béni, » les produits des provinces de Maxoz et toutes les ri- » chesses des provinces de la Paix et de la Bolivie. De » cette manière, Saint-Joachin d’Omaguas sera le ren- » dez-vous commun et le centre de toutes les relations » Commerciales de ces contrées, » » La clé de cet immense foyer de richesses est dans les mains de la France , par sa possession de la Guyane française. La colonie, qui est notre avant-poste dans cette partie du monde, nous fournit des points favorables de station et de relâche , peu éloignés de l'embouchure du fleuve des Amazones, et nous permet de réaliser prochaï- nement les vœux et les espérances de populations loin- taines qui nous appellent et nous attendent. » La France et l'Europe ont besoin d'ouvrir de nou- veaux débouchés à leurs produits agricoles et industriels, et d'établir de nouvelles relations avec les vastes États des deux Amériques qui ont des richesses si abondantes et si variées à échanger avec nos produits. Un autre besoin, généralement senti , est celui d'ouvrir des carrières avan- tageuses à notre jeunesse qui ne trouve plus autour d’elle des’ aliments suflisants pour son activité, Un troisième et SÉANCES GÉNÉRALES. 151 urgent besoin , qui fait palpiter les cœurs généreux , les imaginations ardentes, est celui d’étendre et d’agrandir la sphère de l’instruction générale, en multipliant les sujets et les moyens d’observations «et d'expériences. Nous vou- Jons enfin satisfaire, non-seulement aux besoins physiques : et matériels de notre pays , mais aussi à ses besoins mo- raux et au sentiment élevé et profond de sa dignité , de son honneur , de sa mission qui lui prescrit de travailler eflicacement aux progrès de la civilisation universelle. » L'époque où nous sommes, la plus grande facilité des communications , les chemins de fer , la navigation à la vapeur , le goût des voyages , le besoin de nourrir et d'exercer son intelligence, l’accroissement rapide des po- pulations qui aspirent à se connaître, à s’instruire, à s’ai- der mutuellement , tout nous porte à explorer un monde nouveau, à peu près inconnu jusqu'ici. » Le voisinage où se trouve notre Guyane francaise de l’embouchure des Amazones , l’alliance récente et intime de la France et du Brésil semblent appeler toute la solli- citude des ministres français sur les avantages incalcula- bles que nous pouvons retirer , en peu d’années , de rela- tions commerciales nouvelles , très étendues et actives, avec les peuples nombreux de l'Amérique du Sud. Ils recevront avec empressement nos vins, nos draps et mille objets qui , chez nous, réclament un écoulement néces- saire qu’ils doivent chercher au loin. -» Eh bien! établissons un port libre dans la Guyane française. Il offrira un rendez-vous commun à tous les peuples qui prennent part au commerce du monde. Avant dix ans , notre France aura là son Caleutta, Il suffira de quelques bâtiments de l'État , qu’accompagne- ront à l’envi des navires d’armateurs et de commercants, pour remonter le fleuve des Amazones et une partie de ses affluents , pour établir des relations et des échanges avec les nations dont ces rivières baignent les territoires. 452 SEANCES GENERALES. Là, nous ferons des explorations de tout genre au profit des sciences naturelles et de notre industrie nationale, Là, nous déposerons des agents consulaires français , pourvus de connaissances relatives aux intérêts du com- merce , qui donneront de l’extension et de la consistance aux relations que nous aurons formées , et qui ne tarde- ront pas à se multiplier ; car les récits des voyageurs qui ont visité ces pays , et l’assertion de l’honorable don Pazos, démontrent qu’il existe dans ces contrées une sympathie générale pour Ja France et une disposition ins- tinctive à recevoir ses produits. » Dans ce même port libre , où s’arréteront les bâti- ments de l’Europe qui devront entrer en communication avec les peuples de l'Amérique méridionale , nous pour- rons fonder une grande université , composée de toutes | les facultés que peuvent comporter les sciences naturelles et les sciences médicales , les sciences géographiques et historiques , l’archéologie , la philologie , la science du droit international, l’industrie, le commerce et les arts, » Et l'élite de la jeunesse américaine descendra le grand fleuve et ses aflluents, pour venir puiser une ins- truction solide et variée dont la soif la dévore ! Et les jeunes étudiants de ces différents pays , appelés à partici- per aux mêmes enseignemenis , contracteront entre eux, dès le premier âge, des relations d'amitié et d'intimité qui influeront plus tard.sur l’union réciproque des nations dont ils font partie ! Et une grande fédération américaine du Sud se formera , sous les auspices de la France et de l’Europe , pour resserrer les liens de l’alliance générale des peuples et pour consolider la paix universelle ! Et notre jeunesse française , après s’être nourrie des leçons de nos habiles professeurs , ira répandre dans l’université franco-américaine les bienfaits de l’instruction qu’elle aura reçue en France ! Et beaucoup de familles améri- çcaines , en venant visiter leurs enfants dans cette univer- SEANCES GÉNÉRALES. 153 sité, n'ayant plus qu’une traversée de quinze jours pour venir en France , ne se refuseront pas un voyage qui ser- vira de complément aux moyens d’instruction que nous leur aurons offerts ! Et des relations multipliées, aussi pré- cieuses pour les progrès de la science que pour ceux de Pindustrie , étendront à l'infini les bienfaits des échanges et d’un avancement social , de plus en plus perfectionné ! Et cette influence. toute pacifique, toute scientifique , in- tellectuelle ‘et industrielle de notre patrie et des autres nations européennes, tournera au profit de l’Europe elle- même, de l’Amérique et du monde entier !.….. » Ce riant tableau d’un avenir peu éloigné n’est pas une vaine et séduisante utopie. La réalisation est dans nos mains , si nous la voulons fortement. Là est un puis- sant remède à une partie des souffrances de nos classes laborieuses, | » Si la France ne se hâte pas , l’Angleterre , qui orga- nise en ce moment une Société bolivienne , la Belgique, qui traite avec le gouvernement de l'Amérique centrale (Guatemala), pour y fonder une grande colonie , auront pris les devants sur nous. Il est opportun et urgent d’agir. » Les lecons du passé , les besoins impérieux du pré- sent, les intérêts de l’averir, tout nous convie à saisir le magnifique don qui nous est offert, UN MONDE NOUVEAU À EXPLOITER, nOn plus par la guerre et les conquêtes , mais par les sciences, les arts de la paix, l’industrie et le com- merce. » L'Amérique du Nord, en 1780, imporlait chez elle pour deux millions de nos produits; elle en importe au- jourd’hui pour plus de deux cents millions. Les vastes régions de l’Amérique du Sud sont appelées , avant peu d’anrées , et par les moyens que nous avons indiqués , à étendre , dans de bien autres proportions , les échanges qu’il s’agit d'établir avec elles. Et ce prodigieux résultat exige de nous moins de sacrifices que notre établissement 154 SÉANCES GÉNÉRALES. aux îles Marquises , et surtout que les funestes fortifica- tions de Paris. Quelques bâtiments de l’État ét quelques navires du commerce suffisent pour les explorations pro- posées. Quelle belle et utile application de la navigation transatlantique à la vapeur , consacrée par nos lois et re- commandée à l’activité intelligente du gouvernement et et du commerce! » Des remrciements sont votés à M. Pazos par l’assem- blée. La correspondance fournit : 1° Guide de l'acheteur de bestiaux , par M. Neveu- Dérotrie. 2° Notice historique sur la section d'agriculture de la Société royale académique de Nantes, de 1827 à 1837, par M. Neveu-Dérotrie. 3° Société nantaise d'horticuliure , sous la protection de S. M. la reine des Français, fondée en 14828 , n°’ 1", 2° et 3°. 4° Discours sur l'inauguration de la statue de Jeanne de Laval, par M. le docteur Hunault. 5° Discours sur l'inauguration de la galerie David, par M. Hunault. 6° Archives d'Anjou , recueil de documents et mé- moires inédits, par M. Paul Marchegay. M. de Caumont donne lecture du travail de la com- mission chargée de déterminer la ville où aura lieu la douzième session du Congrès. Les conclusions de la com- mission sont en faveur de Montpellier. (Voir page 165.) M. Roux demande s’il ne serait point possible de par- tager le Congrès entre Montpellier et Marseille. M. Mame propose une excursion seulement qui serait faite de Montpellier à Marseille, M. de Gaumont combat la proposition de M. Roux. SÉANCES GÉNÉRALES. 455 M. Roux émet le vœu que le Congrès, après la session de Montpellier, se tienne à Marseille. . .« M..de Gaumont pense qu’il n’est pa opportun d’agiter cette question. L'assemblée, par un vote, décide que la douzième session aura lieu à Montpellier, Cette session commencera ses travaux du 25 août au 4: septembre. M. de Caumont donne lecture des articles organiques relatifs à la tenue du Congrès à Mantpelons, ils sont adoptés par l’assemblée. Suit l’arrêté qui les contient: -ARTice 1%. La douzième session du Congrès scienti- fique de France se tiendra à Montpellier en 1844. Elle commencera du 25 août au 1°* septembre. Arr. 2. Le Congrès sera divisé en six sections qui por- teront les dénominations suivantes , comme à la session di RES ° Sciences naturelles : fs Agriculture et industrie ; 3° Sciences médicales ; 4° Archéologie et histoire; 5° Littérature et beaux-arts; | 6° Sciences physiques et mathématiques. Sous auçun prétexte il ne pourra être apporté de chan- gement à ces divisions. Arr. 3 MM. Lallemant, Marcel de Serres, À. de Lille, sont priés de former la commission d’organisation dans le sein de laquelle seront choisis des secrétaires pour les six sections. et le trésorier de la douzième session. * Arr. 4 La convocation de la douzième session sera faité au moyen d’une circulaire adressée aux savants de la France et de l'étranger. MM. les secrétaires des précé- dentes sessions seront priés d'aider MM. des commissaires 456 SÉANCES GÉNÉRALES. de la douzième dans cette distribution , chacun dans la province qu’il habite. AnT. 5. Le programme des questions qui seront mises à ‘étude dans la douzième session sera imprimé et distri- bué huit mois avant l’ouverture de la session. Pour éviter la reproduction des questions déjà discutées dans les pré- cédentes réunions , ou des questions qui ne seraient pas de nature à être mises en discussion , le comité de Mont- pellier communiquera le projet du programme à PTastitut des provinces. Anr. 6. MM. les secrétaires-généraux de la onzième session s’occuperont immédiatement de la publication du compte-rendu de cette session , de concert avec MM. les secrétaires et présidents des sections , en résidence à An- gers , qui formeront avec eux le comité de publication : ce compte-rendu sera Liré au moins à huit cents exem- plaires. AnT. 7. Cette commission est chargée de revoir les mémoires lus dans les séances ; elle choisira ceux qui lui paraîtront les plus importants ; elle pourra n’imprimer que par extrait , ou supprimer, si elle le juge convenable, les mémoires présentés pendant la session, lors même que l'impression en aurait été votée en section ou en séance générale. Arr. 8 La même commission présidera à la distri- bution du compte-rendu , dont cent exemplaires seront adressés, au nom du Congrès , aux académies et sociétés savantes. La commission prononcera sur toutes les difli- cultés qui pourraient s'élever ultérieurement, Elle don- nera aux secrétaires , chargés de préparer la douzième session , tous les renseignements qu’ils pourront désirer ; en un mot , elle sera investie des mêmes attributions que le Congrès qu’elle représentera jusqu’à l'ouverture de la douzième session. Arr, 9. Après la distribution du compte-rendu de la SÉANCES GÉNÉRALES. 457 _ onzièmé session aux membres du Congrès et aux sociétés savantes , un dépôt sera fait à Paris, chez M. Derache, libraire, déjà dépositaire des dix précédents volumes. Le produit de la vente sera déposé entre les mains du tréso- rier de l’Institut des provinces , au Mans, jusqu’à ce que le Congrès en ait arrêté l'emploi. Vingt-cinq exemplaires du compte-rendu seront aussi déposés au secrétariat de l’Institut des provinces. Le di- recteur de cette compagnie devra chaque année adresser un exemplaire de ce compte-rendu anx secrétaires char- _gés de la direction des sessions ultérieures du Congrès scientifique de France. M. Guinoyseau fait diverses observations sur la pu- blication des travaux du Congrès. Ces observations seront communiquées à MM. les secrétaires-généraux et particuliers. Un mémoire de M. Hunault est déposé et recommandé à MM. les secrétaires. Il est relatif à l’histoire du Congrès scientifique. M. de Falloux monte à la tribune et entretient l’as- semblée de l’intéressante question des parlements. Il fait un apercu historique de leurs révolutions. Il établit qu'ils ont été en général flottants entre le pouvoir royal et la puissance du peuple; qu’ils n’ont pas toujours suivi un plan arrêté ; qu’ils ont subi le plus souvent l’influence des circonstances. Il passe à la royauté, et dit que la maison de Bourbon paraît avoir eu la mission providentielle, après la ruine de la féodalité, de fonder la nationalité française. Il fait observer que Louis XIV mettait quelquefois Son absolutisme de côté pour appeler au faîte des plus hautes charges des hommes pris dans le sein du peuple. On n’a pas assez remarqué, dit-il, les sympathiés popu- laires de Louis XIV, 158 SÉANCES GÉNÉRALES. Une digression sur la cause des malheurs de la Pologne est vivement applaudie. Il passe au XVII: siécle, et déclare qu'il y avait alors deux règnes en France , celui de Louis XV, celui de Voltaire, et il dit que les Parlements n’ont pas protesté contre ce dernier. Il s'étend ensuite sur le règne de Louis XVI et parle du ministère de l’économiste Turgot , qui, malgré ses vues populaires, est renversé par l'influence des parle- ments. Il fait observer que la royauté, sous le ministère Ca lonne, demanda l'égalité des impôts, et que les parle- ments s’y opposèrent ; aussi les états-généraux décriè- rent-ils les parlements. Il rend cette justice aux parlements, qu’ils ont contri- buë à l’éducation de la nation française ; leur impartia- lité , leur austérité , leurs vertus ont eu une très haute influence sur nos mœurs ; mais M. de Falloux fait des réserves en donnant à entendre que son admiration pour eux se borne à leurs seules vertus. M. Jullien prend la parole sur la question des civili- sations ; il pense qu’il y a un danger pour elles, danger fondé sur l’absence d’idées religieuses et morales, il flé- trit en paroles très-vives la littérature courante, notam- ment les pièces dramatiques et les romans du jour. L’orateur est applaudi. M. Lecerf pense que l’avenir n’est pas aussi sombre que l’a prétendu M. Jullien. Si nous comparons, dit-il, nos temps modernes à ceux passés, nous verrons qu'ils valent mieux encore, sous le rapport religieux et moral, que les temps de la Ligue et de la Fronde, et que les règnes de Louis XV et de la régence. Jamais, a-t-il dit, a-t-on vu mieux qu’à notre époque le sentiment religieux se développer ? SÉANCES GÉNÉRALES. 159 N'y a-t-il pas en outre une tendance de pra: ment générale parmi les hommes? Confiance dans le présent , espérance dans l’avenir, doit être la devise de tous les Français. M. Jullien réplique en disant que, loin de jeter un man- teau sur les vices de la société, il convient au contraire de les signaler pour les guérir. Il termine par une pièce de vers, analogue à l'espoir qu’il a lui aussi de voir lhumanité s'améliorer. M. Trouessard cite deux faits en faveur des temps modernes : la révolution de 1830 et les événements de Lyon, dit-il, n’ont-ils pas prouvé combien, après la vic- toire, il y a de grandeur d'âme, de générosité et de res- peet dans le cœur français ? M. de Caumont, au nom de la ville de Lyon et dans le sien , dépose une médaille frappée à l’occasion de la neuvième session du Congrès, et il en fait hommage à la ville d'Angers. Cette médaille sera déposée au musée des antiquités. La onzième session est terminée par le discours sui- vant que prononce M. de Caumont : « Messieurs, » Nous regrettons tous vivement de ne pouvoir termi- ner nos travaux sous la présidence de celui qui les avait si habiiement dirigés pendant la session : il eût noblement Ÿ exprimé au nom fx tous, combien vos travaux de cette année ont présenté d'intérêt, combien chacun de nous a élé touché de l’accueil si hospitalier et si bienveillant qu’il a reçu dans cetle noble et studieuse cité d'Angers. En l’absence de M. de Las Cases, veuillez permettre que ma faible voix se hasarde, au moment de la séparation, à vous entretenir de quelques-uns des sentiments qui nous ani- ment, el des communes espérances que nous formons 160 SÉANCES GÉNÉRALES. pour le développement et l’avenir de l'institution du Con- grès scientifique. » (Après s'être livré à diverses considérations sur lim- portance el le but des Congrès scientifiques , M. de Cau- mont a terminé ainsi) : « Chaque année nous avons à enregistrer de nouveaux faits, à constater de nouveaux progrès qui démontrent l'accroissement de cette heureuse impulsion à laquelle Le” Congrès scientifique de France a pris une part si belle et si large, et nous n’en voulons pour preuve, Messieurs, que le développement de ces réunions qui partout se for- ment à l’imitation de celle qui nous rassemble. L’associa- tion bretonne, la société encyclopédique des bords du Rhin , et plusieurs autres compagnies nouvellementeréées, démontrent que les anciens corps académiques ne sau- raient plus suflire aux besoins intellectuels de Pépoque; on veut partout de grandes réunions où tout homme puisse apporter le tribut de ses études et de son expé- rience : on les veut, comme on veut les chemins de fer, parce que ces associations fonctionnent avec plus de puis- sance, et doivent produire plus que les anciennes sociétés, dont l’horizon ne dépasse pas les limites d’un arrondisse- ment ou d’un département, » Ainsi, Messieurs, c’est un fait incontestable aujour- d’hui que la vie intellectuelle, autrefois concentrée à Pa- ris, et dans quelques villes privilégiées, se répand et cir- cule librement dans toutes les parties de la France : on peut dire même que cette vie est plus forte, plus indé- pendante en province, parce que là l’étude n’est pas un moyen de parvenir, et qu’on n’y fait point de la science par spéculation. » À Paris où tout le monde se presse, s’insinue, se sup- plante, la plupart fauchent le blé en vert, impatients qu'ils sont d'attendre le temps d’en moissonner les épis : | | | | SÉANCES GÉNÉRALES. 161 en-province on étudie avec plus de crois de sagesse et de maturité. + » Ges-réflexions n’ont d’autre but, Messieurs , que de vous: fortifier dans la persuasion où nous devons être que le Congrès scientifique de France; peut rendre d’impor- tants se UE en dirigeant le goût de l’étude qui s’est réveillé sur tous les points de la: France, que de vous montrer combien doit être belle la part que prendra dé- sormais la province dans le grand mouvement intellectuel de notre époque, »,La XI session du Gongrès scientifique de France à de nouveau révélé combien la province est riche en hommes éminents; vous avez témoigné par vos applaudissements le plaisir que vous ont fait éprouver les orateurs qui sont venus. à celle tribune vous soumettre de vive voix ou par écrit , lc-résultat de leurs méditations sur les problêmes que. vous aviez mis à l’étude. Les objéts traités dans vos séances, et le talent.qui lés a développés, ont excité un mouvement d’altention et d'intérêt qui ne s’est pas aflai- bli un seul instant. » Miusi, Messieurs, sous tous les poid , le Congrès d'Angers a répondu à l'espoir que le monde savant en avait-concu ; toutes les sections ont également produit des travaux utiles et remarquables , toutes ont mis à profit le 4émps qui leur a été accordé, et chacuñe , selon sà spé- cialité, vons a présenté dans son compte rendu quotidien la, preuve qu’un grand nombre de léctures-et de commu- nications ont été faites à tous vos bureaux. l » D’ imposantes solennités sont venues d’ailleurs: signa- ler la Xi° session du Congrès : l’inanguration de la statue du bon roi René d'Anjou nous a vivement émus. Gelte belle cérémonie, dans laquelle M. de la Sicotière a été notre éloquent interprète; a donné à cette session un double caractère, Science et Patriotisme : deux choses TE 11 162 SÉANCES GÉNÉRALES. qui doivent toujours être unies, et qu'aucun de nous ne saurait comprendre PC | Û » Permettez, Messieurs , qu’au nom de | ruobomnbteilé. de Las Cases, j'adresse en terminant les remerciements du Congrès aux personnes qui ont bien voulu prendre part aux travaux de la session , à tous ceux qui ont prêté leur concours et leurs lumières au développement de Pinsti- tution. » Et d’abord je dois remercier au nom de tous, MM. les secrélaires-généraux du Congrès : les préparatifs d’une session sont toujours longs et difliciles, il fallait tout le talent, toute la persévérance dont'ils ont fait preuve pour conduire à si bonne fin les travaux du onzième Congrès scientifique ; nous avons lous apprécié le zèle, le dévoue- ment qui les ont constamment animés, et je suis heureux de leur offrir aujourd’hui expression publique de votre reconnaissance et de votre satisfaction. » Je dois aussi offrir les remerciements du Congrès à M. le préfet de Maine et Loire , à M. le maire et à l’admi- nislration municipale d'Angers , qui ont mis à votre dis- position les belles ‘salles où nous nous réunissons , et géné- reusement pourvu aux moyens de vous rendre le séjour d'Angers agréable, par des fètes dont vous conserverez longtemps le souvenir, » La ville de Nantes , ses administrateurs , les sociétés savantes qu’elle renferme , nous ont donné des preuves éclatantes de sympathie dont vous avez tous élé vivement émus ; je crois être linterprète da Congrès , en vous pro- posant encore de voter des remerciements à M, le maire de Nantes et aux sociétés savantes , qui vous ont reçus dans cette ville avec tant d'empressement. » Après nous être ainsi acquiltés envers les hommes qui ont si bien secondé les eflorts du Congrès , qui l'ont sihonorablement accueilh, nous n’aurons plus qu'à for- mer un vœu, celui de nous retrouver tous , l’année pro- SÉANCES GÉNÉRALES. 463 chaine, dans la ville que vous venez de choisir pour siége de la XIF° session. » "M. Hunault demande que (AR rémerciements soient votës pour le bureau. L'assemblée adhère avec un n vif empressement. La séance est levée. OMISSION. Une erreur typographique a fait omettre une partie importante de la séance générale du 2 septembre, qui se trouve ainsi forcé- ment rejetée ici. . Après celte lecture et après celle du procés-yerbal de la sixième, M. le président accorde la parole à M. Jul- lien, qui propose à l’assemblée de créer dans chacune des Sebtrdts une commission chargée d'étudier ce qu'il peut y avoir d’intéressant en Anjou, à des points de vue divers, La proposition est appuyée. M. Lecerf prend la parole contre et développe ses motifs. M. de la Sicotière s’unit à M. Lecerf pour combattre . sous un autre point de vue, Ja proposition de M. Jullien, qui Jeur réplique à son VASE: ” M. Robinet demande l’ordre du jour, en faisant ob- server que cette proposition n’a pas été soumise ‘au bu- reau Central. "M. Jullien réplique de nouveau. M. le président met aux voix l’ordre du jour qui.est adopté. M. Hunault fait observer que cette décision ne peut porter préjudice 2 à la commission de diverses statistiques relatives à FAnjou, 164 SÉANCES GÉNÉRALES. L'assemblée donne son assentiment à cette observa- tion. La parole est à M. de Caumont, qui fait part de wive voix de divers travaux de l’Association normande et de plusieurs autres sociétés. M. Goguel fait observer à l’assemblée que si les comp- tes-rendus du Congrès de Strasbourg, ne sont pas en- core imprimés, il faut en attribuer le retard moins à la négligence qu’à diverses circonstances étrangères au bon vouloir des secrétaires-généraux. Il demande ensuite si l’assemblée veut considérer la Société encyclopédique des bords du Rhin, comme une succursale du Congrès. M. Lecerf pense qu’il n’y a pas d’inconvénient à pa- troniser cette Socièté. mais il s’oppose à la considérer comme une création du Congrès. M. Freslon monte à la tribune et combat M. Lecerf, par la raison surtout que cette Socièté réunirait l’Alle- magne et la France, il fait très-spirituellement remar- quer que si « nous ne voulons pas prendre le Rhin aux » Allemands, nous pouvons leur prendre leurs idées et » leur communiquer les nôtres. » Divers autres membres prennent part à la diseussion, M. Lecerf pense que la question peut être tranchée par l’examen du texte. Un membre dit qu’il existe une délibération faite à Strasbourg sur ce sujet, et que cette délibération n’est pas rapportée. Il en conclut que la question n’est pas opportune. M. Bélouino prend également part à la discussion. M. Robinet formule une déclaration ainsi conçue : « C’est avec un vif intérêt que le Congrès a entendu le compte-rendu par M. Goguel, des efforts généreux des SÉANCES GÉNÉRALES. 165 commissaires nommés pour l’établissement de la Société encyclopédique des bords du Rhin. Le Congrès s’associe de tous ses vœux au succès de leurs efforts, et prie M. Goguel d’être son interprète auprès d’eux. » Cette formule est adoptée par acclamation. La séance est levée. ae | RAPPORT De la commission centrale sur le choix de la ville où devra se réunir la 12° session du Congrès scienti- fique de France. Messieurs, Votre commission centrale s’est réunie pour examiner dans quelle ville devra se tenir le prochain Congrès; elle a pris connaissance des demandes écrites ou verbales adressées de différents points de la France. Deux demandes écrites ont été adressées : la première, par M. Marcel de Serres , au nom de M. Lallemant et de plusieurs professeurs de Montpellier ; la seconde , par l’Académie des sciences, arts et letires de Rheims. De son côté , M. Roux (de Marseille) a demandé , au nom de plusieurs de ses compatriotes , que le ail se tint dans celte ville en 1844. La ville d'Amiens a encore été indiquée comme récla- mant le Congrès pour une époque rapprochée, mais qui sera subordonnée à celle où la statue de Ducange pourra être terminée et inaugurée. Enfin quelques membres ont exprimé le vœu que le Congrès choisisse, d’ici à quelques années, pour ses réu- nions, les villes de Nancy, Dijon, Rennes, Tours et Tou- louse, 166 SÉANCES GÉNÉRALES. Votre commission considérant que la ville de Montpel- lier avait élé désignée par le Congrès de Lyon , eomme très favorablement située pour nos réunions ; qu’elle est au centre de lx France méridionale , à me disiance pres- que égale de trois grands centres de population ; Lyon , Marseille et Toulouse; qu’elle renferme des professeurs d’un grand mérite, et que ses Facultés ont une célébrité reconnue et méritée, s’est prononcée en faveur de Mont- pellier, et m’a chargé de vous soumettre larrêlé suivant conforme à tous vos arrêtés précédents relalifs à la tenue du Congrès. A. DE CAumonr, Vice-Président. Angers, 11 septembre 1843. » PEOCÉS-VEREAUX LÉTAR EF NE L DES .,'. : SECTIONS secsce0000 061910081608 1OsscarscesarseosiecacesesecsiacetsiS05:e09 60e * PREMIÈRE ET SIXIÈME SECTION RÉUNIES. SCIENCES: NATURELLES , PHYSIQUES ET MATHÉMATIQUES. 0 00 —— Première séance. — Du 2 septembre 1843. La section des sciences naturelles s’est, réunie à sept heures sous la présidence de M. Planchenault, l’un des secrélaires généraux du Congrès. Elle a procédé immédiatement à la formation de son bureau qui a été composé de la manière suivante : Président, — M. Desvaux, naturaliste de Nantes. Vice-président. — M. A. Boreau, directeur du.jardin botanique d'Angers, Secrétaires. NL Wolski , ingénieur civil à Angers. 2 M. Beraud , conseiller à la cour royale d’ 7 — M. Trouessard , professeur de sciences DR MAULS au collège royal d'Angers. M. Desvaux ayant pris place au bureau avec le vice- président et les secrétaires, la séance a été ouverte par la Jecture des questions du programme de la première sec- tion du Congrès. M. le président a invité ceux des mem- bres présents, qui auraient préparé des travaux sur ces questions, à vouloir bien se faire inscrire. Après cette inscription, M. Desvaux a pris la parole pour faire à la section deux communications. La première a eu pour objet de faire connaître la des- 168 PROCÈS-VERBAUX criplion et la figure du genre mycenastrum , champignon globuloïde du groupe des hycoperdées. La seconde était un synopsis des poissons des côtes de l'Ouest. de la France , accompagné de quelques figures. Avant de lever la séance, la section a émis le vœu de se voir réunie à la section des sciences physiques et ma- thématiques. $ Première séance. — Du 2 septembre 1843. Rapporteur de la sixième section : M. DEBRUN, secrétaire. La section des sciences mathématiques et physiques s’est réunie aujourd’hui 2 septembre, à neuf heures du matin, sous la présidence de M. Guillory , l’un des secré- taires généraux du Congrès. Elle a procédé immédiatement à Ja formation de son bureau qui à été composé de la manière suivante : Président. — M. Robinet, membre de la Société royale et centrale d’agriculture. Vice-président. — M. Trouessard. Secrétaires. — M. Heuzé (Gustave), du Grand Jouan. — M. Debrun-Guyer, professeur de mathématiques au collège royal de la Rochelle. — M. Godfroi, professeur de chimie et de pharmacie à l’école de médecine d’Angers. Le bureau ainsi constitué, la séance a été ouverte, et les membres présents ont témoigné le désir de voir leur section réunie à celle des sciences naturelles qui a mani- festé le même vœu. En conséquence, la section s’est ajournée jusqu’à la décision du Congrès, qui devra être provoquée à la prochaine séance. Deuxième séance. — Du 3 septembre 1843. Rapporteur : M. Wozsxr, secrétaire, La première et la sixième section se sont réunies le DES SECTIONS. 169 3 séptembre , à sept heures du matin, sous la présidence de M. Desvaux. On a procédé à la formation da Mise de cétte section réorganisée , qui a été composé de la manière suivante : Président. — M, Robinet. Vice-présidents. —_ M. Boreau., — M. Desvaux. Secrétaires, —M. Wolski, —M. Trouessard. — M. Be- raud. — M. Debrun. — M. Heuzé. — M. Godfroi. Les membres du nouveau bureau ont pris leurs places , et M. le président a proclamé que la nouvelle section, provenant de la fusion de deux anciennes, porterait le nom de celle de Sciences naturelles, physiques et mathé- matiques. Les mémoires suivants ont été déposés : 1° Le moyen, en agriculture et.en horticulture , d'ob- tenir à volonté des variétés dans une direction voulue, par M. Desvaux. M. Millet, naturaliste, d'Angers, commissaire, a été chargé d'analyser ce mémoire. 2° 3 pe essai sur la marne et toutes les éihéaibes confondues avec elle , suivi d’une application générale des amendements terreux quels qu’ils soient; fait par le même membre, et confié à la révision de M. Heuzé, com- missaire, f :44 Mémoire sur la formation de le soie, p2r M, Robi- et donné à l’examen de M. le docteur Bourjot, de = , Commissaire, 4 Description sommaire d’un A simple, à aie duquel un homme de force ordinaire pourra sans fatigue appliquer une partie plus ou moins considérable du.poids de la somme des masses d’un systême roulant, dont, il fera partie, telle qu’une voiture sur une route or- dinaire, ou sur un chemin de fer; pourra lui imprimer un mouvement tenant lieu d’une force de traction égale 170 PROCÈS-V ERBAUX à celle d’un nombre N de chevaux, et remplacer la force expansive de la vapeur. M. Debrun, commissaire , s’est chargé de l’examenide ce mémoire, 5° Une lettre de M. Raimbault, vétérinaire, de Thouarcé, jointe à un mémoire d'observations méléorologiques , confié aux soins de M. Debrun , commissaire, M. Robinet dépose deux livraisons : 1° Procédé pour le battage des cocons, ou moyen d’ob- tenir des cocons le plus de soie possible. 2° Troisième Mémoire sur le mûrier. Elles sont renvoyées au secrétariat général. Les deux Mémoires lus par M. Desvaux , à la séance d’hier, sont également renvoyés au secrétarial. M. Bourjot- Saint-Hilaire a lu une note relative aux deux prémières questions de la première section du pro- gramme, Ces questions vastes, et qui embrassent la phi- losophie de la création, ont mérité des développements que la teneur d’un procès-verbal ne peut comporter. Il nous suffira de dire que , par une vue générale, ce natu- raliste nous a fait assister à la création binaire et comme parallèle entre les animaux et les végétaux, marchant ensemble, et cependant séparément vers la complicité organique , el la perfection. La section émet le vœu qu’une note plus étendue soit insérée au compte rendu imprimé, M. Boreau présente des objections de détails qui n’ont peut-être pas renversé cette vue d'ensemble, encore à l’état d’une vaste ébauche. M. Millet a fait l'hommage au Congrès de trois ouvrages : 1° Faune de Maine et Loire, ou Description méthodi- que des animaux qu’on rencontre dans toute Fétendue du département de Maine et Loire , tant sédentaires que de passage; avec des observations sur leurs mœurs, leurs habitudes , etc. , etc. , en deux volumes. 2 Mollusques terrestres et fluviatiles de Maine et Loire. DES SECTIONS. 471 3° Tableau méthodique des mollusques terrestres et flu- viatiles, vivants, observés dans le département de Maine et Loire. 4 Mre Cauvin, naturaliste, du Mans, demande à présen- ter les dix-huit volumes de la monographie des champi- gnons. La section. se propose de's’en occuper nent ment à sa grande satisfaction. M. Wolski , l’un des secrétaires de la section, com- mence la lecture d’un travail très-remarquable et fort étendu , qui traite les sixième et septième questions du pro- gramme de la section des sciences natnrelles. Dans ce travail, M. Wolski a étudié d’une manière générale non seulement le gisement des houïilles dans l’Anjou et l’asso- - ciation du marbre aux couches exploitées, mais encore les relations géologiques du bassin anthracifère, avec les divers terrains qui l’avoisinent et le couvrent. Il a fait l'hommage au Congrès de deux cartes géologiques, faites avec 1" ÿTeL grand soin, et a mis à sa disposition , dans la salle du secrétariat général, une collection de quelques centaines d'échantillons de divers terrains. Il est chargé, concurremment avec M. Bourjot, d’en faire un extrait pour être présenté à la séance générale. La réunion de la section émet le vœu que le mémoire tout entier, avec ses caries, figure dans le compte rendu de la onzième session. À roisième séance, — Du 4 septembre 1843. Rapporteur : M. TROUESsARD\, Secrétaire. La séance a été ouverte à sept heures sous la présidence de M. Robinet. Le procès-verbal de la séance précédente ayant été déposé au secrétariat-général , pour être inséré au Bul- 172 PROCÈS -VERBAUX tin, la lecture en est ajournée à la fin de la séance de ce jour. Les ouvrages suivants sont déposés sur le bureau de la section: | 1° De la nécessité d’un ministére spécial pour l’agri- culture , par M. Puvis, de l’Ain, correspondant de l’Ins- titut de France. 2° Mémoires de la Société linnéenne de Normandie, avec cartes géologiques, par M. de Gaumont. 5° Statistique de Maine et Loire, publiée en 1834, par la Société d’agriculture , sciences et arts d'Angers, 1°° partie. 4 Statistique de l’histoire naturelle, par M. Desvaux., La section vote des remerciements aux auteurs qui ont bien voulu lui faire hommage de ces ouvrages. L'ordre du jour appelle un rapport verbal de M. Des- vaux sur {a Faune de Maine et Loire, de M. Millet, « Get ouvrage, dit le savant rapporteur, n’est pas une de ces compilations trop nombreuses aujourd’hui en his- toire naturelle. C’est le travail d’un observateur qui étu- die la nature, non dans son cabinet, mais au milieu des campagnes, el qui suit ainsi les animaux, à l’état de liberté, dans toutes les particularités de leurs mœurs. Indépen- damment des faits nouveaux, des détails de mœurs incon- nus , on trouve encore dans l’ouvrage de M. Millet des espèces qui avaient échappé aux divers auteurs des Faunes de la France. » À celte occasion, M. Desvaux croit devoir consigner ici que la grenouille décrite pour la première fois par M. Millet, sous le nom de Rana flavi-ventris, et dont l'existence , comme espèce nouvelle , avait été révo- quée en doute par quelques zoologistes , est si multipliée dans le département de la Loire-Inférieure, et a des mœurs si distinctes , qu’elle doit être définitivement regardée comme une nouvelle espèce acquise à la science. L DES’ SECTIONS, 173 M. Heuzé rend ensuite compte d’un ouvrage inédit de M. Desvaux et qui a pourtitre : Mémoire sur les marnes et sur toutes les substances qui ont été confondues sous cette dénomination. C’est, dit M. Heuzé, une monogra- phie complète des marnes et des substances terreuses employées à l’amendement des terres. Ge travail très recommandable résume toutes les idées émises sur ces matières par les divers auteurs qui s’en sont occupés. Par sa nature, c’est un ouvrage plutôt théorique que pratique qui sera consulté par l’agronome avec fruit , à cause des nombreux documents qu’il renferme. Le rapporteur croit deyoir ajouter toutefois que la science agricole aujour- d’hui ne peut accepter toutes les doctrines théoriques professées par M. Desvaux. Il émet le vœu que M. Des- vaux fasse imprimer : son travail et que la section veuille bien le remercier de sa communication. Les conclusions du rapport sont adoptées , et M. Des- vaux est invité à choisir lui-même dans son ouvrage les chapitres qu’il se propose de lire dans une des prochaines séances. M. Bourjot-Saint-Hilaire, qui a pris communication du Mémoire sur la formation de la soie, que M. Robinet a présenté à la section, en rend un compte qui fait vivement désirer la lecture complète de ce beau travail. L’organi- sation des vers à soie et en particulier la description des organes qui secrètent et élaborent la matière de ce fi pré- cieux , description accompagnée de figures où l’on peut suivre tous les détails anatomiques , offrent un sujet d’é- tude du plus haut intérêt. La lecture du mémoire de M. Robinet est mise à l’ordre du jour de demain. M. Debrun , auquel avait été renvoyé un Mémoire de mécanique, adressé par un anonyme à la section, dit qu'il n’y apas lieu de s’en occuper. Il s’agit encore ici d’une de ces rêveries de mouvement perpétuel auxquelles la science n’a pu encore faire renoncer certains esprits qui 174 PROCÈS-VERBAUX semblent avoir pris à la lettre cette parole célèbre : «{m- possible n’est pas un mot français. » La liste des rapports à l’ordre du jour étant. A épvisée , M. le président , pour réparer un oubli fait dans la séance précédente, lit le programme des questions de la sixième section du Gongrès , quiest maintenant réunie à la pre- mière, et quelques membres se font inscrire pour prendre la parole sur ces questions. - M. Robinet présente ensuite à la section la deuxième partie de ses recherches sur la production de la soie en France. Le savant professeur , dont le zèle si éclairé , si persévérant , et on peut ajouler, si désintéressé pour les progrès de l’industrie de la soie ; et connu et justement apprécié de nous tous, est venu communiquer au Gongrès un vaste travail inédit, dont l’Académie des sciences pourra se montrer jalouse de n’avoir pas eu les prémices. La première partie de ces recherches , relative à la pro- duction de la soie en France, a été présentée à votre sec- 1ion de l’agricultureet dé l’industrie, La deuxième partie, présentée à notre section , a pour tilre : Des propriétés générales de La soie. Pour se conformer à l’usage, un des membres de cette section , M. Trouessard , a été chargé d’en prendre communication avant que la lecture ne soit mise à l’ordre du jour. Après cette présentation , la parole a été donnée à M. Wolski pour achever la lecture de son mémoire sur le bassin anthracifère de Maineet Loire. M. Wolski, à l’aide de démonstrations sur la carte géologique qu’il a dressée lui-même et de figures présentant les coupes théoriques du terrain en différents points du bassin, a pu faire suivre ses descriplions à tous les membres présents , et leur indi- quer neltement les directions et les inclinaisons des diflé- rentes couches. Il a terminé en proposant quelques idées théoriques sur la formation du bassin qu’il venait de dé- cuire, Sous forme d’appendice, il a aussi donné un apercu DES SECTIONS. 175 théorique des exploitations houïillères faîtes dans ce bas- sin, ét'enfin une notice statistique des produits des exploi- tations actuelles. La section , après la lecture de ce long et savant mé- moire auquel elle donne les plus grands éloges, le renvoie à la commission centrale, en émellant le vœu qu’il soit entièrement imprimé dans le vérin des séances du Congrès. M. # doteur Desnos, d’Alencon, un des membres de la section, devant prochainement quitter Angers , demande la parole pour une communication qu’il croit de nature à intéresser la section. Il présente une nolice topographi- que et médicale sur les eaux minérales de Bagnoles , dé- partement de l'Orne , avec différents minéraux recueillis dans le lit sur lequel couient ses eaux. Quelques échan- tillonsont paru à la section être d’origine ignée. Gelte cir- constance jointe à l’action corrosive qu’exercent les eaux sur des métaux tels que le cuivre , bien qu’on n’ait pu ÿ accuser la présence d’un acide , engage la section à ap- peler l'attention des géologues et des minéralogistes sur celte localité qui lui paraîl mériter d’être étudiée. Elle remercie M. Desnos de sa communication , et elle ac- cepte les échantillons de minéraux qui lui ont été présen- tés; elle les fera déposer au secrétariat-général, Mr°< Gauvin met ensuite sous les yeux de la section de mombreux et volumineux cartons, où elle a réuni les figures coloriées de tous les champignons qu’elle à pu dbecier à l’état naturel ou qu’elle a déjà trouvés figurés dans les ouvrages spéciaux, M" Gauvin, qui est eg à la pra- tique des arts du dessin et de la peinture , est cependant _ parvenue , à force de travail et de persévérance , à repré- senter très fidèlement les champignons. M. Boreau, qui a pris communication de celte riche collection , regarde le travail de M Cauvin comme tout à fait digne d’éloges et comme fort utile à consulter, La section remercie 176 PROCÈS-VERBAUX Me Cauvin de sa communication , et sur le désir qu’elle exprime qu’un membre de la section , qui se serait spé- cialement occupé de champignons, voulût bien lui accor- der ses conseils pour nommer les espèces qu’elle a peintes d’après nature sans en connaître le nom botanique, la sec- lion désigne M. le docteur Aulet, d’Houdan (Seine-et- Oise), qui a accepté. | Avant de lever la séance , le secrétaire donne lecture du dernier procès-verbal, Après celle lecture, M. Boreau réclame contre la rédaction d’une partie de ce procès- verbal et demande que la note rectificative qui.suit soit annexée au procès-verbal de la séance de ce jour: a M. Boreau témoigne le désir qu’il soit exprimé que ses observations sur la note de M. Bourjot-Saint-Hilaire se sont bornées à énoncer ce fait : Que si , dans le règne animal , l’hermaphrodisme indique des êtres d’un degré inférieur , il n’en est pas de même parmi les végétaux ; que la plante qui réunit les deux sexes dans la même fleur est, à ses yeux , plus parfaite que celle qui les présente séparés, et qu’un magnolia lui semble de beaucoup supé- rieur à un chêne, La diclinie n’étant que le résultat d’un avortement , la plante se placera dans un ordre d’autant plus élevé que ces avortements seront plus rares. » M. Robinet demande une autre rectification. La section n’a point voté l’impression dans son procès-verbal de la note de M. Bourjot-Saint-Hilaire. Celte note , ainsi que toules les autres communications d’une certaine étendue, doit être renvoyée à la commission centrale , qui en or- donnera l'impression, s’il y a lieu, dans le compte-rendu du Congrès. Cette rectification est adoptée par la section. La séance est levée à neuf heures, DES SECTIONS. 477 Quatrième séance. — Du 5 septembre 1843. Rapporteur : M. DEBRUN, secrétaire. Mardi , 5 septembre, les membres de la section des sciences naturelles, mathématiques et physiques , se sont réunis dans le lieu ordinaire de leurs séances, sous la pré- sidence de M. Robinet. À sept heures un quart, la séance est ouverte. . Le procès-verbal de nos derniers travaux étant chez Pimprimeur, la lecture est renvoyée à la fin de la séance. M. le président donne communication de la correspon- dance : elle présente deux notes de M. Durand, pharma- cien en chef des hôpitaux de Caen , ayant pour litre : lune, Recherches sur l’empoisonnement par l’arséniure trihydrique; l’autre, Expériences concernant l'emploi du procédé de Marsh dans les recherches de la médecine légale. M. Godfroi, commissaire, est chargé d’en prendre communication et d’en faire un rapport pour demain. M. Auiet donne lecture de son rapport sur l'ouvrage de Me Cauvin sur les champignons ; ce rapport est ainsi concu : MESSIEURS, Mme Cauvin, dont l'ouvrage vous a été présenté hier , s'occupe, depuis quelques années , de la recherche des champignons. Cette dame, favorablement placée pour l'étudede ces cryptogames , en a recueilli un très-grand nombre et les a classés d'après les méthodes suivies par MA. Decandolle, Poisson, Derby et Roque. Ce travail , éminemment remarquable , a dû demander à son au- teur des recherches excessivement minutieuses; maïs ce qui le rend surtout curieux, c'est que l’auteur , qui, avant ce travail, n'avait aucune idée du dessin. a représenté les champignons d’une manière Si vraie, qu'il n’y a pas possibilité de méconnaître chaque individu. Ces champignons , représentés dans leurs divers degrés de dévelop- pements , sont peut-être aujourd'hui ce qu'il y a de plus complet dans cette partie de la science , et l’emportent sur les dessins d’ha- T, L 12 178 PROCÈS -V ER BAUX biles artistes qui, pour embellir la nature , la rendent quelquefois mécornaissable. Votre rapporteur, Messieurs , pénétré de l'importance de ce tra- vail, demande que des remerciements soient adressés à son auteur, et que des éloges justement mérités soient votés ponr Mme Cauvin, dont le nom doit être aujourd’hui placé au premier rang des micolo- gistes les plus distingués. M. Trouessard , chargé de prendre communication avant lecture d’un travail de M. Robinet sur les proprié- tés générales de la soie, déclare à la section que ce travail est fort intéressant et conclut à la lecture, qui constituera l’ordre du jour le plus prochain. M. Debrun , chargé de prendre connaissance d’un tra- vail météorologique de M. Raimbault (de Thouarcé), annonce que ce travail peut être regardé comme une réponse aux 8° et 9° questions du programme (sixième section), Il croit en outre que les résultats consignés par l’au- teur peuvent être d’une grande autorité pour le départe- ment, et conclut, er conséquence, pour la lecture, qu’il est chargé de faire immédiatement. Quelques observations sont présentées à la suite de cette lecture par MM. A. Menière , naturaliste d'Angers , Puwis et Trouessard, sur les causes qui ont pu produire les phé- nomènes indiqués au programme , et qui diffèrent de ceux observés par M. Raimbault; mais comme M. le docteur Hupault, d'Angers, doit donner prochainement connais- sance d’un travail météorologique sur le même objet, la section renvoie après celte lecture la suite de cetle impor- tante discussion. L'ordre du jour appelle la lecture d’un mémoire de M. Robinet sur la formation de la soie; on s’en occupe immédiatement. Ge savant, dans un travail consciencieux, plein d'idées neuves , et dégagé des termes techniques et scientifiques dont sont ordinairement hérissés les ouvrages de cette nature, nous a présenté d’abord Panatomie com- | | 14 | | | | | | | DES SECTIONS. : 179 plète de l'appareil producteur du ver à soie, puis les phases successives que subit cette dernière substance de- puis sa formation à l’état liquide jusqu’au moment où elle -est transformée en cocons. La section , après avoir en- tendu cette lecture avec le plus vif intéret, témoigne, par ses applaudissements, ses remerciements à M. Robinet, et décide que ses conclusions seront insérées au procès-ver- bal, et que le mémoire sera fortement recommandé à la commission permanente , pour être imprimé en entier . dans le compte-rendu. Voici les conclusions de ce mé- moire : 1° La soie s'échappe par un orifice simple et membraneux, pra- tiqué dans uu appendice conique et charnu adhérent à la lèvre infé- rieure du ver à soie. J'appelle trompe soyeuse ou sériducte l'ensemble de cet organe. 20 La soie arrive à cet orifice par un canal unique très court ré- sultant de la réunion des deux tubes soyeux. 80 La partie antérieure des tubes soyeux est capillaire. Elle est soudée à la partie moyenne très renflée qui coustitue le réservoir proprement dit. La partie postérieure consiste en un cylindre grêle, très allongé ; c’est probablement l'organe sécréteur. 40 La soie est à l’état d'un liquide épais gélatineux, dans les deux parties postérieures de l'organe. Elle se solidifie dans le ‘tube capil- Rire. Elle arrive à l’état concret au méat externe. 5° Le ver comprime son fil au moyen des contractions d’un coude que forment les deux tubes capillaires à leur point de réunion. C’est ainsi qu'il parvient à arrêter l’excrétion de la soie et à se suspendre à son fil. 60 La matière soyeuse est toujours izcolore par elle-même ; ele tient la couleur qu'elle affecte dans certains eas de la présence d’un enduit qui l'accompagne dans les réservoirs et sort avec elle. - 7° La forme conique du fil de soie est due au rétrécissement pro- gressif des tubes capillaires , qui doivent être considérés comme la filière de la soie. 8° Tous les autres phénomènes qui avaient fait supposer que la soie existait à l'élat d'écheveau dans les réservoirs, s'expliquent faci- tement par le fait de sa solidification dans Les tubes capillaires avant leur réunion, 130 PROCÈS-VERBAUX 90 L'expérience de M. Straust-Durkeim est exacle ; mais cle ve prouve pas la préexistence du fil dans les réservoirs. 109 Lyonet n'admettait pas l'existence d'une pelotte, de soie, comme l’ont dit pur errcur MM. Bourcier et Poorliman, Il a reconnu comme moi la liquidité de fa soie dans les réservoirs, et, avec AUPIQUES différences, sa.solidilication dans le tube capil- laire. 119 Il reste à expliquer ce dernier phénomène, c’est-à-dire à dé- terminer sous quelle influence la malière soyeuse liquide prend, dans les tubes capillaires , la forme d’un fit solide. À cet égard , il n’existe que des conjeclures. M. Godfroi adresse à l’auteur cette question : La ma- tière jaune qui se trouve dans certains vers à soie, dans les proportions de 25 p. °7,, y est-elle ou non en sus de la quantité de soie qui se trouve dars les cocons blancs ? Voici la réponse : L’enduit agglutinatif qui soude les fils de soie existe toujours, ayec ou sans couleur, dans tous les cocons , et par conséquent ne modifie pas la quantité de soie pure que l’on peut extraire des uns et des autres. M. Wolski présente à la section un résumé succinet de son beau travail de géologie da département qu’il a lu précédemment. La section , ainsi qu'il a été décidé, le renvoie à la commission permanente pour être ensuite lu en assemblée générale. Le secrétaire donne lecture de l’esquisse des travaux du jour. La séance est levée à neuf heures un quart. Cinquième séance. — Du 6 septembre 1843. Rapporteur : M. WozsKi, secrétaire. M. Robinet ouvre la séance à sept heures du matin. M. Debrun, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du 5 septembre , qui est maintenu intégrale- ment, DES SECTIONS. 181 Au sujet des questions posées au programme sur la mé- téorologie , M. le docteur Hunault présente à la section une suite d'observations météorologiques remontant à plus de quarante années ; les premières, de 1797 à 1824, par M. Haran, propriétaire à Beaufort , et les secondes, depuis cette époque jusqu’à ce jour , faites par lui-même à Angers. [l a fait connaître ensuite qu'il a tenu un compte particulier et spécial de cette météorologie com- parée , à l’occasion des diverses éclipses de soleil et de lune , qui ont été visibles pour nous en 1854 , 1837 et _1842, observations qu’il présente à la lecture. Revenant à la question de la météorologie proprement dite, ainsi qu’elle est posée dans la question, M. Hunault, après avoir admis comme fait les observations déjà sou- mises à la seclion et sur lesquelles il ne peut y avoir ni doutes ni débat, et dont il pourrait aussi fournir tous les éléments : sous ce rapport, M. Hunault fait connaître une autre partie de cette question , c’est celle des météores ignés ou lumineux , dits étoiles filantes , qui n’ont pas été signalés , et dont il présente un résumé statistique assez satisfaisant et assez complet pour pouvoir être soumis , soit à l'examen, soit à |’ impression , si la section l’en Je | igeait digne. Pisshrt à une autre série de faits, M. Hunault précite la date et les caractères du phénomène qui a tant agité le monde savant vers le mois de mars dernier ; il en assigne l'apparition à Angers du 27 au 29 mars 1843; après en avoir décrit la nature et les caractères sensibles et visibles pour l’observateur placé à ce point de vue , il passe en- suile aux causes qui , aux termes du programme , ont pu produire les anomalies et les contradictions dans la mar- , Che ascendante ou descendante de la colonne de mercure bärométrique ; ces causes qui ont maintenu plus constam- ment depuis quelques unnées notre atmosphère locale dans un état particulier et complexe d’étages nuageux 182 PROCES-VERBAUX divers, se sont aggravées et multipliées surtout sous ce rapport depuis quelques années, et ont nécessairement eu avec les vents un courant d’air opposé ou contraire, dont ils étaient les principales conséquences , la cause ou l'effet. ‘ , Ces causes, ajoute M, Hunault, doivent être attribuées à des masses considérables d’eau en évaporation, qui, selon lui, n’appartiennent pas aux grandes causes géné- rales de l’évaporation solaire, mais bien plutôt à un foyer central d’évaporation terrestre et voisine, qui, en s’irra- diant et se pressant en sens divers, et perdant ainsi tout à la fois et leur chaleur et leur condensation, ont pro- duit et la chaleur actuelle et ces pluies torrentielles ;. que le baromètre ne pouvait ni ne devait accuser et pré- voir, M. Debrun fait remarquer à la section que les conclu- sions de M, Hunault ne détruisent pas les observations météorologiques de M. Raimbault , et que, d’un autre côté, la section, tout en admettant les faits consignés par M. Hunault, ne peut prendre sur elle d’approuver l’expli- cation des faits consignés dans la 9° question de la sixième section du programme ; que ces faits, vrais sans doute pour la localité, sont loin d’être généraux , ainsi qu’on peut le constater, et par le travail de M. Raimbault et par les notes insérées dans les annales de physique et de chimie. La section remercie M. Hunault de sa eommunication, et décide qu’elle sera renvoyée à la section permanente , et fait ses réserves relativement aux causes probables des phénomènes observés. M. Debrun reprend le travail de M, Raimbault et de- mande que ses conclusions soient insérées au procès-ver- bal, et le travail en entier renvoyé à la commission perma- nente. La section adopte celte proposition. DES SECTIONS, 183 Voici ces conclusions: Il résulte des ‘observations sn étééraeiques faites à Thouarcé (Maine et Loire) pendant 1842, que; contrai- _rement à la question 9 de la sixième section du pro- gramme , la moyenne barométrique correspondant au temps clair est la plus élevée ; excepté dans le mois de décembre seulement , dans lequel la moyenne baromé- trique correspondant aux temps couverts et pluvieux, se trouve effectivement plus forte que celle des temps clair et nuageux. Il n’y a donc que le mois de décembre dans’ lequel le baromètre se trouve en GRAS ICE avec ses indications ordinaires, * Les tableaux que M. Raimbault produit démontrent que si les mois d’hiver de 1842 sont plus froids que ceux de 1843, par compensation les mois suivants , c’est-à-dire ceux de mars, avril, mai et juin, de cette dernière année sont plus froids que ceux de 1842: Il prouve plus loin que la température moyenne du preiniér sémestre 1842 est sensiblement la même que celle du premier semestre 1845. La quantité de pluie tombée dans les six prémiers mois de 18/5 est plus de trois fois aussi considérable que celle tombée dans la période correspondante de 1849, et est même plus forte que la sas tombée dans toute cette année 1842. M. Raimbault ajoute que, comme dans les anse 1840, 4n ét49, il a tombé environ un quart plus d’eau pendant le dernier semestre que pendant de premier; s’il en est de même celte année , il est à craindre que hiver prochain ne voie se renouveler les inondations qui 6nt naguère porté de si affreux ravages sur les bords de la Loire. : M. Millet, rapporteur , analyse le mémoire de M. Des- vaux ayant pour titre : Des moÿens en agriculture et en horticulture d'obtenir à volonté des variétés dans une direction voulue. | 184 PROCÈES-VERBAUX Il donne les conclusions suivantes : M. Desvaux prévient qu'il n’est qu’un seul moyen, une seule méthode pour obtenir des objets nouveaux : ce sont les semis, mais faits avec discernement. Dans les paragraphes suivants, il indique les cas où l’on ne peut arriver au but proposé que fortuilement, la résis- tance de la nature pour ces modifications dans certains cas, la susceptibilité de modifications que certaines par- ties des végétaux présentent plutôt les unes que les au- tres, etc. Ea traitant la fleur, M. Desvaux dit que l’horticulteur doit employer lous ses moyens pour se procurer des va- riétés nouvelles , soit dans la couleur , soit par rapport à l’amplitude de la fleur. Ce savant ami de l’horticulture ajoute que, malgré des prédispositions aux changements dans les fleurs , on ne doit pas s’imaginer que ces méla- morphoses s’opèrent brusquement , il faut quelquefois un long espace de temps. M. Millet observe que lorsqu'une espèce ou variété a varié, l'expérience prouve que rarement elle retournera au type primitif, elle continuera de donner des variétés pour les semis. Les fruits peuvent également subir des modifications; suivant les observations de M, Desvaux, on peut jouir des résultats de ces opérations au bout de trois ans. M. Desvaux finit son mémoire par cette observation très-encourageante : toute variation dans une espèce ou une variété est un signe assuré que l’on peut marcher avec certitude vers de nouvelles modifications. Le rapporteur propose le renvoi de ce mémoire à la commission de rédaction , ce que la section adopte avec satisfaction. . M. le président a donné la lecture des cinq premières questions de la section des sciences naturelles, qui , n’é- tant pas élaborées, n’ont produit aucune discussion. DES SECTIONS. 185 Les 6° et 7° questions étaient traitées par le mémoire - de M. Wolski. * La 8° question a été l’objet d’une explication verbale de M. Nicois , ayant pour but de reconnaître que celte ques- tion est jugée pour une grande quantité d’arbres. Uné discussion s'engage sur la g° question, M. Boreau présente des ebicevalions dans lesquelles la section, re- connaissant une solution à la question, engage M. Boreau à formuler ses observations. M. Boreau promet de présenter une note qui sera mise à l’ordre du jour de la prochaine séance de la section. On passe à la 1°° question du programme des sciences physiques et mathématiques. Sar l'invitation de M. le président, et dans l'absence de travaux originaux présentés à la section sur cette ques- lion , M. Trouessard donne verbalement un résumé de Ja théorie professée par M. Dumas , en commun avec MM. Boussingault et Payen , sur la nutrition des plantes et des animaux. Il s'attache à faire connaître quels sont les points de cette théorie sur lesquels les chimistes fran- cais sont d’accord avec M. Liebig, et quels sont ceux sur lesquels cet accord cesse, soit quant à la manière d’inter- prétér les faits, soit quant aux faits eux-mêmes. Enfin il signale les principales objections que font encore se phy- siologistes aux doctrines des chimistes, TE séance est levée à neuf heures. Sixième séance. — Du 7 septembre 1843. Rapporteur : M. DEBRUN, secrétaire. Aujourd’hui, 7 septembre, les membres composant la section des sciences naturelles , physiques et mathéma- tiques ; se sont réunis , dans le lieu ordinaire de ses séan- ces, sous la présidence de M. Robinet. 186 PROCÈS-VER BAUX À sept heures un quart, la séance est ouverte, Le procès-verbal de nos derniers travaux n’ayant pu nous être remis , la lecture est renvoyée à un autre mo. ment. M. Bourjot-Saint-Hilaire présente à la section un 1a- bleau synoptique des professions auxquelles sont utiles des notions d'histoire naturelle, et des avantages auxquels pourraient prétendre ceux qui se livreraient à l’étude de cette science. M. Desvaux est chargé d’examiner ce ta- bleau et d’en faire un rapport pour demain. M. Desvaux donne lecture d’une note ainsi conçue : Nous avons rencontré dans la magnifique collection de champi- gnons mise sous les yeux du Congrès, par Mme Cauvin , plusieurs objets qui nous paraissent nouveaux si une étude en était faite avec soin. Nous avons vu eutr'autres, dans celte collection, un champi- gnou des plus curieux donné pour le Scleroderma geaster. Ce champignon, qui n'a jamais été figuré et qui rentre dans notre genre mycenastrum, mériterait d'être publié. M. Millet s'offre de faire une planche in-80 en réduisant de moitié les objets. Comme les faits sont surtout l’objet des sciences naturelles, et qu’une espèce est un fait, nous proposons que la figure du scleroderma geaster soit publiée dans les actes de la onzième session du Congrès scientifique de France. M. Millet veut bien remettre une planche et une note sur ce sujet. Cette proposition est adoptée par la section. L'ordre du jour appelle la lecture du deuxième mé- moire de M. Robinet sur les propriétés générales de la soie, L’orateur, dans la crainte d'occuper trop longtemps les instants de l’auditoire , se contente de nous faire un résumé succinct de ce travail qui est écouté avec le plus vif intérêt, La section décide que les conclusions seront insérées au procès-verbal, l'ouvrage en entier devant faire partie des publications de la Société d'agriculture de Paris. On passe à l’étude des questions du programme. DES SECTIONS. 187 M. Bourjot prend la parole sur les questions 5, 4 et 5. Il émet le vœu que le genre, bonne base de toute classifi- cation, et surtout de toute bonne détermination, soit éta- bli sur des caractères fondamentaux ; il indique , comme caractère principal , la possibilité qu’ont les espèces d’un genre bien fait , en zoologie eten botanique , de procréer entr’elles des mulets ou hybrides plus oumoins longtemps féconds, Il voudrait que-l’on arrivât à n’admettre que des genres très larges , mais fixés dans cette limite et sur ce caractère, lorsque l’expérimentation le permet, ou sur de telles analogies d’organes de dentition , de préhension , d’ambulation, qu’il soit présumable pour les animaux que deux espèces pourraient se mêler et produire ensemble ; pour les plantes, on pourrait opérer par voie de féconda- tion artificielle ou par la greffe. Il croit à la fixité des espèces et à la faculté plus grande qu’elles ont de produire des variétés, lesquelles n’ont rien de permarent et lendent à faire retour à l’espèce mère, comme les espèces ont peut-être tendance à se cohcen- trer de plus en plus dans les caractères prôprés au genre. M. Trouessard combat l'avis du préopinant ; il croit que l’espèce seule peut servir de base à une bonne classi- fication, et que le genre et les collections ultérieures sont . toujours plus ou moins arbitraires. Il cite à Pappui de la fixité de cette base, Pexpérience que du blé , retrouvé dans les fondations des vieux édi- fices, ayant été semé; a produit du blé pariaieinent sem- blable à celui qui existe aujourd’hui. M. Desvaux, reproduisant à la section le résultat de ses - propres expériences , pense que l’espèce n'offre pas assez de fixité pour se prêter facilement à former une base con- venable de classification, Il émet le vœu que les natura- listes diminuent le nombre prodigieux des subdivisions du genre, qui entravent plutôt qu’elles n’aident l’étude de l’histoire naturelle. 188 PROCES-VERBAUX M. Boreau prend la parole. Il croit que, suivant l’usage généralement adopté , c’est à l’espèce que nous devons avoir recours pour former une classification. Il pense que ce mode d’opérer présente beaucoup de fixité, et en donne pour preuve que les espèces d’animaux et de plantes , tracées par le burin sur les monuments anciens retrouvés par les soins de nos savants archéologues, pré- sentent exactement les mêmes espèces que celles que nous possédons actuellement. M. le président pense que cette question, bi a partagé les avis des plus grands naturalistes, n’est pas susceptible d’être jugée dans cette séance. La section, se rangeant à l'avis de son président , décide que les diverses opinions émises par ses membres seront transmises au procès- verbal en laissant à chacun la responsabilité de son opi- nion. On ouvre la discussion sur la 15° question. M. Bourjot-Saint-Hilaire expose que les naturalistes ont pensé que les calcaires anciens cristallisés sont d’origine animale , et ont dû renfermer des fossiles que l’action du feu, aidée d’une forte pression, aurait pu faire disparaître. Cet avis est controversé par MM. Trouessard et Gue- ranger ( Edouard}, pharmacien du Mans. Il est ensuite soutenu en partie par M. Hunault, qui se propose de présenter à la section des échantillons qui pourront prouver que les animaux ont eu la plus grande part à la formation de Fécorce du globe. M. le président fait alors judicieusement observer qu’il faut néanmoins que les animaux aient pris quelque part ce calcaire , qu’ils ont amené là en si grande abondance. M. Bourjot énonce alors brièvement les circonstances présumables qui ont préludé à la création des animaux, et qui leur ont permis de trouver dans les eaux les sels calcaires , siliceux ou phosphatiques , qui ont servi à la formation des tests , carapaces , squelettes, etc. : 1° cela DES SECTIONS. 159 a été dû en grande partie à la précipitation des sels de chaux sous l’influence d’un excès moindre d’acide carbo- nique; mais il n’y a réellement que l’habitude empirique qui fasse juger si un calcaire peat être dû à la cristallisa- tion par l’action de la chaleur , comme: pour les marbres de la période phylladienne, citant pour exemple le marbre de Carare ; 2° si un calcaire est marin et formé de con- glomérats de coquilles , ou polypiers marins , les tests en témoignent assez; 8° si un calcaire est un travertin, pres- que toujours il est chargé de silice, ou s’il n’est qu’à l’état de marne , dans l’un et l’autre cas , la nature fluviatile ou lacustre des coquilles peu nombreuses dans la pâte indi- quent assez que la fossilisation n’est ici qu’un accident ; tandis qu’elle paraît être la règle et la raison de la com- position des masses dans les formations les plus puissantes des terrains secondaires ct même tertiaires. Il n’est donc pas impossible de dire de prime abord si un calcaire est de production ignée, d’eau douce ou marine.” M. Guéranger , sans admettre complétement les con- clusions du préopinant sur la formation des terrains ter- tiaires , pense que , s’il est des circonstances dans les. quelles on doive reconnaître , comme le demande la 15° question du programme, une roche indépendamment des caractères fossiles et des gisements, ces cas sont heureu- sement fort rares, tandis que ceux où l’on peut faire usage des caractères indiqués ci-dessus se présentent presque toujours et ne sauraient laisser de doute à celui qui s’occupe de paléontologie. On passe à la 16° question : M. le président fait remarquer que cette question, du plus haut intérêt pour le département d’abord et pour les étrangers qui auraient besoin d’y venir puiser des rensei- gnements , doit être résolue avant la fin de la session. Il propose , en conséquence , trois membres qui seraienl chargés d’en apporter la solution prochainement. 190 PROCÈS-VERBAUX MM. Hunault et Boreau font observer que ce travail a probablement été fait par M. Millet. - On renvoie à demain à s’occuper de ce travail, M. Guéranger propose de donner, à la prochaine réu- nion de la section, un travail relatif à la 12€ pires La séance est levée à neuf heures. Septième séance. — Du 8 septembre 1843. Rapporteur : M. DEBRUN, secrétaire. Aujourd’ hui, 8 septembre, les membres de la section des sciences naturelles , physiques et mathématiques , se sont réunis au lieu ordinaire de leurs séances, sous la présidence de M. Robinet, A sept heures un quart la séance est ouverte, Le pro- cès-verbal de nos derniers travaux est lu, et reçoit sa dernière sanction. M. Hunault, d’après la promesse qu’il a faite la veille, présente à la section une série d'échantillons de terrains calcaires, tirée d’une même roche, et qui attestent gra- duellement dans cettecouche la présence antérieure d’une quantilé innombrable d'animaux. | M, de Vielbane , de Thouars , présente à la section un échantillon de grès de terrains tertiaires , qui semble con- tenir des traces d’un travail de main d'homme, remontant à la plus haute antiquité. Get échantillon est scrupuleuse- ment examiné; on fait observer que le phénomène peut être attribué à une variété des jeux de la nature qui se présentent si fréquemment dans celte couche géologique, notamment dans le grès de Fontainebleau, M. Desvaux , chargé de faire un rapport sur le tableau synoptique de M. Bourjot-Saint-Hilaire, s'exprime ainsi : Depuis l'époque de la suppression des écoles centrales, on avait négligé l’histoire naturelle dans l’enseignement secondaire ; cette DES SECTIONS. 191 . 1 science y fut oubliée à un point tel, qu’elle fut complétement anéan- tie. Depuis un certain nombre d'années , l’on est revenu à cet ensei- gnement; mais j'en appelle aux faits, cet enseignement est-il bien réel lorsque tout se fait sur des livres, des tableaux, et souvent par forme voulue et non par goût propre, lorsque l'on ne met rien à la disposition des professeurs pour un enseignement réel. Il est donc important de faire saisir tout ce que la société peut attendre de cette science , tous les besoins que chaque profession en a sérieusement, et c’est ce que démontre, d'une manière exacte, rigoureuse même, le tibleau synoptique présenté par M. le professeur Bourjot , et en cela la section ne peut qué témoigner à son auteur sa satisfaction sur un semblable travail, dont l’ensemble est remarquable, malgré la précision obligée. Ges conclusions sont adoptées par la section. M: Godfroi communique à la section son rapport sur les deux mémoires de M. Durand , pharmacien en chef des hôpitaux de Caen. Il croit qu’une partie au moins de ce travail appartient à la section de médecine ; mais, vu Vintérêt qu’il présente, il conclut à la lecture entière, à laquelle on procède immédiatement. Le premier, intitulé : Recherches sur l’empoisonnement par l'hydrogène arseniqué , donne lieu à diverses obser- vations : 1° dé M. Godfroi, qui pense que le procédé em- ployé par l’expérimentateür, à été depuis modifié avanta- geusement ; 2° de M. Guéranger, qui préfère le moyen de carbonisation des matières animales au moyen de l’acide dzotique. Ge à quoi M. Godfroi répond que depuis deux ans, les chimistes , et M. Orfila surtout , ont constaté que là combustion des matières animales , au moyen de l’azo- tate de potasse , offre moins de chances de déperditions de Parsenic , et qu'ils l'ont presque tous adopté. La section décide, nonobstant, que ce mémoire, pré- sentant une série de faits nouveaux et intéressants , sera annexé au procès-verbal pour être remis à la commission permanente. Le deuxième mémoire, intitulé : Expériences concer- 192 PROCÈS -V ERBAUX nant l'emploi de l'appareil de Marsh , dans les recher- ches de la médecine légale, donne lieu aux observations suivantes : M. Guéranger pense que ce mémoire ne peut être adopté par la section, parce que la plupart des cho- ses qu’il renferme sont déjà connues , et que le procédé indiqué par le contact du chlore gazeux et de l’hydrogène arseniqué est fort dangereux, à cause des explosions im- minentes par ce contact. Cet avis est combattu par divers membres qui disent qu’on peut se borner à faire arriver l'hydrogène bulle à bulle en contact avec le chloré, sans craindre d’explosion. M. Godfroi pense d’ailleurs que le procédé indiqué par M. Lassaigne doit être préféré, sur- tout parce que, dans les recherches de la médecine légale, les matières contiennent presque toujours de l’émétique, et qu'il offre l’avantage de séparer l’arsénic de l’antimoine (l’arsenic reste en dissolution, et l’antimoine se précipite). La section décide que ce mémoire sera renvoyé à la commission permanente, avec cette observation que la première partie du mémoire est susceptible d’être insérée au compte rendu. M. Godfroi fait une communication verbale relative à la recherche du cuivre dans la médecine légale, et à sa séparation par un procédé peu connu, lorsqu'il est mêlé à une grande quantité de matières, tout en se mettant dans l’impossibilité de s’ewparer du cuivre normal, s’il existe. Il propose de laisser les matières douteuses en con- tact avec de l’eau distillée , aiguisée d’acide acétique à la température de 45 à 50 degrés, pendant vingt-quatre heu- res, filtrer, mettre dans une capsule de platine avec du fil d'acier. La température étant élevée à 80 ou 100 de- grés, le cuivre se précipite sur la capsule, et l’on s’en empare au moyen de l’acide azotique. M. Guéranger présente à la section quelques objets d'histoire naturelle recueillis au Mans (dont suit la note). DES SECTIONS. | 193 I. Le serin cini- femelle adulte. — Cet oiseau de double passage dans Je Maine a été remarqué par M. Ed. Guéranger pendant deux années consécutives : mars 1842 et 1843. Chacune de ces années, il a pu se procurer, au Mans, un mâle et une femelle. Cet oiseau se nourrit de très petites graines (graines de pavot) et supporte facilement la cap- tivité. IT. Deux individus d’une couleuvre de jeune âge découverte à Parcé (Sarthe) par M. Avjubault, naturaliste au Mans. Ce reptile présente les caractères de la couleuvre vipérine, moins la carène des écailles dorsales ; ce qui tendrait à la rapprocher de la couleuvre bordelaise. Dans Lous les cas, ni l’un ni l’autre de ces animaux n'avait encore été remarqué dans le département de la Sarthe. : . M. Millet pense que ce reptile pourrait être la cou- . méridionale. III. Une série de fossiles du terrain crétacé du Mans , parmi lesquels on remarque : 19 Plusieurs spérulites, échantillons bivalves et échantillons à valves séparées ; ; une de ces espèces semble nouvelle. 20 Quelques échinidées qui semblent nouveaux et qui sont d'une conservation parfaite ; 30 Une série de polypiers ; 49 Une empreinte végétale foliacée sur le grès de la craie chloritée du Mans; cet éhontillon a été ndini comme très curieux ; 5° Un fragment d’ammonite à double siphon; ce fossile appartient à l'étage du lios dé la Sarthe. Les autres objets se composent de rostelaire: cronie, thécidie, peignes, trigonies, etc. 11 indique ensuite un nouveau procédé de dessiccation par l’immersion dans le sulfate de zinc. Ce procédé très- simple consiste à plonger l’animal dans une solution sa- turée de sulfate de zinc, à laisser macérer quinze jours au plus, suivant la grosseur, à retirer la pièce, et laisser dessécher naturellement. Il présente à la section un bufo desséché par ce procédé, qui a la dureté du bois, et se conserve depuis plusieurs années sans altération. Il est à remarquer que l’animal conservant, en sortant du liquide, sa souplesse naturelle, il est très-probable qu’il serait pos- RES 43 \ 194 PROCÈS - VER BAUX sible de la tamponer et de lui conserver sa forme primitive, L'ordre du jour appelle la solution de la 16% question. M. Millet est prié de faire un résumé succinct du travail qu'il a publié à cet égard dans le Recueil de l’Institut des provinces ; l'honorable membre promet de le fournir très- prochainement. M. de Vielbanc présente à la section une série d’échan- tillons tirée du bassin de Thouars. Ces échantillons peu- vent servir à donner la nalure géologique de ce bassin. M. le comte Msurice du Parc, chambellan de lempe- reur d'Autriche, à Gratz en Styrie, présente à la section un modèle en carton représentant un chemin de fer, dans lequel les locomotives sont remplacées par une rampe dans les tunnells, afin d’éviter les accidents effroyables qui pourraient résulter d’un incendie ou d’un choc sous ces tunnells. La section regrette vivement quele mémoire qui accompagne celte idée philanthropique n’ait pas été annexé au modèle. M. de Vielbanc a la parole. Il communique à l’assem- blée Le résultat de ses travaux, sur la piqûre des végétaux par les insectes. Cet orateur, dans une riche improvisa- tion , aussi brillante par le style que par les pensées, fait envisager à la section les avantages qui résulteraient pour la science de l’étude de la géologie, de la zoologie et de la botanique composée. Il fait voir que l’on n'aura réelle- ment de la science que lorsqu'on se sera pénétré de l’har- monie de l’ensemble de cette étude. La séance est levée à neuf heures un quart. Les 8, 9, 10 et 11 septembre, pendart le voyage de Nantes, cette section a été réunie à-la deuxième. Huitième séance, — Du 12 septembre 1845, Rapporteur : M. GuÉRANGER, vice-secrétaire. Les première, deuxième et sixième sections, réunies DES SECTIONS. 195 sous la présidence de M. Robinet, ouvrent leur séance à onze heures. … Lesecrétaire donne lecture du procès-verbal de la ue pa éme lequel est Miopié après de légères modifica- lions. M. Millet présente une < Ps sur une pelite AUTRE soumise au Gongrès par M. Guéranger. Il résulte de l’exa- men de M. Miliet , que ce reptile Did se rapporter au coluber meridionalis de Daudin. Tous les caractères, in- diqués par ce savant naturalisle , y conviennent parfaite- ment, si ce n’est toutefois ceux fournis par la couleur des plaques transversales qui diffèrent un peu de celles indi- quées par Daudin. Mais, comme on a remarqué que ces plaques sont sujettes à varier de couleur dans certaines espèces, il ne faut peut-être pas attacher trop d’impor- tance à ce caractère. Le même membre communique un sébilio de tri- lobite, du.genre ogygia , des schistes ardoisiers d'Angers, et dont les yeux sont à réseaux. Ce fait, qui n’avait pas encora été constalé par rapport aux lrilobites de celte contrée, s’est reproduit deux fois à la connaissance de M. Mil'et. M. Boreau, professeur de botanique, et directeur du Jardin des plantes d'Angers, en réponse à la deuxième question d’ histoire une: ik une note sur un point de la tératologie végétale , ayant rapport aux expansions fas- _giées. Ce “ter À très-remarquable, porte sur l'examen de cette monstruosité dans des plantes appartenant à des familles tout-à-fait dissemblables , telles que, composées, crucifères , lyliacées , scrofulacinées , labiées , etc. IL résulte de ces observations que le phénomène, dési- gné sous le nom de tige fasciée , peut être aitribué tantôt à la dilatation anormale d’un seul axe , tantôt à la réunion de plusieurs axes en un seul; que ce phénomène peut s'étendre aux organes appendiculaires et jusqu'aux parties 196 PROCÈS-VERBAUX de la fructification elles-mêmes. Ce mémoire est renvoyé per l'assemblée à la commission générale. M. Hunault présente une liste d’oiseaux de passage ac- cidentel qui ne sont point cités dans la Faune de PAnjou, et qui ont été observés par M. de Baract, depuis la pu- blication du livre si consciencieux de M. Millet. Ces oi- seaux sont : canard histrion (jeune âge). — Canard Eider (jeune âge). — Canard siflleur huppé. — Chevallier stag- natyle. — Gigogne noire. — Rollier vulgaire. — Pe del obscur, Le même membre présente au nom de M. de Ba- racé une liste de 210 espèces d'œufs d’oiseaux d'Europe, qu’il a réussi à réunir dans son cabinet. Cette dernière pièce est renvoyée à la commission centrale. M. Edouard Guéranger lit une note sur un nouveau moyen propre, selon lui, à reconnaître facilement dans la pomme de terre la quantité relative de principe nutrilif ou matière solide qui s’y trouve renfermée , sans avoir re- cours à l’analyse chimique. Son procédé est basé sur l’ap- préciation de son poids spécifique obtenu par un moyen très- simple. Gette note, après quelque discussion, est renvoyée à la commission centrale. La discussion est ouverte sur la 25% question d’agricul- ture relative à la greffe de la vigne. M. Lechalas, proprié- taire à Angers, observe qu’il a fait grefler environ deux hectares de vignes blanches et rouges; que dans toutes les parties où celte vigne était encore jeune ou vigou- reuse, la greffe a réussi parfailement , mais n’a pas pro- duit plutôt qu’une nouvelle plantation ; que partout où la vigne élait vieille, elle n’a survécu à lopération qu’un petit nombre d’années. M. Sébille-Auger, président du comice de Saumur, fait remarquer que c’est à Saumur que la pratique de grefler Ja vigne a pris naissance ; que beaucoup d’essais avaient été tentés dans ce genre, et qu’à Saumur même l’on avait fini par abandonner presque généralement cette opéra- DES SECTIONS, 1 97 tion. Il cite de mauvais résultats qui ont été obtenus, et conclut à ce que la greffe de la vigne dans l’Anjou serait plutôt en décroissance qu’en extension, et que celle dé- croissance serait méritée. La discussion est ouverte sur la 28"° question. D’après les observations faites par MM. Sébille-Auger et Huna ul, il résulte que cette question ne saurait être résolue quant à présent. L'ordre du jour amène la 29" question. M. Millet pense que dans l’Anjou, il n’a pas été fait assez d’expériences pour pouvoir discuter cette question sous le point de vue local. M. Puvis, embrassant la question d’une manière plus générale , et procédant par analogie avec les faits connus, pense que l’on doit toujours semer les graines provenant des fruils perfectionnés ; il pense encore que l’on a trop abandonné les semis de fruits. Qu’en se contentant, ainsi qu’ on le fait généralement, de greffer continuellement les mêmes espèces, on ne grefle en quelque sorte que la suite et le prolongement d’un même individu; que les indivi- dus étant sujets à la vieillesse et à la décrépitude, il de- vait arriver un moment où ces be se dégradaient et finissaient même par disparaître tout-à-fait. ll cite à l’ap- pui de son opinion la reinette de Gravelle et la calville blanche, le beurré blanc, le beurré gris, dont les arbres s’affaiblissent de jour en jour. La section adopte la réponse suivante à celle question : . En thèse générale, il serait préférable d’avoir recours pour les semis aux graines des espèces déjà perfectionnées. * M. le président propose la 30"° question. M. Sébille-Auger est d’avis que les changements de culture et d’assolement ont dû nécessairement amener quelques difficultés pour l’éducation des abeilles , en les privant d’une nourriture à laquelle elles étaient accoutu- mées. M. Puvis observe que , malgré les changements de ro- 198 PROCÈS-VERBAUX tation, ces insectes pourraient cependant encore butiner à leur aise ; il cite un grand nombre de plantes cultivées actuellement qui pourraient leur convenir. La section pense que l'éducation des abeilles peut être avantageuse dans l’Anjou; qu’elle peut y prospérer , et qu’il convient de la recommander aux cultivateurs. A une heure, M. le président déclare que les travaux des trois commissions réunies sont terminés. La séance est levée. DEUXIÈME SECTION. AGRICULTURE ET INDUSTRIE. — Première séance, — Du 2 septembre 1843... ! Rapporteurs : MM. GuinoysEau et SÉBILLE - AUGER. M. Guillory , s'étant trouvé indisposé , est remplacé dans la présidence provisoire par M. I, Guinoyseau , secrétaire-général trésorier. La séance est ouverte à onze heures. M. le secrétaire-général invite MM. les secrétaires de la section à prendre place au bureau , qui se trouve com- posé de MM. I. Guinoyseau, président , de Quatrebarbes et Sebille-Auger, secrétaires. Le scrutin est ouvert immédiatement. Viugt-neuf votants déposent leurs bulletins suivant l'appel nominal. Le scrutin est fermé à midi. Le dépouillement du scrutin , égal au nombre des vo- tants, fournit le résultat suivant : DES SECTIONS, 199 Président. — M. le c'° de Quatrebarbes , propriétaire à Angers, membre de la Société d'agriculture , sciences et arts d'Angers, 1er vice-président. — M, de la Foot de Vaudoré, correspondant de l’Institut de France à Poitiers. 2° vice-président. — M. Perret-Lallier, président de Ja Société industrielle de Saint-Étienne. 5° vice-président. — M. Sébille - Auger , président du Comice agricole et industriel de Saumur, secrétaire-géné- ral de la première session du Congrès de vignerons Haut çais. 4° vice-président. — M. le mi de Senonnes , proprié- taire, membre de la Société d’agriculture, sciences et arts d'Angers. :MM. de Quatrebarbes et Sébille- Auger étant Fat l’un président , l’autre vice-président , les faste: de secré- taires de seclion auxquelles ils avaient élé appelés restent vacantes; M. le secrétaire-général propose de les rem- placer immédiatement. Celle manière de procéder est vi7ement contestée par M. le docteur Hanault de la Pelterie {d’Angers), qui pré- tend qu’à la section seule appartient ce droit. M. le secrétaire-général démontre qu'aucune disposi- Lion des sessions précédentes , aucun règlement , ne con- _ testent le droit au bureau central de présenter les secré- taires de section. MM; Lecerf (de Caen), de la Sicotière (d’Alençon) et de Caumont ; ont la même opinion et la développent en preñant la parale successivement. En conséquence , M. le secrétaire - général présente MM. de Falloux (d'Angers) et Robinet (de Paris) comme secrélaires, en remplacement de MM. de Quatrebarbes et Sébille-Auger. Ils sont agréés par la deuxième section. M. le secrétaire-général invite MM. de Quatrebarbes , 200 PROCÈS-VERBAUX de la Fontenelle, Perret-Lallier, Sébille-Auger et de Se- nonnes à prendre place au bureau , qui est définitivement constitué. M. le président ayant procédé au dépouillement de la correspondance, a trouvé plusieurs mémoires et brochures adressés à la section , et le renvoi à divers rapporteurs a été fait comme suit : Brochure de M. Berthier (de Roville) renvoyée à M, le docteur Hunault , ainsi qu’une Statistique de la Suisse , ar M. Schmutz. Travail de M. de Saint-Marceau, renvoyé à la cinquième section. Mémoire de M. Mahier (de Ghâteaugontier) sur la sei- zième question; Et mémoire de M. Loudolphe de Virmont , membre du Comice agricole de Seiches, sur diverses questions d’agri- culture et d’industrie, renvoyés à une autre séance. M. de Caumont a offert l'Annuaire des cinq départe- ments formés de l’ancienne Normandie , avec une carte agricole. Ge travail a été renvoyé à M. Puvis. M. le président a ensuite procédé à la lecture des di- verses questions proposées sur l’agriculture, afin de pren- dre note des communications , tant écrites que verbales, que les membres de la section se proposent de faire sur ces questions. MM. Loudolphe de Virmond et Freslon se proposent de traiter les 1° et 17° questions. M. Desvaux communiquera un travail sur les 2e, 5°, 19€, 28° et 29€ questions. M. Heuzé sur les 2°, 3°, 4°, 5°, 9°, 10°, 11°, 30€ et 32e questions. M. Lecerf sur la 5e question. M. de Caumont sur les 15°, 16° et 26° questions. M. Puvis sur les 9°, 16°, 28° et 29° questions. M. de Senonnes sur-les 13° et 20° questions. DES SECTIONS. 201 M. Isidore Lebrun sur la 15° question. . .M. Robinet et M. le capitaine Allard sur la 31e ques- tion. M. Sébille-Auger sur les 25e, 24°, 25° et 26e ques- tions. . ré Diverses questions relatives à l’agriculture de Maine et Loire ont été remises à la séance de mercredi prochain, à laquelle doit assister M. Oscar Leclerc, qui a offert son ouvrage sur l’agriculture.de notre département et qui pourra répondre aux questions 6°, 7°, 8°, 18°, 19° et 22°. M. Robinet s’est chargé de faire un rapport sur l’ou- vrage de M. Leclerc , ainsi que le compte qu’il a rendu à la Société royale et centrale d’agriculture. Passant aux questions relatives à l’industrie, M. le pré- sident en a donné lecture et les membres ci-après nom- més se sont chargés de répondre à diverses questions, savoir : , M. Lechalas-Dubreil à la 1"° question. M. Lecerf aux 2e et 3e. M. Isidore Lebrun aux 6e et 13°. M. Puvis aux 10°, 11° et 13°. M. de la Sicotière à la 15°. MM. Mahier et de Caumont à la 16°. L'heure à laquelle divers membres de cette section de- . vaïent assisier aux travaux d’une autre section étant arri- vée , M. le président a déclaré que la séance était levée, _ Ilétait une heure après midi. Le présent procès-verbal a été clos à ladite heure. Deuxième séance. — Du 3 septembre 1843. Rapporteur : M. HeuzÉ, vice-secrétaire. M. de Quatrebarbes ouvre la séance à onze heures du matin, | 202 PROCÈS - VERBAUX M. Heuzé, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance du 2 septembre. Le bureau s’empresse de reclifier une erreur commise, l’inscription de M. Jamet, sur la première question. M. de Caumont demande que la note rédigée et offerte par lui à la section, sur l’annotation et la rotation d’ane statistique agricole d2s assolements sur les eartes , soit insérée au procès-verbal. Cette notice est une addition à une communication faile par lai au Congrès, lors de sa dixième session. | Sur Ja proposition de MM. Puvis et Heuzé , la section déclare que les questions d’agriculture seront discutées lundi et jeudi , et celles d'industrie, mardi et samedi, M. de Caumont remet sur le bureau une médaille d’ar- gent qui sera décernée à celui qui aura le mieux traité la 5° question d’agriculture, soit par écrit, soit verbale- ment, dans le sein de la section. M. le président ouvre là correspondance , et fait part à la section d’un travail adressé par M. Thomas, intitulé : Essai sur la solution de la 2° question de l’ageiculture , et de la 6° question de l’industrie. D'une lettre de M. Bourjot , renfermant une question sur l’analÿyse de la charrée, Cette question est renvoyée à la première section. Deux lettres de M. Babault de Chaumont, secrétaire de la Société académique d’agriculture de Poitiers, de M. Baillargeau , des Rosiers, renferment diverses ques- tions sur l’histoire , sciences naturelles, etc. Gette lettre sera remise à la commission permanente. M. Robinet fait hommage à la section de deux mémoi- res. L’un a pour titre : Troisième Mémoire sur le mûrier ; l’autre , celui de : Procédé pour le battage des cocons , ou moyen d'obtenir des cocons le plus de soie possible, M. Puvis dépose sur le bureau une brochure, intitulée : De la Nécessité d’un ministère spécial pour l’agriculture. DES SECTIONS. 203 ns Hunault de la Pelterie rend compte du rapport de la brochure de M. Berthier de Roville. M. le rapporteur réclame contre le titre de cette bro- chure. Il n’ést pas vrai, selon lai, que l’agriculture fran- caise soit l’une des plus arriérées de l’Europe. Il existe au contraire des progrès réels vers l’amélioration du sol. Il pense que M. Berthier donne à l'instruction théori- que une trop grande extension, et fait ressortir avec suc- cès les dangers des théories des écoles d’agriculture , lorsqu’elles sont enseignées sans la démonstration des faits où Papplication directe sur le sol. Quant au code rural, il partage l’avis de M. Berthier, et ajoute que depuis bien longtemps ce besoin est senti par les sociétés d’agriculture et les corps savants. Quant à la proposition de la réunion des parcelles ; pour obvier à l'inconvénient que présentent la culture du sol et la vaine pâture, M. Hunault conclut que lopinion de l’auteur ne peut recevoir én ce moment une application favorable. Quant à l’opinion émise par l’auteur, sur la conserva- tion du cadastre , elle offre à M. le rapporieur l’occasion. - de faire ressortir que les sciences géologiques et agricoles pourraient sans nul doute fournir des renseignements plus rigoureux el plus vrais, quant à l'estination et à l’appré- ciation des terrains. La section vote des remerciements à - Béiics sur sa communication. La discussion est ouverte sur les 1°° et 17° questions. M. Jamel, agriculteur, de Châteaugontier, lit un tra- vail intéressant el consciencieux sur les baux à ferme et à colonage partiaire. Après avoir blâmé les baux à ferme à courte période, le fermage à redevance mixte également contraire aux intérêls du propriétaire et du furet l'honorable mem- bre fait l'éloge du bail à FE d'argent à longue période, 204 PROCÈS-VERBAUX et du bail à rente progressive en usage en Angleterre. Mais il pense , toutefois, que la division des propriétés, les fré- quentes mutations qu’elles nécessitent, en empêchent généralement l'application. Il préfère, à tous égards, le bail à colonie partiaire en usage dans le département de la Mayenne, qui a l’avantage de procurer des capitaux aux fermiers, de l’éclairer sur les relations habituelles avec le propriétaire, et de créer entre eux des rapports bienveillants. Il pense en outre que c’est à ce genre de fermage que l’agriculture doit tous les progrès que l’on constate depuis une période de trente années dans cette conirée. Abordant la 17° question du programme, et désirant concilier les intérêts du propriétaire et du fermier, dans le cas où l'éloignement des licux, des occupations indus- trielles et commerciales , et des fonctions publiques, em- pêcheraient le premier d'exploiter son sol, M. Jamet propose un bail de douze années, avec rachat facultatif de neuf années de jouissance , d’après la clause insérée dans les baux de la culture anglaise ,:et connue sous le nom de holkam. M. Lecerf, professeur honoraire à la faculté de Caen, combat vivement l'opinion émise par M. Jamet, 1° Il pense qu’il n’y a aucune modification à faire aux dispositions de notre législation sur le contrat de bail à ferme, puisqu'elle laisse la liberté entière au propriétaire et au fermier de faire les conventions qu'il j jugera conve- nables. 2° Que le meilleur mode de fermage est en général l'usage des baux à prix d’argent et à longs termes, sauf quelques exceptions qui peuvent résulter de circonstances locales. M. P. de Sevret fils, avocat à Angers, prend la parole, Il ne combat pas le mode de colonie partiaire, et le dé- clare même meilleur en diverses circonstances , à condi- DES SECTIONS. 205 tion que, cependant, il préfère le bail en argent, et se livre à des développements et à des calculs étendus sur le produit brut du canton de Beaupreau, qu’il regarde comme supérieur à celui anglais. M. Heuzé combat le colonage partiaire. Il croit qu’il n’y a rien d’absolu et qu’il existe des circonstances , des . localités , des contrées si pauvres , où le colonage est su- périeur au fermage. Toutes choses égales d’ailleurs, dit- il, le fermage aura toujours , si l’on considère les provin- ces de la Beauce, du Poitou , une priorité sur le colonage. Ge qui manque au sol, ce sont les bras et les capitaux. Si le propriétaire fournit au métayer la force numérique qui lui est nécessaire pour favoriser son existence , l’amé- lioration de son bien-être , il se fait toujours sans intérêt direct , mais avec intérêt indirect. MM. de la Fontenelle et Freslon font quelques observa- tions en faveur du bail à prix d’argent. Mais l'heure étant très- Hpauelet la discussion est remise à la séance de lundi. . Troisième séance. — Du 4 septembre 1843. RARPOBIeur à M. DE FAzLoux, secrétaire. À onze heures, la séance est ouverte par la lecture du procès- -verbal de la veille. M. de Quatrebarbes, président, fait ensuite le dépouil- _ lement de la correspondance : M. Lechalas - Dubreil a envoyé par écrit des considé- rations qui se rattachent aux 27° et 29° questions du pro- gramme. Il n’en est pas donné lecture parce que la parole sera accordée à son auteur à son tour d’ inscription. M. Heuzé présente un mémoire sur la culture du trèfle, qui est renvoyé à M. de Sevret pour en faire le rapport. M. Planchenault annonce que M. Bodinier , frère de 206 PROCÈS > VERBAUX notre compatriote, M. Bodinier, peintre , a levé des plans de maisons rustiques aux environs de Ferrare ét de Bo- logne , et appelle d’avance sur ces travaux r’intérêt de la section. M. Robinet lit un rapport sur l’ouvrage de M. Oscar Leclerc, intitulé : (Agriculture del Ouest de la France, étudiée plus À Er sien dans le département de Maine et Loire, avec cette épigraphe : « Les faits ayant les théo- ries, » M. Robinet rend un éclatant hommage à ce travail. « Les questions, dit-il, 4°, 6°, 8°, 11°, 12°, 18°, 19°, o1° et 25° du programme , reçoivent , des faits recueillis par notre collègue, et des considérations dont il les a fait suivre , des solutions souyent complètes el presque tou- jours satisfaisantes, » L'Académie des sciences , par l’organe de M. de Gas- parin , avait déjà devancé des éluges de M. Robinet. M. Puis rend compte de l’ouvrage de M. de Caumont, intitulé : Annuaire des cinq départements de l’ancienne Normandie, publié par l’Association normande , 1843, 9° année. Ce volume , offert par M. de Caumont au Con- grès , est divisé en trois catégories : agriculture , industrie et sciences. Il est, en outre , enrichi de notices biogra- phiques sur les membres de l’Association normande , récemment enlevés par la mort à celte société. M. le rapporteur, après avoir fait ressortir l'importance et la variété des matières contenues dans ce volume, in- siste sur la reconnaissance qui doit être témoignée à l’au- teur. « On ne comprerd qu’à peine , dit-il, comment une seule existence, quelque active qu’elle soit, peut suflire à tant de travaux, de recherches, de fondations, d’amélio- rations, et malgré la modestie bien connue de M. de Cau- mont, je profite de son absence pour exprimer hautement une admiration pleine de gratitude. » DES SECTIONS. 207 : “M. le président ajoute que les sentiments exprimés par le rapporteur sont ceux de la seclion tout entière, L'assemblée sauctionne alors par les applaudissements les plas chaleureux cet hommage unanime. M. Heuzé lit un rapport sur le mémoire de M. Robinet, intitulé : Recherches sur la production de la soie en France, et conclut à ce que ce mémoire, plein de faits et de considérations du plus haut intérêt, soit communiqué intégralement en assemblée générale. M. Puvis propose que la nessihe générale des discus- sions soit activée , et que , pour arriver à ce but , les dis- sertations orales ne puissent dépasser le délai de dix mi- nules. Gette motion est adoptée. M. de la Fontenelle a la parole sur la première aubs. lion du programme. «C’est le fermier qu’il faut protéger contre le proprié- taire , dit. Les règles du bail , tracées par le code , ne suffisent plus à notre époque , et trop de modifications se sont introduites dans l’agriculture depuis Napoléon, pour que ces modifications ne se réflètent pas dans la législa- tion, Les prairies arüficielles, emploi de la chaux, de la marne , sont des innovations importantes; le chou , et notamment le chou vert , sont considérés par M. de la Fontenelle comine des amendements considérables , qui _ doivent amener une pondération nouvelle des obligations etdevoirs réciproques du maître et du fermier. . : » Mais , dit M. de la Fontenelle , j’ai entendu calom- . nier le colonage partiaire. N'oublions pas que c’est par lui que s’éteignit graduellement le servage , base du régime romain, et par lui que s’opéra la transition au régime des propriétés ecclésiastiques, puis à la liberté, Il défend aussi de colonage partiaire sous le rapport de la moralité, et fait ressortir l’échange honorable et touchant de confiance , qui unit, de génération en génération , le propriétaire et Son part-tenant. Il en appelle, pour preuve, au tableau de 208 PROCÈS-VERBAUX la population vendéenne, tracé par M. de Barante en tête des Mémoires de Mme de Ja Rochejacquelein. On objec- terait vainement que ce régime prétait à la fraude. M. de la Fontenelle, en qualité d'homme pratique, répond qu’il est impossible de soustraire des denrées , sans nombreux complices, et que le silence des tiers n’est pas présumable en pareil cas. Pour les bestiaux , qui se vendent en foire et au milieu d'innombrables témoins, les déteurnements ou déguisements de prix sont plus difficiles encore. Il a exercé diverses magistratures , durant un quart de siècle, et n’a pas connu un seul trait de contestation de ce genre. Abordant ensuite le point de vue purement agricole, il établit que le propriétaire , intéressé aux avances pour l'amélioration du sol, les fera toujours sur une plus large échelle. » L'insertion du travail de M. Jamet au procès-verbal est ordonnée , ainsi que le renvoi à la commission centrale. M. le vicomte de Cussy, membre de l’académie de Metz, désirerait beaucoup que le système de colonie partiaire , si bien mis en lumière par M. de la Fontenelle, pût être ad- mis partout. La morale y gagnerait et les avantages mutuels des parties en découleraient très-naturellement, mais il ne pense pas qu’il puisse s’établir dans toutes les localités. M. de Cussy cite un bail à prix d’argent, de sept à neuf années , en usage assez souvent dans L Calvados ; il con- cilie les intérêts du preneur , ainsi que ceux du bailleur; il consiste à diviser les pâturages de la ferme en autant de . parties que d’années indiquées dans le bail; chacune d’elles est successivement soumise à l’engrais et réserve ainsi l’intérêt réciproque des contractants. Quant aux terres à labour, le bail prévoit et défend l’abus dans las. solement des grains et l’admission deux fois dans le même champ des plantes oléagineuses. M. le président met aux voix les différentes solutions émises, qe a DES SECTIONS. 209 La 1° question , posée par M. Lecerf, et ainsi résumée après quelques contestations : La législation actuelle est- elle suffisante ? est résolue affirmativement. La 2° question, également résolue par M. Lecerf en ces termes : Le bail à prix d’argent est le mode le plus avantageux à l’agriculture, sauf quelques exceptions lo- cales, est aussi idépiéé: M. le docteur Bonnet fait hommage au Congrès d’un Manuel de l’agriculture, à l’usage de la Franche-Comté, et de diverses brochures rentrant dans le même cercle d’études. On passe à la 2° question. M. Desvaux lit un mémoire et établit que la population rurale, en allant s’agglomérer dans les villes, va échanger la simplicité contre le vice , la santé contre la maladie. Ce mal social date du monde antique, et Varron s’en plaignait au milieu des Romains. Alors l'esclavage était cependant considéré comme un remède. Aujourd’hui nous détestons un pareil correctif, et nos populations sont affranchies , mais elles restent esclaves des passions. Remontant aux sources du mal actuel, M. Desvaux si- gnale les besoins multipliés du luxe. Ge n’est pas l’homme de la campagne seulement qu’il s’agit de modifier, c’est le riche, c’est nous-mêmes. La domesticité , l’armée per- manente, sont à ses yeux une cause de graves désordres ; les corruptions de la ville s’introduisent par là dans la . Campagne. M. Desvaux provoque donc l'effort des gouver- nements. « Il ne s’agit pas, dit-il , d’honorer l’agriculture à la manière des Chinois, dont l’empereur, une fois par an, . trace un simulacre de sillon, mais de resserrer chaque -jour, par des institutions agricoles , par des comices ru- raux , les liens qui doivent exister entre le propriétaire riche et le laboureur intelligent. Il y a en Chine des la- T. I. 14 210 PROCÈS-VERBAUX boureurs mandarins , pourquoi n’en verrions-nous pas ici membres de la Légion-d'Honneur ? » M. le président exprime à M. Desvaux le regret qu’il éprouve et que partage le bureav en l’interrompant, pour lui rappeler les limites apportées par le règlement au dé- veloppement des mémoires écrits. M. Desvaux se borne , en conséquence, à formuler des conclusions en ces termes principaux : Suppression de la conscription. Education des classes professionnelles, Abo- lition des jachères. Création de banques agricoles. M. Thomas, ancien notaire à Angers, écrit à la section pour proposer d’attacher le fermier au sol en le rendant propriétaire; son plan consisterait à faire augmenter, par le gouvernement, la solde des travaux publics, opérer une retenue sur le taux des journées de travail, et changer au bout d’un certain temps, cette réserve en Litres et actions dans des colonies agricoles. M. Heuzé tend à démontrer que quatre causes princi- pales contribuent à favoriser l’émigration dont on se plaint généralement : 1° Sur les côtes, la marine mar- chande ; 2° L’accroissement.des grands centres de popu- lation ; 3° La multiplicité des voies de communication, grandes routes, routes stratégiques et de grande vicina- lité; 4° Développement de l'instruction et de la calture intellectuelle, Un remède se présente à ses yeux, ce serait le morcellement du sol, dominé par les grandes exploita- tions ; mais ce remède lui paraît anli-social. Il faut donc se résoudre aux effets dont on ne peut détruire les causes, et favoriser l'amélioration des instruments aratoires. M. de Ja Fontenelle demande à rectifier les faits avan: cés par M. Heuzé , relativement aux routes stratégiques: M. de la Fontenelle, auteur d’une statistique du départe- ment de la Vienne , établit que, dans le département des Deux-Sèvres , la population s’est rapidement élevée de. re re DES SECTIONS. 211 230,000 hommes à 320,000 , et dans celui de la Vendée, de 300 à 360,000, approximäativement. M. de Senonnes s’afilige de ce que l’amour-propre, pas- sion éminemment française , contribue si notablement à la dépopulation des campagnes , par le dédain des enfants de la campagne pour la condition de leurs pères. Les illu- sions fatales enfantent de premiers désordres qui condui- sent bientôt leurs victimes jusqu'aux cours d'assises. Il réplique à M. de la Fontenelle que les augmentations de population citées par lui, portent sur les villés et non sur les campagnes. À l'appui de son opinion, M. de Senonnes cite! la rareté et la cherté des bras au moment des plus urgents travaux de l’agriculture. M. Puvis fait PHARE qu’on s’occupe da mal et non du remède, M. Robinet dit : Voulez-vous créer des propriétaires ou des légions de prolétaires ? Je m'’attache seulement au premier point de la question. Le remède aux abus, c’est la législation moderne, c’est le code civil, qui, en inau- gurant l'égalité, ont ouvert à tous les citoyens l’accès de la probriété. Honorons l’agriculture , et l’agriculteur lui demeurera fidèle. Il y a peu de déserteurs au drapeau , : parce que l'honneur y enchaîne le soldat. Le nom même de ministre de l’agriculture est un mot nouveau. L’année dernière , un journal quotidien a été sur le point de se fonder : ce sont là des sympiômes qui encouragent à at- tendre beaucoup du temps et des moyens déjà mis en œuvre. ; M. de Sevret établit en principe : partout où il y a ri- chesse et travail la population s’accumule ; la rareté ame- nant la cherté, le mal se neutralise par son excès même, _ét la cherté ramène les émigrants au point de départ. Dans Parrondissement de Beaupreau , la moyenne des familles s'élève à cinq enfants, et sera conséquemment doublée en vingt-cinq ans. 212 PROCÈS-V ERBAUX M. le président , sans entrer dans la discussion , fait observer que le christianisme avait couvert lagricul- ture de sa protection puissante à toutes les époques du moyen-âge. Ainsi dans les premières séances du grand concile de Clermont, Urbain IL, avant de prêcher la guerre sainte , fit déclarer que la charrue , empruntant à la Croix sa vertu divine, aurait droit d’asile comme le parvis du sanctuaire , et qu’elle rendrait inviolables tous ceux qui se réfugieraient près d’elle; que la trève de Dieu s’élendrait à toujours , non-seulement aux laboureurs, aux herseurs et à leurs domestiques , mais encore à leurs bœufs et à leurs chevaux; qu'ils jouiraient d’une paix per- pétuelle et que l’excommunication frappapai tous ceux qui oseraient la violer. M. Heuzé fait remarquer que l’opinion de M. de Sevret a corroboré la sienne. M. Olivier de Laleu demande que les chambres amé- liorent l’agriculture par la balance de l'impôt, et sa répar- tilion sur les gbjets de luxe, Les questions n’ayant pas amené de solution précise, ne sont pas mises aux voix , mais la section ordonne que le procès-verbal reproduise les vœux des divers préopi- nants. La séance est levée à une heure. Quatrième séance. — Du 5 septembre 1843. Rapporteur : M. DE’ SEvRET fils, vice-secrétaire, La séance s’ouvre à une heure sous la présidence de M. de Quatrebarbes. Le procès-verbal de la dernière séance est déposé sur le bureau. M. Pavis fait observer que son rapport sur l’ou- vrage de M. de Caumont a été publié et non écrit. Le pro- cès-verbal est adopté. DES SECTIONS. 213 La commission centrale , par l’organe de M. de Cau- mont, avertit la section d’agriculture qu’une nouvelle question a été insérée au programme , sur la proposition de M. Pavis. C’est sur la nécessité de créer nn ministère d'agriculture. La section décide que le problême sera dis- cuté demain. M. Lesaulnier envoie un mémoire sur la seconde ques- tion d'agriculture déjà discutée hier. M. de Sevret fils fait un rapport sur un mémoire de M. Heuzé, concernant la culture du trèfle. Ce rapport vient compléter heureusement l’étude indiquée par le programme du problème de l’élève des bestiaux, puisqu'il s’agit de plantes fourragères. Le mémoire est très-remar- quable par sa classification complète, par la science de son auteur , par les observations et les expériences multi- pliées, auxquelles il s’est livré. Le mémoire étant trop long , M. de Sevret est invilé à en faire l’analyse. Le mé- moire s'occupe de l'influence du climat, du sol et des semences pour la bonne réussite de la culture du trèfle, Le trèfle supporte le froid dans les terrains secs: il vient bien dans les terres argileuses , marneuses , calcaires , mal dans les terrains schisteux; la terre doit avoir été travail- lée pendant plusieurs années , être fraîche et profonde. La section vote le renvoi du mémoire au comité central, en le lui recommandant pour l'impression. M. Puvis présente à la section les statuts d’un concours . ouvert en Italie, et les statuts d’une nombreuse et bril- lante société d’agriculiure , dont le siége est établi à Turin, mais qui compte des membres dans beaucoup de pays. Ses revenus sont considérables; elle a à sa disposition de nombreux moyens moraux et matériels, tels que fermes modèles, publications , journaux , écoles , etc. Elle existe sous la protection du gouvernement , ét elle invite les sociétés d'agriculture françaises , à échanger avec elle leurs publications. 214 PROCES-V ER BAUX La section acceple avec reconnaissance cette commu- nication , et elle envoie ces statuts à la société d’agricul- ture de Maine et Loire. La discussion est ouverte sur la première question d’in- dustrie, M. Robinet fait observer que le moyen d’oblenir une bonne statistique , c’est que les hommes éclairés s’en oc- cupent dans leurs arrondissements. M. Freslon raconte que des tableaux ayant été envoyés par le gouvernement aux maires de chaque commune, avec prière de les remplir, quelques-uns y ont mis des chiffres au hasard , en sorte qu’une seule commune aurait possédé quelques millions de bestiaux. M. le préfet aurait alors senti la nécessité de nommer des commissions qui n’ont pu arriver qu’à des résultats approximalifs, M. Desvaux a obtenu des moyens exacts pour la statis- tique des populations, en comparant les renseignements puisés dans les cahiers des maires, avec ceux fournis par des ecclésiastiques. M. Olivier de Laleu, dit que le gouvernement a envoyé des contrôleurs des contributions pour relever les rensei- gnements nécessaires à la statistique industrielle; mais que la crainte d’être imposés a rendu cette démarche inu- tile, et qu’alors les employés des contributions ont été obligés de fixer l’impôt arbitrairement. M. de Senonnes prend la parole. Il a vu des maires qui élaient fort embarrassés pour répondre aux questions du gouvernement : l’une d’elles demandait combien il y avait de poules dans chaque commune. M. Pavis : Pour obtenir une bonne statistique agricole , il faudrait que les bureaux du ministère ne fussent pas complétement étrangers à l’agriculture. Il y a au ministère du commerce un chef et quatre commis chargés seuls de l’intérév le plus vaste et le plus important de notre patrie. Aussi, les questions envoyées aux maires ont-elles été très- ñn DES SECTIONS. 215 malrédigées:, Et quant aux bestiaux ; on. a omis d’interro- ger MM. les maires sur le nombre des veaux.et des génisses deluurs communes , en sorte que le résultat de la statistique du bétail est d’un tiers au-dessous de la réalité. Quant à la nature.des sols, la classification adoptée n’est ni scientifi- que, ni agricole , c’est un véritable rêve. M. Puvis de- mande qu'un ministère de l’agriculture soit créé , où des hommes spéciaux pourraient donner d’utiles impulsions, et recueillir des renseignements indispensables à tout you- vernement prévoyant, Chaque préfeciure.et chaque sous- préfectune auraient des employés spéciaux ; et qui secon- deraient l’action énergiqneet bienfaisante de ce ministère. M. Robinet. pense que beaucoup d’hommes, comme M: Oscar Leclerc, qui auraient le courage d’aller de com- mune en commune, poursuivant avec persévérance une enquête agricole , éclaireraient suffisamment le probléme, que d’ailleurs la stalislique générale du gouvernement n’est pas aussi défectueuse qu’on le prétend. M. Richelet demande que Fon procède par association ;, des, hommes comme. M. Oscar Leclerc ne se trouvent pas partout, Chaque année l'association ouvrirait une enquête et recueillerait des renseignements que.seul M: Oscar Le- clerc a sufli à réunir, M. de Caumont constate que ces associations existent en Normandie: mais les renseignements ainsi recueillis ne sont que des ébauches imparfaites qui ont besoin d’être polies par des hommes habiles et dévoués. Les enquêtes doivent se faire au centre de chaque canton. M. Olivier de Laleu fait de: nouvean: observer que: les industriels, étant imposés en raison de leurs produits , chercheront toujours à les dissimuler. M. Puvis adopte l’action des associations et des travaux individuels, mais il voudrait qué le gouvernement fût ca- - pable de diviger ces efforts , de les recueillir et. de les ré- pandre, | 216 PROCÉS-VERBAUX Ces observations résument le débat et sont approuvées par l’assemblée. On passe à la discussion des 2° et 3° questions du pro- gramme. Ces deux questions sont réunies. M. Lecerf : La Société d’agriculture de Caen a mis ce probléme au concours, Vingt-trois mémoires ont été en- voyés. Tous reconnaissent la corruption des domestiques, les uns en accusaient les domestiques eux-mêmes, les au- tres les maîtres. Il existe des intérêts opposés entre ces deux classes de personnes, d’où un désaccord. Comment -y remédier ? La législation est ce qu’elle doit être ; elle ne permet pas à l’homme de vendre sa liberté, et en de- hors de cette maxime, elle laisse toute latitude aux con- venlions. Mais doit-on imposer les livrets ? Si les livrets se bornent à constater l’entrée et la sortie et le nom des maîtres , ils sont encore plus dangereux qu’utiles, Dans aucun cas, ils ne peuvent contenir aucuns renseignements sur la moralité du domestique ; le maître ne peut ainsi stigmatiser l’avenir de la personne qui le quitte. D’autre part , les lois générales ne peuvent rien contre la mau- vaise conduite. M. Richelet dit que la question est ancienne; qu’elle a été débattue dans différents Congrès ; que des Sociétés ont couronné des mémoires qui étaient contradictoires. Il reconnaît que le livret a des inconvénients s’il contient des renseignements sur la moralité des domestiques; mais s’il se borne à constater le nom des maîtres, l’entrée et la sorlie, il y a avantage et plus d’inconvénients. La durée du service dans chaque maïson , le nombre des maîtres , quels sont ces maîtres ? sont des renseigne- ments qui ont leur éloquence et qui ne soni préjudiciables qu'aux mauvaises gens, mais qui sont des titres d'honneur pour les braves gens. Il constate que dans les hôtels pu- blics de Paris , on exige des certificats qui équivalent au livret. DES SECTIONS. 242 -M. Freslon prend la parole, Il concoit le livret appli- qué aux hommes , aux ouvriers ; les hommes voyagent , il est diflicile de prendre des renseignements sur leur compte. D'ailleurs , les rapports du maître et de l’ouvrier sont bien moins intimes que les rapports du maître et du domestique. L’ouvrier ne donné qu’un travail limité , il ne vit pas sous le toit de la famille , il peut sans déshon- neur travailler pour le compte d’un maître assez peu moral , hors, du commerce, Mais l’immoralité du maître qu’une jeune fille aura servi, par hasard, peut être une flétrissure. Si le livret ne signifie rien, il est inutile ; s’il signifie quelque chose, il est dangereux. Autrefois , le travail rural s’effectuait par l’esclave : le christianisme a apporté dans le monde l’amour du pro- chain, le principe de l’égalité devant Dieu et de la frater- nité. Aujourd’hui, il n’y a que des hommes libres. Cette dignité de l’homme et la liberté du contrat, voilà les . ps garanties législatives désirables. Hors de la religion, rien que d’arbitraire. Le mauvais maître démoralisera, le bon maître moralisera. Sous ce rapport, la religion si vive du moyen-âge avait apporté dans la famille des relations bien supérieures à celles qu’enfante l’égoisme de notre temps. M. Freslon conclut qu’il faut faire revivre ces idées , ou par la religion , ou par des moyens philosophi- ques s’ils ont cette puissance , et maintenir la liberté du contrat, M. Richelet naît L parole. Aujourd’hui, dit! Porateur, les idées religieuses ont perdu de leur énergie; il distingue les domestiques des campagnes et ceux des villes , et il soutient que le livret est indispensable dans les grands centres de population, où le maître connaît rarement son serviteur, où des maîtres ont vu leur réputation compro- mise par des associations peruicieuses de domestiques ; le livret, dit-il, n’est pas un mal pour un bon serviteur. M. Hunault propose une autre solution. Il demande 218 PROGES + VERBAUX qu’on institue des maisons de refuge et d’honorables s0- ciétés de patronage , poux le placement des serviteurs qu’un caprice a peut-être jetés sur le pavé, Aujourd’hui, les domestiques sans places sont abandonnés à des in- fluences si repoussantes qu’il est impossible de les détail- ler, M. Hunault demande la réhabilitation du domestique comme citoyen. Aujourd’hui , il y a des serviteurs libres servant des maîtres libres. H fait remarquer que le domes- tique de campagne est présque l’égal de son maître. Le livret lui ferait perdre-une partie de sa considération. M. Lechalas regarde les livrets comme utiles. La discussion est fermée, M. Lechalas consulte la sec- tion pour savoir si elle veut prendre une résolution. La majorité pense qu'aucune décision précise et exclu- sive ne peut être adoptée. La section passe à la 5° question. M. Hunault voudrait rattacher les caisses d'épargne à l'établissement de banques agricoles. L'argent des caisses d'épargne est appliqué à la satisfaction des besoins muni- cipaux et départementaux : en payant 4 p. ‘7, , elles pour- raient prêter aux propriétaires à 5 p. ‘7, et ainsi rendre l'usure impossible. M. Puvis appuie ce principe. La section décide que cette question devra être’ traitée à Nantes, où elle a été spécialement étudiée. M. Guinoyseau dépose sur le bureau de nombreux mé- moires que M. Bodinier a rédigés sur l’état de l’agriculture en Toscane. MM. Allard et Leclerc sont nommés rapporteurs. M. Thomas lit un mémoire sur la 2e question déjà réso- lue hier. Il en a été fait mention au procès-verbal de la dernière séance. M. le comte Maurice du Parc présente un mémoire sur les chemins de fer. La discussion s’ouvrant sur la 7° question, M. de Qua- DES SECTIONS. 219 trebarbes lit ce mémoire remarquable. Son objet est de rendre inulile la présence des locomotives dans les tun- nels , son moyen consiste dans la confection de plans inclinés , son but est de prévenir des accidents épouvan- La section, charmée de cette lecture , nomme M. Lau- mônier, élève de l’École polytechnique, ancien officier de marine, pour lui faire un rapport sur ce mémoire. La séance est levée à une heure. : Cinquième séance: — Du 6 septembre 1843. Rapporteur.: M. DE SEVRET fils, vice-secrétaire. La séance s’ouvre à onze heures sous la présidence de M. de Quatrebarbes. Le procès-verbal de la dernière séance est adopté sans réclamations. M. Jamet, de Chäteaugontier, écrit au président de la section, pour le prier de la remercier en son nom de la bienveillance avec laquelle elle a accueilli son travail. M. Bodinier remet au Congrès un projet d’association, _ conforme à celui que M. Berti-Bichat a établi à Bologne. Un agriculteur dans chaque canton serait chargé de re- cueillir des observations météorologiques et agricoles , et de les transmettre à un comité central chargé de les co- ordonner et de les publier. M: Oscar Leclerc-Thouin pense que cette idée a une certaine portée d’avenir, mais son exécution’ est bien dif- ficile; les instruments manqueront, ainsi que la science et l'attention. Néanmoins on peut essayer, et il est cons- . tant que si ces observations étaient bien faites et compa- rées chaque année avec le résultat des récoltes , on pour- rait ainsi obtenir le secret de certaines Lois de la nature, 220 PROCES-VERBAUX dont la connaissance hâterait singulièrement les progrès de la science. M. Hunault annonce que pour sa part il travaille de- puis longtemps au succès de cette bonne pensée. La section décide que la proposition de M. Bodinier sera renvoyée aux Sociétés industrielle et d’agriculture d'Angers: M. de Cussy annonce au Congrès que les agriculteurs des environs d’Edimbourg donnent en commun des ho- noraires à un savant chimiste qui les aide de son expé- rience. M. Pavis a la parole sur cette question : De la nécessité de la création d’un ministère de l’agriculture. Cette proposition a déjà été accueillie par le conseil général d’agriculture et par le Congrès de Lyon, et par diverses associations. L'agriculture est le plus grand intérêt francais, elle s’exerce sur un capital de 66 milliards , emploie 25,000,000 d'hommes, et son revenu est de 5 à 6 milliards en den- rées agricoles. Elle fournit à l’industrie ses matières pre- mières, à l'Etat ses soldats, ses matelots , ses bois de ‘construction; elle paie plus de la moitié de ses impôts. Quoique ses progrès depuis vingt-cinq ans aient été rapi- | des , ils auraient dû l’être bien davantage , et si sa produc- : | tion était au niveau de celle de l'Angleterre , elle pourrait nourrir 5o millions d'habitants. Cependant, l’agriculture, malgré une importance si dominante, n’a ni le rang ni l’influence qu’elle mérite. | C’est le propriétaire qui a le droit d’élire et d’être élu, et | il faut bien distinguer le propriétaire de l’agriculteur. Il | y a encore dans nos idées un reste des vieux préjugés que | lPétat de servitude des travailleurs du sol avait répan- dues sur cette profession. Il y a à peine un agriculteur nommé comme tel à la chambre des pairs, où toutes les bautes fonctions et les industries sont représentées d’une DES SECTIONS. 221 manière si distinguée; et cependant les améliorations en agriculture sont le fruit d'expériences presque toujours ruineuses , et qui ne peuvent jamais conduire à la fortune, mais qui , lorsqu'elles réussissent , sont à peine payées en considération , mais sont récompensées par le sentiment du bonheur de la création d’une richesse nouvelle dont profite l’humanité tout entière. À la fin du règne de Henri IV, Sully avait encouragé l’agriculture; mais Colbert appliqua tous ses soins à déve- lopper le progrès des arts et manufactures; aussi combien fut grande la perturbation apportée par quelques années de malheur ! Le commerce a un code , un ministère, des chambres consuitatives, des prohibitions, et ses popula- tions sont trop souvent remuantes, dangereuses pour l’or- dre public. L'agriculture , bien supérieure au commerce, par son capilal , ses revenus et sa population, n’a qu’une faible protection nécessaire à ses bestiaux et à ses peines, sources de sa richesse; et cependant, l’industrie, dont elle paie les monopoles, lui dispute avec grand bruit ces * seuls avantages. Le pouvoir a eu besoin de bois, de chevaux; il a créé des administrations spéciales ; mais les forêts ont été at- tribuées aux finances, le desséchement des marais aux travaux publics, et la guerre tend à s’emparer des héros. L'agriculture n’a dans le ministère du commerce qu’un petit bureau, si bien que la statistique de l’agriculture a été faite par les bureaux du commerce; les questions ont élé mal rédigées , les chiffres groupés dans l’intérêt jaloux de l’industrie. Et comment un ministre du commerce peut-il être le défenseur de Pagriculture, dans les cas où lintérét de ces deux sources de richesses est contraire ? Les compliments n’ont pas manqué aux agriculteurs, on a encouragé leurs réunions; mais on n’a tenu que peu de . comple de leurs avis, parce qu’ils n’avaient pas de repré- sentants dans le conseil. Un directeur général , avec voix 222 PROCÈS-VERBAUX consultative des ministres, serait. insuffisant , il faudrait un ministre. Jusque-là, tous effets de tous les-comités pos- sibles seront neutralisés par l’inertie du pouvoir. .Toute la section a été charmée de la lecture de ce rap- port; elle manifeste de la manière la plus vive son adhésion à ses conclusions. M. de Sevret propose alors à M. Puvis, de faire une pétition aux chambres en son nom personnel, car un Congrès, n'étant pas corps constitué , ne peut faire une pétition collective, Chaque membre présent pourra la si- guer. Gelte pétition n’aura pas grand effet cette année; mais il a remarqué combien la persévérance était puis- sante sur une assemblée. Ainsi, des mesures peu utiles ; mal accueillies d’abord, sont devenues, par la persévé- rance de leurs auteurs , de grosses questions politiques. - I faut que la création du ministère de l’agriculturs de- vienne une grosse question. MM. Guibert et Lecerf proposent le renvoi au président du conseil. La section adopte toutes ces conclusions; elle forme le vœu de voir créer un ministère de l’agriculture. En con- séquence, considérant que l’agriculture est la base prin- cipale de la prospérité du pays , qu’elle est l'intérêt pres- que unique de 25,000 ,000 de ses habitants , qu’elle donne à tous la vie et au plus grand nombre le bien-être ; Que cependant elle manque essentiellement dans notre état social d’organe et d'appui, particulièrement dans les hautes régions du pouvoir ; qu’elle n’a dans aucun degré de notre hiérarchie d'hommes spéciaux chargés de pré- parer et. de soutenir les lois nombreuses qu’elle réclame depuis si longtemps; considérant que tous les autres grands intérêts du pays, bien moins graves , bien moins essentiels, sont cependant organisés, et ont des ministères spéciaux, pendant que l’agriculture n’est qu’un accessoire du ministère du commerce qui lui est au moins étranger ; DES SECTIONS. 223 Par ces diverses considérations, la section d’agriculture et d'industrie estime que la création d’un ministère spé- cial, comme première base d'organisation ; est désormais une nécessité sociale: Elle renvoie le niémoire de M. Pu- vis à la commission centrale , pour que la lecture er soit faite en séance générale, qui sera invitée à adhérer aux décisions de la section ; et à renvoÿer le mémoire de M. Puvis à M. le président du conseil des ministres. M, Michel fait présent à ja section d’un anni inti- tulé : Annales forestières. : M, de la Saussaie présente un mémoire par M. Hawe- field , sur la jonction des deux Océans. M. Laumonier est changé d’en faire le rapport. La discussion est ouverte sur la 3"° question du pro- gramme, M. Oscar Leclerc prend la pastel pense que le pro- grès des races-est dû surtout à la qualité et à la quantité dela nourriture et au croisement des races. M. Rieffel, de Grand-Jouan, directeur de l’établissement agricole , a amélioré par ce moyen la-race locale pure, sans avoir recours à des croisements étrangers. Depuis un quart de siècle, le progrès a été sensible dans le département de Maine et Loire, grâce à l’amélicration de la culture de plantes fourragères. Il fait remarquer que dans l’arron- dissement de Segré, M: Parage ne fait plus travailler ses élèves. Dans un tel système, la race dé Durham semble- tait présenter des lavantages remarquables. 4 voit avec plaisir l'introduction progressive, dans-nos pays, de cetté race étrangère, La question des moutons n’est pas encore Wûüre; en croisant au premier degré les mérinos et Îles moutons anglais, on a obtenu augmentation de poids et améhoralion de la laine. L’orateur pense que ces effets, possibles en Angleterre, et déjà tentés- dans le Loirét, doivent réussir dans ce département. M. de Cussy propose d'admettre lés pores du Berkshire , 224 PROCÈS-VERBAUX comté voisin de Londres: c’est un croisement du cochon de Chine et de la race indigène. Ces animaux, admira- blement formés pour le but que l’éleveur doit avoir en vue , présentent des flancs larges et profonds. Leur grouin est pointu, leur tête courte et ramassée; ils sont bas sur jambes, et généralement de couleur blanche tachetée de noir ou de brun, Leur peau est très fine et peu velue; leur chair est pleine de saveur, et la qualité de leurs jam- bons est tout-à-fait supérieure. On remarque iv leur grande aptitude à engraisser. M. de Cussy voudrait aussi qu'aux moutons à longue laine du New-Kent, dont l'introduction a déjà eu de très- heureux résultats, on joignit les New-Leicester, qui ont tant de succès en ce moment en Angleterre, pour la beauté de leur laine et leur facilité à engraisser. Et, à propos de la race bovine de Durham, contre laquelle il existe d’assez nombreux préjugés, le préopinant cite un fait qui plaide puissamment en faveur de ce croisement, Les laitières des environs de Londres , qui, au moyen de 12 à 13,000 vaches, fournissent à cette ville pour plus de 25 millions de lait annuellement, n’ont plus que des vaches croisées au premier degré de Durham , et de l’es- pèce dite Holderness , et une ou deux autres, Or, on peut s’en rapporter à l'intelligence de ce genre d'industrie. M. Hunault signale les progrès que la race des moutons a fails dans nos pays. La discussion est close, et la section recommande à l’attention des sociétés d'agriculture et industrielle les croisements déjà opérés entre la race de Durham et les races indigènes , et le croisement des races anglaises à longues laines avec les moutons de la Varenne et de Tou- nay. Elle recommande aussi l’une des races de pores de Baugé, presque aussi belle que la race anglaise. 5®e question. — La section a une médaille à décerner à l’auteur du meilleur mémoire sur ce problème. DES SECTIONS. 225 M. Lecerf lit des conclusions ; il signale comme causes principales de l’amélioration des races : 1° la nourriture des animaux; 2° la confection des étables et écuries; 3° les soins consacrés aux animaux; 4° des ménagements dans le travail qu’on exige d’eux. . M. Desvaux présente un long mémoire , et demande qu’une commission soit nommée pour l’examiner. M. Robinet fait remarquer que MM. Dumas et Bous- singault, et d’autres chimistes, se livrent à d'immenses SERérIEN CFE qui ont pour but la résolution du problème proposé. M. de Caumont prend la parole. Il indique un ASE aperçu dont ces savants chimistes ne s ’occupent pas. C? est l'influence des différents pays sur la nature des animaux, sur leurs dispositions à engraisser, à se fortifier ou à dé- périr ; ainsi les marchands de chevaux normands savent que tel animal venant d’un certain pays sera transformé de telle facon par sa présence dans une autre contrée. Les herbagers savent que tel herbage convient au bœuf de telle ou telle provenance. M. Desvaux fait connaître la division des chapitres du mémoire qu’il a présenté à la section , et une commission composée de MM. Boutton-Levêque, de Gussy, de CGau- mont, Oscar Leclerc et Puvis, doit faire un rapport sur tous les mémoires qui ont été présentés. 6° Question. — M. Boutton-Levêque regrette que M. Corroy n’ait pu venir exposer des observations très-com- plèles et très-intéressantes. M. Oscar Leclerc lit un passage de son ouvrage sur l’a- griculture de l'Ouest de la France, page 4og jusqu’à la page 411, La section décide que ce passage sera imprimé dans le volume du compte-rendu des séances du Congres. M. Hunault pense que le dépôt d’ Etalons d’ Angers n’a commencé qu’en 1805. M. Oscar Leclerc en avait “fait re- monter l'existence au-delà de 1789. Te I. 45. 226 PROCÈS-VERBAUX 7° Question. —M, Boutton-Levêque lit un mémoire où il demande, conformément aux conclusions du conseil général-de la Vendée et à l'opinion du général Oudinot, que le minimum du prix des chevaux soit porté à 550 f., autrement l’administration aceorde une prime au mau- vais élevage. La section décide que ce mémoire sera im- primé, 8° Question. — M. Oscar Leclere pense que la race manselle de Segré est plus favorable pour lengrais dans les herbages que celle de Cholet, du moins il l’a rencon- trée plus fréquemment dans la vallée d’Auge, où on en fait plus de cas. M. de Quatrebarbes pense également que la race man- selle s’engraisse plus vite dans les herbages de la Norman- die. Cependant les agriculteurs des environs de Cholet préfèrent la race de leur pays, car les marchands de Pa- ris achètent plus cher ces bœufs sous le même poids, parce qu’ils donnent une plus grande quantité de suif, En outre, la race de Cholet prend mieux l’engrais à Fétable, principalement à l’aide des choux. Il ajoute qu’à Château- goutier, il a vu des animaux de quatre ans vendus de 800 à 900 fr., tandis que la race choletaise ne s’engraisse qu’à sept où huit ans. M. Massonneau fait remarquer que les bœufs manseaux dont il est parlé travaillent peu; élant engraissés à quatre ans, ils croissent aussi plus vite, ils font de la chair et ne gardent point de graisse à Pintérieur; au contraire, les bœufs de sept ans ont achevé tout leur développement musculaire et prennent mieux la graisse, M. Hunault recommande la nouvelle race de bœufs de Durham. La séance est levée à une heure. DES SECTIONS. 227 Sixième séance. — Du 7 septembre 1843. Rapporteur’: M. DE FALLOUx, secrétaire. Le procès-verbal de la précédente séance est adopté. On procède au dépouillement de la correspondance. M. Desvaux a envoyé à M. le président un Essai sur l’agriculture, chez les différentes nations. Ce travail est confié à un rapporteur : M. Puvis fils accepte ce titre. M. de Laleu rend compte d’une brochure publiée par M. Guénon , et dont le but est de faire reconnaitre , au premier aperçu, la qualité des vaches laitières. M. le président lit un mémoire de M. le comte du Parc. Cet honorable membre du Congrès , étranger à notre pays, soumel à la section les Ste a que lui suggère l’examen altentif de l’état de notre ville, Il est de voir le dépôt de poudre situé dans le château même , et suspendu sur nos têles comme une perpéluelle menace. IL croirait infiniment plus avantageux d’y substituer un vaste réservoir d’eau de la Loire, qui se distribuerait, de ce plateau élevé, dans l’intérieur de nos fontaines publi- ques et des maisons particulières ; tandis que les matières inflammables seraient reléguées , comme en Autriche , dont il cite l’exemple, au milieu de nos campagnes. M. le comte du Parc demande aussi qu’on établisse au château d'Angers une batterie de quatre canons, destinée à faire relentir soudainement l’annonce des incendies. M. Sébille-Auger fait observer que le conseil municipal, sur liniliative dé M. Fourier , a traité déjà la question du transport des eaux de la Loire au sein de notre ville, et que cette proposition , loin d’être rejetée , a été uni- quement ajournée par suite de considérations financières. L'ensemble des vues émises par M. le comte du Parc 228 PROCÈS -VERBAUX est renvoyé et recommandé aux deux sociétés de l’agri- culture et de l’industrie. M. Guibert rend compte de plusieurs numéros des annales forestières. Il fait ressortir le mérite de plusieurs articles sur l’aménagement des forêts. Il analyse une opinion de M. Pascalis , député , sur la nouvelle législation de la chasse , et l’embrigadement des gardes forestiers. Ces numéros traitent encore , à un point de vue auquel M. le rapporteur s’associe , la question des gardes com- munaux , du déboisement des landes , d’un moyen de détruire les insectes nuisibles à la végétation ; il cite l'exemple d’un habitant d’Auxonne, qui, en attirant sur son terrain les oiseaux destructeurs des chenilles , en voyait disparaître jusqu’à 120,000 par jour. La question des forêts de l’Algérie et des découvertes minéralogiques qui s’y rattachent , double et inséparable élément de la prospérité de notre colonie africaine , y est représentée comme dépassant , par le succès, toutes les prévisions an- térieures, Ce rapport est terminé par l’analyse succincte d’un Congrès scientifique , établi à Stutigard , à limitation de la France, et par un appel à l’échange fraternel entre les deux nations. La discussion est ouverte sur le procédé de M. Guénon, que le rapport de M. de Laieu a précédemment fait con- naître à l’assemblée. M. de Laleu raconte l'éducation champêtre de M. Gué- non, son existence enlière vouée aux habitudes de simple laboureur et aux observations qui en dérivent , et signale dans l'expérience même le germe de sa découverte. En 1814, M. Guénon à reconnu sur ses propres besliaux les symplômes dont il devait faire la base de son systême, Eu 1822, ilest devenu marchand de vaches. En 1898, il fixe l’attention des académies. En 183; , il en reçoit de DES SECTIONS. 229 publiques récompenses : le Comice agricole de Bordeaux lui décerne une médaiile d’or, et le Comice d’Aurillac lui accorde le même témoignage de la plus complète appro- bation. Son ouvrage est imprimé aux frais de 30,000 souscripteurs. Gomment se fait-il donc, dit en terminant M. de Laleu, que la connaissance de ce procédé ne soit pas universellement répandue P M. Sébille-Auger, qui s’est procuré l’ouvrage de M. Gué- non, répond qu'il est confusément rédigé, qu'il n’a point été adressé aux Comices angevins, et que les vétérinaires d'Angers ne lui accordent qu’une très médiocre con- fiance. M. Desvaux confirme l’autorité de M. Sébille-Auger par celle du Gomice de Nantes. M. le président cite, au contraire, dans un sens favo- rable à M. Guénon, les expériences de M. Boutton. M. Jamet (de Châteaugontier) et le secrétaire de l’éta- blissement modèle de Rennes , sont aussi invoqués en sa faveur par d’autres membres. M. de Cussy demande alors que ; dans l’état d’incerti- tude où doit être placée l'assemblée par ces assertions contradictoires , M. de Laleu fasse du moins connaître approximalivement le procédé lui-même, afin que chacun puisse se livrer à son expérimentation privée. M. de Laieu explique que la disposition des poils au pis de la vache, et la présence d’écussons divisés par l’au- teur de la découverte en huit catégories, et propres à faire reconnaître les qualités du mâle comme de la femelle, sont figurés, dans l’ouvrage même, par des planches an- ._nexées au volume. Ces planches et ce volume circulent de mains en mains dans la section. Sur la demande de M. de Senonnes , on fait aussi con- naître le prix de l’ouvrage, qui est de 5 fr. 5o c. 230 PROCÈS-VERBAUX Le rapport de M, de Laleu est renvoyé au bureau cén- tral et à la Société d'agriculture. M. le président ouvre la discussion sur la dixième question, M: Massonneau accorde la préférence à l'emploi des chevaux. M. de Senonnes demande des modifications à l’attelage des bœufs , et que du moins le tirage par le poïtrail soit substitué au tirage par le col. M. de la Fontenelle croit qu’en général l’emploi des bœufs est préférable. « Les chevaux, dit-il, diminuent considérablement de valeur durant le service, tandis que le capital, représenté par les bœufs, va croissant jusqu’à l’engraissage. » IL adinet néanmoins l’utilité de l’emploi des vaches dans les petites exploitations. M. Massonneau insisté sur son premier point de vue, et fait observer qu’on tire aussi grand parti dés juments poulinières. M. de Pindray développe l’avantage des mules, ém- ployées en Poitou , et sur lesquelles on réalise de grands bénéfices, notamment aux foires de Champdeniers. M. de la Fontenelle reconnaît les faits émis par son compatriote, M. de Pindray, comme parfaitement justes, mais exceptionnels, En thèse générale , il maintient sa préférence aux bœufs , sauf les cas d'exploitation d’un parcours très étendu. M. de Senonnés combat l’emploi de la vache au labou- rage. M. le président répond que dans les petites cultures , où le closier ne peut acheter des animaux de grande va- ‘ leur pour tracer ses quelques sillons, la vache lui présente, en-outre de son bas prix , un grañd avantage pour le lait et le beurre, qui , bien que diminués de qualité par les DES SECTIONS. 231 fatigues du travail, contribuent encore à nourrir sa fa- . mille. Après quelque hésitalion dans la rédaction de la réponse, MM. de la Fontenelle et de Laleu se réunissent aux termes proposés par M. Puvis, ainsi conçus et adoplés : « Oui, selon les localités, » M. Oscar Leclerc rend compte d’un travail très imté- ressant de M. Désvaux. L'ouvrage est recommandé au bureau central, et l’au- teur a droit aux remerciements autant qu'aux félicita- tions. Personne ne prend la parole sur la 12€ question. M. le président passe à la 13°. M. de Senonnes présente un tableau animé et curieux des variations récentes de notre climat, et de la pérturba- tion des saisons, désordres qu’ilattribue au déboisement exagéré du soi, Il fait ressortir plusieurs abus de la légis- lation et en provoque le redresement. M. Hunault demande qu’on s'occupe des plantations riveraines de toutes les grandes voies de communication. M. Robinet justifie le déboisement des accusations atmosphériques ; mais reproche néanmoins à l’État de vendre des forêts par centaines d’hectares: « Les contribuables auraient plus d'avantages, dit-il, à voir élever leur quote d'impôt , pour un budget régu- lier ,; que de le payer sous une autre forme , et à un laux plus ruineux, par la rareté et la cherté de tous les bois de première nécessité, » M. de Pindray présente plusieurs Mdedératéos dans l'intérêt de pelils propriétaires , dont les plantations sont découragées par és mesures fiscales, et demande que ses vœux soient exprimés au ministre de l’intérieur. M. Oscar Leclerc appuie opinion de M. Robinet , et le conseil-cénéral, dit-il, s’ést occupé de la question d’après les mêmes principes. 