^^^ 'S<^dm, fe-1 -^^ ^ -',-.-. V "^S- V. /■/ --. ^'IHHKte,' .:'"1M -W r /o-S KO^S *Ce-llCL^ OL COSMOS REVUE ENCYCLOPEDIQUE HEBDOMADAIRE DES PROGRES DES SCIENCES /' f a / Get ouvragc est la propriety de M. B. 11. de Montfort. Les exemi'Iaires seront sigrKis de li'.i ct porteront les annes dc la Soci(5ti^ royale d'encouragement de Va- eiice (Espagnc), qui I'a autorisc. PARIS. — lUPRIUERIB CEKTRAIE DE NAPOLEON CUAIX KT C', RUB BERGERE, 20. "cosmos DES PROGRES DES SCIENCES A Fondle et publide par M. B. IS. DE SIO!\'TFORT R^dig^e par M. li'ABBK IIOIGIVO TOME PRFMIER -^^f PARIS : SALLES DU COSMOS, louleva? t des Kaliens, 8 LONDRES • HORNE, THORWAITE et WOOD NEWGATE STREET, 123 1852 >:^9|f!'\ \ PREFACE I']!! terminant ce premier volume du Cosmos, nous croyons devoir exposer, mieux encore que nous ne I'avons fait jusqu'ici, le but que nous avons voulu atteindre par la publication de notre nouvelle Revue. Nous voulons signaler tous les progres de la science pure et appli- quee t mesure qu'ils se produisent en France ou a I'etranger •, les si- gnaler en les appreciant, en les discutant, en les jugeant, en rappelant le passe, en devancant et provoquant des progres nouveaux dans I'a- venir. Nous ne serons done pas des echos froids et glaces ; nous crili- querons, car nous sommes profond^ment convaincu de la necessite, de la legitimile, de I'opportunite de la critique scientifique. II est important, sans doute, que les sciences fassent sans cesse de nouveaux progres ; nous devons tous souhaiter ardemment que la somme des mysteres reveles et des verites connues aille croissant chaque jour; niais il est Men plus important encore que I'erreur ne vienne pas s'abriter sous des noms accoutumes k inspirer une con- fiance sans bornes, et qu'on la combatte energiquement partout oii elle se produira au grand jour. Une verite laissee dans I'ombre, c'est une perte regrettable sans doute; mais par rapport a I'espritbumain, cette perte n'a qu'un effet negatif ; elle ne le blesse pas, elle ne Toffense pas; tandis que I'erreur acceptee est, au point de vue de rinteliigence, un desordre veritable, une veritable calamite. Nous serons seul peut-6tre de notre avis ; mais k la gloire d'avoir decouvert une grande verite, nous prefererions le rnerite d'avoir arrete sur le seull de la science une grande erreur : notre noni serait moius celebre sans doute, mais nous aurions etc plus utile j la conscience d un devoir rempli compenserait largeraent la douleur d'une gloire manquee. II PltKFACE. En France, actuellemenf, tt c'est im granl malheur, la critique scienlifiqup a cessc d'existcr. lis ne sont plus ces temps heureux oii les Arago, Ics Biot, 'cs Thenard, les Gay-I.ussac. places en senlinellcs ;i.vancec8 de la vcrilc, signalaient, a ieur apparition, les theories iiasar- dees ou fausses, les experiences mal faites, les enonccs incomplets, les explications factlces, etc., etc. Nous le demandons a tons les esprits eleves, a tous les amis sinc^res de la Ecience : les Annales de physique et de cliimiey dans cette periode Lienheureuse de 1815 a 1824, alors qu'une critique eclairee, vive, impe'ueuse, passlonnee memc quelque- fois, les animait, n'etaient-elle pas u.ille fois proferables a ce lourd amas de menioires imprimes i la suite, sans ordre, sans intelligence, sans vie; ou I'erreur, pourvu qu'elle vienne d'une plume amie, trouve aussi bicn sa place que la verite ? Gette absence absolue de critique est d'autant plus lamentable en- core, qu'a I'Academie des sciences on a adopte la coutume d'ins^rer aux Compte-rendus de longs extr..its des memoires presentes, avant qu'ils aient ete I'objet d'aucun rapport. Nous ne comprenons pas, nous I'avouons, cette fatale condoscendance, qui n'est motivee par rienj et quand nous nous faisous k nous-m^me Tenumeration des nombreuses et regret tables erreurs jetees ainsi jusqu'aux extremiies du monde, sousle couvercledu plus illustre corps savant de lEurope, avecla si- gnature de ses glorieux secretaires perpetuels, nous sorames verita- blement contriste. . . ^ . ■ . Tout le monde avoue la nedie'sslte de la critiijliie litt^raire, et ce qu'on regarde comme excellent dans le domaine de la litterature et des beaux-arts, on le condamnerait dans le domaine des sciences ! L'erreur, cependant, dans la litterature et dans les arts, n'atteint presque tou- jour? queIaforme,tandisque, dansles sciences, l'erreur, viciantmfeme le fond, est loujours uneatte into grave dquelque verite essentielle. La critique a de plus I'immense avantage d'exciter une vive emula- tion, d'appeler I'altention sur des experiences et des theories qui nai- traient pour mourir si elles n'etaient pas combattues. Qui ne sail, qui ne proclame hauteraent qu'un cxamen serieux , fut-il hostile ou acerbe, est de beaucoup preferable h. la conjuration du silence ? C'est pour nous une conviction intime que la science ferait des progres beaucoup plus rapides et plussurs, si les veterans et les maitres, fati- gues de poursuivre des recherches originales, s'unissaient coura- geusement pour aco-epter et louer, blamer et repouf ser les recherches m6me des travailleurs obscurs, et a plus forte raison les memoires PREFACE. HI qui, se presentant an public sous le patronage d'un nom iiiH^osant, peuventexercer sur les esprits une redoutable influence. En critiquant, on expose sespropres idees : tel auteur experimente qui , apres avoir parcouru une glorieuse carrifere , se condamne au repos et n'aura pas le courage d'ecrire une longue disserta- tion, stimule par I'apparition d'un travail qui combat les opinions de sa vie entiere el compromet sa gloire, laissera echappcr de sa plume des apercus vivitianls qui se seraient eteints avec lui, et qui, recueillis par la generation nouvelle, devicndront le point de depart de decou- vertes ou de recherchcs importanles. Le premier but du Cosmos est done d'exposer les idees originales, neuves, grandes, utiles, qui font faire a la science un grand pas, ou la debarrassent des hypotheses vaines et des explications insuffisan- tes; des idees surtout qui, parce qu'elles sent emises par un auteur encore incompris, excitent a peine I'attention et atteudraient en vain de longues annees I'hospitalite qu'on ne peut cepondant leur refuser sans injustice. On a vu avec quel bonheur et quelle complaisance nous avons reproduille fait capital de la precipitation des vapeurs et du re- froidissement sous I'influence de Telectricite, observe par M. Laborde; la vraie th^orie de ia suspension des nuagos, Timpossibilite des va- peurs vesiculaires, la theorie de I'arc-en-ciel bianc, par M. I'abbe Raillard; les theories deM. Seguin aine, etc., etc. Le second but du Cosmos, et nous croyons Tavoir fidelement rem- pli, est de critiquer avec la plus entiere impartialite, sans caclier cependantnossyffif alhies; avec la plus grande moderation, sans cepen- dant jamais pactiser avec I'erreur. Le Cosmos formera chaque annee deux gros volumes ; nousfaisons paraitre aujourd'hui le premier, L'etendueque nous avons donnee aux deux tables, alphabctique par ordre de matieres et alphabetique par noms d'auteur, feront de ce volume le repertoire ou le compte-rendu complet des progres de la science pen-lant six mois, du T' mai au 1" novembrel852. Nos lectcurs savenl qu'a I'enseignement ecrit du journal devai' se joindre I'enseignement oral des cours du Cosmos ; nous avons le regret de leur apprendre que la realisation de cetfe seconde par- tie de noire programme est fatalement ajournee. Nous voulions creer a Paris un grand centre de mouvement scientifique ; nous voulions, dans des matinees et soirees scientifiques , exposer le vasle ensemble du spectacle et des phenom^nes de la nature, par PREFACE. une melhode toute uouvl-Ho, qui consislc essentiellement a montrer aux yeux de rintelligenca et du corps ce spectacle el ces ph^nonieiies transfornics en vasles tableaux cclaires par la lumiere clcctnque ; nous Youlions produire avec eclat, a I'instant de leur apparition, les inventions etles decouvcrtes nouYclles ; nous voulions ropeter pu- bliquement et solennellement les graudcs experiences faites en France et a 1 etranger; nous voulions mettre a la disposition des travaiUeurs et des amateurs les recueils periodiques tt les ouvrages nouveaux qu'on ne peut consulterdans lesbiblioth^ques pul'liques qu'apres une ou plu^ieurs annees^ nous voulions, en un mot, (}ue la science cosmopolite eut au scin de la capitale son foyer de vibration, sa tribune de vulgarisation, son temp!e del'hospitalitc. Dans notre ardent amour du progres des sciences, nous avions loue pour 18 ans, k grand prix, un edifice vaste et neuf, parfaitement approprie .\ notre but; nous avions meiible ces grands salons avec luxe; un grand nombre de membres de I'lnstitut et de savants nous cncourageaient dans la creation de notre ceuvre , grandement honorable et eminemment utile. EUe etait belle, en elTet, notre auvre, trop beUe; ellen'apasetc comprise ! Monsieur le ministre de la police avail autorise nos reu- nions. Ailleurs 11 n'en a pasete ainsi; des lenteurs administratives plus humiliantes qu'un refus formel d'autorisation nous ont blesseet d^- courage •, les salons du Cosmos vont, helas ! recevoir leur premiere destination, prosaique etcommerciale. Nous avonsaumoins, pour notis consoler, les sentiments de la sympathie douloureuse que tous les hommes eclaires de la capitale ont rtssentie en apprenaut les en- traves apportees a la realisation de notre magnifique projet. TABLE DES MATlfiRES. Abbadie ((!•). Mouveinents des niveaux k buUe d'air, pagfs 69 et 89. -Etudes sur le tonnerro, p. 180. Allain. Boussole ou compas tnrcgistreur, p. 601. Andraud. rheiiomfene du mirage, p. 339. Andrews. Recherclies chimiques, p. 522. Apjohn. Surlapigolite, p. 522. Arago. Leltre au ministre de I'Instruction publique. - Observations de M. E. de Girardin.— Reponse du ministre, p. 67. ARNAUD.Sur la mouclie venimeuse de M. Oswell, p. 655. Arnoux. Sur les produclioni de la Cochinchine, p. 354. BABiKET Planetc nouvelle de M. Lulher, p. 12. - Etoiles perceuses, p. 209.-Sur la terap6ratare des rivieres, p. 259. - Sur les mouveraents extraordinaires de lamer, p. G77. Baldis. ProcL-dc pliotographique, p. 193. Barrai>. Analyse des eauxdepUiie, p. 165. -Id., p. 559. Barreswill. Voijez Leniercicr. Barruel (Germain) . Extraction du cuivre par I'ammoniaqwe, p. 280. Barthelemy. Appareil5 en caoutchouc, p. 369. - Discussion de pnontesur M. Ga- riel,p. 658.— Sonproc6d6 pour la d6sulfuration du coke, p. 662. Bates'on". Impression' resurrcctiormelle ouanastasique, p. 593. Baudens. Trjilement des entorses, p. 20G. Bayard. Sur la vaccine, p. 343. Bechamp. Propii6t6s du coton-poudre, p. 566. Becquerel. De I'amelioration de la Sologne, 644. BECQUEREL(Edniond). Propri(^tes Plectra chimiques del'hydrogene, p. 664. Becquerel et Rodier. filudes sur le sang, p. 2^6. Beer. Absorption de la lumiiire rouge par les fluides color^s, p. 283. Berthelot. Action des acides, de la chileur et des chlorures sur qaelques substances organiques, p . 20i . Bertrand. Sur nn th^orfeme de Poisson, p. 4 1 . Bertsch. Epreuves instant;,< • Forbes. Conductibilite pourlachaUur, p. 5il. "• ' ' ., FoRDOs et Gelis. Analyse commercialc du cyanurc de potassium, p. 408. Fry. Preparation de la gutta-percha pour la photographie, p. 26. FoucAULT. Demonstrations nouvellcs du mouvement de la tcrre, p. 536, 608 ete39. Fr^my. Recherches sur les sulfures dt'compo^ahles par I'eaii, p. 219. Gail-Borden. Biscuit aoimalise, p. 391. Galy'Cazalat. Machine oscillante simplifice k gaz et vapeur, p. 555. Garnier, Relation entre la chaleur speciflque et le poids atomique moyen des corps, p. 494. Gasparis (de). Nouvelle planete, la meraeque cellc de M. Chacoruac, p. 566. Gaudichaud. Effets singuliers de la greffe, p. llO.-Reponsek M. Richard,?. 163.- Accroissement des v^g6taux, p. 226. Gaodry. Navigation k vapeur, p. 140. Gehin fttREMY. Pisciculture, p. 299. Gelis. Voyez Fordos. Gerard [Frederic). Desinfeclion des champignons veneneu](,p.G12. Gerhardt. Acides organiques anhydres, p. 87.— Acide benzoique, ?&.— Ac6tique, ??».— Benzoate ac6tique, 233.— Cuminates ac^tique et benzoique, J6. GiRARD. Chemin de fer hydraulique, p. 406. Girarc. fitamage des t61es, p. 460. GiRARD. Arf6nitt;s sesquibasiques de nickel, de cobalt et d'argent, p. 531. Gladstone. Influence de la radiation solaire sur la v6g6tation, p. 522. Glaisher. P6riodicil6 des annees chaudes et froides, p. 240. (fouLD. Vitesse de I'^lectricitS, p. 118. Graham. Difl"usibilit6 des liquides, p. 590. Grainger (M.) C61febrc ing6nieur dcossais. Sa mort, p. 337. Gratiolet et Cloez. Venin des pustules cutan6es des batraciens, p. 115. Gros (M. le baron). Isolment de la couche de collodion, p. 28. Grove. Moyen de fairerevivre les impressions optiques effac6es, p. 237. Guerard. Du tabac et de la nicotine, p. 498. Gu^rin-Menneville. Cochenille indigene, p. 88. — Production de la soic, p. 494. — Maladie de la vigne. p. 531 . GciNON. Acide nilro-sulfurique, uouvel agent decolurateur, p. 588. IV TABLE. GuYON. rropri6t(5s h^mostaliqucs dc I'amadou dc Cayenne^ p. 223. — Causes An a Jtpre ct dc r616pliantiasis, p. 245. GuYOT. Bees k gaz, p. 139. Haidinger. Direction des vibrations dans !a lumitre polaris6e, p. 163. — Pli6nomfcncs dc polarisation ot cou'cur dos liouppos, p. 252. — Couleur de corps et eouleur de surface, p. 430 ot 454.— Description de deux orages, p. 033. H.^MANN. Reclamation en priorite centre M. Foucault, p. 603. Hamon. Transformation de la touibe en combustible do bonne quality, p. 395. Hariusson (les frtrcs). Tel^graplie (J'leclriquetransiitlantique, p. 558. Hensesev. Theories g6ologiques et ligure de la terre, p. 542. Herapath. Nitrate d'argent choz Us Egyptiens, p. 449. Herschel (John). Effcts du rayonnement solaire, p. 109. Hind. Nouvelle petite planete, p. 223.— Sixienie plani^tc, p. 437 et 586. Hocking. Emploi de I'iodure d'aninionium en photographie, p. 400. Hoffmann. Sur les composes aramoniacaux, p. 311. HoREFORD, Pcrm6abilit6 des m^taux pour le niercure, 239. Humboldt. Lettrc de SI. de Humboldt au redacteur du Cosmos, p. 145 Hunt. De la photograpliie sur le collodion ct la gulta-percha, p. 25. — Action de la lu- inifcre surle chlorure et I'iodure d'argent, p. 599. Jobard. Pavageenfer, p. 119. — Fabrication du gaz par la decomposition del'eau p. 242. Johnson. Direction dc la boussole a bord des vaisseaux, p. 573. JoLY ct Lavocat. Extr6mit6s animale? rameniss au type pentadactyie, p. 027. JONATH.\N(frfere). Vaisseau mu par I'air dilate, p. 588. Josoi'iERES (M. de). fitoilcs filantes, p. 496. JoCLE et Thompson. Chalcur produitc par I'air s'echappant par dc petits trous, p. 514. Jlssieo. R6ponse k M. Gaudichaud, p. 230. Kennedy. Substitution des engrais liquifies aux cngrais solides anciens, p. 300. KNOULAUcn. Action des corps cristallises sur la chalcur, p. 46. Koosen. Th6orie des phcnomtnes d'induction 61eclro-magn6tiqne, p. 48. Kopp. Dilatation des solides par la chaleur, p. 312. Krafft et Delahaye. Silicate dc soude hydrate natif, p. 355. Kupffer. Equivalent dynamique de la chaleur, p. 408 et 464. Laborde (I'abbd). Determination de la valeur d'une marne, d'une picrre i chaox on d'un terrain, p. 501. — Influence de l'61ectritit6 sur la condensaticn des vapenrs, p. 549. Lalande(M. de). Tonnerre en boule, p. 250. Lame. Th6orie de I'elasticitfe dts corps solides, p. 709. Lamont. Ptiriode d^cennale de ladcclinaison magnfetique, p. 117. — Pdriode d^cennale de rintensit6 horizontale, p. 288.— filectricit6 atmosph6rique, 383. •♦ Laurent. Aniniaux nuisibfcs aux bois de construction, p. 41. Lecanu. Composition du sang, p. 403. Legray. Nouveau traite de photographic, p. 624. Lemercier, LEREBouBsetBARRESwiLL, Photolithograpliic, p. 397. Lereboers. Voyez Lemercier. Leverrier. Discussion des observations de Bradley, p. 39. Levol. Maniere de tirer I'oxygtne de I'argent en fusion, p. 282. LiAis. Observations raWorologiques de Cherbourg, p. 496. Lion. Action des6clipses sur raiguillc aimant^e, p. 203. Lloyd. Mtt^orologiedel'lslande, p. 570. TABLE. r Lombard. Sur le climat de Genfeve, p. 629. LucRECE. Passage de Lucrfece suv Ic mouvement des images, p. i IG. LuGEOL. Descriptioa du vaisseaule Nnpoleon, p. 221. Lund. Exploitation des mines du Groenland, p. 2'»l. Luther. Nouvelle planfete, p. 12. Lyell. Sur le hanc de pctits caillonx de Blackead, p. 238. Macdonall. Poidsatoniique du magnesium, p. 590. Malapert. Medallions en sulfate demagnesie, p. 140. Marchand. Presence de I'iode dans les caux, p. 631. Marianini. Augmentation du pouvoir des bobincs electriques, p. 213. Marloye. De I'oreille, p. 604. — Education de I'orcille, p. 015.— Considerations sur le son, p. 714. — Projet d'6ludes concernant Tacoustiquc des salles publiques, p. 719. Martin (Adolphe). Bain fixnteur des cliches n^gatifs, p. 170. — Ses 6preuves positives (par reflexion), p. 247.— Photographic nouvelle, p. 627. Mascher. Lunette de spectacle appliquce au stdrfioscope, p. 376. Matteucci. Magndtisme etdiamagn6tisme des corps, p. 641. Maumene. Analyse des hiiiles par racile sulfurique concentr6, p. G52. Macvais. Collhnation des lunettes astronomiqut?, p. 305. Melloxi. Nouvelles experiences sur Ics radiations calorifiques , p. 351. Meonier. Foudre globulaire, p. 351. Meyeh. Distance apparcnle des corps, p. 47. MiTSCHERLicH et Rose. Voyez Rose. MoiGNO (F.). Programme du Cosmos ; Ens; igncment ecrit, p. 1. — Eoseignement oral, p. 3. — Centre photographique, ib. — Ster6oscopc, p. 4. — Collodion, p. 11, — Salon photographique du Cosmos, p. 12. — Du cosmoplaste ou g^oplaste einopeen de M. Sanis, p. 14. — Traite de telegraphic clectrique, p. 22. — Sur les miracles, p. 433. — Demonstration du mouvement annuel du globe par les phc-nomencs lumi- neux,p. "01. MoiGNO et Plucker. Phenomene~> de fluorescence, p. 472. MoLARD (Humbert dc\ Preparation des g'a es albumiii6es, p. 170. MoNFORT (Benito di). Transtiort de la couche de collodion impressionne, p. 197.— Transformation des epreuves n6catives en epreuves positives, p. 426. Montagne. Multiplication des charas, p. 232. — Champignon imitant le sang, p. 439. MoNTiGNT. Fluctuations de la bulle des niveaux, p. 466. MoRiN. Ventilation d'un grand amphilhealre, p. 40. MoRREN. Teratologic veg6tale, p. 457. Muller. Influence de la pisition des yeux sur la vision, p. 330. Napieb. Boussole autographique, p. 6o0. Nasmvth. Theoric nouvelle de I'origine des pelites p'ani^tcs, p. 618. Nicole. Busc aimante, p. 720. NiEPCE DE Saint-Yictor. Coulcurs photo geniques, p. 49 et 372. — Encore sur I'helio- chromie, p. 683. Normanby. Transformation de I'eau de nier en eau douce, p. 21. Olivier (Theodore). Rapport sur la commission des beaux-arts appliques k I'industrie, p. 303. OswELL. Mouche venimeusc, p. 650. Ottman. Utiiite du ray-gras en agriculture, p. 71. Pannewitz. Laine des bos tiree des feuilies du p-n, p. 367. Parlatore. Sur le papyr is des anciens, p. 448. VI TABLE. Paykn. Happort sur les appareils do M. Rolland, p. 2i3. - Sur la gulla-peitha, p. 459. Paver. Organogenic dedivcrses families v^g6tales, p. 231. Payerne. Qiiaiitit6 d'air n6ccssaire k la respiration normale, p. 'iSi. PERnoT. I'uriflcalion de la gutta-perchu ct son Mirage en feuillfs, p. C64. Person. Voyez Vovckvlj. Critique des experiences de M. Foucaiilt, p. G47. Persoz. Matifcretinctoriale verte des Chinois, p. G49. Petit. Marche des bolides, p. 533. Piazzi-Smvth. Preeminences rouges des Eclipses solaires, p. 515. PiRiA. Salicine arlifieiellc. Son pnuvoirrotatoire, p. 39. Plateau. Reniarques sur la communication du docteur Sinsteden, p. 30'. Plaiit. Transport delacouche du collodion, p. igi.— Chassis multiple pour la photo- graphic, p G53. PiAXKER. Dumagnaismeetdudiamagn6tisme, p. 256. - Recherches sur la dilatation del'cau, p. i2G. Plumier. Fixation des epreuves pholographiques, p. 121. PoissoN. Discussion d'un thtoreme de ee geomfctre, p. 41. Poncelet, Theorie de I'equilibre des voutes, p. C46. PoRRO. Perfectionnementdesappareilsphotographiques, p. 77.— Instruments pour r6- tude des murs du reservoir de Gros-Bois, p. 445.-Polyoptomeire, 500.— Raies lon- gitudinals du spectre , ib. — Raies longitudinales et transversales du spectre, p. 625. PouiLLET.Photometrie chroraatique, p. 54C. PftEvosT ;;Constant\ Dcmande d'unc mission scieniilique, p. 667. Provenzali. Emploi de la gutta-percha dans les machines 61ectriques, p. 321. Provostaye (de la) et Desains. Les corps difif6rents 6mettent des rayons calorifiques differents k la mCmc temperature, p. 202. Quet. Action des aimants sur Tare voltaique, p. 189. Qdetelet. Developpement des organes veg^taux, p. 91. — Ondes atmospheriques, p. 115.— Application du calculdes proba>>ilites a la meteorologie, p. 455. — Electri- city statlque et dynamique de I'air, p. 456.-fileclricit6 atmosphdrique, p. 481. Raillard (M. I'abb6). Sur le tonnerre ^ d^charges successives, p. 183.— Yapeurs v6si- culaires et formation des nuages, p. 610. Rankine. Reconcentration de I'energie m6canique de I'univers, p. 490.— Explication le la temperature 61evee des rivieres, p. 491. Recamier (Notice sur le docteur), p. 265. Regnault. Analyse de I'air, p. IGO. Reich. Den^iie de la terrc, p. 47. ENOf. Temperature moyenne du Loir, p. 231. RiscHNER. Emploi des lourbes, p. 393. Robert. Pile d'etain elplatine, p. 152. Robert (Eugfene). Aurore boreale, p. 568. Robin (Edouard). Action antiseptique ducafe, p. 513, RoBiQUET. Sur la fermentation gallique, p. 282. RoDiER. Voyez Becquerel. Rolland. Nouveaux appareils de panification,p. 62 et 243. Romanet (de). Traiteraent de la pourriture des bestiaux par la teiature d'iode, p. 114. Ronalds. Travaux d ; I'Observaloirc de Kew, p. 520. — Analyse le I'huilc de .sMn/?s/i» p. 591. Rose (Gnstave). Son svstemcde mineralogiecristaUo-c'.imiquc, p. 437. TABLE. VII Rose et Mitsoherlich. Transport des bloes erratiques, p. 117. Rose (Henri). Influence de Teau dans Ics deconiposilions chimiques, p. 410. RossE(lord). Nebuleuses observees avec son grand telescope, 5U. RouLiN. Coloration de la sole par le chica, p. 320. Rousseau (Louis). Champanisation des vins, p. 475. RuMMEL. Resurrectiun des poisson^ geles, 264. Russell. Sur les tempfites ct Ics ourag ms, p. 490. Saint-Evre. Nouveau jaune de cobalt inalterable, p. 648. Salvetat. Voyez Ebeimen. Votjez, Chevandier. Sanis. Cosmoplaste ou geopla^e, p. 14.— Sa carte en relief de I'ltalie, p. 319, Santini et Trattenero. Elements de Melpomiine, p. 635. Saussure. Action dela chaleur solaire dansun vase ferme, p. 107. Scheerer. Separation de I'oxyde et de I'oxydule de fer, p. 412. Schlagintweit (A.. etH.) Hauteur du mont Rosa, p. 29"'. ScHROETTER. Pfoduction de la lurnifere par oxydation lente, p. 633. Secchi (le Pere). Ombre projetee par I'anneau de Salurnc. Divisions de cet arneau. Comparaisondelalumieredesetoi'es,p.43. — Chaleur a la surface du soleil, 44, 191 et 224.— Experiences sur la deviation du pendule, p. 2i5.— Sur la resistance dci fils conducteurs, 272. — Lois des courants 61ectriques, p. 329. — Noufelle comfele, p. ;,7i. _ Comparaison de sa corafete avec celle de Bieia, p. 640. — Conlinualion de ses observations hiliolhcrmiques, 655. Seguier. Sa balance autoraatique pour le triage des monnaies, p. 173. Seguln. Contrasle des coulturs et couleurs accidentelles, p. 335. Seguin et Mauvais. Apalsement des oscillations dans les horizons de raercure, p. 601 . Seguin. Th6arie de la collision, p. 692. Sellmeyer. Moyen de reconnaitre le mouvement dans I'espace par un phfinomene opti- , que, p. 672. Sestini (le Pere). Couleur des6toiles, p. 2il. SiNSTEDEN. filectrJcile statlque par induction, p. 260. Sire. Voyez Foucablt. Sonappaieil, p. 565 ct 603. SoNDHAUSs. Refraction du son, p. 143. Spring. Champignons des ceufs, p. 94. Steinheil. Analyse optique de la bifere, p. 132. Stokes. Visibiiite Jes rayons chimiques du spectre et raies qui les accompagnent p. 472.— Nouvelles proprieles optiques dans un sel de quinine, p. 574. — Emploi de la fluorescence ^ I'analjse qualitative, 590. Talbot. Renoncc k ses patenles en faveur des photographes, p. 401 et 421. Taylor. Ouragans des r6i;ions tropicales, p. 572. Tennant. Histoire du Koh-i-Noor, p. 592. Ternaux. Biscuit animalise, p. 391. Thompson. Lignes de force magnetique, p. 491. — Chaleur de frottement, p. 514.— Sources de la chaleur dans les batteries galvaniques, p. 517. — Loi des influences magnetiques, p. 643. TODSSAiNT. Emplo! des nervures des cactus dans rornementation, p. 268. Trattenero. Voyez Santini. Tr^cul. Organogenic veg6tale, p. 88. Tyndall Propriet-^s moieculaires de quelques substances organiques, p. 5!5.— Theorie anticipee de faction magneto-cristallique, p. 544.— Thermomfetre de contact, p. 579. Unger. Flore fossile, p. 118. Ure. Moyen de reconnaitre la presence de la chicor6e dans le cafe, p. 51 1. VllI TABLE. Valerio (Luca). A reconnu le pmiiicr que les rayons du centre du sdeil 6taienl plus puissants quecmix dcs bords, p. 190. Vallee. Thoustraire k Taction du fcr dc< vaitseaux, p. 573. — a poialage continu, p. GOO et 601. — des tangentcs, p. 504. Britannique. Voyez A^sociatiQii. Bullc des niveaux, ses fluctuations, p. 455. Buscaiinaule, p. 720. Caf^, ?on action auti-scptique, p. 513.— M^yen de reconnaltre la prcs nee dela clii- coree dans le caf6, p. 511. Cailloux. Ciinc depelits cailloux h Blackcjd, p. 2H8. Calcul des probabilit6s appliqu6k la maiJoroloaie, p. 455. :;allao (d^gagement considerable d'acide tulfhydrique dans la bale de), p. 264. Caloriliques (radiations), p. 351. r.aoutctiouc (appareils en), p. 369 et 668. Capillaritc (ph^nonie-ne de), p. 207. Chaleur (action des corps cristallisis sur la), p. 46. — solaire, son action dans des vases fcrmfes, p. 107.— Etude de la chaleur solaire pendant une Eclipse, p. 190.— Lescorps diffdrentsfimetttntdesrayonsdiff^rcnts kla mfime temperature, p. 2o2.— Son Equivalent dynamique, p. 408 et 454. — (sources de) dans lei batteries galvaniques, p. 517. — (conduclibilile pour la), p. 541. — defroltemont, p. 61 1. — produite par I'air s't^chappant par petits trous, p. 514. — (conductibilit6 des corps pour la), p. 700. — sp6clfique, sa relation avec le poids atoraique des corps, p. 494. Chambre obscure nouvelle, p. 643. Champignons des ceufs, p. 94. — imitant le sang, p. 439. — venene IX, leur desinftction, p. 612. Charas, leur multiplication, p. 232. Chemintie h gaz, p. 341. «)i;i* f>i> mumu ' Chemins de fer (application des miroirs aux), p. 345. oTT; , — hydrauliques, p. 406. : r'^if'! •> Chicoree, mojen d'en constater la priisence dans le caffe; pv'&il. Cobalt. Voyez Jaune de. Cochenille indigene, p. 88. Cochinchine (diverses productions de la), p. 35i. Cohesion, sa thdorie, p. 692. Coke (desulfuration du), p. 662. .J Colle-foite liquide, p. 536. • >sn8t asb ''' Co Imation des lunettes astronumiques, p. SOri ' ' Collodion, p. 11 et 25.— Isotement de la couche, p. 28, 52 et 56.— Transport de lacouche de collodion inipressionnE, p.l97.— Soieraploik la fixation des dessins, p. 689. Combinaisons chimiques, p. 521. Conv.le nouvelle, p. 174, 47 1 et 353. — Calcul dc I'orbite de la deuxifeme comfete de 1852, p. 494. — du pfere Seechi et comfcte de Bi61a, p. 6i0. Condensation des gaz sur 1< s solides, p. 214. Conductibiliie des corps pourlathaleur, p. 70C. CoDservatioD des substai^ces animates par Ic chlorure de bkryum, p. 406. TABLE ALPHABETIQVE. Ill Cosmoplaste Oil g^oplasto, i^. 14. Cosmos (Progranime du). Enseignement icrit, p. 1.— Enseigr.enunt oraI,p. 3.— Centre pholographiqu<>, /&. — Salon p^otographique, p. 12. Coton-poudre, ses propriet^s, p. 6C6. Cou'eursdes corps et couleur de surface, p. i30 et iM. — photogtniquc?, p. 49.— Limite de perception des diff^rentes couleur?, p. 208. Contrastes descojleuis et couleurs accidentelles, p. 335 —Voyez Helioc' roniie. Courants elelrique?, leurs lui?, p. 329. — electro-physiologiques, p. 664. Craic blanche dans les Alpes, p. 216. Cuivre, son extraction par I'ammoni&que, p. 280. Cuminates ac6lique et benzoique, p. 233. Cuinjle, sa production, p. 406. Cyanure de potassium, son analyse commerciale, p. 408. D6clinaison magnetique (p^riode d6cennale de la), p. 117.; Decoloration parl'acide liitro-sulfurique, p. 688. Density de la terre, p. 47. Dessins, leur fixaliOH par le collodion, p. 589. Diamagn6tisroe. Voyez Magn6tisme. Diathermansie du verre k diverses lenipiratures, p. 48. Diffraction (nouveaux ph6norafenes de), p. 542. Diffusibilit6 des liquides, p. 590. Digestion artificielle, p. 503. r iti .q ,iii')iut)u-oTil3ij ■ Dilatation des solides par lachaleur, p. 312. liayg lifi'l isq sJioboiq =■ Distance apparentc des corps, p. 47. jO-- B'l'im <«9& •^»i(i'^iuub^op) - . Doublage mitallique des narires (preservation du),invjlll'j?''ef9'' ^-^ oi'OMCin-? -- Eas, sa dilatation, son maximum de densite et sa transformation en glace, p. 426. — de mer, sa transformation en eau douce, p. 21. — son influence dans les decompositions chimiques, p. 410, Eaui de pluie, leur analyse, p. 165 et 659. Eb6nisterie en nervures de cactus, p. 268. Eclairage dlectrique du Champ de Mars, p. 80. •■' Eclat (theorie de 1'), p. 6';7. Eclipses, leur action sur I'siiguille aimant6e, p. 203. — solaires, les proeminences rouges, p- 515. »,,r,i,>i;, . Elasticiie des corps, p. 214. .9b anu o.; — des corps so'ides, sa th6orie, p 709. '■' " Electricity, sa Vitesse, p. 118. ''■' — statique par induction , p. 260. — Insenslbilite de& eofants, p. 346. — atmosph6rique, p. 383. >0.q ,(«!)(! — emploi de la buussole des tangentes, p. 564. Mc ,\i , — son influence sur la condensation des vapeurs,ip.i;64*.''i' i ■ — atmospherique, p. 481. -o.: — statique et dynamique de I'air, p. 456. — son action sur les muscles, p. 572. — diffetentes, leur dispersion diverse, p. 562. Electro-cbiraie, proprittes de I'hydrogene, p. 664. Electro-magnttisme, augmentation du pouvoir des bobines eiectrlques, p. 213. Electro-physiologiques (courant), p. G5't et 572. Elephantiasis. Voyez Lfcpre. Elevation du sol de la Sufede, p. 298. ,y TABLE ALl'HAB^TSyiE. Embryogtnie, inlluence dos cuux d'Aix sur Ic devoloprenienl de rembryon. p. 2:J2. Enfanls, lc«r insensibilile aiix declaiises cleclnqucs. p. 34G. Engraif liquides, Uu-subslilulion aux cngrais solides, p. 306. Eulorscs (ti'iiitemiiit do-), p. 2"G. Epreiiv>s photoi^niplnqiios, Icur fixation, p. 121. — positives par rollfxion, p. 247. Equilibre de la nature, p. G38. • Erratiques (iranspo:l des blocs), p. 117. Etamage des Itilcs, p. 460 Etoilcs, comparaison de leur lumiferc, p. 43. — perceuses, p. 209. — (couleui' des), p. 2li. — nianles, p. 397 el 49.j. Falsification des substances alimenlaires en Anglelcrrc, p. 215. Farincs (analyse des), p. 31. Fata morgana, p. 517. Fer (amalgarac de), p. 033. — pur (pioctdiivpour robltnlion uu), p. 53i. — (separation de I'oxyde el de I'oxydule cle),, p. 412. Fermentation galliqtie, p. 282. Fiuorcsccnce (pbinonienes dc), p. 4''2. — son emploi dans I'analyse qualitative, p. 590. Fromcnt, nouveau mode de culture, p. 31G. — (graines de) de.s momies, leur germination, p. 320- .Frottement de fair s'6chappanl par des pclits trous, source de chaleur, p. 514. Gaz (diemince a), p. 341. ; — a'celairage, sa fabrication par la decomposition de I'eau, p. 242. Genfcvc, son climat, p. C29. G6o!ogie en Dclsique, p. 458. Geologiques (Theories) el figure de la terre, p. 542. Geoplaste. Voyez Cosmoplaste. Germination d'oignons el de cumin conserrvs p.Tidant plusieurs sifecles, p. 337. Gommes, moyens pour les dsiinguer, p. 447. Graisse d'eltipliaist. p. 53C. Greenwich (Observatoire de). Voijez Observatoire. Greff', ses effcls singuliers, p. HO. Greenland. Voyez Mines. Gutla-percha, son emploi en pliotographie, p. 2C. — son emploi dans les machines ^Icclriques, p. 321. — p. 459. — sa pirificaf.oH et sa rc^duelion en feuillcs minees, p. CG4. Gyroscope, demons' ration de la relation dela ttrre, p. 53G, 5G5, 003, 008, G30 ct Gi7 Helioc'iironiie, p. G83. Hemosiatiquc, emploi de I'amadou de Cayenne, p. 223. Horizon arliliciel, destruction de scs rides, p. GOl. Huilc de sioiftsh, nm analyse, p. 591. Huiles, leur analyse par I'acide sulfuriquc, p. 052. Huitres (pt>silion, croissance, pares et croisement des), p. 37. Hydrogenc, 5es propri6t6s 61eclro-chimiqiies, p. GOi. Induction electro-nugnetique (p'r.cnomene d'), p. 48. — (61ectricil6 staliquc par), p. 200. TABLE ALPHAB^TIQUB. T Influence de I'eau dans les t'6conipositions chimiques, p. 4)0. lode, sa presence dans les divers corps, p. 631. lodnre d'amraoniimi, son emploi en photograpliie, p. 400. Impression anastasiquc, p. 593. Incendies, emploi de la vapeur d'eau pour les 6teindre, p. 491. Irlande, sa met^orologie, p. 57i). Irrigations, influence des "aux qu'on y eraploie, p. Hi. Jaune de cobalt inalterable, p. 648. Koh-i-Noor, taille de ce diaraant, p. 313.— Son histoiro, p. 592, Laine des bois tir^e des feuillcs du pin, p. 307. Lampe perp6tuelle. Fausse nouvelle. Lentille en cristal de roche d6couverle ^ Ninive, p. 493. L^pre et el^phantasis, leurs causes, p. 245. Liquides, leur difTiisibilit6, p. 590. Lithographie photograpliique, p. 397. Lueur magntitique, p. 359. Lum;6re diffuse, p. 30.— Direction des Yibrations dans la lumiferc polaiisee, p. 153.— Absoption de la Inm fere rouge par les fluides color6s, p. 283. — son action sur le chlorure et I'ioJure d'argent, p. 599. — pro'iluite par I'oxyiJalion, p. 633. — zodiacale, p. 364. Lune, son image photographique, p. 375- — produit une maree atniusph^rique, p. 4C8. — son action calorifique, p. 603. Machine oscillante ^ gaz et vapeur, p. 655. Machines k air dilatable, p. 347 et 588. Magni^sium, son poids atomique, p. 590. Magndiique (lignesde force), p. 491.— Lueur magn6tique, p. 359. Magnetiques (influences), leur loi, p. 543. — variations, leur retail^ n avec les taches solaires, p. 495. Magn6tisme, lignes de force magnetique, p. 23i.— Magn6lisffie et diaraagnelisme,p.256 et 541. — 6tude de ses variations, p. i6b. Magn^to-cristallique (action), sa thSorie anticip6e, p. 544. Mar^e atmosph^rique lunairc, p. 468. Marne, pierre a chaux ou terrain calcaire, determination de leur valeur, p. 501. Mascaret. Voyez Mcr. Massalia, nouvelle planfete, origine de ce nora, p. 692. Melpomiine (6!^ments de la planctt), p. 535. Mer, ses mouvemeats extraordinaires, p. 077. Mercure (perm^abilite des metaux pour le), p. 239. Metdores lumineux, a^rolitlies, p. 438. M6t6oroiiies sur le soleil, p. 2'-2. Met6orologie. Rapport du conseil de la Soci6t6 royale de Londres, p. 377. — Obiei'vation? de M. Liais ii Cherbourg, p. 496. Mfet^orologie de I'lrlande, p. 570. — optique, p. 30, 57, 83, 126, 321 et 356. M6t6orologique (Soci6te), son programme, 528. — (observations), p. 569. Min^ralogie-cristallo-chimique (syst^me de), p. 437. Mines du Groi^nland, p. 241. VI TABLE ALPHABETIQUP. Miracles, p. 439. Miroirs appliqu6s mix clicmins de fer, p. 3 15. Mirage (ph6no:ni;nes de), p. 306, 321, 339, 310, 51C et 617. MoUasses (iMudes dcs) dc la Suisse, p. 21G. Mont Rosa, sa hauteur, p. 297. Mouche 'cniiiuuse, p. 050 et C55. Mouvcmenl annuel de la trie, sa demonstration, p. G"2, G89 't 701. Muscles (action de I'electncito mr les), p. 572. Xavigati n k vapeur, p. I'lO. Ncige (clarte prodiiite par la n^flcx'on de la), p. 365. Ntbuleuses ob^ervtes avtc le grand t61escope de lord Rosse, p. 514. Nerf sympathique, son ovigine, p. 449. Ncrvcuses (fibres), influence de la tempt'rature sur Icur ilteration, p. C50. Niagara, fa caiialisaion. p. 120. Ninive (lenliUc en quarlz decouverte a), p. 493. Nitrate d'argent chez les Fgyptiens, p. 449. Nilro-sulfurique (acide), ai;ent de d(?coloralion, p. 588. Niveaux ^ buUe d'air, lours niouvenients, p. 69 et 89. Nouve'.les diverses, p. 20 , G« , 80, 105, 199, 291 , 337, 338, 342, 345, 36.5, 366 3G9 , 389, 390, 393, 509, 643, 581, 585, 587, 588. G29, 635, 636 et 639. Nuages. Voyez Vapeurs. — raesurc de leur 6'.6\ation par la lumifere icflecbie, p. 83. — orageux, dechargis par des ballons captifs, p. 273. Observations de Bradley, leur discussion, p. 39. Observatoire de Greenwich, inspection annuellc, p. 175. — Transmel le midi moycn par r^leelricit^, p. 218. — de Kew (travaux de 1'), p. 520. Oculaire nouveau, p. 583. (ffiil (action iiirecte de la lumiln-e sur I'iris de !'), p. C51. Oedes alniospliclnques, p. 115. Optique, moyon de faire rcvivrc les impressions optiques effac6es, p. 237. Or (production de 1') en Autricbe, p. 118. Orages (description de deux), p. C33. Orei'le (de 1), p. 604. — de son education, p. C15. Oi'ianes vcgclaux, leur d.i\elopp nient, p. 91. Ogmiques (substances), set on, sur quelqiics-up.es d'elle«, do la dial ur, dc^ ac'dcs ct des cblcruns, p. 204. Organogenic v6g(5tale, p. 88. — (!e diverses families vc^g^talcs, p. 231. Ouragans des Tropiques, p 572. Ouvcrlure de I'obj. ctif, son influence sur la n.ttelc des images, p. 124 et 146. Oxyde el oxydule de f>T, leur sepai.)lion, p. 412. Oxy^fene, son extraction dc I'argeiit en fusion, p. 2S2. Pain tendre et pain r.issis, p. G41. Panifuaticn (nouvcaux a| paroils dc), p. G2.— Uapjort ii!' le.-; p lUiils de M. Roi- land, p. 243. Palais de cristal, sa nouvelle coi;struclion, p. 220. Papyrus dcs ancicns, p. 448. Pavage tn fer, p. 119. Pcnd Ic (cxp6;iences sur la di'vialion do), p. 215. TABLE ALPHABfiTIQUE. VII PenfadaclylP, types des cxtrdmites aniraales, p. C27. Peripneumonie epizootique, son preservatif, p. 00. Pevpetuelle (l.inipe) dicoiiverte U Langres, p. 33S. Faiisse nouvclle. Ph^nakislicope dtcrit par Lucrfece, p. 116. Photographie, p. 25, 49, 73, 97, 121, li6, 1G9, 193, 217, 21 t, 3-2, 397, 420, 450, 624, 5G8, 597, 663, 683, 703. — noiivelle, p. 527. — (nouve.u traits de), p. 524. Photo-litlio,,raphic, p. 397. Pholomfctrie chromalique, p. 546. Pigolite, p. 522. Piles constantes, p. 86. — Pile ri'etain et platinc, p. 152.— V6iiflcation de la loi de Ohm, p. 186. Pisciculture, p. 299. Pislolets de salon, p. 139. Plarete nouvelle de M. Luther, p. 12.— Nouvelle petite planMe, p. 223. — Plantte de M. Hind, p. 437, 535 et 586.— Premifere planete d6couvcrte, p. 533.— Thforie nouvelle sur I'origine des petites pla) fetes, p. 518. Planfcte nouvelle, Massalia, p. 566. Plan6toides, p. 12 el 71. Poissons gel^s, leur resurrection, 264. Polarisation et couleurs des houppcs, p. 252. Polyoptomfetre, p. 660. Pomnies de terre, leur maladie, p. 95. Porcelainres, p. 249 et 491. Terapetes clouragans, p. 490. Teratologic vegetalc, p. 467. Terre. Voi/c: Mouvement. Tete humaine fossile, p. 246. Thioreme de Poisson, p. 41. IhermoraiUrc de contact, p. 679. Tonnerre (observations de M. d'Abbadie sur le), p. 180. — Decharges successivcs, par M. I'abbe Raillard, p. 183. -Ses ePels siogulierf, p. 136.— en boule, p. 25o, 350 et351. Tourbe, combustible de bonne qualite, o. 395. — (cmp'oi des) p. 393. Tuibinerurale, p. 138. Vaccine (opinion de MM. Carnot et Bayard sur la), p. 343. Vaisseaule:iVo;)o?fon,sa description, p. 221.-le IV^/nrfsor-CasC/e, p. 222. , Vapeur, son emploi pour eteindie les inceadis, p. 497. Yapeurs, leurs densites, p. 520. _ — (influence de reiectricite sur la condensation des), p. 549. — I'vesiculaires des nuages, p. 610. Vegetalion. Voyc:- Azote. Ye-'elaux, leur accroissement, p. 220.— Theorie de la couche generatrlce, p. 228. Venin des pustules culanies dts batraciens, p. 118. Ventilation d'un grand amphithoMre, p. 40. Vigce, sa maladie, p. 27G, 408, 443, 484 et 631 . Vinaigre, sa fabrication par un champigmin, p. G22. Vision (inlluencede la position desyeux sur la),p. 333. — Thitriede lav;-ion,p. 333 cl 336.— Accidents singuiiers, p. 516. COSMOS COSMOS. ENSEIG>'EMENT ECRIT. Le Cosmos, dont nous piiblions aujourd'hui Ic premier numero, vient remplacer et continuer le journal la Lumiere, fonde et dirigfi parM. deMonfort, dans rintervallc du 9 fevrier au 29 octobre 1851. Son fondateur est le meme, et le Cosmos sera toujours le journal cr^e par M. de Monfort ; mais la redaction a passe en d'autres mains, et son cadre s'agrandit. La Lumiere, organe de la Societe h^liographique de Paris, trai- tait principalement, et presque exclusivement, de la photographic; les sciences ct leurs apphcations a I'industrie et aux arts n'y trou- vaient de place que Ires-secondairement, et a la condition qu'cllcs se rattachassent par quelque lien visible ou invisible a la photo- grapbie. Le Cosmos, au contraire, comme son nom I'indique, embrassera le mondc scienlifique entier, renscmble complet des phenomenes de la nature. II est dans notre pensee, et il sera reellement une revue universelle des progres et des conquetes des sciences pures et ap- pliquees. Nous avons cboisi le nom de Cosmos, si glorieusement inaugure par le savant le plus eminemment encyclopedique des temps anciens et modernes, parce qu'il indique parfaitement notre but. En publiant son beau livre appele Cosmos, M. Alexandre de Hum- boldt, auquel aucune science n'est restee ^Irangere, qui, dans sa longue vie et ses immenses voyages, a tout vu, tout etudie, tout discute , tout collectc, s'est propose de transmeltre a la posterile la carte fidele du monde de la science iel qu'il lui apparait a la fin de sa carriere de geant. Le Cosmos est comme un magnifique invenlaire des richesses scientiliques que, par un des plus gioricux testaments dont Thumanite 1 2 COSMOS. conservera Ic souvenir , I'apolre par excellence dc la science legue aux intelligences plus jeunes duxix- siccle,on leur disanla son tour: Bonum depositmn cvstodi; garde ndolement, garde ce noble ddpot. M. Alexandre de Humboldt nous a toujours accueilli avec une orandebonle; il a .daigne inscrire souvcnl notre nom dans les sa- vanles citations du Cosmos; nous avons des lors le droit de prendre un bumble rang parmi les hcritiers de sa science univcrsellc, et nous venous en consequence continuer hardiment le Cosmos. De I'ecole allemande,de I'ecolc d'Alexandre de Humboldt pour le fond et par nos tendances a rerudition encyclopedique , nous ap- parliendrons, sous le rapport dc la forme, a I'ecole francaise, a I'ecole de Francois Arago, donl le savoir est aussi ^astc que celui de son illustre ami; mais qui, en outre, a re^u du ciel un don in- comparable , I'art magique de I'exposition la plus lucide qui fut jamais , de la vulgarisation saisissanle des donnees les plus abstraites des sciences les plus inaccessibles. Alexandre de Humboldt et Francois Arago, ou Francois Arago el Alexandre de Humboldt, voila done nos deux grands mailres, nos deux gi-ands modcles , ct nous oscrions presque dire les deux re- dacteurs d'HONNEUR du Cosmos. Puissions-nous etre dignes d'eux ! Nous nous adressons a tons, aux savants comme aux hommes du mondc et aux amateurs, parce que la science pure ou appliqu6e, dontnous nous ferons les interpretes, ne sera pas de la science Clemen taire, mais bien de la science avancee; vulgaris(5e toutefois, et rendue accessible , autant que nous le pourrons , a toutes les intel- ligences avides de progres et capables d'un leger effort. Nous mettrons dans notre x-edaction tant d'ardeur et de courage, que nous pourrons tout analyser, travaux des socictes savantes, memoires publics dans les rccueils scientillques de I'Europe et du nouvcau monde, etc., etc. Pour condenser en quelques pages les innombrables materiaux qui viennent grossir chaque jour les ar- chives des sciences, des arts et de I'industrie, et qui nous sont ap- porlcs par tous les vents de I'horizon , vents d'Angleterre, vents d'Allemagne, vents d'ltalie, vents d'Amerique, etc., etc., il faudra une grandc patience. Nous n'cn manquerons pas; et le travail que nous nous imposerons sera d'autant plus opinialreque nousvoulons absolument Otre lu integralement de cliacun de nos abonnes. Les instruire , les intercsscr, leur inspirer un ardent amour de la science vraie , utile et agreable, c'est toute notre ambition. F. MOIGNO. COSMOS. 3 COSMOS. ENSEIGNEMENT ORAL. II y a longlemps que nous aspirions a rediger un journal purement scienlifique , a realiser un enscignement ecril qui initiat aux pro- grSs des sciences, des arts et de I'industrie tons les hommes saintc- menl jaloux d'cxercer autour d'oux une bienfaisante et salutaire influence : le Cosmos realise ce premier de nos voeux. II en est un autre que nous osions a peine nous avouer a nous- mSmes , c'etait de faire marcher de front avec I'ensoignement ecrit , un enseignement plus efficace encore, celui qui \ient par les sens de I'ouie et de la \ue; ce second voeu va se realiser a son tour. M. de Monfort met des aujourd'hui h. notre disposition une des salles les plus vastes et les mieux situees de la capitale, boulevard des Italiens, n° 8, la salle du Cosmos, avec tout ce qui est necessaire pour ouvrir immcdiatement un cours qui embrassera I'ensemble complet des phenomenes de la nature reproduits ou montres aux yeux, expliques ou devoil^s ci I'intelligence dans leur nature in- time et dans leurs causes, aulant du moins que les conquetes de la science actuelle le permettront. Cet enseignement, dont nous publierons les programmes dans notre prochain numero, differera essentiellement de tout ce qui a ete fait en ce genre, il remplira un grand vide, vide souvent signale et deplore, mais toujours existant. COSMOS. CENTRE PHOTOGRAPHIQUE. Le Cosmos n'oubliera jamais qu'il remplace la Lumiere, et que sa soeur ainee avail trouve parmi les pholographes de la France et de I'^lranger, le concours le plus sympalhique el I'appui le plus em- pressc. L'amour de I'art merveilleux qu'ils exercent les a relenus enchai- nes en grand nombre, et nous les en felicitons, au journal qui s'e- tait offert a prendre la succession de la Lumiere en remplissant les conditions imposees par le fondateur. Mais qu'il nous soil permis aussi , maintenant que I'heure de la lethargic a passe pour nous, de leur apprendre qu'ils nous trouveront plus ardents que jamais a seconder les progros de la photographie , que nous les tiendrons parfaitement au courant des perfectionnements et des precedes nou- veaux. 4 • COSMOS. Nou'^ revcnons au bon moment, car : 1° ainsi que nous aliens le prouver surabondammcnt , la ilocouvcrtc du stereoscope ouvre a la photographie une ere loulc nouvelle; 2° I'emploi naissant encore du collodion, qui en ce moment fait tourner loules les tetes photogra- phiques e't prdoccnpe tons les esprils, donne les plus brillanles espe- ranccs, ot nous oserions prcsque dire que le difficdc et magnifique probleme de la formation inslanlance des epreuves sur verre et sur papier, est delinilivemcnt resolu ; 3° la creation du salon pbotogra- phique'du Cosmos, en nous ramenant aux beaux jours de la socict6 heliographique va consliluer de nouveau un centre de mouveraent intense et de propagande active. A propos d'epreuves sur papier, hatons-nous de faire noire profes- sion de foi. Le veritable invcnleur de la photograpbie en general, c'est Josepb-Nicepbore Niopce, et non pas Daguerre : le veritable in- venleur de la pbolograpbie sur plaques iodurecs est certainemenl Daguerre : le veritable inventeur de la pbolograpbie sur papier est certainemcnt M. Talbot; et le nom taut combatlu de Talbolypie est aussi vrai, aussi legitime que le nom universellement accepte de Daguerreotypic. Nous sommes tout prets, si on I'exige, a fournir les preuves sur lesquellcs s'appuient nos convictions inebranlables. La plus grande part de gloire de I'immense decouverte de la pho- tographie, revient sans aucun doule a la France; les plus belles couronnes doivent orner les fronts des Niepce, des Daguerre, des Fizeau , des Niepce de Saint-Victor. Mais I'Angleterre a des droits aussi a la reconnaissance universelle et elle est justement fiereet ja- louse des droits sacres de son Talbot et de son Archer. C'est aussi dans son sein que la premiere pensee serieuse de photographie a o-erme, comme nous I'avons prouvc en publiant dans la Lumiere la note vraiment ctonnante dans laquelle le grand cbimiste Davy ren- dait compte des essais et des experiences de Wedgewood. 1" {Stereoscope. Le stereoscope, dont le nom , forme de deux mots grecs, indiquc (pi'il a pour destination de montrer les objets de la nature sous forme desolides, ou tels qu'ils sont en eux-memes , avec leurs trois di- mensions , leurs reliefs et leurs creux , fit sa premiere apparition dans le monde savant le 21 juin 1838, au sein de la Societe royale do Londres , il y a pres de quatorze ans. II a eu pour invcnleur M. Wheatstone, le crealeur de la telegra- phic eleclrique , pliysicien anglais d'un merite incomparable et COSMOS. 5 eminemment ing^nieux. M. Whealstone rcgarde le stereoscope comme un de ses plus beaux litres dc gloire ; et il suffirait , en ef- fet, a rendre son nom immortel. Mais qu'est-ce done que le stereo- scope? Nous vous le dirons, chcrs lecteui's, quand nous aurons repondu avant lout a una question bien petite, bien niaise en appa- rence, et que vous n'aviez certes pas la pensee de nous adresser. Pourquoi avons-nous deux yeux? Si Ton avail pose cette question il y a vingt ans , elle aurail grandemcnt embarrasse les pbysiciens et les physiologistes, et Ton n'y aurait fait que des reponses insigni- liantes et evasives. Nous avons deux yeux , aurait-on dit , pour y voir plus clair. Nous avons deux yeux afin que si nous venons a perdre I'un, I'autre au moins nous reste. Nous avons deux yeux, nous ne savons vraiment pas pourquoi ; c'est sans doute que la na- ture a voulu se jouer de nous en nous proposant une enigme in- d^chiffrable , car comment, ayant deux yeux, ne voyons-nous pas double? etc., etc. Le croirait-on, seul dans les siccles anterieurs, le grand peintre et philosoplie Leonard de Vinci a vaguement en- trevu la difference qui existe entre les images d'un m6me objet vu tour a lour des deux yeux, et pressenli les effets de Icur perception simultancc. Quatre siecles devaienl s'ecouler encore avant que la theorie de la Aision binoculaire put se formuler nettement. Nous avons deux yeux pour pouvoir apprecier les distances, pour dislinguer nettement dans un objet les points plus rapproches de nous des points plus cloign^s, pour le voir, en un mot., tel qu'il est en lui-meme, avec ses reliefs et avec ses creux . Par suite de la position relative differente de nos deux yeux par rapport h un objet quclcon- que, nous ne le voj'ons pas sous le meme aspect de I'ceil droit et dc I'oeil gaucbe : il y a entre les deux images que les rayons emis par cet objet peignent sur les refines de nos deux yeux une dissimili- tude veritable, tres-saillantequelquefois, le plus souvent impercepti- ble , mais ti'es-reelle. Nous n'entrerons pas dans plusde details; il suffira d'enoncerque par suite de la coexistence simultanee de ces deux images, noire Smc se trouve dans les conditions d'un geometre qui, pour fixer sur son dessin la position d'un point, est en possession d'une base fixe et des deux angles que font avec cette base les lignes menees de ses extremitcs au point dont il s'agit. Tout le monde salt qu'alors la po- sition du point est completement delerminee. Mais revenons aux effets merveilleux du stereoscope. Si la theorie de la vision binoculaire est vraie , s'est dit M. Wheatstone, dans un jour d'heureuse inspiration, voici ce qu'il en doit rdsulter infaillible- 6 COSMOS. menl. Jc prcnds ilcux dessins ou deux images d'un meme objel, d'unc p>ramidc, i>ar cxemple, on d'un c6nc, \u tour h tour de roeii droit el (Ic I'ffiil ;;authe ; je los applique contre deux petites cloisons parallc'les placces Tunea droilc, I'aulrc a gauche ; j'installe dcvant olles deux niiroirs plans faisant avec les cloisons des angles de qua- rante-cinq dcgres , faisant enlre eux im angle droit et dont I'arele commune, ou Tangle dicdrc , se drosse devant la ligne verticale qui separe mes deux yeux. Alors, si mes distances ont etc bien mesurees, quand de mes deux yeux je regarderai dans les deux niiroirs, les images reflechies des deux dessins , je ne verrai plus qu'une image unique resultant de leur superposition , et puisque les deux images superposees etaient les deux dessins dune nicnie pyramidevuetour a tour de I'oeil droit et de I'oeil gauche, je devrai voir non pas la representation d'un objet plat, mais la pyramide elle-meme en relief ou en creux avec sa pointe qui se dressera menafante contre mon ffiil, ou quifuira dans le loin- tain. Cette serie de raisonnementsest bien simple , et elle estcepen- dant une oiuvre de genie ; et elle est devenue le point de depart d'une de ces grandes decouverles qui sufdsent a rendre un siecle illustre enlre lous les siccles. Ce que M. ^Yheatstone avail prevu se realisa : le stereoscope etait cree; c'etait bien la pyramide elle-meme qui s'elan^a vers son oeii. Les dessins renverses ou transposes de la droite vers la gauche , de la gauche vers la droite, d'une pyramide en relief, dcviennent les dessins d'une pyramide creuse ; en appliquant done contre la cloison de gauche le dessin d'abord place a droite, contre la cloison de droite le dessin place a gauche, la pyramide en relief devait se trans- former en une pyramide creuse : c'est ce qui arriva en effet. La theorie de la vision binoculaire brillait dun nouvel eclat. Mais il fallait encore qu' en pla^ant et surla cloison de droite et sur la cloison COSMOS. 7 do --auche le memc dessinj, la meme image de I'objct vuc d'un seul ceil \ceil droit ou I'ffiil gauche, le relief et le creux disparussenl pour faire place au plat absolu, et c'est ce qui arriva encore; rombre meme du doute devenait ainsi impossible, et la savanlc Ibeorie avait recu sa derniere consecration. Comment est-il arrive que dix longues anndes se soient 6coul6es sans que celle etonnante decouverte ait a peine excite I'attcntion de quelqucs savants? La reponse est facile. Unc decouverte, et I'histoire est la pour le prouvcr , rencontre d'autant plus d'indifference, d'lnerhe ou de repulsion , quelle est plus neuve et plus eclatante. Le fait est que le stereoscope par reflexion de M. Wheatstone elait presque comple- temcnt oublie lorsque sir David Brewster construisit son stereoscope par refraction que nous aliens decrire en quelques mots. Vousprenez lou jours deux dessins ou inwges d'un meme objet vu tour a tour de I'oeil droit et de I'ceil gauche , mais au lieu de les apphquer centre deux cloisonsverticalesparalleles placees a droite et a gauche, vous les fixez a cote I'une de I'autre sur une cloison unique dressce per- pendiculairement devant votre ceil , au fond d'une petite boite h. droite 1' image vue de I'oeil droit, a gauche I'lmage vue de Iceil gauche ; onlre voire ceil droit et I'image droite vous installez un prisme qui, par une propri6te Men connue, rejette ou portc cctte image vers la o-auche- entre votre ceil gauche et I'image gauche, vous installez un second prisme parfaitement egal au premier, mais tourne en sens contraire, et qui rejette ou reporte I'image gauche vers la droite. bi vous avez choisi convenablement I'angle de vos deux prismes, et si la distance de vos yeux aux images est ce qu'elle doit elre, les points correspondants de I'image droite rejetee vers la gauche , et de 1 1- mage gauche rejette vers la droite, se superposeront pour 1 ceil, se confondront dans ime sensation unique; et, en les percevant super- 8 COSMOS. posecs, Yous aurez iuviiiciblcment la sensation dcs reliefs el descreux de lobjct; yous le verrcz lei qu'il 6lait en lui-meme, et commc s'il 6lait la, dressd dcYant yos yeux regardant sans inlermcdiaire. Vons dire, chers Iccteurs, ce qu'il ya de saisissenienlet de charmc dans cede transformation spontanee de deux images plates en une image unique a trois dimensions , longueur, largeur ct profondeur, ce serait chose impossible ; ct je yous demandc inslamment de Ic scnlir Yous-memcs en voyant de yos propres yeux. Les effets du stereoscope , si cxtraordinaires et qui produisent une j-mpression si yIyc, ne sent pas bornes a la representation des objets gdomelriques, pyramides ou cones. Si Ton regarde dans le merYcil- leux appareil deux images dun bas-relief, dune statue , d'un etre viYant , dun pay sage , deux portraits d'une meme personne, Ic bas-relief, la statue, le paysage, la personne, etc., apparaissent ce qu'ils sont dans la nature. OuYerra, par excmple, les yeux, les IcYres, le nez, toutes les parties saillantes du Yisage et du corps, sortir tres-nettement du fond du tableau , avec leurs dimensions proportionnelles , et I'illusion sera complete ; yous retrouYcrez telle quelle fut , ou telle qu elle est encore , la personne que vous aYCz connue, estimce ou meprisee, aimee ou deteslee. Vous me direz peut-etre qu'il est rigoureusement impossible, meme avec le crayon des Raphael , d'exccuter a la main les dessins dissemblables des bas-reliefs , des statues , des paysages , des per- sonnes viYantes, yus tour a tour de Vcc'il droit et de I'oeil gauche, UYCC cetle exactitude absolue, parfaite dans toute la rigucur du mot, des images peintes sur notrc retine; exactitude que le stereoscope exige impcrieusement pour nous montrer les objets tels qu'ils sont en eux-memes. Oui, sans doute; mais la bonne proYidence, qui devait faire apparaitrelc stereoscope a I'heure marquee dans ses eter- nels desseins , a eu grand soin de faire naitre d'abord la photo- graphic; elle a fait naitre Niepce, Daguerre et Talbot avant MM. Wheatstone et Brc\Yster. Vousle savez, tousles objets de la nature dessinent etfixent leurs images sur la pkujue de Daguerre , sur le papier de M. Talbot , sur le verre transparent albumind de M. Niepce de Saint-Victor , aYCc la meme perfection , aYCC la mSmc exactitude absolue qu'ils peignent leurs images fugitiYCs sur les retines de nos yeux. Qu'aYons-nous done a faire quand nous voulons obtenir les images d'un bas-relief, d'une statue , dun paysage, d'une personne Yivante , yus tour a tour de I'ccil droit ou de I'oeil gauche? C'est de dresser devant ces objets diYcrs une chambrc obscure ouboite de daguerreotype binoculaire, COSMOS. 9 c'esl-a-dirc avec deux ouvcrtures miinies de deux objeclifsdem^me diameire ct de mcme dislanee focale, et de plus au foyer une plaque d'argent ioduree, une feuille de papier sensible, une plaque de verrc albuminee, etc. La cbambre obscure regardera pour nous, verra pour nous I'objet place devant elle; cet objet, dessinaleur complaisant , se peindra lui-meme deux fois, fixera deux fois son image; ct nous serons entres en possession des deux dessins exiges par le stereoscope, des deux dessins vus de I'ceil droit et de I'oeil gauche. Et d^sormais , au jour quit nous plaira , h I'heure de nos caprices , nous verrons tels qu'ils furcnt ou tels qu'ils sont , avec leurs reliefs et leurs creux , avec leurs lumieres et leurs ombres, le bas-relief, la statue, le paysage, la personne vivante, etc., etc. Sans la photographic , le stereoscope , qu'on nous pardonne la comparaison par trop forcee, n'eut ete qu'un nain , un cretin, un idiot ; par la photographic, il est devenu un geant , un gdnie aux ailes audacieuses.Mais aussi, voyez comme en la soulevant sur ses vigou- reuses epaules , ou I'enlevant sur scs ailes rapides, I'enfant recon- naissant a grandi sa mere.- Elle n'6tait qu'un dessinateur parfait et exerce , qu'un peintre de grisailles accompli, et voici qu'en lui lais- sant son crayon incomparable, son clair-obscur inimitable, le ste- reoscope arme sa main d'un ciseau qui desespererait Michel-Ange, el la transforme en sculpteur surhumain , quifouille, qui drape, comme jamais Phidias n'a fouille , drape, etc. Et cette divine meta- morphose dela photographic est acheteepar elle a bien peude frais, puisqu'il a suffi de lui demander deux images au lieu d'une seule qu'elle etait accoutumee ci donner. Voici done que par lamysterieuse union de la photographic etdu stereoscope , nous pouYons sans peine rcaliser des galeries de por- traits qui ne seront plus des fictions de peintres ou de sculpteurs lerrestres , des toiles plates appendues aux murs ou des marbres glaces, mais I'expression vivante des tetes belles ou fortes que nous prenons plaisir a immortaliser ; des musees , reproduction au vif de tons les chefs-d'ceuvre de la sculpture antique et moderne ; des col- lections de tous les sites vantes et celebres, de toutes les grandes mi- nes, de tous les monuments d'architecture , tels qu'ils sont en eux- memes, avec le sentiment profond dela realiie que le pinceau des Claude le Lorrain , des Hobbema , des Poussin , etait impuissant a rendre. La photographie, revivifiee, completee et couronnee par le ste- reoscope, est tenement sup^rieure h elle-meme, que le jour viendra 10 COSMOS. bienlol oii loulcs Ics images photographiqucs, paysagcs, vues de monuments, porlraits, etc., s'associeront constammcnl par couples pour leproduire dans toutc leur vcrite, dans toute Icuv beaute douce et severe , la nature malcrielle et vivantc. El qu'on le remarque bion , ii ne s'agil point ici d'une csperance, d'un crepuscule , tl'un enl'aut an bcrceau, mais d'lmc creation cn- licre, d'une niagnifique realite, acccptee d'entbousiasme et qui a pris possession du mondc. Depuis le jour ou il est entre pour en sortir babilement perfectionne dans les ateliers de M. Jules Did)oscq, centre et point de depart des progres de I'optique moderne, le ste- rt^oscopc a conquis la France, I'Angleterre, I'Allemagne. Autant il fut autrefois meconnu et dcdaign^ lorsqu'il ne s'^tait pas fait natu- raliscr franrais, autant ce charraant appareil est aujourd'hui re- cherche et populaire. La production des images stcreoscopiques par la chambrc ob- scure binoculaire, si facile en thcorie, <5lait inapplicable dans la pratique ; on la remplac^e par un proc^de nouveau dune sim- plicile mcrvcillcuse. Les vues des galeries gigantesques de I'exposi- tion nnivcrselle do Londres, les vues dc I'arc de triomphe de I'Eloile, deM. Duboscq;les groupes de famille, pere, mere, enfants, et les academies de M. Claudel ; une collection deja nombreuse de monuments, de statues, de bas-reliefs, de porlraits, etc., etc., sont des temoins solennels d'un succes qui ira grandissant toujours. On attendait avec impatience que la photographie sur papier fit assez dc progres, et devint un art assez constant dans ses r(5sultats, pour que I'on put substituer, dans le plus grand nombre des cas, des dessins sur papier et sans reflets aux images daguerriennes, dont le miroitage rend la vision plus difficile et moins nette. Ce voeu est pleinement exauce. Un des plus habiles photographes de la France et du monde , M. Ferrier produit a coup sur des epreuves positives qui remplacent les images stcreoscopiques daguerriennes. On a fait mieux encore, on a obtenu des Epreuves positives sur verre transparent que Ton regarde a travers le fond ouvert du ste- reoscope , el qui produisent un effet magique. Les premiers dessins de ce genre qu'il nous a ete donne d'admirer, sont des vues de la galerie principale du Palais de cristal , et des quatre grands bas- reliefs de Tare de triomphe de I'Etoile, etc. : nous ne pouvions pas nous lassor dc les contemplor. C'est done une ere entierement nou- vefle a la photographic ct a la representation des objets d'art, et, sous ce point de vue, le stereoscope ci dessins transparents est une mer- veille non moins etonnante que le daguerreotype. F. Moigno. COSMOS. 11 2" Collodion. Le collodion est une dissolulion de colon -poudre dans Tether alcoolise. M. Archer, pbotographe anglais, eut le premier la pens^e do le substiluer a I'albumine de M.Niepce de Saint-Victor, apres y avoir ajoute une petite quantite d'iodure d'argent en dissolution dans I'iodurede potassium. Les premieres publications de M. Archer sont dat<§es des mois de juillet et aout 1851. En traitant par une solution de bichlorure de mercure les epreuves obtenues avec le collodion, M. Archer, en decembre 1851, Les rendit beaucoup plus belles. Le collodion d'ailleurs ayait sur I'albumine I'immense avan- tage d'une sensibilile incomparablement plus grande : les images etaient prodiiites presque instantanement ; on obtenait un portrait, meme avec un objectif un pen paresseux, en moins de trente se- condes, et le plus souvent en trois sccondes. En novembre 1851 , M. Fry proposa dans I'Athenxum d'ajouter au collodion une petite quantite de gutta percha. 11 afhrmait que par ce moyen il avail produit, h la lumierc du gaz et en moins de cinq se- condes, d'excellentes epreuves positives. La nouvelle preparation s'obtenait en faisant r^agir, pendant un jour ou deux dans un fla- con, le collodion sur la gutta percha, qui s'y dissout dans une pro- portion suffisante. La morte saison commenga ensuite, et le collodion dormit de son cote son sommeil d'hiver ; mais il s'est reveille au printemps , et nous n'entendons parler partout que d'ether el colon-poudre lodu- r^s. C'est comme une fievre ardente qui a envahi lout a coup les pholographes les plus flegmatiques : elle les agile tout le jour et les fait rever toule la null. , Au milieu de ces mille essais, de ces transports d'enlhousiasme, la virile est bien difficile a saisir, et nous ne pourrons qu'aprfis quelques semaines d'examen et de sang-froid, repondre aux deux questions suivanles, qui nous sont posees deja : 1° Le collodion va-t-il rcellement detroner I'albumine, el faul-il defimtivement sub- stiluer le precede de M. Archer au procMe de M. Niepce de Saint- Victor ? 2° De toutes les preparations de collodion offertes en ce moment aux pholographes, quelle est la meiUeure, est-ce celle de M. Archer, ou celle de M. Puech? Fier d'un premier succes, M. Zie- gler s'etail empresse d'ecrire a M. Puech que I'avenir du progrcs de I'heUographie 6tait dans ses mains ; que le veloute des noirs obte- nus avec le collodion fran(:ais I'emportait de beaucoup sur les leintes rousses produites par le collodion anglais. Nous croyons 12 COSMOS. sinceremcnl que M. Pucch a conipletement reussi , et que son me- lange ne laisse ricn a desircr ; nous avons vu des portraits obtcnus avec son liquulo, dans Ics alelicrs de MM. de Monfort el Aguado ; ils donncnl de Ircs-brillantcs esperanccs ; M. Martens, aussi, a oblcnu d'adniirables rcsullats. Mais opcre-t-on bien a coup sur, el le dosage de I'argcnl n'esl-il pas encore incertain? Attendons que la lumierc se I'asse. Ce sur quoi au moins lout le monde est d'accord , c'esl qu'on (5clioue presque toujours quand on opcre avec une preparation recente de collodion iodure. II taut absolument laisser la reaction se continuer pendant quelques jours, dans un endroit calme el obscur. 3" Salon photog^rnphique du Cosmos. Ce qui prouvera niieux que toutes les paroles ct toutcs les pro- messes la \olonlc bien arretee des redacteurs du Cosmos , de mettre tout en CDUvre pour hater les progres et agrandir le cercle dejci si \asle de la photographie , c'cst rouvcrture toute prochaine du grand salon photographique americain dans la maison du Cosmos, boule- vard des Ilaliens, n° 8. Ce salon est fondc et sera dirige par M. Be- nito de Monfort fils. Son exposition mcrveilleuse, a Tangle obtus forme par le boulevard des Italiens et le boulevard Monlniartre, el sa vasle clendue en feront un des plus beaux etablissements du monde. Ce sera la sallc du trone de la photographie et du stereoscope qui s'y monlrera sous toutes ses formes nces on a nailre, avec tous ses efTets si cxtraordinaircs, dans toutes ses applications presentes ou a venir. M. Jules Duboscq s'est engage a seconder de tous ses moyens M. Benito de 3Ionfort , et a concentrcr dans. les salons du Cosmos loutes ses richesses stereoscopiques qui croissent chaque jour dans une proportion veritablement incroyable. ^'ous dirons plus lard comment el a quelles conditions ces memes salons se Iransformeront en galeries d'exposition permanente el de ventc, au compte des artistes, des chefs-d'oeuvre sortis de leurs mains. F. MOIGNO. ASTRONOMIE. DECOCVERTE D'UNE DIX-SEPTIEME PLANETE DANS L'iNTERVALLE DE MARS A JUPITEH , FAR M. RODEKT LUTHER. Le systeme des planetes qui on t le Soleil pour centre de leurs mou- vemenls peul ctre divise en deux groupes, I'un inlerieur, compost de quatre planetes de moyenne grandeur, savoir : Mercure , Venus, la COSMOS. 13 Terre et Mars dans le voisinage du Soleil ; I'autre ext6rieiir, de quatrc grosses planeles, Jupiter, Saturnc, Uranus et Neptune. Au milieu de rinlervallc qui separe Mars, la plus dislante du Soleil dans le groupe interieur, et Jupiter, la moins distante du Soleil dans le groupe exterieur, Kepler avail signale une place vide. Cctte place est main- tenant occupee par dix-sept petites planetes, grace aux travaux de Piazzi, d'Olbers, de Harding, et de MM. Hencke , Hind, Graham, de Gasparis et Luther. La seizieme planete de cc petit groupe a 6te trouvee 11 y a peu de semaines par M. de Gasparis, a Naples; elle n'a pas menie encore re^u de nom. Le 17 avril, M. Luther, du'ec- leur de I'observatoire municipal de Diisseldorf , siluc a Bilk, a une petite distance de la ville , a trouvc la dix-septieme dont il est ques- tion dans cet article. Comme la prccedente elle est de notre cote par rapport a I'ecliptiquc et a I'equateur, c'est-^-dire dans rhemisphere nord, et son eclat est celui d'une etoile de dixicme a onzieme grandeur. M. Luther, I'auteur de celte ddcouverte remarquable, est depuis quelques mois seulement dirccteur du petit observatoire de Bilk, legue, avec une rente annuelle destinee a son entretien, par M. de Bentzenberg connu par ses travaux sur la deviation vers Test des corps qui tombcnt d'une grande hauteur et sur Ics eloiles fdan- tes. M. Luther est eleve eta ete un des assistants du celebre Encke de Berlin : il ne faut pas le confondre avec un astronome du meme nom, et lui-meme d'un grand merile comme observatcur, comme theori- cien et comme calculateur, eleve de Bcssel et digne de son maitre , lequel reside a Koenigsberg. Une particidarite remarquable de I'cdu- calion de I'astronome Boberl Luther, de Bilk, c'est qu'il est un des deux jeunes descendants de Martin Luther, auxquels le roi de Prusse fait une pension annuelle. M. Bobert Luther inaugure heureusement ses fonctions. A cette occasion nous dirons anoslecteurs que la difficulte qu'il y a de trouver et de fixer dans la m(5moire des noms propres pour toutes les petites planetes du groupe situe entre Mars et Ju- piter, a fait penscr a adopter un systeme autre qu'une nomenclature nominale. Les quinze premieres petites planetes portent les noms de Ceres, Pallas, Junon, Vesta, Astree, Hebe, Iris, Flore, Metis, Hygie, Parthenope, Victoria ou Clio , Egerie, Irene et Eunomia. La seizieme et la dix-septieme qui est, cclle deM. Robert Luther, n'ont pas encore de nom. Toutes ont, outre leur nom, un symbole ou si- gne qui les represente , Ceres une faucillc , Heb6 une coupe, Victo- ria une branche de laurier : les autres ont des symboles bien plus complexes , par exemple , I'arc-en-ciel pour Iris , une ancre pour Aslr^e; un autel avec des flammes pour Vesta; etc. 14 COSMOS. M. Gould , Ic directcur de I'excellent journal aslronomiquc ameri- i-ain, a adople pour designer les planiiles de ce gronpe, nn ccrcle avec un nuniero inscrit an milieu. Ainsi Vesta decouverle la quatrit;me est represenlee par un rond porlant le chitTrc 4 au milieu. La planelc de M, Robert Luther le serail dans cette notation par le chiffre 17 au mi- lieu d'un cercle. Depuislongtemps nous proposons comme plus sim- ple, de suivre pour les pelites planetes de ce groupe la milhode em- ployee par Bayer, pour designer individuellemcnt les diverses etoilcs d'uiie memc constellation. On les designerait par les lettres de I'al- phabel grec, alpha, beta, gamma, etc., les memos qui scrvent dans Homere h. num6roter les chants de Xlliade ct de YOdyssce. Dans cette notation , la planetc Ceres decouverle la premiere a pour signe la lettre «, Vesta est representee par la lettre S qui est la quatrieme de I'alphabet. La seizicme planetc decouverle il y a quel- ques scmaines le serait par la lettre tc , qui est la seizieme lettre grecque; enfm, la dix-septieme et derniere, celledeM. R. Lvither, le serait par la lettre p. Cette classification alphabetique dispenserait de tout autre nom ou de toute autre designation. Une fois I'alphabet ^puis(3, on reprendrait comme d'usagc les memes lettres avec les nu- mdros deux, trois, etc. : ainsi la quarante-huitieme planete sera omega deux, oi\ et la centieme delta cinq, S\ Avec les instruments actuels, et d'aprcs I'eclat des nouvelles planetes, on pent presumer qu'on atleindra trentc ou quarante de ces petits astres ; mais si I'on em- ployait les grands refracteurs de quatorze pouces de Poulkova, de Cambridge , Amcrique , ou de rObscrvatoire de Paris , ou bien les telescopes de M. Lassel ou de lord Rosse, on ne pourrait plus assi- gner aucune limite au nombre visible des petits corps planetaircs qui foisonnent enlre Mars et Jupiter. Rabinet. YARIETES. Cosmoplaste et geoplaste europeen. Nous sommes heureux de pouvoir inaugurer notre journal par I'exposition d'une des plus grandes idecs encyclopediques qui soient apparues au xix' siecle. L'arlicle qu'on va lire avail cte compose expres pour le Cosmos, qui devait en avoir les pr^mices; et si nous I'avons public d'abord COSMOS. 15 dans unc feuille quotidienne, le Pays, c'est parce que nous avions quelquc raison d'espdrer que la commission municipale de la Seine ferait entrer imm^diatemcnt le gdoplaste europcen dans les projcts d'embellissement du bois de Boulogne , devcnu propriete de la ville de Paris. Si noire voix n'clait pas dcoulee dcs ddiles de la grande cite ; si nos voeux n'etaient pas cxauccs par cux, nous ne desespcrcrions pas encore , nous n'cn serions pas moins assures du succes ; car nous Savons de source certaine que cetle grande creation exalte un grand nombre d'csprits eleves ct actifs, que des combinaisons pour la rea- lisation comme entreprise particuliere du geoplaste europcen sonl scrieuscment eludiees , et qu'elles aboutironl infailliblement. Nous ferions-nous illusion en pensant que I'ensemble nouveau dcs deux enseignements ecrits et oraux crees par le Cosmos devien- dra , avec le temps , une sorte de puissance organisalrice, un centre d'action forte et rayonnante ; et qu'avec ce levier aux longs bras , nous pourrons venir en aide a toutes les pensees nobles et fecondes, ?i toutes les inventions originates et utiles , a toutes les entreprises vraiment humanitaires et bienfaisantes ? L'un des princes de la science antique , Strabon , a dit il y a bien longlcmps : « Les mers , les fleuves et les montagnes sont les verita- bles jalons de la gdograpliie. » Et il n'est qu'un moyen efficace de nous initier a cette science eminemment necessaire , utile et at- trayanle : c'est d'etendre reellement devant nous les bassins des mers, de faire surgir les montagnes, de faire couler les fleuves et les rivieres. Cet ensemble reel des bassins des mers avec leurs ondes et leurs flots, des lits des fleuves avec leurs eaux courantes ct leurs rives, des montagnes elevees sur leurs bases et des vallees qui les sepa- rent, constitue cc que M. Sanis, son inventeur, a appele le geo- plaste. Ce n'est pas autre chose qu'un immense plan en relief de la surface ondulee du globe; et ce plan en relief borne a I'Europe, en y comprenant toutefois les conquetes limitroplies des Etats euro- peens , I'Algerie , par exemple , possession frangaise , nous voulons absolument qu'on nous pardonne ce mot temeraire , qu'il fasse partie essentielle des transformations et des embellisscments du bois de Boulogne. On choisirait , entre les portes d'Orleans et la porte de Madrid , ou entre Passy et la porte Maillot , dans I'espace ou Ton voit aujour- d'hui le Ranelagh , un terrain de forme rectangulaire , d'une conte- 16 COSMOS. nance de quinze heclares, on cent cinquante millc metres carr^s, a pcu pros relendiie dii jardin dcs Tuilcrics; et c'cst lb. qu'h la grandc gloirc dc Paris ot de la France, on rdaliserait en qnelques annecs Tadinirable projet dn geoplaste europeen. Ses limiles scraicnl : 1° au niiJi I'enipire dii Maroc, I'Algerie, la regcnee de Tnnis, la ralcsline el I'Anatolie; 2° i!j I'csl le bassin du Dnieper, la portion snpcrieure du bassin dn Volga et de la Dwina dn nord ; Svau nord la Finlande, le golfe de Bothnie, la Suede et la Norvege ; 4" enfin a I'onest, tout , jusqu'au Irenliemc dcgre de lon- gilnde occidentale. Unc terrassc de dix pieds d'elevation, semblable a la terrasse du bord de lean des Tnileries , formerait I'enceinle de cloture. Son dcveloppement serait d'environ trois mille metres; le visiteur qui la parcourrait en regardant toujours le geoplaste , verrait apparaitre pour lui a chaque instant un horizon nouvean , pittoresque, in- slruclif et plein de charmes. Quatre tours on obscrvatoires eleves aux quatre angles du rectangle, on sur les milieux de ses cotes, serviraient a la fois d'abri, de station de repos, et de belvedere: de leur somnict, loeil cmbrasserait I'ensemblc de I'immense carte, el se ferait nne idee parfaite de I'Europe cntiere. L'echelle du geoplaste serait d'un dix-millieme ou de dix cen- timetres par kilometre. L'Angleterre aurait ainsi soixanlc-douze metres de longueur du nord au sud; la France, cenlvingl metres dans sa plus longue diagonale; la Corse, pres de dix-sept metres; la Seine, en largeur a son embouchure, entre le Havre et Hon- fleur, un metre \ingt cenlimelrcs; en longueur, soixante-lniit metres. Le parcours du Danube depuis sa source, Schwarlzwald, jus- qu'^ son embouchure, la mcr Noire, serait de deux cent cinquante- six metres; le chemin de fer, enfin, de Paris a Marseille, se derou- lerait sur quatre-vingt-dix metres. L'echelle des reliefs sera nne cchelle de convention, assez grande pour que les pentes rcstent sensibles jusqu'aux bords des fleuves et des mers. LeMulahasen, la plus haule sonlmite de I'Espagne, anraii trois metres cinquante-cinq centimetres de hauteur. LaMaladetla, le plus haul pic des Pyrenees gallo-iberiqucs, trois metres quarante cenlimelrcs; lepic de Sency (mont Dor), un metre qualre-vingt-dix centimetres; le Ballon (Vosges), nn metre quarante centimetres; le Picculet (Jura), un metre soixanle-dix centimetres; le mont Viso (sources du P6), trois metres quatre-vingls centimetres; le pic Iseran (sources de I'lsere), quatre metres; le mont Blanc, le geanl de I'Eu- rope , quatre metres soixanle centimetres ; le Finsler-Aarhorn (Alpes COSMOS. 17 Uenioises), qualre metres; le mont Maloia (sources du Rhin supe- ricur, Alpes centi'ales), Irois metres cinquante centimetres; le moni Ortler (Tyrol italien), trois metres quatre-vingt-quiuze centimetres; le Gros-Gloclmer (Alpes-Noriquesj, trois metres quatre-vingt-di\ centimetres; la Marmoletta (Alpes-Carniques), trois metres cin- quante centimetres; le mont Terglont (Alpes-Juliennes), trois metres cinquante centimetres; le mont Corno (Apennin central), deux metres quatre-vingt-dix centimetres; le mont Etna, le plus grand Yolcan de I'Europe (Sicde), trois metres trente centimetres, etc., etc. Toutes ces hauteurs, les chaines de montagnes de tons les ordres , les plateaux et les collines, les pics et les glaciers seront tailles dans la pierre ; chaque elevation conservera la forme qui lui est propre , avec ses blocs erratiques, scs rochers nus de granil, ses cratercs eteints ou en activite. Des bassins d'un metre de profondeur, et sur lesquels nageront des chaloupes pouvant porter jusqu'avingt yisiteurs, representeroni les mers de I'Europe avec leur configuration malhematiquement re- duite ; chacune d'elles creusera scs golfes, ses bales, ses rades et ses ports; le littoral etalera ses plages, projettera ses pointes, et domi- ncra les mers par ses caps et ses falaises. Toutes les iles surgiront du sein des eaux dans leur position geo- graphique avec leur grandeur et leur forme ; Seeland avec Copen- hague, la capitale des Etats danois; la Grande-Bretagne, la plus vaste des iles de I'Europe , avec ses innombrables ports , ses canaux , ses routes, ses chemins de fer; la verte Irlande, basse et mareca- geuse; Majorque et Minorque, les plus grandes des Baleares;la Corse, avec ses flancs tantot decharnes, tantot converts d'epaisses forets; la Sicile et le mont Etna; Malte, le diamant dc la Mediter- ranee, Corfou, Candic et le mont Ida, Chypre, Rhodes, Negrc- pont, etc., etc. Le parcours de cclte vaste ceinlure de mers durera environ quatre heures. Les fleuves, les rivieres , les lacs et les canaux seront aussi creuses dans la pierre , el on reproduira fidelement toutes leurs sinuosites , leurs iles principalcs , leurs pentes relatives, etc., etc. L'eau coulera dans tons les lits; des filets d'eau , jailUssant des points oii les fleuves et les rivieres prennent leur source , figureront les centres d'irriga- tion de I'Europe, la crue plus ou moins sensible des divers cours d'eau pendant les jours de pluie meltrait en evidence rimportance relative de chacun de ces centres d'irrigation. Les grandes forets et les arbres qui croissent naturellement dans chaque climat , seraient represenles par des individus vivants : on 18 COSMOS. veri-ail dans les conlr^cs m^ridionales I'oranger, I'olivier, Ic murier, Ic jujubicr, etc.; dans les regions moyennes, la vignc, Ic liguicr, laniandier, le poiiier, le prunior, rabricolier, Ic cerisier, elc. Parmi les grands arbrcs, on dislingucrail le cliene, le hetrc, le boulcau, le pcuplicr, le noyer, le clialaignier, le platane, I'erable, le lilleul , le Irene , le pin , le sapin, le meleze , Ic cypres et le cedre. Elcves dans des pots pour qu'ils conservent le plus longlemps pos- sible dcs proportions reduites, ces arbrcs scraient remplaccs des qu'ils auraient trop grandi. Rien n'cnipecberait cependant qu'on iaissat croitre dans les grandcs zones les arbres qui les caracte- risent. On indiquerait, par des echantillons reels, les lieux d'ou Ton ex- trait la bouillc, la tourbc, Ic clmrbon dc terre, le cuivre, Tetain, le plonib, le fer, le zinc, le mercure, Ic soufre, I'anibre , le bitume, le corail,etc. Chaque ccbantillon serait depose au centre d'un puits de quelques centimetres de profondcur, et les richesses minerales de I'Europe scraient ainsi facilement appreciees. Les formes, les dimensions, les populations des grandes villes, scraient gravees sur la pierre ou sur des plaques metalliques incrus- Ices dans la pierre; on placcrait a cote la representation sculptee de Icur monument le plus cclebre. Des rubans d'asplialle marqueraient le cours des principales voles de communication; les cbemins dc fer seront traces avec une precision matbcmatiquc : on verra les pouts jetes sur les fleuves, les viaducs qui comblent les yallccs , les tunnels ou voutes souter- raines qui abaissent les montagnes, etc., etc. N'est-il pas evident que , dans les conditions que nous vcnons d'enumerer, le geoplaste donnerait une idee complete de I'Europe , de scs grands versants, de ses montagnes, de ses collines, de ses plaines, etc., etc.? La distance et la situation relatives des capitales des divers Etats resteraienl gravees a jamais dans I'esprit des visi- teurs. Comme ils admireraient alors ces plaines incomparables du Piemont, du Milanais, de la Lombardie et de la Venctie, arrosces par un nombre protligieux de rivieres el de torrents , qui dcscendent majestueusement ou tumultueusement des Alpes ou des Apcnnins ! Chacun aussi en attendant I'heure dc la realite pourrait s'accorder le charmc d'un voyage de Paris a Londres, a Bruxelles, ti la Haye, aCopenhaguc, a Stockholm, a Berlin, a Varsovie, a Moscou, a Saint-Petcrsbourg , a Constantinople, a Athencs, a Naples, a Rome, a Florence, a Venise, h MUan, a Turin, a Madrid, h Lisbonne, a Alger. II cotoierait et traverserait de verilables fleuves , il gravirait COSMOS. 19 et franchirait de veritables montagnes, il s'enibarquerait sur de vc- ritables mers : ce serait en un mot la nature clle-niemc , mais dans des proportions anioindries. Voila cc que c'cst que le geoplasle europeen , et nous ferions in- jure h nos lecteurs si nous pouvions supposer un instant qu'ils ne comprendront pas aussi bien que nous les iaimenses avantages de cetle creation magique, et qu'ils ne nous aideront pas de leur in- lluence, ou du moins de Icurs voeux sinceres , dans les efforts que nous ferons pour amencr a bonne fin celte grande entreprise. Le Geoplasle, frere et glorieux emule du Jardin des Plantes, alti- rerait et entrainerait vers lui toules les classes de la soci^te. II de- viendrait le but du pelerinagc scientifique le plus frequente du monde. L'homme d'Etat le visilerait souvent pour mieux asseoir ses considerations sur la statistique et les I'elations des divers Etats de I'Europe ; les militaires accourraicnt en foulc pour contempler les champs de bataille celebres et ctudier les accidents de terrain qui decident des victoires : chaque etranger viendrait revoir son pays natal, rever au bonlieur de la patrie et secoucr les ennuis mortels de la nostalgie : I'liistorien et le moraliste voudraient mieux con- naitre le vaste theatre de la grande comedie humaine : le gcologue realiserait en un jour des excursions qui auraient exige de longs mois ou meme de tongues annees; les effets de tasscnient ou de soulevement de I'ecorce de la terre , concentres sur un espace re- duit, et vus d'ensemble , seraient par lui mieux apprecies , il crain- drait moins de se iromper dans I'application de ses savantes theo- ries, etc., etc. II importe grandement de rappeler que ce gigantesque projet a dejci regu un commencement d'exccution. Sous le nom de Georama, M. Sanis , il y a quinze ans , construisit , sur un arpent de terrain , une carte en relief de la France , que tout Paris a voulu voir. Cha- teaubriand la parcourut souvent, etvoici comment il la caracterisa : « La decouverte du georama est la personuificalion de la geograpliie. EUe honore notre pays. » Le celebre financier Laffitte fit aussi son pelerinage a la plaine de Montrouge, et il ecrivit ces lignes memorables : « La vue de la geoplastie de la France sur un arpent de terrain me confond d'etonnemenl , d'admiration et de plaisir. Si j'avais vingt ans de moins, je fournirais moi-meme a I'inventeur le terrain el I'argent necessaires pour realiser celle de I'Europe; je lui fei'ais produire cinq millions par an , ct toutes les nations du monde nous envieraientce monument. « 20 COSMOS. Cinq inillions par an! Et pour (5tal)lir ce cliiffre, Laffillo avail fait un calcul bicn simple : il avait compld le nombre des etrangers ri- dies qui affliicnl chaquo annoe a Paris, el qui, chacun en moycnne, apportoraicnl vinyl francs au geoplaslc. Nous engageons ^ivenlcnt ceux de nos leclcurs qui voudraient se fairc une idee plus parfaiie du geoplaste du bois de Boulogne, a aller voir dans les balimenls du lycee Louis-lc-Grand , rue Sainl- Jacques, 121, la grande carle en relief d'llalie que M. Sanis vienl d'achcvcr. Quel admirable speclacle! ct qu'il serail plus admirable encore, si le tableau avait en dimensions superficielles dix millc metres carres au lieu dun metre; s'il (5tail vivant au lieu d'etre mort. La carte en relief de la France, sur une cchelle plus pelile encore, a glorieusemenl inaugurc le nouvel enseignemenl , enscignement seal ralionnel et efticace de la gcographie. Nous avons eu la pensee de faire voir cette carte telle qu'elle est avcc ses reliefs ct les creux dans le stereoscope, et elle a produil un cffel magique. Nous I'avons fail dessincr sur verre transparent albumine par les precedes de la photograpliie, el en la projelanl a I'aide d'un verre grossissant el de la lumiere eleclrique sur une toile blancbe, de douze pieds de cote, nous I'avons grandie dans des proportions enormes ; nous ne saurions dire I'effel qu'elle a produil sur I'espril des savants amis qui faisaicnt avec nous cette experience. F. Moigno. NOUVELLES DIVERSES. Elections academiques. — L'Academie des sciences a proced^ au- jourd'hui a I'election d'un membre dans la section d'anatomie et de zoologie, en remplacement de M. de Savigny, decede. L'Academie etait tr^s-nombreuse , et le scrulin a ete trfes-anime. Ce n'est guerequ'a la troisifeme epreuve qu'un resullat a ete obtenu. Au premier tour de scrutin, sur 58 volants, M. de Quatrefages a ob- tenu 20 voix; M. Claude Bernard, 18; M. Charles Bonaparte, 8; M. Longet, 7; et M. Dujardin, 5. Aucun des candidats n'ayant ob- tenu la majorite, il a 6te precede a une seconde epreuve. A ce second tour de scrutin, le nombre des volants etait de59; la majorite absolue etait de 30 voix. M. de Quatreftiges a obtenu 29 voix ; M. Claude Bernard, 25; M. Charles Bonaparte, 2; M. Longet, 1, et M. Dujardin, 1. COSMOS. 21 Le second vote n'ayant encore rien decide , il a ete precede a un scrutin de ballottage entre M. de Quatrefages et M. Claude Bernard. A cette nouvelle epreuve , le nombre des volants etait de 58. M. de Quatrefages a obtenu 31 voix, et M. Claude Bernard 24. II y a eu 2 billets blancs. En consequence, M. de Quatrefages a ete proclame membre de I'ln- stitut. Nous applaudissons de tout notre coeur a ce cboix. M. de Qua- trefages , el nous n'avons pas cache nos sympathies , est un naturaliste tres-distingue et un ecrivain elegant , un homme, en un mot, parfaite- ment academique. ficoNOMiE DOMESTIQUE. — 1° Transformation de Veau de mer en eau douce, par M. Normanby. L'auteur s'est propose d'obtenir de I'eau de mer avec un appareil simple et de petit volume, et en ne depensant qu'une quantite tres- petite de combustible , de grandes quantites d'eau douce aeree, inodore et salubre. II annonce qu'avec son appareil il peut obtenir, avec un kilo- gramme de charbon de terre, jusqu'a vingt kilogrammes d'eau douce. Distillee a cent degres centigrades , au moyen de la vapeur, a une pression peu superieure a celle de I'atmosphfere , I'eau de mer se vola- tilise sans entrainer les matieres organiques tenues en suspension et en solulion dans son sein, et qui lui communiquent une odeur nau- seabonde et un gout desagreable. L'appareil consiste en une serie de disques superposes et commu- niquant les uns avec les autres par des galeries contournees en cercles concentriques , et places dans un bain de vapeur. L'eau , en circulant dans les galeries chauffees par la vapeur qui les entoure, degage une certaine quantite de vapeur qui, se melant avec I'air atmo- spherique amene par un tube en communication avec I'atmosphere , se condense finalement en eau douce parfaitement aeree et qui remplit le vase refrigerant. Dans les appareils de distillation ordinaires, il arrive un moment ou l'eau de mer sursaturee laisse deposer le sel. Cet inconvenient n'existe pas dans l'appareil de M. Normanby, car l'eau de mer y circule d'une maniere non interrompue, et il ne s'en evapore qu'une quantity bien inferieure a celle qui est necessaire pour maintenir en solution les sels quelle contient. Un appareil d'environ un metre de haut sur cinquante centimetres de large fournit aisement deux litres d'eau douce par minute. ( La suite auprochain numero.) 22 COSMOS. BULLETIN BIBLIOGRAPIIIQUE. Traitc de telegraphic electrique , par M. I'abbe MoiGNO, ^^ edition, 1 vol. in-8°, avec atlas de 22 planches. Paris, chez Franck, 67, rue Richelieu. Combien de fois, tout enfants, lorsque nous lisions dans les livres splendides de rOrient les prodiges d'une ^poque qui n'est plus, nous nous somnaes arretes avec complaisance a cette histoire de Guinare, la Perle des mers, qui n'avait qu'a briiler un peu d'aloes en prononcant des paroles myst^rieuses , pour que tout de suite son pere, le puissant roi de I'Ocean, I'entendit a mille lieues de distance et vint se jeter dans ses bras!... Que nous etions loin alors de supposer qu'un jour, sans I'anneau de Salomon, sans commander aux genies, sans 6tre nicme un croj^ant, on arriverait a causer avec les absents aussi aisement que s'ils etaient a c6te do nous! Et pourtant, tel estl'empire de I'habitude, qu'avijour- d'hui deja personne ne pense plus au miracle de tous les instants par lequel la tele- graphic electrique est venue feconder la civilisation ! — Mais s'il n'y a plus i'i- tonnement, il y encore beaucoup d'idees fausses a I'egard de la transmission Electrique des pensees, et Ton doit savoir gre au zelc eclaire et infatigable de M. I'abbe Moigno, d'avoir recueilli et expose dans son Traite de telegraphie elec- trique tout ce que Ton peut desirer de connaitre sur cette matiere. — DEja, en 4 848, une premiere Edition de cet ouvrage avail ete faite etEpuisee en quelques mois ; seulement le livre se ressentait de rempressement avec lequel il avait etE redige et une refonte de I'ouvrage elait devenue nEcessaire, surtout depuis que de grands progres dans cette branche de physique appliquEe, en avaient a peu pres change la face. — C'est a ce remaniement complet du Traite de teUgrapMe eleclrique que nous sommes redevables de I'edition actuelle dont un grand nombre de planches, elegamment gravees, augmente encore I'interet. — Nous allons examiner rapidement ce beau livre, qu'une lecture attentive peut seule faire apprecier, et dont I'analyse ne saurait Etre qu'un inventaire plus ou moins ennuyeux, pour lequel nous implorons d'avance le pardon de nos lecleurs. Nihil su6 sole novum, c'est I'eternel refrain de tous les fouilleurs de bibliotheques. — Galilee invente-t-il les lunettes ? Dutens pretend que les anciens les avaient connues et qu'elles etaient decriles dans plusieurs livres fort repandus. Copernic n'est que le valet de Pythagore. Papin est une metempsycose d'Archim^de. Volta aurait trouve sa pile dans Swammerdam ; Foucault se serait bornd a mettre en lumi^re un travail de Viviani. Enfin, suivant ces messieurs, il n'y aurait plus rien a chercher, et tel homme qui pourrait lire et savoir par coeur toute I'anti- quite , devancerait son siecle de quelques milliers d'annees. — Heureusement jusqu'ici les erudits n'ont fait que tourner des pages et endormir leursauditeurs, ce qui n'est pas sans utility ; mais toute leur science retrospective n'a pas fait jaillir la plus petite etincelle. Ainsi quand nous disons que lesChappeont invente le tElEgraphe, nous pouvons soutenir qu'ils I'ont bien et dument invente, puis- que tous les Cardans et les Trithemes du monde n'avaient pu ni su I'etablir. — COSMOS. 23 M. Moigno commence done son livre par rhistorique de la decouverte des freres Chappe et par la description de leur syst^me telegraphique, auquel ii en ajoute quelques autres proposes par la suite, et dont I'un parlicuiierement, celui de M. Gonon, paraissait appele a un avenir glorieux, si I'electricite netait pas venue foudroyer d'un coup loutes les anciennes mani velles, et ces squelettes noirs qui agitaient tristement ieurs bras decharnes sur le champ bleu du firmament. — M. Moigno, en homme consciencieux , craint d'avoir ete une cause indirecte de la ruine dusysteme Cliappe par son livre sur la t^iegraphieelectrique, et montre par des arguments tr^s-justes que I'ancienne lelegrapliie presente sur la nouvelle des avanlages de surete qui peuvent compenser jusqu'a un certain point ses defauts, etqui doivent la faire conserver pour des circonstances exceptionnelles etcommetelegraphie gouvernementale. II nous semble cependant que le systeme des fils souterrains offre assez de garanties de stabilite pour qu'on n'ait plus besoin d'employer les vieux telegraphes tres-paresseux et impuissants par les temps de brouillard et d'orage. Rien de plus curieux dans ce livre que I'histoire de la telegraphic elecfrique. On y voit les efforts successifs des savants pour appliquer I'electricite a la trans- mission des signaux, depuis les premieres annces de la decouverte des pro- prieles du fluide electrique jusqu'au moment ou Yolta revolutionna par sa pile toutes les idees des savants de son epoque. Nous ne pourrions abreger ici cet historique sans en amoindrir I'interet. Les noms de Strada, de Lesage, de Lo- mond, de Reiser, de Salva, de Cavallo, de Betancourt et de Ronalds prouvent combien les esprits eclair^s tenaient a cette idee de se parler de loin avec la rapidite de la pensee. On se servait alors de I'electricite de tension, ce qui ren- dait les experiences difficiles, mais la vitesse prodigieuse que ce fluide paraissait posseder contre-balancait en partie les difficultes de son maniement. La pile une fois decouverte, une grande quantile de fluide electrique mise en circulation avec une tension extremement pea considerable, la telegraphie par I'electricite devenait une chose plus facile. Aussi rencontre- t-on immediatement apres Soemmering transmettant des signaux par la decomposition d'un liquide, et Schvveigger et Coxe proposant a leur tour des moyens particuliers pour atteindre le m^me resuUat. — Puis, en 1820, OErsted decouvre Taction du couranl sur I'ai- guille magn^tique, action que Romagnosi, le grand jurisconsulte italien, avait deja remarquee ; Schweigger invente son multiplicaleur, Fechner et Ampere, Ritchie et Alexander imaginent des telegraphes a aiguilles ; Ampere etablit les lois des actions reciproques des courants sur les courants ; une nouvelle theorie du magnetisme ouvre le chemin aux inventeurs, les electro-aimants, les cou- rants induits de Faraday, les machines magneto-electriques, les piles constantes de Daniell, tout cela devait porter ses fruits dans le domaine de la telegraphie, et en effet, MM. Wheatstone et Morse paraissent bienlot avec Ieurs telegraphes. Schilling, Gauss, Weber, Steinheil qui profite le premier de la conductibiHt6 de la terre. Bain , et bien d'autres que nous ne pourrions nommer dans le cadre res- treint de cet article, completent et perfectionnent de mille manieres differentes I'admirable invention du telegraphe electrique. M. Moigno passe en revue les travaux de chacun, cherchea rendre justice a tout lemonde, mais non pas sans 24 COSMOS. froi?ser qiielquos su=ceplibilit(^s ; il discule loutes les hypotheses et toutes les experiences, ct pcinelrc dn respect que le genie de Volla lui inspire, il essaye de r(?h;ibililer sa theorie du contact, que des hommes fort habiles, mais peut- (>tro iin peu trop preveniis en faveur de leurs idees, avaient voulu renverser pour Clever a sa place la doctrine des actions chimiques. Dans ce grand d6bat auquel ia conductibilile de la terra vient se rattacher, M. Moigno se monlre toujours I'eleve passionn^ d'Amp6re; il en deveioppe ia theorie et les principes, combat avec un peu trop d'aigreur quelquefois les adversaires de son opinion et surloutM. Matteucci, qui a pourtant fait de bien belles choses, et dont les idees et les experiences ont souvenl ^clairci des points tr^s-douteux de la science de I't^ectricite. M. Moigno ne veut pas que la terre soil un conducteur, il la consi- dere seulement comme un reservoir gigantesque. Volta en avait fait autant, et d6s les premieres ann^es de ce siecle ii avait montr^ que le contact d'un c6te de sa lame double avec un conducteur isol^ de grandes dimensions suffisait pour lui permcltre de charger par I'autre cote le plateau d'un condensateur. — Mais en France le contact n'a plus que de rares defenseurs, et cette partie du livre du savant abbe sera cerlainement mieux goxd^e en Allemagne ou la belle theorie de Ohm a fait adopter rhypolh^sede Volta malgreet centre tous ses adversaires. — Quant a la construction des telegraphes electriques, elle occupe une place consi- derable dans I'ouvrage que nous avons sous les yeux. Tous les telegraphes connus y sont d^crits et figures, leurs avantages et leurs inconv6nients y sont approcios et discutes avec une precision remarquable.— II etait curieux de faire connailre le developpement actuel des lignes teiegraphiques dans les differentes contrees du globe, et un chapitre special a ete consacr6 a cet objet dans le traite de M. Moigno. Les services rendus, I'avenir de cette branche de physique appli- qu^e, et la legislation de la teiegraphie, ont trouve place dans la derniere partie de ce long travail. II nous serait impossible d'en dire ici davantage, et nous croyons meme en avoir trop dit. — Ce livre n'est pas une ceuvre ordinaire, un de ces mille traites qui promettent nionts et merveilles et qui ne sont que des abreges plus ou moins imparfaits d'ouvrages surannes et tombes dans I'oubli. — Sa redaction a coiite a son auteur bien de la peine et bien des recherches que les faiseurs de livres en general ont soin d'^viter. II est complet autant qu'une chose peut I'etre de nos jours ou chaque soleil vient eclairer une nouvelle decouverte. II faut esperer que des editions successives ou des supplements annuels permettront de reunir en un seul faisceau tous les faits qui se rappor- lent a cette merveilleuse application du courant electrique. — Nous tacherons en attendant de continuer par notre journal ce que le traite de M. I'abbe Moigno vient d'entreprendre. — Puissions-nous avoir souvent I'occasion de devenir ainsi le complement d'ouvrages sur les sciences dont le besoin se fait vivement sentir dans notre pays et que I'Allemagne, moins prompte mais peut-^tre plus labo- neuse, possede d^ja depuis bon nombre d'annees. G. Govi. DE L'lMPr.lMEME DE CRArELET, ni'E DE VAlCmAP.D, 9 COSMOS PHOTOGRAPHIE. Le dernier num^ro de la magnifique revue The Art Journal con- tenait un long article de M. Hunt, le theoricien anglais de la photogra- phic, sur le collodion de M. Archer, et la gutta-percha de M. Fry. Nous en extrayons tout ce qu'il renferme d'essentiel. Que la couche de collodion et d'iodure d'argent soit incomparable- ment plus sensible a Taction des rayons photog^niques, c'est un fait certain, dit d'abord M. Hunt, et il cherche a I'expliquer par une apti- tude particuUere du coton-poudre, qui est impressionnable a la fois et par les rayons chimiques et par les rayons caloriques. L'addition de la gutta-percha accroit-elle encore la sensibilite de la couche? C'est un peu'douteux, mais elle lui donne certainement plus de tenacite, et la met ainsi mieux a I'abri des deteriorations que pent causer la serie des operations necessaires a la fixation de I'image. Le protosulfate de fer apparait a M. Hunt comma ^tant le meilleur de tons les agents propres k contlnuer le travail de la lumiere et a deve- lopper I'image, enachevant la desoxydation commencee du sel d'argent, et faisant revivre le metal dans un etat de division extreme. Le proto- nitrate de fer est aussi grandement recommande, et voici comment on pent le preparer. On met dans un vase de verre quelques morceaux de protosulfure de fer, et Ton verse dessus une solution d'acide nitrique, formee d'une partie d'acide du commerce et de trois parties d'eau. Le protosulfure est decompose, le gaz hydrogens sulfure se degage, et comme il est tres-dangereux, I'operation doit se faire en plein air. Apr^s la decomposition du protosulfure, ce qui reste dans le vase est du protonitrate de mercure dissous ; on le decante, on le filtre, et pour le debarrasser de la grande quantite d'hydrogene sulfure qu'il contieat encore, on I'expose pendant quelques heures a I'air dans un vase tres- plat. On I'cmploie absolument comme le protosulfate de verre, et il 9 MAI 1852. 2 26 COSMOS. reussit parfaitement sur le verre prepare au collodion ou a I'albumine, comme sur le papier sensible. Un second mode de preparation consiste a faire r6agir une solution de sulfate de fer ordinaire surdu nitrate de ba- ryte : le produit de la double decomposition est du protonitrate de fer pur si Ton a melange ces sels dans la proportion de leurs equivalents. L'action du bichlorure d'argent ou du sublim^ corrosif propose et applique avec tant de succes par M. Archer, est vraiment remarquable. Son premier effet est de noircir la partie deja sombre, de la foncer considerablement et d'accroitre par consequent I'intensite de I'image. Si quand cet effet est au maximum on ne retire pas I'image, on la verra s'effacer peu a peu et disparaitre, mais pour se montrer de nouveau admirablement transformee : on dirait un effet magique. Toutes les parties noires sont devenues blanches, recouvertes qu'elles sont d'un precipite tres-blanc. L'image negative primitive est done transformee en une image positive, et si on la place sur un velours noir ou sur un papier enduit de vernis noir, elle produira I'effet d'une tres-belle pein- ture, par le contraste tres-saillant des blancs et des noirs. Comment ex- phquer cette singulifere metamorphose? Probablement, dit M. Hunt, la reaction du bichlorure de mercure et du sel d'argent fait naitre tour a tour et le sous-chlorure noir de mercure, et le chlorure blanc ou calomel insoluble. M. Hunt signals comme incomparablement belles, comme depas- sant tout ce qu'il a vu en ce genre, les epreuves sur collodion, obte- nues par le docteur Diamond. H rappelle que I'emploi de la potasse, comme agent fixateur, emploi propose par M. Malone, assure aux epreuves une duree beaucoup plus grande que la solution faible de chlorure d'or, proposee par M. Le Gray ; parce que les sels d'or ont I'inconvenient de changer de teinte d'annee en annee, et de communiquer aux dessins sur papier une nuance violette desagreable. Puisqu'il est certain que la gutta-percha a des avantages reels, on nous saura gre de donner avec plus de details le precede de M. Fry. Pour obtenir la dissolution de gutta-percha, il suffit de mettre de petits morceaux de cette substance dans i'ether sulfurique et de les y laisser pendant trois ou quatre jours; on ajoute un tiers de la dissolu- tion ainsi obtenue au collodion iodure. Quand le melange est redevenu trfes-clair , on I'etend sur la plaque de verre , comme on le ferait avec du collodion pur ; et quand I'extension a ete bien faite , on depose la plaque dans un bain de nitrate d'argent contenant un gramme quatre- vingt-quinze centigranmies de sel pour vingt-huit grammes d'eau , et on I'y laisse une minute. Si Ton veut obtenir une epreuve ou cliche COSMOS. 27 negatif , on placera imntiediatemejit dans la chanjbre obscure la plaque retiree du bain, sans I'essuyer, Si, au eontraire, il s'agit d'obtenir un positif, on I'epongera avec le papier-boit le plus fin possible. Quand I'exces d'humidite a et& enleve, la couche devient ferme et on pent lui superposer le cliche negatif soit en verre, soit en papier cire. Au bout d'une ou de quelques secondes, si Ton opere a la lumiere d'un bee de gaz tr^s-brillant , I'image est forniee ; on verse a sa surface de I'eau pure pour favoriser Taction des sels qui doivent la developper. JLa preparation suivante donne d'adnii- rables images d'une grande force et d'une grande beaute : Melez en- semble dix-buit decigrammes de solution saturee de sulfate de fer, dix-huit decigrammes d'eau distillee, dix gouttes de solution de nitrate d'argent contenant dix-neuf decigrammes de sel pour trente et un grammes d'eau , dix gouttes enlin d'acide acetique. Si le developpement de I'image etait trop lent , on abandonnerait la dissolution de sulfate de fer, et on la remplacerait par le bichlorure de mercure dissous dans quatre fois son poids d'eau. Aussitot qu'on a fait couler cette dissolution sur la plaque de verre , on la lave et on la fmit en la tenant plongee pendant un certain temps dans une dissolu- tion saturee d'byposulfite de soude, Dans lalivraison de mai de VArt Journal, un photographe tr^s-exerc^, rnais qui garde I'anonyme, raconte les angoisses et les desappointe- ments qui ont attriste ses premiers essais de collodion. Ses images, presque toujours, etaient couvertes de taches noires, diffuses, mais tres-visibles. II n'employait cependant que d'excellent collodion, pre- pare par MM. Home, Thornvaite et Wood. Desespere, il se mit a pre- parer lui-meme son collodion, Les taches noires semontrerent encore de temps en temps. Apres milje tehees, il reconnut enfin que le collo- dion contenait une trop grande dose d'iodure d'argent ; il la diminua, et depuis il a obtenu des epreuves parfaitement nettes et belles, sans aucun insucces, Suivant lui , la meilleure de toutes les preparations a employer pour obtenir les epreuves positives est une dissolution de protosulfate de fer dans la proportion de vingt-cinq decigrammes de sel pour trente et un grammes d'eau , aiguisee par quelques gouttes d'acide sulfurique ; les blancs ont alors un eclat qu'on n'obtient par aucun autre precede. A proposd'un article de VArtJournal dans lequel on insistaJt 5ur le prix eleve des appareils photographiques, M. D. T, se plait a raconter ce que lui a coute son outillage de photographe. U a achete, au prix de une livre trois shillings (a peu pres vingt-huit francs), chez Knigth et Son, une lentille achromatique simple da deux pouces et demi d'ouverture, de huit pouces de distance focaie, 11 a fait 28 COSMOS. construire, au prix de cinq shillings ( moins de six francs ) , chez un eWniste, une chambre obscure, longue de dix-huit pouces, haute et large de six pouces, munie de ses glissoirs, etc., etc. Voila tout ce qu'il a d«?pense, et il ose dire sans orgueil que toutes les epreuves pho- tographiques, paysages, monuments, portraits, copies de gravures et de tableaux, etc., prises avec son modeste appareil , peuvent rivaliser avec tout ce qu'il a vu de plus beau aux plus riches ^talages de Londres, ou dans Ics collections d'amateurs. Son objectif, qu'il n'echangerait pas contre les objectifs d'Allemagne les plus vantes, fait tout reussir, albumine, collodion, collodion melange de gutta-percha, etc. La photographie sur papier a Rome est entouree de mille difficult^s, et les preparations qui reussissent parfaitement en Angleterre et en France, n'y donnent que de mauvaises epreuves toujours solariees. Quelque petite que soit la dose de nitrate ou de chlorure d'argent, le papier est toujours trop sensible. Le ciel est si pur, la lumiere est si brillante et si active, qu'il est comme impossible d'obtenir un cliche negatif passable; Taction chimique, trop vive a la surface, ne penetre pas le papier. Heureux d'epargner a ses confreres en photographie ses ennuis et son desespoir, M. Richard W. Thomas decrit avec les plus grands details dans lenumero de mai de V Art Journal la seulemethode a suivre pour reussir a coup sur. Cette description est trop etendue pour que nous puissions la reproduire aujourd'hui; elle n'interesse- rait d'ailleurs qu'un petit nombre de nos lecteurs. Les photographes a Rome sont nombreux , ardents et habiles. Les maitres de I'art sont : le prince Giron des Anglonnes, MM. Robinson , Caneva , Constant et Flacheron ; ils se reunissent tons les soirs au cafe Greco , centre du mouvement heliographique , centre aussi d'une bienveillante hospitalite pour tons les nouveaux venus. On annonce que IVL le baron Gros a repete avec succes a Paris une operation d6ja tentee a Londres par M. Archer. II s'agit de detacher de la plaque de verre la couche impressionnee de collodion pour en faire des cliches negatifs presque sans epaisseur. Voici le procede : Au moment de I'operation , le papier est assoupli avec une eponge humide, et aussit6t legerement encolle ; on I'appHque ensuite sur la plaque de verre apres les derniers lavages, et on I'y fait adherer. La couche de collodion alors semble quitter le verre pour adherer au pa- pier; elle se soulfeve, et dfes que le soulfevement a commence k I'un des angles, on I'aide et on le continue en faisant couler entre le verre et le papier un mince filet d'eau. Rientot la pellicule impressionnee s'est detachee entierement de la glace et ne fait plus qu'un avec le pa- pier, qui I'emporte avec elle. Le papier, bien entendu, doit etre COSMOS. 29 mince, exempt de toutes taches ou de marbrures. On comprend sans peine que cette decouverte , si elle se confirmait pleinement , serait riche d'avenir. Les photographes voyageurs n'auraient plus a por- ter avec eux qu'une ou deux plaques de verre pour entrer en posses- sion d'un nombre indetini de negatifssouples, legers, facilesa entasser, parfaitement transparents, etc., etc. On a fait bruit aussi a Paris d'une manipulation de M. Bayard, qui augmente dans une telle proportion la sensibilite du papier, que Tac- tion photogenique est presque instantanee : lorsque le papier sort du bain de nitrate d'argent pour etre soumis a Taction de la lumiere, il repand sur la surface inipressionnable une solution d'acidepyrogallique, forniee de huit decigrammes d'acide pour cinq cents grammes d'eau. En parlant du stereoscope , M. Lerebours disait tout recemment : « Le stereoscope a obtenu en Angleterre un succes incroyable ; esperons qu'en France ce curieux et amusant instrument ne sera pas mis en ou- bli. » Cette phrase nous attriste quelque peu, parce qu'elle contredit par trop les fails. M. Lerebours peut-il ignorer que c'est la France qui a fait en Angleterre meme le succes du stereoscope ; que les innom- brables appareils et les epreuves stereoscopiques plus innombrables encore, vendus a Londres sont en tr^s-grande partie d'origine fran- Caise. Nous maintenons plus que jamais ce passage de notre dernier article : « Depuis le jour ou il est entre pour en sortir habilement perfectionne dans les ateliers de M. Jules Duboscq, le stereoscope a conquis la France, TAngleterre, TAUemagne. Autant il fut autrefois meconnu et dedaigne (meme dans sa mere patrie), lorsqu'il ne s'etait pas fait naturaliser frangais, autant il est aujourd'hui recherche et po- pulaire. » Les stereoscopes et les epreuves stereoscopiques ne se con- fectionnent pas seulement a Paris; ils s'y vendent aussi, graceaDieu, quoiqu'ils soient un de ces objetsde luxe dont la modicite des fortunes en France rend Tacquisition plus difficile. Nous trouvons encore que les epithetes de charmant et curieux sont par trop enfantines, quand il est question d'un appareil qui centuple les forces de la photographie. Dans quelques jours, quand il nous sera donne de reveler un noble secret qui nous est confie, M. Lerebours saura mieux Tavenir que la France prepare au stereoscope, qui n'est encore qu'a son berceau. Enfin, en terminant, nous recommanderons aux photographes de se procurer, de lire et de pratiquer le petit traite de photographie sur verre de M. Couppier. Tous ceux qui, jusqu'ici, avaient completement ou presque completement echoue dans Toperation si delicate de Talbu- minage des plaques de verre, ont parfaitement reussi en repetant k la lettre les manipulations de M. Couppier. Nous sommes pleinement 30 COSMOS. autoris^s ft faire h cette broclntre les plus larges etHpl-uiitS, mais eti usant de ce droit nous nuirions certainelnent aux inlerets de M. Coup- pier sans utilite r^elle pour nos lecteurs, qui n'atleindront le hutqu'en suivant pas h pas les prescriptions de I'auteur : il nous a promis d'ail- leurs de faire une trfes-grande remise, une remise de deux francs Sttf les exemplaires de sa brochure qui seront vendus desormais, et que Toil trouvera chez MM. Charles Chevalier, Puech et J. Duboscq. Le nom de M. Puech nous rappelle que nous aurions dfl lui donner place dans les prospectus de notre premiere livraison. 11 a Cre6 sa fa- brique speciale de produits chimiques poUr la photographic, sous les auspices de la Soci^te h^liographique ; le Cosmos lui restera fidele et I'aidera de tous ses efforts. M. Pluniier, I'un de nos plus habiles photographes, nous a appdrte samedi d'admirables portraits, sans relouche aucune, obtenus avec le collodion anglais de MM. Home et C'% le meilleur de tous, suivant lui, qui les a tous essayes. Le portrait de M. Niepce de Saint-Victor, entre autres, est une merveille. Cette fois ce n'est pas la verite moWe, mals l'am vivant! Nous feviendrons prochainement sur cette importante Cottimuiiicatiorl. MfiTfiOROLOGlE OPTIQUE. PH^NdnfeNES NATDBELS PRODDiTS PAR LA REFLEXION ET LA REFRACTION BE LA LDMlfeRE. L Lumiire diffuse^ L'air 6videmment n'est pas lumineux par lui-meme, car il ne nous ^claire pas en I'absence du Soleil. La lumiere qu'il nous envoie vient du Soleil et des astres; il la reflechit comme tous les autres corps. L'atmospherc a6rienne, formde d'une multitude de molecules extremement petites et tres-ecarlees I'dne de 1' autre, mul- tiplie et propage la lumiere du Soleil par une serie indefinie de re- flexions ou repercussions, et de transmissions. C'eSt par elle que rious avons le jour avant que le Soleil ait apparu sur I'horizon : apres le le- ver de cet astrc, il n'y a pas de lieu si retire, pourvu que l'air puisse s'y introduire , qui ne soil eclair^ , quoique les rayons du Soleil n'y arrivent pas directement. Si f atmosphere n'existait pas, chaque point dc la surface tcrreslre ne recevrait de lumiere que celle qui lui arriverait directement du Soleil; si on cessait de regarder cet astre ou les objets frappes directement de ses rayons, on se trouve- rait aussit6t dans les tenebres; les rayons solaires rMechis par la Tcrre iraient se perdre dans I'espace , et Ton eprouverait un froid COSMOS. 31 excessif. C'esl ce qui arrive cl6ja sur les hautcs montagnes , ou ce- penclant la densite de I'air n'est pas encore deux fois plus petite qu'h la surface de la terre. Sans Tatmosphere, le Soleil, quoique tres-pres de I'horizon, brillerait de toute sa lumiere, et imm^diate- ment apres son couclier, nous serions plonges dans une obscurite absolue ; le matin , lorsque cet astre rcparaitrait sur I'horizon , le jour succcdcrait h la nuit avec la meme rapidite. Au contraire , par I'effet de I'atmosphere , lorsque le Soleil a qu\ii6 I'horizon , il nous envoie encore sa luiiiiere par des reflexions multiples sur les couches les plus ^levees ; et par suite de ce phenomene que Ton nomme le cr^puscule du soir, nous ne passons que pen a pen et par une gradation insensible du jour a Tobscuritc : la meme chose a lieu le matin versl'orient lorsque le Soleil est encore sous I'horizon, sa lumiere reflechie et r6pandue par I'atmosphere forme I'aurore ou le crepuscule du matin. Le pouvoir reflecteur de I'air est clairemenl manifest^ par la lu- miere qu'il jette dans tons les lieux, et la reflexion qui produit la lumiere diffuse se fait bien certainement de particule a particule, comme le prouvent mieux encore les phenomenes de polarisa- tion atmospherique que nous exposerons plus tard. Quelle est la na- ture et quelle est la forme de ces particules reflechissantes? C'est une question toute neuve qu'un physicien et mathematicien allemand, M. Clausius , a ose seul aborder. Nous allons analyser rapidement les memoires qu'il a publics a ce sujet dans les Annates de Poggen- dorff et le Journal de Grunert : M. Clausius precede par Elimination. Il est d'abord evident que la cause des reflexions successives qui produisent la lUmiere diffuse n'est pas la density differente des di- verses couches d'air superposees. Les surfaces de separation de ces Couches, en les supposant reellement distinctes , etant paralleles les unes aux autres et a la surface terrestre , elles ne pourraient reflE- chir la lumiere solaire que suivanl des directions determindes, les- qiielles, le plus souvent, ne rencontreraient pas la surface de la terre, de sorte que le ciel paraitrait tout a fait sombre. Comme cha- que point, au contraire, de la Terre revolt la lumiere reflechie dans toutes les directions, il faut necessaireraent en conclure qu'il existe dans Tatmosphere des surfaces reflechissantes occupant toutes les positions possibles, et admettre la suspension dans l*air d'une infi- nite de petites masses de densite constante ou variable sur les surfaces desquelles la lumiere se r^flechit. Ces petites masses sont-elles opaques ou transparentes? Efles ne peuVent jpas etre opaques ; on ne pent pas les comparer a des grains 32 COSMOS. tic poussiere nageanl dans ralmosphi^re : des masses opaques se com- porteraient, au point do vue de la reflexion, comme de petits miroirs polls; on ne pourrait pas supposer que leur repartition fiat assez rd- guliorc pour ne pas donner naissance a quelque dclairement anormal. Ces petites masses sont done bien certainement transparentes : ce sont ou de petits glaQons, ou des vesicules aqueuses, des goutles d'eau, ou des bulles d'air, ou des molecules d'oxygene et d'azote s6- parccs Tune de I'autrepar de petits espaccsvides. Chaque rayon lu- mineux qui rencontrcra une de ces petites masses sera d'abord r6- fl(?cbi en parlie i sa surface antdrieure ou d'entr6e, en partie aussi ;\ la surface posterieure ou de sortie ; une autre portion du rayon tra- versera la masse en subissant, cil'entrde et a la sortie, une refraction double. En general, apres avoir traverse une semblablc masse, le rayon suivrait une direction nouvelle, sa lumiere serait brisdc et dispersde : et cependant, h I'exception de quelques circonstances fares, la lumiere se propage en ligne droite et reste incolore ; sans cela, en efTet, nous ne verrions pas les objets dans leur position et avec'leur forme et leur couleur reelles. Si ces masses transparentes dtaient de petits glafons ou des bul- les d'air de toutes les formes imaginables , on pourrait dcmontrer facilement que leur cffet total ou resultant serait le meme que si on les supposait toutes sph6riques ; mais en les supposant spheriques, obliendrait-on reellement les phenomenes dont nous sommes iemoins et qui sont constates par I'observalion? M. Clausius a sou- mis cette hypoth5se h une discussion mathematique approfondie, et il se croit en droit de la rejeter. Le pouvoir rdfringent de ces peti- tes masses est ou plus grand que 1, comparable, par exemple, a celui del'eau, ou dgal ci 1, ce qui correspondrait au passage du vide dans I'air, ou de I'oxygene dans I'azote. Dans le premier cas, d'un pouvoir rdfringent egal h celui de I'eau, la perte de lumiere, h la premiere ou h la secondc surface calcuMe par les formules de Fresnel, serait d'environ 0,12. Et comme la lumiere du Soieil dprouve au zenith un affaiblissement dgal, suivant Bouguer, a 0,19, suivant Lambert, a 0,41, ou, en moyenne, a 0,30, cha- que rayon qui arrive ci la terre devra rencontrer dans sa route, s'il vient du z6nith, deux ou trois petites masses spheriques, et de 70 h 100 s'il vient de I'horizon, puisquela portion d'atraosphere traversde par un rayon parallele i I'horizon, est trente-cinq fois plus dtendue. Or, si mainlenant on etudieles effets de refraction produits par I'in- terposition de ces petites masses , on est amene a conclure que le Soleil au zenith ne se montrerait plus sous forme d'un disque tres- COSMOS. 33 nettement termini, mais sous forme tl'espace transparent, de grandes dimensions, pouvant sous-tendre un angle de 60 degres. Celte pre- miere hypothese semble.donc compl^tement inadmissible. Dans la seconde hypolhese, I'indice de refraction des petiles masses trans- parentes differerait tres-peu de I'unite; elles seraient, sous ce rap- port, semblabies a des buUes d'air, d'oxjgene ou d'azote, car les in- dices de refraction dans le passage du vide dans loxygene ou I'azote ou de I'oxygenedans I'azote, sonl respeclivement 1,000294, 1,000272 1,000300, 1,000028. Apres avoir calculi les effets de reflexion et de refraction de ce genre de petites masses transparentes , M. Clausius fait I'application de ses calculsaux etoiles fixes pour en deduire I'as- pect sous lequel elles devraient se montrer a nous, et il trouve qu'elles ne seraient plus alors des points, mais des disques lumineux dont on pent assigner a priori les diamelres. Pour les valeurs suc- cessivessuivantesd(J I'indice dert^fraction 1,0003, 1,00003, 1,00001, 1,000001, 1,0000001, 1,00000001, ces diamelres seraient tour a tour 5''29', 2"13', 25',7; 8', 8; 3', 01. De fait, dans la nature, et la lumiere diffuse etantce qu'elleest, les 6toiles out des diametres lout a fait insaisissables qui n'alteignenl meme pas une seconde : done les reflexions qui produisenl la lumiere diffuse ne se foal pas sur de petites masses transparentes spheriques ou polyedriques. Apres i'eli- mination de ces diverses suppositions, utie seulc hypothese restait possible, celle qui admet que les petites masses transparentes sont deg lamelles excessivement mmces el a surfaces paralleles, des ve^- sicules d'eau terminees par deux surfaces paralleles, spheriques ou planes. Alors la deviation subie a I'entree estcompensee ou detruite par la deviation contraire subie a la sortie. Pendant que les deux reflexions a la surface anterieure eta la surface posterieure s'ajoutent, les refractions se delruisent mutuellemenl, et la portion emergente du rayon poursuit sa direction primitive; la lumiere se propage reellement en ligne droite, en meme temps que la quantite de lu- miere reflechie va croissant toujours. L'existence reelle de ces vesi- cules aqueuses dans I'atmosphere, meme par le temps leplus serein, est tres-probable ; plus le del est pur, plus leurs dimensions sont petites : mais plus aussi alors elles satisfont aux conditions de la re- fraction et de la reflexion qui produisent les ph6nomenei& qui se passent sous nos yeux. En resume, done, dit M. Clausius , si Ton n'admet pas que les re- flexions atmospheriques se font a la surface de corps transparents aageant dans I'atmosphere, cette reflexion donnera naissance a des phennmenes qui seront en complete contradiction avec les ob- 34 <:OSMOS. servalions les plus communes. II en sera de m6me de la refraction almosph^rique , si Ion n'admet pas que les pelites masses Iranspa- rentes sonl des lamelles excessivement minces a surfaces limiles- paralleles. ( Annates de Poggendorf, t. LXXVI ). Nous verrons plus tard que les conjectures deM. Clausius ont recu une confirmation nouvellc de I'explication simple et nette qu'ellos donnent d'autres phenonienes nalurels comme la couleur bleue du ciel , les teintes de I'aurore , et la nuance rouge dont le Soleil cou- chant se colore. ( La suite auprochain numero.) PHYSIQUE APPLIQUEE. ARALVSE OPTIQUE DES SCBSTANCES ALIMENTAIRES OU AlITRES. ^° Analyse des farines, Le problSme le plus grave et le plus important des temps moder- nes est bien certainemcnt la d^couverte de moyens faciles et exp6- dilifs par lesquels on puissc meltrc en evidence I'^tal de purete ou de falsification des substances commerciales, tissus, aliments, bois- sons, etc. On melange continuellement, par exemple, le coton au chanvre, au lin et a la laine; on introduit dans le cafe, le tabac, les farines, une foule de substances ^trangeres; on subslitue dans la fabrication de la biere le sucre de pommes de terrc ou glucose au Sucre ne sponlanement de Taction du ferment sur I'orge gcr- m^e, etc. Or, comment mellre en evidence ces innombrables frau- des? Les analyses chimiques sont trop delicales, trop longues, trop incertaines dans leurs r(5sultals quand celui qui les fait n'est pas un cbimiste tres-habile et tres-exerc6 ; le problcme ne sera done vrai- ment r^solu que lorsqu'on sera parvenu h rcmplacer les manipula- tions chimiques par de simples observations physiques , et c'est le but vers lequel devraient converger les efforts in cessants des savants qui veulent avant tout se rendre utiles. Avec le lactoscope de M. Donnd, on pent, jusqu'k un certain point, eslimer le degre de purel6 du lait par son opacity plus ou moins grande. L'administralion des tabacs arme I'oeil de ses controleurs d'une petite loupe a deux verres, a I'aide delaquelle ils essayent de dis- tinguer les poussieres etrang^res m616es au tabac. On emploie aussi dans le commerce sous le nom de compte-fils trois sortes de loupe, COSMOS. 35 runecYliudrique.raiitreJi bascules pliantes,hi troisieme portee sur trois picds. pour rexamen des elofles de lin, de laine ct de soie; mais cos precedes d'observalions Irop vagues et Irop incomplcls de- niandent des etudes nouvelles que le gouvernement devrait pro- """nous monlrerons plus tard que le saccliarimclre de M. Solcil salisfaitpleinementa toules les conditions d'une analyse parfa.tc des solutions sucrees quelconques , et que ses indications sulfisent aussi a constater la puretS du lait et du miel, la fabrication loyale et consciencieuse de la bierc, etc., etc. Montrons ici comment M Donny par un maniement habile du microscope, est parvenu a raeltre en evidence les alterations des farines, et comment M. Stein- heil par la double observation de la pesanleur specifique et de 1 in- dice'de refraction, classait les differentes bieres suivant leur ordre debont^. , ^., ,..«„< Alphitoscope de M. Donny, de Bruxelles. - La petite boite fig. 1. Fig. 1, renferme d'un c6t6 le microscope simple, que nous represenlons viss6 sur son couvercle ; de I'autre, cinq flacons renfermant les reac- lifs n^cessaires; des dissolutions de potasse, d'lode, d'acidenitrique, d'ammoniaque, avec une capsule qui se place sur le support coude et que Ton chauffe avec une lampe a alcool. On falsifie la farine et le pain de froment par addition : 1° de fecule de pommes de terre ; 2" de farine de riz ou de mais ; 3« de graine ou tourteaux de lin ; 4»de farine de sarrasin; 5» de farines des plantes l^gumineuses. feveroles, pois, haricots, feves, lentilles, etc. 1" Sophistication par la fecule de pommes de terre. — On etend la farine suspecte sur le porte-objet, et on I'arrose avec une dissolution de potasse a 1 et demi ou 2 pour 100 : les grains de farine de pom- mes de terre s'^tendent en grandes plaques minces et transparentes 36 COSMOS. que Ton reconnait sur-le-chanip; ils apparattront beaucoup mteiix si, apres avoir s(5cli6 Ic melange, on y ajoute quelques goultes d'eau d'iode , qui leur communiquera une couleur plus intense. Cc procede s'appliquc t^galement au pain , en remplagant la farine par un I'ragnicnt dc niie de pain 6cras6 dans quelques goultes d'eau de potasse. 2° Sophistication par les farines de riz ou de mens. — On malaxe la farine suspecle sous un filet d'eau, en recevant Ic liquide sur un tamis scrr6 : 1'eau qui traverse le tamis laisse ddposer I'amidon ; on le recueille, on le lave, on I'examine h la loupe, et Ton voit alors tres-netlement les fragments anguleux translucides que conliennent toujours les farines de riz et de mais. En ayant soin de ne recueillir chaque fois que les portions d'amidon qui se deposent les premieres, on pent ddcouvrir la fraude, quelque petite que soit la quantity de farine dtrangere ajout^e. 3° Sophistication par la farine de graine de Un. — On d^laye avec de I'eau de potasse, ci 10 pour 100, sur le porte-objet, quelque peu de farine blutee, ou de mie de pain : on voit alors de petits corps tres-caracteris(§s, plus pelits que les globules de fecule , d'un aspect vitreux, le plus souvent colorcs en rouge, et formant ordinairement des Carres ou des rectangles tres-reguliers , temoins certains de la presence de la graine de lin , dont on pent ainsi decouvrir un centieme. 4° Sophistication par li 3" Nouvelles d'Allemag^ne. pBTSK^UE, — M. Melloai avait pos4 ce difflcile prgbl^me : la quantitd de clialeur rayonnanle transniise & travers un mfime corps, un cristal par exemple, varie-t-elle avec la direction des rayons trausmis ? Les quelques experiences faites par I'illustre physi- cien italien scmblajent donner upe r^ponse negative. U, Knoblauch, qui avait aussi 6choue d'ahord , s'est remis 4 I'tEUvre avec una nouvelle ardeur, et cette fois il a Hi plus heurcux. Voici les resultats au^iiquels il est parvenu, ea operant avec une pile tliermo- eiectrique trfes-sensible ; 1" La chaleur layonnante traverse certains cristaux, Ic cristal dc roche, le beryl, la tourmaline el la dicjuoitc daiis des proportions dilierentes, suivaut la direction du COSMOS- 47 trajet ; et de plus , si Ton soumet ^ de (louvelles dpreuves les rayons qui sortent aprfes avoir suivi des directions dilKreutes dans I'jntdrieur du cristal, on constate qu'ils ont des nropridt^s distinctes; ainsi par exeiuple on verra qu'ils nc se transmettent pas dans la mfime proportion 4 travers une seconde on une troisifeme substance diathermane. La direction de transmission difftSrencie done les falsceaux sous le double rapport de la quantity et de la quality. Enfin le mode de polarisation du faisceau do clialeur rayon- nante a aussi une influence rt5elle sur les diffi-rences signal^es de quantit(5 et de quality. 2° La clialeur rayonnante traverse le cristal de roche enfuni^ , le b^ryl et la tournia- line suivant la direction perpendiculaire aux axes optiques , dans une autre proportion , quesuivant la direction parall^le aux axes optiques, lorsque son plan de polarisation fait un angle de quatre-vingt-dix degres avec I'axe de figure du cristal, Si , au contraire , ce plan de polarisation fait un angle nul avec I'axe de figure , la clialeur rayonnante se transmettra constaniinent dans la iii6me proportion suivant toutes les directions. Dans le premier cas du plan de polarisation normal S I'axe, la difference qualitative entre les rayons transmissera la plus grande possible; dans le second, toute difference qualitative s'6vanouit. 3" Les falsceaux qui traversent le cristal le long de I'axe ne different ni par la propor- tion transmise ni par leurs propri^t^s qualitatives, quelle que soil la direction de leur plan de polarisation. II en est de mCme aussi des rayons qui traversent ces mdnies cris- taux dans diverses directions toutes perpendiculaires k I'axe ; ils ne different ni par la quantity, ni par la quality {Annales de Poggendorff, t. LXXXV, p. IGO). Physique du globe.— Dans un premier travail devenu tr6s-C(516bre , M. Reich avail donn6 le cliiffre 5,45 comme exprimant la density moyenne probable de la Terre. Les immenses et m^morables recherclies de M. Daily avaient abouti au nombre plus grand 5,66. L'astronome anglais avait apport6 dans ses experiences tant de soins et de pre- cautions de tout genre, que M. Reich se crut battu. Cependant ni lui ni M. Daily n'a- vaient pu s'expliquer la difference beaucoup trop grande entre les deux nombres obtenus. Aprfes de longues ann^es de silence et de meditation , M. Reich reparait sur I'arfene. Quelques modifications et un heureux tour de main indiques par M. Forbes, lui ont permis de refaire ses experiences; de plus une etude approfondie de I'ouvrage de M. Daily lui a pleinement prouve que le chiffre 5,66 est trop fort; sans luaintenir done le chiffre trop faible 5,45, il alBrme que la densite moyenne de la terre ne depasse pas 5,68 ( An- nales de Pogg., t. LXXXV, p. 189 ). Physique physiologique. — M. Herman Meyer, de Zurich, avait dej4 demontre par une experience delicate et trfes-dilliciie ci repeter que, & egalite d'image dessinee sur la retine, nous jugeonsqu'un petit objet est plus prfes lorsque les axes optiques de nos yeux sont trfes-convergents ; que nous le jugeons, au contraire, plus eioigne lorsque les axes optiques convergent trfes-peu. Cette consequence est trfes-naturelle , et elle con- flrrae la comparaison que nous faisions I'autre jour, entre la vision binoculaire et l^ determination sur un dessin d'un point connu par les deux angles que forment, avec une base donnee, les lignes menees de ce point aux extreniites de la base. Grace au stereoscope, I'experience de M. Meyer est devenue plus facile. Si, en effet, aprfes avoir place dans le stereoscope i reflexion, deux images de telle sorte que leurs centres correspondent on k trfes-peu prfes au centre des planches, elsi,alors que I'onvoit distincteraent I'image unique en relief, on rapproche simultanement les deux dessins de roeil, I'image en relief seml)le se rapprocher et diminuer : elle parait s'eioigner, au contraire, et grandir si on repousse a la fois les deux dessins. Or quand les dessins se rapprochent, la convergence des axes optiques augmente; elle diminue, au contraire, quand les dessins s'eloignent. Ces conclusions de M. Meyer auraient cependant besoin d'etre discutees et approfondies de nouveau {Ann. de Fogg., p. 198). 48 COSMOS. Physique.— M. Kooseii cssayc rexplication et la ihCorie de phdnonifenes rcinarquables observes dans la production du couiant d'induclion par les machines dlcclro-magn6ti- qiies. Si dans le circuit ferni6 d'une raaciiine ^lectro-niagndtique raise en niouvement , on insialle une boussole des langentcs, de nianifire 4 pouvoir niesurcr 4 cliaque instant I'intensiltS du courant, on constatera les fails suivants : 1° I'intensitd du courant d'in- duction est consid<5rablemcnt diminute par le niouvement de la machine , ct d'autant plus, la force de la pile restant la raCme, que la vilcsse s'accrolt. A mesure que la vitesse diraiiiuc, le courant qui traverse la boussole des tangentes approche d'une valeur dtSler- minde , qui est prdcisi^ment celle qu'il a quand la machine est en repos ; 2° si la machine n'a aucun travail a fairc, qu'clle ait seulenient 4 vaincre la resistance de I'air et les frot- icments ct qu'on augmente la force de la pile, la vitesse de la roue croitra incessam- ment dans la niOme proportion que le courant i qui se produirait avec la machine au repos; au contraire , I'intensitd du courant I de la boussole des tangentes, augmente de quantitds insensibles; 3" enfin si la machine est chargee,qu'elle ait un travail a faire, de telle sorte que la resistance de I'air etdu frottcment puisse 6tre consid^rde comme nulle, le courant de la boussole augraentera un peu plus que dans le premier cas. Si d'abord, quand i devenait ?u', I croissait dans le rapport de laracine cinquifcrae de n i I'unite , il croitra , la machine etant chargde, dans le rapport de la racine cubique de n a I'unite. Tels sont les faits queM.Koosen a voulu expliquer par ses savantes formules et ses experiences habilement failes. IS'ous renvoyons, pour plus de details, au memoire original (^nn. dePogg. p. 226;, en faisant remarquer seulenient qu'on pent conclure des phenomenes enonces que le mouvement de la machine agit sur la pile qui produit le courant priniitif ou principal, comme le ferait un regulateur, et conserve, en quelque sorte, au courant efficace une intensite sensiblemcnt constante. Avant d'analyser une note de M. Ediund d'Upsal sur la polarisation galvanique, nous avons besoin de nous bien fixer nous-mfime , et de fixer nos lecteurs sur le sens net de ce mot vague et iiial dclini de polarisation galvanique {Ann. de Fogg., p. 209). Physique. — M. Ludwig Wilhelmy s'est propose d'etudier la diathermanie du verre chauCre i diverses temperatures, c'est-i-dire de chercher si la quantite de chaleur rayon- naiite que le verre laisse passer varie avec la temperature 4 laquelle on le chauffe, et il a demontre que la transmissibilite du verre pour la chaleur emise par une lampe d'Ar- gant augmente avec la temperature du verre. Une plaque de verre de six millimfetres huitdixiemesd'epaisseur, quide 6 4 8" laisse passer G3 pour 100 de la chaleur rayonnantfr de la lampe; chauffee 4 100 degres transmet 67,2 pour 100, et 72,2 pour 100 quand sa temperature atteint 200 degrds. Des considerations thdoriques avaient fait prevoir ce rdsultat 4 M. Wilhelmy; il avail memc calcuie a priori les quantitds de chaleur trans- mises 4 diverses temperatures, et les nonibres de ses formules s'accordent trfes-bien avec les nombres de I'experience. Nous le felicitous de cette heureuse concordance ( Ann. de Fogg., p. 217). F. Moigno, . ( Les nouvelles d'Atigleterre et d'Amerique au prochain nume'ro.) ERRATUM. Page 13, ligne 19. Bentzenberg , lisez Bensenberf Page 14, ligne 28. TJabwet , lisez Babinet. DE l'|MI>1\IMEIIIE DL CKAPELET, hue du VAIJGIRAUD, 9 COSMOS PHOTOGRAPHIE. 1. Nous le rappelions avec enlhousiasme dans I'un de nos derniers articles : la photographie, qui est par elle-meme un dessinateur parfait, un peintre de grisailles accompli, s'est trouve transformee par I'inven- tion du stereoscope en un sculpteur surhumain , qui fouille et qui drape comme jamais Phidias n'a ni fouille ni drape. Mais il reste en- core un pas a faire. Au crayon d'une habilete infinie, au ciseau d'une puissance sans bornes il faut ajouter le pinceau d'une verite absolue. Comme ils seraient centuples, les merveilleux etfets du stereoscope, si Ton arrivait enfm a substituer aux images photographiques actuelles des images ou les divers objets de la nature se seraient peints eux- memes avec leurs veritables couleurs! Quel progres immense! Quelle admirable conquete ! La seule pensee de ce triomphe remporte exalte noire imagination et nous reniplit de joie. Or, nous verrons de nos yeux ces effets magiques et nous les verrons bientot, si notre faible voix peut se faire entendre des depositaires du pouvoir. Voici plus de trois ans que M. Niepce de Saint- Victor, capitaine dans la garde republicaine, caserne Mouffetard, poursuit sans cesse la solu- tion de ce magnifique probleme ; c'est I'homme choisi par la Providence pour le resoudre, et il le resoudra. 11 avance chaque jour, chaque jour il ajoute une couleur nouvelle a sa palette naissante ; deja nous avons pu admirer des epreuves photographiques ou cinq couleurs tranchees, le rouge, le jaune, le bleu, le vert, le blanc s'etaient reproduites elles- memes avec leur nuance propre ; et ces epreuves soumises par nous a I'examen d'un des plus habiles photographes de I'Angleterre, M. Ma- lone, ont excite une vive surprise, une sorte de stupefaction, tant on etait loin de croire qu'on put jamais obtenir des resultats aussi satisfai- sants. Ce ne sont encore que des ebauches. Cette fois, c'est une aurore, un enfant au berceau, mais une aurore qui blen certainement atteindra 16 MAI 1852. 3 50 COSMOS. Ics splendeurs du midi, un enfant qui deviendra bien certainement un geant. M. Niepce de Saint-Victor, aussi modeste et aussi timide dans son laboratoire qu'il est ferme et fort a la tete de sa compagnie, se tient sur du succes ; il le sent presque au bout de ses doigts, il souffre hor- riblement de ne pouvoir le poursuivre que lentement, quand il faudrait se presser et multiplier h I'infini les experiences. Si la revolution de 1818 ne I'avait pas violemment expulse de la caserne du faubourg Saint-Martin, apres avoir saccage et brule son humble mobilier, apres I'avoir depouille de tout ce qu'il possedait. S'il avait conserve cette salle de police a jamais celebre, toujours vide, grace a I'admirable conduite de I'ancienne garde municipale, et qu'il lui fut donne de transformer en laboratoire de chimie, le magnifique probleme, h I'heure qu'il est, aurait tres-probablement re?u sa solution complete. Les essais de photographic entrainent d'enormes d^penses. Que de plaques argentees il faut detruire, que de substances chimiques d'un prix eleve il faut acheter, etc., etc.! Le fait est que I'intrepide inven- teur est a bout d'expedients, qu'il se traine au lieu de courir, qu'il est force de gratter ses vieilles plaques dans I'impossibilite ou il est de s'en procurer de nouvelles. Trist'e necessite! Et pour nous, ami passionne des progres de la science et de I'art, pour nous, jaloux a I'exces de la gloire de notre belle France, ces lenteurs, ces retards sont une veritable calamity. Ah! si nous pouvions faire comprendre, comme nous le sentons, la grandeur et I'importance du probleme que M. Niepce de Saint-Victor veut resoudre bon gre mal gre, du probleme qu'il a presque r^solu, qu'il resoudra en fort peu de temps si Ton vient a son aide : Fixation DES COULEUnS DE LA NATURE SOR LES PLAQDES PHOTOGRAPHIQUES ; LES OBJETS DE LA NATURE SE PEIGNANT EOX-MEMES AVEC LEURS NUANCES PROPRES ! MaIS C'EST UN NOUVEAU MONDE 1 Si le prince president de la republique , qui a r^compens6 si g^ne- reusement, et nous Ten remercions de tout notre coeur, une brillante experience th^orique , la demonstration sensible et sur place du mou- vement de rotation de la terre, daignait laisser tomber un regard pro- tecteur sur M. Niepce de Saint- Victor ! En substituant le verre albumine a la plaque argentic et au papier sensible, en inventant les cliches negatifs, M. Niepce de Saint-Victor a fait faire a la photographic un immense progres ; une seule epreuve negative suffit desormais a fournir des centaines d'epreuves positives ; et cesepreuves, transparentes , ind^fmiment accouplees dans le ste- reoscope, produisent des effets inattendus. M. Niepce de Saint-Victor, enfin , est entr6 seul dans la voie sftre qui conduira infailliblement h COSMOS. 51 la chromo-photographie ; c'est le cas ou jamais de hater le moment du triomphe par une allocation genereuse , par une noble indemnite. Cette allocation , cette indemnite , I'Academie des sciences et la Societe d'encouragcment peuvent I'accorder, nous dirions presque qu'elles le doiventpour rester fideles a leur grande mission. Dans tons lescas, nous ne nous arreterons point qu'il ne nous ait ele donne d'admirer et de faire admirer dans le stereoscope un portrait ou un paysage dessine, peint, sculpte par la nature elle-meme. II. Avant de quitter ce sujet, rappelons quelques recherches theori- ques et pratiques nouvellesde M. Niepce de Saint- Victor, qui n'ont pas trouv6 place dans I'ancienne Luiniere , et qui ont ete accueillies avec grande faveur a llnstitut. M. Edmond Becquerel a observe le premier qu'une plaque d'argent immergee dans I'eau chloree acquieit I'etonnante propriete de repro- duire, sous Taction de la lumiere, les couleurs du spectre. A cette premiere observation , M. Niepce en ajouta une seconde plus frap- pante encore : c'est que la couleur dominante, celle qui sur la plaque chloruree brille d'un plus vif eclat , vai'ie avec la quantite de chlore contenue dans la solution. Quand la quantite de chlore est la plus pe- tite possible, la couleur dominante est le jaune; k mesure que le chlore est plus abondant , la couleur dominante devient tour a tour le vert , le bleu , I'indigo , le violet , le rouge , I'orange : ces deux der* nieres couleurs n'apparaissent que lorsque la solution est complete- ment saturee. Les sels de cuivre et le deuto-chlorure de fer donnent beaucoup de vivacite aux couleurs qui sont faibles avec le chlore em- ploye seul. Pour obtenir toutes les couleurs a la fois , il faut adopter la proportion de chlore, chlorure et sels de cuivre qui correspondent aux rayons jaunes ou verts , c'est-a-dire aux rayons moyens du spectre. Si dans de I'alcool absolu on verse une petite quantite d'acide chlorhydrique pur, on obtiendra, en I'allumant, une flamme jaune ; si Ton ajoute progressivement une nouvelle quantity d'acide , en ayant soin d'agiter la liqueur placee dans une capsule , la flamme jaune pas- sera tour a tour au vert , au bleu , a I'indigo et au violet qui se pro- duit quand I'alcool est sature , c'estr^-dire quand on ne pent plus y ajouter d'acide sans I'eteindre. Pour obtenir des flammes rouges et orangees, il faut ajouter au liquide du chlorure ou du deuto-chlorure de cuivre. Si Ton projette sur un brasier tres-ardent et trfes-enllamme le chlorure de cuivre con- tenant la quantite de chlore convenable pour ne donner naissance , en brulapt dans lalcpol , qu'a une tlamme verte , on verra se produire 52 COSMOS. presque simultanement des jets de flamme de toutes les couleurs du spectre, de meme qu'on voyait toutes les nuances se fixer sur la plaque plongee dans celle des solutions cblorees correspondante au vert comme couleur dominante. Deja, dans un autre Memoire, M. Niepce de Saint-Victor avail si- gnale une analogie frappante entre les flammes et les images colorees. Les substances qui , en brulant dans I'alcool , conimuniquent a la flamme une couleur determinee sonl telles, que si, apres les avoir fait dissoudre , on trempe une plaque daguerrienne dans la solution , cette plaque , soumise a Taction du spectre solaire , fixera comme couleur dominante la couleur meme de la flamme. HI. Ces resultats sont a leur tour des decouvertes brillantes et inat- tendues; rien ne faisait prevoir ces analogies singuli^res qui eclairent d'un jour tout nouveau les phenomfenes mysterieux de la production et de la nature de la lumiere. Nous avons promis de revenir sur les admirables portraits de M. Plu- niier, et nous le ferons en quelques mots. 11 resulte d'abord de la longue experience de I'habile photographe que la sensibilite du collo- dion va sans cesse en diminuant a mesure qu'on s'eloigne du moment de la preparation. Dans les premiers jours qui suivent la reception de cette substance, qui vient , comme nous I'avons dit , d'Angleterre, sa sensibilite est tres-grande , quatre fois plus grande environ que celle des plaques metalliques les plus impressionnables; on obtient en sept ou huit secondes de tres-beaux portraits : nous les avons vus, et, entre autres, le portrait d'une petite fiUe parfaitement reussi. Apres quelques jours la sensibilite estmoindre, le temps de I'exposition a Tac- tion de la lumiere doit etre la moiti6 au moins du temps d'exposition de la plaque. Bientot enfin la couche de collodion n'est pas plus sen- sible ; on n'opere pas avec plus de rapidite qu'avec la plaque. Une seconde remarque importante, c'est que le cliche negatif pro- duit par Temploi du collodion se deteriore ou s'epuise rapidement. II est horsde service apres qu'on enaobtenu un petit nombre d'epreuves postives. Et voila pourquoi Taddition de la gutta-percha devient en quelque sorte necessaire ; la couche sensible , rendue ainsi plus con- sistante et plus forte , est beaucoup plus profondement impressionnee, et soutfre moins de Taction subsequente de la lumiere. Nous regret- tons vivement que Texcellent procede de M. Fry n'ait pas re^u encore en France d'application , et qu'il n'ait attir6 Tattention d'aucun de nos photographes en renom. Esperons que la pubUcite que nous lui avons donnee dans la seconde livraison du Cosmos produira son fruit. IV. M. A. de Brebisson, a qui Tart de la photographic doit deja plu- COSMOS. 53 sieurs perfectionnements remarquables , et d'autant plus precieux , qu'ils ont tous un caractere pratique , est entre a son tour dans la voie du progr5s. Depuis les premieres annonces des journaux anglais, 'il s'est occupe avec ardeur de la preparation et de I'emploi du collodion , et il a si souvent et si bien reussi , que les insucces dont se plaignent la plupart des operateurs sont pour lui inexplicables. Pour lui le collo- dion est la substance la plus sensible qu'on connaisse. II va jusqu'k dire que Ton depasse avec elle la vitesse de la plaque metallique et des pre- parations albuminees les plus actives , meme celles de M. Bacot dont on admire avec raison les etonnantes epreuves representant la mer avec ses (lots souleves et moutonnes , avec ses vagues elancees et rou- lant sur la greve. M. de Brebisson a produit instantanement sur le col- lodion de nombreuses vues de place et de rues aux jours de marche, avec une foule compacte, mobile, dans toute I'agitation des affaires commerciales. On a toujours desire d'arriver a la creation d'un papier photogra- phique a pate tres-homogene, sans inegalites, sans marbrures nitache, et d'une sensibilite extreme, Le collodion presente tous ces avantages. Ce n'est en realite qu'une feuille tres-mince ou pellicule diaphane que Ton peut detacher au besoin , comme nous I'avons dit , qui de- passe en finesse les papiers les plus delicats, qui, comme eux, se laisse impregner completement par les liquides photogneiques et acquiert ainsi une sensibilite exquise. M. de Brebisson cependant reconnait, et c'est aussi chez nous une conviction profonde, que lorsqu'il s'agit de la reproduction d'un sujet immobile, d'un paysage ou d'un monument, rien ne peut remplacer les plaques albuminees, qui, seches, s'impressionnent parfaitement , que Ton peut preparer par consequent longtemps a I'avance , qu'on peut ne faire apparaitre et fixer que plusieurs jours apres I'exposition a la lumiere et au retour d'une excursion lointaine. li nous appren- drait, si les portraits de M. Plumier ne nous I'avaient pas surabondam- ment prouve, que les cliches negatifs sur collodion donnent aux epreuves positives un aspect beaucoup plus doux et plus moelleux. Puisque M. de Brebisson, qui est un photogr^iphe serieux, croit sin- cerement que le collodion iodure prepare d'apres sa recette est plus sen- sible, ou au moins aussi sensible que les meilleurs collodions anglais, nous emprunterons cette recette a son interessante brochure , que chacun pourra se procurer chez M. Charles Chevalier. 1° Preparation du coton-poudre. — Mettez dans un vase de verre ou de porcelaine 600 grammes d'acide sulfurique concentre du com- merce; ajoutez par portion 400 grammes de salpetre ou nitrate de 54 COSMOS. potasse raffine du commerce reduit en poudre; agitez avec une ba- guette de verre le melange qui forme une sorte de bouillie claire, ayant la consistance du sirop; plongez dans ce melange 20 a 30 gram- mes de coton biensec, non carde, en plusieurs fois, mais rapide- nicnt, de manit're a ce que I'immersion soit prompte et complete, puis tassez et pressez avec une baguette de verre pendant quatre ou cinq minutes ; retirez la masse impregn^e et jetez-la dans I'eau pour dis- soudre le sel adherent ; lavez enfin a grande eau pour enlever toute trace d'acido , exprimez I'eau du coton, en Je pressant dans une ser- viette, epanouissez la masse fibreuse et faites secher k I'air libre ou dans une etuve dont la temperature ne soit pas Irop elevee. 2° Preparation du collodion. — Prenez coton-poudre bien sec 1 gramme, ether sulfurique 90 grammes, alcool ordinaire 60 grammes : agitez ces substances dans un flacon , puis apres quelque temps (com- bien de temps) passez le liquide dans un linge fin et conservez-le dans un flacon bouche avec soin. 3° lodnration du collodion. — Faites deux solutions , I'une avec 30 grammes d'eau distillee et 3 grammes d'azotate d'argent, I'autre avec 40 grammes d'eau distillee et 2 grammes d'iodure de potassium ; versez peu h peu la premiere solution dans la seconde; il se formera de I'iodure d'argent qui se precipitera au fond du vase : lavez leprecipite k grande eau et jetez-le sur un filtre de papier : I'eau ecoulee, versez sur I'iodure d'argent une petite quantite d'alcool pour achever le la- vage : mettez un excfes d'iodure de potassium dans un flacon rempli d'eau a 33 degres; quand I'alcool est sature, d^cantez, et vous aurez une solution alcoolique concentree d'iodure de potassium : dissolvez dans cette solution I'iodure d'argent reste sur le filtre frais et en- core humide : cela fait, prenez collodion 50 grammes, solution alcooli- que 15 grammes et vous aurez le collodion iodure. M. de Brebisson affirme que la scnsibilite sera beaucoup accrue si Ton ajoute 6 gram- mes d'une dissolution concentree dans I'alcool d'iodure de fer obtenu en versant 20 grammes d'eau sur 1 gramme de limaille de fer mele a 3 grammes d'iode. Quand le collodion et les deux dissolutions alcooli- ques sont meles on agite le flacon , on laisse reposer jusqu'k ce que le liquide devienne limpide, ce qui demande au moins douze ou quinze heures : on decante ensuite et Ton conserve la portion la plus claire dans un flacon a large ouverture pour I'etendre plus tard sur les glaces. Le collodion iodure ainsi obtenu doit avoir une belle couleur orangee ou rougeatre : il serait simplement jaune si Ton n'y avail fait entrer que de i'iodure d'argent. 4" Scnsibilisation des glaces enduites de collodion. —Plongez la pla- COSMOS. 55 que dans un bain compose d'eau distillee 60 grammes, nitrate d'argent 4 grammes. Si Ton attendait que la couche de collodion fut sfeche pour la baigner dans la solution d'argent, elle serait sans sensibilite. 6° Apparition de Vimaye. — Prenez une solution saturee de proto- sulfate de fer : ajoutez un douzi^me d'acide ac6tique cristallisable ou simplement d'acide pyroligneux pur et quelques gouttes d'une solu- tion faible d'argent : melez bien le tout et plongez-y I'epreuve d'un seul coup, la couche sensible en dessus. En quelques secondes I'image negative apparaitra dans tous ses details : si elle n'etait pas assez forte on la placera horizontalement sur les doigts de la main gauche , et on versera sur sa surface une solution de 100 grammes d'eau distillee et 4 grammes de nitrate d'argent , en ayant soin que la nappe liquide couvre de suite la totalite de I'epreuve : au bout de vingt secondes en- viron on egoutte la plaque et on I'immerge de nouveau dans le bain ferre : on recommencera ces deux bains successifs si Ton desire encore plus de vigueur. M. de Brebisson remarque que I'argent reduit par son aspect melallique blanchatre convertit le cliche vu sur un fond noir en epreuve positive, sans lui faire perdre son caractere negatif lorsqu'elle est vue par transparence. 6° Fixation de I'epretive negative. — Le meilleur de tous les agents est I'hyposulfite de sonde : si la solution est de 1 gramme de sel, pour 30 grammes d'eau on devra laisser I'epreuve dans lebain au moins trois ou quatre minutes ; I'immersion ne devra etre que d'une minute si la solution etait au dixieme, ou de 10 grammes de sel pour 100 grammes d'eau. On termine en lavant de nouveau et laissant la plaque un cer- tain temps dans I'eau. On pent consolider I'epreuve avant qu'elle soit seche en versant sur elle une solution de 6 grammes de gomme arabique dans 30 grammes d'eau , pass6e dans un llnge fin et purgt^e de bulles d'air au moyen d'un morceau de papier buvard : on etend aussi bien que possible la couche de gomme en inclinant la glace en tous sens; puis aprfes un moment de repos on deverse la gomme excedante. 7" Prodtiction de I'image positive. — Plongez le papier pendant deux ou trois minutes sur un bain forme de 100 grammes eau distillee et 10 grammes chlorure de sodium. S^chez avec un papier buvard, et etendez le cote chlorure sur un second bain d'eau distillee 30 grammes, nitrate d'argent 6 grammes. On ne peut conserver ce papier que quelques jours, car il prend une teinte grise plus ou moins foncee. M. de Brebisson propose aussi cet autre bain : eau dis- tillee, 200 grammes; chlorure de sodium, 8 grammes; tapioka de Groult 6 grammes , auquel on ajouterait 2 ou 3 grammes d'acide tar- 56 COSMOS. trique ou d'acide succinique; si Ton voulait avoir des tons plus ou nioins bistres, on placerait ce melange sur le feu; quandle tapioka est dissous on passe le tout dans un linge; on en enduit des feuilles de pa- pier fort et bien blanc au moyen d'un pinceau queue de morue; et pour faire disparaitre les stries on effleure l^g^rement la surface en- collee avcc un gros pinceau en blaireau, que Ton promene rapide- tnent en decrivant des cercles tres-rapproches. 8° Fixation de I'epreuve positive. — On la plonge dans un bain au dixi^me d'hyposulfite de soude 10 grammes, eau 100 grammes, et on I'y laisse au moins deux heures et meme beaucoup plus si I'on veutdes tons noirs, a la condition que I'epreuve aura ete trfes-poussee au soleil. Au sortir dc riiyposulfite, on lave k plusieurs reprises a grande eau et on laisse baigner pendant douze heures, en changeant plusieurs fois d'eau; il sera meme bon quelquefois de laver une dernifere fois a I'eau presque bouillante; on seche sur papier buvard incline : I'epreuve prendra un ton vigoureux remarquable si on I'approche du feu pour dessecher completement. V. M. Bingham, le photographe anglais si exerce, qui s'est charg^ de produire tous les posilifs representant les objets couronnes par la com- mission de I'exposition universelle; et qui, installe a Versailles dans une charmante villa, produit chaque jour par centaines les epreuves qui doivent completer les catalogues illustres , a presente mardi der- nier a I'Academie des sciences, de trfes-belles epreuves sur collodion. II donne en meme temps les recettes qui lui ont le mieux reussi. Nous les enregistrons avec d'autant plus d'empressement, qu'en fait de col- lodion M. Bingham fait autorite; il a precede M. Archer, dont les pu- blications datent seulement de 1851, tandis que dans une brochure imprimee en 1850, M. Bingham signalait deja I'emploi du collodion comme pouvant remplacer I'albumine. II est vrai toutefois qu'il ne decouvrit pas la grande sensibilite du collodion, parce que pour le de- veloppement de I'image il se servait d'acide gallique au lieu de I'acide pyrogaliique employe par M. Archer. 1° Preparation du collodion iodure. — On verse dans un flacon cent quatre-vingt-sept grammes de coton-poudre dissous et convenablement tluide, avec trente-cinq grammes d'iodure d'ammonium (iodhydrate d'ammoniaque), Ireize decigrammes de fluorure de potassium et quatre ou cinq gouttes d'eau distillee. Le melange agite prend une teinte jaune pale, si le coton-poudre etait bien exempt d'acide ; sans cela il serait rouge fonce, et ce serait un grave inconvt^nient. On pent substituer ;\ I'iorlure d'ammonium quarante-six decigrammes d'iodure d'argent avec soixante-dix-huit decigrammes d'iodure de potassium et quelques COSMOS. 67 gouttesd'eau. Aprfes I'agitation et un repos de quelques jours, ce second melange est blanc ou legerement jaunatre, et o'est alors seulenient qu'il faut s'en servir. Le verre, porte sur un cylindre .en gutta-percha rendu adherent par la chaleur, doit etre nettoye d'abord avec des tampons de colon imbibes de tripoji et d'ammoniaque ; puis avec un tampon de coton trfes-fin imbibe d'alcool pur. 2° Senslbilisation de la plaque. — Avant que la couche de collodion iodure soit s^che, on plonge la plaque dans un bain compose de trente et un grammes d'eau distillee et vingt-six decigrammes de nitrate d'ar- gent ; on laisse la plaque immergee pendant une demi-minute environ, et quand sa surface est devenue blanchatre, on la porte dans la cham- bre noire. 3° Developpement de I'image. — On place la plaque sur un support et on verse rapidement dessus un melange de deux parties d'acide py- rogallique, quatre-vingts parties d'acide acetique cristallisable, et cinq cents parties d'eau. Si la plaque n'avait pas eteassez impressionnee, on pourrait ajouter quelques gouttes de nitrate d'argent. En deux minu- tes I'image apparait tres-bien developpee ; on la lave a grande eau, et on la fixe au moyen d'une solution saturee d'hyposulfite de sonde. On seche enfin a la lampe ou a I'air libre. M. Bingham affirme que par ce procede on obtient de trfes-bons cli- ches negatifs, a I'ombre et avec un objectif allemand, en trois ou quatre secondes. Pour obtenir directement les positils, il faut laisser la plaque expo- see moins longtemps a Taction de la lumiere, et la plonger dans un melange d'acide pyrogallique aiguise par une ou deux gouttes de nitrate d'argent. MfiTfiOROLOGlE OPTIQUE. PHENOMENES PRODUITS PAR LA. REFLEXION ET LA REFRACTION DE LA LUMjtRE. II. Aurore et crepuscule. Par suite de la reflexion atmospherique , le soleil eclaire la terre quelque temps apres qu'en se couchant il est descendu au- dessous de I'horizon , et lorsqu'eu se levant il ne I'a pas en- core atteint. Le soir, cette clarle s'appelle le crepuscule, le ma- tin Y aurore; elle est d'aulant plus vivo que le soleil est plus pres du plan de I'horizon, et elle ne cesse d'etre observable que lors- qu'il est abaisse d'envirou 17 a 18 degres au-dessous de ce plan. Quand le soleil a disparu sous I'horizon ou qu'il est sur le point 58 COSMOS. de I'alteindre , le cOnc lumineux I'ormd dcs rayons qui rascn tangcntiellcment la Icnc , prolong6 a travers toulc ralniosph5rc supposec sph^wque, cl modilid par les refractions qu'il sul)it, trace, en sortant dcs couches limites, un cerclc qui s6parc les regions aeriennes dircclement illuminees de celles qui ne le sont qu'indi- rcclomcni. Cctte courbe limite dela projection del'ombre Icrreslrc dans latmosplierc s'appelle la courbe anticr^pusculaire ; elle sc montre vers I'horizon oriental quand le soleil se couche , et se cou- chc vers I'horizon occidental quand il se leve. Elle se prdsentccomme un arc surbaiss6, d'environ 180" d'amplitude. M. Bravais n'a jamais pu observer le matin I'apparition de la courbe anticr(5pusculairc avant que le soleil eut atteint une distance zenithalc de 95°29' ou futamoinsde A''7l' de I'horizon; elle apparaissait quelquefois un pen plus tard. Cette courbe n'est pas une ligne tranchee, mais un secteur d'une certaine ctendue nuanc6 de diverses teintes rouge , rougeMre, violet ou purpurin sombre, blcuatre, etc. M. Bravais con- sidere comme etant la vraie courbe anticr6pusculaire , la ligne de separation de la teinte rougeatre sup^rieurc et de la teintc bleu- grisdtre situee au-dessous. Lorsque apres le coucher du soleil, la courbe anticrepusculairc s'elevant de plus en plus au-dessus de I'horizon oriental, flnit par de- passer le z6nith, elle change de nom et devient la courbe crepuscu- laire proprement dite. C'est a fort' peu pres par 96'' de distance zenithale du soleil, ou lorsque le soleil est descendu de 6" au-dessous de I'horizon qu'arrive I'instant de ce passage ; mais il n'est claire- ment rendu sensible, ni par 1' observation des teintes de Tare, ni par le degre d'illumination des regions z6nithales du ciel. La courbe crepusculaire rencontre I'horizon en deux points presque diam^tra- lement opposes, et si I'horizon n'est pas vaporeux , c'est la que la Ugne de separation des deux fuseaux clair et obscur de I'hemi- sphere c61cste se dessine plus nette. On pent profiler de cette cir- conslance pour mieux determiner le moment du passage de la courbe au zenith, ou le moment de la transformation dc la courbe anticr(^pusculaire en courbe crepusculaire, car cet instant coincide h tres-peu pres avec I'^poque a laquelle la courbe vient couper I'ho- rizon .