ANTANNAN Division of Mollusks Sectional Library 4) N —X AA WA ‘ Ÿ M RER [2 = Divisior cf Molluske Sectionol Library & cÆ-25 > Nr RL APE FU px * pe RAT HN . ot a! / ER 2 NE à à. LAN COTE ol VE AU STAR AE j , È DE PAL UN d Lu" CONTRIBUTIONS = x 3 Tes “Vision of Molluske Léa iona) “ibrery Extrait du tome XLIX des Mémoires couronnés el Mémoires des savants étrangers, publiés par l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique, — 1887. T4 CONTRIBUTIONS L'HISTOIRE PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT (HELIX POMATIA) p) Euue YUNG, PROFESSEUR SUPPLÉANT A L'UNIVERSITÉ DE GENEVE, # La marche de l'expérience est si lente, qu’un physicien qui voudrait attendre pour publier le résultat de ses travaux qu’il en fût entie- rement satisfait, risquerait d'arriver au bout de sa carrière sans avoir rempli la tâche qu’il s'était imposée et sans avoir rien fait pour la science et pour la société; il faut donc avoir le courage de donner des choses imparfaites, de renoncer au mérite d’avoir fait tout ce qu’on pouvait faire, d’avoir dit tout ce qu’on pouvait dire; cnfin savoir sacrifier son amour-propre au désir d’étre utile et d'accélérer le progrès des sciences. » LAVOISIER. Mémoire sur. la destruction du diamant, 1772.) (Mémoire couronné par la Classe des sciences de l'Académie royale de Belgique en 1886) BRUXELLES F. HAYEZ, IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE rue de Louvain, 108 1887 SONIAN DST Bo «\ Us LE FEB 4 1947 Trona nus mellusks Slatkine 239847 M/8590 is YæS 5 ANT |: sas. A MON CHER MAITRE M. Carl VOGT Je dédie ce travail en témoignage d'affection et de reconnaissance. AVANT-PROPOS. L'auteur du travail qu'on va lire avait espéré pouvoir un jour tracer l’histoire détaillée des fonctions de nutrition, de reproduction et de la vie animale de l’Escargot des vignes (Æ. pomatia). I aurait voulu aussi déter- miner avec quelque précision le rôle relativement considérable que ce modeste animal joue dans la nature. Ce projet, caressé depuis plusieurs années déjà, n’a pu être réalisé qu’en petite partie; les préoccupations variées et toujours renouvelées que crée l’enseignement des sciences ne sont malheureu- sement pas toujours compatibles avec les soins exigés par des recherches minutieuses. Les pages qui suivent rendent compte de ce commencement d'exécution d’un travail de longue haleine. Nullement découragé par la disproportion entre ce qu'il a fait et ce qui reste à faire, l’auteur espère pouvoir prochainement compléter son travail par létude de labsorption, de l'assimilation et de la sensibilité spéciale, puis plus tard par celle des fonctions reproductrices. 4 AVANT-PROPOS. Aujourd'hui, il prend la liberté de soumettre au haut jugement de l'Aca- démie, les résultats qu'il a obtenus sur quelques points de la biologie générale de l’Escargot, la digestion, la fonetion glycogénique, l'innervation du cœur et l’action des poisons chez cet animal. Parmi les nombreux travaux dont les animaux invertébrés ont été l’objet dans ces dernières années, ceux qui concernent la physiologie des Gastéro- podes et plus particulièrement des Pulmonés seront seuls cités dans ce Mémoire. L'auteur s’est abstenu — sauf de rares exceptions — les compa- raisons avec les remarquables résultats obtenus par M. F. Plateau sur les Arthropodes, Paul Bert sur la Sepia, L. Frédérieq sur le Poulpe et d’autres invertébrés, de Krukenberg également sur un grand nombre d’invertébrés divers, ele. Il a tenu à conserver à cette étude son caractère mono- graphique. D'ailleurs, l'Escargot lui a presque seul fourni son matériel de travail. Le choix de l'animal pourra paraitre peu convenable pour des recherches de longue durée. On sait, en effet, que l'Escargot divise son existence annuelle en deux périodes, l’une estivale active, l'autre hivernale passive. Sous nos latitudes, la première s'étend généralement du mois de mars ou d'avril au mois d'octobre, la seconde du mois de novembre au mois de mars. La seconde période est caractérisée par un état de sommeil, durant lequel les fonctions organiques sont ralenties à un point dont nous aurons à maintes reprises l’occasion de donner la mesure. Ces fonctions ne reprennent que lentement au printemps leur activité normale et s’affaiblissent en automne, plusieurs semaines déjà avant la venue du sommeil proprement dit. Dans ces condi- tions, il peut se faire que les résultats quantitatifs des expériences varient beaucoup d'une époque à lautre, et pour plusieurs d'entre eux il serait AVANT-PROPOS. b) désirable d'obtenir des chiffres moyens sur l’ensemble de la période d'activité de l'animal. Autant que nous avons pu le constater, celui-ci varie peu durant le sommeil d'hiver, perdant peu de son poids et ne ‘consommant qu'une très petite fraction de sa substance, Son instinet le pousse à prendre toutes les précautions nécessaires contre la dessication et les trop brusques changements de température. Nous avons choisi l’'Escargot parce qu'il nous a paru aux débuts de nos recherches (1879) un des types les moins connus au point de vue physiologique, tout en étant parmi les invertébrés un de ceux qui, par sa grande dissémination géographique et la division relativement avancée de son travail fonctionnel, sont le plus faciles à se procurer et le plus dignes d'attention. Une autre considération nous a encore dirigé dans notre choix, dont nous demandons la permission de dire quelques mots. Nous envisageons la psychologie avec la majorité des savants contemporains comme une branche — élevée et complexe — de la physiologie comparée. La recherche du degré de connaissance du monde extérieur qu'ont les animaux inférieurs est d’un très vif attrait. Si nous admettons que sensa- tion, mémoire, association d'idées, attention, volonté, etc., sont fonctions de la substance nerveuse ganglionnaire, il va de soi que le physiologiste a mission de les étudier au méme titre que l’excitabilité musculaire, par exemple. Or, les observations de ces dernières années ! font remonter jusqu'aux mollusques gastéropodes les premiers signes d’association d'idées par la mémoire, et l’'Escargot nous à paru propre à nous fournir de nouveaux documents dans ce domaine. ! Voir Romaxës, L'évolution mentale chez les animaux, traduite par H. de Varignv, Paris, 188%, p. 113. 6 AVANT-PROPOS. Nous ajouterons enfin que, quoique lAHelix ait servi à la plupart de nos expériences, nous en avons répété un grand nombre et spécialement pratiqué quelques-unes sur la Limace rousse (Arion rufus ), dont le mode de vivre et les caractères anatomiques ont de l’analogie avec ceux de lEscargot. Sa symétrie bilatérale moins altérée, facilite certaines opérations. Les ouvrages cités ont été entre nos mains; nous signalerons ceux que nous n'avons pas pu nous procurer. Nous devons à la complaisance de nos confrères, Léon Frederieq à Liège, Krukenberg à Jena, Richard à Clermont-Ferrand, Bonardi et Calloni à Pavie, ainsi qu'à M. Collomb à Aigle (canton de Vaud), la communication de quelques documents inédits dont nous les remercions ici. CONTRIBUTIONS L'HISTOIRE PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT (HELIX POMATIA). I. BIOLOGIE GÉNÉRALE. L'Hélice vigneronne vit dans les vignes, les jardins et les bois, sur les terrains calcaires et argilo-calcaires, accidentellement sur les terrains siliceux. C’est un animal végétarien qui s'attaque à toutes les parties aériennes et succulentes des plantes. Dans nos pays il cause au printemps de grands dommages dans les vignes, consommant les jeunes pousses de telle façon qu’elles pendent et se dessèchent; en automne il mange les grappes et les feuilles, choisissant les plus belles. Nous l'avons recueilli en nombre immense après les pluies dans une contrée de vignobles, mais il se trouve également en dehors des eultures de vigne et nous en avons rencontré dans les Alpes vaudoises jusqu’à une altitude de 1000 mètres. Dans le hameau de Sonzier (580 mètres), voisin du lac Léman et centre de nos observations en 1884 et 1885, il est si abondant que nous en avons ramassé jusqu'à douze cents individus en une journée sur une surface d’un kilomètre carré. Nous l'avons vu manger les salades, les choux, le thym, la menthe, le cerfeuil, le persil, Q0 CONTRIBUTIONS A L’'HISTOIRE les fraises dont la feuille et surtout le fruit font ses délices, les fruits de toutes patures, les champignons dont il ne dédaigne pas les espèces vénéneuses, la fiente des animaux herbivores et même les excréments de l’homme ‘. Dans nos bocaux, nous l'avons nourri de feuilles de choux, de pain et aussi de viande. Ce dernier cas est exceptionnel : les individus affamés, par un long jeûne, ont seuls attaqué de la viande de bœuf, de lapin et de pigeon; encore est-il fréquent que dans ces circonstances beaucoup la refusent obstinément, ce qui les distingue des Limax et Arion qui en tous temps mangent volontiers la chair des animaux et la préfèrent aux végétaux. Nous verrons plus loin que les jeunes individus paraissent plus disposés à un tel changement de régime que les âgés. Les expériences que nous avons tentées en vue de déterminer quelle est la nourriture préférée de l'Escargot n’ont pas fourni de résultats concordants, c’est pourquoi nous les passons sous silence. Nous noterons seulement qu'il parait y avoir chez ces mollusques des différences individuelles du goût, puisque les uns préfèrent les choux aux salades, d’au- tres le pain. Les fraises récoltent cependant tous les suffrages ; il suffit d'en placer dans un bocal pour voir les Escargots quitter les autres aliments et se diriger vers elles. Par les chaudes journées de l'été l'Escargot fuit le soleil et se tient caché à l'ombre des haies, dans le creux d’un mur ou les excavations du sol, profitant de la rosée nocturne pour dévorer les cultures. Par les temps de pluie, il sort de sa retraite malgré la lumière du jour à laquelle il n’est pas d’ailleurs très sensible, quoique ses yeux soient relativement hautement organisés ?. DuréE DE L'HVERNAGE. — Les auteurs qui ont écrit sur l’Escargot ne sont pas d'accord sur la durée de la période hivernale, parce qu'ils parlent chacun 1 M. Collomb d’Aigle nous écrit qu'il a eu l’occasion à deux reprises de faire la même observation. 2 Les tentacules oculaires sont au contraire extrêmement sensibles aux changements de température, ils se retirent rapidement à l'approche d’un corps chaud. Lorsqu'on concentre sur l'œil au moyen d'une lentille les rayons solaires, ils ne se contractent qu’au bout d’un instant nécessaire À l’'échauffement, La concentration des rayons lumineux émanés d’une lampe ne fait pas retirer Pœil. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 9 pour une contrée particulière, et que cette durée varie avec l’ensemble des conditions climatériques, la température et l'humidité surtout. Les observations suivantes ont porté sur une période de cinq années; elles ont été faites à Genève (330 mètres) et à Sonzier (580 mètres), soit par moi, soit par M. B.-V., chas- seur d’Escargots très expert, qui en fait un commerce important. À Sonzier, J'ai aussi employé les enfants du village, dont le zèle était entretenu chaque Jour par la promesse d’une récompense pour chacun des individus rapportés. De la sorte des battues en règle étaient instituées par toute la campagne environnante, et j'ai compté comme époque du réveil le jour où plusieurs individus m’étaient rapportés. On remarquera que le mois de février, alors même qu'il est chaud et humide, n'assiste pas à la sortie du sommeil hivernal. M. B.-V. m'aflirme que depuis trente ans qu'il pratique le commerce des Escargots, il ne se souvient pas d'en avoir ramassé «d’éveillés » en février dans nos contrées. On remarquera également que la température moyenne des mois où ils s'éveillent est à peu près la même que celle des mois où ils s’endorment ! : Réveil. ANNÉE. Genève. Souzier. SSP a M POP narS ds ce Nerf avril: SORT TEEN PAT MES 0, 5 A MAGravril SSI Tr tROEmMArS EE de. UTiravril. ASS C1 IG mars.e ee 0: us, (OUavril. OSEO aUNIIE CU ONG) mai. 1 Voici, pour fixer les idées, la température moyenne d’une localité située au bord du lac, tout près de Sonzier, pendant les mois de printemps et d'automne : Température moyenne de Montreux : Th. matin, 4 h. soir. 9 h. soir. MAS NÉ ES ON Ne 28 455 45 ANTIDNEe C Meur 1e de Meg 7:8 1422 10°2 CODE. rte le 875 15:8 %6 NOEL RS ds ce à 3,7 86 5:0 2 Cette année s’est montrée extraordinairement tardive. RO 10 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE Le retard de Sonzier sur Genève provient sans doute de la différence d'altitude. Disparition totale en automne. ANNÉE, Genève. Sonzier. 1882 ME PER RS no eme MERE 7 NoctADres 188300 0 = MSnnoyembDre ee Cr RE 0 OCIODre: ASS SU IOCLObTE NE PT N2 septembre: ASS TO ENAVEMPIE RER 1 octobre. 1886 — — Nous ne pouvons accorder à ces dates qu'une valeur très relative. Il fau- drait multiplier beaucoup les observations. Dans quelques pays du canton de Vaud, les cultivateurs prétendent que la retraite précoce des Escargots est un signe précurseur d'un hiver rigoureux. Il serait intéressant de vérifier la part de vérité que renferme celle assertion. RÉVEIL ACCIDENTEL AU MILIEU DE L'HIVER. — Je ne connais aucun cas où une élévation subite de la température en hiver ait provoqué le réveil général des Escargots dans une contrée, mais on peut susciter celui-ci dans le laboratoire chauffé en plaçant sous une cloche humide les animaux après les avoir débar- rassés de leur épiphragme calcaire et des membranes qui font la clôture de leur coquille. Le procédé le plus rapide consiste à les immerger complètement pendant deux ou trois heures, ils ne tardent pas à sortir au maximum possible de leurs coquilles, dans les efforts qu'ils font pour combattre l’asphyxie. Les individus réveillés de la sorte reprennent bientôt leur état normal, ils acceptent de la nourriture après un jour ou deux, sans témoigner cependant d’un grand appétit. Abandonnés à eux-mêmes, ils se retirent de nouveau et s'endorment, sans reconstruire de couvercle de clôture; mais la mortalité des Escargots qui ont été ainsi, à une ou deux reprises durant l'hiver, dérangés de leur sommeil, est fort considérable, La plupart meurent par dessiceation. D'ailleurs, un marchand d'Escargots qui les collectionne pendant l'hiver à compté qu’en moyenne trois à quatre ?/, de ceux qu'il entasse durant les froids sont morts au printemps. Je ne pais contrôler la valeur de ce chiffre, mais parmi PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 11 cent Helix éveillés par submersion, au mois de janvier 1884, et qui pendant trois jours avaient reçu de la nourriture (pain) et paraissaient en bonne santé, soixante-trois seulement furent retrouvés vivants au mois d'avril. Un réveil accidentel au milieu de l'hiver parait donc être nuisible à la santé de l'Escargot. TEMPS PENDANT LEQUEL L’ESCARGOT PEUT SUPPORTER L'INANITION. — Pendant les quatre à cinq mois de son sommeil hivernal, l'Escargot ne prend aucune nourriture, ses fonctions sont considérablement ralenties; son cœur qui normalement bat 34 à 36 pulsations par minute descend à 1 pulsation ‘/, dans le même temps et quelquefois moins encore. Nous en avons vu donner 1 pul- sation seulement toutes les deux minutes !. Si au printemps on place des Escargots endormis dans un. lieu sec et froid, l’inanition se continue avec le sommeil. J’ai täché, sans y réussir définitivement, de déterminér quelle est la durée maximum pendant laquelle un Escargot continue à vivre sans nourriture. Je ne citerai pour le moment qu’un seul cas, celui d’un Escargot sur lequel nous avions fait quelques observations pendant l'été de 1884, et qui s’est normalement endormi au mois d'octobre de cette même année. Depuis lors, conservé en lieu sec et froid, il ne s’est pas éveillé. Au jour où nous écrivons ces lignes (30 juin 1886) l'épiphragme enlevé et l'animal immergé, il s’est montré parfaitement vivant après plus de vingt mois d’inanition. ACTION D'UN FROID INTENSE SUR L'HELIX. — Nous avons dit que l'Helix se rencontre et hiverne à des allitudes fort élevées dans des régions où la terre est recouverte par la neige plusieurs mois durant. D'autre part, nous avions placé, il y a quelques années, des Escargots enfermés dans leur coquille, dans un vase rempli d’eau, qui fut exposé à la congélation pendant une nuit d'hiver. Le lendemain matin les Escargots étaient pris au centre d’un bloc de glace compacte, et nous ne fûmes pas peu surpris de les voir vivants encore après qu’on les eut lentement réchauffés. On sait, il est vrai, que 1 D’après J. Richard, le cœur cesse complètement de battre en hiver lorsque la tempéra- ture s’abaisse au-dessous de 0. (Revue d'Auvergne, 1886.) 12 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE beaucoup d'animaux invertébrés et même certains vertébrés (poissons, amphibiens) ont la réputation de pouvoir résister à la congélation, en sorte que lÆelix ne constituerait pas une exception à ce point de vue. Mais dans un Mémoire qui date de 1866, F.-A. Pouchet, ayant étudié la question expérimentalement, est arrivé à des conclusions diamétralement opposées à celles auxquelles nous venons de faire allusion !. Ces motifs et d’autres sem- blables nous ont engagé à reprendre cette étude. Dans une série de recherches faites sur l’action d’un froid intense sur les microbes, pour lesquelles nous avons fait usage d’un dispositif dû à M. Raoul Pictet, nous avons eu l’occasion de constater que l'Escargot est infiniment moins sensible au froid que ne l’aflirme Pouchet. Ce savant ayant placé des Limaces rouges (Limax rufus), des Aelix hortensis, Helix aspersa, Helix pomatia, Planorbis corneus, Limneus stagnalis, pour ne citer que des Gastéropodes, dans un sac en caoutchouc ou en taffetas gommé, exposa celui-ci pendant trois heures dans un appareil réfrigérant à une température variant entre — 14 et — 13° C. Dans tous les cas il trouva les animaux congelés et durs sans qu’un réchauffe- ment modéré püt les ramener à la vie ?. Malheureusement cet auteur n'indique pas à quelle époque de l’année il opéra ; il est extrêmement probable quil soumit à l'expérience citée des animaux en pleine activité vitale. J’attribue à celte circonstance le frappant désaccord qui existe entre ses résultats et les 4 K.-A. Poucuer, Recherches expérimentales sur la congélation des animaux. (JOURNAL DE L'ANATOMIE ET DE LA PHYSI0LOGIE DE CH. Romix, t. III, 1866, p. 1.) 2 Dans un travail qui vient de paraître et que nous recevons après la rédaction de ce paragraphe (Recherches physiologiques sur le cœur des Gastéropodes pulmonés. Extrait de la REVUE D'AUVERGNE), J. Richard dit que « les Escargots assez refroidis pour être congelés peuvent résister longtemps, et revenir à la vie lorsque la température se relève graduelle- ment. » Cependant la plupart des observations qu'il cite sont contraires à cette assertion. Ainsi, en janvier 1885 et janvier 1886, 50 escargots furent exposés à des températures assez basses, auxquelles @ seulement résistèrent en 1885 et 2 en 1886. « Il est vrai, ajoute l’auteur, que dans ce dernier cas, sur 50 individus, il y en avait 45 qui avaient déjà été expérimentés en janvier 1885 et qui étaient très affaiblis. » « Or, pendant tout le temps que dure la con- gélation, il ne peut y avoir ni circulation, ni respiration. » M. Richard oublie de nous dire comment il a opéré, et en particulier si les individus mis en expérience avaient été réveillés ou non, si leur épiphragme était demeuré intact. etc., toutes conditions auxquelles, comme on le verra plus loin, il faut attacher de importance. PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 15 miens. Quoi qu'il en soit, voici deux expériences qui prouvent que Les Escar- gois des vignes peuvent supporter pendant leur sommeil hivernal les froids artificiels les plus intenses que nous sachions produire, tandis que les mêmes froids les tuent s'ils ont été réveillés préalablement. EXPÉRIENCE. — Trois individus de Æelix pomatia endormis et dont l’épi- phragme est parfaitement intact, plus trois autres individus semblables dont l’'épiphragme à été enlevé et qui ont été préalablement réveillés par une immersion d'une heure et demie, mais qui sont rentrés dans leur coquille depuis la veille, sont placés, le 28 janvier 1884, en compagnie de deux individus éveillés d’Arion empiricorum, dans un vase de verre hermétique- ment clos. Celui-ci, refroidi d’abord dans de la glace pilée, puis dans un mélange de glace et de sel de cuisine, est soumis ensuite pendant quatre heures à une température d'environ — 100° C. obtenue par l’évaporation à la température du laboratoire (+ 9° C.) de l'acide sulfureux et du protoxyde d'azote liquides. La liquéfaction de ces gaz ayant été arrêtée, on prit des précautions pour éviter un réchauffement trop rapide, un thermomètre témoin ne revint à la température ambiante qu’au bout de trois heures, et cela d’une manière régulièrement progressive. Les animaux sortis du récipient ne donnaient aucun signe de vie, leur musculature ne réagissait pas à une excitation mécanique et un fort courant d’induetion ne produisait aucun effet sur eux. Îls furent tous, après ces quelques essais, plongés dans l’eau (les trois Helix clos furent auparavant débarrassés de leur épiphragme et des membranes qui les suivent). Les Arion et les Helix découverts, dont les uissus étaient flasques, ne tardèrent pas à entrer en décomposition. Au con- traire les Helix qui n'avaient pas été réveillés montrèrent quelques mouve- ments d'extension après trois heures d'immersion; lun d'eux mourut cependant sans être sorti de sa coquille, les deux autres revinrent à la vie et, vingt-quatre heures après la cessation de l'expérience, ils furent trouvés complètement étendus et donnant des signes de sensibilité. L'application d’un faible courant d’induction sur le pied les fit immédiatement rentrer dans leur coquille, ils vidèrent leur poumon de l’eau qu'il renfermait et abandonnèrent une assez forte quantité de mucus. Remis dans un bocal humide, ils attaquérent le lendemain une feuille de choux. Ils paraissaient être en parfaite santé. 14 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE Nous nous en sommes tenus pour ce qui concerne Arion et les Helix éveillés à l'expérience précédente, mais nous avons voulu savoir si les Zelix endormis pourraient supporter un froid plus intense encore et surtout plus prolongé que celui dont il vient d’être question. EXPÉRIENCE. — Trois individus de Aelix pomatia ayant l'épiphragme intact furent enfermés le 7 janvier 1885 dans un vase parfaitement clos, placé lui-même dans une cassette de bois enveloppée de substances mauvaises conductrices de la chaleur. La cassette et son contenu furent d’abord soumis durant vingt heures, à un froid de — 70° C. environ, obtenu par la simple évaporation de lacide sulfureux liquide. Puis on remplaca celui-ci par de la neige d'acide carbonique entretenue el constamment renouvelée autour du vase, sans diminution de pression, pendant quatre-vingt-huit heures, période pendant laquelle le thermomètre se maintint entre — 70 et — 76° C. Enfin pendant une dernière période de vingt heures on fit agir le vide autour de l'acide carbonique solide (0,718 de chute de mercure, la hauteur moyenne du baromètre durant l'expérience étant 0",730), ce qui fit encore tomber la température de — 76 à —130° environ. Cette dernière température n’a pas été mesurée directement, elle a été déterminée au moyen d’une formule donnée par MM. Raoul Pictet et Cellérier dans leur Mémoire sur les tensions maxima des vapeurs saturées, formule qui a été vérifiée pour la vapeur d’eau par M. Broch, directeur du Bureau international des poids et mesures à Auteuil. Après avoir ainsi subi un froid minimum de — 70° pendant. cent huit heures, froid porté à — 130° pendant vingt heures, on cessa de produire l’acide carbonique et on laissa remonter lentement la température. Les Escargots furent sortis de leur récipient six heures après la cessation du vide sur la neige carbonique. Extérieurement lun d’eux montra sa coquille fendue longitudinalement sur le sommet d’une spire. L’opercule était demeuré intact chez les trois individus; l'animal retiré au fond de sa coquille était beaucoup plus contracté que normalement, ses lissus durcis par le froid ne réagissaient plus à la suite d’une irritation mécanique. Cependant l’un d’eux vivait encore et sortit de sa coquille quatre heures après son immersion dans l’eau. Les deux autres, traités de la même manière, demeurèrent sans PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 15 mouvement. On leur découvrit le cœur qui était chez tous deux arrêté en diastole. En résumé, ces expériences ont donné le résultat inattendu que, pendant leur sommeil de l'hiver, les Escargots, loin d'obéir à la règle posée par Pouchet, se rapprochent, au point de vue de la résistance contre le froid, de certaines bactéries et germes de microbes ?. On comprend que les expériences qui viennent d'être citées ne peuvent que difficilement être répétées; c’est pourquoi nous n'avons pu déterminer les causes de la mort lorsque celle-ci se présente et étudier l’état des tissus après un brusque réchauffement. LIMITE SUPÉRIEURE DE LA TEMPÉRATURE COMPATIBLE AVEC LA VIE CHEZ L'HELIX. — La température la plus élevée à laquelle nous ayons rencontré des Escargots dans la nature est 27° C. à l'ombre. L'observation a été faite au mois d'août 1885 à Montreux, à la suite d’une forte averse orageuse qui avait fait « sortir » des mullitudes d'Escargots dans le dessous du bois. Les expériences suivantes, qui ont chacune été répétées au moins trois fois, prou- vent que ces animaux survivent à une lempéralure de 40°, prolongée au delà dun quart d'heure, que la même température prolongée plus d'une heure et demie est mortelle pour eux, qu'enfin une température de + 52 à 60 est mortelle au bout d'une à cing minutes. EXPÉRIENCE. — Un Escargot en parfaite santé est plongé à quatre heures quarante-cinq minutes dans de l’eau chauffée à + 45° (température ambiante + 18°). Il se contracte légèrement pour s'étaler de nouveau, exécutant des mouvements désordonnés des muscles du pied, cherchant sans y parvenir à adhérer contre les parois du vase. À quatre heures quarante-huit minutes il abandonne une petite quantité de mucosités, à quatre heures cinquante- deux minutes, les mouvements faiblissent (à ce moment la température de { A. Friscx, Ueber den Einfluss niederen Temperaturen auf die Lebensfähigkeit der Bacte- rien (NVIENER ACAD. SITZUNGSBER, 1877), et Raouz Picrer et E. Yuxe, De l'action du froid sur les microbes (C. R. be L’ACAD. DES SCtENCES DE PARIS, t. XCVIHIE, p. 747, 1884) 16 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE l’eau est tombée à 39°) et cessent complètement à cinq heures. L'animal lâche de Pair par l'orifice du poumon tout en demeurant étaié et tombe au fond du vase où il parait complètement mort. À cinq heures cinq minutes on le retire, il réagit aux excitations mécaniques sur toute la surface de son corps, mais elles sont insuffisantes pour le faire rentrer dans sa coquille. Au contraire l'application d’un faible courant d’induction à la face inférieure du pied le fait contracter si violemment qu'il vide, sous forme de jet, l'eau qui avait pénétré dans son poumon et il se retire entièrement dans sa coquille. L'animal, abandonné dans un cristallisoir humide, est trouvé le lendemain matin élalé et en bonne santé apparente. La taille de l'individu paraît exercer de l'influence, car la même expérience répétée sur l’Aelix nemoralis a été suivie de mort. Dans les mêmes conditions, l'expérience faite sur PArion empiricorum donne des résultats identiques à ceux qui ont été obtenus chez l’Æclix pomatia. EXPÉRIENCE. -— Un Escargot bien actif est placé dans un vase au fond duquel est une faible couche d’eau à 45° et que l’on maintient lui-même dans une étuve chauffée à la même température (la chambre de létuve est rendue humide par une grosse éponge imbibée d’eau). L’Escargot, après s'être d’abord retiré à moitié dans sa coquille, s'étale de nouveau, mais ne réussit pas à ramper sur le fond du vase, il exécute des mouvements continus avec ses Lentacules sans que leur extrémité soit complètement découverte !. Au bout de dix minutes l’animal se renverse sur le eôté, le pied étalé mais ne faisant plus de mouvements. Sa sensibilité musculaire est toutefois con- servée et si on le replace dans des conditions normales il revient à la vie. Nous avons répété la même expérience en prolongeant davantage le séjour dans l'atmosphère chaude. Déjà après une demi-heure, on a beau électriser certains individus dont la contractilité est conservée, ils meurent peu après, mais il est vrai que d’autres survivent. Après un séjour d’une heure, la 1 Nous avons toujours noté une grande sensibilité de l'extrémité des tentacules supé- rieurs pour la chaleur. On n’aperçoit jamais les yeux dans une atmosphère dont la tempé- rature atteint 409, En temps ordinaire, la moindre élévation de température suflit pour que animal retire ses tentacules oculaires. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 17 plupart meurent, les survivants sont l'exception. Mais aucun ne survit si le séjour a dépassé une heure et demie. Nous verrons plus loin que la mort dans ce cas est très probablement le résultat de l’arrêt du cœur, j Dans des expériences comparatives, l'Arion s’est montré en général un peu plus sensible que l’Æelix. La survivance de ces animaux après un séjour d’une heure à la température de 45° est extrêmement rare. Dans les mêmes conditions, mais à une température de 36°, les Æelix se portent bien pendant vingt à trente minutes, mais ils cessent de se mouvoir après ce temps. Nous les avons maintenus ainsi pendant plus de trois heures sans les tuer. L'un d’eux, laissé pendant la nuit, fut trouvé mort le lendemain matin. Îl est naturellement essentiel d’obvier à toute dessiccation. EXPÉRIENCE. — Un Helix pomatia est plongé dans de l’eau à 60° C. La mort des muscles à cette température est pour ainsi dire instantanée ; l'animal, qui était largement étalé, se contracte immédiatement au maximum, expulsant tout l’air contenu dans son poumon ainsi que des flots de muco- sités par le bourrelet du manteau. Il est bientôt entièrement retiré dans sa coquille, l'extrémité postérieure inerte du pied fait seule légèrement saillie par l’orifice buccal. Après quatre minutes, on retire l'individu qui ne donne plus aueun signe de vie, le pied est dur et insensible, les plus fortes décharges d’induction ne réveillent aucun mouvement. On enlève la coquille, aucun point du corps n’est sensible, le cœur est arrêté en systole. L’Arion, plongé dans de l’eau à la même température, donne identiquement les mêmes résultats. Il se recourbe aussitôt sur sa face inférieure et après une demi-minute n’exécute plus aucun mouvement. EXPÉRIENCE. — J'ai cherché à déterminer exactement la température immédiatement mortelle pour l’Escargot. Jusqu'à 50° il supporte mieux l'air chaud que l’eau chaude, mais à environ 55° les deux milieux sont aussi rapi- dement mortels l’un que l’autre. Il est d’ailleurs difficile de préciser davan- tage le chiffre. Nous n'avons jamais vu d’Escargot survivre après avoir été plongé dans l’eau marquant exactement 60°, quoique le thermomètre tombàt immédiatement de 2 à 3° par le fait de l’introduction de l'animal. Les Arion 5 18 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE sont en apparence un peu plus sensibles par la raison très probablement que ces mollusques sont immédiatement en contact avec le milieu chauffé par toute la surface du corps, tandis que leur coquille protège partiellement les Escargots. Un de ces derniers, plongé dans l’eau à 50°, se contracta d’abord très vivement, jetant un peu de mucosités, mais il se dilata de nouveau peu après. Dix minutes plus tard, resté étalé, il semblait mort, cependant il avait conservé de la sensibilité, répondait à des excitations mécaniques et beau- coup plus fortement aux excilations électriques. Le cœur donne après quinze minutes quelques légères contractions (9 à la minute) qui cessent bientôt. Observé dix minutes plus tard, il est arrêté en systole et le courant d’induction n’a plus d'effet aucun. Krukenberg !, dans ses recherches sur la température de coagulation des albuminoïdes, issus de différentes espèces animales, a montré que la tempé- rature à laquelle l'extrait aqueux des muscles chez quelques Gastéropodes commençait à se coaguler est comprise entre 40 et 50°, tandis que le sang (haemolymphe) de l'Helix pomalia ne se coagule qu'à 76° CG. On comprend pourquoi on trouve encore chez les animaux soumis aux expériences précé- dentes du sang liquide alors que tout le système musculaire ne donne plus aucune réaction. Nous pensons que la mort par la chaleur est la conséquence de la coagulation du plasma des cellules musculaires et vraisemblablement aussi de celui des éléments nerveux. L’anneau œsophagien des individus tués dans l’eau à 60° est dur et complètement opacifié. DE LA SUBMERSION ET DE L’ASPHYXIE. — Nous tuons dans notre laboratoire les Escargots qui doivent être disséqués par les étudiants en les submergeant dans un vase clos, entièrement rempli d’eau ; aussi avons-nous recueilli à cet égard un certain nombre d'observations que nous résumerons brièvement ici. L'eau bouillie ne parait pas amener l’asphyxie beaucoup plus vite que l'eau ordinaire. 