232 PROCÈS -VERBAUX M. Leclerc appelle aussi l'attention sur les dunes de l'Ouest, qui assurent la fécondation d’une pertie considé- rable des côtes, non-seulement en soustrayant les terres riveraines à l’envahissement du sable, mais en permettant de les couvrir de masses de pins , dont la protection s’é- tend au loin et forme un rideau contre les ravages du vent. Il adresse aussi quelques reproches à l’intervention de l'administration des eaux et forêts, qui, au lieu de favo- riser les plantations nouvelles sur les propriétés fluviales, entravent souvent la bonne volonté et les efforts natu- rels des propriétaires, Enfin , M. Leclerc appelle les encouragements de VPÉtat , par voie de prime et de dé- grèvement d'impôts, sur ie défrichement et le boisement des landes. M. Puvis déciare qu’une loi de floréal , dont la date n’est pas présente à sa mémoire d’une manière plus pré- cise, remplit en partie les conditions qu’on vient de récla- mcr. Il s'étonne de la désuétude dans laquelle cette loi paraît tombée, mais il l’a invoquée pour son compte per- sonnel, et il jouit de son bénéfice. M. Charles Ernoult pense que le moroelléemént de la propriélé a été la cause la plus active du déboisement. Le moyen qui lui paraît le plus propre à opérer le reboi- sement serait l’associalion. L'heure avancée ne permet pas à M. Ernoult de donner à sa pensée le développement qu’elle comporte. La séance est levée à une heure. Septième séance. — Du 8 septembre 1843. Rapporteur : M. DE FazLoux, secrétaire. M. Hunault fait hommage au Congrès d’une brochure intitulée : Encore un mot sur le reinboursement et La con- DES SECTIONS. 233 version des 5 pour ‘7, consolidés , par un économiste de province, M. Laumônier rend compte des procédés nouveaux inventés par M. le comte du Parc , qui en demande l’ap- plication aux chemins de fer, et a déposé sous les yeux de la section un modèle en relief. Le rapport de M. Laumônier est favorable , mais laisse entrevoir de graves objections financières. M. du Parc répond qu’en faisant disparaître les dangers qui éloignent encore tant de voyageurs des chemins de fer , son invention centuplera les recettes, et couvrira ainsi d'elle-même les excédants de dépense. M. Robinet dépose un mémoire sur la 31° question, qui ne doit pas être discutée: Les conclusions en sont an- nexées au procès-verbal pour y êire insérées dans leur entier, CONCLUSIONS DE M. ROBINET SUR LA 31e QUESTION. 19 Aujourd’hui la France produit des soies qui ont nne valeur très supérieure à celle des soies de tous les autres pays de produc- tion. 20 Mais si les étrangers introduisent dans leur fabrication les per- fectionnements qui ont été imaginés en France, ils auront l'avantage sur nous pour les prix. 3° Comme celte concurrence s'apprête, la France doit chercher les moyens de la soutenir, en baissant ses prix, 49 Dans l’état actuel des choses , le prix moyen des cocons étant environ de 4 fr. 10 c., les frais de filature de 12 fr. 57 c., la quan- tité de cocons employés pour obtenir un kilogramme de soie de 12 kilog. 370 gr., la soie revient en moyenne à 67 fr, 14 c. Elle se vend 71 fr. 60 c., d'où il suit que le filateur obtient 6 172 pour 070 de bénéfice sur son capital. ; . 5° L’éducatenr du Midi gagne en moyenne des journées de 2 fr, 20 c. 6° Le proprétaire du Midi obtient 4 172 pour 97, de ses planta- tions de mûüriers. 79 Il résulte de ces données que le filateur , le producteur et le propriétaire du Midi, sont dans des conditions ordinaires, el ne peu- 234 PROCÈS -VERBAUX vent, dans l’état actuel des choses, supporter ancune réduction de quelque importance. 80 L’éducateur du Centre peut gagner aujourd'hui, en vendant Ses cocons, des journées de 3 fr. 90 Ce prix est réduit à 1 fr, 25 c. pour le petit producteur qui file lui-même. 100 Les plantations du Centre coûtent environ 50 pour. ‘7, de moins que celles du Midi. 119 En admettant que les mûriers rapportent 25 pour 0%, de moins, il reste un avantage de 25 pour 07, en faveür du propriétaire du Centre, Il peut donc réduire dans'‘cette proportion le prix de la feuille. 129 En tenant compte en outre de la différence de la main-d'œuvre le producteur du Centre arrive sur le marché avec un avantage de 30 pour 07, sur lé producteur du Midi. 130 Le Midi peut lutter avec le Centre en perfectionnant ses cul- tures de mûriers et ses éducations; en faisant de nouvelles planta- tions ; en apportant des changements dans les procédés de filature. M. le capitaine Allard lit un rapport des travaux des comices agricoles de Maine et Loire , et rend compte des beaux plans et dessins sur les maisons rustiques de Bologne et Ferrare , offerts précédemment, par M. Bodi- nier, au Congrès. Renvoi au bureau central, M. Millet fait hommage de sa brochure intitulée : Sta- tistique horticole de Maine et Loire, M. Laumônier obtient le renvoi aux séances qui seront tenues à Nantes , d’un besu mémoire de M. Wackfield , ancien membre du parlement anglais, sur la jonction des Océans Atlantique et Pacifique. M. Laumônier regrette que les documents fournis ne soient pas plus nombreux, et remôntent à une époque déjà ancienne, Le pereement de l’isthme de Panama est une question d’une grande importance. Au point de vue de l'humanité, tout le monde sait combien le passage du cap Horn est dangereux; au point de vue national, personne n’ignore que, dans l'Amé- rique du Sud, sous le rapport de la population, les Fran- DES SECTIONS, 235 caisviennent immédiatement après les Espagnols et les Portugais. Notre industrie a de grands débouchés dans les états de l’Amérique centrale, dans ceux du Pérou et du Chili , et la discussion d’une question aussi importante doit être approfondie par le Congrès. M. Puvis fils lit un rapport sur le travail de M. Desvaux intitulé : Essai sur l'histoire de l'horticulture, chez les différentes nalions. Renvoi au comité central, M. le président ouvre la discussion sur la 7° question de la section d'industrie, M. de Sevret prend la parole et développe d’impor- tantes considérations sur l’état transitoire de nos chemins de fer, sur leur perfectionnement possible , et sur leur nécessité croissante dans l’avenir. M. de Senonnes combat au point 'de vue de l’économie privée, de la moralité et de la centralisation excessive, les aperçus de M. de Sevret, M. Hunault s’élève aussi contre le développement des chemins de fer, dans l'intérêt des marchés de la province, et réprouve une industrie qui ne s’appuie que sur un mo- nopole exclusif. M. Fourier , ingénieur en chef du département, com- bat les objections émises contre les chemins de fer. Son argüthentation ; pleine de faits intéressants > est appuyée sur des chiffres et des documents spéciaux. M. Fourier. s'attache à démontrer que les chemins de fer serviront toujours plus activement au transport des voyageurs que dés mdrchandises ; et il établit que les recettes donnent pour résultät ; jusqu’à: présent : quatre-vingts centièmes pour les personnes, et vingt centièmes seulement pour les marchandises. M. de Laleu fait valoir en faveur des chemins dé fer l'intérêt des ouvriers qui perdent tant de temps et de tra- vail à accomplir leur tour de France. 236 PROCES-VERBAUX M. de Falloux croit que la question devrait être scin- dée, et il en propose la division. « Nous pouvons bien, dit-il , discuter si nous ferons plus , où mieux , que les nations voisines , mais nous ne pouvons pas décider que nous ferons moins ; un pareil aveu de découragement , un pareil abandon de nos inté- rêts commerciaux et militaires, ne peuvent émaner d’une réunion comme celle-ci. » | M. Charles Giraud demande si les chemins de fer pro- duisent des avantages proporlionnés aux dépenses énormes qu’ils entraînent , et après l’examen détaillé de ce point de vue, conclut négativement. M. de Falloux donne à l’opinion qu’il a émise précé- demment la forme d’une proposition ainsi conçue : « Le Congrès n’a traité la 7° question qu'après avoir posé en principe, que les travaux commencés seront con- duits à leur terme, que la nationalité et le commerce du pays seront sauvegardés avant tout, et maintenus au ni- veau des concurrences étrangères. » Cette proposition est adoptée. La séance est levée. 1re, 5€ ET 2€ SECTIONS RÉUNIES. Huitième séance tenue à Nantes, le 8 septembre 1843. Rapporteur : M. H£UZÉ, vire-secrétaire. La séance est présidée par M. de la Fontenelle, M. Robinet prend la parole pour remercier la députa- tion des corps académiques de la ville de Nantes qui ont bien voulu se charger de recevoir le Congrès. M. Heuzé, secrétaire , dépose , de la part de M. Jules Rieflel, un ouvrage en deux volumes, 1840 et 1845, inti- tulée : Agriculture de l'Ouest de la France. M. Neveu-Dérotrie dépose un exemplaire des ouvrages DES SECTIONS. 237 suivants : /’eillées villageoises ; Essais sur la statistique agricole de la Loire-Inférieure. M. Philippe Beaulieu adresse divers mémoires intitulés : Dissertation sur les jardins anglais et sur l'invention réclamée par l'Italie ; Essai historique et statistique de la commune de Sautron (Loire-[uférieure) ; Rapport sur l'énumération des animaux domestiques de tout genre autour de Nantes. M. Bertini offre un ouvrage inlitulé : Statistique des’os. M. Debrun est chargé de faire un rapport sur cet ou- vrage, La section vote des remerciements aux auteurs de ces ouvrages. La discussion est ouverte sur la 5° question d’indus- trie , ainsi conçue : « De l'utilité de l'établissement des banques agricoles en France et des moyens de les créer. » La parole est à M. Neveu-Dérotric. Après avoir exposé que c'est l’absence de capitaux qui fait avorter les projets d’amélioralion les mieux concus et souvent les plus faciles d'exécution , M. Neveu-Dérotrie fait ressortir que le but des banques agricoles , en four- pissant au cultivateur les capilaux qui lui sont nécessaires, est d’élever l’homme des champs en même temps que sa sphère d'action s'agrandit, que des améliorations solides et durables s’exécutent comme par enchantement. Ce prodige n’a rien qui étonne , dit l’auteur, il est dans la nature de l’homme d’obéir à limpulsion qui le com- mande , qui le place au sein de jouissances morales plus vraies. Mais les banques agricoles seront-elles confiées aux soins de sociétés particulières ou seront-elles placées sous la direction immédiate du gouvernement ? Ce dernier, dit M. Neveu-Dérotrie, pour détruire toute idée d’une spécu- lation, doit se mettre à la têle de cette organisation , 238 PROCÈS-VERBAUX nommer les principaux agents, et examiner chaque année le résultat des opérations morales et financières. Mais comme il importe , dans la création de banques agricoles , de ne pas grever la masse des contribuables d’une charge nouvelle , auteur du projet a cherché les moyens de fournir à ses banques les ressources nécessaires sans que le trésor fût obligé d’y contribuer, Abordant ensuite les dispositions réglementaires, M: Ne- veu-Dérotrie demande qu'il soit créé par département une banque spéciale au moyen de souscriptions , dont le mi- nimum pourrait être fixé à 250 francs, et dont les opéra- tions, au profit de l’agriculture, commenceraient aussitôt qu’un eapital de 250,000 francs serait réalisé. Les capitaux des banques seraient consacrés exclusive- ment à favoriser les défrichements des landes et terres vagues, la création des prairies artificielles, Pintroduction des nouvelles cultures, les travaux d'irrigation , la cons- truction des bâtiments ruraux, le repeuplement des bois et l’acquisition de bestiaux de races choisies, Le capital confié aux emprunts ne pourrait être au- dessus du chiffre total de 10,000 francs , quelle que soit l’étendue de l'exploitation, ni excéder 250 francs par hec- lare. L'auteur pense que le temps pour lequel l’emprunt se- rait contracté devrait être , en thèse générale , limité à cinq années , sauf les cas particuliers de plantations et de constructions ; le capital serait amorti par cinquièmes et les fonds porteraient intérêt à 5 pour ‘, par an. Mais pour couvrir les frais d'administration , il serait payé en outre un droit fixe de 2 pour %, du capital emprunté. M. Neveu-Déretrie, préoccupé de la pensée que, dans toute opération financière , on doit loujours chercher les moyens de ne compromettre aucun des intérêts qui s’y trouvent joints, a posé les bases des précautions à prendre pour la garantie des prêts faits par les banques agricoles, DES SECTIONS. 239 dont la première consiste à s'assurer, d’une manière pré- cise, de la moralité des emprunteurs. L'acte de prêt devrait mentionner la deslinalion spé- ciale des fonds, et toute infraction à cette condition don- nerait lieu au remboursement immédiat, Et toutes les conteslalions qui pourraient surgir devraient êlre jugées sommairement en diminuant autant que possible les frais de procédure. Après quelques développements donnés par M. Néon: Dérotrie, M. Frédéric Braheix, rapporteur d’une commis- sion nommée dans le sein de la Société académique de Nantes , pour étudier le projet des banques agricoles , a pris la parole. Il a commencé par déclarer que les suffrages unanimes de la commission avaient accueilli le systéme proposé ; sans se dissimuler les difficultés et les obstacles qu’éprou- verait l’élaplissement des banques agricoles. Faisant ressortir les avantages immenses qui résulte- raient pour l’agriculture de cette organisation toute phi- lanthropique , il s’est écrié : N’est-il pas pénible, n'est-il pas désolant, de voir en France . dans un pays où le sixième de la surface lérritoriale est encore en friche, que le manque de capitaux vienne arrêter l’essor de l’industrie agricole , vienne comprimer l’ardeur et paralyser les ef- forts d’une population active et laborieuse ? Le cœur se serre quand on songe que chaque année dans nos cam- pagnes , une foule d’hommes jeunes et intelligents sont arrachés par la misère aux habitudes d’ordre, d'économie et de moralité , qu’ils avaient contractées au sein de leurs familles , sous le toit paternel , pour être dispersés çà et B , pour être jetés , indistinctement et à l’aventure , au milieu des grands centres d'industrie, pour être livrés sans appui , sans protecteur et sans guide, à tous les ha- sards d’un travail précaire, à toutes les illusions, à toutes les éventualités de la vie manufacturière. 240 PROCÈS-VERBAUX M. Braheix cite, à l'appui de ce triste tableau, l’exem- ple de la situation déplorable de certains districts en An- gleterre, tableau trop vrai de la plus affreuse dégradalion morale , qui doit être pour la France un salutaire avertis- sement, Hg Passant en revue les dangers et les résultats déplorables de l’usure, qui menacent la propriété foncière d’une per- turbation générale , l'honorable rapporteur fait connaître que la dette hypothécaire s’accroit dans des proporlions gigantesques. Ii conclut , avec la commission, à l’adoption de l’œuvre de sagesse et de patriotisme conçue par M. Neveu-Déro- trie. Gomme complément de ce travail , il fait connaître que les banques , créées dans l'intérêt de l’agriculture, pourraient être à la fois des banques d’emprunt et de prêt, d’escomple , de dépôt , de virement et de circula- tion , dirigées par un conseil d'administration , dont les membres seraient élus par les actionnaires réunis en assem- blée générale. Des comités spéciaux, formés dans le sein du conseil d'administration , surveilleraient les différents services, dont les opérations devraient être d’ailleurs soumises à l’inspeclion et au contrôle du commissaire du roi. D'après la pensée de M. Braheix, la banque emprunte- rail au taux de 4 pour °?, pour prêter au taux de 5 pour °7se Les virements de parts ou comptes courants s’élabliraient absolument sur les mêmes bases et de manière à faire profiter le fonds social d’une commission calculée sur le pied de 1 pour ‘7. Suivant ce système , il y a tout lieu d’espérer que les capitaux afllueraient de toutes parts dans les caisses so- ciales, et qu’il en résulterait un surcroît d’aclivité pour les transactions commerciales comme pour les travaux de l'industrie agricole. M. Robinet saisit l’occasion du dépôt de l’ouvrage de DES SECTIONS: 241 M. Bertini pour faire Connaître qu’il considère la question des engrais comme résolue » et rappelle qu’il serait à dé- sirér que chaque département eût, à l'exemple de la Loire- Inférieure , une commission chargée d’examiner les frau- dés commises chaque jour dans la vente des noirs , charrées, etc. * La séance est levée. Neuvième séance à Nantes. — Du 10 septembre 1843. Rapporteur : M. HeuzÉ, vice-secrétaire. M. de la Fontenelle fait connaître qu’il existe à Niort une banque qui fournit , au petit commerce et à lagri- culture, des fonds à un taux modéré. M. *** s’engage à donner aux sociétés de Nantes et Angers des renseigne- ments plus étendus. M. Wolski fait la lecture du résumé du mémoire sur le gisement du bassin anthracifère dans lé département de Maine et Loire, avec les considérations sur le prolonge- ment de ce bassin dans la Loire-[nférieure. M. le président propose la description des procédés employés pour ouvrir des exploitations de charbon de lerre au-dessous des alluvions dela Loire. M. Wolski a repris la parole à ce sujet; il a donné les détails sur les deux moyens employés , l’un par M. de Las Cases , et l’autre par M. Faligan. Le premier consiste à enfoncer par percussion un tube en tôle à travers les alluvions , jusqu’au terrain anthraci- fère, el à vider le puits de sables. Ensuite, on met dans la partie supérieure de ce tube un cylindre creux en fonte, qui fait le piston Propre à intercepter la communication du puits avec l'air almosphérique. Chacun de ces deux fonds est garni d’un trou d'homme fermant hermétique- g PE D 16 242 PROCÈS-VERBAUX ment,et d’un petit robinet de communication ; le fond supérieur possède en sus une soupape de sûrelé, Un tube, qui part des poinpes à air comprimé, traverse ce .cylin- dre , et descend jusqu’à la partie inférieure du puits ; il porte un manomètre exposé continuellement à la vue. Un autre tube met en communicalion le has du puits avec l’atmosphère. La machine à vapeur fait fouler, l'air! au foud , et l’eau remonte autour du puits et par le tube sus- dit. Lorsque ce dernier ne projelte plus que Pair, on s’in- troduit dans le cyliudre par le trou d'homme supérieur, avec des oulils propres à travailler au fond. Après Pavoir fermé hermétiquement , et fait communiquer par le robi- net inférieur le puits avec le cylindre, on attend dans l'air qui sy comprime de plus en plus, et, lorsque sa pression est devenue éyale à ce qui est dans le puits, le trou d'homme inférieur s'ouvre por son propre poids , et les ouvriers descendent sur une échelle suspendue pour travailler au fond, Pour remonter avec les paniers remplis de terres, ôn agit d’une manière lout-à-fait inverse. Après êtré entré dans le cylindre, on ferme Île trou d'homwe inférieur et le robinet placé à côté; on ouvre le robinet supérieur, et, lorsque Pair dans le cylindre s’est mis en équilibre avec l’atmosphère, lé trou d’homme supérieur s'ouvre par son propre poids, et livre la sortie aux ou- vriers. Sous l'influence d'air comprimé, on à foncé le puits à une certaine profondeur; on a disposé une trousse picotée à sa partie inférieure , qu’on a joint avec le tube en Lôle par un cuvellage en bois. Enfin, on a enlevé Pap- pareil à air comprimé , et on a continué le travail comme dans un puits ordinaire. La section émet le vœu que le dessin de cet appareil soit inséré dans le compte-rendu de la session. Un autre moyen est actuellement employé par M. Fa- ligan , aux mines de Saint-Germain-des-Prés : il a d'abord formé un rouet en chêne de 2 m. de diamètre, et 6,53 à ———_— mm — 5 — DES: SECTIONS. 243 d'épaisseur, qu’il a entouré à la base inférieure d’un cer- cle entôle; puis ; après l’avoir placé sur le terrain où de- vait s'ouvrir le puits ; il a fait une maçonnerie en tuffeaux avec de la chaux hydraulique et du ciment romain , par tronçon de deux mètres de hauteur, qui ont suécessive- ment été reliés les uns aux autres par des rouëts et bou- lons pour former une liaison intime dans la tour tout entière. On a fait descendre ce puits par son propre poids, en enlevant de son intérieur des sables avec les tubes à boulet , et en épuisant l’eau avec les pompes mues par un manège. Gelte tour a franchi 14 m: à travers les alluvions, et il reste 2 m: pour arriver au terrain amhracifère. M. de la Fontenelle fait part à la section que la Vendée : possède un bassin houiller, au milieu duquel existe un petit bassin calcaire. M. Puvis rappelle que les capitaux des caisses n. épar- gnes vont au trésor, et que-lors des agitations politiques , 4 déposants pourraient craindre. Il voudrait que ces fonds servissent à fournir des capitaux à l’agriculture , ou pussent être disponibles pour créer des Mu de prêt, Cet argent , que l’on emprunterait à 4 P. 100 , serait fourni à 9 p. 100. } II dit qu’il existe en Allemagne dei banques agricoles qui n’exigent le remboursementsintégral qu’à la 4o°° an- née. Chaque année le quatrième reste à la caisse, M. Robinet rappelle qu'il existe en Piémont des Monts- de-Piété qui prêtent aux malheureux sans intérêt, Il en . existe à Montpellier et à Angers, M: Frédéric Braheix fait sentir qu'il est difficile de ren- irer dans ses prêts. Mais il faut concilier l’intérêt du pré- teur,et de l’emprunteur. Ce qu’il importe , c’est de four- nir des capitaux à l’agriculture , sans avoir recours à l'appui hypothécaire. Il 5 agit de retirer les cultivateurs des mains des usuriers. Après avoir examiné le shitétae acier de lPAngle- 244 PROCÈS-VERBAUX terre et de l’Amérique , il ‘avoue que l’Angleterre a moins de capitaux , et cependant elle fait de brillantes af- faires. Quant à nous, nous avons plus de capitaux, mais beaucoup de ces capitaux sont inutiles. I voudrait que la France émiît des billets de circulation qui dériveraient des banques agricoles d'emprunt créées dans chaque dépar- tement. Mais elle ne fournirait ses capitaux qu’à des gens moraux, et peut-être pourrait-elle fournir des capitaux à un taux au-dessous de 4 p. 100. Gelle banque, fondée par une société anonyme qui aurait des garanties finan- cières et morales, pourrait, si elle avait un million en caisse, émettre jusqu’à 2 millions en circulation. M. Halgan parle en faveur du projet de M. Neveu-Dé- rotrie. La séance est levée. Dixième séance. — Du 11 septembre 1843. e Rapporteur : M. GUÉRANGER, vice-secrétaire. À bord du bateau à vapeur la Vülle-de-Nantes, les pre- mière , deuxième el sixième sections réunies sous la pré- sidence de M. Robinet , ouvrent leur séance à huit heures du matin. Le secrétaire titulaire étant absent , la lecture du pro- cès- verbal de la séance précédente n’est pas faite. À l’occasion de la 1 5e question d'industrie, M. Ed. Gué- ranger a la parole. IL fait remarquer que , d’après des observations nom- breuses faites sur le territoire du département de la Sar- the, il résulte que le nair animal n’agit pas sur les terrains crétacés, oolitiques ét en général sur tous les terrains fos- silifères ; que son aclion au contraire est très puissante sur les terrains anciens schisteux, porphyriques et grani- DES SECTIONS. 245 tiques, qui tous sont dépourvus de fossiles. Cette action , tellement tranchée , a suggéré à M. Guéranger l’idée que le froment , contenant, dans sa composition chimique, le phosphate de chaux en quantité notable , et ne pouvant composer luimême ce corps minéral pour se l’assimiler, avait besoin d’un sol plus ou moins phosphaté; que tous les terrains fossilifères étaient imprégnés de ce sel que l’on ne pouvait plus rencontrer dans les couches géologiques d’origine ignée; qu’enfin le noir animal, composé presque en entier de phosphate de chaux et ne fertilisant que, ces dernières , il lui paraissait évident que son pouvoir de fécondation n’existait récllement que dans son phosphate calcaire. Il observe encore que les terrains anthracifères da Sa- blé, sur lesquels le noir animal n’avait que peu d'action, pouvaient sembler d’abord une exception, mais que l’em- ploi général et abondant de la chaux fossilifère et par conséquent. phosphatée devait remplacer et rendre inu- tile le noir animal dans ces localités, ce qui alors.se trouve d’accord avec l’expérience. M. Robinet pense que le phosphate de chaux pourrait bien ne pas être d’une nécessité indispensable dans la constitution intime du froment, que d’ailleurs il n’exislait aucun terrain, que l’on pût regarder comme absolument exempt de cette matière , que É atmosphère et les insegks devaient répandre partout ; ; il donne pour preuve de cette dernière opinion les marais qui dégagent de l'hydrogène phosphoré inflammable bé ae Hi M. Puvis est de l’avis que le phosphate de chaux est indispensable dans la composition du froment , el qu’un sol, pour être fertile , doit contenir ce sel dans-une pro- portion notable. + Quant à l’idée de l’emploi des matières qui renferment ce sel comme amendement, il est établi par la discussion que la priorité en appartient à M. Puvis. ] 246 PROCÈS-VER BAUX En effet, M: Puvis a publié, vers l’année 1829, dans le Journat d'agriculture de l'Ain, un mémoire sur les cen- dres employées en agriculture, Dans ce travail , ‘ce savant agronome émetlait l’idée qué le résidu de la combustion végétale , soit lessivé, soit non lessivé, devait agir plutôt par la présence du phosphate de chaux que par tout autre principe: La même opinion fut réitérée dans les Annales d'agriculture française , par le même auteur, dans un nouveau mémoire ayant pour litre : Essai sur les amen- dements. M: Puvis observe qu'il néhiede la chaux comme nui- sible, ou au moins inutile dans les sols qui en sont déjà saturés. 4 M. Guéranger, envisageant la question au point de vue qu’il a présenté en commencant , pense qu’il faut distin- guer entre la composition chimique et la formation géo- légigäes d’un terrain ; il est parfaitement de lavis de M. Pavis poir des terrains calcaires , oolitiques et tous ceux compris dans la série fossilifère. Mais les calcaires anciens ou non fossilifères doivent recevoir une influence très salutaire de l'emploi de la chaux préparée avec des calcaires fossilifères qui leur apportent le phosphate de chaux , indispensable à la végétation du froment, Il cite de nouveau les terrains de Sablé, qui , à la connaissance de tous les cultivateurs, ont plus que triplé leurs produits agricoles depuis que la découverte de l’anthracite dans ce pays a permis de faire de la chaux un usage très sur dant. M. de Caumont demande si la chaux préparée avec les marbres anthracifères peut être employée en agricul- ture avec autant d'avantage que celle prb veñant dé cal- caires plus récents. M. Guéranger émet l’opinion que Pon doit distinguer entre les différents étages de ce terrain ; que la partie supérieure , désignée sous le nom de Jallais par les ou- DES SECTIONS. 247 vriers, était très fossilifère, et pouvait par conséquent être rise en: usage dans les cas où le sol réclamait la présence du phosphate de chaux ; qu’au contraire les élages infé- rieurs étant dépourvus de corps organisés: d’origine ani- male, ne pouvaient être utiles que dans les lieux où le prin- cipe calcaire était réclamé. : M, Robinet est de l’avis que l’on doit distinguer parmi les amendements les stimulants-et les engrais: Il donne, à l'appui de cette observation très judicieuse ; l’efficacité du plâtre sur la culture des légumineuses ; lequel agit si puissamment malgré la petite quantité répandue sur le sObpét au ont SMART BLUE M: Puvis observe que les légumineuses contiennent le subfate de chaux dans leur composition chimique , et que c’est la raison de l’accroïssement de ces plantes dans les terrains où l’on répand ce sel calcaire. M. Lechalas, notaire honoraire à Angers , fait l’obser- vation suivante : ? Ne dvit-on pas considérer le noir animal comme un stimulant ne produisant ses effets que dans Pannée où on l'emploie ? Il pense qu’on ne doit pas en faire usage suc- cessivement el sans discontinuation dans les Mémes ter- rains pendant plusieurs années de suite, par ce motif qu'il produit , suivant lui, l'effet d’on grand effort sur la terre, mais qu'il né la meuble pas avec le même avantage que les engrais ordinaires qu’on y répand en bien plus grande quantité, se M. de la Sicotière envisage la question de noir animal sous le rapport judiciaire , el répond ainsi à la 15° ques - 1, RSR EEONNEE # Les meilleures mesures à prendre pour empêcher les fraudes si préjudiciables qui se commettent dé la part des fabricants et marchands de noir animal sont les tribu- naux. Il cite un cas où da noir fraudé ayant été vendu , dans 248 PROCÈS-VERBAUX le département de l’Orne , à un grand nombre d’agri- culteurs , l’effet fut nul et même nuisible dans certains champs. | La fraude ayant été constatée , le fabricant et le ven- deur furent condamnés. M. Puvis observe que la création d’experts vérificateurs serait fort utile, et il cite la ville de Nantes comme ayant une institution de ce genre. M. Guéranger combat la manière dont on apprécie à Nantes la valeur des noirs. On y admet des mélanges étrangers à la condition que le produit sera livré au commerce sous un titre qui indi- quera les proportions de mélange. Cette méthode intro- duit la fraude et ne présente aucune utilité au consomma- teur. En effet, celui qui achète du noir à quarante degrés ne sait pas toujours qu’il y a soixante pour cent de ma- tière étrangère, ou pour trancher le mot, fraude; ainsi il aura à payer ces soixante parties, à un prix modéré, il est vrai, mais encore au-delà de la valeur, et de plus le port de toute cette matière inutile. Le même membre signale un autre produit qui se vend sous le nom de noir animalisé, et qui, en raison de la cou- formité des noms, peut être une occasion de fraude, Ce noir animalisé n’élant composé que de débris de charbon , d’origine végétale ou minérale, mélangés de terre et imprégnés de malières azotées, ne saurait rempla- cer en aucune manière le véritable noir animal. M. le président , en résumant la discussion , énonce les propositions suivantes pour résoudre la 15° question d’in- dustrie : [. Propager l'institution créée à Nantes pour la vérification des noirs destinés à l’agriculture, IL. Poursuivre toute veule d'engrais sous un non) supposé, PROCÈS-VERBAUX 249 aénfi , Ill, thin ; - ë DE Interdire la vente des noirs de raffinerie autrement qu'à l'état de pureté et sous tout autre nom que sous celui de noir d'os ou noir de . raffinerie. Ces propositions sont adoptées. — La séance est levée. (La séance du 12 est portée aux procès-verbaux de la 1'° section.) TROISIÈME SECTION. SCIENCES MÉDICALES. Première séance, — Du 2 septembre 1843. Rapporteur : M. Ep. LarocHE, secrétaire. M. Godard , secrétaire général, remplissant les fonctions de président , ouvre la séance , et fait l'appel nominal des membres inscrits. Il fait un second et un troisième appel des membres présents, et avertit l'assemblée qu’elle: va -procéder de suite, par voie de scrutin, à la nomination d’un président et de.quatre vice-présidents, — Répondent à l'appel , et déposent leurs bulletins : M. Ridard. — M. Mame. — M. Libaudière. — M: Né- grier, — M. Ouvrard. — M. Mayor, de Lausanne. — M. Guérin du, Grandlaunay. — M. Roux, de Marseille. . = M. Lemercier. — M, Bourjot-Saint-Hilaire — M. Ba- locchi: — M. Logerais fils. — M. Bertini, — M. Piccolo. —M. Lachèse père. — M. Gély. — M. Laroche, Victor. — M. Bigot. — M. Laroche père. — M. Godfroi. — M. Laroche , Edouard. — M. Lemarchand, — M. Daviers. — M. Bromet. 250 PROCÉS-V ERBAUX Le scrutin est clos. On procède alors au dépouillement du serulin , et le nombre des votans étant égal au nombre des bulletins, le dépouillement donne le résultat suivant, à la majorité des suffrages : Président. M. Roux, de Marseille. 1er vice-président. M. Mayor, de Lausanne, 2e idem. M. Lemercier, de Mayenne. 3e idem. M. Lachèse père, d'Angers. 4e idem. M. Gély, de Nantes. M. le secrétaire général proclame le résultat du scrulin, et invite MM. les présidents et vice-présidents à prendre place au bureau. Alors M. Roux se lève, et dit que s’il accepte l’honneur de la présidence, c’est parce qu’élant le délégué de la Société royale de médecine de Marseille, il croit devoir saisir avec empressement tout ce qui peut flatter-et ho- norer celle compagnie , et il ajoute que pour répondre au témoignage d’estime et de confiance qu’il vient de rece- voir lui-même, il fera tous ses efforts pour s’en rendre digne, Le bureau étant constitué, M. le président désigne MM. Daviers et Bourjot Saint-Hilaire , pour: Poupée. er fonctions de secrétaires-adjoints. M. le président cède le fauteuil à M. le premier vice- président , prend la parole, et rappelle à l’assemblée qu’au Congrès scientifique de Strasbourg , il a été nommé, au sein de la section des sciences médicales, une commis- sion permanente , ayant pour but d’inviter les médecins et pharmaciens de France , à se constituer en comité dans leurs départements respectifs , pour s’occuper de toules réformes dont la médecine et la pharmacie sont suscep- tibles , et généralement de tout ce qni peut concourir à la dignité et à tous les intérêts du corps médical. — Sur la proposition de M. le docteur Mame , qui demande des ex- 2 "CS LRO OR TENSETIILIES DES SECTIONS. 251 plications sur le but que l’on s’est proposé par cette ins- titution , M. le docteur Roux donne lecture à l’assemblée d’une circulaire adressée par là commission permanente de Strasbourg , qui fait connaître avec détail tout ce qui est relatif à cet objet. La section arrête , après délibéra- lion , qué la commission permanente , qui doit remplacer celle de Strasbourg, sera nommée dans la séance de landi prochain, et se composera de six membres, dont cinq médecins et un pharmacien résidants à Angers. M. le président Roux ajoute qu’en attendant le So rendu des travaux du Congrès de Strasbourg, qui n’a point encore paru, il croit PT signaler Hits uns des résultats obtenus dans divers départements , et notam- ment dans celui des Bouches-du-Rhône, où le comité médical est en pleine activité, M: le président, reprenant le fauteuil, donne lécture des questions concernant la section , et invite les person- nés , qui voudraient prendre la parole sur ces MENTIONS i à se faire a nat a D'HYGIÈNE PUBLIQUE ET unie 17e Question. — M. D A -maÿjor d'artillerie. 6e Question. — M. Ridard de Corné. , 19° D — M. ip -Saint-Hilaire, : n% Er QUESTIONS. DE MÉDECINE. 15e, 20°, 20°, 27° Questions. — M. Bourjot- Saint-Hi: laire. 29° Question. — M. Bertini, de Turin. QUESTIONS DE CHIRURGIE. 7°, 16° 14° Questions. — M. Bourjot- Saint-Hilaire. 9° Question. —= M. Mirault. 12° Question, — M. Lemercier, de Mayenne. 252 PROCES- VER BAUX Telles sont les questions à l’ordre du jour, pour les premières séances de la section. Puis, sur la remarque de M. Mayor, de Lausanne, M. le président invite les per- sonnes , qui auraient des mémoires sur des questions non portées au programme, à vouloir bien les déposer sur le bureau , au terme du règlement, En conséquence se font inscrire : 1° M. Mayor, pour deux mémoires, l’un contre l’expé- rience en général ; l’autre, sur les caractères différentiels de la médecine et de la chirurgie. 2° M. Libaudière ; pour un travail sur l’étude de l’ana- tomie clastique du docteur Auzoux, mise à la portée des gens du monde, 8°M. Gély, sur un nouveau procédé de suture des plaies intestinales. ; 4 M. Bourjot présente un mémoire, intitulé : Apercu synthétique de médecine oculaire, tendant à raltacher par des principes généraux et communs, la pathologie de l’œil à la pathologie générale , en expliquant beaucoup des affections de cet organe par les sympathies de Lissu. M. Mayor demande la parole , et propose à l’assemblée d'établir une sous-section qui tiendra ses séances tous les matins à sepl heures, à l’Hôtel-Dieu, — Cette proposition reçoit l’assentiment général, et M. Daviers en est nommé le secrétaire. Immédiatement après, M. le président lève la séance. Deuxième séance. — Du 3 septembre 1843. Rapporteur : M. Ep. LarocKEe, secrétaire. La séance s’ouvre par la lecture du procès-verbal de la précédente séance. Il est adopté après quelques reclifica tions. \ DES SECTIONS. 253 Correspondance. — La section recoit : 1° Une lettre de M: le docteur Guépin (de Nantes), qui lui exprime le regret de ne pouvoir assister aux séances du Congrès. Si, à son voyage à Nantes , la section de shelacine veul lui accorder quelques instants , il se pro- pose de lire devant elle un travail sur l’organisation des spécialités, comme moyen, pour les provinces, de résister à l’envahissement de la capitale. 2 Un mémoire de M. Tanchou (de Paris) intitulé : Recherches sur la plus grande rareté du cancer et des maludies plus particulières aux femmes dans les campa- gnes que dans les villes. -8° Un règlement d’assuciation entre les médecins, offi- ciers de santé et pharmaciens du département de la Sar- the , dans le but d’agir conformément à la circulaire de la commission permanente instituée à Strasbourg , ayant pour objet les améliorations que réclament la médecine et la pharmacie en France. 4° Un travail imprimé de M. Bertini (de Turin) intitulé: Idrologia minerale, M. Batocéh: rapporteur. 5° Plusieurs exemplaires d’un éloge historique de Fo- déré, par M. le docteur Roux (de Marseille). M. Daviers se fait inscrire pour un travail ayant trait aux 9° et 10° questions du programme (chirurgie). L'ordre du jour appelle à la tribune M. le docteur Bourjot-Saint-Hilaire pour une lecture sur cette ques- tion : « Le système d’enseignement , adopté par l’Université dans les colléges , n’a-t-il pas le grave inconvénient , en mullipliant trop les sujets d’étude, de nuire au dévelop- ‘pement du jugement el de l'intelligence des jeunes en- fants? » Suivant M. Bourjot, qui prb l'histoire naturelle dans un collége de Paris, et qui a parcouru toutes les 254 PROCÈS-VERBAUX classes depuis la sixième jusqu’à la troisième et enfin la philosophie, la multiplicité des travaux dans. les colléges n ’a point les inconvénients qu’on pourrait redouter. « En effet, dit-il, dans chaque classe , il existe seule- ment de sept à dix élèves d'élite qui travaillent avec suc- cès el sans fatigue; le reste fait. défaut dans plusieurs facultés. » Il convient cependant qu’à l'époque des concours , fà- cheusement ouverts dans la saison la plus chaude de Pannée , quelquefois les élèves concourant six fois sur dix à quinze jours, et chaque séance durant de sept à huit heures, il y a eu des exemples de fièvres cérébrales. M. Lachèse père, médecin du collége royal d'Angers, n’a point observé que les élèves fussent plus souvent ma- lades à l’époque des concours , et il attribue ces résultats aux conditions hygiéniques de cel établissement, M. Mame partage les opinions de M, Bourjot. M. Daviers, au contraire, dit que si la question a été posée, c’est qu’un grand nombre de parents se sont plaints du travail excessif qu’on donnait aux élèves, et conclut : que l’intelligence surchargée nuit au développement phy- sique, M. Roux se range à ce dernier avis, et il pourrait citer beaucoup de jeunes gens, surtout des élèves en thévlogie, doni la santé, autant que les facultés intellectuelles, a été gravement compromise par l’excès du travail. I ajoute qu’on ne peut résoudre convenablement celte question qu’en s’appuyant sur des documents slalistiques qui n’ont point encore élé recueillis d’une manière complète, M. Bourjot est de nouveau appelé à prendre la parole sur la 19° question du programme (médecine) ,; ainsi conçue : « Quelles sont les diverses causes qui produisent l’a- maurose, el en quoi l'étude de ces causes peut-elle éclairer le traitement ? » DES SECTIONS. 255 Get honorable membre dit que là distinction à établir lorsqu'il s’agit d’amaurose sera toujours précédée de cette question : Ÿ a-Lil excès ou diminution dans la sensibilité de la rétine , ou celle des nerfs de la sensibilité générale de l'orbite, qui sont la cinquième paire, branche bee mique et son ganglion ? Dans cet ordre d’idées , il ouvre un st pe aux causes de Pamaurose , qu’il divise en sthéniques, hypos - théniques et mécaniques. Il cite à l’appui plusieurs obser- valions de myopie , acquise et exagérée jusqu’au degré d’amaurose, résultant du changethent de forme du globe de l’œil, par compression, .et en particulier par celle que, dans des circonstances données, les muscles de l’œil peu- vent exercer. De même, l’action hyposthénisante. des amères est indiquée comme pouvant aussi diminuer le degré de sensibilité visuelle. Il s'étaie à cet égard de l'opinion du célèbre Beer. Quant au traitement ; il en püise les indications dans les considérations qui précèdent et les regarde comme le guide du praticien. M, Mirault pense que , pour répondre d’une manière complète à la question ; il ne fallait pas restreindre le nombre des espèces d’amauroses au mode supposé d’ac- tion d’un certain nombre de causes et admettre la seule division en siéuique et hyposthénique ; mais qu’il fallait examiner Loutes les causes généralement adimises pour en déduire Le meilleur mode de traitement. . Al cite à cette occasion plusieurs faits de lésions de Ja cinquième paire de nerfs qui ont déterminé l’amaurose, et qu’il serait difficile de faire rentrer dans la classifica- tion adoptée par M. Bourjot. Pour appuyer l'opinion de M. Miraok M. Négrier cite le cas d’une amaurose produite par le dre llnient du nerf optique ; par suite de la projection de l’œil dans une in- flammation de l'orbite, 256 PROCÈS-V ER BAUX M. Lemercier cite une observation d’amaurose à la suite d’une contusion du sourcil, | MM. Roux et Mame établissent que, dans l’état actuel de la science, l’éliologie de l’amaurose est encore, sous le rapport du mode d’action de ses causes, entourée d’une grande obscurité, et qu’il n’est pas toujours facile de ba- ser sur elle les indications curatives. La séance est levée x ure heure. SOUS-SECTION CHIRURGICALE, A L'HÔTEL-DIEU. Séance du 3 septembre 1843. Rapporteur : M. Davrers, secrétaire, À sept heures et demie, la séance est ouverte. M. Laroche père occupe le fauteuil de président. La parole est à M. Mayor, de Lausanne, pour la lecture d’un mémoire sur la tachytomie. Deux choses essentielles doivent être considérées dans toutes les amputations ; ce sont : la douleur et le lambean. 1° La douleur, celte terrible nécessité des ampatalions, engage le malade à différer l’opération de jour en jour, jusqu’au temps où elle devient impossible ou inutile, Or, puisque l’observation prouve que la douleur est en raison directe du temps que dure une opération, elle sera nulle, si cette opération se fait dans un Lemps incommen- surable. C’est ce que prouvent les blessures par armes à feu. M. Mayor en donne cette explication : que la rapidité de la percussion ne permet pas au choc de s’irradier, et de même à l’ébranlement de se communiquer aux parties voisines, C’est dans ce but qu’il propose l'amputation d’un seul coup. DES SECTIONS. 257 Si ce procédé, employé autrelois par Scultet , Fabrice de Hilden, a été abandonné; ce n’est point qu’il soit mau- vais en lui-même; c’est uniquement parce qu’il en résul- tait souvent des hémorrhagies mortelles. Aujourd’hui que les moyens hémostotiques sont per- fectionnés , les préjugés seuls en ont retardé le renouvel- lement. L’orateur combat l’objection tirée de la comparaison de ses instruments à ceux des artisans : le couteau n’est pas plus noble que la hache. Les conditions qui concernent le lambeau, ne sont connues que depuis peu de temps, et à peine est-on d’ac- cord à ce sujet. Donc, la doctrine , concernant l’ablation des extrémités , n’est pas formulée , n’est pas encore ré- glée. ù M. Mayor propose cetle formule : « L”? amputation con- » siste à abattre un membre en tout ou en parlie avec la » plus grande rapidité possible , tout en conservant un er tégumentaire capable de couvrir la plaie, » La ésétque à l’aide de la percussion, fournit les moyens de remplir la première condition. Le labeau doit être taillé en demi-lane , et capable de recouvrir la plaie. Dans le mode opératoire actuel , les muscles venant à se rétracter, l’os demeure entre les lè- vres de la plaie , recouvert. seulement par les tissus ino- dulaire qui les unit. etf Quand, au contraire; le lambeau semi-lunaire est ra- battu sur los qu’il recouvre , une |ymphe plastique, se- crétée par ces parties , établit une adhérence qui permet à la peau de glisser comme au coude, et l’os, caché der- rière elle , ne peut jamais faire saillie. C’est donc à la théorie des amputations phalangiennes généralisée , que l’auteur a donné le nom de tachytomie. La tachytomie, d’ailleurs, est encorè dans son en- fance ; aussi, les instruments grossiers dont elle se sert, T, I. 17 258 | PROCÈS -VERBAUX ne causeront plus , sans doute , quand le temps les aura perfectionnés , ces esquilles qui nécessitent parfois l’em- ploi des cisailles ou de la scie. Toutefois, même actuelle- ment, cetle opération secondaire n 'est point uné aug- imentation de douleur. à Enfin , non seulement les membres, mais la desire le maxillaire inférieur, et toutes les tumeurs saillantes , peuvent être amputées par la tachytomie. Les tachytomes , en effei, ne sont que des ciseaux pro- porlionnés à l’objet à couper. M. Mayor pratique ensuite, à l’appui de son CR néuf amputalions sur le sujet, en se servant de la hache inise en mouvement par la percussion du dalllet M. Gély, de Nantes, communique ensuile à l’ assemblée un nouveau procédé de suture intestinale, et pratiqué sur un intestin et sur la toile les points de suture dont r usage fait le sujel de son mémoire. La séance est levée à.neuf heures. Troisième séance. — Du. 4 septémbre 1843. Rapporteur : M: Minauzr, secrétaire. La séance est ouverte à 11 heures du matin , sous la présidence de M. Roux (de Marseille); Le secrétaire de la section donne Sri du procts- verbal de la dernière séance. Le secrétaire de la sous-section , tenue à l'Hôtel Dieu, àhuit heures du matin, lit le procès verbal des séances des 3 et 4 septembre, | Ù LE Ges procès-verbaux sont adoptés. ?: M. Gély, appelé à prendre la parole, done Lobtilre d'un mémoire intitulé : Recherches sur l’emploi d’un nouveau procédé dé suture contre les divisions de l'intestin, et sar DES! SECTIONS. 259 la possibilité de l’adéssément de cet organe avéc lui-même dans certaines blessures. * L'auteur établit d’abord l’état de la science sur ce point de chirurgie. Il passe en revüe successivement : ‘19 La suture simple ou entrecoupée , dite procédé des quatre maîtres. , 2° La suture à surjet ou spiroïde. 3° La suture à anse de Ledran , et les divers procédés introduits dans celte méthode , par Palfin , Rayÿbard et Lapeyronie. 4° Le procédé de Rhändor, ou par invaginatiôn. 5° Enfin le procédé de M. Jobert (de Lamballe). Tous ces divers procédés sont successivement examinés sous le rapport de leurs avantages et de leurs inconvé- nients, de manière à en déterminer la véritable valeur, ét M. Gély arrive à cette conclusion que ces divers pro- cédés ont été frappés d’une sorte de réprobation , depuis que M; Jobert a établi, comme méthode générale, l’ados- sement dés séreuses. M. Gély, faisant l’examen critique du procédé de ce dernier chirurgien; apprécie son mode d’action, tanl sous le rapport des plaies incomplètes, que sous celui des plaies complètes. Il en fait ressortir la supériorité par rapport aux méthodes qui l’avaient précédé. Cependant il lui re: proche l’inconvénient de recourir à Ja suture de Ledran, qui oblige à laisser béante la plaie de l'abdomen. 11 recon- naîl que les procédés de MM. Denans (de Marseille) Lembert et Baudens, n’ont point à la vérité le même dé- Savahtage ; mais qu'ils ne sont point encore à l’âbri de reproches sérieux. a 44 : L'auteur, envisageant éctte question importatite À son point de vue Je plus large, pose 1és conditions que doit Présenter son procédé pour remplir complétement les in- dications auxquelles aucun des procédés Connus jusqu’à 260 PROCÈS-VERBAUX ce jour n'avait salisfait. Il établit ces indications de la manière suivante : 1° Adossement des surfaces séreuses , condition essen- tielle d’une prompte réunion. . 2° Adossement de la séreuse par un demi-renversement des lèvres de la plaie , tant pour les divisions partielles que pour les plaies complètes, 5° Occlusion exacte de l'ouverture accidentelle , ne laissant aucune chance à l’épanchement primitif ou con- sécutif, 4 Disposition des fils , telle qu'aucun nœud , aucun point ne soit visible du côté du périloine. 5° Possibilité de fermer immédiatement la plaie de l’ab- domen , après avoir réduit l'intestin, et de prévenir ainsi les dangers attachés à la pénétration de Pair, : . Au premier abord , ces conditions pouvaient paraître difficiles à remplir. Gependant l’auteur croit avoir trouvé un procédé qui salisfait à toutes les exigences , et c'est à un événement fortuit qu’il en a dû l'improvisation. Un jeune homme de seize ans ayant élé apporté à l'Hôtel-Dieu de Nantes, pour une blessure de l’abdomer compliquée de deux petites plaies transversales de l’intes- tin grêle, M. Gély obtint la réunion de ces deux plaies par un procédé nouveau , auquel il donne le nom de suture en piqué. La plaie dé l'abdomen fut aussi réunie immédiatement , et le malade put étre cousidéré comme guéri au bout de cinq jours. Pour apprécier les effets de ce procédé , autant que pour en étendre l'application à des cas divers de plaies intestinales , M. Gély se livra à une suite d'expériences sur les animaux , desquelles ilrésulte : que le procédé , dont la description est consignée dans son mémoire, pré- sente des avantages spéciaux , résultant à la fois de la supériorité d'exécution et des applications variées dont il A ge ne mt rio ht DES SECTIONS. 261 est susceptible, On obtient par lui Padossement des sur-- faces séreuses, tout en évitant : ° Les difficultés de l’invagination ; 2° La nécessité de distinguer l’un de l’autre les deux bouts de l'intestin ; 3° L’incision du mésentère. Il permet , en outre, d’adosser diverses parties de l’in- testin , de manière à réparer; sans rétrécir son calibre, de grandes pertes de substance : considération importante, - puisqu’elle est la reproduction du inécanisme à l’aide du- quel la nature triomphe parfois toute seule des plus graves blessures de lintestin. C’est ainsi que l’auteur pense avoir rempli toutes les conditions qu’il s’est proposées, pour rendre l’entérora- phie moins dangereuse el détruire les causes principales qui s'opposent “ la guérison. M. Ballochi demande sur quelle partie de l'intestin ont été pratiquées les blessures dans les expériences de M. Gély, faisant observer que le siége de ces blessures fail varier le degré de leur gravité. M. Gély répond que les blessures ont été faites sur l’in- testin grêle , à des hauteurs variables. Il reconnaît d’ail- leurs que ces plaies sur les animaux ne peuvent pas être assimilées , pour le danger, à PAIE qu’on observe chez l’homme. M. Roux, président, tout en rendant justice au mérite du mémoire de M. Gély , lui fait observer qu’il a peut- être alténué les avantages des procédés employés avant le sien , et exagéré leurs inconvénients , et qu'il est néces- saire , pour fixer la vaieur de ce dernier, d'attendre que V expérience en vienne confirmer les résultats. À ce sujet, il rappelle les succès constants obtenus par M. Denans dans ses expériences sur les chiens. M. Gély explique la perte de deux animaux , sujets de ses expériences , par des circonstances qui ne tiennent pas 262 PROCES - VERBAUX essentiellement à son procédé, Il ajoute qu’il ne croit pas avoir déprécié les procédés antérieurs au sien , eb qu'il a dù entrer à leur égard dans une discussion critique qui pût en établir la valeur comparative, Après celle discussion , l'assemblée, sur la proposition de MM. Lemercier et Mayor, renvoie ce travail au secré- tariat-général el émet le vœu qu’il soil imprimé en entier dans le compte-rendu du Congrès. M. Bourjot-Saint-Hilaire monte à la tribune pour lire un travail sur l’emploi du nitrate d'argent dans les mala- dies du globe de l’œil et de ses dépendances (20° question de médecine). Le nitrate d'argent, dit-il, n’est point un spécifique, c’est un cathérétique facile à manier et qui a pour avan- tage de modifier l’état morbide de la muqueuse oculaire et des follicules mucipares. Il cite des cas nombreux d’ophthalmies purulentes dans l’histoire desquelles il ne croit pas devoir entrer, Il établit que, dans beaucoup de cas de ces ophthalmies , l’action du nitrate d'argent mo- difie puissamment la secrétion blennorrhagique qui en fait le principal caractère. Il passe en revue emploi du nitrate d’argent dans les ophthalmies catarrhales, scrofu- leuses, varioliques, les ulcérations de la cornée , les pus- tules naissanies , les hernies de l’iris , et Lémoigne de ses bons effets. Il conclut que cet agent thérapeutique occupe un rang distingué dans la médecine oculaire. M. Mirault fait observer à M. Bourjot , qu’en outre des maladies de l’œil dont il a fait mention, il en est d’autres contre lesquelles on a obtenu de grands avantages de l’em- ploi du nitrate d’argent ; il cite à ce sujet les conjoncti- viles chroniques, l’ectropion ou renversement, des pau- -pières, les kistes qui se développent dans l'épaisseur de ces voiles protecteurs de l’œil , le staphylôme, suf le trai- tement duquel M. Delarue a publié des observations im- portantes , et enfin l’inflammation chronique des voies DES SECTIONS. 263 lacrymales et ses Men effets, tels me la tumeur et pere NT M, Mirault ionioinéé en prb bonté de de section sur les dangers de la cauiérisation. des taies de la cornée par le nitrate d’argent.en substance, et sur. l’inutilité de la cautérisation LL. hernies de iris, qu’il a toujours vues disparaître spontanément. Conformément à une décision prise san la pdd, it 2 septembre , la section procède, à la nomination. de la commission permanente qui doit remplacer celle nommée du Strasbourg ; au dernier Congrès , qui a pour but, de correspondre avec les comités départementaux , et a été instituée en vue des progrès de la médecine et des Lund rêts du corps médical, si ; sndil Gelte. commission est nommée Rata ire au seru- linsecret. : Les. membres qui la, hi mare MM. K'*rah $ Ridard , Castonnet, Mivault et, Bigot, docteurs en méde- cine, et Roujou , pharmacien, parmi lesquels il sera fait choix d’un président et d’un secrétaire. La séance est levée à trois heures. { 23 à LUN | — SOUS- SECTION CHIRURGICALE, AL "HÔTEL-DIEU. ‘4 Séancé du 4 septembre 1843. Rapporteur : M. Daviers, secrétaire. À huit heures précises, la séance est ouverte. Le procès-verbal de la.dernière séance ; rédigé en l’ab- sence du secrétaire empêché, par M. Frac: chirurgien interne à l'Hôtel-Dieu, est adopté sans-réclamation. M. Mayor, après avoir décrit un appareil en forme de pupitre pour le traitement des fractures du fémur, expose quelques principes généraux sur Paction du calomel qu’il affectionne et ape comme une véritable panacée. Au 264 PROCÈS-VERBAUX moyen d’une sonde droite, ce chirurgien porte le calomel en poudre sur le point malade du canal de lurèthre, dans Ja blennorrhagie , et procède à l’application de cette nou- velle méthode thérapeutique , sur un malade pee l’écou- lement date seulement de huit jours, Le chirurgien de Lausanne , après quelques considéra- tions générales sur son systême déligatoire , insiste sur la nécessité de trouver des points d’appui pour l'application des triangles, qui peuvent remplacer avec avantage la plupart des bandages composés , employés en chirurgie. Comme exemple de sa méthode , l’autenr exécuté sur un malade le bandage de la clavicule, celui des doigts de la main , de la jambe , du pied et du bec-de-lièvre , en faisant, sur les indications qu’on se propose de remplir dans ces différents cas , des réflexions aussi judicieuses qu’intéres- santes. La consolidation de la fracture de la clavicule, traitée par le triangle, se fait sans raccourcissement; ce résultat est facile à constater au moyen du compas d’é- paisseur dont M. Mayor fait un fréquent usage. Une discussion rapide, ail est impossible de repro- duire dans un procès-verbal, s'engage sur différents points, entre plusieurs membres, MM. Mayor, Mirault, Caston- net, Laroche (Edouard), Négrier, Benoist, Mame et Da- viers , et lermine la séance à dix heuros moins un quart. Quatrième séance. — Du 5 septembre 1843. Rapporteur : M. MiRAULT, secrétaire. La séance est ouverte à onze heures sous la présidence de M. Roux (de Marseille). On passe au dépouillement de la correspondance qui présente les ouvrages suivants : 1° Les méditations sur la chirurgie pratique, par DES SECTIONS. 265 M..le docteur Ouvrard, avec un discours sur la phy- siologie, prononcé en 1818, à l’ École de médecine d’An- gers ; sl}: 12° Quelques exemplaires d’un Mémoire sur l’emploi durmercure dans les maladies du foie, par M. Michel Borgialli ; 8° M. Bertini présente à tp dé son mémoire trois statistiques du grand hôpital de l’ordre équestre de Saint- Maurice et dis Lazare dont il est médecin en chef; En outre : | 1° La sara du Congrès scientifique de Lyon; 2° La relation du Congrès scientifique de Strasbourg ; 3° Deux brochures contenant ses observations sur l’ef- ficacité de l’extrait aqueux de seigle ergoté dans les mé- trorrhagies ; 4° L'histoire d'une dep foudroyante suivie de : l'ouverture du cadavre. Après la lecture et l'adoption des procès-verbaux , on passe à l’ordre du jour qui appelle à la tribune M. le doc- teur Bertini (de Turin), pour la lecture d’un mémoire intitulé: De la statistique médicale en Italie, avec des considérations à ce sujet, en réponse à la 29° question du programme (division de médecine). Il a commencé par l’histoire de la statistique en géné- ral, en rapportant des faits à ce sujet. À la fin du XVIII- siècle, on quitta les abstractions métaphysiques pour s’oc- cuper des faits. Il a démontré que le véritable fondateur de lastatistique en Italie a été Melchior Gioia , dont il a cité les ouvrages. C’est d’après lui que , depuis la fin du dernier siècle jusqu’à nos jours, tous les médecins italiens ont rédigé leurs travaux. En Italie, on s'occupe beaucoup derstatistiques, et c’est une pi ri à l’ordre du j dur dans les Congrès. L'auteur du mémoire a fini par poser pour conclusion, la manière de rédiger les statistiques médicales, afin d’en 266 PROGÈS-V ER BAUX tirer les plus grands avantages possibles pour le bien-être des Feuplens Ce mémoire a été écouté avec intérêt. M. Roux (de Marseille), président, cède le fauteuil à un vice-président, et monte à la tribune pour traiter orale- ment la même question. Tout en rendant hommage au mérite de M. Dértini ; M. Roux pense que la question, pour être résolue conve- nablement , réclamait un exposé et un examen des tra - vaux de statistiques médicales entrepris dans ces derniers temps; que l’on aurait pu ainsi mieux apprécier-et cons- tater l'importance de la statistique appliquée à la méde- cine dans le sens de la question. Que si toutefois-on jette un coup-d’œil sur ce que les journaux de médecine nous ont appris à cet égard, on n’y voit pas assez de documents qui seuls nous permettent dès aujourd’hui de soutenir ou de nier l'utilité de la statistique médicale. Ges documents eussent élé peut-être plus nombreux, sans le décourage- ment dans lequel bien des médecins ont été jetés, par les discussions sur l’importance de la statistique spéciale dont il s’agit, soulevées au sein de plusieurs corps savants , notamment au sein de l’Académie royaie de médecine, et qui ont dévoilé des contradicteurs, Mais après avoir exprimé son étonnement que l’on puisse rencontrer ençore une seule personne qui n’ad- mette pas l'utilité de la statistique médicale , M. Roux entre dans des considérations pour prouver que ; depuis vingt-trois siècles , les vrais médecins ont été essemtielle- ment sialisticiens , et qu’il ne devait pas.en être.autre- ment ; que si des diflicultés attachées aux études -de.-la statistique médicale , que si les tableaux faatifs qu’elle a produits se sont opposés à ses progrès, on n’est pas moins forcé de la considérer, si elle est faite consciencieusement, comme étant de la dernière importance, d’une importance telle que , sans elle , il est impossible de se rendre raison DES SECTIONS. 267 : des moindres phénomènes en médecine , comme dans toutes les sciences. Me Roux dépose ensuite sur le bureau quelques exem- plaires du discours qu’il a prononcé , étant président de la Société royale de médecine de Marseille, et qui répond à Je question proposée , quant à la branche la plus essen- tielle de la médecine. "Ge discours est intitulé : De la statistique appliquée à l'étude de l'hygiène publique et de l'hygiène des Marseil- lais en particulier. M. Bourjot-Saint-Hilaire dit qu’en général il faut se défier de toute statistique faite par les auteurs de mono- graphie. ve M. Lemercier, qui est l’auteur d’une statistique, dit que les travaux de ce genre ne font jamais arriver à une con- clusion rigoureuse el mathématique , mais conduisent à des probabilités utiles au progrès de la science. | M. Bourjot fait observer que cela est si vrai, que pour la météorologie elle-même, on ne peut encore arriver au- jourd’hui à une précision mathématique. M. Castonnet craint qu'on n’exagère l’importance des chiffres qui , depuis quelques années , sont devenus à la mode. dans les travaux d’observalion médicale. Il pense que ce n’est pas seulement depuis qu’on formule tout avec les.chiffres qu'on a fait des stalistiques. Hypocrate et tous les observateurs qui ont suivi jusqu’au, dernier siècle , n'ont,point fait de statistique; ce qui n’a pas empêché l’art de faire de grands progrès par leurs travaux. M: Mame fait remarquer la justesse des conclusions du mémoire de M. Bertini ; et propose qu’elles soient impri- mées au compte-rendu , si le mémoire ne l’élait pas en entier... La discussion se continue encore quelque temps entre MM. Bertini , Bourjot et Lemercier, et se termine par le 268 PROCÈS-VERBAUX vote sur l’impresssion en entier du mémoire de M. Ber- tini, M. Lemarchaud est appelé à la tribune pour traiter la 1re question du programme (hygiène publique). M. Lemarchand commence par exposer que cette ques- tion importante de l’hygiène du soldat a été traitée avec détail, sous tous ses rapports, par un grand nombre de médecins militaires d’un savoir distingué. C’est parce qu’elle a trouvé sa solution dans leurs écrits, qu'il croit devoir se restreindre et n’indiquer que succinetement les causes qui rendent aussi grande la mortalité chez les sol- dats, en temps de paix. Profitant des connaissances que lui donnent trente ans de pratique dans les armées, il établit plusieurs catégories chez les soldats , dans lesquelles la mortalité n’est pas la méme. Îl résulte pour lui que si le chiffre des décès est aussi élevé dans les régiments en garnison, c’est que beau- coup de jeunes soldats arrivent au corps avec des mala- dies non reconnues par les conseils de révision. Ce fait il l’a constaté un grand nombre de fois. Il passe ensuite en revue les différentes causes de mala- dies pour les soldats, et il les trouve dans les casernements insalubres, les corps-de-garde et les salles de police trop petites , surtout pour la nuit , où le renouvellement de l'air n’a pas lieu ; la nostalgie si fréquente dans les nou- velles recrues, Il signale, de plus, la mauvaise nourriture, les excès et les punitions infligées aux soldats. M. Ed. Laroche, qui est chargé depuis treize ans d’un service militaire, demande la parole, et présente des con- sidérations qui diffèrent des précédentes , dans ce qui touche la santé du soldat à son entrée au corps. Selon lui, le nombre de ceux qui arrivent avec des maladies qui ont échappé aux investigatious des conseils de révision , est très restreint ; et il est convainou que les causes des mala- dies du jeune soldat proviennent de son séjour dans les a — -DES SECTIONS. 269 garnisons, Îl signale comme causes le changement des habitudes, du vêtement , de la nourriture, les excès mul- tipliés , les punitions trop prolongées dans des prisons humides , la transition brusque du chaud au froid qui a lieu , pendant l'hiver , lorsque le soldat quitte l’atmos- phère très échauflée du corps-de-garde pour faire sa fac- tion. Il signale surtout la coutume de conduire le matin à l'exercice les soldats à jeun. M. Gély partage au contraire les opinions de M. Lemar- chand sur ce point , que beaucoup de militaires arrivent malades ou très faibles au corps. Il insiste particulière- ment sur la mauvaise nourriture du soldat , et ne craint pas d’aflirmer que le pain de munition est de mauvaise qualité et impropre à une bonne alimentation. M. Castonnet combat M. Gély sur le point que les con- seils de révision reconnaissaient aples au service militaire un grand nombre d’hommes évidemment impropres. Il pensé au contraire que, sauf quelques rares exceptions, la jeunesse appelée sous les drapeaux est l’élite de la popu- lation. Il partage l’opinion émise par M. Laroche, que les causes de la mortalité doivent être altribuées à la condi- tion mêine du soldat. M. Ouvrard monte à la tribune pour dire qu’un grand nombre de militaires appelés au corps sont dans 1e dis- positions de santé maladives. Il voudrait qu’une nouvelle statistique fût dressée par ordre du ministre , travail qui aurail pour résultat de porter l’atiention sur la conserva- tion et la vigueur de l’armée. M. le président déclare la discussion terminée , et la Séance est levée à une heure après midi. | LE 2 RS 270 .… PROCÈS» elle mérite d’être élucidée , ét nous devons suivre Mi Ridard dans ses prémisses et dans ses conclusions. “Aprèstun reproche sasamment adressé, de la ténacité des préjugés populaires qui ont aussi été, et qui peuvent 272 PROCÈS-VERBAUX encore être ceux des médecins, M. Ridard dit, comme beaucoup d’entre eux : J’ai cru longtemps à l’influence délétère des émanations des routoirs sur les hommes et sur les animaux. Il cite comme ayant partagé ces opinions, devenues funestes parce qu’elles ont fait apporter des en- traves à l’industrie de ce département , des auteurs juste- ment estimés dans la science. M. Ridard annonce qu’il s'élève, maintenant qu'il est mieux informé, contre des opinions longtemps admises et sous l’autorité de beaucoup de noms, parmi lesquels il cite Baudrillard (Traité des forêts), l'abbé Rozier, Bosc ; enfin, parmi les médecins : Romazzini ; Fourcroy et Pa- tissier. Ges auteurs ont marché, assure M, Ridard , avec une ignorance particulière des faits , sur la voie des asser- tions et non des fails probants. Il invoque, à l’appui de son opinion, bientôt quinze ans d’expérience , et il arrive à cette donnée, éclairée par la statistique, que la popu- lation dans les communes de Mazé, Corné ,#Andard, Brain , qui sont au centre de l’industrie cannabicole, sur les bords de l’Authion, a augmenté considérablement , puisque de 8,665 , chiffre atteint en 1820 , elle s’élève en 1840 à 8,792. — Augmentation, 127. Cependant, la cul- ture du chanvre, et par conséquent le rouissage, aug- mente; la mortalité diminue en même temps. On ne voit pas les lièvres intermilientes y sévir davantage ;, ni y pren- dre plus nettement la forme pernicieuse. La population devient plus robuste , et les épidémies n’ont pas pris ce caractère de périodicité que devrait amener le rouissage périodiquement opéré en août et en septembre, M. Ridard, quoique fort de ses observations , s’étaie encore de celles de M. Giraudet , médecin à Cusset (Allier), de l’avis de l’académie royale de médecine , de l'avis mo- tivé de M. Marc, médecin du roi, et de celui de Parent, du Châtelet, si compétent en la matière , et qui s'était soumis , lui et les siens , à l’influence des routoirs. si DES SECTIONS. 273 Les conclusions de M. Ridard sont: 9, Le voisinage des chanvresdans l’eau des rivières ou de leurs affluents, n’a pas une action nuisible à la santé des populations voisines ; 2 Les années où la récolte de cette plante textile a été très-abondante, et les époques de l’année où le rouissage est pratiqué , ne sont pas marquées par le développement d’une quantité proportionnelle de maladies dont on puisse attribuer l’origine à cette opération; - 3° Les fièvres pernicieuses sont tout aussi rares au voi- sinage des routoirs que dans quelque autre localité que ce soit, el les fièvres intermittentes n’offrent rien là de par- ticulier ni en intensité, ni en fréquence; 4° La santé des animaux n’est pas compromise par l’usage des eaux , dans lesquelles a séjourné du chanvre, ou par le pacage de l'herbe imprégnée de ces eaux ; 5° Il est loin d’être démontré que la chaleur n’est pas une cause aussi aclive de la destruction des poissons que le rouissage. | Après la lecture du mémoire , écoutée avec intérêt par la section , quant au fond et quant à la forme, la discus- sion est ouverte, ) - M. Bértini croit que l’on peut étayer les opinions si anciennes de l’influence fâcheuse des routoirs, rizières, par ce que l’on voit en Piémont, dans les lieux de ces cultures ; il a reconnu et éprouvé par lui-même une ac- tion analogue à celle qui provient dans les marais Pontins de la macération spontanée des végétaux. M. Lachèse père appuie les conclusions générales de’ M. Ridard ; mais il les restreint aux cours d’eau actifs, et - ilen exclut les flaques d’eau , où le rouissage amène tou- jours une putréfaction très-dangereuse; des épidémies auraient élé dues à cette cause, Il désirerait que l’on . substitut au rouissage à l’eau le rouissage par la méthode de l'enterrement qui aurait la même efficacité et moins T. I. 13 274 PROCÈS-VERBAUX de dangers, et donnerait à l’agriculture les matières azo- sécdéidis PR du chanvre ; une sn er fertilisante, M. du Grandlaunay habite consul Ridard és bords de l’Aûthion, grand lac, l'hiver; l'été, une sorte de marais desséché , très-favorable à la culture du chanvre; mais il assure que les gens da bas pays ; plus exposés aux efllavés de ce rouioir, en éprouvent des inconvénients; el il vou- drait que la statistique désignât dans une même commune les gens riverains du routoir, et ceux qui en sont éloignés. M: Balocchi cite un fait remarquable : En 1859, dass les Marches ; entre Forli et Ravenne ,; on cultive, on rouit le chanvre sur une grande échelle ; pendant que eetté opération étaiten brain , un vent du sud-est ayarit régné, il arrivä que toute la contrée, soumise à cette trombe de vent, ebà dix lieues de distance ; subit une formidable épidémie et une épizoolie aussi fâcheuse. M: Oavrard présente le fait contradictoire ; de sa pro- pre habitation entre deux rouloirs à l’état Par ét il m'en a réssenti nuk mauvais effet. Mais , comme le fait observer M. cames cela ne tiendrait-il pas à une circonstance favorable de bonne ventilation ? di M; Ponceau a vu les ouvriers evavnles pris de fièvres d’accès lorsqu'ils travaillatent jirès de fosses où Pon faisait rouir des chanvres et les gens des fermes , dans le foyer d'infection , rester sains et tofs M. Mirault demande si lon ne peut user à l’in- flaenée du rouissage des maladies des jâämbes, ulcérations et nécroses, etc: : M: Bourjot pensé que les causés sont ici les mêmes que pour le débardage du gt par l’eflét du long rés dans Peau, : M, Roux (de Marseille) perise que les débats sur le sujet en question doivent se passer plus particulièrement entre DES SECTIONS. 275 lessmédecins des pays où le ronissäge dû chanvre à lieu; que conséquemment il est tout disposé à adopter l'opinion .derces médecins comme faisant atülorité ; mais que, puis- que l’ox a demandé l'insertion en entier du mémoire dans le compte rendu du Congrès, il croit dévoit faire üne nr dans l'intérêt méTHE" dé cé travail 7" «Pour prouver que lé rouissage des chañvres n'ést point les l’auteur, s’étayant de la statistique , a présenté un tableau des décès pendant une lonigüé série d’añnées, qui montre que le chiffre des décédés a été moindre alors que le rouissage est devenu une grande branche d’indus- trie pour lepays , qu’antérieuremenñt à célle époque , et bien que la population fût plus considérable. Mais n’est-il pas possible que les décès aient été plus nombreux, alors quela population était moins considérable , à cause du règne de maladies plus ou moins graves ? Et dès-lors ne conviendrait-il pas-que l’auteur fit connaître l’étât sani- taire de chaque époque; pour pouvoir lier lés inductions qui nv laisseraient aucun doute sur la cause de soi À tation ou de la diminution des décès ? . La section consultée conclut à l'impression en totalité étitiiopini: Ridard , comme prôvoquarit à dé nou- velles investigations et à de nouvelles obsérvations. M: Bourjot: fait la lecture d’un mémoire intitelé : Aperçu synthétique de médecine ocalaire ; tendant à râttacher par des principes généraux et communs la pa- -thologie de l’œil à la pathologie générale, en éxpliqüuant . beaucoup des affections ‘de lPœilpar les Fa a # tissu. : sb sites b 661) miémoite est po Sr prié d’aialyse. En éhue: c’est un travail tout-à-fait synthétique dans lequel d'a: teur s’est efforcé , si l’on peut diré , à rendre inutiles les volumes qui ont été entassés dans ces derniers temps sur la-médecine oculaire , et en affranchissant la science de cette multiplicité d'espèces et de variétés de maladies ocu- 276 PROCÉS-V ERBAUX _ laires que les ophthalmologistes anglais et allemands vou- draient introduire parmi nous, et surtout en offrant plutôt au jugeinent qu’à la mémoire du pr aticien das indications thérapeutiques certaines. M. Daviers prend Ja pate et il loue M. Bourjot d a- voir montré que l’ophthalmologie n’est pas une spécialité dans l’art de guérir, mais une branche qui se rattache au tronc. | La séance est levée. | Sixième séance, — Du 7 seplembre 1843. Rapporteur : M. Casronnrr, secrétaire. La séance est ouverte à une heure après-midi, sous la présidence de M. Roux (de Marseille). M. Roux prend la parole au commencement de la séance, pour rendre compte à l’assemblée de l'impression qu’il a éprouvée avec plusieurs médecins étrangers, en visilant, ce matin même , la nouvelle maison départemen- tale d’aliénés de Sainte-Gemmes, près Angerss. Gette maï- son , ou plutôt ce château, dit-il, dont la magnificence et la beauté du site sont presque sans égales; réunit tontes les heureuses conditions, pour devenir bientôt un des plus beaux asiles d’aliénés qu’il y ait en Europe. M. le docteur Bertini, médecin en chef de l’hôpital de Turin, communique à l’assemblée, qu’il a visité, en com- pagnie de plusieurs médecins étrangers, avec le plus grand intérêt, les salles d’asile de la ville d'Angers; que ces utiles établissements qui doivent avoir tant d'influence sur la civilisation et le bien-être des masses, ne lui ont semblé nulle part avoir atteint le degré de perfectionnement qu’ils ont à Angers; c’esl un témoignage qu’il est bien aise de rendre au zèle et aux succès complets des dames qui ont pris les salles d'asile sous leur patronage. DES SECTIONS. 277 M:1le docteur Mayor (de Lausanne} expose verbale- ment ce qui a été l’objet de la séance du matin, à l’Hôtel- Dieu. Il a renouvelé devant les médecins réunis, ses ex- périences intéressantes de tachytomie sur le cadavre. A Vappui de la nouvelle méthode d’ampulation que M. Mayor propose d’introduire dans l’art chirurgical , M. Lemarchand , ancien chirurgien-maÿor, fait part d’un cas de chirurgie militaire , où un avant-bras coupé par un coup de sabre fut regardé comme bien amputé par M. le baron Percy, qui se contenta de faire un lambeau avec la peau qui était pendante , et fit établir le pansement après avoir arrondi les extrémités des os’, et la guérison fut par- faite. Eh bien! s’écrie M. Mayor, ne voyez-vous pas que c’est là une application de ma tachytomie ? * Sur la proposition d’un membre, la section vote à Pu- nanimité le renvoi à la commission centrale du mémoire de M. le docteur Mayor, sur la nouvelle méthode d’am- pütation appelée tachytomie, pour qu’il soit imprimé en entier au compte-rendu du Congrès. an On passe à la cotcstétiéet qui présente un mémoire de M. Lemeércier, de Mayenne, intitulé : Considérations cliniques et anatomiques sur les tumeurs blanches des articulations ; sur la nature, les causes et le traitement de ces maladies. (Rapporteur, M. Mayor.) M. le président donne communication d’un méoire de M. le docteur Tanchou, intitulé : Recherches sur La plus grande rareté du cancer et des maladies particu- lières aux femmes, dans les m8 4 que dans les villes. * M. Benoist, après la Arte du mémoire, fait observer que Ja statistique de M. Tanchou est fautive, parce que la population de Paris a beaucoup augmenté depuis dix ans ce dont il ne tient pas compte , et aussi parce que les personnes attoinies de maladies cancéreuses quittent souvent les campagnes pour venir à la ville. 278 PROCÈS- V ER BAUX M: Daviers fait aussi la remarque que la statistique de M. Tanchou doit être inexacte, parce que très-probable- ment elle repose sur les documents ervonés fournis par plusieursimédacins sur le cancer de l'utérus. Ce qu'il ya de positif, c’est que M. Tanchou est dans l'erreur quand il dit que les cancers de l’utérus sont plug dre 4e les cancers du sein. M. Mame regrette que M, Tanchou n'ait pas traité des manière salisfaisante ce qui regarde l’étiologie du cancer, M. le docteur Daviers a la parole pour la lecture d’ur mémoire sur la section de la cornée sit dans l'opération de la cataracte, : Après la lecture de ce mémoire, qui a été fé avec beaucoup d'intérêt, M, Bourjot-Sant-Hilaire, tout en rendant justice au mérite du travail, fait remarquer que la multiplicité des instruments qu’on a inventés pour fixer le globe de l’œil dans l'opération en question , prouve qu'aucun de ces instruments ne remplit bien le but, et que suivant la règle des bons-opérateurs , il faut y renon- cer pour ne se servir que du doigt. …, , nan M, le docteur Ballochi (de Florence), dit qu’un bon opérateur de la cataracte par extraction, ne doit se servir que de son doigt pour fixer le globe de l'œil pendant la section de la er transparente; qu’il Faut tout au plus se seryir de l’élévateur de Pellier. | M. Daviers répond que l'œil fuit presque toujours en dedans , dans l'effort qu’on fait pour pratiquer la section de la cornée, et qu’il n’est guère possible de fixer le globe de l’œil avec le doigt seul, sans qu’il y ait danger de le comprimer. Les objections de MM. Bourjot et Palieet: ont d’ailleurs été discutées dans le mémoire. ; M. le docteur Guérin du Grandlaunay à la mana pour lire un mémoire sur le cathétérisme forcé à l’aide, de sondes en gomme élastique de gros calibre, L'action de ces sondes est fondée sur le même principe que les sondes DES SECTIONS. 279 métalliques du doeteur Ma yor. La nécessité, dit M. du Grandlaunay, est la mère de l’invention, et.e’est dans une circonstance d'urgence qu’il fut amené. à se servir de ces sondes: en gomme élastique. M, du Grandlaunay rapporte deux.ebservations intéressantes, où il parvint à introduire ses sondes dans la vessie. ns des-efforts inutiles: Hephés ayant son arrivée. M. du Grandlaunay vibes son mémoire qui reçoit l’assentiment de l’assemblée, : | M. Mayor remercie M. du Grandlaunay des expressions flattéuses dont il s’est servi à. son égards il explique l'ex- pression de forcé, appliquée au cathétérisme qu'’ila con- seille; ‘il ne faudrait pas entendre par elle. une force aveugle et non mesurée, mais un effort dilatateur du canal. sx y ho «L'heure force de lever la sisinsiie vs assister à’ la séance générale , à l’Hôtel-de-ville. . : 14: fai @p 12 #31 ciert { ti ORUNITETIT Septième séance. — Du 8 septembre 1843. .…. Rapporteur ; M. CasronnerT, secrétaire, 4e séance esi. ouyerle ? à onze heures sous la présidence - Roux (de Marseille). "5 procès- verbal de Ja précédente. séance et, ps “ la sous-seclion qui se tient chaque malin à l'Hôtel - Dieu , so adoplés. Rapport de M, le rame Ballochi ré Eloresce) sur l'Idrologia minerale de M. le docteur Bértini (de Turin). Cet ouvrage est compacle ,etne-présénte point ces longueurs qu’on retrouve dans les livres deinos jours. . L'auteur s’attaché à constater les effets de: l'usage des eaux ; ses inconvénients el ses avantages ; tciréinations à prendre pour pouvoir les transporter. Description et 280 PROCÈS-VERBAUX analyse de chaque source en particulier, Il compare les eaux naturelles aux eaux artificielles. Il passe en revue les bains de vapeur, de sable, d’air, de lumière, de lait; l'Italie est riche en eaux minérales , iodurées. On trouve dans les eaux minérales un moyen d'agrément , le méde- cin y trouve des indications à remplir. M. le docteur du Grandlaunay présente au Congrès un tableau statistique des aliénés qu’il a eu à traiter dars son établissement de Baugé, et l’exposé-d’un plan d’une mai- son d’aliénés pour le département de Maine et Loire. M. Lachèse père fait hommage aux membres du Gon- grès qui vont à Nantes d’un voyage d’ sugess à l'Océan, publié par son fils. M. Lemercier (de Mayenne) prend la parole pour la lecture d’un mémoire sur les scrofules. M. le docteur Bertini propose à la section de demander à l’auteur un extrait de son mémoire pour être inséré au compte-rendu. Cette proposition est appuyée par un vote qui recom- mande cet extrait au comité central. M. Lachèse père fait un rapport sur un mémoire de M. dullien (de Paris), relatif à un projet d’établir dans chaque ville une Société d’édilité , dont la mission serait de surveiller, avec l’autorité municipale, l’assainissement et l’embellissement des villes, et s'occuper d’améliora- tions qui se font attendre trop longtemps par le cours ordinaire des choses. Cette proposition est fortement appuyée par M. le rap- porteur et par la section entière. M. Mayor prend la parole pour rendre compte d’un mémoire de M. Lemercier sur les tumeurs blanches et leur traitement. M. Bourjot-Saint-Hilaire prend la parole pour la lecture d'un mémoire sur le choix de la méthode et du procédé à suivre dans l'opération de la pupille artificielle, DES SECTIONS. 281. Après la lecture de ce mémoire , M. Daviers prend la parole et dit qu’il partage les opinions que vient d’é- mettre l’auteur du mémoire, et que, comme lui, il préfère le procédé de Wenzel au procédé conseillé par M. Vel- peau. M. le dchéiin Mayor a la parole pour la lecture d’un mémoire relatif à des considérations comparatives sur la médecine et sur la chirurgie proprement dite. Ilémet l’opinion, qu’on a aujourd’hui trop de tendance à faire un tout de Ja médecine et de la chirurgie; suivant lui, ces deux branches de l’art de guérir n’ont pas le même point de départ, on peut être praticien dans l’une sans l’être dans l’autre. Après la lecture de ce mémoire , il s’élève une discus- sion vive et animée entre plusieurs membres, MM. les docteurs Bourjot-Saint-Hilaire, Ballochi, Castonnet, Da- viers, Mame, etc., qui sont loin de partager l’opinion de l'honorable chirurgien de Lausanne ; pour eux , comme pour la plupart des: hommes de l’art, le manuel opératoire ne suffit pas seul , et il faut encore au chirurgien le sens médical. ,; Cette discussion étant close, M. Roux quitte le féuieuit de président pour traiter oralement à la tribune la 13° question d'hygiène publique, ainsi conçue : -« Déterminer la différence qui existe entre l’infection et la contagion. Les règlements sanitaires existants actuel- lement en France sont-ils d'accord avec l’histoire médi- cale des faits? » M. Roux dit que, puisque pero ne s’est fait inscrire pour traiter la question dont il s’agit, il croit devoir l’a. border, ne fût-ce que pour avoir l’occasion de jeter quel- -ques fleurs sur la tombe de l’une des plus grandes illus- irations dont le monde médical puisse s’enorgueillir, Etablissant ensuite, quant au premier chef de la ques- tion, la différence entre l'infection et la contagion , difié - 282 PROCÈS-VERBAUX rence déjà établie par Nacquart dans le dictionnaire des sciences médicales, après les Deveze , à Philadelphie, les Valentin, à Naney, et plusieurs autres médecins français, M. Roux est conduit à parler du docteur Chervin, comme ayant le plus contribué à la solution du grand problême de la non contagiou de la fièvre jaune, du ehwléra , etc., et cela en visitant les pays des deux hémisphères, où ces maladies ont exercé leurs ravages; en faisant des recher- ches incessantes ; voyages, recherches, auxquels il a con- sacré sa fortune et la majeure partie de son existeuce, mais qui Jui ont atliré l’admiration des vrais amis de l’hu- manilé, ainsi que des couronnes de Ja part de l’Institut et d’autres corps savants. Chervin pourtant vient de s’éteindre , dit M.-Roux } dans un état voisin de la misère !..,... Paissions-nous du moins voir le commerce , à qui il a rendu de si éminents services, les reconnaître par quelque monument. Quant au second chef de la question, M. Roux soutient que les maladies auxquelles on oppose des mesures de préservation , dans les établissements sanitaires, sont évi- demment des maladies par infection , tandis que la gale, la syphilis , la variole , etc. , maladies contagieuses , s’il en fut, ne sont point comprises dans les règlements sani- taires. M, Roux loue ensuite beaucoup l’administration pour les réformes qu’elle a introduites dans le systême des quarantaines et qui attestent qu'elle tient compte de l’ob- servation médicale des faits ; il pense qu’on obtiendra toutes les réformes, mais insensiblement, car il y a encore bien des préjugés à surmonter, des erreurs à dissiper. Ila cité: aussi en terminant, comme ayant beaucoup fait pour les améliorations obtenues , M. de Ségur-Dupeyron, ins- pecteur-général des lazarets de France, à qui nous devons d’excellents travaux à ce sujet. 1# Sur la proposition de M. Bourjot-Saint- Hiloiné, des DES SECTIONS. 283 remerciéments ont été votés par la section à M. le prési- dent Roux , pour la manière à la fois énergique et conve- nable avec laquelle il a dirigées travaux de la section. 2° M. le président a pris: À parole, et dans les adieux qu'ila faits, au moment de se séparer, a témoigné com- bien les médecins étrangers ont élé sensibles à l'excellent accueil qu’ils ont reçu des médecins d'Angers ; deurs confrères , accueil dont ils couserveront un agréable sou- venir. 5° M. Bertini, au nom de ses sdb prid de présents au Congrès , a exprimé des sentiments de la plus profonde reconneissance pour la manière amicale et fraternelle dont ils ont élé reçus par leurs confrères de la section, ainsi que par les membres du comité central ; il désire: que l'expression des mêmes sentiments soit communiquée aux autorités municipales et administratives. M. Mayor (de Lausanne) fait observer qu’il a demandé le renvoi à la commission centrale, du mémoire de M. Le- mercier , sur les tumeurs blanches , pour être inséré en partie ou en entier dans le compte-rendu du Congrès. La séance est levée. SOUS-SECTION CHIRURGICALE, A L'HÔTEL-DIEU. Séance du 8 septembre 1843. Rapporteur : M. Daviers, secrétaire. La séance est ouverte sous la présidence de M. Laroche père. M. Mayor applique sur un malade , atteint de fracture de la cuisse avec plaie, son appareil en fil de fer; répré- sentant un double plan incliné. Les deux membres sont placés sur l'appareil , avantage immense ; qui permet de déplacer le:malade comme une seule pièce ; sans exposer les fragments à jouer l’un sur l’autre. Le pied est fixé par 284 PROCÈS-VERBAUX un triangle à la partie inférieure de l’appareil, et le bassin produisant par son propre poids une extension à la partie opposée , il en résulte une traction directe sur la cuisse, qui ne peut ainsi se raccourcir sensiblement. Cet appareil a encore l’avantage de prévenir la raideur de larticula- tion du genou au moyen d’une charnière placée à la par- tie moyenne. Le même chirurgien expose ensuite ses principes sur sa version. Ge qui nous a le plus frappé dans les manœuvres du chirurgien de Lausanne , c’est le précepte qu’il donne de faire tourner la femme lorsqu’on a introduit une main avec laquelle il n’est pas facile de saisir le fœtus. La femme doit alors tourner sur la main de l’accoucheur , comme sur un pivot. M. Mayor applique ensuite sur un éléphantiasis des Arabes, des extrémités inférieures, une compression à laide de triangles pour remplacer le bandage fait avec les bandes. M. Mayor fait aussi connaître ses pessaires en fil de fer el ses airignes à angle droit. Ces derniers instruments facilitent l’exlirpation des tumeurs situées à la région cer- vicole, dans le voisinage des vaisseaux et des nerfs. A dix heures, la séance est levée. Huitième séance. — Du 9 septembre 1843. Rapporteur : M. LEMARCHAND. En l'absence de MM. les secrétaires, se Lemarchand est appelé à tenir la plame. En conséquence , M. le président lui donne la parole pour la lecture du procès-verbal de la dernière séance, Ce procès-verbal, après quelques rectifications deman- dées par M. Bertini, est adopté. ——_—_——— DES SECTIONS. 285 1° Ensuite, M. Balocchi se présente pour répondre à la 24° queslion du programme proposé en ces termes : «Quels sont les services que l’application du micros- » cope a rendus à la médecine , et notamment à l’allaite- » ment des enfants ? » M. Balocchi fait sentir, d’abord , combien il est impor- tant que l’on ait des données à peu près certaines pour assurer qu’une nourrice a de bon lait, et qu’elle est dans les conditions voulues pour allaiter. D’après les expériences de M. Donné , on peut, pendant . la grossesse , juger si la femme pourra nourrir; il est des . femmes qui n’ont presque pas de colostrum , ce sont celles qui n’auront pas de lait. D’autres, au contraire, ont beaucoup de colostrum ; mais leur lait, quoique abondant , n’est point nutritif, si ce colostrum est aqueux. Il est encore un colostrum qui doit être considéré comme le signe d’un bon lait, et ordinairement abon- dant, c’est celui qui est visqueux et jaunâtre. Mais il fait observer, en outre, que ces caractères ex- térieurs ne suflisent pas toujours , et qu’il faut recourir à l'analyse microscopique , qui nous montre que la première qualité du colostrum n'offre que des globules muqueux, et la deuxième qualité, des globules muqueux réunis à des corps que M. Donné, cité ci-dessus, a nommé granuleux : la troisième, enfin, présente des globules muqueux , et en grande quantité des corps granuleux qui donnent la couleur jaunâtre indiquée, et puis des globules lacteux plus ou moins bien formés. M: Balocchi parle en outre de l'avantage que le micros- cope peut procurer dans les eas où il existe des abcès interlobulaires du sein ; abcès qui ne se montrent aucu- nement à l'extérieur, et dont l'existence n’est bien dé- montrée que par cet examen, qui fait parfaitement voir les globules de pus, 286 PROCÈS-VERBAUX M. Ballocchi passe ensuite en revue tous les cas où cet nn devient indispensable, l 1 Négrier pense qu’en faisant moins teter le enfants Ba vingt-quatre heures , le lait de la nourrice devient plus fluide et moins nourrissant. : +1: ewb jou 2° M. Bértini traite ensuite la onzième question d’hy- giène , sur l’usage des corsets, considéré dans ses résul- tats hygiéniques sur la santé des femmes.et des enfants. Il regarde les corsets comme étant en général nuisibles, au lieu d’être. utiles; excepté dans les cas de difformité, Il dit qu’il faut imiter la nature, et donne pour exem- ple les sauvages et les populations qui ne font pas usage de corsets ; et qui pourtant ont de très-belles tailles. M. Beriini fixe ensuite l’attention sur les dangers et les inconvénients de ce vélement chez les femmes enceintes, tant pour elles que pour leurs enfants. MM. Roux et Piccolo partagent entièrement l'opinion de M. Bertini , et font remarquer d’ailleurs que la même question, souvent agilée, a toujours été résolue dans le même sens par les meilleurs hygiénistes ; mais que sur ce point, comme sur tant d’autres analogues , les conseils les plus sages n’ont pas élé toujours suivis; qu’il est donc utile de reproduire souvent les mêmes vérités: 5° M. Piccolo aborde ensuite la 7° question de méde- cine ; ainsi conçue : « Quelles sont les causes et le traitement de Phépatité » chronique ? » % Sans vouloir énumérer toutes les causes de celte affec- Lion , il se borne à dire qu’elle diffère suivant les localités : qu’en Sicile, par exemple , les miasmes palludens sont la source la plus commune de cette maladie ; dont le traite- ment , quel qu’il puisse être, et bien que beaucoup dere- mèdes aienL.élé conseillés, est Loujours infructueux. M. Roux considère comme trop exclusive cette asser- lion, que les hépatites chroniques sont au-dessus des res- DES SECTIONS. 287 sources: de la médecine ; elles sont; il est vrai, dit:il, du nombre de ces affections , qui font souvent le désespoir de l’art médical et des malades: Mais on ne saurait soutenir que jainais la médecine ne puisse en triompher. On pos- sède assez de faits qui appuient cellé manière de voir. M. Roux cite plusieurs observations sur efficacité} par exemple, de lemploi dans les hépatites chroniques des préparations mercurielles ; soit à l’intérieur ou à Pexté- rieur, notamment du calomel ; donné à petites doses ; et secondé de l’usage des ca sit et régiine conve- nable. M. Bertin appuie le préopinat , en sjoutai qu'il s’est aussi servi avec succès des frictions de pommades iodu- rées , ainsi que des eaux minérales salinés et ioduréés , ce qu’il a fait remarquer dans son Traité des éaux minérales récemment publié. L M. Piccolo, considérant que dans les hépatités chroni- ques, produités par les miasmés palludens, il y a presque toujours dégénérescence du foie, soulient que dans ces cas du MORE, l'hépatite chronique est rebelle à tous Les moyens curalifs. La discussion fixée à ce point, et personne ne deman- dant la parole, M. le président lève la séance. i li #43 Séance du 9 septembre 1843, tenue au Palais de justice de Nantes. L = raie M. lé docteur Géy, Mon dt € M. Roux. (des Marseille), «président, fait remarquer, en ouvrant la séance, que le Congrès scientifique d'Angers est heureux de venir profiter des travaux qui ont été ré- servés par les médecins nantais qui n’ont pu sé rendre à l'ouverture du Congrès. 288 PROCÈS-VERBAUX La parole est en conséquence donnée à M. Guépin, ins- crit pour un travail sur la pupille artificielle. Il présente d’abord quelques malades intéressants, Le premier malade était atteint de cataracte de nais- sance. M. Guépin l’a traité par la formation d’une pupille artificielle. Il y a eu guérison. Le second malade avait perdu la vue par suite d’iritis spécifique compliqué de cataracte. Une excision considé- rable de l’iris permit au rayon lumineux d’arriver, et a préparé en quelque sorte le succès d’une opération de cataracte qui sera faite ultérieurement. Le troisième malade offre une pupille par décolement , qui a égaleibent rendu la vue au malade, Sur le quatrième , il y a une cataracte capsulaire; la pupille artificielle est faite, et plus tard une seconde opé- ralion achèvera de rendre la vue. Le cinquième malade offre une affection purulente de la membrane de Dellmet , fort rare , et par conséquent intéressante. | | Chez la sixième , il existe cataracte double avec iritis ; une pupille artilicieille a été pratiquée, Abordant ensuite les questions dogmatiques, M. Guépin rappelle que les spécialités remontent aux Egyptiens et aux Arabes, Aujourd’hui les médecins de province doivent suivre la division du travail médical. Pour rivaliser avec la capi- tale, il faut limiter en ce point. Cet élat de choses intéresse réellement hrs: L'établissement d’un dispensaire spécial a permis à notre collègue d'augmenter beaucoup le nombre des faits qui passent sous les yeux du médecin ordinaire. C’est un moyen d’atteindre et de Dre en Loge le charlatanisme ambulant. M. Guépin pense trouver dans sa propre pratique une preuve en faveur des spécialités. CSN, #34 M. Guépin af ail; Sd lever 0 40 © 107 opérations de Due PRE EE 80 de pupille artificielle ; : ot à 30 opérations accessoires. Étudiant spécialement la cataracte ; M. \Guépin indique sur 100 opérations, 82 succès ; ce qui est en définitive un beaurésultat.… TT se duo shot esloeucr.-sutum 24) L'auteur expose en détail la cause de ces insuccès et le | mode opératoire le plas-fréquent, : 4 | aLasataracte congétinale fournit l’ occasion e guelques | L remarques nouvelles et très importantes. rvaoos| M..Guépin en a-opéré cinq. Il préfère du, és hSv- + * : SUR. la pupille artificielle à la cataracte.en pareil. cas, et c’est à elle qu’il. a, dû le plus beau succès. L’ heure avancée force de lever la séance et de la ren- os à demain. Met usé ét fat Neuvième séance, — Du 10 septembre 1843. 2 OHCLET PREURE M. cs pre ne Lait ar + M. Ænipii est a he à continuer la ete du mé moire, commencée.hier, :+ br64 M. Guépin rappelle qu'il a publié en 184; à un tite sur la pupille artificielle, qu’il doit rectifier un peu au- *_jourd’hui. IL reconnaît D CA EG stage ee el deux procédés. di | «Partant des faits qui lui sont propres, il pose.en fait que la pupille artificielle. donne plus de succès que la cata- racte. Il croit être arrivé aujourd’hui à des procédés plus parfaits. que, ceux auxquels ils “était d’abord attaché. Il établi ensuite avec un très grand soin le procédé spécial qu’il appli ique. dans chacune des circonslances:qui exigent l'opération de la pupille artificielle. TNT Le E 19: ma | | | | 200 _ PROCÈS-VÉRÉAUX Cette partie de son travail , riche de faits et de déduc- tions pratiques, Évhaphe à | 'atialyse, Myotomie oculaire. . 4 myopés ont été opérés ; 3 avec succès. Les quatre muscles droits où été coupés cliez chacun de ces imalades. Dans le strabisme, 9 fois sur 12 il ÿ à eu succès. Passant à des éonsidérations générales de thérapeu- tique , l’auteur traite d’abord de sa méthode abortive. Dans uni mémoire sur Pophthaliie granuleuse, auteur à prouvé que c'était là meilleure méthode dé traitement. Il lapplique également dans le/cas de plaie ét de brûlure de l’œil, M. Guépin rapporte un exemple de cette dernière affec- tion dans lequel une brûlure de la conjonctive fut rapide- ment guérie par la méthode substitutive. Dans un autre cas, beaucoup plus grave, M. Guépin est parvenu à guérir sans ankilose phacose une brülure de la conjonctive due à l’action de la fonte de fer. L'auteur cite ensuite trois observations de brüluré de Ja conjonctive par de la chaux , traitée par légère cauté- risations Passant aux brûlurés par la soudure du prombier , M.-Guépin dit qu’il a emploÿé, dans un cas de cette es- pèce, de simples applications astringentes, Il cite un exemple de succès par l’emploi de la même méthode dans Mes cas de plaie. Albugo. M. Guépis fait rémarquer que chez les malades traités par l’excision par l’instrütnent tranchant, d’après la wné- thode de M. Mulgnière , il se produit tantôt un staphy- lôme , tantôt une fenté qui rend la vision doublé ou triple. DÉS" SECTIONS. 291 : Céruäins albügos ne sônt pas susceptibles d’excision à _ cônire l’albigo lé sulfate dé cuivre én poudre mélangé avée d’autres médicaments, + 1 #7 7 Le mémoire de M. Guépin, écouté avec un vif intérêt, Sa renvoyé RES commission Céntrale vec vœu de l'in- sérer en entier dans le éompté-rendu du Congrès.” cd M. Méreschal ayänt proposé un procédé spécial pour le tämiponnemént des fossés nasales , ést appelé à exposer | ses idées. vsysbgiese die Éi dc à En L. Bonäfñÿ se charge, en l'abéénée dé l'autéur, de Faire | ébtihattre brièvemént le procédé de notre collègue. MAUVE Bernie À un tatnponnement partiel, se fondant sur télé obsérvition , vérifiée par quelques nécropsies } que l'Héthorthagié ne provient ordinéifement que d’un point des fosses nasales , lequel répond en général à un bord libre ‘des cornéts inférieurs Le tänipônhément pañtiel pourtait doré suffire’, et c’est à lui que M. Mareschäl à cütrécours: Il porte à cét effet uf bourdorinet dé chiärpie sur le point désigné , à l’aide d’une sonde creuse vel frant'tn fil déquel est attaché c6 corps conmpressdur." loraütéur M: Märéséhal , fait temabquer que la sondé dont il fait usage, a pour but de suppléef at tamipônnd MEN AES arriere harines, qui est quelquefois impossible. IVétablit que Phrémorrhagie nasale provient le plus sou: . vent d’un seul point , et surtout du' lobe postérieur du . Cornét inférieur’ des fosses nasales, et c’est là que doivent étrerétablis les moyens fopiques et la compression. M. Négrier (d'Angers) rappelle qu’il a proposé depuis ielque témps un procédé plus simple," et peut-être par conséquent plus généralement utiles C'est Pélévation d'un oùides deux bras ‘avec occlusion de l'ouverture antérieure | de laiärines Ce moyéria été expérifenté déjà un certain .| nombre de fois et toujours avec succès. 292 PROCÈS-VERBAUX M. Bertini ajoute que l’essai de cette méteedes donné de bons résultats. M. Palois demande à M. Négrier quelle nr " colora- tion du visage et l’élat du pouls. pendant qu’on élève les bras, et quelle explication il pourrait donner de son pro- cédé. M. Négrier indique dans sa réponse que l’idée de son procédé remonte à une observation directe. Un jeune homme, atteint d’hémorrhagie, vit le sang s’arrêler pendant qu’il élevait le bras pour s’appuyer contre la muraille. M. Négrier expérimenta depuis sur lui-même. . L’explication donnée à cet égard par M. Négrier peut être contestée; il le reconnaît Jui; -même; mais quelle que soit celle que l’on adopte , il n’y a rien de changé au fait pratique, qui a été démontré par plus de cinquante obser- vations. M. Palois insiste sur la nécessité d'observer l’état du pouls , et par conséquent sur l’activité de la circulation. Ne serait-ce pas en amenant une sorte de syncope que l'élévation du bras agit ? M. Négrier répliqué qu’il n’ose encore rien établir de précis à cet égard. Quelques faits méritent cependant ’être ste cl. Il a vu une jeune fille guérie à deux fois différentes par l'élévation des bras, mais qui fut atteinte, presque aus- sitôt après, d’une hématurie. Chez un jeune homme exsangue et presque ensyncope, chez lequel l’hémorrhagie continuait, le même moyen réus- sit encore. M. Thibault fait remarquer qu'avant de uk l'ex- plication , il faut bien constater le fait en lui-même. Il peut y avoir des causes d’erreur , les hémorrhagies, na- sales s’arrêtant souvent spontanément. Il cite un ças d’in- succès. | "DES SECTIONS. 293 M. Négrier demande si H'OEGHiSSOE dr lu Harinie a eu lieu. 11 ne croit pas d’ailleurs qu’on puisse promettre un sucets absolu , Qui ne s’observe jamais en médecine. M. Delanneau, qui a vu le malade, dit qu’effectivement l'oeclusion de la narine n’avait pas eu lieu. Avant de terminer la séance , qui sera sécéidimatont la dernière , M. Roux (de Marseille) , président, prie . MM. les membres de la section qui appartiennent à la ville de Nantes d’agréer l’expression des sentiments de gratitude des autres membres du ns Ac peus \gnr bien- veillant concours. .Les relations établies dans ces courts moments, ajoute M. Roux en terminant, nous ont élé trop agréables pour que nous ne devions pas regretter de les voir si prompte- ment interrompus. Sur la demande de M. Bertini , il a été également dé- cidé qu’il serait fait mention au procès-verbal de la visite faite cer matin , à lhôpital-général de Saint-Jacques, et de la satisfaction profonde avec laquelle les médécins étran- gers ont parcouru cet admirable asile de la vieillesse in- fra et de la folie. — La séance est levée, | ; \ Sie Lo EM dr ré A é, dé 7" sd! * QUATRIÈME SEGTION. "1; STAUTE à LA A HISIDIRE ET HCÉPOÉG GE pi PO hits liuretrns asbingitiennnr letodl off fiber 221 Airsgi {Première séance, — Du ptonbre 1843. j DS ACT | AA: cart Aalitbgrier 2: Rapporteur : M. DE Lex, secrétaire "A sept hedres un quart ; M. Godard-Faultrier, rem- plissant les fonctions de président , annonce qu'il va être 294 PROCÈS- VERBAUX procédé à la nominalion d’un président et de 4 quatre wice- présidents, qui, ayec les sccrélaires pote me nommés par MM, les snif vi inter d formeront le bureau définitif, Anételt En'conséquence, Her est dci des noms des per- sonnes déjà inscrites pour pénis) past aux dravaux de la section. . d'or l Quelques membres arrivés la veille ou Fes là dut s’empressent de réclamer leur inscription. +: * On faît ensuite l'appel nominal et chaque mémbre pré- sent vient à son tour déposer son bulletin. +: ti Le dépouillerñent du scrutin donne les cinq noms sui- vants : Nos MM. Cauvin, de Beauregard, Richelet, l'abbé Lacurie, de la Sicotière. MM. Cauvin et de Beauregard ont réuni un ‘nôtibre de voix égal ; mais d’après la considéralion de la supé- riorilé d’ ke et sur le désistement de M. de Beauregard, la présidence esl dévolue à à. M. Cauvin. + Les quatre auires membres sont proclamés yice- prési- dents dans l’ordre indiqué plus haut. M. Godard invite alors M. le président et MM. les vice- présidents à siéger au bureau. M. Cauvin ; après avoir remercié en cb mots l'assemblée de l’honneur qu'elle vient de lui accorder , déclare la séance quyarie pour les travaux relatifs à la section. M. Richelet , vice-président , donne hits des ques- tions du programme , et reçoit les inscriptions des mem- bres présents sur des questions qu'ils ont partieulièrement préparées, ces questions devant être mises les premières à l’ordre du jour. On prend aussi les noms des personnes qui.se proposent de lire des mémoires sur des sujets pe: vant.intéresser le Congrès. DES SECTIONS. 295 ares annonce un travail sur.les questions 186 et partie du programme consacrée à | ‘archéologie. «Deux mémoires sont encore déposés entre les mains du secrétaire : ; Fun de M, de Caumont intitulé : Un mot sur Les dis. aussions qui se sont élepées relativement à l’origine de la tapisserie de B ya: L'autre de M, l'abbé Lacurie : Essai sur les monagrar phies relatives à l’histoire de France. , M.,de Caumont pffre à la section le bulletin. mopu- mental de la Société française -pour année 1843, M. Je président désigne M. T'ailliar pour .en foire, le rapport. M..de Caumont donne aussi communication à J’as- semblée d’une mesure prise par la Société francaise pour la conservation des monuments historiques , afin d'arriver à Ja formation d’un recueil somplet des inscrip- tions de la France. La Société a décidé : _« De donner une médaille d° or de 209 fr. à ceux qui » auraient recueilli et classé cent inscriptions Le _ » existant en France. , à - » De décerner une médaille de 100 fr. à ceux qui au- » ront réuni les inscriptions d’une circonscri tion équi- » valant à l’étendue d’une province ou d’ur d partement, » soit qu’elles aient été isolément publiées « ou qu ’elles » soient en partie inédites. » M. de la Fontenelle de Vaudoré fait remarquer que M. le ministre de l'instruction publique a annoncé, ? par une récente circulaire , l’organisation d’une commission . formée de membres et correspondants de l’Institut , et dont les travaux doivent savoir le même résultat, Il de- mande si, dans cet état de choses, il n’y aurait pas lieu à laisser au ministre, avec l'impulsion première, le choix des moyens d'exécution, 1 NE TO OR 296 PROCÈS-VERBAUX M. de Caumont répond que depuis longtemps la So- ciélé française a pris linitialive, et qu’en proposant des prix, elle n’a fait qu'activer les travaux recommandés par elle depuis plusieurs années, par conséquent lông- temps avant la circulaire du ministre. Il annonce en outre la prochaine publication de la monographie des inscrip- tions du Calvados , et communique le fac-simile de l’une d’elles qui lui paraît offrir un grand intérêt par son an- cienneté. L'assemblée paraît étatndre; avec M. de Éérnbis. que le but proposé sera plus tôt et plus facilement atteint par les efforts combinés du ministère’et de la Société fran- çaise. : Les ouvrages suivants sont remis à la section pour élre offerts au Congrès par différents membres présents. Par M. Tailliar: | Essai sur l'histoire des institutions des g'reReuE peuples ; : Étude sur les anciennes théocraties. . Par M. de Caumont : por, d’antiquités monumentales, 6° partie ; Revue normande, 2° volume, Par M. Biseul : Mémoire sur les voies romaines de la Bretagne, et en particulier sur celle du M orbihan. Par M. Hedde : : Saint-Étienne ancien et moderne. Par M. Richelet : Le Cantique des Cantiques, traduit de l’ 4m Par M. l’abbé Lacurie : Manuel du jeune archéologue. - La discussion est ensuite ouverte sur la 9° question, ainsi CONÇue : ; «+ Quelles ont été les conséqueitces de l’adjonction de | ° DES SECTIONS. 297 » l'Anjou au royaume d'Aquitaine, formé par Louis-le-Dé- sbonnaire et détruit par Charles-le. Chauve. » "M. Marchégay expose l’état de la question et indique l'existencéide plusieurs documents , dont quelques-uns se trouvent aux archives de la préfecture de Maine et Loire, eb d’où il résulte que différentes portions de l’Anjou étaient annexées au royaume d’Aquitaine vs Louis- le- Débonnaire et Charles-le-Chauve. M. Godard, et M. de la Fontenelle d’accord avec lui, font sg par, pee que la question a été mal posée , , le *'Getté réctification au téxte de la question est admise sans contestation, "M. de la Fontenelle établit aussi qu’une portion seule- ment de l’Anjou, celle de la rive gauche de la Loire, fut annexée à cette époque au royaume d'Aquitaine. . M: Godard ; sans contredire positivement cette asser- tion , mentionne une charte de Pépin [*, roi d'Aquitaine, sous la date de 83%, qui octroye à Dodon, évêque d’An- gers, pour l’église de Saint-Maurice d’Angers, le droit de Tonlieu et d’autres impôts sur la navigation. ‘La discussion étant épuisée sur ce point, on passe à Vexamen de la 10° question : . « Quelle a été la part de l’Anjou dans la résistance qui » a été opposée aux Normands ét dans les calamités qui » ont été la conséquence de leur invasion. » * M. Isidore Lebrun réclame contre la rédaction de cette question. Il pense que la résistance qui fut opposée dans l’Anjou , à l'invasion des Normands, dut être bien faible; puisqu'ils pénétrèrent au-delà de cette province de la Loire. Peut-on absolumeut qualifier de calamités les résultats de leurs i incursions , alors que presque tous les écrivains , qui ont raconté ces événements, apparte- naient à l'institut monastique, qui s’était fait de l’ana- thème une arme ordinaire ; même contre ceux qui ne lui 298 PROCÈS-VERBAUX reprenaient aucun de ses biens déjà immenses, Les pro- grammes de diverses sessions du Congrès, contiennent contre les conquêtes des Normands des questions dont on pe cherche la solution que dans ces chroniqueurs pas- sionnés autant qu'ignorants. Îl serait bien temps que Ja crilique philosophique fàt mieux consultée, M, Lecerf défend les Angevins, dont il reçoit en ce mo- ment un bienveillant accueil, et conclut du reste à mettre de côté dans ce débat toute susceptibilité de race et de personnes. M. de la Fontenelle, entrant dans le fond même de Ja question, donne de sayants détails sur les dévastations commises par les Normands. M. Godard , en preuxe de la terreur qu'ils avaient ins- pirée, cite, d’après dom Jean Huynes, ur répons qui se lisait encore à la fin dn xvn° siècle, au monastère de Saint- Florent, et où étaient décrits les ravages des envahisseurs. Un débat animé s’engage sur le caractère de ces expé- dilions el des inyasions plus considérables qui ont eu lieu soit au IX: siècle, soit au V°, et même antérieurement. MM. de la Sicotière , Freslon , Goguei et Tailliar émettent quelques yues générales et élevées sur le rôle des peuples appelés par la Providence à renouveler les nations, sur l’emploi de la force par les hommes civilisés ou barbares, el sur l'utilité finale de ces guerres , malgré les désastres partiels et temporaires qu’elles occasionneut. Voici les opinions particulières de MM, de Ja Sigotière et Tailliar : M. de la Sicotière croit que l’on a fait trop bon marché des Normands d’autrefois, et qu’on les a trop sacrifiés à leurs successeurs, I ne faut pas s’effrayer de l’épithète de barbares; — elle a élé donnée à Lous Jes conquérants , aux soldats de Rome elle-même, Barbarus has segetes CAT VIRG. -DES, SECTIONS, 299 d,ne faut pas s'effrayer der otage. des prières ou des litanies. irigées contre les Normands envahisseurs ; CPE | est permis à ceux qui souffrent, de se plaindre et de prier; mais les souffrances » même d’une partie de l'humanité, ne,sont pas perdues. pour le Progrès et l'amélioration du reste... TL TA La barbarie F8 Normands du I1X° siècle était grande, sans doute; mais l'était elle beaucoup plus que Ja barbarie . des Francs, des Germains, des Visigoths, des autres peu- plades, qui, elles aussi, avaient conquis une partie du ter- _ ritoire, français , et l’occupaient depuis quelques siècles ? | Quand les Normands enyabirent la France, la popula- tion était dégradée , épuisée. Elle languissait sans courage et sans force. Il fallait du jeune sang à ses vieilles veines. Les Normands le lui apportèrent. C’est l’histoire de toutes les invasions. de barbares. Les ruines qu ‘elles font, à, la différence de celles que fait la civilisalion, sont toujours fécondes ; c’est Châteaubriand qui l’a dit. Ce peuple nou- eau, nouyeau par ses vices , comme par ses vertus, parmi lesquelles se placent au premier rang le courage et le sen- timent de, la dignité personnelle rajeunit , retrempa, celui auquel il. :se mélait. Il n°” y a pas. de peuple pur sang : tous se composent. d’ éléments divers, combinés dans diverses proportions, Ce. que les, Normands gnt fait depuis pour Ja ciilisalion, Lous les siècles et tous les pays le savent, et peurentle dire. -Ruines, pillage , a in meurtres, pendant J'inva- siqn,, voilà ce qu'on ne saurait nier, ce qu’on ne saurait segreiter. Mais ,.dans les vues de Ja Providence, le mal même tourne à bien. Méconnaitre les avantages des invasions mormandes , même au. prix de ce qu’elles ont "SAR e0e serait retrancher à la nationalité française un s éléments les plus actifs et Jes plus puissants; ce se- HN counattre la marche de la civilisation et l’œuvre de la Providence. , 300 PROCÈS-VERBAUX M. Tailliar pense que , malgré les calamités déplorables qui ont marqué l'invasion des Normands dans la Neustrie, leur établissement y a été, en définitive , fécond en resul- tats importants. Quand les sociétés décrépites sont ar- rivées à leur dernier état d’épuisement et d’impuissance, il est-indispensable , dit-il, que des races neuves, pleines d'énergie et de vitalité, viennent les ranimer et les recom- poser. Lors de la chute de l’empire romain d'Occident, et dans les temps qui l'ont suivie, l'Europe vieillie avait besoin d’une renovation complète. La régénération était surtout nécessaire dans la Gaule depuis longtemps éner- vée par la corruption et l’inertie. Parmi les peuples nou- veaux qui vinrent s'asseoir sur les débris de la domination romaine écroulée , les Normands furent un des plus re- marquables. Race intrépide et vigoureuse , ils remplirent l’Europe du bruit de leurs exploits, et fondèrent en divers lieux de puissants états. Sans doute, leurs premières ir- ruptions furent äccompagnées de malheurs effroyables , et les écrivains, qui les retracent , en présentent un af- freux tableau. Mais des calamilés de ce genre sont insé- parables d’une invasion de peuples ‘encore barbares , et quand les vieilles sociétés sont gangrenées par la corrup- tion , il semble que le fer et le feu doivent pour ainsi dire les purifier. Dans la Neustrie , occupée par les Normands, les malheurs de l'invasion cessèrent promptement, Une discipline admirable succéda bientôt aux premiers désor- dres. Les nouveaux venus se mélèrent à l’ancienne popu- lation et la régénérèrent. Un gouvernement sage et ré- paratéur fut établi et fonda d’utiles institutions. Après s'être distingués par leurs exploits dans la guerre, les Normands se rendirent célèbres par leur police, leurs coutumes et leur législation. Les maux, qui avaient mar- qué leur établissement , furent ainsi largement nr 24 par les avantages qui en résultèrent. Différentes questions incidentes sont encore shdtess PROCÈS-VERBAUX 301 p" résolues. par MM. de Cussy, de Caumont et Guinoyseau ère. pres 11° question relative à la part de Anjou dans la conquête del’ Angleterre par Guillaume-le-Bâtard , a yant été: incidemment liée à la 10°, M. de la Fontenelle de Vaudoré entre dans quelques détails intéressants sur la coopération de plusieurs chevaliers, Angevins, et particu- lièrement d'Yves Taillebois ou Talbot, à l'établissement des Normands de France dans la Grande-Bretagne. M. Godard mentionne, d’après le'manuscrit de dom : Jean Huynes et l’Epitome fundationis sancti Nicolai, de , Laurent Lepelètier, plusieurs couvents fondés en Angle- terre par les moines de Saint- Florent et par ceux de Saint-Nicolas d’ Angers... M. le président ajourne l’assemblée à dimanche 5, sept heures du matin, et indique, comme devant être traitées dans cette séance, les premières questions d'histoire et d’ archéologie. pour lesquelles il a été pris des inscriptions. La séance est levée à neuf heures et demie. l Deuxième séance. — Du 3 septembre 1843. Rapporteur : M. MarRCHEGAY, secrétaire. La séance est ouverte à sept. heures un quart. "M. le secrétaire de la précédente réunion donne lecture ts procès-verbal qui est adopté. . Déux mémoires destinés à être lus dans une des séances générales du Gongrès sont présentés par MM, Godard et Victor Pavie. EAC Conformément aux dispositions du L'Er UPA le bu- reau désigne M. Lecerf, pour rendre compte de ces tra- vaux à la section qui doit slatuer sur l’opportunité de la lecture. 302 PROCÈS: VERBAUX L'examen des questions contenues dans ph rc est repris. pre M. le président appelle d’abord la discussion hr célle des questions d'histoire qui porte lé n° 2 él ainsi conçue : « Quel est le lieu où ame pi eus M px fes” voté Mainié?s MM. de Cussy, de la phiténelté et Godard sont des cord pour placer aux Ponts-de-Cé, et plus spécialement à Érigné, le champ dé bataille où le’ chef gaulois a été dé- i pi par le général romain Fabius. 7. b'mbon M. Plbche du" demande qu’il soit. positivement établi quele Juliomagus dé la carte de Peutinger est bien Angers, 5 et non pas N.-D. d'Alençon comme M. Godard l'a insi- nué, en accordant, du reste, une juste importance aux noñi- breuses et intéréssantes découvertes faites dans éette der- nière localité, et notamment à celle d’ün sacelläm qui fait la principale richesse de la collection d’objets anti- ques ARPIERRRE à M. PRES LPIOTRNERES honoraire de la ville. i pe BJ Alençon serait-il le vieil Re , et les exemples signa- lés par divers membres de cités anciennes à côté des villes plus modernes du Mans ; d'Evreuxet de Poitiers, séraient- ils encore augmentés par l’adjonction de la capitale du, Pagus Andegavus? C’ést là une difficulté extrémement grave. Pour la résoudre , il faudrait étudier de la manière la plus approfondie les diverses constructions romaines trouvées lant à Alençon qu ’à Angers. Leur comparaison jeterait des lumières positives sur une question qui pré- sente un véritable intérêt pour. la. -province. Différentes observations sbnt préseñtées par MM. hi- chelet et de la Fontenelle, sur la carte de Peutinger, et sur les difficultés qu’on éprouvé à déterminer la situation des localités indiquées par elle, | M. de la Fontenelle donne des renseignements sur Ja voie romaine conduisant de Poitiers à An et dont là DES SECTIONS. 303 direction est si importante à connaître pour résoudre la question | contenue dans le programme ainsi que celle sou- levée p par M. Plancheaault. Il appelle aussi l'attention des Angevins sur le mémoire relatif aux deux voies romaines conduisant de Zimonum, Poitiers, à J uliomagus, Angers, et à Portus Namnetum, Nantes, présenté pur lui à l’Ins- titutet mentionné très-honorablement par an corps aussi apte à juger de pareils travaux. Néaïrhoins M. de la Fon- ténélle ; désireux de prolitér dés lümièrés que des études spéciales étla cénnaissance du | pays donnent aux érudits Angevins el Bretons, leur soumet son mémoire dont un exemplaire a été offert par lui au Congrès. M. le président désigaë cômmé rapporteurs : MM. Go- dard et Bizeul.. M. Godard s'étant excusé sur ses nom- breuses occupations est remplacé par M. de Béauregardi La séélion passe aux questions d'archéologie , et exa* mine celle qui porte le n° 1. Elle est ainsi conçue : | ‘« Gonnaïît-on les documents certains relatifs aux Mmi- gratlonties peuples anciens sur les côtes de la pt Piac ts eb de la Vendée?» m4 0h: 1410) M: Godard, interpellé par M: le. était dit avoir _relevé un grand nombre de monuments de diverses nata- res (1) et il indique leur situation. Il répond aussi aux questions de MM. de Caumont et Richelet , relatives à l’o- rientation des dolmens. En général ceux qui existent en Anjou, ont leur ouverture du côté du sud-est; Les fouilles praliquées.par M. Godard dans ces dolmens ont amené la Fred d’ossements et de poteries de terre noire. ie * MONUMENTS “CELTIQUES RENE LS au arrondissement de Beaupreau. — Le sur l'Evre, has de Bale Martin-de- Bcaupreau ; un à Saint- Macaire, sur ED) Voy. Bodin, 22 Godard : "L’Anjon et ses niet, De ! Beauregard : Statistique de Maine et pr qu Bulletin du Con- grès Archéologique. dans lAnjou et ses Monuments. 304 PROCÈS-VERBAUX la métairie de la RESNÈTEA un à la Tour- “RAT près du Fief- Sauvio. CRYPTES GAULOISES. — Une près de Montrevault : : elle se com- pose d'un rocher appuyé sur huit autres, formant pour ainsi dire l'orifice d'un puits; à 11 centimètres au- dessous, on a découvert une couche de charbon de bois, puis des ossements d'hommes et d'ani- maux presque réduils en poussière. , D LE] : ES TS RouLers. — Un à Torfou, sur les bords de la. Satis dans le parc de M. le marquis de la Bretesche ( dite pierre tourmière)... : , MÉDAILLES GAULOISES. — (Voir le travail de M. T. Grille, pour (celle trouvée à la Chalouère. ) — Autres médailles découvertes sous un tumulus, sur la ferme de la Muette : elles étaient en or et ont élé vendues à un orfèvre. da . MONUMENTS GALLO-ROMAINS. 4 Un théâtre romain, découvert il y a trois ans sur le boulevard du Château. (M. Godard se réserve de publier un travail inédit à ce su- jet.) — Autre théâtre à Gennes, arrondissement de Saumur, décrit Une discussion s’élève au sujet des amphithéâtres entre MM. Isidore Lebrun, Godard et de la Fontenelle, Il est reconnu que le dessin de l’ancien amphithéâtre romain de Grohan est une restauration très-conjecturale, Celui de Doué est attribué à l’époque mérovingienne et paraît être contemporain de la construction du palais de Dagobert à T'heodiwvadum. Ô La discussion étant épuisée sur ce point d’archéologie , on revient à l’histoire et on examine la 12° question : « Comment la dynastie capétienne, à son avénement, fut-elle accueillie en France , ct notamment'en Anjou? » M. Marchegay donne lecture de notes prises par lui dans les chroniques et les chartes sur le caractère des re- lations entre les premiers Capétiens et les souverains de l'Anjou. Ces documents, inédits pour la plupart, établis- sent que ce dernier pays a élé tour à Lour très-opposé et très-favorable à la nouvelle dynastie. Ceux qui montrent DES SECTIONS. 305 de la répulsion, du mépris même pour les nouveaux sou- verains et. les accusent de lâcheté, sont en plus grand nombre; mais les sentiments qu’ils expriment n’ont pas eu un caractère de durée très-prolongé. De Robert, fils de Hugues-Capet, à Philippe, père de Louis-le-Gros , on voit les comtes d'Anjou prêter appui aux rois de France dans leurs guerres, notamment contre les Normands; recevoir à leur tour le secours de leurs armes contre les comtes de Blois, et enfin lutter contre leur souverain en bataille rangée. ” L’enlèvement de la comtesse Bertrade, femme de Foul- ques-Rechin, ranime momentanément les antipathies déjà atténuées par le temps, et Foulques , animé contre le ri- val qui lui avait été préféré , dit dans une charte que le roi n’occupait pas, mais souillait le trône de France, Du resie la réconciliation des deux princes mit bientôt fin à ces injurieuses qualifications. Le comte se consi- déra comme très-heureux de recevoir à Angers le mo- narque et la belle Bertrade, et:il leur rendit même des honneurs plus grands qu’on n’aurait dû en attendre de lui, . M. Godard cite aussi divers documents imprimés, et notamment la chronique de Richer. Tous confirment les faits avancés par le préopinant et montrent les alterna- tives de bonne et de mauvaise intelligence entre les Capé- tiens et les Ingelgériens. M. Marchegay revient sur les faits établis par les chro- niques comme par les chartes de donation, vente, échan- ge etc, qui fournissent les renseignements les plus pré- cieux, et par leur authenticité et par les détails dans les- | Eva elles entrent. - Il cherche aussi à expliquer les qualifications injurieu- ses des chroniques d'Anjou envers Hugues-Capet et ses. descendants. Pour s’établir d’une manière durable, la nouvelle dynastie a eu besoin du repos que les contempo- Ja À 20 306 PROCÈS-VERBAUX rains nomment de la lâcheté, En prenant au sérieux le titre de roi, et en cherchant à faire cesser l’anarchié féo- dale par la reconstitution du pouvoir monarchique , Hu- gues-Capet et ses fils ne pouvaient manquer de rencontrer une grande opposilion auprès de ceux dont ils devaient peu à peu détruire l’omnipotence, M. Tailliar, dans une brillante improvisation , examine la question au point de vue général ; il discuteiet explique les sentiments que lPavènement des Gapétiens ‘a soulevés chez les diverses populations de l’ancienne Gaule. Le Nord de la Gaule est plus particulièrement tudesque, le Midi a conservé les idées romaines , la fusion des divers élé- mets goulois, romains el germains, s'opère seulemsnt au éentre du pays Aussi, n'est-il pas étonnant de voir l’Aquitaine réclamer des souverains particuliers; les pro- vinces du Nord , surtout celles de l’Austrasie, agir et ré- clamer contre l'abandon de la domination franque , et le pays, situé entre la Seine et la Loiré, se prononcer en faveur d’unë dynastie qui résumait en elle les divers inté- rêts de ses populations ; indépendamment de l'importance que devaient attacher les possesseurs de fiefs, à élever au pouvoir un feudataire comme eux, qui nécessairement devait les ménager. Ge qu’on a voulu surtout, en expul- sant le dernier Carlovingien, a été de se soustraire à uh pouvoir exercé par les Germains de lAustrasie, que sou- tenaient leurs frères restés de l’autre côté du Rhin. L’antipathie qu’excite toujours chez un peuple pénétré de sa dignité; la domination étrangère. est un fait trop constant pour qu’il soit besoin de prouver que les Capé- tiens ont l’origine la plus légitime et la plus nationale. Par ces deux causes, la grande majorité du pays se prononce en faveur de la dynastie capétienne qui, en général , est ainsi accueillie avec faveur. À la vérité, quelques seigneurs, restés fidèles à la cause des Carlovingiens ; combattent d’abord la nouvelle dynas- ES DES SECTIONS. 307 tie. Paëmi eux figurent les comtes d'Anjou ; l'intérêt èt la reconnaissance les rattachaient à la maison carlovingiènne. Geoffroy-Grisegonnelle avait reçu de Lothaire le titre hé- réditaire de sénéchal. Toutefois, lés comtes d'Anjou se rapprochent peu à peu des fils de Huguës-Gafet ; en pos- session du Sheet et finissent : 5e leur prêter Jon con- cours. M. Tailliar examine ensuite comment la dynusite capé- tienne a élé accueillie dans les proviacés dù Nord de la Gaule. Déjà, depuis longtemps, dit-il, et dès 869; à l’époque où Gharles-le-Chauve;, après la mort de Lothaire, son neveu, s’élait emparé du royaüme dé Lorraine ; une violente antipathie avait éclaté sur les bords de la Meuse et de l’Escaut (dans le Cambraisis, notamment); éntre les Lothariens (du parti germanique) et les Gällo-Franks, sujets de Charles-le-Chauve ; désignés par le nom de Kar- liens (Karlenses) V. chronique de Balderic; ch. 53, éd. de Le Glay). Pendant plus d’un siècle, cette ânimosité se perpétue; elle se réveille avec une nouvelle fureur, én 957 et 978,1ors de la guerre entre la Germanie; gouvérnée par Othon IL, de la maison de Saxe ; et les Gallo-Franks, dont le roi Lothaire était soutenu par Hugues-Capet, conte de Paris,.et Geoffroi Grisegonnelle, comte d'Anjou. Lés suér- riers el les partisans de Lothiaire ; antagonistes de la puis- sance teutonique, recoiventencoredu chroniqueur le vieux . nom de Karliens ou celui de Wals ou Gaulois (Balderie, ibid. ; chap. 95 et 96). Lorsque Othen IT, vainqueur, pé- mètre en 978 jusque sous les murs de Paris; ses hostilités paraissent même moins dirigées contre le roi Lothaire que contre Hugues-Gapet, sax à Paris; auquel; par dérision, il fait, chanter du haut de Montmartre le cantique des martyrs. (Balderic, ibid). En 987, après la mort de Louis V, lors de PONTS de Hugues-Capet , les deux , partis germanique et allo-frank sont de nouveau en pré- sence. Dans les provinces du Nord ; tout ce qui tenait au 308 PROCÈS-VERBAUX vieux parti karlien ou gallo-frank , surtout en-decà de l’'Escaut, se déclare pour la dynastie capétienne repré- sentant les idées et les opinions contraires à la domination tudesque. Ge n’est guère qu’au-delà de l’Escaut , dans les provinces flamandes, ou austrasiennes, que l’ancienne dynastie compte encore d’assezrnombreux partisans. Dans ce conflit d'opinions opposées , les chroniqueurs , suivant leurs inspirations personnelles , plus souvent encore selon le lieu qu’ils habitent et l'esprit des populations au milieu desquelles ils vivent, se montrent hostiles ou fa- vorables à Hugues-Capet. Les chroniques de Gemblours, de Ninove, de Saint-Bavon, traitent ce prince d’usurpa- teur. Les chroniques de l’intérieur de la France, no- tamment celle d’Elnone ou de Saint-Amand, se bornent à énoncer le fait, à constater que la race de Charlema- gne cesse de régner, et que Hugues-Capet est élevé au trône. — En Flandre, le comte Arnoul refuse d’abord d’obéir au nouveau roi. Celui-ci, pour se venger, s’avance vers la Flandre, s'empare d'Arras et de tout le pays situé sur la Lys. Arnoul, désolé , a recours à l’intervention de Richard, duc de Normandie, et, par ses bons oflices, obtient de Hugues la restitution de tout ce qui lui a été pris. Dès ce moment, la réconciliation est complète. (D. Bouquet, vol. x, p. 184, et Gr. Chron. de S. Denis, vol. ut, p. 191.) Si, de la part des grands vassaux de la cou- ronne, Hugues-Capet rencontre ainsi de son vivant des résistances plus ou moins vives, elles s’évanouissent pres- que entièrement sous le règne de son fils Robert. Entre la France et la Flandre , les rapports deviennent intimes. Susanne , devenue veuve d’Arnoul le jeune, comte de Flandre, mort en 888, épouse le fils de Hugues-Capet, Robert, roi des Français. (W. d’Oudegherst et la chro- _nique de Saint-Bavon.) En 998, le roi Robert et Bau- duin IV, dit Belle-Barbe, assiègent ensemble la ville de Laon. Plus tard, en 1027, le même Bauduin-Belle-Barbe DES SECTIONS. 809 obtient de Robert, pour son fils Bauduin V (de Lille), la main de la princesse Adèle, fille du roi des Français. Après la mort de Henri Ier, en 1060 , c’est ce même Bauduin, de Lille, qui devient régent de France et tuteur de Phi- lippe 1%. Il s’acquitte de ses fonctions avec autant de zèle que de fidélité (1). Entre l’Anjou et la France les rela- lions ne sont pas moins amicales à partir du roi Robert. Ce fut ce prince qui conféra à Geoffroy - Grisegonnelle, pour lui et pour sa prospérité, la charge de sénéchal. (Duchesne, Rec. des Hisi. de France, vol. IV, p. 328.) M. Goguel réclame contre la qualification de souve- rains étrangers donnée par M. Tailliar aux Carlovingiens. Charlemagne était Germain , à la vérité , et il voulut même étendre l'influence de l’élément tudesque, notamment par la propagation de sa langue; mais, on ne peut voir - au VIIT- et IX° siècles aucun autre caractère national que celui dont les fils de Charles Martel étaient les représen- tants. Charlemagne à toujours habité avec prédilection les bords du Rhin; mais il ne s’y est pas fixé exclusivement. IL s’est beaucoup occupé de la Gaule, proprement dite, dans laquelle il avait de nombreuses résidences. En le considérant comme un envahisseur, comme un souverain étranger, on arrive à donner le même nom aux rois de la première race. L’un de ces derniers, Clovis, est considéré, on le sait, comme le fondateur de la mo- narchie française , que l’on rendrait beaucoup trop jeune, en la rapportant seulement à l’année 987. M. Goguel n’admet pas d’ailleurs la suppression de deux dynasties qui ont donné tant de belles pages à nos anna- les. Il maintient aux descendants de Mérovée et de Pépin- le-Bref, le titre de souverains nationaux, (x) Fait, per magna tempora, regens Franciæ fidelis, Chr, de Cysoing. 310 PROCÈS-VERBAUX Revenant sur ce qui a été dit par M. Tailliar, M. Gognel ne pense pas que l’avènement de la troisième dynastie soit dû au désir qu’avaient les grands feudataires d’aug- menter encore leur puissance sous un pouvoir nouveau et moins redoutable par cela même. Les dues de France, avant leur promotion, élaient les plus puissants de ces feudataires , tandis que le dernier carlovingien possédait à peine quelques villes ou châteaux. Ces derniers devaient donc offrir moins d’ombrage à l’autorité féodale. M. Tailliar répond à M. Goguel et insiste sur la part que la question des races a eue dans la révolution qui a donné à la Gauie française une monarchie ayant ses in- térêts et ses sympathies. Les oppositions individuelles ont disparu. devant le besoin publie, et le temps a effacé celles même qui s'étaient manifestées de la manière la plus énergique, M. Freslon demande qu’on éloigne toute opinion qui tendrait à faire considérer Charlemagne comme conqué- rapt et non comme souverain national, Il le représente comme animé du désir de fonder une monarchie con- forme aux idées romaines rajeunies par le christianisme. Les tentatives du grand homme, bien qu’elles aient eu d’indignes continuateurs, n’en ont pas moins été fécondes en heureux résultais pour.les pays qu’il a gouvernés. M. de la Fontenelle explique le rôle de lPAquitaine dans les événements qui ont suivi la chute des Garlovin- giens. Elle a toujours voulu avoir une existence politique conforme à ses antécédents et à ses imérêts. Aussi a:t-elle fort mal accueilli les Capétiens , dont le chef a, pendant la courte durée .de son règne, été obligé de venir assiéger Poitiers à deux fois différentes. On sait qu’Adalbert de Périgord, auquel Hugues Gapet demandait : « Qui L’a fait comte? » lui répondit :.ç Et toi, qui La fait roi ? » Un mariage entre la famille royale et celle des duos DES SECTIONS. 311 : 4 Aquitaine paraît avair, sinon détruit, du moins modifié beaucoup leur inimitié. La discussion étant épuisée, l’ordre cv jour appelle la reprise des questions archéologiques. > On passe à la 3°, ainsi conçue : & Quels. ont été les résultats politiques de la domina- »tion romaine en Anjou ? » : M. Godard rapporie au XI° siècle l'introduction de l’art Mal it en Anjou. Il attribue la décadence qu’il a éprou- vée, avant son importation en France, aux ravages causés aux VIH£ VER BAUX quelquefois ainsi par dérision la personne même de Notre Seigneur, Mais il ne faut sans doute voir ici qu’une ima- gination bizarre d’erliste , sans pensée sacrilége, Au sujet da symbole de la femme à queue de poisson, qui se rencontre fréquemment, et selon la remarque de M. Etoc Demazy, aux cloftres même de Saint-Aubin (à la Préfecture de Maine et Loire), M. Godard rappelle que, d’après un texte de Saint-Clément d'Alexandrie, le mot IXOTYZ représenterait Jésus-Christ. Tysouc, XpioTos, @eou, Yioc, Zwrnp. Il regarde Ja syrène comme figu- rant, dans les idées d’alors , le bonheur un peu sensuel qu’éprouve le Gentil nouvellement enfanté au christia- nisme , en recevant la céleste nourriture. M. Pabbé Legeard émet une opinion différente. Il pense que la syrène représente la Volupté s’éfforçant de retenir le néophyte que figure le symbole du Poisson. M, de Falloux signale la présence du mot IXOYZ sur des tombelles extraites des catacombes, et déposées au Musée du Vatican Quelques autres points d'archéologie sont successive- ment abordés ou discutés. M. Jolly recommande à lat- tention des Congrès futurs la question curieuse du sym- bolisme des nombres en archéologie. IT serait bon de les étudier spécialement dans leurs rapports avec les ancien- ses religions. M. de la Sicotière entretient l’assemblée des travaux qu’ayait préparés sur ce sujet M. Piel, remarquable artiste Nantais que la mort a prématurément enlevé à sa ville et à la France. M. Godard parle aussi d’X d’une forme toute particu- lière, qui se trouvent sur des briques trouvées à Saint- Rémy-la-Varenne , dans le département de Maine et Loire. Il explique cette lettre par le mot Xp15T06. Il rapporte à ce sujet un passage curieux de Platon , où le philosophe : DES SECTIONS. 343 grec imagine une sorte de trinité divine, et dit en propres termes : la deuxième vertu est en X. M. l'abbé Legeard pense comme M: Godard , que PX signifie PHOTOS: mais il y voit en cure un symbole de la croix. D’autres membres signalent l’existence de la même . lettre sur d’autres monuments , où elle a une signification connue. Mais M. Godard maintient la différence de forme de ces X et de ceux qu'il a découverts. Au sujet de la commune de Saint-Rémy-la-Varenne, M. Jolly fait remarquer que ce bourg est entouré de cons- tructions romaines, et mentionne différents objets qu’il y a trouvés ou remarqués, entre autres une peinture à fresque qui lui paraît représenter l'Eglise payenne fuyant devant l’Église chrétienne, Avant de clore la séance, M. le président appelle à la tribune M, Crépon, conseiller à la cour roÿale d'Angers, qui a bien voulu rédiger le procès-verbal de la séance ex- traordinaire tenue la veille au soir pour la lecture de quel- ques mémoires. Ge procès-verbal est sd pis La séance est levée à neuf heures un quart. Sixième séance, — Du 7 sepiembre 1843. Rapporteur : M. MARGHEGAY, secrétaire. La séance ayant été ouverte à sept heures , le procès- verbal de la dernière réunion a été lu et adopté après queiques reclifications. M. de Beauregard lit un rapport sur le mémoire de M. de la Fontenelle , relatif aux voies romaines de Poitiers 344 PROCÈS-VERBAUX à Angers et à Nantes, Il en adopte en grande partie les conclusions. M. Bromet dépose un travail sur une inscription concer- nant Zizim, frère du sultan Bajazet IL. Il distribue aux membres de la section des fac-simile de cette inscription. La discussion donne lieu de rappeler que ce prince Zizim paraît devoir être compris au nombre des personnages célèbres qui ont été emprisonnés dans le château d'Angers, L'ordre du jour appelle la 22° question d'histoire ainsi concue : « Quelles sont les classes de la société qui ont embrassé » avec le plus d’empressement les idées de la réforme, » dans les provinces riveraines de la Loire? » » MM. Marchegay, Godard, Tuilliar, de Beauregard, Goguel, Lecerf, de la Saussaye, de la Sicotière , Cham- poiseau et Lambron, donnent sur ce point des détails nombreux. Tous s’accordent à dire qu’en général le pro- testantisme a été embrassé par les classes les plus éclai- rées. Adopté d’abord par une partie de la noblesse qui s’en faisait une arme politique, il s’infiltra plus largement dans la magistrature, dans le corps des avocats et des médecins et chez les gens de métier les plus riches. M. Tailliar émet l’avis que ce furent d’abord les classes populaires qui embrassèrent le calvinisme, Calvin, de naissance plébéienne , et, dit-on , fils d’un tonnelier, tient à Poitiers en 1534 ses premiers colloques, donnant ses enseignements à des disciples roturiers comme lui, qui de là vont propager ses doctrines dans les villes riveraines de la Loire , à Nantes, à Angers, à Tours, à Amboise et à Blois. On prétend même que le nom de huguenots fut donné à Tours aux calvinistes , soit du nom de l’une des portes de cette ville, la porte du roi Æuguon , auprès de laquelle ils se réunissaient pour prier, soit parce qu’on les apercevait pendant la nuit errants dans les rues comme les fantômes du vieux roi Âuguet. (V. Comment. de DES SECTIONS. 