\ angles droits. Lorsque cette courbe a 15 ou 20 degr^s de hauteur, les incidences h I'horizon se font sensiblement sous le m6me angle; la tranche la plus basse de I'atmospherc, aux deux points d'incidence, se trouve s6par<5e par un trait oblique en deux segments, I'un oppos6 au soleil, obtus et sombre, et I'autre aigu et 6clair6. COSMOS, 59 Lorsque la coiirbc crepusculaire s'est couchde le soir h I'horizon occidental, on pent encore, si les circonstances sent favorables, aper- cevoir une lumiere blancliAtre, illuminant le ciel vers le nord-ouesl jusqu'a une hauteur qui ne depasse pas 30% mais d'une clarte trop faible pour d6rober la \Tie des 6loiles de cinquicme el meme de sixieme grandeur. Saussure au col du Geant avail apergu cette lueur alors que le soleil 6tait abaiss6 de 22" au-dessous de I'horizon. Lors- qu'on essaye d'assigner le point du ciel ou linit cette lueur, en trans- portant ses regards de I'horizon vers le zenith, on cprouve de tres- grandes difficultes, mais la diminution graduelle de I'intensitc de la lumiere, h mesure que I'on s'eloigne de I'horizon, ne laisse aucun doute sur sa veritable nature. 11 est evident que cette lueur cor- respond a des portions de I'atmosphere pour lesquelles la courbe cr(§pusculaire n'esl pas encore couch^e, et que les rayons lumineux qui nous donnent la sensation de ce ph^nomene arrivent h notre ceil apres une double reflexion subie dans les couches sup(§rieiu-es de I'atmosphere. Les observations faites sur leFaul horn par M. Bravais, prouvent que ce phenomene n'est pas tres-rare sur les hautes mon- tagnes. Le 16 aout 1842, 11 a vu la seconde courbe crepusculaire h 10''26'15" du soir, quand le soleil etait k 26«6' au-dessous de I'ho- rizon; et a 2'' 3' du matin quand le soleil 6tait abaiss6 de 23°23'. La deuxi^me courbe crepusculaire pent en effet, et doit se montrer le matin par les memes raisons qui la font apparaitre le soir, puis- qu'elle n'est que la repercussion de la premiere courbe crepuscu- laire. Nous indiquerons ici, sauf h en donner I'explication plus tard, les teintes ou nuances diverses dont le crepuscule se colore, en suivant la marche du soleil de 2 degr^s en 2 degres a mesure qu'il se rap- proche le matin de I'horizon. — Distance zenithale, 102" : k I'orient une bande rougeatre ou orang^e ; la hauteur de la courbe crepuscu- laire est de 7" ; le fuseau compris entre les deux arcs est d'un bleu blanchatre plus clair que le reste du ciel. — Distance zenithale, 100": la hauteur de la zone orangee est de l^; au-dessous le jaune com- mence a paraitre, et sa hauteur atteint 2" 30' ; la hauteur de la courbe est de 12". — Distance zenithale, 98" : la partie teintee de rouge s'e- tend depuis I'horizon jusqu'k 1"15' ; au-dessus teinte jaune jusqu'a S'lO' ; le vert commence h apparaitre sur le jaune, la bande verdatre ne depasse guere 5" de hauteur ; au-dessus, nuance bleuatre faible jusqu'c'i 25", limite de. la courbe crepusculaire. — Distance zeni- thale, 96" : reievation des zones orangee et jaune n'a pas change , la teinte verdatre s'etend jusqu'a 7"; la courbe crepusculaire gagne ra- 60 COSMOS. pidcmonl \c zenith, sa haufcur csl de 70"; Ic cid occulenlnl n'offre encore aiicunc trace d'dclaircment. — Distance z^nithale, 94" : les liandes orangoc et jaune conserventla meme elevation ; la zone ver- dalrc allcint 1-2"; au-dessns commence a se montrer une leinte pur- purino, du moins si Ics circonstances sont favorables ; elle se forme pen aprcs le passage de la courbe crepusculaire par le zenith, et son existence ne dure que qnelques minutes; clle a son maximum d'in- lensite vers 25" de hauteur, et ne depasse pas 45"; on n'observe pas de liscr(5 jaunatre qui la separe de la region verdalre situde au-des- sous; la teinte du zenith est bleue, quelquefois peut-6tre legerement teinloc de verdatre; a I'horizon occidental, Tare anticrepuscnlaire se dessine vers 10" de hauteur, il n'offre pas encore de teinte rouge bien evidcnte, mais un ton bleuatre sombre avec une nuance purpurine plus ou moins prononcce; en dessous le ciel parait plus clair. — Distance z6nithale, 92" : le rouge oriental commence a jaunir, sa hauteur reste la meme; la limite superieure de la zone jaunatre est toujours egale a 3" ou a 3" 15'; de la jusqu'a 18" de hauteur, coloration verle plus intense que dans les periodes precedentes; la teinte pur- purine secondaire a complctemcnt disparu; h I'horizon occidental la hauteur de Tare anticrepuscnlaire est de 3", la coloration en rouge s'etend de 3" jusque vers 15" de hauteur; le rouge offre somen t une teinte violatre ou du moins purpurine; M. Bravais n'a jamais observ6 au-dessous de Tare anticrepuscnlaire le lisdre blanc-jaunatre signale par M. Kaemtz, mais le bleu du ciel y parait quelquefois faiblemenl teinte de verdatre, probablement par un effet de contraste optique; au-dessus de la zone rouge regne le bleu ordinaire sans nuance in- termediaire p.erceptible. — Distance zenithale, 90" : le soleil est leve, son disque et les portions roisines de I'atmosphere offrent assez sou- vent une teinte jaunatre et plus souvent encore orangee; labande orangde s'efface ; sa disparition, lorsquelle a (5te le plus tardive pos- sible, s'est faite lorsque le soleil a atteinl la distance zenithale 89" ou 88"30' ; le jaune persiste jusqu'a 3" de hauteur, de la jusqu'a 22", verdatre bien distinct, le zenith est bleu; du cote oppose ou occi- dental, Tare anticrepuscnlaire a gagnd I'horizon; la teinte rouge s'eieve jusqu'h 4" ou 5" de hauteur ; le jaune qui a commence ci pa- raitre au-dessus, lorsque la distance zenithale solaire atteignait 91", s'deve maintenant jusqu'ti 6" ou 7" de hauteur; au-dessus du jaune un pen de a crdatre commence ci poindre. — Distance zdnilhale du soleil, 88« : le rouge a cntierement abandonne I'horizon oriental; le jaune seul subsiste et s'alTaiblit de plus en plus; la teinte verte sur- monte le soleil et s'etend jusqu'c^ 25" de hauteur; le zdnith est bleu, COSMOS. 61 h I'occident le rouge tie Tare anticrepusculaire a completement dis- paru, le jaune persisle encore, sa limite superieure ne depasse pas 3", le vert qui le siirmonte a son maximum d'intensite vers 5" ou 6", de Ik il s'etend jusqu'a 10" de hauteur, ou meme au dela. — Distance zenitliale, 86" : le jaunc lui-meme a disparu, mais le vert subsiste encore assez Irequemment, surtout dans la parlie du ciel opposee au soleil, ce dernier vestige de la coloration cr^pusculaire s'efface de plus en plus. Les figures 1 et 2 donneront une idee au moins vague des ph^no- menes que nous venous de decrire. La hauteur zcnithale du soleil est de 95 a 93". La courbe RRR est la limite du rouge crepusculaire, GO la limite de I'orange; JJ la limite du jaune; VV la limite du vert ; PP la limite dc la zone purpurine rosatre ; BB est le bleu des regions zenithales; CCC est la courbe crepusculaire, a 80" de hau- teur ou tres-pres du zenith : Tare anticrepusculaire AAA d'un ton bleudtre sombre avec nuance purpurine plus ou moins prononcee, et qui se dessine alors a 10" de hauteur, est represente fig. 2. Ce resume embrasse seulement la succession des couleurs qui ont lieu dans le plan vertical renfermant le centre du soleil : la co- loration du ciel dans les regions laterales offre quelques particula- rit^s dignes de remarque : les points de I'horizon situes a 90" de I'intersection du vertical du soleil commencent a se colorer peu apres que la courbe crepusculaire a ddpasse le zenith : I'apparition des teintes rougcatres y precede celle des teintes vertcs qui les sur- montent et I'emportent de Ion dans ces deux points sur le vert de toule autre partie du ciel , du moins pendant les quelques minutes qui precedent le lever du soleil. Si Ton pouvait bien distinguer parmi les arcs cr^pusculaires quel est celui qu'on doit considerer comme etant recllemcnt le resultat de I'intersection du cone de I'ombre tei-restre avec la surface termi- nate de I'atmosphere, il est certain que I'on pourrait ddduire d'ob- 62 COSMOS. servalions faitcs siir \c point culminant de cet arc , la hauteur r^elle de ratniosphorc , mais cctlc distinction est presquc impossible. Celle courbc limitc n'cst ni la courbe cr(5pusculaire pvopicmcnt dite, ni le second cspace cr(5pusculairc de M. Biot; il est meme prol)al)lc qu'elle ne correspond pas Ji un point fixe et determine du segment crc^pusculaire , ct qu'elle se deplace suivant la position re- lative de I'observateur. Le probleme de la mesure de la hauteur de ratmosphere par les ph^nomcnes du crc^puscule n'est done pas en- core resolu. M. Bravais a trou\6 que la serie des observations faites par lui sur le Faulhorn 6tait assez exactement repr(5sentee en ad- mettant que le sommet de la courbe crepusculaire fut situ6 h 115 000 metres au-dessus du niveau de la mer, et sur le prolon- gement d'un rayon terrestre qui ferait avec le rayon mene au centre du soleil un angle de 95" 58'. 115 000 metres, voilk done quelle serai t la hauteur de I'atmosphere : M. Biot avail obtenu un chiffre beaucoup moindre, 58 916 metres. Comme les observations d'dclipse de lune et les phenomenes qui se produisent h I'entree de eel astre dans Fombre do la terre prouvenl que la hauteur de notre atmo- sphere est au moins egale h 80 000 metres, la hauteur 115 000 metres n'a rien d'exag^re. VARIETES. INVENTIONS NODVELLES. Nouvel ensemble d'appareils de paniftcation, de M. RoUand. On se refuserait a croire, si nous n'en n'etions pas les t^moins forces, que le premier et le plus ancien de tous les arts est le moins avance, nous dirions presque le plus sauvage et le plus barbare. Entrezdans la plus vantee des boulangeries de la capitate ; suivez dans tous ses de- tails I'operation materielle de la transformation de la farine en pains; vous ne verrez pas sans douleur que , quoique sans cesse repetee de- puis quatre ou cinq mille ans, elle n'a fait absolument aucun progres; vous sortirez I'ame attrist6e, le coeur souleve, si tant est meme que ce penible travail ne vous ait pas inspire un profond degout. En plein xix' sifecle, p6trir le pain est un cruel labeur : il faut fouler profonde- ment de sespoings fermes une masse de pate gluante, I'enlacer de ses bras nerveux , la soulever avec de grands efforts et la rejeter brusque- ment cinq ou six fois. Aussi I'ouvrier charge de cette rude besogne COSMOS. 63 a-t-il re^u le nom trop significatif de Geindre, parce que sa fatigue et scs souffrances se trahissent par des gemissements involontaires et sourds. Bientot son corps entier ruisselle de sueur qui tombe a grosses gouttes dans la pate qu'U aglte , et 11 n'arrive qu'epuise de forces au tcnne de cette lutte inhumaine. Apres son travail de la nuit termine, ce sont de nouvelles souffrances; la poussi^re fine qu'il a soulevee et aspires malgre lui en grande quantite engorge ses poumons, excite une toux quelquefois opiniatre et amene une expectoration excessivement penible. La cuisson du pain est plus eff"rayante encore ; on entasse le bois dans le four, on y met le feu ; on le reduit en charbons et en cendres que Ton ramene tout enflammes vers la gueule ouverte : avec de hideux chiff'ons on fait semblant d'essuyer et de laver les pierres de I'atre ; quand elles sont encore sales et brtilantes , on procede a I'enfourne- ment. L'ouvrier pose la pate sur une petite planche de bois attachee a un tres-Iong manche; puis, I'oeil braque vers le fond du four, dont la voute et le sol ardents lui briilent les yeux , il cherche la place ou il pourra le deposer, sans pouvoir efficacement le defendre du contact de ses voisins. Quel travail et quelles douleurs! Et que sort-il du four? Un pain sali de cendres, incruste de fragments de charbons, etc., etc. Faut-il s'etonner, apres cela, que les ouvriers boulangers soient decimes chaque annee par les pneumonies, les peripneumonies, les fluxions .depoitrine, les pleuresies, etc., etc.? Faut-il s'etonner que la plus insalubre des industries soit aussi la plus immorale, et que les malheureux ouvriers boulangers cherchent dans le libertinage ou I'ivresse une triste compensation a des fatigues au-dessus des forces humaines? Ce n'est pas tout ! Si au moins le pain achete si cher, malgre les sa- letes qui le deparent , etait un pain de bonne qualite, toujours sem- blable a lui-meme, fabrique a coup sur ! II n'en est rien malheureuse- ment , et nous le prouverions sans peine par mille documents authen- tiques, si I'inegalite dans la fabrication du pain n'etait pas un fait de chaque jour dont tout le monde se plaindrait si Ton n'etait paa force de la subir. M. Rolland, boulanger, rue Descartes, qui, content de son humble profession, ne s'etait jamais cru appele a la vocation sublime, mais dangereuse d'inventeur, jura d'arriver, dut-il perir a I'oeuvre, a une telle perfection de fabrication , qu'il ne vnit pas meme a la pensee de ses pi^atiques de lui refuser un pain. Arme de cette volonte ferme que Ton retrouve encore chez les ftmes neuves et simples, M. Rolland a r6ussi, et, fort d'un succ^s longtemps et grandement constate , il a 64 COSMOS. aborde sans palir le seuil de TAcademie des sciences et de la Socidte d'encouragement. Tout est change dans I'usine de M. Holland: c'est une revolution complete. Son petrin mecanique est d'une simplicite extreme; la main d'un jeune homme de quinze a vingt ans suffit parfaitement a le faire mou- voir en pleine charge et sans epuisement de force. Ici, plus de manege, plus de chevaux, plus devapeur. Sur une auge renfermantla quantite de pate necessaire a une fournee, regne un axe horizontal, fig. 1 ; a cet Fig. 2. pminnj . UHlHli ^-~-.:^*=s r"~E=*™"~— "« ^-\ "i : a axe sont lixcs deux ensembles de lames curvilignes alternatlvement longues et courtes : ces deux ensembles de lames dessinent deux quarts de surfaces cylindriques a courbures opposees, en ce sens que I'une des surfaces tourne sa concavite et I'autre sa convexite vers le fond de I'auge : ajoutez a cela une roue faisant fonction de volant, une mani- velle qui transmet sa rotation a I'axe horizontal par I'intermediaire de deux petites roues dentees, et vous aurez I'idee complete du petrin de M. Holland. Son action est aussi prompte que facile etefficace; en vingt minutes, si rien ne presse, en un quart d'heure ou meme en dix minutes quand il est necessaire, il transforme plus d'un sac de farine en une pate par- faitement homogene, parfaitement levee et aeree, sans pelotes aucunes, sans grumeaux aucuns, et que le petrissage a bras ne produira jamais. Voila pour le petrin : arrivons au four. On n'en a pas seulement exile le bois, le charbon et les cendres; la fumee et I'air chaud du foyer n'ont pas obtenu le droit d'y penetrer. Cette fumee et cet air chaud partis du foyer, place loin de la bouche du four, et conduits par des tuyaux ramifies en patles d'oie au-dessus de la voute et au-dessous de I'atre, circulent en assez grande abondance pour que le four atteigne promptement la temperature voulue et indi- quee par un Ihermom^tre quel'ouvrier a constamment sous les yeux. L'atre ou le sol du four sur lequel on depose le pain est reconvert de briques vernissees ou non vernissees que rien ne vient jamais salir. Tout cela ne constitue pas encore le caractere propre du four de COSMOS. 65 M. Rolland : ce qui le distingue de tous les autres fours, c'est que les briques dont nous venons de parler, et qui forment I'atre, reposent sur una plate-forme tournante, fig. 2, que I'ouvrier boulanger, celui que I'on qualifie du nom de brigadier, fait mouvoir a I'aide d'une petite mani- veile, sans effort aucun et par la simple pression du doigt. S'il s'agit de remplir le four, on depose les premiers pains sur la partie de la plate-forme tournante qui avoisine la gueule ; puis, quand cette portion est couverte, on tourne la manivelle; un nouvel espace vide se presente, on le remplit; chaque petite portion du four vient ainsi a son tour demander et recevoir le pain qui doit lui etre confie, et I'emporte avec elle en tournant. Plus de pelle de longueur demesu- ree, plus de ces bras tendus avec efforts, plus de ces yeux largement ouverts devant des surfaces ardentes et condamn^s a ajuster longtemps pour decouvrir une place vide; I'enfournement, si cruel et si dange- reux, est devenu un jeu d'enfant. Quand le four est plein, on ferme la porte par une ouverture vitree , menagee dans la paroi et ^clairee par un bee de gaz, I'oeil suit les progres de la cuisson : si elle est plus lente sur un point, trop rapide sur un autre, on tourne la mani- velle pour amener successivement tous les pains dans les regions plus ou moins chauffees, suivant que la n^cessite s'en fait sentir. Apres vingt ou vingt-cinq minutes , la cuisson est terminee , et les pains sont si parfaitement identiques sous le double rapport du volume et de la couleur qu'il est impossible de les distinguer. C'est le bon et le beau absolus. Et, qu'on le remarque bien, en resolvant le probleme delicat d'une cuisson parfaite, M. Rolland a resolu le probleme difficile de la cuisson continue. Pendant qu'on degage ses flancs, le four a reprls la temperature voulue, et Ton peut presque aussilot recommencer une nouvelle fournee. Le nombre des fournees obtenues dans un jour peut atteindre le chiffre enorme de dix-huit ou vingt. M. Rolland n'eslime pas a moins de 60 pour 100 I'economie de combustible realisee par son nouveau four. Quel beau spectacle que celui d'un simple ouvrier, fds de ses oeu- vres, arrivant par la force de sa volonte, par la perseverance de ses Etudes, par la multiplicite d'essais dispendieux, a triompher de la rou- tine la plus inveteree et la plus deplorable, a faire en quelques mois ce que Ton attendait en vain depuis des siecles ! Et puis quelle belle et bonne chose qu'un pain parfaitement propre, colore d'une nuance attrayante, toujours semblable a lui-meme, qui sera le jour de la Saint- Sylvestre ce qu'il fut au premier jour de I'an, parfaitement petri, par- faitement cuit, parfaitement appetissant ! 66 COSMOS. COURRIER SCIENTIFIQUE, 1" IVoaTclles de France. HiSTOiRE. — Mardi dernier, 11 mai, les amis de la science et d'une de ses plus nobles personnifications , M. Arago, fiirent grandennent surpris et affliges de rencontrer dans le Steele la lettre suivanto : a Paris, le 9 mai 1852. « Monsieur le minietre, « Le gouvernement a reconnu lui-m6me que leserment prescrit par I'article 14 de la Constitution no devait pas 6tre exig^ des membres d'un corps purement scientifique et litt^raire tel que I'lnstitut. J'ignore pourquoi on a range dans une autre catpgorie le bureau des longitudes, academie astronomique ou, en casde vacance, on se complete par vole d'election. Ce simple rapprochement eiit sufli , peut-etre, pour m'engager a refuser le serment; mais des considerations d'une autre nature ont exerce , je I'avoue, une iniluence decisive sur mon esprit. « Les circonstances me rendirent, en 1848, comme membre du gouvernement provisolre, un des fondateurs de la Republique; a ce titre, et je m'en glorifie encore aujourd'luii , je contribuai a I'abolition du serment politique. Plus tard , jo fus nomme par la Constituante prt'sident de la Commission executive ; mes actes dans cette derniere situation sent Irop connus du public pour que j'aie be- soin de les rappeler ici. Vous comprendrez, monsieur le ministre, qu'en prfeence de ces souvenirs, ma conscience m'ait command(5 une resolution que, peut-^tre > le directeur de I'Observatoire eut hesite a prendre. « J'avais toujours cru qu'aux terraes de la loi , un astronome du bureau des longitudes 6tait inamovible. Vos arretfe m'ont detromp6. Je viens done vous de- mander, monsieur le ministre , de me fixer le jour ou je devrai quitter un eta- blissement que j'habite depuis bientdt un demi-si^cle. Get etablissement, gr^cea la protection que les gouvernements qui se sont succede en France depuis qua- rante annees lui ont accordee , gr^ce surtout , qu'il me soit permis de le dire , a la bienveillance des assemblees legislatives a mon egard , est sorti de ses ruiues et de sa nuUite , et pent Hre offert maintenant aux etrangers comme un modele. « Ce n'est pas sans une profonde douleur que je me separerai de tant de beaux instruments a la construction desquels j'ai plusou moins directement concouru ; ce n'est pas sans de vives apprehensions que je verrai des moyens de recher- ches, cr6es parmoi , tomber dans des mains malveillantes ou meme ennemies; mais ma conscience a parle , et j'ai du passer outre. « Je desire, dans cette circonstance , que tout ait lieu au grand jour; aussi je m'empresse de vous prevenir, monsieur le ministre, que j'adresserai aux grandes Academies de I'Europe et de rAmt5rique, car j'ai depuis longtemps I'honneur de leur appartenir, une circulaire qui leur apprendra mon eioignement d'un etablis- sement avec lequel mon nom s'etait en quelque sorte identifie , et qui etait pour moi une seconde patrie. « Je veux qu'on sache partout que les motifs qui ont dicte ma determination COSMOS. iSf n'ont rien dont mes enfants puissent jamais avoir a rougir. Je dois surtout ces ex- plications aux savants de premiere ligne qui m'honorent de leur amiti^, aux Humboldt , aux Faraday, aux Brewster, aux Melloni , etc. Je veux aussi que ces illustres personnages ne se preoccupent pas trop du changement considerable que ma determination va apporter dans mon existence. (f Ma sante s'est sans doule fort compromise au service du pays. On n'a pas passe une partie de sa vie, allant de pic en pic, dans les conlrees les plus sau- vages de I'Espagne , a la recherche de la Ggure de la terre ; dans les regions in- hospitalieres de I'Afrique, comprises entre Bougie et le chef-lieu de la Regence ; sur des corsaires alg^riens; dans les prisons de Majorque, de Rosas, de Palamos, sans qu'il en reste de profondes traces ; mais je rappellerai a mes amis qu'une main sans vigueur peut encore tenir une plume, et que le quasi-aveugle irou- vera toujours pres de lui des personnes empressees qui voudront bien recueillir ses paroles. a Agreez , monsieur le minislre, tous mes sentiments. « F. Arago. » Pour attenuer I'effet trop natural et tant redoute de cette desolante publica- tion , M. de Girardin eut I'heureuse pensee d'inserer dans la Presse du mercredi matin les lignes suivantes : « Cette lettre nous a rappele celle qui se trouve en t^te du 3° volume des QEw- vns de M. L. N. Bonaparte, et qui porte la date du 6 decembre 1842. EUe est adressee a M. Thayer, et precedee de ces quelques mots : M. Arago ayant fait demander au prisonnier de Ham, par M. Thayer, son coUegue au conseil municipal de Paris , des renseignements sur les etudes ma- thematiques de Napoleon , ie prince Napoleon-Louis 6crivit a M. Thayer la lettre suivante : Dans cette lettre se trouve ce passage : Ce qui distingue, je crois , les grands hommes, ce qui entlamme leur ambi- tion, ce qui les rend absolus dans leurs volont^s, c'est I'amour de la verity qu'eux seuls croient connaitre ; aussi I'empereur devait-il dans son jeune ^ge preferer aux autres sciences celle qui donne toujours des resultats incontesta- bles et inaccessibles a la chicane et a la mauvaise foi. JIais son esprit tout po^- tique avait des le principe retenu surtout cette portion de math^matiques qui sert a resoudre tous les problemes d'un usage general. Dans la science comme en politique, il repoussait les theories ou les principes dont il ne voyait pas une application immediate, et c'est peut-6tre pour cela qu'il preferait le genie prati- que deMongeau g^nie transcendant de Laplace. Ilestimait, certes, beaucoup le second. Mais il n'aimait pas qu'un savant se renfermclt toujours en lui-meme et ne fut abordable qu'aux inities. Faire avancer la science 6tait sans doute un grand merite , mais la r^pandre dans le peuple 6tait a ses yeux un m^rite plus grand encore. Aussi, combien u'eHd-il pas apprecid M. Arago, voire illustre col- legue, qui possede a un si haul degri ces deux facultes si difficiles a rencontrer dans le m&me homme: Hre le grand prStre de la science, et savoir initier le vul- gaire d ses my sieves ! 68 COSMOS. Cette leltre, exfr^mement remarqiiable, comme presque tout ce qui se trouve dans les trois volumes intitules OEuvres de Louis-Napoleon Bonaparte , se termine ainsi : Si cette leltre ne repond pas enti^rement aiix questions que vous m'avez adressecs, vous y verrez cependant, je I'esp^re, un d6sir de faire quelque chose qui soit agieable a vous et a M. Arago, dont personne plus que moi n'admire le genie scienliGque. Ou nous nous trompons fort, ou M. Arago ne d^menagera pas de I'Observa- toire. L'exception se justifiera parl'exceplion meme. « Cette fois, comme dans tant d'autres circonstances , M. de Girardin a ete prophete. Le ministre de I'instruction publique et des cultes a fait la reponse suivante a la lettre que M. Arago a publr^e mardi matin dans deux journaux : « Monsieur, « En vous excusant, le 9 mai, sur I'etat de voire sanle, de ne pouvoir vous ren- dre, avec vos confreres du bureau des longitudes, a la convocation que j'avais faite pour ia prestation du serment, vous m'aviez aulorise a penser que vous ne d^clineriez pas une obligation imposee par la Conslitution a lous les fonction- naires publics. « Voire seconde leltre, qui porle la meme date el quej'ai re^ue posterieure- menl, ne me laisse pas cette esperance. Sans m'arreter au changemenl de Ian- gage qu'il esl impossible de n'y pas remarquer, et aux termes peumesures que j'ai ele surpris de renconlrer cette fois sous voire plume, j'aidu prendre lesordres du prince avanl d'accepter voire demission. Le President de la republique m'a autoris4 a admettre une exception en faveur d'un savant donl les travaux ont illustre la France et dont son gouvernemenl ne veut point attrisler I'existence. La publicile donnee a voire leltre ne changera rien a la resolution que je m'ho- nore de vous Iransmettre. « Recevez, monsieur, I'assurance de ma consideration dislingu^e. « H. FORTOUL. » Comme nous voulons, dans ces circonstances si delicates, nous reduire au r61e de simple historien, nous emprunterons a M. de La Guerronniere son appre- ciation de la leltre de M. le ministre de rinstruction publique : « Nous enregislrons avec bonheur cette noble reponse. Eii lisant la demission de M. Arago nous pensions qu'elle ne serait pas accepl6e. Ce que nous pensions, ce que nous esperions, nous ne devions pas le dire avanl de laisser au prince le temps de prononcer. C'est souvenl de la justice de supposer la grandeur d'ame, c'esl toujours de la presomption de la conseiller. « Le prince President a done dispense M Arago du sermenl que les scrupules du republicain refusenl a I'eiu de hull millions de suffrages. La science el la conscience appiaudiront a ceile decision. M. Arago a rendu d'immenses elgio- rieux services qu'il n'avait pas besoin de rappeler pour qu'oh s'en souvint. Son serment, ses opinions peuvent appartenir de preference a tel ou tel parti ; mais COSMOS. 69 son nom, son talent, son experience appartiennent a tous les gouvernements car ils appartiennent au pays. Louis-Napoleon i'a compris, et il n'a pas voulu laisser au savant dont s'iionore notre epoque, le pretexte d'une retraite qui eut ete une parte irreparable. II a respecte une superioritc r(5elle jusque dans une hoslilite avouee. Un tel precede est a I'honneur de la politique qui I'a inspire, et de la science dont il consacre rinvioIabilil6. » Nomination. — L'Academie des sciences a elu, dans sa seance du 11 mai 18b2, correspondant de la section de mecanique, M. Fairbairn, en remplace- ment de M. Brunei, decede. Les candidats presentes par la section etaient : en premiere ligne, M. Fairbairn, a Manchester; en deuxieme ligne, ex wquo, M. E. Hodglcinson, a Londres, M. Willis, a Cambridge; en troisieme ligne, M. Weisbach, a Freiberg (Saxe). Sur 45 votants, M. Fairbairn a obtenu 37 suf- frages, 3 bulletins ont porte le nom de M. Stephenson, 2 celui de M. Willis; il y a eu 2 billets blancs. M. Fairbairn est un des plus eminents ingenieurs de I'An- gleterre ; ses gigantesques experiences sur la resistance des metaux et la part glorieuse qu'il a prise a la construction du fameux pont tubulaire qui joint I'An- gleterre a I'lrlande, lui ont conquis une reputation europeenne. Physique du globe. — M. d'Abbadie avait remarque, des le mois d'avril 1 837, pendant un voyage qu'il fit a cette epoque au Bresil, que des niveaux a bulla d'air accusaient de petites voriations dont la somme montrait une niarchedela bulle d'environ 6 a 10" vers le sud. Depuis, en France, il a eu occasion de faire maintes fois des observations semblables. En Abyssinie aussi il a remarque le mdme fait, notamment a Adwa par 14" 10', et a Gondar par 12" 36' de lati- tude nord, en se servant des memos niveaux qu'au Br6sil. Dans tous les cas ces niveaux etaient places sur des murs ou constructions en maoonnerie tres- solides. De retour de ses voyages, M. d'Abbadie a voulu poursuivre I'etude de ce ph6nomene, ce qui lui a paru pouvoir etre fait convenablement dans son cha- teau d'Audaux, situe pres de Navarrins, dans le departement des Basses- Pyrenees. Ce chateau contient, en effet, une cave longue de 8'", large de 3" 7, bStie sur le roc, et dont la voute est isolee des murs exterieurs qui ont d'ailleurs 0,80" d'(5paisseur. Ces dispositions offraient des garanties centre les variations dans la temperature exterieure. Voici comment il a experiments : le 24 juin 1849 les niveaux furent poses sur un bloc de grSslongde 0,70, ayant 0,26 d'e- paisseur. Afin de contr61er les resultats, deux de ces instruments construits a Munich furent places dans le mSridien et deux aulres dans le premier vertical. Observes alors, ils furent laisses en place ; quand on les observa de nouveau, le 19 decembre de la mSme annee, ils ne donnaient plus les mSmes indications : les bulles avaient marche en sens inverse. M. d'Abbadie ayant attribue ces anomalies a des causes exterieures, remplaca alors ces niveaux par d'autres plus sensibles et renfermes sous des toits de verre qui embrassaient les niveaux sans les toucher : il continua a les observer quatre fois par jour jusqu'au 25 mars 1850. Bien que cette suite d'observations offre des journees enlieres oii les po- sitions des centres des bulles ne varient pas, m§me par des changements de temperature, il y a eu en general des variations tres-appreciables , et la bulle placee dans le meridien marcha vers le sud jusqu'a la fin de mars. Du mois 70 COSMOS. d'avril au mois de septembre la niarche generale, au contraire, i'ut vers lenord, et d'environ i". Pendant ce m6me intervallo la bulle du niveau plac(5 dans ie premier vertical s"6lait avancee de 0"8 vers Test. Jusqu'alors Ic bloc de pierre quisoutenaitles niveaux avail ete seuleinent pos6 surlesol. En septembre 1850,M.d'Abbadie filfouiller jusqu'au rocher; Iem6mo bloc fut scelle sur un massif de maconnerie, eton y repla^a les niveaux. En sep- tembre -ISol , M. d'Abbadie choisit deux de ces instruments provenantde chez M. Repsold, de Hambourg, qui s'etaient montr^s jusque-la d'une regularitc par- faite , et les enferma entre trois glaces , dont deux etaient i^tam^es, afin que la reflexion de la lumiere permit d'observer la bulle a distance. Du 25 novembro 1851 au 14 Janvier 1852, la bulle du niveau place dans le m^ridien s'avancade 3", 2 vers le sud. Dans le premier vertical, la variation fut de 5", 3 vers Test. Pen- dant les quatre derniers mois de 1851 les plus grandes fluctuations partielles eurent lieule 18 d^cembre 1851 dans le meridien, et alteignirent, dans I'espace de quinzeheures, 1",3 vers le nord, et 1",6 vers lesud. Dans le sens duparallele il y eut des oscillations vers I'ouest de 5",1 le 25 novembre, et de 1",4 le 28 de- cembre. Les 2G novembre et 12 decembre la bulle s'est avancee, au contraire, de 1",7 et de 1",8 vers Test. Pendant tous ces mouvements le thermom^tre, qui 6tait soigneusement consult^ chaque fois , n'accusait pas la moindre variation dans la temperature. Maintenant que conclure de ces observations, en les supposant a I'abri de toute erreur? Doit-on attribuer ces fluctuations de la bulle a des phenomenes dependant de la construction memodesniveaux, du verre, de Tether employes a les construire? Ne faut-il pas plutot admettre qu'elles sent produites par des fluctuations dans I'ecorce du globe, par des mouvements lents qui s'y produi- saient tant6t dans un sens tantot dans un autre? M. d'Abbadie adopte cette der- niere explication. Plusieurs phenomenes %eologiques, dit-il, demontrent que les couches superficielles du globe terrestre sontsujettes a des changements de forme s^culaires : il n'y a qu'un pas de la a des changements de periodes bien plus courtes et qui peuvent se rapporter aux actions du soleil et de la lune. Mes ob- servations de niveaux, continue-t-il, ont signale d'ailleurs des phenomenes qui se laissent bien expliquer par la flexion du sol sous un poids d'eau considerable. Ainsi lors du mascaret que je suis alle observer a QuillebcEuf le 1 9 mars 1 851 , la bulle du niveau s'61oigna du fleuve de 1"5, peu apr^s le passage de la masse d'eau. A Audaux j'ai fait une observation analogue : a 200 metres a I'ouest de la cave dont il a ete parl6 plus haul, est le lit du gave d'Oloron. Le 23 no- vembre 1851 les bulles des deux niveaux places dans le premier vertical avan- ^aient progressivement vers Touest. Dans la nuit du 25 au 26 une pluie abon- dante fut suivie d'une crue extraordinaire; des huit heures du matin les bulles des deux niveaux commencerent a s'avancer vers Test; et ce mouvement, qui continua jusqu'au 27 novembre a six heures du soir, pent parfaitement s'expli- quer, en supposant que le poids extraordinaire de I'eau aurait abaiss^ le lit de la riviere, et par consequent aussi la rive qui est connexe a ce lit. Le mouvement total de la bulle fut de 4".... M. d'Abbadie tient de M. Biot un fait analogue qui s'est presents a lui pendant les observations astronoojiques qu'il faisait a Padoue. COSMOS. 71 On conQoit que si le deplacement de la bulle des niveaux n'a point d'autre cause que des mouvements ondulatoires dans I'ecorce terrestre, ces instruments pourrontetre tres-avantageusement employes pour robservation, non-seulement des tremblements de terre, mais encore des moindres ondulations du sol ; et M. d'Abbadie donne comme preuve plusieurs observations qu'il a faites dans ce but. Nous y reviendrons bientot. AsTRONOMiE. Dans le groups des dix-septpetites plan^tes qui sont entre Mars et Jupiter, nous avons annonce la dix-septieme , decouverte par M. Robert Luther, le 17 avril dernier a Tobservatoire de Bilk, pres Dusseldorf. Cette pla- nete, designee par la lettre p dans la notation de M. Babinet, n'a pas encore regu de nom mythologique ni de symbole representatif. Cependant les astro- nomes et les calculaleurs ont deja pu determiner approximativement ses princi- paux elements. Sa distance au soleil est a peu pres deux fois et demie la dis- tance deJa terre au soleil, ce qui la place entre Parthenope et Astree. La seizieme qui a ete decouverte par M. de Gasparis, le 17 mars dernier, et qui serait designee par la lettre it, a et6 ^galement observee un assez grand nombre de fois, pour qu'on ait pu calculer son orbite approchee. Sa distance au soleil serait environ trois fois et quatorze centiemes celle de la terre. C'est une des plus eloignees du groupe, car cette distance n'est surpassee que par la distance d'Hygie, qui est trois et dix-huit centiemes. La planete t est la cinqui^me que nous devions a M. de Gasparis, de Naples : il est juste de dire qu'elle avail et6 aussi apergue, puis perdue, par M. Hind, qui , du reste, ne dispute en aucune maniere a M. de Gasparis la priorite desa decouverte, pas plus que M. de Gas- paris n'aeleve de conflit snr la possession de la planete Irene qu'il avait trouvee de son c6te tr^s-peu de temps apres M. Hind , et sans avoir eu aucune connais- sance de I'observation anglaise. La plus rapprochee du soleil dans le groupe en question est Flore , dont la distance est un peu plus de deux fois la distance de la terre. On voit qu'en tenant compte des inclinaisons et des distances ces petites planetes peuvent se mouvoir a I'aise et sans collision dans I'espace tres-^tendu ou s'op^re leur mou- vement. Les temps de leurs revolutions, d'apres la loi de Kepler comme d'apres I'observation , sont aussi fort differents , car Flore fait le tour du soleil en 1193 jours, tandis que Hygie en emploie 207b; c'est a peu pr6s 3 ans et 3 mois pour Flore et 8 ans 8 mois pour Hygie. Ce serait du reste un phenomene bien curieux mais peu probable, quoique nullement impossible, que la rencontre et la reunion de deux de ces petits astres. Agriculture. — Le ray-grass d'ltalie (lolium italicum), n'est pas encore assez gen^ralement repandu, et n'est pas meme apprecie autant qu'il le merite, tanl a cause de ses qualites nutritives qu'a cause de sa prompte crois- sance. II atteint en effet dans la premiere annee de I'ensemencement sa hauteur nor- male, qui est de 130 centimetres. II est tres-feuilie et fournit un excellent founage pour les chevaux et pour les betes a cornes ; mais pour ces dernieres il est bon de le faire passer par le hache-paiile. * 72 COSMOS. Cette planle se recommande principalement pour les prairies que Ton veut rajeunir, parce qu'elle fournit des la premiere ann^e du fourrage en masse, ce qui n'est point le cas pour les aulres especes de ce genre. Onajoute au lolium italicum d'autres graminees, tellesque : le loliumperenne, la poa trivialis, \apoapratensis, Vauihoxantum odoratum, Valopecurus j^raten- sis, \e phleuin praiense, Vavena elalior, la festuca pratensis , la dactylis rjlo- merata. le broinus giganteus, et quelque peu de trefle rouge et blanc. Une quinzaine de jours apres I'ensemencement , la prairie presente un ta- pis vert d'un luxe de vegetation remarquable, et lors de la fenaison, I'herbe ^tait si 6paisse qu'il a fallu quelquefois en faire transporter environ la moitiesur une autre prairie, afin de pouvoir la faire retourner ets^cher. Le lolium italicum iie vit que pendant trois ans, et a la fin de cette epoque il commence a degenerer; mais, pendant ce temps, les aulres graminees ont le temps de croitre et d'atteindre leur hauteur naturelle. Lors de I'ensemencement, il est essentiel de ne point m^ler le tout ensemble , car parmi ces graines il en est de plus pesantes les unes que les autres , et si eiles etaient versees toutes dans le meme sac , les plus lourdes lomberaient au fond a chaque pas du semeur. Le5 graines pesantes sont : le phleum pratense et les trefles ; elles doivent etre semees separ6ment. Toutes les aulres sont du meme poids et peuvent etre melees et semees ensemble. Lorsque le tout est seme, il faut ratisser legerement et ensuite passer le rouleau. [Observation de I\L Ottman pere.) F. MOIGNO. DE l'IMKKIMEIUE OK CUAPELET , HUE DE VAUGIftAt'.D , 9. COSMOS. 73 PHOTOGRAPHIE. J. La photographic a tcnii sa place dans la splendide fclc reli- gieusc et inililaire dii 10 mai. M. Macairc, donl la Lumicrc de M. de Monloil a celehre rhahiletc, el qui produit instantanement de si J)cllcs epreuvcs, avail re^u, disail-on, line mission officiellc, et avail dleve, dans I'intcrieur dii champ de Mars, iin charmant pavilion tres-bien situe, d'oii 11 pouvail viser et sur I'aulel et sur I'eslradc du prince president. Mais, hclas! dans la matinee un ordre impiloyable a fait enlever le pavilion , et nous ne savons pas ce que M. Macaire est devenu. M. Thompson aussi, oriiciellement designe on acceple, avail etc plus prudent, il avail fail elever son eslrade sur le terre- plein , en dehors de I'enceinle reservee , el elle a 6le respectee. II a oblenu d'admirables vues de la ceremonie, et il a pu offrir au prince president deux epreuves parfaites , qui eterniseront le souvenir de cetle grande solennile. Armc d'appareils giganlesques construils par M. Plagnol, el qui laissent bicn loin derriere eux pour la grandeur tout cc qui a etc fail en ce genre, en Allemagne, en Angleterre et en Amcrique, M. Thompson a essayc une vue de la grandeur de qiiatre plaques enlieres ; la poussiere soulevee dans le champ de Mars I'a uialheureusement obscurcie quelque peu, mais elle n'en restera pas moins un monument elevc a la gloire de la photographic, de Niepce el de Daguerre. M. le baron Gros avail oblenu d'installer son appareil photogra- phique dans la galerie de pierre qui couronnc le pavilion central de I'Ecole inililaire, mais on ne pouvail arriver a cetle galerie qu'en marchcanl sur les toils , et sa distance de I'aulel du champ de Mars etail beaucoup Irop grande pour qu'on put obtenir de belles eprem es sur demi-plaque el plaque enliere. M. le baron Gros I'a done abandonnce el il est alio se placer h. cote de M. Thompson. De la, avec celle habiletc et ce bonheur si grand donl il a donne tanl de preuves , el qui lui onl fait conqu^rir les innombrables chefs- d'oeuvre qui ornenl son incomparable collection , il a reproduit les diverses phases de la grande fete religieuse et mililaire a laquelle il raltachera son nom , comme son illuslre pere raltacha le sien au.\ solennites el aux vicloires de I'empire. M. Jules Duboscq, avec quelques amaleurs, etaitreste forcement dans la galerie de pierre , qui lui offrait seule assez d'etendue pour pouvoir prendre sous des angles diff^rents les vues qu'il voulait montrer en relief dans le stereoscope. Mais rinconvenient de la 23 MAI 1852. 4 74 COSMOS. trop grande distance, prdvu par M. le baron Gros, ct rinipossibilild de se procurer ^ temps dcs ol)jcctifs ayant h la fois ct uu long foyer et nnc prandc puissance illiuninatrice, onl paralys(^ ses efforts, Lcs peliles epreuves que nous avons vnes nc reniplissent qu'impar- iiiitcnient le grand but que nous voulions atteindre. Combien cut etc magnifique ccpendant I'cffet produit dans le stereoscope par le spectacle iniposant que presentait le champ de Mars au moment de r(31e\ alien ou de la benediction des drapeanx ! II. Cette circonstance a ramene notre attention siu' la neccssilc ab- soluc et trop oubliee des perfectionnements ([ue reclanient les appa- rcils optlques de la photographic. C'est une excellcnte chose, sans doute (pic de Iravaillcr activcment a rendre dc plus en plus sensible la couclic impressionnable sur laquclle doit s'exercer Taction de la lu- micre; mais Taction qui fait naitre Timage dans un temps plus ou moins court, ne depend pas seulemcnt de la scnsibilite de la cou- che, cite depend au nioins autant du pouvoir eclairant de Tobjectif. Nous nous rappelons qu'il y a cinq ans, M. le professeur Petzval, de Viennc , auquel les objectifs allcmands dc Voigtlander doivent tout leur nitrite , lut dans une des reunions de la Society des amis des sciences naturelles , une note tres-curieuse qui nous a toujours preoccupe, sans que nous ayons pu nous procurer encore les details nccessaires pour lui donner une grande publicity. II s'agissait du problenie d'optique que M. Petzval a]ipelle le probleme de I'ilhimina- tion, Beleuchtungs probleme. Le geometrc avail amene avec lui ii la seance un photographe cclebre, M. Posch; et il Tinvita ^ produire dcvant la savante assemblee plusieurs Epreuves avec un appareil nou- veau construit par Weibcl, de Viennc. Les courbures et les distances des verres de cet appareil photographique ct plus particulii^renicnt encore celles des verres de la partic de Tappareil que Ton appelle illu- minateur, avaient ele calculees avec le plus grand soin par le cclebre mathematicien : la quantile de lumiere qu'il donnait ou son pouvoir Eclairant depassait dans une proportion enorme tout ce qui avail ct(5 obtenu jusque-la. On mesura seance lenante par un proc<5d6 photo- m(5trique expeditif , Tinlcnsitc du faisceau lumineux que Tappareil projetait sur un (5cran, et tout le monde constata qu'elle equivalait a plus de six mille bougies st^ariques; on operail ccpendant a la lu- miere diffuse. Nous avouons nc rien comprendre a cette merveilleuse condensa- tion dc lujnicre, qui constitue a cllc seule une brillanle decouvertc. M. Posch opera cnsuite, ct les dpreuves parfaites qu'il oblint cxcile- rcnt I'admiraliou uuiverselle. COSMOS. 75 Dans une autre seance dc la menic Soci^t^, le 18 juin 1847, M. Petzval lut une note trop courte sur la construction des instru- ments d'optique, et en particulier sur les travaux qu'il poursuit de- puis plusicurs annees et qu'il a amends Mjonne fin. Cen'ctait quele prelude d'une tongue scrie de memoires dont rien n'est encore par- venu jusqu'u nous. Nous savons seulement que les nouvelles rccher- chcs diffeient totalemcnt de cclles des gdometrcs anterieurs ; que M. Petzval a vaincu completemenl toutes les difflcull6s ; que I'influence des cpaisscurs des lentilles, de leurs distances, des aberrations de sph6- ricite et de refrangibilite qui ont defie le gc^nie et cpuise les forces des Euler, des Lagrange, des Biot.^etc, n'arretent jamais M. Petzval; et que, dans tons les cas, au lieu de venir se briser contre quelqucs tlK^^oremes generaux et vagues, il arrive constammentadesnombres que I'arlislc pent mettre en oeuvre immediatement. Objectifs dc grandes dimensions pour I'astronomie, objectifs moindres pour la pliotograpbie , objectifs microscopiques , M. Petzval embrassc tout dans ses toules-puissantes formules. L'impossibilile d'arriver enfin a les connaitre et a les appliquer, est pour nos artistes fran(;ais , une veritable calamitc, que M. Sccretan exprimait 6nergiquement I'autre jour en disant que le cbagrin de rester etranger a cet etonnant progres troublait le rcpos de toutes ses nuits. Quelle cruelle necessite, a une epoque surtout ou les maticres premieres parfaites surabondent, ou I'art cree cbaque jour de grandes masses de crown-glass et flint- glass d'une tres-grande purete, que d'etre forc6 de marcher a tAtons, pour ne pas dire a I'aveugle, que de remettre cent fois un immense objectif sur le tour, que de I'user sans cesse quelqucfois jusqu'a le metire hors de service, avec une pertc considerable de temps et d'ar- gent, quand on sait que les artistes de Vienne sont en possession de nombres qui leur permettent d'operer promptement et presque a coup sur ! Emu par les plaintes qui retentissent autour dc nous, nous allons tout mettre en oeuvre pour nous procurer enfin les memoires du geometre autrichien. Nous sommes heureux , en attendant, de pouvoir annoncer aux pbotographes fran^ais qu'il ne tient qu'u eux d'entrer sous le rap- port des appareils dans une ere loute nouvelle. Posons d'abord cette question : les objectifs allemands sont-ils vrai^ ment superieurs aux objectifs fran^ais ? Beaucoup de pbotographes disent que oui; quelques-uns , et des plus exerccs et des plus com- p(5tents, disent que non. M. de Br6bisson entre autrcs donne la pre- ference aux objectifs composes de M. Charles Chevalier. Coinmc les objectifs fran^ais coident beaucoup moins cher, on les retrouve 76 COSMOS. partoul el en grand nombrc : il faiit prcsquc elrc riche pour pou- voir s'accorder un objcclif allcmand do grandc ouverturc, cl on n'en rencontre en general que dans les ateliers dcs amateurs ou chez les artistes qui out une nombreuse clientele. Or, la verile est que lors([ue ces derniers veulent fairc beaucoup de bcsogne, operer ra- pidemcnt et a coup sur, ils sc servent constamnient de Icur objectif allcmand, qui est leur veritable cheval de balaille, ct laissent dormir dans la poussierc leur objectif fran^ais. Ce fait ne sulTit-il pas a lui seul pour mettre bors de doute une superioritc relative incontes- table'/ Les objectifs allemands, tels qu'ils nous sont offerts aujourd'hui a des prix excessifs , ne sont cependant pas, gardons-nous de le croire, le dernier mot de I'optique, et nous nous batons de signaler les perfectionnements urgents qu'il faut absolumcnt r^aliser. 1° Les objectifs allemands out un foyer beaucoup trop court, etla difference entre Taction du centre et des bords est beaucoup trop grande. lis semblent fails expres pour le portrait, et des qu'il faut prendre des images d'nne grande distance, ils refusent le service. 1° Les objectifs allemands ne peuvenl donner, quand il s'agit de vues ou de monuments, que de tres-petilcs images; et il n'est au- cun pbotographe qui n'ait regrette mille fois, quand il braquait son appareil sur un edifice monumental, de ne pouvoir faire varier a volonte la grandeur de I'image sans deplacer sa chambre obscure. 3° Les objectifs allemands out un cbamp beaucoup trop reslreinl, et Ton ne pent parvenir, comme aussi avec tons les objectifs con- nus, a prendre une vue panoramiquc, qu'en recourant ci I'appareil ingcnieux, 11 est vrai, mais dispendieux et d'un emploi difficile, invente par M. Martens , et conslruit par M. Lerebours. En resume, ce qu'il faut creer, bon grc mat gre, pour repondre aux bcsoins de la pbolographie , ce sont des objectifs qui 1° per- raettent d'obtenir dcs images plus ou moins grandes en restant tou- jours ala meme distance de I'objet (a la distance la plus convenable pour une reproduction conforme aux regies de I'arl), et par un sim- ple allongement tres-petit de la cbambre obscure; qui 2° aient sen- siblemcnt la meme puissance d'action sur les bords et vers le centre; qui, 3° sans aucun appendice mobile, sans qu'il soil necessaire de diapbragmer, de courber et de fairc tourncr la plaque sensible, don- nent h la fois I'imagc d'un tiers au moins de I'horizon ou d'une zone de 1 20 degres , de telle sorte qu'on puisse en trois operations embras- ser I'horizon entier. Voili bien certainement le progres et presque le beau ideal. Mais COSMOS. 77 ceprogres n'est-ilpas impossible a atteindre? Nous ddsespererions, nous aussi, de le voir jamais realise, si nous en jugions par ce que Ton a oblenu jusqu'ici ; si nous n'avions pas en main et sous les yeux les preuves irrecusables de sa possibilite. 11 est si possible, que nous osons dire aux photographes qu'il ne tient qu'a eux d'entrer en possession avant trois mois dcs merveilleux apparcils dont nous venons de decrire les avantages inesperes. Ce serait faire injure h I'esprit bumain que de penser que , parce qu'un probleme a defie pendant dcs siecles la penetration des sa- vants etl'babiletedes opticiens, it est par lameme insoluble. II n'en est rien, et le triomphe de M. Pelzval le prouve surabondamment. Mais voici un second excmple qui nous ramenera immcdiatement au su- jet que nous traitons. On a toujours cberchc, depuis I'invention des lunettes, ;i mesurer les distances a I'aide de micrometres ; mais on a toujours echoue , on n'a jamais atleint I'exactitude sur laquelle on comptait , parce que la variation dc la distance locale dans le pas- sage des grandes distances aux petiles, d'un ceil myope ci un ceil presbyte, allerait forcement les rapporls de grandeur de I'objet et de I'image , et rendait inexactes les indications micrometriques. II y avail done la un veritable nffiud gordien. Or, M. Porro I'a compld- tement trancbe par la construction de sa lunette anallatique h quatre verres, qui laisse rigoureusement invariable le rapport de grandeur entre I'image et I'objet, malgre la variation de longueur necessaire pour I'accommoder aux differentes distances et aux dif- f^rentes vues. Le succes est si complet que la nouvelle lunette fait d6ja partie de I'enseignement des ponts et chaussees, des mines, de I'etat-ma- jor, etc. , et qu'elle est employee par un grand nombre d'ing6- nieurs. Ce premier probleme resolu , M. Porro en a aborde un autre tout oppose , mais non moins difficile ; il s'agissait au contraire de rendre variable suivant une loi donnee , ce nieme rapport de grandeur entre I'image et I'objet, en laissant complctement immobile le foyer ou le lieu ou se forme I'image : on ne pouvait arriver que de cette ma- niere a realiser des perfectionnements grandement desires ; a obte- nir, par exemple , par une lecture direcle , les distances topogra- phiques reduites a I'borizon et vues dans une lunette inclinee. Execulee aussi, et grandement appreciee, celte seconde lunette s'est appelee sthenallatique. Or, reduite a son objeclif , elle s'applique immcdiatement a la photographic et realise completement le progres que nous avons formula en ces termes : faire varier la grandeur de 78 COSMOS. I'image u la voloiil(5 dd'opth-atcur, en reslant h la m6mc distance de rol)jct, et par un allongemenl do la chanibre obscure Ires-pefil com- parafivement a I'amplification dc rimage. Voil^ done line premiere conqu^le authontiqucment confirmee. Le 28 juillet 1850, MiM. Vaillat ct Thompson , dontnoiis invoquons en toute confiancelc temoignage , prirent chez M. Porronnc grande serie d'epreuves, que nous avons vues, qui furcnt monlr(5es fi rAcadomie, et qui repr^scnlaient toutes les phases dc I'Mipse de soleil. Le diameh'e dc ces images avait 83 millimeU'cs, el pour atleindre celte grandeur , il aurait fallu , a molns de grossir par des oculaires, un objecUf a paysages de 8 metres et demi de foyer! Et cependanl I'objectit avcc lequel ces habiles photographes opcrerent n'avail que 75 centimetres de longueur. Mais c'6tait un de ces objeclifs sthenallatiques dont nous venous de paiier; mais il ctait de phis bi-aplan6tique. II est toujours \h pour prouver que Ton pent des aujourd'hul prendre les monuments de loin et oblenir des images de grandes dimensions avec des chambres obscures ordinaires, Reste done a construire des objeclifs qui agissent cgalemenl par le centre et par les bords, et qui soient vraiment panoramiques. Pour y parvenir, U. Porro a suivi une tout autre voie; il a eu I'heureuse idee de reprendre pour les appliquer a la photographic les objeclifs liquides du docteur Blair, excellents en eux-memes, et qui supportent une tres-grande ouverlure; mais d'un emploi difficile en astronomic, a cause des alterations rapides el de la coloration du liquide refringent. Dans un observatoire , ce qu'il faut avant tout c'est un instrument invariable, toujours pret h fonc- tionner, et qui n'exige aucune manipulation preparatoire. Dans un atelier de photographic, c'est toute autre chose; employer un liquide an lieu d'un verre, c'est ajouler simplement un flacon a scs flacons : vider el remplir de nouveau robjeclif tous les huil ou tous les quinze jours, c'est s'imposer une manipulation de plus sur cent ou mille. 11 n'y a done la rien qui effraye ' El s'il est vrai, comme on n'en peut plus douter, que le champ entier d'illuminalion des ob- jeclifs liquides est uniformement dair , et Timage uniformement nelle, a cause du grand pouvoir r6fringcnt du carbure de soufre; s'il est vrai surloul quo les objeclifs liquides sont rdcllcment des objeclifs panoramiques, capables de reproduire d'un seul coup lo liers de I'liorizon, comme M. Porro s'en est assurd par dc nom- breuses experiences, avant de s'assurerla propri(^t(^ de cette nouvelle application, nous ne comprendrions pas que les photographes puis- COSMOS. 79 sent h(5siler encore h se cr6er dc nouvelles el si pr(5cicuses res- sources. Celtc discussion d(5montrejusqu'ul' Evidence que Ics avantnges con- siderables dont nous parlions sont non-seulemcnt realisables , mais realises. Pour produire en grand nombre et rendre accessibles ?i tous Ics trois nouvcaux objectifs : 1° a images de grandeur va- riable et d^passant de beaucoup la portee des objectifs actuels ; 2° i\ image parfaitement 6gale au centre et sur les bords ; 3° ci images panoramiques; que faudrait-il maintenant que tout est calcule, dd- termine, essaye, eprouve? TJn outillage. Et pourcet outillage? L'ac- cord de viugt pbotographes de profession , ou de vingt amateurs de photograpbie qui avanceraient le tiers de leur commande. Ou mieux la volonte forte d'un sent homme., ami ai'dent du progres, jaloux de la gloire de la France. Nous n'ajouterons rien de plus, sinon que ce qui a permis a M. Porro de construire a coup sur les verres de ses objectifs sans avoir besoin de recourir a des retoucbes indefmies, ou a ces accou- plements successifs de lentilles de flint et de crown , qui supposent un assortiment enorme, c'est la decouvei'te de moyens entierement nouveaux de constater et d'opdrer I'acbromatisme, moyens d'une simplicilc extreme, que nous nous reservons de faire connaitre plus tard , autant qu'il faudra pour ne pas nuire a la propricte de I'inven- teur. Nos lecteurs apprendront avec joie que le stereoscope grandit tou- jours, qu'il a pris des formes toutes nouvelles qui lui ouvrent un cbamp nouveau et rendent possibles des applications d'une portde imprevue; que les pbotographes ne suflisent pas a la production des images stereoscopiques que I'Angleterre, I'Allemagne et la France se disputent presque avec une (5gale ardeur; qu'un nombre tres- considerable d'epreuves positives sur verre transparent, dont I'effel est si merveilleux, reproduisent dt\jci, avec une verite incroyable, presque tous les monuments de la capitate. Ainsi, par exemple, la collection de M. Jules Duboscq comprend la place de la Concorde avec les fontaines versant leur eau , et la Madeleine dans le loin- tain il'Hotel de Yille de Paris, vu du quai; la place du Cbatelet; une vue debcieuse du chevet de Notre-Dame de Paris; I'dglise de Saint -Etienne du Mont; la basilique de Saint- Vincent de Paule; une vue des quais de la Seine, prise du pout des Saints- Peres ; la place du Cbatelet ; I'eglise de la Madeleine ; le Pantbeon , ou Sainte-Genevieve; la place et la colonne Yendome; une vue ad- mirable du Pont-Neuf et de la statue de Henri IV, prise du qual 80 COSMOS. Conli ; la cour dii Palais-Royal ; la cour dii palais des Beaux-Arts ; le caf(5 Morel, aux Cliamps-Elysces, Tare de trioniphc de I'Etoilc; la lour de I'llorloge , au Palais do Justice ; le portail de la cath6drale de Rouen ; le Palais de Justice de Rouen ; une vue d^licieusc de I'e- glise Saint-Oucn, a Rouen, etc., etc. Ces images, doubles pour le stt^reoscope , simples pour la lantcrne magique et la fantasmagorie , sont prcsquc autant de chel's-d'oeuvre dus a I'habilete et h I'ardeur infatigable de M. Ferrier. Quelle excellenle chose qu'un cliche sur verre albumin^, qui se transforme indefmiment en images positives aussitdt enlevces que produitcs! Quelle source de richesses pour la France que la photographic avec le stereoscope ! Et que le gouvernement fut bien inspire quand il desint^ressa Daguerre ! M. Arago a mis sous les yeux de 1' Academic plusieurs images pho- lographiques sur papier, que sir David Brewster lui a adressecs. La plus belle de ces epreuves , que nous avons sous les yeux grAce a I'o- bligeance du grand physicien, est une vue generate de la vilie d'E- dimbourg, comprenant I'^glise de Saint-Gille, la maison du gou- vcrneur, la prison cellulaire, le pont du Nord ou North-Bridge, la citadelle, le college des Trois-Eglises ou de la Trinity, three churches college; le monument de William Scott ; la rue des Princes, d'un de- veloppementa pertc do vue, etc., etc. Cette epreuve a 25 centimetres de largeur, ce qui est enorme; elle suppose unobjectifgigantesque; les bords de I'image sont malheureusement flous, ainsi qu'on de- vait s'y attendre; mais le centre est d'une grande beautc et d'une vigueur incomparable. Les amateurs s'extasieraient devant uue autre de ces images qui represente un Ironc d'arbre d6pouill6 et abattu sur un marais; elle a aussi 25 centimetres de largeur. La longueur de cet article nous force a renvoyer au prochain numero une notice sur le magnifique volume Egypte, Nubie, Pales- tine et Syrie, servant d'encadrement de texte aux dessins photo- graphiques do M. Maxime Ducamp, dontMM. Gide etBaudry entre- prennent la courageuse publication. VARIETES. I. On a essaye le jeudi 13 mai d'eclairer le champ de Mars au moyen de la lumiere electrique. Nous avons suivi dans tons ses details cette COSMOS. 81 grande experience et nous pouvons en parler en toute connaissance de cause. M. Jules Dubosq avail accepte de la tenter sur I'invitation de M. le ministre de I'interieur, invitation qui ne lui est parvenue que le mer- credi dans I'aprfes-midi : il a done ete pris tout k fait a I'improviste, et il n'avait reellement que quelques heures pour realiser un travail gigantesque. II fallait avant tout se procurer cinq cents elements de Bunsen pour former cinq fortes piles galvaniques. Or mfime a Paris , cinq cents elements sont difficiles a reunir en un jour! M. Duboscq aussi etait persuade qu'il reussirait beaucoup mieux en s'aidant des lentilles a echelons et autres appareils de Fresnel ; il employa done presque toute sa journee a solliciter de I'administration des phares quelques feux de port, sans assez reflechir qu'ils etaient construits dans un tout autre but. C'etait une mauvaise inspiration , et elle a eu pour effet I'avortement de cet essai grandiose. Si fort de ses seules ressources et se contentant de ses seules lampes electriques, il en avait allume six par le passage du courant au moment oti le feu d'artifice s'eteignait, une a chacun des angles de I'autel et deux sur les faces qui regardent rficole militaire et le pont d'lena , il aurait completement reussi , a la condition toutefois , car le vent etait tres-violent, que chaque lampe eiit ete enfermee dans une simple lanterne ou reverbere. Nous nous sommes assure en eflfet que deux lampes electriques eclairaient tres- suffisamment la largeur du champ de Mars jusqu'aux tertres. Nous sommes revenu de cette excursion scientifique attriste d'un insucces auquel on aurait du s'attendre, par cela seul qu'il etait impos- sible de faire la veille un essai sur place ; mais aussi console , parce qu'^ partir de ce jour nous regardons le probleme de I'eclairage par la lumi^re 61ectrique d'une etendue aussi vaste que le champ de Mars comme entierement resolu. Trois echafaudages de 8 metres de hauteur, de 4 metres de c6te, distribues a distances egales sur la longueur du champ de Mars , avec douze lampes electriques aux quatre angles, produiraient une lumiere au moins egale a celle d'un beau clair de lune. Et qu'on le remarque bien, ceteclairage serait incomparablement plus economique que celui des ifs et des lampions. La depense en effet pour chaque pile et cha- que lampe serait de 50 francs au plus, ce qui fait pour douze lampes 600 francs ; ajoutez a cela la paye de dix-huit ouvriers a 5 francs cha- cun ou 90 francs, vous aurez une depense totale de 690 francs, somme en realite tr6s-minime. Oserons-nous former un voeu? Le prince president a prouve par la fondation de son grand prix qu'il attachait une importance extreme g2 COSMOS. aux applications de I'electricite , et en particulier a I'eclairage electri- que. Quil daigne ordonner une grande revue du soir sur I'immense place du Carrousel dfes qu'clle sera entiferement libre; etsans I'encom- brer par aucune construction, des fenetres et des balcons des Tuileries et du Louvre, on I'eclairera parfaitement h la lumi^re eleclrique, sans grandes depenses. Celles des lampes 61ectriques de M. Duboscq, quel'on n'allumait pas pour la premiere fois, qui avaient etc rcglees et essayees, ont trfes- bien rempli leurs fonctions comme appareils fixateurs; nous n'oserions cependant pas dire encore qu'elles peuvent entiferement se passer de Toeil du maitre qui doit les suivre au moins de loin. Une de ces lampes avait ete installee dans un phare de premier ordre, au sommet de la tour de I'administration sur la butte de Chaillot. Abritee contre le vent par la lanterne, die ne s'est pas eteinte , et elle a admirablemenl fonc- tionne pendant pres de deux hcures. Elle projetait dans I'atmospb^re une large trainee de lumi^re qui effleurait de temps en temps les plainesde Montrouge. A. cette grande distance la lumiere electrique, condensee par leS appareils dioptriques et catadioplriques , avait en- core un vif eclat : on lisait dans les jardins les caracteres les plus fins. La disposition des appareils n'a pas permis de faire tomber le faisceau lumineux sur le champ de Mars; et nous le regrettons vivement, car au lieu d'un insucces nous aurions a constater un succ^s complet. L'ino-enieur des phares est si satisfait des resultats obtenus avec la lu- miere electrique, qu'il est arrete des aujourd'hui qu'a la premiere fete on installera sur le quai Billy, au bas du Trocadero, trois grands ap- pareils disposes expres et munis de lampes electriques, avec la certi- tude d'obtenir un eclairage qui ne laisse rien a desirer. Le phare mis en experience tournait sur lui-m^me au moyen d'un mecanisme d'hor- logerie, et la lumiere electrique, comme celle des phares des c6tes, etait tantot visible, tant6t eclipsee ; mais sa portee etait incomparable- ment plus grande. En resume cette premiere application de la lumiere electrique aux phares a ete si heureuse , elle a tant depasse les previ- sions des maitres de I'art, qu'elle amenera infailliblement et dans un court delai une application en grand sur quelques-uns de nos pro- montoires. Nous irons plus loin et nous affirmerons positivement, apres plusieurd experiences iaites dans les salons de M. le docteur Lardner, dont les soi- rees scientifiques sont si brillantes et si recherchees, que des aujourd'hui la lumiere electrique pent s'adapter parfaitement a feclairage des grandes salles et grands salons avec une veritable economic. Placee au sein d'un lustre dont les cristaux se touchent ou a peu pr5s, la lampe electrique COSMOS. 83 donne une lumi^re divisee d'un 6clat qui ne fatigue pas I'oeil et d'une blancheur parfaite, qui conserve aux objets leurs v6ritables couleurs. Peut-etre meme celte lumiere est-elle trop blanche et niontre-t-elle les visages avec trop de verite. La teinte un peu jaune des lampes, des bougies et du gaz se prete mieux a la coquetterie : mais que nos ele- gantes se consolent et ne s'irritent pas contre le progres ! Pour tout concilier il suffira de donner aux cristaux des lustres une nuance legerement jaunatre. II. Dans cette meme soiree du 13 mai , de dix heures a minuit , une grande partie du ciel vers le nord-est 6tait eclairee par une lumiere rouge tres-vive, qui preoccupaitbeaucoup les habitants de la rive gauche. Nous crumesd'abord que c'etaitune aurore bor^ale, mais nous soupQonnames ensuite , ce qui s'est confirme depuis , que cette lumiere etait le reflet d'un vaste incendie qui avait eclate dans le faubourg Saint-Antoine. Nous avons etudie cette lumiere avec le polariscope de M. Arago, et nous y avons decouvert des traces certaines de polarisation. Lorsque les nuages etaient ainsi lumineux par reflexion, il eut ete tres-facile, surtout s'ils avaient ete composes de masses isolees et bien circon- scrites', de determiner leur hauteur par des observations tres-simples. II nous a semble que la hauteur du nimbus ou nuage de pluie qui refle- chissait la lumiere de I'incendie ne depassait pas trois kilometres. METfiOROLOGlE OPTIQUE. PH^NOMENES NATURELS VRODUITS PAR LA REFLEXION ET LA REFRACTION DE LA LUMIERE, III. Rayons crepusculaires. M. Necker de Saussure a donn6 le nom de rayons crepusculaires aux faisceaux lumineux blancs ou colores qui p6nelrent dans I'at- mosphere a travers les (5chancrures des nuages (le plus souvent des cumido-stratus), interposes entre le soleil couchant et I'ceil de ^.-'-^PC'l' C^^f/f^_ robsefvateur. Quelquefois les arcs lumineux semblent rayonner du soleil et former une sorte de gloire de saint h lafges rayons (fig. 1), 84 COSMOS. et on les appelle arcs cr^piisciilaircs divcrgenls. Quelquefois, au contraire, mais bcaucoup plus rarcmcnt, ils so dcssinent sur le ciel comme de grands cercles qui vont sc couper (fig. 2) au point du Fig. 2. ciel diam^tralement oppose au soleil; on les appelle arcs cr^puscu- laires convergents. Cctte divergence et cette convergence ne sont en clles-memes rien de reel , puisque tons les rayons qui viennent du soleil a notre ceil sont sensiblement paralleles, et ne peuvent former enlre eux qu'un angle d'un demi-degr6 h peine; il y a done la une grande illusion optique, qui s'explique par cet effet bien connu de perspective qui nousmonlreconvergentes les deux rangdes paral- lels d'arbres qui bordent une avenue. Le phenomene des rayons convergents n'cst pas aussi rare que semblent I'indiquer les au- teurs qui en ont parl6 : nous I'avons observe un assez grand nombre de fois a Paris dans les deux ann^es 1850 et 1851. IV. Bandes polaires. On a designe, sous le nom de bandes polaires, une distribution particuliere de la lumiere qui dessine sur une couchc de nuages un arc en apparence circulaire et quelque pen semblable par sa forme et son orientation aux arcs des aurores boi'cales. L'^pithete de po- laire ne signifie pas que le point de convergence des bandes polaires soil le pole reel de la terre ou le pole magnetique; le point de convergence des bandes n'a rien de fixe dans le ciel. A Lyon , le phenomene des bandes polaires a regu le nom d'arcs de Sainl- Andr6 : ces arcs ne sont pas toujours formes par des zones conti- nues (fig. 1 ou 2), ou dessin^s par des espaces continus alternative- ment clairs et sombres : ils ne sont pas toujours nettement limit^s ; ils sont, au contraire, diffus comme des balayures, ou composes de flocons arrondis (fig. 3), align^s comme les grains d'un cha- pelet. Les bandes polaires sont ordinairement poussees par le vent dans le sens de leur longueur, quelle que soil d'ailleurs leur orien- COSMOS. 85 tation; mais leur marche est en general tres-lente, et leur 61dvalion est telle qu'elles ne sont pas affectees par les vents des regions Fig. 1,2,3,4. inferieures. Un mistral violent regnait a Valence, dit M. Fournet , et dans toute la vallee du Rhone, pendant que des bandes polaires d'une regularite parfaite stationnaient au-dessus de la ville avec une remarqiiable immobility , elangant leurs ramifications depuis le zenith des montagnes de I'Ardeche jusqu'au zenith de la plaine. Le 23 juin 1844, vers 8 heures 20' du soir, le ciel etant presque entieremcnt couvert, MM. Arago et Laugier virent se dessiner du c6t6 du sud , sur une couche presque uniforme de nuages , un arc en apparence circulaire (fig. 4) sombre, regulier, tres-etendu, qui ne continuait cependant pas jusqu'^ I'horizon, et qui devint de plus en plus noir et mieux defini : un arc blanchatre se forma bientot le long de la bordure interieure de Tare sombre , mais non dans toute son 6tendue : au-dessus et au-dessous de cette apparence, les nuages semblaient eprouver une agitation singuliere. Les deux arcs tou- jours contigus s'eleverent graduellement au-dessus de I'horizon, et atteignirent le zenith vers 9 heures; apres s'etre notablement affai- bhs, ils disparurent ensuite. Le meme soir, vers 10 heures 25', M. Fournet vit h. Condrieux, sur les bords du Rhone, des colonnes ou bandes polaires d'une blancheur et d'une uniformite remar- quables , regulierement espacees sur toute I'etendue visible du ciel , dont la partie ouest cachee par le mont Pila etait invisible , et qui, h Test, convergeaient vers un point situe du cote des Alpes. M. Arago croit que les arcs de Condrieux n'avaient rien de commun avec ceux de Paris, et que ceux-ci constituent un phenomene dis- tinct des bandes polaires, dont on n'avait encore cit6 aucun exemple. 86 COSMOS. COURRIER SCIENTIFIQUE. 1° NonTclles de France. Physique. — M. DespreU est bien certainement un des plus infaligables tra- vailleurs de I'Acad^mie des sciences, et si, moins ami de la science vraie que des nouveaut{5s et de la gloire, il ne se resignait pas a creuser un sol d(^ja ex- plore, mais trop mal connu, la somme de force vive qu'il depense le conduirait a de brillantes decouverles. Qu'il lui a fallu de courage pour consacrer de lon- gues anndes a I'etude de la pile, tant etudiee deja! II la considera d'abord comme foyer de chaleur, et s'armant d'appareils d'une puissance inouie , il parvinl a fondre et a volaliliser tous les corps connus, meme les plus refrac- taires, meme le carbone. Plus tard, la lumiere electrique I'occupa pendant plu- sieurs mois, il constala, ce que personne n'avait fait avant lui, sa nature con- stante par I'observalion delicate des raies , et montra comment son intensity varie avec le nombre des elements, et I'ordre dans lequel on les dispose. Dans un quatrieme memoire, il 6tudia la pile comme agent tout-puissant de decom- position chimique. Aujourd'hui, enfin, ce qui I'occupe, c'est la duree du cou- rant, sa Constance ou ses variations. Voici les conclusions de son nouveau memoire : « 1° Si Ton entend par pile constante unepile qui niarche un jour ou meme plusieurs jours en conservant une cerlaine puissance, toutes les piles a deux li- quides, et surtout la pile de Daniell, avec ses diverses modifications, sont a peu pres dans ce cas, pourvu que Ton rende la resistance exterieure assez conside- rable pour affaiblir I'intensite, et par suite le travail chimique interieur. « 2° Si Ton considere au contraire comme piles constantes celles qui ne chan- gent que d'un quart de degr6 ou d'une quantite moindre par heure, a une bous- sole des tangentes, dont le cercle a de 35 a 45 centimetres de diam^tre, les piles a acide nitrique de Grove ou de Bunsen doivent 6tre exclues. La pile de Daniell est la seule qu'on puisse considerer comme etant sensiblement con- stante, quand elie est charg^e comme nous I'avons indiqu^. Nous ne parlons pas d'autres dispositions de piles, nous ne nous en sommes pas occupe. « 3° La cause de rinconstance de la pile de Daniell quand la dissolution de sel marin n'est pas convenabiement etendue , reside particulierement dans I'in- crustation des vases poreux. La matiere incrustante tire ses Elements du sulfate de cuivre et du sel marin. « 4° Le sel marin , le sulfate de soude , le sulfate de zitic dissous en certaines proportions dans I'eau sont les mati^res qui nous paraissent les plus propres a rendre constante la pile de Daniell. « 5" La pile a deux liquides presents presque toujours des oscillations centre lesquelles on ne saurait trop se mettre en garde dans beaucoup de recherches. » M. Despretz s'est done arrete, pour le liquide a placer dans I'auge qui ren- ferme le zinc, a une dissolution saturee de sulfate de zinc etendue de son vo- lume d'eau; il suppose sans doute que I'auge qui renferme le cuivre est toujours COSMOS. _, 87 pleine d'une solution satur^e de sulfate de cuivre maintenue sans cesse, autant qu'on le peut , a I'^tat de saturation. Chimie. — M. Charles Gerhardt, I'habilecolIaborateurdeM. Laurent, etcomme lui , non pas novateur hardi, comme on semble le croire , mais reformateur intr6- pide et eniinemment habile , vient de donner une nouvelle et eclatante confirma- tion aux idees Iheoriques qu'il soutient depuis fort longtemps. La (heorie dua- listique admet I'existence d'acides anhydres dans les sels formes par les acides monobasiques de la serie organique. — Or, sices acides exislaientreellement, il devrait etre possible de les isoler en leur enlevanl un equivalent d'eau : or, c'est ce qu'ont essaye en vain les chimistes de toutes les ecoies; ils cnt echoue tou- jours et ils devaient echouer, par^une raison bien simple : M. C. Gerhardt prouve surabondamment par ses experiences et par ses calculs que ces acides anhydres, tels que les dualistes les ont concus, ne peuvent pas exister. — Ces composes impossibles , M. Gerhardt les remplace aujourd'hui par des composes reels , par la decouverte inattendue de loute uno serie d'acides anhydres renfermant deux fois les elements des acides monobasiques, moins de I'eau. Prenons pour exemple de sa maniere d'operer I'acide benzo'ique : II a chauffe a ISO" un melange de benzoate de sonde desseche et d'une quantite ^quivalenle de chlorure benzoVque; la reaction donne naissance a une solution limpide dont on eleve encore la tem- perature jusqu'a separation du chlorure de sodium. — Le residu , lave a I'eau et au carbonate de soude, a laiss6 une matiere blanche cristallisant en beaux prismes obliques, fusibles a 33", volalils, sans decomposition et parfaitement neutres, qui sont I'acide benzo'ique anhydre cherche. Sa composition peut etre representee par C'^H'^O'. L'eau bouiUante et les alcalis causliques hydratent promptement cet acide en donnant deux equivalents d'acides hydrates. M. Gerhardt a obtenu de m^me I'acide acelique anhydre C'H''0^ en chauffant du chlorure benzo'ique avec un exces d'acetale de potasse fondu : c'est un liquids parfaitement incolore, tr^s-mobile, tres-r^fringent, et d'une odeurextr^mement forte , rappelant celle des fleurs d'aubepine. Ces deux acides peuvent etre regar- d's comme des groupes doubles d'un memo corps, et on pourrait les nommer benzoate benzo'ique et acetate acetique. — II est impossible de les confondre avec les acides anhydres correspondant aux acides bibasiques , dont ils se dis- lingueut tres-nettement sous I'aclion des alcalo'ides. En remplacant le benzoate alcalin par un cinnamate , un cuminate , un salycilate de meme base , M. Ger- hardt a obtenu de nouveaux acides anhydres, mais cette fois a deux groupes, et qu'on peut appeler cinnamate, cuminate , et salycilate benzo'iques. — Ce sont des huiles sans odeur , plus pesantes que l'eau , insolubles dans ce liquide , mais que l'eau bouiUante converlit rapidement en acide cinnamique et acide benzo'ique , etc. Les nouveaux acides de M. Gerhardt sont, par rapport a ieurs acides hydrates, ce que les ethers sont aux alcools correspondants. S'il est vrai , comme on l' admet gen'ralement , qu'au point de vue moleculaire les al- cools et les ethers repr'sentent une molecule d'eau dans laquelle un ou deux atomes d'hydrogene sont remplaces par I'hydrogene carbone C^H." ou elhyle ; Tacide acetique hydrate et son acide anhydre pourront et devront 6tre con- sid'res comme une molecule d'eau dans laquelle un ou deux atomes d'hydro- 88 - COSMOS. geno seront remplac^s par le groupe CIl'O. Et ainsi disparaltra le privilege exclusif dont on grali6ait sans raison tin trte-petit nombre de corps compris sous le nom mal d^6ni d'alcools et d'^lhers. Ajoutons que, par un bonheur impr(5vu, M. Gerhardt a renconlr6 sur sa route un corps nouveau, I'oxychlorure de phosphore , agent ^nergique de double decomposition , et dont la chimie organique tirera certainement parti pour la preparation d'un grand nombre de chlorures. Parson moyen, M. Gerhardt a d(?ja obtenu le chlorure acetique C^H'OCI, qui le conduira a beaucoup d'autres. Chimie appliquee. — M. Guerin-Menneville, dont le zele actif pour les progres et le d^veloppement des applications pratiques de I'histoire naturelle ne se ralen- tit jamais, a rdcoU6 dans le midi de la France une esp^ce de cochenille qui peut 6tre grandement nuisible aux feves et aux sainfoins, lorsque sa multiplication, favoris^epar lescirconstancesatmospheriques, atteintdes proportions anormales. M. Guerin-Menneville avail esp6re quecette cochenille indigene pourrait rem- placer dans la teinlure la cochenille exotique, et, sur sa demande, TAcad^mie des sciences avail charg^ M. Chevreul de I'examen comparatif des deux sub- stances. Get examen ne confirme pas les espdrances qu'on avail conQues, La cochenille indigene, en effet, ne presenterait quelque avantage que sur la laine qu'il s'agirait de teindre en couleur capucine, encore faudrait-il que son prix fdt de beaucoup inferieur a celui de la cochenille exotique, car elle est beaucoup moins riche en principe colorant. M. Chevreul engage les chimisles ^ 6ludier avec soin ce principe colorant, qui n'est pas la carmine comme pour la coche- nille exotique : I'examen des mati^res grasses que les deux insectes renferment en assez grande quantite conduirait aussi, sans aucun doute, a de curieux re- sultats. {Comptes rendus, t. XXXIV, p. 701.] Anatomie et physiologie vegetales. — M. Trecul, jeune botanists qui s'est fait connaitre avantageusemenl dans la science, a observe, en parcourant les forets de la Louisiane, un tronc de N^jssa angulisans de Michaux, qu'on avail completementdepouille de son 6coree, sur une hauteur d'environ 4b centimetres. Malgr^ cette grave mutilation, I'arbre avail continue de v^g^teretde croitre; il etait convert de feuilles vertes et fraiches, et portait des fruits tout pr6s de leur malurite. La surface du corps ligneux, d^nudee de son ^corce, pr^sentait sur differents points des productions nouvelles, tr^s-variables de forme et d'^tendue, qui seraienl, suivanl M. Trecul, une ^corce complete et bien constitute. Sous cette formation corlicale on relrouve aussi une veritable couche de bois offrant tous les caracteres du tissu fibreux qui compose les couches ligneuses de forma- tion ancienne. Les commissaires charges de verifier les assertions de M. Trecul, MM. de Jussieu, Brongniart et Richard, rapporteurs, ne conservenl absolument aucun doute sur la realito des fails que nous venons d'^numerer. Voila done une formation de bois qui s'est faite k la surface d'une couche ligneuse mise £l nu par une decortication circulaire el complete, sans communication aucune avec la base des feuilles et des bourgeons qui occupent les sommit^s de I'arbre ; et qui, suivanl M. Trecul el les commissaires de I'Academie, r^sulterait evidem- ment de la transformation de la couche fibroso-ulriculaire qui des I'annee pr6- cddente unissaitle bois a I'ecorce. lis ajoutent que cette transformation, dont on COSMOS. 89 neut suivre a I'ceil les diverses phases, est aujourd'hui universellement admise Lr tous les hommes qui se sont occupes s^rieusement d'organogenie ; quel e constitue un principe fondamenlal, qu'elle est enfin I'expression de I'etat actuel de la science. Elle est ni^e cependant par un des plus iUustres botan.stes de 1 Aca- dc^mie, par M. Gaudichaud, que ses confreres immolent impitoyablement qu .Is excommunient presque, sans toutefois le nommer. Ce n'est pas tout M. Tr6cu a observe encore sur son fameux tronc de Nyssa angulisans qu il s est forme sur toute la partie de la tige qui surmonte la decortication, anssi bten que sur la portion placce au-dessous clelle, une nouvelle couche de bois, comme si la decor- tication n'avait pas eu lieu. Or, ajoutent MM. les commissaires il n y a aucune espece de communication directe entre la partie ou cette couche nouvelle s est produite et la base inferieure des bourgeons : les fibres ligneuses qui la const, iuent n'ont done pu, comme on le pretend dans me certaine theone livev leur origine d'un developpement quel qu'il soit, qui aurait la base de ces bourgeons pour point de depart. Ainsi se trouve confirme en tous points cet axiome admis aujourd'hui par tous les hommes qui ont fait de I'anatomie vegetale, etsurtout de I'organogenie, une etude impartiale et approfondie, a savoir, que toutes les mo- difications du tissu ^lementaire des veg^laux se forment sur la place nieme ou on les observe; qu'elles ne sont que des metamorphoses du tissu utnculaire;... qu'il n'y a pas dans les vegetaux de fibres qui montent pour former les pares du canal medullaire, pas plus qu'il n'y a de fibres qui descendent de la base des boureeons pour constituer chaque annee la nouvelle couche de bo.s. Lanatheme est bien durement formule ; cette certaine theorie combattue par toutes les etudes impartiales et approfondies , qualifiee par consequent de part.ale et de legere; voila certes plus qu'il n'en faut pour blesser au ccEur M. Gaudichaud. Pour nous nui fideles a la doctrine de Dupetit-Thouars, avions une grande sympath.e pou'r les filets descendants, le coup est rude aussi, etnous attendons avec une Vive impatience la r6ponse annoncee et promise. „ . ,. • r Voici les conclusions si favorables du rapport adoptees par 1 Acad^mie. « Le memoire de M. Trecul montre d'abord une tr6s-grande sagacite dans 1 auteur qui a su reconnaitre I'interet qui s'attachait au fait que le hasard lui metta.t sous les yeux. Par les recherches anatomiques auxquelles il s'est livre, par la consta- tation d'un fait qui jusqu'alors avait ete revoqu6 en doute, par la confirmation des principesorganogeniques qu'il enadeduits, Tauteur °^f l^^i^^.^^™^'^ et les encouragements de I'Academie. » [Comptesrendus, t. XXXIV, p. i»^-j Physique du globe. - Le memoire de M. A. d'Abbadie, analyse dans notre dernier numero, est trfes-importanl, et nous nous empressons de le completer par la note ci-jointe : ,. . , „^. « Mes trois miUe observations de niveaux, faites a des heures determmees ont permisde noter des tremblements de terre qui n'ont pas ^e enregistres ailleurs a cause de leur peu d'intensit^. Quand la secousse principale etait grande, j ai pu constater que I'ecorce du globe ne revient au repos qu'apres plusieurs oscil- lations de plus en plus petites. C'est ce qui est arriv6 le 22 octobre 1 8o I . « Les observations faites a Audaux, du 11 au 16 octobre de la meme annee, tendent a montrer qu'on y a ressenti, quoiqu'a un degre plus laible, comme des 90 COSMOS. dchos lointains du Iremblement de terre qui a d(5truit Ips villes do Beratti et do Vallona, en Albanie, en y faisant p6rir deux milie personne?. Le manque de do- cuments contemporains n'a paspermis de rattacher a des treniblements eloignes plusieurs autros secousses que j'ai nolees a leur passage. « Je me propose de continuer ces recherches et de m'affranchir des objections qu'on serait tente de fonder sur la lh(5orie pliysique des niveaux en observant, dans un bain do mercure place au fond d'un puits sec , la reflexion des fiis d'un micrometre place au foyer d'une lunette verticale et d'un tr6s-!ong foyer. Lcs variations indiquees par cette lunette nadirale pourraient ^tre appliqueescommo correction a la lunette zenilhalo proposee depuis longtemps pour les recherches les plus delicales de I'aslronomie , et dont on n'a pas tire les avantages qu'on s'en ^tait promis. » Nous ajouterons enfin que les principaux r^sultats du Memoire de M. A. d'Ab- badie sonl consignes dans un paquet cachete dont I'Acad^mie a accepts le d6p6t en date du 27 octobre 1845. 2° HIonTclles de Belffique. ficoNOMiE noRALE. — On annonce comme tres-reelle et comma accept^e d^ja en Belsjique une decouverte qui interesse au plus haut degre les agriculleurs de tous les pays. M. Willems fils, docteuren medecine a Hasselt, a trouve, assure- t-on un moyen aussi simple qu'efficace de preserver les bestiaux de la peri- pneumonie epizootique; ce fleau terrible qui, depuis plusieurs ann^es, a exerc(^ de si cruels ravages dans plusieurs contrees de I'Europe, et auquel on n'a su op- poser jusqu'a ce moment que des precautions hygieniques et I'isolement absolu. Le proc6d6 de M. Willems, qui nous parait confirme par une suite de faits concluants , consiste dans ['inoculation de raffection conlagieuse elle-m^me. On prend le virus sur un bcEuf infecto, et on le depose sous la queue d'un boeuf sain. A la suite de cette operation , il se d^veloppe localement une scrie de ph(5nom6nes morbides, d'une nature speciale, et apres leur disparition I'animai est a I'abri de tout danger. Les experiences de M. Willems ont ete faites avec tout le soin possible dans une Stable appartenant a son pere , president de la commission provinciale d'a- griculture du Limbourg. Dans cette etable , oil le fleau n'avait cess6 de regner depuis quinze annees , 108 boeufs ou vaches ont dt^ soumis a I'inoculation : pas un seul n'a ete atteint de peripne\imonio, tandis que, sur .50 autres, places cependant dans les memos conditions , mais qui n'avaient etc I'objet d'aucun traitement pr6alable, 17 ont subi I'influence de la maladie. Ces experiences, commencees en f6vrier 18b1 , ont ete sans interruption continuees jusqu'ii ce jour. M. Wniems a genereusement livre son secret au gouvernement beige , qui s'est empress^ de nommer une commission chargce de v6ri6er par de nouveanx essais I'efBcacite de ce mode de conservation. Nous sommes convaincus que le gouvernement francais prendra de son c6te les mesures les plus promptes pour faire constater, par une reunion d'hommes spteiaux, les resultats certains de COSMOS. 91 cetle nouvelle et pr^cieuse cl(5couverte , qui nous delivrerait a jamais des atlein- tes d'un Mau qui a porle tantde fois ie di^sespoir dans noscampagnes. BoTANiQUE APPLiQUEE. — Un des proiil^mes les plus interessants pour les sciences naturelles , est celui qui a pour objet de determiner a priori Ie nombre de jours qu'exige une plante pour donner successivement ses feuiiles, ses fleurs et ses fruits. Ce probleme est Ires-complique, car plusieurs causes concourent si- multanement a Ie produire. Toutes ces causes, il est vrai, n'operent pas avec une egaie energie; il en est meme une qui predomine d'une maniere si 'marquee, que , dans ie plus grand nombre de cas, on pent faire abstraction de toutes les aulres, sans s'exposer a voir les erreurs de calculs d^passer des liniites assez etroites. Cette cause predominante est la chaleur. Le probleme a resoudre semble devoir se reduire a peu pres aux termes sui- vants : une plante etant parvenue a tel degre de son developpement, quelle est la temperature moyenne qu'il convient de lui donner pour lui faire produire ses feuiiles, ses fleurs ou ses fruits, a une 6poque assignee d'avance? Adanson le posa le premier; il remarqua qu'en ajoutant, depuis le commen- cement de I'ann^e, les temperatures moyennes de chaque jour, on volt, quand la somme atteint un certain chiffre, se produire les m^mes phenomenes de la vegetation, par exemple, la feuillaison ou la floraison d'une plante. Les succes- seurs de cet ingenieux savant, et en particulier MM. le comte de Gasparin et Boussingault, chercherent a determiner le point de depart avec plus d'exac- litude. Guide par des considerations particulieres , M. Quetelet a cherche a mon- trer, dans son ouvrage sur Ie climat de la Belgique, qu'a la somme des tempe- ratures, il vaut mieux substituer la somme des carres des temperatures comptees depuis I'epoque du reveil des plantes. L'experience seule pouvait decider en faveur de I'une ou de I'autre de ces deux hypotheses. Une premiere ^preuve repondit parfaitement a I'attente de M. Quetelet; elle fut faite par M. de Bremaecker, qu'une mort premaluree a recemment enlev6 aux sciences. M. Quetelet avait prie ce jeune savant de prendre quelques pieds de lilas, de les oter de terre et de les jeter ensuite dans une cave pour produire un sommeil artiQciel. Au bout de quelque temps. Tune de ces plantes fut remise en terre et exposee dans une serre a une temperature tres-douce et tres-egale. Cette plante se couvrit de boutons et de feuiiles, et la somme des carres des temperatures necessaires pour arriver a I'epoque de la feuillaison, fut exactement celle qu'il avait calculee pour des liias qui avaient pris leurs feuiiles en plein air. Cette seule experience 6tait insuffisante. Depuis longtemps M. Quetelet cher- chait I'occasion de la reproduire sur une plus grande echelle. M. Schram , controleur du Jardin botanique de Bruxelles, a bien voulu se preter a ses desirs et lui remettre les quatre scries d'observalions faites par ses soins dans les serres du Jardin botanique sur des lilas varins. II est a remarquer que M. Schram ignorait le but que se proposait M. Quetelet, et qu'il s'est borne a transcrire les resultats tels qu'il les a obtenus. La serre oii se faisaient les observations avait, au maximum, une temperature 92 COSMOS. de 20 a 21 degr^s Reaumur; cetle temperature descendait pendant la nuit a lo degr^s, et dans quelques circonstances a 10 dcgr^s. M. Quetelet estime que Ton pent prendre pour moyenne 20 degres centigrades. Or, d'apri'S plusieurs annees d'experience , IM. Quetelet a indique, dans I'An- nuaire de I'Observatoire, que les feuilles du lilas varin exigent une somme de temperature egale a 191 degres centigrades pour commencer as'epanouir, ou bien encore une somme de carres de temperature egale a 1315. D'aprfes la me- thode de calcul d'Adanson, de MM. Boussingault et de Gasparin, il faudrait done de 9 a 10 jours de temperature a 20 degres ; et, d'apres celle de M. Quetelet, 3 a 4 jours seulement. D'apres les tableaux de M. Schram, il a fallu, en effet, 3 jours etdemi de tem- perature a 20 degres pour produire I'epanouissement des premieres petites feuilles, et apr^s 9 a 10 jours que suppose I'autre methode de calcul, la feuillai- son etait dejii completement achevee. Pour la premiere floraison du lilas varin, I'Annuaire de I'Observatoire montre qu'il faut 508 degres de temperature centigrades; ou bien, dans la manifere de calculer de Quetelet, une somme de carres de temperatures ^gales a 4657, ce qui suppose, d'apres Adanson, plusde 23 jours, et d'apres la methodedeM. Que- telet, 11 a 12 jours seulement. Or, ce dernier r^sultat encore s'accorde avec les experiences faites au Jardin botanique, qui fixent en moyenne h 11 jours trois quarts I'epoque de la tloraison du lilas varin. II resulte done de toules ces comparaisons que la melhode qui consiste a cal- culer les epoques de la feuillaison et de la floraison, en tenant compte des carres des temperatures, presente, au moins dans les exemples cites, un accord surpre- nant avec les experiences tentees dans les serres. Si cette methode se confirmait pleinement par des epreuves ulterieures, elle presenterait les plus grands avan- tages dans la pratique. M. Quetelet ajoute : un physician ingenieux , M. Babinet, a propose a rinstitut de France ; dont il est membre , une nouvelle methode de calcul , par laquelle le progres de la vegetation doit s'estimer en ayant egard a la somme des temperatures et au carre du nombre des jours (Comptes rendus hebdoma- daires des seances de rAcademie des sciences, l. XXXIII, p. 521 ; avril 1851). D'apres les vues de M. Babinet, dans les trois exemples precedents, les effets produits seraient respectivement comme les nombres suivants : Pour 2 jours a 10 degres 4 X 10 = 40. » 1 jour a 20 » 1X20 = 20. » 4 jours a 5 » 16 X 5 = 80. Ainsi, dans cette maniere de calculer, un jour de 20 degres de temperature, loin de produire I'effet de 2 jours de temperature a^lO degres, produirait un effet moitie moindre; et au contraire, la temperature, ens'abaissant a 5 degres pendant 4 jours, produirait un effet double. Ces resultats sontevidemment con- traires a ce qu'indique I'experience et specialement a ce que montrent les ta- bleaux des observations faites au Jardin botanique de Bruxelles. Le probieme qui nous occupe comprend plusieurs parties interessantes : il est COSMOS. 93 Evident d'abord, quelle que soil la formule de calcul que Ton emploie, qu'il existe de certaines limites de temperatures qu'il ne faut point depasser dans les serres, ou bien au-des50us desquelles il ne faut pas descendre, si Ton ne veut s'exposer non-seulement a nuire au d^veloppement mais encore a compromeltre 1' existence de la plante. La formule qu'a proposee M. Quetelet n'est applicable que sous la condition de ne pas s'ecarter des temperatures moyennes au dela de certaines valeurs. II parait aussi que toutes les plantes n'exigent pas la meme somme de chaleur pour sortir de leur sommeil hivernal ; ce point de depart reste egalement a etablir. Doit-on calculer les temperatures effwaces, c'est-a-dire celles qui contribuent eEQcacement au developpement de la plante, a partir de 0" de I'echelle thermo- metrique centigrade, comme on le fait generalement, ou a partir d'une tempera- ture t, qui ne formerait pas une constante dans le regne vegetal, mais qui serait une quantite variable? Quelles sent enfin les plantes qui restent rebelles aux temperatures des serres, et refusent d'y produire et leurs fleurs et leurs fruits, malgre I'action d'une cha- leur exageree? On voit combien de questions se pr^senlent a la fois, des qu'on cherche a p6- netrer dans cette voie d'observation, qui prend le calcul pour base et qui pent, nous le pensons, r^pandre beaucoup de jour sur I'interessante partie des scien- ces naturelles qui fait I'objet de cette note. Geodesie. — M. le capitaine Liagre, qui partage avec M. Quetelet les travaux de I'observatoire de Bruxelles, manie avec un tact extreme, une grande finesse et une patience a toute epreuve , cette portion si ingrate de I'analyse qui peut seule conduire avec security aux formules de correction des instruments et des observations astronomiques, geodesiques, m^teorologiques, etc. Son M^moire sur la valeur la plus probable d'un cote geodesique commun a deux triangula- tions est une nouvelle preuve de son habilete. M. Liagre suppose que deux re- seaux geodesiques differents ont donne pour un certain cote commun a deux triangles des valeurs inegales; et il se propose de determiner celle de ces deux valeurs qu'il faut adopter comme vraie; c'est une application curieuse et pleine d'inter^t du calcul des probabilites. Apres avoir tenu compte de tout, de la pre- cision avec laquelle la base a ete mesuree; de la grandeur de la base relative- ment a celle du c6l6 douteux; de la precision dans la mesure des angles; du nombre des triangles intermediaires entre la base et le coto ; de la grandeur des coles de ce triangle, de leur conformation plus ou moins avantageuse, il arrive a six equations, qui le conduisent enfin a une formule simple , mais quelque peu empirique, qui donne la valeur la plus probable du cote en question. Sur le rapport de deux de ses membres les plus influents, M. le colonel Nerenburger et M. Timmermans, I'Academie a ordonne I'impression du memoire de leur jeune confrere. Signalons en passant cette excellente coutume sanctionn^e par les reglements de I'Acadenue royale de Belgique, de Munich et autres, de n'accepter la respon- sabilite d'un travail, de quelque nom qu'il soil sign^, et de ne le publier dans les 94 COSMOS. m^moiresou bulletins de TAcademie, qu'aprds qu'il a 6l6 I'objet de deux rap- ports ccritset d'une solennelle approbation. C'esl dur sans doute, tr6s-dur, et la seule ponsee d'une semblable mesure clTraycrait noire Institut de France ; mais combien c'est prudent, et commo I'honneur d'un corps savant est par la sauve- garddl Les bonnes et grandes ceuvres survivent loujours a cetle rude epreuve; les Iravaiix improvises, les brouillons de laboraloire ou de cabinet, les l^g^retes et les erieurs sont seules arrct6s au passage. Qui pourrait le regretter? lliSTOiuE NATURELLE. — De tous les vegetaux parasites observes chez riiomme et les animaux vivants, aucun n'a paru aussi curieux que ia mucedi- nee decouvcrle en 1842 par M. Raver, dans un oeufde poule , et decrite par M. Montagne, sous le nom de Dactfjlium oogenum. Au mois de novembre dernier, en faisanl I'essai d'une couveuse nouvelie, M. A. Spring a rencontre, dans un oeuf de poule frais, qui avait cte expose pendant dix jours a ia chaleur de I'incubalion, un champignon analogue a celui de M. lUiyer. Celte decouverte est devenue pour M. Spring I'objet d'une serie de reclierches pleines d'iuteret, dont il etait loin de prevoir les resultats inat- tcndus. Voulant absolument arriver a determiner I'espece de ce mysterieux champignon, il entreprit de le culliver; il le partagea en petites touffes et les placa successivement dans des tubes de verre contenant quelques gouttes d'eau distillee, bouchees avec soin, et soumises a la chaleur d'incubation ; ou dans d'autres ceufs. Or , quelle ne fut pas sa surprise quand il vit naitre de ses expe- riences non pas une mucedinee unique, constanle et bien definie, mais un grand nombre de mucedinees tres-differeutes, des aspergillus , des sjMrotri- chum, des hemiscijphe , des periconia, des inucor, des penicillium^ etc., etc. Les recherches de M. Spring sont loin d'etre terminees; il est en possession d'un grand nombre de faits plus curieux les uns que les autres, mais dont il convient d'ajourner la publication. II croit cependant pouvoir enoncer des au- jourd'hui, comme cerlaines, les conclusions suivantes : 4° II est des champignons inferieurs qui se developpent, eu espace clos, dans I'obscurite, aux depens des substances Jilbumineuses. 2" La mutabilite de leurs formes est grande; elle s'etend non-seulement dans les limites du genre, mais dans celles de la famille, et memo de I'ordre. 3° L'oxygene de I'air semble citre necessaire au developpement des organes de la fructification. i" Certaines formes ne se produisent qu'a une temperature de 35 degres cen- tigrades, qui est celle du sang et des tissus des animaux superieurs, et de I'homme. 5° La m6me sporule devient sporoirichuvi ou un nvjcelium, sans fructifica- tions, quand elle se developpe dans I'albumine; aspergillus, periconia, hemi- scyphe ou )nucor, quand elle se developpe a I'air sur une base albumineuse et a une temperature de35 degres centigrades; elle deyieal penicilliu7n , quand elle se developpe a I'air libre, sur une base albumineuse et a une temperature de 10 a 15 degres centigrades. 6° L'introduction de sporules ou d'une portion de mycelium dans un oeuf de poule , ne borne pas ses efifets aux substances avec lesquelles elles sont en con- COSMOS. 95 tact; il s'opere pour ainsi dire une contamination g6n6raie, accompagnde de mocliQcations chimiques parliculieres. 7" Le developpement des nouveaux champignons est du a une veritable disse- mination; il n'est pas dii a la vegetation du champignon inocule. Une periodo d'incubalion separe sa vie de celle de ce dernier. II se developpe aussi sur des points asscz eloignes du point dinoculation, sans qu'on puisse decouvrir une communication entre I'un de ces points et les aulres. 8° Les experiences relatees dans cette notice prouvent a Tevidence la these si importante pour la palhologie, que les vegelaux parasites peuvent germer dans des substances et des tissus sains des corps vivanls, et qa'ils peuvent ainsi de- venir la cause de maladies. 9" Loin de ne se developper que sur de la maliere organique prealable- ment alt^ree ou en voie de fermentation , leur presence semble premunir cette matiere centre la putrefaction ordinaire. Lo parasite, en s'emparant de la ma- tiere destinee a un organisme superieur, la conserve en lui imprimant son propre cachet. 10° Les experiences d'inoculation ne reussissent point sur des CEufs pouris. II y a longtemps qu'il ne nous avail ete donne d'analyser un memoire aussi remarquables et aussi important. ficoxoMiE RURALE. — Uu cultivateur de Feniere, departement de TAin , regut et planta en 1850 des tubercules ramasses dans les bois et les montagnes des environs de Mexico. lis donnerent uno recoUe parfaitement saine, quoique toutes les pommes de terre de la localile fussent malades. La culture du nou- veau tubercule prit alors plus d'extension, et M. de Candolle la visita le 2 sep- tembre -ISol. Les fanes etaient vigoureuses et d'un vert intense, les tiges ayaient des renflements prononces ; les fleurs etaient d'un violet rouge vif , plus grandes que celles des autres varietes; les bales 6taient aussi plus grosses, avec des laches blanchatres; les tubercules etaient nombreux, arrondis ou ovoides , du volume environ d'une noix ; la plante etait encore loin de maturite. Le champ fut reconvert au mois de novembre par une neige epaisse avant que les nou- velles pommes de terre fussent arrachees; au printemps de cette annee on les a trouvees parfaitement saines. Les tubercules murs ont en moyenne un pouce de diaifietre ; la peau est lisse , jaune clair, rosee vers les yeux; la chair inlerieure est d'un jaune tres-marque ; bouillie , elle a un gout excellent, sans aucune trace d'amerlume; elle est peu farineuse et ne contient que de 145 a 155 grammes de fecule par kilogramme , tandis que les pommes de terre ordinaires en contiennent de 200 a 250. Le nouveau tubercule ressemble beaucoup au So- lanum verrucosum de Schlechtendal. II est trte-probable qu'il deviendraitpar la culture plus hatif et plus gros ; mais restera-t-il constamment plus robusle et continuera-t-il d'echapper a la maladie? M. de Candolle craint d'autant plus qu'il ne s'altere a son tour, qu'il croit et avec grande raison que la maladie de ja pomme de terre a ete determinee , ou du moins favoris^e, par une culture ge- neralement forcee au moyen des engrais. Les voyageurs qui ont vu le Solanum tuberosum spontane aux iles Chiloe, au Chili et au Perou , I'ont trouve croissant dans des terrains rocailleux ou dans des sables maritimes assez steriles. En Eu- 96 COSMOS. rope, ons'estmisa le cuUiver dans des conditions lout oppos6es , surtout de- puis cinquante ans, que les jach6res ont disparu et qu'on a donndi partout plus d'engrais. On a ainsi obtenu plus de produit dans un temps determine; mais n'a-t-on point d^truit aussi I'harmonie physiologique des fonctions de la plante ? Lors(iu'on fait produire a un vegetal Irop de fecule pour sa nature primitive , il doit arriver ce qui arrive aux races d'animaux surcharges de graisse : d'autres secretions sont en souffrance et I'etre organist n'est plus dans de bonnes condi- tions pour rdsister a certaincs maladies, Sans une cause de cette nature, aussi generale , agissant a la fois dans les pays sees et dans les pays humides , sur les montagnes et dans les plaines , il est difficile de comprendre comment la maladie de la pomme de terre se serait repandue si vite en si peu de temps. Les causes exterieures de climat sont trop locales et trop variables, pour suffire a expliquer une invasion universelle dans des pays si ^loigncs les uns des autres. A ces reflexions eminemment sages de M. de Candolie , ajoulez la loi generale qui preside a la conservation de T^quilibre et de I'harmonie dans la nature ; loi theorique sans doute , mais loi de fai taussi , et suivanl laquelle tout etre vegetul ou animal, qui tend a se multiplier dans des proportions anormales, se trouve bientot en presence d'autres agents qui le combattent et le detruisent, jusqu'a ce que la production soil rentree dans ses limites naturelles, et vous aurez I'explication du fait immense du cholera de la pomme de terre. Nier la loi que nous venons de rappeler, ce serait nier I'intervention et Taction de la divine providence dans le monde physique ; ce serait se faire athee. Page 25, ligne 2T. Protonitrate dc mercure , Usez protoiiitrate de fer. Page 25, ligne 30. Protosulfale de vurre, Usez protosulfate de fer. Page 26, ligne 6. Bicblorure d'argent. Use:: bicliloruie de mercure. L'cxiBtence de ces fautes qu'on voudra bien nous exouser, est pour nous inexplicable. DE l'IMPRIMERIE de CRArELET, HIIE DE VAUGIRAKD, 9. COSMOS. 97 STEREOSCOPES. - PHOTOGRAPllIE. - NOUVELLES. 1. Nous avons annoncc , dans les dernieres livraisons dii Cosmos , que Ic stereoscope grandissait chaque jour, et qu'il avail regu des formes toutes nouvelles qui lui oua rent un champ nouveau , en ren- dant possibles des applications d'unc portde tout a fait imprevue. Ce progres est depuis longtemps accompli , ct voici bientot un mois quo nous nous servons des nouveaux appareils ; mais, comme nous I'a- vons dit, ils nous avaient et6 confi^s sous le secret, et nous ne de- vious les dccrire qu'apres que I'inventeur, M. Jules Duboscq , aurail assure ses droits de propriete. Cette precaution etait d'autant plus urgente , qu'il est dc la nature des idees neuves et hcureuscs , de germer a la fois dans plusieurs csprits et d'apparaitre tout a coup sur des points Ires-eloignes ; c'est ce qui est arrive pour une ou plu- sieurs des applications que nous allons dccrire rapidemcnt. Des trois sortes de stereoscopes adoptes aujourd'hui, le stereo- scope a reflexion de M. Wheatstone , Ic stereoscope a refraction de sir David Brewster, le stereoscope a reflexion tolale de M. Dove out tous une ou deux cloisons situdes h une distance invariable deToeil, opaques ou Iransparentes, contre lesquelles on applique en face Tunc de I'autre, ou a cote Tune de I'autre, les deux images stereoscopiques. Or, ce fond a distance invariable presente des inconvenients assez graves , car 1° I'appareil ne s'adapte plus alors aux diffcrentes vues ; la vision est moins claire et moins nette ; 2° les deux images primi- tives, ctpar suite I'image unique en relief resultant de la perception simullande ou de la superposition, conservent des proportions beau- coup plus petites que celles qu'on pent leur faire acqudrir en fai- sant \ arier leur distance a I'ceil ; 3° la necessitc , quand il s'agit sur- tout de portraits de personnes vivantes , de recourir a une boite plus ou moins volumineuse , et de regarder les deux dessins fixes contre le fond invariable de la boite , excite quelquefois des repu- gnances presquc invincibles; certaines personnes trouvent cette maniere de voir incommode et ridicule ; et ces preventions, quelquc values qu'elles soient, seraient certainement un obstacle a la diffu- sion de ces delicieux appareils ; ils n'obliendraient pas la popularite qui les attend , d'autant plus que la boite. gu le fond augmente leur prix. Ces considerations out ete le point dc depart de la conslruciiop des nouveaux appareils. 1" Stereoscope binocle ou face a main. — II est represenle par les 30 MAI 1852. 6 98 COSMOS. deux figures 1 et 1 bis, qui n'onl pas bcsoin d'explication ; c'cst unc Fig. 1 ct t bis. face a mam ordinaire dans laquelle Ics deux verres sont remplacds par les deux prismes tallies dans une meme lentille, et opposes sommet a sommet. II n'y a ni boite simple ou double , ni fond fixe opaque ou transparent; le passe-partout renfermant les deux des- sins, esttenu a la main, pose sur une table ou appendu h un mur. Tenant en main I'enveloppe exterieure de la face a main qui sert de manche, et les deux prismes ctant dresses devant les yeux, on regarde la double image plact^e d'abord au dela de la vision dis- tincte;on rapprocbe ensuite insensiblement cette double image, jusqu'a ce qu'on n'apergoive presque plus les deux images laterales , mais bien unc seule image cenlrale, qui se montre en relief, comme on la verrait dans le stereoscope a boite. Si, quand on est parvenu a cc point de la vision distinctc en relief, on approche encore Toeil du passe-partout, ou le passe-partout de I'ffiil , on voit I'image gran- dir rapidement et dans une proportion notable , en meme temps quelle augmcntc dencttete etd'eclat : on obtient de cetlc manifere, avec un pen d'exercice, des effets extraordinaires que le stereoscope a fond invariable ne laissait pas soupQonner, et dont rexplication n'est pas facile. Pour prevenir les objections et la repulsion dont le stereoscope face a main pourrait etre I'objet do la part de ceux qui I'examine- raient trop legerement, nous nous empressons de dire que son em- ploi est certainement un pen plus difficile que celui du stereoscope a boite , surtout quand il s'agit d'epreuves sur plaques metalliques dont le miroitagc gene alors beaucoup plus. Mais cette difficult^ que nous avons renconlrde nous-meme est bientot vaincue; mais I'a- vantage d'une vision bfiaucoup plus nette et d'une amplification tres- rdelle est si. considerable , que lorsqu'on s'est liabitue a se servir du stereoscope sans boite , on n'emploie plus qu'i regret le stereoscope avec boite. COSMOS. 99 2" Stereoscope jumelle sans fond et a distance focale variable. — La jumellc pcut etre a une seule baretle, fig. 2 et 2 bis, ou adeux barettcs, Fig. 2 et 2 bis. figure 2 ter. Les deux prisnies laits avec les deux demi-lenlilles, fig. 2 quaier, occupeut la place des ^eITes des juinellesdont on a sup- Fig. 2 ter. \ Fig. 2 quater. prime les oculaires et les objectifs. Rien , dans le stereoscope face a main, ne masque assez les deux images laterales dont la superposition par les prismes doit donner I'imagc unique en relief; un ceil novice ou pen excrce les retrouvc h droite et a gauche, et dies distraient son regard ; le double corps dc la jumelle, noir a I'interieur et memo a I'exterieur, contribuc efficacemcnl a exclure les images laterales, en meme temps qu'il arrete les rayons accidentellement emis par le miroitage des plaques ; on \ oil done plus facilement avec le stereo- scope jumelle qu'avec le stereoscope face a main, et cette fois I'a- vantage de la nettetd et de I'agrandissement de I'image n'est com- battu par aucun inconvenient. Le stereoscope jumelle est I'appareil type, ou le stereoscope le plus excellent de tons. Mais est-ce veritablement un progres notable que la suppres- sion de la boile et du fond , que la construction des deux stereo- scopes face a main et jumelle? Pour repondrc a cette question, nous dirons tout simplcmcnt ce que les nouveaux stereoscopes permet- lent dc r6aliser. C'est une belle chose qu'un album , qu'unc collection dc gravures et dessins representant une serie dc paysages , dc monuments , de 100 - COSMOS. portraits de personnes cele])res , etc., etc. ; mais ce seraii line chose bien plus admirable encore si 1' album permctlaitdevoirlcs paysages avec leur perspective r6cllc , les monuments avec Icurs trois dimen- sions ettols qu'ils sont en eux-memes, les portraits dans loute la v6rit6 de la nature, avec les saillies et les creux du visage , etc., etc. Or rien de plus simple et de plus facile a realiser qu'un semblable album, qu'un album st^r6oscopiquc, avec le stereoscope sans fond. On prcndra sur verre transparent albumine ou coUodionc deux images photographiques negati^es des objets que I'album doit re- presenter; on en obtiendra dcs cpreuves positives sur papier verni, conime Ic font si liabilement M. Fcrrier et M. Blanquart-Everard ; chacune des pages de 1' album sera transformee en un passe-par- tout pour recevoir une couple d'images, et Von regardera ces images accoupl^es avec Ic stereoscope face i\ main ou jumelle ; Ic paysage, le monument, le portrait prendront alors corps et vie. Ce que nous venous de dire des albums s'etend naturellement aux planches des ouvrages d'histoire naturelle , de mecanique, de physique, de geometric a trois dimensions, et de geometric descrip- tive, etc., etc. Sur chaque planche et pour chaque objet represente, un cristal, un mineral, une plante, un insecte, un animal, une machine, un instrument, une surface solide, une construction dans I'espace, etc., etc., on placera hc6l6 I'un de I'autrc deux dessins photogr'aphiques parfaits, pris sous les angles convenables, et en regardant chaque couple tour a tour avec le st(5reoscope face a main ou jumelle, on retrouvera 1' objet de la nature, la machine, I'in- strument, la construction avec autanl de fiddlile et de verite que s'ils 6taienl la eux-memes sous les yeux de I'amateur ou de I'etudiant. Comprend-on maintenant quels dc^bouches immenses les albums et les planches stereoscopiques, dont l'id(5e et la propricte appar- tiennent a M. Jules Duboscq, ouvrent a la photographic sur verre et sur papier! Quclles ressources ils crcent pour la reproduction des objets do la nature et de I'art ! Comme ils rendront I'enseigne- ment moins aride et plus efficace ! Quelqucs mois encore, et des la pre- miere rentree des classes, nous verrons cntre les mains de tons les Aleves des ecoles speciales les planches stereoscopiques des der- niers livres de la geometric de Legendre, et des projections de Monge, etc. , etc. 3° Stereoscope omnibus. — Par cela m^me que , comme nous venons de le demontrer , le stereoscope est appel6 h arriver dans toutes les mains, k se poser devant tons les yeux, il fallait necessairement le r^duire h un tel degrci de simplicity, qu'il ne coiitat presque plus COSMOS. lOJ rien, quelques francs a peine. Dans cc but de multiplication ind6- finie, de prix qui n'effraye pas les plus petites bourses, M. Duboscq a rdalis^ le petit instrument representc fig. 3 et 3 bis, qui ne differe Fig. 3 ct 3 bis. ^ du stereoscope face a main que par sa monture : c'est une simple petite planche avec deux trous dans lesquels s'engagent h frotte- ment les deux bonnettes qui portent les prismes lentilles, presses entre deux plans. On regarde absolument comme avec le stereo- scope lace a main, soil une couple d'images separees, soil les images accouplees des albums et des planches stereoscopiques , en ayant soin que le plan des deux images soil toujours parallele au plan de la planche qui porte les prismes , et perpendiculairc aux axes yi- suels. Avec le stereoscope omnibus , les portraits en relief remplaceront infailliblement parlout les portraits simples du daguerreotype ordi- naire. La difference entre ces deux sortes do portraits est si enorme, en effet, qu'elle sera comprise par tout le monde , par le peuple sur- tout, qui a beaucoup plus qu'on ne le pense le sentiment du vrai et du beau. Et quand un portrait en nature beaucoup plus fidele que le buste achete d'un sculpteur habile au prix de plusieurs centaines de francs necoutera plus, avec I'appareil qui le fait voir, que huit ou dix francs , I'ouvrier, le soldat, etc., tiendront absolument a se montrer h leur vieiix pere, h leur vieille mere, a leur fiancee, tels qu'ils sont, des etres solides et vivanls, et non plus amoindris par un dessin plat et sans reliefs. 4° Stereo-telescope, ou stereoscope longue-vue , flg. 4 , 4 bis et 4 ter. — C'esl un perfeclionnement capital du stereoscope et principalement du stereoscope jumcUe. Dans tons les appareils que nous avons de- crits jusqu'ici , les images stereoscopiques sont vues de tres-pres et par un seul observateur. Et cependant il est extremement a desirer qu'elles puissenl etre vues de loin et par un grand nombre de per- sonnes a la fois. Ce but est compl^tcment atteint par le stereoscope longue-vue, modification tres-ing^nieuse du stereoscope a reflexion totalc. Les deux prismes hypotenuse ou h. angle droit qui rempla- cent les deux prismes-lentilles sont relies par un mecanisme com- mun, fig. 4 et 4 bis, qui pcrmet de les faire tourner simultanement autour d'un de leurs angles homologues et de les incliner symetri- 102 COSMOS. quemenl pour allor chercher Ics images et Ics embrasser dans le champ d'uiie vision d'enscmblo. Ce mecanismc s'explique par Ini- memo : deux petitsl)ras de levicrfix^s aux deux prismes, fig. 4 bis, Fig. -). par une de leurs extremites , se relient par I'autre h une roue ou bou- ton mollct^, fig. 4, que la main de I'observateur fait lourner comme le bouton mollel6 d'une jumelle ou lorgnette de spectacle. De plus, un ressort, fig. 4 ter, fixe par une de ses extrdmites a I'enveloppe ou monture, et appuyant de I'autre centre une goupille implant^e sur Tangle libre aigu de cbaque prisme , tend sans ecsse a le rarne- ner h sa position primitive et parallele a I'axe de la jumelle, lorsqu'il n'est pas soumis a Taction du bouton moUetc ou du levier. Void quelques exemples de ce qu'on pourra obtenir avee le ste- reoscope longue-Yue. On projettera , agrandies sur un ecran par les precedes de la lanterne magique ou de la fantasmagorie , les deux images stereoscopiques sur verre transparent d'un paysage , d'un monument, d'une machine, d'une carte en relief de M. Sanis, etc., et chacun des spectateurs situes en face de ces deux projections pourra de sa place , sans s'(?loigner ou s'approcher, voir au naturel le pay- sage, le monument , la machine, la carte, etc. C'est encore une ere nouvelle pour la charmante Industrie des dissolving iviavs, une voie nouvelle ouverte a Tenseignement , un nouveau debouch^ pour la photographic sur verre, etc., etc. De meme le stereoscope longue- vue permet de regarder sans les deplacer les portraits ou autres images stereoscopiques qui orneraient une chambre, un salon, etc. C'est aussi le meilleur des pseudoscopes, appareil mystdrieux, auxeffets etranges, et que Ton a appcle trompeur parce qu'il im- pose invinciblement li Tame une perception fausse des objets de la nature. Identique avec le stcreo-t61escope, il se compose done de deux prismes a reflexion totale, ajustds dans une meme monture. COSMOS. 103 dresses I'un devant I'oeil droit, I'aulre devant I'oDil gauche. Cette fois, on regarde I'objet lui-memc et non plus les deux dessins ou images dissemblables. Chacun des prismes produit sur la ratine cor- respondante une image renvers^e de robjel; les deux images sont aussi superposdes par I'ajustement des prismes , mais leur superpo- sition montre plus rapproch^s les points les plus dislants, plus dis- tants les points les plus rapproches, et Iransforme par consequent les reliefs en creux et les creux en reliefs. Pour I'oeil arme du pseudoscope , c'est un monde tout nouveau , le monde primitif renverse. Une sphere solide apparait une calotte creusc; une coupe creuse ou concave devient un solide convexe; un baste se transforme en un masque a cavites profondes; une peinture encadree dans un mur semble logee au sein d'une cavity percee dans le mur; les ombres des objets eclaires par une bougie ou par une lampe se montrent autant en avant de I'objet qu'elles se montrent en arriere dans la vision ordinaire, etc., etc. 5° Stereo- fantascope , ou stereoscope a mouvement. — Dans cette ap- plication , M. Jules Duboscq a ete pr6venu, non quant h la disposition des appareils et h la propri6te en France de I'invention , car le ste- reoscope a mouvement fait partie de son brevet d'addition et de per- fectionnement, mais quant a la publicite. M. Claudet, eneffet, dans une correspondance imprimee, annonce qu'il a construit un ste- reoscope dans lequel on voit des personnages se mouvoir : par exemple, une dame travailler h I'aiguille en faisant tous les mouve- ments necessaires; un fumeur eioignant et rapprochant son cigare de sa bouclie pendant qu'il aspire la fumee, et la repoussant en soufflant; des convives qui boivent et portent des toasts ci I'anglaise; des machines a vapeur en mouvement, etc., etc. L'idee d'appliquer le stereoscope a la production des apparences de la vie et du mouvement appartient h. I'inventeur si ingenieux du fantascope ou phenakisticope, ci M. Plateau lui-meme, qui I'a de- veloppee longuement il y a plusieurs annees , dans une de ses plus curieuses brochures ; en indiquant en detail les principes d'apres lesquels il lui semblait que I'instrument diit etre construit. Entreprendre aujourd'hui d'analyser ce beau travail revenu a I'ordre du jour, de decrire en detail les appareils qui realisent ces charmantes illusions, de montrer ce qu'il y a de ravissant dans cette nouvelle transformation de la photographic, qui ajoute cette fois a son crayon d'une habilete infmie, a son ciseau d'une puissance sans bornes , la faculte plus etonnante encore de creer 1' animation et le mouvement ; qui , apres etre devenue tour a tour Raphael et Phi- 104 COSMOS. dias, vcul encore devenirVaucanson, ce serail transformer Ic Cosmos en journal cxclusivcmcnt on principalemenl pholographiquc, ce qui est h niille lieues dc noire pensee. A dimanclio prochain done cclte description si pleine d'inleret. II. VAlJiouno/), de Londrcs, dans sa derniere livraison du 22 mai, contienl une Iclire de M. E. ^y. Dallas, professour irinslilution royale d'Edimbourg , avcc le litre : Photographie microscopique. Nous la traduisons dans ce qu'elle a d'essenliel. « Comme le dcssin pholographiquc des objets microscopiques prdoccupe grandement, au moment actuel, I'attention d'un grand nombrc de personnes, jc vous demande d'cxposer a ce sujet une ou deux idccs, dans le but surtout de provoquer des renseigncments prdcicux que les horames compdtents s'empresseront sans doule d'ajouter aux miens. « L'emploi du collodion me semble eminemment propre h la reproduction des objets microscopiques; mais comme I'accumula- tion des plaques de verre est un inconvenient grave, il faut avant tout substituer au verre un autre support ou gardien des images obtenues; en transportantlacouchede collodion sur du papier circ, comme I'a deja indiqud M. Archer: cette operation se fait sans diffi- culte. Lorsque I'image a etc obtenue, on la plonge dans I'eau et Ton detache la couche dc collodion ; on transporte ensuite cette couche dans un bain de gelatine assez faiblc pour qu'en se refroidissant il resle liquide ; on plonge dans le meme bain la feuille de papier cir(5 prealablement immergee pendant quelques minutes; on fait ad- herer dans le bain de gelatine le bord superieur de la couche de collodion au bord superieur de la feuille de papier; et pressant avec les doigls la feuille et la couche en contact, on les souleve douce- ment pour faire couler le liquide compris entre elles. Quand le li- quide est presquc entierement ecoule, on enleve avec du papier buvard i'exces de ce qui reste encore, et Ton acheve enfm d'eli- miner toute I'cau en pressant doucement et toujours dans le memo sens , ou dans la meme direction sur la surface du papier ; si en- suite on met le tout dans une presse entre des cartons, on verra que la couche de collodion est parfaitement adherente au papier. » M. Dallas envoyait avec sa lettre au directeur de V Athenceuni quel- ques spi^cimens d'images pholographiques obtenues avec le mi- croscope. Nous aurons a ddcrire dans une des prochaines livraisons du Cosmos un microscope appele, par M. Duboscq , microscope siereo- scopique, et qui est parfailcmenl dispose pour donner, avec une COSMOS. 105 Ires-grande facilite, les deux images agrandics des objets d'liisloire naturelle qui doivent entrer dans les planches sl6reoscopiques dont il a 6te question plus haul. III. II nc nous est rien parvenu de nouveau relativement au col- lodion , si ce n'est que les photographes se plaignent de deceptions et d'echecs nombreux. M. Benito de Montfort fils a voulu aller etudier a la source la pre- paration et I'emploi du collodion; il a travaille deux jours aLondres avec M. ThoruAvaite , le correspondant en Angleterre du Cosoms ; il a rapports plusieurs flacons du collodion qu'avec M. Plumier nous avons proclamc le plus sur et le meilleur de tons. Essaye ;i Paris dans des conditions excellentes, ce collodion n'a rien produit, absolument rien. M. Plumier, qui op^rait ces jours derniers avec cette mfime substance, fraichement arrivee cependant, n'a pas etc plus heureux. C'est h ne plus y rien comprendre. D'un autre cotd, M. Puech, qui a eu quinze jours aussi de mau- vaise veine, a obtenu de nouveau un succes complet. Son collodion en ce moment ne laisse rien a d^sirer ; il a donne a M. le comte Vigier, et surtout au directeur du laboratoire de M. Aguado, d'ad- mirables portraits qui dgalent ccux de M. Plumier, s'ils ne les sur- passent pas. IV. Nous avons pri6 M. de Montfort de rapporter de son voyage une collection d'^preuves sur plaque et sur papier, qui puissent nous servir h. constater les progres de la photographic en Angle- terre ; nous sommes heureux de pouvoir dire que Londrcs est reste bien en arricre de Paris. A part les groupes de famille et d'amis que M. Claudet dispose avec tant d'habilete , et qui forment dans le stereoscope un si prodigieux effet , nous n'avons rien vu de beau. Les modeles de stereoscopes et de pseudoscopes fabriques a Lon- dres , sont veritablement informes, et donnent une pauvre idee du talent des petits mecaniciens d'outre - Manche. II est vrai qu'ou a cherche surtout dans ces modeles le bon marche, car la fu- reur du stereoscope est telle a Londres , qu'on le trouve a vendre jusque dans les boutiques d'epicier ; mais le stereoscope-omnibus que nous avons ddcrit coiitera beaucoup moins cher encore, et il a con- serve une cerlaine elegance. Quant aux images stcreoscopiques, les Anglais ne se sont pas donne la peine de creer meme un sujetnouveau, lis sc contcntent de reproduire par la lithographic et des proccdes improvises de photographic amphitype en traits rouges les dessins des collections do M. Jules Duboscq. V. M. Ferrier continue avec un succes toujours croissant sa glo- ^06 COSMOe. rieuse campagnc de reprotluction , sur verre albumine et sur pa- pier, (les monuments dc la ville de Paris. Son inldrieur de I'dglise Saint-Etienne du Mont, vu dans le stereoscope, est d'un effet saisis^ sant et vraiment extraordinaire, L'liabile pliotographe qui opere a coup sur, nous a proniis de faire connaitre dans une serie de no- tes , rodigecs pom* le Cosmos , ses secrets de metier , les tours de main lieureux qui assurent sa reussile ; ces notes seront une bonne fortune pour nos lecteurs. VI. Sur une deniande tres-bienveillante adress^c par M. Baroche, president du conseil d'Etat, a M. de Casablanca , ministre d'Etat , le prince president de la R6publique a daigne recevoir en audience particuliere M. Sanis, professeur special de geographic au lycee Louis-le-Grand. M. Sanis avail ardemment desird de pouvoir offrir au Prince le premier exemplaire de sa belle carte en relief del'Italie, comprenant le royaume de Piemont, les Etats autrichiens, le grand-duchi^ de Toscane , le grand-duchd de Modene , les Etats pontificaux et le royaume de Naples, avcc rimmense chaine des Alpcs suisses, tyro- liennes, etc. , et des Apennins. Louis-Napoleon Bonaparte a long- temps considdre ce chef-d'oeuvre du geographe frangais : il lui a dit avec une bonte parfaite que deja, a I'exposition de 1849, il avail re- marqu6 el signal^ commc Ires-utiles pour renseignemenl dlen:ien- taire et special ses carles en relief de la France et de la Corse ; il ft ecoule avec le plus vif inldrel le recit du premier essai fait ^ Mont- rouge de la carte en relief de la France sur un arpenl : et quand M. Sanis lui a parl6 du giganlesque projel du geoplasle ou de la construction, au sein du bois de Boulogne, de la carte en relief de I'Europe entiere sur vingt hectares de terrain; quand il I'a prid de vouloirbien jeter un coup d' ceil sur I'exposd de ce projet, insdrd dans le Cosmos , le Prince, donl la haute intelligence dlait vivemenl excitee par celte grande pensee, a marque d'un pli les pages de la revue, en promettant de les lire avec la plus s^rieuse attention. MfiTilOROLOGlE. La question si importante des temperatures locales se rattache en partie h. I'effet de concentration de la chaleur qui se produit sur les points de la surface terrestre, ou le renouvellement de I'air est supprime ou entrav6. M. Babinet, qui nous promet pour une des plus prochaines COSMOS, 107 livraisons du Cosmos, une etude aussi complete qu'elle peut I'etre dans I'etat actual de la science, des temperatures locales, nous prie en at- tendant et pour preparer le terrain, de publier les details de deux grandes experiences faites, I'une sur les Alpes par M. de Saussure, souvent citee, mais mal connue ; I'autre au cap de Bonne-Esperance, par sir John Herschel, et presque ignoree en France. Toutes deux ont ete faites dans la pensee de mettre en evidence les effets de la chaleur solaire confineeet condensee. II y a cependant entre elles une diffe- rence notable. Sir John Herscliel avait pour but direct et principal d'observer I'effet de la concentration des rayons solaires, tandis que Saussure cherchait surtout a mesurer I'efficacite des rayons du soleil a diverses hauteurs dans I'atmosphere. Voici le curieux passage de Saussure ( Voyage clans les Alpes, art. 932), Experience sur la chaleur directe du soleil dans un vase ferrrie. « Persuade done, avec Bduguer, que la priilcipale raison du froid qui rfeghe sur des cimes hautes et isolees, est qu'elles sont entourees et re- froidies par un air qui est constarament froid ; et que cet air est froid, parce qu'il ne peut etre fortement rechauffe, ni par les rayons du soleil h cause de sa transparence, ni par la surface de la terre, a cause de 1 distance qui Ten separe; je voulus voir si les rayons directs du soleil auraient, sur la cime d'une haute montagne, la meme efficacite que dans la plaine, lorsque le corps sur lequel ils agiraient serait situe de maniere a ne pouvoir etre que peii ou point refroidi par I'air envi- tonnant. c< Pout" cet effet, apres diverses tentatives dont les details me m^ne- taient trop loin, je fis faire, avec des planches de sapin de demi-pouce d'epaisseur une boite qui avait hors d'oeuvre un pied de longueur sur iieuf pouces de largeur, etautant de hauteur; je fis doubler tout Tin terieur de cette boite avec des plaques de liege noirci epaisses d'un pouce, et je la fermai par trois coulisses de glaces bien transparehtes, poshes les unes au-dessus des autres, en laissant entre elles un police et demi d'intervalle. Ainsi, quand cette boite etait presentee au soleil, les rayons de cet astre penetraient jusqu'au fond, apres avoir traversd les trois glaces. tin thermometre, place au fond de la boite gt rechaijffe par le soleil, etait done garanti de I'actioii de I'air exterieur, d'un cdte par trois glaces de verre et par les couches d'air interposees entre elles, et dfe lous lies autr'es c6tes par une double enveloppe, I'une de bois aiiiii deiiii-pbuce, I'autre de liege d'iih pouce d'epaisseur. 108 COSMOS. « Dans I'intention de faire avec cette boite deux experiences compa- ratives et bien parallMes entre elles, je la fis porter sur lacime du Cra- niont le 16 juillet 1774 ; la, je la rechauffai lentcment au soleil jusqu'a ce que le Ihermometre, qui ctait au fond, eut atteint le 50" degre (62" li centif^rades) : des lors je la tins cxposee directement aux rayons du soleil pendant une heure precise, c'est-a-dire depuis 2'" 12' jusqu'h 3I' 12'; et dans cette heure le thermomfetre monta de 50 a 70" (87° { c). Un thermometre semblable, appliqu^ sur le liege noirci au dehors de la bolte, etait monte a 21"; et un troisifeme thermometre, a boulenue, expose en plein air aux rayons du soleil, a 4 pieds au-dessus du gazon, ne se soutenait qu'k 5". (Saussure emploie le thermometre de Reaumur.) .. Le lendemain, de retour a Courmayeur (777 toises plus bas), ou j'eus le bonheur d'avoir un temps clair, parfaitement semblable k celui de la veille, je choisis une prairie decouverte dans laquelle j'etablis mon appareil : je fis en sorte, en le rechauffant lentement au soleil, qu'a 2'' 12' precises le thermometre, au fond de la boite, se trouvat exactement a 50" , et dfes lors je tins ma boite constamment exposee au soleil pendant une heure precise, en la retournant aux memes perio- des, et le meme nombre de fois que sur le Cramont. Cependant le thermometre renferme dans la boite ne monta qu'a 69", c'est-a-dire moins haut d'un degre que sur le Cramont, quoique celui qui etait place sur le liege en dehors de la boite montat de 6" plus haut qu'au Cramont, savoir a 27", et celui qui etait en plein air a 14" de plus que sur la montagne, savoir a 19^ « Done, dans les circonstances les plus semblables qu'il soit, a ce que je crois, possible de choisir, une difference de 777 toises, dont la cime du Cramont est plus elevee que Courmayeur, diminua de 14" la chaleur que les rayons du soleil etaient capables de donner a un corps entierement expose a Taction de I'air exterieur ; de 6" seulement celle d'un corps qui etait en partie a I'abri de cette action, et elle augmenta au contraire d'un degre celle d'un troisieme corps qui en etait entiere- ment garanti. » II est evident que pour calculer I'effet reel de diminution produit sur les rayons solaires en passant de la station superieure k la station inferieure, il faudrait tenir compte de I'obliquite des rayons provenant de la hauteur du soleil correspondante a I'epoque de I'annee eta I'heure du jour; car la longueur du trajet dans I'atmosphere est I'element important. Voici maintenantl'observation de sir John Herschel au cap de Bonne- Esperance, dans le mois de decembre, vers notre solstice d'hiver : pour COSMOS. 109 ce pays comme pour toutes les latitudes meridionales, c'est I'epoque de la saison chaude. Sur la temperature acquise par la surface du sol expose librement au soleil, et sur quelques autres effets de I' accumulation du ratjonne- ment solaire. ( Besults of astronomical observations, at the Cape of Good Hope, 1847, p. 442.) NOTA. Les temperatures originales sont cn degr^s Fahrenheit. <■ Quand la chaleur, arrivant du soleil, est confinee et qu'on I'empe- che de s'echapper en la for(?ant ainsi a s'accumuler, on atteint de trfes- hautes temperatures. Ainsi, dans une petite boite d'acajou noircie in- terieurement, couverte d'une vitre ajustee pour la grandeur mais non niastiquee , et simplement exposee aux rayons perpendiculaires du soleil, un thermomelre renferme marqua, le 23 novembre 1837, 149° F; le 24 novembre 146", 150°, 152°, etc., etc. Lorsque le sable fut entasse autour de la boite, pour empecher le contact de I'air froid, la temperature s'eleva le 3 decembre 1837 a 177° F. La meme boite, avec le thermometre qu'elle renfermait, ayant ^te placee sous un chassis de bois bien garni de sable tout a I'entour et recouvert d'une vitre (en sus de celle de la boite qui etait dans le chassis), les tempe- ratures obtenues furent, le 3 decembre 1837, a 1'' 30°', apres-midi (temps vrai) 207°,0 F; a 1'' 50™ 217»,5 et a 2'' 44», 218° (103°,33 centi- grades), et cela malgr6 une brise soutenue qui soufflait sur le terrain oil se faisait I'observation. De nouveau, le 5 decembre, avec une sem- blable exposition, les temperatures observees furent, a midi 19", 224° F ; a midi 29-", 230°; a 1'' 15™, 239°; a 1'' 57™, 248° (120° centigrades) ; et k 2'' 57", 240°,5 F. Comme ces temperatures surpassent beaucoup celle de I'eau bouillante, on fit quelques experiences amusantes en expo- sant des ceufs, des fruits, de la viande, etc., aux rayons du soleil dans des appareils analogues. (C'etait le 21 decembre et les jours suivants.) Tons ces objets, apres un temps assezpeu prolonged'insolation,setrou- v^rent parfaitement cuits, — les ceufs etaient durcis et le jaune parfaite- ment farineux jusqu'au centre. Enfin, dans une occasion particuliere, une tres-forte etuvee de viande et de legumes (ce qu'on appelle en franeais boeuf a la mode), fut preparee et mangee avec grand appetit par les personnes conviees h. ce repas. » Je ne doute pas (ajoute tres-bien sir John), qu'en multipliant les vaisseaux enveloppants, les construisant de cuivre noircis al'interieur, les isolant du contact les uns avec les autres par des supports en char- bon, entourant le vase exterieur de coton en fdaments et enserrant le no COSMOS. tout dans du sable sec, une temperature apptochatit de celle de I'igni- tion ne puisse etre produite facilement et a volonte, sans Mtb aiicufte- ment usage des verres ardents. » Ces fails de condensation et d' accumulation de la chaleur solaire confinee ne sont pas aussi simples qu'on pourrait le croire dans un premier apercu, c'est un sujet au contraire herissede difficuU6sj et qui nous a toujours embarrasse. Nous sommes bien heureux que M. Babi- net, qui depuis de longues annees reunit les mat^riaux n^eessaires a cette discussion, veuille biens'en charger. COURRIER SCIENTIFIQUE. i" Woa\elles de t'rance. PHYSioLOGife VEGETALE. — Tout le Dionde connait aujourd'hui la greffe et les heureux r(5sullats qy'elle fournit a I'agricuiture et surtout a rhorticulture; cha- cun sail qu'on multiplie a I'envi les bons fruits et les belles fleurs en les gref- fant sur des sauvageons d'especes congen^res , ou parfois meme heterogenes ; et que, surtout dans le premier cas, il est generalement facile de r^unir plusieurs especes de fleurs et de fruits sur un meme sujet. On salt encore qu'en mariarit les plantes , c'est-a-direi qu'eri portant sur le pistil d'une plante la poussiere fecondante d'une autre plantfe congenere, on cree deS hybrides , c'est-a-dire des varietes nouvelles , souvfent tres-t)recieu3es , qui reunissent les qualites des plantes d'ou elles sont sorties. AiiJSi, par exetiiple, le cactus hybride, ne du mariage du cactus phyllantoides avec le cactus grandiflora ou speciosissima , unit a la splendeur des fleurs du cactus gritrtdiflorU la multi- plicite des fleurs du cactus phyllantoides. Mais il existe en outre des faits nombreux et remarquables, intermediaires en quelque sorte entre les faits de la greffe d'une part, de I'hybridit^ de I'autre , et qu'il est tres-difficile d'expliquer. Certains arbres, par exemple, comme le cyri- sus Adami produisenl plusieurs sortes de fleurs; d'autres, comme la vigne , le pommier, le poirier, etc., portent a la fois plusieurs sortes de fruit^. Premier exemple : M. Gaudichaud , dans la derniferfe seance de t'Acad^mie , a d^poS6 une jeunebrdnche de poitimier, ^nvoyee de Bernay (Eure) par M. jloli- rier, proffesseut de malMmatiques. Cette branche porte trois fruits; les deux sii- p6rieurs sont roux, ce sont des reinettes rousses, et I'inferieur jauriSire, est una reinette du Canada ; ce pommier heterocarpe ; a fruits de diverses sortes , se multiplie fort bien par greffe, siir toutes les essences de sa tribu, et donne Ordi- nairement, sur chacun des nouveaux rameaux, les deux especes de pommes rei- nettes, indiqueesci-dessus. Second exemple : M. Dureau de La Malle a vu greffer, en 1834 , un poirier de bon-chr6tien sur un cognassier : I'arbre greff6 a donne en 1850 des poires de COSMOS. Ill bon-chr^tien de franche qualile, et uii autre fruit encore innomme de forme tra- p^zoide, a queue courte et a peau 6paisse et rude, qui constituera probablement una nouvelle esp6ce jardiniere, Troisieme exemple : II nous a ^t6 racont^ par M. de Monfort. L'archev^que de Seville Majoral, dont le nom se rattache a la terrible histoire des guerres d'Es- pagne, et auquel le mar^chal Suchet, due d'Albufera, fit faire de si magnifiques obs^ques, etait un des plus grands amateurs d'horticulture de son pays et de son temps; son bonheur ^tait de tenter des experiences nouvelles; il avait la passion des hybrides. Or, le resultat le plus curieux de ses essais fut la procrea- tion d'un figuier, qui portait a la fois des figues blanches et des figues rouges; si Ton en croyait m^me la chronique , chacune des figues de cet arbre merveil- leux aurait 6te moiti^ blanche , moitie rouge , ce qui serait par trop extraordi- naire. Comment I'illustre prelat ayait-il obtenu ce singulier hybride? fitait-ce, comme le pr6tendait son jardinier, en melant les deux s^ves laiteuses des deux figuiers primitifs, a fruit rouge et a fruit blanc? c'est difficile a croire. Etait-ce P9r simple greffe? nous ne le pensons pas. Son proc^d^ sans doutQ etait analo- gue au precede de fecondation employe dans le Levant , et qui a re?,u le nom de caprification : le transport du pollen d'un figuier sur I'autre , transport dont des insectes sont les intermediaires. En Orient , en effet , pour f^conder les fi- guiers cultives, on plante au centre du massif un figuier sauvage, sur lequel les fleurs males surabondent, mais qui est couvert aussi de petits insectes analogues a celui qui sur les chines determine par ses piqures la formation des noix de galle. En se promenant sur les fleurs mdles, ces insectes ramassent du pollen , et en p6n6trant ainsi charges dans les fruits des figuiers cultives, ils les f^condent; sans cette fecondation merveilleuse et providentielle, les Bgues n'ar- riveraient pas a maturity, elles tomberaient presque toutes avant d'etre man- geables. Tel fut peut-^tre le secret de I'^veque Majoral. Ce fait du moins appren- draaM. Gaudichaud, s'il etait possible qu'ill'ignorat, que leBguier doit prendre rangparmi les arbres het^rocarpes. Comptes rendus, t. XXXIY, p- 746. Chimie APPLiQuiE. — L'idee de proteger les doublages en cuivre des navires centre I'alteration par I'eau de mer, ^ppartient, comme on le sait, au plus illustre des chimistes anglais, sir Humphrey Davy. II avait pr^vu par la theorie et il de- montra, par des essais realises £k Portsmouth, que le cuivre pouvait 6lre preserve de ralteration, pourvu qu'on le mit en contact avec des metaux plus positifs ou plus oxydables que lui, le zinc, I'etain, le fer, etc. II fut constate que si la sur- face du metal protecteur est un cent cinquantieme au moins de la surface du cuivre, il n'y a ni corrosion ni diminution du poids du metal 5 tandis que, dans le cas contraire, le cuivre eprouve une perte de poids d'autant plus forte que la surface du metal plus positif etplus oxydable diminue. On se hata de mettre en pratique la theorie du grand chimiste ; mais, heias ! le remede fut pire que le mal. En cessant d'etre attaquable, le cuivre avait cesse d'etre veneneux ; jl n'empoisonnait plus les plantes et les mollusques qui ve- naient se coller au navire; I'agglomeration des vegetaux et des coquillages de- venait bienl6t si enorme que le navire, fatalement alourdi, perdait presque toutesft Vitesse et pouvait A peine atteindre le port. Force fut done de dire adieu 112 COSMOS. a la brillante d^couvcrle el do revenir au cuivrc rouge, en se resignant a le remplacersouvent. On roconnut plus tard que le bronze qui renferme six pour cent d'etain em- ploy6 en doublage durait beaucoup plus longtemps que le cuivre et satisfaisait aux conditions lh6oriques posees par Davy, sans presenter les inconvenients d'une accumulation sans cesse croissante d'etres parasites. Ainsi, parexemple, le paquebot Ferdinand, du port de Nantes, a fait dix an- odes de navigation dans les mers les plus chaudes sans que son doublage en bronze ait6te d6truit. Le doublage en bronze aussi deTylimeasubi pendant plu- sieurs ann^es Taction corrosive de I'eau de mer sans alteration sensible. Cesdeux doublages etaient un peu uses, mais tres-egalement, leur ^paisseur etait la memo sur tons les points de la surface ; on voyait seulement ca et la quelques striesou empreintes parall^les d'une profondeur insignifiante. Tout semblait done indiquer que le difficile et grand probleme etait enfin re- solu. Des observations faites en France et en Angleterre dans les circonstances les plus decisives, il r^sulta que pour le bronze de bonne quality, le bronze d'Imphi, par exemple, la perte du doublage etait diminuee dans le rapport de un a deux. Les premiers bronzes fournis par I'industrie furent de lr6s-bonne qualite ; et Ton peut citer un grand nombre de navires dont les doublages dur^rent sept, huit et neuf ans. Le commerce maritime respirait a I'aise et se croyait a I'abri de pertes consi- derables; mais il avait compt6 sans le fl^au de la concurrence. Quid non mortalia pectora cogis, auri sacra fames! Quand la lutte eut commence, que les prix furent baisses , la qualite des bronzes ful fatalement alteree. Tel capitaine vit tout a coup son doublage s'encrasser avec une rapidite efl'rayante, et la marche de son navire se ralentir dans une proportion considerable. Tel autre voyant les feuilles m<5talliques s'alt^rer presque spontanement, se trouvait force de rem- placer, apres dix-huit mois, un bronze qu'on lui avait fourni comme pouvant resistor a une navigation de six ou huit ann^es au moins. Les prejudices apportes aux interets des armateurs par ces deteriorations inattendues sont enormes. Le doublage d'un navire de 500 tonneaux coute envi- ron 1 0 000 francs ; s'il faut le renouveler tous les deux ans et non plus tons les huit ans, c'est un surcrott de depense de 30 000 francs, et le retard d'un navire charge de marchandises, dont le cours sur les marches varie quelquefois d'un jour a I'autre, se traduit toujours en sommes tres-importantes. Charge par le tribunal de commerce de Nantes de rechercher les causes de ces alterations des bronzes, M. Bobierre a etudic avec le plus grand soin les propri^- tes des alliages employes dansle doublage d'un grand nombre de navires, dont la duree a la mer lui dtait connue , et il a reconnu que ce que Ton croyait une anomalie etait certainement le r&ultat d'une mauvaise fabrication. Les doublages de grandeduree avaient une leinte qui se rapprochait beaucoup plus de celle des canons que de celle du cuivre rouge ; leur grain etait parfaitement fin, leur tex- ture bien homogene, leur durele grande; aussi , comme nous I'avons dit, leur epaisseur etait restee la meme sur tous les points; I'usure etait parfaitement reguli^re. Les doublages au conlraire qui s'elaient montres defectueux, avaient COSMOS. 113 une mauvaise couleur, un grain grossier, une texture sans homogeneity; des taches d'^tain apparaissaient ca et la ; le metal positif etait done ou en propor- tion beaucoup trop faible, ou mal reparti , et ne pouvait plus prot^ger le cuivre. Pour un bon service le bronze doit renfermer au moinsquatre pour cent d'etain • et ralt^rabilite de Talliage est presque proportionnelle a la dose des metaux les plus oxydables. La presence presque constanle de I'arsenic dans les bronzes n'est pas un inconvenient grave, et n'empeche pas qu'ils ne puissent avoir a la mer une tr^s-grande duree. En publiant ses consciencieuses recherches, M. Bo- bierre rend un tr6s-grand service a I'industrie. Depuisdeux ans on fait, a Mar- seille surtout , usage d'un enduit m^tailique invente par un baron danois , et exploit^ par M. Besson et compagnie , qui produit a la mer d'excellents effets et remplacerait , dit-on , avec d'immenses avantages les doublages en bronze ; nous avons tous les mat^riaux necessaires pour faire connaitre et appr^cier cette pr^cieuse invention; mais ils ne tombent pas aujourd'hui sous notre main, et nous nous reservons d'y revenir dans une de nos plus prochaines livraisons. ( Comptes rendus , t. XXXIV, p. 688. ) Physique appliquee. — M. Th. du Moncel est parvenu a construire un an6mographe ^lectrique qui , sans qu'il sorte de son cabinet, lui transmet fid6- lement et enregistre sous ses yeux toutes les indications relatives a la direction , » la duree, a la vitesse, aux frequences et aux sens de succession des differents vents. Get instrument se compose de deux appareils distincts : '1° de ran^mo- m^tre proprement dit que Ton place sur \e toit , sur une lour ou meme sur une montagne, et qui recoit iesdiverses influences du vent; 2" de I'appareil indica- teur place dans le cabinet de I'observateur auquel arrivent toutes ces influences et qui les inscrit. L'anemographe entier comprend onze fils et neuf electro-aimants, tous armes de crayons. Un commutateur, qui tourne avec la girouette , fait passer le cou- rant dans I'un ou I'autre des huit premiers Electro-aimants correspondant aux huit directions principales dans lesquelles le vent souffle. Le crayon de i'electro- aimant est alors appuyE contre le papier qui recouvre un cylindre tournant r^gulierement et s'avancant lentement dans le sens de son axe par un mouve- ment d'horlogerie et d'une vis h^licoidale; ainsi appuye, le crayon trace une ligne transversale plus ou moins longue; on connait par la la direction et la dur^e du vent. Si le vent change, un autre Electro-aimant est mis en jeu et son crayon laisse a son tour sa trace sur le cylindre. La Vitesse du vent est enregistree par le neuvieme 61ectro-aimant. Le circuit dont cet Electro-aimant fait partie est ordinairement ouvert , et c'est le moulinet , porte par la girouette et que le vent fait tourner plus ou moins vile, qui, apres chaque cinq cents tours, ferme le circuit et rend aclif le onzieme Electro-aimant; alors le crayon, porte par I'armature de cet Electro-aimant , appuie contre le papier et y marque un trait. Le nombre des traits indique le nombre des tours du moulinet et, par consequent, la vitesse du vent qui est proportionnelle a ce nombre. De plus, en e.xaminant la correspondance de ces traits avec les traces de la persistance des vents, on saura non-seulement la vitesse du vent a chaque instant de la journee, xam encore a quel vent correspond telle ou telle vitesse. 114 COSMOS. L'an^mographe de M. du Moncel est beaucoup plus complet que celui de M. Abria , que nous avons decrit dans notre lelegraphie 61ectrique ; il est tr6s- bien entendu , et il a ilc construit avec habilele parM. Mirand. Nous ajouterons seulement que confi6 a des mains plus habiles encore et a un artiste lout a fait special qui ait , comnie M. Froment, le g6nie de ce genre d'appareils , ii pourrait Hre trt^s-considorablement simplifi^ ; les onze electro-aimants, nous en avons la certitude, pourraient se reduire a deux. (Comptes rendus, t. XXXIV, p. 761.) ficoNOMiE HURALE. — Deux dos troupcaux de M. de Romanet, places en So- logne, I'un de brebis meres, compose de deux cent six betes, et I'autre de mou- tons de deux ans comprenant cent cinquante-huit individus, ayant ete conduits a la fin de IS.'il dans des parlies de palurages basses et humides, furent tout a coup envahis par la pourriture ou cachexie aqueuse. En attendant I'arrivee du velerinaire,M. de Romanet fit frictionner les moutons les plus malades avec de la teinture d'iode, et leur fit avaler dans un verre d'eau une demi-cuilleree a caf6 de celte meme teinture. Renouvelee plusieurs fois, du 14 au 18 avril, cette me- dication produisitd'excellents effets; aucun mouton n'avait succombe. Le ban- gon ou tumeur caracleristique de cetle maladie, n'etait plus visible; I'animal avail repris sa vivacite. II semblerait done que I'iode est apte a guerir une ma- ladie reputee jusqu'a ce jour incurable ; et ce premier succes d6lerminera sans doule I'administration a ordonner que des experiences soient faites dans les ^coles veterinaires et dans les fermes r^gionales. La cachexie aqueuse est un des grands fleaux de I'agriculture, elle enl^ve chaque annee en France plus de cent mille betes a laine. [Comptes rendus, t. XXXIV, p. 738.) Influence des eaux employees dans les irriyations. — D'experiences en grand faites dans les valines des Vosges, MM. Eugene Chevandier et Salvetat tirent les conclusions suivantes : 1° De deux sources semblablement situees, dont les eaux sent employees a I'irrigalion en quantil^s ^gales, et qui produisent des recoltes differenles, les bons effets de la source ferlilisante ne semblent dus ni aux gaz tenus en disso- lution par I'eau, ni aux sels aicalins ou terreux solubles qu'elle contient, ni a la silice, ni aux composes ferrugineux, ni m6me a la masse des matieres orga- niques dissoutes dans les eaux. 2° Les propriet^s fertilisantes semblent tenir a la proportion d'azote contenue dans la matiere organique dissoute dans I'eau. 3° II ne suffit pas de consid6rer la quantite absolue de I'azote, il faut encore tenir comple du rapport de I'azote au carbone dans les matieres organiques que les eaux d'irrigation contiennent. i" Abstraction faite des matieres min^rales, une source ferlilisante se rappro- che beaucoup d'une eau de fumier tres-etendue. Pour donner une idee de I'influence des eaux d'irrigation, nous citerons I'ob- servalion suivante : une prairie arrosee pas la mauvaise source du 13 avril au 31 mai a recju 126 273 metres cubes d'eau, et a produit par hectare 2749 kilo- grammes de foins et regains. La prairie voisine, arrosee par la bonne source, a recu 130 311 metres cubes d'eau, el le produit par hectare a 6te de 10 469 ki- COSMOS. 115 logrammes. La recolte tie la prairie arrosee par la mauvaise source n'est done que le quart de celle de la prairie arrosee par la bonne source. Deja dans un premier memoire M. Chevandier avail demontre qu'une se- mence de sapin pent produire, au bout de cent annees, un arbre dont la valeur atteindra 8b francs ou ne depassera pas le chiffre modique de 7 francs, suivant les quantit^s d'eau qui abreuvent le sol sur lequel cette semence se d^veloppe. On conceit de quelle importance sent pour les progres de ragriculture des ex- periences failes ainsi en grand et avec tant de soins. Physiologie. — MM. Gratiolet et Cloez continuent avec ardeur leur 6tude du venin renferme dans les pustules cutanees des batraciens, crapauds et salaman- dres terrestres. Dans le but de determiner si le venin conserve garde ses proprietes v^neneuses, ils Grent dessecher le 25 avril 1 851 , deux grammes environ de venin de crapaud : une petite quantite de cette substance 16gerement humeclee a ete inoculee a un chardonneret , qui est mort presque aussitot avec les symptdmes accoutumes. Ils ont constate depuis que la substance active du venin soluble a un faible degre dans I'^ther est tres-soluble dans ralcoot, et n'est, par consequent, pas une matiere albuminoide , comme on aurait pu le pr^sumer d'apres I'opinion recue sur la nature des poisons animaux; sa nature est tres-probablement al- caloide. Un fait singulier et dont I'importance sera appreciee, c'est que dans tous les oiseaux soumis aux experiences et morts apres convulsions, les canaux demi- circulaires de I'oreille ont toujours ete trouv^s simultanemenl remplis de sang. {Comptes rendus, t. XXXIV, p. 729.)] 2° Convenes de Belg^ique. Meteorologie. — L'experience nous apprend qu'une pression minimum de I'atmosphere ne se manifeste pas dans une localite seulement, mais qu'en ge- neral on I'observe, en memo temps, sur une suite de points qui ferment, a la surface de la terre , une ligne plus ou moins etendue. L'intervalle qui separe deuxlignes de pression minimum se nomme onde atmospMrique, par analogie avec ce qui se passe sur les mers. La grandeur des ondes atmosph^riques, leur vitesse moyenne de progression , le sens general de leur mouvement , les lieux ou elles se ferment , ceux ou elles s'effacent , I'influence que peuvent avoir les montagnes ou certaines localites pour les modifier, et une infinite d'autres circonstances que nous ne pouvions pas m^me prevoir , ont 6te de la part de M. Qu6telet I'objet de longues Etudes, qu'il resume dans les conclusions suivantes : -1° L'atmosphere est generalement travers^e par plusieurs syst6mes d'ondes differents. Ces ondes interferent et produisent, pour chaque lieu de la terre , un 6tat special de pression. 2" Au milieu de tous les mouvements particuliers , il se prononce un systeme d'ondes predominant, qui semble rester a peu pres constant pour un meme climat. 3" Les ondes atmospheriques , tant en Europe qu'en Asie, se propagent du J 16 COSMOS. nord au sud, sans avoir toutefois la miime vitesse; elles marchent plus rapide- ment dans le syst^me asiatique et dans le syslemo de I'Europe ceutrale , qu'en Russie ou dans les montagnes de I'Oural. 4° Les ondes atmospheriques semblent se propager avec moins d'obstacles a la surface des mers qu'a Tint^rieur des terres.En general, lesasp6rites du globe, et particuiierement les chaines de montagnes , diminuent leur vitesse et modi- fient aussi leur intensity. b° L'in^galite de vitesse, sur le continent , d'une part , et dans le voisinage de la, mer de I'autre , expliquent les inflexions qu'eprouve , dans son ^tendue , la ligne qui Ogure la marche generate des ondes dans notre h^misph6re. Cette ligne se replie de maniere a etre poussee en avant dans le sens de la plus grande vitesse : ainsi I'ondepenetre presqu'en meme temps sur le continent europ^en par les diiTerentes coles de la mer du Nord, de I'Ocean et de la Medi- lerran6e ; d'une autre part, elle vient aboutir presque en m^me temps le longde la chatne de I'Oural ou de celle des Alpes tyroliennes. 6° La vitesse avec laquelle les ondes barometriques se propagent est variable; elle pent 6tre estimee en moyenne de 6 a 1 0 lieues de France a I'heure : elle est un peu plus grande dans I'Europe centrale et moindre en Russie. Au reste, cette vitesse varie d'une onde a I'autre; elle varie m6me pour les differentes parties d'une meme onde. Comme nous I'avons deja fait remarquer, elle est la plus grande vers les cotes, et dans tous les endroils oil la propagation du mouvement parait plus libre. Au contraire, dans le voisinage des montagnes et des plateaux, cette vitesse diminue notablement; dans I'Oural, elle se reduit parfois a n.oins de deux lieues par heure. 7° Les directions des vents n'ont pas de rapports apparents avec les directions des ondes barometriques. Ce fait important semble favorable a I'hypothese de courants compensateurs marchant dans le bas de I'atmosphere et dans des di- rections opposees a celles des courants qui vont du p61e vers I'^quateur. Remar- quons , du reste, que I'air pent aussi se condenser par des pressions laterales sans qu'il y ait des affluents d'air nouveau , et, par suite, des vents sensibles dans les directions de ces pressions. Au contraire , les vents dominants peuvent fort bien subsister sans alteration pendant que les masses d'air qu'ils deplacent changent sensiblement de densite. II doit en 6lre de certaines ondes barom6triques comme des ondes sonores qui se transmettent dans toutes les directions , malgr^ I'obstacle des vents , lesquels peuvent, a la verite, en modifier I'intensite et la vitesse. 3° IVouTelles d'Allemag^ne. HiSTOiRE DES SCIENCES. — Le doctcur Sinsteden a signals recemment un passage du quatrieme livre de Rerum mtura de Lucrece, dans lequel le poete decrit le fanlascope ou ph^nakisticope invente par M. Plateau, avec une exac- titude telle, que si Ton ne savait pas par quelle longue sdrie de considerations lh6oriques et d'experiences le savant physician beige est arriv6 a la construction deson charmant appareil, on pourrait supposer qu'il en a emprunt6 I'id^e au pbilosophe romain. COSMOS. 11^ Voici le texle si curieux de Lucr^ce : Quod superest , non est mirum simulacra moveri , Brachiaque in numerum jaciare et ctctcra membra (Nam fit ut in somnis facere hoc videatur imago). Quippe ubi prima perit , alioque est altera nata Endo statu; prior liaec gestum mutasse videtur. Scilicet id fieri celeri rationo putandum est.... Tanta est mobilitas, et rerum copia tanta, Tantaque sensibili quovis est tempore in uno Copia pariicularum, ut possit suppeditarc. « Quoi de plus encore, il n'est pas ^tonnant que I'objet montr^ a I'ceil semble se mouvoir, qu'il semble agiter devant vous en cadence ses bras et ses autres membres (evolution si rapide et si magique qu'elle semble un songe). Car d6s que la premiere image s'est evanouie, une autre so montre asa place dans une position un pen differente, et I'effet de la nouveile apparition est de faire croire que c'est la premiere image qui a change sa pose. Cette illusion doit avoir son explication dans un rapport de vitesse. Le mouvement est si rapide, le nombre de parties de I'objet qui affectent I'ceil en memo temps, ou dans chaque temps sensible est si grand que la multiplicity d'images fixes pent suppleer aux poses diverses d'une image mobile unique. » Qu'est-ce en effet que le phenakisticope? un instrument a I'aide duquel des figures qui different graduellement entre elles de forme et de position viennent successlvement et a des instants tres-rapproches se presenter a I'ceil, de telle sorte que la persistance des impressions liant les images entre elles, I'oeil croit voir une m^me figure passer d'une maniere continue d'un 6tat a I'autre. Or, Lucrece pouvait-il le decrire en termes plus precis et plus clairs ? Magnetisme TERaESTRE. — M. Lamont, directeur de I'Observatoire royal de Munich, en discutant avec le plus grand soin les observations horaires de I'ai- guille aimantee, croit avoir pleinement constate le fait suivant. « La grandeur des variations de la declinaison presente une periode decennale, de telle sorte qu'elle augmente regulierement pendant cinq ans et decroit de meme pendant cinq autres annees. » Voici comment M. Lamont est arrive a cette conclusion. Operant d'abord sur ses propres observations faites a I'Observatoire de Bo- genhausen de 1840 81 1852, il retranche la declinaison minimum correspondant a huit heures du matin de la declinaison maximum correspondant a une heure apres midi, et constate que la plus faible declinaison a eu lieu vers le milieu de 1843, la plus forte vers le miheu de 1848. Remontant ensuite aux observations de Goettingue, a celles du colonel Beaufoy, faites a.Bushy-Heath, et enfin a celles de Cassini, il d^couvre trois nouveaux maximum, I'un vers le milieu de 1837, I'autre en 1817, le troisieme enfin vers le milieu de 1785. M. Lamont n'a pas reconnu encore si I'intensite horizontale presente dans ses variations les m^mes periodes que la declinaison. Geologie. — MM. Rose et Mitscherlich, en etudiant la composition des blocs erratiques de granit et de porphyre que Ton rencontre sur les parties elevees de I'Apennin et aux environs de Naples , arrivent a cette conclusion : « La basse temperature qui regnait au sud des Alpes a une ^poque ou la mer Blanche com- muniquait aveclamer du Nord, oula Suede, laNorvege, laFinlande, unepartie 118 COSMOS. de la Russie et de rAllemagno claient recouverles par les eaiix, et oii les glaces polaires transportaient , dispersaient et deposaient des blocs erraliques, a dii causer un grand refroidissement en Suisse et en Italia. II n'y a done rien d'ex- traordinaire a supposer que des glaces llottantes ont pu transporter des blocs des Alpes dans le royaume de Naples, surtout si Ton se rappelle qu'a la latitude de Bolzano on voit, dans le golfe du Texas (Amerique du sud), des glaciers qui descendent jusqu'a la mer. Metali-urgie. — Aprfes la Russie, I'Autriche est, de tous les Etats europcens, celui qui fournit la plus grande quantite d'or. Les lavages, en 1850, ont produit 4.3OO marcs ou G03 000 ducats, plus de six millions. Geologie. — On rencontre a Sotzka, en Styrie, prfes Cilli, et a Radoboj, en Croatie, d'enormes quantites de fossiles vegetaux, debris de feuilles et de fruits tr^s-reconnaissables. M. Unger y a retrouve 420 especes diff^rentes, dont huit seulement monocotyledonees ou cryptogames, et toutes les autres dicotyledo- nees. La comparaison de ces plantes avec celles de I'epoque actuelle semble con- duire aux conclusions suivantes : La flore de Sotzka appartenait a un groupe d'iles situees dans un vaste oc6an, qui s'^tendait sur TEurope et I'Afrique, entre le 10« et le 55' degre de latitude nord : son caracl^re general etait celui d'une region tropicale, et elle se rappro- che beaucoup de la flore actuelle des lies de la mer Pacifique et de la Nouvelle- Hollande. La flore de Radoboj est d'une epoque plus tardive. La vegetation actuelle des iles de la mer du Sud presente les restes d'une flore qui, a une epoque reculee, s'etendait sur toute la terre. IVoa>elles d'Ameriqac. La question de la vitesse de I'^lectricit^ occupe grandement les physiciens depuis une vingtaine d'annees : M. Wheatstone tenta le premier, en 1834, d'ex- primer cette vitesse en nombre; mais il ne parvint qu'a etablir une limite infe- rieure qu'elle devait depasser. II n'opera aussi que sur r^lectricil^ ordinaire ou de tension, et ce qu'il importe surtout de connaitre aujourd'hui, c'est la vi- tesse du courant volta'ique. M. Jacobi reprit cette recherche en 1837 sur une ligne lelegraphique de la Russie : MM. Walker et Mitchell y travaillerent a leur tour en Amerique : deux Francais , MM. Fizeau et Gounelle , enfin , mirent tout en CBuvre pour resoudre defmitivement ce grand probl^me. M. Gould parait n'avoir pas ^te completement satisfait des tentatives ante- rieures, et il a entrepris dernierement en Amerique de nouvelles experiences dans le but de fixer avec plus de certitude la vitesse du courant electrique. — Nous ne discuterons pas aujourd'hui la valeur de ses experiences, dont ['Ameri- can Journal a donne la description. II nous suffira d'enregistrer les resultats obtenus, afin de pouvoir les soumettre plus tard a une appreciation rigoureuse : Kilometres. Wheatstone, vitesse de I'electricit^ statique. 