*' .*■- %-. H. r « 'A 1% fS j» t - »- .«. • ms^/' 'êi N THE CU5T0DY Or TME BOSTON PUBLIC UBRARY. 5HELF N^ ^ AOAMS ^ i. 8k % -'Sf ^ ^^.-Q é/.r %s^ ***^, / ' ^ », DIC RAI S O N N É U N I V E SEL D'HISTOIRE NATURELLE. •€5 TOME QUATRIEME. :©• \ CTIONNA RAI S O N N É UNIVERSEL D^HISTOIRE NATURELLE; CONTENANT L^HÏSTOÏRE DES ANIMAUX, DES VÉGÉTAUX ET DES MINÉRAUX, Et celle des Corps céleftes , des Me'téores , & des autres principaux Phénomènes de la Nature; j V E c L'HISTOIRE ET LA DESCRIPTION DES DROGUES SIMPLES TIRÉES DES TROIS REGNES; Et le détail de leurs ufages dans la Médecine, dans l'Économie domeftique & champêtre, & dans les Arts & Métiers ; Plus j une Table concordante des Noms Latins ^ & le renvoi aux objets mentionnés dans cet Ouvragée, Par M. Val M ONT de Bomare, Démonftrateur d'Hiftoîre Naturelle avoué du Gouvernement; Cenfeur Royal; Direfteur des Cabinets d'Hiftoire Naturelle, de Phyfique, &c. de S. A. S. Monfeigneur le PRINCE DE CONDÉ; Honoraire de la Société Économique de Berne ; Membre des Académies Impériale des Curieux de la Nature , Impériale & Royale des Sciences de Bruxelles ; Affocié Regnicole de l'Académie des Sciences , Belles-Lettres &c beaux Arts de Rouen; des Sociétés Royales des Sciences de Montpellier, Littéraires de Caen, de la Rochelle, &c. d'Agriculture de Paris; Maître en Pharmacie. Nouvelle Edition , revue & conjîdérablement augmentée par r Auteur» TOMEQUATRIEME. A PARIS, Chez B R u N E T , Libraire , rue des Écrivains , vis-à-vis le Cloître Saint Jacques de la Boucherie. M. D C C. L X X V. Avec JppRon AT ion , et Privilège du Rou ^ ^.i-Aftrs^^.ir ^'Kf a DICTIONNA RAISONNÉ D'HISTOIRE NATURELLE. M. ABOUJA ou MABOUYA eft une efpece de falamandre de l'Amérique : on lui donne aufîî les noms de brochet d& terre , de cucît:^ du Pérou , & de fcincque brun de la Jamaïque : ce font les Sauvages qui l'ont appelle ma- houya ^ nom qu'ils donnent aux animaux les plus laids, les plus hideux , & à tout ce qui leur fait horreur. Le lézard dont il eft qiieftion , a un pied de long , &: un pouce de groffeur : fi on lui re- tranche la queue , il reffemble à un crapaud ; il a les doigts des pattes plats, larges & arrondis par les bouts ; fes griffes font femblables à l'aiguillon d'une guêpe^ : fa peau de différentes couleurs femble en- duite d'huile. Cet animal fe plaît ou fur les branches d'arbres , ou fur les chevrons des cafés : ceux qui habitent dans des troncs d'arbres pour- ris , ou dans des lieux marécageux oiile foleil ne donne pas, font noirs & affreux ; pendant la nuit , ils pouffent un cri effroyable , qui préfage infailliblement le changement de temps. Ils s'élancent hardiment fur ceux qui les agacent , & quoiqu'ils s'y attachent de manière qu'il efl difficile de les retirer , on a pourtant remarqué qu'ils n'ont jamais Toms IF, A % .^ MAB MAC , mordu ^ ou du moins que la blefTure qu'ils peuvent faire n'efl pas dangereufe. Les Sauvages vouent leurs ennemis aux griffes de cet animal. MABOUJA. On donne aufïï ce nom à une racine de l'Amérique dont les Sauvages font des maffues qui leur fervent d'armes. Cette ra- cine eft noire, longue , groffe , compaûe , noueufe , plus dure & plus pefante que le bois de fer. L'arbre d'où l'on tire cette racine n'eft pas commun : on en trouve fur le haut de la montagne de la Soufrière à la Guadeloupe. Cette racine eft fort eflimée quand elle a une figure de mafîiie , qu'elle a au moins trois pieds de long , & la groffeur du poi- gnet d'un homme. Mabouja fignifie chez ces peuples le Diahk : ils ont donné ce nom à cette racine , parce que quand ils en font armés , ils croient avoir une force plus redoutable que celle du Diable même.. MABOUYA. Fojei Maboja. MACAHALEF. Fojei Calaf. MACAME. Nom fous lequel on défigne à la Nouveîle-Efpagne , fe* cerfs & les chevreuils, MACAO ou MACAOW. Nom que les Voyageurs ont donné à un grand perroquet du Bréfil , dont le plumage eft un mélange de bleu 5 de rouge & de vert ; il eil quatre fois plus gros que les perroquets ordinaires. La couleur de la femelle efl bleue &: jaune : on en apporte aufîi de la Jamaïque : nous nous étendrons plus fur cet animal , aU mot Perroquet. MACAQUE. De toutes les guenons ou finges à longue queue , le macaque , dit M. de Buffon, efl: celui qui approche le plus des babouins ; il a , comme eux , le corps court & ramaffé , la tête groffe , le mufeau large , le nez plat , les joues ridées , & en même temps il efl plus gros 6i plus grand que la plupart des autres guenons ; il efl aufîi d'une lai- deur hideufe , enforte qu'on pourroit le regarder comme une petite efpece de babouin , sïl n'en différoit par la queue qu'il porte en arc comme eux , mais qui efl longue & bien touffue ; au heu que celle des babouins efl en général fort courte : cette efpece efl originaire de Congo ; on la trouve aufîi dans plufieurs parties de l'Amérique méridionale : elle efl fujeîte à plufieurs variétés pour la grandeur , les couleurs &: la difpofition du poil. Valgrcttcne paroît être qu'une variété du macaque «, elle efl plus petite d'environ un tiers , dans toutes les dim^enfions , au Heu de la petite crOtc de çoil qui fe trouve au fommet de la tête du-. 'MAC 5 îiiacaque , l'aigrette porte un épi droit & pointu ; elle femble difFérer encore du macaque par le poil du front qui eu noir , au lieu que fur le front du macaque il eft verdâtre. Ces deux efpeces de guenons ont toutes deux les mœurs douces , ôc font affez dociles ; mais indépen- damment d'une odeur de fourmi ou de faux mufc qu'elles répandent autour d'elles , elles font û malpropres , û laides , & même fiaffreufes lorfqu'elles font la grimace , qu'on ne peut les regarder fans horreur Se fans dégoût ; elles vont fouvent par troupes , & fe raffemblent com- munément pour voler des fruits & des légumes : Bofman raconte qu'elles prennent dans chaque patte un ou deux pieds de milho , autant fous leurs bras , & autant dans leur bouche , qu'elles s'en retournent ainft chargées fautant continuellement fur les pattes de derrière , & que quand on les pourfuit , elles jettent les tiges de milho qu'elles tenoient dans les mains & fous les bras , ne gardant que celles qui font entre leurs dents , afin de pouvoir fuir plus vite fur leurs quatre pieds : elles examinent avec la dernière exaditude chaque tige de milho qu'elles arrachent, & fi elle ne leur plaît pas, elles la rejettent à terre &: en arrachent d'autres ; en forte que par leur bizarre délicateife , elles caufent plus de dommages encore que par leurs vols. MACARET. Nom donné à un flot impétueux qui remonte de la mer dans la Garonne , il efi: de la groffeur d'un tonneau : il renverferoit les plus grands bâtimens , s'ils n'avoient l'attention de l'éviter en tenant le miHeu de la rivière. Le macaret fuit toujours le bord , & fon bruit l'annonce de trois Heues. Nous avons vu plufieurs fois ce macaret dans la Garonne & dans la Seine : voye^^ à VanicU Mer. Le makkrca des Indes Orientales eft le macaret d'Europe. MACAREUX , fratercula. Genre d'oifeau palmipède des pays feptentrionaux , & dont on voit la figure dans les planches de M, Daubenton. Cet oifeaua une phyfionomie finguhere occafionnée par la forme de fon bec qui eft unique de fon efpece. Le bec eft épaj^ , un peu long, comprimé latéralement, d'une forme prefque triangulaire, pointu, d'un bleu terne à fa bafe , rougeâtre vers la pointe. La mandibule ou mâ- choire fupérieure efl élevée & crochue en forme de hache , ce qui a fait appeller cet oifeau par Anderfon perroquet de mer. Sur chaque côté du bec font pratiquées des flries , ou plutôt trois rainures ou rigoles creufes* A 2 4 MAC Le dedans de fa bouche eu de couleur jaune ; les paupières font noires & revêtues d'une très-petite excroiffance charnue de couleur livide & triangulaire. Ses yeux font noirs & l'iris cendré. Il a uniquement trois doigts placés en avant & palmés. Les pieds , les doigts & les membra- nes font orangés. Les parties fupérieures de la tête & du cou font d'un cendré foncé , tout le dos avec le croupion font noirâtres , de même que la queue & les ailes ; le mâle a les couleurs un peu plus fombres ^ue la femelle. Ces oifeaux font de lagrofleur duguillemot , la queue eu. longue d'un pouce & demi à deux pouces. Ces oifeaux habitent les mers , ils fe nourriffent de poifTons , quoique leurs aîles foient petites, ÔC que leurs plumes foient courtes , ils volent affez vite vers la furface de l'eau; leur efTor efl: aidé par l'humidité qu'elles contrarient en fen- dant l'air. Ils volent en troupe , paflent en Angleterre vers la fin de Mars , & difparoiffent de ces côtes vers le mois d'Août. On prétend qu'ils multiplient prodigieufement dans les Ifles défertes de l'Irlande ; ils nichent à terre dans les trous des rochers , la femelle ne pond ce- pendant qu'un ou deux œufs par chaque couvée. On voit quelquefois des combats entre les macareux 6c les corbeaux, qui font aflez plaifans* Dès que le corbeau approche pour enlever au macareux fon petit , celui-ci plus prompt que l'éclair le faifit à la gorge avec fon bec , fort & crochu , lui ferre la poitrine avec fes ongles , le tient toujours ferme jufqu'à ce qu'il foit arrivé au-deffus de la mer; alors il fe laiiTe tomber avec lui & l'étrangle dans l'eau. MACER ou MACIR ou M ACRE, efl une écorce très-rare, dont les A.nciens ont parlé ; elle eu. jaunâtre , à-peu-près femblable à celle du ûmarouba : on l'apporte du fond de l'Orient ou de Barbarie. On ne peut guère douter qu'une écorce , dont quelques relations des Indes Orientales font mention , en lui attribuant la forme , la couleur & les vertus du fimarouba , ne foit cette même écorce ; d'autant plus qu'ea quelques lieux des Indes , l'écorce de fimarouba a le nom de macre : il jl ne faut donc pas confondre le macer avec le macis , comme quelques- uns l'ont fait. Fojei V article MusCADE. Si l'écorce du macer efl un peu plus épaiffe , plus aromatique que celle du fimarouba , peut-être que cette différence n'eft due qu'à la culture ou au cHmat. Voye:^ Stmarouba. Chrijlophc cfAcoJla dit que l'arbre qui porte le macer étoit appelle par les Portugais arbore de las camaras aut arbore fancîo ^ arbre pour les dyffenteries ou arbre faint ; arbore de Sancîo Thoma y MAC 5 arbre de Saint-Thomas par les Chrétiens ; macrnyrc pat les gens du pays , & macn par les Médecins Brachmanes. MACERON ou GROS PERSIL DE UkCtDOY^lL , fmyrnîum , efl une plante bis-annuelle , qui croît aux lieux marécageux ; nous l'avons trouvée fur les rochers proche de la mer entre Cujes & CafTis en Provence. Sa racine efl moyennement longue , groffe , blanche , em- preinte d'un fucre acre & amer , qui a l'odeur & le goût de la myrrhe. Elle pouffe des tiges hautes de trois pieds , rameufes , cannelées , un peu rougeâtres ; Tes feuilles font femblables à celles de Tache , mais plus grandes , un peu découpées , d'une odeur aromatique , & d'un goût approchant de celui du perfil ; toutes fes branches font terminées par des ombelles ou parafols qui foutiennent de petites fleurs blanches, compofées chacune de cinq feuilles , difpofées en rofe : à ces fleurs fuccedent des femences jointes deux à deux , groffes , arrondies , ou taillées en croiffant , cannelées furie dos, noires & d'une faveur amere. On cultive aufîî cette plante dans les jardins : elle fe multiplie aifé- ment de graine : elle fleurit au commencement du printemps, & fa fe- mence eft mûre en Juillet. Elle dure deux ans , & refle verte tout l'hiver. La première année elle ne produit point de tige, & elle périt la féconde année , après avoir pouffé fa tige , & amené fa graine à maturité. Quelques perfonnes retirent de terre fa racine en automne , & la confervent dans le fable pendant l'hiver , afin de l'attendrir ôi de la rendre plus propre à entrer dans les falades : c'étoit autrefois un légume d'un grand ufage en plufieurs lieux : on mangeoit fes jeunes pouffes comme le céleri ; mais ce dernier a pris le deffus & l'a chaffé de nos potagers. On fe fert en Médecine principalement de la racine & de la graine de cette plante : la première , qui peut être fubflituée à la racine d'ache , convient dans les apozemes & bouillons propres à purifier le fang ; mais fa femence eff plus en ufage : elle efl propre pour la colique venteufe , pourl'aflhme : elle entre dans plufieurs comportions cordiales & carminatives à la place de la graine du perfil de Macédoine. La graine du maceron abonde en huile effentielle. MACHAN , efl une efpece de léopard: voye^ ce mot. MACHE , vakrïamlla arvcnjïs precox ^ hum'dls ,femine compreffo. C^ite plante qu'on appelle aufli hourfctu U. douattc , accroupie , faladc de- 6 MAC Chanoine « clairette, blanchute. & pouU grajfc ^ croît par-tOut dans les blés & dans les vignes. Sa racine eft menue , fibreufe , blanche , an- nuelle , d'une faveur prefque infipide ; elle pouffe une tige haute d'en- viron un demi-pied, foible , ronde , fe courbant fouvent vers la terre, cannelée , creufe , nouée tk rameufe : (es feuilles font oblongues , affez épaiffes, molles , tendres , délicates , conjuguées , de couleur herbeufe, les unes crénelées & les autres entières , mais fans queue & d'une faveur douceâtre : fes fleurs qui naiffent aux fommets des branches font petites , ramaffées en bouquets ,• d'une couleur blanchâtre-purpu- rine & fans odeur ; elles font monopétales , en tube évafé divifé en cinq pièces inégales , & ont trois étamines & un piftil : il leur fuccede des fruits arrondis , ridés , blanchâtres , lefquels tombent après leur parfaite maturité. On cultive auffi la mâche dans les potagers : on la feme en terre graffe au mois de Septembre pour en avoir durant l'hiver & pendant le carême : on en mange les jeunes feuilles en falade , feules ou mêlées avec les raiponces & le piffenlit : ce qui dure jufqu'au mois d'Avril , temps où elle pouffe (qs tiges & fes fleurs. La mâche efl rafraîchiffante & déterfive ; (es qualités approchent de celles de la laitue ; elle efl: propre à corriger Fâcreté des humeurs & la trop grande falure du fang. Les agneaux l'aiment beaucoup. MACHEFER,ycorz^ aut recrcmenta ferri. Se dit du létier qui fe forme fur la forge des Ouvriers qui travaillent le fer : voyez ce mot. M ACHLïS , efl un quadrupède fort commun dans la Scandinavie , & un peu femblable à l'alcé ; il a , dit-on , les jambes fans join- tures : pour fe repofer il s'appuie contre un arbre , parce que quand il efl à terre , il ne peut fe relever. Pour le prendre , on fait une en- taillade aux arbres pour le faire tomber quand il s'appuie : il va d'une fi grande vîteffe , qu'on ne le peut prendre autrement : fa lèvre fupé^ rieure efl fort grande , de forte que pour paître , il efl obligé d'aller à reculons. Gesner de quadruped. M. Hal/er ohferve que cet animal efl imaginaire ; ce n'efl , dltil , que l'élan fous un autre nom. MACHOQUET, Efpece de criquet qui fe trouve aux Ifïes : cet în- fefte dont la fuperfîcie des aîles paroît en partie gravée ou comme gau- frée , habite dans des trous ou dans des creux d'arbres. Il entre très- rarement dans les maifons. Son cri qui fe fait entendre la nuit , n'efl point difcordant ni défagréable comme celui de nos criquets. Le bruit MAC 7 qu'il fait eft pîécifément comme un fon métallique , répété trois fois de fuite , & entièrement femblable au bruit que feroient de loin trois coups de marteau frappés fur une enclume l'un après l'autre &avecme- fiir.e. C'eft de-là qu'eft venu le nom de machoquet qu'on a donné à cette efpece de grillon , parce qu'un Forgeron s'appelle aux Ifles machoquet. MACHORAN ou MACHOIRAN , efl le nom d'un poifîbn fmguîier que l'on pêche fur la côte du Pérou près d'Arica : il efl long d'un pied &; demi , & large de quatre pouces : il a des écailles brunes prefqu'im- perceptibles : fa peau efl fine & fa chair eft blanche : fon ventre eft plat & fa tête affez groffe : à la racine des nageoires & proche la tête eft une arête taillée en forme de fcie , dont les dents font inclinées du côté du corps ; cette arrête ell: aufîi longue que la nageoire , & a les mêmes mouvemens. Lorfque le machoiran veut fe défendre des autres poiffons ou du Pêcheur , il drelîe fes arêtes & les enfonce , foit dans le corps des poiffons qui l'aftaquent , foit dans la main de celui qui le pêche , même dans le bois s'il le peut , & il y demeure attaché : cette piqûre eft venimeufe , elle fait enfler les parties bleiféesj^ avec une très-violente douleur : aufii les Pêcheurs fe tiennent-ils fur leurs gardes quand ils pèchent ce poifîbn. Le machoiran a fur les deux côtés de la tête des efpeces de filandres ou barbes afTez femblables à celles du barbillon ou du chat. Peut-être eft-ce pour cela que quel- ques-uns l'appellent chat marin ou chat d& mer y poijfon cornai pet'a homme barbu. Ce poitîbn eft encore fort communaux Ides Saint-Vincent, du Cap Vert, de France , de Bourbon & à la Côte d'Or, La bleflure mortelle que font fes piquans , le fait profcrire du nombre des alimens aux Iftes fous le Vent , où il fe trouve en abondance. Les habitans croient que cet animal fe nourriflant de manzanilles ou pommes de mancelinier , ce fruit lui communique^ {es funeftes qualités. Foye^ Mancelinier. Mais fur les Côtes d'Afrique on trouve fa chair d'un bon goût ôc fort faine, MACIR ou MACRE. T^oyei Macer. MACÎS. Voyei^ ^" ^^^ Muscade. MACLE. On donne ce nom aune pierre figurée en prifme quadran- gulaire , & que l'on trouve en Bretagne à trois heues de Rennes & près de Vannes. Elle reftemble parfaitement aux armes de Rohan , qui font 8 MAC aiifTi des mâcles ; quelques-uns foupçonnent, mais îans fondement J que les pierres de mâcle font des pyrites fpatheufes d'éîain. On en trouve auffi en croix de Saint-André , parce qu'elles font formées de deux prif- mes qui fe coupent. Elles reiTemblent extérieurement , & fouvent inté- rieurement , à ces pierres en croix que les Pèlerins nous rapportent de Saint-Jacques de Compodelle en Efpagne. Ces pierres font renfer- mées dans une pierre fchifleufe & comme talqueufe ou micacée. Voye:^ le Mémoire fur les Mdcks , par Mt le Préfident de Robien. Voyez main- tenant l'article Pierre de Croix. MACOCQWER ou MkCOCYi.,pepo Firginianus. On donne ce nom à un fruit de Virginie qui eft fort en réputation chez les Indiens : ce fruit reflem.ble affez à une courge ou à un melon; fon écorce eftdure, polie , d'un brun plus ou moins foncé en dehors , noirâtre en dedans & 6c d'un goût afîringent : elle contient une pulpe noire , acide & falée , dans laquelle font enveloppées des femences rougeâtres , remplies d'une moelle blanche , & ayant la figure d'un cœur. Les Indiens vident adroi- tement toute la fubflance de ce fruit par un petit trou qu'ils font à l'écorce , puis l'ayant rempli à demi de petits cailloux , ils le bouchent & s'en fervent comme d'un infrrument de mufique dans les temps de rejouifi'ance. Le macock paroît être le même fruit que celui du caUbaJJîer d'Amérique. Voye^^ ce mot. MACRE ou SALIGOT. Voyei Cartide Tribule, MACREUSE, anas nigra. Oifeau aquatique & noir, du genre du canard ; fa chair ell eftimée maigre , & l'on permet d'en manger en carême : fon bec efl plat , large & noir ; il a de remarquable que les côtés des deux parties du bec font difpofées en petites lames, qui s'en- grènent les unes les autres & donnent à l'animal la facilité de retenir les coquillages & les infeftes qu'il attrape, & de plus de laifTer échap- per l'eau qu'il prend néceflairement à l'inftant oii il faifit les infedes ; l'eau s'échappe par ces ouvertures & l'infede refle : (qs pieds font noirs , ainfi que le plumage du mâle ; la femelle eft grife : on l'appelle h'ifette. La matreufe demeure prefqiie toujours fur la mer , oîi elle fe plonge jufqu'au fond pour prendre dans le fable de petits coquillages dont elle fe nourrit ; nous avons dit qu'elle vit auffi d'infeftes , même de plantes marines & de petits poiflbns : cet oifeau vole difficilement & lie s'élève guère que de deux pieds au-defîus de l'eau, fes ailes étant trop M A D 9 trop petites à proportion de la pefanteur 4e fon corps : fes pieds qui font fort foibles lui fervent plutôt à nager qu'à marcher ; fes aîles en font autant en léchant la furface de l'eau , de forte qu'on diroit qu'il marche fur l'eau d'une vîtefTe extrême. Il y a aufîi la grande macreufe ou le gros canard noir de la Baie d'Hudfon. On voit une fi grande quantité de macreufes fur terre en EcofTe , qu'elles obfcurciffent le foleil en volant, & elles y apportent tant de branches , que des habitans en font une affez bonne provifion de bois pour l'hiver. On a ignoré long-temps l'origine des macreufes ; les An- ciens croyoient qu'elles naiffoient de pourriture. M. Graindorge , Mé- decin de Caen , a fait voir que cette efpece de canard efl produit par des œufs couvés comme les autres oifeaux. La macreufe n'eft pas la grande efpece de la foulque ou poule d'eau i qui efl encore différente de l'efpece à laquelle l'on donne quelquefois les noms de diable de mer & àe ptiffin. Voyez ces mots. La chair de la macreufe pafTe pour être dure , coriace , d'un fuc grofîîer & d'un goût fauvage : mais d'habiles Cuifmiers ont trouvé l'art de corriger, par le moyen de l'afTaifonnement, une bonne partie de ces défauts. MADRÉPORE , madnpora , efl le nom qu'on donne à des pro- duftions calcaires à polypier: voye^^ Polypes. La fubflance pierreufe des madrépores efl en forme d'arbre rameux ou d'arbrifTeau moins compare que les coraux & fans écorce ; elle efl compofée de cavités féparées par des cloifons : ces cavités en efpeces d'étoiles font très- diflindles , d'une forme régulière , qui efl toujours la même dans chaque efpece. Cette ruche madrépore dont on diftingue plufieurs efpeces , les pores des uns étant éloignés & faillans , dans d'autres ces pores étant fort rapprochés & rentrans , cette ruche , dis-je , dont les branches font plus ou moins longues & plus ou moins fubdivifées , n'a été formée que pour fervir d'habitation à l'animal qui efl une efpece de médufe : cette demeure a été produite avec la liqueur glutino-calcaire , qui fort du corps de l'animal. On trouve des madrépores dans l'Océan Oriental , dans la Méditerranée & dans la Mer Bakique. Il efl: des endroits fi fé- conds en madrépores , que le fond de la mer reffemble à une forêt des plus épalffes. Pour avoir ces pièces d'hifloire naturelle bien entières, il faut les faire pêcher par des Plongeurs, car la drague ne les donne Tome IV, B 10 M A G que par fragmens , excepté les fungipores qui font d'une figure ramaflee, tels que font les champignons & cerveaux marins , les œillets de mer ^ &c. Des Auteurs comptent parmi les madrépores Valcyonium mou & ra- meux ; c'efl une efpece de zoophyte en forme de main ou de doigts parfemés de petits trous; on l'appelle main de mer: voyez ce mot ÔC celui de ^oophyte. Nous avons donné aux mots Corail & Coralline des détails curieux fur la formation & la nature de toutes ces diverfes productions que l'on admire dans les Cabinets des Naturalises. Les madr&porites ne font que les foffiles de ces mêmes corps , dont les trous paroiffent moins en étoiles. Nous en avons trouvé de plufieurs fortes au pied des Alpes de la Suiffe , & qui n'ont point encore de nom. On en rencontre de toutes les efpeces en France & en Italie : quantité de marbres en font remplis. MAGALAISE ou MANGANÈSE. Efpece de mine de fer qui contient du zinc. Voye:^ notre Miner. Tom. II. MAGALEP ou MAHALEP. Nom que l'on donne à l'amande du fruit d'une efpece de cerilier appelle mahalep. Foye^ ce mot à Carticlc Cerisier. MAGJON ouMAGNESE, ou MAGNESTRE. /^oje^ Manganèse à r article Fer. MAGNOC. Foyei Manihot. MAGOT ou TARTARIN, ou MoMENET Cynocéphale. Cette efpece de fmge a trois pieds ou trois pieds & demi de hauteur : il marche fur fes pieds de derrière , & plus fouvent à quatre pattes : il n'a point de queue , quoiqu'il ait un petit bout de peau qui en ait l'apparence : il a des abajoues , de groffes callofités proéminentes fur les feffes , des dents canines beaucoup plus grandes à proportion que celles de l'homme : la face relevée parle bas en forme de mufeau , femblable à celui du dogue: il a du duvet fur la face , du poil brun verdâtre fur le corps , & jaune- blanchâtre fous le ventre. Cette efpece de fmge paroît généralement répandue dans les climats chauds de l'ancien Continent , en Afie , en Afri- que; on le trouve également enTartarie, en Arabie, en Ethiopie, au Malabar , en Barbarie , en Mauritanie &; jufques dans les terres du cap de Bonne-Efpérance. Ce quadrumane efl: d'une figure hideufe , d'une tempérament afîez robufte ; il fe plaît à l'air dans nos climats pendant l'été , pafle très-bien l'hiver dans un appartement. On a vu quelques-uns de ces individus M A H II doux, dociles, fufceptlBles d'éducation & capables de faire plufieurs tours , de danfer en cadence , gefticuler , fe laifler tranquillement vêtir & coiffer , &c. d'autres , d'un naturel plus fauvage , font brufques , défo- béiffans , mauflades & impatiens : les femelles font plus petites que les mâles. Tous ces animaux rempliffent les poches de leurs joues des chofes qu'on leur donne à manger. Impudens par tempérament ils affeftent de montrer leur derrière nud & calleux ; ce n'efl qu'à coups de fouet qu'on les rend modeiîes. MAHALEB. Fqyei Magalep. MAHOT. Ceft un arbre qui croît aux îles Antilles dans les lieux ma- récageux. M. de Préfontaine dit que cet arbre eft commun en Guiane ; fon bois, quoique peu dur, eft un de ceux qu'on emploie à faire du feu par le frottement. Se feuilles font rondes , larges comme le cul d'une afîieite , douces au toucher : fes fleurs font femblables à celles des mau- ves mufquées : fes feuilles & fes fleurs fervent de nourriture ordinaire aux grands lézards : fon écorce efl: fibreufe ; étant coupée en aiguillettes , elle eft propre à faire d'excellentes cordes , meilleures que celles d'écorce de bouleau. On s'en fert pour lier le tabac 6c pour attacher les rofeaux fur les toits des cabanes : les femmes Caraïbes lèvent ces aiguil- lettes larges & longues , qu'elles pofent fur leur front, & elles les entor- tillent des deux côtés de leurs c atoll ow hottes, pour les porter; les hommes s'en fervent au lieu d'étoupes pour calfater leurs pirogues. Les Sauvages de l'Orenoque fabriquent des hamacs & des filets de pêcheurs avec le Hber du mahot. La fleur de cet arbriffeau efl grofle , jaune , en cloche & découpée : il lui fuccede une goufî'e longue d'un pied, de quinze lignes de diamètre , cannelée , un peu veloutée , & qui laifTe échapper en s'ouvrant un coton des plus fins , très-léger, de couleur tannée , luifant, très-doux au toucher , mais aufîi court que celui du fromager ; il eft impofîible de le filer. Le mahot-coton pourroit être tranfporté dans les climats froids , pour en ouater les vêtemens : il refte dans le pays , oii on ne l'emploie qu'aux mêmes ufages que celui à\\ fromager. Foye^ ce mot ; voye;^ aufjî , pour les diverfes productions de ce genre ^ le mot COTON- NIER. Il y a une efpece de mahot fauvage appelle materehi , & dont on levé la peau : on en tire le jus , qu'on boit pour arrêter le flux de ven- tre : cet arbre eft toujours chargé de fruits qui s'attachent aux cheveux & aux habits. Le choucourou eft encore une efpece de mahot fauvage, B z li M A J MAI dont on preffe les feuilles pour en tirer aufli le jus , qu'on diftlîlé dans la bouche des enfans pour les guérir des tranchées. Le mahot des An- lilles efl encore connu fous le nom de mangle blanc. Voyez ce mot. MAJA ou MAIA. Nom donné à deux efpeces de jolis petits oifeaux du genre du moineau , & qui fe trouvent l'un en Chine & l'autre dans l'île de Cuba aux Indes Orientales. Les majas font très-recherchés des Curieux. Les uns font do la grofleur & ont à-peu-près le plumage de la linote de vigne. Ceux des Indes Orientales font variés de noirâtre & d'un marron pourpré ; une bande large de cette couleur traverfe la poi- trine. Ces oifeaux volent en troupe , & font de grands ravages dans les campagnes enfemencées de riz. Leur chair eft d'un excellent goût. MAIGRE. FoyciOMBKE. MAILLÉ. Foyei à CarticU MaJ^IHOT. MAIMON. Cet animal fait la nuance entre les babouins & les gue- nons , comme le magot la fait entre les finges & les babouins. Il a un caradlere qui le faitaifément diflinguer des babouins & des guenons, c'efl fa queue nue , menue & tournée comme celle du cochon ; il a des aba- joues , des callofités fur les feffes , le mufeau très-large , les orbites des yeux fort faillantes en-deffus ; la face , les oreilles , les mains & les pieds nuds & de couleur de chair ; le poil d'un noir d'olive fur le corps , & d'un jaune roufîatre fur le ventre ; il eft de deux pieds & demi de hauteur , marche tantôt fur deux pieds, tantôt fur quatre. Quoique très-vif & plein de feu, il n'a rien de la pétulance impudente des babouins; il eft doux , traitable , & même carefTant. Il fe trouve à Sumatra , & vraifem- blablem.ent dans les autres provinces de l'Inde Méridionale ; auffi fouf- fre-t-il avec peine le froid de notre climat. MAIN DÉCOUPÉE. Voy^i Platane. MAIN DE MER ou DE LARRON , ou DE JUDAS , manus marina. Efpece de zoophyte mou & rameux , d'un blanc jaunâtre , & que l'on met au nombre des efpeces de polypiers. Voye,\^ ce mot & celui de Zoophyte. MAIN DE SYRENE ou D'HOMME MARIN. Voye^ à VanicU Baleine. MAINATE. Oifeau des Indes Orientales ; il a la grofleur & le plu- mage d'un petit corbeau fort noir; fes jambes & fon bec font jaunes , ainfi que l'efpece de huppe qu'il a derrière la tête. On donne encore le nom de mainate ou mineur des Indes Orientales , mainatuSy à une efpece MAI M A K 13 de grive de couleur violette , qui vole en troupe & fiiïle en imitant le chant de l'homme. On le trouve à Haynan aux Indes Orientales. MAINS ou VRILLES. Voyci ^ l'articU Plante. MAIRE SIOUVO. Nom que l'on donne en Provence -àWchevref mille : yoyez ce mot. MAIS. Foyei BlÉ DE TURQUIE. MAITEN. Arbre du Chili : il croît à la hauteur de quinze à vingt pieds : Ton bois eil: dur & rougeâtre ; Tes branches font très-rameufes , verdâtres , garnies de feuilles tantôt alternes, tantôt oppofées , den- telées & pointues par les deux bouts. La déco£lion de ces feuilles & des rameaux eftle contre-poifon du Ihhi. Voyez ce mot. Il ne s'agit que de s'en frotter pour faire difparoître l'enflure. On ne connoît pas bien les fleurs ni les fruits du maiten. MAK. C'eft le nom que l'on donne à Cayenne au coiijin. Voyez ce mot. MAKAKOATHou SERPENT CERF. Nom donné à un ferpent du Mexique qui a vingt pieds de long , & qui eft , dit-on , de la groffeur d'un homme : il lui pouffe des efpeces de cornes quand il commence à vieillir. Hijl. Gin. des Foyages , Tome XFIU ^ page 25 j , édit. in-12. MAKAQUE , makkakos. Efpece de guenon ou de finge , du nombre de ceux qui ont la queue longue & courbée en arc ; voye^ Macaque. Il y a aufîi le ver makaque. Voyez ce mot. MAKI , projîmia. Famille de fmges , d'une grande beauté , lefquels ne fe trouvent guère qu'à Madagafcar. M. Brïffon , /?. a/^ , en fait un genre , dont il établit quatre efpeces. Leur caraftere diftinclif eft d'avoir à la mâchoire fupérieure quatre dents inciiives , qui font féparées par paires & convergentes; & fix à l'inférieure très-étroites , toutes conti- guës , couchées obliquement & avançant en dehors ; plus , douze dents canines , trois de chaque côté à chaque mâchoire , lefquelles font lar- ges , plates & pointues; quatre dents molaires de chaque côté à la mâchoire fupérieure , & trois à l'inférieure ; en tout trente-fix dents. Les cinq doigts font armés d'ongles plats , terminés par une pointe obtufe ; les pieds de devant font l'office des mains : la queue de ce genre d'animaux efl fort longue ; & la groffeur de leur corps , qui efl effilé , efl: la même que celle des fmges ordinaires. Comme ces animaux: font fort jolis, & qu'on en voit même chez quelques Particuliers , nous allons en faire connoître les diverfes efpeces , d'après M. de Buffon, 14 M A K L'on a donné le nom de maki à plufieurs animaux d'efpeces différentes. Nous ne pouvons l'employer, dit M. de Buffon , que comme un terme générique fous lequel nous comprendrons trois animaux qui fe refTem- blent affez pour être du même genre, mais qui différent aufli par un nombre de carafteres fuffifans pour conftituer des efpeces évidemment différentes. Ces trois animaux ont tous une longue queue , & les pieds conformés comme les finges ; mais leur mufeau efl alongé comme celui d'une fouine , ils ont à la mâchoire inférieure fix dents incifives ; au lieu que tous les finges n'en ont que quatre. Le premier de ces animaux efl le mocock ou mococo , que l'on connoît vulgairement fous le nom de maki à queue annelée : le fécond eil le mongono ou montons, appelle maki brun: mais ceux de cette efpece ne font pas tous bruns ; car il y en a qui ont les joues & les pieds blancs , & d'autres qui ont les joues noires & les pieds jaunes : le troifieme efl le vari, appelle par quelques-uns maki-pic; mais cette domination a été mal appliquée ; car dans cette efpece , outre ceux qui font pies , c'efl-à-dire blancs & noirs , il y en a de tout blancs & de tout noirs. On trouve ces animaux affez communément à Madagafcar. On les rencontre aufîi dans l'Afrique orientale. Ces animaux, dit M. de Buffon , dans un autre endroit, femblent faire la nuance entre les finges à longue queue 5c les animaux fifTipedes ; car ils ont quatre mains & une longue queue comme ces finges, & en même temps ils ont le mufeau long comme les renards ou les fouines ; cependant ils tiennent plus des finges par les habitudes effentielles ; car quoiqu'ils mangent quelquefois de la chair , &: qu'ils fe plaifent aufîi à épier les oifeaux , ils font cependant moins carnafTiers que frugivores , & ils pré- fèrent même dans l'état de domeflicité les fruits , les racines & le pain à la chair cuite ou crue. Le mococo , dit le même Auteur , efl un joU animal d'une phyfionomie fine, d'une figure élégante & fvelte, d'un beau poil toujours propre & luflré. Il efi: remarquable par la grandeur de {qs yeux , par la hauteur de fes jambes de derrière , qui font beaucoup plus longues que celles de devant, & par fa belle & grande queue , qui efl toujours en mouve- ment , & fur laquelle on compte jufqu'à trente anneaux qui font alter- nativement blancs &: noirs , tous bien diilinfts &: bien féparés les uns des autres, il a les mœurs douces : & quoiqu'il reffemble en beaucoup de chofes au finge , il n'en a ni la malice ni le naturel. Dans fon état de liberté il vit en focieté , Ôc on le trouve à Madagafcar par troupes de M A K 15 trente à quarante : dans celui de captivité , il n'eft incommode que par le mouvement prodigieux qu'il fe donne ; c'eft pour cela qu'on le tient ordinairement à la chaîne : car quoique très-vif, très-pétulant & très- éveillé , iln'eil ni méchant ni fauvage , il s'apprivoife affez pour aller à la promenade & revenir au logis , fans craindre qu'il s'enfuie : fa démarche eft oblique comme celle de tous les animaux qui ont quatre mains au lieu de quatre pieds ; il faute de meilleure grâce & plus légèrement qu'il ne marche; il eft affez filencieux, & ne fait entendre fa voix que par un cri court & aigu , qu'il laifîe , pour ainfi dire , échapper lorfqu'on le faifit à l'improvifte ou qu'on l'irrite. Il dort aflis, le mufeau incliné & appuyé fur fa poitrine ; il n'a pas le corps plus gros qu'un chat , mais il l'a plus long , & il paroît plus grand , parce qu'il efl plus élevé fur fes jambes ; fon poil, quoique très-doux au toucher, n'efl pas couché , & fe tient affez fermement droit. Le mongons ou mongous préfente plufieurs variétés non-feulement par le poil , mais aufîi par la grandeur ; en général ils font plus petits que le mococo , ils ont le poil plus foyeux & un peu frifé. J'ai eu chez moi pendant plufieurs années , dit M. dcBuffon , un de ces mongons qui étoit tout brun ; il avoit l'œil jaune , le nez noir & les oreilles courtes ; il s'amufoit à manger fa queue , & en avoit ainfi détruit les quatre ou cinq dernières vertèbres. C'étoit un animal fort fale & affez incommode : on étoit obligé de le tenir à la chaîne ; & quand il pou voit s'échapper, il entroit dans les boutiques du voifmage , pour chercher des fruits, du fucre, & fur-tout des bombons , des confitures dont il ouvroit les boîtes. On avoit bien de la peine à le reprendre , & il mordoit cruellement alors ceux mêmes qu'il connoiffoit le mieux : il avoit un petit grognement prefque continuel ; & lorfqu'il s'ennuyoit & qu'on le laiffoit feul , il fe faifoit entendre de fort loin par un croaffement tout femblable à celui de la grenouille. C'étoit un mâle , & il avoit les tefticules extrêmement gros pour fa taille ; il cherchoit les chattes , & même fe fatisfaifoit avec elles, mais fans accouplement intime & fans produdion. Frileux par nature , il craignoit le froid & l'humidité ; il ne s'éloignoit jamais du feu, & fe tenoit debout pour fe chauffer. On le nourriffoit avec du pain &: des fruits ; fa langue étoit rude comme celle d'un chat ; & fi on le laiffoit faire , il léchoit la main jufqu'à la faire rougir , & finiffoit fouvent par l'entamer avec les dents : le froid de l'hiver de 1756 le fit mourir, quoiqu'il ne fût pas forti du coin du feu. Il étoit très-brufque dans fes i6 MAL mouvemens , & fort pétulant par inflans , par boutades ; cependant il dormoit fouventle jour, mais d'un fommeil léger que le moindre bruit interrompoit. Le varl diffère du mococo par le naturel Se par la conformation ; il efl plus grand , plus fort & plus fauvage ; il efl: même d'une méchanceté fa- rouche dans fon état de liberté. On le diftingue aifément du mococo par la longueur de fon poil , &: encore par les longs poils qui environnent fon cou , & qui hii