345 Pierrede la Pluce, iv. 2, p. 34, et Regnier de la Plan- che, p. 26%) [1]. Quand la ville de Genêve , essentiellement bourgeoise et'industrielle , devient ensuite le foyer du calvinisme, c’est particulièrement à l’aide des marchands-voyageurs, des fabricants, des artistes, que les docirines de Calvin viennent se répandre en France, surtout dans les villes populeuses , dans les ateliers , dans les bouliques, où l’on commence à lire, et où se glissent les instructions de Calvin, mullipliées par l’imprimerie alors récemment dé- couverte. (Ÿ, Regnier de la Planche, hist. de l’estat de France et livre des marchands). C’est aussi dans ces gran- des villes que les sociétés secrètes de calvinistes , compo- sées en majeure partie de bourgeois et même de gens d'arts et métiers , ont plus de facilité de se soustraire aux perquisitions de l’autorité (ibid). Plus tard , sans doute, le calvinisme a pour adeptes des personnes de tout rang, dé toute condition ; il compte dans ses rangs des gentils- hommes , des seigneurs, de hauts personnages , des prin- ces du sang FO mais son organisation est toute démo- cratique. (V. Pierre de la Place, ibid, div. 1°", p. 14), et la masse de ses adhérents est dans le peuple. C’est là que sé trouvent én général les prosélytes les plus sincères et les plus dévoués , les vrais huguenots de religion , plus fermes en leur croyance que les huguenots d'état, guidés trop souvent moins par la conscience que par l'ambition ou le mécontentement. (De la Place, ibid, liv. 2 , p. 43.) La fameuse conspiration d’Amboise, dirigée par La Re- naudie , en 1569 , comprend une foule de gens du peuple, des ouvriers endoctrinés , des campagnards alléchés par la suppression de la dîme. En les voyant fuir par bandes devant les catholiques armés par les Guise , quelques fem- Ines des’villages disent que ce sont des pauvres gens qui [1] Édit, du Panthéou francais, 346 PROCÈS-VERBAUX ne valent pas des huguenots, sorte de très petite monnaie du temps du roi Hugues-Capet , d’une valeur inférieure à des mailles ; d’où, suivant une troisième étymologie , vient l'usage de les appeler huguenots, par moquerie, (Mémoi- res Éd Castelnau , Liv. 11, chap. vu). Ce qui à suivant M. Tailliar, achève de démontrer que, sur les rives de la Loire, ce furent les classes inférieures qui s’empressèrent le plus d’adopter la réforme, c’est l'ordonnance d’amnistie rendue à Amboise, par Fran- çois IT, au mois de mars 1559, immédiatement après la conspiration d’Amboise : « À nosire advénement à la cou- » ronne , porte le préambule, nous avons en la pluspart » des provinces de nostre royaume trouvé de grands trou- » bles au faict de la religion tant par la licence des guer- » res passées que par le moyen de certains predicans venus » de Genève la pluspart gens mechaniques et nulle litté- » rature : ek aussi par une malicieuse dispersion de livres » damnez apportez dudit lieu de Genève, par lesquels a » élé infectée une partie du populaire de nostre royaume » qui par faute de scavoir et de jugement ne peut discer- » ner les doctrines. » (Isambert, Recueil des anc. lois francaises, tome 14, p. 22.) M. de la Sicotière dit qu’à Alençon, où régnait Marguerite de Navarre, protectrice des protestants, dont cependant elle ne partageait pas les doctrines , la réforme commenca par le clergé, les magistrats, les officiers civils, les avo- cats, les médecins, les classes les plus éclairées, La no-- blesse se partagea. Plus tard, la réforme s’infiltra dans les industriels et les commerçants. Au reste, il ne faut pas s’exagérer le rôle des fonctionnaires publics dans le pro- testantisme. S’ils figurent toujours les premiers et quel- quefois seuls sur les listes de suspects ou de proscrits, c’est qu’ils étaient plus en évidence que les autres , les premiers signalés aux vengeances ou à la justice du vainqueur. MM. Champoiseau et de la Saussaye excitent vivement DES SECTIONS... 347 ‘intérêt de l'assemblée au récit de, l’importance indus- trielle de Blois et de Tours. Dans la première ville, l’hor- logerie était l’objet d’une grande fabrique et d’un vaste commerce. Chassée par la dau et de l’édit de Nantes, elle s’est réfugiée à Genêye, dont les proscrits ont fait, pour l EE ustrie qu’ils exerçaient, la ville la plus importante du monde. Les faits du même genre que signale M. Cham- poiseau, se rapportent à la ville de Tours et à la produc- * tion de la soie. L'industrie séricicole n’a pas été détruite en Touraine comme celle de l’horlogerie dans le Blaisois; mais elle a recu de Louis XIV un coup dont elle ne se relèvera peut-être jamais, M. Payie amène la discussion sur les conséquences de la dépopulation de la France, et notamment des villes d'Angers et Saumur, par suite de la révocation de l’édit de Mantes Il attaque les chiffres donnés par Miroménil, dans son mémoire sur l’Anjou, et qui sont : pour Angers 50,000 ayant.ct 56,000 après la révocation ; dÉérenee 14,000. — pour Saumur, avant, 13,000; après, 6,500; diffé- rence , 6,500r M. de Beauregard expose le véritable état de cette ques- tion, sur laquelle un long débat s'engage, quoiqu’elle ne soit pas portée au programme, . MM. Lambron, Pavie, Hunault, de Beauregard, Riche- let, Godard, Marchegay, parlent tour-à-tour, les uns contre, les autres pour les chiffres de Miroménil , inten- dant dela généralité de Tours, et dont les chiffres ont.été sans doute Li. d’après le nombre des feux et les rôles des impositions. La section ne conclut pas; mais elle se félicite d’avoir pu provoquer des opinions qui seront des auxiliaires puis- sants pour une décision ultérieure. M. le président donne lecture de la 11° question d’ar- chéologie ainsi conçue : 348 PROCÈS-VERBAUX « À quelle époque a-t-on cessé de brûler les corps » dans les Gaules et particulièrement en Anjou? Détails »sur les sépultures? » Après des communications très-explicites, faites par MM, de la Saussaye, de Caumont, Tailliar, Champoiseau, Godard et l’abbé Legeard, l’assemblée reconnaît que l’ensevelissement des corps a été substitué à l’incinération par le christianisme. Ce fait est rapporté à la fin du IT: siècle, notamment pour la Touraine. M. l’abbé Legeard croit même avoir vu dans le code de Justinien une loi qui défend de brûler les corps. Sans l’usage adopté et proclamé par les premiers chré- tiens, les églises n’auraient pas possédé de reliques. L'opinion du préopinant est confirmée par M. Tailliar. Sans aucun doute, dit il, l’incinération des corps a dû cesser dans les diverses localités de la Gaule, à mesure que le christianisme y a été admis. La religion chrétienne ordonne nécessairement la conservation des corps, puis- qu’elle annonce leur résurrection lors du jugement der- nier, et fait de ce dogme un article de foi contenu dans les symboles. C’est donc en général vers le IV° siècle, époque où la religion chrétienne s’est répandue dans pres- que toutes les parties de la Gaule, qu’on a dû cesser de brûler les corps. La législation est d’accord sur ce point avec les données historiques. Une loi des empereurs Gra- tien , Valentinien et Théodose, portant la date de 586, et insérée au code Théodosien, suppose linhumation des corps, puisqu'elle défend d’enlever les corps enterrés, surtout ceux des martyrs. (V. loi 7 au c. théod., de se- pulcris violatis, liv. 1v, tit, xvu.) Une autre loi, de 357, émanée de l’empereur Gonstance, punit de la peine in- fligée au violateur de sépulture celui qui soustrait un corps ou des reliques. (V. loi 4 au code Justinien, de sepulcro violato, liv. 1x, tit, x1x.) On peut consulter en- core au même code Justinien, iv. 1, tit. 11, de sacro DES SECTIONS. 349 sanctis ecclesiis , la loi 2, par laquelle les empereurs Gra- tien, Valentinien et Théodose, défendent de donner aux corps des simples mortels (kumanis corportbus) la place réservée aux apôtres et aux martyrs (1). La discussion étant épuisée , lecture est donnée de la 12° question d'archéologie ainsi conçue : « À quelle époque remontent des tombeaux en granit » situés à Price près de Laval, et à Coron en Anjou, sur » lesquels on remarque des empreintes représentant des » socs de charrue , des fuseaux , des quenouilles, des bour- » dons, des croix sculptées à la grecque ? Comment expli- » quer ces signes?» Différents détails sont communiqués par M. Godard , sur les cercueils de pierre, dont-on s’est servi dès l’origine. M. de Beauregard fait remarquer que dans les pays granitiques , le granit a été employé, mais dans des pro- portions très-restreintes. Le calcaire coquillier de Doué a été d’un usage pour ainsi dire général. Les tombeaux mentionnés dans la question paraissent assez modernes, et il est probable que les reliefs qu’ils présentent se rapportent à la profession ou vocation du défunt, La 15° question d’archéologie est encore relative aux sépultures, elle demande : « D'où vient la coutume jusqu’au XVIIe siècle , de : 54 » cer des vases pleins de charbons dans l’intérieur de cer- » tains tombeaux ? » Différentes opinions sont développées par des membres de la section. M. de Gaumont donne des renseignements sur cet usage d’après les textes très-explicites de Guillaume Durand. Le charbon contenu dans un vase grossier, et percé (1) V. au surplus une brochure intitulée : De l’Origine de la cremation où de l’usage de brûler les corps. Paris 1821, in-8°. 350 PROCÈS-VERBAUX avec un instrament aigu, était enflammé lors de son dé- pôt dans le cercueil. Il servait à opérer la éombustion de l’encens. On a trouvé des feuilles de lierre et de lau- rier dans les tombeaux, notamment à l’Evière , près d’An- gers, et en Poitou, à Saint-Pierre-les-Eglises, à Civaux et Antigny. L’encens paraît avoir eu pour but d’éloigner le démon de la dépouille mortelle. Cétte déstinatiôn est encore établie par la présence dans les mêmes tombeaux de fioles qui contenaïent évidemment de Peau bénite. L'usage, dont il a été parlé, semble avoir commencé au XI: siècle; il a duré jusqu’au XVIIe La première de ces dates, correspondant avec celle des plus anciennes mentions de sorciers et de sortilèges dans les actes des conciles, M. Champoiseau pense que cette pratique a été admise pour éloigner les maléfices. Il cite des téxtes, et voudrait voir son opinion adoptée par la section, Néanmoins elle ne se prononce pas à cet égard. Diverses questions et explications sont adressées äu sujet de sépultures trouvées à l’Evière , dans la propriélé de M. Mamert-Coullion , et qui sont mentionnées ci-des- sus. La section décide qu’elle répondra à l’invitation de ce dernier, en visitant les curieuses antiquités dont il veut bien lui-même lui faire les honneurs. La 24° question d’histoire est mise à l’ordre du jour, Elle est ainsi concue : « Quelles furent les principales éauses de la destruction de la Ligue en Anjou, et spécialement quelle influence exerça sur ce fait le mariage de César de Véndôme avec la fille da due de Mercœur ? » M. Godard croit que cette union a été l’une dés éauses qui ont le plus contribué à la dissolution de la ligue. H cite le contrat de mariagé de César de Vendôme, publié par lui d’après l'original appartenant à l'étude de M. R. Pachaut , notaire à Angers. On passe à la 30° question d'histoire : DES SECTIONS, 354 « Quelles sont les améliorations qui ont été produites par les élats provinciaux, depuis Louis XT, jusqu’à la Révolution francaise? » L’attention de l’auditoire suit M. Tailliar, avec le plus vif intérêt, dans les développements avec lesquels il ex- pose l'influence des états provinciaux sur les finances, l'industrie, les douanes et l'agriculture. On sait, dit-il, qu’il existait autrefois quelques provin- ces privilégiées où il était tenu périodiquement des assem- blées particulières formées des députés des trois ordres, et sans le consentement desquelles il ne pouvait être levé ni impôt ni subside. Ges provinces, originairement plus nombreuses, étaient en dernier lieu la Bourgogne , le Languedoc , le Béarn , la Bretagne et l’Artois. Les états de la Flandre Wallonne avaient une forme particulière. Dans les actes de réunion à la couronne ou dans les capitulations , il avait été stipulé, en faveur de ces pro- vinces, qu’il n’y serait fait aucune imposition ni levée de deniers sans le consentement des étais, On les appelait en conséquence pays d'états. Antérieurement à la Révolution , on voit dans chacune de ces provinces les états, périodiquement convoqués , se réunir, afin de déterminer les espèces d'impôts, d’en ré- gler la répartition et le recouvrement. Pour en faciliter la perception, et alléger le poids des subsides qu’il s’agit d’acquitter, il est évidemment de l’in- térêt de ces assemblées, d’accroitre la prospérité des finances , d'augmenter autant que possible la richesse so- ciale , en favorisant ses trois principaux éléments , lagri- culture , l’industrie et le commerce. C’est le plus ordinai- rement sur ces lrois poinis que se porte la sollicitude des étals. 1° Quant à l’agriculture, ils s’efforcent d’en augmenter les produits par des défrichements et dés desséchements. Par leurs soins , ou grâce à leurs encouragements, les ter 352 PROCÈS-VERBAUX res stériles, les landes couvertes de broussailles sont li- vrées à la culture, et se couvrent de moissons. Des marais considérables sont desséchés; des plaines noyées sous les eaux sont mises à sec, et bientôt sillonnées par la char- rue (1); 9° L'industrie, qui façonne et met en œuvre les pro- ductions du sol, reçoit également des états une protection salutaire. Dans les grandes villes, les fabriques , les ma- nufactures sont favorisées ; dans les provinces où il existe des douanes spéciales , les prohibilions ou les tarifs sont combinés de manière soit à augmenter la consommation intérieure , soit à procurer à la fabrication d’utiles débou- chés. Si les douanes royales sont trop onéreuses, les états signalent les abus de droits exorbitants (2) ; 3° Le commerce, qui livre à la circulation le résultat des travaux de l’industrie , n’altire pas à un moindre de- gré l'attention des états provinciaux. Pour faciliter ou accélérer le transport des marchandises, ils s’attachent à lui ouvrir des voies de communication, et surtout à améliorer les chemins alors trop souvent impraticables. Pour leur réparation, ils règlent les corvées auxquelles sont assujettis les habitants des communes, Sous un autre rapport , le contrôle vigilant des états, sur tout ce qui concerne l’administration des finances , introduit tout à la fois plus de régularité dans le manie- -ment des deniers publics, plus d'ordre dans la comptabi- (1) V. notamment l'arrêt du conseil du 20 décembre 1701 pour les desséchements des étangs, paluds et marais du Bas-Languedoe, et les lettres patentes obtenues en 1779, par les états d’Artois, pour le défrichement et le partage des marais de la provinée. (2) V. l'ordonnance de Charies VIL, du 8 juin 1456, rendue sur les doléances des états du Languedoc, art. 27 (ordonnances des rois, in-folio, t. x1v, p. 387. Isambert, rec. des anc. lois françaises , t, 1x, p. 278). DES SECTIONS. 353 lité, plus d’exactitude et de fidélité dans les agents comp- tables. Les états ont encore quelques attributions spéciales , et s'occupent d'objets divers qui intéressent la province. Si des abus existent , ils les signalent aux commissaires du roi placés près d'eux: si la législation ou les coutumes exigent quelque réforme, ils adressent au roi leurs récla- malions à ce sujet. Leurs résolutions sont consignées sur des registres. Laséance est levée à neuf heures et demie. MM. les membres de la section sont convoqués pour la réunion extraordinaire qui aura lieu ce soir à neuf heures pour la lecture des mémoires de M. de Brière et de M. l'abbé Lacurie. Séance supplémentaire du 7 septembre 1843. Rapporteur : M. Dr Cussy. A sept heures, la séance est ouverte sous la présidence de M. Fabbé Lacurie. La parole està M. de Brière ; pour l’exposé de sa théo- rie sur les hiéroglyphes égyptiens. L’orateur prétend que la langue hiéroglyphique ou sacrée était du domaine exclusif des prêtres , qui n’ad- mettaient à son interprétation qu’après toutes les épreuves d’une sévère initiation. M. de Brière donne ensuite quelques détails rapides sur | la théogonie de l'Égypte, ainsi que sur les sciences occul- tes , l'astrologie et la magie, Il conclut , en rejetant de la manière la plus positive, les prétentions des savants qui ont cru pouvoir lire les hiéroglyphes. Leur énseignement est Sans base aucune ; et Par conséquent complétement faux. Après celte théorie , qui à paru exciler l'attention de TL. 23 354 PROCÈS-VERBAUX l’auditoire, M. de Cussy prie M. de Brière de lui permet- tre de faire quelques objections à ce systéme, qui remet en question l’état actuel de nos connaissances sur la matière. Disciple de l’école de Champollion , il demande au préopinant comment il réfute ce qui semble établi et acquis aujourd’hui, relativement au sens et contenu de l'inscription trilingue de Rozetti : le puissant et'si remar- quable résultat de la découverte de la table d’Abydas , qui illumine si bien la chronologie de Manethon; enfin com- ment, après toutes les épreuves auxquelles a été soumise la méthode de Ghampollion , il peut en établir la fausseté. M. de Gussy prétend qu’il faut autre chose que de sim- ples assertions , quelque consciencieuses qu’elles puissent ètre d’ailleurs , pour déclarer sans nulle autorité lensei- gnement d'hommes tels que Le Tronne, Raoul-Rochette, Pireoh : Rozellini et autres. Une discussion pressée s’engage. M. de Brière essaie de répondre à une partie de ces observations , et ainsi qu’il arrive trop souvent, chacun des adversaires persiste dans ses réserves. La séance est levée à huit heures trois quarts. Septième séance. — Du 8 septembre 1843. Rapporteur : M. De Lens, secrétaire. La séance s’ouvre à sept heures un quart, sous la pré- sidence de M. Gauvin. M. de Gussy lit le procès-verbal de la séance supplé- mentaire tenue le jeudi soir, pour entendre un mémoire de M. de Brière. Après cette lecture, M. de Brière sont à l’assemblée, pour éclairer la discussion soulerée la veille, irois ta- bleaux autographiés, dont l'un contient le résumé de sa DES SECTIONS. 355 méthode-hiéroglyphique. Le dépôt de ces pièces est or- donné , et le procès-verbal adopté. M: de Vielbanc expose aux yeux des membres une pierre qu'il regarde comme celtique, et sur laquelle il croit trouver un hiéroglyphe. Il est admis à lire les conclusions d'une lettre qu'il a adressée sur cet objet à la société de statistique de Niort. La section ne paraît pas partager ses opinions. : oh M. Marchegay dépose sur le bureau, pour être offert au! Gongrès , les vingt-quatre premières feuilles d’un vo- lume , intitulé : Archives d'Anjou, Recueil de documents etmémoires inédits sur cette province. L’impression de ce volume, publié sous les auspices du conseil général de Maine et Loire, n’est pas encore terminée. La section re- coit avec empressement les prémices de cette curieuse publication. + On passe à la discussion de la 32° question d’histoire ainsi conçue : _« Quels ont été en France et en Angleterre les diocèses » dans lesquels les abbayes situés en Anjou ont eu des » prieurés ou autres dépendances ? Quelles sont les abbayes » situées en-dehors de PAnjou , qui ont possédé des mai- .» sons dans cette province ? » M: Cauvin communique une note statistique sur les établissements du diocèse du Mans, qui relevaient d’ab- bayes établies dans celui d’Angers. Cette note est-renvoyée à la commission centrale, qui sera invitée à en ordonner l’impression dans le compte-rendu général. M: Marchegay indique les dépendances qu'ont eues, dans d’autres provinces, diverses abbayes d'Anjou, et cite ün travail complet sur celle de Saint-Florent , qui se trouve dans le cartulaire ou livre rouge de cette communauté, La discussion est ensuite appelée sur la 15° question d'archéologie, qui traite des costumes d'hommes et de femmes dans les trois classes des villains, bourgeois ct 356 PROCÈS-VERBAUX nobles ou seigneurs, du XIe au XV° siècle , ainsi que du costume des gens de gucrre à la même époque. MM. Godard , Marchegay, de la Saussaye et Lambron, signalent les moyens de vérifier et de compléter les des- criptions nombreuses et assez exacles de ces costumes qui se trouvent dans divers ouvrages, notamment dans celui de Montfaucon. | … On revient au programme d'histoire et à la 19° ques- tion ainsi cOnÇue : | « Déterminer les résultats que l'institution des parle- » ments en France a pu avoir sur nos institutions ? » Une discussion aussi intéressante que profonde s’engage à ce sujet entre MM. Lecerf, Tailliar, Champoiseau , de la Fontenelle, de Falloux et Planchenault, MM. Goguel, l’abbé Legeard et Lambron, y prennent part occasionnel- lement. M. Lecerf dit que, pour apprécier l’effet que les parle- ments ont produit sur nos institutions, il est nécessaire de fixer d’abord comment et pourquoi ils ont été établis ; quel pouvoir et quelle autorité leur ont été confiés; et comment ils ont exercé leur pouvoir. Avant Philippe-le-Bel , il existait auprès du roi un corps nommé et choisi par lui pour l'aider de ses conseils dans toutes les matières qui se rattachent au gouvernement, comme politique, administration, finances, etc., et qui aussi jugeait les contestations. Philippe-le-Bel ne voulut pas conserver ce corps que l’on appelait conseil , ou cour du roi. Il convoqua les Etats- Généraux; il créa un nouveau conseil du roi; il établit une cour des comptes ; enfin, il établit un corps judiciaire qui prit le nom de parlement, et qui fut uniquement chargé de juger et de rendre la justice au nom du roi. Il n’y eut d’abord qu’un seul parlement , celui de Paris. Depuis, on en établit plusieurs dans les provinces. Tant que les Etats-Généraux furent convoqués à des DES SECTIONS. 357 époques plus ou moins rapprochées, les parlements se renfermèrent dans leurs fonctions de juges , et, dans ces fonctions , ils rendirent des services éminents à l'Etat, et contribuèrent beaucoup au développement de l’ordre, de l’harmonie et de l’unité dans les institutions de la mo- parchie francaise, en détruisant l’usage et les abus des juridictions seigneuriales , et en rendant uniformes l’exé- cution et l’application des lois dans tout le pays. Mais, lorsque l’on cessa de convoquer les Etats-Gé- néraux, et principalement depuis 1614, dernière con- vocation avant la convocation de 1789, les parlements voulurent s’immiscer dans les matières de politiqne , d’ad- ministralion et de finances: ils prétendirent représenter les Elats-Généraux , se constituer les gardiens et les dé- fenseurs de la liberté publique , contribuer avec le pouvoir royal à la confection des lois , connues alors sous le nom d’ordonnances , d’édits et de déclarations. Cette prétention des parlements n’était fondée sur au- cune loi positive , sur aucune charte. Jamais ils n’avaient été élus par le peuple ni recu aucuns pouvoirs ; jamais la couronne ne leur en avait donné sur ce point, et l’on doit reconnaître, en raison et en principe , que la conservation des libertés publiques ne peut appartenir qu’au peuple lui-même, ou à ses délégués, ou aux corps légalement constitués et reconnus , qui forment le gouvernement. Ainsi, par exemple, en France aujourd’hui c’est au roi el aux deux chambres réunies que ce droit appartient exclusivement. Ils peuvent avoir des surveillants; mais ils ne peuvent avoir d'autorité rivale , ayant un pouvoir certain et déterminé. Lorsque les parlements ont voulu exercer ce pouvoir politique, législatif, ou opposant, ils ont cessé de contri- buer au développement et à l’amélioration des inslitutions de la France, et même on peut dire qu’ils ont mis des obstacles à ce développement et à cette amélioration. _ L 358 PROCÈS -VERBAUX Grâce à nos institutions actuelles qui fixent d’une ma- nière posilive l'étendue et les limites des trois grands pouvoirs constitutifs d’un Etat, le pouvoir législatif, le pouvoir exéculif et le pouvoir judiciaire, on n’a plus à redouter ces excursions et ces empiétéments d’un pouvoir sur l’autre , et chacun peut se livrer, dans sa sphère d’ac- tion , à la conservation, au développement et au perfec- tionnement de nos institutions, M. Tailliar pense que les résullats de l'institution des parlements peuvent être examinés à une double époque et sous un double point de vue. Depuis les premiers rois de la troisième race jusqu’à Louis XI, qui rend les mew- bres des parlements inamovibles, ces compagnies , insé- parables de la royauté dont elles ne sont que les organes, confondent leur existence avec la sienne, lui subordon- nent leurs actes et leurs intérêts, et travaillent avec ar- deur à consolider, à étendre le principe d’ordre que re- présente la monarchie. Depuis Louis XI, les parlements, cessant d’être exclusivement au roi , constituent des corps judiciaires distincts, s’attribuent une autorité indépen- dante de celle du gouvernement , et se prétendent même uniques dépositaires des droits du pays en l’absence des Etats-Généraux. Ils agissent alors le plus souvent dans l'intérêt du principe de liberté. L'influence des parlements s’exerce donc successive- ment de deux manières et dans deux sens différents : Dans la première période, antérieure à Louis XI , sur- tout jusqu’au règne de Charles VI, les parlements ne font qu’un avec le monarque, n’existent que par lui et pour lui. Etant ou pouvant être renouvelés à chaque ses- sion , leurs membres , simples délégués temporaires de la royaulé , rétribués par elle, constamment à sa merei , ne sont que ses instruments et ses collaborateurs, et n’ont pas de pouvoir qui leur soit propre. C’est elle qui juge et prononce par leur avis. Jusqu'à Philippe-le-Bel, qui en DES. SECTIONS. 359 1302 fixe à Paris le parlement, celui-ci, ambulatoire comme le monarque, le suit partout où il se rend , parce que toute justice émanant directement du roi, là où est leroï, là. doit être sa cour dé justice. Gette dépendance, eb.est le parlement de la royauté, ne cesse pas après Phi- _ lippe-le-Bel , bien que ce prince l’ait rendu sédentaire à Paris. En 13442, on voit Philippe VI, par une ordonnance du 8 ayril de cette année , ordonner qu’à la fin de chaque session une commission , formée de personnages qu’il in- dique, lui désignera Les plus suffisants pour le prochain parlement, (/sambert, Recueil des anciennes lois fran- çaises , tome 1v, p. 466.) Ænhérents.de la sorte à la royauté.avec laquelle ils s’iden- tifient , les magistrats n’ont en vue que l’affermissement.et l’augmentation de son autorité. Ainsi : 2° Versés dans l’étude du droit romain , ils appliquent à la monarchie française les principes du despotisme im- périal de Théodose et de Justinien. Ils proclament que le souverain ne relève que de Dieu et de son épée, et de la règle latine quod principi placuit legis habet vigorem, ils déduisent la maxime : Sc veut le roi, si veut la loi ; 2° Ils accréditent et maintiennent le principe, que tout sujet.du roi, lésé par un jugement , peut en appeler à sa cour, et par ce moyen subordonnent la puissance des grands vassaux à celle du monarque; 5° En s’interposant dans les contestations entre les sei- gneurs d’une part, les églises, les monastères ou les communes de l’autre, ils énervent par degrés la féodalité ; 4° En, siégeant dans la cour des-pairs, dont ils ne tardent pas à former la majorité, ils supplantent par degrés cette haute cour féodale : 5° En multipliant successivement les cas royaux, c’est- à-dire les crimes et les délits qui doivent ressortir des ju- ridiclions royales , ils diminuent et affaiblissent d'autant les juridictions seigneuriales. 360 PROCES-VERBAUX C’est de la sorte, que, pendant cette première période, les parlements, de concert avec la couronne, portent jusqu’à l’exagération le principe d’ordre qui envahit et absorbe toutes les autres institutions. Néanmoins , ils ne se mêlent pas des affaires de l’Etat, et ne sortent guère de leurs attributions juridiques, qu’ils excéder dudit au nom de la royauté. Pendant la seconde période, à partir de Louis XI, les parlements prennent d’autres tendances , un autre carac- tère. Déjà, sous Charles VI, par l’effet de l’anarchie du temps, on avait omis de renouveler leur membres chaque année , de sorte qu’ils s’élaient perpétués dans leurs char- ges, sauf à recevoir par intervalles une nouvelle institu- tion (1). Néanmoins , sous ce règne , tandis que l’univer- silé se montre et intervient dans la plupart des hautes questions politiques (2), le parlement reste presqu’entiè- rement dans l’ombre. Peu à peu , cependant, il se détache de la royauté, et se produit de lui-même sur la scène du monde. Une sorte d’émancipatlion progressive le conduit par degrés à l'indépendance et à l’autorité, Les oflices de judicalure , laissés aux mêmes magistrats, deviennent, pour ceux qui en sont revêtus, une espèce de possession que le temps légitime. Malgré toutes les ordonnances con- traires, ils se transmeltent secrètement par des cessions ou par des trailés. En 1467, Louis XI déclare les membres des parlements inamovibles. Plus tard, dans les besoins pressants de l'Etat, de nouvelles charges de judicature, créées et vendues par le roi, donnent aux titulaires le droit d’en disposer. Alors , les magistrats, à la fois inamo- vibles et propriétaires de leurs offices , relèvent tout à fait (4) V. lettres du 22 juillet 1418 portant institution nouvelle des membres du parlement (ordonnances des rois, t. x, p. 459). (2) V. la Chronique de Charles VI, du religieux de Saint-Denis, pu- bliée par M. Bellaguet (dans la collect. des documents inédits ‘sur l'Histoire de France). EE DES SECTIONS. 361 la têtes Ce ne sont plus les humbles serviteurs de la royaulé, ce sont des juges souverains qui agissent dans toute! la plénitude de leur volonté. Prenant à l’égard de la royauté une attitude nouvelle , ils s’ingèrent même dans l'exercice de la puissance publique, et se prétendent les gardiens de la liberté , les tuteurs des rois et les défenseurs du royaume. On les voit alors : +19 S’attribuer le droit d'adresser des remontrances à la couronne ; -29 Subordonner l’exécution des lois et ordonnances à leurenregistrement préalable ;° 4° .: 3° Prétendre remplacer les Etats-Généraux dans lin- tervalle des convocations. Le droit de remontrance et le droit d’enregistrement naissent de l’usage où est le gouvernement d’adresser aux parlements les nouvelles lois et ordonnances, afin de les vérifier, et de les faire transcrire sur leurs registres. Get examen n’est pas considéré comme une vaine formalité par plusieurs cours , surtout par celles qui ont intérêt à repousser des innovations contraires à la législation locale. Ces mêmes droits se consolident et se perpétuent par les fautes de la royauté. Au milieu du désordre, il arrive fré- quemment , que , par faveur ou importunité , on oblient du roi des lettres contraires au bien du royaume , des dons immodérés , d’imprudentes aliénations du domaine. Pour remédier à ces abus, interviennent des ordonnances qui défendent ‘aux parlements d’avoir égard aux ordres ou autres lettres subreptices de ce genre. De Rà encore, pour ces cours, en vérifiant les lois et les édits, l’habitude d’adresser des remontrances à leur occasion , et même de refuser leur enregistrement, si elles y trouvent des dis- positions repréhensibles. Quant aux édits bursaux, unc ancienne tradition voulait qu’il ne püt être levé d'impôts ni de subsides sans le consentement des Etats-Généraux. Lorsque de pareils édits doivent être portés , le gouver- 362 PROGÈS-VERBAUX nement, toujours pressé d’argent, aime mieux se hâter de les soumettre aux parlements que de subir les lenteurs et les chances incertaines d’une convocation des Etats. Les parlements deviennent ainsi les remplaçants des as- semblées nationales, résistent surtout aux mesures par trop fiscales , et se trouvent par suite entourés de popu- larité comme défenseurs des droits et des intérêts du pays. Dans leur opposition, ces compagnies n’usent pas tou- jours de la modération convenable. Dans les derniers temps, elles poussent parfois jusqu’à l’insubordination le principe de liberté, comme elles avaient jadis porté le principe d'ordre jusqu’à la servitude. M. Tailliar pense, du reste, avec M. Lecerf, qu’au- jourd’hui l’existence de lois constitutionnelles et léquili- bre maintenu entre différents corps, dont les attributions sont définies, s’oppose au renouvellement de ces abus et à la prédominance exclusive soit du principe d'ordre , soit du principe de liberté, c’est-à-dire au despotisme et à l’anarchie. | M. l'abbé Legeard s’élève contre ce qu’il y a d’un peu systématique dans la manière dont M. Tailliar a divisé les efforts des parlements en faveur des deux principes. À toute époque , les parlements ont agi tour à tour en fa- veur de l’un et de l’autre principe. M. Goguel et M. Champoiseau estiment qu’en l'absence des Etats-Généraux , les parlements étaient les dépositai- res naturels des libertés publiques; ils ont servi la France par leur lutte contre les abus du pouvoir royal. M. Lecerf fait observer qu’ils n’étaient et n’ont pu être les défenseurs légaux des libertés publiques , et qu'il ya toujours danger à en confier le dépôt à un seul corps. M. de la Fontenelle soutient qu’il n’y a pas eu de la part du parlement usurpation de pouvoir, le roi présen- tant lui-même les édits à l’enregistrement. M. de Falloux pense que les parlements n’ont pas été DES SECTIONS. 363 seuls les gardiens des libertés publiques : le peuple ou Pesprit français, et le pouvoir royal lui-même, les ont quel- quefois fait prévaloir sans le parlement et même contre le parlement. L’orateur ajoute que les parlements sont morts d’un excès de pouvoir, comme le despotisme lui- même. M. Planchenault dit qu’on s’est trop préoccupé, dans ce débat , des temps présents et des institutions actuelles ; qu'avant la Révolution française , il n’y avait, en fait, qu’an seul pouvoir, le pouvoir royal, agissant à l’aide d’auxi- liaires, qu’il consuitait selon son bon vouloir, les Etats- Généraux et les parlements. M: de Falloux conteste que l’on doive placer sur la même ligne les Etats-Généraux et les parlements ainsi que les genres divers de concours que le roi leur deman- dait. Le roi consultait les Etats-Généraux, pour se con- former à leur avis; mais, en recevant les remontrances des parlements, il se réservait de passer outre, et de les faire coopérer à l'exécution de ses volontés , s’il n’en était pas salisfait. M: Planchenault répond qu’il n’a pas voulu établir en- trees parlements et les Etats-Généraux une parité d’ori- gine et d’attributions. Après quelques autres observations sur le même point, M: le président indique une séance supplémentaire pour sept heures du soir, et annonce qu’une promenade ar- chéologique va avoir lieu à Saint -Serges et à l'Hôpital Saint-Jean , sous la conduite de M. Godard. La séance. est levée à neuf heures. Séance supplémentaire du 8 septembre 1843. Rapporteur : M. CRÉPoN. A la séance du 8 septembre, la section d'histoire et d'archéologie, pour continuer ses travaux , ét notamment 364 PROCÈS-VERBAUX pour entendre la lecture d’un mémoire présenté par M. l'abbé Lacurie, membre de son bureau , annonce et fixe une séance supplémentaire à six heures et demie du soir, | L'ordre du jour appelle la lecture du travail de M. l’abbé Lacurie, qui a pour objet un plan de travaux et de consciencieuses investigations pour l’histoire générale de France , se composant des mémoires et histoires partiels de chaque ville ou province du royaume. Ce mémoire est écouté avec un vif intérêt, et renvoyé à la commission permanente de rédaction pour l’atiliser dans ses travaux du compte-rendu. … À cette occasion, M. le président, en manifestant toute l'approbation qu’il donne aux idtes de M. l'abbé Lacurie, fait connaître à l'assemblée, qui ne le sait peut-être pas assez, que le travail proposé est l’objet des soins et des efforts de institut des provinces, l’une des ramifications du Congrès scientifique, qui s’occupe exclusivement de celte tâche , a déjà recueilli de précieux matériaux ; et désire ardemment que les hommes d’étude et de science des provinces de l’Ouest, et particulièrement du dépar- tement de Maine et Loire, ne restent pas étrangers au résultat que le pays attend de ce qu’ils voudront bien étu- dier et écrire sur l’histoire de leurs localités respectives. L'ordre du jour appelle la discussion sur la 34° ques- tion d'histoire , ainsi posée au programme : « Quelle a été la conduite du clergé envers les serfs de » différentes conditions ? » Quelles qu’aient été contre le christianisme, dit M. Tail- liar, les préventions de quelques esprits orgueilleux ou égarés , et leur déplorable insistance à nier ses bienfaits, il est impossible de méconnaître quels services immenses la religion chrétienne a rendus à la liberté humaine, et combien le clergé catholique a été favorable à l’émanci- palion des serfs. Qu'on parcoure les histoires et les-re- DES SECTIONS. 365 cueils où se trouvent des documents qui concernent l'Eglise, on verra quelle multitude d’actes ils renferment dans le but de libérer des individus et même des familles entières des liens du servage. Grâce à l'esprit du christia- nisme ; aux généreuses inspirations du clergé , aux con- seils charitables qu’il donne aux laïques , chaque jour, au moyen-âge , de bienfaisantes dispositions, soit par actes entre-vifs, soit par testaments, viennent rendre des serfs à la liberté. Les collections de formules , celles qui ont été rédigées ou publiées par Marculfe, Sirmond , Bignon et Lindebrog , abondent en actes de ce genre : « Notre pieux Seigneur J.-C. (porte-un acte d’affran- » chissement émané en 1112 des chanoines de Saint-Laud » d'Angers) a voulu avec un amour paternel le salut du » genre humain. Entre autres préceptes qu’il a donnés à » ses fidèles, afin qu’ils puissent acquérir les joies de la » vie éternelle, il leur a recommandé de délier leurs dé- » biteurs de leurs dettes, afin qu’au jugement suprême » de leurs fautes, ils puissent eux-mêmes espérer leur 5 pardon. C’est pourquoi, excilés par l’espoir d’une si » importante récompense , et animés par la grâce et les »‘prières de la dame comtesse Ermengarde, nous, cha- » noines de Saint-Laud , délivrons de toutes les charges » inhérentes à la condition de serf notre fidèle Raoul, etc.» "(V. Baluze, capitularia regum , etc., tome IT, col. 946) [1]. "M. de la Fontenelle de Vaudoré appuie Popinion de [1] V: au liv. IT de Marculfe, les formules 32, 33, 54 (dans Baluze, teur, col. 423,424), à Raptlatiide de Märculfe la fcinie 13 (ibid, col. 444), la ‘AE formule de Sirmond, col. 475, la première form. de Bignon, ibid, col. 495, et parmi les die Ha par Lindenhroe les ns 91 et suiv. AL 538 : en remontant plus haut dans l’histoire on voit, dès le vi° siècle, l'émancipation des esclaves regar- dée comme une recommandation à l'estime publique, comme un su- jet de gloire. Ainsi une inscription tumulaire, rapportée par M. de 366 PROCÈS -VERBAUX M. Tailliar, en ce qui concerne notamment la province du Poitou , et fait connaître que la maîtrise des religieux était tellement douce et paternelle, que bien des serfs ne voulaient pas échanger leur position contre l’état de li- berté sous les seigneurs et barons. Il existe des Re sur ce point historique. M. l’abbé Legeard, cite aussi grand nombre de faits qui corroborent les dires des deux préopinants : Dès le VII: siècle, les moines grecs n’avaient point d’esclaves ou de serfs , à la différence des moines latins. D’après la loi des Allemands, au VII: siècle, les serfs de l'Eglise rendaient une partie des fruits , ordinairement, la dime; ils travaillaient la moitié de ia semaine pour l'Eglise, l’autre moitié pour eux, et à leur profit. L'Eglise avait aussi des sujets libres, nommés colons. (Fleury, liv. xxxvur, n° 16.) Au VIT: siècle, défense de vendre aux payens des es- claves chrétiens. Au IX: siècle saint Benoît, d'Amiens , recevait des ter- res, mais non pas les serfs qui y étaient incorporés; il les faisait mettre en liberté. Charlemagne , par un capitulaire publié à Thionville, en 805 , ordonne que l’on ne reçoive pas dans les monas- ières trop de serfs de l’un ou l’autre sexe, pour ne pas rendre déserts les villages; donc , ou ils étaient pro justo affranchis, ou bien la servitude devenait plus douce. Un concile de Mayence , en 813, et d’autres, ordon- nent de ne donner la tonsure aux serfs que du consente- ment des maîtres. Le concile de Chälons , en 813, porte que le mariage Caumont, et qui date de 510 ou de 532, signale parmi les titres d’é- loge d’un personnage distingué (Mannebeube), celui d’avoir rendu à la liberté plusieurs esclaves, ( V. rapport verbal sur les antiquités de Trèves et de Mayence, dans le Bulletin monumental de la société Francaise, t. vr.) DES SECTIONS. 367 des serfs ne doit point être rompu, encore qu'ils appar- tiennent à différents maîtres, pourvu qu’ils se soient ma- riés de leur consentement et suivant les lois. Au XII: siècle, l’an 1102, concile de Londres, qui porte défense de vendre les hommes comme des bêtes. Le pape saint Grégoire affranchit en un jour tous ses esclaves , en disant : Comme notre Rédempteur a pris chair, afin de nous délivrer de l’esclavage du péché, ainsi nous devons rendre à la liberté ceux 4 en ont été privés par la loi des nations. La reine sainte Bathilde affranchit tous ses esclaves. Il est avéré que tous les peuples qui vivaient sous l’au- torité ecclésiastique étaient plus heureux, d’où ce dicton populaire et historique : « Il vaut mieux vivre sous la hou- lette de PEglise que sous l’épée du baron. » M. Bourjot fait observer que le clergé donnait plus d'appui, et présentait une protection plus efficace que celle des barons. M. Ghampoiseau dit que don Martenne a produit un testament des plus curieux , d’où il résulte que les cor- porations ecclésiastiques et religieuses, aux époques les plus reculées de nous , ont affranchi les serfs. La discussion est épuisée , et la question résolue en fa- veur de la conduite et des sentiments du clergé, M. le président donne lecture de la 36° question da programme. On lui fait observer que , sur celte question, M.Marchegay, absent, a des documents précieux à com- Muniquer à la section; on pense qu’elle sera plus utile- ment et plus complétement traitée, au retour de l’ex- cursion que le Congrès va faire à Nantes. Seulement, -MM. Taïlliar et de la Fontenelle disent que les premiers actes publics , écrits en langue vulgaire , et retrouvés dans les archives de la Flandre et du Poitou, portent les dates de 1202 ou 1204. La séance est levée à huit heures un quart. 368 PROCÈS-VERBAUX Huitiome séance. — Du 9 septembre 1843. Rapporteur : M. L. CosNiEr, secrétaire. Nous étions partis d'Angers dépuis une heure environ, lorsque plusieurs membres proposèrent de tenir séance dans le bateau même , qui nous transportait x Nantes, Ce projet fut accueilli avec empressement. La section d’agri- culture se réunit sur le pont du bateau, et la section d’ (TS toire ouvrit sa séance dans le salon de l'arrière, sous la présidence de M. Richelet. M. de la Fontenelle demande à donner quelques ren- seignements sur le pays des Mauges et Saint-Florent de Montglonne, en vue desquels nous allons bientôt passer. Le pays des Mauges, dit-il, faisait autrefois partie.du Poitou. Il fut ravagé par les Normands, qui établirent leur quartier-général dans l’ile Batailleuse; cette mêmeile qui naguère reçut les Vendéens échappés au passage de Ja Loire, et vit mourir Bonchamps. Les neuf paroisses du pays des Mauges n’étaient d’aucun diocèse. Elles appar- tenaient à l’abbaye de Saint-Florent , qui ne relevait point d’une juridiction épiscopale et ne reconnaissait que l’au- torilé du souverain pontife. Il y eut pour celte raison beau- coup de conflits entre l’abbé de Saint-Florent et Henri Ar- nault, évêque d'Angers. M. Lambron demande si M. de la Fontenelle peut don- ner des détails sur l’intronisation de l’abbé de Saint-Flo- rent, porlé par les quatre premiers barons du pays, car cet usage qui existait pour tous les évêques de nos con- trées n’avait pas lieu ordinairement pour les abbés. M. Champoiseau ajoute que la première intronisation d’un archevêque de Tours, date de 1550 , et que par une singularité remarquable, cinq chevaliers au lieu de quatre portaient le prélat. Le chevalier de Saint-Maur servait DES SECTIONS, 369 d’écuyer, et recevait en récompense la monture épisco- pale. M. Legeard demande si cet usage de porter les évêques lors de leur installation était à l’imitation des cérémonies pontificales ; on répond que la cause en était différente. Les barons en agissaienL ainsi parce qu’ils possédaient des fiefs relevant des abbés ou des évêques. M. Lambron pense que cette cérémonie prit naissance seulement à l’époque où les suffragants ne concoururent plus à l'élection des évêques. Gette coutume , ajoute-t-on , consentie d’abord volon- tiers , fut considérée bientôt comme onéreuse. Aussi, les barons s’empressèrent de se faire remplacer. M. Bromet dit qu’en Angleterre, cet usage n’existait que dans quatre villes, et demande s’il était universel en France. On lui répond qu’il régnait généralement, entre autres à Tours , Nantes, le Mans et Angers. À propos de la 18° question d’archéologie relative à l’hôtel des monnaies d'Angers , M. Godard pense que l’on battait monnaie en Anjou dans les temps les plus reculés. Notre cité, dit-il, durant l’ère gallo-romaine, avait sa monnaie, sur laquelle on lisait les mots ANDEC et AN- DECAWV, joints à l'empreinte d’un cavalier ou d’un cheval libre , symbole des franchises dont elle jouissait. Sous la première race de nos rois, Angers eut en cir- culation dés tiers de sous d’or revêtus de la légende AN- - DECAVIS , et au revers le nom du monétaire NVNNVS MONETARIVS. Nous possédons encore le nom d’un au- tre monétaire , savoir celui d'ALLONI. Le tiers dé sou d’or valait 3 fr. 90 c. de notre monnaie actuelle. Lavcroix latine se rencontre sur les monnaies de la première race, à la différence de celles frappées sous les rois Karlovingiens, qui portent la croix grecque, avec em- ploi des monogrammes. SEA LE 24 370 PROCÈS-VERBAUX M. Godard assure qu’il ne connaît aucune monnaie angevine frappée sous la seconde race, si ce n’est une seule généralement attribuée à EUDES , qui vivait vers l’an 867. ll en est autrement sous la troisième race, an com- mencement de laquelle les Foulques d'Anjou , très-puis- sants, répandent leurs monnaies sur les nombreux terri- toires soumis à leur domination ; ces monnaies portent le nom de FVLCO , arrangé en monogramme , et au revers une croix grecque avec une ancre et un clou: Sous Geoffroy-Martel, continue M. Godard, il existait à Angers un monétaire appelé Hubert, HVBERTVS MO- NETARIVS. Jusqu'à la fin du XVIHE: siècle, Angers conserva son hôtel et son personnel administratif, bien qu’alors l’on ne baltit plus monnaie. La lettre F était la marque de la-monnaie d'Angers, L'ouvrage de Ghopin, assure M. Godard, est plein de faits relatifs à ce sujet. On passe ensuite au blason de la ville d'Angers : La té que l’on remarque sur les armes d'Angers , indique que l’Anjou était la clef du royaume de France, du côté de la Bretagne. M. Boiléau fait de paE que, dans son Pare médail- ler, il possède des pièces de monnaie à l’efligie de Char- les I*, sur lesquelles on voit deux clefs, mais point de fleurs-de-lys. On passe ensuite à la 25° question d'histoire, relative à l'importance historique des bords de la Loire. Ces événements , suivant M. Tailliar, peuvent être at- tribués à plusieurs causes principales : 1° La Loire est l’ancienne limite de la puissance, de la langue et de la nationalité francaises. En-decà sont les Gallo Francs de la langue d’oil, nation nouvelle formée du double élément gaulois et germanique , et qui a ses mæurs, son idiome el ses coutumes à part. Au-delà sont DES SECTIONS. 374 “les Gallo-Romains du! Midi, encore tout empreints de {a eimilisalion , des mœurs et de la législation romaines. Les habitants de ces deux parties de la France, longtemps ennemis, conservent pendant plusieurs siècles une pro- fonde antipathie ; .2° La Loire est en même temps la ligne séparative du duché de Bretagne et du comté d'Anjou, presque tou- jours en guerre. C’est sur ces rives où se trouvent des châteaux forts , appartenant à lune ou à l’autre des par- ties belligéranies, que se livrent des combats plus ou moins meurtriers ; 5° Quand le comté d'Anjou passe au pouvoir de l’An- gleterre, les bords de la Loire sont fréquemment le 1héäâ- ire des hostilités longues et acharnées des deux nations rivales ; 4 Enfin , durant les guerres religieuses, la plupart des villés riveraines de la Loire, comptant dans leur sein de nombreux calvinistes, voient surgir entre les deux partis des conflits opiniâtres et sanglants. M. de la Fontenelle pense que la Loire formait la plus importante voie de communication du royaume. Elle était autrefois beaucoup plus navigable qu’à présent , puisque le flux de la mer arrivait jusqu’à Ancenis. Elle amenait donc dans l’intérieur une grande quantité d’étrangers. : M, Goguel ajoute que la réforme a été pour beaucoup dans la célébrité de la Loire. Saumur était le siége d’une université protestante , et les châleaux de Rochefort furent le dernier boulevard de la Ligue. ‘On passe-ensuite à la discussion de l'influence des écrivains de J’Anjou et des provinces voisines sur la litté- rature française. (37° question d'histoire.) On observe que la Loire, étant près de l’Aquitaine, servait en quelque sorte de séparation aux deux langues de la France. Parmi les écrivains de l’Anjou, ce fat Dubellay dont 372 PROCES-VERBAUX les poésies eurent au XVI siècle le plus de retentissement. [l voulait donner à notre langue la pureté de Pantiquité grecque. Quant à la prose , le Tourangeau Rabelais , qu’on pour- rait presque appeler l’Angevin Rabelais, tant son séjour dans notre pays y a laissé de souvenirs, ouvrit la glorieuse marche de nos classiques. M. Planchenault fait valoir les services que notre Jean Bodin a rendus, en écrivant les cinq livres de la Répu- blique en langue vulgaire, au lieu de se servir du latin comme ses contemporains. Ménage , devenu plus tard en quelque sorte le docteur de notre langue , contribua beau- coup à la fixer. M. de Lens fait remarquer, d’après Varillas, que le chancelier Poyet, au XVI° siècle , introduisit l’usage du français dans les tribunaux. M. de la Fontenelle s’étonne que Bodin , dont l'esprit était si éclairé, ait écrit son livre des sorciers , et surtout ait été amené à commettre par superstition des cruautés nombreuses. M. Planchenaault ne trouve d’autre motif à cette dé- plorable contradiction que les préjugés du temps, et la nécessité où Bodin se croyait être de mettre un terme aux associations de malfaiteurs qui couvraient la France. La Démonomanie est écrite avec une naïveté complète; c’est sa meilleure excuse. M. Freslon ajoute que la bonne foi de Bodin peut d’au- tant plus être soutenue, que la croyance aux sorciers s’est coniinuée dans la magistrature , et, on peut le dire , dans les meilleurs esprits jusqu’à la fin du siècle dernier, On pourrait citer de nombreux exemples à l'appui de cette assertion, M. Champoiseau assure que tous les actes, dont parle Bodin , sont répélés de nos jours par le magnétisme. Il ne conpaissait point la véritable cause de ces phénomènes DES SECTIONS. 373 physiologiques ,il n’en dés que les excès , et il devait y croire. Parmi les œuvres littéraires de l’Ouest de la France, M. de la Fontenelle cite encore la chronique da chevalier sans paour et sans reproche , du sire de la Trémoille , par Jehan Bouchet. "Les plus anciens ouvrages en langue vulgaire , écrits en Anjou, sont les poésies du roi René, de Thibault de Blaison, de Jean de Beauvau, les Noëls, et enfin les Mystères de Jean Michel. À neuf heures, le soleil ayant un peu dissipé les nua- ges qui couvraient le ciel depuis le matin, les membres de la section sont invités à venir sur le pont considérer les bords de la Loire, et la séance est levée. Neuvième séance tenue à Nantes, le dimanche 10 septembre 1843. Rapporteur : M. DE LENS, secrétaire. La séance s’ouvre à sept heures un quart, dans la grande salle de la mairie, sous la présidence de M. Richelet, vice-président. Le secrétaire donne lecture du procès-verbal de la séance tenue la veille sur le bateau à vapeur. La rédaction en est approuvée. M. H. Fourmont demande la parole pour donner com- municalion d’un plan d’atlas d’histoire universelle. En raison de l’imporlance et de l'étendue de ce mémoire, l’auteur est invité à le réserver pour une séance supplé- mentaire qui serait tenue le soir, à moins que le bureau central n’en permette la lecture en séance générale. La discussion est ouverte sur la 11° question d’archéo- logie, ainsi conçue : 374 PROCÉS-VERBAUX « Expliquer pourquoi lon trouve assez fréquemment dans les lieux jadis occupés par les Romains , des vases pleins de leurs médailles et monnaies ? » M. de la Sicotière explique ce fait par le besoin queles habitants éprouvaient dans les temps de ren civiles d’enfouir leur trésor. M. de Caumont pense que cette explication ne rend pas compte de tous les cas. Il constate la découverte qui, en Normandie, a été plusieurs fois faite en un même lieu, de plusieurs milliers de monnaies ou médailles, particu- lièrement pour les empereurs qui suivirent les Antonine, M. Champoiseau et M. Richelet donnent des détails analogues pour les localités de Tours et du Mans. M. Leray, docteur-médecin de Nantes , signale parti- culièrement pour son pays la découverte d’un gran nom bre de médailles de Tétricus. On passe à l’examen de la 55° question d'histoire : « Etudier l'influence des Universités en général sur les affaires politiques et religieuses de l’Europe , et sur les progrès des lettres et des sciences , depuis le XIV® siècle jusqu’au temps de Louis XIV ? » M. de Lens, considérant seulement les Universités comine corps et s’attachant surtout à l'influence qu’elles ont directement exercée , indique les principales affaires politiques et religieuses dans lesquelles elles ont été con- sultées ou sont intervenues d’elles-mêmes ; il pensé que leur influence, pour le maintien de la pureté de la fot ca- tholique et la défense des libertés gallicanes , a été géné- ralement salutaire; que leur intervention dans les guerres civilés du XVe et du XVIe siècle a été plus souvent per- nicieuse , et qu’au reste , il y a danger à transporter les esprits voués par profession à la culture des sciences ét des lettres dans”le tumulte des affaires et dans la sphère politique qui réclame l’action plutôt que la méditation. Il ajoute, sans y insister, que la participation des Uni- DES SECTIONS. 375 versités aux progrès. des sciences et des lettres a été imimense, Il trouve cependant que là, comme partout, l'esprit de corporation , en portant les Universités à s’op- poser à d’utiles établissements , a rendu leur influence moins avantageuse et moins considérable. M. Tailliar prend ensuite la parole : | Des trois espèces de supériorité, la naissance, la for- tune et l'intelligence , celle-ci , dit-il, est sans contredit la plus éminente ; émanée de Dieu même, elle excite à un moindre degréles jalousies plébéiennes , et donne plus de facilités pour diriger les hommes naturellement dis- posés à se laisser conduire par l’ascendant du génie ou par les conseils de la persuasion. C’est une supériorité intellectuelle de ce genre qui fait au moyen-âge la puis- sance des Universités, Foyers de lumières au milieu des ténèbres, c’est dans leur sein que toutes les sciences se développent et prennent l'essor. Une sorte d’émulation, féconde en résultats importants, se manifeste à la fois dans les quatre facultés ; et la théologie , le droit, la mé- decine , les lettres et arts recoivent une impulsion sans exemple, qui éveille au plus haut degré les intelligences. La théologie , science (roide , posée, qui paraît purement dogmatique, où doivent dominer le calme, la dignité, la circonspection , enfante pourtant une science nouvelle, véhémente, passionnée , téméraire; c’est la scolastique , c’est-à-dire la discussion et le raisonnement appliqués à l'étude des choses divines. C’est là que brillent le génie de la controverse ; c’est là qu’excellent une foule de doc- teurs plus ou moins renommés. C’est aussi du sein de ces discussions qui abordent audacieusement toutes les ques- tions, et ne reculent devant aucun problème ; que sort La science politique. Les deux traités d’Aristote, la Politique et-la Morale, donnent lieu d’abord à des paraphrases , à des commentaires: puis, naissent des ouvrages originaux. Parmi ces universités, si prospères et si influentes au 376 PROCÈS-VERBAUX moyen-âge , brille avec éclat l’Université de Paris, féconde en savants, tendre mère des arts libéraux , source iné- puisable des sciences et l'honneur du royaume (1). Fière de posséder dans son sein les plus habiles professeurs et des milliers d'étudiants accourus de toutes les parties de l’Europe , elle prend chaque jour plus de consistance , et devient un pouvoir dans l'Etat. Les illustres savants qu’elle renferme , la mettent sans cesse en contact avec les puis- sances , avec les rois, les princes de l'Eglise, les plus hauts personnages, Officieusement consultée d’abord, elle s’habitue par degrés à intervenir spontanément dans les grandes affaires politiques et religieuses, et s’occupe de toutes les hautes questions qui intéressent le royaume, l'Eglise et la chrétienté. Pour prix de ses services et de son appui, les priviléges les plus importants lui sont suc- cessivemen£ accordés. Elle envoie des députés aux conci- les et aux papes, est exempte de contributions, de taxes et de dîmes, a sa juridiction spéciale, et porte ses causes devant le prévôt de Paris, qui se glorifie du titre de con- servateur des privilèges royaux de l'Université. Le rec- teur, chef de la discipline , confère ou retire à son gré les pouvoirs aux prédicateurs, et, revêtu en même temps d’un caractère officiel, signe les traités et autres actes publics. Investie de pareilles prérogatives, jouissant d’une si vasle influence , il n’est pas étonnant que l’Université joue un rôle considérable. Pendant le seul règne de Char- les VI, on la voit : Traduire devant l’évêque de Paris, tant pour outrages envers elle que pour inconduite et irréligion, le prévôt Hugues Aubriot, personnage riche et en crédit, leqüel est néanmoins condamné à faire amende honorable, à genoux (1) Chron. de Charles VI, du Religieux de Saint-Denis (publ. par M. Bellaguet dans Ja collection des documents inédits sur l'Hist. de France), liv. 11, chap. 2, liv. VII, chap. 8. » DES SECTIONS. 377 et sans chaperon, sur un échafaud dressé au parvis Notre- Dame; et, de plus, à subir une rude pénitence (Chron. de Charles VI, du religieux de Saint-Denis, liv. 11, chap. »; tome 1, p. 81); Lutter corps à corps contre les ordres A , pour- suivre du chef d’hérésie un des professeurs de l’ordre des Frères prêcheurs , Jean de Montson , et le faire condam- ner successivement par l’évêque de Paris et par le pape Clément VII, à Avignon (Zbid., live vur, chap. 8; Liv. 1x, chap. 2 et 16); Agir énergiquement contre les ministres de Charles VI, pour s’être permis de déroger aux priviléges de la justice ecclésiastique (Zbid., liv. xrtr, chap. 4, t. 2, p. 15); Interyenir activement dans les affaires du grand schisme d'Occident , négocier avec les papes rivaux, et travailler avec ardeur à rétablir Punion (Zbid., liv. XIV, XV et XVI, t.2, p. 99 et suiv.); En cas d'infraction à ses priviléges , suspendre dans Paris toutes leçons et prédications , et ne les reprendre qu'après avoir obtenu satisfaction, etc. (bid., iv. xx, ch. 20; et xxvVIN, Ch. 293 t. 2,p.747;ett. 3, p.728). On peut juger par ces seuls exemples , à quel degré de puissance et d'autorité est montée l’Université de Paris (1). . Mais , tant de grandeur ne tarde pas à s’éclipser. Gette savante corporation, de même que les autres Universités, ses sœurs , devait sa principale influence à l’ascendant de ses lumières , à sa grande supériorité intellectuelle et aussi à l'ignorance des princes et des grands, gens très-braves sur un champ de bataille, mais pour la plupart de petit (1) L'Essai d’une analyse raisonnée des registres du parle- - ment, par le bibliophile Jacob (Paul Lacroix) — Paris Techener, 1842, broch. de 52 p. in-8° — présente quelques autres documents (p:23, 30 et 50) qui prouvent l'importance et le crédit de P'Uni- versilé de Paris. — V. aussiles Olim publiés par M. Beugnot. 378 PROCÈS-VERBAUX sens et de nulle instruction. Or, à mesure que les con- naissances humaines se répandent , une double révolution s’accomplit : d’une part, les Universités perdent de lim- mense avantage de prédominer dans les sciences , el d’en avoir le monopole exclusif; d’un autre côté, l’habileté, la sagacité, le savoir, pénètrent dans les conseils des sou- verains qui désormais n’ont plus besoin des consultations des Universités. Dès lors, celles-ci, ne régnant plus par l'esprit sur les princes et les peuples, voient rapidement décroitre leur importance. Elles cessent de diriger les sociétés, lorsqu'elles cessent d’être plus éclairées qu’elles. Dans l’ordre moral, la prédominance est à ce prix. Tou- jours l’ascendant et l’influence appartiendront aux plus capables et aux plus habiles, Ge discours est accueilli avec une faveur marquée. M. l’abbé Legeard , d'accord avec M. Tailliar sur la supériorité que les Universités avaient au moyen-âge sous le rapport de la science, confirme ce qui a été dit à cet égard, par l’explication du nom de clerc donné alors au savant, et qui subsiste encore dans la langue. Il ajoute aussi quelques détails sur la coopération déjà reconnue des Universités à la défense des libertés de l'Eglise gal- licane. Une discussion incidente s’élève sur lorigine des Uni- versilés et sur l’époque de institution des plus anciennes écoles. MM. Champoiseau, Lambron, Tailliar, de Lens et le docteur Bromet y prennent part. M. Tailliar regarde l’usage du sceau comme indiquant l’époque de la constitution régulière d’une Université. M. de Lens décrit trois phases dans leur développe- meut. Ge sont: 1° l’institulion primitive des écoles, laquelle remonte en général en France à Charlemagne; 2° l’usage de conférer les degrés , qui ne date guère que de la fin du XIe siècle; 2° la première concession des priviléges par les papes et les rois, qui est fixée, pour l'Université DES. SECTIONS. 379" de Paris, à la fin du XII: siècle, et pour les autres, du XIII au XVe. Après cette discussion, M. Biseul donne lecture d’un fragment de lettre de l’historiographe Jean Lemaire , ré- cemment imprimé dans un recueil d’Archives de la ville de Lille, publié par M. Leglay. Ge. passage contient de curieux détails sur Michel Goulomb, habile sculpteur, qui a exéculé le tombeau de François IE, à Nantes. À huit heures et demie, M. le président lève la séance, afin de permettre à MM. les membres de la section de profiter de l’obligeance de quelques-uns de leurs confrè- res de Nantes pour faire une promenade archéologique. Dixième séance. — Du 11 septembre 1843. Rapporteur : M. px Lens, secrétaire, La séance est ouverte à sept heures et demie sous la présidence de M. Richelet. \ M. de Lens, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance tenue à Nantes le dimanche 10 septembre. La rédaction en est approuvée. La discussion est ouverte sur la 32° question d’histoire : «, Quels sont les ordres monastiques qui ont fondé des » établissements dans l’archevêché de Tours et dans la » portion du diocèse de Poitiers qui appartenait à l'An- » jou? Quelle a été la part de chacun d’eux dans le dé- » veloppement de la civilisation ? » L M. Marchegay prenant la parole donne quelques dé- tails sur Ja première partie de la question , et renvoie, pour une réponse plus complète, en ce qui concerne l’An- jou, au mémoire de M. de Miroménil, réimprimé dans la publication nouvelle des Archives d’ Anjou. Il constate, à l’aide de faits curieux, l'influence que les 380 PROCÈS-VERBAUX moines de ces différents ordres ont exercée sur les pro- grès de l’art médical , sur l’histoire et sur le développe- ment de l’agriculture. M. Richelet dit que ce qui a eu lieu en Anjou, relative- ment à l’agriculture , a été général dans toute la France. Il signale , au sujet de la pratique de la médecine par les moines, un manuscrit de la fin du XIIT° siècle , qu’il a vu à Nantes à l’exposition de la société des beaux-arts, et qui contient un grand nombre de recettes. L'assemblée entend avec intérêt le titre de ce manus- crit relevé sur l'original. On passe à la 36° question d’histoire : « À quelle époque a-t-on commencé à se servir de la » langue vulgaire pour les actes publics , dans les pro- » vinces de l'Ouest riveraines de la Loire ? Quels sont » les caractères particuliers du dialecte de ces provinces ? » En quoi diffère-t-il ou se rapproche-t-il des langues » d’oil ou d’oc proprement dites ? » M. Marchegay expose que ce n’est guère que vers 1260 que l’on commence à trouver en Anjou des chartes rédi- gées en langue vulgaire, et qu’elles ne devieunent un peu nombreuses qu’à partir de 1280. La plus ancienne qu’il puisse citer est une charte de 1256 appartenant au char- trier de Fontevrault. Avant cette époque , on se servait en général du latin pour les actes publics, même dans les communautés de femmes. L'époque indiquée est de beaucoup postérieure à celle où on a fait usage dans le Midi de la langue vulgaire , et il a trouvé dans le chartrier de Fontevrault des chartes relatives au pricuré dela Rochelle, dont la date remonte à 1294. M. Marchegay attribue le retard que l’on a mis en Anjou à se servir de la langue vulgaire , à l’absence des institutions municipales. La langue du peuple n’était ac- ceptée des grands que pour la poésie seulement. Leurs DES SECTIONS. 381 chanceliers écrivaient en latin. L’introduction de l’élé- ment populaire dans les institutions , a rendu dominante la langue vulgaire. Le ul entend avec beaucoup d'intérêt la lecture faite par M. Marchegay des premières lignes de la charte de 1256 mentionnée plus haut. M. Lambron donne , pour la ville de Tours, quelques détails sur at étton de la langue vulgaire ae la rédaction des actes publics. M. Salmon aflirme avoir vu , aux archives du royaume, une charte relative à la ville de Tours, qui porte la date de 1190; mais ce lui paraît être une copie faite au XIIIe siècle. M. Marchegay parle des soins s inégaux apportés , à | dif. férentes époques, à la reproduction ‘dé ces pièces, Quel- ques-unes, par suite d’un singulier système de traduction, offrent un mélange bizarre de mots empruntés aux deux langues, vulgaire et latine. Néanmoins on a conservé quel- quefois, et avec raison, dans certaines chartes latines, les surnoms d'hommes et les noms de lieux usités dans la langue vulgaire. M. Richelet attire particulièrement lattention des membres sur les caractères particuliers du dialecte des provinces riveraines de la Loire et sur leurs analogies plus ou moins grandes avec les langues d’oil et d’oc pro- prement-dites. Il fait quelques remarques sur ce point. en prenant pour base la charte lue par M. Marchegay. M. Marchegay dit que, faute d’études assez approfon- dies , il ne veut pas se prononcer sur les rapprochements que présente l’idiome angevin avec les deux dialectes prin- cipaux de la langue vulgaire d’alors ; il fait cependant ressortir, d’après une charte de 1250, relative à Montreuil- Bellay, et dont on possède deux exemplaires qui ne dif- fèrent que par l’orthographe , les différences de l’idiome angevin et de l'idiome poitevin. 382 PROCÈS-VERBAUX ; En se bornant à Fétude de l’idiome angevin , il eite comme beaucoup plus pur celui de Saurhie et d'Angers; comme l’étant moins, celui de Durtal, Baugé, la Flèche. Enfin tout cet idiome, en général, est plus intelligible que celui qui fut usité plus tard , à la fin du XVe siècle et au commencement du XVIe | On passe aux 19° et 20° questions du programme d’ar- chéologie. M. Godard , pour ne pas faire double emploi avec le rapport intéressant présenté quelques jours auparavant par M. de la Sicotière , se borne à un court exposé de l’origine du musée d’antiquités d'Angers et du genre de classification qu’il a adopté. La section exprime le vœu que la commission centrale, chargée des impressions , comprenne dans son travail le mémoire écrit que M. Godard avait préparé sur cet objet. On revient à la 17° question du même programme re- lative à l'Histoire des monnaies angevines, depuis les comtes Ingelgériens jusqu à la mort du roi René. M. Marchegay, qui n’a pas assisté à la discussion sou- levée à ce sujet pendant le voyage à Nantes , indique , d’après M. Lelewel, de l’école des chartes , une explica- tion de la clef qui fait partie des armes de la ville d’An- sers, explication d’après laquelle cette clef ne serait qu’une transformation du monogramme des Foulques. M. Godard conteste cette explication et cile un passage de Bourdigné , qui peut faire considérer cette clef comme destinée à constater les liens du comté d’Anjou avec le duché de France. Il y a d’ailleurs des médailles de Charles [ qui portent une seconde clef, pent-être pour figurer par celle-ci l'investiture du royaume de ét dinée à ce comte par les papes. M. Lambron exprime le désir que l’on recherche si toutes les villes fortifiées , à l’exception de celles dont les DES SECTIONS. 383 armes étaient parlantes, n’avaient pas des clefs dans leurs armes. La section ordonne que ces différentes observations, et notamment celle de M. Marchegay , soient consignées au procès-verbal pour servir de complément au débat qui a eu lieu dans une séance précédente sur la même question. Question 4o° d’histoire : « Rechercher les usages particuliers aux corporations » d'arts et métiers dans l’Anjou et dans les autres pro- ».vinces dépendantes de’ la généralité de Tours. » M. Godard entre dans quelques détails sur la corpora - tion des orfèvres d'Angers , et signale l’identité de leur sceau avec celui que Philippe de Valois donna aux orfè- vres de Paris. Ceux d’Angers ont également la même devise In sacra inque coronas. Le Musée d’antiquités _ d'Angers possède une empreinte de ce sceau. Le même membre donne , d’après Ménage, de curieux délails sur la corporation des monnayeurs d'Angers et sur ce qu’on appelait serment de l’Empire, serment de France et serment de Brabant. (Wie de Guil. Ménage, p. 285 et 286.) M. Lambron relate les usages particuliers à l’impor- tante corporation des ouvriers en soieries de Tours. M. de Caumont demande si l’on a étudié en Anjou les vitraux, particulièrement ceux de la cathédrale d'Angers, dans leurs rapports avec les corporations , qui souvent faisaient de pareils dons aux églises. Ilexplique les moyens de reconnaître la trace de ces dons dans la signature qui se trouve au bas des vitraux. M. Richelet insiste sur importance de cette étude , et signale l’ouvrage de M. de Lasteyrie comme pouvant ser- vir à la compléter. M. Godard répond qu’il n’y a aucune trace sur les 384 PROCÉS - VERBAUX vitraux de la cathédrale d'Angers qui désigne clairement une donation faite par des corporations. M. Marchegay ajoute que l’on a une liste des bienfai- teurs de lPéglise de Saint-Maurice , et qu’il n’y est fait mention d’aucune corporalion ni pour vitraux ni pour autres dons. M. de Lens signale, d’après un document ofliciel (Rapport au roi sur les Archives des départements, in-8°. Imprimerie royale, 1840), l'existence aux archives de Tours de pièces concernant les corporations d’arts et métiers d'Angers. Il croit que le Congrès pourrait ex- primer le vœu que les différents départements fissent entr’eux l'échange des pièces qui les concernent moins directement, pour concentrer celles-ci dans les dépôts où elles peuvent offrir le plus d’intérêt. Plusieurs membres indiquent les difficultés que les ni ministralions locales pourraient opposer à ces échanges. M. de Lens retire sa proposition sur l’observation 4e M. Marchegay, que les eflorts de l’administration supé- rieure et des élèves de l’école des chartes , généralement chargés aujourd’hui du dépouillement des archives dé- partementales , amèneront plus sûrement le résultat dé- siré, M. Godard a la parole sur la 39° question d’histoire, relative aux artistes angevins et à ceux qui , nés ailleurs, ont exercé leur talent en Anjou. Il fait un catalogue étendu de ces artistes, en indiquant leurs principaux ouvrages. M. Marchegay indique la chronique de Saint-Florent comme pouvant indiquer le nom des artistes qui ont con- couru à l'édification ou aux réparations de l’abbaye. Il apprend aussi à l’assemblée qu’il existe à la biblio- thèque royale un document sur les saints de Solesmes et sur les auteurs de ces belles statues. EE . DES SECTIONS. 385 M. Richelet ne pense pas que ces pepe soient de Germain Pilon. A l'égard de Vulgrin , dont le nom se trouve dans la liste de M. Godard , en reconnaissant la grande réputa- tion dont il a joui , M. Richelet signale de lui _quelques travaux malheureux. M. le docteur Bromet , interpellé par M. Godard, au sujet de la venue de Pitt et de Wellington à Angers pour suivre les cours de l’académie d’équitatior , dont les ar- chitectes ont été nommés dans la discussion , fait con- naître que c’est Gaillaume Pitt, depuis lord Chatham, le frère aîné du ministre, qui a dû venir à Angers. L'heure avancée (il est neuf heures et demie) ne per- mettant pas , dans cette dernière séance , d’épuiser toutes les questions du programme, et MM. Cauvin et de Beau- regard , qui ont promis de faire des lectures sur les ques- tions 41° et 42° d'histoire, n’étant pas présents à la séance, l’assemblée recommande leurs mémoires à la commission centrale. M. le président déclare la séance levée et les travaux de la quatrième section terminés. CINQUIÈME SECTION. LITTÉRATURE ET BEAUX-ARTS. — Première séance, — Du 2 septembre 1843. Rapporteur : M. J. Sorin, secrétaire. À une heure , la séance est ouverte. M. Planchenault, secrétaire général du Congrès, rem- plissant les fonctions de président, et MM. les et rés de la section, prennent place au bureau. T.-L. 25 386 PROCÈS-VERBAUX On procède au scrutin pour la nomination du président et des quatre vice-présidents. Quarante membres y pren- nent part. Le dépouillement des votes donne pour la présidence le résultat suivant : M. Lecerf. — M. de Cussy. Les autres voix sont réparties sur divers membres. M. Lecerf , de Gaen, professeur honoraire à la facalté, est proclamé président. La section décide ensuite, par assis et leré, que les voix données pour la présidence seront comptées pour la vice-présidence. Les suffrages sont acquis dans l’ordre suivant : M. de Cussy. —- M: Tailliar. — M. Goguel. — M, de Laporte. Les autres voix sont réparlies sur divers membres, En conséquence, MM. de Cussy, de l’académie de Metz, Tailliar, conseiller à la cour royale de Douai, Go- guel , chef d'institution à Strasbourg, et de Laporte, de Vendôme, sont proclamés vice-présidents. La section , consultée sur la question de savoir st elle juge convenable d’adjoindre de nouveaux secrétaires à ceux qui ont élé choisis, lors de la première organisation des sections, décide qu’il n’y a lieu à faire de nouvelles nominations. Sur l'invitation de M. le président du bureau provi- soire , le bureau définitif prend inmédiatement la direc- tion des travaux de ja section. M. le président remercie la section de l'avoir appelé au fauteuil, | M. le secrétaire général Planchenault dépose sur le bureau les ouvrages suivants, offerts au Congrès par leur auteur : 1° Trois épitres aux contemporains , par M. Herpain. 2 Balances orthographiques ét grammaticales de fa langue française , par M: Ch. La Loy. DES SECTIONS. 387 8° Quatre volumes de poésie, par M: le chévalier dé Caqueray. - 49 Essai de simplification musicographique » par M.Jo- seph Raymond. | M. le président annonce qu'il va étre donné lecture des questions soumises à l’exarmen de la section ; il invite les merbres, qui se proposent dé prendre la parole sur cha- que question , à se faire inscrire. Après la rédaction de cette liste des Oraléurs, la séance est levée à trois heures. Deuxième séance, — Du 2 septembre 1843, Rapporteur : M. PEAUGER,, secrétaire. : Après quelques observations présentées par MM. Le- cerf, président , Pavie » de la Sicotière Mamie, la section adopte , comme règle de travail, qu’il sera consacré al- lernalivement une séance à chacune des trois subdivisions des questions posées au programme, Les Ouvrages suivants ont été adressés à MM. les secré- laires généraux pour être offerts et soumis au Congrès : 1° Un ouvrage historique et biographique sur Gerson et sur l’Linitation de Jésus-Christ, par M. Jehan Smith. 2° Une biographie de M. Dumont d’Urville ; par M. Isi- dore Lebrun. 3° Une description de la route céleste » par M. Isidore Hedde. 4° Une statistique du département de Mäine et Loire j par M..de Beauregard, 5 Une fable inédite > par M. Bourjot-Saint-Hilaire, 6° Un mémoire sur la 8° question de linguistique , posée au programme, par M. Menard. 7° Des Stances à la nature , traduites de l’Urania de 388 PROCÈS-VERBAUX Fiedge, par M. Duparc , chambellan de l’empereur d’Au- triche. Des remerciements sont votés aux auteurs de ces di- verses communications. Le mémoire de M. Ménard a été renvoyé à MM. Richelet et de la Sicotière, qui feront un rapport sur ce mémoire. Les stances de M. Dupare, et la fable de M. Bourjot- Saint-Hilaire , seront lues à la section. La discussion est ouverte sur la première question du programme. M. Rousseau, littérateur à S'-Genrges-des-Sepli-Voies (Maine et Loire), a la parole, et commence par dire que la question , pour être utilement traitée, doit l’être sous un point de vue complet et élevé. Il établit d’abord qu’on peut distinguer trois manières d’envisager l’art , ou du moins les œuvres d’art : — l’une, absolument nécessaire, mais commune , qui nous entre- tient des procédés du mécanisme de l’exécution , du faire, en un mot; — l’autre, qui soumet les productions de Part à une théorie idéale, à une législation qui nous permet de les juger, et d’en distinguer le bon et le mauvais, les qualités et les défauts , le mérite; — la troisième manière, qui nous fait considérer l’art du point de vue de l’inspira- tion , du génie, de la vie, qui s’adresse, non première- ment à l’ouvrier qui a besoin de produire , non au goût du juge qui désire apprécier, mais à l'artiste qui veut créer. — S'il est évident que tous les artistes doivent pos- séder le métier de leur art, il ne l’est pas moins qu'ils devraient en connaître la haute théorie; surtout, qu'ils devraient savoir ce qui fait arliste, et à quelles marques on reconnaît, en soi et dans les autres , l’homme vraiment né pour les arts, Comme ce dernier point de vue a été le plus négligé par ceux qui se sont occupés de la science de l'esthétique, dit M. Rousseau , c’est celui d’où nous partirons, Ainsi, DES SECTIONS. | 389 avant le métier, avant l’œuvre, il yaura pour nous l’ar- tiste, il y aura le sublime artisan destiné à féconder nos cœurs , et à remplir le vide laissé par l’art ancien. M. Rousseau dit que c’est à ce dernier point de vue qu’il traitera la question. Selon M. Rousseau, lartiste naît tel; il se distingue par les exigences de sa vocation pour l'art; il porte en lui le goût du beau, et il est continuellement entraîné à le chercher et à le réaliser autour de lui. Quant aux inspirations dont il procède, l'artiste les prend dans lès grandes influences morales et intellectuel- les , au milieu desquelles il vis. L'artiste n’est pas seule- ment artiste, ik est homme et citoyen : se rattachant, comme homme, par sa croyance, à une foi religieuse, et, comme citoyen, ayant des relations de patrie ; de telle sorte qu’il y a en lui trois éléments : une aptitude, une religion, et un devoir social, qui le constiluent comme facultés et comme idées. Dans ces conditions, M. Rousseau demande ce que peut être l’esthétique , et à quoi elle doit aboutir ? 1l ex- prime cette opinion , qu’étant donnée une vocation artis- tique, l’esthétique efficace se résout dans l’enseignement d’un dogme et d’une politique destinées à devenir le point de départ de l'artiste, et à alimenter son inspiration, (Ap- plaudissements.) M. Fleury, de Ruffec (Gharente), donne sur la question lecture d’une dissertation. (Cette pièce figure an 2° vo- lume , Mémoires.) M. Freslon, avocat à Angers, demande à M. Fleury, si le résultat de son opinion n’est pas d'établir une dualité dans le monde, M. Fleury répond que le fini, émanant de Pinfini , et ui étant subordonné , il n’y a pas de dualisme possible. M. Goguel a la parole , et s'exprime ainsi : M. Fleury me semble avoir reculé la solution de la question , au lieu de l’avancer. 390 PROCÈS-VERBAUX Je ne puis admettre son point de départ, et par con- séquent la base sur laquelle il semble sévaes asseoir la science de l esthétique, Ce qui m’a frappé le plus dans les rés de l’auteur, c’est le parallélisme qu’il a voulu établir entre le fini et l'infini, parallélisme peu psycologique et peu con- forme à la distance qui sépare la créature du créateur. Ge parallélisme a donné lieu à un autre rapprochement , que je ne saurais non plus accepter, entre le Dieu-Trinité et la société, se révélant tous deux par une triple manifes- tation : la puissance , la volonté , et accord entre la puis- sance et la volonté , triple manifestation à laquelle répon- dent les idées du vrai, du bien et du beau. Ce parallélisme me semble peu approprié à la nature de l’homme, à sa inission sur la terre , el aux idées reli- gieuses. Je ne puis accepter les développements et les con- clusions de M. Fleury. - Je demanderai la permission d’avancer une hypothèse : L'homme est loin d’être parfait ; sorti parfait des mains du Créateur, doué d’une liberté qui le rendait maître et responsable de ses actions, il a dû nécessairement s’écar- ter de plus en plus de cette perfection dont le Créateur lavait doué. Le beau, dans la vie, et l’art qui en est la réalisation, consiste, pour l’homme , à ressaisir cette per- fection qu’il a perdue , à recouvrer cet idéal qu’un nuage dérobe sans cesse à sa vue, et ne lui permet parfois d’en- trevoir que d’une manière plus ou moins imparfaite, Mais, lui est-il donné de ressaisir cette perfection, d’en revenir à ce premier état ? Je ne le crois pas; nos instinets les plus nobles, nos désirs les plus saints nous le prouvent. Mais alors, le beau ne peut-il être réalisé par l’homme , par l’art humain ? L'homme est-il déshérité de l’espoir de fon- der la science de l’esthétique ? Je ne le pense pas non plus, car l’homme ne peut jamais espérer, du moins dans cette vie , de réaliser le beau absolu ; la créature ne peut s’éle- ver à la hauteur de son créateur, L’art humain , e’est-à- DES SECTIONS. 391 dire la réalisation du beau, consiste dans cetle aspiration constante de l’homme vers le beau absolu, vers un but qu’il n’alteindra cependant jamais. Gette tendance doit être surtout morale, c’est-à-dire comprendre dans son mouvement toutes les forces de l’âme , ses facultés les plus nobles; elle doit ne jamais s’écarter non plus de l’in- fluence divine , c’est-à-dire du sentiment des rapports qui unissent le fini à l’infini , la créature au Créateur. Je crois que cetie hypothèse se trouve en rapport plus direct avec les traditions de la philosophie, de la poésie et de l’histoire ; elle est aussi plus conforme aux idées du christianisme, qui a si éminewment contribué à réaliser l’idée du beau , et à l’appliquer aux exigences de la morale et de la religion, M. Fleury répond que les objections que vient de lui adresser M. Goguel, sont sans fondement; qu’il n’a point établi entre l'infini et le fini le parallélisme que M. Goguel lui attribue , et n’a dès lors point à réfuter tout ce qui dé- coule de cette impatation ; qu’il n’a pas plus attribué la perfection à l’homme , et que s’il la déclarée capable d’ar- river au beau , il est en cela d'accord avec tout le monde, eten particulier avec la commission elle-même , qui sans doute n’a pas fait du beau l’objet d’une question, sans croire que , jusqu’à un certain point, il füt possible de Patteindre. M. Peauger, avocat à Angers, déclare qu'il ne. se sent pas éclairé par les développements auxquels a donnédieu laïquestion. Il se place au point de vue de lartisie à la recherche de la notion du beau , et il se trouve aussi indé- cis-qu'il l'était avant toute discussion. M. Fleury a dit que le beau était l’être ; et qu’il se con- fondait dans l’être avec le vrai et le bien. Que conclure de B, à l'application? L'arliste n’a pas la même mission dans le monde que l’homme moral et que le savant : le savant cherche Je vrai, et il sait qu'il consiste dans la conformité 392 PROCÈS-VERBAUX de la notion scientifique avec la réalité; l’homme moral fait le bien, et il sait que le bien est dans l’accomplisse- ment de telle ou telle destinée; mais, Partiste, qui recher- che le beau, et qui se donne pour mission de le réaliser, ne sait pas au juste , dans l’état de la science, ce que c’est que le beau. M. Fleury, selon M. Peauger, n’a pas défini. Au lieu d'aborder le beau par le côté qui peut le rendre distinct, il l’a confondu dans une synthèse absolue qui le rend insaisissable, Au lieu de constituer la science esthétique, il l’a absorbée dans un dogme général. M. Fleury a marché à l’inverse de la spécialité scientifique , à laquelle doivent tendre les esprits. On admet généralement que le beau dans l’art se dis- tingue du beau dans la réalité. C’est peut-être là le point de départ du problême , et M. Peauger croit que l'opinion de M. Fleury ne donne pas les éléments d’une distinction, M. Fleury répond à M. Peauger, que la définition du beau, qu’il est accusé de ne pas avoir donnée , est textuel- lement exposée dans son mémoire; qu’il est facile de s’en assurer par la lecture. Il la reproduit , du reste , verbale- ment, et ajoute que, s’il n’a pas considéré le beau dans ses manifestations par l’art, c’est qu'il n’a pu tout dire dans quelques pages accusées déjà d’être trop concises, et a dû se borner à établir des principes , laissant à l’au- diteur le soin de tirer les conséquences. M. Delens , professeur de phylosophie au collège royal d'Angers, dit qu’il y a trois manières de traiter scientifi- quement la question des caractères essentiels du beau , et en général tous les problèmes esthétiques : la première, en les considérant d’un point de vue purement théorique et métaphysique, en cherchant à déterminet par la seule raison ce que doit être le beau; la seconde, en envisa- geant les objets divers qui nous frappent par leur beauté, décrivant et comparant les éléments ou les rapports qui DES SECTIONS. 393 contribuent à cet effet, et induisant de là l’essence géné- rale de la beauté : c’est le côté-pratique et positif de la queslion; une troisième, enfin, consistant à réunir et à concilier les résultats fournis par ces deux procédés dif- férents. Il m’a paru que la plupart des orateurs , les deux premiers surtout, avec une conscience plus ou moins parfaite de ce qu’ils faisaient , n’ont présenté la question que sous sa face métaphysique; c'était leur droit, et il devait être permis de la traiter ainsi : toutefois, leur point de vue est exclusif. D’autres orateurs auraient pu légiti- mement , quoique incomplétement aussi, mais on ne l’a pas fait, développer le problême , en tenant particulière- mént compte de l’observation et de la réalité. Enfin, il eût été surtout à souhaiter, et cette solution plus compré- hensive eût probablement satisfait M. Peauger, que l’on eût résolu la question, en se plaçant successivement aux deux points de vue, Mais, cette étude, à la fois large et profonde , a ses difficultés ; elle n’a pas été faite jusqu'ici d’une manière satisfaisante, et une esthétique, qui abor- derait sous toutes ses faces la question des caractères es- sentiels du beau, qui serait en même temps expérimentale et rationelle, est encore un des desiderata de la science. M. de Senonnes, d’Angers, croit qu’en effet du travail de M. Fleury, peuvent se déduire les règles qu’on désire, et qui constituent l’esthétique. M. Textoris donne lecture d’un mémoire sur la 2° ques- tion du programme , dans lequel il soutient que le beau et le bien ne sont qu’une seule et même chose, et invo- que à l’appui de cette thèse le témoignage de l’histoire littéraire. M. Freslon croit que M. Textoris a confondu des cho- ses qui doivent être distinguées. Le beau et le bien peu- vent sans doute avoir des relations, mais leur notion res- pective ne peut pas être la même. Que l’on se place dans un monument d’architecture, 394 PROCÈS-VERBAUX dans un temple, on est impressionné dans le sens du beau , et cependant l'architecture n’implique ni bien ni mal. Qu’on se donne le spectacle des montagnes d'Amérique, avec l’immensité des pampas à leur base, et celui des mers à leurs rives, on dira que le spectacle est beau, et ce- pendant où sera la moralité dans un tel fait ? L'artiste réalise le beau, distinct du bien, sans exi- gence absolue de moralité. Souvent même il réalise des monstres , et cependant il est fidèle à sa mission. Le beau et le laid ne sont que deux faces des choses, et la beauté esthétique peut se trouver à des conditions communes, aussi bien dans l’un que dans l’autre. M. Pavie répond à M. Freslon. Il croit que M. Freslon s’est mépris, ou n’a pas vu, dans les exemples qu'il a cités , tout ce qui s’y trouve. Le temple n’est pas seulement une collection de pier- res , c’est un symbole qui exprime la moralité du dogme, les sacrements, les trinités et les mystères. La montagne est un symbole encore , quoique dans des conditions différentes, exprimant dans d’autres termes la gloire et la puissance de la création. A cette hauteur de l’être , duquel tout émane , M. Pavie ne croit pas qu'il y ait à distinguer entre le beau et le bien. Il croit que M. Fleury a posé les idées vraies et les données essentielles de l'esthétique , en disant que le beau est dans l’être, n’y faisant qu’un avec le vrai et le bien. Il est trois heures, la discussion est ciose , et la séance est levée. Troisième séance. — Du 4 septembre 1843, Rapporteur : M. Victor PAYIE, secrétaire. La séanee est ouverte à une heure sous la présidence de M. Lecerf. A SL EL M ES. SE DES SECTIONS, 395 .M..de la Sicotière, avocat d’Alencon, demande l’inser- tion aux annales des trois mémoires sur le beau commu niqués à la dernière séance par. MM, Rousseau, Fleury et Textoris, — La section adopte. L'ordre du. jour appelle les questions, de la deuxième série (linguistique), « 1° Le langage versifié est-il de l’essence de la poésie ». ou n’en est-il qu’une forme facultative et transitoire ? » 2° La prose tend-elle à l’emporter sur les vers » comme forme générale du langage, et particulièrement » comme forme de la littérature dramatique à notre » époque ? » Nul orateur n'ayant demandé la parole à ce sujet , M. Goguel se lève sur la 3° question, ainsi conçue : « Comparer entr’eux les écrits de Joachim du Bellay » et de Ménage sur la langue française. Ces deux écri- ».yains ont-ils eu quelque influence sur la formation de » celle langue ? » : M. Goguel s'étonne de ce rapprochement fortuit entre deux écrivains divers par leur nature , divers par leur époque , divers par leur action , et dont le parallèle ne lui semble explicable qu’au point de yue de la communauté de la patrie. Il résout la question tout en la combattant. Au temps de du Bellay, il y avait anachronisme entre le français de Marot, ce français de wieille roche , et la langue héroïque, renouvelée, turbulente, à laquelle Ron- sard a attaché son nom. Joachim joue un rôle dans cette croisade litléraire et même sonne l’heure de l'assaut. Il eut son accent propre et sa physionomie à part, et de nos jours encore , sur les ruines de cet édifice élevé par ses mains avec un courage téméraire et dont quelques hautes pierres restent debout , il nous apparaît couvert de décorations et de blessures, Ménage, lui, vint plus tard, et étiqueta en paix les ma- _ tériaux d’une langue formée. Il résume des faits accom- 396 PROCÈS -VERBAUX plis , mais ne f£t pas. L’action de l’un fut morte, l’action de l’autre vivante. La section passe à la 4° question de linguistique , ainsi conçue : « Quel est l’état actuel de la langue française ? Doit-on » reporter son véritable type au siècle de Louis XIV ? » Dans ce cas , quels moyens devrait-on employer pour » arrêter la corruption du langage ? Si elle est, au con- » traire , dans un état de transition , que doit-on penser » de ses nouvelles destinées ? » M. de Senonnes, à qui la parole est accordée, s’effraie pour le salut des saines traditions , dont l’école de Louis XIV lui semble la dépositaire, de cette invasion de néolo- gisme croissant qui signale à ses yeux notre période litté- raire. Il ne reconnaît droit de cité dans la langue que pour les mots revêtus de l'attestation d’un art , d’une science , d’une industrie nouvelle et reconnue , additions extérieures et qui ne portent point sur sa constitution essentielle et intime. Il craint que ce travail de transfor- mation rapide , auquel le génie de notre idiome est en proie, n’ait pour effet de rendre Bossuet et Racine inintel- ligibles à nos neveux. En ce qui est des moyens de con- jurer une pareille tendance , il hésite à s’en remettre à Pautorité de l’Académie , recrutée elle-même , depuis quelques années , d’une facon hostile à son point de vue, et toutefois, dominé par la considération qu’une pensée d'honneur et de dignité collective, puisée dans la cons- cience de sa haute mission , préexiste chez ce corps aux questions de vanité personnelle , il propose de confier le sort de la littérature menacée à la garde de l’Aca- démie. En réponse à la mesure proposée par M. de Senonnes, M. Isidore Lebrun, littérateur de Paris, argue du discré- dit dans lequel l’Académie est tombée comme régulatrice des destinées littéraires du pays; et quant à la pensée qui ns - DES, SECTIONS. 397 dirige le préopinant , elle lui semble fondée sur une préoc- cupation trop exclusive de la langue en elle-même , in- dépendamment de la société qu’elle exprime et dont elle doit traduire les évolutions, De l’état qui est mo à l’état qui est nous, n’y a-t-il pas un monde de conceptions et de formes dont la langue doit subir les empreintes ? M. de la Sicotière, ramenant sur le terrain du style la question transportée sur le terrain du genre , sympathise du reste avec l'opinion de M. Lebrun. Du jour où une langue est fixée, elle est morte , a dit un écrivain, dont il commente l’axiome ; et afin de saper, dans son principe même , l'autorité attribuée à l’école du grand siècle, il la montre abreuvée à presque autant de sources qu’elle compte d’historiens, de poètes ou d’orateurs; l’un promu de la Gaule , l’autre de la Castille , tel petit-fils de So- phocle , tel neveu de Rabelais , origines trop tôt el trop simultanément reniées , pour que cette violente fusion puisse être acceptée sans contrôle, du point de vue historique auquel nous nous plaçons aujourd’hui. Il s'explique d’ailleurs , au fanatisme près , cette réaction de la vie , du relief et de la couleur, contre les abstrac- tions d’un langage clarifié d’abord , affadi par la suite, et tellement débilité vers la fin par le régime auquel l’a- vait soumis le dernier siècle , qu’on peut dire que son sang s’était changé en eau. Le trouble, poursuit-il, dont M. de Senonnes s’effraie, n’est que le résultat d’une fermentation présente qui don- nera sa liqueur demain. Selon M. Goguel , l’école romantique , dans sa prédi- Jection pour Ronsard contre Racine , serail passible du reproche d’avoir faussé sa mission en inscrivant le nom d’un novateur gréco-latin sur sa bannière nationale, M. de Senonnes réclame contre les interprétations dont sa pensée a élé victime, Il rétablit son cadre, rétréci dans la discussion , cadre plus favorable qu’on ne l’a supposé à 398 PROCÈS-VÉRBAUX l'extension successive et régulière du langage, mais dans les conditions de pureté et de clarté qui sont le caractère de l’idiome paternel , et que l’école moderne lui semble avoir particulièrement méconnues. Le but de M. Freslon est d’énvisager la question d’une manière plus explicite. Pour juger, il veut comparer, et d’un parallélisme rapidement opéré entre les genres des deux littératurés ; il résulte à ses yeux que dans Pode et l’histoire nous sommes supérieurs au passé; que Félo- quence ardente d’un prédicateur de nos jours, pour n’a- voir jusqu'ici déposé sur aucune page, n’en atteste pas moins, par la puissance de ses effets, la persistance de la parole sacrée ; que le style de la science et le style poli- tique sont des conquêtes de nos jours ; que le roman s’est tourné vers les hauteurs de l'épopée; que le drame, transporté da théâtre royal sur le théâtre populaire, a prodait des eflets autres sinon meilleurs; que tout mar- che , qu’aller est une condition de vivre; qu’il faut bien concéder la diversité des tiges en retour de l’unité et de l'identité da tronc. M. Tailliar se demande si une langue peut être fixée? Non sans doute, en vertu de ses rapports nécessaires avee les fluctuations de la société. On n’admet ni ne prescrit des expressions par ordre. Stalistique , sciéntifique , in- dustriel , financier ; autant de canaux divers du grand courant social qui entraîne ses destinées ; voilà quant aux besoins, quant aux idées, dit M. Taïlliar, selon que l’ordre domine ou que l’anarchie prévaut, le langage reflète avec limpidité ou trouble la face de Louis XIV où celle de Danton. Le régime de bon sens sous lequel nous vivons , fruit de la pondération et du ternpérament des systèmes , pa- raît à M. Taïlliar une caution suflisante contre l’accom- plissement des prédictions sinistres dont M, de Senonnes a aflligé Fassemblée. DES SECTIONS. 399 Gette caution, M. Isidore Lebrun la retrouve dans l’al- liance salutaire de la science et de Part, dans la modéra- tion littéraire du journalisme, dans les sages et prudentes sollicitudes de l'enseignement, . M. de la Sicotière relève dans Racine et Molière des tournures de vers et des déplacements de césure dont l'initiative pe serait nullement attribuable à la phalange poétique de 1828. M. de. Senonnes insiste sur la mn a de ce reproche appliqué au style tragique. Revenant sur le danger des innovalions signalées et sur la nécessité AR une barrière à l’irruption du néologisme , il fais de cette mis- sion une question d'existence pour l'honneur de l’Aca- démie, et propose au Congrès une pétition à cet égard. M. Goguel comprend tout ce que l’absence d’unité dans la direction du langage peut éveiller de sollicitude ; mais comprimer l'excès sans comprimer l'élan lui paraît une tâche difficile. Entre l'appel au peuple et l'appel à l'Académie, le premier impossible en raison de sa natüré, le second ineflicace en raison de son moyen , il ne voit qu’une chose : espérer ec attendre. Quand da Bellay eut lancé les mots de patrie et de pudeur à travers les cla- meurs de son siècle, il espéra et attendit. L'Académie , dit M. Peauger, est un fait. De qui se compose-t-elle ? De plus de jeunes que d’ainés, non par l’âge, mais par l’idée. La critique est un drott. De qui se compose-t- elle ? Même réponse, même majorilé. Par le droit ,. par le fait, la question liltéraire est d'avance une question jugée ; à quoi sert de tenter un résultat prévu ? Son opinion à lui, fort indépendanie d’ailleurs. de cette double juridiction qu’il décline , est qu’il fau s’associer à tout mouvement résultant de Punité et de la multiplicité - du langage, avec, sans, ou malgré l’Académie, M. de SéhoriHes dépose sur ke bureau ses conclusions ainsi rédigées : 400 PROCÈS-VERBAUX - « On demande que le Congrès, dans celte session , manifeste à l’Académie francaise le désir qu'elle s'exprime formellement contre l'envahissement du langage par les néologistes et les prétendus ro- mantiques. » Le Congrès pense que l'Académie obtiendra des succès dans celle entreprise si elle est soutenue par la critique’consciencieuse et raisonnée. » Après le rejet de ces conclusions mises aux voix, le bureau propose à l’assemblée , comme conciliatrice des opinions en lutte, la rédaction suivante qu’elle accepte : « Sur la 4€ question de linguistique, la section pense que l’on ne doit point considérer la langue française comme ayant été définiti- vement fixée au siècle de Louis XIV ou à aucune autre époque; que la langue d’une nation marche toujours et se développe avec les besoius, la civilisation et les institutions de cette nalion ; que cepen- dant il ne faut pas conclure de là que toute espèce de néologisme doive et inême puisse être admis ; que pour empêcher toute intro- duction dangereuse , il faut s'en remettre au bon goût, à la raison et au sentiment public; enfin que c’est à la critique sige et cons- ciencieuse qu'il peut seulement appartenir d'éclairer, de diriger et d'exprimer ce jugement général qui approuvera ou repoussera les innovations du langage. » La séance est levée. Quatrième séance, — Du 5 septembre 1843. Rapporteur : M. Eugène TAzBor, secrétaire. La séance est ouverte à une heure sous la présidence de M. Lecerf. M. Peauger, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du 3 septembre. Il est adopté sans observalions. M. le président donne avis qu’il a reçu de M. Henri de Nerbonne, d'Angers, communication d’une pièce de vers que son auteur désire être lue en séance générale. DES SECTIONS. 401 M. de la Sicotière’est chargé de faire un rapport sur ce sujet. M. Maurice du Parc, chambellan de l’empereur d’Autri- che, a également adressé une pièce de vers intitulée : + ne Re , dont il est immédiatement donné com- munication à la section. M. le président fait mention des ouvrages dont il.a été fait hommage au Congrès, et qui ont été déposés sûr le bureau de bi section. Ces ouvrages sont : 1° Mémoire sur l'influence réciproque du symbolisme religieux et des aris d'imitation. +29,1De l'inflaence dupaganisme sur la morale publique des peuples anciens. 5° Notice sur le châtéau seigneurial d’I ssy, c connu sous le nom de château de C hdidebent. 4° Éclaircissements sur la destination de trois zodia- ques antiques ; et RE st de certains symboles qui s’y trouvent. Ces quatre brochures sont dite au Congrès par leur auteur, M. de Brière ; membre de plusieurs sociélés 5a- ‘vantes à Paris. L'assemblée vote dés remerciements à M, de Brière, Ordre dujour à M.-Henri de Nerbonne donne lecture d’une notice sur l’exposition de peinture organisée l’année dernière par les soins de la société d'agriculture, sciences et arts d'Angers. - Dans ce chmpte-rends » M. Henri de Nérbonne: nous rappelle que c’est la sôciété d'agriculture qui, la première, a fait une exposition ibhéblegique en1839; que le,suc- cès de cette exposition a élé grand, et qu’il'est dû princi- palement aux collections de MM. Gaultier, Grille; Mor- dret, Bazin, Lange, etc. FRS EVA Une seconde exposition archéologique , jointe à une TL SRE 402 PROCÈS-VERBAUX exposition d'œuvres modernes , a de nouveau été orga- nisée en 1842 avec non moins de succès. Le rapporteur termine en disant que pareilles exposi- tions devraient se faire partout , et invite M. de Caumont, au nom de la société, à vouloir bien employer ses moyens pour que le plus grand nombre possible d’exposilions ar- chéologiques ait lieu. L'assemblée remercie M. de Nerbonne de cette com- munication, et décide, sur la proposition de M. Pavie, que ce travail sera transmis à la commission centrale en expri- mant le désir qu’il soit imprimé. — M. de la Sicotière fait un rapport sur deux mémoires de M. Ménard - Bournichon , du Mans, qu'il a été chargé d'examiner conjointement avec M. Richelet. Ces mémoires sont relatifs à des signes nouveaux ou nouveliement appliqués dans le but de simplifier soit l’or- thographe, soit la prononciation de la langue française. La commission a vu des avantages dans ce système, sans pourtant déclarer qu’il soit complet ou facilement applicable. Elle conclut au renvoi du travail de M. Ménard à M. le recteur de l’académie d'Angers , et propose de donner des encouragements à l’auteur, qui sera invité à perfec- tionner, s’il est possible, le systême qu'il a conçu. Ces conclusions sont adoptées. = La discussion est ouverte sur la 17° per relative aux beaux-arts et ainsi conçue : « Rechercher la loi historique en vertu de laquelle se » sont développés successivement dans la vie de l’huma- » nité lés beaux-arts , l’architecture , la sculpture, la » peinture et là musique ? » M. Rousseau a la parole et lit un travail qu’il a rédigé, dit-il, sur cette question. Ge’travail semble destiné surtout à examiner la loi de l'art comique dans l'humanité. ———————————————— bte PA 2 AMIS ER = mans __— NME. M TENTE LIL. DES SECTIONS. 403 Plusieurs membres font observer que l’orateur a plutôt ainsi traité la 24° question que la 1”°. M. Rousseau continue néanmoins la lecture de son travail. M. Tailliar présente des. observations sur la question proposée : Existe-t-il des lois historiques ? — Dans le monde physique, comme dans le monde moral , tout est soumis à des lois générales établies par la Providence. L'ordre admirable de la création , les mouvements réguliers des astres, le cours invariable des saisons, Ia reproduction des êtres, le discernement universel et constant du bien et du mal , attestent également la prévoyance infinie de Dieu. Or, quand des lois de ce genre régissent l’univers entier, on ne peut croire qu’il n’en existe pas d'analogues pour régler la marche des nations et de l'humanité. Quels que soient les doutes qu'’ait à cet égard suscités le scepticisme, la raison et la conscience se réuuissen pour proclamer l'existence de ces lois. Quelles sont ces lois ? — Mais ces lois historiques émanées de la Providence , quelles sont-elles? Quelque difficile qu’il soit de les découvrir et de les constater, on peut admettre qu’il en existe trois principales : 1° La sociabilité, qui, par un penchant irrésistible ,; entraîne l’homme vers ses semblables , dont la présence est nécessaire à ses besoins , à ses affections, au développement de ses facultés intellec- tuelles. à 2° La renovation , loi non moins constante , qui s'applique aux peuples comme aux individus, et qui les soumet aux diverses trans- formations de l'enfance , de la jeunesse, de l’âge mûr et de Ja vieil- lesse. Tout naïft pour se développer, décroitre et mourir, tout meurt pour renaître. 3° La troisième loi est celle du progrés ou de la civilisation. La perfectibilité humaine appliquée aux sociétés produit la civi lisation,. c'est-à-dire une amélioration progressive dans l’état physique, mo- ral et intellectuel des peuples. Maintenant , se demande l'orateur, ez vertu de laquelle de ces trois lois les beaux-arts se sont-ils suCCessivement développés ? La sociabilité ; la renovation ; ont concouru sans doute à les faire éelore.et à les produire ; la sociabilité , en réunissant les hommes dans les cités ; la renovation, en substituant aux populations déjà vieilles de jeunes et actives générations , pleines d’ardeur, d’émula- tion et d'intelligence. Mais assurément la loi historique la plus essen- 04 PROCÈS- VERB AUX tielle , qui a a donné l'essor aux beaux-arts, est celle du progrès et de la civilisation, C’est sous l'impulsion de cette loi féconde que se sont tour à tour développées l'architecture, la sculpture, la pein- ture et la musique. L'architecture a d'abord pris naissance comme un des premiers arts destinés à assurer le bien-être matériel de l'homme. Al a fallu se garantir de l’intempérie des saisons et de la fureur des animaux féroces ; peu à peu la demeure de la famille s'est agrandie et embel- Jie; des édifices plus importants et plüs réguliers ont apparu ; puis, grâce à la perfectibilité du génie humain et à l'essor de l'intelligence, l'architecture est devenue un art important, qui a eufanté les magni- fiques constructions qu'on admire encore dans l’Inde , en Egypte et dans l’Asie centrale. La sculpture , comme l'architecture , a été d’abord grossière et informe avant de S’élever à de plus hautes conceptions. Quelques ornements, découpés avec plus ou moins d'élégance et de goût, ont été ajoutés aux demeures des rois et aux. temples des dieux. Dans l’exiguilé de ses conceptions, l’homme, rapetissant la divinité à son image , ébaucha ses dieux fétiches et tailla les premières statues. Plus tard seulement , grâce à cette faculté de perfectionner insépa- ruble du génie humain , la sculpture et la statuaire s'érigèrent en arts et enfantèrent leurs chefs-d'œuvre. La peinture , prenant naissance dans celte aptitude merveilleuse que possèdent quelques individus à dessiner et à retracer des objets, esquissa d’abord sur les murs d’un temple des sujets pieux ou guer- riers. Elle s'applique ensuite avec plus de succès à perpétuer le sou- venir soit d’offrandes aux dieux dans les temples , soit de victoires remportées sur les ennemis. Iei encore, c’est à la perfectibilité inhé- rente au génie humain que la peinture dut ses progrès et ses plus brillantes inspirations. La musique, considérée comme art de composition, se développa la dernière. Les anciens peuples lui donnèreut peu de développe- ment. Il y a trois siècles, elle était encore presque dans l'enfance. Dans tous les états de civilisation, l'homme sans doute chante ses joies ou ses douleurs; dans les élans de sa reconnaissance ou de sou amour, il élève la voix vers la divinité, ou adresse ses accents à celle qu'il aime. Mais ce n’est qu’à des époques assez modernes , surtout eu Italie, en France et en Allemagne, que des compositeurs éminents ont donné à la musique une vié nouvelle et pour ainsi dire une se- coude création. Daus l'ordre des temps , l'architecture s’est donc développée la première et la musique la dernière. Ce n’est pas toutefois que les DES SECTIONS. 405 beaux-arts aient suivi dans leur développement une marche métho- dique et régulière. Le génie humain, de même que l'humanité elle- même , et x nations qui le composent, ne se meuyent pas dans un ordre chronologique et toujours normal. Il est impossible d'assigner des dates précises aux premiers progrès des beaux-arts , et l'on ne peut pas dire davantage qu’ils aient procédé l’un de l'autre dans un -ordre de succession ou de filiation. Ainsi l’on ne peut pas dire que la sculpture soit néc de l'architecture et que la peiniure soit fille de la sculpture. Tout ce qu’ on peut admettre, c'est que les beaux-arts se sont développés , sinon simultanément , du moins à des époques à pen près correspondantes et en suivant le cours de la civilisation elle-même. Après celte dissertation , vivement applaudie par l’as- semblée , M. de Pindray, de Poitiers, adresse quelques observalions à l’orateur. Il pense que les hyérogliphes ont été l’expression pre- mière , comme écriture , des pensées des hommes. Ces signes hyérogliphiques élaient ni dapigre a des ani- maux, des êtres quelconques; n'est-ce pas là le point de PR de la sculpture, de la peinture ? M. Tailliar répond qu’il a recherché quelle était Ja loi du développement et pon pas de l’origine des arts. Il se réunit au surplus au préopinant pour les observations qu’il a présentées sur ce second point, : M. de la Sicotière remercie M. Tailliar des heureux développements qu’il a donnés en répondant à la ques- tion proposée ; toutefois il pense que M. Tailliar n’a traité qu’un côlé de la question : on s’est occupé de la loi du développement des arts et non de la loi historique de leur succession. M. Trouessard,. professeur de sciences physiques au collège royal d'Angers , pense à son tour que la question n’a pas encore été traitée sous son véritable aspect: On a confondu les arts utiles, croit-il, avec les beaux-arts. M. Lebrun ajoute dans un sens analogue quelques ob- servalions auxquelles répond encore M. Tailliar. M. de la Sicotière prend de nouveau la parole. 406 PROCES-VERBAUX Il s’associe d’une manière presque complète aux pen- sées qu’a émises l’honorable M. Tailliar ; mais il reste, selon lui , dans la question un point important qui semble avoir échappé à chacun. On a demandé, dit-il en relisant la question , suivant quelle loi historique les beaux-arts se sont successivement développés dans la vie de l’humanité. Il pense donc que lon doit examiner surtout quelle était la loi de succes- sion des beaux-arts, et, cherchant à répondre à cette question ainsi posée, l’orateur indique que le besoin pre- mier qui se soit fait sentir à l’homme a été sans doute celui de chercher un abri; cet abri fut d’abord une grotte informe , el bientôt un asile construit avec plus de soin; ainsi naît d’abord l'architecture. La statuaire a dû prendre naissance à sa suite , l’idée de l’homme s’étant promptement reportée sur lui-même, avec le hesoin de reproduire son image, Ce ne fut que plus tard qu'ayant examiné , étudié les couleurs, l’homme dut faire les premiers pas dans la pein- ture, qui fut sans doute, pense l’orateur, une sorte d’imi- tation de la sculpture, Quant à la musique, M. de la Sicotière ne sait à quelle phase de la vie de l’humanité doit remonter la naissance de cet art. Il exprime le désir que la discussion produise sur ce point une notion qui puisse le satisfaire. M. Peauger déclare qu’il accepte la question dans les termes où l’a posée M. de la Sicotière. Il croit qu'il s’a- git moins de savoir à quel besoin ou à quelle exigence humaine telle ou telle variété de l’art a dû répondre, que de déterminer l’ordre de priorité dans le développement de ces variétés. Or, à ce point de vue, M. Peauger dit qu’il n’y a dans le monde que le moi et le non moi, l’homme et son objec- tif. L’art a donc dû se développer selon cette division, subjectivement et abjectivement. DES SECTIONS. 407 L’orateur pense que l’art s’est développé d’abord selon le moi , et qu'il a commencé par se constituer dans l’indi- vidualité humaine. Ensuite l’art a cherché extérieure- ment ses accessoires et ses compléments. Tel est l’ordre logique. © L’art , selon le moi , ne peut être autre que la pensée humaine et son expression élevée à l’état sHRAquEe c’est- à-dire la poésie et la musique. L'art, dans le non moi , est le temple, dus l’architec- ture donne le cadre et dont la statuaire et la peinture ne sont que les accessoires. . Tel est , selon M. Peauger le point dè départ de la question. Si ensuite on voulait faire une histoire complète de l'art, on verrait comment les deux phases se sont respec- tivement. développées à toutes les époques; on verrait Vart selon le moi à l’origine ; puis ensuite Part selon le non moi; mais on constaterait aussi que le moi , après avoir construit le.temple , s’y est trouvé trop à étroit et qu’il a brisé son enceinte; on constaterait que le temple païen a été débordé par l’idée devenant chrétienne, et peut-être aussi verrait-on aujourd’hui le temple chrétien débordé à son tour par une idée plus jeune et plus exi- geante. Telle est du moins mon opinion , dit M. Peauger, qui termine en disant que le monde est à la s HAChE du temple de l’avenir. La discussion semble épuisée, l’assemblée , sans vou- loir manifester d'opinion arrêtée , passe à l’examen de la 2° question. Elle est ainsi conçue : « L'art chrétien placé par la loi même de son dévelop- » pement orthodoxe en dehors de l'influence des mœurs » et des besoins, n’offre-t-il pas dans ses phases un point » auquel les esprits devraient se rattacher de préférence » dans la création d’œuvres nouvelles? » 4108 PROCÈS-VERBAUX M. Victor Pavie, imprimeur-libraire à Angers, démon- tre l’impuissance de l'architecture actuelle à satisfaire les besoïns du culte : — 1° dans le genre grec, par la contra- diction morale de la pensée chrétienne et de l’expression païenne, — par la contradiction matérielle des habitudes du Nord et des importations du Midi, — parle mélange des slyles ,qui vient compliquer encore la disgrâce de ces con- trastes; — 2° dans le genre gothique , par l'ignorance ra- dicale des traditions liturgiques sur lesquelles reposait l’é- conomie du temple, — par l’inintelligence des symboles primitifs , dépouillés de leur acception spirituelle, — par la translation ou la modification arbitraire d’ornements immuables et consacrés, — par la vulgarité de l’exécution plastique, — par la confasion de six siècles en un. A ses yeux, le goût est incomparablement plus choqué par l’aspect des monuments de cette seconde espèce , en ce qu’ils violent chez nous des harmonies plus intimes , et qu ’éveillant plus de désirs , ïls PFOFOQUENT plus de re- grels ; d’où ‘cette conclusion : que c’est à Ja tradition du moyen- âge, mais religieusement senlie et pittoresquement observée, qu’il faut demander le secret de Parchitecture à venir. Pour cela, comment {aire ? — Choisir une époque entre toutes, dont l’imitation précise et homogène imprimerait aux œuvres le sceau de l’unité. — Quelle serait cette époque ? — Celle qui , par ses rapports avec l’histoire de l’art et celle de l’église, plus exclusivement vouée à l’ex- pression catholique , porterait le front vierge de la domi- nation temporelle. , Ici, M. Victor Pavie énumère rapidement le caractère des six siècles qui, du XI° au XVI®, ont reflété sur la pierre les évolutions de notre foi , et demande si le XIII°, précédé du cintre païen et suivi des profanes altérations de l'ogive, ne porte pas inscrit dans la pureté de son type, chaste et fécond tout à la fois, dans l'épanouissement de DES SECTIONS. 409 ses roses, dans lé jet pur de ses arcades, dans l’enseigne- ment de ses sculptures, dans le mystère de ses vitraux, le signe fugitif d’une pensée éternelle , lequel mit trois siècles à naître et en mettra trois à mourir. Passant aux conséquences qu’une pareille concentra- tion de tous les points de la France, sur un seul point de l’art, devrait logiquement engendrer, limitation , dit-il, comporterait l'étude , l’étude donc l'intelligence ; la main-d'œuvre, abaissée en proportion directe de la supé- riorité d'exécution , ne serait plus-un obstacle à la réali- sation des entreprises. Mais, par de là ces résultats, il en est un, selon lui, d’une plus sérieuse portée : l’ortho- doxie, bannie des considérations de l’art chrétien , par suile d’une sécularisation funeste, y reprendrait sa place; l'intelligence donnerait la foi; le prêtre et l’architecte se compléteraient l’un l’autre. M. Pavie estime qu’à travers ce morcellement d’idées et cetie multiplicité de systêmes, qui constituent l'aspect de notre temps, l’unité de l Éclise et l'harmonie nécessaire de ses rapports assureraient, is succès des mesures propo- sées, sans pouvoir signaler dans l’avenir le germe , insai- sissable encore, que coder l'incubation des temps, il sait, sous peine de ne plus croire, que le génie moderne, uni aux tradilions du passé, ne saurait aboutir à des rémi- niscences mortes. Tout porte à supposer que bien des jours s’écouleront d’ici au terme de la régénération pro- mise; néanmoins, conclut-il, quelque longue que soil cetle attente, je ne plaindrais pas l’art, eûl- FE sommeil- ler mille ans sous le baldaquin du XIIe siècle. Après le discours de M. Pavie , qui a produit sur Fau- ditoire une vive sensation, l’heure avancée fait suspendre et renvoyer à demain la discussion à peine entamée de la 2° question, Sur l’observation de l’un des secrétaires , M. le prési- dent propose de renvoyer à l’examen de l'assemblée géné- 410 PROCÈS-VERBAUX rale du Gongrès une ou plusieurs des questions soumises à la section, et il indique comme pouvant l’être la g° ques- de la série des beaux-arts. L’assemblée consultée se prononce unanimement pour le renvoi de cette question à l’une des séances générales. M. Peauger demande que la même décision soit prise à l’égard des deux questions discutées par la section dans le cours de cette séance ; il pense que ces deux questions sont loin d’être épuisées , et que M. de Caumont principa- lement aura d’intéressantes dissertations à présenter sur ce sujet. La proposition n'étant pas appuyée, la séance est levée à trois heures et un quart. Cinquième séance. — Du 6 septembre 1843. Rapporteur : M. GoeuEL, vice-président. M. le secrétaire donne lecture du procès-verbal de la dernière séance , qui est adopté sans réclamation, M. Chénuau aîné, avocat à Angers, membre de la sec- tion , est appelé à la tribune, pour y donner lecture d’un ouvrage sur la musique. Ce rapport, très-clair, très-lu- mineux, donne une idée parfaitemente xacte du systême de M. Raymond, système supérieur, par sa simplicité , à tous ceux qui l’ont précédé , et qui peut être adopté avec succès pour l’usage habituel. M. le président ouvre ensuite la discussion sur la 4° question des beaux-arts, ainsi conçue : « L'architecture moderne, prise depuis la Renaissance, a-t-elle fourni un élément nouveau qui lui soit propre ? Cet élément n'est-il pas la coupole à l’intérieur, et à l’ex- térieur le dôme ? Dans cette hypothèse , peut-on détermi- DES SECTIONS. All ner à quel ordre d'idées philosophiques ou religieuses correspondent la coupole et le dôme ? » M. le docteur Bourjot-Saint-Hilaire, de Paris, revenant sur les idées émises par M, Pavie, lors de la discussion de la 2€ question , déclare que cet orateur a eu tort de gémir ainsi sur la décadence de l’art, sur l’abandon de l’ogive dans la construction de nos églises. D’autres mœurs, d’au- tres besoins se sont manifestés , et ont amené de nouvelles formes dans les arts. La coupole , selon lui, est tout aussi religieuse que l’ogive, qui, à son origine, doit représenter la forêt, habitation première de nos ancêtres. M. de la Sicotière répond à M. Bourjot , que rien ne doit autoriser à innover des formes consacrées par le temps , le goût et le sentiment religieux. Il soutient qu’il ne peut être question de mode dans les arts, surtout lors- qu'il n’y a pas nécessité. La foi, dit l’orateur, a imprimé dans nos âmes des idées qu'il serait dangereux et en tout cas inutile d’ébranler. M. de la Sicotière ne repousse pas la coupole ; mais il la subordonne à l’ogive et à la flèche, qui sont des symboles plus naturels et plus frappants de la pensée religieuse. , Après une discussion intéressante, à laquelle prennent part MM. l’abbé Lacurie, de Saintes, Bourjot, Goguel, de la Sicotière, — M. de Vielbanc, reprenant la discussion de plus haut , remonte à Moïse et à la Genèse. La Genèse, se- lon lui, a révélé aux hommes non seulement l’Etre qu'ils devaient adorer, mais encore la manière dont cette ado- ration devait avoir lieu. Le christianisme vint plus tard couronner l'édifice de la foi. L’art chrétien s’inspira de cetle belle et srande mission ; toutes les parties de la créa- tion , appelées successivement à l’existence par la parole du Créateur, la plante, l’animal, puis l’homme , se pla- cèrent tour à tour et successivement dans la construction de l’édifice , et leur expression définitive fut la cathédrale. - 412 PROCÈS-VERBAUX Les développements de l’orateur sont brillants, et capti- vent vivement l’intérêt de l'assemblée. On passe ensuite à la discussion de la 6° question, ainsi conçue : « Pourquoi, tandis que les métiers autrefois aspiraient tous à la dignité de l'art, voit-on les arts aujourd’hui s’abaisser au niveau du métier ? et comment arrêler celte tendance ? » M. de Nerbonne n’approuve pas la manière dont les beaux-arts sont généralement traités aujourd’hui; leur tendance se matérialise de plus en plus, et les nobles traditions disparaissent de. plus en plus avec le feu sacré, devant la froide et stérile spéculation. M. Goguel croit à l’avenir de l’art , et, malgré les plain- tes de l’orateur qui l’a précédé , il ne peut lui accorder que l’art soit tellement déchu. M. Goguel ne pense pas que la question ait été bien posée; car, ni aux siècles où l’art fut en honneur, ni dans notre époque moins enthou- siaste,, il n’a pu retrouver cette délimitation établie par la question entre l’art et le métier, Le métier et l’art ne sont que des échelons divers d’une puissante manifestation de la vie, d’une tendance constante et indéfinie vers le beau , absolue. I] ne croit pas que le véritable artiste puisse redescendre aussi bas que le fait supposer la question. M. le docteur Hunault, d'Angers, soutient que l’art est loin de s’être abaissé au niveau du métier; mais que c’est plutôt le métier qui s’est élevé à la dignité de l’art. Après | avoir cilé quelques faits à l’appui de son opinion, il con- clut que l’art n’est pas en décadence. Après une discussion de quelques instants, soulevée par M. de la Sicotière , qui croit à l’abaissement de Part, M. le président ouvre la discussion sur la 7° question, ainsi concue : « N’est-il pas à remarquer, comme un des caractères dislinctifs de notre époque , que la plupart des poëles et DES SECTIONS. 413 des artistes donnent les meilleures productions au début ? En déduire les motifs, et résoudre en même temps le probléme de la coexistence de capacités véritables avec la médiocrité générale des œuvres. » M. Lecerf croit trouver la raison de ce fait dans la vie même du poète et de l'artiste, qui se font eux-mêmes hommes de métier. Ils aspirent à se créer une position de richesse et de considération , le plus souvent incompatible avec le caractère qui convient à leur mission, La soif d’ac- quérir les fait dévier de leurs principes, et ils finissent par ne plus prendre au sérieux leurs nobles inspirations. ” Après quelques objections présentées par M. Goguel, tendant à démontrer que nos grands maîtres n’ont pas débuté par des chefs-d’œuvre , et que l’on ne peut faire, des observations soumises par le précédent oraleur, une règle générale, M. Cellier du Fayel, de Paris , entre dans ae RSA ENTREE très-élevées sur cette importante ques- tion, Les considérations de la réalisation du beau, selon lui, sont la raison ét l’imagination: il voit même dans la réunion dé ces deux feultés les éléments essentiels et constilulifs du génie. Après avoir créé, l'artiste et le poète se Lrouvent comme épris de leurs créations, et ne con- sultent plus la raison qui seule pourrait les maintenir dans les limites normales de leur sublime vocation. Li: maginalion seule fait les frais de leurs travaux ultérieurs. L'heure étant avancée, M. le président lève la séance à trois heurés un quart. ! Sixième séance. — Du 7 seplembre 1843. Rapporteur : M. J. Sorix, secrétaire. La séance est ouverte, sous la prééidénce de M. Lecerf, à neuf heures du matin. 14 PROCÈS-VERBAUX M. Victor Pavie donne lecture du procès-verbal de la troisième séance, qui n’avait pas encore pu être présenté. Ge procès-verbal est adopté avec deux modifications présentées par M. le président et dont M. le secrétaire s’empresse de reconnaître la justesse. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion re- lative à la question de l’étude littéraire des Pères de l'Église. Après quelques observations successivement présentées par MM. Goguel , de la Sicotière, Eug. Talbot, d'Angers, de Lens, l’abbé Legeard , Lebrun et J. Sorin, d'Angers, explications desquelles il résulte : Que déjà l'étude des Pères de l’Église a été introduite, depuis plusieurs an- nées, dans l’enseignement public; qu’elle y existe comme faisant partie des travaux assignés aux classes d’huma- nités; qu’elle y existe aussi comme entrant nécessaire- ment dans les travaux relatifs à l’histoire littéraire , qui maintenant sont affectés à la classe de rhétorique, et dont le résultat doit être constaté dans les épreuves pour l’admission au grade de bachelier ès-lettres:; que cepen- dant il y aurait avantage à ce qu’un développement plus grand encore fût donné à cette étude ; — la section, sur la proposition de M. de la Sicotière , adopte à l’unanimité la décision suivante : « La section , reconnaissant l’heureuse influence qu’au point de vue littéraire doit exercer sur l’enseignement public l’étude simultanée des Pères de l'Église et des au- teurs classiques grecs et romains , émet le vœu que cette simultanéité se réalise plus largement dans l’enseigne- ment. » On passe à l’examen de la 5° question de linguistique, ainsi conçue : « Quelle est l'influence de la littérature actuelle de la » capitale sur les études , le goût et les productions litté- » raires en province ? » DES SECTIONS. 415 M. de la Sicotière dit que cette influence est immense, universelle, qu’elle domine toute la littérature. M. le président fait observer qu'il ne s’agit pas seule- ment de constater cette influence comme fait, mais qu'il convient d'examiner si ses résultats sont bons ou mauvais. M. le docteur Mame, de Savennières, pense que, d’a- près cette observation, la question eût été plus logique- ment placée parmi les questions de morale que parmi celles de linguistique. M. Victor Pavie estime qu’elle peut très bien être con- sidérée comme question littéraire, eu égard à la liaison intime qui existe entre la littérature et la morale. Abordant ensuite le fond de la question , il déplore la pernicieuse influence exercée sur les talents purs et naïfs que voit de temps en temps éclore la province par le con- tact avec la littérature industrielle et mercantile de Paris. Ge contact impose au talent des conditions de succès par limitation, conditions qui l’étouffent en le da de sa spontanéité, L’orateur cite l'exemple de Reboul, dont la première production produisit dans le monde littéraire une si vive sensation de gracieuse originalité , ét qui depuis a publié un volume de poésies aux formes pures encore, il est vrai, mais factices et dénuées de l'inspiration qui se révélait avec tant de bonheur dans le premier chant du poète ; en sorte , dit M. Pavie, que « nous avons eu un reflet de Lamartine et de Sainte-Beuve, mais plus de Reboul. » M. Hunault expose qu'il avait espéré que l’examen de la question provoquerait Ja rédaction d’une statistique , par laquelle les productions de la province seraient mises en regard de celles de la capitale. Pour donner une idée de la RPRECER dont il conçoit cette statistique , il passe rapidement en revue les ouvrages que , depuis quelques années , a produits PAnjou dans les différents genres de littérature. Q 416 PROCES-VERBAUX M. Goguel se demande quel doit être l’effet de la cen- tralisation morale etintellectuelle exercée par la capitale. Doit-elle faire prospérer les provinces ? Doit-elle les écra- ser ? C’est ce dernier résultat qu’il faut attendre. Témoin l'accueil favorable habituellement accordé par la capitale aux œuvres intellectuelles produites dans son sein , et le dédain réservé par elle aux ouvrages nés dansla province; témoin encore l'institution même des Congrès, si bien appréciée par les provinces, qui trouvent dans celte ins- titulion un moyen d'établir d’utiles rapports entre une foule d’hommes éminents qu’elles y envoient , tandis que Paris s’y fait à peine représenter par quelques-unes de ses notabilités. Cependant , suivant l’orateur , les travaux intellectuels des provinces et surtout les travaux historiques deman- dent à converger vers un centre commun pour échapper aux inconvénients d’une spécialité trop restreinte et trop locale. Ce centre , M. Goguel est d’avis qu’il convient de le placer dans le Congrès scientifique. M. Eugène Talbot , trouvant dans la question ces trois subdivisions : influence de la capitale sur les études , sur le goût et sur les productions de la province , réunit les deux premières parce que les études enfantent ou du moins développent le goût, qu’il convient de ne pas sépa- rer d'elles. Sous ce rapport, il regarde comme heureuse l'influence de la capitale , qui imprime aux études un mouvement et une direction uniformes, et par là doit con- tribuer à régulariser aussi le développement et les appli- cations du goût. Quant à l’action exercée par la capitale sur les productions de la province , il la regarde comme funeste, et il pense qu’il faut s’en prendre au journalisme et à la librairie, qui n’ont des encouragements et des sym- pathies que pour les productions de Paris. M. Lecerf rappelle que longtemps la littérature produi- DES SECTIONS. 417 sit dans l'intention d’être utile. Maintenant encore , elle s ‘inspire quelquefois de ce motif généreux ; mais trop sou- vent elle n’a d’autre objet qu ’un gain sordide. Par-là , elle est conduite à s’adresser aux plus mauvaises passions, et l’on voit des écrivains descendus à ce degré d’abaisse- ment et de mépris d'eux-mêmes qu’ils se présentent à un libraire, en tenant d’une main un livre moral qu’ils offrent à un certain prix, et de l’autre une composition immorale qu'ils offrent de substituer à la première, si l’on veat leur en donner un prix plus élevé. Or, c’est à Paris surtout que se produisent de pareils scandales. C’est donc de Paris que partent les exemples les plus funestes. Pouvons-nous supprimer le mal ? Non; mais l’atténuer, oui , en protestant individuellement et collectivement contre son existence et en signalant aux jeunes litté- rateurs par de sages conseils les ma a qu'ils doivent éviter. M. Hunault cran sur le projet de statistique dont il a parlé, Il dit que, dans sa pensée, ce projet devait sur- tout conduire à constater ce fuit , qu’il y a généralement plus de moralité dans les œuvres littéraires de la province _ que dans celles de Paris. M. Belouino voit particulièrement la source de l’in- fluence fâcheuse exercée par la capitale sur la province, dans le roman et dans le journalisme, qu’il signale l’un et Pautre comme ne mettant le plus souvent en jeu que des passions dangereuses, M. Lebrun voit le mal dans Fabsence de toute critique consciencieuse, M. Peauger voit avant tout dans 1] question dont on s'occupe, une .queslion d'organisation. De nos jours , on parle beaucoup d'organiser le travail matériel. On ne songe pas à la nécessité d’organisér le travail intellectuel. On fait aux littérateurs des reproches qu'il faudrait adres- TéU, 27 418 PROCÈS-VERBAUX ser plutôt à la masse des lecteurs. Les Jittérateurs qni se. livrent à des travaux sérieux sont condamnés à une exis- tence misérable. Le public , en recherchant avec avidité les romans , les feuilletons , les productions les plus lé- gères , entraîne dans une fausse voie des écrivains qui ne demanderaient pas mieux que de faire un plus digne em- ploi de leur talent, si leurs pénibles. labeurs devaient au moins leur assurer le modeste bien-être qui sufirait à leurs désirs. En ce qui concerne spécialement le journalisme, l'ora- teur pense qu'il y a bien de l’exagération dans les repro- ches qui viennent d’être formulés. Le journalisme, dit-on, est passionné. M. Peauger ac- cepte le fait, au nom du journalisme , comme un éloge et non comme un grief. La passion dans l'expression est une garantie de forte conviction dans l'esprit. La convie: tion sans doute peut se concilier avec l’erreur; mais toute conviction sérieuse mérile d’être jugée avec réserve et respecL. Fée. itik Le journalisme d’ailleurs n’est pas stérile au point de vue littéraire. Sous ce rapport , ce sont d’assez beaux noms que ceux de Châteaubriand , Bonald , Guizot, Thiers, Villemain, Gousin, Jouffroy, Dubois (de la Loire- Infér.), Lacordaire, Montalembert,, G. Sand, Ch. No- dier, Sainie-Beuvé , Lamartine. Or, tous ces nows ont appartenu ou même apparliennent encore au journa- lisme, qui a le droit d’être fier de pouvoir les citer comme siens. M. de la Sicotière rend hommage aux efforts, souvent Jouables, que fait le journalisme pour payer sa dette à la sociélé, surtout le journalisme de province. Car trop sou- venl le journalisme de Paris agit dans l’ombre, tandis que celui de province, connu de tout ce qui l’environne, com- bai au grand jour. Mais lorateur trouve que le préopi- nant a rabaissé la dignité des écrivains en voulant la DES SECTIONS, 419 défendre. Si le goût public, est égaré , si la société est coupable ais |} Mate n’est pas destinée à se faire sa complice. Au lieu de se laisser entraîner par la société dans une fausse voie , le littérateur et le journaliste doi vent ramener au bien la Société. Ils se doivent , devant les hommes et devant Dieu , de remplir saintement une mission sainte. Heureusement il est encore des écrivains, il en est beaucoup même , qui comprennent et remplis- sent leur devoir ; honneur à eux! Quant à ceux qui méconnaissent leur mission, qui désertent leur drapeau, opinion publique ne peut ayoir pour eux assez de flé- trissures. Ces dernières paroles sont accueillies par des applau- dissements prolongés. M. Belouino présente de nouyeau quelques observations dans le même sens. M. Peauger, à son tour, en reconnaissant et en procla- mant les devoirs de la littérature, répète que la société a aussi les siens et qu’elle a spécialement celui d’aider la litiérature à remplir la tâche qui lui est imposée. La discussion est close. M. le président annonce que l’on s’occupera demain d’une question relative aux beaux-arts. M. Rousseau demande qu'il lui soit permis de lire , au commencement de la prochaine séance, 1n mémoire sur la 6° question de linguistique. Cette proposition est rejetée. La section maintient sa décision antérieure , portant qu'il sera tour à tour consacré une séance à chacune des trois subdivisions des questions posées au programme, À onze heures, la séance est levée. 420 PROCÈS-VERBAUX Septième séance. — Du 8 septembre 1843, (Ce procès-verbal a été porté par erreur sous la date du 6, en remplacement de celui qui va suivre qui est celui du 6, et qu'on avait indiqué sur le mauuscrit être du 5.) Rapporteur : M. PEAUGER, secrétaire. Après la lecture du procès-verbal de la séance précé- dente, la discussion est ouverte sur la troisième question de philosophie, ainsi conçue : « Quelle est la nomenclature vraie des genres liltérai- » res qu’affecte la poésie ? Quelle est la valeur des nomen- » clatures suivies et enseignéos jusqu’à présent ? — Genre » épique. — Genre lyrique. — Genre dramatique, etc. » — Le genre tient-il à la forme qui lui est plus ou moins » ordinaire, ou ne tient-il pas à l’idée même dont son » inspiration procède ? » M. de Fleury croit que la question est mal posée, et qu’au lieu d’en restreindre les termes à la poésie , il faut fes étendre à la littérature , dans sa plus grande généralité, La question étant ainsi comprise par M. de Fleury, il établit longuement que la nomenclature liliéraire doit procéder des seules variétés possibles dans la pensée hu- maine elle-même. Or, la pensée humaine, une dans son essence , n’a de variété qu’en raison de sa plus ou moins grande détermination des objets auxquels elle s'applique. Elle se formule, dans sa moins grande détermination , par l’idée de genre. Elle se formule, dans sa détermination moyenne, par l’idée d’espèce. Enfin, dans sa plus com- plète détermination , elle se formule par l’idée purement individuelle, De là, M. de Fleury conclut qu’il n’y a que trois variétés littéraires : l’une , fondée par le merveilleux; l’autre, par l'idéal; la dernière , enfin, fondée sur le positif, C’est à cette trilogie , qu’il ramène la solution de la question posée, DES SECTIONS. 421 Personne ne réclamant la parole après M. de Fleury, on passe à la quatrième question, ainsi conçue : « Les genres littéraires se produisent-ils simultanément, » aux mêmes époques et à toutes les époques, ou se pro- » duisent-ils, principalement au moins , par voie succes- » 'sive et à des époques spéciales à chacun d’eux ? Dans ce » dernier cas , quel est l’ordre historique selon lequei ils » se produisent , et quel est le genre dominant de l’époque » actuelle ? » M. de Fleury, prenant pour point de départ sa division des genres lilléraires, en littérature merveilleuse, littéra- ture idéale , et littérature positive , examine avec de nom- breux développements celte quatrième question, dont la connexilé avec la précédente, lui paraît évidente. M. de Fleury pense que les genres littéraires se sont dé- veloppés par voie de succession. La littérature merveil- leuse à débuté; elle a été le genre de l’enfance de l’huma- nité. La littérature idéale est venue ensuite; elle a été le genre de la jeunesse de l’humanité. Nous en sommes maintenant à la littérature positive ; c’est le genre de la maturité intellectuelle. M. Gogael : La 4° question du programme demande si les genres lilléraires se produisent simultanément , aux mêmes époques el à Loutes les époques. Comme je suis convaincu que , de même que les arts et les beaux-arts , les genres littéraires ont suivi la marche ascendante de la civilisation, je répondrai hardiment que les genres liltéraires se sont produits par voie de succes- sion, et non pas simultanément. Quant à l’ordre historique , selon lequel ces genres se produisent, il y a à faire préalablement une double dis- tinction. Gelte distinction n’est pas nécessaire absolu- ment, mais elle est en quelque sorte indispensable pour expliquer la plus ou moins grande rapidité, la plus ou moins grande lenteur du développement des différents genres. 422 PROCES:- VERBAUX Nous distinguerons donc éntre la civilisation antique ou greco-romaäine ét la civilisation moderne, Prises à leur bércéau, ces deux civilisations ne me semblent pas pla- céés dans les fnêmes conditions ; la première a un élan plus primitif, en quelque sorte. En effet, on nous dit bien que la civilisation grecque est fille de la civilisation orientale ; mais il est constant qu’à peine sortie du creûset de fusion, nous voyons cette civilisation grecque revêtir un caractère qui lui est entièrement propre , soit dans la métropole, soit dans les colonies de l'Asie mineure. La civilisation grecque est-elle plutôt égyptienne que phry- gienne, que phénicienne; porte-t-elle un cachet propre aux diverses nationalités de l'Orient , qui ont contribué au travail de transformation ? En est-il de même de notre civilisation moderne, sur- tout quant à la littérature ? Je ne le pense pas, parce qu’elle porté éminemment le cachet de sa mère, de la civilisation grecque , si, toutefois, nous en exceptons les littératures scandinave et germanique. Quel est le genre que nous trouvons au début de toute société ? c’est Ia poésie lyrique , qui plane en quelque sorte sur le berceau de tous les peuples ; pourquoi ? parce que ce genre est la réaction naturelle de la créature vers le Créateur, parce que c’est le chant, le cri de l’âme, cri dé reconnaissance , cri de louanges, d’adorations. Chez les Grècs, comme chez les Romains, la poésie Iyrique fut d’abord réligieuse : chez les uns, comme chez les autres, elle descendit de l'infini au fini, c’est-à-dire qu'après avoir embrassé la Divinité, ellé embrassa l'humanité. Mais, ce qui lui manqua dans la civilisation antique , c’est le retour du fini à l'infini, l’idée chrétienne , l’idée religieuse ; ellé eut bien l'idée religieuse ; mais , la Divinité ayant été ra. menée aux proportions de linfini, la véritable idée reli- sieuse lui manqua; elle fut remplacée par l’idée du destin. Lorsque , par le fait même de la civilisation , les besoins Per rm DES SECTIONS. 