260 000 Pouillet, Vitesse du courant galvanique dans le cuivre, dix mille fois plus grande que celle de la lumiere • 3 000 000 000 COSMOS. 119 Ce chiffre phenomenal que son auteur aurait pu taire est evidemment le re- sultat d'id^es th^oriques preconcues et d'experiences mal interpretees. Kilometres. Jacobi ^ 0 670 25 800 Walker, dans le fer , „„ .„„ ( oO bOO Mitchell 48 300 „..„,, ( dans le fer. .. . 101 710 Fizeau et Gounelle < , , ,_„ „^^ \ dans le cuivre. 177 722 »^ r. ,j ( 20 690 Le circuit dont M. Gould s'est servi allait deSeaton a Washington. II avait de longueur 1682'', 45. Apres avoir traits les r6sultats de ses experiences par la methode desmoindres carres, M. Gould s'arr^te au nombre 23 989 kilometres conime mesuraut tres-probablement la vitesse de I'electricite ou I'espace qu'elle parcourt en une seconde. Notre confiance dans les experiences de MM. Fizeau et Gounelle est toujours enti6re, et nous craignonsque M. Gould n'ait pas echappe aux interpretations hasardees ou fausses que M. Fizeau a mises bien certainementen evidence dang les experiences de MM. Walker et Mitchell. Pavage en fer. — II y a quatre ans, M. Jobard, de Bruxelles, et un journal francais, le Moniteur industriel, proposerent I'essai d'un pavage en fonte. lis ne furent pas (5coutes. Aujourd'hui cette innovation nous vient du dehors : un pavage en fer vient d'etre ^tabli dans une ville des fitats-Unis. Les plaques de fer qu'on substitue aux paves ont une epaisseur de deux cen- timetres et demi environ, sur une longueur d'un m6tre, et une largeur de cin- quanle centimetres. La surface de ces dalles metaliiques est coupee par des rainures qui courent en zigzag, de maniere a empecher les pieds des chevaux de glisser. Ces dalles sont posees sur un lit de sable mele de chaux dans une faible proportion, et elles s'ajustent entre elles avec une telle perfection que tout demembrement est materiellement impossible par I'aclion des roues des voitures. Ce dallage, s'operant sur une surface plane, se pratique avec une etonnarfte rapidite. Depuis six mois que I'epreuve dure sur une voie situee dans le voisinage d'une fonderie , et qui est sillonnee sans cesse par des voitures chargees de fer et de charbon , on n'a pas eu a constater dans le nouveau pavage I'alteration la plus legere. Les dalles de fer ont admirablement r^siste aux poids enormes qu'elles ont eu a supporter constamment ; aucune pression n'a pu ni en deranger la symetrie, ni en faire flechir le niveau sur un point quelconque , comme cela arrive si frequemment sur les voies pavees d'apr6s les precedes ordinaires. Independamment de I'economie que le nouveau systeme presente sur tous les autres, nous devons aussi faire remarquer les avantages qui resultent de son application pour les transports. Avec Tegalite du pavage, les chevaux se fati- guent beaucoup moins et peuvent d6s lors trainer de plus lourdes charges; le 120 COSMOS. cahotement, si dangereux pour les pistons, si pr^judiciable aux v^hicules, esl supprim6 compl^tement , et une voiture roule sur ces voies unies et loujours propres sans faire plus de bruit que si elle parcourait I'all^e sablee d'un pare. Industrie americaine. — Void ce qu'un voyageur nous racontedesresullals oblenus par la canalisation du Niagara : « Ce n'est pas la dix-milli6me partie du Niagara qui est d^tournee de son cours, et pourtant quel admirable r^sultat on a d6j^ obtenu! La plus belle ligne de canalisation de toute rAmerique, largement pourvue d'eau et des centaines de moulins et de fabriques de toute espece mis en mouvement presque sans frais. « J'ai visite une de ces usines qui m'a semble assez curieuse. On y fabrique des tonneaux pour la farine; car aux ]&tats-Unis oil les sacs sent rares , on les remplace par les barils. Les trongons de bois de merrain, amollis par la vapeur, sent places horizontalement sous un enorme couteau , qui les decoupe en tranches. Ces planchettes sont couples a la longueur par deux scies circulaircs ; faconnees et polies parquatre rabots tournants disposes en barils par une chaino sans fin; puis les fonds et les cercles, fails aussi a la mecanique, sont polls en un din d'ceil avec une precision toute mecanique. V Je suis resle assez longtemps a me faire expliquer toute la machine par le proprietaire lui-m^me, qui est en meme temps son inventeur, et a bien eu soin d'abord de s'assurer que je n'^tais pas un concurrent. C'etait un jeune homme de vingt-trois a vingt-cinq ans, bon et joyeux vivant, d^ja pere de plusieurs enfants , Iravaillant rudement comme ses ouvriers , habit bas, mais en souliers vernis. J'etais emerveille de voir avec quelle rapidite et quelle facilite s'execu- taient toutes ces operations. Point d'embarras, point d'efTorts, et en dix minutes, avec trois hommes et trois enfants, une piece de merrain brut se transformait en un baril parfait et pret a vendre. » Depuis de longues annees un Francais, M. de Menneville, a aussi invente un systeme complet de machines pour la confection mecanique des tonneaux. II r^sulle, d'experiences nombreuses et suffisamment concluantes , qu'avec cet outillage le prix de main d'oeuvre, pour chaque tonneau, serait de 30 a 40 c. au lieu de 3 ou 4 fr. Les efforts de M. de Menneville pour faire accepter son inven- tion ont fatalement ^choue , et nous void une fois encore devanceSk. par le nouveau monde. bE L'laPRlMElUE DE CRAPELEI , RUB DE VAUCIRARD, 9. COSMOS. 121 PHOTOGRAPHIE. — NOUVELLES. I. M. Talbot, le glorieux inventeur de la photographie sur papier, qui porte im vif inleret a I'apparition de notre revue, el qui nous felicite aunom de son illustre ami le baron Alexandre de Humboldl, du nom de Cosmos que nous lui avons, dit-il, si heureusement donne, nous a adressehier un admirable portrait obtenu sur papier en trois secondes par M. Henneman, son disciple favori, celui-la meme qui vint en 1843 donner a Paris des lemons de talbotypie. M. Talbot ne nous ditpas si cette belle tele de vieillard a ete obtenue par I'emploi de I'albumine ou du collodion , ou immediatement sur papier pr^par6 par les precedes de la calotypie. Nous la doposons dans notre salon photographique du Cosmos, pour que tous les artistes puissent la consulter et I'admirer. On dirait une des plus belles tetes sorties du pinceau incomparable de Rembrandt, tant elle est vigoureuse et accentuee; mais elle a de plus ce caractere de verile infinie que le pinceau hinnain ne peut pasatteindre. Elle I'emporte de beaucoup sur les portraits , si etonnants cependant, de M. Plu- mier; c'est un tout autre caractere ; c'est a un degre plus eleve en- core I'art et la vie. Dans notre dernier article nous avons e[6 un peu trop severes envers les photographes anglais ; nous sommes heureux aujourd'hui de proclamer leur triomphe. II. M. Plumier emploie avec succes pour fixer ses epreuves, le pre- cede suivant : on fait dissoudre cent grammes d'hyposulfite dans cinq cents grammes d'eau , et Ton verse de I'alcool jusqu'a ce que la dissolution soil saturee; puis on ajoute quelques goultes d'acide ac^tique. Quand I'epreuve est parvenue au ton que Ton desire lui donner, on la retire de cette dissolution et on la lave dans lean pendant quelques minutes, c'est-a-dire jusqu'a ce que le papier ne laisse plus apercevoir aucune trace d'alcool quand on le retire de I'eau. Des epreuves ainsi fixees il y a trois mois, et qui n'etaient restees que quatre a cinq minutes dans I'eau , sont aussi belles que le premier jour. Pour que ce proced^ reussisse parfaitement, il laut qu'au sortir du chassis positif , I'epreuve ne soil pas trop accusee. Quand le bain a servi k fixer quelques epreuves, il faut y ajouter un peu d'alcool pour I'entretenir au meme degre de saturation. Nous regrettions que le journal qui a public le premier le precede de fixation de M. Plumier, n'eut'pas dit explicitement a quel genre il'^preuves il s'appliquait plus particulierement. Nous ne conipre- nions pas aussi cc qu'on entend par une dissolution liquide saturee 6 jriN 1852. 6 122 COSMOS. d'alcool: cnmnient constater cctte saliualioii? M. I'luinior nous ap- prcnd a I'instant quon jiigc que la solution est saluiec quand I'al- cool siirnage. II n'y a plus d'obscur que les traces ^isiblcs d'alcool. III. 31. Lc Secq , comme on salt, fut un dcs artistes choisis I'annee dernierc par la conunission des monuments liistoriqucs, el charg^ par lc gon^ernement dc reproduire pai- lc daguerreotype les plus beaux monuments archcologiqucs de nos proAinces. Photographe cminemment liabilc et travaillenr Infaligable, il rapporta de sa longue excursion unc ricbe collection d'^preuves d'une rare perfec- tion. On avail surtout admird les grands portails de la calbedrale de Strasbourg et de la cathcdrale de Reims; le porlail lateral de Reims represcntant la curieuse legcnde des \ierges sages et des vierges folles; lc pilier des anges, de Reims aussi ; I'eglise de Com- piegne, etc., etc. Presque loutes les eprcuves deM. Le Secq onl etc acquisespar la commission des monuments pour etre deposees dans les archives du ministere dc rinldrieur; el I'artiste a recju pour mis- sion nouvcUe de reproduire la collection des statues qui ornent les principales cglises de France, produils precienx dc I'arl trop pen ap- pr6cie encore des xnr, xiv% x^'^ et xvi'^ siecles. Nous applaudissons de tout noire cffiur a celle grande pensec , mais nous lui applaudirions bien plus encore si la commission avail impose a M. Lc Secq I'obli- gation de prendre une double cpreuve stereoscopique de chacun des monuments qu'il doit reproduire; ou s'il entrait dans les plans bien arreles du pholographe de marcher courageusemenl dans la voic de progres indefmi ouverte par I'invention du stereoscope. Avec une seule cpreuve on voit ime image fulolc du monument , et c'osl dejci quclque chose; mais avec deux epreuves , on a oil la slalue et le monument eux-memes. Le chef-d'oeuvre dc sculpture est re- produit par un chef-d'a}uvre de sculpture pins etonnanl encore; I'ccil et I'espril sonl egalement el parfaitcmenl salisfails. Le travail serait a refaire si celte anuee encore on sc bornail ci une seule ^preuv e , et Ton aurait dcpense en vain des sommes tres-conside- rables. Nous engageons instamment les amis sincercs et zeles de la pho- tographic el (le I'arl au moyen age, a vcnir, dans noire salon photo- graphiqne du Cosmos, contempler dans lc stereoscope les magniliques epreuves sur verre et sur papier de M. Ferrier ; les vucs surtout du portail de I'eglise Saint-Ouen de Rouen, du chevet de Nolre-Dame de Paris, de rinterieur de Sainl-Etienne du Monl, de rhotcl de ville de Paris, etc., etc. lis comprendront mieux alors pourquoi nous insislons tantsur la necessilc absolue dc deux images, el ils se COSMOS. 128 fcront les avocats eloquents de la noble cause que nous defendons. Maintenant surtout que pour obienir des effets de relief et de per- spective on n'est plus oblige de recourir au stereoscope a boite , el qu'on voit les objets plus nettement et tres-agrandis avec le stereo- scope omnibus d'un euiploi si facile, hcsiter a prendre deux images stercoscopiques, ce serait vraiment un crime. Avec le stereoscope omnibus une epreuve sur sixieme de plaque produit reellement le meme effet qulme epreuve sur demi-plaque. IV. Nous avons sous les yeux la premiere livraison {XEgi/ple, Nubie, Palestine et Sijrie, de M. Maxime du Camp; brillante et utile publication, archeologique a la foiset daguerrienne, pittoresque tout ensemble et savante. Les lieux explores par M. du Camp ont ele le berceau de la religion, de la civilisation, de la science et de Fart. Moise, Josue, David, Sesoslris, Alexandre, Cesar, Mahomel, Napo- leon les ont tour a tour fecondes ou bouleverses par leur parole , sauves ou domptes par leur glaive. Lensemble des monuments dc ces grandes contrces est Thistoire la plus saisissante de I'huraanite; elle plonge jusque dans les profondeurs les plus inaccessibles du passe. Le dessin el la peinturc , la gravure et la lithographie sont impuis- sants a reproduire ces monuments avec une exacte lidelitc ; la plio- tographie seule pouvait les traduire dans leurs plus minces details el dans les effets d'ensemble. Nous felicitous M. du Camp d'avoir osi'; entreprendre celte grande ceuvre, et d'avoir rencontre des cditeurs aussi intrepides et aussi forts que MM. Gidc et Baudry. L'ouvrage entier comprendra cent vingt-cinq planches clioisics avec le plus grand soin et tout a fait irreprochables. Le tirage des epreuves positives a ele confie a M. Blanquart-Evrard qui fail tres-bien et a bon marche ; c'etail une condition indispensable de succes. La premiere livraison comprend : 1° le colosse occidental du Specs de Phre, pres d'Ibsamboul; 2° la parlie seplentrionalc du Speos d'Hathor; 3° I'entreedu Speos d'Hatlior; 4'^ la parlie meridional5du Speos d'Hathor; 5° une vue cavaliere de la seconde cafaracte Both el Hayar (le ventre de pierre).Les grandes figures de ces monumenls sont la tele colossale de Sesostris et la statue colossale aussi de la reine Nofre-Ari, entre deux statues de Ramses ou Sesostris son royal epoux. Quel malheur que le stereoscope dont la decouverle dale cepen- dant de 1838 IVil completement ignore quand M. Maxime du Camp explorait la Nubie, I'Egypte et la Syric avec son daguerreotype. Ces 124 COSMOS. sculptures inlornies el seclies en projection ou dans une represen- tation plate, prodiiiraient un elfet imposant et grandiose si elics sc nionlraient avec leurs reliefs et Icurs creux. Et celte cataracte de- solee,comnieelle serait saisissanle si chacune des ^normes roclies ({ui roulent sur son lit se dressait devanl Toeil du spcctateur ! Nous no savons pas si MM. du Camp, Cide et Baudry out cu la pensee de fairc reproduire surverre albuiniue les photographies deleur collection, iioiu' les montrer agrandies par les procedes de la fanlasmagorie et des dissolving-Yie\\s. Ce serait une tres-bonne entreprise qui les aiderait grandemenl ;\ couvrir les frais de leur lourde publica- tion. On Irouvera dans nos salons du Cosmos les prospectus de Nubie , Egypte, Palestine et Sijrie, ainsi que de l'Italie monumentale de M. Piot, et Ton y rccevra les souscriptions h ces deux beaux ouvra- ges, dont nous desirons ardemment le succcs. V. Lecomte deRosse, president de la Soclete royale de Londres, a donne samedi dernier sa troisieme soiree scientifique. Ce qu'on a le plus admire dans ses salons ce sont les effels de reliefs et de mou- ^ements oblenus avec le stereoscope fantascopique de M. Claudet, effets qu'il nous sera donne bientot de montrer dans nos salons du Cosmos. M. Claudet anssi, dit VAlhenamm, avail depose des images photographiques deslinees a mettre en evidence ce fait remarquable , qu'avec une ouverture de t)'ois ponces et un quart de la lentille du daguerreotype, on pent obtenir des portraits aussi parfaits que si I'ouverture n'avait que les dimensions de la pupille : an aperture of three and a quarter inches can produce as correct a portrait, as one of the size of the pupil. Ce fait suppose que les objectifs dont M. Clau- detdispose, sont d'uneperfection rare. Danscette meme soiree le lieu- tenant Roberts presenta un instrument destine a mettre les navires , c'est-k-dire leurs boussoles a I'abri des attractions locales. M. Lacon e\pl iqua un procede nouveau de suspension des bateaux aux flancs des navires, qui permet deles descendredansl'eau en un temps tres-court et par une manoeuvre tres-facile ; le docteur Mantel exposa une collec- tion vraiment rare de belemniles et autres fossiles; M. Appold mon- tra un mode tres-ingenieux d'abaisser la temperature de I'eau de 20 degres au-dessous de zero, sans qu'elle gele; M. Herdman expH- (|ua une sdrie de dessins destin^e a mettre en evidence les avanla- ges d'un nouveau syslome de perspective circulaire, etc. ;le superbe volume illusfre des Antiquites ecclesiastiques de la Russie presenic recemment a la Societe royale par le prince Demidoff , etalait ses pages splcndides, et atfiraitau plushaut degre I'atlention des nobles COSMOS. 125 et savants visiteurs. La quatriemc et deiniert- soiree do lordRossese tiendra lo 12 jiiin prochain. Jusqu'ici les soirees scientifiqiies du docteur Lardner, dont nous avons deja cnlretcnu nos lecteurs, pouvaient seules en France don- ner une idee de ce que sonl a Londres les receptions du president de la Societe royale ; niais bientot le Cosmos ouvrira aussi scs sa- lons, il fera appel au genie des inventeurs et des artistes, et se peu- plera doeuvres merveilleuses que Ton viendra admirer. Ce ne sera pas la ponipe et la magnificence d'unc demeure aristocralique an- glaise ; on y cherchera en vain le confortable des buffets feeriques de lord Rosse ; mais les yeux et I'esprit y trouveront un glorieux aliment : or, I'homme ne \it pas seulcment de pain! VI. En meme temps que les salons de lord Rosse s'ouvraient a la science aristocralique , la Societe des ingenieurs civils terminait sa session annuelle par la seance que nos voisins d'outre-mcr appel- lent UNE CONVERSATION. Les vastes salles de la Societe surabondaient d'oeuvres d'art , de modeles de niacbines en mouvement, de pro- duits de manufactures et d'ateliers, etc., etc. MM. Glynn et Appel executaicnt en presence d'une foule de visiteurs leurs procedes d'im- pression anastasique ou resurreclionnelle, en reproduisant a la mi- nute et par un simple transport un nombie quelconque de copies d'une page ou d'une gravure imprimees a I'encre grasse. C'est ce que M. Gillot realise avec une superiorite incontestable par sa m6- thode paneiconograpliique, que nous ferons bientot connaiire a nos lecteurs. Effrayes cux-memes des consequences desastreuses do leur art merveilleux dont la fraude pourrait s'emparer, MM. Glynn et Appel ont cherche les moyens de rendre impossible le transport des impressions , et ils ont Irouve en effet que I'addition a la pate du papier d'un set insoluble de cuivre et d'une preparation parti- culiere d'huile de palmeempechait I'encre de sc detacher; la reim- pression alors ne pent plus avoir lieu. MM. Napier avaient expose une balance automatique pesant seule et sans controle les pieces d'or. Les machines de ce genre actuelle- ment connues, celle, entre autres, de M. le baron Seguier, con- struite par M. Deleuil, et la plus parfaite de toules, separent les deux pieces en deux categories, les unes ayant le poids, bonnes, et qui tombent dans le reservoir de droite ; les autres trop legeres, inad- missibles , et qui tombent dans le reservoir de gauche. La balance de MM. Napier met a part : 1° les pieces trop lourdes, ou qui sur- passent le poids l^gal ; 2° les pieces trop legeres au-dessous de la tolerance legale ; 3° enfm les pieces dont le poids est compris entre 126 COSMOS. le mnximum et Ic minimum. MM. Napier ont consUuit aussi un uouveau compas raarin oii boussole do capilaine (pii lui permet de s'assurer, parun simple coup d'ceiUde la route I'ecllcment suivie par son navire, et de reconnaihe h quel moment il a commence i\ s'e- oarfor du droit cliemin. MM. Maudlay el Penns avaieni apporle des modeles de tous les apparcils cmploAos dans la navigation a la va- peur; M. Henderson avait expose une immense serie de navires pour micux lairc ressortir les differences de forme et de dimensions relatives tpii distinguent les batiments des diverses nations; M. Bar- low avait construit sur place nn specimen de rail-way intcgralement construit en for, etc., etc. VI!. Nous esperons qu'il nous sera donnc d'annoncer bientot a nos lecleursl'ouYerture des cours du Cosmos; en attendant, le salon photographique est deja presque completement organise , grace a I'activile de M. Benito de Mont'ort fds; les visileurs y viennent deja en foule constater par eux-memes et admirer les merveilleux effets du stereoscope, et tout est prepare pour la production incessante de portraits et d'cpreuves stercoscopiques. METfiOROLGGlE OPTIQUE. PHENOMESES PRODl'ITS PAR LA REFLEXION ET LA REFRACTION DE LA LUMIERE. V. Refraction atmospherique. C'est un fait connu et d^montre que si un rayon lumineux tra- verse une serie de milieux clisposes consecutivement et separes les uns des autres par des surfaces paralleles, la direction finale du rayon ou Tangle qu'il fcra avec la normale a la surface de sortie, ainsi que sa deviation totale ou la difference entre les angles d'en- tree ct de sortie, serontles memes que si le rayon avait ele transmis immediatement du premier mUieu dans le dernier, sanstenir aucun compte des couches intermediaires. Cela pose , comme I'atmosphere terrestre est composee de couches concentriques dont les densites croissent en general a mesure qu'elles sont plus voisines de la terre , les rayons lumineux qui la Iravcrsent sont necessairement dans le meme cas que s'ils passaient successivement par differcnts milieux de meme nature , superposes et de densites sans cesse croissantes de haul en has, sans cesse COSMOS. 127 decroissantes de bas en haul; ils doivent done perdre leur direetion rectiligne et s'inflcchir vers la terrc. La lumiei'e venant d'un point plus elevc E (fig. 1), ct passant sans ccsse d'uno couche moins dense dans une couche plus dense, ne suivra pas la ligne droite EA (fig. 1), mais une ligne courbc EB, concave vers la surface dela terre et conti- Fig. 1 et i. nue, parce que la densite de Fair croit non pas brusquement, mais par degres insensibles : I'oeil place en B verra done le point E non pas u sa veritable place , mais en E' et relevo , sur le prolongement BE' de la tangenle a la courbe BE. De meme la lumiere partie du point B, et qui'traA ei'serait en sens contiaire les couches almosphe- riques, en passant sans cesse d'unc couche plus dense dans une couche moins dense, leviendrait sur ses pas en decrivant la meme courbe BE, et I'anl silue en E verrait le point B releve en A sur le prolongement de la tangenle EA. Ainsi done un obserxaleur place a la surface de la terre en 0 (fig. 2), ct qui regardc une eloile reellement situee enS, la verra en S'; et s'il mesure sa distance zenithale apparente, il la trouvera ^gale H ZOS', tandis que la distance zenithale vraie, toujours plus grande, est ZOS; la difference S'OS de ces deux angles se nomme la refraction astronomique , sou effot est done generalement de faire voir les astres plus cleves au-dessus de I'horizon qu'ils ne le sont reellenient. 128 COSMOS. II se produil un effet analogue enlre deux points eloigner do !a surface tcrrestrc; quand on observe, par exeniple, la hauleur d'une niontagne, I'observaleur place en 0 (fig. 3), ne voit pas I'objel ter- reslre 0' sur la direction 00', mais sur le prolongement de la der- niere tan""eiile OT, el Ic pbt^noniene de deviation ainsi produit prcnd le nom de refraction terrestre. Les deux pb(§nonienes seraienl micux coinpris sous la denomination commune de refractions at- mosj)heriques. Pour determiner avec une rigueur malhematique la refraction astrunomique, il faudrait avoir I'dquation exacte de la courbe de- critc par le rayon lumineux, ce qui suppose avanl tout la connais- sance acquise de la hauteur de ratmosphere, la loi suivant laquello la densilc de I'air varie avec la hauteur, ct la quantitc de vapeur d'eau cnntenue dans chacune de cos couches, parce que le jiouvoir refringenl varie avecle degre d'humidite. II faudrait enlin admeltre que les couches d'egal pouvoir refringenl sont paralleles a la sur- face du spheroule terrestre, et que ces couclies sont en equilibre parfait les vines au-dessus des autres. Cctte simple enumeration fera assez comprendre que le probleme de la determination des r^fradions est en lui-meme inabordable, qu'il n'est nullement du domaine de I'astronomie et de la physique, mais du domaine de la nieteorologie : or, les phenomenes metcorologiques sont essentielle- ment variables et insaisissables, excepte dans quelques lois generales qui represenlont assez bien leurs circonstances essenlielles : ils sont soumis, en elTet, a I'influence des Elements les plus mobiles, les var ations de temperature, les changements incessants des vents dans leur direction et leur intensite , etc. , etc. La theorie et I'experience s'accordent a montrer 1" que la refrac- tion atmosphcrique est rigoureusement nulle quand I'astre est au zenith; 2° que I'effet de la refraction atmosphcrique s'exerce tout entier dans le plan vertical mene par I'astre etl'oeil de I'observateur, qu'il dcvie I'astre dans le sens vertical en augmentant sa hauteur , ou diminuanl sa distance au zenith , sans alterer sa position dans le sens horizontal ou sans changer son |)lan azimulal ; 3° que la refrac- tion aslionounque croit a mesure que I'astre s'eloigne du z6nitli et descend vers I'horizon. Sil'on admettail, pour obtenir une premiere approximation , que ratmosphere est homogene, que sa density est celle de I'air a la sur- face de la terre, et que sa surface limile est parallele a la surface du globe , la distance zenilhale apparente serait preciscment Tangle de refraction du rayon; el dans ce cas la refraction d'un objet celeste COSMOS. 129 assez clev^ au-dessus de I'liorizon varierait proportionnellemenl n I'exces de I'indice dc refraction n sur I'unit^ , et & la tangente de l;i distance zdnilhale apparente. La differences — 1, d'apres les expe- riences tres-precises de MM. Biot et Arago , est 0,0002943 , on , en la (livisant par sin 1" ou 1" pour la reduire en traction de degrcs , 60' ,66 ; mais elle varie necessairement avec la temperature et la pression. A cctle premiere approximation, I'illustre astronome Bradley en a substitue une seconde , et la loi tres-simple qui porle son nom pent s'enoncer comme il suit : << Dans un meme etat de I'oeil , Ics refraclions a diverses distances apparentes du zenith sont proportionnelles aux tangentes de ces dis- tances diminuees d'un certain multiple dc ces refractions que Ton pent evaluer en moyenne a 3 1/4. » Reduite en nombre, la formule dc Bradley fournit la table sui- vante , qui suffira a donner une idee de I'influence exercee sur les hauteurs des aslres par les refractions astronomiques. Le premier nombre exprime la hauteur apparente , le second la refraction : 90» — 0"; 80« — 10",3; TO" — 21",2; 60»— 33",7 ; 50" — 48, 9; 400— 1' 9",4; 30"— 1' 40",7; 20"— 2' 38",9; 15"— 3' 34",5 ; 10* — 5' 20" ; 9"— 5' 53" ,7 ; 8« — 6' 34",7 ; 7" — 7' 25",6 ; 6" — 8'30",3; 50 _ 9' 54",8 ; 4" — 1 1' 48",8 ; 3" — 14' 28",7 ; 2" — 18' 23",1 ; 1" — 24' 22",3 ; 0"50' — 25' 39",6 ; 0" 40' — 27' 3", 1 ; 0"30' — 28' 33^2 ; 0"20'— 30 10",5 ; 0" 10' — 31' 52",2; 0° 0' — 33' i7",9. A I'aide de cette table on deduit sans peine la hauteur vraie de la hauteur apparente observ^e : il suflit pour cela de retrancher de celle derniere hauteur le nombre assignc par la table. On voit avec quelle rapidile les refractions augmentent dans le voisinage de I'horizon : un astre apparait encore le soir, quoiqu'il soit reellement a 33'47",9 au-dessous du plan de 1 horizon ; il se montrera de meme le matin alors qu'il devrait etre encore invisible. Le soleil et la lune out environ 32' de diametre apparent, et puis- . — M. Malapert, pharmacien a Poitiers, avait offert a la Societe d'encouragement quelques medallions en sulfate de magnesie tr6s-beaux, mais qui avaient I'inconvenient de jaunir avec le temps. Cette alteration provenait de la dissolution du soufre dans Thuile dont il se servait pour oindre les moules. Maintenanl que M, Malapert prend la precaution d'essuyer les moules et de ne les huiler qu'au moment de s'en servir, le meme inconvenient ne se presente plus et les medallions conservent leur blancheiir. — M. Hornu , g6ometre a Allkirch (Haut-Rliln), a invente un nouveau ruban compteur servant de toise ordinaire, et donnant en outre, 1° la mesure des COSMOS. 141 surfaces et des solides rectangulaires par la simple addition de leurs dimen- sions; 2° la mesure des surfaces et des corps ronds; 3' le cube r^duit au quart ou au' cinquieme des bois de construction, ainsi que le cube en sleres des arbres en grume, par I'addition de leurs dimensions et la soustraction de rapports constants ;' 4° enfin les racines carries, cubiques, quatriemes, etc. , par une simple division. — M. Simonneau, propri^taire d'usinesachaux, abriques et atuiles.au MoUin (Vendue) , a construit un nouveau four a chaux qui r^aliserait les avantages suivants : 1° possibilile de se servir de toute esp^ce de combustibles , ensemble ou s^parement, avec une economic considerable ; 2" le chaufournier est maitro de son four et le dirige comme il veut; 3" manoeuvre tres-facile et bonne qua- lite de chaux, surtout quand onchauffe au bois; le calcaireet le combustible font s6par(^s, la chaux est done sans melange; 4° pas de collages possibh s, puisque le chaufournier, avec la plus petite attention, pent les eviter; et que s'il s'en formait, il pourrait les faire dissoudre a I'instant m^me; .5° les cendres de houille ou d'anthracite sont aussi fines que celles du bois , tant I'incineration est parfaite; dans cet etat, elles sont ires-recherchees par I'agriculture. — M. Lepage, ancien arquebusier, a imagine un sysl^me de bouchons en bois pour bocaux, bouteilles et cones de robinet, qui font un service excellent. — A I'Exposition universelle de Londres, la France avail une superiorite evi- dente pour tous les produits qui se recommandent par le gout et le sentiment des arts du dessin. Celle incontestable superiorite elait due a la grande 4coIe d'arlisles qui s'^tait formee depuis quinze ou vingt ans, mais dont les traditions tendent a s'affaiblir, parce que les hommes distingues qui la composaient n'ont que peu ou point de successeurs; or, cet etat de choses inspire de graves in- quietudes. La Societe d'encouragement, ditM. Dumas, ne pent rester indiffe- rente a la grande question de I'application des beaux-arts a I'industrie, elle est appelee necessairement a exercer sur ce point une action salutaire en concen- trant tous les efforts; il faut done creer dans son sein une commission nou- velle , (lite des beaux-arts, composee de membres representant toutes les bran- ches de I'industrie, reunissant a des connaissances profondes une longue pratique; qui etudient ince.ssamment les moyens de soutenir le gout, et appel- lent par des rapports suivis les deliberations du conseil sur les encouragements et les recompenses a donner aux artistes, etc. ; on arriverait par la a donner une direction plus utile aux etudes des jeunes gens qui se livrenta la sculpture et a la peinture. Cetle creation est d'autant plusnecessaire, que I'Angleterre, comprcnantque ses artistes et ses manufacturiers n'ont pas attach^ assez d'importance a I'appli- cation des arts du dessin dans les ceuvres de I'industrie, ne neglige rien en ce moment pour nous disputer et nousenlever la superiorite qui lui fait ombrage. — La mortdeM.Ebelmenafrappeaucceur la Societe d'encouragement; iletait un de ses membres les plus actifs el les plus influents. MM. Dumas et Clievreul onl prononc6 sur sa lombe des discours touchants, auxquels nous feions que!- ques emprunts rapides. Ne, en 1814, a Baume-les-Dames, M. Ebelmen commen^a ses Etudes au col- ^4^ COSMOS. lege de Besan^on , et les acheva a Paris. Apres una annee de mathematiques au Jycee Henri IV, il enlra a I'ecole Polytechnique, a I'^ge de 17 ans; il en sortil un des premiers de sa promotion , et prit rang , en 1 833, dans le corps des mines. H fut tour a tour professeur adjoint a I'ecolo des mines, repelitcur de chimie a I'ecole Polytechnique, administraleur adjoint, puis administraleur titulaire a la manufacture royale de Sevres, ingenieur en chef des mines, professeur de docimasie, professeur enfin deceramique au Conservatoire des arts et metiers. Grace a ses analyses si delicates , le travail des hauts fourneaux n'a plus de mj-steres. II demontra le premier que le charbon brule par I'oxygene en acide carbonique est une source abondanle de chaleur, tandis que brule en oxyde de carbone, il produit du froid. Le role que le combustible joue, les transforma- tions quil eprouve peuvent etre desormais reglees et calculees pour ces vastes foyers qui brulentsans interruption pendant des annees entieres, ct qui devo- rent des montagnes de charbon, avec la precision que le chimiste apporte dans I'experience de laboratoire la plus delicate. On croyait que la proportion des elements de I'air se maintenait invariable ; et Ton cherchait la raison de cet equilibre dans Taction des plantes qui rendent a I'air I'oxygene que I'homme et les animaux lui enlevent. Ce balancement ne serait qu'imaginaire. M. Ebelmen a prouve que les roches qui se desagregent sans cesse pour former les terrains de transport, soustraient a I'air, par le fer qu'elles conliennent, des masses immenses d'oxygene, et que la terre, au con- traire, y rejelte des masses non moins grandes d'acide carbonique, soit paries volcans, soit par les combustions lentes qui s'operenta sa surface. M. Ebelmen n'a fait qu'une apparition dans le domaine de la chimie organique, mais elle fut brillante et tres-feconde ; car il decouvrit les ethers sihcique et bo- rique, dont les proprietes sont si extraordinaires, et arriva par eux a preparer I'hydrophane artificielle. II parvint aussi a fabriquer les pierres les plus pre- cieuses par des precedes eminemment ingenieux , et cette d^couverte quel'ave- nir fecondera sufhrait seule a le rendre immortel. « Que de charmes on trouvait, dit M. Duma?, dans le commerce intime d'E- belmen , quelle surele de coeur, quelle douceur dans les manieres, quelle droi- ture dans les sentiments , quelle fermele dans la voie du bien ! jBonheur, sante , jeunesse, belle renommee, riche avenir de travail et d honneur, tout lui sem- blait prodigue. Quelques heures ont tout fletri. « Que les voies de la Providence sont myst6rieuses! que son pouvoir est ter- rible! que ses coups sont parfois severes! Humilions nos coeurs, humilions nos esprits devant cette tombe soudainement ouverte helas! et qui va se fermersur une gloire brisee dans sa fleur pour les esperances, dans sa maturite pour les services I » COSMOS. 14c COURRIER SCIENTIFIQUE. Moiivelles d'Allemag'ne. Refraction du son. — Ces deux seuls mots, refraction du son, intrigueront grandement les savants physiciens qui daignent nous lire , car jusqu'ici la re- fraction du son est reste un phenomena problematique et inconnu, qui n'appa- raissait que dans les etonnantes formules do M. Cauchy. Or, voici que tout a coup M. Sondliauss annonce, non pas seulement qu'il a constate la refraction r^elle des ondes sonores, mais encore qu'il est arrive a construire un corps len ticuiaire qui jouit de la propriete inattendue de propager en les refractant les rayons sonores qui viennent le frapper, et de les faire converger en un point ou foyer, absolument comme una lentiile de verre concentre a son foyer les rayons lumineux qui tombent sur sa surface. Pour realiser cette merveilleuse experience , a laqueile nous osons a peine croire, M. Sondhauss prit d'abord un ballon en peaudecygne de forme sensible- ment spherique et d'un pied environ de diametre : apres I'avoir rempli de gaz acide carbonique, il le suspendit en I'air, a la distance environ d'un pied d'un gueridon sur lequel il avail place une montre de poche a pulsations assez faibles ; puis placant son oreille de I'autre cote du ballon, il crut reconnaltre que le bruit produit par les battements de la montre etait plus sensible en un certain point de I'axe du ballon prolonge, qu'a droite et a gauche, en avant ou en arriere. La difference cependant n'etait pas assez grande pour qu'il osat conclure a une re- fraction et una concentration reelles. Plus tard, heureusement, ii rencontra un pharmacien de Bresla^\ , M. Miiller, qui manie avec une dexterite extraordi- naire le collodion, et qui, avec les minces pellicules de cette nouvelle substance, construit des ballons d'une finesse de tissu et d'une legerete excessives. M. Sondhauss commanda done a M. Miiller un ballon de collodion, il en detacha deux segments egaux, les colla sur un anneau cylindrique de fer-blanc, d'un pied environ de diametre, de deux pouces de hauteur, et il se procura ainsi une grande lentiile pleine de gaz acide carbonique qu'il suspendit sur deux touril- lons, et en avant de laqueile, a la hauteur du centre, il placa sa montre a batte- ments faibles. Iln'yeutplus alors place au doute; il constata, etdes observateurs exerces, MM. Bunsen, Duflos, Frankenheim , Gebauer, Kirchhof, constaterent que les battements de la montre etaient entendus beaucoup plus distinctement quand I'oreille 4tait placee en un certain point sur le prolongement de I'axe de la lentiile, que lorsqu'on se placait hors de I'axe a une distance plus grande ou plus petite. Voulant pousser les precautions jusqu'a I'exces, M. Sondhauss couvrait d'un bandeau les yeux de I'observateur et le priait de chercher avec son oreille, du cote oppose a la montre, le point oil les battements se faisaientlemieux entendre: toujours ce tatonnement ingenieux amena I'oreille de I'observateur sur I'axe pro- longe de la lentiile. Interposant aussi la main entre la montre et la lentiile, on interceptait les rayons sonores directs, et aussitot I'oreille placee au point de plus grande intensite n'entendait plus rien; la perception du son revenait avec 144 COSMOS. r6cart de la main. Ces observations sont Irop delicates pour que M. Sondhauss ait pu determiner avec exactitude les distances reciproques du point sonore et du foyer; tout ce qu'il a pu determiner avec quelque approximation, c'est la distance a iaquelle les battements de la monlre etaient encore perceptibles. Voici quelques-uns des nombres ainsi obtenus. Distances de la montre au centre de la lentille : huit pouces, un pied trois pouces; un pied six pouce?, deux pieds; "deux pieds neuf pouces ; trois pieds ; trois pieds six pouces : Distances correspon- dantes de I'oreilleau centre de la lentille : dix pouces; neuf pouces; huit pouces- six pouces; quatre pouces; trois pouces; deux pouces. Lorsque la montre etait placee a quatre ou cinq pieds, on n'entendait plus ses battements sans I'inter- mediaire de la lentille acoustique; par son interm^diaire, au contraire, on les percevait tres-nettement a la distance de un et deux pieds. Si Ton voulait appliquer a la refraction du son les formules propres de la re- fraction de la lumiere a Iravers les lentilles, on trouverait que le coefficient de refraction du son surpasse le rapport des vitesses dans I'air et I'acide carbonique. La distance focale donnee par la formule est de quinze pouces et demi, dans des conditions oi'i la distance focale observee n'elait que de douze pouces sept dixifemes. Aux battements de la monlre, M. Sondhauss substitua une parole arlicul^e ; et Ton constata qu'elle etait entendue de I'oreille placee derriere la lentille, alors qu'elle restait insaisissable pour des oreilles situees a egale distance, mais hors de I'axe. La meme diiTerence persista enfm lorsqu'on fit usage d'une source sonore plus intense, un tuyau d'orgue par exemple ; ou lorsqu'a I'oreille on substituait une membrane tendue dont les vibrations plus intenses indiquaient tres-nette- ment le point de convergence des rayons sonores. Nous regrettons vivement que M. Sondhauss n'ait pas eu la pensee de substi- tuer momentanement a sa lentille pleine de gaz un corps de meme forme, mais impermeable au son. Cette experience comparative etait absolument necessaire, car les phenomenes que le physicien ailemand croit ^tre des phenomenes de re- fraction, pourraient etre reellement des phenomenes d'inflexion du son. Au reste, nous prierons M. Marloye, le grand mattre en fait d'acoustique, de r6peter cette curieuse experience et nous nous haterons de transmettre a nos lecteurs les re- sultats deses observations. (.Inn. de Pogg., t. LXXXV, p. 378.) F. MOIGNO. r>B L'lMPRIHIErUE DE CF.APELET, RLE DE V.UOIRARD, 9, COSMOS. ct45 NOUVELLES DU JOUR ET PHOTOGRAPHIE. 1. Le Cosmos a done regu sa consecration. M. Alexandre de Ilum- boldt nous accepte , et il daigne nous tracer lui-meme un glorieux programme. Voici la lettre que I'apotre de la science nous ecrit du cha- teau Sans-Souci. Quelqucs jours encore, et nous aiirons initie pleine- ment noslecteurs aux progres qu'il enumere d'une main si ferme. Ces progres, nous les aurions deja analyses s'ils n'avaient pas precede I'apparition de notre Revue, A Posldam , ce 29 mai 1852. " Je regrette bien vivement , Monsieur, quels peu d'instants qui me restent libres au milieu de la reunion de tant de families princieres qui se trouvent dans ce moment a la cour de Sans-Souci , me privent du plaisir de vous exprimer combien je suis sensible a tout ce que voire lettre et votre journal renferment d'aimable pour nioi. Le Cosmos est un terrain neutre assez vaste pour que chacun de nous puisse s'y etablir. L'etendue et la grande variete de vos connaissances , I'heureuse facilite que vous avez acquise de puiser tout ce que la lilterature etrangere peut offrir d'instructif dans les bulletins des seances academiques de Londres, de Vienne, de Petersbourg, de Bruxelles, de Berlin, d'ltalie, de Suede,... rendront votre repertoire d'une grande utilite pour la communication des idees. La lenteur avec laquelle ces bulle- tins (auxquels il faut ajouter les journaux de physique et de chimie de Poggendorf, de Silliman, de I'Angleterre et d'Ecosse), arrivent dans un point central, m'a toujours paru une grande difficulte a vaincre, non-seulement a cause des frais, mais a cause des soins qu'exige renvoi de chaque cahier a I'epoque de la publication. Les comptes rendus des seances de I'Academie des Sciences, admirable conception due a mon intime et illustre ami, M. Arago, ont donne de Timpulsion k I'Europe enti^re : ils ont servi de modele, ayant ete plus ou moins parfaitement imites. En refondant et en unissant ce qui a ete foit h peu pres simultanement dans I'espace de trois mois dans les deux continents, on obtiendrait un tableau general de la vie intellectuelle des peuples, autant qu'elle se revele dans les differentes branches des sciences naturelles et physiques. La meteorologie optique ; la geologie chimique; I'electro-magnetisme, dans ses myslerieux rapports a la fois avec la lumiereet avec I'enveloppe gazeuse des planetes (I'oxygene des atmospheres); les phenomenes de la vitalite, consideres dans leurs rapports avec la production, I'intensit^, la direction et la vitesse 13 JUiN 1852. 7 146 COSMOS. mesurable des courants electriqucs; les phenom&nes chimiques ap- peles de contact, les attractions nioleculaires a des distances infini- ment petites. . . . voila les vastes champs ouverts a raclivite des physiciens h. I'epoque ou nous vivons; voiiii le but de travaux simultanes qui conduiront a d'autres probleines plus generaux encore. Ceux qui les verront seront tourmentes cependant eux-memes par le doute de n'avoir vu qu'a inoitic. C'est la route qui a conduit de Hales et Mayow h Lavoisier, de Lavoisier a Davy,OErsted et Faraday. L'horizon va fuir progress! vemont. « Excusez, Monsieur, Ic laconisnie scnlcncieux de ceslignes,et agreez, je vous prie, I'expression renouvelee de ma haute conside- ration. ' *** '^i' ' ^^'"Vf' ■■" ■ ■•'J- « !/L: V:' Humboldt. » IL Lorsque, dans notre derniere livraison, nous signalions la pre- sence dans les salons de lord Ross des epreuves daguerriennes par lesquelles M. Claudet pretendaii demontrer qu'av(^c une ouverlure de trois pouces un quart de la lentille du daguerreotype on pouvait obte- nir des portraits aussi parfaits qu'avec une ouverture qui n'aurait que les dimensions de la pupille, nous ne savions pas encore dans quel but I'habile photographe avait essaye cette curieuse et importanle experience ; nous ignorions completenient qu'il s'agissait de refuter des objections graves soulevees par sir David Brewster, et qui ont donne lieu a une controverse dont nous trouvons les Elements dans lesenormes colonnes du Times. Le grand physicien admettait d'abord en principe que les deux images stereoscopiques, ou les deux portraits destines a montrer dans le stereoscope un visage vivant , laissent gran- dement a desirer; il allait meme jusqu'a dire qii'i/s sont une represen- tation monstrneuse dc la nature, dont mil ceil cxerce ne pent supporter la vue. Nous ne nous en serions vraiment pas doute, et surtout nous etions bien loin de soupQonner la cause a laquelle I'imagination ardente du noble vieillard attribuerait ces revoltantes imperfections. II ne s'en prend pas a la qualite inferieure des objectifs, a la mobilite de la per- sonne qui pose, ou a I'attitude fixe et contrainte qu'elle est forcee de garder, etc. Non. En supposant I'objectif fres-parfait, le modelc immo- bile , I'expression de ses traits tout a fait naturelle , le portrait stereos- copique serait mauvais encore, tr^s-mauvais , parce que, dfes que Touverture de la lentille a des dimensions appreciables , le portrait n'est plus un portrait unique, mais la superposition forc6ment confuse d'une multitude innombrable de portraits pris d'un nombre ind^fini de points de vue tr^s-diffi^rents, ayant leurs ombres et leurs luraiiires COSMOS. 147 propres, etc., parce que chacun des points de I'ouverture fonctionne comme un objectif separe. Si , disait sir David Brewster, un ceil peu exerce saisit la difference qui existe entre deux portraits pris I'un de I'oeil droit , I'autre de I'ceil gauche , quoique la distance des deux yeux ne soit que de deux pouces , combien sera plus saillante encore la difference entre les mille portraits produits par les mille points d'un objectif de cinq ou six pouces de diamfetre! Done, concluait sir David Brewster, se procurer k grands prix des objectifs de tres-grande ouverture, c'est tourner le dos au progres ; ce qu'il faut chercher uniquement , ce sont des precedes nouveaux qui rendent la couche photogenique si sensible, qui la rendent impres- sionnable a une si faible intensite lumineuse que Ton puisse se servir d'objectifs dont le diametre ne depasse guere celui de la pupille de notre ceil. Ce sont ces effrayantes exagerations de la theorie que M. Claudet a voulu refuter en prouvant que I'oeil le plus exerce ne distinguait pas un portrait pris avec une ouverture de trois pouces et un quart , d'un portrait pris avec une ouverture infiniment petite. ,, ,: II a fait une autre experience : il a produitdeux images stereoscopi- ; ques d'une sphere avec un meme objectif muni tour a tour de deux diaphragmes, le premier avec fente verticale, le second avec fente hori- zontale toutes deux d'un demi-pouce de largeur. Les deux images etaient parfaitement rondes et parfaitement identiques; elles se superposaient completement dans le stereoscope, et donnaient la sensation tr^s- nette et tres-vive du relief. Vus aussi dans le stereoscope , les deux portraits obtenus I'un avec une ouverture de pres de quatre pouces I'autre avec une ouverture de deux ou trois lignes, se superposaient tr^s-bien; la sensation des reliefs et des creux ne laissait rien a desirer. Ce qu'on pourrait accorder a sir David Brewster, c'est que si I'ou- verture est trop large et la distance du modele a la chambre obscure trop petite, il pourra exister reellement quelque deformation. Mais a la dis- tance de douze pieds environ a laquelle on opere , Tangle soustendu par I'ouverture de I'objectif n'est guere plus grand que Tangle sous- tendu par la pupille quand la personne que Ton regarde est a deux pieds seulement de I'oeil, La reponse et les experiences de M. Claudet n'ont ni convaincu ni desarme Tillustre physician ecossais. Dans une seconde lettre adressee au Times, il affirme encore avec plus d'^nergie que les portraits pho- tographiques s'eloignent d'autant plus d'une representation vraie que le diam^re des objectifs augmente, et il ajoute : « Je me suis empress^ de communiquer men observation nouvelle et importante k MM. Ross 148 COSMOS. ct Thompson, photographes de la reine h Edimbourg; a M. Kilbnrn, photographe de su majeste a Londres; a MM. lleniiemann et Home, qui out produit un si grand nombre de beaux portraits sur papier et sur verre, an moycn du collodion : tous ces artistes eminents out ro^u avec faveur la communication que je leur faisais; rimperfection des portraits photographiques ne leur avail pas echappe , et ils ont resolu de la prevenir desormais en ne se servant que de petits objectifs et cherchant de nouvelles substances chimiques plus sensibles encore a Taction de la lumicre. » La voie ouvcrte par sir David Brewster est evidemment bonne , ses objections ne sont pas sans fondement, mais il en a exagere la portee. Nous avons souvent entendu M. .Tules Duboscq recommandcr aux pho- Ihographes qui font pour lui les images stereoscopiques de diaphrag- mer autant'que possible leurs objectifs , et de placer les objets a une assez grande distance. L'experience de chaque jour prouve que quand, pour obtenir des images agrandies d'un objet petit en lui-meme, d'ua cristal, par exemple, on le rapproche trop de la chambre obscure, les cpreuves ne sont pas bonnes et ne prodaisent presque aucun effet dans le stereoscope. in. Dans une lettre adressee au secretaire de la societe heliogra- phique, M. Le Gray revient sur la decouverte du collodion , et affirme qu'il a public anthentiquement son proced6 un an avant M. Archer. Ses premieres experiences datent de 1849; mais alors il employait principalement le collodion pour donner au papier plus de finesse et d'^galite ; plus tard il etendit celte m^thode au verre : cette serie d'es- sais le conduisit enfin a I'emploi raisonne du collodion comme sub- stance s'impressionnant tres-rapidementk la lumiere; il consigna son procede a la fin de sa brochure imprimee en 1850, et traduite en an- glais h la meme epoque. Si ces affirmations sont vraies comme nous aimons a le croire, et comme nous I'admettons en nous reservant de les verifier par nous-meme, M. Le Gray aurait evidemment devance M. Archer, et on ne pourrait plus lui opposer que M. Bingham, qui, lui aussi, dans une brochure imprimee en 1850, signalait le collodion comme pouvant remplacer I'albumine avec de grands avantages. M. Le Gray encore revendique la priorite de I'emploi du protosul- fate de fer pour developper I'image, de I'ammoniaque et des fluorures comme substances acceleratrices , et il aurait annonce , des 1850, qu'avec ces agents il avait obtenu des portraits en cinq secondes a I'ombre. Plaidant ensuite la cause de deux notabilites photographiques fran- vaises, M. Le Gray assure que I'application de I'acide pyrogallique est COSMOS. 149 due a M. Regnault tie I'lnstitut, et celle de riodure d'argent liquide a M. Humbert de Molard. L'habile photographe enfin annonce qu'il travaille avec ardeur a donner a I'image si fine du collodion plus de profondeur et de puis- sance d'effet, et qu'il a deja decouvert un nouvel agent qui fixe I'image en quelques secondes, et serait bien preferable k I'hyposulGte de sonde qui nuit a la solidite de I'epreuve et compromet sa duree. IV. Puisque nous en sommes au chapitre des rectifications histo- riques, analysons rapidement un article public dans la livraison de I' Art Journal, que nous avous rec-u hier, sous ce litre Photographie ET SEs PATENTES ; uous craignous qu'il n'ait ete ecrit dans un moment d'humeur grande contre M. Fox Talbot ; mais colore n'est pas faus- sete. En 1839, Daguerre annonca sa grande decouverte de la production sur plaque metallique d'images permanentes par Taction des rayons solaires : il se reservait de reveler plus tard qu'il employait pour couche sensible la vapeur diode, pour agent revelateur le mercure, pour agent fixateur le cblorure ou I'hyposulflte de sonde. Surpris par I'annonce de Daguerre, M. Talbot publia immediatement, dans le Philosophical Magazine de mars 1839^ ses procedes de photo- graphie sur papier, par double operation , par la production successive de deux images, I'une negative et dans laquelle les noirs sont remplaces par des blancs, les blancs par des noirs; I'autre positive, ou tout rentre dans I'ordre naturel. Bien avant la divulgation des procedes de Da- guerre, faite dans la fameuse seance du 19 aout 1840, M. Talbot mon- tra en outre a la Societe royale de Londi'es une serie nombreuse et variee de dessins photogeniques. Le 14 mars 1839, cinq raois avant la revelation faite par M. Arago, sir John Herschel presenta a la Societe royale les hyposulfites comma agents tres-efficaces pour fixer les impressions photographiques ; il y ajouta le 20 fevrier 1840 : 1° I'hydriodate de potasse pour blanchir une surface noire par la production de I'iodure d'argent sous Taction de la lumiere; 2" Tiodure d'argent substitue au chlorure. « J'ai constate, disait- il, que le verre revetu d'une couche d'iodure d'argent est beaucoup plus sensible quesion Tavait reconvert de chlorure. » Alamemeepoque, fevrier 1840, M. Hunt annongait deja a Devonport et livrait au commerce le papier prepare a I'hydriodate de potasse. Ce meme M. Hunt presenta, en 1845, lors de la reunion a Plymouth de TAssociation britannique, un procede photographique trfes-sensibie par Temploi du ferrocyanate de potasse avec le papier iodur^. Pour pre- parer ce papier, il le plongeait a deux reprises ditferentes dans du ni- 150 [COSMOS. trate d'argent, puis, apr^s I'avoir laiss^ secher, dans une solution d'hy- driodate de potasse. En 1842 seulement, M. Fox Talbot prit la patente qui contriste tant les photographes anglais. Ce qui les irrite le plus, c'est, 1° que le pa- pier iodure de M. Talbot, principal objet de sa specification, est prepar6 absolument comnie celui de M. Hunt, par remploi successif du nitrate d'argent et de Tiodure de potassium ou bydriodate de potasse; 2° que I'acide gallique avait 6te recommande par sir John Herscbel, le 14 mars 1839; 3° enfin, que le mode de fixation par I'hyposulfite de sonde chaud avait et6 enseigne par Herscbel encore. Qu'on le remarque bien ; on ne nie pas que M. Fox Talbot ait reelle- ment invente les procedes patentes par lui. Tout le monde admet, au contraire, que la decouverte du papier iodure comme couche sensible de I'acide gallique, ou du gallate de fer comme agent revelateur, de I'hyposulfite de soude comme agent fixateur, lui appartient, et que cet ensemble constitue essentiellement I'admirable precede de calo- typie, qui immortalisera son nom. Mais ce qu'on s'obstine h ne point comprendre, c'est qu'apres les publications de MM. Herscbel et Hunt, et prfes de deux ans plus tavd, M. Talbot ait pu encore faire valoir ses droits; c'est que Ton puisse et que Ton veuille comprendre dans le privilege accordea M. Talbot toutesles melhodes photographiques qui precedent par double operation, par la production successive de deux epreuves, I'une negative, I'autre positive; I'emploi, par consequent, de I'albumine et du collodion, et tons les perfectionnements a venir de la photographic sur verre et sur papier. Quoi, s'ecrient les redac- teurs de VArt Journal, la patente de M. Talbot briserait ainsi le pro- gres, et fermerait la porte a I'avenir? mais ce serait une chose trop monstrueuse, a case too monstruotis, et qui suffirait h elle seule a rendre odieuse la loi actuelle des brevets d'invention. En mai 1844, M. Cundell publia dans le Philosophical Magazine un nouvel ensemble complet de procedes de calotypie ; en les suivant on fit beaucoup mieux que n'avait fait jusque-lk M. Talbot , et I'essor fut donne. La France alors entra dans la lice et se signala par des perfec- tionnements glorieux , que couronna la decouverte de la photographie sur verre albumine par M. Niepce de Saint-Yictor. Plus tard, M. Talbot, uni a M. Malone, prit une nouvelle patente pour la substitution de la porcelaine au verre , et la transformation en images positives des ima- ges negatives primitivement obtenues , sur verre ou sur toute autre substance. Sir John Herscbel avait cependant dit en termes precis , dans son Memoire de 1840, que les photographies sur verre, lorsqu'on les plaQait sur un fond noir , et surtout lorsqu'on noircissait en I'enfu- COSMOS. 151 imnt lasurface posterieure du verre, ressemblait tout a fait ^ une epreuve daguerrienne, et que la reflexion plus intense des portions argentees semblait les transformer d'images negatives en images positives. En 1844 encore, M. Robert Hunt indiqua a I'association britannique reunie a York, I'emploi du protosulfate de fer comme agent revela- teur; cctte dale embarrassera peut-etre un peu M. Le Gray. M. Wood, ii la meme epoque, comprit I'iodure de fer dans ses procedes decata- lissotypie ; or, le protosulfate et I'iodure de fer sont les elements actifs et essentiels du precede beaucoup plus rapide qui fait I'objet de la troisieme patente de M. Talbot. M. Alalone avail remarque le premier que lorsqu'on versait sur la surface de I'image negative de leinte brun-rougeatre obtenu sur verre albumine, une solution concentree de nitrate d'argent, cette image passait d'abord au noir tres-intense ; mais que bienlot, par une transformation magique', ce noir redevenait blanc, de telle sorte que I'epreuve, d'abord negative, dcvenail une epreuve positive tout a fait comparable aux epreuves daguerriennes, quand on la regardail par re- flexion, tandis que vue a la lumiere transmise, elle reslait epreuve negative. Nous avons deja rappele que MM. Archer et Fry sont par- venus au m6me resultat en traitant les epreuves sur collodion, le pre- mier par une solution de sublime corrosif, le second par raclicn combinee de I'acide pyrogallique et du protonitrate de fer. Mais on reussit beaucoup mieux en suivant pas a pas la manipula- tion suivante de M. Diamond. ' ^^ .nojboikrj un i'^ oii;mi;dl/. 1 ■u> On prend I'image comme a I'ordiiiaire sttr'coUod'i^Ti'et'olT k dev^w loppe par le protonitrate de fer, prepare par la double decomposition du protosulfate de fer et du nitrate de baryte, comme nous I'avons in- dique ailleurs. Lorsque I'epreuve negative estbien formee, on verse sur elle un melange en parties egales d'acide pyrogallique et d'hyposulfite de sonde dont la reaction a deja amene un commencement de decom- position , en meme temps qu'on chauffe doucement la plaque de verre : dans cette operation les parlies sombrcs sont devenues blanches et tr^s-brillantes par la reduction et le dep6t de I'argent metallique, et I'image definitive placee sur un fond de velours noir aura tons les avantages d'une magnifique epreuve daguerrienne sans avoir lesincon- venients si graves des reflets. 'Bq o)h>.J(on onu inq ,'^ II etait grandement quesliotV en AngleWrt^'tleia' formation d'une societe photographique, mais elle n'a pas pu se constituer encore. II etait dit dans les statuls que Ton obtiendrait avant tout de M. Talbot I'autorisation pour chacun des membres de la societe do pratiquer en amateur, pour son instruction ou son amusement, les difterents pro- 162 COSMOS. cedes de photographie rcnfermes directement ou indircctement dans lespatentes du celebre invontcur do lacalotypie; niais que chacun des incuibros aussi s'c^ngagerait , sous peine d'exclusion, a nc mcttre dans le commerce aucune des epreuves failes par hii, et a ne pas meme se servir do la pliotogragliie comme agent auxiliaire pour perfectionner ou rendrc plus faciles les precedes de gravure et de lithographic. Or, ces conditions, rondues necessaires par les dispositions rigoureuscs de la loi anglaise des patentes, contrariaient vivement les photographes anglais; il lour repugnait do demander huud)lement une licence et de prendre un engagement qui les blessait en leur supposant des inten- tions de commerce h leur profit. II parait qu'informe de ces faits, M. Fox Talbot a pris la genereuse initiative de renoncer completement a ses droits, et de laisser a tous les membres d'une societe dont, plus que tout autre, il desire ardemment la formation, leur liberty pleine et enliere. Cela ne nous etonne pas de sa part; il a accorde gratuite- ment, sur notre demande, a M. Jules Duboscq, la faculte de vendre en Angleterre, en aussi grand nombre qu'il voudra, les belles epreuves ;;ur papier de M. Ferrier, que nos voisins d'outre-mer, aureste, co- pient impiloyablement a mesure qu'elles se produisent. V. Le 24 mai dernier, M. Martyn Robert invitait un certain nombre de savants et d'amateurs a venir voir Tessai d'une pile de nouvelle construction. Cette pile se compose de cinquante plaques d'etain de six pouces de hauteur sur quatre pouces de largeur^ placees chacune entre deux plaques de pkitine de memes dimensions. Les plaques d'etain avec leur enveloppe en platine plongent dans des auges en porcelaine de deux pieds de profondeur, rem plies d'acide nitrique etendu d'eau. La profondeur de ces auges paraitra effrayante , raais on espere de I'action de la pile nouvelle la formation d'un produit com- mercial suffisant pour couvrir a lui seul les frais de production de I'electricite. Sous rinlluence, en eifet, du courant, I'etain donne nais- saaee a un oxyde d'etain hydrate qui tombe a mesure au fond de I'auge etse combine avec de la soude en donnant naissance a du stannate de soude, sel employe en grande quantite comme mordant dans la tein- ture des toiles et ootons. L'inventeur est convaincu que la vente du stannate d'etain, non-seulement couvrira toutes les depenses, mais lui donnera de plus un benefice d'au moins vingt pour cent. L'intensite de la nouvelle pile de cinquante elements etait trfes-con- siderable; on s'«n est scrvi pour produire la lumifere electrique, et elle a donne de tres-brillants effets. Essayee par la decomposition de I'eau, elle a donne neuf pouces cubes par minute du melange d'oxy- gene et d'hydrogfene; son action est sensiblement constante pendant COSMOS. 153 cinq ou six heures; et on peut la comparer, sous ce rapport comme sous celui de I'intensite , a une pile de Grove dont les elements seraient en meme nombre et de meme grandeur. Mais le grand avantage c'est 1" que le platine ne s'altere pas comme dans les piles de Grove, 2» que le sel forme a une valeur reelle, tandis que le sulfate de zinc donne en si grande quantite par les piles de Bunsen ne sert absoluraent k rien. OPTIQUE. FIN d'GHE LONGLE et GRANDE CONTROVERSE. Direction des vibrations lumineuses dans tin rayon de lumiere polarisee rectilignement. (Note de M. Haidinger.) On salt avec quelle admirable exactitude, avec quelle etonnanle precision la theorie des ondulalions rend compte de tous les phe- nomenes de la lumiere. L'explication qu'elle donne des fails n'est pas seulement d'une simplicitc extieme, elle est complete; car ces faits sont intimement lies les uns aux autres par la chaiue des nombres. Les lois si nettes des interferences, les lois si delicates de la diffraction, les lois si multiples des couleurs des plaques minces, epaisses, mixles, etc., dependent d'une seule consfante, la lon- gueur de I'onde dans cliaque milieu; el des que cette consfante a et6 deduile d'une experience quelconque prise dans une serie quel- conque de phenomenes, on peut calculer a priori les details de lous les autres faits ; les distances calculees s'accordent toujours parfai- tement avec les distances mesurees. La polarisation rectiligne, cir- culaire, elliptique, la polarisation chromalique, la rotation des plans de polarisation , tout dans la theorie des ondulations se com- prend avec la plus grande neltete, tout se louche en quelque sorte du doigt. La theorie des ondulations n'est plus aujourd'hui une hypothese; elle est devenue definitivcment une incontestable realitc ; elle est demontree jusqu'a I'evidence par I'experience celebre qui a montre aux yeux que la lumiere va plus vile dans I'air que dans I'eau , ex- perience confue etproposce par M. Arago, experience realisee pour la premiere fois par M. Leon Foucault, puis par MM. Fizeau et Bt6- guet. Qu'il nous soil permis de faire remarquer en passant que Ton a eu tort d'hesiter si longfemps a repousser comme certainement 154 COSMOS. faiisse la th6orie de remission. Si Ton y avail fail plus d'allenlion, si I'on n'avail pas moconnulesloisinllexiblosdelalogiqucilyabien lon-lcnips que Icdcbal serail IcnnincS ol I'on n'aurait pas dcpcns6 en vain unc si grandc sommc de force vivo dans d'inlernunablcs 48 > 48 ) 48 ) 48 ' 48 ) 48 > les inlensitfe thermiques correspondantes etaient : Ces nombres nous semblent assez significatifs, et bien que M. Volpicelli n'en dise rien dans sa note, nous croyons qu'il n'aura pas manque d'observer qu'a partir du moment ou le centre du soleil a ete cache, les temperatures sont al- iees en diminuant plus rapidement que les lunules solaires apparentes, en sorte que les espaces eclairants et les intensites calorifiques se rangent dans I'ordre suivant : Partie decouverte du disque solaire 0,9iO, 0,855, 0,730,0,645, 0,321—0,396, 0,271. Intensites calorifiques 0,988, 0,960, 0,873, 0,792, 0,583 — 0,335, 0,'u6. La courbe des intensitos a done un point d'inflexion, et c'est une nouvelle et brillante confirmation des resuUats obtenus par le P. Secchi, du moins quant a la decroissance des intensites thermiques du centre aux bords du soleil. Le P. Secchi, dans une nouvelle lettre a M. Faye, revient sur quelques points qu'il craint de n'avoir pas assez developpes. « II faut, dit-il, dislinguerdans mon travail les fails observes de I'hypothese qui tend a les relier. Les faits sont : 1° un d^croissement de chaleur du centre aux bords; 2" une difference notable dans la marche de cette diminution au-dessus et au-dessous du centre. Pour expliquer ce second fait, j'ai suppose que les regions equatoriales sont plus 192 COSMOS. chaiides que les regions polaires. D'autres savants ont propose une hypolhfese differente, ils ont cru que le fuit observe s'expliquait naturellement par la diffe- rence des epaisseurs de noire atmosphere, que les rayons des bords sup6rieur et inferieur du soleil ont a traverser. Ce soup^on tout nature! ne m'clait pas echappe, mais je I'avais rejele en me fondant sur... des experiences directes qui montrcnt que pour des hauteurs moyennes, ['absorption de Tatmosph^re terrcstre est sensiblement la nieme dans toute I'etendue du disque.... c Pour resoudre definitivement la difficulle, il faut, suivant la remarque de M. Foucaull, recueiliir et comparer entre elles des observations faites dans des circonstances egales pour I'atmosphere terrestre, et opposees pour le soleil. En attendant, comme depuis I'epoque de mes premieres observations, I'equateur solaire a change de position sur le disque apparent en se rapprochant beaucoup du centre, on devait trouver dans mon hypothe-e quelque variation dans la courbe des intensiles. Or, voici le resultat de deux series d'observalions faites le 16 de ce mois dans les environs du meridien. Les nombres de la premiere ligne expriment la distance du point observe au centre du soleil; ceux de la seconde, rinlensit^ observoe. Premiere serie. _^44'^5 ^lO',-] +6',3 +3',0 +0',^ — 8',5 — 12',0 — U',5 46",9 20»,3 24° 2i»,5 25»,3 22'',9 48«,8 43»,9 Deuxieme serie. ^4',2 43',2 7',2 3',2 0',5 —7', 8 — 12',8 —U',5 -I5»,'5 'I8»,4 24°,5 25« 2o»,4 23",8 16»,9 13»,5. » Toute la courbe se rapproche sensiblement de la symetrie, comme cela devait etre , dans I'hypothese du P. Secchi , qui serait en droit d'en conclure, d6s au- jourd'hui, que cette hypolhese est une verile incontestable; mais il aime mieux altendre de nouvelies observations. La difference sensible entre les nombres correspondants aux deux extremiles du disque, peut tenir a ce que I'equateur solaire ne pas^e pas encore par le centre du disque apparent, ou a ce que les deux hemispheres n'ont pas la meme temperature; elle excede d'ailleurs toute action admissible de I'absorption produile par I'atmosphere terrestre; et le P. Secchi n'heaite pas a la croire rcellement inherente au soleil. II lermine par cette remarque d'une tres-grande portee : « Si Ton arrivait a conclure de ces recherches que I'equateur solaire est plus chciud que les poles, et que ceux-ci ont en meme temps des temperatures differentes, I'etude de la climaiologie au- rait fait un grand pas; la temperature dependrait de la position que I'axe de rotation du soleil prend en differentes saisons , par rapport aux regions ter- restres. » OE L'IMPRIMERIE de CnAPELFT, RLE DE VAL'CIRAI'.D , 9. COSMOS. 193 PHOTOGRAPIIIE ET NOUVELLES DU JOUR. I. Void le procefl6 de photographic sur papier do M. Baldus , annonce dans notre dernicrc livraison. 1° Papiers. — Lesmeilleurs papiers photographiqucs sont, siiivant lui, ceux de MM. Blanchet frcres et Kleber de Rives. Les papiers encollcs avec la gelatine et la resine sont phis lents a se penctrer de Taction de la lumicre , mais ils sont plus fermcs el se maintiennent mieux dans les divers bains; ils sont done prelerables pour les mo- numents et les paysages. Les papiers encoUes al'amidon sont beau- coup plus sensibles et conviennent mieux pour le portrait. Pour qu'un papier soil bon , il faut qu'impregne de cire et regarde a contre-jour, il fasse I'effet dune feuille mince de gelatine : on ne pent cependant le proclamer definitivement bon qu'apres la pro- duction de plusieurs epreuves negatives et positives. 2° Preparation eloignee des papiers pour les epreuves negatives. — I. Papier pour le pay sage , les monuments, les statues, etc. — Prenez d'abord eau distillee, 500 grammes; gelatine blanche, 10 grammes; faites fondre la gelatine an bain-marie dans un vase de porcelainc ; ajoutez 5 grammes d'iodure de potassium, et agitez avec une ba- guette de verre. Versez 25 grammes d'aceto-nitrate prepare avec eau distillee 100 grammes , nitrate d'argent G grammes , acidc ace- tique cristallisable 12 grammes; agitez encore avec la baguette le liquide, qui prend une teinte jaunatre , et laissez a la chalcur pen- dant dix minutes encore. A^ersez la dissolution dans une cuvette te- nue chaude an bain-marie ; prenez la feuille de papier par deux coins opposes ; posez-la sur le liquide par son milieu ; abaissez succes- sivemcnt les deux angles, afin de chasser les bulles d'air; laissez-la adherer an liquide jusqu'a ce qu'elle presente une surface bien plane, ce qui a lieu apres six on dix minutes ; relevez-la alors et sus- pendez-la pour la faire sccher, en raltachant par un angle et faisant adherer a I'aulre un petit morccau de papier buvard pour faciliter I'ecoulement des dernicres goultes. Quand la feuille est scche , on la trempe des deux cotes dans une dissoluhon d'eau distillee 100 gram- mes, iodure de potassium 1 gramme, en commen(;ant par le cote qui a rcQU la premiere preparation, puis retournant la feuille, evi- tant les bulles d'air, et la laissant sur le liquide de six a dix minutes : les leuilles ainsi preparees ct sechcs se conscrvent trcs-longtemps 27 JUiN 1852. 9 J94 COSMOS. dans un carton; le restant dc la liqueur gflatince pcut servir de nouveau , aprcs avoir cle fillrcc ct chauffce. II. Papier negatifpour portraits. — On immerge entiferement le papier coll6 h i'aniidon , beau ct tres-uni , dans un bain forme d'eau distill^e, 100 grammes; bydriodate d'ammoniaque, 1 gramme; by- drobromalc d'ammoniaque, 1 decigramme; laissez-le plonger de cinq a dix minutes , sui\ ant la temperature et I'^paisseur , puis re- tirez et faites sccbcr. II faut que I'liydriodate d'ammoniaque soit tlanc ou lres-lt>gcrcmcnt jaunrdrc. Les deux preparations prec6- denles peuventse faire au jour, en evitant toutefois une trop grande clarte. 3° Preparation immediate ou prochaine du papier negatif. — Versez dans une cuvette plane ou sur une glace une coucbe de 2 millime- ires d'epaisscur dela dissolution d'acdto-nitratc d'argent, ci-dessus; prenez le papier prepare par deux angles opposes, appuyez le milieu surle bquide, abaissez successivement les deux angles, faites adbe- rer en excluant les bulles d'air; attendez que la teinte d'abordva- ri^c, devienne completement uniforme, ce quia lieu ordinairement aprcs cinq ou six minutes. Pendant ce temps , plongcz dans I'eaii distUlee une feuille de papier blancnon prepare, unpeu plus grande que I'epreuve; quand die eslbien impregnec d'eau, ctendcz-la sur la '^lace du cbassis de la cbambre noire. Enlevez alors la feuille pr6- paree de dessu^l'ac^lo-nilrate, ct deposez-la en la faisant adbt^rer sur la feuille de papier bumide , le dos en dcssous, la coucbe sen- sible en debors. On pent op^rer, soit sur-le-cbamp , soit apres quel- ques beures , soit meme le lendemain , quand il ne fait pas trop cbaud. On pourrait operer aussi avec la feuille secbee, apres la sor- tie de I'aceto-nitratc , et placce dans le cbassis entre deux glaces; mais les cpreuves ainsi obtcnues laissent toujours beaucoup plus a desirer. 4° Exposition a la lumiere dans la coambre noire. — La durCe de I'exposition depend de I'intensite de la lumiere , de la bonte et de la longueur focale de I'objectif. Pour les vues et les monuments sur le premier papier pour paysages avec un objectif simple de long foyer, il faut de 4 a 5 minutes , plus si le monument est jauni ou noiratre. Pour le papier a portrait, avec objectif compose a court foyer, il ne faut que de 50 a 60 secondes , si I'on opere sur papier bumide aus- sitot apres qu'il a ete place dans le cbassis. 50 Developpement de l'image.— On prepare quelque temps a I'avance et a une temperature de 18 a 20 degrds une dissolution saturee d'a- cide gallique ; on verse dans une cuvette une coucbe de 2 a 3 mil- COSMOS. 195 limetres d'epaisseiir de la dissolution , et de meme surface que la feuille. On place sur cette couche d'abord la face qui a veqn I'image, puisonretourneauboutd'uninstanl; apres quelques minutes, quand la feuille est blen imprcgnee, Timage commence a parailre , et elle se complete successivement dans toutesses parties; elle doit elre ter- minee dans une demi-heure environ . Si elle est trop faible on ajoute quelques gouttes d'acelo-nitrate d' argent en remuant bien pour que son action se fasse senlir sur I'epreuve entiere ; les noirs bientot se renforcentbeaucoup. On pourr£:itaj outer au bain unepartie d'acide pjTO-gallique et d'acetate d'ammoniaque ; mais c'est dangereux , I'image est dure et sans harmonic ; une bonne epreuve negative doit se terminer dans I'acide gallique seul. 6" Fixation de l'image. — On lave I'image a I'eau filtr(5e , en lais- sant plongee pendant un quart d'heure I'epreuve sortie de I'acide gallique. On verse dans une cuvette une dissolution d'eau distillee 100 grammes , bromure de potassium 3 grammes; on y plonge en- licrcment I'epreuve. Si le bain de bromure prenait une teinte ver- dalrc , on le renouvellerait. Apres avoir laissa immerger I'epreuve pendant au mains une demi-heure , on la lave avec beaucoup de soin dans plusieurs eaux; on la seche en la piquant sur une corde. Au bain de bromure on peut subslitucr eau distillee 100 grammes, hypo-sulfite de sonde 7 grammes , ou meme , surtout pour les por- traits, une simple dissolution saturee de chlorure de sodium , en la- vant de la meme maniere. 7° CiRAGE DE l'epreuye NEGATIVE. — Cettc Operation, suivant M. Bal- dus, est toujours necessaire; I'epreuve qui ne la supporterait pas ne donnerait pas de bons negatifs. On place sur une planche ou sur une table quelques feuilles de papier buvard , et on pose Tepreuvc des- sus , bien a plat , pour eviter les plis ; on elend une couche de cire blanche sur un fer modcrement chaud , et on repasse I'epreuve en appuyant doucement jusqu'a ce que la cire ait bien pendtre et soit tres-uniformement etendue. On peut aussi imbiber d'abord de cire un papier buvard , le placer sur I'epreuve et repasser avec le fer moderement chaud. S'il y avail exces de cire dans I'epreuve , on la mettiait entre deux feuilles de papier buvard non cirees , et I'on repasserait. 8" Preparation du papier positif. — Faites une dissolution d'eau distillee 100 grammes, chlorure de sodium pur 4 et demi; versez dans une cuvette une couche epaisse de 5 a 10 millimetres ; mar- quez d'un signe toutes vos feuilles etendues I'une apres I'autre sur le liquide, laissez chacune de 5 a 8 minutes suivant Fepaisseur et 196 COSMOS, faites sechcr en snspendant par iin angle. L'op^ralion pent se faire en picin jour cl snr un grand nonibre do fcuillcs. On Ics place face Ji face dans un carton , oil elles se conservent longtcmps dans un lieu sec. Prcparcz line autre dissolulion de : eaiidislillee 100 gram- mes, nitrate d'argcnt 15 a 18 grammes, etendcz la surface salee de cliaque feuille sur le nitrate , laisscz-la dc 5 a 6 minutes et se- chez dc noiivcaii parfaitemcnt. Cette operation ne pent se faiie que dans Fohscuritc , a la seule clart6 d'une lampe ou d'une bougie ; on la fail Ic soir pour se servir du papier le lendemain : au bout de deux jours le papier jaiinit et les cpreuves alors sont tres-infe- rieures a celles obtenues sur le papier blanc. 9° TiRACE DE i/efreuve POSITIVE. — On place le negatif sur la glace du chassis a reproduction , le cote le plus a igoureux en dessiis ; on place sur repreuvc le cole nitrate du papier positif, en laissant dcpasser un pen les bords de celui-ci pour mieiix siii\re les effets de la lumiere ; on ferine le chassis , on presse legeremenl au moyen des vis pour faire adherer les deux feiiilles; on ouvre dc temps en temps le chassis sur un sent de ses cotes pour regarder I'image : quand les clairs commencent Ji se voiler il est temps de la retirer. On laisse cependant les noirs se foncer plus qu'il ne faudrait parce que riiyposulfite les affaiblit. 10° FixAGE DE l'epredve POSITIVE. — Vcrscz daus une cuvette une dissolution de : eau distillee 100 grammes , hyposulfitc de sonde 12 grammes , plongez-y entierement Topreuve positive a la sortie du chassis, et chassez bien toutesles biilles d'air; laissez-la jusqu'a ce que les blancs soient tres-eclaircis , en tenant compte du fait que I'epreuve en sechant reprcndra toujours un pen plus de vi- gueur; retirez alors I'image, lavez a grande eau et laissez meme 5 ou 6 heures dans Teau pour enlever tout Thyposulhte ; suspendez enfin pour faire sechcr. L'hyposulfite donne des tons rougeatres assez dcsagreables ; pour les eviter on pcut ajouter une petite quan- tite de dissolulion d'lin demi-gramme de chlorure d'argent nou- vellemcnt precipite dans 100 grammes d'eau. Le papier coUe a I'amidon donne les plus beaux tons noirs. Lliyposulfite sert plu- sieurs fois , mais il faut le filtrer a cliaque nouvelle operation et ajouter une petite quantile de dissolulion nouvelle. On pent d'ail- leurs fixer plusieurs posilifs a la fois, pourvu qu'il y ait assez de liquide pour qu'ils n'adherent pas ensemble. Nous apprenons avcc joie que M. Baldus vient d'elie charge par M. le ministre de rinterieur de reproduire les principaux monu- ments de Paris. Puisse-t-il obtenir de prendre des (5preuvcs dou- COSMOS. 197 hies pour le stereoscope , alors seulement sa mission sera pleine- ment remplie. n. Voici comment M. Benito de Monfort transporte sur papier la couchc impressionnee de collodion ou I'epreuve negative sur collodion. « Je prends la plaque de verre et je gratte avec I'ongle tout autour pour arracher le collodion sur les bords; je plonge ensuite la glace horizontalcment dans I'eau pour faire soulever la couclie de collo- dion ;je la releve ensuite verlicalement et je fais couler doucement une nappe d'eau entre la face interieure de la glace et la couche ; I'eau descend lentcment et arrive enfin jusqu'au bas ; la couchc alors est decollee, mais sans avoir etc enlevee ou deplacce, et sans etre ridee. J'applique alors centre la couche une feuille de papier huraide et Icgerement enduit de gomme arabique ; je renverse la plaque de verre et la pose sur une table bien unie , la feuille de papier en bas, la surface du verre en haul, puis la main etendue sur le verre et appuyant fortement, je la pousse en avant; elle glisse sur la couche de collodion et s'en va , pendant que celle-ci reste adherente au papier, parfaitement etendue et parfaitement lisse. On aurait pu, pour faciliter I'operation, laisser au papier un rebord assez large depassant la couche de collodion et sur lequel on appuierait I'autre main pendant qu'on chasse la plaque de verre. » Ce moyen est prompt et rapide, on pent rex^cuter soit immedia- tement apres I'obtention de I'epreuve negative, soit longtemps apres. II est toujours plus prudent de vernir I'epreuve sur collodion apres le transport sur papier, en faisant couler uniformcment sur sa surface du vernis copal ; on I'empeche ainsi de s'electriser et de se fendiller, ce qui arrive surtout avec ccrtaines preparations de collodion. Le preparateur de M. Aguado, qui a fait le portrait de M"» la marquise , nous affirme que nous avons exagere en comptant dix tehees pour une tres-belle epreuve. II a acquis, dit-il, assez d'exer- cice et d'habilete pour reussir huit fois sur dix. II est convaincu aussi que les cliches de collodion vernisses avec le vernis de copal, ou le fluide siccatif de M. Puech , applique a I'aide d'une douce chaleur, acquiert une grande solidite et pourra donner un grand nombre d'epreuves positives. III. Un habile photographe, M. Plant, nous adresse avec priere de I'inserer un autre precede de decollage du collodion qui lui a 198 COSMOS. toiijoiirs reiissi. On rince h grande can I'epreuve fixee a I'hyposul- file de sonde ou au bromurc dc potassium ; on la place encore monilloe snr nn plan horizontal, ct on verse dessns dc Talbumine battue et rctondicc inelce h. un tiers d'cau en volume ; on incline la glace a (Iroite el a gauche , en haut et en has, pour que I'albumine la reconvre uniformement , et on laisse le collodion s'imbiber. Pen- dant ce temps-la on prend une feuille de papier tres-fm , le papier pelurc est le mcilleur, on I'elend sur un bain d'eau ; quand 11 est imbibe on applique son cote mouille sur ralbumine , on releve la plaque sur un angle, on laisse le liquide s'egoutter ; en passant dou- cement la main sur le papier dans un meme sens et , chassant les bulles d'eau, on le fait adherer pariaitemcnt : on laisse secher lente- ment, ou, si Ton est presse, on hate le sechage en chaufl'ant legere- ment la glace, puis on coupe le papier tout autour, de sorte que les bords extremes soient tout a fail libres et ne s'opposent pas au de- collage. On verse dans le fond d'une cuvette, ou sur une glace, une 16gere couclie d'acide acetique au huitieme, et Ton met en contact avec cctte couchc le cote de la glace reconvert de papier ; Talbumine se coagule et devient insoluble ; on plonge dans un bain d'eau , et au bout du temps n^cessaire pour la penetration du liquide , on souleve le papier par un dc ses angles ou de ses bords ; it cmporte avec lui la couche de collodion qui lui est parfaitement adherente ; on fail secher I'epreuve au papier buvard, la couche alors ne se fendille plus, surtout si on la reconvre de vernis. li ne restera plus qu'a cirer le papier pour obtenir un excellent cliche negalif qui pourra opcrer par ses deux faces. Si on avail de la repugnance pour le papier pelurc, et que Ton pr(5ferat les cliches sur papier fort , il faudrait , par une seconde operation , transporter la couche de collodion du papier fm sur Ic papier epais. On etend cehii-ci sur une glace mouillee, on verse dessus de I'albumine, comme on I'a fait plus haut, on pose dessus la couche humide de collodion adherente au papier fin , on met le papier epais sur le bain d'acide acdtique pour coaguler I'albumine, on laisse secher ; on etend le papier fin sm' une couchc d'ammo- niaquc etenduc d'eau pour decoagider I'albumine , on plonge I'en- semble des deux fcuilles dans I'eau pour ramollir le papier fin , on etend le tout sur une glace, le papier fort en dessous, puis on frotte en rond avec le doigt pour detacher le papier fin , qui se decoUe, se roule, on I'enleve doucemenl par morceaux; le collodion est alors a nn et adherent au papier fort qui a remplac6 la glace et le papier fin ; on a obtenu ainsi le cUche negatif dans sa disposition primitive. COSMOS. 199 III. Le comte de Rosse a donne samedi dernier sa quatrifeme et der- niere soiree de la saison. La reunion etait extremement nombreuse, et lessalles etaient pleines d'objelsd'art et de sciences, remarquables par leur nouveaute, leur rarete, ou la perfection du travail. Nous citerons entre autres I'appareil de M. Bramwell pour regler I'expansion de la vapeur ; la chaloupe de sauvetage et le mode de suspension de cette chaloupe, invente par M. Landell ; le refractometre de M. Wheatstone pour la mesure du pouvoir refringent des liquides ; le moule perfec- tionne de M. Campion pour fondre plus rapidement et plus parfaite- ment les balles connues sous le nom de ballesMinie, et qui servent au tir des carabines rayees ; une serie d'experiences du docteur Scoresby pour prouver qu'il est impossible d'obtenir un etat magnetique perma- nent des aiguilles des boussoles, a bord des vaisseaux conslruits en fer malleable ou en tole ; une splendide collection d'os d'un oiseau gigan- tesque analogue a I'autruche , genre eteint , vivant autrefois dans la Nouvelle-Zelande, os recueillis par le docteur Walter Man tell; une col- lection de mineraux reunis par le professeur Tennant, et renfermant des echantillons d'or de I'Australie et de I'ile de la Reine-Charlotte ; plusieurs beaux specimens de galvanoplastie, argenture et dorure elec- trique deMM. Elkington ; des illustrations d'un systeme d'architecture en fer de M. Pickett; une serie de photographies de tres-grande beaute et de tres-grande delicatesse de MM. Henneman ; des portraits et des gi'oupes sur plaque daguerrienne deM. Mayall, lecelebrephotographe americain, remarquables par leur grandeur et leur perfection, etc., etc. La proehaine reunion de I'association britannique pour I'avancement des sciences s'ouvrira a Belfast, belle ville d'klande, le vendredi V sep- tembre ; et Ton espere quelle entrainera vers le nord le flot de visi- teurs que I'exposition des produits de Industrie irlandaise de Cork entraine aujourd'hui vers le midi. Toutes les sections entre lesquelles se partagent I'examen et la discussion des documents scientifiques tieu- dront cette fois leurs seances dans un seul et meme edifice, le college de la Reine, lequel, ainsi que tous les etablissements publics de Belfast, a ete mis genereusement a la disposition du comite de I'association. Elle sera presidee par le colonel Sabine ; les vice-presidents sont : le comte d'Enniskillen, le comte de Rosse, sir Henry de laBeche, le reverend docteur Hincks , le directeur de Queen's College , le presi- dent de I'academie d'Irlande , le reverend docteur Robinson , le pro- fesseur Stockes, et le professeur Stevelly. Le secretaire general du con- gres est le docteur Forbes Royle, de King's College, a Londres ; les secretaires particuliers ou locaux sont MM. Allen , M'Gee et le profes- seur Wilson. -200 COSMOS. II etait difficile de choisir un lieu de reunion mieux place sous tous les rapports que le port de Belfast, centre d'instruction, de commerce et d'industrie du nbrd de I'irlande. La contree est pleine de sites d'une tres-grande beaute , et elle est plus remarquable encore au point de vue des phenomenes geologiques. Les botanistes et les zoologlstes trouveronl la matiere k de savantes et curieuses observations; les sta- tisticiens et les ethnologues pourront y recueillir des documents pleins d'interet. L'amiraute anglaise a decide, sur la recommandation de la Societe royale, qu'on continuerait les recherches sur les ondes et les marees de la mer du Nord , commencees avec tant de succes I'annee derniere par le capitaine Beechey. La Societe royale a fait imprimer, dans ses Philosophical transactions, les resultats obtenus par le savant et infa- tigable capitaine dans sa premiere campagne. De son c6te, la compagnie de la bale d'Hudson a pris la resolution d'accorder une nouvelle mission au courageux docteur Rae , pour qu'il puisse completer les diverses decouvertes qu'il a deja faites en explorant les c6tes de TAmerique du nord. Quoiqu'il ait deja subi les rigueurs de plusieurs hivers passes dans les regions arctiques, le doc- teur Rae est encore plein de force et de sante , et il lui tarde de pour- suivre les recherches qui ont deja rendu son nom celebre. La veuve du celebre botaniste anglais M. Fielding, a, suivant le de- sir exprime par son mari, donne al'universite de Lancastre son herbier si rare et si beau , avec une collection choisie de livres de botanique, aux conditions suivantes : l"Que I'universite fera construire ou procu- rera un edifice propre a recevoir le vaste herbier de Fielding, de telle sorte qu'il soit accessible a tous les botanistes aux jours et aux heures fixes par les reglements; 2° que I'universite constituera un fonds de 2000 livres au moins (50 000 francs) , dont les interets seront annuellement consacres a maintenir et a continuer la collection; 3° que I'herbier sera plac6 sous la surveillance de trois curateurs : le professeur de botanique , le professeur royal de medecine et un membre de I'universite, lesquels rendront compte de leur gestion a la commission du jardin de botanique dans sa seance annuelle. Pour qu'on ait pu proposer et qu'on puisse accepter des conditions si one- reuses, 50 000 francs pour le fond, d'entretien, et 31 000 francs pour le local , il faut que I'herbier de Fielding soit vraiment une merveille. II resulte, en effet, d'une note redigee par M.le docteur Daubeny, qu'il a une valeur inappreciable. La Societe royale de meteorologie d'Angleterre a tenu sa seance annuelle anniversaire le 25 mai dernier. Cette seance etait presidee COSMOS. 201 par M. Withbread , qui , dans son discours d'ouverture , a donne de precieux details sur ['extension de la societe , I'etat florissant de ses fi- nances, les perfectionnements apportes aux instruments nieteorolo- giques, I'activite de ses membres, rimportance de ses travaux , les progrfes deja realises par elle , etc. , etc, Le docteur Hoskins a pris ensuite la parole pour lire un memoire plein d'interet sur le climat de Guernesey; nous I'analyserons dans notre prochaine livraison , en nous bornant cette fois a traduire quelques considerations generales preli- rainaires. Le lien d'union intkne qui lie entre elles trois sciences tres- separees, la met^orologie, la medecine et I'agriculture, n'est pas seu- ment admis aujourd'hui comme fait theorique, il a de plus ete I'objet de recherches trop peu nombreuses encore, mais deja dignes de fixer I'attention. Maintenant que, grace aux tables et auxmodeles de registres d'observations redigees par I'infaligable secretaire de la societe de me- teorologie, M. Glaisher, les observations seront faites sur un plan uniforme, aux heures les plus convenables du jour et de la nuit, les reductions et les comparaisons des donnees meteorologiques seront rendues beaucoup plus faciles. Deja, M. Glaisher a publie les resultats des observations faites sur une etendue de sept degres en latitude et desept degres en longitude, et ils jettent un tres-grand jour sur le climat de I'Angleterre. Mais il importe, dit M. Hoskins , qu'on arrive a connaitre mieux encore la salubrite et les proprietes sanitaires des val- leesdel'interieur du pays et des baies abritees contre les vents. Comme cbaque localite a son climat propre, chacune d' elles pourrait devenir un asile salutaire si ses caracteres meteorologiques etaient bien definis, si Ton connaissait la distribution de la chaleur et du froid entre les differents mois et les diverses saisons, la temperature moycnne de cha- que jour, et surtout la quantite de vapeur repandue dans Tajn^osphere ; car les observations hygrometriques si negligees jusqu'ici sont les plus essentielles de loutes quand il s'agit d'apprecier le caractere propre d'un climat, et d'etablir a quel genre d'infirmite il pent surtout venir en aide. Aussi, ce qui doit occuper principalement la societe met^o- rologique, c'est le perfectionnement et I'usage plus etendu d'excel- lents appareils hygrometriques. Nos lecteurs savent deja que le palais decristal, I'immense edifice de I'exposition universelle, va etre transports a Sydenham, station de che- min de fer, dans les environs de Londres ; mais nous apprenons aujour- d'hui seulement qu'un des chefs de la nouvelle entreprise aurait eu I'heureuse pensee d'utiliser ces immenses constructions en les donnant comme abri au cosmo-plaste do M. Sanis : de sorte que I'admirable plan d'une carte d'Europe en relief sur vingt hectares de terrain serait 202 COSMOS. realis^e trfes-prochainement en Angleterre. Nous d^sirons ardemment que cette pensee ne soit pas sterile, et que Ton passe rapidement du projet ii I'execution. 11 est Evident qu'il serait impossible de donner au palais de cristal une destination plus heureuse et plus lucrative : il continuerait sa glorieuse carriere et attirerait de nouveau une foule innombrable de visiteurs. M. Buchner, c6l6bre chimiste allemand, qui a rempli trente-quatre ans avec gloire la chaire de cliimie de I'universit^ de Munich, et qui est surtout connu par son grand Rppertoh-e de pharmacie , en 44 vo- lumes in-8°, vient de mourir k I'age de 69 ans. Le bruit a couru en Allemagne et en Angleterre qu'il aurait pour successeur I'illustre baron Liebig , qui aspirait depuis longtemps a resigner sa place de professeur a I'universite de Giessen pour aller se fixer dans la capitale de la Baviere. En lui ouvrant leur sein, I'univer- site et I'academie de Munich feront une brillante acquisition. Lady Franklin vient d'adresser une nouvelle lettre au president des £tats-Unis pour I'engager a preier son noble concours et son appui aux expeditions envoyees cette annee encore a la recherche de I'illustre et infortune navigateur. M. Grinell , de New-York , oifre genereuse- ment de mettre les navires qui lui seront demandes ala disposition des equipages americains qui voudront explorer, dans ce but, les mers du nord; etM. Peabody, de Londres, offre de contribuer pour 50 000 francs aux depenses de I'expedition. IV. L'Academie des sciences a elu, lundi dernier, un membre corres- pondant dans la section de geographie et de navigation en remplace- mentde M. de Krusenstern, decede. Les candidats presentes par la section etaient : 1° sir James Clark-Ross, a Londres; 2" I'amiral Wran- gel a Saint-Petersbourg; 3° le capitaine Charles Wilkes a Washington ; 4° le capitaine F. Beechey a Londres; 5° le lieutenant F. Maury k Washington. M. James Clark-Ross , le hardi navigateur que ses voyages dans les mers du nord a la recherche de sir John Franklin ont rendu si celebre , a ete nomme membre correspondant par 42 suffrages sur 43 volants, et au premier tour de scrutin. Un des honorables acade- miciens avail cru devoir deposer un billet blanc; singulier caprice centre lequel on devrait bien protester. C'est un fait acquis k la science que des sources de chaleur de tem- peratures differentes emettcnt des rayons de qualites differentes, ca- Tact6risees par la propriete de passer inegalement a travers les corps dialhennanes. MM. de La Provostaye et Desains ajoutent a ce premier ait que, meme a des temperatures parfaitement identiques , les divers corps emettent des chaleurs tres-heterogenes. Us ont revetu de cinabre COSMOS. 203 et de noir de fumee les deux moities de la face anterieure d'un grand vase en cuivre; et ils Font rempli d'huile chauffee k 173". A cette temperature , le rapport des rayonnements directs ou das elevations de temperature produites sur un meme thermometre par les rayons rcQus sans intermediaire etait 0,83; tandis que le rapport des rayon- nements transmis , c'est-a-dire le rapport des temperatures accusees par le thermometre qui recevait les rayons apres leur passage a travers unelame de mica, n' etait plus que 0,67 : les rayons emis par le cinabre etaient done absorbes en plus grande porportion que les rayons emis par le noir de fumee. Le premier fait decouvert par Laroche et Berard, avail quelque chose d'extraordinaire et de paradoxal; le second, que MM. de La Provos- taye et Desains, croient avoir mis les premiers en evidence, nous semble, au contraire, tout naturel. II est impossible, en effet, comme nous le faisait remarquer M. Govi, que chaque corps ne modifie pas d'une maniere particuhere la chaleur qu'il transmet; qu'il ne lui com- munique pas quelque chose d'analogue a la teinte ou nuance qui co- lore les rayons lumineux : la difference de permeabihte serait ainsi rendue necessaire et facilement expliquee. M. Arago a annonce, lundi dernier, la triste nouvelle de la mort de M. Heron de Villefosse, inspecteur divisionnaire des mines, etminera- logiste distingue. 11 appartenait a 1' Academic , en qualite d'academicien libre, depuis I'annee 1816; il est mort le 6 juin. Un professeur de physique, M. Lion, avait annonce que I'intensite magnetique du globe subissait des variations tres-scnsibles pendant I'occultation du soleil dans les eclipses ; il pretendait meme que des eclipses invisibles pour nous pouvaient 6tre senties par les boussoles dont les variations permettraient d'en suivre les phases. L' Academic avait nomme une commission pour s'assurer de la realite de cette assertion , qui aurait eu une importance tres-grande pour I'explication physique des phenomenes du magnetisme terrestre; mais les astro- nomes de I'Observatoire , profitant de la derniere eclipse invisible a Paris, du 17 juin 1852, ont soumis a I'experience le fait signale par M. Lion , et M. Arago vient d'annoncer au monde savant que le re- sultat de cette verification est entiferement negatif. Un puits artesien, creuse a Rouen, a donne un jet d'eau dont la tem- perature est de 22",5 cent. La profondeur du puits est de 320 metres. En calculantl'accroissementde temperature d'apres ces donnees, on le trouve d'un degre pour 27 metres environ, ce qui ne serait pas bien eioigne de 30 metres et demi trouves par M. AValferdin dans les puits du bassin de Paris. II faut toutefois remarquer que la temperature a ete 504 COSMOS. prise a Rouen dans I'eau jaillissante elle-mSme , tandis qu'il fallait la prendre au fond du puits, car la nappe d'eau la plus profonde en ren- contre dix autres moins chaudes sur son trajet avant d'arriver a la sur- face du sol. M. Walferdin se propose de determiner exactement cette temperature a I'aide de ses thermomfetres k deversement. COURRIER SCIENTIFIQUE. 1" Houvelles de France. Chimie. — M. Marcellin Berthelot a etudi^ avecbeaucoup plus de soins qu'on ne I'avait faitjusqu'ici, Taction exercee par les acides, la chaleur, et les chloru- res alcalins terreux sur I'essence de ter^benthine et son hydrate , sur le sucre et surralcool. 4° Terebenthine. — On savait que les acides min^raux energiques font subir a la terebenthine une transformation isomerique. L'acide sulfurique et I'acide phosphorique conduisent au tdrebene et au colophene, l'acide nitrique deter- mine la fixation des (Elements de I'eau sur le carbure ; l'acide chlorhydrique produit le camphre artificiel. M. Berthelot ajoute qua 100° les acides mine- raux faibles, I'acide borique, les acides organiques, oxalique, citrique, acetique et le chlorure de zinc, tous corps inactifs a la temperature ordinaire, modifient aussi isomeriquement I'essence de terebenthine, etcela sans entrer en dissolution dans I'essence, sans s'approprier aucun de ses elements, par une pure action de contact. Vers 240 ou 250", la chaleur seule determine a son tour des modifica- tions isomeriques ; et cette action est singulierement acceleree et modifi^e par I'intervention dediverses substances, quoique insolubles dans I'essence a toutes temperatures; des chlorures et des fluorures par exemple : le pouvoir rotatoire et la densite de I'essence changent alors en quelques heures, sans que d'ailleurs il y ait d^gagement de gaz ou formation de nouveaux produits. 2° Hydrate cV essence de terebenthine. — On savait que ce corps a chaud se de- double sous I'influence des acides en eau et terpinol. M. Berthelot a constate que ce m^me dedoublement s'opere en presence du chlorure de zinc a 100°, par la chaleur seule au-dessus de 200° ^ en presence d'autres chlorures ou fluorures entre 160 et 180°. 3° Sucre. — On savait depuis longtemps qu'en presence des acides etendus il se change en glucose avec formation d'eau ; que les acides concentres ainsi que la chaleur le noircissent et le s^parent de I'eau. M. Berthelot a vu que les chlorures terreux a 100° le transforment au bout de quelques heures en glucose, et quelquefois meme le brunissent fortement : laj^action toutefois exige, pour se developper, la presence de quelques traces d'eau ; I'eau seule d'ailleurs, comme M. Soubeiran I'a prouv6, transforme aussi le sucre, mais avec une excessive lenteur. COSMOS. 205 4° Alcool. — On connaissait Taction ^th^iifiante des acides et des chlorures m6- talliques sur I'alcool; action qui don ne naissance tanl6t a Tether proprement dit, tanlot a des Others composes, tantot a des carbures gazeux liquides ou solides, isomeres du gaz olefiant. M. Berthelot ajoute que Taction de la chaleur, nulle jusqu'au rouge, determine a ce point la formation du gaz defiant, quel- quefois sans depot de charbon et sans 6lher. A 360" le chlorure de zinc donne de Tether et du gaz ol6fiant sans subir lui-m^me aucune alteration; Teau et les autres chlorures ou fluorures lui ont paru sans action, meme a 360°. 5" Esprit de bois. — Chauffe seul a 360°, il commence a se troubler par Taddi- tion de Teau. Le chlorure de calcium, des 250°, developpe i'hydrate de methy- lene gazeux, et fait apparaitre au-dessus de 300° des liquides huileux, sans doute des carbures. A cette occasion, M. Berthelot signale un excellent moyen de d(5couvrir et de doser le gaz oleBant; moyen invente par M. Balard. II con- siste dans Temploi du brdme liquide pour absorber le gaz olefiant; Tabsorp- tion est; instantan^e et exacte au centieme, m^me en presence d'autres gaz : on opera sur Teau en agitant le gaz avec un peu de brome dans un flacon ferm6. Le jeune et habile chimiste a voulu utiliser la production de Thydrogene bi- carbone , dans une liqueur neutre pour le faire absorber par le chlorhydrate d'ammoniaqueetproduire ainsi les chlorhydratesdesalcalis ^Ihyliques. L'action du chlorhydrate d'ammoniaque sur Talcool presente deux ordres de pheno- menes, Teth^rification d'abord de 260 a 360° avec decomposition a peu pres complete de Talcool; puis la production des acides elhyiiques que Ton trouve dans la couche aqueuse surnagee par Tether et parmi lesquels domine T6thy- lammine. L'elher, chauffe seul a 400°_avecTiodhydrate d'ammoniaque pur, se sd- pare en deux couches : Tune d'elher, Tautre solution aqueuse des iodhydrates ethylammiques; traits de la m^me maniere, Tesprit de bois pur donne I'hydrate de methylene, des liquides huileux, et les chlorhydrates ou iodhydrates d'alcalis methyliques. M. Berthelot se demande, en terminant, quel est le lien d'unioa entre ces di- vers phenomenes ; et il lui semble qu'ils resultent tous d'une action de presence, exercee souvent sans Tintervention d'une combinaison meme virtuelle. Sous TinQuence de corps quoique inertes, la molecule change, se modifie isomerique- ment, et donne naissance a d'autres molecules ayant des aptitudes et des afiB- nites nouvelles. Ajoutons qu'il n'y a rien de plus simple et de plus naturel en soi que cetle action de presence ou de contact regardee d'abord comme un mystere inexpli- cable, et releguee sous le nom de force catalytique dans la region des etres sans raison d'etre. N'est-il pas tres-rationnel que, sous Taction d'une attraction nou- velle, les conditions d'afBnite qui groupaient sous une certaine forme et dans une certaine disposition les atomes ^lementaires d'une molecule composee changent; que ces conditions venant a changer , le premier equihbre soit par consequent rompu, le premier groupement detruit, la premiere disposition troublee, et que les atomes elementaires rendus a un certain etat de liberte s'assemblent dans un autre ordre. II suffit d'un petit choc pour amener la cristallisation ou le 206 COSMOS. groupement r^gulier des molecules d'une eau restee liqnide jusqu'a 18 ct 20" au-dessous de zero. Dans le terrible hiver de '1829, nousavons vu de nos yeux de I'eau excessivement froide, mais non prise, se transformer en gelee demi-liquide lorsqu'on la versait dans una cuvette. Ici, la presence du corps neutre 6tait rem- placoe par le mouvementou Tagitalion. Est-on bien svir que, si on imprimait un mouvement intime tres-rapide aux molecules de certains composes chimiques, ils nese transformeraient ou ne se d^composeraient pas? C'est une pens^e qui nous ^chappe et qui sera peut-^lre fecondee. (C. R., t. XXXIV, p. 799.) Medecine. — Deux habiles m^decins, M. Alfred Becquerel et M. Rodier^u- dient avec une patience et une habilete grande, cette partie des sciences m^di- cales que Ton a designee du nom d'hematologie, science du sang, sa composi- tion, ses alterations, etc. ; ils adressent aujourd'hui la suite de leursrecherches. Dans la plupart des maladies chroniques, ou bien, spontanement, a la suite de modifications hygieniques de diverses natures, les trois principaux elements du sang, les globules, la fibrine et Talbumine peuvent augmeuter ou diminuer iso- lement, deux a deux ou tons trois a la fois. La quantite d'eau contenue dans le sang augmente alors et devient beaucoup plus considerable que dans I'etat normal. La diminution de proportion des globules se traduit sp^cialement par la deco- loration de la peau, les palpitations, la dyspnee, le bruit du souffle du coeur et descarotides; on la combat par les ferrugineux et un traitement hygienique approprie. La diminution d'albumine determine ordinairement, toujours si elle est aigue, la production d'une hydropisie; on lui oppose le quinquina et une alimentation tonique. La diminution de proportion de fibrine se manifesto par la production d'h6- morrhagies cutan^es ou muqueuses; le remade est encore I'alimentation tonique, I'emploi des acides vegetaux et une hygiene convenable. (C. R., t. XXXIV, p. 835.) Chirurgie. — Les amputations de la jambe proviennent trois fois sur quatre d'entorsesdeg^nerees; c'est terrible a dire, mais ce n'est, helas, que trop vrai : aussi la seule annonce d'une entorse nous remplit-eile de terreur ; nous pref6- rerions quelquefois apprendre que la personne dent il s'agit a eu un bras ou une jambe cassee. Sur soixante-dix-huit amputations de jambe ou depied pratiqu^es par lui, M. Baudens afiirme que soixante avaient pour origine une entorse. Les entorses sont le grand fleau de I'armee; presque tous les militaires proposes pour la relraite, avant I'^ge, sont des ampules de la jambe par suite d'entorses du pied. Serait-ce done qu'une entorse est un mal incurable? non, car M. Bau- dens demontre qu'elle peut ^tre gu6rie radicalement, etsa terrible fille, I'ampu- tation, (5toufTee dans son germe par un traitement simple, facile et infaillible. Jusqu'ici, le seul moyen employe empiriquement contre les entorses c'^taient les sangsues et les cataplasmes, qu'il faut desormais proscrire pour leur substituer Taction d'un froid prolongc pendant plusieurs jours, jusqu'a disparition totalede rinflammation, et rimmobilite absolue des surfaces articulaires. Le malade plonge dans un baquet d'eau froide le pied attaint d'entorse ; il I'y COSMOS. 207 laisse nuit et jour, et plus ou moins longlemps, suivant la gravity du mal , quel- quefois une semaine; en un mot, tant qu'il s'en Irouve bien, et qu'il sent le pied malade plus chaud quel'autre, cequi indique que rinflammation dure encore: lui seul done est juge de la duree de rimmersion. Quand il sent que rinflamma- tion a cesse, on supprime I'eau froide ; par une ponction sous-cutanee on evacue, s'il est necessaire, I'epanchement quelquefois considerable de sang et de synovie; puis, a I'aide du bandage a enlorse qui enveloppe le pied tout entier, et que Ton solidifie par une solution aqueuse de gomme tres-concentree, on maintient les surfaces arlicuiaires dans une immobilite absolue dix, vingt, trente jours et plus, selon le degre de I'entorse. Depuis vingt-deux ans, M. Baudens a traite par cette m^thode des centaines d'entorses, sans qu'aucune, malgre des complications quelquefois tres-graves ait jamais entraine a sa suite I'amputation. En appelant de nouveau I'attention surce sujet si grave, il a bien merite de I'humanite. (C. R., t. XXXIV, p. 792.) Physique. — M. Ed. Desains a fait une application tres-interessante et tres- utile de la theorie des phenomenes capillaires, qui I'a conduit a la construction de tables de correction pour les mesures des gaz contenus dans des tubes gra- dues , soit au-dessus du mercure, soil au-dessus de I'eau. Dans le premier cas, au volume du gaz compte depuis le haut du tube jusqu'au plan tangent au som- met de la convexite du mercure , il faut ajouter le m6nisque compris entre ce plan, la surface du mercure et les parois du verre. Dans le second , au contraire, il faut du volume du gaz retrancher le volume du menisque compte de meme jusqu'au plan tangent au sommet inferieur de la concavite de I'eau. M. Desains demontre d'abord que la hauteur h du cylindre equivalent au menisque qu'il faut ajouter ou retrancher, est donnee par la formula tres-simple K, dans laquelle « est Tangle que le liquide fait avee la paroi du tube ; r le rayon du tube, ftl'elevalion ou la depression du sommet de la surface courbe au-dessus ou au-dessous du niveau exterieur ; o" une constante telle que a* cos w : p repre- sente I'elevalion ou la depression dans un tube extr§mement etroit du rayon p. Un manipulateur tres-exerce et tres-habile, M. Danger, a determine experi- mentalement les valeurs de la hauteur h pour le cas du mercure dans les clo- ches de I millimetre a 30 millimetres de rayon. Pour s'assurer du degre d'exactitude de la theorie de Laplace , M. Desains a deduit des formules de I'immortel g^omfetre la valeur de /*,, et il en a conclu h au moyen de I'equation pr^cedente. L'accord est tel que dans cinquante-six comparaisons, les differences entre le calcul et I'experience n'ont jamais depasse un quinzieme de millimetre. Ce m^me accord s'est retrouve quand M. Desains a compare : 1° les valeurs de la fleche du menisque ou de la distance entre la base et le sommet de la surface courbe, determinees experimentalement par M. Danger, avec les valeurs cor- respondantes calculees par les formules de Laplace ; 2° les valeurs theoriques et pratiques de la fleche du menisque qui termine I'eau dans de larges cylindres de verre. Cette m^me theorie enfin avait ete deja confirmee par les experiences de 208 COSMOS. Gay-Lussac sur r<51evation de I'eau dans des tubes 6troits, et sur le poids neces- saire pour detacher de I'eau un disque de verre liquide. Fort de tant de confir- mations, M. Desains a pens6 qu'il pouvait, sans crainte d'erreur, appliquer cette meme th<5orie a la construction d'une table de corrections pour les gaz en contact avec I'eau , c'est-a-dire d'une table qui , quand on connait le rayon du tube , donne imm6dialement la hauteur h du m^nisque a retrancher du volume du gaz. Cette table se resume dans le tableau suivant; r elh sent exprim6s en milli- metres. r= 1, /i=0,317; r= 2, /i=0,607; r= 3, ft=0,839 ; r= i, /i=:0,998 r= 5, h=],MO; r= 6, ft=1,252; r= 7, /i = 1,365; r— 8, hz=\,'2,99 r= 9, h—\,'2i:i; r=\0, /i=1,193; r=11, fe=1,142; r='12, /i=1,091 r=l3, h=^\,OM; r=M, ;i = 0,992; r=15, /i=0,945; r=20, ft==0,744 r—io, ft=0,603; r—ZO, /t = 0,504. 2° IVouvelles d'Allemag^ne. Physique physiologique. — Le rouge et le jaune sont des couleurs tres-Iumi- neuses, elles se rapprochent plus par leur effet de la lumiere pure; le bleu et le violet, au contraire , sont des couleurs sombres, elles se rapprochent davantage de I'obscurit^ : aussi dit-on un rouge ardent, un jaune criard, un bleu som- bre, etc.; et cependant, remarque M. Dove, lorsque a la nuit tombante, et au moment de sortir d'une galerie de peinture , on jette sur les tableaux un dernier regard , on est surpris de voir que les draperies rouges sont devenues complete- ment invisibles, tandis que les draperies bleues ont conserve presque toute I'in- tensite de leur couleur. Les deux fails que nous venons de rappeler semblent en contradiction complete. Avant de chercher a les concilier, M. Dove a voulu s'as- surer si dans le cas oii le rouge et le bleu obseives seraient, non plus des cou- leurs artificielles ou composees, mais des couleurs naturelles et simples, la per- sistance de clarte serait encore en faveur du bleu ou de la couleur la plus sombre. II a pris deux verres qui ne laissent passer que de la lumiere sensible- ment homogene, I'un la lumiere bleue , I'autre la lumiere rouge ; il a installe ces deux verres centre les bonnettes d'un stereoscope a refraction , et il a regarde a travers ces verres les deux images d'un dessin g^om^trique trace par des lignes blanches sur un fond noir : par un jour ordinaire , il avait la sensation parfaite du relief produit par I'image unique r&ultant de la superposition des deux des- sins , et teinte de la couleur propre au melange du rouge et du bleu ; en dehors de I'image en relief on voyait des coins ou bords rouges d'une part, etbleus de I'autre. Quand lejour venait a faiblir, quand I'obscuril^ grandissait, on cessait de voir les coins ou bords rouges; les bords bleus restaient visibles, et Taction simultan^e des couleurs dans les images superposees s'exercait encore, puisquo la sensation du relief subsistait. Plus tard, cette sensation disparaissait a son tour, et Ton ne voyait plus que les contours du dessin g6om6trique plac6 der- riere le verre bleu , et trac6 par des lignes bleues. Si on remplagait alors le COSMOS. 209 verre bleu par un second verre rouge , on ne voyait plus rien ; le dessin geome- trique n'etait plus trace; si au contraire on rempla^ait le verre rouge par un se- cond verre bleu , les deux dessins etaient traces de nouveau , et leur perception simultanee faisait renaitre le relief. L'experience de M. Dove etait d'autant plus concluante, que son verre bleu etait beaucoup plus epais que son verre rouge. II est done bien certain que les couleurs qui se montrent les plus brillantes par une lumiere vive , sont celles qui s'effacent ou s'eteignent le plus vite dans une lumiere faible. Voici comment M. Dove croit pouvoir expliquer ce fait : Savart a demontre , dit-il, que la limite de perception des sons graves se resserre beaucoup plus que cells des sons aigus, amesure que I'intensite devient plus faible; or, ditM. Dove, la couleur rouge correspondant a un nombre de vibrations moins considerable que celles qui donnent la couleur bleue, est par rapport a cette couleur bieue ce qu'un son plus grave est par rapport a un son plus aigu ; done, elle doit s'etein- dre plus vite quand la lumiere du jour diminue. M. Dove etend ensuite cette explication a un fait tres-remarquable , que per- sonne , dil-il, n'a encore admire : a la faible illumination des etoiles, le bleu du ciel ressort encore tres-bien. Depuis longues annees M. Babinet, dans nos promena- des du soir, a appele mon attention sur cette intensity relative singuiiere du bleu du ciel ; il me I'a souvent montr^ agissant par contraste sur la lumiere des pianetes^ de la lune et des etoiles, et leur communiquant une teintejaune et orangee tres- sensible , tandis que, et nous citons ce fait en passant pour prendre date en fa- veur de M. Babinet , la lumiere jaune des reverberes teint reellement en bleu ces memes astres, et surtout Venus et la lune. M. Babinet encore a le premier signal^ dans le ciel^, et baptise du nom de per- ceuses certaines etoiles remarquables. Quoique d'ordre inferieur, et d'un eclat intrinseque beaucoup moins vif , elles percent beaucoup plus facilement, devien- nent plus tot visibles, et sont plus tard cteintes par les nebulosites du ciel que des etoiles meme de seconde grandeur. Les perceuses neseraient-elles pas precise- ment les etoiles a lumiere bleue? Si cela n'etait pas, on serait force de chercher I'explication de la predominance de leur lumiere dans des relations encore in- connues entre les intensiles des mouvements lumineux des etoiles , la distance que ces mouvements ont parcouru, et leur aptitude a traverser les milieux. Pour mieux faire comprendre notre pensee , et ouvrir le champ a de nouvelles reche^- ches , supposons que deux astres vus d'un certain point aient le meme eclat, mais que leurs clart^s propres soient tres-differentes. et que I'egalite d'intensite soit le resultat de I'inegalite des cliemins parcourus , serait-il impossible de dis- tinguer ces deux lumi^res par quelque caractere physique? Par exemple, la lu- miere plus faible qui a parcouru moins de chemin pour atteindre I'atmosphere , ne serait-elle pas plus apte a percer les couches de I'air? Revenons a M. Dove. Ce qui donne plus d'importance a son experience et a I'explication qu'il en donne , c'est qu'il ne I'a pas faite seulement par un ciel bleu , mais dans des jours ou le ciel etait tres-uniformement convert de nuages blancs: de telle sorte qu'on ne pouvait mettre en evidence aucune trace de pola- risation avec les appareils les plus sensibles , et ou meme des nuages epais rem- 210 COSMOS. plissaient ^galement toute ratmosphore. Pour (Eloigner toute cause d'erreur, il a oper^ au milieu du jour dans des appartements rendus obscurs. Si Ton passe tout a coup d'une chambre tres-eclair^e dans une chambre tres-sombre, et qu'on s'approche assez du lieu par lequel entrent les quelques rayons de iumi(!!re qui reclairent encore pour dislinguer un objet bleu , les objels rouges places a cote apparaitront beaucoup plus brillants, parce que I'ccil est encore sous I'im- pression de la lumi^re vive qui donne au rouge plus d'eclat; maissi on s'eloigne ensuite du point par ou la lumiere entre , on remarquera que les objels bleus se distinguent encore lorsque les objets rouges sont completement invisibles. Dans son beau memoire sur le daltonisme, Seebeck afiBrmaitcomme un fait constant que les rayons moins refrangibies s'eteignaient les premiers le soir dans la lu- miere de Fatmosphere ; or, le rouge estun de ces rayons. Un autre fait du mcme genre, c'est que le spectre prismatique produit par le passage a travers une fente etroite, presente un 6clat beaucoup plus vif vers la limite rouge, quand la lumiere est tr^s-vive, que vers la limite violette. M. Dove croit mSme que si la lumiere solaire etait assez concentree , la parlie sombre au dela du rouge, et qui donne le maximum de chaleur, deviendrait visible. M. Dove passe ensuite a un autre ordre de phenomenes d'eclat ou d'irradia- tion qu'il aurait mieux mis en evidence , en subslituant des lignes aux surfaces colorees. Nous les enoncerons rapidement. '1° Une flamme, vue a travers un verre violet, se montre violette a la distance de la vision distincte ; bleue au centre, avec un contour rouge en deca de la vision distincte; rouge au centre, avec un contour bleu au dela de la vision distincte : I'experience reussit beaucoup mieux si Ton regarde a travers ce verre une fente de diffraction eclair6e par une lumiere tres-brillante. 2° Au dela de la vision distincte, un micrometre, forme de lignes noires sur un fond blanc, apparait gris ; un micrometre form^ de lignes blanches sur un fond noir apparait; comme une tache brillante. Si Ton regarde le second micro- metre, ensemble de lignes blanches sur un fond noir, a travers un verre bleu,, et qu'on I'eloigne assez de I'ceil pour que les lignes, en se superposant, ne fer- ment plus qu'une tache, puis qu'on substitue alors un verre rouge au verre bleu, on verra la tache redevenir un r^seau de lignes distincfes, et il faudra eloigner encore le micrometre de I'ceil pour que la confusion reparaisse. C'est un moyen facile, dit M. Dove, de s'assurer que la distance de la vision dis- tincte est beaucoup plus grande pour la lumiere rouge que pour la lumiere bleue ; on constaterait de meme qu'elle est plus grande pour la lumifere blanche que pour la lumiere bleue. 3° On unit dans le stereoscope un premier dessin forme de lignes blanches sur un fond noir, avec un second dessin form6 de lignes noires sur un fond blanc, et on les regarde a travers un verre color6 place devant les deux yeux. Si le verre est couleur rubis et la lumiere tres-intense, les contours de I'image en relief sembleront formes de cuivre poU. i° On connait le ph^nomene optique designe sous le nom de coeurs agites. On vit d'abord qu'une image verte, dessinee sur un fond rouge, semble danser sur le fond lorsque Ton imprime a I'etoffe, au papier, par exemple, qui porte ce COSMOS. 211 fond, un mouvement rapide de va-et-vient, et qu'on regarde indirectement par vision oblique et non d'aplomb. Comme le vert et le rouge sont deux couleurs complementaires, on crut que ce phenomena elait du a I'influence mutuelle et bien connue de ce genre de couleurs. Mais M. Wiieatstone montra plus tard qu'un dessin bleu sur fond rouge, et un dessin rouge sur fond bleu, vus de la meme maniere, donnaient la sensation d'un mouvement plus rapide encore; on fut amene alors a penser que le phenomene avait pour cause la difference de refraction entre les deux couleurs. M. Brewster avait, en effet, remarque le premier, en regardant des cartes geognostiques a zones diversementxolorees, que le bleu et le rouge, par exemple, ne se montraient pas dans le meme plan, ou a la meme distance de I'ceil. M. Dove a de plus constate que si on fait tourner le fond dans son plan, le dessin teint d'une autre couleur paraitra se mouvoir avec une vitesse angulaire differente de celle du fond, de sorte qu'il semblera se deplacer. S° On salt, depuis assez longtemps, que I'image d'un objet reflechi par un miroir concave ne se montre en avant de I'objet que lorsqu'on regarde avec les deux yeux. M. Dove confirme ce fait par I'experience suivanle: on attache un anneau a un petit baton, et on I'approche du miroir concave jusqu'a ce qu'on voie apparailre, entre le miroir concave et I'anneau, I'lmage grossie de cet anneau traverse par le baton ; si alors on ferme I'ceil gauche, on voit de nou- veau I'image de I'anneau fuir derriere le miroir. Le cone tronque, qui tournait d'abord sa grande base vers I'ceil, dirige'maintenant vers lui sa petite base. 6° L'experience de Scherfer, qui montre qu'un petit objet, vu a travers deux ouvertures accolees I'une a I'autre, parait simple a la distance de la vision dis- tincte, et double en deca, reussit a des distances differentes, suivant que Ton eclaire avec de la lumiere rouge ou avec de la lumiere bleue : a une distance plus grande avecles rayons rouges, a une distance plus petite avec les rayons bleus; la distance correspondante a la lumiere blanche est comprise entre les deux premieres. On fait tres-facilement cette experience en prenant deux fentes de difiFraction recouvertes de deux verres colores et vivement eclairees. {Annales de Pofjg., LXXXV, p. 397). Couleur des etoiles. — Le docteur Christian Doppler, autrefois professeur de geometrie a I'Universite de Prague, maintenant directeur de Tlnstitut de physique et membrede I'Acad^mie des sciences de Vienne (Autriche), a cru pouvoir expliquer les changements de couleur des etoiles par la vitesse de leur mouvement dans I'espace, mouvement qui tanlot les rapproche, tanfot leseloigne de la terra. La theorie de M. Doppler ne nous parait pas encore parfaitement fondee ; nous avons formule contre elle dans notre repertoire d'optique moderne des objections tres-graves qui n'ont pas 6te resolues; mais nous pouvons avoir tort, et nous attendons, sans parti pris, le controle des fails. Aussi nous appre- nons avec bonheur qu'un aslronome tres-actif et tres-distingue, le P. Benoit Sestini, jesuite, vient d'offrir a M. Doppler, theoricien avant tout, son concours d'observateur exerce pour eclairer cette grande question. CoUuborateur avant <848 du c(^lebreP. de Vice a I'observatoire du college romain ; chass^ comme 212 COSMOS. lui deRome en 1848 ; parti avec lui pour aller demander aux fitats-Unis le bien- faitd'une noble hospitalite, et accueilli avec transport, le P. Sestini a fonde el dirige avec unelres-grande habilete robservatoire de Georges-Town, Maryland. Lorsqu'il parlit de Rome, il venait de terminer une longue s^rie d'observations sur les 6toiles colorees du firmament; et, stimulo surtout par les savantes har- diesses de M. Doppler, il a voulu recommencer imm^diatement sousle ciel ame- ricain sa grande revue du monde etoile. L'accord entre les observations de Rome et celles de Georges-Town est ^tonnant, et constate une similitude absolue, une ^c'alite parfaile entre les atmospheres de ces deux contrees si eloignees. Toutes les particularites relatives aux taches de la lune, aux taches de Venus, aux anneaux de Saturne qui I'avaient frappe a Rome , il les a retrouvees sous le beau ciel du Maryland. Et commeil observait avec les memes instruments, compagnons fideles de son exil, les differences qu'il sera amen6 a constater entre les cou- leurs des etoiles devront etre acceptees comme des differences objectives et essentielles, et non comme des differences accidentelles produites par les circon- stances atmospheriques ou I'influence propre des instruments optiques. Cela pos6, le P. Sestini a deja reconnu dans la couleur des Etoiles des chan- "^ements evidents et incontestables. Ainsi /. du Sagiltaire qu'il avait vu a Rome orange fonc6, est aujourd'hui jaune clair; n de I'Aigle a passe de I'orange fonce au jaune ; /. du Serpent, du jaune clair a I'orange fonce; 0 de Pegase du blanc a I'orange; y de Pegase du bleu pourpre au blanc. Jusqu'ici toutes les autres etoiles ont conserve la couleur sous laquelie elles se montraient a Rome, et c'est un grand argument en faveur d'un changementreel et non pas seulement appa- rent pour les etoiles dont I'aspect a change. On volt par ce qui precede que les variations constatees ont eu lieu en sens contraire : ainsi pendant que "/. du Sa- giltaire passait de I'orange fonce au jaune clair, "/. du Serpent passait du jaune clair a I'orange fonce. D'ou il resulterait, si la Iheorie de M. Doppler elait cer- taine, que I'un de ces astres s'eloignail considerablement de la terre, pendant que I'aulre s'en rapprochait. Ce qui rejouit le plus M. Doppler, ce qui tend a donner plus de poids a sa theo- rie, c'est le fail affirme par le P. Sestini, que si leschangemenls de couleurs ont 6te rares pour les etoiles simples ; s'ils n'ont et6 pour elles en quelque sorte qu'une exception, puisque cinq seulement ont pris une autre nuance , la varia- tion au contraire a 6te pour les etoiles doubles ou multiples la r^gle generale; le plus grand nombre d'entre elles semontraientaGeorges Town teinles d'une autre nuance qu'a Rome. Cetle confirmation est d'autanl plus frappante que la revo- lution des etoiles doubles ne laisse aucun doute sur leur deplacement reel dans I'espace, sur I'existence pour elles d'un mouvemenl propre auquel la terre ne participe pas. A toute chose malheur est bon,"dit un vieux proverbe, ou mieux suivant la lou- chante expression des hvres saints: Diligentibus Deum omnia cooper antur in honum. Sans le fatal essai de la Republique romaine, le P. Sestini serait reste a Rome avecle P. deVico; au lieu de deux observatoires, la science n'en compte- rait qu'un. Le P. Secchi succ^de a Rome au P. de Vico, et le remplace avec bonheur; le P. Sestini succ^de en Amerique au m^me P. de Vico el le continue COSMOS. 213 "lorieusement; en confondant leurs travaux, les deux habiles astronomes dou- bleront leurs forces, car, dit I'Esprit-Saint, le frere qui est aide parson frere est comma une ville imprenable. {Annates de Po(jg.,LXXXY, p. 371 .) 3° IWoavelles d'ltalie. Electro-magnetisme. — M. Marianini fils vient de publier un travail fort interessant sous le point de vue de I'application du courant electrique. L'on sait depuis iongtemps que si Ton presente un cylindre en far doux a Touverture d'une helice ou d'une bobine electro-magnetique en activite, le cylindre est absorbe par I'helice , et quelquefois avec tant de violence , que la vitesse acquise le fait sortir de I'autre c6le de la bobine. Six couples de Wollaston, dont le zinc amaigame avait une surface de 1 decimetre carre dans chaque couple , excites par une eau acidulee par 17 millifemes d'acide azotique et autant d'acide sul- furique, attiraient entierement un cylindre en fer doux pesant 67 grammes lorsqu'on I'avait entre de moitie dans la bobine qui fermait le circuit. Cette hobine avait 1 decimetre de longueur, 1 4 millimetres d'ouverture et se compo- sait d'un fd de cuivre de \^"'^'l d'epaisseur, isol6 et faisant cent tours sur I'axe de la bobine. Si I'appareil etait tenu horizontalement, le petit cylindre en fer sortail de la bobine a I'ouverture du circuit. Tout ceci est bien connu ; jusque-la, rien de nouveau. Mais M. P. Marianini , apres avoir fait comme les autres, a eu I'heureuse idee d'envelopper sa bobine d'un cylindre en fer creux, et cette simple addition d'une chemise m^tallique continue a sufR pour donner a son appareil un accroissement de puissance extraordinaire. Au lieu d'altirer sim- plement le petit cylindre de 67 grammes , I'helice placee horizontalement le chassait a trois decimetres de distance apres I'avoir attir6. C'est la un fait nouveau qui promet beaucoup , et que M. Marianini ne voudra pas laisserisole. Son pere avait deja pense faire parcourir a un cylindre en fer doux de longs Irajets avec une grande vitesse en lui faisant traverser une suite d'h^hces electro-motrices dont le cylindre aurait alternativement ferme et ouvert lui-meme le circuit. Peut-etre que la decouverte du fils, s'ajoulant a la pensee du pere, reussira a nous donner des moyens de transport rapide par Taction seule du courant elec- trique. Yoici, en attendant le resullat d'une experience instituee par M. P. Ma- rianini dans le but de se rendre compte de I'augmentation de puissance que le revetement en fer communique a I'helice electro-motrice. La bobine etant placee verticalement et sans I'enveloppe de fer, pouvait soutenir 'I0s'',8; avec I'enve- loppe, 36s',0. Dans une autre experience on a eu les rapports suivants : Bobine nue, 1448',;}; bobine enveloppee, SSSs^l. On avait deja etudie I'etfet d'une bobine a I'interieur d'un cylindre en fer, et l'on avait trouve que ce dernier ne s'aimantait pas sensiblement. MM. Parrot, Lentz, Jacobi et d'autres avaient essaye de rendre compte de ce fait d'apres la theorie d' Ampere; mais ils n'avaient pas apergu, si nos souvenirs ne nous trom- pent, cette reaction de I'enveloppe en fer sur I'electricile de la bobine, qui serait pourtant bien remarquable a une epoque surtout oii les regards des sa- vants et des praliciens sont tous fis^s sur le point de I'application de la pile aux 214 COSMOS. operations industrielles comme principe moteur ou comme agent physique ou chimique. Physique molecdlatre. — Un jeune chimiste ilalien, M. Chiozza, a eu I'heu- reuse idee d'eludier laloi de condensation desgaz a la surface des corps solides, loi qui est bien loin d'etre connue. Une semblabie recherche est entouree de si grandes difficultes qu'il fallait bien du courage et du devouement pour oser I'en- treprendre. M. Chiozza I'a franchement abord^e , et il a construit a cet effet un appareil assez compliqu^ en apparence, mais dont le mode d'action est bien simple. Il consiste essentiellement en un cylindre en verre qui pent etre rempli d'un gaz quelconque. Ce premier cylindre est prepare pour en recevoir un autre qui con- tient un "rand nombre de tubes capillaires en cristal, dont on a determine la surface aussi exactement que possible. Ce second cylindre, et les tubes accoles, sont remplis de mercure ; on les a d'abord chauffes a une temperature tres-elevee, puis on a fait le vide dans tout I'appareil, aBn d'en chasser toute trace de gaz anciennement condensi5. Le premier cylindre communique avcc un manometre fort sensible, a mercure et esprit-de-vin; le second communique hbrement par le haut avec le premier; et au moyen d'un robinet a deux voies on pent aussi le mettre en rapport par sa partie inferieure avec la base du premier cylindre pour laisserecouler le mercure, quand il s'agit de faire I'experience. L' ensemble des deux recipients est environne d'eau maintenue a une temperature constante, et tous lesjoints sont hermetiquement fermes a I'acces de I'air. Pour operer avec cet instrument, le grand cylindre etant remph de gaz, le petit et ses tubes de mer- cure, on commence par observer la pression interieure marquee par le mano- metre, on fait passer ensuite peu a peu le mercure du vase interne dans le cy- lindre ext^rieur , et Ton observe le changement de pression que cet accroissement de surface, sans variation de volume, pent avoir produit. En operant avec tous les soins convenables, M. Chiozza a trouve que 317517 millimetres carres du verre de ses tubes condensaient 5 millimetres cubes environ d'acide carbonique, la temperature du milieu ambiant etant de 15" C. Les difficultes inherentes au maniement d'un semblabie appareil, ne lui ont pas encore permis d'etendre ses recherchcs a d'autres gaz, ni a d'autres corps, tels que le platine, par exemple, dont la force catalytiquc est bien connue. II aurait desire aussi etudier I'influence de la temperature et de la pression sur ces phenomenes analogues aux pheno- menes capillaires; mais absorbe par ses etudes chimiques, il est force d'a- journer ses recherches a un temps indefini. Puissent-elles etre reprises par des physiciens quo leur position met a memo de faire largement les frais d'expe- riences dispendieuses, mais grandement utiles. Mecanique. — Dansle premier volume des Actes de VAcademie des Lincet, de Rome, nous trouvons, entre autres m^moires de M. Volpicelli , un travail sur la mecanique moleculaire dont nous donnerons plus tard une idee plus complete. Apres avoir deduit d'un ensemble d'id^es theoriques toutes les formulas qui se rapportent aux lois d'equilibre et de mouvement des corps, M. Volpicelli donne une meihode qui nous semble nouvelle, pour la determination des coefficients d'eiasticite. Cette melhode se resume dans une formule tres-simple qui relie COSMOS. 215 entre elles ces trois quantites : la hauteur de chute h d'un corps 61aslique la hauteur li' a Jaquelle ce meme corps remonte apres le choc, et le coefficient p d'elasticit(5; on obliendrait ce dernier coefficient en prenantla racinecarree du rapport h' : h de's deux hauteurs. Si Ton suspend done a un fil flexible une masse elastique , et qu'apres I'avoir ^cartee de la verlicale d'un certain angle a, on la laisse tomber contre un autre corps fixe , plac^ dans la verticale qui passe par le point de suspension , on pourra toujours mesurer I'etendue des arcs decrits par le corps avant et apres le choc; et comme ces arcs sont lies aux hauteurs correspondanles h et h' par les formules tres-simples A — sin. v. a, A'=sin. v. a', on pourra caiculer les hauteurs et par suite le coefficient relatif d'elasticite des differents corps solides. Ces experiences peuvent etre faites dansle vide, et eu faisant marcher deux corps a la rencontre I'unde I'autre. AsTRONOMiE PHYSIQUE. — Daus un opuscule r^cemment publie a Padoue M. I'abbe Zantedeschi rend compte d'experiences sur la deviation du pendule faites par lui, aPadoue,avec une sphere pesant 21'"', 5, et un fil d'acier anglais d'un demi-millim^tre de diametre, de 9"", 53 de longueur. II est arrive au mime resultat que le general Dufoura Geneve, un physicien a Louvain, et un autre ob- servateur a Rio-Janeiro ; c'est-a-dire qu'il a constat^ que la vitesse anguiaire dans le plan normal au meridien astronomique a toujours une valeur plus "rande que celie deduite de la loi du sinus, tandis que dans le plan du meridien astronomique, cette vitesse est toujours moindre que la valeur calculee. Ainsi a la latitude de Padoue la loi du sinus donne 10" 42' par heure; or I'experience a toujours donne a M. Zantedeschi un peu moins de 10" dans le plan du meridien astronomique, etplus de 12" dans le plan perpendiculaire au meridien. Get enonce de M. Zantedeschi est un peu obscur. Le fait constate par le gene- ral Dufour etait que le temps employe par le pendule, pour atteindre dans I'ex- perience de M. Foucault une deviation donn6e, 25" par exemple, etait sensible- ment plus long quand le pendule partait de la meridienne que lorsqu'il partait de la perpendiculaire a la meridienne; etque par consequent la vitesse de devia- tion est plus petite dans le premier cas que dans le second. La difference remarquee par JL Zantedeschi est enorme et inadmissible ou ne peut etre expliqu^e que par des influences locales. M. Foucault, qui a fait' ces memes experiences avec le plus grand soin, n'a trouve que de tres-faibles anomalies. Le R. P. Secchi, observateur de grand merite , a voulu voir aussi s'il etait vrai que la deviation observee dans le plan du meridien differat de la deviation dans le plan perpendiculaire; il a entrepris ace sujet deux series d'observations, mais les differences entre le calcul et I'experience n'etaient constantes ni dans leur signe, ni dans leur valeur, et il les a attribuees a des erreurs d'observation. A Rome, la deviation horaire observee etait 9" 53' 1 5"; la deviation calculee par la loi du sinus 10 1°' 2". Par cela seul que la loi du sinus est une loi mathema- tique, qui a rendu populaire et immortalisera le nom deM. Foucault, on consta- tera dans I'observation des ecarts en plus ou en moins, mais ces ecarts ne feront 216 COSMOS. que confirmer sa verit6 , au moins pour tous les esprits intelligents et vraimeni philosophiqnes. 4° ]Vouvelles de Suisse. Geologie. — La presence de la craie blanche dans les Alpes n'est pas un fait nouveau ; niaisyes terrains oii la craie se rencontre ne sont pas encore bien de- finis. M. Alplionse Favre , dans un Memoire lu recemment a la Societe de phy- sique et d'histoire naturelle de Geneve , a decrit le premier, avec tous les details caracteristiques , un de ces terrains situes dans les Alpes de la Savoie , pres des deserts d'Entre-mont. II s'est developpe sur une grande echelle et ressemble, parson apparence comme par ses fossiles, aux terrains crayeux des environs de Paris. Le fait n'est pas sans importance au point de vue de la formation de ces terrains : il semble en effet qu'on doive en conclure que le bassin mediterra- neen de M. d'Orbigny doit comprendre les couches neocomiennes du Jura et des Alpes , ainsi que les couches albiennes de la Savoie et de la Suisse. Ce golfe ou bassin remontait done fort loin au nord de la Provence, le long de la chaine des Alpes. {Bibl. univers. de Geneve, avril , p. 203.) Geologie. — M. le professeur Deike de Saint-Gall a fait faire un grand pas a I'etude encore peu avanceedes molasses de la Suisse, en constatant les alter- natives de formation d'eau douce et de formations marines qui sont un des caracteres' saillants des terrains tertiaires des environs de Paris. La molasse en effet du canton de Saint-Gall, en outre d'un grand nombre d'empreintes vegelales, compte plus de cent trente especes de fossiles verts ou marins; et ces deux sortes de fossiles ne se trouvent jamais melangees ; elles font toujours parlies de couches differentes s^parees en general par un banc de nagelflue. La molasse, d'apres les fossiles, se diviseen trois etages : I" I'etage inferieur de 4200 a 2000 pieds d'epaisseur en forme de terres glaises, de gres durs et resistants ou de nagelflues; il contient des plantes et des fossiles terrestres d'eau douce; 2° I'etage moyen de 500 a 600 pieds d'epaisseur plus argileux contient des fossiles d'eau douce dans le voisinage des lignites et des fossiles marines dans d'autres couches; 3° la position de I'etage supcrieur est de 400 a 500 pieds. (Bib. universelle, avril, p. 17.) DE L'iMriUMERlE DE CRAPELET , Rl'E DE YAUGIRARD, 9. COSMOS. 217 PHOTOGRAPIIIE ET NOUVELLES DU JOUR. I 11 parait que nous nous etions trop avances en annongant que M Bacot avail conscnti a prendre part an concours de la Societe (I'encourasement, car I'illustre photographe nous ecrit la lettrc sui- ^anle que nous inserons avcc Ic regret de voir s'eloigner encore Ic terme de ce qui nous etait apparu corame une calamite pliotogra- phique. « Monsieur, „ Je lis dans Ic nuniero du journal le Cosmos du 20 juin, que M Bacot va faire un de ces jours, devant la commission de a So- ciete d'encouragement, des experiences de pliotogi;aphie , et quit va sans doule publier les precedes par lesquels il opere. .. Je regrelte beaucoup, Monsieur, dene pouvou- execuler les in- tentions que Yous me pretez. Jusqu'a ce jour j'ai toujours refuse de faire des communications a qui que ce soil, et jamais je n aipris vis-a-Yis de personne, I'engagemenl de faire les experiences dont vous parlez. ..„ , .< Je YOUS prie done, Monsieur, de vouloir bien rectifier voire ar- ticle en ce qui me concerne, et de reccYoir mes salutations respec- ti^euses. ^^ £ mCOl. » Nous avons encore une rectification a faire. La personne qui nous uYait appris que M. Plumicr n'avait pu tirer que douze epreuYes po- sitiYCsdu cliche negatif sur collodion du beau portrait de M.Niepce de Saint-Victor , etait parfaitemenl digne de foi , et elle nous pa- raissait d'autanl mieux informce que ces tirages I'intcressaient per- sonnellemcnt; il parait cependant quelle s'est tromp6e, car M. Plu- mier a deju tir6 Yingt-deux epreuves positives, et il peut en lirer encore Nous n'avions donne place a cette nouvelle que dans le but d'6clairer une question delicate, d'amener un perfectionncment nou- veau et nous sommes d6sole qu'elle ait pu contrister M. Plumier. La semaine a ete pauvre en fait de nouvelles photographiques , et nous n'avons absolument rien d'int^ressant a transmettre u nos lecteurs II La classe des sciences de 1' Academic royale de Belgique, pro- pose pour le concours de la presente annee 1852, les six sujets de 4 JUILLET 1852. ^^ 218 COSxMOS. pvix suivants : 1° Coordonner les difforcnles theories publi^cs jus- qu'u ce jour sur les inlegralcs definics; classcr et rt5iinir en ime table les integrales d(5finies connucs. 2° Faire im examen appro- fondi dc nos connaissances sur la pluic et sur les principalcs causes qui niodilient cc phenomene, en tenant compte des observations rccueillics sur differents points du globe. 3° Determiner la consti- tution des alcalis organiqucs. 4" Faire un travail , accompagne de planches, sur le developpemcnt d'un animal appartenant a I'un des types suivants : articules, moUusqucs, vers, (5chinodermes, polypes, meduses on infnsoires. 5° Faire la description des foraminiferes de la Bclgique, avec toutes les especcs decriles. 6%'Exposer les diffe- rents mccanismes organiques de la coloration chez les vegetaux ; faire voir comment les modes de coloration sc diversifient par I'age et les circonstances ou les plantes se trouvent placees ; demontrer les fails par des figures d'apres des dissections nouvelles ; faire un resume succinct des connaissances que la chimie organiquc peut fournir sur ces matieres; enfin rattacher les fails de I'ordrc histo- rique avec les doctrines physiologiques sur la distribution et les modifications que la nature et la culture nous monlrent exister dans les couleurs des organes, principalement des fleurs. Le con- cours sera fermc le 20 septcmbre 1852. Les memoires doivent etre ecrils en latin, frangais ou flamand, accompagnes d'une devise et d'un billet cachetc conlenant le nom de I'auteur. III. Les arrangements pris pour transmettre regulierement le temps moyen de I'Observatoire dc Greenwich , a I'office ou bureau central des telegrapbes electriques, de Charring-Cross , Strand, en face du marche de Himgerford , ont ete enfin termincs la semaine derniere, et Finstallalion des appareils a grandement preoccupe la population de Londres. On salt que jusqu'ici les astronomes de I'Ob- servatoire signalaient le midi moyen a tousles vaisseaux de laTamise. en laissant tomber, du haut d'un mat, uneboule ou globe de grandes dimensions. Desormais, toutes les fois que le globe de Greenwich se detachera du mat, un globe tout a fait semblable se detachera en meme temps, sous I'influence du courant electrique parli de I'Observatoire et parvenu a Londres instantanement , d'un mat dresse sur le dome de I'office des telegraphes. Le globe est en zinc, et peint en noir avec une zone ou ceinture ^quatoriale blanche ; il a six picds de hauteur , dix-huit pieds de circonference ; il est place a une hauteur de 110 pieds. La vitesse de relectricit^ est si grande, el la distance de Londres a Greenwich si petite, que la descente des deux globes s'exccutera au meme instant. Quelques mois encore. COSMOS. ' 219 et le midi moyen dc Greenwich sera transmis a toutes les stations principales des cliemins de fer et a touies les villes imporlantes de I'Angleterrc. Une dilficiiltc surgit cependant : quelques villes, d'lr- lande surtout, Galway, Cork et Dublin , s'obstinent a ne pas aban- donner le temps vrai ; elles croiraient d^roger en cedant h I'entrai- nement general, si [raisonnable cependant. Les magistrats de ces villes antiques ignorent sans doute que cette heureuse revolution s'est deja operee a Rome , au debut du pontifical de Pie IX , et dans des conditions beaucoup plus difficiles ; car la division bizarre du temps , conservee dans la capitalc du mondc chr^tieri depuis des siecles, etait devenue pour les Roinains une seconde nature. Les astronomes du college romain sont specialement charges de donner au sominet du chateau Saint-Ange le signal du midi moyen, sur le- quel sont maintenanl rcglces toutes les horloges publiques de laville, en faisant tomber un globe tout a fait semblable au ballon de Green- wich , et dont la chute est aussilot suivie d'une decharge de canon. Six secondes avant le midi moyen, I'astronozne place dans la saUe de riiorloge du chateau , transmet par un petit telegraphe electrique le signal de laisser tomber le ballon , et si le canonnier qui se tient sur ses gardes, met immcdiatement le feu h sa piece, le coup re- tentit dans toute la ville a Finstant precis de midi. L'horloge est reglee sur la pendule de la lunette meridienne dc I'Observatoire , et ellc est d'ailleurs si parfaite , que ses variations ne sont que de quelques secondes par jour. Quand done Paris entrera-l-il aussi a son tour dans la voie du progres? N'esl-ce pas un spectacle desolant que les differences considerables qui blessent I'ceil sur les cadrans des horloges des differents etablissements publics, I'lnstitut, la Bourse, les Tiuleries, etc., etc.? Le midi moyen n'est signale nulle part d'une maniere officiellc ; le midi vrai est seul indique au Palais- Royal par la decharge d'un petit canon, lorsqu'il plait au soleil de se montrer et de mettre lui-meme le feu a I'amorce. Pourquoi done, puisque les fits du telegraphe electrique communiquent actuellement de rObservatoire au Ministere de Tinterieur, et du Ministere de rinterieur a la place de la Bourse, un de nos astronomes ne deter- minerait-il pas sur le toit du bureau des telegraphes ou du palais de la Bourse la chute dun ballon et I'explosion d'un canon? Pourquoi ne forcerait-on pas tons les artistes charges de I'egler les horloges publiques , de se trouver a leur poste a ce moment solennel? Resler en arriere de Rome et de Londres , c'est vraiment une honlo pour a grande ville , si fiere de s'entendre proclamer d'une voix una- nime la capitale du monde. *220 COSMOS. — Les jounmux anglais nows apprennenl que le baron de Liebig a (;\c definilivemcnt nomm6 professeur do chimic Ji l'iiniversil(5 de Munich. Lc Gardener's Chronicle donnc dos dolails fort curieux sur la reconstruction du palais de cristal. La longueur lolalc de I'edifice sera de 1853 pieds , sa plus grande largeur de 384 pieds; les glaces peseront 600 grammes par pied carr6, au lieu de 336 grammes. Le palais sera construit sur un soubassement avec colonnes destine ?i recevoir les calorifores, les machines ct les provisions. Yoici Tun des projels de d(5coration ou de disposition interieure : Onfcrarognera I'une des extremites la vegetation des tropiques, (lui sc modifiera progressivement comme dans la nahire pour se transformer au centre du transept en vegetation des climats tem- p6rcs ; la temperature, tres-elevee dans la region des tropiques, s'abaissera successivement jusqu'c^ la temperature de I'Angleterre. Un o^rand nomhre de portions du palais scront disposi^es en rec- tangles semblahles aux salles des beaux-arts de I'exposition univer- selle. Ces salons rectangulaires sont destines a la representation fidele des habitudes , des moeurs , et des formes d'habillements des peuples des diverses contrees. L'un d'eux deviendra un veritable ba- zar indien, ou Ton retrouvcra toutes les particidarites de la vie in- dienne ; un autre sera consacre a la Chine ; lui troisieme reproduira I'interieur de I'Alliambra organise par M. Jones ; le quatrieme sera une restaiu-ation fidele d'une des maisons de Pompeia. Dans l'un des pelits transepts, onrassemblcra toutes les antiquites ^gyptiennes; des bas-reliefs et des statues en fonte figureront I'histoire , le com- merce et les principaux monuments de I'Egypte ; chaque objet re- cevra sa couleur propre, et I'ensemble donnera une-idee complete desmanieres ct des choses de la vieille Egypte. On a prisd^ja toutes les mesures necessaires a la formation d'une nombreuse collection de sculptures, de monuments et d'ornements d'architecture , qui montre aiLX yeux le progres des arts depuis leur origine jusqu'a I'ecole modernc , qui sera representee par les chefs-d'oeuvre des grands maitres, des Canova, des Ranch , des Schwantaler , des Cor- nelius, des Schorr, desPradier, etc., etc. La collection architectu- rale formera une serie progressive , moyen age , ere actuelle , et servira d'encadrement a une autre^collection non moins pleine d'in- terct, celle des produits de Tinduslrie et des manufactures. Un large espace sera accorde a la geologie et aux collections g^olo- giques, distributes suivant I'ordre des couches, avec cartes, vues, coupes des terrains, specimens de vegetation, etc., etc. Des modeles COSMOS. 221. des principaux oulils et machines fonclionneront sur place, et Ton verra les matieres premieres passer dc leur etat brut et informe ii I'etat de produits confeclionnes et parfaits. Le but des fondateurs est de r^aliser I'enseignement professionnel et nationalle plus complet qui fut jamais. Au centre des diverses nefs jailliront de magnifiques fontaines : la plus importante, la fontaine Victoria elancera ses eaux a cent cinquante pieds de hauteur , vingt pieds plus haut que le sommet de la colonne Nelson. Tout est si bien prepare que Ton annonce ddja que I'immense construction ouvrira ses larges flancs au public au mois d'aout procliain. Samedi dernier, une. deputa- tion compos6e de I'archeveque de Cantorbery , des eveques de Londres et de Winchester , des conites d'Harrowby et de Shaftes- bury , et autres illustres personnages , est allee a la residence offi- cielle de lord Derby , president du conseil des ministres , le presser de permettre a la compagnie du nouveau palais de cristal de com- mencer immediatement ses travaux. IV. M. le capitaine de vaisseau Lugeol nous donne dans une lettre des renseignements pleins d'inleret sur le vaisseau le Napoleon qu'il commande , et qui est au terme de son armement. « En aucun temps, dans aucune marine, on n'a rien produitd'aussibeau. Vous qui etes enthousiaste des belles choses, \ous seriez dans le ra\is- sementsivous pouviez venir admirer cette magnifique construction. Ce vaisseau, concu par le prince de Joinville dans le but d'eclipser le vieux materiel anglais, va, j'espere, repondre a tout ce qu'on doit attendre de lui. II sera pret le mois prochain ; des que nos expe- riences seront faites, si le succes a justifie nos esperances , je vous donnerai des details qui ne pourront manquer de vous interesser , et d'interesser les hommes jaloux comme vous de la gloire et de la grandeur de notre marine. Le Napoleon porte en batterie 02 ca- nons de gros calibre , langant des boulets de 30 livres ; et sur ces 92 pieces, 8 plus considerables, systeme Paixhans, langantdes obus ou bombes incendiaires de 22 centimetres de diametre. Imaginez une citadelle de cette force , emportant quand il le faudra deux rcgunents complets, avec une vitesse de plus de douze noeuds a I'heure pendant 7 a 8 jours, et vous verrez ce que pourrait la France si au lieu de ses quarante vaisseaux a voiles , elle avail seule- ment vingt vaisseaux semblables au Napoleon. » Ajoutons que I'appareil nageur du Napoleon est une helice en bronze de six metres de diametre ; sa plus grande vitesse sera de 54 tours par minute; elle revolt I'impulsion de la machine de douze a treize cents chevaux, au moven d'un arbre en fer de 222 COSMOS. 32 metres de long, dc 38 centimetres de ditamotrc. Le vaisseau a etc construit snr les dessins dun de nos plus habiles et en nieme temps de nos plus jeunes ingenieurs, M. Dupuy de Lome. La ma- chine sortde letablissement d'Indret, dirige par M. Moll. L'Angleterre de son cote ne dort pas ; le prochain achevement du Leviathan des vaisseaux de lignes a helice, le Windsor-Castle , au- jourd'hui sur le chantier de Pembroke, excite un grand intoret dans le monde maritime. Les dimensions de ce navire sont colos- sales; ce sera incontcstablemcnt le plus fort vaisseau du monde : il jaugera pres de 4000 lonneaux. Ses dimensions officielles sont : longueur depuis I'extremite de la figure & I'avanl jusqu'a la tige du gomemail, 278 pieds G ponces; longueur entre les pcrpendicu- laires, 240 pieds 6 pouccs; longueur de la quille pour le tonnage, 211 pieds 11 pouces et demi; largeur la plus grande, 60 pieds; largeur pour le tonnage, 59 pieds 2 pouces; largeur moyenne, 48 pieds 4 pouces; profondeur de la cale, 24 pieds 8 pouces. Capa- cite en tonnage , 3 758 tonnes 4/94""". Dans le principe 11 devait porter 120 canons, et comma il a et6 allonge par le milieu de 23 pieds, il pourra porter 140 canons. Les machines, sorties des ateliers de M. Robert Napier, sont de la force nominate de 650 a 700 chevaux : on pense que ce gigantesque na- vire pourra etre mis k I'eau a la fin de la presente annee. Nous regrettons que le Moniteur industriel, auquel nous empruntons ces details, destines a completer un premier article sur le Napoleon, n'ait pas donne les dimensions officielles du navire francais. M. le capitaine Lugeol ajoutail : « Nous sommes en pleine paix , restons-y en faveur dn developpeinent des arts et de I'industrie. » Qui, res- tons en paix , mais se figure-t-on ce que serait un combat , ime attaque a bout porlant, entre deux vaisseaux monstrueux comme le Napoleon et le Windsor- Castle. Nous ne connaissons pas la dis- position interieure du navire anglais, mais nous savons que dans le Napoleon les principaux organes de la machine fonctionnent au- dessous de la ligne deflotlaison, et qu'ils sont ainsi complelement a I'abri des projectiles ennemis. Nous savons qu'au ras de la flottai- son et pres de la batterie basse , dans tout I'espace occupd par la machine , I'epaisseur de la muraille est d'un metre ; qu'il n'y a de vulnerable aux projectiles de I'enncmi que les deux tuyaux des cheminees en forte tole, qui peuvent etre cribles de boulets impunement, et sans qu'un tel fait infiue enrien sur lamarche du vaisseau. — Encore une petite planete a ajouter aux dix-sept astcroides qui COSMOS. 223 llottent entre Mars et Jupiter, encore un ^clat du grand astre d6- truit que M. Hind vient de reconnaitre le 24 juin , h son passage dans'le champ du telescope de M. Bishop. C'est un grand trouveur de planetes que M. Hind, qui nous a deja donne, en cinq ans, Flore, Victoria, Iris et Irene, et qui ne s'arrelera certes pas en si beau chemin, aiguillonne qu'il est par I'activite infatigable de son comp^ileur, M. de Gasparis, qui en deux ans a deniche cinq pla- netes, nombre effrayant si on le compare aux sept que les hommes se sont content^s d'observer pendant Dieu sail combien de siecles. La nouvelle planete de M. flind , qui n'a pas encore reqn de nom , mais que M. Babinet appellerait a d'apres sa notation , brille comme une etoUe de 9™' grandeur, ayant une lumiere tranquille et jaune. Comparee soigneusement a une etoile voisine de 10= grandeur, on en connaitrait la position avec toute la rigueur requise , si cette petite etoile ne manquait dans les cartes, ce qui a oblige M. Hind a la rapporter a une autre etoile plus eloignee mais bien connue , et qui est la 2G5^ de la IS-^ hcure de Bessel. Voici les coordonn^es de la planete ^ rapport6es a cette etoile : T. M. de Greenwich. A. R. app. Dist. polaire nord. Juin 24. 13'' 13- 13^ 18'' 12"> 58%78 98° 16' 0",9 Differences entre la petite planete et I'eloile inconnue h laquelle on I'a rapportee : T M de Greenwich. A. R. Planete. Dlst. polaire nord de la planete. Ji * 1*2" 41" 22^ — 24%10 —4' 53",1 14b 3™ 16^ — 27%92 —4' 47",2 — II n'y a peut-etre personne qui ne se soit servi d'amadou pour arreter des petites hemorrhagies , quelquefois avec succes, souvent aussi sans parvenir a les suspendre. M. Guyon, medecin en chef de I'armee d' Afrique, Algerie, annonce qu'il a substitue avec grand avan- tage X amadou de Cayenne au vieil amadou de nos peres , que nous tirions du boletus irjniarius, et qui est devenu assez rare depuis I'in- troduction des allumettes phosphoriques. L' amadou de Catjenne est I'oeuvre d'une espece particuliere de fourmis, appel6e fourmi bi- epineuse, formica bi-spinosa, 0\h .; formica spinicollis , Latr.; qui habite I'Amerique meridionale, et qui s'y lapisse des nids avec les duvets arraches a plusieurs plantes cotonneuses et sp^cialement au miconla holosericea. Ces duvets tass6s et feutr^s par les fourmis constituent un tissu spongieux, absorbant, facile h bruler, qui a recu le nom d'amadou de Cayenne, et qui presente, d'apres M. Guyon, 224 COSMOS. tics propricles heiiiostatiqucs tros-romarqiiablcs. Dans la province de Para, an Brcsil, on a rhabilndc dc Ircmper cct amadou dans une solntion d'aluniinc; cellc addition nc pcul ccrlaincmcnt pas augmcnlcr sa combustibilitc, mais elle pent conlribucr ci le rendre encore pins li(5moslalique. La formica fimgosa. Fab., qui vil a Su- rinam, dans la Guyane hollandaise, fabriquc aussi nn amadou scmblable avec du colon qu'elle sail feufrer ct rendre absorbanl. — 31. Cbabanon aine, d'Uzes, ayant cu a trailer plusieurs cas de rage causae par les morsures d'unc louve hydrophobe, pretend avoir complelement reussi par la cauterisation profonde des plaies au moyen de I'acide sulfurique concentre. L'emploi du fer rouge indique par Celse, remplace plus lard par des lopiqucs impuis- sants, au nombre desquels Yan-Hehnonl place lesharcngs sales, ne pourrait arreter la maladie qu'aulant qu'il serail appliques tout de suite apres la morsure. Bien que le nouveau caustique, I'acide sul- l^ijrique, paraisse plus propre que le fer a poursuivrc le venin dans sa marche d'absorption , 11 en sera malheureuscment peul-etre de lui comme du beurre d'aiitimoine dc M. Didiois , on du nitrate acide de mercm'e, par lequel on a voululeremplacer; 11 faudratou- jours que le remede arrive au moment de rinoculalion , ct le plus souvent cela est lout a fait impossible. Les spccifiqucs contre la rage sont tres-nombrcux , a ne consultcr que les annates dc lame- , decine, mais la pratique journallere nous revcle I'lmpuissance ab- solue de tous ces remcdes. Nous sommes hcureux de voir qu'une methodc preservative mcilleure succede a une. autre qui n'avait souvent pas reussi ; mais nous aimerions bien mieux qu'une etude chimique et physique complete du virus rabien vint nous metlre sur la vole d'un trailement rationncl et facilement applicable. Un fait consolanl, c'est que vmgt-trois personnes mordues par la louve enragee ont 6tc prdservees de I'hydrophobie par le proced6 de M. Chabanou; tandis que d'autres personnes egalement at- teinles'par le meme animal, mais qui n'avaienl pas etc soumises iiison trailement, ont fatalement succombe. ■'.*.' — Le pere Secchi qui craignait, d'apres le recit de quelqucs jour- naux, que M. Arago n'eut cte offense de I'apparition subite, et par rintcrmediaire de M. Fayc, de ses observations sur la distribution dc la chaleur a la surface du soleil , lui a adresse la letlre suivante : « Comme pcrsonne mieux que moi n'cst dispose a reconnaitre combien notre Observatoire doit ci vos attentions , je crois de mon devoir de vous declarer quelle est la vc^rite.... Je ne savais rien des preparatifs qui avaient ot6 fails h. I'Observatoire de Paris pour COSMOS. 225 rcaliscr vos savantes previsions. Si jc les eusse connus , je n'aurais pas manqu(5 de vous demander la permission de publier mes tra- Taux ou du moins c'cst a vous que j'aurais adresse ma lellre. En parcourant autrefois les comptes rendus , j'avais vu que vous vous kez occupe de la photomclrie solaire, et j'abandonnai ce cole de la question , descsperant de pouvoir faire sur cela mieux que vous. .. J'eus tort, sans doute, de ne pas faire une mention loute specia e de vos travaux ; mais vous me pardonnerez cet oubli, a cause de la redaction prccipitee d'une letlre dans laquelle j'ai neglige plusieurs autrcs details interessants.... J'avoue que mes ulees sont bien pos- terieures aux votres.... Pour ce qui regarde la nccessite, dont vous parlez, de rcpeter les observations, je conviens avec vous que cettc ndcessite existe. » Cette lettre connrme pleinement ce que nous avons dit, pages 45 et 46 du Cosmos, en rendant compte des belles recherches du pcre Secchi et des observations critiques de M. Arago. A cette occasion , disons au pere Secchi qu'on regrette h Pans que dans la communication necessairement incomplete de ses pre- cieuses observations, il n'ait jamais donne les temperatures au- dessus et au-dessous du centre , que pour un seul grand cercle ou meridien; s'il avail transmis les nombres correspondants a plu- sieurs meridiens pris a droite et a gauche, nombres qu'd possede peut-etre, on aurait ete bien plus vite fixe sur la realite, aujour- d'hui incontestable, nous le croyons, de sa belle decouverte. Si nous ne nous sommes pas fails plus tot I'echo de cette objection ou de ce rec^ret c'est qu'il nous semblait, comme au pere Secchi sans doute, que la' rotation du soleil sur son axe, substituant chaque jour un nouveau grand cercle au cercle de la veille, dispensait de recouru' a des observations laterales. , , . , -L'ordre du jour de la derniere seance de 1 Academic des scien- ces 28 juin, appelait I'election d'un correspondant dans la section de zooloo-ie pour remplir la place devenue vacante par I'elevation re- cente^de M. Tiedemann, au rang d'associ6 etranger. La section avait pr^sente comme candidats : en premiere ligne M. Temminck, a Leyde- en seconde ligne, ex .rquo, et par ordre alphabetique , MM Dana , a Boston ; Dckay , a New-York ; Eschricht , a Copenha- o-ue- Holbrook, h Charleston; Nilsson, a Lund; Nordman, a Odessa; Saai^s, a Berghen; Van Bencden, a Louvain; Waterhouse, a Lon- dres. Quoique la section de zoologie comprenne aussi les anato- mistes, il avait ete convenu qu'on ne prcsenterait cette fois au cnoix de r Academic que des zoologistes. Au premier tour de scrutm M. Temminck, le cdebre ornithologiste, a reuni trente-six sutlrages 226 COSMOS. sur qiiarante-six volants et a 616 proclamd membrc corrcspondant dc rinstifut. Qualrc suffrages sc sonl poiids sur M. Escliriclit; deux siir M. Nordmau; deux sur M. Carus, en dehors dela listc presentee par la section. COURRIER SCIENTIFIQUE. !« Noavelles de France. Anatomieet Puysiologievegetales. '^ccr02ssemen< en diametre des tigesdes vigetaux. — La grande controverse continue toiijours, maiselle est entree dans une phase nouvelle ; phase de respect mutuel, phase de discussion calme, phase de conciliation. Dans la seance du lundiTjuin, M. Gaudichaud a voulu conSrmer par des fails recents la Iheorie des filets descendants, en mettant sous les yeux de ses confre- res deux jeunes branches de fr^ne, qui justifient, dit-il, toutes ses assertions sur raccroissement en diametre des tiges. Le 15 avril, il a fait sur I'une dix decor- tications, sur I'autre sept; il les a coupees le 18 mai; or, tout homme qui les examinera, reconnaitra , dit-il, 1° les vaisseaux verlicaux qui existaient deja au moment des decortications ; 2° les vaisseaux radiculaires des bourgeons isoles , dont les superieurs, qui coulent, pour ainsi dire, de ces bourgeons, comme des torrents de liquide , remontent souvent de 6 a 10 millimetres au-dessus de leur point de depart, avant de se courber en s'arrondissant pour prendre leur direc- tion descendante naturelle ; 3° la tendance qu'ont les filets radiculaires a s'^pa- nouir, a s'isoler, a s'eloigner les uns des autres pour s'etendre, de maniere a couvrir les filets verticaux prec^demment formes , et a envelopper la portion de tige sur laquelle ils op^rent leur decurrence ; 4° les tours , les detours et sinuo- sites qu'ils forment a leur base, pour essayer de franchir I'obstacle oppose; S" les amas de tissus vasculaires irr^guliers, et en quelque sorte bulleux ou va- riqueux, qui se produisent a la base des vaisseaux, sur les portions de tige mu- Dies de bourgeons comme sur celles qui en sont privies, et sur lesquelles les vaisseaux anciens , ceux qui existaient deja sur toute I'dtendue des tiges au mo- ment ou Ton a fait les premieres decortications, sont restes vivants, et n'ont pas cesse de fonctionner pour leur Elongation descendante. Qui aurait pu douter un instant qu'en presentant ces fails a TAcad^mie M. Gaudichaud voulait demontrer I'existence de filets rdeilement descendants; cependant il n'en est rien , et nous avouerons qu'a ce point du ddbat, les bras nous sont tomb^s , notre surprise a etE extreme, ficoulons M. Gaudichaud : « Le rapport dit encore que toutes les modifications du lissu Elementaire des vegetaux se ferment dans la place meme ou on les observe.... Nous n'avons jamais dit le contraire. Si nous avons fait descendre les vaisseaux radiculaires des rameaux sur les branches, des branches sur les tiges, et des tiges sur les racines, c'etait COSMOS. 