forment comme une efpece de cravate. Ces animaux, au rapport des Voyageurs, font méchans comme des tigres, & quand ils font ou en amour ou en fureur, ils varient tant leurs accens, & font un tel bruit dans les bois , que s'il y en a deux , il fembleroit qu'il y en a un cent. En effet, la voix du vari tient un peu du rugiflement du lion, ôi elle efl: effrayante lorfqu'on l'entend pour la première fois. Cette force étonnante de voix, dans un animal qui n'efl: que de grandeur médiocre, dépend d'une ftrudure fmguliere de la trachée artère , dont les deux branches s'élargiffent & forment une grande concavité avant d'arriver aux branches du poumon. Ces animaux font tous originaires de l'Afrique orientale , & notamment de Madagafcar, oii on les trouve en grand nombre , ainfi qu'au Mozambique & aux terres voifmes de ces Ifles. MALABATRE, malabathmm. Foye^ FEUILLE Indienne, MALACHITE, malachites. Les Naturahfl:es & les JoaiUiers donnent ce nom à une ftalagmite cuivreufe , plus verte que bleuâtre , folide & fufceptible du poli : on la trouve dans les cavités des filons de cuivre, en morceaux protubérances , plus ou moins compares , & particulièrement dans les mines de cuivre de la Sibérie & de la Chine : c'efl une des efpeces de vert de montagne, folide, ou une forte de chryfocoUe verte , dont plulieurs Auteurs ont fait mention. Foye^ f article Vert de Montagne & celui de CuiVRE. Quelques Lithographes ont rangé la malachite , mal-à-propos , dans les jafpes. On en diflingue de plufieurs fortes , par rapport aux couleurs ; la première & la plus rare efl d'un beau vert de mauve ou de prairie ; la féconde a un fond vert , entremêlé de quelques veines blanches , de fpath ou de quartz , ou de parties terreufes noirâtres : elle reffemble un peu à la pierre Arménienne : la troifieme tire fur la couleur du lapis lazuli , ce n'efl fouvent qu'une efpece de bleu de montagne : la quatrième MAL ly •Cfuatrieme enfin eft d'un vert uniforme , approchant de celui de la tur- quoife & d'une dureté moyenne. Les Anciens étoient dans l'ufage de tailler les morceaux de mala- chite qui étoient d'un certain volume , &c d'en faire des vafes à boire , des manches de couteaux, même des bijoux, des tabatières : & comme de tout temps les Empyriques ont cru que ce qui étoit propre à la pa- rure convenoit également au corps humain , ils n'ont pas manqué d'em- ployer cette fubilance comme un remède propre à fortifier le cœur ; nais c'efl un vert-de-gris naturel, qui par conféquent efî: plus que fuf- peâ pour l'ufage intérieur^ MALAGUETTE ou MANIGUETTE. Foyeiàrart. Cardamome. MAL ARM AT, lyra altéra, Rondelet. PoifTon de mer affez connu fur les bords Européens de la Méditerranée : on le nomme à Rome , pefce capone: il efl du genre des poifTons à nageoires épineufes. Ce poiflbn a huit angles , il efl long d'un pied , & a un pouce & demi d'épaifl^eur près des ouies : le refte de fon corps fe termine en pointe comme la flèche d'un clocher : il eft tout couvert d'écaillés comme ofTeufes , crêtées ou garnies d'épines dirigées en arrière : fa tête efl dure, cafquée , remplie d'os, & terminée par deux cornes affez larges, & quelquefois longues d'un demi pied; fa bouche qui n'eft point garnie de dents , eftau-def- fous: au bas de la mâchoire inférieure il a deux barbillons mous &c charnus, deux aiguillons 6c une nageoire de chaque côté: fon corps efl rougeâtre quand il efl vivant, mais cette couleur difparoît quand il eil mort, & devient blanchâtre : il a deux ouies de chaque côté de la tête. MALBROUCH. Le malbrouch & le bonnet Chinois paroiffent à M. de Buffon être des guenons de la même efpece , & très-voifmes de celles du macaque & de Vaigrette. Le malbrouch a des abajoues &c des callo- fités fur les feffes, les paupières couleur de chair , la face d'un gris cendré, les yeux grands, le mufeau large & relevé, les oreilles grandes, minces & de couleur de chair; il porte un bandeau de poil gris, comme la mone ; mais au refte il a le poil d'une couleur uniforme, d'un jaune brun fur les parties fupérieures du corps , & d'un gris jaunâtre fur celles du defibus ; il marche à quatre pieds; il a environ un pied & demi de longueur depuis l'extrémité du mufeau jufqu'à l'origine de la queue. Le bonnet Chinois n'en diffère que parce qu'il a le poil du fommet de la \^X^ clifpofé en forme de calotte ou de bonnet plat, & que fa queue eft plus longue à proportioi? du corps, Ces animau;^ fe réuniffent en troupes j. Tome. IF,, C ï8 MAL vont dérober les cannes à fucre : on les voit à Bengale. Voyc^ Singe du pays de Bengale. MALESTROM ou Maelstroom, ou Mahlstroom ou Mosks- TEIN , efpece d'abyme marin. C'efl un tournant d'eau. Voyci^ ^ la fin des mots Mer (S- Vent; voye^ au(Ji Us articles CouRANs & Gouffre. MALETTE A BERGER ou TABOURET. F. Bourse a Pasteur. MALFAISANTE. Efpece de milUpieds d'Amérique. Voye^cemot & Vartick SCOLOPENDRE. MALHERBE. Efpece de thymelée qui croît en Provence & dans le Languedoc, & qui fert en teinture : il en eil mention fous les noms de Malherbe & de Trentaml, dans les Réglemens de teinture de M.Colbert. Voyei Thymelée & Bois Genti. MALICORIUM. Foje^ Grenadier. MALLEAMOTHE. C'eft un arbrilTeau très-utile dans le Malabar; fes feuilles reflemblent à celles de l'oranger, & fes fruits à celui du lentifque ; fes racines fervent à faire des manches de couteau , &: fes feuilles à fumer la terre : frites dans de l'huile de palmier , elles font un bon liniment pour les pullules de la petite vérole. Cette defcription du malleamothe efl infuffifante. C'efl le Pavate de Parkinfon. MALPOLON. C'eft un ferpent de l'efpece de VIbibohoca. Voyez ce mot. MALT ou GRAIN GERMÉ. Voy c^ à r article Okge^ MALTA. Efpece de requin. Voyez ce mot. MALTHA. VoyeiVom minérale. On donne auffi le nom de maltha au forât qui eft une efpece de requin- dont les dents font fort femblables à celles de la lamie. Voye^ Requin. MALVaCÉES, malvcei^ columniferce qiiorumd^. On appelle ainfi les plantes de la famille des mauves : on voit dans cette famille des herbes annuelles , des arbriffeaux & des arbres : leurs racines font extrêmement longues, & s'étendent pour l'ordinaire horizontalement: leurs tiges & les jeunes branches font arrondies dans le plus grand nombre , & angu- leufes dans les autres : leur écorce, quoique épaiffe , efl fort fouple & très-liante: le bois efl mou & léger: les feuilles font alternes, fimples^ palmées ou digitées , & quelques-unes ont fur la bafe de leurs nervures desefpeces de rigoles qui font comme autant de vaiffeaux fecrétoires, dont les bords font fouvent renflés en jiianiere d'^ tubercules, d'où fort iine liqueur firupeufç ; le pédicule qui porte les feuilles efl ordinaire^ MAL M A M 19 ment cylindrique, renflé à fon origine, & comme articulé avec les branches: la plupart ont des fleurs hermaphrodites, & elles ne s'épa- nouiffent communément que depuis neuf heures du matin jufqu'à une heure du foir , & changent de couleur en fe Hétriflant ; les rouges de- viennent violettes ou pourpres; les blanches, couleur de chair, & les jaunes blanchifTent : leur pouiTiere fécondante confiée en globules jau- nâtres, opaques & hériffés de pointes coniques. Ces fleurs , dit iM. De- lcu{e^ nailTent de l'aifTelle des feuilles: elles font complettes : leur ca- lice efl fouvent double: la corolle efl à cinq lobes profondement divi- fés, adhérens entr'eux par l'onglet, & qui, lorfque la fleur fe ferme, s'enveloppent mutuellement en recouvrement de droite à gauche. Les étamines font réunies par leur bafe en un feul corps adhérent à la co- rolle, fous la forme d'un tuyau cylindrique ou conique, qui entoure les piflils, dont le nombre égale celui des loges du fruit. La fleur tombe tout d'une pièce: ce qui, joint à ce qu'elle porte les étamines, a pu la faire regarder par quelques Auteurs comme monopétale. Le fruit efl une baie ou une capfule ligneufe ou membraneufe. Les plantes maîva- cées abondent en mucilage , aufll rendent-elles l'eau vifqueufe & même gélatineufe. En général elles font émoUientes , rafraîchiffantes & apé- ritives. Foyei Guimauve, Baobab, Ceyba, Mauve, Ketmie, Coton , &c. MALVOISIE. Nom qu'on donne proprementau vin de l'Ifle de Can- die. Voyei CanicU VlN au mot ViGNE. MAMANT, ou MAMMOTOVAKOST , ou MAMMOTH. Foyc^ YVOIRE FOSSILE & UnICORNE FOSSILE. MAMELONS D'OURSINS , echinorum autahula. On donne ce nom aux parties pentagones ou hexagones qui fe détachent d'une efjjece d'ourfm à mamelons, & fur chacune defquelles il fe trouve une efpece ^'excroiffance appellée mamelon , qui fervoit pendant la vie de l'animal k «mboîter la pointe fur laquelle il s'appuie pour marcher. V. Oursin. MAMITHSA DES ARABES. Plante dont parle Rhafes dans le cha- pitre VII. de fon Traité de la petite vérole, & que PauUt dit refîem- blerau pavot connu. Jiiftoire de la petite vérole^ Tom, IL notefurKhcikSy pageC^. MAMMEY. Ceû Vabricot de Saint-Domingue. Voyez ce mot. MAMMON. C'eft le plus beau chat des Indes Orientales. Foyei Chat, C X 10 M A M M A N MAMONET. Efpece de iinge à tête de cochon & fans queue , de couleur rougeâtre; il eft fort gros ôc d'une figure très-hideufe. Collcct, A Cad. Tom. IV. MANAGURREL. Efpece de porc-épic de la Nouvelle Efpagne , fa chair eft exquife. VoytT^ au mot PoRC-ÉPic. MANAQUIN ou MANAKIN , //z^/z^a/j. Genre d'oifeaux étrangers &charmans , dont le caraftere eft d'avoir quatre doigts, trois devant & un derrière, le doigt du milieu efl réuni aux autres feulement par la première articulation. Le bec eft court & comprimé vers la pointe. Il y a plufieurs variétés : i". les manakins chaperonnés de noir ont le deffus du corps noirâtre, ainfi que les aîles & la queue, & un collier blanc: d'autres font d'un noir changeant en couleur d'acier poli , avec la gorge blanche. Plufieurs de cette couleur d'acier font ou chaperonnés de blanc, ou couronnés d'une belle couleur d'or mclée d'un peu de rouge vif. D'autres font en partie d'un très-bel orangé, &: en partie d'un noir d'a- cier, avec la tête d'un rouge vif & un collier couleur d'or;, d'autres d'un bleu très-éclatant, avec le fmciput d'un bleu d'aiguë marine ; d'autres enfin d'un beau noir de velours, & couronnés d'une efpece de huppe d'im rouge très-vif, en forme de bouclier. Ces jolis oifeaux font propres ou originaires du nouveau Continent j on les trouve au Bréfil , au Mexique ôc à Cayenne ; ils font de la groifeur du bec-figue. M AN ATI. Dans la langue Gahbi ou Caraïbe, que parlent les na- turels des environs de Cayenne & de toute la Guiane , on donne le nom de manatl au lamentin. Voyez Lamentin. MANBALA, eft un des plus beaux ferpens qu'il y ait au Ceylan: fa rohe efl: de couleur châtain, & ornée d'un aifemblage de chaînons ovalaires & marbrés ; il a la tête d'un chien ; les écailles du front & de& mâchoires font peintes d'un rouge foncé ; il a la gueule armée de longues dents, les yeux grands , pétillans , la peau du ventre jaunâtre & enrichie d'une très-belle marbrure : ce ferpent détruit beaucoup d'oifeaux ; aufiî les habitans menacent-ils du manbala tous les volatiles qui font du dégât dans leurs jardins ou dans leurs campagnes, MANCANDRITES. Nom donné à l'une des efpeces de champs gnons de mer , ou fongites. Voyc^^ ces mots. iMANCELINIER ou MANCHENILÏER , mancanïlia aut arbor toxicai & laclea , frucîu fuavi pomi-formi j qiio Indiani fagittas inficium, C'eftr M AN 21 Vhippomane foU'is ovatls ferratls de Linneus. Le P. Plumier dit qu'en Amérique l'on donne ce nom à un arbre qui eft fort beau , mais bien dangereux : on en diilingue de trois efpeces , par la forme des feuilles. Cet arbre efl de la hauteur de nos noyers , & fon tronc a jufqu'à deux pieds de diamètre : fon écorce efl: affez unie & grisâtre : pour peu qu'on y faffe une incifion , il en fort une fubflance laiteufe , qui efl un poifon acre , bridant & mortel : les Indiens trempent dedans- les bouts de leurs flèches qu'ils veulent empoifonner , pour s'en fervir dans les combats. Le bois de cet arbre efl: très -beau , dur, compadle comme celui du noyer , marbré en quelques endroits de veines grisâtres & noirâtres ^ fufceptible du poli : on en fait de très-beaux meubles ; ce bois eft très- dangereux pour les ouvriers qui le fcient , fur-tout lorfqu'il n'eft pas bien fec. Quand on veut abattre un mancelinier, on commence par allumer tout autour un grand feu de bois fec : il faut en éviter la fumée , crainte d'en être incommodé ; & quand on juge que Thumi* dite eft confumée , on peut y mettre la hache avec moins de danger. Ses feuilles qui font annuelles , reflemblent à celles du poirier , elles font laiteufes en dedans , & capables auiîi d'empoifonner : {qs fleurs font des chatons , qui ont la forme d'un épi long d'environ demi- pied , couverts de plufieurs petits fommets charnus , & d'un fort beau rouge : fes fruits naiflent à des endroits féparés de ces chatons; ce font des efpeces de pommes , qui s'annoncent fous des appas trompeurs ; elles reflTembîent beaucoup extérieurement, en grofleur, en figure &: en couleur , à nos pommes d'api ; leur odeur agréable invite à les manger : leur chair eft empreinte d'un fuc très-blanc periide , fem- blable à celui de l'écorce & des feuilles ; c'eft aufli un grand poifon* au milieu de cette chair, on trouve un noyau gros comme une châtaigne, dur & ligneux. On nomme ces fruits mancenilUs ou maniaiiïlUs. Le mancd'inicr croît dans la plupart des Ifles Antilles , aux bords de la mer : fi le voyageur excédé de fatigue eft aflez hardi pour fe repofer à l'ombre de cet arbre , à fon réveil il a lieu de s'en re- pentir , car les yeux ne tardent pas à s'enflammer , & le corps de- vient enflé : la rofée & la pluie qui ont coulé fur les feuilles , en tombant fur la peau y font l'effet de véficatoires. La feuille fait un. ulcere à la peau à l'endroit oii elle la touche. Les Sauvages Caraïbes qui vont à cet arbre pour y empoifonner leurs flèches , détournent 12 M A N la tête en coupant Técorce, pour en éviter la vapeur & pour qu'il ne leur rejailliire pas du fuc clans les yeux. Il tombe quelquefois des pommes dn mancheniiier dans les eaux : la chair des poifTons & des animaux teilacées & cruftacées qui en mangent , devient un vrai poi- fon : enfin cet arbre contient en toutes fes parties un poifon corrofif &: redoutable aux Américains. Il y a peu d'habitans d'entre les Tro- piques qui ne fâchent combien il eft dangereux de coucher fous cet arbre , ou d'en manger les fruits. On prétend que quand l'on en a mangé inopinément &c en petite quantité, ce poifon terrible porte le feu jufques dans les entrailles. Au refte on peut fe guérir en buvant à long traits un grand gobelet d'eau de la mer ; comme cet arbre ne croît que fur les bords de cet élément, on trouve auiîl-tôt le remède contre fon poifon. Les armes 6c les flèches que l'on a trempées dans le fuc du man- cheniiier , en confervent très-long-temps la qualité venimeufe. Nous en avons vu l'effet à Tarfenal de Bruxelles , oii l'on lança, en préfence d'un de nos Généraux , une de ces flèches dans les feffes d'un chien. Quoique la flèche eût été empoifonnée plus de cent quarante ans avant l'expérience , le malheureux animal ne confirma pas moins , par une prompte mort, que le poifon n'étoit pas encore éteint. On voit de ces fortes d'armes des Sauvages dans tous les cabinets des Curieux , Se l'on ne peut trop blâmer l'imprudence qu'ont certaines perfonnes d'en fucer la pointe , dans l'idée qu'elles font trop anciennes pour pouvoir nuire. Il y a dans un des cabinets du Stathouder des Provinces-Unies tme armoire remplie de divers inflrumens , empoifonnés fans doute de ce même fuc. On y voit auili des pointes de petites flèches, faites d'un bois de palmier , que les Indiens Ticoumas lancent avec le foufïle par le moyen d'une farbacane ; ces armes ne fécondent que jrop bien leur ardeur pour la vengeance. Heureufement que le poifon n'agit qu'étant mêlé immédiatement avec le fang. MANCHE DE COUTEAU. Foye^ Coutelier. MANCHE DE VELOURS. Oifeau qui fe trouve en Angola : il eft de la grolTeur d'une oie ; fon bec efl long , & fon plumage eu extrê- mement blanc. Les Portugais le nomment mangasdc velludo, parce qu'il a les ailes toutes picotées de noir , & qu'il les remue inceffamment comme les pigeons. Cet oifeau efl une efpece de meifager , qui an- nonce au Nautonnier l'approche de la terre ; aiiiTi les matelots aiment- M A N 2y ils à le voir. Il voltige fur les flots pendant tout le jour, & retourne la nuit au rivage. MANCHETTE DE NEPTUNE ou DENTELLE DE MER. Nom donné à une efpece de madrépore , nommée efchare. Ce corps marin &: pierreux efi: fort fragile , élégamment & auiîî délicatement tra- vaillé que de la dentelle : on diroit d'un point d'Angleterre. Foye? à r article CORALLINE. lAPi^CUOT , fphemfcus. Genre d'oifeau aquatique qui fe trouve dans les mers méridionales , qui refTemble allez au penguin ; mais il a quatre doigts , dont trois antérieurs & palmés, celui de derrière eft ifolé &: élevé ; fon bec eft droit , le bout de la mâchoire fupérieure eft crochu , celui de l'inférieure efl tronqué. Le manchot a des aîles fort courtes , & quoiqu'il les tienne toujours étendues , il ne peut s'en fervir pour voler. Les petites plumes qui couvrent le corps font noirâtres & fort roides ; celles des aîles (ont fi courtes & fi dures qu'on les prendroit pour des écailles. Le plumage inférieur efl: «^risâtre. Il y a aufli le manchot tacheté de blanc , fph&nifcus nczvius. Son bec eft auflî chargé de filions comme écailleux ; les narines fe trouvent au milieu de la longueur de la mâchoire. Le manchot efl; de la grofl^eur d'un canard mufqué , il habite les eaux , fe tient foulevé à leur furface : à voir cet oifeau de loin fur les bords de la mer, on le prendroit pour un enfant au miUeu des eaux, & qui paroîtroit avoir un tablier blanc. Plus rObfervateur feroit frappé de cette idée, plus il la croiroit vraie • il feroit touché de la mort ou du danger de ce prétendu infortuné mais le Naturahfte fe hâteroit de lui dire : Vous gémifl^'ez pour un enfant qui fe noyoit ; vous vous êtes trompé , c'efl un oifeau qui faifoit le plongeon. Voye:^ maintenant l'article PengUIN. Mk'HDVàUh^ ^ jnandibuUtes. Nom donné aux mâchoires des poiflbns^ fofllies ou pétrifiés. MANDOUSTE. C'eflame efpece de couleuvre de Madagafcar , de la grojGTeur de la cuifle d'un homme : elle efl afl^'ez fembîable à celles de France : elle mange les petits oifeaux dans les nids , tue tous les rats qu'elle rencontre , & en fait fa proie. Voye^ Couleuvre. MANDRAGORE , Mandragora. Plante fans tiges , & dont on dSflin- gue deux efpeces ; favoir , la blanche ou mâle , & la noire ou femelle. - La Mandragore mâle, mandragora mas frucîu rotundo , ^ une racine longue , grofle , quelquefois Ample 6c unique , fouventpartagé(? 14 M A N en deux , entourée de iîîamens courts Sz menus comme des poils , repré- fentant en quelque forte , quand elle eH entière , les parties inférieures d'un homme. Quelquefois cette racine eft partagée en trois ou quatre branches ; elle eft blanchâtre en dehors, ou cendrée & grisâtre intérieu- rement : fes feuilles fortent immédiatement du fommet de la racine ; elles font longues de plus d'un pied , plus larges que la main en leur milieu , pointues des deux bouts , de couleur verte brune , & d'une odeur défa- gréable : il fort d'entre ces feuilles beaucoup de pédicules , longs d'un pouce & demi ou environ , foutenant chacun une fleur en cloche , fendue ordinairement en cinq parties , un peu velue , blanchâtre, tirant fur le purpurin : fon calice eft formé en entonnoir , feuillu , découpé , velu ; il lui fuccede une petite pomme ronde, groffe comme une neiîle, cornue, charnue , verte d'abord , enfuite jaunâtre , d'une odeur forte & puante , & dont la pulpe contient quelques femences blanches , qui ont fouvent la figure d'un petit rein. La Mandragore femelle , mandragora fœmina , flore fuh-ccerul&o purpiirafuntc , a une racine longue d'un pied , fouvent divifée en deux branches , brune en dehors , blanche en dedans, & garnie de quelques fibres : fes feuilles font femblables à celles de la majidragon mdk , mais plus étroites & plus noires : fes fleurs font de couleur purpurine , tirant fur le bleu : fes fruits font plus pâles , plus petits , & en forme de poire , de la figure de ceux du forbier ou du poirier , mais d'une odeur aufîi forte que celle de la mandragore mdk ; it^ graines font plus petites & plus noires. L'une & l'autre mandragores viennent naturellement dans les pays chauds , dans l'ItaUe , l'Efpagne , dans les forêts à l'ombre , & fur le bord des fleuves : on ne les trouve chez nous que dans les jardins où on les cultive. Leurs feuilles & l'écorce des racines font d'ufage ; elles répandent ce- pendant une odeur puante : l'écorce de la racine deiTéchée a une faveur acre , un peu gluante , amere , qui caufe des naufées : on nous l'apporte communément de l'ItaHe. On a coutume de placer la mandragore parmi les remèdes flupéfîans , ou narcotiques & affoupifTans ; & on conclut qu'elle a cette vertu par fon odeur défagréable & puante qui porte à la tête. On a des preuves qu'elle purge par haut & par bas , en donnant des convulfions ; cependant on la recommande pour les mouvemens con- yujiifs. U faut efpsrer que ce remède redoutable ou incertain jufqu'à préfent , M A N z^ préfent , fera quelque jour mieux examiné par l'illuftre M. Storck ; & que ce (avant Médecin , reconnoiiTant dans cette plante tant de propriétés analogues à celles du napel , de la pomme épineufe , de la ciguë 6c de la jufquiame , dont il a eiîayé l'ufage interne , fera les mêmes expériences fur la mandragore. /. Tcrenùus & Linceus , ProfefTeurs de Botanique à Rome , ont déjà commencé ces expériences ; ils ont avalé à jeun & en public le fruit de Ja mandragore avec les graines , fans éprouver le moindre fymptome d'af- foupiiTement ou de quelqu'autre mal. En attendant la décifion de M. Storck , nous confelUons aux femmes enceintes de ne point fe fervir de cette plante comjTie d'un fpécifique pour la matrice ; elle y produit fouvent des fymptomes fpafmodiques , & fouvent l'avortem.ent. Les anciens Médecins donnoient du vin dans le- quel on avoit fait infufer de la racine de mandragore , pour procurer l'en- gourdiffement quand il falloit couper quelque membre au malade : on dit que cette plante appliquée en cataplafme , amollit & réfout les tu- meurs dures , fquirrheufes & écrouelleufes. Les Anciens & quelques Modernes ont avancé bien des chofes fmgu- lieres de la mandragore ; mais ce font des fables ridicules qui ne méri- tent pas qu'on s'y arrête. Nous avons dit que la racine de mandragore repréfente fouvent d'une manière groffiere par fes deux branches qui fe plongent dans la terre , lescuiffes de l'homme : elle ne lui reffemble point du tout par fa partie fupérieure. On vient aifément à bout par artifice de rendre les racines non-feulement de cette plante , mais encore de beaucoup d'autres, fort femblables au corps humain. Les Impofleurs ou les Charlatans qui per- fuadent facilement au vulgaire crédule , que les mandragores ne fe trouvent que dans un petit canton inacceffible de la Chine, impriment fur les racines des rofeaux , de la bryone , & de beaucoup d'autres plantes encore vertes , .des figures d'homme ou de femme. Pour repré- fenter les poils , ils implantent dans les endroits convenables des grains d'orge , -d'avoine ou de millet ; enfuite ils remettent ces racines dans des foffes qu'ils rempliffent de fable fin , & les y laifient jufqu'à ce que ces graines aient pouffé des racines , qu'ils divifent enfuiîe en fîlamens très-menus , & les ajuftent de forte qu'ils repréfentent les cheveux , la barbe & les autres poils du corps. En cet état ils les vendent comme Jomt IK ' D 26 M A N vraies racines de mandragore , & qiii ont des propriétés mervellleufes.^ MANDRILL ou BOGGO. Cette efpece de babouin a des abajoues , des callofités fur les feffes , la queue de deux ou trois pouces de longueur, & efl d'une laideur défagréable & dégoûtante ; indépendamment de fon nez tout plat ou plutôt de deux nafeaux d'où découle continuellement une morve qu'il recueille avec la langue ; indépendamment encore de fon très-gros & long mufeau , de fon corps trappu , de fes feffes cou- leur de fang & de fon anus apparent & placé pour ainfi dire dans les lombes ; il a encore la face violette & fillonnée des deux côtés de rides profondes & longitudinales , qui en augmentent beaucoup la trifleffe & la difformité ; il a les oreilles nues auffi bien que le dedans des mains Ôc des pieds : le poil long d'un brun rouffâtre fur le corps , & gris fur la poitrine & le ventre : il a quatre pieds & demi à-peu-près de hauteur lorfqu'il eff debout , ôc marche fur deux pieds plus fouvent que fur quatre. MANEQUE. Voyez MufcaJemdle, à l'article Musc ADE. MANGABEY. Voyez Singes de Madagafcar , à l'article Singe. MANGAIBA , eft un bel arbre du Bréfil , de la grandeur d'un de nos pruniers. Ses feuilles font petites & oppofées , verdâtres & fmuées. Ses fleurs font petites , blanches , difpofées en étoiles comme celles du jaf- min , fort odorantes. Son fruit reffemble à un abricot pour la figure , la couleur & le goût : il contient une pulpe moëlleufe , fuccuîente , lai- teufe , d'un goût exquis , & renfermant fix petits noyaux. Ce fruit qui naît en abondance , ne mûrit que quand il eft tombé de l'arbre ; il hu- mefte & rafraîchit les entrailles , il lâche le ventre. L'arbre du man- gaiba multiplie tellement, qu'il remplit des forêts du pays : il eft en fleur pendant neuf mois de l'année, MANGANAISE ou MAGNESIE DES VERRIERS. Voyez le mot manganaife , à l'article Fer, MANGE-BOUILLON ou les SOUFFRETEUSES. Goëdard dit que la plante appellée le bouillon blanc nourrit de petits vers , de petites arai- gnées , & un autre petit animal qui a des pincettes au front , qu'il ouvre & renferme quand il veut. Ces animaux qui naiffent fur la feuille du bouillon blanc fe détruifent fingulierement. Le ver devient la proie de l'araignée , & l'infede à pincettes qui fe nourrit de Pun & de l'autre , attend volontiers que l'araignée foit remplie de vers , puis il la coupe pai* le milieu du corps & l'avale auffitôt. M A N 27 MANGE-FROMENT , eft la chenille û per nîcieufe aux blés quand ils font fur pied ; voye^ PAPILLON DES BLÉS : elle en mange la fubflance & en ronge les épis ; elle fe fauve en terre quand elle fent qu'on touche à l'épi : cette fauffe chenille fe transforme en mouche. MANGE-CEUFS DE GRILLONS. Foye^ Destructeur de Che- nilles. MANGE-SERPENT. Nom que les Egyptiens donnent à Vil^is : voyez ce mot. MANGEUR D'ABEILLES, ^oyei Guêpier. MANGEUR DE CHENILLES , eft le ferpent de Surinam dont le dos efl cendré gris , tiqueté de roux : les chenilles rafes lui fervent , dit- on, de pâture : le ferpent d'Afrique ne mange que les chenilles velues. MANGEUR DE FOURMIS ou MYRMECOPHAGE. FoyeiFovR^ millier. MANGEUR D'HOMMES. Foyei Arompo. MANGEUR DE LOIRS, f'oy ci Ammodite. MANGEUR DE MILLET. Dans l'île de Cayenne on donne ce nom à une efpece d'ortolan qui détruit les plantations de mil. MANGEUR DE PIERRES. /^o^^^Lithophage. MANGEUR DE POIRES. On donne ce nom à la larve qui mange l'efpece de poire nommée lafucrée : elle fe métamorphofe en une forte de teigne : voyez ce mot. MANGEUR DE POULES. Efpece de faucon nommé paganl dans l'île de Cayenne. M ANGLE ou MANGLIER , mangue , eft un arbre des plus communs qui croiflent aux lieux maritimes fous la zone torride dans les Indes Occidentales , principalement le long des côtes de la Nouvelle Efpa- gne & aux îles Amilles vers l'embouchure des rivières , oii ils fe multi- plient prodlgieufement. Lêmerl dit qu'il y en a trois efpeces. La première efl: appellée cereïba : c'eft le mangle blanc; il reflemble à un petit faule. Ses feuilles qui font oppofées , reluifent au foleil, parce qu'elles font poudrées à leur fuperficie d'un fel fort blanc, qui vient des vapeurs de la mer , delTéchées par la chaleur du foleil ; mais quand le temps efl humide , ce fel fe fond ( Ce phénomène mérite quelqu'at- tention de la part des Chimiftes , en ce qu'il prouveroit que le fel marin monte avec fon eau dans l'athmofphere jufqu'à une certaine hauteur ). Si cette propriété étoit particulière au cereiba & qu'elle fût bien réelle > D 2 iB ' M A N' cet arbrifleaii feroit fuffifamment défigné ; mais toutes les plantes dlin- autre genre , qui font aufli voifmes de la mer, en font prefqiie toujours également couvertes. Au relie , les fleurs du cereiba blanc font jaunâ- tres êc d'une odeur de miel. L'on fait aujourd'hui que le mangle blanc efl le mahot, La féconde efpece de mangU fe nomme ccrdbuna. C'eft un petit ar- briffeau dont la feuille efl: ronde & épaiffe , d'un beau vert : fa fleur efl blanche ; fon fruit efl gros comme une aveline , & fort amer. La troifieme efl: appellée par les Indiens guaparciha , & par les Portu- gais//2.7/zj//2 veA-^/^^^^i/'o, mangue noir véritable. Cet arbre efl beaucoup plus élevé &: plus ample que les précédens ; il n'excède pas vingt-cinq pieds de hauteur & vingt pouces de diamètre ; fon écorce eft grife brunâtre. Sa manière de croître efl fmguliere &: admirable ; car de fes rameaux flexibles , élevés & étendus, partent des paquets de fîlamens qui defcendent jufqu'à terre , s'y couchent, y prennent racine & croifTent de nouveau en arbres aufîi gros que celui d'où ils fortent. Ceux-ci fe multiplient de la même manière : un feul arbre peut devenir la fouche d'une forêt emiere. M. Froget dans la Relation de fes voyages, dit, que dans l'ile de Cayenne les marais font couverts de mangles , & que les huîtres s'attachent aux pieds & aux branches qui pendent de ces arlires. Des huîtres y dépofent leur frai ; la petite poflérité y adhère auffî , grofTit , & dans les flux & reflux fe trouve alternativement dans l'eau ou fufpendue aux branches dans l'air. Le bois de ce mangle efl foUde , pefant, ayant les fibres longues & ferrées ; fa couleur efl brune rougeâtre : les Charpentiers s'en fervent pour les petits bâtimens. Ses feuilles reffemblent à celles du poirier: fes fleurs font petites ; elles font fuivies par des gouffes femblables extérieurement à des bâtons de caiTe , remplies d'une pulpe femblable à îa moelle des os, d'un goût amer. Quelques Indiens en mangent faute d'autre nourriture. Sa racine efl fort tendre : les Pêcheurs s'en fervent pour guérir les piqûres des bêtes venimeufes & des poiflbns. La décoc- tion de fon écorce teint en couleur de rouille. Cette efpece de mangîe efl un palctttv'ur : voyez ce mot. Ces arbres font fi épais & leurs raci- nes , fortant la plupart de terre , remontent, dit le même Auteur , & s'entrelacent fi bien , qu'on peut en certains endroits marcher deffùs pendant vingt lieues , fans pofer le pied à terre. La difpofition des racines du manglier empêche l'abordage à ceux qui naviguent , ôs M A N . 29 donnent une retraite sûre aux poiffons contre les Pêcheurs." L'on voit dans les Cabinets des parties de branches ou de racines ds mangliers toutes couvertes d'huîtres. MANGOUSTAN ou MANGOSTANS. Arbre pomifere des îles Moluques , mais qu'on a tranfporté dans l'île de Java, & dont on cul- tive auffi quelques pieds à Malaca , à Siam & aux Manilles. Il a la touffe fi belle, fi régulière, fi égale, qu'on le regarde aujourd'hui à Batavia comme infiniment plus propre à orner un jardin que le marronnier d'Inde même. Le mangouiîan reffemble beaucoup au citronnier. Ses feuilles font beaucoup plus longues &; oppofées ; fes fleurs font jaunes & aurore. Son fruit efl de la groffeur d'une petite orange , 8c renfermé dans une manière de boîte grife par dehors & rouge en dedans, épaiife d'un demi-doigt, un peu femblable à celle de la grenade , & alTez amere : il porte en haut une efpece de couronne à plufieurs pointes mouffes , qui répondent à autant de rayons , renfermant des noyaux entourés d'une chair très-blanche , qui a le goût agréable & rafraîchiffant de la cerife 6c de l'orange. On remarque une chofe fmguhere dans ce fruit, c'eft que la chair efllaxative & l'écorce allringente. On fait de celle-ci un tifane très-bonne pour la dyffenterie , qui efl: une maladie fort com- mune aux Indes. Quant au bois de mangoufîan , il n'efl bon qu'à brûler. Hijl. de. VAcad. année iy^o ^ page 66". Hijh Nat, d& Siam & Tranfuci^ Philofoph. MANGOUSTE ou MANGOUSE , ou RAT D'EGYPTE. Foyci ICHNEUMON. MANGROVE. Les Anglois donnent ce nom ^\\ pareturkr o\\ palctu- vîer des Africains. Voyci l'article Palétuvier. MANGUIER, mangas aut arbor mangifera. C'efl un arbre grand & rameux qui croît dans les pays d'Ormus , de Malabar , de Goa, de Gu- zarate, de Bengale, de Pegu &de Malaca : il y en a de deux efpeces; l'un efl domepiquc &C cultivé, l'autre eiïfauvage. Le manguier domejli que efl très-gros , toujours vert , &c a jufqu'à 40 pieds de haut. Il étend fes branches au loin à la ronde , & porte du fruit deux fois par an , depuis fix ou fept ans jufqu'à cent ans : on le mulîiplie , foit en le greffant , foit en le femant : il a de grandes feuilles. Son fruit , qui approche affez de la forme d'un cœur, pefe quelquefois deux livres : on en trouve de diverfes couleurs f.ir un même arbrç ^ yerdâtres, rouges, jaunes j tous font d'un très-bon goût, favoureux $£ 30 M A N d*une odeur agréable. Ces fruits contiennent un noyau large Sc applatl, dans lequel eu une amande d'un goût d'amande amere ; ce noyau eft recouvert de la chair ou pulpe du fruit qui eft jaune , & plus ou moins filamenteufe. On préfère les efpeces qui ont peu ou point de fibres , à caufe que cette filafle eft fujette à refter entre les dents , ce qui eft fort incommode. Cette chair fibreufe eft enveloppée d'une peau aftez forte , quoique peu épaift"e ; elle contient un fuc amer & réfineux dont l'odeur eft très-pénétrante , mais agréable au goût ; ce fuc eft laiteux &c cauf- tique avant la maturité du fruit. Plus le noyau eft petit, meilleure eft la mangue. On préfère même celle qui n'a point de noyau ; mais cet accident eft rare. On coupe la mangue par morceaux, & on la mange crue ou macérée dans le vin. Les Indiens en confîfent beaucoup au vi- naigre ; c'eft ce qu'on appelle achars de mangue, ( Le mot ^cAars'emploie pour tous les fruits qu'ils confifent ainfi : c'eft pourquoi l'on dit achars de bambou , qui font les plus eftimés , achars de bilembi , achars de de papaye , achars de cornichons , de limons , de citrons, de caram- boles, &c. ). La mangue s'appelle en Perfe ambo , & en Turquie amba» Son noyau étant rôti eft employé intérieurement pour arrêter le cours de ventre & pour tuer les vers. Le manguier fauvage eft plus petit que le cultivé : il croît abondam- ment dans tout le Malabar. Ses feuilles font plus courtes ; fon fruit eft gros comme celui du coignafîier , de couleur verte, refplendiflante , peu charnu , empreint d'un fuc laiteux ; fon noyau eft fort gros & dur : on appelle ce fruit ma/igas bravas. Il pafle pour être un grand poifon; 6t l'on dit que tous ceux qui en mangent , meurent fur le champ. MANICOU ou MANITOU. Animal très-joli qui fe trouve dans l'Ifle de la Grenade : on le nomme opajfum dans la Virginie ; maritacaca & cor'iguayra dans d'autres endroits de ce Continent. C'eft le philandre (forte de marmofc & de rat manicou ) des Naturaliftes; le manitou du Père Dutertre : on l'appelle aufti didelphc ou loir fauvage de l'Amérique. Voye?