Digitized by the Internet Archive in 2010 with funding from University of Ottawa http://www.archive.org/details/delmigrationde00bram sé Lis ee DE L'ÉMIGRATION CAMPAGNES EE A CRE RS PO PES A + A MO TP ÿ* * » £ | Hé ‘ 384 L2 w . » l ds + 4 Fe = e TE + Vin x . - cape ru : ‘ \ “ É + j ÿ | x: pe à LOL ; +: : pa A Pan, à j Le ‘ + É té: | bus a S re ; LA k . À “ So (ll » . 0 = \ L) à (l \ lt ï , : Ÿ ; . ol L \ ‘ . 4 Le P à ‘ Nr de 2 » y [Y% AT porn : A ? A À » n Q L « nl À » t * DE 6 L'ÉMIGRATION DES CAMPAGNES Par Jules BRAME, DÉPUTÉ DU NORD. Remettez en honneur le soc de la charrue, Repeuplez la Campagne aux dépens de la rue, Grevez d'impôts la ville et dégrevez les champs; Ayez moins de bourgeois et plus de paysaus. Émire Aucien. La Jeunesse (Comédie). 2m ÉDITION. EN VENTE : A LILLE, | A PARIS, CHEZ BÉGHIN, LIBRAIRE, | CHEZ MAILLET-SCHMITZ, rue de la Grande-Chaussée, 26 bis. | Libraire éditeur, 15, rue Touchet. 1859. en France. : = Er = 28 + [. Mouvement de la population en France. Remettez en honneur le soc de la charrue, Repeuplez la campagne aux dépens de la rue, Grevez d'impôts la ville et dégrevez les champs ; Ayez moins de bourgeois et pius de paysans. () Êize AuGiER. La Jeunesse (Comédie). L'émigration des habitants des campagnes vers les villes, et des villes vers la capitale, est () Le mot Paysan veut dire villageois, campagnard =, ‘8 assure-t-on, beauconp plus considérable de nes jours que dans le passé. Ainsi, d’après M. de Lavergne, l’un des membres les plus distingués de l’Académie des sciences morales et politiques, qui s’est occupé de relever les chiffres du dernier recensement (1856), ce phénomène d’émigration aurait pro- duit les faits suivants : Cinquante-quatre départements sur quatre- vingt-six, ont vu leur population diminuer au habitant le pays, conne bourgeois et citadin signifient habitant du bourg, de la cité ou de la ville ; paysan veut dire encore travailleur de la campagne. On doit s’hono- rer de ce titre; les ignorants seuls lui ont donné une signification qu'il n'a jamais eue. ro lieu de s’accroître et quatre sont restés à peu près stationnaires. Sur ces cinquante-quatre où la population a baissé, trente ont perdu plus de 5,000 âmes chacun, et sur ces trente, on en compte seize qui ont perdu plus de 10,000 âmes. La diminution a été surtout sensible dans un groupe de départements formant l’angle nord- est du territoire: Haute-Saône, Meurthe, Bas- Rhin, Meuse, Vosges, Jura, Côte-d'Or, Yonne, Haute-Marne, Doubs, Ardennes et Moselle ; ces douze départements appartenant aux anciennes provinces de Lorraine, Alsace, Champagne et Bourgogne, ont perdu ensemble plus de200,000 habitants. Dans celui de la Haute-Saône, le plus éprouvé de tous, la perte ressemble à un véritable dé- sastre, la population ayant diminué de 36,000 âmes sur 947,000, c’est-à-dire un dixième. — 10 — Un second groupe composé de six départe- ments qui avoisinent Paris, paraît avoir payé un large tribut à l'augmentation de la popula- tion parisienne; il comprend : le Calvados, la Manche, l'Orne, l'Eure, l'Oise et la Sarthe. Ces départements ont perdu près de 55,009 ha- bitants. A l'extrémité de la Bretagne, le Finistère, les Côtes-du-Nord et le Morbihan, ont diminué de 26,000 âmes. Dans le centre, le Puy-de-Dôme, la Creuse le Cantal et la Corrèze, ont également perdu 26,000 âmes. Au midi, le département de l’Arriège, a subi une réduction énorme : 46,000 âmes sur 267,000. En y joignant les Hautes et Basses- Pyrénées, le Tarn et l'Aude, on arrive à près de 50,000 âmes de perte totale pour ce groupe. Dans les Alpes, l'Isère a diminué de 27,000 âmes ; c’est le département qui a été le plus éprouvé après la Haute-Saône. Ceux qui ont perdu moins de 5,600 âmes, sont les suivants: Somme, Aisne, Marne, Seine- et-Marne, Aube, Eure-et-Loir, Mayenne et Nievre, au nord de la Loire, et au sud et l’est du même fleuve : Charente, Dordogne, Lot-et-Ga- ronne, Lot, Aveyron, Lozère, Haute-Loire, Ain, Ardèche, Drôme, Hautes et Basses-Alpes. Comme on le voit, à l'exception de la Lor- raine, de l'Alsace et de la Normandie où agis- sent des causes particulières, ce sont les parties les plus pauvres de la France qui ont le plus A", PAS souffert; sur les cinquante-quatre départements qu'on vient d'énumérer, trente-six comptaient déjà parmi les moins peuplés. Les quatre qui sont restés à peu près sta- tionnaires, sont : l'Indre, la Saône-et-Loire, la Haute-Vienne et les Pyrénées-Orientales, Sur les vingt-huit départements restant qui ont échappé à la loi générale du ralentissement, douze ont vu augmenter leur population comme à l'ordinaire ; ce sont : la Seine-Inférieure, Vendée, Haut-Rhin, Vienne, Charente-Infé- rieure, Vaucluse, Deux-Sèvres, Ille-et-Vilaine, Loiret, Corse, Indre-et-Loire et Loir-et-Cher. Enfin seize ont beaucoup gagné. Au premier rang, vient le département de la PR CM Seine, le plus peuplé de tous, qui s’est élevé de 1,422,000 âmes à 1,727,000 , ce qui donne une augmentation de 505,000 habitants. La comparaison annuelle des naissances avee les décès, prouve que la population nouvelle provient presque toute entière de l’émigration. Cet accroissement inoui est dû, sans doute, aux travaux extraordinaires qui ont été entrepris dans Paris. Le second de nos départements, comme po- pulation, le Nord, s’est également accru, quoi- que dans une moindre proportion; de 1,138,285 il s’est élevé à 1,212,553 habitants; différence : 04,068 ('). (°) M. de Lavergne se trompe en classant le Nord parmi 2 EE N AE Le troisième, le Rhône, a été de 575,000 âmes à 626,000 ; 51,000 en plus. Viennent ensuite: les Bouches-du-Rhône, qui ont gagné 44,000 âmes ; la Loire, 53,000; la Gironde, 26,000; la Loire-[nférieure, 20,000; le Pas-de-Calais, 20,000 ; l'Allier, 15,000; le Var, 14,000; la Seine-et-Oise, 12,000; le Gard, 11,500; l'Hérault, 11,000 ; Maine-et-Loire, 9,006 ; le Cher, 8,500 et les Landes 8,000. () Le progrès de ces derniers départements au- les départements qui doivent à une cause extraordinaire l'accroissement de la population. Nous nous proposons de démontrer plus loin que cet accroissement est au con- traire des plus réguliers. (”) M. Legoyt, chef de la statistique générale au minis- tère de l’agriculture et du commerce, constate d’après des relevés officiels, que la seule période décennale de a — trefois si pauvres et si abandonnés, est digne d'être remarqué. Tels sont les faits que M. de L'avergne a si- gnalés et que le gouvernement attribue, en grande partie, à l’ÉMIGRATION ACTIVE de l'habitant des communes rurales, c’est-à-dire à son départ prémédité, effectué volontairement sans esprit de retour au sein des campagnes où il est né et où il a longtemps vécu. Ces faits sont exacts et doivent nous servir plus tard à apprécier comme il convient de le faire, le mouvement de la population. 1836 à 1846, a enlevé aux campagnes 2,626,300 ha- bitants, c’est-à-dire un douzième de la population totale de la France. PAGE Une pareille révélation devait éveiller la sol- licitude du pouvoir; aussi, a-t-il adressé la lettre suivante à toutes les chambres consul- tatives d'agriculture : « « L’attention du gouvernement est appelée sur la diminution croissante que la popula- tion aurait éprouvée dans certaines localités el qui serait attribuée à la tendance fâcheuse qu'auraient les habitants des communes rurales vers les grandes villes et vers les grands centres industriels. Ce déplacement des forces actives n'est pas sans présenter des inconvénients, et la question mérite d’être étudiée. « Je vous prie de vouloir bien examiner et me fuire connaître dans quelle mesure cette émigration intérieure s’est exercée dans l’ar- rondissement de.....Quelles sont les causes sérieuses qui ont pu la déterminer et quels Se « pourraient ètre les remèdes efficaces à em- « ployer pour rattacher les populations à « l'agriculture. » Voilà donc une enquête commencée; le gouvernement s'inquiète de l’émigration des campagnes et il nous en demande les causes ? Quant à nous, habitants du Nord, qui avons bénéficié du mouvement de la population, peut- être aurions-nous été dans le premier moment tout disposés à nous récuser ; mais en présence de l'opinion indiquée par le gouvernement et qui attribuerait l’émigration « à la tendance facheuse de nos paysans vers les grands centres industriels, » nous manquerions à notre de- voir si nous ne disions à l'administration toute notre pensée sur une question aussi importante. . Ce que M. de Lavergne a fait pour la France, MR nous allons essayer de le faire pour notre dé- partement. En examinant avec soin l’ensemble et les détails des dénombrements de 1851 et de 1856, ainsi que les faits qui s’y rattachent, peut-être nous sera-t-il possible de reconnaître comment et pourquoi nos campagnes se peuplent ou se dépeuplent; comment et pourquoi l’équilibre, qui doit exister entre les populations rurales et les populations urbaines, s’altère ou se main- tient ? Au début de ce travail, nous croyons devoir expliquer que les chiffres qu'on y trouve, ont été relevés exclusivement, soit dans les ta- bleaux officiels du Bulletin des Lois, soit dans les statistiques ministérielles. — De cette ma- nière, nos appréciations seront moins contes- tables puisqu'elles s’appuieront sur des don- RSS (Cu nées que l'administration, elle-même, reconnait les plus exactes, et s’il y a des erreurs, on ne pourra nous les imputer ni prétendre que nous nous en sommes servis pour arriver plus ai- sément à trouver nos preuves et à déduire nos conclusions. tri À , L 2.1 _ di" is 13 AVE NR CA . HE LT 10e { 14 [AT 4 \ PRET PE FE - - s A . d'in. = ei 413 COTE ALAN z “T3 LI. Mouvement de la population dans le département du Nord. (RE Mouvement de la population dans le departement du Nord. Le département du Nord comprend aujour- d’hui sept arrondissements , soixante cantons six centsoixante-dix-neufcommunes et soixante- douze agglomérations ou bourgs et villes de 2,000 âmes et au-dessus. POELE Depuis 1856, sa population totale compte 1,212,555 habitants ainsi partagée : Population flottante. . . . 32,213 () — municipale. . . . 1,180,140 Cette dernière se divise : En population agglomérée ou urbaine. 437,118 _—_ rurale. . . . . . 149,022 En 1851, le nombre des arrondissements et des cantons était le même, celui des commu- (") Cette population comptée à part, conformément à l'article 2 du décret du9 février 1856, est formée par les militaires, les élèves des séminaires, lycées et pensions, |] ms er nes de 262 et celui des agglomérations de 75. La population totale s'élevait à 1,158,285 hab. — flottante: 2,7 929.916 — municipale . . 1,132,969 — urbaine . . . 414,178 — rurale. . . . ‘718,191 Si nous comparons maintenant les chiffres des deux recensements de 4851 et 1856, nous obtenons au compte de ce dernier, les différences suivantes en faveur : De la population totale. . . 54,068 hab. = flottante . . 6,897 les personnes appartenant aux communautés religieuses et aux hospices, les réfugiés, les détenus, elc. Ps: PE De la population municipale . 47,171 — urbaine. . . 22,940 — rurale. _: . 241931 I faut remarquer que l'addition des diffé- rences dont bénéficient les populations flot- tantes et municipales, comme celle des diffé- rences des populations flottantes, urbaines et rurales, nous ramènent exactement au chiffre total de 54,068 habitants que gagne notre dé- partement. Il résulte au premier abord de la comparai- son que nous venons de faire, qu'aucun chan- gement important ne s’est opéré dans les rap- ports généraux existant déjà entre les villes et les campagnes du département, car la popula- tion de celles-ci qui était pour les premières, en 1831, comme 1,000 est à 576, a conservé à peu de chose près (douze millièmes) la même AURE = proportion, puisqu'elle est aujourd’hui comme 1,000 est à 588. Mais la population rurale relativement à l'importance de son chiffre a beaucoup moins profité que la population des villes (), et en constatant cette différence préjudiciable à l’agri- culture, nous nous proposons d’en rechercher les causes. Avant tout, constatons que l'accroissement de notre population départementale est, depuis longues années, continu et parfaitement régu- () Toute proportion admise, puisque la population des villes qui s'élève à 437,118, s’est accrue de 22,940 ha- bitants; celle des campagnes qui est de 743,022 aurait dû s’accroître de 39,204 au lieu de 24,253 habitants. PA Er lier. Il y a de cela un demi-siècle, en 1806, le département du Nord renfermait 857,699 hab. En 1841, ce nombre s'élevait à 1,085,298 h. et donnait ainsi une augmentation de 247,599 habitants, soit dans ces trente-cinq années, une moyenne de 7,077, De 1841 à 1851, les 1,085,298 étant montés à 1,212,533 habitants, l'accroissement dans ces quinze dernières années, a été de 127,055 et la moyenne de 8,470, Enfin la dernière période quinquennale ayant donné ainsi que nous l'avons dit plus haut, une plus-value de 54,068, la moyenne obtenue est de 10,813. On voit donc que ces trois moyennes sont à peu près en rapport, toute proportion gardée CA entre les chiffres de la population inscrite aux époques diverses dont nous venons de parler, Cet accroissement qui nous frappe par sa régularité, est-il dû au déplacement des habi- tants appartenant à d’autres départements, ainsi que semble le croire M. de Lavergne? Nos recherches nous ont démontré que la cause n'était pas là : elle se trouve, en effet, dans l'excédent des naissances sur les décès pour les huit dixièmes, et pour le reste, en très grande partie, dans l'établissement des ouvriers et commerçants belges (”) au sein de nos popu- lations. (‘) En 1851, sur les 1,158,285 hab. du département, on comptait 80,876 étrangers, dont 717,674 belges. Il n’y en a que 128,104 dans toute la France. — 30 — Ainsi de 1856 à 1840, la statistique générale . publiée par le ministère du commerce, constate que l’excédent des naissances sur les décès dans LENS, Le 6 RER AE ET ne LS EE 42,442 De 1840 à 1845 qu'il a été de.... 40,966 Et de 1845 à 1850 de........ "TOR Elle constate, en outre, que cet excédent dans les cinq dernières années qui nous occupent plus particulièrement (1851-1536) S'éleves a PeTE Gr L'AAUAE 45,838 () (9 Excédent de 1854 à "2e Re » 1852 25 ta SNS » CE RE EE » RE PPT A » SAS. se pe en EEE 2 ySmuEe Notre département, il faut le reconnaître, ne devrait donc pas être classé, ainsi qu'il l’a été par l'honorable membre de l'académie des sciences morales et politiques, parmi les ré- gions qui ont beaucoup gagné, comme celle de la Seine, par suite des pertes que d’autres ont éprouvées. Reprenons maintenant la question au point où nous l'avons laissée, et examinons dans ses détails le mouvement de la population. Nous savons déjà que le département a ga- gné 54,068 habitants de 1851 à 1856 ; voyons d'abord quelle a été la part de chacun de nos arrondissements dans cette plus-value générale? La population de chaque arrondissement 2-68 20 s’est élevée pendant la dernière période quin- quennale dans les proportions suivantes : Différence en plus. Lille de..... 371,156 à 404,279 33,113 h. Douai: 02 101,109 » 106,155 5,046 Valenciennes 136,779 » 163,082 6,303 Avesnes .... 145,040 » 150,523 5,483 Cambrai.... 174,245 » 179,863 5,618 Dunkerque... 105,441 » 105,517 276 Tofd2F6 Te 99,849 h. L’arrondissement d'Hazebrouck est descendu En moins. de...,.%.,2 104,915" 1059/5170 L’accroissement départemental, avons-nous dit, est de 54,068 habitants; cependant nous trouvons que celui de six arrondissements sur sept (bà,849) lui est supérieur. Eans ce cas la plus-value de la partie étant plus considérable que celle de l’entier lui-même, on doit croire tout naturellement qu'il y a erreur; mais un examen attentif fait connaître que dans ce total d'ensemble, on doit tenir compte également des différences en plus et en moins qui se pro- duisent dans les détails, et que dès lors, ce, total étant de 55,849 habitants moins 1,781 doit être représenté par le chiffre... 34,068 h. inscrit plus haut. Notons ce fait, malgré son peu d'importance relative, parce qu'il se reproduira encore et qu'il expliquera par lui-même la possibilité de certains résultäts obtenus par les déplacements de la population à l’intérieur, résultats qui semblent au premier abord, inexacts à cause de leur exagération. Ainsi, nous venons de constater que le mou- oi vement, dans son ensemble , a été favorable à six de nos arrondissements et surtout à celui de Lille, le plus manufacturier de tous, qui a gagné comme nous voyons, les trois cinquièmes du bénéfice total (33,123 habitants sur 55,849); — La répartition de ces trois cinquièmes entre les populations urbaines et rurales de la circonscripuion, est plus inégale encore que celle qui à eu lieu entre les mêmes populations dans tout le département. Dans l'arrondissement de Lille qui renferme 19 agglomérations, la population qui était en 1851, de : Population totale......... 371,156 hab. — flottante scie 10,942 — municipale... 905,214 Cette dernière se subdivise en : CE Je Population urbaine ....... 163 — rurales. 1.1.7: 1096480 S’était élevée en 1856 à : Population totale......... 404,279 hab. —— floftante.0% 0200493504 — municipale..... 391,975 Cette dernière se subdivise en : Population urbaine........ 190,716 — TÜrAReR A. | 29201:916 Différence : Population totale: ........ 99,128 hab. — flottante 7.7 2: 1,302 — municipale..... 91,761 Cette dernière se subdivise en : Population urbaine....... sva182 — ruialosh.h:.iiis 4,061 La première pensée que suggérent les chiffres de ce tableau, c’est de les comparer à ceux que nous avons déjà présentés ct qui sont relatifs à l'accroissement des diverses parties de la popu- lation départementale. On remarque d’abord l'énorme disproportion, qui existe entre les populations urbaines et rurales de l'arrondis- sement, comparées à celles du département. ARRONDISSEMENT. DÉPARTEMENT. 190,916 201,141 431,118 743,022 Urbaine. iurale. Urbaine. Rurale. Ensuite on se demande comment il peut se faire que la population urbaine de la circons- cription hlloise compteen plus27,182 habitants lorsque le département n’en gagne que 22,94. (Voir page 10.) La remarque déjà faite à propos de la plus- valuc départementale et de celle des six arroe- % Pre dissements qui en ont profilé, peut et doit être faite ici, parce qu'il existe des différences en moins au compte de la population urbaine des arrondissements d’Avesnes, d'Hazebrouck, de Douai, de Dunkerque et de Valenciennes, éva- luées d’après les chiffres du Bulletin des Lois, à 11,788 habitants, et une différence en plus de 7,546 habitants au compte de ia population de l'arrondissement de Cambrai. Cette dernière avec les 27,482 habitants de l'arrondissement de Lille, nous donne ainsi un total partiel de 34,128. Nous avons alors pour le département lab Eénéral 25 eh us, Le 54,128 h. L'ETAT .. 11,788 C'est-à-dire. .... nu alt eu 2 A) De plus, il est démontré par la statistique officielle même, queles pertes et bénéfices se rapportant à certaines fractions de la popula- tion urbaine, sont parfois plus apparents que PES ve réels lorsqu'ils ne sont pas le produit d’une erreur. Les agglomérations sont des bourgs ou des villes de 2,000 âmes et au-dessus , qui renfer- ment ce qu'il est convenu administrativement d'appeler la population urbaine. Or, il arrive souvent que plusieurs chefs-lieux de communes exclusivement rurales, qui possédaient un pen moins de 2,000 habitants lors d’un recense- ment et dont, par conséquent, la population figurait parmi celle des campagnes, viennent s'inscrire dans le tableau d’un autre recensc- ment au compte de la population urbaine, par un chiffre de 2,000 habitants et quelquefois davantage , par suite d’accroissement d’une cinquantaine ou d’une centaine d'habitants tout au plus. —-On voit tout de suite combien il est nécessaire de distinguer entre le compte nou- veau de la population urbaine et sa réelle plus- ES value, si l’on veut apprécier son mouvement avec exactitude. — C’est ce que nous allons essayer de faire, — En procédant ainsi, nous montreronsque nous n avons pas besoin d’exa- gérer le mal pour le constater; il est déjà assez grand par lui-même. Dans le compte nouveau de l'augmentation urbaine, inscrit au Bulletin des Lois, nous trou- vons les 27,182 habitants, dont nous avons parlé, répartis de la manière suivante entre les dix-neuf agglomérations de l'arrondissement. ARRONDISSEMENT Différence | Différence de Lille. 1551. | 1856. en plus. | en moins. Annœulin. . . | 2,961| 2,913... 18 Armentières . .| 7,202] 8,195] 1,593 Comines . . 3,072| 3,288 216 Cysoing. . . . . 2,190! 2,224 34 Esquermes ed | 2,934| 2,934 | Haubourdin. . | 3,082| 3,105 23 HE 3,021 | 3,880 859 Five 3,041| 4,995| 1,454 La Bassée. . 2,390 | 2,452 62 La Madeleine. |.......| 2,433 | 9,433 | #1 } nie SE ASE es 68,463 | 71,286 | 92,893 Loos . HAde, 1614112341 180 | Moulins-Lille. | 4,875! 7,418| 92,543 RES LON ee er lors . 2,085 | 2,086 Roubaix ... | 23, 857 26,500 | 2,643 SET l'E PSS NES 2,126| 2,994 268 Tourcoing . . .| 18,047 | 19,860 | 1,813 VWatrelos . . 3,081 | 3,180 99 Wazeinmes . . .! 15,059 | 18,226| 5,167 Es FT RE hab. bah (FHSRE 190,94 16 A F4 48 | L 1 () Nous avons à déduire des 27,230, total des diffé- 2 0 7 QE Nous avons déjà fait remarquer que les agglomérations nouvelles apportent souvent au compte d'un nouveau recensement, le total de leur population, mais qu'il était nécessaire alors de distinguer entre ce compte et la réelle plus-value. — Dans le tableau qui précède, nous trouvons en effet, trois agglomérations placées dans les conditions précitées; ce sont : celles de Quesnoy, d'Esquermes et de la Magdeleine, qui donnent à la population urbaine de 1856, un contingent d'ensemble de. . . 7,455 h. tandis que leur plus-value réelle n’est que OR RE dl rt. eh. Il convient donc de rectifier le tableau pré- rences en plus , la différence en moins de 48. — Ce qui nous ramène aux 27,182, chiffre de la population urbaine de l'arrondissement de Lille. SA ee cédent du mouvement de la population de notre arrondissement, en déduisant de 27,182 h. le chiffre de 7,453 moins 1,747, c'est-à-dire de L2 . . LL . L L LI EL ee . ),106 Ce qui donne un total définitifde 21,476 h. que gagne réellement la population urbaine de l'arrondissement. — De cette manière, la po- pulation rurale profite de la différence qui existe entre ces 21,476 h. et la plus-value de la po- pulation municipale qui est de 31,761 h. et cette différence s'élève à. . . . 10,285 h. au lie de. init 50104: 50 40 RE que le compte du Bulletin des Lois, nous avait ind'qué. Maintenant en considérant que la population rurale de l'arrondissement est plus considérable que la population urbaine, et en admettant, ce qui est la réalité, que les naissances sont pro- portionnellement égales des deux côtés, nous 0) devons être frappés de l'énorme écart qui existe entre les plus-values respectives des campagnes et des grandes villes — et cet écart (11,191) nous apprend dans quelle mesure se sont opérés les déplacements intérieurs qui ont dépeuplé nos campagnes . DIS TRE à ELA TS « LS : D 'RR 7 OR COTES NS RS A CIN MRR DER : 3» } k SEA r Cr l à L re: Lo ( LA ca PA ” 4 FI Deere 4 a re : NN T3 : ” EE NET. nt | 2< re : A se PVÉG "TTL ; à . U LS RAR ELA » : an ? D < LES ‘ 1 ’ tetes ® LUE | E + F 7 È £ 4 s ml 4 de die } « ? : ; p À if : Lg _. # : à TL à ag 4h 14 ( Fat sal ds AAA dE RUeR APCE TENTE LA aNfU 2 4 Tan (ep 8 fbry fi CE £U k} F ; PE) F et D: #4 Fr HE L'AIINM Lu Pme i), ilot tracts Ly ia ; . AIT OT PE RUN ET _ - € È d' h À ‘ ; = * [a 0 140 e LE . 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Les causes de cette émigration qui jettent ainsi l'inquiétude et le malaise au sein de nos communes rurales, sont con- nues depuis longtemps. Nos économistes les plus distingués, les ont discutées maintes fois dans des écrits remarquables, aussi n’avons- nous rien de nouveau à apprendre à ce sujet; mais le gouvernement veut savoir qu’elles sont celles qui ont déterminé plus particulièrement l’émigration intérieure de notre circonscription préfectorale, nous devons les lui signaler. 