227 sans songer le moins du monde a faire marcher les utricules autrement que pour leur elongation individuelle.... Nous avons nomme ces vaisseaux descendants, parce qu'ils se forment du sommet a la base des arbres , mais nous n'avons ja- mais eu la pensee de faire promener les utricules qui les composent des bran- ches aux racines : on peut nous preter desid^es absurdes, mais nous les repous- sons. » Nous verrons bienlot le parti que MM. Brongniart et Jussieu ont tire de cette concession inattendue et vraiment incroyable ; M. Gaudichaud abandonne evidemment la doctrine de du Petit-Thouars. Craignant un autre reproche , il se hate aussi de reconnaitre que la seve , suivant lui le principe nutrilif par excel- lence, passe, avant d'arriver aux feuilles, par toules les parties des tiges, des branches et des rameaux; et que loutes les parties aeiiennes , surtoul les feuil- les, puisent dans I'atmosphere par absorption et par respiration une grande quan- tite d'humidite, qui se transmet avec facilite des feuilles aux tiges et aux raci- nes. (C. /{., XXXIV, p. 857.) Mais arrivons a la seance du 21 juin , M. Gaudichaud aborde enfin le verita- ble objet du d^bat, le fait nouveau , signale par M. Trecul , sur le Nyssa angu- lisans. « On a enleve une longue bande circulaire d'ecorce sur un arbre , et il a suinle, sur divers points de la surface ligneuse, fraichement mise a nu, un fluide gelatineux, une sorte de lymphe plastique , qui a fini par s'organiserentierement, et par se solidifier a la surface en croiite corticale. Le fluide gelatineux qui sort ainsi des arbres ^corces, est-il du cambium ? Ce cambium forme-t-il du tissu ge- nerateur? Ce tissu generateur, en se transformant , produit-il des vaisseaux? Voila toute la question. » Non , ce n'est pas la la question; la question c'estque sur le tronc decortique du Nyssa angulisans un tissu ligneux s'est organise en- tierement sur place, sans aucune intervention des Glets ou vaisseaux descen- dants. Or, M. Gaudichaud, qu'on croirait embarrasso par I'objection, n'ose ni af- firmer directement que les filets descendants sont intervenus, ni accorder que !e tissu ligneux s'est organise sans leur intervention. II cherche un biais, un ac- commodement.... II dit: « Pourquoi les tissus vascuiaires sous-jacents, lesquels, preserves de Taction directe des agents exterieurs, continuent de vivre, de fonc- tionner et de s'allonger , n'enverraient-ils pas dans les masses gelatineuses qui ont suinte de la tige quelques-unes de leurs ramifications, qui, tout en obeissant a la loi generale dedescension, peuvent prendre des directions laterales et mo- mentanement ascendantes ? » Puis, pour conSrmer cette interpretation, M. Gau- dichaud reporte les souvenirs des commissaires sur une des plaques de nouvelle formation du Nyssa, dont M. Trecul lui-meme a dit : « Le dcveloppement li- gneux qui s'est effectue parait emaner horizontalement du tissu ligneux de la tige, de la surface duquel il rayonne ensuite dans tous les sens, a droite et a gauche. » « Done, conclut M. Gaudichaud, a la place du tissu generateur, qui a ete decrit par M. Trecul , et verifie par MM. les commissaires, il n'y a , et nous n'avons trouve qu'un plexus ligneux considerable , forme par une penetration et un developpement anormaux des filets ligneux et verticaux de la tige dans I'e- panchement gelatineux ; done, le fait offert par le Nyssa est simple et nalurel, et loin d'infirmer les principes que nous defendons, il vient au contraire les confir- mer par une preuve e vidente . » Nous avons bien certainement donne a I'argumen- 228 COSMOS. talion de M. Gaudichaud plus de clarte et de force qu'elle n'en a dans les comp- tes rendus, et nous la croyons suffisante. Le tissu ligneux , forme sur le tronc d^cortique du Ni/ssa est evidemment un tissu anormal, provenant, non pas, il est vrai , de Glets descendants nouveaux , mais d'une expansion , d'une penetra- tion avec allongement des filets verticaux anciens , et par consequent il est im- possible d'apporter cette formation en preuve de Torganisation sur place, et sans I'intervention des filets descendants, d'un tissu ligneux normal. Les conimissai- res se sont done tromp^s , et le fait observe par M. Trecul n'avait pas du tout la portee qu'ils lui ont attribute. ficoutons maintenant M. Adolphe Brongniart; sa note ou plut6t sa lecon de physiologie veg^tale est ecrite avec une clarte et une precision vraiment remar- quables. Alors meme que le debat n'aurait abouti qu'a amener cette exposition si lucide des theories de I'^cole qui a trouv^ dans M. Gaudichaud un si rude ad- versaire , il faudrait le proclamer grandement utile. M. Brongniart , avec une noble fierte et une sainte indignation, declare d'a- bord que si les commissaires combattent les opinions de M. Gaudichaud, ce n'est pas par une routine aveugle, mais par une conviction sincere, basee surl'^tude des travaux des anatomistes les plus distingu^s des temps modernes, et sur leurs propres observations. II lui semble profondement injuste que M. Gaudichaud ose accuser tous les savants contemporains d'etre dans I'erreur, et d'y persister presque volontairement,afindepervertir et d'egarer la jeunessede nos ecoles.... Puis il entre en mati^re. « Pour les premiers auteurs qui ont employe ce nom, le cambium etait une couche d'un liquide mucilagineux, interpose entre I'ecorce et le bois. Des obser- vations microscopiques d^hcates ont prouve depuis que de jeunes tissus a pa- rois molles et transparentes, penetr^s et pour ainsi dire baignes dans un liquide abondantr formaient la zone du cambium. Cette couche mince de jeunes tissus moux et gelatineux a recu le nom nouveau de couche generatrice, le cambium n'est plus que le liquide nourricier qui baigne ces jeunes tissus. « Quelle est I'origine de cette couche generatrice, ou de ces jeunes tissus qui, a mesure qu'ils se roproduisent, se transforment en tissu cortical, et en jeune bois ou aubier bien caracterises? Doivent-ils leur origine directement aux bour- geons etaux feuilles? En proviennent-ils par I'elongation successive des elements qui constituent les bourgeons? Sont-ils, en un mot, des fibres radiculaires des bourgeons, comme ledisait duPetit-Thouars; des fibres radiculaires des phytons ou merithalles, comme I'affirme M. Gaudichaud, qui s'allongeraient successive- ment entre I'ecorce et le bois pour former les nouvelles couches de ces tissus? Ou bien ces jeunes tissus se forment-ils dans le point mSme qu'ils occupent, sans exiger une continuite organique avec les tissus analogues du bourgeon et des feuilles? Sont-ils crees par les tissus preexistants sur le m^me point, et par les liquides qui y affluent, sans elre la continuation necessaire d'autres fibres provenant des bourgeons? Telle nous a paru etre la question a r^soudre pour decider entre les deux theories, qui peuvent encore se resumer ainsi : les bour- geons, les rameaus et les feuilles produisent-ils les fibres et les vaisseaux du bois et de I'ecorce, ou bien eiaborent-ils seulement le fluide nourricier, ou s^ve COSMOS. 229 descendante qui doit alimenter ces tissus? M. Gaudichaud croit r^soudre la question en faveur de la theorie des phylons, en montrant ia continuile des vaisseaux du bois dans les jeunes rameaux et dans les couches ligneuses des tiges ou des branches sur lesquels lis naissent. Ce fait, nous ne I'ayons jamais nie ; mais il ne prouve rien quant au mode de formation de ces vaisseaux.... II n'en resulfe pas necessairement que ces vaisseaux se soient formes successive- ment de haut en bas.... II y a des cas oii certainement des portions de vais- seaux se forment independamment et s'abouchent ensuite les uns avec les autres. L'observation des decortications de portions de tiges , portant des bourgeons isol6s, et dans iesquelles les vaisseaux et les Gbres ligneuses paraissent irradier de la base du rameau, form4 par Telongation du bourgeon et couvrir toute la branche sur laquelle il est ne, parait a M. Gaudichaud une preuve bien plus 6vidente de leur mode de formation.... Mais ces preparations prouvent seule- u.cnt que les nouveaux tissus se forment sous I'iufluence des sues nourriciers qui leur arrivent des bourgeons..., que la transformation des fibres ou cellules allong^es en vaisseaux a lieu dans des directions determinees par la direction des courants de seve qui y affluent. Les faits peuvent done egalement s'expli- quer dans Tune et dans I'autre theorie, et ne sont pas decisifs entre elles. .. Les noyaux ligneux d^veloppfe isol(5ment dans I'ecorce, et la formation de couches ligneuses sur des souches de sapins, faits signales par M. Dutrochet, me parais- saient ne pouvoir s'expliquer dans la theorie des Blets descendants et des phytons qu'en lui faisant subir une veritable metamorphose et la ramenant a une forme qui ne differerait plus que par des mots, des opinions que nous sou- tenons.... J'ai fait il y a plus de vingt ans, sur des arbres du pare de la manu- facture de Sevres, des experiences qui ne m'avaient laisse aucun doute sur la formation du bois d'une maniere independante des fibres provenant des bour- geons; mais elles ne m'avaient pas paru assez completes pour les publier.... Le memoire de M. Tri^cul etait done pour moi tout a fait conforme a des faits que j'avais deja observes... Les observations sur Iesquelles il reposait etaient nettes et bien etudiees; elles nous paraissaientincompaliblesavec la theorie soutenue parM. Gaudichaud, et nous n'avons pas du hesiter a exprimer notre conviction a cet egard, car notre honorable confrere nous avait habitues a combattre vive- mentl'erreurpartout oil I'on est persuade qu'elleexiste.... Comment comprendre qu'une couche de bois parfait, de quelques millimetres d'epaisseur, formant une plaque isolee, ne communiquant avec le reste de la tige que par la partie vi- vante du bois sur laquelle elle est appliquee, puisse etre formee par des fibres ligneuses provenant des bourgeons de la partie superieure de I'arbre?... II n'ya aucune continuity entre le nouveau bois et celui qui s'est forme la meme annee au-dessus de la decortication dont il devrait etre une continuation , un develop- pement descendant, suivant la theorie que nouscombattons.... Ces excroissances ligneuses ont ete, dit-on, souvent observees, le fait n'est pas nouveau ; mais s'il est connu, comment n'a-t-il pas ete explique. Lorsque j'en parlais a M. Gaudi- chaud, je lui ai toujours entendu soutenir que ces excroissances etaient pure- mentcelluleuses et d^pourvues de tissu ligneux et ceilulaire. Un fait de ce genre ayant et6 observe par du Pelil-Thouars ; il s'exprima ainsi : « Par cette obser- 230 COSMOS. « vation, une des bases surlesquellesj'ai fait reposerma th^orie se trouvait forte- « meiit ^branloe; car je me suis cru autoris6 par tout ce que j'ai vu jusqu'a pre- « sent a prononcer qii'il n'y avail pas une fibre ligneuse ou corticale dans le tronc « d'un arbre qui ne I'lU le produit d'un bourgeon ; organis^e par lui at pour lui, « elie ^tablit la communication avec les racines.... » Voici comment du Petit- Thouars explique le phenomene : « Les fibres superieures se prolongeaient aussi c loin qu'elles pouvaient en bas ; arrivees au bord de la plaie, elles y causaient le « bourrelet. L'inlention organisatrice plongeait sous la surface dessechee, revfi- a tait de la vie toutes les fibres qui se trouvaient sur son passage jusqu'au bord « inferieur de la plaie ; se relevant alors, elles formaientle bourrelet inferieur et « finissaient pargagnerles racines. Si sur leur chemin queique cause parliculiere a permettait au cambium de venir jusque-la, les fibres en profitaient, la formation « du bois et de I'ecorce avait ainsi lieu sur la plaie.... » Une theorie qui est obli- gee d'avoir recours a une intention organisatrice, me parait en effet bien ebran- l^el Pourquoi ne pas adniettre que celte intention organisatrice, c'est le lluide organisateur, la seve descendanle? mais alors pourquoi ne pas admeltre aussi que le fluide organisateur, qui forme le bois au-dessous de la plaie annulaire, ne le forme pas aussi bien au-dessus et dans tous les autres cas? Pourquoi , en un mot , ne pas admettre avec I'immense majorite des botanistes, anciens et actuels, que ce sent les lluides elabores par les feuilles et les autres parties vertes des plantes, constituant la seve descendante, et souvent aussi melangees a la seve ascendante, qui sont la cause du developpement des nouveaux tissus et des di- vers organes, toutes les fois que ces fluides viennent penetrer des tissus jeunes et encore susceplibles de s'accroitre et de se multiplier ? » Avec un peu de bonne volonte, M. Brongniart aurait pu ne pas relever I'in- tention organisatrice de Dupetit-Thouars; on voit, en effet, tr6s-clairement par ie contexte que ce sont reellement les filets superieurs anciens qu'il fait penetrer dans le bois non completement desseche , et que son explication ne differe pas de celle de M. Gaudichaud, laquelle n'est pas, comme nous I'avons dit, denuee de fondement. M. de Jussieu a aussi pris la parole. « M. Gaudichaud, dit-il, reconnait des fluides seveux ascendants, et des fluides organisateurs descendants, aux depens desquels les tissus se ferment sur place. II parle ailleurs des utri- cules qui composent les vaisseaux descendants. Sauf queique disparite de langage, il sembie y avoir un assez grand accord entre les theories. » Et, en efl"et, des que M. Gaudichaud admet, comme il I'a fait solennellement, qu'il ne s'est servi du mot descendant que par metaphore et pour abreger; que les utricules reellement ne descendent pas; qu'elles se developpent a la place m6me qu'elles occupent; que les vaisseaux par consequent se ferment par I'union bout a bout d'utricules dispos^es en serie; il abjure formellement la theorie de du Petit-Thouars , et se range a la theorie defendue par ses adver- saires. Pourquoi alors tant de colcres IM.de Jussieu , dans une note , raconte , avec une satisfaction queique peu maligne, un croc-en-jambe donne par lui a M. Gaudichaud. II avait reussi a lui faire avouer que lorsqu'il avait dit que les tissus vasculaires a trachees deroulees se constituent de haut en bas , c'etait COSMOS. 231 par un lapsus calami, et qu'il aurait dii ecrire de bas en haul; or, c'etait bien de haut en bas qu'il fallait dire. M. Gaudichaud est tombe dans le piege ; il saura, sans aucun doute, s'en degager. Mais tout est fini s'il ne retracte pas la concession qu'il a faite de la non-descendance reelle des utricules ou filets. Cette concession est una veritable apostasie, et les partisans de du Pelit-Thouars seraient en droit de I'excommunier. {C. R., XXXIV, p. 926, 933, 940. ) BoTANiQCE. — M. Payer a pr^sente, dans les seances des 14 et 21 juin , deux longs Memoires sur I'organogonie des Tiliacees et des Maivacees , d'une part; des Berberidees et des Menisperm^es de I'autre. II nous est absolument impossible et de les reproduire dans leur int^grite, et de les analyser; mais ils seront sans doute I'objet d'un rapport que nous publierons avec bonheur. Nous dirons, en attendant, que I'habile botaniste a mieux observe que ses devanciers la formation de divers organes. M. Duchartre, par exemple, voulait : 1° que le calice des Maivacees se presentat d'abord sous forme de bourrelets ; 2° que I'apparition de I'androc^e eut lieu avant celle des petales, et que Tandrocee se de- veloppfit d'abord par cinq paires de mamelons staminaux. Or, il resulte de toutes les etudes de M. Payer, que le calice des Maivacees apparait d'abord sous forme de cinq mamelons parfaitement s^pares; que I'apparition des petales precede celle de I'androcee; que revolution des etamines est centripete et non centri- fuge. {C. R., XXXIV, p. 908, 943.) Meteorologie. — Par quatre annces d'observations sur les temperatures re- latives de Fair et des eaux du Loir, M. Renou deVend6me a mis en evidence ce fait inattendu, que la temperature moyenne du Loir depasse celle de I'air de 2", 24. En 1851 aussi la variation diurne a 6ie de 8", 03 pour I'air, et de 0",85 seulement pour la riviere. Le Loir a dans la campagne une largeur de de 35 a 40 metres et une profondeur de 3 a 5 metres; il est tr^s-encaisse et tres- lent a cause des nombreux moulins qu'il fait tourner; ses eaux sont generalement limpides etson niveau tres-peu variable. On pouvait croire que sa haute tempe- rature tenait a ces conditions particuli^res. Mais il resulte des observations faites simultanement sur la Loire , a Tours , par M. Oscar Valin , sur la demands de M. Renou, que la Loire, large de 400 metres, profonde de 2 metres, courant assez rapidementsur un lit de sable et de cailloux roules, offre le meme ph^no- m^ne que le Loir, quoique a un degre un peu moindre; les variations diurnes ou accidentelles y sont aussi notablement plus grandes. Nous nous abstiendrons de discuter aujourd'hui le fait curieux constate par M. Renou , parce que nous Savons que M. Babinet doit en donner I'explication dans une des plus prochaines seances de I'Academie. {C. R., XXXIV, p. 914.) Chimie. — M. Girard a decouvert plusieurs arsenitesnouveaux, qu'il designe sous les noms d'arsenites sesquibasiques de nickel, de cobalt et d'argent. Le premier se prepare en versant rapidement de I'arsenite de potasse dans du chlorure de nickel dissous dans un tres-grand exces de ch'.orhydrate d'ammo- niaque; il se precipile sous forme d'un corps blanc, leg6rement verdatre ; chauffe au contact de I'air, il perd d'abord son eau et devient vert un peu plus fonce. II contient : oxyde de nickel, 36,4; acide arsenieux, 63,6; sa formule est (AsO')=(NiO)VjHO. 232 COSMOS. Le second arsenite s'oblient par la substitution du chlorure de cobalt au chlorure de nickel. II est d'un rose tendre qui se fonce par ragglomeralion , et plus encore sous Taction de la chaleur. II contient : oxyde de cobalt, 36,2; acide ars(5nieux, 63,7; sa formule est (AsO'')''(CoO)'4HO. Tour obtenir le troisieme arsenite, on verse goutte a goutte de I'arscnite de potasse mele a un grand exc6s de nitrate d'ammoniaque ; on voit se deposer un prccipite d'arst^nite d'argent sesquibasique ; ce sel noircit a la lumiere et se dissout dans I'ammoniaque. II contient : acide ars^nieux, 36,4; oxyde d'ar- gent, 63,7; sa formule est (AsO'^)''(AgO)"iHO. Chauffes, ces trois sels donnent un sublime d'acide arsenieux , et laissent pour residu : le premier, une poudre jaune infusible; le second , une poudre d'un beau bleu qui se fond et se prend par le refroidissement en une masse cristalline; le troisieme, une poudre d'un beau rouge fusible, et qui semble etre I'arseniate. {C. R., XXXIV, p. 918.) Embryogenie. — M. Despine, medecin des eaux d'Aix, en Savoie, a soumis a rinfluence des eaux thermales un certain nombre d'ceufs de poule, dans le but de savoir si la chaleur naturelle de ces eaux etait suflisante pour provpquer le developpement de I'embryon. II r^sulte de ses experiences 1" que la chaleur des eaux sulfureuses d'Aix est plus que suffisante pour provoquer le developpement du poulet dans I'cEuf ; mais 2° que la presence de I'acide sulfhydrique dans ces memes eaux cause la mort de I'embryon , soit directement, soit par la transfor- mation qu'il opere dans la coquille de I'oeuf en la rendant beaucoup plus dure. M. Despine se propose de reprendre ces experiences avec un appareil qui le mette a I'abri de ces inconvenients. [C. R., XXXIV, p. 921.) BoTANiQUE. — Multiplication des charas ou charaques par division. NuUe part , excepte peut-etre a Mantoue , on n'a pu constater encore la presence des graines du chara sielligera; on devait done penser que la sage et prevoyante nature y a suppled par d'autres organes. Cette plante, en effet, est pourvue de noeuds apparents, reguliers, disposes le long du tube principal, d'abord a c6tes de melon , puis elegamment stelliformes. lis sont formes par une agglomeration de cellules, au nombre quelquefois de quatorze; ces cellules sont remplies de f6cule , ce qui leur donne a I'exterieur la couieur et le poli de I'ivoire. Or, a quoi peuvent servir ces depots amylaces, si ce n'est au developpement d'une nouvelle plante, d'un nouvel individu? Partoutou dans la nature il se forme des ma^asins de fecule , c'est toujours pour fournir a la nutrition d'un embryon ou d'un bourgeon si c'est un tubercule , ou meme d'une jeune pousse si c'est une racine, unbulbcou un rhizome. II n'y aurait done rien d'etrange, rien d'im- possible surtout a ce que les noeuds du chara stelligera jouassent le rdle de bulbilles et reproduisissent une plante semblable a la plante mere. Jusqu'ici ce n'etaient que des conjectures , mais I'observation directe est venue bient6t les confirmer. M. Montague , en effet , a vu une de ces ^toiles detachee du tube central, tombde dans la vase et toute couverte de radicelles nees de sa periphe- rie, et surtout de sa base; elle avait deja produit plusieurs nouveaux tubes entourfe eux-memes , a quelque distance de leur origine, de quelques cellules amylophores. Done, dit M. Montague, les charaques sont aptes , comme les autres plantes pourvues de bulbilles, les liliacees par exemple , et surtout les COSMOS. 233 al^ues, avec lesquelles les charas ont tant de ressemblance , a se propager au- trement que par leurs graines. Un jeune botaniste, M. Ramey, qui a trouv6 recemment pres de Bordeaux le chara stelligera, jusqu'ici tres-rare , ajoule ses observations a celles de M. Montagne. Le 22 novembre dernier, epoque a laquelle les tiges du chara ^taient a peu pres mortes , les etoiles , au contraire , elaient en pleine vegetation ; eiles etaient fixees a la vase au moyen de filaments qui naissaient du noeud inferieur, et qui ne pouvaient etre que des racines; done, les etoiles sont des organes reproducteurs. Quelle singuliere destinee, dit M. Montagne en terminant , que celle de cette modeste familie qui a occupe la sagacite d'une quinzaine des plus habiles natu- raiistes de I'Europe, sans qu'on ait pu tout dire encore. (C. R., XXXIV, p. 898.) CuiMiE. — Nos lecteurs n'ont pas oublie le beau Memoire de M. Gerhardt sur les acides organiques anhydres, et principalement sur I'acide benzo'i'que anhydre, I'acide acetique anhydre, et le chlorure acetique. II resultait de ses recherches qu'il existe entre I'acide acetique hydrate et I'acide acetique anhydre le meme rapport qu'entre I'alcool et I'ether, d'oii il concluait que les acides hydrates monobasiques ne contiennent pas d'eau, comme le veut la theorie dualistique. Pour completer la ressemblance entre I'^ther et les acides anhydres, il fallait avant tout meltre en evidence I'existence et la composition des acides anhydres a deuxgroupes differents. Si, en effet, chaque acide monobasique peut fonction- ner comme, aicool, on doit parvenir a faire avec chacun d'eux des ethers composes. Or, M. Gerhardt vient d'obtenir le benzoate acetique, ou I'acetate benzoique en mettant le chlorure acetique en contact avec le benzoate de sonde desseche. La reaction tres-vive s'accomplitsans qu'on ait besoin de chauffer. Le produit siru- peux lav6 a I'eau et au carbonate de soude donne une huile plus pesante que I'eau, neutre au papier, et d'une agreable odeur de vin d'Espagne. On purifie aisement cette huile de I'eau et des malieres etrangeres en I'agitant avec de I'ether exempt d'alcool, et chassant I'ether par, une douce chaleur. Ce produit a donne a I'analyse -h phT -i ,1-. m C»H»0' = {C''H'0, CWO)0. L'eau bouillante le rend acide, mais pour que la decomposition soit complete, il faut I'intervention des alcalis comme pour les ethers. Soumis a la distillation, il se dedouble exactement vers ISO" en acide acetique anhydre et en acide ben- zoique anhydre; il y a 6videmment double echange entre deux molecules. Le cuminate acetique ou acetate cuminique s'obtient comme I'anhydrite pre- cedent. Recemment prepare, c'est aussi une huile odorante qui presente les memos caracteres que le benzoate acetique ; abandonnee a I'etat humide dans un flacon bouche, elle se rempiit de magnifiques lames d'acide cuminique, qui finissent par I'epaissir au point de donner a la matiere I'aspect et la consistance de I'huile d'olives fi'g^e. La formulede I'huile pure est ^^-'^ ^*- •"' C'«H'*0' = (C^H''0, C'»H«'0)0. Le cuminate benzoique ou benzoate cuminique , huile pesante semblable , a pour formule C'^H'«0^ = (C'H"0, C'»H"0)0. 234 COSMOS. M. Gerhardt continue ses experiences sur les acides bulyrique, valerianique, nitrobenzoique , etc. II appeile en attendant I'attention des chimisles sur une analogie fort rcmarquable , qui exists entre certains composes organiques com- parables au type Eau, et certains autres compares au type Hydrogene, en ela- blissant le parallele suivant : (H, H) hydrogene libra , (H, H)0 eau , (C-H-', H) hydrure d'ethyle, (C41«, 11)0 alcool ; (Cm", C'H")ethyle, (C^H% C»H-)0, ^iher, (C*H'^0, H) aldehyde, (eH'O, 11)0 acide acetique, (C^H'-O, C'lPO) acetyle inconnu , (C^H''0, C*H'0;0 acide acetique anhydre, (G^H^O, CH=) acetone, (C*H'0, CH'^)0 acetate mi5lhylique. Ce parallele permet de predire qu'on obtiendra 1° I'acetyle, et en general les groupes oxygen6s fonctionnant comme I'hydrogene, les radicaux oxyg^nes, en faisant agir les chlorures correspondants sur les aldehydatesm^talliques; 2° les acetones, en faisant agir les dihers chlorhydriques sur les m^mes ald^bydates metalliques. (C. R., XXXIV, p. 902.) 3° IVouTelles d'Ang^leterre. Physique. Lignes de force magnetique, parM. Faraday. — L'illustrephysicien anglais publie dans le Philosophical Magazine sa trenti^me serie de recherches sur I'electricite. Elle se termine au paragraphe 3299; chaque paragraphe a en moyenne vingt lignes , deux paragrapbes ferment une page in-8°; cette longue suite de memoires remplit done deja 1649 pages. Les traduire en francais, les rendre parfaitement intelligibles, faire ressortir tout ce qu'elles contiennent de faits nouveaux, de theories certaines, d'hypolh^ses probables, ce serail rendre bien certainement a la science un immense service, mais ce serait aussi s'im- poser un travail herculeen; les hommes tres-rares qui pourraient I'enlreprendre ne le voudront probablement pas. La derniere s6rie est plus transcendante encore que toutes les autres; les faits avec lesquels on est le plus familiarise ont pris un caractere d'abstraction theorique , qui d^concerte et effraye ; ils sent d'ailleurs exprimes dans une langue toute nouvelle. Ce n'est pas un reproche que nous adressons, tant s'enfaut; M. Faraday agit ainsi dans la conviction intime que la consideration des lignes de forces, effrayante aujourd'hui, jetteraun grand jour sur les raisons inconnues et la nature plus intime d'un grand nombre de ph^ nom^nes. Tout ce que nous pouvons faire, c'est de poser nettement la question. M. Fa- raday part de ce fait que I'action des aimants s'exerce suivant des lignes courbes plus ou moins r^gulieres, prenant leur origineau p61e magnetique et conslituant dans I'espace qu'elles occupent le champ magnetique. La distribution des petits filaments de fer doux jetes sur la feuille de papier qui recouvre un aimant, donne une id^e assez exacte des lignes dent il s'agit : elles ont une direction d^terminee. L'action s'exerce tantot dans un sens, tanlot dans un autre; et les forces qui en ^manent sont constantes pour ua aimant donn6. La presence et les propri^tes des COSMOS. 235 lignes de force magnetique sont mieux mises en evidence encore au moyen d'une petite aiguille aimantee qui se place toujours tangentiellement a la direction de la ligne. Mais M. Faraday a invente un autre moyen d'etude qui fait I'objet de son avant-dernier Memoire. II consiste a faire usage d'un fil metaliique mobile compose de trois parties, Tune axiale, partant de Tun des p6les de I'aimant et se prolongeant le long de I'aimant jusqu'a son milieu; la seconde radiaie, partant perpendiculairementde la seconde extremile de la partie axiale et s'etendant sur toute la largeur de I'aimant ou du systeme de deux aimants juxtaposfe* la troisieme liee a I'extremite dela portion radiaie et revenant au premier point de depart de la partie axiale, apres un circuit plus ou moins long. M. Faraday s'etait arrange de mani^re que ces trois parties du fil , recouvertes de soie et isolees, fussent mobiles ou pussent fourner separement. La premiere devait lui indiquer la nature des lignes de force magnetique dans I'interieur, lelongde I'aimant; la seconde la nature des lignes de force magnetique dans I'interieur perpendi- culairement a I'aimant; la troisieme la nature des lignes de force magnetique en dehors de I'aimant. Ces trois parties, en effet, en tournant et prenant toutes les positions possibles, devaientcouper toutes les lignes de force magnetique, et comme les extr6mit6s de I'ensemble elaient toujours en communication avec un galvanometre tres-sensible, on pouvait apprecier a chaque instant les effets d'in- duction. La presence ou I'absence des courants, leurs intensites mesurees par le galvanometre, devenaient ainsi 1' expression mathematique exacte des lignes de force. Par ce mode d' experimentation eminemment ingenieux ,M. Faraday a reconnu 4" que lorsque la partie exlerieure du fil tourne autour de I'axe de I'aimant d'un certain nombre de degres, dans une direction determinee, la valeur totale du courant d'induction developpe demeure la meme, et independante soit de la ra- pidite plus ou moins grande dumouvement de rotation, soit de la distance plus ou moins grande du fil a I'aimant ou de ses ecarts ; 2° que si, la partie exterieure du fil demeurant fixe, on fait tourner la seconde portion tres-courte appelee ra- diaie, on obtient un courant dont la direction est inverse de celle du courant obtenue dans le premier cas, alors meme que les deux mouvements de revolution se feraient dans le meme sens ; qui a la meme intensite que lui, lorsque les deux angles de rotation sont les m^mes; et qui de plus ne varie pas quand on fait tourner autour de I'axe soit I'aimant seul, soit I'aimant avec la partie radiaie; 3° que si Ton fait tourner a la fois etdu meme nombre de degres la partie externe et la portion radiaie, il n'y a plus de deviation de I'aiguille, parce que les deux courants, qui se developpent simultanement, sont egaux et contraires; 4° enfin, que si la partie radiaie tourne seule autour de I'axe, il y a absence totale de cou- rant; elle n'agit done que comme conducteur, r61e que la matiere de I'aimant pent elle-meme remplir, de sorte qu'on pourrait la supprimer et se contenter de faire aboutir le double fil externe et radial d'un coteau p61e, de I'autre au milieu de I'axe de I'aimant. M. Faraday conclut de ces observations que la force magnetique a une valeur definie; que cette valeur reste la meme pour les memes lignes de force magne- tique, a quelque distance de I'aimant que soient situes les points oil Ton coupe 23G COSMOS. ces lignes, ou le plan dans lequel on les coupe; que la convergence ou la diver- eence des lignes de force, ainsi que I'obliquite des intersections n'a aucune in- fluence sur leur pouvoir d'induclion ; que dans des champs egaux de force niagn6- tique la deviation est proportionnelle au temps ou a la vitesse du mouvement, ou au nombre des lignes de force rencontr^es et couples; que les lignes de force interieures ont aussi une valeur definie parfaitementcgale a celles des lignes ex- terieures, qui n'en sont que la continuation ; que cliaque ligne de force magn6- tique, a quelque distance qu'elle soit de I'aimant, est une courbe fermee, qui en quelques points de son cours traverse I'aimant et vient y chercher ce que Ton peutappeler ses poles; que le courant ou la quantite d'electricite ddveloppee est proportionnelle a la largeur et a I'epaisseur, en un mot a la masse du fil qui ren- contre, dans un temps donno, d'autant plus de lignes de forces que cette masse est plus grande ; que la nature du fil ne produit d'autre effet que celui qui r^sulte de sa plus ou moins grande conductibilite electriquc; que la nature du milieu dans lequel le fil se meut: air, alcool, eau, terebenthine, etc. , n'exerce aucune influence sur les resultats. Quant a la polarite magnetique , M. Faraday entend par ce mot I'etat ou la condition d'actions opposees ou antilli^tiques qui se manifeste aux extr6mit& opposes, ou aux cotes opposes d'une portion limit^e de ligne de force magneti- que ; il pense que cet 6tat ou cette condition ne se manifeste pas dans tous les cas avec certitude et d'une maniere absoluepar Taltraclion ou par la repulsion, parce que I'attraction ou la repulsion sont modifiees, et quelquefois memo chan- gees I'une dans I'autre par des circonstances accidentelles. Ainsi, parexemple, une solution de sulfate de fer est altiree par le p61e magnetique , si elle est en- touree d'une solution moins magnetique qu'elle , et repoussee si elle est entouree d'une solution plus fortement magnetique. Mais la direction des lignes de force passant dans la solution de sulfate et les solutions qui I'entourent restant les m6mes dans les deux cas , la polarite reste done aussi la meme , et elle est toiijours parfaitement mise en evidence par le fil mobile. M. Faraday a appliqu^. cette proprieto du fil mobile a I'etude des courants qui se developpent dans des disques de difT^rents metaux , que I'on fait tourner en- tre les poles d'un aimant en fer a cheval : il a reconnu que les lignes de force magnetique qui traversent ces metaux, et la polarite par consequent, restent les memes, soit que les disques soient paramagnetiques ou magn^tiquesa la fa- con du fer , soit qu'ils soient diamagn6tiqucs ou magnetiques a la facon du bismuth. Le fer , le bismuth, le cuivre, I'etain, le plomb donnent les m^mes resultats. Le long memoire insert dansla dernierelivraison du Philosophical magazine, n'ajoutel ces belles experiences que des considerations et des developpements th(5oriques. Le but de M. Faraday en I'toivant a ete de montrer que la conside- ration des lignes de forces magnetiques jetait un nouveau jour sur I'ensemble de ses recherches relatives a I'electricite , qu'elle lui permettait de mieux enchai- ner et de gen^raliser les resultats auxquels il etait successivement parvenu. En terminant, il pose cependant une question qui doit nous arr^ter quelques instants. Les lignes de force magnetique ont-elles une existence physique? COSMOS. 237 Nous voyons qu'en chacun de leurs points, la poussiere de limaille de fer est at- tiree , que I'aiguille aimantee se dirige tangentiellement , qu'il y a courant d'in- duclion produit dans le fil mobile ; mais ne faut-il pas aller plus loin ? En outre de ces effets, n'y a-t-il pas quelque entite physique r(§elle; les lignes de force sont-elles seulement une serie de points geometriques oil {'action de I'aimant s'exerce d'une maniere d^terminee ; a cette ligne geometrique et de pure abstrac- tion, ne faut-ii pas substiluer une ligne physique ou concrete; n'y a-t-il pas tension de la matiere eth^ree, du fluide ou des fluides magnetiques, ou courant de la matiere etheree et des fluides magnetiques, etc., etc., une modification substantielle , en un mot, de quelque agent physique? M. Faraday se prononce resolument pour I'afSrmative; sans cela , dit-il , il y aurait effet sans cause , et jeme verrais dans la necessite de laisser completement inexpliques, sans lien d'ensemble , sans theorie , sans hypothese , sans meme supposition vague de leur origine, une foule de faits anciens et nouveaux. Ainsi le grand physicien admet comme des realites incontestables les lignes physiques de force : leur existence il I'avoue, n'est pas encore demontree invariablement pour tous , mais il espere la demontrer bientot , et les mettre partout en evidence , dans I'electricite la lu- mi6re, la chaleur, la pesanteur meme; partout enfin oil il y a action sur la ma- tiere en general. [Phil, magaz., juin, p. 402.) Physique PHysioLOGiQUE. Moijen de [aire revivre des impressions dormantes de la retine, par M. Gkove. — Quand, apres avoir regarde fixement un objet lu- mineux, dont I'eclat puisse etre support6 par I'ceil , sans qu'il soit blesse , on re- porte le regard sur un corps obscur ou un espace sombre , tout le monde salt que I'on revolt une image de I'objet eclaire. Si , lorsque cette image est complete- ment effacee, on fait passer entre le fond obscur et I'oeil une substance blanche une feuille de papier , par example , I'image eteinte de I'objet eclaire, renaitra tout a coup , et on peut la faire revivre ainsi indefiniment. M. Grove croit que cette observation est nouvelle, du moins il ne I'a trouv^e consignee nulle part. L'interposition de la feuille de papier, frappee par la lumiere , ferait meme ap- paraitre la premiere image de I'objet eclaire, si I'impression recue par I'oeil n'a- vait pas ete assez vive. Si on renverse I'experience, etqu'apros avoir regarde I'objet eclaire, on reporte les yeux sur la feuille de papier blanc, on verra une image sombre de I'objet ; et pour la faire revivre apres qu'elle se sera effacee, il suffira de faire passer entre I'oeil et le papier blanc une substance obscure, placee de maniere a reflechir la plus petite quantite possible de lumiere. Le nombre des images que Ton peut ainsi faire revivre , lorsque Ton est un peu exerce a ce genre d'experiences , est vraiment etonnant ; les sensations successives peuvent se prolonger pendant un temps tres-long. Ces faits s'expliquent par un effet de contraste entre les portions plus ebran- lees et moins ebranli^es de la retine. Dans la premiere experience, le papier blanc amortit ou ^mousse plus la portion de la retine qui est restee sensible que celle qui a ete rendue insensible par la vivacite de la premiere impression ; et e noir qui revient apres I'enlevement de la feuille de papier produit sur la pre-' miere portion un plus grand effet de contraste ; ce qui restera dans I'oeil, c'est done du blanc au milieu du noir, ou une nouvelle image de I'objet eclaire. Dans 238 COSMOS. la seconde experience, le noir interpose rend plus sensible la portion de la re- tine moins affectee, celle qui a recii primiti vement I'impression de I'objet obscur ; quand done I'inlerposition du noir cessera, la portion de la retine qu'il a rendue plus sensible sera plus impressionn^e par le papier blanc ; on verra done du noir au sein du blanc, ou une nouvelle image de I'objet noir. [Phil, mag., juin, p. 436.) HiSTOiRE DES Sciences. — Leprofesseur de Morgan d^montre par une s6rie de raisonnementsetde faits qui nous paraissenttres-concluants, que le cclebreecrit insere dansles Transactions philosophiques del 71 4-1 5, sous ce litre : An account of the book entitled " Commercium epistoliccm, " ou notes sur la correspon- dance entre Leibnitz et Newton, est veritablement I'oeuvre de Newton lui- meme, et non pas de Keill, comme on le croit gen^ralement en Angleterre. [Phil, mag., p. 440.) — M. Robert Grant vient de publier, sous le titre d'Histoire de rAstronomie physique, depuis les premiers ages jusqu'au milieu du xix° siecle , 1 volume in-8 de 635 pages, qui a produit en Angleterre une grande sensation. II aurait pris noblement sa place parmi les ouvrages chefs-d'oeuvre ou modeles {standard- works) ; d'abord parce qu'il comble un grand vide, et surtout parce que son au- teur, homme de science profonde et de jugement , a eu le bon esprit de recourir directement aux sources primitives et originales. II ne se passionne pour aucun corps ni pour aucune theorie ; dans les grandes discussions, comme cellos qui di- viserent Newton et Flamsteed , ou celle que suscita la decouverte de la planete Neptune, il raisonne et raconte avec une si grande impartialite, qu'il inspire une conGance absolue, et qu'on ne sent plus la necessit6 ni le desir de verifier les faits par soi-meme. — M. Albany Hancock a public un memoire tres-complet sur ranatomie de la Doris. — Le celebre geologue sir Charles Lyell a fait a I'institution royale une lecon pleine d'interet sur le banc de petits cailloux {pebble -bed) de Blackhead, et cer- tains phenomenes geologiques qui se sont produits dans le voisinage de Londres. Le sable ou le banc de petits cailloux contient une grande quantite de fossiles d'eau douce, et surtout des cyrena, et M. Lyell en conclut que sur ce point il y a eu aftluence d'eau douce ou de rivifere pendant toute la p^riode eocene; d'un au- tre cote, la presence d'huitres et autres coquillages marins prouve que la mer y a fait des invasions accidentelles. Le depot de ces sables serait de formation tres- ancienne ; il aurait eu lieu un tr^s-grand nombre de siecles avant la periode correspondante a 1' apparition de Thomme; il serait anterieur a la formation des gigantesques chaines des Alpes, puisque Ton retrouve les nummulites deposees pendant la periode eocene , jusqu'a 10 000 pieds de hauteur sur les Alpes suis- ses ; il serait anterieur a plus forte raison aux formations volcaniques du centre de la France et de la Sicile, puisque dans les lits de cailloux qui forment la base des terrains tertiaires d'Auvergne , du Cantal et du Velay, on ne trouve aucun caillou d'origine volcanique. — M. Clouslon dt'crit avec beaucoup de details une colonne de lumi^re perpe n. diculaire qu'il vit chaque jour pendant le mois d'avril dernier , au lever et au COSMOS. 239 coucher du soleil, sans soupconner que le phenomene observe par lui est la lu- mifere zodiacale. Le redacteur du Philosophical magazine a commis la meme in- advertance , et presente I'observation de M. Clouston comme entierement nou- velie. Nous rappellerons bientot a nos lecteurs ce que c'est que la lumiere zodiacale. 3° IWoaTelles d'Ameriqae. ■ Physique molecclaire. Permeabilite des metaux pour le mercure. Le ce- l6bre chimiste anglais Daniel avail observe 1 " que des barres de plotnb, d'etain de zinc, d'or et d'argent se laissaient penutrer par le mercure dans lequel elles etaient plongees ; 2° que les quatre premiers metaux en se combinant avec le mercure a la temperature ordinaire donnaient naissance a des amalgames cris- tallises, et qu'il en etait de m^me de I'argent. Le professeur Henry avait remar- que, en outre, que si apres avoir recourbe un cylindre de plomb en forme de siphon, on faisait plonger la petite branche dans du mercure, le mercure mon- tait dans le cylindre de plomb ets'ecouiait par Textremite de la longue branche, comme I'eau s'ecoule d'un siphon creux en verre. Le professeur Hereford de Haward a repris ces curieuses experiences, et il est arrive aux rcsultats suivants : 1° La Vitesse do penetration du mercure dans le plomb, diminue en proeres- sion geometrique quand la longueur de la barre saturee croit en progression arithmetique ; elle est plus grande et le mercure s'eleve a une plus grande hau- teur dans le plomb fondu que dans le plomb elire ou lamino ; elle aut'mente quand la pesanteur aide la penetration, c'est-a-dire quand le mercure est en haut et le plomb en bas; 2° Le mercure qui a ete aspire par un cylindre de plomb, contient en disso- lution du plomb pris dans la masse du cylindre; et il est encore apte a etre ab- sorbe par d'autres cylindres; 3° La pesanteur specifique du plomb sature de mercure est plus grande que celle du plomb ordinaire, il est extr^mement cassant, et contient sur 100 parties 96,45 de plomb , 3,53 de mercure; il perd a I'air 2,75 de mercure, et n'en con- serve que 0,80; il a repris presque sa texture primitive, sa surface seulement se recouvre d'amalgame cristallise, et le mercure cesse de se s^parer; cet amalgame contient 2,50 de plomb sur (00 parties. Le plomb sature maintenu longtemps en contact avec le mercure, prend une texture cristalline et se cre- vasse ; 4° L'etain sature de mercure devient plus pesant, il se fendille, et les nom- breuses Assures montrent des angles et des surfaces indiquant une veritable crislallisation. La vitesse de penetration est moindre pour retain que pour le plomb, mais elle reste uniforme, tandis qu'elle diminue rapidement dans le plomb. La cristaliisation empeche le cylindre d'etain d'agir longtemps comme siphon. L'amalgame cristallise d'etain est forme de 1 atome de mercure, et de 8 atomes d'etain. L'amalgame liquide contient 1,55 d'etain; 98,45 de mercure; 240 COSMOS. 5° Le mercuro penetre Tor ol I'argent, mais trte-lentement : il dissout le zinc et le cadmium ; il ne penetre pas a la temperature ordinaire le fer, le platine, le palladium, le cuivre et le bronze. Pour donner une id(5e de la vilesse de pene- tration du mercure, nous dirons que dans un tube creux de glomb d'un quart de pouce de diametre, il a parcouruTO millimetres en 2iheures, 177 millimetres en 234 jours. [Journal de Silliman, mai, p. 305.) Physique ArPLiQUEE..P/ia?-es. — II rcsulte d'un rapport, redigo par une com- mission d'ofQciers, sous la pr^sidence du secretaire de la trcsorerie, M. Thomas Corwin, que le service des phares en Amerique, est dans un etat deplorable, et qu'on a depense des sommes enormes pour arriver aux plus tristes resultals. Les tours construites il y a peu d'annees, sont deja presque en mines, les appareils d'eclaira^e, imparfaits au dela de ce qu'on peut imaginer, fonctionnent mal; les appareils reflecteurs laissent plus a dcsirer encore ; I'inferiorite de I'ensemble des phares americains, compares aux phares de France et d'Angleterre, est vrai- nient desesperante. Le langage des commissaires est d'une franchise et d'une severitc extraordinaires, ils font sentir a chaque instant qu'ils sont indignes du le , est le parfait isolement des fils et des deux bobines. Si, quoiqu'il en eut congu le plan depuis bien longtemps, M. Ruhmkorff n'a pas construit cet instrument avant 1851 , c'est qu'il ne savait pas encore comment realiser les conditions d'un isolement parfait. Voyons ce que M. Sistenden y a ajoute. II a eu I'heureuse idee d'envelopper les deux bobines de deux cylindres formes de deux feuilles d'ctain; ctces deux cylindressontde- venus de verilables condensateurs. Si on les met en communication chacun avec line boule en laiton siluee en dehors de I'appareil, les deux boules seront char- sees d'electricilEs contraires, comme les boules des conducteurs d'une machine a double Electricite : chacune d'elles donne sEparement des etincelles dont la lon- otieur peut atteindre jusqu'a quatre millimetres lorsqu'on les decharge avec un conducteur metallique. Si on les met en communication avec un appareil sem- blable au perce-carte, ou simplement avec deux conducteurs termines par deux pointes suffisamment rapprochees I'une de I'autre, on voit une serie non inter- rompue d'etincelles oclatant avec bruit, et formant quelquefois, par leur conti- nuite, une large ligne de lumiere ; I'intensitE et la tension de I'electricite estassez grande pour que I'etincelle, en s'elan^ant d'une pointe a I'autre, perce six plis de papier, melte le feu a I'alcool, et allume du coton saupoudre de colophane. M. Sistenden a observe aussi un phenom^ne tres-extraordinaire, qui devra etre inscrit dans la science sous son nom, quoique M. Ruhmkorff I'ait observe de son c6te et I'ait communique meme a plusieurs physiciens, mais sans le pu- blier. Nous avons dit que le marteau et I'enclume etaient rev6tus d'une feuille mince de platine ; or, si aux feuilles de platine on substitue deux feuilles d'ar- gent, I'appareil ne donne aucun signe sensible d'electricit6 de tension; les boules ne donnent plus d'etincelles, meme lorsqu'on les rapproche a I'aide de conducteurs mobiles : c'est a peine si on ressent une petite piqure lorsqu'on les COSMOS. 263 louche une avec la langue ; tandis qu'avec le marteau et I'enclume recouverts de platine, la commotion dans ce seul cas etait tres-forte. M. Sistenden explique ce fait capital par la difference de conductibiiite entre le platine et I'argent. La conductibilite du platine est cinq fois moins grande environ que celle de I'ar- gent; dans la femieture du courant par le platine, il y a done une resistance appreciable au passage de I'electricite, resistance qui n'existe pas ou qui est incomparablement plus petite quand la fermelure a lieu par I'argent : dans le premier cas, le courant direct sejourne plus longtemps dans la bobine a fil court et I'electricite induite chemine plus longtemps aussi dans la bobine a fils longs; or, M. Sistenden est convaincu que cette prolongation du mouvement electrique dans la bobine induite est la condition essentielle, ou meme la cause efficiente de la production de I'electricite de tension; il entre a ce sujet dans des developpements que nous sommes forces de passer sous silence. Cette inter- pretation des faits est-elle bien legitime et bien exacte? nous serions tentes d'en douter, car M. Ruhmkorff nous afBrme que le cuivre rouge produit presque le meme effetque le platine, quoique la conductibilite du cuivre soit sensiblement 6gale a celle de I'argent. II y a plus de difference entre les conductibilites de I'argent et du mercure qu'entre celles du platine et de I'argent, et cependant lorsque I'interruplion se fait par le mercure, I'electricite de tension se produit d'une maniere sensible dans I'appareil de M. Ruhmkorff. Disons en terminant que ce joli appareil a deja recu des applications impor- tantes. 1° il est tres-propre a mettre en evidence un fait capital decouvert par M. Neef, et qui n'a pas encore fixe I'attention autant qu'il le meritait, a savoir que la lumifere electrique apparait toujours au pole hegatif de la pile : en effet lorsque Ton fait passer le courant d'induction dans le vide a travers I'ceuf elec- trique, on Yoit tres-distinctement que la lumiere reside sur celle des boules qui communique au pole negatif, qu'elle rayonne de cette premiere boule sur I'autre, et qu'elle rayonne de cette seconde boule, si , par Taction du commutateur, on change le sens du courant pour la rendre a son tour negative. 2° M. Edmond Becquerel I'a employe avec succes pour electriser Fair et les gaz dont on rem- plit I'oeuf electrique, pour produire ainsi de I'ozone et amener la formation du gaz nitreux : lorsque la serie des etincelles a traverse I'air assez longtemps, on le voit se colorer en rouge par I'apparition des vapeurs d'acide rutilant; pour que I'experience reussisse, il ne faut pas laisser Fare voltaique se former, parce que la temperature alors s'eleverait trop, et I'oxygene se deselectriserait; 3" en mettant deux conducteurs aux vis de pression BB, on recueillerait I'extra-courant ou le courant de retour de la bobine a fil court : termines par deux poignees qu'on tiendrait a la main, ces conducteurs serviraient a la production des se- cousses, comme dans I'appareil a roues dentees de M. Masson : en faisant com- muniquer ces memes conducteurs avec les deux pdles d'un voltametre, on ver- rait la decomposition de I'eau devenir plus rapide et plus intense : on constate- rait ainsi un fait remarquable decouvert par M. de La Rive. 2G4 COSMOS. 3° Moavelles d'Amvriqae. — Un grand nombre d'observations se reunissent pour prouver que des pois- sons glaces reviennent a la vie lorsqu'on les place dans un baquet d'eau liede. M. William Rummel, de Jersey, prit un jour un certain nombre de perches qui furent bientot complolement gelees; il les laissa dans la neige pendant trois se- maines, les mit ensuite dans un baquet et y versa de I'eau de puits ; vingt-deux perches sur trenle commencerent bientot a nager. Des brochets, des truites et des carpes gelees et dures comme du bois, trouvees ainsi au sein des rivieres glacees, ou amenees a cet etat par le grand froid de I'atmosphere, se sont mis aussi a nager des qu'on les a places dans un baquet d'eau degourdie. Un autre observateur ajoute une particularite remarquable : suivantlui les poissons dege- les seraient tous aveugles ; le sens de la vue avail ete delruit. Tout recemment M. Auguste Dumeril annoncait a I'Academie un fait du meme genre observe par lui dans ses recherches sur la temperature des reptiles. Une grenouiUe dont la rigidite etait complete, revint a la vie apres avoir ete mise en contact graduellement, avec de la glace fondante, puis avec de I'eau de moins en moins froide; il a obtenu plusieurs fois cetle resurrection en agissant avec les memos precautions. A la temperature a laquelle il operait, tous les li- quides interieurs furent trouves gales; I'intestin etait dur, ainsi que le foie et le cceur. II est tres-probable que les grenouilles et les poissons passent ainsi geles une grande partie de I'hiver. — II y a quelques mois il se produisit dans la bale de Callao une quantite considerable d'acide sulfhydrique, hydrogene sulfure, qui a fait p6rir une im- mense quantite de poissons. L'eau de la mer perdit sa couleur verte et prit une teinte laiteuse; bientot I'odeur du gaz se fit sentir; une piece d'argent que Ton plongeait dans l'eau etaient promptement noircie, et les peintures a I'huile des environs se noircirent a leur tour. Les poissons montaient tres-nombreux du fond a la surface sur laquelle ils sautillaient pendant quelques instants agites de mouvements convulsifs; ils s'^lancaient tanlot en avant, tantot en arriere, couches sur le dos; ils decri- vaient un cercle qui se resserrait successivement, puis tout mouvement cessait et ils mouraient par milliers, tous de la meme maniere; leurs entrailles et leurs cerveaux etaient injectes de sang lr6s-noir. • DE L'lJIPRlMEUIE DF, CR^TELET, RUE DE VAl'CIRARD, 9, COSMOS. 265 NOUVELLES DE LA SEMAINE. 1. Nous venons bien tard exprimer la douieur profonde que nous a causee la mort de M. Recamier, I'un des plus illustres medecins du monde. Nous I'avons approche de trfes-pres ; pendant plusieurs annees, nous I'avons vu regulierement chaque matin; nous avons ete, par consequent , temoin de ses hautes vertus , confident de son heroique charite, admirateur enlhousiaste de sa science, disons mieux, de son genie. Sa figure coloree et pleine d'expression, le jeu rapide de ses sourcils, sa vivacite penetrante, son geste brusque et si significatif, sa parole inspiree, pressee, imagee, convaincue, etc., tout revelait en lui un homnie extraordinaire. Intelligence elevee et encyclopedi- que , esprit penetrant et d'une activite incomparable , memoire vaste et fidele, coup d'oeil prompt et sur, mainferme et habile, energie in- domptable, courage allant presque jusqu'a I'audace, il possedait au plus haul degre toutes les qualites qui font les grands medecins et les grands chirurgiens. « Aussi, dit M. Gibert, que de merveilles operees par la pratique de M. Recamier. Ici c'est un kyste qu'il decouvre dans la profondeur des organes , qu'il opere et qu'il guerit ; lii c'est un ago- nisant, atteint d'une cardite trop longtemps ignoree, qu'il saigne a outrance et qu'il guerit; ailleurs c'est un mourant, presque un mort, qu'il rappelle a la vie par I'application bardie des affusions froides; ce sont des crampes atroces, des contractions musculaires invincibles , qu'il conjure par la pression ou malaxation cadencee; des pneumonies malignes, qu'il guerit rapidement par le muse; des pseudo-peritonites qu'il arrete dans leur cours avec le camphre et la valeriane; des vo- missements choleriques qu'il encbaine avec I'amidon ; des gastfo-en- teralgies qu'il dissipe comme par enchantement avec du chaibon en poudre. » Le nombre des cures etonnantes, inattendues, merveilleu- ses, qu'il a obtenues par les moyens les plus simples et les plus vul- gaires, est immense. C'etait un magnifique spectacle que de le voir lutter corps a corps, pendant des semaines, des mois , des annees, contre une maladie violente et incurable. A chacun des coups que la mort portait a sa victime, et qu'elle croyait devoir etre le dernier, I'imagination toute-puissante de M. Recamier opposait un moyen nou- veau qui le rendait mailre du cbamp de bataille. Nous ne croyons pas qu'il y ait dans les annales de la medecine rien de comparable a la prolongation, pendant dix-huit mois entiers, de I'agonie du celebre redacteur du Courrier francais , Chatelain. IS .IDILLET 1852 12 266 ;COSMOS. L'age semblait avoir aiigmente pour M. Recamier et les forces phy- siques et Ic prestige de limaginalion : la temporisalion, le calme de I'esprit, la lenteur des mouvenients, privileges inherents et obliges des vieillards, n'avaient pas trouve acces chez lui. Le soir do sa mort, su- bite et imprevue, parvenu a l'age de soixante-dix-huit ans, et ayant conserve toute la plenitude, toute I'onergie de son intelligence, on pourrait presque dire toute I'activite de ses jeunes aiinees, il s'entre- tenait avec un de ses anciens eleves , monte depuis longtemps au rang des maitres, le professeur Cruveilhier, et discutait avec lui le cas ob- scur et epineux d'une nialade confiee a leurs soins. Une heure s'etait a peine ecoulee, et ce corps, si vivant et si anime, n'etait plus qu'un cadavre. » Mon Dicu ! s'ecria tout a coup M. Recamier, ayez pitie de « moi. » Et 11 rendaille dernier soupir, etouffe par une apoplexie pul- monaire! La mort subite est, dans la plupart des cas, un malheur et un chatiment terrible : aussi I'Eglise engage-t-elle vivement ses enfants a repeter chaque jour : a subitanea et improvisa morte, libera nos, Do- mine .-mais apres une vie pleine de bonnes oeuvres, comma celle de M. Recamier, on peut la regarder comme une recompense, comme un dernier bienfait de Dieu. Le saint cardinal de Cheverus avail efface le mot subitanea des litanies des saints de son breviaire , et il ne pouvait pas prendre sur lui de prier Dieu de lui epargner une mort subite : le seul malheur, a ses yeux, etait la mort imprevue. M. Recamier n'etait pas seulement homme de foi grande, eclairee, vive, ardente, forte jusqu'au miracle, convaincue jusqu'al'evidence; sa piete etait plus admirable encore; c'etait cette douce familiar! te de I'ame avec Dieu, qu'on ne rencontre que dans les coeurs angeliques. Quoique se couchant fort tard , et appele souvent, pendant lanuit, au chevet des malades, il se levait a six heures du matin, faisait une fervente priere, et se faisait lire , pendant qu'il procedait aux soins de sa modeste toilette, dans quelque auteur ascetique, un sujet de medi- tation qu'il poursuivait en se rendant a I'Hotel-Dieu. Aussi souvent qu'il le pouvait, il allait, vers sept heures , entendre la sainte messe dans le tranquille oratoire de quelque humble communaute religieuse , et communiait plusieurs fois chaque semaine. La delicatesse de sa conscience etait extreme ; il ne se pardonnait pas les fautes les plus l^geres. Vif et brusque, il s'irritait quelquefois , et ne cachait pas tou- jours assez ses antipathies ; mais aussi souvent qu'il s'elait oublie , il n'avait de repos qu'apres avoir exprime sa douleur et obtenu son par- don. Jamais il ne se refusait a un acte de charite, et les sommes ver- sees par lui entre les mains des pauvres atteigncnt un chiffire enorme. COSMOS. 267 Chaque matin, en comptant les recettes de la veille, il mettait dans le sac, toujours ouvert , des pauvres, le dixieme de ce qu'il avait gagne ; et sa maniere de prelever ce dixieme a quelque chose de touchant et d'heroique dont le souvenir nous emeut encore. Si, apres avoir mis cent francs dans la bourse de sa famille, il avait mis dix francs dans le sac des. pauvres , il ne leur aurait reserve en realite qu'un onzieme; ce n'etait pas ainsi qu'il faisait : aussitot qu'il avait compte cent francs , 11 en retirait dix, qui allaient grossir le tresor de I'indigence, et ne s'en reservait que quatre-vingt-dix; la part du pauvre , de cette maniere, etait reellement un neuvieme. - Le partage, le glorieux privilege de la foi et de la piete ici-bas, c'est la persecution et le martyre; ils n'ont pas manque a M. Recamier. Que d'outrages, que de calomnies, que de dedains, que de violences se sont dechainees contre lui ! II a ete pour beaucoup un objet de haine, uniquemont parce qu'il etait chretien, Chretien sincere, Chretien con- vaincu, chretien dans toute sa vie, odio eritls propter nomen meum. Disons-le, quoique a regret et ea prenant notre coear a deux miins, disons-Ie parce qu'il est temps de mettre fm a ces lamentables injus- tices : si M. Recamier eut ete impie, iucredule, indifferent du moins et de moeurs legeres, les hommes qui usurpent le droit de faire les re- nommees, tous les echos de I'opinion publique, tous ses confreres, coUegues, rivaux, eleves, etc., I'eussent proclame le plus grand mede- cin des temps modernes, le genie midical incarne. Mais ses convic- tions religieuses etaient un remords, sa piete un reproche, sa vie entiere une condamnation; et a travers ce remords, ce reproche, cette condamnation, c'etait a peine si le talent se faisait jour encore. Que de fois nous avons ete indigne lorsque nous avons vu des hommes eminents d'ailleurs et honorables, mais aveugles par leurs antipathies irreligieuses, ne montrer dans M. Recamier qu'un enthousiaste, un illumine, un energumene, un fou! Ce qui prouve d'une maniere ecla- lante la verite de la cause assignee par nous, a I'opposition acharnee, a I'injustice criante dont M. Recamier a ete I'objet pendant presque toute sa vie ; c'est le concert unanime de louanges qui a retenti apres sa mort. Alors il est apparu ce qu'il etait, un grand homme, un genie puissant, le medecin incomparable, etc. 0 mors^ quam bonum est ju- dicium tuum ! — L' Angleterre a perdu aussi une de ses sommites scientifiques. Leplus ancien etle plus illustre des chimistes delaGrande-Bretagne, M.Thomas Thomson est mort a Glascow le 2 juillet dernier, age de soixante-dix- neuf ans. Depuis ISOOjusqu'a la derniere annee de sa vie,il n'a pas cesse ses lecons publiqiies, c'etait le doyen des professeurs de I'Europe •2m COSMOS. et du nionde. Nous publierons bientot I'histoire abregee de sa vie , et I'analyse des travaux qui ont illuslre son nom; contentons-nous de dire aujourd'hui que son plus grand litre de gloire est I'introduction dans I'enseignement de la chimie des nomenclatures symboliques, et la clas- sification des diverscs substances par leur composition cbimique. 11 ex- posa, il developpa, il fit adopter la theorie atomique de Dalton ; il ou- vrit au celcbre Berzelius la voie que celui-ci a si glorieusement suivie. M. Flourens enfin, a annonce lundi dernier a I'Academie des Sciences la mort du doyen des correspondants de la section de chimie, M. Welter de Valenciennes , le collaborateur et I'ami de Gay-Lussac, I'inventeur des tubes de stirete qui portent son nom. II. II nous a ete donne d'admirer et de faire connaitre le premier une nouvelle et curieuse industrie. On trouve abondamment dans la nature une planto remarquable , belle et terrible a la fois, que nous ne voyons dans nos climats du nord que dansles serres chaudes ou temperees, mais qui en Amerique, dans les regions tropicales, en Espagne, enSicile, dans le midi de la France, en At^erie, etc., croit spontanement, et couvre d'immenses etendues de terrain : c'est le cactus opuntia, ou le cactier a raquettes. Sur les c6tes de la Mediterianee, le cactier dont nous parlons monte h deux ou trois metres; en Corse et dans la province d'Alger, il atteint iusciu'asix et sept metres; dans les plaines arides du Mexique, depuis le 'Tolfe de Honduras jusqu'a Guatemala, sa hauteur est quelquefois de vin«t metres et plus. Sa tige d'un vert glauque se compose d'un grand nombre d'articulations ovales en forme de raquettes , plus ou moins epaisses, armees d'epines roides, greles, rousses, disposees par petits bouquets, et autour desquels se dressent cinq aiguillons solides, aigus, aceres dont la piqiJre est tres-douloureuse, et daiigereuse meme quel- quefois. Du centre de ces defenses sortent des fleurs solitaires, inodores, iaunes, s'epanouissant en avril , se succedant jusqu'en juin et donnant naissance, les unes apres les aulres, a un fruit succulent quoiqu'un peu fade dela forme et de la grosseur d'une figue. Les Siciliens s'en nour- rissent pendant cinq mois de I'ele et en font secher des quantites con- siderables comme provisions d'hiver. Sa fleur et surtout les jeunes pousscs longues de vingt-sept a cinquante-quatre millimetres font de tres-bonnes salades. On peut aussi faire cuire les jeunes pousses pour les manner en guise d'asperges. Dans la Calabre, les boeufs, les mou- tons el les chevres, surtout lorsque les grandes secheresses onlbrul^ les herbages , acceptent sans repugnance les raquettes ou articulations du cactus coupees en tranches et depouill^es de leurs epines. Ce re- "ime les mainlient en bonne sanle, continue la production de leur lait COSMOS. 269 TabiSe™'' '^''"'"'^'' ''"' ''"^''"'' '' ''''"' '^^ '^"'^ "«"^«-i'"re Lesraquettes contiennent aussi en assez grande abondance un li- quide .nsip.de que I'on extrait par la pression et qui constitue une bois- son rafraich.ssante employee tres-souventpour tempererlesardeurs de la fievre, tr^s-commune dans les regions tropicales et chaudes, ou ve~ g^ent les cactus. La puipe broyee est un excellent topique contre les ulceresetlesplaiesde diverses natures ; on I'applique en cataplasme dans une foule de crconstances, dans les casdedyssenterie, par exem- ple, ou autres inflammations intestinales. Quoique les articulations ou les raquettes ne soient en apparence qu une masse charnue epaisse, elles renferment cependant des cou! ches l.gneuses pen developpees, mais tres-reelles. Chaque vegetation annuelle donne naissance a une nouvelle feuille de bois, de la forme de la raquette, d'epaisseur tres-variable, qui se superpose aux couches des annees precedentes , de telle sorte que Ion puisse tres-facilement evaluer le nombre des annees de la plante en comptant ses feuiUes li- gneuses. Ces feuilles ne sont pas un tissu continu, mais un amas de fibres discontinues qui laissent entre elles des vides , se croisent et sen tre-cro.sent de mille maniferes differentes, se;separent, se rejoi-nent' s entrelacent de maniere a donner naissance a de veritables dentelles ou guipures a points irreguliers et de dessins varies h I'infini L'em L seur des plus minces de ces feuilles ne depasse guere celle des fines guipures de Hollande, I'epaisseur des autres pent atteindre jusqu'a quatre et cinq millimetres. •' ^ Un sous-officier desspahisd'Afrique, M.Toussaint, s'etaitpris d'une belle passion pour les produits du sol algerien ; chaque nouvelle cam pagne, chaque nouvelle excursion, chaque changement de garnison augmentaitsa petite collection qu'il etalail avec bonheur dans sa cellule d6s qu il se trouvait ramene a une station quelque peu fixe, et qui de- nes cl inleret , et d applications pratiques. L'histoire du lieutenant, aujourd'hui capitaine Niopce de Saint-Vic- tor, qui transforma en laboratoire dechimie la salle de police de la ca- serne du faubourg Saint-Martin, et qui, consacrant h I'Lde et a I'ex- p^rience tout le temps que les exigences du service n'absorbaient pas sest rendu a jamais celebre par la decouverte de la photographie sur verre albumine, par la fixation sur plaque daguerrienne d^es Si's avec Infn ''' T' ''''"''"' i'^'Pressionne M. Toussaint; et il avait pris ,nvpnr !? If g^gement d'honneur d'attacher son nom a quelque invention utile. Son id^e fixe etait d'arriver a donner une valeur reelle 270 COSMOS. a des produits abandonnes du sol algerien. II ne savait rien ou presque rien de ce qui avail ete ecrit sur Ic cactus optmtia; on lui avail dit seulement el il avail vu de ses yeux que les varietes les moins epineu- ses de cette planle servaienl d'habitalion el d'alimenl a la cochenille ; cet insecle bizarre qui fournita I'induslrie elaux beaux -arts leurs plus brillants tons de couleur ecarlate. 11 s'etait dit a lui-meme qu'on pour- rait arriver peut-etre a fairs par une operation chimique ce que I'in- secte fait par succion el par digestion, c'est-a-dire a exlraire de la tige ou des fleurs du cactier en bien plus grande abondance ces couleurs d'un si grand prix. Poursuivi null el jour par celle pensee , il se mil avec ardeur a de- couper, a broyer, a faire macerer, a trailer par des agents chimiques , acides ou alcalins, des quantiles considerables de raquettes, de fleurs et de fruits; mais, helas! la matiere colorante fuyait loujours ou n'ap- paraissail qu'en quanlite Irop petite ou de qualile trop inferieure. Ces essais n'avaientabouti qu'a remplir sa cellule des couches ligneuses que nous avons decrites plus haul , qu'il ne s'etail pas attendu a renconlrer en aussi grand volume, qui le frapperent vivemenl et I'etonnerenl par leur extreme solidite, par la variete innombrable de leurs teintes et de leurs dessins , par la richesse capricieuse de leurs decoupures. II ne pouvait se lasser de les contempler, et son bouheur etait d'inviter ses coi:ypagnons d'armes , ses chefs et ses camaiades, a venir admirer avec lui ses magnifiques dentelles du Sahara ou du desert; c'etail le nom riche d'avenir qu'il avail donne dans son enlhousiasme au produil de ses infatigables recherches. Un nom, c'esl quelque chose, mais ce n'est pas tout : Elles sont su- perbes mes guipures, se disait-il souvent, mais la beaute ne suffit pas; il faut absolument passer du beau a I'utile. Qu'en ferai-je?... Apres de longs jours de lenebres el d'inceriitudes, le jour de la lumiere el de I'inspiralion arriva enfm. M. Toussainl, dans une heureuse contempla- tion se rappela ces oeuvres d'art et de gout si elegantes, ces mille petits meubles charmants , jardinieres , vases, etageres, colTrets, benitiers, vide-poches , etc., etc., fabriques avec les hois de fanlaisie, bois des iles, bois de rose, bois de Spa, etc., qu'il avail tanl caresses du regard dans les splendides etalsges de la rue de la Paix et des boulevards, dans les sallesd'exposition de Tahan, etc., etc. ; et il s'ecria tout a coup, dans un transport de joie indefinissable : cheres dentelles du Sahara, voiladonc qu'enfm I'heure des glorieuses fiangailles a sonne pour vous; il ne mo reste plus qu'a vous revelir de quelques ornemenls faciles pour vous ouvrir I'entree des salons splendides, des chambres parfumees, des bou- doirs mysterieux, etc., etc. Un peu de patience, encore quelques jours COSMOS. 271 de fatigues et de combats pour conquerir ma liberie , et je volerai vers la grande capitale , fier de ma noble progeniture , et je vous etablirai splendidement, et vous enrichirez a voire tour le pauvre soldat. M. Toussaint ne soupirait done plus qu'apres sa liberation du ser- vice militaire, et il avait a peine obtenu son conge qu'il partait pour Paris avec une enorme provision de couches ligneuses de cactus. II s'installa dans un petit logement de la rue Bergere, il se mil a I'oeuvre sur-le champ, il transforma en petits meubles charmants ses guipures faciles a polir, plus faciles encore a revetir d'un vernis brillant. Mais, helas! dans son ivresse d'inventeur, il avait oublie que procreer est un jeu, qu'ecouler les produits de ses creations, que venir heurter de front contre I'habitude et la routine, que venir tenter I'assaut d'une place depuis longtemps conquise, e'est une rude et cruelle entreprise. L'heure de I'inquietude et des angoisses sonna done a son tour; mais non pas l'heure du decouragement et du desespoir. M. Toussaint avait foi dans son eloile, et son etoile ne I'a point abandonne. Il la vit s'ar- reter un jour sur le palais de 1 Elysee, et elle semblait lui dire : Pour- quoi le neveu du grand Cesar, le dieu de Virgile, ne serait-il pas aussi ton dieu protecteur? II est puissant et bon. Aussitdt M. Toussaint courut vers son humble atelier, empaquefa ses plus jolis meubles, ecrivit a la hate une lettre d'horamage et de prieres; il revint a I'Elysee deposer ses petits chefs-d'oeuvre°et s'en retourna tout console. « Pourquoi craindrais-je, se disait-il, pourquoi ne serais-je pas assure d'un succes qui ne peut se faire longtemps at- tendre? Je donne une valeur reelle et grande a des produits inconnus et dedaignes, je cree une nouvelle Industrie : lIAlgerie a trop longtemps epuise la France, sa mere, elle a toujours regu sans rien donner- I'amener a pouvoir acquitter enfm une petite partie de son enorme delte, c'est bien meriter du pays ; et puis, elles sont si belles, si co- quettes, si seduisantes mes dentelles du Sahara, que je puis dor'mir en paix! >. II dormit done d'un bon sommeil, ce brave M. Toussaint, et a son reveil une genereuse gratification, le premier billet de mille francs que ses doigts industriels eussent jamais caresse, lui apprit que son hommage etait agree. Le prince president avait ete, en etfet, seduit par la grace enchanteresse de ces petits coffrets. Leur berceau est si ori- ginal, leur naissance est si romanlique, leur nom prete tant a la reverie! line haie de cactus plus redoutable que tous les chevaux de frise, transformee .en meubles delicieux ; un marechal des logis de spahis devenu k I'improviste emule des Boule, des Tahan; d'immenses plages arides tout a coup fecondees, etc., etc.; les sauvages aliments des feux du bivouac changes en or ! 272 COSMOS. Louis-Napoleon devint enthousiaste a son tour, et il chargea un de ses aides de camp de faire a M. Toussaint una brillante commande, non plus d'objets minuscules, mais de grands meubles. Et lundi 21 juin, I'heureux inventeur a depose dans un des plus beaux salons de riilysee une table-gondole composee tout entiere de dentelles du Sahara reliees par des baguettes de metal et rehaussees par de suaves rondcs-bosses , genies et aigles. Nous I'avons vue et nous I'avons gran- dement admiree; mais ce qui a surtout captive notre attention dans le petit atelier, ce sont deux vases d'une grande simplicite, et d'un effet vraiment extraordinaire. Quatre magnifiques feuilles de bois de cactus, dentelles d'une richesse incomparable, avec leur forme primi- tive de raquettes, implantent leur extremite inferieure dans le vase et retombent courbees comme des feuilles d'acanthe avec une grace infinie. III. Le R. P. Secchi a adresse a M. Arago une nouvelle lettre sur la resistance que les fils opposent au courant electrique. « Je regrette, dit M. Arago, que la longueur de cette lettre ne me permetle pas de I'inserer dans le compte rendu ; mais nous reviendrons sur cette communication aussitot que les commissaires nommes auront fait leur rapport. L'habile directeur de I'Observatoire romain s'oflTrira alors aux lecteurs sous un jour entierement nouveau; ils verront en lui, en etfet, un observateur trcs-experimente dans les questions de physique, et un geometre au courant de toutes les ressources que pent offrir r^nalyse infinitesimale. Disons seulement que le but principal du P. Secchi est d'expliquer le resultat obtenu par M. Despretz, etsui- vant lequel la resistance des fils ne serait pas proportionnelle a leur longueur. » Le P. Secchi, dans une autre lettre qu'il a bien voulu nous adresser, nous apprend que la courbe des temperatures solaires est devenue parfaitement symetrique aussitot que le plan de I'equateur est venu passer par le centre du soleil, ce qui confirme de plus en plus la realite de sa decouverte des temperatures in^gales au centre et vers les bords, plus intense au centre, moins intense sur les bords. II nous annon^ait en outre qu'il avait fait des observations importantes sur les modifications que la presence des taches faisait subir a la tem- perature du disque du soleil. Des que les details de ces dernieres experiences nous seront parvenus, nous nous empresserons de les publier. En attendant, voici que les journaux d'ltalie, de France et d'Angleterre nous apportent une grande nouvelle, Le P. Secchi est, en outre, un helleniste et un archeologue celebre; h ce double titre, il a si bien fait ses preuves, qu'il a conquis un fauteuil h I'lnstitut de France ; et depuis plusieurs annees il est membre correspondant de COSMOS. 273 lAcademie des inscriptions et belles lettres. Or, il resulterait des pro- CL'S-verbaux d^une des dernieres seances de I'Academie archeologique (le Rome, que ce meme P. Secchi aurait complete I'oeuvre de Cham- pollion, et retrouve completement la clef des caracteres hieroglyphi- (]iies : il serait arrive a lire couramment un grand nombre d'inscrip- tions monuraentales ; ilse serait assure qu'ellesne sent pas simplement, comme on le croyait, de simples epitaphes tumulaires, mais souvent de veritables poemes. Ainsi, lesgrandes pages de Tobelisque de Luxor, renfermeraient un hymne en vers de buit syllabes! IV. L'Universite d'Oxford, grace a la genereuse initiative du doc- teur Daubeny, qui avait offert spontanement une partie de ses ap- poinlements pour faire face aux charges qui resulteraient de I'accep- lation de la donation, est entree defmitivement en possession du magnifique berbier de Fielding. Les magistrals d'Oxford, a I'unanimite, ont vote les 25 000 francs necessaires a la construction du Musee botanique, et fonde la rente de 2500 francs exigee pour la conserva- tion et I'accroissement de cette collection, unique au monde. V. Ce n'est pas M. Babinet, mais M. Arago qui, dansl'avant-derniere seance de I'Academie des sciences, a signale I'emploi avantageux que I'on pourrait tirer des ballons captifs pour decbarger les nuages elec- triques et prevenir les suites desastreuses des orages. M. Letellier, des Hatignolles , croyait naivement qu'il avait eu le premier I'idee de cet emploi des ballons. M. Arago , pour dissiper son illusion , lui rappelle les nombreuses experiences failes il y a longtemps avec des cerfs-vo- lants par M. de Romas, a Nerac; et ce qui! proposa lui-meme il y a quatorze ans. Cette note, extraite de I'Annuaire du bureau des longi- tudes pour 1838, est tres-curieuse, et nous croyons devoir la repro- duire : « Cet intrepide pbysicien lanca dans les airs, a des bauteurs de 130 a 160 metres {-i a 500 pieds), un cerf-volant dont la corde etait, comme les grosses cordes de violon , entouree dun fil metalUque. Pendant un orage tr^s-mediocre , a peine accompagne de quelques legers coups de tonnerre, Romas lira de I'extremite inferieure de la corde de son appa- reil, non plusde simples etincelles, mais des lames de feu de 3 metres ;i 3 metres un quart (de 9 a 10 pieds) de longueur. Ces lames faisaient autant de bruit qu'un coup de pistolet. En moins d'une heure, Romas en tira 30 , sans compter un millier d'autres de la longueur de 2 metres un quart (7 pieds) et au-dessous ! « Le pbysicien de Nerac remarqua plusieurs fois que , pendant la duree de ses experiences, les eclairs et le tonnerre cessaient totalemont. Le docteur Lining, deCharlestown, etM. Cbarles, quoiqueayantopere 274 COSMOS. moins en grand , transformferent aussi des nuages orageux en nuages ordinaires. » « Cos observations ouvraient une large et brillante carriere , dans laquelle il est regrettable que Ton ne soit pas entre. La formation de la grele semble incontestablement liee a la presence dans les nuages d'une abondante quantite de matiere fulminante. Soutirez cette matiere, et la gr^Ie ne naitra point ou bien elle restera a I'etat rudimentaire, et vous ne verrez plus tomber sur la terre que du gresil inoffensif. Doute-t-on des grands avantages que I'agricuiture retirerait dans cer- tains pays de la disparition des orages a grele? Voici ma reponse : En 1764, un habitant eclaire du midi de la France ecrivait ces lignes dans VEnajclopedie : « li n'y a pas d'annee ou la grele ne ravage la moitie, quelquefois les trois quarts des dioceses de Rieux, Comminge, Couserans, Auch et Lombez. » Le seul orage du 16 juiUet 1788 frappa en France mille trente-neuf communes. Une enquete officielle porta le degat a 25 millions de francs! « Je sais tres-bien que la manoeuvre du cerf-volant n'est pas exempte de danger; que I'orage nait, se developpe, se fortifie par un temps ge- neralement calme; que le vent, a I'aide duquel I'appareil pourrait etre lance dans les airs, ne commence qu'au moment ou la pluie et la gr^le tombent deja, etc. Aussi n'est-ce pas de cerfs-volants que Ton devrait, suivant moi, se servir. Je voudrais que Ton employat des aerostats cap- tifs pour cette grande et belle experience ; je voudrais qu'on les fit monter beaucoup plus haut que les cerfs-volants de Romas. Si en de- passant d'une centaine de metres la couche atmospherique ou s'ar- retent ordinairement les extremites des paratonnerres , de petites aigrettes deviennent des langues de feu de 3 a 4 metres de long, que n'arriverait-il pas lorsque tout le systeme, suivant les circonslanccs , s'etanteleve trois, quatre.... dix fois plus, irait presque cfHeurer la surface inferieure des nuees; lorsque aussi, et cette particularite a de Timportance, la pointe metallique soutirante qui serait en communi- cation avec la longue corde semi-metallique faisant fonction de con- ductcur, etant fixee a la partie superieure du ballon , se presenterait aux nuages a peu pres verticalement ou dans la position d'un para- tonnerre ordinaire. 11 n'y a rien de trop hasarde a supposer que , par ce systeme , on parviendrait a faire avorter les plus forts orages. En tons cas, une experience, qui interesse si directement la science et la richesse agricole du royaume, merite d'etre tentee. Si i'on se servait de ballons de dimensions mediocres, la depense serait certainement tant inferieure a celle de decharges de boites, de canons, que s'ira- posent aujourd'hui, sans aucun fruit , les pays de vignobles. » COSMOS. 275 II est des hommes vraiment malheureux, a qui rien ne reussit, qui ne sont jamais aides, jamais encourages, meme lorsqu'ils proposent les idees les plus ingenieuses et les plus utiles. Au premier rang de ces victimes du destin, il faut placer M. Dupuis Delcourt, le plus an- cien , et I'un des plus courageux , des plus habiles aeronautes de France. II y a deja longtenips, en 1844, M. Dupuis-Delcourt a adresse a I'Academie les dessins et la description d'un appareil appele par lui ^lectro-subtracleur destine a soutirer I'electricite des nuages et a pre- venir la formation de la grele.. Renvoye deux fois a I'examen d'une commission , ce memoire n'a pas encore ete I'objet d'un rapport. M. Arago ferait une noble et bonne action, si, tendant une main bien- veillante a cet areonaute, que de cruels revers ont trop souvent atleint, il obtenait pour lui du ministre de I'instruction publique, par Tinter- vention de I'Academie des sciences, la mission et les fonds necessaires pour I'application des ballons captifs a la decharge des nuages. L'il- lustre secretaire perpetuel doit desirer ardemment de voir appliquer eufin les grandes pensees qu'il a si souvent exposees, alors surtout qu'il s'agit d'un interet public et si considerable. Les pertes causees chaque annee par la grele sont immenses; et rester dans I'inaction apres avoir tant affirme qu'il est possible de les prevenir, ce serait evi- demment assumer sur soi une trop redoutable responsabilite. VI. Les falsifications et les adulterations des substances alimen- taires et medicales depassent en Anglelerre et en France tout cc qu'on pourrait imaginer. Essayons, pour determiner I'administration a ap- porter enfin a ce mal immense un remede prompt et efficace, de sou- lever une fois encore I'indignation publique. Les commissaires de I'administration anglaise , connus sous le nom de Lancet commissio- ners, ont pris a I'improvisle, dans diverses boutiques de Londres, vingt-huit echantillons de poivre rouge ou poivre de Cayenne, pour les analyser avec soin. Or, il resulte de leur examen, que quatre seu- lement de ces echantillons etaient purs, les vingt-qualre autres etaient indignement frelates; et de plus vingt-deux contenaient des matieres colorantes minerales tres-dangereuses. 1° treize echantillons renfer- maient de I'oxyde rouge de plomb en proportion assez considerable pour determiner I'empoisonnement; 2° sept renferraaienl du rouge de Venise , de I'ocre rouge, de la pous^iere de brique rouge et autres terres ferrugineuses; 3" un renfermait du cinabre, du vermilion, du sulfure rouge de mercure ; 4° dix etaient des melanges de riz cru, deracine de patience, de poivre de Cayenne en petite quanlite, co- lores par I'oxyde rouge de plomb ou des terres ferrugineuses; 5° six renfermaient du sel, soit presque seul, soit mele plus souvent -a du 27G . COSMOS. riz , et colore par des oxydes de fer ou de plomb; G° un etait frelate par Taddition de son de moutarde blanche; 7° deux, enfin , 6taient formes seulement de riz colore par les oxydes de fer ou de plomb. Per- sonne n'ignore que I'oxyde rouge de plomb, le vermilion et le sulfure demercure sont des substances tres-deletcres ; donlla presence etl'accu- mulation jour par jour finissent par engendrer des affections morbides speciales ettres-graves; les marchands qui les emploient sont done de veritables monstres, des assassins de sang-fi^oid. Et quand ils sont pris en flagrant debt, la loi punit leur crime d'une legere amende! Ce qui revolte le plus les commissaires anglais, c'est I'audace de ces odieux frelateurs; les quantites de substances etrangeres et nuisibles qu'ils emploient sont telles qu'on les reconnait a Tccil nu, en pla^ant sur un verre leur preparation , et la delayant dans un peu d'eau. Tout recemment un medecin racontait dans la Gazette medicate, qu'il lui avait pris envie d'analyser des pilules de digitaline, prises dans une pbarmacie connue, et que grand avait ete son etonnement lorsqu'il eut ete amene a reconnaitre que ces pilules ne renfermaient pas un atome de digitaline. EUes etaient formees d'une mati^re com- pletement inerte; et par consequent le medecin qui comptait sur un agent energique pour defendre son malade d'accidents graves, avait compte sans son bote, trop familier, helas! la mauvaise volonte ou la mativaise foi du pharmacien. YII. Nous enipruntons au Moniteur industriel la note suivante sur la maladie de la vigne qui reparait sur divers points. « La maladie de la vigne connue sous le nom d'oidium Tvckeri, qui Tannee derniere s'etait etendue sur toute I'Europe meridionale, et avait donne de si vives inquietudes, vient de reparaitre dans les envi- rons de Paris. Dimanche 27 juin nous I'avons observee sur des plants de la Madeleine, aux abris dun pare a Saint-Denis, oil dejti elle avait fait d'alTreux ravages. «La contagion se presente avec les memes caracteres : les feuilles couvertes d'une legere couche blanchatre ont un aspect terne , souf- freteux ; deja plusieurs se roulent sur elles-memes et commencent a se dess^cher; comme toujours elles laissent echapper une forte odeur de champignon qui se sent a distance ; le pampre a peine consistant est tache de larges plaques noires qui penetrent dans les tissus; le raisin, a peine en fleur, semble deja ressentir les etreintes du crypto - game qui bient6t va le faire perir. « Cette annee , comme I'annee derniere, ce sont les plants de la Ma- deleine, exposes au levant, qui semblent devoir etre atteints les pre- miers. Quant aux innombrables chasselas qui tapissent les longs murs COSMOS. 277 du pare , nous n'avons pu y decouvrir les traces du champignon , mais a leur aspect insolite il est a craindre que d'ici a qiielques jours la maladie ne s'en empare. Voidium Tuckeri 'fut d'abord observee en Augleterre , au commencement de 1845, par M. Tucker, jardinier a Margate ; en 1847, les primoristes des environs de Paris la remarque- rent dans leurs cultures forcees : peu importante alors, e'est en 1849 qu'elle fit invasion dans les jardins. En 1850, elle sevissait sur la belle collection du Luxembourg et sur le potager de Versailles. Enfia I'annee derniere elle s'est subitement declaree dans tout le midi de I'Europe , et a un instant inspire les craintes les plus vives. Jusqu'ici les degats qu'elle a causes ne sont pas considerables; c'est surtout le raisin de table qui a soutfert. Quant aux vignes de pleine terre, elles n'ont en- core eprouve que des pertes legeres. Mais plaise au ciel que cette annee nous n'ayons pas a enregistrer de nouveaux et plus graves sinistres ! « Des I'apparition de la maladie , les savants en ont voulu expliquer la cause. Les uns I'ont atlribuee aux influences atmospheriques, les autres a la presence de certains insectes sur les plantes attaquees , enfin quelques-uns a Taction du champignon lui-meme. Mais toutes ces explications sont peu satisfaisantes ; les influences atmo pheriques n'ont pas I'importance qu'on voudrait leur accorder, puisque depuis que le mal existe les saisons ont etealternativemetsechesou humides, froides ou chaudes. La presence de certains insectes sur les vignes alteintes ne peut etre regardee comme une cause determinante, mais plutot comma uneffet, puisque c'est en general aux plantes maladives que les insectes s'attaquent. II en est de meme des champignons , dont le role, dans la nature, semble etre de hater la decomposition des vege- taux dont la destinee est accomplie. Les savants se trompent done lorsqu'ils attribuent au champignon lui-meme ou a Taction de certains insectes la maladie de la vigne. Ce ne sont la que des etfets secon- daires eloignes ; les veritables causes resident dans Talteration du cUmat et dans le mauvais agencement des cultures. » Nous aussi nous sommes pleinement convaincu que I'apparition de la plante parasite est Teffet et non la cause de la maladie. PIIOTOGRAPHIE. M. Blanquart Everard nous adrcsse de Lille la letlre suivante, que nous publions sans y changer un mot, et sans conimentaire. « Ne pensez-vous pas que ce serail rendre service aux amateurs 278 COSMOS. de photographie, en possesion de prdcieuscs decouverles, que de proiivcr que les illiislrcs invcnleurs Talbot et Daguerre, loin d'a- jouter a lour merilc, auraient an contraiic nui a leiir gloire, s'ils avaient use leur vie a la recherche dcs perfcclionncments qui sonl n(§s le lendcinain de Icurs publications? « Ces reflexions me sont suggerces, non pas sculcment par le mutisme bien rdsolu de I'habile photographe, donl la leltre inser6e dans voire dernier numero contriste tout le monde photographique, mais aussi par celui de deux de ines conciloyens qui possedent une mclhodc non moins precieuse que celle de cc dernier, puisqu'ils out Irouve une prepaiation de papier negatif qui permct d'obtenir des processions en marche, des chevaux en pleine course! « Le d(^sir de ne livrer an public que des methodes sures et d'un procdde facile est fort legilisne sans doute, mais nous I'avouerons, nous n'avons jamais su nous rcsigner aux lenteurs qu'ils cntrai- nent; nous pensons du reste quune idee vraie n'arrive jamais trop tot, et que livrce a I'ctude detous, elle donne plus viteet plus sure- ment ses consequences. En attendant I'heureux jour des confidences, nous resterons lidele h nos defauls en engageant vos lecteurs a etu- dier : « 1° La substitution de I'acetate d'argent a I'acide acetique dans lebain qui sensibilise les verres on les papiers iodures; nous avons oblenu Irop de scnsibilile a son emploi. « 2° Pour I'emploi de I'albumine, Taction des vapours de I'acide acetique, et I'usage du fluorure de potassium, raoyens que nous avons deja preconis^s pour arriver a une plus grande sensibilite. tc Voici notre mode de preparation : « On ajoute a I'albumine 8 pour 100 de miel et ^pour 100 d'io- dure d'ammoniaque. Lorsquc I'albumine est bien egalement eiendue sur le vcrrc, on enferme cclui-ci dans une boite, dont le couvercle en bois est imbibe d'acide acetique cristallisable, an bout de quel- ques minutes, I'albumine prend un aspect laileux, c'est la coagula- tion; on chasse I'acide acetique en chauffant alors tres-fortement la glace au-dessus d'un foyer on dune lampe a espril-de-vin. « On obticnt ainsi une couche d'albumine plus sensible a Taction phologenique, et infiniment plus pure que paries procedes jus- qu'ici decrils , car elle est exempte des pclitcs poussicres qui depa- rent fant de belles dpreuves, et les images ont un veloutc que Ton ne trouve que tres-exceptionnellcment dans les glaces simplement albuminees. « Pourajouter a la sensibilite, on emploie apres le bain d'argent, COSMOS. 279. iin bain de fluornre de potassium , l gramme sur 300 grammes d'eau, on ne laisse en contact la couclie sensible sur le bain de (luorure que pendant 10 secondes, puis h I'instant on met celte meme couche en contact aussi pendant 10 secondes sm' un troi- sieme bain contcnant 1 partie de nitrate d'argent dans sept parlies d'eau. Le nitrate d'argent s'cmpare, comme .I'a fort bien observe M. Le Moine, de Limoges, du' fluornre reste libre, et Temploi de ce seln'offre plus le moindre inconvenient. » — M. Niepce de Saint-Victor poursuit avec perseverance et ar- deur, avec bonheur aussi, scs brillants essais de la fixation des cou- leurs. Les epreuves qu'il a obtenuesja semaine derniere depassent beaucoup leurs sffiurs ainees. Quelques-unes atteignent presque le but , raais it n'a pas rcussi a les fixer encore ; une surtout, repro- duction d'un portrait colorie du prince president , donne les plus belles esperanccs. Le prince la 'vena et it encouragera I'habile chromographe , et le grand probleme sera cnfin resolu ! COURRIER SCIENTIFIQUE. 1° moavelles de France. CniMiE. — Recherches sur les sulfures decomposables par I'eau, par M. E. Frejiy. — Lorsque Ton envisage Taction de I'eau sur les sulfures , on reconnait que ces composes peuvent etre partages en trois classes. La premiere comprend les sulfures alcalins et alcalino-terreux qui se dissolvent dans I'eau ; la seconde est formee par les sulfures insolubles;; la troisieme se compose des sulfures de bore, de silicium, de magnesium et d'aluminium , qui sont decomposes par I'eau : ces derniers sulfures sont a peine connus, parce que leur preparation presentait jusqu'a present de grandes difBcultes. L'etude de ces corps ofTre cependant un veritable interet; car faction que I'eau exerce sur eux permet d'expliquer les phenomenSs principaux qui accom- pagnent la production des sources sulfureuses. M. Fremy a obtenu les sulfures de bore , de silicium, de magnesium et dalu- mmium, en soumettant a faction du sulfure de carbone, sous i'influence d'une temperature ^levee , facide borique, la silice, la magnesie et I'alumine. Pour rendre cette reaction plus facile el pour souslraire le sulfure a faction deconi- posantedes alcalis contenus dans les tubes de porcelaine , il est quelquefois utile de melanger les oxydes a reduire avec du charbon, et de former des bou- lettes qui ressemblent a celles qui sont employees dans la preparatiou du chlo- rure de silicium. 280 COSMOS. M. Fremy s'est assure par I'analyse, que ces sulfures correspondent aux oxydes qui les ont produits. II a forme le sulfure de silicium avec la plus grande facility, en faisant passer de la vapeur de sulfure de carbone sur des boulettes de charbon et de silice g61a- tineuse qui sont placees dans uii tube de porcelaine que Ton porte au rouge vif. Le sulfure de silicium se condense dans ie tube et se pre^enle alors en belles aiguilles soyeuses et blanches, qui sont peu volaliles, mais faciles a entrainer par des vapeurs. Lorsqu'on chauffe du sulfure de silicium dans un courant d'air humide, il se decompose et forme des cristaux soyeux de sil;ce anhydre; il est evident qu'on peut expliquer , au moyen de cette experience , la production naturelle de cer- tains cristaux filamenteux de silice. Le sulfure de silicium mis en presence de I'eau , donne, commeon le salt, un vif d^gagement d'acide sulfhydrique et de la silice qui reste entierement en dis- solution et ne se decompose que lorsqu"on evapore la liqueur : il est impossible de ne pas rapprocher cette propri^te curieuse du sulfure de silicium , des circon- stances naturelles dans lesquelles se ferment certaines eaux minerales et quel- ques incrustations siliceuses. Comme le sulfure de silicium se produit probablement dans tons les cas oil la silice se trouve soumise a la double action d'un compose binaire, qui lui cede du soufie et s'empare en meme temps de son oxygene , ce sulfure n'cst peut-etre pas aussi rare qu'on le pensait jusqu'a present; et en admettant sa presence dans les terrains qui produisent les sources sulfureuses, on expliquerait I'exis- tence simultan^e de la silice et de I'acidesulfhydrique dans les principales eaux sulfureuses : cette hypothese se trouve en quelque soi te confirmee par les into- ressantes observations de M. Descluizeaux , qui demontrent que les eaux sili- ceuses des Geysers d'Islande contiennent une quantite notable d'acide sulf- hydrique. M. Fr6my se contente de soumettre ces considerations aux geologues, et de leur faire remarquer qu'en expliquant la formation des eaux sulfureuses et sili- ceuses par la decomposition du sulfure de silicium, il ne fait que donner de I'ex- tension a la Iheorie ingenieuse proposee par M. Dumas, pour rendre compte de la formation de I'acide borique. Les sulfures de bore et d'aluminium ont ete produits comme le sulfure de silicium , et sont egalement decomposes par I'eau, II a obtenu le sulfure de magnesium en faisant passer du sulfure de carbone sur de la magnesie pure; dans ce cas la presence du carbone ne parait pas utile. Ce sulfure est cristallisable, et soluble dans I'eau froide : lorsque sa dissolution est conservee a la temperature ordinaire, elle ne degage que tres-lentement de I'acide sulfhydrique; mais lorsqu'elle est portee a I'ebullition, elle produit alors une vive effervescence d'acide sulfhydrique , en laissant deposer aussitot de la magnesie. ( C. /?., tome XXXV, p. 27. ) Chimie ArpLiQUEE. Extraction daculure par V ammoniaque , -par M. Germain Bakruel. — « Un mineral de cuivre sulfure, pyriteux, gris, quelque complexe qu'il soit, etant donne, en retirer tout le cuivre, rien que le cuivre, sans grillage COSMOS. 281 et en laissant lout le reste du mineral , telle est la question que je me suis posee, dans I'interet du proprietaire d'une mine de la Calle en Aig6rie, que Ton croyait cuivre carbonate, et qui n'etait qu'un cuivre gris reconvert de car- bonate. " Guid^ par la grande afBnite du cuivre pour I'oxygene en presence de I'am- moniaque, j'ai tente d'abord Tempioi de ce reactif : le succes a ete complet. Le mineral mis en poudre et place avec de Tammoniaque ^tendu dans un flacon pouvant contenir en outre la quantity d'air suffisante pour fournir au cuivre tout Coxygene necessaire a son oxydation, fut agile queiques instants, le flacon etant parfaitement bouche : la coloration de rammoniaque fut instanlanee, et I'oxygene absorbe produisit un vide dont il ful facile de s'assurer en renversanl le flacon et retirant faiblement le bouchon, car I'air rentra vivement; la liqueur debarrassee de I'ammoniaque laissa I'oxyde de cuivre. « Le probleme etait resolu theoriquement, mais il fallait s'assurer si d'autres metaux,commele zinc, le cobalt, le nickel, I'argent qui auraient pu s'y trouver, et dont les oxydes sent egalement solubles dans I'ammoniaque, ne se compoi'- teralent pas comme le cuivre. Je traltai done de la meme maniere des combi- naisons nalurelles sulfurees et sulfo-arsenicales de ces metaux : Taction fut nuile; on ne retirait done que le cuivre. Pour m'assurer de I'enti^re effica- cite de Taction, je traitai le residu, que je supposais ^puise de cuivre et je n'ob- tins pas trace de coloration rouge par le prussiate de potasse; et le probleme otait ainsi completement resolu comme experience de laboratoire. « Ne pouvant, dans une note aussi succincte, donner les details des difficultes que j'ai du combattre pour Tapplication industrielle , je dirai seulement qu'apres avoir determine directement la proportion d'ammoniaque necessaire a Topera- tion, j'ai trouve qu'il fallait exactement 1 equivalent d'ammoniaque pour 1 de cuivre. Comme Toxydation est produite par un courant d'air insuffle lentement a travers le liquide, au milieu duquel le minerai pulverise est maintenu en suspension, j'ai cherche ce qu'il fallait d'air pour arriver au resultat: j'ai trouv6 que 1 kilogramme de cuivre demandait 833 decimetres cubes d'air. c< L'operation ne doit pas marcher trop vivement, car la temperature s'ele- vant, une grande partie de I'ammoniaque serait entrainee. On ne peut eviter tout a fait cet inconvenient, au moyen d'une disposition qui permettede retrou- ver cette ammonioque. « La dissolution cupro-ammoniacale, separee du reste du minerai, est sou- mise a une distillation convenable pour reprendre I'ammoniaque et Temployer aux operations subs(§quentes ; Toxyde de cuivre s'est alors s^par^ sous forme de paillettes micacees, noires, brillantes, qui sont reduites et fondues pour avoir le cuivre metallique. J'ai reussi aussi completement en employant directement Turine putreflee, traitee convenablement, mais non distillee. « Ce precede peut Hre applique avantageusement a Tessai de semblables mi- nerals, et Ton obtient ainsi en pen de temps tout le cuivre sous forme de culot, en fondant Toxyde oblenu avec un pen de charbon. « Ayant appris par M. Wuriz, qu'on venait de prendre pour TAngleterre et TAm6rique le brevet que j'ai pris, il y a deux ans pour ce precede, d'apr^s le 282 COSMOS. conseil de M. Dumas, devant lequel j'avais repete I'exp^rience, j'ai cru devoir communiquer a TAcademie ce resultat do recherches failes dans le but de pre- server les ouvriers ct Ics voisins des usines a cuivre , des dangers resultant souvent des vapeurs produites par le grillage. » [C. R. , I. XXXV, p. 18.) CniJiiE oncANrouE. — Recherches surla fermentation gallique ; par M. Robi- QtJET. — La noix de galle conlient, en outre du tannin et des divers principes dcja signaies par les chimistes, de la pectose et de la pectase. Ce dernier fer- ment, qui existe a I'elat soluble et a I'eLat insoluble, agit a la foissur la pectose etsur le tannin, transformantla premiere en pectine, et le second en acide gal- lique. La presence de I'eau et une temperature de 25 a 30°, sent nccessaires a celte reaction, en tous points semblables aux phenomenes ordinaires de fer- mentation. Le tannin elherique ordinaire contient assez de pectase pour 6tre transforme spontanement, en presence de I'eau en acide gallique; mais si Ton a soin de le puriGer ou simplement de faire bouillir pendant quelques minutes ses solutions, la metamorphose ne s'accomplil plus. La synaptase, le ferment de biere, I'albumine vegetale, I'albumine animale, la legumine ont une action fort douteuse sur le tannin, et retardcnt plut6t qu'iis n'accelerent sa formation en acide gallique. II est tout aussi facile de convertir la pectine des fruits en acide pectique au moyen de la pectase retiree de la noix de galle , que de transformer le tannin en acide gallique avec de la pectase separee du sue de racines nouvelles et en par- ticulier des racines de navets. L'ensemble des pht^nomenes observes dans le memoire de M. Robiquet peut etre designe sous le nom de fermentation gallique ; mais il ne faut pas oublier que cette derniere se confond avec la fermentation pectique. Le liquide sirupeux que Ton obtient dans la preparation du tannin par la melhode de M. Pelouze, ne doit pas etre consideie comme un ether tannique, mais simplement comme une juxlaposilion d'eau , de tannin et d'ether en pro- portions ires-variables et nullementderinies. 11 faut, pour que cette especed'as- sociation s'accomplisse, realiser une des deux conditions suivantes : ou exposer assez longlemps la noix de g:ille a I'humidite pour que le tannin s'hydrate direc- tement, puis lixivier avec I'elher non hydrate, ou employer de I'elher sulfu- rique \a\6 , conlenant assez d'eau pour arriver au m(^me resultat. CniMiE APPLiQUEE. — Rochuge de I'argent; experiences de M. Levol. — Les orfevres connaissaient depuis bien longlemps un phenomene curieux que pr(5- sente I'argent fondu sur la coupelle; mais M. Lucas en a le premier donnu la theorie, et toutes les observations posterieures n'ont rien ajoute de nouveau a son explication. Ce phenomene connu sous le nom de rochage consiste en ceci , que la surface du bain d'argent, polieet tranquilleun instant avantsa sohdiBca- tion , aussitit que celle-ci commence , se boursoufle endiffurents endroits, laisse ^chapper des jets abondantsde malicre gazeuse , qui entraine quelquefois du metal en fusion , et offre a la vue quelque chose de semblable a une petite ^rtp- lion volcanique. Le gaz qui sort ainsi de la masse d'argent, est de I'oxygene assez pur , que le metal plac6 dans de certaines conditions avait soustrait a I'air COSMOS. 283 ambiant , et qu'il avait condense autour de ses molecules a peu pres comme I'eau retient I'acide carbonique dans les eaus qu'on appelle gazeuses. Get oxygene, dont ie volume atleint souvent vingt-deux fois celui del'argent, peut 6tie re- cueilli au moment de la solidification du metal, ou bien peutse combiner avec du carbone et constituer de I'acide carbonique si Ton projette des charbons a la surface du bain avant le moment du rochage. Mais on n'avait pas songe jusqu'ici a s^parer I'oxygene de I'argent pendant que ce dernier est encore en un etat de paifaite liquidite; M. Levol la essaye et a reussi : il a reconnu que I'addilion d'une certaine quantity d'or dans la masse de I'argent, amenait le degagement immediat de I'oxygene absorbe. II se produit dans ce cas une veritable effervescence, la matiere se gonfle, bouilionneet peut meme facilement deborder pour peu que le creuset soil assez rempli, car M. Levol avul'alliage boursoufle occuper environ deux ou trois fois le volume de I'alliage en repos. Ce fait ne nous parait curieux que par la rarete des substances qui le pro- duisent; caril rentre completement dans I'ordre des phenomenes de dissolution et des actions capillairesou moleculaires. En effet, il ne nous semble differer en rien de ce qui arrive lorsque Ton ajoute de I'alcool a de I'eau de Sellz, qui a cess6 de mousser spontanement , ou qu'on y met du sucre, ou que Ton y plonge une cuiller d'argent ou de toute autre matiere. Ce qui arrive alors s'explique simple- mentpar le jeu des attractions moleculaires : comme elles sont plus puissantes entre I'eau, I'alcool, le sucre ou le solide plonge, qu'entre I'eau et I'acide carbo- nique, ce dernier est mis en liberie par le liquide qui s'engage alors dans une nou- velle association moins ephemere. — La stabilite tres-grande que prcsentent les alliages d'or et d'argent , revele une force adhesive assez notable entre les mole- cules de ces deuxmetaux; il n'y a done pas lieu de s'etonner que Toxygene faible- ment retenu par I'argent en fusion soil abandonne aussilot que I'or se prcsente pour en prendre la place. II est plus que probable que le platine produirait la meme effet, et que le cuivre, le plomb et d'autres metaux encore se preteraient assez bien a cette experience, si I'oxygene a I'etat naissant ne venait peut-elr© a se combiner avec eux au lieu de se degager librement. 2° IVonrelles d'AIIemag^ne. Physique. Evaluation de la quantiie cV absorption de la lumiere rouge par son passage a travers les fluides colores ; memoire de M. Beer de Bonn. — M. Beer est un jeune savant de ties-grande esperance; eleve favori de M. Piucker, il manie aussi avec une egale facility le calcul et les instruments de physique. Quoique encore au debut de sa carriere, il a aborde les questions les plus delicates de I'optique, et men^ a bonne Gn des recherches iheoriques a la fois et experimental! s qui auraient effraye de vieux physiciens. Ainsi, par exemple, la question de I'absorption de la lumiere par les milieux colores est tel- lement complexe que M. Babinet, apres Fresnel, I'appelle une vraie bouteille a I'encre, et qu'aucun physicien n'a ose encore exprimer par des nombres la quan- tite do lumiere absorbee; M. Beer le tenle aujourd'hui. II est le premier a recon- naitre que cet essai laisse grandement a desirer : 1° parce qu'il n'a opere que 284 COSMOS. sur de la lumiere rouge, la seule que Ton puisse obtenir homogene au moyen de verres transparents; 2° parce qu'il a el6 force d'operer avec la lumi6re des larapes et non pas avec la lumi6re solaire, ce qui le condamnait a n'employer que de tr^s-pelites epuisseurs des liquides coion'ts, ou des solutions tres-etendues d'eau, et ne lui a permisd'obtenir que des nombres Ires-petits, d'oii il est impos- sible de deduire, sans de tres-grandes erreurs, la quanlile d'absorption de cou- ches plus epaisses ou de solutions plus concentr^es. Ces imperfections n'empe- chenl pas que le travail du jeune physicien ne soil un tres-grand progres, et nous I'analysprons avec soin. Les mesures ont 6t6 pri?es avec un photometre nouveau tres-habilement construit : c'est le photometre de Richtie perfectionne par la methode de M. Arago. II est represenle fig. \. Les deux faisccaux paralleles de lumiere dont Fi-. I. on veut comparer les intensiles viennent horizontalement, I'un de la droite, I'autre de la gauche, et tombent sur deux prismes de Nicol. Ces deux prismes sont fixes dans les monlures h, h, qui tournent autour des axes des deux tubes horizontauxr,r, etsontmuniesde deux tetescirculaires divisSesi, t. Les tubes r,r enlrent dans un tube vertical plus large R R muni, a son extremile inferieure, d'un petit miroir double en acier poli, a son extremile superieure d'un syst^me oculaire special que nous decrirons plus lard. L'angle diedre du miroir double dont les faces polies sont inclin^es de 45 degres sur les axes des tubes R et r, passe par le point d'interseclion de ces memes axes : ce miroir pent tourner autour de I'axe du tuyau principal R; et Tangle parcouru dans ?a rotation peut ^tre mesure sur le cercle divise s. Sur Tangle diedre du miroir repose un dia- phragme horizontal avec une ouverture centrale et circulaire de cinq millimetres environ de diametre. Aii-dessus de celte ouverture circulaire, a travers laquelle on peut voir Tune ou Tautre des faces du miroir, se trouve une loupe o, ajustee dans la monture verticale H, avec un prisme de Nicol place au-dessous d'elle et une plaque de verre rouge transparent a lumiere homogene; la monture H, avec les trois pieces qu'elle renferme, peut tourner autour de Taxe R, au moyen du bras i, et Tangle de la rotation se lit sur le cercle divide T T. Pour se servir de cet appareil on rend d'abord le bord aigu ou Tangle diedre COSMOS. 285 du miroir perpendiculaire a I'ase commun des deux tubes r ; ses deux faces redechissent alors verticalement les deux rayons lurnineux horizontaux qu'il s'agit de comparer; et en regardant a travers la loupe on voit les deux moilies du diaphragme circulaire eclairees en general inegalement. On place a ant>le droit les sections principales des deux prismes de Nicol , de sorte que I'une coincide avec le plan de reflexion, c'est-a-dire avec le plan des deux axes R r tandis que I'autre est perpendiculaire a ce meme plan. On reconnait que cette condition de perpendicularile e=t remplie, lorsque la lumiere reflechie par le miroir ert tout a fait polarisee rectilignement ; et que par consequent pour une certaine position du prisme de Nicol vertical , la premiere moitie du diaphragme circulaire est completement obscure, la seconde moitie claire; tandis que 3 90° de cette position c'est la seconde moitie qui devient obscure a son tour. Admettons que la moitie de gauche est la moiiie sombre lorsque le bras ou index i est sitae dans I'azimulh 9, Tangle 9 etant compte a partir de la direction de Tangle diedre ou du bord du miroir double : si les deux faisceaux lurnineux a comparer avaient exactement la meme intensite, et que les pertps de lumiere produites par le passage a travers les prismes de Nicol et par la reflexion sur les faces du miroir elaient rigoureusement egales, les deux demi-ouvertures du dia- phragme circulaire apparailraientegalement lumineuses, lorsque Tindex i serait amene a I'azimulh 'f-)-i5°. Mais si le faisceau de droite est moins inlense si i'amplitude a de ses vibrations est plus petite que Tampliiude A des vibrations du faisceau de gauche, dans Tazimuth cp-|-4o, la moitie droile de Touverture circulaire sera plus sombre, et pour obtcnir Tegalite de lumiere des deux demi- ouvertures, il faudra placer Tindex i dans Tazimuth 9 -|- «, a etant plus petit que 45°; et d'apres la loi du cosinus, decouverte par M. Araso, on aura tang 9 = a : A. Par consequent, en operant comme nous venons de le dire II suffira, pour trouvor le rnpport des amplitudes, de chercher les deux azimuths de Tindex i, pour lesquelles les deux demi-ouvertures du diaphragme apparais- sent tres-egalement eclairees. La moitie de la difference entre ces deux azimuths donne Tangle a, et la tangente de cet angle sera !e rapport cherche des ampli- tudes. La demi-somme de ces memes angles azimuthaux donne Tangle 9, c'est- a-dire Tazimuth dans lequel la demi-ouvet ture de gauche doit se montrer au maximum d'exlinction : Ton pourra verifier s'il en est reellement ainsi, et con- troler, par consequent, les valeurs obtenues pour a. Mais on a suppose dans ce qui precede, que la perte de lumi6re dans I'instrument etait rigoureusement la meme pour ces deux faisceaux; ce qui n'a pas lieu en general; voici comment M. Beer se met, dans ses experiences, a Tabri de eel inconvenient. II emploie comme sources de lumiere deux lampes L, L a hnile et a double courant d'air dont la meche a quinze millimetres de diamelre. Leurs lumieres sont reflechies par deux miroirs concaves, et ramenees a Teiat de faisceaux paralleles. Apres qu'il a amene Tindex i dans Tazimulh 9 — J-, 9 ayanl la meme signification que ci-dessus, et -l designant un angle plus petit que 45°, qui differe de 43 d'au moins un degre, il re|.;le la lumiere de ses lampes de telle sorte que les deux moilies du dia(ihragme circulaire soient tres-igalement eclairees; et apres chaque experience il examine de nouveau si cette condition est remplie ; dans 286 COSiMOS. le tres-grand nombre des cas, les variations sont insensibles. Appelonsa 1' ampli- tude dufaisceau de droite, A Tamplilude du faiiceaude gauche, on aura encore tan<'4< = a: A. Cela fait, il place sur le trnjet du faisceau de droite la substance absorbante. L'amplitude de ce cole n est plus a, mais va, en designant par v le coemdent d'extinction de la substance : par la miMiie, la demi-ouverture droite apparail plus sombre ; et pour ramener I'egalite de luniiere il faut amener I'lndex dans razimulh'-? + a, ou cp— a, ce qui donne tang a = v a : A. De ces deux equa- tions rcunies on tire v = tang a : tang ■% L'angle 9 est connu de fait , Ton con- nait aussi 9— 4', on aura par consequent 4-; et I'on calculera immediatement v. Ce coefficient d'extinction doit elre considere comme le produit de deux autres coefficients, du coefficient relatif a Fextinction produile reellement par le milieu absorbant, 'et du coefficient rclatif a I'extinction produile par les passages de I'air dans le milieu interpos6, et de ce milieu dans lair, Dans les exp(5rietices de M Beer, les solutions salines etaient placees dans des tubes fermes par des verres paralleles : il y avail done passage de I'air dans le verre, du verre dans le liquide, du liquide dans le verre, et du verre dans I'air. Pourle passage de I'air dans le verre, la theorie donne pour coefScient d'extinction 2 : (1+e), en d6signant par e I'indice de refraction du verre; indice qu'on peul faire 6gal a 1,52, puisqu'on agissait sur de la lumiere rouge. En admeltant que I'indice de refraction du liquide, tres-peu different de celui de I'eau, ful e, =:1,33 ; I'extinction produile par le passage du verre dans le liquide aurasensiblementpourvaleur2: (^ +'^) = !« coefficient d'extinction pour le passage du liquide dans le verre sera do meine 2 : (^ 4"^ , et du verre dans I'air 2 f 1 -f -) •• en faisant done abstraction de la reflexion de la lumiere , le coefficient r d'extinction par les surfaces de separation des milieux sera donne par la formule : qui , traduite en nombre , donne : log r=: 9,9791679, r = 0,953. En appelant maintenantX le coefficient de I'extinction reellement produite par la seule absorption du liquide colore , on aura : V tang a. ''■~7~ 0,95. tang 'I . M Beer appelle coefficient d'absorption principal le coefficient d'extinc- tion \x que subit l'amplitude du rayon dans son passage a travers une longueur du milieu absorbant , egale a I'unite , et il prend pour unite de longueur un decimetre • il fait de plus observer que la theorie indique , et qu'il a demontre , par des experiences directes, que X etait lie avec le coefficient d'absorption COSMOS. 287 principal (j. , par I'equation X = [j. , d etant lepaisseur de^la colonne liquide interposee ; on aura done definitivement : V«,95. tang'i/ ■ M. Beer a op^rc sur des dissolutions a divers degres de concentration, plus ou moins etendues d'eau, et robservation n'a pas tarde a lui apprendre que le pouvoir absorbant sp^cifique ne dependait que de I'epaisseur travers^e de solu- tion concentree au maximum. Ainsi , par exemple , il a rempli d'abord un tube d'un decimetre de longueur d'une dissolution de sulfate de cuivre contenant, a la temperature 13° 5,1 volume de sel et 9 volumes d'eau, diluee par conse- quent dans le rapport de 1 a 9 ; puis un tube de 2 decimetres de longueur, d'une solution diluee dans le rapport de I a 19; il y avait (5videmment dans les deux tubes la meme quantite de solution concentree ; vues a la lumiere blanche eiles semontraienl colorees exactement de la meme nuance; aussi examinees dans le photometre , et analysees par le verre rouge, eiles donnaient sensiblement la meme valeur de Tangle a , 3° 28' 10" pour le tube d'un decimetre; 3» 23' 0" pour le tube de deux decimetres; et les deux valeurs du coefficient d'absorption de la solution concentree , deduites des deux systemes de valeur des angles a et <1, differaient tr^s-peu I'un de I'autre 0,065 ; 0,063. Pour donner une idee du degre de precision des mesures obtenues par le pro- cede d'observation de M. Beer, nous transcrirons les details d'une de ses operations. A la temperature delO", il remplit un tube d'un decimetre de longueur avecune dissolution d'ac^late de cuivre, renfermant un volume de solution concentree et neuf volumes d'eau : apres que les lampes eurent ete reglees , de telle sorte que les deux demi-ouvertures du diaphragme se montrassent egalement eclairees lorsque I'azimuth de I'index i etait 9 — 6 = — 16°, il placa le tube sur le trajet du rayon de droite : les deux demi-ouvertures du diaphragme reparurent e<^a- lement eclairees dans une serie d'essai, , lorsque les azimuths de I'index i furent 1 " du c6te de 9 26° 50' , 26" 35', 27°, 27° ; en moyenne 26° .56' 23 ; 2° de I'autre cote , 29° 50', 30° 30', 29° 30', 30°, en moyenne 29° 57' 5, on avait done o + «= 29° 57/ 5 ; tp — a= 26° 56' 25. a= 1« 30' 40"; 0 = 28° 26' 30", i =9 -f- 16. On en deduisait, pour le coefficient principal d'abiorption d'une solution d'ace- tate de cuivre elendue dans le rapport de 1 a 9 , _ tang. 1° 30' W. 0,93. tang (28° 26' 50" -|- 16°)' Nous ne reproduirons pas la table complete dans laquelle M. Beer resume ses recherches; nous enregistrerons seulement les coefficients moyens d'absorption des solutions liquides sur lesquelles il a op§r6, en indiquant la temperature au moment de rop(5ration : 288 COSMOS. Acetate de cuivre 40" 0,0298. Sulfate de cuivre -IS^.S 0,0658. Chlorure de cuivre 11" 0,0900. Sulfiite de cuivre ammoniacal. ... 13° 0,09Gi. Sulfate de nickel et de potasse. . . 13",5 0,029.i. Nitrate de nickel 12»,5 0,1831. Chromate d'alumine '13",5 0,1692. Acetate defer 10»,5 0,2110. CWorure de fer 9",3 0,2749. Chlorure d'urane 13",5 0,8688. Cyanhydrate de potasse et de fer. 42", 3 0,3169. Monochromate de potasse 11° 0,8797. Bichromate de potasse 1 4",5 0,9342. Magnetisme terrestre. D;ins une premiere note que nous avons analysee, M. Lamont croyait avoir demonlre que I'amplitude des variations de la decli- naison diurne presente une periode decennale; de telle sorte qu'elle augmenle re'^ulierement pendant cinq ans, et decroit de meme pendant cinq aulres annees. II s'etait reserve de reconnailre si ^inten^ite horizontale presente dans ses variations les memes pdriodes que la declinaison, et communique en conse- quence , dans une note nouvelle , le resullat de ses recherches. II prend pour t^randeur du mouvement diurne de Tintensite horizontale, la difference entre les positions de I'aiguille a onze heures du matin et a six heures du soir, et il obtient les moyennes annuelles suivantes exprimees en dix milliemes de I'intensite horizontale : 1843 — 7,8; 1844—6,9; 1845 — 6,6; 1846 — 11,4; 1847—12,1; 4 848 — 14,3; 1849 — 12,0; 1850 — 10,7; 1851 — 9,1. La marche de ces moyennes est beaucoup moins reguliere que dans le cas de la declinaison ; on voit cependant se dessiner une periode de variations maximum et minimum; ainsi le premier minimum a eu lieu vers 1843; le maximum vers 1848, cinq ansapres, conime pour les variations de la declinaison. Cette periodicity de variations tour a tour croissantes et decroissantes suppose une periodicite sem- bkibie dans les variations de la cause qui les produisent. Celte cause des variations macneliques, la grande majorite des physiciens s'accorde h la chercher dans la temperature de I'atmosphere. « II faudrait done, ditM. Lamont, arriver a con- stater dans les variations de la temperature atmosph6rique cette meme perio- dicity de variations tour a tour croissantes et decroissiintes pendant un certain nombre d'annees. » Or n'est-ce pas ce qu'a fait reellement M. Glaisher, comme nous I'avons rappel'j page 240 du Cosmos? BE L'lHPRIUEr.lE DE CRAPELET , T.UE DE YAtGiRAr.D, 9. COSMOS. 289 NOUVELLES DE LA SEMAINE. Angleterre. — 1 . Les communications de telegraphic electrique entre I'Angleterre et rirlande, entre rirlande et TEcosse sont aujourd'hui detinitivement etablies. Les grandes operations de rimmersion des cables conducteurs sous-marins, d'une part, a travers le canal Saint- George, entre Holyhead, a I'extreniite de I'ile d'Anglesey, et le cap Howth pres de Dublin; de I'autre, a travers le canal d'Irlande, Irish- channel, de Belfast a Port-Patrick, ont ete executees avec une promp- titude et un bonheur incomparables. Nous empruntons les details de la premiere de ces operations a une lettre adressee par M. Le Chatelier a la Societe d'encouragement. « Pendant que Tattention publiquesepreoccupaitvivementdel'eta- blissement du telegraphe sous-marin , et que des compagnies cher- chaient vivement a se constituer et a reunir les capitaux necessaires, M. Newall et ses associes , proprietaires de la fabrique de cables en fil de fer de Gateshead, qui I'annee derniere, avec leurs moyens puissants et perfectionnes de travail , avaient applique en moins d'un mois au cable sous-marin de Douvres a Calais son enorme enveloppe metal- lique, se sont decides subitement et sans mettre personne dans leur confidence, a fabriquer a leurs risques et perils et a immerger un nou- veau cable sous-marin de I'extremite de I'ile Holyhead au cap Howth, voisin de Dublin , sur une distance de 80 milles ou de 130 kilometres. « En trois semaines, M. Samuel Stateham , directeur de la grande fabrique de gutta-rpercha de Londres, leur a fourni le fil de cuivre en- duit d'une double enveloppe de gutta-percha; ils I'ont transports aussitot a leur usine de Gateshead, et I'ont emprisonne a I'aide de leurs ingenieuses machines, dans une enveloppe metallique formee de douze fils de fer galvanises. " Le cable entier d'une seule piece, pesant, a raison d'une tonne par mille, 80 tonnes (80 000 kilogr. ), a 6te charge sur un convoi de quinze a vingt wagons accouples avec soin, et a traverse I'Angleterre en quelques heures , pour arriver a Maryport , ou 11 a ete charge sur le bateau a vapeur Britannia. « Apres une inspection minutieuse du cable qui fit reconnaitre un defaut dans I'enveloppe isolante , et qui for^a a le debarquer pour faire la reparation necessaire , M. Newall et M. Stateham procederent a rimmersion. <« Partis de grand matin de Holyhead, le 1" juin, sur le Britannia^ 25 JDILLET 1852. 13 290 COSMOS. quo remorquait le bateau a vapeur de la marine royale , le Prosper, apres avoir surnionte avec beaucoup d'energic et (riiabilcte les diffi- cultes que presente le deroulement du cAhlc , ils jetoront I'aiicre a Howlh, vers sept heures du soir, apres avoir marche a une vilosse varia- ble de trois a cinq mille h I'heure. Un echange de depeclies conimenca aussitot entre le Britannia et Holyhead, et vint recompenser de lous lours efforts les auteurs de cette entroprise bardie. Enfin, le len- demain out lieu la jonction de I'extremite du cable avec le rivage, qui presente d'assez grandes diftlcult^s, egalement surmonteos par MM. Newall et Stateham, et la communication fut definitivement etablie de la maniere la plus satisfaisante entre Dublin et Holybead. « M. Nowall et ses associes ont fait faire un pas considerable a la te- legraphic sous-marine, non-seulement en quadruplant la distance qui avait ete francbie entre Douvres et Calais, mais en reduisant dans le rapport de dix a un le poids du cable. Leur cable ne pfese, en effet, qu'une tonne par mille, tandis que le cable immerge de Douvres a Calais en pese au moins dix. Ce dernier comprend , a la verite , quatre fils isoles ; mais il y a tout avantage a ne pas compromettre dans une seule operation , d'autant plus difficile que le poids specifique du cable est plus considerable, les conducteurs multiples que Ton etablit pour satisfaire aux besoins d'un service tres-actif ou qui doivent se suppleer en cas d'avarie. II est egalement avantageux de les ecarter aux approches du rivage, pour que tous a la fois ne soient pas soumis aux memos chances d'accidents, dans le cas oil un navire viendrait h Jeter I'ancre dans le voisinage. » D'un autre cote, on lisait la semaine derniere dans le Belfast News Letter : << Le cable sous-marin qui doit unir I'Ecosse a I'lrlande est maintenant a bord du vapeur qui est a I'ancre a Port-Patrick. II sera definitivement immerge aujourd'hui dans toute la traversee du canal. II n' y avait pas un seul lit disponible k Port-Patrick et dans les envi- rons, tant etait grando raffluence des personnes avides d'assister a cette interessante ceremonie. On doit les plus grands eloges au zele deploye par MM. Gilpin et Griffin pour completer la communication entre les trois royaumes unis. D'apres le tarif excessivement mod6re que la compagnie a I'intention d'adopter, nous pensons que I'entre- prise ne peut manquer de reussir pleinement , et que toute opposition devient desormais parfaitement inutile. » Voila done encore un grand progres accompli , et dans quelques mois , esperons-le, nous apprendrons a nos lecteurs que le cable sous- marin qui doit unir I'lrlande par Halifax avec I'Amerique du nord a ete lui-meme depose au sein de 1' Ocean. COSMOS. 291 2. Le rapport des juges commissaires de la grande exposition uni- verselle de 1851 vient enfin de paraitre. C'est un enorme volume de 866 pages imprimees sur double colonne , et renfermant Fanalyse exacte de tous les principaux objets compris dans les trente classes de I'expo- sition. 11 debute par le rapport general de M. le vicomte Canning , president du conseil, rapport lu dans la seance solennelle de la pro- clamation du jugement des divers comites ; viennent ensuite Ic discours du royal conjoint, lo prince Albert; en reponse au rapport du vicomte Canning , et la nomenclature de tous les objets couronnes , des noms des exposants qui ont obtenu les grandes medailles , council medals ^ les medailles de prix , prize medals , des recompenses en argent , ou enfin des mentions honorables. On a inscrit dans une liste speciale les noms des dames qui ont remporte des prix. Les rapports des presi- dents des comites speciaux sont reproduits integralement; voici les noms de quelques-uns des auteurs de ces rapports : Produits mine- raux, M. Dufresnoy, 35 pages; substances alimentaires , D"" Hooker, 16 pages ; materiaux bruts ou matiferes premieres des manufactures , les professeurs Solly etOwen, 100 pages; machines du genie civil, M. Brunei, 3 pages; architecture navale, artillerie , M. le baron Charles Dupin, 15 pages; instruments d'agriculture , M. Pusey , 18 pages; instruments de physique et demathematiques,M. Giaisher, 80 pages; imprimerie et librairie, MM. Firmin Didot, Whittingham et de La Rue, 58 pages ; veiTerie, lordde Mauley, 16 pages; arts meca- niques, le due d'Argyle , 5 pages; produits divers non classes, MIVL Hoffman et Waren de La Rue , 79 pages; sculpture, M. Panizzi , 7 pages ; arts du dessin , M. Redgrave , 54 pages ; substances mine- rales travailleeset employees dans les constructions ou les decorations, M. Ansteed, 36 pages. L'enorme quantite de documents historiques , scientifiques et descriptifs contenus dans ce vaste ensemble, en fait une veritable encyclopedic des sciences et des arts que Ton consultera sans cesse et qui sera d'autant plus utile qu'on I'a enrichie d'une double table, alphabetique et par ordre de matieres, en ayantsoin de renvoyer aux catalogues officiels et illustres publics par les directeurs de la so- ciete du Palais de cristal. Ce volume , ajoute le LUeranj Gazette, re- dige par les plumes les plus habiles et les plus competentes, couronne glorieusement la grande exposition , et conservera a la posterite le souvenir de I'intelligence , du zele , del'esprit de justice et d'impartia- lite qui presid^rent a I'examen des innombrables produits du genie et de I'industrie de tous les peuples. Les commissaires royaux ont decide que chacun des exposants recevra un exemplaire de ce rapport gene- ral , et la distribution commencera dans le courant du mois d'ao6t. 292 COSMOS. 3. Les impressions suivantes d'un emigre de I'Australie donneront une idee des etonnants rt'sultats de la navigation a vapeur. Le soir, dit-il, apr^s men penible travail du jour, je m'assois sur le rivage et je benis les vagues qui m'apportent de doux souvenirs de mon pays natal. Elles caressent agreablement mon oreille en me repelant tour a tour que je ne suis plus qu'a soixanle-dix jours de nia vieille Angle- terre.Soixante-dix jours seulement! £t il ya quelquesanneesle voyage de I'Angleterre en Australie etait un voyage de six ou sept mois. Les progres de la science sent si rapides, le genie du commerce et de I'in- dustrie bondit avec tant de vitesse , qu'avant une annee ma distance au sol qui me vit naitre ne sera plus que detrente-cinq jours. L'Australie sera plus pres de TAngleterre que ne I'etait le Canada il y a vingtans ! 4. Les directeurs de I'entreprise du palais de cristal de Sydenham ont resolu d'amener I'Ocean a cette station de cheminde fer, qui n'est encore qu'un village , et de la convertir en un vaste etablissement de bains de mer , oii I'habitant de Londres viendra retablir sa sante et se distraire de ses Iravaux. De Sydenham, I'eau salee sera distribuee sans peine dans les principales residences seigneuriales, les hopitaux, les hotels et les bains publics de Londres; et Ton a calcule deja qu'un bain d'eau de mer ne couterait qu'un penny , dix centimes. Les An- glais tressaillent de plaisir a la pensee que bientot les pulsations de la mer se feront sentir jusque dans les baignoires de leurs chambres! 5. Le reverend W. R. Dawes a lu dans la derniere seance de la societe royale d'Aslronomie, une note tres-curieuse sur les corps lu- mineux ou nieteoroides que Ton voit au telescope dans les rayons du soleil , etqueM. Read, un autre savant anglais, a souventaussi obser- ves. Le 9 septembre 1851, le ciel etait serein, le soleil tres-chaud, et le vent E. N. E. tres-sec. Un peu avant midi, M. Dawes se preparait a observer le soleil avec sa lunette de huit pieds et demi , et pendant qu'il regardait dans le chercheur a travers un verre sombre, il fut vi- vement surpris de voir un objet brillant croiser tres-rapidement le champ de la vision. Quelques secondes apres un second objet sem- blable passa dans la meme direction et fut suivi d'un assez grand nombre d'autres : I'^clat de ces petits corps lumineux etait vraiment extraordinaire, et frappa d'autant plus M. Dawes, que le soleil eclai- rait aussi le champ du chercheur. 11 arma sa lunette d'un oculaire positif a large ouverture, grossissant environ soixante Ibis, dirigea sa lu- nette vers le soleil, et apres avoir mis au foyer sur les bords de I'astre, il I'eloigna assez du disque pour pouvoir supporter a I'oeil nu I'eclat de ses rayons. II vit aussitdt une multitude de corps brillants courant lous a peu pres dans la meme direction , de I'est-nord-est a I'ouest- COSMOS. 293 sud-ouest ; quelques-uns cependant passaient du nord-est au nord- nord-est. 11 y en avail de toute grosseur ; les plus ronds etaient les plus gros, et ils se moiivaient plus rapidenient que les petits : aucun d'eux ne montrait de phase , quoique leur eclat ne fut pas le nieme sur tous les points. Get eclat augmentait considerablement lorsque la lu- nette se rapprochait du disque solaire , et il atteignait son maximum lorsque les rayons directs du soleil penetraient eux-memes pour un instant tres-court dans la lunette. Pour se faire une idee de I'eclat de ces corps brillants, M. Dawes dirigea sa lunette sur la planfete Venus qui se trouvait a six degres du soleil vers I'ouest ; le champ etait encore sillonne d'une multitude de corps brillants, et la lumiere de plusieurs d'entre eux surpassait de beaucoup celle de Venus ; on les voyait a travers un verre noir qui eteignait completement la lumiere de la pla- nete. Le volume de plusieurs de ces corps brillants etait plus grand que celui de Jupiter vu avec le meme grossissement. Que sont-ils enrealite? Des meteores, des asteroides; on le croirait du moins a entendre M. Read qui s'en est tant preoccupe. M. Dawes n'a pas partage cette illusion. Parturient monies , nascelur ridiculus miis. II savait deja par experience que la presence dans Tatmosphere, entre la lunette et le soleil, de graines ailees, des graines du chardon, par exemple, donnait naissance aux memes apparences extraordinaires, lorsque ces graines etaient vues au dela du foyer. Sa lunette heureu- sement est montee equatorialement, il pouvait dfes lors esperer de suivre assez longtemps I'un des corps dans sa course pour pouvoir I'amener parfaitement au foyer : il le fit, et la veritable nature de r^tre myslerieux se revela ainsi completement a lui. C'etait bien une graine ailee emportee par I'air dans le sens du vent regnant. Les plus grosses roulaientsur elles-memes, et dans ces mouvementsla forme de la houppeleg^re qui surmonte la graine apparaissait tres-distinctement. Les distances de ces differents corps etaient tres-inegales, comme cela devait etre, et on ne pouvait les amener au foyer que successivement. Les plus petits etaient en general les plus eloignes. Vers six heuresdu soir, ils etaient moins nombreux qu'a midi ; ils brillaient extraordinai- Tement tant qu'ils ne passaient pas sur le disque du soleil , alors ils n'e- taient plus qu'une tache noire semblable au troisieme ou au quatri^me satellite de Jupiter lorsqu'ils se projettenL sur la planete. Ceux qui dans ce moment etaient exactement au foyer montraient leur forme ailee plus parfaitement dessinee par leur profil noir sur la surface eclairee 294 COSMOS. du soleil. Los differences de formes observees par M. Dawes le forcent a croire que plusieurs sortes de graines ailees llottaient a la fois dans I'atniosplierc , des graines de chardon , de pissenlit , de senegon , de saule, etc., etc. M. Dawes ne dit pas formellement que les meteores observes et decrits avec tant de complaisance par M. Read sent des graines prosaiques suspendues dans I'air, entrainees par le vent et eclairees vivement par les rayons du soleil ; mais il existe une si grande similitude entre les phenomenes observes par lui le 9 septembre 1851 et les apparences qui frapperent tant M. Read dans I'automne de 1850, qu'il lui semble tout a fait impossible de revoquer en doute I'identite de cause de ces phenomenes et de ces apparences. 6. M. Faraday a fait a I'lnstitution royale une nouvelle le?on sur les lignes physiques do force magnelique ; ellc n'ajoutc absolument rien a ce que nous avous dit dans la dixieme livraison du Cosmos. 7. 11 est grandement question en Angleterre d'un traite d'uniou entre les diverses societes scientifiques et artistiques. Le conseil de la societe Royale de Londres aurait invite les presidents de la societe Lin- neenne, de la societe Zoologique, de la societe royale Astronomique, de la societe de Chimie a se reunir a lui pour discuter un projet longue- ment expose dansun memoire redige par le comte de Rosse, et qui aurait pour but de reunir sous un meme toit, dans un meme local, les cinq grands corps qui se partagent le monde savant anglais, et a faire converger dans un butcommun les forces de leurs illustres membres, de maniere a donner au progres scientifique une impulsion nouvelle et plus forte. Les seances de ces societes se tiendraient dans lesmemes salles ou du moins aux divers etages d'un meme edifice; leurs biblio- thfeques, rangees dans des salles attenantes les unes aux autres, ne seraient plus que des portions unies d'un vaste tout, veritablement ency- clopedique, comparable a la bibliotheque commune des cinq acade- mies qui composent notre Institut de France, mais beaucoup plus riche. Ce projet d'union nous semble tres-simple, et cependantil apparaiten Angleterre comme une grande revolution dont on ne parle qu'en trem- blant et a demi-mot, ainsi qu'on le ferait dun coup d'Etat. La societe des Arts qui la premiere a provoque cette concentration ou cetle mise en commun d'efforts grandement diminues par I'isolement, n'a recu encore aucune ouverture : elle est forte cependant et tres-puissante ; pourquoi ne lui ferait-on pas le meme honneur qu'a I'academie fran- ?aise des Beaux- Arts? 8. Les encouragements accordes aux hommes qui cultivent la science avec ardeur et gloire sont de la part des gouvernements un acte de haute intelligence ; aussi tous les organes de la publicite en Angleterre COSMOS. 295 sont-iJs unanimes pour feliciler le ministere anglais d'avoir accorde, sur la recommandation deloid Rosse, a M. Hind, le grand decouvreur de planetes, une pension annuelle de 200 livres (5000 fr.); a M. Man- tell, I'iilustre paleontologiste, une pension de 100 livres (2500 fr.); a M. Ronalds, I'infatigabJe directeur de I'observatoire de Kew, une pension de 75 livres (1875 fr.}. 9. Sir James Mac-Adam, I'inventeur du celebre' empierrement des routes qui porte son nom, est mort dans les environs de Londres, la semaine derniere. Les Parisiens du boulevard, quand le moment de la colere irreflechie sera passe, lui eleveront peut-etre une statue en macadam. 10. On vient de publier en Angleterre la liste des accidents arrives sur leschemins de fer, du 1" juillet au 31 decembre 1851. Le nombre des voyageurs transportes a ete de 47 509 392; 113 personnes ont ete tuees, 264 ont ete blessees. Le nombre des accidents independants de toute imprudence de la part des passagers a ete de 8 pour les per- sonnes tuees, de 213 pour les personnes blessees; 9 cas de mort et 14 cas de blessures sont dus a I'imprudence ou a la mauvaise conduite des voyageurs ; 32 employes et 11 voyageurs ont ete blesses parce qu'ils n'avaient pas pris les precautions exigees par les reglements • 32 morts et 6 cas de blessures graves sont dus a des passages intem- pestifs sur la voie. La longueur totale des chemins de fer en exploita- tion, au commencement de 1852, etait de 6800 njilles, 2266 lieues plus de 9000 kilometres. Amerique.— 1. On annonce une nouvelle et curieuse application des principes de la telegraphie electrique. Un inventeur des environs de Louisville a reussi a faire qu'un morceau de musique improvise et joue sur le piano ou sur I'orgue fiit imprime en meme temps en points ou en chiflfres par Faction du couraut electrique. £n meme temps qu'une tou- che ou une pedale sont abaissees par I'artiste et qu'un son est produit ce son est represente par un point trace sur du papier de musique regie, absolument comme dans les telegraphes imprimant a distance. Le di- recteur du Scie7iii/ic American journal se trompe en rangeant cette decouverte dans la meme categorie que celle de M. Bain qui proposait un moyen efficace de jouer un morceau quelconque de musique sur un piano, ou un orgue, place a telle distance que Ton voudrait. La seconde invention a un degre d'utilite beaucoup plus evident. Nous trouvons malgre cela que la somme de 10 000 livres sterling, offerte a I'inven- teur pour sa paten te est par trop enorme, 2. La production de Tor, qui n'etait en 1846 que de 114 674 livres, s'est elevee en 1850 a 365 950 livres. L'augmentation de la production 296 COSMOS. de I'or dans ces cinq annees a done ete do 219 pour cent; tandis que cello de I'argent n'a ote que de 34 ^ pour cent : cette dcrnifere de 1979 084 livres en 1845, no s'est olovoe en 1850 qua 2 653 386 livres. L'accroissement annuel do la quantite d'or est done de 44 pour cent environ, celui de I'argent de 7 pour cent. En 1801 on produisait 19 tonnes d'or , 856 tonnes d'argent ; une livre d'or pour 45 livres d'argent; les chiffres de la production ont ete, en 1846, 42 tonnes d'or, 727 tonnes d'argent; une livre d'or pour 17 livres d'argent ; en 1850, 34 tonnes d'or, 978 d'argent; une livre d'or pour 7 livres d'ar- gent; en 1851 , 180 tonnes d'or, 1002 d'argent; une livre d'or pour 5 livres d'argent; en 1852 enfin la production sera 242 tonnes d'or, 1027 tonnes d'argent; une livre d'or pour 4 livres d'argent. 3. Un puitsartesien creuse a Cohaba et profond de 735pieds, donne 5400 litres d'eau par minute , plus du double du puits de Grenelle , si variable, holas ! dans son rendement. Get immense jet forme en retom- bant une magnifique cataracte , et pour distribuer ses eaux il a fallu creuser un canal large et tres-long. 4. M. John Wite de Lancastre, dans sa cent trente et unieme ascen- sion du 3 juillet, a Portsmouth-Ohio , a vu de trfes-pres un grand orage en action dans I'air , et voici les particularites observees par lui. 1° L'ensemble des nuages orageux formait deux couches distinctes , separees I'une de I'autre par une distance d'environ 2000 pieds. 2° La pluie, la neige et le gresil partaient toujours de la couche superieure. 3° Des nappes de lumiere orangee, semblables a des vagues, ondu- laient silencieusement dans I'espace qui separait les deux couches. 4° Les decharges 61ectriques, eclairs, tonnerres, foudres, avaient lieu constamment dans la couche inferieure. 5° L' orage etait beaucoup plus violent au-dessus qu'au-dessous de l'ensemble des deux couches de nuage , et ce qui sortait de la couche inferieure , pluie ou gr^le , faisait avec la verticale un angle d'environ 25° ; la pluie et la grele etaient beaucoup plus denses au centre de la couche inferieure que sur les bords. 6° A I'ombre de la couche superieure il faisait vraiment froid; a I'ombre au contraire de la couche inferieure, il faisait tres-chaud. 7° La couche superieure etait emportee par le courant qui souffle tou- jours do I'ouest vers Test. Ces fails confirment les theories admises. Franklin, de Saussure, Bec- caria,etc., ont depuis longlemps emis I'opinion que pour constituer un orage proprement dit il fallait necessairement la superposition de deux couches de nuages charges d'electricite differente. 5. Un auleur americain, M. Mascher, fait entre les machines d'inven- tion humaine et les machines de creation divine un rapprochement COSMOS. 29T qui confond rimagination. Un pigeon voyageur, dit-il, du poids d'une livre, convertit en 24 heures 96 grains de charbon en acide carbonique, et Ics exhale par la respiration. Admettons que lorsqu'il vole il con- sume une quantite double de charbon, ce sera 192 grains ou un tren- tieme de livre pour un voyage de 24 heures ; et pendant ce temps-la, avec une vitesse moyenne de 60 milles par heure, il fera par jour 1440 milles, et traversera I'Ocean en moins de deux jours. Or, les plus grands bateaux a vapeur, les mieux construits, mettent douze ou treize jours et depensent presque leur volume de charbon. Chez I'oiseau ce n'est pas de la vapeur, mais bien de I'electricite qui est produite, et produite sans depense aucune, par I'oxygfene eniprunt^ a Fair ; or, mal- gre tous les progres et tous les efforts de la science, et meme en depen- sant des quantites enormes d'acide et de metaux, il est impossible, a I'heure qu'il est, de faire traverser I'Ocean a un navire par Taction des courants electriques! Nous ne sommes done pas encore sousce rapport a I'enfance de I'art, et ce que nous avons a faire avant tout c'est d'etu- dier avec ardeur la mecanique de la nature, la mecanique des etres vi- vants, pour I'imiter au moins de loin. C'est la le seul et veritable chemin du progres. Suisse. — 1. Deux jeunes freres, MM. Adolphe et Hermann Schla- gintweit , qui ont parcouru et etudie avec tant de succ^s la chaine des Alpes , viennent de publier quelques mesures hypsometriques det sommets du mont jRosft , le plus eleve des mamelons alpiques, apres le mont Blanc. La mesure la plus directe qu'ils aient obtenue se rap- porte a la Yincent-Pyramide, sur laquelle ils sont montes avec leurs barometres, en partant de Zermatt en Valais. II leur a ete possible de s'y livrer a une serie d'observations qu'ils ont comparees ensuite a celles pratiquees contemporaineraent dans les principaux observatoires. La formule dont ils ont fait usage est celle de Gauss, avec les corrections de Bessel ; la hauteur obtenue par cette voie est de 4224 metres , nombre qui ne differe pas beaucoup de la hauteur determinee par d'autres melhodes et a d'autres epoques, par MM. de Saussure, Oriani, Carlini , Plana , Coraboeuf , de Welden , Berchtold et Delcros. — Voici maintenant les elevations des aulres sommets du mont Rosa , deter- minees par des moyens indirects , mais dans lesquels MM. Schlagint- weit paraissent avoir toute confiance. Les cimes mesurees sont ali- gnees suivant la direction N. S. Metres. Pieds. 1. Nordende 4597 14 153 2. Hochste Spitze, cime la plus elevee. 4640 14 284 298 COSMOS. Mitres. Pieds. 3. Zumsteinspitze 4569 U 064 4. Signalkuppe 4562 14 044 5. Parrotspitze 4440 13 668 6. Ludwigshohe 4337 13 350 7. Schwarzhorn 4295 13 220 8. Balenenhorn 4245 13 070 9. Vincent-Pyramide 4224 13 003 2. Les journaux suisses racontaient naguere qu'un ouvrier du canton de Schwitz avait imagine et construit un appareil a imprimer par Tac- tion des courantselectriques. Aussitot qu'on a depose unelettre dansle composteur, le circuit galvanique estferme, et cette lettre, quelle que soit d'ailleurs sa forme, s'imprime immediatement sur la feuille de pa- pier qui avance d'un pas a chaque lettre nouvelle. Les electro-aimants qui impriment la lettre et font avancer le papier deviennent actifs a la fois, et s'arretent a la fois, de telle sorte que le papier reste a la meme place tant que I'ouvrier n'a pas depose une lettre nouvelle. On ajoutait quel'impression electrique etait tres-belle et presque semblable acelle des presses ordinaires h la mecanique. Prusse. L'Academie royale des sciences de Prusse a Berlin propose pour le concours de I'annee 1854, comme sujet de prix , la theorie complete des mortiers hydrauliques. Voici les termes du programme : « Quoique la nature des mortiers hydrauliques soit en grande partie connue, puisqu'elle resulte certainement de la formation de silicates, il reste cependant a mettre mieux en evidence la composition des combinaisons auxquelles la preparation des divers mortiers donne naissance. L' Academic de Berlin demande en consequence que le genre entier des composes designes sous le nom de mortiers hydrau- liques devienne I'objet de recherches plus approfondies et plus com- pletes , et que Ton constate par des methodes facilement applicables la nature des divers produits nes de leur fabrication. » Le concours sera ferme le 1" mars 1854. Le prix est de ICO ducats (1185 fr.). II sera decerne, s'il y a lieu, dans la seance tenue annuellement pour I'anniversaire de la naissance de Leibnitz, dans le courant du mois de juillet 1854. Les memoires doivent etre ecrits soit en allemand, soit en fran^ais, soit en latin. Suede. L'Academie des sciences de Stockholm a institue en differents points des c6tes de la Sufede des observations journalieres dans le but de faire constater d'une mani^re precise quelle est la quantite reelle dont s'exhausse annuellement le sol de ce pays. De mesures compa- ratives faites a differentes epoques on avait deduit que cet exhausse- COSMOS. 299 ment etait d'environ 1",33 par si^cle a Stockholm, et qu'il etait plus considerable dans la golfe de Bothnie. En attendant le resultat de nouvelles observations qui meriteront toute confiance , on a cite le fait suivant qui semblerait infirmer la valeur du chifi're rapporte plus haut, au moins pour la latitude de Stockholm. II existe a Stockholm , sur la place Skeppsbron, pres du port, une maison qui a ete batie au commencement du xvii* siecle , et dont la cave est inondee lorsque I'eau de la mer attemt une elevation de 66 centimetres au-dessus du niveau moyen. Or, si le sol avait ete exhausse de 2°, 66 depuis deux siecles , il s'ensuivrait que lors de la construction de la maison le sol de la cave aurait ete habituellement sous I'eau , ce qui est peu pro- bable. En reduisant meme de moitie le chiffre de I'exhaussement survenu pendant les deux siecles qui se sont ecoules depuis la con- struction de la maison , on aurait encore un resultat invraisemblable. France. — 1. On lisait il y a quelques jours dans le Monlteur : « Par une decision du 12 courant et sur la designation de la commission de pisciculture instituee aupr^s du departement de I'interieur, de I'agri- culture et du commerce, M. Ducos, ministre de la marine, a charge un. savant ichthyologiste, M. Valenciennes, membre de I'lnstitut, pour la section d'anatomie et de zoologie, d'une mission qui embrasse les objets suivants : « 1" La determination des fleuves et des rivieres affluant a la mer, sur la partie de la Manche et de I'Ocean, comprise entre le Havre et la Teste, et dont le repeuplement devrait etre tente au moyen de la fecondation artificielle des oeufs de poissons ; « 2° L'indication des points de cette portion du littoral oii des essais analogues devraient etre entrepris sur les crustaces, et particuliere- ment sur les langoustes et les homards ; « 3° La constatation des especes de petits poissons pris par les pe- cheries etablies sur les greves susceptibles de croissance, et la deter- mination des effets de ces etablissements, par rapport a la conserva- tion et a la reproduction du poisson, c'est-a-dire a la prosperite de la peche en general ; « 4° Enfin I'examen de la question de savoir si les herbes marines exercent une heureuse influence sur la conservation du frai et du poisson du premier age, contrairement a I'opinion exprimee en 1772 par des membres de 1' Academic des sciences, opinion qui a servi de base a la declaration du 30 octobre de ladite annee, relative a la recolte du varech, et contre laquelle les administrateurs et les hommes pra- tiques n'ont cess^ de s'elever. « Independamment de la mission speciale confine a M. Valenciennes, 300 ■ COSMOS. deux autres membres de I'lnstitut, MM. Milne Edwards et Coste, qui font partie comnie lui de la section d'anatomie et de zoologie, ainsi que de la commission de pisciculture, se livreront aux etudes ci-dessus indiqui5es, entre Cherbourg et Granville, et dans les environs de Trou- ville. « Le gouvernement, comme on le voit , ne neglige aucun moyen pour arriver a la regeneration de la peche cotiere. L'appel qu'il fait en ce moment h la science offre une nouvelle preuve de son desir de s'entourer de toutes les lumieres necessaires avant d'arreter definiti- vement les mesures qui doivent conduire au but que le departement de la marine poursuit avec perseverance. « Nous avons ete surpris de voir que les noms des pecheurs des Vosges, MM. Gehin et Remy, n'etaient pas ofiiciellement unis a ceux de MM. Valenciennes, Coste et Milne Edwards; niais, nous I'esperons, ils prendront part a cette glorieuse campagne sous la direction des illustres chefs designes par le gouvernement, et nous leur devrons une eclatante victoire. Sans eux la fecondation artificielle des oeufs de poissons, quoique entrevue et essayee de loin en loin, serait restee une brillante utopie; tandis que, grace a eux, ii est demontre aujour- d'hui, par I'evidence de faits nombreux, authentiques et solennels, que Ton pent semer du poisson comme on seme du grain. « Qu'il leur a fallu, a ces braves gens, de sagacite et de patience, disait naguere M. de Quatrefages, aujourd'hui membre de I'lnstitut, pour tout ap- prendre, tout imiter, tout reproduire dans le merveilleux ensemble des precedes suivis par la nature pour assurer la multiplication des poissons, pour arriver seuls, sans guides et sans ressources, a une ve- ritable creation ! •> Les lecteurs du Cosmos nous sauront bon gre de les initier a cette brillante decouverte; et ils nous permettront de leur apprendre que nous avons plaide avec assez d'ardeur la cause aujour- d'hui gagn^e de ces obscurs inventeurs pour avoir droit de nous feli- citer grandement de leur succes. Chez les poissons, il n'y a pas d'accouplement : les oeufs sent pon- dus d'abord par la femelle, puis fecondes par le male. Ces actes en quelque sorte preliminaires ne s'accomplissent guere que de nuit, au commencement de la saison froide. Peu de savants de cabinet auraient eu la t^nacite d'observation necessaire pour reconnaitre et analyser toutes les circonstances de cette double operation ; et il fallait une in- telligence elevee, une hardiesse d'experimentation extraordinaire pour pretendre realiser aussitot la fecondation artificielle. MM. Gehin et Remy choisirent d'abord la truite; ils s'emparerent de plusieurs fe- melles : en leur pressant doucement le ventre, ils tirent couler les COSMOS. 301 oeufs dans un baquet, ils se mirent ensuite aux aguets pour saisir de memedes males, auxquels, par le meme nioyen, ils firent rendre leur laitance melee aussitot aux oeufs. Au leger trouble qui se manifesta peu apres, nos pecheurs, transportes de joie, reconnurent que la fe- condation venait de s'operer; ils depos^rent les a'ufs fecondes dans una boUe percee de trous, au sein d'une eau pure et courante; et les voila en fin en possession de jeunes poissons eclos entre leurs mains; il ne leur reste plus qu'a creer des reserves, des especes de pepinieres ou ils pourront emmagasiner leurs produits pour les ecouler au be- soin. Nous nous trompons, il y avait encore une grande difficulte a vaincre, une grande decouverte a faire. Si MM. Gehin et Remy avaient d'abord opere sur des especes herbivores, sur des carpes, par exemple, leur tache aurait ete bien simplifiee et bien reduite : les carpillons au- raient trouve dans la vase ou sur les bords de I'etang ou du ruisseau une nourriture toute prete. Mais les truites sont des poissons carnas- siers, et oil chercher la nourriture appropriee a la fois a leur age et a leurs instincts? Nos pecheurs avaient vu les petites truites se nourrir, au moment de leur naissance, de la substance mucilagineuse qui en- toure les cEufs, et I'idee leur vint aussitot de leur fournir dans le frai de grenouiile une nourriture analogue ; ce qui reussit fort bien. Quand les truitons, devenus plus forts, demanderent une nourriture plus sub- stantielle, nos eleveurs eurent d'abord recours a la viande hachee, a des intestins de mouton et de boeuf divises en lanieres tres-minces. Mais, mieux inspires plus tard, ils inventerent un precede bien plus ingenieux et qui merite reellement I'epithete de scientifique. Pour nourrir leurs petites truites, ils semerent a cote d'elles d'autres especes de poissons plus petites et herbivores. Celles-ci s'elevent et s'entre- tiennent elles-memes aux depens des vegetaux aquatiques ; a leur tour elles servent d'aliment aux truites, qui se nourrissent de chair. Nos pe- cheurs done ont eu le talent et le bonheur d'appliquer a leur Industrie une des lois les plus generates sur lesquelles reposent les harmonies naturelles de la creation animee. MM. Gehin et Remy n'ont pas borne les applications de leurs recher- ches aux ruisseaux exploites par eux. Appeles dans diverses com- munes, ils ont rempoissonnedes cours d'eau depuis longtemps depeu- ples, et dans une seule riviere, la Mosselotte, un des aflluents de la Moselle, ils ont seme cinquante mille truitons qu'on peche aujourd'hui a I'etat adulte. Leur reputation s'est etendue, et I'annee derniere I'un d'eux, appele a Huningue, a employe ses procedes pour la multiplica- tion du saumon avec un succes comparable a celui que le conite de Golstein avait obtenu il y a pres d'un siecle. 302 COSMOS. Au mois d'avinl dernier M. Gehin , appele a Paris, proceda a Saint- Cyr k unc solennelle experience , en presence do la commission de pisciculture. On pocha dans I'etang quelques brochets males et femelles, on fit tomber dans un baquet d'abord les oeufs des brochets femelles, puis le frai des brochets males. Dix minutes s'etaient a peine ecoulees que le melange dejii trouble annon^ait que la fecondation etait operee. Les oeufs restes steriles se distinguaient par leur transparence et leur blancheur eclatante ; les ceufs fecondes par leur opacite et leur teinte jaunatre tres-prononcee. En les regardant de prfes on voyait a leur milieu un petit point noir, centre de I'organisation en activite. En moins d'un quart d'heure on avait conquis plusieurs millions de brochets en germe ; ils ecloront dans i'etang, et le rempoissonnement autrefois aban- donne au hasard sera desormais institue regulierement et a coup sur. II y a plus, la fecondation sur place n'est pas du tout necessaire : MM. Gehin et Remy envoient par la diligence ou par les chemins de fer des masses d'oeufs fecondes. Pour qu'ils arrivent a bon port, il suf- fit qu'ils soient places par lits serres entre deux couches de marne ou de sable humide. Partout I'eclosion des oeufs ainsi transportes s'opere comme par enchantement, les proprietaires emerveiiles voient naitre sous leurs yeux des milliers de truiles, de saumons , de brochets , de perches, de tanches, d'ombres - chevahers , etc., etc. ; ils les voient grandir chaque jour et parcourir en tous sens leurs eaux jusque-la veuves et vides; nous avons lu un grand norabre de lettres de remer- ciment adressees a nos braves pecheurs de tous les points de la France; ceux qui les avaient ecrites ne savaient pas comment exprimer assez leur admiration et leur reconnaissance. Un pas encore : des oeufs de saumon fecondes artificiellement ont ete mis dans une boite en sapin par couches alternees avec du sable humide : la boite est restee deposee pendant deux mois dans une chambre froide; pas assez froide cependant pour que la gelee put at- teindre les'oeufs. Apres ce laps de temps ils etaient rides mais encore vivants ; et, envoyes a Paris, ils sont nes au college de France dans I'appareil d'eclosion de M. Coste. 11 est done vrai que I'application pratique des fecondations artifi- cielles est aujourd'hui un fait accompli , un fait d'une immense portee. L'industrie de MM. Gehin et Remy doit exciter des sympathies d'autant plus ardentes que i'on deplorait de toute part la depopulation sans cesse croissante de nos fleuves et de nos rivieres; que la peche fluvia- tile, qui autrefois offrait aux populations riveraines une source abon- dante d'alimentation saine et agreable et qui constituait une industrie considerable , n'offrait plus aucune ressource. Les barrages multiplies COSMOS. 303 chaque jour Fe long des pelits affluents s'opposent aux migrations des poissons, dont les oeufs et le frai doivent etre deposes dans le voisinage meme des soui'ces ; et les ruisseaux ne fournissent plus par consequent aux rivieres leur contingentannuel de petits poissons. D'un autre cote, les berges des rivieres et des fleuves sont sans cesse rincees par les re- mous des bateaux a vapeur qui les balayant plusieurs fois par jour, en detachent le frai et le font avorter tristement. Comme d'ailleurs la p^che continue toujours, les poissons deviennent de plus en plus rares et disparaissont. La Sa6ne offrait un exemple frappant d'une sterilite complete amenee par les barrages et la navigation a vapeur. Mainte- nant tout sera repare : le rendement des etangs, de triennal qu'il etait, deviendra sans peine annuel, et nos fleuves, repeuples d'excellents poissons indigenes, s'enrichiront de plus d'especes nouvelles et etran- geres importees a I'etat d'oeufs fecondes en nombre immense. Si les memes miracles s'operent sur nos cotes devastees, si les nouveaux pro- cedes reussissent aussi bien pour la propagation des hultres, des lan- goustes, des homards , ce sera comme une ere nouvelle ouverte a la France, ere grandement glorieuse et bienfaisante. En Angleterre, les travaux et les succes de MM. Gehin et Remy ont eu un tres-grand retentissement. On a publie tout recemment I'en- semble de leurs procedes; de riches proprietaires, des compagnies puissantes se sont mis a I'oeuvre et le rempoissonnement a ete opere sur quelques points dans de larges proportions. La justice nous fait meme un devoir de reconnaitre que c'est a un journal anglais le Lite- rarij Gazette que revient I'honneur d'avoir rappele le nom de nos humbles pecheurs a I'occasion des derniers arrets du ministre de la marine, et d'avoir repare I'injustice du silence desolant de la presse francaise. 3. La Societe d'encouragement a definitivement constitue sa commis- sion des beaux-arts appliques a I'industrie : elle est formee 1" des mem- bres composant le bureau, le president, le vice-president et les secre- taires ; 2° des membres du conseil d'administration nommes par les comites et dont les noms suivent : MM. Amedee Durand, Barre, Bussy, Calla, Chapelle, Gauthier de Rumilly, Gourlier, Huzard, due de Montmorency, marquis de Pastoret, Salvetat, Vilmorin. Nous regret- tons de ne pouvoir reproduire integralement le rapport fait par M. Theodore Olivier sur la creation de cette commission. Nous indi- querons, au moins, les idees principales de ce travail tres-bien pense et elegamment ecrit. » Toutn'estpassciencedansrindustrie,ily a aussi le gout artistique.... U en est du goiit artistique comme de la voix : il y a des peuples qui 304 COSMOS. clianlent, il en est qui ne chanteront jamais.... La France est la terre uatale du bon gout; c'est de la France qu'il gouverne le nionde.... Ne mettez sous les yeux du peuple que des objets de bon goiit, aux for- mes pures et elegantes; ne faites lire au peuple que des livres bonne- tes et moraux, et vous aurez un peuple ayant du gout et de la mora- lite en toutes choses, et dans la vie privee et dans la vie publique.... L'abslraction a joue un tres-grand role dans ces derniers temps ; elle a voulu tout envahir.... Nous avons presque tous oublie qu'il faut, non rever, maistravailler; or, I'abus de Fabstraction conduit toujours aux plus deplorables utopies.... L'abslraction est tolerable jusqu'a un cer- tain point dans les oeuvres d'art, mais elle doit etre repudiee dans les objets industriels.... C'est la surtout qu'il faut Irancher et dire nette- ment: Cela est de bon gout, ceci est de mauvais gout; cette forme pourrait etre modifiee heureusement de telle maniere, et devenir plus elegante sans cesser d'atteindre le but industriel que Ton s'est propose en la creant . . . . Le temps est venu d'encourager I'enseignement des beaux- arts dans ses applications a I'industrie.... Les artistes meme habiles ne savent pas assez si telle ou telle forme pent etre reproduite dans I'atelier avec telle ou telle matiere; si tel dessin de fleurs peut etre tisse ; si tel ornement peut etre decoupe en bois ou moule en fonte.... Autrefois, I'artiste etait en meme temps peintre, sculpteur, architecte, ingenieur. . . . Aujourd'hui, I'artiste n'est que peintre, ou sculpteur, ou architecte; I'artisan ou I'ouvrier-artiste a disparu aussi , il n'y a plus que des ou- vriers.... II faut done recreer en France la classe si utile, et des lors si honorable des artisans, des hommes qui executent parfaitement, parce qu'ils comprennent parfaitement la pensee de I'artiste, qui se contenient de la seconde place.... Or, par les recompenses, par les no- bles encouragements qu'elle provoquera, la commission permanente des beaux-arts ne contribuera pas peu a ramener cet heureux etat des choses.... Elle s'empressera de rechercher, pour chaque produit in- dustriel et artistique, le veritable inventeur; elle le mettra en lumiere, et plusd'un artisan habile lui devra I'aisance, et un peu de cette re- nommee qui fait que Ton est heureux dans un modeste atelier.... Elle signalera et couronnera ces fabricants qui, se respectant comme peres de famiUe non moins que comme hommes de talent, ne repandent par le commerce dans nos villes et dans nos campagnes que des objets que la morale et le bon gout puissent egalement avouer.... Elle recompen- sera ces hommes dont les fabriques sent pour tous ceux qui y sont em- ployes de veritables ecoles de I'apphcation des beaux-arls a I'indus- trie, et oil Ton s'applaudit d'etre admis pour prohter des conseils et de I'experience d'un chef honnete et habile.... COSMOS. 