^ Didelphe & Marmose. On donne auftl le nom de manicou à une efpece de crabe de la Grenade , &c. f^oyci à Car- ticle Crabe. MANIGUETTEou GRAINE DE PARADIS. Foy^^ Cardamome. MANIHOT ou MAGNOC,ouMANIOQUE, ricinoides ex quâpa- rdtur magnoc , aut yuca foliis cannabinis ( les Nègres prononcent ma- gnoc , les Portugais du Bréfil difent mandioca ). C'eft un arbrifteau qui M A N 31 croît en Amérique , & des racines duquel on retire une farine avec laquelle on fait une forte de pain appelle cajfave. Les peuples de l'Amérique , depuis la Floride jufqu'au Magellan, le cultivent avec foin & ufent de la caflave par préférence au maïs qu'ils ont en abondance. Cet arbrifleau s'élève depuis trois pieds jufqu'à huit à neuf pieds de hauteur ; fa tige eft rougeâtre extérieurement , ligneufe , tendre , caflante , femblable à celle du fureau , partagée en plufieurs branches tortueufes & longues de cinq à fix pieds. Ses feuilles font d'un vert brun & digitées comme celles du chanvre ; fes fleurs font à cinq pétales d'un jaune pâle; la graine reflemble à celle du ricin, & n'efl: bonne qu'à femer, C^t arbriffeau, ainfi que tous ceux à moelle, prend très-facilement de bouture. On connoît trois fortes de magnocs à Cayenne : fa voir, 1°. le maillé qui vient de chez les Indiens appelles Maillés ; fa racine eft bonne à arracher au bout de huit ou neuf mois ; elle a la figure d'une bette- rave , & elle en a auffi la couleur quand on lui a enlevé la première peau. z^. Le magnoc rouge qui a plus de goût que le précédent ; il doit refter en terre un an. 3°. Le magnoc baccacova ; il eft en ufage chez les feuls Indiens. Ces racines font prefque toujours attachées trois ou quatre enfemble. DanslaGuiane on plante le magnoc quand il commence à pleuvoir de temps en temps : ce plant fe multiplie de branches coupées de fept ou huit pouces de longueur. Les Caraïbes ou Sauvages des Ifles entendent bien cette culture. Dans les Indes & en Amérique on mange en manière d'épinards les feuilles du magnoc hachées & cuites dans l'huile. La racine de cet arbrifleau mangée crue feroit unpoifon mortel; mais lorfqu'elle efl: deflTéchée ou préparée , on en peut faire du pain fl bon , que l'on dit que les Européens même le préfèrent par goût au pain de froment. De quelque manière qu'on s'y prenne , l'eflentiel efl: d'enlever à cette racine un lait qui efl un véritable poifon; voici la méthode flmple des Indiens & des Sauvages. Après avoir arraché les racines du magnoc quirefl^emblent afîez àdes navets , ils les lavent & enenleventla peau ; ils gragent cette racine fur des râpes de cuivre rouge , & mettent la râpure dans un fac de jonc ou tiflli d'écorce de latanier d'un tiflTu très- lâche ; ils difpofent fous ce fac un vafe très-pefant , qui faifant l'oflice de poids exprime le fuc du magnoc & le reçoit en même temps. On rejette ce fuc qui efl mortel pour les hommes, ôcmême poiur Iqs 32 M A N animaux , quoiqu'ils en foient fort friands. On fait fccher fur des pla- ques de fer à l'aide du feu la fubftance farineufe qui reûe , &c on achevé par-là de dilTiper toutes les parties volatiles &c venimeufes. Les gru- meaux de magnoc defféchés & divifés par le moyen d'un hébichet ( efpece de crible un peu gros ) font la farine de magnoc appellée au Bréfil & au Pérou , farina de, palo : on en fait du couac &C de la caflave. Les Indiens de la côte de Cayenne préfèrent le couac ou couan à la caflave ; il eft connu à la Martinique fous le nom de farine de magnoc : on en fait au moins autant d'iifage que de la cafî'ave. Pour faire le couac on jette dans une poêle large &c peu profonde de la farine de magnoc , on remue fur un feu lent & modéré cette farine durant huit heures de fuite , prenant garde qu'elle ne fe pelotte en maffe , pendant que l'hu- midité de la farine s'évapore doucement : l'opération eft finie quand la fumée diminue , ôc que le couac en rougiiTant fe réunit en petits grains. La caflave fefait en deflcchant la farine de magnoc, jufqu'àce qu'elle foit compaûe : on la caffe pour la paffer dans une efpece de tamis ap- pelle manaret : pendant cette opération on fait chauffer une platine qui efl ou de terre cuite ou de fer : on y étend la farine jufqu'au bord de tous les côtés ; lorfqu'elle fe couvre de petites élévations , c'efl une marque que la cafTave efl cuite du côté où elle touche la platine ; on la retourne pour la cuire également de l'autre côté rson l'expofe enfuite au foleil ,' afin qu'elle fe conferve long-temps : on la garde dans un lieu chaud au défaut d'étuves. Ces efpeces de galettes, larges & minces à-peu-près comme du croquet , s'appellent /'.'zZ/z de cajfave ow pain de Madagafcar : les Sauvages les font plus épaifles. Pour faire ufage du couac ou de la cafTave , il ne s'agit que de les humefter avec un peu d'eau pure ou de bouillon. Le lait exprimé de la racine du magnoc , a la blancheur & l'odeur du lait d'amande. Quoique ce foit un poifon , en le laifTant dépofer on obtient une fubflance blanche & nourriflante que l'on trouve dans le fond du vafe, & qu'on lave bien avec de l'eau. Cette fécule a l'appa- rence de l'amidon le plus blanc. On l'appelle mou[fache , on l'emploie au même ufage que notre amidon : mais cette poudre brûle les cheveux à la longue : on en faitaufîi des efpeces d'échaudés & des mafTepains, ô^c, §n y mêlant du fuçre. Les Sauvages écrafent la mouffache fur les deffins M A N 33 ideiîins qu'ils gravent fur leurs ouvrages en bois ^ de façon que les hachures paroliîenî blanches fur un fond noir ou brun , félon la cou- leur du bois qu'ils ont mis en œuvre. Cette troifieme préparation de la farine de magnoc porte le nom de cipipa. On donne le nom de capiou à la préparation fuivante : on prend l'eau de magnoc toute fimple & celle qui furnage le cipipa : on les fait réduire à moitié fur le feu en les écumant à mefure; on y ajoute alors une cuillerée de cipipa , &on faitrebouilHr le tout jufqu'à ce qu'il ait acquis une certaine confiilance, on y met du fel & du piment : voilà le cabloii. On fait auflidu langou avec de la cafTave qu'on trempe un peu dans de l'eau froide , & on la jette enfuite dans de l'eau bouillante : on remue le tout , & il en réfulte une forte de pâte ou bouillie qui efl la nourriture la plus ordinaire des Ef- claves Noirs : elle ell faine & légère. Le mateté ell du langou dans le- quel l'on mêle du fucre ou du firop : les Nègres s'en nourrilTent quand ils font malades. On prétend que le fuc du roucou eft un contre-polfon pour ceux qui auroient avalé du manihot non préparé , pourvu qu'on l'avale fur le champ ; car ce remède n'auroit aucun effet, fi on laiflbit pafTer plus d'une demi-heure. On a lu à l'Académie de Berlin le 17 Mai 1764 quelques expériences curieufesque M. Ph.Fermin^ Médecin, a faites à Surinam, fur le fuc exprimé de la racine de la cafTave amere ou du manioc : (car il y a la cafTave douce dont le fuc efl peu ou point dangereux) : ce Dotleur a fait périr dans l'intervalle de vingt-quatre minutes , des chiens & des chats auxquels il a donné ce fuc à une dofe médiocre (comme à celle d'une once & demie pour un chien d'une taille moyenne). Les fymptomes qui précédoient une mort fi prompte étoient des envies de vomir , des anxiétés , des mouvemens convulfifs , la falivation & une évacuation abondante durine & d'excrémens. Ayant ouvert le corps de ces animaux , M. Fermin trouva dans leur eflomac la môme quan- tité de fuc qu'ils avoient.avalée , fans aucun veflige d'inflammation , d'altération dans les vifceres , ni de coagulation dans le fang ; d'oii il conclut que ce poifon n'eflpas acre ou corrofif, & qu'il n'agit que fur le genre nerveux. M. Fermin dit avoir guéri un chat , qu'il avoit em- poifonné ainfi , en le faifant vomir avec de l'huile chaude de navette : il ajoute qu'ayant dillillé à un feu gradué cinquante livres de fuc récent de manioque , la vertu du poifon n'a pafîe que dans les -trois premières onces de l'efprit qu'il a retiré, & dont l'odeur étoit infupportable. Il Tçme IV, E 34 M A N a eu occTiCion d'eflayer fur un Efclave empoifonneuf la force terrible de cet efprit : il en donna à ce malheureux trente-cinq gouttes qui furent à peine defcenduesdans fon eilomac , qu'il pouffa des hurlemcns affreux, & donna le fpe£lacle des contorfions les plus violentes; ce qui fut fuivi d'évacuations & de mouvemens convulfifs , dans lefquels il expira au bout de fix minutes. Trois heures après on ouvrit le cadavre, & on ne trouva aucune partie offenfée ni enflammée , mais l'eftomac s'étoit rétréci de plus de la moitié. MANIKIN. Efpece de grand fmge qui fe trouve à la côte d'Or. Son poil eu. noir & de la longueur du doigt : il a la barbe blanche &c û lon- gue , qu'on lui a donné le nom de monkcys , qui fignifîe pitlt moine. Les Nègres emploient fa peau à faire des fetls , efpeces de bonnets dont ils fe couvrent la tête. MANIL. Arbre affez commun eaGuiane : il porte ordinairement fur fes vieilles branches une réfme qui fert de brai auxhabitans pour calfater leurs canots. Elle conferve affez bien le bois qu'on en frotte. Pour l'avoir il faut quelquefois abattre l'arbre qui heureufement fert à d'autres ufa- ges. On le coupe de longueur , on le refend pour en faire des dou- ves de barriques ; le bardeau qu'on en fait dure dix ans. Maif. Rujl» de Caycnm. MANIMA. Serpent aquatique du Bréfil : il ne fort que peu ou point de l'eau : il s'en trouve qui ont trente pieds de longueur : il eft tiqueté de différentes couleurs fort oppofées entr'elles. Les Sauvages difent que c'eff de là qu'ils ont pris la coutume de fe peindre le corps : ils ont une fi grande vénération pour cet animal , que celui à qui le manima s'efl fait voir , demeure perfuadé qu'il vivra très-long-temps. MANIOQUE ou MANIOC. Voyc^^ Manihot. MANIPOURlSouTAPlRETTE. Tqyq Tapir. MANIS. Quelques Auteurs donnent ce nom au léiardicailkux: voyez ce mot. Les Agriculteurs de la Bretagne appellent auffi manis les fu- miers compofés en partie de goémon ou varec : ils efliment beaucoup le manis défigné fous le nom de petit chêne de mer à pois ou à boutons, MANITOU. Foyei ^^^ articles ToNNE & ManICOU^ MANNE ou MANNE SOLUTIVE , manna, C'eff un fuc mielleux concret , qui tient beaucoup de la nature du fucre ou du miel , qui fe fond &; fe difibut facilement dans l'eau , d'un goût doux, mielleux,, «l'une odeur foible & fade , & de la claffe des corps mu queux. On en. M A N 35 îdîftlngue de plufieurs fortes ; il y en a de couleur blanche ou jaunâtre , ïl y en a de grafTe ou folide , en larmes ou en grains , ou en marrons , enfin félon la forme , le lieu où on la récolte , & les arbres d'où elle fort. La Manne de Calabre , manna CaUbra , efî: communément en lar- mes graffettes , d'un blanc blond , d'une odeur de drogue , jauniffant par la fuite , & devenant plus glutineufe & un peu acre. On choifit celle qui eft plus légère , pure , d'un jaune clair & agréable au goût : elle purge mieux que celle qui eft très-pure & en larmes. Dans la Calabre & la Sicile , la manne découle d'elle-même ou par inciiion , de deux fortes de frêne : voyc^^ ci CartïcU Frêne. C'eft pendant les chaleurs de l'été que cet écoulement fe fait fous la forme d'une li- queur claire ; la manne fort des branches & des feuilles 'dé cet arbre , & s'il ne pleut pas , elle fe durcit par la chaleur du foleil en grains ou en grumeaux. Leshabitans de la Calabre appellent la manne qui coule d'elle-même mannx di fpontana , & celle qui fort par une incifion faite à l'écorce de l'arbre , manna foriatdla : on appelle manna di fronde celle que l'on recueille fur les feuilles , & manna di corpo , celle que l'on tire du tronc de l'arbre. M. Geoffroi , Mat. Medic. dit que dans la Calabre la manne coule d'elle-même par un temps ferein , depuis le vingt Juin , jufqu'à la fin de Juillet , du tronc & des grolTes branches des frênes : elle commence à couler vers le midi , & elle continue jufqu'au foir , fous la forme d'une liqueur très-claire : elle s'épaiifit enfuite peu-à-peu , &fe forme en gru- meaux qui durciffent & deviennent blancs : on ne les ramaffe que le len- demain matin , en les détachant avec des couteaux de bois , pouvu que le temps ait été ferein pendant la nuit : car s'il furvient de la pluie ou du brouillard , la manne fe fond & fe perd entièrement. Après que l'on a ramaffé les grumeaux , on les met dans des vafes de terre non ver- niffés ; enfuite on les étend fur du papier blanc , & on les expofe au foleil , jufqu'à ce qu'ils ne s'attachent plus aux mains : c'efl-là ce que l'on appelle la manne choijie du tronc de l'arbre , ou la manne en forte des boutiques. Sur la fin de Juillet , lorfque cette liqueur cefTe de couler , les Pay fans font des incifions dans l'écorce des deux fortes de frêne ; alors il découle encore une femblable liqueur depuis le midi jufqu'au foir , qui fe coa- gule en grumeaux plus gros. Quelquefois ce fuc eft fi abondant qu'il E2 36 M A N coule jufqu'au pied de l'arbre , & y forme de grandes mafles qui reffem- blent à de la cire ou à de la réfine. On les y laiffe pendant un ou deux: jours , afin qu'elles fe durciflent ; enfuite on les coupe par petits mor- ceaux , & on les fait fccher au foleil : c'eft-là ce que l'on appelle la manna par inàjion , manna fortaiçLla : fa couleur n'eft pas fi blanche , elle de- vient bientôt jaunâtre , puis brunâtre : elle eft toujours remplie d'im- puretés. Latroifieme efpece de manne , efl: celle que Ton recueille fur les feuil- les du petit frêne , fraxiniis humïllor : c'eil la manna di fronde. Aux mois de Juillet & d'Août vers le midi , on la voit paroître d'elle-même , comme de petites gouttes d'une liqueur très-claire fur les fib-res ner- veufes des grandes feuilles , & fur les veines des petites ; par la chaleur ces gouttes fe coagulent bientôt en petits grains blancs , de la groffeur du froment. Cette manne eft difficile à ramaffer ; auifi la trouve-t>on ra- rement dans les boutiques , même en Italie : on l'appelle manne mafii- chine ou en grains. Les habitans de la Calabre mettent de la différence entre la manne ti- rée par incifion des arbres qui en ont déjà donné d'eux-mêmes , & celle qui eit tirée des frênes fauvages , qui n'en donnent jamais d'eux-mêmes ; on prétend que cette dernière eft meilleure que la première , de même que la manne qui coule d'elle-même du tronc , eft préférable à toute autre. Quelquefois après que l'on a fait l'incifion dans l'écorce de cer- tains frênes , qui ne font qu'une variété de notre fraxinus exceljîor , ^ ne croiffent qu'à la hauteur de quinze pieds , on y infère des pailles ou de petites branches , & par ce moyen le fuc qui coule le long de ces corps prend en s'épaiffiffant la forme des ftalaftites pendantes , que l'on enlevé quand elles fontaffez grandes. Telle eft la manne en larmes de nos boutiques , qui eft légère , blanchâtre , pure , d'un allez bon goût , mais qui purge moins que les autres : on la tient bien enfermée dans des boîtes , car le conta£l de l'air la ramollit ou la fait jaunir faci- lement. Après la manne en larmes , on fait plus de cas dans nos boutiques de la manne yèc/zé , & tn forte , fous le nom de manne de marême. On place après celle-là la manne de Cïnefy , qui efl blanche , feche & en petites larmes. Vient enfuite la manne romaine qui efl en larmes aflez groifes , mêlées de marrons ou grumeaux , & de couleur jaunâtre ; puis ia manne de Calabre , 6c celle qu'on récolte dans la Fouille vers M A N 37 'Galliopoli près du tnont Garganiis , appelle aujourd'hui le mont Saint- jinge : quoiqu'elle ne foit pas fort lèche , & que fa couleur foit un peu jaune , elle n'efl pas moins eflimée. Enfin la moins recherchée eft celle qui vient dans le territoire de Rome , appellée la tolfa , près de Civita - Vecchia. Cette manne , quoique feche , efl opaque 6c pefante. Outre ces fortes de mannes de l'Italie , nous avons encore celle de France , nommée manne de Briançon , ou du mélèze , parce qu'elle dé- coule prés de Briançon en Dauphiné , de l'arbre qui porte le nom de mélc^e. Cette manne eft blanche , en petits grains aîongés & de la grofTeur ^u poivre : elle elî douce & agréable , d'un goût de fucre & un peu réfineux : on en fait rarement ufa'ge à Paris , car elle purge beaucoup moins que celle d'Italie. La manne de Briançon paroît fur les feuilles du mélèze en difîérens temps , depuis le vingt de Juin jufqu'à la fin d'Août. On n'en peut faire la récolte que dans des années chaudes &: feches ; car il ne paroît point de manne quand la faifon eft pluvieufe : on a de la peine à la féparer de la feuille du mélèze , où elle efl atta- chée fortement. \.es payfans vont le matin abattre, à coups de hache, les branches de cet arbre; & les ayant mifes par monceaux , ils les gardent à l'ombre fous les arbres. Le fuc qui eft encore alors trop mou s'épaifiit & fe durcit dans l'intervalle de vingt-quatre heures : alors on le ramaiTe & onl'expofe au foleil pour le fécher entièrement. On fait ufage en Orient d'une autre efpece de manne , qui vient d'un petit arbrifleau épineux, nommé alhagi ou a'gul^ Se qui croît abondam- ment en Egypte, en Arménie, en Géorgie , autour du Mont Ararat 6c d'Ecbatanes , & dans quelques Ifles de l'Archipel , même en Perfe , oii les peuples appellent cette manne tmnfchibin , de même que les Arabes la nomment thereniabin Scirung'ibin. Voyez au mot Agul. On trouve encore de la manne fur le pin, le fapin , le chêne, le gené- vrier, l'érable , l'olivier, le cèdre, le faule, le figuier, & fur piufieurs autres arbres. Les diverfes efpeces de mannes font défignées dans les Auteurs, fous quantité de noms allez différens. On a appelle la manne, dans les pre- miers temps, miel de fair ou rofée cêUJle, parce qu'on croy oit qu'elle tomboit la nuit fur les feuilles de frêne, de la même manière que Dieu 3S M A N fit autrefois pleuvoir dans le Défert la manne des Ifraéiites : on a encore appelle manne y des fucs concrets qui fe trouvent fur les feuilles du cèdre , de l'apocin de Syrie , &c. Ces fucs font connus fous les noms à^huiU midkufc , ou éléomcli , owfacchar-alhu^ar, ou alhajfer , onjiracon , miel cédrin , ou du Mont-Liban , &c. Toutes les efpeces de mannes purgatives proviennent de l'extrava- lion du fuc nourricier des arbres fur lefquels on les trouve. Il y a des frênes qui en donnent fans difcontinuer pendant trente ou quarante ans. La manne eft un purgatif très-bon & très-doux, propre à chalTerles matières vifqueufes des premières voies, elle convient aux enfans, à tous les malades, aux femmes enceintes & aux vieillards: elle eft très- utile dans les maladies de la poitrine, bilieufes , inflammatoires ; diffipe la tenfion du bas-ventre, & évacue par les felles toutes les humeurs groffieres. Les Médecins praticiens fçavent les cas où il faut joindre à la manne le tamarin , le féné, quelque fel, &c. Mais dans tous les cas il faut toujours faire bouillir un peu la manne , & avoir foin , quand on en acheté , de fentir fi elle n'a pas une odeur aigre ou de levain ; ce qui annonce une vieille manne & qui eft d'une qualité bien inférieure, pouf ne pas dire défeûueufe. MANNE D'ALAGIE ou D'ALHAGL Foyei Agul. MANNE ou SUCRE D'ALHUSAR, ou ALHASSER. Voyei à l'art. Apocin. MANNE DE BRIANÇON. Foyei Mélèze 6- Panick Manne. MANNE D'ENCENS. Foye^ au mot Oliban. MANNE DE POLOGNE. On a donné auifi ce nom à la graine d'un chiendent très-commun en France & même aux environs de Paris : c'eft \q gramen diciyloidesefculentum^ ou chiendent pied de poule. MANNE DE PRUSSE. C'eft la graine d'un autre chiendent qui n'efl guère moins commun que le précédent , & qui a le nom de chiendent jlottant^ parce qu'il vient dans les ruifieaux. M. Guettard dit que les Prufliens ramafîent les grains de ce chiendent, comme les Polonois le font de ceux du chiendent pied de poule , avec des tamis qu'ils pafTent fous leurs épis, en fecouant ces épis. L'un & l'autre peuple fait avec ces grains des efpeces de gruaux très - délicats , &dont les foupes font agréables à manger. MANNE LIQUIDE. C'eft la manne thereniahin , qui eft tombée en tine forte de deliquinm, Foye^ le mot Agul & l'article M ANNE. M A N ^9 MANNE MASTICHINE. ^ojei au mot Cédrta. MaNOBI. Voy^i Pistache de terre. MANOUSE. C'eil: une forte de lin qui nous vient du Levant à Mar- feille. Voye-i Lin. MANS, C'efl la larve du hanneton. MANS ARD. Nom qu'on donne au pigeonramier.Fby.i /'^/■/.Pigeon. MANTE ou L'ITALIENNE. Itallca, mantis dicta. C'eil: un infede qui approche beaucoup du genre des fauterelles, mais dont le corps efl infini- ment plus effilé. Ses tarfes ont chacun cinq articles ; fes antennes font amples , courtes & filiformes ; fa tête eft petite & aplatie : aux deux côtes de la tête font deux gros yeux à réfeau , & en delfus deux petits yeux lilTes; ce qui fait quatre en total: fon corfelet efl long, étroit , bordé & orné d'une efpece de croix faillante : les étuis qui couvrent les deux tiers de l'infede, font veinés, à réfeau , croifésl'un fur l'autre , &: couvrent des ailes tranfparentes & veinées : les pattes poUérieures font fort longues & les antérieures très-larges: la couleur de la mante efl verte, un peu brunâtre. Comme cet infede a des jambes fort longues, qu'il plie&: pofe quelquefois les deux premières Tune contre l'autre, en fe tenant prefque droit fur les autres pattes, cette attitude pieufe qui imite alors celle où nous joignons les mains, a fuffi pour en faire un infe£le dévot, dit M. de Réaumur, Mlm. /, Tom. pag. ic) : on lui a fait prier Dieu; le peuple de Provence l'appelle même prega-Diou , preirue- Dieu; & croit que Tinfede devine les chofes & indique les chemins qu'on lui demande, paixe qu'il étend fouvent fes pattes de devant tan- tôt à droite, tantôt à gauche. Aulîi le regarde-t-on comme un infede prefque facré, auquel il ne faut faire aucun mal. Le paquet d'œufs que la feme'le dépofe efl des plus fnguliers par leur forme & par leur pofi- tion. M. Halkr dit qu'on a auffi trouvé des mantes en Suiffe. On voit diverfes fortes de mantes au Cabinet du Jardin du Roi , l'une zppeWée la. fraife de Saint-Domingue, l'autre \q fpecire, &c. La mante s'attache, au temps de fa métamorphofe , aux extrémités des branches de quelques arbres ; il n'en a pas fallu davantage à ceux qui les ont va fortir de leurs chryfalides ainfi fituées, & quifont à-peu-près du même vert que la branche à laquelle elles font attachées , pour afîlirer que ces infedesnaifloient effectivement d'un arbre. Foye:^^ maintenant l'article Feuille ambulante. MANTEAU DUCAL. Efpece de coquillage bivalve du genre des '4^ M AN M A Q peignes Se h. oreilles inégales : fes deux valves font également belles ^ elles font rouges, bariolées par zones de blanc , de jaune & de noir: le travail en eft grené, à côtes longitudinales, chargées de ftries comme tuilées; les bords des oreilles font orangés & fes contours font chan- tournés: cette coquille ell fort recherchée dans les Cabinets de Curio- fités. Le manteau ducal blanc s'appelle la gibecière ou la bourfc. MANTEAU ROYAL, ^oje^ Chenille a manteau royal. MANTEQUE. Voye^ à Vartick AUTRUCHE. MANUCODIATA. Nom que les indiens ont donné à un genre d'oi- feau que nous nommons oifeau dô paradis. Voyez ce mot. MAPAS. Arbre laiteux de la'Guyane , qui vient très-haut & très-gros fans être fort branchu : fon écorce efl: lifie. Le fuc de cet arbre , mêlé avec une égale quantité de fuc de figuier fauvage , produit une fubftance impénétrable à l'eau, une efpece de cuir non élaftique , qui s'amollit pourtant au feu ou expofé à la grande ardeur du foleil : Les Nègres em- ploient le lait qu'ils en tirent pour détruire les pians des enfans qui ont fou- vent bien de la peine à guérir de cette maladie ; mais, comme le dit M.^tf P refontaine, il ne faut s'en fervir qu'après que la mère (le figne diagnofti- que) des pians a difparu : on lave alors les enfans avec la feuille & la racine de mapas bouilli, Cette attention épargne aux enfans les fuites funefles des pians. •Cet arbre , au défaut d'autres , peut fervir à faire des planches propres à couvrir les vafes ou les canots qui fervent au roucou ou aux différentes boiffons. C'efl Vamapa du Pérou. Maif. Rujl. de Cayenne. On n'eil pas encore bien inftruit de la différence ou des rapports qu'il y a entre cet arbre & le mapou des Indes Orientales. Le bois de celui-ci efl très-léger & mou; on l'appelle bois de flot ou de liège .- il y a tel de ces arbres fi gros que dix hommes ne pourroient l'embrafTer. Le mapou efl le mahot à grandes feuilles : fon tronc & fes branches contiennent abondamment une moelle blanchâtre , feche & fort légère. Le bois vidé de cette moelle & coupé par tronçons , fupplée au liège. On trouve aufîi à Saint-Domingue le mapou rouge. MAPOU. Foyei^ ^ Vartick Mapas. MAPURITA. Voyei^ à Vartick MOUFFETTES. MAQUEREAU ou AURIOL ou HORREA U , fcomber , efl un poiffon de mer fort connu dans les polfTonneries : il efl long d'environ un pied; fon corps ell rond , charnu , épais & fans écailles j gros comme le poignet ; M A Q 41 poignel: : il a le miifeait pointu , la queue l'eft encore davantage , & finit par deux ailerons ou nageoires éloignées l'une de l'autre : l'ouverture de fa bouche eft afTez grande ; les bords du bec font menus & aigus ; la mâchoire de deflbus entre dans celle de deiïïis, & fe ferme comme une boîte : l'une & l'autre font garnies de petites dents : (es yeux font grands & dorés ; la peau de fon dos dans l'eau eu d'une couleur Jaune de fou- fre ; hors de l'eau , quand il eft mort, elle eft de couleur verte , bleuâtre & argentine au ventre & fur les côtés ; fon dos eft marqué de plufieurs traits noirs en travers : proche de l'anus il a une petite nageoire , fur le dos une pareille , & plufieurs autres plus petites encore d'efpace en efpace : il a une autre nageoire au commencement du dos , deux autres aux ouies , & deux au deffous. Arijlotc dit que les maquereaux , ainfi que le thon , fraient au mois de Février : ils font leurs œufs au commen- cement de Juin; ces œufs éclofent enfermés dans une petite membrane. Les maquereaux de l'Océan font plus grands que ceux de la Méditer- ranée : la chair de ce poilTon eft graffe , cependant compare , fans arêtes , de bon fuc & nourrifTante. Les Iflandois méprifent ce poiffon au point de ne pas vouloir les pêcher. Les Anciens faifoient de la liqueur des ma- quereaux falés leur garum , faumure fort eftimée & d'un grand prix. Lémcrl dit que l'on adonné le nom de maquereau à ce poiflbn, parce que dès l'arrivée du printems il fuit les petites alofes , qui font appellées pucellcs ou vierges , & les conduit à leurs mâles. Quoi qu'il en foit , le maquereau efl de l'efpece des poiffons qui font annuellement la grande route , & femblent , ainfi que les harengs , s'offrir à la plupart des peuples de l'Europe. y[.,Anderfon Hifl. Nat. de rijlandepag. icjy^ dit qu'on lui a aflliré que ce poiffon paffe l'hiver dans le Nord. Vers le printems il côtoie riflande , le Hittland , l'EcofTe & l'Irlande , en fe jetant de-là dans l'Océan Atlantique , où une colonne , en pafTant devant le Portugal &z l'Efpagne, va fe rendre dans la Méditerranée, pendant que l'autre rentre dans la Manche où elle paroît en Mai fur les côtes de France & d'An- gleterre , Se paffe de-là en Juin devant les côtes de Hollande & de Frife, Cette colonne étant arrivée en Juillet fur la côte de Jutland , détache une divifion qui , faifant le tour de la pointe , fe jette dans la mer Baltique, pendant que le refleen paffant devant la Norvège , s'en retourne au Nord. Comme ce poifîbn n'efl pas propre pour le commerce , & que géné- ralement on n'y fait pas d'attention , l'Auteur dit qu'il lui a été impoffible de parvenir à une certitude pofitive à l'égard de fa marche , ôc il a été Tome IK F 42 M A R obligé de fe contenter du témoignage de deux Pêcheurs expérimentés de Hilgeland(les infeftes& les petits vers de mer qui fe trouvent en différens temps dans les parages , font vraifemblablement les bouffoles qui les dirigent dans cette marche). On commence cependant àfaler ce poiiTon comme le hareng ; nous en avons mangé en différens endroits de l'EcofTe & qui ailleurs étoit très-bon : on choifit le plus gros pour cette opéra- tion. La pêche s'en fait la nuit ; du moins elle efl plus abondante quç; pendant le jour. Le maquereau des Indes a des couleurs vives , une ligne autour div ventre , & une autre qui lui prend depuis la tête jufqu'aux yeux. ^ Le maquereau de Surinam efl , félon Ray , le trachurus du Bréfil ^ auquel les habitans du pays donnent le nom de guara-tereba : la largeur de fa tête & de fon corps efl plus perpendiculaire que tranfverfale : foa corps efl ferré, excepté près de l'anus où il efl très-large : il eflprefque carré vers la queue : les yeux font petits , l'iris pourpre : il a huit na- geoires garnies d'arêtes fans compter la queue , ÔC dix petites nageoires- fans arêtes : on le pêche à Surinam. On donne le nom de maquereau bâtard à un poifTon nommé ^zx Ronde'- ht ^ gafcanet & chicarou. Voyez SiEUREL. MARACANNA. Oifeau du Bréfil plus grand que les perroquets : la couleur de fon plumage efl d'un gris tirant fur le bleu : fon cri efl fembla- ble à celui des perroquets. Il fe nourrit de fruits. MARACOANI. Petit cancre carré & velu du Bréfil : il fe promené dans les endroits qui fe trouvent à fec après le reflux de lamer ; dans tout autre temps il ne fort pas de ion trou : fa couleur efl rouffe. Les habitans du pays en mangent la chair. MARACOC ou MURUCUJA. VoyerJ article Grenadille. M ARAILDES AMAZONES. Nom qu'on donne dans l'ifle de Cayenne & dans les pays qu'arrofe la rivière des Amazones , à un oifeau que Mo de Buffon foupçonne être la femelle de Vyacou. Il y en a de couleur cen-- drée & noirâtre. Cet oifeau s'apprivoife aifément : fa chair efl: délicate- & meilleure que celle du faifan , en ce qu'elle efl plus fucculente. MARAIS , palus. Nom donné à un lieu plus bas que les lieux voifins , ou les eaux s'afTemblent & croupifTent parce qu'elles n'ont point de fortie. On appelle aufîi marais certains lieux humides & bas où l'eau vient quand- on creufe un pied ou deux dans la terre. Un tel fol efl noirâtre , poreux y mou & comme détrempé par de l'eau dormante , qui s'y corrompt ôc putréfie en même temps la plupart des rofeaux & autres plantes qui jr M A II 43 végètent. Les marais &les étangs différent desîacs, en ce qu'Us peuvent €tre deflechés : le terrain d'un lac efl toujours noyé ou couvert d'eau. Les marais font fouvent en pure perte entre les mains des particuliers (finon dans les endroits voifins de la mer, où l'on conftruit des marais falans entourés de digues ; voyei Sel marin). On pourroit cependant en tirer bon parti , foit en les deflechant par des foffés capables de recevoir Feau & de relever le terrain , ou par des canaux & faignées qui la failent écouler s'ily a de la pente, ou par des moulins ou par quelqu'autre artifice femblable.Ces opérations û naturelles, û faciles,mais fi négligées, feroient une fource de richefles pour un grand nombre de pays où l'on a befoin de pâturages ou de tourbières ou de terrain habitable, &cc. Les Provinces- Unies des Pays-Bas & les environs de Bergues-Saint-Vinoc, peuvent bien fervir de modèle à cet égard, f^oje^ les motsTERRE & Tourbe, &c. Les marais les plus confidérables que l'on connoifle font à Surinam ; ils ont plus de cent lieues d'étendue : en Afie les marais de l'Euphrate 3c le Palus Méotide font très-renommés : les plus fameux marais de l'Europe font ceux de Mofcovie à la fource duTanaïs , ceux de Finlande , de Hol- lande &c de Weiliphalie : l'Amérique n'eft prefque qu'un marais continu dans toutes fes plaines. La mare eft une très-grande citerne , fouvent aufîi profonde que large ^ que l'on pratique dans une cour ou dans les champs pour l'ul'age des beftiaux : fon eau eft toujours trouble & d'un goût terreux ou bourbeux, ainfi que toutes les eaux flragnantes : le fol en eft argileux. Les eaux des mares & des marais recouvrent communément des buiffons & des moufles , & fervent de retraite à une infinité d'infeftes , &c. MARALIS. Efpece de cerfs jaunes que l'on a amenés quelquefois de Petersbourg du pays des Yacoutes , à ce que dit Gmdin. MARANGOUIN. Voye^^ Maringouin & U wor Cousin. . MARAQUAouMARAKA. Fqye;[CALEBAssiER. MARBRE, T/z^r/zzo/-, eftune pierre dure, compaâe , fufceptible de poli , blanche ou de différentes couleurs , d'un grain plus ou moins fin , opaque , quelquefois demi-tranfparente , fe divifant en morceaux irré- guliers. Il y en a de différente dureté ; mais toutes les efpeces produifent au feu , à l'air & dans les acides les mêmes effets que la pierre à chaux. La propriété qu'ont quelques-uns d'entrer en fufion au feu ordinaire , ne dépend que des mélanges de matières hétérogènes qui s'y trouvent inter- pofées. Les marbres variant à chaque couche , on conçoit pourquoi F 2 44 M A R ils n'ont pas la même dureté , & ne prennent point un poli également brillant. Le marbre , quel qu'il Toit , efl formé , pour la plus grande partie , de coquilles marines, de madrépores , à' entroques , de belemius , ai orthoccratites y & d'autres femblables productions à /o/y/'i^r ou ^oophytes également cal- caires. Dans les marbres groiïïers & à taches de différentes couleurs, on reconnoît toujours ces corps organifés , fur-tout dans les parties blan- ches ; dans ceux qui font plus fins on ne les rencontre pas toujours , parce qu'ils font compofés de parties plus atténuées. L'efpece de tranfparence de plufieurs fortes de marbre appuie cette conjedVure , ainfi que celle des albâtres qui ne font que des marbres parafites. Plus les marbres font fins, plus ils font fufceptibles d'être bien travaillés, fculptés , tournés & polis ; ce qui rend en même temps leurs couleurs plus belles & plus brillantes , ainfi qu'on peut l'obferver fur les colonnes , les vafes & les ftatues qui en font faites. La partie liante des grains du marbre eft la même que le gluten de la marne. Les pierres de ce genre , quoique dures dans leurs car- rières , acquièrent encore plus de cette propriété étant iorties fur le champ ; mais par leur nature qui donne prife aux imprefTions de l'air les marbres expofés dans les lieux publics jauniiTent , fe dcpoliffent , fe Crevaffent & fe détruifent plus ou moins promptement , félon le plus ou moins de parties glutineufes qui mafquent & cimentent les mo- lécules calcaires qui confiituent cette pierre. Les couches ou les mafl'es de marbre font quelquefois très-épaiffes & très-confidérables : elles obfervent dans leur carrière la même po- fition des lits ou bancs que les autres pierres calcaires. Lorfqu'on efl sûr du degré de perfedion de cette pierre , on fuit la veine , difons la couche de la carrière, & à l'aide de la poudre & du levier, on en divife les maffes ; enfuite on les fcie , on les taille avec l'acier , & on les polit avec le fable , la ponce , &c. on en orne les édifices def- tinés à annoncer la richeffe & la magnificence. Les Lithologiftes ont décrit une infinité de diverfes efpeces de mar- bres , qui ne varient entr'elles que par la dureté , l'éclat , la couleur & la grandeur des bigarrures. Les veines & les couleurs qui relèvent l'éclat du marbre , font dues aux infiltrations des fubflances métalliques. Nous ne diftinguerons que trois efpeces générales de marbre ; favoir : 1°. Le Marbre proprement dit ou d'une seule couleur. M A R 45 marmor unlcoîor. Il y en a de blanc , tels font ceux de Saligno , de Carrare , de Padoue , de Gênes & de Bayonne , celui du Mont-Caputo ,' près de Palerme & que l'on appelle ïl marmo corallïno bianco , \imbof' cate du Mont Sinaï , ceux de Paros & d'Antiparos ou de Grèce , qui font aufîi fins que certaines efpeces d'albâtres , mais trop tendres pour prendre un beau poli. Ces fortes de marbres blancs, font après le noir,^ les plus légers de tous ; d'ailleurs ils font très-propres à la fculpture : les plus belles ilatues de l'antiquité & ces édifices pompeux qui ont échappé aux injures àes temps & de la barbarie , ont été faites de ce marbre : auiîi l'appelle-t-on le marbre Jlatuairc. En 1760 on a cherché & trouvé dans le Bourbonnois les carrières de marbre blanc & co- loré, exploitées autrefois par les Romains, & qu'ils avoient employé dans la conftrudion des bains de Bourbon-Lancy. On en a pavé tout récemment la Cathédrale de Paris. On compte encore parmi les mar- bres d'une feule couleur le marbre gris de Lesbos, le marbre bleu turquin de Siti , le marbre Jaune de Numidie , le marbre rouge du Mont Goizim , celui qui eft appelle le verdelLo d'Italie , le noir ou tufcbe d'Aflbuan. Les marbres noirs de Dinant, de Namur, de Barbançon , de Laval , de Pons , font encore très-renommés , ainli que ceux que l'on appelle le porte-or , la griotte , la brèche de Sauveterre. Le marbre, brèche n'eft autre chofe qu'un amas de petits cailloux de marbre de différentes couleurs fortement unis enfemble, de manière que lorfqu'il fe cafî'e , il s'en forme autant de brèches .qui lui ont fait donner ce nom. La brèche d'Alep efl un mélange de petits morceaux , ou gris , ou rougeâtres , ou bruns , ou noirâtres , mais où le jaune domine. La brèche violette efl: un compofé de fragmens blancs , violets & quelque- fois bruns. La brèche grifc efl compofée de morceaux gris, noirs , blancs , bruns. Il y a quantité d'autres variétés de marbres brèches; celles de Memphis, de Florence, de Carrare, d'Arabie, &c. 2°. Le Marbre panaché ou mélangé, marmor varlegatum. On y dif1:ingue toutes les couleurs précédentes, mais diflribuées par veines ou par zones , de manière à en former des variétés très-agréables ; telle efl la différence qu'on remarque dans les marbres appelles le Jaune , le rouge & le vert antique , la brocatelle d'Ef pagne , le cerf-fon-' taine, le feracolin , V Africain jafpé^ ècc. 3°. Le Marbre figuré, marmor opacum figuratum. Tels font les 46 M A R marbres de HefTe & de Florence , fur lefqiiels on remarque des ap- parences d'arbriffeaiix , pietra embofcata , des efquifTes de villes , de châteaux, de montagnes, de lointains, des rmnQS, pietra citadina, &c. On place parmi cette efpece de marbre figuré ceux dans lefquels ont reconnoît encore des coralloïdes , des petites coquilles , des pierres lenticulaires ; les Italiens nomment lumachdla cette dernière forte de marbre : il efl d'un gris jaunâtre. C'eft le marbre. coquïUkr des Fran- çois , ou le marbre conchyte des Naturaliftes. On vient d'en découvrir une carrière en Champagne. Voyei^ Pierre lumachelle. Le marbre oolite ou pifoUte reflemble à un poudingue : voyez ce mot.' Le marbre ammonite d'Altorf eft nommé ainli , parce qu'il efl rempli 4e cornes d'Amman fpatheufes : on en a trouvé près de Bareith. Lorfqu'on travaille le marbre noir , il s'en exhale une odeur de bitume afTez défagréable. Cette couleur noire ne tient pas au feu , elle fe dégage & laifTe la pierre blanchâtre : les marbres rouges colorés par les métaux , y acquièrent au contraire de l'intenfité. L'induflrie efl parvenue à colorer aufîi des marbres blancs , foit à froid , foit à chaud ; c'efl à l'aide des teintures des végétaux , ou des difTolutions métalliques. On en trouve le procédé dans tous les livres de Phyfique , ainfi que la manière de faire le fluc , ce faux marbre dont on fait aujourd'hui tant d'ufage dans la nouvelle architefture : on en fait aufîi des tables , des confoles , des chambranles de cheminées ^ &c. Foyei MOSAÏQUE. MARCASSIN. Voyei Sanglier. MARCASSITE , marchajjîta. Ce mot efl une exprefîîon vague & non déterminée dans tous les Auteurs. Selon quelques Minéraloglfles , la marcafTite efl un corps minéral criflallifé à facettes & fous différentes formes régulières , opaque , d'une couleur pâle , blanchâtre intérieure- ment, qui tient autant aux pyrites qu'aux métaux, & qui diffère efTen» tiellement des pyrites en ce qu'il n'efl pas fufceptible de tomber en efïïorefcence à l'air , ni de fe réduire facilement au feu : ce n'efl qu'à force de combuflions qu'on parvient à réduire fon minéralifateur qui a la propriété de rendre réfradaire la plupart des fubflances métalliques auxquelles il fe trouve fouvent uni. En fe détruifant dans le feu la mar- caffite exhale une fumée