1 KRUkENBERG, Die Gerinnungstemperaturen der Eivweisskürper in den contractilen Geweben der Thiere. VERGLEICHEND-PHYSIOL. STUDIEN AN DEN KÜSTEN DER ADri4, Il. Abtheil., 1880, p. 2. — Zur vergleichenden Physiologie der Lymphe, der Hydro- und Hämolymphe. VERGLEICHEN- PHYSIOL. STUDIEN, Il. Reiïhe, 1. Abth., 1882, p. 87. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 19 Il existe en toutes saisons de grandes différences individuelles quant à la durée de la submersion nécessaire pour entrainer la mort définitive. Nous appelons mort définitive, la disparition de toute sensibilité des muscles du corps aux agents mécaniques et électriques, coïncidant avec l'arrêt du cœur. Nous avons vu des Escargots d'hiver, qui avaient séjourné quarante-huit heures sous l’eau, à leur maximum d'extension, qui ne donnaient plus signe de vie et dont le cœur ne pulsait plus, se réveiller et se contracter vivement pendant qu’on les disséquait. Il est difficile d'indiquer des chiffres précis, voici cependant quelques indications provisoires : Les Escargots de grande taille résistent mieux à l’asphyxie que ceux de petite taille. Ils résistent mieux en hiver qu’en été. Nous n'avons jamais vu d'individus résister pendant les mois de juin, juillet et août à une submer- sion de plus de cinquante-deux heures, tandis qu'aux mois de janvier et février, quelques individus vivent encore après trois jours. Les muscles du pied sont déjà insensibles dans la plupart des cas, alors que le cœur donne encore quelques pulsations. Lorsqu'il reste quelques traces de sensibilité on peut ramener l’animal à la vie au moyen d’un courant d’induction plus ou moins fort qui l’oblige à se contracter et pendant qu’il s'enfonce dans sa coquille lui fait vider l’eau de son sac pulmonaire. La submersion ralentit presque immédiatement les battements du cœur. (Voir plus loin Physiologie du cœur.) L’Arion empiricorum, en été, est plus vite asphyxié que l’Helix ; nous n'avons pas eu l’occasion d’en noyer en hiver, époque à laquelle il n’est pas facile de s’en procurer. Nous avons retiré vivants des Helix qui avaient séjourné quinze, vingt- quatre, trente-huit heures sous la cloche d’une machine pneumatique sous une pression de 2? millimètres de mercure. Dans un cas, sur douze individus laissés pendant cinq jours sous la cloche pneumatique, deux d’entre eux vivaient encore. 20 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE DE LA DIGESTION. Nous avons jugé nécessaire, tant au point de vue du présent travail que pour d’autres recherches que nous poursuivons sur les différentes classes de Mollusques, de soumettre le canal digestif et ses annexes chez l’Helix pomatia à une étude histologique détaillée. Nous n’en indiquerons ici que les points principaux, pouvant aider à la compréhension des fonctions de cet appareil. La situation élevée de l’Escargot dans la série des Céphalophores lui donne un grand intérêt comparatif; il a d’ailleurs été généralement laissé de côté par les observateurs contemporains et le travail récent de Bonardi qui le vise spécialement, quoique renfermant quelques faits intéressants, est loin d’avoir épuisé le sujet {. Hisrorique. — Le canal intestinal de l’Escargot a été disséqué d’abord par Swammerdam (Biblia naturæ), puis par Cuvier qui le décrit en gros assez exactement, sauf pour ce qui concerne ses différentes inflexions ?. La célèbre figure qu'il a donnée sur l’ensemble de l'anatomie du Colimacon et qui est reproduite dans tous les manuels d'anatomie comparée est erronée en ce sens que l'intestin y est dessiné relativement trop long. Lebert 5 a abordé l'étude détaillée des pièces de la bouche chez quelques Pulmonés, mais il ne dit rien spécialement de l’Helix. Il en est de même de Semper # dans un mémoire que nous aurons, à plu- { Boxarni Enoarbo, Contribuzione all istologia del Sistema digerente dell Helix pomatia. Ari DELLA R. ACADEMIA ToriNo, t. XIX, p. 17, 1883. 2 G. Cuvier, Mémoires pour servir à l'histoire et à l'anatomie des Mollusques. MÉMOIRE SUR LA LIMACE ET LE COLIMAÇON, in-4°, Paris, 1817. 3 H. Leserr, Beobachtungen über die Mundorgane einiger Gasteropoden. MuLLer’s ARCHIV, 1846, p. 435 (ce qui concerne Limax, p. 457). # SEMPER, Beiträge zur Anatomie und Physiologie der Pulmonaten. ZErrscHR. F. W. Z00L., t. VIT, 1857, p. 340. (Voir Verdauungssystem, p. 353.) PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 21 sieurs reprises, l’occasion de citer et dans lequel il décrit plus minutieuse- ment qu'on ne l'avait fait jusqu'à lui l'intestin des Pulmonés. On trouvera surtout des points de comparaison importants dans les divers mémoires de Leydig sur l'anatomie des Mollusques résumés dans son Traité d’histologie ! et surtout dans son fameux mémoire sur la Paludina vivipara qui sert encore de modèle à ceux qui se livrent à l’histologie comparée ?. Outre ces ouvrages fondamentaux, nous citerons, au fur et à mesure de notre étude, les travaux antérieurs relatifs à tel ou tel organe en parti- culier. DESCRIPTION DU TUBE INTESTINAL ET DE SON PARCOURS. — L’Escargot pos- sède un canal intestinal complet relié aux parois du corps par quelques brides musculaires et adhérant dans sa portion rectale au repli tégumentaire qui constitue le poumon. Il commence par une bouche ventrale, située à l’extré- mité antérieure du corps et se lermine par un anus qui débouche sur le côté droit du bourrelet palléal, dans l’invagination des téguments qui con- duit à l’intérieur du sac pulmonaire. La bouche à l’état de repos se présente comme une fente transversale, limitée par deux lèvres formées par la peau légèrement invaginée en cet endroit. La lèvre supérieure porte sur sa ligne médiane un bourrelet vertical qui s’efface lorsque la mâchoire fait saillie au dehors. La fente buccale dont la forme rappelle un Ÿ surmonté d’un accent circonflexe prend alors une forme sensiblement circulaire. Si nous franchis- sons la fente buccale nous pénétrons dans une cavité divisée imparfaitement en deux chambres par la radule qui à l’état de repos est plissée transversa- lement (fig. 1 Bet D). Pour étudier la cavité buccale nous fendons les parois en long sur la ligne médiane, ou bien de chaque côté afin d’en ménager le plafond et le plancher. C’est à l'extrémité antérieure du bourrelet qui fait suite à la lèvre supé- ! Leynic, Traité d'histologie de l'homme et des animaux, trad. de l’allemand par R. Lahil- lonne, Paris, 1866. L'édition originale date de 1857. 2 Leynic, Ueber Paludina vivipara. Zexrscur. Fr. w. Z00L., t. II, 1850. 22 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE rieure que se trouve une plaque cornée souvent décrite, la mâchoire (pl. I, fig. 2). Sa forme est semi-lunaire et sa surface porte une série de sept côtes verticales dont les médianes et les deux latérales externes sont le moins pro- noncées. Les bords ondulés de la mâchoire se continuent directement avec la euticule de l’épithélium cylindrique dont est tapissé le plafond de la cavité buccale (fig. 7 À et B). Lorsqu'on détache la mâchoire par traction, il y reste toujours adhérents quelques lambeaux de cet épithélium assez consis- tant pour pouvoir être soulevé par lamelles, avec les pinces, ainsi que nous le verrons plus loin, chez certains individus, et particulièrement chez ceux qui ont été cuits. Vues de champ sous une lentille moyenne, ces lamelles présentent l’aspect d’une mosaïque à pièces irrégulièrement polygonales. Leydig décrit très bien ce recouvrement particulier chez Paludina ; il le considérait primitivement comme résultant du durcissement du plateau des cellules cylindriques de lépithélium, mais il a reconnu plus tard qu'il était un produit de sécrétion de ces cellules !. Ses dessins en mosaïque s’expli- quent par l'empreinte que laisse la masse homogène des extrémités libres des cellules cylindriques (dont la coupe est effectivement polygonale) sur la substance sécrélée. Le plancher de la cavité buccale (fig. 4, e) est recouvert en avant d’une cuticule consistante, semblable en tous points à la précédente; mais un peu plus en arrière, il porte en outre une lamelle chitineuse translucide, de cou- leur légèrement jaunâtre, la radule, dont l’origine doit être aussi rattachée aux formations cuticulaires sécrétées par les cellules épithéliales. L'opinion défendue autrefois par Külliker et Gegenbaur, qui considéraient la couche cornée de la mâchoire des Céphalopodes ainsi que les plaques chitineuses den- taires de l’estomac des Ptéropodes et d’une manière générale toutes les forma- 1 Dans un récent travail, Ch. Livon arrive aux mêmes conclusions relativement au recouvrement corné correspondant de la bouche des Poulpes. V. Livox, Recherches sur la structure des organes digestifs des Poulpes. JOURNAL DE L’ANA- TOMIE ET DE LA PHYSIOLOGIE DE Cu. Rogix, t. XVII, 1881. Nous avons quelquefois rencontré un recouvrement semblable, quoique moins consistant, autour de la bouche d’Anodonta cygnea et A. anatina, en sorte que son existence paraît être générale chez les Mollusques. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 25 tions dures de l’intestin des Mollusques, comme provenant de la chitinisation des cellules épithéliales elles-mêmes, n’est plus soutenable aujourd'hui. On trouve en effet des cellules actives sous ces lamelles inertes et leur structure lamel- laire montre qu’elles sont formées de couches superposées d’un produit de sécrétion !. La radule est recouverte d’une multitude de petites dents émoussées, dis- posées en rangées horizontales et parallèles (odontognathes). Elle repose sur deux muscles puissants et symétriques et elle est reliée par les extrémités postérieures de ceux-ci à une masse musculaire qui trouve son point d'appui dans une papille (fig. 1 € et D, e) située en arrière du pharynx et dont la convexité fait saillie dans la cavité du corps. Cette papille, légère évagina- tion de la paroi du pharynx, renferme dans son épaisseur une couche de fibres musculaires circulaires; dans sa cavité viennent s’insérer deux mus- cles, mentionnés pour la première fois par Lebert et qui indépendamment des contractions de la masse entière du pharynx concourent, avec les mus- cles qui lui sont sous-jacents, à animer la radule. Ces derniers muscles, insérés sur le bord antérieur de la radule, ont pour effet en se contractant de la déplisser tout en lui faisant exécuter un mouvement oscillatoire d’ar- rière en avant, mouvement qui est amplifié encore par la poussée des mus- cles postérieurs, de telle sorte que tout le plancher buccal est mobile d’arrière en avant en même temps que de bas en haut. Au repos, la hauteur de la voûte buccale est à son maximum (fig. 4), elle varie, selon le jeu des muscles radulaires. Lorsque ceux-ci font avancer la radule ils abaissent du même coup la voûte, La cloison divisant la cavité buccale en deux chambres s’efface (fig. 4, 2), puis, revenant sur elle-même, elle s'élève jusqu’à toucher le plafond de la cavité, précisément au point où débouche l'æsophage dans la cavité pharyngienne (fig. 4, {). De cette manière les aliments sont élevés vers l’orifice œsophagien dans lequel ils doivent pénétrer, et la radule ne se montre pas seulement un organe de masticalion, 1 Voir sur la structure intime de la radule : Rücker, Ueber die Bildung der Radula bei Helix pomatia. Ber. OBeru. GESELLSCH. Nar. uND Hixpe., t. XXII, 1883, p. 209. 24 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE mais aussi en quelque sorte de déglutition. Guvier ! avait déjà parfaitement compris ce double mécanisme. Il dit en effet : « C'est par le soulèvement alternatif de cette plaque (la langue), lequel résulte lui-même des mouve- ments du petit cône qui la termine en arrière, que les aliments coupés par la mâchoire sont introduits dans l’œsophage..….... Cette succession d’élévations et d’abaissements fait exécuter à la plaque linguale une sorte de mouvements péristaltiques, où une espèce de rotation dans laquelle les côtes saillantes et transverses de la surface saisissent les aliments comme pourrait le faire une roue dentée et les présentent à l’orifice de l’œsophage. » Personne depuis Cuvier n’a plus clairement et plus justement compris le rôle de la radule. Mais les muscles dont il vient d’être question ne sont pas les seuls élé- ments actifs dans l'acte masticatoire. Le pharynx (fig. À Cet D) a la forme d’un ovoïde dont le grand axe est antéro-postérieur. IT possède des parois extrêmement épaisses (fig. 3, 2) dans lesquelles on distingue deux sortes de fibres musculaires, des longitudinales et des circulaires qui se contractent alternativement de telle sorte que le relâchement des premières qui s’insè- rent en avant sur le bord postérieur de la mâchoire et la contraction des secondes concourent à la projection de la mâchoire en avant. Celle-ci pen- dant son temps de travail trouve un point d'appui, soit contre la radule elle- même, soit contre une plaque cornée (fig. 4, e) qui précède celle-ci et recouvre le plancher buccal immédiatement en arrière de la lèvre inférieure; la mâchoire coupe les aliments en lanières et celles-ci sont bientôt reprises par la radule qui les rabote en menus copeaux. Cest sous cette forme qu'on les rencontre dans l’œsophage. Pendant la mastication, la masse pharyngienne qui n’adhère aux parois du corps que par son pourtour antérieur fixé à la peau des lèvres exécute des mouvements de propulsion et de retrait, grâce au jeu de muscles dont nous devons dire quelques mots. L'une de ces brides musculaires (fig. 1 €, a) s’insère d’un côté un peu en avant et au-dessous de la papille pharyngienne et de l’autre contre la puissante masse des muscles du pied. Les autres, fort ténues et au nombre de cinq (fig. 1 D), s’insèrent par lune de leurs extré- 1 CuviEr, loc. cit., p. 17. PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 25 mités contre la masse du pharynx et par l’autre extrémité contre la masse de tissu conjonctif qui entoure les ganglions et les connectifs de l'anneau œsophagien (fig. 5, à, #, l). Enfin il s'insère sur les deux côtés de la masse buccale un muscle puissant (fig. 1 D, c et fig. 5, m) dont les deux branches se réunissent un peu en arrière du ganglion sous-æsophagien et vont se rendre dans les muscles de la columelle. Si on observe un Escargot man- geant, on aperçoit à travers les téguments le mouvement de va-et-vient de la masse pharyngienne. On réussit d'autre part à se rendre compte de l’action de ràpe de la radule en se plaçant un individu affamé sur le bras, après avoir frotté celui-ci avec une feuille de chou, on sent très bien le frot- tement de la radule. Le bord antérieur de la radule est arrondi et sa convexité est tournée en avant. Des coupes fines exécutées transversalement et longitudinalement sur un pharynx durei à l'alcool, coloré au carmin boracique, puis inclus dans la paraffine (fig. 3 et 4) montrent les rapports des différentes parties et rendent compte des replis de la radule à l’état de contraction. Cuvier avait partiellement reconnu l'existence des muscles dont il vient d'être question et qui animent la masse pharyngienne. Il dit en effet ! : « Elle (la masse charnue de la bouche) est chassée en dehors par les con- tractions du bourrelet et des fibres annulaires de l'enveloppe générale, portée de côté par plusieurs petits faisceaux qui s'unissent aux parties environnantes de la peau et retirée en dedans par deux grands muscles attachés à la colu- melle de la coquille et marchant parallèlement, sur les deux grands muscles du pied, ils s’insèrent sous la masse charnue qu'ils retirent, et pour sv rendre passent avec l’œsophage au travers du collier nerveux que le cer- veau forme avec le ganglion inférieur. » La cavité buccale est partiellement ciliée, partout où la cuticule n’est pas chitinisée. Au premier printemps, alors que l'animal n’est pas encore sorti de son repos hivernal, on a beaucoup de peine à isoler les cellules vibra- tiles. En plein été, il est, au contraire, aisé de les mettre en évidence par une dilacération pratiquée sur un individu fraichement tué. Nous les démontrons 1 Cuvier, loc. cit., p. 14. 26 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE dans notre laboratoire en tranchant d’un coup de ciseaux la tête de lanimal vivant; on débarrasse rapidement le pharynx sous l’eau de ses éléments contractiles, puis on le fend longitudinalement de chaque côté et l’on porte sous le microscope son endothélium. Les cils sont abondants, surtout sur la ligne médiane du plafond entre la mâchoire et le commencement de læso- phage. Les cils sont longs sur les zones saillantes de Ta muqueuse, beaucoup plus courts dans les dépressions, leur mouvement dirigé d'avant en arrière persiste durant plusieurs heures dans une goutte d’eau. Ils ne sont pas exclu- sivement localisés dans cette région. Nous en avons souvent constaté en d’autres points de la cavité buccale, sans qu'il soit possible de leur assigner des places fixes; leur distribution parait se modifier selon les individus, mais partout où ils existent ils se distinguent en longs cils et en cils beaucoup plus courts dont la recherche réclame des lentilles plus puissantes. On con- çoit que ces organes nombreux et très actifs, surtout au voisinage des ouver- tures des glandes salivaires, ont pour but de mêler plus intimement les aliments avec la mucosité de ces glandes et d'assurer la progression des bols alimentaires vers l'entrée de l'œsophage. Ce dernier organe prend naissance sur la face dorsale de la masse pha- ryngienne (fig. 1 G, fig. 5, d) entre les points d'insertion des conduits des glandes salivaires (e), par un orifice aplati à l’état de repos mais qui se relève pendant la déglutition grâce aux muscles de sa paroï ainsi qu'à ceux de la masse pharyngienne. L’æsophage est un tube cylindrique à parois minces qui, à l’état de vacuité de l'organe, sont fortement plissées longitudinalement ; ces plis diminuent de nombre et d’ampleur lorsque l'œsophage se remplit et que ses muscles circulaires se relächent. Lorsqu'on ouvre lanimal après qu'il vient de manger, l'œsophage est fortement distendu, toutefois les plis ne sont jamais complètement effacés. On constate sous un faible grossissement que quoique leur direction générale soit longitudinale, ils ne sont pas tous paral- lèles, quelques-uns se bifurquent et anastomosent leurs rameaux, en sorte que la muqueuse est dessinée comme par un réticulum à larges mailles. L'œsophage, dépourvu de toute espèce de cæcum, de renflements ou de rétrécissement cardial, se continue en arrière dans ce que Cuvier nommait l'estomac. En réalité, il est fort difficile de dire où commence et où finit PHYSIOLOGIQUE DE L’'ESCARGOT. 27 l'estomac, c’est pourquoi les auteurs varient beaucoup dans la description de cet organe chez les différents Gastéropodes. Nous verrons qu’au point de vue fonctionnel il n°y a pas lieu non plus de distinguer un estomac proprement dit, la structure histologique se maintenant à peu près la même dans toute la longueur de l'intestin. Toutefois lorsqu'on suit pas à pas le parcours de l’in- testin durant la dissection, on remarque toujours un point où le diamètre de l’æsophage augmente rapidement et devient un large canal qui, après s’être maintenu tel dans une longueur de 2 à 3 centimètres, se rétrécit de nouveau en arrière. Nous allons d’ailleurs décrire rapidement le parcours de l'intestin de l’Escargot dont la mention exacte ne se trouve nulle part, à notre connais- sance du moins. L’œsophage parti de la face supérieure du pharynx s’abaisse sur sa moitié AA postérieure et se rétrécit légère- en ment au niveau de l’anneau ner- veux qui l'entoure; après avoir franchi celui-ci il forme une anse (e) dont la convexité est tournée à gauche et en avant. (Voir la figure ci-contre.) À peu près au niveau du bourrelet glandulaire du man- teau et à 15 millimètres (mesures prises sur un individu dont le pied 4 étalé mesurait 7 !/, centimètres) commence l'estomac, plus distinct que lorsqu'on à étalé l'intestin, la région (p) où débute la dilatation du tube, étant plus apparente. A peu près à la moitié de la longueur _de celui-ci une bride musculaire j transversale, partant et se rendant ‘A de l’unedes parois du corps au tissu conjonctif entourant l'utérus, passe au-dessus de l'estomac et le comprime légèrement. C’est à cet endroit que l'estomac, dont la portion antérieure à 25 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE jusqu'ici cheminé au-dessus du pied, s'engage dans le premier tour de la spire et en suit le mouvement pour passer alors dans les tours suivants jusqu’à l’avant-dernier, en ondulant plus ou moins, mais sans constituer à proprement parler de circonvolutions. Au niveau de l’avant-dernier tour de spire, l'intestin rencontre le canal excréteur des lobes hépatiques (x) et il forme en avant de la glande hermaphrodite qui se dessine en blanc sur le dernier lobe du foie, un eœcum bosselé (4) dont la convexité est tournée normalement en bas el en arrière. (Naturellement les rapports changent un peu selon l’état de contraction de l'animal.) C’est dans la concavité de l’anse qu'aboutit le canal collecteur du foie (a) qui débouche par un large orifice dépourvu de valvules, en sorte que le contenu de l'intestin peut aisément y pénétrer. C’est là également que l'intestin se recourbe sur lui-même et s’avance en ondulant jusqu’à l'extrémité postérieure du rein où, s’infléchissant de nou- veau (2) sous un angle aigu, il s’abaisse et retourne en arrière. Cette portion est presque entièrement cachée par la masse du foie, sa dissection est plus difficile. La tunique conjonctive du rein et du foie adhère très intimement en celle région à la paroi intestinale qui, fort mince, se déchire aisément. En sortant du foie, l'intestin se porte vers la droite (Æ) pour atteindre le bord du repli cutané qui forme le plafond de la poche pulmonaire; il suit ce bord jusqu’au bourrelet palléal, recouvert par un prolongement du tissu conjoncetif pulmonaire. Dans cette région, qu’on peut appeler rectale, le diamètre de l'intestin est un peu plus considérable que dans les portions précédentes. Enfin l'anus, qui débouche sur le bord de l'orifice respiratoire, est muni d’un faible sphincter. Les parois de l'estomac sont plissées ainsi que celles de l'œsophage, mais les plis y sont plus nombreux et plus ramifiés, en sorte que la face interne vue de champ sous un faible grossissement parait entièrement carrelée. Semper compare cet aspect à celui de follicules glandulaires remplis de cel- lules; il pourrait en effet induire en erreur et faire croire à la nature glandu- laire de l'estomac. STRUCTURE HISTOLOGIQUE DE L'INTESTIN. TECHNIQUE. — Nous avons étudié la structure intime de l’appareil digestif, par trois procédés principaux. PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 29 4° À l'état frais. — Nous ne saurions trop recommander, en général, l'étude des tissus tout à fait frais, vivants pour ainsi dire, étude que les his- tologistes ont toujours beaucoup trop négligée. Sans vouloir diminuer en aucune manière la valeur des différentes méthodes d'investigation le plus en faveur aujourd’hui, nous tenons à insister encore une fois sur les inconvé- nients des réactifs. [ls exercent tous une action spécifique qui altère plus ou moins la figure et les particularités de structure des éléments. Cette remarque est applicable surtout aux animaux invertébrés chez lesquels les éléments n’ont pas encore acquis le degré de fixation et de différenciation qui les distin- guent chez les animaux supérieurs. Sans vouloir répéter ici les preuves que nous avons fournies dans un précédent travail sur les modifications subies par presque tous les tissus sous l’influence des réactifs !, nous dirons que nous nous sommes donné pour règle d'observer les tissus tout à fait frais, chaque fois que cela était possible, avant l'application des réactifs. Nous avons pratiqué maintes dilacérations des différentes portions de l’intestin dans le sang même de lanimal ou tout au moins dans l’iodsérum fraichement préparé avec l’eau de l’amnios selon la méthode de Frey; 2° Après macération dans l’eau additionnée de picro-carmin à 1 : 400 pendant environ quarante-huit heures; dans l'alcool au tiers pendant vingt- quatre heures; dans l’iodsérum fort, pendant vingt-quatre heures et enfin dans l'acide chromique à 1 : 5000 pendant plusieurs jours. Il faut dans ce dernier cas, selon le conseil de Ranvier, ajouter un peu d’eau phéniquée afin de prévenir le développement de champignons ; 3° Après avoir isolé sous l’eau, aussi rapidement que possible, le canal intestinal tout entier, nous le fendons longitudinalement et le lavons sous un courant d’eau ordinaire pour le débarrasser complètement des détritus alimen- taires. Puis nous le suspendons par un petit crochet en verre filé dans 50 cen- timètres cubes d’une solution d'acide osmique à 1 °/, dans laquelle nous le maintenons à l'obscurité pendant vingt-quatre heures. Retiré de là, il est lavé à l’eau distillée, puis plongé dans une solution forte de carmin de Beale (on 1 V. Emie Yuwc, De la structure intime et des fonctions du système nerveux chez les Crus= tacés décapodes. ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE, 1879. 50 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE peut obtenir aussi une assez bonne coloration des noyaux avec l’hématoxyline et la teinture de cochenille). Le picro-carmin ne nous a pas donné de jolies colorations après l’action de l'acide osmique. Après vingt-quatre heures de séjour dans le carmin de Beale, on lave soigneusement, puis on laisse macérer dans l’eau. Ce procédé nous à fourni de magnifiques résultats. Les cellules endothéliales parfaitement fixées par l'acide osmique s'isolent très bien. Le seul inconvénient est le noircissement intense des granulations qu’elles ren- ferment, et qui obscurcissent le noyau lorsqu'elles sont nombreuses. Des pré- parations montées depuis quatre ans à la glycérine sont encore aussi belles que le premier jour; 4° Sur des coupes. — L'intestin détaché est fixé soit par l'alcool, l'acide chromique à 1 : 3000 ou l'acide osmique à 4 : 100. Dans le premier cas (durcissement dans l’alcool), le meilleur colorant est incontestablement le carmin boracique (il réussit moins bien après l’acide chromique ou l'acide osmique) appliqué selon la méthode de Grenacher. Le carmin alunique et l’hématoxyline donnent aussi de fort bons résultats, mais on sait que les pré- parations avec celte dernière substance se décolorent à la longue, tandis que les coupes colorées au carmin boracique demeurent toujours belles. Nos coupes ont été faites après inclusion à la parafline selon la méthode connue, perfec- tionnée par Giesbrecht. Pour l'étude des glandes salivaires, nous avons obtenu de bons résultats en les dilacérant après une macération de plusieurs jours dans l'alcool au tiers. A l’état frais, il est très difficile d'obtenir autre chose que des cellules éparses débarrassées de leur enveloppe conjonctive. Quant aux coupes, on peut utiliser l'acide osmique, mais presque toujours l'alcool absolu nous a suffi. Le foie se dilacère très bien à l’état frais, mais on n'obtient ainsi que le contenu des cellules qui sont grandes et très fragiles. Pour étudier celles-ci dans leur intégrité, il est indispensable de recourir aux coupes. Le mieux pour atteindre ce but est de couper le foie frais en petits fragments de 3 ou 4 millimètres de côté, que l’on fixe par l'acide osmique à 1 °} et que l'on coupe ensuite dans la parafline. Pendant l'inclusion dans cette dernière, il faut veiller à ce que la température ne s'élève pas au-dessus de 55 à 60°, car le tissu deviendrait alors extrêmement friable. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 51 INTESTIN. — De l’orifice æsophagien jusqu’à l'anus, les parois du canal intestinal de lPÆelix sont composées de cinq lamelles principales qui de l'extérieur vers l’intérieur sont : a une lamelle péritonéale conjonctive; b une couche de fibres musculaires circulaires ; c une couche de fibres musculaires longitudinales; d une endothélium cylindrique; e une cuticule amorphe sécrélée par le précédent. En outre, au niveau des glandes salivaires leur recouvrement péritonéal se replie par places sur l’intestin. FEUILLET PÉRITONÉAL. — Celui-ci, dont l'épaisseur varie peu, est composé principalement de cellules étoilées (fig. 18 C) réunies les unes aux autres par leurs prolongements et entre lesquelles flottent de nombreux noyaux isolés au milieu d’un tissu finement réticulé par de minces fibrilles enchevé- trées. À l’état frais, ces cellules sont transparentes avec un noyau ovalaire finement granuleux. Leur protoplasma renferme aussi des granulations, elles sont le plus souvent ramassées autour du noyau. Nous en avons représenté une (fig. 18 C) qui possède une vacuole analogue à celles, plus fréquentes, que l’on aperçoit dans ces mêmes cellules (fig. 18 B) lorsqu'elles ont été coagulées dans l’alcool et dilacérées après séjour dans l’alcool au tiers. Semper ‘, qui décrit ces cellules, dit qu’elles ne renferment pas de graisse. Cependant leurs granulations, dont quelques-unes possèdent un contour par- faitement distinet, noircissent fortement par l'acide osmique. Outre ces cel- lules, il s’en trouve de plus petites, ovoïdes ou sphériques, contenant une forte proportion de graisse sous forme de globules de différents diamètres. Semper dit avoir vu ces globules se dissoudre dans l’éther, je n’ai pas répété son observation, mais je les ai vus rapidement noircir sous l’action de l’acide osmique. Je n'ai qu'exceptionneliement rencontré une troisième forme de cel- lules ovoïdes renfermant des concrétions calcaires, telles qu’on en trouve ordinairement dans le foie; la seule observation que j'en possède date du mois de septembre 1885. J'en ai vainement cherché au printemps, mais on en trouve, par contre, pendant toute l’année dans l'enveloppe conjonctive du ! SEMPER, Beiträge zur Anatomie und Physiologie der Pulmonaten. ZerrscHr. F. Ww. Z001., 1857, t. VIII, p. 340. 