305 3. M. Arago, en donnant connaissance a I'Acaclemie d'un travail de M. Mauvais, dont nous allons rendre compte, I'a fait preceder des re- marques historiques suivantes,que nous ne croyons pas pouvoir passer sous silence. Avant I'invention des lunettes tout le monde sait que les astronomes n'etudiaient le ciel que par des operations a I'ceil nu , en determinant la position de tel ou tel astre par I'observation a travers des pinnules , sorte de fentes directrices qui determinaient exactement sur le cercle la direction du rayon visuel. La il ne pouvait y avoir qu'une erreur personnelle de la part de I'observateur, car I'observation une fois faite, il n'y avait aucun doute sur la veritable direction observee. 11 n'en est pas de meme pour les lunettes. Dans ces instruments la ligne de foi n'existe pas reellement, elle est une simple ligne hypothetique depen- dant du centrage des verres, de leurs aberrations de sphericite, de la tem- perature a I'interieur de la lunette et de plusieurs autres circonstances. Hevelius, qui etait pourtant un tres-grand astronome, ne voulut, a cause de cela, se servir de lunettes que pour I'etude physique des corps celestes; lorsqu'il s'agissait d'en determiner la position, il reprenait ses pinnules. — La recherche de la position de cette ligne theorique dans les lunettes constitue ce que les astronomes ont appele leur collima- tion; et ce n'est pas une petite affaire que de la determiner exactement. Ayant eu a publier les anciennes observations faites a Paris avec les cercles de Fortin et de Gambey, MM. Mauvais et Laugier ont voulu ve- rifier, avant tout , la collimation de ces instruments. M. Laugier s'est reserve I'etude du cercle de Gambey, M. Mauvais a pris celui de Fortin. Ce sont les resultats des recherches de ce dernier astronome que nous allons maintenant exposer. La graduation du cercle mural de Fortin est disposee de telle sorte que quand la lunette marche du pole nord vers le p61e sud en faisant mouyoir avec elle le cercle auquel elle est attachee, la lecture des divisions augmente de plus en plus. Cela pose , voici ce que I'on obtient aux differentes epoques de I'an- nee, lorsque Ton determine la division correspondant a la direction de la lunette sur le p61e ou la collimation ; cette collimation augmente progressive men t depuis I'ete jusqu'au milieu de I'hiver oii elle alteint son maximum, puis elle diminue de nouveau jusqu'a I'ete suivant, et ainsi de suite periodiquement chaque annee. M. Mauvais a constate cette periodicite sur pres de sept annees d'ob- servations, depuis le mois de decembre 1835 jusqu'au mois de iuil- jet 1842. Dans un tableau joint a sa note, M. Mauvais compare deux a deux 306 COSMOS. les maxima et les minima successifs lorsqu'ils n'ont pas etc interrom- pus par un changement dc position de la lunette sur le cercle ; la moyenne de la variation du maximum au minimum parait etre de 12 se- condes de degre. La coUimation, a diverses epoques intermediaires, au mois de mars par exemple , et au mois de septembre , determinee par des observations directes, s'est moutree comprise comme cela de- vait etre entre les valeurs extremes , maximum et minimum. Quand les erreurs de coUimation des deux grands ccjcles muraux seront plus parfaitement connues, quand on aura mieux mis en evidence la loi qui les regit , on fera subir aux observations les corrections qui sont la consequence de ces erreurs, et on les feraseivir en bien plus grand nombre a L; determination des points fixes si iinnortauts auxquels on rapporte la position du soleil et des planetes, »11 serait, je pense, prematur6, dit M. Mauvais en terminant sa note , de porter des a present un jugement sur les causes de cette p6- riodicite; cependant, comme elle est annuelle, ilest bien difficile de ne pas en faire le rapprochement avec la periode des temperatures an- nuelles. On se rappelle que M. Arago a montre , par I'observation des grands thermometres, dont les reservoirs etaient plonges a diverses profondeurs dans la terre, que les temperatures exterieures se pro- pagent lentement a travers le sol , et qu'a une certaine profondeur le maximum arrive plusieurs mois apres I'effet produit a la surface. « M. Henri, de I'observatoire de Greenwich, dans un memoire pre- sente a [la societe Astronomique de Londres, avail constate une varia- tion periodique annuelle dans les indications du niveau des lunettes meridiennes de Greenwich et de Cambridge, et une autre dansleur direction azimutale ; les amplitudes de ces variations etaient de 2",5 et 2",0; les maxima et minima correspondaient a peu pres a I'epoque des equinoxes. L'avenir montrera peut-etre s'il y a ou non quelque analogic entre ces phenoraenes et ceux que nous venons de signaler a I'attention des astronomes. » 4. M. Blondat, qui occupe un appartement au deuxieme etaged'une maison situee rue de Fleurus , n° 37, ecrit a I'Academie que mardi dernier, 13 juillet, de quatre a cinq heures du soir, il a observe des fenetres de cet appartement un phenomene de mirage qui differait de ceux qu'on observe le plus souvent par plusieurs particularites. II voyait au-dessus du dome de la Sorbonne , qui hmite son point de vue, une image de ce dome , superposee , un peu grossie, mais non renvcrsee. La distance entre le dome reel et son image droite a paru etre le double de la hauteur du dome : I'image, du reste, etait d'une nettete et d'une precision par£aites. Nous ne pensons pas que le phe- COSMOS. 307 nomene observe par 31. Blondat soit un phenomenc de mirage pro- prement dit; c'est plus simplement un etfet de refraction extraordi- naire , comme nous I'expliquerons dans la plus prochaine livi'aison du Cosmos. Una commission est cliargee de visiter les lieux et de prendre sur ce phenomene des renseignements plus complets. En rendant compte a rAcademie de ce phenomene qui s'est mani- feste par une des journees les plus chaudes que nous ayons eues cette annee, M. Arago fait la remarque suivante. Dans la journee du 13 juillet , le thermometre , il est vrai , s'est eleve a I'Observatoire , au nord , loin de tout mur, a Sb" ; mais il ne faudrait pas croire, comme quelques personnes I'ont deja affirme, qu'il n'y a pas encore eu d'exemple a Paris d'une temperature aussi elevee. En effet, pour n'en citer qu'un exemple, en 1793, le thermometre s'est eleve a 38°,04. 5. Le proprieiaire d'une des plus excellentes vignes du elos Saint- Georges ecrit de Montpellier : « Dans les environs de Nimes, la maladie de la vigne a atteint tous les raisins, et il ne faut plus compter sur la recolte. A Lunel , les vignes sont deja a moitie envahies par la plante parasite et le mal gagne en etendue chaque jour. J'ai parcouru plus de trente vignobles sans en trouver un seul qui ne fut pas attaque. Saint-Georges est aussi cruellement eprouve. » 6. L'ordre du jour de la derniere seance'de'l'Academie des sciences appelait I'election d'un correspondant dans la section de geographie et de navigation. La section , considerant qu'elle ne compte en ce mo- ment parmi ses correspondants qu'un seul Frangais, n'avait presente pour cette fois que des candidats nationaux : en premiere ligne , M. Antoine d'Abbadie a Urugue , pres Saint-Jean de Luz; en deuxieme ligne, M. Victor Lottin, capitaine de fregate a Versailles; en troisieme ligne , ex xqtto , et par ordre alphabetique , MM. Ferret et Galinier, capitaines d'efat-major. Sur 41 votants, M. d'Abbadie a reuni 37 suf- frages , M. Lottin 3 ; il y a eu une voix perdue : en consequence , M. d'Abbadie , que les lecteurs du Cosmos connaissent deja et connai- tront mieux encore bientot, lorsqu'il aura realise les belles expe- riences de physique du globe qu'il prepare , est proclame correspon- dant de I'Academie des sciences. Belgique. — On nous trouvera toujours pret a retracter les erreurs qui nous seront echappees. Notre savant ami M. Plateau nous signale aujourd'hui une traduction faite certainement sous I'influence d'une idee precongue ; il a cent fois raison : « Dans un article du Cosmos (n" 5) page 116, article intitule Hisioire des sciences, vous vous exprimez ainsi : 308 COSMOS. « Le doctcur Sinsteden a signalo recemment un passage du IV-^ livrc « de llerum natura de Lucrcce, dans lequel le poete decrit le fanta- • scope ou plienakisticope invente par M. Plateau, avec une exactitude .. telle que, si Ton ne savait pas par quelle longue serie de considera- .. tions theoriqucs et d'experiences le savant physicien beige est arrive « h la construction de son 'charmant appareil , on pourrait supposer « qu'il en a emprunte I'idee au philosophe remain. » « Voila une assertion bien positive et qui ne permet gufere le doute. Du reste, pour que vos lecteurs puissent juger par eux-memes, vous citez le passage dont il s'agit; puis vous le traduisez ; enfin vous ajou- tez quelques reflexions, pour montrer avec quelle verite il se rapporte au phenakisticope. Yotrc article me place done sous la prevention de n'avoir fait que ressusciter un instrument deja connu dans I'ancienne Rome; etje me trouve consequemment oblige deramener, par lavoie de votre journal, les choses a leur juste valeur. « Frappe comme vous de la singularite du passage indique par M. Sinsteden, passage dont je pouvais d'autant moins apprecier la ve- ritable portee, queM. Sinsteden y avait supprime le vers Nam fit ul in somnis facere hoc vulealur imago qui m'aurait peut-etre eclaire sur I'intention du poete, j'ai examine dans le !¥•= livre de I'ouvrage de Lucrece ce qui precede ce meme passage, afm de mieux demeler le sens exact de celui-ci, etj'ai reconnu alors que les vers en question etaient relatifs, non a un instrument d'optique, mais simplcment aux images qui nous apparaissent en songe. En fai- sant votre traduction, vous vous etes laisse dominer a votre insu, par I'idee que Lucrece decrit reellement le phenakisticope, et il en est resulte que cette traduction s'ecarte de I'original en quelques points importants, comme vous en serez bientot convaincu. <■ Lucrece commence son 1V<^ livre par exposer longuement cette theorie de la vision, d'apres laquelle les objets lancent incessamment dans I'espace de subtiles emanations qui conservent la forme et la cou- leur de ces objets, et qui, en penetrant dans nos yeux, nous donnent la sensation de ces memes objets. II attribue ensuite les songes a ce que quelques-uns de ces legers simulacres {simulacra) etant parvenus jus- qu'a I'ame et I'ayant affectee, elle les pergoit pendant le sommeil; comme chacun de ces memes simulacres doit avoir une forme et une position determinees, il restait a determiner comment des personnages vus en songe paraissent executer des mouvements : or, pour cela, Lu- crece imagine que des images, differant entre elles quant a leur po- sition, naissent et s'effacent rapidement I'une apr^s I'autre, de fagon COSMOS. 3C9 que I'oa croit n'en voir qu'une seule changeant d'attitude. C'est bien lii, sans doute, le principe sur lequel repose I'illusion du phenakisti- cope; mais, vous le voyez, il ne s'agit nullement de la realisation de cette illusion au moyen d'un instrument de physique. Le mot simula- cra ne doit done point se traduire, comme vous I'avez fait, par Vobjet montrc a I'wil, puisqu'il n'est question que des perceptions de I'anie dans les songes, at qu'ainsi il n'y a point d'objet montre a I'oeil; vous voyez, en outre que le vers Nam fit ut in somnis facere hoc videalur imago, ne doit point etre rendu, comme dans votre article, par : evolution si rapide et si magique, qu'elle scmhle iin songe; mais bien, comme I'in- dique sa traduction litterale, par : il arrive en effet que, dans les son- ges, I'image semble (aire cela. « Ce peu de mots suffiront, j'espere, pour faire apprecier la veri- table relation qui existe entre le passage de Lucrece et le phenakisti- cope, et pour eloigner de moi tout soup?on d'avoir emprunte I'idee de raon instrument a I'antiquite. » ANALYSE DES RECHERCHES SCIENTIFIQUES. Physique. — M. Donovan publie une serie de memoires sur la pretendue identite des agents auxquels on attribue les phenomenes de relectricite ordi- naire ou statique, de reiectriciLe voltaique, de relectro-magnetisme, et de la thermo-electricite, ils ne renferment rien de neuf ; I'auteur interprete seulement a sa maniere les fails connus, avec I'lntention clairement exprimee de separer ce que Ton s'est efforce d'unir. II regarde evidemment comme irrationnelle et mauvaise la tendance naturelle des esprits philosophiques a attribuer le plus grand nombre d'effets au plus petit nombre de causes possible. II va jusqu'a declarer que la simplicity n'est pas le caractere des op^ralions de la nature; que nous faisons injure au Tout-Puissant en regardant la simplicite comme un des attributs de Taction divine, parce que, dit-il, il est aussi facile a Dieu de met- tre en action un million de causes que de produire, par une seule cause, un million d'effets. Nous ne sommes pas du tout de I'ecole de M. Donovan, nous croyons au contraire que Dieu est libre quant a la fin, et que I'optimisme reve par Leibnitz et Malebranche est une grande erreur; Dieu peut creer des mon- des et des etres plus ou moins parfails, mais il atleint une fm donnee par les moyens les plus simples possibles ; et voila pourquoi nous Irouvons que tous les phenomenes de la nature sont domin^s par le principe de la moindre action. Dieu, disent les divines licritures, a tout fait avec poids, nombre et mesure, et 310 COSMOS. bien certainement le nombre des causes par lesquelles il produit un nombre donne d'effets est le plus petit possible. Dans son premier memoire, M. Donovan s'est propose celte question : I'dec- tricile qui produit lour a tour de la lumiere, de ia chaleur, du niagndtisme, des combinaisons chiniiques, est-elle un element simple? Non, repond-il, et quoi- qu'on ne puisse pas le prouver encore peremptoirement, au lieu d'etre un mi- lieu elastique homog^ne, comme on le croil generalement, I'l^lectricite est con- stituee par la reunion de plusieurs composants elementaires ayant chacun leurs proprietes caractt^ristiques. Nous rejetons ces conclusions. Dans le second memoire, M. Donovan combat I'opinion recue que I'electri- cite voltaique ne differe pas essentiellement de I'electricite ordinaire, qu'elle en differe accidentellement, par ce fait que dans I'electricile ordinaire la quantite est petite , mais I'intensite grande, tandis que dans I'electricite voltaique , la quantite est grande et I'intensite faible. II joue longtemps sur le mot mal defini d'intensite, auquel on devrait en effet substituer le mot de tension ; puis par- tant de ce fait qu'avec un fil de cuivre, pesant un llSa* de grain, en con- tact avec un fil de platine , et plonge un instant indivisible dans une dissolution d'acide nitrique, on obtient par I'electricite voltaique une deviation de Taiguille aimantee qu'on n'obtient pas par la decharge d'une batterie electrique dont la surface serait egale a 3510 pouces carr^s; il conclut que les deux electri- cit6s different essentiellement, et dans leur nature intime et non pas acciden- tellement. La conclusion n'est certainement pas renfermee dans les premisses et nous n'avons pas besoin de la combattre directement. Dansle troisieme memoire, M. Donovan appuie, par un argument nouveau , la these qu'il a defendue dans le second. M. Faraday a conclu de ses expe- riences qu'il faudrait huit cent mille d^charges d'une bouteille de Leyde pour decomposer un poids d'eau egal a un grain, et que I'electricite employee a cette decomposition par I'oxydation de 4 grains de zinc sufSrait a former un puis- sant orage, une effrayante d6cbarge de la foudre. II en r^sulte, dit M. Donovan , que I'electricite issue de la dissolution de 4 grains de zinc ^quivaut a cells de 2140 millions d'etincelles electriques; et cependant elle circule a travers le fil de platine du voltametre, sans meme I'echauffer ; done evidemment I'elec- tricite volta'ique n'est pas identique avec I'electricite ordinaire , puisque la de- charge de batterie electrique de Van Marum de 223 pieds carres de surface fon- dait un fil de fer de 40 pieds de long, et d'un 240' de pouce de diametre. Toujours meme vice de raisonnement : I'electricite voltaique devie I'aiguille du galvauometre, et ne brule pas le fil de platine, parce qu'elle a de la quantite sans grande tension; I'electricite ordinaire ne devie pas I'aiguille et brule le fil de fer, parce qu'elle a de la tension quoique sans grande quantite ; mais cela ne constitue pas necessairement une difference dans la nature intime. Le quatrieme memoire a pour objet de revoquer en doute la loi suivante enon- cee par M. Faraday : si la meme quantite absolue d'electricite passe ci travers le galvanometre, quelle que soit son intensite ou sa tension, elle produira sur I'aifuille magnetique la mSme deviation ; cette loi a ete demontrce par des experiences directes pour I'electricite ordinaire. M. Donovan lui oppose le r^- COSMOS. 3H suUat suivant de sa propre experimentation, suivant lequel une m^me quantite d'^lectricite correspondante a la dissolution dans la pile d'une quantite donn^e de zinc a toujours produit la meme deviation moyenne de 670 , quoiqu'elle eut traverse le galvanom^tre dans des temps tres-differents , 8 minutes , 5 heures et demie , 33 minutes, 13 minutes. Comment M. Donovan n'a-t-il pas vu que son experience etait exlremement complexe? il operait tantot avec du zinc amalgam^, tantdt avec du zinc non amalgame, avec des dissolutions renfermant des quan- tites inegales d'acide,d'un pouvoircoiiducteur different etde resistance variable. Dans ces conditions, ^videmment la deviation de I'aiguille n'exprime pas la quantite d'electricit^ qui passe a chaque instant; ce n'est pas ainsi que M. Fa- raday experimente, et le physicien irlandais a tort de vouloir se mesurer avec le geant de I'electricite. Arrivons au dernier memoire, le seul que nous eussions a analyser. Cette fois, ce que M. Donovan oppose a I'hypothese de Tidentit^ , c'est la difference des seconsses ou chocs produits par reiectricit^ ordinaire et I'electricite voltaique. La commotion produite par une pile composee de milie ou deux mille plaques est effroyable et capable des plus terribles effets. Or, dit M. Donovan, d'apr^s la theorie recue, la pile donne de la quantity et non de I'intensite ou tension; done, les commotions de I'electricite voltaique sont dues a la quantite. Avec I'electricite ordinaire elles sont au contraire dues a la tension : en effet , dit M. Donovan , si Ton a une puissante machine electrique a deux conducteurs donnant, I'un de I'electricite positive , I'autre de I'electricite negative, et qu'on mette a la fois une main sur chaque conducteur, on n'eprouvera aucune com- motion, quel que soit le nombre des tours du plateau; mais si Ton detache une main, et qu'on I'eloigne peu a peu du conducteur qu'eile touchait, on eprouvera des commotions de plus en plus fortes; la quantite d'electricite est la meme dans les deux cas ; mais dans le premier cas elle s'ecoulait sans pouvoir acquerir de la tension ; dans le second elle acquiert de la tension ; done , etc. Un physicien qui ignore que quand le nombre des elements et des plaques devient assez conside- rable , et que la resistance interieure est tr^s-grande , reiectricite voltaique acquiert de la tension , n'est pas un physicien serieux. Dans nos experiences sur les piles de Clarke, avec deux ou trois mille elements la tension etait si forte que , m^me en marchant sur le plancher sans communication directe avec les p61es, on etait quelquefois comme foudroye; il n'y avail plus d'isolement pos- sible , la pile se dechargeait d'elle-meme ; aussi la lumiere electrique obtenue avec ces trois mille elements etait-elle tres-faible relativement. C'est assez et trop pour apprecier les innombrables pages que les Philosophical magazine consacrent aux raisonnements sans fin de M. Donovan. {Ph. mag. fevrier, mars, avril, mai et juin.) Chimie. Recherches sur les composes ammoniacaux, par M. Hoffmann. — On a confondu pendant longtemps plusieurs alcalis gazeux avec I'ammoniaque dont ils presentaient les reactions principales; c'est a M. Wurtz que Ton doit d'avoir demontre, le premier, qu'il pouvaity avoir des ammoniaquesde plusieurs espe- ces, et que leur composition pouvait toujours etre representee par un equivalent d'ammoiiiaque dans lequel un ou plusieurs equivalents d'hydrog^ne auraient et6 ;U-2 COSMOS. remplaces par un ou plusieurs equivalents d'un hydrog^ne carbone. M. Hoff- mann a donne une grande extension au travail de M. Wurtz, et c'est en le com- plelant qu'il a rencontre un corps Strange , d'origine artificielle et exlremement semblable a la polasse ; puis un autre corps non moins merveilleux, car il resou- drait un grand probleme dechimie s'il ne manquait de quelques conditions, un isomere de la quinine, ayant presque les memes caracteres, excepts celui d'etre de la quinine. Mais M. Hoffmann n'est pas le seul qui se soit mis a eludier les ammoniaques de M. Wurtz. Bien d'autres chimistes, en France et surtout en AUemagne , en ont fait I'objet de leurs recherches. M. Wertheim s'est surtout signale par la decouverte d'un de ces alcaloides nouveaux, la propylamine dans le jus qui s'ecoule spontan^ment des harengs sales. Or, il paraitrait, d'apres M. Hoffmann, que cette base nouvelle deM. Wertheim ne serait aulre chose que la trinuHhylamine que lui-meme avail decouverte bien avant les recherches de ce dernier chimiste. Une analyse exacte de cet alcali du jus des harengs, et sur- tout sa reaction en presence de I'iodure methylique, avec lequel il donne nais- sance a de I'iodure de tetramethylammonium ne paraissent laisser aucun doute sur la veritable nature de la propylamine de M. Wertheim. La formule de la tri- m^thylamine serait, d'apres RI. Hoffmann, C«H'Az=i:(Azir— H') -f 3 (C^H^). Physique. Sur la dilatation de quelques corps solides sous I'influence de la chaleur, par M. Hermann Kopp. — Dans le but de rechercher s'il existail quel- ques rapports constants et simples entre les dilatations des corps composes et celles des corps composants, M. Hermann Kopp a voulu determiner de nouveau, avec le plus grand soin , la dilatation cubique d'un tres-grand nombre de corps. Le precede qu'il a employe est celui de MM. Dulong et Petit : il consiste a prendre , a diverses temperatures, le poids d'un vase rempli d'eau ou de mer- cure, et renfermant le corps dont il s'agit. M. Kopp est force de conclure, de ses experiences et des nombres obtenus par lui , que la dilatation des combinaisons chimiques solides nest pas en rapport simple avec leur composition chimique. La difference entre les coefficients de dilatation de I'arragonite et du spath cal- caire, par exemple, egaux, le premier a 0,000055, le second a 0,000018, est si grande, qu'on ne pent pas meme penser a faire dependre leur dilatation de la composition intime, puisque ces deux corps sent deux carbonates de chaux. La dilatation ne depend pas non plus de la seule disposition mecanique des atomes ou molecules, puisque des corps isomorphes ont la m^me dilatation , tandis que d'autres corps, aussi isomorphes entre eux, ont des dilatations tres-in^gales. Jusqu'ici on avait place les metaux au premier rang des corps dilatables, et cependant beaucoup d'autres substances se dilatent autant que les metaux. Les coefficients de dilatation du souffre, de la galene, de I'arragonite, du spath pe- sant, de la celestine, du quartz, qui sont respectivement 0,000183; 0,000068; 0,00006b; 0,0000o8; 0,000061 ; 0,000042, sont tout a fait de meme ordreque ceux des motaux, et meme plus grands. UE L'lMPRlMEUIE DE CH. LAllURE ( MAISON CRAPELET), Hue de Vaugirard , 9 , pri'S de I'Od^on. COSMOS. 313 NOUVELLES DE LA SEMAIXE. Angleterre. — L'operation de la taille du celebre diamant le Koh- 1-Noor preoccupe a un point extraordinaire I'attention publique en Angleterre : on en jugera par ce court recit. A i'exposition universelle, le diamant tantvante, la fameuse niontagnede lumiere, n'avait produit qu'un tres-mediocre effet, et il avait ete resolu des lors qu'on lui cree- rait de nouvelles facettes. Mais cette operation pouvait-elle s'executer sans danger ; ne courrait-on pas les risques d'une destruction totale? Deux celebres professeurs de mineralogie, MM. Tennant et Mitchell, furent officiellement charges d'examiner cette question et de faire un rapport au gouvernement. Ces deux savants admirent en principe les heureux resultats que Ton devait attendre de la taille projetee, niais ils emirent le doute que les tentatives de taille laterale pouvaient detacher des morceaux considerables et compromettre I'integrite du gigan- tesquc cristal. On se decida alors a consulter les hommes pratiques, les lapidaires de profession ; on fit venir les joailliers de la couronne, MM. Garrard, on les chargea de prendre avis des hommes les plus competents, et de le faire connaitre dans le plus court delai. MM. Gar- rard s'adresserent a MM. Coster d' Amsterdam comme aux plus habiles lapidaires de I'Europe, et apres un mur examen, ceux-ci declarerent que quoique les craintes soulevees par les deux savants theoriciens ne fussent pas sans fondement, le danger cependant n'etait pas assez grand pour qu'on dut renoncer a l'operation projetee, pourvu qu'elle fut confiee a des mains tres-exercees, a des artistes eminents. L'ordre de proceder a la taille du Koh-I-Noor fut alors donne. MM. Garrard commanderent a MM. Maudslay et Field une machine a vapeur de la force de deux chevaux, et Ton se mit a lauvre vendredi de la semaine derniere. Sa Grace le due de Wellington qui s'est epris d'amour pour la montagne de lumiere, voulut que l'operation com- mencatsous ses yeux ; ce fut lui qui apres qu'on eut plonge le diamant dans un lit de plomb, a I'exception d'un petit angle, le deposa sur la roue horizontale qui doit I'entrainer avec une tres-grande vitesse • au bout de quelques heures Tangle saillant fut use et I'illustre general vit avec transport la nouvelle facette apparaitre et briller. Cette opera- tion grandiose et delicate qui exige autant d'intelligence que de soins dans ceux qui I'executent, a ete confiee a deux artistes allemands, et du- rera plusieurs mois. Les journaux anglais d'hier annon^aient I'appari- tion de la troisieme face comme un evenement. Par sa taille nouvelle le 1" AOUT 1852. 14 314 COSMOS. Koh-I-Noor deviendra un 6norme brillant de forme ovale; son poids actiiel est de cent quatre-vingt-six carats; la diminution produite par la faille sera ii peine sensible; et il seradevenu incomparablement plus beau et plus precieux. Les deux diamants plus petits qui I'aecompa- gnaient h I'exposition, seront tailles absolument de la meme maniere, et lui serviront toujours de pendants. — C'est a peine si Ton a parleen France dune d^couverte eminem- ment curieuse et importante faite par un Fran^ais, M. Esprit Fabre , d'Agde, et publico pour la premiere fois par M. Dunal, professcur de bolanique a la faculte de medecine de Montpellier. II s'agit de la trans- Fig. 1. formation successive et com- plete d'une herbe sauvage, si inutile , quelle n'a pas meme regu de nom vulgaire, Vxgilops ova/a, en froment de la plus excellente qualite. Orce fait, dontnousn'avions pas meme entendu parler a Paris, excite en Angleterre un enthousiasme extraor- dinaire. Qu'une mechante herbe, s'ecrie le Gardener's Chronicle, dont nous don- nons ici le portrait fidele , ait pu en moins de douze generations, devenir du pur froment, le grand element de I'alimentation luimaine, c'est un phenomene veritablement incroyable, et que les maitres de la science auraient a priori declare impossible. En 1838, M. Fabre rencontra sur un pied (Usegilops ovafa, cette modification particuliere qui avait amene plusieurs botanistes h creer une espece nouvelle sous le nom d'segilops triticoides. II recueillit sur cette plante anormale un certain nombre de graines qu'il sema en 1839, et qui lui donnerent 5 pour 1 d'une graine grele comme celle de Vsegilops , concave et velout^e Ji son extremite superieure. Mais I'exterieur de la plante s'etait d^ja modifie ; les barbes si lon- gues et si abondantes des enveloppes commencaient h diminuer de nombre et k disparaitre ; I'aspect general etait celui de I'esp^ce de ble designee dans le midi sous le nom de touzelle. En 1840, M. Fabre sema loutes les graines obtenues dans la premifere recolte; les epillets furent plus nombreux et renfermaient chacun deux grains : les epis ^talent beaucoup moins greles ; le grain ^tait moins concave et moins velout6, COSMOS. 3I5» lesbarbes avaient encore diminue. En 1841, le changement devint plus- evident encore ; les ^pillets renfermaient jusqu'a trois grains ; la plante etait de plus en plus semblable au froment. En 1842, la recolte fut gran- dement endommagee par la rouille ; les barbes avaient enti^reraent disparu etlesepis etaient completement ceux de latouzelle. En 1843, la plante atteint la hauteur d'un metre, et ressemble exactement a du; froment ; les follicules des imbrications n'ont plus qu'une seule barbe ; les epillets contiennent de trois a quatre grains ; les epis sont beaucoup. moins greles; le grain est si amplifie qu'il depasse son enveloppe; le produit de certains grains a ete de 180 et meme de 450 pour 1. En 1844, leschangements continuerent dans le meme sens, mais le progret^ fut lent. En 1849, Vxgilops etait devenu reellement du froment. Pen- dant les quatre annees suivantes, M. Fabre a opere en plein champ^^ surun terrain entoure de vignes, et loin de toute autre piece de fro- ment; chaque annee, sa recolte fut tout a fait semblable et comparable a celle des fermiers du voisinage. En 1850, la paille etait roide et pleine; les epis presque unis Etaient composes de huit a douze epillets conte- nant chacun trois grains tres-farineux qui n'avaient conserve aucune- trace de leur forme concave primitive. Ainsi done, peu a peu la graine chetive et maigre s'est enflee et engraissee en se remplissant de plus en plus de farine ; I'epi grele a donne naissance a des epillets conte- nant d'abord un seul grain, puis deux, trois, et jusqu'a cinq; la tige- est devenuede plus en plus haute et rigide, les feuilles se sont elargies. les epis se sont allonges, le grain s'est ramolli et a grossi, et enfin h- froment de qualite superieure est apparu dans toute sa magnificence^ et sa beaute. Ce qui ajoute a I'importance de ces experiences, c'es? qu'elles ontete faites a ciel ouvert, sur une large echelle; qu'elles on;- abouti a une culture reelle et en grand; c'est que dans cette longut- serie de semis successifs Vsegilops n'a pas cesse un instant sa marchf- ascendante. Le point de depart de sa transformation en froment a eib uneanomalie, un jeu de vegetation , ce que les Anglais appellent a sport. Or I'etude attentive de ces jeux de vegetation a une importance extreme; ils sont ou peuvent toujours 6tre le point de depart d'un per- fectionnement inattendu, d'une creation nouvelle. Ainsi, par exemple, un jardinier, en visitant ses pieds-d'alouette^ remarque quelques fleurs anormales , une multiplication de petales ; if note le plant, cueiile a part ses graines, les seme separement, et sa pre- miere recolte comprenddeja un quart de pieds-d'alouette doubles. Une autre observation du meme genre lui fera conquerir des pieds-d'r;- louette a couleurs multipliees et variees. Un pied de carotte sauvage se presente avec une racine plus grosse qua I'ordinaire ; c'est un jeu , 316 COSMOS. un accident de vegetation; on cueille avec soin ses graines, on les seme, et i'on arrive pen a pen au precieux legume que nous trouvons aujourd'hui partout. Nous reviendrons une autre fois sur ce sujet , si plein d'interet. Sous ce litre : xV word in season, Vn mot de saison, un tres-habile agriculteur anglais a ecrit une petite brochure, arrivee deja k sa neu- vifeme edition, et qui fait le plus grand bruit. II ne s'agit de rien moins, comme on va le voir, que d'une revolution complete dans le mode de culture du froment. Yoici d'abord les faits : L'agronome dont nous parlons opere sur quatre acres de terrain, un peu plus d'un hectare et demi ; il en cultive chaque annee la moitie, deux acres, et laisse I'autre moitie en jachere. La terre, quand il I'a prise, etait completement epuisee et a fin d'assolement ; il I'a labouree a une profondeur plus grande d'un pouce que dans la culture ordinaire ; il I'a nettoyee et I'a nivelee ; ila seme, sans autre preparation, en raison de neuf litres par demi-acre ou par vingt ares; le resultat a ete une recolte de vingt quarters et demi, cinquante-huit hectolitres de bon et beau ble ; un be- nefice net, tons frais deduitsde 37 livres 3 schellings, 936 francs. Mais c'est mysterieux , incroyable , diabolique ? Je vous assure qu'il n'en est rien, repond l'agronome. Le merveilleux n'est que dans votre imagi- nation et I'incroyable dans la routine qui vous aveugle encore. Quand je vous ai dit que je n'avais fait usage d'aucune fumure, je m'expri- mais mal ; car j'ai du fumier en abondance , du fumier de nature orga- nique et inorganique a la fois, des engrais mineraux, vegetaux et ani- maux, et cela pour une succession indefinie de recoltes de froment sur mes memes quatre acres de terrain, sans y rien apporter. Les engrais inorganiques : ils existent en quantites inepuisables dans le sous-sol ; en ramenant a la surface I'epaisseur de ce sous-sol, que les froids de I'hiver et les arJeurs de I'ete peuvent penetrer, j'ai toujours prete la provision necessaire et largement suffisante k ma recolle de I'annee. Les engrais organiques ! Est-ce que le professeur Way, le celebre chimiste de la societe royale d'agriculture d'Angleterro , n'a pas de- montre que les terres labourables possedent au plus haut degre la pro- priete d'aspirer et de condenser Taramoniaque de I'air? Cela est si vrai , que si on fait passer de Fair charge de carbonate d'ammoniaque a travers un tube renfermant de I'argile en petits fragments, I'air sor- tira tout a fait depouille de I'ammoniaque qu'il contenait; or, les terres labourables renferment toutes de I'argile, elles fixent done I'ammo- niaque de I'air, elles le fixent probablement a I'etat de silicate soluble, qui fournit a la fois au ble et la silice et I'azote necessaires a son deve- loppement. Rendez done, conclut le reformateur anglais, rendez, par COSMOS. 317 un labourage profond , vos terres accessibles a Taction du soleil et de Fair; laissez de I'espace entre vos plants de ble, faites que la lumiere I'air et I'humidit^ circulent librement entre leurs tiges et leurs feuilles, et ne vous inquietez de rien , la nature fera le reste : I'azote viendra de lui-meme, et vos moissons ne laisseront rien a desirer. Nous croyons devoir declarer que ce qui precede est une traduction fidele et abregee du remarquable article de la Gazette anglaise d'agri- culture , le journal classique par excellence. On le voit , nos idees tant combattues sur le rdle immense que joue dans la production des ce- reales I'azote de Tatraosphere, gagnent chaque jour du terrain , et se- ront bientdt universellement adoptees ; deja MM. Barral et Isidore Pierre ont constate que les pluies seules condensaient en ammoniaque et en azote lequivalent d'une richefumure; deja le mot tant maudit de jacberes a fait sa reapparition a I'lnstitut de France par i'organe de M. Arago. Qui sait ce qu'un avenir prochain nous apportera d'inat- tendu en ce genre? Dans la prochaine livraison du Cosmos nous ren- drons compte de la recolte de froment obtenue par M. le docteur Barthelemy dans des circonstances incroyables. — L'audace des compagnies transatlantiques de navigation h. la va- peur n'a plus de bornes. La semaine derniere, le directeur de I'unede ces colossales entreprises, Eastern steam navigation company, a ob- tenu des actionnaires I'autorisation de construire une nouvelle classe de vaisseaux a vapeur depassant de beaucoup, par leur capacite et leur puissance, tout ce qui a ete fait en ce genre. lis sont destines a faire le trajet direct d'un des ports de la Manche h Calcutta , par la voie du Cap, sans toucher a aucun point intermediaire, et en moinsde trente jours ! Allemagne. — M. Bischoff , le celebre chimiste de Marburg , vient d'etre promu a la chaire de Heidelberg. M. Liebig est en route pour Munich. M. Rossmaeler, qui eut le malheur de se laisser entrainer par son enthousiasme republicain et qui quitta le champ de la science pour le champ de la politique, est force de s'exiler de I'AUemagne. M. Mits- cherlich, nomme recemment associe etranger de I'lnstitut de France, adresse ses reraerciments a I'Academie et annonce son intention de se rendre a Paris , ou il compte arriver avant la fin du mois d'aout. — M. le baron George-Frederic de Langsdorff, voyageur celebre et botaniste tres-distingue , vient de mourir a Fribourg (grand-duche de Bade), dans sa soixante-dix-huitieme annee. II etait ne a Heidelberg, oil son pere remplissait les fonctions de chancelier de i'Universite : b. peine ^ge de trente ans , il accompagna I'amiral Krusenstern , comma botaniste, dans son voyage autour du monde. II consacra de longues 318 COSMOS. aanees a I'exploration des centres les plus importants du monde vege- tal, etfut plusieurs fois charge, par le gouvernement de la Russie, de missions diplomatiques auprfes de la cour du Bresil , a Rio-Janeiro. L'histoire de ses voyages et de ses decouvertes a fait I'objet de plu- sieurs volumes pleins d'interet, publics a Paris, a Francfort, a Berlin, ii Dresde et a Leipsick. — L'Academie des sciences de Stockholm a perdu le plus ancien de ses membres dans la personne de M. Guillaume Uissinger, mort al'age -de quatre-vingt-six ans. 11 a pris part, pendant quarante-huitans, aux seances de TAcademie, et I'a souvent presidee avec distinction. II con- Iribua grandement , par ses Merits, a repandre en Suede la connais- aance de la mineralogie et de la geologic : il possedait, dans la province de Stola-Kopparberg , des mines vastes et riches, et s'empressa d'y Introduire tons les procedes nouveaux et les nouvelles machines qui , -depuis le commencement de ce siecle, ont rendu plus facile et plus productive I'exploitation des mines. II a un autre titre encore a la re- connaissance du monde savant : il devina Berzelius, alors qu'il etait -etudiant inconnu , I'encouragea dans ses debuts , I'aida de sa bourse quand le jeune chimiste etait a bout de ressources, et ne I'abandonna que quand il le vit arrive au port. En reconnaissance des services qu'il avail rendus a la science , le dernier roi , Charles-Jean , lui avait accorde -des titres de noblesse. — Le vingt-neuvieme congres des naturalistes et des physiciens alle- smands se tiendra cette annee, le 18 septembre, a Wiesbaden. Void en quels termes les secretaires de I'association , MM. Fresenius et Braun, invitent les savants nationaux et etrangers a prendre part a ce p^lerinage de la science : « Notre ville, si facilement accessible par les chemins de fer et les Sjateaux a vapeur, presente , par la beaute et la distribution de ses edi- Sces , par les tresors de I'art et de la nature qu'elle renferme, par ses sources minerales si celebres, par les sites si pittoresques de ses alen- loars, le lieu de reunion le plus propice et le plus attrayant. Aussi ■venons-nous en toute confiance presser nos honorables collaborateurs ■et tous les amis des sciences naturelles de s'unir a nous. La reunion de 1852 sera, nous n'en doutons pas, tres-nombreuse el tres-brillante. Nous et nos concitoyens, nous mettrons tout en ceuvre pour rendre le «ongres agreable et grandement profitable au double point de vue de la science el des relations sociales. Les seances commenceront le 18 et Sniront le 25 septembre. Le centre officiel des reunions sera I'hotel 1 ; mais comme la valeur absolue du rapport depend It aussi de celle de d, ce coefficient pourra varier dans quelques instruments, sui- vant les differentes parties de I'echelle , etre d'abord plus grand que 1, puis plus petit que 1 ou vice versa. On pourra done etablir i'equation suivante : I,_tangd,_p I tangd"^ ' dans laquelle P sera generalement positif pour les longues aiguilles, et negatif pour les courtes. Cela pose, si Ton examine les experiences de M. Pouillet, on voit quMl s'est servi d'une boussole des tangentes dont le cercle avaitO'",41 de diam^tre, et I'aiguille de 5 a 6 centimetres de longueur, ce qui correspond a peu pres aux dimensions de I'appareil du P. Secchi, pour lequel il avait 7- <'! ; done, COSMOS. 333 dans les recherches de M. PouiP.et, la loi des tangentes etait loin d'etre exacte, surtoutpour les deviations de 60° et de 34°. En ^aialant les deux valeurs obtenues de ~, on aura ° 1 tang d )-, ' oil toutes les foisque P=Q, . — ^ = ^-5 ce qui resulte aussi des recherches ^ tang a a, de M. Pouillet, c'est-a-dire que les tangentes des deviations sont en raison in- verse des longueurs des circuits, exprimees en metres de fil. II est bien vrai que Ton nepeut pas etablir a priori I'egalit^ des deux quantites P et Q, puis- qu'elles dependent de la forme du circuit, des dimensions de la boussole, etc., etc., et de plusieurs autres coefficients encore inconnus ; mais on peut toujours sup- poser qu'elle a eu lieu dans les experiences dont nous venons de parler. Elles peuvent done etre tres-exactes , et la conclusion que Ton en tire directement peut tres-bien subsister sans que Ton puisse prouver pour cela que les resistan- ces sont simplement en raison des longueurs mesurees; puisqu'il suffirait d' em- ployer des deviations moindres, et une aiguille plus longue pour trouver tout le contraire. Les experiences de M. Pouillet, dit le P. Secchi en terminant , ne paraissent done pas etre en contradiction avec celies de M. Despretz ; mais elles ne prou- vent pas non plus d'une maniere absolue la proportionnalite des intensites aux longueurs mesurees des circuits ; celles-ci devant toujours etre reduites a ce qu'elles deviennent, en tenant compte de Taction caloriGque du courant. C'est done maintenant aux observateurs, qui sont a m^me de le faire, de determiner I'influence que la temperature du fil conducteur peut avoir sur sa resistance, et de trancher de cette maniere une difficulte qui vient de naitre dans I'etude des iois des courants , ou bien d'en reveler d'autres qui ouvrent un plus vaste champ a I'etude des physiciens et des geometres. Optique de l'oeilet theorie dela vision. — Ledocleur Fliedner de Ilanaw enonce les propositions suivantes : 1 . Le faisceau ou cono de lumiere qu'un point brillant envoie a I'osil meme en le supposant tres-delie et admettant qu'il passe par le centre de la pupille . n'est jamais amene par la refraction en un point unique. 2. A chacun des diametres dela pupille correspond une distance focalepropre et un foyer particulier : ces foyers particuliers sont places I'un derriere I'autre, et ferment ainsi une ligne ou trainee focale; cette ligne ou trainee n'est pas une ligne droite, mais une ligne a double courbure. ' icite n.5gative propre. 2° Qu'en elle-meme cette quantile d'electricite est constante, mais que sa distribution sur le sph6- roide terrestre peut 6tre diff^rente suivant les differenls temps : il convient de COSMOS. 385 designer cette electricite propre sous le nom d'6Iectricit6 permanente du globe, pour la distinguer de Teiectrite accidentelle ou induite que la terre peut ac- querir sous I'influence d'autres corps electrises. 3° Que ratmosphere ou I'air pur ne possede aucune electricite propre, et qu'il ne peut par lui-meme ni conserver I'electricite, ni servir de conducteur a I'electricite. 4° Que pour che- que point de la terre elev6 au-dessus de I'horizon , la tension eleclnque croit proportionnellement a I'eievation; c'est une consequence necessaire de ce fait theorique que ie fluide electrique, comme le fluide magnetique, s'accumuie sur les pointes et sur les angles beaucoup plus que sur les surfaces planes; et I'observation de chaque jour prouve que sur les toits, sur les tours et les sommets de montagnes, I'electricite est plus abondante que dans les plaines. S° Que I'electricite de la terre est surtout modifiee par les vapeurs suspendues dans I'atmosphere. Sous ce rapport, il peut se presenter deux cas : la masse de va- peurs peut ou elre en contact avec la terre, ou isolee : si elle est en contact avec la terre, elle se comporte comme une montagne, Telectricite abandonne les points de la terre que la masse de vapeurs touche, et se distribue a la sur- face du nuage ; dans le second cas, I'electricite neutre de la masse de vapeurs est decompos6e; I'electricite negative est repoussee; relectricite positive est attiree,et dissimule en parlie I'electricite negative de la terre. Un nuage electris6 positivement induit I'electricite neutre des points de la surface de la terre situes au-dessous de lui sur une cerlaine etendue qui diminue avec la distance du Duage, met en evidence de I'electricite negative qui s'ajoute a I'electricite ne- gative permanente de la terre, et accroit la tension : un nuage electrise negati- vement developpe de I'electricite positive, repousse I'electricite negative de la terre, et il peut en resulter, suivant les circonstances, soit une diminution de I'electricite permanente, soit une neutralisation complete de cette electricite, soit I'apparition d'electricite contraire ou positive : le nuage a son tour peut subir les memes variations. Considerons maintenant quelles doivent etre les indications de I'electrometre dans ces diverses circonstances. Lorsqu'on veut observer avec cet instrument, on monte avec lui sur un toit ou sur un point culminant a I'abri de toute influence etrangere, et on le place sur un support eleve; on touclie le tube en K avec le doigt, et on redescend avec I'instrument dans un espace ferme, une chambre, par exemple, ou doit se faire la lecture de la deviation. En touchant avec le doigt, on a etabli la communication avec la terre, et dans la supposition que I'almosphere soit pure, I'electricite, qui tend lonjours a gagner le point culminant, se condense dans I'electrometre en quantite pro- portionnelle a la hauteur. Lorsqu'on est revenu dans I'espace ferme, oti il n'y a aucune tension electrique etrangere, Texces d'electricite, accumulee dans la portion isolee de Teleclrometre, se manifeste; le cadre et I'aiguille se re- poussent aussitot. L'electricite contenue dans I'electrometre doit etre et est reel- lement de I'electricite negative, comme on le prouve, en conslatant que si Ton approche un baton de gomme laque frollo de la boule K, la repulsion et la d^- vlatiou sont accrues. 386 COSMOS. Si la presence d'un nuage avuit rendu positive la portion de la ferre placee sous son intliience, en r^pctant la nieme experience on conslaterait que I'ap- proche du balou do gomme iaqiie diminuerait la repulsion et la deviation; et que, par consequent, la portion isolee de ['(^ieclromctre contenait de I'electricite positive. Si on procede a I'observation par un ciel couvert, et apres une grande et lon- gue pluie, aiors que I'air est sature de vapeurs, et que ces vapeurs metlent la terre en communication non inlerrompue avec lesnuages, on ne trouve au- cune tension electrique : alors , en effet, I'observateur se trouve situo a rint6- rieur d'un corps electrise, et ne pent nuilement senlir I'influence de I'electricite, pas plus qu'il ne la sent dans une cliambre fermee. Toutes les observations faites jusqu'ici parM. Lament conBrment pleinement ces previsions theoriques. En effet : 1° par un ciel serein I'electricite de la terre est toujours negative et d'une intensite sensiblement constante; 2° les nuages, en general, poss^dent; une certaine quantite d'eiectricite negative qui diminue I'elecLricite negative permanente de la terre; 3° les nuages orageux conliennent le plus souvent une si grande quantite d'61ectricite negative, que s'ils se rapprochent sulfisamment de la terre, non-seulement ils dissimulent son electricite negative permanente, mais encore lui communiquent une quantite plus ou moins grande d'electricile positive ; 4° les nuages electrises positive- ment,etqui, par consequent, augmentent I'electricite negative permanente de la terre, sont tres-rares. De celte maniere d'envisager les faits, il resulte que les variations de la ten^ sion Electrique a la surface de la terre dependent exclusivement de la presence des masses de vapeur. Comme la tension electrique en chacun des points de la surface de la terre est li^e necessairement a ceile des autres points, il en resulte qu'un changement ■survenu en un point quelconque doit se faire sentir sur la surface entiere du "lobe, et se faire sentir presque instantanement , a cause de la vitesse enorme de I'electricite. Sous ce rapport, des observations simultanees ou faites aux me- mesheures dans divers iieux, presenteraient un tresgrand inter^t, dans le cas du moins de ruptures d'equilibre electrique qui se produiraient sur de grandes etendues de terrain; car les ruptures d'equilibre produites par un nuage ora- geux isole, quelque intenses qu'on les suppose, sont locales et sans influence sur I'immense quantite de fluide electrique ni^gatif distribuee sur toute la sur- face de la terre. Nous avons jusqu'ici traduit fidelement la note de M. Lament; il la termine en priant les physiciens de faire des observations d'electricite atmospherique toutes les fois qu'une aurore boreale apparait, et surtout passe au zenith du lieu qu'ils habitent; si, en effet, I'aurore boreale, comme quelques-uns i'ont pens6, 4tait due a des decharges electriques, elle exercerait necessairement une in- fluence sensible sur I'electricite de la terre. Nous profilerons do cette circonstance pour resumer en quelques mots les connaissances acquises sur I'electricite de I'atmosphere , et conslater , non sans COSMOS. 387 qiielque chagrin , que cette parlie si essentielle cle la meleorologie n'a fait pres- que aucun progtes depuis cinquante ans. 1. La tension electrique de la terre presente des variations diurnes tres-regu- liores; ce fait a ete mis compietement hors de doute par Schiibler, vers 1800 ; voici la marche gen^rale du phenomene. Un premier minimum a lieu environ une heure apres I'apparilion de I'aurore ; la tension croit ensuite et alteint son premier maximum entre 6 et 7 heures du matin en ele, entre 8 et 9 heures au printemps et dans Tautomne, vers 11 heures en hiver. Elle diminue ensuite jusque vers 5 heures en el^, 4 heures au printemps e^ en automne, 3 heures en hiver; il y a alors un second minimum qui dure environ une heure ou une heure et demie. La tension angmente ensuite de nouveau, atteint un second maximum vers 9 ou 10 heures du soir, pour diminuer jusqu'au matin. II. La tension electrique varie suivant les differents mois de I'annee, elle va en croissant depuis le mois de juillet jusqu'au mois de Janvier, et diminue en- suite depuis le mois de fevrier jusqu'au mois de juin ; de sorte que le maximum d'intensite est en hiver, et ie minimum en ete. III. La tension electrique de la terre est plus forte quand le ciel est serein que quand il est couvert, et 1' electricity par un ciel serein surpasse d'autant plus reieclricite observee par un ciel couvert, qu'on se rapproche davantage de Janvier. Peltier a eu la gloire de demontrer le premier que la terre possede essentiel- lement et normalement une puissante tension d'electricite negative, le premier aussi il a construit un electrometre atmospherique comparable. L'lntensite si grande de la tension electrique de la terre en hiver, et I'inten- site moins grande de I'ele, sont un fait remarquable qui n'a pas ete clairement et suffisamment explique. Qu'on nous permelte de revenir sur queiques idees que nous avons emises a ce sujet en 1847, dans la Revue encijdopedique de M. Didot. II n'est pas douteux pour no js que les piantes dans Facte de la res- piration, apres avoir absorbe le carbone de Fair, lui rendent I'oxygene a I'etat naissant, c'est-a-dire electrise negativement, sans I'atmosphere d'electricite po- sitive qui le constitue a I'etut neutre ou normal. Ce fait admis : dans les mois de mai el de juin, ou la vegetation a touts son activite, la quantite d'oxygene a I'otat naissant sera tres-conjiderable, et il y aura par la, meme dans Fair, sur- tout a la fin de la nuit, vers le lever de Faurore, une certaine quantite d'electri- cite negative, qui dissimulera en parlie Feleclricite negative de la terre; la tension electrique constalee par I'electrometre sera done beaucoup moindre. Au mois de Janvier, au contraire, oil la vegetation estnulle, I'electricite negative do Foxy- gene a I'etat naissant, ne dissimulera plus I'electricite permanente de la terre, et la tension aura son maximum d'intensite. J'ajoutais dansce meme article qui a cinq ans de date : « On n'a pas tenu assez compte jusqu'ici de ce fait important, que I'oxygdne degage des piantes n'est pas a I'etat neutre. Nous avons la conviction in- time que cet oxyg^ne naissant, sans son atmosphere positive, est Fozone decou- vert par M. Schoenbein, doue d'une odeur sui generis, et possedant a un haut degre toutes les proprietcs des corps eiectro-negatifs. Le blanchiment de la 388 COSMOS. toile, de I'ivoire, de la cire a I'air libre, sur des prairies en pleine vegetation, la formation spontanea de I'acide nitrique et du saipctre, ainsi que beaucoup de phenomenes , n'ont pas d'aulres causes que I'aclion puissante de I'oxygene a r^tat naisj^ant ou avec son electricil6 negative non dissimulee. » Nous avons fait, en 1845, le voyage de Strasbourg a Bale, uniquement pour voir par nos yeux, les curieuses experiences de M. Schoenbein sur i'ozone; et en renilant compte, dans I'Epoque de novembre 1845, des fails dont nous avions etc temoin, nous prononcames hardiment que I'ozone n'6lait pas autre chose que I'oxygene electrise nugativement. Aujourd'hui le fait est admis par tout le monde; il a ete recemment I'objet d'un tres-beau momoire de M. Edmond Bec- querel et Fremy. II nous est permis, sans aucun doule , de revendiquer , sur des documents certains et imprimes, la priorite d'idees que nous croyons riches d'avenir. Deja les deux savants que nous venons de nommer ont demontre qu'en presence de I'oxygene electrise, I'azote pouvait donner naissance a diverses combinaisons; c'est un premier pas de fait dans le vaste champ qui s'etait ou- vert devant nous, nous sommes certain que bientot nos autres indications seront elles-memes confirmees. Signalons enfin un fait extraordinaire, observe parM. Quetelet : En 1849, la tension electrique de la terre fut beaucoup moins considerable que dans les annees precedentes. La moyenne de Janvier qui, de 1845 a 1848, avait ete de 53 degres, ne fut pour Janvier 1849, que de 39 degres ; cette disproportion con- siderable se maintint jusqu'au mois d'aoul, et I'electricite revint ensuite a son etat normal; or, de Janvier a aodt 1849, le cholera exerca de grands ravages dans TEurope presque entiere. La diminution de la tension electrique doit coinci- der avec un accroissement dans Tatmosphere de la quantite d'ozone ou d'oxygene electrise negativement; cette surabondance d'ozone serait-elle reellement pour quelque chose dans I'apparition de I'epidemie : quelques savants anglais ont deja discule cette question mais pas a ssez serieusement pour que nous ayons cru devoir analyser leur travail. A la m^me epoque de 1849, on afBrmait qu'en Russie les aimants avaient perdu de leur efficacite, et M. Andraud ^crivait a TAcad^mie des sciences, que, pendant toute la duree du cholera a Paris, la machine Electrique refusait de donner des etincelles ou n'en donnait qu'a regret. M. Andraud nous racontait tres-s6rieusement, I'autre jour, que depuis que le cholera sevit dans quelques villes de Pologue, sa fameuse machine electrique perdait chaque jour de sa puissance. DE l'IMPRIMERIE de en. LAHURE (ancienne maison crapelet), luf de Vangirard . 9, prcs de I'Od^on. COSMOS. 389 NOUVELLES DE LA SEJIAINE. Angleterre. — On lisait dans les journaux et les revues de Londres dedimanche dernier I'annonce suivante, qui a excite une vive atten- tion. « Une ascension en ballon, dans un but de recherches scientifi- ques, aura lieu au jardin du Vauxhall , le mardi 17 ou le jeudi 19 aout, a 3 heures aprfes midi , sous la direction du comite de I'observatoire de Kew, faisant partie du conseil de 1' Association britannique pour I'a- vancement des sciences. « Les observateurs meteorologistes compris dans un rayon de cent cinquante milles autour de Londres, sont respectueusement invites a observer le barometre , le thermometre a boule seche, le therraometre a boule mouillee et I'hygrometre de Daniell , a toutes les heures , ou plus souvent s'ils le peuvent, depuis 2 heures jusqu'a 8 heures apres midi , le jour de I'ascension. Si le ballon devenait visible pour une sta- tion , I'observateur est instamment prie de prendre note de I'espece et de I'apparence generale des nuages dans le voisinage de I'aerostat, et du moment precis de son entree ou de sa sorlie de la masse nua- geuse. » Voila certes une excursion parfaitement organisee , et qui pent don- ner d'excellents resultats ; les observations simultanees doivent etre adressees au colonel Sykes , president du comite de Kew, India House, Londres. Plus prudents que nos hardis compatriotes , MSI. Bixio et Barral, et avertis par le danger que ceux-ci coururent dans leur voyage aerien , les savants anglais ne se lanceront pas seuls dans les profon- deurs de I'atmosphere ; ils se sont adjoint un aeronaute habile et ce- lebre, exerce depuis longues annees a tenir d'une main ferme les re- nes d'un ballon. Les objets principaux des investigations du comite de Kew sont la direction des courants qui sillonnent I'atmosphere a diverses hauteurs au-dessus de la terre ; I'etat electrique de I'air a de tr^s-grandes eleva- tions; la quantite et la tension de la vapeur; la formation et la dissolu- tion des nuages , etc., etc. — M. Hind ecritau Times que I'astronome I'oyalM. Airy, invite par M. Bishop a devenir le parrain de la nouvelle planfete decouverte le 24 juin dernier, lui a donne le nom de Melpomene. M. Hind ajoute : « cette planete , I'une des plus voisines de la terre , dans le groupe d'astres compris entre Mars et Jupiter, est situee entre Flore et Victo- ria, le temps desa revolution est de 1269 jours. » — La reunion de la Societe d'agricuUure des montagnes de I'ficosse, 22 AODT 1852. 17 390 COSMOS. tenue recemment ti Perth, a donne lieu h de tr6s-belles experiences. II s'agissait de comparer entre elles ct de juger definitivement diver- ses machines h moissonner, tr5s-vantees, ct qui avaient chacune leurs partisans enthousiastes. La hitte s'etait deja engagee a I'exposition uni- verselle entre deux machines inventees par deux Americains, MM, Cor- mick et Hussey ; la machine de M. Cormick avait triomphe , et le prix lui avait cte decerne. A Perth , on opposait a la machine de M. Ilussey une machine anglaise, construite il y a vingt-cinq ans par le reverend ^I. Bell, cure de la paroisse de Carmylie, et depuis cinq ans en usage dans la grande ferme d'Inkmichael. Les juges ont prononce a I'unani- mite que la machine de M. Bell avait une superiorite incontestable ; ii y a avee elle grande dconomie de temps , les tiges sont coupees beau- coup plus franchement, le grain est moins secoue,le ble coupe est cou- che tres-regulierement , les lames sont moins arret(^es par la presence des mauvaises herbes , elle exige une moindre puissance de traction pour couvrir le meme espace de terrain , elle n'a pas besoin d'un espace vide pour commencer ses operations, elle rejette le ble de cote sans le secours de mains d'hommes, et supplee les aides de moissonneurs. Une machine d'Hussey coute 18 livres (450 francs) ; celle de M. Bell coute 875 francs , mais I'excfes de depense premiere est largement com- pense par I'excedant de travail. Cette derniere machine n'est pas trai- nee comme les autres, I'appareil coupeur marche en avant des che- vaux ; il porte sur son front des bras en forme de volants, qui inclinent les tiges. Ajoutons que la machine ecossaise est egalement apte a fonctionner dans toutes les circonstances possibles, sur de I'avoine, de I'orge , du bie verse, des terres ondul^es, etc., tandis que la machine americaine n'opere tres-bien que sur du froment droit et des terrains unis. — U Atheneiim invite instamment les villes de Plymouth, deBalh, de Bristol, d'Exeter a suivre I'exemple queleur ont donne Durham, Lin- coln, Carlisle, Inverness, Edimbourg, Manchester, Liverpool et toutes les autres cites importantes des trois royaumes unis, qui toutes ont adopte le temps moyen de Greenwich. L'uniformite dans les indica- tions des horloges des villes qui communiquentinstantan^ment par le telegraphe electrique, sera non-seulemcnt un bien considerable, mais elle est une necessite absolue : iljy a quelque chose d'absurde et d'of- fensant pour I'intelligence humaine dans le fait renouvele chaque jour d'un message parti h 12 heures 6 minutes apres midi et arrive a Plymouth all heures 50 minutes avant midi, d'une nouvelle re(?ue avant d'avoir ete expediee. Et la France, quand entrera-t-elle dans la voie du progres? Quand le midi moyen de rObservatoire national COSMOS. 391 scra-t-il signals a Paris, comme a Londrcs et a Rome, par la chute d'un ballon sur le dome des Tuileries, du Palais-Royal ou de la Bourse, ou sur la place du Carrousel? Quand les horloges des villes unies par les chemins de fer et les telegraphes electriques seront-elles reglees sur le temps moyen de I'Observatoire? — Le Gardener s chronicle appelle I'attention de ses lecteurs sur un biscuit animalism, fabrique en quantites 6normes dans les magnifiques prairies du Texas, et qui doit infailliblement prendre place paraii les substances alimentaires les plus estimees. Voici comment il est pre- pare : La viande de boeuf sortant de la boucherie est hachee tres-fin par une machine, et on la fait bouillir dans une grande quantite d'eau pendant 16 heures. La graisse est alors enlevee, et le liquide, separe par filtration des matieres solides, est evapore a un degre uniforme de densite, marqu^ par un pese-sirop. Cet extrait, semblable a du sirop de Sucre, est ensuite melange et petri avec de lafarinede froment de pre- miere qualite, roule, coupe en biscuits par les machines ordinaires, et cuit dans un four a une temperature toujours la meme. Sa couleur est celle des plus beaux gateaux ; il seche facilement, se durcit et se con- serve indefiniment. Une livre de biscuit animalise contient, a I'excep- tion de la graisse, toute la matiere nutritive de cinq livres de boeuf de premiere qualite melee a celle d'une demi-livre du meilleur froment : une once de biscuit rape ou pulverise et bouilli dans un litre d'eau, donne une soupe tres-agreable et tres-nourrissante, dontonne se lasse jamais. II a ete demontre et il a ete reconnu par le jury de I'exposition universelle de Londres , que dix livres de cette substance additionnee d'une quantite suffisante d'eau, donnent, sous le double rapport du volume et du pouvoir nutritif, la quantite d'aliments suffi- sante pour maintenir dans toute I'integrite de ses facultes intellec- tuelles et physiques un ouvrier fort et vigoureux pendant un mois. L'analyse chimique a prouve en effet, que le biscuit animalise orga- nique contient 4,19 pour 100 d'azote, et 31,85 pour 100 des sub- stances composantes de la chair. L'examen du jury futsi favorable que I'unanimite des juges decerna a I'inventeur, M. Gail-Borden, une des rares medailles de premiere classe, council medals. Des regiments et des equipages entiers ont vecu plusieurs mois avec ce seul biscuit, sans rien perdre de leurs forces et de leur sante. M. Ternaux, dont Ic nom sera toujours cher a la France, entreprit ily a longtemps la fabrication, aux portes de Paris, d'un biscuit a peu pres semblable ^ celui que le jury de I'exposition universelle vient de couronner; mais rengraissement des bestiaux dans le voisinage de la capitale coute beaucoup trop cher; et si M. Gail-Borden a si bien 392 COSMOS. reussijC'est precisement parce que dans les plaines si riches du Texas, u viande de boucherie no coiite presque rien. Dans le Limousin et la iJretagne au contraire, un etabiissemenl de biscuit animalisd auiait de grandes chances desucces, et sa creation serait un bienfait; nos sol- dats, nos marins, nos ouvriers pauvres entreraient par la en posses- sion d'une nourriture economique, salubre et fortifiante. — La commission dite du Lancet, chargee de verifier a Londres I'etat de purete des substances alimentaires, poursuit avec ardour et cou- rage sa grande mission. Son dernier rapport au gouvernement avail surtout pour objet les fruits confits dans I'alcool et les conserves de legumes : elle constate, h son grand regret, que la plupart des fabricants, dans le but lamentable de flatter avanttout la vue, avaient contractela fatalc habitude dc recourir aux preparations de cuivre pour rehausser la couleur de leurs produits, sans tcnir aucun compte de la qualite, de la saveur et surtout de la salubrite. Sur33 echantillons de fruits en bouteilles, et de legumes en boite achetes dans les depots des nego- ciants les plus achalandes et qui expedient le plus aux Indes, 27 etaient plus ou moins impregnes de cuivre : on le mettait facile- ment en evidence, en plongeant dans un vase contenant trois onces du liquide dans lequel nageaient les fruits ou les legumes, une petite barre de fer doux, apres avoir prealablement acidule ce liquide par quelques gouttes d'acide nitrique concentre. Quand on retirait le bar- reau de fer du liquide, on le Irouvait recouvert d'une couche continue etbvillante de cuivre, sur toute sa surface ou sur une partie de sa sur- face, suivant la quantite de cuivre employee pour rehausser le vert des fruits et des legumes. Le rapport etablit tres-neltement que le cuivre, mis en evidence par les reactifs, ne provenait pas des vases dont on s'etait servi pour les confire ou les cuire : la preuve c'est qu'on ne le retrouvait que dans les fruits de couleur verte, jamais dans les fruits de couleur rouge. Ce que Ton voulait par cette frauduleuse et coupable addition, c'etait done evidemment une nuance plus appe- tissante pour les fruits et legumes verts. La commission public impi- toyablement les noms des vcndeurs de ces conserves empoisonnees; elle public aussi le nom du seul depot dont les conserves ont ete Irouvees exemptes de cuivre ; elle regrette de venir trop tard, alors que tant de personnes ont deja achete ces preparations devenues ho- micides par I'addition en proportions considerables d'un poison aussi violent que le cuivre. A quoibon, s'ecrie le Times, se tant occuper du drainage, dc ventilation, d'eau potable abondante, de bains, etc., etc., quand nous voyons qu'un vaste systeme d'empoisonnement est orga- nise autourde nous, qu'ilsc propage dans I'ombre et exerce ses ravages COSMOS. 393 jusque dans I'interieur de nos maisons, qii'il s'assoit a notre table ct nous sert des aliments deleleres, qu'il se dresse devant notre lit de douleur et nous impose ses medicaments devenus inertes par la sophis- tication, etc.! — II est un fait observe presque partout et qui jusqu'ici est demeure inexplicable. Pendant plusieurs semaines, depuis la fin de mai jusque vers le milieu de juin, la creme du lait devient presque subitement ranee, et le beurre qu'on en extrait prend un tres-mauvais gout. On a pens6 d'abord que ces alterations etaient dues a I'apparition dans les paturages vers cette epoque de I'annee de plantes i'lcres, ameres ou acides : mais cette explication ne supporte pas un examen serieux , car on observe les memes alterations dans des paturages oi^i Ton ne ren- contre aucune de ces mauvaises plantes, lesquelles continuent d'ailleurs a vegeter et a fleurir pendant les mois de juin, de juillet et d'aout. Un correspondant du Gardener's chronicle est intimement convaincu qu'il faut attribuer la rancidite de la creme et le mauvais gout du beurre a une disposition mauvaise des vaches. On les conduit ordinairement au taureau dans les mois de fevrier et de mars , qui sont en general pour elles I'epoque du rut; cet etat d'excitation dure plusieurs mois, et il est naturel que les perturbations qu'il amene ne se fassent sentir que plus tard dans toute leur intensite par I'alteration de la creme et du beurre. Quoi qu'il en soit, on ne connait encore aucun moyen de pre- venir cet inconvenient si grave; et le seul parti a prendre, c'est de consommer le lait doux ou aigri, d'autant plus que sous ces formes le mauvais gout ne se fait pas sentir, sans lui laisser produire la creme et sans en extraire le beurre. Allemagne. — Une des plus grandes questions a I'ordre du jour, c'est la question des tourbieres et des tourbes. Quel est I'avenir des tour- bieres? Comment depouillerla tourbe de I'odeur nauseabonde qu'elle repand en brulant? Comment I'amener a bruler avec flanime ? Com- ment accroitre la duree trop courte de sa combustion? La tourbe peut- elle remplacer le^bois dans les hauts fourneaux? Peut-on la distiller economiquement pour en extraire les sels ammoniacaux et la parafine qu'elle contient?Quel est le meilleur proc6de de distillation? etc. etc. Ceux qui connaissent I'immense etendue des tourbieres de I'Eu- rope , et qui se sont fait une idee des richesses qu'elles contiennent, comprendront I'importance des desiderata ou problemes que nous venons d'enoncer. Nous ne les aborderons pas aujourd'hui dans leur ensemble, mais noussommesheureuxdeprouver pardeux faitsrecents que la solution ne se fera pas attendre. M. Rischner, directeur des hauls fourneaux de Carolinen Hutte, pr^s Achthal en Styrie, pendant deux 394 COSMOS. canipagnes de quatorze semaines chacune, a employe dans la premiere du bois de cliarbon seul, dans la seconde un melange de charbon de Lois , de tourbes compactes et de tourbes fibreuses, dans le m6me fourneau, avec les memos appareils de soufflerie et d'introduction d'air cliaud. II resulte de cetle experimentation en grand : 1° que Temploi de la tourbe n'a exerce sur la qualite de la fonte aucune in- fluence defavorable; 2" que dans I'affmage et le puddlage, lefer obtenu par le melange de la tourbe se comporlait absolument comme le for obtenu par le charbon de bois sans melange ; 3" que le moulage , au contraire, etait plus facile et tres-superieur quand on employait les produits obtenus par la tourbe : les fontes elaient beaucoup plus pures, de grain plus fin, de cassure plus unie , plus douces, plus faciles a couper, percer, tourner etc., etc.; aux temperatures les plus elevees ces fontes ne rejetaient ni ecume, ni graphite, ce qui n'a pas lieu nieme avec le fer le plus dur obtenu par le charbon de bois ; la fonte a la tourbe est done eminemment propre a la construction des pieces des machines, desoutils, et des ornemenls, etc., etc.; 4° quetres-pro- bablement on aurait pu remplacer par de la tourbe la moitie du char- bon de bois si le haul fourneau etl'appareil de chautfage n'avaientpas ete dans un etat de degradation, et que la pression du vent eut pu etre poussee davantage ; 5" que ces conditions defavorables font mieux ressortir encore I'emploi de la tourbe sechee a I'air pour I'exploilation des hauts fourneaux; 6° que la substitution de la tourbe au charbon de bois, en outre des avantages deja enumeres, serait tres-avantageuse sousle rapport economique : 12 pieds cubes de tourbe coulant dans la localite habitee par M. Rischner G8%832 , peuvent remplacer 7 pieds cubes de charbon de bois, coutant 1]7%946; I'economie serait done de 49%114, par chaque cent livres de fonte produite. Le Monitcur in- clnstriel , dans une note sur ces recherches , croit qu'il faut deduire quelque chose de ce chilTre 49% parce qu'il faudra avec la tourbe augmenter la quantittS d'air et sa pression ; mais il n'en est pas moins persuade que I'emploi de la tourbe dans les hauts fourneaux sera avantageux lorsqu'on ne sera pas oblige de la faire venir de trop loin. Les briques de tourbe de M. Rischner etaient formees d'un melange de 5 parties de tourbe compacte et d'une partie de tourbe grossiere et fibreuse , elles etaient simplement sechees a I'air. France. — Dans un article insere I'annee derniere dans le journal le Pays, nous avons rendu compte des experiences faites par M. Ha- mon, Franc-ais fixe depuis longtemps h Londres. Apres de longues etudes, des recherches patientes, de nombreuses visites aux tourbieres de I'Angleterre et de I'lrlande, M. Hamon etait arrive enfin a decouvrir COSMOS. 395 que, pour transformer la tourbe en un combustible excellent etagrea- ble , qui ne repande aucune odeur nauseabonde , qui brule avec flamme, de toutes pieces, lentement, sans fumee, presque comme du bois d'orme, il suffisait, aussitot apres I'extraction, de comprimer les mottes ou briques assez fortement pour reduire leur volume d'un tiers, et en extraire I'eau infecte et chargee de sels qu'elles contiennent. Le sechage a I'air sous des hangars s'effectue tres-rapidement , en moins d'un mois, et la tourbe, pesant beaucoup plus sous un volume beau- coup moindre, est expediee a moins de t'rais au loin. M. Hamon avail mis a notre disposition un certain nombre de lourbes ; nous les essayames dans une cheminee ordinaire, sans grille, et nous nous assurames par nous-meme qu'elles remplissaient toutes les promesses de I'inventeur et constituaient un excellent chautiage. Notre article avait k peine paru, qu'un grand nombre de proprie- taires et d'amateurs accourureut demandant des echantillons et nous conjurant de les mettre en rapport avec M. Hamon. Mais M. Hamon , qui n"a pas I'ardeur mercantile, etait alle passer I'hiver en Angletei^re. Nous ne I'avions pas vu depuis six mois , lorsqu'il est venu nous an- noncer lui-meme son retour et nous prier d'aller visiter une tourbiere situee pres du village de May , a vingt kilometres de Meaux , sur les bords du canal de I'Ourcq, ou ses precedes sont appliques en grand. Nous avons fait ce voyage avec joie , car la grande question des tour- bieres est une de celles qui nous interessent et nous preoccupent le plus dans I'interet de la France. Nous avons vu la tourbe, extraite sous nos yeux d'une profondeur de six a douze pieds sous I'eau, passer dans les presses, en sortir comprimee, ^tendue sur des claies dans de vastes hangars, etc., etc. Les presses sont simples, elegantes et tres-efficaces ; chacune d'elles, mue par un seul ouvrier, comprime de quatre a cinq mills briques par jour ; un enfant suffit pour introduire et enlever les quatre briques que Ton presse a la fois ; le prix de main-d'oeuvre est par consequent tres- reduit, et Ton a degage ce combustible providentiel , fourni en si grande adondance par la nature, de toutes les parties vicieuses qui en rendaient I'emploi impossible dans les families et les usines. Quel est le pouvoir calorifique de la tourbe comprimee et que Ton a appelee Hamonide? D'experiences positives, dont nous n'avons nuUe raison de nous defier, 11 r^sulterait : 1° que pour degager dans le m^me temps une meme quantite de calorique, la depense serait en bois 4 fr. 26 cent., en coke 2 fr. 3 cent., en charbon de terre 1 fr. 62 cent., en hamonide 1 fr. 2 cent.; 1° que pour chauflfer une chambre pen- dant 12 heures, il faudrait 62 cent, de coke, 51 cent, de charbon, 396 COSMOS. 1 fr. 37 cent, de bois, 38 cent, sculement de hamonide; et que les degres de chaleur degages par ces 4 combustibles seraient repr^scntes par les nombres 3100 pour le coke, 3141 pour le cbarbon, 3213 pour le bois, 3885 pour la hamonide; 3" que, par consequent, au pnx au- quel il peut etre livre sur le marche de Paris, le combustible obtenu par les precedes de M. Hamon serait plus economique dans le rapport de 300 a 100 ou de 3 a 1 compare au bois, de 200 k 100 compare au coke, de 100 a 60 compare au cbarbon de terre. Si M. Rischncr avait rempli ses hauls fourneaux des tourbcs com- primees de M. Hamon, il aurait bien certainement constate une ame- lioration incomparable dans la qualite de la fonte et une economie enorme. Quand la tourbe est comprimee, elle se carbonise avec autant de facilite que le bois, par le meme precede , la combustion lente a I'abri de I'air ; et le charbon de tourbe est grandement preferable au cbarbon de bois et de terre, parce qu'il donne beaucoup de chaleur; au coke , parce qu'il est pur et ne contient pas de soufre , si nuisible dans le traitement des metaux. Un coutelier celebre de Londres, qui a employe dans sa fabrication le charbon de tourbe de M. Hamon, a obtenu de si excellents produits, des rasoirs, des couteaux, des instruments de tout genre, de qualite si superieure , que pour en con- server le souvenir il a ecrit sur chacun d'eux ces mots : fabrique att charbon de tourbe. II suffira de signaler ce fait a nos illustres coute- liers de Paris, nos Charrifere, nos Mathieu, nos Luer, etc., etc., pour qu'ils s'en rendent immediatementraison; et qu'ils s'empressent d'au- tant plus d'imiter ce precieux exemple , que leur interet materiel le leur commando, independamment de I'amelioration certaine des pro- duits de leur art. L'invention de M. Hamon, on le voit, est d'une simplicite extreme et en meme temps d'une portee immense , d'un avenir incalculable. Comprimer la tourbe c'est en apparence un jeu d'enfant , et cepen- dant pour reussir , pour arriver surtout a une main-d'oeuvre qui ne coutat presque rien, il a fallu vaincre de tres-grandes difficultes, inventer une foule de tours de main. Si nous ne craignions pas de reveler un secret qui nous est confie, nous etonnerions nos lecteurs en leur apprenant a I'emploi de quelle substance tenait le succes de la compression. Une experience faite sur place nous en a demontr6 I'efficacite souveraine : dans les tourbi^res de May il existe un bassin dont la tourbe repand une odeur d'hydrogfene sulfure insupportable ; or, des qu'elle a et6 comprimee, I'odeur disparait comme par enchan- tement, et les briques seches brulent dans un cabinet ferme sans infecter en rien I'atmosphere. COSMOS. 397 — M. Coulvier-Gravier , qui passe ses nuits h. contenipler la voute etoilee pour y denombrer les etoiles filarites, vient de presenter a I'Academie des sciences le resultat de ses dernieres observations. Cette annee encore, conime toutes les aulres annees, il y a eu un maximum do bolides dans la nuit du 10 aout; on a pu en compter 63 par heure, puis le nombre est alle en decroissant; et le 13 aoiit, il n'y en avait deja plus que 43 par beure. Les premiers mois de I'annee ont etc tres-pauvres en etoiles filantes, I'augmentation n'a gu^re ete sensible qu'a partir du 18 juin; etlacourbe des accroissements a presente cette fois-ci comme toujours UuS resularite teliement grande , qu'on par- viendra, grace a elle, il taut I esperer, a la determinauoi. .-- v-de ces meteores et de leur inegale distribution dans I'espace. PHOTOGRAPHIE. Nous avons aiijourd'hui une grande nouvelle a transmeltre aux photographcs ; mais maiheureusement cetle belle dccouverte nous aurail a peine fourni quclques lignes d'annonce, piiisque les proce- des reslcnt jusqu'a nouvcl ordre dans le portefeuille des inven- teurs , si noire collaboralcur M. Govi n'avait pas eu la pensee de pendlrcr leur secret. C'est la seconde fois que pareille chose arrive pour la meme in- vention. Deja, en 1841, dans la seance du 23 aout, M. Arago avait presente h I'Academie des epreuves fort belles representant la nebuleuse d'Orion , que le P. de Vico lui avait envoyees de I'ob- servatoirc du college Romain. Void comment ces epreuves avaient 6t6 obtenues. M. Rondoni, lithographe, apres avoir, en s'aidant d'une exccllente lunette de Cauchoix, fait un dessin de la nebu- leuse sur papier, reproduisait ce dessin sur pierre a I'aide des pro- cedes daguerriens. La preparation dont M. Rondoni recouvrait sa pierre n'etait pas connue de M. A'ico , I'artiste lui avait dit seulc- ment que I'image invisible s'y etait imprimee en moins de cinq mi- nutes ; qu'ensuite, sans autre preparation qu'une forte aciditlation, la pierre, recouverte d'encre ordinaire lithographique, avait donnc des epreuves, les premieres imparfailes, les suivantes d'une nettete remarquable. C'etaicnt en effet de belles epreuves que celles de M. Rondoni, et nous pouvons en rcndre bon temoignage, puis- qu'ellcs sont la sous nos yeux ; mais il nous semble certain, n'en 398 COSMOS. (leplaise h I'liabilc lithographc romain, que Ic crayon a rcclifie, en plusicurs cndroits de ses images, cc que I'impression photogra- phique avail pu laisser d'inacheve. M3I. Lcraercier, LereLours et Barreswill ayant r^uni leurs efforts, sont parvenus an nieme rosultat que M. Rondoni, si tant est que M. Rondoni , dont nous n'avons plus entendu parler, n'ait pas Iromp^ le P. do Vico, ct par le P. de Yico, FAcademic des sciences, lis out meme fait mieux, car h I'inspection de leurs epreuves, nous le's'^onTn?"'^ reconnaitre nuUc part le --^g^ge du crayon : lis ne . . . ^.cxa urces d'alUeurs de dcssins faits a la main. Nous Pe connaissonspasla part que chacun des inventeurs a prise a la clecouverte ; mais qui pouvait douter que la lumiere ne dut jaillir de la reunion de Irois homines dont I'un doit elre regarde commc le plus habile des lithographes, I'aulre comme un excellent opti- cien, le troisieme comme un chimiste fort distingue? Nous venous devoir deux Epreuves tiroes sur papier de Chine, et obtenuesparle nouveau procedc photo-lithographique , et nous devons dire que jamais premier essai n'a ete plus heureux que celui qu'on nous a mis sous les ycux. A part certains defauts inevitables dans toute tentative , les epreuves photo-lithographiques presentent une telle douceur de ton et une telle finesse d'execulion, que nous ne pourrions les comparer qu'a des epreuves photographiques des mieux rcus- sies. L'uu des essais que nous avons vus repr^sentait le ponl Neuf, et c'etait le moins bien venu. II y avail une certaine confusion de details qui ne pouvait provenir que de la trop grande uniformile du ton gris des ombres-; la perspective aerienne n'elait pas assez respectee, mais on y voyait dej^^, sinon un succes complet, du moins un grand pas de fail pour I'atteindre. Le second tableau re- produisail un fragment du plafond du grand salon de I'ecole fran- gaise, au Louvre, avcc ses cariatidcs, ses arabesques et ses portraits d'arlistes cclebres; la tete de David se monlrail au centre; la ca- riatide de droite etait un veritable chef-d'ceuvre, aussi bien que le portrait central el une parlie des ornements qui I'entourent. Le reste etait moins bien rdussi, mais on y voyait neanmoins cetle grande dolicalessc de louche, si nous pouvons nous exprimer ainsi, et cetle precision malhemalique qui, sans^sorlir du domaine de I'art, par des contours sees et tranchanls, ajoutc tant de eharme aux belles productions des peintres de I'ecole hollandaise/Nous re- greltons vivemenl de ne pouvoir pas donner de plus^amples details sur le nouvel art qui vient de naitre ; mais il nous sera permis au moins de hasarder quelques conjectures, ne fut-ce que pour enga- COSMOS. 399 ger les photographes ti en faire I'essai , si tant est qu'elles leur pa- raissent mcriter d'etre essayees. Nous commencerons par faire observer que les epreuves dont nous venons de parlcr ne nous paraisscnt pas avoir cl6 obtenues directement parl'expositionde la picrre preparee dans la chambrc noire. Nous connaissons une epreuve magnifique du plafond du Louvre, que nous avons admiree pendant longtemps dans la montre de M. Lereboiu's ; la plioto-lithograpbie que nous avons vue rcpresente, si nos souvenirs ne nous trompent pas, le meme nior- ceau de decoration, les memes cariatidcs, les memes portraits de Gros, de David et do Girodet; ellc est probablement Ic produit d'un negatif sur albumine ou sur collodion; car le papier donncrait dif- ficilemcnt aulant de finesse aux moindres details. Quant a la vue du pout Neuf, nous ne pouvons assurer avec la meme certitude que nous en connaissions la matrice ; peut-etre la trouverait-on dans I'un des brillants albums de la magnifique collection de M. Lere- bours. Quoi qu'il en soil, nous osons affirmer, d'apres ces souve- nirs, que la pierre lithographique n'a point servi a la formation de I'image dans la chambre noire, mais qu'elle a etc soumise aux ra- diations lumineuses sous un negatif, sur verre albumine ou collo- dione, ou sur papier. Ceci nous permet d'admettre que I'exposition a ete plus longue pour la pierre qu'elle ne I'aurait dt^ dans le cas d'une exposition dirccte dans la chambre noire. Or, parmi les substances impressionnablcs, les travaux immortels de Niepce nous out fait connaitre les resines conv enablement pre- parees, qui se dcsagrcgent sous les chocs rcpetes de lalumiere et peuvent donner d'assez belles images des objets lumineux. Suppo- sons done une pierre lithographique enduite d'un voile mince de resine, et, avant que la lumicre ait pu agirsur la couche impression- nable, couvrons-la d'une image negative sur albmuine ou sur col- lodion, voire meme sur papier, et exposons I'ensemble a Taction de la lumiere, comme on pourrait le faire pour obtenir les images positives ordinaires. La resine s'impressionne lentement ; mais pour avoir un clich6, rien ne nous empeche de laisser notre pierre au soleil ou a la lumiere diffuse pendant des minutes et meme pendant des hcurcs , pourvu que les noirs de I'image negative jouissent d'une opacite suffisante. Des lors il est Evident que la cou- che resineuse correspondante aux blancs de I'image negative se trouvera desagregee ; et si Ton vient a encrcr la pierre dans cet (5tat, I'encre lithographique, savonneusc, adherera a la pierre dans tons ces endroits, s'attachera partout ailleurs a la resine non entam<5e. 400 COSMOS. Que Ton acidiilo niaintenant Ic dessin, le savon decompose laissera line couche grassc sur lapicrre el sur la resiuc; mais si on vient h les laver par I'alcool ou par Tclher, la couche rcsincuse sera dis- soulc et emport(^c avec Ic corps gras qui la recouvrail, landis que la ou la couche grasse adherait dircctement a la pierre, il n'y aura pas do changement produit : apres ce lavage et uue nomellc aci- dulation, si on le juge convenable, le dessin pourra donner dcs epreuves par les methodes ordinaires de tirage lithograpliique. Nous vcnons d'indiquer un des moyens qui se sont presentes h noire esprit au moment mcme ou les images de MM. Lemercier, Lerebours et Barreswill nous ont 616 montrees ; nous pourrions en indiquer d'aulres; mais il nous semble si facile de faire I'essai de cettc premiere methode que nous avons prefer6 do la donner immc- diatemcnta nos lecteui's, sauf a leur exposer plus tard les aulres, que la theorie des actions photographiques nous a ddja indiqu^es. Nous voudrions pouvoir appr(5cier en terminant le degre d'impor- tance que cette nouvelle decouverte pent avoir pour le progres des arts ou des sciences, mais nous manquons de toute donnee relative au nombre d'exemplaires qu'une pierre ainsi preparee pcut donner a I'impression ; de sorte que nous ne pourrions nous livrer qu'a de nomellcs conjectures , et nous aimons mieux nous en abstenir. La comparaison des images obtenues par les plaques gravees de MM. Donne et Fizeau avec celles de MM. Lemercier, Lerebours et Barrcs>vill , est tout a I'avantage de ces dernieres : les plaques o-ravecs offrent une duretc de tons et de contours qui ne se retrou- vent plus sur les photo-lithographies. Ceci est tellemenl vrai que , nonobstant les beaux resultats deja obtenus . la gravure des pla- ques daguerrcotypiques a etc completement abandonnce , et qu'on lui a prelere le clichage, long et penible, des images sur papier. II faut done espcrer que la methode nouvelle de reproduction photo-lilhographique, grace surtout a I'liabilct^ avec laquelle on fail aujourd'hui les transports, pourra remplacer sous pen le tirage pho- tographiquc pur, et que les admirables albums des photographes pourronl devenir un objel de commerce lucratif , et une collection de modeles artistiques a la portee de toutes les fortunes. — Un correspondanl de YAtheneum , M. Hocking , recommande aux photographes la substitution de I'iodure d'ammonium ou hydrio- dale d'ammoniaque a I'iodure de potassium ou hydriodate de po- tasse dans I'emploi du collodion. Cette substitution a deja etc proposce par M. Adolphe Martin , de Versailles , dans la seance de I'Academie des sciences du 5 juillct. L'iodure d'ammonium, dit COSMOS. 401 M. Hocking, possede de grands avantages secondaires on collaie- raux. L'iodure double d'argent el d'ammonium sc dissoiit on toulc proportion et avec une grande facilite dans le collodion , et la dis- solution ne laisse pas deposcr une portion dc son argent , commc cela arrive pour la dissolution d'iodure d'argent et de potassium : en consequence , le collodion pent etre iodure en moins d'une heure et employe immcdialement apres. La lenacile de la nouvelle couchc sensible est beaucoup plus grande ; la tendance a I'amincis- sement ou h reclaircissement presque indcfmi du collodion est beaucoup moins grande , et le melange ne se decolore plus rapidc- ment sous les diverses influences qui le decoloraient autrefois. BI. Hocking a maintenu , pendant quinze jours , une boulcille , non pleine et souvcnt ouvcrle , du nouveau collodion iodure , u la tem- perature de 20 h 25 degres cenligradcs, sans que son aspect ait nullement change. Par I'addilion de dix a \ingt gouttcs d'une dis- solution alcoolique saturee du double iodure d'ammonium ct d'argent a chaqueonceou trente grammes de collodion, M. Hocking a pu obtenir de bonnes epreuvcs positives d'un edifice dans une fraction de seconde , et un portrait negalif en une seconde , sans rien changer, du rcste , au proccde ordinaire , par la scule substi- tution , par consequent , du double iodure d'ammonium et d'argent au double iodure de potassium et d'argent. — Nous traduisons litteralement du Literanj gazette I'article sui- vant, en nous I'eservant de publicr dans toute leur extension la leltre du president de la Soci^tc royale et de 1' Academic royale a M. Talbot, ainsi que la reponse dc I'illustre inventeur de la calo- lypie : « Les journaux du matin d'hier vendredi, 13 aout , out imprime deux lettres formant la correspondance du president de la Societe et de I'Academie royales avec I'honorable M. Fox Talbot. Ces deux lellres intercsscront au plus haul degreetrejouiront grandemenlles amateurs de photographie. Considerantles rapidesprogres que, grace a la concurrence. Fart de la photographie sur papier a fait en France, les representants de la science el de I'art en Anglelerrc ont pressc I'opulent {sic) invenleur etpatente d'apporler a rcxcrcice de ses droits des adoucissements et des modifications tels que cct exercice ne soil plus un obstacle invincible aux progres de I'art en Angleterre. M. Talbot, se sentantimpuissant apoursuivre hii-meme les difTerenles applications de ce bel art, a repondu gencrcusement a la requete qui lui etait adressee, en renon^ant a ses paten tes ou brevets d'invention, et en rendant entierement libre la pratique dc 402 COSMOS. la calotypic ou photographic sur papier, a I'exception toutefois de rappUcation particuUerc qui consistc h prendre des portraits sur papier pour les hvrcr Ji prix d'argent. » Les patentes de M. Talhot, commc nous I'avons ditailleurs, elaicnt au nombre de quatrc : la premiere, de 18dl ; la seconde , dc 1842 , pour divers perfcctionncmenls relatifs principalement i la fixation des epreuves; la troisieme , prise de concert avec M. Malone , pour peintures photographiques sur plaques de porcelaine , et des perfectionnements apporles h I'emploi de Talbumine sur papier et sur verre; la quatrieme, enfin, pour le proc(5d(5 de production in- stanlanee des epreuves photographiques. Ces patentes ont donnd naissance a des reclamations inccssantes de la part des patentes , j\ des discussions penibles, h. des dcbats malheurcux , qui vont enfin cesser par la renonciation volonlaire de M. Talbot. La production de portraits photographies faits pour la vente est scule reservee encore. On dit que cetle reserve a <5te impos^e h M. Talbot par la difficultc ou Ton s'est trouvc de fixer le chiffre des dedonunagements auxqucls avail droit le concessionnaire de M. Talbot, I'habile M. Henneman , qui exerce cettc induslrie sur unc immense echclle. II est a regretter que ces difficultcs n'aient pas etc aplanies , comme M. Talbot le d6sirait sincerement : d'au- tant plus que, d6finitivement , le procedc du collodion reste en de- hors des patentes de M. Talbot, et qu'il sera bientot si parfait que Ton abandonnera completement , pour les portraits , I'ancien pro- cede de calotypic. « Quoi qu'il en soit, ajoute le Literary gazette, la photographic , dans ses plus larges , ses plus belles et ses plus utiles applications , est debarrassce de loutes les entraves. Nous n'en doutons pas , la liberie donnera un nouvel 61an a I'dnergie de nos artistes anglais , et bientot les recits de nos voyageurs et de nos tou- ristes seront illustres par des representations de la nature peintes paf elle-meme dans toutc leur virile et leur beauts. » — Sous ce litre : Photographie en France , I' Art journal ecrit les lignes suivantes, qui nous font le plus grand honneur : « La France a certaiuement I'avantage sur nous dans tout ce qui concerne la photographic. Nous venons de voir quelques calotypies extraordi- nairement belles des tombeaux et des temples de la Nubie et de rEgypfe , publiees dans les excursions daguerriennes de MM. Le- rebours et Secretan , et nous ne pouvons assez les admirer ; elles sont vendues moins dc quatre schclhngs la piece, et, par conse- quent, tons les amateurs de fortune moyenne peuvent se procurer ces representations fideles de ces reliques grandioses du vieux COSMOS. 403 monde, pages sublimes de I'histolre primitive du genre humain. Pendant que la France met a profit tous les progres de cet art , pliotographie sur papier et sur vcrre, nous, en Angleterre, cn- trav^s par des patentes , nous sommes reduits a aclieler par des concessions humiliantes Ic .droit de suivre de loin les nations ri- vales. » L'heure de I'emancipation a sonn^ ! — M. ToAvnsend ecrit a VArt journal qu'il a reQU de son frere, re- sidant a Abbrokuta , yille considerable do I'intericur de I'Afrique , quelques pbotographies sur papier prises dans cette localite. Ces eprcuves ne sont pas parfaites, parcc que, par defaut de temps, elles n'ont pas etc prises avec assez de soin ; mais elles prouventque le climat et la lumiere de ces contrees brulantcs sont neanmoins tres-favorables a la pbotograpliie. C'est, au reste, unc nouvelle fort interessante que celle qui nous montre ce bel art pi^netrant jus- qu'au centre de la Barbarie. ANALYSE DES RECHERCHES SCIENTIFIQFES. Recherches d'hematologie, par M. Lecanu. Rapport de M. Thenard. — II y a peu de substances dans la nature qui aient ete aussi eludiees que le sang ; et malgre cela Ton peut dire que nous ne le connaissons pas encore. Toute re- cherche tendant a ^clairer ce point obscur d'anatomie et de physiologie est done par cela meme de la plus haute importance, surtout si Ton veut faire at- tention au role essentiel que le sangjoue dans toute la serie des phenomenes que nous avons I'habitude de nommer phenomenes de la vie. C'est done avec raison que M. Thenard est venu faire a TAcademie un rapport si flalteur sur les nouvelles etudes chimiques sur le sang, de M. le docteur Lecanu. Ce n'est pas que ces Etudes ajoutent reellement beaucoup a ce que Ton savait deja sur la na- ture du sang; mais 11 y a dans ce moment encore une telle hostilite de la part de certains medecins centre les doctrines chimiques, que tout pas fait pour ra- mener la medecine sur la voie qui seule peut la transformer en une science, doit etre considere comme un progres immense, et meriter, comme te!, I'ap- probation des hommes qui ont vou6 leur vie a la recherche de la v6rite. M. Lecanu a prouv6 que le sang contient plusieurs substances parfaitement deBnies qui sont: I'h^matosine, la globuline, la matiere fibrineuse, I'albu- mine, la fibrine, une matiere grasse, une matiere e.xtractive, quelques sels en quantites fort petites, et de I'eau. — Voici le precede qui permet d'isoler les globules du reste du sang, et de commencer ainsi la separation des principes immediats. On agite le sang dans une solution satur^e de sulfate de soude a 12° C. Les globules ne se dissolvant pas peuvent etre recueillis par filtration, et 40-4 COSMOS. le liqtiide qui s'ecoule, etendu de huit a neu[ volumes d'eau, laUse deposer la Cbrine sous la forme de fi'amcnts gclatineux. Des lavages repetes au sulfate de soude permellent de depouiller completement les globules de toule subslanco ctran^-cre, apres quoi on peut les etudier pour en extraire les divers principes composan'ls. — Quant a I'eau qui 6tait resleo apres la separation de la fibrine, elle n'en conlient plus de trace, et se compose uniquement d'albumine, d'eau, de traces de sel, et surtout de chlorures. Les globules offrent un mode singulier de composition qui tendrait a les rapprocher des grains de fecule, si ceux-ci etaient tels que M. Raspail les a imagines. — Les globules du sang, en effet, seraient, d'apr6s M. Lecanu, des vessies fibrineuses remplies de malieres solubles telles que I'hematosiue, la globuline, I'albumine, etc., qui se repandraient dans I'eau ou dans tout autre liquide ambiant, aussilot que I'enveloppe viendrait a en 6tre dissoute ou dechiree d'une maniere quelconque. II est fort a regretter que M. Lecanu ait si mal etudie des substances telles que I'hematosine, la globuline et la fibrine du sang. Ce qu'il nous en dit est purement descriptif, I'analyse chi- mique y est completement etrang^re, et pourtant c'etait par la qu'il aurait fallu commencer. Nous allons voir tout a I'heure que M. Thenard lui-meme n'a pu passer sous silence cette grave omission de M. Lecanu, et qu'il I'a formulee parmi les desiderata de la science qu'il a voulu faire connaitre aux chimistes et aux physiologistes. — L'h4matosine , quelle qu'en soit la composition, est soluble dans I'alcool concentre et dans I'ether a la temperature ordinaire ; elle les colore en un beau rouge de sang, et reste, aprfes evaporation du dissolvant, sous forme de lamelles a eclat metallique d'une couleur amethyste, et d'une transparence qui rappellent assez I'eclat, la couleur et la transparence de I'ar- gent rouge (sulfure d'argent et d'antimoine). Quant a la globuline, signal^e au- trefois par Berzelius, Gmelin et Mudler, elle se dissout a chaud dans Talcool a 20", et n'est point precipitee par le sous-acetate de plomb, ce qui la differencie d'avec I'albumine dont elle approche beaucoup par ses autres proprielcs. Les globules sent composes en grande partie de globuline, dont il n'y a pas de traces dans le serum. La matifere fibrineuse qui forme, d'apres M. Lecanu, I'enveloppe des globules sanguins, est soluble dans I'eau, mais non pas dans le serum, ni dans les liquides albumineux, ni dans certaines solutions salines. L'agi- tation prolong^e du sang parait la dccbirer, car apres cette operation, I'hemato- sine se trouve r^pandue et dissoute dans le s^rum qui n'en contenait pas auparavant. — Si apres avoir fouette vivement le sang, on le laisse en repos, les enveloppes fibrineuses ne tardent pas a se deposer en formant des lamelles incolores translucides, a reilets nacres, et douees d'une grande flexibilite. Ce qui distingue cette matiere fibrineuse de la fibrine proprement dite, c'est son peu de solubilite dans la potasse caustique. L'eau chargee de -j^y de cet alcali, diisout a froid la fibrine hydratde, et n'attaque pas a 100° I'enveloppe fibri- neuse des globules. En voyant le peu d'albumine que Ton rencontre dans les globules, M. Thenard serait porte a croire qu'elle proviendrait d'une absorption op'jree par les globules eux-m^mes, absorption qui s'expliquerait assez bien, a ce qu'il nous semble, par une action endosmosique de la part de I'enveloppe fibrineuse des globules sur le serum tres-charge d'albumine. COSMOS. 405 Apres avoir ainsi expose le travail de M. Lecanu , nous aliens dunner uae serie de probl6mes de chiniie physiologique, dont M. TiienarJ a voulu, cnrichir son rapport. Get illustre chimiste avail bien raison lorsque repondant a un de ses confreres qui osait lui reprocher aussi bien qu'a tous les autres chimisles, de ne pas etudier assez la vie dans les reactions de I'organisme ; il lui disait : que les medecins meritaient bien autrement des reproches pour n'avoir jamais voulu, et ne vouloir pas encore approfondir I'etude de la cliimie et de la phy- sique, sans lesquelles il ne peuty avoir de medecine veritable. En effet, il n'y a rien de plus pitoyabie que d'entendre des gens qui ne savent pas le premier mot des sciences qu'ilsdedaignent, attaquer a belles dents iachimieet la physique par des argumentations scolastiques de la valeur de celles que les savants do leur temps opposaient a Galilee, a Harvey, a Colombo et a tant d'autres martyrs de la verite. — Nous voudrions bien que ces medecins qui se moquent de Ves- tomac cornue, comme ils I'appellent, vinssent nous donner une definition de la vie, a laquelle ils font jouer un si grand r6!e dans leurs theories medicales. En verity, ils ne ressemblent pas mal a ces peuples primitifs qui cachent un Dieu derriere chaque phenomena, et abregent le chemin des sciences en donnant une puissance occulte pour cause premiere de tout effet dont la cause immediate ne se r6vele pas a leurs yeux cataractes 1 Esperons que le vrai se fera jour malgre toute resistance, et que la chimie et la physique, finiront par triompher comme les matheraatiques, et des pr^jugfe philosophiques, et de la routine, bien plus terrible que tous les prejuges. Voyons maintenant les problemes de M. Thenard • « 1° Refaire et r^peter plusieurs fois I'analyse des divers sangs veineux et celle du sang arteriel en tenant comple, autant que possible, des influences qui pourraient en modifier la composition. « 2° Constater avec un grand soin la difference qui existe entre la nature de I'un et celle de I'autre. « 3° Determiner la proportion des'principes constituants de I'hematosine, de la globuline et de I'enveloppe des globules sanguins. « 4° En quoi I'hematosine da sang arteriel differe-t-elle de I'hematosine du sang veineux? « 5° Quelle est Taction qu'exercent I'oxygene et les principauxgaz sur le sang veineux et le sang arteriel? « 6° Le sang veineux est-il transform^ en vrai sang arteriel dans son contact avec I'oxygene hors de la circulation ? Le sang arteriel est-il ramene a I'etat de sang veineux par Taction du gaz azote, du gaz carbonique, du gaz hydrogene dans les m^mes circonstances? « 7° Quelle est la densite du s^rum et celle des globules sanguins dans la meme espece de sang? « 8° Pourquoi le sang abandonne au repos se prend-il en masse, meme lors- qu'on le maintient au degre de la chaleur animale et qu'on le met en mouve- menl? Comment se fait-il que les sels du serum qui tiennent la Gbrine en disso- lution dans les arteres et les veines, de concert avec Talbumine peut-etre, cessent de la dissoudre, quand le sang en est extrait? L'air entre-t-il pour quel- que chose dans ce ph^nom^ne extraordinaire? 406 COSMOS. a 9° En quoi les mat^riaux du sang different-ils reellement des mat6riaux du chyle et de ceux de la lymphe ? « 40° Comment s'opere la transformation du chyle et de la lymphe en sang? « 1 1° N'v aurait-il pas quelque analogic entre I'enveloppe des globules et la substance qui constitue les veines et les arleres? » M. Arago a voulu ajouter une autre question a celles formul6es d6ja par son confrere, et 11 a demande aux physiologistes d'etudier par des phenom^nes optiques, et suriout pur celui des anneaux colores, la dimension des globules san- guins dans differentes conditions palhologiques. Nous avouerons franchement que cette recherche proposee par I'illustre secretaire ne nous parait pas repondre a son but, puisque Veriometredu. docteur Young dont il voudraitse servir, donne bien moins de precision aux mesures, que I'observalion directe au microscope muni d'un micrometre oculaire, ou d'une chambre claire pour la mesure des images. L'en'ometre est un moyen d'observation trop indirect pour qu'on puisse avoir en lui une grande conGance, et d'ailleurs, il est impossible que Veriometre d'Young fasse connaitre les differences qui existent entre les globules d'un meme sang, ce que le microscope permet d'etudier avec une grande precision. Puisque nons avons entame ce sujet de physiologie chimique, et qu'il est bon d'indiquer tout ce qui peut faire progresser la science et les applications scien- tifiques, nous ajouterons, que M. le docteur Blandet signale le chlorure de ba- ryte, comme substance propre a conserver le sang a I'etat liquide sans qu'il ait a subir de putrefaction ni de separation d'elements constitutifs. II propose en outre d'injecter du sang ainsi rendu imputrescible , dans le syst^me circulatoire des cadavres embaumes, afin de leur rendre cette apparence de vie, que la dis- parition de la couleur rouge du sang leur avait enlevee. Nous trouvons tout cela tres-curieux, mais nous voudrions bien savoir avant de M. Blandet, ce qu'il en- tend par chlorure de baryte, car si c'est le chlorure de haryum, nous ne lui con- naissons pas d'autre nom que celui des chimistes; et si c'etait \' hypochlorite de baryte, nous aurions mieux aime qu'il nous I'eut dit dans sa note; car il n'y a rien de plus desagr^able que d'introduire des logomachies dans les sciences, et souvent de telles fautes de langage ont ete cause des plus terribles accidents. Mecanique appliquee. — M. Girard vient de proposer un nouveau systeme dechemins de fer a moteur hydraulique. Le principe de cette invention consiste a lancer de I'eau par une assez forte pression contre les aubes courbes d'une turbine d6velopp^e sur un plan horizontal attach^ au train. Les jets d'eau se trouvent a quelques centaines de metres I'un de I'autre, toutle long de la route a parcourir, et sent alimentes par de grands reservoirs fixes ou I'eau est com- primee a huit atmospheres. C'est le train lui-meme qui ouvre, en passant, le jet d'eau qui doit le pousser ; et M. Girard pretend que ce systeme offrira de grands avantages sur celui a la vapeur actuellement en usage. Nous reparlerons sous peu de cette nouvelle invention. Chimie. — M. Chiozza, jeune et habile chimiste italien , vient d'isoler un des radicaux oxygenes, a la recherche desquels bien des chimistes ont perdu inuli- lement les meilleures annces de leur existence. Le cumijle est le radical qui donne naissance par son oxydation a I'acide cuminique et a bien d'autres pro- COSMOS. 407 duils de la serie cuminique, qu'il serait trop long d'enum^rer ici. Pour I'isoler, M. Chiozza s'est servi d'un compose qui le contient, le cuminol potassc. Le cu- minol potasse s'obtient en chauffant du cuminol avec du potassium dans un petit creuset de platine muni de son couvercle. On purifie le produit en le pres- sant entre des doubles de papier a filtres et en le faisant sojourner pendant quelque temps dans le vide sur de I'acide sulfurique concentre qui absorbeavec aviditc le cuminol (^chappe a Taction du potassium. La substance ainsi obtenue ayant etc, mise en contact avec une quantile ^quivalente de chlorure de cumyle, ne tarda pas a se liquefier , en donnant un melange homogene qu'une legere ele- vation de temperature rendit piiteux en y determinant la separation du chlorure de potassium. La masse fut traitee d'abord par I'eau, puis par une solution de carbonate de potasse, et enfin agit^e avec de I'ether. La couche 6th6ree renfer- mant tout le cumyle en solution ne tarda pas a se rendre a la surface du liquide ; on la decanta au moyen d'une pipette et Ton chassa I'ether par une douce cha- leur. II est cependant necessaire, pour priver entierement le produit de I'eau qu'il renferme, de le chauffer jusqu'a ce qu'il commence a emettre des vapeurs. La reaction entre le cuminol potasse C" H" KG, et le chlorure de cumyle s'exprime tres-nettement par I'^quation suivante : \ I C'»H" 0 ) _ I C'»H" 0 1 ( K 1 i + 1 CI i ~ 1 C" H" 0 j + 1 CI j C'OH" 0) , ( C'»H K Le cumyle se prdsente sous la forme d'une huile epaisse plus pesante que I'eau : a froid il ne possede qu'une odeur tres-faible; mais quand on le chautfe legerement, il emet une odeur agroable qui rappelle celle du geranium. II est curieux de voir que le cumyle partage ce dernier caractere avec son homologue, ( C IP 0 ] le benzoYle | p? tis r, K obtenu par MM. Etthng et Stenhouse dans la distillation seche du benzoate de cuivre. Le cumyle s'enflamme difficilement et brule avec une flamme fuligineuse. Soumis a Taction du froid produit par un melange de glace et de sel marin, il perd entierement sa fluidite, si bien que Ton peut re- tourner le vase sans qu'il se deplace. Dans cet etat , il est parfaitenient limpide et ne presente aucun indice de cristallisation ; en revenant a la temperature ambiante, il reprend sa fluidite. II est assez soluble dans Talcool bouillant, tandis qu'il ne se dissout qu'en tr6s-petite quantite dans Talcool froid. Le cu- myle entre en ebullition a une temperature superieure a 300", puis se decom- pose en acide cuminique et en d'autres produits moins oxyg^nes , en memo temps qu'il reste dans la cornue un residu charbonneux. Soumis a Tanalyse, il a donne des nombres qui conduisent aux rapports exig6s par la th^orie : sa for- mule est C^« H'- 0^ Quand on chaufFe doucement du cumyle avec une petite quantite d'hydrate de potasse, il se transforme en cuminate en meme temps que se degage Todeur 408 COSMOS. forte et caracteri?lique du cuminol; colte reaction s'explique par I'c^qualion suivanto : C'MI"0| , (H)„ (C"'H"01 , (COH-'OI^ C'»H"0i + (KJ°"=l II i + 1 K r Par Taction du chlorure de benzo'ile sur le cuminol polasse, on obtient une huile incristallisable semblable au cumyle, et qui se transforme aisenient en celte derniere substance quand on la chaulTe avec une solution de carbonate de potasse. L'eau seule parait, du reste, operer cette metamorphose qui n'est ac- compagnoe d'aucun degagement de gaz. En traitant le cuminol potasse par du chlorure d'acetyle [C \P 0, CI ) , et en reprenant le produit par une solution de carbonate de potasse , on obtient aussi du cumyle. £co.\o.MiE RURALE. — M. Vezou pretend guerir la vigne desa maladieen I'as- pergeant d'une solution de sulfate de protoxyde de fer (250 grammes dans 20 li- tres d'eau) , il dit que des ceps arros^s de la sorte se sent retablis comme par enchantement, et que le funeste champignon, Voidium Tuckerii qui les devas- tait, a completement disparu au bout de quelques aspersions de sulfate. L'eau ammoniacale employee au commencement de la maladie donnerait aussi, sui- vant M. Vezou, d'assez bons r^sultats. CiiiMiE APPLiQUEE. — MM. Fordos et G^lis se sent pr^occup^s de I'analyso commerciale du cyanure de potassium dont on fait aujourd'hui un si grand usage en photographie et en galvanoplastie, lis ont Irouve qu'il etait possible de le doser exactement au moyen de I'iode, en transformant les alcalis caustiques, ou les carbonates qui pourraient se Irouver dans le cyanure du commerce, enbi- carLonates inattaquables par I'iode, a I'aide d'eau de Seltz tres-chargee d'acide carbonique. — Le cyanure donne alors en presence de I'iode la reaction sui- vante : CyK+2I— IK+ICy. Nous attendrons que MM. Fordos et Gelis veuillent bien nous indiquer com- ment ils dosent les produits de cette reaction, c'etait le but essentiel de leur travail, et malgr^ cela ils n'en ont encore rien dit. Physique appliquee. Sur V equivalent mecanique de lachaleur, par M. A. F. KuPFFER. — Concevons qu'un Bl cylindrlque, dont le rayon et la longueur sont egaux a I'unite lineaire, soit soUicite a son extremite superieure par un poids egal h I'unile, il s'allongera d'une cerlaine quanlite I. Concevons que le m§me fil soit chauffe depuis 0 jusqu'a 100 degrcs, il se dilatera d'une certaine quan- tile d. La quantite de chaleur qui produit cette dilatation ne pent s'estimer que par comparaison ; on peut s'imaginer un cylindre d'eau dont la hauteur et le rayon, a 0°, sont a la fois egaux a I'unit^, et prendre pour unite calorique la quantite de chaleur qu'il faut communiquer a ce cylindre pour clever sa tempe- rature de 0 a 100 degres; alors, en designant par c la chaleur specifique du metal du fil, par p sa pesanteur specifique, celle de l'eau etant prise pour unit6, la quantite de chaleur necessaire pour elever la temperature du fil de 0 a 100 de- grcs sera cp. COSMOS. 409 Cela pose, comme les dilatations d'un fil sent proportionnelles aux forces mises en jeu , on voit que si les valours do I et de d etaient connues , elies con- duiraient a una equation entre les forces de dilatation de la chaleur et d'un poids ; ou , en d'autres termes, que ces valeurs nous mettraient en possession d'un moyen de determiner I'equivalent mecanique de la chaleur. On ne doit pas oublier que la chaleur agit egalement dans tous les sens, comme une pression, et qu'il a ^te demontre par Poisson que le poids qui allonge un fil de la quan- tite /, employe comme pression s'exercant egalement dans tous les sens, produit une extension lineaire egale seulement a la moitie de I; d'oii il resulte que le rapport de I'effet mecanique de la quantile de chaleur ci-dessus assignee a I'ef- fet mecanique du poids correspondant- est 2f/ : I. Pour reduire ce rapport en nombre, il faudrait connaitre, pour chaque substance, son coefficient d'exten- sion, sa pesanteur speciGque et sa chaleur specifique. Par des exp^riences'qu'il croit exactes,M. Kupffera trouve que les coefficients d'exlension des Gls de fer, de laiton, de platine, d'argent etaient respectivement 0,00000001110; 0,00000002139; 0,00000001269; 0,0000000285-i; les pesan- teurs specifiques p correspondantes sent 7,55536; 8,4760; 20,962i; 10,4845; les chaleurs specifiques c, 0,11379; 0,09391 ; 0,03243; 0,05701; les dilatations c/, de OalOOdegres, 0,0H82, 0,001878, 0,0008842, 0,001910. En appelant e I'e- quivalent mecanique de la chaleur necessaire pour elever la temperature du cylindre ideal d'eau de 0 a 100 degres, ou la pression exprimee en poids que cette quantite de chaleur exerce, on doit avoir e=; — . Icp Or, si Ton substitue tour a tour dans cette equation les valeurs correspondan- tes de d, Z, c, p, on trouve par le fil de fer e=:247 800; par le fil de laiton 6=220 500; parle fil de platine e=: 205 050; par le fil d'argent e=223 900.Ces nombres, on le voit, sont tres-peu differenls I'un de I'autre, et les differences s'expliquent sufDsamment park valeur assez inexactement connue des donnces primitives. La moyenne des valeurs de e , que Ton pent prendre pour le veritable equiva- lent mecanique, est 224325, dont le logarithme est 5,35088. Si, partant de cette moyenne, on calcule pour lesquatre metaux une des donnees primitives, la dilatation par la chaleur, par exemple, en supposant connues les trois autres donnees, on obtient les nombres calcules 0,001070; 0,001909; 0,000968; 0,001918, dont les differences avec les nombres observes 0,001182; 0,001878; 0,000854; 0,001910 sont tres-certainement comprises entre les limites des er- reurs d'observation. La pression de 224 325 livres s'exerce sur la surface du cercle dont le rayon est egal a I'unite , surface egale a un nombre de pouces carres , exprimo par le rapport :: de la circonference au diametre ; en divisant le nombre 224 325 par -, on a pour la pression exercee sur 1 pouce carre par la force qui represente I'effet mecanique de la chaleur 75 441 livres , plus de 1327 atmospheres. M. Kupffer indique encoreun autre moyen de determiner I'equivalent mecani- que de la chaleur. Le cylindre de metal dont la hauteur et le rayon sont cgaux a 410 COSMOS. I'unite, est allonge de I par Taction d'un poids de 1 livre; un poids P 6gal a 1 : i I'allongera done de 1 pouce; et Ton pent caracl^riser la force 6Iastique du cy- lindre en disant qu'il 61eve le poids P a la hauteur de 1 pouce; car cette force 61astique tient en equilibre le poids P tombe de 1 pouce de hauteur. Si maintenant on eleve la temperature de ce meme cylindre de 0 a 100 de- gres, il se dilate par hypothese de la quantite d, et si la chaleur, au lieu de s'exercer dans toutes les directions, avait agi comme le poids P dans une seule direction, I'allongement du cylindre aurait ete2c/. : la quantity de chaleur qui produit cette extension , si Ton designe par C la quantity de chaleur necessaire pour Clever de 0 a 100 degres la temperature d'un cylindre d'eau , dont la hau- teur egale au rayon est 1 , serait Ccp : done Ccp : rd est la quantite de chaleur qui produirait une extension de 1 pouce; et, puisque les forces qui produisent des effets egaux doivent etre ^gales , on aura Onad'ailleursP=:1 -.d, e=-^, , donce=C. L'on en conclut que la quantite de chaleur necessaire pour elever de 0 a 1 00 de- gres un cylindre d'eau d'une hauteur et d'un rayon egaux a I'unite, est capable d'(51ever un poids de224 323 livres de Russie , a la hauteur de 1 pouce. En cal- culant lepoidsde ce cylindre d'eau, et passant, pour pouvoir comparer ses resul- tats aux resultats obtenus anterieurement, des mesures russes aux mesures an- glaises, M. Kupffer trouve 9921 pour le nombre de livres anglaises qu'eleverait a la hauteur d'un pouce la quantity de chaleur necessaire pour faire passer une livre d'eau de la temperature de la glace fondante a la temperature du point d'e- bullition. M. Joule, par des experiences faites sur la chaleur de froltement, avait trouv^ 4069; et, par des experiences sur la chaleur developpee dans la compression de I'air 9876 el 9540 ; ces nombres , on le voit , sent tres-rapproches les uns des autres. En resume, la chaleur necessaire pour porter de 0 a 1 degre la tempera- ture de 1 kilogramme d'eau ^quivaut a la force sufBsante pour elever 4b3 kilo- grammes a la haufeur de 1 m^tre. Chimie. Sur I'influence de I'eau dans les decompositions chimiques, par M. Henri Rose. — C'est une tres-longue 6tude sur un sujet delicat: I'auteur la continue dans son nouveau memoire par des considerations g6nerales sur la ma- niere dont I'eau se comporte relativement a I'acide carbonique dans son action sur les carbonates. M. H. Rose a d^montr^ dans ses recherches ant^rieures que I'eau pent cbasser des carbonates de la plupart des oxydes metalhques une certaine quantity d'acide carbonique, et se substituer a sa place. La quantit6 d'acide carbonique elimin6e ou chass^e est diff^rente pour les differents carbo- nates, et depend de I'afBnite du carbonate non decompose pour I'hydrate ne de la substitution de I'eau a I'acide carbonique. Le carbonate et I'hydrate s'unissent, et dans la plupart des cas la combinaison se fait en proportions simples, mais COSMOS. 411 qui varient avec la nature des oxydes m^talliques. Citons seulement quelques exemples. Magnesie. Quatre alomes de carbonate neutre s'unissent a un atome d'hydrate de magnesie, et la combinaison renferme en outre de I'eau de cristallisatioa : sous raction longtempscontinuee d'une quantite suffisante d'eau a une tempe- rature elev^e , on elimine, pour laremplacer par I'eau, une quantity plus grande encore d'acide carbonique. Manganese oxydule (manganoxydule). II est difficile de determiner dans quelle proportion le carbonate neutre s'unit a I'hydrate; peut-etre est-ce dans le rap- port de 5 atomes de carbonate a 1 atome d'hydrate, avec 1 atome d'eau de cris- tallisation. Oxydede plomh. G atomes de carbonate neutre s'unissent a 1 atome d'hydrate. Oxyde de cobalt. 2 atomes de carbonate s'unissent a 3 atomes d'hydrate ; c'est la meme cliose pour Voxyde de nickel. Pour Voxyde de zinc, les proportions de la combinaison du carbonate avec I'hydrate sont ties-variables. Comme i'affinil6 de Voxyde de cadmium pour I'acide carbonique est beaucoup plus grande que son affinite pour I'eau : 10 atomes de carbonate s'unissent a 1 seul atome d'hy- drate. La premiere de ces affinites I'emporte plus encore sur la seconde dans le cas de Voxyde d'argent, et I'eau ne peut plus deplacer I'acide carbonique. La substitution n'a plus lieu non plus pour les carbonates a bases tres-fortes, la ba- ryte, la strontiane et la chaux. Dans beaucoup de cas I'afBnite de I'eau pour les bases, lorsqu'elle joue le role d'acide, est presque egale a I'affinite de i'acide carbonique : aussi les bases qui ne perdent leur eau que tres-difficilement a la temperature la plus elevee, donnent naissance a des carbonates qui ne se de- composent pas a cette m^me temperature. Ces bases sont la soude, la potasse, la lithine, la baryte et la chaux. Le carbonate de chaux, a la temperature rouge, perd a la fois son eau et son acide carbonique. Quoique les affinites de ces fortes bases pour I'eau et I'acide carbonique soient sensiblement ^gales, il ne faut pas nier cependant que I'acide carbonique emousse bien plus vite les proprietes caus- tiques de ces alcalis que ne pourrait le faire I'eau. A des temperatures differentes I'affinite de I'eau pour les bases peut-elle etre tantot plus grande, tant6t plus petite que I'affinite de I'acide carbonique? II n'est pas douteux qu'a la temperature ordinaire , et meme a la temperature de I'eau bouillante, I'affinite des terres alcalines pour I'acide carbonique soit plus grande que leur affinite pour I'eau. Mais en est-il ainsi encore a des tempera- tures clevees? Tout le monde connait les belles experiences de MM. Gay-Lussac etTh^nard : ils chauff^rent au rouge des carbonates de baryte , de potasse de soude sans qu'il se degageflt un atome d'acide carbonique; mais aussi(6t qu'ils firent circuler de la vapeur d'eau dans le tube qui renfermait les carbonates incandescents , I'acide carbonique se degagea instantanement. M. Gay-Lussac croyait, et tous les auteurs de trait^s de chimie repetent apres lui, que Faction de la vapeur dans cette decomposition est purement mecanique, et qu'il ne faut pas I'attribuer a une plus grande affinite des carbonates chauffes au rouge blanc pour I'eau que pour I'acide carbonique. Cette opinion semblait confirmee par ce fait remarquable que I'air chaud produisait presque le meme effet que la vapeur 412 COSMOS. d'eau et delerminait aussi le depart de I'acide carbonique. M. Henry Rose sou- tient cependant qu'elle est fausse etaffirme que le depart de I'acide carboniquo a pour cause efficiente la formation d'un hydrate ou la substitution de I'eau. « En efTet, dit-il, tant qu'on ne fait passer sur les fragments incandescents du carbonate de baryte prepare artificiellement ou pris pur dans la nature , sous forme de whiterite par exemple, que de I'air ou des gaz parfaitement sees, il ne se degage pas un atome d'acide carbonique , tandis que le dogagenienl com- mence des que I'air ou les gaz sont un peu humides. De plus, lorsque Ton traite par I'acide sulfurique une dissolution de carbonate de baryte , prealablement chauffe au rouge et soumis a Taction de I'air liumide , on oblient un precipit(5 abondant, signe caracleristique de la presence d'un veritable hydrate. Sans nier done Taction mccanique mise en avant par Gay-Lussac , il faut admeltre une action chimique reeile de la vapeur d'eau et la preponderance de Taffinite de Teau pour la base sur celle de I'acide carbonique. » M. Henry Rose apporte en preuve de cetle assertion un certain nombre d'experiences qui demontrent que lorsqu'on les fait bouillir, un grand nombre de dissolutions de carbonates a bases alcalines terreuses perdent une certaine quantite d'acide carbonique. La premiere experience de ce genre a ete faite par M. Jacquelain sur le carbonate de soude.Cememe chimisteamontre aussi que le carbonate de sonde perd par la simple fusion une certaine quantite d'acide carbonique; mais M. Henry Rose ajoute que cette perte n'cst pas aussi considerable que TindiqueM. Jacquelain; ill'a trouveo egalea 0,32, et nonpasa 1,07 ou 2, 4 3. CiiiMiE. Methode pour la separation quantitative de I'oxyde et de I'oxjdule de fcr, par M. Sciieeueb. — Les methodes par lesquelles on essayait jusqu'ici de determiner les quantites relatives d'oxyde et d'oxydule de fer contenues dans un mineral qui renfermait a la fois ces deux degres d'oxydation du fer, ne s'accor- daient, dit M. Scheerer, que sur un point : en ce sens qu'elles etaient plus ou moins inexactes. II lui semble que son nouveau precede est a Tabri du meme reproche : il repose sur ce fait que, si Ton traite une solution de sulfate d'oxyde et d'oxydule de fer par un carbonate de magnesie neutre et anhydre, a la tempe- rature de Teau bouillante, Toxyde de fer se precipite tout entier, tandis que Toxy- dule de fer reste completementdissous. La magnesie de Frankenstein, enSilesie, est un carbonate neutre et anhydre tres-propre a ce genre d'analyse ; il faut seule- ment avoir soin de n'employer que des ediantillons parfaitement blancs et purs, parfaitement homogenes, a cassure a gros grains, nese laissantbriser ou desagre- ger qu'avec un certain effort. Pour que Toperation de la separation ou du depart se fasse dans de bonnes conditions, il faut de plus qu'elle soit executee comple- tement a Tabri de Tair; ausein, par exemple, d'un courant continu d'acide car- bonique, rendu parfaitement pur de toute substance etrang^re. Nous ren- voyons au memoire original pour la description des appareils et les details de Toperation. En Iraitant par son precede les melanges connus d'oxyde et d'oxy- dule de fer, M. Scheerer a constate le parfait accord du calcul et de Texpedence. OE L'lMPRlMERIE DE CH. LAHURE ( ANCIENNE MAISON CRAPELEt), rue do Vaiigirard , 9, pres de I'Dil^on. COSMOS. 413 NOUVELLES DE LA SEMAINE. Angleterre. — L'ascension projetee et annoncee par le comite de I'observatoire de Kew a eu lieu jeudi dernier 19 aout. Comme nous I'avonsdit, le but de cette ascension ctait purement scientifique; il s'a- gissiiit uniquement d'observations meteorologiques sur la temperature de Fair a diverses hauteurs, son etat hygrometrique, sa tension elec- trique et magnelique, etc., etc. Plus prudents que nos illustres compatriotes, MM. Biot et Gay-Lus- sac, et surlout que MM. Barral et Bixio, les savants anglais avaient choisi, pour les emporter dans les airs, un ballon grandement eprouve, le Nassau; el pour guide, le plus experimente et le plus celebre des aeronautes, Green, le veteran, comme I'appellentles Anglais. Celte fois, dit YAthenxum, ce n'etait plus, comme au dela du detroit, Phaeton le lemeraire, le novice, mais le dieu lui-meme qui conduisait le char da soleil dans des routes parfaitement connues. Les meteoro- logues n'avaient done k s'occuper que de leurs observations, en s'a- bandonnant en toute confiance a I'homme le plus habile dans I'art de tenir d'une main ferme les renes du ballon. L'ascension a eu lieu au Vauxhall, mis genereusement a la disposi- tion du comite par le directeur, M, Lessee. Le ballon, portant dans deux nacelles munies d'excellents instruments, deux des membres de I'observaloire de Kew, MM. Welsh et Nicklin, a ete rempli par le gaz ordinaire d'eclairage, et s'estelance danslesairsa quatreheures moins dix minutes apres midi. Ladescente s'est faitea cinq heures vingt-sept minutes avec !a plus grande facilite ct sans le moindre accident, aSvva- vesey, au nord-ouest de Cambridge. Le Nassau a parcouru environ soixante milles (vingt lieues) en une heure trente-quatre minutes; ila atteint une hauteur de plus de 19 500 pieds (pres de 6000 metres). A cette hauteur, la temperature etait de 7" Farenheit, 15° centigrades au- dessous de zero. On comprend que les savants anglais n'aient pas eu le temps de r^- diger encore leurs observations. Nous apprenons seulement, par une note de M. John Welsh, que les couches nuageuses traversees par le ballon ont ete 1° des cumulus tres-basqu'ilsatteignirent tres-prompte- ment, a la hauteur d'undemi-mille, 805 metres; 2° une seconde cou- che intermediaire, de cumulus encore, a la hauteur de quatre kilo- metres; 3° enfin une couchede cirro-cumulus et cirro-stratus qu'ils ne franchirentpas, mais dont les limitesn'elaient pas tres-eloignees. Prfes du point le plus eleve de leur course, ils ont rencontre de petits cris- 29 AOUT 1852. 18 414 COSMOS. taux etoiles do neige, d'un millimetre environ de diametre : lis sem- blaient tomber, mais leur chute n'etait peut-etre qu'une illusion pro- duitepar I'ascension du ballon. Les observations barometriques, Iher- mometriquos, hygrometriques ont ete faites sans peine, a de tr^s- courts intervalles; on apuise de I'air a diverses hauteurs pour en faire I'analyse. M. Welsh a eprouve une legere compression sur les tempes et dans les oreilles; M. Nicklin respirait avec quelque difficulte. Le froid, assez piquant, serait devenu tres-d^sagreable, s'il avait dure plus longtemps. La vitesse du ballon et la grande distance qu'il a parcourue vers le nord, prouvent qu'une grande masse d'air etait entrainde dans cctte direction ; et en effet, les observations faites en divers lieux consta- tent qu'un vent violent du sud soufflait sur presque toute I'Angle- terre. Le soleil estrestecouvert pendant presque toute I'ascension : I'orage qui a eclate a Londres le jeudi, n'avait pas commence encore, pen- dant que MM. Welsh et Nicklin sondaient les airs. Tous les meteorolo- gistes, dans un rayon de 50 lieues autour de Londres, ont du faire des observations regulieres d'heure en heure, au moins, depuis deux heures apres midi jusqu'a huit heures. Ces observations seront bientot compai'ees; elles conduiront sans doute a quelques resultats dignes d'interet, et nous les altendons avec impatience. France. — La Societe d'oncouragement a tenu, il y a quinze jours, sa seance generate, consacree, d'apr^s les statuts de la Societe , a en- tendre le rapport sur les travaux du conseil d'administration, le rapport sur I'etat financier, a la distribution des medailles d'encouragement aux ouvriers et contre-maifres des etablissements agricoles et manu- facturiers. M. E. Peligot, de I'Academie des sciences, I'un des secretaires de la Societe, a rendu compte des travaux du conseil d'administration. Les travaux du conseil se revclent par les rapports inseres au bulle- tin, par les recompenses dont les auteurs se sont rendus dignes; mais M'. le secretaire a appele principalemenl I'attention de I'assemblee sur un projet d' exposition des produits de la Guyane francaise, presente par M. Salomon, naturaliste [geologue, attachejau Museum d'histoire na- turelle. Le conseil d'administration est persuade qu'une exposition complete, qu'une etude approfondie et raisonnee des produits si varies de la Guyanne pourra eclairer les industries diverses de la metropole sur I'utilite a tirer d'un sol encore inexploite et presque inconnu. La pensee du conseil, en tra^ant le tableau des produits comraer- ciaux et industriels de la Guyane, a ete de faciliter les eiforts du gou- COSMOS. 415 vernement qui veut avec raison feconder cette colonie et prendre I'initiative de la colonisation. En revenant de I'exposition universelle de Londres, M. Ebelmen parla, a plusieurs membres de la Societe d'encouragement , de I'uti- lite de creer, dans le sein du conseil , une commission des beaux-arts. Comme directeur de la manufacture de Sevres, J\l. Ebelmen avait, mieux que personne, ete a meme d'apprecier tout ce qu'avait d'utile , d'indispensable meme, I'influence des beaux-arts sur les produits in- dustriels. Le conseil convaincu que I'alliance des arts, des sciences et des ma- nufactures est tres-desirable, qu'elle doit produire les plus utiles re- sultats, a cree dans son sein, la commission permanente dite des applications des beaux-arts a Vindustrie. Le rapport de M. Michelot, doyen des referendaires a la cour des foraptes, et membre de la commission des fonds, a prouve, une fois de plus, avec quel soin sont gerees les ressources financieres de la So- cietet; il a rendu un hommage bien senti a M. Agasse, notaire hono- raire qui, depuis 1827, a bien voulu accepter les difficiles fonctions de tresorier. La Societe a precede ensuite a la distribution des medailles d'encou- ragement. Nous ne suivrons pas I'ordre des medailles, nous comprendrons dans des articles separes les industries qui ont ete I'objet des recom- penses de la societe d'encouragement. Agriculture , Arts alimentaires. — La Societe a decerne la medaille d'argent a M. Resal, constructeur d'instruments d'agriculture, a Bou- ville fSeine-Inferieure). Les perfectionnements apportes par lui a la herse Bataille, et les in- struments qu'il fabrique ont contribue au progres de I'agriculture dans son arrondissement. Une medaille d'or est la juste recompense de la decouverte de nou- veaux precedes de raouture du mais de M. Betz-Penot, meunier a Allay (Oise). Le mais occupe un rang assez important parmi les cultures de ce- reales qui couvrent le sol de la France pour que la Societe ait porte un interet particulier aux produits remarquables que M. Betz-Penot a retires de ce grain par des precedes de mouture qui lui sent per- sonnels. Boulangerie. — La Societe avait, en 1850, compris dans la distribu- tion des medailles aux contre-maitres, MM. Lanchantin et Loriot : ils lui ont adresse, comme temeignage de leur reconnaissance, le pre- 416 COSMOS. mier, des observations pratiques sur la duree du temps pendant lequcl doivent sejourner dans le four cliaud les differentes esp^ces de bois, afin qu'elles soii-nt dessechees convenablement pour devenir plus pro- pres a la cuisson du pain ; le second, un appareil destine a donner de la vapeur dans les fours de boulangerie. Les resultats obtenus sont una plus grande regularite dans le travail, reconomie de temps de I'ouvrier, et consrquemment, reconomie dans la production du chauffage. Des medailles de bronze ont constate I'utilite des innovations de MM. Lanchantin et Loriot. M. Holland s'est propose de rendre reguliere, economique et salubre la fabrication du pain, a I'aide de moyens mecaniques et de disposi- tions particulieres relatives au chauffage. Ce systeme offre deux parties distinctes, un petrin mecanique, et un four a atre circulaire, mobile, sur lequel la cuisson s'opfere a I'air chaud. C'est a I'ensemble de ce systeme, en activite depuis plus d'un an, que la Societe a decerne la medaille de platine. Moteurs. —L?i Societe a juge digne de medailles d'argent, 1° M. EL de Canson, d'Annonay, pour son nouveau systeme de recepteur hydraulique que son auteur a fait connaitre sous le nom de turbine rurale ; M. de Canson a construitl2i de ces appareils, presentant ensemble une force de 1116 chevaux. Cette turbine rurale rentre dans la classe des bonnes roues hydrauliques , et elle convient particulierement aux grandes chutes et aux petits volumes d'eau ; 2° M. Mauzaize, de Chartres, pour son mecanisme d'arret et de mise en mouvement d'une paire de meules , sans interruption de la marche dumoteur du moulin a engrenage, etpour un nouveau boitard. L'importance de ces mecanismes a ete appreciee a I'exposition uni- verselle de Londres , ou une medaille leur a ete adjugee. Meccmistnes divers. — M. E. Maurel, a Marseille, a obtenu une me- daille d'argent pour ses cloches a battant a charniere fixe. M. Maurel , abandonnant les regies admises par ses confreres fondeurs de cloches, a voulu se frayer une nouvelle voie par d'heureuses innovations. M. Remond, mecanicien frangais etabli a Birmingham, regoit une medaille dememc ordre, pour sa machine a plier, coller et timbrer les enveloppes de lettres. Cette machine se distingue surtout par I'intro- duction dans la mecanique industrielle d'un agent physique , la com- pression de I'air, qui semble par sa prestesse et sa precision defier, dans certaines fonclions delicates , les organes metalliques les plus souples , les plus delies , les plus actifs et les mieux combines. MM. Lemonnier et Yallee , chefs des ateliers du chemin de far COSMOS. 417 d'Orleans, obtiennent une medaiUe d'argent pour avoir apporte aux soupapes de surete des machines locomotives mw. heureuse modifica- tion qui a deja recu d'importantes applications. Instruments de precision. — Une medaille d'argent, a M. Groetaere, capitaine du genie beige , pour un appareil propre a mesurer les di- stances inaccessibles. Une medaille semblable a M. Guillemot pour un instrument de pre- cision propre a tracer les arcs a grands rayons , sans recourir au centre. La Societe d'encouragement est d'autant plus heureuse de signaler I'oeuvredeM. Guillemot qu'elle al'espoir fonde que cet instrument sera I'occasion de grands et importants progres dans I'art de I'optique, en permettant aux eminents artistes qui deja ont place la France au premier rang de cetle Industrie, de donner aux verres des lunettes des courbures d'une precision mathematique rigoureuse. Une medaille de platine a M. Boussard , de Toulouse, pour un mou- vemenl d'horlogerie a force constante. Dans les dispositions de son mecanisme , M. Boussard n'a pas seulement fait preuve d'une grande fecondite de conception, d'une tres-grande facilite dans le choix, I'arrangement et la simplicite de ses organes mecaniques , il a en meme temps prouve une profondeur de vues que la Societe s'est plu a signaler. Dans la fabrique de ceruse de MM. Th. Lefebvre , a Moulins-Lille (Nord), ou Ton prepare 16 a 18 millions de kilogrammes de ceruse par an, ou Ton comple de 80 a 120 ouvriers, tout le travail se fait dans des conditions telles, que les ouvriers ne sont plus exposes a ces ma- ladies saturnines qui decimaient les cerusiens. C'est a M. Lefebvre, il faut le dire bien haut, que Ton doit les ameliorations hygieniques qui ont ete apportees dans les fabriques de ceruse. M. Besan^on , fabricant de ceruse a Ivry, a rendu aussi service a I'humanite : 1° en broyant la ceruse, lorsqu'elle est encore humide, de maniere qu'il n'y ait pas dispersion de poussiere; 2° en desse- chant le blanc de plomb par pression au lieu de le placer dans des pots ; 3° en preparant la ceruse broyee a I'huile, et qui n'a plus besoin de main-d'oeuvre, de fa^on qu'elle puisse etre employee de suite. La Societe a fait acte de justice en decernant a M. Th. Lefebvre la medaille d'or, a M. Besangon la medaille de platine. Arts ceramiques. — Les premiers travaux de M. de Saint- Amans, dont le nom est bien connu de toutes les personnes qui s'interessent aux progres des arts ceramiques en France, remontent a ISII. Auteur d'un procede de moulage, dont les resultats constates par de nom- breuses experiences ont ete completement satisfaisants, des 1818 il 418 COSMOS. entreprit une serie d'essais sur la fabrication des faiences fines dures et des gr^s cerames fins. Les rt^ultats de ces essais ont ^te d'une assez grande importance pour qu'on soit en droit d'en conclure qu'ils ont eu une influence capitale sur le developpement de cette branche de I'industrie ceramique en France. La derniere communication de M. de Saint-Amans est relative a un nouveau procede d'impression par la presse typographique pour la poterie. Ces travaux ont valu a M. de Saint-Amans la medaille d'or. La meme distinction a ete accordee a M. Bapterosses pour sa fabri- cation de boutons en pate ceramique. C'est une fabrication qui a pris naissance en Angleterre. Les pro- cedes dont M. Bapterosses est I'inventeur different radicalement, a plusieurs egards, des procedes anglais. La superiorite des proc6des inventes et mis en pratique par ce mecanicien distingue sur les pro- cedes anglais, a amene un resultat des plus favorables pour I'industrie fran?aise. La fabrication des boutons a cessecompletementaujourd'hui en Angleterre. £clairage. — Reflecteur diurne de M. Troupeau. Comme I'air, le jour est necessaire a nos habitations, a nos etablissements publics et particuliers. La lumiere factice, independamment de ce qu'elle a de moins commode, est toujours plus ou moins dispendieuse, et Ton a A\x chercher a faire penetrer la lumiere du jour dans tons les endroits qui en etaient naturellement prives , et oil il n'etait pas complelement impossible de la faire parvenir. L'application de ce mode de repartition de la lumiej^e diurne a me- rite a M. Troupeau la medaille de bronze. L'appareil ingenieux de M. Guyot, pbarmacien, realise le but qu'il s'etait propose, d'arriver a une meilleure utilisation du gaz d'eclai- rage et pent etre d'un emploi avantageux, tanl sous le rapport de I'economie que sous celui de la salubrite. Une medaille de bronze a ete decernee a M- Guyot. Les lampes a moderateur sont aujourd'hui d'un usage assez repandu pour que chacun connaisse leurs avantages , et aussi leurs inconve- nients , tels que la duree de leur eclairage qui est trop restreinte , et le crachement d'huile lorsqu'on les remonte. Ces inconvenients , M.FiUiol est parvenu a les faire disparaitre: et quoique ces innovations soient rccentes, la Societe ne les a pas moins jugees dignes des a present de la medaille de bronze. Economie domestique. — U. Farge, dont I'industrie deplore la perte recente, avait etendu et ameliore la fabrication des parapluies, sous COSMOS. 419 le triple rapport de la qualite, de la conimodile ct de la modicite du prix. M. Cazal est I'un de nos industrials qui se sont occupes des pre- miers, et avec intelligence ct activite , a perfectionner le parapluie el I'ombrelle, a les rendre plus commodes et plus legers. line medaille de bronze a etedecernee a M. Garye. Uoe medaille d'argent a ete la recompense de M. Cazal. Une medaille de bronze a ete obtenue par M. Bellicart, pour son fausset hydraulique, dont I'objet est de s'opposer a I'introduclion de I'air atmospherique dans les vases oa les liquides sont en fermentation, tout en menageant une issue aux gaz qui se forment ; et de permettre a I'air exterieur de penetrer, en quantite necessaire, dans un vase clos dont on soutire le liquide, sans que le renouvellement d'air soit pos- sible a I'interieur du vase dhs que Ton fait cesser I'ecoulement. M. Collas, pharmacien, a regu une medaille de meme ordre, pour une substance , la benzine , propre a remplacer les huiles essentielles employees dans I'art du teinturier degraisseur. Nous rappellerons ici que c'est au moyen de la benzine que Ton prepare la nilro-benzine, produit dont I'odeur rappelle celle des amandes ameres et qui est aujourd'hui trcs-employe dans la parfume- rie. Au point de vue qui nous occupe, c'est-a-dire pour rapplication au degraissage, nous devons faire remarquer que la benzine dissout par- faitement bien toutes les matieres grasses, les resines, la cire, etc. Pendant longtemps, on a ete force de recourir a un nouvel ^tamage total lorsque Ton tenait a faire disparaitre une alteration locale et cir- conscrite du tain des glaces. Frappe de ces inconvenients, M. Thomas, ebeniste et miroitier, a dirige ses efforts vers la decouverte d'un procede de preparation par- tielle du tain des glaces, n'entrainant pas de modification dans la na- ture du tain. M. Thomas a resolu le probleme d'une manifere tres-sa- tisfaisante, a I'aide d'un procede et d'un outillage ingenieux de son invention. Une medaille d'argent a recompense I'auteur de la solution de ce probleme. Armes a feu. — La Societe , par sa medaille de bronze , decernee a M. Bazelaire, donne son approbation a son systeme qui met le fusil hors d'etat de faire feu dans toute autre position que celle convenable pour le tir. Parsa medaille d'argent, ello a sanctionne le succes de I'arme a feu fort elegante de M. Flobert , connue sous le nom de pistolet de salon. Depuis , perseverant dans la voie qu'il a su s'ouvrir, M. Flobert a atta- 420 COSMOS. qu6 d'une maniere tout k fait nouvelle le chargement des armes par la culasse. Chimie. — A M. Pessier, professeur de chimie, a Valenciennes, une m^daille d'argent pour son natrometre ou instrument qni fait connaitre la quantite de sonde contenue dans Ics potasses. Plusieurs precedes ont ete proposes , mais celui de M. Pessier merite d'etre signale d'une maniere particulifere , parce que , adopte par I'induslrie, et d'une ma- nipulation qui n'exige que les connaissances que Ton est en droit d'at- tendre d'un manufacturier, il est appele a rendre beaucoup de services dans I'industrie. A M"' Mantois , egalement une medaille d'argent pour I'application dublanc dezinc a I'aquarelle, a la gouache et a la peinture a I'huile. Le but que cettedame s'est propose, est 1° la conservation des objets d'art; 2° de soustraire les artistes aux dangers qui resultent pour eux de I'emploi du blanc de plomb. {Extrait du Monileur indiistriel.) PHOTOGRAPHIE. Nous inserons comme un document important dans I'histoire de la photographic ces deux lettres remarquables dont nous avons parle dans notre dcrniere livraison, ct que nous avons pu nous procurer depuis. Lettre du comte de Rosse, president de la Societe rorjale, et de sir EASTLA.K, president de V Academie royale de peinture a M. Fox Talbot. Juillet 1852. « Cher monsieur, « En vous adrcssant cettc lettre, nous croyons exprimcr les sen- timents d'un grand nombrc d'hommes cniinents par Icur amour de la science ct de I'art. « L'art dc la photographic sur papier dont vous etes I'invcntcur, est arrive a un tel degr6 de perfection, qu'il prend desormais une importance nationale; et nous dcsirons ardemment que de meme que cet art est ne en Angletcrre, il rc(;oive aussi de I'Anglcterre ses dcveloppcmcnts et sa perfection a vcnir. An moment acluel cependant, quoique I'Anglcterre continue a tenir la corde dans COSMOS. 421 plnsieurs branches de cet art; dans plnsienrs an contraire, la France fait incontestablement de pins rapidcs progres qne nous. « II est vrainient desirable que nous ne restions pas en arriere des nations du continent dans le dcveloppement et le pcrfectionne- ment d'nne invention pnrement anglaise; et commc vons etes en possession par vos patcntes du droit exclnsif de I'exploitation de cettc invention, que vos patentes sont encore valables pour pln- sieurs annees, pour plus longtemps, peut-etre, si elles obtenaient le renouvellement ; nous prenons la liberie d'appeler voire atten- tion sur ce sujet, et de vous demander s'il ne vous serait pas pos- sible d'apportcr quelqnes modifications a I'exercicc de vos droits , de maniere a eloigner les difficultes qui semblent mainlenant ar- reter les progres de I'arl en Angleterre. Plnsieurs des applications les plus delicales de celte invention exigeront probablement la cooperation des homines de science et d'artistes ingenieux. Or il est Evident que plus sera grande la liberie avec laquelle ils pourront deployer les ressources de leur talent, plus leurs efforts seront couronnes d'eminents succes. « Comme nous savons avec certitude que ces judicienscs modi- fications seront accueillies avec grande satisfaction, et qu' elles sont le moyen d'un perfeclionnement rapide de ce bet art, nous osons vons faire amicalenient cette communication , dans la pleine con- fiance que vous la recevrez dans le meme esprit : les perfectionne- ments de la science et de I'art sont le but commun de nos efforts, pour vons comme pour nous. » Reponse de 31. Talbot. << Mon cher lord Rosse , « J'ai eu rhonneur de recevoir la lettre ecrile en commun par vous et sir C. Easllak, relalivement a mcs inventions photogra- phiques, et j'ai le plaisir de vous repondre. « Depuis la grande exposition, j'ai senti qu'une nouvelle ere commencait pour la photographic, comme pour beaucoup d'autres arts et inventions utiles. Des milliers de personnes sont aujour- d'hui initiees a eel art : apres avoir admire tant de belles cpreuves produites en Anglelerre et en France, elles ont eprouve naturelle- menl le dcsir de le praliquer elles-memes. Une grande vari6te d'applicalions ont deja cle imaginees; et, sans aucun doutc, beau- coup d'autres restent encore a dccouvrir. » Jc me sens incapable de poursuivrc moi-mcme toutes les 422 COSMOS. branches si nombreuses de mon invention , dc maniere ci essayer do lui conscrver scs droits ; bicn plus, jc crois que cela n'est pas plus longlcnips necessaire, maintenant que I'art a jcte des racines profondes en Anglcterrc el en France ; el qu'on pcul sans danger le laisscr prendre son d(^veloppemenl naturcl, en reniancipant. Je desire aussi ardemment que qui que ce soil parmi les amis de la science el de I'art, que noire contree continue a tenir la corde dans celte branche nouvellcment decouvertc des beaux-arts; el apres y avoir beaucoup rcflechi , je pense que la meilleure chose que je puissc faire , que le nioyen le plus cfficace de slimuler les perfectionnenients fulurs de la pholographie , est dc provoquer I'eniulation et la concurrence de nos artistes el de nos amateurs, en renongant aux droits que je possede sur cette invention. En consequence, en rcponse a voti'e aimable Icltre, je mets, a I'ex- ceplion d'un seul point que je mentionnerai tout a I'heure, a la libre disposition du public, non-seulement ma premiere patente, mais encore mes autres pcrfectionnements du meme art, nn des- quels m'a cle garanti tout recemment, et qui devait rester ma propriete pendant treize ans encore. L'exception dont j'ai parte, et que je desire toujours maintenir dans les mains de mon unique concessionnaire, est rapplicalion de I'invcntion a la production de portraits pholographiques destines a etre vendus au public. « C'est une branche de I'art que tres-peu de personnes, relative- ment, peuvenl exploiter , parce qu'elle suppose une maison bdtie on adaptee h dessein, ayant un appartement eclaire par la lumiere directc du ciel, etc.; cai' les portraits nc peuvenl pas en general etre pris a I'interieur, sans grande difliculte. » Avec cette exception, j'offre mon invention a mon pays, et j'ai confiance qu'cUc rcalisera les esperances que nous avons congues de sa future utililc. » — Nous avons regu, it y a quelques jours seulement, im opuscule qui nous ctait annonce depuis longtemps par sir David Brewster, et que nous attendions avec une vive impatience. C'est un me- nioire de quarante pages sur la vision binoculaire el le stereo- scope, insere dans la livraison de niai de la. Revue d'Edimbourg , North British Rcvieiv. Nous en extrairons les passages les plus interessants , en commcncant par la theorie du stereoscope, que nous avions a peine osc abordcr. Laissons parlcr lillustre physi- cien ecossais. Si nous regardons une statue avec un seul ceil, I'ceil gauche, par exemple, et si nous projetons sur une surface plane I'image COSMOS. 423 vuc de cet oeil, I'ceil gauche de la statue sera representc par un point que nous appelons O, Textremile du nez par un point TV, et la poinle du menton par un point 31. Si, sans remuer la tete, nous regardons la meme statue avec I'oeil droit, nous aurons un second dessin dans lequel o representera I'oeil gauche de la statue, n le nez, et m le menton. Si maiutenan't nous plagons a cote I'un de Tautre ces deux dessins devant les yeux auxquels ils correspon- dent, le premier devant I'oeil gauche, le second devant Toeil droit, nous verrons que le dessin obtenu avec I'oeil gauche montre beau- •oup plus de la portion droile xle la statue , et I'image obtenue ivec I'oeil droit beaucoup plus de la portion gauche. Ces deux des- sins sont done v^ritablement dissemblables. La distance Oo entre les deux yeux gaudies des dessins" est plus petite que la distance Nn des deux nez, parce que i'oeil est plus pres du plan de projec- iion que le nez, et la distance 3Jm des mcnlous est intermediaire entre les distances Oo, Nn, c'est-a-chre que Ton a Oo C'est qu'en effet M. Arago, dans cette memorable soiree, avait vu a la sur- face de notre sateUite des parlicularites merveilleuses. Que ne doit-on pas attendre des lors de la briilante campagne dont lord Rosse s'eta- ^64 COSMOS. blit le chef? Pourquoi faut-il que les aslronomes de Paris, si impatients deja en 1848, soient fatalement reduils, apres huit longues annees, a attendre encore le moment ou Icur grand objectif pourra suivre Ic mouvement diurne des astres? Le colonel Sabine annonce I'apparition prochaine de deux ouvrages de grande valeur : le catalogue des etoiles de I'ecliptique de I'obser- vatoire de Markrde, et les catalogues des observations faites a I'observa- toire d'Armngh. Le premier de ces ouvrages donne la position de toutes les etoiles de I'ecliptique jusqu'a la douzieme grandeur inclusi- venient ; il facilitera dans une proportion enorme la recherche des pla- netes inconnues. Ces deux travaux herculeens sont publics aux frais de la Societe royale de Londres , qui est venue genereusement en aide a sa noble soeur, la Societe royale d'Irlande, qui est loin d'avoir les memes ressources financieres. Optique. — Le grand evenement de la reunion de Belfast sera une brillante decouverte d'optique faite par un physicien deja celebre, M. Stokes. II nous a ete donne de pouvoir etudier a I'avance ces cu- rieux phenomencs, et nous leur consacrons un article special dans cette livraison du Cosmos. Chimie. — La reunion actuelle de Belfast posera les bases d'un grand travail d'ensemble, ayant pour objet la revision et la determination plus exacte des equivalents ou des poids atomiques de toutes les sub- stances simples et composees; travail qui s'executera sous la direction de I'illustre president de la section de chimie, le docteur Andrews. Chaleur. — La mauvaise sante du savant professeur James Forbes, d'Edimbourg, prive la reunion de la lecture d'un memoire attendu avec beaucoup d'impatience : le resume complet de toutes les recherches recentes relatives a la theorie de la chaleur. Dans ces dernieres annees, la science de la chaleur, la moins avancee de toutes les branches de la physique, a fait de tres-grands progres, grace surtout aux experiences si importantes de M. Joule, qui a determine avec le plus grand soin les relations numeriques qui lient les quantites de chaleur aux quan- tites de travail mecanique ; qui a mis completement en Evidence la veritable nature de la chaleur entrevue par Davy et Rumfort, qui bien- t6t, donnant plus d'extension a ses recherches parviendra a determiner exactement les equivalents mecaniques de toutes les forces de la na- ture, chaleur, electricity, magn^tisme, electro-magnetisme , etc. Tout le monde admet aujourd'hui que la chaleur en elle-meme est un veri- table mouvement atomique, et non pas seulement un fluide mysterieux qui penetre dans les corps et s'echange entre eux en plus ou moins J COSMOS. 465 grande quantite. Les recherches recentes de MM. llelmhotz , Rankine, Thompson, Kupffer, etc., confirment pleinement celles de M. Joule. Magnetisme terrestre. — Le magnetisme terrestre nous apparait comma una puissance pai tout en jeu a la surface de notre globe at sc manifestant par un grand nombre de phenomenes caracteristiques , mais nous ne savons encore presque rien de sa nature intime, de ses lois, at des fonctions qu'il remplit dans reconomia du monde. On est nalurellement amene a penser que cette force ne s'axerce pas seule- mant sur la terra, et qu'elle doit trouver ses analogues dans tous les corps du monde solaire; que la soleil, par consequent, et la luna doi- vent avoir aussileur magnetisme, etque Tinfluence de ce magnetisme non-saulement paut, mais doit etre sensible aux autres plan^tes. Pour changer ces conjectures an realite il fallait, avant tout, arriver a con- naitre, aussi parfaitament que possible, la distribution, I'intensite, les variations des forces magnetiques a la surface de la terre, et c'est le grand but que 1' Association britannique poursuit incessamment depuis sa creation, par tous les moyens en sun pouvoir. Des milliers d'obser- vations ont deja ate faites, mais il en reste encore enormement a faire. line grande partie du globe a eta exploree , mais il reste d'immenses lacunas a combler. On est convenu de represenler sur la sphere ter- restre I'ensemble des observations magnetiques par trois syst^mes de lignes courbes, les lignes isogoniques ou d'egale direction horizontale, la declinaison, las lignes isocliniquas ou d'egale direction verticale, I'inclinaison ; les lignes isodynamiques ou d'egale intensite. En tragant, h diversas epoques ces trois systemes de lignes, on a raconnu qu'elles sa deplacent par un mouvement progressif et continu, dont la cause estresteeinconnue, et que Ton aappele changamentseculaire, pour le distinguer des changements a periodes plus courtes. On a reconnu plus tard que les trois elements magnetiques : la decli- naison ou direction horizontale, I'inclinaison ou la direction verticale , la force ou I'intensite, sont les resultantes d'un double systeme de forces magnetiques, dont I'un, au moins, subit un mouvement de translation continue et progressive dans I'espace geographique ; cette translation s'execute de I'ouest vers Test, dans Themisphere nord, de Test vers I'ouest dans I'h^misphfere sud; et c'est alia qui produit prin- cipalement, sinon integralement, la variation oule deplacementseculaire des lignes magnetiques. Les observations prouvent, qu'au moins pen- dant les trois derniers sifeclas, ce mouvement de translation a ate uni- forme, ou a trfes-peu pres uniforme , de telle sorte qu'on pourrait a quelques minutes pres tracer a priori le deplacement des lignes ma- gnetiques : la variation annuelle de la declinaison est de plus de huit 466 COSMOS. minutes. Encore quelfjues annees et les lois du changement seculaire scront plcineincnt conijiics; quant a sa cause physique, ricn ne la fait encore pressentir. On est un pcu plus avance dans I'etude des variations a courtc pe- riode : il est desormais certain que ces periodes coincident avec le temps de la revolution de la terre autour du soleil , les autres avec le temps de revolution de la terre autour de son axe : les pre- mieres sont annuelles, les secondes diurnes. On a, de plus, determine les valejrs numeriques de ces variations pour les trois elements de la force magnetique, la declinaison, I'inclinaison, I'intensite. Leur cause ou source reelle est certainement dans le soleil ; elles sont le produit de rinduence magnetique solaire, car partout, a la surface du globe, les epoques des solstices et de I'equinoxe sont les epoques critiques des variations annuelles, et partout aussi , dans tons les meridiens, les variations diurnes suivenc, a tres-peu pres, la loi des heures solaires locales : enfm , les tempetes ou les grandes perturbations magnetiques elles-memes, les aureoles polaires , etc. , dont la production et I'appa- rition ne semblaient soumises a aucune regularite, a aucune loi, sont, on ne pent plus en douter, des phenomenes a periodes regulieres ou Ton apergoit distinctement I'influence des heures locales solaires. Le soleil est done la cause premiere des variations magnetiques a courte periode : mais comment agit-il? Est-il lui-meme un aimantou produit-il une action directe? Son influence magnetique reside-t-elle dans son action calorifique , par les courants galvaniques ou therm i- ques que la chaleur faitnaitre; ou parce que, sous I'influence de la cha- leur, Tetat magnetique des substances situees a la surface de la terre ou entrant dans la composition de I'atmosphfere, serait tantot exalte, tantot diminue? Les observations ne sont pas encore assez nombreuses etassez precises pour qu'on puisse choisir entre ces diverses hypotheses. Le fait cependant que les epoques critiques des variations annuelles coin- cident, non pas avec les maxima et les minima des temperatures an- nuelles, mais avec les solstices et les equinoxes, semble completement favorable a I'hypothese de Taction directe du soleil. Les forces magne- tiques aussi pour I'hemisphere sud , comme pour I'hemisphere nord, sont plus intenses , dans les mois de decembre, Janvier et fevrier, alors que le soleil est plus pres de la terre , que dans les mois de mai , juin et juillet, alors que le soleil en est plus distant. Si I'influence du soleil etait due a son action thermique ou calorifique ; les intensites pour les deux hemispheres devraient se produire en sens contraire ; le maxi- mum pour I'un devrait correspondre au minimum de I'autre, et r6ci- proquement. I COSMOS. 467 II est aussi toutefois des variations periodiques plus petites et moins regulieres, qui correspondent aux maxima et aux minima de tempe- rature , fct que Ton peut attribuer, en partie du moins, aux influences thermiques , surtout depuis que le grand chimiste et philosophe de I'Angleterre, ]\1. Faraday, a mieux etudie les proprietes magnetiques de I'oxygene, et les variations que la chaleur fait subir a ses proprietes. II serait en effet difficile d'admettre que les variations magnetiques ne soient pas influencees par les changeraents dans les conditions magne- tiques de I'oxygene aux differentes saisons et aux differentes heures du jour: mais ce qui n'est pas demontre encore, c'est que cette influence soit reellement au nombre de celles qui sont sensibles a nos instru- ments. Le fait le plus reraarquable et le plus important decouvert dans les derniers mois qui viennent de s'ecouler, c'est sans contredit I'exislence d'une variation ou inegalite periodique affectant partout I'intensite des variations magnetiques diurnes, ainsi que I'intensite et le nombre des perturbations ou tempetes magnetiques. Le cycle ou temps periodique de cette inegalite est d'environ dix annees ; le maximum et le minimum des grandeurs qu'elle affecte etant separes par un intervalle de cinq ans. Les differences constatees sont trop grandes et sont deduitesd'un trop grand nombre d'observations faites dans des lieux tres-distants , pour que I'existence de la periode dont nous parlony puisse rester dou- teuse. Par une coincidence vraiment singuliere, cette periode decen- nale des variations magnetiques a precisement la meme duree que la periode de la variation dans le nombre et I'etendue des taches solaires »mise en evidence par les trente-six annees d'observations assidues de M. Schwabe. En supposant cette coincidence definitivement etablie , la periode decennale manifestee par nos appareils magnetiques serait una periode solaire rendue sensible a nos regards par I'accroissement et le decroissement alternatif du nombre et de la grandeur des obscurcisse- ments du disque solaire. Ce premier rcsultat ne met-il pas sur la'voie d'un changement seculaire dans le magnetisme du soleil, affectant son atmospbere lumineuse ou sa pliotospbere , et modifiant I'influence ma- gnetique qu'il exerce sur notre globe ? Geodesie. — La determination de la forme et des dimensions verita- bles de notre globe est grandement avancee ; encore quelques annees, et elle sera aussi complete qu'elle peut I'etre. Le resultat des travaux les plus recents, formule dans une note presentee par M. Struve k I'aca- demie des sciences de Saint-Petersbourg , est que I'aplatissement de la terre vers les poles serait plus considerable que celui assign^ en 1837 et 1841 par I'illustreBessel, et par consequent beaacoup plus grand que celui que Laplace avail adople. 468 COSMOS. Marees des oceans et de l' atmosphere. — L' Association britannique met tout en ccuvre pour determiner le gouvernement anglais h com- mander enfin la grande expedition pour I'etudc des marees atlan- tiques , Atlantic tidal expedition : nous regrettons de ne pouvoir pas publier immediatement le memoire r^dige a cet effet par le con- seil de 1' Association. Les observations atmospheriques, faites depuis quelques annees dans Tile Sainte-H^lene, ont montre I'existence d'une tnaree atmo- S2)}icrique lunaire; et cette existence ressort aussi des observations faites , a Madras, sous les ordres du capitaine Elliot. Comme on devait s'y attendre, I'influence de I'attraction lunaire sur I'atmosphfere pro- duit un effet un peu plus grand sur le barometre de Syngapore , par 1^19' de latitude, que sur le barometre de Sainte-Helfene, par 15''57'de latitude. A I'equateur, la bauteur barometrique est plus grande de 57 dix-milliemes de pouce, a I'instant de la cuhnination de la lune, que lorsque la lune est a 6 heures du meridien. M. Dove envoie a I'Association la suite de ses importantes recherches sur les temperatures a la surface du globe. Dans un premier travail, il avait dessine sur des cartes , autant que ses observations le lui avaienl permis, la position des lignes isothermales du mois et de I'annee pour toutes les regions du globe. II transmet , cette fois , 1° la temperature normale de chacun des paralleles de la latitude pour chaque mois ; 2° les temperatures anormales ou les differences entre les temperatures de chaque lieu , et la temperature moyenne du paral- lele passant par ce lieu. L'ensemble de ces derniers nombres con- duit a la construction des lignes de temperatures anormales pour chaque mois, entourant et circonscrivant les districts, ou regions et localites qui, par des conditions particulieres de surface, ou par d'autres causes influani sur la distribution de la chaleur, sont carac- terisees par des elevations anormales de temperature, ou des froids anorraaux. On comprend loute I'importance de ces recherches pour I'etude et la theorie des perturbations ou des inegalites dans la distri- bution de la chaleur pour les diverses latitudes. Le colonel Sabine entre ensuite dans de longs details sur I'heureuse intervention dans le champ des observations meteorologiques des deux grandes marines des fitats-Unis et de I'Angleterre ; les lecteurs du Cosmos n'ont rien a apprendre a cet egard , parce que nous les avonsj deja mis au courant de cet admirable concentration de forces. Le professeur Stokes , sur la demande du conseil de I'Association j britannique, et avec les fonds mis par elle a sa disposition , a com- mence, dans une des salles de I'observatoire de Kew, une longuel COSMOS. 