d'une odeur d'ail , lorfqu'elle efl blanche , ou defoufre lorfqu'elle efl jaunâtre j fa couleur ordinaire tire fur celle du M A R ^y laiton. On peut dire en général que la marcafïîte, cette matière brillante relevée de toute la fplendeur éclatante des métaux les plus riches , pro- met en apparence des morceaux d'or & d'argent maffif ; mais , comme nous venons de le dire , expofée au feu , elle fruftre l'attente du pofTef- feur ; ce n'efl qu'une efpece de pyrite , qui étant taillée en facettes , re- çoit plus d'éclat. On en fait des bagues & d'autres ornemens. yoyc:^ au mot Pyrite. MARE. Foyei à r article M kRkls\ M AREC A, eft un canard fauvage du Bréfil dont on diftingue deux efpeces : les extrémités des grandes plumes font blanches dans l'une , & rouffes dans l'autre. Leur chair étant rôtie ou grillée , teint les mains ou le linge d'une couleur de vermillon fanguin. Voye^^ Vanick Canard. MARÉCAGE, eil un lieu plat comme bourbeux ou humide , oîi l'on trouve beaucoup à^humus formée par la deftruftion de divers végétaux & des infeQes, De pareils terrains font rarement afTez fermes pour qu'orr puifle paffer deffus. Dans tous les terrains oii les eaux ne peuvent trou- ver d'écoulement, elles forment des marais & des marécages. Il y a de très-grands marécages en Angleterre , dans Lincolnshire près de la mer i on y trouve , lorfqu'on les fouille , une très-grande quantité d'arbres. On en trouve aufïi en Ecofle , & près de Bruges en Flandres : voyez Tranf actions Philofophiques , Abridg, pag. zi8. vol, IF, Voyez aufîî Marais. MARÉCHAL ou RESSORT. Genre de fcarabée dont il y a plufieurs- efpeces. Voyei EscARBOT & Taupin. MARÉE. Voyci ^ l'article Mer. MARGAY. Efpece d'animal qui fe trouve en Guiane , au Bréfil & dans toutes les autres provinces de l'Amérique méridionale ; il reffem- ble beaucoup au chat fauvage par la grandeur & par la figure du corps, îl eft de couleur fauve & marqué de bandes , de raies &: de taches noires, fon poil eft plus court que celui du chat fauvage. Cet animal eft nommé à Cayenne chat tigre : il a les mœurs &: le naturel du chat fauvage , il" fe nourrit ainfi que lui de volaille & de petit gibier qu'il fait furprendre avec beaucoup d'adrefTe. Si nous faifons , dit M. de Buffon , la revifiori^ de ces animaux cruels dont la robe eft fi belle & la nature fi perfide ,. nous trouverons dans l'ancien Continent le tigre , \^ panthère , le léopard y fonce , leferval; & dans le nouveau, le jaguar , Voce/ot, le margay, qus Sous trois ne paroifTent être que des diminutifs des premiers, & qui n'en 48 M A R ayant ni la taille ni la force , font aufîi timides , aiiïîî lâches que les autres font intrépides & fiers. Lemargay paroît être l'efpece voifine de celle de l'once. MARGUERITE , bdlls. Plante dont on diftingue deux fortes , favoir la grandi & hjfetitc. Ces deux plantes, dit M. Veleuie , font de différent genre. La Marguerite grande, leucantkemum vu/gare , que l'on nomme aufîi grande pâquerette ou œil de bouc , a une racine fibre ufe & rampante ; elle pouffe des tiges hautes d'un pied , droites , anguleufes , velues : fes feuilles font crénelées & naiffent alternativement fur les tiges : fes fleurs font fans odeur , belles, radiées ; leur difque efl compofé de plu- fieurs fleurons de couleur d'or, & la couronne de demi-fleurons blancs: ces fleurons font foutenus par des cahces , qui font des efpeces de ca- lottes écailleufes & noirâtres; leur forme leur a fait donner le nom ai' œil de bouc. A ces fleurs fuccedent des femences oblongues , cannelées & fans aigrettes, fur un placenta ras. On plante cette marguerite , qui efl le chryfantemum leucanthemum de LiNN. pour l'ornement des parterres pendant l'automne , & elle tient fon rang parmi les fleurs de la grande efpece : cette plante vivace fe multiplie de femences & de racines éclatées : elle croît aufîi fans culture le long des chemins & dans les prés : les feuilles ont une odeur d'herbe , & rougifTent légèrement le papier bleu. ^ La Marguerite PETITE ou Pâquerette, beUisminor autfylvejîris , croît également par-tout dans les prés : {qs racines font fibrées ; fes feuilles font en grand nombre , couchées fur terre, un peu épaiffes , ve- lues , arrondies & légèrement dentelées. Elle n'a point de tiges , mais elle a beaucoup de pédicules longs , qui fortent d'entre les feuilles & foutiennent de petites fleurs qui différent des précédentes par le calice qui efl formé de lanières oblongues & point imbriqué. Miller diflingue huit efpeces de pâquerette. Les feuilles, les fleurs & les racines de cette plante fontd'ufage : elles font vulnéraires , déterfives & diurétiques , très-recommandables en boifTon dans le crachement purulent , & pour réfoudre le fang coagulé : les Allemands fe fervent de la petite marguerite pour lâcher le ventre des enfans. Cette belle plante fleurit au printems vers Pâques. Elle fe multiplie aifément de graines & de plants enracinés : elle orne très- joliment les gazons champêtres j on fait avec la variété de la petite efpece M A R 49 erpece à fleurs doubles , des bordures & des rampes d'efcaliers dans les jardins. La grande efpece de marguerite orne très-bien les grands parterres. La marguerite jaune ou fouci des champs, fi abondante en Allemagne,^ eft la iliur dorée àQS Jardiniers , & le chryfantemum fegetum vulgare , folio glauco des Botaniftes. Elle eft commune dans les terres à blé : elle donne par la culture des fleurs belles , doubles & radiées , propres à teindre en jaune. Voyez les Mémoires de r Académie des Sciences , artn. lyi^, MARIBONSES. Nom que les habitans de Surinam donnent à des guêpes brunâtres & fort incommodes : elles attaquent & piquent toutes les efpeces d'animaux qui les troublent dans leur travail. Mademoifelle Mérian dit que ces guêpes féroces font la pefle du pays : elles font de petits nids , dont la conftruftion efl admirable , foit pour loger leurs petits , foit pour fe mettre à l'abri de la pluie & du vent : elles ont à- peu-près le talent des guêpes cartonnieres. MARICOUPY. Cette plante qui croît à la Guiane , n'a point de tiges; c'efl: la meilleure de toutes pour couvrir les cafés , quand on n'a point ^occaye ni de tourlouri : voyez ce dernier mot. MARIGNONS. Foyei Maringouins. MARIGOT. Dans les îles de l'Amérique , on donne ce nom aux lieux oîi les eaux de pluie s'aflfemblent 6c fe confervent. f^oyeiMARAis. MARIK.INA. C'eft le fmge-lion décrit par M. de Buffon. A Cayenne on l'appelle acarima. On donne encore le nom de marikina au maragnon, qui efl auffi Vefpece de fmge , que quelques-uns nomment \eJinge-lion ; cette efpece de fmge n'a ni abajoues , ni callofités fur les fefljes, c'efl une efpece defagouin; il a les mêmes manières, la même vivacité & les mêmes inclinations que les autres fagouins ; mais il paroît être d'un tempérament plus robufte ; la femelle n'efl: point fujette à l'écoulement périodique. F'oyeiT article Sl} que les unes coupent les herbes les plus fines, que d'autres les ramafîent, & que tour-à-tourelles fervent de voitures pour les tranfporter : l'une , dit-on , fe couche fur le dos , fe laifTe charger de foin , étend (qs pattes en haut pour fervir de ridelles , & enfuite fe laifîe traîner par les autres , qui la tu-ent par la queue & prennent garde en même temps que la voi- ture ne verfe. C'efl , à ce qu'on prétend , par ce frottement trop fouvent réitéré qu'elles ont prefque toutes le poil rongé fur le dos, On pourroit 54 M A R cependant en donner une autre raifon, dit M. de Bufon^c\Çt qu'habitant fous la terre & s'occupant fans ceireàlacreufer,cela feulfuffit pour leur peler le dos. Quoi qu'il en foit , il efî fiir qu'elles demeurent enfemble & qu'elles travaillent en commun à leur habitation , laquelle une fois creufée fert à tous les defcendans de chaque famille , à moins qu'elle ne foit rui- née, foit par un Chaffeur, foit par un éboulement fouterrain , foit par quelqu'autre accident. Elles y paffent les trois quarts de leur vie, placées ou couchées à quatre pouces l'une de l'autre : elles n'enfortent que dans les plus beaux jours, chauds & fereins, & ne s'en éloignent guère ; l'ime fait le guet , affife fur un rocher élevé , tandis que les autres s'amufent à jouer fur le gazon , ou s'occupent à le couper pour en faire du foin ; & lorfque celle qui fait la fentinelle apperçoit un homme , un aigle , un chien , &c. elle avertit la troupe par un coup de fifflet ; auflî-tôt la gent marmotte fe retire dans fa tanière , & la fentinelle n'y rentre que la dernière. Les marmottes , dit M. de Buffon , ne font point de provifion pour l'hiver ( nous avons dit ci-deiTus qu'elles n'en font que de mouffe & de foin pour matelaifer leurs clapiers ) ; ils femblent qu'elles devinent qu'elles feroient inutiles ; mais lorfqu'elles fentent les premières appro- ches de la faifon qui les doit engourdir, elles travaillent à fermer les deux portes de leur domicile; & elles le font avec tant de foin& de fohdité y qu'il efl difficile d'en diflinguer la place, & qu'il eft plus aifé d'ouvrir la terre par-tout ailleurs que dans l'endroit qu'elles ont muré. Elles font graifes alors ; il y en a dans le pays de Claris qui pefent jufqu'à 20 livres; mais fur la fin de Thiver elles font maigres. Lorfqu'on découvre leurs re- traites , on les trouve refferrées en boule , engourdies comme les loirs. Voyez au mot LoiR ce que nous avons dit au fujet del'engourdiffement commun à quelques efpeces d'animaux, fur-tout à ceux dont le ventre eft rempli de graiffe. On choifit les marmottes graffes , que l'on trouve ainfi engourdies , pour les manger ; on apprivoife les plus jeunes. Celles qu'on nourrit à la maifon , en les tenant dans les Heux chauds , ne s'engourdifTent dans aucun temps. Les Chaffeurs ont grand foin de ne pas creufer les retraites des marmottes dans un temps doux , parce qu'alors elles fe réveillent & creu- fent plus avant; mais dans les grands froids on eft fur de les faifir engourdies. Ces animaux vivent en petite fociété; ils neproduifent qu'un fois l'an,' M A R ^^ Les portées ordinaires ne font que de trois oit quatre petits :leur ac- croixTement eu. prompt , & la durée de leur vie n'efl que de neuf ou dix ans. Les marmottes font des animaux qui paroiflent particulièrement at- tachés à la chaîne des Alpes , où ils femblent choifir l'expofition du Midi & du Levant de préférence à celle du Nord ou du Couchant. Cependant ïl s'en trouve dans les Appennins , dans les Pyrénées , dans les plus hautes montagnes de l'Allemagne & dans tout le pays de Kamtfchatka. Les Kurilles s'habillent de leurs peaux , qui font fort chaudes & très- légères. Le caraâere de la marmotte ( animal que M. Brîjfon met dans le genre du loir, & M. Linneus dans celui du rat ), eil d'avoir deux dents incifives à chaque mâchoire , point de dents canines , les doigts onguiculés , la queue longue & couverte de poils rangés de façon qu'elle paroît ronde. M, JBriJfo/z rapporte à ce caractère générique & fpécifîque le cavia oxila. mar- motte de Bahama ; le mouax du Maryland & du Canada ; celle de Po- logne , dont nous avons parlé au mot bobaquc ; le cuicet ou marmotte de Strasbourg , qui eft Varciomys de la Paleftine ; le chomïr des Polonois ô£ le hamjier des Allemands ; enfin la marmotte ordinaire des Alpes , dont nous avons parlé ci-deffus. MARMOTTE BATARDE. Petit quadrupède connu au Cap de Bonne-^ Efpérance fous le nom de /:/z/;^^5,c'efl-à-dire blaireau des rochers ,^ dont M. Vofmaèr ^ Diredeur des Cabinets du Prince Stadhouder , vient de donner la defcription. Cet animal n'a aucune reffemblance avec le blai- reau ; il n'en a ni la taille , ni la forme , ni les qualités intrinfeques , ni l'économie ; il reffemble mieux à une marmotte. Il a la taille d'un forf lapin , mais il eft plus gros & plus ramaffé. Ses oreilles font ovales , rafesàleurs bords , en partie couvertes d'un poil court & doux , &pref- que cachées fous les poils de la tête ; fes yeux font médiocrement grands, les paupières aflez diftinftes & bien difpofées , ainfi que les fix poils qui compofent chaque mouftacke. Son nez efl noir , nud , & la lèvre fupé- rieure comme divifée en deux , fans l'être efFeftivement. On remarque €n dijEFerentes parties de la peau , des efpeces de verrues d'où fortent quelques poils noirs , roides & plus ou moins longs. Sa langue eft fort epaifîe & garnie de petits mamelons. Le palais de la bouche a huit can- nelures ou filions profonds. De la mâchoire fupérieure fortent deux dents affez longues , très-écartées l'une de l'autre , fortes & affilées , elles çntla forme d'un triangle alongé & aplati. La mâchoire inférieure efl 56 M A R armée de quatre dents incirives. Les dents molaires font aflez grofTeS & placées au fond de la bouche ; il y en a quatre de chaque côté , tant en haut qu'en bas. Les pieds antérieurs font fort courts & cachés en partie 'fous la peau du corps. Une grande partie de ces pieds & de ceux de der- rière eft fans poil , & comme recouverte d'une pellicule noire. Les pattes antérieures font divifées en quatre doigts , & les poftérieures en trois. Ces doigts font arrondis , & armés par le bout' d'onglets courts ôc ronds, La marmotte bâtarde n'a point de queue. L'anus paroît fort long, & !e prépuce en bourrelet rond , découvre vifiblement un peu le membre de la génération. La couleur du poil qui eft comme laineux & doux , reiïemble à celui des lapins de garenne , un peu plus foncé fur la tête & fur le dos , & blanchâtre au devant de la poitrine & du ventre. Entre le cou & le dos paroît une bande blanchâtre qui fe termine à la nailTance des pieds antérieurs. Cet animal mené un genre de vie fort trifte , il vit communément fous terre , & dort fouvent dans la journée. Son allure paroît lente , & s'exécute par bonds. En effet il faute comme les lapins fur les pieds de derrière dont la plante fort alongée efl toute calleufe. Il pouffe fré- quemment des cris de courte durée , mais aigus & perçans. Il eff fort vraifemblable , dit M. Fofmaër ^ que ces animaux mettent bas fouvent & en grand nombre à la fois , & qu'en cela , comme à d'autres égards , ils reffemblent aux lapins. Kolbc dit que fa chair eff bonne à manger, & qu'éiuvée & cpicée, c'efl une nourriture auflî appétiffante que faine. MARNE, marga, eff une terre communémentblanchâtre, grisâtre, com- pofée de craie, de glaife,& fouvent d'un peu de fable fin. Selon qu'il entre plus ou moins d'une de ces terres dans une quantité donnée de marne,' alors elle eff ou plus légère , ou moins compare , ou moins abforbante. Ou plus vitrifîable , ou moins diffoluble aux acides , ou plus ou moins colorée & friable ; mais elle eff toujours plus folide que la craie. En général une bonne marne fait effervefcence dans les acides , ce qui décelé une partie crétacée : mais lorfqu'elle en eff dépouillée , elle paroît te- nace , s'endurcit au feu ; étant détrempée avec de l'eau , on en peut faire des vafes fur le tour ; ceci décelé aufîi fa partie argileufe : enfin on peut féparer la partie fableufe par le lavage ; ipais fi on laiiîe la glaife , M A R 57 6c qu'on la poiiffe ait feu , on en obtiendra une forte de vefre laiteux , ou une porcelaine. C'eft dans les ouvrages de Minéralogie , de Litho- géognofie , & dans le Diûionnaire de Chimie ^ qu'on trouvera ces fortes de détails. Quant aux différentes couleurs des marnes , elles font dues aux par- ties moins végétales que métalliques qui y ont été dépofées dans l'état de guhr avec les autres parties conflituantes de cette forte de terre. On appelle marm pure celle qui ne contient que de la craie , ou une terre calcaire 6c de la glaife très-fînç , à dofes à-peu-près égales ; quand la craie y domine , on l'appelle marne crétacée ; lorfque l'argile s'y trouve en plus grande quantité , on l'appelle marne à foulon. La marne qui fe décompofe dans l'eau ou à l'air , & qui fe fend en lames, eil une forte de marne pure ; elle efl excellente pour fertilifer les terrains fableux ou arides ; fi elle contient trop peu d'argile , elle tombe en pouiîiere. Plus la marne ell argileufe , mieux elle convient fur les terres épuifées par les enfemencemens; plus la marne efl: calcaire &: fableufe , meilleure elle efl: pour les terrains humides & tenaces , ou pour les landes écobuées des bas fonds ; car dans les landes de haut terrain la marne argileufe efl préférable. Voyei le mot Terre , & l'article Falu- NIERES. La marne pétrifîable efl: dans le même cas que l'argile pétrifiable : un fable très-atténué domine dans fa compofuion , & acquiert par la fuite du temps , avec le gluten argileux , une extrême dureté , à la ma- nière de la plupart des pierres. Voye[ Caillou. Enfin la marne à foulons efl: celle qui efl furchargée de terre bolaire & favonneufe ; elle s'étend dans l'eau au point d'y éprouver une forte de diffolution : elle efl feuilletée & fe durcit peu-à-peu au feu ; on s'en fert pour fouler les draps au défaut de la véritable argile à foulon. Voyez ce mot & l'article Terre a foulon. On donne encore le nom de marne à plufleurs autres fortes de terres dont on fait ufage dans les arts; mais ce font pour la plupart des efpeces d'argiles blanches : on les emploie pour faire des creufets , des moules,' &c. Voye^^ Argile. A l'égard de la marne fétide , on doit la regarder comme une efpece de pierre puante calcaire qui fe trouve dans les environs des charbonniè- res. Voyei Pierre puante. La marne fe trouve communément en Normandie , en Champagne ^8 M A K^ à la profondeur de trente ^ quarante, & jufqu'à cent pieds , quelquefois- en pleine campagne , d'autres fois au pied des collines , d'où commu"- nément il découle un petit fil-et d'eau. Elle forme des lits affez horizons- taux ; on y trouve fouvent des cailloux , mais peu de coquilles , fmon en Suiffe , en Bourgogne, & en quelques autres pays. Les premiers & derniers bancs de marne font les plus graveleux ; il femble que cette terre ne foit qu'un dépôt vafeux de la mer, lequel eft , dans certains endroits , compofé du tritus de coquilles & d'un limon provenant de la- dellruftion 6c du récrément des anim.aux de la mer , &C-; Obfavationsfur la Marne, Nous difons que la marne efl: une compofition préparée par les mains' de la nature, pour fervir l'induflrie de l'homme, & qu'elle efl formée d'une terre calcaire , telle qu'il en réfuite des coquilles réduites en pouf^ iiere ; ces molécules terreufes ont été unies & cimentées pour ainfi dire par les parties glutineufes des animaux qui habiîoient ces teftacées. L'invention de marner les terres pour les amender , eft très-ancienne ; mais la nature delà marne, l'efpece de terrain, fa fituation & ce qu'il doit •produire , font quatre chofes qui doivent faire varier dans la manière d'employer la marne. Il ne fuffiî pas d'examiner cette terre en Natura- lise & en Phyficien , il importe bien plus de l'envifager en Econome. Adolphe Kulbel y qui a écrit fur les caiifcs de la fertilué des terres ^ prétend que l'aîkali, mêlé dans une jufte proportion avec la terre , eft la vraie caufe de fa fertilité ; .& que la marne eft fans contredit de toutes les terres celle qui contient le plus & qui retient le mieux les alkalis : &: c'eft à cette propriété qu'il faut , fuivant fon opinion , attribuer les grands effets de cette terre. Bernard PaliJJy dit qu'on trouve la bonne marne au-deftbus de là première terre , ou de quelques couches mêlées ; & qu'on la diftingue par fa couleur jaunâtre ou bleuâtre , par fa folidité ,, par fa qualité graffe & par fon poids. Quantité de Laboureurs fe perfuadent trop aifémçnt qu'il n'y a point de marne dans leur canton , fondés fur ce que l'on ne découvre pas cette terre à la fuperfîcie du fol : mais dans tout pays oh il y a de la craie & de la pierre à chaux, il doit s'y rencontrer de la marne; pour îa trouver il ne s'agit que de fouiller à une certaine profondeur. ' Nous avons eu l'honneur de repréfenter au Gouvernement combien ■ M A R 5^ ?i feroit utile d'avoir dans chaque diftriû de ce R.oyaume , une grande lariere bannale pour fonder la terre. En perçant le terrain par le moyen de cet inftrument on ameneroit à la fuperfieie du fol des échantillons des différentes couches de terre , & l'on feroit en état de faire , à coup sûr , des fouilles & des puits pour en retirer ou de la marne , ou du, fable , ou de la pierre à chaux , ou de la mine , ou du charbon de terre , &c. Par là on connoîtroit à-peu-près les produ£lions fouterraines de la France. La dépenfe d'une telle fonde efl peu confidérable , &: l'utilité en feroit très-grande. Au refte il n'efl pas fuffifant de fouiller ainfi la t^rre : fi l'on n'efl pas aflez inllruit pour en diftinguer les différentes efpeces, on les con- fondra facilement , & l'on prendra du quartz blanc pour une marne blanche , dure , ainfi qu'il efl arrivé il y a quelques années dans une contrée de ce Royaume , oii l'on crut devoir récompenfer la fagacité & la découverte du Citoyen qui faifoit un û beau préfent à fa Province. Il faut efpérer que dans ce moment de paix le Miniflere, qui a ci-devant fait de fi grands frais pour mefurer toute la France , va s'occuper férieu- fement d'un point aufîi important que celui de l'agriculture , & faire voyager dans les Provinces des gens éclairés , & dont les talens en ce genre fe feront déjà fait connoître. Ils apprendront aux Laboureurs , qu'au défaut d'une marne naturelle l'on en peut faire une artificielle avec de la craie & un peu d'argile fableufe , ayant foin de bien unir le mélange. Ils leur montreront à en diminuer ou augmenter les pro- portions pour former le mélange qu'il convient de porter fur une terre dont la nature eu aâuellement oppofée à celle de l'engrais ; ils leur fe- ront voir que l'argile ne convient point à une terre tenace , que la craie n'amende pas non plus une terre calcaire, que la marne convient tou- jours dans un terrain pierreux, léger, fablonneux ou graveleux, ainfi que dans un terroir trop meuble , &c. Quand on veut engraifîér un terrain par la marne , il faut expofer cette terre à l'air par monceaux avant l'hiver ; le foleil , la neige , les pluies , les gelées l'attendrifTent : au printemps , il faut écrafer au mail- let cette marne, puis la diflribuer également & en petite quantité fur le terrain. Il faut encore laifTer ces furfaces , ainfi multipliées , quel- que temps expofées à l'air , enfuite labourer plufieurs fois à quinze jours d'intervalle , fur-tout quand il a plu. Un tel engrais peut fervir pour vingt &: mçme pour trente ans. La terre produit peu la première H 2 6o M A R année , elle rapporte davantage la féconde , la récolte eft déjà bonne à la troifieme année , & ainfi de fuite. Il ne faut donc pas fe rebuter d'a- bord , ni s'exempter pour cela de porter toutes les huit à dix années de bon fumier fur fon terrain. Tout démontre que les terres blanches confervent les amendemens plus long-temps que celles qui font colo- rées : les plantes s'y foutiennent très-bien, ôcfouvent elles y grenent davantage. Foyei pour la manière de marner les terres , ce qui eft dit dans le Corps complet d'agriculture d'Angleterre & dans celui de France : le Dictionnaire des engrais , inféré dans le Journal èconomiiue de Leipfig, Tom, I. & III. On trouve aufîi dans le Journal économique de Saxe , la police du Roi de PrulTe pour la manière de marner les terres. MAROLY. Oifeau pafTager affez extraordinaire , & qu'on croît être originaire d'Afrique. Il eft de la grandeur d'un aigle , & a la forme d'un oifeau de proie ; il a deux efpeces d'oreilles d'une énorme grandeur , qui lui tombent fur la gorge ; le fommet de fa tête efi: élevé en pointe de diamant , & enrichi de plumes de différentes couleurs ; celles de fa tête & de (qs oreilles font d'une couleur tirant fur le noir : il fe nourrit du poiffon qu'il trouve mort fur le rivage de la mer , & bien fouvent de ferpens &: de vipères. On pourroit lui donner le nom àH-aigk de mer. Cet oifeau fait fon paflage aux mois de Septembre & Oclobre , plutôt que dans un autre temps. Les Perfans l'appellent Pac. MARON ou SIMARRON. Nom donné à un Nègre efclave & fuyard; qui fe trouvant accablé de travaux ou de punitions , s'échappe par- tout où il peut , dans les bois , dans les montagnes , dans les falaifes , & autres lieux peu fréquentés, oii il préfère la vie la plus miférable à l'efclavage. Voye?^ à l'article NegRE. MAROUCHIN. C'efl le pailel ou vouede de la plus mauvaife qualité. MAROUETE. Nom donné au petit râle d'eau. /"oye^RALE. MAROUTE. Voyei Camomille. MARQUIS D'ENCRE. Nom que quelques Modernes ont donné à un fcarabée noir qu'on trouve fur les fleurs : fes fourreaux qui ne font point velus , font marqués de deux bandes jaune-noires fur un fond Jaune ou rouge , ce qui lui a fait donner le furnom de livrée dencrc. Le bout du ventre de l'infede n'eft pas recouvert par les étuis. MARRONIER, Efpeçe de châtaignier cultivé. Foyei à l'article Châtaignier. M A II (Si Le Marronier a fleurs rouges, pavla^ eft originaire de la Caroline ; il s'élève à la hauteur de quinze pieds ; fes fleurs font rouges; fon fruit ell brun , & le brou n'en eft point épineux. Le Maronnier d'Inde , hippocafianum vulgare. Grand & bel arbre originaire des Indes , acluellement cultivé par toute l'Europe depuis cent cinquante ans , non pas à caufe du fruit qu'il rapporte, mais à caufe de l'ombre délicieufe qu'il produit , &; parce qu'il le cultive aifé- ment dans tous les terrains , & monte en arbre en peu d'années. Cet arbre répand (qs rameaux fort au large ; fa tige eft droite & fort grofie. Dans la jeunefle de l'arbre , fon écorce eft liiTe & cendrée ; lorfqu'il eft dans fa force , elle devient brune & gerfée, Ses feuilles font difpo- fées en main ouverte , cinq à cinq ou fept à fept fur une queue longue , étroites par la bafe , dentelées en leurs bords , vertes & d'une faveur amere. De ^extrémité des branches naifient plufieurs rameaux qui por- tent chacun , dès la fin d'Avril , plufieurs fleurs blanches ou purpurines à quatre ou cinq pétales j & accompagnées de plufieurs étamines jaunes. A ces fleurs qui forment une grappe pyramidale , fuccedent des fruits arrondis, épineux, qui s'ouvrent en deux ou trois parties , & qui ren- ferment fous leur brou une ou plufieurs châtaignes oblongues , affez grofîes , mais qui n'ont point la pointe qu'on obferve dans les châtaignes ordinaires & dans les marrons. Les amandes ou châtaignes du marronier d'inde ne valent rien à manger ; elles font ameres, acres , aftringentes. M. Bon , Préfident de Montpellier , a cependant trouvé le moyen de rendre ces m.arrons utiles pour la nourriture des beftiaux & des volailles; il fufHt de les préparer à la manière des olives , pour les rendre bons k manger. Voyez les Mémoires de t Académie & le Journal économique , mois d'Ociobre \y5i & mois de Septembre lySy. Plufieurs Maréchaux en font avaler aux chevaux poufTifs. On a eftayé d'en tirer parti pour la compo- (ition des certaines efpeces de bougies, mais fans un grand fuccès ; la lumière en étoit trifte & fombre. On en a tiré aufti de l'amidon , de l'huile àbrCder , de la poudre favonneufe. Diverfes expériences , dit M. Deku:(e^ paroifTent prouver que ce fruit pilé pourroit s'employer utilement pour le blanchiiTage du linge, pour le roui du chanvre, & dans les Manufactures, com»me un bon décraffant : il contient un principe falin & favonneux. Les marrons d'inde fervent au chauffage des pauvres gens ; les enfans s'amufent quelquefois à faire avec ce fruit des reliefs & des fculptures, €i M A R dont le degré do perfeâ:ion annonce l'adrefle & le talent. Les bois du ynarronier brûle difficilement , mais fa cendre fait une très-bonne leiîive. Ce bois n'eft pas fujet à la vermoulure ; il efi: blanc, tendre , mollaffe & filandreux ; il efl de meilleur fervice que le tilleul pour la gravure. On multiplie ce marronier en femant fon marron. Il faut avoir foin de le tailler fur les côtés dans la force de fon âge ; il acquiert aflez facile- ment cette forme agréable , cet air de grandeur , qui fe font remarquer dans la grande allée des Tuileries à Paris. Quel beaufpeclacle que cet arbre chargé de fes girandoles de fleurs ! MARROQUIN. Nom qu'on donne à la peau de bouc & de chèvre préparée d'une manière particulière. Voyc^^à la fin du mot Bouc. MARRUBE , marrubium. Plante qui a une odeur forte , & dont on - peu de foleil , & à être replanté fitôt que fes caïeux font détachés : fes> feuilles font verticillées. Voyei_ Lys. MARTE ou MARTRE, martes abietum. Cetanimal reflfenîble beaucoup • à la fouine , cependant il a la tête plus groflTe & plus courte , les jambes plus longues,& par conféquent il court plusaifément qu'elle. Uwq marque ■ diflinâ-ive des plus fenfibles , c'efl; que la gorge de la marte efl: jaune , aU' lieu que celle de la fouine efl: blanche ; le poil de la marte efl: aufli plus Sri;, plus fourni, êc moins fujet à tomber que celui de la fouine. Quelques • 64 M A R perfonnes ont avancé que ces deux animaux étoient de la même efpece-, & qu'ils fe mêlolent dans l'accouplement : mais ce fait ne paroît pas prouvé ; car on ne trouve point de métis qui viennent de leur accou- plement. La marte originaire du Nord , eft naturelle à ce climat , & s'y trouve en û grand nombre , que l'on eft étonné de la quantité de fourrures de cette efpece que l'on y confomme &c que l'on en tire. Elle e{\ au contraire en très-petit nombre dans les pays tempérés , & ne fe trouve point dans les pays chauds ; elle efl aufli rare en France , que la fouine y efl com- mune. La marte parcourt les bois , &: grimpe au-deffus des arbres : elle vit de chafle , 6c détruit une prodigieufe quantité d'oifeaux , dont elle cherche les nids pour en fuccr les œufs ; elle prend les écureuils & les mulots ; elle mange auffi du miel comme la fouine & les putois. Elle diffère beaucoup de la fouine par la manière dont elle fe fait chafler: dès que celle-ci fe fent pourfuivie par un chien, elle s'enfuit promptement dans fon grenier ou dans fon trou. La marte au contraire fe faitfuivre long-temps par les chiens, avant de grimper fur un arbre; elle ne fe donne pas la peine de monter fur les branches , elle fe tient fur la tige , &de là les regarde paffer. La trace qu'elle laifîe fur la neige , paroît être celle d'une grande bête , parce qu'elle ne va qu'en fautant, &c qu'elle marque toujours de deux pieds à la fois. La marte s'empare , pour mettre bas (es petits , de ces nids que les écureuils font pour eux avec tant d'art , & elle fe contente d'en élargir l'ouverture. Elle met bas au printems ; fa portée n'efl que de deux ou trois petits , qu'elle nourrit d'œufs d'oifeaux , & elle les mené enfuite à la chaffe avec elle. Les oifeaux connoiffent fi bien leurs ennemis , qu'ils font pour la marte comme pour le renard, le même petit cri d'avertiffe- ment. Une preuve que c'efl la haine qui les anime plutôt que la crainte,' dit M. de Buffon , c'eil: qu'ils les fuivent affez loin , & qu'ils font ce cri contre tous les animaux voraces & carnafliers, tels que le loup, le chat fauvage , la belette , & jamais contre le cerf, le chevreuil & le lièvre. Les martes font auffi communes dans le Nord de l'Amérique, que dans le Nord de l'Europe & de l'Afie : on en apporte beaucoup de fourrures du Canada ; mais les plus magnifiques viennent du pays de Kamtf- chatka , où les naturels mangent la chair de cet animal qu'ils trouvent délicieufe. Il ne faut pas confondre la marte dont nous parlons , avec la marte gibeline 5 M A R 6^ llbelinc, qui eu. un autre animal, dont la fourrure eu. bien plus pré-« cieufe. La zibeline eil noire , la marte n'ed que brune & jaune : voye^ Zibeline. La partie de la peau qui efl la plus eftimée dans la marte, eil celle qui efl la plus brune , 6c qui s'étend tout le long du dos, jufqu'aii bout de la queue. MARTE DOMESTIQUE. Ceft le nom que l'on donne fouvent à la fouine. Voyez ce mot. MARTE ZIBELINE. Voyei Zibeline. MARTEAU. Nom donné à une coquille bivalve du genre des huîtres " & dont les replis , la longue queue & les deux parties d'enhaut , ont la figure d'un vrai marteau ou d'une petite enclume ou d'un T. L'extenfion de fes bras un peu plies & contournés , l'a fait appeller crucifix chez les Hollandois : fa couleur brune ou noire qui tire fur le violet efl afTez diflinguée fiu: fa robe. L'intérieur de cette coquille efl brillant & nacré. Malgré la bizarrerie des contours de fes écailles , on efl étonné de la jûflefTe avec laquelle elles fe joignent ; mais elle a cela de commun avec toutes les huîtres. Sa charnière fe trouve dans le milieu de la valve in- férieure , c'efl une large dent triangulaire applatie , chargée elle-même d'autres dents très-fines , qui s'engrènent dans les petites cavités de la valve oppofée. Il y a encore une profonde échancrure dans les deux val- ves deflinées à recevoir le ligament. Cette coquille nous vient des Indes, Nous avons vu un marteau tout blanc. MARTEAU , libella pif cis. Animal de mer d'un afpe£l horrible , fort redoutable aux Mariniers , & qu'on voit communément en Afrique : il porte en Amérique le nom àe pantouflier : on l'appelle aufîi lygéne, C'efl le toibandalo des Efpagnols , & le panapana des Brafiliens. Cet animal vorace efl mis parmi les efpeces de chien de mer; fa tête plate & difforme , s'étend des deux côtés , comme celle d'un marteau ; fes yeux qui fe trouvent placés aux deux extrémités , font ronds , grands , rouges , étincelans : en^ un mot leur mouvement a quelque chofe d'effrayant. Sa large gueule efl armée de plufieurs rangées de dents fort tranchantes : cette gueule efl difpofée de manière qu'elle n'efl point em- barraffée par la longueur de fon mufcau , comme l'efl celle du requin : le corps efl rond & fe termine par une groffe & forte queue. Il n'a point d'écaillés , mais fa peau efltrès-épaiffe , marquée de taches, dure & rude comme celle du requin, mais d'un grain plus fin. ^es nageoires font grandes , fortes , ôc cartilagineufes. Il s'élance fur fa proie avec une Tome IVt I 66 M A R avidité extrême ; tout convient à fa voracité , fur-tout la chair humaine.' Malgré fa vîtefle ,fa force & la crainte du danger , les Nègres l'attaquent volontiers , &; le tuent fort adroitement, & avec d'autant plus de facilité qu'il eft plus grand , parce qu'il fe remue alors bien plus difficilement. On en voit de la grandeur des cétacées moyens : il n'eft pas rare d'en prendre dans la Méditerranée : on l'appelle à \A2iX{^^ç. ptfu jow^ion ^poijfonjuïfy à caufe de fa reflemblance avec l'ornement de tête que les Juifs de Pro- vence portoient anciennement. La chair du marteau efl dure , & d'un goût défagréable. MARTEAU ou NIVEAU D'EAU DOUCE, libella fiuviatilis. On donne ce nom à une forte d'infeûe qui a quelque reffembiance avec le poifTon de mer , dont il eft mention ci-deffus. Ce petit infede eft de la forme d'un T ou d'un niveau ; il a trois pieds de chaque côté , fa queue finit en trois pointes vertes : cette queue, ainft que fes pieds , lui fervent à nager. MARTIN PÊCHEUR ou MARTINET PÊCHEUR, ou ALCYON DES MODERNES. Nom donné à un genre d'oifeau très-beau & dont on diftingue plulleurs efpeces. Le martin pêcheur dont nous parlons ici , fe nomme en latin ipfida nojlras aut alcedo fiuviatilis. C'eft un oifeau qui pefe environ dix gros : il a à-peu-près un demi-pied de longueur , à prendre depuis le bout du bec , jufqu'au bout de la queue , & une envergure de dix à onze pouces , le bec gros , ordinairement droit , pointu , noirâtre & long de deux pouces , la bouche fafranée en dedans : la tête eft grofte en proportion du corps , le cou court , le menton & le milieu du ventre blancs avec quelque mélange de roux-cannelle, le bas du ventre & le deflbus des aîles roufîatres ; la poitrine d'un rouge de cuivre luifant avec les extrémités des plumes d'un bleu verdâtre fale. Il eft orné d'une très-belle couleur d'un bleu clair argenté & éblouiffant fur tout le dos : on y remarque cependant des lignes de noir nuancé. Le fommet de la tête eft d'un noir verdâtre , quelquefois doré ; avec des taches bleues en travers. Le grand pennage eft aufti d'une couleur bleue verdâtre ; la queue eft communé- ment courte , & d'un bleu obfcur ; les jambes font menues, courtes , noirâtres par devant & rougeâtres par derrière , cachées dans les plu- mes jufqu'aux genouillères , terminées par quatre doigts longs , trois antérieurs & un poftérieur ( le doigt externe eft le plus long , ce qui conftitue le caraftere de ce genre d'oifeaux ) , adhérens les uns aux autres M A R ^j jufqu'à la deuxième mi troifieme articulation affez diftantes , de façon que la plante du pied s'y montre large & applatie. Bdon dit qu'on lui donne le furnom de pêcheur, pour ne pas le confondre avec une efpece d'hirondelle nommée aufîi martinet , & qui fait fon nid au bord de l'eau ,' comme le martinet pêcheur. Lorfque cet oifeau ( le mâle avec fa femelle ) trouve un lieu com- mode fur le bord de quelque rivière , d'un canal , d'un vivier , oh il y a un trou creufé de plus de deux pieds de profondeur , foit par des rats d'eau , ou par des racines d'aune , ou par l'eau même , il s'y établit & y couve ; il ne quitte pas même ce lieu quand on lui déniche fes petits : il donne à fon nid une figure ronde , & il en place l'entrée fur un petit angle éminent. Sa ponte eft de quatre œufs, & fouvent il la renouvelle trois fois par an. Comme il nourrit fes enfans de petits poifTons qu'il faiiit avec adreffe en rafant la furface de l'eau, la Nature a donné à cet oifeau un avantage fingulier ; quand ils en ont digéré la chair , les arêtes , les écailles, les épines, les nageoires , demeurent entières & en pelotte dans leur eftomac , & ils les revomiffent dans leur nid en une petite maffe ronde , comme un oifeau de proie rend la curée des os & des plumes de l'oifeau