32 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE cerveau !. Ces cellules calcaires sont beaucoup plus abondantes autour de l'intestin de l’Arion empiricorum et en général chez les Pulmonés à coquille rudimentaire. Musczes. — Nous traiterons en même temps des deux couches muscu- laires qui sont à peu près partout aussi épaisses l’une que l’autre et dont les cellules constituantes sont identiques. Nous avons représenté ces dernières dans les figures 9 et 10 et nous donnons figure 14 l'image de la paroi de l'estomac débarrassée de son recouvrement endothélial et montrant la direc- tion des faisceaux musculaires. Chez l’Helix, ces deux lamelles subissent beau- coup moins de variations que chez les Pulmonés aquatiques, c’est à peine si elles sont un peu plus épaisses dans les parois de l'estomac que dans celles de l’œsophage. Les points où nous leur avons trouvé l'épaisseur maximum sont le commencement de l'estomac, les parois du cœcum qui le termine en arrière et l'extrémité du rectum. Nous n'avons réussi à les séparer l’une de l'autre, comme le montre la figure 14, que sur des lambeaux qui avaient longtemps macéré dans l'alcool au tiers. Les cellules sont fusiformes très allongées, étroitement accolées les unes contre les autres (fig. 9 et 10). Elles possèdent un assez grand noyau ovalaire qui se colore vivement dans les réactifs. Leur protoplasma varie beaucoup d'aspect d’une cellule à l’autre, chez certaines d’entre elles il parait parfaitement homogène; dans d’autres, il est rempli de fines granulations qui sont parfois disposées de telle sorte qu’elles simulent une striation longitu- dinale, ainsi que nous avons cherché à le représenter dans la figure 10, En général, comme le remarque fort justement Bonardi ?, ces granulations se ramassent dans la région axiale de la cellule. Quant aux striations transver- sales que Leydig 5 dit avoir été constatées dans les muscles du pharynx de plusieurs Gastéropodes, je les ai cherchées avec beaucoup de soin, en m'aidant { Voir Brocx, Untersuchungen über die interstitiellen Bindesubstanzzellen der Mollusken. Zerrscur. F. W. Z00L., 1885, p. 1. 2 Bonarpi, loc. cil., p. 39. 3 Levnic, Traité d'histologie de l'homme et des animaux, trad. française de Lahillonne, 1866, p. 148. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 35 des plus fortes lentilles. Jamais je n'ai vu de striation proprement dite. I est vrai que par places on aperçoit quelque chose qui y ressemble, mais ce sont des granulations arrangées en lignes droites et parallèles. L'alcool ordinaire coagule le plasma de ces cellules en grumeaux qui se ramassent autour du noyau; toute la cellule se contracte. Dans les parois distendues de l'estomac, les cellules fusiformes sont moins serrées les unes contre les autres et, après qu'on s’est’ servi de réactifs, elles prennent la forme de petites baguettes cylindriques telles que Bonardi en a représentées à la figure 6, a de son mémoire, et telles qu’elles se trouvent plus souvent encore dans le tissu conjonelif de l'intestin après macération dans l'alcool au tiers. D'ailleurs, tous les réactifs contractent énormément ces cellules, et c’est ainsi qu’on les voit presque loujours, car, à l’état frais, leur dilacération est extrémement difficile. ExporaéLium. — Cette couche est partout composée de cellules cylindriques de formes et de dimensions fort variées. Les réactifs les modifient telle- ment qu'il faut les étudier à l’état frais, ou bien sur des coupes pratiquées après fixation à l’acide osmique. À l’état frais les cellules endothéliales sont larges à leur extrémité tournée du côté de la cavité intestinale, légèrement renflées au niveau du noyau (fig. 7 À, D) et se terminent en pointe émoussée à l’autre extrémité, L'eau distillée les altère au bout de quelques instants : elles deviennent bosselées et l'extrémité s’effile quelquefois énormément. Nous avons représenté (fig. 6) cette modification telle que nous l'avons observée sur l'endothélium du canal excréteur du foie, qui ne parait être d’ailleurs que la continuation de celui de l'intestin. Si, après l’eau, on ajoute de l'acide osmique, la fixation se fait dans cel état de déformation. Les cellules les plus longues sont placées sur le sommet des plis de la muqueuse, les plus courtes dans les sillons qui les séparent. Nous en avons rencontré d'immenses dans l’estomac ; les plus courtes et les plus larges étaient dans les sillons de la cavité pharyngienne. Il serait plus exact de les désigner sous le nom de cellules prismatiques ; en effet, leur coupe est poly- gonale, ainsi qu'on peut s’en convaincre en les contemplant de champ à) 54 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE (fig. 7 B). Le polygone est irrégulier, c’est à lui qu'est dû l’aspect de mosaïque que nous avons signalé plus haut. ; Le contenu des cellules est ordinairement clair et transparent, renfermant une quantité plus ou moins considérable de granulations qui sont ramassées autour du noyau et vers l'extrémité libre de la cellule. On rencontre égale- ment ei et là de petites vésicules à contours très nets qui se noircissent dans l'acide osmique. Nous ne pouvons aflirmer avec Semper que les granulations soient plus nombreuses dans l’endothélium de l'estomac que dans celui du pharynx; mais il nous a semblé, sans que nous osions l’affirmer d’une facon catégorique, qu’elles abondent surtout dans les cellules à l’état de repos ; les cellules des Escargots d'hiver en sont particulièrement chargées. Sur tout le parcours de l'intestin, nous avons trouvé chez beaucoup de ces cellules de petites boules se colorant en brun par liode ; nous verrons plus loin qu'il s’agit là de légères accumulations de glycogène. Quant à des dépôts pigmen- taires, résistant à l'action des acides, nous n’en avons jamais vu. Curicuze. — Dans le pharynx, la cuticule sécrétée par les cellules endo- théliales est fort épaisse, ainsi que nous l'avons déjà dit. Mais elle se continue sur tout le trajet de l'intestin avec une épaisseur beaucoup moindre. Elle est homogène et présente par places une consistance suffisante pour permettre de la détacher avec des pinces, comme c’est le cas chez la Paludine, d’après une indication de Leydig, lorsque les animaux ont été tués dans l’eau chaude !. Elle atteint chez l'Helix son maximum d'épaisseur et sa plus grande consis- tance après la période d’hibernation. Dans les mois de février et de mars, on trouve fréquemment l'intestin obstrué par une sorte de bouchon composé de cellules endothéliales enveloppées dans des écailles cuticulaires détachées de la paroi, à la suite d'une véritable mue. Ces paquets de cellules abondent surtout dans l'intestin proprement dit, en arrière du cœcum, mais on en ren- contre également dans l'estomac. Le bouchon est quelquefois si volumineux et si compact qu'il est moulé sur la lumière de Pintestin, ressemblant à la tige cristalline des Lamellibranches. Nous en avons mesuré un de 15 milli- { Leynice, Ueber Paludina vivipara. Lerrscar. Fr. W. Zoo, t. IE, 1850, p. 162. PHYSIOLOGIQUE DE L’'ESCARGOT. A © mètres de long dans une des anses intestinales comprises dans le foie. La transparence de cet exsudat n’est jamais parfaite, et en le délayant dans l’eau on y constate toujours des débris de cellules et de nombreux noyaux. Durci dans l'alcool et coupé transversalement en tranches minces, on y voit des couches concentriques, ainsi que dans la cuticule adhérente, lorsque celle-ci atteint une certaine épaisseur. Ces couches ou strates correspondent sans doute aux périodes de plus grande activité des cellules sécrétoires. Elles apparaissent avec la plus parfaite netteté dans l'épaisseur de la radule et de la mâchoire. Dans l’œsophage la euticule montre un mouvement vibratile fort beau. C’est au sommet des plis de la paroi que les cils sont le plus longs ; le mouvement toujours dirigé d'avant en arrière est accusé par bandelettés auxquelles il est difficile d’assigner une situation précise. Dans son important mémoire sur l’Anatomie des pulmonés , Semper dit que chez l’Helix la vibration de l'estomac est partielle dans sa partie anté- rieure, tandis qu'en arrière elle serait générale. Cette particularité n’est pas constante. Îl est vrai que, dans la plupart des cas, les cils vibratiles sont plus localisés en avant de l'estomac que dans sa partie postérieure, mais il nous a toujours semblé qu’il y avait des variations selon l’état fonctionnel de l'intestin. Il nous est arrivé de chercher en vain le mouvement ciliaire dans l'estomac chez des individus qui n'avaient pas mangé depuis longtemps. Il serait donc intéressant de suivre le rapport qui peut exister entre le degré de proliféra- tion des cellules vibratiles et l’activité fonctionnelle. GLANDES SALIVAIRES. — Les anciens anatomistes ont désigné sous ce nom les grandes glandes de couleur blanche ou jaunâtre que l’on aperçoit tout d’abord, sur les côtés de l'estomac, lorsqu'on dissèque l'Escargot. Elles sont relativement volumineuses, disposées en plusieurs lobes aplatis, entourées d’une lame de tissu conjonctif dans laquelle se rencontrent de nombreuses fibres entre-croisées et des noyaux épars; ce tissu conjoncetif relie chaque lobe des glandes par une ou plusieurs brides aux parois de l’estomac. De leur 4 SEMPER, loc. cit. 36 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE extrémité antérieure partent deux canaux excréleurs de même couleur que les glandes, à contours irréguliers, comme s'ils avaient été tordus et chif- fonnés; ils s'avancent librement, passent à travers l'anneau nerveux et débou- chent sur la face dorsale du pharynx, à droite et à gauche du point de départ de l'œsophage. Ces canaux, dont celui de droite est généralement un peu plus long que l’autre, possèdent d'épaisses parois dans lesquelles on constate la présence de cellules fusiformes probablement musculaires et de grandes cellules conjonctives accompagnées de fibrilles de la même sub- stance, Leur face interne est tapissée de petites cellules cylindriques recou- vertes de cils vibratiles très courts. Nous n'avons reconnu l'existence de ces derniers que le long du parcours du canal collecteur. Semper ! n’a réussi à constater le mouvement vibratile dans les canaux excréteurs des glandes sali- vaires que chez Limnœus. Leydig ? et Barfurth 5 l'ont retrouvé chez Limax. Ce dernier auteur affirme même avoir vu la ciliation jusque dans les plus petits canalicules de la glande chez Limax variegatus. Pas plus que lui nous n'avons réussi à la voir chez l'Helix, même en nous servant des plus forts grossissements. La lumière des canaux collecteurs est fort étroite. Ils déversent dans la cavité buccale un liquide de consistance légèrement visqueuse qui joue un rôle dans la mastication des aliments sans paraitre exercer sur eux d'action chimique. Ce liquide tient en suspension de nombreuses vésicules sphériques à contenu très transparent et des fragments de cellules salivaires granuleuses. Des coupes pratiquées dans l'épaisseur de la glande en été, pendant sa période d'activité, montrent les lumières d’un assez grand nombre de canalicules (fig. 15, «) qui sont les branches afférentes du canal collecteur et qui ren- ferment la sécrétion sous forme d’un coagulum. La progression du produit sécrélé dans ces canaux serait sans doute expliquée par la présence de cils vibratiles, mais leur existence est douteuse dans la plupart des cas. I faut done admettre que la poussée de nouvelles quantités du produit et le jeu des 1 SEMPER, Loc. Cit., p. 366. 2 Levnic, Histologie de l’homme et des animaux, p. 395. 3 Barrurru, Vergleichend-histochemische Untersuchungen über das Glycogen. (5. Speichel- drüsen von Gastropoden.) ARCHIV FÜR MIKROSK. ANATOMIE, t. XXV, 1885, p: 283. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 37 muscles reconnus par Semper dans l'épaisseur des parois en sont la cause principale. Lorsqu'on dilacère à létat frais dans le sang de l’animal un fragment de la glande salivaire de l'Æelix, on obtient une masse semi-liquide dans laquelle flottent un nombre considérable de noyaux cellulaires, de fragments ‘de cel- lules, de vésieules et de granulations, rarement de cellules entières. 11 faut, pour obtenir de ces dernières, laisser macérer la glande dans l'alcool au tiers, alors seulement on a quelque chance d'isoler les grandes cellules avec la gaine conjonctive qui les renferme. Nous pouvons, en effet, considérer les glandes salivaires de l'Helix (ainsi d’ailleurs que celles de tous les Pulmonés, nous avons eu l’occasion de nous en assurer sur une dizaine de genres) comme des amas de glandes mono-cellulaires analogues, par exemple, à celles que l’on rencontre autour du pharynx des Hirudinées. Chaque cellule de grande dimension, ovoïde ou sphérique, est enfermée dans une enveloppe de tissu conjonctif à parois fermes et élastiques, qui se prolonge sur un point en un fin canalicule. Cette gaine est amorphe et possède un ou deux noyaux ova- laires très petits qui ne peuvent être confondus avec le noyau de la cellule salivaire; le canalicule n’est jamais cilié ; après un certain trajet, il se réunit à un voisin et après plusieurs anastomoses successives ces canalicules se déversent dans des canaux plus importants. Le prolongement de la gaine donne aux cellules salivaires une apparence pyriforme. Le noyau de ces cel- lules est ovoïde, légèrement excentrique, il se colore fortement dans les réac- üifs (le carmin boracique donne de très belles colorations), tandis qu’à l’état frais il est fort diflicile de l’apercevoir, surtout dans les cellules riches en granulations. Pourtant le noyau est lui-même fortement granuleux et ren- ferme, en outre, de nombreuses petites vésicules claires. Quant au proto- plasma environnant, il varie beaucoup selon l’état d'activité de la glande. Tantôt, il est parfaitement clair et transparent, tantôt il est granuleux et l'on y voit flotter, entre les granulations, de petites goutteleltes sphériques et bril- lantes !, constituées probablement par de la mucine; elles se déforment faci- 1 Il semble que ces gouttelettes ont été minutieusement décrites par C. BERGONZINI : Sulle glandole salivali degli Helix, in « Spallanzani. » REVUE DE SCIENCES MÉDICALES ET NATURELLES, 58 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE lement sous la pression du verrelet; elles sont quelquefois accompagnées d’autres gouttelettes qui se colorent en noir par l'acide osmique ou en brun par l’iode. Dans ce dernier cas, on a affaire à des dépôts de glycogène, qui ont été particulièrement étudiés par Barfurth dans le mémoire cité plus haut. « En principe, dit cet auteur, il n’y a aucun élément du üssu dans lequel on ne trouve du glycogène. Il ÿ en a davantage dans les cellules conjonctives et dans les enveloppes de tissu conjonctif des cellules salivaires, mais il y en a beaucoup aussi dans les cellules salivaires elles-mêmes, et seulement des vestiges dans l'endothélium des canaux excréteurs !, » Le protoplasma des cellules est plus fourni de toutes ces formations en été qu’en hiver. On sait que Heidenhain ?, Pflüger 5, Nussbaum #, ont signalé à différentes reprises les modifications que subissent les éléments des glandes salivaires des ani- maux vertébrés lorsqu'elles passent de l'état de repos à l'état d'activité. Ils ont mis en évidence ce fait capital que les cellules actives se conduisent d'une manière différente vis-à-vis des réactifs que les ceilules au repos, ce qui indique que le protoplasma et le noyau des cellules sont le siège, pen- dant leur période de travail, d'altérations chimiques importantes. Nous avons entrepris, en excilant directement la glande salivaire de PAHelix pomalia, au moyen de courants électriques, des recherches du même genre, mais elles ne nous paraissent pas assez concluantes pour en publier dès maintenant les résultats. Nous dirons seulement que ce que nous en savons, confirme par- tiellement les faits observés chez les Vertébrés. D'ailleurs, nous renvoyons au travail de Barfurth (pp. 368 et suiv.) pour ce qui concerne les différences d'action de l’hématoxyline sur les cellules salivaires au repos et au travail. série 2, fase. IX, Modena, 1880. Nous n'avons pu nous procurer ce travail dont nous devons un extrait à l’obligeance de M. le D' Calloni de l’Université de Pavie. { Voir BarrurtH, loc. cit., t. XVIII, fig. 23 à 51. 2 Heipenuax, Studien des physiologischen Instituts zu Breslau, t. IV, 1868, et Hermann's Handbuch der Physiologie, t. V, 1880. 3 Priücer, Die Endigungen der Absonderungsnerven in den Speicheldrüsen, Bonn, 1866, etarticle : Speicheldrüsen, in Srrickers HANDBUCH DER LEHRE VON DEN GEWEBEN, Leip- sick, 1871. 4 Nusssaun, Ueber den Bau und die Thätigkeit der Drüsen. ARCH. FUR MIKROSK. ANATOMIE, t. XIII, 4874. PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 39 Foie. — Cette glande énorme, la glande digestive par excellence chez les Mollusques, enveloppe l'intestin de lÆelix en arrière de l'estomac. Elle est composée de quatre lobes, divisés eux-mêmes en lobules. Sa couleur varie beaucoup selon les saisons et son degré d'activité. Elle est toujours brunâtre, mais très foncée jusqu'au noir, ou très claire jusqu’au gris. Sa structure est celle d’une glande folliculaire dont les follicules sont extrême- ment ramifiés. Chaque follicule possède un petit canal excréteur, et tous les canaux excréteurs des différents lobules aboutissent dans un grand canal collecteur commun. Les follicules glandulaires portent sur leurs parois de nature conjonctive, de grandes cellules qu'on ne peut étudier que sur des coupes transversales dans leur intégrité et parmi lesquelles on peut en dis- tinguer de trois sortes. La glande est entièrement enveloppée par une lame conjonetive musculaire qui pénètre entre les follicules. Cette membrane (tunica serosa et 1. muscularis de Barfurth) est très mince, on réussit cepen- dant à la détacher avec quelque précaution. Les cellules musculaires y sont fort distinctes. On y rencontre aussi de grandes cellules claires à petits noyaux excentriques et des cellules calcaires remplies de sphérules de car- bonate de chaux; ces dernières, qui sont très abondantes chez Arion, sont, au contraire, relativement rares dans l'enveloppe du foie de l'Escargot ; on les trouve dans le voisinage des rameaux de l'artère hépatique qui est, comme on le sait, admirablement dessinée en blane grâce à leur grand nombre à la surface du foie de l'Arion. Ces cellules gorgées de calcaire sont beaucoup plus petites que celles du type conjonetif pur, elles ont un contour très net, mais leur noyau est ordinairement caché par les concrétions qu’elles con- tiennent et qui dégagent de l'acide carbonique lorsqu'on les traite par une faible solution d'acide chlorhydrique. Entre ces éléments cellulaires se rami- fient de nombreuses fibrilles conjonctives qui s’entre-croisent dans tous les sens. Le produit de sécrétion du foie, de couleur brune, verte, vert-jaunâtre, ete., se déverse dans le grand canal excréteur, si largement ouvert sur l'intestin qu'il n’est pas rare d'y rencontrer des particules alimentaires non encore digérées. Nous y avons vu sur des coupes des granules de chlorophylle après alimentation par des feuilles de choux, des granules d’amidon après 40 CONTRIBUTIONS À L'HISTOIRE alimentation avee du pain; ces particules peuvent même remonter fort loin à l’intérieur de la glande. Le canal excréteur du foie peut donc être consi- déré comme une évagination de la paroi intestinale. Quant au liquide sécrété, il est réparti dans l'intestin aussi bien du côté de la portion antérieure qu'en arrière, grâce à l'inclinaison du tube intestinal. Il arrive ainsi dans l'estomac où il agit immédiatement sur les aliments qu'il renferme. Nous avons surtout porté notre attention sur les différentes cellules tapissant l'intérieur des follicules; notre description différera peu de celle qui a été publiée récemment par Barfurth ! qui a étudié le foie chez Aron empiricorum, Limax cinereus, L. agrestis, L. carinatus, L. variegatus, en signalant les petites différences qui se montrent chez ces divers genres. Comme l’a fait ce savant, nous distinguerons trois groupes de cellules. a. Les cellules-ferment (Fermentzellen) (fig. 19 et 20). On les distingue immédiatement dans une dilacération du tissu hépatique à l'état frais, grâce à leur contenu coloré en amas irréguliers ou en boules rondes. Normalement pressées les unes contre les autres et appliquées aux parois des follicules, elles sont irrégulièrement cylindriques, à enveloppe très fragile, parce qu'elle n'est pas une euticule proprement dite, mais simplement une couche de pro- toplasma plus dense, qui se déchire facilement et laisse échapper la ou les vésicules qu’elle renferme. Le nombre de ces dernières varie beaucoup dans une même cellule, nous en avons compté jusqu'à cinq ou six et parfois on en voit deux, emboitées l'une dans l'autre. Lorsqu'il n’y en à qu'une, sa forme est toujours sphérique, mais lorsqu'elles sont nombreuses et pressées les unes contre les autres, elles deviennent irrégulièrement polygonales, I est vrai qu'elles reprennent facilement leur forme primitive lorsqu'on les isole. Selon Barfurth, les vésicules qui contiennent le ferment apparaissent d'abord au sein du protoplasma comme de simples vacuoles transparentes, dans lesquelles les granulations se montrent peu à peu comme à la suite d’un précipité. Lorsque ces granulations sont très abondantes et que la vésicule en 4 D. Barrurru, Ueber den Bau und die Thätigkeit der Gasteropodenleber. ARCR. FÜR 172 MIKROSK. ANATOMIE, t. XXII, 1883, p. 473. PHYSIOLOGIQUE DE L’'ESCARGOT. 4 est chargée, celle-ci se rapproche peu à peu de la périphérie de la cellule, puis se fraie un chemin à travers la couche de protoplasma épaissi qui con- stitue l'enveloppe cellulaire. C’est ainsi que les vésicules sortent des cellules, tombent dans la lumière du follicule et, se mélant aux autres produits de sécrétion, atteignent les canaux excréteurs. Les cellules-ferment de l’'Helix ont un noyau que nous n'avons réussi à voir que sur des coupes après colo- ration au carmin boracique. Il est excentrique, quelquefois appliqué contre la pseudo-enveloppe, sa forme est sphérique, il renferme un (rarement deux) nucléole très distinct. Lorsqu'on a dilacéré le foie dans l’eau distillée, il se produit une violente osmose, les vésicules-ferment se dilatent et ne tardent pas à éclater, leur contenu, dont la couleur varie du jaune au jaune-ver- dâtre et au brun plus ou moins foncé, ne tarde pas à se dissoudre. C'est pré- cisément là un caractère qui permet de les distinguer des autres cellules de l'organe, et qui explique pourquoi il ne faut étudier que des foies frais ou ayant séjourné dans de l’alcool et non dans l’eau. Si l’on place sous l'eau un petit morceau de foie d'Escargot, seulement pendant vingt-quatre heures, l’eau se colore en brun, mais on cherche en vain dans le tissu hépatique les vésicules-ferment, elles ont été dissoutes. La même chose a lieu si, à la place d’eau, on emploie la glycérine; celle-ci dissout le ferment et ce qui le prouve, c’est qu’elle a acquis dès lors la faculté de dissoudre les substances alimen- taires. Barfurth a constaté encore cette même propriété dissolvante chez les acides et les alealis étendus. Ajoutons enfin que l’acide osmique noircit le con- tenu coloré des cellules-ferment. b. Cellules hépatiques (Leberzellen). Elles ont à peu près la même forme que les précédentes lorsqu'on les examine sur des coupes. Elles sont généra- lement un peu plus petites et leurs dimensions varient sensiblement selon leur situation. Les follicules forment dans le foie des franges plissées dont le sommet est toujours occupé par des cellules plus longues que la base, elles y sont plus comprimées et plus nombreuses. Leur nombre total dans le foie est d’ailleurs beaucoup plus grand que celui des cellules-ferment. Elles renfer- ment (fig. 21) un noyau excentrique situé du côté de la base de la cellule et que les solutions carminées colorent rapidement, ce qui le fait reconnaitre 6 42 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE facilement au milieu des nombreuses vacuoles de même forme qui nagent dans le protoplasma finement granuleux. Ce sont ces vacuoles qui renferment les produits d’excrétion du foie, sous forme de petites boulettes colorées en jaune ou en brun, moins foncées que dans les précédentes, ou sous celle de concrétions irrégulières. L’acide osmique ne les colore pas en noir comme c’est le cas pour le contenu des cellules-ferment et elles ne sont solubles ni dans l’eau ni dans la glycérine. Nous admettrons avec Barfurth que ces cellules ne renferment que des produits destinés à être expulsés de l’organisme sans que celui-ci sache en ürer profit. Leur contenu ne servirait done eu aucune manière à la diges- tion, Le savant de Bonn appuie sa manière de voir sur les faits suivants, dont nous avons contrôlé l'exactitude. Les vésicules-ferment sont toujours absentes des excréments de l’Escargot, ou n’en rencontre plus dans le rectum; elles ont donc été consommées pendant l'acte digestif, tandis que les concrétions des cellules hépatiques y sont abondantes et sont régulièrement expulsées par l'anus. D'autre part, la présence de ces dernières est constante dans l'intestin pendant l’hivernage comme pendant l'été, alors que les cellules- ferment, devenues inutiles puisque la digestion cesse pendant l'hiver, ne ren- ferment plus de concrétions colorées. Enfin on peut tirer un caractère dis- tinctif entre ces deux ordres de cellules du fait que le contenu des dernières se dissout complètement dans l’alcool et l’éther, tandis que celui des cellules- ferment y est complètement insoluble. c. Les cellules calcaires (Kalkzellen). Elles sont grandes, à contours très nets et se reconnaissent immédiatement, grâce aux nombreux corpuscules réfringents, serrés les uns contre les autres, qui les remplissent. Tandis que les cellules dont il a été question jusqu'ici possèdent un noyau de petite taille qui est ordinairement diflicile à voir, les cellules calcaires montrent toujours un gros noyau rond granuleux accompagné fréquemment d'un noyau acces- soire plus petit qui lui est accolé. Dans la dilacération du tissu frais, ces cel- lules déchirées répandent dans le liquide ambiant leurs noyaux (dont l’acces- soire demeure attaché au principal) et la masse de leurs concrétions miné- rales. Les laborieuses recherches de Barfurth, dont nous consignerons ici les PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 43 résultats sans avoir eu d’ailleurs l’occasion de les vérifier, lui a fait décou- vrir que ces particules minérales n'étaient point composées de carbonate de chaux, comme c’est le cas pour les cellules calcaires du tissu conjonetif qui se rencontrent aussi dans les parois des vaisseaux, mais bien exclusivement de phosphate de chaux. Il paraît que c’est là une provision de substance, un matériel qui s’'accumule pendant l'été et qui permettra à l'animal, l'automne venu, de consolider l’épiphragme au moyen duquel il clôt l'orifice de sa coquille. L'analyse chimique montre, en effet, que pendant qu’en été les cen- dres du foie constituent les 20 à 25 °}, du poids total du tissu desséché, celte proportion tombe à 10 °/, pendant l'hiver. L'examen microscopique du foie des animaux réveillés de leur sommeil hivernal prouve également que les cellules calcaires renferment un nombre beaucoup moindre de gra- nules minéraux. D'ailleurs, l'analyse chimique comparative de la coquille et de l’épiphragme ! indique que le dernier est relativement riche en phosphate de chaux (plus de 5 °/,) tandis que la première en est pauvre (à peine 1 °/,). Ces faits sont déjà favorables à la supposition que le phosphate de chaux émigre du foie à l'approche de la saison froide pour passer dans la construc- tion de l’épiphragme. Mais Barfurth à poussé plus loin l’investigation. On sait que le couvercle d'hiver est sécrété par les glandes logées dans l'épaisseur du bourrelet du manteau; Barfurth a analysé en différentes saisons des frag- ments de celui-ci. Il a découvert de la sorte qu'au printemps et en été il ne renferme pas d'acide phosphorique, alors précisément que celui-ci abonde dans le tissu du foie, tandis qu’en automne, pendant les jours où les Escargots se préparent au sommeil hivernal, le foie se vide positivement de phosphate de { Voici, par exemple, les chiffres publiés par B. Wicke et rapportés par Barfurth : ÉPIPHRAGME. COQUILLE, Garbonate de CHAUX ENS Re eee ele 86,75 90,07 Carbonate de magnésie. . . . . . , . . . . 10:96 0,98 Bhosphate delChAUR EE Ce 5,96 0,85 Phosphate d'oxyde de fer. + ... . . . : © . . - : 0,16 — Oiiotc à5 6010 RO RER RE OT 0,35 1,15 SUDSLANCE OTFARIQUER EE RS ee ee sue. 6,42 6,95 44 CONTRIBUTIONS A L’'HISTOIRE chaux et qu'en même temps cette substance apparait dans le manteau. Il faut done bien admettre une relation inverse entre l'existence des cellules calcaires dans le foie et la production de l’épiphragme. De la sorte on com- prend pourquoi les cellules calcaires ne jouent aucun rôle dans l’action diges- tive exercée par le liquide hépatique. On sait que Krukenberg ! a constaté dans le sue intestinal des Escargots d'hiver, suc provenant de la sécrétion du foie, l'existence d’un pigment qu'il a nommé hélicorubine et qui donne au spectroscope des raies d'absorption très semblables à celles de l'hémoglobine (raies visibles seulement en solu- tion alealine). Il est vraisemblable que ce pigment s’élabore au sein des cel- lules hépatiques. { KrukENBERG, Ueber das Helicorubin und die Leberpigmente von Helix pomatia. VERr- GLEICH.-PHYsi0L. STuDIEN, II Reche, 2" Abth., 1882, p. 63. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. A5 LIT. PHYSIOLOGIE DE LA DIGESTION. Le résumé anatomique que nous venons de donner nous permet un cer- tain nombre de déductions que nous passerons rapidement en revue. Le pharynx est une chambre dans laquelle les aliments subissent une prépara- tion mécanique par le jeu de la mâchoire et de la radule, et physique de la part du liquide sécrété par les glandes salivaires. Les parois du pharynx, pas plus que celles du reste de l'intestin, ne renferment dans leur épaisseur des glandes proprement dites. Les cellules endothéliales cylindriques ne sécrè- tent rien autre qu'une cuticule, on n’y rencontre que ei et là de petits glo- bules de graisse colorés par l'acide osmique, mais pas d'éléments de sécrétion qui leur soient propres. Elles sont partiellement recouvertes de cils vibra- tiles destinés à assurer la marche des substances ingérées, et sont soumises à des mues qui expliquent comment on en rencontre qui sont détachées et flottent dans la cavité de l'intestin. Il ne peut être question, par conséquent, d’un suc gastrique ou d’un suc intestinal proprement dit, émanant des parois du tube digestif et, fonctionnellement parlant, les expressions d'estomac, de duodénum, etc., employées par les anatomistes n’ont pas de sens. Le liquide légèrement visqueux de couleur brun-verdâtre qui remplit l’estomac provient d’un mélange des sécrétions du foie et des glandes salivaires. Ce sont ces deux masses glandulaires qui doivent attirer l'attention de l’expérimentateur; toutefois, nous avons jugé convenable pour plus de sûreté d'étudier séparé- ment d'elles les parois intestinales. Car l'observation histologique ne nous permet que des conjectures, ainsi que l’a très justement remarqué Claude Bernard !. « L’impuissance de l’anatomie, dit-il, à nous apprendre les fonc- tions organiques devient surtout évidente dans les cas particuliers où elle \ est réduite à elle-même. Pour les organes sur les usages desquels la phy- 1 CL. BERNARD, La science expérimentale. Le problème de la physiologie générale. Paris, 1878, p. 105. 