0 Avant tout, dégageons ce travail de la ques- tion qui touche à notre belle mdustrie manu- facturière, La démonstration de l’étroite solidarité qui unit les intéréts agricoles aux intérêts manu- facturiers, n’est plus à faire aujourd'hui. Per- sonne n'ignore que les deux branches du tra- vaii national, se prêtent un mutuel secours. Pour qu'une nation soit heureuse et prospère, il faut que les deux industries se tiennent par la main, qu'elles marchent d’un pas égal dans la voie du progrès. L'industrie manufacturière est pour l'industrie agricole, une sorte de banque qui procure à nos cultivateurs, non sous forme de prêt, mais sous forme d'achat, ce qui vaut mieux, une partie du capital néces- saire à une bonne exploitation du sol. La pre- mière produit, l’autre confectionne et livre au consommateur. Toutes deux sont solidaires, 4 aussi les pays industriels sont-ils, en même temps, ceux où l’agriculture a fait le plus de progrès, parce qu’elle a pu développer sa pro- duction, activer le travail et vendre à des prix rémunérateurs. La vérité de cette heureuse concordance est démontrée par l’industrieuse Anz e‘erre dont l’agriculture est si prospère ; par l'Alsace, la Normandie et notre pays lui- même. Le département de la Haute-Saône, au contraire , exclusivement agricole, a perdu 96,000 âmes en six années; et dans le départe- ment du Nord, l'arrondissement d'Hazebrouck, le seul qui n’est point industriel, est également en décroissance de population et de richesse. Il serait donc injuste, comme on semble le craindre, d'attribuer à la prospérité de nos ma- nufactures, les souffrances de nos campagnes, alors qu'il est reconnu par les hommes les plus compétents, que les causes de ces souf- PU) mue frances se rattachent particulièrement à notre état social et politique. Ces causes sont l’absen- téisme, les armées nombreuses et permanentes, les travaux énormes que l’on exécute dans la capitale et dans les grandes villes, le défaut d'assistance dans les campagnes, le manque de tarifs protecteurs, de crédit, d'instruction pro- fessionnelle, le mode de recrutement de l’armée, surtout l'application du système nouveau, enfin l'impôt foncier. î : , : N" w _' = = vit * umo be Ft tt PMS 1144 Le Ar AUTANT. At EF as ? S We" 2 Le 7 | s £ | " r : + PONT: 4 énrb tte: | " Jetta RNA T0 GITE ET i A ste. 0 pe Or A Le . - 6 sis are Pie Ta y D th de 2 y TC ji AE FAN) 'UAIrTUN ARIUATE © x 1 ; : 4 S 67 fn? 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L’Irlande, conquise par les rois d'Angleterre, fût divisée en fiefs pour les barons anglais qui firent ex- ploiter par d'autres, leur conquête. Tous les produits de lfrlande, transformés en argent , se dépensaient en Angleterre comme les produits de nos campagnes se dépensent dans les grandes villes. Il advint qu’au licu de rendre à la terre les soins qu'elle réclamait, les exploitants se découragèrent, le sol s’appauvrit et les exploitations tom- bèrent en ruine. L'Irlande fut alors décimée par le pillage, le meurtre et lincendie:; la famine fit périr un jt nt pus million d'hommes, l’'émigration en dévora deux fois autant au profit de l'Amérique. On ne par- vint à régénérer ce malheureux pays, qu'en faisant une liquidation générale et en lui ap- pliquant les lois de la libre Angleterre. L'histoire, dit M. Frédéric Passy, ne cessera de rappeler les conséquences de l’absentéisme irlandais comme un des plus terribles ensei- gnements par lesquels elle puisse apprendre aux hommes à respecter le droit, à ne séparer jamais la jouissance de l'effort, et la richesse du travail. De tous les pays de l'Europe, la France, peut-être, est celui où l’absentéisme s’est pro- duit de la façon la plus générale et la plus suivie. Les possesseurs du sol ont l'habitude de venir passer la belle saison dans leurs do- maines pour y chercher quelques distractions. Ils touchent leurs fermages, jouissent des plai- CR sirs de la villégiature, ordonnent quelques tra- vaux de réparations sur les dépendances qu'ils habitent et puis, l'automne arrivé, ils rentrent à la ville où ils dépensent la presque totalité des revenus d’une terre sur laquelle ils ne semblent vouloir poser que comme l'abeille sur la fleur. L'absentéisme est un mal qui remonte à une époque ancienne, Philippe de Co- mines, il y a trois cents ans, l’a dépeint comme suit : « Ils n’ont, dit-il, (parlant des Français de son temps) souci de rien, sinon d’offices et états, que trop bien ils savent faire valoir ; cause principale de mouvoir guerres et rébellions. » Mais voici comment cette calamité s’est dé- veloppée dans notre pays. Il exista jadis en France, une guerre sourde ou déclarée, entre les rois et les grands ; elle éclata sous Louis XI qui la fit à sa manière. Plus tard, on trouva un moyen moins terrible que de couper les têtes, ce fut d'attirer et de lier les grands à la cour, de changer , en un mot, ces fiers châtelains, ces vassaux turbulents en humbles courtisans. C'est à Richelieu et à Mazarin que revient l'honneur d’avoir inventé et exécuté ce sys- tème , dont la première condition était toute- fois de dégoûter les seigneurs de vivre à la campagne, on se servit pour cela de l’arme Ja plus terrible en France : du ridicule. Il fut dé- versé à pleines mains sur Ceux qui persistaient à demeurer dans leurs châteaux , et bientôt le nom de gentilhomme campagnard fût une épi- thète de mépris que tout le monde voulüt évi- ter. La noblesse, en masse, déserta ses terres et s’en vint à la cour ou dans les grandes villes de province et ces hommes, que la crainte des armes n'aurait pu soumettre aux lois, de- vinrent valets, par la crainte du ridicule. — 60 — L'effet que ces dispositions produisirent ne se fit pas attendre. La désertion des grands propriétaires devait ruiner l’Agriculture. Bientôt, en effet, l’exploi- tation du sol qui naguère passait, comme aujourd'hui en Angleterre et en Allemagne, pour l'occupation la plus noble et la plus hono- rable , fût abandonnée à la gent corvéable et taillable , et tomba tellement dans l'opinion publique que le dernier bourgeois aurait cru se déshonorer en devenant cultivateur. Cela devait être : Ce sont les hommes qui font la profession. D'un autre côté , on favorisait les viles, on y attirait le plus d'habitants possible, on y concentrait les capitaux et les talents. Les mœurs des grands, a dit Massillon, forment les mœurs publiques. — 61 —- Lorsque la révolution de 1789 éclata et que lon vint annoncer au campagnard qu'il était devenu libre, que le système des corvées et des maîitrises avait disparu , que désormais il pou- vait travailler pour lui seul, il ne songea pas à s'attacher à la terre sur laquelle jusque-là il n'avait pu trouver la fin de son dénuement et de sa misère; l'air des cités, les tristes murs de l'atelier lui parurent moins lourds que l'ombre et les souvenirs du château féodal. Un homme éclairé, François de Neufchâteau essaya vers le commencement de ce siècle, de pousserlegouvernement dans une voienouvelle, dans la voie de Sully ; le génie de Napoléon lui décéla toute l'importance de lAgricul- ture pour la France, il était disposé à l’encou- rager puissamment, à suivre l'impulsion donnée par le ministre, mais le temps lui manqua. Il ne pût nous laisser que cette étincelle de sa - Hi] Le fe pensée : « Il n'y à de bonnes finances dans un Etat que lorsqu'il y a une bonne agriculture.» Depuis cette époque, les besoins du luxe, les habitudes de spéculation , les jeux de bourse, en s'emparant de presque toutes les classes de la société, ont encore contribué à diminuer le goût des champs et à faire mépriser le genre d’occupations qui accroît la richesse du monde. Les divers gouvernements , qui se sont succédé depuis un demi-siècie, n'ont rien fait pour mettre obstacle à l’absentéisme. L'appau- vrissement des campagnes a été la conséquence de la retraite des grands propriétaires, que les fils des cultivateurs suivirent en apportant dans les villes leurs bras et leur intelligence. Complétons notre pensée par quelques chiffres, — 63 — Il résulte du travail administratif exécuté en vertu de l’art. 2 de la loi du 27 Avril 4850, que le revenu des immeubles de la France peut être évalué à 2,645,365,716 fr., et M. Esquirou de Parieu, président de section au Conseil d'État, dans son livre sur les impôts généraux, estime à 3,157,009,009 fr. , les revenus mobiliers du pays. Les immenses revenus de la fortune immobi- lière et mobilière se dépensent en majeure partie dans les grandes villes et sur les 2 milliards et demi que la terre donne à ses possesseurs, il reste à peine une moitié dans les campagnes, moitié qui représente le bénéfice des petits pro- priétaires cultivateurs et qui est employée, non comme superflu, mais comme strict nécessaire à leur nourriture et à leur entretien. in effet, tout se lie et se tient iei bas. Lorsque EAU QE l’ouvrier quitte les campagnes, c’est le travail qui émigre, mais lorsque les propriétaires s’en vont pour toujours à la ville, c’est le capital qui disparaît; et de nos jours, les riches pro- priétaires imitent les anciens seigneurs; ils fa- vorisent le mouvement de cette émigration des campagnes, ils encouragent la désertion, en dé- sertant eux-mêmes et surtout, en emportant dans les grands centres, la partie !a plus con- sidérable des revenus de leurs terres. L’absen- téisme produit l'insuffisance de la culture dans beaucoup de localités , la stérilité comolète dans d’autres ; il est la cause immédiate de ce défaut de production, qui depuis le retour de la paix, a forcé nos industriels à s'adresser à l'étranger pour combler le déficit des matières premières indispensables à l'alimentation de nos manu- factures. Est-ce aux propriétaires seuls qu'il faut s’en ER Tu prendre de ce divorce qui existe entr'eux ct leurs domaines ? Pour être juste, ne faut-1l pas reconnaître que cet éloignement des hommes intelligents et riches pour la vie agricole, est en majeure partie, motivé par la situation qui leur est faite dans l’état actuel de la législation ! Le genre de vie adopté par les grands pro- priétaires en Angleterre et aux États-Unis, au- rait dû fixer depuis longtemps, l'attention du Pouvoir. 1/existence du grand propriétaire en Angle- terre, aussi honorable qu'heureuse, est sans contredit, la plus utile à sa famille et à la so- ciété ; mais elle suppose d'excellentes institu- tions qui attirent vers les campagnes les pos- sesseurs du sol, en leur assurant tous les avan- tages d’une sage liberté! — Revêtu par le suf- frage de ses concitoyens, de pouvoirs étendus que Ja loi consacre, le propriétaire préside, — 66 — en qualité de commissaire de sa paroisse (commune) ou du comté (département), au tracé, à l'exécution et à l'entretien des routes, des ca- naux, ete.; il règle tous les différents entre ls compagnies, les entrepreneurs et les particu- liers; il concilie leurs intérêts, il dirige lui-même daus ses domaines , les constructions, les des- séchements, les déboisements, les plantations. Il consacre à ces divers travaux la moitié de son revenu au moins, parce qu'il trouve dans la vie rurale, bénéfice, indépendance et plaisir. Jl n'en est pas de même dans d’autres pays. Le nôtre, par exemple, n'offre plus dans Ja campagne au grand propriétaire ni les mêmes charmes, ni les mêmes avantages. Füt-il l’homme le plus respecté de sa région, il ne peut s'occuper activement des intérêts de sa commune, des améliorations à y introduire. Chaque réclamation qu'il doit adresser en fa- — 601 — veur de ses concitoyens, exige de sa part des dérangements pénibles, de nombreuses dé- marches et pertes de temps. fmpuissant à se- courir les malheureux qui invoquent son appui, il se voit placé entre les impulsions de son cœur généreux et le soin de sa dignité et de son repos, Souvent en lutte avec des employés subalternes qui par leur force d’inertie, viennent briser sa volonté, il s’épuise, se déconsidère en sollicitations stériles; pris enfin par le vertige du découragement, il se dégoûte du séjour des champs, cède aux suggestions de sa compagne, qu'une éducation futile éloigne des travaux sé- rieux, confie ses affaires à un étranger et va habiter la capitale, dernier et seul refuge de l'indépendance. Nous voulons être justes cependant, nous reconnaissons que ces regrets ne s'adressent point seulement à l'administration actuelle , SÈME mais surtout à celles qui l'ont précédée et qui lui ont légué pour héritage, la centralisation ad- ministrative, véritable fléau français qui arrête tous les ressorts, décourage toutes les bonnes intentions, multiplie les entraves, éternise les difficultés, tue les initiatives et compromet l'existence du gouvernement même; car on est habitué à tout rapporter à lui, le mal comme le bien. On l’accuse d'événements qu'il n’a pu ni prévoir, ni conjurer, ce qui a fait dire mali- cieusement à Sterne, « qu'en France lorsqu'il pleut trop longtemps on s’en prend au gouver- nement, lorsqu'il a été trop longtemps sans pleu- voir, on s’en prend encore au gouvernement. » Aie ne + . S # 2 . Cr à v FE] 4 # HAL . LI + 2-8 EUR - RS : ( : re à = Ex Ÿ. s ù Systeme d'organisation de l'Armée. s ‘ … : ; LL. = s “ =. = 220 2° x - ré « 4 Fr: - * SE FL TERRE | 12 Systeme d'organisation de l'Armee. C'est un grand mal que la dépopulation des campagnes, toute l'histoire apprend que c'est le commencement de la décadence des nations. Quand, la Grèce vint à décliner, elle se dépeupla RE et le désert se fit dans la campagne romaine, à mesure que Rome avança vers sa fin. Depuis près d’un siècle, on a constaté que la France est un des grands Etats de l'Europe où la population s'accroît avec le plus de len- teur. () Le dénombrement de 1836 a témoigné qu'elle était même entrée dans une période décroissante relativement à l'augmentation nor- male de sa population. Nul doute que cette situation ne soit, en partie , le résultat de nos révolutions et des longues guerres que nous avons eues à soutenir. (‘) Le dernier recensement que fit l'Angleterre , avait produit une augmentation de 3,000,000 d’âmes; en dix ans , de 1846 à 1856 , deux recensements n’ont donné une augmentation en France que de 638,878 âmes. te Mais la gucrre, toute cruclle qu’elle est, n’est pas une suffisante cause de la dépopulation, car la guerre n’estpas coutinuelle, etles vides qu'elle fait, sont réparés par la paix. Ce qui est pire que la guerre , c’est la per- manence des grandes armées, qui, se recru- tant sans cesse dans les campagnes, les mettent en coupe réglée, en pompent la sève, ct devien- nent une cause incessante de dépopulation. I faudrait cependant nous efforcer de faire men- tir cette maxime formulée par Montesquieu : e La France se perdra par les gens de guerre () » Malheureusement, la France par sa position (”) Montesquieu : Pensées diverses, édition Lefebvre, p. 475. 