qu'il a mangé. Quoique cet alcyon fe nourriffe de bon poiffon , cependant on ne mange point fa chair : lorfque les payfans le dénichent, ils le font fécher , moins à caufe de la beauté raviffante de fon plumage, que parce qu'ils prétendent que cet oifeau confervé dans un garde-meuble , en éloigne les teignes & toutes fortes d'infe£les nuifibles. Sa chair, difent-ils, efl incorruptible , mais j'ai malheureufement des preuves du contraire ; car tous ceux que j'avois fait préparer , & que j'avois diftribués dans ma colle£tion d'oifeaux , ont été attaqués par les teignes. Toutes les autres propriétés qu'on afligne à cet oifeau , ne font pas moins febuleufes. Le martin pécheur ne pofe prefque point à terre , non plus que le pi- vert , parce que fes jambes font trop courtes. La femelle efl un peu moins belle & moins grofTe que le mâle : tous les deux s'aiment tendre- ment, & font très-fîdeles l'un à l'autre ; pendant la couvaifon , le mâle ne cefTe d'aller à la picorée & de l'apporter à fa femelle, aînfi qu'à {t% enfans nouvellement nés. Il y a peu d'oifeaux à qui l'on ait donné autant de noms qu'à celui- ci : on l'a nommé alcyon , tartarïn , oifeau de glace , oifeau de Saint- I 2 6S M A R Martin , pêcheur du Roi, drapier ou artre, monnleri, pivert d\ati ^pcche'^ verron , merle bleu & d\au ou vierlet- pêcher et , virevent ou le puant des matelots. Des perfonnes font fccherle cœur de cetoifeau , l'enferment dans un fachet & le pendent au cou des enfans , dans l'efpérance de les préferver de l'épilepfie : la graiffe du martinet ell: rouffe. L'on voit dans les Cabinets des Ornlthologiftes d'autres efpeces de martin-pêcheur qui fe trouvent à Smyrne , à la Caroline , à Bengale , &c. celui de Madagafcar efl de la plus grande beauté , ainfi que celui du Mexique dont la tête eft huppée ; fa queue & fes aîles font rayées de bleu & blanc; fon ventre efl de couleur aurore. Le martin-pêcheur à collier des Indes , ipjîda indka torquata^ eft très-agréable à la vue. MARTINET , ^/V^/z^o agrejlis Pliniijive rujlica. Efpece d'hirondelle qui a la gorge & le ventre blancs , & le dos noirâtre. Foye^ ^article Hirondelle. M ARUM , marum^ eft le nom que l'on donne à deux genres de plan- tes, dont l'une eft le vrai manim ou mariim de cor tuf us ^ & l'autre efl le marum-majlic. Le vrai Marum ou Marjolaine de Crète, marumCortufi^ efl une plante aromatique de la famille des chamsedris ; c'efl le chamœdris marlt'nna , incana fructefcens , foliis lanceolatis. Tournefort. Nous l'avons rencontrée en abondance dans la Provence , notamment aux Ifles d'Hye- res , dans celle qui efl appellée Porte-Croz, autour de Toulon , & dans les environs de Graffe. Elle eft de la hauteur d'un pied: fa racine efl £breufe; fes tiges font ligneufes , blanches &; velues comme celles du thym. Ses feuilles font femblables à un fer de lance , approchantes de celles du ferpolet , un peu cotonneufes , d'une faveur fort acre , & d'une odeur fort aromatique ; étant froifîées , elles font fouvent éternuer. Ses fleurs qui font entièrement femblables à celles de la germandrée , naiflent des aiifelles des feuilles; elles font purpurines: il leur fuccede à chacune qratre femences arrondies, renfermées dans une capfule qui fervoit de calice à la fleur. On cultive aufîî cetre plante dans nos jardins ; mais on efl obligé de l'environner d'une cage ou de petits cerceaux de fer, à caufe de (on odeur qui attire les chats de toutes parts. Elle les rend comme infenfés & brilles du feu de la lubricité : de forte qu'ils mordent le marum , fe roulent delTus , Ihumcf^ent de beaucoup de falive 6c même de leur femence. M A R MAS 6^ Cemarum qui croît dans les pays méridionaux , ne nous parvient qu'entièrement defféché. Cette plante étant diflillée avec de l'eau comme les autres plantes aromatiques, fournit beaucoup d'huile effentielle qui tient en Hollande un des premiers rangs parmi les céphaliques , les carmi- natifs, les anti-fcorbutiques , les anti-paralytiques & les remèdes utérins. La poudre ou l'infufion du marum produit, quoique plus lentement , ces mêmes effets; elle excite prodigieufement à l'amour & convient fingu- lierement dans la maladie des nerfs : nous avons l'expérience de cette dernière propriété fur nous-mêmes. La poudre de marum mêlée & prife par le nez avec le tabac , fortifie Se purge le cerveau , & rétablit l'odorat. Le Marum mastic, marum majllch^ thymhrci Hifpanlca majorancz folio, eft doué d'une odeur affez défagréable; il vient de lui-même dans les pays chauds : nous l'avons rencontré dans une terre feche & pier- reufe à l'adofTement Sud du Canigou dans les Pyrénées. Plufieurs par- ticuliers en Efpagne le cultivent volontiers dans leurs jardins. Cette efpece de marum efî: une petite plante ligneufe comme la marjolaine , très-ramifîée & haute de deux pieds : (qs racines fontligneufes & fibrées : ies feuilles font affez femblables à celles du ferpolet , d'une faveur acre d'une odeur de mallic ; près du fommet des rameaux font de petites têtes cotonneufes , qui les embraffent en manière d'anneaux : il en fort de petites fleurs blanchâtres , femblables, ainfi que les graines , à celles du thym. On attribue à cette forte de marum les mêmes vertus qu'au précédent; mais on en fait plus rarement ufage : on préfère même la première ef- pece dans la difpenfadon des trochifques ^Hcdicroi, qui entrent dans la grande thériaque. MASAPUTÉ. ;^oy^7 Serval. MASCAP*.ET ou BARRE , fe dit du reflux ou de la première pointe du flot qui , proche de l'embouchure des rivières , fait monter le cou- rant & le re pouffe vers fa fource. Voyci^ à C article Mer. MASLAC. Aoj^^Bangue. MASQUAPENNE , eft une racine de la Virginie qui eff rouge comme du fang, & dont le fuc fert aux habitans pour peindre leurs armes & leurs meubles. Nous ne favons à quelle forte d'arbre cette racine ap- partient. MASSE AU BEDEAU. Foyai Roquette des champs. 70 MAS MAT MASSE D'EAU. Voyc^ à r article Rose av. MASSICOT, efl une chaux de plomb d'une couleur plus ou moins jaune , & d'ufage en peinture, f^oyei Plomb. MASSUE DES SAUVAGES DE L'AMÉRIQUE. Foyei Mabouja. MASTIC : voyei au mot Lentisque. On trouve chez les Epiciers une matière pierreufe que l'on appelle colk à pierre ou gros majlic: c'eft un compofé de brique réduite en poudre & incorporée dans de la poix ré- fine & de la cire ou de la colle forte liquéfiées. On joint à ce mélange quelque couleur qui convienne à l'ufage que l'on veut en faire. Ce maftic fert à rejoindre les marbres cafTés ou écorchés : on l'emploie auffi pour remplir les crevaffes des gouttières. Les Lapidaires s'en fervent aufll pour tenir les pierres quand ils les taillent. MATAGESSE. Ct^\3. pie-gricche. Voyez ce mot. MATE. Foyei Thé DU Paraguay. MATETÉ. Voye^ à C article Manihot. MATO. Efpece de mangouflan fauvage de l'Amérique, moins beau que celui des Indes Orientales. Voye^^ Mangoustan. MATRICAIRE ou ESPARGOUTTE, matricaria^ eft une plante qui croît en terre grafle dans les jardins & dans les terres fortes des champs. Sa racine efl blanche & fibreufe : elle poufle plufieurs tiges à la hauteur de deux pieds, grofles, roides, cannelées, remplies d'une moelle fon- gueufe. Ses feuilles font nombreufes , d'un vert gai, d'une odeur forte , placées fans ordre , compofées & très-découpées. Ses fleurs naiffent par bouquets aux fommités des branches, & font radiées comme celles de la camomille : le calice eflhémifphérique , formé de plufieurs rangs d'écaillés à rebord membraneux : le placenta efl ras: il fuccede à ces fleurs des femences oblongues, cannelées & fans aigrettes. Toute cette plante a une odeur forte , défagréable , & tient un rang diflingué parmi les hyflériques : elle efl fur-tout recommandée pour les lochies retardées, & les règles douloureufes: elle produit utilement tout ce que les amers & les carminatifs peuvent procurer. Son fuc ex- primé chafTe les vers. La matricaire , ainfi que la maroute , efl un bon préfervatif contre l'approche des abeilles & des coufins ; car ces infe£les n'en peuvent fupporter l'odeur : ainfi lesperfonnes pléthoriques, qui font fujettes à la vifite de ces importuns, feront très-bien de fe munir d'un bouquet de cette plante, lorfqu'elles fe promèneront dans les jardins, ï^a matricaire efl une des quatre fleurs çarminatives* L'infufion de cette MAT 71 plante paroît être très-falutaire dans les maladies des bêtes à cornes, & lorfqr.'elles ont de la difpofition à être attaquées de pourriture. MATRICE , matrices. On donne ce nom aux enveloppes des criftaux & d'autres pierres , & à celles des minéraux & des métaux : on le donne auffi à cette partie charnue des femelles des animaux vivipares , laquelle efl dellinée par la Nature à recevoir, à élaborer, à perfeâ:ionner, ou tout au moins à retenir & à loger la matière féminale. Voyc^ ces détails fur la conception, & de quelle manière l'enfant fe nourrit dans la ma- trice jufqu'au temps de la délivrance , à la fuite du mot Homme. Les matrices métalliques qui renferment les minières des métaux , font ordinairement des corps pierreux ou folides , & qui paroilTent être le laboratoire fouterrain oii fe combinent les métaux, tant purs que miné- ralifés. Hoffman prétend que ces matrices exiftoient avant la formation des métaux qui s'y font préparés & logés. Stahl doute de cette pré- exiftence , parce que ces matrices , félon lui , font trop compares pour pouvoir être pénétrées par les exhalaifons ou vapeurs minérales , qui doivent les féconder en les pénétrant. Peut - être étoient - elles plus poreufes & moins dures avant que d'avoir été pénétrées par les va- peurs, & remplies des filtrations minérales. M. Bertrand dit que les matrices les plus ordinaires des métaux font des foffiles & des miné- raux qui ont déjà des parties élémentaires des métaux: il y a, dit-il, des matrices générales , comme il y en a de particulières. Les générales font les fentes & les filons qui croifent les couches de roche des montagnes: voye^^ les mots Fentes & Filons. Les falbandes ou lifieres qui foutiennent les filons , doivent encore être envifagées comme autant de matrices. Là fe dépofent peu-à-peu les molécules métalliques qui circulent avec les vapeurs humides, ou qui s'élèvent par les exhalaifons fouterraines. Les lifieres les plus molles, comme le fpath, dit toujours M. Bertrand^ étant les plus pénétrables, deviennent aufîi ordinairement les plus riches en métaux. Si les lifieres font dures , comme le quartz , la pierre de corne , les criflaux de mon- tagne , alors les particules métalliques font entraînées ailleurs , ou bien elles s'attachent à la furface des corps moins pénétrables. Peut-être y a-t-il de certaines terres ou pierres qui font plus difpofées à rece\^oir telle ou telle efpece de métal; ce qui produiroit alors des matrices par- ticulières. Ces matrices font fouvent molles & peu compares avant de recevoir les exhalaifons : elles fe durciffent concurremment avec les •72 MAT ■ M A U pariicules métalliques. Ces matrices paroifîent aux Minéraloglftes très- utiles pour la formation & confervation des métaux , parce qu'elles les retiennent dans leur fein , & les préfervent de l'adion de l'air , de l'eau & de la chaleur; moyens fuffifans pour décompofer , altérer & enlever la mine : enfin ces matrices fervent fouvent d'intermède pour la fonte & purification des métaux mcmes. Sur la formation des mines ou métaux, on peut confulter Stalh dans fon Spécimen Beclicrianum ; Neu- mann dans fa Chimie pharmaceutique ; Henckel dans plufieurs Ecrits; Hoffmann dans fa Difjertation fur les matrices des métaux ; Lehmann dans {qs Traités de PhyJïquejd'Hifoire Naturelle, 6i.C. ^gricola & Kœnig ont encore dit quelque chofe de fatîsfaifant fur cette matière. ' MATTE : voyeiTuÉ DU Paraguay. Les MétallurgiHes donnent aufîî le nom de matte à la fubftance métallique encore chargée de foufre , demi- minéralifée . qu'on retire des premières fontes d'une mine qui a été traitée dans le fourneau de fufion. La matte crue efl le roh/iàn des Allemands. Le travail de la mine de cuivre & de plomb en fournit des exemples: voyei Cuivre & VarticU Mines. MATUMA. Très-grand & beau ferpent d'eau douce du Bréfil : mais très-vorace & très-dangereux pour les hommes & les brutes. MAUBECHE, callydris. Oifeau du genre du bécaifeau & dont on diflingue quatre efpeces. La première, de la grofîeur du chevalier, a le deffus du corps d'un brun -noirâtre bordé de marron , clair ; c'eft la' maubêche vulgaire. La féconde, un peu moins groffe , efl en deffus d'ur^ cendré brun , tacheté de noir & de roux , avec des bords blancs au croupion ; c'efl la maubêche tachetée, La troifieme efl grife avec des bords d'un gris blanchâtre ; c'efl la grande maubêche grife. La quatrième , beau» coup plus petite que la précédente, efl également grife , avec de petites taches noires, excepté la partie antérieure de la t3te , les joues & le deiTous du corps qui font d'un blanc de neige. Ces oiieaux vivent en troupe £v habitent ou fréquentent très-fouvent les rivages , fur-tout le bord des lacs & des marais. MAURELLE : voye^^ à L'article TOURNESOL. MAURET ou MYRTILLE : voyei Airelle. MAUVE , malva. Plante dont on diflingue cinq efpeces , favoir , la mauve fid. petite mauve , la mauve de jardin ou hirofe d^ outre-mer y la mauve de mer ou en arbre , & la mauve fauvage. Ce genre de plantes , dit M. Deleuie , fe diflingue des autres genres de l'ordre M AU 75 Tordre des malvacëes en ce que la fleur a deux calices , dont l'intérieur eft fimple Se un peu refendu en cinq pointes , d>c l'extérieur compofé de trois petites feuilles étroites ; le fruit eu. formé de plufieurs capfules monofpermes , réunies en difque autour d'un pivot. La GRANDE Mauve, malva vidgans flore, majore. , efl une plante qui vient d'elle-même le long des haies & des chemins , dans les lieux incultes &; fur les décombres. Sa racine efl limple , blanche, peufibreufe ; plon- gée fi profondément dans la terre , qu'on a peine à l'en arracher ; d'une faveur douce & vifqueufe. Elle pouffe plufieurs tiges hautes d'un pied & demi ou environ , rondes , velues , remplies de moelle , branchues , & de la-groffeur du petit doigt. La plupart font couchées à terre. Ses feuilles font prefque rondes, un peu découpées, couvertes d'un petit duvet, cre' nelées à leur bord , & verdâtres. Ses fleurs fortent des aiffelles des feuilles, formées en cloche, d'une couleur blanchâtre, m.êlée de purpurin. A cette fleur fuccede un fruit applati , orbiculaire , d'un goût fade & vifqueux: il renferme des femences menues , qui ont la figure d'un petit rein. La PETITE Mauve , malva vulgaris ^ flore minore. Toutes les parties de cette plante font plus petites que celles de la précédente : elle rampe davantage à terre ; fes feuilles font moins découpées & plus rondes : elle croît communément en terre graffe , dans les mêmes endroits que l'autre mauve. Toutes les deux font d'ufage en Médecine : elles con- tiennent un fuc mucilagineux , d'où dépend leur principale vertu adou- ciffante. La mauve étoit autrefois d'un grand ufage parmi les alimens : elle tenoit prefque le premier rang dans les tables ; mais aujourd'hui elle efl bannie des cuifmes , & reléguée dans les boutiques des Apothicaires. Il y a cependant encore quelques perfonnes qui , au printems , mangent au commencement de leur repas les têtes & les jeunes poufTes de la mauve avec de l'huile &: du vinaigre , comme les afperges , afin d'avoir le ventre libre. L'une & l'autre mauve humedent , calment , lâchent les urines. La mauve efl la première àes quatre plantes cmolllentes ^q^\\ font \àmauvey h guimauve , la violette noire SL^acanthe. Toutes font également utiles en cataplafme & en lavement. La décodion des feuilles de mauve calme les inflammations des reins , de la veiTie , de la matrice & des conduits urinaires. La Mauve de jardin, ou Rose d'outremer, ou Passe-rose, ou Rose tremiere , malva rofea, C'efl VaU&a rofea de Linn. M. DcUuii Tome IV» K. 74 M A U dit qu'on en fait un genre différent de celui de la mauve, parce que fori calice extérieur eil: formé de fix feuilles. On la cultive dans les jardins à caufe de la beauté de fa fleur. On en fait des allées & des avenues qui font un effet charmant. Sa racine efl longue, blanche ôi mucilagineufe. Sa tige s'élève à la hauteur d'un arbriffeau : elle eu groffe, droite , ferme & velue , un peu branchue. Ses feuilles font larges , arrondies , velues , dentelées , vertes en deffus , blanchâtres en deffous. Ses fleurs font belles, amples , faites comme celles de la mauve commune , mais grandes comme des rofes, tantôt fimples , tantôt doubles , communément d'un rouge incarnat , mêlé de blanc : il y en a aufli de blanches , de jaunes, d'orangées, de couleur de lilas, de rofes, de couleur paille ^ & qui ornent les parterres. Elles laiflTent après elles un fruit applati , comme une paflille. Les fleurs de cette plante , bouillies dans le lait , font un excellent gargarifme anodin, pour les maladies des amygdales &c de la gorge : le refle de la plante eu vulnéraire & aflringent. La Mauve en arbre ou Mauve de mer, malva arhona , efl une efpece d'arbrifleau que M. Linneus défigne fous le nom de lavatera ar~ borea , & qu'on cultive aufîi dans les jardins. M. Dckuiç dit qu'on le fépare aufîi du genre des mauves , principalement parce que le calice extérieur efl d'une feule pièce à trois lobes. Sa tige efl groiTe , forte , affermie dans la terre par plufieurs groffes fibres. Ses feuilles font gran- des , arrondies , femblables à celles de la mauve commune , molles au toucher comme celles de la guimauve. Ses fleurs font d'une belle couleur rouge , pareilles à celles des mauves ordinaires. 11 leur fuccede de grands fruits applatis, comme dans les autres efpeces de mauves. Ses feuilles &: fes fleurs font adouciffantes & émollientes. La Mauve sauvage ou Alcée, alcca vulgaris. Cette plante qui croît communément dans les champs , diifere de la guimauve & de la mauve par la découpure de fes feuilles. Sa racine efl: blanche & ligneufe : {es tiges font nombre ufes , hautes de deux pieds &: demi : fes feuilles font découpées profondément , de couleur verte-brune , & velues fur le revers. Les fleurs nailfent folitaires , femblables à celles de la mauve , de couleur de chair : il leur fuccede des graines noires & velues. On n'emploie les feuilles & la racine de cette plante qu'au défaut de la mauve. Les vertus font à-peu-près les mêmes. La mauve fauvage convient cependant mievix dans Içs dyffenteries épidémiqiics. M. HaUcr M A U M É A 7j: dit qu'elle paffe à la campagne pour un remède ophthalmique , capable d€ retarder l'accroiflement de la cataraâe. Il y a aufîl la Mauve frisée , malva fol'ds crlfpls. Quant à la mauve des Indes , voy&:;^ Fausse Guimauve. La Mauve des Juifs efl le corcAorc. Voyez ce mot. MAUVE. Voyi7^ Mouette. MAUVIETTE. On donne ce nom à une efpece d'alouette grafTe , & celui de mauvls^ à une efpece de petite grive , ou de grive de gui que tout le monde connoît à caufe du goût délicieux de fa chair , de foa gazouillement, &c. ^oye^ Grive & Alouette. MAYENNE. Voyc:{^ Mélongene. MAYPOURI ouMANIPOURI. f'oyqTAPiR. MAZA'vlE. M. de. Buffonàit que dans la Langue Mexicaine , c'étoit là le nom du genre entier des cerfs , des daims & des chevreuils. Hernan^ dei , Recchi & Fcrnandei^ qui nous ont tranfmis ce nom , ont difnngué deux efpeces de mazames toutes deux communes au Mexique & dans la nouvelle Efpagne. Ils donnent le nom fimple àemaïamc à l'efpece qui eft la plus grande & porte un bois femblable à celui du chevreuil d'Eu- rope , c'eft-à-dire un bois de fix à fept pouces de longueur , dont l'ex- trémité eftdivifée en deux pointes, & qui n'a qu'un feul andouiller à la partie moyenne du merrain. La féconde efpece eft plus petite , appel- lée temamaçanc , & ne porte qu'un bois fimple & fans andoûillers , comme celui d'un daguet. La mazame paroît k Vl. de Buffon un chevreuil fem- blable au nôtre , & le fécond n'en être qu'une variété. Ce même Hifto- rien prétend que ces deux animaux du Mexique font les mêmes que le cuguacu-apara 6L\e cuguacu-été àw'QréxiX , ÔC qu'à Cayenne le premier fe nomme carlacou ou biche des bois; & le fécond , petit cariacou ou biche des palétuviers. MÊANDRITE, meandrites aut coralUtes undulatus. C'eft une forte de polypier dur , ordinairenlent orbiculaire , & qui eft marqué par des tortuofités vermiculaires & des concavités irrégulieres. Il y en a qui reffemblent à des éponges , d'autres à un cerveau humain. Le méandrite fe diftingue facilement de tout autre polypier , foit par fa forme fmgu- liere , foit parce qu'il n'eft ni lift'e , ni étoile , ni poreux , ni compofé de tabulaires ; il eft profondément fiUonné de différentes manières. Ses anfraftuofités plus ou moins multipliées fur la furface & aux extré- mités, & qui imitent les vagues de la mer, lui font propres , c'eft-à-dire, K 2 7(^ M É A M É C qu'elles font continuité de charpente. On donne particulièrement le nom de mêandriu h celui qui eft formé de tortuo fîtes , en forme de ver- miiïeaux , ou d'ondes :, ou de vagues : on appelle inancandriu , celui dont les tortuofitës font pointues , dont les côtés & les interflices font profondément rayés & fiUonnés. Celui qui.eil aveo^estortuofités & des iinuofités plus petites , mais en forme de feuilles de jonc , s'appelle jonc corallolde, ; celui à qui les tortuofiîés ou anfraduofités tuberculeufes donnent la figure d'an cerveau , s'appelle cérébrite : le polype vivant oc- cupe la fuperfîcie comme dans les madrépores : voye^^ Corail & Ma- drépore. Il n'eft cependant pas rare de trouver des méandrites lifies & unis , leurs pores ayant été remplis par une matière pierreufs acci- dentelle , pendant leur féjour en terre. On trouve des méandrites pétrifiés. MÉAR. Les Nègres du Cap Vert en Afrique donnent ce nom à utî poiffon de la grandeur &à-peu-près de la figure de la morue. Il efl wn. peu plus épais , mais il prend le fel de môme : on en mange beaucoup dans le pays. MECHOACHAN , mcchoacanna. On donne ce nom & ceux de rhu- barbe blanche ou àe fcammonnée S Amérique, k une racine blanchâtre qui fe carie facilement , & qui a de la peine à conferver fa vertu pendant trois ans. Dans le commerce , cette racine efl en morceaux ou tranches feches , blanchâtres, d'une fubflance un peu mollaffe , un peu fibrée , d'un goût douceâtre , avec une certaine âcreté , qui ne fe fait pas fentir d'abord , mais qui excite quelquefois le vomifl'ement. Elle efl différente de la racine de brionne avec laquelle on l'a quelquefois confondue , en ce qu'elle efl compade & qu'elle n'eft pas fongueufe, ni amere , nî puante. On l'appelle méchoachan, du nom d'une Province de l'Amérique Méridionale , où les Efpagnols l'ont d'abord trouvée : on en apporte auffi de plufieurs autres pays circonvoifms , comme de Nicaragua, de Quito & du Bréfil où elle naît. M. Geoffroi ( Mat. Mcd. ) dit que cette racine n'efl: connue que de- puis l'année 1 524 , où Nicolas Monard la mit en ufage, Marcgrave a été le premier qui a reconnu que la plante du méchoachan efl une efpece de liferon £ Amérique , appelle en latin , convolvulus Americanus , mechoannct dictusy chez les Indiens du Para Jonqui , & chez les Br^SiXitus .^ jetucu. Cette racine eft fouvent branchue ; étant verte , elle eft fort grofîe & a un pied de longueur ; elle eft brune en dehors , blanche en dedans ^ M É C 11 lalteufe & refineiife. Elle poufie des tiges farmenteufes &: rampantes , anguleufes , laiteufes & garnies de feuilles alternes , vertes , & de la figure d'un cœur : les fleurs font d'une feule pièce en forme de cloche , de couleur de chair pâle, purpurines intérieurement. Les fruits font noi- râtres , triangulaires & de la groffeur d'un pois. Les habitans du Bréfil ramaffent ces racines au printemps , les cou- pent en tranches ou circulaires ou oblongues , puis les enfilent pour les faire fécher. Ayant ôté l'écorce de cette racine , ils l'expriment dans une étofle , & ils font fécher ce qui fe précipite au fond de la liqueur après quelques heures : c'efl ce qu'on appelle Lait ou fécuh d& méchoiichan. Avant que l'on fut que la vertu purgative de cette racine fe perd par l'ébullition , on l'eflimoit fort ; mais on lui a fubflitué X^jalap , qui ell aufîi une efpece de Ufcron d'Amérique , qui agit moins lentement & à plus petite dofe. J^oyei Jalap , à [" article Belle DE nuit. Ainfi la réputation du méchoachan a beaucoup diminué. Au refîe , il n'efl point défagréable ; il purge doucement & fans danger les humeurs épaifTes , vifqueufes & féreufes de la tête , de la poitrine &: des articu- lations ; il convient en fubflance dans la goutte , les écrouelles , les ma- ladies vénériennes & dans l'hydropifie : on le prend foit en fubflance ( en poudre ) , foit infufé dans du vin ou dans queîqu'autre liqueur con- venable que l'on évite de faire bouillir. Le méchoachan qu'on récolte quelquefois en Provence , a beaucoup moins de vertu que celui d'Amérique. 11 paroît que le méchuacanica , dont Hernande:^ a parlé fous le nom de tacuache , efl différent de notre méchoachan ordinaire , en ce que cette racine brûle aulTi-tôt la gorge & que le méchoachan efl prefque infipide. MÉCHOACHAN DU CANADA. Foye^ Morelle a grappes. MÉCONITES, On donne ce nom à une pierre calcaire ordinairement grifâtre ou blanchâtre , qui femble formée de l'affemblage de petites pierres arrondies , groffes comme des œufs de poifTon ou des graines de pavot : on la nomme quelquefois /^i^rre ovaire. MÉCONIUM ou MCECONIUM. On donne ce nom à deux fubflances différentes; l'une QQiVopium d'Angleterre que l'on fait dans ce pays , en faifant bouillir les têtes de pavot ( en Turquie le mèconium efl un ex- trait tiré par expreffion de toutes les parties de la plante pilées 78 M É D enfemble : voyei à ParùcU Pavot ). L'autre eft une fubftance excrëmen- teufe, fans mauvaife odeur, que rend l'enfant imm^îdiatement après la naiffance. MÉDAILLE. Voyei BuLBONACH. MÉDAILLES. Les Cabinets de quantité d'Amateurs offrent aux Cu- rieux des colledions de médailles & de monnoles. Les médailles méritent l'aLtention de ceux qui veulent connoître les falles , les époques , les événemens , en un mot approfondir ce que l'Hiftoire, la Chronologie & la Géographie renferment de plus curieux & de plus intéreifant. Dans les fiecles d'ignorance où il n'étoit , pour ainfi dire , pas permis de favoir lire ni écrire , il n'y avoit ni Prince , ni Grand qui ne fe piquât d'avoir des médailles. On comptoit dans les Pays-Bas près de deux cents cabinets de médailles , cent foixante-quinze en Allemagne , plus de trois cents quatre-vingts en Italie , & environ deux cents en France. On fait qu'Alphonfe, Pvoi d'Arragon & de Naples en 1450 , en form.a une fuite , qu'il faifoit porter par-tout avec lui dans une caffette d'ivoire. Ce Monarque avouoit que la vue de ces monu- lîiens étoit pour lui un puifTant aiguillon qui î'excitoit à imiter les vertus de ceux dont il pofledoit l'image. Le goût ôc la connoifTance des mé- dailles fe font bien perfeftionnées depuis la renaiffance des lettres & des fciences : cette connoiiTance s'étendra encore plus chez nos neveux, parce que dans le laps du temps, dans la fuite des fiecles, les faits mémorables fe multiplieront; & il faut convenir que fi l'Hiftoire tire des médailles tant de lumières & de certitude , quelquefois aufîi les médailles tirent de l'hifloire leur explication , en forte qu'elles fe prê- tent un mutuel fecours. L'hiftoire eft le commentaire des médailles , comme les médailles font le flambeau de l'hifloire. L'Egypte , la Grèce & Rome n'ont rien fait de confidérable, foit dans la paix, foit dans la guerre, dont les médailles ne nous retracent le fou venir. Ce font les médailles qui nous repréfentent fi exaftement les Divinités que les Egyptiens , les Grecs & les Romains adoroient , les fondions myftérieufes de leurs Religions , les ftatues , les autels , les temples & tous les inftrumens dont ils fe fervoient dans leurs facrifîces. On y voit les arcs de triomphe , les portiques, les théâtres , les amphithéâtres , les cirques, les colifées, les obélifques , les colonnes hiftoriques , & tant d'autres édifices dont la beauté nous feroit inconnue , fans la repréfentation que l'on en trouve Air les médailles. On y découvre ce que les Anciens faifoient pour M É D 79 gagner le cœur des peuples , comme font rétabllfTement des Colonies, l'adnumération des tribus , l'abolition des impôts . les fpedacles , les combats des animaux , les jeux féculaires , les ports de mer , les aque- ducs , les ponts , les marchés , les congialres &c les autres libéralités des Empereurs ; elles indiquent le commencement de leur règne , la naiffance de leurs enfans , les adoptions , les créations des Céfars, les funérail- les, les apoîhéofes, & enfin une infinité de chofes que l'on apprend plus fiirement que par les livres. Enfin quand il n'y auroit fur ces mo- numens que les portraits des Augufles & des Céfars , c'eft toujours beaucoup d'avoir , d'après nature , l'effigie de ces Maîtres du monde. Toutes les médailles en général font ou d'or , ou d'argent, ou de bronze , ou d'étain, ou de plomb. La fuite des médailles d'or eft très-belle Se très-précieufe ; on peut la pouffer jufqu'au nombre de trois mille ; la fuite en argent peut aller jufqu'à mille. Il a été un temps où l'on fe con- tentoit de frapper les médailles fur le cuivre & de les couvrir d'une feuille d'étain. Les anciennes médailles de plomb font reconnoilTables , parce que le plomb antique efl plus blanc, plus dur & moins flexible que le moderne qui eft plus épuré, La fuite des médailles de bronze efl la plus complette de toutes. On diflingue celles-ci en grand , moyen & petit bronze : on en compte au-delà de trois mille. Enfin quelques Auteurs prétendent que le nombre des médailles connues de toutes les grandeurs & en tous métaux, peut aller au-delà de trente mille. Il y a deux chofes importantes à obferver pour ceux qui étudient les mé- dailles, ou qui veulent s'en faire une colledion. D'abord il faut fe mettre au fait des types dont les légendes font l'ame & la langue : ce n'eil que l'habitude & le travail qui peuvent donner la facilité de lire ces légendes , fouvent frufles , & la plupart compofées de lettres initiales ou d'abré- viations. En premier lieu , un curieux ne fauroit apporter trop d'atten- tion contre la fraude & la fupercherie dans lafalfifîcation des médailles: il y en a de toutes efpeces :.fouvent les plus favans y font pris. Le plus sur moyen de difcernerles véritables médailles antiquesd'avec les fauffes, c'efl de manier fouvent les unes & les autres , &c s'accoutumer à en faire la différence fous les yeux de quelque connoifTeur capable d'en faire fentir le degré de falfi^'^ation. Outre les médailles Grecques, Romaines & Latines, lej médailles Impériales du haut &c du bas Empire tiennent un rang dans les collerions ; elles font pour la plupart aiTez rares. Les Curieux font grand cas de celles qui font chargées de plufieurs têtes , go M È D M É E Ibit que ces têtes foient affrontées , foit qu'elles folent accolées. Les plus anciennes médailles font du neuvième fiecle. Les Romains avoient une vénération outrée & même fuperftitieufe pour l'effigie de leurs Empereurs. Cétoit un crime de leze-Majefté de frapper un efclave qui portoit fur lui de la monnoie marquée au coin de Tibère. Cétoit également un crime de lezeMajefté d'entrer dans un en- droit mal propre ou dans un lieu de débauché avec de la monnoie. Les Empereurs Romains étoient fi jaloux du droit de battre exclufivement la monnoie d'or , que Juflinien accorda comme une faveur fmguliere aux Rois de France la permiflion de frapper à leurs coins la monnoie d'or, leur promettant qu'elle feroit reçue par tout l'empire dans le com- merce , comme celle oii fa propre image étoit empreinte. Les temps font changés ; aujourd'hui chaque Souverain , chaque Souveraineté a le droit de battre monnoie , d'y appofer fon effigie , fes armes , fa lé- gende. On frappe auffi des pièces d'or, ou d'argent , ou de cuivre, à l'occafion des événemens : & ces pièces deviendront autant de médailles précleufes pour nos defcendans dans quelques fiecles. On voit déjà les Amateurs recueillir les pièces frappées à l'occafion de la plupart des événemens de notre Monarchie. L'habile Warïn a fait en or & en argent la colledion des Rois de France ; on diilingue auffi déjà la fuite des mé- dailles qui portent l'empreinte des faftes & événemens de ce Royaume fous Louis XllI , Louis XIV & Louis XV. On voit ces différentes col- lerions dans l'un des Cabinets du Château de Chantilly; ainfi que les médailles frappées à la gloire des grands Héros, celles des Monarques, &c. Nous y avons rangé, dans un ordre à découvert, fous des glaces, ces monumens, ainfi que ceux des Empereurs de Rome; la Mythologie imitée d'après les plus belles pierres gravées. MÉDICINIER D'ESPAGNE. Foyc^ au mot RiCiN. MÉDUSE. Voyei^ au mot Palmier MARIN. MÉEAREL. C'efl le nom que N'uuhoff donne au poifTon ubirre de Laët: fon corps efl brun, marqué de taches faites en forme de lofanges: il mue comme le ferpent : la partie antérieure du corps efî mince, celle de derrière efl du double plus épalffe : fon mufeau efl long & prefque toujours entr'ouvert; fes dents font très-pointues. Cette efpece de poif- fon fe retire entre les rochers oîi il s'engraifle ; il efl très-bon à manger : ceux qui le tuent font faifis de frayeur, & s'afToupifTent quelquefois; «nais ce fommçil fe dilTipe peu de temps après. Ce phénomène , s'il exiHe, M É L gï fexîfle , paroît encore plus fingulier que l'engourcIifTement que caufent îa torpilk & l'anguille tremblante de Cayenne. MÉLANDRE ou MÉLANDRIN. PoifTon qui fe trouve dans nos mers , & fe vend fous le nom de far^o , à caufe de fa reffemblance avec ce dernier poiflbn. Voy&i^ Sargo. Le mélandre efl: noir par tout le corps , & de couleur violette autour de la \.QX.t ; fes dents font petites , aiguës & courbées vers les côtés : du bas des yeux fort une taie faite comme la paupière des oifeaux, qui lui couvre les yeux & lui nuit fort quand il fe bat avec d'autres poifTons : mais il n'en veut ordinairement qu'aux Pêcheurs ; quand il eo voit quelqu'un fur le bord du rivage , il va aufîi-tôt l'attaquer & lui mordre ,-s'il le peut, les jambes ou les cuiiTes : ce poiiTon ell affez méchant pour fe faire craindre. Sa queue diffère de celle du fargo , en ce qu'elle n'a qu'une nageoire : fa chair efl molle & d'un alTez bon goût. En Languedoc, l'on appelle ce poiiTon ca^not , $c pal à Mar- feille : c'eft une efpece de chien de. mer. MÉLANTERIE , melamena. Nom donné à une terre noire vitrio- lique , tendre , qui fe difibut dans l'eau , la colore , & lui donne une faveur fliptique : c'eft une efpece de pierre atramenraire , qui fe trouve en Egypte & dans l'Afie Mineure. Voye^ ce que nous en avons dit dans notre Minéralogie, Tome I , page 65S & fuiv. MELASSE. Foyei l'article Sucre , au mot Canne a Sucre. MELET ou SANGLÉS. Poillon de rivage ou d'étang de mer, fort connu en Languedoc : c'efl une efpece à^fardine. Voyez ce mot. MELETTE. PoiiTon de la Côte d'Or en Afrique , ÔC de la Suéde , dont on diilingue deux efpeces, l'une grande & l'autre petite. La chair de la petite efpece ell très-gralTe & agréable , foit marinée comme le thon, foit defféchée comme les harengs rouges de Hambourg. Les Hollandois en font d'aflez bonnes provifions. MÉLÈZE , larix. Les mélèzes ne différent point des fapins : on pour^ roit même confondre ces deux genres d'arbres ; mais fi on veut les diftinguer , il faut avoir recours aux feuilles qui , dans les mélèzes , fortent en grand nombre & par houpes d'une efpece de tubercule. Ces arbres portent des fleurs mâles & des fleurs femelles , mais placées- dans des endroits diffcrens du même arbre, Les fleurs mâles font de petits chatons écailleux ; les fleurs femelles paroifTent fous la forme d'une petite pomme de pin , ovale , longuette & çcailleufe , d'une $ï M É L . belle couleur pourpre violette , laquelle contient les femences foii^-' fes écailles. On diltingue deux principales efpeces de mélèze ; favoir , le mèU\e. qui quitte its feuilles l'hiver , qu'on nomme auffi épinette rouge du. Canada ; & le mélèze du Levant, à gros fruit rond & obtus , ou cèdre. du Liban, dont nous avons parlé au mot cèdre ou pin du Liban, Voyez ce mot. Le mélèze qui quitte fes feuilles l'hiver, eft un arbre qui devient très- grande très-beau, lorfqu'au printemps il s'orne de la plus belle verdure. Ses feuilles font molles &: non piquantes. Dans le Dauphiné , & en général dans les Alpes de France , de Savoie &: des Grifons ,. même fur le mont Apennin , il y a de grandes forêts de mélèzes. C'eft fur- tout dans L^ pays froids, fur les revers des montagnes du côté du Nord, que fe plaifent les mélèzes. Ces arbres y ont jufqu'à quatre- vingts pieds de hauteur. Pline cite , au Liv. iG. Chap, 40 defon Hijloire NaturelUyWn mélèze de cent vingt pieds de tige, de deux pieds de dia- mètre par-tout, fans compter le faîte garni de fes branches , qui avoient encore cent pieds de longueur fur un demi-pied de diamètre. Pour éle- ver ces arbres de graines, il faut avoir foin de les préferver de la grande ardeur du foleil. Le bois de mélèze eft très-bon. Le cœur de ce bois eft quelquefois rougeâtre , ce qui dépend de l'âge de l'arbre. Les MenLiifiers préfèrent ce bois au pin & au fapin; cependant il fe tourmente à l'air, & ne peut guère, dit M. H aller , fervir de boifage , parce qu'il fue de la téré- benthine pendant plufieurs années. On en fait de bonne charpente dans^ la conflrudion des bâtimens de mer. Dans le Briançonnois & dans lé Valais , quand les mélèzes font dans la vigueur de leur âge , on en tire une