428 sé furent augmentés , et avec eux le désir de les satiefaire, l’homme se détacha encore plus des régions de l'infini; il se réporta davantage vers la contemplation de l’homme lui-même ; et de tout ce qui y louche; la poésie se fit dra- malique où humaine , didactique , etc., ou objective. de n’ai pas la prétention d’épuiser une question aussi vaste que celle qui nous est imposée par le programme ; je me bornérai à vous exposer pourquoi le genre drama- tique se développa plus lentement chez les Grecs que chez les peuples modernes. Pourquoi le genre dramatique fit-1l des progrès si ra- pides chez les Grecs ? pourquoi, immédiatement après sa naissanc® , le voyons-nous grandir dans dés proportions si gigantesques , ét arriver à un degré de perfection qui n’a pas été dépassé? En parlant du génre dramatique chez les Grecs, je veux parler, en général; du drame antique: car, chez les Romains , il n’est qu’une imitation froide ét stérile , et même sophistique , comme dans Senèque , ou une imitation presque servile , faite par Térence et Plante, ‘ des auteurs de la comédie moyenne des Grecs. Pourquoi, d’un autre côté, le genre dramatique se développe-tal si lentement ? La principale cause , à mon avis , est celleci : chez les Grecs , le drame eut un point de départ et un bat aatres que chez les peuples modernes, Chez les Grecs, l’idée dominante est celle du destin, mais d’un destin aveugle , et trop peu élevé au‘dessus des forces de l’homme; c’est l’idée du fini, appliquée princi- palement à l'étude, à l’observation de l’homme et de ses instincts , de ses passions. Chez les peuples modernes, le drame me semble tendre, dès l’abord, vers l'infini, et c’est encore cette tendance que je retrouve dans les dra- mes de Racine; les Mystères et Racine, les uns encore informes et grossiers , l’autre ayant ressaisi la perfection, partent de l’idée même de la civilisation moderne, de Fidée chrétienne. Chez ces peuples, le travail s’opère 424 ” PROCÈS-VERBAUX moins lentement; ainsi, Lops de Vega et Shakespeare, sont arrivés plus vite au but que se propose le genre dra- matique. Mais, dans les autres pays, en France particu- lièrement , la marche progressive fut ralentie non seule- nent par les événements contemporains, mais encore par l'influence des littératures étrangères, et, en particulier, de la littérature espagnole. D’où proviennent les taches dans Corneille , si, toutefois , taches il y a, sinon de l’imi- tation d’abord forte du genre espagnol, Pourquoi Racine a-t-il atteint le plus haut degré de perfection , c’est qu’il n’est ni espagnol, ni ilalien, ni grec; il s’est imbu de toutes ces tendances; mais il est resté poèle éminemment français. En résumé, nous retrouvons en France la ten- dance vers l'infini, dans le genre dramatique , aussi bien à son début qu’à son apogée , et c’est en cela que je trouve la cause de la différence entre le genre dramatique anti- que et le genre dramatique moderne , et la différence dans leur développement. Je n’abuserai pas plus longtemps de l’indulgence de l'assemblée; je m’arrête , quoique n’ayant fait qu’ébaucher la question. ) M. Cellier présente quelques autres développements sur la question. Les cinquième et sixième questions du programme sont appelées , sans que personne demande la parole. On passe à la septième question, ainsi conçue: , « Quelle serait l'influence, au point de vue littéraire, » de l’étude des Pères de l'Église , introduite dans l’ensei- » gnement universilaire ? » M. Cellier pense que l'étude des Pères de l’Église ne pourrait produire que de très-bons effets. Il considère celte étude comme indispensable, et reproche assez vive- ment à l’Université de ne lui avoir pas donné, dans le programme de son enseignement , la place qu’elle mérite. M. Goguel, sans s'associer aux reproches adressés par bi * DES SECTIONS. 425 M. Cellier, à l’Université, partage son avis sur l’utilité de étude des Pères de l'Église. Notre tradition n’est pas seulement grecque et romaine ; elle est aussi chrétienne. L'enseignement littéraire doit porter sur l’ensemble de ses monuments, sans en négliger aucun. M. Sorin défend l Univeteilé Ce qu’on lui reproche de ne pas faire , elle l’a fait depuis plusieurs annnées déjà. Les Pères de l Église font partie de son programme d’en- seignement, à un degré suflisant; ce qui mérite le plus d'être mis en relief, comme modèle de latinité ou de grécité, a élé réuni, et est Lexle d’enseignement littéraire. La question est renvoyée à la séance prochaine , où la discussion sera reprise et continuée. Le 9, jour du départ pour Nantes, cette section n’a pas tenu de séance. Huitième séance tenue à Nantes, le 10 septembre 1843. Rapporteur : M. GoeueL,, vice-président. La discussion est ouverte sur la 15"° question de lin- guistique. M. Goguel croit qu’il n’est pas nécessaire de faire dis- paraître le caractère local ; il serait même dangereux d’y toucher, dans l’intérêt même de l’unité nationale. Après avoir défini le caractère local, l’orateur entre particuliè- rement dans des considérations détaillées sur la langue, comme expression du caractère local, ainsi que la chose a lieu en Alsace. Toutes les tentatives faites à diverses époques de notre histoire, pour faire disparaître ce carac- tère local , ant chaque fois soulevé des répugnances éner- giques de la part des popu'ations, Après quelques autres considérations relatives aux autres provinces, M. Goguel 496 PROCÈS-VERBAUX conclut qu’il faut respecter le caractère local où provin- cial, parce qu’il est indispensable , essentiel même à la formation du caractère nalional de l’anité française, M. Holgan, président de la société royale académique de Nantes, déclare , avec une lucidité et une chaleur qui captivent entièrement l'intérêt de l’assemblée, que dé- truire les idiomes particuliers, ce serait attaquer le passé dans une de ses manifestations les plus puissantes: mais, pour le présent , il eroit que ce respect des idiomes doit nuire à l'unité du caractère, Au reste, il ne croit pas avoir d'opinion arrêtée à ce sujet, L’honorable oratéur reconnaît en principe que, s’il est dans les décrets de la Providence, que ces idiomes disparaissent, c’est alors qu'ils disparaîtront, et l’homme devra se résignér; mais, l’homme doit-il prendre des mesures pour les faire dispa- taître, l’orateur ne le pense pas; il lui conteste ce droit, attendu que la langue est une manifestation sacrée de la vie. M. Lecerf ajoute à ces considérations des observations pleines d’intérêt et de justesse; tout en restant d’accord avec le préopinant, il admet la variété dans l’unité , et, après avoir conslaté cette variété dans l’ordre matériel et dans l’ordfé moral, il ptofesse un grand respect pour elle, tant qu’elle ne se pose pas contradictoirement avec l'unité. On passe ensuite à la discussion de la 11° question des beaux-arts. ; M. de Cussy croit que la rime ne vient ni de l'Orient, ni de la Germanie : mais il la trouve dans les vers léoniens du moyÿen-âge, qui, selon lui, remontent beauconp plus haut que le 11° siècle , comme on l’admet généralement. Quant aux modifications que la rime a subies , M. de Cussÿ croit qu’elles suivent la marche des vers léoniens. — L’orateur a trouvé 50 où 60 vers qui riment les uns avec lés autres, M. le président invité M, de Cussy, à con- ‘ DES SECTIONS. 497 signer autant que possible toutes les recherches qu’il a pu faire à ce sujet, attendu qu’elles sont du plus haut intérêt. M. Goguel ne croit pas nou plus qu’il convienne de faire dériver la rime des langues orientales ; il cite quelques faits poétiques relatifs à ces langues ; il demande à M. de Cussy, si, dans les recherches nombreuses qu'il a faites, il n’a pu retrouver des traces de vers blancs , au berceau de notre poésie vulgaire / avant que Baïf ne tentât de les réhabiliter dans notre poésie. On passe ensuite à [a 10° question des beaux-arts, « Rechercher quels rapports les comédies sociales d’A- ristophane pourraient avoir avec nos mœurs actuelles ? » M. Talliar se livre à une improvisation aussi brillante que profonde. Boileau , art poétique , liv. 1, v. 335, a dit: Des succès fortunés du spectacle tragique Dans Athènes naquit la comédie antique ; Là le Grec né moqueur, par mille jeux plaisants Distilla le venin de $es traits médisants. Aux accès insolents d’une bouffonne joie La sagesse , l'esprit, l'honneur fureut en proie; On vit par le public un poète avoué S’eurichir aux dépens du mérite joué, Et Socrate par lui dans un chœur de nuéés D’uu vil amas de peuple attirer les huées ; Enfin , de la licence on arrêta le cours ; Le magistrat des lois emprunta le secours, Et rendant par édit les poètes plus sages, Défendit de marquer les noms et Les visages. Boileau , dans ces vers , n’a point envisagé Aristophane, sous le point de vue des mœurs sociales. Étrauger à toute étude politique ; vivant à la cour de Louis XIV, Boileau n'était ni par caractère , ni par position , appelé à appré- cier le peintre de la démocratie d'Athènes. Les critiques , les littérateurs dt XVIII: siècle n’étaient 428 PROCES-VERBAUX guère, sous ce rapport, dans des conditions plus favora- bles; ils n'avaient pas un état populaire sous les yeux. Pour bien juger d’une démocratie, c’est un avantage de vivre dans une démocratie. Aujourd’hui, quoique la France soit une monarchie constitutionnelle, la démo- cratie y lient cependant une place assez large pour que nous puissions avec plus de facilités juger les productions d’Aristophane , et y puiser d’intéressants rapprochements. Ainsi , en lisant cet auteur comique avec nos idées ac- tuelles , et en rapport avec nos mœurs sociales, nous trou- vons dans la société d’Athènes : Pour l’exercice des droits politiques , la substitution des distinctions de fortune aux distinctions de naissance: Un esprit démocratique très-caractérisé , une passion ardente pour légalité , une jalousie continuelle contre les supériorilés sociales ; Une habitude d’opposition très-vive contre ceux qui ont en main le gouvernement. La comédie , tenant lieu de pamphlets et de journaux, s'attaque aux fonctionnaires publics, aux généraux en chef, les bafoue , les persiffle, signale leurs fautes avec une impitoyable rigueur. Aristo- phane s’en prend surtout à Cléon , son adversaire person- nel. Dans la pièce des chevaliers , dirigée principalement contre lui, on lit : « Pour gouverner la république , il ne faut plus être homme d’esprit cultivé et de mœurs pures, il faut être ignorant et scélérat » (les cheval., v. 191); et plus loin dans la même pièce : « Tu as tout ce qu'il te faut pour te concilier l’affection du peuple : une voix for- midable , un earactère méchant , les habitudes de la halle; rien ne te manque de ce qui est en usage dans l’adminis- tration de la république. » (Vers 217.) On retrouve également dans les mœurs d’Athènes, re- tracées par Aristophane : Une malignité, un dénigrement persévérants contre tout ce qui est fonctionnaire ; DES SECTIONS, 429 L'expression, l'intervention continuelle de l'opinion publique dans tout ce qui concerne les affaires de l’état ; : L'influence immense des juges ou pour mieux dire des jurés. Quelques exemples, tirés au hasard des Acharniens, donne une idée des pièces d’Aristophane et des mœurs d'Athènes. | M. Goguel répond à M. Tailliar. Après une improvisation très-détaillée, M. Goguel ar- rive à. celle conclusion, qu’il ne voit pas dans Aristophane l'expression sociale de son temps, mais une salyre pleine de malignité contre la société athénienne. Il le compare à Rabelais, et ne croit pas que la société grecque, quoi- que inférieure à la société moderne, sous tous les rap- ports, puisqu'elle est dépourvue de l’élément chrétien organisateur, soit aussi mauvaise qu’Aristophane la dé- peint. Il cite Méandre , ou plutôt les imitateurs de cet auteur dramatique , Térence et Plaute, etc. La séance est levée à 11 heures, —— Le 11, jour du retour à Angers, la 5€ section n’a pas tenu de séance. Neuvième séance. — Du 12 septembre 1843. Rapporteur : M. DE SENONNES, secrétaire. La séance est ouverte à une heure. M. le président rend compte des séances précédentes, du voyage à Nantes et des discussions qui se sont élevées sur les questions mises à l’examen. M. de Senonnes prend Ja parole sur la 10€ question , relative à la méthode nouvelle de l’histoire. Il essaie de démontrer que les innovations trop vives, trop tranchées dans l’histoire, dans la langue, dans toutes 430 PROCÈS-VERBAUX nos institutions , peuvent avoir de grands inconvénients , entrainer des perturbations dont on n’a pas assez expliqué les fâcheux effets. Il prétend que M. Thiers, comme his- torien , a été beaucoup trop vanté. Il le fait descendre de son piédestal : il signale des fautes graves dans son style et dans ses locutions ; il déclare que les paroles qui se- ront un jour de l’histoire sont écrites dans un fort man- vais langage; il dit qu'il ne faut porter qu’une main ré- servée sur toutes les parties de notre histoire, que de tout temps la France a été riche en vertus, en talents, en hon- neur, en Courage, en loyauté, et que l’avenir , il en est sûr, ne démentira ni le passé, ni le présent, M. Mame combat cette opinion et défend M. Thiers. En ce qui touche les innovations trop rapides , il pré- tend qu’elles ne peuvent être attaquées. M. de Senonnes réplique et maintient ses idées. Il s'appuie sur Napoléon, qui ne voulait que des chan- gements par degrés et qui ne répugnassent pas aux habi- tudes populaires. M. de Pindray soutient que l’on ne peut mettre de bar- rières aux progrès des connaissances humaines; que si un fait est faux, il faut le rectifier ; si un nom est incorrect , il faut le rétablir. M. Thiers a rendu de grands services à l'histoire. M. de Vielbanc (de Thouars) prétend que la question n’a pas été prise d’assez haut. L'histoire grecque a tout changé dans les pays occupés par les Grecs. Leur génie a inventé des harangües qui n’ont jamais pu être pronon- cées. Les historiens romains ont changé aussi par mépris les noms des peuples vaincus on combaltus par eux. L'histoire s’écrit presque de lout temps sous l'influence des passions. Il vante l’histoire des Mérovingiens par M. Thierry. Un peuple qui progresse se civilise et peut-être s’affai- blit davantage : la langue suit ces modifications, et la lan- DES SECTIONS, 431 gue française se prêle merveilleusement à tous ces déve- loppements, L’orateur ajoute que l’histoire, étant un récit , doit être vraie, elle doit se rattacher à toutes les idées raison- nables. Il se livre à des considérations d’un ordre très élevé qui le ramènent à la question telle qu’il l'a comprise, Îl exa- mine plusieurs écoles, celle des matérialistes entr’autres, Un système doit avoir des causes ; elles sont d’en haut. Bossuet , Le sublime Bossuet , voit partout la prédeslina- tion ; l’orateur l’en blâme ; l’idée religieuse néanmoins duit dominer l’histoire. La séance est levée. 12° Session 1841 à Nimes (Gard) 2 © 50 —— MODIFICATIONS APPORTÉES À L'ARRÊTÉ RELATIF A LA TENUE DE LA 12€ SESSION DU CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. (Extrait du procès-verbal de la séance du 5 mars 1844, de l’Insiitut des provinces.) Des difficultés s’étant élevées relativement à la tenue de la 12° session du Congrès à Montpellier. MM. Lallemand , Delille et Marcel de Serres qui avaient été nommés secré- taires-généraux, ont désiré que la réunion à Montpellier fût ajournée et ont écrit dans ce sens à M. de Caumont. Ce dernier a du en référer au bureau de la 21° session tenue à Angers et à l'Institut des provinces. Une réunion 432 CONGRÈS SCIENTIFIQUE de membres de cette savante compagnie a eu lieu à Paris, le 5 mars. Des lettres de MM, Lallemand, Delille, Marcel de Serres et Guillory, ont été lues et une discussion s’est éta- blie sur le choix de la ville qui pourrait être fait pour la session du 1** septembre prochain : MM. Bonnet, du Doubs; Richelet, du Mans, secrétaire de l’Institut; V'° de Cussy, de Saint-Mandé; de Gaumont, de Caen; Robinet, de la Société royale et centrale d'agriculture; Mis de la Bourdonnaye, de Rennes; de Fontette, député; Arthu, du Bas-Rhin; et Duchätellier, de Quimper (1), ont suc- cessivement pris la parole : après quoi l’assemblée a dé- cidé conformément à l’avis de M. Guillory, lun des se- crélaires-généraux de la onzième session, que la session de 1844, qui devait avoir lieu à Montpellier, s’ouvrira à Nimes le 1° septembre : MM. d’Ombres Firmas, de l’Ins- titut des provinces, et de La Baume, de l’Académie de Nîmes, ont élé nommés secrétaires-généraux. MM. de Caumont, Richelet, V'° de Gussy, de Commarmond, membres de l’Institut des provinces, et M. Guillory, se- crélaire-général de la 1 1° session, qui ont déclaré qu’ils se rendraient à Nimes, ont été chargés spécialement de di- riger les travaux et d’aviser aux mesures que n’auraient pu prendre MM. les secrétaires-généraux auxquels il ne restera que le temps strictement nécessaire pour les con- vocations et les mesures d'organisation. L'Institut a pensé qu’une excursion pourrait être faite à Montpellier à la fin de la session par le chemin de fer. Pour extrait conforme : Caen, le 6 avril 1844. À. DE GAUMONT, (1) M. de Las Cases, président général de la 11° session du Con- grès, n'avait pu se rendre à la réunion à laquelle il avait élé convo- qué, + DE FRANCE. 433 CIRCULAIRE . DE LA COMMISSION PERMANENTE DE LA SECTION DES SCIENCES MÉDICALES NOMMÉE À ANGERS PENDANT LA 11° SESSION. Messieurs et honorables confrères, Nous venons remplir auprès de vous la mission que nous avons recue d'établir, entre tous les médecins et pharmaciens français, l’unité de vues, l'ensemble d’ef- forts si désirable, dont l’absence ajoute aux causes, déjà trop multipliées , de préjudice pour la profession médicale. = Vous le savez, l'exercice de la médecine et de la phar- macie est entouré d’innombrables abus. Le charlata- nisme, sous toutes les formes et à tous les degrés , spécu- Jant sur la crédulité des malades , exploite l'ignorance des gens du monde , et, se jouant des lois qui doivent le réprimer, appauyrit la profession et déshonore la science, au grand détriment de l'humanité et de la moralité pu- blique. Contre cette audace impunie des médicastres de tout étage, nos plaintes sont incessanles ; mais leur isolement nuit à leur efficacité. La réforme médicale qu’elles solli- citent, et qu’on avait promise , fuit d'année en année de- vant l'espoir que nous avions conçu. On ajourne depuis dix ans une loi nécessaire sur l'exercice de la médecine, que nos réclamations avaient fait élaborer dans les con- seils du pouvoir (1). (1) La création en 1835, sous le patronage de la Société de mé- decine d'Angers , d’une association des médecins et pharmaciens de Maine et Loire, un ‘mémoire lrès-étendu sur l’état de la médecine et de la pharmacie dans le département de Maine et Loire, adressé par à M À 28 434 CONGRÈS SCIENTIFIQUE En attendant , le mal fait des progrès , et, pour hâter le remède , le Gongrès scientifique de France , dans sa dixième session, à Strasbourg , sur la proposition de M. P.-M. Roux (de Marseille), a pris, dans les termes sui- vants , une décision par suite de laquelle il est aujour- d’hui , pour la seconde fois , fait un appel aux médecins et pharmaciens de nos quatre-vingt-six départements. > 2 S SZ > > VE De VA » ) > > > 3 y » « Une commission de six membres , choisie parmi les médecins et pharmaciens de la ville où le Congrès aura siégé , représentera la section médicale du Congrès ) scientifique pendant l'intervalle des sessions ; elle aura pour mission de servir de centre el de point de rallie- ment à tous les efforts qui ont pour but la réforme mé- dicale. » Gette commission invitera les médecins et pharma- ciens de chaque département à créer au chef-lieu une commission semblable. Les comités départementaux veilleront à l’exécution des lois sur l’exercice de la mé- deciné et de la pharmacie. Quelque incomplète que soit la législation actuelle , elle contient des garanties précieuses qu'il importe de ne pas laisser tomber en désuétude. Les comités recueilleront tous les faits con- traires à ces lois ou à la dignité de la profession ; ils réuniront tous les documents qui ont pour objet les améliorations à introduire dans l’organisation actuelle de la médecine. la Société de médecine d'Angers à la commission nommée par le mi- nistre pour élaborer le projet de loi sur la médecine ; un autre mé- moire sur le chaxlatanisme , publié depuis daus le bulletin de la So- ciété industrielle de Maine et Loire en 1838; la nomination et les travaux d’une commission de répression du charlatanisme qui amena une circulaire des autorités civiles et judiciaires, pour l'exécution ef- fieace et rigoureuse des lois sur la médecine et la pharmacie, témoi- gnent assez que les médecins d'Angers ne sont pas restés inertes dans la poursuite des améliorations que nous avons le droit de demander, dans l'intérêt de la société autant que dans celui de notre profession, DE FRANCE. 435 » Les comités départementaux correspondront avec la commission centrale et lui transmettront les résultats de leurs trayaux. La commission cenirale , réunissant ces cbservations isolées , en présentera l’ensemble aux autorités compétentes, et sera chargée d’accomplir, au nom des médecins et des pharmaciens de la France, toutes les démarches nécessaires pour arriver au but de nos efforts. 3 0% © % D 1% » À l'ouverture du nouveau Congrès , la commission centrale rendra compte à la section médicale des tra- yaux entrepris et des résultats obtenus ; elle déposera ses pouvoirs au sein de l’assemblée , et une nouvelle commission , élue parmi les membres résidants, conti- » nuera l’œuvre de là première. Ainsi chaque année, le » Congrès scientifique de France sera saisi de l’impor- » tante question de la réforme médicale, et chaque année, » une commission centrale , prise parmi ses membres, » 2 » ‘+ À = entretiendra, dans l’intervalle des sessions, l'impulsion nécessaire pour arriver au but. La ville d'Angers sera le siége de la onzième session du Congrès scientifique , » c’est parmi les médecins et pharmaciens de cette ville » que sera choisie la commission centrale de 1843 à » 1844 (1). » Messieurs et honorables confrères , nous aimons à _croire que cette institution nouvelle, en donnant de l’en- semble à nos efforts , nous fera réussir dans la lutte. Ral- lions-nous à ce centre d’action qui nous est offert. Notre union fera notre force , et la répétition , l’unanimité de nos plaintes , les feront entendre de ceux qui peuyent y faire droit, La commission permanente veut les progrès de Ta science , la dignité , les intérêts de la profession médi- cale. (1) Le Congrès scientifique de 1844 devait se réunir à Montpellier; d’autres dispositions en mettent le siége à Nimes, pre 436 | CONGRÈS SCIENTIFIQUE Pour atteindre ce but , et s’adressant à tous nos con- frères , elle charge spécialement , dans chaque départe- ment , les sociétés de médecine , et , à leur défaut , les : jurys médicaux, de nommer des comités auxquels seront confiées , dans chaque localité , les importantes attribu- tions de rechercher les faits nuisibles à l’art de guérir et préjudiciables à ceux qui l’exercent dans ses diverses branches. Ces comités départementaux, veillant à la stricte exé- cution des lois sur lexercice de la médecine et de la pharmacie, poursuivront les abus en ces matières par tous les moyens en leur pouvoir et en particulier par- devant l’autorité judiciaire. Ils sont invités à faire connaître , dans le plus bref dé- lai, à la commission permanente leur existence et leur or- ganisation , et à transmettre avant le 1° août le résultat de leurs travaux (1). Alors, messieurs et honorables confrères, aidée de vo- tre active collaboration : appuyée sur les matériaux que vous aurez recueillis pour elle, la commission permanente de la 11° session pourra, en remettant ses pouvoirs à celle du 12° Congrès scientifique de France, fournir un compte- rendu riche de résultats positifs, et fécond en espérances pour le succès de notre œuvre de réformation el de pro- grès. Angers, le 25 mars 1844. Les membres de la commission centrale, Maur, d.-m., président ; GASTONNET, d.-m., secrélaire ; Bicor, Mirauzr, dd.-mm.; Rousou, pharmacien. (1) Les lettres devront être adressées , franches de port, à M. le docteur Castonnet , secrétaire die la commission centrale à Angers. DE FRANCE. 437 NOTES. Ne 1%. + Les récompenses distribuées dans la séance générale du 7 septembre 1843 (voir pages 75 et suivantes), con- sistaient en F | 2 médailles d’or. 1 rappel de! médaille d’or. 5 médailles de vermeil. 13 médailles d'argent. ’ 4 rappels de médailles d'argent. 21 médailles de bronze. 3 rappels de médailles de bronze. 34. mentions honorables. 1 rappel de mention honorable. 13 citations favorables. 1 récompense pécuniaire. Ensemble. 98 distinctions décernées aux exposants. [N° Jme, Plusieurs docteurs en médecine, du nom de Roux, habitant là ville de Marseille, il est convenable de faire connaître ici que celui qui a assisté au Congrès d'Angers, et qui a présidé la 3° section, — sciences médicales (voir les pages 249 et suivantes), est M. P. M. Roux , de Mar- seille, secrétaire perpétuel de la Société de statistique des Bouches-du-Rhône. FIN DU PREMIER VOLUME. ERRATUNM. Pag. 158, lig. 18, au lieu de: mais M, de Falloux..…..… jusqu’à la fin de la phrase, mettez : M. de Falloux a terminé son discours en rendant une éclatante justice au rôle magnifique des parlements dans l'administration de la justice : il les représente allant recevoir, pour ainsi dire, dux pieds dà éhèné de Vincennes, là justice des mains même de saint Louis, et se la transmettant de génération en généra- tion comme uñ dépôt sacré, TABLE DES MATIÈRES DU PREMIER VOLUME. Extrait de l’arrêté du Congrès scientifique de France + ::, Programme arrêté par là commission centrale de la 11° séssion. Questions proposées pour chaque section. Première section. — Sciences naturelles. — Géologie, bota- QUE lol 200106 | NN oo OR Ve SE Deuxième section. — Agriculture et industrie. , : . . . Troisième section. — Sciences médicales, — Hygiène publique étiprivée.) 0,0. Meme oim - ist olf et à £tA eubnazquee sihomuiross 0 C2 ° . ° e e + . . e +. ‘ F Chirurgie vel te elle el ee (ele Ve TROUS OS LISE à Milecihe)Nétérinaire ju ii Li) irooune fe Mer atind à à Quatrième section. — Histoire et archéologie, — Histoire. _« D OOME a tente no bob u mu Mr La hs lg Cinquième section. — Littérature et beaux-arts, — Morale et po nt DURE TL. QU SEE NE nm ae 2e VE PAC NNSE RON RE 8 ATEN ONE A QU UE 2 VAN, Eu LENS ET, pÜloSie due Sixième section. — Sciences physiques et mathématiques . , Fêtes à l’occasion de la onzième séssion du Congrès scientifique EPP RON AT ELA Cr he abrite et Emploi des soirées pendant la tenue du Congrès 41. 21, . t1 13 17 18 20 21 Ibid 24 26 27 29 31 32 33 440 TABLE DES MATIÈRES. Arrêté de M. le maire de la ville d'Angers . . . . . . . Apercu des principaux établissements, monuments et collec- tions accessibles à MM. les membres du Congrès . . . . Collections particulières et ateliers d’arts . . . . , . , Etablissements particuliers... 4. 004 4 mem, Programme de l’excursion à Nantes, +. . . . . + : . Assemblées générales. Première séance générale . . + + + + + + + + + … Deuxième séance générale. . « . . . «+ . . . . . Troisième séance générale. . . . . . + . . . . . Quatrième séance générale. . . . + «+ + «+ + «+ . . Cinquième séance générale . . «+ . . . + + + +. + SIXLEME SÉANICE PÉNETAIES LE re = 2 == eee Septième séance générale . * ."". «+ . + + . + + . . Huitième séance générale . . + + « + . + + . + + Excursion du Congrès scientitique de France à Nantes . . . Neuvième séance générale. 1. Me ee. Séance de réception du Congrès scientifique à Nantes . . . Dixièmie séance générale "0% Ge de de se it's nos Onzième Séance générale 00" Me MU, ET Douzième séance générale: + 4 4 . . . . . . , . Treizièmeïséance générales0 cie qe. nf bus Sorti daufes Omission à la deuxième séance générale. . . . . . . . PROCÈS-VERBAUX DES SECTIONS. 98 140 144 146 148 163 Première et sixième sections réunies, — Sciences naturelles, physiques et mathématiques. Première séance du 2 septembre 1843 (M, Trouessard, rap- porteur de la première section). .- ,:. . . . . . : Première séance du 2 septembre 1843 (M. Debrun, rapporteur ide lasixième section). - .- .+1.+ ,- 0: .: ,- .- +. A Deuxième séanee du 3 septembre (M. Wolski, rapporteur): Troisième séance du 4 septembre (M. Trouessard, rapporteur) Quatrième séance du 5 septembre (12, Debrun , rapporteur) . Cinquième séance du 6 septembre (M. Wolski, rapporteur) . Sixième séance du 7 septembre (M. Debrun, rapporteur). . Septième séance du 8 septembre (M. Debrun, rapporteur). . Huitième séance du 12 septembre (M. Guéranger, rapporteur). Deuxième section, — Agriculture et industrie. Première séance du 2 septembre 1843 (MM. Guinoyseau et Sé- bille-Auger, rapporteurs) th "4.568 21 tie Ps non à piçré dal 18 167 « 168 | Ibid 171 177 180 185 190 194 198 TABLE DES MATIÈRES. Deuxième séance du 3 septembre (M. Heuzé , rapporteur) .. Troisième séance du 4 septembre (M. de Falloux, rapporteur). Quatrième séance du 5 septembre (M. de Sevret, rapporteur). Cinquième séance du 6 septembre (M. de Sevret, rapporteur). Sixième séance du 7 septembre (M. de Falloux , rapporteur). Septième séance du 8 septembre (M. de Falloux, rapporteur). Huitième séance du 9 septembre (M. Heuzé, rapporteur). . Neuvième séance du 10 septembre ( M. Heuzé , rapporteur) Dixième séance du 11 septembre (M. Guéranger, rapporteur). Troisième section. — Sciences médicales. Première séance du 2 sept. 1843 (M. Ed. Laroche, rapporteur). Deuxième séance du 3 septemb. (M. Ed. Laroche, rapporteur) : Séauce du 3 sept. de là sous-section chirurgicale , à l’'Hôtel- Dieu (M. Dayiers, rapporteur) . . . . ut Troisième séance du 4 septembre (M. Mirault rapporteur). Séance du 4 sept. de la sous-section chir ba a l’Hôtel- : Dieu (M. Daviers, rapporteur) . . . SE (AR e Quatrième séance du 5 septembre (M. Mirault, ; rapporteur). Séance du 5 sept. de la sous-section chirur POUTEt à l’Hôtel- Dieu (M. Daviers, rapporteur) . . . NET ER Cinquième séance dû 6 sept. (M. Bouriétst Hilaité : out JA Sixième séance du 7 septembre (M. Castonnet, rapporteur). Septième séance du 8 septembre (M. Castonnet, rapporteur). Séance du 8 sept. de la sous-section chirurgicale, a l’Hôtel- Dieu (M. Daviers, rapporteur) UMA ler Ne Mrs Notes Huitième séance du 9 sept. (M. Lemarchand, rapporteur). Séance du 9 septembre, tenue au Palais de justice à Nantes (M. le docteur Gély, rapporteur). . . CHALET Neuvième séance du, 10 sept. (M. le docteur Gély, rapporteur). Quatrième section. — Histoire et archéologie. Première séance du 2 septembre 1843 (M. de Lens, rapporteur) Deuxième séance du 3 septembre (M. Marchegay, rapporteur) Troisième séance du 4 septembre (M. Marchegay, rapporteur) Quatrième séance du 5 septembre (M. L. Cosnier, rapporteur). Séance supplémentaire du 5 sept, (M. Crépon, rapporteur). Cinquième séance du 6 septembre ( M. de Lens, rapporteur). Sixième séance du 7 septembre (M. Marchegay, PAbDOeUE) Séance supplémentaire du 7 sept. (M. de Cussy, rapporteur). Septième séance du 8 septembre (M. de Lens, rapporteur). . (! 2 : TABLE DES MATIÈRES, Pages Huitième séance du 9 septembre (M. L. Cosnier, rapporteur). 368 Neuvième séance tenue à Nantes, le dimanche 10 septembre (M. de Lens, rapporteur) . . , . . . 20e QUES Dixième séance du 11 septembre (Me de Lens ha béitäné) + 379 Cinquième section. — Littérature et beaux-arts. Première séance du 2 septemb. 1843 (M. J. Sorin, rapporteur) 385 Deuxième séance du 3 septembre (M. Peauger, rapporteur) . 387 Troisième séance du 4 septembre (M. V. Pavie, rapporteur). 394 Quatrième séance du 5 septemb, (M. Eug. Talbot, rapporteur) 400 Cinquième séance du 6 septembre (M. Goguel, rapporteur). . 410 Sixième séance du 7 septembre (M. J. Sorin, rapporteur). . 413 Septième séance dn 8 septembre (M. Peauger, rapporteur). . 420 Huitième séance tenue à Nantes, le 10 septembre (M. Goguel, rapporteur). 7: "0", . ALT VTUR 425 Neuvième séance du 12 sept. (M. d Senonnes rappor Fr}: 429 Modifications’ apportées à l’arrêté relatif à Ia tenue de la 12e : session du Congrès scientifique A ae ee ml env cv: | Circulaire de la commission permanente de: la section des sciences médicales nommée à Angers pendant la 118 session. 433 Notes ON 28 SU Mount Upon suite #1 ah que à NB Boo FIN DE LA TABLE, CONGRÈS »* SCIENTIFIQUE DE FRANCE ——— 0 00 —— 11° SESSION. — ANGERS 1845. VA pe. Nef ñ a # REP Dr res Ne * ne Moi sR fs PHARE A A 9 de Lee EN 5 d ) 6 dl we deg Fe 4 # ë ap" CONGRÈS SCIENTIFIQUE FRANCE, ONZIÈME SESSION, TENUE A ANGERS, EN SEPTEMBRE 1843. TOME SECOND. MÉMOIRES. ANGERS, CHEZ TOUS LES LIBRAIRES DE LA VILLE. PARIS, CHEZ DERACHE, LIBRAIRE, RUE DU BOULOY, 7, MDCCCXXXXIIE, Énx À AAOÏSA wo | NU 4 Fou 4 £ ET 4 és DIE CAL say sun _ Ré se ET LACHÈSE. CONGRES SCIENTIFIQUE DE FRANCE. ONZIÈME SESSION cree: C0000101000S000022080000060200000800060© 1@rcoosersçetescece F MÉMOIRES DES 1r° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. Sciences naturelles, Physiques et mathématiques. GÉOLOGIE. MÉMOIRE SUR LE GISEMENT DU BASSIN ANTHRAXIFÈRE, DANS LE DÉPARTEMENT DE MAINE ET LOIRE, L'AVOISINENT ET QUI LE COUVRENT, PAR M. A. N. WOLSKI, : ET SUR SES RELATIONS GÉOLOGIQUES AVEC DIVERS TERRAINS QUI Ingénieur civil employé à l'administration royale des mines. . ° EE l'écorce de la Pé- sule, qui compose sa partie ouest, est divisée par les ,insule de l'ouest roches primitives en trois bassins distincts de terrain de dela France, transilion mis en relief par leur soulèvement. L'étude générale de la France a démontré que la pénin- Aperçu général de TL 1 Le bassin de tran- sition de Rennes. 2 MÉMOIRES Le premier, au nord, comprend en entier le départe- went de la Manche et les frontières ouest des départe- ments du Calvados et de l’Orne, il s'étend depuis Cher- bourg jusqu’à la grande bande de granit entre Alençon et Brest, | Le second s’appuie au nord sur celte même chaîne gra- nitique , au sud sur celle du Bocage vendéen , et à l’ouest il se termine par un étranglement produit par la jonction de ces deux chaînes granitiques dans les montagnes an- ciennes du Morbihan, Près de la limite nord de ce bassin, qui forme le centre de la Bretagne , existe la ville de Rennes, dont le nom a servi à M. Dufrenoy pour dési- gner ce bassin. Le dernier bassin, beaucoup moins étendu que les deux autres, est presque entièrement limité par les montagnes d’Arrez au nord , et par les montagnes noires au sud. Les deux chaînes appartiennent entièrement au terrain de transition. Ces trois bassins ne sont pas complétement isolés. Gelui de la Manche communique au bassin de Rennes par la petite chaîne de grès de Domfront et de Mortain. Quant au bassin de Rennes , il se ramifie à celui du Finistère par une langue étroite comprise entre Corlay et Rostre- nenn , la jonction des montagnes anciennes de Brest et de Morlaix avec celles du Morbihan n’étant pas com- plète. Le terrain anthraxifère de Maine et Loire, qui est l’ob- jet du présent mémoire, faisant partie du bassin de Ren- nes, me donne l’occasion d’en passer en revue la com- posilion avant d’entrer dans la description détaillée du gisement de ce terrain et de ceux qui l’avoisinent. Entre la limite nord du granite de la Vendée, qui passe par Tilliers, Cholet, Izernay et une ligne qui joint la pre- mière à Tilliers , et qui se dirige vers La Salle et Saint- ST DES 1'° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 3 Pierre , on observe une roche ou un ensemble des roches d’origine ignée. M. Lechatelier , ingénieur des mines , l’a rapportée à l’eurite ou feldspath grenu. Cette roche est généralement très fissurée et ne donne que des maté- riaux de petites dimensions ; elle n’est exploitée que comme moëllon et pavé; elle fournit de très bons maté- riaux pour entretien des routes. Au milieu de cette masse , à Coron, Vezins, Trémen- time , il existe une belle syenite, généralement composée de quartz , de feldspath blanc ou jaunâtre , et quelquefois de mica noir. Parfois le feldspath est rose, et la roche donne des pierres de taille d’un bel effet dans les cons- tructions. Près d'Angers , il existe deux mamelons granitiques de peu d’étendue , qui apparaissent au milieu des schistes de transilion sans relation apparente avec les roches précé- dentes. Le plus considérable est compris entre les com- munes de Saint-Glément , la Meignanne , Saint-Lambert la-Potherie et la route royale d'Angers à Rennes. Le second, beaucoup moins étendu, est situé au sud et à peu de distance de Bécon , dans le voisinage du premier, On connaît dans l’Anjou un quatrième flot granitique au sud de la Chapelle-Rousselin. Il forme à peu près un cercle d’environ 3,000 mètres de diamètre. On observe de nombreux gisements de porphyres - quartzifères, roche à pâte feldspathique compacte, parse- mée des cristaux de quartz isolés dans la pâte ; quelque- fois elle devient cristalline , et renferme de petits cristaux d’amphibole qui lui donne un faux air de granit. La partie ouest-nord de ce bassin jusqu’à la ligne de Ploërmel à Dinan et un liséré autour des granits du nord présente les caractères du terrain cambrien; sa direction est constamment comprise entre est-20° à 50°-nord , tandis que les schistes placés à l’est de cette ligne se dirigent est-10° à 15°-sud. Les observations de 4 MÉMOIRES l'aiguille magnétique à elles seules fourniraient une grande probabilité pour la séparation des deux terrains ; celte considération est transformée en une preuve certaine par Ja confirmation qu’elle reçoit de la différence de la nature du terrain. Il se compose principalement de roches schis- teuses d’un noir bleuâtre , fréquemment satinées et pas- sant au schiste talqueux Elles sont associées à du grès à grains fins et à des grauwackes schisteuses. Ges dernières roches sont d’un gris jaunâtre, tantôt violacées, maculées de parties plus claires et passant à des masses argilo - schisteuses un peu endurcies et de la même couleur. Il y a peu de calcaire dans le système cambrien. Celui de Cartravers, près de Pontivy, paraît cependant se rappor- ter à cet élage du terrain, On y voit quelques carrières d’ardoises , mais elles sont Loujours épaisses ei ne servent qu’à des usages locaux. M. Lorieux , ingénieur en chef des mines , dans son élude géologique du Murbihan , a marqué la séparation de deux terrains de transition par le passage des poudin- gues qui se suivent sur une longueur de 20 kilomètres en- viron ; ils forment plusieurs bandes parallèles, mais toutes placées à la séparation des schistes ronges et verts, aux environs de Plador et Perousse, ainsi que près de Lohéac et Malestroit. M. Dufrenoy, dans l’étude générale de la France , rap- porte que la construction de ce poudingue , sa direction conforme à celle des schistes rouges qui appartiennent au terrain silurien , les fragments de quartz noir et de schiste vert qu’il contient et qui proviennent du cambrien, doi- vent le faire ranger dans ce premier terrain, comme une séparation entre les deux étages du terrain de transition. Le terrain silurien, avec ses deux systèmes anthraxifères, couvre le reste de l’étendue du bassin; sa direction géné- rale est ouest-15°- nord. Les roches principales qui le composent sont des poudingues à galets de quartz hyalin DES 1'e ET 6° SECTIONS REUNIES. 5 blanc , de quartz hyalin rose et violet et de quartz noir, reliés en général par un ciment siliceux , quelquefois ce- pendant par un ciment talqueux. Ge poudingue forme la couche la plus inférieure de ce groupe des’ terrains de transition ; les divisions de ces terrains sont donc mar- quées comme pour les terrains secondaires par le dépôt de roches arénacées, circonstance naturelle et en rapport avec les causes qui ont apporté une solution de continuité dans l’échelle des formations géologiques. Immédiatement au-dessus du poudingue succèdent des grès blancs, sili- ceux , à grains fins et à cassure souvent esquilleuse. On rencontre dans ces couches entr’autres un fossile dont la forme est celle de tiges cylindroïdes un peu cannelées, avec des espèces de ssl de distance en distance ; ces tiges sont placées presque toujours perpendiculairement à la direction des couches, c’est-à-dire dans une direction inverse de celle qu’auraient dû prendre des corps char- riés par les eaux; il faut donc qu’ils appartiennent soit à des coraux qui ont vécu sur la place même où on les observe actuellement, soit à des plantes qui ont végété en même temps que le grès se déposait. On peut supposer encore que ces Liges appartenaient à d’anciens tubes creu- sés par des coquilles lithophages , et que les siries trans- versales qu’ils portent sont les traces des valves de ces fossiles. Ces grès sont nées micacés ; quelques couches ont peu d’adhérence et se désagrègent sous forme de sable. Cest la roche la plus constante du terrain silurien, au milieu duquel elle forme la plupart des cimes saillan- tes. Des schistes noirs, bleuâtres , recouvrent le grès ; c’est à celte assise du terrain que M. Dufrenoy rapporte les ardoises d’ Angers. Ce schiste fossile constitue plusieurs couches puissantes dans ses environs ; on les rencontre en marchant du nord au sud , depuis la butte d’Erigné aux Ponts-de-Cé jusqu’à Saint-Barthélemy. Gelte zône, 6 MÉMOIRES qui se prolonge suivant la direction générale des couches siluriennes , renferme un grand nombre de carrières très importantes. Elle a été exploitée très anciennement dans sa partie sud, sur le coteau de la rive gauche de la Loire, à Juigné. Quelques tentatives infructueuses ont été faites sur la partie moyenne entre les Ponts-de-Cé et la route de Saumur; mais aujourd’hui toutes les exploitations sont coucentrées sur la limite nord. En allant au nord de cette zône, on rencontre trois autres lignes tout à fait dis- tinctes. La première présente, près des communes de Saint-Michel et Chanveaux, de petites carrières pla - cées à cheval sur la limite du département de Maine et Loire. La deuxième , sur la route de Segré à Pouancé, présente dans les landes de la commune de Noyant , qui la bordent au Nord, deux petites carrières de peu d’im- portance. Enfin la troisième ligne, formée par une couche peu puissante de schiste ardoisier de bonne qualité , est exploitée à Renazé, dans la Mayenne , sur la commune de Saint-Sauveur, et montre, entre Marigné et la Jaille- Ivon , de nombreuses carrières abandonnées. Au-dessus des schistes , on retrouve de nouvelles couches de grès, mais elles sont en général beaucoup moins épaisses que celles qui forment la base de ce groupe du terrain de transition. Les schistes reparaissent ensuite associés aux couches de calcaire et à celles des grauwackes. Enfin les syslèmes anthraxifères couronnent ce bassin de transi- tion. Je m'étendrai sur la position géologique de ces cou- ches , en donnant les détails des environs du terrain an- thraxifère d'Anjou. Les départements de la Sarthe et de la Mayenne sont traversés par une couche anthraxifère , suivant une ligne qui se dirige de l’est-25°-sud à l’ouest-25°-nord. Cette bande se rétrécit en avançant vers l’ouest dans le dépar- tement d’Ille-et-Vilaine. L'existence du bassin y est par- faitement caractérisée. Les mêmes couches se reprodui- DES 1'° ET 6° SECTIONS REUNIES. 7 sent inversement disposées et plongent en sens contraire; au milieu du bassin, dans l’endroit où le pli s’est fait, elles sont violemment contournées et repliées sur elles- mêmes. M, Dufrenoy met cette bande au même niveau géologique que celle d’Anjou qui fait le sujet de l’étude suivante. Le terrain de Pen du sud du département de Maine et Loire, depuis son contact avec les roches ignées, présente une zône métamorphique que lon peut consi- dérer comme limitée au nord par le Layon jusqu’à Saint- Lambert-du-Lattay, et, à partir de ce point, par une ligne tirée de Saint-Lambert à Saint-Florent-sur-Loire. Ces roches ont éprouvé une espèce de recuit , qui a eu pour résultat un nouveau groupement de molécules et quelquefois même le développement ou l’introduction de certains éléments étrangers à la roche; c’est ainsi que l’on voit, d’une manière tout à fait certaine, des calcaires compactes devenir cristallins ou se transformer en dolo- mie; des grès prendre une structure porphyroïde ou se changer en quartzites; les schistes argileux se charger de cristaux de mica, de tale, de tourmaline , d’amphibole ; souvent ils sont formés de feuillets contournés contenant des modules de quartz. Dans cette région , on trouve de nombreux filons de quartz blanc laiteux , exploités pour l'entretien des routes ; deux:de ces filons ont élé signalés comme métallifères. Ils renferment de la pyrite, du fer arsénical , de la galène et du cuivre pyriteux. Ces mine- rais paraissent avoir donné lieu anciennement à une exploi- tation. La chaîne granitique de la Vendée, au commencement de son soulèvement, a brisé, dans la direction de sa crête, les couches stratifiées, jadis déposées dessus; ensuite, au fur et à mesure que son ascension avançait, le rayon d’ondulation s’augmentait et les strates devenaient de plus en plus obliques. Enfin , lorsque la nature , lassée Position actuelle du terrain anthra- xifère d’Anjou et 8 MÉMOIRES dans cette région , a transporté ailleurs ses exploits, elle a laissé le terrain sédimentaire plus ou moins incliné vers le nord-est , quelquefois même vertical , suivant les iné- galités de la surface granitique sur laquelle il a glissé, suivant les changem®nts d'épaisseur, les formes et la du- reté des rochers qui composaient les strates. Ges eflets se sont propagés à 50 kilomètres du bord visible du granite, à l’est du département de Maine et Loire , et à 70 kilo- mètres à l’ouest. Les deux points extrêmes sont liés par une ligne plus ou moins sinueuse. Quant au côté nord-est du terrain anthraxifère, on voit dans la route départementale n° 9 , depuis Sablé jusqu’à Saint-Denis-d’Anjou, l’inclinaison se maintenir constam- ment au sud. À partir de ce point jusqu'à la carrière d’ardoises de la Désirée , près d'Angers , on recoupe une série de schistes et quelques couches de grauwackes d’in- clinaisons diverses , mais toujours très voisines de la ver- ticale. Enfin, depuis le schiste ardoisier jusqu’au bassin anthraxifère , toutes les couches plongent au sud. Gette inclinaison se manifeste sur le développement tout entier de son bord nord est, comme nous le verrons plus loin. En terme général, elle est probablement produite par le soulèvement des chaînes graniliques du nord , et son in- constance entre Saint-Denis-d’Anjou et Angers peut être due au soulèvement partiel du granit, dont une portion seulement aurait pu arriver au jour, près de la Meignanne et de Saint-Lambert-la Potherie. Pour donner cependant uné explication satisfaisante de ces faits, il faut attendre ’étude détaillée du bassin anthraxifère de Sablé et de ses environs. Le terrain anthraxifère de Maine et Loire s’étend sur une longueur développée de 59 kilomètres entre Baugé, près des roches qui l'en- de Doué , et Ingrandes , où il entre dans le département de la Loire-Inférieure pour continuer environ 40 kilomèt. DES 1'e ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 9 jusqu’à Languin , situé à 6 kilomètres à l’ouest de Nort. Sa direction Béstéate est ouest-27°-nord, On peut le con- sidérer comme composé de quatre amandes jointes par des étranglements plus ou moins stériles. La première prend son origine à*l’est , sous le terrain jurassique , entre Baugé et Doué:, qui la couvre en cou- ches horizontales, et ss travers desquelles on n’a tenté au- cune recherche. Elle se dirige vers Minière , près de Sou- langer , en affectant un angle ouest-29°-nord avec une largeur moyenne de 1,200 mètres. Après avoir dépassé la route de Saumur aux Sables, elle finit par un étranglement qui réduit sa largeur à 550 mètres et une déviation de direction vers sud-1 1°-ouest jusqu’au château des Mines. Dans cet intervalle, qui fait le commencement de l’autre amande , le terrain augmente visiblement de largeur jusqu’à 1,500 mètres. À partir de ce château, la seconde amande prend la direction ouest-42°-nord jus- qu'à Maligné en se maintenant sur 2,300 mètres de lar- geur. Elle continue jusqu’à Thouarcé en forme de coin, sous l’angle de ouest-29°-nord ; et elle s’y termine en ré- trécissement inappréciable. Ce coin s’avance jusqu’à 500 mètres au-delà du ruisseau de Javoineau , sous un dépôt du terrain terliaire dont je m’occuperai plus tard. La direction des rochers environnants indique qu’il fait un coude très prononcé et que le sommet de sa courbure peut s'étendre jusqu’au-dessous des Basses-Chasnières, La troisième amande prend sa naissance du point susdit à l’ouest du ruisseau Javoineau , elle suit une direction presque régulière ouest-24°-nord jusqu’à la vallée de la Loire, puis elle s’infléchit à ouest-29°-nord pour se termi- ner, au-dessous des alluvions, par un rétrécissement que la direction des roches voisines et les sondages faits à la Basse-Î[le accusent. Depuis son commencement est, cetls amande gagne insensiblement en largeur. Elle est de 9,700 mètres sur la ligne quai passe par le Fourneau, pro- 10 MÉMOIRES priété de M. Fleury (de Ghalonnes), et le pâtis de Laleu ; de là , elle diminue de nouveau jusqu’à sa réduction de 1,000 mètres environ dans le rétrécissement, La qua- trième amande non achevée du bassin anthraxifère est comprise entre le rétrécissement susdit et la ville d’In- grandes , située sur la rive droite de la Loire. Sa largeur moyenne , prise entre les deux extrémités reconnues du bassin , sur la latitude de Saint-Germain-des-Prés et de Montjean , est de »,500 mètres; elle se dirige sous l’angle de ouest-10°-nord et entre dans le département de la Loire-Inférieure avec une largeur inconnue ; vu que sa rive sud sort de l’Anjou couverte par les alluvions de la Loire , et qu’au commencement de l’autre département une espèce de poudingue postérieur à ce terrain, et com- posé de débris siluriens, le masque à l’observateur. Le bassin anthraxifère sur ses deux rives est accompa- gné par une succession plusieurs fois répétée des schistes rouges et verts. [l s’en présente plusieurs variétés de cou- leurs plus ou moins foncées. Les uns sont doux au tou- cher, les autres rudes; ceux surtout qui avoisinent les points, où des roches porphyriques ont été soulevées, pré- sentent ce dernier caractère. En général, ceux de la rive sud sont plus compactes et se rapprochent du grès schis teux à grains fins , souvent ils passent à des grauwackes schisteuses , comme cela se manifeste très visiblement au sud du bourg de Montjean, entre Saint-Lambert-du-Lat- tay, Rablay et plusieurs autres localités. Ges schistes en- caissent plusieurs rochers et lambeaux anthraxifères que je traiterai séparément. Le terrain jurassique , après avoir couvert l’extrémité sud-est du bassin anthraxifère, à 100 mètres plus au sud, dans l’endroit où lui-même disparaît sous le terrain cré- tacé, couvre un lambeau anthraxifère , qui ne reparaît qu’une seule fois à l’ouest dans le chemin creux entre Verchers et Doué , à 800 mètres du bassin , au point où DES 4'° ET 6® SECTIONS RÉUNIES. ii le crétacé vient s'appuyer sur le schiste métamorphique. Il présente 50 mètres de largeur sans avoir excité aucune recherche sérieuse. Entre Thouarcé et Martigné-Briant, le bassin anthraxifère est limité sur 2,700 mètres de lon- gueur par un banc de grès quartzeux de 6o mètres de largeur ; il se trouve dans plusieurs endroits contenir des ampelites en forme de brèches. Son milieu, appelé Jouanette, possède une fontaine, la plus remarquable du département; ses eaux sont chargées d’acide carbonique, de sels , de calcium et de magnesium, de sulfate et d’hy- drochlorate, d’oxide de fer à l’état de sous-carbonate , et enfin de matières organiques. Elle a acquis de la réputa- tion ; chaque année , des malades s’y réunissent pour y chercher la santé. Elle se divise en trois sources. MM. Li- nacier et Duclozeaux avaient voulu faire passer pour sulfu- reuse une d'elles, qu’on a qualifiée Fontaine des galeux ; mais elle n’a pu être telle que par addition , ou par la présence , dans les boues de cette source , de quelques parties végétales qui produisent , par leur action sur les sulfates et la décomposition de ces sels, quelques parties hydrosulfuriques ou hydrogène sulfuré. Entre Saint-Aubin et Chalonnes , on rencontre deux petits bancs de même quartz aux environs de la limite du bassin. En 1841, au-dessous des ruines du château de Cha- lonnes , appartenant autrefois au duc d'Anjou , dans une : carrière d’où l’on tire de la pierre à bâtir, on a trouvé les. fentes du grès schisteux remplies de poussière verte de cuivre carbonaté; elle y a été déposée probablement en état de vapeur dans le temps de bouleversement du ter- rain de transition. Les échantillons les plus riches, ana- lysés par M. Lechatelier, ingénieur des mines, ont donné 2 et 172 de cuivre pour 100 de matière. Depuis le château de Frenay , commune de Saint- Aubin -de-Luigné , en longeant le bassin anthraxifère , à 12 MÉMOIRES la distance moyenne de 1,200 mètres, par Chaudefonds, Longhons, vis-à-vis Chalonnes, par Chateaupanne, l'Or- chère , la Guibourgère , Morellerie , la Caduère, jusqu’au ruisseau du moulin Benoit, sur une longueur de 21 kilo- mètres , on voit le calcaire , tantôt paraître comme un simple aflleurement , et tantôt occuper de grandes lar- geurs; une de ses amandes, près de Chaudefonds , a 800 mètres , et l’autre , à l'Orchère , 670. Il repose sur le schiste à stratification concordante, ses débris le couvrent quelquefois sur de grandes profondeurs. Son inclinaison vers nord-est est environ de 70°, Il est d’un gris noir foncé, intercalé de veines de spath calcaire et sillonné en divers sens de grandes fentes. Au milieu de la carrière du grand Fourneau , commune de Chalonnes, se dresse une grande muraille de dolomie caverneuse, souvent terreuse, de 3 à 4 mètres de largeur et d’au moins 20 mètres de hauteur. Elle se rencontre dans d’autres localités, mais nulle part elle n’est aussi saillante que là. Gette roche, ne fournis- sant pas de pierre à chaux, est restée debout entre les excavalions profondes qui la circonscrivent. Sa direction, qui coïncide avec celle du terrain , peut la faire considé- rer comme une assise du calcaire, Des faces lisses, striées sur la paroi sud , semblent au contraire en faire un filon remplissant une vaste fente, une faille dans toute l’accep- tion du mot. Sa composition chimique est la suivante : Carbonate de chaux. . . . . . . ‘56 Carbonate de magnésie. . . . . . 45 Oxide de fer et matières pierreuses . . 1 100 Elle s'accorde , à quelque chose près , avec celle que M. Berthier a faite da calcaire dolomitique de Schirmeck (Vosges). On y rencontre quelques filons peu importants de fer hydraté, accompagné de fer carbonaté , cristallisé DES 1re ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 13 en prismes rhomboïdaux très réguliers. On y trouve aussi des parcelles de manganèse per-oxidé, quelques coquilles fossiles propres au terrain silurien et un assez grand nombre de polypiers. On rencontre dans les carrières de .ce même calcaire des grottes à ossements , et d’autres grottes vides ou remplies de cailloux roulés ; on en voit une d’une grandeur immense près de Chaudefonds. Le calcaire de ce banc est trop dur pour être taillé en pièces de marbre ; tous les produits de ses carrières sont em- ployés pour la fabrication de la chaux. Trente fours con- tinus , chauffés au charbon de terre , se sont établis sur ce banc; ils fournissent environ 600,000 hectolitres de chaux grasse par an. A l’exception d’une petite quantité qu’on emploie pour les constructions , presque toute cette chaux sert pour amender les terres. On rencontre dans plusieurs localités des passages de schiste noir sans suite qui contient des veines d’ampe- lites; eiles sont le plus apparentes à l’ouest de la route de Chalonnes à Saint-Lambert-du-Laltay , à côté d’une butle de quartzites. Au sud du banc de calcaire , entre la route stratégique de Montjean à la Pommeraie et Saint-Florent , on distin- gue trois lambeaux du terrain anthraxifère, dont deux sont irès-apparents. Le premier est insignifiant; il pré- sente un seul afileurement dans trois points, sur 750 m. de développement , au nord du Mesnil, entre Saint-Michel et le Chêne. Le second commence à la Grandinière ; il y affecte un arc de cercle autour d’une butte de quartzites, ensuite il continue à l’ouest par la Bourelière, jusqu’au chemin de la Grande-Brunetière à la Sauvetière. Il est visible sur 200 m. de largeur moyenne. Une société, guidée par les affleurements de charbon de terre dans le creux du che- min, entre Bourelière et la Rue-Chèvre , a fait foncer deux puits de recherche. On n’y a trouvé que des veinu- 14 MÉMOIRES les de o m. 02 à 0,10 d'épaisseur, Ce lambeau, dans sa suite, se rétrécit de plus en plus; entre la Gendronnière et le château de Vaugiraulr, ses traces sont à peine visi- bles. Ensuite , il se refait un peu; passe au nord du Mes- nil, avec 20 m. environ de largeur, et tombe compléte- ment en crin près du moulin Brülé. Son nas agit total est de 6,000 m. Un troisième lambeau commence au sud-ouest du Mes- nil, près des moulins du Piou , passe par la Giraudière, l’'Ecoulé, et se trouve couvert par les alluvions de la Loire, entre la Perrière et le pont sur le chemin de Saint-Flo- rent. Sa largeur moyenne est de 120 im. Il a attiré deux fois attention des spéculateurs. Avant 1792, M. de la Pommeraie a fait foncer un puits à l’est du chemin de la Reuillère et la Planchette, où il a trouvé quelques filons de charbon insignifiants, En 1858 , quelques propriétaires des environs se sont associés , et en ont fait foncer un au- ire à l’ouest de ce chemin; ils y ont rencontré les mêmes suites improductives. Le développement visible de ce lam- beau est de 3,500 m. Depuis l'extrémité est du second lambeau, jusqu’à la latitude de Chaudefonds, on rencontre plusieurs buttes de quarizites, surgis postérieurement à la révolution da terrain de transition. Ils donnent souvent d’excellents matériaux pour l’empierrement des routes. Les strates des schistes métamorphiques, qui les entourent , suivent les ondulations de leurs cimes. Une d'elles , située à l’ouest de la route stratégique de Montjean , a rejeté l’extrémité du second lambeau anthraxifère dont j’ai parlé plus haut, Au sud de tous ces terrains, on remarque un banc de calcaire qui forme sur le sol des communes de Liré et Bouzillé, des masses très-importantes ; il se rattache au calcaire d’Ancenis , vers l’autre rive de la Loire, et pré- sente peut-être encore quelques jalons dans l’intérieur des terres vers Sainte-Christine , Ghaudron , le Pin-en-Mau- DES 1'° ET 6° SECTIONS REÉUNIES. 45 ges, quoique jusqu'ici toutes les recherches de calcaire aient. été infructueuses dans l’arrondissement de Beau- preau. Tout le terrain stratifié au nord-est du bassin anthraxi- fère, jusqu'à Sablé, s'incline en général au sud - ouest. Gelte inclinaison n’est pas très-régulière partout, comme je l’ai mentionné précédemment, parce qu’elle provient de différents surgissements indépendants les uns des au- tres. Entre les roches encaissées dans le schiste de tran- sition de cette rive du bassin, la plus proche de ses bords est celle des phlanites. C’est un quartz noir schisteux, traversé par des réseaux de veinules blanches de même nature. Gette couche et quelquefois deux, très-rappro- chées l’une de l’autre, de o m. 50 à 3 m. d'épaisseur, accompagnent le bassin à la distance de 26 à 50 m., pres- que sur tout son développement, encaissé simplement par les schistes rouges et verts. Partout ailleurs , où une roche éruptive a séparé le bassin de ces schistes , les phtanites ont subi une déviation autour de cette roche. À part, de celte position géologique , on voit des phtanites dans plu- sieurs endroits, disséminés par amas au milieu des schis- tes de transition. Ils offrent une grande ressource pour l'entretien des routes. Aux environs du Breuil, quelques lames de schistes verts sont imprégnées d’une légère couche de cuivre car- bonaté. + De Midion, près Rochefort, jusqu’au pressoir Girault, on distingue des traces d’un lambeau anthraxifère , com- pris entre les deux bancs de poudingue. Il renferme deux veines de charbon, dans lesquelles il n’a jamais été fait aucune recherche. On trouve de l’autre côté de l’alluvion de la Loire , entre les buttes de porphyre ; à l’est de La- leu, les suites bouleversées de ce lambeau. La rive nord du bassin est accompagnée de distance . ©n distance par une roche plus ou moins verdâtre , quel- 16 MÉMOIRES quefois jaunâtre , et même rougeâtre, Elle est schistoide, en contact avec des schistes de transition , tandis qu’au milieu, son état cristallin et sa cassure esquilleuse accu- sent sa formation ignée. Au simple aspect, on la juge tantôt talqueuse , tantôt felspathique , et même serpenti- neuse; quelques traces d’amphybole lui ont fait donner le nom d’amphybolite. Elle paraît à l’est du bassin, de- puis le terrain jurassique jusqu’à la route de Soulanger à Saint-Georges-Châtelaison, avec 350 m, maximum de largeur. Son extrémité oucst est couverte par le terrain tertiaire. Une autre amande est visible depuis le chemin de Saint-Georges-Chätelaison au Bois-Airault, et se perd sous les faluns de Maligné ; son épaisseur est tout au plus 150 m. La plus forte masse a surgi entre le pont Cailleau- sur-Layon et la Roche-Airault, près de Louet. Elle oc- cupe une largeur maximum de 6oo m. sur la route d’An- gers à Saint- stable Sa partie ouest , jusque vis-à-vis le pont de Bezigon, ne paraît que par butles au milieu des schistes de transition. Les couches de phtanite contour- nent l’ensemble de ces buttes sans aucune sinuosité, aussi bien que les masses susdites. On peut en déduire qu’elles se réunissent dans la profondeur, pour former une seule masse semblable aux précédentes. La dernière butte, vi- sible, se trouve dans le chemin qui conduit d’Ingrandes à la route d'Angers à Nantes. Dans ces buttes, près de la Soucherie, de Veau, Roche- Airault et Ingrandes , on rencontre quelques boules insi- gnifiantes , de calcaire silurien métamorphysé , englobées dans la roche. Vis-à-vis le pont Barré , on voit une couche presque verticale de ce calcaire, de 40 m. de largeur, et de 500 m. de longueur apparente, Elle alimente quatre fours produisant par an environ 50,000 hect. de chaux employée pour amender les terres. Ce calcaire touche le terrain anthraxifère; on rencontre des échantillons cou- verts, d’un côté, de schiste carboné , et de l’aûtre , de - DES Â'° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 17 calcaire. Dans son milieu , on découvre très-fréquemment des géodes remplis d'huile de pétrole , qui sert aux car- rières comme rémède par excellence pour guérir les bles- - sures. Il se présente rarement pur, la roche, qui l’envi- rônne , le subdivise en couches minces , et forme avec elles: des rubans. M. Tonellier, un des propriétaires de four à chaux ,; pour mettre à profit cetle variation des cou- leurs!, en a fait faire quelques dalles de marbre dans l’éta- blisséement de Sablé. Les veines verdâtres , qui sillonnent sur un fond tantôt gris et opaque , tantôt blanc et trans- lucide , le font ressembler à certains marbres d’Italie. La dureté de cette roche présente une grande difficulté pour sonexploitation en grands blocs; son sciage et le polissage dés dalles sont plus coûtéux que celui du calcaire de Sa- . blé, Mais, comme sa couleur lui donne la supériorité, on pourrait peut-être en faire une industrie avantageuse. * La réunion intime du calcaire avec les amphibolites ; et sa structure cristalline, indiquent que cette roche , en s’élevant à Pétat liquide, l’a rencontré quelque part au milieu du terrain de transition, et qu’elle l’a amené'au jour, en le métamorphisant. M. Cacarrier, ingénieur des mines, a reconnu l'identité de cette roche avec celle qu’il a rencontrée-dans plusieurs localités du département des Deux-Sèvres, en faisant l’étude géologique de ce départe- mént. Il a fait son analyse microscopique et chimique, qui ne peut pas trouver sa place dans ce court mémoire; mais les annales des inines , destinées à ce but, doivent _ Ja recueillir comme un document précieux pour la science. Vient maintenant une multitude de monticules de por- phyres, qui surgissent au milieu du schiste de transition aux environs de Rochefort, Poissonnière , Saint-Georges- sur:Loire et Champtocé. En s’alignant dans le sens de la siratification ; dans ce pays si peu accidenté , ces sommi- tés ; quoique bien peu saillantes, jouent cependant un Le IL. desk 2 PT 18 MÉMOIRES rôle important dans ie relief du sol, et fournissent le moyen de saisir, même de loin, la position générale de ces différents témoins de l’action ignée. Sur un développement si petit, comme celui de Roche- fort à Champtocé, les caractères apparents de ces por- phyres quartzifères sont tout-à-fait différents. À Champ- tocé , dans les carrières ouvertes pour l’empierrement des routes, le porphyre est pour ainsi dire réduit à sa pâte; il ne contient pas de cristaux de quartz, est homogène , et présente une cassure esquilleuse. Au moulin de la Croix- Blanche, près de Rochefort, il se présente en forme d’une argile talqueuse, endurcie et d’une couleur rosée , veinée de blanc, avec cristaux de quartz, qui se détachent faci- lement , lorsque la pâle se trouve désagrégée. À Laleu, celle pâle est verdâtre et plus compacte. En terme géné- ral, ils affectent une disposition feudillée, qu’on pourrait, dans certain cas, prendre pour une stratification; mais, le plus ordinairement , on distingue simplement une struc- ture prismatique. Le plus léger examen suflit pour prou- ver que celte disposition est due au retrait que la roche a éprouvée en se refroidissant. Ge soulèvement n’a pas dé- rangé gravement ni la direction, ni l’inclinaison des schis- tes environnants. La première a subi des ondulations irès-légères autour de ses crêtes seulement. El la première plonge plus ou moins vers le sud. Les phtanites, qui ac- compagnent le bassin anthraxifère , suivent déjà leur di- rection régulière, et, quant au bassin lui-mêmu, il ne paraît pas en avoir reçu aucune influence; on voit sa rive passer sans ondulation à 200 m. de la grande butte du pâtis de Laleu, et s’infléchir au nord, pour former une convexité très-saillante vis-à-vis de la butte des porphyres du Paregault et Petit-Vaurichard. Sur toute là superficie parsemée par les buttes des porphyres, les schistes de transition se trouvent métamorphysés. Aux environs de Laleu , ils sont micacés, et vis-à-vis Saint-Georges-sur- DES 4'e ET 2° SECTIONS RÉUNIES. 19 . Loire ; ils sont luisants, satinés , et présentent dans plu- _ sieurs points des taches jaunâtres sur un fond gris-clair. Ces taches sont souvent légèrement saillantes par la dé- composition , comme seraient des centres de cristallisation, ce qui leur donne quelque analogie avec certaines vario- lites. Gette roche maculée , assez dure , et dont la cassure est esquilleuse , n’est pas habituelle au terrain de transi- tion; mais , elle alierne un si grand nombre de fois avec des roches schisteuses , elle passe si souvent à ces derniè- res, qu'il est impossible de la supposer de même origine que les porphyres; il est plus probable qu’elle est le pro- duit de leur action. Une roche amygdaloïde, que l’on trouve en contact avec la roche porphyrique, fournit, . pour ainsi dire, une preuve matérielle de ce métamor- physme. C’est le schiste lui-même qui est devenu amyg- dalin; on peut recueillir des échantillons moitié schiste et moitié amygdaloïde , et , tandis que les parties, en contact avec la roche ignée , contiennent de nombreuses amandes et de vacuoles, celle qui est placée à une certaine dis- tance, présente seulement des caractères d’un schiste endurci. L'ensemble de ces collines, qui constituent un alignement, semble prouver qu’elles sont autant de té- moins d’une chaîne continue, qui n’a pas pu s'élever complétement à la surface du sol. On pourrait également attribuer à l'insuffisance de la force éruplive le peu de dérangement que l’arrivée au jour de ces roches a produit au terrain environnant. La seconde ligne du calcaire , du côté nord-ouest du bassin anthraxifère, présente quelques rognons sans suite à Denééet Savénnières. Elle a donné lieu à Savennières à l'établissement d’un four à chaux qui est obligé mainte- nant de s’alimenter avec la pierre de Chalonnes. . En comparant les roches de deux côtés du bassin an- thraxifère, on s’aperçoit qu’il n’y a de semblables que des schistes rouges et verts et des gramvackes. Chaque rive 20 : : . MÉMOIRES a bien deux bancs de calcaire, dont les deux extrêmes sembleraient seuls pouvoir être mis en rapport. Je tâche- rai cependant d'expliquer la possibilité de la formation d’un pli complet du terrain , lorsque j’aurai analysé l’état actuel de la couche anthraxifère. Après avoir étudié les terrains siluriens , j’entrerai dans quelques détails sur les formations postérieures à celle du terrain anthraxifère , qui le couvrent dans certains en- droits, ou qui l’avoisinent. Les formations T'errain jurassique. — Le bassin anthraxifère n’est en rs contact qu'avec les couches supérieures du lias et les xifère qui le cou- couches inférieures de l’étage inférieur du calcaire ooli- vrent ou qui la- 3 nent. thique. Il ya, du reste, un passage graduel d’un étage à l’autre, qui permet difficilement d'établir une séparation tranchée. Les couches supérieures du lias renferment quelques assises marneuses qui alternent avec les couches de calcaire argileux propre à la fabrication de la chaux hydraulique. Suivant l’analyse de M. Fourier, ingénieur en chef des ponts et chaussées, celte pierre de calcaire de Doué et de Brossay, contient : Carbonate de chaux. 1% 070, 7 00840 AtBniestt JEU 2 TP MONS EST SE RON OPA RS déc ue. der hY D SSD Il renferme de nombreux fossiles, parmi lesquels on distingue des bélemnites, des ammonites, des nautiles et des trigonies. On n’en trouve que deux lambeaux près du bassin anthraxifère : l’un, qui s’étend des Douces, vers Saint-Hilaire-le-Doyen, sur 3,000 m. de largeur moyenne. Il couvre l’extrémité est du bassin qui présente dans cet endroit 700 m. de largeur, en allant de Baugé vers Doué. IL est exploité dans les grandes carrières qui alimentent six fours à chaux hydraulique de MM, Ollivier frères. Ges carrières , qui atteignent une profondeur de 10 wm., à ciel DES d'e ET 6° SECTIONS RÉUNIES. on. ouvert, sont dans la partie inférieure du calcaire oolithi- que inférieur. Un puits, creusé à la profondeur de 15 m., a rencontré le calcaire bleu à belemnites , formant la par- tie supérieure du lias. À une demi-lieue de Îà , on voit d’autres fours de M. Guyon. Ces deux établissements four- nissent par an environ 100,000 hectolitres de chaux hy- draulique qu’on exploite pour les départements voisins , etparticulièrement pour l’ancienne Bretagne. Celle chaux, réduite en poudre ; est mise dans les sacs, et expédiée ainsi. à de grandes distances. Le second dépôt de ce terrain est très-petit ; il se trouve au-nord des Hautes-Fontaines, sur le Poue du coteau du Layon. | Terrain crétacé, — Son étage intermédiaire seul s’ob- serve dans les environs qui nous intéressent. Il présente, à la partie inférieure , des sables verts alternant avec des marnes feuilletées et des sables marneux, puis à la partie supérieure des. couches de craie compacte plus ou moins mélangée de sable fin présentant de petits points ver- dâtres qui doivent, indépendamment des caractères zoolo- giques , la faire rapporter au terrain crétacé inférieur. Enfin ; sur quelques points , on retrouve des sables verts au-dessus de la craie-tuffeau, Quelques assises peu puis- santes forment un calcaire grossier parsemé de coquilles. Ces terrains ont élé parfaitement caractérisés par deux fossiles qu’on y trouve répandus à profusion , la griffée- colombe et l’huitre biauriculée. On y trouve en outre des ammonites , des térébratules, des dentrites, des moules, des pointes d’oursins. Une amande du terrain crétacé , aux environs de Mar- tigné-Briant , couvre d’un côté le schiste métamorphique désagrégé et de l’autre la rive sud du bassin anthraxifère. Ce bourg tout entier , à l'exception de l’ancien château, est bâti sur ce dépôt, qui commence au nord à Jouannette et finit au sud dans la vallée du Layon, vis-à-vis Miligné, 29 MEMOIRES en s'étendant sur une superficie de 4,000 mètres de lon: gueur et 1,000 mètres de largeur maximum. Plusieurs puits à eau faits à Martigné ont accusé l’existence du terrain anthraxifère à 9 mètres de profondeur moyenne, un de ces puits a trouvé une veine de charbon accompa- gnée du gaz méphytique , on l’a comblé à cause de ses émanations désagréables. Entre Saint-Georges-Châtelaison et Méa , une partie d’un grand lambeau crétacé couvre la rive sud du bassin anthraxifère sur 1,500 mètres de longueur. Une tranchée faite de la porte de Méa , dans la direction sud-ouest , a démontré que ce bassin , recouvert par une légère couche de sable vert et de marnes feuilletées , se termine à 200 mèlres de cette porte. Entre le château des Mines et les Rochettes , le sable d’alluvions recouvre le bassin anthraxifère ainsi que le dépôt crétacé , qui s’élend , dans la partie sud , sur une grande superficie. Aux environs de Baugé, il n’est séparé du bassin que par une trentaine de mètres de schistes mélamorphiques, où il rencontre le terrain jurassique et le couvre jusqu’à la vallée du Thouet. IL se perd sous les alluvions de cette vallée sur toute la partie sud. Sa lisière ouest repose sur les schistes mé- tamorphiques. Terrains tertiaires. — De trois étages qui constituent ce terrain, le moyen a pris un développement considé- rable aux environs du bassin anthraxifère. Il consiste en deux terrains bien distincts. La molasse ou le grès coquillier est exploité comme pierre de construction, Gette roche est composée en grande partie de coquilles quelquefois très-bien conser- vées ; elles se rattachent intimement, par leur nature, aux espèces qui vivent encore dans les mers actuelles ; on y trouve fréquemment des ossements d'animaux sili- cifiés. DES {'° ET 6° SECTIONS REUNIES, 23 Les puits , anciennement foncés aux environs de Mali- gné, pour l'extraction du charbon de terre ; ont accusé 1o#mètres de l'épaisseur moyenne de ce dépôt. En des- _ cendant le coteau du Layon , on le perd tout près du bourg susdit , 1andis qu’à l’est il se poursuit jusqu’à Chan- teloup. Cette amande s’est déposée à moitié sur le gise- ment anthraxifère et à moitié sur les schistes de tran- sition. On exploite ‘sa pierre pour la construction des maisons ordinaires. L'ancien château de Martigné-Briant est bâti sur une petite éminence de ce dépôt, au'milieu du terrain cré- tacé; il y'est resté comme un témoin d’uné vaste courant. Saint-Georges-Châtelaison et: Ghâtclaison sont situés sur une amande du même terrain , déposé au milieu da bassin anthraxifère. Il fournit la pierre de construction locale. | - Plusieurs lambeaux de la molasse coquillière environ- nent le bassin anthraxifère. Celles de Machelle , Noyers, Villeneuve, Aubigné, Tigné, donnent par leur cuisson de la: chaux: qui sert pour amender les terres, et celui de Soulanger , Doué et Douces est exploité pour piérres de taille, Dans les localités susdites , on’ a! établi douze fours continus qui livrent à l’agriculture environ 180,000 hec- tolitres de chaux par an. Les terrains de transport plus récents que le précédent le couvrent dans plusieurs localités et témoignent une formation très étendue détruite après le coup. Ils consis- tent en sables de toutes les grosseurs formés de galets _ arrondis. Souvent ces sables sont mélangés d'argile ferru- | gineuse, et quelquefois ils sont agglutinés sous la forme de grès grossier par un ciment ferrugineux. On les voit sur une vaste plaine , entre Saint-Georges-Ghâtelaison et Tigné , aux environs des Varannes , Champloin, Maury, Bretignolle, Folletière, Noizé et Roirie, où ce dépôt ne paraît que de place en place, en partie sur le terrain an- 24 MÉMOIRES thraxifère et en partie sur les schistes de transition, Ils couvrent , aux environs de Thouarcé, une portion du bas- sin anthraxifère et des schistes métamorphiques en sui- vant la rivière du Layon. Leur dépôt est appréciable à l’ouest jusqu’au ruisseau Javoineau et à l’est sur la super- ficie comprise entre Thouarcé, Jouanette, Cornu et Grand-Acé. Terrains diluviens, — Quelques milliers de blocs de grès de Fontainebleau sont restés dans la plaine du châ- teau de Noyers , sur les schistes de transition , près du dépôt de la molasse coquillière. On voyait encore, il y a peu de temps, près de Ghamptocé, un bloc de grès lustré arrondi , reposant à la surface du sol , loin de tous les points où la même roche peut encore s’observer. Terrains modernes. — Cette dernière formation dans l'échelle géologique s’est formée et se forme encore jour- nellement sous l’influence des causes actuelles. La vallée de la Loire présente une alluvion puissante; au pied du coteau de la Haie-Longue , elle atteint une épaisseur de 18 mètres qui diminue en allant vers la rive droile et ne s’éteint complétement qu’à 1,000 mètres de l’autre côté de cette rive, À Saint-Germain-des-Prés , à 300 mètres de la rive droite de la Loire, elle a 16 mètres d'épaisseur, Le puits en tôle de M. Triger a fourni le pre- mier chiffre, et un autre en pierre de taille de M. Faligan le second, En jetant un coup-d’æil sur la carte géologique, on voit que lalluvion de la Loire couvre le bassin anthraxifère presque sur loule sa largeur, depuis la rive gauche du Louet jusqu’à Ingrandes, à l’exception de deux portions de sa lisière nord , situées sur la rive droite de la Loire, une entre Laleu et la Basse-Villette , et lautre entre l'Epinay et Champtocé. Montjean seul indique lappari- tion du passage d’une portion de ce bassin sur la rive gauche. DES {'° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 25 L’alluvion du Layon dans beaucoup de localités est presque insensible. Son étendue la plus large se présente entre la porte de Méa et les Mousseaux ; elle couvre la lisière nord du bassin anthraxifère sur 2,500 mètres en- viron de longueur. La position géologique de ce terrain doit le faire ranger dans la classe anthraxifère, quoique le combustible qu’il renferme se rapproche tout à fait par sa nature des véri- tables houilles. La houille est quelquefois és grasse ; mais elle est le plus généralement sèche et se rapproche souvent à de véritables anthraxites. On exploite actuellement, près de Saint-Lambert-du- -Latiay, sur la concession de Saint- Georges-Châtelaison , une veine qui présente tous les ca- ractères de ce dernier, Les analyses suivantes , faites par M. Lechätelier, de quatorze variétés de houille exploitées dans ce.bassin , donnent une idée précise de la nature de ce combustible. “1° Concession de Saint-Georges-Chätelaison. 1 2 3 RUE Gendres, .,. .. à, 11,20 11,69 9,61 3,00 Goke,, : . «5.(65.00 72,52:,.80,90 . 78,10 Matières volatiles. 23,80 15,60 9,40 18,40 100,00 100,00 100,00 100,00 2° Concession de Chaudefonds. 5 6 Cendres , +. :, 16,43 16,62 Cake arte 78,97. 71,78 Matières volatiles. 10,00 11,60 100,00 100,00 Les détails de la couche an- thraxifère, 26 MÉMOIRES 5° Concession de Layon et Loire. 7 8 9 10 11 Cendres . 4,41 4,41 3,79 ‘12,08 16,37 Coke. . . 82,59 77,59 80,21 68,92 67,05 Mat, volat. 15,20, 18,00 17,00 18,00 16,60 100,00 100,00 100,00 100,00 100,00 4° Concession de Montjean. 12 15 14 Ceres re er PI0,7S 3,90 6,78 Cost. 7. tee 0980, 79,70 1:0% Matières volatiles. 25,40 22,54 17,20 100,00 100,00 : 100,00 Une analyse quantitative de la houille de Layon et Loire m’a donné la composition suivante : Carbone. . . 89,28 Oxisènest it 2,88 Hydrogène. . 4,15 Cendres. . . 3,69 100,00 L'expérience en grand de la carbonisation de la houille de Doué a démontré que : 5 hectolitres de la houille menue donnent 5 hectolitres de coke. 1 hectolitre de la houille pèse 100 kilogrammes. 1 hectolitre de coke pèse 37 kilogrammes 60 grammes. Il en résulte que 100 kilogrammes de houille donnent 62 kilogrammes Goo grammes de coke. DES 1'° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 27 Les veines combustibles sont intercalées par les schis- tes, grès ou poudingues. Dans le terrain solide, elles sont toujours plus régulières et donnent de la houille de meil- leure qualité que dans les schistes où elles se rencontrent par chapelets, nommés dans le pays bouillards. Entou- - rées de schistes , elles dégagent à l'ordinaire une grande quantité d'hydrogène carboné , appelé par les ouvriers grizou. Son émanation est souvent annoncée par un bruit analogue à celui d’un éssaim d’abeilles. Là où on craint son explosion , on s’éclaire avec des lampes entourées de toile métallique, et on a soin de produire un courant d’air pour le chasser au fur et à mesure qu’il se développe; car, lorsqu'il est très concentré , il brûle dans l’intérieur de la lämpe, fait rougir la toile de l’enveloppe , qui, étant bon conducteur du calorique , l’allumerait dans la ga- lerie. : FRS Le schiste argileux est plus ou moins noir, plus ou moins compact , souvent tolqueux et presque toujours micacé. Il contient en outre fréquemment des rognons de fer carbonaté, disposé dans le sens de la stratification. Le grès siliceux a le grain tantôt fin et tantôt très gros- sier ; il présente par fois des bancs épais et très durs , et par fois il est schistenx. On rencontre dans ce terrain une roche particulière et qui a excité vivement l'attention des géologues. Elle a été désignée sous le nom de pierre carrée, à cause de la propriété qu’elle possède de se casser en fragments rhom- boïdaux. Elle se présente tantôt en couches très épaisses, renfermant plusieurs veines de houille, et tantôt en minces filets , ce que je démontrerai par les coupes du terrain. Elle possède très souvent une texture parfaitement homo- gène ; sa cassure esquilleuse lui donne de l’analogie avec le petrosilex; mais cette roche est en général peu dure, se laisse rayer par une pointe d'acier. Elle est facilement fusible en émail blanc. La couleur de la pierre carrée est 28 MÉMOIRES assez variable ; cependant elle est généralement d’un gris verdâtre assez clair, quelquefois rougeâtre. Elle contient constamment des parlies jaunâtres, qui paraissent serpeu- lineuses; d’après une analyse que M. Declerck, ingénieur des mines, a faite d’un échantillon de la pierre carrée de la mine de Layon et Loire ; elle se compose de : DIE: codée ei PU OR Alumine coloré par de l’oxide de fer. . . 0,179 CR en dr on OT: D AL 1 et JOUR POLAR. Lean li». AUD AT) . On rencontre quelquefois un grès grossier, parsemé de grains blancs , sans tenacité , et analogue à un feldspath désagrégé ; les grains blancs se détachent sur un fond grisâtre. Il est appelé vulgairement par les ouvriers tourte, à cause de sa ressemblance à la vue avec le marc qui reste de la fabrication de l’huile de chenevottes. Le terrain anthraxifère commence souvent par un pou- dingue composé de galets de quartz hyalin laiteux , de quartz noir, de schiste micacé et d’un schiste verdâtre très caractéristique. On trouve fréquemment , au milieu du bassin, des poudingues composés simplement de galets entourés de la pâte du grès ou de celle de pierre carrée. Les veines de houille sont souvent accompagnées d’un schisle pyriteux en couches extrêmement minces , qui s’eflleurit très proemptement à l'air, et qui, délayé par l’eau , forme une argile blanchâtre. Les ouvriers l’appel- lent la blancheronne. Les débris végétaux y sont extrêmement nombreux, surtout dans le voisinage des couches charbonneuses , et se composent principalement de plantes qui se rapportent aux familles des fougères , des lycopodiacées , des équisé- tacées. À la première de ces familles , appartiennent les DES 1{'° ET 6° SECTIONS REUNIES, 29 sigillaires, qui offrent des tiges cannelées, sarnies de cica- trices disposées par séries longitudinales , et dont les va- riations sont très nombreuses ; les pecopteries, dont les folioles , peu détachées du pédicule, se réunissent quel- quefois en une seule feuille découpée plus où moins pro- fondément. La famille des licopodiacées fournit les lepido- dendrons, et les esquisétacées présentent diverses sortes de calimites à tige cannelée sans cicatrices: Pour déterminer les différentes inclinaisons des couches qui composent le bassin anthraxifère , et en conclure une loi de sa formation primitive, j'en donnerai plusieurs cou- pes à travers et j’indiquerai quelques points intermédiaires qui serviront de jalons de raccordement. Première coupe. — La première coupe est faite entre Doué et les Verchers : on voit d’abord les faluns de Doué, puis les schistes de transition , avec un banc de phianites s’inclinant fortement au sud. La roche amphybolique qui joint le terrain anthraxifère ; les premiers bancs de pou- dingue, alternant avec le grès fin et l’argile blanche, con- tiennent plusieurs aflleurements dont deux sont l’objet d'exploitation actuelle par le puits Foulon, aux environs des minières , où les travaux souterrains accusent leur inclinaison au sud-ouest. Toutes les couchés susdites ) ainsi que le puits en trafnard fait à la fontaine d’Argent- Perdu , affectent la même inclinaison. Plus loin , On par- court un dépôt assez large d'argile rouge; on y rencontre un puits d'exploration , fait aux environs de Fontenelle, qui a démontré une succession de bancs de poudingues rouges , grès fin et argile blanchâtre , semblables à ceux de la partie nord , avec cette seule différence que le sens de leur inclinaison est diamétralement opposé à celui des premiers. Vers l’extrémité sud du bassin, un puits a élé foncé à Baugé; on y a trouvé un filon appuyé sur du grès gris s’inclinant au nord en stratification concordante avec le schiste métamorphique , visible jusqu’anx Mousseaux. 30 MÉMOIRES Un lambeau anthraxifère de 50 mètres d’épaisseur est coupé dans le chemin creux des Verchers à Doué; il pré- sente une succession d’aflleurements schisteux , des pou- dingues , schistes charbonnés et grès. Immédiatement après, le dépôt crétacé couvre les schistes métlamorphi- ques jusqu'aux Verchers. Geite coupe indique que le bas- sin anthraxifère y présente la forme du bateau dont l'axe inférieur ne peut être déterminé d’une manière mathé- malique que par les travaux souterrains. Deuxième coupe. — Aux environs de Saint-Georges- Châtelaison , le terrain , étudié par les affleurements et travaux, qui consistent en tranchées de recherche et gale- ries d'exploitation, a produit une coupe de quinze veines de houille , dont douze sont connues par leurs produits et trois par les aflleurements et l’emplacement des puits qui les ont atteints en profondeur. Les deux premières veines du sud sont exploitées ac- tuellement par le puits de la Conception ; leur allure est bouleversée, comme cela se rencontre à l’ordinaire sur la limite du bassin. Après avoir dépassé un banc de grès grossier, verdâtre , on arrive à la veine du Heton. Elle avait été exploitée avant 1792 par le puits du même nom et par celui de Ghantepie. Le premier n’était foncé qu’à 20 mètres de profondeur, où on a rencontré la veine. On fut obligé de l’abandonner au moment de la révolution faute de moyens , et les soldats du camp de Concourson en arrachèrent les premières croisures. La veine des Epinettes était exploitée par le puits du même nom et celui d’Adèle. Les résultats du premier ne sont pas connus ; le second a donné lieu à l’exploitation d’un bouillard que cette veine a présentée dans cet en- droit. La veine du Mouton a été reconnue par le puits du même nom et par celui d’Adèle, abandonné depuis deux ans , où elle a donné également un chapelet. DES 1'° ET 6% SECTIONS REUNIES. 31 La veine du Grand-Puisard et les deux autres au nord étaient exploitées anciennement par les puits : Grand- Puisard, Hardouin, Busse, Bretonnière, Ponnir, Bigot , Hirondelle et Bigotelle. La veine du PMipesue était desservie par les puits : Clos, Tourton , Beaujoin , Puissant , Morat et Pavé. Les plus beaux travaux ont existé entre les puits Beaujoin et Puis- sant. Ils n’ont pas dépassé 100 mètres de profondeur, on n’a pas même vidé les tailles supérieures qu’on se propose d'enlever actuellement. On tire encore les restes de la partie supérieure d’un grand bouillard exploité autrefois au puits Pavé. La veine Plateuse et celle du Grizon , éloignées l’une de l’autre de 8 mètres environ, ont été cRnlaitéés par les puits : Sagesse, Solitaire , Bonneterie et Pavé. Dans la hu a on n’a exploité qu’un bouillard au niveau de 100 mètres du puits Solitaire. Comme ce puits n’avait que 180 mètres de profondeur, on a exploité la veine du Grizon par trois bures jusqu’au niveau de 280 mètres. Elle a donné une exploitation très lucrative arrêtée par suite de la révolution de 1792. La veine du Nord , à 60 mètres environ de la précé- dente, a élé desservie par les puits : Constance, Sagesse, Nord et puits Ancien. Elle a été partout très mince , er rognons de bon charbon, entourés de schistes jusqu’au niveau de 280. mètres. La veine du Bel-Air, connue par le puits du même nom et celui de Feronnières. Les vestiges des travaux des trois autres veines ne sont indiqués que par l’emplacement des puits de Ferr, Bar- thélemy et Cormier. Il reste encore 350 mètres de largeur inconnue du bassin. Tous les bancs qui composent cette coupe s’inclinent au nord en faisant l’angle d'environ 70° avec l'horizon. 32 MÉMOIRES Les schistes rouges et verts du nord sont très tourmentés ; ils ne s’inclinent au sud qu’à 100 mètres environ de la rive du bassin. La rive sud est couverte par un petit dé- pôt de sables d’alluvions du Layon, ensuite par le terrain crétacé., On voit cependant , à une pelite distance de celte coupe ,-le bassin encaissé par les schistes métamorphi- ques en stralifications concordantes , plongeant au nord. Troisième coupe. — Elle est faite par Saint-Lambert- du-Lattay, où le schiste métamorphique de la rive sud du bassin et 6o mètres environ du terrain anthraxifère lui- même s’inclinent au nord; ensuite sa largeur toute entière plonge au sud. En commençant par la rive sud , on trouve d’abord une centaine de mètres de schistes noirs; ensuite | le puits de la Confiance , qui a coupé deux veinules : une d’elles présente actuellement un bouillard assez avanta- geux dans le puits de la Renaissance, foncé à l’est de cette coupe. Celui de Saint-Nicolas et deux autres puits de recherche ont accusé trois veinules au milieu du bassin, et le puits de la Promenade, foncé près de la rive nord, une. Les roches qui séparent ces veines sont indiquées sur la coupe. Entre la rive nord du bassin et les schistes de. transition , une largeur de 700 mètres est occupée par les amphybolites. On y voit le dépôt calcaire toucher presque le bord du bassin. Le schiste qui reprend au-delà de cette roche ignée est Lourmenté sur une soixantaine de mètres environ de lergeur, et enfin il plonge au sud. Quatrième coupe. — La plus belle coupe qu’on puisse faire du bassin anthraxifère et des roches qui l’encaissent est celle aux environs de la Haïie-Longue. Une multitade de puits avec leurs coupements faits dans la concession de Layon et Loire, une trentaine de sondages et un puits foncé dans celle de Désert, vérifiés par les affleurements sur l’escarpement du coteau du Louet , entre Chaloanes et Rochefort, fournissent des données suflisantes pour sa construction mathémathique. M. Rolland , ingénieur de DES 1° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 33 la mine de Layon et Loire, l’a déposée l’année dernière à la société géologique de France, réunie à Angers. Comme elle est faite avec une grande exactitude, je Ja reproduis en y ajoutant au nord et au sud les roches qui l’encais- .sent. Après avoir dépassé les buttes de quartzites du sud , le banc du calcaire silurien ; une couche d’ampelites et üne grande épaisseur de grauwackes et schistes rouges el verts s’inclinant au nord > On arrive à un poudingue à ciment Quartzeux qui commence le bassin anthraxifère. I! présente dans cette latitude huit subdivisions séparées l’une de l’autre par des poudingues, La première zône est appelée systéme da Poirier-Sam- son. Elle ne renferme qu’une veine , divisée quelquefois en deux veinules peu régulières. Les schistes qui avoisi- nent les veines contiennent de nombreuses empreintes d’une fougère à Liges très ténues,. La seconde est le systême des Bourgognes. Il contient trois veines qui souvent se réduisent à deux et quelquefois à une seule; ce qui donne lieu à des amas considérables auxquels succèdent souvent des parties stériles d’une grande étendue, Les roches qui séparent les couches de combustible sont des grès à grains fins et des argiles schisteuses très noires. ; Le systéme de Goismard est englobé dans la pierre carrée; il contient quatre veines : CAL Deux veines de Goismard , grande et pelite ; donnant acluellement une belle exploitation à cause de leur régu: larité ; : : kfbr À La veine de Recherche, peu exploitable, ainsi que celle du Chôve, A l'exception de la dernière veine qui recouvre le sys- tême , les trois autres. ne sont séparées de la pierre carrée que par des bancs peu épais de schistes et de grès, Ti TE à 34 MÉMOIRES Le poudingue , à ciment de pierre carrée , sépare ce système du précédent, Vient ensuite le mur de la grande veine , qui se compose d’une légère couche de la blanche- ronne déposée sur un grès présentant peu de tenacilé, son épaisseur est de 7 à 8 m. La grande veine a une épaisseur moyenne de o m. 60. Elle est séparée de la pe- tite, dont l'épaisseur moyenne est de 0, 4o, par un grès schisteux de 6 à 8 m. de puissance. La tourte fait le toit de la dernière veine. Gette couche est recouverte par un banc de pierre carrée de 70 m. d'épaisseur , appelé par les ouvriers le bon toit. Il présente la plus grande soli- dité, et une extrême tenacité; il n’a besoin, pour être mainteau , d’auoun bois d’étançconnage. Cette grande s0- lidité a permis ,én un point des mines du roc , de creuser une excavalion, cubant environ 1 ,8000 m. cubes, et dans laquelle manœuvre un manège à quatre chevaux , exécuté sur de grandes dimensions. Cette pierre carrée , dont les strales sont très-régulières , renferme des empreintes de lépidodendrons, Dans la carrière de la Dressière, on a enlevé plusieurs empreintes de troncs de palmiers fort re- marquables,, et placés, d’une manière oblique, aux stra- tes de la pierre carrée; ils sont à l'ordinaire légèrement aplatis sur leur couche. Un de ces échantillons avait 1m. 70 de hauteur, o, 38 de diamètre dans un sens, et 0, 20 dans l’autre. Une légère couche de houille semble remplacer l’écorce , tandis que tout l’intérieur est passé à l’état de pierre carrée. La veine du Chêne a pour mur un banc de grès dur, et pour le toit, du grès schisteux. Système de la Barre repose sur un poudingue à grains de quartz de petites dimensions. Il contient trois veines : La veine du Vouzeau, sud, celle du Vouzeau, nord, et une, nommée de Trois-Filons. : La veine du Vouzeau, nord , a présenté une régularité parfaite dans les anciens travaux de la Haie-Longue. Les DES {'° ET 6£/SEQMONS RÉUNIES. 35 -couches sont accompagnées d’un banc mince de pierre carrée, contenant une veinule sans importance. La veine de Trois-Filons est accompagnée d’une couche peu puis- sante de rognons de fer carbonaté. Cette couche est très- apparente sur le bord du Layon. Les grès et les schistes de cé systême sont d’un gris noirâtre plus ou moins fonté. Ils contiennent des empreintes de calämites en grande abondance. On ÿ rencontre des troncs de paliers passés à l'état de grès , ei disposés pérpendieulairemient à la stra- tification des roches. | Système de Bel-Air s’appuie sur un potdingue à gran- des empreintes de végétaux aplatis: il est très-visible à l'est de la maison du Vouzeau. Il contient quatre veiries : Veines du Caf : petite, grande veine; Veines de Bel-Air : petite, grande veine. Sur le coteau de la Haie-Longue, les deux dernières paraissent étre d’une exploitation plus avantageuse que les premières. Les grès et les schistes, qui avoisinént les couches, sont d’une nature différenté des autres. Léur eouleur est grise, leur texture est très-fine. Quelques bancs contiennent beaucoup d’empreintes végélales , et surtoul de calamites. La base du système des Noulis est un poudingue assez grossier. Îl contient trois veines : Gelle des Noulis, de la Portinière , el de la maïson des Noulis. La première avait été exploitée avec avantage pour le charbon de forge. Le mur de cette véine est formé par la pierre carrée. La seconde est péü connue, on lui donne cependant quelque importance dans le puits de la Portinière. La dernière est connue pour peu avantageuse Les veines sont séparées par des grès et des schistes noi- râtres, : Systême de la Haie-Longue est Souténu par un pou- dingue à ciment grossier, êt contenant des grains de 36 MApA MÉMOIRES 2 quartz de grandes dimensions. Le village de là Haïe-Lon- gue, qui existe dans cet endroit, lui a donné son nom. Trois veines le composent : Veines de la Haie-Longue : petite, grande veine; Veines du Pâtis. Elles sont peu connues , et semblent d’une assez faible importance. Entre les veines, se trouve une succession de grès à grains fins, et de schistes très-micacés jaunâtres. Le poudingue, qui fait la base du système des Essards, est très-grossier ; 1] se présente sur les'bords de: Louet, près de la maison du Pätis, en pointe élevée. Ge systême se compose de trois veines. La première, nommée des, Essards, a donné lieu, seule , à une exploitation régulière et assez avantageuse, Gelle du Petii-Honx est en petit: chapelets ; et enfin, la veine de Vaujuel n’est connue que par des recherches infructueuses. Ces veines sont séparées les unes des autres par des bancs plus ou moins épais de 4 grès et de schistes noirâtres. Ce dernier système est cou vert par un poudingue qui contient les débris des schiste: rouges et verts. Il se fait apercevoir sur plusieurs-point de la rive nord du bassin anthracifère , entre autres dan le puits de la Route-aux-Loups de Saint-Georges-sur: Loire , et sur l’escarpement du coteau du Loue, Les premiers quatre systêmes s’inclinent au nord sou l'angle de 50 à 70°; le cinquième présente une inclinai son douteuse, el les trois derniers plongent au sud sou l'angle dé 40 à 80°. En supposant que cette inclinaison incertaine du milieu du bassin, plonge au sud, on pour rait admettre que celle coupe représente le redressemen de toutes les couches qui compossient l’épaisseur du dé, pôt anthraxifère , à l’époque de sa formation. Cinquième coupe. Cette coupe est faite par Montjean e a f 1 : Saint-Germain-des-Prés. En partant du sud, on voit at milieu des schistes un lambeau du terrain anthraxifère | dévié par le surgissement des quarlziles; ensuite, on DES 1'° ET 6° SECTIONS REUNIES. 37 passe-une couche du caleaire cristallin, puis une épais- seur,assez grande des schistes, des grauwackes , ei on ar- rive , avec la stratification concordanteet l’inclinaison au nord , sur le bassin'anthraxifère. Le terrain présente d’a- bord une couche assez épaisse de schistes brassés avec des filonages. insignifiants de charbon. La veine du sud, exploitée autrefois. avec avantage, termine ce terrain pauvre, et. ouvre la succession de plusieurs veines qui ont donné des produits positifs, La veine de Bellevue et de Sainte - Anne ont fourni du charbon de forge , et les deux veines du Pavillon , du charbon propre à la cuisson de là chaux. La pierre carrée englobe les deux veines in- termédiaires, forme le toit de la veine du sud et le mur de celle du Pavillon. Ensuite, on voit une succession de grès à différents grains, de la pierre carrée, du grès à filonages insignifiants, et un.nouveau banc épais de pierre carrée, qui contient les deux veines du Cassis , la veine du Dôme , et les deux veines du Vallon. Ce système de la pierre carrée se termine par la veine de l’Aumonerie, dont le loit est en grès. Toutes les roches et les veines susdites s’inclinent au nord , sous l’angle de 4o à 70°. Puis, l’alluvion de la Loire couvre. le bassin anthracifère. De l’autre côté de l’alluvion , les puits des Grandes-Rivet- tes et de Verrière ont rencontré les affleurements s’incli- ant ,au sud, tandis que le groupe de sondages, aux environs de la, Corvée ; a accusé le pendage de 70° au nord des quatre veines exploitables. Il faut admettre-alors que le repli du bassin est quelque part entre le puits de Verrière et le sondage de la Corvée. Au nord du bassin, le: schiste de transition s'incline au sud, en stratification concordante avec lui. Sixième coupe. La dernière épais peu, explicative, est faite. par Ingrandes. En allant du nord au sud, on passe d’abord:les LL rouges et verts, qui, contiennent des bancs de grès qu’on-exploite pour des constructions, Au 38 MÉMOIRES milieu de ces schistes, plongeant au sud , on apercoit une petite butte d’amphybolites ; sa partie supérizure conte- nait une quinzaine de mètres cubes de calcaire cristallin et rubané, semblable à celui du pont Barré. Vient ensuite la bassin anthraxifère qui s’y présente en succession de poudingues , schistes, poudingues, grès, poudingues et schistes , séparés par plusieurs affleurements. Deux puits, foncés dans la ville d’Ingrandes, ont indiqué les veines exploitables; on les a abandonnées, sans en avoir tiré partie , à cause de la loï de police qui interdit l’établisse- ment des puits près des maisons, Le bassin n’y est visible que sur 1,000 mèt. environ de largeur; sa rive sud est couverte d’un poudingue plus récent que sa formation. L'inclinaison de toutes ces roches est au nord, Les allu- vions de la Loire masquent le terrain silurien sur une assez grande largeur. Au nord du Mesnil, on coupe deux lambeaux du terrain anthraxifère, qui ne présentent au- cun avantage dans celte localité , et, au sud de ce bourg, un troisième un peu plus large que les précédents, mais sans importance industrielle. Les schistes argileux encais- sent ces lambeaux , léur inchnaison est au nord. En étudiant les coupes que je viens de donner et plu- sieurs points intermédiaires sur le plan géologique du bassin anthracifère, on reconnattra qu’à partir de son extrémité sud-est, presque la moitié de la largeur plonge au nord, et l’autre moitié , au sud. À l’extrémité opposée de la première amande, la pente au sud disparaît. La seconde amande tout entière, et une portion de la troi- sième ; s’inclinent au nord jusqu’au pont Barré. On dé- termine dans ce dernier lieu là rencontre des deux incli- naisons opposées, suivant une ligne biaise, par rapport à la direction du bassin anthraxiftre, La ligne de replie passe aux environs des puits de la Confiance et de la Pro- menade, Depuis cette ligne de démarcation jusqu'aux en- virons de Saint-Aubin, tout le bassin s'incline au sud. DES 1'° ET 6% SECTIONS RÉUNIES. 39 L’inclinaison au nord reprend en forme de coin sur la rive sud du bassin , aux environs de ce bourg, et continue vers l’ouest , en s élargissant de plus en plus. La coupe, aux environs du Louet, présente la rencontre de deux inclinaisons opposées, presque au milieu du bas- sin. Plusieurs sondages et un puits foncé au milieu des alluvions de la Loire , près de Désert, accusent la pente au Nord, tandis que les puits de la rive droite de la Loire, depuis Laleu, jusqu’à l'extrémité ouest de la troisième amande, indique au sud. Tous les travaux souterrains de Montjean, et un groupe de sondages de l’autre côté de la rivière , aux environs de la Corvée, ont réncontré lincli- naison au nord; les puits foncés plus près de la rive nord du bassin , entre la Missonnière et Champtocé , ont trouvé le terrain s’incliner au sud. Enfin; la dernière coupe, par Ingrandes , ne donne que l’inclinaison au nord, La direc- tion des roches environnantes , indique qu’entre la Boire de Champtocé et celle de la Fresnaye , la rive nord du bassin anthraxifère affecte une inflexion réntrant au sud ; il est à présumer qu’à son sommet, l’inclinaison sud , ac- cusée dans la coupe faite par Montjéan et Saint-Germain, se perd totalement. L’assemblage de ces inclinaisons , permet de tracer üne ligne moins sinueuse que celle qui est décrite par le milieu du bassin. Tout ce qui se trouve au sud de cette ligne, plonge au nord , et, réciproquement, ce qui se trouve au nord, s'incline au sud. Il arrive souvent que la largeur tout entière du bassin n’a qu’un seul sens d’inclinaison; mais, les schistes qui l’encaissent, ‘affectent toujours la forme des paroïs d’un bateau. Lorsque la rive du bassin est en stratification concor- dante avee les schistes, l’inclinaison et la direction des strates sont parfaitement caractérisés ; dans le cas con- traire, ils sont brassés sur une largeur plus ou moins grande , à partir de la rive du bassin. Conclusion. 40 | MEMOIRES Après avoir terminé la description des circonstances relatives au gisement anihraxifère dans l’Anjou, et de sa situation , par rapport aux diflérentes couches qui cons- tituent le terrain de transition, je tâcherai d'expliquer le mode de leur formation , en me servant de preuves pui- sées dans les détails qui précèdent. . Faisons abstraction , pour le moment , des roches d’é- ruptions , partielles , telles que les amphybolites, les por- phyres et les quartzites, qui ont surgi après le dernier mouvement du terrain de transition; admetlons, en ou- tre , que toutes les causes, qui ont occasionné le redresse- ment des couches de ce terrain , aient disparu, et que leurs strates, en se dépliant autour de l’axe longitudinal que j'ai déterminé précédemment , deviennent plus ou moins. horizontales, sans, être gênées dans le glissement Pune sur l’autre , et nous arriverons alors à concevoir la construction du terrain, Lelle qu’elle a été avant son pre- mier bouleversement. . Les puits d’extraction, foncés jusqu’à 300 mèt, de pro- fondeur, près de la ligne susdite de division, de bassin , n’ont pas atleint son repli; sans savoir définitivement à quel niveau on le trouverait, il est constant que, si on admet le chiffre 300, comme une limite minimum , tou- tes les couches qui composent le bassin, et celles qui l’environneut, seraient repliées à des profondeurs pro- portionnelles aux distances comprises entre les afileure- mens de ces couches et l’axe du: pli. Prenons pour exem- ple la quatrième coupe, et admettons que l’inelinaison moyenne du Lerrain soit de 70°, les poudingues , qui limi- tent les rives du bassin, se rencontreraient au niveau de 3,900 mèt. Les phtanites , qui afleurent près de sa rive nord , seraient repliés à celui de 4,000 :mèt., et le banc du calcaire marbre du sud, à 7,400 mèt. Si chacune des deux dernières roches paraissait au nord et au sud du bassin , les phtanites présenteraient nne largeur dévelop- DES 1'° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 4t pée de10,000 mèt. au moins sans compter les portions au-delà des déchirures ; et le calcaire, une étendue, de 16,000 mèt. Ilest possible que la limite de 300 mèt. ait besoin d’être :doublée , ou même, peut-être décuplée ; alors, les chiffres qui en. dérivent, subiraient le même changement, Le quatrième coupe , qui cine le repli de toutes les couches anthraxifères, semble indiquer que leur dépôt a élé formé à quatre g grandes époques bien tranchées, et les débris les plus grossiers des roches entraînées par les courants , suivant l’ordre de leur pesanteur, se seraient déposés d’abord, et auraient formé les couchas composées des plus gros éléménts , qui se trouvent à la base de cha- cun des systêmes. On ne rencontre pas de grandes analo- gies. entre Îles systèmes correspondants, Par exemple, celui de Goismard repose sur le poudingue à ciment de pierre carrée, et son correspondant des Noulis, sur un poudingue à pâte quartzeuse , contenant, des grains sem- blables à des cailloux roulés. La pierre carrée, qui est très-développée dans le premier, l’est beaucoup moins dans le second. Le grès schisieux, qui sépare les deux veines de Goismard , a 8 mèt. d’épaisseur à son aflleure- ment; il n’en a que à à 100 mèt. de profondeur, mesurée suivant l’inclinaison des. couches , et'moins de 1 mèt. à 200 mèt. ; il disparaît complètement dans l’exploitation la plus profonde de la Haie-Longue, et les deux couches de combustibles se réunissent pour disparaître peut-être à leur tour. Ce casse présente dans beaucoup d’autres localités du bassin. La veine de Noulis parait être le pro- longement d’un des filons insignifiants qui se montrent au nord. de, la pierre carrée du Goismard. La disparition des roches dans les profondeurs , nous prouve que l’épais- seur des couches, charriées par un courant quelconque, sur une surface plus, ou moins inégale, est en rapport avec leur largeur ; il rie serait donc pas étonnant que celle 42 MEMOIRES des phtanites fut moindre de 10,000 mèt., et celle du calcaire , de 16,000 mèt. Les différents lambeaux du terrain anthracifère , que nous avons signalés précédemment , entrent dans la même catégorie. Chacune de ces roches, prises séparément, étant arrêtée dans son mouvement , a déposé un lit plus ou moins épais, suivant la quantilé d’eau évaporée dans chaque localité. Ensuite, lorsque un nouveau courant a charrié une autre couche , elle a suivi les bas fonds, et, après l’évaporation de l’eau qu’elle contenait , elle a laissé des ondulations plus compliquées que la précédente. Ajou- tons à cela les grandes inégalités que la croûte du terrain igné a laissées après son refroidissement , el nous ne se- rons pas étonnés de voir tant de variations dans les incli- naisons et dans les directions des couches supérieures du terrain silurien. Le transport de ces couches d’une loca- lité à l’autre, entre les époques successives de la forma- tion , peut jouer un grand rôle dans son ensemble, qui se présente actuellement. Pendant que les roches ignées relevaient les strates du terrain, celles qui étaient plus compactes , exerçaient une plus grande résistance que celles qui étaient friables: C’est pour cela qu’on voit toutes les ondulations extérieures des rives du terrain anthraxifère , entourées de schistes rou- ges et verts très-feuilletés ; tandis que celles qui rentrent dans l’intérieur du bassin, sont accompagnées du grès dur à strates épaisses. Ces ondulations sont très-visibles entre Laleu et Champtocé. Les porphyres ont surgi de ce côté , et plusieurs géologues leur ont attribué le déran- gement de la rive du bassin ; mais, l’examen de leur po- sition relative , et la faible déviation des schistes qui cou- ronnent leurs cîmes , sufhisent pour donner une opinion contraire à ce sujet. Le bassin antraxifère est exploité par huit compagnies concessionnaires : DES 1'* ET 6° SECTIONS REÉUNIES, 43 La concesssion de Doué occupe sa première amande, celle de Saint-Georges-Châtelaison embrasse la seconde et la portion est de la troisième jusqu’au pont Barré, La partie centrale de la troisième , entre la rivière de Louet et celle de Layon, est concédée à la compagaie de Layon et Loire. Les deux portions du bassin de la rive gauche du Läyon, éntre Cholonnes et pont Barré, composent la ‘concession de Chaudefonds. La rive droite de la Loire, jusqu ’x l'extrémité ouest de cette amande, porte le nom de concession de Saint- Georges-sur- -Loire. Les îles de Chalonnes , vis-à-vis la concession précédente, jusqu’au Louet, s’appellent la concession de Désert. La portion nord-est, de la dernière amande, forme la concession de Saint-Germain-des-Prés, et celle de sud-ouest porte le noi de la concession de Montjean. Les rapports de M. de Voglie, ingénieur du roi en ch f, pour les ponts et chaussées, à Fours ; et de M. Du- hamel fils, ingénieur des mines, prouvent qu'avant la Révolution de 1792, la concession de Saint-Georges-Chä- telaison a été la plus productive dans l’Anjou. La rivière de Layon, canalisée , luka-faoilité le-transport de charbon jusqu’à la mer; aussi, les ports de FOcéan et les colonies françaises furent approvisionnées de charbon de Saint- Georgés- -Châtelaison pendant la-guerré d'Amérique; leur qualité supérieure, reconnue à Brest et à Rochefort , les fit particulièrement rechercher pour forger les clefs de mât. On n’eut plus besoin de recourir au commerce inter- lope de Jersey et de Guernesey, pour se procurer du char- bon anglais; sa consommation , à Nantes et dans les ports, s’éleva , en un on, à douze mille pipes nantaises du poids de mille à onze cents livres. Ge charbon a été fourni par les usines du Grand-Puisard , du Puissant, du Grizon et du Nord. Pendant la guerre dé la Vendée, le canal fut détruit, tous les approvisionnements de la compagnie enlevés , et les puits déboisés. Après le passage de ce fléau, 44 MEMOIRES il n’estresté qu’un puits d'extraction, et on n’a pas osé rétablie de grands travaux, à cause du manque de dé- bouchés. | Actuellement , la concession de Layon-et-Loire donne les plus beaux résultats de tous. Ses produits sont tirés des veines des Bourgognes , par les puits des Bourgognes, du Bocage et de la Coulée; de celle de Goismard , par les puits de l'Ouest, Sainte-Barbe, Saint-Marc et la Galerie du Roc; enfin, le puits des Barres. sert pour exploiter la veine de Bel-Air et celle des Noulis. Sa production moyenne est de 200,000 hectolitres par an, de charbon, qui est emiployé presque en totalité pour la cuisson de chaux. En 1840, toutes les mines d'Anjou, réunies , ont pro- duit 192,800 PE. mélriques de charbon de fourneau et de charbon de forge. Sur cette quantité , les mines de Layon et Loire ont par 196,450. Généralement, le charbon de forge est le dixième du produit total. — —— C00 — BOTANIQUE. NOTE SUR LES TIGES FASCIÉES, PAR M. A. BOREAU, Directeur du jardin botanique de la ville d'Angers, président du co- t mité d’horticulture et d'histoire naturelle de la Société industrielle de Maine et Loire. L'opinion des physiologistes sur l’origine des tiges fas- ciées dans les plantes paraît jusqu'ici n’être pas définiti- vement fixée. Linné regardait ces expansions comme provenant de la soudure de plusieurs tiges en une seule. Jœger, qui s’est longuement occupé de cet objet , com- bat cette opinion, et considère la fasciation comme résul- °3 52252 unes RES 8 L'on — Pl LEE #55 = E E La oi . Le De AN x ÈSSJTY ss BE FRERE KR - | A Lai] e CCC Euth de 2 D È 2 À à > vebte À Sn k ‘ Le] CE Se à o EN Le Ces Coupes Ü eue D, Lea eme Con 4 Peu À Name de Roabou de tar À WW Devrain de Hausition À È 3 ("4 3 à ; j À à janconiriiéé. 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Moquin Ten- don, dans sa T'eratologie végétale (p. 148) , est d’une opinion différente ; pour lui, c’est une anomalie spéciale produite par un excès de nourriture. Auguste de Saint- Hilaire , dans sa Morphologie végétale (p. 127) , nie posi- tivement que ce phénomène résulte de la soudure de plu= sieurs tiges ou même de plusieurs rameaux en un seul corps. Il. pense, avec Link, que c’est le premier degré de la partition ; on voit , dit-il, des tiges fasciées qui com- mencent à se partager, et d’autres qui sont divisées jus- - qu’à une cerlaine profondeur. Dans une notice sur plu- sieurs |faits. de teratologie végétale , publiée en 1842, . Kirschleger fait l’histoire d’une veronique à lige fasciée , - et} après avoir rappelé, comme nous venons de le faire , la divergence des opinions à cet égard , il conclut que ; toul en envisageant Îles fascies des corymbifères, des aunes, des saules, des sapins ; comme des élats morbidés Spéciaux , il n'ose pas enlièrement rejeter l'opinion de Linné et est assez disposé à admettre l'hypothèse de la . coalition de deux axes. » Ces deux opinions controversées ne sont pourtant pas inconciliables, et les-opservations que nous avons recueil- lies nous portent à considérer ces deux hypothèses comme des faits désormais acquis à la science. Lorsqu'une plante à tige habituellement très rameusé ne présente qu’une surface plane simple et plus large au sommet qu’à la base, EE 46 1: : MÉMOIRES n’est-il pas rationnel d'admettre que l’anomalie, dont la tige principale a été affectée s’est étendue jusqu'aux axes sécondaires ou rameaux , et qu'ils se sont soudés avec l'axe primaire pour ne former qu’une seul corps ? Une viperine commune (Echium vulgare ; L.) offrait une tige élevée d'environ un mètre , aplatie et large de 6. à 8 centimètres, se divisant au sommet en ramifications également aplaties , et qui paraissaient séparées par une sorte de déchirement ; une multitude de feuilles étaient éparses à leur surface sous forme de petites bractées et un grand nombre de fleurs étaient pressées sur cette espèce de crête ; et rappelaient par leur disposition la forme bi- zarre du Celosia cristata. Il n’était pas difficile de voir que ces rameaux soudés ne s'étaient séparés qu’en cédant à la force d'expansion qui dilatait la plante vers son extrémité supérieure. Gette viperine croissait dans un pré sec parmi d’autres indivi- dus à l’état normal. Une carline commune (Carlina vulgaris, L.) présen- tait un état presque semblable, mais elle n’était pas rami- fiée, quelques anthodes s’épanouissaient au sommet. Dans d’autres espèces, également spontanées, telles que les Cichorium intybus, L., Pieris hivrarioides, L., Chondrilla juncéa , L., Cardamine pratensis, L., Beta vulgaris, L., Ranunculus acris , L., les rameaux , soit qu'ils fussent complétement adhérents à Paxe principal, soit qu’ils s’en séparassent plus ou moins , laissaient tou- jours apercevoir la soudure qui les réunissait dans une certaine partie de leur longueur. Une tulipe des jardins (Tulipa gesneriana ; L.) avait produit une hampe ; qui, vers sa parlie moyenne, offrait cinq ramifications terminées chacune par une fleur simple et formant ainsi un bouquet d’une rare élégance. L’orga- nisalion bien connue de la tulipe ne permet pas de douter qu'il n’y eût en ce cas cinq axes soudés dans une partie DES 1"° ET 6*1SECMONS RÉUNIES. 47 de leur longueur, on pouvait même les distinguer encore, bien au-dessous de leur point de jonction, où ils formaient des angles, mais non une surface aplatie. Jusqu'ici les tiges dont nous avons signalé les altéra- tions approchaienL plus ou moins de la forme cylindrique, mais dans les tiges quadrangulaires , la disposition diffé- rente des fibres devait produire une fascie d’une autre nature. Un individu de Leonurus marrubiastrum , L., présen- tait une tige fasciée, sur laquelle on distinguait des angles prononcés comme si, plusieurs tiges tetragones avaient été très rapprochées , mais il n’en résultait pas une surface plane comme dans les autres fascies; l’aplatissement était irrégulier et la tige se contournait.en une spirale, dont les spires Boioustent plus läâches à mesure qu’elles appro- chaient du sommet de la plante. Les feuilles n'avaient pu conserver la disposition oppositive qui leur est naturelle; elles étaient régulièrement rangées sur une ligné qui sui: vait les. circonvolutions de la spirale. Je conserve dans ma collection celte curieuse-monstfuosilé. Dans une scrophulaire (Scraphularia sambucifolia, L.) cultivée au jardin d'Angers, en 1845, les quatre angles de la tige étaient:oblitérés; la tige, devenue cylindracée, était sensiblement gonflée , ce n'était qu’à son extrémité qu'elle inontrait un aplatissement ments la soudure évidente des rameaux s’étendait jusqu'aux pedicelles’ et aux fleurs. Ces fleurs , beaucoup plus grandes que dans l'état ordinaire , étaient distendues sürtoût dans le sens de leur largeur ; elles se composaient de deux corolles adhérentes entr’elles de telle manière qu’il n’en résultait . qu’une seule cavité; le rudiment d’étamine, ou petit ap- pendice qui s’observe sous la lèvre supérieure de la corolle des scrophulaires , se trouvait ici répété deux fois ; ces deux appendices n’étaient point contigus, ils étaient écar- ‘tés l’un de l’autre sous cette voûte qui leur était com- 48 MÉMOIRES mune ; le nombre des étamines était doublé , mais plu- sieurs d’entr’elles semblaient oblitérées ; l’ovaire , qui occupait le centre de ces appareils, résultsit évidemment de l’adhérence de deux ovaires ; les quatre sillons qu’il porte dans l’état ordinaire étaient multipliés, mais il n°é- tait surmonté que d’un seul style; les graines étaient fort nombreuses : elles m'ont paru mal conformées , accident du reste assez fréquent dans les scrophulaires cultivées. Il résulte de ces observations que le phénomène dési- gné sous le nom de lige fasciée peut être attribué tantôt à la dilatation anormale d’un seul axe, tantôt à la réunion de plusieurs axes en un seul, que ce PARCS peut s’élendre aux organes -appendiculaires et jusqu'aux par- ties de la fuevication elles-mêmes. DESCRIPTION ET FIGURE DU GENRE MYCENASTRUM, Par M DESVAUX, botaniste à Nantes. Le genre Myééradiee étant un végétal décrit par nous, seulement en 1842, dans les A ab des sciences natu- relles (1), nous avons cru qu'il serait intéressant de rat- tacher celte curieuse production aux travaux du Congrès scienlifique de cette partie de l’ouest de Ja France , à laquelle appartient cette production. Une figure exacte fixera invariablement cette espèce dans la science , d’au- tant plus que le savant my cologue anglais Barckley nous marque que lui-même à PARTNER ; au cap de Bonne- Espérance , une espèce qui se rattache à ce genre nou- veau. (1) T.XVIL, p. 143, ae à A" koi AUTO er Ne oh ÊH ET Me de. LR FN. PARTS L' . Let la Re à. DES ‘ fie 4 1 , + « F4 HT Lg 7 bol Lo ir War QU " TREA di ai ve | SNA: 204 ti 4e AECTEREE ” , ae pa ie RÉ (LE (ya 1146 FA L2.. Mycenastrum Corium der V2 syemden PI. Æ. Là Mycenastrum Ceaster Cau 4/2 jndeur. FN e) Fay odttbant 40h aq, hit Hat de is ONE TIT OT ec RS LEE bb 448 ends 4 : l'a: DUT AN PRET EU" TS | | Don . rte 23 gg L: 1 ls Ÿ ne : LL Enr DES 1'° ET 6° SECTIONS REUNIES. 49 Nous avons presque la certitude que la Boviste sube- rosa , de Fries, est la même que notre Mycenastrum corium , et encore le même que le Lycoperdon corium de De Candolle. Dans le doute où se trouvent les bota- nistes à cet égard, rien n’est plus propre à fixer l’incerti- tude que la publication d’une bonne figure, et probable- ment que, par là, la science y gagnera la suppression de deux noms , ou au moins la facilité de constater si l’Eu- rope renferme plusieurs espèces se rapprochant de la nôtre , observée dans le département de la Loire-Infé- rieure , sur les bords de la mer, au Croisic, dans les sables , près la chapelle de Saint-Gonstan , vers le mois d'octobre 1841. MYCÉNASTRE (Mycenastrum). Ce champignon globuloïde, du groupe des lycoperdées, est charnu dans son premier état de développement; peu à peu il durcit, et en vieillissant , et avant même qu’il s'ouvre, il perd une pellicule blanche l’enveloppant com- plétement et qui tombe par lambeaux. La partie coriace, épaisse , persistante, s'ouvre au sommet en sorte d'étoile irrégulière ; l’intérieur est rempli d’une masse brun-ver- dâtre en forme de feutre , renfermant dans son tissu les spons ou la poussière qui se répand au-dehors. MYCÉNASTRE CUIR /Mycenastrum corium). Desv. Planche III, fig. 1 et 2. Cette espèce est plus oa moins globuleuse ou ovale, blanche, de la grosseur d’un œuf d’oie à peu près (fig. 1), n'ayant pas de corps radiculaire appréciable, mais tenant à la terre par des fibriles parlant de sa pellicule caduque blanche ; couleur gris brun après la chute de la pellicule blanche ; déhiscence plus ou moins régulière, par le som- met en cinq à sept parties formant de grands lobes dis- T. ‘IL. LA 50 MÉMOIRES posés comme en étoile (fig. 2) et offrant , dans leur épais- seur notable et approchant de celle de gros Carton ou de Guir épais, un tissu très serré et dur, La figure que nous donnons suflira pour donner l'idée complète de ce champignon , sans que nous ayons re- cours à des détails microscopiques , lesquels, selon nous, aident moins la science qu’ils ne la surchargent ; et dont tout le mérite doit être attribué à l’epticien plutôt qu’au naturaliste , au moins teile est notre opinion sur le luxe actuel de micrographie dont on encombre les sciences naturelles. EXPLICATION DE LA PLANCHE II. Fig. 1. Un individu ayant perdu la plus grande partie de sa pellicule extérieure , maïs sans être encore ouvert. Fig. 2. Individu aux deux tiers de sa ruptilité spontanée. Nota, La très curieuse et très vaste collection icono- graphique de champignons ; faite par M?° Cauvin (du Mans), tant sur les documents publiés que d’après ses propres observations, nous a fourni un champignon erois- sant dans le département de la Sarthe , sous le nom de Scleroderma geaster (Fries et Desp., FL. de la Sarthe). Ce curieux végétal devant certainement faire partie de notre genre M ycénastre, nous renyoyons à la descriplion de cette espèce , faite et promise à la onzième session du Congrès scientifique par M®° Cauvin , afin de bien faire remarquer la différence qui existe entre celle-ci et l’espèce que nous venons de décrire. MYCÉNASTRE GÉASTRE /Mycenastrum geaster). Gauvin. Planche IV, fig. 1 et 2. Scleroderma geaster, Fries et Desp., F7. de la Sarthe et de la Mayenne. Ce champignon , de couleur jaune sale terreux , est DES {'° ET 6* SECTIONS RÉUNIES. 51 globuleux avant son déreloppement , légèrement aplati au sommet , ainsi qu’à la base , qui souvent est un peu amincie ; la partie supérieure est ordinairement garnie d’une certain nombre de petites écailles, et l'on remarque parfois à l’extérieur , vers l’époque où il doit s'ouvrir , de légères côtes obtuses, Il varie dans son diamètre qui est quelquefois de 15 à 18 centimètres. Il est sessile, fixé à la terre par une touffe de fibrilles entrelacées, presque car- tilagineuses. Enfin il s’ouvre par le sommet, se fend en six ou huit lobes aigus, inégaux, mais de même forme ou à peu près, disposés en étoile , et s’étale sur la terre à la manière des géastres. Ges lobes, épais de 3 à 5 centi- mètres, sont , à l’état frais , très cassants ; en se dessé- chant , ils perdent beaucoup de leur épaisseur et de leur étendue, prennent la consistance du liége ét se contour-. nent à leur extrémité. L'intérieur est rempli par une masse assez compacte , composée de globules noirs et gris qui se changent plus tard en une poussière abondante brune. Cette masse peut facilement être détachée sans la déformer. On rencontre. ce champignon , à l’état frais , au mois d'octobre, dans les bois de Pins , aux environs du Mans, particulièrement à Ponilieue, près Funay. Il se dessèche bientôt et passe ainsi l’hiver sans se décomposer. EXPLICATION DE LA PLANCHE IV. Fig. 1. Un individu réduit à plus de moitié de sa gran- deur naturelle eb présentant un commencement de rup- tilité. | k Fig. 2. Ce méme champignon, également réduit à plus de moitié de sa grandeur naturelle , complétement déve- loppé et montrant au centre une masse compacte com- posée de globules noirs et gris. 52 MÉMOIRES OVOLOGIE. CATALOGUE DE LA COLLECTION D’OEUFS APPARTENANT A M. RAOUL DESTRICHÉ DE BARACÉ, NATURALISTE A ANGERS, CLASSIFICATION ORDONNÉE SELON C.-J. TEMMINCK. ORDRE PREMIER, — Rapaces. Genre 1er. Genre 2e. Genre 3€, Genre #e€, Faucon hobereau. Falco subbuteo. (Lath.) — émérillon, æsalon. (Mih.) — cresserelle. tinnunculus. (Linn.) Aigle botté. pennatus. (Linn.) — Jean-le-Blanc. brachydactylus. (Wolf.) — balbuzard, haliaëtus, (Linn. Autour. palumbarius. (Linn.) Epervier. nisus. (Linn.) Milan royal. milvus, (Linn.) Buse. buteo. (Linn.) Bondrée. apivorus. (Linn.) rufus. (Linn.) Buzard harpaye. cineraceus. (Mont.) — _Mmontagu. Genre 5€. Chouette huiotte, Strix aluco. (Meyer.) — effraie. flammea, (Linn.) — chevêche. Passerina. (Auctorum.) — tengmalm. tengmalmi. (Linn.) — chevêchette. acadica. (Linn.) Hibou brachiôte. brachyotos. (Lath.) BAR ARESRE ETAS — grand-duc. Striæ bubo. (Linn. — moyen-duc. — otus. (Lion) — SCOps. — scops. (Linn.) ORDRE NI£.— Omnivores. Genre 6e. Corneille noire. Corvus corone. (Linn.) Freux. — frugilegus, (Linn.) Choucas. — monedula. (Linn.) Pie. — pica.(Linn. Geai, — glandarius. (Linn.) DES dre ET 6° SECTIONS REUNIES. Genre 7€. Genre 8€. Genre 9€. Genre 10€. Genre 11€. Loriot. Oriolus gatbula. (Linn.) Genre 12€. $ | Etourneau. Sturnus vulgaris. (Linn.) — unicolore. — unicolor. (Marm.) Genre 13°. ORDRE IL. — Zrsectivores. Genre 14€. pitte chou. rouge-gorge. gorge-bleue. rouge-queue, de murailles. à poitrine jaune. siffleur. provincialis. (Gmel.) rubecula. (Lath.) suecica. (Lath.). tithys. (Scopoli.) phenicurus. (Lath.) hippolaïs. (Lath.) sibilatrix. (Bechst.) Pie grièche grise. Lanius excubitor. (Linn.) — à poitrine rose. — minor. (Linn.) — rousse. — rufus.(Briss.) — écorcheur. — collurio. (Briss.) : Genre 15€. Gobe-mouche gris. Muscicapa grisola. (Linn.) . — à collier. — albicollis.(Mihi.) Genre 16€. Merle draine. Turdus viscivorus. (Linn.) — litorne. — pilaris. (Linn.) — grive. — musicus. (Linn.) —. noir. — merula.(Linn.) — de roche. — saxatilis. (Lalh.) Genre 17€. Cincle plongeur. Cinclus aquaticus. (Bechst.) Genre 18€. s Becfin rousserole. Sylvia turdoides. (Meyer. — rivérain. — fluviatilis. (Meyer. — locustelle. — locustella. (Lath.) — aquatique, — aquatica. (Lath.) — phragmite. — phragmitis. (Bechst.) — effarvatte. — arundinacea. (Lath.) — verderolle. — palustris. (Bechst.) — rossignol. — luscinia. (Lath.) — philomèle. — philomela: (Bechst.) — orphée. — orphea. (Mihi.) — tête noire, — atricapilla. (Lath.) — fanvette. — hortensis. (Bechst.) — griselte. — cinerea. (Lath.) 53 54 Becfin pouillot. — véloce. — _nalterer. Roitelet ordinaire. — triple bandeau. — lroglodyte. Genre 19€. Traquet moteux. — stapazin. — oreillard. — tarier. — pâtre. Genre 20e. Accenteur mouchet. — pégot. Genre 21e. Bergeronnette grise. _— jaune. — printannière. Genre 22e. Pipit spioncelle. — rousseline. — farlouse. — desbuissons. MÉMOIRES Sylvia tochilus. (Lath.) — rufa. (Lath.) — nattereri. (Mihi.) — regulus. (Lath.) — ignicapilla. (Brehm.) — troglodytes. (Lath.) Saxicola ænanthe. (Bechst.) — stapazina. (Mihi.) — aurila. (Mihi.) — rubetra. (Bechst.) — rubicola. (Bechst.) Accentor modularis. (Cuv.) — alpinus. (Bechst.) Motacilla alba. (Linn.) — boarula. (Linn.) — _flava. (Linn.) Anthus aquaticus. (Bechst.) — rufescens. uen — pratensis. (Bechst.) — arboreus. (Bechst.) ORDRE 1IV®. — Granivores. Genre 23e. Alouette calandre. — cochevis. — des champs. — lulu. — calandrelle. Genre 24€. Mesange charbonnière. — petite charbonnière, — bleue. — huppée. — nonétle: — longue queue. — moustache. Genre 25e. Bruant jaune. —. IAPrOYEer. — de roscau. — ortolan. — _zizioudehaie. — fou ou de pré. Genre 26€, Alauda calandra. (Linn.} cristata, (Linn.) arvensis, (Linn.) arborea. (Liun.) brachidacty la. (Mihi.) ater. (Linn.) cæruleus. (Linn.) cristatus. (Linn.) palustris. (Linm.) caudatus. (Linn.) Parus major. (Linn.) — biarmicus, (Linn.} Emberiza citrinella. (Linn.) _— miliaria. (Liun.) — schæniculus. (Linn.) — hortulana. (Linn.) — cirlus. (Linn.} — cia, (Linn.) DES 1° ET 6° SEGTIONS RÉUNIES. 55 Genre 27e. Bouvreuil commun. , Pyrrhkula vulgaris. (Briss.) Genre 28€. Gros-bec. Fringilla coccothraustes.(Mihi.) — verdier. — chloris, (Mihi.) — soulcie. — petronia. (Linn.) — moineau. — domestica, (Linn.) — friquet. — montan& (Linn.) — ini. — serinuss(Linn.) — pinson. — cælebs. (Linn.) — linotte. — cannabina.(Linn.) — tarin. — spinus. (Linn.)} — sizerin. — cinaria. (Linn.) — chardonneret. — carduelis, (Linn.) ORDRE VE. Genre 29e. Coucou gris. Cuculus canorus. (Linin:} Genre 30€. Pic vert. Picus viridis. (Linn.) — épeiche. — major. (Linn. — épeichette. — minor. (Linn. Genre 31€. Torcol. Yunx torquilla. (Linn.) ORDRE VI£. Genre 32e. Sitelle torchepot. Sitta europea. (Linn.) Genre 33€. Grimpereau. Certuia familiaris. (Limn.) Genre 34€. Genre 35€. La huppe. Üpupa epops. (Linn.) ORDRE VIIC. Gerre 36€. Genre 37€. Martin-pêécheur. Alcedo hispida, (Linn.) ORDRE VITE. Genre 38€. Hirondelle de cheminée. Hirundo rustica. (Linn.)} — de fenêtre, — urbica. (Linn.} — de rivage. — riparia. (Linn.}) — de rocher. — rupestris. (Linu.) Genre 39e. Martinet de muraille, Cypselus murarius, (Mihi.) Genre 40e. Engoulevent ordin. Caprimulgus Europeus.(Linn.) ORDRE IX°. Genre 41°. Pigeon ramier. Columba palumbus. (Lint.) — colombin. — OEnas. (Liom.) — bizet. — Livia. (Briss:} — tourterélle. — turtur, (Lun) 56 ORDRE Genre 42€. Faisan vulgaire. — tetrasauerhan. Genre 43€. Genre 44. Genre 45€. Perdrix bartavelle. Genre 46€, MÉMOIRES x€. — Gallinacées. Phasianus colchicus, (Linn.) Tetrao urogallus. (Liun.) Perdix saxatilis. (Meyer.) rubra. (Briss.) cinerea. (Lath.) petrosa. (Lath.) coturnix, (Lath.) — ORDRE xI®. — Alectorides. Genre 47€. ORDRE XI1€. — Coureurs. Genre 48e. Grande outarde barbue. Genre 49€. canepetière. Otis tarda. (Linn.) — tetrax, (Linn.) ORDRE XIIIe. — Gralles. Genre 50€. Œdicnème criard. Genre 51°. Genre 52€. Genre 53e. Huiterier pie. Genre 54€. Pluvier doré. Grand pluvier à collier. Petit pluvier à collier. Pluvier à collier interrompu. Genre 55€. Vanneau huppé. Genre 56€, Tournepierre. Genre 57€. Genre 58€. Cicogne blanche. Genre 59€. Héron cendré. — pourpré. butor. — blongios. Genre 60€. Flammant rouge, OEdicremus crepitans. (Mihi.) Hœmatopus ostralegus. (Linn.) pluvialis. (Linn.) hiaticula. (Linn.) minor. (Meyer.) cantianus. (Lath.) Charadrius Vanellus cristatus. (Meyer.) Trepsilas collaris, (Mihi.) Ciconia alba. (Bellon.) Ardea cinerea. (Lath.) — purpurea. (Linn.) stellaris. (Linn.) minuta. (Linn.) Phænicopterus ruber, (Linn.) DES 1'° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 57 Genre 61€. : Avocetle à nuque noire. Genre 62e. - Spatule blanche. Genre 63€. Genre 64€. Genre 65e. Becasseau combattant. Genre 66e. Chevalier gambette. Genre 67€. 1 Barge à queue noire. Genre 68e. Bécasse ordinaire. Bécassine ordinaire, — sourde. Genre 69e. Rale d’eau. Genre 70€. Poule d’eau de genet. — marouetle. — poussin. — bâillon. — ordinaire. Genre 71e. Recurvirostra avocetta, (Linn.) Platalea leucorodia. (Linn.) Tringa pugnax. (Linv.) Totanus calidris, (Bechst.) Limosa melanura. (Leisler.) Scotopaz rusticola. (Linn.) .— gallinago. (Linn.) — gallinula, (Linn.) Rallus aquaticus. (Linn.) Gallinula crex. (Lath.) — porzana. (Lath.) — pusilla. (Bechst.) — baillonii. (Vieill.). — chloropus. (Lath.) ORDRE XIV. — Pinnatipédes. Genre 72e. Foulque macroule. Genre 73€. Genre 74e. Grèbe huppé. — jou gris. — Cornu. — Castagneux. Fulica atra. (Linn.) Podiceps cristatus. (Lath.) — rubricollis. (Lath.) — cornutus, (Lath.) — minor. ORDRE XV®. — Palmipèdes. Genre 75e. Hirondelle de mer Caugek. Sn Dougall. — Pierre Garin. — épouvyantail. Petite hirondelle de mer. Genre 76€. Goëland à manteau bleu. — à pieds jaunes. Mouette à pieds bleus. Sterna cantiaca, (Gmel.) — dougalli, (Montagu.) — hirundo. (Linn.) — nigra, (Linn.) — minuta. (Linn.) Larus fuscus. (Linn.) — argentatus, (Brunn.) — canus, (Linn., sed non auctorum.) 58 Mouette tridactyle, rieuse. Genre 77e. Genre 78€, Petrel cendré. — tempête, Genre 79e. Oie cendrée. — vulgaire. — d'Egypte. — du Canada. Cygne sauvage. du taberéaié: Canard tadorne. sauvage. sifleur. souchet. sarcelle d’été. eider. milouin. Genre 80€, Genre 81°, Pélican blanc. Genre 82e. Grand cormoran. — BEBE largup. — pygmée. Genre 83e, Fou de Bassan. Genre 84€, Plongeon imbrim. . Genre 85e. Guillemot à capuchon. Genre 86e, Macareux moine. Genre 87€. MÉMOIRES Larus tridactylus. (Lath:) ridibundus. (Leisler.} Procellaria cinerea, (Gmel.) pelagica. (Linn.) Anas anser ferus. (Lath.) EE ER TL segetum. (Gmel.) cygnus. (Linn.} olor. (Einn.) tadorna. (Liun.) boschas. (Linn.) penelope. (Lion.) clypeata. (Linn.) querquedula. (Linn.) mollissima. (Linn.) Jerina. (Linn.) Pelecanus onocrotalus. (Linn.) Carbo cormoranus.(Meyer.) cristatus. (Mihi.) — pygmœæus, (Mihi.) Sula alba. (Meyer.} Colymbus glacialis. (Linn.) Uria troile. (Lath.) Mormon fratercula. (Mihi.) Total d'Europe : 210 espèces. Quelques œufs exotiques qui ont leurs homonymes en Europe. Collection d'œufs, 250 espèces. ROLOGIE, MÉTÉO æ TRES . + a rs écs'zc toc |z6c ‘816 7cL|L81"eor ‘0912/0108 ocz {or #01 902 lo cz #51 | eco 8ocl''siotu 37 pl £ ssh ss se Ass Tir reel sets Li s E CLa ‘sys eg lozc‘cca 99 |999‘998‘0c |7}1 07679 Sao co eines lmotarea hatod ce + anoioe Lo Gif Le a Led £9 09*09 0‘LF &‘r9 |''qwWoa99q + : crc ycr sr |909‘910'cc |e£e‘80c 07 |789‘e17 06 | 966'&S cy‘tc 1'£e 84 |''AWAON É ee 0069026 |ers‘reo'oc |coc‘sgo'ce lcec‘ezc'og | æz‘oc ce‘ec 968 1:49 [0190300 Es £ Mssc'ozr 16 |er9fLrc're |CTr'LISÉTS |e8c‘6eL'0c F97'FC oT‘ec L'Tr ‘yo l'qwordas û 3 Grr'Lcg'ec [csa 71 ce |F9L‘TI6 7S |cec‘r97 09 0FG‘rG 0T‘9c 1'cy 149 |''""""00y Ex 2 999'016%S [000007 ‘60 |zcr‘egz‘ec |00ç‘29c "09 6767 068 PAT ÿ‘19 reims m S AMoog‘ogt‘ce |ooc‘coc'oc locs‘zce‘zo |000€L8*6c SG LG 08'8c SIC 99 f'''"ums A 8 999‘990°cG [00000536 |zes‘ereec |000‘0cz ‘80 976°0€ c9‘oc L'67 9‘eg "T'en es © Nirrroc es lecr'ore*1e |o0o‘ooz‘rc |ees‘oco‘oc 619°7C core L‘cy eg |''''INAY 5 É Nrca ces og |aco‘eyr'1c |oec‘rzetre |117 us 79 0006 0695 0cr 8‘89 "San < & Noco‘oce‘os lozrtryr‘og |9ec‘ysotoc |opot1z 01630 ca cc g°Le tel | 19HA94 = 2 ozr‘our'ycL|1cR‘ar9 2101/9099 990 6c2|1ce* Du ol bem) 8 OL ol on RL 62 dd Mes ve e13'8CL 09'9çL (HE 271 6804 | Jorauer Fi 2 < a TS Pl.meSle. 2 le À Sue les el" S'en D ER e pee ‘XAHIANTA | “LHHANOO |-‘XAAOVAN *HIYTO SANOIREU S9P | -xWNIXOM | HNUININ | WANIXVIN PA AN NE X ON à É à | &Y81 ;. $ SdNAL XAV INVANO4SAYXO9 ONIANOUVE ANNHAON “SANÜNRILANOUVE SNOIIVAUNASI0 Sad Annsau es) 60 MEMOIRES La première colonne de ce tableau donne pour chaque mois le maximum, c’est-à-dire la plus grande hauteur atteinte par le baromètre. La deuxième et la troisième donnent , l’une le plus grand abaissement du baromètre dans le mois, l’autre la moyenne de ces deux termes. Enfin la quatrième est la moyenne des hauteurs à midi de chaque jour du mois. Dans la deuxième partie du tableau ; la première co- lonne donne la hauteur moyenne du baromètre corres- pondant avec un temps clair, c’est-à-dire sans nuages ou presque sans nuages, et est la résultante de trois observa- tions par jour. Les deux autres donnent également la moyenne de trois observations par jour. Ë Enfin la quatrième est la moyenne résultant de toutes les hauteurs barométriques observées pendant un temps pluvieux et failes six fois par jour. Dans la dernière ligne, on voit que la moyenne baro- métrique à midi, que les observateurs prennent générale- ment pour la moyenne la plus exacte de l’année , est un peu plus élevée que celle obtenue par le calcul des mazxima et des minima. Comme la moyenne correspondant au temps clair est la plus élevée, je ne sais si la 9° question du programme de la sixième section (1} est bien exacte, et si, au lieu de dire : « dans le cours de l’année dernière, » on n’a pas voulu mettre : « dans le dernier mois , » c’est-à-dire le mois de décembre, dans lequel la moyenne correspondant aux temps couvert et pluvieux se trouve effectivement plus forte que celle des temps clair et nuageux. Il n’y a donc que ce mois de décembre dans lequel le . baromètre se trouve en contradiction avec ses indications (1) I résulte des observations météorologiques faites à Angers pen- dant le cours de l’année dernière, et dans les deux premiers mois de celle-ci, que le baromètre a été constamment moins élevé pendant les beaux jours que pendant les jours pluvieux. 61 DES 1° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. Le tableau c o $ T > à à ES _« 2 QE £S I8r'‘81a 9 | 0€‘6c cyc‘zcy‘ co |000° 008: 19 |000‘007'&S [000 ‘000° par AAVOA 5€ Cr = 8 & 2: ë Fr 000072 ‘79 | 0F‘c9 000°000°194 00000829. [000 ‘ooc‘zo |ece‘egs'c9 AAVOAE 58 = S © B = n © E à c c “te sanof D à 000‘07£‘F92| 07794 G8L'ET&" 91 |000‘068€94/000 00L'€9L sa tout on i= 1Eux. *IPIUT 2p [1 D La Eu CMS o 3 —_ n [SN 2 — ANNHXON |" MANMININ|MANIXVINR "XNAAHIANTA *LHHANOD ‘XNHP9VAN *U1Y19 & © ANNHXOM EX 4 ‘91{999( = & mm 1 © Ÿd ES "ar S *SHAÔNITANONVE SANT XAV AT: .— [.b] de SNOILVAUISAO SA AWNSAU INVANOAISAUNOD HAÔIULANOUVE ANNAAON ps © © ëp 62 12 MÉMOIRES Dans la première décade , il n’a point tombé de plaie etil y a eu plusieurs jours de brouillards, Si la moyenne barométrique correspondant au temps couvert est plus élevée que celle des temps clair, cela résulte de ce que l’on a coutume de compter comme temps couvert les brouillards, et que ces brouillards, qui se dissipent assez ordinairement après quelques heures, et sont le plus sou- vent suivis d’un beau temps, ne diminuent pas beaucoup le poids de l’atmosphère , et peuvent bien coïncider avee une grande hauteur barométrique. Dans la deuxième décade, il n’a tombé que o m. 0025 (2 millim. et 172) de pluie, et la moyenne dés temps plu- vieux est la moins élevée. Celle correspondant au temps couvert est la plus forte et résulte encore probablement de ce que les 19 et 20, où le baromètre a atteint la plus grande élévation (o m. 7742 et o m. 7755), le ciel s’est trouvé couvert , mais légèrement et un peu brouillé, coïn- cidant avec des vents du nord-nord-ouest et du nord-ouest qui donnent ordinairement une grande hauteur baromé- trique, comme il est démontré par le tableau dressé plus loin. Pendant les onze derniers jours, il a tombé o m. 0105 (10 millim. et 172) de pluie, et la moyenne barométrique correspondant au temps pluvieux se trouve la plus élevée, Comme il n’y a point ici de brouillards pour rendre rai- son de cette différence, il se pourrait que cela tint, comme le dit la question , à des doubles courants d’air, que je n’ai, du reste, pas observé moi-même, et aussi aux vents d’ouest qui ont soufllé pendant la moitié de cette période, c’est-à-dire pendant cinq jours et demi. DES {°° ET 6* SECTIONS RÉUNIES. 63 La même question désigne aussi les deux premiers mois de l’année 1843 comme ayant eu, à Angers, des hauteurs barométriques plus grandes pendant les jours pluvieux que pendant les beaux jours, Mes observations se trouvent encore en désaccord sur ce point là avec celles d’Angers, et ne s’en rapprocheraient guère que pour les dix pre- miers jours de janvier, dans lesquels la moyenne baro- métrique correspondant au temps couvert est cependant encore plus basse de 15 centièmes de millimètre que celle du temps clair, ce que l’on peut voir par le tableau sui- vant : | MOYENNE BAROMÉTRIQUE CORRESPONDANT 1843 AUX TEMPS Janvier. CLAIR. NUAGEUX. COUVERT, PLUVIEUX, 1€ DÉCADE 10 ier ' Pen 760,875 ,000|759,000,000!759,333,333[755,698,652 MÉMOIRES 64 ooz‘ozs ‘cezlovot1rotzez|ser rte teczlses‘zrr‘oozlooc‘cyr ‘gcc |o99 sec ‘oc looc‘coe ‘oc {crc ras ogg{"stour ar s2p Re — mn 2 AT EU A DMC EE TETE RE CR eee OR à de Se de en 2 te ec ee ee A ER 00F°19 9918 00L‘1 00967 008 ‘FC 007‘ F9 00L‘09 996'5C 08L‘9c AA) 0tc‘ec 006‘CG Ge ec LLY‘9c 0096 99L°LC 00£‘9c 008‘9c 088 6€ 366€ 0c9‘roz 0c8‘8cz ‘A-"S-"S °a-*S 028 €9 00499 069‘09 0889 006°7c 99ç‘0c 006 LC Ca CG c8s‘eg 000°LG 00L‘96L cog‘e9 08%‘ 19 ££0‘09 00F‘09 00Z°19 cL9'LG 0068 99666 008‘FS 0c8‘09 £89°9L L' 001‘£9 0c8'cc 000“c9 00629 0098 00ÿ° FC e86°cc 63909 09c‘09 La GL8‘9cL *-'N-"H 990°c9 LLe‘6C 9F9°T9 LLS‘9c 608°LS 09€°09 FIL‘ T9 00°39 898‘ 9c | OyL‘LS 00ç‘ÿc « 00979 « 0GS‘F9L 0ce‘094 € 18:86 &19°Cc I8C°LG 0c8*€9 001‘ F9 918‘29 00L‘6C &I6°CC c8L‘6c 88c‘89 GEL‘COL "SINHA SUAAIG SAT JHAY ANVANOdSHHHOD ANÜIHLANOUVI ANNILON AÆNNAXON “2411999 “dIQUU9AON *** 214070 21qtu91d9S no y Jon f ump DEC TT ne |LAY se SAvIN **** INA ****oIAURE 1 A DES 1'° ET 6° SECTIONS REUNIES. LST'89 0095 99869 cLI‘8c 006c9 9c0‘86 096" : €8g* 00° &L CO ES ———+ — ‘094 *O-"N="N CLI89 a a 009°09 996‘ F9 999°6S £99°19 ggf Lo 00ç°€C 0c7'cG 00029 0c8'8cL *O-°N 002‘668 ‘0921008256 66L|TIT‘907"LGL|99T a 08£°89 002 ‘Yy OST'YC C&T 9 00£*£9 00069 [4 0G0‘£ 002 L9 oct 'CCL ‘O-"N-"0 "SENTA SUAAIG SAT 9HAY 1&1°L9 00€‘06 000‘0 ET: ceL'8c F8L‘LG £1£'86 082 90 YYY' TC 169‘06 F9L'9Y 0Y0‘LCL ‘0 INVANOdSAUYO9 ANÔÜIALHNOUVE ANNHAON ‘oce CCLITFI 081 Cr o8z° 6? 