74 géographique et par les craintes qu'elle inspire, estune des nations européennes qui doit entre- tenir une armée considérable. Si les États- Unis se peuplent rapidement, c'est qu'ils n’ont pas besoin de soldats; si l'Angleterre a vu sa population doublée , quand la nôtre s’accrois- sait à peine d’un quart, c’est qu'elle ne paie pas de son sang la défense de son terri- toire, et qu'elle recrute son armée, en grande partie, chez les nations étrangères Partout la population se développe en sens inverse du chiffre de l’armée ; si la France oc- cupe un des derniers rangs dans le tableau du développement de la population, elle est au premier rang dans celui de l'effectif des soldats. Enfin ce n’est pas dans les villes, mais au milieu de nos campagnes que l’on trouve ces robustes cultivateurs, auxquels on donne Ja préférence pour remplacer les congédiés et — 19 — maintenir en grande partie l'effectif de l'armée. La cause est légale, nous le reconnaissons, mais elle n'en est pas moins une de celles qui font le plus grand mal à notre agriculture, parce que son action est incessante et régulière. Qu'on pe répète pas un sophisme souvent avancé, que la présence, sous le drapeau, des hommes appelés à composer l’armée, est une éducation qui développe leur intelligence, les forme à la discipline et les rend à la campagne, après en avoir fait des hommes plus aptes aux travaux qui leur sont réservés. La vérité est, qu’au bout du temps de service, un grand nombre de conscrits manquent à l'appel; la mortalité au régiment est bien autre qu'à la ferme. Le goût des grandes cités, l'habi- tude d’un travail moins pénible ont bientôt fait oublier aux jeunes soldats le village auquel ils renoncent trop souvent lorsqu'ils l'ont une LAN Br fois quitté. De nos jours, le soldat laboureur devient une fiction. Le nouveau système est venu compliquer cette partie de la question. Sous l’ancienne loi l'effectif demandé chaque année se composait de 80,000 hommes qui étaient divisés en deux catégories : 40,000 hommes étaient aussitôt mis à la réserve, ils n'étaient réclamés que pour des cas exceptionnels. L'autre moitié, au moment de l'appel sous les drapeaux, se rédui- sait à 52,000 environ, parce qu'on fixe tou- jours à un cinquième le nombre des non- valeurs (soutiens de famille, décédés, condam- nés ou réformés) au moment du départ. Chacun des jeunes soldats partait bravement, sachant qu'il ne devait être libéré qu'au bout de sept années ; dès les deux premières, il avait perdu le souvenir du clocher, il était moins DE habitué aux tendresses, aux soins de la famille, il était aguerri. Le départ de l'effectif ne se caaposant que de 52,000 hommes, la campagne hi en fournir les deux tiers, soit par année el pour toute la France 21,000 environ (|. Si la seconde catégorie de 40,000 hommes n’était point demandée pour les nécessités du service militaire, c'étaient autant de jeunes gens qui restaient dans nos villes et dans nos cam- pagnes. Si le complément, formant la réserve, était appelé avant libération définitive de la classe, () ya 25 millions de campagnards et 11 millions de personnes appartenant à des professions diverses non agri- coles. — = les jeunes gens avaient parfois passé de longues années au milieu de leurs familles, ils avaient débuté dans la vie par être cultivateurs au lieu d’être soldats, ils avaient eu le temps de prendre racine au village et revenaient toujours au milieu des leurs. Si enfin, la classe de 80,000 était demandée d'un seul coup, c’étaient (déduction faite du cinquième) 64,000 hommes qui étaient appeles, dont 42,000 pour les campagnes. L'économie de ces dispositions a été modifiée, on a sans doute pensé que la plus grande partie des Français devaient servir au moins quelques années pour connaître le maniement des armes. On a augmenté le contingent an- nuel, en créant en principe, le système des congés renouvelables ; nqns comprenons que certaines nécessités imposent l'adoption d’une e: mesure de ce genre, aussi nous ne ferons Îa critique de ce système que relativement au contre-coup reçu par l’agriculture. Ce ne sont plus 40,000 hommes, mais 100,090 qui entendent sonner l'heure du départ; ce ne sont plus 21,000, mais 55,000, toute réduction faite des non-valeurs, qui doivent quitter nos campagnes. En supposant même, comme nous l'avons indiqué plus haut, que les deux catégories aient été appelées en une seule fois, elles étaient réduites à 64,000, comme les 100,000 appelés aujourd’hui, sont réduits à 80,000. La différence par année et pour toute la France, est donc entre les deux systèmes de 16,000 hommes, ce qui forme pour la période de sept années de service, une augmentation de 112,000 hommes sur les demandes précédentes, ET et le déficit qui pour nos campagnes est des deux tiers, s'élève pour le même laps de temps à 74,666. Nous avons vu pendant ces dernières années dans notre arrondissement, les cantons les plus riches en hommes, épuisés par le recrutement; une cruelle déception succédait au bonheur qu'avait fait éprouver la sortie d’un bon nu- méro et l’on trouvait qu'avec un pareil système, le tirage devenait pour ainsi dire inutile. Nous avons vu des cultivateurs réduits à la dure nécessité d'exécuter eux-mêmes des travaux que leur vieillesse ou leurs infirmités avaient mis au-dessus de leurs forces. Beaucoup de ces jeunes soldats, nous le savons, obtiennent des congés renouvelables au bout de deux années de ser- vice, mais peu d’entr'eux reviennent à la cam- pagne. Deux années ont suffi pour les dégourdir et er rR les éloigner pour toujours du travail des champs. [ls ont comparé le sombre cabaret de leur village, à l’élégant café des villes ; en fou- lant le bitume des grandes cités, ils se sont souvenus de leurs chemins défoncés et boueux. Ils ont joui d'une espèce de far-niente et de béa- titude qui leur étaient inconnus jusqu'alors: ils se sont aperçus que l’aube se levait moins tôt pour le travail dans les villes que dans les campagnes, que la retraite venait plus tard mettre obstacle à leurs plaisirs, que les salaires étaient plus élevés et la nourriture plus subs- tantielle. Ils ont compris enfin qu'il était plus agréable d’habiter les villes parce que la liberté y est plus grande. Is oublient leurs promesses du départ, leurs familles, et par suite d’un égoïsme inhérent à notre espèce, ils ne songent qu'à la réalisation immédiate d’un bien-être dont ils ne savent re encore souder ni les déceptions, ni les dangers ; c'est donc une tige qu'on a enlevée de la plante pour la greffer inutilement ailleurs, et ce serait une grave erreur de penser que le bénéfice du congé renouvelable, les rattache pour toujours au sol qui les a vus naître ; ils deviennent, pour ainsi dire déclassés. Le rappel qui les menace, empêche le cultivateur, qui aime la stabilité, de les reprendre à son service. Ils ne peuvent ni se réimplanter au milieu des leurs, ni se marier, ni s'établir, ni contracter.Frappés enfin d’une sorte de suspicion légitime, ils sollicitent un changement de résidence qui les éloigne pour toujours , et l’administration peut se con- vaincre de la réalité de cette assertion, si elle veut bien se souvenir du nombre prodigieux de demandes qu’elle reçoit de la part d'anciens militaires qui briguent auprès d'elle des emplois publics ou privés. Mais leurs camarades qu’un hazard moins LR: D heureux n'a pas désignés, et qui sont restés au régiment, pensent que la période de sept années de service, n'est plus exigée; ils ne se rendent pas compte des motifs pour les- quels ils sont retenus sous les drapeaux, lorsque leurs amis du contingent ne sont plus près d’eux ; ils sont mécontents. Incessamment excités par l’appât de ce congé auquel ils aspi- rent, ils se figurent qu'il est devenu pour eux le droit, ils font d’incroyables efforts, de véritables tours de force, pour arriver à leur but; il semble que le dégoût de l’état militaire, les ait frappés au cœur. Toutes les familles des cam- pagnes se mettent en mouvement et avec elles, toutes les influences dont elles peuvent dispo- ser, tant un appel si considérable a produit de mal et tant le retour est désiré par les familles. Tels sont les effets du système nouveau sur notre agriculture ; beaucoup plus de jeunes gens quittent nos campagnes, et Si au moment de partir tous désiraient rester attachés aux ES Ne travaux des champs, lorsque le jour de la libé- ration est arrivé, après avoir goûté l'attrait du séjour des villes, c’est à qui ne reviendra plus au village. Ils est donc à désirer qu'on puisse, tout en éloignant le moins possible de jeunes conscrits des campagnes, arriver à une diminution du nombre des soldats, en temps de paix. Ce serait un grand apaisement pour les esprits, une grande économie pour le trésor et un immense bienfait pour l’agriculture Que l'on ne croie pas que notre puissance militaire en soit diminuée, la France peut toujours mettre en ligne des millions de baïonnettes sur les champs de ba- taille, car le Français avec ses instincts de guerre, n’a pas besoin d'apprentissage pour être un soldat, et quand il est fait appel à son patrio- tüisme, il a prouvé plus d’une fois qu'il sait dé- fendre le sol national et l'honneur de la patrie. és” : Le . f F è : ; " pes » v Ü : - " se _ ect - ! L À +. 1: _ d A +. . VI. Travaux dans les grandes villes. L'une des principales causes qui viennent encore ajouter à la dépopulation des cam- pagnes, c'est la prédominance qu’en ces der- piers temps, les grandes villes n’ont cessé de prendre. Toutes les statistiques témoignent que leur accroissement annuel est de plus d'un = se dixième de leur population. Pour Marseille et Lyon, la progression est encore plus forte. Le département de la Seine, depuis 1851, s’est accru de 305,000 âmes, c’est-à-dire de plus de la moitié pendant cinq ans, de l'accroissement de la France entière pendant dix ans, et c’est par- ticulièrement la ville de Paris qui a profité de cette augmentation. Nous ne parlons pas des villes secondaires (‘) que nous avons vues s’aggrandir spontanément et dépasser en population, d'anciens chefs-lieux de départements. D'où viennent les habitants qui encombrent ces grandes villes ? De la cam- pagne , toujours de la campagne, et comme la mortalité va vite dans les villes. ce sont les () Montmartre, en dix-huit ans, a augmenté de 6,000 âmes à 60,000, AO communes rurales qni remplissent les vides à mesure qu'ils se font. Nous reconnaissons que l’affluence dans les grandes cités, est en partie déterminée par le développement de l'industrie, mais il ne faut pas confondre. De même qu'après la guerre, il nous reste les armées permanentes, à côté de l'industrie utile qui enrichit l’agriculture et la nation, il existe une industrie improductive et de luxe qui la perd. Nous appelons industrie improductive, celle qui aurait pour résultat de nous faire vivre dans des palais, de nous couvrir d’or et de nous laisser mourir de faim; de faire éclore à chaque pas ces constructions innombrables, ces embellissements merveilleux qu’on élève en peu de mois, quand il fallait autrefois des siècles pour les achever. C’est, dit-on, la gloire — 9Ù — de notre époque, mais c’est aussi la folie du moment. Non seulement ces gigantesques tra- vaux exigent un plus grand nombre d'ouvriers, ils ajoutent encore à l'attraction qu’exercent les grandes villes sur les habitants des cam- pagnes par le salaire et les dissipations qu'elles leur offrent. Ces travaux absorbent les res- sources du présent, grèvent l'avenir, aug- mentent chaque année le budget