réfme que l'on fait couler par de petites gouttières ou canules de bois , ajuftées à des trous de ta- rière que l'on fait aux troncs de ces arbres , environ à deux pieds au- delTûs de la terre. Cette térébenthine de mélèze ne découle pas feule- ment de l'écorce , mais elle eil: répandue dans le corps ligneux de l'arbre , dans des efpeces de réfervoirs qui ont quelquefois jufqu'à un pouce d'é- paiffeur dans les vieux mélèzes ; dans les jeunes, c'eft tout le bois qui eft gras & réfmeux. C'efl: depuis la fin de Juin jufqu'au commencement de Septembre que l'on va ramafler la térébenthine qui fe trouve dans les baquets le foir 6c le matin. Un mélèze bien vigoureux peut fourmi* M É L ' ^5 tous les ans fept à huit livres de térébenthine pendant quarante ou cinquante ans. Cette térébenthine refte toujours coulante & de la con- fiftance d'un firop bien cuit. On retire , par la diftillation de la térében- thine du mélèze , une huile eflentielle employée au même ufage que celle que l'on retire de la térébenthine du fapin, mais qui n'eft cepen- clant pas fi eflimée. Il refîe au fond de la cucurbite une réfme épailTe dont on peut faire du brai gras. M. Duhamel penfe qu'on pourroit tirer des mélèzes du goudron fort gras, en fuivant les procédés que nous décrivons au mot Pin. Dans le Briançonnois où l'on bâtit avec ce bois , les maifons nou- vellement bâties font blanches ; mais au bout de deux ou trois ans elles deviennent noires comme du charbon , & toutes les Jointures font fer- mées par la réfme que la chaleur du foleil a fait fuer & a attiré hors des pores du bois. Cette réfme qui fe durcit à l'air , forme un vernis luifant & poli , qui efl fort propre. Ce vernis rend ces maifons impé- nétrables à l'eau & au vent , mais auiîl très-combuflibles ; c'efl ce qui a obligé les Maglftrats d'ordonner, par un Règlement de Police , qu'elles feroient bâties à une certaine diftance les unes des autres. On n'em- ploie pour conftruire les maifons que les arbres dont on a retiré la Téfme. La térébenthine du mélèze , qui efl , je crois , dit M. Duhamel^ celle tju'on appelle à Paris, la térébcmim de, Venife (ce nom eft dû, félon M. H aller ^ à la térébenthine de Chio , qui fe répandoit autrefois en •Europe par le canal de Venife ) , pour être bonne , doit être tranfpa- rente , de coniîflance de lirop épais , d'un goût amer & d'une odeur forte, affez défagréable. On l'emploie , comme celle du fapin, qu'on nomme térébenthine claire , pour les maladies des reins & de la vefîie, & pour déterger les ulcères intérieurs ; mais elle eft plus acre , & elle efl irritante : elle entre dans la compofition de beaucoup d'em- plâtres , & dans celle de .plufieurs vernis. De toutes les térébenthines que nous ne tirons point de l'étranger^ la plus douce efl celle qu'on nous apporte de l'Amérique feptentrionale, & qu'on nomme le baume blanc de Canada. Voyez ce mot. Après elle efl la térébenthine claire du fapin, puis celle du mélèze; & la plus acre efl celle que l'on retire des pins. L'écorce des jeunes mé- lèzes fert, ainfi que celle du chêne, à tanner les aiirs. Les fruits & les feuilles du mélèze font aflringens. L 2 S4 M É L Les mélèzes des Alpes portent vers la fin de Mal , lorfque les arbres font dans le fort de leur fève, de petits grains blancs de la groffeur des femences de coriandre ; c'eft ce qu'on appelle la manne de Briançon. Si on ne la ramaffe avant le foleil levant , cet aftre diffipe bientôt tous ces grains. Foye^ Manne de Briançon, à l'article Manne. C'eft encore fur le mélèze que fe trouve le meilleur agaric ; on réduit aufli cet arbre réfmeux en charbon , dont on fe fert autour de Brefce ôc de Trente pour la rédudion des mines de fer. MÉLIANTE ou FLEUR MIELLÉE , ou PIMPRENELLE D'AFRI- QUE , melianthus Africanus , eft une plante qui croît aux lieux humides & montagneux : elle eft rare en Europe ; elle tire fon origine d'Afrique : on la cultive dans quelques jardins , fur-tout en Angleterre. Confultez Miller. M. Hermans ^ ci-devant ProfeiTeur à Leyde, a été le premier qui en a fait mention. Le méliante croît à la hauteur de fix pieds : fa racine eft longue , grofte , ligneufe , branchue & très-rampante. Sa tige qui eft: toujours verte , eft de la grofleur du pouce , cannelée , nouée, ligneufe en fa bafe , folide & rougeâtre. Ses feuilles font femblables à celles de la pimprenelle , mais cinq ou fix fois aufti grandes , rudes au toucher > d'une odeur narcotique très- forte , d'un goût herbeux , & afl'ez vertes. Ses fleurs naift'ent en fes fommités , difpofées en épi , purpurines , à quatre étamines inégales & à quatre feuilles , foutenues par un calice rempli d'une liqueur mielleufe , rouge , d'un goût vineux & fort agréa- ble. A cette fleur fuccede un fruit en veflîe , comme celui de la nielle y membraneux , anguleux & renfermant dans quatre loges des femences oblongues, noires, luiiàntes comme celles de la pivoine. La liqueur mielleufe eft cordiale , ftomachale & nourriflante. MÉLILOT ou MIRLIROT , melilotus. Plante à fleurs papilionacées , & dont M. de Tournefort cite quinze efpeces , indépendamment de celle dont il eft parlé dans les Mémoires de l'' Académie de Pétersbourg, Tome y III , page lyc) : elle y eft nommée melilotus , Jiliqu'â membranaceâ comprcfsd : elle eft venue de graines venues en Sibérie. Mais nous ne décrirons ici que notre mélilot commun à fleurs jaunes. C'eft une plante qui vient en abondance dans les prés , dans les haies , les buiflbns , parmi les blés , aux bords des rivières , môme aux lieux rudes & pier- reux. Sa racine eft blanche , pliante & fibrée , plongée profondément dans la terre : elle pouflTe une ou plufteurs tiges à la hauteur de deux ou trois pieds, rondes, cannelées, crevifss, foibîçs ôc rameufes. Ses M É L 87 feuilles naiffent pat* intervalles , portées au nombre de trois fur une même queue , oblongues, peu dentelées, lifles &c d'un vert foncé. Ses fleurs font petites, légumineufes , difpofées en épis longs, jaunâtres, & d'une odeur affez agréable : il leur fuccede des capfules noirâtres , qui renferment chacune une ou deux femences menues, arrondies & pâles. Cette plante verte n'a prefque point d'odeur ; mais quand elle eu feche; elle en a une très-pénétrante , & pour peu qu'on en mette dans le corps d'un lapin clapier ou domeflique , nouvellement tué & vidé , fa chair contraftera le goût agréable des meilleurs lapins de garenne. Lemélilot eft légèrement réfolutif & carminatif : on l'emploie rarement à l'intérieur , mais quelquefois à l'extérieur , à caufe de fa vertu ano- dine & émoUiente. On fait avec fes fommités fleuries des fomentations utiles pour les douleurs de la matrice , qui viennent après l'accouche- anent. M. Hal/era. obfervé que la graine de mélilot contrafte une âcreté confidérable avec le temps , & qu'alors elle eft plutôt rongeante qu'é- moUiente. Il en a vu de très-mauvais effets dans les maux de gor> établiffement font dans l'ufage de verfer un peu d'huile fur la » mer, afin qu'en calmant fon agitation , ils puiffent voir les huîtres » qui font au fond : cette pratique s'obferve de même fur les autres » parties de la côte d'Efpagne. Les Marins ont aufli obfervé de nos » jours que le fillage d'un vaifl'eau nouvellement efpalmé agite beaucoup » moins l'eau que celui d'un vaiffeau auquel on n'a pu donner le fuif » depuis long-temps. M. Pcnnant rapporte une autre obfervation fiiite » par ceux qui font la pêche du veau marin en EcofTe ( British Zoolo^ » gy, voL ly, art. ScaL ) : lorfque ces animaux dévorent un poifTon très- » huileux, ce qu'ils font facilement au fond de la mer, étant parfaite- » ment amphibies , on remarque que la mer à la furface eft d'une » tranquillité fmguliere , ce qui apprend à ces Pêcheurs que c'efi: en M ces endroits qu'ils doivent chercher les veaux marins. Pline fera » donc encore une fois juftifîé : fi les expériences annoncées font exaéles » & authentiques, on pourra ajouter foi à un autre phénomène biesi i> plus furprenant & dont Pline a parlé : cet Auteur afllire auffi qu'o/z » calme une tempête en jettant un peu de vinaigre dans l'air », Au refle plus on étudie la Nature , plus on apprend à fufpendre foa jugement fur ce qui eft faux ou vrai , poftible ou impoftible. La Phi- lofophie a détruit bien des erreurs accréditées par le long témoignage des nations & des liecles ; mais elle a aufti quelquefois rejeté trop- légèrement des opinions qui lui paroiflbient abfurdes , & dont le temps ou le hafard ont prouvé la vérité. On ne fauroit trop répéter que le C différence de pefanteur , je ne pus en faire, l'expérience ; d'ailleurs M. le Comte cïe Marfoli a déterminé que l'eau de la fuperficie de cette mer , étoit d'une quatre cent fixieme partie moins pefante que celle qui étoit à cent cinquante brafîes au-defibus , & que l'eau de cette même mer contient de fel en fa fuperficie, la trente-deuxième partie de fon propre poids , &: dans le fond une vingt-neuvième partie ; c'eft la proportion que montre la balance , ma'S l'aréomètre fait voir qu'il doit y en avoir une partie de plus. L'eau de la Méditerranée pefe plus que celle de l'Océan , félon le Père FcuUlie. Notre principale obfervation fe porta auffi-tôt fur un autre phénomène que voici : toutes les lames d'eau nous fembloient étinceler à mefure que nous les brifions en nageant. Je frottai mes mains & mes cuifTes hors de l'eau , & j'en tirai aufîî des efpeces d'étincelles : j'agitai fortement les cheveux de M. Orter^^ qui parurent aufii-tôt comme autant de vergettes lumineufes. Je fis déshabiller mon domeflique , & lui dis de fe frotter aufîi , avant de fe baigner dans la mer; mais il ne put produire fur lui le même effet qu'il remarquoit fur moi. Je m'avifai de le tirer par le bras : quelle fut notre furprife , notre admiration ,lorfque je vis l'image de ma main mouillée entièrement tracée fur ce bras, comme fi c'eût été un crayon phof[3horique qui l'eût imprimée ; enfin il fe mit à l'eau , ôi je le fis nager pour l'examiner à mon aife ; l'on auroit dit d'un homme de feu qui fe débattoit dans l'eau : nous prîmes du fable & àcs fucus 6^ns le fond de la mer, & en frottant ces corps , ils parurent également chargés de particules phofphoriques. Bientôt la mer nous parut plus lumineufe encore , on auroit pu dire au premier coup d'œil que les étoiles ûxes réîléchiilbient leurs brillantes images dans cet élément. Pénétré d'une curiofîté extrême d'examiner plus attentivement la caufe & les objets fcintillans , regrettant de n'avoir point un vafe pour le remplir d'eau marine , je pris un autre parti. Je plongeai un mouchoir blanc dans MER 117 l'eau , & le retirai tout couvert, comme de petites étoiles ou de points brillans & azurés , qui fembloient s'ëcraier, s'étendre par le frottement, & former des plaques lumineufes. De retour au logis, je me fis apporter une bougie allumée , mais je ne pus diftinguer fur ce mouchoir que des corpufcules dont l'extrême petiteffe &rafFoiblifrementphofphoriqae les déroba peu-à-peu à mes yeux. Le lendemain de grand matin je fus tremper dans la mer un fécond mouchoir, que je repliai bien foi- gneufement ; &; quand le jour fut favorable, je pris ma loupe (un microfcope m'eût été plus utile ) , & je crus reconnoîîre fur la toile du mouchoir des atomes informes , immobiles & bleuâtres : je defcendis dans la cave pour éprouver s'ils ne reluiroient pas mieux qu'au jour; mais tout le beau phénomène étoit détruit. Ainfi j'attribuai l'effet d'un tel fpeftacle , tantôt à des feux phofphoriques & tantôt à des vers marins. Nous difons que le corps lumineux s'affoiblit ôc cefie de remuer dès qu'il eÛ forti de l'eau , de même que fi l'on enferme de l'eau de la mer pendant vingt^quatre heures dans une bouteille, l'eau commence à fe corrompre & ne jette plus d'étincelles. En 1766 , naviguant dans la Manche par un temps fort chaud qui me- naçoit d'un grand orage & au milieu de la nuit la plus obfcure , je fus frappé de voir les feux dont cette mer étinceloit de toutes parts, fe ré- péter , fe mêler & fe confondre , pour ainfi dire , avec les éclairs qui fiUonnoient le cielSc l'horizon , je me rappellcis l'obfervation que j'avois faite fur la Méditerranée , lorfque le vaifieau dans lequel j'étois fe trouva invefli de quantité de barques. Rien ne pouvoit être plus inté- reifant ni plus agréable que le fpedacle dont j'étois témoin. Je me trou- vois fur une côte habitée par des Pêcheurs ; les approches de la tempête les obhgeoient à ramener leurs barques vers le port ; il fembloit que toutes les barques étoient portées fur des flots , en quelque forte en- flammés & environnés de longues lames de feu que fembloit produire chaque coup de rames. Je^fîs tirer un fe hi d'eau de la mer , je pris un godet de terre, rempli aux deux tiers de ladite eau, je me tranfportai au pied du mât du vaifleau fur le pont, afin d'être moins baloté par les coups de mer ( rofcillation étant plus grande au bout des leviers, vers la poupe, la proue, & vers les bords du vaifTeau ) : je m'enveloppai tout le corps & notamment la tête de deux redingotes , pour inter- cepter toute communication avec la lumière que réfléchifToicnt les éclairs & la mer; dans cet état l'eau de mon godet me parut un peu ii8 MER fciiitlllante ; j'y jetai par hafard quelques gouttes d'éther vitriolique dont je falfois ufage , quoique fans fuccès , pour me préferver du mal de mer: je fus étonné de voir quantité de corps animés des plus brillans, s'agiter & produire le même phénomène qui arrive quand on laifTe tomber une pincée de limaille d'acier fur le difque d'une bougie allumée ; tout ce brillant fpeftacle ne dura qu'un infiant. M. RigauJ a. hit auffi différentes recherches en 1763 & 1764 fur la caufe qui rend la mer lumineufe : ce Phyficien a détaillé dans un Mémoire lu en 1768 , à l'Académie Royale des Sciences de Paris , le réfultat de fes obfervations : & ii prétend que fur les côtes de France, depuis l'embouchure de la Garonne jufqu'à Ollende , même que dans l'Océan, depuis le port de Bredjuf- qu'aux îles Antilles & au banc de Terre-Neuve, la mer doit principa- lement la lumière dont on voit briller fes eaux , à une immenfe quantité de petits polypes , à-peu-près fphériques , prefqu'auffi diaphanes que l'eau , ayant environ un quart de ligne de diamètre , & un feul bras d'environ un fixieme de ligne de longueur , qu'ils meuvent avec beau- coup de lenteur , ainfi que leur corps. Ces polypes deviennent lumi- neux dès qu'on agite l'eau de la mer , ou lorfqu'un petit infefte s'approche d'eux. En puifant de l'eau à la furface de la mer lorfqu'elle efl lumi- neufe , on fe procure aifément une grande quantité de ces polypes. Pour bien voir ces petits animaux, dit M. Rigaud , il faut remplir d'eau lumineufe un caraffon de verre blanc & mince , dont le cou foit étroit , enfuite placer le vafe fur un plan folide entre l'œil de l'Obfervateur & le jour d'une fenêtre , ou bien fic'eft lanuit, entre l'oeil & la lumière d'une bougie; bientôt les polypes gagneront la furface de l'eau & les parois du verre ; il fera facile alors d'en prendre avec la barbe d'une plume dans le cou de la bouteille , & on les placera fur un porte-objet au foyer d'un microfcope. C'efl: ainfi que M. Rigaud efl parvenu à dé- couvrir leur figure , à la defîiner & à diflinguer les mouvemens de ces individus. Pour s'afTurer que ces polypes font autant de foyers lumi- neux qui éclairent l'eau dans laquelle ils nagent, il fufKtde filtrer cette eau par un papier gris , elle ne rend plus de lumière , &c les polypes qui reflent dans les pores du filtre étant écrafés avec le doigt deviendront aufTi-tôt lumineux , de même que le doigt. Si l'on met de l'eau marine & lumineufe dans uirtriflal de montre , ck que l'on y verfe , étant dans un lieu obfcur , quelques gouttes de fort vinaigre ou d'un acide miné- ral , foit vitriolique ou nitreux , mais aiïbibli , on voit s'agiter 6c briller MER ,,9 à rînftant autant de points phofphoriques d'un éclat lumineux très-vif, qu'il y a efFedivement de polypes. Mais cet éclat eft le dernier qu'on en doit attendre : un moment après , ils fe précipitent au fond du vafe , & y meurent privés de leur lumière. Cette expérience faite en grand doit produire un très bel effet. Deux gros d'acide nitreux ont produit le même phénomène fur l'eau d'une barrique de la mefure de deux cents quarante pintes. L'acide vitriolique préfenta le même réfulrat , mais l'acide marin agit moins fortement & moins promptement , il fallut une livre de vinaigre pour produire le même effet que celui de deux gros d'efprit de nitre. L'huile de tartre & l'alkali volatil éteigni- f ent bien plus difficilement la lumière de ces infedes , que les acides minéraux. M. Rigaud a tenté vainement de faire reparoître ceux que les acides avoient détruits , en neutralifant les acides par les alkalis , même avant que ces infeûes euffent perdu leur lumière. L'été & l'automne font les temps où ces polypes font les plus nombreux , les plus agiles ; ils font plus gros & plus lumineux encore fous la zone torride que fous la zone tempérée. Foye^^ Polipe. M. Bajon , Médecin à Cayenne, a fait aufîî pendant fa traverfée de France en cette colonie , quelques obfervations fur les corps lumineux qui brillent dans l'obfcurité fur la mer : cette lumière phofphorique qui forme des étincelles , eft un des phénomènes qui l'ont le plus aifedé. Leur vivacité étoit en raifon du frottement plus ou moins confidérable , tant à la furface de l'eau qu'entre les parties de l'eau même diverfement agitées. Les mouvemens violens & brufques font peu favorables à la formation des kïncdks ; elles font plus abondantes & plus vives quand le mouvement efl uniforme , & plus fortes lorfque les mouvemens font produits par des corps étrangers , qu'entre les parties de l'eau même. Indépendamment de ces étincelles on voit dans un certain temps feulement des apparences laiteufes , d'autres fois des efpeces de flammes plus ou moins grandes & de formes affez irrégulieres, fe former dans l'intérieiu- de l'eau à deux & plus de trois pieds de profondeur. On peut comparer ces efpeces de jlammes marims aux éclairs qui partent d'une nuée orageufe : la couleur de leur feu efî cependant plus pale que la lumière des étincelles dont nous avons parlé ci-defîlis & qui font pro-- duites par le frottement , tandis qu'on obferve que les flammes font en- plus grand nombre, la mer étant tranquille & n'ayant qu'un fimple mouvement d'ondulation : il y a plus, le frottement du navire xi^n- 120 M E R produifoit aucune. M. Bajon foupçonne que ces flammes pourroient bien être l'effet des frottemens qui s'exécutent dans l'intérieur de l'eau par la rencontre des courans , dont le cours efl diamétralement oppofé. 11 n'a obfervé ces efpeces de flammes qu'après avoir pafTé le Tropique du Cancer; & elles ne font devenues nombreufes que vers le douzième, le dixième &: le hviitieme degré de latitude feptentrionale , qui eft pré- cifément l'endroit où il a obfervé de terribles courans. Voyc^ a mot. Enfin ces feux fe multiplient de plus en plus quand on approche de la Zone Torride; mais ils diminuent quand on touche fond, qu'on appro- che de terre & fur-tout des embouchures des rivières. Ce Phyficien prétend qu'outre ces frottemens intérieurs , il y en a encore d'autres dépendans de l'impulfion de l'atmofphere fur la furface de l'eau , qui d'ailleurs ne peut en faire mouvoir qu'une certaine mafTe qui prefle contre la partie inférieure. D'après cet expofé de M. Bajon, il paroît que le frottement eft la caufe de ces feux , & principalement des étincelles qu'on obfervé fur la furface de la mer , puifqu'elles n'ont réellement lieu qu'aux endroits oîi l'on reconnoît un frottement marqué , notamment toutes les fois que des vagues font élevées au-delà de la furface de l'eau , qu'elles viennent enfuite à s'ouvrir & àglilTer fur celles qui leur font inf.'rieures, C'efl: autour du navire qui fait un fillage rapide , qu'elles font le plus fenfibles. Lorfque des colonnes entières de poiffons, même ceux dont la couleur elt fombre , font des émigrations en nageant un peu vite , & offrent fur la mer, au lieu de leur paflage, une lumière brillante ; cette lumière paroît encore due au frottement. M. Bajon ayant examiné de près ces points lumineux , leur figure lui a paru fphéroïde; il a reconnu auiTi que la lumière augmentoit en proportion de leur nombre, qi e pluiieurs paroifîent s'élever au-defTus la furface de l'eau & fe perdre dans l'atmofphere : il y a aufîi quelques-uns de ces points lumineux qui commencent à briller dans l'intérieur de Teau, parcourent un certain efpace &: difparoiffent fans parvenir jufqu'à la furface. On ignore d'où dépendent les circonflances qui font varier fi fingu- lierement ces feux, ces lumières : dépendent-elles de la diredion des vents & de l'état de l'atmofphere ? On a obfervé que les vents du Nord font très- favorables, tandis que les temps humides & les vents du Sud leur font contraires. Telles font les généralités que M. Bajon rapporte fur cette matière lumineufe , MER 121 lumineufe , que quelques-uns attribuent à de petits animaux , d'autres aune matière phofphorique , & divers Phyficiens, fur-tout M. Bajon^ à une matière qui a une analogie direfte avec l'éleftricité. Ces trois opinions paroîtront vraifemblables à plufieurs de nos Lefteurs. Au com- mencement de cet article ( rjier lumineufe ) , nous avons expofé l'opinion appuyée d'expériences, qui démontrent qu'il faut attribuer cette lumière à de petits animaux. Les deux autres, quoiqu'hypothétiques , font au moins très-ingénieufes. M. Bajon, en judicieux &: curieux Obfervateur, a déjà tenté quelques recherches particulières à cet égard, c'eft- à-dire , fur les étincelles & les flammes dont il a fait mention. En voici le réful- tat ; notre Phyficien ayant tiré de l'eau de la mer dans un feau , a reconnu que de tous les corps dont il s'efl fervi pour y produire du frottement, foit avec un morceau de bois , foit avec une lame de couteau , foit avec \qs doigts de la main , foit avec le verre , les corps métalliques occa- lionnentle pkis d'étincelles. Les parties animales en donnent moins que le fer, mais plus que les bois ; le verre n'en produit prefqu'aucune. Dès qu'on agite l'eau , fur-tout avec une lame de couteau , il brille à l'inftant une grande quantité de points rouges qui paroifTent s'élancer de la lame même du couteau , & difparoiffent tout de fuite : ce phénomène dimi- mie & difparoît fi on continue ces mêmes frottemens un peu de temps dans la même eau ; mais li on la lailTe repofer pendant quelque temps , & qu'on y promené de nouveau la lame d'un couteau , les étincelles reparoîtront , à la vérité moins nombreufes & moins lumineufes que quand l'eau eft fraîchement tirée de la mer. La même expérience répétée plufieurs fois, a toujours offert le même fpedacle , donné le même réfultat : enfin fi l'eau de la mer eft renfermée dans une bouteille bien bouchée , enfuite agitée même avec les excitateurs ci-deffus défignés , il ne s'y manifefte aucune étincelle ; l'eau vidée de la bouteille dans un feau & expofée pendant quelques minutes à l'air Hbre , enfuite agitée comme ci-deffus , redevient lumineufe , étincelante. Mer morte ou Mer de sel. Voye^ ranïcle Asphalte. Mer noire ou Mer terrible ou Mer majeure. Nom donné au Pont-Euxin qui communique avec la Méditerranée. Sqs tempêtes font plus furieufes, plus dangereufes que celles d'aucurte autre mer, parce que fes eaux font renfermées de tous côtés , &' que les vagues attaquent en tout fens les vaiffeaux. Indépendamment des vents , il y a des courans fort fmguUers dans le canal de la mer Noire ; H Tome IF, Q ïii MER y en a de petits qui permettent aux bateaux de montef , tandis que d'autres bateaux defcendent à la faveur du grand courant. L'eau de cette mer où l'on ne trouve aucun bon port , & dont les rades font découvertes, efl fi peu falée qu'elle fe gèle prefque entièrement en hiver. Cette mer reçoit les plus grandes rivières de l'Europe. Son limon eft , dit-on , une fange alTez noirâtre. Peut-être cette couleur n'eft-elle due qu'à l'ombre réfléchie des bois qui couvrent les côtes de cette mer. Mer pacifique ou Mer du Sud. On l'a nommée pacifique à caufe des grands calmes qui y régnent en certains temps & en certains pa- rages. On y trouve le golfe appelle mer Vermeille. Mer rouge & Mer verte. Voye^ à l'article Mer. Les Anciens l'ont aufîi appellée mer du Suph ou vier du Jonc , à caufe de la grande quantité de joncs ou de mouffes de mer qui s'y trouve. MERCURE. Voye^^ au mot Planete. MERCURE ou VIF - ARGENT , mercurius aut hydrargyrus. C'ed une fubllance métallique , particulière , fans ténacité ni confiflance , froide au toucher & inodore ; mais habituellement fluide & coulante comme du plomb tenu en fufion. Le vif-argent fe divife au moindre effort en un grand rîombre de particules fphériques. Lorfqu'il efl pur, il coule fans faire de traînée fur le papier. Sa couleur ell: blanche , brillante, argentine; il efl entièrement opaque & réfléchit les objets comme une glace. Le mercure purifié efl: , après l'or & la platine , le plus pefant des métaux & des demi-métaux , il pefe quatorze fois plus que l'eau , &; huit cents quarante fois plus que l'air. Un volume d'argent-vif, mis dans un vafe , peut fupporter un volume de fer plus confidérable d'un tiers , fans qu'il s'y précipite. Un pied cube de mercure pefe neuf cents foixante & dix-fept livres. Foye:;^ ia pefan- teur fpècifique des métaux ^ au mot MÉTAUX. Le vif-argent efl une fubflance métallique particulière : ce n'efl point un métal , puifquïl efl volatil , qu'il fe diiTipe dans le feu , mcme au degré de l'eau bouillante , & qu'il manque de fixité & de duftilité. Le plus grand froid de la nature ne le rend point folide. MM. Grifchow & Braun , Académiciens de Saint-Pétersbourg , ne font parvenus en 1760, à fixer le mercure au point de le rendre flexible , malléable & de la confiflance du plomb , qu'en employant un froid artificiel de 186 degrés 6c deux tiers (félon la divifion de Réaumur ), Le mercure MER Ï25 n'eft point un demi-métal en ce qu'il n'eft point combuftible. Doit-il être regardé comme une fubllance métallique feule de fon efpece > ou (eroit-il un monilre dans l'ordre des demi-métaux , comme l'efl la platine dans l'ordre des métaux } Le mercure s'amalgame avec prefque tous les métaux & demi-më- taux qu'il pénètre peu-à-peu & qu'il ronge : l'or & l'argent font les fubftances fur lefquelles il produit ce phénomène par excellence , &c. Le vif-argent fe trouve dans fes mines propres & particulières, en Italie , dans le Frioul , en Hongrie , à Ydria en Carniole ( celles-ci furent découvertes en 1497 ) , à Almaden en Efpagne , en Chine & à Chalatiri dans le Potofi. M. l'Abbé Sauvages prétend qu'il y en a une mine fous la ville de Montpellier. La mine la plus fameufe qui foit dans l'Amérique méridionale eft auprès de Guancavelica au Pérou dans l'Audience de Lima , à foixante lieues de Pifco : c'eil de cette grande minière qu'on retire le mercure propre à la purification & exploita- tion de l'or & de l'argent de ces contrées. Cette mine eft creufée pro- fondément dans une montagne fort vafte , & les feules dépenfes qu'on a faites en bois pour la foutenir, font immenfes. On trouve dans cette mine des places , des rues , & une Chapelle 011 l'on célèbre la Meffe les jours de Fêtes ; on y eft éclairé par un grand nornbre de chandelles allumées pendant qu'on y travaille. Les particuliers y font travailler à leurs frais , & font obligés , fous les plus grandes peines , de remettre au Roi d'Efpagne tout le mercure qu'ils en tirent. On le leur paye à un certain prix fixé ; & lorfqu'on en a tiré une quantité fufEfante , l'entrée de la mine efl fermée, & perfonne n'en peut avoir que de celui des magafms. On tire communément tous les ans des mines de Guancavelica , pour un million de livres de vif-argent , qu'on tranf- porte par terre à Lima, puis à Arica , & de-là à Potofi. On a obfervé que quand le mercure fe rencontre fous fa forme fluide , alors il efl difperfé dans des drufcns .-.s'il eft intercepté dans de la pierre , de quel- que nature & couleur qu'elle foit, alors il forme des filons inclinés, & plonge très-profondément en terre : on en a tiré à plus de neuf cents pieds de profondeur perpendiculaire de la mine d'Yuria en Eu- rope. On defcend dans cette mine par des bures ou puits. Il y a une infinité de galeries fous terre , & fi baftes que l'on eft obligé de fe cour- ber pour pouvoir y paffer ; & il y a des endroits où il fait ft chaud , que pour peu qu'on s'y arrête, on eft dans une fueur très-abondante : 124 MER aufli ne travaîlle-t-on guère dans ces fouterrains que pendant l'hîver. Les mines de la Carniole produifent un revenu très-confidérable à la Maifon d'Autriche , puifqu'il s'en débite 4000 quintaux par an. On donne le nom de mercure vierge au vif-argent fluide , coulant , fans mélange , que l'on trouve dans des matrices terreufes ou pier- reufes , mais dont on peut le féparer par le moyen d'un ruiffeau d'eau courante ou par des cribles , ou des égouttoirs faits exprès , ou par le feu. Il eft fouvent difficile de le retirer tout fluide des entrailles de la terre , car il s'infiltre facilement & en peu de temps dans des . fentes terreufes ou pierreufes , em forte qu'on le perd fouvent de vue , quand on croit être en état de l'obtenir entièrement. Quand ïe mercure pur eft extrêmement divifé dans la mafle pierreufe , on broie les mafles , & on l'en retire par la fimple diflillation , foit per afcenfum , foit per defcenfum. Tous les Auteurs difent que les Indiens & tous ceux qui travaillent à retirer ce minéral fluide de {qs mines, ne vivent pas long-tems, & qu'ils font bientôt paralytiques de tous leurs membres &: meurent tous étiques. On en attribue la caufe aux vapeurs mercurielles qui afFeftent le genre nerveux. On dit encore que l'on ne condamne aujourd'hui aux travaux de ces fortes de mines, in opus metalli , que des criminels. Les atteliers où l'on diûille pendant l'été la mine de mercure d'Ydria , font à quelque diftance de la mi- nière : on y refpire une odeur très-défagréable : les beûiaux ne veulent guère pâturer dans les herbages voifms : les Ouvriers font relevés tous les mois, & le tour de chacun d'eux ne revient qu'une fois l'an. Ceux qui travaillent dans les fouterrains à retirer le mercure vierge, font changés au bout de quinze jours ; ils remontent pour laver la mine à l'air libre , ce qui prolonge un peu leur vie. On affure avoir vu de ces Ouvriers dont la fueur étoit prefque autant de larmes de mercure vif. On nous mande d'Ydria qu'il y a dans cette mine des Travailleurs volontaires & peu maladifs ; ils font relevés tous les deux jours. Le mercure réduit en vapeur a la propriété de détruire les infeftes. L'on appelle mercure miner alifé celui qui eft tellement atténué , divifé & difperfé , foit dans le quartz , foit dans le fchifte , ôcc. qu'on a quel- quefois de la peine à l'y reconnoître fans le fecours de la loupe , & fur- tout celui qui s'eft combiné avec le foufre , avec lequel il forme une mafle rouge , nommée cinabre : voyez ce mot. On donne à cette forte de vif-» argent le nom de mine de mercure rou^e^ MER 125 Le Naturalise qui voyage , & qui aura de forts foupçons qu'il doit exifler dans tel ou tel lieu une mine de mercure , a une expérience fa- cile pour s'en aflurer ; il fuffira de faire rougir une brique qu'on couvrira d'une demi-ligne d'épailTeur de limaille d'acier on de pierre de chaux cal- cinée ; on pofera la prétendue mine de mercure fur cette limaille & on cou' vrira le tout d'un verre à boire renverfé. Dès que la mine aura reçu une chaleur fiifîifanre , le mercure , s'il y en a , s'élèvera & s'attachera au Verre en vapeurs blanchâtres qui fe condenferont bientôt en gouttelettes fluides , fans avoir la propriété de mouiller. Le mercure & fes prépa- rations font encore employées très-fréquemment contre les vers , comme le fpécifîque le plus certain. M. Bourgeois affure que c'eil un excellent remède contre le rhumatifme , les obftruâions fquirrheufes du méfen- tere & des autres vifceres , & en général contre toutes les maladies de la peau. Il produit même fouvent de très-bons effets dans les maladies fcrophuleufes , fur-tout fi on le joint à l'extrait de ciguë. On fait avec le mercure des boules propres , dit-on , à purifier l'eau. Les perfonnes peu inftruites , & même crédules , rifquent fouvent d'être dupées par une efpece de filouterie chimique. Des Charlatans leur font accroire qu'ils pofTedent une liqueur avec laquelle ils convertifTent le cuivre en argent. Pour y parvenir ils plongent une lame de cuivre dans une liqueur qui efl une difTolution de mercure avec excès d'acide. L'a- cide s'unit au cuivre & fixe le mercure fur le cuivre que l'on retire aufîî- tot , & qui alors efl d'un brillant argentin. C'efl par le moyen du mercure que l'on met les glaces au tain , qu'on applique l'or fur le cuivre , & que l'on traite certaines mines d'or & d'argent. Le vif-argent étant plus denfe en hiver qu'en été , fert encore à faire des thermomètres : on en fait aufîi le cinabre fadlice ou le ver- millon fi utile en peinture. Il entre dans la compofition dont fe fait l'ef- pece de végétation métallique appellée arbre de Diane. On l'emploie en Médecine pour purifier la m^ffe du fan-g & pour guérir les perfonnes attaquées du mal vénérien. M. Baudot, Médecin à la Charité fur Loire, vient de renouveller avec fucçès l'ufage du mercure comme anti-hydro- phobique. On l'emploie en friftions camphrées pour combattre les fymp- tomes féroces de la rage , maladie fpafmodique dans tous les temps & locale dansfon principe. Voyez l'Ouvrage intitulé : EJfuis ami-hydro- ■phobiques, de \ Imprimerie Royale , lyyo. Quelques perfonnes font pafîer le mercure à travers d'une peau de chamois pour reconnoître s'il n'eil 12^ MER pas altéré : quoiqii'alllé au plomb ou au bifmuth ou à l'étain , il y pafle également ; mais il fait alors une traînée quand on en verfe fur un plan . incliné. Nous avons dit que le mercure s'amalgame très facilement avec l'or , l'argent , l'étain , le plomb , le bifmuth , difficilement avec le cui- vre , & point du tout avec le fer. Il s'unit très-promptement aufîi à la graiiTe & au mucus animal appellé/^/ive , & au mucus végétal appelle gomme arabique. Alors il donne le mercure gommeux & peut s'étendre dans l'eau ; & combien d'autres préparations mercurielles I On nous envoie le mercure par la voie de Hollande & de Marfeille dans des facs nommés bouillons , du poids de cent foixante à cent qua- tre-vingts livres chacun. Ces bouillons font faits de cuirs doubles de mouton ; liés & enfermés dans des barils de bois dont les interfaces font remplis de fon & de fciùres de bois ou de paille hachée menu. Voye:i notre Minéralogie pour la manière d'exploiter & de purifier le mercure , tom» IL pag. i6z , èdit, de iJJ^ , ainji que pour la réduction du cinabre, MERCURIALE , mcrcurialis. Plante dont M. de Toumefort diftingue neufefpeces. M. Deleu^e obferve dans chacune deux fortes d'individus ; toutes les plantes de ce genre portent , dit-il , fur des pieds diiFérens les fleurs mâles & les fleurs femelles. Nous décrirons ici les efpeces de mercuriales les plus communes , & en même temps les plus ulitées. La Mercuriale mâle ou Foirolle ou Vignoble ou Vignette; mercurialis mas , eft une plante qui croît par-tout le long des haies , des chemins , dans les cimetières , dans les jardins potagers , les vignobles & autres lieux humides & ombrageux. Sa racine eft tendre , fibreufe & annuelle ; elle pouffe des tiges hautes d'un pied , anguleufes , ge- nouillées , lifTes & rameufes : fes feuilles reffemblent affez à celles de la pariétaire , elles font oppofées , oblongues , pointues , verdâtres , dentelées en leur bord , d'une faveur nitreufe amriioniacale nauféabonde. Il fort de leurs aiffelles des pédicules courts & menus , auxquels font attachées des fleurs à Ample calice de trois ou quatre feuilles & à deux piftils : à ces fleurs fuccedent des fruits à deux capfules en forme de tef- ticules , rudes & velues , contenant chacune une femence arrondie. La Mercuriale femelle ou a épi , mercurialis fœmina , autfpl' cata , ne diffère de la précédente que par fes fleurs qui font ramaffées en épi , & qui ne font fuivies d'aucun fruit ni femences. Ainfi on devroit changer les noms de ces deux efpeces de mercuriales ; car celle en epi qui porte des fleurs à pUifieurs étamines ( au nombre de douze oi^ MER 127 feîze ) fouteniies par un calice à trois ou quatre feuilles , eft précifé- ment la fécondante , c'eft-à-dire , la mercuriale mdle , & celle qui porte la graine efl: la mercuriale femelle : on voit par-là combien étoit fauffe Tidée de quelques Anciens qui croyoient que la mercuriale qu'ils appelloient mdle , étoit propre à faire engendrer des garçons , & que celle qu'ils appelloient /t'/;ziETE. Toutes les efpeces de métaux , ainfi que les demi-métaux fe ren- contrent ou en fragmens , plus ou moins confidérables , ou en veines fuivies: voye^ aux articles MiNES & Minéraux. Les métaux fe for- ment tous les jours, fe décompofent , & cesdécompofitions font fuivies de reprodudions nouvelles. Foyei Filons & Ochres. Quant à la manière de les réduire , c'efl une connoifTance de métal- lurgie , qu'on doit puifer dans les ouvrages des Minéralogifles : voye^ le Dictionnaire de Chimie & notre Minéralogie. MÉTEIL. Nom donné à du grain mêlé de froment ôc de feigîe, Foyei au mot BlÉ, MET 141 MÉTEL ou METELLES. On donne ce nom au fruit de la pomme épineufe appellèe Jlramomum. Voyez PoMME Épineuse. MÉTÉORES, mcteora. On donne ce nom à certaines efpeces de phénomènes qui naiflent & paroifTenc dans le corps de l'atmofphere , c'efl-à-dire , dans la mafle d'air qui nous environne immédiatement, ÔC où nous refpirons; tels font \^s nuages ^ le tonnerre .