469 sei'ie de recherches sur le coefficient de frotlement des differents gaz. Dejii, en 1829, le colonel Sabine avait reconnu par I'experience que la resistance opposee par les difl'erents gaz au mouvement du pendale, ou le retard cause par cette resistance, n'etaient pas proportionnels a leurs densites respectives , mais qu'il dependait en partie de certaines qua- lites physiques inherentes a ces gaz, et d'ou resultait un frotlement propre a chaque gaz ; M. Stokes se propose d'approfondir complete- ment cette question si delicate, et d'exprimer en nonibre ces resistan- ces independantes de la densite. Le president exprime ensuite au nom de I'Association la joie univer- selle qu'a excitee dans le monde savant I'annonce des pensions accor- dees par le gouvernement a M. Hind, le grand denicheur de planetes, a M. le docteur Mantel, le grand denicheur de fossiles, a M. Ronalds, I'infatigable directeur de I'observatoire de Kew. Depuis le commencement du regne de la reine actuelle, Victoria, le premier ministre de la couronne peut disposer annuellement d'une somme de 1200 livres (30 000 francs) pour pensions a accorder aux savants et autres personnes de I'ordre civil qui se recommandent par leurs travaux et les services rendus. Or, dans les quatorze dernieres annees, un trentieme seulement de cette somme a ete consacre a des pensions accordees aux savants. L' Association britannique et les corps savants de I'Angleterre avaient reclame conlre cette parcimonie offen- sante , et cette annee pour la premiere fois la science aura pour sa part un tiers de la somme allouee par le budget. Le gouvernement des Etats-Unis , tres-empresse a favoriser de tout son pouvoir les progres des sciences , avait propose au gouvernement anglais d'admettre en franchise tous les livres et brochures scientifiques adresses par les savants anglais aux savants americains ; il suffirait, pour ne payer aucun droit, de les envoyer al'institut Smithsonien, qui se chargeait de les distribuer a leur adresse, pourvu loutefois que, de son cote, le gouvernement anglais consentit a admettre en franchise les brochures et les livres americains. Apres de longs pourparlers entre le president de la Societe royale, le president du comite du parlcment, le fresorier et le principal membre du comite J de la chambre des communes, la proposition du gouvernement americain a ete favorable- ment accueillie, lechange mutuel ou I'enlree reciproque en franchise est definitivement regie. Les ouvrages envoyes sous le convert de la Societe royale a I'adresse des savanls dont la liste sera arretee de temps en temps par le conseil de cette meme Societe , seront transmis sans payement d'aucun droit. Esperons qu'un semblable accord existera bientot entre la France et I'Amerique, d'une part ; la France et I'Angie- 470 COSMOS. terre, de Tantre. Esperons plus encore, avec lo colonel Sabine, que los prix de transports par la poste, qui rcndent impossible I'envoi d'An- gleterre en France, et de Franco en Ani;leterre, des brochures scienti- fiques, et ferment un obstacle redoutable a la communication des idees, seront bientot roduits dans une proportion enorme. 11 taudra meme plus lard que la reduction s'etende aux droits de douane pour I'importation des instruments ou appareils scientifiques. Nous avonsvoulu la semaine derniere, dansrinteretdel'administration des contributions indirectes , faire venir d'AUemagne un instrument nouveau d'une importance tres-grande : il vaut a peu pres 30 francs, et nous avons ele condamnes non-seulement a payer 15 francs de droits, mais a passer trois mortelles heures dans les bureaux et maga- sins des douanes , courant de bureaux en bureaux et desesperant presque de pouvoir entrer en possession de I'instrument tant desire, non pas dans notre interet, mais dans I'interef de la societe, puisqu'il servira efticacement, nous I'esperons, a demasquer la fraude. — Nous completons, d'apres le Monitcur itidustriel , Tenumeration des industries recompensees par la Societe d'encouragemenf. Application des beaux-arts. Materianx propres aux beaux-arts. — M. Ware, horloger mecanicien a Paris, a construit un petit instru- ment pour tailler les crayons. Bien que I'idee premiere de cet instru- ment se trouve dans un taille-crayon de M. Rouget Delile, les perfec- tionnements apportes par M. Ware ont ete apprecies et lui ont fait donner la medaille de bronze. Une medaille d'argent a ete meritee par M. Garneray, peintre de marine, pour la preparation des toiles a ta- bleaux. Des essais faits par M. Chevreuil, il resulte que la lumiere n'a foit eprouver aucune alteration a la peinture couchee sur les toiles de Garneray ; et de ceux de la commission de la Societe d'encouragement, que les causes les plus alterantes, celles meme qui se sont fait sentir sur les chassis eux-memes, n'ont pas modifie la solidite de ces toiles. M. Ch. E. Clerget, dessinateur ornemaniste, auteur de plusieurs ou- vrages d'ornementation, renon^ant au merite comme au plaisir de I'invention, n'a voulu que reproduire dans leur naivete, quelquefois meme legerement incorrecte, une partie de ces compositions si inge- nieuses et si gracieuses en meme temps, dues aux artistes de la re- naissance, motifs applicables a I'ornementation des travaux d'architec-^ lure, d'ameublement, de typographie, d'orfevrerie, de bijouterie, etc- La Societe d'encouragement a principalement pour but de recompen- ser les inventions industrielles; mais elle a toujours favorise I'alliance de I'industrie et de I'art; il lui appartient d'encourager a son debut, par une medaille d'argent , une publication qui doit contribuer a assu- COSMOS. 471 rer, sous le rapport du gout, le merite des productions de nos divers arts economiques. II est peu de professeurs qui, dans le cours d'un enseignement pu- blic, n'aient regrette de ne pouvoir presenter a leurs audlteurs une image des objets dont ils veulent les entretenir, reduite a des propor- tions convenables pour I etude. C'est ce but d'utilite que M. Mabrun a cherche a atteindre par I'appllcation des procedes de fabrication des papiers peints. 11 a tente plus encore : il a cherche et il est parvenu a fournir a bon marcbe des tableaux qui pussent, jusqu'a un certain point, rivaliser avec les peintures a I'huile qui font le principal orne- ment des eglises, et dont la plupart de nos paroisses de village sont privees en raison du prix eleve do ces objets d'art. M. Mabrun a deja obtenu \m succes remarquable dans la nouvelle voie qu'il cherche a elargir aujourd'hui, et les efforts heureux qu'il vient de tenter dans la fabrication des papiers peints ont motive la medaille de platine qui lui a ete decernee. L'annee derniere, la Societe a decerne a M. Stahl, mouleur du Mu- seum d'histoire naturelle, une medaille d'argent; et M. Stahl a cru ne pouvoir mieux temoigner sa reconnaissance qu'en poursuivant ses tra- vaux avec la meme ardeur, et en tachant d'apporter k son art de nou- veaux et utiles perfectionnements. Ces efforts ont ete couronnes de succes: M. Stahl est parvenu rocemment, et au moyen d'un proceJe qui lui est propre, a operer de la maniere la plus heureuse le moulage si delicat et si difticile des moUusques, de ces animaux dont les formes naturelles n'avaient pu etre conservees jusqu'ici par aucun moyen sa- tisfaisant, et dont I'etude presentait consequemment de tres-reelles difficultes. C'est done un nouveau service que M. Stahl a rendu a la science, et pour lequel la Societe a juge cet habile artiste digne de la medaille de platine. Nous avons puise les motifs des medailles dans les rapports speciaux des comites; et en resumant, on voit que, dans cette seance generale, la Societe a decerne 34 medailles, dont 10 en bronze, 15 en argent, 5 en platine et 4 en or. — Le P. Secchi a decouvert une petite comete dans la constellation des Gemeaux, le 26 aout dernier. A 3'' 30"" t. m., la comete pi't§cedait de 4' environ une petite etoile (s') de 9"= ou de 10° grandeur; elle la couvrait exactement a 3'' 52'". A ce moment , la comete ne sc revelait que par une espece de nebulosite qui entourait I'etoile; une demi- heure apres, I'etoile etait de nouveau a decouvert. Par trois compa- raisons faites a I'aide du micrometre circulaire au telescope de Cauchoix, en prenant pour termc de comparaison I'etoile 1 1637 de Lalaade II. C, 472 COSMOS. le P. Secchi a pu determiner la position suivante de I'etoile (a'). A (s') = Lai. + 5°' 43%6; D (a') = Lai. + 5'20". En prenant pour position de la comete celle de la petite etoile au moment de roccullation precise, on aurait pour le 25 aout a 15'' 52"', t. m. de Rome, ^ ascension droite , 7'' 29"" 31' 4; D declinaison 21° 48' 37". Le mouvement horaire approche resultant de I'ensemble des obser- vations serait, en ascension + 12% en declinaison — 115" (un peu inccrtaine, elle tend vers le sud). Les dernieres observations donnent : 25 aout 16'' 14'" 5', A. == (*') + 3» 8 5/ D = (s) — 42". rHYSIQUE ET PHOTOGENIE. LU5IIERE VISIBLE EXGESDREE PAR DES RAVONS INVISIBLES. M. Pliicher, I'illustre professeur de physique de I'universite de Bonn, nous avail apporte quelques indications relatives a une grande decou- verte faite tout recemment par un celebre physicien anglais, M. Stokes, et qui est I'evenement memorable de la reunion de I'Association bri- tannique pour I'avancement des sciences, a Belfast. Lesjournaux scien- tifiques anglais de dimanche dernier contiennent deja quelques details relatifs a ces brillantes experiences sur lesquelles le president de I'As- sociation, le colonel Sabine, a appele I'attention de la glorieuse assem- blee reunie en ce moment dans la capitale industrielle de I'lrlande du nord ; mais nous n'avions pas attendu ces renseignements , et grace a la complaisance de M. Jules Duboscq , grace aussi au beau soleil des derniers jours de la semaine derniere et aux excellents instruments mis a notre disposition, nous avons pu, avec M. Pliicher et M. Govi, jeune savant italien , reproduire la serie entiere des phenomenes mysterieux annonces par M. Stokes ; peut-etre meme sommes-nous alles un peu plus en avant, et n'aurons-nous plus rien k apprendre des commu- nications ulterieures des revues anglaises. Dans un vase rempli d'eau, on fait infuser pendant quelques minutes del'ecorce fraiche de^marronnier des Indes.L'esculine, substance orga- nique que cette ecorce contient, se dissout en donnant naissance a de petits floconsou nuages bleus, etbientot le liquide, eclaire par un fais- ceau de lumiere directe , apparait colore en bleu clair. On le verso alors dans une auge ou vase en verre a faces paralleles, et Ton fait tom- ber sur I'auge, perpendiculairement a I'une de ses faces verticales, un spectre donne par un prisme de flint-glass tres-pur et tres-blanc. La COSMOS. 473 fente etroite par laquelle la lumifere entre dans la chambre obscure etant verticale, ainsi que I'arete du prisme, le spectre est horizontal ou parallele a la surface libre du liquide contenu dans I'auge, et on le rend parfaitement net et distinct sur la face d'incidence oud'entree par rinterposition , a distance convenable , d'une lentille convergente. En regardant au sein de la masse fluide , vers la portion en contact avec la face d'entree , on voit en dehors du spectre visible de Newton , au dela de Textremite violette, a la place que Ton sait occupee par les rayons invisibles, chimiques et phosphorogeniques, une longue bande de lumiere bleuatre : son eteridue est au moins egale a la longueur du spectre visible. Elle penetre dans le liquide jusqu'a une certaine pro- fondeur, assez grande dans le voisinage de I'extremite violette du spectre visible , de plus en plus petite a mesure que Ton s'eloigne de cette extr^mite : elle penetre cependant beaucoup moins que la lu- miere du spectre visible, et si la cuve est assez profonde, on voit tres- distinctenient qu'elle n'atteint pas le fond. Si la lentille est parfaitement au foyer, la bande bleuatre apparait sillonnee de' raies obscures tres-saillantes , et parmi lesquelles ressort un groupe de quatre lignes doubles qui nous rappelait le groupe N des raies que M. Mathiessen a vues et dessin^es dans la portion jusque-iii invisible et inconnue du spectre qui lui est apparue dans son lenti- prisnie. M. Govi croit que les raies de la bande bleuatre coincident avec celles que M. Edmond Becquerel a vues , fixees et decrites dans le spectre chimique. Qu'est-ce que c'est que cette bande de lumiere bicue? Est-ce prc- cisement la portion du spectre apparue pour la premiere fois dans le lentiprisme de M. Mathiessen, et dont I'eclat a ete exalte par Taction de la dissolution d'esculine? On serait tente de le croire, tant est grande la similitude des raies. Est-ce une portion invisible du spectre chi- mique, devenue tout a coup visible par un changement dans la lon- gueur d'ondulation et la refrangibilite? On nous assure , et le colonel Sabine I'affirme, que c'est I'opinion emise par M. Stokes : dans ces termes, nous ne I'accepterions pas, nous n'y croyons pas. Est-ce, au con- traire, une lumiere nouvelle propre a la solution d'esculine, resultant du mouvement vibratoire excite par les ondulations des rayons chi- miques, d'une sorte d'incandescence ou de phosphorescence suscitee au sein du liquide? Cette derniere explication nous semble plus sim- ple, beaucoup plus probable, pour ne pas dire certaine, et M. Stokes s'y ralliera sans aucun doute, puisqu'il a deja donne au phenomene de- couvert par lui le nom de fluorescence, tres-voisin et presque syno- nyme de phosphorescence. Le fait suivant est presque une demonstra- 474 COSMOS. tion. Au centre dc cette bande do lumiere bleue , nous avons fait descendre un lube reaipli d'une eau laiteuse; en avant et en arriero du tube, on voyait trfes-bien Ic flol de lumiere bleuatrc; mais il n'ap- paraissait nullement a I'interieur du tube, tandis que, quand nous pla- cions le tube dans le faisceau des rayons ordinaires du spectre, I'eau laiteuse se colorait tour a tour en violet, bleu, vert, etc. La bande de lumiere adventice nait done d'un mouvement vibratoire propre a la solution d'esculine, excite et propage seulement dans son seln, et qui n'a pas d'existencc hors d'elle : e'est bien la eviderament le caractere de I'incandescence et de la pbosphorescence. Si a la dissolution d'esculine on substitue une dissolution de sulfate de quinine, I'etTet est sensiblementle meme; on voit encore au dcla de I'extremile violette du spectre une tres-longue bande de lumiere grise, violatre ou bleuatre ; les raies sont restees a pen pres k la memo place ; on les voit se dessiner tres-intenses centre la parol de la cuve sur la- quclle le spectre tombe normalement. Seulement I'epaisseur ou la pe- netration dans le liquide du faisceau phosphorescent, assez grande pres de la limite violette du spectre ordinaire, diminue avec une extreme rapidite, de telle sorte quelle n'est plus bientot que de quelques milli- metres. Si Ton opere enfin toujours de la meme maniere sur une dissolu- tion alcoolique de chlorophylle, obtenue en faisant infuser pendant quelques heures des feuilles vertes dans de I'alcool a 36 ou 40 degres ; la longae bande de lumiere bleuatre ou violatre sera remplacee par une bande de lumiere rouge ou pourpre d'une intensite remarquable. Elle ne s'etend pas seulement en dehors du violet, on I'aperQoit dis- tinctement sous ou derriere les espaces violet et bleu du spectre or- dinaire ; il est meme probable qu'elle nait aussi sous les espaces vert, jaune, orange et rouge. Le caractere d'une lumiere propre ou phos- phorescente suscilee au sein du liquide par les vibrations obscures est cette fois beaucoup plus tranche encore, soitpar la nuance rouge com- pletement ditferente du gris violet entrevu par M. Mathiessen , soit par I'extension de la bande sur toute la surface eclairee par ;le faisceau in- cident. Les raies noires apparaissent moins distinctement, mais leur existence n'est pas douteuse. En partageant en deux par une cloison en verre I'auge a flices pa- ralleles, en plongeant un prisme dans le liquide, on constate que les lumieres phosphorescentes ou Quorescentes se retlechissent et se re- fractent suivant les lois connues ; mais nous n'avons pas pu encore me- surer I'angle de rellexion totale et la refrangibilite de maniere a pou- voir determiner la longueur de I'onde. L'action photogenique de ces COSMOS. 475 Ijandes lumineuses est tres-intense mais le soleil a disparu au moment oil nous voulions les faire agir sur des plaques coUodionees de ma- ni^re a apprecier I'intensite de leur action , et fixer ainsi les raies obscures. La justice nous fait un devoir de rappeler que deux immortels phy- siciens, sir John Herschel et sir David Brewster, avaient parfaitement vu et etudie les faisceaux de lumiere qui naissent au sein des disso- lutions d'esculine, de sulfate de quinine, de chlorophylle , et d'une foule d'autres substances; mais ils n'avaient pas eu la pensee d'etudier ces phenomenes a I'aide du spectre solaire ; ils s'etaient contentes de faire tomber sur I'auge un rayon de lumiere directe et blanche; la na- ture reelle du phenomene, la production de lumiere sous Taction do rayons invisibles, leur avait par la meme echappe; ils n'avaient vu qu'une sorte de dispersion la ou nous voyons une phosphorescence, une fluorescence reelle ; la branche de laurier qui devait s'ajouter a leur couronne deja si belle est venue ainsi ceindre le front de leur jeunc (imule. Un mot encore : au fond et en considerant ces experiences si ncuves du point de vue ou nous sommes places, et que nous croyons etre le veritable, la fluorescence n'a rien d'extraordinaire et de mysterieux. II n'y a rien d'impossible a ce qu'un mouvement vibratoire d'une lon- gueur d'onde donnee engendre un nouveau mouvement vibratoire d'une autre longueur d'onde; c'est au contraire trfes-possible a prevoir et tres-naturel, et nous entendons chaque jour, par exemple, un son grave donner naissance a un son aigu, un son aigu donner naissance a un son grave, dans des conditions determinees. Mais il est un fait plus eclatant, completement analogue a ceux que nous venons d'analyser, qui n'en sont qu'une manifestation nouvelle : nous voulons parler des substances phosphorescentes proprement dites; la lumiere qu'elles emettent a des varietes de nuances presque infinies, et elle est pro- duite principalement , exclusivement peut-etrc, par les radiations obscures ou invisibles. VARIETES. CHAMPANISATION DES VINS ET AUTRES BOISSONS FERMENTEES. GrSce k un excellent memoire publie par M. Louis Rousseau dans la Revue scientifique, nous pouvonsenfin aborder une question tout a fait neuve, qui in- 476 COSMOS. t^ressera vivement lous nos lecteurs. Les aliments de rhomme civilise peuvent ^tre ranges en deux classes : les aliments nutritifs et les aliments stimulants. Les premiers repondent aux besoins de la vie animate ; les seconds cxercent sur I'etre humain une influence morale ; celui-ci , en aiguisant I'esprit , celui-ia , en dilatant le cceur. De toutes les substances de la seconde esp6ce que la nature , aidee de I'art , a mises a la disposition de I'homme , il n'en est aucune dont I'im- portance morale et sociale puisse etre comparee a celle du vin, ou des boissons I'erment^es qui le remplacent. Le vin , dit le Sage , bu avec sobri^te, est une se- conde vie ; il rejouit le cceur de I'homme ; son usage moderu est lasante de I'ame etdu corps. Les excellents effets du vin ne proviennentpas seulemenl de I'alcool qu'il ren- ferme : son arome ou bouquet et le gaz acide carbonique qu'il contient y contri- buent pour une grande part , pour la plus grande peut-etre. Les gourmets et les personnes douees d'un sens plus exquis ne classent pas les vins en raison de leur spirituosite : ils placent au contraire au premier rang les produits de certains vignobles de grand renom, fort peu riches en alcool, et cependant delicieux , alurs que la legeret^ relative est largement compensee parle charme etles ver- lus excilantes du bouquet. Les vins de Champagne mousseux, qui passionnent si fort les consommateurs de tous les pays , et sans lesquels il n'y a pas de festin complet , possedent com- parativement peu de vinosite et ne pourraient que perdre en qualite s'ils deve- naient plus alcooliques. Le gaz acide carbonique , condens6 dans les vins mous- S3UX, equivaut largement a un exces d'alcool; en sorte qu'un vin mousseux partage, s'il est convenablement dcgorg6, avec les vins riches en bouquet, I'im- mense avantage d'etre tres-agreable et tres-sain sans ^tre trop alcoolique. Le gtiz acide carbonique a done une valeur commerciale exprimable en chiffres et comparable a celle de I'alcool ; et I'economie publique bien entendue, d'accord avec la saine philosophie, doit desirer que la production et la consommation des vins mousseux prennent chaque jour plus d'extension. Mais qu'on le remarque bien , quoique les gourmets exigent dans le vin mous- seux une forte charge d'acide carbonique , ils sent loin d'applaudir au vin qui, apres avoir produit une forte detonation , laisse echapper son gaz en grosses bul- les et en un clin d'ceil. Loin de la , ils I'appelient impitoyablement vin fou , et le repoussent avec d^dain. lis savent parfaitement que les bons vins mousseux ne sont pas ceux qui ont fermente tumultueusement a la maniere des bieres de Pa- ris , mais au contraire ceux dont le travail de fermentation s'est fait a froid et aussi lenlement que possible. Dansces derniers vins, les seuls estim^s, la mousse rjiulte d'une infinite de bulles tres-5nes, indice certain que le gaz acide carboni- que etait non pas emprisonne par la pression, mais veritablement dissous , ce qui ne pent avoir lieu que dans les vins conduits suivant les v^ritables regies de I'art. Exposons ces regies trop peu connues. Une liqueur n'est fermentescible qu'autant qu'elle renferme une certaine quanlitc de sucre, plus une mati^re azotee, connue sous le nom de ferment. Les deux conditions essentielles de la fermentation se trouvent naturellement en presence dans le raisin et plusieurs autres fruits; le jus que Ton en extrait, et COSMOS. 477 qui doit fermenler plus tard, s'appelle moiit. S'il s'agit de la biere, le liquide Sucre que Ton obtient du grain germe s'appelle , en terme de brasserie, irempe , et le ferment ajout^ s'appelle /ei'ure. Des qu'un moikt ou une trempe additionnee de levure sont places dans une temperature convenable , la levure , Element ac- tif dela fermentation, decompose le Sucre qui en est Tel^ment passif, et le con- vertit parlie en alcool , parlie en gaz acide carbonique. Le role essentiel que joue le ferment dans cette belle operation de la nature n'empeche pas qu'il ne soit par lui-meme impropre a I'alimentation de Thomme, et que toute boisson dont il n'est pas expulse ne soit par cela seul degoutante et insalubre. Quand le consommateur repousse avec indignation une liqueur trou- ble, quand il exige une limpidite absolue , il fait acte de prudence non moins que de sensuality. Qu'est-ce, en effet, que le ferment tel qu'il nous a ete mon- tre par la science moderne? Un 6tre organist, une plants tres-probablement, un animalcule peut-etre, qui vit et se developpe , qui absorbe a son profit et con- somme la force qui unissait les particules des corps amends par lui a I'etat de fermentation, qui s'assimile I'une , au moins , des substances qu'il separe. Aussi ecoulez M. Dumas. « Combien de maladies, s'ecrie-t-il , sont resultees de I'introduction fortuite d'un ferment dans le sang ! Quel epouvantable desordre pent et doit resulter de I'envahissementsoudain d'un liquide essentiel a la vie par des myriadesd'etres microscopique?, se multipliant a /infini aux depens de la mati6re animale, qu'ils decomposent ! » Tout le monde sait, et la saison d'ete de i8o2 I'a trop eioquemment prouve , que les bieres mousseuses mal clarifiees et troubles, comme, helas 1 toutes les bieres ordinaires de Paris, causent quelquefois, presque instantanement, des re- tentions d'urine ou d'autres desordres graves. Dans les vins blancs qui ne cuvent pas, une grande partie du ferment est ex- pulsee de la barrique par la bonde ; dans les vins rouges une portion non moins grande de ferment seprecipite sous forme de lie ; les vins rouges cependant et les vins blancs restent longtemps encore opaques, et cette opacite est le temoin cer- tain de la presence d'un reste de ferment qui les deshonore et les vicie, dont on s'efforce de les debarrasser par le soutirage, le collage, divers autres manipula- tions, et le temps, le grand remede a tous les maux. Les vins les plus placides, pour peu qu'ils aientet^ bien conduits, contiennent toujours une certaine quantite d'acide carbonique, la quantite qu'ils peuvent dis- soudre sous la simple pression d'une atmosphere; sans cela , ils seraient plats , quelque spiritueux qu'ils fussent d'ailleurs. Pour exalter les effets agr^ables et salubres resultant de la presence de I'acide carbonique, on verse le vin dans des vases hermetiquementclos, ou il acheve sa fermentation, et ou m^me, au be- soin , comme pour les vins de Champagne, on le soumet a une fermentation nou- velle parl'addition decertaines substances fermentescibles, et surtout du sucre. Tout le gaz qui se d6gage pendant ce travail ulterieur , ne pouvant s'echopper delabouteille, se trouve retenu dans la liqueur ou, en vertu de sa prodigieuse elasticite, il peutetre reduit au huitieme et meme au douzi6me de son volume, si le vase est capable de resister a une aussi forte pression. Si plus tard on de- 478 COSMOS. Louche la bouteille, le gaz comprim^ se detend , s'^lance liors du vase impetueu- sement; tout entier, si le vin est de mauvaise qualite; promptement d'abord , lentement et longtemps ensuile, si le vin est de qualit6 supurieure. Signalons en passant , pour le fl(5trir, le precede frauduleux qui consiste a prendre des vins placides et a y introduire par des moyens mecaniques le gaz carbonique obtenu cliimiquement. Quand 11 arrive que le vin supporte un pareil trailement sans perdresa limpidite, sa saveur en est alteree, etTon n'a d'ailleurs par ce freiatage qu'un vin fou, d'oii le gaz s'^chappe d'un seulbond, et ne laisse dans le verre qu'une liqueur plate et sans vertu. II n'y a nuUe comparaison a etablir entre les qualitcs gastronomiqueset hygieniques d'un gaz produit chimi- quement, et introduit de force dans une liqueur quelconque, et celui que la li- queur degage elle-meme en fermentaut, el qui est retenu en elle par I'lierme- tique cloture du vase qui la contient. II n'est personne qui, npres avoir bu du bon vin de Cbampagne mousseux n'ait eprouve ce subit ecliauffement de I'organisme, ce doux ebranlement des papilles nerveuses, interieures et exterieures, cet elat de bien-elre, inaccouLume que I'al- CJoi seul serait impuissant a produire ; cette excitation si agreable est en grande partie I'effet de I'acide carbonique engendre et condense dans le vin. Le vin de Champagne mousseux est non-seulement la plus delicate, mais la plus salubre de toutesles boissons, a la condition qu'il sera fabrique conscieucieusement. Si une temperature trop 61evee pendant la premiere fermentation du vin nuit a sa qualite, I'elevation exageree de temperature est bien plus defavorable en- core pendant le travail qu'il subit uUerieurement dans les bouteilles oil 11 prend la mousse. Les colliers souterrains ou les producteurs champenois font leurs ope- rations, et oil la temperature ne s'el^ve jamais au-dessus de 10 degres, exercent une grande influence sur la qualite desproduits. Mais il est une condition beaucoup plus essentielle a la production d'un via parfait. La fermentation vineuse n'engendre pas seulement de I'alcool et de I'a- cide carbonique, principes precieux et bienfaisants : elle engendre aussi du fer- ment, matiere detestable qu'il faut necessairement expulser. Nous voici done ea face d'un nouveau probleme : expulser de la bouteille par un proced6 mecani- que toute la matiere epaisse que la fermentation y a produite, sans laisser ^chap- per le gaz engendr^ et condense dans le vin ; ce qui s'appelle faire degorger le vin. Dans I'etat actuel de I'industrie, cette operation e.xige une serie de manipu- lations delicates et couteuses , et voila pourquoi les vins de Champagne, en pas- sant a I'etat mousseux, acquierent une valeur venale triple ou quadruple de celle qu'ils ont en eux-memes. II est notoire que le vin des meilieurs crus achete en barriques ne revient pas a plus de 40 a 80 centimes la bouteille, tandis que le meme vin convenablement traite et devenu mousseux ne se vend pas moins de 2 a 3 francs. On se iromperait en attribuant cette caorme augmentation de prix aux bene- fices exageres des embouleilleurs ; ces benefices , balances par la libre concur- rence, sont en realite ce qu'ils doivent etre. L'enorme ditference de prix entre le vin en futailles et le vin devenu mousseux, vient certainement de I'imperfection des precedes actuels de champanisalion : car, 1" ces precedes exigent deux ou COSMOS. 479 Irois degorgements par bouteille; 2° le succ^s du dcgorgement depend en entier de I'adresse et de I'aUenlion de I'ouvrier, encore echoue-t-il souvent alors m^me qu'il a fait un long apprentissage et acquis une tres-grande experience ; 3° rien n'indique ext^rieurement a rembouteilleur champenois les progres de la fermen- tation dans la bouteille, ni par consequent le degre de pression qui en resulte: il est ainsi expose a livrer sans le savoir un vin dont la charge de gaz est insuf- fisante , ou a voir la bouleille se briser sous I'effort d'une tension excessive. Au- trefois on evaluait la casse a 20 pour 100, annee moyenne; elle ne serait plus aij jourd'hui , dit-on , que de S a 6 pour 1 00, nous en doutons. Si done il est ardemment a desirer que la bouteille de vin mousseux, sinon de Champagne, du moins loyalennent traite a la maniere de Champagne, vienne eg.iyer de temps en temps le repas du petit bourgeois et de I'ouvrier, et prendre sa place a la suite de la poule au pot revee par le bon Henri, il faut absolument que les proc^des de champanisation deviennent plus faciles et plus 6conomi- ques; et c'est le progres que M. Louis Rousseau veut realiser des le debut des prochaines vendanges, apres quarante anne.^s d'etudes et de longs essais. One observation curieuse qu'il fit il y a bien longtemps le mit sur la voie qui devait le conduire a la solution complete du difficile probleme. En 1811, jeune marin, prisonnier de guerre sur les pontons d'Angleterre, vou- lant echapper a I'ennui par I'etude, il imagina de faire une s^rie d'experiences sur la fermentation alcoolique. II ne put se procurer que des carottes, de la me- lasseet de la levure de biere; apr^s avoir reduit les carottes en pulpe et en avoir extrait le jus , il y ajouta une certaine dose de melasse et mit en levain cet Strange mout, non-seulement trouble, mais boueux. Aussitdt apres Tapparition de la fermentation, il remplit de ce liquide une bouteille d'une force extraordi- naire qu'il boucha soigneusement, ficela et cacheta : le reste du liquide fut verse dans une bouteille bouch^e negligemment avec du papier. Dans la seconde bou- teille, le tumulte dela fermentation se manifesta a peine; dans la premiere, des le second jour, on voyait a la partie supi^rieure du liquide une zone de quelques lignes d'epaisseur d'une limpidite parfaite. Le jour suivant, la zone limpideavait pres de 1 pouce de hauteur, et la portion trouble s'affaissait de plus en plus. M. Rousseau perca alors le bouchon , et I'acide carbonique s'echappa en quan- tite considerable. II fut des lors demontre pour lui que la clarification d'un liquide qui fermente ne depend pas seulement de la difference de pesanteur specifique entre le li- quide et le ferment, mais qu'elle est grandement acc61eree par la tension pro- duite par I'accumulation du gaz et la dissolution de ce gaz dans le liquide. En effet, que Ton prenne un mout quelconque, aussi trouble que Ton voudra, qu'on I'enferme dans un vase clos, et Ton conslatera par soi-m^me que des que la fer- mentation sera etablie, et que la tension interieure aura acquis une certaine in- tensite , de trois ou quatre atmospheres, la liqueur commencera a se clarifier en partant d'en haut , et que le depot descendra de plus en plus a m€sure que la pression augmentera. II est assez extraordinaire que ce phenomena capital ait completement echappe a I'attention des physiciens et des producteurs de vins mousseux, ace point 480 COSMOS. qu'un savant qui s'est occupe specialement et avec une haute intelligence de la question des vins champanis^s affirmait encore en 1850 que le d^pol se pr^ci- pite par la seule difference de pesanteur specifique , et que I'accroissement de densite resultant de I'absorption du gaz est m^me un obstacle a la precipitation. Le fait decouvert par M. Rousseau est incontestable , nous I'avons verifie par nous-meme, nous avons fait plus, nous en avons donn^ la theorie physique cer- taine, et nous I'exposerons bientot avec son application a un grand nooibre de phenomenes restesjusqu'ici sans explication satisfaisante. Nous avons insist^sur cette observation minime en apparence, parce qu'elie est devenue le point de depart de la solution complete du grand probU^'me de la chanipanisation des vins, solution qu'il nous reste a faire connaitre. Pour abaisser le prix des vins champanis^s et les mettre a la portee des plus petites bourses, il faut necessairement, 1° remplacer I'operation du degorgement multiple, executeebouteille par bouteille, par une operation unique, exercee sur une grande masse de liquide, un ou plusieurs hectolitres ; 2° suppleer a I'adresse et a rhabilete du degorgeur par un appareil de precision qui n'exige de ses met- teurs en oeuvre qu'une intelligence ordinaire et une attention facile ; 3° montrer a chaque instant a rembouteilleur le degre de pression du liquide en fermenta- tion lente, de sorte qu'il puisse ajouter au besoin un supplement de principe fer- mentescible, parer au danger de I'explosion quand il devient imminent, et sa- voir quand, la clarification 6tant complete , le vin peut etre mis en bouteille et livre au consommateur; 4° enfin dispenser entierement du collage et du souti- rage, de telle sorte que les vins puissent aussitotapresleur fabrication etre pla- ces dans le vase oil ils doivent prendre la mousse avec I'expulsion sans frais du ferment ou depdt. Pour realiser efGcacement ce beau programme, M. Rousseau a done d'abord substitue a la bouteille VOEnophore, vase allonge a deux goulots dont la capa- cite peut atteindre deux ou un grand nombre d'hectolitres, et il y verse le vin de Champagne ou d'autres crus , mais relativement pauvres en alcool du vin. II y aurait crime a champaniser des vins alcooliques, les vins de Bourgogne, par exemple, dont les proprietes enivrantes sont alors accrues dans une proportion enorme qui les rend tres-dangereux. Sous I'influence de la pression causee par I'accumulation du gaz carbonique, le ferment se precipitera incessamment au fond de I'oenophore, et le degorgement s'effecluera quand il en sera temps par un simple tour de clef du robinet place au goulot inferieur. Si apres le degorgement on procedait a Tembouteillage du vin mousseux conime on le fait pour les eaux gazeuses, on eprouverait un terrible mecompte, car la pression decroissant de plus en plus a mesure que I'oenophore se viderait, le vin serait de plus en plus pauvre en acide carbonique; il fmirait par ne plus ^tre mousseux, il serait plat et sans vertu. Mais si la masse aeriforme contenue dansl'espace vide de I'oenophore conserve toujours la meme tension, la pression constante exercee sur le vin empSchera le gaz acide carbonique de se d^gager, et la derniere bouteille sera aussi mousseuse, aussi excellente que la premiere. M. Rousseau remplit cette condition essentielle en mettant I'oenophore en com- munication avec un second appareil appele par lui gazoslateur, d'une capacitt- COSMOS. 481 decuple de celle de Toenophore, et rempli constamment d'air a la meme pres- sion que le gaz acide carbonique du vin champanise, au commencement de I'embouteillage. De cette maniere^ la difference de pression dans la derniere bonteille ne diffe- rera de la pression dans la premiere que d'un septieme d'atmosphere, difference beaucoup moinsgrande que ceilequi existeentre les pressions de deux bouteiiles de vin de Champagne prises au hasard dans un meme panier. Un seul gazotateur pourra desservir tour a tour un grand nombre d'ceuophores, ce qui reduira a peu de chose la depense de cet appareil additionnel pour chaque hectolitre de con- tenance. Nous n'entrerons pas dans plus de details ; nous ajouterons seulement que la matiere qui jusqu'ici a le mieux reussi pour I'oenophore est la tdle vitrifiee de M. Paris ; et que les manometres par lesquels M. Rousseau met en evidence la pression interieure soit de I'oenophore, soil du gazostateur sont d'une simplicile extreme et d'une efficacit6 tres-grande. II ne nous reste plus qu'aresumerce long article par quelques mots qui fassent bien coniprendre la pens^e de I'inventeur, homme de talent et homme de bien dunt la vie entiere a ete consacree a de bonnes et grandes oeuvres. M. Louis Rousseau ne pretend apporter aucune innovation dans la maniero de trailer les vins pour les disposer a la mousse ; il accepte les moyens connus soit pour r^veiller la fermentation, soit pour corriger la trop grande verdeurdes vins. Son precede n'a point precisement pour objet d'abregerle temps necessaire pour produire un bon vin mousseux. Ce qu'il veut, c'est 1" supprimer le collage et le soutirage ; 2* clarifier sponlanement le vin et le charger du gaz acide car- bonique ne lentement de la fermentation; 3" le degorger non plus par le seul f positive condease plus la vapeur que leleclricite negative. 3" Si on met le jet de vapeur entre deux pointes degageant la m&tne esp6ce d'eiectricite, la condensation, loin d'(^lre augmentee, est considerablement di- minuce. •i" Si Ton met le jet de vapeur entre une pointe positive et une pointe negative, la condensation devient plus forte. M. I'abbe Laborde explique ainsi ces deux fails. On sait que deux pointes qui donnent la meme espece d'eiectricite se nuisent parleur rapprochement, etdegagent moins d'eiectricite qu'une seule. II n'est done pas tHonnant que la condensation soit moins forte sous la double in- ilucnce. '■)" L'electricite positive traverse plus facilement I'air quel'electricitc negative; de plus , soUicitee par I'electricitt^ contraire , elle s'echappe plus abondante et produitune condensation plus forte. De legers nuages qui vont de la pointe po- sitive a la pointe negative rendent cette predominance manifeste. Si Ton place , vis-a-vis de la pointe qui condense, un corps simplement conducteur, la con- densation est encore augment6e, et reparait meme lorsque le degagement eiec- trique etait trop faible pour la determiner. M. I'abbe Laborde croit que ce der- nier faitpeut fournir I'explication dune particularite que presentent les nuages qui donnent la grele, et qui consiste en ce qu'ils sont en general peu Aleves. Suivantluilanuee orageuse soilicitee par Taction de la terre doit agir plus for- tement sur les nuages places plus bas , que sur les nuages places plus haul; ce sera done dans les nuages inferieurs que la grele se formera de pref(5rence. L'ha- bile physicien aurait puajouter que la formation de I'orage et de la grele, sup- pose ou un nuage inferieur electris^ positivement en presence de la terre nega- tive, cequi est beaucoup plus rare, ou, ce qui:est le casle plus ordinaire, deux nuages, I'un inferieur electrise negativementcomme la terre, d'oii sont parties les vapeursqui I'ont engendre, I'aulre superieur electrise positivement. Tout alors, pluie, gr^le, eclairs, foudre, part du nuage superieur, dans le sens de la trans- mission du fluide electrique qui va toujours du corps electrise positivement au corps electrise negativement, mais en definitive tout n'arrivea la terre qu'a tra- vers le nuage inferieur, et voila pourquoi ce sont toujours les nuages les plusbas qui semblent donner la grele. Qu'on nous permette en hnissant un rapprochement frappant. Le roi-prophete avail ditdans un deses plus admirables psaumes : fulgura in pluviam fecit, « il a fait de la pluie avec la foudre. » Avant les experiences de M. I'abbe Laborde , ces mots n'indiquaient qu'un fait remarquable confirme par I'observation de chaque jour; aujourd'hui, ils sont devenus 1' expression d'une theorie neuve et f6conde. C'est ainsi que bon grc malgre la science avancee et mure arrive tou- jours a confimier les recits et les assertions des ecrivains inspires. COSMOS. 555 MeCAMOUE APPLIQUEE. — NOUVELLE MACHINE OSCILLAME SIMPLIFIEE , ET SIISE E\ JIOUVEMENT PAR LES FORCES COMBINEES DE LA VAPEUR ET DES GAZ , par M. Galy-Cazalat. ( Dans le memoire que j'ai I'honneur de soumettre au jugement de TAcad^- mie, avant de faire la description de ma machine, je calcule les puissances comparatives des moteurs engendres par la force expansive du calorique , en me fondant sur les principes suivants : « Chaque kilogramme de houiile , qualile moyenne , peut developper 7500 ca- lories en se combinant avec roxygenede9 metres cubes d'airsur 18 qu'onlaisse passer a travers la grille du foyer. « En prenant pour unite le calorique- necessaire pour elever de 1 degre un kilogramme d'eau, le calorique specifique de 1 kilogramme de vapeur est 6gal a 0,70, et le calorique specifique de 1 kilogramme d'air est 0,28. « Les produits gazeux de la combustion de la houiile ont a peu pr6s la m^me capacite pour la chaleur que I'air. '( Les puissances dynamiques des gaz el des>apeurs, agissant sans conden- sation, sont proportionnelles aux accroissements de volume qu'ils prennent dans le mcme temps. « D'apres ces principes, je calcule la puissance dynamique de la flamme ou des produits gazeux de la combustion de 1 kilogramme de houiile moyenne dans un foyer clos, alimente par une soufflerie qui absorbe 2b pour 100 de la force emprisonnee dans le foyer. « Je calcule ensuite la portion de cette puissance qui passe dans les genera- teurs pour y vaporiser de I'eau, pour y chauffer de la vapeur deja form^e , pour augmenter la force elastique d'un poids connu d'air emprisonn^. « Les resultats du calcul fondesur les principes ci-dessus admis en physique, sont representes comme il suit : « 1° La puissance dynamique de la* flamme ou des gaz d^veloppes par 7 300 ca- lories (en retranchant un quart absorbe par la machine soufflante) 100 « 5' 4500 calories, sur 7500, produisant dans la chaudiere 7 kilo- grammes de vapeur 20 « 3" 4550 calories employees a surchauffer de la vapeur 67 « 4° 4550 calories se combinant avec une masse d'air dans un vase clos 77 « Ces resultats demontrent'que le |moteur le plus economique est la flamme ou la reunion des gaz, developpes dans un foyer clos, alimente d'air par une machine soufflante. « Toutefois, I'application de la flamme, comme puissance motrice, estimpra- ticable parce que Taction des gaz, agissant a tres-haute temperature, feraient gripper le piston; la fermeture hermetique rendrait trop difficile la continuite de la combustion; enfin, la soufflerie devrait avoir des dimensions si grandes qu'elle compliquerait notablement le mecanisme. J'ai obvie a ces graves incon- venients au moyen de la nouvelle machine qui realise une partie de I'economie due aux moteurs. 556 COSMOS. « Description. — Cette machine se compose d'lme capacity annulaire llogee dans une chambre a feu entour^e d'eau, miinagee a la suite de la grille d'une chaudicre tubulaire. La partie superieure de la capacite est divis(5e en deux com- pai timents distincts par une cloison fixe , tandis que la partie inf6rieure est a moitie remplie de plomb fondu. La machine est liee par des bras de fer avec un axe horizontal , qui doit osciller sur deux paliers exterieurs a la chambre qui lacontient. Une desextremites de I'axe fait corps avec lamanivelle destinee a mener une bielle, qui transforme le mouvement d'oscillation en niouvement rotatif. L'autre extremite de I'axe creux est embrass^e par un man- chon qui porte la boite connue de distribution de la vapeur. Cette derniere est conduitedela chaudiere dans la boite par un tuyau fixe, autour duquel oscille hermetiquement I'axe creux du manchon. u La distribution du moteur est reglee par le mouvement du tiroir, comme dans les machines oscillantes sans condensation et a detente. « Pour mettre la machine en train , on laisse arriver la vapeur entre le bain metallique et la cloison , qu'elle repousse du cote vers lequel elle fait mooter le plomb fondu. La difference des niveaux metalliques mesure la force de la vapeur qui afflue jusqu'a ce que le tiroir I'arrete. Alors, ello agit par detente. Apres la detente, vers la hmite de I'oscillation, le tiroirimet en communication les trois orifices qu'il recouvre. Aussitot la vapeur s'echappe parrouverturecentrale,etle plomb qu'elle soulevait tombe en faisantun vide sous la cloison. Ce videse rempHt a I'instant de gaz chaud ou d'air froid , selon que I'orifice central sous le tiroir communique avec la chambre a feu ou avec I'atmosphere. Immediatement apres I'entree des gaz dans la machine, le tiroir les y emprisonne en continuant son mouvement, qui laisse entrer la vapeur. Les forces combinees des gaz et de la vapeur, qui se dilatent dans la capacite annulaire, repoussentla cloison en sens contraire , en agissant par detente , jusqu'a l'autre limite de I'oscillation , etainsi de suite. « Comparaison avec les machines dvapmr. — Dans I'application aux bateaux I'appareil se composerait de quatre chaudieres contenant chacune une machine oscillante respiratoire. Une machine de mille chevaux , cvaluee a raison de 35 ki- logrammes de vapeur utilisee, par heure et par cheval, coule aujourd'hui a la marine 1 400 000 francs; elle depense par heure 35 000 kilogrammes de vapeur el 5000 kilogrammes de houille. Elle pese 630 tonneaux avec I'eau dans la chaudiere , plus de 960 tonneaux de houille , pour un approvisionnement de huit jours. Enfin , elle occupe , comme la machine du Napoleon, 28", 6 de longueur au milieu du bateau, dont la longueur totale est de 71"", 23. « Suivant notre systfeme , une machine de mille chevaux couterait 500 000 fr., depenserait deux fois moins de houille , et elle occuperait deux fois moins de place. » DE L'lMPr.lMEUlE DE CH. LAnURE ( ANCIENNE MAISON CRAPELET), rue de Vaugirard, 9, prfes de I'Odeon. COSMOS. 557 NOUYELLES DE LA SEMAINE. M. Constant Prevost re?ut de rAcademie, en 1831, la mission d'aller ^tudier, sous le rapport geologique, lanouvelle ile qui venait de sur-nr dans la Mediterranee, entre ies cotes de Sidle et celles d'Afrique. Dans ses savantes recherches, M. C. Prevost ne se borna pas aux nhe- nomenes qui precederent et accompagnferent I'apparition de I'ile; mais s'aidant des documents qu'il avail pu recueillir dans I'etude de I'Etna des lies Lipari, du Vesuve, des Champs phlegreens, des lies du golfe de Naples, etc., etc., il chercha a demontrer Ies lois des nombreux phenomenes que presentent Ies eruptions volcaniques. Le resultatdu voyage deM. C. Prevost interessa vivement I'Academie elle I'autorisa a en faire la publication dans ses recueils ; mais, dans I'intention de rendre son travail plus digne de lasavante societe quilui avail fait I'honneur delui confier cette mission, il a attendu, voulant le completer par de nouvelles eludes et de nouvelles observations. Cette nouvelle eruption de I'Etna est sans doute une occasion bien favorable pour cela; aussi, M. C. Prevost, dans I'interet dela science, rappelle a I'Academie ses anciens travaux, et la prle avec instance de vouloir bien lui confier une mission analogue a celle de 1831. Si I'Academie daigne accueillir favorablement sa demande, JVI. C. Pre- vost se propose d'aller directement a Catane, oii il esp^re trouver Ies moyens et Ies conseils necessaires pour arriver a observer toutes Ies particularites de la nouvelle eruption de I'Etna; puis, il verrait rapide- ment la serie des formations volcaniques depuis I'Etna jusqu'au cap Passaro, s'arreterait quelque temps aux environs de Palerme ; et re- viendrait a Naples pour soumettre a de nouvelles epreuves ses impres- sions d'il y a vingt ans sur le Vesuve, Pouzzole et le Monte-Nuovo; en- fin, il etudierait avec soin Ies environs de Rome dans leurs rapports avec sa mission. Cette excursion geologique dureraitenviron quatre mois. Nous avons la presque certitude que I'Academie voudra bien accueil- lir favorablement la demande de M. C. Prevost, qui se trouve plac^ dans des circonstances a rendre de tres-grands services a la science, en Jeter du jour sur Ies problemesrelatifs aux phenomenes particuliers des irruptions. U pourra contribuer grandement aux progres de I'histoire positive de la terre en eclairant Ies difl'erents modes d'epanchement des laves en rapport avecleur nature, leur densite, etc., etc.; Ies effets des eruptions qui peuvent avoir lieu sous Ies eaux, leur difference d'avec celles qui ontheu dans I'air; Ies conditions et consequences des projec- 10 OCTOBRE 1852. 24 «58 COSMOS. tions de cendre, de fragments, de gaz; lois du refroidissement des pro- duits volcaniques, leur conductibilile variable, leur action physique et cliimique sur les corps avec lesquels ces diversesmatieres sont en rap- port, etc., etc. — Lapossibilite d'etablir un telegraphe sous-marin qui mcttraitl An- "leterre, et, en definitive, I'Europe en communication avec I'Amerique, est une question qui merite d'etre meditee; et bien que nous vivions dans un siecle ou les mots difficulte, impossibilite, doivent etre expul- ses du vocabulaire de I'ingenieur, la traversee de I'Atlantique, c'est-a- dire une distance de 3000 niilles a franchir est un obstacle des plus formidables. Les seuls points de terre ou de roche dont on pourrait se servir pour rattacher les fils, sont les Trois Cheminees vers 30" de longi- tude 0., et Jacket-Island 40«, d'ou le fil se dirigerait sur Saint-Jean de Terre-Neuve, longitude environ 55«, traversant ainsi de longs espaces de mer de diverses profondeurs et pleins de difficultes auxquelles on ne sait comment se soustraire. Dans quelques parties de I'Atlantique, la sonde est descendue jusqu'^ 5 milles sans toucher le fond ; ailleurs, la profon- deur des vallees de la mer varie d'un demi-mille a deux milles ; et beau- coup des endroits les moins profonds renferment des roches aigues qui, par Taction violente de la mer, useraient et couperaient en pen de temps une corde metallique, quelque forte, quelque bien recouverte qu'elle fut. Des masses gigantesques d'herbes marines, d'une epaisseur in- connue, couvrent le fond de la mer et s'etendent sur des milliers de metres carres, d'ou la corde , une fois engagee ou brisee , ne pourrait etre i-etiree. « En presence de ces fails, il parait done necessan-e, si une commu- nication telegraphique doit etre etablie entre les deux pays, de cher- cher une route qui presente plus de terre ferme et moins d'obslacles. Deux jeunes ingenieurs, MM. Harrisson freres, semblent avoir heureu- sement resolu le probleme. lis proposent de partir du point le plus septentrional de l'Ec<)sse, de passer aux iles Orcades, Shetland, Feroe, puis a I'ouest vers I'Islande et la cote orientale du Groenland, puis a travers la peninsule, vers le detroit de Davis, pres dn cercle arctique, et le cap Valsingham. La derni^re ligne sous-marine traverserait la bale d'Hudson dans le haut Canada; et les fils se dirigeraient sur Quebec, d'oii ils communiqueraient avec tout le continent de I'Amerique. Par ces dispositions, toute la Hgne sous-marine n'excederait probablement pas 2500 milles en parties detachees, dont la plus longue, des iles Feroe en Islande , ne depasserait gu^re 500 milles , ce qui augmente immen- s^ment les chances de succ^s. De plus le lit de la mer du Nord est fa- vorable a ce projet. En effet, h des profondeurs qui varient de 160 h COSMOS. 559 200 brasses, il consiste en lits de pierre, de sable, ondule en niontagnes ou en vallees, ou jamais on ne jette I'ancre, et ou par consoquent les ills seraient parfaitement en surete, tandis qu'ils accompliraient leur rapide etmysterieuse mission. La longueur de la ligne de terre excede- rait de beaucoup celle de mer; mais, comme elle ne presents aucun empechement, qu'eile soit pos^e sur des poteaux ou qu'elle soit sou- terraiiie, la seule difficulte sera I'immense quantite de fils a y consa- crer, et par consequent la depense. Par la construction de cette ligne, une communication instantanee envelopperait la terre ; passant a I'ouest a travers les possessions russo-americaines, on arriverait au detroit de Behring, qui, traverse par une ligne sous-marine a I'endroit le plus etroit, par exemple 230 milles, prfes du cap du Prince de Galles, nous conduirait sur la cote de Russie en Asie, et, passant par la Siberie, eta- blirait une ceinture electrique entourant le globe, et qui pourrait faci- lement etablir les communications entre les principales places de I'Europe, de TAsie et de I'Amerique. Des Etats-Unis, par I'isthme de Panama, on obliendrait lesmemes resultats a I'egard de I'Amerique du Sud. C'est assez en dire surce projet, auquel nous savons que le gou- vernement danois s'est montre favorable, ce gouvernement etant deter- mine a proteger la ligne qui traverserait son territoire. Nous ne dou- tons pas que la science perseverante ne parvienne a I'executer avec succes (Athenaeum Francais). — M. Barral a continue ses rechercbes sur la composition des eaux de pluie recueillies a I'Observatoire de Paris. li avait ete arrete jusqu'ici par une grave difficulte qui sera bientot levee. II n'avait a sa disposi- tion que des vases en verre ; or, les eaux qu'il devait distiller exergaient sur ces vases une action dissolvante et corrosive qui troublait les resul- tats de ses analyses en y introduisant des elements nouveaux et etran- gers. Ainsi , par exemple , la distillation de 4 litres d'eau de pluie, re- passant dans la meme cornue de maniere a etre evaporee et condensee sept fois de suite , fmit par enlever au verre plus de deux grannnes de chaux , 1 gramme de silice et 5 decigrammes de potasse et de soude. Bientot, grace a la genereuse intervention de TAcademie, les eaux que M. Barral aura analysees n'auront louche que du platine dans les udometres oil elles tomberont, dans les vases oil elles seiont recueil- lies, dans les entonnoirs oii elles seront fdtrees et dans les cornues oii elles seront distiliees ; il pourra determiner alors avec certitude I'exis- tence et les proportions des bases fixes contenues dans les eaux nieteo- riques : jusque-Ia il se borne au dosage de I'azote et du chlore. II resulte de cette troisieme serie de ses rechercbes : 1° que pendant une annee, comptee du 1" juillet 1851 au 30 juin 1852, il est tombe a 660 COSMOS. Paris une quantite d'azote combinee egale a 22^,5 par hectare, savoir : 12*^ 5 d'azote a I'etat d'acide azolique, et 10 kilogrammes d'azote a I'etat d'ammoniaque ; 2" que la ([uantite d'ammoniaque, tombee pendant cet espace de temps , s'est elevee a 13S8 par hectare ; 3° que la quantity d'acide azotique reel , qui s'est trouvee en meme temps dans les eaux de pluie, monte a 46S3 par hectare ; 4° que la quantite d'ammoniaque a diniinue dans les mois ou la quantite d'acide azotique a augmente ; 6° que la quantite d'acide azotique s'accroit des que le temps devient orageux ; 6° que, durant les mois de fevrier, mars, avril et juin seule- ment, la' quantite d'azote a I'etat d'acide azotique s'est trouvee etre un peu plus petite que la quantite d'azote a I'etat d'ammoniaque ; 7° que la quantite de chlore tombee s'est elevee a 11 kilogrammes, representant 18*= 1 de sel marin par hectare; 8° que les matieres en suspension dans les eaux de pluie et non solubles contenaient , pour les six premiers mois de I'annee 1852, de I'azote s'elevant a un kilogramme par hec- tare. M. Barral , parfaitement seconde par un preparateur zele et habile, M. de Luca' a rencontre enfm une methode analytique qui lui per- mettra de mettre en evidence les plus petites quantites d'iode conte- nues dans I'eau de pluie ; il pourra done desormais controler, c'est-a- dire verifier ou rectifier les resultats obtenus par MM. Chatin et Marchand. Nous lui signalerons, a cette occasion, un fait qui n'est pas sans importance. Un chimiste anglais, M. Stevenson Macadam, avait pense que M. Chatin etait dans I'erreur, et quel'iode, qu'il croyait avoir mis en evidence dans I'air, provenait reellement de la potasse doflt il se servait dans ses analyses. Ce soupgon determina M. Maca- dam a soumettre a I'analyse un grand nombre d'echantillons de po- tasse, et il constata en etfet qu'ils contenaient tous de I'iode. Dans tons les cas , I'iode de I'air ne lui est pas essentiel , il provient certai- nement des' eaux de I'Ocean que les vents emportent, soit a I'etat de vapeur, soit meme a I'etat de molecules tres-divisees. — M. Porro a presente a 1' Academic des sciences un instrument i nouveau appele par lui polyoptometre , et qui , comme son nom rin-| dique se prete a un tres-grand nombre d'observations de precision en oplique Avec cet instrument , M. Porro a deja pu constater que les raies transversalcs , les raies longitudinales et un fil tendu sur la fente du porte-lumiere donnent dans la lunette trois foyers ditferents, et tels que les deux premiers ont leur foyer conjugue en dehors de I'appareil. 11 en conclut que les raies longitudinales de M. Zantedeschi n'ont pas uniquement pour cause, ainsi qu'on a paru le cioire, les corps etran- gers d'une grande tenuite qui pourraient se trouver accidentellement COSMOS. 561 sur le porte-lumi^re. Ceci ne nous apprenJ rien de nouveau ; car il est constate depuis longtemps qu'en outre des poussieres qui pourraient se rencontrer sur les bords de la fente qui donne passage au i-ayon lumineux , qu'en outre des imperfections , asperites , rayures , la- ches, etc., du miroir du porte-lumiere, de la lentille objective ou des oculaires , etc., Ic champ de I'illumination ou la portion de I'espace qui envoie ses rayons a la lunette et eclaire I'objectif pent produire par ses differences de lumifere et d'ombre des raies longitudinales parfaitement observees par M. Keller de Francfort, etque Ton retrouve avec le len- tiprisme de M. Matthiessen toutes les fois qu'un nuage passait dans le champ de la vision. Mais toutes ces raies longitudinales sont evi- demment accidentelles ; elles ne sont en aucune maniere ni une qua- lite propre de la lumiere, comme les raies de Fraunhofer, ni le resul- tat d'une modification intrinseque subie par la lumiere ; elles dispa- raissent toutes par une operation mecanique qui n'exerce aucune action intime sur le rayon lumineux, nettoyage, poll plus parfait, mou- vement du miroir reflecteur, rotation de I'objectif, changement du champ de la vision, etc., etc. Elles n'ont done pas toute la portee que M. Zantedeschi attribuait a ses raies longitudinales. Cette conclusion serait vraie alors meme que les raies dont nous avons le premier en- trevu la possibility, que M. Babinet a signalees a I'lnstitut, et qui auraient leur origine dans un effet analogue a celui qui se produit dans le scintillometrede M. Arago, existeraient reellement, comme une nouvelle experience de M. Porro semble le prouver. Ces dernieres raies longitudinales resultant de la dispersion par le prisma des cercles ou anneaux brillants et obscurs qui se forment sur I'axe d'une lunette dont I'objectif est convenablement diaphragme, quand on s'eloigne dans un sens ou dans I'autre du foyer, ne constitueraient pas encore une decouverle du meme ordre que celle de Wollaston ou de Fraunhofer. II n'en est pas moins certain que M. I'abbe Zantedeschi a fait des ob- servations tres-curieuses, et qu'il a rendu a la science de I'optique un veritable et important service, en appelant I'attention sur des pheno- menes qui jusqu'^ lui avaient passe presque inaper^us, et dont nous pos- sedons maintenant la theorie. Dans les innombrables experiences que nous avons faites, nous avons souvent vu, il est vrai, des raies longitudinales, niais toujours de la premiere et de la seconde espece, c'est-k-dire dues aux imperfec- tions de I'appareil, ou aux lignes d'ombre et de lumiere du champ illuminateur. II nous tarde de voir celles de la troisieme espece, pro- pre des interferences du scintillometre. M. Ragona-Scina avail affirme aussi qu'en pla?ant une lentille au-dcvant de la fente, sans prisnie dis- 502 COSMOS. perseur, on trouvait toujours derriere la lentillc une distance telle, que I'image de la fente, le^ue a cette distance sur un ocran, se mon- trat sillonnee de raies longitudinales. Nous avons en vain clierche ces raies : M. Duboscq, MM. Govi et moi; M. Keller, de Franctbrt, et M. Merz, de Munich, n'ont pas ete plus heureux ; leur existence est done plus que problemalique. Ellcs auraient eu pour cause, suivant M. Ragona-Scina, les interferences resultant de celte circonstance que salenttlle, d'unmfetre de foyer, reduit, dansla proportion d'environ 1 a3, la largeur du spectre produit par le prisme, de telle sorte que I'image du spectre condensee par la lentille serait reellement la superposition de trois images distinctes. Cette superposition, mise en evidence par I'experience avec le prisme, subsisterait encore pour I'image de la fente produite sans prisme ; et les rayons superposes produiraient, par leurs interferences, h des distances determinees, des raies longitudi- nales qui ne seraient pas non pluscelles de M. Zantedeschi, qui a tou- jours opere avec des prismes , mais qui seraient encore analogues h celles du scintillometre. Nous avouons que les raisonnemenls et les observations de M. Ragona-Scina sont pour nous un mystere impene- lr£Ll}l6* — M. Relli avait affirme que I'electricite negative ou resineuse se perdait plus promptement que I'electricite positive ou vitree. Ses expe- riences avaient ete faites avec une bouteille de Leyde que M. Belli de- chargeait par un excitateur. M. Zantedeschi, au contraire, a trouve qu'e^tlu moins quand on opere avec des electrophores, I'electricite positive se perd beaucoup plus vite que I'electricite negative. Deux electrophores charges positivement n'ont pas conserv6 leur charge au dela d'un mois : les memos electrophores charges negative- ment donnaient encore, aprfes huit mois, des signes tres-manifestes d'electricite. D'ou M. Zantedeschi concluait, pour la pratique, que tou- tes les fois qu'on veut que des electrophores ou des condensateurs conservent longtemps leur charge, il faut les charger negativement. S'il etait vrai , en general et en soi, comme nous le croyons jus- qu'a preuve certaine du contraire, que Tune des electricites se perd plus vite que I'autre, la verite serait du cote de I'assertion de M. I'abbe Zantedeschi. ^ — M. Fabre-Massias met en evidence, par un assez grand nombre d' observations etde rapprochements, une correlation certaine entre les grandes emissions de vent d'Afrique, siroco, et les inondations du Rhin, du Rhone, de la Loire, etc. Le 17 octobre 1846, a Philippeville, le siroco soufQail avec une violence extraordinaire ; deux jours apres d'eifroyables inondations desolaient les vallees dont I'origine est aux Alpes et aux COSMOS. 563 Cevennes. Le 18 sepiembre dernier, dans le vent qui soufflait du sud si chaud et si humide, M. Massias retrouva les caracleres du siroco et ii annonga aux personnes qui I'entouraient des inondations pro- chaines : « L'evenement, dit-il, a trop donne raison a cette prediction. » Nous avions eu la menie pensee, et dans un petit article qui faisait suite aux quelques lignes par lesquelles nous annoncions le fait principal d'une elevation de temperature vraiment extraordinaire ( 22' livraison du Cosmos, page 500), nous voulions montrer quelle heureuse confir- iiaation apportait a la theorie de la pluie de M. Babinet, cette coinci- dence des inondations du Rhin et du Doubs, avec I'apparition d'un vent sud, a une temperature tres-elevee, et sature de vapeurs. Mais nous fumes arretes par la discordance des dates. Les inondations avaient commence le 15 ou le 16 et le siroco n'avait souffle a Paris que le 18, de huit a dix heures du matin; nous supprimames en conse- quence noire rapprochement. M. Fabre-Massias a ete plus hardi, non sans raison peut-etre, car un meme vent sud pent atteindre a desinter- valles de temps tres-inegaux des contrees situees sur un meme paral- lele. II serait vraiment a regretter que le moment precis du change- ment brusque de temperature, survenu le 18 septembre, n'eut pasete note exactement dans des lieux suffisamment distants, de telle sorte qu'on put determiner approximativement au moins, la vitesse de pro- pagation du siroco qui le causa. M. Babinet affirme que le changeraent se produisit des huit heures du matin ; or a Londres, il fit assez froid toute la matinee et jusqu'a midi, pour qu'un correspondant du Gar- den's Chronicle, M. Bree, conservat du feu dans son cabinet : une pluie fine et froide tomba toute I'apres-midi, etce fut seulement a six heures et demie du soir, comme il sortait de chez lui, que M. Bree fut frappe de I'extreme chaleur de I'atmosphere qui etait celle dune serre. Dans son cabinet chauffe, un thermometre place sur la table marquait 14%44 centig. II porta le thermometre dehors, et il indiqua rapide- ment 21°, 11 ; cet exces de chaleur se maintenait encore a onze heures dusoir. La variation de temperature fut en vingt-quatre heures deplus de vingt degres. Le vent soufflait deja evidemment quand M. Bree s'a- pergut de la chaleur excessive ; nous n'avons done pas encore I'instant precis de la presence du siroco a Londres. STANCE DE L'ACADfiMIE DES SCIENCES. (4 octobre 1852.) M. Desprelz continue toiijours, avec un zele et une activite vraiment admi rabies I'examen des phenomenes qui accompagneiU et manifestent la production 564 COSMOS. des courants electriques. Dans une dixi^me communicatioa sur ce sujet, il fait connaitre aujourd'hui ses recherches sur !es lois de deviation de I'aiguille aimainlee dans la boussole rheometrique appel6e boussole des langentes. Aprte avoir expose Ihistorique de son sujet, le savant professeur indique les conditions dans lesquelles il s'est plac6 afin d'6viter toute chance d'erreur dans revalua- tion des angles donnas par son instrument. Sa boussole, construite par M. Rum- korff, avec I'habilete que tout le monde lui connait, se compose principalement d'une aiijuille aimantee placee au centre d'un cercle destine a recevoir le cou- rant. Le diametre du cercle dans lequel passe le courant est de 444 mm. et le diatnetre du cercle divis6 est de 180 mm. Le cercle du courant et le cercle divi^e, ppuvent se mouvoir independamment I'un de I'autre, autour d'un axe verlii al pas.^ant par leur centre commun, qui est en meme temps le sommet du pivot sur lequel tourne I'aiguille aimantee. Cette derniere porte perpendiculaire- ment a su longueur une aiguille horizontale , en argent, exactement centr6e, qui pennet de lire facilement la deviation de I'aiguille aimantee. La bande de cuivre rouge qui forme le cercle du courant se replie suivant I'axe vertical, les deux extreiiiites plongent dans des godets rectangulaires en verre, et elles ne sont s^paiees I'une de I'autre que par I'epaisseur du ruban de sole qui les recouvre, ^i ce n'est dans la partie qui penetre dans le mercure ou elles sont ecarlee> de I'epaisseur des parois des deux memes godets qui les resolvent. La distance entre le bord inferieur du cercle et la surface du mercure, est de 2 de- cimetres; on ne saurait la rendre trop grande. Le cercle horizontal destine a accuser la deviation de I'aiguille est divise en sixiemes de degre : comme on estiiiie facdemenl a I'aide d'une loupe des cinquiemes de division, les erreurs de lecture ne doivent pas depasser deux minutes. Voici maintenant de quelle maniere M. Despretz precede dans ses experiences. L'aiguille aimantee et I'aiguille d'argent etant plac^es perpendiculairement I'une a i'autre, on fait tourner le cercle divise autour de I'axe qui le porte, jus- qu'a ce qii>^ la ligne z^ro soit a peu prfes normale au cercle du courant. On fixe le cercle divis6, au moyen d'une vis de pression, en sorte qu'il ne puisse plus se deplficer qu'avec le cercle du courant, et Ton fait mouvoir celui-ci de maniere a nimener le z^ro vis-a-vis I'index. On fait passer le courant dans I'instrument et Ton note les deviations a droite et a gauche ; si ces deviations sont egales, I'instrument est regie; dans le cas contraire, qui est le cas general, on imprime un leger deplacement au cercle divise, deplacement dont la grandeur et le sens sont donne^ par la difference des deux deviations observees; on ramene de nou- veau I'index a zero, en deplacant le cercle du courant, puis on recommence a noter les deviations, et Ton continue, jusqu'a ce que les deviations soient egales a droite et a gauche. Lorsqtie, pour savoir si la boussole est bien regiee, on observe les deviations a droite et a gauche produites par le meme courant, il est indispensable que ce courant soit assez energique pour donner des deviations d'une amplitude au moins e;:ale k celle des plus grandes deviations qu'ont veut atteindre dans les experie:ices. Il est, en effet, aise de reconnaitre qu'un defaut d'orientation capable d'al COSMOS. 565 t^rer notablement les deviations de 50 et de 60 degree, se fait a peine senlir sur une deviation de 10 degr^s. Quand la boussole etait ainsi reglee, M. Despretz commengait I'etude des courants qu'il voulait comparer, et ii avait recoups au proc^de de la derivation pour affaiblir un courant dans une proportion donnee. Les fils qui lui servaient pour obtenir les courants derives avaient 6te pr^alable- ment, de sa part, le sujet d'une etude speciale ; il voulait etre bien sur que la di- minution de I'intensite par leur interposition serait celle que le besoin de I'ex- p^rience exigeait. La formule qui a servi a M. Despretz , pour le calcul de ses resultats et qu'il trouve elre d'accord avec I'exp^rience, n'est point la formule ordinaire I = T tang 8, dans laquelle T est I'intensite du magnetisme terrestre; 15a^ mais bien la formule plus complexe I =: (1 -|- 3 a*) tang 9 — - sin 20 que o donne le calcul fond^ sur la theorie d' Ampere. Dans cette formule, I etant I'inten- site du courant, a est le rapport entre la demi-distance des p61es de Taiguille et le rayon du cercle du courant, 0 la deviation observ^e de I'aiguille. Void main- tenant les resultats auxquels M. Despretz est parvenu en employant tous les soins possibles pour ecarter les causes d'erreurs. II a vu, premierement, que les tangentes des deviations ne sont point proportionnelles aux intensites des cou- rants, meme dans les boussoles ou le cercle du courant a pres d'un demi-metre de diam^tre, et I'aiguille seulement une longueur de Q'",Qi. Ceci obligera dor^- navant les physiciens a se servir de la formule complete qui represente assez bien les resultats , au lieu de la formule plus simple qui n'a pas d'exaclitude dans les fortes deviations de I'aiguille. On peut neanmoins employer encore la formule simple, pourvu que Ton calcule un coefficient pour chaque appareil qui mette cette meme formule d'accord avec rexp^rience. Le moyen le plus stir de ne pas se tromper dans revaluation des intensites des courants consiste a employer des cercles de courants qui aient a peu pres 1 metre de diameire, et des aiguilles de 3 centimetres, au moins, de longueur. Dans ce cas la formule ordinaire represente assez bien les intensites observees. Si Ton remplace la lame des grands cercles par quatre gros fils enveloppes de sole, de 5 a 8 millimetres de diametre, on obtient une boussole bien plus sensible, qui devient ainsi un veritable rheometre proportionnel. La diminution du diametre des fils jusqu'a 3 ou 4 millimetres et I'augmentation du nombre des tours jusqu'a 20 pout trans- former la boussole en un rheoscope differentiel d'une sensibilite sufiisante pour le plus grand nombre des experiences. — M. Sire, preparateur de physique a la faculte de Besantjon, qui avait songe, en meme temps que M. Foucault, a utiliser la fixite du plan de rotation d'un corps dans I'etude du mouvement diurne du globe, vient de faire connailre les dispositions qu'il avait adoptees pour ces experiences. Le pendule ctait rem- place par une roue massive en metal , parfaitement equilibree , qui pouvait tourner autour de deux axes rectangulaires : I'un de ces axes, celui qui se trouvait dans le plan de rotation dela roue devait etre place suivant la verticale du lieu. Un meridien artificiel en bois, sur lequel la roue pouvait etre fixee a diverges distances des p6les , permettait de reconnaitre I'influence de la latitude sur les mouvements de I'appareil. II aurait ete facile de voir ainsi que, la roue etant a requateur, son plan de rotation ne pouvait pas rester dans un plan meri- 566 COSMOS. dien , et qu'apr^s otre venue se placer dans le plan meme de I'^qualeur, elle devait tourner dans le meme sens que la terre. Jamais les axes ne devaient 6tre simullanenient dans le plan de rotation de la terre, I'axe horizontal se serait place toujours dans un plan meridien, tandis que le plan de rotation de la roue aurait ele constamnient sur la surface conique engendr6e pai- la revo- lution do la verticale. Mallieureusement, ces bonnes intentions de M. Sire, qu'il fait connaitre un peu trop tard , n'ont jamais pu etre completement r6a- lis^es par ses appareils, qui tournaient, comme il I'avouelui-m^me, tantdt dans un sens, tantdt dans le sens oppose; ce qui expliquerait suffisamment le silence dans lequel M. Sire se serait renferm^ avant I'annonce des brillants rdsultats de M. Foucault. — M. de Gasparis a d^couvert une nouvelle planete , le 19 septembre dernier, a 9 beures 50 minutes t. m. de Naples. Elle se pr^sente comme une 6toile de neuvieme grandeur. Ses positions, determinees par M. de Gasparis, etaient les suivantes : -1802. — Septembre, 19, a 10'' 20™ 24* t. m. de Naples, AR. appar. 0^ 42"' ■10%73 , D + 1" 53' 0",6. Id. 20, a 7'' 50" 22" t. m. de Naples, AR. appar. O'' 11-" 22^62, D + r 47' 16", 8. M. Aragoa fait remarquer que cette nouvelle planete et Massilia, de M. Cha- cornac, devaient etre le meme astre ; mais que M. Chacornac I'ayant d6couvert seulement le 20 , la priorite semblait acquise a I'astronome napolitain; que, toutefois, M. Chacornac s'etant apercu, en remontant dans ses registrcs, que sa planete n'etait qu'une ^toile deja observt^e par lui , le 9 , et qui n'existait plus a sa place, il y avait encore lieu de se demander si Tobservaleur francais ne devait pas avoir droit a la decouverte. S'il nous etait permis de formuler hum- blement notre pensee, nous dirions que malgre toutc I'envie que nous aurions de posseder une planete francaise , nous ne pourrions adopter la maniere de voir de I'illustre directeur de I'Observatoire de Paris, car d'apres son raisonne- ment, il serait facile de prouver que ce n'est pas Herschel qui a d<5couvert Uranus , que Neptune n'appartient pas a M. Leverrier ; et que, peut-6tre, beau- coup d'autres planetes devraient etre enlevees a leurs inventeurs , parce que des astronomes, qui faisaient des catalogues d'etoiles, avaient jadis enregistre ces planetes parmi les astres de telle ou telle heure , sans s'etre apercjus de leur mouvement de translation dans I'espace. — M. Ville, ex-pro fesseurde chimie agricolea I'lnstitut de Versailles, vient de terminer de grandes recherches sur le r6le que joue I'azote de I'atmosphere dans la vegetation des plantes. Comme nous avons I'intention derevenirsur ce travail, nous n'en donnerons aujourd'hui que les conclusions : 1° la quantite d'ammonia- que contenue dans I'air est en moyenne de 22s',41, par million de kilogrammes d'air; le maximum et le minimum elant de 29s',48 et Hs^li. 2°L'azote de I'air est absorbe par les plantes et sert a leur nutrition ; el les cereales ne font point exception sous ce rapport. — La pyroxyline, ou le coton-poudre, apres avoir ete pendant quelque temps le grand evenementde I'epoque, a ete completement ou presque completement ou- bliee, etce n'est qu'a la decouverte du collodion eta son application a la photogra- phie que la pyroxyline doit un renouvellement de vitalite. Mais M. Bechampn'a- COSMOS. 667 vait pas oublie le ooton-poudre, tandis que toutle'.monde chimique I'abandonnait ; et ses recherches relatives a ce curieux produit de Taction de I'acide nilrique sur la matiere ligneuse, meritent de trouver place dans notre journal, aussi bien par leur int^rSt comme 6tude de chimie, que sous le point de vue des applications que Ton peut en faire a I'artdu photographe. Nous allons done passer en revue rapidement lesprincipalesconclusionsdutravailde M.Bechamp. Et premi6rementnousappel- lerons I'attention sur un fait qui peut faciliter beaucoup la preparation dubonco- ton-poudredoue d'unesolubilite complete dans I'^lheralcoolise. M. Bechampavu que le coton fulminant devenait soluble toutes les fois que Ton permetlait a la bouillie de nitre et d'acide sulfurlquede prendre une temperature superieure a celle du milieu ambiant, tandis qu'en refroidissantle melange, le coton fulminant qu'oa en obtenait t^tait insoluble. Le coton-poudre insoluble, plonge dans de la bouillie nitro-sulfurique chaude, peut acqu^rir la faculte de se dissoudre dans I'ether al- coolise. Ea faisant passer, pendant une demi-heure au moins, un courantde gaz ammoniac dans une dissolution de 2 parties de pyroxyline, 80 parties d'ether et 30 parties d'alcool a 86", on trouve que la dissolution vii^queuse se fluidifie com- pletement. Le gaz sulfhydrique determine dans cette dissolution ammoniacale la formation d'un prccipit^ jaune, insoluble dans I'alcool a 90". jCe precipite est complexe ; il contient une partie soluble et une partie insoluble dans I'eau. D'a- pr6s quelques reactions, M. Bechamp a cru y reconnaitre un compose sulfure. — La dissolution ammoniacale, versee tout a coup dans 16 a 20 fois son volume d'eau, donne un precipite d'une poudre blanche parfaitement insoluble dans I'eau ; un sejour de 48 heures dans ce liquide ne I'allere pas. Voici ses proprie- tes : dessecliee a 20" dans une cloche sur I'acide sulfurique, puis a 100", elle se conserve tres-bien. Elle est peu dense, sans odeur et sans saveur. Elle est elec- trique par frottement. Cliauffee dans un tube, elle fulmine plus tard que la py- roxyline, repand des vapours nitreuses et laisse un residu de charbon. Chauffee avec de I'acide clilorhydrique fumant, elle se dissout peu a peu et degage du chlore en abondance. L'acide sulfurique concentre la dissout sanstlegagement apparent de gaz. Le melange sulfurico-nitrique ne parait pas I'alterer; toutefois, Ton ne s'est pas encore assure si la pyroxyline etait ou non regeneree. L'eau dans laquelle la precipitation alien, contient du nitrate d'ammoniaque, mais tres- peu de matiere organique. Ce fait est digne d'attention. L'analyse elemenlaire montre, en eifet, que la nouvelle combinaison ne differe de la pyroxyline que par un equivalent d'acide nitrique en moins. Cette nouvelle substance est de compo- sition constante. Le produit, recueilli tout de suite apres la precipitation, ou aprte un contact de 48 heures avec Teau, ne differe pas sensiblement. Sa compoiitioa est representee par les quantit^s suivantes : Carbone 28,216 ; hydrogene 3,575 ; azote 10,777 ; oxygene 57,432. La matiere avait ete dessechee a 100". En tenant compte de la formation du nitrate d'ammoniaque et de la formule de la pyroxiline donn^epar M. Pelouze, on aurait : C"H" 0", o.Aj:0'' + A:.H' + HO = AzO^ A:H^O + C"n"0", 4 A^O^ D'apr^s cette formule, lacompositiondunouveau produitserait:carbone28,070; 568 COSMOS. hydrog^ne 3,315; azote 40,9^6; oxyg^ne 27,699. De 20" a 100", la substance perd 1,727 d'eau pour 100, ou 9,015 d'eau dans la quantitc de mati^re qu' ex- prime la formula C-' II" 0", 4 AzO", c'est-a-dire un Equivalent d'eau. La for- mule de la nouvelie substance a la temperature de 20° est done C^Ml'^O", 4AzOMIO; ou en divisant par 2, C'^H''0^ « AsO' ou C'^ H» (AzO'f 0" ; c'est-a-dire la formule du sucre de canne dans laquelle 2AzO* tiennent lieu de 2H. — M. Eugene Robert, sortant de Paris le 29 septembre a 9 heures du soir, par le cheniin de fer de I'Ouest, vit au nord-ouest un grand arc lumineux, qu'au pre- mier abord on aurait pu prendre pour un arc-en-ciel imparfait. L'arc, nettement dessine et d'une teinte jaunatre, renfermait un espace d'une lumi^re assez vive, quefaisaientsurtout ressortir, par-ci par-la, despetitsnuagesnoirtitres du c6t6 de I'observateur. Ces nuages parurent a M. Robert devoir Etre de m^me couleurque l'arc du c6te oppose. Le ciel, en dehors de l'arc et immediatement apres, avail une teinte uniforme d'un gris noiratre. Dix minutes a peine apr^s qu'il eut not6 ces parlicularites atmospheriques, qui ont semblE a M. Robert appartenir a une aurore boreale , l'arc avait disparu, et il ne resta plus dans la m^me region du ciel qu'une lueur blafarde. PHOTOGRAPHIE. If Nous conjurons MM. les photographes de prendre encore patience pendant quelques jours. Nous n'aurions pu leur donner aujourd'hui que des renseignements vagues et incomplets ; mais la prochaine livrai- son du Cosmos contiendra un tres-long article de photographic plein de fails nouveaux et du plus grand interet. Nous avons d'excellentes nouvelles a leur apprendre. L'horizon s'etend de plus en plus, et de brillants perfectionnements assurent a leur bel art un avenir que rien ne faisait encore soupgonner. Notre annonce du nouveau proced^ de photographic instantanee renferme plusieurs indications inexactes. L'inventeur n'est pas M. Boecht, mais M. Bertsch, employe de la prefecture de la Seine • sa couche sensible est non pas Talbumine, mais un collodion nouveau que Ton pent se procurer chez M. Lahaye, rue de Lancry, Nous con- iiaissions depuis longtemps M. Bertsch, nous I'avons revu avec bon- heur, et nous transmettrons avec joie a nos lecteurs les renseigne- ments qu'il nous a promis. VINGT-DEDXIEME REUNION DE l' ASSOCIATION BRITANNIQUE POUR l'AVANCE- MENT DES SCIENCES. (Belfast, septembre 1852.) LuNDi , 6 SEPTEMBRE. Le coloncl Sabine lit une lettre du professeur Henry, de I'institut Smithsonien, sur le plan adopte pour une etude COSMOS. 569 complete de la meteorologie de TAmerique du nord. En outre des ob- servations ordinaires , le but principal qu'on veut atteindre par le nouveau plan d'ensemble, est una connaissance plus exacte des tem- petes ou ouragans, de leurs causes, de leur nature intime et de leurs eflFets. Le nombre desobservateurs quiontmisencommun leurs efforts est deja de deux cents ; chacun d'eux s'engage a noter avec le plus grand soin les changements apportes par la tempete aux moyennes du mois pour tous les elements m^teorologiques, pression atmospherique, tem- perature, humidite, vent, etc., etc. ; et a tracer sur une serie de cartes ou tableaux toutes les phases des mouvements de I'atmosphere, depuis le commencement de la perturbation atmospherique jusqu'a sa fin. Comme il s'agit beaucoup moins de faire des observations absolues que de constater des variations ou differences, il n'est pas rigoureusement necessaire que les appareils aient ete compares ou verifies minutieuse- ment. L'institut Smithsonien, comme nous I'avons deja dit, soUicite le concours de I'Association britannique, et par ce concours, des series d'observations faites simultanement en Angleterre, et dans les posses- sions britanniques. — Le colonel Sykes presente et discute les observations de tempe- rature moyenne et de quantites de pluies, faites, dans cent vingt-sept stations de la pr^sidence du Bengale, par des officiers du service me- dical de la marine. Le fait le plus saillant, mis en evidence par ces observations, est I'influence des circonstances locales, independam- ment de la latitude. Dans des lieux assez rapprocbes et situes sur un meme parallfele, la moyenne annuelle de la quantite de pluie tombee varie entre des hmites enormes, 30 pouces et 610 pouces.] — Le docteur Buist a voulu par quatre series d'observations simul- tanees comparer les quantites de pluie tombees a Bombay a differentes hauteurs comprises entre 0 et 200 pieds. Mais il n'est arrive a aucun resultat definitif, parce que les mesures prises aux diverses hauteurs, ne presentaient rien d'uniforme. Quelquefois le pluviom^tre superieur recevait plus d'eau : quelquefois il recevait moins d'eau que le pluvio- mfetre inferieur ; souvent meme les recepteurs places k la m^me hau- teur, contenaient des quantites inegales d'eau. II semble cependant r^sulter de la discussion a laquelle a donne lieu la communication de M. Buist, qu'il est certain que la quantite de pluie augmente d'abord quand le pluviometre s'eleve, atteint un maximum etdiminue ensuite. — Le docteur Buist dans une seconde note sur les fluctuations at- mospberiques , diurnes et annuelles, s'est propose de demontrer que I'opinion generalement admise, d'apres laquelle la course annuelle du barometre croitrait et ses fluctuations diurnes diminueraient amesure 570 COSMOS. qu'on s'eloigne de I'^quateur , est contredite par trop de faits particu- liers, pour qu'on puisse racceptercomme generalenient vraie. La lec- ture de cette note donne lieu a une discussion sur la temperature diurne moyenne, et la maniere de I'etablir. En chaque lieu les obser- vations, qui doivent servir k la determination de la temperature moyenne, doivent etre separees par un intervalle variable d'un lieu k I'autre, et qu'on appelle intervalle critique. Ainsi en Ecosse comme k Plymouth I'intervalle critique est de ll*" 15'; et des observations diurnes fiiites a des heures separees par cet intervalle, a 9'' avant midi et 8'' 15' apres midi ; a 8'' 45' avant midi et 8'' apres midi ; a S*" 30' avant midi et 7'' 45' apres midi, donnent avec une assez grande exactitude la temperature moyenne , laquelle cependant est affectee par diverses causes locales, tellesque la silhouette de Ihorizon et autres. — M.John Welsh communique lesresultatsgenerauxdes observations qu'il a faites dans ses deux ascensions en ballon. Les instruments em- portes dans les airs par les deux observateurs etaient : un barom^tre a siphon, systeme Gay-Lussac; deux paires de thermometres a boule seche et a boule humide ; Thygrometre apointderoseedeM. Regnault et de Daniel. On avait pris toutes les precautions connues, chemise en metal poli, ventilateur, etc., pour que les thermometres donnassent autant que possible la temperature exacte de I'air. On a fait plus de cent observations thermometriques et hygrometriques dans la pre- miere ascension, environ cent soixante dans la seconde; et voici les faits principaux qu'elles mettent en evidence ; 1° la tension de la va- peur diminue d'abord reguherement jusqu'a une certaine distance de la surface de la terre. A cette distance, elle diminue brusquement, et atteint presque d'un seal bond la plus petite valeur qu'elle doit acque- rir plus tard , dans le reste de I'ascension. La hauteur a laquelle cette reduction soudaine de la tension de la vapeur aqueuse a lieu, ne s'est pas montree la meme dans les deux excursions : le 17 aoiit elle fut de 5000 pieds, le 26 de 80OO pieds environ. 2" a la meme distance de la terre a laquelle se manifesle cette si grande reduction dans la tension de la vapeur, la diminution reguliere de la temperature, ou I'abaissement regulier du thermometre s'arrete pour quelque temps, et pendant un certain intervalle; ce qui montre que le deficit des va- peurs aqueuses est accompagne d'une elevation relative de tempe- rature. — Le reverend docteur Lloyd lit un memoire sur la meteorologie de rirlande; nous n'en extrairons que quclques resultats plus gene- raux. Les temperatures moyennes de chaque mois sont moins elevees dans I'interieur de I'ile que sur les cotes, mais la difference est moins COSMOS. 571 grande «n ete qu'«aa hiver. L'etendue des excursions diurnes et an- nuelles est au coiitraire plus grande dans linterieur que sur les cotes. La difference entre la temperature moyenne sur les cotes aux. stations extremes est de 3" 5', ce qui donne une diminution d'un degre pour 80 milles geographiques, dans la direction du sud au nord. La temperature moyenne annuelle diminue aussi dans la direction de Test a I'ouest, d'un degre pour 130 milles geographiques. Les angles que les lignes isothermiques forment avec le nieridien aux differentes saisons de I'annee, sont : priutemps, S. 63" E.; ete, N. 77" E. au- tomne, S. 27" E. ; hiver, S. 47" E. : la direction de ces lignes parcourt done dans le courant de I'annee un angle enorme de 80". Leur di- rection moyenne pour I'annee entiere est S. 57" E. ; leurs positioxis extremes correspondent a deux saisons consecutives, I'ete et I'au- tomne. Ces deplacements sont dus surtout a I'influence du Gulf- Stream, laquelle commence a se manifester au mois de septembre, et I'end I'hiver tres-doux en Irlande. Le maximum de la force elastique de la vapeur se retrouve, comme on devait s'y attendre, dans les stations du sud; le minimum dans les stations du nord : la tension moyenne de la vapeur pendant I'annee 1851 a ete egale a 314 milliemes d'un pouce de mercure ; les variations extremes dependant des circonstances lo- cales ont ete de 45 milliemes. On obtient la mesure de I'humidite en divisant Telasticite actuelle de la vapeur par le maximum de la force elastique correspondante a la meme temperature : I'humidite en Irlande est tres-grande ; la moyenne annuelle pour I'annee entiere est de 85 centiemes. Les stations les plus seches sont celles des cotes de Test; les plus humides, celles des cotes de I'ouest. Les differences entre les moyennes amiuelles des quantites de pluie tombee aux di- verses stations, situees presque toutes a quelques pieds au-dessus du niveau des mers, sont tres-considerables : la plus grande de ces moyennes est egale a plus de trois fois la plus petite. Les stations oil il tombe le moins de pluie sont celles de I'interieur ou des cotes est. Les stations ou il en tombe le plus sont celles des cotes ouest ou de leur voisinage. La quantite de pluie depend grandement du voisinage des chaines de montagnes ; elle est toujours tres-grande pres de ces chaines, a moins que la station ne soil situee au nord-est de la chaine. Le maximum de la quantite de pluie pour Dublin a lieu en octo- bre, sa valeur est 3,34 pouces anglais : le minimum a lieu en fevrier et il n'est que 1,74. On constate tres-souvent dans I'atmosphere I'exis- tence de mouvements cycloniques ou circulaires, en comparant les di- rections des vents pour un meme instant dans les differentes stations. Le mouvement rotatoire de I'air qui constitue ce que M. Lloyd appelle 572 COSMOS. une cyclone, n'existe pas seulement dans le cas de courants violcnts; il se manifeste meme pour les brises fraiches. L'illustre physicien ter- mine en montrant comment , par la combinaison des observations d'apres la methode des moindres carres, on peut determiner la direc- tion et la Vitesse du centre du tourbillon. — Le docteur J, Taylor a longtemps etudie les ouragans des regions tropicales. lis commencent entre 10 et 20 degres a partir de I'equa- teur; leur approche est signalee par un etat chaud, etouffant et calme de I'atmosph^re , accompagn^ d'une pression barometrique tres-basse. La violence du vent augmente a mesure que le centre de la zone sur laquelle s'etend Taction de I'ouragan s'approche. La direction du tour- billon dans rhemisphere nord est toujours en sens contraire du mou- vement de Taiguille sur un cadran de montre; dans I'hemisphere sud, au contraire, la direction du tourbillon est celle del'aiguille du cadran. La direction du mouvement rotatoire est done constamment la meme dans un meme hemisphere, et I'ouragan a pour cause le double mou- vement de rotation et de translation d'une certaine masse d'air. Le vide constate par la faible hauteur du baromfetre au commencement de I'ouragan n'est pas, suivant M. Taylor, I'effet de cet ouragan produit par la tendance centrifuge imprimee k la masse d'air par le tourbillon exterieur ; ce vide serait au contraire I'origine ou la cause du tourbil- lon et de I'ouragan. Par celamemeen effet que ce vide existe, I'airen- vironnant tend as'y pr^cipiter : si la terre etait immobile, I'air se pr6- cipiterait dans le vide en ligne droite, mais sous I'influence du mou- vement diurne de la terre , I'air arrive dans le vide anime d'un mouve- ment de rotation. L'auteur montre, par un calcul facile et en partant de I'etendue que les observations assignent aux masses d'air mises en jeu dans les ouragans, que la vitesse imprimee au vent par la double cause que nous venons d'assigner, la presence d'un vide et la rotation de la terre, est plus que suffisante pour expliquer les effets les plus violents dont I'histoire a conserve le souvenir. — MM. Wells et Rankine presentent les ensembles d'observations m^- t^orologiques faites pendant I'ann^e 1851 a Birmingham et a Huggate; ces observations comprennent la temperature , la pression atmosph^- rique, Thumidite, la quantite de pluie , les ondes atmospheriques, les vents, les aurores boreales et les etoiles filantes. — Mardi 7 septembre. M. E. du Bois Reymond decrit un nouvel efFet produit sur les muscles par le courant electrique. Lorsqu'un courant electrique traverse une portion de nerf, il y fait naitre par une sorte d'induction, un courant qui circule dans le nerf entier. Le meme phenomene se manifeste pour les muscles, COSMOS. 573 toutefois avec une difference essentielle. Quand le courant excitateur du nerf cesse, le courant induit cesse aussi ; le nerf sous ce rapport se comporte comme le fer doux qui n'est plus magnetique quand le cou- rant qui avait excite le magnetisme n'agit plus. Le muscle, au contraire, se comporte comme le fer trempe ou I'acier, et possede une certaine puissance coercitive ; et pour lui le courant induit persiste quelque temps apres que le courant excitateur a cesse. — M. Snow-Harris lit un rapport sur la redaction]|des observations anemometriques ; nous n'en connaissons pas les details. — M. le capitaine Johnson lit une note sur la maniere de placer les compas marins ou boussoles sur les navires en fer. Pendant que le vaisseau le Trident etait encore dans le bassin de Woolwich , M. John- son a cherche experimentalement s'il etait possible de trouver sur ce navire un point ou les influences des fers de construction seraient tel- lement equilibrees, que la deviation causeepar ces influences, devenue nulle ou presque nulle , put etre negligee. La veritable direction ma- gnetique de la proue du navire fut d'abord exactement determines au moyen d'une boussole placee sur le rivage; le compas etalon du navire indiquait unecartou deviation de20'* versl'ouest; M. Taylor le deplaga et le mit plus loin sur la ligne centrale du vaisseau , et constata que la deviation avait cru , elle etait de 29" ouest ; a mesure qu'il s'avanca de 6 en 6pieds, la deviation ouest diminua, et lors- qu'il eut place le trepied de la boussole sur la tete du gouvernail , la deviation devint est. II en resultait qu'on devait rencontrer entre les deux dernieres positions un point ou il n'y aurait plus de deviation et ou la boussole indiqueraitla veritable direction magnetique M. Taylor atteignit enfin ce point par une serie de deplacements d'un petit nom- bre de pouces. 11 restail a savoir si un changement de direction dans la proue du navire ne ferait pas renaitre I'influence perturbatrice et les deviations eliminees. Des que le vaisseau, sorti du bassin, put tourner sur lui- meme , M. Taylor fit cette derniere experience; il observa dans les huit directions principales de la rose des vents, et il constata avec joie que les indications de la boussole restaientexactes a un quart de degres pres. Les poutres du Trident , au-dessous du tillac , sont en bois ; qu'arriverait- il si le navire etait tout en fer? Le point de deviations compensees ou equilibrees ne changera-t-il pas avec la position geographique du na- vire? c'est ce que des observations ulterieures peuvent seules decider. II arrivera aussi souvent, sans doute , que ce meme point de deviation nulle sera inacceplable dans la pratique , parce qu'il sera trop pres des machines ou d'appareils en fer mobiles ; la solution du probleme que 574 COSMOS. M. Johnson s'etait propose est done encore loin d'etre complete. Ileu- reuscment que les navires en fer ont grandenient perdu de lem- vogue, et que les construclions en bois reprennent le dessus. — M. le capilaine Strachey presente de nouvelles formules pour la redaction des observations faitesavec le therinometreaboule mouillee. M. le docteur Apjohn croit ces formules inexactes ou du nioins in- completes par I'omission d'un facteur dont il faut necessairement tenir compte. — Sir W. R. Ilaniilton lit un memoire sur les biquaternions qui jouent un grand role dans le nouveau systeme d'algebre qu'il a in- vente , et dont il essaye de demontrer les avanlages , en Tappliquant a quelques problemes relatifs a la rotation des plans. Nous ne le sui- vrons pas sur ce terrain aride. — M. le professeur Stokes enumere les proprieles optiques qu'il a recemment decouvertes dans un nouveau sel de quinine. Voici avant tout le mode de preparation de ce sel. On fait dissoudre du bisulfate de quinine dans de I'acide acetique chaud; on ajoute a la dissolution quelques goutles d'une solution d'acide dans I'alcool, ct on laisse re- froidir. On volt alors se deposcr de pelites lames cristallisees qui reflechissent une lumiere verte avec I'eclat des metaux. Retires du fluide, ces cristaux reflechissent une lumiere vert jaunatre avec aspect metallique. lis possedent h un tres-haut degre la propriete de polariser la lumiere, et le docteur Herapath qui les decouvrit le premier a deja fliit remarquer qu'ils remplaceraient avec avantage les tourmalines si on pouvait les obtenir sous un volume suffisant. Ces cristaux paraissentappartenir au systeme prismatique , et sous le double rapport de leurs proprietes optiques et de la direction des faces lalerales ; ils semblentsymetriques par rapport a deux plans rectangulaires perpendiculaires aux lames. M. Stokes designe ces deux plans sous les noms de plan principal de la longueur, et plan principal de la largeur; la lame ordinairement est plus longue que large. Yus dans la lumiere transmise directement , polarisee avant I'incidence et analysee par le cristal, ou polarisee par le cristal et analysee apres L'emergence, de maniere que dans tons les cas la luniiere perdue par I'oeil soit polarisee dans un seul des plans principaux; les cristaux, pour le cas de la lumiere polarisee dans le plan priucipal de la longueur se montrent transparents et incolores, au moins pour des lames tres-minces; tandis que pour le cas de la lumiere polarisee dans le plan principal de la largeur ils sont opaques et noirs, quelque minces qu'ils soient d'ailleurs. Examines dans la lumiere rellechie a la surface sous de petits angles et analysee apres la reflexion M COSMOS. 575 de telle sorte qu'elle soit polarises dans I'un ou I'autre de ces menies plans principaux, les crlstaux pour la lumiere polarisee dans le plan principal de la longueur ont I'eclat vitreux et sont incolores ; tandis que pour la lumifere polarisee dans le plan principal de la largeur ils ont I'eclat metalliqueet secolorent en vert jaunatre. Si le plan d'incidence coincide avec le plan principal de la longueur, et que Tangle d'incidence croisse de 0" a 90", la portion dii rayon reflechi qui est polarisee dans le plan d'incidence n'eprouve aucune modification remarquable; il prend seulement quelque peu I'eclat metallique. L'exanien de la portion du rayon reflechi polarisee a angle droit de la premiere portion prouve que le cristal n'a pas d'angle de polarisation ; car cette portion ne s'eteint jamais, quel que soit Tangle d'incidence ; elle change seulement de cou- leur en passant du vert jaunatre au bleu d'acier fonce qu'elle prend sous de tres-grands angles d'incidence. Si Ton etudie de la meme ma- niere la lumiere reflechie dans le plan principal de la largeur , on voit que le faisceau polarise dans le plan d'incidence ne subit pas de chan- gement remarquable , si ce n'est qu'il semble reflechi par une surface metallique; tandis que Tautre faisceau incolore s'evanouit sous un certain angle et reparait ensuite, ce qui prouve que dans ce plan le cristal a un angle de polarisation. Si maintenant, pour plus de clarte, nous designons les deux faisceaux que les cristaux, milieux double- ment refringents, transmettentindependammentl'un de Tautre, paries noms de rayons ordinaire et extraordinaire, le premier de ces faisceaux etant celui qui est transmis avec le moins de perte, il en resulterait que jusqu'a un certain point , le milieu est transparent pour le rayon ordi- naire, et opaque pour le rayon extraordinaire ; tandis que, relativement a la reflexion, le cristal a les proprietes d'un milieu transparent ou d'un metal , suivant que le rayon refracte est le rayon ordinaire ou le rayon extraordinaire. Si Ton emploie la lumiere commune pour eclairer le cristal , la transmission donne naissance a deux rayons refractes , et les deux rayons reflechis sont confondus; mais en analysant leur me- lange au moyen d'un prisme de Nicol , les faisceaux reflechis sont vus separement, du moins lorsque les observations sont limiteesaux rayons situes dans les plans principaux. Les cristaux du nouveau sel sont sans aucun doute biaxiaux , et les faisceaux appeles ici rayons ordinaire et extraordinaire sont ceux qui, dans le langage de la theorie, correspondent aux differentes nappes de la surface des ondes. Les proprietes reflechis- santes de ces cristaux peuvent etre considcrees reunies sous un point de vue d' ensemble, en admettant que le milieu est non-seulement dou- blement refringent et doublement absorbant, mais doublement me- tallique. Lametallicite, pour parlerainsi, pendant que le rayon lumineux 576 COSMOS. arrive successivemcnt h fous les points de la surface de I'onde, varie continucUement el n'est jamais mathematiquement nuUe , meme pour le rayon ordinaire. Si Ja reflexion est r^ellement de nature m^tallique, il doit se produire un changement relatif de phase dans les vibrations du rayon polarise dans le plan d'incidence et perpendiculairement au plan d'incidence. M. Stokes a verifie cette deduction en observant I'effet produit par le rayon reflechi sur les anneaux du spath calcaire. Comme chaque cristal pris separement est trop petit pour se preter a une experience de ce genre , on faisait I'observation en pla^ant a c6te I'une de I'autre un grand nombre de lamelles sur une surface noire, et prenant soin de rendre leurs axes principaux paralleles. La direction du changement produit dans les anneaux est la meme que dans le cas des metaux, et inverse, par consequent, de celle du changement produit dans le cas de la reflexion totale interieure. Dans le cas du faisceau extraordinaire les cristaux sont moins opaques, et cons6quemnient moins metaUiques relativement a la lumiere rouge qu'aux rayons de plus grande refrangibilite. M. Stokes a encore examine ces cristaux au point de vue du chan- gement qu'ils pouvaient apporter a la refrangibilite des rayons transmis ; mais il n'a rien decouvert sous ce rapport. Les phenomenes observes par M. Stokes sont evidemment de meme ordre que ceux que M. Haidinger a tant etudies, selon les noms de couleurs de surface et de couleurs de corps. Dans notre repertoire d'optique moderne, nous avons dit que la gloire de la decouverte du premier fait de ce genre appartient au chef illustre de I'ecole d'fidim- bourg, observateur infaligable, toujours en avant du progres expe- rimental, M. Stokes rappelle aussi les droits de sir David Brewster, qui communiqua ses premieres observations sur le chrysammate de potasse, dans I'une des seances de I'Association britannique, enseptembre 1846. 31. Haidinger, faisant violence a sa modestie, elfeve a cet egard une petite reclamation. II rcQut en juin 1845, du celebre chimiste Vohler, un premier echantillon d'hydrochinon vert, et constata que la couleur metallique de surface etait polarisee dans une direction determinee, perpendiculairement a la direction longitudinale, ou a I'axe du cristaL Celte observation fut redigee le 7 juillet 1845. Le second corps qui lui montra deux couleurs de surface polarisees, I'une parallelement a I'axe du cristal, et I'autre perpendiculairement au plan d'incidence, fut le cyanure de magnesium et de platine, decouvert par M. le pro- fesseur Quadrat. Cette seconde observation fut lue le 4 mai 1846 dans une des reunions des Amis des sciences naturelles : elle fut imprimee en substance dans la Gazette de Vienne du 12 mai, puis avec tous les COSMOS. 577 details, dans le premier volume des Memoires de cette societe, le 13 aout 1847. II est evident par ces dates, que M. Haidinger a trouve de son cote ces phenomenes si curieux, et que, du nioins, quant a la publica- tion, il a la priorite sur sir David Brewster. M. Stokes a presente au comite divers milieux sensibles ou fluo- rescents ; un cristal de spath fluor vert, qui, sous rinfluence de la lu- miere bleue, change de couleur ; une solution de bisulfate de quinine dans I'eau acidulee, laquelle sous I'influence des rayons invisibles, pro- duit une lumiere bleue; une solution dela matiere colorante desfeuil- les dans I'alcool, donnant naissance sous la nieme influence a une lu- miere rouge. Ces deux derniers milieux sont precisement deux de ceux avec lesquels nous avons experimente. — M. le professeur Smyth presente un instrument a reflexion pour les observations en mer, de forme nouvelle, et qu'il croit tres-preferable au sextant et au cercle de Borda : c'est aussi un cercle, tres-petit, leger, simple, et dont tous les organes delicats sont completement abrites. L'appareil illuminateur ou d'eclairage est grandement per- fectionne, et pent fonctionner meme avec une tres-faible lumiere; un. mecanisme additionnel, procure, de jour comme de nuii, un point de mire horizontal, nettement visible au centre du champ de la vision. — M. Townshand avait apporte un instrument destine a mettre en evidence la veritable couleur des liquides vus par transmission. C'etait une longue auge munie a ses deux extremites de miroirs parall^les qui se renvoyaient mutuellement le rayon lumineux , et le for^aient a traverser plusieurs fois la couche de liquide, pour accroitre sa colo- ration et la rendre sensible, quelle que faible qu'elle fut primitivement. M. Townshand avait construit son appareil dans le but de mettre en evidence la couleur bleue intense des eaux du Rhone , lorsqu'il entre dans le lac de Geneve; et il fut tout etonne de voir que ces eaux se montraient colorees en jaune sombre. Sir David Brewster explique sans peine cette anomalie en faisant remarquer que les reflexions successives sur les miroirs tendent , par un effet bien connu , a deve- lopper la couleur rouge dans le rayon transmis, de telle sorte que I'instrument de M. Townshand dissimule et fausse la couleur veri- table du milieu, au lieu de lui donner plus d'intensite. — Sir David Brewster presente quelques remarques critiques sur la thcorie de I'eclat de M. Dove. Le savant professeur de Berlin avait fait, en 1851, une tres-curieuse observation. Si, apres avoir place dans le stereoscope les images d'une pyramide tronquee , teintes de couleurs 578 COSMOS. coniplementaires, Time bleue, par exemple, et I'autre jaune : on les regarde a travers un verre violet, elles apparaitront brillantes d'un eclat metallKiue tros-intense, tandis que, vues d'un seul ceil, elles restent conipletement mates. Si aux deux images colorees on snbsti- tue dans le stereoscope, deux images de la pyramide dessinees, I'une en noir sur un fond blanc, I'autre en blanc sur un fond noir, et qu'on les regarde des deux yeux , I'image resultante aura encore un eclat metallique vraiment extraordinaii^e, quoique en eux-memes les dessins noirs et blancs fussent tres-mats. Ces experiences condui- sirent M. Dove a une nouvelle Iheorie de I'eclat. Partout, disait-il, ou une surface appnrait brillante , il y a toujours une couche transparente ou translucide, de faible puissance, a travers laquelle on voit un autre corps : il y a par la menie melange de lumiere reflecbie extei ieuremeiit avec de la lumiere reflecbie ou dispersee interieurement ; et c'est la coexistence, avec influence mutuelle de ces deux lumieres, qui fait naitre I'eclat. Pendant que I'oeil s'accommode a la vision du corps vu a travers la coucbe mince , il ne voit pas distinctement la lumiere reflecbie a la surface exterieure, et c'est la conscience dumiroitage, vu d'une vision non distincte, qui cause la sensation de retlat Les objets colores en bleu, pour etre vus distinctement, ont besoiu d'etre places plus pres de I'ceil que les objets colores en jaune ; dans I'experience des deux images bleue et jaune, vues au stereoscope, il y a done la conscience d'une vision indistincte : I'une des images est comme vue a travers I'autre , et voila pourquoi on aurait la sensation de I'eclat. Dans le cas, enfm, du blanc et du noir, le noir doit etre considere comme une image plus eloignee, le blanc comme une image plus proche; on se trouve done encore sous I'influence d'une double vision distincte et indistincte, ce qui suffit encore a donner la sen- sation de I'eclat. C'est cette theorie de Teclat que M. Brewster vienl combattre par des arguments que Tanalyse incomplete des juurnaux anglais ne nous fait pas bien saisir. Nous les traduirons litteralement. Puiscjue nous savons, d'apr^s les phenomenes connus des lames minces melalliques , que des lumieres de couleurs tres-differentes sont transmises a travers des couches de matieres diverses , ou de diverses epaisseurs; puisque d'ailleurs il resulte de la refrangibilite diverse des diverses lumieres, qu'une meme lentille ne pent pas les faire converger en meme temps a son foyer, quand elles sont placees a la meme distance ; n'est-on pas en droit de dire que Teclat metallique est cause par Teffort qu'on fait pour accommoder I'a'il a la vision distincte de toutes ces couleurs? Cette explication confirme ou etend, plus qu'elle ne la combat, celle de M. Dove. COSMOS. " 57^ Sir David Brewster lit en outre unc note sur un arbre frappe de la foudre. Get arbre place au centre d'un groupe serre n'etait pas le plus ^love. La foudre I'a frappe lateralement h 15 pieds au-dessus du sol, au point d'insertion des deux branches principales : elle a projete au loin un large morceau d'ecorce et un grand eclat de bois ; elle a pene- tre ensuite dans le tronc pour arriver a la terre et I'a fendu en deux. Ce fait prouve que des conducteurs verticaux places a une plus grande hauteur ne suffiscnt pas a preserver un edifice, et que pour se mettre completeinent a I'abri, il faudrait necessairement ajouter des paraton- nerres lateraux et horizontaux. — M. Royle communique les resultats d'observations horaires, baro- metriques et thermometriques, faites a Saharunpore , au nord-ouest de rinde. — M. Tyndall presente le nouveau thermomfetre de contact aveclequel il fit les experiences que nous avons deja analysees : cet instrument n'a quo le noni de commun avec le thermometre de Fourier ; et se prete admirablement a I'etude experimentale de la conductibilite des corps. Voici quelques nouvelles observations curieuses : tandis qu'un cube de bois ne transmet en une minute, a la face opposee a la source de chaleur, qu'une quantite de calorique marquant de 10 a 12° au thermometre nouveau, un cube seniblable de silice ou de quartz produit une elevation de 90". Ce fait explique I'uniformite de tempe- rature des terrains plats et decouverts , et les differences extremes de la temperature pendant le jour et la nuit dans les vastes deserts sablonneux, le Sahara, par exemple : le sable compose en grande partie de silice, absorbe tres-rapidement la chaleur de midi et la perd subitement des que le soleil est couche. Le tissu musculaire est tres- mauvais conducteur du calorique, et c'est en grande partie a cette non-conductibilite qu'est due la Constance de temperature du corps humain aux differentes saisons de I'annee, et sous tous les differents climats. C'est a elle aussi que MM. sir Charles Blagden et Chantrey durent leur salut dans la memorable experience ou ils exposerent leur corps a une temperature tres-elevee : grace a I'impermeabilite des tissus pour la chaleur, I'iritation se borna presque a la surface. — Le reverend docteur Bryce lit une note sur les notations arithme- tiques des Chinois, analogues a celle des anciens Romains, et bien inferieures a celles des Arabes et des Indiens, malgre des perfection- nements recents dus au docteur Moncrief. — M. Gartland expose un procede analytique a I'aide duquel on peut distinguer les racines reelles et imaginaires pour les equations biqua- dratiques : c'est une extension et une simplification de la methode de Sturm. 580 COSMOS. MM. sir John Ross et W. Hooper apportent des theories assez seni- blablcs et qu'ils croient aussi satisfaisantes que completes du phenomene mysterieux des aurores boreales. Je crois, dit M. Hooper, que I'aurore boreale n'est rien de plus ou rien de moins, qu'un amas d'humidite, rosee ou vapeur liquide ou glacee, illuminee par les corps celestes, soil directement, soit indirectement par la reflexion des rayons sur les masses de glace qui entourent les poles du globe ou nienie sur les vastes etendues de neigequi couvrent laterre. Sir John Ross affirme que sa Iheorie, combattue par M. Arago, a ete admise par I'illustre Schuma- cker; etqueM. Martins et ses compagnons seraient revenus de leur expedition d'Hammerfest, en 1842, presque convaincus de sa verite. M. Hooper I'appuie de faits et d'arguments nouveaux. DE t'lMPRlMERIE DE CU. LAIIURE ( ANCIENNE MAISON CRAPELET), nic de Vaugirard, 9, pr^s de I'Odeon. COSMOS. 581 NOIJYELLES DS ixV SEMAINE. La question de I'adoption du temps moyen de Greenwich par Ics villes d'Exeter, de Plymoutli , de Devonport et de Bristol avait souleve deuxdiffjcultes. Onsc deinandait d'abord si les tables des marees ne doviendraient pas d'un emploi penible, ot s'il n'en resulterait pas de graves inconvenients; puis, en second lieu, ce que ce serait alors que le temps legal. L'astronome royal , M. Airy, a leve sans peine la premiere difficultc en faisant remarquer qu'il suffirait dans la reimpression des tables des marees de tenircompte de la difference des temps anciens et nouveaux. D'un autre cote, un des juges les plus eminents del'Angle- terre, a erais Topinion que le temps legal etantle temps adoptedansle lieu dont il s'agit, ilne voyaitaucuninconvenient^a la substitution d'un temps a un autre. La grande refornie s'opcrera done , tout le fait es- perer. — La methodedereglerle temps pour uneconlreecntiere,parleclioix d'un meridien determine et la transmission de I'heure par les lelegra- phes electriques, est en voie d' execution en Allemagae. Le docteur Erb, professeur d'as(ronon)ie a I'lmiversile d'lleidelberg, aobtenu de la com- mune de Bamberg, la concession d'un terrain, dans le but d'y elever une haute tour, sur laquelleilinstallera unehorloge electrique. Ce pro- jet a recu I'aulorisation du gouvernement de Baviere, et les travaux commencerontbientot. La ville de Bamberg est le lieu leplusconvcna- ble pour le point de depart du temps regulateur : elle est situee presque au centre de rAUemogr.e; elle est liee par la ligne de Leipzig avec les chemins de fer du nord etdei'est; la hgne d'Augsbourg la met en communication avec SlutgarJ, Munich, et le lac de Constance ; enfln la ligne de Francfort la relie a toutes les villes du Rhin depuis Basle jusqu'a Dusseldorf. Elle a aussi I'immense avantage d'etre a proximite des grandes voics par eau de I'Europe centrale, situee qu'elle est sur le Ludwigs canal, entre le Danube et le Rhin, la mer du Nord et I'Euxin. — La correspondance dela Gazette de Savoie parlait, il y a quelque temps, d'un vaste projet de telegraphic electrique. La ligne de Londres a Paris et Lyon atteindrait , par Chambery et Turin , Genes sur la Me- ditcrranee; le gouvernement sarde relierait G^nes avec laSpezia; la compagnie sous-marine alors prolongerait le fil sous la mer jusqu'a Sasiia a travers la petite ile de Gorgona; puis de Bastia a Cagliari en. Sicile. Le fd sous-marin quiunira la Sicile aux cotes d'Afrique peut 17 OCTOBUE 1852. 25 582 COSMOS. elro etabli sans difficaltosinsurmontablcs : uno fois cct intervallcfranchi, riiabile ii)genieur Boiielli qui a conc-u ce plan gigantesque , constitue- rait a Tunis un centre de comniunicationslolegraphiquesquele gouver- nement francais relierait avec Bougie et Alger, et le gouvernement anglais avec Tripoli , Alexandric, le Cairo et Suez. Nous attendionsdes renseignements plus precis pour parler de la gi"-antesque lunette qu'un simple vicaire episcopalian , le reverend M. Craig, a fait construire et installer a ses frais surle terrain communal de Wandsworth. L'objectif de la lunette a 24 pouces anglais, G decinie- Ires de diametre ; sa distance focale varie de 75 a 80 pieds. Le tuyau de la lunette , avec le porte-oculaire et le chapeau qui abrito l'objectif, a 85 pieds de longueur ; sa forme est celle d'un cigare ou double cone ; son plus grand diametre est de 12 pieds. L'observatoire se compose d'une simple tour, servant d'appui a la construction qui porte I'enorme tube, c'est une charpente enbois de forme tres-legere, montee siir des roues en fonte, roulant sur un chemin de fer circulaire de 52 pieds de dia- metre. Le tube est si bien equilibre qu'on le pointe sous lous les an- gles avec autant de facilite qu'un telescope ordinaire, depuis la posi- tion horizontale jusqu'a I'inclinaison de 80" : les mouvements en hauteur sont produils par I'intermediaire d'une roue placee a la droite de I'observateur. Pour observer dans les divers azimuts, on fait rou- ler la charpente sur le chemin de fer circulaire , ce qui se fait par un deploiement tres-minime de force. Cet objectif sorti des ateliers de M. Chance, qui refusait de I'entreprendre et qui ne se niit a I'oiuvre que vaincu par les pressantes instances de M. Craig, est forme de deux verres Hint et crown-glass, qu'on dit tres-limpides et tres-homo- genes : il n'est pas parfait encore, les verres ont besoin d'etre retouches, mais il resout dejk les nebuleuses en etoiles, etles montre sous la forme qu'elles ont dans le telescope de lord Ross : il a separe tr6s-nettement les astres composants de quelques etoiles doubles de la grande ourse; il a meme montr^ , enlre ces astres, des etoiles restees jusqu'ici invisi- bles. Le Scientific American journal affirme que la lune, vue dans la lunette de M. Craig, presente un aspect vraimentmagnifique; elleap- parait parfaitement brillante et incolore avec ses rochers, ses monta- gnes et ses cratferes, grandis d'une maniere effrayante. II ajoute que M. Craig s'apprele h. pointer sa lunette sur Venus, dans lebut de cher- cher si cette planete a ou non des satellites. Observer Venus, c'est au reste le vc'iitable moyen de connaitre la perfection de I'instrument, car K'aiQS les lunettes SOilt bonnes sur la lune, et presque toutes sont mau- vaises sur Venus. Le plus grand des oculaires de la lunette sous-tend un angle de30' ; COSMOS. 583 il grossit 125 fois ; le diamfetre de ses lentilles est de 8 polices, la grandeur a peu pres de la pleine lune. Le second oculaire a 4 pouces de diamfetre, et sous-tend un angle de 15'; il grossit 250 fois. Les angles sous-tendus par les autres oculaires varient entre 9' et 50" ; leur pouvoir grossissant s'etend de 500 a 3000 fois. Avec le plus faible ocu- laire , on lit sans peine des caracteres de 6 millimetres de hauteur a 800 metres de distance. L'apparition subite de la gigantesque lunettede M. Craig, le passage brusque et inespere del4 ou 20 pouces h 24 pouces, est un evene- ment astronomique considerable. — Un savant astronome anglais, le reverend M. Dawes, a presente recemment, a la Societe royale astronomique de Londres , une disposi- tion d'oculaire toute nouvelle, dont il attend de tr^s-heureux resultats. Ce qui caracterise cette disposition, c'est I'addition d'une coulisse en metal percee de trous de differentes grandeurs, et qui traverse nornia- lement le tube oculaire, exactement au foyer de I'objectif. Les dia- metres des trous varient depuis 5 dixiemes jusqu'a 75 milliemes de pouce anglais; ce sont de veritables diaphragnips qui ont pour effet de diminuer dans une proportion plus ou moins grande I'eclat et la cha- leur excessifs de I'image du soleil, et de rendre ainsi les observations plus faciles et plus excellentes. Quand on s'est servi de I'oculaire dia- phragme, on est bientot pleinement convaincu de ses avantages; on voit jusqu'a I'evidence qu'a chaque genre d'observations correspond une ouverture propre et speciale qui montre les objets avec beaucoup plus de nettete et de verite. Citons comme cxemple I'etude de la sur- face du soleil, que M. Dawes a faite avec son instrument. II a constate {'existence d'une nouvelle couche de lumiere comparativement faible; appelee par lui couche nuageuse {the cloudy stratum). Son aspect pro- duit la sensation d'une profondeur tres-grande, au-dessous de la se- conde couche lumineuse dans laquelle se fornient I'ombre et la pe- nombre que Ton voit ordinairement autour du noyau des laches. Cette couche nuageuse ne serait pas lumineuse par elle-meme, elle aurait la propriete d'absorber une trfes-grande quantite de lumiere et d'en re- flechir fort peu : son eclairement u'est pas uniforme, sa surface est on- dulee, certaines portions sc montrent plus lumineuses, mais tou- jours beaucoup moins brillantes que la couche des penombres dont elle differe encore en ce qu'elle ne se montre jamais comme elle, striee ou ridee. Dans toutes les taches de grandeur considerable et dans quelques taches plus petites, on voit la couche nuageuse perforce par une ouverture noire, dont la lumiere ne surpasse pas celle de Tatmosph^re eclairee par le soleil, comme M. Dawes s'en est as- 584 COSMOS. sure par des experiences positives. En donnant a sa lunette un trhs- petit champ et armant son ceil d'un verre obscur, il regardait un point de Tatmosphere tres-voisin du disque du soleil, puis il dirigeait son objeclif diapliragmc par la plus petite ouverture du tube oculairc sur la portion obscure d'une large tache ; il voyait alors tres-distinctement la couche nuageuse remplacant en grande partie ce que Ton a consi- dere jusqu'ici comme le noyau de la tache, et ce que Ton croyait etre le corps opaque du soleil : et comme a travers le verre obscur dont il se servait, cette portion de la couche nuageuse apparaissait noire tandis que I'atmosphere, dans le voisinage du soleil, etait encore un peu eclairee, il en concluait que la couche nuageuse estmoins lumineuse : e'est bien elle qui constitue le noyau des taches M. Dawes a vu aussi tres-distinctement le mouvement de rotation dont etait animee une tache qui se montra du 17 au 23 Janvier 1852. C'etait la tache entiere qui tournait autour du petit noyau sombre. En examinant avec la plus grande attention la surface du soleil , M. Dawes s'est assure que le mouvement ondulatoire rapide de la partie poreuse de son atmosphere n'est pas un mouvement reel, comme on I'a cru jusqu'ici, mais un mouvement apparent procluit par les pertur- bations de notre atmosphere. II est pleinement convaincu que le plus excellent moyen pour observer le soleil est d'employer des objectifs a large ouverture, avec un pouvoir grossissant proportionne, ce qui de- vient possible et facile avec Toculaire diaphragme. On voit ainsi les fa- cules avec une nettete vraiment exiraordinaire, surtout sur les bords est et ouest du disque solaire, oii dies produisent I'effet de sommets etroits dont les flancs sont vus de face. Elles sont ordinairement dis- posces le long d'un cercle de latitude trace sur la surface du soleil, et sont rarement assez elevees pour qu'on puisse les apercevoir se pro- jetant reellement sur le limbe du soleil. Cependant, dans une cir- constance plus favorable, le 22 Janvier dernier, M. Dawes parvint a s'assurer de la verite de I'opinion qui voit dans les facules des sommets ou des elevations de la matiere lumineuse. II voyait une large raie brillante, ou facule, courir comme d'ordinaire a une petite distance et parallelement au bord du soleil ; puis s'intlechir tout a coup brusque- ment vers le bord et passer par-dessus; le limbe de I'astre etait bien defini, et pendant qu'il se montrait tres-aigu et tres-fixe, la raie bril- lante ^tait vue se projetant legerement au tlela du profil uni du limbe, a la maniere d'un sommet montagneux parallele a I'equateur du soleil. M. Dawes a applique son oculaire, en septembre dernier, au roflec- teur de vingt pieds de M. Lassell, et a pu observer le soleil retlechi par la surface entiere du miroir de 24 pouces. Apres deux heures de poin- COSMOS. 585 tage I'oculaire n'etait que sensiblement chaud, mais non pas brulant. II est certain, des aujourd'hui, que ce petit appareil rendra de tr^s-grands services dans I'examen de la surface de la lune, dans I'observation des occultations des petites etoiles et des eclipses des satellites de Jupiter, etc. ; on decouvriia plus facilement par son moyen, les trfes-petits sa- tellites des planetes; il permettra de suivre Mercure et Venus jusque pres dusoleil, etc. En unmot, I'oculaire a ouvertures variables realise d'une nianiere beaucoup plus rationnelle et plus pratique la pensee du R. P. de Vice, qui, pour retrouver, par exemple, I'un des satellites de Saturne, cachait la planete et les autres satellites derriere des fils me- talliques opaques, ce que d'ailleurs d'auti'es astronomes avaient fait avant lui dans des circonstances analogues. — Pour donner une idee de I'immense developpement et de la puis- sance sans bornes de la typographic anglaise, nous enregistrons les deux faits suivants. Une seule imprimerie particuliere, celle de laSo- ciete biblique anglaise et etrangere, avail imprime, a la date du 31 mai 1852, dans I'espace de47 annees, vingt-quatre millions deux cent cin- quante mille exemplaires de VAncien et Nouveau Testament , en cent quarante langues differentes. On cria au miracle lorsque le directeurde rimprimerie nationale de France, M. Marcel, par ordre de I'empereur, ayant fait venirdeRome lesfontes de \-APropagcmde, fit parailre sa Collec- tion d'Oraisons dominicales en cent cinquante idiomes difierents. Que sont cependant quelques centaines d'exemplaires de vingt lignes re- produites en cent cinquante langues, aupres decent quarante versions de la Bible entiere imprimees par millions? Le ministred'Etat, kla parole in- cisive, dont le discoursaclos la seance duParlement, vers troisheures du matin, et produit une ti'es-vive sensation, recoit les journaux du matin, en meme temps qu'on lui sert sa tasse de chocolat, a neuf heures, et il retrouve mot pour mot sa harangue de trois longues heures, avee les fautes de grammaire corrigees et les citations fidelement verifiees ! — Ce que fut la Mediterranee dans les ages anterieurs , I'ocean Pa- cifique tend a le devenir un jour. Sur tons les rivages de ce vaste ocean de nouveaux empires surgissent avec une rapidity sans exemple dans I'histoire, et qui defie meme I'imagination la plus puissante. 11 y a cinquante ans le Pacifique etait I'ocean des romans bucoliques , la ceinture humide des mille iles du bonheur : les grands continents qui avaient vue sur ces eaux puissantes et tranquilles etaientou des deserts sauvages, ou d'antiques et mysterieuses ruines; les entreprises com- merciales y etaient choses inconnues, et ils ne donnaient presque au- cun signe de vie. Or, voici que tout h. coup Sydney et San Francisco etendent leurs longs bras k travers cet ocean. Deux empires anglo- 586 COSMOS. saxons regncnt sur les livages et les iles du Pacifique, pendant que leurs llottes remplisscnt scs ports du conforlable de toutes les nations , et transportent on echange jusqu'aux plus froides latitudes du nord, les produits dores des tropiques. La Chine et les iles du Japon , fermees depuis des siecles aux invasions du commerce et de la civilisation, se- ront conlraintes par la seule force des evenements, d'ouvrir largement leurs scins. Mais ce qui ajoutc bien plus encore a I'importance de I'ocean Pacifique , c'est qu'il semble entoure de tous c6t^s par les con- trees du globe les plus abondamment auriferes. Les destinees de cette puissante mer et de ses brillants rivages, sa richesse future, etc., sont veritabiement fanlastiques; et elles se r^aliseront du jour ou I'ancien monde, en faisant tomber les barrieres jusqu'ici infranchissables de I'islhme de Panama, ne sera plus qu'a quelques jours de distance de ces terres de I'or et de la colonisation. Cet immense besoin d'un pas- sage facile est si profondement senti de plus en plus, que chaque jour voU nailre de nouveaux projets de percement ou de canalisation, pour metlre en communication les deux Ameriques et les deux Oceans. On fait appel de tous les cotes, au nom des nations, a toutes les grandes puissances pour hater la realisation de cette gigantesque entreprise.^ A I'heurc qu'il est, une compagnie considerable poursuit avec une vive ardeur I'execution d'un canal de jonction, et le dernier numero de VEloile de Panama annongait que le gouvernement de la Nouvelle-Gre- nade lui a fait une concession de 99 annees. Ce nouveau privilege si- gne a Bogota, est date du 1" juin 1852. Le canal devra etre acheve en dix ans; si cependant le tiers des travaux etait execute en juin 1862, on acco'rderait a la compagnie une prorogation de quatre annees. Elle devra verser un cautionnement de 24 mille livres sterhng (500 mille francs), dans les douze mois qui suivront la signature du traite, et on lui donne en garantie cent mille fanegadas de terrain a choisir par elle sur tous les points de la Republique. Les ports de I'ocean Pacifique et de I'ocean Allanlique seront des ports neutres : le gouvernement de la Nouvelle-Grenade recevra trois pour cent des benefices pendant 80 ans, et cinq pour cent pendant les dix-neuf dernieres annees : les contrac- tants au nom de la compagnie sont MM. Edward Cullen, sir Charles Fox, John Enderson et Thomas Brassey; ils n'attendent pour se mettre a l'(BUvre que le consentement de la compagnie du chemin de fer de Panama; mais, comme il s'agitd'une entreprise rivale, I'obtention de ce consentement sera certainement le point le plus delicat et le plus diffi- cile de la negociation. — M. Hind a donne <^ la nouvelle planete, trouvee par lui, le nom de. FouTUNE ; ses elements ont et6 calcules par M. Vogel, assistant de I'ob-j COSMOS. 587 servaloire de M. Bishop , sur les observations de M. Hind , a Londres, et celles de M. Challis, a Cambridge : I'orbile est remarquable par sa faible inclinaison sur recliptique ; le temps de la revolution est de 1393 jours, la moyenne distance au soleil 2,44093. Le Lilerartj Gazelle croit que la planete vue par M. Chacornac , et que M. de Gasparis a trouvec aussi a Naples, est identique avec celle de M. Hind. — M. FredericTroyon,proprietaire aBelair,un despluszeles,desplus industrieux et des plus habiles archeologues du continent, a trouve sur sa terre un crane humain, comprime arlificiellement; d'autres cranes semblables ont ete decouverts en Savoie, en Crimee, en Autriche et ailleurs. Lorsqu'ils etaient rares, on croyait ces cranes venus du Perou, oij la singuliere coutume d'aplatir la tete des enfants nouveau-nes subsiste encore; mais, depuis qu'ils ont ete rencontres en si grand nom- bre, il faut necessairement admettre que I'ancien monde, comme le nouveau, I'Europe comme I'Amerique, se sont accordes dans cette bi- zarre pratique. Nous sommestres-elonnesd'apprendre, par tout ce qui a ete ecrit sur ce sujet, que les archeologues ignorent qu'en plein \\\^ siecle, et dans plusieurs de nos provinces, le Languedoc, par exemple, un grand nombre de meres prennent plaisir a allonger la tete de leurs enfants , au lieu de lui laisser sa forme spherique qui n'a pas leurs sympathies. — L'editeur d'un journal americain, Neiv Orleans Picayune^ an- nonce qu'il re^ut, il y a trois semaines, d'un voyageur arrivant de Te- huantopec, un volume compose d'un certain nombre de feuilles de par- chemin, unies ensemble par des agraffes d'airain. Ce volume venait, dit-on, d'une viile appelee Coaxchencigo, le mystcre des montar/nes, habitee uniquement par des Azteques ou descendants des anciens Mexi- cains. On conserverait dans le grand temple de cette citecinquante vo- lumes de meme forme exterieure, sauves de la destruction, lors de la conquete de Fernand Cortes ; consideres comme livi'es sacres, ils ne se- raient montrcs que dans les jours de grandes solennites. Le volume dont nous parlons est rempli de caracteres hieroglyphiques, complete- ment inintelligibles; mais, sur deux ou trois pages on voit, au-dessous des hieroglyphes, diverscs inscriptions en caracteres grecs, ecrites a rebours, suivant la coutume orientale, mais composees de mots grecs; ainsi, par exemple, on lit sur la premiere page cette phrase : VCOTVaTT VWT GOyriX ^ XoYo? Ttov TiavTwv, la langue de tout. Sur une autre page on voit une peinture represenlant de I'eau , avec le mot : c-zjircaXaO, QaXac-sriC, vier, et un navire plein d'hommes. La presence de ces inscrip- 688 COSMOS. tions prouve : 1° que ees volumes ont ete ecrils p;u' un pouplo qu avail assGZ de communications avec Ics Grecs, pour apprendre Imirlan- gue ; 2° que ce peuple etoit d'origine asiatique, puisqu'il ecrivait comme les Orionlaux do gauche a droite. Si Ton se rappellc qu'il y a quclqucs annecs on trouva au sein d'une tribu indienne dc I'ouost, un volume ecrit en liebreu , on sera tente de penser que le peuple en question est le peuple hebreu; il y a, d'aillcurs, une tres-grande similitude entre les coufumes, les rits et les ceremonies des Aztequps et des anciens Juifs; la pliysionomie des enfants Aztequos est cssentioUement juivc; il est imposs'hie d'y meconnaitre le type hebreu. II est dans I'histoire sainle un fait r.iysterieux et indefinissablo : la disparition de dix tribus : ne seraient-ce pas ces tribus quiseraientalleeshabiter le Mexique, et fon- der la vieille et grande nation des Azteques? — On annonce que le navire Ericson, de deux niille lonneaux, et dans lequel on a substilue aux machines a vapeurs le raoteur k air chaud, que nous avons decrit dans le Cosmos, va quitter bientdt la bnie d'Hudson, pour se lancer en pleine mer et se montrer glorieux et ma- gnifique aux regards etonnes des habitants du vieux monde. Suivant I'expression des journaux americains , il porte emprisonne dans ses tlancs un ouragan artificiel, terrible, mais parfaitement dompte et gou- verno, a I'aide duquel Ic vaisseau peut affronter les vents et les va- gues. Frere Jonathan ne doute nullement du succes desa merveilleuse deconverte, dont les avantages seraient considerables, puisque la quan- tite du charbon consonuiie est diminuee dans une proportion enorme. Dans sa pleine securite, il triomphe deja de la defaite et de la confusion de frere John Bull. Quelques semaines encore et nous saurons a quoi nous en fenir sur la solution du plus grand probleme que Ton ait aborde depuis I'invention de la vapeur. La machine de M. Ericson dif- ferc pen de celle de M. Galy Cazalat, qui fut presentee ily a quelques jouis a rinstitut, et que nos lecteurs connaissent. Pourquoi faut-il qUe I'ingenieur franc-ais ne puisse pasobtenir I'essai de son moteur? — M. Guinon, peintre, ayant eu derniercment I'occasion de tou- cher avec Tacide sulfurique une piece d'etofl'e de soie leinteen rose an moyen dc la cochenille ammoniacale, fut tout surpris de voir quo la couleur disparaissait tout a coup. En recherchant les causes de ce phe- nomcno inattendu, il arriva enfin aconstater que reffetdeblanchiment etait du a la presence do I'acide nilreux dans I'acide sulfurique dont il s'etait servi. Separes, I'acide sulfurique et I'acide nitrique sont impuis- sanls a produire cet effet, mais leur melange et I'absorption de vapeurs d'aride nitreux par I'acide sulfurique qui en est le resultat necessaire, donnent naissance a un compose nouveau appele par M. Guinon acide • COSMOS. 689 nitro-suifurique, qui a la propriete de decolorer instantanement la co- cheniile ammoniacale. Get acide abandonne son oxygene avec une faci- litc extreme, pi'esrjue comparable a celle du bioxyde d'hydrogetie ou dereauoxygenes, et par la, d'due meme dans I'eau, il deviant un agent tres-puissant d'oxydation et de decoloration. Applique chaudou froid, il blancbit la soie presque instantanement, et il suffit de la presence d'un deux-inillieme d'acide nilreux pour decolorer une solution do coche- nille dans I'amnioniaque : cette solution , par consequent aussi sen- sible au moins que celle de protosulfate de fer , est le reactifpar excel- lence de I'acide nitreux : il n'a pas d'ailleurs, comme le sel de fer, rinconvenicnt d'etre influence par les autres composes d'acide nitrique. Le meilleur moyen de preparer I'acide nitro-suKurique est do conden- ser dans I'acide sulfurique les vapeurs degagees par Taction de I'acide nitrinue sur les metaux, ou dans la fabiication de I'acide oxalique. — Le collodion vient de recevoir en AUemagne une nouvelle et pre- cieuse application. Mele a quatre parlies d'ether, il forme lui compose tres-limpide : ce compose applique sur le papier s'evapore rapidement, en liiissant sur la surface de la feuille une couche transparenle, laquelle, sans ricn enlever de sa nettele au dessin I race au crayon sur le papier, le preserve completement en le mettant a I'abri de rhumidilc, du frotte- ment et de tous les autres agents exterieurs de destruction. Ce mode de preservation est d'autant plus excellent qu'il n'empeche pas I'artiste de retoucher son dessin s'il lui plait, mais il ne pourra plus proteger les retouches par un nouvel emploi du collodion. Pour etendrela solution etheree,on se scrt d'une large brosse Ires-douce que Ton promene lransver?alement sur le papier. Xous apprencns a I'instant que cet em- ploi du collodion est connu depuis assez longtemps eu France, et que Ton trouve chez M. Susse, place de la Bourse, une preparation qui aurait de plus I'avantage de pouvoir etre appliquee aux dessins fails au fusain et au pastel, ce que Ton n'a pas pu fairc encore en AUemagne. VINGT-DEUXIE.ME REUNIOX DE l'aSSOCUTION BRITANMQUE POUP. l'aVANCE- jiENT DES SCIENCES. (Belfast, septembre J 852.) SciENXES ceiMiQUES. Scwied/ , A septembre. — Sous le litre de ^ofe sur les effeis des rayons de la li/ne , 3L Knox transmet les resultats de quelques experiences sur les effeis de fusion produils par une lenlille sur diverses substances, la'silice, par exemple ; en tenant compte de la temperature aux jour et heure de I'experience, et du temps necessaire pour la fusion. Quant a ce qui concerne la lune, M. Knox affirme que 590 COSMOS. deux personnes ont senti la chaleur do ses rayons concentres au foyer de la lentille. — M. Macdonnall a conclu, d'un grand nombre d'analyses, que le poids atomique du magnesium est 12,107 , au lieu de 12; et celui de la magnesie 19,95, au lieu de 20. — AI. BoUaert a lu un Memoire sur la distribution geographique du sel : il croit que les masses de sel de roche renfermees dans le sein de la terre sont plutot _le resultat d'agents volcaniques, que des depots formes par I'Ocean. Limdi, 6 septembre. — M. Graham, qui a repris les recherches de MM. Dutrochet, Porrett, Magnus, Matteucci , Liebig et autres, sur les phenomenes d'endosmose , a communique verbalement les resultats auxquels il est parvenu. 11 decrit un instrument appele par lui osmo- metre , a I'aide duquel il mesure la diffusion dans I'eau des solutions salines a travers les membranes poreuses. II est arrive ainsi a des con- sequences curieuses, dont la plus singuliere serait la negation de Taction designee sous le nom d'exosmose. M. Graham a classe les solu- tions salines et les autres liquides , sous le rapport de leur diffusibilite, a travers les membranes. Les substances les plus diffusibles sont les combinaisons des alcalis avec les acides vegetaux : c'est un fait impor- tant quand on le rapproche de la presence de ces sals dans la seve des plantes. — M. Andrews lit une note sur la composition et la structure micro- scopique de certains basaltes et roches metamorphiques ; il insiste par- ticulierement sur la presence , dans les roches , du fer a I'etat metal- lique , ou sous forme de petits cristaux de fer sulfure, ou pyrite jaune , et d'oxyde magnetique. II a separe I'oxyde de fer du mineral pulverise, a I'aide d'un barreau aimante, et y a trouve de la chaux , quoique, le plus ordinairement, I'oxyde de fer soil remplace par la magnesie dans diverses roches schisteuses. — M. Stockes indique I'application que Ton peut faire des pheno- menes de fluorescence, etudies par lui , et que nous avons longuement exposes, a I'analyse chimique qualitative. Les sels de pcroxyde d'urane, par example , ont la propriete de faire naitre des lignes obscures dans une certaine portion du spectre; ces raies se montrerent a M. Stockes sur un globule de platine fondu au chalumeau , et dans lequel rien ne faisait soup^onner la presence de I'urane; mais il se rappela plus tard que le hi de platine avait ete en contact avec des dissolutions renfer- mant ce metal. L'acide manganesique en solution donne aussi des raies noires particuH6res; etdans un cas fort douteux, ou des chimistes tres-habiles soup^onnaipnt la presence de cet acide dans une solution COSMOS. 591 cramoisie de manganese, I'absence des raies trancha la difficulte. Un fait tres-singulier, c'ost que I'addition des alcalis et des acides les plus energiques n'enleve pas a I'acide manganesique la propiiete de pro- duire des raies et de manifester, par consequent, sa presence ans des casou il serait tr5s-difficile de la constater. M. Stockes dec.it de vive voix les caracleres optiques du cobalt, de la chloropliylle, du : ul- fate de quinine, et autres substances. 11 ajoute qu'il est bon, dai]!; ce genre d'experiences , d'employer un prisme qui soit tranducide t';.ns etre diaphane, et sir David Erewster, a cette occasion, recommande de nouveau les prismes en sel de roche. Cette communication fut suivie d'une discussion tres-animee sur I'histoire et les applications de ces decouvertes optiques, discussion a laquelle prirent part MM. Hunt, Brewster, Graham et autres. — M. Apjohn s'etait propose cette question : L'effet mecanique jresultant de la quantite de chaleur employee a vaporiser un liquide est-il independant de la nature de ce liquide? Les tables qui donnent la temperature , la tension et la quantite de vapeurs relatives aux diffe- rents liquidessont encore trop imparfaites pour qu'on puisse arrivcr a des conclusions exactes , alors meme qu'on ne tiendrait pas compte du prix des substances, alcool, ether, cbloroforme, e?prit de bois, etc., que Ton a propose de substituer a I'eau , et des dangers que pour- raient presenter les vapeurs nees de ces liquides. Ce qui est certain , tout le monde en convient, c'est que, meme dans le cas des machines a vapeur actuelles, il resle beaucoup a faii'e pour obtenir de la chaleur tout ce qu'elle pourrait donner, surtout a cause de Timperfection des moyens de condensation , etc. ; et , sous ce rapport , la chimie et la mecanique ont encore beaucoup de progres a reali.ser. — M. Brazier lit una note sur la substance appelee beurre des ma- rais d'lrlande [Irish bog butter). Cette substance se rencontre dans quel- ques localites marecageuses de I'lrlande et de I'Ecosse, enfermee dans des caques ou barils tres-etroits, de construction tout a fait elementaire ; celle que presente M. Brazier a un pied de hauteur sur dix pouces de diametre. On ne connait pas du tout la nature de la substance pri- mitive transformee plus tard en beurre des marais. March', 7 septembre. — M. Hunt lit son rapport sur I'influence de la radiation solaire, c'est un grand travail. Nous en avons trouve I'analyse faite par I'auteur lui-meme dans VArt, journal, et nous la donnons a I'article Photographie. — M. Ronalds a analyse I'huile d'un poisson, appele en anglais sy?)fish fpoisson du soleil) , k cause de sa forme ronde, du genre des gymno- dontes ; les pecheurs de Claddagh le prennent au harpon comme la 592 COSMOS. baleine. La quantite de liquide donnee par chaque poisson, s'elSve a environ 400 litres: on en retire 70 pour 100 d'unc luiilejaune et com- pletement Iran'^parente ; ?a pesanteur specifique est Ircs-fiuble, de 0,87i ci 0,87'.) ; elle brule dans les lampes avec un ^clat comparable a celui des meilleures liuiles vdgelales ; ralcool, a la densite de 0,820, la dissent en quantite considerable ; traitee par I'acide sulfurique, elle dcgage une chaleur enorme ; sa composition cbimique est , car- bone 82,77; hydrogcne 12,99; oxygene 4,24; elle se distingue done aussi des autrcs huilcs par la quantite minime d'oxygene qu'eile con- tient; son equivalent est 7,5. — MM. Lawes et Gilbert ont etudie la composition des fourrages ou aliments dans leurs relations avec la respiration et la nutrition des ani- maux. lis sont convaincus qu'on a donne beaucoup trop d'importance et fait jouer un beaucoup trop grand role a la proportion d'azole ren- ferniee dans les aliments ; ces idees preconguesont ete un grand obstacle au progres , et il est temps, sinon de les abandonner, au moins de les modifier considerablement. Nous avons toujours ete de cet avis. M. Hodges lit une note sur les nodules phosphatiques trouv(5s dans le sable vert du nord de I'lrlande. On les rencontre places imme- diatement au-dessous des Ills calcaires sur les c6tes des comles de Down et d' Antrim. Ce sont des coprolytbes si riches en phosphate de chaux, qu'on les transporte pulverises a Londres , pour les ajouter au gua- no, qu'on denature ainsi. II est question d'employer ces nodules comme engrais. Le sable vert contient cinq pour cent de terre phosphatee pro- venant d'os, les nodules en contiennent de 30 a 50 pour cent : une tonne de sable apporterait au sol 148 livres de terre phosphatee des OS , dont la valeur a trois quarts de denier par livre produirait 9 schel- lings 3 deniers. — M. Penny lit un memoire sur la determination de I'iode. Nous n'en connaissons rien. — M. Tennant fait I'histoire du fameux diamant la Montague de lu- miere. A la derniere reunion de 1' Association britannique, M. le doc- teur Bek3 avait affirme qu'un autre diamant celebreconnu sous le nom de Diamond stab avait ete detache du Koh-i-noor. Suivant lui, lors de la prise de la ville de Coochan on avait trouve parmi les joyaux du ha- rem de Reeza Kooli Kan, le chef de la place, un grand diamant pe- sant 130 carats et portant encore sur sa plus grande face les traces certaines de I'operation qui I'avait separe d'un diamant plusgros; cette face de separation avait d'ailleurs des dimensions assez semblables a celles du Koh-i-noor. M. Tennant regarde I'opinion deM. Beke comrae ti'es-probable , et pretend a son tour que le gros diamant de Russie est COSMOS. 593 lui-m^me un troisi^me fragment de I'enorme diamant connu sous le nom de Montague de himiere , desormais partage entre les hides, I'Angleterre et la Russie; et qui etait primitivement un rhouiboedre dodecaedrique appartenant au systeme tesseral ou cubique, avec quatre directions de clivage paralleles aux faces de I'octaedre regulier. Deux des faces du Koh-i-noor, lors de son exhibition a Londres, etaient cer- tainement des plans de clivage : sir David Brewster est convaincu aussi qu'il n'est qu'une portion d'une pierre magnifique, celie peut-etre qui a ete decrite par I'illustre voyageur Tavernier. La taille du Koh-i-Noor est aujourd'hui completement terminee : de masse sans forme et sans lustre, ilest devenuun bijou qui surpasse en beaute et en eclat tout ce qu'on pourrait imaginer; eclaire par les rayons du soleil, il est vei'itablement eblouissant. — M. Bateson lit une note pleine d'interet sur les moyens inventes par MiM. Glyn et Appel, pour prevenir Tabus que les faussaires pour- raient faire des procedes d'impression anastasique ou i^esurrection- nelle. Ce mode d'impression futdecouvert, il y a neuf ans, par M. Ru- dolph Appel, originaire de Silesie ; on I'a appele resurrectionnel, parce qu'il donne un nombre indcfini de reproductions ou de fac simile par- fails, d'un document imprime quelconque, quelque ouvragee que soil la gravure, ou quelque complexe que soit le dessin. Voici comment on op^re : la feuille imprimee dont on veutobtenir des copies est d'a- bord trempee dans une solution tres-etendue d'acide nitrique, une parlie d'acide pour sept parties d'eau ; on la place ensuite entre des feuilles de papier buvard, pour enlever I'humidite excedante. La solu- tion aqueuse d'acide ne s'attache pas a I'encre de I'imprime qui est grasse ; des lors, si la feuille preparee, comme nous venons de le dire, est placee sur une planche polie de zinc et fortement comprimee, la portion imprimee laissera son empreinte encree sur le zinc, tandis que I'acide nitrique , en contact avec les parties non imprimees , mordra sur la plaque en corrodant le zinc, et la creusera. On enleve alors la feuille originale qui est restee intacte ; Ton etend ensuite sur la plaque une solution de gomme arabique qui n'adherera pas aux portions im- primees huileuses, mais s'attachera a toutes les autres parties : on encre plustard avec un rouleau, I'encre s'attache aux reliefs, qui cor- respondent aux lettres de I'imprime et ne se fixe pas sur la gomme : enfin , on verse sur la plaque une solution d'acide phosphorique qui mord et corrode plus profondement les parlies de zinc roirespon- dantes aux vides de I'imprime, et les creuse assez pour que I'encre des rouleaux ne puisse plus les atteindre. La planche d'impression resur- rectionnelle est ainsi toute preparee et peut donner un nombre d'exem- 694 COSMOS. plaires indefini. Ce modo de reproduction ne s'cU'rete pas aux feuilles imprimties avec de I'encre typographique; toutos les autres encres, meme les plus fugitives, peuvent recevoir une preparation premiere telle qu'elles puissent etre soumises h la meme operation, et voilii cc qui pent creer une source de dangers Ires-graves. Rien de plus facile, en eftet, que d'obtenir des copies d'actions on de billets de ban que assez parfaites pour defier I'oeil le plus habile ; il est arrive de fait maintcs fois, que des banquiers eux-memes y out ete trompes. L'abus que Ton pouvait fuire de leurbrillante invention avail effraye M^l. Glyn et Appel, et ils n'ont pas eu de repos qu'ils n'aient trouve eux-menics un. moyen completement efficace de prevenir la fraude. Ce nioyen est tres-simple : il consiste a impregner la pate qui sort a la fabrication du papier d'un sel insoluble de cuivre; le phosphate, par exemple, qui produit les plus excellents efTets. Pour cela, on ajoute succcssivement a la pate du sulfate de cuivre d'abord, puis du phosphate de sonde qui, par leur reaction mutuelle, engcndrent le phosphate de cuivre in- soluble : on ajoute, en outre, une petite quantito d'un savon gras qui ne seche point; la protection centre la fraude est ainsi double et com- plete. Si le fraudeur cssaye de soumettre une action ou un billet de banque imprimes sur le papier patente aux precedes anastasiques, une couche de cuivre metallique se separe et s'intei'pose entrc le papier et le zinc. Non-seulenient cette couche empeche le relief de se former, mais elle fait adherer si fort le papier a la plaque de zinc qu'on ne pent le detacher qu'en le detruisantet I'arrachant par petits morceaux. De cette maniere le fraudeur est puni de sa coupable tentative, par la perte de I'original ; le public est a I'abri du vol ; la compagnie ou la banque font un benefice reel par Talteration substantielle d'un tilre qu'on ne pourra plus leur i^epresenter et qu'ils n'auront point a rem- bourser, etc., etc. Jusqu'icile travail de la gravure, la beaute du dessin, et la necessite pour les reproduire de recourir a des mains habiles et cheres avaient ete les seuls gardiens de la propriete. II fallait absolument quele frau- deur flit lui-meme un graveur eminent ou qu'il recourut a des artistes distingues; la confidence qu'il etait contraint de faire amenait presque toujours la decouverte de son attentat. Mais quelles ne devaient pas etre les terreurs des directeurs de compagnie et des banquiers, lors- qu'ils savaient que tout homme, un peu initie aux precedes de la chi- mie et de I'impression lithographique, pouvait, avec une plaque de zinc, un peu d'acide nitrique et une presse, reproduire des fac simile de billets et d'actions dont I'oeil de lynx de leurs commis ne pouvait pas soupQonner la faussete, ou mieux, I'origine criminelle? Qui ne COSMOS. 595 conviendra que Ton ne pouvait pas, sans crime, reveler au monde le secret d'un precede si dangereux et qui met dans les mains de lafraude des amies si redoutables, sans reveler en meme temps le moyen de sauvegarder tant d'interets compromis et de rendre le crime impuis- sant? La belle invention de I'impression anastasique fit son apparition en Angleterre en aout 1845, elle fut presentee et decrite a I'institution royale par I'illustre Faraday , et nous reproduisimes dans VEpoque I'a- nalyse de sa legon. Partis quelques jours apres pour Londres, notre premiere visite fut pour M. Appel que nous voulions voir operer el qui reproduisit sous nos yeux en quelques minutes I'article du journal que nous avions consacre a sa decouverte. Nous sortimes de chez lui sans connaitre son secret, mais ravi de ce que nous avions vu. A notre grande surprise, six longues annees s'ecoulerent sans que nous enten- dissions parler uneseule foisdecet admirable procede. Les dangers qu'ils faisait naitre souleverent-ils des repugnances invincibles? La crainte des tristes abus qu'on pouvait faire de leur decouverte paralysait-elle I'ardeur des inventeurs?Ou n'arriverent-ils que tres-lentement aux re- sultats pleinement satisfaisants qu'ils obtiennent aujourd'hui ? Quoi qu'il en soil I'impression anastasique ressuscita a I'exposition universelle de Londres; alors seulement elle fut appreciee a sa juste valeur, eton lui accorda les honneurs du triomplie en lui decernant une medaille de prix. Maintenant qu'elle se montre, d'une part, arrivee ti la perfection, de I'autre, avec des garanties certaines contre les abus qu'elle pouvait engendrer, elle marchera sans doute a pas de geant ; c'est un art veri- tablement merveilleux dont la France au reste pent revendiquer I'hon- neur au nioins en partie , car les procedes de MM. Dupont conduisent presque au meme but que ceux de MM. Appel et Glyn. — Le memoire de M. Hodge sur la culture et le traitement du lin a vivement interesse la section de chimie. L'auteur a fait I'bistoire de cette plante et de son emploi en Irlande depuis les temps les plus anciens ; il a rendu compte des essais de culture qu'il a faits lui-memesur un ter- rain approprie ; il a donne I'analyse des principales substances qui en- trent dans la composition du lin, et decrit en detail toutes les operations qu'on lui fait subir avant de le livrer aux fdeurs. En outre des methodes ordinaires, il a expose le procede entierement nouveau invente et pa- tente par M. Watts, pour separer I'epidernie du brin de lin proprement dit. Ce procede consiste a soumettre les tiges a faction de la vapeur condensee dans des chambres closes, en meme temps qu'on les presse entre de longs rouleaux. Cette communication fut suivie d'une discus- sion tres-animee a laquelle plusieurs manufacturiers prirent une part fi96 COSMOS. active. M. le docteur Ryan rappek le procedc par lequel M. Clausen convertit le lin en un produit qui imite parfaitement le coton. Defen- due par les uns, ccUe invention fut franchement critiques par les au- tres; ce qui est certain, c'est qu'oUe n'a pas encore rempli ses pro- messes. Les meaibrcs do rassociation britannique ont profile de leur sejour a Belfast, ou le lin est cultive sur une tres-grande echelle, pour se mettre au courant de celte importante industrie; c'etait le moment de la coupe et de la recolte; les chimistcs vislterent I'etablissement de rouissage de M. Schenck, et ils virent s'operer dans d'immenses cuves remplies d'eau cliaude la fermentation qui doit enlever I'epiderme : cette fermentation que M. Hodge designe du nom de butyrique repand une odeur tres-desagreable. On pratique dans ces memes ateliers, par des moyens mecaniques , reparation du battage pour separer la matiere ligneuse centrale. Le peignage et le nettoyage complet des fibres se font dans les moulins a lin du voisinage. Le samedi suivant la section de chimie presque en- liore se transporta a la blanchisserie de M. Penton. Les toilcs placees dans de larges cuves en bois sont immergees tour a tour dans une so- lution de chlorure de chaux melee a du carbonate de soude et dans une diluiion d'acide sulfurique. On les bat en outre plusieurs fois avec de grands bras en bois dans un courant d'eau. Les premieres opera- tions terminees , on fait passer les toiles dans des machines ou clles sont frottees avec un savon energique , puis empesees , et dans celles enfin on, par un battage longlemps prolonge, ellts recoivent le dernier lustre. Les cbimistes de Tassociation voulurent aussi visiter la fabrique oil M. Boyd prepare I'acide sulfurique et le carbonate de soude neces- saires au blanchiment du lin. On leur montra I'enorme chambre de plomb ou I'acide se forme, les citernes en plonib oil il est recueilli, I'immense alambic de platine ou on le concentre par I'evaporation ; ils traverserent de vastes magasins remplis d'acide chloihydrique concen- tre, de se!, de craie, de charbon, qu'on mole ensemble pour former le tourteau noir qui, soumis au feu du fourneau , doit produire le car- bonate de soude ; et enfin les grosses cornues d'oi^i se degagent les torrents dechlore qui , passantsur la chaux, la transforment en poudre blanchissante. Restait encore la fabrique d'empois et de coUe de M. Tucker; I'empois se prepare avec de la farine , et la colie s'extrait des mauvais restes de cuir et de sabots des ruminants. Les plus intre- pides enfin ne voulurent pas repartir sans avoir suivi en_detail les diffe- rents precedes par lesquels, dans les ateliers de M. Clonart, on imprime sur la toile les dessins en couleur. Les toiles peintes de M. Clonard alimentent les magasins de la ville d'Ulster et font I'objet d'un com- merce tres-important. I COSMOS. 097 PHOTOGRAPIIIE. Les deux nouvelles inventions , ou les deux nouvelles applications des precedes de la photograpliie et du principe du stereoscope que nous avons laissees entrevoir dans la derniere livraison du Cosmos, ne sent pas encore assez garanties dans leur propriete pour que nous puis- sions les faire connaitre aujourd'hui; mais aussilut que les dcrnieres formalites seront remplies, nous en transmeltrons lous les details a nos lecteurs; ils verront que nous n'avons rien exagere en annonQant qu'elles etendaient considerableoient le champ deja si vaste du bel art des Niepce , des Daguerre et des Talbot. — L'annonce des epreuves instaotanees obtenues par M. Bertscli avait, conime nous I'avonsdit, vivement excite notre attention, et nous nous sommes empresses d'allcr apprecier a sa source la portee de ce brillant perfectionnement. Malheureusement pour nos lecteurs , nous pouvons bicn leur dire ce que nous avons vu; nous pouvons leur indiquer la niarche suivie pour obtenir les epreuves instantanees ; mais nous ne savons pas comment se prepare la couche sensible de M. Bertsch. C'est cortainement du collodion, et les sels de fer lui vien- nenten aide comme agents accelerateurs ; deplus, M. Bertsch emploie I'hyposulfite de soude pour fixer les epreuves; mais voila tout, etle se- cret de son collodion est encore son secret, a moins que, comme on le soupconne, I'exces de sensibilite qu'il a obtenu ne soit le resullat du soin extreme apporte par lui a la mise en pratique des formules con- riues, et de I'obscurite absoluc dans laquelle il opere; ce qui pourrait bien etre. Ce qui est hors de doute encore, c'est que la rapidite avec laquelle se forment les images dans ia chambre obscure hermetique- ment fermee de M. Bertsch est vraiment extraordinaire. L'obturateur destine a couvrir et a decouvrir I'objectif est une plaque metallique niue par un ressort bande et qu'un cliquet arrete devant I'ouverture de I'objectif pour qu'on puisse la lacher a volonle au moment de I'expe- rience. Cette plaque tourne autour d'un point place sur la circonfe- rence de I'objectif, et couvre et decouvre alternativement la lentille dans le mouvement de rotation que le ressort lui impiime; le petit cliquet qui sert a la Isicher, s'arrete aussi lorsqu'elle revient a sa place apres avoir decrit une circonference. L'objectif est ainsi decouvert et recouvert dans I'espace de quelques dixiemes de seconde ; mais il nous semble que cette maniere d'operer laisse beaucoup a desirer sous le rapport de I'eclairement lorsqu'on se sert de substances aussi impressionnables que celle de M- Bertscli. 598 COSMOS. Les parlies inferieures on supericures de robjoctif sont en effet les premieres a so decouvrir ct les dernieres a disparaiire dans la rotation de I'obturateur; et comma I'aberration chromatique et I'aberration de spbeiicite sont les plus grandes pour ces portions de la lentille , 11 doit en resulter un pen de confusion sur les bords des images; confu- sion qui deviendra d'autant plus sensible, que les moycns d'accelera- tion scront plus parfaits. Pour des epreuves instanlanecs, il faut necessairement se servir d'objectifs diaphragmes, a ouverture libre tres-etroite, de maniere a ce que les ditferents points de la lentille soient mis a nu , a peu pres au meme instant absolu; et nous croyons savoir qu'en effet I'habile pbotograplie n'utilise que la portion centrale tres-limitee de sa len- tille. II reussirait mieux encore , s'il pouvait former son obturateur de deux demi-cercles se separant par leur diametre commun; mais nous ne connaissons pas encore de moyens pratiques pour obtenir ce resultat. Les epreuves que M. Berfsch a obtenues devant nous ont ete assez belles, mais pas assez encore pour nous convaincre que, meme en prenant toutes les precautions imaginables, on parvienne a obtenir a coup sur des cliches parfaits. Une coucbc sensible, qui s'imprcssionne instantanement, n'est-elle pas un agent indomptable? ne se refuse-t- elle pas invinciblement a la reproduction exacte des gradations en nuances indefinies d'ombre et de lumiere? Nous le craignons. Ne serait-il pas vrai, au contraire, que toutes les epreuves generalement admir^es, et proclamees des imitations incomparables de la nature, des chefs-d'oeuvre de I'art, sur plaques daguerriennes, sur papier, sur albumine , sur collodion, etc., ont ete de fait le resultat d'une action de la lumiere relativement lente, ou d'une exposition relativement prolongee. Nous croyons qu'il en estainsi; et I'essai de reproduction instantanee d'un biscuit, que M. Bertsch a tente devant nous, avec la lumiere diffuse de son cabinet de travail], vicndrait lui-meme a I'appui de notre opinion : les demi-teintes et les 'ombres etaient imparfaite- menl accusees. En photographic, comme en toutes choses, on devra toujours reconnaitre la verite du vieil adage : Est modus in rebus, sunt certi denique fines Quos ultra citraque nequit consistere rectum. Alors meme que les glorieux et ingenieux essais de M. Bertsch n'au- raient servi qua fixer les limites que I'homme sage ne doit jamais de- depasser, il aurait rendu un immense service a la photographic. Nous I COSMOS. 