de l’État et celui des grandes villes ; ils empêchent qu'on puisse verser dans les communes rurales , en encouragement à l’agriculture, toutes les sages économies qu'il serait possible de réaliser. C’est cette industrie du bâtiment dans la capitale qu'il faut arrêter ou dont il faut du moins ré- partir les dépenses sur un certain nombre d’an- nées, au lieu d'agir avec la précipitation de ces malades qui n'espèrent pas de lendemain. Qui veut avoir vite, paie toujours beaucoup plus cher, et c’est une vérité que la truelle u'enrichit personne. oh Il y a dans les grandes dépenses publiques, occasionnées par les travaux d’embellisse- ments ou d'agrandissements des villes, par les fêtes, toutes les fois que les dépenses sur- passent la proportion de ce qui est indispen- sable ou tout au moins nécessaire, « Il y a, disait Frédéric Bastiat, ce qu’on voit et ce qu'on ne voit pas. » Ce qu'on voit, ce sont : les achats, les tra- vaux, l'éclat, les lampions, les feux d'artifices, les statues, les cascades , les monuments, les promenades , les jets d’eau; ce qu'on ne voit pas, c’est le déplacement faneste des capitaux, c'est l’appauvrissement d'industries utiles en faveur d'industries de luxe. (") () Il est admis par les économistes que toutes dé- penses publiques suppriment une quantité équivalente de dépenses privées. = 299 Ce que l’on voit, hélas, c’est toujours ce qui brille. Il en est qui croient que les dépenses publiques, lors même qu’elles seraient impro- ductives, ont cependant leur utilité, qu’elles ac- tivent la circulation et la reproduction, qu’elles font aller le commerce » comme on dit vulgai- rement. Font-elles aussi fleurir l’agriculture ? Non, car le cultivateur paie sa quote-part qui est peut-être la plus grosse de toutes ? Lorsque la partie disponible de cette colc- part est employée en travaux utiles sur tous les points du pays, les capitaux privés suivent l’im- pulsion donnée aux travaux publics, et si le travail est réparti d’une manière aussi égale que possible, en ne s’exposant pas surtout à at- tirer sur un seul point des bras en trop grande je quantité, il résulte de ces dispositions le main- tien d’un équilibre au profit de toutes les in- dustries nationales. Nous allons voir qu'il n’en a pas été ainsi, pendant Île cours des années précédentes. Depuis 1852 jusqu’à 1838, Paris a employé par emprunts, subventions de l'Etat ou excédent de recette, une somme de plus de 400 millions en dépenses extraordinaires, travaux publics et embellissements de la capitale. Nous aurions été dans l'impossibilité de donner une indication précise relativement aux dépenses laissées à l'industrie privée pour la construction des bä- timents nouveaux créés dans Paris, et notre travail aurait élé incomplet faute de rensei- gnements exacts , Si par une circonstance heureuse, nous u’avions trouvé dans le Rap- port de M. le Préfet de la Seine, adressé au conseil municipal le 19 mars 1838, un rensci- pl =: tes snement qui nous servira de base pour indi- quer autant que possible la somme que lindus- trie privée a été appelée à fournir pour complé- ter l’ensemble des travaux publics. Nous voyons en effet, page 5, 1er K de ce Rap- port, qu'à la suite de démolitions et appropria- tions exécutées, de l'impulsion donnée aux travaux dans le département de la Seine et de l'attrait offert aux nombreux travailleurs allé- chés par ce capital, de 1852 à 1857, 1768 mai- sons seulement ont été détruites, par suite d'expropriation, dans le département de la Seine, tandis que 25944 constructions nou- velles y ont été élevées, En établissant une moyenne de prix pour chacune de ces constructions, à 40,000 franes, nous trouverons une somme de 957,760,000 f. et un total de". 2% .. 1,57,760,000f. a” — 9 — Voilà pour le passé. L'avenir n'est pas plus r'assUrANL pOur nos campagnes et nos départements, puisque M. Île Préfet déclare dans son rapport : « Qu'aujour- « d'hui, nos chemins de fer, comme d'immenses fleuves alimentés par des affluents nombreux, versent incessamment à Paris, des flots in- tarissables d'habitants de nos provinces ou des pays étrangers, qu'attire ce centre de l’activité des affaires, de l'intelligence et des arts. » Plus loin, M. le Préfet ajoute : « Que les faits déjà observés chez nous, constatent que ce mouvement d'agglomération n'est pas près de se ralentir, qu'il est impossible d'y opposer, sans nuire à la prospérité générale, un obstacle efficace ; qu’il fallait done agir en conséquence et tout disposer, pour que linva- — 96 — « sion inévitable de nouveaux habitants ne de- « vint pas, pour la population normale, une « cause d’intolérables souffrances et, partant, « un péril public, » Monsieur le Préfet de la Seine, à la suite de ces considérations, a obtenu du Gouvernement et de la ville de Paris une nouvelle somme de 170 millions pour continuer son œuvre. Et, comme le projet constate qu'il faudra construire 25,000 mètres de rues nouvelles pour terminer ce travail, c’est une somme de 940 millions que l'industrie privée devra retirer des provinces et reporter sur Paris, ce qui complète pour la période prochaine une somme de 710 millions, en supposant que ces 170 mil- lions ne se trouvent pas déjà compris dans Îles 400 millions dont nous avons parlé plus haut, et le rapport de M. le Préfet indique que eette Care somme ne tardera pas à être absorbée [",. Ni on y ajoute maintenant les 1,530 millions cm- ployés pour la guerre de Crimée, on arrive à un chiffre de plus de 3 milliards 00 millions (”) qui auront été absorbés en dix ans, d’une manière à peu près improductive, sur deux petits points du globe. Nous ne rappelons les dépenses de Crimée , que pour répondre à cette partie de la question (°) D'après les plans établis pour les derniers projets, il existe 25 mille mètres de rues nouvelles ; donnant 50 mille mètres de façade. La profondeur d'une maison est en moyenne de 18 mètres ; 50 mille mètres de façade à 18 m. de profondeur moyenne, font 900,000 mètres superficiels à bâtir à 600 fr. l’un, soit 540,000,000 fr. sans y comprendre les constructions faites dans les an- ciennes rues. (”) 3,997,660,000. — V5 — de la lettre préfectoraie qui semble faire sup- poser que le dépeuplement de nos campagnes et le déplacement des capitaux, sont dûs à nos industries manufacturières. C’est une erreur qu'il importe de ne pas laisser se propager, si nous nous rappelons surtout les graves questions qu'on doit débattre bientôt. Mais nous sommes les preiniers à reconnaître qu’à ce prix de 1500 millions , ce n’est pas trop chèrement payer la revanche que nous avions à prendre el qui nous à valu une si grande gloire. Pour les nations comme pour les individus, l’hon- neur passe avant tout : il faut vaincre ou mourir. Il est constaté, d’un autre côté, que le budget de nos travaux publics pour la France entière, qui était en 1847 de 212 millions, en 1848 de 218, a, depuis cette époque, toujours successi- ment diminué jusqu'au chiffre de 82 millions, fo somme portée aux budgets de 1858 et 4859. ) L'on ne s'étonnera plus de laceroissement prodigieux que prend la population de Paris, de l’état d'abandon qui frappe nos provinces et noscampagnes, puisque le budgetextraordinaire des travaux publics de la capitale s'élève à plus de 50 millions par année et le budget ordinaire et extraordinaire des travaux publics de a France, à 82 millions de francs seulement; que Paris contient {,200,000 individus et le reste de lempire 54 millions d’âmes. Ainsi, en face de la progression constante et même excessive (‘) Aujourd’hui la dépense des chemins de fer ne figure plus au budget des travaux publics que pour une somme très-faible relativement à celles des cessions anté- rieures ; en 1847-48...52,les dépenses des chemins de fer s’élevaient à 80 millions par an par application de la loi de 1842. Ce sont actuellement les compaguies qui supportent ces dépenses. — 100 — des travaux d’une seule ville, se place nettement la décroissance constante et rapide des travaux publics de la France entière, Si nous ajoutons maintenant les sommes ab- sorbées par les grandes villes, puisque Marseille va exécuter des travaux pour dd millions, Lille 30 millions, Lyon 20 millions, Toulon, par l’ad- ministration de la guerre et la marine, la ville elle-même, 28 millions, on reconnaîtra que partout Îles intérêts de l’agriculture sont sacrifiés au profit des grandes cités, et si cela continue :l deviendra nécessaire de prendre un jour des dispositions pour exempter du service militaire tout homme qui voudra rester cultiva- teur, comme on l’a déjà fait au profit des institu-" teurs et des séminaristes. Est-il nécessaire de faire remarquer main- tenant que lorsque des millions sont dé- — A0! — peusés pour appeler l'air et la lumière dans les grandes villes, comme on se plait à le répéter, les habitants des villages peuvent à peine mal- gré leurs démarches, obtenir quelques milliers de francs pour construire ou assainir une fon- taine, pour paver leurs chemins de terre, pour rectifier le réseau de leurs routes vicinales, dont les lignes courbes et tortucuses, semblent avoir été tracées par la marche vacillante d’un homme ivre. On sait l'influence qu'exercent les moyens de viabilité dans les campagnes. Si l'on empier- rait tous les chemins de terre en France, ce qu'on estime à une dépense d’un milliard, on doublerait les revenus de la culture. I est même établi qu'un allongement inutile d’un ki- lomètre, grève la circulation de 0,20€ par tonne et par kilomètre, que s'il passe 0 mille tonnes par an, sur une route, (c’est là une faible — 108, — moyenne pour beaucoup de chemins vicinaux), leur transport coûtera au commerce et à lagri- culture 10,000 francs en sus de ce qu'il aurait dû coûter ; c’est la destruction d’un capital de 200 mille fr. dont l’agriculture paie l'intérêt. () Cependant nous ne serons pas exclusifs, nous äadmeltons avec le gouvernement la nécessité d'exécuter dans la capitale des travaux vraiment stratégiques qui seraient de nature à maintenir la tranquillité et à donner de la force contre les passions anarchiques. Nous admettons que les arts et les sciences doivent y tenir un rang élevé, mais nous pensons qu'il n’est pas prudent de poursuivre le développement in- défini de Paris. Nous regarderions comme une () Guaflier, Ponts et Chaussées ; introduction. p.8 LIRE : calamité pour la patrie, que ectte ville par sa prépondérance, absorbät le reste de l'empire, plus encore qu’elle ne l’a fait jusqu'à present. Jadis les Romains s'étaient passionnés pour les monuments, la vieille Rome était bâtie en briques, il l'ont rasée jusqu’au sol, pour la réédifier en marbre. L'histoire nous apprend qu'à cette époque, le peuple de César-Auguste, n'était plus occupé qu'à la construction des cirques et des palais, que son dédain pour le travail des champs, l'avait réduit à demander sa nourriture quotidienne à de lointaines contrées, et la postérité est venue lui reprocher d’avoir tout sacrifié à une splendeur qui a été le point de départ de la décadence et la cause principale de ruine de cette grande nation. Imitons les Romains dans ce qu'ils ont fait de beau; mais en reconstruisant une nouvelle — 104 — Rome, sachons éloigner de nos mœurs les habitudes d’un luxe démoralisateur qui pour- rait un jour, entrainer la France dans les dangers dont histoire nous fournit tant d'exemples. Comme consécration de notre opinion, nous pouvons citer le passage suivant, que nous extrayons d'un ouvrage dent l'autorité ne saurait être méconnue : « La France est un des pays les plus im- « posés de l'Europe. Elle serait peut être le pays le plus riche, si la fortune publique A A était répartie de la manière la plus équitable. « Le prélèvement de l'impôt peut se com- « parer à l’action du soleil, qui absorbe les A vapeurs de la terre, pour les répartir ensuite « « — 105 — à l’état de pluie, sur tous les lieux qui ont besoin d’eau pour être fécondés et pour produire. Lorsque cette restitution s'opère régulièrement, la fertilité s'en suit; mais lorsque le ciel, dans sa colère, déverse par- tiellement en orages, en trombes et en tem-- pêtes, les vapeurs absorbées, les germes de production sont détruits, et il en résulte la stérilité; car il donne aux uns beaucoup lrop, et aux autres pas assez. Cependant, quelle qu'ait été l’action bienfaisante ou malfaisante de l'atmosphère, c’est presque toujours, au bout de l’année, la même quan- lité d'eau qui a été prise et rendue. La ré- partition seule fait donc la différence. Equi- table et régulière, elle crée labondance; prodigue et partielle, elle amène la disette. « 11 en est de même des effets d’une bonne ou d'une mauvaise administration. Si les — 41067 sommes prélevées chaque année sur la gé- néralité des habitants sont employées à des usages improdnctifs, comme à créer des places inutiles, à élever des monuments stériles, à entretenir, au milieu d’une paix profonde, une armée plus dispendieuse que celle qui vainquit à Austerlitz, l'impôt, dans ce cas, devient un fardeau écrasant ; il épuise le pays, 1] prend sans rendre; mais si, au contraire, ces ressources sont employées à créer de nouveaux éléments de production, à rétablir l'équilibre des richesses, à détruire la misère en activant et en organisant le travail, à guérir enfin les maux que notre civilisation entraine avec elle, alors certai- nement l'impôt devient pour les citoyens, coinme l'a dit un jour un ministre à la tribune : le meilleur des placements. (*) () Napoléon IT, 1* volume, pages 144, 115, 116. k 5 4 LÉ CRORATSE ol Jia ] 4 0 Ed Ld - - ; ; ADN UE ALT AU dis 4 is + L = e j ne - . 