46 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE siologie expérimentale n’a encore rien dit, l’anatomie reste absolument muette. » RÉACTION DES LIQUIDES DU TUBE DiGEsriFr, — Nous l'avons attentivement examinée d’un bout à l’autre de l'intestin dans les différents mois de l’année; nous ne reproduirons ici qu'une partie de nos notes, quelques-unes d’entre elles pouvant nous entrainer à une discussion qui trouvera sa place plus tard. Remarquons d'abord que durant les mois d'hiver, alors que nous réveillions les Escargots après la fabrication de leur épiphragme, toute la portion antérieure de lintestin fut trouvée parfaitement neutre. Dans quel- ques cas rares, celte neutralité se maintenait sur toute la longueur de l'intestin, même après avoir réveillé l'animal et lavoir tenu quelques jours à jeun, mais actif. Le plus souvent cependant la réaction au débouché du canal excréteur du foie est légèrement acide. Le tissu du foie présente la même réaction acide pendant que celui de la glande salivaire est toujours neutre. Durant les mois d'été, au contraire, pendant la période d'activité diges- tive, les glandes salivaires écrasées sur le papier-réactif sont fréquemment alcalines, alors que les parois de l'intestin dans toute leur étendue et le liquide hépatique fournissent une réaction franchement acide. C’est là un caractère constant, quoiqu'il se manifeste avec un degré d'intensité variable. Son maximum a été constaté pendant les mois de juin et de juillet chez des Escargots qui venaient de manger et dont l'estomac était rempli de nourri- ture. Nous verrons plus loin que la réaction acide constante du sue digestif de l’Helix lui crée une situation à part parmi les autres Pulmonés, dont les uns digèrent seulement dans un milieu alcalin et les autres également bien dans un milieu acide ou alcalin. Nous avons fait usage dans nos recherches d’un papier de tournesol très sensible préparé pour nous par notre collègue M. le D' Frütiger, assistant au laboratoire de chimie biologique, qui nous a d'ailleurs donné pour la partie chimique de ce travail maints conseils dont nous le remercions sincèrement. MUQUEUSE DE L'INTESTIN, — Les parois du canal digestif soigneusement PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 47 luvées ne renferment ni ferment diastatique, ni ferment peptique ou tryp- sique. Nous avons, aux différentes époques de l’année, essayé de retirer du fer- ment digestif des parois de l’intestin, après lavoir lavé à grande eau. Notre procédé consistait tantôt à racler la muqueuse, tantôt plus simplement à couper l'intestin en petits morceaux qu’on laissait infuser dans de l’eau dis- tillée ou que l’on conservait dans la glycérine. On n’a fait usage que de la portion antérieure de lintestin, coupée à quelques millimètres du cœeum vers lequel débouche le canal biliaire. Plus en arrière, l'intestin est tellement plongé dans les lobes du foie qu’il est très difficile de l’en isoler sans les blesser. Or, il est indispensable dans de telles recherches d'opérer rapide- ment puisqu'il s’agit d’avoir à sa disposition un assez grand nombre d’intes- tins. D'ailleurs, la structure histologique de l’intestin étant la même en arrière du cœcum, il est probable que ce que nous allons dire est applicable aux parois de la portion postérieure de l’intestin. Les glandes salivaires doivent naturellement être détachées avec soin. L’intestin isolé et fendu longitudina- lement était régulièrement lavé dans de l’eau courante. EXPÉRIENCE. — L’intestin préparé comme il vient d’être dit est enlevé à douze Helix pomatia de grande taille, le 16 juin, puis placé dans une cap- sule de porcelaine préalablement pesée. Le poids de la matière employée est de 35,256; on ajoute 6 centimètres cubes d’eau distillée à 40° C, on tri- ture avec soin pendant une demi-heure, puis on filtre. Le liquide clair et incolore présente une réaction acide à peine appréciable, que nous renforçons par l’addition de trois ou quatre gouttes d’une solution d’acide chlorhydrique à 0,1 °f. Quelques fragments de fibrine crue, extraite du sang de bœuf, y sont plongés, puis le tout est placé dans une étuve réglée à 37° C. La fibrine demeure parfaitement intacte, elle ne montre aucune trace de dissolution, même après un séjour de dix heures. Des fibrilles musculaires fraiches prises au gastrocnémien de la grenouille ne montrent non plus d’autres modifica- tions que celles qui sont dues à l'acide. EXPÉRIENCE. — Les mêmes résultats négatifs sont obtenus dans les mêmes 48 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE conditions, lorsqu'au lieu d’acide on ajoute quelques gouttes d’une solution de carbonate de soude à 1 °/, jusqu’à réaction franchement alcaline. EXPÉRIENCE. — L’infusion de 34,88 d'intestin dans 6 centimètres cubes d’eau distillée, est ajoutée à de l’empois d’amidon sans qu'après une action de six heures il y ait trace de saccharification. Ces expériences ont été répétées pendant les mois de janvier (avec des Escargots réveillés), d'août et de septembre, et ont donné les mêmes résul- tats négalfs. Un de nos élèves, travaillant au laboratoire de chimie physio- logique de l’Université, reçut des liquides extraits comme il est dit plus haut el fut chargé, sans connaitre nos résultats, de les contrôler. Il arriva aux mêmes conclusions. Toutefois je copie iei une expérience qui parait contraire. EXPÉRIENCE. — 16 septembre 1885. Sonzier. Douze intestins d’Æelix pomalia (très grands individus) sont triturés par le procédé ordinaire. Après une heure et à la température ambiante de 20° l’infusion additionnée d’em- pois d’amidon réduit le réactif cupro-potassique indiquant la présence du glucose. Nous ne citons cette expérience qu'avec réserves, parce qu'elle a été faite à la campagne où je ne possédais pas l'outillage nécessaire pour donner beau- coup de précision. Un lavage insuffisant peut être la cause de cette exception el je ne pense pas qu’elle doive infirmer le caractère absolu de notre con- clusion. D'ailleurs, nous pouvons rappeler ici que Claude Bernard a trouvé que le mucus simple a parfois, dans un tissu quelconque, le pouvoir de sac- charifier lempois d’amidon. 11 dit à propos du pancréas : « Cette propriété de transformer l’amidon en sucre ne peut plus même servir à caractériser le pancréas et les glandes salivaires; et tous les tissus muqueux particulière ment peuvent l’acquérir lorsqu'on les a fait macérer dans lalcool. C’est ainsi que j'ai fait macérer dans de l'alcool la membrane muqueuse de la bouche, de l’estomac, de l'intestin grêle, du gros intestin, de la vessie, de la tra- chée, ete., puis toutes ces membranes étant desséchées dans du papier brouil- lard et remises dans de l’eau avec de l’empois, ont transformé l’amidon en PHYSIOLOGIQUE DE L’'ESCARGOT. 49 sucre, aussi rapidement que le tissu du pancréas et des glandes salivaires !. » Il serait intéressant de rechercher s’il en est régulièrement de même avec les tissus des Escargots conservés dans l’alcool, GLANDES SALIVAIRES. — Les glandes salivaires de l'Helix sécrètent une mucosilé neutre où faiblement alcaline, dépourvue de ferment diastatique. Elles ne produisent pas non plus de ferment capable de digérer les substances albuminoïdes. Cette assertion est conforme aux résultats obtenus en premier lieu par L. Fredericq chez Arion rufus ?, puis par Krukenberg 5 sur les glandes salivaires de Sepia Rondeletii, S. officinalis, S. elegans, Eledone moschata, et par Bourquelot * sur les mêmes glandes chez Octopus vulgaris et Sepia officinalis. Ce dernier auteur n’a pas trouvé que leur infusion agisse plus sur l’amidon hydraté que sur l’amidon brut, et quant à Krukenberg, il rem- place le nom de glandes salivaires chez ces animaux par celui de glandes muco-pharyngiennes (Pharynæschleimdrüsen). H est vrai que tout en obte- nant les mêmes résultats négatifs que Fredericq Ÿ relativement à l'existence d’un ferment diastatique dans les glandes salivaires du Poulpe, Jousset de Bellesme © a trouvé que les glandes salivaires inférieures de cet animal exer- çaient une action dissolvante sur les tendons et le sarcolemme. « Ayant introduit, dit-il, des fragments de muscles dans le liquide sécrété par ces glandes, je vis les faisceaux primitifs se dissocier rapidement tandis que la 1 CL. Bernar», Leçons de physiologie expérimentale, t. IE, p. 376. 2 L. Frenerico, La digestion des matières albuminoïdes chez quelques invertébrés. BULLETINS, DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, 2° série, t. XLVI, 1878, et ARCHIVES DE Z00L. EXPÉRIMEN- TALE, t. VII, p. 391, 1878. 3 KRUKENBERG, Die Verdauungsvorgänge bei einigen Cephalopoden und Pulmonaten. UNTER- SUCHUNGEN AUS DEM PHYSIOL. INSTITUTE DER UNIVERSITAT HEIDELBERG, t. Il, 1882, p. 2. 4 BourqueLor, Recherches expérimentales sur l'action des sues digestifs des Céphalopodes sur les matières amylacées et sucrées. ARCH. DE Z00L. EXPÉRIMENTALE, t. X, 1882, p. 385. 5 L. FrenErico, Recherches sur la physiologie du Poulpe commun (Octopus vulgaris). ARCH. DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE, t. VII, 1878, p. 535. 6 Jousser pe BELLESNE, Recherches sur la digestion chez les Mollusques céphalopodes. C. R. DE L’ACAD. DES SCIENCES DE PARIS, t. LXXXVIIL, 1879, p. 498. d0 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE fibre musculaire restait intacte. Le sarcolemme lui-même et les tendons paraissent se dissoudre, mais la fibre musculaire n’est jamais attaquée... Les salivaires postérieures jouent done un rôle préparatoire, elles facilitent et accélèrent la digestion des albuminoïdes, en mettant à nu la fibre muscu- laire et en la livrant à l’action du suc digestif principal. » Il est certain qu'une telle dissociation est due à Pacidité du suc sécrété par ces glandes et qui est en relation avec l'alimentation carnivore des Céphalopodes. Paul Bert ! avait autrefois insisté sur l’acidité de l'intestin tout entier chez la Seiche. Mais nos observations nous ont montré qu'il n'existe rien de sem- blable dans la glande salivaire de l'Escargot, qui est un herbivore et dont le suc buccal est neutre ou alcalin. Cependant, dans un récent mémoire, Bonardi ? a trouvé qu’en été les glandes salivaires de l’Æelix pomatia, H. nemoralis, Limax maximus, L. psarus et L. variegatus, transforment l’'amidon en sucre. C’est le seul auteur à notre connaissance qui ait constaté une telle action; nous n'avons pas été aussi heureux que lui. J'ai opéré de la manière suivante : Les glandes salivaires de vingt-cinq individus d'Aelix pomatia furent hachées et pilées dans de l’eau distillée. On obtient ainsi, après filtration, un liquide visqueux et assez épais dont la réaction est légèrement alcaline et qui est employé directement aux expé- riences. EXPÉRIENCE (juin 1884). — On suspend dans un petit tube de verre con- tenant 4 centimètres cubes de linfusion salivaire, quelques flocons de fibrine du sang de bœuf conservée dans la glycérine, quelques fibres mus- culaires de la grenouille. Puis on place le tube tantôt à l’étuve, tantôt on le maintient à la température ordinaire. Jamais trace d'action, même après dix-huit heures de séjour. ! Pau Bert, Mémoire sur la physiologie de la Seiche, dans MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DES SCIENCES PHYSIQUES ET NATURELLES DE BORDEAUX, t. V, 1867; tiré à part dans Notes d'anatomie et de physioloqie comparées, % série, Paris, J.-B. Baillière, 1870. 2 BoxarDi, Dell azione dei succhi digestivi di alcuni Gasteropodi terrestri, sull amido et sui saccarosci, Pavia, 1884; tirage à part complété d’une première note parue dans le BoLL. sc. pi Pavia, anno V, 1883, sous le titre : Intorno all azione saccarificante della saliva ed alla glicogenesi epatica in aleuni Molluschi terrestri. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 51 ExPÉRIENCE (juin 1884). — Un Arion empiricorum, affamé par un jeûne de trois semaines, prend une copieuse ration de viande de lapin. Tué immé- diatement dans le chloroforme, on l’ouvre rapidement, on lie lœsophage rempli de viande et de mucus sécrété par les glandes salivaires. On laisse en cet état pendant une heure (température 16° C), puis on examine le contenu. Les fibres musculaires lavées et portées sous le microscope ne montrent aucune modification, les stries sont normales et la dilacération se fait comme en temps ordinaire. Au contraire les portions de viande qui sont plongées dans le suc digestif de l'estomac sont altérées, ainsi que nous le verrons plus loin. Si, au lieu de viande, on donne du pain à l’Arion affamé, on retrouve la bouillie hachée dans l’œsophage sans qu’elle donne la réaction du glucose. L'expérience a été faite sur dix individus d’Arion dont on a infusé dans l'eau le pharynx et l'œsophage. ExpPÉRIENCE. — On ajoute à 10 centimètres cubes du liquide d’infusion salivaire de lAHelix, 2 centimètres cubes d’empois d’amidon. On porte le mélange à l’étuve (37° C) pendant trois, quatre, huit, dix heures. Le liquide demeure toujours sans action sur la liqueur cupro-potassique. Nous avons répété cette expérience pendant les mois de janvier (Bonardi n’a pas obtenu de résultats positifs pendant les mois d'hiver), mai, juin, juillet, août, sep- tembre et octobre, les résultats ont toujours été négatifs (les expériences de Bonardi qui lui ont donné des résultats positifs, ont été faites au mois de mai), même après un séjour de vingt-quatre heures, soit à l’étuve, soit à la température ordinaire. Nous avons essayé sans succès de faire avaler de la farine et de la dex- trine en nature à des Escargots et à des Limaces, mais la structure de leur appareil buccal semble ne leur permettre de s'attaquer qu’à des corps d’une cerlaine consistance. EXPÉRIENCE. -— Nous avons composé une pâte avec de la farine de pommes de terre, broyée avec douze glandes salivaires de l’Æelix, le mélange a été porté additionné d’eau dans l’étuve à 37° C. pendant dix heures, puis lavé à l’eau et filtré. Le liquide filtré ne renfermait pas trace de sucre. 32 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE Foncrions pu Foie. — Cette glande, que son volume considérable avait fait envisager comme fort importante par les anatomistes, fabrique des fer- ments qui peptonisent les albuminoïdes, saccharifient les féculents et saponi- fient les graisses. Elle produit aussi du glycogène en plus forte proportion qu'aucun autre tissu du corps. Elle est donc la glande digestive par excel- lence. ACTION SUR LES FÉCULENTS. — Lorsqu'on ouvre un Escargot au milieu de l'hiver on trouve ordinairement dans son intestin une quantité plus où moins considérable d'un liquide visqueux de couleur brun-verdâtre, brun, gris- foncé ou même noir, dépourvu de substances alimentaires, mais dans lequel flottent des flocons d’endothélium détaché. La réaction de ce liquide est légè- rement acide, ainsi que celle du tissu même du foie. L'absence de ce liquide en hiver et la vacuité complète de l'intestin ne sont que tout à fait exception- nelles. Nous y avons à plusieurs reprises, pendant le mois de janvier, con- staté la présence du sucre au moyen de la réaction de Trommer (précipité rouge de protoxyde de cuivre, après addition de potasse et de sulfate de cuivre à chaud). Claude Bernard avait déjà constaté la présence du sucre au mois de juillet dans le liquide stomacal de Limax rufus *. Pour obtenir des résultats bien nets il faut opérer sur un assez grand nombre d’estomaecs, une vingtaine, dont on a naturellement soin de ne pas laisser écouler le contenu. Si on ajoute le liquide stomacal en hiver dans une solution d’empois d'amidon, celui-ci ne tarde pas à se transformer en sucre. Si à une telle solution on ajoute quelques fragments de tissu hépatique, le sucre appa- rait également au bout de deux à trois heures, à la température de 37° C. A froid [+ 2° C], nous n'avons pas obtenu la modification, même après vingt-quatre heures. Nous avons remarqué qu’à cette époque, les animaux étant plongés dans le sommeil hivernal, le sucre est localisé dans l'estomac. Il doit donc être { CLaune Bervarp, Recherches sur une nouvelle fonction du foie, ANNALES DES SCIENCES NATURELLES, 3° série, t. XIX, 1853, p. 331, note. PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 55 entièrement absorbé dans la région moyenne de l'intestin, En effet, si l’on détache soigneusement la portion du rectum qui court sur le côté du sac pul- monaire et qu'on la broie dans un peu d’eau, on n'obtient plus la réaction de Trommer. Nous avons opéré sur dix rectums. D'autre part, la portion ter- minale de l'intestin ne contient pas de ferment diastatique en hiver, tandis qu’en été il nous est arrivé d’en rencontrer, alors cependant que tout le sucre formé est déjà absorbé. Pendant les mois d'été, juin, juillet et août, les Escargots ramassés dans les bois et immédiatement ouverts montrent généralement l'intestin large- ment dilaté par les aliments végétaux baignés d'un abondant liquide brun- rougeâtre ou verdâtre. La réaction de ce liquide qui est constamment déversé par le canal excréteur du foie en pleine activité est franchement acide, Son action saccharifiante sur l'empois d'amidon, la mie de pain et la farine non hydratée, est très puissante, D'ailleurs, ce contenu stomacal renferme du sucre déjà formé, On le constate en détachant sur quelques individus l'intestin antérieur jusqu’au cœcum en ayant soin de ne pas entrainer des fragments du foie. Le plus avantageux pour celte opération est de poser une ligature aussitôt l'animal ouvert, au niveau des deux points extrêmes, puis de couper en arrière des ligatures ; avec quelques précautions on isole ainsi l'estomac et son contenu sans rien en perdre. Puis, on place les intestins dans une éprouvette avec un peu d’eau, on délaie, on filtre et l’on essaie le liquide filtré à la liqueur cupro-potassique. Ce même liquide, débarrassé de son sucre dans un dia- lyseur minuscule, conserve le ferment diastatique qui lui permet de saccha- rifier de l’empois d’amidon en moins d’une heure à la température ordi- naire. Le ferment n'est pas seulement dans le liquide déversé par le foie, mais dans le tissu du foie lui-même. ExPÉRIENCE. — Nous enlevons au mois de juin la plus grande partie des lobes du foie chez dix Helix, puis, après les avoir rapidement lavés dans l’eau distillée, on les triture dans un mortier de porcelaine avec un peu de sable siliceux. Le liquide fortement coloré en brun et rempli de granulations est D4 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE d'abord filtré deux fois en s’aidant de la trompe, pour activer la filtra- tion, qui sans cela est extrêmement lente. Le liquide, légèrement coloré, renferme toujours du sucre dont on le débarrasse par la dialyse. On ajoute À centimètre cube de cet extrait à 10 centimètres cubes d’une solution d'empois d’amidon dans un tube A. Dans un tube B, servant de témoin, on place 10 centimètres cubes d’em- pois d’amidon sans addition de liquide hépatique. Les deux tubes sont exposés dans l’étuve à 37° C. Examinés deux heures plus tard, le tube A donne un abondant précipité de cuivre avec le liquide de Trommer, le tube B demeure intact. Nous nous sommes également servi avec succès dans d’autres expériences analogues de la réaction de Bôttcher. On ajoute au liquide une solution alea- line d'oxyde de bismuth, puis on fait bouillir pendant quelques minutes. Lorsqu'il y a du sucre l’oxyde de bismuth est réduit, le liquide passe au gris, puis au noir et laisse déposer une poudre noire f. Si, au lieu d’empois d'amidon, on place dans le tube qui contient le liquide ferment de la farine en poudre ou des fragments de mie de pain, la trans- formation s'effectue également, mais elle ne devient bien nette qu'après plu- sieurs heures. Nous avons obtenu les mêmes résultats en opérant avec le foie de l’Arion empiricorum. Le foie d’Helix renferme donc, en hiver comme en été, mais beaucoup plus abondamment dans cette dernière saison, un ferment analogue à celui de la salive des animaux vertébrés, qui transforme l’amidon en sucre. De plus, il fabrique du sucre dans son propre tissu aux dépens vraisemblable- ment du glycogène qu'il renferme et dont nous allons parler. Ce ferment n'agit que très faiblement aux basses températures, en été il est beaucoup plus actif qu'en hiver ainsi qu'à la température de 37-38° C. d’une étuve. De plus lébullition le détruit; la réduction de l’oxyde de cuivre n’a, en effet, plus lieu si on fait bouillir préalablement le liquide dans l’éprouvette. 1 Voir, pour plus de détails, les traités de Chimie physiologique de Gautier, Hoppe- Seyler, Gorup-Besanez, ou encore le Manuel du laboratoire de physiologie de Burdon-San- derson, Foster et Brunton. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. nb) Le sucre produit dans le foie et pendant la digestion est absorbé dans l'estomac; on n'en trouve pas dans l'intestin terminal. Nous avons dit que le suc digestif sécrété par le foie reflue dans l'estomac qui est le siège de la digestion. C’est là aussi qu'a lieu principalement l’ab- sorption du sucre, car on ne rencontre cette substance dans la portion termi- nale de lintestin que dans des cas exceptionnels à la suite d’une alimenta- tion exelusivement féculente. EXPÉRIENCE. — On recueille au mois de juin les excréments d’un grand nombre d’Helix nourris de feuilles de chou, nous en avons eu jusqu’à 3 grammes, on les délaie dans un peu d’eau, on filtre et l’on recherche le sucre. Résultat négatif. On examine de la même manière 15,980 d’excréments d’Ayrion. Résultat négatif. EXPÉRIENCE. — On recueille les excréments déposés par cinquante Helix nourris de pain blanc. Faible réduction de l’oxyde de cuivre. Les excréments, grisätres et plus durs, renferment done un peu de sucre. ExpéRIENcE. — Le 14 août 1885. On enlève rapidement sous l’eau l'intestin de trente Æelix ramassés dans les bois. La portion antérieure jus- qu’au cœcum est mise à part de la portion postérieure depuis sa sortie du foie jusqu’à l'anus. On traite les deux parts de la même manière en les tri- turant dans l’eau; l'extrait filtré est essayé à la liqueur cupro-potassique qui est abondamment réduite dans le premier cas, et pas du tout dans le second. La petite quantité de substances sur laquelle nous opérions nous a tou- jours empêché de faire des dosages. Pour cela il faudrait une portion de sub- stances telle, qu'elle est incompatible avec la rapidité indispensable dans de pareilles recherches. Il faut au moins vingt minutes pour extraire l'intestin, et je n'aurais pu opérer sur un nombre aussi grand que celui qui est indiqué ci-dessus, si je n'avais recouru à l’aide de quelques élèves. En été, les tissus se putréfient si vite qu'il faut absolument éviter cette cause d'erreur. 56 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE Nous n'avons pas remarqué chez l’Helixæ une alternance de sécrétion « sucrée » et de sécrétion « biliaire, » telle que l’a observée Claude Bernard chez Limax *. Mais nous retenons une observation de l’illustre physiologiste qui est en parfait accord avec ce que nous venons de dire : « Chez Limax, l'absorption du liquide parait se faire spécialement dans lestomac où la sécrétion sucrée s'accumule sans qu'il semble en passer des quantités nota- bles dans l'intestin. » Malheureusement l’auteur n'entre pas dans des détails sur ses expériences, il ne dit pas s’il a directement cherché le sucre dans les différentes parties de Pintestin. Du cLycocÈne. — Le glycogène a élé constaté dans le foie des Vers, des Lamellibranches, des Gastéropodes, des Crustacés et des Insectes par Claude Bernard lui-même ?. Depuis lui, Hoppe-Seyler 5, Bertkau #, Krukenberg *, Max Weber 6, Frenzel 7, Bourquelot#, etc., ont reconnu sa présence non seu- lement dans le foie des animaux inférieurs, mais dans à peu près tous les autres tissus de l'organisme, en sorte que chez les invertébrés adultes, il est généralisé dans la masse entière du corps comme c’est le cas, d’après Claude Bernard, chez les embryons des vertébrés. Dès le début de nos études sur l'Escargot, nous avons recherché cette substance dans les coupes histologi- ques que nous étions appelé à faire, et particulièrement dans l'intestin et ses annexes, La publication, survenue l'an dernier, de la vaste enquête à laquelle 1 CL. BERNARD, loc. cit., p. 333. 2 CL. BernaRp, Loc. eit., p. 330, et Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux ani- maux et aux végétaux, t. I, p. 110. 3 Horre-SeyLer, Unterschiede in chemischen Bau und der Verdauung hüherer und niederer Thiere. PrLücer’s ARGHIv., t. XIV, p. 399. | 4 Berrkau, Ueber den Bau und die Funktion der sog. Leber bei den Spinnen. ARCH. FÜR MIKROSK. ANATOMIE, t. XXII, p. 224. (Cet auteur ne mentionne le glycogène dans le foie des Araignées que d’une manière douteuse.) 5 KrukENBERG, Ueber Reservestoffe. Vergl. — Physiol. Studien. 2e Abth, 1880, p. 59. 6 Max-Weger, Ueber den Bau und die Thätigkeit der sog. Leber der Crustaceen. Arc. F. MIKROSK. ANAT., t. XVII, p. 459. T FREUzEL, Ueber die Mitteldarmdrüse der Crustaceen. MiTTH. AUS D. Z00L. STATION ZU NrAPEL, t. V, 1885. 8 BourqueLor, Recherches sur les phénomènes de la digestion chez les Mollusques céphalo- podes. ARCH. DE Z00L. EXPÉRIMENTALE, 2° série, t. III, 1885. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 57 s’est livré Barfurth ! sur la répartition du glycogène chez un grand nombre d'animaux, el en particulier chez les Gastéropodes, me dispense d’insister sur l'historique de la question. Je donnerai les résultats auxquels je suis arrivé seulement en ce qui concerne le foie de PHelix. Voici quelle a été ma méthode de recherche : L'animal chloroformé était rapidement ouvert et le foie détaché, puis on le plongeait dans un excès d'alcool absolu pendant quelques minutes. Le glycogène est, en effet, soluble dans l’eau; or, si on le plongeait dans l’eau bouillante ainsi qu'on le pratiquait autrefois pour la recherche du glycogène, on obtiendrail une coloration diffuse ; c’est pourquoi nous avons suivi le pro- cédé dont il va être question. Après durcissement dans l'alcool absolu, le foie est détaillé en coupes aussi minces que possible que l’on examine dans une goulle de solution alcoolique d’iode ou d’une solution diode dans l'iodure de potassium ?. On sait que l’iode a la propriété de colorer en jaune clair tous les tissus, mais elle colore en brun ou brun-rougeätre les dépôts de glycogène reposant dans les cellules. Cette coloration brune, sur laquelle est basée la recherche micro-chimique de l’amidon animal, varie beaucoup dans ses teintes selon les tissus et l’état dans lequel le glycogène s’y rencontre. On trouvera beaucoup de détails sur ces nuances dans le travail de Barfurth 5 auquel je renvoie. Dans la plupart des cas, la réaction se montre avec une telle netteté sur les coupes, surtout au voisinage des noyaux cellulaires, autour desquels le glycogène se concentre en masses amorphes, que le doute n’est pas possible. Il faut savoir cependant qu'en cas de doute, on peut laisser la coupe dans une goulte de glycérine à laquelle on ajoute un peu de la solution d'iode. Si la coloration disparaît au bout de quelques temps, c’est qu’elle était effecti- 4 BarrurT, Vergleichend-histochemische Untersuchungen über das Glycogen. ArcH. FÜR MIKROSK. ANATOMIE, t. XXV, 1885, p. 259. ? Voici les proportions dont j'ai fait usage ainsi que Barfurth : ET 0 cc D UC 500 (Ouurede PolasS NE en er eee 3 GE coûte 010 9 CONSNRRNNRNNE 1 3 BarrurTE, loc. cit., p. 261. 58 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE vement due au glycogène, attendu que la combinaison de celui-ci avec liode est soluble dans la glycérine, aussi bien que le glycogène pur. Lorsqu'on tient à se rendre compte de la teneur comparative du glyco- gène dans différents foies, il faut naturellement multiplier beaucoup les coupes et en pratiquer sur plusieurs lobes de chaque foie. Une recherche précise serait très minutieuse et prendrait beaucoup de temps; on est obligé presque toujours de s'en tenir à une approximation. Avec un bon réactif, fraichement préparé, on reconnait tout de suite si le foie qu'on a sous les veux est riche où pauvre en glycogène. Concurremment avec le procédé des coupes, on peut se contenter de dilacérer la glande après durcissement à l'alcool, dans la solution d’iode. Lorsque la glande est riche de glycogène, celle-ci remplit les cellules parfois à tel point qu'après la coloration il est impossible de voir les noyaux; lorsque la glande en est pauvre, on aperçoit ça et là quelques taches brunes plus ou moins granuleuses, appli- quées contre la paroi cellulaire ou contre le noyau. La forme normale du glycogène, celle sous laquelle on le trouve le plus souvent dans le proto- plasma cellulaire, est la forme de vésicules ou de gouttelettes semblables à de la graisse. Sur des foies qui ont séjourné dans l’eau, le glycogène a perdu sa forme, il a diffusé dans les cellules dont le protoplasma tout entier se colore par l'action de liode. Nous avons dosé une seule fois, au mois de juin de cette année, la teneur du glycogène dans l'ensemble des tissus d'Escargots de grande taille et en pleine activité fonctionnelle. Et, afin de comparer avec les chiffres publiés par Bourquelot pour les Céphalopodes, nous avons exactement suivi sa méthode qui n’est autre que celle de Landwerr ‘, légèrement modifiée. Voici, brièvement rapportée, quelle est la série des opérations. Un kilogramme d’Escargots débarrassés de leur coquille et lavés à grande eau, sont plongés dans un excès d’eau bouillante additionnée de lessive de soude à raison de 3 centimètres cubes par litre, où on les laisse cuire pen- 1 LaNpwerr, Eine neue Methode zur Darstellung und quantitativen Bestimmung des Glyco- gens. ZEITSCHR. F. pHYS10L. CHEMIE, t. VIII, 1884, p. 165. BourqQuELoT, Sur le dosage du glycogène. JOURNAL DES CONNAISSANCES MÉDICALES, mars, 1884 et loc. cil., ARCH. DE Z00L. EXPER., t. LI, 1885, p. 3. < PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 59 dant un quart d'heure. Puis on les triture avec soin et on les cuit de nouveau dans une nouvelle quantité d’eau alcalisée, on décante et on lave sur un filtre avec de l’eau bouillante. On réunit les bouillons que lon reporte à l’ébullition. On précipite les substances albuminoïdes non coagulées avec de l’acétate de zinc, après avoir neutralisé la liqueur au moyen de Pacide acé- tique. Après filtration du liquide, on ajoute du perchlorure de fer et on pré- cipite de nouveau avec de la lessive de soude. Le précipité ainsi obtenu est une combinaison de glycogène et de peroxyde de fer. On le lave à l’eau dis- tillée jusqu’à ce que le liquide filtrant ne précipite plus par le nitrate d’ar- gent. « On met alors le précipité dans une capsule placée sur un bain-marie, maintenu à 80°; on ajoute une petite quantité d’eau ; puis 40 grammes d'acide tartrique pulvérisé. On agite jusqu’à dissolution complète et on jette sur un filtre. » « Le liquide rouge-brun qu’on obtient ainsi est refroidi convenablement, puis additionné rapidement d'acide chlorhydrique concentré, jusqu’à ce que la couleur soit devenue jaune de brun-foncé qu'elle était, On verse alors la solution dans de lalcool à 90°. Le glycogène se précipite en flocons blancs. » Le précipité est assez volumineux, on le recueille sur un filtre, on le lave, puis on le dessèche soigneusement au bain-marie avant de le peser. Sur les 1,000 grammes de viande d'Escargot ainsi traités, j'ai obtenu 57,650 de glycogène. Il serait sans doute intéressant de répéter plusieurs fois un tel dosage aux différentes saisons, et d'étudier l'influence de l'alimentation sur le total du glycogène; mais l'opération est si longue que nous n'avons pas eu le loisir de la renouveler. D'ailleurs, le chiffre que nous avons obtenu rentre dans la moyenne de ceux qui ont été publiés par Bourquelot, qui sont chez les moules communes de 4,50 dans un cas et de 85,35 dans l’autre, par kilogramme de chair fraiche". ExPÉRIENCE. — Dans l’état d'alimentation normale, ce sont les cellules du tissu conjonctif du foie dans lesquelles se montre le glycogène. Si, au mois de { BourquELoT, loc. cit., p. 6. 