009°69 008€ 007°GG 0017 079°39L ‘O=°5r"0 0ÿ1‘9c £98'LF 99c°67 O0T'FS &96°6C 09L°YC _£es‘oc ocL‘cG « dd al CLT'96 090'LCL °0-'S cec‘8c (142742 CLL‘0S cac‘Le € « 00ç'€c 006‘FG 001‘ 19 00€‘99 001‘0CL ‘o-"s-"sS ‘ice scu|606 Frc'ycL|LLL ‘09 ECL|ece OC ECL a de | qua | ue À oogece laque 83107 0C6°19 0c6‘8} 0c0‘ Fc 0c9cc 006‘cG £61 96 geg‘ec 007‘1G 000°c€ 0c98cL RP Re ANNAHXON A Es ne D ii Ps is &I SP *21419994 *AQUI9AON 910190 a1qu91d9$ sr inoy + oplimf eqne meer certe ILIAY sers SANT DR CIF RER | *+** 1OIAUCS T,. IL 66 1842 JOURS de la lune. 24 > 12 1 © D © S © OO 1 GG JANVIER, 796,9 61,5 53,4 50,7 56,3 58,8 66,2 67,6 67,9 59,3 60,2 56,1 45,1 55,7 48,2 50,0 58,7 56,6 58,8 63,2 64,6 61,4 57,3 54,9 571,9 60,5 65,0 65,2 62,8 62,9 MÉMOIRES MOYENNE BAROMÉTRIQUE CORRESPONDANT MARS. AVRIL. MAI. 763,2 = LA LA % ? ? , ? a Le L ? , , L L 2 ; , L] , 1 , ’ ’ F L L ? ’ , ? , , L ? ? ? ? L 3 ñ, L , L , , Li 1 ,* , ? , , ? ? ? » , , , ’ ’ , , , ? ? , L , L 2 ? , , , , = , » , , , LA % , , , , x b = , ’ ? , ? ke A ’ , , , , ? , , , ’ = , ÿ: , ? ? 7 4 ; ’ = , , ’ , æ # + , ’ » ; » 9%, ; ? ; , , 3 ' , , LA L] Li , ’ L Le F, , ? , , ? r = , : u ’ , _ L 2 , , ? ’ ? 99,4 5437 60,3 61,0 63,3 61,4 58,4 56,1 52,8 55,0 53,4 53,3 55,2 "54,7 56,8 55,2 58,0 59,0 60,3 60,1 55,1 55,2 57,1 59,0 57,2 49,9 51,0 53,8 59,9 JUIN. | À CHAQUE JOUR. DE LA LUNE. JUILLET. = DES 1'° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. EPTEMBRE, OCTOBRE. NOVEMBRE. DECEMBRE. MOYENNE des 12 MOIS. 759,341 60,008 59,016 58,300 59,791 62,316 62,600 62,108 59,958 57,066 57,745 58,063 55,375 54,733 53,775 55,791 57,808 57,758 56,608 55,018 55,718 55,700 53,983 56,666 56,241 55,291 54,850 57,666 59,700 58,757 67 68 Janvier.| + Février . | Mars... Avril Mai... Juin... Juillet … Août Septemb Octobre Novemb Décemh 1842 MAXIMUM. 8,1 12,4 MINIMUM. MÉMOIRES THERMOMÈTRE. MOYENNE. MOYENNE DES MAXIMA, + 2,520 5,262 11,606 14,256 18,830 25,760 25,266 25,175 19,670 MOYENNE DES MINIMA. — 0,963 + 3,796 6,570 6,786 11,225 16,653 16,832 17,225 12,510 5,680 4,493 3,700 MOYENNE ABSOLUE. 21,216 21,049 21,100 16,090 9,103 6,394 5,533 12 mois. [+ 20,483,33/+ 3,091,66|+ 11,825,00 |+ 14,711,250|+ 8,692,250/+ 11,701,: DES 1'° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. 69 (6 observations par jour.)] JOURS PENDANT PENDANT FRE | LE JOUR. |LA NUIT. PT CLAIR. |[NUAGEUX | COUVERT (De 6 b. du ma- (De 6 h. du soir tin à 6h. du| à 6h. du ma- soir.) tin.) ASPECT DU CIEL. AE QUANTITÉ DE PLUIE. om 0168 Om 0177 0m 0545 0089 0087 0176 0202 0170 0372 0124 0071 0195 0066 0099 0105 0203 0056 0259 0073 0048 0121 0609 0307 0916 0557 0116 0673 0152 0364 0526 0243 0615 0858 0090 0040 0130 758 754 618 128 om 2586 om 2150 om 4736 70 MÉMOIRES / THERMOMÈTRE. 1843 MOYENNE MOYENNE | MOYENNE MAXIMUM. | MINIMUM. | MOYENNE. DES MAXIMA. DES MINIMA. ABSOLUE. l Janvier.| + 12,0 | — 0,8 + 5,60 + 7,432 | + 3,454 | + 5,433 Février. 12,0 À — 1,4 5,30 7,435 3,842 5,638 Mars.….| 18,1 | — 0,5 8,80 11,610 5,890 8,750 Avril... 19,1 | + 2,2 10,65 14,053 8,253 11,153 Mai... 21,1 6,4 13,75 17,719 11,216 14,467 Juin... 25,0 9,5 17,25 19,382 13,382 16,272 A Juillet. Les deux tableaux précédents démontrent que si les mois d'hiver de 1842 sont plus froids que ceux de 1843, par compensation ; les mois suivants, c’est-à-dire ceux de mars, avril, mai et juin de cette dernière année sont plus DES 1'° ET 6° SECTIONS RÉUNIES. ASPECT DU CIEL. QUANTITÉ DE PLUIE. (6 observations par jour)! JOURS | — — | TT —, PENDANE PENDANT DE PLUIE. TOTAUX. CLAIR. [NUAGEUX|COUVERT LE JOUR. | LA NUIT. 0m 0665 om 0252 om 0927 17 50 | 101 15 0415 0406 0821 67 5€ |: 61 9 0253 0210 0463 41 75 63 21 0521 0339 0860 21 110 53 20 0392 0353 LES 19 96 52 16 0354 0589 0943 35 78 65 il 0252 0563 0615 froids que ceux de 1842, et l’on verra plus loin que la température moyenne du premier semestre 1842 est sen- siblement la même que celle du premier semestre 1843. MÉMOIRES 72 oca‘ocr'oc [98e Le TILFI6 8S |IF6 CON ‘ES gas‘8co‘as |ILC'S8Tr'cS 697‘ eLo'ec |SLa 09 "TS 000‘00c‘LY |01c‘868‘6r ce‘ y1L‘6€ |OIG‘GLY'9Y ri rrz‘ocz|rLc‘ 819 6cz|erc#c6 672199909739 1FL°L96°80 Y08‘L8y‘9c FOL'TIF'YC 000°C4F 96 L8‘eL9‘8y gec‘ecr'sr 000‘005‘09 000‘00L‘FS 000‘00€°€9 J81'890‘6S TOI‘ FI8"LG 000‘0c8‘67 16266 ces‘rg FL6‘€S 99°C £61° 76 00997 LSE‘LGL c9'&c ‘er CL‘Fc 6°cy 06‘£ L‘yy CAC 9°T# 0L'€Y Fra 0£‘0cL 1084 gg f""" term gag um eg À. eg | ay c‘69 21" "San ogo |-au49] g‘ozz.=|l""""""4orauer PL PEER ‘XNHIAN'TA | ‘LUHANO9 om mm" *"XA49VAON SdNWaL XAY INVANOdSHUAON ANAÔÜIALANOUVA ANNHAON *UIVT9 ‘IAIN V SYNHLAVH SA ANNHXON *ANNYIAON | ‘ANNMININ ‘SANÔÜIALANOUVA “WANIXVIN £Y8T SNOILVAUAS4O SA ANNASAH mm * 73 DES 1" ET 62 SECTIONS RÉUNIES. cel‘ecr'or |oor‘ege‘ac [ess‘rce‘ac |ras‘oro‘oc [ecs‘cec‘ec |TIT‘7621S | o‘oca ee | e‘e6e*co YST ooc‘e69 ec |oss‘oco‘ccz|ger‘rez‘ocz|095 ‘1920941000 ‘00914 |ges‘ocr'ocz| e‘eee‘cyz | e‘esefLo SSI PEN CC D GER . ‘Ian V , SYAHLAVH Sa | ‘XAGIANTd | “LHHANO9 *XAAH9 VIN °YIV9 *ANNAXON | AWNAININ | ‘NANIXVA AINNHXON ‘SAULSANIS mm" = SYXIRA YA SNL XAV ‘SHAÔIALANOUVA | ixvaxoasauto \ | 74 MÉMOIRES TEMPÉRATURE MOYENNE. [JOURS] QUANTITÉ PREMIERS ‘de de SEMESTRES. 1er PROCÉDÉ.|2€ PROCÉDÉ.| PLUIE. PLUIE. 1842 + 10,333,3 | +10,191,5 Om 1512 1843 + 10,225 0 + 10,285,5 On voit par les tableaux ci-dessus que si la moyenne barométrique du premier semestre 1842 est plus élevée que celle du premier semestre de 1843 , la quantité de pluie est aussi bien moins considérable. La hauteur correspondant au temps clair est aussi la plus grande ; viennent ensuite celles qui correspondent aux temps nuageux et couvert, qui sont sensiblement les mêmes pour HLbde année; enfin celle du temps pluvieux qui est la plus faible de toutes , comme le veut la théorie du baromètre. La quantité de pluie tombée dans les six premiers mois de 1845 est plus de trois fois aussi considérable que celle tombée dans la période correspondante de 1842 , et est même plus forte que la quantité tombée dans toute cette année 18/42. J’ajouterai de plus que, comme dans les années 1840, 41 et 42, il a tombé environ un quart plus d’eau pendant le dernier semestre que pendant le premier; s’il en est de même cette année , il est à craindre que l'hiver prochain ne voie se renouveler les inondations qui ont naguère porté de si affreux ravages sur les bords de la Loire, DES 1'° ET 6° SECTIONS REUNIES. 75 CHIMIE. OBSERVATION SUR L’ANALYSE CHIMIQUE DE LA POMME DE TERRE, PAR M. ÉDOUARD GUÉRANGER, Pharmacien au Mans. Pour apprécier la valeur des différentes et nombreuses variétés de pommes de terre que l’agriculture a obtenues par ses soins, il faut avoir recours à l’analyse chimique. Ayant eu l’occasion d’examiner 17 variétés de cette espèce de tubercule, j’ai tronvé une différence de 17 à 32. Ge travail, entrepris pour établir un choix raisonné de telle espèce à l'exclusion de telle autre , donna donc un résultat tranché. | Frappé, dès lors, de l’utilité de analyse, et de la dif- ficulté qu’il y avait à faire descendre cette opération, malgré sa simplicité, jusque dans la classe des hommes agricoles , j’ai tenté un moyen plus simple encore, et qui m'a complétement réussi. Ce moyen est la pesanteur spé- cifique , appréciée au moyen d’une balance ordinaire. Je pèse 500 grammes de pommes de terre, je les enfile dans une petite ficelle que je suspends au fond d’un des pla- teaux de la balance, soit au moyen d’un peu de cire à cacheter, soit de toute autre manière, et je plonge ce chapelet dans de l’eau. Le poids, qui reste, indique la richesse en produits solides et nourrissants. Ce procédé, . 76 MÉMOIRES qui n’est encore que comparatif, et qui, malheureuse- ment , ne saurait encore se traduire par des chiffres, m’a donné des résultats toujours conformes à l’analyse, et pourrait dès à présent être utilisé. Voici comment : Je suppose un cultivateur ayant 19 espèces de pommes de terre, dont il veut apprécier la valeur nutritive; il prendra 500 grammes de chacune. Si la première lui laisse pendant son immersion dans l’eau 30, l’autre 40, l’au- tre 50, l’autre 60, ainsi de suite, ce sera toujours celle qui offrira le poids le plus élevé qui sera la meilleure. Il serait sûrement fort utile que l’on possédât une table qui pût exprimer par un chiffre le rapport de la matière solide avec le poids spécifique. Mais cette table qui n’existe pas pourra se faire, et, en attendant, le principe peut toujours être utilisé. Il est indispensable de tenir compte, dans l’essai des pommes de terre, envisagé sous le point de vue que je viens d'indiquer, de l’époque de l’arrachement et du lieu plus ou moins sec où ces racines ont été conservées. Il est évident qu’en sortant de terre, ces tubercules sont plus aqueux que trois mois après leur récolte. De même, s’ils ont été conservés dans un endroit sec, ils auront perdu une plus grande quantité de leur eau de végétation, que s’ils eussent été placés dans un lieu humide. Relativement à mes expériences, j’ai remarqué que les jaunes étaient en général meilleures que les rouges ou les blanches, ! _ DES 1'° ET 6 SECTIONS RÉUNIES. 14 RECHERCHES SUR L'EMPOISONNEMENT PAR L'ARSÉNIURE TRIHYDRIQUE, PAR M. P.-B. DURAND, Pharmacien en chef des hôpitaux de Caen. Parmi les composés dans lesquels l’arsenic entre come partie constituante , on sait que le gaz hydrogène arséni- qué est le plus subtil. Toutes les personnes qui en ont respiré seulement quelques bulles , en le préparant , ont éprouvé de l'anxiété, de la lassitude, des vertiges, des nausées , des vomissements et de la constipation. L’Alle- mand Gelhen, chimiste très-distingué , mourut en 1815, après huit jours de souffrances horribles, pour avoir res- piré une pelile quantité de ce gaz, pendant qu'il le pré- parait. Depuis cette époque , plusieurs personnes ont péri victimes de l’action délétère du gaz hydrogène arseniqué. Ainsi, il n’y a aucun doute sur ses propriétés toxiques. Mais ce gaz est-il absorbé par les animaux, passe-t-il dans le sang ? Après la mort, est-il possible de retrouver un de ses principes constituants , l’arsenic ? Ce sont des questions auxquelles personne , je crois, n'a encore répondu. Il est inutile que je m'arrête ici à prouver qu'’el- les peuvent, dans quelques cas, être d’une haute impor- tance pour la médecine légale ; elles ne sont pas sans intérêt non plus pour la physiologie : c’est ce qui m'a dé- terminé à faire quelques expériences pour les éclairer. ” Première expérience. — Un lapin, âgé de deux mois environ , est mis sous une cloche pleine d’air atmosphé- rique ; on fait passer dans cette cloche le gaz qui se dé- 78 MÉMOIRES gage d’un flacon dans lequel on avait placé du zinc, de l'eau , de l’acide sulfurique et un peu d’acide arsénieux. Ce gaz n’était assurément pas de l’hydrogène arseniqué pur; il contenait une grande quantité d'hydrogène libre (néanmoins, nous le désignerons dans nos expériences , sous le nom d'hydrogène arseniqué ou d’arseniure trihy- drique). Le lapin, soumis ainsi à l’action de ce gaz, est retiré de dessous la cloche au bout de 15 minutes. Au sortir de la cloche, l’animal se trouve dans un état de stupeur générale, il est engourdi; il n’exprime aucune douleur, et ne fait aucun mouvement convulsif; aucun vomissement ne se déclare. Plus tard , les extrémités pos- térieures paraissent être paralysées et la sensibilité de- vient presque nulle; enfin, au bout d’une heure la mort arrive. 1 On a successivement examiné les organes de la respi- ration , de la circulation et l’encéphale. Ces organes, par le mode d’empoisonnement , devaient, plutôt que tous les autres , présenter quelques lésions anatomiques. Les organes de la respiration n’ont rien offert de bien extraordinaire : la muqueuse du larynx et des bronches présentait seulement une teinte blafarde paraissant dé- noter la présence du sang noir dans les capillaires; il en était de même dans les plèvres. Quant aux organes circulatoires , toutes les cavités du cœur étaient pleines de sang noir et coagulé; il en était de même des artères pulmonaires, dont les ramifications se dessinaient dans les poumons par des lignes noirâtres. Les autres artères présentaient, dans le sang qu’elles con- tenaient , les mêmes phénomènes. L’organe cérébral a montré à l’examen une injection assez marquée, et les vaisseaux, qui entourent l’encé- phale, renfermaient du sang noir. On a examiné, en outre, l’estomac et le foie. Ges or- ganes n’ont rien présenté que de normal. = — DES 1'° ET 6° SECTIONS REUNIES. 79 L’encéphale, le cœur, les poumons et le foie , préala- blement coupés par morceaux, ont élé projetés par pe- tites portions dans de l’acide azotique pur, chauffé dans une capsule de porcelaine. Ces matières n’ont pas tardé à se dissoudre et à se décomposer: Lorsqu’elles ont com- mencé à s’épaissir, et qu’une fumée épaisse s’en est déga- gée, on a reliré la capsule du feu : la carbonisation s’est alors achevée d’elle-même. Le charbon obtenu a été pul- vérisé dans un mortier de verre, et on l’a fait bouillir à plusieurs reprises dans de l’eau distillée. La liqueur filtrée a été placée dans un appareil de Marsh , qui fonctionnait depuis 25 minutes , sans donner aucune tache de quelque nature.que ce soit (1). Aussitôt après l’introduction de cette liqueur, l’appareil a fourni des taches nombreuses, brillantes, miroitantes, n’altirant point l’humidité de l'air, ne rougissant point le papier de tournesol, et se . volatilisant à la flamme du gaz hydrogène pur. Ces taches se sont facilement dissoutes à froid dans l’acide azotique concentré. Get acide, chassé par une évaporation ména- gée, a laissé un résidu soluble dans l’eau , et qui a donné, avec le nitrate d’argent , un précipité rouge-brique d’ar- seniate d’argent. Deuxième expérience. — Un lapin est empoisonné avec l'hydrogène arseniqué. L'animal meurt deux heures après. L'encéphale , le cœur, les poumons et le foie sont traités après dessiccation , par l’acide nitrique ,comme dans l’ex- périence précédente. Le charbon, qui résulte de cette opération , est chauffé avec de l’eau distillée; la liqueur est filtrée ; elleest introduite dans un appareil de Marsh, et elle fournit des taches arsenicales nombreuses. Troisième expérience. — L’encéphale d’un lapin, em- (1) On a eu soin également, dans toutes les expériences suivantes, d'essayer pendant quelque temps l'appareil avant d’y introduire les matières à examiner. 80 MÉMOIRES poisonné par l’arseniure trihydrique , est traité par l’acide nitrique , de la même manière que dans la première ex- périence; on fait bouillir le charbon avec de l’eau distil-- lée , et l’on obtient une liqueur qui, dans un appareil de Marsh , fournit deux petite taches arsenicales. Quatrième expérience. — On fait chauffer, avec de Pacide azotique, les poumons d’un lapin empoisonné par l'arseniure d'hydrogène, jusqu’à ce qu’ils soient convertis en charbon. Ge charbon, traité par l’eau bouillante, donne une liqueur qui fournit des taches arsénicales, dans un appareil de Marsh. Cinquième expérience. — Le cœur d’un lapin, empoi- sonné par le même procédé , esL transformé en charbon par l’acide azotique , comme dans les expériences préct- dentes. On fait bouillir le charbon avec de l’eau distillée, on filtre la liqueur, on l’introduit dans un appareil de Marsh, et on obtient des taches arsénicales bien caracté- risées. Sixième expérience. — Le foie d’un lapin, empoisonné de la même manière , ayant été traité par l’acide azoti- que, après dessiccation , a laissé un charbon que l’on a chauffé avec de l’eau distillée pendant 25 minutes; on a filtré ensuite la liqueur, et on l’a introduite dans un ap- pareil de Marsh; on a enflammé le gaz , et on a présenté à la flamme une soucoupe de porcelaine; celle-ci s’est recouverte de taches arsénicales. Septième expérience. — Un lapin, à l’état normal , a été tué par strangulation; on a desséché l’eacéphale , le cœur, les poumons et le foie; tous ces organes ont été transformés en charbon par l'acide nitrique , comme dans l'expérience n° 1°. Le charbon obtenu a été chauffé avec de l’eau distillée; la liqueur a été filtrée et introduite dans un appareil de Marsh; elle n’a donné aucune tache arsé- nicale. DES 4° ET 6€ SECTIONS REUNIES. 81 Huitième expérience. — Un lapin est empoisonné à deux heures du soir avec l'hydrogène arseniqué; on pra- tique une ligature à la verge; l’animal meurt trois heures après. Le lendemain , on détache la vessie, on en extrait l'urine, que l’on carbonise par l’acide nitrique. Le résidu de cette opération, ayant été traité par l’eau bouillante, donne une liqueur qui, dans un appareil de Marsh , ne fournit aucune tache. Neuvième expérience. — Les reins et l’urine d’un la- pin, empoisonné par l’arseniure trihydrique , ayant été trailé par l’acide nitrique, le charbon, bouilli avec de Peau distillée, à donné une liqueur qui n’a fourni, par Pappareil de Marsh, aucune tache arsenicale, L’animal avait vécu deux heures et demie. Toutes ces expériences , dont les résultats ont été bien tranchés , m'ont convaincu que l’hydrogène arseniqué est absorbé par les animaux; qu’il circule dans le sang, et va se rendre dans la plupart des organes ; qu’ainsi absorbé, il est possible, après la mort, de mettre en évidence un de ses principes constituants , l’arsenic , par les procédés que possède aujourd’hui la médecine légale. T. IL. 6 MÉMOIRES DE LA DEUXIÈME SECTION. ms Qu Agriculture et industrie. AGRICULTURE. NOTE RELATIVE À LA CONFECTION DE CARTES AGRONOMIQUES, PAR M. À. DE CAUMONT. L'année dernière, j'ai exposé à la section d'agriculture du Congrès de Strasbourg, le système que j'ai adopté pour l’exécution de la carte agronomique du Calvados, que j'ai dressée. Le compte-rendu du Congrès devra re- produire l’analyse de mon exposé, et je ne dois point ici revenir sur ce que j’ai dit l’année dernière : j'ai seule ment à annoncer au Congrès que plusieurs cartes agro- -nomiques sont en voie d’exécution dans divers départe- F = EE a ——— MÉMOIRES DE LA DEUXIÈME SECTION. 83 ments, d’après ma proposition, et le mode de notation que. j'ai indiqué. Ainsi, la communication que j'ai faite à Strasbourg , et celle que j'avais précédemment faite à Lyon, ont eu du retentissement. Avant peu d’années, nous aurons des cartes agronomiques de France, comme nous avons des cartes géologiques; et je serai heureux d’avoir concouru à l'exécution de ce travail intéresssant. Cetle bonne nouvelle annoncée au Congrès; qui a bien voulu accueillir mon projet et le recotimander comme ulile, j’aurai à communiquer à la section le sys- tème de notation auquel je me suis arrêlé pour l’indica- tion des assolements. L’année dernière , j’indiquai deux modes de notation; mais j'ai décidément adopté celui que voici, et qui me paraît le plus simple : J'indique , par des lettres initiales, lés plantes culli- vées, el j'exprime, par la disposition de ces lettres, Ja rotation de culture usitée dans les divers cantons. Quel- ques exemples me feront comprendre. Däns l'arrondissement de Falaise, où l’on suit la rota- tion suivante, j'indique cét ordre de cullure par les let- tres b, o, s, ainsi disposées : Blé. B Orge. O Sainfoin. S Quand deux plantes sont indifféremment placées dans la rototerie de l’assolement , telles que l’orge et l’avoine, ce signe — indique le parallélisme des plantes dans le système de rototerie, Ainsi, blé, orge ou avoiné, trèfle, pourront s’exprimer ainsi : Mais, le trèfle ou le sainfoin , semé dans l'orge, est conservé deux où trois ans, ce qui interrompt l’assole- 84 MÉMOIRES ment : pour exprimer cette persistance, j’emploie un si- gne très simple, que j'emprunte à la notation musi- cale =, et sous lequel je place un chiffre, indiquant le nombre d’années , consacré à la prairie artificielle, Ainsi, l’assolement quadriennal du bocage , sarruzin, blé, orge avec trèfle prolongé , s’exprimera : S. B. O. T On sait que la silice, la chaux, l’alumine , forment la base .des terres arables. J'aurais désiré pouvoir indiquer la prédominance de l’un de ces éléments, lorsqu'elle existe, et donner aussi des renseignements sur l’état mé- canique du sol dans certaines régions. J’essaierai de me servir de différents signes : la présence des galets ou silex, répandus dans la terre arable, pourra étre indiqué, au moyen d’un semé de points, dans les cantons où ces dé- bris existent en quantité notable, Les détails relatifs aux races, aux pays d’éièves, pour les chevaux, les vaches, les moutons, pourront être in- diqués en marge de la carte, près des couleurs de la lé- gende , qui correspondent à chaque région agricole, dans le projet de carte présenté l’année dernière. Quelques signes pourront aussi être placés sur la carte mème; mais, pour éviter la confusion et ne point fatiguer l’œil dans la recherche de ces signes, je compte toujours les employer ‘avec sobriété. Ces détails , joints à ceux que j’ai eu l'honneur de com- muniquer au Congrès l’année dernière, complètent , je crois, un systéme de notation figurative, qui peut être employé pour la confection des cartes agronomiques, et je serais heureux d’apprendre que, dans le département de Maine et Loire, en s’occupe de dresser une pareille carte, en modifiant, s’il est nécessaire , mon système de nolation figurative. Je vous demande la permission d’en exprimer ici le vœu formel , et de recommander cet objet à l’attention des agronomes d’Angers et des départements voisins , qui assistent à la 11° session du Congrès. DE LA DEUXIÈME SECTION. 85 MÉMOIRE EN RÉPONSE AUX QUESTIONS SUIVANTES, TRAITÉES J . PAR M. CH. LOUDOLPHE DE VIRMOND, Vice-président du comice agricole de Seiches (Maine et Loire). « 10 Quel serait en France, et particulièrement dans les départe- » ments de l'Ouest, le meilleur mode de fermage pour hâter les pro- »grès de l’agriculture? » « 170 Par quelle modification dans la loi du fermage pourrait-on » concilier les droits du propriétaire du sol et du cultivateur-fer- » mier, et lui donner sécurité, rétribution pour ses travaux d’amé- »lioration? » Il est reconnu que le temps, la capacité, et l’argent, sgnt les conditions de succès de toute entreprise agricole. Donner du temps ou un long bail, à un cultivateur intel- ligent et pourvu des capitaux nécessaires , suffit donc, sans aucun doute, pour arriver à l’amélioralion du sol. Malheureusement, ces deux conditions sont très-rares dans un pays où l’agriculiure est peu avancée ; il est donc indispensable de chercher quelque moyen d’obvier à ce grave inconvénient; par B , seulement, on pourra espé- rer vaincre l’antipathie, bien prononcée , qui existe géné- ralement en France pour les longs baux, Cette antipathie, qui nuit essentiellement aux vrais intérêts des propriélaires , en empêchant toute améliora- tion iwporlante et durable, n’est pas cependant dénuée de (out fondement. Au désir immodéré, et souvent bien nuisible à leurs vrais intérêls, d'augmenter leurs fermages , se joint l’in- 86 MÉMOIRES quiétude, malheureusement trop fondée, que donne la négligence et la détestable manière de cultiver, de la plu- part des fermiers ; mais, comme à son tour, et par l’effet même de ses précautions , le propriétaire les empêche de l’améliorer, on se trouve ainsi renfermé dans une espèce de cercle vicieux d’où il devient impossible de sortir, et le mal naît du mal même. Concilier les intérêts du propriétaire et du fermier, voilà où doivent tendre tous les efforts. Tout ce qui n’at- teindra pas ce double but, demeurera inutile; car, de même que le fermier ne voudra pas aventurer son capilal, sans une garantie suffisante de jouissance; de même aussi, le propriétaire ne consentira pas à augmenter la durée actuelle des baux , si ses intérêts ne sont pas suffi- samment garantis ; et ils ne peuvent l’être que par l’inser- tion de certaines conditions , destinées à le protéger con- tre l’ignorance ou la mauvaise volonté des fermiers, qui, durant un long bail , pourraient ruiner ses terres. Quelques hommes de mérite, ont préconisé les avan- tages de la clause, dite de lord Kames, du nom du pro- priétaire anglais , qui le premier l’a mise en usage. Elle a du bon, sans doute, surtout pour les baux de courte durée, et dans un pays où l’éducation agricole est déjà très-avancée ; mais, elle entraînerait de graves inconvé- nients , lorsqu'il s’agit en même temps d’améliorer les terres , et d’instruire les cultivateurs. Partout, d’ailleurs, celte clause a le grand défaut de ne pas établir des obligations et des avantages récipro- ques. Elle constitue une espèce d’aliénation de la pro- priété, et place le propriétaire, en quelque sorte, à la merci d’un fermier, toujours libre de le quitter à l’expi- ration de chaque période; tandis que lui, ne saurait le renvoyer à aucune époque, et quels que puissent être ses sujets de mécontentement, sans lui donner une indem- nité , laquelle dépend de la seule volonté du fermier, non DE LA DEUXIÈME SECTION. 87 des dépenses qu’il a faites; en sorte que le plus mauvais fermier serait, par cela même, toujours assuré de réali- ser'une somme plus ou moins considérable, un proprié- taire ne pouvant , malgré l’offre d’un fermage élevé; laisser dans sa ferme un homme qui la ruine. Les baux à durée fixe sont donc infiniment préférables, en leur donnant , toutefois, une assez longue durée , pour que le fermier, assuré d’en recueillir les bénéfices , puisse faire des dépenses d'amélioration. On convient géñérale- ment que le meilleur assolement est celui dans lequel la même nature de culture revient le moins souvezt ; mais, le cultivateur ne pouvant espérer recueillir, dès la pre- mière année, le fruit de ses travaux et de ses dépenses, on n’obtiendra pas de lui ce progrès avec des baux de neuf ans, comme on les fait le plus ordinairement ici. Le nombre exact d’années devant toujours dépendre de la rotalion adoptée, car le fermier doit jouir des rota- tions complètes, il n’est guère possible d'indiquer un chiffre précis; mais, des baux de vingt ans environ, me paraissent être les plus convenables, De tels baux assurent au fermier toute la latitude dont il a besoin , et peuvent en même temps dévenir très-avan- tageux aux propriétaires qui les consentent , si l’on prend soin de stipuler une augmentatien du fermage , après une période de neuf, dix ou douze ans, suivant la longueur du bail. Encouragé par la sécurité qui résulte d’un long bail, tandis qu'en même Lemps son industrié serait slimulée par l'élévation successive du fermage , le fermier entrepren- drait bientôt d'importantes améliorations, D'ailleurs , sans prétendre régler à l’avance toutes ses opérations, ce qui ne saurait manquer d’être préjudiciable, on pourrait ce- pendant insérer dans les baux certaines conditions, que le fermier serait tenu d’exécuter, sous peine d être privé de sa jouissance. 88 MÉMOIRES Ceci est la garantie du propriétaire, car, le bénéfice d’un long bail, qui cesserait d’ailleurs d’exister pour le fermier, s’il cultivait mal , ne lui est accordé qu’à la con- dition d'améliorer. Ainsi, l'intérêt du propriétaire se con- fond avec celui du fermier, et de l’agriculture elle-même. C’est ici le lieu de rappeler les sages conseils donnés par M. J. Bujault, dans son Guide des comices et des pro- priétaires , et d’insister sur l’insertion, dans tous les baux, de l'obligation imposée par lui au fermier, de faire et en- tretenir nne quantité déterminée de prairies artificielles. On pourrait y joindre également l’obligation de défoncer, et, par suite, de nettoyer les terres de Loutes les plantes parasites dont elles sont infestées. On pourrait ajouter aussi , celle d'employer des engrais artificiels, dût même, le propriétaire, concourir, dans une certaine proporlion, à la dépense des premières années. Nos baux , faits par des hommes que leur mérite même n’empêche pas d'ignorer complètement tout ce qui se rattache à la science agricole, nos baux ont presque tou- jours le grand défaut d’être rédigés d’après un formulaire qui, comme le dit M. Bujault, n’a pas changé depuis Charlemagne ; aussi, sont-ils surchargés de clauses inu- tiles, et souvent même nuisibles, telles, par exemple , que l'obligation qu’ils contiennent tous , de ne rien changer à l’assolement , etc., etc. On enchaîne ainsi le fermier, sans nécessité, ce qui porte un grave préjudice aux deux parties; et, malgré tout le fatras inutile que contiennent les baux , on omet presque toujours les précautions néces- saires, pour prévenir l’épuisement des terres el la dévas- tation de la propriété, précautions , toujours et partout indispensables; mais, qui le sont bien plus encore dans un pays où les connaissances agricoles sont encore peu répandues. Ge que je viens de dire, s’applique à plus forte raison aux baux sous seing privé , qui, tout aussi imparfaits que DE LA DEUXIÈME SECTION. 89 . les baux devant notre , sur lesquels d’ordinaire ils sont calqués , ont en outre une multitude d’inconvénients qui leur sont propres. On doit donc toujours préférer les baux devant notaire, même avant la réforme du formulaire , dont il serait bien à souhaiter qu’on s’occupât dans l’in- térêt de l’agriculture. Tout ce qui précède pouvant s'appliquer indifférem- ment au bail à prix d'argent, et au métayage au bail à partage de fruits, il reste encore à déterminer lequel de ces deux modes est susceptible de hâter davantage les progrès. Dans un pays où l’agriculture arriérée ne permet pas de trouver des fermiers assez habiles , assez industrieux, et assez riches, pour pouvoir entreprendre et diriger les cultures avec avantage, un propriétaire qui possède des connaissances agricoles , qui vit dans ses terres, et veut s'occuper de leur amélioration, trouvera certainement dans le métayage le moyen le plus prompt d’y arriver, puisque ce mode de fermage, par lequel il partage pres- que toutes les dépenses, de même que les produits, lui donne le droit d'intervenir d’une manière active et con- tinue dans tous les travaux de la ferme , et de faire exé- cuter tous ceux qu’il juge utiles. . On comprend que le fermier devant faire une portion des dépenses, la nécessité d’un long bail demeure la même. Il est essentiel aussi, que le propriétaire, auquel seul, dans un temps plus ou moins éloigné, profiteront les dépenses communes , ail plus en vue l’amélioration du sol que le gain présent; il ne faut donc pas qu’il fasse peser sur le métayer, trop, et de trop lourdes charges. Un propriétaire intelligent est assuré d'obtenir de ses terres , par ce mode d’affermage , un revenu égal au moins à celui que lui, produirait un bail à prix d'argent, cela doit lui suffire. Si, dans la crainte d’être trompé par le métayer, il cherche tous les moyens de diminuer ses pro- 90 MÉMOIRES fits, s’il lui laisse à peine de quoi subsister, s’il lui ravit enfin , avec l’espoir d’améliorer sa condition, l'exercice intelligent de son industrie, le malheureux, se méfiant d’un maître qu’il regarderail comme un ennemi, résiste- rail à tous ses conseils , et rien ne se férait,. En France, autrefois, le métayage était adopté dans les quatre seplièmes au moins du territoire; aujourd” hui, dit-on , il enveloppe encore la moitié du sol arable, On le trouve en Italie, depuis les Alpes jusqu’en Galabre; enfin, ce syslême existe encore en‘Savoie et en Espagne. Ce- pendant, comme il exige chez les propriétaires, non seulement une résidence habituelle, et surtout des con- naissances agricoles aussi étendues que pour exploiter eux-mêmes, mais encore l’harmonie la plus constante entre eux et leurs métayers , ce mode de culture présente de si grands inconvénients , qu’on ne doit le regarder que comme essentiellement transitoire, Loin d’en étendre l'usage , il faut donc chercher à le restreindre, partout où l’on pourra trouver des fermiers convenables. Ceux-ci, d’ailleurs , préfèrent généralement un bail à ferme. Le paiement du bail peut être stipulé , soit en argent, ce qui est le plus ordinaire , soit en produits du sol, soit en argent ou en produits du sol, au choix du propriétaire. Gé mode de paiement nuit nécessairement aux intérêts du fermier; car, le propriétaire ne manque pas de choisir, pour le paiement en nature, le moment où les denrées ont une valeur plus élevée; or, comme c’est presque tou- jours en raison de leur rarelé qu’elles acquièrent cette élévation de prix, il en résulte, que la rente augmente précisément dans la même proportion , que les moyens de la payer diminuent. Cette clause est trop préjudiciable aux intérêts du fer- mier, pour ne pas le devenir au propriétaire lui-même ; car, il ne faut pas oublier que la condition de toute amé- lioration du sol, et par conséquent d’une augmentation DE LA DEUXIÈME SECTION. 91 de richesse pour le propriétaire, c’est l’assurance d’une honnête aisance pour le fermier. Pressurezle , ruinez-le, et’soyez bien certain, qu’à une époque plus où moins rap- prochée , vous partagerez sa ruine , en affermant à moitié prix des terres entièrement épuisées , résultat inévitable de la misère du fermier. Je me résume, et je dis : les baux fès plus propres à hâter les progrès de l’agriculture, sont ceux à long terme, à époque fixe, avec stipulation d'augmentation de fer- mage , et contenant en outre les conditions améliorantes dont j'ai parlé plus haat. Je pense que les sociétés agricoles , et, en général, tous lés amis de l’agriculture , doivent s’altacher à combattre le fatal préjugé, qui, contrairement au lieu commun , et à leur propre intérêt, porte encore les propriétaires à re- pousser Pasage des longs baux. Mais , je crois en même temps qu’il faut se garder d’ap- peler’sur ce point la réforme de la loi. Et voici les raisons sur lesquelles j’appuie mon opinion, relativement à cette question, qui , bien que distincte de la première , s’y rat- tache cependant par trop de points, pour qu’il me fût possible de les traiter séparément. Aujourd’hui, tout propriétaire à le droit de consentir des baux tant longs qu'il le désire; le mari, comme ad- ministrateur des NT de sa femme, le peut également, dès que celle-ci intervient , et signe le bail, Les adminis- trateurs des hospices et des biens communaux, etc., etc, n'ont besoin, pour consentir de tels baux, que d’ane simple autorisation, qu'il leur est facile de demander et d'obtenir, sans modifier la loi. Gelle-ci n’a véritablement de dispositions prohibitives, qu’à l'égard des usufruitiers et des tuteurs. En cela , on ne peut se refuser à convenir qu’elle est sage, et protécirice des intérêts de ceux ge ne sont pas en positions de les défendre eux-mêmes. Est-il juste qu’au moyen du pot-de-vin , qu’un long bail 92 : MÉMOIRES à vil prix lui permettrait d'obtenir, lusufruitier, dépouil- lant le propriétaire légitime , assure à ses propres héritiers une propriété permanente, quand il ne lui avait été ac- cordé qu’une jouissance de peu d’années ? Faudra-t-il aussi, que , même après sa mort, la mau- vaise administration de l’usufruitier pèse’sur le proprié- taire ? que , pendant de longues années , elle paralyse son industrie, et l'empêche de faire sur son héritage d’utiles améliorations ? on fait toujours mieux ce qu’on fait pour soi, que ce qu’on fait peur les autres, c’est une chose avérée. La faculté accordée à l’usufruitier, loin donc de profiter à l'intérêt général , en favorisant le progrès de l’agriculture , pourrait bien , en définitive , tourner à son préjudice. Ne doit-on pas aussi redouter labus que pourraient faire, d’une semblable faculté , des tuteurs négligents, malhabiles , ou malhonnèêtes , car il faut bien prévoir ce cas malheureusement trop commun. Et ne tremble-t-on pas des dommages qui pourraient en résulter pour les in- terdits et les mineurs? exposés déjà à tant de chances fâcheuses , qu’assurément il n’est besoin d’y rien ajouter! Pour les dépouiller ainsi des garanties protectrices que le législateur leur à accordées , il faudrait au moins un de ces motifs graves qui font sacrifier l’intérêt privé à l’inté- rêt public; mais, voit-on rien de semblable ici ? non, cer- | tainement. Les mineurs, les interdits, les usufruitiers, ne forment qu’une petite fraction de la société. Les mineurs et interdits sont bien loin d’être tous propriétaires; et ceux qui le sont , d’ailleurs , de même que les usufruitiers, ne possèdent pas toujours des biens ruraux. On voit com- bien se trouve réduite l’étendue probable de leurs biens. Enfin, le régime exceptionnel auquel ils sont soumis , ne dure le plus souvent qu’un petit nombre d'années , à l’ex- piration desquelles ces propriétés rentrent dans le droit commun. DE LA DEUXIÈME SECTION. 93 Une modification à la loi du fermage , ne pouvant jamais entraîner l'obligation de faire des baux de longue durée, né changerait rien aux habitudes des propriétaires , puis- que , aujourd’hui , Pexercice de leurs droits n’est limité que par leur volonté même. Cette modification aurait donc, pour unique résultat, la ruine possible, et sans compensation , d’une classe de propriétaires que la loi ac- tuelle à pour but de protéger. EXAMEN CRITIQUE DES DIFFÉRENTS BAUX A FERME ET A COLONIE PARTIAIRE ; QUEL EST CELUI QUI RÉPOND LE MIEUX AU DÉSIR FORMULÉ DANS LES 1'€ ET 17€ QUESTIONS DE LA 2° SECTION? PAR M. E. JAMET, Propriétaire-agriculteur à Châteaugontier. Le sol ne peut pas toujours être cultivé par celui qui le possède; celui-ci est donc obligé d’en confier l’exploita- tion à des mains étrangères. Le contrat, passé entre le propriétaire et le cultivateur, prend le nom de bail; il règle , selon l’usage des lieux où est situé le terrain con- cédé , les devoirs et les droits de chacune des parties. Ce contrat peut être verbal ou écrit, authentique ou sous- seings-privés ; les notaires rédigent ordinairement les actes qui concernent les propriétés d’une grande étendue; les sous-seings privés sont applicables aux fermes d’une faible importance , et, le plus souvent, le bail-verbal régit les conventions de la colonie partiaire. 94 MÉMOIRES é Les principales amodiations se divisent en baux à prix d'argent ou à redevances mixtes de courte et de longue période , en fermage à rente progressive, el en association . de partage à moitié fruits, sous le nom de mélayage. Bail à prix d'argent de courte période. Les baux de courte période sont également nuisibles aux propriétaires et aux fermiers; vainement, le sol au- rait été cullivé avec soin pendant plusieurs années, lors même qu’il posséderait au plus haut degré ce que les Al- lemands appellent une vieille force , il ne tarderait pas à se détériorer sous la main de celui qui n’a qu’une courte jouissance. Les plantes fourragères et les prairies artili- cielles dispendieuses , que l’avenir seul peut largement payer, feraient place aux récoltes épuisantes d’une prompte réalisation en numéraire , et qui laissent peu de moyens réparateurs. Ainsi, le propriétaire, peu éclairé sur ses véritables intérêts , croit seulement avoir loué le revenu de son domaine, et il ne se doute pas que le fermier lui paie chaque annuité avec une partie de son capital. Si, au contraire , le sol est épuisé, si les champs sont infestés de mauvaises herbes, et surtout de plantes péren- nes, que peut-on espérer d’un bail à courte période? Le fermier dépensera-1-1l beaucoup d'argent en frais de sar- clage, en achat d'engrais, pour réparer les terres arables; améliorera-t-il les prairies naturelles ? non, sans doute, Car il craindrait de ne pouvoir rentrer dans ses débour- sés ; il cullivera tant bien que mal, et rendra le sol en plus mauvais état encore, s’ilest possible. Le propriétaire, un peu intelligent, ne donnera jamais un pareil bal, et le fermier, qui comprend ses intérêts , ne l’acceptera pas davantage. Du fermage à redevances mixtes. Ce genre d’amodiation est également contraire aux DE LA DEUXIÈME SECTION. - 96 intérêts des deux parties. Le chiffre du revenu étant va- riable, le propriétaire s’expose à voir déranger chaque année l’économie de sa maison : si les denrées qu’il reçoit sont d’un prix élevé et de facile écoulement, il obtiendra une rente plus considérable, aux dépens de son fermier; il sera dans la gêne, dans le cas où les récoltes seront abondantes , et par conséquent à vil prix, car les quantités seront les mêmes. D’une autre part, dans les années de disette, le tenancier, après avoir conduit au domicile du propriétaire ce qu’il lui doit en nature , sera forcé de don- ner le reste à la consommation de son ménage , et il ne pourra payer sa redevance en argent. Ce contrat, qui froisse à tour de rôle, pour ainsi dire, les intérêts des contractants, est immoral; n'est-il pas odieux , en eflet, que l’aisance de chacun des associés soit le résuliat de la misère de l’autre ! dans l’intérêt même de la propriété , il faut que le détenteur du fonds, et celui qui l’exploite, jouissent d’avantages justement propor- tionnés. Bail à prix d’argent de longue période. La division des héritages, si heureusement consacrée par notre code civil, et les mutations qui en résultent , s'opposent à l'introduction des fermages à très-longue période, vantés par nos voisins d’Outre-Manche. Quatre ou. cinq rotalions sont indispensables au fermier; mais, un bail à plus long terme , serait presque une aliénation; le capital foncier subirait une déprécialion d'autant plus forte , que le bail se rapprocherait davantage du point de départ. D’un autre côté, quelle que soit la durée de la jouissance, on ne peut obtenir une amélioration progres- sive , parce que la dernière période est toujours une épo- que de décroissement. Les légistes et les agronomes les plus habiles ont vainement essayé de faire cesser ce fä- cheux étai de choses; les clauses. comminatoires , les | 96 © MÉMOIRES mieux rédigées, n’ont jamais complètement remédié au mal. | | Il en'sera toujours ainsi , tant que le fermier n'aura pas la certitude d’une prolongation de bail, soit au même prix, soit en payant une rente, dont le chiffre n’excédera pas celui de la moitié du produit réel. Le cultivateur ne travaille pas le sol pour le sol, mais pour les fruits, puis- qu'il ne le possède que temporairement : un propriétaire raisonnable ne peut exiger du fermier, à qui il loue chè- rement sa terre, l'amélioration du capital au dépens des annuités , si ce n’est les premières années du bail, pour l’épuiser ensuite à son profit. Avec un amodiateur intelli- gent et riche , on verra bientôt le sol se couvrir de belles récoltes améliorantes; mais, par cela même que l’exploi- tant sera capable, il épuisera, pendant la dernière pé- riode, le sol qu’il avait fertilisé dans son intérêt seul. Le désir de rentrer dans ses avances, et surtout la crainte de subir une trop forte augmentation du prix de ferme , le font agir ainsi; cela est le résultat d’un calcul d'intérêt personnel; le travail ne peut et ne doit pas avoir d’autre mobile. Blâmera-t-on , dans le cultivateur, l'esprit de pré- voyance qui dirige le commercant et l’industriel ! le pro- priétaire lui-même , dans la rédaction des clauses de son bail, cherche son avantage säns ménagement pour celui du fermier, il veut obtenir le revenu le plus considérable: le cultivateur, à son tour, vise à l'augmentation des pro- duits au dépens du sol, il emprunte alors au capital pour payer la rente. S'il était possible de mettre de côté les intérêts opposés des deux parties , en ne s’occupant que du fonds; si une portion du prix de ferme était convertie en travaux d’a- mélioration, en achat d’engrais et amendements , tout le monde y gagneraïit ; le propriétaire, en capital et par suite en revenu; le tenancier, sur la rente et les consomma- teurs, par l’augmentation des produits. Nous ne saurions DE LA DEUXIÈME SECTION. 97 trop le répéter, on doit avoir constamment en vue la bo- nification du sol, il est la source de l’alimentation et du bien-être de tous : il ne faut pas, cependant, que cela soit au désavantage de celui qui le fertilise; le fermier ne doit pas seulement vivre de son travail; mais devenir aisé ou riche, suivant l’importance de sa ferme et de ses ca- pitaux. je à de Bail à rente progressive. Les baux à rente progressive sont particuliers à l’An- gleterre ; ils portent le nom de lord Kames, qui le pre- mier les a.mis en usage : l’augmentation de chaque pé- riode est fixée à l’avance; ils ont une durée de trente à quarante ans. Avec la connaissance du sol qu’il cultive, le fermier peut , dès les premières années, apprécier l’aug- - mentation des produits, et calculer ses bénéfices à venir. S’il a de l'intelligence et des capitaux suffisants, ses dé- penses premières seront considérables ; il sait que la terre deviendra pour lui une caisse d'épargne, dont les intérêts seraient usuraires dans le monde commercial; le sol sera porté en peu d'années à un haut degré de fertilité, et la période décroissante sera grandement affaiblie, sinon dé- truite; mais ce genre d’amodiation est généralement im- praticable dans nos contrées. L’aristocratie anglaise est usufruitière de la presque totalité de ses biens; peu lui importe de voir son capital engagé pour un long terme, elle n’en a pas la libre dis- position. Les terres ne se divisent pas, elles passent en entier à un nouyeau propriétaire, qui les possède au même titre, et le cultivateur. n’a jamais affaire qu’à un seul créancier. Il n’en est heureusement pas de même en Frince, et ce genre de fermage serait préjudiciable dans nos contrées , soit à cause de la division du capital entre co-héritiers , soit pour la vente du fonds, si le nombre T, -IL. CT 7 98 MÉMOIRES des ayants-droit ne permettait pas le partage. Nous devons faire observer que, dans les départements de l'Ouest, les propriélés affermées se vendent moins cher que les do- maines exploités par le métayage. Bail à colonie partiaire. Nous sommes arrivés à la partie la plus difficile de no- tre travail : il s’agit de faire pénétrer, dans des esprits prévenus, la conviction profonde, acquise par l’expé- rience , que ce systême d’amodiation est supérieur à tous les autres. Nous savons que celte opinion est vivement combattue par la presse agricole; mais, nous avons pour appui plusieurs noms recommandables , et nous espérons voir bientôt triompher celte vérité. L’excellence de ce genre de culture, dans notre arrondissement, donnera aux développements qui vont suivre, l’autorité des faits, Si on compare les terres des départements de l'Est et du Nord, soumises aux fermages, avec celles que régit la colonie partiaire, détestablement mise en pratique dans le Midi et quelques localités de Ouest, on aura raison de dire que la culture à moitié fruits est déplorable. L’as- sociation ne peut donner que de misérables résultats, si le possesseur foncier ne s’en occupe point, car, lui seul peut donner une direction intelligente et les capitaux né- cessaires. Mais, il ne faut pas juger une méthode par le mauvais emploi qu’on en fait, et les termes de comparai- son doivent être pris dans la même contrée; c’est ce que nous allons faire. Nous devons avouer, tout d’abord , que la colonie par- tiaire est difficile à mettre en pratique dans les localités où elle est inconnue; nous conviendrons également qu’elle n’est pas applicable avec profit aux propriétés d’une grande surface; au-dessus de 50 à Go hectares, le mé- tayage perd ce qu’il a d’essentiellement bon, le travail du sol par la famille. C'est là probablement une des ançien- Et DE LA DEUXIÈME SECTION. 99 nes causes de la division de nos terres ; tous les jours , on reconnaît que les métairies , réduites à la moitié du chif- fre que nous venons de ciler, sont mieux cultivées que les autres , toutes conditions égales , d’ailleurs. Le bail à colonie partiaire est un acte de société, le plus souvent verbal, rarement authentique, dont la durée est de trois, six ou neuf années; mais qui, dans la pen- sée des contractants, doit se continuer par tacite récon- duction. La mort des parties n’en arrête pas les effets; les deux familles du propriétaire et de Pamodiateur accep- tent les clauses primordiales, et n’y apportent que les modifications nécessilées par le temps. Le bailleur et le métayer désirent également continuer association; il faut de graves motifs pour que l’un d’eux demande une résiliation , qui doit être préjudiciable aux intérêts com- muns. Cela est si vrai, que la moitié des fermes à colonie partiaire est cultivée par les mêmes familles depuis un temps immémorial. Il existe à cet égard une sorte d’hé- rédilé consacrée par lusage, c’est le fils aîné qui conti- nue l'exploitation : lorsqu'il est en âge de se marier, ses parents lui abandonnent un quart dans l’association, c’est-à-dire la moitié des charges et bénéfices du métayer, cela se nomme un appartissement. Le colon affectionne les champs qui l’ont vu naître, et qu'il espère ne jamais quitter ; il ne craint pas d’y enfouir tout son avoir, parce qu’il.est sûe d’en tirer profit. On doit voir que si le fer-- mage présente toujours ; plus ou moins , une période dé- croissante, la culture à moitié fruits, au contraire , est ‘un moyen de progrès incessant, Le colon fournit les instruments aratoires , la moitié des semences et du cheptel, il paie seul Pimpôt foncier : ila, pour compensation, les légumes et les fruits du jar- din , fumé avec les engrais communs ; le bois de chauffage provenant des arbres émondables ; le beurre , les volailles et les œufs, dont le propriétaire prend une part fixée à 100 MÉMOIRES l'avance , mais qui ne va pas à la moitié, De plus, le pro- priétaire solde les deux tiers de la chaux pour les terres arables , et quelques-uns la totalité de celle qui est desti- née à l’amélioration des prairies naturelles, Nous ferons remarquer que les frais de chaulage sont considérables ; les fermes de vingt-cinq hectares , par exemple, emploient moyernement 200 hectolitres de cette substance chaque année, ce qui fait un déboursé de 500 fr., sans compter les frais de transport et de manipulation. Le métayer re- çoil encore gratuitement le bois nécessaire à la confection de ses instruments aratoires, Plus riche que son associé, le propriétaire fait, sans intérêts , les avances pour l’achat des engrais et des ani- maux reproducteurs qui doivent améliorer les différentes races du cheptel. Plus instruit, et moins accessible aux préjugés, il l’engage à modifier l’assol-ment, el à étendre les cultures fourragères , sans lésquelles il ne peut y avoir de progrès; s’il éprouve des diflicultés, ce que je suis loin de nier, il finit par les surmonter avec un peu de per- sévérance , et il augmente son capital et ses produits. Depuis vingt-cinq ans , l’agriculture à fait des progrès remarquables dans nos communes; elle continue sa mar- che ascendante : il est bien reconnu de tous que cela est dû à la culture à moitié fruits, le fermage ne fait que suivre, et quelquefois de très-loin, Nous connaissons deux propriétés de la même commune, d’égale contenance, dont l’estimation cadastrale est semblable ; Pune, à co- lonie partiaire, produit 1,500 fr. de revenu net, tandis que le fermier de l’autre peut à peine en payer 600 : le cheptel de la première est quadruple de celui de la se- conde. Nous n'avons pas besoin de faire remarquer que plus le chiffre de la valeur des animaux d’une ferme est élevé, plus son amélioration est constante et durable, Nous ne voulons pas dire que ces propriétés font la balance moyenne entre les deux genres de culture; mais nous DE LA DEUXIÈME SECTION. 104 pouvons aflirmer quil ya au moins une différence: du quart en faveur de 1 à colonie parliaire. Dans le métayage , le propriétaire a la direction, le cultivateur est seulement chargé des travaux. L’insiruc- tion théorique du premier se forme par la lecture des ou- vragos. élémentaires, et des journaux d'agriculture; ses connaissances pratiques sont Île résultat de communica- lions orales journalières. Les cereles littéraires, dont.les membres , malgré la prétention du titre, sontplus agri- culteurs qu’hommes de lettres, deviennent de véritables comices; ils ne, se réunissent pas à des époques éloignées, mais tous les jours, et tous les jours ils s’occupent de ce qui les intéresse le plus. Malgré cela , nous ne dirons pas que tous.les propriétaires ont l'instruction et la fermeté nécessaires pour bien diriger la culture à moitié fruits; mais , l’élan donné par quelques-uns, gagne peu à peu, et il provoque l’émulation générale, . On nous objectera que le département de la Mayenne a toujours été soumis à ce genre d’amodiation, et que l'agriculture a seulement fait des progrès sensibles depuis vingt-cinq ans; cela est vrai, mais le métayage n’y est pour rien. Avant notre première révolution , les terres du clergé et de la noblesse étaient cultivées à moitié fruits , sous la direction de fermiers principaux, c’est-à-dire par une société qui ne portait aucun intérêt au sol, et les biens du tiers s’appauvrissaient sous le poids des impôts. Les troubles civils, qui précédèrent l’Empire et la Restau- ration, mirent ensuile obstacle à son perfectionnement ; mais, depuis , et pendant cette dernière, époque , des pro- ris ises ont mieux compris leurs intérêts; ils se sont emparés de la direction, laissée jusque-là entre.les mains d'hommes rouliniers et pauvres ,. et ils ont vivifié le prin- cipe recommandé aujourd'hui par les économistes les plus éclairés , ils font de l’agriculture par association. Il ne faut pas croire que la colonie partiaire demande 102 MÉMOIRES une surveillance de tous les instants, comme la culture par domestiques ou manouvriers. Lorsque les soles, la quantité des engrais pour chacune d'elles , le choix des graines et des plantes à semer et à cultiver, le nombre des élèves à faire , ont été fixés, il suflit d’une visite hebdo- madaire pour voir si les travaux sont faits avec soin , et examiner ceux qu'il est utile d'entreprendre : le détail appartient à l'exploitant. Le colon, dont l’activité est sti- mulée par le partage des fruits, donne à la société la somme entière du travail des bras de sa famille , et il ap- porte tous ses soins à la conservation des produits com- muns. On a souvent dit que la colonie partiaire était un en- couragement à la fraude : nous ne prétendons pas dire que tous nos mélayers soient honnêtes gens; mais, ils ne sont pas plus fripons que les autres habitants de la cam- pagne , et leur aisance croissante Lend chaque jour à les moraliser. Le vol, d’ailleurs, n’est pas aussi facile à com- . méttre qu’on le croit communément , si ce n’est pour des produits de peu de valeur. Les deux plus fortes branches du revenu de nos fermes , sont les bestiaux et les grains; ceux-là sont vendus publiquement dans les foires , et ; lors même que le propriétaire n’assisterait pas à la livraison, le prix pourrait être difficilement.déguisé , il est ordinai- rement connu des voisins. Pour les céréales , il est tou- jours possible de visiter les lieux d’approvisionnement, sans blesser la susceptibilité du colon; celui-ci, du resté, n’opère pas seul le nétoyage, et il craint les indiscrétions. Au surplus , le meilleur moyen d’empêcher le vol, est de ne pas placer le métayer dans la dure nécessité de le commettre. Quelques écrivains agronomes, qui n’ont probablement jamais vu de colonie partiaire bien dirigée , ne manquent jamais l’occasion de crier haro sur cette méthode : si l’on veut ajouter foi à leurs lieux communs déclamatoires , le DE LA DEUXIÈME SECTION. 103 malheureux paysan est dans la plüs dégradante position de! servage ; il yen a même qui le comparent su nègre sous le fouet du commandeur. Nous ignorons cotnment on traite les esclaves aux coloniés; maïs, nous savons qu’un tel régime ne prendrait pas avec nos campagnards. Pendant les troubles civils qui ont désolé notre pays, ils ont prouvé qu’ils nè manquaient ni de fierté ni de cou- rage, et le propriétaire, qui voudrait agir brutalement avec eux, ne sérait pas tenté de recommencer. Quant à la contrainte morale , elle existe dans tous lés genres d’ine … dustrie ; celui qui donne le travail fait ordinairement les conditions ; sous ce rapport , l'avantage reste encore à là colonie partiaire , car le métayer recoil'un salaire propor- tionné à son labeur, par lé partagé égal des produits. En est-il de même pour l’ouvrier des villes ! Le meilleur sÿstème d’amodiation pour les départe- ments de l’Ouést est, sans aucun douté pour nous , la colonie partiaire : elle réunit les deux conditions esseh- tiélles d'une bonne culture , l'intelligence et les capitaux. Si l’on ajoute à ces moyens de succès , le travail intéressé de la famille , et la juste rémunération de ce travail, par lé partage des produits, on obtient ainsi l’amendémént progressif du sol et l’amélioration morale et matériéllé dé ceux qui l’exploitent. Il'ne faut donc pas en cherchér un autre, mais corriger ce qu’il a de défectueux dans la pra- tique; cela est d’autant plus facile qu'il s’agit d’éclairer celui des associés qui, par son instruction première , ést le plus apte à recevoir un nouvel enseignement, S'il y à des abus, ils proviennent des hommes: s’il existe de mauvais métayérs , il y a atissi des propriétaires durs et avides : les uns et les autres né prouvent rien contre la bonté de l'institution. N’én déplaise aux pro- priétaires , lorsqu'une terre soumise à la culture à moitié fruits ne prospère pas, cela est plus souvent leur faute que celle des colôns : ceux-ci ressemblent aux domesti- 104 MÉMOIRES ques, leurs bonnes ou mauvaises qualités dépendent pres- que toujours des hommes qui les commandent ou les dirigent. Il faut que le propriétaire sache bien que lai- sance de son colon sera pour lui une garantie d'ordre , de travail et de probité; il doit largement laider de. ses deniers, le récompenser quelquefois, et payer seul les essais suivis de mécompte. En agissant ainsi, il retirera amplement ses déboursés, et il obtiendra une obéissance aveugle ; si le métayer n’a pas confiance dans l'innovation qu’on lui demande, il sait qu’il partagera les bénéfices, sans courir d’autres chances de perte que celle du travail appartenant à la communauté. La culture de l’arrondissement de Châleaugontier est regardée comme triennale, cependant cela n’est pas; les terres arables sont bien divisées en trois parties, mais la rotation n’en est point régulière. Deux soles sont alterna- tivement cultivées en ie d'hiver, jusqu’à ce qu r'elles en aient produit trois ou quatre, selon leur état de ferti- lité; chacune d’elles donne , après l’emblavure , des pro- duits intercalaires, tels que lupuline , trèfle, vesce, etc. L'autre division est occupée par des pommes de terre, choux poitevins, navets, orge et avoine de printemps, avec prairies arlificielles. Tout cela se fait sans aucune régularité , on ne sait trop quel nom donner à cette cul- ture; l’assolement biennal, composé, est le seul qu’on puisse lui appliquer. Malgré cette anomalie, l’agriculture a fait de notables progrès, et chaque année ses richesses augmentent : cela est dû à l’énorme quantité de chaux employée à l'amendement du sol. | Le département de la Mayenne se compose de trois arrondissements ; ceux de Laval et de Châteaugontier ont seuls des bancs calcaires; ils possèdent 147 fours à chaux, 49 au bois, et 98 à l’anthracite à foyer continu. Ceux-ci sont allumés pendant dix mois , ei cuisent moyennement 10 mètres cubes de pierre par jour, ce qui donne par DE LA DEUXIÈME SECTION. 105 année la quantité de 294,000 mètres, qui, à la sortie de l'usine, coûtent 15 fr.; la dépense annuelle du chau- lage , dans le département de la Mayenne, est donc de L,410,000 fr. Nous n’avons pas compris dans ce calcul les frais de transport et de trituration qui sont considéra- bles; nous ne faisons pas également entrer, en ligne de compte , le produit des 47 fours au bois , quoiqu'il ne soit pas entièrement consommé pour les bâtisses. Cette sta- tistique est certainement au-dessous de la vérité , elle date de 1855, et, depuis, il a été construit plusieurs fours de proporlions gigantesques ; nous en avons vu qui Sapuen 32 mètres cubes par vingt- -quaire heures. L’arrondissement de Had UE dont la conte- nance cadastrale est inférieure aux deux autres, emploie plus du tiers de cette masse; aussi, les blés, les trèfles -et les autres légumineuses y donnent-ils des récoltes abon- dantes. Nos bonnes terres ont produit jusqu’à 48 hecto- litres de froment à l’hectare , et la moyenne, pour tous les sols, est au moins de 20. Les bestiaux ont plus que doublé par tête ou en poids, et nous sommes fondés à croire que le capital cheptel de nos fermes, présente moyennement une valeur de 180 fr. par hectare. Il est facile de comprendre qu’il n’y a pas d’exagération dans ces produits, après a de la dépense faite pour les obtenir. + Nous le demandons, le fermage aurait-il voulu, aurait- il pu faire de semblables arbides Non, il faut posséder le sol ou l’exploiter avec sécurité d’avenir, pour y jeter ainsi les capitaux; la colonie partiaire pouvait seule ob- tenir un pareil résultat. En résumé, nous ne savons pas: si la colonie partiaire peut être fructueusement applicable en tous lieux; mais nous pouvons affirmer que, dans le département de la Mayenne, et surtout dans l’arrondissement de Château- gontier, elle donne un produit plus considérable que l’a- 106 MÉMOIRES modiation à prix d'argent. Cela vient, sans doute, des habitudes consacrées par un long usage , ét de l'absence de toute autre industrie rivale. Les propriétaires s’occu- pent presque tous du mélayage, à l'exception de ceux dont le travail commercial et industriel, ou les fonctions publiques, réclament tous les soins; cependant, en gé- néral, le magistrat et administrateur , le médecin et le légiste , le marchand et l’ouvrier-maître , font valoir leurs biens à moitié fruits. Ainsi, l'instruction agricole sé ré- pand dans toutes les classes de la société, et chaque jour elle tend à s’agrandir. Nous invitons les adversaires consciencieux du mé- tayage, à venir visiter nos communes , l'inspection des lieux leur fera certainement partager nos cenvictions. La supériorité de la colonie partiaire , sur le fermage, n’est révoquée en doute par aucun de nos concitoyens elle est tellement reconnue par tous, que le premier soin d’un acquéreur est d’obtenir, à tout prix, la résiliation du bail à ferme , pour lui substituer l’autre mode. Que l’on déclame tant qu’on voudra coutre la culture à moitié fruits, nous n’en persisterons pas moins , attendu que nous oblenons, tout à la fois, un accroissement de capital et de revenu. Après avoir répondu au premier paragraphe de la 2° section , formulé par le secrétariat général du Congrès, il nous reste à examiner quel mode de fermage garanti- rait le mieux les intérêts du sol , et permettrait en même temps au cultivateur, de retirer le fruit de ses avances et de ses travaux. y Nous avions scindé notre travail sur les deux questions, il a été décidé hier qu’elles seraient réunies; nous allons donner lecture des moyens les plus eflicaces pour arriver au but proposé par le 17° paragraphe. DE LA DEUXIÈME SECTION, 107 Bail à rachat facultatif d'années de jouissance. L’éloignement des lieux, les occupations industrielles et commerciales , les fonctions publiques, ne permettent pas toujours l’exploitation des biens par la colonie par- tiaire ; il faut donc chercher le genre de fermage qui ga- ranlirait , tout à la fois , les intérêts du sol ou du proprié- taire et ceux du fermier. Ce double but serait atteint par le rachat facultatif d’années de jouissance à une époque détérminée ; on améliorerait ainsi l’amodiation de lord Kames, puisque l'accroissement de la rente serait mis en équitable rapport avec la valeur du revenu réel, au lieu d’être arbitrairement fixé à l’avance. Expliquons-nous : Une métairie est donnée à ferme par un bail de douze années , avec rachat facultatif de neuf années de jouis- sance par le propriétaire et le fermier ; le prix de loyer est de deux mille francs. A la fin de la pénultième année, les parties ouvrent leurs enchères devant un officier mi- nislériel ou deux témoins. Supposons que le fermier offre cinq cents francs d'augmentation de la rente annuelle ; si le propriétaire n’est pas satisfait de ce surcroit de revenu, il surenchérit; admettons qu’il demande huit cents francs, Si le fermier accepte, il a encore devant lui dix années de jouissance, une à 2,000 fr., et.neuf à 2,800; si, au contraire, il refuse , le propriétaire devra lui compter la moilié du capital cinq pour cent de l’augmentation of- ferte,, c’esl-à-dire cinq mille francs. Cette clause de rachat facultatif tend à mettre d'accord les deux intérêts opposés ou à les ménager égaleinent, D'une part, le fermier ne craint pas de faire des avances au sol, car il doit les recouvrer en nature, s’il continue l'exploitation, ou en recevoir la juste indemnité, s’il abandonne les lieux. D’un autre côté, le propriétaire voit 108 MÉMOIRES l'augmentation de son revenu suivre progressivement celle du capital, et, s’il donne une indemnité, il sait qu’elle sera doublement couverte par l’élévation du prix de louage. Le fermier est obligé, dans son intérêt bien entendu, d'offrir un accroissement de rente proportionné © à la valeur moyenne de la moitié des produits , car, s’il est expulsé, l'indemnité qu’il doit recevoir, a pour base le chiffre même de sa proposition. Le propriétaire étant dé- raisonnable , le fermier ne souffre pas de son exigence, il se retire avec une somme d’argent qui lui rembourse les frais d'amélioration. Le rachat facultatif pourrait se répé- ter l’avant- dernière année de chaque nouvelle période de jouissance ; il y aurait ainsi sécurité d’avenir pour le fer- mier, rente véritablement évaluée d’après la valeur fon- cière , augmentation de produits dans l'intérêt général. On nous fera peut-être le reproche d’avoir placé trop près de la fin du bail, le rachat d'années de jouissance ; mais , il le fallait , pour éviter la fatale époque de détério- ration. On pourrait encore admettre une clause comminatoire, qui porterait le sol à un haut degré de fertilité, sans nuire aux intérêts de celui qui exploite. Il faudrait que le chiffre da cheptel fût proportionné à l’étendue et à la qualité des terres, et qu’il devint progressif comme la rente : le fermier serait forcé de faire des prairies artifi- cielles, et de cultiver des plantes fourragères en assez grande quantité pour noürrir un nombreux bétail. Cette condition , qui paraîtrait onéreuse à la majorité des fer- miers, parce qu’elle maintiendrait les récoltes dans une certaine limite , leur donnerait au contraire les moyens d’obtenir une plus grande somme de ces mêmes produits, par l’abondance des fumures : ils auraient en outre une ressource assurée dans la vente des bestiaux , si les céréa- les venaient à subir une trop grande dépréciation. Ce système n’a rien d’impraticable; nous voulons ap- DE LA DEUXIÈME SECTION. 109 pliquer un corps de ferme, à’un ensemble de pièces de terre de différente nature, ce que les propriétaires nor- mands font pour leurs pâtarages. Le nourrisseur, qui prend une prairie à loyer, est forcé de faire consommer herbe par un nombre de têtes de bétail proportionné à l'étendue et à la fertilité du pacage. Nous croyons que les baux, ainsi conçus, donneraient un résultat avantageux dans les départements de l’Ouèst , qui se livrent à l'élève des bestiaux. Qu’on nous permette d'exprimer notre con- viction par une- formule, qui semblera peut-être étrange au premier aperçu , mais qui n’en est pas moins une vé- rilé pratique. Le chiffre du cheptel d’une ferme est à l'appréciation de son état de fertilité, comme le thermomètre à la con- naissance des variations de l’atmosphère. Nous ‘avons donné en 1840 un protocole de bail à ferme , qui a été inséré au Bulletin; n° 5, 11° année, de la Société industrielle : ce bail , rédigé d’après les usages ruraux de l’arrondissement de Segré et du département de la Mayenne , pourrait recevoir ces deux modifications, dont la première est applicable aux fermages de toutes les contrées. se MEMOIRE De M. DESVAUX, botaniste à Nantes. EN RÉPONSE A CETTE QUESTION : « Jusqu'à quel point la nourriture et le régime peuvent modifier » les formes des animaux domestiques, et des véritables moyens » d'obtenir des races nouvelles? » Ut enim terræ variis mutatisque se- minibus, ita ingenia nostra nunc hac, nunc illa meditatione recoluntur. Pzin. Lib, 7. Epist. 9. Lorsque nous observions tout ce qui nous entourait , 410 MÉMOIRES au milieu des cultures, tout en faisant des observations sur l’histoire naturelle , nous ne présumions pas qu’il ar- riverail des circonstances où le plus grand nombre de ces résultats d'observations isolées , pourrait se trouver utile- ment groupé, et que, quelque jour, il nous serait loi- sible de récapituler des souvenirs du laps de presque un demi-siècle. Aujourd’hui, nous nous trouvons heureux de noter quelques faits , quelques observations qui se sont offerts : l’éducation des animaux domestiques ne nous ayant pas moins intéressé que toutes les autres branches de l’agriculture, tantôt à l’époque de nos premières an- nées, où reliré à la campagne durant les orages révolu- tionnaires, nous vivions au milieu des troupeaux dediverses sortes, que lorsque nous-même, pendant quelques an- nées , avons fait des élèves de diverses espèces. Nous al- lons donc exposer en quelques paragraphes toutes les considérations que nous croirons utiles au sujet qui nous occupe, et s’il se trouve émanées, par d’autres voix que la nôtre, des considérations ou plus importantes ou d’un autre ordre , nous aurons au moins le mérite de la bonne volonté, dans une matière que nous n’avons pas là pré- tention de considérer comme une de nos spécialités. CHAPITRE PREMIER. DE LA NOURRITURE ET SES EFFETS SUR LES ANIMAUX DOMESTIQUES. $ I. — NWégligence générale, relativement à l'éducation des animaux domestiques. Les agronomes ont fait des efforts pour améliorer, changer, renouveler les races d’animaux domestiques ; mais , leurs tentatives, qui datent déjà d’un assez grand nombre d'années, n’ont pas eu, dans les applications vulgaires, les heureux résultats qu’elles devaient avoir, Les effets en ont, à la vérité , été plus sensibles sur la race DE LA DEUXIÈME SECTION. 411 ovine; mais, que de temps il a fallu pour.arriver à ce mince résultat, lorsque nous nous rappelons l’époque où un magnifique troupeau de mérinos élait ramené d’'Espa- gne, par le savant vétérinaire Gilbert, et que ce troupeau traversait les plaines du Haut-Poitou , pour de là se dis- perser sur toule la France, et opérer une heureuse réno- vation dans nos troupeaux ! Si les résultats n’ont pas eu l'importance qu’ils devaient avoir, pour la France, c’est que, dans l’éducation de nos habitants des campagnes, rien ne vient modifier ses habitudes, ses usages domesti- ques , et si on lui confie un animal d’une race particulière, ou si le hasard la lui met en possession , il ne fera rien de plus que ce qu’il faisait avec une race abâtardie ou dégé- nérée ; il n’en suivra ni l’alimentation, ni les soins voulus, tout rentrera dans l’ordre ordinaire des choses , el, çe qui était un produit remarquable , dégénérera bientôt sous sa main. On sait qu’à la troisième génération, la plus belle espèce peut être perdue, de même que la plus rare peut être ramenée presque à son plus beau type, pourvu que lon en ait au moins un individu : ©’est ainsi qu'avec une chèvre du Thibet et un jeune bouc ou cabri, de l'ile de Bourbon, nous avons pu avoir une race franche du Thi- bet , sortie du deuxième croisement seulement (x). Pour obtenir des résultats , il faut, nous ne dirons pas de la science , mais de la réflexion, et, en général, l’édu- calion commune conduit plutôt à l’imitation que la ré- flexion, et, dès-lors, comment obtenir des habitants des campagnes ce que l’on trouve rarement pour résuliat par l'éducation des villes. Cependant, l'intelligence marche, des efforts sont produits de divers points el par quelques individus et par quelques agglomérations hienveillantes qui s'intéressent aux progrès de l’agriculture , forcent na- (1) La première portée ayant donné un mâle des plus ressemblants à sa mère, ce mâle, avec la mère, a donné une race thibetaine. 112 MÉMOIRES ture, pour ainsi dire. Dès lors, espérons que, tout en n’obtenant que lentement des progrès , la marche progres- sive ne restera pas suspendue, - Nous avions besoin de constater, en débutant, que les soins donnés aux animaux domestiques sont généralement négligés, et qu’assez ordinairement tout est abandonné au hasard , et de là , une des causes d’entrave aux efforts que l’on fait pour l'amélioration des races d’animaux do- mestiques. $ 2.— Influence manifeste du manque d'alimentation. Il est indispensable de convaincre les agriculteurs que non seulement le défaut de nourriture nuit aux individus, mais encore qu’il nuit aux races. Non seulement, là où la nourriture est précaire , là où seulement elle est peu abondante , les animaux souffrent pour l'individu; mais, graduellement, les races s’affai- blissent , se rapetissent, et même, abstraction faite du climat , finissent par perdre, pour ainsi dire , le caractère de leur race, Si le cheval, dans les déserts de l’Asie, n’est ni beau, ni-bien fait, au moins il est encore de la taille moyenne de nos chevaux de l’Europe ; mais, cette taille baisse graduellement, et, dans tous les pays de landes, on sait déjà que la race des chevaux est mal famée; le défaut de pacages abondants en fait une véritable race abâtardie. Cependant , la disproportion avec les races ordinaires ne devient telle , que lorsque la nourriture est vraiment restreinte à n'offrir, pour ainsi dire, qu’ure sorte de famine perpétuelle , et c’est là où en est la race des petits chevaux de l’île Ouessant : laquelle, cependant, est devenue pour le pays non pas une source de richesse , mais une pelite branche de commerce; ces chevaux pou- vant servir de monture aux dames et aux enfants. Nous ne connaissons la race navarrine qu'hors de son sol; mais, malgré le mérite, la vivacité, l'intelligence même DE LA DEUXIÈME SECTION. 113 de’tous les individus de cette race que nous avons pu ob- server, nous pensons que les montagnes de la Navarre ne fournissent qu’une alimentation imparfaite , puisque cette race, supérieure , à la vérité, à celle d’Ouessant, con- serve un caractère de petitesse remarquable. Le dernier degré de la dégénération se trouve à l’ex- trémité nord de l'Écosse : là , un cheval ne dépasse pas la hauteur de nos chèvres de grande race , est souvent plus petit , et est incapable-de supporter le poids d’un homme. Là, il est vrai de dire que deux causes de dégénérescence se trouvent combinées, et la rareté de la nourriture et l’abaissement de la moyenne température. Bien que la race des chevaux d'Islande, ne soit pas tombée aussi bas, on doit se douter que des animaux qui mangent les poutres de leur écurie , qui se nourrissent souvent de goëmons mêlés de sable (1), lorsque le besoin ‘les y force , ne peuvent pas présenter une race notable, Longtemps avant d’avoir vu la race des brebis qui erre sur les dunes des côtes de l’Ouest de la France, nous ne pouvions pas croire que l’espèce ovine pût être dégradée plus que nous ne l’avions vu dans certaines parties des anciens Berry et Haut-Poitou ; mais, en voyant combien était petite la brebis que nous signalons, nous avons conclu, surtout en étudiant la flore du terrain où elle paît, de quelle importance est l’alimentation pour les animaux domestiques, $ 3. — L'alimentation insuffisante seule pour l’amé- 4 lioration des races. Lorsque les Espagnols abandonnèrent leur belle race de chevaux dans les immenses plaines ou dans les riches savanes de l'Amérique méridionale , ces animaux s’y mul- tiplièrent au point, qu’encore aujourd’hui, on y trouve (1) Voyage en Islande, 1. V, p. 255, T. Il. 8 |: | AIS MÉMOIRES souvent des troupes d’un millier à dix mille individus réunis (1). Bien que dans ces savanes, les herbes de toutes sortes y croissent en abondance, et que souvent un homme serait caché au milieu des herbes de ces riches pacages, cependant, la race , loin de s’y être améliorée, est défectueuse en beaucoup de points. Si elle a conservé une grande vélocité, de l'énergie , elle a perdu presque toujours ses formes et son port, el a pris surtout un ca- ractère presque indomptable, par suite de ses habiludes. sauvages , datant déjà de races multipliées pendant plus de irois siècles. Si, de l’état sauvage, nous observons l’abondanee de la nourriture dans les animaux domestiques, nous ver- rons bien que si cette nourriture entrelient en bon état, en vigueur les individus, elle conservera la race, la ren- dra bonne en ce qu’elle est, mais ne la changera pas, c’est ce dont on doit être parfaitement convaincu; elle m’apporlera aucune disposition nouvelle à l’essence de celle race, el il faut être bien convainc de cette vérité, si l’on veut obtenir quelques notions précises sur cette partie de l’économie domestique. $ 4. — Utilisé de la bonne alimentation pour les jeunes animaux. Il existe un préjugé , c’est que , dans de trop bons ter- rains , les pépinières ne conviennent pas , à raison de ce que souvent les plantes , sorties de là , croissent mal dans un terrain inférieur, Nous avons constaté, par des expé- riences, un résultat tout contraire : il est vrai que du beau plant n’est pas aussi brillant après quelques années, qu’il eût été dans les bonnes lerres ; mais, les plants, sor- tis de pépinières à terres médiocres , réussissaient encore moins bien , et même pas du tout, dans les terres ingra- tes , où les plants vigoureux se maintenaient utilement. (1) Azzara, Hist. naturelle du Chili. DE LA DEUXIÈME SECTION. 1145 Ge que nous avons vu pour les arbres , nous l’avons vu pour les races de nos animaux domestiques ; partout où les jeunes animaux avaient, dans leur bas âge, une nour- riture épargnée , partout ils s’en ressentaient pour toute la vie, et leur accroissement s’en trouvait manifestement suspendu ou même arrêté. Dans les portées de la truie, ordinairement un ou deux individus sont d’une chétive apparence; eh bien ! dans les cas où on les a soignés et nourris convenablement , il nous est arrivé de voir ces rilous, comme on les nomme dans quelques parties de la France , gagner bientôt et dépasser quelquefois les indivi- dus de la même portée. Si l’on veut donc avoir de bons animaux domestiques, c’est , quelle qu’en soit la race , d’en soigner les jeunes individus , sous le rapport d’une bonne et abondante ali- mentalion. + Dans la race humaine , on remarque que le plus ordi- nairement la surabondance de l’alimentation emporté une partie des enfants avant leur deuxième année , et cela , sans que leurs parents puissent se douter que leur trop de soins alent des suiles aussi funestes: mais la manière dont se nourrissent les jeunes animaux ne peut amener les mêmes résultats, puisqu'on ne les force pas, pour ainsi dire, à une ingestion outre nature, et qu’ils ne pren- nent presque jamais de nourriture que ce que leur appé- lit comporte , que ce que leur estomac peut digérer sans fatigue et sans incommodité. K 5. — Alimentations hors des établés et dans les étables. Ici se présente une question qui n’est pas débattue pour la première fois , c’est celle des deux genres d’alimenta - lion en usage. Tant que la terre n’a pas manqué à l’homme , il a bien fait de laisser errer ses troupeaux dans les vastes pâtu- 116 MÉMOIRES rages à sa disposition; mais les ressources diminuant par la multiplication de la race humaine, c’est à elle à chan- ver la manière de nourrir les animaux qu’elle a associés à ses progrès sociaux. Il est prouvé que plusieurs animaux peuvent parfaitement bien vivre du produit de terres où un seul de la même espèce jeûnerait par le parcours, même pendant les plus beaux mois de l’année. Dès-lors, l'avantage, sous tous les rapports, est pour la nourriture des animaux dans l’étable. Là , cette nourriture , plus abondante, bien que plus économiquement administrée, sera plus profitable et à l’animal et à celui qui en re- cherche le bénéfice. Les Japonais , peuple auquel on ne peut refuser une civilisation très avancée , gardent tou- jours leurs animaux domestiques à létable (1). Nous sa- vons bien cependant qu’il ne faut pas entendre par cette habitude d’être nourri à l’étable une inclusion absolue , il est même bien que les animaux qui ne sont pas menés au-dehors pour le travail aient une cour, un terrain quel- conque, pour prendre l’air et se promener ; sans cela, on connaît les inconvénients de la retenue complète dans les étables. Si l’on veut tenir compte des produits , pour les en- srais, obtenus en plus par cette méthode , on verra que tout est à l'avantage, et pour la beauté des races et pour la belle conservation des individus , dans le mode de nourriture à l’étable. Au surplus, une grande partie des animaux de travail sont naturellement entretenus d’après ce systême , qui en principe doit finir par être appliqué exclusivement à tout autre. Nous ne pensons pas que pour l’engraissement du bœuf, par exemple, il y ait aucun avantage à lui livrer de riches pâturages, qu’il a bientôt ou souillés ou altérés, avant de les avoir uiilisés , ainsi que maintes fois nous en (1) Voyez Thunberg, voyages, t, II, p. 287, in-4°, DE LA DEUXIÈME SECTION. 417 avons été témoin , plutôt que de lui donner une nourri- ture abondante, mais distribuée par la main de l’homme. $ 6. — Les qualités transmises par la génération. Si le développement d’un animal domestique n'a pas été favorisé autant que cela était possible , il transmettra à ses descendants ses dispositions infimes , et ceux-ci de plus en plus perdront de leurs avantages primitifs, si rien ne vient contrebalancer ou suspendre un peu cette mar- che croissante vers la dégénérescence. Cependant , ainsi que nous l'avons déjà dit, quels que soient les soins en bien ou en mal que l’on pourra appliquer aux animaux domestiques , la race ne sera pas changée dans son es- sence, dans sa forme générale, si d’autres causes ne vien- neht y déterminer des modifications , ainsi que nous allons er traiter un peu plus loin. Une race donnée ne pourra donc, par le mode d’ali- mentation , qu'être modifiée très incomplétement , et la forme de l’animal n’en sera point modifiée; c’est là le point important auquel nous voulions arriver, afin d’ou- vrir la voie aux véritables moyens d'améliorer nos races d'animaux domestiques. | $ 7. — Des trois modes d'emploi de nourriture pour les animaux. La nourriture négligée se compose habituellement d’une alimentation spontanée , prise par l'animal au-de- hors dans des pacages rarement substantiels , et d’une alimentation prise à l’étable. Nous pourrions dire que c’est celle appliquée en général aux cinq sixièmes de nos animaux domestiques , et, dans ce cas, c’est tout au plus si les races d'animaux ne perdent ni ne gagnent, et s’ils se maintiennent , sans délérioration sensible , à leur nature particulière. On ne doit attendre d'animaux nourris ainsi 118 | MÉMOIRES ni une énergie spéciale, ni un aspect remarquable, ni un avantage prononcé pour son possesseur, La nourriture soignée est celle qui, bien distribuée par la main de l’homme, est profitable à Ja force, à la beauté de l’animal. Elle est réglée sur les facultés spé- ciales des individus el surtout d’après ce que l’on attend d’eux , dans les travaux auxquels ils sont appliqués. Un animal domestique, parfaitement ralionné, aura toujours un avantage sur celui même auquel on aura prodigué une nourriture semblable, mais sans y mettre une limite rai- sonnable, et d’où souvent résultent des pertes notables de substance alimentaire. Nous avons dit que cette nourriture devait être relative aux facultés spéciales des individus. Il faut bien faire at- tenlion que chez les animaux , comme chez l’homme , il est des particularités organiques qui font que tel chevai ou tel bœuf , même d’une taille identique , fera une con- sommalion presque double des autres animaux , sans se mieux porter, sans être plus fort. En général , ces ani- maux sont bodards, comme on le dit vulgairement , et leur large panse, déterminant un gros ventre, les fait faci- lement reconnaître. Nous avons vu très souvent de bons observateurs, parmi le vulgaire, ne pas aimer se charger de semblables consommateurs, et très bien les distinguer, ces animaux ne faisant pas plus de besogne et souvent moins que ceux qui se nourrissent à l’ordinaire, L'alimentation forcée a lieu dans trois circonstances: ou lorsque lon veut subvenir ou fournir à un rapide ac- croissement dans les jeunes élèves , ou lorsque l’on veut contrebalancer les inconvénients d’un travail forcé ou d’un exercice extraordinaire , ou enfin lorsqu'on a lintention dé pousser à l’embonpoint et à l’engrais, Dans ces trois circonstances , on obtiendra des avan- tages certains , par une nourriture abondante , saine et appropriée , si elle est convenablement distribuée ; mais DE LA DEUXIÈME SECTION. 119 si les: individus s ‘améliorent , les races ne séront pis mo: difiées ; l’animal sera plus beau , plus frais ; plus fort même, et communiquera tous ces avantages à sa rüce s’il ést destiné à la propagation ; mais il conservera et ses formes générales et toutes ses dispositions antérieures, et la race sera toujours la même en réalité. Dans alimentation forcée, nourriture et repos produi- ront l’engrais , noutrituré et travail conserveront un bon état de ant et, dans les jeunes animaüx, cette alimen- tation ajoulera à la rapidité du développement, et con- courra à l'extension de ce développement un peu au-délà des limites naturelles à l’animal. C’est là tout l'espoir dé l’agronome , et ces notions simples doivent guider, pour une race donnée , Pour en oblenir tout ce que l’on est en droit d’attendre. Ces considérations serviront en même temps à diriger les agriculteurs , pour compenser, par dés soins bien ap- - proptiés , les inconvénients d’un mauvais terrain , relati- vément à une belle race d'animaux qui serait dans lé cas de s’y trouver établie, N oùs venons d’exposér rapidement tout ce qu'une bonne nourriture et un régime régularisé peuvent obtenir sur les races des animaux domestiques: mais si l’on s’en tenait Rà, c’est trop peu, ce serait se restreindre, pour ainsi dire, à uñe trop simple bonification , tandis que l’industrie progressive de l’homme l’appelle à dés résultats plus re- levés. $ 8. — Des habitudes pour la nourriture ‘des $ > animaux. f Le climat et les circonstances peuvent modifier les ha- bitudes les plus naturelles à un animal et même les per- vérlir complétement ; c’est ainsi que nous avons vu un jeune agneau , élevé dans une vaste cuisine , commencer par ronger les os des côtelettes de mouton et finir par en 120 MÉMOIRES manger de la viande. Dans l'Islande , les chevaux , les bœufs , mangent les algues rejetées par la mer et qu’ils vont même pâturer sur les rochers sous-marins à marée basse ; et quelquefois même ils ont mangé des peaux et débris d’animaux de leur espèce, tant leurs habitudes , faute d’herbages suffisants, se trouvent modifiées. Si nous avons vu quelquefois les vaches manger quelques fucus sur les côtes, nous l’avons plutôt attribué à l’appétence de ces animaux pour le sel qu’à leur besoin de nourriture. Les chevaux andalous , nourris à la paille et à l’orge, ont de la peine à s’habituer à l’alimentation de nos che- vaux , et la pousse les prend très promptement ; et bien plus encore le cheval arabe du désert , qui , aussi sobre que son maître, se contente comme lui pour tout aliment d’une jointée de farine réduite en pâte, lorsque son com- pagnon de voyage , le chameau , se contente de quelques noyaux ou graines cornées et très dures de dattes. Dans des ces d’alimentation pour ainsi dire aussi excen- triques aux habitudes de nos animaux domestiques , pul doute que l’appareil digestif de ces diverses races n’ait été modifié de manière à ce que longtemps les dispositions pour une alimentation différente ne puissent être obte- nues, et puissent surtout encore agir sur la modification ou l’amélioration de la race, tant il est constant, par l’expé- rience , que non-seulement les individus sont soumis à l'influence des races, mais que les races elles-mêmes hé- ritent des résultats prédisposés par des habitudes. Des qualités remarquables peuvent donc encore se trouver avec des races d'animaux domestiques, malgré la grande différence dans le genre d'alimentation, soit sous le rapport du volume, soit sous celui de la nature de ces aliments. | Nous avons vu de irès beaux mulets qui, pour toute nourriture , avaient l'équivalent de quatre décalitres d’a- jone nain (ulex nanus), coupé et broyé, pour ainsi dire , © DE LA DEUXIÈME SECTION. 121 pour vingt-quatre heures , sans foin ni avoine , et qui se portaient mieux que bien des animaux en apparence plus soigneusement nourris, Ici les soins suppléaient , il n’y a pas de doute, joints à l’habitude , au manque d’une ali- mentation plus naturelle au mulet que celle de Pajonc, bien qu’il tienne de son père des qualités de sobriété bien reconnues. MÉMOIRE DE M. LE COMTE EDMOND DE SAINT-MARSAULT, Membre de la Société royale d'agriculture de la Rochelle, EN RÉPONSE A LA CINQUIÈME QUESTION DU PROGRAMME : « Jusqu’à quel point la nourriture et le régime peuvent-ils modi- » fier les formes des animaux domestiques? Les modifications nota- » bles qui se manifestent dans les formes des chevaux , des bœufs et » des autres animaux, par suite de changement d'habitation et de »régime, ne devraient-elles pas donner lieu a des études plus sé- » rieuses que celles auxquelles on s’est livré jusqu'à ce jour? » Il est incontestable que la nourriture et le régime mo- difient essentiellement les formes des animaux domesti- ques; mais il ne faut pas oublier une cause aussi très in- fluente, le climat. Il n’en est pas tout à fait ainsi du choix des reproducteurs , qui n’est qu’une raison secondaire et non permanente des modifications dans les formes. Tout porte à croire que , dans le principe , chaque es- pèce de nos animaux était une, parce qu’elle a dû prendre naissance et se développer sur une étendue restreinte du globe ; la mieux appropriée à son essence. Le premier changement a dû äpparaître quand l’homme a réduit les 122 «ue MÉMOIRES animaux en domesticité ; les révolutions physiques de notre planète, peut-être quelques circonstances inappré- ciables, et enfin l’extension de l'espèce humaine, traînant à sa suile ses nouveaux serviteurs , ont dû répandre les espèces les plus utiles, sur la plus grande partie de la surface de la terre. Quelques individus sont revenus à l’état sauvage , dans les nouvelles contrées où ils avaient élé conduits , tandis que les autres , soumis à diflérents travaux , suivant les besoins successifs de l’homme , ont formé autant de sous-races appropriées à leur nouveau climat, qu’il a été créé de services différents pour en tirer parti. Ainsi bien des causes diverses ont modifié les es- pèces; le climat , la nourriture et le régime sont les plus remarquables. Nous allons ici examiner quelles sont les principales propriétés des divers aliments les plus habituellement employés à la nourriture des animaux domestiques et - principalement du cheval, le plus remarquable de tous; car ce que nous dirons pour lui pourra ; dans la plupart des circonstances et avec de légères modifications , s’ap- pliquer aux autres espèces. L’avoine fait grandir et fortifie, durcit les os et les ten- dons , arrête le développement exagéré des muscles , et par conséquent donne peu de corps. Il serait dangereux dé l’emploÿer seule pour la nourriture habituelle et même en trop grande abondance : elle ne vaudrait rien , sur- tout pour lés jeunes animaux, parce qu’elle contient trop de principes nutritifs sous un faible volume, et trop d’ex- citants dans la partie résineuse de son écorce. Elle cons- titue les tempéraments irritables , mêlés de bilieux , de sanguin, mais surtout dominés par le nerveux. Des obser- valions savantes et exactes ont démontré l’erreur grave de ceux qui supposent que son emploi, pour les poulains, leur occasionne la fluxion périodique. Lés autres grains ont des effets analogues quoiqu’un DE LA DEUXIÈME SECTION. 123 peu différents; le froment est trop nourrissant; l’orge pas assez excitante ; le seigle sec trop rafraîchissant ; bouilti il'a réussi sur ddéivire points de la France ; et paraît remplacer, avec aulant d'économie que d'avantage pour les chevaux , toute autre espèce de nourriture, Il est ce- perdant bon, par précaution ; de lui associer une faible quantité de foin. Les féverolles, ramollies dans l’eau, sont aussi employées avec succès dans certains pays, mais ja- mais seules. La farine d’orge est plulôt un remède on un assaisonnement qu’une nourriture ; elle s’associe bien avec tous les grains et fourrages secs ; auxquels on la mêle en l’humectant plus ou moins; elle sert aussi à pal- lier les inconvénients de l’eau qui sert de boisson. Le son doit toujours êlre donné conjointement avec d’autres substances ; il est lourd , indigeste et non nourrissant , à moins qu’il ne contienne une assez grande quantité de farine. Les épis des céréales , consommés en vert ou au moment de la maturité, ont souvent occasionné de graves maladies, En résumé, il faut nécessairement du grain aux chevaux surtout , mais il doit être distribué d’une ma- nière calculée. Le pain, composé de diverses substances, paraît avoir élé adopté assez économiquement chez quel- ques expérimentaleurs de France et de Belsiqué princi- palement ; il ne donne pas d’ardeur aû travail ; mais nourrit et soutient bien contre la fatigue. Le foin est une nourriture échauffañte, et cependant il amollit les animaux qui en sont nourris. Il fatigue les or- ganes de la circulation et de la respiration ; seul , 1l ferait vivre ; mäis formerait une dangereuse nourriture ; il don- rérait une mauvaise constitution et le germe de gravés affections. [1 détermine les tempéraments bilieux et san- guins. Cependant il convient bien à la rate bovine , sur- tout quand il est accompagné d’une alimentation fraîche ou aqueuse , comme des racines ou dés résidus de distil- lérie. 124 MÉMOIRES La paille n’est pas assez nourrissante , pour le jeune âge surtout. Les poulains qui en seraient nourris , outre la difficulté de la mâcher , n’y trouveraient pas assez de substance assimilable pour prendre de l’accroissement, Donnée en même temps que des fourrages ou grains très nutritifs , elle sert, pour ainsi dire, de lest et occupe les - sucs gastriques , qui, sans elle , réagiraient sur les mu- queuses de l’estomac. La paille hachée se mêle souvent au foin haché de même, ainsi qu'aux grains entiers ou concassés ; la masticalion et la digestion en deviennent alors plus faciles. C’est aussi un moyen économique d’en- tretenir les animaux dans les années de disette, Toutes les plantes vertes, qu’on désigne habituellement sous le nom général de vert , nourriraient bien à elles seules, mais ne donneraient aucune énergie ; elles ren- draient, au contraire, les animaux aussi lourds que mous. En outre, le vert , en faisant dominer le systême lympha- tique, peut amener des maladies fâcheuses pour l’avenir. Ses inconvénients diminuent , disparaissent même en par- tie, quand il est pris dans certains pâturages, et il devient, au contraire, avantageux pour la plupart des jeunes ani- maux de travail , auxquels on le fait prendre pendant le printemps. Les pâturages sont généralement la manière la plus économique d’élever les jeunes bestiaux. On les divise en prés d'élève et prés d’embouche , pour engraisser les bêtes de boucherie : cependant , dans ces derniers , on élève presque toujours quelques chevaux , afin de con- sommer les plantes refusées par les bœufs. La qualité des herbages influe puissamment sur la taille et sur les for- mes. Les poulains , achetés en Bretagne , Poitou , Aunis et Saintonge , deviennent , en Normandie , des chevaux normands, Îl est, en outre, des prés, en apparence sem- blables , et qui produisent cependant les effets les plus opposés. On trouve, dans la Charente-Inférieure et la DE LA DEUXIÈME SECTION. 125 Vendée, des prés marais où les chevaux, haut montés sur jambes , prennent du dessous presque sans grandir, tan- dis que, non loin de là, d’autres prairies donnent la taille ou redressent la direction des membres , sans presque faire grossir le corps. Les prés marais desséchés de la rive droite de la Sèvre sont reconnus bien supérieurs, pour élever et engraisser, à ceux de la rive gauche , et cependant leur apparence est semblable. L’habitude de tenir, presque toute l’année, les poulains dans les marais, et par Lous les temps, les rend propres à supporter les fa- tigues , les privations et les intempéries ; leur tempéra- ment se forme ainsi et devient excellent. Nous pensons qu’on arriverait probablement à réunir des notions plus étendues sur les effets de certaines nour- ritures ou régimes , en parcourant les pays d'élèves, où nécessairement les habitants ont dû recueillir quelques observations qui pourraient éclairer la question. Les regains des prés naturels sont souvent consominés en vert, au pâturage ; les moutons S'y engraissent faci- lement et à bas prix, pourvu que le terrain ne soit pas humide , auquel cas, ils ne conviennent guère qu’à l’es- pèce bovine. Le foin des regains fauchés est très estimé pour les vaches laitières, ainsi que pour les bœufs et mou- tons engraissés à l’étable. On a cherché , depuis quelques années , à augmenter le nombre des substances alimentaires pour les animaux domestiques. La pomme de terre a été essayée en plusieurs endroits, cuite et crue, Nous ne pensons pas qu’elle soit générale- ment une très bonne nourriture , surtout crue , à cause du principe vénéneux contenu dans sa pellicule; en outre, la multiplicité des usages auxquels on l’emploie doit la rendre peu économique pour la nourriture des bestiaux dans bien des circonstances. Le lait des vaches qui en sont nourries est de médiocre qualité. 126 MÉMOIRES La betterave est mangée avec plaisir par presque tous les chevaux ; elle convient surtout aux bœufs , pores et moutons ; elle donne aux vaches un lait abondant et bon. La carotte est la racine par excellence pour tous les animaux, Il y a lieu de croire qu’elle a les meilleures, sinon les plus abondantes propriétés nutrilives et même hygiéniques; car les expériences de M, de Dombasie dé- montrent qu’elle nourrit moins que d’autres substances ou racines, Dans tous les cas, les racines exigent l’emploi des grains et fourrages secs, pour ne pas altérer la constitu- lion des animaux et leur laisser la force de résister à la fatigue. Les fourrages artificiels, qui se répandent aujourd'hui, sont généralement bons. Le trèfle incarnat ou farouch, le plus inférieur de tous, est considérablement amélioré, quand on le fait fermenter suivant la méthode de Klap- meyer. Le trèfle rouge ; comme le précédent , convient mieux aux bœufs qu'aux chevaux; il donne un foin mou; le sainfoin et la luzerne sont un peu échauffants , mais très estimés pour les chevaux de travail; les vesces et les pois sont plus convenables que tous autres pour les mou- ions. On a remarqué que les chevaux ne mangeaient pas volontiers les pois et vesces blanches ou jarosses , et même, qu'en vert, celle nourriture leur enlevait les (or- ces , au point que leurs jambes se dérobent sous eux et paraissent ne pouvoir plus supporter le poids du corps. Il n'en est pas de même de la vesce noire. Les fourrages artificiels verts sont , à celte exceplion près, ce qu’il y a de mieux pour la nourriture d’été. On y joint aussi quel- quefois l’épautre , l’escourgeon d’avoine et le maïs , qui donnent aux vaches, ce dernier surtout, un lait abondant et d'excellente qualité. Nous noterons en passant que de ptit porcs, nourris aux colonies , presqu’exclusivement avec des cannes à DE LA DEUXIÈME SECTION. +27 sucre, fournissent une chair assez légère, pour qu’elle soit préférée à toute autre pour les convalescents. + Quant à la nourriture animale , dont a parlé M. Ha- mont , el qui serait donnée aux chevaux de la plus pure race arabe, dans le Nedj ou Arabie centrale, elle consiste en lait de chamelle , bouillon de viande , et même en viande de mouton bouilli. Nous ne connaissons encore que les assertions de cet ancien chef de l’art vétérinaire en Egypte et ne sachons pas qu'aucune expérience ait été tentée jusqu'ici à ce sujet chez les peuples civilisés; à moins qu’on n’éprouve celle alimentation aujourd’hui sur les chevaux arabes, dernièrement envoyés à Louis-Phi- lippe par Méhémet-Ali, Nous n’oublierons pas de mentionner ici les essais faits, pour nourrir les chevaux, avec l'aliment pur, c’est-à-dire la partie des aliments communs seulement assimilable et séparée des malières grossières, inutiles à la nutrition , et qui sont expulsées comme excréments. Mais il a fallu re- noncer à celte expérience , parce que l'estomac a besoin d’agir sur une substance décomposable. En outre , il est nécessaire qu’il soit garni d’un certain poids de nourri- ture , indispensable pour que lanimal opère régulière- ment toutes ses fonctions. La qualité et Pabondance de l’eau influent encore puis- samment sur le développement et la santé des animaux. Nous avons mêlé avec succès , à l’eau que buvaient nos moutons, du sulfate de fer, ainsi que Tessier le conseille, pendant les saisons extrêmes de grande chaleur ou d’hu- midité constante , et nous nous en sommes fort bien trouvés. C’est un puissant préservatif contre la cachexie aqueuse. L'eau ferrugineuse , qui sort des puits artésiens de Tours , influe avantageusement sur la santé des che- vaux de la garnison qui en sont abreuvés. Toujours et avec toute espèce de nourriture, un peu de selest un utile assaisonnement , pour tous les animaux; il | 128 MÉMOIRES remédie aux fourrages viciés , donne du ton à l’estomac et préserve de certaines affections. Enfin , l'abondance de la nourriture ou sa pénurie ap- portent des différences énormes dans la taille, les formes, les qualités et même la santé des animaux. On en trouve des preuves bien frappantes en parcourant les différentes fermes de la Lorraine, ainsi que dans beaucoup d’autres contrées , où les chevaux ont plus ou moins compléte- ment changé, suivant que l'introduction, plus ou moins répandue, des fourrages artificiels, a permis de leur con- sacrer une plus ou moins grande quantité de nourriture, Dans tous les cas , on doit regarder comme un principe certain que les animaux doivent recevoir, sans profusion , une nourriture saine , abondante , d’un volume et d’une nature appropriés à leur espèce, à leur âge, à leurs facul- tés digestives et au service auquel on les destine. En outre , aucune substance ne peut généralement former, à elle seule , l'alimentation des animaux , mais il faut tou- jours en associer plusieurs ensemble , autant par écono- mie que dans l’intérêt de la santé , et en choisissant les aliments qu’on disiribuera , on parviendra à former des sujets pour tous les usages ; car, ainsi que l’a dit M. de Dombasle, on peut considérer l’animal comme une étoffe, à laquelle on donne la forme que l’on désire , au moyen du choix de la nourriture , qui est comme le patron sur lequel on taille. Le régime se compose, outre la nourriture dont nous venons de parler, de l’exercice, des soins et des habita- tions. Signalons , d’abord , qu’il existe toujours une grande différence , en faveur des animaux élevés et entretenus en liberté, sur ceux que l’on retient à la crèche. Les habitations doivent toujours être propres, sèches, claires, aérées, ni trop chaudes, ni trop froides ; toute faute, commise contre ces règles , est payée par des vices de conformation intérieure ou extérieure , ainsi que par DE LA DEUXIÈME SECTION. 129 des maladies , qui déprécient lanimal, ou le rendent im- propre au service. Dans le jeuue âge , les animaux erai- suent le froid : quand on veut engraisser, il faut au con- traire du silence , de l’obsceurité et de la chaleur. Dans ce cas spécial , l'air lourd d’étables fermées , saturé des va- peurs du fumier, est très-favorable. L'exercice est indispensable aux jeunes animaux , pour leur santé , leur développement , leur vigueur, et princi- palement pour leurs aplombs et la direction de leurs membres. Il doit être modéré, et la liberté dans des en- clos en terrain sec et suflisamment étendus , est ce qui convient le mieux aux animaux. Il est très-avantageux qu'il sy trouve de l’ombre, un abri contre les intem- péries , de l’eau pure et abondante. Pour les chevaux de luxe, on ménage ces enclos près des habitations , et on les y nourrit ; au moyen de divers aliments, qu’on y apporte; mais, les pâturages ordinaires sont infiniment plus éco- nomiques pour les bestiaux communs , employés à des services divers. Ils y trouvent, sans frais, une herbe abondante; il faut seulement avoir le soin de choisir la nature de l’herbage , suivant l’espèce que l’on désire élever ou entretenir. Nous ne saurions trop insister, sur les soins que récla- ment Îles animaux, dans toutes les circonstances , mais surtout dans leur jeune âge , ainsi que les mères en état de gestation. Nous ne voulons pas parler, ici, de ce luxe de palfreniers, employés par les sportmen, mais bien, de la douceur dont on doit toujours user envers les ani- maux , de la régularité dans les heures et la quantité des repas, de la bonne qualité de la nourriture , des ménage- ments dans le travail ou l'exercice, de la propreté des habitations , des ustensiles de service et des individus , de la surveillance à exercer, pour qu’il n’arrive pas d’acci- dents ou de maladies, enfin , dans ce dernier cas, de tous T. I, ! 9 130 MÉMOIRES les moyens à employer promptement , avec ménägement el connaissance de cause , pour ramener la santé. Quoique le programme ne parle pas expressément du climat , nous croyons , ainsi que nous l’avons indiqué en commencant, devoir traiter ce sujet, qui, d’ailleurs, nous semble compris tacitement dans les expressions, nourriture et régime. En effet , le climat réagit sur la qua- lité de la nourriture, et dans la plupart des circonstances, on n’est pas libre de choisir cette qualité, comme on peut le faire pour lespèce et la quantité; il existe , d’ailleurs , des obligations de position, qui forcent à suivre un ré- gime , plutôt qu'un autre; dans le climat où lon se trouve. La nourriture et de régime dépendent dote , jus- qu'à un certain point, du climat, et toutes les fois qu'on voudra faire violence à la nature, on n’arrivera qu’à ün résultat artificiel , etencore avec de grandes dépenses. Les pays élevés et secs produisent des chevaux petits, légers , à taille élancée ; à tête mince , les membres grêles, la peau fine , les crins soyeux et rares , la corne dure, le pied souvent encastelé , et le pâturon un peu long, Leurs os sont plus durs et plus denses, leurs muscles plus appa- rents , et le tissu cellulaire très-serré, Ils sont aptès au service de la selle. : On trouvé dans les marais dés chévaux grands et lourds, pieds larges, pâluron court, tête forte, péau épaisse, poils abondants, Leurs 6s sont gros et mous, leurs mus- cles développés, le tissu cellulaire lâche et comme infil- tré. Is ne sont propres qu’au service du trait. Dans les plainés, le cheval tient de la nature du terrain, mais , généralement, se rapproche davantage de la race dés marais que de celle de la montagne. Pour bien apprécier tous les climats, il faut encore distinguer les terrains, suivant leur position géographi- que, leur conformation et leur nature géologique. Car, dans les terrains sableux et granitiques, généralement DE LA DEUXIÈME SECTION. 131 hauts et accidentés, le cheval se rapproche de celui des montagnes , et, dans les schistes et les argiles ; où le sol _est:plus bas et plus uni , da race.se confond, jusqu'à un certain point, avec celle des marais. Les terrains calcai- res , presque toujours en plaine ; font naîlre , mais élèvent . généralement peu. Les chevaux des pays chauds ont éga- lement beaucoup d’analogie avec ceux de montagne; ceux des pays froids , se rapprochent des races de plaine et de marais. Tel est le cheval de la nature , et &’est par ces diverses causés locales, que se sont formées successivement les différentes races que nous connaissons , prenant leur dé- veloppement et leurs formes , en raison du sol sur lequel elles vivaient. Mais l’homme est venu changer l’ordre naturel , et, au moyen de la connaissance des: propriétés des végélaux , en économisant les uns et distribuant lar- gement les autres , en soustrayant le cheval plus ou moins aux influences locales et atmosphériques, en le faisant changer de pays, souvent même seulement de pâturage, pendant soh jeune âge , en choisissant les reproducteurs s en l’entourant enfin de soins calculés, il ést parvenu à former des races artificielles, qui reviendront au type de la localité, que le sol leur imprimera forcément , le jour où elles seront abandonnées à elles-mêmes. Nous sommes tout à fait convaincus de l’avantage qu’il y aurait à étudier sérieusement ces questions de modifi- cations des animaux, par le régime et la nourriture ; mais nous croyons y voir bien des obstacles. En France, nous ne sommes pas assez-riches et, disons-le, assez cons- tants; peu de personnes même ont une mstruclion, ou un Caractère assez spécial, pour arriver à des conclusions satisfaisantes. La vie d’un homme, d’ailleurs, ne suffirait peut-être pas pour parvenir au résultat cherché; car, pour une solution complète et concluante dè la question, il faudrait, ce nous semble, travailler dans diverses loca- 132 MÉMOIRES lités de montagne, de plaine et de marais; avoir, dans chacune de ces positions, plusieurs substances à l'étude; enfin, dans toutes ces expériences, agir sur un nombre suffisant d'animaux , pour que le résultat püt être général et non individuel. En outre , ne faudrait-il pas, peut-être, étudier sur diverses espèces ? car, ce qui serait vrai pour les solipèdes, pourrait ne plus être complétement exact pour les ruminants ou les omnivores. Il en résulterait l’entretien onéreux, et presque improductif, d’une masse de bestiaux, car l’élève et l’engrais offriraient, sans doute encore, des diflérences importantes à constater. Il est vrai que plusieurs personnes pourraient séparément faire ces expériences, ce serait même, nous le pensons, le seul moyen pralicable , et qui aurait encore l'avantage d'offrir des résultats qui se vérifieraient les uns par les autres; mais alors, quel mérite supérieur ne faudrait-il pas à ce- lui qui serait chargé de réunir tous ces résultats partiels, et de les coordonner entre eux , quand on observera , sur- tout , qu’ils différeront nécessairement d’après les carac- tères et les manières diverses d’opérer de chaque expéri- mentateur ? Nous n’oublierons pas de mentionner ici les expériences de M. de Dombasle , sur les moutons; expé- riences dont il a donné le détail dans les Annales de Ro- ville, et qui fournissent déjà un commencement de ré- ponse à la question du Congrès. Nous ne connaissons pas en France , de recherches sur la qualité de diverses nour- ritures , qui aient été faites avec autant de soin et d’exac- titude. Mais si ces données sont utiles pour la théorie, nous craignons que, pour la pralique, elles ne soient encore longtemps d’une moindre importance; car, l’expérience apprend suflisamment, et en peu de temps à chacun, quels sont à peu près les qualités et les défauts de son cli- mat et des substances nutritives qu’il y recueille pour ses bestiaux, Nous pensons que la difliculté la plus grande est DE LA DEUXIÈME SECTION. 133 de créer, à bon marché , des bestiaux d’un usage utile, dont la vente soit avantageuse au producteur, autant que l'emploi au consommateur. Et cette difficulté exislera , jusqu’à ce que l'instruction agricole et le goût des bes- tiaux se répandent parmi les agriculteurs français. Alors, chacun saura bien profiter des avantages , et compenser les défauts de sa position, pour arriver à produire du bon, avec le moins de frais possible, en corrigeant la nature , sans la forcer, afin de ne pas perdre, par des causes locales, souvent presque inappréciables, le fruit de ses soins et de ses dépenses. . Nous nous résumerons , en disant que nous reconnais- sons que toute race a élé formée naturellement ou arti- ficiellement par les influences du climat, de la nourriture, du résime, et aussi un peu par les accouplements. C’est ainsi que Bakewel, et ses continuateurs, profitant habi- lement des circonstances, ont créé en Angleterre de su- perbes et excellentes races de bestiaux; que le luxe anglais a formé le Race horse; que les arabes ont amélioré leurs coursiers , et que notre civilisation s’est procurée ses che- vaux pour tous les services, Car, le type primitif de toutes nos races, exposé alternativement au chaud et au froid, à la sécheresse et à l'humidité, à la disette et à l’abon- dance, au repos et à la crainte de ses ennemis naturels , ce type, disons-nous, ne pouvait être employé, par homme, qu’à des usages restreinlis, et ne lui fournir qu’un service très-limité. La chose importante aujourd’hui, c’est de répandre l instruction sur toutes les matières agricoles , comme sur cet objet en particulier; nous pensons donc, malgré les craintes que nous avons exprimées plus haut , que L Con- grès scientifique a sagement agi, en entrant dans celte voie et en posant cette question. C’est fournir aux uns un sujet d’études et à d’autres l'idée de tenter quel- ques expériences, Quant à nous , nous sommes loin d’a- 134 MÉMOIRES voir la prétention d’avoir résolu la question; mais; peut: être, aurons-nous contribué quelque peu à aider à en obtenir 1x solution, at nous serions heureux alors, que notre’ travail pût être utile à de plus savants, ou à ceux qui seraient en position de travailler, pour arriver à ce résultat, site À GO —— RAPPORT DE M. OSCAR LECLERC-THOUIN, Professeur d'agriculture au Conservatoire royal d’arts et métiers de Päris, SUR DEUX MÉMOIRES RÉPONDANT A LA 5€ QUESTION DU PROGRAMME. Messieurs, Deux mémoires ont été présentés en réponse à la cin- quième question du programine soumis à la section d’a- griculture du Congrès. L’un est de M. Lecerf, l’autre de M. Desvaux. M. Lécerf, après avoir déduit des phénomènes journa- liérs dela dégénérescence qüe les caractères qui distinguent les races n’ont rien de la fixité des caractères de l'espèce , et qu’ils ne dérivent pas des mêmes causes premières , à cherché à démontrer qu’ils sont principalement le résal- tat de l'alimentation, du régime, ét il en a concla que les agriculteurs devraient s'occuper plus attentivement qu’ils ne l’ont fait jusqu'ici , d'étudier chez les divers animaux domestiques les effets de la nourriture, du logement , des soins journaliers qu’on leur donne et du travail auquel on les soumet. M. Desvaux, portant plus loin ses investigations, a non- seulement indiqué les mêmes causes , mais il en a recher- ché les effets directs, et jugéant de leur insuffisance , il à DE LA DEUXIÈME, SECTION. 435 tenté de. compléter son sujet dans: Fétude des croise- ments. Selon lui, une alimentation insuffisante, en arrê- tantà {out âge, mais surtout dans la jeunesse, le dévelop- perpent individuel , amoindrit progressivement les races; aussi la première condition pour oblenir de beaux ani- maux , quelle que soit leur espèce ou leur variété, est-elle une noûrrituré abondante ét toujours proportionnée, soit au développement musculaire où graisseux, soit à la dé- perdition de forces par le travail de chaque individu, Toutefois, par un semblable moyen; si Fon peut grandir l'animal ; on ne peut arriver à modifier les formes de la race, Afin de pousser plus loin l’amélioration, il est indis- pensable d’interroger les lois de la génération. Sous ce point de vue ; M. Desvaux adoptant sans res: triction les théories de Girou de Buzaringue, sur la pro- création des sexes à volonté , considère cette première donnée comme très importante à consulter par léleveur. ILeroït , en deuxième lieu, qu’il importe de connaître les effets remarquables que produit parfois une première fé- . Condation sur les gestations suivantes , puisque quelques exemples attestent les conséquences ,: jusqu'ici inexpli- cables , des accouplements antérieurs sur les gestations uliérieures., et puisque dès lors les femelles vierges où celles dont on connaît la qualité des premiers ne doivent être préférées. | L'auteur cite ensuite différents exemples à l’appuï de son opinion sur la fécondité des mulets. Il démontre que la nature donne accidentellement, et, du moins én appa- rence , spontanément naissance à des variélés nouvelles qu’il reproche à lagricullure de négliger. Enfin, dans un dernier paragraphe , après de courtes considérations sur Pappropriation des races aux circonstances locales el aux besoins spéciaux de l’agriculture , il termine par les con- clusions suivantes : Que la nourriture et le régime peuvent améliorer une race , mais qu’ils ne peuvent en modifier les 136 MÉMOIRES formes , au moins d’après tout ce que nous avons vu et observé, que ces formes embellies par l’embonpoint, for- tifiées par une bonne nourriture, développées par l’abon- dance de cette nourriture , ne peuvent être modifiées que par des croisements ou par des formes nouvelles fournies spontanément par la nature. Vous le voyez , Messieurs , le mémoire de M. Desvaux soulève de nombreuses et graves questions. Il est riche de faits curieux, que l’érudition de notre savant collègue lui à permis de grouper à l’appui de ses opinions théori- ques. Si quelques-uns ont semblé à votre commission moins propres à asseoir une règle qu’à constater des exceptions; si nous ne pouvons admettre , par exemple , que l’opinion , généralement admise et tant de fois prou- vée , sur l’infécondité de {a plupart des mulets , soit un préjugé; si nous n’allribuons pas une très haute impor- tance pratique aux effets consécutifs d’un premier accou- plement , el si nous pensons que les variations qui se ma- nifestent accidentellement durant ia gestation sont assez rarement transmissibles , nous sommes loin de nier qu’il en soit ainsi dans quelques cas, et nous reconnaissens que de telles observations , toui isolées qu’elles soient , sont dès à présent aussi intéressantes pour la science qu’elles pourront le devenir plus tard pour l’application. Aussi, Messieurs , vous proposons-nous de remercier M. Desvaux de son intéressant travail et de le renvoyer, avec votre approbation , au comité chargé de la rédaction du compte-rendu du Congrés. d :DE LA DEUXIÈME SECTION. 137 RÉPONSE DE M. OSCAR LECLERC-THOUIN , ñ A LA 6 QUESTION D'AGRICUÈTURE AINSI CONQUE : « Quelle influence le dépôt d’étalons d'Angers a-t-1l exercée sur » l'amélioration de l'espèce chevaline depuis son organisation dans »le département de Maine et Loire, et quels avantages l’éleveur » peut-il retirer de l'emploi d'étalon pur sang. » Avant 1789, l’Anjou ne possédait qu’une trentaine d’é- talons. Il est curieux de suivre la progression croissante du nombre de ces animaux, puisque c’est à eux que l’on doit la plupart des améliorations dont il vient d’être parlé. A la suite des guerres de la révolution et des désastres qu’elle avait entraînés dans ce pays , jusqu’en 1803, on ne put réunir, à Angers , que 4 étalons , les seuls qui restas- sent de l’ancienne administration. L’année suivante , le petit dépôt s'élevait à 8; en 1809, à 24. Le gouvernement était venu en aide au département, et l’amélioration pro- mettait d’être rapide. La proportion des saillies croissait tous les ans; de 1805 à 1814 inclusivement, le nombre de ces animaux resta cependant le même. Ils étaient alors répartis dans les départements de Maine et Loire et de la Loire-Inférieure. On compta qu’ils servirent 4,342 ju- ments, dont 35,072 en Maine et Loire, 1,485 à Angers et 1,987 dans les stations établies sur divers points du dé- partement. La moyenne des saillies par chaque étalon se trouva ainsi de 19 à 20 seulement par année. Dans les dix années suivantes, la circonscription du dépôt s’étendit à la Mayenne, mais la moyenne des éta- lons s’éleva à 34. Le nombre des saillies devint plus que double, puisqu'il atteignit le chiffre de 9,267, dont 4,555 en Maine et Loire, 2,017 à Angers, 2,538 dans les sta- 138 MÉMOIRES tions du département. Ce fut, pour chaque étalon, un un peu plus de 27 saillies par année. De 1825 à 1854, troisième période décennale de la création du dépôt, la moyenne des étalons fut de 41, le chiffre total des saïllies dé 12,021, dont 4,846 en Maine “et: Loire, 2,167 à Angers et 2,679 dans les stalions. La moyenne des saillies , pour chaque étalon, se trouva ainsi de 29 à 3a par an. Dans les cinq dernières années, c’est-à-dire de 1835 à 1839, la moyenne, en étalons, a atteint le nombre 45; ils ont sailli 8,545 juments , dont 4,795 en Maine et Loire, 1,411 à Angers et 3,589 dans les stations, La moyenne des saillies est aïnsi portée, pour chaque étalon , à 38 par an. | En descendant de ces données générales à celles qui s'appliquent plus spécialement à Maine et Loire et en re- cherchant les résultats obtenus année par année, on voit que le nombre des saillies de chaque individu s’est accru constamment en même temps que celui des étalons. La progression a surtout élé remarquable dans ces derniers temps : la moyenne, qui n’était que 10 au début, en 1837, par exemple, était de 38; en 1838, de 56; en 1839, de 59 et demi, puisque la première de ces trois années 799, la deuxième, 1,187 juments ont été saillies par 21 étalons, et la troisième 1,667 par 28. Tout caleul fait, depuis 1806, 225 étalons, dont 22 de pur sang oriental ou anglais, se sont succédé dans le pays, ont fait la monte dans la circonscription des haras d’An- gers et donné des produits qui ont fondé , à juste titre, la bonne réputation des chevaux angevins. Une grande par- tie des élèves de ce pays ont remonté la cavalerie légère ou sont allés compléter leur développement dans les her- bages normands, d’où ils sont revenus souvent sous le nom de chevaux normands. Peu d'années après la fondation du häras, 250 jeunes chevaux 6nt remonté le 26° régiment DE LA DEUXIÈME SECTION. 439 de chasseurs, dont le dépôt était à Saumur; en 1825, un autre régiment de chasseurs s’est remonté en Anjou avant de passer en Espagne, et tous les animaux achetés dans ce pays ont parfaitement résislé aux influences morbides qui ont reridu cette campagne si désastreuse, pour la très- grande majorité de nos troupes à cheval. Tant que le dé- pôt de remonte qui vient d’être créé à Angers ne sera pas encore en activité, les meilleurs chevaux de celui de Saint- Maixent proviendront de Maïne et Loire. Beaucoup sont propres à l’arme des dragons. Les éleveurs cherchent maintenant les étalons pur sang; ceux de race anglaise surtont. Ils ont vu qu’ils grandis- saient l’espèce locale, qu’ils la corrigeaient dans ce qu’elle avait de défectueux, qu’ils la fortifiaient même dans sa constitution, et que, tout en la réformant des membres et en donnant à ceux-ci plus de distinction, ils ajoutaient no- täblement à sa valeur. Un premier degré franchi, ils ont reconnu qu’il devenait bien plus facile d’en atteindre un second , et que la marche de l’amélioration , après avoir suivi , si l’on peut dire, quelque années durant , une pro- gression arithmétique, se faisait bientôt sentir dans une progression géométrique. Du reste, non-seulement on a recouru aux étalons étran- gers pour réaliser les améliorations dont je viens de par- ler, mais encore plusieurs propriétaires ont fait venir, à grands frais, de belles juments anglaises ; onze de celles- ci furent introduites à la fois , il y a peu d'années. Placées toûtes désormais chez des éleveurs distingués, elles ont déjà donné de superbes produits de luxe. 140 | MÉMOIRES NOTE DE M. BOUTTON-LEVÊQUE, Vice-président de la Société industrielle d'Angers, EN RÉPONSE A LA 7€ QUESTION DU PROGRAMME DE LA SECTION D’'AGRICULTURE : «Le prix payé par la remonte est-il en rapport avee le Lg: de revient? » Cette question a été traitée avec beaucoup d’étendue dans le Journal des Haras et dans celui de l’Argus, depuis qu’elle à été présentée par le comité d’agriculture de la Société industrielle d'Angers. Le comice hippique, les éleveurs , le général Oudinot , sont tous d’accord pour reconnaître cette vérité , le prix des chevaux payé par la remonte ne couvre pas les frais de l'élevage. Le prix des chevaux de remonte est ainsi fixé pour 1844. Il a éprouvé une hausse sensible depuis 1828. En effet, à cette époque, il était payé : En 1898. En 1844, Réserve :...,. 1D4o fr 700 fr. Ligne... ::400 600 Légère . . . 390 500 Le Depuis quinze ans, a dit le général Oudinot à la » chambre des députés , le prix des chevaux a suivi une » progression ascendante très marquée , empressons-nous ‘ » de le reconnaitre ; il n’est pas cependant partout en » rapport avec les sacrifices des éleveurs, aussi faudra-t-il » l’augmenter de nouveau , le département de la guerre » en reconnaît la nécessité ; il sait que l'accroissement in- » cessant de la valeur des propriétés élève naturellement ; le prix de revient du cheval. » DE LA DEUXIÈME SECTION. at L’état a presque seul besoin de chevaux légers, chacun maintenant recherche un cheval dit à deux fins; l’état doit donc offrir à l’éleveur un prix capable de Findemni- ser des sacrifices qu’il peut faire. Plus le cheval est léger, plus il a de sang, plus il est difficile à élever, el des tares , qui passent inaperçues quand il s’agit d’un gros cheval, enlèvent au cheval léger une partie notable de sa valeur. L’an dernier , le ministre de la guerre ayant consulté les conseils généraux sur les moyens de remonter l’armée en France , et surtout sur celui d'obtenir le cheval de ca- valerie légère, la plupart des conseils ont répondu : Il faut élever le prix pour la remonte, un bon prix étant la meil- leure prime et le plus sûr moyen d’agir sur la produc- tion. — « Le conseil général de la Vendée a même pro- » posé d'élever le prix da cheval de cavalerie légère au » même taux que celui de la grosse cavalerie, par la rai- » son que les poulains légers sont plus difficiles à élever et » d’une vente beaucoup moins sûre et moins avantageuse » que celle des chevaux de plus forte étoffe. » Je pense, Messieurs, qu’il ne devrait exister qu’un seul prix minimum pour toutes les armes, comme en a émis le vœu le conseil général de la Vendée, et qu’il serait con- venable de le fixer à 750 fr. Ii est impossible, dans pres- que toute la France, de bien élever un cheval à moins de 50 centimes par jour, depuis sa naissance jusqu’à l’âge de trois ans et demi , époque à laquelle il peut être vendu pour la remonte. Il aura , à cet âge , coûté la somme de 630 fr., celle de 120 fr. restant dans les mains de l’éle- veur ne sera que suffisante pour couvrir les chances d’ac- cidents et de mortalité qui pete souvent $ ’élever au cinquième, Si l’éleveur avait la perspective de vendre son cheval 950 fr., alors il pourrait bien l’élever, lui donner l’avoine si nécessaire dans le jeune âge pour développer le tempé- 142 MÉMOIRES rament du poulain. Dans peu de temps ; l’armée trou- verait facilement à se remonter en irès bons chevaux, et il deviendrait plus facile de trouver des chevaux d’oif- ciers sans en augmenter le prix actuel. Nos routes deve- nant tous les jours plus belles ; nos voilures , devenues plus légères, n'ayant plus besoin d’être traînées par des carrossiers de grande taille , le luxe n’aurait plus à de- mander à l'Angleterre et à l'Allemagne, des .attelages qu'il trouverait parmi les chevaux les plus distingués éle- vés pour la remonte de la cavalerie, Ainsi donc, le prix de 500 fr. fixé en 1844 pour la cava- lerie légère, et même celui de 600 fr. pour la digne ; ne peuvent êlre regardés que comme une prime accordée au mauvais élevage , car, à ce prix, on ne peut bien éle- ver, on ne peut donner de l’avoine aux poulains. Celui de 750 fr. est le minimum auquel on puisse por - ter le prix du cheval de cavalerie en France, et c’est seu- lement à ce prix que l’on peut exiger qu’un oflicier de remonte n’achèle que de bons chevaux. O0 INDUSTRIE. NOTE RELATIVE À L'INFLUENCE DES BOIS SERVANT A LA FABRICATION DES BARRIQUES SUR LA QUALITÉ DES VINS; MOYENS DEN NEUTRALISER L'EFFET ET DE SE SERVIR DES ROIS BLANCS , Par M. MAYER, pharmacien à Châteaugontier (Mayenne). | Au nombre des soins indiqués pour la conservation des DE LA DEUXIÈME SECTION. 143 vins; il faut admettre et reconnaître l'influence que pro- duisent sur eux les divers bois dont sont fabriquées les barriques qui les contiennent; surtout à l’élat neuf où récent, Cette influence varie selon leur essence, leur origine, et consiste dans la réaction du principe extractif propre ou particulier à chaque bois qui en relient toujours ; mal- gré les lavages. L'observation a signalé depuis longtemps cet inconvé- nient à la qualité des vins, et l’usage a fait préférer l’es- señnce de chêne aux essences de châtaignier et de sapin, pour ‘cause de leur porosité et de leur plus sensible réaction : l’on a même reconnu que l'essence de chêne, provenant du nord de l’Europe, élait meilleure que celle indigène; aussi, s’en sert-on généralement dans le Bor- delaiset dans tout le Midi dé la Franée. : Comme la diminution , aujourd’hui , du prix des vins doit tendre à procurer à nos bois les propriétés qui leur manquent pour l’emploi des barriques , il importe que la théorie explique , par l’analyse de leurs divers extraëlifs , les effets de leur réaction, et PER les moyens de les en priver complètement. L’extractif ou la sève, dans tous ces boîïs , est différent, selon le sol et le climat : ainsi, le chêne, originaire du Nord , le chêne et le châtaignier, élevés dans un sol hu- midé , produisent un extractif aqueux ou gommeux , S0- luble à l’eau , et peu soluble dans le vin ; tandis que cés mêtnes ‘essences, prises dans nos climats, sur un sol aride, siliceux, fournissent un extractif résinoidé ou gommo-résineux, peu soluble à l’éau, ét d’autant plus soluble dans lé vin qu'il est généreux. Voilà sur quoi est fondée avec raison là préférence qu’on accorde aux ché- nés dû Nord, malgré que nos chênes, d’üne densité su- périeure , soient plis convenables pour éviter l'absorption dés vins: [l'en est dé même dés bofs blancs du Nord, qui 144 MÉMOIRES sont plus poreux et moins résineux que ceùx de nos pays. Les connaissances de la physiologie végétale ont cons- taté ces faits de la diversité du principe extractif dans les bois , selon leur origine et leur essence , et elles indiquent que sa quaniilté doit être en raison inverse de leur densité, de même que la diminution ou lévaporation des vins, dans les tonneaux , doit être moindre dans ceux très-den- ses comme le chêne : de là, pour leur conservation, ne devrait-on se servir que de fûts confectionnés avec cette essence la moins poreuse , mais bien privée de son extrac- tif? Sans quoi , ce principe immédiat puirait à la qualité des vins , en les altérant dans leur goût et dans leur cou- leur , surtout les blancs. L'analyse chimique, en effet, reconnait comme corps constituants de leur extractif : Dans le chêne, l’albumine, le tanin , une substance extractive ou aqueuse ou résinoïde, suivant le sol, et un peu de matière colorante ; Dans le châtaignier, l’albumine , un peu de tanin , une substance extractive résinoïde et deux matières coloran- tes, rouge et jaune, d’une saveur un peu amère ; Dans . bois blancs , principalement, de la résine et une huile volatile ; Principes lous capables de réagir sur les vins, selon que les tonneaux en retiennent plus ou moins. Les lavages à l’eau bouillante seule , ou avec le chlo- rure de sodium (sel de cuisine), ne sont pas suflisants : l'usage et le séjour de l’eau de chaux récente , caustique, et en excès dont on emplirait les barriques , dissoudrait davantage d’extractif, surtout si cette eau de chaux con- tenait déjà en solution 250 à 500 grammes de potasse du commerce ; cet alcali, devenant caustique par la réaction de la chaux vive, aurait une bien plus forte action de dis- solvence sur les bois même résineux. L’on pourrait faire servir cette même eau successivement à plusieurs autres DE LA DEUXIÈME SECTION. 145 barriques ; et il n’y aurait qu’à ajouter de la chaux et de la potasse au besoin. Cependant , l'expérience ayant démontré que la péné- tration des divers agents chimiques, PURE à la conser- vation des bois ; n’est pas complète, n’atteint pas toute la profondeur des ligneux , même par immersion , l’on peut parvenir à ce résultat, en plongeant les bois, destinés à la confection des barriques ; dans de l’eau de chaux et de potasse, en vase clos et sous l'influence de la pression, d’après M. Breaut; ou encore, en se contentant de les soumettre à la vapeur, d’après le procédé de M. Moll, avant l’immersion. Un autre plus grand avantage, serait de pouvoir em- ployer le bois blanc dans la confection des tonneaux pour les vins , malgré sa porosité et son odeur résineuse , en le rendant imperméable; mais il faudrait que le moyen ne püt donuer aucun goût au vin. Si après avoir traité le merrain de bois blanc à l’eau de chaux et de potasse , comme il vient d’être exposé , et l’avoir lavé, on le faisait ensuite tremper dans une eau bien saturée d’alun , et de ce bain dans une solution d’hy-. drochlorate de chaux, avant la confection immédiate des tonneaux, leurs pores se rempliraient ainsi de sulfate de chaux et d° hydrate d’alumine; ce bois deviendrait plus dense, plus dur, moins combustible : et si encore l’on enduisait extérieurement les tonneaux (faits même de toutes autres espèces d’essence de bois) ou de goudron, ou mieux d’un vernis gras, composé d’huile siccative à la litharge et d’oxide rouge de fer, l’on éviterait toute déper- did , soit des vins, soit même des alcools , et l’on ren- drait les barriques et leurs cercles presque indestructibles, surtout les cercles ayant été impregnés auparavant de muriate de chaux (chlorure de calcium) en solution à 15°, lequel leur çonserye toute leur souplesse. ga à à 1 £ 10 146 MÉMOIRES Je ne pense pas que l’on ait à redouter, comme dans certaines eaux , le goût de crudité du sulfate de chaux, l’alcool s’opposant à sa solution. Quant à l’alumine , elle ne pourrait que réagir bien faiblement sur le principe co- lorant du yin rouge, en se précipilant mutuellement et encore enveloppé de sulfate de chaux, cette action me . paraîl peu possible, Ges mêmes procédés d'immersion et d’enduit convien- draient également aux meérrains de chêne et de châtaignier, en augmeptlant leur densité et leur durée : ils sufliraient, saps ayoir recours aux moyens de perfectionnement de MM. Breaut et Moll. Dans la confection des barriques , il ne devrait entrer, pour leur solidité, que des bois de fente et non de sciage , la plus grande force des bois consistant toujours dans la longueur de leurs fibres : aussi, en Anjou , où l’on n’em- ploie que du merrain de chêne et de fente , se contente- t-on d’une épaisseur de trois lignes (6 millimètres), tandis qu'avec le bois de sciage, il faut au moins le double d’é- paisseur. Îl en résulte , avec l'avantage de la force , écono- mie de matière et de poids dans les transports ; il y a plus de souplesse, el nos barriques, étant plus cintrées, pos- sèdent moins de cercles, et ne favorisent pas la fraude de Pajustage de pièces que l’on trouve souvent dans celles dites bordelaises, En Angleterre , la compression commence à être appli- quée sur les bois destinés aux mécaniques, pour leur procurer plus de force : dans l’usage des tonneaux, il fau- drait commencer par les priver de leur extraclif. Il serait peut-être plus simple , plus avantageux de faire absorber aux bois vifs, selon M. le docteur Boucherie, les solutions alternatives que j'indique : l’on sait que c’est avéc celle d’alun, qu’il rend les bois incombustibles, et, avec d’autres solutions, qu’il leur donne de la durée ou DE LA DEUXIÈME SECTION. 147 de la couleur, qu’il varie à son gré; mais, ces bois ne pourraient plus subir la fente , ét doivent être d’un travail plus résistant à l’action des outils, rapport au plâtre et à l’alumine qu’ils contiennent à plein leurs pores. Avec ces moyens, il me paraît démpniré qu’on peut cesser d’être tributaires des bois étrangers dans la con- fection des barriques pour nos vins, qu’on doit même, indépendamment de l’avantage pécuniaire, leur préférer les nôtres , et qu’au besoin, par économie de nos essences de chène et de châlaignier, si recherchées pour nos cons- truclions et autres usages, l’on peut se servir du bois blanc privé de son extractif; enfin , qu'avec l'application extérieure d’un enduit qui empêche l’évaporalion , tous les tonneaux, de quelques bois qu’ils soient, deviennent presque indestruclibles , et sans que cet enduit puisse faire craindre la réaction du vin , vu l’interposition da plâtre et de l’alumine dans les pores du bois. Il est facile d'apprécier le bas prix de revient de cha- que barrique préparée d’après ces procédés : surtout , si l’on se contente de la simple purgation de l’extractif par l’eau de chaux et de potasse, et ensuite de l’enduit; quant aux immersions dans les bains d’alun et d’hydrochlorate de chaux, et quant à l’enduit, ces substances sont à bon marché , et sont d’ailleurs absorbées en assez faible quan- tité pour en élever peu le prix, surtout fait en grand, où l’on pourrait fabriquer l’hydrochlorate de chaux à l'état liquide, pour éviter les frais d’évaporatien. L'état de la science, au moment où plusieurs causes tendent à diminuer la production &es bois, malgré l’ac- croissement de leur consommalion, permet donc, soit par la durée, soit par la substitution des essences , de ré- _soudre le problême de leur conservation et de leur suffi- sance à nos besoins , l’une des plus importantes questions d'économie publique. Il faut reconnaître en compensation, de quelle durée 148 MÉMOIRES et de quelle conservation seraient avantageuses ces bar- riques pour les liquides alcooliques ! DU PARCOURS DES TUNNELS ou SOUTERRAINS DE CHEMINS DE FER, DANS UNE SEULE DIRECTION , — SANS L'EMPLOI DES LOCOMOTIVES, — ET EN ÉVITANT AINSI TOUT DANGER D’EXPLOSION ET D’INCENDIE , — DE MÊME QUE LE CHOC DE DEUX CONVOIS VOYAGEAXT EN SENS INVERSE, PAR M. LE Cte MAURICE DU PARC, Chambellan de Sa Majesté l’empereur d'Autriche. “ = « Les choses les plns utiles à la société sont » négligées; moins parce qu’elles sont diffci- » les, que parce que lon n’y a pas fait atten- » tion, » DE LA CHAPELLE, Discours sur l’étude des mathématiques. Auteur d’une traduction, encore inédite, d’un ouvrage sur les chemins de fer considérés comme lignes d’opéra- tions militaires, celte occupation m’a mis dans le cas de réfléchir beaucoup plus sur tous les détails de cette voie de communication , que je n’eusse élé dans le cas de le faire sans celte circonslance. Une réflexion surtout m’a frappé : c’est qu'après laf- freuse catastrophe de Versailles , il n’y a pas sur les che- mins de fer de plus graves accidents possibles que ceux : d’une explosion de locomotive, — d’un incendie ou d’un choc violent de deux convois, marchant en sens inverse, dans un tunnel de quelque étendue. Les accidents que je signale ici ont cela de particulière- ment formidable, que la simple prévision de leur possibi- DE LA DEUXIÈME SECTION. 149 lité est déjà un malheur moral réel , qui opprime dès à présent les nombreux voyageurs qui circulent sous l’im- pression de cette cruelle hypothèse ; et qu’il y a cent à parier contre un, qu’en laissant aux choses leur forme ac- tuelle, une telle catastrophe arrivera : — ou plus tôt ou plus tard , — ou par cas fortuit , — ou par négligence , — ou dans une contrée de l’Europe , — ou dans une autre. C’est donc un devoir d'humanité , et c’est rendre un véritable service à la sociélé, que de lui indiquer un moyen assuré : 1° De prévenir la possibilité de l” a me en loco- molive dans un tunnel de longue étendue ; accident qui aurait pour résultat indubitable le massacre d’un nombre probablement considérable de voyageurs , dans la situa- tion la plus difficile pour leur porter secours , et qui en même temps menaccrait de faire écrouler la voûte. 2° D'éviter, dans les mêmes données, l’incendie d’un convoi , soit d’hommes ou de marchandises : chose qui devient tout à fait improbable, du moment où les convois ne sont pas accompagnés de machines à vapeur. 5° De rendre impossible tout choc dans un tunnel de deux trains voyageant en sens contraire, et d'enlever, par conséquent , aux voyageurs par chemins de fer, les chan- ces de malheurs les plus à redouter. -. 4 Enfin , d'éviter ainsi d'introduire dans les souter- rains aucune vapeur malfaisante susceptible de nuire , par leur méphitisme, à la santé des voyageurs ou des tra- vailleurs , ou de nuire > par l’humidité qui s’en dégage , à la solidité des voûtes et des parois. Voilà les principaux avantages, Passons maintenant aux moyens d’exécution. Il semble presque bizarre de rappeler ici que les tun- nels se percent à travers les montagnes. Gela est cependant nécessaire pour expliquer que la 150 | MÉMOIRES percéé pouvant s’éntämer sûr un point arbitrairement p'us 6ù imoins élevé du fläne où de la face de ces terrains mütitueux ; l'ingénieur peut éncore prolonger à volonté son souterfain dafis une direction parfaitéemeiit horizon- tale, ou bien l’incliner; soit de haut en ba$, soit de bas en haut , à partir du point d'ouverture , et selon uñé pente que les bésoins détértiitient come devant êtré plus ou mois rapide. Ceci bien enténdû ; ét voulañt Maintenant trâvefser ma montagne dans les detix sens contraires sañs lé se- cours des locomotives et par la seule impulsion du poids du convoi roulant sur un plan incliné ; Jé me déciderai d’abord : 1° À substituer au tunnel à deux voies, deux tünnels à une seule vole. : (J’admets particulièrement ce systême pour les souter: rains d’une longüie étendue.) ‘3 À écarter à une distance convenable de léür orifice ines deux voies, posées à ciel ouvert, dé mänière à cé que la paroi de maecnnerie haturelle , qui existera entfé les deux tunnels, soit 46sez épaisse et résistante pour que leur voisinage rie puisse être la cause d’aucun ébouleñient , et de manière que la voie de droite, qui sera toujours lé che min d'entrée ; puisse êlre élevé en chaussée sans que le pied de son talus puisse en tien empiéter sur là diréctiof naturelle de {@ voie de gnuche ; qui sért toujours le che- min de sürrie ; et le point le moins élevé à son débouché. 