^ la pluie , la grêle , la neige , les brouillards , le ferein , la rofée , les feux follets , "^éclair , les globes de feu , les vents , les tourbillons y les orages y &c. Voyez cha- cun de ces mots. Les Phyliciens font trois divifions des météofes, en ignés ^ en aériens , & en aqueux. Les premiers font le tonnerre , le feu Saint-Elme , le prcjier & autres phénomènes qui tiennent à l'éledricité. Les météores aériens font les vents; les météores aqueux font ceux qui nouspréfcntent Veau dans fes divers états , tels que les nuages , la grêle , la rofée , la neige , la pluie , les vapeurs ou les brouillards , &c. Nous parlerons de chacun de ces phénomènes fous leur nom particulier : nous dirons feulement ici que prefque tous les météores préfentent dans le mécanifme de leur formation des difficultés confidérables , des myfteres profonds , que toute la fagacité des Phyficiens n'a pu encore pénétrer. Cette réflexion n'efl: qu'une fuite de la ledure de De/cartes, de Mufchcmbroeck ^ de Hamberger y &c. furies météores. MÉTIS & MULATRES , en latin hybris pour le mâle , & hybrida pour la femelle. Les métis font une efpece d'hommes nés d'un Blanc ( Européen) & d'une femme Maureffe : ils font défignés dans toute l'Amérique Efpagnole, fous le nom de meJU^os , c'efl-à-dire métis ; 6c ceux qui naifTent d'un Blanc & d'une Negreffe fe nomment Mulatos, & Mulâtres dans nos Colonies : on appelle au Bréfxldu nom de Mamelus, les fils d'Européens & d'Indiennes , les mêmes qu'on nomme Métis au Pérou : on nomme Jambos ceux qui font nés d'un Sauvage ôc d'une Mé- îive. Voye:^^ aux mots Ne GRE &HoMME. Dans les animaux quadrupèdes , on remarque ordinairement , lorf- qu'il y a mélange d'efpeces , que ce qui efl engendré a plus de reffem- blance à la mère qu'au père , principalement en ce qui regarde la forme & l'habitude du corps. Voyei^ MuLET 6* Jumart. METLE , eft un arbriffeau naturel du Mexique , oîi il croît en abon- dance ; quelques Auteurs croient fans fondement que cette plante eft le maghey des Voyageurs. Le metle eft un arbriffeau que l'on plante ôc 142 M E U cultive de la même manière que la vigne ; Tes feuilles différent les unes des autres , & fervent à divers ufages ; de celles qui ne font que de naître , on en fait des confitures , du papier , des étoffes , des nattes , des ceintures, des dentelles, des fouliers, des cordages; du vin appelle nulque , de l'eau-de-vie ; ces mêmes feuilles en vieilliiTant fur Tarbre , deviennentarmées d'épines fi fortes & fi aiguës , qu'on en fait des efpeces de fcie. Les épines fervent de poinçons &• d'aiguilles. MEULE, ^ojé^ Lune & Mole. MEULIERE. Foyt?/ Pierre MEULIERE. MEUM D'ATHAMANTE, meum fiu meu Athamantïcum , aut fxnl- culum Alpinum pzrznm , capillacco folio odore imdïcato. Plante fort aro- matique , ou efpece de fenouil qui vient de lui-même & en abondance en Italie , en Efpagne , en France , en Allemagne & en Angleterre. Ses racines font longues de neuf pouces , branchues, plongées dans la terre obliquement & profondément : elles fubfiflent pendant l'hiver. Ses feuilles font femblables à celles du fenouil, mais plus petites, plus nombreufes & plus découpées. Du milieu de i^s feuilles s'élèvent des tiges également femblables à celles du fenouil; mais moins grandes , cannelées , creufes & branchues, terminées par des bouquets de fleurs difi^ofées en ombelles , auxquelles fuccedent des fruits à deuxgrain?s, oblonguss , cannelées , odorantes , ameres & un peu acres. Pendant l'hiver les racines relient garnies de fibres chevelues vers l'origine des tip'es : ces fibres ne font que les queues des feuilles defféchées. On trouve chez les Droguifles la racine feche de meum. Elle efl de la groifeur du petit doigt, grisâtre en dehors , pâle en dedans , conte- nant une moelle blanchâtre , mucilagineufe , d'une odeur de panais , mais plus aromatique, d'un goût un peu défagréable : on nous l'envoyoit autrefois d'une montagne de Grèce ou de Theffalie , appellée Athaman.' •te ; mais on nous l'apporte aujourd'hui des montagnes d'Auvergne , des Alpes & des Pyrénées , même des Vofges , du Dauphiné & de la Bour- gogne. C'efl ley/'i^/z^/ des Anglois. En Médecine , on recommande cette racine dans l'aflhme humoral, & pour guérir le gonflement venteux de l'efliomac , les coliques des inteflins , la fupprefîîon des règles & des urines. Appliquée fur l'os pubis des enfans , elle arrête auffi l'écoulement de l'urine ; elle entre dans plufieurs comportions célèbres de Pharmacie , fur-tout dans le mithridate & la thériaque. M E U MIC - 143 On trouve , fur les Alpes & les Pyrénées , une autre efpece de mmm , dont lesfïeurs font purpurines; c'ell une forte àe phellandrium Alpïnum, Elle eiî; très-eilimée pour la nourriture du bétail : on lui attribue en grande partie la bonne qualité des laitages de certaines montagnes où elle abonde. Elle eft aromatique, fans avoir le goût &: l'odeur fmgu- liere du mtum. Les Médecins ne l'emploient pas , dît îvl. HalUr. MEUNIER ou MEUGE , cyprïnus oblongus. C'eil un poifîbn de rivière à nageoires molles & de la famille des muges , ou du genre de la carpe : voye^ ces mots. Ce pciUon nommé meunier , parce qu'on le trouve autour des moulins , eft connu auffi fous le nom de vilain , parce qu'il vit dans l'ordure : il y en a qui l'appellent têtard ou têtu, à caufe de fa grofîe tête. Il eft femblable au mulet de mer nommé cabot dans le Languedoc. Ses écailles font luifantes, notamment fous le ventre. Il a une nageoire au dos , deux au bas des ouies , deux au bas du ventre , & une autre près de l'anus (celle-ci a onze rayons félon M. Lijineus). Sa tête eft grofte & grande; fa bouche n'a point de dents ; mais fon palais qui eft charnu , eft garni d'os : il a dans la tête un os entouré de pointes comme une châtaigne : il a quatre ouies de chaque côté : fa veftie eft double & pleine de vent ; la toile du ventre eft noire : fa chair eft blan- che, molle, d'un goût fade, pleine d'arêtes, &un peu meilleure falée que fraîche : on trouve des meuniers qui pefent quarante , cinquante & même foixante livres : confultei Rédi & Rondelet. Comme ce poiftbn ne va jamais feul , on en prend beaiicoup, foit à la ligne, foit aux filets. MEUNIER, fcarabeolus pijllnarius. On donne ce nom à un petit fcarabée qui naît dans la farine humide vers la meule des moulins ; il eft long , armé de petites cornes très-fines , & monté fur fix pieds : il eft noir par-tout , excepté fous le ventre , oii il eft d'un rouge obfcur. On donne encore le nom de meunier au martin-pêcheur. MEUTE. Se dit d'un aftemblage de chiens courans deftinés à chafTer les bêtes fauves ou carnaflieres , comme cerfs , fa.igliers , loups , &ic, f^oyei aux articles Chien & Cerf. MEZERÉON. Foyei BoiS GENTIL. MICA. Nom donné à une efpece de pierre brillante , feuilletée ou écailleufe, communément tranfparente , douce au toucher, réfradaire au feu ordinaire & aux acides , fe divifant à l'aide d'un couteau en la- mes paraHeles ou en feuillets très-minces , flexibles , élaftiques , luifans , 144 M î C fouvent de figure indéterminée & dont la nature eu peu connue; on en diftingue de plufieurs fortes ; favoir : 1°. Le Verre de Moscovie ou Mica pur , gUcks Marlce. Ses particules font blanches , argentines , ou d'un Jaune clair : on le trouve en grands morceaux aux environs d'Archangel , & en petits morceaux dans les montagnes du canton d'Utoë. C'efl le plus flexible , le plus divifible , & le plus tranfparent de toutes les efpeces de mica ; les Mofcovites s'en fervoient autrefois en place de verre, &:lorfqu'il étoit fale , ils le dégraiflbient dans une lefîive de potaffe , ou bien ils l'en- duifoient de cendres chaudes : car fi on l'eut jette dans un feu violent , comme l'ont prétendu quelques-uns , ils fe feroit divifé ou gercé , de manière que les rayons de la lumière n'y auroient pu palier direfte- ment. C'étoit de cette pierre que fe faifoient les vitres des fenêtres & les glaces des litières couvertes des Dames Romaines. Les Religieufes appellent les petits morceaux de ce he^w m\c^ , pierre à Jefus : elles en font de petites glaces qu'elles mettent devant des images : c'efl de là qu'efl venu le nom de glacies Maria. Il ne faut pas confondre cette pierre avec le miroir d'une, qui efl un gypfe tranfparent. Fojei Gypse. 2°. Le Mica brillant : les feuillets en font communément petits, peu ou point tranfparens , peu flexibles , & de différentes couleurs : nous en avons de blanc du Bréfil , il s'en trouve dans tous les pays gra- niteux ; du noir du. Duché de ^yirtemberg; du veri de Sibérie ; du cendré de Salhberg ; du jaune de Rio Janeiro : on nomme celui qui efl blanc , argent de chat , & celui efl jaune , or de chat ; l'un & l'autre fervent à mettre fur l'écriture. On les trouve ou enclavés dans les pierres de roche , ou détachés & roulant avec le fable de certaines rivières , telles que la Loire, le Rhin , &c. Quelquefois cette forte de mica efl difpofé en écailles , en flries , ou ondulé , ou en morceaux demi-fphériques : expofé au feu , il fe pelotonne ; s'il efl coloré , il y devient blanc , mais il y perd fa pellucidité. Un Chimifle Allemand ( M. de Jujli ) vient de dé- couvrir une nouvelle fubflance métallique dans le mica jaune , mais qui n'efl pas malléable. En donnant au mica l'argent pour fondant, on en tira une chaux femblable à celle de l'or , enfuite un métal aigre qui fembloit tenir le milieu entre le fer & le zinc. Il le fondit avec de l'or, qui en parut plus beau , plus fin , & confervant fa malléabilité. M. de Jujîi croit que ce mica contient un des principes de l'or. Le crayon des Peintres ou molybdène, contiçnt beaucoup de matière micacée M I C ,45 micacée ou talqueufe. Il y a quantité de pierres qui ne contiennent autre chofe que du mica coloré , & que des perlonnes peu accoutumées à juger de la nature des pierres & des minéraux par la vue , prennent pour de ia blende. Voyez ce mot. MICACOULIER ou MICOCOULIER , lotus arbor aut celtis frucîa nigrlcante. Arbre grand , gros & rameux , qui croît principalement aux pays chauds ; (qs racines font comprimées ou applaties par les côtés : (on écorce eil unie & d'un brun blanchâtre; fes feuilles font afTez fembla- bles à celles de l'orme , vertes deflus , blanchâtres en deflbus , rudes au toucher. Ses fleurs font enrofe, petites, de couleur herbacée &de mil agrément ; il y en a de mâles & d'autres hermaphrodites : les pre- mières ont cinq étamines & le calice divifé enfix parties; ces dernières ont le même nombre d'étamines & deux piftils, auxquels fuccedent des baies fphériques femblables aux mérifes , mais dont la chair eil blanche , d'un goût agréable : le noyau eft gros à proportion du fruit ; les oifeaux font friands de ce fruit. Toutes les parties de cet arbre font aftringentes. Le micacoulier s'eft naturalifé dans nos climats ; il fupporte afTez bien l'hiver dans nos terrains gras & humides, il devient aufTi grand qu'un orme, & on peut en faire des avenues : il fe multiplie aifément de femences , & comme il pouffr- beaucoup de branches , qui font fouples , on en peut faire des pahfîades , des berceaux. Cet arbre efl: rarement atta- qué des infedes : fon bois efl noirâtre , dur, liant & plie fans fe rompre ; cette élafticité le rend propre pour des brancards de chaife : on en fait aufli d'excellens cerceaux de cuve. On s'en fert pour les inflru- mens à vent , & il ell très-propre aux ufages de fculpture , parce qu'il ne contrarie jamais de gerçures. Sa racine & fon écorce fervent en teinture. Pline fait mention de lotus qui avoient beaucoup plus de quatre cents cinquante ans d'antiquité ( liv. iG ^ Hijîoirc Naturelle ), Les Provençaux appellent cet arbre fabrecouiller ou falabriquier. Indé- pendamment du micocoulier à fruit noir ou noirâtre , il y a le micocou- lier du Levant & celui d'AiPiérique. Ils font très-rares en France. M; Ajlruc a donné un Mémoire fur cet arbre , qui avec un peu de fe» cours , fournit aifément des fourches à trois branches. MICHEN ou MUCKEN PULVER. Les Mineurs Allemands expri- ment vulgairement par ces deux mots Varfenic tejîacé , ou le cobalt arfenical écailLux , mis en poudre , ôc qu'on mêle avec de l'eau pour Tomi IF, T m6 MIC faire mourir les infeftes. Ces parafites affamés & altérés font fort avides de ce breuvage empoifonné : on en fait ufage dans les cabinets d'étude , afin d'être délivré de la perfécution des mouches. Cette fubftance n'efl pas fans danger pour les hommes & pour les brutes : M. Bourgeois a vu périr un homme pour en avoir mangé dans fa foupe ; il eut tous les fymptômes d'une perfonne qui auroit avalé de l'arfenic , quoique un peu moins violens. Il a vu aufîi des chiens & des chats périr pour avoir avalé du lait qui contenoit du michm piilver. On devroit donc prendre plus de précautions , qu'on ne fait communément , en faifant ufage de cette drogue dans les maifons , pour faire mourir les mouches. Le même Obfervateur a remarqué plus d'une fois , qu'une forte difTolution de favon blanc dans l'eau commune avec un peu de fucre , attire également ces infedes , & les fait périr dans quelques minutes. MICHUACANENS. Voye^ à VartïcU Chien. MICO. Nom donné à une efpece de finge. M, de, Buffon le place dans la famille des plus petits fmges qu'il appelle fagouins. Cette ef- pece de fagouins n'a ni abajoues ni callofités fur les fefles; il a la queue lâche, non prenante & d'environ moitié plus longue que la tête & le corps pris enfemble ; il eft très-remarquable & très-fmgulier par fa face , fes oreilles nues, d'un vermillon très-vif; fon mufeau efl court , {qs oreilles font grandes ; fon poil eft d'un beau blanc argenté, & celui de la queue d'un brun luflré & prefque noir ; il marche à quatre pieds & n'a envi- ron que fept à huit pouces de longueur. Les femelles ne font point fujettes à l'écoulement périodique i on le trouve dans les terres de rOrénoque. MICROSCOME, microf cornus. Animal de mer des plus fmguliers,' & qui a été décrit par Rldi. Cet animal ne paroît à la vue & au tou- cher, qu'un morceau de rocher très-dur, compofé de détrimens de pierres , de corail & d'autres concrétions marines. Sur cette furface qui recouvre l'animal , croiffent de petites plantes marines , parmi lefquelles fe trouvent aulîl de petits coquillages & d'autres petits animaux , tels que des fcolopendres , &c. La figure du logement qui contient l'animal eft longue , & fe divife. en deux branches , qui ont toutes deux à leur extrémité un petit trou ïond, ouvert dans une membrane qui eft cachée fous l'écorce pier- ^ ïeufe. L'animal ouvre & ferme ces trous à fon gré; c'eft par-là qu'il MIE ,47 pompe l'eau & qu'il la rejette : lorfqu'on le manie , il la lance fort loin , de la même manière que les carnumi ou œufs de mer , qui font de faux glands de mer , qui n'ont point de coquilles , mais fimplement une peau calleufe. Ces faux glands marins ont deux trous comme les priapes de mer , & lancent une eau fort acre ; leur chair efl rouge à l'intérieur & d'un goût excellent. Toute la cavité intérieure de l'enveloppe pierreufe qui contient le mîcrofcome , efl tapiffée par des expanfions membraneufes & molles qui fervent de peau à l'animal , & qui enveloppent le canal des ali- mens, les vaifleauxdes fluides, le foie & le cœur. Cet animal fmgulier diffère des œufs de mer & des priapes de mer , non-feulement par ces parties , mais encore par fa conformation , tant intérieure qu'extérieure, & par la fubftance de fa chair , qui eft fort tendre & d'un goût fem- blable à celui des huîtres & des palourdes. MIEL , md. Voyez au mot Abeille ce que nous avons dit de ce fuc fucré & fermentefcible que ces infedes ailés ramaffent avec leur trompe dans le neftaire des plantes. Pline a parlé d'un miel amer, dont les Na- turalises modernes ont nié l'exiftence. Mais en faifant attention que le miel a une faveur relative à l'efpece de plante fur laquelle l'abeille le récolte , le paradoxe fera détruit , & Ton reconnoîtra avec Tourne/on la bonne foi du Prince des Naturalises Latins , injuSement fufpedée dans ce point. MIELAT ou MIELÉE. On donne ce nom à une matière fluide qu'on trouve ordinairement le foir & le matin en été , fous la forme de gouttes , attachées aux feuilles des plantes & fur les herbes , laquelle fuinte des plantes mêmes. Il ne faut pas confondre le mielat avec la rofée. Le mielat efl ainfi nommé de fa faveur fucrée & un peu muci- lagineufe : il y en a qui paroît tenir de la nature d'une gomme difToute, & un autre qui femble participer un peu de la réfme. M. l'Abbé Boijfjer de Sauvages vient de donner des obfervations fur l'origine du miel, il a obfervé deux fortes de mielées, qui paroifTent d'ailleurs de même nature , & dont les mouches à miel s'accommodent également ; ellestirent l'une & l'autre leur fource des végétaux , mais d'une manière bien différente. La première efl cette tranfudation ou tranfpiration fenfible de ce fuc doux & mielleux , qui après avoir cir- culé avec la fève dans les différentes parties de certains végétaux, s'en fépare & va édorre tout préparé, foit au fond des fleurs, foit à la T 2 148 M I G MIL partie fupérieure des feuilles, & qui dans quelques plantes fe porte avec plus d'abondance , tantôt dans la moelle , ainli qu'on l'obferve dans la canne à fucre & le maïs , tantôt dans la pulpe des fruits char- nus, qui dans leur maturité ont plus ou moins de faveur douce , feloii que ce fuc mielleux eft plus ou moins bridé par d'autres principes & plus ou moins développé ; l'autre mielée efl formée par certaines efpeces de pucerons qui , fans nuire aux arbres , fans caufer aux feuilles des difformités , telles qu'en produit l'efpece qui fait recoquiller les feuilles , & celles dont la piqûre fait croître fur les bourgeons da l'orme & du térébinthe des galles creules , reftcnt immobiles pendant plufieurs mois de l'année fur quelques efpeces d'arbres , tel que le til- leul, fucent la fève dont ils fe nourriflent , & rejettent par le derrière un fuc mielleux qui retombe fur les feuilles des arbres qui font au- deffous , & que les abeilles récoltent avec un très-grand foin ; c'efl dans l'eflomac ou peut-être dans les dernières voies que le fuc de l'arbre , d'abord âpre & revêche fous l'écorce , prend une faveur douce , toute pareille , à en juger par le goût , à celle de la mielée végétale , tant celle qui tranfpire des feuilles , que celle qui naît dans le mciarium des fleurs. MIGNARDISE. Voyei Œillet frangé. MIGR ANE. Efpece de crabe de mer , dont les premières jambes (ont dentelées comme la crête d'un coq. MIGUEL DE TUC AMAN. Serpent du Paraguay de l'efpece de ceux que l'on nomme double marcheur ou amphlsbene^. Voyez ces mots. MIL. Foyei Millet. MILABRE. Nom donné à un petit infeâe qui fe trouve fur les fleurs. On ne connoît que peu ou point fon hifloire. MILAN , inilvus. Nom que l'on donne à plufieurs oifeaux de proie : on diftingue entr'autres le milan royal & le milan noir. Le Milan royal , milvus vulgaris aut regalis , efî un fort oifeau , long de deux pieds , avec une envergure de cinq : fon bec a environ deux pouces de long , la partie fupérieure qui eft la plus longue , efl: courbée comme dans les oifeaux de proie ; fesyeux font larges , l'iris ea eft d'un beau jaune pâle ; (es jambes & fes pattes font jaunes, la ferra du milieu a un taillant aigu en-dedans : il a les plumes de la tête , du cou , du menton , de couleur du frêne , bigarrées de lignes noires , celles de la poitrine , du ventre ôc des cuifTes d'un brun rougeâtre, tachetées MIL • 149 de noir ; le dos eft d'un brun foncé , ainfi que les plumes qui font près de la queue. L'enfemble du plumage eft fouvent tacheté de blanc. Cet oifeau fe cache l'hiver ; il eft fujet à la goutte. Le facre & le duc lui font cruellement la guerre : il n'y a guère que le facre qui fe puiffe élever aufFihaut que lui ; il fond fur lui , & le ramené à terre à force de coups de griffes ou de bec. Le milan royal, lorf qu'il vole , étend fes ailes & fe balance en l'air , 011 il demeure long-temps , pour ainfi dire , immobile , fans que fes ailes faffent le moindre mouvement , & il fend l'air d'un endroit à l'autre fans fe remuer beaucoup. On le diftingue des autres oifeaux de proie par fa queue fourchue. Ce vigoureux oifeau eu. un terrible deflruûeur de poulets , de jeunes canards & d'oifons ; à la ville, comme à la campagne , il entre hardiment dans les cours. Le milan royal efl le feul qui fe trouve dans notre climat. On l'a nommé milan royal , parce qu'il fervoit au plaifir des Princes qui lui faifoient donner la chaffe &: livrer combat par le faucon ou l'épervier. On voit en effet avec plaifir cet oifeau lâche , quoique doué de toutes les facultés qui devroient lui donner du courage , ne manquant ni d'armes , ni de forces , ni de légèreté , refufer de combattre & fuir devant l'épervier beaucoup plus petit que lui , toujours en tournoyant & s'élevant pour fe cacher dans les nues , jufqu'à ce que celui-ci l'atteigne, le rabatte à coups d'aîles , de ferres & de bec , & le ramené à terre moins bleffé que battu , 6c plus vaincu par la peur que par la force de fon ennemi. Cette efpece de milan efl commune en France , fur-tout dans les Provinces de Franche-Comté, du Dauphiné, du Bugey, de l'Auvergne, & dans toutes les autres qui font Voifînes des montagnes. Ce ne font pas des oifeaux de paiTage , car ils font leur nid dans le pays , & l'établiffent dans des creux de rochers : leurs œufs font blanchâtres , avec des taches d'un ja\ine fale. Le Milan noir , mllvus nlger. Les grandes plumes des ailes font noires. Cet oifeau , au défaut de viande , fe nourrit de fruits. Bdon marque en avoir vu en hiver manger des dattes fur les palmiers. Au Caire il efl affez hardi pour aller fur les fenêtres des maifons. Son vol efl très-agile, & quoique plus petit que le précédent , il fatigue encore davantage le facre dans les combats qu'ils ont enfemble. Le milan efl regardé comme l'oifeau de proie de la troifieme efpece. Sur la Côte d'Or en Afrique , fa hardieffe efl fi étrange , qu'il arrache 150 MIL en plein jour, au milieu des marchés ,\ les poiffons & autres alimens de la main des Nègres , fur-tout de celle des femmes. Le milan noir eil: un oifeau de paflage qui quitte notre climat en au- tomne pour fe rendre dans des pays plus chauds : on les voit paffer le Pont-Euxin en automne en files nombreufes , & repaffer dans le môme ordre au commencement d'Avril. Ils refient pendant tout l'hiver en Egypte , & font fi familiers qu'ils viennent dans les villes & fe tiennent fur les fenêtres des maifons : ils ont la vue & le vol fi fCirs, qu'ils fai- fiffent en l'air les morceaux de viande qu'on leur jette. On donne auffi le nom de milan au/au-perdrieu ; mais celui-ci efl du genre du busard , Voyez Fau-perdrieu. M IL A N MARIN , milvago. C'efl un poifTon de mer voîant , à nageoires épineufes. Les Provençaux l'appellent hclugo , parce que fa tête luit la nuit comme des étincelles de feu. Il a la tête large , carrée , ofTeufe , ferrée entre les deux yeux , le corps rond & long d'un pied & demi ; il eft couvert d'écaillés fort dures, âpres & difpofées depuis la tête jufqu'à la queue en lignes parallèles : le dos efl de couleur noirâtre, fes ailes ne font autre chofe que des nageoires qu'il approche des ouies , & qui s'étendent jufqu'à fa queue : il en a deux de chaque côté : la couleur en efl olivâtre , mais les bords font ornés de taches rondes bleuâtres , tirant fur le blanc. Par le moyen de fes ailes à rayons , ce poifTon s'élève au-defTus de l'eau comme un jet de pierre , & il peut voler ainfi par élans tant que fes ailes font humides : dès qu'elles fe fechent , il retombe : par là il évite fouvent de devenir la proie des dorades qui font fes ennemies , & qui le pourfuivent. Il y en a une autre efpece qui efl garnie au derrière de deux grandes & fortes épines qui lui fervent de défenfe. Le palais de ce poifîbn a l'éclat d'un charbon enflammé. Des Ichtyolifles regardent le milan marin comme une efpece à'hironddledc mcr^ ou àe faucon marin. Voyez Poisson VOLANT. MILANDRE. Efpece de chien de mer. f^oy^^MELANDRE. MILLE-CANTON. Nom que l'on donne à de très-petites perches qui n'ont pas encore fait leur accroifîement & qui fe prennent au mois de Juillet dans le lac de Genève ; elles font beaucoup plus abondantes dans le lac de Neufchâtel ou d'Yverdon : dans ce temps elles ne font pas plus groffes que les plus petits fers de lacets. On en prend une grande quantité dans les années où les eaux font baffes. C'eft un mets fort délicat : c'efl ce MIL 151 qu'on nomme de la monté à Caen , & de hfotuvllle à Rouen : on publie quelquefois des défenfes de pêcher le mille-canton , pour empêcher que les rivières ne fe dépeuplent. MILLE-FEUILLE ou Herbe a la coupure ou aux Voituriers, milU-folium vulgare album , eft une plante qui croît prefque par-tout le long des grands chemins , dans les lieux incultes , fecs , dans les cime- tières, dans les pâturages, &c. fa racine eflligneufe, fîbreufe, noirâtre; elle pouffe plufieurs tiges à la hauteur d'un pied & demi , roides , can- nelées, velues rougeâtres , moëlleufes & rameufes vers leurs fommités : fes feuilles font rangées le long d'une côte par paires : leurs parties oppofées font prefque égales , & elles repréfentent une plume d'oifeau ; elles font d'ailleurs toutes labourées de petits filions, dit M. HalUr: elles ont une odeur affez agréable & un goût un peu acre : (qs fleurs naiffent en été aux fommets des branches , en petites ombelles : chaque fleur eft petite , radiée , blanche ou un peu purpurine, odorante, fou- tenue par un calice cylindrique & écailleux : elles font fuivies par des femences menues. Cette plante efl vulnéraire , réfolutive & aftringente : on l'emploie intérieurement & extérieurement poiu- arrêter toutes fortes d'hémor- rhagies ; elle eft encore très-utile contre les hémorrhoides & les fleurs blanches trop abondantes ; cependant les femmes & les filles fujettes au flux hémorrhoïdal ne doivent pas trop en continuer l'ufage , qui leur cauferoit une fuppreflion de règles plus fâcheufe que les hémorrhoides. Son fuc déterge d'une manière furprenante les ulcères vomiques du poumon. Stahl en tiroit une effence ftomachique & vulnéraire, dont il faifoit un grand ufage. M. Bourgeois dit que cette herbe pilée & appliquée fur les piqûres & enclouûres des pieds des beftiaux & des chevaux, eil le plus excellent remède qu'on puiffe mettre en ufage. Faye^ la Differ- tation de Hoffman fur la milh-fmilU» M. de. Tournefort diflingue encore huit autres efpeces de mille-feuiîle, M. ^<2//érrapporte que le mille folium nohile de Tragus eft plus rare , mais plus haut & plus odorant que le mille-feuille commun. On le diftingue par les divifions de fes feuilles moins nombreufes & plus éloignées. MILLE-GRAINE. CqH le Piment. MILLE-GREUX. Sur nos côtes, on donne ce nom à différentes fortes de jonc marin qui bordent les côtes. MILLEPEDE ou ARAIGNÉE DE MER , millcj^cda^Nom queks 1^1 MIL. Conchyllologues donnent à une efpece de coquillage unlvalve du genre des murex. 11 efl ainfi nommé du nombre des pieds qu'on voit au pour- tour de fon aile qui efl: fort étendue : le corps eft tout rempli de bofies & de tubercules; la queue eft alongée & recourbée. On donne auiîi le nom de millcpcdes au milUpkds, Voyez ce mot. MILLEPERTUIS , hypericum vulgarc. Plante qui croît abondamment dans les champs , dans les bois & aux lieux incultes. Sa racine eft dure, jaunâtre & fibreufe : elle poufTe des tiges à la hauteur d'un pied & demi, roides , ligneufes , rondes , rougeâtres & rameufes. Ses feuilles naiffent deux-à-deux à l'endroit des nœuds de la tige , oppofées , fans queue , lifles , veinées , & paroiftent perforées en nombre d'endroits lorfqu'on les expofe au foleil & qu'on regarde à travers. Mais ces points tranfpa- rens ne font autre chofe que des véficules remplies d'un fuc huileux , d'une faveur aftringente & un peu amere , & qui laifîe de la fécherefle fur la langue. Ses fleurs naifîent en grai?d nombre aux fommités des branches : elles font jaunes & difpofées en rofe. Il leur fuccede pour fruits de petites capfules à trois coins, empreintes d'un fuc rouge, divi- fées en trois loges remplies de femences très-petites , luifantes , d'un brun noirâtre , d'une faveur amere , réfineufe & d'une odeur de poix. Les fleurs & les fommets remplis de graines , étant piles , répandent un fuc rouge comme du fang , d'une odeur affez agréable. Cette plante contient beaucoup d'huile eftentielle, femblable à l'huile de térébenthine. Le millepertuis ordinaire eft d'un grand ufage , & fert beaucoup dans plufieurs maladies : il tient le premier rang parmi les plantes vulné- raires ; on s'en fert pour mondifîer & confolider les plaies & ulcères tant internes qu'externes, & notamment pour les contufions. Il guérit le crachement & le piffement de fang , réfout le fang grumelé & excite les règles. On le recommande beaucoup pour détruire les vers, pour la pafTion hyftérique & l'aliénation de l'efprit : auffi l'appellç-t-on/w^^ dccmonum. Cette plante eft la bafe de la plupart des baumes par infu- lion & par diftillation. Dans les boutiques, on tient une huile de mille- pertuis faite par infufion ; elle eft rougeâtre. A Montpellier on macère les fleurs de cette plante dans une liqueur réfmeufe, tirée des véficules d'orme. Aujourd'hui des perfonnes tirent des fleurs une belle teinture jaune pour colorer les laines & les foies. On donne le nom ôCa/cyron à deux autres efpeces de millepertuis. Le véritable MIL Ï53 véritable afcyrum a la tige carrée : l'autre eft un millepertuis rampant. M. de. Tourne/on compte vingt-deux efpeces de millepertuis , indépen- damment de celle qu'il trouva en voyageant de Sinope à Trébizonde; il l'appelle millepertuis oriental à feuilles de Hieibe à hernuer. MILLEPIEDS D'AMÉRIQUEouCENTIPEDES, /;2/7/,î/;e^^^, font des animaux ovipares , dont le corps eft fort long , à anneaux, fourni d'une très-grande quantité de pieds : il y a des perfonnes qui les con- fondent mal-à-propos avec les cloportes^ infedles auxquels on a donné autrefois ce nom. Les millepieds dont il eflqueftion, font de différentes couleurs, grandeurs & formes. Près de la bouche fortent deux pinces garnies d'ongles noirs , pointus & crochus, lefquelles fervent à l'animal pour fe faifir des autres fortes d'animaux dont il fe nourrit : voilà les armes avec lefquelles l'animal pique violemment. Seha a vu un mille- pieds qui avoit deux pieds fort longs , qui fortoient de la partie pofté- rieure de fon corps; chacun de ces pieds qui étoit formé de quatre arti- culations , étoit aufîi muni d'un croc pointu. La tête qui femble n'être qu'une longue articulation rouflatre , porte deux longues cornes ou antennes pointues, filiformes , articulées, & deux petits yeux noirs. Cet infefte fe loge affez communément dans le bois des vaifTeaux, Ces animaux fe mettent en rond pour fe repofer. En confidérant leur manière de vivre , on les prendroit pour des efpeces de vers de mer. Les millepieds d'Amboine & de la mer de Hollande , dont parle Seha ^ font une efpece particulière de ces grands vers de mer qui fe fourrent dans les vieux pilotis enfoncés dans la mer : voye^ Ver de mer & Taret. Les millepieds terreflres d'Amérique font comme cruflacés , leur robe efl dure ; ils fe trouvent dans les bois & lieux incultes , & nuifent beaucoup aux Nègres ; car leur piqûre eft aufîi dangereufe que celle du fcorpion , mais par bonheur les ferpens aveugles en diminuent le nombre. On les appelle malfuifans , parce que leur piqûre caufe une vive douleur fuivie quelquefois d'une enflure confidérable , toujours accompagnée d'inflammation & fouvent de la fièvre. Leurs écailles font convexes & emboîtées les unes fur les autres , comme celles de la queue d'une écreviffe. Les cabinets des Curieux en confervent qui font d'une groffeur monflrueufe ; leur figure efl: hideufe. Le millepieds d'Amé- rique eil plus large qu'épais , il marche avec une aifance & une agilité Tome IF, Y 1^4 M I L étonnantes ; mais fî par accident il perd une de fes pattes , fa courfç de- vient plus lente & fa marche plus gênée. Cet animal peut fe tourner de toutes parts. La femelle n'a point de cornes : elle porte fes œufs, comme la falicoque , fous le ventre ; dès que les petits millepieds en font fortis , ils quittent auffi-tôt la merc, commencent à ramper &: fe répandent par-, tout à la ronde. Ces animaux fe trouvent aufîi abondamment aux Indes Orientales! qu'en Occident , & fmguliérement au Cap de Bonne-Efpérance , oîi ils ont jufqu'à fept pouces & plus de longueur ; leur couleur efl fauve» yoyei maintenant C article SCOLOPENDRE. MILLEPIEDS A DARD. M. de Rlaumur a donné ce nom à des in-i feftes ( vers aquatiques ) qui n'ont que fept à huit lignes de longueur^ Ils font remarquables par une trompe ou dard charnu qu'ils portent en devant de leur tête , & qu'on ne trouve pas aux millepieds des autres efpeces : ils fe foutiennent dans l'eau & y nagent au moyen des inflexions qu'ils font faire à leur corps avec vîtefle ; ils fe repofent & ils rampent fur tous les corps qu'ils rencontrent. M. Trcmbley dit qu'on en trouve beaucoup fur les plantes aquatiques, & qu'ils deviennent la nourriture des polypes d'eau douce. Les millepieds à dard peuvent être regardés aufîi comme de véritables polypes , puifqu'ils ont la propriété d'être multipliés en les coupant , c'eft-à-dire , que toutes les portions coupées de leur corps deviennent autant de millepieds femblables au premier, Foyei Polype. MILLEPORE ou MîLLEPORITE, milkpora, eft une produdion à polypier : cette habitation de polypes eft communément de figure d'ar- bre ou de buiffon rameufe ou feuillée , dont la fuperfîcie ou les extré- mités font marquées de quantité de petits pores fnnpîes qui vont juf- qu'au centre de la tige , en traverfant tout le corps pierreux en manière de réfeau. Les millepores différent des madrépores ; ceux-ci font toujours étoiles ; ces étoiles s'y préfentent d'une manière très-diil:in6le , au lieu que les millepores n'ont que des trous f.mples non étoiles ; du moins ils ne le paroiiTcnt pas î\ l'œil ni à la loupe. On connoît le beau milUpore a feuilles de chou qui fe trouve près de Curaçao ; fes feuilles font blanches, larges ,nnnces , étendues & piquées de petits trous ronds. Il y a aufîi le millepore appelle \?ifraife de veau; fes feuilles font plus épaifTes, moins éparpillées , plus ferrées ôc imitent MIL ijj par les plis & replis de leurs extrémités une fraife de veau bien, dentelée & bien frangée. Parmi les millepores branchus fortantde la mer , ou devenus foÏÏîîes milleporites , il y en a dont la fuperfîcie eft couverte de petites cavités peu profondes en apparence ; d'autres font couvertes de pointes épi- neufes & poreufes; d'autres ont les branches comprimées en forme de cornes de daim , poreufes ou comme piquées de trous d'épingles , c'efl une {orte de frondipore ; d'autres ont les branches compofées d'écailîes ou de petits tubercules ou de véficules poreufes. Les millepores à forme de buiffon font également folides & à pores fimples. Tous les trous des millepores pénètrent dans l'iniérieur & ont fervi de logement aux polypes qui en ont été les architeâ:es. Voye^ l'article Escare , au mot CORALLINE. MILLET ou MIL , mîlium. Il y a quantité d'efpeces de millet qui font partie de la famille des graminées ; mais nous ne parlerons ici que de celles qu'on cultive ; favoir, le grand millet d'' Afrique , nommé aufîi forgo fur la côte de Guinée; le grand millet noir; le millet d'outremer ^ ÔC le petit millet ou millet commun. Le GRAND Millet ou Sorgo , forgumjlve melica , aut milium arun- dinaceum ffubrotundo femine nigricante , pouffe plufieurs tuyaux fembla- bles à ceux des rofeaux, à la hauteur de huit ou dix pieds, articulés , remplis d'une moelle blanche & douceâtre que Mathiole vante comme un remède contre les écrouelles. Des nœuds des tuyaux fortent des feuilles affez femblables à celles du rofeau , garnies de petites dents pointues qui coupent les doigts quand on les manie , en faifant defcen- dre la main le long de la feuille. Ses fleurs naiffent au fommet des tiges en manière de bouquets ; elles font fans pétales , petites , jaunes , com- pofées de trois étamines qui fortent du milieu d'un calice à deux feuilles : il y a communément un calice mâle ftérile , porté fur un pédicule à côté d'un calice hermaphrodite fertile , qui eff fefîile & applati par le dos. Aux fleurs fuccedent des femences plus groffes que celles du millet ordinaire. Elles font ovales , noires (l'efpece qui a une femence blanche fe cultive à Malte , & y efl connue fous le nom de carambajfe ). Lorf- que les femences ont été fecouées , car elles ne tombent point d'elles- mêmes , il refte des pédicules en forme de gros filamens , dont on fe fert pour faire des broffes. La racine de ce millet efl compofée V 2 15^ MIL 'de greffes fibres. Ses tîges ou tuyaux rougiffent quand la femence mûrit. Le grand millet ou forgo aime une terre graffe ou forte & humide. Il a été apporté d'Afrique en Efpagne , & de-là dans les autres pays chauds cil on le cultive principalement. Le plus grand ufage que l'on fafle de ce grain dans ce pays , eft pour cngraiffer les poules , les pigeons & toute la volaille , dont il rend la chair exquife ; cependant en Italie les gens de campagne le font moudre & en font du pain , mais qui eft brunâtre âpre , de difficile digeftion Se qui fournit moins de nourriture que le fro- ment. Il y a peu de plantes qui produifent auffi abondamment que le millet d'Afrique ; pour un grain qu'on a femé , on en recueille au moins cent foixante. Cette efpece de millet eft rarement expofée aux infultes des oifeaux ; elle n'exige pas une culture pénible , & n'épuife pas trop la terre oii on l'a femée à proportion de fon grand produit. On cul- tive aujourd'hui le forgo ou. forgko dans les climats chauds & même dans les tempérés ; nous en avons vu des champs entiers en Suifte. La graine qui eft moins nourrie eft une forte à.'