60 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE juin, on examine micro-chimiquement le foie d’un Escargot en pleine diges- tion de substances végétales, on voit que les éléments conjonetifs sont tous gorgés de glycogène. Ce sont les grandes cellules plasmatiques des lamelles conjonctives intercalées entre les lobules qui en contiennent le plus. L'iode y fait apparaitre des taches brunes qui ont la forme de vésicules sphériques ou ovoïdes ou bien qui sont irrégulières. Dans ces conditions normales el durant toute la belle saison, nous n'avons qu'exceptionnellement constaté de telles taches brunes au sein des follicules glandulaires eux-mêmes, les cel- lules hépatiques nous en ont toujours paru dépourvues; quant aux cellules- ferment, il en est généralement de même. On serait donc tenté d'admettre d'après cela que la distinction, faite par Claude Bernard, d'un tissu hépatique et d’un tissu glvcogénique dans le foie, est applicable aux Gastéropodes. Mais nous verrons bientôt qu'il suffit d'augmenter la dose des matières féculentes mangées par l’Helix, pour que cette alimentation, extrêmement propice à la production du glycogène au sein des tissus, le fasse apparaitre dans la por- tion glandulaire du foie. D'ailleurs, Barfurth ‘ dit qu’on trouve déjà sur une Limaxæ nourrie de feuilles de chou, le glycogène, non seulement dans les cel- lules du tissu conjonetif, mais encore dans l’endothélium folliculaire lui-même. Et le même auteur, après avoir rapporté ses expériences sur l’alimentation de l’'AHelix avec du pain, s'exprime ainsi : La séparation d’un foie glycogénique et d’un foie hépatique adoptée par Claude Bernard doit être abandonnée. Tout le foie peut s’infiltrer de glycogène lorsque la nourriture est abondante. Selon nous, cette infiltration ne se produit qu'à la suite d’un régime amylacé. Expérience. — Le glycogène augmente à la suite d'une alimentation riche en fécule, il diminue par une alimentation riche en albuminoïdes. L'expérience est très simple et très concluante lorsqu'on l’effectue chez l'Arion, qui est omnivore. Nous prenons six individus d’Arion au mois de juin, affamés par un jeûne de quinze jours, et nous les divisons en trois groupes de deux individus; le groupe a reçoit de la viande de bœuf, le groupe b du pain blanc humide, et le groupe c des feuilles de chou. Après 1 BarFrurTa, loc. cit., p. 328. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 61 quatre jours de cette nourriture, on les sacrifie et on recherche micro-chi- miquement le glycogène. Si on conserve les coupes pratiquées dans le foie des six individus, leur examen comparatif montre que, tandis que les coupes du groupe b sont farcies de glycogène et qu’on en trouve dans tous les tissus de la coupe, chez celles des groupes a et € il y en a sensiblement moins et il y est seulement localisé dans le tissu conjonetif. Les coupes du foie de l'individu nourri exclusivement à la viande sont les plus pauvres en glycogène. Il vaudrait la peine de recommencer cette expérience sur un nombre suf- fisant d’Arion pour qu'il soit possible de peser la quantité de glycogène. On sait, en effet, combien les physiologistes contemporains sont peu d'accord sur la classe d'aliments d’où l'organisme tire les éléments du glycogène. Les expériences faites dans le but de connaitre l'origine du glycogène chez les Vertébrés, le font provenir tantôt des féculents, tantôt des albuminoïdes. Les observations qui viennent d’être rapportées seraient, par analogie, favorables à la première de ces opinions. EXPÉRIENCE. — À la suite d'une alimentation féculente, prolongée pendant plusieurs jours, le glycogène normalement localisé dans le tissu conjonctif du foie envahit les cellules glanduluires. En nourrissant des Escargots avec de la pâte de pain blanc. régime auquel ils s’habituent après avoir été affamés, on constate une production excessive de glycogène et les coupes accusent sa présence, non seulement dans le tissu conjonetif qui est selon Barfurth celui qui, dans tous les organes, est le plus apte à recevoir les dépôts de glycogène, mais aussi dans les grandes cellules qui tapissent les follicules. Après huit jours de régime au pain, la réserve glycogénique est telle, que si l’on vient à faire cuire le foie dans l’eau pendant un quart d'heure, puis qu'on le traite par la solution d'iode, sa masse entière se colore en rouge-brun. EXPÉRIENCE. — Le glycogène fait défaut dans le foie de l'Hélix, un mois à cinq semaines après le début du sommeil hivernal. L’Escargot possède dans son foie, au moment où il se plonge dans son 62 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE sommeil d'hiver, une provision de glycagène qui va décroissant toujours. Nous avons suivi vingt Escargots pendant l'hiver 1884-1885 en les tuant deux par deux tous les huit jours. Huit jours après la confection définitive de Pépi- phragme, la proportion de glycogène parait avoir déjà notablement diminué. Après quinze jours, la solution iodée ne fait déjà plus apparaitre de coloration dans les faisceaux fibrillaires et les petites cellules de substance conjonctive. Après trois semaines, les cellules plasmatiques elles-mêmes en sont assez pauvres. En comparant des séries de coupes pratiquées dans diverses direc- tions, on acquiert la certitude que cette pauvreté est générale. Elle s’accentue à la fin du premier mois, à tel point que certains individus paraissent com- plètement dépourvus de glycogène. Toutefois, nous croyons devoir indiquer la fin de la cinquième semaine comme terme extrême au delà duquel la con- sommation du glycogène est achevée, Il parait, d'après Claude Bernard ?, qu'un phénomène semblable se mani- feste chez les animaux vertébrés qui hivernent. « Parmi les matières qui doivent servir à la nutrition permanente de l'animal engourdi, il existe tou- jours une grande quantité de matière glycogène. Les grenouilles nous pré- sentent le même fait. Au printemps, l'activité vitale s’éveille, la nutrition longtemps engourdie se ranime. Aussi, à ce moment des rénovations orga- niques, la matière du foie se consomme; l'organe est alors noirâtre, très petit et contient peu de glycogène et de sucre. Cest à la fin de la saison, vers l'automne, que l'animal se trouve arrivé au plus haut degré de vigueur, et que la vie atteint, chez lui, toute son intensité. C’est à ce moment-là qu'il faut examiner le foie de l’animal. Le foie contient alors du sucre et beaucoup de matière glycogène. » Expérience. — Lorsqu'on soumet FHélix à l'inanition au milieu de l'éte, son glycogène hépatique disparait plus vile qu'en hiver. On n'en trouve déjà plus après quinze jours *. 1 CLaupe Bervan»D, Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végé- taux, t. II, p. 102. 2 D'après les chiffres publiés par Barfurth dans son tableau I, il parait que le genre Limax consomme sa réserve de glycogène moins vite que l’Helix. (Voir BarFuRTH, loc. cit.) PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 63 Le glycogène est consommé après sa tranformation en sucre sous l’in- fluence du ferment diastatique du foie. L'activité de tous les organes étant plus grande en été qu'en hiver, il n’est pas surprenant qu'il en soit de même pour les cellules dans lesquelles s’élabore le ferment. Sept individus de P'Helix pomatia furent nourris pendant quatre jours avec de la mie de pain pendant le mois de juin. L'un d’eux, ouvert tout de suile comme témoin, montra son foie gorgé de glycogène. Les cinq autres furent maintenus à jeûn sous une eloche de verre dont l'humidité fut entretenue et contre les parois de laquelle ils ne cessèrent de se promener fréquemment. L'un d'eux fut sacrifié huit jours après le début de la période d’inanition. Son foie, beaucoup moins riche déjà en glycogène (localisé dans le tissu conjonctif), en renfermait cependant encore sous forme de gouttelettes dans les grandes cellules conjonetives. Le dixième jour, encore quelques gouttelettes dans les cellules conjonctives. Le douzième jour, pas trouvé de glycogène dans les coupes du foie de l'individu sacrifié. Le treizième jour, trouvé des traces de glycogène se colorant en brun-rouge dans les couches périphériques du protoplasma des cellules conjonetives. Le quinzième jour, aucune trace dans le foie des deux derniers individus en expérience. En résumé, le glycogène est normal dans le tissu du foie de l'Escargot, il y joue le rôle d'une substance nutritive de réserve, qui se transforme en sucre sous l'influence du ferment diastatique de l'organe, et sa proportion subit des variations selon la nature de l'alimentation el selon l'époque à laquelle on l'examine. ACTION DU SUC DIGESTIF SÉCRÉTÉ PAR LE FOIE SUR LES ALBUMINOÏDES. — Les premières recherches relatives à l’action du sue, extrait du foie des Gasté- ropodes, sur les albuminoïdes, sont dues à L. Fredericq et à Krukenberg. — Jousset de Bellesme, Paul Bert, Bourquelot et les savants professeurs des Universités de Liège et de Jéna que nous venons de citer, les ont étendues aux Lamellibranches et aux Céphalopodes !. Il résulte de ces travaux que le { Voir les mémoires déjà cités de ces auteurs, et en outre Jousser pe BELLESNE, Recherches 64 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE suc du foie des Mollusques agit toujours sur les albuminoïdes (fibrine, albu- mine), tantôt seulement dans un milieu alcalin ou acide, tantôt aussi bien dans les deux milieux. De là, la supposition que le foie des Mollusques fabrique simultanément où séparément deux ferments analogues à la pep- sine où à la trypsine de l'estomac et du pancréas des animaux vertébrés. Nous allons voir que chez lAelix pomatia, W ne peut être question que d’un ferment peptique (kelico-pepsine de Krukenberg), puisque la réaction du foie et du contenu stomacal est toujours acide chez lui et que, d'autre part, l'addition d’une solution alcaline, au suc retiré du foie, loin d'activer son pouvoir digestif ainsi que l’a constaté Fredericq chez Arion rufus, l’anéantit complètement. Ce dernier point nous parail surtout décisif, mais nous devons signaler également que l’ensemble des phénomènes de la digestion de la fibrine, son gonflement précédant sa dissolution, sa trans- formation en syntonine avant la peptonisation, sont également favorables à la théorie qui veut que le ferment du foie de l'Helix soit un ferment peptique. Dans le remarquable travail cité de Bourquelot, ce savant discute avec beaucoup de sagacité la question de savoir si deux ferments tels que la pepsine et la trypsine peuvent réellement coexister dans le foie du poulpe. Nous savons que tandis que la pepsine ne digère que dans un milieu acide, la trypsine peptonise les albuminoïdes dans un milieu neutre, alealin ou fai- blement acide, en sorte que, quoique le liquide hépatique des Céphalopodes soit acide, cela ne signifie pas que le ferment ne puisse être de la trypsine dans tous les cas, Frédéricq et Krukenberg ont constaté que la macération aqueuse du tissu hépatique du poulpe digère la fibrine en solution acide et en solution alcaline et leurs recherches ont été confirmées par Bourquelot. Existe-t-il donc deux ferments comme l'ont admis les premiers expérimen- sur le foie des Mollusques céphalopodes, C. R. DE L'ACAD. DES SCIENCES DE Pas, t. LXXXVII, 1879, p. 304. On trouvera une bibliographie étendue relative à la physiologie de la digestion chez les Invertébrés et les Poissons dans KkukeNBERG : Grundzüge einer vergleichenden Physiologie der Verdauung in VerGs. Puysioz. VortrAGE, IL. Heidelberg, 1832. On trouvera également un bon résumé de nos connaissances sur cet objet dans Bour- QUELOT : La digestion chez les animaux invertébrés. REVUE SCIENTIFIQUE, 23 juin 1883, p. 785. PHYSIOLOGIQUE DE L’'ESCARGOT. 65 tateurs ? Bourquelot a constaté &) que la fibrine ne se gonfle pas plus dans le suc hépatique du poulpe que dans le suc pancréatique des Vertébrés supé- rieurs; b) qu’elle se transforme en une substance particulière, la globuline, ainsi que c’est le cas dans le suc pancréatique, et qu’à cette phase, le liquide ne renferme pas de synlonine, alors même que le milieu est acide (ce qui devrait être le cas si le ferment en action était de la pepsine); c) que la digestion des muscles (de crustacés) par la sécrétion hépatique naturelle ressemble surtout à leur digestion par le sue pancréatique; d) que cette sécrétion naturelle détermine la digestion du lait à la manière du suc pan- créatique et non du suc gastrique. Tous ces faits indiquent, par conséquent, qu’en temps normal la digestion des substances protéiques par le suc hépa- tique du poulpe est une digestion identique à la digestion pancréatique chez les animaux supérieurs. Cependant Bourquelot lui-même cite une expérience qui tend à prouver que ce même suc renferme de la pepsine. Ayant dissous dans de l'acide chlorhydrique à 2 °/,., 25 centigrammes des ferments extraits du foie de poulpe et y ayant plongé quelques fragments de fibrine de mouton, il vit à la température de 35° ceux-ci se gonfler, se désagréger; puis, après douze heures, ayant neutralisé le liquide, il obtint un abondant précipité de syntonine, tandis que dans une autre portion du liquide il obtint la réaction des peptones. La fibrine avait donc été dissoute comme si elle eût été digérée dans du suc gastrique. Pourtant un doute subsistait encore sur l'existence de la pepsine, car on sait que la fibrine traitée par l'acide chlorhydrique seul se transforme en syntonine; l'expérience précédente aurait, par conséquent, pu conduire au même résultat sans que le sue extrait du foie renfermät de ferment peptique. Bourquelot a surmonté la difficulté en suivant une voie indirecte. Il s'est assuré d’abord que le ferment diastatique qui est élaboré par le foie du poulpe comme par celui de l’'Escargot est détruit par la pepsine dans un milieu acide, et que c’est là une propriété spéciale à ce ferment; il a expérimenté avec des solutions de pepsine dans l'acide chlorhydrique, puis avec du suc gastrique de lapin, tous deux mélés à de la salive, et il a vu que lorsque l'acidité était suffisante (c’est-à-dire lorsque la proportion d'acide dépassait 0,50 /,,), la salive perdait la propriété de saccharifier l'amidon. Or, en acidulant avec l'acide H. CI. l'extrait de foie de poulpe qui 9 66 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE renferme une dose notable de diastase, jusqu’à lui donner une acidité égale à 2 °/, On constate, en neutralisant le liquide après quelques heures, que sa diastase à été détruite et a complètement perdu la faculté de saccharifier l'empois d'amidon. D'où Bourquelot conelut que l'extrait de foie de poulpe renferme bien de la pepsine, mais que normalement elle demeure inutilisée à cause de la trop faible acidité du sue digestif, insuffisance d’acidité qui permet justement à ce dernier de conserver le pouvoir saccharifiant sur les féculents. Chez l'Escargot, toutes les difficultés dont il vient d’être question, et qui ont élé si ingénieusement résolues par Bourquelot, ne se présentent pas, car nous n'avons recueilli aucun fait qui impose l'hypothèse de deux ferments digestifs des substances protéiques dans le produit de sécrétion du foie. Celui-ci est toujours acide en été et en hiver, el sans que nous ayons réussi à mesurer le degré de cette acidilé, la réaction sur le tournesol pen- dant la période d'activité digestive est si intense qu’elle dénote une assez forte proportion d'acide. Cet acide doit bien, d'autre part, être fabriqué dans le foie et non pas résulter des aliments ingérés, puisque le tissu du foie possède celle réaction et qu'on la retrouve dans le suc intestinal même à la suiteïde longs jeünes. Nous avons, comme nos prédécesseurs, étudié la question, en nous aidant de digestions artificielles pratiquées soit au moyen du suc contenu dans l’estomac, soit au moyen d'extraits du foie préparé frais ou après infusion dans la glycérine, selon la méthode de Wittich. Ayant toujours sous la main des Escargots vivants, je n'ai d’ailleurs qu'exceptionnellement utilisé ce der- nier procédé. L’extrait de foie est toujours coloré et assez opaque, sa filtra- tion est extrémement lente, il faut l’employer dans de petits tubes, dans lesquels on suspend la substance que l’on étudie. L’extrait aqueux est géné- ralement plus puissant que l'extrait dans la glycérine. Les liquides additionnels dont j'ai fait usage sont les suivants : Solutions d'acide chlorhydrique à 0,1 °,, à 0,5 °, et à 4°. Solution d'acide oxalique à 4 ‘4 et à 0,5 °/,. Solution de carbonate de soude à 2 °/,. Mais nous avons suivi pas à pas la marche de la digestion dans l'intestin PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 67 lui-même, tantôt chez PHelix, tantôt chez l'Arion. Nous tuons animal un temps plus ou moins long après lui avoir fait manger une substance déter- minée. Ces animaux sont très favorables à l’application de cette méthode, il suffit de les emprisonner dans un bocal renfermant une seule espèce de nour- riture après les avoir fait jeuner. Les Escargots supportent le jeûne beaucoup mieux que les Limaces, ils sont en pleine santé à la suite d’un jeûne de six à huit semaines, tandis qu'après trois semaines seulement, beaucoup d’Arion meurent déjà. Nous avons de la sorte fait prendre à des Æelix dont l'intestin était vide d'aliments, ou à peu près, du blanc d'œuf cuit (ils montrent même une grande gourmandise pour cette substance) du jaune d'œuf, de la graisse de bœuf crue, du lard cru, du pain et de la viande de bœuf et de lapin. Cependant ils montrent peu de goût pour ce dernier aliment dont les Arion, au contraire, se gorgent avec délices. C’est pourquoi les expériences rela- tives à la viande ont été faites surtout sur cette dernière espèce. ExPpÉRIENCE. — Nous placçons, le 25 juillet, dans deux petits tubes à essai, environ 3 centimètres cubes du liquide rouge-brun retiré des estomacs d’Es- cargots qui avaient jeüné depuis vingt jours. La réaction est faiblement acide. Nous suspendons dans chaque tube quelques faisceaux de muscles lavés de la cuisse d’un lapin fraichement disséqué. L'un des tubes 4, est placé à l’'étuve chauffée à 38° C; l’autre B, est maintenu à la température du labo- raloire, 48° C. Après une heure, pas de changements appréciables. Ceux-ci se manifestent dans le tube À au bout de la quatrième heure : les faisceaux musculaires se dissocient, se gonflent, le liquide se trouble, la striation trans- versale examinée sur quelques parcelles du muscle n’est plus distincte. Après sept heures, les muscles sont entièrement dissous. Les mêmes phénomènes se montrent dans le tube B à partir de la sixième heure, mais après vingt heures, le liquide très troublé contient encore des fibres non entièrement dissoutes. EXPÉRIENCE. — La même que la précédente. On place dans le liquide des fibres musculaires de bœuf et d’écrevisse. Ces dernières sont complètement dissoutes à chaud au bout de six heures, et à froid après dix heures seule- 68 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE ment. La viande de bœuf est plus résistante, la digestion dans Pétuve demande huit heures et vingt heures à la température ordinaire. EXPÉRIENCE. — La même que la précédente, mais on place dans les tubes de la viande de bœuf et d’écrevisse cuite. Après vingt heures, la première n'est digérée, ni à chaud, ni à froid. Après vingt heures, les muscles des pinces d’une écrevisse cuite sont digérés dans les deux tubes. Krukenberg indique comme un caractère de l'hélicopepsine qui la distingue de la pepsine des vertèbres, qu’elle ne dissout pas la fibrine cuite. On vient de voir que ce caractère n’est pas absolu. ExPÉRIENCE. —— La même que les précédentes. On place dans les tubes des flocons de fibrine crue de sang de bœuf. À chaud, dissolution complète après dix heures. À froid la fibrine est entièrement digérée après vingt heures. ExpÉRIENCE. — La même que la précédente, avec cette différence que la fibrine a été bouillie. Des traces de dissolution sont observées dans le tube placé à l'étuve après vingt heures. Expérience. — La même que les précédentes. On place dans les tubes contenant du liquide stomacal de petits cubes d’albumine cuite de l'œuf de poule, Pas trace d'action après vingt heures, ni à chaud, ni à froid. ExpÉRIENCE. — La même que les précédentes. On place dans les tubes quelques fragments de caséine du lait de vache. Après vingt heures, aucune modification notable. ExpéRiENcE. — On mélange un demi-centimètre cube d'huile d'olive à 2 centimétres cubes d’eau distillée, on agite, puis on laisse reposer. L'huile revient à la surface. On ajoute le contenu stomacal de deux Æelix ayant jeuné depuis huit jours, on agite de nouveau, l'huile revient à la surface. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 69 Après dix heures, on agite de nouveau, pas d’émulsion. Après vingt heures, on ajoute encore, pas d’émulsion. Nota. Si au lieu de faire agir du sue stomacal puisé chez des animaux ayant Jeüné, on recueille celui qui est contenu dans l'estomac chez des individus en pleine digestion, on obtient des résultats plus rapides que ceux qui viennent d’être exposés. Nous avons donc des raisons de croire que le liquide stomacal qui séjourne chez les Escargots à jeün est un résidu de la sécrétion hépatique qui à déjà usé son pouvoir digestif sans l'avoir épuisé. En effet, nous allons voir que l'extrait aqueux du foie possède un pouvoir digestif beaucoup plus intense que la sécrétion contenue dans l'estomac. EXPÉRIENCE (juillet 1885). qui ont été submergés dans l’eau pendant vingt-quatre heures et qui ne sont Nous enlevons rapidement sur dix Helix pas encore morts, les derniers tours de spire renfermant le foie; nous les débarrassons de l’appendice de la glande albuminoïde, de la glande herma- phrodite et de son canal exeréteur, ainsi que de l'intestin autant que pos- sible, puis nous les triturons dans un mortier de porcelaine avec un peu d’eau. Nous obtenons ainsi un liquide granuleux brunâtre que nous filtrons d’abord à travers de la mousseline, puis à travers un morceau de toile, enfin à deux reprises à travers du papier-filtre. Nous obtenons ainsi un liquide grisätre qui renferme encore un nombre considérable de granulations (sa préparation demande huit heures, les filtrations sont très lentes), mais qui cependant présente sous une petite épaisseur suflisamment de transparence pour permettre de suivre les modifications des corps que l’on y plonge. Ce liquide distribué soit dans de petits tubes à essai, soit dans des verres de montre, présente les propriétés suivantes : a. Il digère les fibres musculaires de bœuf, de lapin et d’écrevisse au bout de peu d'heures à l’étuve; mais aussi, quoique un peu plus lentement, à la température ordinaire. La chair d’écrevisse est la plus rapidement digérée. Tous les muscles gonflent avant de se dissoudre. b. Il digère lentement les muscles cuits de la pince de l'écrevisse, mais n'allaque que très peu où pas du tout la viande cuite de bœuf. 70 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE ce. I ne digère pas la caséine. d. 11 désagrège et dissout partiellement le parenchyme des feuilles de chou. e. I émulsionne les graisses. Nous nous sommes servi d'huile d'olive addi- tionnée d’un peu d’eau. L’émulsion n’a jamais lieu immédiatement, mais elle se manifeste au bout de deux ou trois heures. Le dédoublement de l'huile en acides gras est toujours douteux, la petite quantité de liquide que nous avions à notre disposition ne nous à pas permis de procéder à une analyse chimique, et la réaction du papier de tournesol n’est ici d'aucun secours, puisque dès le début de lopération la réaction du liquide est acide. L'acidité de l'extrait de foie dont il vient d’être question est toujours très faible, elle est moindre que celle du sue stomacal, atténuée qu’elle est, très probablement, par les sels calcaires en présence desquels elle est mise dans le cours de la préperation de l'extrait. On se souvient, en effet, que le foie renferme dans son lissu conjonctif des cellules calcaires qui sont parfois en quantité suffisante pour neutraliser lacide. C’est pourquoi dans beaucoup de cas il est avantageux d’additionner le liquide des solutions acides mention- nées plus haut. Sans relater ici toutes nos expériences, nous dirons que l’aci- dité du liquide est toujours favorable à la digestion des muscles et de la fibrine du sang, quelle que soit la nature de l'acide employé; toutefois, ainsi que Krukenberg le mentionne déjà, les acides organiques ! se montrent plus actifs à petites doses que l'acide chlorhydrique. Ainsi, la fibrine se dissout plus rapidement dans le suc acidifié avec l'acide oxalique à 0,5 °}, que dans l'acide H. CI. à la même dose. Mais la solution de ce dernier acide à 1 °/, se montre plus active que toutes les autres. C'est avec son secours que nous avons obtenu une action digestive sur le blanc d'œuf coagulé. EXPÉRIENCE. — Nous plaçons dix petits cubes de blanc d'œuf coagulé mesurant environ 2 millimètres de côté dans 6 centimètres cubes du sue extrait du foie de l’Aelix additionné de la même quantité de la solution d'acide chlorhydrique à 4 °},. Après une heure à froid pas de changement. 1 Krukenberg a fait usage, outre l'acide oxalique, d'acides acétique et lactique. PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 71 Nous enfermons le tube dans létuve à 38° C. à 8 heures du soir. Le lende- main matin à 8 heures (après douze heures) nous trouvons les fragments d’albumine fortement attaqués, leurs bords sont dissous, les cubes sont trans- formés en petites boulettes irrégulières, tout autour est une masse glaireuse et transparente. Nous agitons le liquide et nous l’alcalisons avec de la les- sive de soude, puis nous ajoutons du sulfate de cuivre. La coloration rose des peptones apparait. La digestion partielle de l’albumine est, par conséquent, évidente. Nota. Au moment où l’on mélange la solution acide avec l'extrait de foie, on entend parfois un grésillement dans l’éprouvette et de petites bulles de gaz montent à la surface. Il y a done bien du carbonate de chaux libre dans l'extrait. EXPÉRIENCE. — La même que la précédente, avec addition de caséine à la place d’albumine. Après vingt heures à létuve, la caséine est retrouvée intacte. Ajoutons tout de suite que nous n'avons jamais réussi à obtenir la diges- tion de la caséine, pas plus à chaud qu'à froid, ni dans le liquide stomacal, ni dans l'extrait de foie, alcalin ou acide. De plus : Les propriétés digestives du suc puisé dans l'estomac et de l'extrait du foie sont abolies par leur neutralisation au moyen du carbonate de soude. Ceci résulte de plusieurs expériences faites à différentes époques, dans lesquelles nous ajoutions aux liquides digestifs sus-mentionnés (et dont une portion acidifiée se montrait très active) une quantité égale de la solution de carbonate de soude à 2 °},. La fibrine du sang, la chair musculaire et l’albu- mine coagulée y demeuraient intactes jusqu'à putréfaction du liquide. Nous insistons sur ce fait ainsi que sur l’inaction du suc extrait du foie lorsqu'il se trouve neutre par le fait de sa préparation, parce qu'il démontre que le ferment digestif n’a pas de parenté avec la trypsine, dont le caractère essentiel est précisément de digérer les substances protéiques en solution alcaline. 72 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE MARCHE DE LA DIGESTION DANS L'INTESTIN. — La digestion s'effectue en grande partie dans l'estomac; cependant il est probable qu'elle à lieu aussi dans le canal excréteur du foie où l’on trouve souvent des portions d’ali- ments et, pour les albuminoïdes, dont la peptonisation demande plus de temps que la saccharification des féculents, elle se continue dans Fintestin proprement dit. L'Escargot absorbe une dose relativement considérable de nourriture ; nous avons cherché à l’apprécier en pesant lanimal avant et après son repas en opérant sur des individus qui avaient été tenus à jeûn pendant trois semaines au mois de mai. Il faut avoir soin de peser les Escargots humides dans les deux cas afin d'éviter l'erreur due à l'absorption de l'eau. Voici les moyennes de dix observations pour chaque sorte de nourriture, prises sur des individus dont le poids avant le repas variait de 18 à 21 grammes. Le repas durait trois heures dans tous les cas, c’est-à-dire que les animaux étaient laissés en présence de la nourriture pendant trois heures. Les pesées ont été faites sur un individu à la fois et les moyennes tirées ensuile : Feuilles de choux 4 MT O2: 870 Blanc d'œuf coagulé . . . ,.4. 1, 920 Viande de bœuf . . . . . . 1, 125 (Moyenne de deux individus seulement.) Mie:deipain blanc C0 2720 On voit que l'Escargot avale en peu de temps jusqu'à un huitième du poids de son corps y compris la coquille. Les aliments séjournent dans l'estomac d'autant plus longtemps qu'ils sont plus digestifs ; ainsi les aliments végétaux y demeurent davantage que le blane d'œuf et la viande. Si l'on ouvre un Escargot immédiatement après le repas, on trouve les aliments baignés dans le liquide rouge-brun de l’estomae, sous une forme qui varie selon les aliments; les feuilles de choux sont en copeaux plus où moins agglutinés les uns aux autres, le pain est en frag- ments épars, l’albumine à si bien réuni ces fragments qu’on les rencontre en petites boulettes ou en cylindres moulés par l’œsophage; la viande est sous 2, PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 75 forme de fibres plus ou moins finement coupées. Peut-être ÿ a-t-il parfois, après le passage du bol alimentaire dans l’intestin, retour vers l’estomac; nous n’en possédons aucune preuve bien certaine, mais nous avons trouvé dans l'estomac des masses alimentaires ayant la forme cylindrique qu’elles prennent régulièrement dans l’intestin ; aucune valvule d’ailleurs n'empêche ce retour. Quoi qu’il en soit de ce point qui mérite de nouvelles recherches, nous n'avons jamais vu d'aliments plus de deux heures dans l'estomac; pen- dant ce temps ils s’imbibent de suc digestif et la peptonisation d’une partie des albuminoïdes s'effectue ainsi qu’on le constate au moyen de la réaction (soude et sulfate de cuivre) en délayant le contenu slomacal dans un peu d'eau. En temps normal les aliments ne demeurent pas longtemps dans l'intestin en sorte que leur digestion n’est jamais que partielle; ceci explique la voracité apparente de ces animaux et les dégâts énormes qu’ils peuvent commettre dans un Jardin. En examinant les fèces sous le microscope, on y voit Loujours des portions non digérées ; ceci est remarquable surtout pour les aliments auxquels l’Escargot n’est pas accoutumé, ainsi le blanc et le Jaune d'œuf. En plaçant le soir deux individus dans des bocaux avec ces substances, on les retrouve le lendemain entourés de petits cylindres blanes et jaunes dont la substance n’est pas sensiblement modifiée, La facilité avec laquelle on leur fait manger du blanc d'œuf nous a permis de recueillir une assez forte proportion de celte albumine qui avail traversé l'intestin; sur 1 grammes de cette substance provenant d’une trentaine d'individus, nous avons cherché si elle renfermait des peptones. Le résultat a été tout à fait négatif. Il faut done admettre que, s’il y a eu peptonisation d’une partie de l’albumine ingérée (et l’on ne peut guère en douter étant donnée l'expérience de digestion artificielle relatée plus haut), la peptone a été absorbée complè- lement. La graisse de bœuf est aussi rejetée en grande partie intacte, en petits cordons cylindriques mesurant jusqu’à 2 centimètres de longueur, mais on ne peut douter qu'une partie de celte graisse n’ait été utilisée, car lorsqu'on tue des Escargots à différents temps après l’ingestion, on trouve contre les parois de l'estomac et de l'intestin un nombre immense de petits globules graisseux ; la graisse a donc été divisée et émulsionnée. Mais nous ne savons 10 74 CONTRIBUTIONS A L’'HISTOIRE pas comment les globules sont absorbés. La digestion des graisses chez les Mollusques est encore très obscure, elle n’a d’ailleurs été que fort peu étu- diée et seulement chez les Céphalopodes. Jousset de Bellesme !, ayant extrait au moyen d'une canule six gouttes de la sécrétion du foie d’un poulpe et y ayant ajouté une gouttelette d'huile d'olive, n’obtint aucune trace d’émulsion. Il conclut done que le foie de ce mollusque est incapable de digérer les graisses. Au contraire, Bourquelot ? a suivi dans lintestin des poulpes la digestion de la graisse du foie des crabes qu'il leur donnait à manger; il a vu que, dans le jabot, les globules de cette graisse qui sont très gros avaient conservé leurs mêmes dimensions, landis que dans l'estomac ils deviennent d’une extrême pelitesse el disparaissent peu à peu complètement dans l'intestin, d’où la conclusion que le liquide contenu dans l'estomac des poulpes émulsionne les graisses. Cette conclusion a été confirmée, par le même auteur, dans une expérience où il mélangeait quelques gouttes d'huile avec une solution aqueuse des ferments du foie de poulpe, précipités par l’alcool. En agitant le mélange, l'huile s’émulsionne. Nous avons vu plus haut qu'il en est de même pour lextrait aqueux du foie d’Helix auquel on additionne un peu d'huile d'olive, mais nous ne discuterons pas la cause de cette émulsion, n'ayant pas encore fait d’expé- riences dans ce but. Quant aux substances végétales, feuilles de choux ou autres, que les Escar- gots dévorent dans les jardins et dans les haies, elles passent imparfaitement digérées dans l’intestin. Leur parenchyme cellulaire est ordinairement le pre- nier dissous, à l'exception des granules colorés de la couche chlorophyl- lienne que lon voit en grand nombre sur le parcours de lintestin et que l’on retrouve dans les excréments, avec de nombreux faisceaux de fibres et des trachées si bien détachées et isolées que l’on peut y puiser de superbes objets pour monter en préparations microscopiques. Mais lorsqu'il ÿ a abon- dance de nourriture végétale dans le bocal où est enfermé l'animal, celui-ci 1 Jousser DE BELLESME, Loc. cit., C. R. DE L'ACAD. DES SCIENCES DE Paris, t. LXXXVIIT, 1879, p. 305. 