3° Dans la supposition que ; d’après le système actuel des deux convois travérsant simullanément un même tun- nel, en sens inverse, au moyen de locomotives, la ligne dé parcours soit parfaitement horizontale, A déterminer de combien mon point d’entrée dévra être plus élevé que mon point de sortie, parallèle à certe ligne horizontale, de manière à ce que la pente de mes tunnels inclinés ; l’un de À en B et l’autre dé B en A, DE LA DEUXIÈME SECTION: _ 451 m’excède pas l'élévation exactement nécessaire pouf qué les convois, marchant en sens inverse, puissent arriver au poitit de sortie sans autre moletir que leffet mécanique d’un corps libre sur ses axes et roulant pär sa püissance de gravitätion sur üñ plau incliné, Naturellement cette élévation variera pour chaque tun: nél Suivant la longueur du trajet à parcourir dans les dif: férents souterrains. Ho! 4 À diriger le mouvement ascendañt des côfvois vers les points d’éñitrée dans là montagne par uñe péñte, à ciel ouvert ; telle qu’elle he soit pas dé nature à fatiguer les machines. 5° A'ïñe énager, devañt chaque orifiéé d’éñtrée, üné sorte de place d’armés à plan horizntal, sur léquel puisse tenir à son aise le convoi présumé le plus long, et sur 142 quelle la locomotive , placée en têté du convoi er pärÿve üué à l’'émbouéliure du tunnel, puisse encore ôpétér par lé tôté eætérieur dés deux voies; pour véñir potissér 18 convoi par derrière jusqu’au momént où lé derñiér wagon aüra pénétré dañs le tunñel, et soit par éonséqüetit aban= donné à l'impulsion du plän incliné, épération après las quelle la locomotive devra allé atténdré à la sortie AA le convoi parti en B püuf traverser là môhtagné, : Les opérations sont naturellement les mêmus dé chaque côté de la montagne, entre lesquels les locomotives n’au- râient qu’un mouvéiñent de nävéelte à faire d’un tunnel à l'autre, S'il s'eñ trouvait plusiturs à des distances rapproz chées ; Ou aütrément d’ün tunnel à l4 station là plus voi- sine. 7 … De cétte dispositiof , il résulte avec la plus grande évi: dénce : Qu'il n’y à plus dé nécessité d’introdüire aucune loco- motive dans les tunnels , puisque les convois peuvent ÿ chemitier tout seuls, Qu'il n’y a donc plus -à redouter le danger de leur 152. MÉMOIRES DE LA DEUXIEME SECTION. explosion , puisqu'ils ne se trouvent pas dans les souter- rains. Que la même cause fait ec FRA de la fumée des machines. Enfin que la rencontre en sens contraire de deux con- vois n’est plus une idée admissible , là où il n’y en a et où il ne peut matériellement y en avoir qu’un seul se diri- geant toujours dans le sens de la pente. Et comme , d’après cette disposition , il devient présu- mable que le milieu de deux lignes de même pente , de même niveau à leur point de départ et d’arrivée et de même longueur, doive aussi y être au même horizon, l’on pourrait établir à ce centre une ligne de communication transversale, tant pour multiplier les courants d'air, les moyens de refuge , que pour servir de magasins, d'ateliers et pour d’autres cas prévus ct imprévus. Après la conception de la pensée que j'ai eu l'honneur de vous exposer ici, Messieurs , j’ai voulu m’attacher, pour le bien de la cause , à devenir mon propre antago- niste , el je n’ai encore trouvé aucune objection qui dût faire rejeter une idée qui, communiquée à un de nos géné- raux de génie les plus distingués , doit peut-être à son suffrage absolu, le courage, qui je prends aujourd’hui à la mettre au jour , lorsque je n s: suis appelé par aucune spécialité. = Du reste, comme le sujet de ce petit mémoire est une question de haute philanthropie , le Congrès trouvera peut-être qu’il lui appartient de la soumettre à une dis- cussion approfondie , qui soit de nature , ou à lui donner de l’autorité , si son adoption pure et simple paraissait profitable , ou bien encore lui substituer une meilleure pensée tendant au même but , et je m'’estimerai heureux, en tout cas, d’avoir été l’occasion de l’adoption d’un moyen de salut de plus en faveur de la sainte cause de l'humanité, Er 7 D paf ur 24 T£ SE DA LS _ Mec D { : DZ Ÿ . (MI 1° / Pde MÉMOIRES DE LA TROISIÈME SECTION. —0——— Sciences médicales. — HYGIÈNE PUBLIQUE. MÉMOIRE DE M. LE Dr RIDARD, DE CORNÉ (MAINE ET LOIRE), SUR CETTE QUESTION : « Ee rouissage des chauvres qui a lieu chaque année dans une »grande étendue du département de Maine et Loire, y donne-t-il »lieu à des maladies? » Depuis que nous nageons , heureux mortels , en plein siècle de lumières, on se félicite chaque jour, comme d’un progrès , de la disparition rapide des préjugés qui, na- guère encore , obscurcissaient les idées populaires. Pro- grès immense, en effet ! Victoire éclatante, remportée par l'esprit de recherche sur l'esprit de routine et d’immobi- lité ! Mais, hélas ! tous les préjugés ne vivent-ils donc que dans le peuple, ou bien ne serions-nous pas tous un peu 154 MEMOIRES plus, un peu moins, du peuple, médecins et même savants peut-être ? Hâtons-nous de le dire pourtant, les préjugés que nous nommerçns scientifiques , par ôüppôsilion à ceux qui ont reçu le nom de populaires , ont cet avantage , si c'en est un , d’être d’aulant plus persistants et comme indestruc- tibles, que les esprits qui en sont possédés les croient ap- puÿés al l’expériérice el lé faisoninémeñt..s...s L’éxpé: rience ! admirable mot qui voile bien des paresses ! L'expérience, c’est, hélas ! trop souvent le dixit magister qu’une génération enseigne à la génération suivante ! On s’épargne ainsi täht dé travaux êt d’études ! On se fait un oreiller si commode pour le repos de sa conscience ! On s'évite la peine de vérifier soi-même ce que les livres nous ent redit ävée tant de éomplaisante Et d’unanimité. Le moyen, dites-moi, de mettre en doute les assertions de tant d'hommes justement recommandables , et par leurs lumières et surtout par le respect séculaire dont on a baptisé leur mémoire ! Il ya bien des siècles pourtant , Hippocrate a dit : « L'expérience est trompeuse , le juge- ment est diflicile, » Et de nos jours , comme au temps d'Hippocrate , l'expérience est restée Wompeuse , le juge- ment est encore diflicile ; et trop souvent ils ’égare , lors- que l'esprit qui doit juger voit des effets M et des causes productrices , là où existe seulement üne conco: mittance , une succession de phénomènes. Combien de vérilés ainsi faites sont devenues des erreurs ! Combien, après avoir circulé come une motinaie qu’il est défendu d’aliérer soûs peine dé crime et de fnoñt intellectuéllé, sont alléés s’enfoüir dans la vaste nécropole des croyances" htimaines ! Toutés ces réflexions , tfop longues peut-être et qui sentent tant soit peu l’hérésie scientifique, me sont venues à la pénséé én lisant la quesliôh du programme que je mé süis proposé dé lraiter. DE LA TROISIÈME SECTION. 455 Ad éoinrnénéeieut dé ma carrièré médicalé, jé pañta- geais satis scrupulé les idées écrités ds les livrés élas- siques au shjet du roüissagé du chañvre: Il est impos- sible; me disais-jé; qu'en odeur aussi pestilente que célle qui émane des roütoits nait pas üne influence funeste sut la santé des populations voisines; il est impossible que les animaux qui viennent s’abreuvér à cette eau corrompue ; n’en éprouvent pâs des maladies plus où moins graves ; il est imipossible enfin que le poisson ; plongé dans ce mi- lieu, n’y trouve pas une mort inévitable, Puis, en suivant ce raisonnement si bien commencé , j’arrivais presqué à proscrire, ou du moins à restreindre dans les plus étroites limites une opération si grosse de dangers pour tous les êtres vivants. J'étais bien près d’être d’accord avec l’ad- ministration des eaux et forêts qui , pleine d’un beau zèle hygiénique , veut soustraire les hommes et surtout le poisson à l’action d’une cause meurtrière s’il en fût ja- mais, Je m ’appuyais, du reste, sur d’imposantes autorités. Ainsi Baudrillard (Traité des edux et foréts) dit que « la décomposition du lin et du chanvre corrompt l’eau; » fait mourir le poisson , et occasionne des maladies aux » änimaux qui y vont boire , et même aux hommes. » L'abbé Rozier ( Dictionnaire d'agriculture) écrit : « Les anciennes et les nouvelles coutumes de toutes les » provinces du royaume , par la crainte de, l'infection. - » des eaux et des personnes , ont proscrit le rouissage » dans les eaux même courantes... Gelle défense fait » parlie du droit public en France. » Suivant Bosc (Wouveau cours d’agriculture) : « Le » rouissage a des inconvéniehis non NA AE pour la » santé dé ceux qui l’exécutent , mais même pour la » sûrelé des villages voisins des rouloirs.... Les effets sur » les hommes et ‘ls animaux qui boivent de ces eaux à » très hautes doses doivent (doivent !\ être narcotiques 156 MEMOIRES ».et purgatifs,.... Si les animaux mangeaient de l’herbe » empreinte de l’odeur du chanvre, ils seraient exposés à » des maladies graves, et même à la mort. » Le professeur Fodéré (de Strasbourg) pense que « l’on » peut regarder les mares où l’opération se fait comme » l'origine de la grande quantité de fièvres pernicieuses » qui règnent dans les pays de chanvre. » Ramazzini (Maladies des artisans), Fourcroy, son tra- ducteur ; M. Pâtissier, qui l’a commenté, prétendent que « la macération du chanvre est dangereuse , à cause de » l'odeur infecte qu’elle répand. » Voilà ;, certes , d’assez beaux noms; voilà des opinions assez nettement formulées pour entraîuer les esprits et expliquer la proscription du rouissage. Pourtant en ne tenant point compte des noms, puisque nul homme , si haut qu'il soit placé , n’est à l’abri de la prévention et de l'erreur; en soumettant à une sévère analyse toutes les phrases que nous venons de citer, que trouvons-nous ? Des opinions et rien de plus; de faits, qui leur servent de base , il n’en est pas trace. Ainsi, pour l'abbé Rozier, c’est La crainte de l'infection , non l’infec- tion reconnue , prouvée , qui fait proscrire le rouissage. Pour Bosc, c’est l’usage des eaux qui doit être narcolique et purgatif. Pour Fodéré, les fièvres pernicieuses qui ré- gnent dans les pays de chanvre peuvent être attribuées au rouissage. Pour Ramazzini el ses traducteurs, c’est l'odeur infecte du chanvre qui est dangereuse. Comme s’il suffisait de craintes ; comme s’il suflisait de la possibilité d’un danger ; comme s’il suflisait d’une odeur infecte pour faire repousser une industrie pleine de richesse et de bien-être ! Comme si c'était par peuvent et doivent qu'il faut procéder , quand il s’agit de fixer la science sur des points essentiellement pratiques ! Gomme si, avant d’aflirmer que le rouissage est l’origine d’une DE LA TROISIÈME SECTION. 157 grande quantité de fièvres pernicieuses, il ne faudrait pas d’abord prouver que ces fièvres sont fréquentes aux lieux où cette opération se pratique ! Et la généralité des ter- mes dont se sert M. Fodéré exclut l’idée qu’il a voulu par- ler seulement d’une localité soumise à son observation. Parlerai-je de l’odeur désagréable des routoirs ? C’est un des arguments les plus forts qu’ait fait valoir contre nous un adversaire puissant du rouissage. Quand on en vient R, qu’est-il besoin de discuter ? Il ne reste qu’à ouvrir les narines , et puis à condamner en masse tout ce qui peut désagréablement affecter l’odorat ; et pourvu que chaque sens vint à son tour réclamer l’anéantissement des objets qui lui déplaisent , on ne tarderait pas à faire de ce monde un paradis terrestre , et que pourrions-nous envier à nos premiers parents ? Adieu alors ces mille odeurs infectes, qui s’exhalent, non-seulement des routoirs et des marais, mais encore des rues de nos villes pendant les chaleurs de l'été; adieu tous les objets hideux ou difformes qui offus- quent tant les regards ; adieu les bruits discordants ou terribles dont l'oreille est offensée ; adieu surtout le froid rigoureux de l’hiver ou bien les ardeurs brûlantes de la canicule, ces deux extrêmes, sources de douleurs pour les épidermes trop sensibles. Mais jusqu’à la réalisation de cet Eldorado chimérique , né dans les rêves des heureux du siècle, il faut se résigner à disputer la vie aux cent et un ennemis qui la menacent sous toutes les formes; il faut tenir compte , mais pour ce qu ‘ils valent et rien de plus j des agents extérieurs qui sont désagréables sans être nui- sibles, et ce mot nous ramène au cœur même de la ques- tion du rouissage envisagé dans ses rapports avec la santé publique. Aujourd’hui, après une pratique de plus de quinze an- _ nées dans les communes de Corné, Andard, Brain, assises toutes les trois sur la rive droite et presque au bord de PAuthion, livrées à une culture très étendue du chanvre 158 MÉMOIRES et soumises, chaque année à ses émanations ; après une étude attentive des faits ; après une expérience d’autant moins suspecte qu’elle ne s’est pas formée à l’ombre d’une conyiction faile d’ayance, j'ose croire et dire que la santé publique n’est pas compromise par le voisinage de l’Au- thion , dans lequel séjournent de grandes masses de chan- vre; que les animaux peuvent, paître sur ses bords et boire de ses eaux sans en éprouver de pernicieux effets. Je laisse à dessein de côté la question du poisson qui n'entre pas dans l'esprit du programme, et dont l’imper- tance d’ailleurs ne peut jamais contrebalancer celle de la récolte qui nous occupe. Qu'est-ce, en eifet , que la con- servalion du poisson, rapportant à l'Etat quelques milliers de francs, comparée à la préparation du chanvre, dont la vente , par les millions qu’elle produit , alimente et enri- chit nos campagnes ? … Depuis que le chanvre est cultivé en grand dans notre vallée, la mortalité a-t-elle augmenté ? Les maladies sont- elles plus fréquentes, et revêtent-elles un caractère parti- culier et toujours identique, surtout à l’époque de l’année où le rouissage a lieu ? Tel est le double problême qu’il faut résondre avant de pouyoïir répondre , avec connaissance de cause , à la question posée dans le programme. Mes recherches ont porté sur les quatre communes de Mazé, Corné, Andard et Brain. Quant à la mortalité , j’ai pris les tables de décès des années aniérieures à 1800 pour les comparer aux tables de décès des années postérieures à 1820; c’est-à-dire que j'ai opposé l’une à l’autre deux époques essentiellement différentes sous le rapport de la culture et du rouissage du chanyre ; une très grande étendue de terrains com- munaux , jusque là incultes , ayant élé défrichés et cou- verts de chanyre pendant la dernière période que je viens de mentionner. DE LA TROISIÈME SECTION. 159 De 1790 à 1800, le nombre des décès est de 1,975, ce qui donne à peu près 199 par année, De 1820 à 1850, il est de 1,754 , ce qui donne à peu près 176 par année. Enfin ; de 1830 à 1840 , il n’est plus que de 1,443, c’est-à-dire à peu près 144 par année. Cependant le chiffre de la population , loin de dimi- auer, n’a fait que s’accroitre. Il est vrai que les-états de recensement smsnanlié pour trois communes jusqu’à 1820. Mais, 1° la population des quatre communes , qui était alors de 8,665 , s'élevait en 1840 ù 8,792 ; — augmenlation en vingl années de 127. 2° La commune de Gorné , dont j'ai pu compulser les états de recensement , avait, en 1800, 1,886 habitants; elle en complait , en 1840 , 2,092 ; — augmentation en quarante années de 206 ou à peu près d’un dixième. Ainsi , avec l’accroissement graduel de la population , ayec un développement extraordinaire de la culture du _chanyre, on voit la mortalité diminuer. Sera-t-il permis d'en conclure que la santé publique n’a pas été mortellement atteinte par l'influence des éma- nalions des routoirs ? Quelles sont donc les maladies spéciales, endémiques, dent lorigine , la gravité, peuvent être , avec juste rai- son, attribuées à l’action malfaisante des émanations du chanvre soumis au rouissage ? Les affections qui sévissent aux lieux et aux époques où celte opération s’exécute , ne se retrouvent-elles jamais ou qu’exceptionnellement , du moins à des époques et dans des localités éloignées ? Car, si tout ce que nous yoyons ici, nous le retrouvons ail- leurs, dans des circonstances et avec des conditions di- verses , serons-nous fondés à admetire l’existence d’one cause spécifique, Faction malfaisante des émanations des routoirs ? Et d’abord, on a raisonné avant d'observer; on a dit : « Les fièvres intermittentes , pernicieuses ou non, 160 MÉMOIRES sont plus fréquentes en automne, au voisinage des ma- rais ; donc, il doit en être de même près des routoirs qui contiennent du chanvre en décomposition. » Nous qui, après avoir raisonné ainsi, nous sommes donné la peine d’observer, d'analyser les faits dont nous sommes témoin depuis plus de quinze années, nous aflir- mons, avec la plus entière conviction, qu’il y a erreur dans la similitude établie entre les marais et les routoirs ; nous aflirmons que , pour tout homme de bonne foi, il y a un abime entre la théorie et la pratique, entre les as- sertions du savant, qui invoque des analogies mensongè- res, et les observations du médecin, qui cherche la vérité dans les faits, et la dit telle qu’elle s’est offerte à ses re- gards. | À supposer donc, qu’en automne, sur les bords des rivières et des ruisseaux qui contiennent du chanvre , il apparaît des fièvres intermittentes , simples ou pernicieu- ses , il resterait à prouver qu’elles sont dues exclusivement aux émanations de cette plante, et non point à l’humidité du sol qui n’a pas entièrement absorbé soit les eaux pla- viales , soit les eaux de débordement; car, partout et tou- jours, on a vu là des conditions d’insalubrité. Mais, il est loin d’en être ainsi , et les propositions qui suivent, et qui sont le résultat de nos constantes études, sont loin de justifier les craintes dont l’administration supérieure et un grand nombre de médecins semblent préoccupés : 1° Dans les communes de Corné, Andard, Brain , de- puis quinze ans, et avec une clientelle assez étendue , je n’ai pas eu à traiter quatre fièvres pernicieuses ; aucune d’elles ne m’a semblé pouvoir être , seulement avec une apparence de raison, attribuée aux cflluves du chanvre, puisque deux au moins se sont manifeslées à des époques où le chanvre est encore debout sur la terre. 2° Les années de récolte abondante du chanvre, ne DE LA TROISIÈME SECTION. 161 correspondent pas exactement ni même le plus souvent avec un grand développement de fièvres intermittentes ; ce qui devrait être dans l'hypothèse contraire à l'opinion que je soutiens comme vraie. 3° Pendant huit ans au moins , de 1827 à 1835 , je n’ai observé qu’un nombre peu remarquable de ces pyrexies, soit de printemps, soit d’automne; et pourtant, durant cette période , la culture du chanvre, loin de diminuer dans notre vallée, n’a fait que s’accroître , par suite du défrichement d’une vaste étendue de terrains communaux incultes jusque-là. 4° Lorsque les fièvres intermittentes ont sévi avec force dans nos campagnes, comme en 1857, 58, 59, les habi- tants des hauts pays , distants de trois ou quatre kilomè- tres au nord de l’Authion, en étaient atteints aussi bien que les habitants du rivage. »° Dans ces mêmes années, en BAIE nos regards au- delà de nos contrées, nous voyons qu'aux mêmes épo- ques , une partie de la France fut désolée par ces aflec- tions morbides , à tel point que le sulfate de quinine avait presque doublé de prix. Le rouissage sera-t-il accusé d’a- voir améné le développement de ces fièvres dans des lieux où il n’a jamais été pratiqué ? 6° Loin que l’invasion des fièvres réponde à l’époque où le chanvre est déposé dans l’eau, jai remarqué plu- sieurs fois , notamment en 1837, qu’elles prirent naissance, : - au printemps, pour continuer sans interruption jusqu’à la fin de l'automne, cesser en partie pendant l’hiver, et revenir plus nombreuses avant le milieu de 1838. Or, on sait que le rouissage ne commence que vers la fin du mois. - : d’août. 7° Il existe à deux kilomètres est de Corné , au nord et tout au voisinage de la route départementale d'Angers à Longué, un village nommé les Aulnaies , formé de plu- sieurs maisons , traversé et comme entouré d’un ruisseau FIL. 11 162 MÉMOIRES qui, dans une de ses parties, présente une très-grande largeur, Là, se fait rouir chaque année une masse énorme de chanvre, et malgré la puanteur qui s’exhale de ce foyer , et qui semble insupportable aux étrangers, les ha- bitants du village vivent aussi longtemps, offrent la même apparence de santé , el ne sont pas sujets à plus de mala- dies que les personnes éloignées de celte atmosphère. 8 J'ai vu à plusieurs reprises des étrangers: s'établir non loin du rivage de l’Authion, sans que leur santé ait éprouvé des allérations plus graves que celle des naturels du pays. 9° de traite depuis longtemps un grand nombre de per- sonnes des deux sexes qui se livrent, durantune partie de l’année , aux soins que réclame le chanvre pendant et après le rouissage , et aucun caraclère particulier ne s’est jamais manifesté à mes yeux , soit dans leur état habituel, soit dans les maladies dont elles ont été atteintes, 10° Je n'ai pas connaissance d’affections soit sporadi- ques, soit épidémiques, observées dans nos campagnes sur les animaux qui font usage, pour boisson , de l’eau de la rivière ou de ses aflluents, chargés des détrilus du chanvre. Si la pratique et l’obseryation nous font les réponses que nous venons de vous soumettre, que nous diront la science et la théorie, au sujet des émanalions considérées comme causes de maladies ? 1° Dans le rouissage du chanvre, il se dégage de l'acide carbonique, entrainant avec lui quelques nor Héulhe d'une huile essentielle , sui generis, dont l’odeur est si péné- trante. On sait que l’eau dissout l’acide carbonique en assez notable proportion; il ne peut donc s’en exhaler dans l’air que la faible quantité non absorbée par r’eau qu’il traverse. Et, pour accuser ce principe huileux, de produire seul tous les accidents qui , dit-on , résultent du rauissage , il faudrait qu'il fût prouvé ; et il est loin d’en ER ———— mms 5e DE LA TROISIÈME SECTION. 163 être ainsi, que l’activité malfaisante des émanations est en raison directe de la puissance de leur odeur, 9° Les émanations produites par les fermentations sont funestes, surtout quand l'air frappe directement les matières putrescibles, imprégnées d’humidité et de cha- leur, Ainsi, les épidémies sont plus communes en Egypte, quand le Nil se retire de la vallée, laissant après lui un limon noir et épais. Il est, au contraire, de la plus haute imporlance pour le succès du rouissage, que le chanvre, disposé par masses plus ou moins considérables , soit tout entier plongé dans l’eau , et par conséquent.soustrait au contact de Fair. ; 3° Les eflluves dont l’influence délétère agit sur la constitution de l’homme de manière à la détériorer doi- vent être persistantes, et alors, comme on le remarque dans les contrées marécageuses, les individus soumis à leur action sont faibles, lymphatiques ; sans énergie mus- culaire. Dans nos campagnes, les populations sont acti- ves , robustes , offrant tous les atiributs de la santé. Le rouissage ne s'opère qu'à des époques eirconserites cha- que année. 4° L'homme est d’autant plus insensible à l’action des émanations qu’il est plus acclimaté. Cette règle n'est-elle pas de tout point applicable aux habitants dei Benx où le rouissage s’opère ? * IL y a présomption qu’une émanation donne nais- sance à une maladie quand il y a un rapport évident en- tre ces deux phénomènes ; quand le développemment de l’un coïncide avec l’action de l’autre; quand les mêmes causes amènent avec régularité les mêmes effets; quand nulle autre influence morbide ne peut rendre compte de la maladie dbservée. Nous avons vu: qu'il n’en est point ainsi des fièvres intermiltentes dont on a voulu trouver l’origine dans le rouissage du chanvre. Sommes-nous donc; par toutes les opinions que nous 164 MÉMOIRES . avons soutenues jusqu'ici, en opposition flagrante avec tous les hommes qui font autorité dans la science, si bien qu’on pourrait justement nous taxer d’une singulière outrecuidance, nous obscur et inconnu qui viendrions saper d’un pied impuissant la base d’un édifice élevé par la croyance générale et consacré par les siècles? Nous ne sommes, Dieu merci, ni aussi téméraire , ni réduit à un isolement aussi complet. Nous avons pour nous des autorités qui nous rassurent et nous viennenl en aide, et les noms de Marc, de Parent-Duchâtelet, et le juge- ment de l’académie de médecine ne seront, j'aime à le croire, récusés par personne. M. Marc, dont tout le monde respecte le double carac- ière d’homme et de médecin, consulté sur le danger des routoirs dans quelques communes du département de la Manche, d'accord avec cinq médecins de ces mêmes communes, M. Marc conclut de l’examen des faits : « Que les routoirs n'avaient pas déterminé les maladies endémiques dont on leur attribuait l’origine, puisque là où d’autres causes locales ne viennent pas ajouter leur influence délétère , ces maladies n’existent pas. » L’académie de médecine, dans un rapport destiné à fixer Padminisiration du Mans sur les inconvénients qu’il y avait à introduire dans les fontaines publiques l’eau d’un ruisseau qui alimentait dans son cours plusieurs routoirs, est d'avis « Que les principes délétères intro- » duits dans l’eau même stagnante, par le rouissage, » n’atteignent jamais un degré de concentration tel qu’ils » puissent la rendre vénéneuse, » En 1828, lors de la discussion de la loi sur la pêche fluviaie à la chambre des Pairs , à propos de l’article 30, titre 4, destiné , disait l’exposé des motifs, « à prévenir par des peines sévères le danger généralement reconnu du rouissage pour la santé publique et la conservation du poisson, » un membre posa ce dilemme puissant et peu DE LA TROISIÈME SECTION. 165 favorable aux prétentions de l'administration des eaux et forêts : « Où la culture du chanvre n’est pas considéra- ble, elle ne saurait porler dommage à la pêche, et là où cette culture est considérable, elle constitue un intérêt supérieur à’ la pêche. La récolte du chanvre dans le Grainvaudan rapporte plusieurs millions; la pêche de F Isère ne vaut pas trente mille francs. » Qu’aurait dit de mieux un représentant des intérêts de notre agriculture? Un autre pair ajouta : « Les réclamations isolées éle- vées contre le rouissage dans l’eau des fleuves, des ri- vières et des ruisseaux, n’ont jamais pu soutenir l’exa- men... Les rivières de la Belgique, quoique peu rapides pour la plupart, contiennent une telle quantité de chan- vre que leurs eaux m'ont paru noires comme de l’encre. Les habitants interrogés n’ont jamais, disent-ils , éprouvé le moindre inconvénient de cet usage, et il n’est venu dans la pensée de personne de le changer. » M. le docteur Giraudet, médecin à Gusset (Allier), longtemps entraîné par l’autorité des maîtres et du temps, soumis aux prescriptions de la loi, tranquille avec sa conscience comme on peut l’être alors qu’on a pour soi les livres et l’assentiment général, M. Giraudet s’avisa de réfléchir, de douter, d'observer; et au bout de dix années d’études attentives , d'analyse exacte des faits journelle- ment accomplis sous ses yeux, il est arrivé à des conclu- sions toutes contraires à l’opinion universellement ad- “mise... Dans les années 1827 et 1828, la récolte du chanvre fut très faible dans l'Allier; par conséquent les principes délétères introduits par sa macération dans l’eau des rivières furent peu abondants; au contraire les fièvres intermitientes , les inflammations des voies diges- tives se montrèrent en grand nombre, En 1830 et 1851, la récolte des durée fut très abondante, il y eut peu de fièvres intermittentes, peu d’affections aiguës du ca- 166 MÉMOIRES nal intéstinal. Les 10/19‘ des fièvres observées par ce médecin ont eu leur période d’invasion à üne époque qui a précédé le dépôt du chanvre dans les routoirs. M. Gi- raudet a visité avec le plus grand soin et un grand nombre de fois les lotalités dont il parle, il a goûté, bu l’eau des routôirs , des puits qui les avoisinent , sans en avoir éprouvé aucune incommodilé, Il a vu toujours que lés ouvriers qui manipolent le chänvre dès leur enfance ne sont pas plus maladifs et atteignent un âge aussi avancé que ceux qui ne s’en occupent jamais, Aucune maladie épidémique née à l’époque du rouissage n’est venue pour lui confiriner l’opinion dés auteurs à ce sujet. Au temps où M. Giraudet, revueillant ainsi les notes dont noùs venons de présenter le résumé, ne songeait pas encore à les publier, ce qu’il à fait depuis (1), un hommeë dotit la vie fut consacrée à la science, dont la mort prématurée vint interrompre d'importants el assi- dus travaux; un homme qui brilla par sa modestie et sa bonne foi autant que par son désintéressement et son savoir, Pärent-Düchâtelet, frappé du vague et de l’incer- titudé qui règne dans les ouvrages d’hygiène publique, relativement au sujét qui nous occupe, de la fragilité de la base sur laquelle sont assises la plupart des opinions réghantes , Parent-Duchâtelet voulut reviser tant de juge- ments adoptés sans conteste, et pendant deux ans il mulliplia et varia.les expériences directes propres à ré- soudre lé problême si peu éclairé jusque-là. On peut en prendre connaissance dans les annales d'hygiène et de médecine légale , année 1832. De ces expériences il résulte pour Parent-Duchâtelet , celte conviction formelle : 1° Que les poissons peuvent vivre sans dommage dans Peau où l’on a mis rouir du chanvre (c’est l’avis de (1) Annales d'hygiène et de médecine légale, 1832, DE LA TROISIÈME SECTION. 107 plasieurs autres auteurs); que souvent, pendant l'été; lerpüisson meurt entrès grande quantité dans les rivières oùtil n’a jamais été déposé de chanvre, sans qu’on cherche alors à saisir; à expliquer la cause de cette mortalité ; KE 5° Que les animaux et les hommes peuvent boire im- punément et pendant longtemps des macérations chat gées de chanvré; 3° Que les émanations provenant du Chanvré én rouûis- âgé n’agissent pas d’une mänière nuisible Sur les ani- maux, que des hommes, des fetimes, des enfants en bas âge, des valétudinaires peuvent rester dés nuits 6n- tières au milieu de ces émanations sans eh être incom: modés el sans que les fièvres itlérmittéëntes dont cés derniers avaïent été atteints quelque +. CE soient excitées de nouveati. n]Pne faut pas perdré de vüe que Parent-Düchâtelet fit toutés sés expériences sur lui-même, sa famille tout éhtière , séé domestiques , dans des liéux elos; là où par conséquent l’air à l'état de côncenträtioii devait bien: lôt'se trouver imprégné, saturé des priticipes émanñés du chanvre en décomposition. Que serä-ce done lorsque ces _ principes , dissous en partie dans l'eau où'ils se forment; trouvént encore pour se disséminér de grandés masses d’air atmosphérique incessamment renouvelé par les cou- rants qui le traversent ? Ainsi, d’un côté des idées préconcües qüi sé trans- méttent sans examen à travers les âges; dés médeciris qui tirent des conséquénces de prémisses fausses ou iti- cümplètes ; des raisünnements sans faits qui les appuiént uñé administration qui colore la proleeliüh exclusive dont élle veut couvrir là pêche du spécieux prétéxte de la santé publique; de Pautre côté, dés faits scrupuleusement ét longuèment observés; des expériences répélées avec ün infatigable courage ; une conviction entière et ration- 168 MÉMOIRES nelle; d’un côté l'intérêt minime de la pêche dans nos rivières; de l’autre l'immense intérêt de l’agriculture dans nos vallées , le bien-être des populations , tels sont, Messieurs , les deux poids contraires qui doivent charger les plateaux de la balance. Pour nous le choix n’est pas douteux, et nous croyons être dans le vrai en concluant comme nous allons le faire : 1° Le rouissage du chanvre dans l’eau des rivières ou de leurs affluents n’a pas une action nuisible à la santé des populations voisines. 2° Les années où la récolte de cette plante textile est très abondante et les époques de l’année où le rouissage est pratiqué , ne sont pas marquées par le développement d’une quantité proportionnelle de maladies dont on puisse attribuer l’origine à cette opération. 3° Les fièvres pernicieuses sont tout aussi rares au voisinage des rouloirs que dans quelque autre localité que ce soit, et les fièvres intermittentes n’offrent rien là de particulier, ni en intensité ni en fréquence. 4° La santé des animaux n’est pas compromise par l’usage des eaux dans lesquelles a séjourné du chanvre, ou par le pacage de l’herbe imprégnée de ces eaux. 5° Il est loin d’être démontré que la chaleur n’est pas une cause aussi active de la destruction du poisson , que le rouissage. 6° Le jugement des siècles non plus que l’opinion d’un grand nombre de médecins , d’ailleurs recommandables , ne sont pas un sûr garant de la réalité des idées qui ont cours sur le sujet dont nous nous occupons; parce que les médecins, au lieu d’observer, d'interroger les faits , ont trouvé plus commode et plus expéditif de se copier les uns les autres, bien sûrs, en agissant ainsi, de ne pas mériler le reproche de se faire novateurs; parce que les siècles, indulgents pour les erreurs qui offrent au DE LA TROISIÈME SECTION. 169 moins{une apparence extérieure de probabilité, se lais- -_ sent facilement aller à cette douce paresse où trop sou- vent s’endort l’esprit de l’homme. J'ai achevé bien incomplétement, je le crains, Mes- sieurs, la tâche que je m'étais imposée. Mais je m’esti- merai assez heureux si j’ai pu faire passer dans quelques esprits la conviction profonde dont je suis animé, * RAPPORT SUR L'OUVRAGE DE M. LE Dr BERTINI, INTITULÉ : IDROLOGIA MINERALE DEGLI STATI SARDI, Par M. LE D' BALOCCHI, de Florence (Toscane). Messieurs , Je viens vous soumettre le rapport dont vous avez bien voulu me faire l’honneur de me charger, relativement à l’ouvrage de M. Bertini, intitulé : Zdrologia minerale degli stati sardi (Idrologie minérale des états sardes), ouvrage dont l'honorable auteur a fait hommage au Con- grès. Ce gros volume in-8°, est un de ces travaux qu'il n’est pas donné de résumer en peu de mots; car l’auteur, embrassant une matière si étendue, s’est attaché à rendre claire, et en même temps la plus courte possible, l’expo- sition de son sujet. Il n’y a pas là , Messieurs, de ces pa- ges inutiles dont, malheureusement, abondent la plupart des livres médicaux d’aujourd’hui , où Pon cherche plu- tôt à faire des spéculations typographiques , qu’à être uti- les aux lecteurs. M. Bertini, avec le talent qui lui est propre, a fait un travail consciencieux, érudit et utile, 170 MÉMOIRES nün séulefnent pour lés médecins auxquels il est adféssé, mais aussi aux bäigneurs , qui ÿ trouvérotit tout ce qüi peut leur être avantageux sous tous les rapports. L'idrologie minérale des états sardés est divisée en deux parties, et accompagée d’un long äppendicé, La préiièré roule sur les généralités des éaux minérales, qui sont traitées én dix chapitres, où l’on ne saurait pas dire laquelle des deux , ou l’érudition , ou la science , l’empor- tent vraiment. C’est là que le médecin peut puiser une foule de notions élaguées de futiles théories, soit sur l’a- nalyse , soit sur les différents usages qu’on peut faire des eaux minérales , et sur les règles à 6bserver, tant pour la boisson de ces eaux, que pour la grande variété de leur mode d’administration extérieure, L’auterr s'attache à cotistater les effets qui dérivent de l’emploi des eaux dif: férentes, explique leur mode d’action, et montre les avantages qu’on peut en frelirer, lorsqu'elles Sont prises seules , ou avec d’autres médieaments , qui en augmentent ou en modifient l’eflicacité. Il indique avec soin les in- convénients qui peuvent résulter de leur usage , les acci- dents qui peuvent arriver aux baigneurs et aux buveurs pendant la saison des bains, ét lés moyens appropriés pour les évitér, où pour les guérir üne fois survenus ; montre enfin les précautions nécessaires à observer pour le transport des eaux et des boues minérales ; précautions sans lesquelles leur efficacité est perdue , et auxquelles les eaux dé Sedlitz, de Selters et autres , doivent une célébrité inéritée , même transportées dans les plus lointains pays. — La division dés eaux minéralés, suivie par notre au- teür, ëst basée sut la prédoïninance de tels où tels ÿrin= cipes qui s’y trouvent, et c’est pour cela qu’il en fait 4 classés sëulement , c’est-à-dire eaux gazeuses où acidu- les, eaux salines, eaux ferrugineusés, eaux sulfüreuses ; il voudrait bieh en former une 5°, celle des eaux iodu- réësi Mais, observant qué cé principe n’ést jamais le DE LA TROISIÈME SECTION. 171 principe prépôndérant , se réserve à en indiquer la pré: sence toutes les fois qu’il s’en présentera l’occasion , et à pärler alors des circonstances spéviales dans lesquelles on peut en faire une utile application. La deuxième partie de ce travail est consacrée toute énitière à la description; à l'analyse et aux propriétés de chaque source en particulier. Si l’on considère que dans célté partie (où l’on trouve rien moins que 185 sources d'eaux minérales), on a la description de 100 sources pour le continent, et de 16 pour l'ile de Sardaigne ; on sera naturellement porté à s’attendre à üné lécture en- nuyeuse. Néanmoins , le savant auteur a si bien su mêler les rôses aux épinés , qu’on est conduit à lire avec grand plaisir ce travail qui, de prime abord , paraissait devoir être fatigant, Et qu’il me soit permis, ici, de féliciter l’au< teuf, qui, à un langäge des rives de l’Arno , a su unir des peintures si vives ; si colorées. Oui ; il a su, comme Pous- sin ét Salvator Rosa, esquisser à grands traits tous les sites charmants ou imposants, des différentes sources , de telle manière qu’en le lisant , on se croirait transporté-sur ces mêmes lieux qu’il nous a voulu faire connaître, Cette par: tie ; riche d’analyses chimiques exactes ; riche dé rensei- gnements locaux très-importants, sera consultée avec beaucoup de fruit par les médecins qui voudront faire choix des différentes circonstances nécessaires pour telle où telle maladie: Et, comme à l’auteur ne paraissait pas avoir accompli sa tâche en entier dans son appendice , il a voulu donner une rapide ; inais savante esquisse des éaux minérales ar- üficielles , montrer les avantages et les désavantages qu’on à dans ce genre de médicatioh ; comparée à la médication opérée par les éaux naturelles. Considérant; en outre, que le beau pays divisé par l’Apennin ; et environné par les Alpes et par là mér, se trouve , par sa situation topo- graphique, toujours près des eaux marines , il a donné 172 MÉMOIRES une analyse de ces eaux , a indiqué la manière de s’en ser- vir, et a expliqué en outre leur mode d’action. Passant ensuite aux autres médications , qu’on appelle aussi du nom de bains, il parle successivement du bain électrique, du bain de lumière , de celui d’air sec et comprimé , de bains de vapeur, de sable, elc.; quant aux bains faits au moyen des substances organiques , il parle rapidement des fumigations , des bains aromatiques, des bains alcooli- ques, sinapisés , d'huile, de son, d'herbes émollientes. Enfin, il ne néglige pas le règne animal , et il s’entretient des bains de lait , de sang chaud , de bouillon , des entrail- les d'animaux , d’eau de cire, etc. Voilà , Messieurs , une rapide esquisse de cet ouvrage que je voudrais voir imité dans chaque pays. Si je n’avais pas craint d’abuser de vos moments précieux , et peut-être de faire penser que j'avais un peu trop de prédilection pour un co-national, et si je n’eusse craint aussi de bles- ser la modestie de l’homme qui se trouve au milieu de vous, je vous aurais traduit quelque passage de ce livre, et certes, j'en suis sûr, votre temps n’aurait pas été perdu. Il résulte de ce grand travail : 1° Pour le géologue, que l'Italie supérieure est plus riche en eaux minérales, proportion gardée, qu’aucun autre pays, surtout pour celles iodurées, reconnues au- jourd’hui si utiles, et qu’en considérant la nature du sol duquel elles jaillissent , et le rapport des régions dans les- quelles on les trouve , on remarque que les sources ther- males se rencontrent en deux seuls points du système Alpin, où les soulèvements des époques postérieures lais- sèrent les roches primitives plus brisées et plus décompo- sées. Ainsi , les thermes de Valdieri, Vinadio , de Bonne- val, de Corwmayerw, etc., correspondent respectivement au Montoise, au Mont-Blanc, qui se trouvent sur l’axe des deux derniers soulèvements. En outre, que par ieur presque constante identité de température , on peut croire DE LA TROISIÈME SECTION. 173 à l'existence des centres communs de thermalisation et de minéralisation. 2° Pour lagriculteur, qu’on trouve dans les eaux mi- nérales un moyen facile et peu coûteux pour fertiliser les terrains, comme, du reste, a fait très-avantageusement _le professeur Ragarzoni , avec l’eau sulfureuse de Lée , et pour faire abreuver les bestiaux , lorsque, surtout, ces eaux contiennent du nitrate de soude. 3° Pour les médecins, que ceux qui cherchent à guérir leurs malades , tuto, cito et jucunde , trouveront dans les eaux minérales, non seulement des remèdes aptes à vain- cre plusieurs infirmités spéciales, mais encore qu’ils au- ront avec elles des moyens thérapeutiques non dégoûütants, ét excellents pour provoquer les sueurs , les urines, faire mouvoir le ventre, et procurer des crises impossibles aux. maladies , auxquelles beaucoup d’autres moyens énergi- ‘ques avaient été réfractaires. Mais, deux paroles encore, Messieurs, puisqu'il m'en est offert la plus belle occasion , deux mots pour repous- ser les assertions énoncées , pour ne pas dire fausses , de M. Combes, qui, dans son récent ouvrage sur la Méde- cine en France et en Italie, a dit qu’il était fâcheux qu’au “milieu de tant de richesses, il n’y eût pas dans aucune part de notre belle Péninsule , les analyses des eaux minérä- les, pas même de celles qui sont les plus célèbres. Je ne vous ennuierai pas, en vous rappelant les travaux faits en Toscane, par T'argioni , Calderini et Calami , ceux faits dans le royaume des Deux-Siciles , par les soins de PAca- démie royale des sciences de Naples; qu’il me soit permis seulement de vous montrer l’ouvrage de M. Bertini , qui, certes , à lui seul, peut donner le plus solennel démenti à l’auteur précité. 174 : MÉMOIRES RAPPORT SUR UN PROJET DE SOCIÉTÉ CENTRALE D'ÉDILITÉ, PAR M. LE Dr G. LACHÈSE, D'ANGERS, Chevalier de la Légion-d'Honneur, directeur honoraire de l'école préparatoire de médecine et de pharmacie d'Angers. Le mémoire de M. Jullien , de Paris, qui propose d’é- tablir une sociélé centrale d’édilité, dans la capitale de la France , démontre quels efforts elle aurait à faire pour obtenir d’importantes améliorations : il prouve que le seul esprit d’associalion pourrait surmonter les obstacles qui, presque Loujours, s'opposent aux innovalions les plus sa- ges et les plus utiles : il cite les sociétés d'encouragement qui ont réussi à donner, par cet ensemble social, de grands avantages à l'industrie, à l'instruction élémentaire, à la morale... Il compare Londres à Paris, et il dit combien celte première ville est supérieure à la seconde sous les rapports de la salubrité, de la santé publique, de la pro- preté, de la distribution des eaux, de la largeur des rues, de l’éclairage, du confortable intérieur des maisons, …, Il réclame l'attention des architectes sur la bonne distribu- tion des appartements, et les efforts de tous les Français généreux pour que Paris puisse jouir, en peu de temps (dix ou quinze ans au plus), de tout ce qui a été procuré à Londres par une administration municipale et une ci- vilisation plus avancées que chez nous. Il veut que cette association , avisant aux moyens de faire une ville modèle de notre capitale, ait une surveillance assidue et toujours DE LA TROISIÈME SECTION. 475 active pour faire disparaître le mauvais entretien du pa- vage , des trottoirs , du balayäge ; de l'éclairage , en ex- citant les propriétaires insoucieux, paresseux , égoïstes, vers les améliorations qui ne tarderaient pas à s'étendre, par l'influence de l'exemple; à:nos grandes et petites villes des départements. Cette édilité , qui fit honneur aux plas grands hommes de Rome, aurait un comité central, puis des sections locales pour l’assainissement des quar- tiers, pour l’hygiène publique , pour les hospices et les hopitaux, pour l'instruction primaire et populaire , pour les salles d’asile de l’enfance, pour les gymnases, etc. Ce mémoire, dont l’analyse ne peut donner une assez juste idée, est dicté par le cœur d’un citoyen qui aime et connaît bien son pays. Nous pensons qu'il mérite l’entière approbation du Congrès : nos vœux et nos efforts doivent aider la réali- Bud dés vues immenses et bienfaisantes qu'il renferme. Puisse cette association d’édililé et Les règlements qu’elle proposera, atteindre le but que nous AA désirer avec l'honorable M. Jullien, de Paris. P.S. Ce projet d’une utilité si grande pourrait , dès ce.jour, s'appliquer aux villes des départements, et je sollicite particulièrement lapostille du Gongrès pour que notre ville d'Angers en puisse jouir dans toute son éten- due: ce serait, pour elle, marquer utilement et honora- blement le séjour du savant Congrès stisntifique dans ses murs en 1843. | 1 176 MÉMOIRES MÉDECINE. MÉMOIRE RELATIF A LA 29° QUESTION DE MÉDECINE, PAR M. LE Dr B. BERTINI, DE TURIN (SARDAIGNE). DE LA STATISTIQUE MÉDICALE EN ITALIE, AVEC QUELQUES CONSI- DÉRATIONS À CE SUJET. L'accueil fraternel et les distinctions flatteuses reçues aux Congrès de Lyon , de Strasbourg et d’Angers , me font espérer que l’illustre et savante assemblée à qui j'ai l’honneur de me présenter voudra bien accorder son in- dulgence au mémoire dont je vais donner lecture. J'ai entretenu , l’année dernière , la section médicale du Congrès sur les doctrines médicales dominantes en Italie, depuis le commencement du XIX: siècle. Je me propose aujourd’hui de traiter devant vous , très honorés confrères , un point de médecine positive qui fixe, depuis quelques années, l'attention des médecins. J’entends par- ler de la statistique médicale , en me bornant à l’exposi- tion de ce qui s’est opéré en Italie , relativement à cette nouvelle méthode d’études médicales. N’allez pas croire, très honorés confrères, que ce soit par un amour municipal mal entendu que je vous entre- tienne toujours de la médecine de mon pays. Les sciences ont la patrie commune , et ne connaissent point de bar- rières géographiques. Les Congrès de France en fournis- sent une preuve éclatante en accueillant les étrangers comme des frères. Le motif qui m’a déterminé à vous DE LA TROISIÈME SECTION. 177 lire ée mémoire est celui d'entendre la discussion d’un sujet si important au sein de cette solennelle réunion de savants français, et en faire connaître les résultats à mes compatriotes , qui s’en sont occupés et qui s’en occupent encore dans leur Congrès. J’exposerai d’abord en peu de mots l’histoire de la sta- tistique médicale en Iialie. de poserai successivement quelques propositions sur la statistique, dont quelques- unes touchent de plus près la 29° question du programme de cette seclion. En parcourant l’histoire de la médecine depuis les temps les plus reculés , on reconnaît aisément qu’il y a eu à toutes les époques une tendance continuelle à établir des principes généraux, qui, ne pouvant se soutenir, ont continuellement succédé les uns aux autres. Je crois, Messieurs , que la cause de l’échouement des systêmes doit uniquement être attribuée au défaut de méthode dans l’étude et de justesse dans l’interprétalion des faits. En effet, la logique des anciens se perdait dans des contemplations abstraites , desquelles on ne pouvait tirer que des conjectures idéales et sans fondement ; elle s’oc- cupait de la théorie du syllogisme, de la nature des idées, de l’existence ou de la non-existence de celles innées; on allait même à douter de l’existence des corps. Cette logi- que faisait précéder les théories aux faits, les définitions aux exemples. Elle donnait la préférence aux objets com- pliqués sur les simples , au lieu d’enseigner les préceptes pour bien sentir, bien réfléchir, bien se rappeler, pour bien classer en ordre, pour tirer des conséquences justes, pour bien parler et bien expérimenter. Par une conséquence inévitable d’une telle méthode, ses disciples perdaicnt leur temps à construire de vaines formules dialectiques : ils se contentaient de mots: et quand ils se dédiaient à l’étude de quelque science posi- T. IE 12 178 MÉMOIRES tive, ils y portaient tous les sophismes, toute la rs qu’ils avaient appris aux écoles de logique. Celte vérité avait été bien comprise par votre illustre Bonnet, el ensuite par de Gerando, comme on peut ri dans son T'raité sur les systèmes. A la fin du XVIII: siècle, on commença à s’apercevoir de l'erreur ; les hommes adonnés à la culture des sciences moräles et physiques marchèrent par une voie plus posi- tive, c’est-à-dire par la voie des faits, C'est à cette époque où naquit la statistique , expression heureuse de la ten- dance de présque tous les savants vers le positif. Fatigués de se fier à la lumière douteuse des théories abstraites, ils allèrent à la recherche des faits, les accumulèrent, les comparèrent , les expérimentèrent de mille manières , et ils en découvrirent toutes les vérités possibles, « Cher- chons les faits, répélaient-ils avec Bonnet, voyons ce qui en résulte; voilà notre philosophie. A l'instar d’Achenwal en Allemagne, Melchior Gioia, cet immortel philosophe statistique , à le mérite d’avoir en lialie donné la première impulsion à cultiver celle science posilive , en la portant à Loute la perfection dont elle est susceptible, en traçant les meilleures règles pour rédiger les lableaux statistiques, Je vous citerai ses ou- vraues à ce sujel : La statistique des départements de l'Olona et du Lario (dans le ci-devant royaume d'Italie); les tables stutistiques ; la logique statistique ; le génie, l'extension, les avantages de la statistique ; la philoso- phie de la Statistique , et autres semblables écrits. Plus tard , le célèbre Romagnosi , le géographe Adrien Balbi, Accadri , et le professeur Padoyani , ayec leurs écrits, ont illustré les ouyrages de Gioia, et firent éclater davantage l'utilité des slalistiques. À celte époque , on fonda des chaires de statistique dans les universités italiennes ; on établit des commis- on 00 me DE LA TROISIÈME SECTION. 179 sions-spégiales pour recueillir des mhtériaux, et, äu mo- ment où j'ai l’honneur de vous adresser la parole, chaque état d'Italie fait rédiger et publier des tableaux exacts sur les différentes branches de son ane ÉMR RTN civile et judiciaire, Aussitôt que la raisiq fut mise à profit pire les éco- nomisles, la médecine s’en empara. En Jialie, dès 1597, lillustre Joseph Evouks fils du célèbre Jean-Pierre et son successeur dans la chairé de clinique à Pavie, avait publié un compte-rendu de sa cli- nique pendant le premier semestre 1795; et Panazzi ;-en 1801, publia son année clinique. Ges deux ouvrages pour- raient être considérés comme stalistiques, s'ils eugsent élé rédigés avec. une meilleure méthode. Je ne parlerai pas des travaux faits, en 18041 , par une commission des hom- mes de l’art les plus célèbres de l’époque , tels que Pa- letta, Monteggia, Giannini , Bertololi', Locatelli, à Feffet de constater l'efficacité de la vaccination, et je mention- nerai de suile le premier ouvrage de statistique médicale, qui, par la manière dont il est rédigé, mérile à juste titre le nom de statistique. J'entends parler du premier Pros. pecius clinique de l'illustre Rasori ; écrit d’après les pré- ceples statistiques tracés par Gioia dans les ouvrages que j'ai nommés, Il serait trop long d’entrer dans les détails eur les tables et sur les notes qui les accompagnent; je me bornerai à vous dire que, dans ce prospectus, il indiquait la quantité et la qualité des maladies, leurs terminaisons leur durée, la qualité et le prix des remèdes précisément d’après Ja méthode de Gioia. Rasori suivit la même marche dans son Compte-rendu des péripneumonies traitées avee le tartre émétique, en y exprimant le vœu que lapplication de l’arithmétique aux différentes espèces ét aux diverses formes des maladies, pôût un jour être prescrite avec toutes les améliorations a 180 MÉMOIRES dont elle est susceptible, pour obtenir par ce moyen des conséquences nombreuses et certaines, Brera, Thienné, Cerri, Zecchinelli, Acerbi, OEmodei, suivant l’exemple de Rasori , adoptèrent la méthode sta- tistique , soit dans les comptes-rendus de leurs cliniques, soit dans la description de la fièvre pétéchiale qui fit tant de ravages parmi nous en 1817-18. La méthode des chiffres fut aussi adoptée par Hil- denbrand dans le compte-rendu de sa clinique de Puni- versité de Pavie , pendant une période de cinq années, c’est-à-dire de 1817 à 1821. En 1821, l’illustre Tommasini fit précéder ses leçons de clinique dans l’université de Bologne d’un discours tendant à démontrer la nécessité de soumettre à une sta- tistique les faits les plus importants de la médecine pra- tique. Se conformant aux idées contenues dans cet écrit, il publia un cadre des résultats de traitement de sa cli- nique depuis 1823 jusqu’à 1828 , en ajoutant à ses ta- bleaux quelques compartiments essentiels pour y noter les maladies légères , les graves, les dangereuses , les in- curables ou mortelles , et celles qui présentaient une al- téralion organique. Par cette méthode , le professeur Tommazini simplifia les faits cliniques , et les rendit sus- ceptibles d’être rendus en unités numériques , attendu qu’ils se trouvent isolés , séparés , analogues entr’eux et différents de tous les autres. Speranza publia, en 1824 , un tableau nosographique clinique des maladies traitées à l’université ducale de Parme. Convaincu de la nécessité de ramasser des faits analo- gues pour faire avancer notre science, principalement en ce qui a rapport à la clinique, je commençai , moi aussi, en 1821, lors de la réouverture faite dans la capitale des états sardes du grand hôpital de l’ordre équestre de Saint-Maurice et Lazare, à recueillir des notions exactes DE LA TROISIÈME SECTION. _ 181 sur les maladies y traitées par moi et par mes collègues de service, et j'en ai rédigé une statistique (dont j'ai l'honneur de faire howumage à cette savante assemblée), qui embrasse presque un quart de siècle , en y compre- want celle pour 1839 et 1840 , dressée par mon confrère Bellingeri. Tels sont les fruits produits par les ouvrages de Gioia. Sur tous les points de l’Italie, on s’occupa de statistiques nosographiques, de monographies statistiques. Les gou- vernements, convaincus de la nécessité de cette manière de travaux , les aidèrent de leur appui. On ordonna la confection de tables dans Les hôpilaux civils et militaires, sous la direction de commissions spéciales, qui s’en occu- pèrent avec toute l'exactitude possible , et la bonne vo- lonté des employés eut une grande influence sur la réus- site de la chose. Pour ne pas abuser rx votre indulgence , je ne ferai pas une plus longue énumération des écrivains italiens de statistique. J’appellerai votre attention sur une nou- velle ère pour la statistique médicale italienne , qui va s’ouvrir, grâce au zèle du savant et infatigable docteur Joseph Ferrario (de Milan). Auteur de la statistique mé- dicale de Milan , depuis le XV: siècle jusqu’à nos jours, ouvrage qui a obtenu les suffrages de plusieurs corps sa- vants et. une médaille de la Société médicale de Bologne, il fut le premier à proposer, en 1839, à Pise, où se tint le premier Congrès d’Lialie (imitation heureuse de ceux de France et d'Allemagne) , un projet de statistique médi- cale générale. Il lut à ce propos un discours très érudit , "ep à prouver sa grande utilité en concluant que : « Une méthode statistique, employée avec ordre , est ca- -pable de former, dans un espace de quelques années, une statistique médicale complète , c’est-à-dire un code de médecine italien ,-français, allemand. » Cette proposition fut accueillie avec. faveur par tous 182 MÉMOIRES les mémbres présents à la section médicale , et Tomma- sini, qui la présidait, ordonna l’impression à ses frais des modèles du tableau élinico-statistique présenté par le docteur Ferrario ; afin qu'après un mûr examen et les modifications nécessaires , il füt de nouveau discuté l’an- née suivante au Congrès de Turin, pour y être adopté et généralisé au moins dans les hôpitaux d’halie: Dans la section médicale da Congrès de Turin, une commission fat nommée (dont j'ai été désigné membre) pour examiner les modèles dû docteur Ferrario. Elle ÿ apporta quelques légères modifications, et sur son rap- port favorable , la section désigna la ville de Milan , rési- dence de Ferrario , eomme point central pour l'envoi de tous les matériaux statistiques recueillis dans les hôpitaux italiens , pour ÿ être ensuite publiés sous la direction et sous la protection du gouvernement autrichien. Une matière d’une importance si grande fat remisë en question au Congrès de Florence en 1841. Une nouvelle comwission fut tiortimée , qui après de longues discus- sions soumit à la section médicale un rapport rédigé par le docteur Galderini , successeur du docteur OEmodei dans la rédaction des Annali universali di medicina ; dans ce rapport il est dit : « La statistique médicale , est cet art ou science , si l’on veut l’appeler ainsi, laquelle détermine et exprime en chiffres numériques la valeur, autant que possible exacte, des circonstances, des faits dont s'occupe la médecine pratique , ou des maladies , pour en déduire ; jusqu’au point qu'on ÿ peut parvenir, le rapport des causes qui existe entre ces circonstances et les faits mêmes. » Les statistiques doivent être divisées en statistiques générales; et en monographies statistiques, Il y a beau- coup de difficultés à vaincre et même de limpossibilité, dans la rédaction des premières, car devant tenir un compte exaët du grand nombre de rapports minutieux » DE LA TROISIÈME SECTION. 183 qui existent dâns les différents éléments d’un fait, et qu'on exprime avec des chiffres , el tous les groupes dans lesquels se réunissent les faits mêmes dans de telles sta- tistiques, n’élant pas composés d'unités : parfaitement idéntiques, il s'ensuit que les résultats fournis par la stalistique générale doivent réussir variables-et imparfaits. » On péut, malgré cela ; tirer une eonclusion en faveur . des stalistiques générales, vu qu’elles seules fournissent les matériaux pour les statistiques spéciales; en effet, elles nous indiquent quelles sont les infirmités plus com- munes qui ‘afiligent l'espèce humaine ; celles qui exigent uneétude spéciale, et cellesenfin qui ént rendu illusoires tous les essais des médecins pour en découvrir les causes et la méthode curative. 5 La monographie statistique où spéciale est la seule qui, à l’état actuel de la science, puisse être mise à exécu- tion ; celle est la seule vraiment utile, ét préférable! aux autres.-Ellé peut s’obtenir avec des procédés plus exacts et plus-rigoureux: Gelte monographie entreprend lexa- mien d’une maladie seule; la tourne et la retourne dans tous. les sens, et de chaque côté statistique ; étudié les relations qu’elle a avec les circonstances parmi les+ quelles la maladie se développe ; augmente , et finit : de la constance de certains rapports avee lesdites circon- skances , elle déduit le rapport prôbable des causes qui la ‘lie à ces dernières; elle se sert ensuite de cés données à un-but prophylactique ou thérapeutique, » On parvient à un résultat si utile en mettant en pa- rallèle successivement et une à une ; chaque circonstance de la maladie avec la maladie même pour reconnaitre : 1° combien de fois les rapports des causes se sont mani- festés constamment les mêmes et ont donné un résultat conforme; 2° quelle a été l'intensité de ces circonstan- ces; 3° par quels moyens on s’est rendu maître de la ma- ladié ; ‘par quels autres elle a été seulement modérée; 184 MEMOIRES par quels autres enfin on a empêché un plus fàächeux dé- veloppement, etc. » On peut réduire à deux les fins qu’on se propose avec une statistique médicale : découvrir les circonstances dans lesquelles une maladie se développe , et indiquer les moyens propres à la guérir. La première serait appelée statistique hygiénique, la seconde pratique. Les deux modèles de tableaux qu’on présente, auraient été des- tinés : le premier, pour marquer dans les différentes di- visions le n° d’ordre, le prénom, le nom, la demeure fixe ou accidentelle du malade; son âge , son état civil; sa condition sociale , les circonstances héréditaires de santé; les maladies précédentes; le tempérament, la complexion; les spécialités individuelles et locales qui ont des rapports avec les aliments , et les autres habitu- des et manières de vivre. » Le second tableau, destiné pour la pratique ou théra- peutique, contient le nom vulgaire de la maladie, et sa dénomination (conventionnellement } d’après le système de Cullen; les dates de la maladie, celle du traitement; les complications survenues; les secours internes , exter- nes , et diététiques employés; la terminaison par la gué- rison , par la mort , par le passage en état chronique , ou dons une autre maladie; ce second tableau contient en- core trois autres sous-divisions : 1° pour les malades qui ve veulent plus continuer le traitement; 2° pour le nom- bre des journées de traitement; 3° pour les observations nécroscopiques et autres. » Ces tableaux doivent être précédés par les renseigne- ments sur le climat, et la topographie physique du pays et par les observations météorologiques. » Le rapporteur termine son discours en faisant obser- vation qu'il est très difficile d'exécuter le travail des sta- tistiques sans la coopération des gouvernements. La discussion fut reprise l’annéc dernière à Padoue. DE LA TROISIÈME SECTION. 135 Plusieurs membres furent d’avis de ne plus retarder l'exécution de ce qui avait été décidé à Turin en 1840, ausujet de la rédaction des tableaux statistiques. Mais a prévalu l’opinion d’attendre au Congrès qui se tiendra dans ce mois même à Lucques pour une décision défini- tive, afin d’avoir ainsi l'approbation de tous les Italiens. C’est dans les termes que j’ai l’honneur de vous expo- ser que se trouve la question de la statistique médicale en Lialie. Il y a beaucoup à espérer, et même la certitude, ‘que bientôt tous les médecins de la Péninsule s’occupe- ront à recueillir des matériaux, qui envoyés et élaborés à un centre commun, ne tarderont pas à prouver avec le fait l’utilité de la statistique appliquée à la médecine. Pour ne pas abuser davantage de votre complaisance, je finis en exposant en peu de mots mes idées sur la sta- tistique, conformes en grande partie à celles exprimées par la commission du Congrès de Florence, dont je vous ai donné exprès un compte un peu plus détaillé. 1° La statistique médicale consiste dans l’exposition numérique des faits analysés d’après les divers éléments qui les composent, de l’ensemble et dü parallèle desquels on peut déduire des lois générales de probabilité morale. 2° Dans ce sens la statistique a toujours existé, puis- que depuis Hyppocrate jusqu’à nos jours on a toujours exposé des faits, avec cette différence néanmoins , que - ces faits étaient peu nombreux et isolés; que leurs élé- ments n'étaient pas bien connus; et qu’enfin les corol- laires qu’on en déduisaient ne pouvaient pas se soutenir au creuset d’une saine logique. 3° Le but de la statistique médicale est de fournir des matériaux à la philosophie médicale pour faire de bonnes inductions; sans de tels matériaux il n’existera jamais aucune valable théorie. 4° Au moment actuel il est plus utile de s’occuper des monographies statistiques ; plus tard peut-être on pourra 186 MEMOIRES obtenir des monographies générales aussitôt qu’on aura ramassé assez de faits avec les autres, | 5° Les monographies statistiques doivent s'occuper principalement des maladies plus communes et plus dan: geréuses ; et sur le traitement desquelles on n’est pas en- core Lombé parfaitement d'accord; les récherches sur les faits cliniques déjà bien connus et qui n’admettent pas de discussions sereiént en pure perte, 60 On peut donnér la forme statistique aux faits clini- ques , si on tie laisse de côté aucun de leurs éléinents: ils constituent alors de véritables unités , qu’on peut réduire à nombré. 7° Chäque fait analogue ne pouvant pourtant pas l'être à un degré tél de ne point offrir aucuné variété, il suffira que les éléments essentiels soient identiques : on peut bien sans inconténient laisser de côté les différences peu importantes, 8° Dans la rédaction d’une monographie statistico-cli- nique ôn doit avoir en vue quatre points principaux : iv les causes de la maladie; 2° ses concomitances; 3° ses conséquences ; 4° la méthode curative. g° Sion a bien rendu le contenu de ces quatre points, on peut être assuré que le travail sera d’une grande uli- lié pour faire connaître le rapport de la mn. avec son étiologie , et des remèdes avec la maladie même : deux éléments sur lesquels repose toute la science cli- nique. 10° Lorsque le lien entre les causes et la maladie, en- tre celle-ci et les remèdes est connu, la philosophie mé- dicale peut en déduire des principes fixes et constants pour prévenir les maladies; ou les éloigner lorsqu'on n’a pu les prévenir. 12° La statistique médicale offre la preuve la plas écla- tante de l'efficacité de la médecine ; mieux , qu’avec tont DE LA TROISIÈME SECTION. 187 autre argument, on peut avec elle réfuter l’opinion vul- gaire que la nature suflit pour guérir les maladies. ma92* La:statistique médicale est d’un grand secours à la statistique civile destinée à l’amélioration des peuples. 18° Elle nous découvre l’influence de certaines causes, qui garantissent la santé ou y nuisent, 14° Elle offre des données pour prédire ; presqué avec certitude, l'issue de la plupart des maladies. 15° Elle nous indique les vraies méthodes cüratives. 16° La statistique médicale enfin c’est la pierre de touché de la conduite du médecin au lit du malade, le jugement suprême ou l’arrêt des systèmes et des théoriés. 000 ANATOMIE. RAPPORT SUR UN MEMOIRE ABLATIF À L'ANATOMIE PLASTIQUE, FAIT AU NOM D'UNE COMMISSION COMPOSÉE DE MM. LES D'° GÉLY, PICCOLO ” ÉT BALOCCHI, DE PALERME (SICILE), RAPPORTEUR, . à cer 2 LE Messieurs, Le travail de M. le docteur Libaudière, qui a été soumis * à notre examen par la section de médecine, n’est point un travail scientifique , mais il renferme le développement ra- pide d’un projet qui se rattache intimement à l’üne des branches de la science de l’homme. L'auteur a entrepris de populariser les notions générales d’anatomie et de phy- siologie comparée, trop malheureusement ignorées par les gens du monde. Il signale avec force et vérité l'ignorance regrettable qu’on observe à cet égard chez certains hom- mes chargés de veiller à la sûreté ou aux intérêts de leurs semblables , et même parfois chez les artistes. Son but est de les appeler à suivre les éonférenées qu’il se propose 183 MEMOIRES d'ouvrir après la clôture de ce Congrès. Ses inoyens maté- riels, pour atteindre ce but, se trouvent dans une collec- tion complète d'anatomie plastique, du docteur Auzoux, dont tous les anatomistes remarquent l’exactitude de forme et de couleur. Ces moyens nous paraissent très- avantageux, puisqu'ils épargnent le dégoût et la fatigue attachés aux études anatomiques , et qu’ils sont sans cesse à la disposition des auditeurs. La tentative du docteur Libaudière est donc utile, et par conséquent digne d’intérêl; et nous pensons qu’il y a lieu de demander, à titre d'encouragement, la lecture de son trayail en séance générale. CHIRURGIE. RECHERCHES SUR L'EMPLOI D'UN NOUVEAU PROCÉDÉ DE SUTURE , SUR LES DIVISIONS DE L'INTESTIN ET SUR LA POSSIBILITÉ DE L'ADOSSEMENT DE CET ORGANE AVEC LUI-MÈME DANS CERTAINES BLESSURES , PAR J.-A. GÉLY, DE NANTES, DOCTEUR-MÉDECIN, CHIRURGIEN SUPPLÉANT DE L’'HÔTEL-DIEU, CHEF DES TRAVAUX ANATOMIQUES A L'ÉCOLE PRÉPARATOIRE DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE (JUIN 1842). Consilio manuque...……. Et refellere sine pertinacià et refelli sine iracun- dià parati sumus. État de la science sur ce point. Le traitement des divisions de l'intestin a été de nos jours l'objet de quelques travaux d'un grand intérêt, et cependant si lon com- DE LA TROISIÈME SECTION. 189 pare des progrès accomplis dans presque toutes les branches de la chirurgie, à ce qui a été fait de véritablement utile sur ce point, on ne tarde pas à S'apercevoir que cette question est loin d’avoir mar- ché du même pas que beaucoup d’autres. On trouve sans doute dans la rareté et dans l’excessive gravité des faits de ce genre la raison decette indifférence. Mais ces deux conditions , quelque pré- pondérantes quelles soient d’ailleurs, ne doivent point faire oublier les exemples de guérison assez nombreux qui démontrent l’heu- reuse tendance de la nature, quand elle n’est point entravée par des circonstances trop défavorables. Tous les efforts du chirurgien doi- vent donc tendre à neutraliser ces circonstances fâcheuses qui ne sont, en définitive, que des complications accidentelles , mais trop souvent funestes des divisions intestinales. it La thérapeutique chirurgicale est-elle parvenue à atteindre ce but? nous ne le pensons pas. Peut-être même serait-il permis de dire que les moyens mécaniques mis en usage pour réunir l'intestin divisé, sont en général inefficaces et dangereux. Ils nous paraissent inefficaces en ce qu'ils ne maintiennent point convenablement en contact les surfaces entre lesquelles on veut dé- terminer une adhérence. Dangereux en ce qu'ils exposent à l’épanchement des matières, et en ce que nécessitant la présence d’un corps étranger dans la plaie extérieure , ils s'opposent à sa fermeture immédiate et permet- tent l'entrée de l'air. Nous allons successivement examiner à ce point de vue les divers procédés mis en usage à différentes époques. Pour mettre de l’ordre dans cette étude, nous les considérerons successivement par rapport à chacune des méthodes générales de traitement qui peuvent être mises en usage. C’est la seu:e marche véritablement utile dans l'exposé de notions de médecine opératoire, et c'est encore celle qui permet le mieux de tracer l'histoire des progrès de la thérapeutique chirurgicale par rapport à l'entérora- phie. Tout ce qui va suivre se rapporte exclusivement aux plaies sim- ples , les pertes de substances qui succèdent à la gangrène et celles qui sont la suite des plaies d'armes à feu devant être examinées plus tard. Nous terminerons par l'exposé de nos expériences sur les ani- maux. ç Plaies simples. L'entéroraphie compte trois méthodes générales et un grand nombre de procédés qui se groupent diversement autour de cha- cune d'elles. 190 MÉMOIRES La première méthode générale est celle des anciens. Elle consiste à mettre en contact les deux surfaces saignantes de manière à obté- uir leur rénnion par le mécanisme qui préside à la guérison de toutes les plaies qui ne suppureut pas. Nous ne sayons pas, d’une manière précise, à quelle époque et par quelles mains elle fut appliquée pour la première fois sur l'homme vivant , mais son emploi dut se pré- senler naturellement à l'esprit comme simple extension de la mé- thode générale du traitémeut des plaies simples qui réclamentla suture, La seconde méthode , plus récente que la première , met en con- tact permanent la surface péritonéale du bout supérieur avee la sur- face muqueuse du bout inférieur, au moyen d'une invagination du premier dans le second, Elle porte le nom de Randhor, soniuventeur, et n.a élé appliquée qu'aux plaies complètes. La troisième méthode, dont la découverte appartient à M. Jobert, est toute moderne et doit être appelée méthode par adossement des séreuses. Il importe maintenant d'établir la valeur différentielle des trois méthodes de traitement , qui ont élé successivement précouisées, et des procédés qui s’y rattachent. La méthode ancienne , en affrontant les surfaces saignantes , pou- vait certainement procurer leur agglutination; cependant elle pré- sente des inconvénients qui n'ont dû échapper à aucun chirurgien. Le peu d'épaisseur des lèvres de la plaie , leur enroulement en de- hors , le contact du courant des matières liquides, qui tendent à se faire jour par la plaie, sont autant de circonstances défavorables surtout daus les plaies complètes. D'un autre côté, les procédés mis en usage, pour appliquer cette méthode , ne contribuèretit pas à di- minuer ses inconvénients. La suture simple ou entrecoupée, ordinairement soutenue par un tube solide introduit dans chacun des bouts de l'intestin, est à la fois le plus ancien procédé mis en usage contre les plaies inteslinales et celui que les chirurgiens ont reproduit le plus souvent avec des mo- difications nouvelles. Préconisé par les quatre maîtres dont il porte le nom, par Rogier et Théodore, blâmé par Guillaume de Salicet et Guy de Chauliac , ce procédé tomba bientôt daus un tel oubli que Duverger, qui le reproduisit au commencement du siècle dernier, crut en être l'inventeur, Une canule de Sambuc , une carte roulée, une trachée artère , furent successivement introduits dans l'intestin pour fagiliter la suture. Mais en établissant des préceptes à get égard, il ne paraît pas que les anciens aieut eu en vue les plaies complètes qu'ils regardaient comme mortelles. De nos jours, Scurpa, DE LA TROISIÈME SECTION. 4191 Sabatier, Besault , et Chopart, ont di-pts quelques modifications à son manuel. ‘Au premierabord, on ponwait sobsliléeer comme condition propre à ce dernier procédé le libre passage des matières à Lravers le tuyau central sur lequel l'intestin se resserre avec assez d'énergie pour s'apposur à tout épanchement. Mais l'expérience a prouvé et la ré- flexion fait facilement comprendre que les choses ne se passent point constamment ainsi , le tube central se ramolliteet s'affaisse, et, dans cet état, constitue dan ni un obstacle à la circulation des matières. Aussi quelques chirurgiens ; Cooper, Travers , rejetant tous corps étrangers, se bornent-ils à la suture simple. Cooper, qui dit l'avoir employée plusieurs fois, ne cite cependant que des expériences sur les animaux. Elle paraît aujourd'hui complétement abandonnée et mérite de l'être ; surtout pour les plaies eoniplètes. Cependant les expériences de Cooper ont établi qu'une plaie complète de l'intestin peut guérir, chez les chiens, sans autre moyen de réun:on que trois ou quatre points de suture. Ce fait prouve que plusieurs couditions aralormiques s’opposent , jusqu’à un cerlain poiul, à l'issue des ma- tières iutestiuales. Parmi ces conditions , il faut sans doute citer la contraction des plans charnus ei le reuversement des bords de la plaie qui en est la suite. Mais ce phénomène, si constant d’ailleurs , est précisément celui qui s'oppose à une réunion immédiate des sur- faces saignantes, et c’est en le considérant d’une manière exelusive que M. Jobert a pu dire « que Jamais peut-être on n'avait obtenu la guérison par gette méthode de réunion.» Les expériences de Cooper, cilées plus haut , prouvent cependant que cette assertion est trop absolue. On peut admettre, d’après ce qu'elles ont établi, que la consolidation s'opère alors fréquemment à l’aide de l'adhérence des deux bouts, de l'intestin aux parties. voisines, c’est-à-dire à l'aide d'une espèce de virole extérieure formée par l’épiploon, la paroi ab- dominale ou d'autres portions d’intestin. _ Les inconvénie uls de ces procédés sont fagiles à saisir, la réunion ne se ferait certainement pas toujours dans l'intervalle tre points de suture. La chute des fils pourrait donner lieu à des ulcérations dan- gcreuses ; car, bien qu'on ait démontré (1) qu'ils peuvent être diri- gés vers la cavité de l'intestin et qu'ils peuvent même séjourner pendant longtemps dans les parois sans déterminer d'accident, on pe peul douter que le contraire ne soit à craindre, Suture à surjet ou spiroide. — Suture à points passés. La suture en surjet, proposée par Guy de Chauliac, et la suture à (1) Cooper. Exp. cit, 192 MÉMOIRES points passés , mise en usage par Bertrandi, avaient l'avantage de fermer, bien plus exactement que la précélente, l'ouverture de l’in- testin ; mais la première rachetait cet avantage dans les plaies éten- dues par la multiplicité des piqûres, par l'impossibilité de retirer le fil, par les dangers qui pouvaient accompagner sa présence et sa chuté: Il faut, par contre, reconnaître que la suture à points passés avait sur la précédente une vérilable supériorité sous tous ses rap- ports. Malgré leurs défauts, ces deux espèces de suture étaient géné- ralement mises en usage, mais seulement contre les plaies incom- plètes. De nos jours encore , Béclard à proposé une modification à la suture à points passés, dans le but de faire disparaître la difficulté de l'enlèvement des fils ; tandis que M. Velpeau préconise la suture spiroïde , combinée avec le mode de renversement de M. Lambert. C'est également à ce procédé que Dupurytren s'était arrêlé en der- nier lieu (1). Suture à anse de Ledran. — Procédé de Palfin. — Procédé de Raybard, — Procédé de Lapeyronie. Dans beaucoup de procédés qui se rattachent , jusqu’à un certain point, à ceux que nous venons d'indiquer, on avait évité les dangers résultant de la persistance et de la chute des fils, en les remplaçant, pour ainsi dire, par ceux qni découlent de l’accès de l'air par la plaie de l'abdomen , maintenue ouverte, et de la présence temporaire des fils qui doivent traverser cette plaie. Ainsi les conditions les plus fâcheuses qui pèsent sur les blessés n'avaient pas été neutralisées. Tels sont la suture à anse de Ledran, le procédé de Palfin, dont celui de M. Raybard n'est qu'une variété, la modification proposée par Béclard pour la suture à points passés, et la méthode qui consiste à passer un fil dans le mésentère, que l’on rapporte à Lapeyronie. Du resté , dans toutes ces méthodes, qui ne sont applicables qu'aux plaies incomplètes, il est douteux que la guérison fût exclusivement la suite de l’agglutination des bords de la plaie. Il est plus probable qu elle était en partie effectuée à l’aide de l’adossement de l'intestin à la paroi abdominale. En maintenant l'intestin divisé derrière la plaie extérieure , toutes ces méthodes ont, en effet, l'avantage de provoquer des adhérences entre ces deux surfaces et de s'opposer ainsi à l'accès de l’air, tout en donnant un point d'appui aux lèvres de la plaie. C'est à cette heureuse disposition qu'il faut rapporter l'absence d'accidents graves, de même que c'est elle qui, dans le cas de non-agglutination , prévient les dangers de l’épanchement en as- surant l'issue des matières au-dehors. (1) Traité des plaies, t, K, p. 184. DE LA TROISIÈME SECTION. 193 Randhor, cherchant à mieux remplir les indications que présente Je traïtement des plaies complètes , tenta l'invagination du bout su- périeur das l'inférieur chez une femme atteinte de hernie avec gan- grène. L'heureux la guérison de la mort. après guérison. | | DURÉE DE LA VIE DES PLAIES. d'ordre. Premièrestin, Guérison Cinq mois et demi. expériencé uatrième jour. 6 août. Den, ort au bout expérienc nte-six heures. EE ES .. tres. Troisièmcres. Dix-neuf jours. expériencées ensemble. au SIXIÈME Jour. 14 avril. QuatrièméS- bl Deux mois. expérienceés ensemDle. | : 28 mai. | | [ Cinquièmé- Guérison Dix-huit jours. uatrième jour. 21 avril. expérience elliptique Vingt-un jours. Guérison 28 avril. sixième jour. } Sixième expérienCetes, M Mort Septième, . ommencement expérience, sain. sixième jour. Vingt-cinq jours. 27 mal. | Huitièmetion. lexpériencekmble. Neuvièmel Douze jours. Énaes RÉSUMÉ STATISTIQUE DES EXPÉRIENCES. ESPÈCE, âge ÉTAT DE SANTÉ. * 10 d'ordre. : qu'on à et force des Chiens. hevé de cour Comme s'i] & - RE ES $ Première Chienne de petite taille Très-vive expérience. âgée de six mois. et très-bien portante. uture a été — € exac lu nœ s it ns Les fl : Chienne de chasse Maigre, mal nourrie, ts « Les au fond Deuxième de moyenne taille couverte aie; il en est Morence. âgée de dix-huit mois. | de traces de coups. sement des tun: à Uni. le. Il a Nécessai. Es Chien loup mâtiné, à | deux fois celle Troisième de moyenne taille M RONNE Ono expérience. âgé de trois ans. et bien portant. FS complètes dy ement de deux nt des sérenses ement de deux ment de deux male un cercle [ternativement e de substance . Chien caniche Quatrième de moyenne taille Très-bon état de santé. experience. |Agé de Lrois à quatre ans. | ne i ass Cinquième | eme dede | fat de sé expérience. | âgée de quatre ans. assez médiocre. . Chien épagneul 1 Vis de grande race En très-bon état de santé. pncrence. âgé de quatre à cinq ans. Septième Fe épagnen | 1 e grande taille En très-bon état de santé. périence. âgé de deux à trois ans. |- Huitième Petit Chien £ expérience. âgé de quatre ans. En bon état de santé. DURÉE D DATE AE DURÉE DE LA VIE INDICATION DU NOMBRE ET DE L'ÉTENDUE DES PLAIES. de de la guérison l'opération. de l'opération. ou dela mort après guérison. Section complète et transversale de l'intestin. . Opération Ft Guérison Cinq mois et demi. facile et prompte. au quatrième jour. 6 août. Opération longue, Section complète et transversale de l'intestin. la suture fut manquée 24 mars Mort au bout etrecommencée. d de trente-six heures. | Une ph longitudinale de quatre centimètres. Une plaie transversale de deux centimètres. Opération facile i j Deux perforations avec perte de substance adossées ensemble. bien nt peu longue. FRemas: UNE Que de RIRE (Ouverture du larynx ). L C Une plaie spiroïde de quatre centimètres, Opérati : : e f . Opération Guérison Deux mois. Deux perforations avec perte de substance adossées ensemble. facile et prompte. 28 mars. au quatrième jour. 98 mai. Section complète transversale du tube, Opération très-facile : Guérison Dix-huit jours. Plaie oblique de quinze millimètres. et très-prompte. 3 avril. au quatrième jour. 21 avril. ——_—_—— Vingt-un jours. Grande perte de substance incomplète et elliptique 28 avril. traitée par l'inflexion de l'intestin. Plaie longitudinale de trois centimètres. Opération très-longue 7 avril Guérison et très-difficile. Le au sixième jour. ———————————— Chien de chasse de grande taille âgé de trois à quatre aus. ; En bon état de santé. Section complète et oblique. ee : , Mort Plaie longitudinale de deux centimètres. : Ont pe 17 avril. au commencement Une perte de substance adossée à un point sain. du sixième jour. ——————— Guérison Vangt-cinq jours. au quatrième jour. 27 mai. Une perte de substance traitée par inflexion. . Opération ARE Deux plaies longitudinales adossées ensemble. facile et prompte. r : ï À Gucrison Douze jours. Une plaie longitudinale adossée à un point sain, 1 Opération facile. 4 juin. au quatrième jour. 16 Ait CN HA Lit}, Charpentier, Nantes Nantes Lith. Charpentier à RE NW SERRE U Ÿ »] ! SX PIN (A1, SN [A 5e | VALLE 773 NT LE Zith. Charpentier, Nantes. AG f, KEANE n f; X n: Ÿ $ ÿ È ë à à lig 10. — ue Fig 7 Zik. Charpentier, lantere lg Lig 10 mure LRAMINEZ Bass lanket Jilk. Charpentier DE LA TROISIÈME SECTION. 237 . Eig. 4. Application de la suture en piqué à l'adossement des deux bouts de l’intestin dans le cas de gangrène, suite de hernie. La su- ture représenterait alors une ligne droite comme dans la figure 6. 10 Fig. 5, 6, 7. Dispositions diversés qu’on pourrait dovner à ce "genre d’adossement , toujours dans le but de favoriser l’application ultérieure de l’entérotome de Dupuytren. Fig. 8, 9. Procédé spécial, à laide duquel nous avons adossé une plaie longitudinale contre une partie saine du tube. Ce procédé donne un adossement presque aussi exact que la suture en piqué. Il est d'une exécution plus prompte. Les deux figures représentent la disposition des fils dans la cavité intestinale. La figure 8, du côté de l’anse blessée, dont la plaie est indiquée par une ligne longitudi- nale ; la figure 9, du côté de l’anse saine. Fig. 10. Autre procédé plus simple, mais moins sûr, qui pourrait être employé dans le même cas que le précédent. MÉMOIRES DE LA QUATRIÈME SECTION. Histoire et Archéologie. HISTOIRE. MÉMOIRE SUR LA QUATRIÈME QUESTION DU PROGRAMME, AINSI CONÇUE : «Existait-il des défenseurs des cités avant leur institution légale? » Dans le cas d’affirmative, à quelle époque peut-on faire remonter »leur établissement? » Par M. H. LAMBRON DE LIGNIM (de Tours), Capitaine de cavalerie, membre de plusieurs sociétés savantes, et du collége héraïdique de France. APERÇU HISTORIQUE SUR LE DROIT MUNICIPAL EN TOURAINE, DEPUIS LES GAULOIS JUSQU'AU RÈGNE DE HUGUES CAPRT (987). CHAPITRE Ier. ÉPOQUE GAULOISE ET GALLO-ROMAINE. Parmi les institutions qui nous ont été léguées par le moyen-âge et dont l’heureuse influence a contribué, le plus puissamment , à répandre en France les germes pré- MÉMOIRES DE LA QUATRIÈME SECTION. 239 cieux de la civilisation , se place, en première ligne , l’é- tablissement des communes. On fait remonter assez gé- néralement à la fin du XI° siècle la création , ou plutôt le renouvellement de cet ordre de choses. Philippe 1° du nom, et Louis VI , dit le Gros, son fils, furent les pre- miers de nos rois qui eurent, dit-on, l’heureuse idée d'entreprendre cette émancipation sociale, Nous discu- terons plus tard , à l’époque du règne de Louis VI, la juste part qui doit lui revenir dans cette restauration na- tionale. Toutefois, malgré l'intérêt si naturel qui s’atta- che à cette œuvre de haute politique , les actives recher- ches des historiens ne peuvent , qu’imparfaitement , dissiper l'obscurité profonde qui entoure ces premiers temps de notre régénération civile. Tant d'événements, de toutes sortes, ont contribué à la dispersion des titres de nos cités, qu’il serait très dificile, pour ne pas dire ‘impossible , de traiter, d’une manière complète Phis- toire municipale de l’une d’elles. Ge n’est donc que par un concours et un ensemble de travaux partiels , entre- : pris dans diverses localités, que l’on pourra parvenir à réédifier ce vaste monument, ce précieux palladium de nos antiques libertés. Ces recherches historiques , que nous entreprenons sur le droit municipal en Touraine , ne seront pas sans intérêt pour les provinces qui l’avoisinent. Leur sort, sous la _ domination romaine, dut avoir beaucoup de similitude, Plus tard, au moyen-âge, les comtes d'Anjou possédè- rent une partie de la Touraine. Enfin, comme pour ci- menter une union plus intime entre elles , la création des intendances dans le royaume vint les réunir en une seule et même famille sous la dénomination de Généralité des provinces de Touraine , Anjou et le Maine. Nous trouvons aussi dans les Commentaires (1) de (1) J. César, Commentarii de Bella Gallico , lib, VIE, cap, 15. 240 MÉMOIRES César les premiers indices des libertés qui furent le par- tage de nos pères. Ge grand capitaine nous apprend que le système électoral était en vigueur dans les Gaules. Il cite plusieurs assemblées convoquées pour délibérer sur les affaires publiques. Soumise à la domination du peuple- roi après des combats qui ne furent pas sans gloire pour ses habitants , Tours obtint du vainqueur de conserver ses antiques privilèges dont le plus important, à nos yeux, était celui d’élire les magistrats auxquels la con- fiance générale imposait la direction des affaires de la cité. Nous voyons également dans Suetone que la plupart des villes de la Gaule Celtique appartenaient à la classe qu'on appelait Fectigales, c’est-à-dire soumises à l’im- pôt; Tours devait présumablement partager le sort com- mun, acquitter le tribut auquel elle était taxée et se gouverner selon ses lois particulières. L'empereur Adrien étant venu dans les Gaules , vers la 117° année de l’ère chrétienne , fut touché des mal- heurs des Gaulois et se plut à soulager leurs maux (1). Îl accorda de nombreuses immunités à ce peuple infor- tuné, et les soins qu’il donna aux diverses parties de l’ad- ministration renouvelèrent , en quelque sorte , la face de VÉtat. Pour transmettre à la postérité le souvenir de cette heureuse époque, on frappa des médailles et des monnaies sur lesquelles on voit Adrien relevant la Gaule agenouillée à ses pieds , avec celte exergue : Restitutori ou Conservationi Galliæ. Ce fut vers la même époque que ce prince confirma à la cité des Tourangeaux le titre de ville libre (2). Plus- tard, en 415, elle devint la métropole de la troisième (1) Mémoires de Touraine ; dom Housseau, carton n0 XXIV, bibliothèque royale de Paris. Manuscrits, (2) Idem. DE LA QUATRIÈME SECTION. 241 Lyonnaise. Ge n’était pas seulement un titre d'honneur, mais encorc de juridiction , car cela lui procurait des prérogatives qui la distinguaient des autres villes de la ‘troisième province. Le cartulaire de l’abbaye royale de Saint-Martin de Tours, connu sous le nom de Pancarte- ‘Noire (1), fait foi qu’elle avait une basilique ornée de colonnes et dé portiques, et si bien disposée auprès de la place publique , qu’elle servait tout à la fois de prétoire pour la justice des officiers municipaux et de bourse pour le commerce. Gest ce genre d’édifice que les Gaulois ap- pelaient des salles. Tours possédait également un amphi- théâtre pour les jeux, les combats et les autres specta- cles; des bains publics , et un Soie où l’on PSE - les lettres. Les Romains, après leurs conquêtes, établirent dans les principales villes des Gaules, un gouvernement dont | la forme était aristocratique. Chacune de ces cités avait un sénat qui formait l’ordre politique. Depuis l’époque où Tours fut déclarée ville libre elle eut son sénat et ses lois. On: distinguait trois ordres ou classes d'habitants » non compris les serfs qui étaient, en ‘ quelque sorte, hors de la société. : : La première classe était composée des familles sénato- riales où patriciennes , originaires du pays ou issues de sénateurs romains (2). Elles jouissaient des privilèges les plus étendus , mais cependant n'étaient point exemples de impôt foncier, ni des charges extraordinaires. La seconde classe se rattachait à la première par beau- coup de liens. Elle était formée des ciloyens qui possé- daient, en toute propriété , des biens fonds situés dans le territoire de leur cité et qui appartenaient à des familles distinguées. C'était proprement l’ordre des Curiales. La (1) Carta Nigra. (2) Même ouvrage. T. IL 16 242 MÉMOIRES première condition et la plus essentielle pour faire partie de la curie, était que l'habitant de la cité possédät un domaine de 25 journaux , qu'il n'avait pas le droit d’a- liéner s’il voulait conserver son titre d’électeur ; ils pos- sédaient donc le droit de suffrage, votaient pour l’élec- tion des magistrats et des agents municipaux qui élaient pris dans leur ordre et formaient dans chaque ville un sénat inférieur. : La troisième classe était formée des citoyens qui ti- raient leurs moyens d’existence d’un art, ou de la pro- fession mécanique qu'ils exercaient. Les artisans qui en faisaient partie étaient divisés en corps d'arts et métiers qu’on appelait colléges , collegia opifieum. Ils prenaient part au règlement de la police de leur corps, mais il ne paraît pas qu’ils eussent d’autres droits en matière d’ad- ministration municipale. Quant à l’organisation intérieure de la ville, elle se di- visait en curies. Les curies étaient, à peu de choses près, ce qu'ont été les paroisses dans les villes jasqu’en 1789. ‘Chaque curie obéissait à un certain nombre de décurions, La réunion de tous ces décurions formait une assemblée qu’on appelait le sénat ; il ayait, comme celui de Rome, ses consuls qu’on nommait duumvirs et ses tribuns ou défenseurs de la cité. Les duumvirs avaient dans leurs me he a la con- naissance des causes qui concernaient les tutelles, testa- ments et autres acles de même nature. Ils jouissaient dans la ville de Tours des mêmes honneurs que les con- suls à Rome; ils étaient revêtus de robe de pourpre, lorsqu'ils marchaient en public, et l’on portait devant eux deux faisceaux comme marque de leur dignité. Les défenseurs de la cité étaient à peu près ce que sont nos maires. Ils avaient la même autorité dans la vilie de Tours et les mêmes fonctions que les tribuns à Rome; on leur altribua même depuis ce titre d’honneur qui était ! DE LA QUATRIÈME SECTION. 243 encore en usage du temps de Grégoire de Tours (1). Ge magistrat ne pouvait. être tiré de l’ordre des décurions parce qui ’il était, , pour ainsi dire , le père, l'avocat du peuple; dans les Gaules , comme à Rome, il devait être choisi dans la classe plébéienne. Sa charge le placait im. médiatement après les duumvirs, dont il se distinguait par les appariteurs dont il était précédé au lieu de he: teurs. Ces tribuns étaient choisis parmi les plus considé- rables du peuple; ils prenaient soin de la police, taxaient les denrées ; jugeaient les causes du menu peuple et des gens de la campagne, apaisaient les séditions,, autori- saient les testaments à donations , et autres acles, de, leur juridiétion. Indépendamment de cette organisation municipale, il existait encore des assemblées provinciales, dont l’origine, se perdait dans la nuit des siècles (2). C’érait l’ordre des décurions qui possédait le privilège de représenter les ci- tés dans ces réunions solennelles. __ La troisième Lyonnaise avait son vicaire qui SEC" à Tours, et son président, privilèse qui lui était commun avec dix provinces des Gaules (3). Elle avait aussi deux préfets dont les résidences étaient fixées au Mans el à Rennes. Il n’y avait dans toutes les, Lyonnaises qu’un in- tendant des héros et un procureur, de la monnaie, Tek élait l’état connu de nos contrées. On voit bien dans, l'empire des ducs, ou comtes provinciaux , des maîtres, del la milice , des proconsuls ou préteurs y , mais, on ignore les, villes où ils faisaient leur. résidence. Dans le système d’ administration adopté pag les, Cao lois , où chaque pouvoir émanait de l’urne électorale, les, droits civils se confondaient avec les droits religieux (4). (1) Grégoire de Tours, Æistoire des Francs, Liv. VII, ch. 23. (2) De Bello Gallico, lib. VIL, cap. 15. (3) Dom Housseau déja cité , même carton. (4) Greg. Turon. de Mirac. 3. Martini, cap. 3. 244 MÉMOIRES Nous ne pouvons passer sous silence le droit que possé- daient les habitants de Tours, de prendre part à lélec- tion des évêques de cette ville. Ge fut le peuple qui forca, en quelque façon , saint Martin à accepter le gouverne- ment de l'église de Tours, en 571; il donna également son assentiment à l'élection de saint Brice, en 4oo (1). Enfin, sous le gouvernement des rois de la première race (2), nous aurons l’occasion de signaler de nouveau l'existence de ce droit important, qui ne fut retiré au peuple , d’une manière officielle, qu’au concile de Saint- Jean-de-Latran, tenu en 1215, dans la ville de Rome. Tels sont les seuls renseignements qu’il nous a été possible de puiser aux sources historiques, malgré les pa- tientes investigations auxquelles nous nous sommes livré. Les documents relatifs à cette époque de notre histoire particulière , sont tellement indéterminés, qu’on ne peut, en quelque sorte, juger que par induction. Grégoire de Tours, dans son récit de la construction de la première église de cette ville, nous fait connaître qu’elle fut bâtie sur l'emplacement de la maison d’un sénateur. Celle cir- constance vient à l’appui de ce que nous avons dit pré- cédemment sur l’organisation municipale dans les Gaules, et prouve qu'après leur soumission, les habitants de Tours avaient adopté le système d’administration de leurs vainqueurs. L’on sait qu'il entrait dans la politique des Romains de respecter momentanément les usages et les lois des peuples qu’ils avaient soumis , afin de ne pas les effrayer par une trop brusque transition dans leur exis- tence habituelle; ils abandonnaient , au temps et à la ci- vilisation, ces deux puissants auxiliaires, le soin de faire naître chez ces peuples le désir d'adopter leurs propres coutumes. Nous ignorons l’époque précise de ce grand (1) Greg. Turon. de Mirac. S. Martini, cap. 3. (2) Hist, Fran,, lib. IT, cap. 1. DE LA QUATRIÈME SECTION. 245 changement politique chez les Gaulois, mais il est incon- testable que la loi romaine devint le droit commun dans ‘ presque toutes les provinces des Gaules , et qu’il ne resta plus que les coutumes et les usages entièrement particu- liers à celte nation qui furent conservés. Nous devons aussi faire remarquer que la langue latine était la langue vulgaire du pays au IVe siècle, et que les sciences y étaient parvenues alors à un tel degré de splendeur, que depuis cette époque, elles ne firent plus que décliner jusqu’au règne de Charlemagne. CHAPITRE II. ÉPOQUE MÉROVINGIENNE: Après avoir péniblement glané dans les anciens histo- riens, quelques documents rares et incomplets sur les mœurs, usages et coutumes des Gaulois , sous la domina- tion romaine, nous sommes heureux de trouver un champ plus fécond , une source plus abondante dans les récits pleins d’intérêt que nous offre Grégoire de Tours. Sous la plume naïve, quelquefois même un peu crédule de ce saint évêque , nommé à'juste titre le père de l’histoire de France, nous voyons naître et se développer graduelle- lement, sous nos yeux, les premiers éléments de nos vieilles libertés municipales , plus vieilles elles-mêmes que la monarchie française. Les faits qu'il produit à la lu- mière sont groupés avec un tel art, qu’ils se prêtent un mutuel appui, et prennent un nouveau degré d’authen- ticité par les preuves nombreuses dont il les accompa- gne. Enfin , il ne laisse aux écrivains, qui veulent traiter celle parlie intéressante de notre droit commun, sous les rois de la première race, que le soin de le lire et le regret de le traduire si imparfaitement. Il n’est pas de ville en France qui puisse se glorifier, avec plus de raison, de l’antiquité de ses privilèges, que 246 MÉMOIRES la ville de Tours (1). Elle obtint les premières faveurs de nos rois, même avant dé leur êire soumise. Clovis, roi dés Fräncs ; marchant à la tête de son armée, contre les Visigoths, qui étaient alors maîtres d’une partie dé la Tourainé, rendit le premier édit qui soit connu dans no- tre histoire, en faveur des habitants de ce pays. 1l n’ac- corda à sés soldats que l’eau des rivières et l’usage de l'herbe dans les Champs aux environs de la ville, pou la nourriture de leurs chevaux. Il fit exécuter cet édit avéc tant de rigueur, qu’il punit dé mort un dé ses cavaliérs, pour avoir pris du foin à un villageois du pays, qui était veau lui en porter sa plainte. Après avoir träité aussi favorablement les habitants de Tours, avant que cette ville ne füt sous sa domination, on ne peut douter que ce prince ne lui ait accordé de. grands privilèges , lorsqu’il fut de retour dé son expédi- ES d'Aquitaine, et qu'il eut réuni la Touraine à sa éouronne (2). Ce fait nous paraît clairement démontré par l événement qui se passa sous le règne de Clotaire [*, l’un de ses enfants. Ge prince ayant Mr l’ordre à ses officiers de dresser des rôles de contribution , pour lous les pays de sa domination, el-les habitants de Tours, y ayant été compris, obtinrent du roi , sur leurs réclama- tions, et après un mûr examen, d’en être exemptés en vertu des privilèges qui leur avaient été concédés, et pour que pareille erreur ne püt se comméttre de nouveau , le roi fit brûler cés rôlés en sa présence, afin qu’on ne pût s’en servir contre eux à l’avenir. Grégoire de Tours nous apprend également, dans son histoire des Français, qu'après la mort de Glotaire Ier (561), la Touraine échut en partage , à Caribert , son fils ainé, Les habitants de cette province, firent serment de (1) Dom Housseau déjà cité , carton n° XXIV. (2) Grég. Turon. Hist. Fra, lib, IX, cap. 30, DE LA QUATMÈME SECTION. 247 fidélité à ce prince qui , de son côté (1), leur promit sous la foi du serment , de ne leur imposer aucunes nouvelles lois, ni coutumes , et de les laisser ] jouir du même état dub lequel ils avaient vécu sous le règne de son père. Nous trouvons dans ce passage une preuve certaine que les peuples dé Touraine , sous les rois de la première race, possédaient leurs lois municipales et leurs coutu= mes particulières. En s’établissant dans les Gaules, où le droit municipal était adopté, les Francs en avaient conservé tout ce qui pouvait s’allier avec le droit de conquête. Onconçoit alors aisément que cet ordre de choses, ayant été suivi de siècle en siècle, eût en sa fa-- veus la sanction du temps, et que le roi Garibert se soit cru engagé envers les citoyens de Tours, à les laisser vivre selon leurs anciens usages ét dans toutes leurs fran: chisés. Quelque césips après , Gaïson , comte de Tobrs; ayant entrepris de lever des contributions sur les häbitants de cette ville, Pévêque Eufrona fut trouver cet officier et l’empêcha d’achever son recouvrement. L'affaire fut in- strüuite devant le tribunal du prince, et Garibert, agissant en cette circonstance de la même manière que Clotaire , fit jeter les rôles au feu, en déclarant qu’il ne voulait pas que les habitants de Tours payassent dorénavant au- cuns droits à sa couronne. | (566) Sigebert , après avoir succédé à Caribert, son frère, en usa de la même manière que lui; il n’exigea aucun tribut des habitants de Tours et lès maintint dans la jouissance de leurs exemptions. (579) Childebert , fils aîné de Sigebert , régna 15 ans sans rien exiger des mêmes LB 5 mais En 989, étant alors dans la 14° année de son règne, il envoya dans ses états Florentin, son grand maître d’hôtel , et (1) Greg. Turon. Hist. Fran., Mb, IX, cap. 30. 248 MÉMOIRES d Romnulfe ou Romulf, comte de son palais, pour faire rentrer dans son trésor les tributs qui lui étaient dus de- puis la mort de son père (1). Les commissaires , après avoir terminé leur recouvrement dans le Poitou , s’en vin- rent à Tours, pour percevoir les mêmes contributions, mais Grégoire, accompagné des principaux habitants de la ville, remontra qu’ils étaient exempts et ne devaient aucun droit. | Les commissaires ayant exhibé un rôle où les habitants de Tours étaient inscrits, l’évêque soutint hardiment que cet état n’avait point été pris dans le charirier du roi, eL par conséquent qu’ils n'étaient point obligés de le recon- naître. Dans cette occurrence , les commissaires et les habitants furent obligés d’envoyer des députés au roi pour connäître sa volonté, Grégoire rapporte qu'aussitôt leur arrivée à la cour, les députés obtinrent des lettres- patentes du roi, par lesquelles il était ordonné, qu’en mémoire de saint Martin , les habitants de Tours ne se- raient plus employés dans aucuns rôles de contributions. (628) Le roi Dagobert I se montra également très favorable aux Tourangeaux. Il combla de ses dons lé- glise de Saint-Martin, et la.fit décorer avec beaucoup de splendeur. Il fit exécuter, à ses dépens , par saint Eloy, évêque de Noyon, une châsse magnifique, dans laquelle il fit renfermer le corps de saint Martin. Il confirma tous les privilèges qui avaient été accordés aux habitants de Tours, par les rois ses prédécesseurs, et, par une conces- sion particulière , il accorda à l’église de Tours tous les revenus de la ville, ainsi qu’à ses évêques le droit de nommer, à l'avenir, tous les comtes ou gouverneurs, pré- rogalive dont il paraît qu’ils n’ont joui que sous quelques rois de la première race. Grégoire nous a conservé un exemple de l'exercice d’un semblable privilège, sous (1) Greg. Turon. Hist. Fran,, lib, IX, cap. 30. -DE LA QUATRIÈME SECTION. 249 Chilpéric ; lorsque l’évêque et les habitants de Tours élu- rent eux-mêmes leur comte : Data nobis et populo optio- ne, Eunomius in comitatum eligitur (1). Un pareil droit s’exerça dans le Maine par suite d’une concession faite, en 698, par Ghildeberi II, dans laquelle il déclara que les habitants du pays du Mans n’obéiraient qu’au duc, ou au comte , élu par l’évêque et les citoyens, Nous avons cité, sous la période gallo-romaine , plu- sieurs élections d’évêques auxquelles le peuple de Tours avait concouru; cet.usage s'était conservé sous l’admi- nistration des rois francs. Eufrona appelé au gouverne- ment de l’église de Tours , en 556; fut élu avecile con- cours des habitants de cette ville; le choix de saint Grégoire, pour le même siége , en 572, se fit du consen- tement unanime du clergé, de la noblesse et du peuple, tant de la ville que de la campagne (2). L’exereice de ce droit ressortait du principe proclamé par le pape Léon I, qui disait : Tous doivent concourir à l’élection de celui à qui tous doivent obéir (3).- Les chartes qui constatent à la fois la souveraine puis- sance de nos rois et les libertés des peuples de la Tou- raine , disparaissent en même temps que la monarchie mérovingienne, car, quel rapport peut avoir avec la ma- jesté du gouvernement royal, le passage sur le trône de . France, de ces princes que l’histoire à justement flétris du nom de rois fainéants. Leurs noms, stygmatisés par la honte, n’occupent une place dans nos annales, que pour rappeler aux siècles futurs tout le mépris qui s’at- tache à la némoire de ces princes impuissants qui, satis- faits de porter un vain titre attaché à la royauté , aban- dounaient l’exercice de celte sublime magistrature et dé- (1) Greg. Turon., lib. V, cap. 17. | (2) Greg. Turon. Hist. Fran., lib. LV, cap. 15. (3) Vita Greg, Turon. Ruinart. < 250 MÉMOIRES posaient lâéhement les rênes de l'Etat dans les mains du mairé du palais. | Agathias nôus offre dans sés écrits une péinturé des Fihbsi! qui uôus semble si honorable pour ces LÉ j que nous nous émpréssons de là reproduire (1) : « Les Francs, nous dit cet historien, ont adopté la » plus grandé parlié du gouverñement romain; ils sont » Mégis par les mêmes lois; ils contractent et se marienñt à » la manière des Romains, dont ils ont aussi adopté la re- » digion , car tous les Francs sont chrétiens. Ils ont dans » leurs villes dés magistrats , des évêques. Ils ne diffèrent v en rien des Rénmibs: , que par leurs habits et leurs lan- » gages, » De l’ensemble de tous ces documents , nous tirons la conséquence que jusqu’à la fin du règne de Gharlemagne, l’adiinistration municipale de la plupart des villes de la France fut, en partie, une reproduction de celle des Romains. Mais lorsque la mort, en frappant ce grand homme, fit passer le vaste héritage qu'avait conquis sa formidable épée, dans les mains débiles de ses impuissants succésseufs , la civilisation momentanée que le génie de ce héros avait fait naître, disparut avec lui, À partir de cet instant, la France retombe dans la plus déplorable anarchié; la force brutale se substitue violemment au droit et à la justice, et le pouvoir féodal, élevant sa tête altière, commence son régne d’oppression et de terreur, CHAPITRE IH. ÉPOQUE CARLOVINGIENNE: - Les monuments historiques qui pourraient transmettre à la postérité les actes de la munificence des rois, dès la seconde race , en faveur des habitants de la Touraine , ne (1) Agathias de bello Goth., Gb. TL, cap. #4, cité par M. Ray- nouard, Histoire du droit municipal èn France, %, T, p.268. DE LA QUATRIÈME SECTION. 251 sont parvenus jusqu'à nous qu'én très petit nombre. Mäis un règne aussi glorieux que celui de Charlemagne, réhfermé en lui séul'assez d’œüvres nobles et grandes, - pour illüstrér toute une dynastie. I éxiste , À la date de 804 , c’est-à-dire sous les der: nièrés années du règne de Charlémagne , ui monument précieux (1), qui démontre que lés formes du droit muni- cipal; établiés par les lois romaines , continuaiént d’être observées dans le IX° siècle : « Devant lé vénérablé Wil- »fréd, défenseur, ét toute la curie d'Angers, Agambeñt a »dit : Jé vous prie, honorable défenséur, et vous, officiers » publics, d’ordonner qu’on m’ouvre les registres , jé de- » mandé l'insertion aux actes municipaux 6). » Fils dégénéré d’un héros, Louis [®, surnommé le Dé- bonnaire, succède à Charlemagne, et, dans les actes de son règne, nous offre quelques titres qui le signalent à la D LR des Tourangeaux. En PR 814 ,ilfit don à l'église de Tours de Ja ville de Tours-sur-Marne, ‘ avec son elle et ses dépendances. En 816, il confirma à l'abbaye + de Saint-Martin la possession de tous les biens’ qui lui avaient été donnés. Il mit aussi à exécution le pro- jet, concu par Charlemagne , de construire des levées pour contenir dans leur Fi les eaux de la Loire , et, par ce 5 wrand ouvrage, il rendit un service imporlant aux pro- vinces que baigne ce fleuve, si inconstant dans son cours. En. parvenant à la couronne, il avait divisé ses états en dix départements, qu’on appelait Missatica. La Touraine, qui comprenait l’Anjou et le Maine , forma le huitième Missaticum (5); on nommait ainsi le pays soumis à l’au- . torité des Miss dominici, et nous trouvons , dans cette institution , l’origine des intendants et des généralités. (1) Mariine. Vet. scrip. amplis. coll., col, 58 et 59. (2) M. Raynouard , Histoire du Droit municipal, p. 328.et sniv. (3) Chalmel, Histoire de Tours, t, 1, p. 242. 252 MÉMOIRES On doit encore à ce prince le rétablissement de la liberté : des élections pour les évèchés. En 822, il publia un ca- pitulaire dont l’article 2 autorise non-seulement le clergé, la noblesse et le peuple , mais encore les évêques de la province ecclésiastique à donner leurs suffrages ; c’est sans doute depuis ce temps qu’ils furent nommés suffra- gants des métropolitains, titre qu’ils ont conservé même après l’époque où ils cessèrent de prendre part aux élec- tions des archevêques. Sous ce prince , trop faible pour maintenir ses droits, commencèrent les premières entreprises des grands vas- saux pour se rendre indépendants. Avec un courage plus iwâle, un caractère plus ferme, Louis-le-Débonnaire eût occupé une place distinguée parmi nos souverains , mais sa pusillanimilé sans Mes le place au dernier rang (1), Trop occupé de la réforme de son église et trop peu du gouvernement de ses états , il s’attira la haine du clergé el perdit l’estime de ses sujets. Ge prince mourut le 25 juin 840. . Charles-le-Chauve, comme ses prédécesseurs, confirma les immunités qui avaient été accordées à l’abbaye de Saint-Martin , et, pour favoriser l’agrandissement du bourg , qui s’était insensiblement formé auprès de son église , lui accorda par ses lettres , en date du 26 avril 862, des priviléges semblables à ceux qu'avait obtenus la ville de Tours : il exempta le bourg de Châteauneuf de tous les droits que ses officiers pouvaient prétendre sur le vin et les autres denrées qui s’y vendraient , pendant que lui ou ses successeurs séjourneraient à Tours. Il ac- corda une pareille exemption aux habitants du faubourg Saint - Pierre - Puellier , dépendant du chapitre Saint- Martin. Sous l’administration de ce prince, en 871, la nomina- (1) Henault, in-80, p. 30. DE LA QUATRIÈME SECTION. 253 tionf au siége archiépiscopal de Tours , faite en faveur d’Actard , fut le résultat d’une élection à laquelle con- courut le peuple de cette ville (1). Sous son règne, les Normands, dont rien n’arrélait les incursions , se répandirent à plusieurs reprises dans la Touraine où ils portèrent le pillage et l'incendie. Les: grands du royaume , comptant sur la faiblesse de ce prince, rendirent héréditaires dans leur maison les char- ges qu'avant lui ils n’avaient possédées que pendant leur vie. à Le roi Louis IL, surnommé le Bègue, fils et successeur de Charles-lé-Chauve , vint en Touraine, en 878, pour défendre cette province contre les Normands qui la me- naçaient. À peine arrivé à Tours, il tomba si dangereuse- ment malade qu’on désespéra de sa vie. Gependant il recouvra la santé, si l’on peut donner ce nom à l’état de langueur dans lequel il vécut jusqu’au 10 avril de l'année . suivante. Désireux de prouver sa reconnaissance envers saint Martin , à l’intercession duquel il attribuait, le re- tour de sa santé , il combla ce monastère de ses dons. Bien plus , par un diplôme donné à Tours , le 9 des ca- lendes du mois d’août , il exempta le chapitre de Saint- Martin de toutes visites onéreuses des comtes , vicomtes et autres officiers publics. Ayant quitté Tours pour se rendre à Troyes, où se tenait un concile, il confirma aussi à la même abbaye le don, qui lui avait été fait par Gharles-le-Chauve , des prévôtés de Ghablis et de Milcey. Les fastes de la Touraine offrent peu de Litres qui rap- pellent Charles-le-Gros à notre souvenir, On sait qu'il _accorda , en 885, à l’église de la Basocke, quaire-vingt- seize perches de terrain avec les murs, chemin de ronde et l’emplacement de la salle où l’on rendait précédem- . (1) Thomassin, Peter. et nov. eccl, disc. ,U If, p. 521. 254 MÉMOIRES ment la justice , et que l’on nommait vulgairement la salle Maudite. Gette église avait été construite sur lem- placement où avait été déposée la châsse de saint Martin, pendant le siége des Normands, en 838. Ce fut sous son règne que les Tourangeaux se remirent en possession des reliques de saint Martin, qui , depuis trente-un.ans, étaient restées à Auxerre, où , en 856, la crainte trop fondée de l'invasion des Normands les avait fait transporter. Un sei- sneur, nommé Ingelger, comte du Gâtinais et d’une par- tie de l’Anjou, qui était en même temps sénéchal de Tours, se mit en tête de cette entreprise, dans laquelle il fut secondé par les barons de Preuilly, de Semblançgay et de l’Ile-Bouchard. Il partit de Tours , au mois d’ogtobre 887, à la tête d’une armée forte de 6,000 hommes , tant d'infanterie que de cavalerie , et se présenta devant . Auxerre avant même qu'on eût été instruit de son départ et de ses projets; l’évêque de cette ville, n’étant plus en mesure de persister dans son refus, consentit enfin à lais- ser partir le corps de saint Martin. Après cet heureux résultat, les Tourangeaux se remirent en route et firent leur entrée triomphante dans la ville de Tours le 13 dé: cembre de la même année. À cette occasion, le chapitre de Saint-Martin signala sa reconnaissance envers Ingel- ger en l’établissant trésorier de son église, dignité qui fut créée en sa faveur. Atton, baron de Preuilly, obtint pour lui et sés descendants le titre d’avoué ou défenseur du chapitre , ainsi que celui de porte-enseigne de Saint- Martin. Ingelger survécut peu de temps aa service signalé qu’il avait rendu au chapitre de Saint-Martin ; il mourut, en 888 , à Châteauneuf en Anjou. Son corps fut trans- porté à Tours et inhumé dans l’église de Saint-Martin. Il laissa de son mariage avec Adeline , nièce d’Adeland , archevêque de Tours, Foulques I‘, dit le Roux, comte d'Anjou , et forma ainsi la souche de cette illustre . maison. 3 DE LA QUARRIÈME. SECTION. 255 Lonis V, surnommé le Fainéant , fils de Lothaire et d'Emme , succède à son père en 986 , et, comme lui, meurt empoisonné. La race des rois Carlovingicens finit avec l’existence de ce jeune prince par l’usurpation de Hugues-Capet qui s'empare de la couronne , malgré les droits de Charles , duc de Lorraine , oncle du roi Louis, Nous trouvons , dans les dernières années qui pré- cèdent la chute des deux premières races de nos rois, une similitude étrange , des rapports analogiques qui ne peuvent échapper aux appréciations critiques de l’his- toire. Les mêmes causes offrent sans cesse à nos yeux les tristes résultats qu’il est si facile de prévoir. Toujours l'incapacité et la faiblesse d’une part , de l’autre l’ambi- tion et le courage qui font tout entreprendre et parvenir à tout. L’usurpation de Pepin-le-Bref met un terme au règne des rois fainéants , celle de Hugues-Gapet a lieu après le passage sur le trône d’un roi flétri du même sur- nom par la justice du peuple. Les crimes qui précèdent la chute de ces deux dynasties ne sont ni moins épouvan- tables ni moins nombreux. Pendant l'exécution de ces assassinats , qui se succèdent sous toutes les formes , le désordre dans l’État-est à son comble, et les populations, abandonnées à elles-mêmes ; incapables de présenter une sérieuse défense , offreni une proie facile aux sanglantes invasions des Normands. Cependant il existe entre ces deux usurpations une notable différence , par rapport à leurs conséquences “pour la nation , et nous croyons devoir la signaler. La première s'offre à nos yeux plutôt comme une mutation de règne que comme un changement de dynastie ; en effet , l'autorité des maires du Palais était alors parvenue à un Lel degré de puissance, que le fétiche doré , sous le nom. duquel ils gouvernaient , n’occupait réellement le trône que sous leur bon plaisir, Pour conserver lestime et le respect des peuples , la royauté ne doit jamais lais- 256 MÉMOIRES ser sommeiller son pouvoir ; elle ne peut , sans danger, rester , comme la divinité, inaperçue et cachée dans l'ombre du sanctuaire. Il est surtout des circonstances où elle doit se montrer hautement , c’est lorsque la dé- fense du pays ou de ses droits réclame sa présence à la tête des armées. Les Français , accoutumés à placer leur confiance dans les maires du Palais, dont le courage ne défaillait point à l'heure du danger , acceptèrent volon- tiers les prétentions de Hngues-Capet, et virent avec joie disparaître ce vain simulacre de royauté qui ne leur ins- pirait que le plus profond mépris. Cette substitution , si nous pouvons l'appeler ainsi , dut s'effectuer dans Île royaume d’une manière presque insensible ; l’époque où elle avait lieu étint encore assez rapprochée de celle où le vœu unanime des citoyens conférait le pouvoir su- prême et plaçait la couronne sur la tête du plus digne. Mais, pendant le cours de cette seconde race , l’inca- pacité et la faiblesse des rois avaient laissé surgir un pou- voir nouveau dans l’État. Tous les stéhinhes de haute magistrature , el de quelque rang qu’ils fussent , plus ou moins élevés dans l’ordre politique , avaient rendu héré- ditaires dans leur maison les charges et les emplois dont ils n’avaient précédenvment que la jouissance tempo- raire. C’est l’origine du jfouvoir féodal , espèce de sainte alliance formée par tous les grands vassaux de la cou- ronne , afin de consolider leur usurpation commune. Pour rendre cette association plus redoutable, ils y agréè- rent , par des sous-inféodalions, ou arrières-fiefs, les pos- sesseurs des moindres propriétés territoriales de deurs domaines ; à la charge seulement d’une faible redevance et de reconnaitre vs suzeraineté, Sorte d’anarchie or- ganisée dans laquelle en ne renconire le bien jamais, et le mal toujours ;: époque où lon voit ces hauts barons , toujours en guerre les uns contre les autres, également prêts à s’entre-déchirer et à se réunir lorsqu'il s’agit DE LA QUATRIÈME SECTION. 257 d'attaquer la royauté ou de se défendre contre elle. Il est facile d'apprécier toute la différence qui existe entre l’usurpation de Pépin-le-Bref, continuant de régner pai- siblement selon l’ordre légal adopté par les rues , et d’après le-texte des lois es rep du royaume , et. celle de Hugues-Capet , obligé, en s’emparant du trône, d'accepter en même temps le désordre , reconnu forcé- ment par les rois qui l’avaient précédé. Usurpateur lui- même , son élévation au rang suprême consolidait et ga- rantissait les droits que niet arrogés les puissants seigneurs qui lui frayaient le chemin du trône , el ne lui Domeialt pas de se montrer trop scrupuleux défenseur des priviléges d’une monarchie si nouvellement impro- visée. C'était une espèce de compromis tacite dans lequel tous les droits , généralement usurpés, étaient implicite- ment reconnus par les parties prenantes, excepté cepen- dant ceux du peuple, qui ne paraissait, dans cette impor tante transaction , que pour se voir partagé comme un vil troupeau. C’est sans doute les craintes, assez fondées, que lui inspirait celte fausse position , qui l’engagèrent à s’adjoindre à la couronne Robert, son fils; nous en trou- vons un témeignage dans la discussion un peu vive qu’il eut avec Adalbert, comte de Périgord , qui soutenait les droits au trône de Charles, duc de Lorraine. « Qui vous a fait comte ? » lui disaient Hugues-Capet et Robert, son. fils. « Ceux qui vous ont faits rois, » répondait Adal- bert.. « La noblesse , ignorée en France jusqu’au temps des » fiefs, dit Hénault (1), commença avec cette nouvelle » seigneurie; en sorte que’ce.fut la possession des terres » qui fit les nobles , parce qu’elle leur donna des espèces » de sujeis nommés vassaux , qui s’en donnèrent à leur (1) 4brégé chronotogique de L'Histoire de France, par le pré- sident Hénault , in-8°, p. 43. T, IL. 17 258 MÉMOIRES » tour par des sous-inféodations; et ce droit des seigneurs » fut tel, que les vassaux étaient obligés, dans de certains » ças, de les suivre à la guerre contre le roi même, » Ge nouveau systême de gouvernement rendit, pendant plusieurs siècles , le désordre permanent dans nos pro- vinces. Si la France est parvenue à détruire ce mons- trueux édifice , créé par l’égoisme et la barbarie des sei- gneurs, c’est à l'institution des communes qu’elle le doit en partie, C’est une grande et belle étude , offerte à la sévère appréciation du philosophe , que cette époque de réhabilitation du tiers-état , et ces réclamations qui s’é- lèvent, en même temps, sur tous les points de la France, au nom d’un peuple généreux, qui s’indigne, à la fin, des entraves mises à sa liberté, et réclame hautement le libre exercice de ses droits. Dans les combats entrepris pour soutenir ses justes prétentions , le peuple nous présente un beau modèle de constance , un admirable exemple de fermeté. Souvent renversé , jamais il n’abandonne la poursuite de ses droits ; il se montre semblable à Antée, il retrouve des forces nouvelles chaque fois que ses enne- mis l’ont terrassé. D’autres causes ont également servi au retour d’un gouvernement plus rationel pour notre pays, mais il serait injuste de ne pas reconnaître tout ce que le clergé a fait de beau et de grand pour venir en aide à cette noble émancipation sociale. Dans les premiers siècles de l’Église, nous trouvons les évêques de France remplissant l'emploi de défenseurs des peuples. Leur ardente charité les place sans cesse en tête de toutes les améliorations sociales; nous les rencontrons toujours , dans l’histoire , comme les sentinelles avancées de la civilisation. Ils protègent les habitants de nos cités, dont ils défendent puissamment les droits. La postérité a confirmé le titre de saint, que la plupart de ces pasteurs des peuples ont obtenu de la juste reconnaissance de leurs contemporains, vox populi, vox Der. DE LA QUATRIÈME SECTION. 259 Une autre époque se présente : Un pouvoir oppresseur vient de naître, et la nation asservie gémit et se débat en vain sous le joug féodal. C’est alors que se déroulent à nos yeux les pages les plus sublimes des annales du clergé. Nous le voyons entreprendre une noble lutte contre ce pouvoir despotique, le combattre sans relâche, le saisir corps à corps , et, après des efforts inouis , par- venir. à renverser ce vaste colosse aux pieds d’argile , dont la grandeur écrasait la nation. Le prêtre devient l’appui ou le consolateur de toutes les infortunes ; il se place, en quelque sorte, comme un bouclier vivant entre le tyran et la victime. Si la France est sortie de l’état d’avilissement dans lequel la féodalité l’avait plongée , nous nous plaisons à le proclamer, c’est au clergé, à sa paternelle influence , qu’elle en est principalement rede- vable. C’est lui qui, combattant avec les seules armes de la foi et de la charité l’orgueilleuse puissance de ces farouches barons , parvint à faire pénétrer dans leurs cœurs les germes précieux de la morale évangélique. Admirable résultat d’une religion qui trouve ses plus puissants auxiliaires dans les sentiments d’amour et de charité qu’elle fait éclore dans les âmes, Existe-t-il un plus noble but que celui qu’elle se propose , lorsqu'elle tend à réunir, dans les liens d’une seule et même confra- ternité, sous le signe vénéré de la croix, l’humanité tout entière ? Ne parviendrait-elle pas alors à atteindre ce but idéal , vainement poursuivi jusqu’à ce jour , que nous pourrions appeler, dans une acception toute chrétienne, la meilleure et la plus sainte des républiques possibles ?. 4 260 MÉMOIRES MÉMOIRE RELATIF A LA SAINT-BARTHÉLEM Y, LU PAR M. DE FALLOUX, ” EN SÉANCE GÉNÉRALE, LE MARDI 5 SEPTEMBRE 1843, EN RÉPONSE À LA VINGT-TROISIÈME QUESTION DU PROGRAMME. Quelle fut la part de la politique dans la Saint-Barthé- lemy? C'est-à-dire , quelle fut la part de la préméditation et de quels éléments se composa le plan prémédité ? Dans quelle proportion y entra le fanatisme religieux , ou le ressentiment politique ? Quelle direction reçut alors l'Église de son chef suprême ? Enfin nulle question posée en termes plus simples ne devait provoquer de réponses plus complexes, et l’examen approfondi de toutes les cir- constances qui se rattachent à la Saint-Barthélemy pour- rait seul fournir une solution complète. Je n’entrepren- drai pas un si vaste travail , et je me bornerai à un seul point que je tâcherai du moins d’éclaircir avec une en- tière bonne foi, Je répondrai d’abord : La Saint-Barthélemy appartient tout entière à la politique , et , dans cette politique, l’im- prévu joue un bien plus grand rôle qu’on ne le suppose généralement , parce que l’impulsion vint des masses pe- pulaires , et que les masses agissent spontanément. Le Saint-Siége, comme instigateur , y demeura absolument étranger. J’essaierai même de démontrer que le Souve- rain Pontife suivait une ligne parfaitement distincte de celle qui aboutit à la nuit fatale du 24 août 1572. Car, L DE LA QUATRIÈME SECTION. ne dans une matière aussi controversée , une simple asser- tion ne suffit plus, et la conscience de l'historien ne de- vrait pas se reposer sur l’absence seule des témoins accu- sateurs de l'Eglise, si des témoignages qui établissent , à mon sens , le plus incontestable alibi , ne pouvaient se produire au grand jour de lévidence. Ges preuves, je me hâte de les réunir sous vos yeux. Grégoire XIII était à peine monté sur le trône ponti- fical lorsqu’éclata la terrible catastrophe. Toute la res- ponsabilité des préparatifs , si l'Église y avait pris part, retomberait done à la charge du prédécesseur de Gré- goire, et ce pape était saint Pie V, dont le règne fut voué tout entier aux plus pures inspirations du catholicisme, et dont la mémoire est couronnée du plus illustre dia- dême, l’auréole de la canonisation. Lorsque le 10 novembre 1567, les calvinistes reprirent les armes, et livrèrent au Roi, à la porte de Paris, la ba- taille connue sous le nom de bataille de Saint-Denis , et dans laquelle périt le connétable de Montmorency, Pie V régnait dépuis un an. Ge moment était décisif pour les | intérêts du catholicisme en France : le pape ne s’astrei- gnit point à une neutralité qui n’existait alors ni dans les mœurs , ni dans les lois, ni dans les principes fondamen- taux de la constitution européenne. La royauté, d’ailleurs , était, selon une expression de saint Paul , considérée , à cette époque, « comme un mi- » nistère de religion envers Dieu , de rigueur envers les » méchants, de paternité envers les justes. » — « L’écri- » ture sainte nous enseigne , s’écriait encore un orateur » sacré dans le siècle suivant , que toute âme doit être » soumise aux puissances ; mais elle nous enseigne aussi que loute puissance doit veiller sur les âmes qui lui sont soumises : s’il y a des rois dans le monde, ce n’est pas » pour recevoir, comme des idoles, l’encens et les vœux » de leurs sujets, dans une oisiveté superflue. » > y 262 : MÉMOIRES Le pape pressa donc le roi de France de remplir ses devoirs envers la république chrétienne : Catherine de Médicis lui répondit par le tableau de ses troupes en dé- sordre et de ses finances épuisées ; le pape offrit son assis- tance en soldats et en subsides. Le duc d’Anjou se mit à la tête de l’armée royale; les auxiliaires italiens, guidés par François Sforzia , se rangèrent sous ses ordres ; les bataillons pontificaux prirent une part active et patente aux sanglantes journées de Jarnac et de Montcontour, dans le cours de lannée 1569. Les huguenots avaient pris , selon l’aveu même de De Thou , l'initiative de Pap- pel à l'étranger. Louis de Nassau commandait, à côté de Coligny, les renforts allemands , et le Hävre , occupé par les lieutenants du prince de Gondé, avait ouvert ses portes aux garnisons anglaises. C’est à partir de cette époque, c’est-à-dire trois ans avant la Saint-Barthélemy , qu’éclate une scission mar- quée, importante, et bientôt immense, entre la politique du Saint-Siége et la politique de la reine régente,. Pie V n’avait pas pris les armes pour que l’ascendant des Guise l’emportât sur l’ascendant des Goligny , et il n’était pas d’avis qu’on les déposât pour un si mince succès. Il voulait que l'Église conservât sur le trône de France un fils très chrétien; il voulait que ce noble pays guérit à jamais les blessures d’où s’écoulait à flots le plus pur de son sang; que le corps entier de la nation enfin, redevenu sain et libre, reprit le pas dans la marche euro- péenne, et, d’un de ses élans accoutumés, entraînât avec lui, à l’encontre des hordes musulmanes , les masses ré- conciliées du christianisme. Pie V ne prétendait rien de plus et ne consentait à rien de moins. Catherine , au contraire , impatiente de se délivrer des embarras de la guerre, ne cherchait, dans le triomphe, que des facilités de transaction et des expédients provi- soires. La victoire du duc d'Anjou à Jarnac et à Mon- DE LA QUATRIÈME SECTION. 263 contour, fut aussitôt suivie de la reprise des négociations, et les catholiques craignirent de se voir sacrifiés dans le présent, sans garantie pour l’avenir. Le pape ne tarda pas dès-lors à faire entendre son lan- gage prévoyant et sévère. Catherine répondait à ces avertissements en pressant la signature d’un traité avec les huguenots. Leurs dépu- tés, Jean Lafin, seigneur de Beauvais, et Charles de Téli- gay, vinrent chercher le roi jusqu’à Angers, où il se trou- vait alors en voyage avec la reine sa mère. Les pourparlers furent remis d'Angers à Châteaubriant. La cour se ren- dait ensuite à Nantes , et la négociation ne s’arrêtait point devant les divers brefs du souverain Pontife , ainsi conçus : A notre trés-cher fils en J.-C. « Bien que nous eussions la confiance que Votre Majésté ne ferait rien qu'avec piété, réflexion et prudence, surtout dans une affaire qui ne compromettait pas moins sa propre sûreté que celle de son royaume et de toute la république chrétienne, émus cependant à ce bruit qui nous est transmis de bouche en bouche, et qui paraît cons- tater que la paix est à la veille de se conclure entre Votre Majesté ef les hérétiques , ennemis communs de tous les catholiques et Sujets rebelles , le devoir attaché à notre charge, et notre sollicitude pa- ternelle , ne nous permettent pas de manquer à avertir Votre Ma- jesté, qu’elle doit réfléchir plus d’une fois, et songer attentivement à ce qui va se faire. Assurément , si nous voyions qu’il pût jamais - exister entre Votre Majesté et ses ennemis une paix qui dût ou rele- ver la cause de la religion, ou procurer en quelque manière la tranquillité de ce royaume fatigué par une longue guerre , nous n’ou- blierions pas le caractère dont nous avons été revêtus, nous ne méconnaîtrions pas notre mission , au point de ne pas interposer tout notre zèle et notre autorité pouf la faire conclure le plus tôt pos- sible. Mais, comme nous savons personnellement ee dont Votré Majesté a mille fois fait l'expérience , c’est-à-dire qu'il ne peut exis- ter d'union entre la lumière et les ténèbres, et qu’il n’y a ici de composition possible qu’une composition feinte et pleine de piéges, nous sommes amené nécessairement à trembler pour votre per- sonne , pour le salut commun de la république chrétienne , et la 264 MÉMOIRES conservation de la foi catholique. Déterminé par ces motifs , nous exhortons Votre Majesté à ranimer son courage, si élevé par lui- même , et si disposé aux nobles entreprises , à redoubler l'effet de son habileté naturelle pour dissiper les restes de cette lutte intestine, venger les injures de sa couronne et celles du Dieu Tout-Puissant, à raffermir enfin, à consolider pour sa postérité autant que pour elle-même, ce royaume ébranlé par la conjuration la plus criminelle qui aitété ourdie par la perversité des méchants. Il faut en ceci que Votre Majesté ne fasse rien de nouveau ni d'insolite, mais qu’elle continue à suivre la marche qu'elle a suivie jusqu’à ce jour. Je veux dire que, laissant de côté toute pensée, toute volupté terrestres, elle s’adonne à cet unique soin, et ne prête l'oreille à aucun dis- cours des hommes, quels qu’ils fussent, qui lui donneraient des avis contraires. » Nous avons écrit ces choses à Votre Majesté, dans l'abondance de la tendresse paternelle que nous lui portons, et, comme elles partent d’un cœur très-désireux du salut et de la dignité de Votre Majesté, nous avons pensé qu’elles ne lui seraient pas désagréables, et nous demandons pour elle au Dieu Tout-Puissant une victoire parfaite et complète sur ces communs ennemis. » Donné à Rome, le 29 janvier 1570. » Pie V écrivait à la reine avec la même chaleur, et, voyant que ses instances ne produisaient pas sur l’esprit du roi l’impression qu’il en attendait, il les redoublait en ces termes : A Charles, roi très-chrétien des Francais. « Désirant, autant que possible, satisfaire aux exigences de notre conscience , fondées sur les devoirs attachés au ministère apostoli- que qui nous à été, quoiqu’indigne , confié par le Dieu Fout-Puis- sant, nous ne pouvons en aucune manière manquer à avertir per- sonnéllement Votre Majesté, relativement à cette paix qui est, dit-on, ou déjà conclue, ou à la veille de se conclure. Nous, en effet, libre de tout intérêt propre , n'ayant en vue que la cause de Dieu , votre salut et celui de votre royaume ; après avoir mûürement examiné une telle affaire, nous vous avertissons (et cet avis n’est que trop vrai et trop certain) qu'une telle paix ne sera point une paix véritable, mais la source des plus grandes calamités de ce royaume. S'il est auprès de vous des personnes qui pensent autre- ment, et qui s'efforcent de persuader à Votre Majesté que leur sen- DE LA QUATRIÈME SECTION. 265 timent est le meilleur, ceux-là se trompent par ambition , ou cor- rompus, éux-mêmes , trompent Votre Majesté; ou bien encore, oubliant ce qu’exige l'honneur de la religion et de votre Majesté, ils ne respectent ni Dieu ni le roi... Nous avons voulu donner ces avertissements à’ Votre Majesté, pour remplir notre ministère, et suivre l'impulsion de la charité paternelle que nous ressentons pour elle dans le Seigneur. Si elle défère à notre voix , elle en retirera personnellement autant d'avantage qu’elle nous causera de joie. Si Votre Majesté ne le fait pas, notre douleur aura du moins cette con- solation , que nous n’aurons, en notre qualité de Père commun de tous, et dans l'intérêt de l’union de la république chrétienne, rien omis des offices que nous devions rendre à Votre Majesté. IL ne nous reste plus qu’à abandonner à la direction de la divine miséricorde, ce que par ailleurs il nous est impossible de prévoir, et prier humblement le Dieu Tout-Puissant pour la conservation de Votre Majesté et la prospérité de son reyaume. » Donné à Rome, le 23 avril 1570. » Néanmoirs , le 8 août 1570 , un édit accorda d’abord amnistie complète du passé , et déclarait bons et fidèles sujets ou alliés du roi les princes de Navarre et de Condé, ainsi que tous chevaliers et seigneurs attachés à leur ban- nière, de même aussi tous étrangers qui les avaient assis- tés de leurs personnes ou de leurs conseils, et nommément le duc de Deux-Ponts, le prince d'Orange, Louis de Nas- ‘sau et Volrad de Mansfeld. Et parce que le parlement de Toulouse était suspect de partialité catholique, toutes les causes de religion , ressortissant de sa juridiction , étaient de plein droit et sans appel transférées devant les maîtres des requêtes à Paris. Quant aux parlements de Rouen, d’Aix, de Dijon, de Grenoble et de Rennes, permission élait octroyée à tout protestant de récuser six juges , y compris le président, et doûze dans celui de Bordeaux, sans être astreint à motiver leur récusation. Aux garan- ties juridiques , le même édit adjoignait quatre villes de sûreté qui étaient : La Rochelle, Montauban, Cognac ei la Charité-sur-Loire. La conclusion de cette paix fut sui- vie du mariage de Téligny , jeune homme de brillante 266 MÉMOIRES espérance , avec Louise de Châtillon, fille de l'amiral de Coligny, qui commençait à vieillir. | Lorsque les conditions de cet édit furent publiées , Pie V adressa ce cri de douleur au cardinal Charles de Bourbon : « Votre prudence vous fera comprendre plus facilement que nous ne »ouvons l'exprimer par des paroles, l’'amertume dont nous avons été abreuvé à la nouvelle de cette pacification. Noùs ne pouvons en effet, sans verser des larmes, songer combien elle est déplorable pour nous et tous les gens de bien , combien elle est dangereuse, et de combien de regrets elle sera la source! » Ge n’est pas la sagacité prophétique du souverain Pon- tife qu’il sera nécessaire de justifier pour ceux qui réflé- chiront à la date de ces lettres si promptement suivies du massacre de la Saint-Barthélemy et de l’épouvantable agonie de Gharles IX; mais c’est la justification de l’Église tout entière, si obstinément impliquée dans les catastrophes de cette époque, qu’il faut poursuivre jus- qu’au bout. De Thou raconte que , dans des conférences tenues, cinq ans avant la Saint-Barthélemy, en 1567, sur les frontières d’Espagne, à la sollicitation du pape , on s’y rangea au sentiment du duc d’Albe, qui était de suivre les Vêpres siciliennes ; de Thou ne prend pas cependant la responsabilité de cette allégation : il cite son auteur avec quelques restrictions; mais les historiens qui l’ont suivi v’imitent plus sa réserve : ils ne doutent plus , ils aflir- ment , ils précisent , ils amplifient. On en conviendra pourtant : rien n’élait plus opposé aux maximes et aux mesures perfides que le langage et les conseils qu’on vient d'entendre de la bouche même du souverain Pon- tife. Dans quel écrivain philosophe trouvera-t-on une condamnation de la politique de Catherine plus formelle que cette réprobation anticipée; que celle voix pleine d'angoisse, qui supplie et qui menace; qui, sans relâche, DE LA QUATRIÈME SECTION. 267 appelle dans la voie droite; met en garde contre les moyens insolites, et recommande par dessus tout de com- battre le bon combat. Ge ne sont pas encore R , il est vrai , les théories pro- fessées de nos jours , et ce n’est pas non plus au point de vue moderne , qui n’était celui de personne au XVI: siècle, qu’on peut et qu’on doit justifier l’action papale. L'’inertie de l'Église , au milieu du choc des croyances , eût été une monstruosité à cette époque : ce n’est donc point sa participation à la lutte générale qu’il est permis d’atténuer; ce n’est pas son personnage qu’il s’agit d’a- moindrir ; bien au contraire : mais c’est la loyauté dans “le choix des moyens, la noblesse d’attitude dans larêne, la persistance impassible dans une ligne droite à travers les déviations particulières , qu’il suffit d’opposer aux ac- cusations erronées. Réduire les hérétiques à l’impuis- sance de se propager et de nuire; combattre l’hérésie par la réformation des mœurs , par la pureté du dogme , par la sainteté de ses propres exemples , voilà la politique du SARPSIÉES , à la veille de la Saint-Barthélemy , et lors- qu’on veut évoquer les spectres sanglants de cette hor- rible nuit , il faut s’abstenir enfin d y méler la figure majestueuse d’un souverain Pontife. Quant aux réjouissances qui en accueillirent la nou- velle dans la ville de Rome, elles s'expliquent déjà patu- rellement par les appréhensions que témoigne ici Pie V, qu'il léguait à son successeur , et que partageaient tous les esprits clairvoyants. On sait , en outre , que les dé- pêches expédiées de Paris présentèrent à toute l’Europe le massacre des protestants comme la répression d’ane soudaine attaque de leur part , comme le résultat d’une conflagration inopinément allumée par suite de l’attentat commis contre Goligny; les Romains se félicitèrent con- séquemment de ce triomphe , ainsi que de tous les avan- tages antérieurs remportés sur les ennemis communs. 268 MÉMOIRES M. Capefigue , que nous citerons comme le plus récent des historiens qui aient traité de cette époque, n’a pu retenir l’aveu suivant, dans une lettre à M. Pasquier, aujourd’hui chancelier, qui sert de préface à son livre de la Réforme : « Je considère a Henriade comme l’œuvre qui a le plus faussé les idées sur les événements de cette époque ; ce n’est pas seulement une poésie froide, mais bien encore expression de mauvaises étu- des sur un temps qui échappait à la génération encyclopédique, laquel!e n'était préoccupée que de sa haïne contre le catholicisme. » Dans le même ouvrage , M. Capefigue (page 311, édi- tion in-18) rend brièvement compte des efforts de Pie V el de Philippe IT, pour empêcher la conclusion du traité de paix , et il résume ainsi son opinion à ce sujet : « Le projet de se délivrer des huguenots par un massacre , pou- vait bien confusément se présenter à la pensée ; mais, s’il avait été arrêté , si la paix n’avait été conclue que dans cet objet, il est im- possible que le pape et le roi d'Espagne , ces deux puissances de l’unité catholique, n'en fussent pas prévenus, ou qu'ils n’eussent pas l'instinct du but secret de la paix. » Plus loin, M. Capefigue dit : « Quand on livra les dépêches, les instructions du roi d'Espagne, et son joyeux étonnement sur la Saint-Barthélemy, il sera impossi- ble de ne pas rester convaincu qu’il n’y avait dans cet événement rien de préparé; qu’une force de choses spontanée , invincible, l’opinion du peuple, obligea Charles IX à sanctionner plutôt qn'à méditer de sanglantes journées. » Enfin , M. Cepefigue termine le seizième chapitre par ce résumé : « Les calvinistes sont le parti anti-national, un parti de morcel- lement, un fédéralisme provincial ; ils font ravager la France par les reîtres et les lansquenets ; et il faudra bien dire une fois pour toules, que le parti catholique et des ligueurs conserva seul la na- tionalité francaise. » Ilexiste un dernier reproche , dont Pie V aussi a pro- curé d’avance la réfutation , dans le vaste syslème d’em- DE LA QUATRIÈME SECTION. 