4 R FC A ‘ i va 4 - * L . _ LL à » < 1 f y » L É : Q ‘À 4 L ? à es L À - à . . À : si 1 r LL CA ù D 4 L 4 sh Le d'u Le . L . y " . Ÿs L lt = 4 ” . e 1 } =: ; PE Te a 2E' mt: LASER Le VIT. Défaut d'assistance dans les campagnes. Il vaudrait mieux établir une fabriqne dans un village, a-t-on dit, que d'y fonder un hôpital parce qu’il vaut mieux donner du travail, que des bouillons de pauvre; mais il s'opère dans l'existence de l’homme, des temps d'arrêt ou k — 110 — au moins des époques fatales qui ontfait recon- uailre que le travail est à l’âge mür, ce que l'assistance est à la misère et à la vieillesse. Rien ne prouve davantage l'appréhension dont les classes laborieuses se sentent menacées, que le malaise qui les chasse des lieux où elles sont. C'est l’insomnie du malade qui se retourne sur son lit de douleur. L'un des motifs qui attirent encore l’ou- vrier de la campagne vers les villes, c'est l'espoir en cas de chômage et de maladie d’ob- tenir l'assistance; c’est l'espoir de ne pas ar- river sans ressources au terme de sa carrière, c'est l'espoir de trouver des écoles gratuites, des salles d'asile, des ouvroirs pourses enfants, et souvent pour Jui-même des cours industriels etgratuits. S'il veut se marier, des associations bienfaisantes viennent le solliciter et font les jrais de la cérémonie, Si la maladie le surprend, — Ali — l'hôpital le reçoit, la pieuse sœur de charité lui donne ses soins, et il conservera pour les jours de sa convalescence Îles économies de ses journées de labeur. Dans sa vieillesse, il peut devenir pensionnaire d'un hospice, mais c’est à Paris, et Dieu en soit loué, que la bien- faisance déploie surtout ses ressources : Fonda- tions publiques et privées, caisses mutuelles et spéciales, invalides du travail, cachets de soupes, de pains et de viande, caisse de boulangerie, fourneaux économiques, distribu- tion à domicile, hôpitaux, orphelinats, loteries, sociétés mutuelles, bals pour les pauvres, dames de charité, commissions instituées pour suppri- mer ou faire améliorer les logements insa- lubres. (”) ()A Lyon, une société de Dames charitables paie une — 112 — M. Husson, chef de division à la Préfecture de la Seine, nous apprend dans son ouvrage des consommations de Paris , et nous copions textuellement que : « Les qualités nutritives , la blancheur et la qualité du pain de Paris, en font une nourriture appétissante et pleine de saveur. Vendu par la boulangerie parisienne , il est recherché de toutes les classes de con- sommateurs. Le pauvre lui-même n’en veut pas d'autre, l'administration municipale qui, chaque année, avait coutume de distribuer aux bureaux de bienfaisance, la farine nécessaire à la confection du pain bis et de bonne qualité, destiné aux indigents , a dû renoncer a cette dotation en nature. Dans les asiles consacrés aux vieillards et aux infirmes l’administration mère indigente qui nourrit son enfant, comme si cet enfant était un nourrisson étranger. lo e— hospitalière fait servir un pain demi-blanc dont se contenterait volontiers un consommateur aisé. » Îl en est de même pour les prisons. (” Les petits cultivateurs de nos contrées ne jouissent pas de tant d'avantages ; malgré leurs rudes travaux, leur stricte économie, ils man- gent tout au plus une fois par semaine de la viande avec leur pain noir. Le questionnaire officiel et départemental nous apprend que la moyenne de salaire et de dépense pour une fa- mille composée de cinq personnes de manou- vricrs des arrondissements de Lille et de Cam- brai, est de 819 fr. par an, ce qui fait 45 cen- times par jour pour chaque individu. () Les Consommations de Paris, par Amand Husson, chez Guillaumin et Cie ( ch. 2, p. 78). — 114 — Mais l'auteur des consommations de Paris ajoute que les habitants des campagnes trou- vent dans la pureté de l’air atmosphérique, dans l'exercice modéré de la force musculaire, dans l'habitude des repas réguliers et sobres des éléments très utiles à l'équilibre des fonc- tions vitales. « Grand merci, dit M. de Lavergne, mais si à ces avantages , ils pouvaient ajouter un peu de viande et de pain demi-blane, cela n'en vaudrait que mieux ! » Dans la plus grande partie de nos campa- gnes, qu'y a-t-il en fait de secours ? Quelques dames compâtissantes qui s'efforcent de don- ner l'impulsion et dérobent à leurs occupations de chaque jour, de précieux moments pour sa- tisfaire au devoir sacré de l'humanité; le cul- üivateur qui ne refuse jamais un morceau de pain et un abri au vieux serviteur que l’âge a forcé d'abandonner la charrue pour prendre — 115 — la besace; le bon curé qui doune au pauvre tout ce qui ne lui est pas de la plus indispen- sable nécessité; le Jeune médecin, rempli de dé- voüment et de savoir, et dont la bourse est vide. Mais cette intervention d’une charité privée qui s'exerce souvent de la façon la plus large, peut disparaître avec les personnes dont elle émane et ne constitue ni une organisation régulière, ni une garantie suffisante contre toutes les chances d’infortune qui atteignent les malheu- reux. La somme totale affectée par la charité publique et légale au soulagement de la misère, s'élève annuellement à 117,124,650 fr. d0 c. On estime que près des trois quarts de cette somme, sont employés en secours dans les villes et répartis sur une population deux fois moins considérable que celle des campagnes. I existe en France 37,000 communes et 9,536 bureaux — 116 — de bienfaisance. Les grandes cités en possèdent plusieurs, les villes au moins un; il y a donc plus de 28,000 communes qui sont dépourvues de ces précieux établissements. Nous sommes loin de réclamer une égale ré- partition, nous savons tout ce qu'il y à de res- pectable et de sacré dans l'intention des dona- teurs ; nous ferons remarquer seulement que ce point de la question touche encore à l’absen- téisme, car ceux qui possèdent à la campagne mais qui habitent les villes, sont naturellement entraînés à exercer leur bienfaisance en faveur de ces dernières. Si parfois il existe dans nos communes rurales, un bureau de secours qui dispose de quelques centaines de francs, on n’y trouve ni une pharmacie gratuite, ni une sœur de charité, ni un toit pour abriter la tête du mourant qui souvent, expire dans une cabane isolée au milieu d’un désert de boue. AT Les habitants de nos campagnes ignorent sans doute cet adage latin : Ubr benè, ibi pa- tria, mais ils en ont le sentiment; ils ignorent les détails des articles de nos codes, mais ils savent qu'on est secouru plutôt à la ville qu’à la campagne. Une loi du 24 vendémiaire an I, déclare que le séjour d’un an dans une com- mune suffit à tout citoyen majeur pour y ac- quérir le domicile de secours. Cette loi n’a Jamais pu être mise à exécution dans les campagnes, et l’on ne doit pas s'étonner que dans l'espoir de trouver le travail et l’assis- tance dans le besoin, les ouvriers se dirigent à flots vers les grandes villes, comme le fleuve s'écouie sur la pente de son lit. fui DUT sam, senti Ms DT PAS at va. ne {at ME sx Rat pins E , jus ne ts than pl dent: rL THÉ * ; ET aie AMEN: NUM! An 4 ANTINTE CRT oIte ii L lof ARAU EE A: de 00 27 ph À ee vE * ; | IT HAVE NT AVES Et MUEOLA RASE SAN RERO Ag k1@ ER hi :SRtes LEON CI LOPAET EURE Mob. s k n ’ # Aire! x CERN RL ACTE &: { mi -edrths 4 = £ L ra En lOUTATTONT id RU UT TT tft £ ‘ nd . nl A - LMILUIIPETTIONS Lie 1881 ME MO TU È È d _ 7 EUR * re Lu La 14 [1 ete fi } pt | ‘ { 15) ka 4 . à mr 116124 h ! F : A VE 2 6 n Qt ; x te À Pè Ts x * | Je É UN ae & Fe] À ee à 4 De L LA L VAI. + CA Régime commercial applique à l'agriculture. M LATE } 7 ( » M & L VIII. Régime commercial appliqué à l’agriculture. De nouvelles causes viennent s'ajouter encore à celles que nous avons déjà indiquées. On ne saurait se livrer à des opérations dont la consé- quence serait la ruime, et le cultivateur qui cal- cule, ne sème que s'il a l'espoir de recueillir. Or pa il n’a ni protection pour son industrie, ni crédit pour son négoce, n1 moyens d'instruction profes- sionnelle pour arriver au progrès et, par suite, son bénéfice restreint ne lui permet pas de mettre un prix assez élevé au salaire. Donc les ouvriers s’éloignent de lui et le délaissent. Il n’a pas de protection pour son mdustrie, et cependant comme toute société doit disposer des éléments indis- pensables au maintien de la sécurité des citoyens, d'une armée pour défendre son territoire, elle doit posséder également les moyens légaux de sauve- garder ses intérêts industriels et commerciaux. Le prix de revient de chaque production, y com- pris les frais de transport, n'étant pas le même dans tous les pays, on a dû créer et l’on doit respecter le système qui a pour but de laisser un bénéfice légitime au producteur national, tout en l’excitant à produire le plus abondamment et à vendre le moms chèrement possible. C'est l’ensemble de ces dispositions que lon — 123 — nomme le régime protecteur et l'équilibre doit en être maintenu entre toutes les mdustries, car toutes subissent l’influence de l’agriculture; elles gran- dissent ou périclitent avec elle. Prétendre les dé- velopper isolément, c’est vouloir élever un édifice et le raffermir sans en augmenter les fondations. Les faits viennent chaque jour confirmer cette maxime que læ prospérité manufacturière et com- merciale d’un pays lorsqu'elle n’a pas lagricul- türe pour soutien, est un corps monté sur des échasses et que la moindre commotion renverse. Voilà l’explication de ces paroles si souvent répé- tées en France : Le commerce ne va pas. W ne va pas parce que l’agriculture souffre et qu’à des époques périodiques , 11 y à pour le commerce et les mannfactures, 25 millions de consomma- teurs, qui font défaut sur le marché... Or, au pomtdevue du régime protecteur les intérêts de l’agriculture sont complètement à déconvert; les deux grandes productions nationales , le blé et la viande ne possèdent plus pour lesprotéger, que — 124 — des droits fictifs; on s'occupe en ce moment de faire disparaître toute protection sur noslins. Les tourteaux si recherchés par nos agriculteurs du Nord, peuvent franchir la frontièreen soldant un droit illusoire et, par contre, les huiles étrangères peuvent entrer presque sans rétribution ; d’un autre côté , nos sucres supportent des droits énormes dans l’intérêt du fisc. Le guano est sou- mis à des droits différentiels, ce qui en a réduit en France, l'importation à 6,000 tonnes, lorsqu’en Angleterre elle a été de 80,000 et de 430,000 en Amérique. De cette façon, l'Agriculture est com- plètement livrée aujourd'hui aux ravages qu’exer- cent les libre-échangistes qui ne lui laissent jus- qu'à présent, que le mauvais côté de leur système. Est-ce une manœuvre de leur part, dans l'espoir de séparer un jour en France, l'élément agricole de l'élément manufacturier, et d'augmenter ainsi les rangs de leur croisade anti-nationale ; nous sommes certains que l’agriculture ne deviendra jamais la complice de doctrines qui complète- raient sa ruine. 