2 BourqQuELoT, loc. cit., ARCHIVES DE Z00LOGIE EXPÉRIMENTALE, 2° sér., t. LIT, p. 50, 1885. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 75 mange tellement et digère si peu, qu'il rejette par l'anus des lambeaux de feuille intacts. (Il en est de même chez PArion qui parail moins apte que l’Helix à digérer les matières végétales.) Si on agite dans l’eau ces excréments d’Escargots, le liquide se colore en vert et cette coloration subsiste, quoique beaucoup moins intense, après plu- sieurs filtrations; elle est due à des granules de chlorophylle. Les fibres musculaires non digérées qui se rencontrent encore dans les excréments d'Escargots nourris de viande, sont enveloppées d’une sorte de gaine de fibrilles conjonctives provenant des faisceaux qui ont été dissous. Elles sont accompagnées également de nombreux globules de graisse. Dilacé- rées et examinées sous de fortes lentilles, nous n’y avons plus constaté la striation transversale. Dans ces derniers temps, nous avons alimenté des Escargots avec du fromage sec dont ils se sont montrés assez friands. Les animaux sacrifiés durant la digestion de cette substance, renfermaient un bol alimentaire d'aspect semblable à celui de la graisse, la caséine était agglutinée en petites boules irrégulières et enveloppée d’un magma dans lequel flottaient de nombreux globules graisseux, qui avaient toute l'apparence de la graisse émulsionnée. 76 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE EN: EFFETS DE LA DESTRUCTION DU CERVEAU OÙ GANGLION SUS-0ESOPHAGIEN. Le seul auteur qui, à notre connaissance, ait fait des expériences sur le rôle physiologique du ganglion sus-æsophagien chez l’Helix, est Vulpian !. « La physiologie du système nerveux des Mollusques, disait cet éminent expérimentateur, se réduit encore presque exclusivement à des inductions fondées sur l'anatomie. » Depuis lors, les recherches sur les Céphalopodes se sont multipliées, mais les Gastéropodes ont été considérablement négligés. On sait que chez l’Helix et le Limax, les centres ganglionnaires sont loca- lisés autour de la portion antérieure de l'intestin et comprennent deux masses principales, un ganglion sus-œsophagien, et un ganglion sous-æsophagien, réunis par des commissures latérales. Chaque masse ganglionnaire donne naissance à un grand nombre de nerfs qui se rendent aux organes des sens et dans toutes les régions du corps; ces nerfs portent parfois des renflements dans lesquels se trouvent des cellules nerveuses et que l’on peut considérer comme des ganglions accessoires où ganglions de renforcement. Nous renvoyons à un Mémoire que nous nous proposons de publier plus tard, pour tout ce qui concerne la topographie des centres nerveux chez l'Escargot. Nous dirons seulement que nous y avons rencontré la preuve que le cerveau ou ganglion sus-æsophagien d'où partent les nerfs qui se rendent aux tentacules, aux yeux, aux otocysles et aux appareils gustatifs situés dans la masse buccale, est composé de deux masses ganglionnaires 1 Vuzpian, Leçons sur la physiologie générale et comparée du système nerveux. Paris, 1866, p. 760. ER “| PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. (fig. 2 ci-jointe À et B) à la périphérie desquelles sont groupées deux sortes de cellules mono ou bi-polaires, des grandes cellules (fig. 3 et 4 À) enveloppées chacune d’une gaine conjonetive, ramassées sur le bord interne et antérieur de chaque ganglion, et de petites cellules (fig. 3 et 4 B et D) serrées les unes contre les autres, sur le bord externe et antérieur de chaque gan- Fig. 3. glion, B et sur leur bord interne et postérieur, D. Les figures que nous Jjoi- gnons ici ont été dessinées d’après des coupes horizontales pratiquées dans 78 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE le ganglion sus-æsophagien de lAÆelix pomatia. La figure 2 est purement schématique. On voit en C dans les figures 3 et 4 la substance nerveuse amorphe, finement granuleuse et renfermant ci et là des noyaux ovalaires, telle qu'on la rencontre dans les ganglions de tous les Invertébrés. Ces figures montrent également comment les éléments nerveux sont plongés dans une masse considérable de tissu conjonctif (fig. 3 G). Un point important à noter est la réunion des deux ganglions céphaliques par une commissure transver- sale (fig. 4 F) dont l'épaisseur est moindre que celle des ganglions et qui ne se voit que sur les coupes de la face inférieure. (Comparer les fig. 3 et 4.) Les expériences que nous avons faites en extirpant le cerveau ne nous ayant donné que peu de résultats, à cause de la difficulté de faire vivre les animaux après cette opération, nous avons employé la méthode suivante. Après avoir chez l'Helix et l’Arion délimité depuis l'extérieur aussi exacte- ment que possible la place qu'occupe le cerveau, l'animal étant étalé, nous cherchions à l’atteindre, depuis le dehors, au moyen d’une aiguille chauffée au rouge blanc, qui présente l’avantage d’atténuer la perte de sang. En effet, le grand inconvénient au point de vue de la vivisection de l'existence d’un système lacunaire chez ces Mollusques est l'écoulement du sang par les moin- PHYSIOLOGIQUE DE L’'ESCARGOT. 79 dres blessures qu’on leur fait subir, perte de sang qui entraine la mort, du moins pendant les mois d'été où nous avons opéré. M. Vulpian nous dit ! que ses expériences lui ont montré une différence bien grande entre les gan- glions cérébroïdes et les ganglions sous-æsophagiens, sous le rapport de leur influence sur la vie, et quoiqu'il prétende que « lextirpation du ganglion sous-æsophagien peut se faire, lorsqu'on s’est exercé à cette opération, sans plus de dégâts que celle du ganglion cérébroïde, de telle sorte que la diffé- rence du résultat ne saurait être attribuée à la gravité plus ou moins grande de l'opération », nous regrettons que M. Vulpian n'ait pas décrit son pro- cédé, car, de quelque manière que nous nous y soyons pris, nous avons tou- jours vu le sang se déverser en beaucoup plus grande abondance lorsqu'on pénétrait par le pied jusqu’au collier œsophagien que lorsqu'on y atteignait par la face dorsale pour frapper le cerveau, et il faut avouer que la plaie nécessaire est toujours beaucoup plus grande. « Si on enlève, dit M. Vaul- pian, le ganglion sous-æsophagien, l'animal meurt ordinairement en vingt- quatre heures, tandis qu'il survit quatre ou cinq semaines à l’extirpation du ganglion cérébroïde. » Je n'ai jamais été assez heureux, même en faisant usage du fer rouge, pour garder aussi longtemps des Escargots sans cerveau. Quant à ceux qui sont privés du ganglion sous-æsophagien ou de l'anneau nerveux central en entier, ils ne survivent, en effet, que quelques heures. En lous cas leurs mouvements sont extrêmement réduits; le pied tout entier élant paralysé et le cœur arrêté, il est difficile de dire, par conséquent, où finit la vie et où commence la mort. Au contraire, j'ai conservé pendant des semaines et des mois des individus dont une portion plus ou moins considérable du cerveau avait été brûlée au moyen de l'aiguille chauffée au rouge, puis j'ai vu dans quelques cas peu à peu réapparaitre les fonctions qui avaient été abolies, ce qui prouve, pour le dire en passant, que si la régénération du cerveau ne se produit pas comme l’ont cru quelques anciens observateurs, mais comme aucun expérimentateur des temps modernes ne l’a constaté, il y a cependant prolifération de cellules et reproduction de certaines parties du cerveau. { VücpraN, loc. cit., p. 760. 80 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE La destruction complète du ganglion sus-æsophagien n'abolit pas les mou- vements du pied, du cœur, de l'orifice qui conduit au sac pulmonaire ; mais les Lentacules supérieurs el inférieurs, les mouvements de la mâchoire sont paralysés. L'antégrité du cerveau parait nécessaire pour la coordination des mouvements, car si l'animal privé de cerveau exécute encore des mouve- ments de contraction du pied, il a beaucoup de peine à ramper, l'Escargot demeure presque toujours au fond de sa coquille; l'Arion se ramasse sur lui-même dans la plupart des cas, cependant quelques individus réussissent à progresser, Sans jamais savoir se diriger. ExpéRIENCE. — Nous fendons la peau du corps d’un individu de l’Æelix pomatia qui, quoique légèrement chloralisé, s’est de nouveau étalé et, par conséquent, peut être plus aisément opéré. Toutefois, il est fort difficile de réussir en opérant lentement comme nous l'avons fait dans cette expérience eLil est préférable, au point de vue de la constatation des résultats (quoiqu’on y perde un plus grand nombre d'individus), de trancher le ganglion un peu au hasard au moyen de ciseaux courbes. La peau une fois échancrée au-dessus du cerveau, l'animal perd des flots de sang et se retire au fond de sa coquille d'où parfois il ne ressort plus. Dans le cas contraire, on agit de telle sorte qu'avec les petites pinces on découvre le cerveau, puis on l’extirpe d’un coup de ciseaux. (Fréquemment l'æsophage est atteint de ce fait et plus ou moins endommagé.) Aussitôt l’animal se retire violemment dans sa coquille, sans plus exécuter aucun mouvement. Le lendemain matin, dix-sept heures après l’extirpation du ganglion, il est dans la même position; on l'immerge alors complètement dans l’eau et, au bout de deux heures, on le voit qui se dilate peu à peu comme le ferait un individu normal, avec cette différence qu'il fait des efforts pour adhérer avec son pied aux parois du verre sans y réussir jamais. En effet, il se contracte irrégulièrement sous l’eau, le pied exécutant des mouvements de torsion sur lui-même, mais les ondes musculaires de reptation qui sont si belles à voir sur un Escargot en bonne santé, n'appa- raissent plus et il demeure dans cette situation, incapable par lui-même d’en sortir. Si on le sort de l’eau et qu'on le place, blessé comme il est, sur une plaque de porcelaine, ses mouvements sont si mal coordonnés qu’on ne réussit PHYSIOLOGIQUE DE L’'ESCARGOT. 81 pas non plus à le faire adhérer et progresser. Quant aux organes tactiles et oculaires, ils ont été tellement altérés par l'opération qu'on ne peut faire aucune observation sur eux. L'animal retiré dans sa coquille n’en ressort plus à l'air. Ouvert trois jours plus tard il est en pleine décomposition. EXPÉRIENCE. — Un Helix bien étalé sur une lame de verre humide et qui a été ramassé la veille dans les bois, est blessé d’un coup de ciseaux dirigé longitudinalement, de manière à couper le cerveau en deux moitiés, droite et gauche. (Nous n'avons réussi qu’une fois sur neuf tentatives). Il est indispensable d'agir très rapidement. L'animal se retire aussitôt dans sa coquille en perdant beaucoup de sang; puis, ayant été plongé dans l’eau, il en ressort trois heures et demie après l’incision et exécute quelques mouve- ments irréguliers de reptation sur le fond du vase. Nous notons que l’adhé- rence du pied contre le verre est très faible, l'animal est incapable de monter contre la paroi verticale. Les tentacules qui ont été respectés par les ciseaux se conduisent différemment, l’inférieur et le supérieur du côté droit s'étendent et se contractent comme à l'ordinaire quoique plus lentement; les deux du côté gauche demeurent contractés, sans qu’on réussisse, en excitant au moyen d’un faible courant d’induction leur voisinage, à leur faire exécuter le moindre mouvement. Sorti de l’eau, l'animal se contracte de nouveau dans sa coquille. Soixante-douze heures plus tard, il y est trouvé mort, le cœur est arrêté en diastole et les muscles du pied ont perdu toute exeitabilité, ils ne répondent plus à une excitation électrique. A l’autopsie, que nous prati- quons avec beaucoup de soin, nous constatons que le cerveau a bien réelle- ment été tranché en deux portions, mais ces portions sont inégales, les ciseaux ayant passé selon la ligne x, y, du schéma, figure 2; les deux moitiés se sont éloignées l’une de l’autre. La potion de droite possède intacte toute sa masse ganglionnaire, centre des nerfs qui se rendent aux tentacules corres- pondants; la portion de gauche a sans doute ! perdu tout, ou une forte partie, ! Nous ne pouvons l’aflirmer, n'ayant pas pratiqué des coupes fines sur ces fragments, mais cette supposition est rendue fort vraisemblable par les résultats des expériences suivantes. 11 82 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE des grandes et des petites cellules (A et D, fig. 3) de son bord interne. L'œsophage avait d’ailleurs été troué par la pointe des ciseaux. ExréRiENcE. — On applique au-dessus du cerveau d'un Helix bien étalé et rampant sur une plaque de verre, un fer chauffé au rouge !. Avec un peu d'expérience on réussit à le maintenir pendant quelques secondes, suflisam- ment pour que le cerveau soit atteint et détruit par la chaleur. L'animal se relire dans sa coquille en ne perdant pas de sang et répandant très peu de mucosité. Au bout de trois heures, on le plonge dans l’eau, il ne tarde pas alors à sortir de sa coquille et à s’étaler complètement, la tête montre une large plaie brune et carbonisée. En cet état, on observe que l'animal fait des efforts pour adhérer à la surface du verre, mais son pied quoique étalé est tordu sur lui-même de sorte qu'il ne peut s'appliquer sur un plan; orifice du sac pulmonaire exécute des mouvements irréguliers; les mouvements du cœur sont intacts, leur nombre est normal et leur rythme est régulier. Les lentacules retirés n’exéeutent plus aucun mouvement. D'ailleurs, toute la portion antérieure et supérieure du corps parait insensible; la mâchoire immobile fait saillie au dehors. L'animal sorti de l’eau demeure étalé sur une lame de porcelaine, le pied, toujours excitable, exécute des mouvements irréguliers. L'application d'un faible courant d’induction suffit pour que l'animal se retire, mais il sort de nouveau spontanément. Maintenu sous une cloche humide, le cœur continue à battre en se ralentissant progressivement jusqu’au quatrième jour. Puis l'animal meurt et entre rapidement en décom- position le cinquième jour après l'opération. Expérience. — La même que la précédente sur lArion empiricorum. L'animal se met en boule et perd une assez forte quantité de mucosité, mais après l'avoir mis dans l’eau, il s'étale de nouveau et on constate la conserva- lion des mouvements respiratoires et de ceux du pied, quoique ces derniers ne présentent plus aucune régularité. Il meurt après quarante-huit heures. ! Nous nous sommes servi d’un fer à souder d'assez grand volume, une simple lame de scalpel se refroidit trop vite et ne brûle que la peau. <* PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 83 Note. A propos de la conservation des mouvements respiratoires, je dois faire remarquer que Vulpian avait constaté le même fait. Il dit, en effet (loc. cit. p. 7164): « J'ai examiné aussi l'influence de l’extirpation des ganglions sur la respiration. Quand j'enlevais le ganglion céphalique, les mouvements respi- ratoires persistaient ; quand j'enlevais les ganglions sus el sous-œsophagiens, les mouvements rythmiques du cœur continuaient et même, contrairement à mon attente, les mouvements irrégulièrement rythmiques de lorifice respi- raloire continuaient aussi. Seulement les mouvements respiratoires étaient alors un peu moins normaux que lorsque le ganglion cérébroïde avait été seul enlevé. S'il y a des centres qui, chez les animaux, sont chargés de déterminer les mouvements respiratoires et ceux du cœur, ce ne sont done, ces expériences le montrent bien, ni le ganglion sus-æsophagien, ni le gan- glion sous-æsophagien. » Je n'ai pas fait d'expériences sur l’ablation du ganglion sous-æsophagien, ou du moins celles que j'ai tentées m'ont si mal réussi que je ne puis en publier les résultats, mais je puis dire que si sur un Arion dont le nombre des mouvements respiratoires compté à l’orifice du sac pulmonaire est de treize dans l’espace de cinq minutes, on vient à serrer un nœud coulant en arrière de l’anneau œsophagien, l'animal se contracte fortement sur lui-même, se met en boule et sécrète une assez forte quantité de mucosité. Il demeure en cet élat pendant quatre heures sans fournir plus aueun mouvement respi- ratoire, puis, sans que le lien se soit apparemment desserré, il recommence à exécuter quelques mouvements du pied, il rampe avec une extrême len- teur et les mouvements respiratoires reprennent peu à peu leur régularité. (Nous avons conservé un individu ainsi lié pendant huit jours sans qu'il put prendre de nourriture, mais ses allures paraissaient normales, à l'exception de la lenteur persistante des mouvements de locomotion). Si l’on vient à serrer le nœud coulant jusqu'à couper la tête, séparant ainsi complétement l’anneau œsophagien du reste du corps, l'animal perd naturellement beaucoup de sang, il se contracture complètement et meurt en cel étal sans que nous ayons vu reparaitre aucun mouvement respiratoire. Le cœur découvert bat encore, (Voir plus loin quelle est l’action des centres nerveux sur les mou- vements cardiaques. ) 84 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE ExpéRiENcE. — Nous brülons complètement la portion antérieure du corps d'un Ayrion en plaçant le biseau du fer rouge transversalement au-dessus de l'anneau œsophagien. L'animal se contracte énormément, se ramassant sur lui-même, il perd du sang, mais beaucoup moins que lorsqu'on lui coupe la lèle avec des ciseaux, et demeure en cet état sans plus exécuter ni mouve- ment de locomotion, ni mouvement respiratoire. Dix-huit heures plus tard, il est trouvé dans le même état; le cœur bat encore (4 pulsations à la minute) et les muscles du pied se contractent encore à la suite d’une exci- lation électrique. Mais après trente-six heures animal est mort. Nous avons vainement cherché à réveiller des mouvements respiratoires rythmiques en promenant la pince électrique sur le bord du sac pulmonaire ou en irritant mécaniquement les bords mêmes de l'orifice respiratoire. M. Vulpian ! affirme que si « on excise tout le bord du manteau en y comprenant l'orifice respiratoire, on voit encore des mouvements rythmiques dans la région voisine de cet orifice, sans que pourtant il arrive jamais à s'entr'ouvrir. » Les soi-disant mouvements rythmiques dont il est question ici ne nous paraissent être que de simples contractions musculaires locales ; en tout cas en répétant l'expérience nous n'avons jamais vu non plus lorifice se rouvrir. Ces expériences ayant été répétées plusieurs fois chez l’Helixz comme chez l'Arion, et conduisant aux mêmes résultats, nous en concluons que : la destruction des centres nerveux a pour effet d'abolir tout mouvement volon- laire, ainsi que les mouvements respiratoires ; tandis que les réflexes sont conservés jusqu'à ce que les tissus meurent par arrét de nutrition, consé- quence de la perte de sang et de la cessation des pulsations cardiaques. ExPÉRIENCE, — 1l existe dans le cerveau une localisation fonctionnelle pour les mouvements des tentacules oculaires. Ceux-cr sont paralysés à la suite de la destruction de l'amas des grandes cellules situées sur le bord interne de chaque ganglion. En outre, il n'y a pas croisement de fibres, la destruction du groupe cellulaire du côté droit paralyse le tentacule droit et réciproquement. 1 VuLpiaw, Loc. cit., p. 762. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 85 Nous avons constaté le fait sur l'Helix et V'Arion en opérant de la manière suivante. Nous laissions les individus s’étaler au maximum et, pendant même qu'ils rampaient sur une plaque de porcelaine, nous les piquions au niveau du cerveau avec une aiguille à dilacérer, courte et forte, chauffée au rouge. Les portions du cerveau touchées par l'aiguille sont complètement détruites sur une étendue plus ou moins considérable, ordinairement très petite. À l'œil nu, il est impossible de la délimiter exactement, c’est pourquoi il faut recourir à une autopsie délicate consistant à durcir le cerveau et à le débiter en coupes minces horizontales. Dans nombre de cas, on n'obtient pas à la suite de la piqûre de résultats bien nets; cela provient de ce qu'opérant un peu au hasard on ne peut dire avant l'opération : je vais détruire telle ou telle por- tion du cerveau. Souvent on ne l’atteint pas, ou bien n'ayant pas opéré assez rapidement, l'aiguille s’est refroidie et son action destructive à été con- sidérablement amoindrie. D’autres fois, au contraire, on a trop détruit, par le fait d’un faux mouvement qui, au lieu d’une simple piqüre, a provoqué une déchirure, etc. On comprend donc que ces recherches sont très lentes, que la dissection fine qui en est le complément indispensable, et que l’on ne pra- tique d’ailleurs que lorsque les altérations fonctionnelles sont bien précises, les complique beaucoup. Aussi avouons-nous que nous n'avons pu jusqu'ici leur consacrer le temps nécessaire. Nous avons voulu cependant indiquer le procédé que nous espérons pouvoir appliquer ultérieurement, non seulement aux ganglions supérieurs mais aussi aux ganglions sous-æsophagiens, et montrer par un exemple l'intérêt qui se rattache à de telles expériences. Un Helix piqué, ainsi que nous venons de le dire, se retire vivement dans sa coquille, exsude dans le voisinage du point touché une mucosité épaisse, puis demeure contracté pendant plusieurs heures. S'il ne le fait spontané- ment, on l’oblige à sortir de sa demeure et à s’étaler de nouveau en le plon- geant quelques instants dans l’eau. On constate alors qu'il n’a perdu aucune de ses facultés de locomotion, qu'il peut ramper, qu'il peut manger, bref, qu'il se conduit comme un individu normal. Toutefois, tandis que le tentacule oculaire du côté gauche semble avoir conservé toute sa sensibilité, celui de droite demeure obstinément retiré et aucune excitation ne réussit à provo- quer chez lui le moindre mouvement. L’Escargot est borgne et ne touche 86 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE que par le tentacule gauche. L'animal mis en observation demeure en cet état pendant six jours. On le noie alors et on dissèque soigneusement son anneau œsophagien dont on isole le cerveau qui ne montre à sa surface qu'un petit point blanc opaque. Le cerveau fixé au bi-chromate de potasse, puis à l'acide chromique à 3 p. °/ ! pendant quinze jours, est ensuite coupé dans la parafline et c’est ainsi que l’on constate qu'il existe une lacune, à la place occupée par la masse des grandes cellules dont nous avons parlé. (Voir le signe + dans la figure 2. Il s’agit des cellules groupées en À, figures 2 el 3.) Toutes ces cellules cependant n'ont pas été détruites, il en existe encore de parfaitement intactes sur les bords de la lacune, et peut-être qu’en poussant plus loin que nous ne l’avons fait l'observation de l'animal blessé, en essayant sur lui, par exemple, l’action des substances odoriférantes, on constaterail d’autres altérations que celle dont nous avons fait mention. Mais, nous le répélons, ces expériences délicates demandent à être renouvelées et variées. Si, au lieu d’une simple aiguille, on se sert pour attaquer le cerveau d'un fort poinçon, les lésions sont plus étendues et les altérations fonctionnelles plus considérables. Nous avons réussi de la sorte, non seulement à paralyser les tentacules supérieurs el inférieurs, mais une partie des pièces buccales, la lèvre supérieure et la mâchoire. Dans un cas où toute la portion droite du cerveau avait élé brûlée, tandis que la gauche était demeurée intacte, nous avons remarqué que lanimal retiré d’abord dans sa coquille et étalé de nouveau avait perdu la coordination des mouvements du pied, nécessaires pour permettre la progression. Les mouvements réflexes étaient conservés sur toute l'étendue du corps, mais le bord droit du pied était recourbé en dedans et demeurait en cet état, l’exagérant à la suite d’excitations mécani- ques. Cette expérience, que nous n'avons pas réussi à reproduire, indiquerait done que la partie droite du cerveau, outre ses fonctions propres (sensibilité ! Voyez, pour la technique, le Mémoire de W. Viexaz, Recherches histologiques sur les centres nerveux de quelques invertébrés. ARCH. DE Z00LOGIE EXPÉRIMENTALE, 2° sér., t. |, 1883, p. 334, note. PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 87 spéciale), présiderait à la coordination des mouvements d'ensemble dans la partie correspondante du pied. Le procédé des piqüres à chaud dont nous venons de parler présente le grand avantage d'atteindre le cerveau sans blesser grandement l’animal et sans lui faire perdre des quantités notables de sang. Nous ajouterons que les essais que nous avons faits pour détruire tout ou partie du cerveau en injec- tant dans son voisinage des substances corrosives, telles qu’acide chromique à 1°}, nitrate d'argent, acide osmique, ne nous ont conduit à aucun résultat. De telles injections ont pour effet de tuer l'animal, il se retire dans sa coquille alors que la canule est encore enfoncée sous la peau, ce qui fait qu'il peut y avoir lésion mécanique et, une fois complètement retiré, l'Escargot meurt en cel élat. Cela provient de ce que la substance injectée pénétrant dans des espaces lacunaires et se mélant au sang, il n’est pas possible d'en limiter l’action. 88 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE \É PHYSIOLOGIE DU COEUR. Les mouvements du cœur des Gastéropodes et la question du mode d’innervation de cet organe ont déjà provoqué plusieurs travaux intéressants dont nous citerons les résultats principaux au cours de notre exposé. On sait que le cœur de l'Helix pomatia situé sur la face dorsale du corps, entre le sac pulmonaire et la glande rénale, est composé d’une oreillette et d’un ven- tricule qui sont tous les deux enfermés dans un péricarde complètement clos. Les parois du ventricule sont plus épaisses et plus puissantes que celles de l'oreillette. Lorsqu'on sépare entièrement le cœur du reste du corps, ses pulsations continuent, ainsi que c’est le cas chez beaucoup d'animaux. Ce fait a donné lieu à des discussions qui ne sont pas définitivement closes. Foster ! qui a, l’un des premiers, porté son attention sur le cœur de l'Escargot et qui a fait sur lui plusieurs observations originales, n’admet pas l'existence dans ses parois d'éléments nerveux. Selon lui, il n’y existe ni fibres, ni cellules ner- veuses et les mouvements seraient dus simplement à la contractilité propre des éléments museulaires. Selon lui encore ?, une excitation électrique portée sur le cœur détaché, l'arrête en diastole, action paralysante qui parait contraire à ce que nous savons de l’action généralement excitante du courant élec- trique sur le protoplasma. C’est pourquoi le travail de Dogiel 5 fut très bien accueilli lorsqu'il annonça avoir trouvé des cellules apolaires de nature ner- veuse dans les parois du cœur des Lamellibranches et des Gastéropodes. Le 1 Foster, Ueber einen besonderen Fall von Hemmungswirkung. PrLüGERs ARCHIV., t. V, 1872, p. 191. 2 Fosrer et DEw-Suiru, On the Behaviour of the Hearts of Mollusks under the influence of electrie currents. Proc. oF THE Roy. Soc., 1875, p. 318. 3 DocteL, Die Muskeln und Nerven des Herzens bei einigen Mollusken. ARCH. FÜR MIKROSK. ANATOMIE, t. XIV, 1877, p. 59. PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 89 cœur de ces animaux posséderait donc des centres automatiques pouvant rendre compte des faits observés. Malheureusement pour cette manière d'interpréter les mouvements du cœur, Biedermann !, qui a consacré un long travail à la physiologie du cœur de l’Æelix, a cherché vainement sur trois cœurs de ces animaux les cellules signalées par Dogiel. Et cependant ces cellules soi-disant nerveuses existent, nous les avons pour notre part souvent constatées, telles que les a décrites Dogiel. Mais, contrairement à son asser- lion, nous sommes parfaitement d'accord, pour des raisons multiples, de les considérer avec Ransom ? comme de simples cellules plasmatiques intersti- tielles de nature conjonctive. Elles ne nous ont pas fourni les réactions carac- téristiques des cellules nerveuses, et il suffit de les comparer avec les cellules conjonctives qui se rencontrent autour ou dans l'épaisseur des autres organes pour ne conserver aucun doute sur leur identité. Ni les coupes, après trai- tement au chlorure d'or, ni les dilacérations les plus minutieuses, ne nous ont montré des traces quelconques de substance ganglionnaire nerveuse. Nous avouons n'avoir pas élé plus heureux dans la recherche des extré- mités nerveuses décrites par Ransom. Selon cet auteur, un nerf impair prenant naissance dans une petite protubérance médiane du ganglion sous-æsophagien et qui va, longeant l'artère aorte, jusqu’au canal déférent auquel il donne une petite branche, détacherait un peu plus loin un ramus- cule qui pénétrerait avec l'aorte jusque dans la paroi du ventricule. Une autre branche du même nerf atteindrait les parois de l'oreillette, de sorte que le cœur serait innervé par un même trone nerveux à ses deux extrémités auriculaire et ventriculaire, Mais si nous n'avons pas réussi à suivre le trajet de ces filets nerveux, nous ne pouvons a priori nier leur existence, car une action des centres nerveux sur les mouvements cardiaques est indubitable aussi bien que l’automatisme du cœur, en dehors de toute relation organique du cœur avec ces mêmes centres, et nous ne pouvons nous rendre compte 4 BiEDERMANN, Ueber das Herz von Helix pomatia. SiTzUNGSBER. D. k. AkaD. DER Wiss., Wien, 1884, F. Lxxxix, p. 19. 