269 bûches qu’on s’est plu à ourdir et à prêter aux catholi- ques; les historiens ont souvent prétendu que le mariage de Marguerite de Valois et d'Henri IV, n’avait été qu’un prétexte pour endormir la: méfiance des huguenots , tromper leurs précautions et'attirer leur chef à la cour. De Thou dit : « Pendant les négociations de la paix ,on parla du mariage de Marguerite de France , sœur du roi, avec le prince de Navarre, in- ventionu merveilleuse pour affermir la paix ou pour mieux cacher les mauvais desseins que l’on méditait. » _ Gette demi-accusation de l’historien , avidement repro- duite et commentée après lui comme toutes les autres, est.sans doute une injustice, même envers Catherine : . mais pour ce qui concerne la complicité du Saint-Père, elle croule au premier examen. Non-seulement, Pie V ne descendit pas jusqu’à de semblables combinaisons , mais il en soutenait une toute opposée en principe et en conséquence. Don Sébastien, roi de Portugal, était alors âgé de 17 ans, et c’est sur ce prince que le pape avait jeté les yeux. Louis de Torrès, clerc de la chambre apostolique, fut envoyé de Rome à Cintra où résidait en ce moment la cour, et remit au jeune roi des dépêches de Pie V, expo- sant tous les avantages qu’on devait attendre de l’union . des deux monarchies catholiques, dans des temps où ces liens ne pouvaient être trop étroitement resserrés; le Saint-Père offrait d'entamer lui-même cette négociation. Le prince répondit qu’il rendait mille grâces à Sa Sain- teté, d’une bonté si particulière à son égard, qu’il ne pouvait manquer de consulter son oncle, le roi d’Espa- gne, et qu'après cetie communication, il répondrait plus amplement au souverain Pontife. Pie V, qui ne cessait en même temps de pourvoir à de nouveaux préparatifs de guerre contre les Turcs, en- voya son neveu; le cardinal Alexandrin , à la cour de 270 MÉMOIRES Lisbonne, en qualité de légat , le chargeant tout à la fois et de poursuivre la négociation entamée par Louis de Torrès , et de nouer une ligue puissante contre les infi- dèles. Il apportait de nouvelles lettres de Pie V, dont la teneur se reproduit tout entière, dans la réponse de don Sébastien , qui a été textuellement conservée : « Trés Saint-Pére, » Nous avons reçu la lettre de Votre Sainteté, dans laquelle nous avons remarqué son extrême piété envers Dieu, son zèle et son amour pour l'Eglise, et son affection singulière envers nous, ce qui nous a puissamment déterminé à défendre la religion, et à en pro- curer l'accroissement de toutes nos forces : Votre Sainteté , tout oc- cupée qu’elle est à gouverner le troupeau de J.-C., et à l'étendre par toute la terre, ne s'est pas contentée de nous écrire, elle a bien voulu se priver de la présence et des services importants du révé- rendissime cardinal, son neveu ; nous avons été charmé de sa con- versation toute sainte et toute religieuse, et nous l’avons recue avec d'autant plus de respect, que nous voyions en lui une copie fidèle des vertus de son très-saint oncle. » Son entrée dans nos Etats a causé une allégresse universelle à tous nos sujets. La foule incroyable de personnes de toutes sortes * d'états et de conditions qui ont été au-devant de lui pour le recevoir, leur joie et leurs acclamations, sont les témoignages publics de l’ex- trême satisfaction qu’ils ont eue de son arrivée, qui s’est augmentée par la considération, qu'avec sa qualité de légat du Saint-Siége , il était le digne neveu d’un pape très-saint, qui préfère les intérêts de la religion et le salut des âmes qui lui sont commises, non seulement à toutes les richesses de la terre, mais même à sa propre vie, pour laquelle les hommes ont naturellement une si violente passion. » Ici le roi répond en détail au sujet de la ligue projetée, puis il reprend : « Pour ce qui est de notre mariage avec la princesse Marguerite de France, sœur du roi très-chrétien , nous en avons traité jusqu’à présent avec les mesures que je suis obligé de garder, et pour la dignité de ma personne , et pour la gloire de mon Etat : mais, Votre Sainteté ayant chargé le révérendissime cardinal de nous en parler, nous l'avons écouté avec joie , et reçu avec respect les conseils qu'il nous à donnés de la part de Votre Sainteté , qui font voir à tout le DE LA QUATRIÈME SECTION. 271 monde l'affection paternelle qu’elle nous porte, le zèle ardent qu’elle témoigne pour l’intérét commun de la chrétienté, et sa vigi- lance pastorale à secourir la France allligée de guerres civiles, à prévenir les malheurs dont elle est menacée , et à rémédier aux dé. sordres qui en pourraient bannir la religion ; enfin , son empresse- ment pour moyenner une paix générale entre tous les princes chré- tiens, et pour exciter dans leurs cœurs la charité de J.-C., qui se refroidit tous les jours. : » Ces considérations et le mérite extraordinaire de cette très-ver- tueuse et très-accomplie princesse , nous ont fait résoudre à la de- mander en mariage, et à charger le révérendissime cardinal Alexan- drin de cette commission à $on arrivée en France, où il trouvera notre ambassadeur chargé de nos ordres pour en faire en notre nom la demande avec lui : si on voit la cour disposée à cette alliance, je me mettrai aussitôt en état de l’aller épouser. _» Je crois que mon mariage avec cette princesse portera son frère à entrer dans la ligue sainte. Pour faire connaître à Sa Majesté, combien j'estime l'honneur de son alliance , et pour témoigner à l'Europe la passion que j'ai de contribuer à retirer l’Eglise de l’op- pression des Turcs, je ne demande pour la dot de cette princesse, que l’union du roi très-chrétien avec les autres princes qui se sont déjà ligués avec Votre Sainteté. Je prie Dieu , très-Saint-Père , qu’il conserve à Votre Sainteté de longues années pour le bien de son Eglise. » À Lisbonne, ce 20 décembre 1571. » « Pendant que le cardinal légat traitait ces affaires en Portugal, ajoute le biographe de Pie V, il reçut un ordre fort pressant de pas- ser promptement en France , où on était sur le point de conclure le mariage de Madame Marguerite de Valois avec Henri, roi de Na- varre. Il ne fut pas plus tôt entré en France, qu’il recut dès les fron- tières , une partie des honneurs extraordinaires qu’on lui destinait à Blois, où était la cour. Dans l’audience secrète qu’il eut du roi, Charles IX déclara : « qu’il avait de puissantes raisons d'état, pour éonclure le mariage de la princesse, sa sœur, avec le roi de Na- varre. » É Sa Majesté finissant son discours, elle tira de son doigt un diamant d’un très grand prix qu’il (texte) pria le lé- gai d'accepter comme un gage de l’amitié particulière qu’il avait pour sa personne, et comme une preuve de son 272 MÉMOIRES attachement inviolable au Saint-Siége. Le légat pria sa Majesté de le dispenser de le prendre , en lui disant que les promesses d’un si grand roi n’avaient pas besoin d'autre caution que sa parole, mais en effet pour obéir aux ordres du bienheureux Pie V, qui lui avait défendu d'accepter aucun présent des princes chez lesquels il l’envoyait. Antoine Salviati, évêque de Saint-Papoul et depuis cardinal , qui remplissait en ce moment les fonctions d’in- ternonce apostolique près de Gharles IX, ayant écrit à Pie V, que malgré tous ses efforts la princesse Marguerite avait été fiancée avec Henri de Bourbon , et la reine mère Catherine de Médicis, sollicitant avec plus d’instances ce que Charles n'avait pu obtenir, savoir que le Pape lui accordât les dispenses nécessaires pour que le mariage pût se contracter légitimement , Pie V en fut fort aflligé et dit : « Qu’on nc pouvait lui annoncer aucune nouvelle plus triste que celle-là; que non-seulement ce mariage ne lui plaisait point , mais même qu’il n’était pas licite. » Pie qui jugeait tout selon Dieu, voyait lés choses tout autrement que le roi de France. Il envisageait tout sous un autre aspect, il réfutait toutes les raisons qu’on lui al- léguait, et prévoyant tout le mal qui en découlerait, accablé de chagrin et tout brûlant du zèle de la gloire de Dieu , on dit que portant à sa têle la main gauche dont il se servait habituellement à la place de la droite, il affir- ma par serment, qu’il encourrait plutôt la perte de la vie que de céder par complaisance aux demandes injustes de la reine , et de manquer à la cause publique , qu’il affron- terait l’orage quel qu’il püt être, pour ne pas attirer par sa condescendance pour quelques personnes, un mal général, Rien ne put vaincre la fermeté de Pie V, et il fallut attendre sa mort pour célébrer la cérémonie : Sully n’en parle que comme d’un fait de notoriété à la cour. DE LA QUAMRIÈME SECTION. 273 « Le pape Pie V, dit-il, nefat pas à couvert des emportements de Charles, à dense (ln refus qu'il fit de: la dispense nécessaire au ma- riage de Heuri ave Marguer ile, dont Îes préparatifs se faisaient avec une extrême maguifiéence. » Pour répondre maintenant, après un long mais indis- pensable détour, à la question posée par le programme, nous répéterons : tout dans Ja Saint-Barthélemy appar- tient à la politique et cette politique elle-même se subdi- vise en trois branches principales. Le, seizième siècle,en est traversé tout entier comme par trois grands, courants qui ne confondent leurs flots , qu ’après avoir roulé long- mp distincts et côte à côte : : Ja politique protestante , que je ne crois pas utile de caractériser d’une manière précise en ce moment; la politique des souverains qui argumente , combat ou plie, selon les chances acciden- telles du moment; la politique de l'Eglise, qui résiste dans sa sphère, inflexiblement appuyée sur les préceptes éternels. En France, ces trois lignes séparées aboutirent à trois issues différentes. Les huguenots empruntant leur force au mécontentement des pren À et aux passions qui s’y rattachaient, dépérirent à mesure dus ces mêmes griefs furent satisfails ou vaincus; ils n’atteignirent qu’à la consistance d’un parti, se rallièrent sur ce terrain étroit, y combattirent avec l’aide de chefs puissants et de loin- tains auxiliaires, y déclinèrent à mesure que les portes du royaume se refermèrent sur,eux, que leurs places fortes se démantelèrent et y défaillirent enfin lorsque le _ canon de Richelieu eut râsé les murs de la Rochelle et réduit leur existence à la merci d’un édit. . Le sysième. de Catherine qui avait tant usé de. la torche et du poignard , trébucha de faiblesse en violence, pour aller périr d’un coup de couteau avec le malheu- reux Henri IT, Ee IL, L | 48 27h MÉMOIRES La politique chrétienne surmonta seule tant d’étranges vicissitudes , et triompha le jour où le prince Navarroïs qui s'appelait alors Henri IV, implora lPonction sainte sous les voûtes bénites de la cathédrale de Chartres, et librement converti, transforma ses amis rebelles en sujets soumis. Ainsi, Messieurs, saint Pie V ne se rencontre nulle part dans les préparatifs de la Saint-Barthélemy, et cela suffit pour vider le point essentiel du débat; mais sa gloire et celle de l'Eglise seraient grandement intéressées à ce qu’on pût le montrer là où il était réellement , à où étaient ses pensées, ses projets de prédilection. Il faudrait maintenant contempler le Saint-Siége dans la plénitude de sa liberté et de son action. Il faudrait montrer à quelle largeur d’expansion il invitait, dans quelle car- rière il prétendait conduire un siècle où on le représente lui-même comme égaré dans les sentiers de la politique européenne, épris de ses haines, lié à ses complots, Il faudrait mesurer de quelle hauteur de conception, de quelle indépendance de pensée il planait au-dessus des scènes tumultueuses dont on prétend le rendre solidaire. L’islamisme était encore à cette époque un ennemi re- doutable et redouté. L’esprit des croisades, réveillé par Pie IT, pouvait encore, sous Pie V, faire faire un pas de géant à la civilisation. L'Eglise n'avait cessé de provoquer ces tendances par lesquelles le code libérateur de l’évan- gile aspirait à régénérer les plus vastes contrées du globe ou ignorantes, ou corrompues, et partout asservies. Cette ambition sublime était celle de saint Pie V, c'était sa préoccupation dominante, et si le temps m’avait pér- mis de dérouler devant vous seulement deux pages de son histoire ; vous auriez vu un règne de six ans s’ouvrir glo- rieusement par la délivrance de Malte, et se fermer plus glorieusement encore, quelques mois avant la Saint-Bar- thélemy, par la bataille de Lépante. DE LA QUATRIÈME SECTION. 275 CONSIDÉRATIONS ANS DE LA SAINT-BARTHÉLEMY, PAR M. TROUESSART , MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ INDUSTRIELLE DANGERS. ! : Facio fortassis imperitè qui nou ser- viam temporibus, sed is meus est mos, mea natura. Mremrz DE L'Hospirar. On à déjà depuis longtemps et bien diversement parlé de cette triste journée du 24 août 1572. Quels furent les véritables auteurs , les conseillers et les complices de la Saint-Barthélemy ? Est-ce une sorte de fatalité qui y en- iraîna les esprits presque malgré eux , ou une volonté libre, réfléchie et complétement responsable ? S’agissait-il des destinées du catholicisme et de la monarchie ou des intérêts de la papauté et de Gatherine de Médicis ? Faut- il y voir le déplorable résultat des querelles des factions et des intrigues d’une cour corrompue, ou bien l'issue d’une de ces luttes que se livrent , depuis le commence- ment du monde, l'esprit de conservation et l’esprit de re- novation sociale , le principe d’autorité et le principe dé liberté ?....….. Autant de questions , autant de systêmes et de solutions. Aussi n’élait-ce pas à ce point de vue com- plexe qu’une discussion historique sur ce grave sujet avait élé provoquée par le programme du Gongrès. On deman- dait simplement : « Quelle a été la part de la politique dans les causes de la Saint-Barthélemy ? » Qu'il. y eût d’autres causes que ce que lon est convenu d’appeler la 276 MÉMOIRES politique, et que ces causes fussent les principales, il sem- blait qu’à cet égard il ne pouvait plas y avoir de doute ; mais la politique s’effaçait tellement dans ce grand drame qu'il était bien permis de demander quel rôle elle y avait joué. Cependant on est venu nous dire qu'il ne fallait pas faire une part, mais tout donner à la politique, à la poli- tique de Catherine de Médicis. Ainsi le mouvement des idées religieuses, qui entraînait si violemment les esprits, aurait été changé, détourné de son cours par la main d’une femme rusée et perfide. La Saint-Barthélemy ne serait pas le fruit amer des doctrines qui prévalaient alors dans les conseils de la papauté , ce n’eût été qu’une des exigences de l’ambitieux égoiïsme de Catherine, un der- nier expédient de sa rite politique de bascule. Une femme de moins, une autre femme de plus à la cour de Charles IX, et la S'-Barthélemy n’était plus possible (1). Nous ne pouvons accepter celte solution , et, pour la combattre , nous sommes forcément amenés sur un ter- rain encore brûlant. Nous comprenons le sentiment , fort honorable en soi, qui fait désirer à l’historien , à la vue des grands crimes, de n’avoir jamais à en étendre la responsabilité à des hommes ou à des doctrines qu’il voudrait trouver tou- jours irréprochables. Mais il ne faut pas que ce sentiment nous entraîne à couvrir d’un voile prétendu pieux une partie de l’histoire. Ge serait en compromettre la dignité et la moralité. L'histoire n’est point un poëme où nous cherchons à réaliser notre idéal. C’est le drame de la vie humaine telle qu’elle se développe sur le théâtre du (1) Singulier rapprochement que nous donnons du reste pour ce qu’il vaut : Au témoignage de Capilupi, Catherine de Médicis aurait prétendu que sa politique perfide , à l'égard des protestants , n’était qu’une imitation de la politique de Blanche de Castille à l’égard des Albigeois. (Voir de Thou, t. VI, p. 444, édit, de Londres 1774, et lo Stratagemma , etç..., Cam, Capilupi.) DE LA QUATRIÈME SECTION. 277 monde réel , dans toute sa liberté, dans toute sa sincérité. Pour que l’histoire atteigne à sa haute destination d’en- seignement moral, elle doit nous montrer tous les côtés de l'humanité; ce qui révèle sa grandeur et ce .. trahit sa faiblesse. Les erreurs et même les crimes qu "enregis- trent les annales des peuples ; à quelque hauteur qu’en doive remonter la responsabilité, ont une puissance pro- pre d’instruction et de moralisation. Ils sont à pour les guides des générations qui suivent, comme sur une carte pour le pilote, les écueils signalés par des naufrages. :Recherchons donc , avant tout , la vérité en Misibire. N’essayons pas de grandir les petites choses et d’amoin- drir les grandes. Soyons en bien persuadés : les grands événéments de l’histoire , ceux qui ont exercé une puis- sante influence sur les idées , qui ont mis en mouvement toutes les passions des générations contemporaines , et dont le souvenir seul , après plusieurs siècles , impres- sionné encore vivement les générations actuelles ; ces grands, événements ne peuvent avoir de petites causes. C’est une loi du monde moral comme du monde physi- ‘que, que toujours la cause est proportionnée à l'effet. Les intérêts personnels peuvent bien exploiter à leur profit les mouvements politiques ou religieux qui agitent la société; ils seraient impuissants à les produire. Pour mouvoir les masses , il faut la puissance des idées. Si la S'-Barthélemy n’avait été qu’une mesure de politi- que, comment s'expliquer que « Gatherine eût pu trouver, » du jour au lendemain, dans la population parisienne, qua- » rante mille exécuteurs de ses sanglantes volontés... qua- »rante mille bourreaux de’leurs frères (1). » Qu’avaient de commun, les intérêts de la politique de: Gatherine, de Médicis et les passions de ces catholiques ardents ? « Ca- »therine , tête de pouvoir et femme d’ambition ; n'avait (1) Etude sur la Saint-Barthélemy, Angers 1840, p. 6 et 15. 278 MÉMOIRES » aucune conviction bien arrêtée; à vrai dire, elle eût » même préféré les huguenots , parce que ; opinion faible » par rapport aux masses , ils avaient besoin de l’autorité » royale pour grandir et se fortifier ; tandis que les catho- » liques et le duc de Guise se protégeaient par leur propre » puissance (1). » Aussi lutta-t-elle longtemps contre le parti catholique pour empêcher l'entière extermination des protestants ; mais enfin, entraînée par un cours d'idées qu’elle était impuissante à diriger , elle s’aban- donna au parti Le plus fort et consentit à devenir l’instru- ment. de passions qu’elle ne partageait pas. Son crime : n’en est que plus grand à nos yeux. Que sa mémoire soit à jamais flétrie ! Mais enfin, quelque coupable qu’elle soit, elle ne fut qu’un instrument. La cause morale de la Saint- Barthélemy, ce fut le fanatisme religieux, et la Papauté, Philippe IL et les Guises en furent les auteurs moraux. Les catholiques les plus sincères accordent sans diff- culté la première partie de cetie proposition : « La Saint- » Barthélemy, dit M. Léon Boré, fut, de la part du peuple, » un acte de fanatisme religieux. C’est ce qui lui a donné »à Ja fois ce caractère de violence extrême et de froide »atrocité. En effet, par cela même que la religion est en » nous ce qu'il y a de plus sacré, de plus profond , de plus »vintime , en un mot, de plus divin , lorsqu’une fois elle » s’égare au point de vouloir établir par le glaive ce qui, » suivant les préceptes de l’évangile , ne doit être établi » que par les armes pacifiques de la vertu et de l’intelli- » gence , elle devient naturellement la chose du monde la » plus terrible (2), » La seconde partie de notre proposition est plus sérieu- sement contestée : qu’il y ait eu fanatisme , on l’accorde, mais on ne veut pas en reconnaître la source. Ge fana- (1) Histoire de la Réforme, Capefigue, t. ILE, p. 124, édit. de 1834. (2) Etude sur la Saint-Barthélemy, Angers 1840, p. 6 et 15. DE LA QUAXRIÈME SECTION. 279 tisme se développa tout naturellement par Fantagonisme des idées religieuses en présence. « Il ne faut en accuser personne (1). » Il n’y a plus de responsabilité pour Per- reur ou pour le crime , là où l'erreur ou le crime serait imputable à tout le monde. La papauté , que l’on veut, bién à tort, mettre ici en cause, fût de son époque et non dé la nôtre, voilà tout... On n’y prend pas garde, c’ést réduire à un bien triste rôle le pouvoir qui était appelé à exercer la souveraine mägistrature morale. Mais , dans tous les cas , c’est une assertion démentie par l’histoire. La papauté ne se laissa pas entraîner au mouvement des idées-de son époque; elle ne subit pas , elle créa la situa- tion qui amena la Saint-Barthélemy. DE AN Nous le demandons, s’il était constant que la papauté, dans les années qui précédèrent le massacre, eût toujours voulu, toujours demandé lextermination des hérétiques ; si ,-bien loin d'intervenir au milieu des guerres atroces que se faisaient les partis , pour prêcher la douceur et la clémence, et pour proclamer, comme à une autre époque, la paix de Dieu; la trève de Dieu, la papauté y avait pris part elle-même , et si, moins miséricordieuse que la puis- sance séculière, elle n’avait jamais permis qu’on accordât ni paix ni trève à ceux qu’elle appelait les ennemis de Dieu; si, pour forcer la main à la royauté , elle avait en- couragé les chefs catholiques à désobéir aux édits de paix et-de tolérance; si elle avait présenté comme les modèles des-roistet de leurs ministres, l’inflexible Philippe I et le sanguinaire duc d’Albe , recommandé leurs conseils , ap- prouvé et sanctionné leurs barbares exécutions ; enfin si elle avait loué , glorifié la Saint-Barthélemy, sans réserve et en parfaite connaissance de cause; si tont cela, disons- nous, était constant, la papauté n’aurait-elle pas à prendre ici une large part de responsabilité morale ? Laissons donc maintenant parler les faits. (1) Capefigue, t, LIL, p, 126. 280 MÉMOIRES Remontons jusqu’à l’année 1557, Philippe I règne en Espagne , le grand-inquisiteur , Pierre Garafle, sous le nom de Paul IV, est depuis deux aus souverain Pontife, Ce sont.les beaux jours de l’inquisition. Ce tribunal que Paul IV regardait comme le ressort mystérieux de la reli- gion , avait été rétabli par lui à Rome , sous Paul HIT. Devenu pape , il ne chercha qu’à fortifier et à étendre celte redoutable juridiction. Des jugements fort sévères furent rendus sur toute sorte de personnes. Donnant lui- même l’exemple , il faisait un devoir à tous les princes catholiques d’une extrême sévérité (1). À Paris, au mois de septembre 1557, on avait arrêté et jeté en prison 150 protestants qui avaient été surpris par les catholiques, dans une maison particulière où ils célé- braient la cène. Sept furent brûlés. Le même supplice était réservé à plusieurs autres, lorsque les instances des députés des cantons suisses et des autres princes alle- mands , qui fournissaient à la France ses meilleurs sol- dats , engagèrent Henri IT à faire suspendre les procé- dures... Mais Paul IV, excessivement irrité de cette modération, en fit de grandes plaintes dans le consistoire et dit qu’il ne fallait pas s’étonner si les affaires de France allaient si mal , puisque le roi faisait plus de fond sur le secours des hérétiques que sur la protection du ciel (2). -Bientôt Paul IV lance une bulle par laquelle il renou-: velle toutes les censures et les peines prononcées par ses prédécesseurs contre les hérétiques..…. Les rois et empe- reurs contrevenants seront privés de leurs royaumes et empires, lesquels seront dévolus au premier occupant ca- tholique (3). (1) De Thou , t. IL, p. 19 et 337. Fleury, XXXI-211, Sismondi, XVIII-14. (2) De Thou, t. III, p. 530. Raynald, Ann. Eec!.'ad an. 1557. Sarpi, conc. trent. |. V, n° 33, (3) Bulle du 15 fév. 1559, confirmée par Pie V, le 21 déc. 1566. Raynald, ad an. 1559. DE LA QUATRIÈME SECTION. 284 -Lezèle de Henri II n’avait pas besoin de ces encoura- gements. Le puritanisme des protestants contrastait avec le scandale des mœurs de sa cour. S'il avait vécu plus longtemps , Philippe IL aurait eu un digne émule. Le traité de Cateau-Cambrésis, conclu, le 30 avril 1559, par les soins des cardinaux de Lorraine et de Granvelle , de- vai préparer une ligue entre Philippe Il, Henri IL et Paul IV, pour Laétière extirpation de l’hérésie. L’inqui- sition devait être organisée en France , en Écosse, dans les Pays-Bas et en Halie , comme elle l’était en Espagne. Paul IV attachait sa gloire à faire fleurir cette institution dans toute l’Europe, Les deux rois s'étaient promis de surprendre les protestants partout à la fois pour les exter- iner. Quatre grands seigneurs de la cour de Philippe IL, le duc d’Albe, le prince d'Orange, le duc d’Arschott et le comte d'Egmond, se trouvaient alors auprès de Henri II en Ôôtages. Le roi, ne doutant pas qu'ils ne fussent initiés à tous les secrets de leur maître, parla le premier au prince d'Orange de leur accord pour l’extermination des protestants, et celui-ci, qui dut à sa retenue le surnom de Guillaume-le-Taciturne , sut tout entendre en ne parais- sant rien ignorer (1). La pensée (je ne dis pas le com- plot) d’en finir avec les huguenots par un massacre, date de loin comme on voit. Philippe II obtint du pape l'établissement de nouveaux évêchés dans les Pays-Bas pour y faciliter l’introduction de l’inquisition. Bientôt le sang coula par torrents sur les échafauds dans ces alé be Gsus provinces , tandis que les bûchers de Séville et de Valladolid, allumés sous les yeux du Roi Catholique, dévoraient de nombreuses vic- times de tout rang et de lout sexe (2). (1) Sismondi, XVIII-92. Raynald, Ann. Ecclest, — Apologie de Guillaume d'Orange. (2) Fleury, liv. 154, De Thou, liv. 23. 282 MÉMOIRES Henri I trouvait plus de difficultés à tenir ses engage- ments. Le parlement de Paris, qui jusque-là avait connu du crime d’hérésie, s’opposait à l’établissement de Pin- quisition en France. On procéda contre lui par intimida- tion. Anne Dubourg , Henri Dufaur et six autres conseil- lers, brutalement arrachés de leurs sièges, furent livrés à des commissions ecclésiastiques. A défaut de l’inquisi- tion, Henri IT déférait aux évêques le droit de faire punir les hérétiques , sans appel Ga): On sait quel fut le triste sort d’Anne Dubourg. Cependant le pape « voyait encore avec chagrin les » progrès de la nouvelle doctrine en France et dans les » Pays-Bas , quoiqu’il apprit avec joie le zèle des deux » rois Henri IT et Philippe IT pour en arrêter le cours ; il » ne cessait de les en faire solliciter par ses nonces et d’en » parler à leurs ambassadeurs (2). » La mort prématurée de Henri II affigea sensiblement Paul IV et hâta la sienne. Il mourut en recommandant aux cardinaux le très saint tribunal de l’inquisition (ce sont ses expressions) , et il ajouta, en s’adressant au car- dinal de la Gueva , qu’il avait la consolation en mourant de laisser, en la personne de Philippe IT, un prince que Dieu avait suscité pour la défense de la foi catholique et dont les bonnes intentions lui étaient connues (5). Le fanatisme des masses n’en était pas encore venu à approuver toutes les rigueurs de la papauté contre les hérétiques. A péine Paul IV avait-il fermé les yeux que le peuple de Rome se souleva avec fureur, mutila les statues du Pontife , brisa les portes des cachots de l’inquisition en délivrant les prisonniers , jeta aux flammes toutes les (1) Sismondi, XVIIL. 94-97. De Thou, liv. XXII. Sarpi, liv. V, n° 40: (2) Fleury, t. XXXI, liv. 154, n° 7. (3) De Thou , III-414. Fleury, |, 154, n° 13, DE LA QUATRIÈME SECTION. 283 procédures, mit le feu au palais inquisitorial, menaca du même sort le couvent des dominicains de Minerve , et poursuivit de ses clameurs et de ses outrages le grand- inquisiteur Michel Ghisleri, plus tard Pie V (1). Pie IV, qui succéda à Paul IV, suivit à peu près les mêmes traditions , quoique sa morale , un peu relächée, eût dà lui inspirer un zèle moins ardent. S’il usa moins de l’inquisition , au grand regret du futur Pie V, les con- seils de sa politique extérieure n’étaient pas moins rigou- reux. Laissons de côté le blâme sévère qu’il adresse au duc de Savoie pour s’être laissé fléchir par les malheu- reux Vaudoïs , ses sujets , et ses éloges pour les ministres du Roï Catholique, qui se montrent impitoyables pour les luthériens dans le royaume de Naples (2); ne nous occu- pons que de la France. Après la conjuration d’Amboise , qui cependant avait été punie , comme on sait , avec la dernière rigueur, le pape envoya à là cour de France un légat spécial chargé de se plaindre de l’amnistie qui , au épis de l'autorité pontificale , avait été accordée aux hérétiques les moins compromis. « Il devait, en même temps, remontrer au roi que le véritable remède au dé- sordre du royaume était de procéder juridiquement contre tous ceux qui seraient soupconnés d’hérésie, où si la mul- titude des hérétiques ne permettait pas qu’on prit cette voie , d'employer celle des armes, pour remettre tout le monde dans le devoir avant que le mal fût plus grand... que si le roi voulait se déterminer à réduire à l’obéissance les rebelles, avant que le nombre s’en augmentât et qu’ils devinssent plus puissants , il s’offrait de l’assistér de tout son pouvoir et d'engager le roi d’Espagne et les princes d'Italie de lui fournir de puissants secours. .… Si le prince (1) Fleury, 1. 154, n° 13, De Thou, 1. 23. Sismondi, XVIII-115. (2) Sarpi, conc. de trente, 1. V, n° 70, Sismondi, XVIHII-215. De Thou , 1. XXVII. 284 + MÉMOIRES ve pouvait se résoudre à employer les armes contre ses sujets.….…; le nonce lui proposerait une ligue contre Génève...... pour détruire l'infection dans son foyer (1). Suivant l'impulsion qui venait de si haut , le clergé, les moines, les ardents catholiques poursuivaient partout les huguenots et employaient pour.les découvrir les pro- cédés les plus odieux. « On avait mis, à chaque coin de »rue , de petites images de la Vierge , et les catholiques » fervents apostés forçaient tous les passants à ôter leur » chaperon ou leur toque ; si quelqu’un s’y refusait , on le »iraînait en prison comme huguenot , et les prisons se »remplirent de telle sorte qu’on fut obligé de supposer » une espèce de conjuration pour débarrasser le Châtelet »et conduire les hérétiques au supplice (2). » On ressuscitait contre les huguenots ces indignes fables inventées jadis par les payens contre les premiers chré- tiens : magie , dépravation de mœurs , mystères infâmes des conventicules, Le cardinal de Lorraine se chargea de lire à la Reine une de ces dénonciations calomnieuses en y ajoutant les explications les plus révoltantes (3). Cependant après la mort de François IT, qui était en- tièrement livré aux Guises, il y eut en France , dans l’opinion des classes les plus éclairées de la société, une vive réaction contre le systême d’impitoyable rigueur. L’illustre de l’Hospital venait d’entrer dans les conseils de la couronne. Aux états-généraux, qui furent réunis par ses soins, en 1560 el en 1561, le clergé seul et une faible minorité de la noblesse réclamèrent la répression de l’hé- résie avec toute la sévérité des édits de François [* et de Henri II. Mais dans les cahiers du tiers-état et de la majo- (1) Sarpi, L. V, n° 74. Fleury, |. 154, n° 99. De Thou, I. 26. Ray- nald. 1560. (2) Capefigue, IT-102. Voir aussi de Thou, 1. 23, d’Aubigné, de la Planche, Sismondi. (3) Sismondi, XVIHIL-119. De Thou, |. XXII, DE LA QUATRIÈME SECTION. 285 rité de la noblesse on demandait : « qu’on ne persécutât » plus personne pour la foi, et que ceux qui étaient accusés »d’erreur fussent relächés de leur: prison ou rappelés de » leur exil , sous la seule obligation de ne pas troubler » l'ordre public (1). » Il faut Mi dans l’histoire de France de Garnier, tome XV ; toute l’analyse de ces cahiers et les discours du chancelier de l’Hospital. On est heureux de voir que la. cause de l’humanité et les intérêts de la morale universelle ont toujours eu leurs défenseurs. À la suite des états-généraux d'Orléans était intervenu un édit , résultat des conférences du conseil-d’état avec les députés des parlements de province ; il tolérait le culte protestant, mais seulement dans les maisons parti- culières ; il laissait aux évêques la connaissance du crime d’hérésie et sa punition, qui ne devait pas excéder le ban- nissement ; il punissait d’ailleurs de ia confiscation de corps et de biens la célébration de toute assemblée reli- gieusc. Le parlement de Paris ne voulut accorder à cet édit qu’un enregistrement provisoire. Le pape Pie IV loua la conduite du parlement , et se plaignit de ce qu’au pré- judice des Décrétales, on n’admit contre l’hérésie que la peine du bannissement (2). Les états provinciaux , au contraire, réclamèrent contre la rigueur de l’édit. Un autre édit de tolérance, du 17 janvier 1562, ne fut pas mieux accueilli par le pape. Dans l'assemblée réunie pour préparer cet édit, le digne’ chancelier de PHospital avait proclamé des maximes qui devaient plus tard servir de base à notre droit public : « L’état politique diffère de l’état religieux... il n’y a point d’impossibilité à être bon Français sans être bon chrétien et à vivre en paix sans être membres d’une même religion. » Pie IV traita d’hé- rétique le discours du chancelier et menaca de le déférer (1) Garnier, t. XV, p. 79-92. — 160-170. (2) Dupuy. Mém. p. 81, Sarpi, L: V, n° 71. 286 MÉMOIRES à l’inquisition. Gharles IX écrivit pour excuser son chan- celier. Mais tandis que le pape saisissait toutes les occasions de blâmer hautement l'esprit de charité et de tolérance pour les huguenots, il laissait les catholiques ardents s’a- bandonner à toutes les inspirations de leur zèle, sans éle- ver la voix pour la sainte cause de l’humanité, Nous ne parlerons point des exécutions de Tavannes én Bour- gogne, de Ponievez de Flassan à Aix, du due de Guise à Vassy, on dirait qu’ils n’étaient pas ses sujéts, qu’ils n’é- taient. pas ecciésiastiques et qu'il n’avait rien à voir dans leur conduite. Mais lorsque Fabrizzio Serbelloni ;, général des troupes pontificales à Avignon et proche parent de Pie IV; surprit Orange, « fit précipiter les huguenots sur des pieux, des hallebardes, des épées et des piques ; en fit pendre à la cheminée et brûler à petit feu....; » et que la rage de ses soldats , n’épargnant ni l’âge ni le sexe , se fut livrée à des atrocités que notre plume se refuse à re- tracer (1), le Pontife, qu'avait si vivement ému la haran- gue du chancelier de l’Hospital, ne crut pas de son devoir d’infliger au moins un blâme à la conduite de son général et de son parent. Cependant une ligue s’organisait entre les Guises, Phi- lippe IT et le pape , dans le but avoué d’exterminer les hérétiques. Du projet de cette ligue , qui menaçait de déchéance la dynastie des Valois si elle refusait son con- cours, sortit le Triumvirat (2), dont Catherine fut obligée de subir le joug pour conserver la couronne à son fils. La première guerre civile éclate. Le nouveau conseil du roi déclare « les huguenots proscrits et exhorte tous les catholiques à s’armer dans les villages et à leur courir sus. (1) Varillas, Hist, de Charles IX. Hist. des Papes, par Bruys, 1. IV, p. 654. D’Aubigné, etc. De Thou, liv. 31. (2) Capefigue, t. II, p, 226 et 245, DE LA QUATRIÈME SECTION. 287 Chaque dimanche, les curés lisaient cet arrêt, au prône, à leurs paroissiens. Des moines se mettaient à la tête des paysans, couraient les campagnes et commettaient cha- que-jour des actes de la plus horrible férocité..… L'évêque du Mans , ayant levé une bande de 500 soldats , attaqua l’un après l’autre tous ceux qu’il seupconnait d’avoir favo- risé la réforme ou d’avoir montré De bienveillance aux réformés (1). « Le cardinal de Lorraine et les curés, écrit Ét. Pas- » quier, prêchent par toutes les paroisses contre la mau- » dite huguenoterie. Un minime venait de dire en pleine » chaire , qu’il fallait mourir et se laisser espuiser jusqu’à » la dernière goutte du sang , plutôt qué de éneiots is » contre l'honneur de son Dieu et de son Église , qu'autre »religion ait cours en la France que celle que nos ancé- »tres avaient si étroitement et si religieusement obser: »vée.….... Ge m'a été chose nouvelle de voir prêcher un » cardinal comme peu auparavant un minime; il a excité » grandement le peuple aux armes (2). » Il est inutile de dire que cés prédications n'avaient pas cu besoin d’être provoquées par l’édit de prescription. Dès 1561, « les quartiers étaient agités par des prédica- »tions de paroisse. On voyait des moines dans les halles , : » soulevant les femmes et les fières confréries par l'aspect » des vierges et des saints mutilés (3). » On äpprenait au peuple à se faire juslice par ses propres mains. Voyez ce que dit Pasquier du « frère Jean de Hans, qui faisait rage de maltraiter les réformés. …. (4) » Le peuple prononcait des arrêts de proscription et les exécatait : « Ge jour... »le lieutenant-civil arriva pour annoncer que le peuple (1) Sismondi, XVILL, 295-298. De Thou, I. XXX, (2) Lettr. d’Est. Pasquier, liv, IV, let, 15, (3) Capeñigue, LI-217 et 229, (4) Zbidem. 288 MÉMOIRES » désignait le nom de ceux qui devaient vider la ville; »sils ne le faisaient , il voulait les piller et sacca- »ger (1). La guerre qui suivit fut atroce. « Là où le huguenot est le maître , il ruine les images , démolit les sépultures et tombeaux (même , passant par Cléry, iln’a pas par- donné à celui du roi Louis onzième), enlève tous les biens sacrés et voués aux églises. En contre eschange de ce, le catholique tue, meurtrit , noie tous ceux qu'il con- naît de cette secte, el en regorgent les rivières (2).» Le légat du pape semblait excuser par sa présence ces excès du zèle religieux. Il était à la prise de Rouen, qui fut suivie d’épouvantables massacres (3). C’est en vain qu'on voudrait mettre tout cela sur le compte des vengeances populaires. Il ne faut pas soule- ver, même pour une bonne cause , des passions qu’on se- rait impuissant à contenir dans de justes bornes. Mais enfin, quand on les a imprudemment soulevées, c’est un devoir d’en biâmer au moins les excès , et ce blâme, nous ne le trouvons exprimé nulle part. Ceux qui conservaient encore quelque sentiment d’hu- manité , dans les deux partis , furent bientôt las de cette première guerre civile, On parla d’accommodement. « Rien ne faisait plus de peine au pape que les avis qu’il »avait reçus d’un accommedement proposé avec les pro- » testants, à condition de leur laisser le libre exercice de » leur religion; parce qu’il prévoyait que, si la France » jouissait de la paix, elle ferait prolonger un concile dont » il avait hâte d’être débarrassé (4), » (1) Regist. du Parlem!, Capefigue, IL-251. (2) Estienne Pasquier, lett. 17, liv. IV. (3) Capefigue, 11-208. — Consulter aussi de Thou, liv. XXI. Sismondi, XVIIL-309. Anquelil ann. 1562. Mémoires de Brautome, de Montluc, de Tavannes. Hist, du Calv., par Maimbourg. (4) De Thou, t. LV, liv, 33, p. 345. DE LA QUATRIÈME SECTION. 289 À la nouvelle que le roi avait accordé la paix à ses sujets par l’édit d’Amboise (mars 1565), il adressa une bulle (7 avril) aux cardinaux inquisiteurs-généraux de la répu- blique chrétienne , par laquelle il leur permettait de pro- céder en général et en particulier contre tous les héré- tiques et leurs fauteurs, même dans les états où ils n'avaient pas juridiction (1). Plusieurs prélats français, soupconnés d’hérésie , et la reine de Navarre , furent cités à Rome, pour y rendre raison de leur foi, sous peine de déchéance. La cour de France s’opposa à ces prélentions. . Gelie lutte de la papauté- contre l’esprit de tolérance encourageait naturellement les populations catholiques, qui se trouvaient en présence des protestants, à résister à l'édit. « Les prêtres et les moines leur répétaient sans cesse que, quelle que fût la faiblesse ou la trahison du gou- vernement , leur devoir à eux était de re pas souffrir d’ou- trage à la divinité, mais d’effrayer ou de punir les héré- tiques qui s’assemblaient sous leurs yeux pour offenser Dieu (2). L Peu s’en fallut même que la Saint-Barthélemy à Paris ne füt avancée de dix ans. Il paraît que le connétable de Montmorenci était à la tête du complot que déjoua Gathe- rine, avertie à propos, en amenant le roi à Paris, « Quel- »ques-uns des complices les plus’ furieux , abandonnés de » leurs chefs, furent pendus la nuit, sans forme de procès, » aux fenêtres de leurs maisons... Mais ce que le conné- » table entreprenait dans la capitale contre les calvinistes, » Damwville, son fils, le tentait en Languedoc, Tayannes en # » Bourgogne et beaucoup d’autres gouverneurs dans leurs » provinces (5). » (1) De Thou, t. IV, p. 575. (2) Sismondi, XVILE-375. Tavannes, c. 18 et 19. Montluc, V-402. (3) Anquetil, Esprit dé ia Ligue et Histoire de France. Capetigue, Il-412. ae Ou 1 19 290 MÉMOIRES Pour vaincre ces résistances, d’autres disent pour pas- ser en revue les forces des protestants , Gatherine entre- prit avec son fils un voyage dons le Midi. A Dijon, la reine wayant pas voulu promettre de supprimer lédit de paci- lication, « les catholiques bourguignons s’associèrent en » confréries, sous l’invocation du Saint-Ésprit, s’engageant » par serment à se tenir prêts pour attaquer les protes- »tants dès que Poccasion paraîtrait favorable. Dans les » sermons adressés à ces confréries, on célébrait toujours » Philippe IT comme le vengeur de la Foi, comme le mo- » narque religieux qui ne laissait subsister aucune hérésie » dans ses états (1). » C'était , en effet, vers Philippe IE , vicaire du pape, Pontife armé, personnification de la ligue (2) , que se tournaient les espérances des catholiques. Les archives de Simancas ont appris « qu’il élait en correspondance sui- » vie avec les cardinaux de Lorraine , de Guise, de Tour- »non , d’Armagnac et les princes de Guise , et qu’il se » mettait à leur disposition pour exterminer les héréti- » ques... » que de plus il entretenait des relations se- crètes avec les moines de France , « qui avaient organisé dans leurs couvents un systéme complet d’espionnage à son profit (3). » En juillet 1561, un prêtre , nommé Ar- thus Didier, avait été arrêté près d'Orléans , porteur d’une requête adressée au roi catholique , au nom du clergé de France , pour implorer son aide contre les pro- testanis (4). Aussi pouvait-il écrire d’un ton de maître à Catherine : « Que si elle manquait à son devoir de punir les sectaires avec toute la rigueur dont avait usé Henri IE, il était résolu , de l'avis de son conseil , de sacrifier tous ses biens et sa vie même pour détruire cette peste... (1) Sismondi, XVIII-415. * (2) Gapefigue, préf. du tome II, page XII. (3) Le même, I-68-147-226. (4) Sismondi, XVILL-247, De Thou, liv. 28: Sarpi, liv, 5, n° 71. DE LA QUARRIÈME SECTION. 291 comme il en était sollicité.par les grands et les peuples de .ce royaume G). Mais on ne s’en tenait pas à des louanges diériles de _ l'intolérance. Au printemps de 1566 ; on comptait déjà plus de 132 personnes qui, depuis la paix, avaient été tuées en haine de leur religion ; sans que les: tribunaux eussent puni aucun de ces meuftres (2). Catherine cependant poursuivait son voyage et prenait ses mesures, pour contenir au: besoin les calvinistes ; en faisant bâtir des citadelles dans l’intérieur des villes où ils étaient nombreux. À Bayonne, en juin 1565; elle eut une entrevue avec le duc d’Albe , le plus intime confident de Philippe IL. Il était question d’aviser aux moyéns d’apai- ser les troubles religieux en France. Catherine aurait préféré les voies de douceur et de ménagement. « Le duc d’Albe repoussa l’idée d’une nouvelle transaction... 1l fallait , pour extirper le mal jusqu’à la racine ; employer les remèdes sévères, sans épargner ni le fer ni le fe, car la douceur et le support-ne servaient qu’à l’accroître ()- Ù « On discuta les moyens de détruire à tout jamais la » huguenoterie, et.les dépêches du duc d’Albe, dit Gape- » figue, qui les avait vues , constatent que, dès cetie épo- que, l’idée d’un massacre général des hérétiques, n’était »pas repoussée, Elle. était en progrès dans la,.tête des » chefs de parti (4). » : Il résulie clairement de tout ce que nous venons de : rapporter, que si le.massacre fut arrêté.en principe , dès l’entrevue de Bayonne , ce n’est pas Catherine seule qui doit être mise en cause : c’est tout un parti qu il faut ac - cuser. Il est même plus que probable à nos, yeux, mal- gré l’assertion. contraire des historiens Davila et Adriani, (1) De Thou, liv. 28. Fleury, liv. 157, n°.143. Sarpi, L. V, n° 75. (2) Sismondi, XVIII-422. (3) Davila, t. IL-146, De Thou, Liv. 37, t 235. (4) Capeñgue , II-412, 292 MÉMOIRES qui ont voulu fairé honneur à Catherine d’une longue préméditation, que ce massacre ne se présentail alors à son esprit que comme une dernière extrémité qu'elle re- culerait autant que cela dépendrait d'elle. En paraissant accepter complétement la pensée de ces conseils violents, elle avait un double but : amuser par cette promesse les impatients du parti catholique, qui menaçaient de se faire eux-mêmes justice, etse concilier la bienveillance de Phi- lippe IL, du pape et des autres princes catholiques, par- faitement d’accord à cette époque sur la politique à suivre contre les hérétiques. Ces conférences de Bayonne , en effet, avaient été tenues à la sollicitation du pape (1). Un promoteur des mesures rigoureuses , non moins ar - dent que Philippe, succéda, peu après ces événements, à Pie IV, c'était le grand-inquisiteur, Michel Ghisleri, qui . prit le nom de Pie V. L'importance du rôle qu’il doit avoir dans la suite appelle naturellement un regard ré- trosfectif sur son caractère et ses antécédents. Michel Ghisleri , entré dans l’ordre des Dominicains dès l’âge de quatorze ans , avait appris, au sein de celle milice armée contre les hérétiques , à invoquer plus sou- vent le Dieu jaloux, le Dieu irrité de la loi judaïque, que le Dieu doux, le Dieu clément de l'Évangile. Il s’y acquit bientôt ane grande réputation de sagesse et d’austérité. « Paul IV, instruit de son mérite et de sa vertu, lui donna » l'évêché de Sutri en 1556, le créa cardinal en 1597, et »le fit inquisiteur-général de la Foi dans le Milanais et la » Lombardie ; mais la sévérité avec laquelle il exerca son »emploi dans des’ temps pénibles où les erreurs péné- » traient partout, l’obligea de quitter ce pays. On l’envoya »à Venise, où l’ardeur de son zèle trouva encore plus » d'obstacles (2). » — « À Bergame, état de Venise, pour (1) J.-B. Adriani apud de Thou, t, V, liv. 37, p. 35, (2) Feller, art, Pie V. DE LA QUATRIÈME SECTION. 293 » mettre le comble à l’audace et à la roideur avec laquelle vil exerçait Son emploi , il osa faire citer à son tribunal » l’évêque même de Bergame. Le gouverneur de la ville, »au nom du sénat , arrêla le cours d’une procédure si » violente , en ordonnant au moine insolent et étourdi de » sortir promptement de la ville (1). » On sait si le pape Pie V oublia linjure faite par le sénat de Venise à l’inqui- siteur Ghisleri. Jusqu’en 1557, la charge de édétiquitatt avait été partagée entre le pape et trois autres cardinaux. « Paul IV, »en élevant Ghisleri au cardinalat , le nomma seul grand- »inquisiteur, avec un pouvoir absolu. Pour justifier cette » conduite, le Pontife dit que le nombre des inquisiteurs » affaiblissait une puissance qui devait être insurmontable »et être exercée irrésistiblement sur toutes les personnes: » qu'il avait appris, par sa propre expérience, que les uns » ruinaient souvent , sous prétexte de douceur et d’huma- »nité, ce que les autres avaient sagement et sévèrement » ordonné (2). » Le cardinal Alexandrin ne trompa pas la confiance que le zélé dominicain avait inspirée à Paul IV. Il se rendit odieux par une rigueur et une sévérité que Pie IV, suc- cesseur de Paul IV, fut plus d’une fois obligé de tempé- rer (3). -_ @ A la mort de Pie IV, il fut mis sur le siége de saint » Pierre. Elevé à la première place du christianisme par » son mérile , il redoubla de zèle, et déploya contre l’hé- » résié une sévérité devenue plus nécessaire que jamais, » et qui étoufferait Les sectes dans leur naissance, si ceux » qui ont l'autorité en main songeaient à l’employer. (Dictionnaire historique de Feller, art. Pie V, 9"° édition (1) De Thou, V, liv. 39, p. 129. (2) Zbid. p. 130. (3) Zbid. 294 | MÉMOIRES revue el corrigée par une société d’ecclésiastiques , 1837, 4 vol. in-4°.) « Le peuple , ayant appris son élection , frémit de co- » ère et d’indignation. Il avait la mémoire toute récente » du pontificat de Paul IV, qui avait élevé Ghisleri aux » honneurs et aux dignités , et il craignait que Pie V ne » fil revivre en sa personne le Pontife dont il était la créa- » ture. Sa crainte ne fut pas vaine... Devenu pape , il » exerça lui-même et fit exercer la juridiction inquisito- » riale avec tant de rigueur et de violence que plusieurs »essuyèrent des vexations et des persécutions horri- » bles (1 1). » « Dès les premiers jours de son règne, pour que l’Italie » connût bien sa détermination de faire périr sur le bû- » cher tout homme dont la foi serait suspecte... il fit » demander au duc Gôme de Médicis de lui livrer Pierre » Garneseochi , son sujet, son favori , un des plus émi- » nents littérateurs de Florence ; à la république de Ve- » nise, Giulio Zanetti, savant de Padoue , et au sénat de » Milan , Aonius Palearius , le plus éloquent professeur » des lettres grecques ét latines d'Italie ; tous trois pas- » saient pour protestants , tous trois furent condamnés » au feu, » et subirent leur supplice après avoir été obli- gés de signer une sorte de- formule de rétractation par laquelle ils reconnaissaient « que le souverain Pontife » avait le droit de faire périr les hérétiques, » Le grand crime de Palearius était d’avoir dit « que linquisiion était un poignard levé sur tous les gens de lettres (2) : ..+ . - + Onlelui fit bien voir. « Pie V avait une si grande aversion pour la clémence (1) De Thou, V-130. (2) Sismbtidi, XVIII-462, De Thou, V-132.—Vid, Fleury, Adria- ni, Laderchii an. Ecclest, Ant. Giccarelli. Vit. Pi V. De Potter (Hlist. ai Christ), t. V-200. DÉ LA QUATRIÈME SECTION. 295 » que, faisant un jour l'éloge de cette aimable vertu, uni- » quement pour cacher son humeur dure et inflexible , il » termina enfin son discours en disant que la clémence » consistait à punir très sévèrement les coupables (1). » Philippe II était le seul monarque qui parût à l’austère Pontife avoir connu toute l’étendue de ses devoirs. Tou- tefois il ne cessait « de l’exhorter à extirper partout l’hé- résie , de le louer de sa vigueur, de lui recommander de ne point se relâcher, surtout dans les Pays-Bas où le dan- ger lui paraissait le plus grand. » Ainsi Philippe IT, l’au- teur de tant d’auto-da-fé, le monarque qui transmettait à son digne ministre, le duc d’Albe, des ordres impitoya- bles, qui faisait mourir son fils, don Carlos, suspect d’hé- résie (2), réalisait à peine , aux yeux du Pontife , Pidéal d’un roi catholique ! « Quant à la France , il se défait » d’elle ; il hésitait s’il devait la regarder comme chré- » tienne ; néanmoins il pressait Gatherige de prouver à » PÉglise qu’elle ne méritait pas d’être classée parmi les » fauteurs des hérétiques, et que, malgré les ménagements » auxquels elle s’élait prêtée, elle ne perdait pas de vue » l’exécution de sa promesse de travailler à leur extirpa- » tion totale (5). » À peine assis sur le trône pontifical en 1566, « Pie V » faisait solliciter par ses députés secrets, le roi de France » de prendre les armes contre les huguenots. En échange, » il lui promettait la prédication d’une croisade , le secours » du roi d'Espagne et du duc de Savoie, réunis dans la » pensée universelle de réprimer l’hérésie (4). » 2 (1) De Thou , V-133. (2) Pie Ÿ donna à Philippe de grandes louanges pour cet acte de sévérité (de Thou, liv. XLIIE, t. V-437. (3) Sismondi, XVIIT-464 , d'après Ant. Ciccarelli Vit. Pii V. — Laderchii Ann. Ecclest. (Voyez aussi Lettres de Pie V, passim ; Cape- figue, passim ; Ferreras, Synopses de Espana, XIV.) (4) Capefigue, II-419. 296 MÉMOIRES Si la correspondance de ce pape ne nous avait été con- servée, nous ne pourrions croire, malgré le témoignage des historiens, à quel excès de zèle se laissait entraîner un ministre de Celui qui a dit : Beati mites, beati paci- fici… misericordiam volo, et non sacrificium. « Il'existe, dit Capefigue, un monument de la plus » haute curiosité historique : la correspondance du pape » Pie V au milieu de ces tourmentes sociales, et l’on » s’explique tout un siècle , en lisant les cruelles maximes » qu’un homme, doux de mœurs et de caractère, expose, » et veut meltre en pratique (1). » Il n'appartient qu’à M. Capeñigue, qui, faisant abstraction de la moralité des faits historiques , ne semble en avoir envisagé que le côté pittoresque ou dramatique, de ne voir ici qu’ un monu- ment d’une haute curiosité. Pour nous, c’est au point de vue de l’enseignement moral que cette correspondance nous paraît précieuse, En nous montrant à quelles fatales conséquences la doctrine d’intolérance entraîne les meil- leurs esprits , elle nous enseigne-combien est respectable et véritablement saint le principe de la liberté de cons- cience. Le criterium des doctrines est dans leurs consé- quences morales : £x fructibus earum, cognoscctis eas. Depuis son élévation au pontificat , le but que poursui- vait Pie V, dans son active correspondance avec Philippe II et la cour de France , était la reprise des hostilités contre les hérétiques. Le duc d’Albe fut envoyé en Flandre. En passant par Alexandrie de la Paille, il dépécha Bernardin de Mendoze au pape , pour reprendre les négociations qui avaient été commencées à Bayonne avec la reine Cathe- rine de Médicis, et pour délibérer sur ce qu'il y avait à faire (2)... Bientôt, il s'établit « des conférences entre le » pape ou ses ministres et ceux des deux rois : conféren- (1) Capeñigue, 11-489. (2) De Thou, liv, XLI, t, V-290. DE LA QUATRIÈME SECTION. 297 » ces où le pontife ne travaillait qu’à entretenir et aug- » menter la haine des deux princes contre les protestants » de France et des Pays-Bas , et à faire allamer dans le » même temps le feu de la guerre par Philippe ;, en Flan- » dre, et par Charles, dans son royaume (1). » Il n’y réussit que trop bien. On n’observait plus les édits donnés en faveur des protestants; on en éludait les dispositions soit par de nouvelles déclarations, soit par la mauvaise volonté des juges et des gouverneurs de provinces (2). « Les haines des catholiques contre eux étaient excitées » par des prédications continuelles devant les petites ima- » ges où brûlaient les lampes saintes , au coin des rues (3).» La guerre civile recommencça. Après des succès divers, la paix fut encore conclue, le 23 mars 1568. Non seule- ment, le pape bläma cette paix, mais il écrivit à des gou- verneurs de provinces pour les encourager à ne pas la respeeter. Voici sa lettre du 5 juillet 1568, à Jacques de Sayoie , duc de Nemours : « Nous t’avons toujours chéri à cause de ton zèle pour » la religion catholique, et de la constance de ta foi que » tu as ane dans les périls du royaume de France; » mais, lorsque nous avons appris qu'après la paix qui » vient d’être faite avec les hérétiques et les rebelles du » roi très-chrétien, notre fils, tu as été le premier qui, » dans les villes de Lyon et de Grenoble, as refusé d’en » exécuter les conditions comme fatales à la religion ca- » tholique , et dérogatoires à la dignité du sois notre » amour pour Lot , et notre respect pour ta vertu, s’en sont » infiniment augmentés; la tristesse que nous causaient » les conditions de cette paiX, a été soulagée : aussi, ne » voulons-nous point omettre de t’en attribuer la gloire, » et de t’en rendre grâces, car nous jugeons que tu as (1) De Thou, l. XLIL, V-344. (2) Le même, V-343.. (3) Capefigue, IT-437. 298 MÉMOIRES » bien mérité de la religion catholique, du Roi Très-Chré- » tien et du royaume de France. Plaise à Dieu que tous » les grands du royaume et tous les gouverneurs de pro- » vinces imitent ton exemple (1). » Gette lettre n’a pas besoin de commentaire ! La tristesse du pontife , à cette époque, avait encore d’autres consolations, Le duc d’Albe, celui qui , en quit- tant la Flandre, put se vanter d’avoir fait périr 1 8,000 re- belles et hérétiques de la main du bourreau, le duc d’Albe venait de faire tomber les têtes des comtes d’Egmond et de Hoorn et de tant d’autres... , dont le plus grand crime était de s'être associés contre la sainte inquisition d’Es- pagne (2). Pie V lui écrit à la date du 26 août 1568 : « Non seulement, nous te félicitons , toi que le secours d’en-haut a si manifestement assisté, landis que tu com- battais dans les combats du Seigneur, mais nous te re- mercions au nom de toute l'Eglise , de ce que, sans être rebuté par aucuns travaux, sans reculer devant aucun danger, tu n’as pas cessé de bien mériter d’elle (3). » Dans cet état de choses , on concoit toutes les difficul- tés de la position de Catherine. Obligée qu’elle était, pour la justification de sa politique auprès de-Philippe et du pape, de présenter la paix accordée aux protestants comme un simple délai apporté à leur châtiment , elle ne pouvait songer à la faire respecter (4). Le chancelier de l’Hospital n’était plus écouté : « On ne doit point garder de foi aux hérétiques , disait-on hautement; c’est une action juste et belle de les massacrer (5). » Aussi, sous ce prétendu régime de paix, faisait-on une guerre de détail (4) Laderchii Ann. Eccl, XXIII-125, apud Sismondi, XIX-21. (2) Voyez le système incroyable de proscription suivi à l’égard des Pays-Bas par les inquisiteurs d'Espagne : de Thou, liv. XLILE, t. V, p. 437 et 448 à 452. (3) Laderchii Ann. Eccles, XXIII-138, apud Sismondi, XIX-21. (4) Davila, IV-187. (5) Capefigue, 11-449, DE LA QUATRIÈME SECTION, 299 aux huguenots, En vain, « ils se plaignaient : qu’à Paris, » les prédicateurs se déchaînaïent avec tant de rage con- »tre eux , qu'il paraissait qu'il s'agissait bien moins de » rejeter leurs doctrines que de les livrer au premier jour » à la fureur du peuple ; qu’on devait remarquer surtout » les principes de certains théologiens nouveaux , qui se » donnaient le nom de jésuites : savoir, qu’on ne doit pas » faire de paix avec les hérétiques , qu'on n’est point » obligé de leur garder la foi qu’on leur a donnée ; que » c'était une action de piété , et utile pour le salut que de » les tuer ; que tous les chrétiens devaient prendre les ar- » mes pour exterminer celte peste ; qu’au décret du con- » cile de Constance , qui permet de ne pas garder la foi . » aux hérétiques , ils joignaient l’Ecriture , pour prouver » là même chose ; qu’ils citaient, par exemple, ceux que » les Lévites tuèrent par ordre de Moïse, ceux qui avaient » adoré le veau d’or, les prêtres de Baal que Jehü enferma » par une supercherie dans le temple de leur dieu , et qu’il » fit tous massacrer (1). Qu'on entendait de toutes parts » les discours et les menaces des factieux qui disaient (4) Pourquoi Gt que Bossuet, le grand Bossuet di méme: ait ap- prouvé ces désolantes doctrines. Lorsque nous lisons, au début de sa Politique tirée de l’Écriture-Sainte , ces belles pr opositions : les hom- mes n'ont qu'une même fin et un même objet qui est Dieu. L'amour de Dieu oblige les hommes à s'aimer les uns les autres, Tous les hom- mes sont frères, ete, Combien peu nous nous attendons à trouver ceci plus loin : Jehu est loué de Dieu pour avoir fait mourir tous les faux prophètes de.Baal qui séduisaient le peuple, sans en laisser échapper un seul : en cela il ne faisait qu’imiter le zèle d’Elie (liv. VIE, art. 3, p: 9). Ds grand philosophe catholique de l'Italie, M. le curé Ron, a fait au moins la part des temps : Le Dieu des pairiarches, dit-il, est . le Dieu terrible de la nature, nous avons découvert depuis dans l’é- vangile le Dieu de la grâce. Rosmini-Serbati (opuascules) *: * Illa inimicorum interfectio carnali adhuc popalo congruebat, cui Lex tanquam pœdagogus data erat, sicut Apostolus dicit...,. bæc.est brevissima et apertissima differentia duorum Testamentorum timor et amor : illud ad veterem, hoc ad novum hominem pertinet, — (August, contrà Adimant. Manich. discip. cap. XVII.) 300 MÉMOIRES » que Les huguenots n'avaient plus que trois mois à vivre ; » que dès que la moisson et les vendanges seraient ache- » vées, on ferait main-basse sur eux; que le roi même ne » le pourrait pas empêcher, quand il le voudrait, et que » s’il le voulait, on l’enfermerait dans un couvent, et » qu’on en mettrait un autre à sa place (1). » Ge n’était pas la première fois que les catholiques ardents mena- çaient de renverser la dynastie, si elle persévérait dans sa tolérance pour les hérétiques. Catherine, pour ne point compromeltre son pouvoir et les droits de ses fils, se laissa entraîner par ces conseils violents. Des massacres eurent lieu à Amiens, Auxerre , Rouen , Bourges , Issoudun , An- train , Troyes, Orléans, Blois, etc. ; elle ne chercha pas à en faire punir les auteurs. Le chancelier de l’Hospital devenait un conseiller importun. Pour le perdre dans l’es- prit du roi, elle l’accusa de huguenoterie. « Il arriva une » chose qui donna occasion à ses ennemis de le rendre » encore plus suspect. Le pape accorda au roi une bulle » qui lui permettait d’aliéner les biens de l’Eglise jusqu’à » la somme de 150,000 écus de rente , à condition que » cette somme serait employée à faire la guerre aux héré- » tiques , afin de les exterminer entièrement ou de les for- » cer à se soumettre à l'Eglise romaine (2). » Le chance- lier s’opposa , à cause de cette clause barbare , à la publi- cation de la bulle , et entraîna l’avis du conseil. Ge fut la dernière victoire de l’esprit de tolérance. L’Hospital re- connut bientôt qu’il était impuissant à conjurer l'orage. Par des dénis de justice calculés, on provoquait les hu- guenots à la révolte. Il résigna les sceaux. Peu après, la guerre éclate. Là même, où les huguenots, comme à Or- léans, ne songent pas à se défendre , ils sont massacrés par une populace ameutée par les moines (3). (1) De Thou, t. V-516. (2) Ibid, 520. (3) Sismondi, XIX, p. 58. DE LA QUATRIÈME SECTION. 301 Quand le pape apprit que Gharles IX s'était enfin dé- cidé à la guerre, il écrivit à tous les princes catholiques pour les inviter à soutenir ce fils zélé de l'Eglise, qui en- treprenait l’entière extermination des misérables hugue- nots. Lui-même envoya un corps de troupes auxiliaires de 4,000 hommes d’infanterie et de 800 chevaux. Le cardi- nal de Lorraine crut devoir prendre part en personne à cette guerre sainte , et Tavannes eut besoin de lui rappeler la maxime : « À chacun son métier, ce n’est pas trop. » À Jarnac et à Moncontour, les protestants éprouvèrent deux sanglantes défaites , et un grand nombre d’entre eux furent faits prisonniers. À la nouvelle de la victoire de Jar- nac , Pie V écrivit au roi, à Catherine, au duc d'Anjou, pour les féliciter, et surlout pour leur recommander de livrer impitoyablement tous les prisonniers au bourreau, et de poursuivre le reste des hérétiques jusqu’à leur en- tière extermination (ad internecionem usque). Voici quelques extraits de ces lettres (Epist. Pii pa- pæ V. Edid. Goubau. Auturp. 1640) : « Nous avons levé les mains au ciel en actions de grâces, » écrit-il à Charles IX, en apprenant la mort de Condé » (tué par Montesquiou , après qu’il se fut constitué pri- » sonnier)...; mais, plus le Tout-Puissant s’est montré » bon, en envoyant la défaite à nos communs ennemis, » plus il te faut redoubler d’efforts pour poursuivre et » achever ce qu’il en reste, de manière à arracher jus- » qu'aux dernières racines du mal... Point de pitié pour » les prisonniers... Qu’aucune considération de personnes » ou de choses ne te fasse épargner les ennemis de Dieu. » Ta ne pourras apaiser Dieu ; que si tu venges les injures » qu'il a reçues , en livrant ces hérétiques , les plus scélé- » rats de tous les hommes , aux rigoureux supplices qu’ils » n’ont que trop mérités.. Si tu n’écoutes pas ces con- » seils , redoute le-sort de Saül , qui fut dépouillé du trône » et de la vie, pour avoir épargné, malgré l’ordre de 302 MÉMOIRES » Dieu , transmis par Samuel , le roi des Amalécites..… Get » exemple doit servir d’enseignement aux rois , et les aver- » lit de ne jamais négliger les vengeances célestes (1). » Ces conseils sont répétés presque textuellement dans une lettre de la même date adressée à Catherine. Plus tard , Pie V est informé que l’on est disposé à user d’indulgence à l'égard de quelques prisonniers. Il en écrit aussitôt à Catherine : « Nous apprenons qu’il y a certaines gens qui s’occu- » pent de faire relâcher quelques-uns de ces hérétiques » qui sont prisonniers, et de les soustraire ainsi à leur » châtiment ; il faut que tu emploies tout ton zèle et toute » ton habileté pour l’empêcher, et pour faire subir à ces » scélérats leur juste sapplice. » Pie V ajoute encore la menace aux conseils : « Que Catherine se souvienne de la colère de Dieu contre Saül, colère qui serait proportion- née à sa bienveillance actuelle , si on négligeait les dons de cette dernière (2). » C’est dans le même esprit qu’il écrit au roi à la même date : « Tu ne peux différer la punition (1)... Sed quanto benegnius tecum nobiscumque egit Deus, tanto enixius ac diligentius hujus occasione victoriæ enitendum est tibi ut eorum qui restant hostium relliquias persequaris atque conficias , omnesque tanti tamque corroborati mali radices atque etiam radi- cum fibras funditus evellas..... hoc autem facies , si pullarum perso- narum rerumque humanarum respectus te in eam mentem adducere poterit ut Dei hostibus parcas..… non aliter Deum placare poteris quam si Dei injurias sceleratissimorum hominum debita pœna seve- rissime ulciscaris..….… Propouat sibi ante oculos majestas tua Saülis regis exemplum, qui cum a Deo per Samuelem prophetam jussus erat, etc., etc. Goub. Ep. Pü pap.V, lib. ILE, ep. 10, 28 mars 1569. Vid. Ep. II. (2) Quod dari operam istic ab aliquibus audimus ut ex eorum hæreticoram qui capti sunt üümero quidam liberentur inultique abeant; quod ne fiat utque homines sceleratissimi justis afficiantur suppliciis curare te omni studio atque indastria oportet (ibid: ep. 12, 13 avril). DE LA QUATRIÈME SECTION. , 0 de ces hérétiques qui ont offensé la majesté divine de mille manières, Car si, par quelque considération que ce soit, tu négliges de poursuivre et de venger ces offenses, Lu lasseras certainement sa patience , et tu provoqueras sa colère. Ne te laisse done émouvoir ni par les prières ni par les liens du sang (1). » La lettre que ce pontife adressait au duc d'Anjou, con- tenait aussi les plus pressantes recommandations de sévé- rité : Ton devoir, à toi, lui dit-il, est non seulement d’user de tous les moyens pour que la justice et les lois aient leur libre cours, et pour qu’on ne pèche pas en cela par l’indulgence , mais encore de te montrer inexorable à ceux qui auraient l’audace de te supplier pour ces scélé- | 1 C) RS 4 (1) Nam si qualibet inductus causa quod non putamus, ea de qui- bus offeaditur (Deus), insectari atque ulcisci detuleris certe ad iras- cendum éjus patientiam provocabis (lib. 3, ep. 16). (2) In quo illæ tuæ partes erunt, non solum omnibus modis adju- vare ut justitiæ ac lesibus locus sit, nihilque in ea re indulgentia pec- cetur, sed eliam his qui pro scelestissimis hominibus supplicare au- debunt inexorabilem te præbere (lib. 3,ep. 17, 26 avril) *. * Dans des circonstances semblables, un père de l'Eglise qui w’avait pas moins de zèle que Pie V pour Forthodoxie croyait devoir donner des con- seils bien différents : Voici ce qu’écrivait saint Augustin, après les conférences de Carthage, au tribun et au proconsul chargés de faire exécuter les lois de Fempereur Ho- norius contre les Donatistes : Pœna illorum quamvis de tantis sceleribus confessorum (meurtres, sacri- léges, etc.) rogo te ut præter mortis supplicium sit, et propter conscientiam nostram et propter catholicam mansuetudinem comméndandam..... Si Pro- consul vel simul ambo in illo’estis sententiam prolaturi, et forte ille persis- titvelle gladio vindicare quamwvis sit christianus et quantum advertere po- tuimus non sit ad hæc cruciamenta proclivis; tamen si necesse fuerit, etiam Gestis jubete allegari epistolas meas quas de hac re singualas vobis mittendas putavi, soleo enim audire in potestate esse judicis mollire sententiam et mi- tius vindicare quàm jubeant leges. Si autem nee litteris meïs ad hoc con- senserit, hoc saltem præstet ut in custodiam recipiantur, atque hoc de ele- mentia imperatorum impetrare eurabimus, ne passiones servorum Dei quæ debent esse gloriosæ , inimicorum sanguine dehouestentur. (Augus. ad Mar- cellin: Epist. 139. Ed. Benedict.) Mihi sollicitudo maxima inçussa est ne fortè sublimitas tua censeat eos 304 * MÉMOIRES Après la victoire de Moncontour, même conseils d’in- flexible rigueur : « Que le roi ne dispute pas à la vengeance divine ses victimes , en voulant s’acquérir à lui-même le renom de miséricordieux : car, il n’y a rien de plus cruel que celle pitié , que cette miséricorde pour des impies qui ont mérité les derniers supplices » (on se rappelle ici la définition que donnait Pie V de la clémence)... Il faut l'unité de la foi. Tant qu’il y aura deux religions, il y aura deux peuples, et le royaume ne se reposera pas. « Pour atteindre ce but, tu dois livrer au supplice tous ceux qui ont levé des armes impies contre le Dieu Tout-Puissant et ta Majesté, et établir dans toutes les villes des inquisiteurs pour rechercher les fauteurs de la dépravation héréti- que (1). » | Philippe IE, de son côté, dans les lettres de félicitation qu'il écrivait de sa main aux cardinaux de Lorraine , de Guise et de Bourbon , « les engageait à pousser le roi à ne faire aucun traité et générosité avec les rebelles (2). » Gependant , malgré les instances du pape et de Philippe, la cour paraissait vouloir user de clémence , et l’on prépa- rait la paix de Saint-Germain. Pie V écrit alors à Catherine « Frappé du bruit géné- »ralement répandu parmi les hommes , et des nouvelles (1) Nihil est enim ea pietate misericordiaque crudelius quæ in im- pios et supplicia ultima meritos confertur... Hujus autem rei tam sa- lutaris ohtinendæ causa et de his qui contra Deum omnipotentem et Majestatem tuam scelerata arma sumpserunt supplicia sumere, et hæ- reticæ pravitatis inquisitores per singulas civitates constituere..….…. (Majestas tua) debet. (Lib. 3, ep. 45, 20 octobre) *,. (2) Arch. de Simancas, apud Capefigue, IL-480. tanta legum severitate plectendos ut qualia fecerunt talia patiantur; ided “his litteris obtestor fidem tuam quam habes in Christo per ipsius Domini mi- sericordiam, ut hoc nec facias, nec fieri omnino permittas…. (Aug. ad eumdem Epist. 133); et ailleurs : Ep. 54. — Malis parce vir bone, quanto me- lior, tanto esto mitior; quantà sis celsior potestate, tanto humilior fias pietate. DE LA QUATRIÈME SECTION. 305 »qui nous annoncent que-la-paix entre notre cher fils et »les hérétiques ennemis de Dieu et rebelles à la France est »sur le point d’être conclue , nous devons vous dire que > nous sommes assurés qu’il n’y a rien de commun entre » Satan etes fils de la lumière; nous tenons également pour »indubitable qu’il ne peut y avoir aucun arrangement, si »ce n’est plein de fausselés et de tromperies, entre les »catholiques et les hérétiques. Æn/lammez l'esprit du » Roi Très-Chrétien , votre fils, pour qu’il anéantisse ce » qui reste encore des débris de la guerre civile (1).» Lorsque cette paix, qu’il appelait une infäme trahison, eut été enfin, malgré lui, accordée aux protestants, il en exhala toute sa douleur dans une lettre au cardinal de Lorraine : « Notre très cher fils, dès que nous fûmes assurés que »la paix venait d’être conclue entre notre très cher fils »en Jésus-Christ, le Roi Très-Chrétien , et les hérétiques » (si toutefois on peut appeler paix le traité par lequel des » lois si infâmes et si perverses à la religion catholique, »ont été imposées à Sa Majesté Très-Chrétienne par des »hommes dépravés), notre âme fut saisie d’une vive »douleur. Nous considérons cette paix comme ayant »porté à la France un coup plus funeste que tous ceux » qu’elle avait soufferts depuis qu’elle était agitée par les » discordes intestines avec les hérétiques (2). » Quelles étaient donc ces lois si infâmes ? « La liberté » de conscience et de prêche était accordée aux protes- » tants dans deux localités spéciales pour chaque gouver- »nement, avec défense Loutefois de tout synode et réu- »nion dans un rayon de dix lieues autour de Paris: on y » déclarait que les huguenots, étant tenus de toutes les » contributions de l'Etat, seraient aussi regardés comme (1) Lib, 4, ep. 2. Traduction de Capefgue, t, IL, p. 489, (2) ibid, ep. 8, septembre 1570. T. IL. 20 306 MÉMOIRES » capables d’en posséder toutes les charges... que les » pauvres et les malades seraient reçus dans toutes les » écoles et dans tous les hôpitaux, sans distinction de Re- »ligion (1): » | Si cette paix ne fut pas durable, si elle ne fut même qu’un acheminement à la Saint-Barthélemy, faut-il s’en étonner? on était résolu de forcer la main à la Royauté. « Des lettres confidentielles du Pape au cardinai de » Lorraine contenaient des instructions pour maintenir la » sainte Eglise menacée et surtout pour la ruine de l’hé- »résie..…. Le légat se plaignait sans cesse de l’insoléence » des hérétiques... Les métiers, les halles ardentes n’é- »coutaient pas un sermon où il ne fut question de l’in- »solence des hérétiques..... Tous s’exaltaient par une » correspondance de clocher à clocher, de commune à » commune sur les insultes des calvinistes , sur la multi- » plication des prêches et de la cène au milieu des cathé- » drales en ruines. Quand cet intolérable état cesserait-il? » Ne valait-il pas mieux saisir: une fois les armes, courir »sus à ces rebelles à Dieu et au Roi, ou s’en débarrasser »par de bonnes wépres siciliennes? Telle était opinion » commune dans ce peuple de la grande cité... On con- » trevenait partout à l’édit de pacification..…. Tous les re- »gistres des chartes sont remplis des plaintes des protes- »tants persécutés..….. L’amiral de Chatillon mande au » Roi que depuis peu on a tué deux de ses gens et qu’on » lui refuse des vivres pour de l’argent (2), » Cependant Catherine fort embarrassée de son rôle : « Faisait au clergé, aux Guises, aux gouverneurs de pro- »vinces et aux parlements de vagues promesses. Rien »n’élait stipulé, mais l’extermination de l’hérésie était »toujours sous-entendue; la Gour n’était censée fidèle à (1) De Thou, t. VI, p. 60-61. (2) Capeligue, ILE, p. 39-48-57, DE LA QUATRIÈME SECTION. 307 »l pue l'Eglise fidèle à la Gour que sous cette condi- »tion; il n’était pas besoin de conventions plus précises ; » les volontés étaient unanimes, et chagun était prêt, quand » le roi dirait frappez, à tirer le poignard et à frapper (1).» Nous savons que la conduite de Catherine a été au- trement expliquée. L'écrivain Camille Gapilupi (2), le prédicateur Jean Rondinelli (3), les historiens Davila et Adriani, si dévoués aux Médicis (4) ; ont prétendu que la Saint-Barthélemy était le résultat d’un complot formé depuis longues années et conduit par Catherine de Médicis et Charles IX avec une habileté et une dissimulation dont il leur font grand honneur. Mais cela ne prouve qu’une chose, quand on rapproche ces assertions des faits, c’est que cette exécution sanglante répondait si bien aux vœux et aux espérances du parti catholique ;: surtout au-delà des Monts, que la préméditation n’était pour les auteurs, au point de vue de leurs panégyristes , qu’an titre de gloire de plus. De Thou fait observer què « les écrivains »italiens et espagnols sont fort ingénieux pour nous pré- »ter leur raffinement de politique et les traits de pré- » voyance qu'ils ont imaginés après coup. Nos courtisans » ont fait le contraire; car ils ont-employé leur adresse à »excuser l’atrocilé de l’action, sur ce qu’elle fut faite » sans avoir été préméditée et par une espèce de hasard » que l’occasion fit naître (5). » La vérité est entre ces deux assertions contraires. Que lon complète ce que nous venons de raconter en lisant (1) Sismondi, XIX, p. 88. / (2) Lo stratagemma di Carlo IX, re di Francia, contro gli Ugonetti. Roma 1572, in-40. (3) Oratio Joan. Rondinelli , in exequiis Karoli IX, vales. dits Gallor. regis. Florentiæ 1574. (4) G. B. Adriani storia, lib. XVITI-XXII, Davila, delle Guerre civ. di Francia, 1. IV-V. (5) De Thou, liv. LIL, t, VE 445. 308 MÉMOIRES les détails des derniers préparatifs et de Pexécation de Ja Saint-Barthélemy dans les Mémoires de Tavannes, dans le récit fait par le duc d’Anjou (Henri IL) à son médecin Miron (x), dans les livres LI et LIT de l’histoire de de Thou, dans les Mémoires du même et enfin dans l’histoire de Capefigue , qui a pu consulter plusieurs documents iné- dits; on demeurera alors convaincu, comme nous, qu’il n’y a rien à donner ici au hasard ni à la longue prémédi- tation des conseils de la Royauté. « On à fait de Charles IX » un monstre, de Catherine de Médicis une figure san- » glante de femme; l’un et l’autre luttèrent longues an- » nées contre une réaction qu'ils furent obligés de se- » conder (2). » La Saint Barthélemy fut la conséquence logique de la doctrine d’intolérance armée, que pré- chaient depuis plus de quinze ans les chefs du catholi- cisme, prédication qui développa un fanatisme que rien ne pouvait plus contenir. On voulait l'entière extermina- tion des hérétiques; on se préoccupait peu des moyens d’exéculion; tous paraissaient bons : guerre , bourreaux, inquisition ou massacre, nous sommes en droit de le dire, car tous avaient été employés , aucun n’avait été répudié. Nous avons vainement cherché un blâme, un désaveu donné par le Pape à ces étranges excès de zèle, où se lais- saient entraîner les meilleurs catholiques et les plus haut placés. Dans cet état des esprits Catherine fut mise en demeure d’opter entre une guerre civile, que la Ligue fe- rait celte fois pour son compte, et un massacre général que le Roi ordonnerait, Catherine qui, comme tous les esprits politiques , cherchait à atteindre le but avec le moins de dépense possible de force et d’énergie , proposa encore au dernier moment, pour échapper à l’une et (1) Discours du roy Henri IEL..... des causes et molifs de la Saint- Barthélemy, t. XLIV de la collection Petitot, re série, (2) Capefigue, t. IT; préface, p. XIT, (Lettre à M. Molé.) DE LA QUATRIÈME SECTION. 309 l’autre extrémités, de se débarrasser des chefs des deux partis. « Le conseil secret répoussa le projet de la reine » d’envelopper les grandes têtes des deux partis dans une » commune luerie.... Ge juste milieu sanglant ne pou- » vait répondre à l’élat des esprits. Le vent soufilait: au ».eatholicisme , il fallait de toute nécessité s’abandonner » au duc de Guise... En confiant l’exécution des ven- » geances à des mains populaires , en plaçant les catho- » liques à la tête de ce massacre , c’était le rendre géné- » ral. Une fois emporté par le mouvement on ne pouvait » plus s'arrêter; on allait à l’extermination entière des » huguenots (1). » Le massacre fut donc résolu....!On sait le reste. Ni le Pape ni Philippe IT ne l’avaient formellement con- seillé, du moins à cette époque; ils n’en furent pas même instruits d'avance. C’est notre conviction. Tous deux en effet, ne comprenaient guère qu’on eut besoin d’em- ployer des ménagements et des voies détournées pour exterminer les hérétiques. La guerre ouverte, mais la guerre à outrance (ad internecionem usque) (2), puis les bourreaux et l’inquisition, voilà sans doute les moyens qu’ils auraient préférés. Mais s’ils n'avaient pas suggéré la pensée de ces nouvelles vépres-siciliennes , ils n’igno- raient pas qu’elle était dans l’esprit des catholiques ar- dents, et ils ne l’ont pas condamnée d’avance; ils l’ont par leurs provocations incessantes nourrie , entrelenue , exaltée, et a l'exécution ils ont complétement ac- ceplé celte pensée comme leur. Gela suflit-il pour engager leur responsabilité morale ? On a dit d’abord : le Pape et Philippe IF voulaient une guerre franche et loyale, en un mot combattre un beau combat... . Mais les catholiques étaient au moins dix contre un. Venir dire aux protestants : croyez ce que (1) Capefigue, t. IIL, p. 171. (2) Lettres de Pie V, passim, 310 MÉMOIRES nous croyons, servez Dieu comme nous, ou combattez, et si vous ne tombez pas sous notre glaive vous périrez de la main du bourreau ou sur les bûchers de l’inquisi- tion; est-ce là proposer un beau combat ? Pour nous, nous ne voyons entre ce que vous vouliez et ce que vous donna Catherine de Médicis d’autre différence qu'entre une Saint-Barthélemy. de jour et une Saint-Barthélemy de nait. Eh bien ! nous aimons mieux la dernière; sans être essentiellement plus immorale, elle fut moins sanglante ; nous l’aimons mieux encore parce que le caractère odieux qu’elle a revêtu par cette circonstance de guet-apens , est comme le sceau de réprobation que la Providence a voulu imprimer aux doctrines qui l’ont enfantée; nous l’aimons mieux surtout parce qu’elle nous fit échapper à linquisition , et par-là nous préserva de cet abaissement intellectuel, de cette dégradation morale, où sont tombées, sous le poids de ce joug, l'Italie et l'Espagne, et d’où elles ne se releveront peut-être jamais, Sans la liberté, en effet, tout développement intellectuel et moral devient impos- sible; la raison en est toute simple, c’est que l’essence même de l’être intelligent et moral, c’est la liberté, Voilà pour le fond. On dit ensuite : « Dans les récits de cette catastrophe on n’a pas assez distingué entre l’ap- probation donnée à un fait accompli , et la volonté qui le prépare. La différence est pourtant immense... » Nous confesserons, à la honte de notre intelligence, que nous ne comprenons pas comment celle distinction absout la Pa- pauté, Plus un fait accompli favorise nos passions et nos intérêts même les plus légitimes , plus nous devons mettre de soin, tout en l’acceptant, à répudier l’immoralité des moyens qui l’ont préparé. Ge deyoir est surlout impé- rieux pour ceux qui exercent une magistrature morale. Se taire alors, ce serait déjà prendre une grave respon- sabilité. Que serait-ce donc si au lieu d’une approbation silencieuse on en venait à louer hautement laction, à DE LA QUATRIÈME SECTION. 311 glorifier ses auteurs sans réserve; et avec tant d'abandon qu'eux mêmes sentiraient la rougeur de la honte leur en monter au front ? et c’est cependant ce qu’on a fait pour la Saint-Barthélemy. On a prétendu, ilest vrai; en der- nier désespoir de cause, que le Pape et le roi d'Espagne ayaient été trompés sur l’origine et les circonstances de l'événement. « De quoi se félicitèrent-ils ? d’un triomphe » soudain, inattendu des catholiques sur les protestants ; » triomphe qui ne fut présenté nulle part dans le premier »-moment sous ses véritables couleurs .et avec le carac- » tère de la perfidie et du massacre, mais comme le ré- » sultat d’une conflagration inopinément allumée par » suite de l'attentat des Guise contre l'amiral Coligny, »-où comme la répression d’une tentative des huguenots __» contre la personne même du Roi... » Gelte excuse elle- même, quelque faible qu’elle fût au fond , aura été invo- quée en vain, Oui, sans doute , on usa de précautions et de détours en communiquant cette nouvelle aux princes protestants; à Elisabeth, aux Princes Allemands et aux Ligues Suisses; mais comme l’a fort bien dit Gapefigue : « l n’était pas besoin de tant de ménagements avec le ! » Pape et le roi d’Espagne. Le triste massacre de Paris » entrait dans les intérêts et les opinions du catholicisme » dont ils étaient la grande expression. » Voyez la lettre de Catherine de Médicis à son bon fils Catholique, citée par Capefigue, d’après les archives de Simancas. « Ici, » continue l'historien , ou se trouvait à l’aise, on annon- » caitune bonne nouvelle. Les dépêches adressées au Pape » étaient écrites avec la même jote abandonnée (a). » A quoi bon d’ailleurs essayer de tromper le Pape et le roi d’Espagne qui avaient à Paris tant d’émissaires , tant de correspondants dont quelques-uns étaient si haut placés et si bien informés ? (1) Capeñigue, ILE, p. 208-210. 312 MÉMOIRES En conservant ainsi toute leur sincérité aux faits qui suivirent la Saint-Barthélemy, on y verra qué la Papauté et Philippe IL ont accepté sans réserve et en pléine con- naissance de cause , toute la roponsabtite morale _. ce massacre, | C2 À la nouvelle de la Saint-Barthélemy, « l’ivresse fat au comble en Espagne. Philippe II n'avait pas été étran- ger à la pensée d’en finir avec les huguenots. Sa corres- pondance avec son ambassadeur et le duc de Guise, indique qu’il engageait Catherine et le Conseil à prendre un moyen quelconque pour se débarrasser des calvi- nistes , dont les desseins sé liaient à la révolte des Pays- Bas. Quand il sut que tous avaient été enveloppés dans un massacre , il en écrivit au Roi et l’en félicita dans les termes d’un enthousiasme religieux (1). » Lorsque la nouvelle du massacre de Paris arriva à Rome, ce fut une joie au-dessus de tout ce qu’on peul dire. Les lettres du nonce (Salviati\ que le pape (alors Grégoire XIIT, saccesseur de Pie V) avait à Ia cour de France furent lues le 6 de septembre dans l’assem- blée des cardinaux. Elles portaient que toute l’expédi- tion avait Été projetée et cæécutée par l'ordre cxprès du Roï. » Voici un extrait de la dépêche du nonce (2). » Que notre Seigneur me permette de lui baiser les pieds et de me réjouir avec lui du fond de mon cœur qu'il ait plu à Ja majesté divine de faire marcher, dès le début de son pontificat , si heureusement et si glo- rieusement les affaires de ce Royaume; d’avoir si € étendu sa protection sur le Roiet la Reine mère, qu "ils ont eu la volonté et le pouvoir d’arracher cette racine (1) Gapeñigue, ITE, p. 250. (2) La correspondance de Salviali, recucillie par M. dé Château- briand pendant son ambassade à Rome, a été publiée à la suite de l’histoire d'Angleterre de Mackintosh, t, II, DE LA QUATRIÈME SECTION. 313 » de pestilence avec tant de prudence , en temps si op- » portun, qu'ils tenaïent tous leurs rebelles comme sous » clés et en cage (che tutti t loro rebellé erano sotlo » chiave, in gabbia ) (x). » Après cette lecture , il fut résolu que le pape accom- » pagné des cardinaux irait à l’église de Saint-Marc pour » remercier Dieu solennellement de la grâce singulière » qu’il venait de faire au Saint-Siége et à toute la chré- » tienté , et que le lundi suivant on dirait à ce sujet une » messe solennelle à la Minerve, où le pape et les cardi- » naux assisteraient, et qu’on publierait un jubilé univer- ».sel pour les causes suivantes : 1° parce que les ennemis . » de la vérité et de l'Église avaient été exterminés en » France ; 2° à cause 54 la grande victoire remportée » sur les Turcs et des boyacon succès du duc d’Albe, » en Flandre , elc... » Quelle étrange confusion d’idées morales! la Saint-Barthélemy, les exécutions du duc d’Albe , la victoire de Lépante , mises sur la même ligne! je me trompe, la première place était donnée à la Sont Barthélemy. «Sur le soir, on tira le canon du château Saint-Ange et » on alluma des feux dans toutes les rues; en un mot on »n’oublia rien de tout ce qui s’est toujours fait après les » victoires les plus grandes et les plus signalées qui aient » élé remportées pour l'Eglise romaine. » Le cardinal de Lorraine comme transporté de joie fit » compiler mille écus d’or à un gentilhomme du duc d’Au- »imale, son frère, qui lui apporta cette agéable nouvelle » (que pouvait- -il ignorer alors ? ), « et il témoigna qu’il en »avait une joie inexprimable. Sur si demande, le Pape, » ous les cardinaux et les ambassadeurs catholiques... se »rendirent processionnellement à l’église de Saint-Louis, » où le cardinal de Lorraine célébra la messe avec une (1) Voir le texte de cet extrait dans Sismondi, t. XIX-187. 314 MÉMOIRES pompe superbe... On avait mis à la porte de l’église une inscription qui portait : Que le cardinal de Lorraine , au nom du roi très-chrétien , Charles IX, rendait grâces à Dieu et félicitait notre Saint-Père le pape Grégoire XHIT , le Sacré Gollége des cardinaux, le Sénat et le peuple ro- main ; du succès étonnant et incroyable qu’avaient eu Les conseils que le Saint-Siége avait donnés, les secours qu’ilavait envoyés et les prières que Sa Sainteté avait or- données pour douze ans (1). | « Grégoire XIII exprima toute sa joie de la Saint-Bar- » thélemy dans une lettre adressée au roi Charles IX et à » Catherine, sa mère. Il les félicite d’avoir servi la foi du » Christ en secouant l’affreuse hérésie. Pour attester son » zèle et l'enthousiasme dont il était animé , il fit peindre » un large tableau de tous ces massacres: car une belle » image lui avait été envoyée; puis comme au temps des » Gésars on frappa des médailles d’or en commémoration » du triomphe (2). » Ce ne fut pas tout. De Madrid et de Rome on envoya des ambassades solennelles. Le marquis d’Ayamonte, au nom de Philippe IT, devait dire au Roi : « J’avertis très- » amicalement, mon très-cher et très-aimé frère, qu’il » persévère dans d'aussi bons principes, frappant de telle » manière les huguenots , ses rebelles , qu’en quelle par- » tie du royaume qu’ils se retirent, on en finisse cette » fois d’eux et de leur fausse doctrine, et si pour cette » bonne œuvre , il a besoin de mon secours et assistance , » je les lui donnerai de bon cœur, et j’en ai bien grand » désir (3). » Un légat spécial, le cardinal des Ursins (Fabio Or- » sini}, fut chargé des hautes félicitations de la cour de (1) De Thou, liv. LIL, t. VI, p. 441-443. (2) Capefigue, III-258. (3) Zbid, 260, d’après les Arch. de Simancas. DE LA QUATRIÈME SECTION. 315 » Rome (1). Ses instructions secrètes portaient de faire »linstance pour que le concile de Trente füt reçu dans le »royaume... et trouvant bonnes dispositions il propo- » sera de mettre l’inquisition en France (2). » | Le cardinal des Ursins s’arrêta quelques jours à Awi- gnon: « Il vit à son arrivée que la face des choses était » bien différente de l’idée qu’il en avait prise à Rome. Il » trouva les catholiques saisis d’effroi, les protestants ir- » rités ; tout le royaume rempli de troubles, et il fut. bien » swrpris qu’une action qu’on louait tant à Rome était » généralement détestée en France, et que le roi même à » qui ils donnaient la gloire d’avoir préparé de longue » main et si bien concerté le coup qu’il venait de frapper, » était réduit à s’en justifier auprès de ses peuples, comme ». d’un événement que l’occasion avait fait naître ; auquel » il avait été forcé, mais qu'il n’avait pas prémédité, (3). » On délibéra même si on y recevrait le légat, ou si le » roi ne chercherait pas quelque excuse honnête pour se » dispenser de lui parler; mais il craignait en renvoyant » le légat de perdre l'amitié du pape qu’il avait gagnée » par le massacre de la Saint-Barthélemy..….-On le laissa » donc entrer dans le royaume (4). » Des Ursins fut recu à Lyon avec les honneurs accou- (1) Sollicitus (Gregorius) quam salubris ægro regni corpori tam Copiosa depravati sanguinis emissio esset profutura Fabium cardina- lem Ursinum , legatum a latere in Galliam destinat qui Garolum re- gem admoneat ut cœæptis insistat fortiter neque curam , asperis reme- diis inchoatam prospere, perdat leniora miscendo. Ann. Ecel. ad an. 1572, apud de Potter, Hist, du Christ, t. VII-330. (2) Capefigue, ILE-260, d’après les Arch. de Simancas. (3) Admirable esprit de la nation française qui se revèle à toutes les époques de son histoire : la violence, le mépris des droits de l’huma- nité suffisent pour compromettre les causes les plus populaires ! La vue du sang de nos frères répandu par nos mains dissipe bientôt l’i- vresse du fanatisme des opinions, (4) De Thou , L, LIV, t, VI-533, 316 | MÉMOIRES tumés. « Les massacres avaient été exécutés dans cette » ville le dimanche 31 août avec des circonstances révol- » tantes. Outre les huguenots qui avaient été tués par la » populace dans les rues, plus de huit cents protestants » étaient déposés dans les prisons sous la foi du gouver- » neur Mandelot ; celui-ci laissa agir un homme de sang, » nommé Boidon , qui , après avoir vainement demandé » l’assistance des soldats de la citadelle et même celle du » bourreau , recrula enfin des bourgeois fahatiques avec » lesquels il força successivement les dépôts des Gorde- » liers, des Gélestins et de l’Archevêché. » La sépulture ecclésiastique ayant été refusée aux restes de ces malheu- reux , la populace les jeta dans le Rhône. « Le légat , » dans tout son voyage, avait entendu parler de cette exé- » cution.Un millier de corps morts, roulés en même temps » dans les eaux du Rhône, avaient porté leffroi à toutes » les villes bâties sur ses bords... A Arles, la population, » qui n’a d’autre eau que celle du fleuve, s’était refusée, » pendant plusieurs jours , à en boire (1). » Malgré tout cela, le légat , à son arrivée à Lyon, « donna de grands » éloges au zèle de la bourgenisie, complimenta publique- » ment le fameux Boidon, chef de cette horrible bouche- » rie , et lui donna , de sa pleine puissance, une absolution » générale du passé (2). Les ministres lui avaient fait dire » de parler sobrement sur cette affaire (de la Saint-Barthé- » lemy); mais il ne laissa pas d’exalter la prudence du roi » et de répéter en tous lieux, dans toutes les maisons, en » public et en particulier, que ce prince avait donné, dans » celte occasion , des marques d’une patience à toute » épreuve et d’une grandeur d'âme peu commune. (1) Sismondi, XIX-188. De Thou, 1. LIE, t. VI, p. 424. (2) Gette absolution porta les fruits qu’on devait en attendre, Ce même Boidon commit depuis toute sorte de crimes et d’infamies qui le firent condamner à mort et exécuter à Clermont (Auvergne), De Thou, LIL, t. VE, p. 424, DE LA QUADRIÈME SECTION. 347 . ut + +. Dans l'audience qu’ileût du roi, il lui fit »toutes. les instances possibles et employa les motifs les » plus puissants pour engager ce prince à ordonner, dans . mtoutes les cours du royaume , la publication du concile » de Trente, suspendue en France depuis neuf ans , au » grand scandale de la chrétienté , et de consacrer, par » l’approbation de ce saint concile , la mémoire de la » grande action qu’il venait de faire pour la gloire de -» Dieu et pour l'élévation de la sainte Église romaine ; » action qui ferait , disait-il, la matière des éloges de tous » les siècles. Notre siècle , ajouta-t-il, et Lous ceux qui le »suivront demeureront convaincus que ce n’est ni la » haine , ni la vengeance , ni le ressentiment de quelque » injure particulière qui ont fait consentir un prince aussi » chrétien que Votre Majesté, au meurtre de tant de per- » sonnes , mais uniquement le zèle de la gloire de Dieu , » afin que la religion de nos ancêtres, c’est-à-dire la reli- » gion catholique, apostolique et romaine , que le concile » de Trente; vient de purger du poison de l’hérésie , soit » désormais établie unanimement dans toute la France » sans exceplion, ce qu’on ne pouvait jamais espérer tant » que la faction des protestants ne serait pas -extermi- » née (1). » SA LA 1 | Il n’y a rien à ajouter à ce récit... Concluons donc: La véritable cause, la cause première , la cause pro- fonde de la Saint-Barthélemy , ce fut le fanatisme reli- gieux. La responsabilité morale de ce massacre doit , en conséquence , peser sur ceux qui ont excité et entretenu - ce fanatisme : le Pape, Philippe IT et les chefs catholiques. Quand on a cherché à les justifier au point de vue du ca- tholicisme , on n’a pas assez distingué l’intolérance au regard du dogme, de l’intolérance au regard de la morale pratique. Le pouvoir religieux a le droit , c’est même son (1) De Thou, t. VE, p. 533, édit, de Londres, 1734, in-40, 318 MÉMOIRES devoir, de condamner.les doctrines qu’il croit fausses et dangereuses; mais tout en jetant l’anathême aux doctri- nes, qu’il n'oublie jamais de recommander une charité fraternelle pour les personnes, un respect inviolable pour les consciences, Chacun de noùs, dans sa sphère d’action, doit aussi faire un prosélytisme ardent, infatigable pour ses croyances , s’il pense qu’elles importent au bonheur de ses semblables, mais seulement par la voie pacifique de la parole, qui ne provoque jamais aux actes de violence, qui ne reconnaît comme siennes que les conquêtes faites par une douce persuasion, Si le zèle nous emporte au- delà , nous alléguerons en vain pour excuse les exigences de notre foi; nos actes n’auront pour juge que la morale universelle, L’humanité a des droits imprescriptibles , et « il n’y a point de droit contre le droit (1). » (1) Voici comment s’expriment quelques-uns des premiers Pères de l'Eglise, Humani juris et naturalis potestatis est unicuique quod putaverit colere; nec alii obest aut prodest alterius religio. Sed nec religionis est cogere religionem quæ sponte suscipi debeat, non vi. Tertul. ad scapulam cap, 2. — Videte enim ne et hoc ad irreligiositatis elogium concurrat, adimere libertatem religionis, et interdicere optionem di- vinitatis ut non Jiceat mihi colere quem velim sed cogar colere quem nolim, Nemo se ab invito coli vellet, ne homo quidem, Tertul. ApoIo- gelicus. Cap. 24. — Vid. cap. 28. Non est opus vi et injuria quia religio cogi non potest, verbis potius quam verberibus res. est agenda, ut sit voluntas.... Nemo a nobis re- tinetur invitus; inutilis est enim Deo qui devotione et fide caret…. longe diversa sunt carnificina et pietas ; nec potest aut veritas cum vi, aut justitia cum crudelitate conjuugi... sed defendenda sunt, in- quiunt, suscepta publice sacra : O quam honesta voluntate miseri er- rant ! sentiunt enim nihil esse in rebus humaunis religione præstantius, eamque summa vi oportere defendi; sed ut in ipsa religione, sic in defensionis genere falluntur, Defendenda enim religio est non occi- dendo, sed monendo; non sævitia sed patientia; non scelere sed fide : illa enim malorum sunt, hæc bonorum; et necesse quidem est bonum in religione versari, non malum. Nam si sanguine, si tormentis, si malo religionem defendere velis, jam non defendetur illa, sed pollue- tur, atque violabitur, Nibil est enim tam voluntarium quan religio, in DE LA QUATRIÈME SECTION. 319 L'illustre chancelier de l’Hospital avait déjà compris et proclamé ces principes ; mais il ne put les faire prévaloir. Ils sont aujourd’hui presqu'universellement admis, du moins, et c’est ce qui importe le plus, dans leurs consé- quences pratiques. Cependant il est une certaine école historique qui ne veut pas encore voir un progrès dans ce triomphe des idées libérales sur les doctrines absolues de l’autorité et de l'intolérance; elle le déplore, au contraire, et, dénigrant le présent , elle désespère de lavenir, si les générations nouvelles , abandonnant une direction fatale, ne reprennent la voie du passé. Une autorité morale, libre- ment acceptée, volontairement obéie; une vérité tou- jours ancienne et toujours nouvelle ; une société qui se conserve au milieu d’un mouvement incessant de reno- vation...... chimères , où l’on cherche vainément , nous dit-elle, à concilier ce qui est de soi inconciliable, l’auto- rité et la liberté, la vérité ét l’erreur, l’esprit conserva- teur et l’esprit révolutionnaire. Pour cette école, tout le mal qui s’est fait dans le gouvernement des affaires de ce monde est dû aux doctrines libérales ; tout le bien aux doctrines conservatrices , sans le contrepoids desquelles, la société, emportée par l’esprit novateur, se précipitait à sa ruine. Il faut donc se hâter d'y revenir, abjurer nos qua si animus sacrificantis aversus est, jam sublata, jam nulla est, Lactant. Divin, Instit, lib. V, cap. 20. Hæc, fratres, cum impigna mansuetudine agenda et prædicanda retinete : Diligite homines , interficite errores; sine superbià de veri- tate præsumite, sine sævitia pro veritate certate. Augustin. contra litt, Petil. lib. T, cap. 29. Ecce non agimus ferro, sed verbo, ibid, lib, II, cap\69. Nullis tamen bonis in catholica hoc placet, si usque ad mor- tem in quemquanm licet hæreticum sæviatur. Contra Grescon. lib. III, cap 50. —Vide ad Donatistas post collat. cap. XVII. —Sermon. 35 et 36 inter Sirmond. — Tractat, in Johan., etc. Cædes et vincula aliena sunt a nostra ecclesia, Athanas. Apol. 2, — Nous indiqueronsencore : Sancti Ignatii Epist. ad Philadelph. — Sancti Justin, Apolog, 2. — Sancti Gregor. mago. lib. I, Epist. c. 34. Et enfin : fides suadenda est non imperanda, St Bern, Serm. 61 in cantic. 320 = MÉMOIRES erreurs, brûler nos idoles, relever ce que nous avons rén- versé. Nous n’exagérons rien. Tel est l’enseignement qu’un des historiens de l’école soi-disant catholique veut tirer de la Saint-Barthélemy. M. Capefigue , après nous avoir montré Philippe IT comme le pontife aemé de cette époque , comme la personnification la plus complète du catholicisme militant; après nous avoir présenté, sans dé- guisement , la Saint-Barthélemy comme le triomphe du dogme d’autorité sur la doctrine du libre examen ; conti- nue en ses termes: « Quand je commençais ss décrire les troubles-de-la » Ligue , le canon de la guerre civile retentissait à mes » oreilles; je voyais de mes yeux se reproduire pour d’au- » tres idées ;. pour des exaltations d’une autre nature , les » mêmes cruautés , le même désordre de pensées , la joie » des vainqueurs , l’insulte aux vaincus... Des joies » atroces et des maximes impitoyables applaudies à la tri- » bune et postes dans les lois... les journées des ven- » geances populaires se ressemblent... » À qui atiribuer ce désordre d’idées ? A la maxime du » libre examen... L’aulorité du catholicisme à été ébran- » lée , puis on en est venu à l’autorité royale, à la légiti- » mité des races; maintenant, il est une autre légitimité » attaquée par ce libre et terrible examen, c’est l’autorité » des gouvernements et le droit de propriété; rien ne » résistera à l’impitoyable fatalité qui poursuit les sociétés » quand elles ont secoué les maximes conservatrices. Ges » maximes ont croulé dans un grand naufrage ; -elles » vivent comme un culte dans le cœur de quelques fa- » milles, et dans la hante raison des hommes qui ont les » yeux sur l’avenir..… Une heure arrive où tous les partis » fatigués se cherchent pour se presser autour d’un prin- » cipe qu’un verlige a renversé (1). » (1) Capefigue, t. III, p. 25-26. Lettre à M, Molé, DE LA QUATRIÈME SECTION. 321 Voilà donc où nous conduit la préoccupation de les- prit de parti! 1830 ne vaut pas mieux que 1972, je me trompe, il vaut moins, car si les moyens furent les mêmes, le but était bien différent. Là, c’est le principe conserva- teur dela société qui triomphe; ici, c’est le principe ré- volutionnaire et subversif..…. Mais non, et que la Provi- dence en soit bénie, les journées des vengeances populaires ne se ressemblent pas ! C’est en comparant l’immense dis- tance qui sépare les journées de juillet 1830 de la Saint- Barthélemy 1572; la révolte des ouvriers de Lyon de cette boucherie qui ensanglanta les eaux du Rhône, que l’on comprend surtout combien a été grand le progrès des idées ‘- morales et religieuses. Les notions du droit et du devoir ont si profondément pénétré , chez nous, dans les masses populaires que les plus violentes passions , quelquefois les plus légitimes , ne les leur font pas mettre en oubli. N’est- ce pas là, la plus éclatante justification de ces doctrines qu’on traite de subversives ? Oui, quoiqu’on dise, le pré- sent vaut mieux que le passé, et nous ajoutons avec con- fiance , l’avenir vaudra mieux encore. Car rien ne peut plus arrêter le progrès de la civilisation, L’humanité a au. jourd’hui la conscience de ses destinées. Ce progrès continu , providentiel , nous reconnaissons qu'il ne se fait souvent qu’au prix, de durs sacrifices , et que la société souffre dans les crises qui accompagnent cha- cune de ses transformations. Mais nous n’admettons pas qu’à ces époques critiques une raison d'état ait quelquefois rendu nécessaires de grands crimes, comme des remèdes héroïques , pour défendre la constitution du corps social. M. Capefigue a appliqué à la Saint-Barthélemy cette doc- trine d’impérieuse nécessité , que d’autres historiens avaient invoquée dans l'intérêt d’une tout autre cause. Il veut que la Saint-Barthélemy, en rendant définitif le triomphe du Catholicisme en France, ait sauvé la Monar- chie, et avec la Monarchie les hautes destinées auxquelles T. IL 21 322 MÉMOIRES la France était appelée. C’est aussi à ce point de vüe que s’est placé M. Le Normant dans ses leçons sur cette épo- que de notre histoire. Quelle que soit la cause qu’il s’a- gisse de défendre , notre raison , non moins que notre conscience, repousse cette désolante doctrine, Elle se ré- duit au fond à ce sophisme : Puisque le but , but grand et légitime, a été atteint par tel moyen, il ny en avañt pas d’autres, ou du moins celui-là a récu la sanction de la Pro- vidence, qui en a permis le succès. Nous savons que Dieu peut , en quelque sorte, tirer le bien da mal, et que, du inilieu des faits qui semblent bouleverser les sociétés, il sait faire sortir l’ordre, comme de la mort il fait jaillir la vie. Mais c’est une impiété de prétendre que ce sont là les voies que choisit sa sagesse, et que les grands criminels ne sont par fois que les instruments qu'il dirige. Non, ce n’est pas ainsi que procède la sainte Providence. Elle neutralise le mal par un plus grand bien , parce qu’elle à én elle une source de bien inépuisable. Mais si le mal a disparu sous le bien, il n’en a pas moins existé, librement existé , c’est là son essence, et ses auleurs en seront res- ponsables. Puisse cette notion d’une responsabilité morale, dont rien ne dispense , pénétrer de plus en plus profondément au sein de la société. Laissons les lois de nécessité et de fatalité au monde des Choses. Elevés par le Créateur à la dignité de Personnes , êtres intelligents et moraux , ayons toujours dans nos actions la conscience de notre liberté, DE LA QUATRIÈME SECTION. 323 LE MARÉCHAL DE CIÉ De PAR M. ds vi PAVIE. : : | LUE 2 Qu'il m'est apparu de fois, dans le lointain de riotre hisioire , tantôt joyeux enfant sur l’esplanade de Mottier- Grolle, tantôt vieillard pensif sous les ombrages du Ver- ger; ici, le bâton, là, le bourdon en main , pélerin en Galice, et maréchal à Fornoue ; ou de marbre et à cheval sur le fronton de la grand’cour, ou de verte.et à génoux dans les flammes des vitraux, ou d’albâtre et couché sur les dalles du mausolée, — ce seigneur de Gié, ce vicomte de Rohan, duc de Nemours, comte de Guise ; seigneur de Mouliherne , de Baugé, de Penhouët, de Chengy et de Bar-sur-Aube! Sur lui l’Anjou est sobre, et la Bretagne prodigue : car, au temps où il vivait, l’écu recouvrait le berceau comme la tombe; l’homme relevait du nom, ainsi que le vassal du suzerain;, et les mâcles de Rohan jetaient plus haut leurs voix que les tourelles du Verger et le don- jon de Mortier-Crolle. Aujourd’hui, que le marteau des révolutions , en frappant sur l’écu, a mis à nu le person- nage , l’histoire reprend son bien dans le charirier des familles ; les rameaux affranchis de leur souche féodale refleurissent aux lieux préférés : et voila comme quoi le maréchal Pierre de Gié nous revient de Bretagne, en pas- sant par la France, Deux grandes fois dans sa vie, au commencement et à la fin, une fois pour sa grandeur, et uné autre fois pour sa perte, il protesta contre la suprématie du sol. H n'avait 324 MÉMOIRES pas quinze ans (1), lorsque Tanneguy du Châtel, trans- fuge de cette même cour d’où il déracinait son pupille , et qui était allé à sa rencontre jusqu’à Thouars, en société de 200 gentilshommes, le présenta au roi Louis XI : « de » vous amène , bieau sire , ce tiercelet dessus mon poing, » déchaperonné d’à-nuit, et l'œil encore hagard sous ce » nouveau soleil de France. Je le dressais pour un autre, » mais Dieu vous le départ; pour hardie et fidèle, je vous » réponds de sa volée ; essayez-en, j’engage ma vicomté » de Bellière , qu’une fois lancé, il ne rentrera au perchoir » qu'avec du sang au bec, et aux serres grasse curée. » — Par la Pasques-Dieu ! compère , le bon tour que jouez » là à mon gentil cousin François! Approchez donc, mes- » sire ! qu’il est séant et qu’il nous va! » — Et donnant sa main croche à baiser au jeune prince qui ne s’y prêtait qu’à demi : « Salut et liesse à la maison de Rohan. C’est » fête à-nuit céans, vrai comme c’est deuil là-bas. Debout, » messire; assez vous agenouillerez plus tard, quand » nous vous octroierons de notre gracieuse main le bâton, » voire un jour l’épée, laquelle, » poursuivit-il, en se penchant vers son oreille , « n’a poiat exclu du front de » notre regretté Arthur cette belle couronne de Breta- » gne. » Durant ce temps-là , couverts de sueur et de poussière, les émissaires de François IT lui racontaient l'issue pi- teuse de leurs recherches. François se mordit les lèvres et se frotta les yeux; les bonnes grâces de M”° de Ville- quier lui coûtaient cher. Tanneguy et la fortune avaient délogé du même coup; et, à demi-soulevé du sein de son impérieuse maîtresse , il put voir se dresser dans l’ombre le fatal cormier de Saint-Aubin. (1) Né en 1455, au château de Mortier-Crolle, il avait , à la mort de son père, en 1458, été amené à la cour de Bretagne sur mande- ment du duc Arthur ITL, et confé à la tutelle du sire de Pont, DE LA QUATRIÈME SECTION. 325 Quelles que soient les promesses dont Louis XI cajola son hôte , le fait est que ses faveurs ne se firent pas long- temps attendre. Nous voyons le jeune vicomte, dès le com- mencement de l’année qui suivit (avril 1472), réintégré dans la principauté de Normandie, confisquée précédem- ment pour cause de rébellion, sur Louis de Rohän, sire de Guémené. Et nous le retrouvons , le 17 juin de cette même année, à la tête de quarante lances, promu au com- mandement de ville et château de Blois, avec pension de 1,200 livres sur le duché de Guienne, devenu, comme chacun sait, si à propos vacant (1). L'occasion vint vite en aide au favori pour le rembour- sement de tant d’avances. Il fit ses premières armes sous les murs de Lectoure. Qui ne connaît les horreurs de ce siège trop fameux ? L’hostie rompue en deux à la dérision de Dieu et à la déception des hommes ; à sac la ville , à mort les habitants ; d’Armagnac poignardé entre les bras de sa femme; sa race exterminée dans un asile plus ten- dre et plus sacré encore que le berceau. Un chevalier s’élançca de cette nuée de soldats ivres ; ce fut le vicomte de Rohan : l’épée levée , arrachant à la brutalité des siens les dames d’atour de la comtesse , il emporta en croupe les seuls débris d'honneur et de vie qu’il lui fût donné de sauver. Au début d’une carrière , au fort de cette rancune dont l'assassin Gorgias (2) éprouva la munificence, une pareille courtoisie était hardie et de grand goût. D'une issue moins heureuse, au prix d’un moins exé- crable souvenir, le siège de Perpignan continua celui de Lectoure. Il y allait d’une couronne offerte par les Gata- (1) Charles de Guienne, frère de Louis XI, mourut empoisonné par une pêche, dans les préliminaires d’une coalition formidable contre le roi. (2) Gorgias, qui avait porté le premier coup au comte , recul de Louis XI une tasse d’argent remplie d’écus, et fut fait archer de,sa garde (5 mars 1474). 326 MÉMOIRES lans révoltés à notre René d'Anjou, déjà affaissé sous la sienne. Or, de ces deux vieillards qui, une main sur le scepire et un pied dans le tombeau, se hâtaient de vider leur querelle, autant l’un, sage, calme , désabusé, se résignait de loin aux destinées d’une cause dont il avait confié le soin et le profit aux siens , autant l’autre , acharné, haletant , infatigable , malgré sa cataracte et ses soixante- seize ans , se ruait âprement à la brèche : c’était Jean IF, roi de Navarre et d'Aragon, Il y eut là des prouesses à refléter le soleil des Espagnes : la lance du jeune vicomte se croisa dans la mêlée avec celle que le vieux roi bran- dissait à tâtons ; deux fois pris par l'ennemi, deux fois re- pris par les siens, il emporta une pierre de cette citadelle obstinée qui ne devait crouler que deux ans plus tard (1). C’est vers la même époque, et sans doute à l’expiration de cette campagne que, rentré à la cour de France, il y fut reçu avec les plus hautes distinctions, nommé cheva- lier de lordre , chambellan ordinaire du roi, et pourvu d’une pension de 2,000 livres (2). Une convention nouvelle , la septième depuis quatorze ans, ayant été conclue entre la Bretagne et la France, c’est à Pierre de Rohan que la ratification en fut confiée. Vrai tour à la Louis XI, et dont je le vois d’ici ricaner sous sa caloite rapée , que ce regret éveillé dans l’âme du suzerain par la présence de son transfuge, dans l’éclat des honneurs, du crédit et de la fortune, et le collier de France au cou. Mieux que cela, et par sureroît d’humi- liation pour le duc, le mandataire de Louis ne retourna point auprès de son maître sans rapporter en France , à la semelle de ses talons, un nouveau lambeau de Breta- (1) Non plus aux mains de l’oncle, mais aux mains du neveu ( 21 janvier 1475). (2) Louis XI écrivait au comte de Dammartin que M. de Rohan était un des grands seigneurs du royaume qu’il se félicitait le plus d’ayoir attaché à son service, DE LA QUATRIÈME, SECTION. 327 gne,,Îl venait d’épouser, selon contrat de mariage, au château de Nantes, Françoise de Penhouët, vicomLesse de Fronsac. .Le 11 septembre 1476, il fut promu au gr ade de 1 ma- réchal de France (1). Le 16 mai de cette. année , le ma: réchal Joachim Rouault, assailli par une de ces royales bourrasques dont Comines apprécie discrètement les cau- ses (2), ensevelissait à Thouars les débris de sa fortune, là même où cinq années auparavant son successeur futur avait fait le premier pas dans la sienne. Un pareil rappro- chementvint-il à la pensée de celui qui, quarante ans après, sur le théâtre. du Verger, devait jouer trait pour trait le, rôle du seigneur de Gamasche ? Au temps de Louis XI on ne rêvait guère; et ce ne sont pas de ces rêves que l’on fait à vingt ans... L’hypocrisie de Louis XI germait autour de lui avec un succès remarquable. Goyctier, Olivier le Daim et la Ba- lue,en France trouvaient dans la personne de Gourmel et de Landois de dignes émules en Bretagne. Le. duc lui- même allait fort bien, témoins ses sourdes menées près la cour d'Angleterre , en dépit du traité de Senlis: Quand les secrets de l’élève eurent transpiré aux oreilles du mai- - tre ,:que le roi eut souri, que le duc eut tremblé, et que de vifs appétits d’infraction prochaine eurent provoqué de nouveaux serments , on arrêta sous le nom de traité de Luxeul , en Picardie (3), une seconde édition du traité . de Senlis, dont le maréchal de Gié fut chargé de reviser les clauses; le tout pour être juré sur les reliques de saint Gildas, surla vraie croix, sur l’évangile.…. et pour être violé au plus tôt. La guerre de Picardie, à laquelle le traité de Luxeul se (1) Lettres du roi données à Tours. (2) « Mais les imaginations des princes sont diverses, et ne les peuvent entendre tous ceux qui se mêlent d’en parler, » (3) 1477, 328 MÉMOIRES rattache , était le coup d’essai de cette sanglante investi- ture préparée à la France par la catastrophe de Nancy. Le moyen-âge fuyait : veuve de Charles, viagère de René, immolée en même temps et dans la splendeur de ses co- lères et dans la mélancolie de ses soupirs ; la féodalité élait pareille à un monde où la lune et le soleil se cou- cheraient à la fois. À voir gisant sur son estrade de ve- lours, sa couronne sur la tête , aux pieds ses bottines d’é- carlate , le cadavre de ce terrible duc de Bourgogne au cou duquel une population incrédule touchait vainement la cicatrice de Montlhery; au chevet du lit d’honneur le vieux René en larmes , sa barbe blanche saupoudrée d’or à la mode des anciens preux, on pouvait se demander quel était le plus défunt des deux; qui de Bourgogne ou d’An- jou reviendrait le plus tôt à la France. Types curieux et divers que la fortune a jetés là au point de rencontre des deux âges : Gharles, ce lion, René, cette colombe, un renard entre les deux , croquant le faible , leurrant le fort! Revenons au maréchal dont le nom, durant toute cette période, se trouve vaillamment accolé à celui de Philippe de Grèvecœur, plus conau sous le nom de Descordes , transfuge du Haïnault comme lui de Bretagne, attiré par Comines comme lui par Tanneguy. Ainsi se mélaient les hommes par anticipation des patries. Toutefois, moins à plaindre que son compagnon d’armes, celui-ci pour pas- ser en France n’avait point eu à lever la herse d’une cita- delle confiée chèrement à sa garde, à renier dans la fille tous les souvenirs du père, à marcher sur le corps non refroidi de son bienfaiteur.. — Leur mot aux traîtres, quelque part qu’ils se trouvent ! Ils reprirent ensemble, avec un secours de 800 lances, toutes les frontières du Nord dont Maximilien s'était em- paré par surprise (1). Témoin de l'affaire de Guinegate (1) 1479. DE LA QUATRIÈME SECTION. 329 où Descordes , emporté à la poursuite de l’ennemi, livra ses francs archers au choc de la cavalerie allemande et perdit en une heure tout le:succès de la bataille ; de Gié en fit sa lecon pour la bataille de Fornoue. Le siége d’Aire qu’il entreprit quelques années plus tard contre les mé- mes ennemis et sous les mêmes auspices , eut ce rapport avec le siége de Perpignan , qu’on s’y battait de même qu’on s’était réconcilié là, pour rire. De Gié crut à la guerre comme il avait cru à la paix. IL assiégea la ville avec une telle vigueur, que toute vendue qu’elle était elle parut céder à la force (1). A mesure que la renommée du maréchal montait, elle se projetait sur nous par une série de circonstances qui l'identifiaient à notre sol. En 1478, il entra par transac- tion de Louis de Rohan, son frère aîné, en possession de la terre de Mortier-Crolle et de l'Hôtellerie de Flée, en vertu de son droit à la succession paternelle (2). En 1480, par lettres de Louis XI aux gens des comptes, il recoit en échange du comté de Vire les terres et seigneuries de Baugé et de Mouliherne avec la forêt de Monnaye. L’an- née suivante Louis XI lui fit don de toute la tapisserie que Louis de Sicile possédait en Anjou. Enfin, comme pour sceller par une acquisition de son choix ces apports successifs de la naissance et de la fortune, il acheta le Verger à Pierre de Ghabot , son cousin , et grossit de ce titre, à la fois le plus jeune et le plus populaire des siens, le chartrier de sa noblesse. Lors des premiers symptômes de cette léthargie du vieux roi, dont chaque réveil comptait un échafaud ou une potence , il se trouva appelé à la direction de l'état, (1) 1482. (2) Il recut en même temps les seigneuries de Gacilly (Bretagne), de Carentan (Normandie), de Gié, (Bourgogne), de Béchardière (Perche), de Tarteron et Soulanèze (Poitou). 330 MÉMOIRES de concert avec l’évêque d’Alby, le gouverneur de Bourg, son frère , et le seigneur du Lude, « car ceux-là se trouvè- rent, » dit Comines , « à l'heure que son mal lui prit , et estoient tous logés dans sa chambre, en deux pau chambrettes qu 1 avoit. » Les faveurs de Louis persistèrent sous Charles qui, dès l’année de son avènement (1), lui conféra le brevet de capitaine de cent lances fournies. En outre, et pour échange du comté de Porcien et autres vendus à Jacques de Savoie, il reçoit du même prince 20,000 liv. de rentes viagères sur le vicomté de Mortaing (2). Il assista au sacre où, par manière d’essai , il géra les fonctions de connétable , se souvenant plus que jamais des allusions du feu roi et de cette épée de Richemont qu’il lui avait montrée du doigt, pendue aux flancs d’un duc de Bretagne. Ge souvenir du reste, si souvenir il y eut, se présenta à son esprit pur de toutes les arrière- pensées que le calcul des circonstances pouvait naturellement sus- citer. Quand l’illustre et fatal connétable d’alors, dans son irritation contre la politique de Madame, fit sur l’ar- mée du Nord l’essai d’une rébellion prochaine , Gié qui la commandait conjointement avec Descordes , s’unit à lui pour conjurer un désastre précieux à son avancement , et ferma de sa main cette porte ouverte à sa fortune. Leurs conseils réussirent à le ramener près de Madame qui venait d’arriver à Compiègne avec le roi. Ainsi déjoué, grâce à l’intervention des deux chefs, dans son espoir de guerre civile, harcelé de place en place à la pointe de leurs mille lances fournies distribuées en deux camps volants, l’archiduc Maximilien battit lentement en retraite , et manquant à la fois de deniers et de vivres, s’en (1) 20 novembre 1483. (2) En dédommagement du comté de Porcien et autres que le roi voulait rendre à Jacques de Savoie (4 avril 1484). DE LA QUATRIÈME SECTION. 331 retourna moindre qu’il n’était venu. Enfin l’année sui- vante, par la prise des ducs de Gueldres et de Nassau, près Bethune, ils courbèrent sans retour la tête de l’en- nemi un instant redressée par le succès de Saint-Omer, et rendirent à la France, dégagée de ce côté, toute li- berté d'action sur la Bretagne. “La mort de Louis de Bourbon, amiral de France, ayant laissé vacante la capitainerie de Granville, Pierre de Rohan ly remplaça (1). Les faveurs pleuvent sur sa tête : 5 juin 1488, lieutenant-général en Champagne; 26 juin 1489 , lieutenant-général au pays de Guyenne; 20 et 26 ‘octobre 1490, lieutenant - général du Maine et de PAnjou. Il y avait, près d'Angers, sur la rive à xüélé du Loir, au pied de la colline de Matheflon, un château fortifié en 1441 contre les incursions des Anglais dans le Maine, cuirassé de murs épais , flanqué de hautes tours, douves aux pieds, barbacanes en tête, sombre comme les idées de surprise et de défiance dont il était en France la tar- dive expression. Le château du Verger n’affectait rien en- core de cette magnifique ordonnance, de ces éblouissants et capricieux décors sous lesquels aujourd’hui Partiste- évoque sa mémoire , l’œil humide et le poing levé sur le cardinal de Rohan. Tel qu’il était, du reste, en cette an- née 1487, son air morose el taciturne sympathisait avec le sujet de l’entrevue dont il fut l'hôte et le témoin. Là comparurent , tête basse en regard de ceux du roi , les plénipotentiaires du très humble sujet de Charles, du faible duc François, du vaincu de Saint-Aubin-du-Cor- mier. Là fut dressé, lu et signé le testament de la Bre- tagne. Ruine et humiliation de la dernière suzeraineté du royaume : les destinées du chef du plus beau duché de France réglées à ses dépens sous le toit d’un ancien vas- (1) 19 février 1486. 332 MÉMOIRES sal, dans une demeureachetée aux frais de celui-ci, dé- possédée elle-même de ses iraditions de famille, et con- damnée par l'acquéreur pour être reconstruite demain. — Quand les réveries vous assiègent ainsi , encombrant le terrain d’une monographie secondaire, de quelle pointe d'acier doit être armée la plume d’un historien pour tra- cer son sillon jusqu'au bout , et pour écrire l’histoire d’une nation ou d’un royaume , sans se laisser égarer par les considérations du chemin ! En 1494, Charles VIII marcha sur l’Italie. Dès les pre- mières étapes, le maréchal Descordes, auquel le comman- dement de l’armée était confié, mourut subitement à l’Arbresle , comme s’il eût protesté par là contre une expédition dont sa vieille expérience s’était obstinément alarmée. Sa mort, pleurée, on le sait, avec des honneurs tout royaux , fut pour Pierre de Rohan le signal d’une évidence décisive. Gette fraternité d’armes, quelque peu absorbante pour la renommée du cadet, cessa , et lui per- mit de se produire pour son compie. Il est peu de pages de Comines , de Paul Jove et de Guichardin , d’où son nom ne surgisse, tantôt avec l’éclat des armes, tantôt avec la force du conseil. À Rome, en société de Jean de Rely, évêque d'Angers , il est député vers le château Saint- Ange, et conjure les hostilités grondantes déjà entre l’ar- tillerie de France et les foudres de l’Église. Il voit Naples le premier et ÿ commande trois jours en l’attente du roi son maître, qui, comme à Rome , comme à Florence , y fait son entrée de nuit et aux flambeaux. Prestigieuse clarté , singulièrement d’accord avec la gloire de cette campagne ! — À Pise, où sa tête est en jeu (1), il soutient vaillamment l’honneur de sa parole contre les: assauts (1) Il avait, en tête du conseil, résisté aux’ injustes condescen- dances du roi pour les Pisans contre les Florentins ses alliés, et s’é- tait mis en butte à l’exaspération de l’armée, « aussi y en eut-il qui dirent de grosses paroles au maréchal de Gié, » (Comines.) DE LA QUATRIÈME SECTION. 333 d’une émeute qui tint quatante-huit heures le président _Gannai enfermé. À Fornoue , il remporte la victoire de Fornoue (1). — Résumons en quelques lignes les sou- venirs de ce haut fait, qe met la retraite au-dessus de la conquête. | L’armée confédérée , foité de 35,000 hommes , avait concu le projet d’emprisonner la nôtre dans les gorges de l’Apennin. Le maréchal de Gié déconcerta cette me- sure : à la tête de son avant. garde , il prit les devants, franchit de périlleux passages , et déboucha au pied d’une colline , dans une vaste plaine d’où la bataille a pris son nom. À l’aspect de l’ennemi par trop supérieur en noin- bre , il recula son camp , mais se retrancha si bien que celui-ci, qui d’abord avait tenté l’attaque , jugea la posi- tion inexpugnable, et se retira. Le reste de l’armée arriva le troisième jour, Le roi commandait le corps, le comte de Foix l’arrière-garde. La rupture de l’armée , sur la- quelle ; en vertu de la faiblesse de ces deux corps isolés, portaient les prévisions du marquis de Mantoue, était sur -le point de s’opérer, lorsque Charles comprit le désastre et y para avec tout l’à-propos de son impétuosité chevale- resque. L’ennemi , attéré par la vigueur du coup , lâcha piteusement pied , sans égard ni à la supériorité de ses forces, ni aux avantages du début. Durant ce temps-là, le comte de Cajazze, chargé de s’opposer à la jonction de Pavant-garde, se ruait sur le maréchal; il brisa contre Jui toutes les pointes de ses lances. L’attitude formidable de cette portion de notre armée , sous la direction ferme et contenue de son chef, mit la stupeur aux troupes ita- liennes , et décida du gain de la bataille. Nous avions 10,000 hommes contre 35,000 ennemis ; nous laissâmes 200 morts contre eux 5,500 cadavres. Une pareille victoire n’est point de celles que l'envie (1) 26 novembre 1495, 334 MÉMOIRES laisse paisiblement enregistrer par l’histoire; on atténua de son mieux le mérite du vainqueur. Par dessus ce qu’il avait fait , on montra ce qu’il eût pu faire. On lui dé- manda compte des 30,000 fuyards qu’il n’avait pas taillés en pièces. Dans une phrase prétentieuse de réticences et d’ambiguité, Brantôme lui ôte d’un mot ce qu’il lui con- cède de l’autre, et conclut néanmoins par cette aflirma- tion formelle, écho de l'opinion de son temps : « Enfin, » tout alla bien, et le maréchal ne laissa pas d’emporter le »renom d’avoir été un bon capitaine , et pour la paix et » pour la guerre. » Qu’on se mette à sa place, et sans con- tester à Brantôme que « s’il eust seulement marché cent » pas , tout l’ost des ennemis se fut mis en fuite, » qu’on se reporte à l'instant où, incertain du sort de tout le reste des siens, en vue de plusieurs corps d’ennemis qui fai- saient fraîche contenance de l’autre côté du Taro ; il ne pouvait lâcher bride à ses troupes sans franchir le tor- rent, sans consommer celle rupture , point de mire des manœuvres adverses, sans épuiser les chances d’une ré- serve salutaire, sans aliéner un poste où, dans la possibi- lité d’un malheur, il eût pu se rallier et tenter de nouveau la fortune. Qu’eûl-on fait à cette place ? Eût-on marché, fût-on resté? Se füt-on rappelé l'épreuve de Guine- gate ? — L'ensemble de cette affaire ; depuis le départ de l'avant-garde jusqu’à la déroute de l’ennemi, atteste dans Gié toutes les qualités d’une valeur prudente et raisonnée. « I sembloit ung second Hector, » dit Bourdigné , qui ne le compare pas à Achille. L’Achille , ce fut le roi, qui rendit pleine justice aux prévoyances de l’Hector. Le sur- lendemain de cette bataille , il lui assigna , sur la recette des Ponts-de-Gé, 11,200 livres pour son état, en recon- naissance des services rendus à la bataille de Fornoue. C’est par lui que fut conclue la trève de Venise. C’est à lui que le futur Louis XIL, enfermé dans Novarre par le duc de Milan, dut de sortir de la place, Il fallait un ôtage, DE LA QUATRIÈME SECTION. 335 et.le maréchal avait présenté pour caution du prince; son neveu, Louis de Rohan, seigneur de Rainefort. … Louis XIX ne tarda pas:à payer les services rendus au duc d'Orléans. On le voit , en effet, dès les premiers mois de son avènement au trône (28 août 1498) accroître dans le fils les dignités du père , par la nomination de Charles de Rohan, seigneur de Gié, à la Pen de grand-échanson de la couronne (1). Et lorsque le nouveau roi , plus amoureux de la veuve que du trône de son prédécesseur, alla chercher à Nantes la main d'Anne de Bretagne, le gouverneur d'Angers l’ac- compagna. L’année d’après , 1499 , s’élevèrent les premières a as- sises du nouveau château du Verger, abri futur qu’il se bâtissait là sans le savoir, aux dénéne de sa grandeur, à l'issue de son meilleur siècle ; contre les réactions du sui- vant. L’origine du monastère des Anges, érigé simultané- ment par lui dans sa terre de Mortier:Grolle , se rapporte aux adieux de Charles VSIT et de la reine à Lyon, lors du départ pour l'expédition d'Italie, et au couvent de l’ordre de Saint-François qu’ils y fondèrent (2). Les archives de Guémené mentionnent le bref d'Alexandre VI à cette occasion : « Quod ipse fervore devotionis accensus , cu- »piens transitoria in æterna , et temporalia in cœlestia »felici commercio commutare.........., fratrum mino- (1) « .…. Où il s’est employé et exposé, s’emploie et s'expose cha- » que jour vertueusement sans épargner corps et bien. » (2)« En ce temps-là le noble et vertueux chevalier fonda auprès dé son très plaisant château du Verger, sur la rivière de Loir, ! ung beau couvent de Religieux Célestins , et pareillement iceluy sire, mé- moratif que le roi Charles VIII estant à Lyon, à la persuasion du dde Jehan Bourgeois, fit édiffier près icelle ville à Lyon ung couvent de frères de l’observance de saint François, appelé ledit couvent de N. D. des Anges, meu de dévotion et ‘de tel exemple, fit construire en sa terre de Mortier-Crolle ung beau couvent de frères mineurs, lequel pareillement voulut être appelé N, D. des Anges, » oridighé.) 336 MÉMOIRES »rum , etc: » — À voir de telles paroles , pures et suaves comme l'Église, tomber des lèvres d’un Borgia, on songe au rayon de miel dans la gueule de ce lion dont les vers faisaient leur pâture. Il y a tout lieu de supposer, d’après l'inspection de ses ruines, enlacées aux rameaux des chênes contemporains, que le château même de Mortier-Crolle, avec ses fenêtres à nervures , rehaussées de frontons à crochets, ses tou- relles de briques coupées de cercles de moëllons, se rat- tache à cette ère pacifiquement illustre de la vie de notre héros. Ainsi, entre deux guerres , glorifiant ses loisirs , surveillant ses chantiers d'Anjou du fond de son hôtel des Tournelles (1), il jouait son rôle d’artiste dans les émulations de cette école qui closait, après trois siècles, par les réminiscences d'Italie , la période ouverte par les importations d'Orient, Gaillon et le Verger, d’Amboise et de Rohan , deux ailes magnifiques dont les deux favoris flanquaient le palais du monarque. Nous assistons à Lyon , en 1501 , au conseil de Louis XII; voici l’importante question qui s’y traitait. L’infan- terie alliée, au nombre de.7,000 hommes, avait dévasté le Milanais, et sous le coup de la démoralisation profonde causée à nos soldats par l’opiniâtreté de ses manœuvres, le roi, pressé d’obvier aux désastres que de pareilles ren- conires ne manqueraient jamais de susciter, écoutait les avis et recueillait les voix de ses capitaines. Gié, dont les molions prévalaient d'habitude en l’absence du cardinal, se leva et remontra quelle inégalité radicale établissait, entre l’infanterie ennemie et la nôtre, le mode de leurs for- mations respectives; qu'’ilen serait ainsi de nous tant qu’on abandonnerait aux chefs le soin d’improviser , au matin d’une campagne , une armée de vagabonds qu’on licen- cierait le soir ; qu’il n’y a point de soldats sans l’identifi- (1) Donné par Louis XIL (6 septembre 1500). DE LA QUATRIÈME SECTION. 337 cation au drapeau, celté ancre et ce talisman des compa- gnies d'ordonnance. « Mais le trésor est à sec et vous reculez devant impôt ; eh! Sire, qu’à si peu ne tienne : licenciez-moi d’un coup quatre de vos compagnies d’or- donnance , et voilà l’entretien de votre infanterie payé. » Celui qui disait cela voyait juste, mais de loin , les temps n'étaient pas mûrs pour l’exécution de sa pensée. La noblesse protesta contre l’avilissement de ses titres aux mains de francs archers , de routiers et de braban- cons. Et sur qui tomberait la suppression proposée ? — Ici le maréchal se tut ; il échoua , enfouissant son projet dans l’histoire. Il fut de l’entrée à Gênes et de ceux qui chevauchaient aux côtés de Louis XIT, dans le groupe chevaleresque publié par Montfaucon. Nous renvoyons en note l’énu- mération fastidieuse des confiscations multipliées à son profit par la gratitude du monarque (1). Il lui gardait au relour une plus éclatante faveur. La mort de Louis de Nemours , tué d’une balle de mousquet à la bataille de Gérignoles , faisait de Margue- rite d’Armagnac, sa sœur, le point de mire de toutes les ambitions du royaume. Veuf et à cinquante ans, mais fort d’un royal patronage , le seigneur du Verger l’emporta. Il fut stipulé par contrat de mariage, rédigé à Provins en juin 1503, qu’en cas de survivance il jouirait du duché de Nemours et s’en réserverait le titre, abandonnant à leur fils le nom et les armes d’Armagnac. La dotation de ce duché , objet de contestations sérieuses de la part de la cour des comptes , avait été à peine validée par des (1) Dons des biens et immeubles confisqués sur Bon Galéas avec la seigneurie de Castellargue au diocèse de Plaisance; de Florensolo, des Torchers, d’une partie de la seigneurie de Fa avec DRE a tion de la possession de toutes les terres que Charles VIII lui avait données dans le royaume de Naples. T. IL 22 338 : MÉMOIRES lettres de jussion (1) , lorsque le décès de la duchesse dans les six mois (2) provoqua sa réunion définitive à Ja couronne. Il n’en garda pas moins le titre jusqu’à sa mort. Gependant l’égoiste opposition de la noblesse aux me- sures du maréchal portait ses fruits en Italie. L’infanterie espagnole avait imprimé ses talons sur le corps de nos braves à Séminare et à Cérignoles. Des quatre armées , dont trois de terre, que Louis XII leva en désespéré et du même coup, celle qui avait mission de harceler les fron- tières d’Espagne , pour faire diversion aux troupes de Ferdinand sur Naples, partit sous la conduite des sires de Gié ét d’Albret. Association fatale qui mit le sort de la France à la merci d’une rivalité domestique ! Quand le chef des Gascons n’eût pas prodigué à ses troupes tous les ménagements d’une propriété personnelle , quand il n’eût pas rédouté les rancunes de l'Espagne pour le roi de Navarre son fils , il n’en eût pas moins vu dans son compagnon d'armes le préféré de l’héritière d’Armagnac. Il comprima ses ressources , traversa ses projels , et fit si bien par peur et par rancune que, repoussé faute de vivres des remparts de Fontarabie , malheureux devant Saxé où les troupes du duc d’Albe triomphèrent de la jonction de nos deux armées, le maréchal revint à la cour avec le chagrin d’un premiét revers. Malgré les amertumes publiques et privées dont il fai- sait l’apprentissage un peu tard , il se maintenait debout , et l’éclat de son crédit ne semblait point souffrir de lobs- curcissement de son étoile, Le roi, comme pour renouér le fil rompu de son alliance , venait de marier Charles de Rohan, son fils aîné, avec Charlotte , sœur de Marguerite (1) Sur ses remontrances qu’elle n’était point un démembrement de la couronne, ayant été donnée par Charles VI à Charles IE, roi de Navarre, en échange du comté d'Evreux. (2) 15 novembre 1503. DE LA QUATRIÈME SECTION. 339 d’Armagnac; second échec porté au sire d’Albret qui, à défaut de l’aînée , s’était rejeté sur la cadette, Père de trois garçons , allié par le premier à la plus riche maison de France , allié de l’Église par le second , évêque d’An- gers (1), grand de Bretagne, favori de France, conseiller de Louis XI, de Charles VIT , de Louis XIT, gouverneur de François I* (2) , il était monté là d’où il n’avait plus qu’à descendre. L'occasion ne lui faillit pas, L’inimitié de deux femmes diverses par l’esprit, mais pareilles de caractère, partageait la cour en deux camps, Il s’agissait entre elles de la main de Claude de France, fiancée par Anne, sa mère, à Charles de Luxembourg (3), destinée par Louis XII et par le vœu du pays à Francois, fils de la comtesse d'Angoulême. Ghacun des deux partis, suivant. que l’avenir offrait plus de chances , ou le présent plus de sécurité, flattait en l’irritant les prétentions des deux princesses. Ici comme d’habitude , bien que le parti da présent fut désormais le parti de son âge, Pierre de Rohan se tourna vers l’avenir. Les Rohan, il est vrai, étaient insupportables à la reine (4); mais le souci de son royal pupille parlait encore plus haut dans le cœur (1) François de Rohan, nommé évêque d'Angers à dix-neuf ans, et deux ans après archevêque de Lyon, où il mourut en 1536. Il ap- porta aussi sa pierre à l’histoire architecturale de notre province, par l'érection du grand éscalier qui conduit de la cour à la salle du Capi- tole (v. Bodin.) : Ge ne fut que plus tard , en 1514, que le troisième de ses fils, par son mariage avec Aune sa cousine, réunit la branche cadette à la branche aînée des Rohan. Il fut tué à la bataille de Pavie. (2) A la mort de son père, en 1496, l’héritier présomptif avait été amené de Cognac au château d’Amboise, par ordre de Louis XII qui lui avait donné le maréchal pour gouverneur, | (3) Charles d'Autriche, prince d’Espagne, plus tard Charles- Quint: : (4) A cause des prétentions des Rohan à la couronne de Bretagne, prétentions récemment élevées par le vicomte de Rohan, cousin du nôtre, 340 MÉMOIRES de celui-ci que les griefs de race ou les répulsions du sang. Nul, à ce qu'il paraît, n’avait pénétré plus avant dans les suites d’un mariage qui, en incorporant la Bre- tägne à l’Autriche, troublait à nos dépens l'équilibre de l’Europe. n Les choses en étaient là , quand au plus fort d’une ma- ladie qui mit trois mois la vie de Louis XIT en péril (1), on avisa près d'Angers un convoi qui descendait la Loire. — C'était tout simplement la couronne de Bretagne qui transfuge de la France retournait au pays natal. Une mala- die sérieuse aussi, et dont depuis quinze années Anne, plus duchesse que reine, n’avait pu complétement guérir, la maladie du sol venait de se réveiller chez elle, En douai- rière féodale, elle s’assurait de ses reprises contre les chances du veuvage; et embarquant à Blois ses meubles, joyaux et bijoux, elle les dirigeait à tout événement sur Nantes; même sa fille, dit-on, faisait partie des passagers. Le gouverneur d'Angers (toujours Pierre de Rohan) s’é- mut grandement à cette nouvelle. Avec son rare coup d’œil il déméla le complot sous les mystères du convoi; avec son dévouement il comprit le salut de létat au tra- vers de ses périls propres. D’une part la France réduite, l'Espagne triomphante, le passé redressant sa têle sur l'avenir, et remis en question tout le systême de la mo- narchie; de l’autre, une femme altière, publiquement blessée dans le vif de sa passion, et qui au dire de Bran- tome, « ne chômait point sur la vengeance, » voilà ce qu’il vit à la fois. L’absence du cardinal d’Amboise lin- vestissait alors d’une responsabilité sans réserve; il ne balanca pas. Il tira des armoiries d’Anjou cette clef qui (1)« Car leur ville (en parlant des Angevins) fut très-somptueuse- ment tendue et tapissée, et eulx tous, chacun sa torche au poing, al- lèrent dévotement la tête nue, et plusieurs les pieds nuds en ladite procession , requérans humblement le créateur qu’il donnât bonne vie et prospérité à leur prince, » ( Bourdigné.) DE LA QUATRIÈME SECTION. 341 ferme la porte de la-province, et fit arrêt sur l’équipage. Ghez quelques historiens lattitude du maréchal revêt un caractère de prévision menaçante. Îl aurait par avance fortifié Angers, se serait ménagé des intelligences en Bre- tagne , et doublant la garde d'Amboise , aurait donné le mot à un de ses lieutenants d’enlever le jeune Francois du château de cette ville-pour le transporter au château d'Angers. Puis il aurait échelonné, larme au bras, le reste de sa compagnie sur la Loire (1). Quoi qu’il en fût, le succès passa d’abord ses espérances. Soit dissimulation, soit anxiété conjugale, soit surprise et stupeur d’un coup de main aussi hardi, Anne baissa la tête, et sans troubler le maréchal dans les illusions desa victoire, laissa paisi- blement ‘confluer ‘devant le trône les remerciements du monarque et les applaudissements de la nation. Le fait est que Louis X1I mort, le rôle du maréchal at- teignait tout à coup des proportions considérables. Auteur . d’une mesure qui venait de sauver l’état à l'heure où l’é- tat changeait de maître , gouverneur de celui qui en tien- drait les rênes et dont lui-même tiendrait les mains, son passé n’était rien en vue des horizons subits que lui dé- voilait la fortune. S'il rêva tout cela, son rêve ne fut pas long. La gué- rison du roi donna à son ennemie le loisir de se recon- naître. Au premier souffle d’une colère dont la sérénité des prémiers temps ne lui permettait point de soupcon- ner toute la portée, il jugea prudent de se retirer au Ver- ger. Mais la tourmente croissait ,; et quand il reparut à la cour, ce fut pour s’y convaincre de tout ce que le ressen- liment d’une reine peut amonceler d’orages en quelques jours. Il se tourna vers la duchesse d'Angoulême; mais (1) Cette seconde version , trop conforme aux termes de l’accusa- tion qui va suivre, pour ne pas inspirer de graves défiances, se trouve développée avec complaisance dans Garnier. 