699 le prions instamment de faire , samedi prochain , un essai solennel et definitif de sa methode , en prenant pour le stereoscope dcs images doubles du magnifique cortege du prince president. Si le defile doit atteindre le boulevard des Italiens a une heure convenable, nous niet- trons tres-volontiers a sa disposition la lerrasse et les moyens photo- graphiques du Cosmos ; c'est bien certainement le plus beau point de vue que Ton puisse choisir. — M. Hunt, le savant qui, en Angleterre, a le plus etudie Taction chimique et photogenique de la lumierc , a enfiri termine son rapport sur les radiations solaires ; et il nous est donne d'en publier des aujourd'liui I'analyse faite par lui-meme : 1" M. Hunt a etudie de nouveau les changements que subissent le chlorure et I'iodure d'ar- gent soumis a raction de la lumiere, et il croit avoir prouve que les noirs de la plupart des preparations pliotographiques, sont produits par de I'argent metallique k un etat extreme de division ; 2° la revivi- fication de I'argent metallique par Taction ducharbon sur les solutions qui le renferment, a longtemps fixe son attention, et il a trouve que la lumiere privee d'action chimique, ou separee des rayons acliniques par Tinterposilion d'un verre jaune, est la plus favorable a la produc- tion ou formation des cristaux d'argent ; 3° il a fait diverses experiences avec de petits appareils voltaiques, dans le but de determiner Taction retardatriceou acceleratrice des differents rayons lumineux sur la pro- duction des phenomenes eleclro-chimiques, et il a obtenu de tres- curieux resultats; 4" il a fait un examen complct de Taction chimique du spectre prismatique sur les plaques daguerriennes, sur Tiodure d'argent employe dans les procedes de la calotypie, sur le chlorure d'argent pur, et sur les plaques preparecs avec le collodion iodure. Dans ces experiences, il a employe en outre plusicurs centaines de morceaux de verre diversement colores et analyses avec le plus grand soin ; les resultats de ces recherches'sont representes par une immense serie de spectres chimiques, obtenus par les rayons qui avaient tra- verse les verres et les liquides colores, ou des solutions transparentes et incolores. Nous citerons encore une curieuse observation faite par M. Hunt. On admet communement que la lumiere transmise par un verre jauno n'exerce plus d'action chimique sur les preparations photographiqucs sensibles. Or cela n'est pas vrai quand la couche sensible est le collo- dion iodure. Des impressions de spectre ont ete obtenues sur collodion a travers une grande vari^te de verres jaunes; ellcs prouvent qu'une bande de rayons chimiques, s'etendant du bord extreme du vert jus- qu'au dela du violet visible, passe a travers ces verres et produit un coo COSMOS. effet instantane sur les preparations plus sensibles. Cos fails deniontrent que dans la chanibre obscure, oil Ton opere sur collodion, on ne doit pas employer desvcrres jaunes;et que les galeries pholographiques ne seront pas suffisamment protegees par des chassis jaunes, si Ton se sert de collodion. STANCE DE L'ACADfiMlE DES SCIENCES. [Seance du lundi \\ septembre 1852.) MM. Deieuil, perc et fils, ont enfin terminoel presente a rAcademie des scien- ces la boussole ou compas enregislreur, self-register^ que nos lecteurs con- naisienl deja par les quelques lignes dans lesquelles nous avons annonce son apparition aux briilantes soirees de lord Ross. Cette boussole a pour but de pointer la marche du batiment, de trois minutes en trois minutes, pendant vingt-quatre heurcs; ce pointage se fait sur une rose en papier, ce qui permet au capitaine de contr61er avec certitude la direction suivic parson navire, et de surveiller plus efficacement la manoeuvre des timo- niers et du pilote. Elle est composee de trois parlies principales : 1° d'un mouvement d'horlo- gerie place au centre de I'appareil; ii est destine afaire monter et descendre la pointe ou le pivot qui porte les aiguilles; ce mouvement d'horlogerie est con- struit en cuivre, atin qu'il n'exerce aucunc influence sur la direction des aiguilles aimantees : 2° d'une vis sans fin armee d'un ecrou qui porte la pointe servant a percer le papier : 3" enfm de la rose formeede trois aiguilles fixees a une feuille de mica, substance aussi parfaitement hygromelrique que possible; la feuille de mica est recouverte d'un disque en velours colie a la colle forte, et donl le tissu a ete imbibe de colle trcs-liquide; cette colle, une fois refroidie, presente une surface bien plane et percee d'un nombre infini do pelits trous ou pores , dans lesquels la pointe pent punelrcr sans efforts apres avoir perce la rose en papier; grSce a cette heureuse addition, la formation du point n'arr(^te en au- cune maniere la marche du mouvement ; cette fois, comme partout et toujour?, un detail, en apparence insignifiant, est devenu la condition essentielle du succes. Lorsque I'aiguille est fixes vers le nord on amene I'axe ou diametre de la rose des vents dans I'axe du navire, et chaque point, perce de trois en trois mi- nutes, vient indiquer tour a lour la deviation de ce dernier axe, par rapport a I'aiguille aimantee; rcnsemble des points, ou la ligne presque continue qu'ils tracent, montre a I'Goil les ecarls de la route. M. Deieuil nous a apporle son ap- parcil et I'a fait fonclionner sous nos yeux : sa marche est tres-reguliere et sa sensibilile tres-grande; ainsi, quand il marche lejour, Tirregularite des points accuse les oscilations produites par les 6branlemenls de la rue; la serie des points perces pendant le calme de la nnil, est au coitraire une ligne parfaite- ment droite. COSMOS. 601 La boussole du capitaine Napier a eteparfailementext^cutee par MM.Deleuil- elle fera honneur a la France : nos construclcurs incontcstablement font beau- coup mieux ct a bien meilleur niarche que les constructeurs anglais. Fabriques en Angleterre, ces beaux instruments coutaienl 600 francs, le mecanicien fran- cais les livre a 450 francs, bien plus elegants dans la forme , et non moins par- faitsau fond. — Un capitaine de vaisseau francais, M. Allain. a execute aussi de son cote un compas marin self-register, fonde sur un tout autre principe; cette fois les ■ ecarls de direction ne sont plus dessines et montres aux yeux ; ils sont compt^s ou exprimes en nombres facilement transformables d'ailleurs en courbes. Cette seconds boussole renfermee dans un habitacle de grandeur ordinaire, et sus- pendue par un niouvement de Cardan^se compose 1" d'un plateau circulaire a cases, plac6 au fond de I'habilacle; 2" d'une aiguille aimantee; 3" d'un meca- nisme propre a distribucr r(?gulierement des grains de plomb, et supporte par le double fond de I'habitacle. Le easier circulaire a 32 cases correspondantes a 32 runibs de vent; et chaque case est divisee en outre en tiois conipartiments. L'aiguille aimantee fixee sur un pivot au centre du easier domine les cases d'environ 5 centimetres; elle porte un reservoir a deux branches paralleles a sa direction ; une seule des branches, celle inclince vers le nord, est en commu- nication avec Ic reservoir ; 1^ autre ne sert qu'a lui faire equiiibre. Le mecanisme de distribution comprend une boite remplie de grains de plomb dans laquelle penetre la partie superieure d'une roue percee dc quarante trous d'un diamelro un pen plus grand que les grains , ct mue par un double rcuage qui lui fait faire mvanablement un quarantieme de tour en six secondes, un tour en tier en quatre minutes. Le reservoir de Taiguille aimantee correspond e.xaclement au point ou la roue, dans son niouvement de rotation , laisse ediapper un a un les grains de plomb; chaque grain, en quiltant la partie inferieure de la roue, lomfae dans le reservoir, suit son canal , tombe dans cello des cases qui se trouvo sous le pole de l'aiguille, et indique le rumb de vent auquel on gouverne , par le nom de cette case : le nombre des grains de chaque case, en raison de dix par minute, mesure le temps pendant lequel on a marche dans la direction corres- pondante. Nous preferons de beaucoup la boussole de M. Napier, qui dispense de toutcalcul, et montre immediatcment a Toeii , non pas seulement les va- riations dans la direction de marche, mais I'ordrcdans lequel ces variations ont eu lieu, ce que ne fait pas I'instrument de M. Allain. — M. Seguin aine, lec^lebre ingenieur, le veritable inventeur delalocomotivc a grande Vitesse, lecreatcur desponts en fil de fer, etc., se repose de ses grands travaux, dans un cbarmanl observatoire qu'il s'est construit au centre des bSti- ments de I'ancienne abbaye de Foutenay, presMontbard les Dijon. 11 vit dans cetie belle retraite en veritable patriarche des temps antiques, partageant tout son temps entre la contemplation descieux, de nouvelles recherches scientifiques et ses devoirs de pere et de grand-pcre de la famille la plus nombreuse et le plus tendrement unie. La , tons ne font qu'un cocur el qu'une ame, et rien n'est plus touchant que ce plein accord des intelligences, que cette union indissoluble des volontfe, s'identifiant dans un centre commun , la pensee et la volonte du 602 COSMOS. chef de la tribu. Si nous avions pu retrouver la piste d'un manuscrit destine u la Sociel(5 d'encouragemcnt, nous aurions grandement interesse les lecteurs du Cosmos, en lour transmcllant I'analyse d'un precicux travail de photometrie fait on famille dans les longucs soirees d'hiver deFontenay. M. Seguin avait temoi- '^ne lo desir d'uno comparaison ctablie par tous les ycux a la fois des diverses lumieres employees dans I'economie domcstique. Aussitdt que le plan des expe- riences fut arriHe, tous, grand-pere, grand'm^re, peres, meres, freres et soeurs, f'endres et brus so mirent a rauivre; lumiere des chandelles, lumiere des bou- "ies, lumiere des lampcs de diverses formes et alimenlees de diverses huiles, lumieredu gaz, etc., etc., tout fut etudie parlous; lescliiffres des eclairements relatifs ne furent arrc^les definitivement ct inscrits sur les registres d'obser- valions, que lorsqu'ils avaient ete acceptes par tous, ou du moins par la ma- jorile. Au point de vue de la thcorie, on pent mieux faire sans doute, mais an point de vue pratique ces recherches ne laissaient rien a desirer , et nous re- grettons vivement qu'elles soient perdues. C'est a Fontenay aussi que M. Seguin a concu et redige cette grande et belle etude des attractions moleculaires qui ramenentles ph^nomenessimyst^rieux, si inabordables, si inexpliques etpresque sans raison d'(^tre, de la cohesion, de raffinile, de la repulsion apparente ou dilatation, a la seule loi newtonienne de I'attraclion en raison inverse du carre de la distance. Les raisonnements de M. Seguin sent si simples, ses hypotheses si evidemment vraies, ses explications si pleinement satisfaisantes, que sa magnifique synthese aurait du etre accept^e avecenthousiasme. Peut-etre que lesmemoires lus a I'Academie de loin en loin, par notre savant ami , ont ete presents sous nne forme trop aride; nous essayerons, dans quelques jours, de leur donner une vie nouvelle par une analyse rapide et animee. Mais revenons a I'observatoire de Fontenay et par lui a la seance de I'acade- niie. Place danslevoisinagede la papeteriedeM. Montgoirier,gendredeM. Seguin, ou mieux en contact avec cette bruyante usine, I'observatoire est trop ebranle , trop agite, pour que certaines observations nedeviennent possibles qu'a I'aidede precautions et d'artifices qu'il'n'est pas toujours facile de deviner. Cette situation singuliereetpenible a fait naitre la note suivantecommuniquee parM. Mauvais. Les astronomes se servent assez souvent d'une surface mince de mercure pour reflechir I'image des etoiles avant de la recevoir dans les telescopes. Mais ce miroir liquide offre plusieurs inconvenients qui contrebalancent jusqu'a un certain point I'avantage de son horizontalite et du poli qu'on pent lui rendre si facilement. Le plus grave parmi les inconvenients presentes par les hori- zons artificiels en mercure est leur excessive mobility qui fait danser I'etoile r^flechie dans le champ du telescope, toutes les fois que le sol qui supporte la cuve de mercure vient a etre ebranle. Or, il est assez difficile et peut-6tre meme impossible d'empecher le sol et les murs d'un observatoire d'etre mis en vibration par le mouvement des corps lourdsquise meuventdansle voisinage, et meme a une assez grande distance. Cette difficulte qui paraissait insurmontable, vient d'etre heureusement tranchee par MM. Seguin et Mauvais. L'exp^dient imagine par eux afm d'obvier aux trepidations du bain de mercure, COSMOS. 603 est d'une simplicite extreme, et cependant, tout simple qu'il est, il donne ur.e sta- bilile telle a la surface reflechissante du mobile horison, que les etoiles pcuvent y supporter d'assez forts grossissements sans qu'on les voie meme trembler. MM. Seguin et Mauvais essayerent d'abord, mais en vain, de placer le vase a mercure sur des coussins elastiques, sur des ressorts a boudin, de I'attacher a des ressorts, de le suspendre a Textremite do lames 6lasliques ; ils desesperaient presque, lorsqu'ils eurent I'heureuse pens^e de recourir a une laniere de caout- chouc vulcanise: ils la plierent en deux, ils fixerent au pli, c'est-a-dire au milieu de la bande, le plateau cjui supporte I'liorizon de mercure et rattacherent les deux bouts a une corde suspendue au plafond. L'effet de ce mode de suspension fut merveilleux, le niiroir liquide fut completement soustrait aux influences des vi- bralions de I'edifice ; et les observations, jusque-la tres-difficiles ou presque im- possibles, se font aujourd'hui avec une securite et une regularite qui ne laissent absolument rienadesirer. Puisque cet arrangement a parfaitement reussi dans I'observatoire deFontenay, que les pilons et les machines d'une immense papeterie ebranlent jusque dans ses fondements, il est plus que probable qu'il sera plus efficace encore dans les autres observatoires oii les causes d'ebranlement sont bien moins continues et d'une puissance incomparablement moindre. Une con- dition essentielle du succes, c'est que le poids du bain de mercure ne soit pas assez lourd pour epuiser I'elasticite de la bande de caoutchouc, et ne Tamene pas au maximum de la tension. — M.l'abbe Zantedeschi annonce qu'il a observe des mouvementstres-marques dans plusieurs plantes sensibles , la Mimosa ciliata, la Mimosa pudica et dans le Desmodium gyrans, lorsqu'il les a soumis a Taction directe des rayons de la luno', ce scrait, d'apres ce savant, une confirmation nouvelle do la radiation ca- lorifique de la lumiere lunaire que M. Melloni a eu tant de peine a constater, avec de grandes lentilles et des Ihermoscopes tres-sensibles. — M. Sire , preparateur a Besangon , a apporle une nouvelle piece a I'appui de sa reclamation de priorite : c'est un certificat de M. Terrier, horloger, qui fut charge par lui, en decembre I80I, de la construction de son appareil destine a d6montrer la fixite du plan do rotation. Le passage suivant de la lettre de M. Terrier nous a paru presenter quelque interet. « J'ai cru voir dans ces faits (fixite du plan , orientation , etc., etc.] une nou- velle explication de certaines irregularites qu'on observe dans la marche des montrcs , lorsqu'on leur imprime des mouvements dans differents sens. Je citerai encore une application. On avait prepare une piece d'artifice qui, par sa dispo- sition , devait produire deux mouvements de rotation dans des plans perpendi- culaires entre eux. Un de mes amis , connaissant I'instrument et les experiences de M. Sire, remarqua que cette piece ne pouvait pas marcher. En effet, toutes les cartouches qui devaient faire mouvoir la piece ont brule, et un seul mouve- ment s'esl produit. » — M. Hamann, habile constructeur, auquel on doitdeja plusieurs instruments ingenieux, avait pense, lui aussi, a tirer parti de la fixite du plan de rotation des corps; il est meme entre le premier dans la lice, commeleprouveun paquet cachete, depose par lui a I'Academie des sciences, le 10 mars 1851. (304 COSMOS. « Lcs experiences deM. Foucault, disait-il, qui onl demontro rinduence du mouvement de la terre , m6me dans Ic cas d'observations faitcs sur une pcUto eclielle, m'ont donne I'idce d'uliliser ces resuUats pour la construction d'un iiistrunient servant a s'oricntor et a trouver la hauteur du pdlo d'un lieu quol- conciue. L'appan-il que je m'occupe de construire, consisle en un tourniquet olectrique, donl I'axc do rotation est suspcndu de maniere a pouvoir se placer dans toules les directions. Deux ccrcles divises servent a mesurer I'angle que fait cct axe avcc la pcrpendiculaire et avec I'liorizontale. Le tourniquet est o'quilibre de maniere a n'ctre pas soumis a Taction de la gravity ; relcctricitc lui communique un mouvement de rotation tres-rapide , qui lui assure la stabilite sous le rapport du plan de rotation dans lospace. On amene lo plan de rotation (lu tourniquet dans une position ou il reste invariable; dans cette position , le meridien de I'endroit se trouve etre pcrpendiculaire il I'axe du tourniquet, et Tangle que fait ce plan avec la perpendiculairc correspond a la hauteur du pole. Cetappareil pourra servir en mt^me tsmps a determiner la direction du mouve- ment relatif de Tendroit ou il sera pose, Icl qu'un bateau ou un autre point mobile quelconque. » La priority de Tidee appartient done a M. Hamann; mais son instrument, malhoureusement borne a des tatonnements et des essais, est reste a Telat de projet et n'a pas ete soumis au contr61e de Texperience. De plus, son tourniquet ne dovenait une espece de boussole d'inclinaison, et ne pouvait lui indiquer le plan du meridien qu'apres qu'il Ty avait amene a la main, et par Tobserva- tion de la direction dans laquelle le plan de rotation restait invariable. Quant a la hauteur du pole, M. Hamann voulait la deduire de Tangle que fait la pcrpen- diculaire avec le plan de rotation du tourniquet electrique, ce qui na plus re caractere de simplicite et cette unite d'aclion qui caracterisent la me- thode do M. Foucault. On ne pent pas pourtant refuser sa part de gloire a is\. Hamann, qui a su par la theorie et quelques mauvaises experiences arriyer tout d'un coup a la conception assez comp'.exe de la possibilitc de trouver To- rientation et la hauteur du pole par la rotation des corps. DF. t'lMPBIMERlR DE CJI. LAIR'RE (ANCIENNE MAISON CRAPELET), rus de Vaugirard, 9, prJs de I'Odeon. COSMOS. G05 HEUiSION DE l'aSSOCIATION ALLEJIANDE POUR l'aVANCE.MENT DES SClEiNXES. WIESBADEN 1852. D63 le 17 septembre , un grand nombre de savants venus de toutes les parties de I'Allemagne, firent leur entree dans la ville- Chaque convoi du chemin de fer accroissait le nombre de ces visiteurs bienveniis, en I'honneurdesquels tous les hotels etaient pavoises de drapeaux aux couleurs nationales. Pour ctre membre privilegie ou titulaire de I'Association, pour avoir le droit de prendre la parole et de voter au sein des reunions , il fallait avoir fait ses preuves par la publication d'un ouvrage sur I'histoire naturelle, la physique ou la medecine. Mais, pour etre admis comme associe temporaire, avec la faculte d'assister comme simple auditeur, a toutes les seances, et de prendre part a toutes Its reunions de fetes, 11 suffisait d'avoir paye la modeste contribution de deux florins ou dollars de Prusse, un peu moins de huit francs. Le nombre [des membres et des souscripteurs s'est eleve a environ 800. Plus de cent noms alle- mands, honorablement connus, donnaient aux listes de iSo^, un eclat vraiment extraordinaire. Nous indiqueronSjparmi les plus illustres, MM. Leopold deBuch, Rose, Magnus et Von Carnal de Berlin; MM. Haidinger, Schroetter, Von Etlings- Hausen, Von Hauer et Jager de Vienne; MM- Leonard et Chelius d'Heidelberg, Nees Von Esenbeck de Breslau; Gerlach, Witt et Heyfelder d'Erlangen, Voeh- ler, Baum , Liicke , Weber de Gottingue, Texter de Wursbourg, Hill et Blazius de Halle; Forchammer et Himly de Kiel, Seyfer de Stuttgard, Eisenlohr de Carl- sruhe ; Fichter, Vierord et Schiossberger de Tubingue, Schimper de Schwitzin- gen. Schmaltz de Dresde, Bach de Boppard, Rau de Bern, Lomby de Iburg ; Mar- tin d'lena, Rossmaesler de Leipzig , Lehman de Hambourg ; Plucker, Weber et Budge de Boim ; Nasse de Marbourg, Leuckhart, Vogel, Hoffman, Eckhard et Dieffenbach de Giessen, Miiller d'Aix-la-Chapelle,Miiller et les deux freres Sand- herger de Wiesbaden , SchuUz de Deidisheim , Stannius et Moser de Mayence, Adelman de Dorpat, Sporer deSaint-Petersbourg, et Gioesener de Liege, etc, etc. L'Augleterre etait representee par vingt-deux savants : MM. Hamilton, Sco- resby, Austen, Morier, Hoffmann, Lee, Hooker, Waller, etc. Le nombre des Francais ne s'elevait qu'a neuf , et Ton comptait parmi eux M. Charles Bona- parte, prince de Canino, le comte d'lsoard-Vauvenargues^, Marcha!, Jolyde Tou- louse, etc. La premiere reunion gen^rale a eu lieu le matin du 18 septembre, dans la grande salle du Kursaal ; le president , M. Frezenius de Wiesbaden , ouvrit les seances du congres par une courte adresse, dans laquelle il rappelait le but et les avanlages de Tassociation allemande. On lut ensuite les reglements, puis un rapport sur le projet de monument a Clever au grand naturaliste Oken, d'lena. M. Von Leonard fit une brillante lecture sur les produits et les r^sidus ou scories des fonderies des hauts-fourneaux au point de vue des hypotheses geologiques; M. Sandberger communiqua un rapport sur les travaux de la soci^te g^ologique du Rhin moyen; M. Spengler, un memoire sur I'efficacite des eaux d'Ems dans 24 OCTOBRE 1852. 26 606 COSMOS. ie Iraitement des broncliites ; M. Guido Sandberger, uno note sur I'etude des debris organiqiies. Ledimanche, 19 septembre, I'assemblee savante se Iransporta tout entiere au Rhein2;au ; les deux jours suivantsfurent consacrfe a des fetes cliampetres don- nees par la municipalile do la ville et le grand-due de Nassau, dans les sites si pittoresques de Nersberg et de Plaltz; le prince avait largement ouvert ses caves; c'etait comme une inondation des c61ebres vinsde Steinberg el des meil- leurs crus de la valine du Rhin. Lundi , mercredi et jeudi , les sections furent en seance depuis huit heures du matin jusqu'a une heure apres midi. Les deux autres seances generales se sont tenues le mardi et le vendredi. Dans I'uneM. Haidingerinteressa vivement par son compte rendu des travauxde I'in- stilutgtologique" imperial deVienne. Le principal objet de ces travaux est la pu- blicatron d'une serie de cartes geologiques des possessions aulrichiennes, en commencant par I'Autriche proprement dite , I'ltalie, la Ilongrie, la Boh^me ; on espere que cette immense publication sera terminee en'ltrente annees , grftce a I'habileleetal'ardeur infatigable des jeunes coUaborateurs du savant direc- teur, MM. Yon Hauer, Yon Ettingshausen, etc. M. le professeurNees Von Esen- beckcelebra, dans un discours d'apparat, le 200' anniversaire de I'Academie Leopoldo-Caroline; il raconteson origine, el fait I'analyse rapide de ses travaux. M. le docteur Posner lut un memoire sur I'influence que la profession medicale peut avoir sur la condition sanitaire des societesbumaines. Dans la troisieme reunion generale, le vendredi, M. le professeur Neeslut des considerations sur la responsabilite du gouvernement, au point de vue des epi- demics; M. Wolf un memoire sur le bassin tertiaire de Mayence; M. le doc- teurs Rossmaeler une note sur la necessitede multiplier les associations pour ob- jets scientifiques. La ville de Tubingue a 6te clioisie pour lieu'du congres de 1 853. Les communications faites aux diverses sections ont ete tres-nombreuses, les discussions ont ete interessantes ; nous ne pouvons qu'indiquer rapidement les litres des principaux memoires : , , , Section de physique. — M. le professeur Miiller, tableau de formules gene- rales pour la cristallographie. M. le professeur Magnus, sur les deviations des projectiles. M. Langsdorf, sur le pouvoir conducleur de I'argent. M. MuUer, ap- pareil destine a mettre en evidence le developpement de la chaleur dans la con- gelation de I'eau, et explication nouvelle de la formation de la grele. ^ Section de chimie. — M. le professeur Yon Heim, memoire sur les graisses animales M. Seybel, sur les progres des manufactures chimiques en Autnche. M Schoedler, sur la carbonisation dubois sous I'eau. M.Hoffman sur I'emplo. des appareils pour la combustion des gaz, dans I'analyse elementaire des substances organiques. Section de geologie. - M. le professeur Zimmermann, sur des formations vraiment r^centes de sulfures. M. F. Sandberger, sur la geologie du Nassau. M. Kurr, sur des dents humaines fossiles, que M. Meyer croit provemr d etres po^t-diluviens. M. Klepstein, sur les formations geologiques de la Hesse. M. Au- COSMOS. 607 sten, sur la vallee du canal britannique ou de la Manche, el les accumulations produites dans son sein. M. Dumont, comparaison entre les formations geologi- ques de I'Angleterre et de la Belgique. M. Von Hauer, sur les formations tertiaires de Vienna. M. Schwarlzenberg, sur la g^ologie de rAlgerie. M. Von Ettings- hausen, sur les fougeres et autres v^getaux des formations carboniferes de Stra- donitz, pres Beraun. Jit. Desor, sur les phenomenes paralleles produits par les deluges et les glaciers dans la Scandinavie, la Suisse et I'Amerique du Nord. RI. Braun, sur les groupes fossiies de Salzkausen. RIM. Von Meyer et Thioiliere, sur les vertebrcs des couches lithograpliiques recemment decouvertes a Ceron, France. M. Forclihammer, projet d'une carte sous-marine de la Mediterrannee. M. Lesquereur, sur la formation des toufbes. Section de botamque. — M. Hoffmann, sur I'influence des rivieres limites sur la distribution des plantes. M. Schimper, sur un plan d'arrangement spirolo- gique des plantes. M. Fresenius, sur les champignons de la maiadie des vignes. M. Lehman , sur le developpement de chaleur produit dans la belle plante Victoria regina. M. Schuct, sur la multiplication des orchidees par bulbes. M. Wirtgen , sur le genre menthe. M. Hoffmann , sur le champignon rouge des pommes de terre dans la Westphalie. M. Schenk, sur la culture du ver a sole dans le Nassau. M. Loehr, sur la presence de plantes de I'Allemagne du sud dans le nord , et reciproquement. M. Seeman , sur una substance grasse obtenue d'une euphorbiac^e , Stillingia sehifera , tres-employee en Angletarre pour la preparation de la slearine. M. Brandis, sur une pluie atmospherique de petits champignons noirs arrondis, Sderotium semen, pres de Cologne. Section de zoologie. — M. Lee , sur la dependance des mamelles relative- ment a la corde spinale du cerveau. M. Verordt, surun procedo plus facile pour compter le nombre des globules du sang , sur la structure microscopique des organes nerveux centraux. M. Gerlach,'sur les papilles cutanees et les organes pyramidaux speciaux du sens du toucher; contrairement a ce qu'avait avanc6 M. Wagner, tous ces organes ont presente des ramifications vascuiaires. M. Hering, sur la periode de temps de la circulation : elle est d'une demi-mi- nute danslecheval, et n'est acceleree ni par la respiration ni par les battements du coeur. M. Budge, influence de la section des racines spinales anterieures et postericures sur la pupille des grenouiUes. M. Moleschott , sur la diminution de I'acide carbonique dans I'air respire, les globules rouges du sang, I'ablation du foie et de la rate des grenouilies, et sur la formation du Sucre dans les ani- maux sous la dependance^du foie. M. Will, sur les polls des chenilles : ce sont des tubes contenant de Tacido formique. M. Remak, developpement du foetus des vertebres : le germe plat des poulets est compose de trois couches corres- pondantes a la sensation, au mouvement et au developpement des systemes glandulaire et intestinal. M. Schiff , atrophia des os produite par la section des nerfs. M. Mayer, sur la structure microscopique des fibres nerveuses et des ganglions, et sur le raccourcissament des nerfs de la sangsue par une gaine musculaire. M. Waller, sur les fonctions des ganglions et de la moelle epiniere, mises en evidence par la section des racines spinales. M. Schlossberger, sur la constitution chimique du cerveau dans les divers animaux, et a differents ages. M. Charles Bonaparte, sur quelques especes nouvelies et la classification des oiseaux. M. Rossmaessler , sur la necessite d"une investigation anatomique des coquilles. M. Calvvar, sur le developpement du Bucconium mactatum; dans cette espece, plusieurs ceufs contribuent au developpement d'un memo indi- 608 COSMOS. vidu- tandis quo de I'ceuf d'un tubularie il sort, au contraire, plusieurs embr'yons , commo M. Beneden I'a demontr(§. M. Joly, sur la cause exterieure reelle de la coloration dcs cocons du ver a sole. Section de medecine. — M. Rau , sur les tubes acoustiques at les sondes en gutta-porcha. M. Groisinger, sur lo typhus en figypte, caracteris6 par des symplomes bilieux et la dilatation de la rate. M. Hoeflo, sur les champignons microscopiques qui se montrent dans les cxsudations muqueuses. M. Nauman, sur I'amaurose dans ses rapports avec riiypertrophio des glandes thyroids et du cccur. M. Snell , sur la perte de la sensibilite tres-frequente dans les aliena- tions mentales; il cite 18 cas de perte totale , et 160 cas de perte partielle de la sensibilite. M. Erlenmeyer, sur les perturbations ou desordres du sens du toucher, et leurs rapports avec les maladies mentales. Le congres a pris una determination qui donnera beaucoup plus d'int6ret a ses seances , c'est da n'admattra aucune communication d6ja connue par voie d'impression. PHYSIQUE DU GLOBE. ROTATION DE LA TERRE. — GYROSCOPE DE M. FOUCAHLT. L'appareil dont M. Foucaul t s'est serv i pour demontrer les propriety nouvelles des corps tournants.etleurs rapports aveclesmouvementsde la terra estrepresente Fig. 1 et 2. par la fig. 1, dans laquelle W est un tore en bronze, aussihomogene que possible COSMOS. 609 et mieux (5quilibr^ sur son axe par I'addition de quelques vis qui font coincider exactement son centre de gravity avec son centre de figure. L'axe du tore en aciertrempe, est termine par deuxpointes coniques, retenues a frottement d'oux parlesextremitesdedeuxvis77'(rig.2),faisantrofficedecrapai((/»ies.Surl'axedu tore se trouve un pignon r, qui peut engrener avec les dents d'une roue, destinee a imprimer au tore un mouvement de revolution tres-rapide, qui peut aller jus- qu'aitlO tours par seconde. L'instrument, al'aideduquel le tore peut etremis en rotation, n'a pas besoin d'etre decrit, car tout systeme de roues denizes peut servir a cet effet, pourvu qu'il y ait une roue capable d'engrener avec le pignon du tore et qu'ellese meuve avecassez de vitesse. Le centre du tore n'est pas a jour. II est occup(5 par un disquo plat qui porte une lame de verre a faces paralloles , ou un miroir metallique, a I'aide desquels on peut reconnaitre exactement, par la reflexion d'une mire eloignee, le plan fixe de rotation du mobile. Le tore et son axe sont portes par un anneau cylindrique b h' (Qg. \ et 2}, dont l'axe du tore occupe un des diametres.C'est dans cet anneau que sont vissfe les trous coniques ou crapaudines qq', dans lesquels entrent les deux pointes de I'arbre du tore qui peuvent, par suite de cette disposition, etre plus ou moins genees dans leur mou- vement. Au-dessus des vis a crapaudines, I'anneau porte des vis verticales a ecrou mobile uu', qui conjointement avec les autres vis horizontales vv' (Go-, g) sont destinies a ramener I'^quilibredans tout le systeme quand on le pose sur les couteaux cc' en acier trempe, qui sont fixes sur la partie exterieure de I'anneau aux extremites de son diametre perpendiculaire a celui qui contient l'axe de ro- tation du tore. Ces couteaux, dans leplan'de la section moyenne de I'anneau peuvent etre installes sur deux plaques en agate que porte un troisieme anneau del' (fig. 1) , qui est le plus exterieur du systeme. Les diverses parties de I'appa- reil que nous venons de decrire, doivent etre ramenees par des tatonnements a un etat d'equilibre indifferent, tel que, les couteaux reposant sur les plaques par- faitement de niveau, quelle quesoit la position donneeau tore autourde son axe I'anneau qui le porte se maintienne toujours dans le plan horizontal. On peut alors considerer I'ensemble de ces pieces comme le fleau d'une balance de pre- cision, que le plus petit poidsajoute d'un cole ou de I'autre peut faire immedia- tement trebucher. Quant au cercle ou anneau cylindrique exterieur dd', il est dispose de telle maniere, que les plaques d'agate destinees a porter les couteaux soient sur son diametre horizontal , tandis que son diametre vertical contient I'appareil de suspension qui lui donne une tres-grande mobility. Cet appareil de suspen- sion se compose d'un crochet o fixe a la partie superieure de I'anneau, par lequel on le suspend a'un fil de sole sans torsion f garanti, par un tube ver- tical, de Taction immediate des agents exterieurs, et attach6 a une vis m (fig. 1), qui permet de soulever ou d'abaisser I'anneau de tres-petites quantites, suivant le besoin. — La tige qui porte le crochet passe a travers un coussinet double q dont la partie superieure sert en meme temps de frein pour fixer I'anneau dans un azimut quelconque. II est bien entendu que le frottement de la tige dans le coussinet est nul , et que ce dernier n'est la que pour emp^cher les mouvements pendulaires de 610 COSMOS. 'anneau. — La parlie infcrieure de cet anneau porte une pointe conique q qui se meut dans une crapaudine , sans pourlanl la toucher, car elle n'a d'autre but que celui du coussinet superieur, c'est-a-dire d'empecher le balancement deTanuoau. Tout cot ensemble de pieces est supporte par un demi-cercle solide exlericur g qui est soulenu par un pled a vis calantes aa', a I'alde desquelles on peut mettre le fil et le grand anneau dans un plan parfaitement vertical. — Le tore et son anneau peuvent etre facilemenl retires de dessus les plans d'a^ale du cercle exlerieur pour elre portes snr I'appareil qui doit mettre le tore en rotation, une fois qu'elle a 6t6 oblenue, on replace tout le systeme dans le cercle exterieur , oil les ph6nomenes dus a la Cxite du plan de rotation ne tardent pas a se produire. Pour mesurer le deplacement du grand cercle par rapport a I'observateur suppose fixe, ou plut6t pour constater le sens et la quantite du mouvement de rotation de I'observateur, on a trace sur la surface ext^rieure du grand anneau des divisions qui correspondent aux degres, minutes, etc. , d'un cercle horizon- tal qui aurait pour centre celui de tout le systeme^ et pour rayon la distance de ce centre a la place occupee par les divisions, qui se trouvent vis-a-vis les outeaux du cercle interieur. Un microscope permetde lire les plus petits depla- cements des divisions du cercle par rapport a un fil fixe, tendu au foyer de I'oculaire. Par ce moyen on constate avec facilito la marche angulaire du cercle, proportionnelle au sinus de la latitude. Si, au lieu de placer les couteaux sur les plaques d'agate, on y met les tetes de \iiqq' qui portent I'axe du tore, ce qui empeche tout mouvement d'inclinaison du cercle interieur, on observe immediate- ment le phenomene de I'orientation de I'appareil dont le grand cercle va se fixer avec le plan de rotation du tore, dans le premier vertical, tandis que I'axe du tore s'arrete dans le plan du meridien terrestre. Que si, au contraire. Ton replace le cercle interieur avec ses couteaux sur les plaques d'agate, et que Ton fixe k I'aide du frein q le grand cercle exterieur dans le plan du premier vertical , tandis que I'axe du tore se trouve sur le meridien, on verra aussitot I'inclinaison se manifester et le cercle interieur tournera sur ses couteaux, jusqu'a ce que I'axe de rotation du mobile soit parallele a celui de la terre, et que le sens du mouvement du tore soit le meme que celui de la rotation diurne du spheroide terrestre. Voila quelestl'ingenieux appareil imaging par M. Foucault et construit par M. Froment, a I'aide duquel il est possible de s'orienter, de trouver le pole ou de determiner la latitude, et d'etudier la vitesse du mouvement angulaire de la terre sans avoir recours ni aux observations astronomiques, ni aux indica- tions mobiles de la boussole , ni aux oscillations des pendules qui sent tou- jours difficiles a etablir dans de bonnes conditions, et qu'il n'est pas moins difficile de rendre portatifs. METEOROLOGIE. VAPEURS VESICULAIRES ET FORMATION DES NUAGES, PAR M. L'ABBE RAILLARD. En parcourant le programme de la Soci^te des sciences de Harlem , pour I'annee 1852, programme que M. Plucker nous a communique, et que nous COSMOS. 611 reproduirons dans nos plus prochaines livraisons, nous avons rencontr6 le passage suivant : « D'apres les recherches de M. Clausius , la reflexion de la lumiere dans I'atmosphere, et par consequent Fazur celeste, ainsi que les teintes rougeatres de I'horizon, quand le soleii s'en approche le matin et le soir, ne sauraient etre expliquees qu'en admettant qu'elles sent produites par des vapeurs vesiculaires, c'est-a-dire par un amas de globules composes d'une pellicule limpide et remplie d'air, etsuspendus dans I'atmosphere; la Soci^te demande que la presence , dans i'atmosphere , de celte vapeur a l'6tat vesicu- iaire , soit demontree par des experiences directes, et que le phenomena du passage du gaz d'eau a I'etat de vapeur d'eau, c'est-a-dire d'eau liquide, mais dispersee dans un grand volume d'air ou dans un espace vide tres-elendu , soit expliquee par des experiences exactes et d^cisives. » Nous avons analyse les recherches de M. Clausius , du moins la premiere partie, dans la seconde livraison du Cosmos ; nous 1' avons suivi jusqu'au mo- ment ou il conclut que pour expiiquer la reflexion et la refraction atmosph^- riques, il faut necessairement admettre que les petites masses transparentes qui reflechissent et refractent la lumiere, sont des lamelles extremement minces, a surfaces li mites paralieles. II parait bien difficile, pour ne pas dire impossible , d'admettre I'existence de semblables lamelles plates. M. Clausius I'avait compris , et par une transition par trop brusque, il avait essaye de rattacher son hypothese a la theorie gen6ralement admise , en afhrmant que les vapeurs vt'siculaires de Saussure, les bulles de gaz emprisonn^es dans une enveloppe liquide tres-mince, equivalaient a deux lamelles liquides. Nous ne pumes pas comprendre , nous I'avouons , que le savant physicien eflt eu mSme la pensee de revenir ainsi , par un tour de passe-passe , a la forme de globules spheriques qu'il avait completement rejetee ; nous nous refu- sames done a le suivre sur ce nouveau terrain ; nous faisons plus aujourd'hui : nous venons combattredirectement, avec M. I'abbe Raillart, I'hypothese des vapeurs vesiculaires que la Societe de Harlem semble admettre comme une v6rite susceptible d'un demonstration certaine. La plupart des physiciens ont adopts, sans s'en rendre assez compte, une opi- nion tres-singuliere, relativement a la constitution des nuages, qu'ils composent de vapeurs vesiculaires, c'est-a-dire de globules d'eau remplis d'air. Les nuages, ainsi que les brouillards, seraient, suivant eux, des amas de pelits ballons aeros- tatiques, formes a I'exterieur d'une couche mince d'eau spherique, servant d'en- veloppe a une sphere gazeuse ou a une bulle ronde d'air. Le celebre Saussure imagina le premier cette singuliere hypothese, a I'epoque ou les freres Montgol- fier venaient de remettre en vogue les ballons oublies depuis soixante ans. Place vn jour sur le flanc d'une montagne, il crut voir comme de petites bulles volti- ger dans toutes les directions , et il transforma ces globules en vapeurs vesicu- laires. Si, I'oeil arme d'un microscope, on regarde au sein des vapeurs qui s'ele- vent au-dessus de I'eau chaude ou d'un brouillard, on voit apparaitre devant I'objectif une multitude de petits globules dont la transparence n'est pas homo- gene, qui passentet repassent, s'approchent ou s'eloignent, etc.; la suspension 612 COSMOS. de cos globules, Icur legereto specifique permettent-elles d'y voir autre chose que dc pelitsballons creux, des buiies dc savon, des vapours veiiciilaires ? Enfin, un tr^s-habilo physicien, M. Bravais , a montre recemment que I'arc- en-ciel blanc s'expliquait trtis-facilement et tres-completement par raclion de globules eau et air sur les rayons lumiiieux qui lestraversent. L'arc-en-ciel blanc existe, les globules ou les vapeurs vesiculaires doivent done exister aussi. Nous venons d'analyser en quelques lignes les fails bien vagues et les raisonnemenls peu concluants sur lesquels on appuie I'hypothese des vapeurs v^siculaires : tout ceia ne supporte pas la discussion. H" Saussure a vu voltiger dans I'air des globules ronds; mais rien ne lui prou- vait que ces globules ^^aient liquides a la surface , gazeux a I'inlerieur ; des glo- bules plcins ou enlierement liquides peuvent voltiger tout aussi bien. Lorsque, par I'effet d'un obstacle, un courant d'air se releve, il eniporte et fait monler avec lui, meme de tres-grosses gouttes de pluie. 2° On concoit peut-etre que quand la vapeur monte au sein du liquide et ar- rive a la surface la legere nappe d'eau soulevee puisse se detacher, envelopper un peu d'air, et former un petit ballon que les courants ascendants d'air chaud entraiueront. Mais rien de semblable ne se passe dans la formation d'un nuage. II n'y aplus alors de vapeurs produisaiit un eiTet mecanique et soulevant une nappe liquide. Void au contraire ce qui arrive : si, lorsque la vapeur repandue dans I'air est arrivee sur quelques points au plus haut degre de tension qu'elle puisse avoir a la temperature actuelle, celte temperature vient a s'abaisser, la vapeur se precipite en partie , elle passe a I'etat liquide ; ella passerait meme a r^tat solide si I'abaissement de temperature etait assez considerable ; c'est ainsi que Ton voit se deposer de I'eau ou du givre sur des corps plus froids que I'air humide environnant. Or comment dans ces circonstances pourrait-on convevoir la formation de vcsicules aqueuses , ou trouver des nappes liquides qui se con- tournent sur elles-memos et se ferment pour emprisonner des bulles d'air? 3° L'acte de suspension el la legerete de transport des globules n'exigent nul- lemenlqu'ils soient en partie liquides, en partie gazeux ; au contraire, la consti- tution vcsiculaire ne donne en aucune maniere la raison suffisante de la suspen- sion des nuages dans Fatmosphfere. En effet, quelle que soil la nature du gazque les globules renferment, ce gaz fut-il de I'hydrogene pur, leur enveloppe les rendra toujours specifiquement plus pesants que I'air. Bien plus, cet exces de pesanteur subsislerait meme dans le cas extreme el inadmissible d'une densite nulle du gaz ou d'une v6sicule vide a I'inlerieur. II est en effet facile de dcmon- trer que si un globule gazeux a rinterieur avail un diamctre inferieur a un tiers de millimetre, I'epaisseur de I'enveloppe du globule ne devrait pas depasser soixanle- douze millioniemes de millimetre, pour que le globule put rosier en equilibre dans un gaz dont la densite serait 0,0013, celle de I'eau etant prise pour unite. Or premi6rement la densite 0,0013 est de beaucoup superieure a celle de I'air dans la r(5gion des nuages; secondement, une couche ou enveloppe d'eau dont I'epaisseur est inferieure a soixante-douze millioniemes de millimetre ne reflechit plus de lumifere visible ; troisiemement, enfin, tout le monde admet que le dia- melre des globules vesiculaires est de beaucoup inferieur a un tiers de milli- COSMOS. ^ 613 metre ; done I'hypoth^se q\u transformerait les] molecules des nuages et des brouillards en globules vesiculaires et en ballons aerostatiques specifique- ment plus legers que I'air, ou leur donnerait des dimensions 6normes qu'ils n'ontpas, ou les rendrait completement invisibles; par consequent, puisqu'ils ne sont ni si gros ni invisibles, ils ne sont certainement pas des ballons plus lagers que I'air, restant suspendus en I'air par reffet de leur pesanteur sped- fique moindre. On sera peut-etre curieux de savoir comment M. I'abbe Raillard a obtenu les nombres que nous venons de discuter. En appelant e I'epaisseur de I'enveloppe, o son diametre exterieur, d la density de I'air, et d' la densite du gaz contenu dans le globule, la densite de I'eau etant prise pour unite; et exprimant qu'une bulle eau et gaz, dont le diametre exterieur est S, et le diametre intdrieur o — 2e se tienten equilibre dans I'air, on trouve d'ou 0^(1 — d)==(3_2e)^(1 - d'), o — 26 = 0 i/-!— ^,. '=ii'-\^T^) 4° Mais comment expliquer autrement que par I'hypothese de ballons aeros- tatiques a enveloppe liquide, a noyau gazeux, la suspension et la l^gerete rela- tive des nuages? Par un raisonnement bien simple; et si ces phenomenes ont cause tant d'embarras aux savants , c'est parce qu'ils ont neglige dans la solution du probleme le seul element essentiel etabsoiument indispensable , Element bien vulgaire neanmoins, la resistance qu'un milieu fluide oppose a la chute d'un corps. Cetle resistance est d'autant plus grande que le corps, sous un poids donne , presente une plus grande surface : la feuille d'or infmiment mince tombe dans le vide aussi rapidement que I'or massif ; mais elle reste longtemps sus- pendue dans I'air , et le plus petit souffle I'emporte. Quelle que soit la loi de la re- sistance de I'air a la chute des corps, que cette resistance soit simplement pro- portionnelle a la surface du corps ou qu'elle varie d'une maniere plus complexe, il sufSt, et rexp6rience prouve qu'il en est ainsi, quo la resistance augmenteavec la surface , pour qu'on puisse en conclure immediatement que si une sphere pe- sante, un globule d'eau, par exemple, se subdivise en globules plus petits, la resis- tance opposee par Fair a la chute sera augmentee dans une tres-grande propor- tion, parceque le poids du globule restant le meme, la somme des surfaces des globules resultant de la subdivision surpassera considerablement la surface du globule primitif. Admettons en effet qu'un globule dont le diametre est 3 soit di- vis^en d'autres globules dont le diametre soit 5 : ?i; le volume du premier glo- bule etant - - 3', et celui de chacun des autres - - ^ ; on devra avoir en ap- 6 b n" pelant m leur nombre : 1 '^'^ I - , -, z m - - -^ =^ - -0', et par suite m = n-": 6 n° 0 g,4 COSMOS. le nombre des petits globules sera doncexprime par le cube du nombre n. D'un autre c6te la surface s du globule primilif est 6gal a - Z\ celle de cliacun des globules composants est - J et leur somme S = n' :: ^^ = nro"- =:= ns ; la somme des surfaces est done egale a n fois la surface primitive, ce qu'il fallait demontrer. Ainsi une goutte d'eau d'un centimetre de diam^tre reduite en gout- telettes d'un cenlieme de millimetre offrira une surface mille fois plus grande , et eprouvera par consequent mille fois plus de resistance dans sa chute a travers I'air meme dans le cas ou la resistance est simplement proportionnelio a la simple surface : or M. I'abbe Raillard fait observer avec raison que la resistance de I'air doit augmenter dans une proportion plus grande que la surface , car il n'est pas douteux que Fair exerce en outre sur la gouttelette d'eau une action du genre des actions capillaires. D'ailleurs I'experience de chaque jour ne nous montre-t-ellepas que des corps tres-divises', comme les poussieres , tombent avec une extreme lenteur, meme dans un air parfaitement tranquille. II faut souvent des heuresentierespour voir s'abattre tout a fait la poussiere d'un appartement ferme ; et le rayon de soleil qui penetre dans la chambre rend toujours visibles de petits atomes qui flottent dans I'air , alors meme que ces atomes sent des corps solides d'une densite plus grande que celle de I'eau , de la poussiere de craie, par exemple. Les eaux trou- blees par une terre deiayee , et qui reprennent si lentement leur limpidite ; les precipltes chimiques qui souvent ne se deposent qu'apres plusieurs jours ou meme plusieurs semaines, sont autant d'exemples de la resistance qu'un milieu fluide oppose a la chute des corps extremement divises. Concluons de ce qui precede que pour se rendre pleinement compte de la sus- pension apparente des brouillards et des nuages dans I'atmosphere, il sufBt de leur attribuer leur constitution reelle , en les regardant comme des amas de pe- tits corps d'une tenuite extreme et dissemines dans I'air; des precipitcs liquides ou memes solides nageant au sein d'un milieu aeriforme. Nous disons suspension apparente , car les nuages nous paraitraient encore suspendus s'ils mcttaient seulement une heure a descendre d'une hauteur de 10 metres ou meme plus grande. Par cela memequ'ils sont conslitues d'eau liquide ou do pelits cristaux de glace a I'etat de division extreme , la lenteur de leur chute est excessive. Cette excessive lenteur les fait apparaitre suspendus. Elle leur laisse de plus la faculte de monter sous la moindre impulsion des vents. En resume , I'hypothese des vapeurs vesiculaires est combattue par le mode meme de formation des nuages, comme aussi parle fait incontestable de I'exis- tence des nuages dans des regions de I'atmosphere ou la temperature est de beaucoup au-dessousde zero. Elle n'est nuUement necessaire a Fexplication de la legerete relative et de la suspension des nuages ; au contraire, ces globules vesi- culaires ne pourraient devenir relativement plus legers que I'air qu'en perdant la propriete cssentielle de reflechir la lumiere et devenant completement invi- sibles. D'ailleurs la legerete relative et la suspension apparente des nuages, s'ex- pliquent tres-naturellement et trcs-complctemcnt, quand on admetconformement a la verite qu'ils sont formes de goulteleltes d'eau ou de particules de neige ou COSMOS. 615 de glace excessivement divis^es ; done cette vaine hypothese , impossible en elle-m^me, inconciliable avec les apparences qui I'ontfait admettre, insufilsante a expliquer les phenom^nes les plus elementaires et les plus essenliels de la me- teorologie des nuages, doit e^fedefinitivementrejet6e comme une grande et inu- tile erreur. II ne lui resterait plus pour appui tres-eloigne que le parti qu'ena Uv6 M. Bra- vaispourl'explication del'arc-en-cielblanc, explication adoptee par M.Regnault et enseignee par I'illustre academicien au college de France; mais le petit calcul relatifal'^paisseur de I'enveloppe enleve a cette explication toute sa probability, etnous verrons dans un second article que M. I'abbe Raillard atrouvc en dehors de I'hypothese des vesicules une theorie beaucoup plus simple et plus ralionnel!e de I'arc-en-ciel blanc. Cette analyse du travail de notre savant 61eve et ami parle assez par elle-mem e et nous n'avons pas besoia de faire ressortir le merite et I'importance de son excellente dissertation. Les calculs relatifs a la determination de I'epaisseur de I'enveloppe, et de la somme des surfaces des globules nes de la division, sont deux charmantes applications qui devraient trouver place dans tous les trait^s elementaires. Deja , pour defendre leurs doctrines paradoxals, les medecins homocopatf^^ avaient fait valoir cet argument qui n'est pas sans valeur del'accroissement ex- cessivement rapide et vraiment enorme de la surface de I'agent therapeutique par la trituration , ou la division en millions de millions de globules. Rien ne prouve, disaient-il, que Taction du medicament ne soitpas une action de surface du genre des actions ^lectriques; done , puisque la somme des surfaces des glo- bules infiniment petits est des millions de fois plus grande que la surface du glo- bule a dimensions finies employe paries allopathes, refficacitc des moyens ho- moeopalhiques n'a rien d'impossible^ou d'incroyable. ACOUSTIQUE. Education de l'oreille, p\r m. marloit:. « La premiere chose a faire quand on commence I'education de I'oreille est done d'apprendre a ecouter. Des le principe on s'exercera a fixer toute I'atten- tion de I'oreille sur un seul point ; ainsi, quand on entendra plusieurs sons ou bruits quelconques simultanement, on n'en ecoutera qu'un. Si Ton n'en entend que deux, I'un faible, I'autre plus fort, on n' ecoutera que le premier et Ton tachera d'etre sourd au second. On s'habituera a ecouter comment les sons commencent ct comment ils finissent, ainsi qu'a preter I'oreille beaucoup moins a ce que Ton entend qu'a ce que Ton croit ne pas entendre, et a n'ecouter ja- mais la menie chose qu'un instant. Ces exercices u'apprendront pas grand'chose pour le moment; mais comme ils ne prennent pas de temps, ils en font gagner, attendu qu'il en faut toujours beaucoup pour contracter une habitude. « Pendant qu'on se livrera a ces exercices, on enseignera a I'oreille a dislin- guer les intervalles niusicaux. Ceci effraye assez generalement, parce qu'on salt 61G COSMOS. que la plupart des eleves qui apprennent la musique depuis trois ou quatre ans ne les connaissent pas encore ; non , et par une bonne raison , c'est qu'on ne les leur a pas enseignes. En commen^ant I'etude des intervalles muslcaux a vingtcinq ans, il faut six ou huit mois, en y consacrant une heure par jour , pour les bien connaitre. C'est quelque chose , je le sais , mais c'est aussi quelque chose qu'une oreille exerc^e, quand on en a besoin. « Pour la marche a suivre dans I'etude des intervalles, je crois ne pouvoir mieux faire que d'indiquer celle que suit M. Duchemin , aujourd'hui directeur de I'enseignement musical dans les salles d'asile de Paris , par la raison que les resultats dont j'ai ete temoin , lorsqu'il fit chez moi I'essai de sa m^thode de musique , ne m'ont rien laisse a desirer. a M. Duchemin commence par faire entendre a I'eleve, a I'aide d'un instrument de musique quelconque , I'intervalle d'un ton et celui d'un demi-ton , abstrac- tion faite de loule notation. Lorsque I'eleve est parvenu a bien distinguer ces deux intervalles , il lui fait entendre I'intervalle d'un ton et celui d'une tierce majeure. Puis il lui fait comparer la tierce majeure a la quarte, etainsi succes- sivement tous les intervalles majeurs d'une meme octave. II rcvient ensuite au point de depart et fait comparer les intervalles majeurs aux intervalles mineurs. Lorsque I'eleve connait tous les intervalles en montant , il recommence les memes exercices que ci-dessus , mais en descendant. Enfm , quand I'eleve a compart ainsi tous les intervalles deux a deux, M. Duchemin lui fait entendre des inter- valles isoles soit en monlant, soiten descendant, d'abord dans I'ctendue d'une octave , puis dans I'etendue de deux octaves , etc. « Si laconnaissanceque Ton a ainsi acquise des intervalles musicaux est suffi- sante pour le musicien, elle ne Test pas pour le physicien. II ne suflit pas au phy- sicien de savoir quand un intervalle est juste ou faux, ni m^me quand il est tropfort ou trop faible; il faut qu'il puisse estimer a peu pres de combien il est trop grand ou trop petit. II ne lui suffit pas non plus de savoir comparer les sons pi'oduits par les instruments de musique : pour lui toute sensation de I'oreille provenantd'unmouvement vibratoire quelconque etant un son, ilen entendrade toute esp^ce , tant sous le rapport du timbre , que de I'intensitc, de la dur6e, de la nettete, etc. Meme souvent il sera oblige de demelcr et comparer des sons qui n'auront ni le meme timbre , ni la meme intensity , ni la meme duree , et alors il faut une grande silrete de Toreille , et mSme une longue habitude , pour ne pas commeltre d'erreur. II est done necessaire de reprendre I'etude des inter- valles , mais cette fois Ton n'a plus besoin de personne , meme une partie du travail peutse faire sans perdre de temps. « II faut actuellement comparer chaque intervalle a lui-meme, en le prenant juste dans un cas , et plus ou moins altere dans I'autre. Pour cela, on se servira d'un sonometre divise de maniere a pouvoir prendre les intervalles justes , eten mSme temps faire connaitre la difference numerique existant ontre I'intervalle juste et le m^me intervalle altere. ( Mon sonometre differenliel est tres-propre- a cet usage, c'est meme parce qu'il m'a servi des son origine a cette 6tude que je lui ai donno co nom. ) Et comme il est necessaire d'entendre les deux sons d'un meme intervalle dans le plus court espace de temps possible , ainsi que de COSMOS. 617 les entendre souvent simultanement pour habituer I'oreille a cette sensation , on commencera par accorder les deux cordes da sonometrc a I'unisson , afin de pouvoir prendre , a I'aide des chevalets mobiles , le premier son sur I'une et le second sur I'autre. Puis on comparera I'intervalle juste, d'abord avec linter- valle altere au maximum , c'est-a-dire d'un quart de ton environ , soit en plus, soit en moins , et Ton continuera la comparaison en diminuant graduellement la difference jusqu'a zero, commencant toujours par ecouter I'intervalle juste. « Ce ne sera pas avec un archet qu'on fera sonner les cordes pour cette etude, mais avec le doigt et toujours faiblement , par la raison que Ton apprecie mieux ius sons faiblcs et d'une courte duree que les sons forts ou continus. « On comprend que par cesexercicesnon-seulement I'oreille apprend a mesurer le rapport de deux sons avec assez de precision, mais encore qu'elle s'habitue a la justesse la plus rigoureuse. « Jusqu'a present Ton n'a appris a connaitre que les intervalles de sons tou- jours tres-distincts et toujours de meme nature, puisqu'ils etaient donnes par le meme instrument. Cela ne suffit pas ; il faut aussi pouvoir apprecier les inter- valles de sons peu distincts, et meme ceiix qui peuvent donner deux sons de nature differente. Pour ceci , il n'est plus besoin d'instruments iii d'etudes regu- li6res, il suffit d'y penser quand on a un instant de libre et de saisir toutes les oc- casions qui se presentent; par exemple, si Ton est seul a table, on comparera le son d'un verre ou d'une carafe a celui d'une bouteille. Si Ton a sous la main deux bouteilles inegalement pleines, on soufflera sur le bord de leur goulot; le son qu'on entendra sera faible a la verite pour des oreilles peu exercees, mais nean- moins tres-appreciable. Si Ton est dans son cabinet, au coin de son feu, on com- parera le son de la pelle a celui des pincettes, le son de I'ecritoire a celui du flambeau ou d'une buclie; en un mot, suivant les circonstances oil Ton se trou- vera, on se servira pour cette etude de tons les ohjets susceptibles de rendre un son quelconque. En employant ainsi tons les jours quelques moments de loisira ces exercices, fort innocents et peu serieux en apparence, I'oreille s'habituera insensiblement a ne plus entendre de bruils, mais toujours des sons, et des sons dont elle saisit parfaitement les rapports. « Tant que les sons ont le nieme timbre, quel que soil leur peu de duree, leur degre de nettete ou meme d'acuite, leurs rapports sont toujours assez faciles a saisir. Tout le monde reconnait une gamme resultant du bruit que font en tom- bant huit morceaux de bois accordes qu'on jette successivement par terre, quoi- que la tonalite de chaque morceau, pris separement, ne soit pas appreciable pour des musiciens ; mais il n'en est plus ainsi quand les sons different par le timbre, surtout s'ils manquent de nettete : alors il est extremement facile a une Oreille qui n'est pas tres-cxercee de se tromper d'une octave, de meme que de confondre I'octave avec la quinte , si rintervalle excede I'etendue de trois oc- taves. « Reste enfin une derniere chose a faire, et qui n'est ni la moins importante ni la plus facile, c'est d'exercer I'oreille a I'analyse des sons. Pour un musicien, c'est une chose aisee que d'analy.«er un accord, d'abord parce qu'il les connait tons, et ensuite parce que les sons dont il se compose sont toujours tres-distincts 618 COSMOS. et produits par des instruments dont le timbre lui est parfaitement connu ; mais analyser un accord ou melange de sons, lorsque souvent on croit n'en entendre qu'uD, sans avoir d'ailleurs aucune donnee sur ceux qu'on soup^onne pouvoir Taccompagner, et se proposer non-seulemcnt de trouver les rapports existant entre eux, mais encore de determiner leur origine ainsi que les causes qui les ont fait naitre, c'est une chose tr^s-differente. II ne suffit plus pour cela d'avoir I'habitude d'entendre des sons, il faut les savoir 6couter et les avoir etudies. « Encore un mot sur I'analyse des sons. « Lorsqu'un diapason est monte sur une caisse a son unisson, comme mon dia- pason normal , il est facilement ebranl6 par le moindre mouvement vibratoire que I'air contenu dans sa caisse peut recevoir d'un son etranger ; mais comme les corps n'entrent en vibration sympalhiquement que sous I'influence de leur unisson, il s'ensuit que ce diapason est muet pour tous les sons, excepte pourle sien, auquel il repond a I'instant avec plus ou moins d'energie, selon que la jus- tesse des deux sons est plus ou moins grande, qu'ils sont plus ou moins proches, et que le sonproduit est plus ou moins intense. Done, si un diapason ainsi mont4 est a proximite du lieu d'ou part un son quelconque accompagn^ d'un harmoni- que a I'unisson du diapason, celui-ci en avertit a I'instant en sonnant. « Loin de moi pourtant la pens^e de proposer un semblable moyen pour sup- pleer a I'oreille, elle m'est trop bien connue. Je m'en suis cependant servi et souvent avec succfes, mais dans le cas seulement oii je soupconnais dans un son son octave aigue, que je ne pouvais distinguer, moins h cause de sa faiblesse qu'a cause de sa parfaite consonnance avec le son principal. « C'est par cc moyen que j'ai reconnu que les sons de poitrine de la voix hu- maine sont toujours accompagnes de I'octave aigue et de la double octave. a Tout ce que je puis faire ici, c'est d'indiquer quels sont les exercices auxquels il faut se livrer pour apprendre a distinguer un ou plusieurs sons faibles meles a un son plus fort, puis j'entrerai dans quelques considerations sur le son, oil Ton trouvera, parmi les observations que j'ai eu occasion de faire, certaines don- nees qui seront souvent utiles a la solution des questions de cette nature. « Pour premier exercice, on prendra un son qui ne soit ni trop grave ni trop aigu, et autant pur que possible, comme, par exemple, celui d'un tuyau d'orgue ouvert donnant un son compris entre ttfj et ut., ou celui de mon diapason mont6 sur sa caisse. A ce son on en ajoutera un autre bien connu d'avance, mais dif- ferent par le timbre et plus aigu d'un intervalle quelconque, juste ou faux, quecelui qu'on prendraitauhasard'surunvioion, une plaque ou une lame metal- lique. Pendant qu'on entendra ces deux sons simultanement, on n'ecoutera que le plus aigu, que Ton affaiblira graduellement, en I'eloignant, ou de toute autre maniere, suivant sa nature, jusqu'a ce que Ton cesse de le distinguer, ce qui ne doit avoir lieu que lorsqu'on cesse de I'entendre. On reconnaitra que ce son est encore tres-distinct pour I'oreille quand on pourra prendre son unisson sur le sonometre. On recommencera cet exercice en changeant le son aigu a chaque fois, jusqu'a ce que i'oreille soit sure de rintervaile, quelque faible que soit ce son. o On reprendra de nouveau ces memes exercices en se servant, si Ton veut, des m6mes instruments que prec6demment, pourvu qu'on change le son grave; mais COSMOS. 619 cette fois le son aigu qu'on y ajoutera devra ctre inconnu, c'est-a-dire qu'il n'aura pas ete entendu seul avant Texperience; de plus, il doit etre continu et faible proportionnellement au son grave, afin d'etre bien dans les conditions oii se trou- vent ordinairement les harmoniques ainsi que les autres sons qui accompa-nent toujoursle son principal. Les deux sons etant ainsi entendus, on chercherali ap- precier I'lntervalle, et en meme temps le timbre du plus aigu. « Lorsqu'on sera parvenu a bien analyser un melange de deux sons de timbre different d'lntensite et de tonalite, on emploiera les m^mes moyens pour appren- dre a analyser un melange de trois sons , apres quoi Ton s'arretera : I'liabitude d'ecouter fera le reste ; car une des proprietes de I'oreiUe etant de toujours en- tendre sans la participation de notre vdonte, il s'ensuit qu'ayant pris I'liabitude d'ecouter, elle ecoute presque a notre insu. Ainsi, sans y songer, quand on en- tendra chequer un verre de cristal par la lame d'un couteau , on distinguera trois sons : le son fondamental et le premier liarmonique, dont I'intervalle varie, sui- vant la forme et les proportions da verre, de la sixte mineure a la dixieme ma- jeure, plus le second harmonique tres-faible et beaucoup plus aigu. c Quand on entendra sonner une corde qui ne sera pas trop courte, on distin- guera une suite d'harmoniques, et Ton remarquera que ces sons varient suivant le point d'attaque et la maniere d'attaquer la corde. « Quand on entendra un tambour seul, on remarquera d'abord un son grave, sourd et confus : c'est celui de I'air renfermo dans la caisse ; puis une serie de sons plus aigus, plus clairset plus nets, annoncant un mode de vibrations phis facile: c'est le son fondamental de la membrane et ses harmoniques, parmi lesquels on distingue souvent une neuvieme ou une dixieme assez brillante. On remarquera aussi un grand nombre d'harmoniques tr^s-aigus et de courte duree : ce sent ceux produits par le fouettement des cordes sur la membrane inferieure, et enfin on reconnaitra a une espece de tintement metallique le son produit par les parois de la caisse. » ECONOMIE DOMESTIQUE. CHAMPIGNONS VEiNENEUX. — COl'RAGEUSES EXPERIENCES DE M. FREDERIC GERARD. II y a quinze jours, a peu pres, nous recumes de M. Frederic Gerard une lettre par laquelle il nous priait d'assister a une de ces redoutables experiences qu'il repele periodiquement avec un sang-froid et un courage vraiment extraordi- naires. Les journaux venaient de raconter quelques cas terribles d'empoison- nement par les champignons, et ces lamentables recits determinaient M. F. Ge- rard a tenter, par un sublime effort, de prevenir de nouveaux malheurs ; il voulait, une fois encore, eclairer I'opinion publique. La veiile, il avait parcouru les bois des environs de Paris, et il avait fait une ample provision d'amanites bulbeuses et veneneuses , les plus redoutables des champignons de nos climats, puisque, a la dose de 1 5 a 20 grammes, ils causent presque infailliblement la mort. Ces amanites contiennent a la fois. et dans de grandes proportions, les deux principes deleteres qui rendent les champignons 620 COSMOS. si veneneux : I'un volatil et stupefiant qui amene, dans le sysleme nerveux, des desordres graves; I'autre fixe, acre, corrosif, qui irrite a I'exces les en- trailles. Sa provision faite, M. F. Gerard invita plusieurs repr^sentants de la presse scientifique, des modecins et des savants, a venir le voir manger en famille un kilogramme du poison mortel. La reunion ne fut pas si nombreuse qu'il I'aurait desire; elle ne sufSsait pas a lui faire atteindre le grand but qu'il poursuivait lete baissee, il ne recuia pas cependant; il s'assit a table avec ses sept enfants ; on servit les champignons. M. Gerard en mangea , pour sa part, cinq cents grammes, vingt fois plus qu'il n'en fallait pour determiner un empoisonnement mortel; quatre des enfants, et parmi eux une petite Qlle de 6 a 7 ans, accepterent sans fremir leur part des cinq cents grammes restants. Animee par I'exemple de son chef si energique, la nombreuse famille n'avait rien perdu de sa gaiete ; la pauvre 'mere seule n'avait pu rester impassible ; elle etait vivement 6mue, bientdt meme elle se trouva mal , quoiqu'elle n'eut paspris'part au triste festin, et une crise nerveuse assez violente la forca de s'eloigner. Le repas (ini, on en attendit le resultat dans un calme parfait; la digestion se fit sans peine , il ne se manifesta aucun symptome effrayant, tons se portaient aussi bien, et peul-etre mieux que s'ils avaient fait un tres-bon repas chez Che- vet ou chez Vefour. Parmi les temoins de I'experience, nous citerons M. I'abbe Le Guillou, rc^dac- teur du Bulletin d' horticulture du journal la Patrie; M. Walfredin, ancien membre de I'Assemblee constituante, et savant distingue; M. le docteur Corbiere, qui s'est fait une grande reputation par ses etudes sur les champignons; un bota- niste tres-connu , dont le nom nousechappe, etc. MM. Corbiere et Walferdin avaient voulu prendre leur part du plat homicide, et ils n'ont rien ressenti. Quand nous arrivames, vers quatre heures , toute la famille de M. Gerard etait en parfaite sanle. Pour ne pas interrompre ce recit, nous avons omis quelques circonstances essen- tielles, sur lesquelles nous devons maintenant insister. La provision de champi- gnons etait restee intacte jusqu'a I'arrivee des temoins de I'experience. Leurs pieds etaient encore garnis de terie; ils furent examines un a un par MM. Cor- biere et Hocquart et reconnus comme amanites bulbeuses et vendneuses. La reconnaissance achevee, on avait procede a la preparation indiquee par M. Ge- rard comme propre a detruire tout principe vent^neux, et a transformer en ali- ment agreable et inoffensif ce qui avait ete proclame poison violent. Void, en detail la recette de M. Gerard : Pour chaque 500 grammes , ou pour chaque livre de champignons, coupes en morceaux d'assez mediocre grandeur, il faut un litre ou deux livres , un poids double, d'eau acidulee par deux ou trois cuillerees de vinaigre, ou deux poignces de sel gris, si Ton n'a pas autre chose. Dans le cas oii Ton n'aurait sous la main ni vinaigre , ni sel , mais seulement de I'eau , il faudrait la renouveler une ou deux fois; on laisse les champignons macerer dans le liquide pendant deux heures enlieres, puis on les lave a grande eau. Ils sont mis alors dans de I'eau COSMOS. 621 froide, qu'on porteal'ebullition, et, apr6s un quart d'heure ou une demi-heure on les retire, on les lave, on les essuie, et on les apprete , soit comme un mets special , soit comme garniture ou condiment; ils comportent les memes assai- sonnements que les champignons comestibles. Apr^s cette pr(5paralion , les fausses oronges, ainsi que les amanites bul- beuses et veneneuses dont I'odeur est fade et repoussante, dont la saveur est acre et degoAtante, prennent I'odeur et le gout des champignons comestibles. Les faits suivants demontrent mieux encore refficacite absolue de la prepara- tion que nous avons decrite. En 4850 , dans I'espace d'un mois, il enfra chez M. Gerard plus de cent cin- quante livres de champignons veneneux , fausse oronge, amanites, agaric eme- tique et sanguin, bolet pernicieux , bolet chryscntere, etc., etc. Pendant huit jours, M. Gerard s'astreignit a manger deux fois par jour, malgre la repugnance que lui causait cette uniformite de nourriture, de 250 a 500 grammes de cham- pignons cuits! N'en ayant ressenti aucune incommodite, ilne s'en tint pas la. Craignant que les nombreuses experiences qu'il ne cessait pas de faire sur lui-meme n'eussent ^mousse sa sensibililo, il admit tous les membres de sa famille, qui est de douze personnes, a s'associer a lui. II proceda avec lenteur; apres avoir essaye sur un de ses enfants, il en prenait un second, et continua ainsi jusqu'a ce qu'il fut convaincu que, malgre la difference des ages , des sexes et des temperaments personne n'etait incommode. L'epreuve etait decisive, fividemmont il ne s'a^is- sait plus de quelques grammes de champignons ou d'essais sur des animaux ; une famille de douze personnes avait mango de ces champignons si dangereux jusqu'a ce que la saliete eut amene la repugnance, et personne n'avait souffert. Qa'a voulu M. Frederic Gerard dans cette longue serie d'etudes et d'ex- periences qui lui font le plus grand honneur, et dans lesquelles il a deploye une force d'Ame incomparable? Que voulons-nous en eciairant ces fails du grand jour de la publicite? inspirer une confjance perilleuse; encourager des tenta- tives temeraires; venir en aide a la legeret^, a I'entetement, a la gourmandise ; autoriser a cueillir et a transformer en aliment des esp^ces meme seulement suspectes? Non , mille fois non ! Nous ne cesserons pas de rept-ter sans cesse : Soyez prudents jusqu'a I'exces, abstenez-vous ; c'est un crime que d'exposer sa vie et la vie des siens en cedant fatalement a un premier mouvement d'envie d^raisonnable ou de sensualitcVinsensee. ' Mais si vous etes assez leger, assez faible, assez aveugle pour ne pas resistor a la mauvaise pensee de cueillir dans les champs et dans les bois des cham- pignons que vous ne connaissez pas assez ou dont vous doutez , ne vous fiez a aucune des vagues epreuves acceptees jusqu'ici , de la piece d'argent, de loignon, de la bague d'or, etc. ; faites-vous un devoir, un devoir rigoureux, de conscience, de faire subir aux champignons que vous avez cueillis, et que vous voulez appruter centre toute raison, le traitement si simple, si rationnel, si elBcace, si solennellement oprouve de M. Frederic Gerard. II a rendu un veritable service a Thumanite en faisant cesser, par tant d'e.x- periences sur lui et les siens, une cruelle incertitude; en mettant en t^vidence 622 COSMOS. un moycn sur et tout-puisiant de prevenir I03 ompoisonncments par les cham- pignons, en indiquant netlemcnt les especcs qui peuvenl devenir propres a I'a- imentalion , etc. II a droit, par consequent, a radmiration de tous , car nous n'avons jamais rencontre d'ameplus fortement trempee, et aussi a la reconnais sance publique, car il no tiendra pas a lui que nous ne soyons pour toujours a I'abri de ces accidents terribles, de ces recits navrants que chaque 6te ramdne avec une desoiante monotonie. SOPHISTICATION DES SUBSTANCES ALIMENTAIRES. — EPREUVE ET FABRICATION DU VINAIGRE. Le dernier rapport de la commission sanitaire anglaise prepos^e a Texamen des substances alimentaires et medicinales avait pour objet I'analyse microsco- pique et chimique des vinaigres du commerce. li a ete constat^ que sur vingt- huit ecliantillons achetes dans les boutiques de divers detaillants, et provenant de presque toutes les fabriques ayant quelque reputation a Londres et dans la banlieue, quatre seulement ne renfermaient pas d'acide sulfurique. Vingt-quatre etaient sophistiques et falsifies par I'addition de cet acide mine- ral si corrosif. Deux le contenaient en petite quantite, trois en grande quantite, douze en quantite tres-cousiderable , sept enfin en quantite vraiment immense t excessive. Le rapport insere dans la Lanceite publie a I'ordinaire les noms des detaillants et des fabricants de vinaigres empoisonnes, comme aussi ceux des quatre com- mercants dont le vinaigre avait ete trouve pur. Ce fait que dans quatre 6tablis- sements le vinaigre etait vendu naturel a une grande portee , parce qu'il prouve que I'addition d'acide sulfurique ou d'huile de vitriol n'est nullement necessaire a la conservation des vinaigres, mais qu'elle a pour but de lui donner une force faclice et apparente qui permette de i'etendre ensuite de beaucoup d'eau. Le meilleur moyen de mettre I'acide sulfurique en Evidence est de verser dans le vinaigre du chlorure de baryum qui se transforme en sulfate insoluble, en don- nant naissance a un precipite plus ou moins abondant. M. Payen indique un autre moyen : on delaye dans un decilitre de vinaigre soupconne cinq decigrammes de fecule de pommes de terre , et Ton chauffe do 20 a 30 minutes a 1' ebullition. Si le vinaigre ne contient que de I'acide ace- tique , il n'aura pas desagrege la fecule au point oii elle cesse de bleuir par I'iode; I'addition de ce reactif dans le liquide refroidi donnera une coloration bleue in- tense. Si cette couleur ne se manifestait pas, on devrait en conclure que le vinaigre renferme un acide Stranger. II suffiraitde deux a trois milliemes d'acide sulfurique pour produire la ddsagregation de la fecule, et sa conversion en dex- trine, puis en glucose depourvue de la faculty de prendre la teinte bleue au contact de I'iode. Profondement desolee des innombrables fraudes qu'elle est appelee a consta- ter chaque jour, la commission sanitaire anglaise joint a son rapport une lettre dans laqueile M. Fletcher, chirurgien de Bromsgrove, apprend aux families a produire elles-memes, par un procede tres-simple, avec du sucre, de la melasse COSMOS. 623 et de I'eau , et un champignon connu sous le nom de plante du vinaigre^(t)me- gar plant), la quantite de vinaigre qui leur est necessaire, soit pour les besoins de la table, soit pour tous les autres usages domestiques , de telle sorte qu'elles puissent echapper a Todieuse conspiration des fabricants deshonnetes. Deposez le champignon en question dans une jarre en terre, ajoutez-y la moiti6 de son poids de cassonnade a gros grains et une quantite egale de melasse; versez sur le melange cinq pintes d'eau tiede ; couvrez le vase de maniere a mettre la liqueur a I'abri de la poussiere, sans arreter la circulation de I'air; placez-le dans un lieu assez chaud et tranquille, oii le liquide ne soit pas agite, et laissez-le fermenter doucement pendant sept semaines. Au bout de ce temps, le liquide sera devenu du vinaigre tres-pur et d'excellente qualitc que vous mettrez dans des bouteilles bien bouchees pour vous en servir au besoin. Quand tout aura ete mis en bouteille, ajoutez de nouveau la meme quantite d'eau tiede, de vinaigre et de melasse, et laissez fermenter de nouveau. L'on obtient une seconde provision de vinaigre. De plus, a la fin des secondes sept semaines, le champignon a grandi, il apparait sous forme de deux plaques epaisses assez semblables a des galettes. On peut alors multipher la plante en s6parant le jeune rejeton sans le dechirer. Si le champignon reste longtemps expose au froid ou hors du liquide, il devient noir et meurt. M. Fletcher avait recu son bienheureux champignon dans le courant de I'hiver ; non-seulement il lui a fait produire une enorme provision de vinaigre, mais il en a obtenu plusieurs plantes nouvelles qu'il a partagees entre ses amis. Qu'est-ce que c'est que ce prccieux fungus, le vinegar plant de M. Fletcher- quel est son nom botanique, oil le rencontre-t-on , comment se le procurer? A toutes ces questions, et malgre les recherches les plus patientes, nous sommes orces de repondre encore: nous ne le savons pas. II nous a 6te impossible, absolument impossible d'obtenir a cet egard aucun renseignement precis ; les ivres de botanique les plus complets; les encyclopedies anglaises les plus estimees, les traites de fermentation acide les plus consciencieux ne disent pas un mot du champignon du vinaigre, fungus vinegar plant. A en croire une synonymie botanique anglaise qui jouit d'une grande repu- tation, le vinegar plant serait le sumac de Virginie, rhus Virginiacum. C'est absurde, car le sumac est un arbre a sue tres-vcnoneux , que nous connaissons parfaitement, et non pas un champignon. Mais que les lecteursdu Cosmos, que les amateurs du vinaigre naturel, se rassurent; nous les mettrons bientot a meme de faire leur provision; nous ecrirons pourcela, s'il le faut, aM. Fletcher. Autrefois , en Bretagne du moins, le vinaigre se preparait en famille, et on ne I'achetait pas. Nous nous rappelons tres-bien qu'a Tun des angles du gre- nier de la maison paternelle, il y avait un petit tonneau mysterieux toujours pourvu de vinaigre ne dans son sein. II ctait occupe en grande parlie par une masse tres-epaisse albumineuse ou gelatineuse^ gluante, d'un gris sale, assez d^goutante a la vue, et que Ton appelait mere du vinaigre; elle nous deplai- sait fort. Quand nous etions enfants nous prenions plaisir a la dechirer, et bien souvent nous fumes tentcs de I'enlever tout entiere et de la jeter dans la cour. Helas! nous aurions arrele dans son germe ou dans sa cause la bienfaisante 624 COSMOS, operation de racidificalion qui se continuait dans ce petit lonneau depuis plu- sieurs generations; il sufTisait en effet d'y verser de temps en temps une bou- teille de vin ou de cidre aigris, ou non aigris, pour,que la source de vinaigre et d'excellent vinaigre fut intarissable. Nous avons eu la curiosito, liier, de demander aux trait63 de chimie mo- derne la veritable nature de celte singuli^re mere du vinaigre, et a noire grand ^tonnement, lis sont restcs muets. Prenons-en un auhasard, M. Baudrimond, par exemple, void ce qu'il nous en dit : « Pendant la fermentation acide, ii se forme une masse visqueuse particuliere , qui parait jouer un rdle important, mais elle n'a pas encore cte etudiee. Absorbe-t-elle le liquide alcoolique, et I'absorplion de I'oxygene se fait-elle dans son sein? C'est ce que Ton ne sait pas, mais c'est ce qui est probable. » Eh bien! nous le disons avec certitude, sans crainte de nous tromper : 1" cette masse visqueuse, gelatineuse, albumi- neuse, c'est un veritable vegetal, ou un compose deveg(5laux,un amas de champi- gnons ou d'algues qui vivent, respirent, s'accroissent, etc., etc.; 2° elle n'absorbe pas le liquide alcoolique ; elle absorbe encore moins I'oxygene; 3°ce qu'elle fait, c'est de decomposer I'air qu'elle respire, de s'assimiler le carbone ct I'azote, d'exhaler I'oxygene, de I'exhaler a I'^tat naissant, c'est-a-dire dans la condition la plus excellente pour qu'il puisse exercer son affinite puissante, entreren com- binaison et transformer I'alcool en acide acetique. Ainsi s'explique tout natu- rellement la formation du vinaigre, soil dans les tonneaux pourvus d"une mere generatrice, soit dans les jarres en possession du champignon de M. Fletcher. Au reste, la plupart des auteurs sont d'accord pour attribuer la fermentation acide a une simple oxygenation. Cette petite discussion nous suggera quelques experiences curieuses que nous rdpelerons bientot et que nous transmettrons a nos lecteurs. 1° Nous etu- dierons la mere du vinaigre au microscope soit ordinaire, soit solaire; nous mettrons en evidence sa nature v^getale; 2° nous ferons passer de I'oxygene a I'etat naissant, de I'ozone ou de I'oxygene electrise a travers une liqueur alcoo- lique, et nous la verrons certainement s'acidifier tres-promptement. Qui sait si ces essais ne conduiront pas a une ni6lhode nouvellede preparation du vinaigre et si Ton ne pourra pas substituer une action energique et rapide a Taction lente du fungus ou de la mere du vinaigre, ou de I'air sans cesse agite et forc6 de traverser le liquide alcoolique a un etat de division extreme, pour que ses molecules attaquent en quelque sorte individuellement les molecules de I'alcool, et les acidifient dans une serie de combats singuliers? Agiter I'air et le diviser en faisant tomber, par exemple, sur des fagots ou brindelles de bois le liquide alcoolique, ou en I'obligeant a sortir par de petits trous , c'est dans I'etal actuel de I'art le precede le plus efTicace et le plus prompt de preparation du vinaigre. Mais que ces digressions ne fassent pas oublier a nos lecteurs le but principal de cet article. Qa'ils gemissent et qu'ils s'indignent comme nous de la mauvaise foi , de la perversite, de la cruaute de sang-froid des fabricants et detaillants qui ont I'odieux courage d'aiguiser leur vinaigre par un poison corrosif, I'acide sulfurique ! II y a longtemps , holas ! que notre consoil de salubrite a constatt' a Paris , ce COSMOS. G25 que la commission sanitaire anglaise a constate a Londres, la sophistication I'adulteration sur uno immense echelle de substances alimentaires et medici- nales, et en particulier la presence dans presque tous les vinaigres de quantites notables d'acide sulfuiique. Tout le monde sait qu'on trouve dans les vinaigres naturellement fabriqu(53et purs des animalcules extraordinaires, dessortesd'an- guilles qui apparaissent tr6s-nombreuses , et grandement grossies quand , apres les avoir placees au foyer de nos microscopes solaires, on les projette sur un vaste ecran eclairc; on les volt s'agiter , nager, se tordre, etc., etc. Or, dans r^tat actuel du commerce , un vinaigre propre a ces brillantes experiences est une chose tres-rare , il faut beaucoup courir pour en trouver un, et quand on I'a trouve , il faut le garder precieusement. Ce fait singulier ne trouverait-il pas son explication dans I'abominable pra- tique qne nous signalonsV L'acide sulfurique tuerait cesmalheureuses anguilles, elles tomberaient a I'elat de cadavres au fond des vases , et nous ne les retrou- verions plus nageant dans !e liquide ; nous v^rifierons par de nouvelles expe- riences ces tristes conjectures.. Si le vinaigre vicie et empoisonne tue les petits animaux qui naissent et vivent naturellement dans son sein , n'est-il pas evi- dent qu'il exercera sur Teconomie humaine une action deletere? Nos commcr- cants le savent aussi bien que nous , ils le savent , et ils ne s'arretent pas , et I'amour du lucre I'emporte , et ils versent le poison d'une main ferme , et ils osent encore se proclamerles plus honnetes des hommes ; ils n'ont ni tue, ni vole ! Les convertir , arreter le torrent de la fraude , c'est impossible , absolument impossible. Que faire done? revenir aux antiques usages, preparer au foyer do- mestique tout ce qu'on pent y preparer, confire ses fruits verts et ses legumes sans addition de cuivre et de gros sous : faire soi-meme son sirop de gomme et son vinaigre, etc., etc. OPTIQUE. RAIES TRANSVERSALES ET LONGITUDINALES DU SPECTRE. Nous croyons devoir inserer textucUement la lettre suivante de M. Porro h M. Babinet : elle souleve de grandes difilcultes que de nouvelles experiences et la theorie resoudront sans aucun doule. « D'apres le desir que vous m'en avez exprime, monsieur, je me suis em- presse de repeter, avec mon grand appareil, I'experience fondamentale de la theorie des raies longitudinales de M. Zantedeschi, indiquee dans votrerecente communication a I'Academie des sciences; voici les r^sultats que j'ai obtenus hier entre trois et quatre heures avec lesoleil et un petit trou de O^^jG place au foyer d'un objectif de 4 metres, et avec une lunette d'observation de 280°"" de longueur focale, munie d'une echelle a I'oculairo, disposee parallelement a I'axe optique; meme prisme que dans les experiences precedentes. « Le diaphragme avait 7""', 5; il etait rectangulaire et place sur la premiere face du prisme dont il occupait toute la largeur : les resultats qui suivent sont 626 COSMOS. de la meme nature que ccux quo vous avoz observes vuus-meme avec Ic dia phragme rond sur I'objectif de la lunette; seulement ils ont plus dc nettet^. « N° 1 . Avec CCS dispositions, la vision nette du point lumineux avail lieu au foyer des rayons parali^les (^SO"""), et avec le prisme on avait un spectre li- neaire tr6s-allong^, mais tres-net, dans lequel aucune raie n'apparaissait ni en long ni on travers. u En poussanl I'ocuiaire vers I'objectif on trouve successivement : « N° 2. A 277"'"", 90, une raie noire fine au milieu et deux bandes claires qui traversent loutes les couleurs du rouge au violet. « N° 3. A 276""', 50 on^n'apercoit presque pas de raieslongitudinales, mais, quoique tres-courtes, on distingue assez bien les principales raies de Fraun- hofer. « N" 4. A 274""°', ^"7 oil voitune paire de raies noires finesau milieu, separee par une raie brillante tres-fine, deux bandes d'eclat moyen suivent symetriquc- ment. et deux raies noires longitudinales tres-fines so montrent pres des bords du spectre deja fort dilate. « N° 5. A 272""', 15, trois bandes brillanles sont separees par deux paires de raies noires tres-fines et terminees par les limites laterales du spectre. « N° 6. A 270°"",1 5, deux bandes brillantesse presentent symetriquementaux deux cotes d'une bande d'a pen pres meme largeur qui regne au milieu, la- quelle se trouve assombrie et sillonnee par 'une multitude de raies longitudi- nales tres-fines. « L'oculaire de la lunette d' observation ne peufpas s'avancer au dela de ce point; en le retirant, au contraire, plus [loin que le foyer principal, on trouve ce qui suit : « N° 7. A 284""', 90, m^me ph6nom6ne qu'au n° 2. '!« N° 8. A 289'"'",40, le spectre est partage par deux raies longitudinales en trois bandes d'egale largeur , deux raies se voyant dans les bandes laterales, ainsi qu'une multitude de raies trds-fines dans la bande du milieu. N° 9. A 300""",40 les raies longitudinales sont tr^s-fines et trfes-serrees'vers le milieu , le spectre est termine vers les c6tfe par deux bandes m^diocrement lumineuses. « L'instrument n'a'pas permis d'aller au dela; d'ailleurs la lumiere devient tres-faible au dela de ce point. « En passant de Tune a I'autre de ces positions, les raies longitudinales pro- pres a la position precedente ne se transforment que par gradations a peu pros insensibles , a I'exception des deux premieres a partir du foyer , en enfoncant I'ocuiaire ; et des trois qu'on trouve en retirant I'ocuiaire , dans I'intervalle desquelles on trouve un espace a peu pres vide de raies ; d'ou il suit que les ordres distincts des raies longitudinales sont au nombre de cinq. Dans toutes ces experiences on a remarque une grande symelric par rapport a la ligne m6- diane du spectre. « Je me borne a vous rapporter Gdelement les fails tels que je les ai obser- ves; c'est a vous, monsieur, qu'ilappartient ds les coordonner avec latheorie.» COSMOS. 627 ANATOMIE COMPAREE. LES EXTREMITES DES MAMMIFKRES P.AMEXES A UN TYPE UNIQUE. LE TYPE PENTAD \CTYLE MEMOIRE DE M. N. JOLY ET A. LAVOCAT. Dans leurs memoires, MM. Joly et Lavocat cherchent a prouver par I'analo^ie et I'observation directe, que dans I'ensemble des mammiferes la main et le pfed sont construits sur un meme plan et peuvent etre ramenes au mi^me type • la pentadactylie. if ■ * Apres avoir etabli, contrairement a I'opinion dominante, qu'il y a r^ellement 10 OS carpiens, ilsprouvent qu'il existe aussi 10 os tarsiens. Ces os sont disposes sur 2 rangs, formes chacun de 5 pieces correspondantes aux 5 metacarpiens, qui eux-memes correspondent a 3 phalanges. Les OS carpiens et tarsiens sont done dans un rapport numerique exact avec ceux du m^tacarpe, du metatarse et avec les doigts. Mais souvent le type quinaire de ces os est dissimul6 par des compenetrations ou soudures. MM. Joly et Lavo- cat font ensuite remarquer les analogies et les modifications de ces deux extremi- tes dans plusieurs mammiferes. Le type quinaire ou pentadactyle est facile a constater chez les mammiferes onguicules; mais 11 est beaucoup plus difficile de ramener a ce type les mammi- feres ongules. Cuvier s'exprime a leur egard ainsi qu'il suit : « Les solipedes on deux doigts imparfaits et un parfait, en tout trois; les rhinoceros, trois; les ru- minants, deux imparfaits, deux parfaits, en tout quatre ; le tapir etl'hippopotame. quatre parfaits. » MM. N. Joly et A. Lavocat ont fait voir, cette annee, a I'Academie des scien- ces de Toulouse, unpouce anormalement developpe dans les cochons : cette ano- malie n'est ^videmment qu'un retour au type. Du cochon domeslique au pecari il n'y a qu'un pas; et chez ce dernier animal les deux metacarpiens et metatarsiens sont sondes en une espece de canon comme chez les ruminants. Le pecari ctablit done une transition presque insensible entre les pachydermes et les ruminants. Les rhinoceros se laissent cgalement ramener au type pentadactyle. Bien qu'il n'aient que 3 doigts apparents, Rymer Jones a'cependant trouv(5 chez eux 2 pieces carpiennes, qu'il nomme surnumeraires. Or, I'existence de ces 2 os carpiens suf- fit pour indiquer celle du pouce et du petit doigt reunis aux elements carpiens qui en ferment la base. L'anoplotherium ne faisait pas non plus exception a la loi gen^rale,quoique, de I'aveu de Cuvier lui-meme, outre ses 2 grands doigts, il en avait encore 3 autres reduits a I'^tat de vestige. Cet animal se rapprochait done beaucoup du genre hyoemoschus, dont les 2 metacarpiens principaux restent separes. MM. N. Joly et A. Lavocat concluent ainsi : « Quand aux solipedes, si improprement nommes monodactyles, nous croyons voir demontre que : 628 COSMOS. « 1° Leur grand doigl est double et repr^sente les deux grands doigls du pore et des ruminants; 2° I'auriculaire etl'index sont cvidemment repr^sentt^s par les stylets metacarpiens; 3° le pouce, celui de tous les doigts qui, chez les mammi- feres marcheurs, se modifie le plus, est indiqu6 chez le cheval par I'excroissance corn(5e appelee chataigne. » lis citent, a Fappui de ces conclusions, la pal^ontologie. D'apres 51. le D"- Kaup, chez les hippotherium ou chevaux de I'ancien monde, independamment du doigt principal, equivalent au deuxieme et au troisit;mo doigts de riiomme ou des ruminants, il y avait2 doigls lateraux servant de pha- langes , plus un prolongement styloYde, que le docteur Kaup regarde comme un qua'trieme doigt rudimenlaire, et qui est incontestablement l3 cinquieme. Sous ce rapport, ces chevaux se rapprochaient done des palaeolhcrium, et surtout des palteotherium hippouies, decouverts a Sansan par M. E. Lartet. Dans leur etude, MM. Joly et Lavocat ont du dinger leur attention sur les par- ties vraiment essentielles de la main et du pied ; ils font observer que les os du carpe sont en quelque sorte la base fondamentale de la main, comme ceux du tarse sont la base fondamentale du pied ; que c'est I'examen comparatif de ces parties qui l9s a particuli^rement occupes, que la r(5gion phalangienne est tene- ment modifiable, qu'elle donne a certains mammiferes I'apparence de ne posse- der que 1 , 2, 3 ou i doigts; et que de la sont venus les termes de monodactyles, didactyles, tetradactyles reguliers ou irreguliers : toutes denominations erron- n^es, en ce sens que, d'apres des caracleres superficiels et inexacts, elles ^ta- blissent une profonde division entre des animaux qui, en realite et a ce meme point de Yue, se rapprochent et se groupent sous un meme type : la pentadactylie. DE L'lMPRlMERlE DE CH. LAHURE ( ANCIENNE JIAISON CRAPELET), rue de Yaugirard, 9, prJs de TOdeon. COSMOS. 629 NOUVELLES DE LA SE)IAINE. — M. Nadau de Tonnins (Lot-et-Garonne) a transmis a I'Academie de medecine le programme suivant d'un cours populaire d 'hygiene publi- que et privee, pour lequel il a fonde un prix de trois mille francs. 1° Faire connaitre succinctement la constitution physique et morale de I'homme. les veritables conditions de sa sante ; montrer I'heureuse influence d'une education forte etjeligieuse sur le caractere et le bien- etre des hommes ; 2" Exposer d'une maniere generale les influences des climats, des vi- cissitudes atmospheriques, des habitations et des vetements ; 3° Traiter du regime en general, du choix et de I'emploi des aliments et des boissons, et des habitudes qui s'y rapportent ; 4" Insister sur les avantages de la sobriete et de la temperance panni les hommes; dire quels ont ete les heureux resultats obtenus paries societes de temperance en Angleterre et aux Etats-Unis; 5" Traiter de I'exercice et du travail ; en montrer les bons effets sur la sante dans les diverses professions , mais surtout dans la marine et I'a- griculture ; 6° Indiquer les principales causes des maladies, et montrer quels moyens de les prevenir peut fournir une sage application des lois de I'hygiene. Apres la distribution duprix, M. Nadau sechargera, concurremment avec le laureat, de publier a ses frais les meilleures lemons du cours afm de les repandre comme une sorte,de cateehisme de la sante. — M. le docteur Lombard, de Geneve, resume dans les propositions suivantes ses longues etudes du climat de Geneve: I. Pour le climat de Geneve , les mois sont ranges dans I'ordre sui- vant, en commenQant par le mois le plus niorbide, et finissant par le plus sain: 1° fevrier , 2" avril, 3° mars, 4" Janvier, 5° mai, 6° juin, 7° decembre, 8° aoiit, 9° juiilet, 10° novembre, 11° septembre, 12° octobre. A une temperature froide et durable , seche et variable , a I'abaisse- ment et a de fortes oscillations du barometre , a la predominance des vents du nord et a la rarete des brouillards correspondent une forte morbidite. Inversement, a une temperature chaude et prolongee, hu- mide et peu variable, a la rarete des vents du nord, a la hauteur com- parativement plus grande et a de faibles oscillations du barometre , ainsi qu'a la frequence des brouillards correspond unefaible morbiJite. 31 OCTOBRE 1852. 27 .^30 COSMOS. II. En decomposant la population dans ses divers elements : sexe , age, conditions sociales , etc. , on arrive aux consequences suivantes : Plus il y a de resistance , soit en raison du sexe , soit en raison de rai?e, plus la chaleur est facheuse, tandis que I'influence morbide du fro'id's'exerce plus specialement sur le sexe Ic plus faible et sur les personnes qui , par leur age , sont privees d'une ccrtaine force de re- sistance vilale. Les classes pauvres et ouvriferes possedent une plus grande force de resistance aux influences morbides des saisons. Quant aux maladies annuelles, en prenant pour exemple les maladies du tube digestif, voici le resultat des observations : 1" Les mois d'aout et de septembre sont I'epoque du plus grand nombre de malades et de deces ; 2° L'hiver est la saison qui compte le plus petit nombre de malades et de deces ; 3" L'eteest la saison la plus chargee de malades, etl'automne, celle qui compte le plus grand nombre de deces ; A" Entre ces deux extremes, juillet, epoque du maximum, etdecem- bre epoque du minimum, la croissance et la decroissance du nombre des'malades suivent une marche parfaitement reguliere , tres-lente de decembre a juillet, et trfes-rapide de juillet a decembre ; 5° L'influence des vicissitudes atmospheriques est plus prononcee sur les deces que sur les malades. 111. Quant a la nature pathologique des maladies , voici quelques resuUats generaux : 1° les maladies inflammatoires sont frequentes en hiver e^ au printemps. Le maximum des malades tombe en Janvier et en fevrier; le maximum des deces correspond a fevrier et a mars. Le minimum des malades tombe sur I'automne ; mais, a cette epoque , leur gravite est plus grande ; de telle maniere qu'a un petit nombre de malades correspond un assez grand nombre de deces. 2» Les nialadies bilieuses augmentent lentement de decembre, epo- que du minimtim, jusqu'a mai; elles font un saut tres-rapide en mai et juin, epoque du maximum, et des lors diminuent lentement jusqu'<\ decembre ; 3" Les maladies rhumatismales sont surtout frequentes au printemps et en hiver, et deviennent trfes-rares en automne et surtout en ete. 4° Les maladies nevralgiques sont tres-frequentes en hiver et au printemps, et tres-rares en ete et en automne; 5° Les maladies h^morrhagiques sont frequentes et graves au prin- temps et en automne, rares et benignes en hiver et en ete; COSMOS. (831 6° Les maladies catarrhales aigues sont frequentes en hiver et au printemps, et rares en automne et en etc; 7° Les maladies eruptives sporadiques sont frequentes au printemps et en ete, rares en hiver et en automne. Les maladies eruptives epide- miques presentent une tres-forte predominance du printemps sur toutes les autres saisons; 8" Les maladies miasmatiques paludeennes sont frequentes en ete et au printemps, rares en automne et en hiver; 9° Les fievres typhoides ont leur maximum en octobreet leur mini- mum en mars. La mortalite qui en results est a son maximum en oc- tobre et k son minimum en juillet. Recherchant ensuite quelle est I'intensite des influences atmosphe- riques sur le developpement de ces diverses sortes de maladies, M. Lom- bard etablit I'ordre suivant, en commengant par celui qui est le plus facilement influence par les vicissitudes atmospheriques : 1° les fievres typhoides; 2" les fievi'es intermittentes ; 3° les maladies catarrhales; 4° les maladies eruptives; 5" les maladies inflammatoires; 6" les mala- dies nevralgiques ; T les maladies hemorrhagiques ; 8" les maladies rhumatismales ; 9" les maladies bilieuses. — ■ M. Eugene Marchand, pharmacien a Fecamp, avait adrassea TAca- demie de medecine un ouvrage manuscrit ayant pour titre : Desi eauoa potables en general, considerees dans leur constitution physique et chi~ mique et dans leur rapport avcc la physique, la (jeologie, laphysiologie generate et V hygiene puldique , ainsi que dans lews applications a I'in- dustrie, a I'agriculture ; en particuiier des eaux xitilisees dans les arron- dissements du Havre et d'Yoetot. En comparantles eaux des differentes sources avec I'eau de mer, I'auteur etait arrive a considerer les mers comme les reservoirs d'oii eraanent, par evaporation, tous les elements transportes par I'atmosphere, et dont les pluies la depouillent en par- tie. U enumerait avec le plus grand soin tous les principes gazeux ou fixes que les eaux renferment et qu'elles ont pris dans leur passage soit a travers I'atmosphere , soit a travers les couches teri'estres. M. Marchand admettait comme M. Chatin, que toutes les eaux contien- nent de I'iode et du brdme , et que le goitre et le cretinisme ont pour cause principale I'absence de I'iode dans les eaux potables. Ce grand tra- vail du savant et infatigable pharmacien, a ete I'objet de deux rapports favorables fails, I'un par M. Boullay a l' Academic de medecine, I'autre par M. Bussy a I'Academie des sciences. M. Bussy a fait sur les recherches de M. Chatin un rapport plus fa- vorable encore, et nous profiterons de celte occasion pour examiner de nouveau les deux grandes questions soulevees dans ces derniers G32 COSMOS. temps relativement a la presence et aux effets de I'iode dans I'air et dans I'eau. 1° L'air renferme-t-il des quantit^s appreciables d'iode? MM. Ctia- tin, Marchand,Niepce, etc., affirment que ce fait ne peut pas etre re- voque en doute ; niais ils I'ont mis en evidence en employant pour reactifs la potasse et I'acide nitrique. Or, nousavons deja constate avec un chimiste anylais, M. Macadam, que toutes les potasses, meme les plus pures, contiennent elles-memes de I'iode : et M. Despretz nous rappelait I'autre jour qu'il lui avait ete absolument impossible de se procurer de ,1a potasse exempte de cblore et par suite d'iode. D'un autre cote, M. Boettger a prouve recemment, au sein de la reunion al- lemande pour I'avancement des sciences, que tous les acides nitriques <:oncentres, et particulierement ceux qui ^mettent des vapeurs ruti- lantes, renferment de I'iode sous forme de chlorure d'iode que le sul- furc de carbone fait apparaitre immediatement; d'ou le celebre chi- miste de Francfort concluait que les experiences par lesquelles M. Chatin pretend avoir demontre la presence de I'iode dans toutes les terres, toutes les eaux et l'air ne doivent etre acceptees que sous benefice d'inventaire. La commission nommee par 1' Academic des sciences a Juge et declare elle-meme que la question ne pouvait etre definitive- ment resolue que par de nouvelles experiences indispensablement ne- cessaires. 2° Y a-t-il coincidence entre I'abondancc de I'iode soit dans l'air, soit dans les eaux et I'absence complete du goitre et du cretinisme; entre la diminution progressive de la quantite d'iode et le developpe- ment de ces maladies? La commission del'Academie a refuse de suivre M. Chatin dans cette discussion ; elle a pense que les faits sur lesquels elle repose ne sont encore ni assez nombreux ni assez concluants pour permettre des a present de porter sur cette question un jugement suf- fisamment motive. Elle affirme qu'on est en droit de douter que I'iode ait reellement, au point de vue du goitre et du cretinisme, I'impor- tance que M. Chatin lui attribue ; que Ton doit etre tres-reserve dans les consequences que Ton tire des analyses comparees de l'air, des eaux et des aliments pour en deduire les proportions d'iode qui doi- vent etre absorbees par I'homme. On le voit done, ce ne sont encore partout qu'incertitudes, que doutes, que problemes a resoudre, el Ton ne nous reprochera plusnotre incredulity. La seule consequence generale et essentielle du travail de M. Chatin, ajoute M. Bussy, c'est l' extreme diffusion de I'iode dans la nature or- ganique et inorganique , la dissemination de I'iode sur tout notre globe ; mais, tres-certainement , I'iode ne differe pas en cela des autres sub-. COSMOS. 633 stances simples, le chlore, le brome, le soufre, le phosphore, que Ton retrouvera aussi partout quand on s'avisera de les chercher, et auxquelles, avec un peu d'imagination, on pourra essayer de faire jouer un role noii moins spccieux et non moins important. — M. Boettger, dont nous portions tout a I'heure, a fait une curieuse decouverte. Tout le monde connait les aiiialgames d'or, d'argent, de zinc ; niais ramalgame de fer etait jusqu'ici chose inconnue et meme impro- bable. Et, cependant , il se produit facilement quand on ajoute quelques gouttes de mercure au melange suivant : une partie en poids de fer, deux parties de deuto-chlorure de mercure (sublime corrosif;, et deux parties d'eau. Pour produire dans les plus excellentes conditions I'amal- game de zinc, il suffit de meter ensemble une partie en poids de zinc, quatre parties de deuto-chlorure de mercure, et deux parties d'eau. Le melange d'une partie en poids de fer, de quatre parlies de deuto- chlorure et de deux parties d'eau, donne naissajicc a la foisa du chlc- rure de fer, du proto-chlorure de mercure ou calomel, et a de I'amal- game de fer. — M. Schroetter, de Vienne, a etudie avec plus de soin qu'on ne I'avait fait jusqu'ici, les causes de la production de la lumiere par ele- vation de temperature ; il a prouve que les lueurs emises par le phos- phore, avaient pour origine non I'evaporation, mais I'oxydation. II a. montre que le soufre , le selenium, le tellure et I'arsenic suffisamment chauffes en presence de principes oxydifiants, emettaient aussi de la lumiere en donnant naissance a des oxydes differents de ceux que Ton obtient par les procedcs ordinaires de combustion. — Dans I'Annuaire du bureau des longitudes pour 1835, M. Arago s'etait pose cette question : Quelle est la limite inferieure de la hau- teur des nuages orageux? II repondit par ces quelques exemples : « Les observations de Tobolsk donnent un cas ou le nuage orageux pouvait n'etre eleve verticaleinent que de 214 metres; un second, oil la hau- teur etait de 292 metres; six cas correspondant a des hauteurs com- pvisos entre 400 et 600 metres; trois cas oii les nuages se trouvaient entre 600 et 800 metres. » M. Arago ajoutait : « Je n'ai pas recueilli tant de nombres par une value curiosite; on les verra prendre place dans la discussion de cer- taines questions capitales, fort controversees entre les physiciens; ils nous serviront a examiner si la foudre descend toujours des nuages vers la terre, ou bien si quelqiiefois , au contraire, elle remonte de la terre aux nuages. » En possession de deux observations tres-precieuses de coups de foudre sortis de nuages beaucoup plus bas , M. Haidinger croit qu'il est 634 COSMOS. graiulfment utile de Ics publier, et il nous les adresse aujourd'hui meme de Vienne; nous nousjifttons de repondre au vtru de notre sa- vant ami. OrcKje d'Aclmont, 26aout 1827. — Cetorage alaisse de tristeset impe- rissables souvenirs dans les annales du convent capilulaire ou Colle- giale d'Admont; il eclata pendant les vepres et tua deux jeiines pretres dans le choeur meme de I'eglise. Le nuage d'ou partit la foudre n'avait que 8 metres d'epaisseur, et sa distance perpendiculaire au sol ne de- passait pas 28 metres- L'intensite extraordinaire de cet orage fut , en- quelque sorte, concentree tout enti^re dans le couvent, et dura moins d'une demi-heure. Le petit nombre^d'eclairs que Ton apergut allaient de haut en has, du nuage h la terre. Le couvent, situe dans la vallee, possede sur la colline le chateau de Roetfelstein , a une hauteur de 117 metres. Le chateau n'avait pour habitants que le chasseur et sa femme ; pendant tout I'orage , ils virent la croix du clocher, haut de 36 metres, dominer la couche nuageuse, dont la surface inferieure rasait Tune des fenetres de la tour, percee ^ environ 28 metres du sol'. La couche couvrait la vallee dans toute sa largeur, et atteignait, dans la direction du sud au nord, les deux chaines de montagnes. Une autre couche de nuages s'etendait au-dessus sur toute la largeur de la vallee ; on put estimer son elevation par les lignes suivant lesquelles elle coupait les flancs des montagnes et les sommets qu'elle cachait ou lais- sait a decouvert. Sa distance verticale au soletait d'environ 732 metres, et la distance entre les deux nuages de 666 metres h. peu pres. Le plus "■rand nombre des decharges echangees entre les deux nuages allaient du nuage inferieur au nuage superieur : tres-peu d' eclairs suivirent la direction contraire. Oratje de Graz, 19 juin 1826.— Les decharges electriques eclaterent le soir, et se prolongerent une heure au plus. II ne tomba point de orele, mais il plut sur divers points, surtout pendant la premiere moi- tie de I'orage. Les eclairs se succedaient coup sur coup, et, en general, sans de trop forts coups de tonnerre. Les eclats de foudre proprement dits etaient accompagnes d'un craquement tres-vif , surtout au debut. La foudre tomba neuf fois , cinq fois avec inflammation. La ville de Graz est batie, comme on salt, sur les flancs du Schlossberg; or la citadclle, sitiiee au sommet de cette colline haute de 490 metres, resta decouverte pendant toute la duree de I'orage , le ciel au-dessus etait tout a fait serein et bleu : au contraire la tour de I'horloge du Johan- neum, a 123 metres au-dessousdu sommet, etait presque entierement plongee dans la couche orageuse. On en conclut que la distance verti- cale de la surface superieure du nuage etait d'environ 106 metres, la COSMOS. 63& distance de la surface inferieure d'environ 70 metres; I'epaisseur, par consequent, de la couche nuageuse etait de 36 metres. En terminant la note qu'il nous adresse, M. Haidinger exprinie son regret de voir que presqiie aucun physicien ne se soit empresse d'a- jouter quelque observation precise a celles reciieiilies par M. Arago, il y apres de quinzeans; etpour reveiller les indifferenls, il leurrappelle cetle severe le^on du grand physicien. « Sices resultats ne sont pas plus nombreux, il faut s'en prendre i la deplorable habitude qu'ont eue la plupart des auteurs de traites de physique, de presenter tous les problemes con)me resolus, toutes les questions comnie etant entiere- nient epuisees. Des assertions tranehantes, la ou le doute devrait ac- compagner chaque parole , nuisent essentiellement aux progres des sciences. Signaler des lacunes est encore plus utile qu'enregistrer des decouvertes. C'est en essayant de faire disparaitre certaines difficultes de la theorie newtonienne de remission que plusieurs physiciens exacts ont donnes a I'optique une face entierement nouvelle. C'est en ne croyant pas sur parole ceux qui criaient naguere a pleine voix : « II .< n'y a plus rien a trouver sur 1 electricite et le magnetisme, qui ne soit " aujourd'hui du ressort immediat du calcul, >. qu'on a enrichi cesdeux sciences d'une innombrable serie d'etonnants phenomenes dont on n'a- vait pas la plus legere idee il y a quelques annees. » — L'Academie des sciences de Berlin a perdu le plus jeune de ses membres. Le docteur Eisenstein, le plus habile malhematicien de la jeune Allemagne, le successeur de Jacobi dansla chaire de I'Universite, est mort a I'age de 31 ans. — M. Vicars Griffith, le secretaire adjoint de la societe royale de Dublin, est mort subitenient a Lyon , ou il etait venu seul passer quel- ques jours avant de se rendre en Italie. — Le systeme decimal sera detinitivement adopte dans les lies Bri- tanniques. La banque d'Angleterreaannonce officiellemcnt qu'a partir du 1" novembre, elle n'emploiera plus comme poids legaux que I'once troy et ses parties decimates; ce qui entraine la suppression des livres, onces, deniers et grains en usage aujourd'hui. — M. Tresca, ingenieur civil, ecrita la Societe d'encouragement qu'au moment ou , a la suite d'une discussion recente , elle se preoccupe de la question de I'art industriel , I'Angleterre fait des efforts inouis pour ameliorer chez elle le gout artistique. 11 a pense qu'il pourrait ^tre utile de faire connaitre quelle est I'itnportance des moyens dont dis- pose le departement de I'art pratique, cree en Angleterre a la suite de Texposition universelle , et a la tete duquel le gouvernement a place M. Cole, I'un des membres les plus influents du comite executif. 636 COSMOS. « Une somme considerable a ete affectee a I'achat d'objels d'art des- tines aiix ecoles de dessin, et quoiquc peut-etre le gout qui a preside au choix de ces objets, n'ait pas ete, au point de vue fran^ais, irrepro- chable, toujours est-il qu'un grand nombre de nos plus beaux produits en orfevrerie, en bronze, en porcelaine eten ornement de touteespece serveiit aujourd'bui de modeles pour I'enseignement du dessin a Londres. « Ce n'est jusque-la qu'une operation en quelque sorle particulifere, et la commission royale, independante du gouvernement, ne pouvait faire un meilleur emploi desa miraculeuse fortune qu'en en consacrant une partie a cette question. « Mais il a fallu que I'inferiorite de I'art industriel en Angleterre fiit bien reconnue, pour que, dans un pays oil la plupart des grandes creations sont exclusivement dues a I'association d'interets prives et d'efforts individuels, le gouvernement se soit decide a intervenir en creant une nouvelle administration qu'il a dotee d'un revenu de 500 000 francs. « Un vaste musee, une bibliolhfeque , tout ce qui pent aider au dd- veloppement du gout,et particulierement des modeles d'ornements clioisis comme objets historiques chez les differents peoples et dans les difFerents styles, serontrassemblessuccessivement a Marlborough-House. Ce musee a du etre organise le 1" septembre dernier, et entieremenl consacre a I'art industriel et d'ornements. « II existe en Angleterre, depuis longtemps, un grand nombre d'ecoles de dessin, qui, sous le rapport materiel, sont plus impor- tantes et mieux organisees que les notres. Bien que distribuees sur toute la surface du royaume, elles ne sont pas absoiument iudepen- dantes. Le departement de I'art pratique va maintenant centraliser la direction de tous ces etablissements et leur donner une nouvelle im- pulsion. « L'exposition a eu pour but serieux de faire connaitre le fort et le faible de cliaque Industrie. L'Angleterre a vu pourquoi nos produits sont plus recherches que les siens. Elle aura la sagesse de faire des efforts considerables pour diminuer la distance qui la separe de n'ous sous ce rapport. Sansdoute I'art pour cela n'abandonnera pas laFrance ; mais, si des creations de ce genre sont utiles, pourquoi, dit M.Tresca, serail-il reserve a nos voisins d'en profiler seuls? « — La reapparition du cholera en Pologne et en Prusse determine M. Guyon a publier un moyen tres-efficace de faire cesser immediate- ment les crampes des jambes , et qui consiste a renverser le pied sur la jambe. A cet effet on saisit le talon d'une main, tandis qu'embras- COSMOS. G37 sant de I'autre la pointe du pied, on opere le renvcrsement sur la jambe. On salt, ajoute M. Guyon , combien on tourmente les choleric ques pour remedier aux crampes par des frictions plus ou moins rudes et douloureuses , par I'application des rubefiants plus ou moins irri- tants, etc. On ajoutait ainsi, et en pure perte, la fatigue de la medica- tion et les dangers d'un refroidisscment toujours funeste aux dou- leurs d'une invasion si redoutable par elle-meme. M. Guyon a employe et ftiit employer, dans I'Algerie et la regence de Tunis , pendant les dernieres epidemics de ces contrees ce moyen si rationnel et d'execu- tion si facile. Le premier medecin de son altesse le bey de Tunis, M. le docteur Lombroso, a qui M. Guyon avait recommande sa me- thode , en parle ainsi dans son Hi&toire du cholera : « J'ai mis en pratique le moyen que m'avait indique le docteur Guyon pour faire cesser les crampes des extremites, et j'ai toujours obtenu la cessation instantanee de ce terrible symplome. » Les crampes des doigts et des mains disparaissent comme celles des jambes, par I'extension des doigts sur la main et de la main sur I'avant- bras. Comment se fait-il que M. le docteur Guyon ne connaisse pas, ou ne daigne pas rappeler le moyen si simple et si efficace qu'un jeune me- decin , M. le docteur Burcq , employa avec tant de succes pour atteindre le meme but et faire disparaitre les crampes choleriques comme par enchantement? Tons les journaux de medecine ont cependaiit parle des resuliats vraiment etonnants obtenus dans plusieurs hopilaux de Paris. II suffisait d'appliquer sur la jambe ou le bras envahi un large anneau de cuivre, soil seul et sec, soit revetu a I'interieur d'une cou- che concentrique de linge trempe dans de I'eau salee pour faire cesser presque subitement des crampes douloureuses a Texces. Encourage par ces premiers succes, M. Burcq etendit I'application des anneaux metalliques ; nous I'avons vu s'en servir dans de violentes attaques d'hysterie , et faire succeder un calme parfait a des convul- sions vraiment effrayantts. Un grand nombre d'affections nerveuses qui avaient defie I'habilete des plus illustres medecins et resistea tous les traitements imaginables, ont cede sans peine au contact des me- taux, cuivre, fer, acier, or ou argent. Nous pourrions citer a cet egard un grand nombre de faits con- cluants et parfaitement constates, mais contentons-nous de signa- ler un curieux resulfat de la slatistique du cholera. II resulte d'une enquete faile avec le plus grand soin que le cholera , dans ses deux invasions, a epargne presque completement, nous dirions nienie com- pletement , car les tres-rares exceptions trouvent une explication facile , 638 COSMOS. les ouvriers qui sont en contact incessant avec Ic cuivre ct comme plonges dans une atmosphere cuivreo. Les fondeurs en cuivre , lour- neurs en cuivre, mecaniciens travaillant le cuivre , etc., etc., ont presquetous ete k I'abri de la contagion. Au contraire, les ateliers consacres au travail des autres metaux , fer, acier, zinc, etc.,auraient etc cruel lenient decimes. En nous rapportant ce fiut, que nous appuierons bientdt de docu- ments authenliques , M. le docteur Burcqa pour but d'appelor I'atten- tion de ses confreres sur le parti que Ton pourrait tirer du cuivre , comme moycn preventif ou curatif , daais le cas oil nous serious visiles une fois encore par le cruel fleau qui fait deja tant de victimes en Pologne et en Prusse. — M. Warington a mis recemment en evidence, par un faitcurieux, un des procedes employes par la nature pour maintenir le balance- ment des trois grands regnes de la creation, ou I'equilibre entre les gtres vivants et les substances inorganiqucs. II avait installe quelques poissons dores dans un bocal en verre tres-grand, au sein duquel vege- taient quelques tiges d'une plants aquatique, le vallisneria spiralis. II esperait que I'acide carbonique , degage par la respiration , serait de- compose et revivifie par la respiration de la plante qui absorberait le carbone et rendrait I'oxygene. Le resultat de ces experiences fut un desappointement cruel ; les choses ne se passerent pas comme il I'avait cru : ses poissons languirent et la plante deperit. Une vegetation cryptogamique ou fungoide enva- hit le bocal tout entier, et la mort devint menagante pour les etres qu'il avait voulu fortifier par sa nialencontreuse alliance. Apres avoir longtemps reflechi sur les causes de sa mesaventure, il arriva enfin a se deniander a lui-meme si dans la fondation de sa colonie aquatique , complete au point de vue theorique , il n'avait pas oublie un element pratique essentiel. La vie des plantes est essentiellement fugace, elle ne se continue que par un renouvellement successif ; les premieres tiges bientot ne sont plus que des debris ; elles tombent au fond du vase , se decompo- sent et corrompent I'eau, si on ne Ten delivre pas. Son etablissement mixte avait evidemment besoin d'un vidangeur ou d'un boueur, et il n'y avait pas pense. Voila la veritable source du mal, voila pourquoi ses poisssons souffrent, et sa plante se fane. Mais quel sera le remede? Le trouver n'est pas chose facile , et de longs jours s'ecoulerent sans que M. Warington I'eut devine. Un jour enfm, dans une de ses prome- nades matinales , il remarqua un escargot colie a une tige dessechee dont il faisait son dejeuner, en s'attachant de preference aux portions COSMOS. 639 tout a fait privees de vie. Ce fut pour lui une illumination soudaine : « Pourquoi, s'ecria-t-il, n'ajouterais-je pas quelques petits limagons a ma colonie? » II le fit en revenant, et aussitot tout rentra dans I'ordre normal; les champignons disparurent, les poissons recouvrerent une sante parfaite , la plante reverdit ; I'eau redevint pure et ne perdit plus sa limpidite. Voila comment la nature, animee par I'esprit createur, ar- rive a ses fins sublimes par les plus humbles moyens. — Sur le chemin de fer de Giessen , duche de Hesse-Darmstadt, en visitant un wagon de troisieme classe , depuis longtemps en dehors du service, on remarqua qu'un petit oiseau, un rouge-queue, avait construit son nid, renfermant cinq oeufs, tout pr^s des ressorts d'attache. Le wa- gon fit ce jour-la m6me partie d'un convoi expedie a Francfort sur le Mein a la distance d'environ douze lieues. II stationna environ trente- six heures a Francfort , et revint a Giessen : au lieu de cinq oeufs on y trouva cinq petits. Touche de ce devouement maternel, le chef de la gare ordonna qu'on detachatle wagon et qu'on le mit en lieu sur; il le visitait de temps en temps et voyait avec un vif plaisir le pere et la mere aller et venir ap- portant la becquee k leurs petits. Au bout de trois jours , trois des jeunes oiseaux avaient pris leur vol, et cinq jours aprfes les deux autres quitterent aussi le nid. Le conducteur du train de Francfort, qui igno- rait ces details, avait ete surpris de voir a chaque station un petit rouge- queue sortir de I'un des wagons et revenir bientot pour repartir en- core. La grande vitesse et le bruit du convoi ne I'eflarouchaient pas ; et I'instinct paternel ou maternel lui faisait tout affronter ; ses petits avaient besoin de chaleur, d'abri , de nourriture , il les leur prodigua a travers des espaces inconnus , sans se laisser arreter par aucun ob- stacle. — M. Foucault enonce ainsi le principe qui lui a servi de guide dans ses recherches sur I'orientation et sur I'inclinaison des corps tournants. Quand un corps tourne autour d'un axe principal et qu'une force ou un systfeme de forces tend a produire une rotation nouvelle, non paral- lele a la premiere, I'effet resultant est un deplacement de I'axe de rota- lion primitive, qui se dirige vers I'axe nouveau de rotation par le che- min favorable au parallelisme des deux rotations. L'axe nouveau de rotation pent, suivant le cas, etre fixe ou mobile et dependant de la position du corps: quand il est fixe, le corps tour- nant tend vers une position definie , c'est ce qui arrive en presence du seul mouvementde laterre; quand il est mobile avec l'axe du corps, ce- lui-ci change constamment de direction, sans jamais rencontrer de po- sition d'equilibre ; c'est ce qui arrive dans les phenomenes de precession 640 COSMOS. anterieurenient etudi^s et auxquels se rattaclie I'experience qui consiste a abandonner a Taction de la pesanteur un corps tournant pose surun point fixe par I'line ou I'autre extremite de son axe. En formant avee le corps tournant un pendule conique, on trouve pareillement que son axe doit sc maintenir dirige sur la verlicale du point de suspension et qu'il doit se retourner bout pour bout par Tinterversion du sens de I'oscilialion ; Texperience verifie tres-fidfelement encore cette prevision fondee sur la tendance des rotations au parallelisme. — Lc R. P. Secchi ecrit, a la date du 16 septembre,au directeur de la correspondance scientifique romaine : » En vous apprenant la decou- vertc de ma derniere petite comete , je vous disais que c'etait proba- blement la comete de Biela .. J'ai le plaisir de vous annoncer aujour- d'hui que la probabilite s'est changee en certitude, parce que ce matin j'ai retrouve la seconde moitie de la comete de Biela a une petite dis- tance de la premiere. Cette seconde moitie est beaucoup plus faible, de figure ovale, sans noyau apparent; le sommet le plus aigu de To- vale est dirige vers le soleil. La distance des deux moities est de 2 de- gres environ, en ascension droite, d'un demi-degre en declinaison plus australe pour la seconde. Je ne puis donner plus exactement la position de cette seconde moitie , parce que c'est a peine si j'ai eu le temps d'observer avec une exactitude suffisante la position de la premiere. Celle-ci a encore perdu sa figure ronde; elle semble armee de deux panaches tres-delies. Le passage au perihelie est fixe par M, Santini au 28 du present mois. Voici la position de la comete comparee a une petite etoile de dixieme grandeur, qui en etait tres-rapprochee. 14 septembre 1852, 16'" 43' 58" T. M. de Rome, AR. Com. = AR. Et. — 17",2 ; D. Com. = D. Et.—5?y"X Pour fixer la position de la petite etoile, je I'ai comparee a ^ duLion, et j'ai trouve : AR. ^7. = AR. ^— 7'75"2;D. ^#. = D. ? — 16". La position moyenne de I, au 1" Janvier 1852, etait, d'apres le cata- logue de I'Association britannique : AR. ?r=9i> 23' 57",95 ; D. ;= + ll'' 57' 13",04. COSMOS. 641 VARIETES. liCONOMIE DOMESTIQUE. DU PAIN TENDRE ET DU PAIN RASSIS. Qu'est-cc que le pain rassis? 11 y a un jour a peine, si vous aviez iidresse une pareille demande aux chimistes, ils vous auraient repondu peut-etre tous en choeur : c'est du pain qui, ayant perdu de I'eau, est devenu plus dur. On etait meme tellement convaincu de cette dessic- cation, que Ton avangait k priori que le pain rassis devaitetre plus nu- tritif que le pain frais, puisqu'il contenait, a poids egal, une plus grande quantite de matiere alimentaire seche. El pourtant, voyez I'incerlitude des jugements humains quant ils n'ont pas I'experience pour point de depart! M. Boussingault , tout savant illustre qu'il est, n'a pas dedaigne I'etude d'un fait aussi trivial que le passage du pain de I'etat frais a I'etat de pain rassis; et leresultat de ses recherches prouve assezcom- bien etait difficile la solution de ce probleme si simple en apparence. M. Boussingault avait commence aussi par croire a la deshydraJation de la mie, maisapres avoir vu que dans les menages, des qu'une four- nee est cuite on I'enferme dans la huche; on la porte au cellier ou on la descend a la cave; qu'elle est, en un mot, toujours placee dans les conditions les moins favorables a la deperdition de I'humidite, ii com- menga a douter de Texplication traditionnelie. II ne se passe pas vingt- quatre heures, nialgretoutes ces precautions, sans que la mie ait perdu uue partie de sa flexibilite, sans qu'on puisse I'emietter facilement; la croute, au contraire, de croquante, de cassante qu'elle etait, devient tenace en prenant une certaine souplesse. Ce changenient d'etat suit I'abaissement de temperature, et il ne parait pas raisonnable de I'attri- buera un effet de dessiccation. Qui ne salt, par exemple, qu'un pain froid et rassis recouvre dans le four loutes les proprietes du pain ten- dre, ou bien encore lorsqu'on en grille une tranche sur un feu vif? A. la verite, les surfaces d'un morceau de pain roti sont torrefiees, carbo- nisees, fortement dessechees par Taction trop directe de la chaleur, mais a I'interieur la mie est flexible, elastique et leadre. On ne saurait nier cependantque le pain en sejournant dans le four, etque la tranche grillee n'aient perdu I'un et I'autre une quantite notable d'eau. Done, dit M. Boussingault, ce n'est point I'eau qui fait le pain tendre. II y a une autre condition qui parait favoriser la conservation de la mollesse 642 COSMOS. • du paia. Cette condition, c'est le peu de conductlbilite calorifique du pain. Dans un pain rond de 33 centimetres de diamfetre, 14 centimetres d'^paisseur et pris lorsqu'on defournait, M. Boussingault introduisit au centre, h 7 centim6tres de la surface, le reservoir d'un thermometre; quelques instants apres son introduction, I'instrumcnt marquait 97V Le four etait chauffe de 280 a 300° ; mais il faut tenir compte de la presence de I'eau dans la mie au-dessous de la croute, qui en retient toujours de 35 a 45 pour 100; cette eau qui n'etait soumise a aucune pression ne pouvait pas se chauffer au dela de lOO**. Le pain chaud pesait 3'''',7GO; on le plapa dans une chambre oil un thermometre suspendu dansl'airindiquait 19"; a cote du pain portant un thermometre on en avail place un autre pour jugerdu changement d'etat. Vingt-quatre heures apres qu'on eut defourne, la temperature du pain etant sensi- blement la meme que celle de la chambre et des lors le refroidissement pouvant etre considere comme accompli , le pain etait demi-rassis , comme Test ordinairement celui qui est cuit depuis un jour ; la croute ne se brisait plus sous la pression , il y avail eu 30 grammes d'eau de dissipes, soil les 0,008 du poids initial. Le sixieme jour, lorsque le pain etait extremement rassis, la perte ne s'elail pas elevee au-dessus de 0,01. Dans les six derniers jours, c'esl-a-dire pendant la periode ou la mo- dification a ete la plus prononcee , bien qu'elle ait eu lieu aprfes le complet refroidissement, la perte en eau n'a ete que de 40 grammes sur 3730, ou a tres-peu pres de 0,01. L'experience suivanle prouvera, d'ailleurs, que I'elimination de I'eau , dans des limites restreintes , ne contribue en rien a la transformation du pain tendre en pain rassis. Le pain cuit depviis six jours, et donl le poids etait de 3690 a et6 remis au four. Une heure apres, le thermometre place au milieu de la mie indiquait seulement70", ce pain ayant ete coupe, onle trouva tout aussi frais que ceux que Ton venait de cuire. II ne pesait plus que 3570, ayant perdu 120 grammes d'eau ou 3 | pour 100. Cette experience a 6te repetee sous une autre forme. On a mis une tranche de pain chaud dans une capsule placee sous une cloche , dont louverture reposait sur de I'eau , de maniere a ce que I'air confme dans la cloche fut sa- ture d'humidite. Chaque jour, a la meme heure, la tranche a et6 exa- minee et pesee, et Ton a trouve que le pain etait devenu demi-rassis apres avoir perdu 0,007 de son poids. Une foisacetetat, la consistence a ete en augmentant, bien que les pertes successives n'aient plus ete que de 0,002, 0,0016, 0,003 du poids initial. La tranche de pain rassis a elegrillee, elle a pese 26^%7b, plus des^ etaient regeneres a I'etat de pain tendre , quoique , par Taction de la COSMOS. 643 chaleur, la perte , due en grande partie a de I'eau volatilisee , se sent elevee a pres de -j^j du poids primilif. En remettant au four un pain tr^s-rassis, on a vu qu'il etait devenu tendre lorsque le thermometre , place dans son interieur, se tcnait a 70°. Afin de constater si le chan- geinent d'etat avait lieu a une temperature moins elevee, M. Boussin- gault a introduit, dans un etui en fer-blanc, un cylindre de mie taille dans du pain cuit depuis plusieurs jours. Pour prevenir toute dissipa- tion d'humidite, I'etui a 6te ferme avec un bouchon , puis on I'a main- tenu pendant une heure au bain-marie chauffe entre 50 et 60^ La mieestdevenue souple, elastique eomme si on I'eut retiree du four. On I'alaisseerefroidir.Vingt-quatreheuresapres, saconsistance etait celle du pain demi-rassis, et, au bout de vingt-huit heures, celle du pain rassis. La disposition prise pour elever la temperature sans qu'il y cut perte d'eau , a permis de modifier nombre de fois le pain enferme dans I'etui en le chauffant et le laissant refroidir alternativement. Des faits expo- ses precedemment, M. Boussingault est arrive a conclure que ce n'est pas par une moindre proportion d'eau que le pain rassis differe du pain tendre, mais par un etat moleculaire particulier qui se manifeste pendant le refroidissement , se developpeensuite et persiste aussi long- temps que la temperature ne depasse pas une certaine limite. Nous avouons qu'apres ces experiences on pouvait s'attendre a vme solution plus nette de la difticulte , car cet etat moleculaire particulier frise de bien pres la virtus dormitiva que Diafoirus reconnait a I'opium. M. Thenard , qui n'aime pas trop ces explications scolastiques , apres avoir entendu la lecture de la note de M. Boussingault , a ajoute que pour son compte il croyait plutot a Taction de la temperature ele- vee sur I'amidon et sur le gluten en presence de I'eau qu'a un arran- gement moleculaire particulier ; et rilliistrc cbimiste nous permettra de nous associer ici a son opinion , en ajoutant que les exemples de ramoUissement par la chaleur ne sont pas aussi rares qu'on pourrait d'abord le supposer. La gelatine ne s'hydrate certes pas davantage lors- que chauffee doucement elle devlent liqiiide apres avoir ete solide et elastique. Le caoutchouc nous offre un phenomene tout a fait sem- blable , sans qu'il y ait addition d'humidite dans la masse, ni fusion de la substance resineuse. L'empois d'amidon lui-meme qui est mou et presque coulant quand il est chaud, ne se fige-t-il pas et ne devient-il pas gelatineux et solide apres le refroidissement? L'explication du ra- moUissement du pain I'assis par la chaleur, considere sous ce point de vue, deviendrait alors bien simple, et serait degagee de tout ce mystere dent elle parait etre encore entouree. Car il n'y aurait autre chose a voir dans ce phenomene qu'un ramoUissement de Tempois, le 644 COSMOS. passage a I'etat de vapeur d'une partie de son eau d'hydratalion et I'im- bibition du gluten par cette eau ou par cetle vapeur qui lui reiuiraient cette souplesse dont lefroid et I'hydratation trop facile I'avaient priveo. Ce qui rend cette maniere de voir assez probable , c'est la lenteur avec laijuelle lempois d'amidon se desseche au contact de I'air, et ia facilite que possede le gluten de devenir dur et cassant dans un temps assez court. L'enipois ecbauffe ne tarde pas a abandonner une partie de son huniidite en se ramollissant , et le gluten, expose a I'action de I'eau et d'une temperature assez elevee , reprend bientot I'elasticite et ia sou- plesse qu'il avait perdues. Nous sommes bien sur, du reste , que M. BoLissingault Ini-meme ne tardera pas a faire disparaitre de sanote la modification moleculaire pour y substituer ou I'explication que nous venous de donncr, ou une auti^e theorie encore plus satisfaisante que son intelligence ne manquera pas de decouvrir. STANCE DE L'ACADfiMIE DES SCIENCES. {Seance du landi 18 octobre 18b2.) £cOi\OMiE RURALE. — M. Becquerel lit des consid6ralions sur ramelioration de la Sologne. La Sologne autrefois fut couverte de forels; les principaies causes qui ont concouru a son deboisement sont les conquetes, les giierres incessantes du nioyen age, les progres de la civilisation, les usagers et le libre pacage du betail , particulicrement des moutons. Au deboisement succederent les bruyeres, leur envahissement par les eaux et les etangs. Aajourd'hui celle contree se com- pose de parties sablonneuses et arides , et de parlies inondees et marecageuses. Les premieres ne peuvent convenir, comme les iandes de Gascogne , qu'a la culture des arbres verts, les autres, comme la Brenne, la Bresse et la Dombes, ont besoin d'etre assainies, marnces et cullivees. La Brenne, d'une superficie de 80 000 hectares, dont 4000 en etangs, ^tait, comme la Sologne, il y a douze siecles, couverte de foruts entrecoupecs de prai- ries arrosees d^eaux courantes et vives. Elle etait renommee par la fertility de ses paturages et la douceur de son climat. Les forets tomberenl sous la main de I'homme et la dent meurtriere du b^lail, ou furent devorees par I'incendie ; les eaux plus turd envahirent les terrains productifs etles transformerent en marais. Le sous-sol impermeable, se pretait facilement a la creation d'etangs; aussi les communautes religieuses se halerent-elles de les multiplier dans le double but d'utiliser des terres sans valeur, et d'en retirer une nourrilure preferable a celle des planles potageres. Le problems a r^soudre pour la Brenne, comme pour la Sologne, est de revenir a I'etat primitif, en plantant et cultivant les terres apres les avoir asjainies et amendees. La partie inondee de la Bresse et de la Dombes presente une superficie de 107 200 hectares, dont 20 000 en etangs. Ces deux conlr^es etaient egalement riches et peuplees il y a peu de siecles; le depeuplement et I'insalubrite ne re- COSMOS. 645 montent pas au dela dii xvi« o« wir si6cle , cpoque oii Ton a commence a etablir des etangs. II est prouve encore que I'insalubrile cesse la oil I'on des- s6che les etangs pour les transformer en prairies; et que la disparition des bois est la consequence de la necessite oil Ton s'est trouve d'avoir de grands patu- rages pour remplacer les prfe devenus des etangs. La Bresse deja est dans des conditions meilleures par suite de ses Etangs dess^ches, de ses prairies reconquises et de ses terres calcaires. C'est un utile avertissement pour la Sologne. II est bien constats que le deboisement dans les contrees a sol argilo-siliceux , et a sous-sol impermeable amene a sa suite les landes, les bruyeres, I'envahis- sementdes eaux, les terrains marecageux, relabiissement des etangs et enfin I'insalubrite. Dans plusieurs tlals de I'Europe on a cherche a appliquer le principe de la colonisation agricole an defrichement des terres, en y faisant concourir toutes les categories d'indigents honnetes ou criminels, innocents ou vicieux , valides ou invalides. Les efforts tentes dans cette voie n'ont pas toujours ete heurenx, m^me avec le concours des gouvernements. Quelle chance de surces pouvail-on obtenir avec des malheureux extenues par la mi^ere, habitues a I'existence des villes, peu propres a devenir agriculteurs, precisemeni parce qu'ils avaient un autre etat? Quelques examples, trop rares encore, prouvent qu'en procedant tout autrement, on pent parfaitement reussir. En 1848 le gouvernement beige forma, dans la commune de Lommel, province du Limbourg, una petite colonic composee d'un presbytere, d'une eglise, d'une ecole de vingt formes. Pour exciter I'emulation des colons et faire naitre chez eux I'amour de la propriety, on leur passa des baux a long terme, avec faculte d'achat et grandes facilites pour le payement. Le resullat obtenu est satisfaisant, et tout fait entrevoir que dans dix ans la Campine deviendra I'une des plus belles provinces de la Belgique, digne con- quete des sciences , des arts, de I'industrie et de I'amour du bien public. La colonie agricole d'essai du val d'Yevre , pre> Bourges, fondee en '1847 par M. Charles Lucas dans un marais desseche, est aujourd'hui tres-prospere. La colonie agricole de jeunes detenus d'Ostwald (Bas-Rhin) s'accroit chaque annee et ne laisse rien a desirer. M. Becquerel cite encore la colonie agricole et horticole de Notre-Dame des Orphelins, presdeGicn, sur les confins de la Sologne. Son pieux fundateur, I'abbe Tallereau, a plante sa tente au milieu du desert, et s'est mis a cultiver a la grace de Dieu , sans s'occuper de I'avenir. Son but etait de recueillir, jusqu'a I'age de vingt ans, des orphelins pauvres et abandonnes de huit et douzeans, pour les initier aux travaux de I'agriculture et de I'horticulture, tout en leur donnant une instruction religieuse et des lecons de lecture, d'ecriture et de calcul. L'existence de la colonie est maintenant assuree; de magnifiquesr^coltes obtenues cette annee dans des terres couvertes de bruyeres , il y a tiois ars , ont recompense les efforts du colon. L'enfant de dix a quinze ans, surtout quand il n'est pas corrompu par le sejour des prisons, est I'element par excellence des colonies agricoles affectees au defrichement des terres do facile culture. « lis peuvent, ajoute le savant academicien , remplacer, jusqu'a un certain point, les 646 COSMOS. anciennes communautes religicuses , qui rendircnt a la soci6le des services si 6minents. Ce fiirent eiies qui defricherent une parlio de la France, quiaballirent les forets dans les plaines et stir les coleaiix , et qui planterent la vigne dans les ck)S si renomnies de la Bourgogne , de la Champagne et du Jura. Prenons ce qu'il y a de bon dans ces institutions que ie temps a renvers^es, leur charit6 . leur esprit d'association et leur perseverance dons I'execulion de leurs projets , afin de faire concourir ces precieuses qualites aux progres de la civilisation , au bien-eire des classes malheureuses et a la gloire de la France. » Le plus simple serait d'aider puissamment au retablissement de ces ordres religieux; pour leur prendre ce qu'ils ont de bon , il faut les prendre eux-memes. Mec.vmque appliquee. — M. Poncelel lit une longue note ayant pour objet I'examen critique et historique des principales theories ou solutions concernant r^quilibre des voiites. — Les questions relatives a la stabilite des edifices, celles qui concernent notamment I'equilibre des voutes, joignent a une haute utilite pratique , une importance theorique que Ton ne saurait meconnaitre d'apres le grand nombre de tentalives qui jusqu'ici ont 6te faites par les geo- metres pour en soumettre les donnees au colcul. Ces questions ont d'ailleurs acquis par les immenses travaux des chemins de fer en cours d'execution , ou en projet, un interet d'actualite tel , que M. Poncelet a cru rendre un veritable ser- vice aux ingenieurs en leur mettant sous les yeux le tableau resume des prin- cipales recherches concernant la theorie des voutes, et qui ont pu exercer direc- tement ou indirectement une certaine influence sur les solutions aujourd'hui raises en pratique. Avant Coulomb on ne possedait sur I'equilibre des voutes que des considera- tions niathematiques ou des regies empiriques fort imparfaites , fondees sur des hypotheses restreintes, et la plupart denuees du caractere de precision et de cer- titude qui pent seul les recommander a la confiance des ingenieurs eclaires. Parent, Couplet, B6lidor et Bosnit, en France; Gregory, Whevveli , Emerson, Button, en Angleterre; Lorgna, Mascheroni, etc. , en Italie, et avant eux La- hire , en negligeant toute influence de la cohesion et du frottement sur les plans des joints , avaient considere la partie superieure de la voiite comme une snrte de coin agissant sym^triquement de part et d'autre de la clef, pour renverser les parties hiterales et inferieures par rotation autour de I'arete exterieure de la base des pieds droits; car on avait fenti de bonne heure que Thypothese du poll des joints n'elait nullement admissible pour ces dernieres parties. Dans son Memoire de 1773 , Coulomb indiqua le premier, d'une maniere pre- cise , les veritables conditions de I'equilibre et de la stabilite des voutes en ber- ceau, supposees symetriques par rapport au plan vertical qui partage la clef en parties egales , en tenant compte du frottement sur les plans de joint , de la cohesion , de la possibilite de la rotation des voussoirs autour des aretes extremes des joints dans les regions oil la rupture pent se faire. Vinrcnt ensuite les expe- riences^ de MM. Gauthey, Bondelet , Boistard , dans le but de metire en complete evidence les veritables lois de la rupture des voiites par rotation. M. Navier, plus tard , reproduisit ces experiences en y ajoutant des developpements et des remarques utiles publiees dans la nouvelle edition de la Science des ingenieurs , COSMOS. 647 de Belidor. En 1820, M. Audoy, chef de bataillon du genie , dans son beau Me- moire insere dans le Memorial de Vofficier du genie , rectifia ces theories incom- pletes et ramena les ingenieurs aux methodes gen6rales et lumineuses'de Cou- lomb; il fit, le premier, usage du multiplicateur numerique ou coefficient de stabilite qu'il faut appliqucr a la valeur de la poussee, pour donner a chaque espece de voiite le surcroit de stabilite indique par I'experience. En 1823, MM. Lame et Clapeyron , a I'occasion de la reconstruction de I'eglise Saint-Isaac, a Saint- Pelersbourg, publierent leur remarquable Memoire sur la stability des voutes. lis y joignirent diverses remarques et applications qui donnent a leurs recherches un caractere particulier d'originaiile. lis indiquerent les premiers la voie analytique par laquelie on pourrait, dans Thypothese d'^quilibre par rota- tion , determiner en profit la forme d'es courbes d'intrados ou d'extrados des voutes cylindriques qui correspondent au maximum de stabilite ou a une egale stabilite sur tous les points. En 1 825 et 1 826 , M. Navier, a I'ficole des ponts-et- chaussees, et M. Persy, a I'ficole d'application de Metz, firenl de tres-savantes lecons sur I'equilibre des voutes. MM. de Garidel et Petit, en 1835 , MM. Ardant et Michon , en 1848 , s'efforcerent de simplifier de plus en plus Tapplicalion des formules de MM. Audoy et Navier; ils les reduisirent de plus en tables d'un usage pratique, qui limitent le nombre des calculs et des latonnements neces- saires a I'etablissement des vout£s. Dans un memoire publie en 1839, un ingenieur anglais, M. Moseley, fit une etude speciale et toute mathemalique de la ligne des resullantes de pression , qu'il appela ligne de resistance et qui lui sert a discuter geometriquement I'etat et les conditions d'equilibre d'un massif pesant, compose d'un nombre quel- conque de solides en contact immediat; lels qu'une voule avec ou sans pieds droits , contreforts , surcharges , etc. M. Moseley envisage aussi les cas de rup- ture relatifs au glissement reciproque des voussoirs ou parties quelconques de voute sur les plans des joints, plans dontil determine la position au moyen d'une seconde courbe qu'il nomme ligne des pressions. II est demeure malheureuse- ment dans des generalites dont la difficulte et les incertitudes dans les appli- cations tiennent a I'indeterminalion meme des courbes de resistance et de pression. Le meme reproche s'adresse a I'interessant memoire public par M. Mery, en 1840, dans les Annales des ponts-et-chaussees. Dans les lecons qu'il fait actuellement a I'ficole des ponts-et-chaussees, M. Belanger adopteen partie les idees de M. Mery, et les rectifie en generalisant I'hypothese de Navier, relative a la distribution des pressions entre deux solides ^lasliques limites a un plan de joints communs. M. Belanger a, le premier, remplacela consideration du triangle de com.pression par celle d'un trapeze quelconque. AsTRONOMiE PHYSIQUE. — M. Person revient encore sur la question de la rota- tion de la terre, mise en evidence par I'appareilde Bohnenberger. II est toujours convaincu que les appareils de M. Leon Foucault et de M. Sire, par cela meme qu'ilsn'ont que deux axes de suspension, sont moins propresamettre en evidence les phenomenes de la rotation de la terre que I'appareil de Buhnenberger, qui a troisaxes et n'est pas entraine par la rotation de son support. II reproche a M. Fou- 648 COSMOS. cault (ie n'avoir tenu comptc que de la composante horizontale de la rotation tcrre?tre, de n'avoir parle nulle part de la composante verticale; sans doute parce qu'il croyait I'avoir annulee par son mode de suspension a I'aide d'un fil sans torsion. Mais , ajoute M. Per-on , ie fil sans torsion est une chimere ; la tor- sion se produit necessairenient, puisque I'extremite inferieuro du fil est altacliee a un cercie qui. d'apres I'auteur lui-meme, ne tourne pas, tandis que I'extre- mite superieure lourne avec la lerre ; el celle torsion, en outre, n'est pas n6gli- gcable dans un cas ou Ton parle de fixite absolue. Que M, Person nous permelte de Ie lui dire , la querelle qu'il fait aujourd'hui a M. Foucault est une veritable querelle d'Allemand. Qmnd il s'est servi de ce mot fixite abi• — Le P. Secchi, directeur de I'observatoire du college romain, con- tinue avec ardeur et avec des precautions nouvelles ses observations heliothermiques de maniere a prevenir, autant que possible, toutes les objections, eta mettre en relief les diverses causes auxquelles on pour- rait attribuer les differences de temperature observees. II s'est d'abord occupe de perfectionner son appareil. Des le mois d'aout les observa- tions ont ete faites avec la lunette de Cauchoix (2m. 43 de longueur fo- cale, et 0m.l62 d'ouverture), montee tout expres pour cela sur un pied parallactique. Les observations ont ete conduites de maniere a mettre successive- ment a I'epreuve les hypotheses auxquelles on pourrait avoir recours pour expliquer les differences de temperature observees sur le disque du soleil : 1° excedant de chaleur de la zone equatoriale; 2" inegalite de chaleur des deux hemispheres boreal et austral ; 3" inegalite des differentes faces que le soleil nous presente , c'est-a-dire des hemi- spheres separes par un cercle de declinaison heliocentrique ; 4° varia- tions irregulieres et purement accidentelles ; 5° aetion de I'atmosphere terrestre; 6° thermochrose solaire. » Afm d'eviter toute objection relative a I'absorption atmospherique, et d'ehminer entierement son influence, le P. Secchi a choisi quatre points places aux extremites de deux cordes egales a b,c d , paralleles a la direction du mouvement diurne. Vers le milieu de juin, I'equateur 656 COSMOS. solaire se projetait sur un diametre a peu prfes dirig6 de b vers d ; (cs points etaient done les plus voisins de I'equateur, tandis que les points a et 0 en etaient les plus eloignes. Or, les observations ont donne constamment b plus cliaud que a, et d plus que b. Cependantla tempera- ture de 6 et de a etait relativement plus forte, en general, que celle de d et de f ; ce qui s'expliquerait en attribuant aux deux hemispheres une inegalUe de temperature, conformement a une hypothese d'Herschel que M. Arago a rappelee. Cette experience parait trancher la question de I'exces de tempera- ture de I'equateur solaire, car elle porte son controle en elle-meme, et se trouve totalement indcpendante de I'influence de notre atmo- sphere. Les mSmes resultats ont ete obtenus par les experiences faites dans le mois de septembre, ou I'equateur prend une position inverse relati- vement au mouvement diurne, et se projette non plus au-dessus mais au-dessous du centre. Voici les resultats auxquels ont conduit les observations faites dans le sens du cercle de declinaison. Au mois d'aoiit, I'hemisphere supe- rieur se montrait un peu plus chaud que I'hemisphere inferieur ; mais les differences toujours tres-petites , avaient lieu souvent en sens in- verse. En septembre , I'hemisphere inferieur s'est montre decidement le plus chaud ; le maximum de difference etait de plus de 2 degres (du galvanometre), et c'est a peu pres ce qu'on avait trouve au mois de mars, mais en sens oppose. De plus ce maximum a eu lieu du 14 au 16 septembre, et c'est aussi I'epoque du maximum de depression de I'equateur solaire. Cependant pour que ces coincidences soient demonstratives, il fau- drait prouver en meme temps que le soleil tournait vers nous, en mars et en septembre, toujours la meme face. Or la duree de la rotation du soleil n'est pas assez bien connue pour qu'on en puisse repondre a un ou deux jours pres. En adoptant '27 j. 4 pour la duree de la rotation relative a la terre , on trouve que la face qui etait tournee vers nous le 15 septembre, I'etait encore le 20 mars, le 4 avril, le 29 mai et le 25 juin. On a de nombreuses observations faites a ces deux dernieres epoques, qui s'accordent a placer le maximum de chaleur dans I'hemi- sphere superieur, tandis qu'en septembre ce maximum s'est transporte dans I'hemisphere oppose. II faut done, ou qu'il se soit produit dans I'intensite absolue de la chaleur du soleil une variation de pres de -^ ou que la difference obser- \ee soit due au simple changement de position de I'equateur solaire par rapport a nous. On ne peut prouver que la premiere alternative COSMOS. 657 soit absolument fausse , et c'est pour cela seulement que la deuxienie reste encore incertaine. II y a une autre ressource clans I'examen comparatif de I'extremite des cordes. Elles ont donne des differences qui s'accordent parfaite- ment avec la derniere hypothese, car le point a est devenu plus chaud que b, etc plus que d. Pour reussir dans ces experiences, 11 faut prendre garde qu'il n'y ait point de taches dans le voisinage des points a, b, c, d, car les taches produiraient de grandes anomalies. Leur influence semble s'etendre a une distance plus considerable pour la chaleur que pour la lumiere. Le P. Secchi a vu quelquefois une tache qui n'occupait que -^ de I'ou- verture de la pile faire tomber la chaleur de 3 degres ou meme davan- tage. En otant les verres du telescope, et en recevant directement les rayons du soleil sur la pile avec differentes substances interposees, le P. Secchi a constate la singuliere inversion de thermochrose que M. Melloni a decouverte entre I'eau et le quartz enfume ; ses nombres sont un peu plus petits, mais cela tient peut-etre a la qualite du quartz. — « Mardi dernier 5 octobre, dit le Nouvellisfevcmdo/s, un vent dosplus violents a passe sur le canton de Vaud des les deux heures de I'apr^s- midi; ce vent que Ton appelle sirocco et qui etait tres-chaud, venait dans la direction de Geneve et soufflait horizontalement. Le temps etait assez beau et le ciel sans nuages. Apres avoir arrache beaucoup d'ar- bres dans la campagne, le sirocco a baisse dans la soiree , et la pluie lui a succede avec abondance. « Ce vent nous arrive d'ordinaire par la vallee du Rhone, ou il s'est fait senlir aussi. « 11 a du etre d'une violence considerable pour tourner les Alpes, et nous arriver par la direction de Geneve. « II n'a pas souffle dans la vallee de Joux, ou le calme a regne pen- dant toute la journee. II a ete tres-fort a Fribourg. Le thcrmometre, qui ne marquait que 4 a 5 degres les jours precedents, depassait 15 de- gres, et, dans les endroits exposes au vent, il s'est eleve a 19 degres; a Berne et dans la plaine du Rhdne, il a atteint la meme hauteur. « II faut que I'air du pays ou le sirocco prend son origine, soit a une temperature bien elevee, pour que ce vent puisse rechauffer de la sorte I'air froid des contrees qu'il traverse tout en conservant lui-meme une temperature d'environ 20 degres centigrades. « On est porte a croire qu'il prend naissance dans les plaines de I'Afrique. 658 COSMOS. « 11 scrait tr^s-int^ressant de faire des observations sur ces courants, de determiner leur cause , leur point de depart et les chemins qu'ils parcourent. « Depuis quelques mois le courant d'air qui domine vientdusud; il est tres-chaud et charge de vapeurs d'eau qui tombent sous forme de pluie lorsqu'elles arrivent dans notre bassin, dont I'atmosphere a una temperature beaucoup plus basse. « II alterne avec un courant du nord qui est aussi tres-violent. Ainsi le 22 septembre nous avons eu une bise des plus fortes, qui a dure trois jours, et qui soufflait dans le fond de la plaine Suisse. » — M. Ville , en continuant ses recherches sur la vegetation et sur le role que joue Tammoniaque dans ce phenom^ne , est arrive aux con- clusions suivantes : 1° k la dose de 4 dix-milliemes , I'ammoniaque ajoutee a I'air im- prime ci la vegetation une activite remarquable ; 2" Les recoltes obtenues dans ces conditions, a egalite de poids, contiennent plus d'azote que celles de ces raemes plantes venues dans I'air pur ; 3° A ces deux conclusions , j'ajoute qu'il y a des temps d' election pour I'emploi de I'ammoniaque , pendant lesquels ce gaz produit des effets differents ; 4° Si on en commence I'emploi lorsqu'une periode de plusieurs mois separe les plantes de la floraison, il iniprime a la vegetation une activite remarquable, sans troubler le cours des phases qu'elle doit traverser ; 5° Si Ton commence son emploi au moment de la floraison , cette fonction s'arrete ou se ralenlit; la plante se couvre de feuilles et ne donne pas de fruits. — Page 369 du Cosmos, 15'= livraison, nous avons enregistre une reclamation adressee a I'Academie des sciences par M. le docteur Barthelemy, au sujet du prix de 2000 fr. decerne a IM. le docteur Gariel , pour I'application du caoutchouc a la confection des instru- ments de chirurgie. Appuye de documents authentiques , nous affir- mions que la decouverte et la propriete de ces applications apparte- naient evidemment a M. Barthelemy. Qu'on juge done de notre sur- prise lorsque nous avons lu , dans les comptes rendus de I'Academie , seance du 30 aout dernier, tome XXXV, page 297, la note suivante : « M. Yelpeau, charge d'examiner la declaration de M. Barthelemy contre M. Gariel, trouve que cette reclamation n'est fondee que sur un malentendu de la part de I'auteur. Ce n'est point, en effet, pour I'invention de bandes en caoutchouc , mais bien pour V application qu'il COSMOS. 659 a faite du caoutchouc vulcanise a la confection de la plupart des ban- dages et appareils de la chirurfjie, que M. le docteur Gariel a 6te re- compense par I'Academie. Or, M. Barthelemy ne dit absolument rien de pareil dans la these qu'il invoque , et dont M. Velpeau ^tait d'ailleurs president; quant a I'analogie dcs brevets, la commission des prix Monthyon et I'Academie n'ont point a s'en occuper. Les auteurs au- ront a la discuter, s'ils le jugent convenable, devant un autre tri- bunal. » La legerete avec laquelle ce jugement a ete formule nous a effraye ; il nous a rappele cette fameuse definition de I'ancienne Academic frauQaise : ecrevisse , petit poisson rouge marchant k reculons ; qui n'a d'inconvenient que d'etre fausse et ridicule de tout point; car I'ecrevisse qui n'est niun poisson, ni rouge, ne marche pas a reculons. C'est absolument la meme chose dans I'arret prononce par M. Vel- peau ; car, 1° il n'etait pas president de la these de M. Barthelemy ; 2° il est parle, dans la thfese de M. Barthelemy, d'instruments de cbi- rurgie ; 3° I'application du caoutchouc aux bandages et appareils de chirurgie appartient, en gloire et en propriete, a M. Barthelemy et non pas a M. Gariel. l°Ouvrons, en effet, la these de M. Barthelemy, et cherchons-y le tableau officiel du president, des examinateurs en titre et des exami- nateurs suppleants ; le voici : President, M. Jules (2oc(\uQi; examinateurs, MM. Berard, Bouillaud, Chomel; suppleants, MM. Rostan et Lesueur. Quant a M. Velpeau, il figure purement et simplement au rang des professeurs de la faculte de medecine. L'illustre chirurgien, en invoquant sa presence en qua- lite de president a la these de M. Barthelemy, a voulu donner sans doute plus de poids au jugement qui enleve k M. Barthelemy sa der- niere esperance. Se fier dans une circonstance si grave, a un vague souvenir, a un souvenir completement illusoire ; est-ce bien digne d'un grave academicien ? 2° Suivant M. Velpeau , M. Barthelemy, dans la thfese qu'il invoque , ne dit absolument rien de pareil , c'est-a-dire de bandages et appareils de la chirurgie. Ouvrons encore la these, page 7, lignes 1 a4 : .< Lorsque je parvins a trouver un moyen peu dispendieux de couler le caoutchouc..., il ne me fut pas difficile de sentir tout I'avantage de cette decouverte pour fabriquer de nouveaux bandages. » Voila pour les bandages, et le principal, I'unique objet de la th^se de 1836 est la compression exercee au moyen du caoutchouc applique en ban- dages. Ce n'est pas tout, a cette meme page nous lisons la note sui- vante : « A cette epoque, je donnais depuis longtemps des soins a 660 COSMOS. M. A. de N, , notrc ami , malade d'lin retrecissement du canal de I'u- rfetre, et dont la sensibilite etait tcllement exaltee, qu'il ne pouvait supporter les bougies de cire. Bien ddsireux de soulager ses souf- frances, j'avais pense que les proprietds elastiques du caoutchouc me scraient d'un immense avantage pour trailer ces affections , et depuis un an (des 1835) je me livrais a des experiences sur cette substance, lorsqu'a cette epoque je parvins k couler d 'une seule piece des sondes et BOUGIES de caoutchouc pur. Les soins relatifs au perfectionnementde cette invention , et les essais que j'ai faits de ces sondes, dansplusieurs cas de retrecissement du canal de I'uretre, retarderont jusqu'au mois prochain la publication de cette decouverte et notre methode de traitement, methode qui rendra la guerison de ces maladies plus sure, plus facile et plus prompte , au moins nous I'esperons. » Voila pour les appareils de la chirurgie , et si M. Velpeau avait ete reellement, non pas meme president, mais simple temoin de la these de M. Bar- thelemy, il se rappellerait et les sondes et bougies deposees sur la table par le candidal, et la brillante leQon sur les applications du caout- chouc a la chirurgie qui lui a valu I'unanimite des suffrages. 3° Les essais de M. Barthelemy se prolongerent plus longtemps qu'il ne I'avait cru, et ce fut seulement le 10 juin 1838 qu'il prit son brevet pour la fabrication d'un arsenal complet d'instruments de chirurgie. Nous avons sous les yeux le texte authentique du brevet, et nous y li- sons : « 3° sondes et bougies de caoutchouc coule, tubes de meme na- ture, de quelque grosseur que ce soit sans soudure ; sondes et tubes dilatateurs, tubes souffles pour les hemorrhagies, ballons, pessaires, grands et petits urinaux, genouilleres, manches, calottes et serre- tete. » C'est bien la evidemment I'application du caoutchouc a la con- fection de la plupart des bandages et appareils de la chirurgie, dont 1' Academic attribue, et dont M. Velpeau maintient la gloire et la pro- priete a M. Garriel. II so presente toutefois une objection, sortie de la bouche de M. Vel- peau lui-meme : « Mais dans la these de 1836, comme dans le brevet d'invention de 1838, il n'est pas question de caoutchouc VULCANISE ; or voici comment I'Academie motive la recompense accordee h M. Gar- riel : « empruntant la modification importante qu'on a fait subir au caoutchouc sous le titre de vulcanisation , M. le docteur Garriel est parvenu a construire une infinite d'objets et d'instruments destinesaremplacer, en chirurgie et en medecine, les bandes, les liens, les coussins, les cein- tures, les bourrelets, les pessaires, les tampons, etc., etc. >■ La reponse a cette objection estaussi facile qu'elle sera victorieuse : M. Barthelemy dans sa these ne parle pas de caoutchouc vulcanis6, parce que le nom COSMOS. 661 vulcanise n'existait pas encore ; pour le prouver , il suffit de rappeler cette phrase d'un meraoire lu a TAcademie des sciences par M. Payen, dans la seance du 29 mars 1852, tome XXXIV, page 453. « On attribue generalement a Hankock , manufacturier anglais , la decouverte faite en 1843, des proprietes remarquables communiquees au caoutchouc, a I'aide d'une sulfuration particuliere, dite VULCANISATION. 