2495 Cependant le maintien du décret qui suspend les bons effets de l'échelle mobile , lorsque nos grains sont abondants et à vil prix, est venu, en quelque sorte, briser le dernier lien qui attachait l’homme au travail de la terre. Cette disposition nous remet en mémoire, l'acte d’un des gouver- nements déchus, invitant les propriétaires de la capitale, à susprendre toute poursuite contre leurs locataires qui se déclaraient, par écrit, dans l’im- possibilité de payer leurs termes, et en regard de cette mesure si favorable aux locataires , enga- geant par une circulaire énergique ses agents, à faire rentrer dans les caisses de PEtat, un impôt extraordinaire. Comment les propriétaires pou- vaient-ils payer leurs contributions ordinaires et extraordinaires, si les locataires ne payaient pas leurs loyers ? Comment nos cultivateurs pourront-ils acquit- ter leurs impôts et leurs assurances, satisfaire 9 — 126 — aux charges nombreuses qui les accablent, s'ils sont forcés de renoncer à la culture de leur pro- duit le plus important ou de lutter avec létran- er en perdant du prix de revient au prix de vente, le quart au moins de la valeur de leur marchandise ? Comment pourront-ils lutter, S'il ne leur est accordé aucun allégement , aucune diminution d'impôts, si leurs chemins restent impraticables, si les bras sont de plus en plus rares, sila man- d'œuvre est très élevée , s'ils doivent aussi payer très cher ce qu'ils achètent et vendre très bon marché ce qu'ils produisent, tandis que leurs heureux concurrents sont affranchis de toutes charges, ne payent aucun impot, ne participent en rien aux embellissements de notre pays ? L'application des principes de l'échelle mobile, remédiat en partie à cet inconvénient , son mé- — 127 — canisme rétablissait l'équilibre entre lintérèt des consommateurs et ceux des producteurs. Les bons comptes faisaient les bons amis. Le main- üen dece principe en établissantle tarif sur cha- que année au lieu de chaque mois, eût satisfait à tous les besoms. Mais la suppression du prin- cipe, amène une nouvelle cause d’émigration au moment où, de toutes parts, on s'inquiète de l'épuisement et du dépeuplement de nos cam- pagnes ? Peut-on objecter à l'appui de la suppression de Péchelle mobile, que le sol français n’est ni assez riche ni assez fécond, ni assez étendu pour nourrir ses nombreux enfants, ou bien encore que c'est l'intelligence et l'aptitude qui nous man- quent ? Non, voici la vérité à ce sujet : La pro- duction du blé qui, en 1815 , après de longues querres était de 39,460,971 hectolitres: s'est suc- cessivement accrue ; en 1829, elle était de TC ee 64,285,521 hectolitres; en 1847, de 97,611,140 hectolitres. (*) Iei se trouve le dernier chiffre , faute de documents certains, mais depuis dix an- nées la production doitavoirdépassé de beaucoup 100,000,000 d'hectolitres. La population de la France, en 1815, était de 30,000,000 d’âmes; en 1859, elleest de36,000,000 La population n’a donc pas augmenté d’un ein- quième : les revenus de la terre ont quadruplé. Les bienfaits d’une longue paix , la sagesse de la loi avaient engagéle cultivateur à se livreraux rogrès d'une culture à la fois intensive et extensive. [Il à défriché ses bois et redoublé d'efforts (”),mais la loi disparait, le sol manque (*) Maurice Bloch : Recueil, charges de lAgriculture en Europe. (")Notre moyenne en produits, n’est encore que de 14 AVE sous ses pas; la route devient périlleuse, on le jette dans l'inconnu; il hésite, 1l évite les dé- penses les plus utiles, repousse toute idée d'a- mélioration et renonce bientôt à une culture qui ne lui présenterait que des chances de perte. L’excessif bon marché amènera pour conséquence infaillible lexcessive cherté. Il est facile de démontrer cependant que le principe de Péchelle mobile a donné raison à noslégislateurs. Quarante années de prospérité ont tracé son passage jus- qu'à nous et si quelques Jours désastreux sont venus assombrir la situation, la production aug- mentait, et la movenne des prix de nos céréales, a satisfait à tous les besoins. L'histoire elle-même vient plaider en faveur du maintien de ce prin- hectolitres de blé par hectare; celle des Anglais de 22; celle des Américains de 40. Nous avons de la marge par la culture intensiveet nos 8 millions d'hectares de terre inculte, — 150 — cipe. Vers la fin du XVIIe siècle, on comprima l'essor de l’agriculture par mille entraves. On tenta des essais, et le laboureur ne recevant plus le légitime tribut de son travail, quitta l’atelier agricole et déserta vers la ville ; l’agriculture dé- périt abandonnée, et la disette en fut le résultat. On avait Versailles étincelant de splendeur et les terres du Royaume en friche. Les grandes villes étaient dévorées par le luxe et les paysans mangealent de lherbe dans les campagnes, ou mouraent de faim dans leurs chaumières. () Nous sommes assurés qu'un gouvernement éclairé n'exposera pas la nation à de tels dangers (°) Vauban, Saint-Simon. — 191 — et que nous reverrons fonctionner bientôt par le rétablissement de l'échelle mobile, un système qui contient en lui-même des garanties si utiles à la tranquillité et au bien-être de l’industrie et de Pagriculture françaises, Si le mal n'était arrêté, notre nation en un jour d’infortune, aurait à subir les conséquences inévitables de ces dispositions auxquelles les pra- ticiens et les principaux intéressés ne prennent aucune part. [ls doivent s'en mquiéter beaucoup, mais ne peuvent S'en mêler en rien. C'est sur leurs épaules que se jouent les parties d’expé- rlences, de mécomptes et de mésaventures dont ils sont victimes parce qu’un décret peut, d’un jour à Pautre, venir leur apprendre qu'ils sont incendiés par les doctrines de ces esprits ardents qui pensent que toute innovation est un progrès, tout changement une amélioration ; mais en attendant, comme les garanties n'existent plus, — 132 — que l'argent n’a pas d’entrailles, qu'il est craintif et soupçonneux, 1l déserte les campagnes et l’ouvrier s’empresse de le suivre, car le capital seul peut fournir le travail et lesmoyens d'exister. QI CHR E PTS PK Defaut de credit agricole. Le erédit pour le laboureur remplacerait, 1 est vrai, le capital; ilest le nerf de l'agriculture et du commerce, comme l'argent est, dit-on, le nerf de la guerre. Il serait d'autant plus imdispen- sable aux opérations de la culture, que celles-ci — 136 — sont longues et chanceuses. Si le cultivateur manque une récolte, il est remis à l’année sui- vante qui peut aussi n'être pas bonne; 1l est dès- lors forcé pour satisfaire à ses engagements, de vendre ses produits à vil prix; l'épuisement de ses ressources le livre à la merci des spéculateurs et des usuriers qui, ayant soutiré son dernier écu, le mettent dans l'impossibilité de pourvoir lan- née suivante aux sacrifices qu'exige toujours une bonne culture, Sa ruine enlace dans les étreintes de la misère tout ce qui l'entoure, et les spécu- lateurs en créant la hausse des prix, profitent seuls enfin d’un malheur publie. Mais si la so- ciété tout entière, est mtéressée à ce qu'il v ait un bon crédit agricole, le manque de ce crédit a englouti de belles exploitations, et dans la posi- tion où se trouve le cultivateur, qui voudrait lui faire crédit ? Il à bien entendu dire du fond de ses campagnes, qu'à Paris on avait mis sur l’en- seigne d’un grand hôtel: Crédit foncier de France, mais il ne se souvient de Paris que par la crainte — A13T — qu'il a d'y vor déserterson fils. Pourlui, c’est trop loin ; 11 désire connaître celui avec qui il opère. Défiant et pour cause, à propos de crédit, il re- doute tout autant celui à qui il emprunte, que celui à qui il prête, et nous allons voir que son intelligence la bien servi, car en s'adressant au crédit foncier, 1l se serait exposé à trouver porte close ou à ne pas sortir du labyrinthe dans lequel il se serait engagé. LE L'idée de la création du crédit foncier en France, est arrivée en ligne directe de la Polo- one,de la Prusse et de la Russie, où 1l existe des associations, sorte de syndicat formé par les pro- priétaires désirant s’entr'aider mutuellement. Ils réunissent à cet effet leurs capitaux disponibles en une caisse commune qui sert aux besoins de la propriété ; les opérations de cette caisse, sont d'autant moins dangereuses, que dans ce pays de fiefs et de féodalité, les subdivisions de — 138 — partage de familles et les hypothèques, y sont inconnues et impossibles. Le Gourvernement fran- cas, en instituant le crédit foncier, a dû néces- sairement coordonner les règles de son institution avec l’économie de notre état social et de notre législation. Les précautions les plus sages ont été prises pour ne pas placer à l'aventure, un capi- tal considérable, qui, après tout, était une.pro- priété nationale; mais 1} en est advenu que la muluplicité même de ces précautions, produit un déraillement dont les conséquences ont été profitables à la grande propriété et fatales à la moyenne et à la petite culture. [l ne pouvait en être autrement, le crédit fon- cier ne prêtant que sur üitre légal. Or dans beau- coup de contrées, les lacunes, les irrégularités viennent compromettre la pureté du titre qui souvent même a tout-à-fait disparu. La grande ropriété seule est en règle, mas si cette pre- pre] É — 159 — mière entrave n'avait pas barré le chemin au cultivateur, 1l en est d’autres qu'il n'aurait jamais pu surmonter. Pour obtenir l'argent dont il avait besoin, il aurait fallu qu'il s’adressät à Paris, qu'il écrivit, sollicitàt, se mit en rapport avec les sens d'affaires et enfin ce n’eût pas été de l'ar- sent qu'on lui aurait remis, mais une lettre de sage ou obligation ; perdant au change et sol- dant le courtage, il serait revenu chez lui hale- tant, jurant mais un peu tard, qu'on ne Fy reprendrait plus. Voici les preuves à l’appui de notre assertion : les résultats démontreront qu'on a fait fausse route, que le crédit foncier n'a pas constitué le crédit agricole. La moyenne des prêts hypothé caires a été, dans une période de dix années, de plus 400 millions de francs par an. Les demandes d'emprunt, faites au crédit foncier, s’élevaent au Aer mars 1858, à 231 millions, dont 85 millions — 140 — régularisés par acte définitif, soit une moyenne de 15 millions en 6 années, au lieu de 400 mil- lions. Sur cette somme de 85 millions, 58 sont garantis par des propriétés urbaines. Le dépar- tement de la Seme seul, v est compris pour 50 millions. On peut donc se convaincre que les prêts ne sont garantis en général que par les propriétés de grande valeur sur lesquelles on em- prunte généralement, non pour améliorer la terre, mais pour augmenter des jouissances de luxe, et sans doute pour compléter une ruine. Ces prêts ne profitent nullement au cultivateur qui n’est propriétaire qu'exceptionnellement, La grande industrie, le haut commerce, lin- dustrie moyenne et le petit négoce ont à leur disposition, tous les établissements de crédit publie et privé, depuis la banque de France jusqu'aux monts-de-piété, qui sont au nombre de 45 et prêtent annuellement une somme de HT 42,999,251 fr. 20. L'agriculture est absolument dépourvue de toute institution de crédit. Nous ne voulons pas insister, nous savons que Vattention du gouvernement est dirigée d’une façon toute spéciale sur ce point de la question; nous reconnaissons qu'il à déjà fait de grands efforts pour la résoudre, mais en attendant, le paysan plus que tout autre, a le droit de dire que pour lui : « Crédit est mort. » Or, pas de crédit, pas de capitaux, donc pas d'industrie , pas de salaire pour l’ouvrier ; pour être logiques, nous sommes forcés de rappeler que la conséquence, c’est encore l'abandon du travail des champs. à 4 s. à Ce? Tu TI Ta PA Qui sas En LE " We à ne Tr ir À gr = . M = ESA: wi k : 5 MU MET NTSC aies RTE Fr à RL « A” ps s . _— ? ni q rs ‘ 4 « _ à + \ 7m ” é Ë Éthe. AL ER His “afsl ‘o J 411 )LRE AA Et TON M tr Le. HA LENS UD RAS OCT RE ' | 24 th . Ka 4 fa 1 et 5 RL + 7 Ne ét AU: 4 1h : | EL at À L t " N = +5 [A PA n 2 if 3 s « . } f Her » LASTAS d J n ? > Te : * F Fa L_] , | / 2 1 \ + PL s | À Lo] & - ù L « # or L ’ : , # uction industrielle et instruction agricole. + 5 Fr . l ] C2 L > à , : EXRPRIR, té dé Wr A3 4 10% = . + . . « * à à 2 # 1 L x . L , . a ‘ . À ; L « » À, ’ . 