2 VW. B. Raxsom, On the cardiac rhythm of Invertebrata. Jourx. or PaysiooGy, t. V, 1885, p. 261. (Voir plus particulièrement p. 327 de ce Mémoire, ainsi que les figures 8a et 8b de la planche VII.) 12 90 CONTRIBUTIONS A L’'HISTOIRE de l’action d'arrêt, par exemple, dont il sera bientôt parlé, qu'en admettant une continuité nerveuse depuis l'anneau œsophagien jusqu’au cœur. En résumé, il n'existe pas de centres gunglionnaires dans les parois du cœur, ses pulsations sont dues à la contractilité propre des cellules muscu- laires qui le constituent, mais les centres nerveux de l'anneau æsophagien exercent sur lui une action d'arrét indubitable. RuYrHME NORMAL pu coEuR. — Toutes les expériences dont il va être fait mention ont été effectuées sur des Escargots de grande taille pendant leur période d'activité. Nous avons tout de suite renoncé à pratiquer, ainsi que l'ont fait la plupart de nos prédécesseurs !, une fenêtre dans la coquille au-dessus du cœur, parce que les bords de cette fenêtre étant loujours tran- chants, l'animal s'y déchire en se contractant; nous préférons faire sauter complètement toute la coquille le long de sa première spire et découvrir de la sorte toute la portion antérieure du corps. L'expérience nous à montré que les animaux ainsi découverts ne souffrent pas du tout, à condition qu’on les tienne dans une atmosphère constamment humide. Nous en avous gardé pendant plusieurs semaines qui mangeaient et avaient conservé leurs allures normales, montrant parfaitement leur cœur, grâce à la transparence du péricarde. Il s’agit seulement de ne pas leur laisser recon- struire une nouvelle coquille, ce qui a lieu rapidement lorsqu'on leur donne beaucoup de nourriture; pour cela, il suffit d'enlever la pellicule coquillière au fur et à mesure qu'elle se produit. En temps normal, la systole du ventricule suit régulièrement celle de l'oreillette, mais il suffit de la plus légère irritation pour altérer ce rythme et constater qu’en réalité les deux portions du cœur peuvent pulser d’une manière tout à fait indépendante l’une de l’autre. Ainsi, immédiatement après l'opération qui consiste à enlever la coquille, on voit le ventricule continuer à battre rapidement, alors que l'oreillette gonflée de sang fait saillie, arrêtée en t Voir en particulier les ouvrages de J. Richard et Biederman (loc. cit.). J. Ricuaro, Recherches physiologiques sur le cœur des Gastéropodes pulmonés. Extraits de la REVUE D'AUVERGNE, 1885-1886. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. JM diastole. D’autres fois, c'est l'inverse : le ventricule s'arrête alors que loreil- Ù | lette continue à battre; ou bien encore lanimal étant crispé sur lui-même, le cœur entier s'arrête momentanément. NOMBRE DES PULSATIONS. — Ce nombre varie beaucoup selon la tempéra- ture et le degré d'activité de l'animal. Lorsqu'on ouvre les Escargots pendant leur sommeil d'hiver à une température de 0°, le cœur ne donne que de très rares pulsalions, et je ne doute pas qu'il ne s'arrête complètement à quelques degrés au-dessous de 0°. Mais à 0° ou à + { ou 2°, le cœur pulse une fois par minute ou par deux minutes, entretenant ainsi chez l’animal endormi une circulation très lente. Si, sur ces animaux éveillés, on expérimente l’action d'une élévation de température, on constate que, conformément à un fait général chez tous les Invertébrés (très remarquable surtout chez les Arthro- podes et les Lamellibranches), l'augmentation de température est accompa- gnée d’une accélération progressive des pulsations. Voici une observation faite en hiver (9 janvier 1885) sur un Helix de grande taille. à O°+ 1° 1 pulsation toutes les deux minutes, à + 5° 4 pulsations par minute, à + 10° 12 » » à +15 17 » à —+ 20° 926 » » L'animal était plongé dans l’eau à laquelle à + 95 38 - k on ajoutait de l'eau chaude. A 300 V4 Le » A1 4095% 50 0 à» » à + 40° pulsations irrégulières. | Cette progression est plus rapide en été et le nombre des pulsations est beaucoup plus considérable. Ainsi, au mois de juin, par une température de + 17°, nous comptons sur plusieurs individus dont le cœur à été décou- vert 36 pulsations par minute. Plongés dans l’eau à 25° le nombre monte à 52 pulsations. » » à 30° » » à 67 » » à 39° » » à 82 » » » à 40° l'animal se contracte beaucoup et les pulsations 92 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE sont trop irrégulières pour qu'il soit possible de les compter. A 45° le nombre est moins considérable; à 50° il y a arrêt du cœur en systole. Si, au lieu d'opérer sur l'animal entier, on détache le cœur et qu’on le reçoive dans une solution de chlorure de sodium à 0,5 2}, contenue dans un verre de montre, on sait que le cœur continue à battre, il donne à 18°, 36 pulsations et accé- ère sa marche à peu près comme il vient d'être indiqué, si on chauffe l'eau salée dans le verre de montre. Dans le cas où l'élévation de température est brusque ou bien que la dif- férence de température entre les deux milieux est grande, le cœur s'arrête en systole et y demeure parfois assez longtemps (plus d’une heure) à une température qu'il aurait parfaitement supportée s’il y avait été amené pro- gressivement. Au contraire, si on fait passer l'animal d'une eau chaude (30-35°) dans une eau froide (5-6°) le cœur s'arrête en diastole. D'ailleurs, il semble que le cœur peut cesser longtemps de battre sans que cela nuise à l'animal. Lorsque celui-ei se contracte violemment, le sang, refluant vers le cœur, le dilate à tel point qu'il fait saillie au dehors. Dans cet état, il cesse de battre pendant plusieurs minutes. Richard ! nous dit qu’en enlevant le cœur de l'Helix, il a vu de ces ani- maux ne mourir que trois jours plus tard. L'observation est juste, si l'on apprécie la vitalité à la contractilité des tissus. Il est vrai que, même après quatre et cinq jours en hiver, un Escargot, auquel on a extirpé le cœur, réagit encore à une excilation mécanique ou électrique portée sur le pied, le bord du manteau, ete. Mais, contrairement à ce qu'aflirme Richard, je n'ai pas vu l'Escargot marcher après l'opération. Ordinairement, il se contracte, ses tentacules se retirent pour ne plus s’étaler, son corps flasque repose sur le côté et, quoique pouvant encore se retirer dans sa coquille, il meurt le plus souvent dans cet élal. Le nombre moyen de 36 pulsations, à la température de 15-20°, est aug- menté si l'animal est en mouvement. Durant la reptation et le jeu continuel des tentacules, le nombre des pulsations monte jusqu’à 50. Nous verrons plus loin que toute irritation portée à la périphérie produit le même résultat. 4 J. Ricaarp, loc. cil., p. 4. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 95 un p Je ne comprends pas comment et pourquoi, à l'inverse de ce qu'ont juste- ment constaté Foster et Biedermann, Ransom nie l’altération du jeu cardiaque à la suite d’une déchirure du péricarde. Les chiffres que nous donnons plus haut et que nous indiquerons par la suite, concernent les pulsations du cœur dont le péricarde est intact. Dans les mêmes conditions de température et de pression, les cœurs de tous les individus d’Æelix donnent le même nombre de pulsätions. Il n’en est plus de même lorsque le péricarde est ouvert, et l’on constate alors d'assez grandes différences individuelles. Lorsqu'on fend le péricarde de l’Æelix donnant 36 pulsations à la minute, on voit ce chiffre tomber à 14, 18,25, selon les cas: il v a toujours une chute du nombre des pulsations et en même temps le rythme est altéré, en ce sens que l’oreillette et le ventrieule battent indépendamment l’un de l’autre. Il est vrai qu’au bout de quelques instants la régularité se rétablit, mais rarement au degré où elle était auparavant, C’est done à tort que Ransom a négligé de tenir compte de celle circonstance et qu'il a indifféremment opéré sur des cœurs intaets et sur des cœurs dépourvus de leur péricarde. Dans ce dernier cas, il faut tenir compte à chaque expérience de l'influence de la déchirure du péricarde. INFLUENCE DE L'ASPHYXIE SUR LES MOUVEMENTS DU COEUR, — L'asphyæie à pour effet de ralentir les pulsations cardiaques. et finalement d'arrêter le cœur en diastole. Mes expériences sur ce point sont entièrement confirmatives de celles de J. Richard, mais tandis que cet expérimentateur s’est contenté de submerger ) æ les animaux dont il avait découvert le cœur, j'ai contrôlé ce mode de faire en 24 placant des Escargots sous la cloche de la machine pneumatique et en injec- tant de lhuile dans leur sac pulmonaire. Voici le procès-verbal de quelques expériences : EXPÉRIENCE. — Je submerge dans un vase exactement rempli d’eau un Helix pomatia de grande taille, dont le cœur est découvert depuis trois jours et donne régulièrement, au repos de l'animal, 38 pulsations à la minute, L'animal s'étale bientôt et fait des efforts pour sortir du vase, Une demi-heure après la submersion, je compte 46 pulsations, alors que l’animal se contracte 94 CONTRIBUTIONS À L'HISTOIRE irréguliérement, appliqué contre le couvercle du vase. Deux heures plus tard, le nombre des pulsations est descendu à 30; quatre heures après, il n'est que de 16; quinze heures après — 6 pulsations ; vingt-quatre heures après — 2 pulsations. Trente-six heures après, le cœur est arrêté en dias- tole. À ce moment on retire l’animal de Peau et l’on applique sur son pied la pince électrique : il se contracte vivement, un jet d’eau jaillit de son sac pulmonaire, mais le cœur demeure arrêté, Cependant l'animal abandonné à lui-même reprend peu à peu toutes ses fonctions et le cœur donne de nou- veau 34 pulsations, vingt-quatre heures après qu'on la sorti de l’eau. Expérience. — Un #elix de grande taille dont le cœur découvert depuis quatre jours donne 38 pulsations à la minute, est placé sous une petite cloche pneumatique, assez petite pour qu'on puisse voir l'animal dans toutes les positions. On fait le vide jusqu'à 2 millimètres de mercure : l'animal abandonne une assez forte quantité de mucus, il se contracte, le cœur gonfle et l’on ne peut compter ses pulsations. Cependant, deux heures plus tard, il s’est étalé un peu et, quoique ne rampant pas, on compte encore 26 pulsa- tions. Après quatre heures — 15 pulsations ; après quatorze heures — 6 pul- sations; après vingt-quatre heures — 4 pulsations; après trente-six heures — 1-2 pulsations; après quarante-huit heures — 1-2 pulsations. Il demeure en cet état jusqu'à la fin du troisième jour. Le cœur est alors arrêté en dias- tole. On laisse rentrer l'air sous la cloche ; l'animal inerte un instant aupa- ravant. se contracte légèrement. Il réagit parfaitement aux excitations méca- niques et électriques; pourtant on ne réussit pas à le rappeler à la vie. Le lendemain matin il entre en décomposition. Expérience. — J'injecte rapidement à travers l’orifice pulmonaire de l'Helix, 4 centimètres cubes d'huile d'olive, l'animal se contracte et la plus grande partie de l'huile ressort; cependant il en reste une assez forte quan- tité pour gêner la respiration et cela réagit sur le cœur, dont le nombre initial de pulsations était 38 à la minute. Deux heures après, l'animal s'étant élalé de nouveau, on lui injecte une nouvelle quantité d'huile et, deux heures après cette nouvelle injection, le nombre des pulsations est tombé à 24. Le lende- PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 95 main matin, l'animal est trouvé inerte au fond du vase; quatorze heures après — 10 pulsations; dix-huit heures après — 8 pulsations. Ce dernier nombre se maintient longtemps. Trois jours plus tard l'animal vit encore, le cœur donnant encore 3-4 pulsations par minute. INFLUENCE D'UN COURANT D'INDUCTION SUR LES PULSATIONS CARDIAQUES. — Nous nous sommes servi dans ces expériences d’une petite bobine de Dubois- Reymond, alimentée par une pile au bichromate de potasse et acide sulfu- rique, de grande dimension. Les électrodes de platine pouvaient être éloignés ou rapprochés à volonté. Un faible courant d'induction appliqué sur le péricarde n'a pas d'effet sur le cœur, mais appliqué directement sur celui-ci après que le péricarde a été fendu, l'arrêt en systole est immédiat. Appliqué, au contraire, sur le ganglion sous-æsophagien ou sur le tronc du nerf d'arrêt de Ransom, le cœur s'arrête en diastole. Cependant, pour obtenir l'arrét complet, il faut un courant d'une certaine intensité ; un faible courant ne provoque qu'une dimi- nution du nombre des pulsations. ExpÉRIENCE. — Un Helix dont le cœur est découvert depuis trois jours et donne 38 pulsations régulières par minute, est soumis à l'influence d’un faible courant d’induction (bobine tout à fait ouverte). La pince posée sur le poumon amène une contraction passagère de tout le corps, dont le cœur se ressent; il accélère sa marche, donne quelques pulsations rapides et irrégu- lières, puis redevient normal. La pince appliquée sur le péricarde ne donne pas d’autres résultats. On ouvre alors le péricarde : le nombre des pulsations après cinq minutes est descendu à 26, qui se maintiennent régulières pendant cinq autres minutes. L'application sur le cœur des branches d’une petite pince (excitation mécanique) fait monter les pulsations à 30, 32, 34; en lout cas elle ne les diminue pas. Au contraire, l'application de la pince électrique de manière que l’une des branches touche l'oreillette et l’autre le ventri- cule, arrête immédiatement le cœur en systole. Si le courant est très faible, les pulsations recommencent après que la pince est éloignée, mais si l’on ferme complètement la bobine, la systole est définitive. 96 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE Sur un autre individu à péricarde fendu on applique la pince, dont les deux branches sont rapprochées jusqu'à 2 millimètres, à la naissance du ventricule : celui-ci s'arrête en diastole, pendant que, si le courant n’est pas trop intense, l'oreillette continue à battre. L’inverse à lieu lorsqu'on applique la pince avec un courant moyennement fort à la naissance de l'oreillette, c'est-à-dire que celle-ci s'arrête en diastole, tandis que le ven- tricule bat toujours. (Confirmation d'une expérience de Ransom.) Expérience. — Un Helix dont le cœur est découvert, est légèrement chloralisé, puis solidement épinglé sur une plaque de liège. Dans cet état, on dissèque l'extrémité antérieure de manière à découvrir l'anneau œsopha- gien en évitant de couper aucun des nerfs qui en partent, L'opération, très diflicile, demande au moins une heure; la mucosité répandue par lanimal qui se contracte fortement, gêne la manipulation, il faut procéder très lente- ment et souvent laver sous un courant d’eau. On éloigne avec une épingle le commencement de l'intestin afin de voir le ganglion sous-æsophagien et le tronc nerveux de Ransom dont il a été question plus haut. On sort la plaque de liège de l'eau et l’on compte les pulsations ; au début, le chloral avait fait tomber leur nombre initial de 38 à 22 pulsations, mais après la longue opé- ration, ce nombre n’est plus que de 8. On attend que le rythme soit rétabli, puis on applique la pince avee un très faible courant (bobine ouverte) sur le ganglion sous-æsophagien dans le voisinage du point de départ du nerf de Ransom. Immédiatement les pulsations se montrent beaucoup plus espacées et, après trois minutes, on n'en compte que 2 par minute. La pince étant tou- jours appliquée sur le ganglion, on coupe le nerf, les pulsations remontent à 8 à la minute, le nerf est done bien le conducteur de l’action d'arrêt. Le nerf étant coupé au ras du ganglion, si l'on irrite son bout périphérique en le pinçant ou bien en l’arrosant d'eau légèrement acidulée, l’action d'arrêt se manifeste, le cœur demeure immobile en diastole. Si, au lieu d'un léger courant, on utilise un courant moyennement fort (bobine à moitié fermée), le cœur s'arrête en diastole aussitôt que l’on place la pince sur le ganglion sous-æsophagien. Note. — Nous avons pu également répéter avec succès l'expérience de PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 97 Ransom qui consiste à isoler complètement l’une des extrémités du cœur, laissant l’autre intacte, et constater alors que l’action d'arrêt ne s'effectue que sur la moitié demeurée en relation avec le centre nerveux péri-æsophagien ; tantôt l’oreillette est arrêtée en diastole alors que le ventricule détaché et abandonné à lui-même continue à battre, tantôt c'est l'inverse. La netteté de ces résultats m'oblige done à admettre des relations morpholegiques telles que les a brièvement décrites Ransom, quoique, je le répète, je n’aie pas réussi à les constater par la dissection. Note. -— Des nerfs accélérateurs et des nerfs d'arrêt du cœur ne paraissent pas étre rares chez les Invertébrés. Pour ne parler ici que des Mollusques, je rappellerai que Paul Bert ! a découvert que si l’on excite par un fort courant d’induction les nerfs qui se rendent aux cœurs de la Sepia, on voit ceux-ci s’arrêler en diastole, tandis que Fredericq ?, dans sa belle étude sur la Phy- siologie du poulpe, a été conduit à distinguer chez cet animal des nerfs accé- lérateurs, outre les nerfs d'arrêt. Il a montré que si l’on porte une excitation électrique sur les nerfs qui courent le long de la grande veine cave, le nombre des pulsations cardiaques augmente immédiatement, tandis que l'excitation forte du tronc des nerfs viscéraux a, au contraire, pour résultat d'arrêter les cœurs en diastole. L’analogie dont ces faits témoignent entre l’innervation du cœur des Mollusques supérieurs et celle du cœur des Vertébrés, donnait un grand intérêt à constater la même double action chez les Gastéropodes. Malgré les soins que nous y avons pris, en opérant isolément sur les différents nerfs du collier æsophagien, nous n'avons obtenu que des résultats négatifs. Toutefois nous ne pouvons nier absolument l'existence de nerfs accélérateurs émanant de ganglions encore énigmatiques dont les anatomistes ont, à diverses reprises, signalé l'existence en différentes régions du corps des Gastéropodes. Mais c’est là une recherche qui demanderait des études nouvelles. ! Pau BERrr, loc. cit., p. 66. 2 FREDERIC, loc. cit., p. 24. 98 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE VI: ACTION DES POISONS. Nous avons dit plus haut pour quelles raisons il n’est pas possible de pra- tiquer des vivisections bien étendues chez les Pulmonés. C'est alors qu'il est permis d'attendre des résultats intéressants de l’action des poisons chez ces animaux. Ces précieux réactifs, pénétrant à la suite d’une simple piqüre dans l'intimité des tissus, agissant sur certains d’entre eux tout en ménageant les autres, semblaient devoir servir d’auxiliaires au physiologiste pour l'étude surtout des fonctions nerveuses et musculaires. Malheureusement l'Escargot, protégé par sa coquille dans laquelle il se retire à la suite de la moindre excitation et qui parfois y demeure des heures durant, sans donner signe de vie, est peu propice aux expériences loxicologiques; aussi les résultats obtenus manquent-ils de netteté, et l’on est obligé de répéter un grand nombre de fois les expériences avant d'oser en tirer une conclusion. L'Arion est un peu plus avantageux à ce point de vue. Nous nous en sommes servi comme point de comparaison, sans toutefois qu'on puisse non plus le signaler comme une espèce favorable aux recherches dont il va être question, En effet, comme l'Escargot, il absorbe peu ou pas du tout par la peau, et si sa surface pulmonaire est, au contraire, plus absorbante, il peut toujours subsister des doutes relativement à l'effet de lasphyxie compliquant celui du poison introduit par cette voie. En outre, lArion répand des flots d’une mucosité qui gène ses mouvements et dont la perte affaiblit tellement l’animal que souvent cette seule cause suffit pour entrainer la mort. L'action des poisons a été déjà essayée sur un grand nombre d’Inverté- brés, qui ont fourni, en général, des résultats concordants; je renvoie pour PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 99 9 la bibliographie aux travaux de Plateau !, Krukenberg ? et René Kæbler 5. Je me contenterai de signaler ici ce qui concerne les Mollusques et plus particulièrement les Gastéropodes. Tandis que le curare fournissait des résultats positifs à Vulpian # et Steiner Ÿ opérant sur l'Escargot, la strychnine n’agit pas sur le même animal entre les mains du premier de ces expérimentateurs. Paul Bert $ obtint des effets immédiats sur la Seiche au moven du chlor- hydrate de strychnine et, au contraire, un effet très lent avec le curare. Le professeur Colasanti 7 a étudié l’action de l’atropine, de la strychnine et du curare sur les Céphalopodes, sans mentionner, dans le mémoire que j'ai sous les yeux, les espèces auxquelles il s’est adressé. Klemensiewiez $, dans ses importantes recherches sur le Jeu des Chromatophores, a soumis l’Eledone moschata à Vaction de lamylnitrit, de la strychnine et du curare. Heckel ° a expérimenté le sulfate et l’oxalate de strychnine sur lÆelix pomatia, H. aspersa et Zonites algirus. Krukenberg !° à fourni beaucoup de rensei- gnemenls sur la question qui nous occupe. IT à étudié sur l'Eledone et Sepia et en partie aussi sur l’Æelix pomatia l'action des poisons suivants : quinine, 1 Fécix PLateau, Recherches physiologiques sur le cœur des Crustacés décapodes. ARCHIVES DE PHYSIOLOGIE, t. L, 1880, p. 595. 2 KRukENBERG, Vergleichend-toxicologische Untersuchungen. VERGL. PHYSIOL. STUDIEN, 4e Abth., 1880, p. 77. — Der Mechanismus des Chromalophorenspieles bei Eledone moschata. IBin., p. 1. -— Das Verhältniss der Toxicologie zu den übrigen biologischen Disciplinen. Estratto dal BOLLETINO DELLA SOCIETA ADRIATICA DI SCIENZE NATURALI, t. V, 1879. 3 RENÉ KoEuLer, Recherches physiologiques sur l'action des poisons chez les Invertébres, Paris, J.-B. Baillière et fils. 1883. 4 VupriAn, Leçons sur la physiologie générale et comparée du système nerveux. Paris, 1866, pp. 202 et 784. 5 STEINER, Ueber die Wirkung des amerikanisches Pfeilgiftes curare. Arch. Fr. ANAT. uND Puysioc., 1875, p. 145. 6 Paur Bert, Mémoire sur la physiologie de la Seiche, Paris, 1867, p. 68. 1 Cozasanri, Ricerche anatomische et fisiologische sopra il braccio dei Cefalopodi. R. Acca- DEMIA DEI LiINCEI. F. 1876. 8 KLEMENSIEWICZ, Beiträge zur Kenntniss des Farbemwechsels der Cephalopoden. SirzuNGsBER. p. k. K. Acap. p. Wiss. zu WIEN, t. LXX VIII, IIT Abth., 1878. 9 HecxeL, De l’action des sels de strychnine sur les Mollusques gastéropodes, C. R. pe l’Acan. DES SCIENCES DE PARIS, t. LXXXVIII, p. 918, 1879. 10 KRUKENBERG, Loc. cit. 100 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE nicotine, atropine, strychnine, alcool, chloroforme, éther, curare, camphre, muscarine, vératrine, cofféine, physostigmine, picrotoxine. Vulpian a égale- ment observé l'effet des poisons dits du cœur (inée, muscarine) sur les Gastéropodes !. Moi-même ?, j'ai expérimenté sur les Céphalopodes et les Lamellibranches l’action des acides et des alcalis, du bichlorure de mer- cure, de l’arsenie, du curare, de la strychnine, de la nicotine, de l’atropine, de la muscarine, de la vératrine et de Fupas-antiar. Enfin, plus récemment, dans le travail cité de Ransom, cet auteur étudie l'action de plusieurs poi- sons sur le cœur des Céphalopodes et de l'Helix aspersa. Kœbhler * à fait une enquête, étendue à plusieurs Invertébrés, sur l'action des poisons . On peut reprocher à cet auteur d’avoir, pour ce qui concerne les Pulmonés, opéré aux mois de février, mars et avril, c'est-à-dire à une époque où ces animaux sont encore plongés dansleur sommeil d'hiver, ou ne font qu’en sortir. Toutes les fonctions étant alors suspendues, les phénomènes d'absorption et de diffusion des poisons devaient sans doute subir un ralentissement génant. Afin d'éviter la perte d’une partie du poison injecté, Kæhler s’est même servi — il le dit expressément — d'individus encore pourvus de leur opereule calcaire sous lequel se trouvaient les opercules membraneux. Après avoir enlevé le premier, il perçait de la canule de la seringue les deux autres, puis l’enfonçait dans le pied. Il me semble « priori que ce procédé n’est pas heureux, et je me suis convaincu de ses défectuosités en l’appliquant au mois de février sur des Escargots endormis. D'abord, quel que soit le poison, l'animal demeure presque toujours enfoncé dans sa coquille, ne donnant aucun signe quelconque d’empoisonnement où de non-empoisonnement: ensuite, il est très difficile de dire si l’on a inoculé le poison dans le pied ou ailleurs, attendu que l’opacité des membranes est telle (lorsque les deux sont 1 Vupian, Action des poisons du cœur sur les Gastéropodes, C. R. DE L’ACAD. DES SCIENCES pe Paris, t. LXXXVIII, 1879, p. 1293, et Inew, Étude physiologique des poisons. REVUE INTERNATIONALE DES SCIENCES, 1881-82. 2 E. Yuxc, Recherches expérimentales sur l'action des poisons chez les Céphalopodes. MITTHEILUNGEN AUS DER Z00L. Star. Zu NeAPEL, t. IL, p. 97; Inen, De l’action des poisons chex les Mollusques. ARCH. DES SCIENCES PHYS. ET NAT., 9° période, t. VII, 1882, p. à. 3 KoEHLER, Loc. cit. 4 J. RicHaRD, Loc. cit. PHYSIOLOGIQUE DE L’ESCARGOT. 101 respectées) que l’on ne voit pas le bout de la canule; enfin les mouvements du cœur étant irrégulièrement ralentis chez les Escargots d'hiver, il est très malaisé de constater si, oui ou non, le petit nombre de battements est dû à l’action du poison ou à l’affaiblissement hivernal. Aussi lit-on dans le mémoire de l’auteur des phrases comme celles-ei : « Les mouvements du cœur sont considérablement ralentis » (p. 14 à propos du curare). « Une injection d'ésérine d’un centigramme ralentit les mouvements du cœur qui reste petit el faible » (p. 23). « Les battements du cœur sont ralentis » (p. 28, à propos de la caféine). « Le cœur mis à nu offre des battements réguliers, mais faibles et lents » (p.38 à propos de la nicotine), ete., sans jamais que l’auteur ajoute des chiffres sur la rapidité initiale du cœur, ce qu'on serait en droit d'exiger puisque les expériences ont eu lieu à une époque où les mouvements cardiaques sont normalement très lents. D'ailleurs, je me demande com- ment, avee sa méthode qui consiste à injecter le poison sur un animal retiré au fond de sa coquille, M. Kœhler à pu constater que le curare « amène presque immédiatement la suppression des mouvements volontaires » ; celle suppression de mouvements volontaires chez un animal qui n’en à pas fait depuis des mois, me parait quelque chose de bizarre et de difficile à com- prendre. Nous aurons, du reste, à revenir plus loin sur le mémoire de M. Kœhler qui, après avoir exposé le procédé que nous venons de critiquer, ajoute : « Je n'ai pu faire au commencement de juin que quelques expé- riences sur les limaces, suffisantes cependant pour comparer l'action des toxiques sur l'Escargot et la Limace (Arion rufus). » Or, en général, le résultat de cette comparaison est : que lorsqu'il y a une différence, elle con- siste en ce que l’action du poison se montre beaucoup plus rapide, beaucoup plus énergique chez la Limace que chez l’Escargot. Nous ne pensons pas que ce soit là une différence spécifique ainsi que le laisse entendre M. Kæbhler, mais tout simplement le fait que, chez la Limace, le poison a été administré à l'époque d'activité, tandis que, chez l’Escargot, il l'a été durant la période de repos. Ces remarques nous semblent suffisamment justifier notre manière de faire, consistant à opérer en été, pendant les mois de juin et de juillet. Quant à l’introduetion du poison, nous lavons obtenue quelquefois en immergeant 102 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE l'animal soit partiellement, soit entièrement dans les vapeurs ou la solution de la substance toxique; le plus souvent en linoculant dans le pied au moyen d'uve petite seringue de Pravaz. Dans tous les cas où la solution toxique est aqueuse et neutre, on obtient des effets en immergeant complètement l'animal dans la solution. Acnes. — L'Escargot et l’Arion sont tous deux très sensibles à l’action des acides; elle se manifeste tout d'abord par la production d'une grande quantité de mueus dont les animaux se fabriquent en un petit nombre de minutes une sorte de fourreau protecteur. Or, comme ces mucosilés ainsi que tous les tissus tégumentaires renferment une certaine proportion de carbo- nate de chaux, si l’on fait usage d’une solution faiblement acide, celle-ci est bientôt neutralisée et il est indispensable de la renouveler fréquemment. De plus, la coquille de l'Helix produit la même action beaucoup plus eflicace- ment encore, en sorte que les expériences par immersion demandent une grande quantité de liquide. Nous avons fait usage de solution d'acides sul- furique, azotique et chlorhydrique à 0,5 et 1 °,, dans lesquelles nous plongions les animaux, le vase étant rempli de la solution et parfaitement clos. 11 nous parait superflu de relater en détail les expériences. Nous en résumerons les résultats de la manière suivante : L'acide sulfurique à À °,, agit sur les deux genres avec la même rapi- dité, l'animal exsude une quantité prodigieuse de mucosité, il se contracte énormément, devient dur el ramassé sur lui-même, Les mouvements réflexes sont complètement abolis sur toute la surface du corps au bout de 10 minutes, au maximum, chez lArion, et de 25 minutes chez l'Helix. Les animaux paraissent être morts. Toutefois il nous est arrivé de constater, après les avoir bien lavés à grande eau et débarrassés des mucosités qui les enveloppaient, la réapparition des mouvements réflexes dans les couches profondes de la peau et les muscles du corps. Mais, si en cet état on les plonge de nouveau dans la solution acide, la mort définitive arrive au bout de 3 à 4 minutes, proba- blement à cause de la perte de la couche de mucus qui les protège. Même un fort courant d’induction est incapable de réveiller le moindre mouvement réflexe. Le cœur découvert est trouvé régulièrement arrêté en systole com- PHYSIOLOGIQUE DE L’'ESCARGOT. 