11 fallait Stre loup, et loup mourant de faim, pour ne pas se contenter de I'excuse si naive et si peremptoire de I'agneau : coniment I'aurais-je fait, mot qvi n'etais pas we'?M. Barthelemy repond de meme, comment aurais-je appele mon caoutchouc caoutchouc vulcanise , puisque le mot vulca- nise restait encore a creer?Mais le caoutchouc de Saint-Ouen 6tait tres- reellement, et meme en depit de I'inventeur, du caoutchouc vulcanise, dans toute la force du mot ; la th5se et le brevet expriment positivement qu'il avail cinq dec/res differents d'elasticite, suivant que la quantite d'ether sulfurique employee etait plus ou moins grande ; qu'il n'^tait pas cassant, qu'il ne s'alterait pas a des temperatures moderees, etc., etc. Nous disons vulcanise malgre I'inventeur, car la vulcanisation etait le resultat necessaire et inevitable du traitement par I'ether sulfurique du commerce, qui contient de I'acide sulfureux et du soufre en exces ; c'etait au point que divers fabricants refusaient le caoutchouc file de M. Barthelemy parce qu'il ne perdait pas son elasticite a des tempera- tures basses, et que des lors, disaient-ils, ce ne pouvait plus etre du veritable caoutchouc. Voila la verite vraie, et cette discussion fera sans doute regretter k M. Velpeau son incroyable note. Mais ce n'est pas assez du repentir, et I'Academie jugera, nous I'esperons, qu'il est de son devoir de reparer la grande injustice dont elle s'est rendue cou- pable sans le savoir, et de proclamer que le veritable inventeur du caout- chouc vulcanise et des applications du caoutchouc vulcanise, est M. le docteur Barthelemy de Saint-Ouen. Nous n'insisterons pas sur cette doc- trine par trop absurde etpar trop revoltante deM. Velpeau, la commis- sion des prix Monthiion el I'Academie n'onl point a s'occuper des brevets d' invention et des droits quits consacrent. Le simple bon sens et les premiers principes de la justice distributive proclament, en effet, que nul au monde ne peut consommer sans crime la spoliation et la con- trefagon. Que I'Academie refuse, suivant ses antiques usages, I'examen et la recompense des industries brevetees, ce sera dur et peut-etre deraisonnable : mais en faisant ses reserves, elle exercera du moins un droit legitime, et tsmoignera du respect qu'elle a pour elle-menie.Mais des qu'elle admet au concours les industries mises sous la pi'otection des lois par des brevets d'invention, il faut absolument qu'elle pese dans la balance les droits de chacun des inventeurs, car elle ne peut 662 COSMOS. couronner I'un aux d^pens des autres, qu'en pronongant forc^ment que la gloire et la proprieto de la decouverte appartiennent h. son lau- reat. Nous n'avons tant insiste sur cette discussion delicate, que, parce que la communication de M. Yelpeau etait une sorte de dementi donne a notre article du Cosmos. La priorite d'application du caoutchouc aux instruments de cliirurgie revient bien certainement tout entiere a M. Barthelemy; et c'est a lui aussi qu'appartient, comme nous I'ayons prouvc, la gloire de la preparation du caoutchouc vulcanise. Voici comment cette gloire a passe de la France a I'Angleterre, de M. Barthe- lemy a M. Hancock. Des Anglais venus a Paris apprirent que M. Bar- thelemy, h Saint-Ouen, communiquait au caoutchouc des proprietes nouvelles, une elasticite plus grande et plus durable , une plus grande inalterabilile par la chaleur, etc., etc. Cette nouvelle les intrigua vive- ment, et ils chercherent aussitot a entrer en relation avec I'inventeur frangais. Le resultat des conferences qui suivirent fut un projet de traite, par lequel M. Barthelemy s'engageait a donner, pour une somme convenue, le secret de sa preparation. Au jour fixe pour la signature du traite, les commergants anglais revinrent a Saint-Ouen. Ce jour-la, M. Barthelemy avait fait venir plusieurs barriques de soufre, et ces bar- riques n'avaient pas encore ete remisees dans les magasins ; la vue do tant de soufre etonna nos Anglais etlesamena a penser que la transfor- mation du caoutchouc etait le resultat de sa combinaison avec le soufre, ou d'une veritable sulfuration. A quoi bon, se dirent-ils alors acheter fort cher un procede que nous avons devine, que nous arriverons a pratiquer apres quelques essais ? Ils firent aussitot tourner bride aux chevaux qui les avaient amenes, ils planterent la M. Barthelemy sans lui donner aucune explication, et bientot on apprit en France qu'un Anglais avait invente le caoutchouc vulcanise. Ce qu'il y a de plus ex- traordinaire dans ce fait, c'est que le soufre qui avait eveille I'atlention des manufacturiers anglais, n'avait nullement pour destination d'etre combine avec le caoutchouc, dont la vulcanisation, chez M. Barthelemy, s'operait par la simple dissolution dans le melange d'ether sulfurique du commerce et d'huile essentielle de caoutchouc. — A propos de I'annonce faite h I'Academie par M. Chevreuil de la desulfuration du coke par M. Calvert, nous avons rappele que cette desulfuration avait ete une des conquetes des ateliers de M. Barthelemy a Saint-Ouen. Nous sommes heureux de pouvoir aujourd'hui non-seu- lement prouver la justice de notre reclamation, mais encore publier sans reserve aucune le proc6de de notre savant ami. L'industrie bien certainement tirera parti de cette nouvelle operation doublement avan- COSMOS. ggg tageuse, puisqu ei mgme temps qu'olle utilise la combustion du char- bon pour la production de la vapeur, elle le transforme en un produit tres-precieux dans les arts metallurgiques, le coke desulfure A la grille fixe du foyer, on substitue une grille mobile, formee de simples barreaux droits portes aux deux bouts par deux chaines en fer rephees sur elles-memes, et sans fin. Le charbon tombe en quantite determmee, toutes les quatre ou cinq minutes , sur la portion de la grille qui n'estpas encore au-dessus du foyer de la combustion ; la grille aussitot reeoit une impulsion qui amene le charbon au-dessus du foyer : ce charbon immobile pendant quatre ou cinq minutes s allume; la grille recoit une nouvelle mesure de charbon, et flui un nouveau frajet pour redevenir stationnaire encore pendant quatre ou cinq minutes. Pendant que le second charbon s'allume , le premier est devenu incandescent et se trouve engage sous une voute ou la chaleur est tres-intense. De station en station , le premier charbon arrive a la seconde extremite de la grille sans fin , au point oii elle se replie sur elle-meme ; il tombe alors dans une auge placee pour le recevoir : un robinet qui s'ouvre a ce meme instant lance sur le charbon tombe dans I'auge un jet de vapeur qui I'eteint presque subitement. Cettememe vapeur, tres-dilatee, passe a travers les barreaux de la grille, rencontre la mesure suivante de charbon mcandescent et decompose, son hydrogene se brule et active la com- bustion , son oxygene se combine avec le soufre du charbon et donne naissance a de I'acide sulfureux qui se brule aussi a la gueule de cette espfece de four, en produisant une lumiere bleue fort visible. Par cette operation tres-simple , la seconde portion de charbon et toutes les por- tions suivantes se trouvent completement desulfurees , de sorte, que si Ton a enleve de I'auge la premiere portion de charbon , tout le depot recueilli pendant la marche de la machine a vapeur, sera du coke de- sulfure. Suivant M. Calvert, ce coke presents de si grands avantages , qu'il se vendra beaucoup plus cher; s'il en etait ainsi, le precede de M. Barthelemy produirait des resultats merveilleux, la production de la vapeur et le travail mecanique ne couteraient rien ou presque rien. Une grille mobile, du genre de celle que nous venous de decrire, a parfaitement fonctionne dans I'usine de Saint-Ouen , pendant les an- nees 1846 et 1847. Nous appelons d'une maniere particuli6re,rattention de nos lecteurs sur cette premiere application de la precieuse propriete qu'a la vapeur d'eau deteindre le charbon allume; propriete signalee dabord par M. Dujardin de Lille ; et si bien utilises par M. Fourneyron dans plu- sieurs cas d'incendie. — M. Perrot , a qui Ton doit tant d'applications heureuses de la 664 COSMOS. science a rindustrie, vient d'en realiser unc encore, qui parait ap- pelee a rendre de grands services a i'iniprcssion lithoyraphique. U est parvenu a purifier la gutta-percha au point de la rendre parfaitement blanche, et a Tobtenir en feuilles aussi minces que le plus leger pa- pier de soie : sous cette forme , la gutta-percha re^oit les impressions lithographiques beaucoup plus parfi\itement que le plus beau papier de Chine. Les effets de la lumierey sont d'une vigueur et dune richesse dont n'approchent point les plus belles impressions sur papier. Comme en outre , la feuille de gutta-percha est transparente , on a sur le revers une epreuve renversee, et le dessin peut etre vu soit d'un cote, soil de I'autre. Nous avons emprunte cette precieuse nouvelle au journal r Institute mais nous avions vu il y a quinze jours environ, les pre- mieres feuilles de gutta-percha blanches preparees par M. Perrot : ce qui nous avait le plus frappe , c'etait un sac cylindrique a fond ferme sans coutures. L'habile ingenieur est ence moment tres-preoccupe des applications que pourra recevoir sa preparation nouvelle. Comme tissu pour impressions lithographiques , la question est decidee , le resultat est merveilleux ; il en sera de meme , esperons-le , pour I'impression en taille-douce. Le premier pas a faire ensuite, sera de chercher par quelle substance on pourra rendre ces feuilles sensibles a Tac- tion de la lumiere , de maniere a obtenir avec elles des epreuves pho- tographiques. ELECTRICITE. PROPRIETES ELECTRO-CHIMIQUES DE L'HYDROGENE; PAR M. EDMOXD BECOUEREL. En 1838, M. Matteucci communiqua a I'Academie des sciences les re- sultats d'experiences qui prouvaient que des lames de platine, plongees prealabloment I'une dans I'hydrogene, I'autre dans I'oxygene, puis, im- mergees dans I'eau acidulee, constituent un couple. M. Matteucci nion- tra, en outre, que des gaz autres que I'oxygene et I'hydrogene pouvaient donner lieu a des effets analogues. M. Grove eut I'idee , plus tard , de reunir en pile des couples formes par des lames de platine plongees mi-parlie dans I'eau acidulee. II ob- tint ainsi ce que Ton nomme la pile a gaz, dans laquelle il n'entre qu'un seul liquide, un seul metal et deux gaz. M. Grove etudia plus tard ce phenomene en cherchant a evaluer la puissance de developpement d'electricite dans sa pile. II resulte de COSMOS. 666 ses recherches et de celles de M. Delarive, Faraday, Schoenbein etautres physiciens qui sesont occupesde cette question, que la cause premiere de la production d'electricite est la combinaison lente des gaz dissous dans le liquide, sous Taction des lames de platine. En effet, quand on decompose I'eau dans un voltametre a I'aide d'une batterie a gaz, a me- sure que les volumes des gaz provenant de la decomposition de I'eau augmentent dans le voltametre, les volumes de I'oxygene et deThydro- gene de chaque couple a gaz diminuent dans la meme proportion ; cela montre que dans chaque couple il se forme de nouveau autant d'eau qu'il y en a de decomposee dans le voltametre. M. Jacobi a fait connaitre plus recemment la propriete que posse- dent les lames et fils de platine d'operer la recomposition de I'eau dans les voltametres, quand on laisse longtemps le melange obtenu en pre- sence des rheophores metalliques, meme recouverts par i'eau de I'appa- reil. Tous ces fails demandaient une explication, car la theorie n'en avail pas encore ete formulee, etc'est pour parvenir a cette explication que M. Edmond Becquerel a entrepris les nouvelles recherches , dont nous allons exposer lesresullats les plus remarquables. Si I'on place une eprouvette d'une tres-petite dimension remplie de gaz hydrogene, dans un vase contenant une dissolution assez concen- tree de chlorure d'or, au bout de plusieurs jours , la temperature n'ayant pas sensiblement varie, le niveau du chlorure d'or a I'interieur du tube sera peu different de ce qu'il etait precedemment. En introdui- sant alors un til de platine dans 1' eprouvette, de maniere a ce que le fd se trouve en partie dans le gaz hydrogene, et en partie plonge par son autre extremite dans le chlorure d'or, on voit le gaz diminuer lente- ment de volume , et meme , au bout d'un certain temps, disparaitre completement, lorsque le 111 de platine monte jusqu'au hautdel'eprou- vette. Mais en meme temps que le gaz hydrogene disparait I'or se pre- cipite a I'etat metallique sur la portion du fil de platine plongeant dans le chlorure. II imporle de remarquer que le liquide ne conlient pas de chlorure d'or neutre , autant du moins que les precedes d'analyse permettent de s'en assurer ; et qu'en outre Fair exterieur n'intervient pas dans la manifestation du phenomene, puisque ce dernier se produit egalement dans des tubes fernies. Si apres avoir rempli d'hydrogene de petites cloches, faites avee des tubes fermes d'un tres-petit diametre , on pose ces cloches sur des dissolutions de nitrate d'argent ou de chlorure de platine , le gaz est absorbe peu a peu, etle metal se reduit; d'autres dissolutions metal- liques, au contraire, n'eprouvent aucune action appreciable : telles sont, par exemple, les dissolutions de cuivre et de plomb. 666 COSMOS. Void maintenant les conclusions que M. Becquerel a cru pouvoir tirer de ses recherches : 1° Un fil de platine qui ne reduit pas une dissolution neutre de chlorure d'or peut acquerir cette propriele lorsque la solution su trouve en contact avec le gaz hydrog^ne, et que le fd est plonge en partie dans le gaz et en partie dans la dissolution; I'or se precipitc a I'etat metallique sur la portion du fd de platine plongeant dans le liquide, et le gaz est absorbe a mesure que le depot s'opfere ; 1° Cette action se manifeste egalement dans des tubes fermes et soustraits a Taction do I'air atmospherique. Comme le liquide apres la reaction ne renferme pas de platine en dissolution, il en resulte que le metal ne subit aucune alteration, qu'il ne sert que de conducteur, ou qu'il agit seulement par sa presence. Ces recherches paraissent demontrer que dans cette circonstance il se produit entre un liquide et un gaz (le chlorure d'or et I'hydrogene) en presence du platine, une action du meme genre qu'entre I'oxygene et I'hydrogene sous Tinfluence de ce metal ; 3° Un fil ou une lame d'or dans les memes conditions ne donnent lieu a aucun etfet appreciable ; A° On peut former un couple voltaique avec un seul liquide (la so- lution deja citee), deux lames de platine et un seul gaz, I'hydrogene, en contact avec une des lames et avec le liquide. En reunissant plusieurs couples ou aurait une pile a gaz composee d'un seul gaz, d'un metal et d'un liquide. Jusqu'ici on avait admis qu'avec le platine et I'eau acidulee, deux gaz, I'oxygene et I'hydrogene, etaient necessaires pour obtenir le cou- rant ; seulement les elements de pile formes avec le chlorure d'or ont une intensite d'action plus faible que les autres ; 5° La dissolution de chlorure d'or chimiquement pure peut done etre consideree en definitive comme remplagant I'eau acidulee et I'oxy- gene de la pile a gaz. On ne doit pas confondre les effets remarquables qui se manifestent dans cette circonstance, avec ceux auxquels donneraient lieu certaines dissolutions gazeuses ou des liquides (tels que I'acide azotique) absor- bant I'hydrogene a la temperature ordinaire et sans I'intervention du platine. Nous aliens ajouter maintenant quelques considerations theoriques aux conclusions du savant physicien que nous venons d'exposer. Et premierement , nous avouerons que le role electrique que M. E. Bec- querel fait jouer a I'hydrogene, ne nous semble pas aussi clair que I'auteur le suppose , en entendant toutefois par action electrique COSMOS. 667 d'un corps la faculte que possede ce meme corps de rompre I'equi- libre electrique dans une autre substance toutes les fois qu'il se trouve en contact avec cette meme substance, et qu'il y a action chimique entre les deux. En etfet, le role de conducteur que M. Becquerel fait jouer ici au platine , n'explique point Taction de I'hydrogene , car si ce gaz n'est producleur d'electricite que par le chlorure d'or qu'il touche, on ne voit pas trop a quoi servirait alors le conducteur en platine , qui n'augmenterait nuUement la surface de contact des deux corps en presence. L'hydrogene devrait done agir seul sur le sesqui- chlorure d'or, il n'aurait aucune raison de plus pour devenir actif lors de la presence du platine considere seulement comme corps conduc- teur. Mais M. Becquerel lui-meme a entrevu, sans s'y arreter, ce que nous croyons etre la veritable source de la decomposition du sel d'or et la cause productrice du courant electrique developpe dans ses experiences. Cette cause, qui avait ete signalee deji par M. Grove et par d'autres, et que M. Edmond Becquerel a peut-etre sous-entendue dans ses explications , nous croyons la rencontrer dans la force catalytique dont certains corps sont doues , le platine divise surtout , et qui n'est point Veleciricite , mais qui peut devenir une cause de mouvement electrique, comme les experiences de M. Becquerel pere Font prouve depuis fort longtemps. En effet, le platine du commerce n'etant qu'un amas compacte de particules tres-tenues de ce metal, rappro- cheespar leur forte pression et par I'ecrouissage, on congoit aisement que les fds et les lames de platine non fondu peuvent otfrir, a un degre moindre , les memes phenomenes que presentent I'eponge et le noir de platine a un degre si eminent. Or, c'est ce qui a lieu en realite, et les faits observes par M. Jacobi ne sont a cetegard qu'un cas special de la decouverte de Doebereiner si savamment etudiee par son auteur, par MM. Thenard et Dulong, par Liebig et par d'autres cliimistes et physiciens de notre temps. Si doncle platine jouit de la faculte de con- denser les gaz a sa surface , et si I'hydrogene n'echappe nullement a cette faculte de condensation , qu'y a-t-il d'etonnant a ce que la solu- tion d'or soit reduite en presence de I'hydrogene et du platine ordi- naire? Voici comment les choses se passent dans ce cas particulier, et quel est le role de chacune des trois substances dans la production des phenomenes qui se manifestent. Le platine en presence de I'hydrogene et du sesquichlorure d'or, condense a sa surface une certaine quantite de gaz et une certaine quantite aussi du liquide qui I'environne. Al'en- droit ou le gaz et le liquide ainsi condenses se touchent, il doit y avoir decomposition du sesquichlorure, dontl'instabihte, comme onsait, est assez grande pour que les vibrations lumineuses memes soient capables 668 COSMOS. de le decomposer. L'hydrog^ne presque liquide sur le platine s'unit au chlore du sesquichlorure , pour former de I'acide chlorhydriquc , Tor est mis en liberie; dans ce mouvement moleculaire I'^lectricite prend naissance, et si le platine est dispose de maniere a pouvoir etre mis en rapport avec un galvanometre par ses deux extremites, I'instru- ment doit reveler la presence d'un courant electrique allant a I'exte- rieur de la partie qui plonge dans I'hydrogfene a celle qui est mouillee par le chlorure. L'action une fois commencee, elle doit se continuer de la meme maniere jusqu'a absorption complete du gaz; aprfes quoi I'on doit tronver le platine intact, puisque I'acide chlorhydriquc ne pent pas I'attaquer, et I'or depose sur le platine par suite du courant qui setait developpe. Nous pouvons nous tromper dans cette maniere de voir, mais il nous semble qu'elle pr^sente avec assez de simplicite I'explication des phenom^nes observes par M. Edmond Becquerel, aussi bien que de ceux constates par MM. Jacobi, Grove, Matteucci, Schoenbein, Liebig, Thenard, Dulong, Doebereiner et les autres sa- vants qui se sont occupes de ces questions de catalytic. Pour ne pren- dre en effet qu'un seul cas , celui de la pile a gaz , il est evident que I'oxygene condense parle platine doit constituer, avec I'eau en con- tact , du bioxyde d'hydrogene , dont la communication avec I'hydro- gene condense de I'autre cote, doit produire de I'eau ou du protoxyde d'hydrogene. L'equiUbre electrique, trouble par ces reactions, se de- voilera done par un courant plus ou moins energique et la pile a gaz de M. Grove ou de M. Matteucci produira ses eflfets. II va sans dire que ce qui a lieu pour le platine pourra avoir lieu aussi pour d'autres corps conducteurs places dans les memes conditions d'energie cataly- tique ; et que ce qui est vrai pour I'hydrogene et pour le chlorure d'or ou pour I'eau et ses deux composants sera vrai de meme pour tous les autres corps qui donneront lieu a des reactions semblables. COSMOS. 669 VARIETES. PHYSIOLOGIE VEGETALE. — BECHERCHES EXPERIMENTALES SUR LA VEGETATION, PAR M. G. VILLE. « Tandis que cinquante-six elements concourent a la formation des mine- raux, quatre suJBsent a la production de toutes les plantes. Ces quatre elements sout I'hydrogene , I'oxygene , le carbons et I'azote. « Si nous pouvions determiner avec, certitude la source ou les plantes \ont puiser chacun de ces corps et les circonstances qui en reglent Tabsorption , nous possederions tous les elements d'une theorie complete de la production agricole. Resultat desirable , mais dont nous sommes encore bien eloignos. « On s'est souvent demande si I'air, et en particulier I'azote, ccntribuail a la formation des plantes ; on a toujours repondu negativement a cette question. « D'un autre cote, cependant, on sait que les plantes ne tirent pas tout leur azote du sol. Chaque annee , les recoltes qu'une terre produit contlennent plus d'azote que I'engrais qu'elle a recu. D"ou vient done I'azote des recoltes, et , d'une mani^re plus generale, I'azote des plantes que le sol ne leur a pas fourni ? Telle est la question que je me suis posee. « Lorsque je dis qu'on a toujours refuse a I'azote de I'air la faculte de servir a la nutrition des plantes, il faut excepter Priestley et Ingenhoouz. Ces deux savants, au contraire, avaient admis que I'air est une condition de la vie des plantes , mais leurs experiences , insuffisantes pour resoudre ce probleme , furent reprises et refutees par Th. de Saussure; et voici en quels termes ce savant resume , a la fois, ses critiques et ses observations : « Si I'azote est un etre simple, s'il n'est pas un element de I'eau , on doit etre force de reconnaitre que les plantes ne se I'assimilent que dans les extraits vegetaux et animaux, et dans les vapours ammoniacales. On ne peut douter de la presence des vapours ammoniacales dans I'air, lorsque Ton voit que le sulfate d'alumine pur finit par se changer en sulfate ammoniacal d'alumine. >' « Theodore de Saussure a, le premier, attire I'attention des savants sur la presence de I'ammoniac dans I'air, et , le premier, il lui a assigne un role de- termine dans I'economie des plantes. Nous verrons bientot ce qu'il faut penser de cette opinion : I'experience en d^cidera. Mais auparavant, nous devons ter- miner I'histoire des travaux plus recents dont I'absorption de I'azote par les plantes a etc I'objet. « M. Boussingault a consacre deux annees a I'etude de cette question. « Mais au lieu de proceder comme Priestley et de Saussure, au lieu d'analyser I'air au milieu duquel une plante aurait sejourne et de determiner les change- ments qu'elle aurait produits dans sa composition, M. Boussingault a renversele probleme. « II a seme un certain nombre de graines, d'une composition connue , dans un sol priv6 de matieres organiques. Tous les jours, les plantes etaient arros6es 070 COSMOS. avec de I'eau distill^e , et tous les pots qui servaient a I'experience 6taient en- fernies dans un pavilion ^loign^ de toute habitation. « En operant dans ces conditions nouvelles , M. Boussingault a constate que les plantes absorbent des quantit^s appreciables d'azote , sans preciser dans quelles circonstances ni sous quelle forme i'absorption de ce gaz avait lieu. « Los recherches quej'ai entreprises, dit-il, semblent ^tablir que, dans plu- sieurs conditions , certaines plantes sont aptes a puiser de I'azote dans I'air. Mais dans quelles circonstances, a quel etat I'azote se fixe-t-il dans les vogetaux? c'est ce que nous ignorons encore. » « Reprenant en sous-oeuvre une opinion primitivement avancee par Theodore de Saussure , M. Liebig considere , comme un fait demontre jusqu'a la derniere evidence , que I'azote des plantes vient de I'ammoniaque de I'air, et cette opinion, dans I'etat present, est la plus gencralement admise. Ainsi , lorsque les plantes empruntent de I'azote a I'air, ce serait a I'ctat d'amraoniaque. II parait que les corps organiques prives d'azote produisent de Tammoniaque lorsqu'ils se decom- posent. Cette production r^sulte de I'hydrogene naissant que la matiere degage avec I'azote de I'air. A son tour, M. Mulder attribue a cette origine tout I'azote que les plantes n'ont pu emprunter au sol. « Si nous d^gageons pour un instant le sujet de toute preoccupation theorique et de toute consideration personnelle, et si , nous posant de nouveau la question par laquelle nous avons commence : d'ou vient I'azote des plantes? I'azote de I'air sert-il a leur nutrition ? nous voulons y r^pondre par des experiences; nous devons d'abord nous assurer si I'air contient de I'ammoniaque et determiner combien il en contient : puis si une plante , qui vegete dans un sol prive de ma- tieres oro^aniques et aux depens d'un volume d'air connu , trouve dans cet air assez d'amnioniaque pour rendre compte de I'azote qu'elle a absorb^. ((Enfin, si I'ammoniaque de I'air rempiit , dans I'^conomie des plantes, un role aussi important qu'on I'a pretendu, il est interessant de constater par quels phenomenesse traduitsoninQuence, lorsque Ton augmentela quantiteque I'air en contient deja. « Ces trois questions : 1° recherche et dosage de I'ammoniaque de Fair; 2° absorption de I'azote par les plantes; 3° influence des vapeurs ammoniacales sur la vegetation ; ces trois questions forment le cadre des 6tudes que j'ai I'hon- neur de soumettre a I'Academie , et dont il me reste a lui faire connaitre les principaux resultats. « Recherche et doaage de I'ammoniaque de I'air. — Lorsque Ton abandonne a I'air une dissolution de sulfate d'alumine, elle se change en alua ammoniacal : preuve evidente que I'air est mel6 de vapeurs ammoniacales. « Depuis que M. Th. de Saussure a public cette curieuse observation , trois tentatives ont ^t^ faites pour doser I'ammoniaque de I'air. La premiere est due a M. Graeger, la seconde a M. Kemp, et la troisi6me a M. Fres^nius. D'apresM. Graeger, un million de kilogrammes d'air contient. 0S333s'^ A^H' D'apres M. Kemp 3,880 ( I'air diurne 0,098 D'aprfes M. Fr6s6nius | ^,^.^ ^^^^^^^^ 0,169 COSMOS. 671 « Decestrois tentatives, la derniere m(5ritait surtout de fixer notre attention, par les soins de tout genre dont I'auteur s'est entoure ; cependant, M. Fresenius, comme ces devanciers, faute d'avoir opere sur un volume d'air suffisant , est arrive a des resultats inexacts ; en voici la preuve : « La quantite d'ammoniaque que M. Fresenius a obtenue , dans les deux seules determinations qu'il ait faites, est de 0 gr. 00004 et de 0 gr. 000079. Or, en operant par la methode de M. Fresenius , je n'ai jamais pu doser una quantity connue d'ammoniaque a plus de 0 gr. 00007; ce qui fait que les chiffres de ce savant , se trouvant compris dans la limite des erreurs que le precede comporte, ne peuvent conduire a aucun resultat fonde. « Pour mon compte j'ai fait seize determinations de I'ammoniaque atmos- pherique , en operant successivement sur 20, 30, 55 mille litres d'air; je suis force de renvoyer a mon memoire pour la description des appareils. Je dirai cependant que I'air etait pris a 8 et 1 0 metres au-dessus du sol, qu'avant d'arriver dans les reactifs, il traversaitun tube rempli de fil de verre, dispose en petits tampons superposes, destines a arreter les poussi^res qu'il tient en suspension; I'air passait ensuite par dix pointes effilees dans de I'acide hydrochlorique etendu ; puis il venait se meler a des vapeurs du meme acide au moyen d'une disposition d'appareil tres-simple , qui m'a ete suggeree par M. Regnault ; enfia il venait se laver une derniere fois dans une dissolution de bichlorure de platine. Pour faire I'analyse les liqueurs etaient reunies et evaporees dans uq alambic de platine; I'ammoniaque etait dosee a I'etat de bichlorure deplatineet d'ammoniaque. Pour peser le precipite, on le reunissait dans un tube effile, qui faisait I'officede Qltre. En prenant toutes les precautions que j'indique, on peut doser I'ammoniaque a 0 gr. 00007. Je m'en suis assure par des epreuves mul- tipliees et directes ; je me suis assure aussi par des experiences dont je rapporte tous les elements dans mon memoire, que les laveurs arretent toute I'ammoniaque de I'air, et que le filtre de I'air place en avant des appareils d'analyse n'en arrete pas. « Dans les anneesi 849 et 1850, j'ai trouve que 1 million de kilogrammes d'air contenait en moyenne 23 gr. 3 d'ammoniaque (Az H^), le maximum s'est eleve a 31 gr. 71, le minimum est descendua 17 gr. 76. a En 1850, la moyenne a etc d3 21 gr. 10, le maximum de 27 gr. 26, et le minimum 16 gr. 52. (( Ce qui donnerait enfin comme resultat definitif, en moyenne, 22 gr. 41, en maximum 29 gr. 00, eten minimum 17 gr. 14. (c Decxieaie PARTiE. — L'azote de I'air est-il absorbe par les plantes? Pour repondre a cette question, voici la methode que Ton a suivie : « On a dispose un appareil compost essentiellement d'une cloche etd'un aspi- rateur. On placait dans la cloche un certain nombre de graines semees dans du sable blanc, additionne des cendres de la plante. Le fond des vases plongeait dans une nappe d'eau distillee. L'arrosage se faisait ainsi de lui-meme par la seule capillarite des pots. Chaque jour I'aspirateur faisait passer dans la cloche un volume connu d'air ; et comme ce volume, bien que considerable , n'eut pas contenu sufSsamment d'acide carbonique , on en degageait un exces dans la cloche au moyen d'une pendule ^iectrique qui en reglait la production. 672 COSMOS. « En m^me temps que cet appareil fonctionnait , en meme temps que les plantes enferm^es sous la cloche parcouraient les phases successives de leur vegetation , on dcterminait I'ammoniaque de I'air. Dans ces deux experiences, faites simultanement, on pouvait done doduire : « 1° La quanlit6 d'ammoniaquecontenue dans I'air qui avait passe dans la cloche ; « 2° La quantite d'azote que les plantes avaient absorb^e : et de la comparaison de ces deux quantitesconclure si I'ammoniaque de I'air avait sufii a cette absorp- tion. Or, en 1847, il a penetr6 dans la cloche 0 gr. 00125 d'ammoniaque , et I'azote des recoltes I'emportait sur celui des semences de 0 gr. 104, « En 1850, il a passe dans la cloche 0 gr. 0021 d'ammoniaque , et I'azote des recoltes i'emportait de 1 gr. 188. « En 1850, on avait renouvele I'eau des cloches sept fois, a chaque reprise on introduisait 2 litres. Pour preparer les pots on a employe 8 litres ; soit 22 litres. Or,.1 litre d'eau a fourni 0 gr. 014 de bichlorure de platine ammoniacal, ce qui porterait I'ammoniaque de i'eau a Ogr. 024. Or, en supposant que toule I'ammoniaque de I'eau ait profile aux plantes, il resterait encore 1 gr. 1 63 d'azote, dont ni I'ammoniaque de I'air , ni celle de I'eau ne peuvent rendre compte. « En 1851 on a fait I'exp^rience autrement. Avant d'arriver dans la cloche, I'air passait sur de la ponce imbibee d'acide suifurique, puis dans une disso- lution de bicarbonate de soude. Ainsi I'ammoniaque de I'air ne pouvait plus in- tervenir dans les phenomenes. De plus , I'eau qui a et6 mise dans la cloche n'a jamais ete renouvelce. Dans ces conditions I'azote des recoltes a surpasse celui des semences de 0 s' 481 ; j'ajouterai que, dans cette experience qui reposa-it sur trois soleils et deux tabacs , les deux soleils ont fleuri et produit 95 graines rudi- raentaires. « Enfin en 1852, une experience faitesur le ble a produit lesmemesresultats. La planle a fructifie entierement et I'azote de la recolle I'a emporte sur celui de la semence de 0 gr. 036. « D'oii nous tirerons cette nouvelle conclusion, que I'azote de I'air est absorbe par les plantes et sert a leur nutrition, et que les cereales ne font pas exception sous ce rapport, n OPTIQUE, PROJET DE NOUVELLES EXPERIENCES POCVANT METTRE E.N EVIDENCE LE DEPLA- CEMENT DA.\S l'esPACE DU LIEU D'OBSERVATION, PAR M. SELLMEYER. Nous avons rendu compte dans le second volume de notre repertoire d'opti- que des experiences par lesquelles MM. Arago et Babinet essayerentdemettreen evidence les mouvements de rotation et de translation de la terre, et qui abou- tirent constamment a un resultat purement n^gatif. M. Arago constats que les rayons lumineux emanant de deux etoiles situees dans I'^cliptique, I'une en avant de I'observateur, ou vers laquelle la terre marche ; I'autre en arri^re et dont la terre s'eloigue, subissent dans un prisme de verre la m^me refraction COSMOS. 673 quoique la vitesse de la lumiere soil diminuee dans un cas, augmentee dans I'autre, de la vitesse de la terre. M. Babinet a constamment vu qu'une plaque r^fringente entrainee par la terre retarde les rayons lumineux exactement de la meme quantite, soit iorsque le sens du mouvement de la lumiere conspire avec celui de la terre dans I'espace, soit Iorsque les deux mouvements sent en sens conlraire. Pour expliquer ces rfeuitats tout a fait imprevus et vraiment singuliers, M. Fresnel et apres lui M. Cauchy avaient admis que la terre emporte avec elie dans I'espace, non-seulement son atmosphere aerienne, mais encore une masse considerable d'elher, ou ce qu'on pourrait appeler son atmosphere 6lher6e. Dans cetle hypothese en effet tous les phenomenes de reflexion, de refraction, d'interference observes a la surface de la terre, etant les memes que si la terre perdait son mouvement de rotation diurne et son mouvement de translation autour du soleil, ces mouvements de rotation et de translation ne pourraient produire qu'un changement dans la direction d'un rayon lumineux, origine du phenomene connu sous le nom d'aberration. Des lors les experiences de MM. Arago et Babinet devenaient insuffisantes a mettre en evidence les mouve- ments propres de la terre, et leurs resullals negatifs n'ont rien d'etonnant. Ces insuccesn'ontpas decourageun physicien allemand, M. Seilmeyer, qui nous est recommande par M. Alexandre de Humboldt; il nous adresse un projet d'ex- periences toutes nouvelles tentees dans le meme but, en nous priant instamment de le mettre a meme de le realiser par I'envoi de prismes doublement refringents que les artistes francais auxquels M. Soleil a transmis son habilete, peuvent seuls construire. La iettre de M. Seilmeyer est fort interessante, et sans rien prejuger sur I'exac- titude de sa theorie, comme sur Tissue de sa glorieuse tentative, mais simple- ment pour prendre date et fiiire naitre quelques pensees heureuses, nous I'in- s^rons aujourd'hui dans notre journal. « Fresnel, pour concilier les phenomenes de I'aberration avec la theorie des ondulations a admis le premier que Tether qui penetre iibrement a travers les atomes des corps , n'est pas affect^ par le mouvement de translation de ces corps. Amene a etudier ce sujet au point de vue de la theorie mathematique, je me suis convaincu aussi de la necessite de celte hypothese, de telle sorte que si elle est demontree fausse, la theorie des ondulations devra etre force- ment rejelee. Des recherches qui auraient pour but de determiner directement la direction et la vitesse du rayon vu directement et du rayon transmis, par la mesure de leurs longueurs d'ondulation, m'ont semble des lors avoir une impor- tance extreme. En effet, si ce probleme etait resolu on prononcerait alors defi- nitivement et avec certitude sur la veiite de Thypolhese de Fresnel et de la theorie des ondulations, puisque Ton serait entre en possession d'un moyen de mettre en evidence et presque de mesurer Taction exercee sur Tether par le deplacement du lieu de Tobservalion ou de Tobservateur. Comme Tether dans son ensemble ou en tant que fluide remplissant Timmensite de Tespace doit etre considere comme immobile et ne sedeplacant pas, le mouvement constate de Tobservateur serait un deplacement absolu, et Ton arriverait par consequent ainsi a resoudre le fameux probleme du mouvement absolu. 674 COSMOS. « En elitninant tour a tour de ce d^placement les composantes correspondantes aux mouvements de rotation et de translation de la terre; le reste de I'elimina- tion exprimerait en direction et en vitesse le mouvement de progression dans I'espace du systeme solaire. Par la nieme, on aurait asa disposition le moyen do connaitre par line simple experience d'optique, faite dansune chambre ferm^e, ou meme dans I'inlerieur de la terre, dans quelle direction et avec quelle vitesse lesoleilse deplace dans ies espaces celestes. « Telle est la nature des recherches qui me preoccupent depuis longtemps. Jusqn'ici mes efforts ont ete inutiles ; Ies phonomenes de la refraction simple, de la reflexion et des interferences des rayons de lumiere ordinaire utilises dans Ies conditions Ies plus rationnelles, et Ies hypotheses Ies plus probables sur le mode d'action des atonies maleriels des corps, ne m'ont conduit qu a des resultats en- tierement ne.qalifs.Presqued(5sespere,j'^tudiai avecune ardeur nouvelle Ies lois de la refraction et de la reflexion exterieure ou lotale des rayons extraordinaires dans Ies cristaux doublement refringents ; je d^veloppai Ies consequences'des lois de ces phenom^nes, et, a ma grande satisfaction, j'arrivai a cet important resul- tatquesilatheoriedeFresnel est vraie, cette refraction et cette reflexion doivent etre modifiees par iedepiacement de I'observateur , quelles que soient d'ailleurs Ies suppositions que Ton ait pu faire a priori sur Ies relations de I'elher avec Ies atomes des corps; de telle sorte que si, en se placant dans des circonstances convenables ces modifications ou cette influence du deplacement ne se manifeslaient pas 11 en rfeulterait une objection tres-grave contre la theorie des ondulations. « L'appareil le plus propre a manifester cette influence est un systeme ou en- semble de prismes de spalh d'Isiande associes comme le montre la figure ci-jointe dans laquelle Ies directions des axes opliques sont indiquees par leslignespleines, et la marcbe des rayons extraordinaires par Ies lignes poncluees. « A travers cet appareil convenablement installe dansune lunette, on doit voir generalement deux images apportees, I'une par le rayon ordinaire, I'autre par le rayon extraordinaire ; etl'image extraordinaire doit seule changer de place sous rinfluence du deplacement de I'observateur : elle se deplacera d'aiUeurs'de ma- ni^re a demeurer toujours dans le plan qui, passant par I'image ordinaire, est perpendiculairea I'axe du prisme. Dans I'hypolhese la plus vraisemblable, le de- placement de I'image extraordinaire produit par le deplacement du lieu de I'ob- servation est exprime par la formule Ar = — n — -V cos 9 cos v, i COSMOS. 676 dans laquelle n est le nombre des prismes assembles, m. et rui, les coefficients de refraction, le premier dans la direction de I'axe oplique , le second dans la di- rection perpendiculaire a I'axe ; v la vitesse de progression du lieu de I'observa- tion, en prenant pour unite la vitesse de propagation de la lumiere dans I'espace vide de maliere ; o Tangle d'inclinaison de la direction de progression v sur le plan perpendiculaire a I'axe du prisme : •} Tangle que la projection sur le plan de la direction de la progression, fait avec la direction primitive ayant tourne de Tangle BC ; Ace enfin, le deplacement de Timage ou Tare qui, dans le cercle, ayant Tunit6 pour rayon, mesure Tangle dont Timage extraordinaire s'est d6- plac^e apr6s le mouvement de rotation BC. « Cette variation sera plus commodement et plus surement saisie dans Tob- servation de Teloignement des deux images produit par le deplacement de la lu- nette point^e tour a tour sur divers objets, dans differentes directions; ou par la rotation de la lunette sur son axe, pendant qu'on regarde un m^me objet, ce qui fait varier le seul angle 9 ; ou enSn, lorsque la lunette et Tobjet reslant immo- biles, on observe a differentes heures du jour. « En tenant compte du seul mouvement de rotation de la terre pour lequel v='2,0",H5 , et en employant des prismes de spath d'Islande, dont les trois faces lat^rales fassent avec i'axe optique des angles respectivement ^gauxa O'',90°, et 48'',7 , et pour lesquels on a m^ = \,66i; mb=1,483, on trouverait Aa;= — n. 4", 41 4. cos 9. cos "i, et par consequent en faisantn=2, ou employant deux prismes, on pourrait compter sur un deplacement de huit secondes. « Comme la reflexion ordinaire est une reflexion totale sans perte de lumiere, on pent multiplier le nombre des prismes, et, si la theorie est vraie^ on doitpou- voir mettre en evidence par ce moyen la direction et la vitesse de translation du systeme solaire avec une approximation suffisante. » Pour mieux poser la question soulevee par M. Sellmeyer, rappelons que Ton a fait trois hypotheses principales sur les rapports de Tether avec la matiere ponderable : ou 1 ° Tether est adherent et comme fixe aux molecules du corps et partage, par consequent, les mouvements qui peuvent etre imprimes a ce corps: ou T Tether est hbre et independant, et n'est pas entraine par le corps dansses mouvements; ou 3° enfin, une portion de Tether est libre, Tautre portion restant Gxee aux molecules et parlageant seule ses mouvements. Cette derni6re hypothese est proprement celle de Fresnel. Voici ce qui resulte de chacune d'elles relativement a la vitesse de la lumiere transmise. Si Tether est entraine en totalite avec le corps, la vitesse de la lumiere devra etre augmentee de toute la vitesse du corps, le rayon etant suppose dirige dans le sens du mouvement. Si Tether est suppose libre , la vitesse de la lumiere ne sera nullement alte- ree. Enfin, si une partie seulement de Tether est en mouvement , la vitesse de la lumiere sera augmentee, mais d'une fraction seulement, de la vitesse du corps, et non pas de la totahte. Cette derniere consequence n'est pas aussi evidente que les precedentes. Rappelons encore que M. Hippolyte Fizeau, par une serie d'experiences extr6- 676 COSMOS. mement ing6nieuses et qui feront epoque dans la science, a demontr^ de fait que la vitesse du rayon transmis est modifi6epar la Vitesse du milieu, de I'eau par exemple. II a vu qu'une vitesse d'ecoulement de I'eau 6gale a 2 metres par seconde suffisait a manifester une augmentation ou une diminution dans la vitesse du rayon transmis , suivant qu'il marchait dans le sens du courant d'eau ou en sens contraire ; il a pu avec une vitesse de 7 metres par seconde mesurer cet accroissement de vitesse , et le comparer avec raccroissement th^orique deduit de la seconde ou de la troisieme hypothese. II resulte de ces belles recherches , qui auraient ete impossibles si M. Arago n'avait pas invente son refracteur interferentiel : I" que la premiere des hypo- theses enoncees est fausse, que I'ether n'est ni enti^rement libre, ni ind^pendant du mouvement des corps; qu'il est entraine en tout ou en partie par les molecules mat^rielles des corps, de maniere a partager leurs mouvements ; que le mouve- ment des corps donne lieu a un changement dans la vitesse de la lumi6re, et que ce changement de vitesse est plus ou moins grand pour les differens milieux, suivant I'energie avec laquelle ces milieux refractent la lumiere , considerable dans les corps tres-refringents, et tres-faible dans ceux qui refractent peu comme I'air. Enfm, comme I'accroissement de vitesse, ou mieux, le deplacement des franges par lequel on le mesurail n'etait qu'environ la moiti6 de ce qu'il aurait du elre dans I'hypoth^se ou I'ether aurait ete entraine tout enlier; qu'il differait au contraire tres-peu de ce qu'il devrait etre dans I'hypothese de Fresnel ; M. Fizeau regarde cette derniere hypothese comme plus probable, en avouant toutefois qu'elle est en elle-m^me si extraordinaire et sous quelques rapports si difficile a admettre, qu'on est en droit d'exiger d'autres preuves encore et un examen plus approfondi avant de I'adopter comme I'expression de la realite des choses. Quo! qu'il en soit. la base au moins des calculs theoriques et des experiences de M. Sellmeyer est solidement etablie par les observations de M. Fizeau , et il sera plus a I'aise pour attendre le resultat heureux de ses futures observations. BE L'lMPP.lMEUlE DE CH. LAHURE ( ANCIENNE MAISON CRAPELET), i-ue de Vaugirard, 9, pr^s de I'Odeon. ^: COSMOS. 677 PHYSIQUE DU GLOBE. DISCOURS SUR LES MOCVEMENTS EXTRAORDINAIRES DE LA MER, connus sous lenom de Barre de flat, Mascaret, Bore, Pororoca, etc., lu a. la seatice publique des cinq academies de I'lnstitut, par M. Babinet. S'il est un lieu ou la nature se soit plu a reunir toutes ses beautes gran- dioses et gracieuses, c'est sans contredit la vaste embouchure du fleuve qui baigne les quaisde noire capitale, et qui, apres un cours modeste, raais rendu utile par une longue ligne de navigation comnierciale, prend tout a coup en approchant de I'Ocean une largeur qui en fait un veritable bras de mer. C'est a Quilleboeuf que la Seine, jusque-la resserree entre des rives mediocrement distantes, prend subitement une etendue de plusieurs kilometres, qu'elle garde ensuite jusqu'a ce qu'elle arrive a la hauteur du Havre, pour se confondre avec I'Atlantique. La beaute de ses rives boisees, de ses falaises escarpees ou croulantes, de ses villes riveraines, de ses chateaux et de ses monuments ro- mains, feodaux ou monarchiques, anciens ou modernes; les rivieres et les ma- rais tributaires qui joignent leurs eaux a celles de la Seine ; mille effets de per- spective aerienne, de lumiere, d'ombre, de soleil, de brouillards, d'arcs-en-ciel, d'aurores et de nuages colores, de lointains aux plus riches teintes; tout cela> fait du paysage de Quilleboeuf, un tableau aussi riche que varie, mais surtout perpetuellement changeant. Si Ton y ajoute les mouvements de I'Gcean qui, deux fois par jour, envahit majestueusemeut le fleuve et vient battre les galets de la greve qui fait suite au quai, les bancs de sable continuellement deplac^s et retentissant de la chute de leurs bords dans le courant qui les ron"e sans cesse, les vents de la mer et les tempetes et lous les autrcs meteores sonores ou silencieux ; enfin, toule celte vaste scene animee par le mouvement de mille bailments de long cours ou de barques depecheurs et de pilotes qui descendent ou reraontent cette grande route fluviale de Paris a rAllantique ; on concevra que rien ne manque a ces admirables points de vue, pas mi^me les temoins assidus et nombreux des phenomenes des eaux, de la terre et du ciel, ces vieux pilotes de Quilleboeuf, qui, assis sur les pierres et sous les arbres du cimetiere voisinde la mer, contemplent maintenant avec securite les flots redoutables qui les ont epargnes si longlemps. Lorsque Newton, en y pensant toujours, eut decouvert la loi re<^ulatrice des mouvements celestes, I'Attbaction UNivEnsELLE, il I'app'.iqua aux mouve- ments de rOcean, il en penetra la cause, mais il en laissa le developpement a ses successeurs, qui en possession d'une analyse mathematique perfectioimee pouvaient aller plus loin dans I'explication des nombreuses particular iles des marees. Au premier rang des heritiers et des rivaux de Newton, chacun a deja nomm6 Laplace, de I'lnstitut de France. Ce ne serait done point un sujet nouveau et convenable a meltre sous vos yeux que cette obeissance, je dirais 14 NOVEMBRE 1852. 29 678 COSMOS. presquc passive, do FOcean aux formulcs mathemaliqucs de Laplace et de Newton. Lucain dans sa Pliarsale, parlant des cotes maritimes de la France, signale : Ces plages incerlaines qui tantol appartiennent a la terre et tant6t a, la mer; que le vasic Ocean envahit et abandunne tour a tour. II indique pour cause Taction dcs vents, du solcil et de la lune. « Cherchcz, dit-il, 6 vous qui prenez souci de p^netrer le mecanisme du monde, cherchez d'ou naissent ces alter- natives si frequentes. Pour moi, je me soumets a I'ignorance que les dieux ont^ ici voulu imposer aux liommes. « Newton et Laplace ont cherche et, au grand honneur de I'esprit humain, ji7s ont trouve. Mais les rivages et le bassin de la Seine oflrent encore dans les parages de Qaillebo3uf un curieux et redoutable effet des marees, c'est ce qu'on appelle, aux pleines lunes et aux nouvelles lunes des equinoxes, la barre de flot. Ce mouvement tout a fait extraordinaire des eaux do la mer, immense dans son d6vcloppement, capricieux par I'influence des localites, des vents, et surtout de Tetat variable du fond du lit du Heme, a fait I'objet des longues recherclies que je viens aujourd'hui developper devant vous. Voyons d'abord ce que c'est que la barre de Hot. Tandis qu'en general et m6me a I'extr^me embouchure de la Seine, au Havre, a Honfleur, a Berville, la mer, a finstant du flux, monfc par degrcs in- sensibles et s'eleve graduellement; on voit au contraire dans la portion du lit du fleuve, au-dessous et au-dessus de Quillebceuf, le premier flot se precipiter en immense cataracte, formant une vague roulante, haute comme les con- structions du rivage, occupant le fleuvo dans toute sa largeur de dix a douze kilometres, renversant tout siir son passage, et remplissant insiaManemcnt ie bassin immense de la Seine. Ricn de plus majestueux que cetto formidable va^ue si rapidcment mobile. Des qu'elle s'est brisee centre les quais de Quiile- bcEuf, qu'elle inonde de ses rejaillisscments, elle s'engage en remontant dans le lit plus etroit du fleuve qui court alors vers sa source avec la rapidit6 d'un cheval au '^alop. Les navires echoues, incapables de resister a I'assaut d'une va-ue si furieuse, sont ce qu'on appelle, en perdition. Les prairies des bords ron^ees et delayees par le courant se mettent, suivant une autre expression locale en fonte, et disparaissent. Successivement le lit du fleuve se d6place de plusie'urs kilometres de I'une a I'autre des falaises qui le dominent; enfin, les bancs de sable et de vase du fond sont agites et mobilises commejles vagues de la surface Rien de plus etonnant que ces redoutables barres de flot obser- vees sous les rayons du jour le plus pur, au milieu du calme le plus complet et dans I'abscnce de tout indice de vent, de temp^te ou d'orage de foudre. Les bruits les plus assourdissantsannoncent et accompagnent ces grandes crises de la nature preparees par une cause eminemment silencieuse, Yattractton univevselle. Homere, le grand peintre de la nature, semblerait avoir ^e temoin de pareils phcnomtmes lorsqu'il en ^crivait la fidele description que voici : « Telle aux embouchures d'un fleuve qui code guide par Jupiter, la vague immense mugit centre le courant, tandis que les rives escarp^es retentissent au loin du fracas de la mer que le fleuve repousse hors de son lit. » Ces mouvements, vraiment extraordinaires , n'ont rien de fixe m pour le» 1 COSMOS. 679 Ijoints du fleuve ou ils sont le plus violents, ni pour la hauteur de la cataracte. qui se precipitc vers sa source. Un vent de mer modere aide la foi-mation de la barre; un vent violent etale les eaux et en diminue la hauteur; dans les eaux, profondes la barre est faible ; elle Test de mt^me sur les bancs trop peu recou- verts. Souvent d'une maree a I'autre , il s'opere un changement complet dans le- regime de ces courants si bizarres et si destructeurs. II y a trentc ans environ que les curieux effets de la barre de la Seine me furent indiques par M. Robin, actuellement inspecleur divisionnaire des ponts et chauss^es. Get excellent observatcur , charge alors des travaux de Quillebceuf avait fait le nivellemcnt de la partie voisine du fleuve et note les curieux elfets de la barre de Hot. II me rendit une premiere fois temoin de ces mouvemenls de rOcean si grandioses, et alors tout a fait inexpliques. Depuis celte epoque et pendant un quart de siecle, aux jours des grandes marees annoncees par les calculs du bureau des longitudes et inscriles dans VAnnuaire , je courais obser- ver les singuliers et imposants deplacements de ces immenses masses liquides. 3'en suivis les effets sur tous les points de la Seine aulour de Quilleboeuf et jus- qu'a Rouen. Je les ai contemples des prairies et des greves menacees par le flot , du haut des falaises d'Aizier, dc laRoque et de Tancarville. J'ai observe la barre par le calme , par le vent, par la tempete; par le soieil , par la pluie, par Is brouillard; par le chaud , par le froid , dans le jour, dans la nuit. J'esperais qu'une observation assidue des particularites du phenomene, combine eavec les notions de m<^canique qui sont maintenant la propriete de tous, m'en fournirait tot ou tard I'explicalion. C'est ce qui a eu lieu lorsque sont venues a nia connaissances les belle.-; ro- clierches de M. Russel sur la vitesse des vagues dans les canaux d'une prol'on- deur donnee. Or, il resulte de ces recherches que cette vitesse est beaucoup moindre dans une cau moins profonde; et, au contraire, que la vague marc'ie et se propage tres-rapidement dans une eau Ires-profonde. On pent done, a peu pr6s , sender la profondeur d'un lac ou d'un canal en y excitant des vai;ucs et en mesurant leur vitesse. C'est ainsi que la profondeur de la Manche cnlre Plymouth et Boulogne a ete evaluee a 60 metres; c'est encore ainsi que la pro- digieuse rapidite des ondes de la maree dans les mors profondes (par Lcure 600 kilometres et au-dessus) a permis de sender I'Atlanlique et le Pacifique et iiousadonne, enmoyenne, 4800 metres de profondeur pour I'Atlantique, et GiOO metres pour I'ocean Pacifique. 11 serait injuste de ne pas rappeler que Lagrange, de rinstitut, avait deja trouve, par Ic calcul, les resultats que M. Russel a de- duits de I'experience, et que Thomas Young, place par I'Academie des sciences au rang illustre de sesassocies etrangers, avait modifie en plusieurs points le Iheo- remede Lagrange. Permettez-moi cependantd'insister sur le merile de la conGr- mationexperimentale donnee parM. Russel aux calculs analytiques. Les pheno- menesde la nature sont si compliques que les theories nesont pour ainsi dire que des presomplions, jusqu'au moment oil leur verification par les faits leur donne le rang de verites annexees a perpetuite a I'apanage de I'esprit humain. Souve- nez-vous de ce mot du spirituel Fontenelle : Quand une chose pent etre de diux fagons , elle est presque toujours de la faron dont on ne la con^oit pas (jmerah' mcnt! 680 COSMOS. Mainlenant que grkce aux. travaux de Lagrango et deM. Russel , noussavons qiie la marchc des vaguc5 est rctardoe dans uneeau nioiiis profonde , nous com- preridrons sans peine la cause de la cataracte du flux quand la maree abordc cerlaincs portions du bassin de la Seine. En effet, dans toutes les localilcs oil Teau deviendi a de moins en moins profonde , les premieres vagues relardoes parle manque de profondeur seront devancees par les suivantes qui marchent dans une eau plus profonde, el celies-ci seronl elles-memes rejointes par celles qui les suivent , de manicre que les vagues anlerieures etant depass^es en Vi- tesse par toutes celles qui les suivent, ces dernieres retomberont en cascade par-dessus les vagues anterieures, et produiront cette immense cataracte rou- lante dont j'ai decrit plus baut la forme et les effets. Pour peindre par un exemple familier a tout le monde cet entassement des lames de maree produit par le ralcntisscment de vitesse de celles qui marchent en t^te, ralcntisscment qui provient, je le repete, de ce que ces premieres lames voyagent dans une eau moins profonde ; cbbervez ce qui arrive a un troupcau dont la tete est retardee danssa marchc par un obstacle quelconque. A I'instant m^me on voit les animaux du second rang se scrrer centre les premiers et ceux qui viennent ensuife se dresser sur leurs piedsde derriere en appuyantles pieds de devant sur ceux qui les precedent. Ainsi toutes lesfois que les vagues do la mar^e montantese propageront dans tine eau de moins en moins profonde en allant du large au rivage, 11 se produira xm etfet analogue a la barrc de la Seine, qu'il y ait un fleuve ou simplement le rivage de la mor avec une pente graduee. C'est une circonstance et un cfTet dont j'ai ete temoin aux alentours du mont Saint-Michel que Ton peut aborder a gue dans les basses mors equinoxialcs. Mais quand le reflux cessc, la mer revient en vague roulante el fait courir les plus grands dangers a ceux qui se trouvcnt en- core au milieu du gue. II resulte de cette theorie que si, d'apres la position des bancs qui cccupent le fond de la Seine, I'eau, apres avoir diminu^ et prouuit une bane, vient a re- prendre de la profondeur, les vagues anterieures ne seront plus retard^es et par suite que la barre cessera de se produiro. C'est ce que j'ai frequemment ob- serve du haul des falaises qui dominent la Seine dans la portion de son cours qui s^pare le promontoire de la Roque de la pointe de Tancarville. Cette meme theorie doit faire pressenlir que le phenomene de la barre n'est point exclusivement propre a la Seine. Toutes les rivieres a marees qui offriront un bassin dont la profondeur diminuera graduellement devront le produire, 11 a, en effet, (5te observe depuis iongtemps dans la Dordogne, ou il est connu sous le nom de mascaret, nom que j'adople, avec M. Arago, pour designer ces mou- vements extraordinaires de la mer, car le nom de barre se donne ordinairement a cette sorte de barricre sous-marine que forme a I'embouchure des fleuves le depot des sables, des vases et des troubles entraines par le courant, et qui s'ac- cumulent a I'endroit oii celui-ci vient s'arreter par robstacle de la mer. J'ai aussi observe le mascaret de la Dordogne qui a ete decrit par I'admirable Ber- nard Palissy. Quant a la theorie qu'il essaye d'en donner, outre sa complica- tion, elle scrait completenient en defaut dans le cas des mascarets sans riviere du mont Saint-Michel. COSMOS. 681 Un mascaret formidable, dit Pororoca. ravage l'eiiil)oiich(ire de I'Ama/nnf . Ceux qui voudront bien prendre la peine de comparer la description qu'en donnj La Condamine, avec rexplication qui precede, y trouveront, je pcnsc, une noo- velle confirmation de ma Ih^oric. La Condamine ne donneaucune expliciition de la pororoca. Enfin le meme phdnomene se relrouve dans les rivieres et sur les plages du nord de I'ficosse; en Angleterre, dans le Saverne et dans I'Hum- ber; aux Grandes-Indes, dans quelques-unes des embouchures du Gange. Mais si nous voulons un exemple fameux des effets d'un mascaret observe trois cents ans avant notre ere, il nous faut ouvrir Quinte Curce et suivre avcc lui Alexandre le Grand arrivant a I'embouchure de I'lndus dans le desir pas- sionne de voir I'Dcean k ces limites du monde. La flottille du conqucrant des Indes trouve deja de I'eau salee ; rien ne fait presager un danger dans la locaiite calme et d^couverte ou Ton se trouve. Mais le flot arrive subitement, le fleuve remonte vers sa source avec la vitesse d'un torrent, tous les vaisseaux, echoues d'abord, sent culbutes ensuite, tous les rivages sont converts de debris. Les soldats sont terrifies de voir des naufrages en pleine terre, une nier entiere dan$ le bassin d'un fleuve. Ce beau passage inintelligible a ceux qui ne connaitraient que les marges ordinaires se ressent de I'ignorance meme de I'auteur, qui Ta ecrit evidemment d'apres les notions generales. Pour le bien concevoir, et sans- sortir de notre pays, qu'on se figure un de ces chefs normands envahisseurs de- la Neustrie, remontant a pleines voiles le bassin de la Seine par le vent d'ouest ordinaire dans notre climat. S'il prend pose le matin a I'^chouage sur les rives du fleuve entre Quilleboeuf et Villequier, un jour de grande maree equinoxiale , le mascaret du soir le fera perir k peu pres infailliblement, lui et touto sa suite maritime. N'est-il pas curieux que le mascaret de la seine, pour ainsi dire aux portes de Paris, ait ete connu plus tard que celui de I'Amazone? II a ete mentionn^, pour la premiere fois, dans la prose eloquente de Bernardin de Saint-Pierre. Get admirable observateur de la nature decrit, avec une rare precision, la Jiion- tagne d'eau quivient du cdtc de la mer en se roulant sur elle-m^me, occupant ioute la largeur du fleuve, et surmontant ses rivages a droite et a gauche avec un fracas Ipouvantable. Suivant I'imaginalion poetique de I'auteur, la Seine est une nymphe que Neptune, amoureux, poursuit a grand bruit, en soulevant les flots qui forment la barre. Dirai-je que I'exp^rience que chacun pent faire en agitant I'eau d'une mare, ou celle qui est emprisonnee dans un canal en bois dont le fond va en se rele- vant, confirme toutes les provisions de la theorie, et reproduit en petit le mas- caret et toutes ses circonstances ? Rien n'est a nOgliger de ce qui pent entrainer une complete conviction dans la theorie des forces de !a nature, et faire passer de Vinquietude de la recherche a la securite de la verite connue. Serait-on bien sur, par exemple, de la theorie de I'arc-en-ciel, si, au moyen des gouttes d'eau que Ton fait jaiUir soi-m4me en plein soleil, on n'avait pas reproduit, dans toutes ses particularites, ce brillant meteore? Les experiences de cabinet sont modestes, mais utiles, done estimables. N'est-ce pas en reparant le mauvais module de machine a vapeur d'un cabinet de physique que Watt decouvrit la 682 COSMOS. machine a vapcur travaillcnse, cotle ouvriere univcrscllc et infaligablc dont notre compatriotc et confrere de I'lnstilut, M. Segiiin, a fait plus tard la loco- motive, transformant, pourainsi dire, une lourdeb6te dc sommo en un cheval de course, aussi rapidc dans sa marche qu'energique dans son travail. Platon et son 6cole melaphysique pensaient quo c'etait faire deroger la geo- metric que dc I'appliquer, comme en figypte, a Tarpcnlago dos terres. Un phi- losophe du dernier si^clc, encore plus orgucilloux, disait a peu pros ce qui suit : Quand un penseur trouve une application utile do ses theories, il en fait part a la multitude qui I'emploie selon ses intercuts, et de Id naissent les arts que Ion jeiteau peuple pour lui apprendre a respecter la philosophie. Dans notre siecle, heureusemcnt tutelaire, on n'est pas si dedaigneux. Ceux qui nous ont donne les moteurs par I'eau et lo feu, le telegraphe elcctrique, la photographie, I'c- therisation, les theories agricoles et tant d'autres honneurs de la civilisation moderne, ontestimea sa valeur cc qn'Ws jetaicnt an peuple, lequel les en a convenablement remercies. Adoptons done la belle maxime de Pline : Pour I'homme, c'est etre Dieu que d'Mre utile a Vhomme ! Mais, dira-t-on, a quoi pent servir la connaissance des lois des mouvements du flot dans les rivieres a marees ? Demandez-le aux conslructeurs des grands travaux qui, sur les rivieres d'Ecosse et dans laTamise m6me, ont obtenu que les batinients du commerce franchissent d'une seule maree, le chemin qu'iis meltaient autrefois deux ou trois jours a parcourir. Demandez-Ie aux travaux qui se font aujourd'hui dans le? parages ravages jusqu'ici par la barre de la Seine, coulant bas les navires et detruisant les prairies elles-memes avec une force irresistible? M.Arago, consulte officieusement par un de nos ing^nieurs sur ces travaux, lui disait : « Dans le Gauge, a ses nombreuses embouchures, on a observe que les vaisseaux a flot dans une eau profonde, ne souffrent point du mascaret, qui fait couler bas les batimenis echoues ou stationnes dans une eau peu abondante. T;\chez done de donner de la profondeur au lit do la Seine. » C'est ce qu'on a fait en retrecissant le lit du fleuve au-dessus do Quillebceuf, et lesuccesparait devoir couronner ces utiles tentalives. Tons ccux qui, en des- cendant la Seine, ont vu a plusieurs kilometres, dans les vasles et riches prai- ries du nord et du sud, les mats encore subsistants dos navires qui s'y sent perdus autrefois, quand le courant y passait ; ou ceux qui ont naviguo a la va- peur dans les localitcs memos que, peu d'annees auparavant, ils avaient par- courues a cheval, au milieu des cultures les plus productives, et des mille teles d'eleves de bestiaux de toute espece, sentiront la haule importance de ces ap- pMcations de la science des mouvements extraordinaires des eaux de la mer. Mais pour quitter, en finissant, le domain-e des inlerets materiels et revenir a la contemplation de la nature, qui n'a point observe sur le rivage de la mer cet interminable brisement des vagues qui viennent sans cesse a la cote, et re- culent ensuile apres s'6tre ctalees sur le sable et les cailloux de la greve. Dans leur grande variete d'aspcct, elles ont toutes, cependant, une analogie de orme, qui exclut I'idce de hasard et annonce une loi. Cette loi q\ii modele une humble vague qui brise, est exactement la memo que celle qui pro- duit la redoutal)le barre de not. La petite vague plate qui aborde le rivage COSMOS. nc^ ou :i500' « La presence de Fair dans Imterieur de la sphere ne chan-e nasle resultat. ^ ^ '< Pour observer cette difference d'intcnslte, je suppose deux piles thermoelectriques^/j'placees ades distances egales d'une lampe S, sur un support KK' susceptible de tourner autour d'unaxe vertical passant par le point S. Un conducteur cc' reunit los piles par leurs p61es de meme nom. « Deux conducteurs(Zf/'raettentles deux autres poles en communica- tion avec les deux extremites du fil d'un galvanometre G. Celui-ci est place sur un support immobile independant du support KK'. « Les deux piles etant opposees pole a p61e, si elles sont de meme force, il n'y aura pas de courant, tant que I'intensite du rayonnement sera la meme sur les deux faces //',• mais il se produira un courant aussitot que I'intensite cessera d'etre egale pour les deux piles, et le sens du courant permettra de reconnaitre quelle sera la pile sur laquelle ,le rayonnement sera le plus intense. « L'experience 6tant faite par exemple au moment de la journee ou le mouvement annuel de la terre a lieu dans le plan de I'horizon, on fera tourner tres-lentement I'appareil autour de I'axe vertical. Par I'effet de I'inegalite du rayonnement dans les differents azimuts, Ton devra observer au moyen du galvanometre I'existence d'.un courant. 692 COSMOS. dont le sens et I'intensit^ devront etre en rapport avec la direction du mouvenient annuel, ou plutot do la resultante de tons les mouvemenls dont la terre est aniniee. « Cette experience presente sans doule'.quelques difficultes d'execu- tion; mais d'apr^s les recherches que j'ai faites dans cette vue depuis quelque temps sur les proprietes des piles thermometriques de construc- tions differentes et sur la sensibilite des galvanomfetres, je la considere comme partaitement realisable; et si les raisonnements que je viens d'indiquer ne cachent pas quelque erreur que je n'aurais pas apercue, il me semble que Ton aurait ainsi du probleme en question une solu- tion simple et directe. » AsTRONOMiE. — M. Valz annonce que M. de Gasparis, le fecond decou- vreur de planetes a renonce a ses droits sur le nouvel asteroide que M. Cha- cornac avait apergu a Marseille avantque M. de Gasparis le decouvrita Naples. Le nom de cette nouvelle planete restera done tel que M. Valz I'avait donne, et les astronomes auront Massulia parmi le groupe de petits astres qui circulent entre Mars et Jupiter. Quant au nom de 3las- salia que nous avions ecrit d'abord Massiiia, pour nous tenir a la ver- sion habituelle, il parait que, d'apres I'historienRussi et les medailles phoceennes que M. Valz vient de consulter, on doit appeler Massulia la ville de Marseille, et non pas Massiiia, comme I'ont 6crit Heindrich, Jean-Pierre des Ours, de Mandajors, et les autres qui se sont occupes de I'origine de cette ville. On pretend que le mot 3Iassalia fut compose par Protus, le commandant des Phoceens, lorsque, vers I'aneOO avant Jesus-Christ, il vint coloniser les cotes de la Celto-Lydie, et Ton dit que ce mot signifie demeure {mas) des Salyes ou Salyens {sal). PHYSIQUE MOLECULAIRE. THEORIE DE LA COHESION ET DE l'eCARTEMENT DES PARTICULES MATERIELLES OU MOLECULES DES CORPS, PAR M. SEGUIN AINE , CORRESPONDANT DE l'INS- TITUT. Newton, ce hardi createur de la magnifique theoriede I'attraction universelle, theorie qui lui a donne la clef de tanl de mysteres avant lui impenetrables , les mouvements et les perturbations des planetes , la marche des cometes, la 6gure de la terre , les marees des oceans , la precession des Equinoxes, le deplacement des nceuds de la lune, etc., etc.; Newton, en finissant son immortel livre des Priiicipes , averlit son lecteur qu'il n'a parle de I'attraction que comme d'un fait , d'une force , dont I'existence et les lois sont constatees et demontrees par I'observation. II se montre assez dispose a aborder la recherche beaucoup plus delicate des causes m^mes de I'attraction ; il laisse entrevoir dans le lointain un G' ide subtil qui traverserait les corps solides , ou s'accumulerait dans leur inte- COSMOS. e9Z rieur, el dont t'intervention poiirrait expliquer plusleiirs ppopri^tes phvsiqups des corps: lacohfeion, I'impenetrabilite, les affinites chimiques, les attractions et les repulsions ^lectriques ou magnetiques , la pesanteur, les attractions des corps celestes , et meme plusieurs effets physiologiques du genre de ceux que I'on a parfois attribues a un fluide nerveux. Dans les questions posees par lui a la fin de son Optique, il revient sur les memes idees , il reprend son fluide uni- versel , son 6lher comme pouvant donner la clef des actions exercees par les corps sur le rayon lumineux , etc. On se tromperaitgrandement si Ton attribuait a Newton I'opinion inconsideree et insoutenable des physiciens et des philosophes modernes qui voit dans I'attrac- tion proportionnelle aux masses et en raison inverse du carr6 de la distance une propriety intrins^que et inherente a la matiere; qui fait de molecules essentielle- ment inertes des foyers d'activite et de mouvement. Non, Newton n'a pas merit6 lesplaisanteries acerees, les objections ecrasantes sous lesquelles le grand Euler, dans ses incomparables Lettres a une princesse d'Allemagne, a enseveli a jamais, les partisans des attractions r^elles. Si! est quelque chose de certain au monde c'est que les molecules des corps et les corps eux-memes ne s'attirent pas rtelle- ment; c'est que I'attraction n'est pas une force intrins^que, mais seulement une force explicative ; c'est que tout se passe comme si les corps s'attiraient , quoi- qu'il soit incontestablement vrai que les corps ne s'attirent pas. Newton comme Euler , comme tons les philosophes dignes de ce nom, n'ont pu voir dans la ma- tiere que deux choses, I'inertie, et le mouvement primitivement imprime par une volonte libre, moteur premier et infini. Et c'est avec ces deux grandes choses, I'inertie et le mouvement, que la science avanc(5e doit pouvoir expliquer un jour tons les ph^nomenes du monde physique. Deja des esprits courageux se sont efforces d'expliquer par I'inertie et le mou- vement le grand fait , le fait capital de I'attraction universelle , mais ces expli- cations ne sont ni assez netlement formulees , ni assez plausibles pour que nous puissions en donner meme une id^e. Rien ne prouve d'ailleurs que celte attrac- tion ne soit pas un premier principe ayant pour cause essentielle et unique la volonte libre du Dieu cr^ateur. Dieu pour constituer le monde materiel, aurait decret6 que les atomes graviteraient I'un vers I'autre , comme il a donne aux plantes la vie; aux animaux la vie, la sensation et I'inslinct; a I'homme la vie, la sensation , le sentiment et I'intelligence. A ce point de vue philosophiquc e seul vrai , nous le pensons du moins, I'attraction serait I'attraction, comme I'^tre est I'etre; la vie, la vie; I'intelligence, I'intelligence; elle ne serait pas la consequence de ph^nomfenes anterieurs , mais le point de depart de lous les phenomenes , le premier anneau de la chaine soutenu par le seul doigt createur. Mais en admettant cette premiere et vaste inconnue , ce mystere premier et impenetrable, I'attraction universelle , comment pourra-t-on du moins d^gager les autres inconnues et approfondir les autres mysteres du monde materiel ; le mystere, par exemple de la cohesion , le seul qui nous occupera aujourd'hui , de cette force singuliere qui lie entre elles des molecules s^par^es par des intervalles vides, et les emp^che de se perdre dans I'espace, ou de se precipiter isolement sur le corps vers lequel elles gravitent , vers la terre, par exemple, s'il s'agit des corps situes dans la sphere d'attraction de notre globe ? •694 . COSMOS. ■f Ce secret de la cohesion , I'un de nos plus glorieux compatriotes, M. Sequin ain6, I'a poursuivi pendant vingt annoes, et I'a certainement trouve; il consiste bien reellenient , comma nous aliens le d(^montrer, dans ce fait incontestable que les molecules des corps surpassent , en nombre et en petitesse , tout ce que nous pouvons imaginer. Entrons en matiere. Des physiciens, qui ont voulu expliquer la cohesion ou cette force de contact par laquelle les molecules des corps adherent lesunes aux autres, ont^te arr^ti^s par deux difficulies insurmontabies. La premiere etait de concevoir comment deux molecules contigues d'un corps solide, placees en presence I'une de I'autre , pouvaient exercer I'une sur I'autre une action plus grande que ratlraction de la lerre sur chacune d'elles; et Ton a suppose ie plus ordinairement, pour expliquer ce fait , que Tatlraction a distance semodifie, ou s'exerce suivant une autre loi , a mesure que les molecules se rapprochent davantage. Mais cette premiere difficulte vaincue, il restait a expliquer pourquoi les molecules , soustraites par leurs actions reciproques a Taction de la terre , et libres d'obeir a leur attraction mutuelle, ne tendent pas ind^finiment a se con- centrer au centre de gravity commun. Ces molecules, en effet, ne se trouvent nuliement dans le cas des corps du systeme planetaire , soumis, a la fois, a deux actions qui se font equilibre , la gravitation et la force centrifuge; et qui par la meme restent a des distances comprises entre certaines limites fixes qii'ils ne peuvent pas franchir. Pour expliquer ce second fait, dont on ne pensait pas que la loi d'altraction universelle put rendre raison, on a souvent admis que I'at- traclion moleculaire se changeait en repulsion , lorsque les deux molecules elaient par trop rapprochees ; souvent aussi , on a suppose que le calorique in- terpose entre les molecules des corps tendait a les maintenir a distance, en remplissant vis-a-vis d'elles le role que joue la force centrifuge dans I'ensemble des mouvements des corps celestes. Voyons comment M. Seguin reussita expliquer completement ces deux memes faits et a resoudre ces deux grandes difficultes par la simple consideration du volume infiniment petit des molecules materielles, ajoutee a la loi de I'attrac- tion universelle. L'aclion qu'une agregation de molecules ou une certaine mas?e materielle exercesur une autre masse semblable, plac^e au contact, pent etre'envisagee de deux manieres : premierement, en considerant separement les deux ensembles de molecules comme condensees ou concentrees respectivement en leur centre de gravile , et agissant I'une sur I'autre en raison directe des masses et en raison inverse du carr6 des distances; secondement, en les supposant form6es par la reunion de molecules tres-denses et tres-petites , separees par des espaces vides beaucoup plus (5tendus que les espaces pleins qu'elles occupent. Dans le premier cas, en designant par I'unite la masse des ensembles de mo- lecules, ensembles que nous supposons , pour plus de simplicile , sph^riques, egaux et placfe a I'unite de distance , leur attraction mutuelle sera exprim^e par un divise par un elev^ au carre, ou par un. Dans le second cas, il en sera tout autrement. Admeltons, en effet, pour COSMOS. 695 .fixer les id^es, que les deux spheres sont form(5es par la reunion de'dduze files de soixante molecules chacune, disposees en forme de rayons dans leur intt- rieur, inclinees lesunes sur les aulresde soixante degres. et unies, par d'autres files, egalement de soixante elements chacune. Le polyedre, unique en son genre, obtenuainsi, etqui resulte naturellement de la juxtaposition de molecules spheriques de maniere a remplir I'espace, est le cubo-octaedre des min^ralo- gistes ; il est quasi-regulier et inscriplible dans une sphere qu'il rencontre en douze points. En faisant abstraction des molecules qui se superposent dans les angles, le nombre des petits globules qui entrent dans la formation des deux grosses spheres est egal a 2160 , et la masse de chaque molecule ou petite sphere est la 2160' partie de I'unite. De plus, comme il y a 120 molecules entre les centres des deux grosses spheres , ou sur la distance egale a deux fois I'unite de leurs centres de gravite , la distance enlre les centres de deux petites spheres ou mo- lecules contigues sera egale a un 1 20' ; par consequent , I'atlraction d'une de ces petites spheres ou molecules sur sa voisine est exprimee par 21fiO • \ 190 i 21611 u,uu..., c'est-a-dire que, en raison de leur lenuite et de leur plus grand rapproche- ment , les petites molecules exercent I'une sur I'autre une attraction six fois plus considerable que celle des deux spheres tout entieres I'une sur I'autre. Si au lieu de 60 molecules dans chaque file, nous en supposons 600 000, cha- que petite sphere ou molecule exercerait sur sa voisine une attraction egale a (1 200 000)^ elev6 au carre et divise par 21 600 COO, ou a 66 666; ce qui montre, comme il etait facile dele prevoir, que I'attraction entre les molecules, comparee a celle des deux corps entre eux, croiten raison dirccte de leur division. Et comme d'ailleurs, Ton peut supposer que les files sont composees d'un nombre de molecules aussi grand que Ton voudra, il en resulte qu'on est libre d'imaginer a un corps une forme constitutive telle, que I'une quelconque des molecules exerce sur sa voisine une attraction plus grande que celle qu'exerce- rait surcette molecule tout autre corps forme de la meme matiere, quel que soit d'ailleurs le volume ou la masse que Ton puisse supposer ace corps. M. Seguin ne s'estpas arrete a ce resultat general, il a recherche quelles se- raient les conditions de masse, de densite, de distance et d'arrangement qu'il faudrait attribuer aux molecules qui , par leur reunion , forment les corps qui sontdoues de la propriete de cohesion, pour permettre a ces corps de rester or- ganises lorsqu'ils se trouvent sous I'influeDce d'une masse puissante comme la terre, et que le calcul indique que I'attraction de cette masse sur les diverses parties de ces corps est plus grande que I'attraction de ces memes parties entre elles, en les consid^rantles unes et lesautres comme concen trees respectivcment a leur centre de gravite. C'est bien de cette maniere que doitetre formule le probleme; car si Ton peut ramener I'explication de la cohesion a la simple loi de I'attraction, il faut, lors- qu'un corps, dont la tenacite est assez grande pour resister a Teffort de son propre 696 COSMOS. poids ponr en operer la niptire, se .roiive librooient fuspendu, el retenu seiile- ment par son extrt-mite superieure, que Taction exercee par ses propres mole- cules les unes sur les aulres au point d'attache, soil plus grande que ceile de la terre sur toute la masse des molecules qui se trouvent plac^es entre elles et ce m^me point d'attache. Prenons pour example le cas Irds-simple d'une verge de fer suspendue verti- calement par unc de ses extremites. Le calcul indique que la cohesion du metal est egale a I'eiTort qui est exerce par une colonne de 6000 metres de longueur, et que, passe celle limite, le poids de la partie inferieure en determinerait la rupture. Si done on isole par la pensee une file de molecules dans lo sens de la longueur de cette verge, ou si on la considere comme simplement compos(5e d'une file de molecules a la suite les unes des autres, 11 faudra qu'au point oil s'o- p^rera la rupture, I'attraction des molecules appartenantrespectivement acha- cune des files qui se trouve en deca et au dela de ce point, soit ^gale a celle que la terre exerce sur la totalile des molecules qui se trouvent plac^es entre la terro et ce meme point de rupture. Pour determiner cette action, examinons de quelle maniere I'atlraction agit dans ce cas sur les molecules, en supposant d'abord que deux corps A et B, de forme sph6rique, ayant chacun un volume egal acelui de la terre et de meme densite, se trouvent en contact par un point de leur surface; et que la somme de leurs masses et la distance de leurs centres sont representees par I'unite. Leur 1 action reciproque sera alors evidemment exprimee p?r -j^ ^LSH'on suppose actuellement ces corps divises en spheres de 1 metre de diametre, et ayant la meme densite, le diametre de la terre elant en nombre rond de 12000 000 de metres, le nombre des spheres composant chacune des deux masses sera de (1 2 000 000)' et I'attraction de chacune de ces spheres sur celle avec laquelle elle se trouve en contact sera exprimee par I > ^3 • ( 1 -jg — ] M2 000 OOO'V * M2 000 000/ J2 000 00U d'ou il suit qn'en supposant la densite de ces spheres 12000 000 de fois plus grande, ou, en d'autres termes, que leur nombre soit 12000 000 de fois plus petit, chacune d'elles jouira de la propriete d'exercer a sa surface une attraction egale a celle des deux grands corps I'un sur I'autre. Mais comme I'attraction des spheres en contact doit 6lre assez puissante , ainsi que nous I'avons dit, pour soutenir une file de 6000 spheres , il faudra que leur action a ce point soil 6000 fois plus considerable : or, c'est ce que Ton obtiendra en augmentant leur densite ou en diminuant leur nombre dans le memo rapport de 1 a 6000, ce qui le reduira a (12 000 000)'' 12000 000X6000 24X10' Independamment de Taction que les deux spheres ou molecules conligugs exerceront individuellement I'une sur Tautre, chacune d'elles exercera sur toutes celles de la meme file une action qui sera mesuree par leur masse divisee par le carre de la distance qui les separe. Nommons a, a', a",.... h, h', b',.... les spheres COSMOS. 697 ou molecules appartenant respectivement a la file placee ea de^a et a ia file placee au dela du point de contact, et ordonnons leurs distances a partir de ce point; nous trouverons que la somme de I'aUraction des deux files I'une sur I'autre comprend : I- I'attraction de a sur h=. -„ =r.| ; 2" les attractions de a sur V et de a' sur b ^gales toutes deux a ^, =z i et ensemble a | ; 3" les attractions de 0 sur 6", de o' sur b', de a" sur 6, 6gales chacune a -4= f et ensemble a \ ; et ainsi de suite. La loi de la progression se manifesle des les premiers termes etla somme des attractions, ou rattraction totale d'une file sur I'autre sera en consequence, donnee par la somme des six mille premiers termes de la suite. 'I ) I) J. h 6^c. En ajoutant les neuf premiers termes on trouve 2,83. Si Ton prend les 90 termes suivantset qu'on en cherche la somme, on arriveraa la meme valeur, puisqu'on aura dix fois plus de termes ayant cliacun une valeur moyenne dix fois moindre; et en partageant tous les autres termes en groupes dont les nombres de termes soientsuccessivement dix fois plus grands, c"est-a-dire de 900 a 9000, de 9000 a 90000, il en sera de meme pour chacun des groupes '. Par consequent, la somme des termes de la serie egale a la somme des valeurs des groupes, pourra etre cxprimee par le produit que Ton oblient en muUipliant le logarithme du nombre des termes par la valeur commune des groupes, puisque le nombre des groupes est le logarithme du nombre des termes. Dans ie cas que nous considerons, le nombre des termes est 6000 ; leur somme sera done 2,83 X log 6000 =2,83X3,778= 10,79, ou en nombre rond 10. On pourra done, par suite de cette seconde source d'at- tractions ajoutee a la premiere, supposer les molecules dix fois moins denses, et leur nombre dix fois plus considerable, c'est-a-dire egal a 24X 10"* = 240 000 000 000. Ces considerations prouventqueFaclion exercee paries spheres ou molecules les unes sur les autres, est due a deux sources distinctes qu'il impor- tait de considerer chacune en particulier. La premiere est ruction de moleciiles ' Cetle nianifcre d'uvaluer approxiinativemciit la soniiiie ties termes do la sdiie ciivei- genlc 1, 5, J, 1, etc., est exlieiiieinent iiigenlcusc; M. SOguiii a su toiirner uiic diflicultc; qui avail arreld de trfes-savaiits matiiOmaticiens. Le procride par Icqiiel il deniontrc I'exac- titude dc son Evaluation est plus habile encore. 11 prend les differences eiitre les lerines des divers groupes, et il remarque que ces differences^, ^, -pj, ■—, ^, -^, -Jj, 47 irOs- consid^rablcs pourle premier groupe,deviennentf-J^, ^, ... -^rr^pj pour le second groujjc; TooiTu) ■•• »in)'c7n> pourle troisiijme groupe. Des lctroisiO;megroupe done, la difference entrc deux termes consecutifs devient exccssivement petite, ellc n'est plus que le milliome de sa valeur pour le premier groupe, et iM. Seguin en conclut qu'on peut mt-mca partir du second groupe subslituer ix un certain nombre de teruics Tun d'enlre eux nniltipliii par leur sounne : il en rfeulte iinmddiatement que le second groupe -nj, rr. tt. ••• ii? sera sen- siblement dgal au premier 1, ■, ',... [„ i)uisqu'on peut le i)artageren neui ro'jpes se- condaircs compost's chacun de neuf termes dont les summes respcctives si out j ocisE- nient les termes du premier groupe. 698 COSMOS. a molecules contigues, et elle n'a pour effet ni d'augmenter ni de diminuer la lon'^ueur totale que formeralent les molecules si on lessupposaittoutes placees a la suite les unes des autres. Ea effet, dans le cas qui nous occupe, cette longueur est (<2 000 OOOr _ ^^ qqq qqq qoO de metres, lorsque chaque sphere a un i2 000 000 X 6000 . ^ ^ f metre de diametre ; or, pour des spheres d'un millimetre de diametre,par exemple nn aiirait oo'alement — 7— r- =24.000 000 000 de spheres ayant un dia- On aurail tadiemciio ;i^ yyy qqoOOO ^ •' metre mille fois plus petit , ce qui formerait la meme longueur de 24 000 ' millions de metres. La seconde source de la cohesion est Taction des molecules non contigues; or, il a ele demontre que cette seconde action croit proportionnel- lement au logarilhme du nombre des molecules, et depend plus particulierement , encore de I'etat de division et de densite auquel ces molecules sont rMuites. Nous voici done arrives a cette conclusion fondamentale que, pour expliquer les phenomenes de la cohesion , sans recourir a d'aulres causes que I'attraction newtonienne , il suffit completement de supposer 1° que les molecules des corps se groupent par files d'autant plus longues que la cohesion est plus grande; 2° que les dimensions des molecules groupees par files sont si petites qu'elles depassent toutes les idees que nous pouvons nous faire des quantitesinfiniment petites. On comprend en effet alors que le logarithme du nombre qui exprime la quantilede molecules contenues dans une file d'une longueur finie, aussi petite que Ton voudra, pourra elre lui-meme assez grand pour augmenter indefiniment la force attractive qui lie entre elles les diverses parlies du systeme : on pourra par la m6me supposer que la densite de chaque molecule, et par consequent I'attraction qu'elle exerce individiiellement sursa voisine, est d'autant moindre que le logarithme du nombre des molecules qui constituent la file, est plus grand, Ces conclusions de M. Seguin relalivement au nombre immense et a la peti- tesse infinie des molecules des corps, n'ontrien que de tres-conforme a I'opinion commune des physiciens. Deja Muschenbroeck avait enonce comme demontrees, meme experimentalement, les deux propositions suivantes: '1° quelque grand que soit le volume d'un corps, les videscompris entre ses molecules sont assez elendus pour qu'on puisse concevoir que ce corps, sans rien perdre de sa substance puisse etre reduit a un volume infiniment petit, a celui d'un grain de sable ou du plus petit atome de maliere visible; 2° dans le plus petit grain de sable, dans le plus petit alomedepoussiere visible, il y a assez de parties separables ou actuellement separees, pour qu'on puisse en former un globe aussi grand que Ton voudra et dans lequel deux alomes voisins ou conligusseront places a une distance plus petite que toute longueur assignable. M. Seguin enonce autrement et sans sourciller ces memes propositions du savant physicien hollandais : quel- que denses que soient les corps, dit-il , leurs derniers atomes sont relativement a leur volume aussi eloignes I'un de I'autre que le sont les corps celestes dans i'espacol i{ vious reste a exposer encore en quelques mots comment M. S6guin a cher- che a constater experimentalement I'intensite des forces altractives de la ma- COSMOS> 699 tiere a I'etat de division extreme. II a pris pour exemple le cas ou, par suite de> la reaction ciiimique qui s'opere entre des substances de nature differente en dissolution dansl'eau, un corps solide vient a se former et a apparaitre au milieu de ce liquide. II construisit lui-meme un appareil optique destine a me- surer I'espace parcouru par les molecules au moment oii elles apparaissent a I'etat solide pour parvenir du point oil se termine I'attraction de chacun des cen- tres d'action, jusqu'au point oil elies arrivent pour former un des noyaux flocon- neux dont la reunion constitue le precipite. Considerant alors chacun de ces centres de groupement comme une masse agissant sur les molecules les [plus eloignees pour les attirer a elle ; il a compare I'espace que cette petite masse fait parcourir dans un temps donne aux molecules attirees a celui que la terre au- rait fait parcourir dans le meme temps a un corps place sur sa surface, II importait d'operer sur un precipite dont la formation ne fut pas trop prompte. M. Seguin a choisi en consequence celui qui se forme lorsqu'on fait dissoudre du savon dans I'eau contenant en dissolution du sulfate de chaux; il a verse de cette eau dans une petite auge a fond transparent piac^e au foyer des ravens paralleles dun sysleme de lentiiles, et il y a plonge un petit morceau de savon humide; il s'est forme a I'inslant memo, en moins d'une seconde, un precipite tloconneux compose de parlies opaques alternant avec des parties claires et constituees par des filets tres-delies dont les positions respectives, les formes et les dimensions n'onl pas vari6 d'une mani6re sensible pendant la duree de I'ob- servation. Onmesurait au moyen d'un micrometre place dans I'ocuiaire de I'ap- pareil la distance de centre a centre des parties claires et obscures contigues: une moyenne de plusieurs observations a donne pour cette distance 0'",36; representant I'arete du petit cube qui contient la nialiere solide groupee au cen- tre d'action, et qui equivaut a tres-peu pres au volume d'une sphere de 3 milli- metres de diametre. En designant par I'unilo le volume de cette petite masse , Ton Irouve par le caicul que celui de la terre serait exprime par 7611 X 10 ^", mais comme I'eau ne contenait en dissolution que le millieme de son poids de maliere solide dont la density n'est que la moitie de cells de la terre , le nombre ci-dessus doit en- core etre multiplie par 2000 , il devient ainsi 113 282 X 10 -'' et exprime ie rap- port de la masse de la terre a la masse du (locon un. Cela pose pour obtenir enfin le rapport des attractions a distance, on divise le nombre ci-dessus par le carre du rapport des rayons de la petite masse et de la terre ou par 18x1 0'", ce qui donne 8487 X "1 0 * : et comme la terre fait par- courir aux corps places a sa surface un espace d'environ 5 metres dans la pre- miere seconde de leur chute , il s'ensuit que la petite masse , en agissant d'apres les-m^mes lois sur la molecule aurait dii ne lui faire parcourir, dans le meme 1 temps qu'un espace de 5 metres divise par le nombre qui precede ou ■ de metre ; en decimales , le nombre 6029 precede de douze zeros. Mais I'espace parcouru en une seconde est evidemment egal a la moitie de celui qui etait occupy par I'eau transparente qui separait Tune de I'autre deux petites agglomerations de matiere; et M. Seguin a Irouve par une moyenne de plusieurs observations COSMOS. 700 que celespace etait de 0"s6, c'est-a-diredix-sepl cent milliards defois plus g \.nd que si I'altraclion de la petite masse sur la molecule n'eiit 6t6 que le resultat de toules les parties qui la composaient, considerees comme concentr^es a leur centr j de "ravit6. II a done fallu necessairement que I'^tat de division extreme et la petftesse infiuie des molecules intervinssent pour accroitre dans une proportioa CQorme ratlraction qui a produitlegroupement. Ces experiences de M. Seguia ne sent qu'un premier essai , essai grandement heureux qui ouvre des voies nouvelles et qu'on pent comparer au premier calcu' par lequel Newton comparant la quantity observ6e de chute de la lune a la quanlite de chute des corps silues a la surface de la terre , concluait que les mouvements de la lune av?'-ent pour cause unique I'altraction de la terre en raison inverse du carre de la distance. Nous plaindrions ceux qui ne verrpient pas dans le travail que nous venons d'analyser une des plus belles et des pirs vraies etudes de philosophie de la nature qui aient et6 faites depuis longtemps ; et nous ne comprendrions pas que ces considerations si imporlantes restassent plus lont'temps absentes de I'enseignement. Nous montreronsbientot dans un second article comment, etendant le champ de ses meditations, M. Seguin est parvenu a expliquer par la seule attraction proportionnelle aux masses et en raison inverse du carre des distances aidee du mouvement, la repulsion apparente des molecules des corps , la dilatation , la reduction en vapeur , etc., etc. DE L'lMPRlMERlE DE CH. LAHURE ( ANCIENNE MAISON CRAPELET) rue de Vaugirard, 9, prJ'S de I'Odeon. COSMOS. 701 NOUYELLES DE LA SEMAINE. Nous rappelions I'autre jour les efforts tentes par les physiciens les plus illustres, Fresnel, M. Arago, etc., par M. Babinet surtout pour mettre en evidence, par des experiences optiques, le mouvement de translation de la terre. Les recherches de M. Fizeau expliquent parfaite- ment le resultat negatif de I'experience de M. Arago ; le jeune et savant physicien a revele aussi a M. Babinet les causes de I'inefficacite des combinaisons si ing^nieuses employees par lui tour a tour. Partout il survient une compensation ou neutralisation fatale qui masque ou annule I'effet qu'on voulait mettre en evidence; et M. Fizeau craint beaucoup que M. Sellmeyer ne soit pas plus heureux. Qu'on nous permette d'indiquer a notre tour un moyen certain de mettre en evidence le mouvement de translation de la terre, et de la mesurer par une experience facile a faire, presque deja faite meme, et qui reussira infailliblement. C'esttout simplement, avec quelques mo- difications accidentelles , I'experience par laquelle M. Fizeau a constate et mesure la vitesse de la lumiere. On choisira deux stations suffisam- ment distantes et placees sur une meme ligne parallele au mouvement de rotation annuel de la terre, et a chacune de ces stations on etablira I'ensemble des appareils de M. Fizeau, lunette, source lumineuse, disque tournant a roue denlee, etc. Les deux lunettes pointeront en- core I'une sur I'autre , de maniere que I'image de I'objectif de chacune d'elles se forme au foyer de I'autre ; mais cette fois au foyer de la se- conde comme au foyer de la premiere il y aura une glace transparente inclinee, au lieu du mii'oir qui devait renvoyer le rayon sur ses pas. Cela pose , appelons A la premiere station , B la seconde , et admettons que la direction de A vers B soit la direction du mouvement de trans- lation de la terre ; quand par consequent, la lumifere ira de A en B sa vitesse sera accrue de la vitesse de translation de la terre , tandis que lorsque la lumiere viendra de B en A, la vitesse sera diminuee de la vitesse de la terre. La vitesse de la lumiere est, en nombre rond, (^gale a 300 000 kilometres par seconde; la vitesse de translation de la teire est de 30 kilometres par seconde; la premiere est environ dix mille fois plus grands que la seconde ; par la meme , la vitesse du mouve- ment lumineux qui va de A en B surpasse de deux dix-miliit;mes ou d'un cinq-millieme la vitesse du rayon qui va de B en A ; c'est-a-dire que le rayon qui va de B en A mettra un cinq-millieme de seconde de 21 NOVEMBRE 1852. 30 702 COSMOS. plus a parcourir la distance BA. Si, pour fixer les idees, on admet que le disque fait cent tours par seconde et qu'il a , comme celui de M. Fizcau, 720 dents, un cinq-millieme de seconde correspondra ti un cinquantieme de tour ou a 11 dents; c'est-a-dire que le rayon lumineux qui lance en face de I'espace vide marque 1 parcourrait I'espace avec une Vitesse moindred'un cinq-millieme, rcncontrerait I'espace vide marque 1 14 ; cet intervalle de 14 dents est largement suffisant, et il est impossible qu'il ne soit pas nettement pergu dans I'operation qu'il nous reste ade- crire. Lesdeux roues denizes de 720 dents sent done installeessurle pas- sage des rayons lumineux, et elles font exactenient le meme nombre de tours, cent tours, par exemple, par seconde; ce qui en une seconde fait passer devant le rayon 72 200 dents ou espaces vides. Le rayon lumineux part d'abord de A pour aller a B en sortant par I'espace vide marque 1, place en face de I'espace vide n° 1 de la seconde roue den- tee en B. En ne tenant pas compte de la vitesse de translation de la terre, le rayon aurait rencontre sur la roue dentee en B , un espace vide ou plain portant le chiffre m ; mais si on tient compte du mouve- ment de la terre, ce qui accroit la vitesse d'un dix-millieme de seconde, correspondant a 7 dents, il rencontrera I'espace plein ou vide m — 7. En raisonnant absolument de la meme mani^re, on verrait que le rayon parti de B, en traversant I'espace vide 1 de la seconde roue, rcn- contrerait, en arrivant en B, I'espace plein ou vide m -)- 7. Cela pose, il est evident que si chaque observateur determine a son tour, pour le rayon parti de la station opposee, la periode d'eclipse et de reappari- tion; c'est-a-dire le nombre qui indique apres combien de tours et de fractions de tour le rayon est eclipse, puis brille de nouveau, etc., etc., les periodes seront necessairement ditferentes; leur comparaison donnera immediatement la difference de vitesse des deux rayons, et la moitie de cette difference sera la vitesse cherchee du mouvement de translation de la terre. Si Ton veut bien faire attention aux conditions dans lesquelles I'experience de M. Fizeau a reussi, on reconnaitra sans peine que la notre doit reussir beaucoup mieux encore. En effet, le rayon lumineux de M. Fizeau avail parcouru moins de 20 kilometres, son retard n'etait done pas de 20 : 300000 ou 0,00005, cinq cent-mil- liemes, et cependant il a parfaitement vu le rayon s'eclipser et briller de nouveau. L'Academie des sciences a mis liberalement a la disposition de M. Fizeau les fonds necessaires pour la construction d'appareils parfaits avec lesquels il puisse continuer ses m^morables et magnifiques re- cherches sur la vitesse de la lumiere ; on nous annonce que ces instru- ments seront bientdt prets a fonctionner ; c'est pour nous une grande et COSMOS. 703 bonne nouvelle, car il est impossible que rexpericnce sur la vitesse de translation de la terre, ne fasse'pas partie du nouveau programme (jue M. Fizeau se tracait. II n'y aurait de Lien difficile dans notre projet que de r^glor ou de fiiire marcher parfaitement d'ensemble les deux appareils de rotation , mais I'on y parviendra cerlainement en recourant aux moyens fournis par le telegraphe electrique. PIIOTOGRAPillE. NOUVBAUX STEREOSCOPES DE JI. JULES DUBOSCQ. I. Stereoscope a mikoirs tournants otj a ijiages superposees.— Jusqu'ici, dans le stereoscope, les images qui devaient etre amences a coinci- der pour donner la sensation du relief, etaienl placees ou en face I'unc del'aulre, ou a cotd I'une del'aulre, ct personne n'a propose encoredo faire coiacider deux images installees I'une au- dcssus dc I'autre. Ge- pcndanl plusieurs applications importantcs du stereoscope sonl impossibles a realiser sans ce perfeclionnemenl essentiel. Pour faire coincider deux images superposees, il faul faire descendre la plus elevee et faire monler la plus basse : M. Duboscq y parvient par un ensemble de deux niiroirs pouvant tourner independamment, a I'aide dc deux boulons, aulour dc deux axes horizontaux, etenip'or- tes ensemble dans I'espace par un chassis commun mobile aulour d'un axe vertical de rotation. La distance cntreles centres des deux miroirs, comme pour leslcntilles du stereoscope par refraction, est (5gale ix la distance des deux yeux , et les images sonl placees en avant des miroirs, a la distance de la vision distincte. On les i-e- garde par reflexion a Iravers une ouverture plact'c entre elles ou au-dessous d'elles ; elles sc montrent d'abord separees et au-dcs- sus I'une de I'autre , mais en araenant par rotation les deux mi- roirs a des inclinaisons convenabies, on les fait coincider sans Irop de tatonnements, et leur coincidence produit la sensation invinci- ble du relief. II. stereo-fantascope ou BIOSCOPE. —Get appareil ajoufe aux pro- prietes merveilleuses du stereoscope les proprietes pins merveilleu- ses encore du fantascope ou phenakisticope de M. Plateau. Le stereoscope donne la sensation du relief des objets ; le phenakisti- cope donnc la sensation du mouvemcnt ; le stereo-fantascope ou bioscope donne a la fois, comme son nom I'indique, la sensation du relief et du mouvement, ou la sensation dc la vie. Les ei'fets du 704 COSMOS. i'antascopc, que nous n'avons pas besoin dc dccrirc, s'oblicnnent, comnie ou sail , en jiartageanl en un certain nombre de temps ou pliases, le mouvcnienlqu'il s'agit de reproduirc, en douzc temps, par exemple; en faisant donze dessins de I'objet dans cbacune dcs douze pbascs du mouvemenl; en pla^ant ces douze dessins a la circonference d'undisque que Ton regarde, par reflexion ou direc- tement, dans des conditions determinees et a Iravers une I'ente, de maniere a ne voir a la fois qu'un seal dessin, el que Ton pent lour- ner assez rapidemenl pour que la sensation du premier dessin per- sisle encore dans I'ffiil quand le second apparait. Pour transformer la i'antascope en stereo-fantascope ou bioscope, il a suffi : 1° de pren- dre deux images stcreoscopiques de I'objet dans cbacune des douze phases de son mouvemenl; 2°de placer sur le disque tournant ces douze couples d'images; les images vues de Yaiil droit au-dessous, les images vues de I'oeil gaucbe au-dessus , ou rcciproquement ; 3° de regarder ces images par reflexion sur les miroirs tournant a tra- vers deux fentes percees devant les deux yeux ; 4° de faire tourner le disque , comme dans le fantascope ordinaire. Le disque porle done vingt-quatre images ; quand il est immobile et qu'on ne voit a travers les fentes que les deux dessins stereoscopiques correspon- dant a la premiere phase du mouvemenl, on voit, si les miroirs ont ele amenes a la position voulue et que les images coincideut, I'ob- jet en relief dans cette premiere phase ; il apparaitra en relief dans la seconde quand les deux dessins suivants seronl reflechis par les miroirs ; el le mouvemenl de rotation continue, en unissant les pha- ses diverses, montrera I'objet en relief, ou tel qu'il est , executant le mouvemenl cntier. III. Stkreoscope panoramique. — L'ctendue des images dans les stereoscopes connus jusqu'ici est necessairement limitee, et its sont impuissants a montrer avec leur relief nalurel les parties successives d'une vue panoramique. Pour pen qu'on y rcflechisse, on compren- dra en effet qu'on n'obtiendrait absolumenl rien en faisant deliler devant les lentilles du stereoscope par refraction une s6rie de vues prises successivement , parce qu'il est de I'essencc de ce mode de construction que les portions vues a la fois par les deux yeux sont Celies qui onl ete vues a la fois sous Tangle voulu. Mais quand, an lieu de placer les series d'images a cole I'une de 1' autre, on les place au-dessus I'une de I'autre el qu'on les fait glisser a la fois devant les deux yeux, la superposition continue, impossible dans le premier cas, a lieu necessairement dans le second; et Ton oblient alors sans peine I'admirable effel d'une longue vue de quais, meme d'un hori- COSMOS. 705 zon entier, d'nn defile immense, d'unc procession, d'lm corlegc sc derouler en relief dcvant YccW du spectafeiir. Le stereoscope pano- ramique est la seconde application du stereoscope a iniroirs tour- nants. II n'a pas besoin d'etre decrit on figurd, puisque toute la manreiivre consiste simplement a fixer, Tunc au-dessus de I'aulre, sur im chassis, les deux vues panoramiques, de maniere que les points correspondants soient bien sur une memo ligne verticale, et a Ics regarder reflechiesdansles deuxmiroirstournants. Nous n'avons pas besoin d'ajouter que si les images panorami(jues sont obtenues sur papier et fixccs sur une toile, on pourra les enrouler prealable- menl sur un cylindre et les derouler successivemcnt. M. Duboscq a conslruit le stereoscope panoramique par un autre moyen. Les deux images panoramiques sont encore dress^es I'une au-dessus de I'aulre devant les yeux, et on les regarde a travers deux bonnettes, Tunc vide, I'autre munie d'un ensemble de prismes a reflexion totale;'ruii des yeux voit done une des images direclement, I'autre oeil voit Tautre image relevce ou abaiss^e , et en memo temps redressee par une double reflexion, de maniere a pouvoir etre amenee en coincidence avec la premiere , ce qu'on n'aurait pas pu obtenir avec un seul prisme. Ce n'est pas le principe des miroirs tournants, mais le prin- cipe des images superposees qui est en jeu. IV. Abat-jours stereoscopiques. — Le stereoscope a miroirs tour- nants a rendu plus facile une charmante application des images stereoscopiques, imaginee par M. Valin, contre-maitre des ateliers de M. Jules Duboscq. Elle consiste a remplacer, sur les abat-jours, les peintures ordinaires, ou les tableaux en porcelaine translucide d'Allemagne, par des images accouplces transparentes. Placces a cote Tunc de I'autre, les images occuperaient trop do place ou de- vraient etre trop r^duites; on peut cependant leur donner cetle position, on les regardera alors avec le stereoscope omnibus, le stereoscope face a main, ou le stereoscope ('i reflexion totale. Placces I'une au-dessus de I'autre sur les pans d'un prisme polygonal , ou sur les faces d'unc pyramide tronquee , elles seront regardees avec le stereoscope a miroirs toiu-nants. Les images de I'abat-jour pour- ront etre, d'ailleurs, ou sur verre albumine et collodione, appliquecs sur une glace depolie, soit sur papier translucide, soit enfin sur verre peint de couleurs sur la face albuminee , et regardees par la face opposee, suivant les procedes de M. Ferrier. Nous ferons observer, en terminant, que cette application, comme les deux preccdentes, supposent essentieflement I'emploi des stereoscopes, dont I'inven- tion et la propriete appartiennent h M. Jules Duboscq. 706 COSMOS. VARIETES. PHYSIQUE. CONDUCTIBILITE DES CORPS POUR LA CIIALEUR, PAR M. DESPRETZ. M. Despretz, qui avail fait dans le temps im travail fort ctendu sur la conduc- tibilite des corps pour la chaieur, ct sur la loi de sa propagation a I'interieurdes corps, futaltaque en 1843 par M. Langberg, de Chrisliania, physicien distingue, qui avail entrepris, lui aussi, I'otude des memes phenomcnes par une methode differente. — M. Langberg pretondait que M. Despretz avail obtenu, en se ser- vant de procedds impai fails, des rusultats complexes desquels il elait assez diffi- cile de lirer les lois veritables. M. Despretz, revenu niaintenant sur son ancien travail, y regagne pas a pas le terrain que M. Langberg lui avail fait perdre. En effet, rexperimentateur norwegien reproche a M. Despretz d'avoirtrouve que les temperatures decroissent, dans certains cas, plus rapidemenl que les termes d'une progression geometrique; mais il n'y a en cela rien d'elonnanl, vu que les barres sur lesquelles M. Despretz dludia la propagation de la chaieur n'etaient pas assez longues pour que I'exc^s de leur extremite la moins chaude sur la temperature de Fair ambiant fut negligeable, c'est-a-dire pour que ces barres pussent etre regarddes comme infinies. M. Desprelz avail employe des thermometresa mercure dont le reservoir elait court etetroit; M. Langberg s'est servi de piles thermo-electriques tres-petite?. Le thermometre serait sansdouto insuffisant pour la recherche des temperatures dans les solides de tres-petite section; mais M. Desprelz, qui avail lui-meme songc a I'emploi des thermo-multiplicateurs pour ces recherches, s'etait arrete a I'emploi des ihermometres, parce que ses barres avaienl des sections conside- rables, qui rendaient facile I'usage de ces instruments. Pour noire compte, nous aimons mienx aussi la mesure directe des phenomenes, quand celte mesure est po.-sible; et le thermometre nous semble bien plus propre a mesurer la chaieur que les actions clectriquesdeveloppees par des changementsde temperature, qui peuvent neanmoins presenter, dans certains cas, quelques avantages. M. Des- pretz a toujours trouve constant le quotient de la somme de deux exces par I'ex- ces intermediaire, lorsquo ses barres n'etaient pas trop petites ; dans les petiles barres de plomb, de marbro, de porcelaine, de terre cuite, etc., les quotients decroissaient plus ou moins rapidemenl ; mais ces memes corps, en masses plus considerables, suivaient la loi gcnerale de lous les bons conducteurs. M. Langberg objoclait a M. Desprelz de s'elre servi d'exces trop conside- rables, et pour losquels la loi de Newton n'etait plus verifiee. Si cela est vrai pour des temperaluros de 60", comme ces temperatures ont die employees aussi bien pour les mauvais que pour les bons conducteurs, et que, pour ces derniers^ la loi y elait observ6e, ce n'est pas a cela qu'il faul attribuer les anomalies si- gnalees dans les mauvais conducteurs. Les experiences faites par M. Despretz sur I'eau en vue d'etudier sa conduclibilite, s'accordenl parfailement avec la theorie mathematique dans le cas des bons conducteurs de longueur infinio ; COSMOS. 707 etcette th^orie mathc^matique que M. Langberg dit n'avoir jamais etc verifi(5e avant ISio, I'avait 6l6, ce nous semble, par M. Despretz bien avantcette 6poque. Ce savant physicieii avail, en efTet, constate: 4° la Constance du quotient de la somme de deux exc^s par I'exces interm^diaire dans une barre de longueur finie ; 2" la progression geom6trique des exces dans une barre infinie; 3° la relation en- tre les diametres de deux barres infinies, et les quotients donn6s par les deux pro- gressions geom^triques °" ^, = ^^-. Voila done les objections de l\r. Lang- berg r^futees par M. Despretz, que plusieurs causes avaient empech(5 jusqu'ici de repondre. Nous aliens ajouter maintenant quelques nouveaux resultats d'ex- penence que M. Despretz gardait dans son portefeuille, et que la discussion est venue tirer de I'oubli. Ces experiences sent relatives a la conductibilito de la fonte, du fer, de la pierre lilhographique et d'autres substances qui ontete I'ob- jet des derniers travaux de M. Despretz. Barre de fonte. — Diametre, 0"\'i20 ; longueur O^jCO/i-. —Distance des trous comptee du centre 0"',045. — Diametre des trous C^OOSS. — Le milieu de cheque reservoir dans I'axe du cylindre. — Temperature de I'air ^a^.U. Temperatures. 46", U ,77 . . 43,33 .. 42 ,52 . . 41 ,47 .. 40 ,56 . . 39,83 .. 39,17 .. 38,51 .. 37 ,94 . . , 37 ,77 . . . Exces. 23,86 22,63 21,19 20,38 19,33 18,42 17,69 17,03 16,37 15,80 15,63 Temperatures 43",01 . 41 ,03 . 39 ,40 . 37 ,99 . 36 ,90 . 35 ,99 . 35 ,23 . 34 ,64 Barre de far. - Exces. 18,96 16,95 13,32 13,91 12,82 11,91 11,15 10,56 Quotients. Moyenne. 1,991 2,029 1,993 2,007 2,0024 .... 2,009 2,004 .... 2,000 .... 2,005 2,002 -Diametre 0"', 0795. Quolienls. Moyenne. ^.2,022 . ... 2,014 2,023 ...-. 2,017 . ... 2,014 . ... 2,013 2,015 Temperature de I'air 24'',08. La temperature de la partie sup6rieure 6tait de 50"; mais M. Despretz s'est aper^u trop tard qu'un des trous voisins de rextr6mit(5 n'avait pas la meme pro- fondeur que les autres, les trois temperatures les plus ^levees ont etc rejetees. 708 COSMOS. Temperatures. Exces. b3»,70 ... . 35,66 42 ,70 ... . 24,70 34,39 ... . 16,35 29 ,59 ... . 11,55 26,01 ... . 7,97 23,64 ... . 5,60 22,06 ... . 4,02 20 ,81 . . . . 2,77 Les quotients trouves pour la fonte et le fer different a peine d'une unite dans le troisieme chiffre; on rendrait peut-etre encore la difference plus petite en mul- tipliant les precautions. C'est parliculierement regality del'intervalle qui sc^pare deux thermomelres consecutifs qui est la condition importante a remplir. Marbre statuaire blanc. — Diametre 0'",219. QuoUenls. Moyenne. 2,105 2,217 2,105 .... 2,133 2,153 2,141 2,082 Temperature de I'air, 18",04. Les quotients n'ont pas ici la meriie regularite que dans la fonte et le fer. La discordance peut tenir a un defaut d'homogeneite dans la matiere : on constate chaque jour que le marbre et loutes les pierres ne presentent pas la meme r(5- sistance, dans toutes les directions d'une meme section; elle tient aussi a ce que les cavites cylindriques etroites et profondes sont difficiles a percer dans cette espece de marbre, suivant une direction bien rectiligne. Quoi qu'il en soit, la moyenne doit etre peu t^loignee de la verite. Pierre lithographique. — Diam6lre 0'",219. Quotients. Moyenne. 2,126 2,118 2,068 2,103 2,109 2,107 2,086 2,107 J,63 Temperature de I'air 24°, 30. Pierre de Tonnerre s^ch^e pendant un certain temps dans une boulangerie. — Diametre 0"'221 Quotients. Temperatures. Exces. 540,39 . .. 30,09 45.82 . .. 21,52 39 ,97 . .. 15,67 35 ,98 . .. 11,68 32 ,79 . .. 8,49 30 ,53 . 6,23 28,94 . .. 4,64 27 ,75 . .. 3,45 26 ,93 . . . 2,63 mperatures. Exces. 50«,92 . . .. 30,70 38 ,27 . . .. 18,05 30,32 .. .. 10,10 .26,14 .. . . 5,92 23 ,71 . . .. 3,49 22 ,27 . . .. 2,05 21,48 .. .. 1,26 21 ,05 .. .. 0,83 2,260 2,373 2,295 2,283 2,317 2,285 Moyenne. 2,302 Temperature de I'air 20*,22. COSMOS. ro9 Temperatures. Exces. Quotien 530,83 . . , . 38,15 40,59 ... • 24,91 .. .. 2,20 32 ,40 ... . 16,72 .. . 2,15 26 JO . . . . 11,02 .. . 2,16 22 ,77 ... 7,09 ... 2,22 20 ,37 ... 4,69 . . . . 2,18 48,81 ... 3,13 .. . 2,27 18,09 ... 2,41 Danslapierre deTonnerre, telle qu'on I'emploie pour les constructions, la propagation d(5croissante de la chaleur dans son interieur amenait une dessicca- tion in^gale, c'est pour ne pas operer sur un corps h6terogene que M. Despretz a fait s^cher le cylindre dans toute son ^tendue avant de I'employer. Bois de sapin. — Diametre 0'",215, temperature de I'air 15",68. Moyenue. 2,19 Ces coefficients sont aussi egaux qu'ils peuvent I'etre dans une barre aussi peu homogene. Toutes les barres qui ont servi dans ces nouvelles experiences etaient couvertesd'unefeuilie de papier blanc el mince, colleesur la surface; elles etaient placees verticalement et chauffees a la partie superieure par le precede d6taill6 par I'auteur, dans son Memoire sur la propagation de la chaleur dans les liqui- des; elles avaient toutes une meme hauteur, les Ihermometres etaient places dans toutes de la meme maniere. Ayant vu la grande difference de conductibilite pour le fluideeiectrique dont I'eau jouit suivant qu'elle est pure ou qu'elle lient des corps etrangers en disso- lution, M. Despretz a voulu voir s'il en aurait ete de meme pour sa conductibi- lite thermique. L'eau pure lui avail donne 2,10 pour quotient de la division de deux exces consecutifs, l'eau contenant 37 parties de chlorure de sodium sur 997 d'eau, donna le meme nombre; et quand la dose du sel fut triplee on n'eut que 2,102, c'est-a-dire que raccroissement, s'il y en avail un , ne fut point ap- preciable. MECANIQUE. SUR LA THEORIE DE l'elASTICITE DES CORPS SOLIDES ; PAR M. LAME. En faisant hommage a I'Academie de son dernier ouvrage intitul6 : Lecons sur la theorie niathematique del'elasticite des corps solides ', M. Lame, dans la note suivante , a voulu exposer succinctement le but et les caract^res distinctifs de cette publication. II s'est propose d'etablir, avec toute la clart6 n^cessaire, les equations qui r^gissent I'elasticit^, consideree dans les corps solides ; d'en d^duire le plus simplement possible , les lois g^nerales de ce pWnomene phy- sique; enfin, de prouver que cette theorie math^matique est maintenant aussi ' Paris, Chez Bachelier, 55,quai des Augustins, volume in-8 de 335 pages. 710 COSMOS. exacte, aussi rigoureuse que la m^canique rationnelle. C'est en grande partie une oeuvre de coordination ; car les elements de la science dont il s'agit, se trou- vent disstJmines dans les Iravaux des g^omtitres de notre opoque , m(^me dans ceux d'anaiyse pure , qui souvent ont plus aide au progr6s de la physique ma- thematique, que les memoires speciaux. Voici le texte meme de sa note. « Les premiers pas de cette science, toule nouvelle, ont et6 incertains. Des discussions se sont elevces entre d'illustres g^omctres de cette Academie sur les principes poses, sur la nature des actions moli^culaires, et sur les fonctions qui peuvent les representer. Les objections et les reponses , cgalement obscures et incompletes , ont inspire des doutes sur la realite de la nouvelle theorie ; doutes que sont venues confirmer plusieurs opreuves experimentales , constatant I'in- exactitude [de certains nombres '^deduits de cette theorie. Aujourd'hui, toutes ces discussions sont sans objet, ces doutes ne peuvent plus exister, et les preu- ves experimentales serviront a faire connaitre des coefficients specifiques , que la theorie seule ne saurait determiner. Quelques developpements sont neces- saires pour justiQer ces assertions. « Un corps solide etant en equilibre d'clasticit^, si Ton imagine un plan qui le coupe en deux parties que Ton isole , chacune de ces parties s'agitera inlerieu- rement; maison conceit que son etat d'equilibre pourrait etre conserve, si Ton appliquait sur chaque dement du plan secant, une force d'intensite et de di- rection convenables. Cette force que j'appelle force elastique, est analogue a lu tension du fil que Ton considere en mecanique, ou plutdt cette tension n'en est qu'un cas particulier. La force elastique varie autour de chaque point, suivant I'orientation du plan secant, et d'un point a I'autre du milieu solide. Les lois de ces variations se deduisent^de la necessite que tout element de volume soil en Equilibre , sous I'actionj des forces elastiques , et des forces qui sollicitent la masse, y compris les forces d'inertie, si le corps se deforme ou vibre. « Mais les forces elastiques r&ultent d'une deformation, elles dependent done du doplacement moleculaire, ou des projections orthogonales de ce deplacement, lesquelles constituent trois fonctions de quatre variables en g6neral. Dans le cas d'une faible deformation, leseul que I'on doive etudier d'abord, les composantes des forces Elastiques s'expriment a I'aide des derivees partielles du premier ordre des trois fonctions dont je viens de parler. Les coefficients compris dans ces ex- pressions sont au nombre de trente-six ;|ils sont variables si le corps est hete- rogene ; constants, s'll est homogdne ; et ce dernier cas est le seul que Ton traite dans la theorie actuelle. « Le grand ifombre des coefficients donnant aux equations de I'elasticite une forme compliqu6B qui rend leur etude difficile , les g^ometres ont voulu borner leurs premieres i^echerches a des solides homogenes, dits d'elasticite constante, ou dans lesquels I'elasticite put ^tre consideree comme etant la m6me suivant toutes les directions. Partant de cette definition de la Constance d'elaslicife , et consid6rant la force Elastique comme la resultante d'aclions moleculaires en nombre infini, ils ont obtenu ses composantes par des integrations. De la sorte les trente-six coefficients se sontreduits a un seul. Mais cette simplification etait exageree. Elle s'appuyait d'ailleurs sur I'hypothese inadmissible de la continuite \ COSMOS. 711 de la maiiere dans les milieux solides, ou bicn elle supposait, graluitemenl, que les actions moleculaires qui coniposent la force elastique sont en nonibre infini. De la sont venue les doutes et les inexactitudes. « Sans faire ancune hypolhese , aucune supposition de cetle nature, sans avoir recours a aucune integration , on pent restreindre de beaucoup le nombre des coefficicients. D'abord, I'indifference relative des axes choisis diminue ce nonibre de 36 a 8 seulement ; puis , une disposition symetrique des molecules , par rapport a deux plans rectangulaires, le reduit a trois; enfin , 11 sufTit d'eta- blir une relation fort simple entre les coefTicients qui reslent, pour que les effets de I'elasticite soient independants de la position des plans de symi5lrie; c'est-a- dire par exemple , pour que le corps solide se lorde , ou qu'il s' allonge de la memo quantit6, sous Taction des m^mes efforts exterieurs, quelle que soit la direction de I'axe de torsion, ou celle de la ligne de traction. On a ainsi une definition naturelle des solides homogenes d'une 41asticite constante ; et les equations correspondantes contiennent deux coefficients, dont le rapport reste indetermin^. « Ce rapport deviendrait I'unite, si Ton avait encore recours a la m^thode defeclueuse de I'integration autour d'un point. Les experiences de M. Wertheim ont demontr6 que telle ne pouvait etre la valeur de ce rapport. Cct ingenieux physicien a cru pouvoir conclure des memes experiences que la vraie valeu ^ est 2. Mais divers motifs conduisent a penser que le rapport dont il s'agit est incommensurable , et memo qu'il varie d'un solide homogene a un autre. Dans les lecons que je publie , j'admets deux coefficients distincts au lieu d'un seul , ce qui n'amene d'ailleurs aucune complication notable dans les formules. « M. Clapeyron a decouvertun theoreme general, qui merite le nom de prin- cipe du travail des forces elastiques. Lorsqu'un corps solide est en equilibre d'elasticite sous Taction de plusieurs forces, on obtient, comme on salt, le double du travail de la deformation, en faisant la somme des produits respectifs de chaque force exterieure par la projection , sur sa direction , du deplacement relatif deson point d'application. Or, M. Clapeyron a trouve une autre expres- sion du memo travail, dans laquelle entrent, sans en exceptor aucune, toutes les forces elastiques developpees a Tinterieur du solide deforme; et c'est Tegalite de ces deux expressions diflerentes qui constitue son theoreme. Co nouveau prin- cipe sort de base a une theorie des ressorts, ot determine Ics dispositions les plus avantageuses des differentes parties de toute construction. L'ouvrage que je presente ne pouvait passer sous silence un theoreme aussi utile; il en contient la demonstration et plusieurs applications. « L'equilibre d'un fil ou d'une surface elastique ; les vibrations des cordes ou des membranes tendues, ne sont que des cas tres-exceptionnels de I'elasticite des cordes solides. Je fais voir comment ces anciens problemes doivent se ralta- cher a la nouvelle theorie, et de quelle maniere il convient de les mettre en equation. .le signale , a cette occasion, la liaison intime qui existe entre la theorie des nombres et la vibration des membranes : il faut en effet avoir recours aux formes quadratiques des nombres enliers , pour classer les sons, pour savoir a combien d'elals vibratoires differents correspond chacun d'eux , enfin , 712 COSMOS. pour assigner la forme des surfaces nodales. J'etablis ensuite lefe equations de relasticile, en coordonnees rectilignes , en coordonn6es semi-polaires ou cylin- driques, en coordonnees polaires ou spheriques, pour trailer successivement I'equilibre et les vibrations des corps de forme prismatique, la torsion et les vibrations des tiges, les vibrations des spheres et des timbres, reqiiilibre d'une enveloppe spherique et celui d'une croute planetaire. Toutes ces questions exi- geaient une nouveile etude, dans le but de reconnoitre les modifications que I'emploi de deux coefficients, au lieu d'un seul , pouvait apporler aux anciennes solutions. « Jusque-la , j'ai presenlc la lli(5orie de I'elasticile comme une science ration- neile , expliquant des faits qui ne peuvent pas dvidemment avoir une autre origine. J'ai cru utile de la considerer ensuite comme un instrument de recher- ches; ou comme un moyen de reconnaitre si telle id6e prcconcue, sur la cause d'une certaine classede phenomenes, est vraie ou fausse. Pour cela , je ne pou- vais choisir un meilleur exemple que celui du travail qui a conduit Fresnel a ses decouvertes sur la double refraction. Jo suppose done connu le fait de la non-interference des rayons polarises a angle droit , et celui de la double refrac- tion du verre comprime dans un seul sens : le premier demontre que les vibra- tions lumineuses sont transversales; le second prouve que la birefringence d'un corps diaphane depend de la diffdrence d'61asticit6 qu'il prdsente dans des direc- tions diverses autour d'un de ses points. Cette dependance semble indiquer que les molecules memes des corps diaphanes recoivent, executent et propagent les vibrations lumineuses , puisqu'une simple indgalite dans les intervalles de ses molecules modifie la lumiere transmise, au point de doubler sa route. Telle est I'idee preconcue dont il s'agit de reconnaitre la verite ou la faussete. Si elle est vraie , les etats vibratoires, que la lumiere etablit dans un corps cris- tallise, sont representes par les equations generales des petits mouvements interieurs des milieux solides homogenes. Je prends done les Equations de I'elas- ticite avec lous les coefficients au nombre de 36 , et je cherche les relations qui doivent exister enlre ces coefficients, pour qu'une onde plane de vibrations transversales puisse se propager avec deux vitesses differentes. J'obtiens ainsi les equations qui reprdsenteraient les mouvements vibratoires du milieu cristal- lise, et d'ou naitraient toutes ses proprietes optiques , suivant I'idee preconcue qu'il faut juger. « Je deduis successivement de ces equations la loi des vitesses des ondes pla- nes, les directions des vibrations et I'equation de la surface des ondes. A I'aide d'une analyse ties-simple, je demele toutes les proprietes gdometriques de la surface trouvee, telles que : ses sections principales, ses cercles de contact, ses ombilics, ses coniques spheriques et ellipsoTdales qui la decoupent en Elements rectangulaires. La generalisation de la construction d'Huyghens transforme ces diverses proprietes en lois, qui doivent regir la double refraction. La verification complete de ces lois, et surtout celle des refractions coniques et cylindriques, semble repondre affirmativement a la question posee. 1 Mais I'explication des ph6nomenes optiques des cristaux birefringents, de- duite de la construction d'Huyghens gdndralis^e, repose sur ce principe, qu'une COSMOS. 713 molecule de la surface du corps diaphane, alteinte par la lumiere, devient !e centre d'un systeme d'onde a deux nappes. II est done n^cessaire pour la verity de cette explication, qu'un pareil systeme puisse exister seul. Interrogeant de nouveau les Equations trouv^es, j'en deduis la loi des amplitudes des vibration?, et celle de leur direction auxdifferents points du milieu agit^, par un seul centre; d'ebranlement. Or, il resulte de ces lois que le centre m6me devrait ex^cuter des vibrations d'une amplitude infinie, et cela dans toutes les directions a la fois, ce qui est physiquement impossible. Ainsi I'hypothese d'une suite indefinie d'ondes progressives produite par un seul centre d'ebranlement, sur laquelle repose I'expiication des phenomcnes optiques des milieux birefringents, est compl^te- ment inadmissible, quand on suppose que ce sent les molecules ponderables qui recoivent, executant et propagent les vibrations lumineuses. De la resulte la ne- cessite d'admettre la presence du fluide ether(5 dans les corps diaphanes etd'au- tres consequences non moins importantes. » Nous ajouterons peu de chose a cette analyse de I'ouvrage deM. Lame. Inter- pelle par M. Cauchy, qui lui demandait en quoi ses resultats different do ceux obtenuspar lui, M. Cauchy, en 1830; le savant examinateur de I'ecole polytech- nique a repondu que si aucune difference essentielle n'exisle dans les resultat.-, il etait neanmoins utile de chercher, le plus possible, a presenter les applications d'une maniere elementaire. Dans une note inseree page 519 de notre Repertoire d'optique, tome II, nous disions : « J'ai emprunte a dessein cette exposition abreg^e du systeme d'Euler a M. Melloni, qui s'est raliie a ropinion de I'immortel geometre. M. Mel- loni seulement, par megarde sans doute, au lieu d'attribuer le mouvementaux particules etherees des corps, I'attribue aux molecules ponderables de la nia- tiere, ce qui me parait vraiment incroyable. Tout le monde doit admettre, il me semble, que les molecules ponderables en vibrant donnent naissance aux phe- nomenes du son et non de la lumiere. » Cette note offensa M. Melloni, qui n'ac- cepta pas la distinction sur laquelle nous avionscru devoir insister.M.Lame nous donne raison en declarant positivement que « les ondes lumineuses sont pro- duces et propagees dans les corps diaphanes par les vibrations d'un fluide im- ponderable qui nepeut etre que I'ether. » Lemons, page 328. llajoute, page 334: « L'existence du fluide ethere est incontestablement demontree par la propaga- tion de la lumiere dans les espaces planetaires, par I'expiication si simple, si complete, des phenomcnes de la diffraction dans la theorie des ondes; et comme nous I'avons vu, les lois de la double refraction prouvent avec non moins de certitude que I'ether existe dans tous les milieux diaphanes. Ainsi la matiere ponderable n'est pas seule dans I'univers, ses particules nagent en quelque sorte au milieu d'un fluide. Si ce fluide n'est pas la cause unique de tous les faits observables, il doit au moins les modiCer, les propager, compliquer leurs lois. II n'est done plus possible d'arriver a une explication rationnelle et com- plete des phenomenesde la nature physique, sans faire intervenir cet agent dont la presence est inevitable. On n'en saurait douter, cette intervention sagement conduite trouvera le secret ou la veritable cause des effets quo Ton attribue au calorique, a I'^lectricite, au raagnetisme, a I'attraction universelle, a la cohe- 7i4 COSMOS. sion, aux alBnites chimiques; car tons ces etres mysterieux et incomprehensibles ne sont, au fond, que des hypotheses de coordination, utiles sans doute a notre ignorance actuelle, mais que les progres de la veritable science finiront par d6- truner. » Nous regrettons tr6s-sinc6rement que pour M. Lame la belle theorie de la co- hesion, parM. S^guin, soil restee comme non avenue. EUe est cependant aussi certaine en elle-m6me que la theorie de la lumiere, et personne n'avait mieux pose que notre ami la distinction entre les deux sortes de molecules qui consti- tuent les corps, les molecules ponderables qu'il appelait les m, ot les molecules imponderables qu'il appelait molecules [j., comme nous le montrerons dans notre prochaine analyse de la seconde partie de ses belles recherches. ACOUSTIQUE. CONSIDER.VTION SUR LE SON , FAR M. MARLOVE. « II n'existe point de son simple; tous sans exception sont accompagnes d'un melange de sons plus ou moins apf reciables a I'oreille, variant par le norabre de ceux qui le composent, par leurs rapports respectifs et par le mode de vibra- tion qui les faitnaitre, suivant I'etendue, la forme et la nature des corps qui les produisent. De plus , si par son etendue , sa forme ou sa nature, le corps sonore peut rendre facilement deux sons de meme espece , je veux dire provenant d'un m^me mode de vibration , on n'entendra jamais le son le plus grave sans qu'il soit precede du plus aigu , excepts peut-etre le cas oil il entrerait en vibration par I'influence d'un unisson. Et s'il en peut rendre facilement plusieurs de m^me espece , les premiers harmoniques seront , comme le son fondamental, toujours precedes d'autres harmoniques d'un ordre plus cleve. « Voici la serie d'exp^riences qui m'a conduit a ces observations. Dans la se- conde edition de mon catalogue j'ai dit deux mots d'une experience fort remar- quable de M. Delezenne sur les cordes vibrantes, et des conclusions que M. Du- hamel et moi en avons tirees. Je vais retracer ici ce que j'ai dit a ce sujet en y joignantles nouvelles observations que j'ai fuites, ainsi que les conclusions que j'en ai tirees. « M. Delezenne me fit voir, en -1842 , qu'il est impossible de faire sonner une corde qu'on attaque par son milieu avec un archet. M. Duhamel a qui j'en par- lai, soupconna que dans une corde qui rend le son fondamental, le premier harmonique oscille , et que c'est parce que I'archet empeche ce mouvement quand il est au milieu de la corde et que ce son ne peut se developper. Pour verifier son hypothese, M. Duhamel essaya de faire resonner la corde a I'aide de deux archets marchant dans le meme sens et places a droite et a gauche du mi- Leu de la corde; point de son : au contraire , conservant la meme position des archets et leur imprimant un mouvement oppose avec une 6gale vitesse, le son fondamental se d^veloppa instantanement accompagne du premier harmonique. Ci.'tte ing^nieuse demonstration n'admettait pas de replique, cependant je ue COSMOS. 715 demeurai pas longtemps convaincu. Je ne pouvais comprendre pourquoi le pre- mier harmonique 6tait plus n^cessaire au doveloppementdu son fondamental de la corde , que tant d'autres harmoniques d'ordre superieur qu'on entend ordi- nairement pendant loute la dur^e du son. Alors, suivant I'usage, j'abandonnai roreille pour avoir recours aux yeux. J'essayai, sur le monocorde a table noire de Savart, de faire rendre a la corde le son fondamental , en I'attaquant avec I'archet pres du milieu. J'y parvins et je vis , en etTet , deux cordes ayant un na3ud de vibration a leur milieu. M. Duhamel avail encore raison. « Je I'attaquai ensuite successivement pres des autres divisions harmoniques pour en tirer toujours le son fondamental. Alors, en I'attaquant pres du tiers de sa longueur, je vis trois cordes ayant chacune un noeud de vibration au tiers de cette longueur. En I'attaquant pres du quart j'en vis quatre ; pres du cinquieme j'en vis cinq et ainsi de suite. Abandonnant alors eel instrument qui n'a pas de son, pour me servir de mon sonometre differentiel cl en appeler au jugement de I'oreille, je reconnus effectivement qu'en allaquant la corde pres du tiers de sa longueur, on entend avec une intensite presque egalo la douzieme el le son fondamental. Qu'en I'atlaquant pres du quart, on entend la double octave; pres du cinquieme, la dix-seplieme majeure, etc. Et ce qu'il y a de remarquable, e'est que I'harmonique precede toujours le son fondamental. « On voit done d'apres cela que I'harmonique oblige qui accompagne le son fondamental n'est pas toujours ie premier, mais bien celui correspondanl a la division la plus voisine du point d'altaque. De la il resulte qu'une corde parfai- tement libre de toute influence ^trangere ne peat resonner sous Taction de I'ar- chet, non-seulemenl quand on I'attaque par son milieu , mais encore quand on I'atlaque sur I'une quelconque de ses divisions harmoniques, ainsi qu'on peut le "verifier sur mon appareil pour vibrations longitudinales des cordes. « Tout ce qui vient d'etre dit relativement a remission du son fondamental d'une corde qui vibre transversalement est applicable aux harmoniques , au moins dans les limites du possible, c'est-a-dire que toutes les experiences failes sur la corde entiere rendant le son fondamental peuvent se repeter sur une par- tie de cette corde rendant un son harmonique ; seulement les phenomenes seront moins sensibles, par la raison que les parties de la corde qui reslent libres in- lluencenl plus ou moins celle qu'on allaque, etque, d'ailleurs, les sons sontd'au- tant moins appreciables a I'oreille qu'ils sent plus aigus el plus faibles. Ainsi , par exemple , si Ton essaye de faire sonner le premier harmonique d'une corde, meme isolee autant que possible, comme celle de I'appareil pour vibrations longitudinales , en allaquant I'une des deux moities par son milieu avec I'ar- chet, pendant que de la main gauche on louche legerement du bout du doigt le milieu de la corde entiere, au lieu de n'entendre aucun son comme dans le cas precedent, on enlendra un peu cet harmonique, quoique mal arlicule, parce que I'autre moitie de la corde restant libre , hen ne s'opposera a sa division , sinon en deux, au moins en trois, et par consequent elle pourra sonner tant bien que mal. « De meme si Ton allaque I'une des moities de la corde pres de son milieu pour la faire resonner, il n'y aura pas de raison pour que le premier harmonique 716 COSMOS. soil plutbt accompagn6 du second que du troisi^me, puisque rien non plus ne s'oppose a ces divisions dans la seconde moilie de la corde. Mais quelles que soient les circonstances qui favorisent le developpement de ce son , jamais on ne I'entendra sans qu'il soit pr6ced6 et accompagn6 d'un harmonique plus aigu , et il en sera de memo a I'egard du troisi6me , ainsi que des autres harmoniques d'ordres plus Aleves, tant que les sons seront perceptibles a Toreille. « En voiia assez sur ce sujet. II me suffit ici d'avoir demontr6 qu'une corde qu'on attaque transversalement ne peut sonner qu'a la condition qu'elle pourra rendre au moins deux sons transversaux , dont le plus aigu d^pendra du point d'attaque ou du mode d'ebranlement. « Toute corde qui vibre transversalement entre deux points fixes vibre en m6me temps longitudinalement; cela est Evident puisqu'elle ne peut devier de la ligne droite sans s'allonger, ni revenir a la ligne droite si elle'en a d^vie, sans se rac- courcir. Le son qui en resulte est generalement peu sensible dans les instru- ments de musique, mcme dans le sonomfetre, parce que le chevalet ne pouvant arreter lemouvement vibratoire longitudinal, il se transmet a la portion de la corde qui le d^passe , ce qui rend le son tres-variable et I'empeche de se d^ve- lopper. II est cependant queiquefois reconnaissable , quoique tres-defigur6, dans le la du violoncelle , comme le savent fort bien , sans trop s'en rendre compte , ceux qui apprennent a jouer de cet instrument. C'est ce son qui , lorsqu'il est bien articule, est connu, en terme de I'art, sous le nom de canard. « Lorsque la corde, au contraire , vibre entre deux points fixes comme celle montee sur I'appareil pour vibrations longitudinales, alors, soit qu'on I'altaque avec I'archet , soit qu'on la frappe , le son longitudinal accompagne le son transversal pendant toute sa duree, et, si Ton prete I'oreille, on enlendra ega- lement le son longitudinal de la moitie de la corde si Ton fait sonner transver- salement le premier harmonique. « Independamment de ces deux modes de vibrations diffi^rents, toute corde qui vibre transversalement en execute un troisi6me inseparable des deux autres. « Que Ton accroche vers le milieu d'une corde une petite boucle en fil de laiton tr6s-fin , ayant la forme d'un 8 , portant a I'un de ses anneaux un petit pavilion en papier, tandis que I'autre enveloppe la corde sans la serrer, et qu'on fasse ensuite vibrer la corde transversalement, soit avec I'archet, soit en la frappant aussit6t on verra le pavilion tourner avec une extreme rapidity, puis revenir sur lui-meme pour tourner en sens contraire et changer ainsi dix ou douze fois de direction s'il est construit avec 16g6ret6. Et pour observer ce phenomene, il n'est nullement necessaire de tirer le son fondamental de la corde, le pavilion tournera de la meme maniere au milieu du ventre de vibration du premier, du second et mSme du troisieme harmonique; et si, au lieu d'un pavilion Ton en met deux, on remarquera que lorsqu'ils seront places sur deux divisions cons6- cutives, ils tourneront en sens opposes. « Or, evidemment pour que ceci ait lieu, il faut que la corde en vibrant prenne un mouvement de rotation , puisque le pavilion tourne , et que ce mouvement de rotation soit determine par un mouvement de torsion , puisque le pavilion change periodiquement de direction. I COSiMOS 717 « De tout ce qui vient d'etre dit sur les cordes, il resulte qu'une corde qui viijre transversalement execute forcement au nioins quatre mouvemenls de vibration differents : deux transversaux , comme je I'ai demontre plus haut, un longitu- dinal et un de torsion rotatif alternatif. Ajoutant maintenant a ceux-ci les diffe- rents mouvements de vibration accidentels provenant de diverses transforma- tions, c"est-a-dire ceux qui donnent naissance a cette multitude d'harmoniques de toute espece qu'on entend toujours quand la corde est un peu longue, on reconnaitra qu'une corde de moyenne longueur qui sonne transversalement, pent souvent executer simultanement dix a douze mouvements de vibration differents. a Si le concours simultane de plusieurs mouvements vibratoires difTerents est indispensable a la production du son dans une corde, ce concours ne parait pas moins necessaire a la production du son dans un corps quelconque, quelles quo soient sa nature et sa forme ; car depuis huit ans que je cherche partout un son simple, je n'en ai encore trouve nuUe part : tous les sons que j'entends sont precedes et accompagnes d'un ou de plusieurs harmoniques provenant d'un meme ou de plusieurs modes de vibrations differents, dont les relations avec le son principal varient suivant la nature et la forme du corps vibrant, et souvent aussi suivant le point d'attaque et le mode d'ebranlement. Cost de la que provient principalement cette variele de timbres qu'on remarque dans le son que pro- duisent les corps differents de forme ou de nature, ainsi que la difference qui existe souvent dans le timbre d'un meme son produit par un m^me corps, atta- que par divers points, ou mis en vibration par differents moyens. Dans les corps solides, un son produit par un choc a rarement le meme timbre que le meme son produit par un archet, parce que Taction continue de I'archet empeche souvent certains harmoniques de se developper spontanement par des transfor- mations de mouvements, tandis qu'il en determine d'autres qui persistent pen- dant tout le temps que Taction dure, ainsi qu'on en a eu un exemple dans les cordes. Dans les colonnes d'air qui ne font entendre que des harmoniques, comme dans le cor, la trompette, le trombone, et tous les instruments a piston, le timbre est tres-different de celui qu'on remarque dans les colonnes d'air qui rendent le son fondamental, comme dans la ffiite, la clarinette,Tophicleide, etc. : d'abord parce que Tembouchure a une grande influence sur le timbre, et ensuilo parce que, dans le premier cas, les vibrations ne sont que longitudinales, tandis que, dans le second, elles sont mixtes, comme on le verra plus tard ; conse- quemment un meme son pris dans deux cas dilTerents peut ne pas etre accom- pagne des m^mes harmoniques. « Ainsi done , quand on voudra connattre les divers mouvements vibratoires coexistant dans un corps vibrant, et qu'on n'aura que Toreille pour juge, il faudra necessairement tenir compte de la maniere dont les vibrations seront excitees. II serait necessaire aussi d'avoir pour experimenter, un lieu parfaitement appro- prie a ce genre d' observation, et dont toutes les circonstances acoustiques se- raient bien connues. Les questions sur le son sont deja si complexes en elles- memes, qu'on ne saurait trop prendre de precautions pour empecher, aulant que possible, qu'aucune cause perturbalrice ne vienne encore compliquer le pb^nomene. 7i8 COSMOS. « En exporimentant dnn? line cliambre, j'ai souvent observe qu'une double re- flexion suffit pour produire des baltements avec un son ou avec un de ses har- moniques, de manicre a faire soupoonner deux sons presque identiques la ou it n'v en a qu'un. « J'ai reconnu aussi qu'une certaine intensity de son d'un harmonique trans- versal peut ctre attribuce a des vibrations longitudinales, alors que cotte inten- sity n'est due qu'a une coincidence de vibrations entro cat harmonique et nne subdivision de I'air ou de tout autre corps contenu dans la chambre. « II arrive encore qu'on croit faire sonner I'air contenu dans une caisse, tandis qu'on ne fait sonner qn'un harmonique de la chambre ; ou bien qu'en cherchant a imprimer un mouvement vibratoire a un corps solide ou liquide, on determine dans une masse d'air contigue un son tolalement dilTerent de celui qu'on croit entendre. « Tres-frequemment aussi on est expose a laisser echapper beaucoup de sons faibles, qui seraient tres-appreciables a I'oreille si elle n'etait sans cesse troublee rt incommodee par le bruit cxterieur qu'on croit ne pas entendre parce qu'on I'entend toujours. « Cependant qu'a-t-on fait jusqu'a present pour prevenir ces causes d'erreurs et celles de tant d'aulres qui probabiement sent encore inconnues? Rien, que je sache. II semblerait menie qu'on n'y aurait pas pense. On exp^rimente indif- feremment dans un lieu ou dans un autre, ce qui, a vrai dire, importe assez peu, puisque sous le rapport acoustique on n'en connalt aucun. Eh bien , je demande si avant de vouloir penctrer plus loin dans ce labyrinthe d'erreurs et de decep- tions, il ne seraitpas raisonnable de retourner en arriere, do faire comme si on croyait ne rien savoir concernant le son, et commencer une etude serieuse de tons les phenom^nes que peut ofFrir le son repandu dans un espace limite ou in- defini, transmis librement par I'air ou a traversun obstacle soit solide, soit liquide, r^dechi partiellement ou totalement, etc., non-seulement au point de vue scien- tifique, mais encore au point de vue pratique, puisque la fin de toule science doit etre I'application ? N'est-il pas a desirer, en effet, de voir cesser le spectacle humiliant pour la science, de toiites ces lentatives infructueuses ou ridicules qu'on fait chaque jour en architecture pour remedier a des defauts d'acoustique qu'on n'a su ni eviter ni prevoirl N'est-il pas deplorable de voir qu'en Europe il n'existe pas une chambre parlementaire ou une salle d'audience passable, qui ne soit due au hasard ! Ce n'est pas, qu'on le sache bien, I'ignorance des arcbi- tectes que j'accuse, il leur est bien permis d'ignorer ce que les savants ne soup- connent pas. Je ne reprocherai pas non plus aux musiciens d'entasser une masse d'artistes dans une salle qui leur est inconnue, en vue d'annihiler par un volume de son qu'ils n'obtiennent pas, les defauts presumes d'une salle faite au hasard : non, ils sent bien assez malheureux d'etre oblig6s d'entendre jusqu'a la fin le charivari qu'ils essayent d'harmoniser. « Ce seniles savants qui sont responsables de la plupartde ces sottises, puisque c'est de la science que I'art attend toute lumiere. Aussi, c'est a eux que je m'a- dresse pour appuyer une demande que je ne fais pas, parce que je n'en fais au- cune, mais qui, je pense, serait favorablement accueillie par le Gouvernemenf^ COSMOS. 719 si elle lui etait adrossee, et appiiyee par les pliysiciens eminents qui honorent la France. » PROJET d'etudes coxcernant l'acocstique des salles publiques. « Le moyen que je propose, sauf meilleur avis, pour essayer de resoudre les questions d'acoustiqiie concernant les monuments publics, ainsi que beaucoup d'autros qui tiennent aujourd'hui la science en echec, consiste a faire construire, dans un lieu convenablement choisi, une chambresourde et muette, c'est-a-dire, line chambre dans laquelle aucun son ne pourrait penetrer sans la volonte de Texperimenlateur, et dont les parois interieures seraient d'abord revetues de mani^re a ne reflechir aucun son. S'il etait possible de satisfaire a cette condi- tion, ce qui ne me parait pas douteux, il est evident que cette chambre n'aurait aucune sonority, puisque I'air interieur vibrerait comme dans un espace sans limites, et consequemment son role se bornerait a celui de vehicule du son. La, exempt de tout bruit, de toute rdtlexion, en un mot de toute perturbation, ce qui serait entendu serait connu. « Passant aux recherches concernant la transmission et la reflexion du son dans un espace limite, on s'assurerait d'abord que dans Fair de la chambre ainsi pre- paree il ne se forme, au moins d'uno maniere sensible, aucun noeud de vibration. Puis, dogarnissant le plafond, que je suppose plat , pour obtenir un plan reflec- teur, on chercherait dans I'air la position des nneuds de vibration, qui peut-etre y determineraient dilferents sons produits en divers points de la chambre, et Ton reconnaitrait, chemin fuisant, que le son portc plus loin avec le plafond reflec- teur que dans le cas precedent. On degarnirait ensuite le sol et successivement les quatre murs lateraux, en observant a chaque nouvelle modification les noeuds produis dans Fair par les memos sons partant des memos points, et notant avec soin Fetat des choses au moment ou le son commence a perdre sa purete, c'est- a-dire au moment ou le son commence a roster dans I'espace, apres la cessa- tion de la cause qui Fa produit; car, pour qu'un son soit distinct, il ne sufiSt pas qu'il paraisse intense, il faut avant tout qu'il soit net, surtout dans la parole. « On r^tablirait de nouveau toute chose comme dans Forigine , moins le plafond qui resterait degarni et qu'on baisserait de la moitie de sa hauteur primitive (c'est-a-dire qu'on en construirait temporairement un second qui n'aurait besoin que d'une resistance moyenne) : la on remarquerait, d'abord, qu'a egale dis- tance, les memos sons paraissent plus nets et plus distincts que lorsque le pla- fond etait plus eleve, ee qui doit etre, puisque le son refl^chi parcourt un espace moindre a cause de I'incidence qui est plus grande, et que, par cette memo cause, la reflexion est plus complete. On rep^terait ensuite les experiences faites dans le cas analogue pour la determination des noeuds de vibration , puis on re- degarnirait successivement le sol et les murs lateraux suivant le memeordre que precedemment, et en repliant toujours a chaque nouvel etat de choses la serie d'experiences faites dans le cas semblable. « Nul doute, qu'apres ce premier travail on no connaisse parfaitement toutes les circonstances acoustiques d'un espace prismatique rectangulaire a parois 720 COSMOS. d'une resistance infinie. du moins pour des sons dont I'intensite et r(5tendue de I'onde sonore n'exc^dont pascelles de la voix liumaine. n Que dans cette chanibre on en construise niaintenant une seconde a parois minces, distantes de cinquante centimetres des miirs de la premiere, pour Ten Jsoler complctement et permettre une libre circulation entre les parois des deux chambres pour les observations qu'il y faudrait faire. « Qu'on recommence dans cette nouvelle sallo , oil les reflexions ne seront plus que parlielles et confuses, la serie d'experiences faites pr6cedemment dans I'au- tre, en notant la longueur qu'a I'onde sonore et I'intensite qu'a le son quand il cesse d'avoir toute la nettet(5 desirable ainsi que I'inlluence que peut avoir le revetement des murs de la premiere chambre sur la seconde, et en un mot toutes les observations qu'une telle situation donnerait occasion de faire. « Apr63 ce second travail il resteraita etudieravecsoinl'influencequepeuvent exercersur I'etat acoustique d'une salle les courants d'air froids ou chauds , sees ou humides provenant de tel ou tel point de la salle, ainsi que I'influence des ouvertures, de leur situation, de la nature et de la resistance des parois qui les ferment, et enfin de celles des objets mobiliers, etc. Mais la plupart de ces etudes pourraient etre faites a peu de frais et presque partout, puisqu'o'n poss^derait des donneescertainesqui permettraienttoujoursdedire : Si telle salle n'^tait pas percee , eile serait telle; si telle autre n'elait pas meublee, elle serait ainsi , etc. « J'aurai probablement a regretter de n'elre pas entre dans plus de details , de n'avoir pas parle d'une foule d'experiences a faire sur la reflexion sous diffe- rentes incidences produites par des surfaces polies ou brutes, de n'avoir rien dit du rapport qui doit existcr entre la resistance du plan reflecteur et la longueur de I'onde sonore, enfin de n'avoir pas donne assez de d^veloppement a ma pens^e pour faire sentir toute I'importance de ma proposition, tant au point de vue scientifique qu'au point de vue pratiqne. Peut-etre memeaurai-je a regretter de n'en avoir pas dit assez pour etre clair ; mais je suis deja bien loin de mon sujet. » Les quatre notes de M. Marloye, que nous avons ete si heureux d'inserer dans le Cosmos, forment une sorte de preface a la troisieme edition de son ca- talogue d'instruments d'acoustique. A nos yeux , ces notes sont de petits chefs- d'oeuvre, des modeles du genre, comme, au reste, le catalogue entier, le meilleur de tous les resumes de la science des sons. On y trouve tout I'expose des ph^nom6nes , I'enonce des lois, la description des appareils et le mode d'ex- perimentation. PHYS QUE APPLIQUEE A LA MEDECINE. BUSC AIMANTE DE M. NICOLE. Un jeune docteur en philosophie, M. W. Beetz, nous a adresse tout re- cemment un discours inaugural, lu Ic 4 3 mars dernier dans la seance an- nuelle de ['Association scientifique d'Allemagne, et dans lequel il esquisse a grands traits I'histoire du magn^tisme, sa theorie, les decouvertes dont il a il6 I'objet, ses applications si pleines d'avenir, etc., etc. M. Beetz a su condenser en quelques pages la matiere d'un gros volume, et COSMOS. 721 nous regrettons de ne pouvoir transmettre a nos lecteurs la traduction complete de sa brillan te dissertation. II analyse et raconte tout, depuis las vieilles anecdotes du raoyen age jusqu'aux recherches les plus abstraites des physiciens de nos jours, d'Ampere et de Faraday. Parnii les proprietes merveilleuses attributes par nos peres a I'electricite et au magnelisme, il faut placer au premier rang celles dont Gilbert et Paracelse se sont faits les echos. Gilbert et Paracelse sont deux grands noms et deux grands maitres. Or, Gilbert affirme qu'une pierre d'aimant ou un barreau aimante deiivre celui qui le porte presque instantanement des inquietudes et des douleurs des pieds etdes jambes, ainsi que d'autres infirmites designees sous le nom vague de maladies nerveuses. Paracelse rapporte serieusement comme un fait constate de son temps qu'un anneau ou bague d'ambrejaune met a I'abri des attaqiios de paralysie, d'apoplexie et meme d'epilepsie. Le temps n'est plus oil Ton elait force de jurer in verba magistri! Mais voici bientotdeux ans qu'un homme excellent et parfaitement honorable, M. Nicole, vint nous voir les mains pleines de buses aimaiitees avec lesquels, disait-il, il operait des cures veritablement merveilleuses. En notre qualite de physicien, nous nous primes presque a sourire de cette etrange pretention, et M. Nicole nous quitta lecoeur grosde tristesse. Nous ne Tavions cependant pas decourage complelement. « Puisque le nombre des personnes gueries par vous est deja si grand, lui disions-nous, suivez les regies ordinaires de la prudence, faites constater par un medeein consciencieux leur etat anterieur, et I'amelioration si notable produite par le traitement magnelique; quand le nombre des obser- vations ainsi recueillies sera assez considerable, presentez vos buses a I'Aca- demie des sciences, en meme temps que le medeein qui vous aura prete son appui deposera son memoire; alors, mais alors seulement, nouspourrons con- sentir a nous initier a vos incroyables cures, a les constater par nous-memes, et a proclamer en presence de faits irrecusables votre bonheur et vos succes. » Nous le dirons en toute franchise: nous etions grandement incredules, et nous esperions que I'impossibilite oil serait M. Nicole de rencontrer un medeein qui vouliit I'ecouter et se preter a de si etranges verifications contribuerait efTica- cement a I'arracher a ce qui nous apparaissait comme une innocente, mais profonde illusion, et que nous n'entendrions plus parler des buses magnetiques. Qu'on juge done de notre surprise quand nous avons appris par les ComiAes rendus de 1' Academic des sciences qu'un jeune medeein de talent, M. Victor Masson, fils d"un praticien distingue, qui doilpar consequent entourerde respect le nom honorable de son p6re et ne pas se compromettre aux debuts d'une car- riere difScile, avait depose un memoire en regie sur I'emploi medical des buses magnetiques, avec le recit circonstancie de vingt-quatre guerisons authcnti- quement constatees par lui. Fier de ce premier triomphe, et le memoire de M. Masson a la main, M. Nicole revint nous sommer d'accomplir noire promesse. Nous aurions pu nous echapper encore par une porte de derriere, et ajourner tout exa- nien jusqu'a I'apparition du rapport de la commission de I'Academie, com- posee de MM. Magendie, Serres, Andral et Pouiilet. Mais c'evit ete renvoyer 722 COSMOS. M. Nicole aux calendes grccques, car clix ans ct plus s'(5couleront avant que la commission pcnse meme a se rassembler et conscnte a voir, a entendre et a juger. Pour ellc, sans doule, et nous comprenons ccltc disposition d'esprit, le busc magnelique do il. Nicole et les observations do M. Masson sont une veri- table mystification : si nous nous (5tions obstine a la suivre dans cette voie de defiance absoluc el dc repulsion, nous aurions portc iin coup mortcl a la sante ou a la raison de M. Nicole. Qu'un barreau aimanle simplement maintenu sur la face anterieure du tronc produise sur les organes, les membranes et les fluides du corps Immain, une action assez onergique pour retablir un equilibre depuis longtemps rompu, et ramener a Telat normal des functions depuis longtemps troublees; c'est diCBcile a croire, nous I'avouons, pour un physicien surtout, qui ne voit en aucune ma- niere comment faire, dans ce cas, I'application de ses theories. Mais enfin, qui oserait dire que c'est completement impossible ct tellement absurde qu'on doive le repousser comme une extravagance et chasser impitoyablement I'inventeur honnete et le medecin consciencieux qui osent parlor de guerisons obtenues par un semblable moyen? Nous avons dit barreau aimante, car le busc magnetique de M. Nicole est une forte lame d'acier trempee, mais recuite, pour qu'elie ne soit pas cassante, aimant^e par les procedes ordinaires, pr^sentant a ses extremites deux p61es ou centres d'action magnetique assez puissants pour attirer et maintenir suspendu un poids de 75 grammes pour les buses faibles, de 1 50 grammes pour les buses forts. L'allraction des poles s'exerce, comme nous 1' avons constate, a travers un bloc de marbre de plus d'un pied d'epaisseur, et a travers le corps, car I'aiguille d'une boussole placee a une certaine distance du dos est tres-fortement dcviee sous rinfluence du busc. II est certain par la meme qu'il u'est pas dans la poi- trine un seul point ou le magnetisme du busc ne puisse agir ; et s'il est vrai, comme les rechorclies de MM. Faraday, Becquerel, Pliicker, etc., Font demontrd jusqu'a I'evidence, que toutes les substances de la nature sont magnetiques, soit magnetiques a la facon du fer ou paramagnetiques; soit magnetiques a la facon du bismutli oudiamagnetiques; ne serait-il pas temeraire ou meme derai- sonnablc de s'insurger centre une action reelle du busc aimant(5 sur les fluides, ponderables ou imponderables, et sur les matieres solides du corps? Cette action, au contraire, est necessaire, incontestable, quoiqu'il soit impos- sible d'expliquer comment elle se produit et comment elle s'exerce, d'evaluer a priori son intensite, de prevoir seseffets, etc., etc. Fut-elle infiniment petite, que sa conlinuite pourrait I'amener a un degr6 d'efficacite tres-appreciable. Est-ce que Taction sans cesse repelee de la pesanteur ne finit pas par donner au corps le plusl6ger, qui tombe dans le vide, une vitesse excessive? Est-ce que la coutte (♦'eau qui tombe incessamment ne finit pas par creuser le pave ? Est-ce que la tige si faible des cereales ne finit pas par fendre la terre la plus s6che et la plus condensee? Est-ce quo la tari6re si moUe d'un insecte ou d'une chenille ne finit pas par leur donner acces au seiu des bois les plus compactes? Est-ce (jue Textrcmite si cassante de lacoquille des pholades ne finit pas par lour ouvrir COSMOS„ 723 une demeure dans les rochers les plus durs? Patience ct longueur de temps font plus que force ni que rage. Mais la question n'est pas la , elle est tout entiere ailleurs. Ne parlous pas theorie, puisque la theorie se recuse elle-ni^me , ou hausse les epaules : parlous do I'applicalion pratique, juge souverain niemc des theories les plus savantes et les plus salisfaites d'elles-memes. De faitf le busc ainiante a-t-il produit et pro- duit-il encore chaque jour des effetspropres, ou sui generis, et inconlestables, des guerisons averees et irrdcusables? Oui, repond sans hi^silation M. Masson : « I'inventeur, en distribuant lui-m^me ses buses a des malades pris au hasard, est parvenu a me metlre en possession de preuves certaines de leur efficacile dans un grand nombre de cas d'affections nerveuses, d'inflammation des en- trailles, de gastrites, etc. ; apr6s avoir douto moi-meme, j'ai ete lieureux de voir ce mode de medication reassir entro mes mains la oii tous les autres movens avaient echoue. J'ai eu soin d'ailleurs de clioisir pour les observations queje voulais soumettre aujugement deTAcad^mie celles dans lesquelles lessympto- mes de la maladie etaient si saillants et si faciles a caracteriser par les malades et par les personnes qui les entourent, que leur disparition fiit un fait eclatant. » Citons quelques exemples. « -l" M"'= Renaud, femme d'un mouleur, rue Popincourt, 2, souffrait a la base de la poitrine et a I'epigastre. Les digestions etaient mauvaises, elles s'accom- pagnaient de renvois et d'eructations presque continuels; elle fit usage d'un buscaimante : aussitot les eructations disparurent : elle quitla son busc pendant deux jours, Tinfirmite revint; elle le reprit, et depuis co moment la gucrison est complete, les digestions sont aussi bonnes qu'on pent le souhaiter. « 2° M--^ Debu, rue du Pont-de-la-Reforme, 12, vomissaitsouvent ses repas et m^me du sang; elle eprouvait de violents maux d'estomac et une doiileur fixe dans le dos. Depuis qu'elle porte un busc aimante elle ne vomit plus, sa sante est retablie; elle est meme devenue mere apres onze ans. 0 3° M"'' Power, dame anglaise, d'une constitution robuste en apparence souffrait de douleurs intermittentes, qui revenaient trois ou quatre fois par jour! Ces crampes, qui prenaient toute I'epaule jusqu'a laparde posterieurede la t^te, causaient une telle souffrance que pour les evitcr M"- Power tordait son cou et son propre corps d'une maniere tr6s-fatigante ; elle eprouvait de plus une oppression si forte qu'elle n'avait pas le courage de monter I'escalier de son appartement. Un busc fort a fait disparaitre ces douleurs et cette g^ne. (Nous connaissons particulierement M. Power, nous avons rendu compte, dans le temps, de sa belle Industrie d'argenterie sur verre , il nous a souvent atteste la y^r'M de I'observation de M. Masson ; M'"' Power, de son cote, nous parlait avec enthousiasme des heureux effets de son busc.) « i" M""^ Angis, de Cernaux (Haut-Rhin), avait fait plusieurs voyages a Paris pour demander aux sommites medicales la guerison d'une affection nerveuse tres- extraordinaire de I'estomac et des intestins. On voyait d'une maniere apparente au travers des parois de I'abdomen des grosseurs du volume du poing environ parcourir le ventre en divers sens, et ces mouvements etaient accompagnos de douleurs intolerable;' L'application du bu;c aimante fit ces.-er imnKdiatement 724 COSMOS. cetle mobility si singuliere et si rebelle ; et en moins de trente jours la malade fut tout ii fait guerie de I'afTection gastrique qui la tourmentait tant. « 5° Un menuisier, demeurant impasse Guemen^e , n" 8, age de 56 ans , etait aftlige depuis 20 ansd'uiie diarrliee opiniatre qui le forcait a sorlir douzc et quinzc fois par jour de I'atelier et le rendait insupportable aux maitresqui Toc- cupaicnl; ses digestions elaient si maiivaises et il vomissait si souvent ses repas, qu'il avail presque horreur des aliments et ne pouvail se resoudre qu'a faire un scul repas le soir ; il ne dormait presque pas la nuit; ses insomnies et ses infirmilfe lui rendaient la vie odieuse; il avait d'ailleurs essaye en vain tous les remcdes. 11 accepta un busc aimante et le porta sur sa poitrine suspendu a un cordon ou engaine dans son gilet. Au bout de quelques jours, il sortait deja moins souvent de Tatclier ; une semaine n'etait pas ecoulee, que ses digestions etaient deja bonnes; et au bout d'un mois, tous les phenomenes de la gaslro- enterite avaienl disparu , la sante etait revenue avec un appetit tres-developp^, un sommeil excellent, et il n'etait plus force d'interrompre son travail. » Nous avons vu ce menuisier ; il nous a raconte sa maladie et sa guerison. Craignant que cette irritation excessive des intestins ne fut due a Tabus des liqueurs alcooliques, et qu'elle n'eut cMe qu'au retour a la temperance, nous lui avons demande si vraimcnt sa guerison ne devait pas etre attribuee a un chansement de regime. II nous a affirme que ce changement de regime n'avait pas eu lieu, qu'il n'avait pas d'exces a se reprocher, et qu'il avait continue a boire toujours la meme quantite de vin et d'eau-de-vie. Le recit de ce brave homme nous a vivement impressionn^ ; I'effet du busc a 6te pour lui une resur- rection veritable. Nous pourrions multiplier les exemples a I'infini, mais c'est tropdeja; et il ne nous reste plus qu'a conclure. L'action therapeutique et bienfaisante de I'electricite et du magnetisme dans un grand nombre de maladies n'est plus revoquee en doule; I'extension, refficacit^ plus grande de cette methode cura- tive, sont meme un des objets du plus grand prix institue par le Prince President de la Republique. On a d'abord employe I'electricite ordinaire de mille manieres diflerentes ; on I'a remplacee plus tard par I'electricite voltaique , puis par les courants electro-magnetiques, et nous avons vu nailre tour a tour les appareils de MM. Pixii, Klarke, Breton freres, Duchenne de Boulogne, Deleuil, etc., les chaines galvano-electriques de Goldberger, les chaines voltaiques de M. Reca- mier, etc., le lissu magnetique de M. Paul Gage , etc. M.' Nicole nous ramene au vieux barreau aimantd, le plus simple evidemment de tous les appareils magnetiques. 11 est toujours pret a fonctionner, il ne cause aucun ennui , il coute peu ; sa puissance physique est manifeste a tous les yeux puisqu'il attire de 150 a 300 grammes de fer ; son action m^dicale nesemble pas pouvoir etre revoquee en doute, apres ce que nous avons vu : elle est prompte et energique dans le cercle des affections nerveuses ou gastralgiques. I DE L'lMPRlMERIE DE CH. LAHIRE ( ANCIENNE MAISON CRAPELEX), rue de Vaugirard, 9, pr6s de I'Odeon. I