342 MÉMOIRES tranquille désormais sur les intérêts de son fils, cette mère, qui redevenait femme (1), oublia les services et préféra se souvenir des humiliations sans nombre dont son orgueil les avait payés. Alors on assista au spectacle de deux rivales qui, chacune partie d’un grief opposé , fai- saient de la tête d’un favori le point de rencontre de leur haine. D’Amboise pouvait, — mais il s’abstint ; cette pen- sée énervante , qu’il serait doux de gouverner seul , vint- elle à l’encontre de son zèle ?.:.. Quant au roi qui naguère du chevet de son lit de douleur avait préconisé le dévoue- ment de son minisire et mêlé le nom de Pierre de Rohan à ses adieux (2), il en fut de lui comme de tous ceux dont le cœur longtemps changeant réagit par excès de fidélité contre l’inconstance, Avec une faiblesse que n’a point suffisamment stigmatisée l’histoire ; il laissa flotter la passion sur le cou de cette reine, puissante comme la beauté et boiteuse comme la vengeance. C'était Pheure pour le maréchal de s’appliquer ces mots par lesquels Dammartin, disgrâcié avant lui, s'était plaint dans une lettre à lui-même, de ce qu'il n’était plus au nombre des gens de bien pour l'instant. F L'affaire s’instruisait; — trop lentement au gré de la reine qui se mit partie au procès. D’une main portant la torche à ce bûcher de témoignages édifié de longue main par l’industrie des envieux , elle fouillait de l’autre dans les arsenaux d'Italie, requérant des docteurs, à l'appui de (1) Même en qualité de mère (dans l’acception étroite et passion- née du mot), Louise de Savoie n’était pas sans rancune. « Le jour de la conversion de saint Paul, 25 janvier 1501, environ deux heures de l'après-midi, mon César et mon fils auprès d’Amboise fut emporté au travers des champs par une haquenée que lui avait donné le maré- chal de Gié, et fut le danger si grand, que ceux qui étaient présents le jugèrent irréparable. — Mémoires de Louise de Savoie. » (2) Il avait même chargé Roquefort de lui exprimer toute sa gra- titude, d’une facon qui sentait plus le sujet que le monarque, DE LA QUATRIÈME SECTION. 343 ses conclusions , les armes de la jurisprudence remaine. Les frais de la procédure, pour son compte seulement, montèrent à 32,000 livres. Il n’y eut pas un ennemi qui défaillit au poste; pas un grief si petit, si oublié en appa- rence , qui.ne prit vie et ne revêtit corps : grief de la no- blesse contre le promoteur de l’infanterie ; grief da sire de Dreux contre l’époux et le père des héritières d’Arma- gpac; grief de la comtesse contre un tuteur sans conces- sion; grief des courtisans contre un ministre sans bas- sesse. On pouvait remonter la gloire du maréchal à la lueur des brandons suspendus sur sa tête. -Ilfut arrêté à Orléans. Sans reproduire ici toutes les évolutions d’une procédure qui dura trois années, et qui durerait encore , si l’impatience de la reine n’eût traqué son ennemi dans les dérniers retranchements de la justi- ce (1), nous la résumerons en trois ré bien dis- tinetes : Evocation de l'affaire au grand aile sous qualifi cation du crime de lèse-majesté, de l’avis de Marsiliis et de Louis Bolognien, jurisconsultes de l’école de Pavie. Il attend, sous verroux et privé d'avocats, la signification d’une requête monstrueuse , fruit de l’association des Pontbriants, ses protégés , de la comtesse son cbligée, et de cet ignoble sire d’Albret dont le vieil amour pour Anne se réchauffait dans la haine. Il y eut un procureur du roi misérable, qui conclut à la tête tranchée, à l’écartellement et à la confisçation des biens. Il y eut un président hon- nêle homme , que ce tissu d’iniquités révolta , qui déchira enquête, annula la procédure, rendit par provision la li- berté au prisonnier, et Pajourna à PHRRDATARES avec ses moyens de défense. (1) Il avait signifié une liste de témoins où figuraient le roi, le cardinal d’Amboise, des gouverneurs de province, des officiers de l’armée d'Italie, des ministres chargés de négociations à l'étranger. Cette signification n’eut pas de suite, 344 MÉMOIRES Reprise de l’enquête et confrontation des témoins. De toutes les épreuves que l’accusé eut à subir, celle-ci fut sans contredit la plus rude. Il eut à repousser les inculpa- tions de Louise dans ce même château d’Amboise, con- fident de leurs intérêts communs, où le cœur du vieux guerrier avait battu tant de fois sous les regards de l’arti- licieuse princesse (1). Ges entrevues d’ailleurs n’avaient rien d’attrayant pour l’honneur de ses adversaires. Le lâche sire d’Albret, relancé par les commissaires d’Am- boise à Chartres et de Chartres à Dreux, feignit d'être malade et, pour échapper aux confrontations de sa vic- time, se jeta aux bras des médecins. Il fallut que Rohan, stipulant de son côté toutes les garanties d’une défense en règles, pénétrât dans le château par capitulation. Là se passèrent des scènes lamentables. On lit dans Jean d’Au- thon que laccusé portait une longue barbe blanche, et que, Lout préoccupé de ses idées et de son chagrin, il la prenait dans ses mains ei s’en couvrait le visage; qu’un singe du sire d’Albret, s’élançant du lit de son maître, s’aittacha à cette barbe aux rires des valets, insultant le maréchal dans les deux choses les plus inviolables chez l’homme, dans la vieillesse et dans l'honneur, — Ilres - sort du dossier plus d’une simple et haute parole, dont après deux cents ans, sur cette Lerre qui l’a vu naître, les amis de sa mémoire se réjouissent encore. Ainsi en se défendant d’avoir mal parlé de la reine , qu’en cas que ces paroles lui fussent échappées, il aurait très-mal dit et qu’il ne voudrait pas les avoir dites de la moindre gentille femme de France. Ainsi à la comtesse , par ma- nière d’allusion délicate à l’intimité de leurs souvenirs : que s’il avait toujours servi Dieu comme il avait servi Madame, il n'aurait pas grand compte à rendre à sa mort. (1) Quelques auteurs vont jusqu’à dire qu’il avait aspiré à sa main, et qu’une démarche formelle avait eu lieu à cet égard. DE LA QUATRIÈME SECTION. 345 Renvoi de l'affaire devant le parlement de Toulouse. On sait que ce tribunal était en odeur de sang dans le royaume. La reine , féodale jusque dans s1 vengeance, avait argué de son droit de suzeraine pour traduire Ro- han, d’une famille bretonne ; pardevant qui bon lui sem- blerait. Ceux ‘qui, pour justifier la reine de son choix, allèguent que les lois romaines , suivies alors dans ce pays, correspondaïient avec une rigoureuse justesse à la nature du crime dont le maréchal avait à répondre, arrivent à notre but, mais par un autre chemin. Du reste , somme toute , criblée et tamisée par trois années de procédure , voici à quelle substance se réduisait l’accusation : D’avoir révélé que le roi avait un flux de sang qui le conduirait dans peu au tombeau ; ; De s’être vanté, dans cette supposition, de s'opposer à la retraite de la reine en Bretagne, et d’avoir agi à cet effet auprès des barons du pays; | D’avoir comploté le mariage de sé Claude avec le jpeg comte d'Angoulême ; + D’avoir pris des mesures pour conduire le prince , hé- ritier présomptif de la couronne , en son gouvernement d'Angers, pour s’emparer de l'autorité sous son nom ; D’avoir, dans le dessein de primer les grands , conseillé une levée parmi les sujets de 20,000 hommes d’infanterie réglée et permanente ; D’ avoir tiré du château ichipétte quinze mortes-paies entretenues des deniers publics, pour les établir dans son château de Fronsac. Le maréchal, pour se défendre, n’avait pas attendu Pouverture des débats. Déjà, dans deux mémoires , et une fois par procuration, dans la personne de Jacques de Meudon , chanoine de l’Eglise de Saint-Pierre d'Angers , il avait riposté avec la dignité d’un seigneur et la fierté d’un chevalier, aux coups de. cette procédure meurtrière. Il ne se démentit pas à l’heure de l’interrogatoire, Il parla 346 MÉMOIRES de sa lignée, dont on avait cherché à ternir l'éclat, lignée de seigneurs et princes dont le crédit, joint à ses offices , le dispensait des cabales à l’aide desquelles d’autres par- viennent, Il protesta, au nom de la reconnaissance, con- tre toute allusion ou vanterie sur la mort prochaine du roi; quant à la motion d’une levée d’infanterie, dit qu'il y persistail, bien loin de s’en repentir, comme du seul moyen de se soustraire à la domination des Suisses, Qu'il se souciait si peu de se dresser contre ses pairs , qu’il les défiait de citer une fortification aux maisons qu’il avait bâties. Il étaya , de la requête de tous les ordres de l'Etat, son projet de garantir la Bretagne à la France, par le ma- riage de Claude et de François. Sans reculer devant la res- ponsabilité de sa conduite envers la reine , il désavoua avec une indignation nouvelle les paroles qu’on lui avait fait tenir, comme impossibles, dit-il, dans la bouche d’un ancien chevalier sans reproche, qui avait vieilli dans le commandement des armées, et à la cour de trois rois. Il se montra plus faible sur l’article des mortes-paies , bien qu’il eût pu se targuer de cette réponse sans réplique faite à Lonis XI, par son camarade Descordes : « Sire , avec cel argent, j'ai conquis les villes d'Arras, de Hesdin, de Boulogne; rendez-moi mes villes, et je vous rendrai voire argent ». Ce fut là-dessus pourtant , et sur deux autres peccadil- les, débris de ce formidable échafaudage d’accusations, que se concentra toute la sévérité des juges. Il fut donc condamné, par arrêt du 9 février 1505 , pour réparation de quelques excès et défauts, et pour certaines causes et considérations , à perdre l’état et le titre de gouverneur du comte d'Angoulême , les gouvernements d’Amboise et d'Angers , sa compagnie de cent lances; à être privé des fonctions de maréchal pendant cinq ans; à restituer au trésor la solde des quinze mortes-paies qu’il avait établies dans Je château de Fronsac. DE LA QUATRIÈME SECTION. 347 Appel du condamné au roi, qui, par lettres datées de Romorantin, 25 mars 1506 , ordonna l’exécution de l’ar- rêt Pope in de Toulouse. Au point de vue du délit, la sentence justifiait toute la renommée du tribunal, Au point de vue des royales ven- geances, était-ce bien tout ce qu’il fallait ? Des paroles de la’reine , trop connues et trop cruelles pour que nous les rapportions ici, trahissent à ce sujet un dépit coloré de joie (1): Amis et ennemis chantèrent le Te Deum ; il en fut de cette bataille comme de celle de Fornoue. La chute du maréchal fut pour le château du Verger le signal, d’une élévation rapide, Tandis que son procès, commenté par deux passions contraires , offrait aux clercs dela Bazoche un texte de joyeux calemboures (2), lui, reprenait son œuvre interrompue par la guerre, et vouant sa vieillesse aux labeurs de l'exil , il surmontait de cette devise un chaperon à larges bords : « À la bonne heure m’a prins la pluie ». Si le faix de l'historien , déjà trop lourd pour nos épaules, pouvait se grossir encore de celui de l’archéologue , nous dirions les féeries de ce monument illustre , où l’ogive et le cintre joûtaient comme deux che- valiers , chacun aux couleurs de leur siècle ; comment le sire de Gié le divisa en deux cours, flanqua ses angles de six tourelles , auxquelles il assigna des douves pour miroir; festonna les créneaux, élanca les clochetons, accosta de poivrières le fronton aigu des portiques. Le souffle de l’Ita- lie, soufile cher à ses premiers ans, en assortit toutes les pierres ; il bâtit ses mémoires , ainsi que d’autres les écri- vaient. Vainement échut le terme de sa disgrâce , il ne reparut (1) Voir Brantôme. (2) Un maréchal ferrait un 4ne ; c L'éne rua pour se venger, _ Et du coup l’atteignant au crâne Le culbuta dans le verger. 348 MÉMOIRES point à la cour. D'ailleurs ce noble instinct qui, en toutes circonstances , tourna son œil vers l'avenir, lui avait en- tr’ouvert les horizons de l’autre vie. Il s’y acheminait , courbé sur ce bâton pieux qui l’avait dirigé jadis dans son pélerinage à Compostelle (1). La chapelle de Sainte- Croix (2), qu’il érigea près du château, et où son fils, l’évêque d'Angers, fut consacré, éclatante de statues , ru- tilante de vitraux , témoigne de sa munificence (5). C’est là que, par testament, en date du 19 avril après Pâques 1515, il demanda que son cœur fût déposé. Dans ces lignes , il se montre calme, serein, purifié, pareil en tout à cette ressemblance d’albâtre qu’il avait fait placer au lieu de sa sépulture (4). Il s’y recommande à Pierre, patron de son baptême; à Michel, patron de son ordre ; à Jacques, patron des pèlerins ; il distribue aux pauvres la dixième partie de ses revenus, et, du bord de la tombe, tournant sa tête vers le berceau , il lègue aux siens l’achè- vement de sa chère Notre-Dame-des-Anges. (1) Bodin fait allusion à ce pélérinage, mentionné d’ailleurs sur les armoiries de Pierre de Gié, que Montfaucon décrit en ces termes : au 1er et 4€ de Navarre écartelé d’Évreux, au 2€ et 3€ de Rohan , au lambel de trois pendants qui est de Gié, sur le tout de Milan; sup- port, deux anges chacun sur une; entourées de coquilles avec cette devise : Dieu guard’ de mal le pélerin. (2) Desservie par des moines de cet ordre nommés aussi Cruci- fers, à cause de la croix rouge qu’ils portaient sur la poitrine, (3) L'on y voyait à genoux, près le grand autel et au-dessus des armoiries que nous venons de citer, la statue en albâtre du maréchal, et sur les vitraux Francoise de Penhouët, priant Dieu devant son oratoire, en voile noir et en jupe rouge, ses trois enfants à ses côtés. (4) La figure de saint Pierre, contiguë à celle de saint Christophe, ainsi que les huit apôtres à mi-corps dépaysés dans des panneaux du XIIIe siècle, proviennent également de la chapelle de Sainte-Croix. Le cabinet de M. Mordret contient de magnifiques fragments de cette verrière, M. Grille en possède aussi quelques-uns, plus un curieux tableau sur bois (1530), d’un caractère mystique et ayant trait à la dédicace de la chapelle, DE LA QUATRIÈME SECTION. 349 « Sain de corps et d'esprit, » dit-il, trois jours après, il mourut à Paris, en son hôtel des Tournelles , à l’âge de 62 ans. La fatale nouvelle de la bataille des éperons, qui arriva dans l'intervalle, aurait-elle frappé le vieux guer- rier encore debout d’une facon plus rude que la disgrâce ? Celle qui lui avait gardé une si implacable rancune mourut elle-même un. an après; et lorsqu'on la plaça sur le lit de parade , couronne en tête , hermine sur l’épaule, belle encore sous les ravages de la maladie et de la mort, quelqu'un, par une distraction salutaire dont l’histoire fait son profit, lui mit l’attribut de justice dans la main gauche. J’ai vu Mortier-Crolle. Le monastère, achevé par les hommes, l’a été ensuite par le temps. Au pied des rem- parts du châieau , ruines du XIIT: siècle, surmontées des ruines du XVI°, deux taureaux, dans l’eau jusqu’aux cor- nes , s’entrechoquaient encore, parodiant les combats qui ne sont plus. J’ai vu l’enceinte du Verger. Sa démolition est célèbre. Les éclats en ont volé jusqu’au chœur de notre cathé- drale , où le soleil chaque matin illumine, en se levant, la figure du géant saint Christophe (1}. Paix à Pâme de celui qui, par un senliment excessif du passé, contre le- quel eût protesté son ancêtre, arracha ses ossements au contact d’un parvenu. À l'instant de mêler mon anathême aux autres, je me suis arrêté, et personnifiant le monu- ment, je l’ai fait solidaire de la mesure dont il semble victime. En cette époque d’industrie, où il n’y a de vie (1) « Considérant que toute humaine créature est née au monde pour une fois mourir... et que la terre, mère de toutes choses, re- prend enfin tout ce qui d’elle a pris naissance... que l’état de ce monde transitoire est tant seulement un brief pélérinage où chacun vient et passe pour parvenir à l'éteruelle mention... » 350 MÉMOIRES sauve qu’au prix d’une transformation vulgaire, qu’eût-il tant gagné à survivre? que füt-il devenu ? usine, caserne ou prison ? | Il à fait comme ceux-là dont l’histoire a gardé le nom. Il est mort plutôt que de se rendre. DU TOMBEAU DE FRANÇOIS II, DUC DE BRETAGNE, ET DE SON AUTEUR, PAR M. BIZEUL, Membre de la Société des antiquaires de France, à Blin (Loire-Inf.). On trouve dans le premier fascicule des analectes his- toriques publiés par M. Leglay, archiviste de Lille (Mémoire de la Société royale de Lille, 1838, p. 255 et suivantes), une lettre de Jean Lemaire, historiographe et indiciaire de Bourgogne , à Marguerite d'Autriche, dans laquelle il parle de Michel Coulombe , tailleur d'ymaiges du roy, de ses talents et des soins qu’il met à faire la sé- pulture du duc Philibert de Savoie, dernier mari de la princesse. « Le très-bon ouvrier, maistre Michiel Cou- lombe et trois de ses nepveux, dit-il. Ledit Coulombe est fort ancien et pesant , c’est assavoir environ de iiijxx (80) ans, et est goutteux et maladif à cause des travaulx passez , par quoy il faut que je le gaigne par doulceur et longanimité..…. Le bonhomme rajouenist pour l’honneur de vous, madame, et a le cuer a vostre besoigne...…, Les- dicts deux nepveux sont ouvriers en perfection comme DE LA QUATRIÈME SECTION. 351 héritiers de leur oncle , l’un en taille d’ymaigerié , l’autre en architecture et maçonnerie, et n’y à gens nulle part ‘que je sache qui mieulx réduisent une héboigaé en Lu volume que eulx deux, » Cette lettre fut écrite à Tours , le 22 ivéltibré 1511, . Jean Lemaire y étoit allé trouver Michiel Coulombe pour traiter avec lui du tombeau du duc Philibert. Le marché en fut passé le 3 décembre suivant, en voici quelques extraits : « Je, Michiel Goulombe , habitant de Tours et tailleur d’ymaiges du roy nostre sire, tant en mon propre et privé nom comme ès noms de Gtillätirhe Regnault , tailleur d’ymaiges , Bastien François , maistre masson de l'église de Sainct-Martin de Tours, et François Cou- lombe, enlumineur, tous trois mes nepveux, confesse, promectz, affirme, etc... j’asseure et aflerme que Guil- laume Regnault, tailleur d’ymaiges, mon nepveu, est souflisant et bien expérimenté pour réduire en grand vo- lume la taille des ymaiges servant à la dite sépalture, en ensuivant mes patrons, car il m'a servi, et aidé l’espace de quarante ans ou environ, en tel affaire, en toutes grandes besoignes , petites et moyennes que par la grace de Dieu j’ay eues en main jusques aujourd’huy et auray encoires et tant qu’il plaira à Dieu. Mesmement il m’a très-bien servy et aidé en la derrenière euvre que j’ay achevée, c’est assavoir La sépulture du duc F rançots de Bretaigne , père de la royne, de laquelle sépulture j’en- voye un portrait à madame. » D’autre part ledit Bastyen Francois, gendre de mon dit nepveu , s’afferme estre souflisant pour exploicter et dresser en grand volume les patrons de ladicte sépulture, quant à l’art de massonnerie et architecture , lesquels pa- trons seront faitz en petit volume de sa main propre. » Francois Goulombe étoit enlumineur et devoit estoffer les patrons de paincture blanche et noire ; selon ce que la nature du marbre le requiert, etc. 352 MÉMOIRES Michel Coulombe parle aussi dans le même marché de Jehan de Chartes , son disciple et serviteur, lequel l’avoit servy l’espace de dix-huit à vingt ans et éloit à l’époque tailleur d’ymaiges de madame de Bourbon (Anne de France, fille de Louis XI). À Il est à croire que Michel Coulombe, modela le pa- tron du tombeau de François II, et que Guillaume Re- gnault. et Bastien François, son gendre reduisirent en grand volume la taille des ymaiges. On ne voit pas trop quel fut dans ce magnifique ouvrage le rôle de François Coulombe , l’enlumineur, qui mourut vers le commence- ment de l’année 1512, ainsi que l’apprend une autre let- tre de Jehan Lemaire, datée à Blois, du 14 mai de celte même année. Chalmel, dans son histoire de Tours, t. IV, 115, croit que Michel Coulombe, qu’il nomme Colombeau, était né en Touraine. La lettre de Jehan Lemaire prouve au moins qu'il demeurait à Tours, dans son extrême vieil- lesse. : à 00 ARCHÉOLOGIE. — L'ÉGLISE ET L'ABBAYE DE TOUSSAINT, PAR L'ABBÉ CHOYER, Professeur à la Psallette d'Angers. Si nous jetons un regard sur la statistique des monu- ments d'Angers à l’époque de la révolution, un des plus célèbres comme aussi uu des plus oubliés depuis , c’est l'église de Toussaint. Gependant rien ne mérile si peu de l’être. Franchissez cette double enceinte qui vous l’a dé- robé si longtemps , pénétrez dans ce pelit sanctuaire DE LA QUATRIÈME- SECTION. 353 consacré autrefois sous l’invocation de Tous Les Saints, el dites, en contemplant des ruines encore si belles et si intéressantes, quelle impression pénible de surprise et de regret on éprouve en entendant un auteur célèbre (1) se plaindre aux Angevins qu'un de leurs chefs-d’œuvre, connu de l’Europe savante , nait Jamais été remarqué par eux. 1 Voué ce semble à une ruine totale, ce monument si justement vanté, était naguère encore enseveli sous un immense amas de déblais et paraissait condamné par un abandon volontaire à se perdre pour toujours dans l’oubli et les décombres qui depuis un demi siècle l’ont enlevé à l'admiration. Mais ce respect prononcé que l’on montre aujourd’hui pour les œuvres éminemment religieuses d’un âge qui n’est plus le nôtre, paraît devoir lui promettre un avenir plus heureux, Puisse ce zèle archéologique lui rendre une partie de cette ancienne célébrité qui l’avait fait connaître des hommes les plus instruits et les plas capables de l’apprécier ! La réputation de Toussaint était, en effet, si grande aux yeux du célèbre Rondelet, architecte du dôme de Sainte- Geneviève de Paris, qu’il crut devoir étudier lui- même une construction dont on lui avait tant de fois parlé. Plusieurs pages et un dessin spécial furent consacrés par lui, dans son Traité théorique et pratique de l’art de bâtir (2), à expliquer la hardiesse en apparence si extraor- dinaire du chef-d'œuvre angevin. © On admire, dit-il , deux colonnes de l’église de Tous- » Saint, d'Angers , de onze pouces de diamètre sur vingt- » quatre pieds de hauteur, qui soutiennent les retombées » d’une voûle gothique de soixante-trois pieds de lon- ? Sucur sur trente-un pieds six pouces de large. » (1) Bodin, t. 1, note 20. J (2) Tome III, p, 184, T. IL. 23 354 MÉMOIRES Le calcul appliqué par lui, démontre que la dureté des pierres (1) pouvait supporter un poids quatre fois et demi plus considérable que celui qu’elles soutenaient; puis il ajoute : « Mais ce qui cause l’étonnement , c’est » la proportion svelte du fût de ces colonnes qui ont » vingt fois et demie leur diamètre , comparée au déve- » loppement considérable qu’elles soutiennent, » Ici encore Rondelet prouve que la grande épaisseur des mürs qui contenaient la voûte, s’opposant au moin- dre affaissement oblique de la charge, en faisait retom- ber tout le poids perpendiculairement sur les colonnes, et leur donnait ainsi toute leur force : « Car il est évi- » dent , ajoute-t-il encore , que sans ces murs, le peu de » base de ses colonnes, par rapport à leur hauteur, les » mettrait hors d'état de résister au moindre mouvement » ou effort oblique capable de les renverser avec les » voûtes qu’elles soutiennent. » Quoiqu'il en soit de ces explications données par un de nos plus savants architectes modernes, il n’en reste pas moins logique de conclure d’abord , que l’église de Toussaint jouissait à la fin du dernier siècle d’une répu- tation qui justifie assez l’expression de l’auteur des Re- cherches sur le Bas-Anjou; en second lieu que nos pères, tout en produisant du merveilleux dans les constructions, n’en excluaient cependant point la solidité. Génieys dans ses tables de la résistance des solides, d’après les indications du même Rondelet, nous donne la charge calculée des colonnes de Toussaint. La voici com- parée à celle de plusieurs autres monuments , abstraction faite de la nature des pierres (2). (1) Les colonnes étaient composées chacune de trois pierres de Fourneux, carrière à deux lieues de Saumur. Les pierres de Four- neux sont d’un gris roussâtre, coquilleuses et très-dures, (2) Recueil des tables à l'usage des ingénieurs, p. 115. DE LA QUATRIÈME SECTION. 355 Poids maximum supporté par millimètre carré. Golonnes de l’église de Toussaint d'Angers. 443 gram. Piliers du dôme de Sainte-Geneviève, « . 294 ‘Id. de la tour de Saint-Méry. : . . 294 Id. de Saint-Paul de Londres. , . . 194 Id. de Saint-Pierre de Rome. , +, . 164 Id, du dôme des Invalides. +: + . . 148 Ajoutons encore que Delalande dans son voyage d’I- talie, ne croit pouvoir faire un plus bel éloge de l’église de Milan qu’en la mettant, pour la hardiesse des colon- nes , au-dessus de celle de Toussaint d'Angers (1). "Tel était le monument qu’une inexplicable négligence à laissé s’écrouler en 1815. Si nous recherchons l’époque de sa construction, le XII: siècle avec son élégance sévère et lhardie , sa so- briété d’ornements grâcieuse et épurée, vient nous dire que c’est lui qui a jeté les fondements de ces restes pré- cieux que nous admirons encore aujourd’hui. Les fené- tres en lancettes parfaitement conservées, les colonnettes longues et multipliées qui soutiennent, avec tant de lé- gèreté , la naissance de voûtes à moulures arrondies , un dessin extraordinairement correct dans toutes les lignes , tout nous annonce en effet la splendeur d’un âge avancé dans l’art de construire. Mais interrogeons l’histoire. Vers le commencement du XI: siècle , sous le pontifi- cat d'Hubert de Vendôme, un nommé Girard , chantre et chanoine de Saint-Maurice , fonda de ses propres de- miers une petite aumônerie toute dans l'intérêt de ‘la classe pauvre et malkeareuse- C'était un de ces hommes que la Providence fait naître de loin en loin pour le sou- lagement de l’humanité aflligée. (1) Tome 1, note a, p. 151. Delalande ne donne que 11 pouces de diamètre aux colonnes de Toussaint et non LI comme alu Bodin. L'erreur vient d’une faute d'impression dans le premier chiffre de 44, 356 MÉMOIRES Mais ce n’était pas assez pour lui d’être le Vincent-de- Paul d'Angers, il voulut encore en être le vertueux Tobie. Un cimetière acheté et béni par lui, reçut dans la terre du Seigneur. ceux que la mort avait surpris dans le dénûment. Cependant une œuvre si bienfaisante se recomnian- dait trop d’elle-mème pour n’avoir pas des admirations et des soutiens. Le chapitre et tout le clergé de la ville de- vinrent bientôt jaloux d’avoir une part à tant de mérites. Ils prirent le petit hôpital de Girard sous leur protection, y bâtirent un oratoire sous l’invocation de Tous Les Saints, et y placèrent, à leurs frais, un prêtre pour visiter et en- sépulturer les pauvres. Telle fut Paumônerie de Toussaint jusqu’au commen- cement du XIT° siècle , que Renaud de Martigné, évêque d'Angers, résolut d'y mettre des chanoines réguliers , soit qu’il ne goûtât pas les dispositions présentes, soil qu’il voulût donner plus d’extension à une œuvre dont les effets étaient si heureux. Il demanda donc des religieux du morastère de Saint- Pierre d’Airvaux (1). Rigaud et Amalger, tous deux d’une instruction et d’une régularité de vie remarquables , fu- rent envoyés au vénérable prélat, par la communauté heureuse d’une telle demande. Renaud de son côté ne négligea rien pour leur témoigner sa bienveillance et son affection. Son attachement pour eux alla même jusque- à qu’en leur considération il fit à Saint-Pierre d’Airvaux l'abandon d’une église de Saint-Pierre, située dans un lieu de son diocèse , appelé Dam-Pierre (2). Mais quel est ce Girard qui a si bien mérité d'Angers, (1) Auxea Vazzis, diocèse de Poitiers. V. Gallia Christiana Nova, vol. IL. (2) Cette église de Dam-Pierre est sans doute celle de Dampierre , près Saumur (Domnus-Petrus), DE LA QUATRIÈME SECTION. 357 par sa charité et son dévouement ? Quelle a été sa vie, quelle a été sa mort ? Réduits à ne le connaître que par sa bienfaisance pour les paavres , pourquoi ne retrouverions- nous pas son histoire dans ces quelques lignes si encou- rageantes de David (1). « Heureux celui à qui a été donnée l'intelligence des besoins des pauvres, parce que Dieu mullipliera ses jours heureux sur la terre, et qu’à ses derniers instants il viendra lui-même retourner sa couche de douleur pour lui épargner la souffrance. » Pour l’œil le moins observateur, les ruines qui nous restent de Toussaint, ne sont point celles de l’oratoire bâti par le chapitre d'Angers. Gependant la première chapelle de Toussaint existait encore de 1115 à 1125, lors de la donation de Dam- Pierre par l’évêque Renaud. On peut dire qu’elle n’a pas dü être remplacée de sitôt, car avant de construire il a fallu donner à la communauté le temps de se développer el de s’accroître, Une église comme celle qui nous reste eüt été complétement inutile pour quelques religieux seulement, et vraisemblablement au-dessus de leurs res- sources. D’un autre côté, nous voyons par quelques extraits d'anciens statuts synodaux, que Foulque de Mathefelon , évêque d'Angers, fit annexer une des prébendes de Saint- Maurice à l’abbaye de Toussaint , en 1551 (2). Ne peut-on pas regarder cette prébende détachée des biens de Saint-Maurice, pour passer en propre aux reli- gieux de Toussaint ; comme un secours accordé pour sou- tenir cet accroissement qui aufait nécessité le-renouvelle- ment de la chapelle ; ce qui la ferait remonter, le chœur (1) Psaume 40. (2) Apud Clementem Sextum, summum pontificem , egit ut una ex prœbendis ecclesiæ andegavensis abbatiæ Omnium Sanctorum an- pecterelur, 4 358 MÉMOIRES excepté , à la fin du XIITe siècle? Ce qu’il y au moins de certain , c’est que nous retrouvons dans la voûte (1), dans les restes des statues qui n'étaient pas sans mérite, dans les fenêtres du transsept, et surtout dans celle du dessus dé la porte , des caractères architectoniques qui sont loin de contredire cette date, Nous avons dit que le chœur ne devait point être re- gardé comme l'ouvrage de l’architecte qui a bâti l’église : c’est qu’en effet, il a été construit à une époque assez rap- prochée de nous. Nous trouvons dans le journal manuscrit de Lého- reau (2), une description de l’église Toussaint, qui ne fait aucune mention du chœur, « Cette église, dit le journal, » commence par les deux ailes qui dans les autres forment » une croix. Le grand autel est au milieu des deux ailes; « en sorte qu’il occupe la nef, qui pour cela est très-pe- . » tite. » La clarté, en général , n’est pas la première qualité de l’ouvrage que nous citons; mais ici, l’auteur nous en a bien dédommagé, en traçant à la marge une sorte de plan par terre qui ne laisse aucune équivoque à sa pensée. C’est comme s’il eût prévu les difficultés que devaient amener (1) Un arceau de la voûte et plusieurs fenêtres différentes, mesu- rées avec soin, nous ont convaincus que tous les arcs avaient été dé- crits avec un rayon égal à la largeur de l’ogive. Les centres du plus grand nombre de ces arcs se trouvent sur les chapiteaux des colonnes opposées. Une coupe géométrale de la voûte, donnée par Rondelet, et ce qui nous a été conservé de l’église, nous ont fourni les données suf- fisantes pour en reproduire l’intérieur par la perspective. (2) Ce manuscrit, déposé à la Bibliothèque de l’évêché, a pour titre : Cérémonial de l’église d’ Angers, composé par René Lého- reau, sieur du Fresne, prêtre, maire-chapelain de Rue-Chèvre, de la même église, natif de la Portiéraieaul cire. près Montjeau en Anjou, commencé en 1692 et fini en 1720, DE LA QUATRIÈME SECTION. 359 plus tard les changements qui ont eu lieu quelques années après lui. Ce plan n’a pas d’autre forme que celle d’un T, d’où il faut conclure que le chœur a été ajouté depuis 1720 , époque à laquelle l’auteur a cessé d'écrire. Péan de la Thuilerie, dans sa description de la ville d'Angers, pag. 140, complète parfaitement Léhoreau. « L'église de Toussaint, dit-il, est aujourd’hui une des » plus belles églises de la ville, vu les grandes augmenta- » tions qui ont été faites en 1723. L'intérieur, dont le plan »est celui d’une croix, est très-magnifique depuis, son » agrandissement. » Voulez-vous juger par vous-même de la différence des constructions ? Arrêtez-vous au faire des moulures du chœur, aux portes des sacristies, construites en pleins murs, et qui appartiennent par leurs caractères au XVIIIe siècle. Enfin, votre œil suivra sans peine, dans le dou- bleau du transsept , la reprise de la partie moderne. Les deux colonnettes du côté de la nef appartiennent à l’an- cien style ; les deux autres au nouveau. Cependant, il est une observation importante que nous devons consigner ici : c’est que cette construction du XVIII: siècle , dans le style primitif , est presque le seul exemple de ce genre que nous trouvions à cette époque, où la restauration des monuments gothiques en style grec, était devenu une sorte de manie. Il est probable que cette grande et lourde rosace, qui se trouve au fond du chœur, n’est qu’une imitation d’une rose plus élégante, qui aurait jeté du jour sur le grand autel , en perçant un pignon semblable et parallèle à celui du fond. Si, à cette ouverture, nous ajoutons dix-sept fenêtres , dont trois grandes à un et deux meneaux (1), nous trouverons assez motivée celle observation de l’au- (1) La fenêtre au-dessus de la porte avait deux meneaux. On en retrouve encore les bases jusqu’à la hauteur de 15 à 20 centimètres. 360 MÉMOIRES teur que nous avons déjà cité : « Que la chapelle de Tous- saint était aussi claire qu'aucune église. » La hardiesse paraît surlout avoir été le caractère de l'architecte qui a élevé les voûtes si élancées de cet inté- ressant oratoire. Mais, ce que notre æil, trop exigeant aujourd’hui, ne pourrait lui pardonner, ce serait d’avoir fait porter à faux toutes les.colonnettes, en les faisant reposer sur les dais qui couronnent les niches, si nous ne retrouvions dans ces pontifes , ces martyrs et ces apôtres, qui servent cux- mêmes de colonnes à l’église, une de ces heureuses idées mystiques que nos pères aimaient tant à reproduire dans leurs édifices. Le portail qui donne sur la rue , la porte en bois sculpté que l’on a transformée dernièrement à cause de sa ruine, en un meuble déposé au musée (1), et quelques petites sculptures assez jolies qui se trouvent au-dessous de la première niche de l'aile droite, peuvent être regardés comme des restes de réparations assez impsrtantes faites au XV° siècle. Peut-être même que le petit buffet d’or- gue ; qu’on nous dit avoir été au-dessus de la porte, était de cette époque. Nous en trouvons un du même temps dans l’église de Cunault. La délicatesse du travail de celui- ci nous ferait regretter, dans le premier, la perte d’un objet vraiment précieux. Auprès de la porte de l’ancienne sacristie, du côté de l’abbaye, se trouve le tombeau de Nicolas de Bouvery, frère de Gabriel de Bouvery, évêque d'Angers, mort en 1572. Tous les ans, le vendredi de la semaine de la Passion, la procession de Saint-Maurice allait à Toussaint, et chan- tait le repons Zibera devant ce tombeau qu’on dit avoir (1) Cette porte, à l'exception de quelques panneaux , était entiè- rement vermoulue : autrement je l’eusse conservée, HZ. Godard. DE LA QUATRIÈME SECTION. 361 étémagnifique , et dont il ne reste plus aujourd’hui qu’une inscription à demi effacée par le salpêtre. Cette inscrip- tion , toute dans l'intérêt du lecteur, avait été murée pen- dant la Révolution. Ge n’est qu’au mois d'avril dernier qu’elle fut retrouvée, par M. Godard ; en déblayant l’é- glise. Nous essaierons de la rétablir, en mettant en ita- liques les lettres qui manquent sur la pierre : MANES DEFUNCTI AD PIUM VIATOREM : Qui properas compesce gradum, memor et brevis ævi Quo fueris , velut in speculo sic marmore in isto , Cerne vices quas fata ferunt. Modo vivus agebam Quæ præstas ; cassusque feres quæ pulvere pressum Ferre vides. Nicolaus eram Bouvreyus , alti Sanguinis, Audinus patrià, eui multa benigni Dona Dei, sublimis honos , sanctique tiara Præsulis, atque piæ certissima regula vitæ, Plura manens tibi fama canet : tu sortis acerbæ Usque memor, bona verba refer semperque valeto. Nicolas de Bouvery est mort en 1548. De l’autre côté, des ossements nombreux et épars çà et là dans un caveau , qui servait vraisemblablement à la sépulture des abbés, nous rendent plus éloquentes encore les leçons que nous venons de lire sur la pierre funéraire. A côté, dans le mur du bout de l’aile , des traces d’une ancienne ouverture , refaite en 1786, selon la date qu’on y lit encore au-dessus (1), nous montre la porte de com- munication de l’église avec une petite chapelle qui lui était adossée. C’est de cette chapelle que l’on pénétrait dans l’escalier placé à l’angle extérieur de la même aile, et dont on ne voit pas la destination. Mais , avant de quitter ces intéressantes ruines de Tous- saint, qu'il nous soit permis de jeter un coup d'œil sur (1) Une seconde date, 1632, qu’on lit encore au-dessus, au milieu de La fenêtre, nous paraît indiquer le temps ou cette fenêtre a été mu- rée.ou badigeonnée. 362 MÉMOIRES l’aumônerie de Girard , devenue une abbaye considérable, Passons par cet escalier du milieu , aussi remarquable par sa forme que par sa hardiesse. Pénétrons dans les jardins. Quel aspect plus frais, plus riant et plus délicieux que celui de ce long berçeau de tilleuls qui se développe de- vant vous ? Au silence profond qui vous entoure, à cet #s- pect champêtre que donnent des arbres que l’on n’émonde plus, vous oubliez que vous êtes au milieu d’une cité po- puleuse, A l’est de ces mêmes jardins, une façade régulière el assez étendue, vous montre le côté principal de la mai- son , qui est spacieuse et solidement construite. On nous a conservé l'inscription gravée sur la pierre fondamentale des dortoirs : Âoe fundamentum instaurandis œædibus et restituendæ regulari disciplinæ, rite et auspicato posuit vir elarissimus Germanus Nerferon, presbyter, hujus monasterit et abbas commendatarius, et canonicus ec- clesiæ andegavensis , die XIV septembris, anno Incar- nationis 1627, regnante Ludovico XIIT, sede episcopali vacante, Claudio de Ruel electo. La réforme introduite par le pieux cardinal de Laro- chefoucault, en 1624, d’abord dans l’abbaye de Sainte- Géneviève , dont il a été abbé, puis, les années suivantes, dans tout l’ordre des chanoines réguliers de Saint-Augus- tin, nous explique ce rétablissement de la discipline dont il est ici parlé. Il paraît , d’après quelques anciens manus- crits du chapitre, que les religieux de Toussaint ne se réformèrent qu’en 1626, et prirent l’habit blanc, au lieu du noir qu’ils portaient comme tous les autres ecclésias- tiques. La maison abbatiale était autrefois sur le bord de la rue Toussaint , hors de la communauté, Il paraît que c’est encore à la même époque que l’abbé commendataire l’a- bandonna pour rentrer dans la maison commune, et prendre son logement parmi ses religieux. Petite et mal DÉ LA QUATRIÈME SECTION. 363 bâtie, elle est devenue depuis la demeure d’un pauvre artisan. À l’extrémité du jardin, au nord, dans le mur qui touche le chœur de l’église, se irouve une petite porte murée depuis longtemps. Ne serait-ce, point celle que Marie de Médicis , pendant l’année qu’elle passa au logis Barrault, aujourd’hui le Musée, fit percer dans le mur du jardin de Toussaint, pour aller à l’église des chanoines réguliers , sans sortir par la rue, comme on le voit dans les mémoires manuscrits de M. Grandet , curé de Sainte- Groix. Cette porte se voyait encore de,son temps. Dans le jardin voisin, sur le mur même du Musée , on lit encore, gravée sur la pierre, l'inscription d’une citerne creusée en 1619. C’est précisément l’année, que l'épouse de Henri IV passa à Angers. Il est probable que c’est par elle ou pour elle qn’elle a été construite. L'abbaye de Toussaint servit aussi de séminaire pour le diocèse , et c’étaient les religieux eux-mêmes qui le di- rigeaient. Mais il paraît qu'ils obtinrent peu de succès dans cette vocation qui n’était pas la leur. Vers la fin de son épiscopat, M. Arnauld le leur enleva pour le donner à quatre prêtres diocésains qui avaient fondé au logis Bar- raud, un autre séminaire dans lesprit de M. Ollier de Saint-Sulpice. Bientôt, sous M. Lepeltier, ce nouveau séminaire fut abandonné aux Sulpiciens eux-mêmes en _ 1695. Ainsi , rendus à la réforme qu’ils travaillaient à établir dans leur maison , les religieux de Toussaint s’appliquè- rent à une régularité qui alla toujours en croissant , jus- qu’au moment de la Révolution, qu’ils donnèrent la preuve la moins équivoque de leur amour pour la retraite. Enveloppés dans la proscription générale , deux d’entre eux furent députés à la commune, pour demander, au prix même de tous leurs biens, la faculté de rester incon- aus dans leurs cloîtres , et d’y recevoir ceux de leur ordre 364 MÉMOIRES qui voudraient partager leur solitude. Mais tout fat inu- tile , il fallut céder à la force des circonstances et aban- donner les biens , la maison et la chapelle au vandalisme révolutionnaire, Telles furent la maison et l’église de Toussaint. Une pensée heureuse et conservatrice va rendre cette dernière dépositaire d’une réunion d’objets archéologiques , dont elle-même sera le plus intéressant. Espérons que cet em- pressement à grouper, pour les mieux conserver, quelques débris du moyen-âge échappés au naufrage, ne restera point sans activité pour le monument d’Angers , qui a les titres les plus incontestables à d’urgentes réparations. nd NOTICE D'UNE INSCRIPTION RELATIVE À ZIZIM, FRÈRE DE BAJAZET Hi, PAR M. LE D' BROMET, Membre de la Société des antiquaires, à Londres. L'inscription suivante (dont je transmets avec celle no- tice plusieurs exemplaires pour la commodité des mem- bres de la section), se trouve sur le revers d’un médaillon en bronze, qui paraît avoir été fondu dans un moule levé sur l’original en émeraude , dont l’obvers porte en relief la tête de Jésus-Christ entourée d’un nimbe à la forme grecque et de cette légende : VHS. XPC. SALVATOR MVNDI. DE LA QUATRIÈME SECTION. 365 &Y PRESENTES. FIGURE. AD. SIMILITUDINEM DOMINI : IHESV . SALVATORIS . / NOSTRI . ET.APOSTOLI . PAVLI. IN. AMIRALDO. IMPRESSE . MAGNITHEVCRI | PREDECESSORES . ANTIA . | SINGVLARITER . OBSERVATE . MISSE. SUNT. AB. IPSO . MAGNO. THEVCRO . S. D. N. PAPE. INNOCENCIO. OCTAVO. fe PRO . SINGULARI, CLENODIO.AD. HVNC.FINEM.VT.S WM. FRATREM.CAPTIWS RETINERET. La figure de saint Paul se trouve sur l’obvers d’un autre médaillon , dont le revers porte cette inscription : BENEDICITE IN EXCELSIS DEO DOMINO DE FONTIBUS ISRAEL IBI BENTAMIM ADOLESCENTVLVS IN MENTIS EXCESSV. 866. MÉMOIRES Je ne sais trop comment expliquer certains mots de la première inscription , mais; comme elle me semble être relative à l’histoire du roi Charles VIII de France, je m’empresse à l’offrir à cette savante assemblée en recon- naissance de l’honneur qu’elle m’a fait en me recevant dans son sein. Il me paraît donc que cette inscription a rapport à l’emprisonnement d’un prince ottoman qui-se nommait Zizim, et qui, après avoir inutilement essayé de disputer le trône des sultans à son frère Bajazet II, se réfugia à Rhodes, chez le grand maître des chevaliers de Saint- Jean de Jérusalem. Celui-ci, craignant le pouvoir de Ba- jazet, envoya Zizim au roi Charles, qui, dans ce temps-là, faisait la guerre en Italie, Charles livra ce malheureux prince au pape Inno- cent VIIT, qui le retint prisonnier au prix de 75,000 du- cats, annuellement payés par Bajazet, à quelle somme ce sultan ajouta de nombreux présents. Parmi ces dons, on cite le fer de la lance qui servit à percer le côté de Jésus- Christ, et l’émeraude dont il est question; mais qui, con- sidérant ses grandes proportions , a bien pu être tout bon- nement du verre. Quant au mot ANTIA, j’y vois le nom de la ville d’An- tioche, où fut trouvé le fer de lance dont j’ai fait mention, et, probablement aussi, les émeraudes dont l'inscription parle. Mais il est bien possible que le mot ANTIA veuille ex- primer certaines parties bombées des écus ou boucliers dans lesquelles ont conservait des reliques qui devaient, croyait-on, préserver des dangers de combat ceux qui les portaient; ou, peut-être, que ce mot ANTIA, mal écrit pour Antea, veuille dire que ces figures étaient restées longtemps dans la possession des souverains de Gonstan- tinople. DE LA QUATRIÈME SECTION. 367 Le mot GLENODIVM est probablement dérivé du mot allemand KLEINOD — bijou. Gette inscription ainsi sert à réfuter ce que dit Vola- terranus , que le Grand Turc donnait au Pape le fer de lance por æmollir (ut leniret) le sort de son frère captif. Pour conclusion de cette imparfaité notice , il faut dire que le roi Charles, dès qu’il trouva que la garde de Zizim était aussi profitable, le demanda au pape Alexandre VI, successeur du pape Innocent VIIT; mais celui-ci, pour se venger du roi, fit administrer du poison au pauvre pri- sonnier, qui en mourut peu après son arrivée en France. NOTICE SUR UN MONUMENT SUPPOSÉ DRUIDIQUE, SITUÉ SUR LE PLATEAU DE SAIN£-MARTIN, COMMUNE DE MARTIGNÉ- BRIANT , DÉPARTEMENT DE MAINE ET LOIRE; PAR M: H: DE NERBONNE, D’ANGERS, Tout ce plateau, appelé Grouas dans le pays, ainsi que les endroits arides semblables à celui-ci, est calcaire, et les pierres prétendues druidiques sont en grès dur el fin, tel qu’il se trouve naturellement sur le revers du coteau, au couchant, près le village des Noyers. Trois pierres seu- lement , et les plus petites, n°* 2, 8 et 8, sont d’un grain plus fin, plus blanc et plus dur qui semble quartzeux. Les n° 4 et 5 sont seuls debout, et semblent être res- tés tels qu’ils ont été posés; les autres sont plus ou moins affaissés contre la terre, et tous vers lé couchant qui est le côté d’où vient le plus fréquemment la pluie qui a dû rendre la terre de ce côté moins résistante à l’éffort de la pierre pour se péncher. Quelques pierres ont été brisées, et le n° 6, par exemple, a , du côté À, sept blocs encore 368 MÉMOIRES sur place qui en ont évidemment été détachés, Il est na- turel de penser que des pierres entières ont été brisées et enlevées en entier, peut-être pour servir à la construction du château voisin des Noyers, ou pour faire du payé. Il existe à un kilomètre environ N.-0. du centre de la Grouas, dans un pré, et à cinquante pas de la rivière du Layon, une pierre de même nature que les n° 1, 4, 5, 6 et 7, s’élevant de deux mètres au-dessus du sol, et qui est évidemment ce qu’on appelle un peulvan. DIMENSION DES PIERRES. N° 1. Longueur environ 5 mètres 172. Largeur id. 2 mètres 25 centimètres. Épaisseur id, 1 —- 20 — N° 2. Longueur id, 2 — 7o — Largeur id nya Lin és N° 5. Longueur id. 3 — 80 — Largeur id. 1 — Lo — N° 4. Largeur id. 3 — 30 — Hauteur au-dessus du sol 3 mètres, Épaisseur 90 centimètres. N° 5. Longueur environ 2 mètres 85 centimètres. Hauteur 1 mètre 80 centimètres. N° 6. Longueur 6 — 50 — Largeur 3 — 85 © — Épaisseur 1 — 80 — N° 7. Longueur environ 4 mètres 80 centimètres. Largeur id. 35 — 8o — paisseur 1 mètre. Un autre monument présumé druidique est à 5 kilomètres ouest de Saumur environ , et à 1 kilomètre et demi nord- ouest du village de Pocé, sur un mamelon inculte appelé la butte à Matto, joignant le bois de Pocé , actuellement à M. de Montreuil. hs re tuLq r “ god À. Lnoni Hi sb 15 HIER à PE s 4% à 2 US \ >44910 IE nue . phrases but gps ‘b. 5h AR UE V 2 Es du ae à io‘ sp 2) Do 6 ” be ch ext PAP LA « | v{1 ortéun @.NONTRA 10 OULUO DO 2. bi AUPCUr. I LOUE ñ Cr x Ü MÉTOTER | re OURS 2 crea cs démon vibur D Sa 241 E La ain : 10 MIEL ## ce où dr + ma b, * él EX ‘4 sogiof : : EL ATOS Mid, Ge Ouest Hoid Sonate 2 CL / Drm, CR LAUGUT 291 /0 7?7e pormho 27777 4 Lt ci x d # 4 2402 y ga EG D 4 (il 2 dé Li 2p 29900-piou y 4 es PRE DE Fo Apr Poeme PP TÉMEEE ANE NG 7 7 She à bissid” us der à) à ‘ (=) nee er « ; = . ro, : € £ Ltareds@ Jaissssi 19 K ; s æ \ à Ps 1 TdÈ wie Pirée. Su #98) # NIME à ns ‘sr PU, “ti, FN & ne 4 var Sn us dr cs nf r " à Er, DE LA QUATRIÈME SECTION. 369 Il est impossible de ne pas reconnaître qu’une idée ait présidé à la disposition des pierres qui couvrent ce ma- melon. Bien que la majeure partie ait été enlevée, il suf- fit de arcourir les vastes: landes qui le touchent, et qui sons de’ même nature que lui , pour s'assurer que rien de pareil ou même d’analogue ne se trouve; en effet, d’énor- mes pierres de grès sont partout répandues sur ces lan- des, mais dans aucun endroit l’on n’en peut trouver plus de deux ou trois, que la nature ou les faiseurs de pavé aient mises ainsi; or, il en est compté un très-grand nombre sur la butte à Matto , et de plus, elles semblent agglomé- rées dans un espace de quelques centaines de,pas, autour d’autres pierres qui restent, et dont la disposition ne peut aussi laisser de doute sur l’existence d’un dolmen. Il est à présumer que ces landes qui sont aujourd’hui exploitées avec activité par des faiseurs de pavé; l’ont été depuis long- temps, et que les plus belles pierres de ce monument ont dû être “exploitées les premières , ant à cause de leur di- mension qu’à cause de la facilité de les travailler, puis- qu’elles étaient toutes sorties de terre, tandis que partout il faut les chercher dans le sol. Les pierres les plus élevées qui restent debout, peuvent avoir 1 mètre 5o centimèt. de hauteur, et presque toutes semblent avoir été brisées sur place. Le dolmen a bien, selon l’usage, son ouverture placée entre l’est et le midi ; il a environ 12 mètres de long sur 3 172 de large, de de- hors en dehors. Le. premier rang de pierres debout cir- conscrivant le dolmen en est éloigné de 6 à 8 mètres en- viron , et le second d’une quinzaine , le troisième d’une trentaine, le dernier de go à 100 mètres. Vers l’est paraît comme l’un des côtés d’une avenue formée de pierres plus petites et dont la dernière est à go mètres du dolmen. C'est cette sorte d’avenue qui est, je crois, surtout à re- remarquer. T. IL. * F : 24 MÉMOIRES DE LA CINQUIÈME SECTION. Littérature et Benux-Arts. MORALE ET PHILOSOPHIE. MÉMOIRE SUR LES PRENTÈRE ET DEUXIÈME QUESTIONS DU PROGRAMME, AINSI CONÇUES . « 1° Qu'est-ce qui constitue le beau esthélique? Y a-t-il une » science du beau? Des conditions dans lesquelles ont doit le cher- » cher, et des règles qui s'imposent à ses réalisations dans les di- » verses branches de l’art humain? Quel est l’état de cette science? » « 20 Rechercher quelles relations existent entre le beau et le bien, »et examiner s’il est vrai qu'il y ait chez les peuples entre la mora- lité et le goût, une liaison tellement intime, que tous deux obéis- »sent dans leur développement simultané à la même loi de progrès et de décadence? » Par M. ARMAND DE FLEURY, de Ruffec (Charente). Un fait bien remarquable vous aura sans doute toujours frappés comme moi, Messieurs, c’est qu’à la vue d’une chose qui est belle, on exprime souvent la pensée qu'elle MÉMOIRES DELA CINQUIÈME SECTION. 371 est belle par l'affirmation qu’elle est bonne ou vraie, et qu’à la vue d’une chose qui est bonne ou vraie, on ex- . Prime de même la pensée qu’elle est bonne ou vraie par l'affirmation qu’elle est belle : si bien que chacun des trois noms du bien, du beau , du vrai, nomme ainsi le vrai, le bien, le beau , c’est-à-dire présente à la fois l’idée de tous les trois à l'esprit. ‘ k Or, de ce fait vraiment digne de toute l'attention du philosophe, que conclure nécessairement » Messieurs, soit pour la constitution esthétique du beau, soit pour les relations qui existent entre le beau et le bien ? Le carac- tère du nom n'est-il pas de présenter à l'esprit l’idée de la chose qu’il signifie? Bien, beau ; Vrai, Ces trois noms qui présentent chacun à l'esprit l’idée des trois, ne sont donc tout au plus que trois distinctions du même nom : le bien, le beau, le vrai, ces trois choses que l'esprit aperçoit dans chacune d’entre elles > ne sont donc aussi que trois distinctions d’une même chose: ne sont donc qu’une seule et même chose nommée sous trois aspects. Les deux questions qui s’enquièrent au programme : l’une de la constitution esthétique du beau, laquelle n’est pas autre , comme on le voit, que celle du bien et du yrai ; l’autre des relations du bien avec le beau > lesquelles sont dans la constitution cherchée, ne sont ainsi qu’une ques- tion; et la solution de l’un des problèmes est dans celle de l’autre, et il n°y a ainsi point de ma faute si je ne vais pas les séparer. Le Quelle est donc la constitution de la chose dont le beau, le bien, Le vrai ne sont que des distinctions ? Mais d’abord, quelle est cette chose elle-même, dont la constitution est cherchée et que nous ne connaissons pas ? C’est bien là ce qu'il faut avant tout se demander. | Je ne sais en vérité, Messieurs , quelle est cette chose que noire plus pressant besoin est ici de connaître; mais ce que je n’ignore point, c’est que le beau, le bien, le vrai : 872 MÉMOIRES élant ses aspects, el un aspect d’ane chose ne pouvant êlre où n’est pas la chose, la chose acttrellemient chér- chée est partout où nous voyons du bien, du beau et dn vrai, | : Quoi? la chose cherché est partout où il y a du beau, du bien et du vrai? Sans doute. Elle est donc partout . alors; car partout, dans Lout ce qui est sous nos yeux , à quelque distance qu’ils se portent, il y à du beau, du bien, du vrai. Gette chose là serait-elle donc l’être lui-même, c’est-à-dire ce qui est? Oui, Messieurs, précisément , la chose dont le beau, le bien, le vrai sont des aspects, c’est l'être; et nous n’avons plus qu’à en chercher la consti- iulion. Let | - Mais, me crie-t-on ici et avant que j'aille plus loin, qu'est-ce que l’être dans lequel vous ne voyez que ce qui est vrai, bien et beau? Le faux n'est-il pas aussi bien que le vrai? Le hideux n’est-il pas aussi bien que le beau? et le mal n’est-il pas de même qu’est le bien? En un mot, le faux, le hideux et le mal ne sont-ils pas de l’être comine le vrai, le beau et le bien ? Non certes, Messieurs; non, le faux, le hideux, le mal ne sont pas de l’être, non, ils ne sont pas dans l’être, non, ils ne sont pas réellement, Ils sont chacun une négation de Pun des trois aspects de l’être , loin qu’ils soient de l'être. Chacun d’eux nie un aspect de l’être comme , de l’être lui-même, le néant qui les résume est la négation. Eh quoi! on exprimera qu’une chose est fausse en di- sant qu’elle n’est pas, puis on viendra soutenir que le faux est de l’être ! À la vue d’une forme hideuse on exprimera sa pensée en disant que cette forme n’en est pas une, et on s'obsti- nera à voir le hideux dans l’être. Et on sera assez insensé pour dire encore que le faux et le hideux sont, quand pour en présenter l'idée on se sera servi de l’expression qu’ils ne sont pas ? DE LA CINQUIÈME SECTION. 373 Mais c’est surtout au mal que lon s’obstine à attribuer dans l’être une place qu'il n’a ni ne peut avoir. On veut à tout prix que lé mal soit dans l'être; on le veut avec fu- reur; on ne le- voudrait pas. plus pans soi ; et telles gens vonL jusqu’à s’écrier que si le mal n’est pas dans l'être, l'être à leurs yeux n'existe pas. Eh bien oui, répondrai-je avec douleur, le mal est dans l'être tel que l’homme se voit lui-même dans sa Propre conscience; le mal est dans l’être tel que l’homme s’est fait par des actions mauvaises : mais il n’est pas pour cela dans l’être selon la nature, dans l’être naturel, dans l’homme , tel que Dieu l’a fait. Loin qu’il soit dans l’être selon la nature, il n’est qu’à proportion que l’être selon la nature n’est pas; il n’est dans l’homme qu’à proportion que l’homme n’est pas l'homme. Il n’est donc naturelle- ment, c’est-à-dire véritablement ni dans l’être en général, ni dans l’homme en particulier. Il est au contraire la né- galion. de l’être et de l’homme introduite dans l'être et dans l’homme, et la plus grande obstination de l’homme à le placer dans la constitution de l’être est, pour peu qu’on y réfléchisse, le plus grand argument de la cor- ruption de la nature humaine. Certes, Messieurs, c’est là une bien grande misère , et si la vérité pouvait être dite enfin d’une manière nette sur la nature et la valeur du mal, un grand service serait rendu sans doute à la philosophie. Permetiez-moi donc de vous faire ici en quelques lignes part de mes idées à ce sujet. Par cela même que l'être fini est fini, ila des limites naturelles en decà desquelles 1l est, au-delà desquelles il n’est pas; en dedans desquelles il y a pour. lui être, en dehors desquelles il y a pour lui non être , absence d’être, végnt : si bien qu ‘ilest à la fois et n’est pas. Or l'être fini ainsi circonscrit n’est pas parfait absolu- ment puisque perfection absolue implique infinité, tandis 374 MÉMOIRES que luï a des limites en dehors desquelles il n’ést pas, mais il est parfait relativément à sa nature; tant que la ligne tracée par Sa nature éntre son être et son absence d’être reste intacte, son absence d’être ne gêne en rien son être : son être est vrai, son être est bon, son être est beau; il ne peut ni manquer ni souffrir, Que si la ligne naturelle n tracée entre l’être et le non-être de l’être fini est au con- traire violée par l’absence d’être; si absence d’être en- vahit ainsi une portion de la sphère naturelle de l’être fini, Pêtre fini cesse d’être à proportion que l'invasion est plus considérable; il est en même temps moins vrai, moins bon, moins beau; il souffre dans toute la partie de sa sphère d’être qui a été envahie. Eh bien ! Messieurs, voilà éomment le mal peut exister dans l’être; voilà ce qu’est le mal; voilà comment on doit dès-lors le définir : l’ab- sence d’être établie en decà des limites naturelles de l'être fini. Que mes contradicteurs ne viennent donc plus m’accu- ser de nier le ciel et la terre, parce qué dans l’être j’ai refusé de voir le mal. Qu’ils n’aillent pas jusqu’à m’accu- sér de nier la morale, comme lont fait quelques-uns, par l'exclusion du mal de la constitution de l’être. Jé n’ai pas nié le mal, jé n’ai nié le mal que dans l'être; et si quel- qu’un niait ici la morale ; si quelqu'un portait le couteau de la parole dans ses vénérables entrailles, ce ne serait pas moi, mais celui qui, contrairement à moi, persiste- rail à soutenir que le mal est dans l’être; car l'être c’est Dieu; et dire que le mal est dans l'être équivaudrait à dire que le mal est en Dieu. Arrière donc le mensonge, le difforme et le mal. Ils ne sont point dans l’être, où du moins ils n’en sont pas. Le vrai, le bien, le beau, voilà l’être selon ses uniques as- pects, et l’être, comme nous venons de le voir, dans l’ac- ceptation la plus haute , c’est Dieu. Le vrai , le bien et le beau sont donc en Dieu, et leur DE LA CINQUIÈME SECTION. 375 _ plénitude n’est donc qu’en Dieu ? Sans doute, Messieurs ; ebils ne sont point où il n’est pas. Comment donc se fait-il alors que tant de choses qui ne sont pas Dieu soient ce- pendant vraies, bonnes et belles ? Cela se fait comme il se fait qu’elles sont des choses. De Dieu leur vient leur être, _de Dieu leur viennent aussi leurs aspects. Dieu est présent dans tout être fini par la loi constitutive de l’être qu’il lui a donnée; il y est présent encore par ses aspects de vérité, de bonté, de beauté qu’il leur a donnés avec l'être; et c’est pour cela qu’il est aussi exact en philosophie qu’en dogme catholique de dire que Dieu est partout; c’est pour cela encore que voir quelque part le vrai, le bien, le beau, c’est voir l’infini à travers le fini, Dieu à travers la terre. Qui dès lors s’étonnera , Messieurs , si, à la vue d’une chose vraie, bonne et belle, nous sortons tout à coup par l'enthousiasme de la mesure accoutumée de notre être ? Qui s’étonnera si, à l’apparition inattendue du vrai, du bien, du beau, nous sentons se multiplier toutes les forces et tout le bonheur de notre être , puisque c’est l’être in- fini lui-même, alors Dieu lui-même, qui nous approche, qui nous touche , et s'établit en rapport immédiat'avec nous ! Dans ce moment d’énergie indicible et quelquefois mortelle tant elle est grande , tous les ressorts de la ma- tière tendent à se rompre en nous; nos pieds veulent quit- ter la terre en dépit de la loi du corps, notre sang, cet agent de la vie mortelle, s’arrête instinctivement dans nos veines, comme pour que nous passions à l’éternelle vie dont sa fonction continuée retarderait le jour. O mon Dieu ! car je ne puis me dispenser.de prononcer ici votre nom, quel. bonheur sera donc celui de vous voir vous-même éternellement et sans voiles! Ah! je com- prends aujourd’hui comment , afin de rendre ce bonheur possible à l’homme, vous avez consenti à entrer dans les conditions douloureuses de la terre pour verser un sang divin sur nouset nous inoculer la vie. 376 ÿ MÉMOIRES Et maintenant, Messieurs , où cherchons-nous la cons- litution du beau , lequel avec le vrai et le bien , nous ve- nons de trouver en Dieu ? Cette constitulion ne tient-elle pas à celle même de Dieu ? Est-elle autre que celle même de Dieu ? Et la constitution de Dieu en chercherons-nous le nom, quand depuis deux mille ans Dieu lui-même nous l’a nommée ! Quoi, en effet ? celui qui a dit à l’homme : Je suis un, ne lui a-t-il pas dit encore : Je suis trinité? Ne lui a-t-il pas dit : Je suis puissance infinie de moi-même, sous la dis- tinction de père;, volonté infinie de moi-même, sous la distinction de fils; accord ou amour infini de moi-même avec moi-même de ma puissance avec ma volonté, sous la distinction d’Esprit-Saint; c’est-à-dire je suis celui qui peut infiniment comme il veut, qui veut infiniment comme il peut ? Trinité, voilà donc par son nom la sainte consli- tution divine. Mais si Dieu est type de l’homme , de l’être fini, la constitution de l’homme , de l’être fini, est néces- sairement l’image de celle de Dieu, de la sainte Trinité. Il y a nécessairement trinité sur la terre parce qu’il y a trinité dans le ciel , et il n’y a être fini que là où il y a tri- nité finie. Or, Messieurs , elle est connue la trinité finie, elle porte sur la terre un nom qui nous est bien connu , que nous prononçons tous souvent avec respect et amour, et ce nom est société. Oui, société c’est trinité , et s’il y a là deux mots, il n°y a pas pour cela deux choses dont l’une ne soit pas l’autre. Comme la Trinité, la société est puissance , volonté, ac- cord réciproque ou amour de puissance et de volonté; et comme la Trinité divine constitue un seul être qui est Dieu, la société constitue autant de fois qu’elle est un seul être, Que l’on étudie en effet un à un tous les êtres, on reconnaîlra que chacun est, par une possibilité ou puissance de son être, une volonté de son être ; un ac- cord entre puissance et volonté de son être, c’est-à-dire DE LA CINQUIÈME SECTION. 377 société; et que l’on étudie de même une à une chaque so- ciété, on verra qu’elle constitue un seul être, Citerai-je un exemple? Soit donc pour exemple un voyage. Un voyage a+: lieu sans être possible, sans puis- sance d’être ? En admettant ce voyage possible, cela suf- fira-t-il pour qu’il soit ? Ne faudra-t-il pas encore qu’il soit voulu? Enfin, s’il est à la fois pu et voulu, ne faut-il pas encore pour être qu'il soit pu comme il est voulu, voulu comme il est pu ? L'existence d’un voyage comme dé toute chose implique donc nécessairement société , c’est-à-dire puissance , volonté, accord de puissance avec volonté, et par retour l’existence de toute société implique un être. Eh bien ! Messieurs, il va m’être facile maintenant de démontrer que le vrai, le. bien, le beau correspondent chacun à l’une des trois distinctions constitutives de lé- tre, c'est-à-dire sont une société des trois aspects de l’être, et que cette sociélé des trois aspects trinitaires de l’être forme sous le nom d’ordre l aspect unité de l’être. Qui niera, en effet , que le vrai corresponde par sa na- ture à la puissance , le bien à la volonté, le beau à l’ac- cord entre puissance et volonté, l’ordre à l’être, puisque pour dire qu’une chose n’est pas vraie on dit qu’elle n’est pas possible; puisque pour savoir si une action est bonne on demande si elle a été voulue; puisque pour trouver beau quelque chose on veut qu’il y ait harmonie; puisque pour savoir à quel point une chose est on demande à quel point l’ordre est en elle? Qui ne l’affirmera pas au con- traire avec moi, et ne s’écriera pas que recourir à de nou- veaux arguments pour le démontrer serait chose désor- mais dieuaet La double question : quelle est Ja constitution du beau esthétique et quelles sont les relations du beau avec le bien , se trouve donc résolue au moment où nous ne sem- blions pas nous y attendre encore. Elle est résolue, dis-je, puisque d’une part la constitution du beau ou plutôt la 378 MÉMOIRES place du beau dans la constitution de lordre.nous est connue; puisque, d’autre part , la présence du bien et du beau dans le même être nous révèle leurs relations intimes. Le beau est-il une science ? dans quelles conditions doit-on le chercher ? quelles sont les règles qui s'imposent à sa réalisation dans les diverses branches de Part hu- main ? quel est l’état de cette science? quelle est chez les peuples la liaison intime de la moralité et du goût? Tous ces problèmes là, je l’avoue, je les ai impliqués dans ceux qui les dominent, chacun d’eux n’a point trou- vé sous ma plume une solution spéciale; mais s’il en est ainsi est-ce ma faute ou celle de la matière et du temps qui a pu m'être accordé ? que si j'avais entrepris de les saisir un à un, Corps à corps, c’est dans une série de vingt séances et non dans un quart d'heure, c’est sur des vo- lumes et non sur quelques pages que j'aurais pu les ren- verser à vos yeux, Force n’a bien été pour faire quelque chose, pour que quelque chose fût, de régler ma volonté sur ma puissance, de ne vouloir que ce que je pouvais et comme je le pouvais, et il m'est doux de puiser ainsi en terminant mwa justification dans celle loi même que j'ai dû signaler comme la loi unique de tout ce qui est dans l'univers. QQ QE LINGUISTIQUE. RAPPORT SUR LE MÉMOIRE DE M, MÉNARD-BOURNICHON, RELATIF À LA HUITIÈME QUESTION DE LINGUISTIQUE, Par M. DE LA SICOTIERBE, d’Alencon. Messieurs, Nous avons, M. Richelet et moi, étudié avec beaucoup DE LA CINQUIÈME SECTION. 379 d'attention et d’intérêt les deux mémoires de M. Ménard- Bournichon renvoyés à notre examen. Ges mémoires sont relatifs à l'application nouvelle ou à l'insertion de cer- tains tildes. Les tildes sont les sy qui affectent une lettre pour indiquer une observation ou une modification , soit dans la voix soit dans l’accent. M. Ménard , frappé des difficultés que présente à la lec- ture des mots où certaines lettres perdent complétement leur valeur alphabétique ou Munte e cette valeur, a voulu y remédier. Au-dessous de chaque lettre DL ce genre en interligne, M. Ménard place un petit trait qui auf que la lettre ne doit pas être prononcée, ou bien un point moniteur qui indique un changement nécessaire dans la prononciation, mais sans caractériser ce changement. Il remplace ainsi la prononciation interlinéaire , ou la substitution de lettres, ou les chiffres renvoyant à un tableau correspondant, qu'ont figurés sur leurs livres plusieurs auteurs de nou- veaux systêmes de lecture. On ne peut refuser à celui de M. Ménard une ingé- nieuse simplicité. La position des signes empêche de les confondre avec ceux employés dans l’ortographe ordi- naire; leur petit nombre ne saurait fatiguer l’attention. Au-dessus des lettres M. Ménard ne place comme signe nouveau que le tilde bref, employé dans la prosodie 1a- tine; ce tilde lui sert à indiquer la pis voyelle d’une diphthongue. Û Quant aux tildes placés au-dessus des lettres trémas, apostrophes, accents , et qui sont actuellement en usage, ils recoivent, par le système de M. Ménard , une extension qui est une innovation pour l'orthographe. Toutes les pro- positions de ce genre ont échoué; celle-ci, quoique plus simple et ne portant que sur les accessoires des lettres et non sur les lettres mêmes, doit-elle être plus heureuse ? 380 MEMOIRES le Congrès peut-il décider cette question? peutAl faire : des vœux pour que lusage consacre cette innovation ? Cette dernière question nous paraît dans les attributions du Congrès ainsi que dans les intentions de l’auteur, qui demande le renvoi de ce système au recteur de lacadé- mie, qui pourra reconnaître quel est l’avantage qu’il peut en tirer pour l'instruction primaire. Le Gongrès peut en- core remercier l’auteur de l’hommage qu’il a fait de son travail, et l’encourager à le perfectionner. Quant à son utilité pour les étrangers qui veulent apprendre le fran- çais, il est certain qu'aucun autre travail ne présente au- tant d'avantages. Quant au bénéfice que le commerce et les sciences peuvent en retirer, il se borne à mettre une certaine exactitude dans l’énoncé des mots qui représen- tent les choses, de telle sorte que ces mots prononcés en français pourront être compris de l’étranger, mais alors il nous sera interdit de franciser aucun moë, “sm 0 © Q 0-0-— BEAUX-ARTS. NOTE EN RÉPONSE A LA SIXIÈME QUESTION, PAR M. H. DE NERBONNE, D’ANGERS. Quelquefois le cœur se surprend à de bien présomp- tueuses velléités. L’on sent quelquelois si vivement, si profondément une chose qui nous paraît belle et vraie, qu’on voudrait pouvoir la faire sentir à tout le monde, et imposer sa volonté à tout ce qui nous entoure. Gelle pré- DE LA CINQUIÈME SECTION. 38! somplion n’est, du reste, pas toujours un souhait égoïste, parce qu’en soi l’on sent certains-besoins de réforme; -elle-est l'expression d’un certain développement social, plus avancé peut-être, et auquel on est soumis collective- ment, avec quelques autres et même parfois beaucoup d’autres. Quoiqu'il en soit, nous gémissons sur [a manière dont les beaux-arts sont presque g pr aa compris à notre époque, et je dis à notre époque, parce qu ’à l’aide de l’histoire et: de l’analogie, je crois qu’il est facile de prouver que pas un éeles passé n’a ressemblé au nôtre en cela , et je parle principalement de lx France, — Nous sommes dans le siècle de l’industrie, et sans chercher par quel moyen nous sommes arrivés là, constatons que notre époque a trouvé les machines à vapeur, les chemins de fer, les puits artésiens , les ponts suspendus; qu’elle développe Vindustrie, par des expositions irès-solennelles dans la ca- pitale; que la littérature, la peinture et la musique sont à fort bon marché, et que chacun cherche à débiter sa marchandise pour grossir sa bourse. Si ce que nous avan- cons est un fait, que deviendra l’art au milieu de ces con- fortabilités sans goût, qui nous débordent, et du bruit in- cessant de l’argent qui se compte ? Ou il périra, si Dieu pouvait permettre ce malheur, ou il se réfugiera dans le cœur de quelques nobles artistes, chargés de renouer en silence le passé à l’avenir par le culte caché du beau. Et c’est ce qui arrive : il faut donc aujourd'hui, pour que l’art ait cours, qu’il passe sous les fourches caudines de l’'industrialisme ou du métier. La question sixième se trouve ainsi expliquée , nous le croyons, en ce qu elle demande « pourquoi voit-on au- » jourd’hui les arts s’abaisser au niveau du métier? » Main- tenant prenons l’autre partie de la question, bien que nous ayons cru devoir en intervertir la composition, « tandis s qu’autrefois les métiers aspiraient tous à la dignité de » Part, » | 382 MÉMOIRES ; Par autrefois, je pense que l’on veut entendre principa- lement le moyen-âge jusqu’à la renaissance ; prenons le XV: siècle et opérons sur l'Italie où nous rencontrons tous les éléments nécessaires à l’éclaircissement dela question. — En effet, nous voyons des institutions d’ar- tistes sous le nom et le patronage de saint Luc (auteur prétendu du portrait de la Vierge), et si les Fiesole, les Pinturicchio ou les Del Sarte glorifient cette époque et cette association, nous ‘comprenons facilement que l’ou- vrier, le peintre de bâtiments ou le maçon, l’orfèvre, etc., devaient se considérer comme bien honorés , s’ils étaient admis à approcher ces hommes; mais la raison de leur culte envers le beau était moins dans le prestige de vé- nération que devaient inspirer ces grandes intelligences, ou plutôt ces grands cœurs, que dans l’état de la société elle-même de cette époque. Alors le monde sortait des luttes longues et cruelles du catholicisme, et en aucune manière l’industrie , qui n’a pour but que le bien-être hu- main, n’eût pu chanter cette conquête magnifique. Il fal- lait de grands enthousiastes et de grands poètes, et la pein- ture des XIII°, XIV: et XV° siècles fut choisie par Dieu pour chanter ses louanges le plus haut sur la terre. Le beau alors n’était qu’un instinct, n’était que l’ex- pression de l’amour du peuple porté sur le même Dieu et ie même culte, et l’on songeait moins à définir le beau qu’à le rendre. Le beau était dans la société, et par une juste appréciation de soi-même , l’ouvrier qui sentait l’in- fériorité de ses travaux en les comparant à ceux des grands maîtres dont il voyait les œuvres, se rendait justice à lui- même , et les métiers, suivant l'expression de la 6° ques- tion , aspiraient naturellement à la dignité de l’art. — Et comment veut-on qu'aujourd'hui le métier aspire à la di- gnité de l’art, puisque le métier se déclare le dieu de la société, et qu’il exige presque que chacun sacrifie à son autel? L’art pour lui est une mine , une carrière à exploi- DE LA CINQUIÈME SECTION. 383 ter comme une autre, el Part industriel, c’est-à-dire celui qui n’en n’est pas un, a seul de la valeur dans la société.’ — Mais quoi qu’il puisse arriver, jamais l’art véritable ne sera confondu avec les exigences futiles d’un goût plus futil encore; quelques-uns gardent l’arche sainte. Se place ici tout naturellement la question 22% : « Apprécier à sa juste valeur, et particulièrement dans >ses rapports avec l’art et dans son influence sur la pein- » ture , la découverte du dagüerréotype ? » L'invention du daguerréotype est le fruit du travail, non pas d’un artiste, mais d’un industriel ou d’un chimiste, (Daguerre cependant est un peintre, mais un peintre d’ef- fets de diorama, et ce n’est pas le lieu de chercher quelle place occupe ce genre de peinture dans les arts.) Ce nou- - vel instrument ne sert, nousle croyons, qu’à trancher la question plus positivement et plus rapidement. Il donne, à la vérité, l’occasion de faire de prétendus chefs-d’œuvre sans se creuser le cerveau ét en restant fort tranquille de corps et d'esprit. Mais cela est-il de Part, ou peut-il le ser- vir ou lui être nuisible? nous déclarons que Part est com- plétement indépendant de cette invention, et que l’un et l’autre n’ont aucun rapport important entre eux. En général l’on donne cette définition à la peinture; « la peinture est l’imitation de la nature ; » el je prétends que cette définition, qui au temps des écoles italienne ou al- lemande était juste et naturelle, ne peut plus rester au- jourd’hui sans un commentaire; parce que la moralité, ou tout simplement l’état moral des nations ayant changé, une interprétation différente a été donnée à la même dé- finition. — Au moyen-âge la pensée était forte et élevée, le goût et l’harmonie étaient de l’essence des œuvres , et nul inconvénient alors d’appeler la peinture imitation de la nature , puisqu'il n’était pas supposé alors que la pein- ture et les arts en général pussent être traités autrement qu'avec des interprétations élevées de cette nature. L’on 384 MÉMOIRES était peintre alors parce qu ’on était poète, el que le peu- ple, pour qui l’on travaillait, était poète lui-même. Mais en traversant les siècles pour venir en 1845, dans quel état d'esthétique trouve-t-on la société ? Nous l’avons déjà dit, nous la trouvons en masse et quant aux arts dénuée de goût, d'idée, d'ensemble et d'harmonie, et mettant la culturé des arts à l’état d’un divertissement comme un autre. Aussi avec quel empressement certains ont-ils ad- mis le daguerréotype; chacun s’est cru, sans doute, en voyant des résultats si précis , artistes au-dessus de Ra- phaël; et chacun prenant à la lettre la définition de la peinture laissée par le moyen- âge, croit être dans le vrai avec cet instrument. Mais un jour que j'appelle ne tardera pas à venir où ces futilités passeront. En effet, la peinture est la science de limitation de la nature, mais à une condition, qu’en imi- tant cette nature, qu’en vous en servant Comme moyen, vous créez une nouvelle œuvre, une conception à vous, où se fasse jour la poésie on le feu sacré, et que vous ti- riez de la nature, ce grand livre de Dieu, tout ouvert à chacun, un noble enseignement pour le cœur et l'esprit. Ce n’est qu'avec ces idées que l'artiste imite la nature, . autrement ce n’est pas un artiste, c’est ce que vous vou- drez d’insignifiant. _ La naiure est belle pour tout le monde, mais chacun la comprend à sa manière, Avez-vous jamais rencontré deux.écrivains dont le style soit identique ? a-t-on jamais trouvé deux peintres qui voyaient, sentaient de la même manière ? Jamais! EL cependant la nature esi toujours la même , elle est immuable ; il s’agit donc de l’interpréter ! que m'importe qu’un pauvre arliste s’en aille passer des années à consigner sur la toile les cent mille feuilles qui peuvent se compter dans un arbre, et faire une œuvre de patience plate et insignifianie ; avant tout qu'il me fasse un arbre qui me révèle quelque chose, soit par la frai- DE LA CINQUIÈME SECTION. 385 cheur de ses feuilles ; Soit par la grâce de sa forme , soit par la hardiesse de sa lige, soit par l’ombrage opaque qu'il fournit au troupeau, etc., et qu'il passe à cela peu ou beaucoup de temps , que m'importe: mais que son œuvre nous dise quelque chose ! La nature contient tous ces germes, mais c’est à l’artiste à nous les articuler, à nous les faire sentir. Le daguerréotype » Messieurs, ne fait pas autre chose que de nous reproduire la nature, mais sans aucune interprétation, C’est [a nature elle-même moins la nature, c’est la mort qu’on nous donne comme portrait de la vie, e - Qu’à l’aide de la loupe nous Comptions sur un dessin de daguerréotype tous les brins d’herbe de cette prairie , en serons-nous plus avancés ? "Un grand poète a dit : 208 numerandi sed ponderandi. L'art-accepte ces pa- roles , l’industrie seul les Tépousse, son affaire est de compter. La peinture doit donc être l’expression de nos senti- ments à l’aide de limitation de la nature, mais non l’imi- tation elle-même. Aujourd’hui notre époque à besoin de celte nouvelle définition, puisque , par la position esthé- tique où elle se trouve, elle n’est point en mesure de com- prendre la simple définition léguée par le moyen-âge, Je conclus donc, pour la question 29m, que le daguer- réotype n’a aucun "epport avec l’art de la peinture ni aucune espèce d’art qui a en vue le culte du beau. T. Il, 25 386 MÉMOIRES RAPPORT SUR L'ESSAI DE NOTATION MUSICALE DE M. TJ. RAYMOND, DE PARIS, PAR M. CHÉNUAU AINÉ, Avocat près la Cour royale, à Angers. Messieurs , M. Joseph Raymond, de Paris, a fait l'envoi au Congrès d’un mémoire intitulé : Essai de simplification musico- graphique, avec un précis analytique des principaux systêmes de notation musicale proposés depuis le AV I° siècle. G’est sur cet ouvrage que j’ai l'honneur de présen- ter ce rapport à votre section. Les beaux-arts, Messieurs , sont les fils de la civilisa- tion. Ghez les ançiens , comme dans nos sociétés moder- nes, la musique, la peinture , la sculpture ont été floris- santes partout où le progrès a amené le culte du beau. Ne soyons donc point surpris qu’au XIX° siècle, à notre époque de civilisation et de progrès , si jamais il en fut, la musique occupe un rang que personne assurément ne voudrait lui contester. C’est un des besoins de notre épo- que, et si les théories politiques, sociales , philosophiques produisent dans les hautes régions des controverses cha- leureuses , les questions musicales, elles aussi, dans une sphère moins élevée ou plus modeste si l’on veut, ne ren- contrent pas moins les sympathies des classes intelligen- tes. Je n’en veux pour preuve que l’empressement avec lequel chaque soir la foule se porte à l'Opéra, aux Ita- liens, aux concerts, où elle doit entendre la musique de nos grands maîtres, DE LA CINQUIÈME SECTION. . 387 Geci posé, on comprend sans peine que la musique , comme les autres arts et les autres sciences , occupe les méditations des savants et devienne parfois l’objet d’a- méliorations et de réformes... Il en est ainsi de tout. La perfectibilité est de l’essence même des ouvrages des hom- mes, et pas plus que les autres arts , la musique n’a at- teint l’apogée de sa perfection. C’est sous l’inspiration de cette pensée sans doute que M, Raymond a rédigé le mémoire dont nous avons à vous entretenir. Une intention excellente , disons-le tout d’a- bord, a dirigé l’auteur dans lexposé de son systéme. Il a voulu faciliter l'étendue de la musique, en rendre les progrès plus rapides, et pour arriver à ce but il s’est at- taché à simplifier le plus possible les signes de conven- tion qui reproduisent les pensées musicales, Déjà bon nombre d’essais de ce genre ont été tentés depuis le XVI° siècle. Sauveur, Demotz de la Salle , J.-J. Rousseau et autres ont successivement proposé des sys- têmes plus où moins heureux, soit de sténographie ; soit de notation musicale. M. Raymond les passe en revue tour à tour dans la première partie de son mémoire, et en fait une critique aussi judicieuse qu’éclairée. Je crois fondés les reproches qu’il leur adresse , et je pense que leur sub- stitution au mode de notation usité jusqu'ici, loin d’en- gager à l’étude de la musique par une prétendue simplifi- cation des signes musicographiques , ne pourrait que ren- dre cette étude plus pénible par l’imperfection même des méthodes proposées, Le système de M. Raymond est-il propre à mieux rem- plir le but ? et d’abord en quoi consiste ce système ? Pour le bien comprendre , il faut se rappeler la mé- thode musicographique adoptée jusqu’à présent. Il ÿ à, comme chacun le sait, sept sons primitifs pour la musi- que, comme il y a sepi couleurs primitives pour la pein- ture. Ges sept sons forment la gamme naturelle composée 288 MÉMOIRES de cinq tons et deux demi-tons; ils «e divisent en douze demi-tons qui, au moyen des dièses et doubles dièses, des bémols et des doubles bémols, etc., peuvent avoir eux- mêmes un tel nombre de subdivisions qu’il ne soit plus possible à la faiblesse de nos organes dé les saisir. Ces sons, dans le systême actuel, sont représentés par des notes écrites sur une certaine série de lignes droites ho- rizontales. Cinq lignes composent la portée , mais en de- hors de la portée se trouvent encore un nombre indéfini de lignes d'emprunt , dont l’adjonction a pour effet de permettre d'écrire une foule de notes qui ne peuvent trou- ver place dans la portée, parce qu’elles sont plus ou moins élevées qu’elle. A ce systême , dont il reconnaît les excellentes bases et qu'il préfère à tous ceux essayés depuis le XVI: siècle, M. Raymond propose les modifications suivantes : (Je ne ferai remarquer que les principales afin d’éco- nomiser les moments de la section , dont peut-être beau- coup de membres ne s’occupent pas d’études musicales.) M. Raymond propose 1° de supprimer trois lignes sur les cinq de la portée du systême usité; 2° de joindre les accidents, dièses , bémols, becarres à la note même qu'ils sont destinés à modifier, au lieu de les écrire séparément et avant celte note comme on l’a fait jusqu'ici; 3° de ré- péter ces accidents à toutes les notes modifiées, alors même qu’elles se retrouvent plusieurs fois dans la même mesure; 4° d'adopter une clef unique pour toute la mu- sique écrite; 9° enfin de diminuer considérablement les barres des valeurs. Comment M. Raymond entend-il l'exécution de ces changements, et quelles objections peut-on lui faire ? La suppression de trois lignes dans la portée actuelle, réduit la nouvelle portée à deux lignes parallèles hori- zontales , qui sont éloignées l’une de l’autre autant que la première et la dernière ligne de la portée ancienne. En DE LA CINQUIÈME SECTION. 389 retranchant à l’ancienne portée les trois lignes intermé- diaires on a la nouvelle portée de deux lignes. Les notes sont écrites entre cet espace de deux lignes avec une forme et dans une position analogue à l’an- cienne. — M. Raymond prétend que l’exécutant pourra, avec plus de facilité, déchiffrer ces notes au moyen de la suppression des trois lignes intermédiaires. Sur ce point nous ne partageons pas complétement son avis. En effet, les trois lignes qu’il veut supprimer servent à déterminer et à fixer régulièrement les distances; de plus, les notes sont placées ou sur chacune de ces lignes ou dans les es- paces intermédiaires, en sorte que chaque ligne, chaque espace est consacré à une note distincte et séparée, et dès que le musicien aperçoit la ligne il reconnaît la note. Dans le systéme proposé, au contraire, il faudra supputer, calculer par approximation la distance qui ne sera plus réglée par des lignes invariables, avant de reconnaître la note. Et puis, remarquons-le bien , cette suppression de trois lignes augmente considérablement la difficulté d’écrire la musique, et à supposer que l’inconvénient ne se rencon- tre pas dans la musique imprimée, ne pourra-t-il pas du moins se faire sentir souvent, lorsqu'un copiste un peu pressé n’aura pas eu le temps de calculer la distance des notes à l’une et l’autre des deux seules lignes tracées? — On est d'accord sur ce point que les notes écrites au- dessus ou au-dessous de la portée sont en général moins faciles à lire que celles qui figurent dans la portée même, Or, M. Raymond écrit les notes de la portée d’une ma- nière analogue à celles qui aujourd’hui, et d’après le sys- _ tême usité, figurent en dehors de la portée. Qu’en con- clure ? évidemment que l'innovation proposée ne remplit pas exaclement le but de son auteur, quant aux notes de la portée. — Il est vrai que le système de M. Raymond permettrait de supprimer les lignes additionnelles multi- 390 MÉMOIRES pliées, ou les lignes d'emprunt en nombre indéfini, et ce résultat offrirait des avantages. Mais, ne peut-on, tout en adoptant cette méthode pour les notes écrites hors de lu portée, conserver les cinq lignes si évidemment utiles et nécessaires du système usité ? M. Raymond supprime en quelque sorte les dièses , bémols et bécarres , pour les remplacer par des accidents adhérents à la même note. Le signe accidentel est un simple trait dont la direction exprime avec beaucoup d’analogie , il est vrai, l’ordre ascendant ou descendant des demi-tons. Cette ressource présente assurément son bon côté, elle économise l’espace en faisant disparaître des signes qui se rencontrent fréquemment entre les no- tes, et qui, lorsque la musique est déjà très-chargée, peuvent devenir un obstacle à la facilité de lecture. Mais peut-être aussi, en reportant les accidents sur la note même, y a-t-il parfois un peu de surcharge pour cette note; lorsque, par exemple , une série de doubles ou tri- ples croches accidentées se rencontre dans une même phrase, le trait indicatif de l'accident qui, d’après le sys- iême proposé, vient pour chaque note s'ajouter à la ligne qui déjà forme la queue de cette note, peut produire une certaine confusion, notamment dans la musique copiée. — Cette remarque s’applique d'autant mieux au système, que M. Raymond répète les accidents d’une manière cons- tante à toutes les notes accidentées, tandis que dans la méthode actuelle on s’en dispense pour les notes de même degré qui se trouvent dans la même mesure. — Il faut, toutefois, reconnaître que la répétition des accidents est fort utile , et savoir gré à M. Raymond de l'avoir fait fi- gurer dans ses projets de réforme. L'adoption d’une clef unique pour toute la musique écrite est aussi un bon projet. Il est certain, comme le dit M. Raymond, que dans le système usité l’insuflisance de la portée et la multiplicité des lignes additionnelles obli- DE LA CINQUIÈME SECTION. 391 gent à faire usage de plusieurs clefs à la fois, ce qui est d’une très-grande difficulté dans l'étude et. dans la lec- ture de la musique. Le systême simplifié, tel qu’il est ex- pliqué dans le mémoire, pourrait conduire à cette unité de clef dont les harpistes et les pianistes surtout appré- cieraient bien vite les avantages, — Assurément la lecture de la musique y gagnerait beaucoup, et elle acquerrait une extrême simplicité si cette réforme pouvait être mise à exécution. L'auteur du mémoire arrive à diminuer les barres des valeurs en diminuant de moitié la valeur de chacune des notes musicales. Ainsi, dans son système, la ronde vaut une blanche , la blanche une noire, la noire une croche, la croche une double croche, celle-ci une triple cro- - che, etc... Pour compléter ce systéme il n’a qu’à substi- tuer une nouvelle note à la ronde de la méthode actuelle, et c’est ce qu'il fait. Gette innovation très-ingénieuse sim- plifie évidemment Pécriture musicale. C’est une écono- mie immense de barres dans tel ou tel morceau où les doubles et triples croches jouent un grand rôle. — Ce serait une facilité incontestable apportée à la lecture de la musique, et tous y gagneraient, compositeurs, copisles eb exécutanis. Tels sont, Messieurs, les principaux projets de ré- forme ou plutôt d'amélioration que nous avons remarqués dans le mémoire de M. Raymond. Il a pensé, et nous pen- sons avec lui, que la science musicale a encore des pro- grès à faire, et ces progrès il a voulu les hâter en appelant la discussion sur les améliorations qu’il propose. C’est une noble tâche, et M. Raymond, il faut le dire en terminant, l’a comprise et remplie en homme consciencieux et éclai- ré. On ne rencontre point dans son mémoire de ces pro- positions peu méditées ou trop hardies, que la prudence conseille de rejeter sans même leur faire l'honneur de les discuter. Novateur, il est vrai, mais en même temps animé 392 MÉMOIRES d’un esprit de réserve et de modération, l’auteur, à en juger par cet ouvrage , semble avoir compris qu’en ma- tière d’art un perfectionnement vaut presque toujours mieux qu’une réforme. Aussi , à la différence des projets proposés jusqu’à présent, celui-ci ne repousse point le système de notation musicale usité jusqu'ici; il offre, se- lon les propres expressions de l’auteur, les traces des amé- liorations qu’on peut faire à chaque branche du systême musicographique actuel, sans s’éloigner de ce qui est connu el recu. Espérons qu’en suivant cette marche , et avec les qua- lités qu’il possède, M. Raymond pourra contribuer pour sa part aux progrès d’un art qui lui est cher... Et peut- être voudrez-vous bien , Messieurs , l’encourager dans ce louable dessein en votant des remerciements et des élo- ges qui seront pour cet artiste la trop juste récompense de ses eilorts. © € Q ——— COMPTE-RENDU DES EXPOSITIONS DE PEINTURE ET SCULPTURE ANCIENNES ET MO- DERNES, ORGANISÉE PAR LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE, SCIENCES ET ARTS D'ANGERS , PAR M. H. DE NERBONNE, D’ANGERS. Chargé par la Société d'agriculture , sciences et arts d'Angers, de la statistique spéciale des travaux qu’elle a faits en faveur des beaux-arts, nous nens sommes mis à Pœuvre avec d'autant plus d’empressement que celte cause est loujours, selon nous, une des plus belles à embrasser. Ces trois mots : littérature, peinture, musique, ces trois filles sublimes de leur plus sublime mère encore , la poé- DE LA CINQUIÈME SECTION. 393 sie ; sont les trois moyens que Dieu a mis au service de notre cœur, pour qu'il puisse chanter les merveilles du sentiment et de la beauté dont il est le foyer. Nous voyons par un retour qui servirait peut-être à expliquer les vi- cissitudes. des sociétés, que l’homme d’abord en toutes choses, cherche l’utile, le matériel si l’on peut dire, par exemple, l’agriculture, l’histoire, les moyens de se for- mer en société , elc.; et ce n’est que lorsqu'un peuple est arrivé, par tous ces travaux, à une constitution forte, que la paix voit briller les beaux-arts. Ainsi dans toutes les classifications , même celles du Gongrès, nous voyons les beaux-arts arriver à la fin, et celte place leur est natu- relle, elle est l’expression de ce qui se passe dans les so- ciétés, c’est la plus belle création de notre terre, len- fant glorieux qui naît après de longues années d’enfante- ment et de peines. C’est l’or qui arrive plus pur après avoir passé par tous les creusets; aussi comme cet or fin, doivent-ils avoir une bien grande valeur dans la société; en eux sont renfermés les germes les plus subtils et les enseignements les plus larges, et leur étude approfondie rend clairvoyant sur tous les grands principes sociaux, même religieux, parce qu’ils partent du cœur et ne peu- vent être cultivés que par des esprits larges et indépen- dants. Nous pensons que la présente statistique, bien qu’ex- cessivement succincte, pourra intéresser le Congrès : 1° Parce qu’elle a trait aux beaux-arts; 2° Parce que-la Société d’agriculture , en soumettant les moyens qu’elle employe pour stimuler le goût des belles choses, pourra avoir en retour lPassentiment ou les avis du Congrès ; 3° Parce qu’on pourra apprécier l’état du pays avant les expositions et les résultats obtenus par elles, princi- palement par l'Exposition archéologique (23° question). Nous lisons en tête des comptes-rendus de l'Exposition 394 MÉMOIRES archéologique d'Angers de 1839 : « Sur la proposition de » M. Henri A. de Nerbonne, tendant à ce qu’il soit fait une » exposition des objets de peinture et sculpture anciennes » contenus dans le département de Maine et Loire, » la Société a admis ce principe, en le modifiant sur quelques points, et a organisé l’exposition projetée en motivant ainsi sa décision : « Pour entretenir et propager l'amour » de l’art et la culture des modèles, pour faire jouir le » public des belles œuvres disséminées et renfermées dans »les galeries particulières, pour fortifier les esprits par » des jugements et des comparaisons à établir entre les » productions des maîtres, et, en outre, pour parvenir à » dresser une statistique générale des sujets les plus pré- » cieux que comprend le ressort de la Cour royale, dans » l'espérance aussi de provoquer ailleurs des travaux ana- » logues qui, en se multipliant, grandiraient l'importance » des siens , a décidé qu’elle ferait une exposition archéo- » logique et a rédigé un programme. » Voici un extrait de quelques articles du programme qui servent à déterminer l’idée de la Société, Arr. 16r. La Société fixe l’époque de Louis XV (comme limite pour elle, passé laquelle s’arrête la bonne sculpture ornementale, et elle n’admettra rien en fait d’ornementation qui soit postérieur à cette époque). Arr. 7. L'exposition durera un mois (cet espace de temps a été beaucoup trop court, eu égard au désir de ceux qui voulaient étu- dier et comparer, et des étrangers qui ont à peine eu le temps de connaître l'existence de cette exposition et d'arriver), ART. 9. Le plus grand soin sera apporté au transport et au manie- ment des objets, etc. Nous voyons ensuite aux premiers feuillets de la notice cette profession de foi de la commission nommée par la Société. « En procédant à la rédaction d’une notice , la » commission ne s’est point dissimulé les questions déli- » cates que ce travail pourrait soulever; toutefois, sans dé- » cliner la responsabilité de ses jugements, elle a cru devoir DE LA CINQUIÈME SECTION. 395 » en bien déterminer la nature par l'indication du principe » qui l’a dirigée dans sa marche, » Ainsi, relativement aux origines , elle a statué, moins » sur l’œuvre en elle-même que sur l’ensemble des tradi- » tions alléguées et la validité des témoignages produits; » le petit nombre de ses affirmations absolues, surtout vis- »à-vis des plus imposantes renommées, fait foi de sa scru- » puleuse réserve à cet égard. Elle a dû au contraire pro- » diguer les signes de doute , afin d’ouvrir une large porte »aux documents précieux qui pourront le convertir en » certitude. Si le mot attribué a souvent été employé par » elle, à ou le possesseur lui-même avait désigné ur nom » d'auteur, cette mesure n’a nullement eu pour but de » contester une authenticité , etc. » La Société ayant eu l’intention d’affecter des médailles aux meilleures œuvres, avait jugé convenable de faire trois divisions ou classes pour les objets fournis à l’ex- position. 4: | Première division. — Peinture comprenant : tableaux à l’huile, à l’encaustic, à l'œuf; — pastels; — gouaches; — dessins; — manuscrits illustrés; — émaux; — vitraux; — mosaïques ; — tapisseries; — gravures, Deuxième division. — Sculpture. Troisième division. — Sculpture ornementative ou d’ornementation., - Le succès de cette exposition a été très-grand , et l’on peut le dire ici parce que ce succès n’intéresse pas seule- ment les Angevins , mais la science , l’histoire et les arts, Que de richesses ont été réunies ensemble, sans compter celles des cabinets de MM. Grille, Mordret , Bazin, Gaul- tier, Quelin, Saint-Rémy, Lange, etc. !... Le catalogue a enregistré onze cents objets, et un seul numéro en repré- . sentait souvent une série; plusieurs grandes montres vi- trées renfermant tous ces manuscrits, ces vases ciselés, ce précieux sacellum de M. Grille, des fragments de 396 MÉMOIRES sculpture et une multitude de petits objets remarquables, dans un nombre infini, n’avaient chacune qu’un numéro collectif, ainsi que plus de deux cents fragments de vi- traux à M. Mordret. Nous lisons ces quelques lignes dans le compte-rendu des Annales de la société : « Depuis plus » d’une semaine les salles de l’exposition sont ouvertes au » public, et la foule, toujours croissante des visiteurs , té- »moigne en faveur d’une idée qui s’est développée avec » tant de bonheur. Avouons-le franchement, nous n’osions » nous abandonner à l’espoir d’une telle fortune. » Le but de la Société, en organisant celte première ex- position archéologique, n’était pas de fournir aux yeux des curieux un vaste champ où se récréer. Elle voulait amasser des matériaux pour l’étude de l'artiste et de l’his- torien. Nous croyons qu’elle ne s’est pas trompée dans sa double attente. Le nombre des archéologues et archéolo- gues historiens, des amateurs de bonne peinture et des artistes pratiques s’est vite augmenté à Angers, eb c’est à ce genre déjà développé que nous devons peut-être le Congrès archéologique de 1841, et ce Congrès, nous pou- vons le dire, fut le précurseur de celui d’aujourd’hui. La Société d’agriculture , voulant par elle-même sonder l’ef- fet de son premier effort, a organisé, l’année dernière, une nouvelle exposition archéologique à laquelle elle a joint une exposition de peinture et sculplure modernes. Deux vastes salles pouvaient à peine contenir les nou- veaux objets d’art ancien qui n'avaient pas figuré à la première exposition, et l’exposition d'œuvres modernes, plus étendue encore, présentait quelques noms des plus recommandables peintres. Avant de terminer cette trop succincte analyse, et de faire une demande au Congrès , citons encore un passage tiré du projet d’exposition archéologique , imprimé dans les Annales de la société. « La notice sur l'exposition ser- » vira à constater nos richesses artistiques el pourra, en » » DE LA CINQUIÈME SECTION. 397 faisant connaître nos travaux, trouver un sentiment sympathique hors du département. D’autres sociétés marcheront sur nos traces en comprenant que nous n’avons écrit que la première page d’une statistique générale, et d’autant plus intéressante qu’elle se géné- ralisera d’avantage; car à l’aide de ces livrets compa- rés s’expliqueront bien des particularités étranges, dis- paraîtront bien des doutes, et bien des réhabilitations seront faites. Ainsi pourra s’accomplir la biographie in- complète de certains artistes par mille indices sur eux, disséminés çà et là dans toutes les parties de la France. Que de faibles copies dont le crédit usurpé atténue la gloire des originaux , et qui alors seraient appréciées à leur juste valeur. — Gomme la patrie des beaux-arts est partout, ne pouvons-nous pas supporter l’existence de cette sorte d’inventaire artistique en Italie, en Alle- magne, etc.? alors cette collection de notices serait une bibliothèque d’un nouveau genre , bien chère aux ar- tistes et d’autant plus intéressante et propre à porter des fruits, qu'elles seraient plus nombreuses, » Nous demandons donc au Congrès, ou plutôt à son di- recteur perpétuel, M. de Gaumont, d’accueillir favorable- ment notre idée, et de faire comprendre dans toutes les cités où se tiendra le Congrès à l’avenir, combien peut être intéressante une exposition archéologique, et com- bien par ce témoignage de vénération pour les œuvres de nos pères, pareils travaux peuvent être utiles à la science archéologique, historique et aux beaux-arts, 7 ERRATA RELATIFS AU MÉMOIRE DE M. WOLSKY. PAGE 10 LIGNE 14, postérieur, lisez antérieur. 17 14, sont plus coûteux , lisez est plus coûteux. 18 16, feudillée, Lisez fendillée. 18 24, et la première, lisez et la dernière, 19 35, des granwackes, lisez des grauwackes. 29 18, ; les premiers, lisez. Les premiers. 32 22, de 700 mètres , lisez de 600 mètres. 38 12 et 13, sa rive sud est couverte d’un poudingue plus récent que sa formation, lisez sa rive sud consiste en pondingue ou con- glomera composé de roches plus an- ciennes que les siennes. 43 32, les usines, Zisez les veines, LISTE ALPHABÉTIQUE DES PERSONNES QUI ONT ADHÉRÉ A LA ONZIÈME SESSION DU CONGRÈS SCIENTIFIQUE DE FRANCE. Messieurs : AgBriIA , professeur de physique à la faculté des sciences, à Bordeaux. Apam (Edmond), rédacteur du Précurseur de l’Ouést, à Angers. ALBERT, sous-censeur au collège royal d'Angers. ALLAIN-TARGÉ, premier avocat général à Angers. ALLARD (Emile), docteur médcein à Nantes. ALLARD , capitdine d'état-major à Angers. Ameray (Auguste d’), à Montigny (Seine-Inférieure). AncELoN (Etienne-Auguste), doct. en méd., à Dieuze (Meurthe). ANGEBAULT, évêque d'Angers. Anraus fils, propriétaire à Nantes. ARMAILLÉ (général vicomte d’), maréchal de camp, à la Morozière, près Chemillé (Maine et Loire). ATHENAS , directeur de Saint-Jacques, à Nantes. Aucer, docteur-médecin à Houdan (Seine-et-Oise). AuLT-DUMESNIL, propriétaire à Angers. AVELINE, notaire à Angers. AVENANT (Paul ) propriétaire à Angers. AVENANT (Victor), notaire à Angers. AVENANT (Jules), négociant à Angers. AVENANT (Auguste), idem. 400 LISTE ALPHABÉTIQUE BAILLOU DE LA BROSSE ( Edmond), membre de la Société française pour la conservation des monuments, à Saumur (Maine et Loire), Bazoccnr, docteur en médecine, membre de la Société des géor- gophiles, à Florence. BaANVILLE (vicomte de), à Caen (Calvados). BARACÉ (Raoul de), natufaliste à Angers. BARASSÉ ( Eugène), imprimeur à Angers. Banper, avoué près la cour royale d'Angers. Barper, propriétaire, maire de Corzé (Maine et Loire). BARON, négociant à Angers. Bayaw, professeur de mathématiques spéciales an collège royal a’Angers. BEauLuèËrE (Louis), propriétaire à Laval (Mayenne). BeaurEGaRD (de), président de chambre à la cour royale d'Angers. BEaurEeGarD (Charles de), propriétaire au Mans (Sarthe). BELLEUVRE (Paul), manufacturier à Angers. BeLuN (Gaspord), juge suppléant au tribunal de première instance, secrétaire de la Société liftéraire, à Lyon. BELLON , préfet de Maine et Loire, à Angers, BELOUNO , docteur-médecin à Angers. Benoist (Charles), doct.-médecin à Châteauneuf (Maine et Loire). BErAuUD, conseiller à la cour royale d'Angers. BERGER ( François), membre du conseil général de Maine et Loire, à Angers. BERGER père, conseiller municipal à Angers. BERTAULD, procureur-général à Caen (Calvados). BERTHOLD (Arnold-Adolphe), professeur de médecine à Gættingue (Hanovre). Berri (Alexandre-Auguste), maître de poste à Suette (M. et L.). Bernx , chimiste , vérilicateur des engrais, à Nantes. Bertin (Bernardin), président de la Société chirurgicale, doyen de la faculté de médecine à l’université royale de Turin. BESxARD-REVELLIÈRE ; négociant à Angers. BESNARD , négociant à Angers. Bicor (Elie), teneur de livres à Angers. Bicor (Théodore), docteur-médecin à Angers. BiLLer, ancien directeur de l’école royale d'arts et métiers, à Angers. BinEAU , ingénieur en chef des mines, député de Maine et Loire , à Paris. Bizeur., membre de la Société des antiquaires de France , à Blain (Loire-Inférieure). BLancHet (Jules), négociant à Angers. DES MEMBRES DU CONGRÈS. 401 BLANDIN,, greffier du tribunal de commerce à Angers, BLois (comte À. de), correspondant du ministère pour l’histoire de France, à Quimper. | BLorDier (Chsrles), voyer en chef à Angers. BoDINIER (Victor), propriétaire à Angers. BOILLEAU, conservateur du cabinet archéologique de Tours. BolSLamBERT (Charles de), avocat, membre de l'association nor- mande , à Caen. Boismarp (le chevalier), à Cologne. _Borssarp (comte Charles de), à Angers. Boissimon (Charles de), membre de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale, à Linières- Bouton (Maine et Loire). Boissy (de), membre de la Société géologique de France, à Nantes. Bompois (l’abbé}, principal du collège de Cholet (Maine et Loire). Bonamy (Eugène), docteur-médecin à Nantes. BoncHamps (vicomte de), ancien sous-préfet, à Saint-Laurent-des - Mortiers (Mayenne). BONNEAU-LA-VARANNE , aVoCat à Angers. BONNEMÈRE , avocat à Angers. BoNNEMÈRE aîné, agriculteur, maire de Varennes-sous-Montsoreau (Maine et Loire). ; Boxer, docteur-médecin à Besançon ( Doubs). BorDiLLON (Grégoire), vice-président de la Société industrielle à Angers. Ly| 4 BorDILLON (Théodore), ingénieur civil à Nantes. BorEAU, directeur du jardin des plantes, à Angers. BoucHarp, docteur-imédecin à Doué (Maine et Loire). BoucHer DE PERTHES, président de la Société royale d’émulation, à Abbeville (Somme). BOUCHEREAU, conseiller de préfecture, correspondant de la Société royale et centrale d'agriculture, à Bordeaux. BOUILLER (l'abbé Isidore), curé de la Trinité, chanoine honoraire, à Laval. BourciER, conseiller à la cour royale d'Angers. BourpiLLoN (l'abbé), professeur de rhétorique à Privas: BoURJOT DE SAINT-HiLAIRE, proféssenr d'histoire naturelle au col- lège Bourbon, à Paris, BOURIUGE (Augustin), avoué près la cour royale d'Angers. Bourmonr (comte Charles de), au château de Bourmont, près Candé (Maine et Loire). BourTon-LEvÈQUE, vice-prés, de la Société industrielle, à Angers, 41 IL. 2 6 402 LISTE ALPHABÉTIQUE Bouvier (Adolphe), docteur en médecine au Louroux-Béconnais (Maine et Loire). Bouvier, maître de pension à Angers. BRAHEIX (Frédéric), négociant à Nantes. Brière (de), membre de plusieurs Sociétés savantes, délégué de l’Institut historique de Paris. Brissac (marquis de), à Brissac (Maine et Loire). Bromer (le docteur), membre de la Société des antiquaires, à Londres. BROUILLET, docteur-médecin à Beaupreau (Maine et Loire). BruaAs (Auguste), notaire à Angers. BRUNEAU, agent général de la compagnie la France, à Angers. Bure (de), conseiller à la cour royale d'Angers. BuviGnier (Amand), Een de la Société philomatique, à Ver- dun (Meuse). BuzeLer (de), membre du conseil général , maire de Saint-Remy-la- Varenne (Maine et Loire). Carccaup (Frédéric), conservateur du musée d'histoire naturelle à Nantes. Cawzeau, membre du conseil général, à Saumur. CamBour& (Antoine de), propriétaire à Angers. CaouEraY (le chevalier de), ancien député à Angers. CARRÉ-GENDRON , propriétaire à Angers. CarRIOL-BARON, filateur à Angers. CasronnerT, professeur adjoint à l'école de médecine, à Angers. CATERNAULT, filateur, maire de Cholet (Maine et Loire). CarernauLT, conducteur des ponts-et-chaussées, à Angers. Caumowr (de), correspondant de l'Institut à Caen. Cauvin, délégué de la Société d'agriculture , sciences et arts du Mans. CELLIER DU FAYEL , à Paris. CEsBRoN-LAMOTYE , notaire à Angers. Ceseron-LaAvau (Charles), membre du conseil général, à Cholet (Maine et Loire). CHameray (le général marquis de), à Damville (Eure). CHAMPAGNE (Louis), principal du collège de Beaufort (M. et L.). CHAMPOISEAU , vice-président de la Société archéologique de Fou- raine, à Tours. CHANLOUINEAU, juge suppléant à Angers. Cuaper , préfet de la Loire-Inférieure, à Nantes, CHapyyx, docteur-médecin à Saumur. CHARPENTIER flls, lithographe à Nantes. DES MEMBRES DU CONGRÈS. 403 CHAUVEAU (l'abbé), supérieur du petit séminaire de Meaux (Seine- _ et-Marne). CHÉNUAU (Auguste), avocat à Angers. Cxeror, ancien élève de l'école polytechnique, à Nantes. CHEUX, ex-premier adjoint au maire d'Angers. CHEVRÉ fils, négociant à Angers, CHEVROLLIER, notaire à Châteaugontier (Mayenne). CHOYER ( l'abbé), professeur à Angers. CHUDEAU-ORIOLLE, négociant à Angers. Civrac-Durrort (comte de), membre dn conseil d'arrondissement, à Beaupreau (Maine et Loire), CLerc, professeur de rhétorique à à Luxeuil (Haute-Saône), CLEDAT DE LA VIGERIE , directeur de l’école normale à Angers. Corry, secrétaire de la Société pour là propagation de la srieuee des comptes, à Paris. CorzEeT-DUBIGNON , ancien recteur de l'Académie, à à Angers. CozzetTis (le général), ministre de Grèce , à Paris. CoromeeL (Evariste), avocat à Nantes. CoLomgiers (des), prés. de la Société d’agric. de l'Ain, à à Poullung. COMARMOND, directeur des musées archéologiques de Lyon. CommeqQuiers, membre de la Société royale académique de Nantes, CorgiN, procureur-général à Angers. CorNILLEAU, imprimeur à Angers. Corroy, médecin vétérinaire du haras, à Angers. Cosnier (Léon), imprimenr- libraire à Angers. CoueTILLER , conseiller à la cour royale d'Angers. CourTIN , ingénieur des mines, à Doué (Maine et Loire). CouRTIN (César), directeur des mines, à Doué (Maine et Loire). CoururaT, ingénieur en chef des ponts-et-chaussées, à Strasbourg. CrÉéPON , conseiller à la cour royale d'Angers. CRETTÉ , inspecteur des écoles primaires de Maine et Loire, à Angers. CroZET (l'abbé), curé de Notre-Dame à Montbrison (Loire). .CuissaRT, secrétaire de la Société des beaux-arts à Nantes, Cussx (vicomte de), officier supérieur d'infanterie , membre de l'A- cadémie royale de Metz, de l’Institut des provinces, à Saint-Mandé (Seine). Dame (don Salvador), capitaine espagnol à Bourges, DAVIERS (Eugène), docteur-médecin, chirurgien adjoint à l Hôtel- Dieu , à Angers. à Deux . Drofeiene de mathématiques à à la Rochelle. DEFRANCE, géologue à Sceaux (Seine). DELALANDE (Francois), avoué près la cour royale, à Angers. 04 LISTE ALPHABÉTIQUE DRLALANDE (Jean-Marie), professeur de botanique et de zoologie au petit séminaire de Nantes. DELAMARE , professeur à l’école de médecine à Nantes, DE LA TouscHe, membre du conseil d'arrondissement, à Angers. DELAUNAY-BAZILLE , aVocat à Angers. DE LENS , professeur de philosophie au collège royal d'Angers. DELLÈTRE , architecte à Angers. DEMANGEAT, membre de la Société royale académique, à Nantes. DEMIAU DE CRoUZILHAC, substitut du procureur-général à Lyon. DE Moxri (le marquis), propriétaire à Nantes. DENECHEAU (l'abbé), vicaire de la cathédrale, à Angers. Denis (Claude-François), correspondant de la Société des antiquai- res de France, à Commercy (Meuse). Denos (le docteur), à Bagnole, près Alencon (Orue). DERUINEAU, peintre à Angers. DEscars , principal du collège de Châteaugoutier (Mayenne). Descamps, inspecteur des forêts en retraite, à Caen. DEscaÈRes, banquier à Angers. DESLONGCHAMPS, professeur à la faculté des sciences, à Caen. DESMAZIÈRES, premier président de la cour royale, à Angers. DESMÉ (Louis), propriétaire à Saumur (Maine et Loire). DESNOYERS, propriétaire à Angers. Des ORGERIES, receveur de l'enregistrement à Angers. DESsPinE (le chevalier), inspecteur général des mines, à Turin. DEsROZIERS, maire de Saint-Laurent-du-Mottay (Maine et Loire). DESVARANNES (Camille), juge au tribunal de commerce à Angers. DEsvaux (Auguste), correspondant de la Société centrale d’agricul- ture, etc., à Nantes. DETOURBET, propriétaire à Ventoux (Côte-d'Or). DÉTRICHÉ, direct. de l’école prim. supérieure de Cholet (M. et L.). Don VicenTE PAzos, consul général de la république de Bolivie, à Londres. Donner, maire de Caen. Doucet pe BoisræiBauLT, bâtonnier de l’ordre des avocats à Char- tres (Eure-et-Loir). DRioLLeT, architecte de la ville, à Nantes. Drouer (Charles), memb. du conseil général de la Sarthe, au Mans. Drouart, membre du conseil municipal à Angers. Dusgort, membre du conseil d’arrondist, à Beaufort (M. et L.). DUBREUIL, avocat à Angers. DuCHATELLIER , secrétaire - général de l'Association bretonne, à Quimper (Finistère). _ DES MEMBRES DU CONGRÈS. 405 DUCHEMIN DE VILLIERS, ancien président du tribunal civil, à Laval, DUCHESNE aîné, conservateur de la bibliothèque royale, à Paris. Duray, docteur-médecin à Paris. DUGUÉ, avoué près la cour royale d'Angers. DupLaquET, médecin vétérinaire au dépôt de remonte, à Angers. Durier , maire de Baugé, député de Maine et Loire. ErnouLrr (Charles), conducteur des ponts-et-chaussées, à Angers. FALIGAND, directeur des mines de Saint-Germain (Maine et Loire). FazLoux (comte de), au bourg d’Iré (Maine et Loire). FarLoux (vicomte Alfred de), au bourg d'Iré. FarRan, membre de la chambre des députés, à Angers. FEUILLET, juge de paix à Lyon. FLEURY-ROUSSEL, maire de Chalonnes (Maine et Loire). FLeury (Armand de), propriétaire à Vieux-Ruffec (Charente). FONTENELLE DE VAUDORÉ (de la), conseiller à à la cour royale de Poi- tiers (Vienne). FoRMEVILLE, conseiller à la cour royale de Caen. Foucaurr (Alfred), négociant à Angers. Fou&ërE, professeur de mathématiques spéciales au collège royal d Angérs. Fouré (Julien-Anne), doctear-médecin à Nantes. Fourier, ingénieur en chef de la navigation, à Angers. FOURNIER , avocat à Châteaugontier (Mayenne). FRESLON , avocat à Angers. Gacker (Victor) libraire à Angers. GAILLARD , Capitaine d'artillerie à Angers. GAIMARD (Paul), président de la commission scientifique du Nord, correspondant de l’Institut, à Paris. GAIN, bâtonnier de l’ordre des avocats, à Angers. GANNE, membre de la Société industrielle, à Angers. GAUGAIN, trésorier de la Société francaise pour la conservation des monuments, à Caen. GauLTIER (Frédéric), membre de la Société industrielle , à Angers. GAULTIER , procureur général, vice- “président de l’Académie royale des sciences, belles-lettres et arts, à Rouen (Seine-Inférieure). GaurrEr DE LA Moricière, licencié en droit à Montfaucon. Gay, professeur de pharmacie à Montpellier (Hérault). Gay (Abel), médecin à Fontevrault (Maine et Loire). GELLERAT aîné, directeur de l’école mutuelle, à Angers. GELY, chef des lravaux anitomiques à l’école de médecine, à Nautes. GENDEON (Henri), propriétaire à Angers, GENEST-BURON, propriétaire à Augers, 406 LISTE ALPHABÉTIQUE GERVAIS, avocat, vice-président de la Société des antiquaires de Normandie, à Cien. - GicouEau, officier de santé, dentiste à Angers. + GiRauD (Auguste), membre du conseil général de Mairie et Loire, mäite de la ville d'Angers. GirauD (Charles), membre du conseil général de Maine ét Loire, à Corzé. GiRAUDAIS (Ch.-B. la), avocat à Nantes. GIRAULT-LESOURD-DELISLE, propriétaire à Angers. GoparD-FAULTRIER, conservateur du musée d’antiquités, à Angers. GoperRoy, trésorier de l'association normande, à Caen. Goper (Paul), imprimeur à Saumur (Maine et Loire). Goprror, professeur de chimie à l'école de médecine, à Angers. GoGues, chef d'institution, correspondant de l'Institut historique, à Strasbourg. GorrAND (Henri-Paul), médecin à Jarzé (Maine et Loire). GonTARD père, propriétaire à Atigers. Gouin, avoué licencié à Bangé (Maine et Loire). Gouin, docteur-médecin à Noyant (Maine et Loire). Gouzon (l'abbé), professeur au collège de Cholet (Maine et Loire}. GoumENaAuULT (Eugène), substitut du procureur général à Angers. GourDon (l'abbé Joseph), curé de la cäthédrale d'Angers. GouRDON-MEIGNAN, propriétaire à Angers. Goury aîné, inspecteur divisionnaire honoraire des ponts-et-chaus- sées , à Angers. Gran-Mouun, curé-archidiacre, docteur ès-lettres, licencié ès- sciences , à Saint-Quentin. GRAND-PERRIN (Antony), propriétaire à Angers. GRENIER , docteur-médecin à Paris. GriGNON (Narcisse), propriétaire à Douces (Maine et Loire). GRILLE, doclteur-médecin à Angers. GRILLE, bibliothécaire honoraire de la ville, à Angers. Grippar, docteur-médecin à Angers. Grosourpy, docteur-médecin à Tigné (Maine et Loire). GuÉPIN, directeur de l’école préparatoire de médecine ét de phar- macie, à Angers. GuÉPiN (Ange), docteur-médecin à Nantes. GUÉRANGER (Frédéric), officier de l’Académie, professeur au collège du Mans. GuÉRANGER (Edouird), délégué de la Société de pharmacie du Mans. GUÉRETIN, docteur-médecin au Lion-d'Angers (Maine et Loire). GuÉRIN Du GRAND-Launay, docteur-médecin à Baugé (M. et L.). DES MEMBRES DU CONGRÈS. 407 GuéRiN ; notaire aux Ponts-de-Cé (Mainé et Loire). Guérin Des BROSSES , conseiller à la cour royale d'Angers. Guérin (Lucien), propriétaire à Angers. GuÉri , docteur-médecin à Pouancé (Maine et Loire). Guisert (Camille), avotat à Angers. GuicHarD, docteur-médecin à Angers. GuyaRD (l'abbé), chanoine titulairé de la cathédrale , à Tours. GuiLLier, docteur-médecin à Pouancé. Gui£zoïs (Jean), ancien notaire à Angers: GuicLory aîné, président de la Société industrielle, à Angers. GUINEBERTIÈRE ; docteur-médecin à Jallais (Maine et Loire): GUINOYSEAU père, propriétaire à la Flecherie , près Arigers. GUINOYSEAU-JOUBERT, négociant-manufacturier à Angers: HAËGAN (Emmanuel }, président de la Société royale académique, à Nantes. HEDDE (Isidore), trésorier de la Société agricole et industrielle ; à Saint-Étienne (Loiré). Henry, recteur de l’Académie , à Angers: Hepp, professeur de droit à la faculté de Strasbourg (Bas-Rhin). HERBERGER, docteur, directeur de la Société pharmaco-technolo- gique du Palatinat, Kaiserslautérn. HEUZÉ (Gustave), profess. de culture à l’Institut agricole du Grand- Jouan (Loire-Inférieure). Hienarp, médecin titulaire de l’Hôtel-Dieu , à Nantes: HiroN, juge au tribunal de première inistancé , à Angers, HiRow, chef de division à la préfecture, à Angers. Hossarp (Jules), direct. dé l'établissemént orthopédique, à Angers, Houper, neveu, négociant à Nantes. HuErTE, opticien à Nantes. Human (Antoine), président de là Sotiété d'horticulture de Mayence (Hesse-Darmstadt). HuNAULT DE LA PELTERIE, doctéur-fnédecin à Angers. HUVÉ (Félix), gaïde-minés de la Sarthe et de la Mayenne, à Sablé (Sarthe). JALLOT-HaRDOUIN, membre du conseil général de Mainé et Loire, à Potüancé). JAMET (Emile), propriétaire agricult. à Châteaugontier (Mayenne). JANVIER (ADOLPHE), vicé-président du trib. de première instance, à Angers. JANVIER (Elie), conseiller à la cour royäle, à Angers. Janvier (Eugène), conseillér d'état, membre de la chambre des dé- putés, à Paris. 408 LISTE ALPHABÉTIQUE JAUBERT (comte de), membre de la chambre des députés, à Mezières. JENNERT (Jean), professeur de langues vivantes au collège royal , à Angers. JoLLer (Louis), constructeur à Chantenay (Loire-Inférieure). Jozy, architecte, inspecteur correspondant du ministère de l'inté- rieur pour les monuments historiques, à Saumur. Jouix (l'abbé), curé de Jarzé (Maine et Loire). JouLNEaux, membre de la chambre des députés, à Candé. : Jouver, doct.-médecin, professeur à l’école de médecine, à Angers. Juin (Théodore), avocat à Angers. JULLIEN (de Paris), ancien fondateur-directeur de la Revue encyclo- pédique , délégué de la Société phylotechnique , à Paris. Joy8erT (Joseph de), prop. à la Garenne, près Trelazé (M. et L.). KNIGaT (milady Anne), membre de la Société de l'émancipation d'Angleterre, à Chelmsford (Angleterre). LABUSSIÈRE, libraire à Angers. LacnÈèse père, doct.-méd., membre de la Légion-d'H., à Angers. LaonësE (Adolphe), imprimeur-libraire à Angers. Lacnèse (Eliacin), procureur du roi à Baugé (Maine et Loire). LacèsE (Ferdinand), architecte à Angers. La Cnouquais, président de chambre à la cour royale de Caen. LACOTTIÈRE, percepleur à Mazé (Maine et Loire). Lacour (Charles de), juge d'instruction à Beauvais (Oise). LAcoUR (baron Émile de), membre de plusieurs sociétés scieutili- ques , à Loches (Indre et Loire). Lacour (le chevalier Delphis de), idem. LACURIE (l'abbé), secrétaire de la Société académique de Saintes (Charente-Inférieure). LAINÉ-LAROCHE, filateur à Angers. Larr, secrétaire de la Société d'agriculture de Caen. LaLoy, professeur de langues au Mans. LAMARTELLIÈRE , propriétaire à Angers. LamBEgt (l'abbé), professeur au collège de Cholet (Maine et Loire). LamBerr (Ed.), directeur de la Société des antiquaires de Norman- die, à Caen. LAMBRON DE LiGnim (H.), cap. de caval., à Tours (Indre-et-Loire). LaAMOUREUx, aumônier de l’école des arts, à Angers. LANGE, bijoutier à Saumur (Maine el Loire}. LANGLois, propriétaire à Angers. LANGLOIS , conseiller à la cour royale d'Angers, LAREVELLIÈRE (Victorin), ancien député, maire d’Avrillé (M. et L.). LARIVIÈRE (Ferdinand), ancien notaire à Angers. DES MEMBRES DU CONGRÈS. 409 LAROCHE père , docteur en médecine à Angers. Larocue-TazBor, profess. adjoint à l'école de médecine d'Angers. LarocHE (Victor), docteur-médecin à Angers. LAROULÈRE (V. de), propriétaire à Niort. Las CAsEs (comte de), membre de la chambre des députés, à Paris. LASTEYRIE (Jules de), député de la Sarthe, à Paris. La Tour, chef de bataillon du génie , à Angers. * LAUMONIER (Frédéric), ancien élève de l'école polytechn.., à Angers. LAuNAy-GAGNoT, imprimeur-libraire à Angers. Launay (Jean-Baptiste), architecte à Angers. Laurz, avocat à la cour supérieure de Cologne. LEBE-GIGUN, receveur principal des contributions, à Angers. LEBOSSÉ , professeur à Angers. LEBRETON ,; pharmacien à Angers. LEBRUMAN , sous-inspecteur des écoles primaires de Maine et Loire, à Angers. LeBrun (Isidore), membre de plusieurs académies, à Paris. Lecerr, professeur honoraire en droit, à Caen. LEcHaLAs (Mederic), notaire honoraire à Angers. Lecxaras-Dugreic (Pierre), propriétaire à Angers. LEcuaT (l'abbé), dr ès-lettres, professeur au collège royal de Nantes. LECLERC-GuILLORY, négociant manufacturier à Angers. LECLERC-LAROCHE, idem. Leccerc-THouin (Oscar), professeur au Conservatoire royal d'arts et métiers, à Chalonnes (Maine et Loire). LerRANcoIs , docteur-médecin à Angers. LEFEUBRE (Alexandre), avocat à Angers. Lerèvre (Adolphe), propriétaire à Châteaupanne (Maine et Loire). LEGALL, conseiller à la cour royale de Rennes. LEGANGNEUX , propriétaire à Angers. LEGÉ , négociant à Angers. LEGEARD DE LA Dyryais (l'abbé), aumôn. du collège royal d'Angers. LEGEAY, membre du comité supérieur d'instruction de l’arrondisse- ment de Beaupreau, à Jallais (Maine et Loire). LEGEAY, avocat à Nantes. p LEGONIDEC DE TRESSAN (comte), à la Baratière (Ille-et-Vilaine). LEGris (Ludovic), à Angers. LEMARCHANT, docteur en médecine à Angers. LEMÉE-EMERY, propriétaire à Angers. LEMÉE (Eugène), étudiant en médecine à Angers. LEMERGIER , médecin en chef des hôpitaux de la ville de Mayenne. LEMERCIER-LAMONNERAYE , propriétaire à Angers. 410 LISTE ALPHABÉTIQUE LEMIERRE, ingénieur en chef des ponts-et-chaussées , à Nantes. LEMOIGNE (Charles-Frahçois), propriétaire à Alonnes (M: ét L.). LEMOTHEUX (Prosper), propriétaire à Angers, LEPAGE (Adrien-Eugène), avocat à Angers. LÉPAGE , huissier, rue Baudrière, à Angers. Leray, docteur-médécin, bibliothécaire de la Société royale atadé- mique , à Nantes. LEREBOULLET, à Strasbourg (Bas-Rhin), LEROY (Louis), horticulteur à Angers. LEROY (André), pépiniériste, correspondant de la Société d’agrieul< ture, à Angers. . Leroy (Jules), horticulteur à Angers: LEROY-BEAULIEU , sous-préfet à Saumur (Maine ét Loire). LEROI , professeur au collège de Châteaugontier (Mayenne). LESAULNIER, profess. de mathématiques à l’école normale, à Angers: LESAUVAGE, médecin en chef de l’hospice de Caen. Le Sourp (Ernest), propriétaire à Paris. LesourD-DELISLE (A.), propriétaire à Angers: LETOURNEAU, notaire à Angers: LETOURNEAU-AUBRY, étitrepreneur à Angers. L&u (0. de la), propriétaire à Angers. LiBAUDIÈRE (Adolphe), docteur-médecin à Nantes, LIÉGEARD, Capitaine d'artillerie à Angers. LiHensTOLPE (de), de Suède , à Paris. LorricraL, membre de la Légion-d'Honneur, à la Grange (M: et L,). LoGerais, docteur-médecin à Angefs. LoGErais (Victor), docteur-médecin à Angers. LonGréhier (Henri de), prémier employé au département des mé: dailles de la bibliothèque royale, à Paris. Lorrer, docteur-médecin à Lyon. Louver (Charles), banquier à Saumur (Maine ét Loire). LOWENHIELM (comte de), ambassadeur de Suède, à Paris. MAILLE Du CHÈNE (Georges-Louis), à Baugé (Mäine et Loire). Mapenis, professeur de botanique au petit séminaire , à Lyon. MAGDELAINE , ingénieur en chef de la Mayenne , à Laval. MaumiEr, pharmacien à Chäteaugontier (Mayenne). MaAIGE , imprimeur à Angers. MAïLLARD (Adrien), avoué à Angers. MaLINAS , avocat à Angers. MaLLARD, membre de la Société royale académique, à Nantes. Mam£, docteür-médeciti à Saveuñièrés (Maine et Loire). Mamerr, conseiller de préfecture à Augers. DES MEMBRES DU CONGRÈS. Ait MANcEAU, précépteur à Angers. MARANDAIS (Hippolyte), propriétaire à Laval (Mayenne). Mañc, propriétäire à Sablé (Sarthe). MarcHaAIs , avoué près le tribunal de première instance, à Angers: MARCHEGAY, archiviste du département de Maine et Loire, à Añgerss Marcomge (de), membre du conseil général de Maine et Loire, à Angers, MARGUERIE (monseigneur de), évêque de Saint-Flour: MARTIN-DESMAZIÈRES , propriétaire à Angers: MASSONNEAU, expert à Angers. Maraias-Mayor, docteur en médecine à Lausanne (Suisse): MAUCHIEN (Victor), propriétaire à Angers. Maur, percepteur aux Ponts-de-Cé (Maine et Loire). Maupoinr (l'abbé), curé de la Trinité, à Augers. MAurointr, docteur-médecin à Angers. MAZURIÉ (Théodore), avocat à Châteaugontier (Mayenne): MEAUZÉ , négociant à Añgers. MENARD-BOURNICHON , propriétaire au Mans (Sarthe). MENIÈRE (A.), merbre de la Société industrielle, à Angers: MENIÈRE (Prosper), docteur-médecin à l'Institut royal des sourds et muets, à Paris. Meresse (Just), notaire à Guérande (Loire-Inférieuré). MErir (Alfred du), président de la Société des antiquaires de Nor- mandie, à Marcelet (Calvados). Merrau (Pitre); propriétaire à Angers. Meszer (Michel), vice-président du Mont-de-Piété, à Angers. MEsner (Victor), propriétaire à Angers: MEsuiER (Elie), docteur-médecin à St-Georges-sur-Loire. MESTAYER, notaire à Angers: : Mérivier (Jules), substitut du procureur général, à Angers. MEUNIER (Victor), rédacteur de la Revue synthétique, à Paris. MIcHeuIN , avocat à Angers. Mieer, Secrétaire perpétuel de la Société d'agriculture , à Angers, Micer-SantT-Pierre , courtier d’assurance au Hâvre (Séine-Inf.). Mrrauzr, professeur à l’école de médecine, à Angers. Mo, architecte, à Paris. Moxgrux (le comté de), sous-intendant militaire, à Angers. MonTRIEUx-BAZILLE, membre du conseil municipal, à Angers. Moreau, sous-préfet à Baugé (Maine et Loire). MorEav, notaire honoraire à Bedumont (Maine et Loire). MOREAU, correspondant du ministère sa les inonuments histori- ques; à Saintes. 412 LISTE ALPHABÉTIQUE MorEAU, docteur-médecin à Ingrandes (Maine et Loire), Moreau (Eugène), banquier à Doué (Maine et Loire). Morren, doyen de la faculté des sciences, à Rennes (Ille-et-Vilaine). Mounier , ingénieur en chef du Calvados, à Caen. Nau (Th.), architecte des hospices civils, à Nantes. NEGRIER , docteur-médecin à Angers. NERBONNE (Henri de), membre de la Société d'agriculture, à Angers. NEvEU-DEROTRIE (Eugène), inspecteur d'agriculture à Nantes. Opera, docteur-médecin à Luxeuil (Haute-Saône), ORIOLLE-GABEAU, manufacturier à Angers. Ouninor (le général marquis), député, à Paris. Ousrarer, docteur-médecin à Montbeliard (Doubs). OuvraR», professeur à l’école de médecine d'Angers. PAGHAUT, notaire à Angers. PaLots, docteur-médecin, vice-président de la Société industrielle, à Nantes. PALLU, prés. de la Société d'agriculture, sciences et arts du Mans. PARAGE- Farran, docteur en droit à Angers. Parc (comte Maurice du), chambellan de Sa Majesté aan d'Autriche, à Gratz. PASQUIER (l'abbé), curé de Notre-Dame, à Angers. Pau (l'abbé), à Beaufort (Maine et Loire). PaviE (Victor), imprimeur à Angers. PEAUGER, rédacteur en chef du Précurseur de l'Ouest, à Angers. PEccor, conservateur de la bibliothèque, à Nantes. PELOU, notaire à Angers. PELTIER fils, pharmacien à Doué (Maine et Loire). PEerrussEL, docteur-médecin à Nantes. PEroN, membre du conseil d'arrond., maire de Tigné (M. et L.). PEYRET-LALLIER , président de la Société agricole et industrielle de Saint-Etienne (Loire). PRELIPPE-BEAULIEU , avocat à Nantes. PiccoLo, membre de l’Académie des sciences médicales, à Palerme. Picasrre-Bosc, membre du conseil général, à Angers. Pixpray (de), propriétaire à Poitiers (Vienne). PIQUELIN , avocat à Angers. PLANCHENAULT, président du tribunal civil, à Angers. Porrou (Eugène), substitut à Angers. PoncEau (Théodore), docteur-médecin à Angers. Porte (de la), membre du conseil d'administration de la Société française, à Vendôme. Poresras, bibliothécaire de la marine, à Rochefort (Charente-Inf,). DES MEMBRES DU CONGRÈS. 413 PRADALE (Emile), chirurgien-dentiste à Nantes. PREAULX (marquis de), membre du conseil général, maire de Poua- .cé Maine et Loire). : Prreur-DuPERRAY père, avocat à Angers. Prrou fils, à Gresillé (Maine et Loire). Pristrow, géomètre en chef du cadastre , à Angers. Prôsr, directeur des postes, à Mende (Lozère). PROU, avocat à Angers. Puvis, président de la Société d'agriculture de l'Ain, à Bourg. Puvis (Charles), memb, de la Société d’agricult. de J’Ain, à Bourg, QuaTREBARBES (cte de), membre de la Société d’agricult., à Angers. RABEAU, membre du conseil d'arrondissement de Baugé (M. et L.). RABUSSEAU, recteur de l’Académie, à Limoges. RAGUENEAU, docteur-médecin à Montfaucon (Maine et Loire). RarmBAuLT, médecin vétérinaire à Thouarcé (Maine et Loire). RANTÉ , juge de paix à Sceaux (Seine). Raymonp (Joseph), de Turin, à Paris. RÉcy (de), président central de la Société des antiquaires de Nor- mandie, à Caen. REGNIER, conseiller à la cour royale d'Angers. RENOU, médecin à Angers. RENOU, chirurgien en ‘ehef de l’école de la Flèche (Sarthe). Ricarp, lithographe à Angers. , RicxarD, docteur-médecin à Nantes. RicHArp-DUvERNAY, maire de Drain, à Angers. RichARD, propriétaire à la Possonnière (Maine et Loire). RIcHELET, secrétaire général de l’Institut des provinces, au Mans. RicHou (Pierre), négociant à Angers. RicHou (Désiré), négociant, membre de la chambre consultative des arts et manufactures, à Angers. Ricxou (Henri), négociant à Angers. RiparD, docteur-médecin, maire de Corné (Maine et Loire). Rinozri (marquis Cosme), professeur à l’Institut agricole, attaché à l'université , à Pise (Toscane). RIEFFEL (Jules), directeur de l’Institut agricole de Grand-Jouan (Loire-Inférieure). RiFFAULT, directeur du Panthéon de la Pensée, à Paris. RIOTTEAU fils , négociant à Angers. Rivaurr, membre de la Société francaise pour la conservation des monuments, au Mans. ROBINEAU, membre du conseil général , à Angers. Roger, membre de l'Académie royale de médecine, à Paris. 414 LISTE ALPHABÉTIQUE RoDtER (l'abbé), curé de Blaison (Maine et Loire). ROLLAND, ingénieur des mines, à la Haie-Longue (M. et L.). RouJou, propriétaire à Angers. Rousseau, membre de la Société industrielle , à Saint-Georges-des- Sept-Voies (Maine et Loire). ROUSSELIN , premier président de cour royale, à Caen. Roux (P. M.), docteur-médecin, secrétaire perpétuel de la Société statistique, à Marseille (Bouches-du-Rhône). Royer, notaire honoraire à Angers. RuILLÉ (comte Rodolphe de), à Angers. SALLION, doct.-méd., membre de la Société académique , à Nantes. SaLMoN, pens. de l’école royale des Chartes, à Tours (Indre-et-L.). SALMON , membre de la Société francaise pour la conservation des monuments , à Sablé (Sarthe). SargourG (Victor de), officier du génie en retraite, à Angers. SAUSSAYE (de la), corresp. de l’Institut, à Blois (Loir-et-Cher). ScamuTz, docteur, banquier, à Fribourg (Suisse). ScHoELcHER (Victor), à Paris. ScHUELER, Conseiller des mines et professeur de minéralogie, à l'université d'Iéna (Saxe). SEBILLE-AUGER, président du comice agricole de Saumur. SEGrIs (Emile), avocat à Angers. SELLE (Amédée de la), propriétaire à Echmilly (Maine et Loire). SENONNES (marquis de), membre de la Société d'agriculture d’An- gers, à Sautré (Maine et Loire). SENONNES (le vicomte de), propriétaire à Sautré (M. et L.). SEVRET (le colonel de), membre de la chambre des dépatés et du conseil général de Maine et Loire, à Angers. SEVRET (de) fils, avocat à Angers. SicoTièrE (de la), avocat à Alençon (Orne). Simon, rédacteur en chef du Breton, à Nantes. Simon, secrétaire général du 52 Congrès, à Metz (Moselle). Simonin père, directeur de l’école secondaire de médecine, à Nancy. SOCIÉTÉ (la) médicale de Tours, représentée par M. Anglada, doc- teur-médecin, son secrétaire général, à Tours. — centrale d'agriculture de Rouen (Seine-Inférieure), repré- sentée par son secrétaire, M. Dubreuil, à Rouen. — libre d'émulation de Rouen, représentée par son secrétaire, M. Léon Vivet, à Rouen. — d'agriculture, sciences et arts du Mans, représentée par M. Pallu, son président , et M. Etoc-Demazy, lun de ses membres. DES MEMBRES DU CONGRÈS. 415 SOctÉTÉ (la) centrale d'agriculture, sciences et arts du départ. du Nord, représentée par son secrét., M. Brassart, à Douai. — centrale dhorticulture de Rouen, représentée par M; Tou- gard, son président , à Rouen. — de médecine de la Sarthe, représentée par MM. Vallée, son vice-président, et Suard, son secrétaire, au Mans. — d'agriculture de l'Ain, représentée par M. des Colombiers, son président, à Bourg. — d'histoire naturelle de Mayence. — des sciences et des arts de Mayence. — royale d'agriculture, sciences et arts d'Angers. — d'agriculture d’'Indre-et-Loire, représentée par M. Chau- veau, son secrétaire perpétuel, à Tours. — industrielle d'Angers et du département de Maine et Loire. — de médecine de Nîmes, représentée par M. Mutru, secré- taire général, à Nîmes (Gard). — de médecine de Châteaugontier (Mayenne). SoLAnD (Aimé de), avocat à Angers. Sorin (J.), proviseur du collège royal d'Angers. Sorin (Eugènc), propriétaire à Angers. Soin (Charles), idem. Soucay, notaire à Angers. Souer »’ErMIGny, ancien contrôleur de la monnaie, à Nantes. SouLLié (Prosper), professeur au collège royal d'Angers. SouLtrair (Georges de), à Paris. SPENCER-SMITH, membre de l’université d'Oxford, à Caen. SuprE , inventeur de la Téléphonie musicale, à Paris. Taïzzrar, conseiller à la-cour royale de Douai (Nord). Tazsor (Eugène), substitut du procureur du roi, à Angers. Tazzor (Théodore), avocat à Angers. TaztB0ON, licencié en droit, à Loches (Indre-et-Loire). TALLON , avoué à Angers. Tancnou, docteur-médecin à Paris. TERRIEN, ancien manufacturier à Angers. TESsIÉ DE LA Morte, député de Maine et Loire, aux Rosiers. TESSIÉ DE LA MorTE (G.), propriétäire à Angers. TexToris (Marius-César), capitaine d'infanterie à Angers. Tuerauzr (Ambroise), professeur au collège de Saumur (M. et L.). Taigau», directeur d'une fabrique de vitraux peints, à Clermont (Puy-de-Dôme). TaiBsEauD, docteur-médecin à Nantes. THiérx, membre de la Société industrielle, à Saint-Georges-sur- * Loire (Maine et Loire). 416 LISTE ALPHABÉTIQUE, ETC. Taomas (Joseph), propriétaire à Angers. TuomNE-DESMAZURES, avocat à Caen. Tuorez (Louis-Charles), expert à Angers. Tuuau, docteur-médecin à Baugé (Maine et Loire). TEerLEKi (le comte), de Lithuanie, à à Paris. TOLLEMARE (de) fils, littéraleur à Nantes. TosrTaIN, ingénieur en chef des travaux maritimes, à Caen. Tricor, bibliothécaire de la ville, à Mantes (Seine-et-Oise). TRISTAN-MARTIN , propriétaire à Saint-Pierre-Montlimard. TrouEssarT, professeur de physique au collège royal d'Angers. TscaaRNer (Adorne de), d'Upsal, docteur et professeur de méde- decine, à Paris. VARANNES , propriétaire à Angers. Varin (l'abbé), membre de l'association normande, à Caen. Vernier, officier de l’Académie , professeur de mathématiques au collège du Mans. VERDIER, architecte à Tours. VERGER (F.-J.), ancien négociant à Nantes. VIiBERT, propriétaire à Angers. VIBRAYE (le vicomte Paul de), membre de la Société géologique de France, à Blois. Viezganc (Alcibiade de), membre du conseil général des Deux-Sè- vres, à Thouars. VIEN ( Isidore), homme de lettres à Valence (Drôme). Vizzarsy, membre de la Société royale académique, à Nantes. VizLeBois (le comte de), à Angers. Vizers (de), membre de l'assoc. normande, à Bayeux (Calvados). Visess (Franccis de), architecte à Angers. Vior-PruDRG 2€, membre du conseil d'arrondissement, à Tours. Virmonp (Charles Loudolphe de), propriétaire à Jarzé (M. et L.). Voisin, receveur général de Maine et Loire , à Angers. Voisin, propriétaire à Angers. VOLLAIGE, proprictaire à Angers. WALDEcKk-ROUSSEAU, avocat, membre de la Société industrielle , à Nantes. WoLski, ingénieur civil à Angers. FIN DU SECOND VOLUME, TABLE DES MATIÈRES DU SECOND VOLUME. PREMIÈRE ET SIXIÈME SECTIONS RÉUNIES. Pages Mémoire sur le gisement du bassin anthraxifère, dans le dépar- tement de Maine et Loire, et sur les relations géologiques avec divers terrains qui l’avoisinent et qui le couvrent, par M. A.-N. Wolski, ingénieur civil. . . . . . . . . 1 Note sur les tiges fasciées, par M. A. Boreau, directeur du jar- din botanique de la ville d'Angers. . . . . . . . . 44 Description et figure du genre mycenastrum , par M. Dee boite Nantess: PALERME ORAN PNR TUE Catalogue de la collection d’œufs appartenant à f, :aoul Des- triché de Baracé, naturaliste à Angers. . . ë 2 Météorologie, par M. L. Raimbault, de THouasee (M. et L. ): : 59 Observation sur l'analyse chimique de la pomme de terre, par M. Édouard Guéranger, pharmacien au Mans. . . . . 75 Recherches sur lémposoitement par l’arséniure trihydrique, par M. P.-B. Durand, pharmacien en Fes hôpitaux de Damon tr de NIUE Éd udEbne 77 DEUXIÈME SECTION. Note relative à la confection de cartes agronomiques, EE M. A. de Caumont. . Susan bé . . 82 Mémoire en réponse aux questions traitées, par M. Ch. “nf dolphe de Virmond, vice-président du comice agricole de Seiches ( Maine et Loire) . a TR q2 fr: 27 . 418 TABLE DES MATIÈRES. Examen critique des différents baux à ferme et à colonie par- tiaire, par M. E, Jamet, propriétaire-agriculteur à Château- ar SM ee OR RS RE 7 re Mémoire de M. Desvaux, botaniste à Nantes, en réponse à la cinquième question du programme , , , . , Mémoire de M, le ct’ Edmond de Saint-Marsault, membre de la Société royale d'agriculture de la Rochelle, en réponse à la cinquième question du PFOSTARUIe | EE TRES Ropport de M. Oscar Leclerc-Thouin , professeur d’agriculturé au Conservatoire royal d'arts et métiers de Paris, sur deux Mémoires répondant à la cinquième question du programme Réponse de M, Oscar Leclerc-Thouin, à la sixième question dagricultoné ICS. GIE. Hi SARA ML | Note de M. Boutton-Levêque, vice-président de la Société in- dustrielle d'Angers, en réponse à la septième question du programme de la section d'agriculture , , . . CPR Note relative à l'influence des bois servant à la fabrication des barriques sur la qualité des vins; moyens d’en neutraliser l'effet et de se servir des bois blancs, par M. Mayer, phar- macien à Châteaugontier (Mayenne), “is Due Du parcours des tunnels ou souterrains de chemins de fer, par M. le cte Maurice du Parc, chambellan de Sa Majesté l’em- PERS dAaeest if de bed mthrue At tour onHoHad os TROISIÈME SECTION, Mémoire de M, le docteur Ridard , de Corné (M. et L.), sur la sixième question du programme . . , . ° fige Rapport sur l’ouvrage de M. le dr Bertini, intitulé : Tdrologia minerale degli stati Sardi, par M. le dr Balocchi, de Flo- rence (Coca) ie -425r hu ANS SUR ue ob Rapport sur un projet de Société centrale d’édilité, par M, le dr G. Lachèse, d'Angers. . , . . . . . Mémoire relatif à la 292 question de médecine, par B. Bertini, de Turin (Sardaigne). . . , Rapport sur un Mémoire relatif à l'anatomie plastique, par M. le dr Balocchi, de Palerme (Riel) SU EOUESE Recherches sur l'emploi d’un nouveau procédé de suture con- tre les divisions de l'intestin, par M. le dr J.-A. Gély, de SAR, PR is he Ut | TRE QUATRIEME SECTION. Aperçu historique sur le droit municipal en Touraine , par M. H. Lambron de Lignim, de Tours, M. le dr 109 121 134 137 140 142 148 153 169 174 176 187 188 238 TABLE DES MATIÈRES. Mémoire relatif à la Saint-Barthélemy, par M. de Falloux. Considératians sur les causes de la Bee 4 par M. Trouessart . . . Mie te fentie Le maréchal de Gié, . M. Vator a Ps Lice dei detre Du tombeau de François II, duc de Bretagne, et de son au- teur, par M. Bizeul » V4 0 BPM MU L'église et l'abbaye de Toussaint, Lu l'abbé Choyér. shtettse Notice d’une inscription relative à Zizim, frère de Bajazet II, par M. le docteur Bromet . . . . . . . . . . . Notice sur un monument supposé druidique , par M. Henri de ne ner "nn ENS ee UE 7e CINQUIEME SECTION. Mémoire sur les 1e et 2€ questions du programme , par M. Armand de Fleury, de Ruffec (Charente) . . ,. . . . * Rapport sur le Mémoire de M. Ménard-Bournichon , relatif à la huitième question de Linguistique, par M. de la Sicotière, LATE DENT PAREE TANANONLEEET ee ANI RO ER Note en réponse à la sixième question, par M. H. de Nerbonne Rapport sur l’Essai de notation musicale de M. J. Raymond, par M: Chénuañsainé. 4e 4e 2e doi te ea, e ie da ce Le Compte-rendu des expositions de peinture et sculpture ancien- nes et modernes, par M. H. de Nerbonne . . . . . . Liste alphabétique des personnes qui ont adhéré à la onzième session du Congrès scientifique de France . . . . FIN DE LA TABLE. 419 Pages 260 275 323 350 352 364 367 370 378 380 386 392 399 ‘4 La : fa cs es cris an (RD DEEE) #f ; wi PR 5 , An Cie ee Lis (ou RER KA F2 ANT 35 3 1 Da à oi L ous, AL giopgprit AE net be Ga Ar à | Bises # pu ES ui Fig ASP 98 H LMP ni essai. ab Fa Hi à ñ “asbgts ci teqif ITR re : > rh Lo Ai Et: PR a Sao “reg esdphos 1 Jqna,) Drome té 2. TS 2 Au aogaih a * . vire ‘ : ve AT “lart OMR PE pr ef AP: ) s# 1 vdi N 4 be AL mes carry es CROTEURE. ia md, dmirst re ne Li À ces no PAL 2 nu: 4 } isa en mor ae ROUTE PES OV Lara dE 4 grip a igiénentf sui sf, ol Eu hassan: ? 0 oeuf liebe ofoitiuott-frienalée (Mob srl of MoN FPE : réitonié ai a: ee Aro tale nt nb j» 2 84e : V4 sh Vi alt a +1; EM NS ta Pause ; +, 846) préde À 1d “ht. sat leo rrrôtrie ai à pps: LE Mag Le RO L° ro shops LL 1 ab Alogisist mobtetüen ab. ineniÉf aRe LARMES 0 el A duerie dssen) MAT à gala à te pe ba à © J ‘à *VEORES gs Pr lo arf; 54 9b anoijleogzs ele ee | | RS jan “i mer à LE. EURE TRES SET Rae ON RP: EE. À SERRE %, PER ; à ae RE Ve BU TYT PACA PSS FR fee. En rain “a, " |” “ De | j OT 2. à k FE ; À ? 4 re FR LATE PET LÉ à \ . wir VON ne x (” SES À ME en \ RÉ PTT LR | RAOETE n HER - jh im PEUR, ve NE rene. \ ? #1) CNRS; s À « à 4 | 1 ? - ve t !? s, s pi! AA tds PE Hess. Le +. ki , 2128 IA : 1, 22 27" » e A ML FA AA © et Sos , S RE PCM RE ET nf Lens à pool | * Ie AR DT NÉE POP": L p: LUS Ait an ‘are Mae À î cn , « LE” | an je [re NET Mie vale es DL 2 L ï % î ' ? 3 ui È HAMMNRENNE He isa i