105 plète, il est devenu presque aussi dur que les muscles du pied. L'excitation électrique de l'anneau œsophagien ne donne aucun résultat. La solution dans laquelle on plonge l’Arion se colore en jaune orangé qui pälit après quelques heures. Les animaux prennent, au contraire, une colora- tion brune très foncée. L’acide sulfurique doit prendre place, ainsi que tous les autres acides, parmi les poisons musculaires ; en effet, la consistance que prend le pied, puis tous les téguments, est semblable à celle qui est obtenue par la chaleur; elle résulte d’une coagulation du protoplasma cellulaire par l'acide. Si l’on injecte la solution à 0,5 ‘,, dans la masse du pied, on n’oblient qu'une action locale d'autant plus étendue que le liquide a été poussé plus fort et a, par conséquent, rencontré un plus grand nombre d'éléments. Le pied est para- lysé sur un périmètre plus ou moins grand autour du point touché par la canule. Mais il n'y a pas d'action générale et les portions du corps non alleintes continuent à fonctionner normalement, à la condition cependant que la quantité de liquide soit très faible. Si l’on injecte 1 ou 2 centimètres cubes de la solution à 0,5 ‘},, à travers le pied (une pareille dose d’eau ordinaire est inoffensive) l'animal meurt au bout de dix à douze heures en moyenne, Pourtant un Arion donnait encore des mouvements réflexes sur le dos après vingt-quatre heures. Dans ce cas on rencontre des troubles internes qui prouvent que la mort est due à la coagulation du sang. Le contenu du cœur el de la cavité péricardiaque est blanchâtre et granuleux. D'ailleurs, après avoir injecté 2 centimètres cubes d'acide azotique à 4 °,, nous avons constaté l'existence de petites bulles de gaz à l’intérieur des vaisseaux sanguins répandus sur les parois de l'estomac et de l'intestin de l’Arion. On sait que les parois de ces vaisseaux sont très riches en carbonate de chaux ; il fallait donc que l’acidité de l'injection n’eût pas encore été neutralisée à son arrivée sur l'intestin. Si l’on répète l'expérience avec une solution beau- coup plus forte, 8 °/,,, la mort accompagnée de l'abolition des réflexes arrive en moins d’une heure. Le muscle cardiaque est extrémement sensible aux solutions acides. II suffit pour s’en convaincre de détacher le cœur d’un Escargot et de le rece- voir sur une lame de verre avec un peu d’eau, Dans ces conditions, on sait 104 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE qu'il continue à pulser pendant plusieurs heures ; mais si lon vient à laisser tomber sur lui une goutte d'une solution d'acide minéral à 1 °/,,, il s'arrête instantanément. Il va sans dire qu'il en est de même sur le cœur en place. Lorsqu'on fait usage d’une solution extrêmement faible d'acide à 0,1 °},, par exemple, sur un cœur d’Æelix fatigué et sur le point de s’éteindre, la solution agit comme un excitant, le nombre des pulsations augmente passa- gèrement pour laisser bientôt le cœur arrêté en systole. Les acides azotique et chlorhydrique agissent comme le précédent, mais avec plus d'intensité encore; c'est l'acide azotique qui nous a paru jouir du maximum de toxicité, ainsi que c’est le cas chez les Céphalopodes. Un Arion meurt au bout de dix minutes dans la solution de 1 °/,.. L'acide borique à À °}, tue les Limaces et les Escargots en moins de cinq minutes, avec celte différence que la contraction musculaire est beau- coup moins intense qu'avec les acides précédents. ALCALIS. — L’ammoniaque est l’alcali dont l’action est le plus intense. Les animaux plongés dans une solution à 0,5 *,,, meurent au bout d'une heure, tandis qu'ils résistent un peu plus de temps à des solutions de potasse et de soude à la même dose. D'ailleurs, Paction des alcalis est fort semblable à celle des acides ; nous devons les considérer comme des poisons musculaires, ainsi que nous l'avons reconnu déjà chez les Céphalopodes. Mais les alcalis agissent avec moins de rapidité que les acides, et cette différence se trahit à égalité de dose, par la persistance avec laquelle les animaux exécutent des mouvements dans les solutions alcalines, tandis que dans les acides l'animal, violemment contracté, tombe au fond du vase et demeure en cet état jusqu’à la mort. Il n'y a aucune différence notable entre l’action de la potasse et celle de la soude. Les alcalis comme les acides arrêtent le cœur en systole lorsqu'on larrose directement de leurs solutions. CHLOROFORME ET ÉTHER. — Ces deux substances doivent être également rangées parmi les poisons qui agissent directement sur les muscles. Le chlo- PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 105 roforme agit à doses extrêmement faibles, car il suffit de placer un Escargot sur une lame de verre qui a été arrosée avec ce liquide, quoiqu'il se soit évaporé depuis quelques instants et que la plaque paraisse parfaitement sèche, pour que l'animal rende une grande abondance de bave blanchâtre provenant des glandes du bord du manteau. C’est là le premier signe de l'action de ces anesthésiques sur lÆelix. Lorsqu'on plonge ce dernier dans une atmosphère de chloroforme ou d’éther, il se contracte violemment dans sa coquille expulsant beaucoup de mucosité blanchätre. La contraction est si forte que ces agents ne peuvent être utilisés pour anesthésier les animaux que lon se propose de disséquer. Nous avons plongé des Escargots dont la coquille était enlevée au-dessus du cœur de manière à pouvoir suivre ses pulsations, dans une atmosphère saturée de chloroforme. Au premier moment, pendant la durée de la contraction de tout le corps, le sang affluant en grande abon- dance vers le cœur, celui-ci se gonfle, fait saillie au dehors et s'arrête en diastole; il demeure en cet état pendant trois à cinq minutes, puis se remet à battre très rapidement. Le nombre initial des pulsations étant de 38, nous l'avons vu monter à 60 pendant cette période d’excitation. Mais cela ne dure que trois ou quatre minutes et, l'animal contracté au maximum, les pulsations du cœur diminuent rapidement. Après dix minutes le nombre des pulsations n’est que de 14, après quinze minutes il tombe à 4 pulsations, puis le cœur s'arrête après vingt minutes en systole. L'animal est retiré. Il n’exécute aucun mouvement, on le lave et on applique sans résultat la pince électrique en différentes régions du corps. Les réflexes sont complètement abolis, le pied est extrêmement dur, l'animal est mort. Si, au lieu de placer l'Escargot dans une atmosphère saturée de chloro- forme, on l’introduit dans un mélange d’air et de vapeur, les phénomènes sont semblables, mais beaucoup moins précipités. Au bout d’une heure seu- lement, il y a arrêt du cœur en systole et, malgré la contracture du corps et la dureté des muscles du pied, si on lave l'animal à grande eau, il revient à la vie. On voit réapparaître les mouvements réflexes après une ou deux heures, et après huit à dix heures les mouvements volontaires. Il faut done admettre que la vapeur de chloroforme ne coagule pas le protoplasma des cellules musculaires, ainsi que le font les acides, mais modifie sa structure 14 106 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE physique tout en lui laissant la faculté de revenir à son état premier. Ce relour à l'activité musculaire est obtenu plus facilement après l’action de l’éther mélangé d'air. Sous tous les rapports, l’éther se montre moins puis- samment toxique que le chloroforme. $ J'ajouterai que lArion est plus sensible que l'Helix et que, lorsqu'on a poussé l'expérience jusqu'à l'arrêt du cœur, le lavage à grande eau et lexpo- sition à un courant d'air ne suffisent pas pour le ramener à la vie. Les mou- vements réflexes seuls réapparaissent, mais lanimal abandonné à lui-même meurt sans avoir recouvré les mouvements volontaires. Krukenberg !, dans son Mémoire de 1880, a donné beaucoup de soins à l'étude des poisons du groupe alcool (alcool, chloroforme, éther) sur la sangsue, et s’est ingénié avec un plein succès, selon nous, à démontrer qu'ils agissaient directement sur les muscles indépendamment de toute action cen- tale. Les résultats que nous avons obtenus au moyen des mêmes substances sur l’Escargot confirment sa manière de voir. EL pour nous, la sécrétion abondante qui accompagne en premier lieu l’action du chloroforme sur l'Helix en est un témoignage : elle résulte sans doute de la contraction des fibres musculaires décrites par Leydig, autour des glandes calcaires du bour- relet palléal. Étant les plas superficielles, elles sont les premières atteintes. Curare. — Le curare dont j'ai fait usage provient de chez Rousseau à Paris. Il est très actif sur les grenouilles. Un Aelix plongé dans une solution de eurare à 0,5 °}, y demeure pen- dant dix-huit heures sans montrer aucune altération plus grave que si on l’eût maintenu sous l’eau pure. Il en est de même chez l’Arion; nous n'avons jamais constaté une augmentation bien notable des sécrétions cutanées, contrairement à ce qui a lieu avec les substances précédentes. Nous en concluons que le curare n’est pas absorbé par la surface pulmonaire, analogie avec ce qui se passe chez les Céphalopodes dont les branchies, si aptes à 1 KRukENBERG, Vergleichend toxicologische Untersuchungen als experimentelle Grundlage für eine Nerven und Muskelphysiologie der Evertebraten. VERGLEICH. PHYSIOL. STUDIEN, I Abth., 1880, p. 77. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 107 absorber la strvchnine, par exemple, n’absorbent pas du tout le curare. Nous concluons en outre que son action est nulle sur les muscles éjaculateurs des glandes, puisque leur produit de sécrétion n’est pas expulsé. Si, au lieu de submerger un Escargot dans une solution de curare, nous inoculons dans son pied 0,5 centimètre cube de la solution à 1 °,, nous n’assistons pas d'abord à des phénomènes bien particuliers, Fanimal est à peine affecté par l'injection pendant les cinq premières minutes. Il se retire d’abord lentement dans sa coquille, puis il en ressort et recommence à se promener. Cependant, au bout de vingt minutes, les tentacules demeurent retirés et aucune excitation ne réussit à les faire étaler de nouveau. L'animal ne rampe plus, il n’adhère même plus à la surface de porcelaine, il demeure dans la position qu’on lui donne, incapable d'exécuter des mouvements volon- laires; toutefois les réflexes sont conservés sur toute la surface du corps; un léger courant d'induetion suffit pour que l'animal se retire vivement dans sa coquille dans laquelle il demeure. Les mouvements d'ouverture et de ferme- ture de l'orifice respiratoire sont intacts. Le cœur, qui était à 38 pulsations par minute au moment de l'injection, descend à 22, cinq minutes plus tard, puis à 16 après dix minutes, puis à 6 après quinze minutes. Il se maintient longtemps et d’une facon irrégulière autour de ce chiffre, tombant à 4 pour remonter à 7. Après une heure, il bat toujours lentement. L'animal n'est observé de nouveau que le lendemain : les pulsations, régulières, sont remon- tées à 32 à la minute, les mouvements volontaires sont revenus, l'animal a changé de place pendant la nuit et, comme le bocal qu'il habite était sec, il s’est fixé au moyen d’un peu de mucosité contre une paroi verticale, Le poison a done été éliminé, car l'animal étant transporté dans un bassin humide, il reprend ses allures normales et ne tarde pas à attaquer une feuille de chou. A la dose indiquée le curare agit done comme paralysant des mouvements volontaires, mais seulement d'une facon passagère. En doublant la dose, c’est-à-dire après injection d’un centimètre cube de la solution à 1 °}, l'effet est plus rapide et plus accusé ; l'arrêt complet du cœur est même obtenu après une heure, et l'animal meurt si on l'abandonne ; mais si on le lave et qu’on le place en un lieu humide et bien aéré, les mou- vements respiratoires, qui avaient également cessé, se réveillent, et le cœur 108 CONTRIBUTIONS A L’HISTOIRE recommence à battre. Nous avons de la sorte obtenu le retour à la vie nor- male d'Escargots qui avaient passé pour morts. Quelle que soit la dose de curare employée (il nous est arrivé de renouveler jusqu’à trois reprises, sur un même individu, l'injection d’un centimètre cube de curare à 1 °/,), nous n'avons jamais obtenu l'arrêt des réflexes. Mais de toutes les expériences, publiées depuis Vulpian, qui avait trouvé que «le curare n’a presque aucun effet sur les Mollusques » !, les plus remarquables sont dues à Ransom. Ce savant s’est assuré que l’action d'arrêt du cœur dont nous avons parlé plus haut n’a plus lieu lorsqu'on inocule «une goutte de curare dans la veine cave », et cela à un moment où le cœur ralenti pulse encore et peut subir une accélération par lexcita- tion électrique directe. Sur un Æelix préparé comme nous l'avons dit, dont le cœur et l'anneau œsophagien sont en même temps découverts et auquel on a inoculé un quart d'heure avant le commencement de lopération 1,5 centimètre cube de eurare à 1 °/,, le cœur donne encore 6 à 7 pulsa- tions à la minute après l'opération. La bobine d’induetion étant fermée on applique la pince sur le ganglion sous-æsophagien, le courant très fort fait contracter l'animal, le cœur s'arrête un instant, puis recommence à = battre en donnant toujours 6 à 7 pulsations, la pince étant toujours appli- quée. Si l’on vient à couper le nerf de Ransom, les mouvements continuent ; si l’on électrise le tronc nerveux, il en est de même sans qu’on puisse noter de diminution dans le nombre des pulsations. Conformément à laflirmation de lexpérimentateur anglais, l’action modératrice des nerfs viscéraux est complètement paralysée par le eurare à haute dose. En résumé, le curare n’est absorbé ni par la peau, ni par la surface pubnonaire ; l'Escargot qui l'a reçu en injection, à doses toxiques pour des Vertébrés, se montre rebelle à ses effets. Mais à très fortes doses el injecté dans la masse du sang, il montre une action paralysante des mouvements volontaires et des mouvements cardiaques. Il annihile en méme temps le pouvoir modérateur du nerf de Ransom. Son action porte sur le système nerveux et non sur les muscles. l VuLpiaN, Leçons, p. 762. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 109 Upas-anriar. — J'ai employé de l’upas-antiar envoyé par Rousseau à Paris, et dont deux gouttes de la solution aqueuse saturée à la température ordi- paire, suffisent pour tuer un grenouille, par arrêt du cœur, au bout de quelques minutes. Pas mieux que le curare, l’'Escargot ne labsorbe par les poumons. Inoculé à travers le pied à la dose énorme de { centimètre cube, il ne pro- duit aucune action appréciable autre qu’un arrêt douteux des mouvements volontaires, qui ne lardent pas d’ailleurs à reparaitre. Le cœur mis à nu subit un arrêt momentané immédiatement après l'injection, mais cinq minutes plus tard il a repris son rythme normal. ArRopixE. — Des expériences antérieures n'ayant montré que de faibles solutions de sulfate d’atropine sont sans action, j'ai fait usage d’une solution renfermant 05,3 par centimètre cube Un Helix plongé dans cette solution sécrète immédiatement une abon- dante mucosité, il se retire dans sa coquille, le pied devient ferme; ce sont là des effets propres aux poisons musculaires. Une heure après, les mouve- ments volontaires sont abolis et les réflexes fortement atténués, mais, retiré à ce moment, le cœur étant arrêté en syslole, on peut rétablir ses mouvements en lui appliquant directement sur le ventrieule un faible courant d’induction, et le lendemain l’'Escargot est trouvé en bonne santé apparente. L'action de l’atropine sur le cœur est intéressante en ce qu'elle a été niée par quelques auteurs. Chez l’Helix et l'Arion dont le cœur a été mis à décou- vert et le péricarde fendu, l'arrêt en systole est cependant obtenu par quel- ques gouttes de la solution susindiquée, posées directement sur le ventri- cule. L'injection de À centimètre cube de la solution à travers le pied arrête le cœur en systole au bout de dix minutes, sans accélération préalable de ses pulsations. Mais cette accélération est très manifeste, au contraire, lorsqu'on suit les pulsations sur le cœur découvert d'un Æelix submergé dans la solu- tion. Voici ce que nous avons observé : Un Æelix est plongé dans la solution, le cœur découvert donnant 38 pulsations initiales. L'animal se contracte vivement et le cœur s'arrête quelques instants pendant que lEscargot se ramasse sur lui-même. Mais bientôt il recommence à battre, et durant cinq minutes le nombre des pulsations dépasse d’un tiers ce qu'il était au début. 110 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE Ainsi, deux minutes après la submersion, le cœur est arrêté en diastole, à la fin de la troisième minute les pulsations recommencent, et tout de suite il donne 49 pulsations ; le nombre monte jusqu'à 62 dans les cinq minutes sui- vantes, puis redescend presque subitement à 24, 15, 12, 10, 9, 7, un peu plus tard, [se maintient quelque temps à ce chiffre, puis s'arrête tout à coup. Sauf ce point, nos résullats sont conformes à ceux qui ont été publiés par nos prédécesseurs. Note. — Nous avons encore étudié au moyen de notre méthode d’absorp- lion pulmonaire, la brucine, la strychnine, l’aconitine, la nicotine et la véra- trine; les résultats que nous avons obtenus ne différant pas de ceux qui ont été publiés par Heckel, Vulpian, Kohler, Ransom et J. Richard, nous les passons sous silence. La muscarine, dont l’action est intense à la suite d’une injection, n'est pas absorbée par la surface pulmonaire. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 111 RÉSUMÉ GÉNÉRAL. 1. — La durée de l'hivernage de l’Æelix pomatia varie dans notre pays selon les conditions climatériques, la température, le degré d'humidité, Palti- tude, entre quatre mois et demi et six mois et demi. (Moyenne de quatre années d'observations entre 300 et 580 mètres d'altitude.) 2. — Le réveil accidentel pendant l'hiver est nuisible à ces animaux; la mortalité de ceux qui ont été réveillés est considérable. 3. — La durée pendant laquelle l’'Escargot peut supporter linanition varie beaucoup d’un individu à l’autre; elle peut excéder une année, 4. — L'Escargot peut supporter pendant plus de quatre jours les froids artificiels les plus intenses que nous sachions produire, à condition que l’on opère pendant leur sommeil hivernal, sans les éveiller et sans altérer leur épiphragme. Les tissus ne sont pas détériorés par la congélation, si celle-ci n’est pas brusque et si l’animal a été très lentement réchauffé. 5. — Il supporte une température de + 40° prolongée au delà d'un quart d'heure, mais à + 52-60°, il meurt au bout d’une à cinq minutes par coagu- lation du protoplasma des cellules musculaires et arrêt du cœur. À égale température, au-dessous de 50°, l'air chaud est moins nuisible que Peau chaude. 6. — Les individus de grande taille résistent mieux à lasphyxie par submersion que ceux de petite taille. Les uns et les autres résistent mieux en hiver qu’en été. Les individus de grande taille sont tous morts en été après cinquante-deux heures; en hiver il faut, pour tuer quelques-uns d’entre eux, quatre-vingts à quatre-vingt-dix heures. L’Arion est, en général, plus rapidement asphyxié que l’Æelix. Ce dernier peut survivre pendant cinq jours au vide d'une machine pneumatique. 112 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE 1. — Les parois de l’intestin sont composées de cinq lamelles, une lamelle péritonéale à l'extérieur, de nature conjonctive, une couche de fibres mus- culaires circulaires, une couche de fibres musculaires longitudinales, une couche de cellules endothéliales cylindriques, une cuticule. 8. Les parois de l'intestin ne renferment aucune glande digestive. 9. — Nous avons retrouvé dans le foie, les trois types de cellules étudiés par Barfurth. Chacun de ces types, quoique intimement mêlé aux deux autres, remplit des fonctions qui lui sont propres. 10. — La réaction de l'intestin est neutre en hiver dans sa portion anté- rieure, ainsi que la réaction des glandes salivaires. En été, ces dernières donnent souvent une réaction alcaline, tandis que lintestin dans toute sa longueur et le foie, fournissent une réaction acide. 11. — Les parois de l'intestin ne renferment aucun ferment digestif. 12. — Les glandes salivaires sécrêtent en été une mucosité neutre ou D] alcaline, dépourvue de ferment diastatique; elles ne renferment pas non plus de ferment capable de digérer les substances albuminoïdes. 15. temps des ferments qui saccharifient les féculents, peptonisent les albumi- Le foie est la glande digestive par excellence ; elle produit en même noïdes et saponifient les graisses. 4%. — Contrairement à ce qui a lieu chez plusieurs Gastéropodes, le suc hépatique de l'Helix perd ses propriétés digestives des albuminoïdes dans un milieu alcalin; il ne peut done être question chez lui d’un ferment sem- blable à la trypsine des Vertébrés. 15. — Le foie fabrique en outre du glycogène qui se transforme norma- lement en sucre. 16. Le sucre produit dans le foie et pendant la digestion est absorbé dans l'estomac, on n’en trouve pas dans l'intestin terminal. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 115 47. — La proportion de glycogène contenu dans l’ensemble des tissus de l’'Escargot, au mois de juin, est de 5#,650 pour 1,000 grammes. 18. — Dans l'état d'alimentation normale, ce sont les cellules du tissu conjonctif du foie dans lesquelles se montre surtout le glycogène. 19. — Le glycogène augmente dans le foie à la suite d’une alimentation riche en fécule, il diminue par une alimentation riche en albuminoïdes. 20. — A la suite d’une alimentation riche en fécules, prolongée pendant plusieurs jours, le glycogène normalement localisé dans le tissu conjonctif du foie, envahit le protoplasma des cellules glandulaires. 21. — Le glycogène fait défaut dans le foie de l’Æelix, un mois à cinq semaines après le début du sommeil hivernal. 22. — Lorsqu'on soumet l’Æelix à l'inanition au milieu de l'été, son gly- cogène hépatique disparait plus vite qu’en hiver. On n’en trouve déjà plus après quinze jours. 23. — Le liquide digestif contenu dans l'estomac et l'extrait aqueux du foie, digèrent la fibrine du sang de bœuf et de porc; les fibres musculaires du bœuf, du lapin, de l’écrevisse ; celles de l’écrevisse sont le plus vite digé- rées. Cette action est activée par la chaleur de 37-38° d’une étuve, mais elle se manifeste parfaitement à la température ordinaire. Ces mêmes liquides digèrent les muscles d’écrevisse cuits, mais peu ou pas du tout ceux de bœuf et de lapin. Ils digèrent l’albumine coagulée du blane d'œuf lorsqu'on aug- mente leur acidité normale. Ils demeurent sans action sur la caséine. Ils émulsionnent les graisses. Ils désagrègent et dissolvent partiellement le parenchyme des végétaux. Ils transforment les albuminoïdes en peptones qui donnent les réactions caractéristiques des peptones obtenues avec le suc gastrique des mammifères. 24. — La destruction complète du ganglion sus-æsophagien ou cerveau de l’Escargot, n’abolit pas les mouvements du pied, du cœur et de l'orifice 15 114 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE respiratoire; mais les tentacules supérieurs et inférieurs, la lèvre supérieure el la mâchoire sont paralysés, L’intégrité du cerveau parait nécessaire pour la coordination des mouvements de reptation et pour la direction de l'animal. 25. — La destruction totale des centres nerveux a pour effet d’abolir tout mouvement volontaire, ainsi que les mouvements respiratoires, tandis que certains réflexes persistent jusqu'à la mort des tissus. 26. — Il existe dans le cerveau une localisation fonctionnelle pour les mouvements des tentacules oculaires. Ceux-ci sont paralysés à la suite de la destruction de l’amas des grandes cellules situées sur le bord interne de chaque ganglion. La destruction d’un de ces groupes cellulaires entraine la paralysie du tentacule du côté correspondant. 27. — Il n'existe pas de centres nerveux ganglionnaires dans les parois du cœur. Les faits physiologiques sont conformes à l'admission d’une rela- lion organique entre le cœur et les centres nerveux (ganglion sous-æsopha- gien), mais nous n'avons pas réussi à retrouver les nerfs d’arrêt décrits par Ransom. 28. — Normalement, il existe un rythme dans les pulsations cardiaques ; mais, dans des circonstances très variées, l'oreillette et le ventricule peuvent continuer à battre d’une façon indépendante. 29. — Le cœur ne cesse normalement de battre qu'à plusieurs degrés au-dessous de 0. L'augmentation de température jusqu’à + 40° accélère les pulsations. 30. — La rupture du péricarde a pour effet une chute du nombre des pulsations du cœur. 341, — L'asphvxie a pour résultat de ralentir les pulsations cardiaques et Pa) finalement d'arrêter le cœur en diastole. PHYSIOLOGIQUE DE L'ESCARGOT. 115 32. — Un faible courant d'induction appliqué sur le péricarde n’a pas d'effet sur le cœur, mais appliqué directement sur celui-ci, après que le péri- carde a été fendu, l'arrêt en systole est immédiat. Appliqué, au contraire, sur le glanglion sous-æsophagien ou sur le tronc du nerf d'arrêt de Ransom, le cœur s'arrête en diastole, Cependant, pour obtenir l'arrêt complet, il faut un courant d’une certaine intensité. Un faible courant ne provoque qu'une diminution du nombre des pulsations. 33. — Les Pulmonés n'absorbent pas ou peu les poisons par la peau, mais lorsqu'ils sont en solution neutre el aqueuse, les poisons qui sont de nature cristalloïde passent peu à peu dans le sang à travers le poumon. 34. culaires, détruisant la contractilité des cellules par une sorte de coagulation Les acides agissent à la dose de 0,5 à 1 °/, comme poisons mus- ou de précipité. Le cœur est particulièrement sensible à cette action des acides : il meurt immédiatement dans les solutions à 1 °/. 39. — Les alcalis agissent d’une façon semblable à celle des acides, seu- lement à égalité de dose leur action est moins intense. œ) 36. — Le chloroforme et l'éther agissent comme puissants poisons mus- culaires, mais, landis que les altérations produites par les acides sont défini- tives, celles du chloroforme sont passagères et les muscles atteints reviennent à leur état premier, lorsque la dose employée ne dépasse pas une certaine limite. L'action modératrice sur les pulsations cardiaques est précédée d’une courte période d’excitation, pendant laquelle le nombre des pulsations aug- mente. 91. — Le curare n'est pas absorbé par la surface pulmonaire. A très forte dose son injection provoque une paralysie des mouvements volontaires, mais les réflexes sont longtemps conservés. Les pulsations cardiaques dimi- nuent et l’on peut même obtenir l'arrêt complet du cœur. Le curare paralyse l’action modératrice du nerf de Ransom sur le cœur. 116 CONTRIBUTIONS A L'HISTOIRE 38. —- L'upas-antiar, même à forte dose, ne parait pas agir sur 5) 2 Le) l'Escargot. 39. — L'atropine à forte dose agit comme paralysant du cœur; cette paralysie est précédée d’une période d'accélération des pulsations cardia- ques. EXPLICATION DES FIGURES. Toutes les figures concernent l’Helix pomatia. Fic. 1. — La masse buccale : À vue du plancher de la cavité buccale qui a été fendue par le haut : a lèvre, b la mâchoire coupée par le milieu, c bord antérieur de la radule, d repli postérieur de la radule, e œsophage; B vue de la fente buccale à demi dilatée : a bord de la mâchoire, b lèvres; C la masse buccale vue de côté; D la même, vue obli- quement. Fi6. 2. — La mâchoire : Leitz, Oc. 1, Obj. L. Fic. 3. — Coupe transversale de la masse buccale après isolement de ses relations avec les parois du corps : à chambre supérieure de la cavité buccale, b chambre inférieure, e repli de la muqueuse le long du plafond de la cavité buccale, d et e la radule, portion postérieure repliée sur la portion antérieure, { couche musculaire sur laquelle repose la radule, g couche dermo-musculaire, À tissu conjonctif lâche, à masses musculaires de la paroi de la bouche, k brides musculaires. Fi. 4. — Coupe sagittale de la masse buccale : a lèvre supérieure avec son recouvrement épithélial, b lèvre inférieure, c la mâchoire, d lamelle cornée faisant suite à la mâchoire et recouvrant le plafond de la partie antérieure de la cavité buccale, e lamelle cornée opposée à la précédente sur le plancher de la cavité buccale, f tissu conjonctivo-muscu- laire, g replis de la muqueuse buccale, À repli vertical de la radule, à muscles sur lesquels repose la radule, # grande cavité de la bouche, / commencement de l'æsophage, mn muscles, 00 couche épithéliale. Fi. 5. — La masse buccale et le commencement de l'intestin, avec les muscles, qui la relient au tissu conjonctif de l'anneau œsophagien et au muscle columellaire : a bouche, b masse buccale, c papille postérieure, d æsophage, e conduit salivaire droit, f cerveau coupé par le milieu pour écarter l'anneau œsophagien, 4 ganglion sous-æsophagien, h nerfs pédieux, à faisceau musculaire inséré à l’une de ses extrémités contre la masse 118 EXPLICATION DES FIGURES. buccale et à l’autre extrémité contre le tissu conjonctif enveloppant le cerveau, k faisceaux musculaires unissant la masse buccale aux cordons de l'anneau œsophagien, /{m muscle unissant la masse buccale au muscle columellaire. Fic. 6. — Différentes formes de cellules cylindriques de l’épithélium du canal hépatique dilacéré frais, puis fixé à lacide osmique. (Seibert, Oc. 1, Obj. VIT Imm.) Fic. T. — Cellules épithéliales du canal intestinal : A cellules de la cavité buccale, après séjour dans l’alcool au tiers et coloration au carmin de Beale; B l’endothélium buccal vu de champ; C différentes formes de cellules de l’œsophage : a quatre cellules observées après séjour dans l'alcool au tiers, b deux cellules après traitement à l'acide osmique, le contenu granuleux est devenu très noir; D deux cellules de l'estomac après traitement à l'acide osmique; E deux cellules larges de la portion terminale de l'estomac. Fic. 8. — Coupe transversale de l’œsophage montrant les replis de sa muqueuse : a cavité de l’œsophage, b couche musculaire, c endothélium cylindrique, d tissu conjonctif parcouru par des faisceaux musculaires e, f noyaux du tissu péritonéal faisant autour de l'intestin un fourreau incomplet dans la coupe. (Seibert, Oe. [, Obj. I.) Fic. 9. — Cellules musculaires fusiformes de la paroi du pharynx. Fi. 10. — Cellules musculaires fusiformes obtenues par dilacération de la paroi de l'estomac après séjour dans l'alcool au tiers. (Seibert, Oc. If, Obj. VIT. Imm.) Fic. 11. — Coupe de la paroi de l'estomac au niveau des glandes salivaires : «à endothélium cylindrique, b couche de muscles enveloppés de tissu conjonctif, e couche musculaire circulaire, d mucosité coagulée entre les villosités de lestomac, ee cellules des glandes salivaires. (Leitz, Oc. [, Obj. [.) Fc. 12, — Coupe de deux villosités de l'estomac : « cuticule, b cellules cylindriques de lendothélium, € noyaux des cellules conjonctives de la couche enveloppante, d faisceanx musculaires s’'enfonçant dans le sillon d’un pli et allant très probablement s'insérer contre la paroi de l'estomac, d' faisceaux de muscles circulaires, e couche des museles circulaires, f recouvrement péritonéal, 4 cellules salivaires, À cellules endothéliales détachées et retenues dans la mucosité intestinale, à amas de noyaux desdites cellules dont le corps protoplasmique a été détruit. (Leitz, Oc. T1, Obj. VIT.) Fig. 13. — Quelques cellules de la coupe précédente vues sous un plus fort grossissement : a cuticule, b corps protoplasmique des cellules, c noyaux des cellules, d espaces inter- cellulaires, e fibres musculaires, f noyaux conjonctifs. (Leitz, Oc. HI, Obj. IX.) Fi6. 14. — Paroi de l'estomac après enlèvement de la couche endothéliale : à couche conjonctive externe, b cellules musculaires formant la couche longitudinale, e couche EXPLICATION DES FIGURES. 119 circulaire, d repli des deux couches de muscles laissant voir la couche conjonctive. Leitz, Oc. [, Obj. VIL.) Fiç. 15. — Coupe transversale de l'extrémité antérieure d’une glande salivaire comprenant le grand canal excréteur (Leitz, Oc. !, Obj. IV) : a lumière du canal excréteur, b proto- - plasma granuleux des cellules salivaires, € noyau de ces cellules, d cellule renfermant deux noyaux, e petits noyaux de substance conjonctive, f couche amorphe conjonctive, g recouvrement endothélial du canal excréteur, À orifice d’un canalicule excréteur secondaire, à noyaux épars à l’intérieur du canal. Fig. 16. — Différentes formes de cellules salivaires. (Leitz, Oc. 1, Obj. VIF.) Fig. 17. — Un groupe de cellules salivaires (Leitz, Oe. 1, Obj. V.) Fic. 18. — Cellules du tissu conjonctif entourant la masse pharyngienne : A différentes formes de cellules calcaires renfermant la concrétion sous la forme de globules ovalaires ; B cellules conjonctives montrant des vacuoles dans leur protoplasma après action de l'alcool; C cellule conjonctive étoilée : « prolongements, b vacuole, c noyau. (Leitz, Oc. IT, Obj. VIL.) F1. 19. — Produit de la dilacération du foie à l’état frais : a cellules-ferment, b cellules calcaires, ce globules de graisse noircissant par l’action de l'acide osmique, e granulations très fines nageant dans le liquide de sécrétion et présentant un mouvement brownien très vif. (Seibert, Oc. I, Obj. V.) Fig. 20. — Contenu des grandes cellules-ferment, renfermant des boules de substance colorée en jaune et jaune verdâtre. (Seibert, Oc. [, Obj. V.) Pic 21. — Noyaux des cellules hépatiques (Leberzellen de Barfurth) renfermant plusieurs nucléoles et de nombreuses granulations (Seibert, Oc. 1, Obj. VL.) Fic. 22. — Cellules calcaires du foie. (Seibert, Oc. ILE, Obj. VL.) Fic. 23. — Cellules musculaires rencontrées dans le tissu conjonctif du foie. Co ’ nf ner Û . F à ; Bruxelles It CSevereyn: Cour..t.XLIX. PL. Lig 16 P'Arrgi a rat. des. È Ti GC Severeyns, Bruxelles PAR on 148 Pl A: he NL Y'A KY DPTAU LH sie PONT DAT Le) ORAN ON br if TU \ AT ) jan mil Fu TS Ai ni En ge Lee LS MR 1 GER EN : Aa De ka + Le L é * AL * Pa € 4 je 4 ME AI re ETES A A 7 TE Fr ms Pay L LT HET IS 7 De à cé Er DIR Ce. 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