7) f SUIS ETTE Instruction industrielle et instruction agricole Vous voulez faire aimer l’agriculture, faites ce qui est nécessaire pour la faire aimer. Otez-lui ce caractère de vulgarité et d’asservissement que lui donne la routine. Elevez- la à la dignité d’une science, car c’est la reine des sriences. Ce n’est pas la nature de ses opérations, ce n’est pas le travail manuel qui la font dédaigner. Les méde- cins, les chirurgiens, les chimistes font des opérations plus repoussantes que la plupart de celles auxquelles se livrent les paysans, mais leur intelligence relève leur travail et lui donne de la dignité. Ce qui fait dédaigner l’agriculture, c’est l'ignorance, c’est la routine. Ayez des cultiva- teurs instruits, ils seront bientôt inventifs; ils trouveront aussi des procédés nouveaux, des pcrfectionnements inespérés, et la terre, pour être cultivée par des mains habiles, n’en sera que plus féconde. Cette vérité commence à être bien comprise pour les arts manuels et ce n’est pas sans une profonde satisfaction que nous voyons, chaque jour, se développer l’enseignement profes- } ë — 147 — sionnel ; c’est une tendance que nous aimons à signaler. Au-dessous des trois écoles impériales d'arts et métiers qui ont un caractère de géné- ralité, on compte de nombreuses institutions locales dont le but exclusif est d'enseigner tel ou tel élément des sciences envisagées dans leurs applications aux arts industriels. — L'étude de certaines parties de la techno- logie a été introduite dans presque toutes les écoles primaires de second degré. — Les Frères des écoles chrétiennes s’effor- cent tout particulièrement, depuis plusieurs années, de l'emporter à ce sujet, sur les écoles primaires. Des écoles gratuites de dessin, des écoles pro- fessionnelles également gratuites, des cours pu- + — 148 — blics élémentaires de chimie, mécanique, phy- sique, géométrie, etc., ont été institués dans la plupart des villes de l'Empire. Parmi les établis- sements locaux qui ont un caractère spéciale- ment industriel, on remarque: — Celui des dentellières de Dieppe et l'or- phelinat de Mesnières, dans l'arrondissement de Rouen. — Les écoles de dessin industriel du Haut- Rhin. — Celle de Saint-Etienne pour les articles de mode et de rubannerie, — Celle de Strasbourg pour le travail du fil à la forge et à l’étau, l’art du tourneur, la menui- serie, la lithographie, les manipulations chimi- ques, etc., etc, — 149 — — Les écoles d'horlogerie du Doubs et du Jura, et celles de la Meurthe pour la confection des ustensiles en bois et des jouets d'enfants. — Les écoles de dessin de fabrique , d’ar- chitecture et d'ornement, ainsi que de méca- nique , de chimie, etc., de Marseille , Avignon, Montauban, Digne, Auch, Grenoble, Tarbes, Grasse , etc. — L'école des mineurs de Saint-Etienne et celle des maîtres ouvriers d’Alais. — Les sociétés d'instruction industrielle de Nantes, Bordeaux, Rouen, Menars dans le Loir- et-Cher, Tours, Limoges, le Puy, etc. I faudrait un volume pour donner la nomen- clature entière des établissements de ce genre. —. 150 — [l y en a partout et nous devons le constater, partout les conseils communaux, départemen- taux, etc., leur viennent en aide. Que sont nos rares et modestes fermes-écoles auprès de ces richesses ? Dieu nous garde, nous ne cessons de le ré- péter, de combattre cette généreuse impulsion donnée aux arts industriels, car pour nous, agri- culture et industrie sont deux enfants que la Francedoitañner avec la même sollicitude. Nous demandons que ce qui est reconnu nécessaire pour l’une, le soit aussi pour l’autre; que ce qui est fait pour les arts industriels soit aussi fait pour l’agriculture ; pour l’agriculture qui est Ia mère nourricière des arts, qui leur fournit les matières premières dont non-seulement la quan- lité mais Ja qualité importe tant au travail; car la qualité ajoute toujours à la beauté et au prix. L'agriculture sera-t-elle donc la seule science qui ne doive s’apprendre que par la routine et qui manquera d'écoles, précisément parce qu'elle à un plus grand nombre d’écoliers ? Pour nous, il y a peu de différence entre les di- verses occupations des hommes. Bien faire, voilà le principal ; et pour bien faire, il faut être ins- truit ; aussi, est-ce avec un vif plaisir que nous venons de lire dans les discussions de la tribune d’un État voisin, que l’instruetion obligatoire de- vait être considérée comme le triomphede la civi- lisation. Mais il est un complément d'instruction tout aussi précieux pour le cultivateur, c’est la discussion qui fait jaillir la lumière, c’est la pu- blicité qui le tient au courant des progrès de la science, excite son émulation, proclame le succès. En Amérique eten Angleterre, les assemblées agricoles, les concours et les comices se mul- — 152 — tiplient, la liberté la plus entière y préside; trente journaux spéciaux, rédigés par les hommes les plus habiles, sont répandus dans le pays à 500,000 exemplaires et les journaux littéraires et politiques se rendent les échos de leurs confrères, en répétant à l'envie leurs le- çons, car dit le fermier américain ou anglais: « Souvent une parole bien placée, peut devenir une pomme d'or. » En France on semble avoir oublié ces belles paroles de Montesquieu : « Les pays, ne sont pas cultivés en raison de leur fertilité, mais en raison de leur liberté, » En France on s'expose à anéantir le complément de l’instruc- tion du cultivateur, on y confond trop souvent la liberté politique que nos lois ont restreinte, avee cette liberté que doit posséder tout citoyen de pouvoir défendre sa fortune et ses intérêts. L'excès de zèle produit la crainte et le silence, PE TR 193 — entrave tous les rapports, supprime toute im- pulsion bienfaisante, et. par suite d’un senti- ment de conservation personnelle, mais bien légitime, les organes mêmes de la publicité, tremblent lorsqu'ils veulent défendre l'intérêt général. On peut comparer les deux systèmes et dé- eider si les culivateurs anglais et américains n'ont pas dans leurs riantes campagnes, une somme de félicité, d'encouragement et de liberté plus considérable que celle dont jouit le paysan français, aussi l’un reste, l’autre s’en va. XI. Considérations générales p 2 \A CE. Gonsidérations genérales. Tels sont les motifs du dépeuplement, il tend à s’aggraver chaque année. Si l'on inter- rogeait nos cultivateurs, on acquerrait cette triste conviction que si tous ne partent pas, presque tous envient le sort de ceux qui s'en vont. Depuis un siècle, les mêmes causes ont pro- duit les mêmes effets; la réhabilitation de l’agriculture ne suffit pas ; aujourd’hui comme autrefois, elle voit la fortune se faire autour d'elle dans les grandes villes, mais son aurore rémunératrice n'étant pas encore levée, elle est toujours déshéritée. On voit donc que la solution du problème ne serait point dans l'application de ces moyens qui tendraient à diminuer le salaire des vuvriers des grandes villes pour l’équilibrer avec celui de leurs confrères agricoles, de rendre le citadin aussi malheureux que lhabi- tant de la campagne; ce serait le systèm ede l'envie et de la jalousie. Il faut établir l'égalité dans la prospérité et non dans la misère; il faut respecter les lois éternelles et divines du pro- grès qui ne consistent pas à faire descendre celui qui est en haut, mais qui veulent autant — 159 — que possible faire monter celui qui est en bas. Il faut enfin se rappeler ces paroles si popu- laires : « Ne raccourcissons pas les pans d’ha- « bits, mais allongcons ceux des vestes. » Pourquoi accuser le paysan? I obéit à une loi inmuable, celle de l'intérêt personnel. In- terrogez les fils de cultivateurs qui abandonnent un sol riche et fécond pour chercher du tra- vail ou des emplois : ils vous répondront qu'ils espèrent trouver dans les grandes villes ce que n'a pu leur donner la culture de la terre. C'est done avec raison qu'on a dit de lui : « 1] travaille pour donner du pain à la nation, il est le plus mal nourri; il s’épuise à fournir les matières qui servent à l'habillement de ses concitoyens, ilest le plus mal vêtu; malgré ses prestations en nature, ses routes sont des cloaques, il à de la boue jusqu’à la cheville, — 160 — il estle plus mal chaussé. () Qu’a t-il done fait pour être ainsi déshérité de la rétribution et des droits qui appartiennent à un titre égal aux habitants d’une même nation ? » Ecoutons ce que dit un auteur moderne : « Mystère étrange; il “faut que cet homme ait un trésor caché... Il en à un, en effet : le travail persistant, la sobriété et le jeûne. Dieu semble avoir donné pour patrimoine à cette indestructible race, le don de travailler, de combattre au besoin sans manger, de vivre d'espérance, de gaîté courageuse. » Vers 1500, quand la France épuisée par Louis XI, semble achever sa ruine en ftalie, la noblesse qui part pour combattre, est obligée (‘) Bonnemere. ER de vendre; la terre passant cn de nouvelles mains, refleurit tout à coup: on travaille, on bätit. Ce beau moment (daas le style de Fhis- toire monarchique) s’est appelé le bon Louis XI. Il dure peu malheureusement. La terre est à peine remise en bon état, le fisc fond dessus ; les guerres de religion arrivent qui semblent raser tout, jusqu'au sol; () misères horribles, famines atroces où les mères mangeaient leurs enfants !.. qui croirait que le pays se relève de là ? Eh bien ! la guerre finit à peine, de ce champ ravagé, de cette chaumière encore noire et brü- lée, sort l'épargne du paysan. Il achète; en dix (‘) Voir Fourmenteau : Secret des finances de France. 1981; Preuves, p. 995 — VITE. ans, la France a changé de face, en x A . PR: trente, tous les biens sont doublés, Conclusion \ XLL. Conclusion. En ouvrant une enquête sur ectte grave ques- tion, le gouvernement à prouvé que sa solli- citude était éveillée sur le sort des classes agri- coles qui l'en remercient. Qu'il veuille nous excuser, si notre langage s’est écarté des règles — 166 — d’une constante approbation; on nous 1 de- mandé la vérité, notre devoir était de dire toute entière. Nous avons compris d’aneurs, que nous étions loin de cette époque où Louis XV demandant à l’un de ses courtisans l'heure qu'il était ? celui-ci répondit : « L'heure qu'il plaît à Votre Majesté, Sire.» Le silence qu'on observe avec un prince, dans les mo- ments de crise et de danger, est l'effet d’un zèle inintelligent ou intéressé et de l’abaissement des esprits; il finit par produire sur une na- tion, les résultats que l’usage immodéré de l'o- pium exerce sur le corps humain. Nous, que les passions politiques ne sauraient aveugler, qui avons la reconnaissance du bien de quelque côté qu'il nous advienne, nous di- rons que justement préoccupés des intérêts de l’agriculture en souffrance , nos administrateurs consentent à reporter sur un seul arrondisse- NET > ment la semme qu'il faut dépenser pour ouvrir une rue ou construire un édifice, qu'ils se rap- pellent qu'on mettrait en bonne culture un hec- tare de mauvaise terre, pour ce que coûte une pierre sculptée placéesur la façade d’une maison de Paris, et les résultats d’une semblable expé- rience les détermineront à renoncer à tant d’infé- condes productions, ils verront bientôt le salaire des ouvriers des campagnes se relever pro gressivement, s'équilibrer avec celui des grandes villes sans porter atteinte à ces derniers. L'Empereur a donné l'exemple, en faisant exécuter des travaux agricoles, il a repeuplé des contrées presque désertes , rendu l'existence el l’activité à trois départements, (*) en y refou- lant les capitaux et le travail. (*) Les Landes, l'Indre et le Loiret. AGE Nous dirons : Ennoblissez les travaux de la terre, vous doublerez sa fécondité, multipliez nos voies de communication, suspendez les tra- vaux publics sans utilité, modérez le goût du luxe, combattez l’influence des grandes villes , favorisez dans le hameau et dans le village les industries mixtes, propagez l'instruction, hono- rez tous ceux qui consacrent à la culture leur intelligence et leur fortune, reportez toute l'énergie de votre activité sur les campagnes, déversez vos bienfaits sur les habitants des provinces comme sur ceux de Paris, maintenez la paix par tous les moyens que l'honneur n'interdit pas; nos injures sont vengées, la France a conquis le premier rang parmi les nations. Réduisez le nombre des soldats, dimi- nuez les impôts ; conservez les garanties aux- quelles nos industries doivent leur grandeur et comme couronnement de l’œuvre, accom- plissez la promesse inscrite au froutispice de notre Constitution, donnez aux Français ce n à à PE ut 4, LA , f NE œ x nn cs Fe sé EN] : "Th % LE + ‘ ai é de Fe An icipe de liberté dont ils sont si fiers et si , et votre nom sera béni comme ont été is les noms de Louis XIL et d'Henri IV. TABLE. CR ——— —— Chapitres. Page I. Mouvement de la population en France. I. Mouvement de la population dans le dé- paiement du Nord." sn HIT. Solidarité des intérêts agricoles et manu- MARIBESS 2 SAS Re GA et RER MR AhSentéisme. :- "4 C4 4.4 7, C:0709 V. Système d'organisation de l’Armée . . 71 VI. Travaux dans les grandes villes . . . 87 NII, Défaut d'assistance dans les campagnes . 109 Mt LES VI. Régime commercial appliqué à l'agriculture IX. Défaut de crédit agricole . . . , . X. Instruction industrielle et instruction A ÉPOI se DE ee ARE XI. Considérations générales XIE Conclusion Lille, imp de Lefebvre Ducrocy 19 194 dt ra nt , Me. PLEASE DO NOT REMOVE CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY 600 O1 20 € 60 6€ 9 W311 SOd 41HS AVS 3ONVH Q MAIASNMOQ