épcautrc ou ^e froment locar. Voyez ce mot. L'efpece , quand elle eft belle , eft recherchée. Voyez les Mem', de la Soc. économ. de Berne. he petit millet ou millet ordinaire^ milium vulgare ^femine luteo aut albo, diffère de l'autre par la petitefî'e de la plante & des grains qui font blancs ou jaunâtres , & que l'on donne tant aux oifeaux de volière que de bafte- cour. Toutes fes fleurs font hermaphrodites. Les Botaniftes ont placé pendant long-temps le forgo dans la clafTe des millets ; mais adluellement , à caufe de la diverfité des cara£leres de fa fleur , ils en font un genre à part. Le petit fe plaît particulièrement dans une terre douce & légère ^ même fablonneufe ; on doit le femer fort clair & le recouvrir de terre. Le jeune millet craint beaucoup les gelées , c'eft pourquoi on ne doit le femer qu'en Mai ; on peut même en femer encore vers la fin de Juin. Un mois après que le millet eft levé , on éclaircit les pieds , & il faut laifter fept à huit pouces de diftance entre chaque pied , fans quoi il produiroit peu , & fa tige feroit courte. Le millet femé en Mai fe récolte ordinairement en Septembre, & celui qui a été femé en Juin fe recueille vers la fin d'Odobre. On a obfervé que les millets tardifs grenent moins que ceux qui font hâtifs. Ces fortes de plantes épuifent un peu les terres iiinfi que le blé de Turquie. Lqrfque les panniçules du petit millet font -MIL ï^y en grains , on doit garnir le champ de quelque épouvantail , autrement les oifeaux en auroient bientôt fait la récolte. Les femmes font la récolte du millet en coupant les pannicules ou épis près du dernier nœud. On en lie pîulieurs enfemble par paquets , & on les fufpend pendant quelques jours à des perches pour mieux fé- cher. On bat ces pannicules au fléau ; & lorfque ce grain a été ferré bien fec , il fe conferve très-bien , quoiqu'on ne le remue que rarement ; & le charançon ne l'attaque pas. Les tiges étant fauchées & defféchées fer- vent à brûler ; elles font un bon engrais à la terre , & les racines qui reftent enterrées fourniffent affez de nourriture pendant deux ans aux vers du froment. Si l'on vouloit garantir des vers le blé enfemencé,il n'en faudroit femer que dans des terrains qui auroient produit l'année précé- dente du millet, fur-tout de celui d'Afrique. On prépare avec le millet mondé & nétoyé de fa coque , des mets qui reffemblent affez au riz. La bouillie qu'on en fait efl exquife & très-alimenteufe ; cinq livres de fa fa- rine avec fuffifante quantité de lait,peuvent fournir un repas à vingt-cinq perfonnes. Voilà l'aliment ordinaire des Maures & des Nègres. M. Jla/^er dit qu'en Italie on fait avec le millet une décoâion qu'on emploie dans la petite vérole. Dans la Guiane le mil fe récolte deux mois après qu'il a été femé : les Sauvages le rôtiffent fur les charbons & le mangent. Les Galibis en font du palinot ( efpece de bière ). On efl obligé dans ce pays de faire garder les pièces de mil par de vieux Nègres , car les finges en font fort friands & s'affemblent par troupes pour l'arracher. On fait avec la farine du mil des mateté & des efpeces de langous qui valent bien les efpeces de caffaves faites avec la farine de manihot. ( Voyez ce mot pour ce qui concerne la préparation de ces fubflances ). On met dans les langous faits de farine de mil, de l'huile de palmier d'Aouara ; les Nègres s'en noiu:- riffent auffi. MILLOCO. Dans le Bourdelois on donne ce nom au grand millet d'Afrique. Foy^^ Millet. MILLOUIN. C'eft l'oifeau de Pénélope de Jonfion ; il eu fort fmgu- lier qu'on ait donné à cet oifeau le nom de la Reine d'Itaque ; & d'après quel rapport ? Il efl un peu moins gros qu'un canard domeflique ; il a la tête , la gorge & la plus grande partie du cou d'un beau marron : le bas de fon cou & la partie antérieure de fon corps font de couleur de fuie , avec des pointes de gris-blanc aux plumes de la poitrine. On le trouve fur les bords de la mer $c dans les marais, Il y a eiicore deux 158 M I M MIN autres millouins , dont le dernier appartient au Nouveau Monde ; il eft à-peu-près de la même corpulence que le précédent. Le premier a la tête , la gorge & une partie du cou d'un marron obfcur ; il a le deffus du corps noirâtre , & le deffous blanc. Le millouin du Lac du Mexique eft rayé de fauve & de brun , pref- que furtoutesles parties fupérieures du corps, /^oje;^; Canne Pénélope à la fuite de V article Canard. MIMEUSE ou MIMOSE. Voyei^ Sensitive. MINEL DU CANADA. Voyei Cerisier. MINÉRALISATEURS & MINÉRALISATION. La minéralifation eil une -opération par laquelle la Nature combine une fubllance métalli- que avec du foufre ou avec de l'arfenic , ou avec l'acide marin , ou avec l'une & l'autre de ces fubflances à la fois. Par cette combinaifon , l'afpeâ: du métal , ainli que fes propriétés conftituantes , eft entière- ment changé , déguifé ; tous les métaux prennent alors une infinité de formes & de couleurs qui les rendent méconnoiffables à ceux qui n'ont point les yeux accoutumés aies voir dans l'état de mine ou minerai. C'eft ainfi que l'argent qui efl blanc lorfqu'il efl minéralifé ou combiné avec le foufre & l'arfenic , prend la forme de criflaux rouges quelquefois tranf- parens. S'il n'y avoit que du foufre , la mine d'argent feroit grife & ten- dre. La mine de plomb minéralifée par le foufre affefte une forme cu- bique. Ce même métal combiné avec de l'arfenic a une figure criftalline tantôt verte & tantôt blanche , &c. L'étain minéralifé par l'arfenic eft en criilaux d'un gris-brun &. polygones. L'antimoine combiné avec le foufre a une forme Uriée. L'arfenic uni au foufre donne , fuivant les propor* tions , l'orpiment ou le réalgar. Le foufre combiné avec le mercure donne le cinabre. Il femble que le bifmuth & l'or foient les feules fubftances métalliques qu'on n'a point encore rencontré abfolument minéralifccs. La Chimie eil parvenue à imiter la Nature dans un grand nombre de fes minéralifations. On appelle aufii fubjlances minéralifces celles dont les interftices ou pores ont été remplis par des infiltrations ou vapeurs minérales métal- liques : ce font des opérations lentes & fuccefiives. 11 y a des minéralifa- teurs , tels que les pyrites fulfureufes , qui fe trouvent dans le bois devenu fofiile , & le brûlent fouvent en fe décompofant. Les métaux minéralifés par le foufre & l'arfenic font plus difficiles à fe réduire que s'ils en étoient privés : les os minéralifés ou pénétrés par une diflblution de cuivre , forment les turquoifes. Les fpaths qui font colorés , font MIN ,59 pefans , fufibles & prefque toujours minéralifés par le fer ou par le cui- vre ; les quartz le font plus rarement , mais ils font fouvent recouverts de cryftaux pyriteux qui , dans leur état de fluidité , n'ont pu s'y infil- trer , & fe font attachés à la fuperfîcie extérieure. Foyei ci-defous à Var^ ticU Minéraux. MINÉRAUX ou MINERAIS , mineralia. Le mot minéral exprime & comprend ordinairement tout ce qui fe tire de la terre , c'eft-à-dire , tout ce qui appartient au règne minéral : cependant pour lui donner plus de précifion ou un fens plus particulier , on ne comprend fous ce nom que les corps qui renferment ou des pyrites ou des fels , ou des bitumes &foufres, ou des parties métalliques, foit de demi-métaux, foit de métaux (J^oyei^ ces mots & lefuivani). En forte que par minéral otx déiigne une mine dans fa matrice terreufe ou pierreufe. Les minéraux métalliques contiennent plus de métal que de terre non- métallique , tandis que ceux qui contiennent plus de foufre , d'arfenic , &c. c'ell-à-dire , plus de minéralifateurs que de métal , font des pyrites , &c. dont on ne peut retirer le métal avec profit. Voyei Pyrites. La Saxe, l'Allemagne , la Suéde , le Danemarck , l'Angleterre la Hongrie & la France fourniffent des minéraux métalliques de la plus grande beauté. MINES , minera. Ce nom fe donne tantôt au lieu fouterrain d'où on tire le minéral, & qui efl: proprement X^. minière; & tantôt aux glèbes de minerai ou de minéral d'où on tire le métal , glebcB metallicœ : Ion entend plus particulièrement fous le terme de mine les mélanges que la Nature produit dans (es atteliers fouterrains, en unifiant avec les plus petites parties métalliques différentes matières étrangères, de façon que ces parties métalliques fe trouvent deflituées de toutes les propriétés &: de tous les caraderes des métaux , jufqu'à ce que l'art venant à les dé- gager de leurs minéralifateurs & de tout ce qui n'efï point de leur fub- ftance , elles prennent une forme véritablement métallique, & devien- nent métaux ou demi-métaux. On donne aulîi le nom de mines, quoi- qu'improprement , aux endroits d'où l'on tire du diamant ou du crifïa]; on dit mine de diamant^ mine de crijlal. Pour avoir une idée générale du' mot de mines, voye^ Us articles Fentes, Filons, Matrices, Mé- taux , demi-Métaux, Minéraux, &:c. où l'on verra que les mines métalliques font quelquefois égarées , & que les minerais font d'autres fois fcparés^çà & là dans les fiffures des rochers. Les mines fixes font les meilleures , fur-tout quand elles font étendues en longueur & en i6o MIN. profondeur en façon de rameaux , en filons , en veines , qui fefuivent ; & pour l'ordinaire elles font enfermées ou foutenues par un double têt de pierres. La préfence d'une' mine ou d'une minière de bonne qualité , riche , abondante , eu. ordinairement annoncée par plufieurs indices extérieurs ; par exemple , par les fables des rivières voifmes oh l'on trouve des pail- lettes minérales; par des traces de terre tendre & ondueufe nommée bejîcg; par le guhr qu'on rencontre dans les fentes des collines rapides; par la fituation du terrain qui efl montueux & aride. L'expérience a appris que ies fommets des montagnes qui contiennent des filons métalliques s'étendent affez horizontalement vers le Sud-Eil, & s'abaifTent enfuite par degrés vers le Nord-Oueft. Le bas de ces montagnes efl pour l'or- dinaire coloré, terminé en pente douce, & ombragé par des arbres touffus toujours verts , quelquefois tortueux, noueux, féchés par la cime. Quelquefois le fommet de ces montagnes eft couvert de plantes vivaces, dont les feuilles font noirâtres. Quand des feux follets, des météores ignés , des vapeurs fubtiles & fulfureufes , qui en' exhalent , fondent très- vîte la neige qui tombe en hiver , ou qu'on apperçoit , dès la crête ou fur la croupe de la montagne , des indices de filons métalliques , qui fe décèlent par des veines de quartz ou de fpath communément vitreux, de matières ferrugineufes ; alors on doit trouver la minière dans le mi- lieu de la colline. L'expérience nous apprend encore que dans les en- droits où des filons courent fous terre ou à peu de profondeur, les tiges de grains qu'on a femés à la furface , jaunifTent & fe flétriilent fouvent dès qu'elles fortent de terre. Si les eaux qui defcendent des montagnes font thermales, c'eft une marque qu'en rétrogradant leurs cours on y trouvera des pyrites , &c. Tous ces indices , pris féparément , font équi- voques; mais plufieurs réunis forment une plus grande probabilité. Les montagnes qui renferment les célèbres mines du Pérou , préfentent pre{^ que toutes ces indications , & on les trouve raffemblées dans plufieurs des Cantons de laSuilTe, de la Saxe, du Nord, &c. Les montagnes à filons , quoique de l'ordre des primitives, font ordinairement d'une élévation médiocre, régulières, intaftes , & fans dérangement. Plufieurs Auteurs anciens font mention dans leurs Livres de différentes mines que nous ne connoifTons plus. La France où elles ne font pas acluellement communes, en comptoit autrefois de très-riches. i'/z'^^o/z, dans fa Géographie , nous dit que les Romains tiroient abondamment des MIN i^i des métaux de France , au point qu'elle pouvoit à cet égard le difputer avec l'Efpagne ; Pline nous parle de l'or qui fe trouvoit dans la Gaule, nous ignorons l'emplacement de ces anciennes mines; ont-elles été tota- lement épuifées ? Non , elles exiftent probablement encore en partie ; mais la fureur des guerres, la barbarie & la révolution des temps en ont effacé jufqu'à la trace. Il feroit digne d'un Savant de s'occuper , dans les Auteurs anciens , de la recherche de tout ce qui peut être rela- tif aux mines des pays que nous connoiffons ; il efl à préfumer qu'après une infpeftion étudiée des lieux, on viendroit peut-être à bout de faire des découvertes heureufes, & l'on trouveroit certains emplacemens de ces anciennes mines , dont pluiieurs s'étant certainement reproduites , oiîriroient encore de nouvelles richeffes. Lorsqu'on efl certain de l'exiflence d'une mine dans un endroit , il faut, avant que d'en impétrer la conceflion , confidérer s'il y a un fort ruiffeau & des bois voifms de ce lieu ; enfuite faire l'efîai de la mine , mais fur-tout il faut fe garantir de l'erreur dans les opérations & le cal- cul ; autrement on fe ruineroit bientôt , ainfi que tous les intéreffés : enfuite on fait des puits ou bures , pour aller chercher la matière miné- rale , & l'on y établit des machines pour en épuifer les eaux & y renou- veller l'air, &c. Voye^ notre Minéralogie ^VArt des Mines, traduit par M. Hellot , &c. pour les autres formalités dans l'exploitation d'une mine. Voyei aujfi C article EXHALAISONS de ut ouvrage. On ne peut trop encourager à l'étude des minéraux , & à trouver des moyens d'économie dans l'exploitation générale de ces fubftances fi utiles à la fociété civile. Dans le Nord, les Souverains encouragent les travailleurs par des franchifes & des privilèges qui leur font fermer les yeux furies dangers qui accompagnent la profefTion de mineure la dureté de ce travail. En effet, le travail des mines étoit un fupphce chez les Romains ; il faut pafTer la plus grande partie de fa vie enterré tout vivant dans des fouterrains oii l'on eil privé de la lumière du jour, & continuellement en péril d'être noyé , ou étouffé ou écrafé. Jufqu'ici les Minéralogifles ont confidéré les mines métalliques fous trois états différens , i°. ou comme fufibles par elles-mêmes; 2°. ou qui fe fondent facilement à l'aide d'un intermède; 3**. ou qui entrent en fufion difficilement, même avec des fondans. M. 6'e//t?/-lesdiflingue en mines fèp arables dans le lavoir; en mines infèp arables, mais fufibles; & en Xiîm.tsrapaces ou prefque intraitables ^^ Tome IK i6i MIN Rarement on tfouve purs les minéraux : ils font plus communément minéralifés , c'eft-à-dire mafqués & comme déguifés par les fubflances avec lefquelles ils font combinés ( quelquefois ils font dans l'état de chaux). L'or paroît être le feul des métaux qui fafle exception à cette règle , mais il efl fouvent allié. L'argent eft mêlé avec du plomb ; le cuivre efl fouvent mêlé avec du fer, & contient outre cela une portion d'argent. Que de moyens n'a-t-il pas fallu imaginer pour féparer &: conferver certains minéraux qu'on avoit intérêt de garder 1 Ils exigent fouvent des traitemens difFérens de ceux des métaux en raifon des pro- priétés qui les différencient. Sans être partifan des Adeptes, pourrions- nous ne pas croire que les travaux de l'Alchimie , qui ont pour objet Vaméliûration , la maturation , la traîif mutation àç.s métaux , que ces travaux , dis-je , ont jeté un grand jour fur la fcience de la métallur- gie ? Il y a des métaux qui font plus communs en quelques climats que dans d'autres ; l'or & l'argent fe trouvent plus abondamment près des Tropiques , & les autres métaux vers le Septentrion ; le fer efl rare dans les climats chauds. La plupart de nos mines font communément plus riches à l'horizon du bas de la montagne ; celles des Provinces feptentrionales de l'Afie , telles qu'en Sibérie , fe trouvent à la furface de la terre ; tandis que celles du Nord de l'Europe , notamment les mines de cuivre de Suéde , pourroient être fouillées jufqu'à plus de quatre cents toifes de profondeur. Les mines d'argent de Sainte-Marie, la mine de fel de Pologne , la mine de charbon d'Ingrande en Bretagne , la mine de plomb de Poulavoine dans la même Province , la mine de mercure d'Ydria , celle de cinabre d'Almaden , la mine d'étain de Cor- nouailles , la mine d'orpiment de Turquie , la mine de cobalt en Saxe, la mine d'or de Chemnitz , & quantité d'autres efpeces , fe fouillent auiîi à des profondeurs confidérables. Il n'y a point de mine qui n'ait des particularités & des détails qui méritent l'attention du Phyficien, du Chimifle & du Naturalifle. Chaque mine a fa forme ou fon appa- rence extérieure : c'efl l'ufage qui apprend à les diflingucr & à les re- connoître. C'efl en vifitant les cabinets des Naturalifles ou les atteliers des Mineurs de chaque efpece des mines , qu'on peut s'en inflruire , & notamment en defcendant dans les galeries. Quand on réfléchit que les mines ou filons paroiffent produites par crifcallifation & par des vapeurs fouterraines & chaudes qui s'attachent dans les fentes des montagnes qu'elles remplilTent peu-à-peu , on doit- convenir que ces vapeurs , MIN 163 <ïui par rapport à leur origine peuvent être de différente nature , fe mêlent entr'elles de plufieurs façons très-différentes : de ces exhalaifons différemment combinées naiffent peu>à-peu toutes les efpeces de mines & de mélanges métalliques qui fe trouvent affez fouvent dans le même endroit du même filon. Ce font de femblables exhalaifons qui incruftent des morceaux de bois , des coquilles , des offemens & autres matières tout-à-fait étrangères au règne minéral. A Orbriffeau en Bohême , on trouve du bois changé en mine de fer : en Bourgogne , on trouve des coquilles dont on retire de très-bon fer. Ces faits prouvent auffi la reprodudion des mines : pour s'en convaincre , il fuffit de defcendre dans une mine abandonnée , & jeter les yeux fur les parois des rochers des galeries. En Allemagne , on a trouvé une incruftation de mine qui s'étoit formée en deux ans fur un morceau de bois provenu d'une échelle : elle contenoit huit marcs d'argent au quintal. Dans une mine de plomb en Angleterre , on a trouvé une portion de l'os de la cuiffe d'un Mineur qui y étoit péri , tout incrufté de minéral de plomb. Nous confervons la tête de cet os dans notre Cabinet. Hmckd cite un Mineur tué par une mouffette , & qui quelque temps après fut tout couvert de pyrites criftalhfées qui l'entouroient de toutes parts, comme s'il eût été lui-même changé en pyrite. Il y a environ trois ans que dans l'intérieur de la montagne de l'île d'Elbe, à l'endroit 011 l'on exploite la belle & curieufe mine de fer. Ton trouva entre deux blocs de mine deux uflenfiles nommés pics à roc, quiétoient tout recouverts de mine criflallifée femblables en tous points à celle de cette même mine fi connue des Curieux (^). On fait que cette mine avoit été exploitée autrefois par les Romains. Ces outils y auront été abandonnés alors ; mais ceci prouve toujours que la nature reprend quelquefois fes opérations, qu'elle les continue journellement, & que travaillant avec les mêmes matériaux, la même lenteur, elle fait les mêmes ouvrages. Il eft maintenant aifé de concevoir que les mines s'épuifent à la longue ; une fubftance métallique ou fe reproduit ou difparoît pour faire place à une autre, & celle-ci à fon tour eft remplacée par une troifieme , ainli (*2) Cette mine qui eft en blocs n'exlfte point par filons réguliers ; elle paroît avoir été culbutée par quelque révolution locale. On ne peiu donc pas l'exploiter par des galeries. On y marche &. on y travaille à ciel ouvert. X 2 i64 MIN de fuite. On peut citer pour exemple la mine d'antimoine en plumes rouges de Braenfdorf en Saxe; la mine de plomb rouge de Sibérie ; la mine de plomb blanche en aiguilles capillaires du Hartz ; le fiosferri de Stirie ; Va{ur étoile de Bulach ; la mine d^ argent cornée de Saxe ; \ argent vierge en végé- tation de Sainte-Marie en Alface , & beaucoup d'autres dont les veines ou filons font taris depuis quelques années. A ces mines ont fuccédé les marcajjîtcs en crête de coq de l'île d'Anglefey , les pyrites cuivreufes & crijlallifées où brillent les couleurs les plus vives & les plus variées de Sax€ & d'Angleterre ; le mercure coulant & le cinabre en crijîaux tranfpa- rens de Mœrfchfeld dans le Palatinat , d'Ydria en Carniole : les belles galènes de Derbyshire ; les mines de plomb blanche en carions & noire tubuleufe de la Baffe-Bretagne, &c. & ces mines mêmes ne tarderont pas à difparoître auffi , &; à être remplacées par de nouvelles efpeces, peut-être plus rares & plus fmgulieres encore , & aduellement en ré- ierve dans des lieux où le Mineur n'a point encore pénétré. L'étude des fecrets de la nature dans les entrailles de la terre eil fans doute la plus hardie , mais aufîi la plus belle &: la plus élevée. La matière eft vafle , le travail s'y fait en grand. L'ouvrage frappe les yeux, ravit d'admiration ; mais la main de l'ouvrier eft invifible. Voyez main- tenant les cara£leres que nous avons affignés aux différentes efpeces de chaque genre de mines , à leurs mots généraux ; car les métaux daas l'état de mine ont un coup d'œil tout différent de celui qu'ils ont lorf- qu'ils font purs. Voye^^ Argent , Antimoine , Bismuth , Cobalt , Or , Étain , Fer , Plomb , Cuivre , Zinc , Arsenic , Mercure. Quant à la manière de réduire les minerais minéralifés ou alliés, nous renvoyons aux Livres de Métallurgie. Confultez aufîi le Diction' naire de Chimie & le deuxième vol. de notre Minéralogie , édition de >yy^. MINE D'ACIER. Cette efpece de mine , dont plufieurs Auteurs ont parlé , ne doit être regardée que comme une mine de fer qui donne de l'acier dès la première fufion , parce qu'elle eff pure & dégagée de fubffance$ étrangères nuifibles à la perfeftion du fer. Il n'y a point, à proprement parler, d'acier naturel, c'eff-à-dire en mine dans les en- îrailles de la terre. Quelques-uns donnent encore plus improprement le nom de mine d'acier à une efpece de galène de plomb qui a la dureté & la couleur de l'acier. La mine d'argent blanche qu'on a fait bleuir par le recuit reffemble auffi à la mine d'acier. MINE DE GÊNÉ VPvIER. Les ouvriers de la mine de Salberg en Suéde, m MIN ,(jj donnent ce nom à une efpece d'asbefte en bouquets. M. W^alUrîus dit qu'elle contient un peu de plomb & d'argent. Ce que les Ouvriers nomment mlm d'atlas owfannie efl: une mine de cuivre verdatre ; la mine de pois ou de fèves , efl communément une mine de fer globuleufe ; la mine de payfan eft la mine d'argent vierge en mafle. La mine en marrons ou en rognons , minera nldiilans , eft celle qui fe trouve en tas ou par maffes détachées plus ou moins grofles , répa relues çà &: là dans une roche , au lieu de former des filons fuivis & continus. On les nomme aufli mines égarées , mines accumulées ou mines en nids. Cette manière de trouver les mines n'eft point la plus avantageufe pour l'exploitation; mais elle annonce ou le voifinage des filons , ou un endroit propre à la formation des métaux. Il ne faut point confondre ces mines en marrons avec les mines par fragmens qui ont été arrachées des filons par des courans d'eau , arrondies par le roulemens , & tranf- portées quelquefois fort au loin. Au refle elles peuvent fouvent con- duire aux filons dont elles ont été arrachées. MINE DE PLOMB NOIRE ou PLOMBAGINE. Voyc^ Mo- lybdène. MINEURS. Voyei Vers mineurs de feuilles , Chenille mi- neuse & Abeille mineuse. MINIA. Sorte de ferpent venimeux qui fe trouve dans le pays des Nègres : il efl fi grand & fi gros qu'il avale , dit-on , des moutons , des pourceaux , & même des cerfs entiers : il fe tient à l'affût dans des brouffailles ; & quand il découvre quelque proie , il s'élance deffus , & s'entortillant autour de fon corps , il l'étouffé en la preffant. On rap- porte une chofe particulière de ce ferpent , c'cil qu'avant que d'englou- tir ce qu'il a pris , il regarde tout autour s'il n'y a point quelque fourmi qui fe pourroit gliffer dans fon corps avec fa proie pour lui ronger les entrailles ; la peur qu'il en a , vient , dit-on , de ce qu'après avoir avalé un animal de cette grofl'eur , il lui efl impofTible de fe remuer , jufqu'à ce qu'il l'ait digéré. La fable efl fouvent à côté du merveilleux. MINIERE, fodina metullica , efl le lieu où l'on fouille le minerai. Voyei au mot Mines. Par minière on entend aufîi la terre , la pierre ou le fable dans lefquels on trouve une mine ou un métal. MINIUM ou PLOMB ROUGE MATE. Efpece de chaux de plomb qui efl d'un rouge vif, cependant un peu jaunâtre. Foyei Plomb, i66 MIN MÎRAILLET. roye^ Raie lisse â r article Raie. MIRLIROT. Voyei Melilot. MÎRMÈCOPHAGE. l^oyei Fourmillier, MIROIR D'ANE ou PIERRE SPÉCULAIRE. Foyeifon article au mot Gyspe. MIROIR DE VÉNUS. Voy^i Campanule. MIRTHE ou MYRTE , mynhus. C'eft un arbriffeau dont on diftingue plufieurs efpeces , entr'autres les mirthes à grandes feuilles, tels que le minhe Romain & celui à^Efpagne , le mirthe à feuilles panachées , le mirthc à petites feuilles ; &C le grand mirthe à fleurs doubles ; celui-ci eft très- agréable par le nombre de (qs fleurs qui durent très-long-temps. Les mirthes ont toujours les feuilles pofées alternativement & dans un ordre croifé ; leur odeur eft agréable : elles ne tombent point du tout pendant l'hiver. Leurs feuilles font quelquefois petites & ovales ; quel- quefois plus alongées; d'autres fois plus arrondies & pointues, fuivant les efpeces : elles font unies & luifantes comme celles du buis. Les fleurs fortent des aiffelles des feuilles : elles font en rofe, blanches & odorantes; aux fleurs fuccedent des baies ovales, qui contiennent plufieurs femences de la figure d'un rein. Ces arbrifTeaux font un joli effet dans les bofquets d'hiver & d'été dans nos provinces méridionales , telles que le Languedoc , la Provence , &;c. où on peut les élever en pleine terre. Ici nous ne pouvons les con- ferver que dans nos ferres, ayant l'attention de les tenir à portée des portes &: des fenêtres , afin qu'ils jouifTent de l'air dans les temps doux & humides ; fans quoi ils fe dépouillent de leurs feuilles. Ces arbuiles font fouples , dociles , & font propres à prendre toutes les figures fous le cifeau tondeur du Jardinier induftrieux. Confultez Miller dans la fixieme Edition Angloife de fon Dictionnaire des Jardiniers. Les feuilles & les baies de mirthe , qu'on nomme mirtilles^ font aflrin- gentes & recommandées pour affermir les dents qui ont été ébranlées parle fcorbut. Les feuilles feules entrent dans la compofition des fachets d'odeur & dans les pots-pourris, &:c. Les baies de mirthe ou mirtilles tenoient lieu de poivre aux Anciens avant que cet aromate de l'Inde eût été découvert. On les emploie en Allemagne pour faire une teinture ardoifée , qui a cependant peu d'éclat. En Provence les oifeaux mangent beaucoup de ces baies qui les engraiiTent & donnent à leur chair un goût excellent, M. HalUr a raifon de dire qu'il ne faut pas confondre les fruits MIN 167 aflringens & aromatiques du mirthe avec les baies douceâtres Se colo-i rentes de l'airelle qu'on appelle aufîî mïnilU, Voyez Airelle. On retire des fleurs du mirthe, en les diftillant dans l'eau, une eau aflringente que l'on nomme eau d'Ange : elle eft fort recherchée pour fa bonne odeur , &c. Les Dames s'en fervent pour fe laver ; l'expé- rience leur a appris qu'elle eft fouveraine pour nettoyer la peau , la parfumer & affermir les chairs. On lit , dans le Diciionnaire portatif iTHiJloire naturelle un fait qui , s'il exifle , tend à démontrer la forte aftridion du mirthe. L'Auteur le rapporte comme un trait de Morale àc de Phyfique , voici fes propres exprefTions : « Le mirthe efl auffi la » bafe d'une pommade appellée pommade de la Comtejfe connue par un » trait d'hiiioire fmguher. Un jeune élégant , papillon de toilette , fe » trouvoit feul un jour dans l'arfenal des Grâces ; fa main curieufe a » bientôt parcouru les parfums , les fachets , la poudre odorante , les » effences , les cofmétiques. Pour donner à fes lèvres plus de vermeil, » plus de fouplefle & diffiper des feux fauvages , il étend légèrement » avec fon doigt indifcret la pommade fatale , fe regarde au miroir , » fe contemple , s'admire, s'adonife. La Dame entre; il veut parler; » fa bouche fe rétrécit , le contour des lèvres fe refferre , il balbutie. » La Dame étonnée le regarde , jette les yeux fur fa toilette , recon- » noît au petit pot découvert la caufe de l'erreur , & fe met li rire à »' gorge déployée aux dépens de l'indifcret confus ». Avis au Lecteur, il ne faut pas toujours fe jouer à la toilette de toutes les Darnes. Les habita ns d'Illyrie, ceux de Naples & de la Calabre , préparent & perfedionnent leurs cuirs avec les feuilles du mirthe, comme font les Macédoniens avec celles du fumach , les Egyptiens avec les fdiques d'acacia , les Peuples de l'Afie Mineure avec les calices des glands de chêne , les François avec Técorce moyenne de cet arbre, les Phrygiens avec l'écorce du pin fauvage. Belon a obfervé qu'on trouve fous les feuilles du mirthe une graine d'écarlate ou gallinfeûe femblable au ker- mès, qui renferme un petit animal vivant dans fa coque, f^oyc^ Kermès. MIRTHE BATARD des Pays froids, Mirthe du Brabant, Piment royal ou Gale d'Europe, myrtus Brahamïca aut Chamce^ leagus. C'efl un petit arbrifieau que les Allemands appellent ^^^e/; il refîemble à un petit faule. Ses tiges font menues & branchues, hautes de deux pieds & demi , garnies de feuilles alternes , aflez femblables à celles du mirthe , mais en quelque forte blanchâtres , d'une odeur de i68 M I N drogue ou de baume. Ses fleurs mâles font à chatons comme celles du bouleau ; les fleurs femelles croiiTent fur des individus diffcrens &C font difpofées en grappes, auxquelles fuccedent des femences menues, d'une odeur afTez forte , couvertes de petites écailles appliquées fur leur furface. Cet arbriffeau aime les lieux incultes pleins de bruyères , aquatiques & marécageux : il fleurit en Mai ; il croît particulièrement dans les prairies humides de St. Léger au-delà de Verfailles. Il étoit plus connu autrefois: on apportoit fes branches par charretées à Paris , on s'en fervoit pour garnir les cheminées & les croifées des appartemens , à caufe de l'odeur des fleurs & des boutons, qui efl forte & entête fans être défagréable; les femmes les mettoient dans leurs armoires parmi le linge & les bar- des , pour les parfumer & pour en chafTer les teignes ; mais les eflais qu'a faits M. ^ n'efl point une chimère, une hypothefe curieufe , dans laquelle fe joue refprit de l'homme , fous une fauffe apparence de vérité. Voye^ ce qus^ nous avons dit au mot ANIMALCULE, & la définition du mot ANIMAL, Confultez notamment les Confidirations fur Us corps organifés , par-le- iàvant M. Bonnet; MOLENE. ^oy^^ Bouillon BLANC. MOLIERE. Dans la plupart des pays on donne ca nom à des terres grafTes ou marécageufes , tellement molles que les chevaux &les voi-! tures y enfoncent. MOLLE ou POIVRIER DU PÉROU, ou LENTISQUE DU PÉROU; mol/is arbor aut kntifcus Peruana. C'efl un grand arbre fort étendu qu? croît abondamment dans le Pérou & au Chili : fes feuilles reffemblent à celle du lentifque , elles font dentelées & rendent un fuc laiteux ôC gluant , qui a l'odeur & le goût du fenouil. Ses fleurs font nombreufea & en rofe , attachées- à des rameaux particuliers , de couleur jaune-» blanchâtre : il leur fuccede en Juillet des baies femblables au fruit di» poivrier , difpofées en grappes , couvertes d'une pellicule rougeâtre f^ très-graffe , contenant chacune un petit noyau ofTeux. Ces fruits ont l'odeur & îe goait des baies de genièvre ; on les fait boiiillir dans de l'eau pour en préparer une baifTon vineufe, très-bonne, mais qui (e convertit bientôt en vinaigre. On fait des incifions à l'écorce de cet arbre^ par oii il découle une réfme odorante , blanche & purgative. On dit qu'elle a beaucoup de rapport avec celle que l'on appelle e/s/wi/ L'écorce & les feuilles du molle font employées dans les pays pouf les humeurs froides , les enflures des jambes & des cuifïes. Ses petits rameaux fervent à faire des curedents ; on fait bouillir fa réflne dans dii îait , pour emporter les taches & les cataraftes des yeux : la poudre de fon écorce fert à teindre en rouge & à mondifîer les ulcères : la liqueur vineufe du fruit efl: utile dans les maladies des reins. Les Péruviens ref^^ peftent beaucoup cet arbr£ , ils l'appellent mulU , c'«ll V'arffdr-a de Marcgravci Mot 182 i^OLtVSQlJE.royeiaumotUovs. MOLUQUE , molucca. Plante étrangère qui tient de la méliffe , & dont on diftingue deux efpeees. ï'°. La MoLUQUÈ ODORANTE , molucca Icevis. Sa racine eft ligneufei & fibrèe : fes tiges font hautes d'un pied & demi , fortes , carrées y fougeâtres , remplies de moelle ; fes feuilles reffemblent à celles de la méliffe pour la figure & l'odeur : fes fleurs font verticillées & de cou-^ leur blanche ; il fuccede à cette fleur quatre femences triangulaires, enfermées dans une capfule qui a fervi de calice à la fleur. 2°. La MoLUQUE ÉPINEUSE, molucca fplnofa. Ses feuilles font plu3 verdâtres ; fes fleurs font foutenues par des calices plus longs , moins larges & garnis de forts piquans : elle a une odeur défagréable. On cultive l'une & l'autre moluque dans les jardins ; elles naifTent naturellement aux îles Moluques. On ne fe fert que de la première efpece ; elle efl alexipharmaque, propre à fortifier le cerveau & le cœur: elle aromatife les liqueurs d'une manière agréable; MOLY. Nom que les Anciens ont donné à plufieurs efpeees d'aiîV qu'ils diflinguent de l'ail ordinaire par fon peu d'odeur. Homère a célébré cette plante comme propre à détruire les venins & les enchantemens» Ce^V'aUlum latifolïum Ulifiorum de Tournefon : its fleurs font jaunes, belles & s'épanouifTertt en été : voye^^ Ail. M. Huiler dit que M. TrilUr a foutenu dans une favante thefe que Cîrcé donnoit des philtres , & que l'hellébore noir étoit le remède de ces poifons. On peut confulter à ce fujet VHiJîoire de la Médiane par M. le Clerc , édit. de lyzg , pag, 14^ 33 y 88. MOLYBDENE ou MICA NOIR DÈS PEINTRES ou CRAYON, &C. molybdesna , nigricafabrilis ^ aut Jlerile mgrum,feu plumbagofcriptoriay' efl une fubfîance noirâtre , brillante comme du plomb fraîchement coupé , friable , micacée , douce au toucher & comme favonneufe : ca rappelle aufTi crayon d'Angleterre. Quelques-uns la regardent comme ii'ne efpece de blende : voyez ce mot. Nous croyons, avec affez de fon- dement, qu'elle n'eft qu'une efpece de itéatite tendre & talqueufe-, femblable au talc coloré appelle improprement h craie noire deBriançor>» Cette fléatite paroît être une combinaifon de fer , de foufre & de zin« de la nature de celle qui conf^itue la blende , toutes fubflances qui ne contribuent pas peu à lui donner beaucoup de pefanteur. Nous eri tirons la preuve de <:e que fi on lui fait fubir un feu violent ^ il en exhale- iSi M O M des fleurs inflammables d'un bleu foncé : comme 11 arrive avec les mines de zinc. M. Pott a prouvé que le crayon dont il eft queflion , contient prefque toujours du fer , parce que fi on le mêle , dit-il, avec du fel ammoniac , il donne des fleurs martiales , & que quand le feu l'a dégagé des parties grafTes qui l'environnent, il efl attiré par l'aimant, &c. La molybdène eft folide & matte ; quand on la cafTe , elle paroît en petites écailles & grenue ; elle donne aux mains , au papier & au linge une couleur grisâtre perlée ou talqueufe : elle fe détruit difficilement dans le feu : fon ufage eu. purement mécanique , on s'en fert pour luftrer de vieux uflenfiles de fer , on en fait aufTi des crayons. Pour cela il faut d'abord réduire en poudre celle qui efl exempte de parties fableufes, puis en faire une pâte avec une légère difTolution de colle de poifTon : on en emplit des bâtons évidés en rond ou en carré avec une rainure qu'on bouche enfuite par une petite tringle qui s'enchâfTe exaftement: on rafîujettit avec des ficelles , & lorfque le tout efl fec , on taille le bout en pointe pour écrire ou defîiner. Les Ouvriers donnent à la molybdène les noms àe potclot, mine de plomb noire owfavonneufe^ plomb de mer, plombagine , plomb de mine , cérufe noire , talc-blende , faujfe galène , mica des Peintres , ou crayon de plomb. La molyl^dene fe trouve dans la HefTe , dans la Finlande , & fur-tout en Angleterre dans la Province de Cumberland , à peu de dlflance de Carlifle : la mine de cet endroit efl unique dans ion efpece , & le Gouvernement en a pris un foin tout particulier ; on prétend même que l'exportation de cette molybdène fine & en nature efl défendue fous des peines très-rigoureufes ; on ne peut fortir du royaume que celle qui efl employée en crayons. Il n'y a que la mine fableufe ou grofîiere qui nous parvient dans le commerce. Les mines d'étain en contiennent quelquefois , ainfi que celle de plomb; mais c'efl un redoutable rainéralifateur , en ce qu'il rend très- difficile la rédudion de ces minerais. MOMENET CYNOCÉPHALE. Voye^ Magot. MOMIE ou MUMIE , mumia , efl un mot Arabe qui défigne un cada- vre embaumé & defTéché. Les premières momies humaines ont été tirées des fépulcres des anciens Egyptiens fous les pyramides , dont on voit encore de beaux refies à quelques lieues du grand Caire. On trouve quelquefois fur les côtes de la Lybie des cadavres humains, qui y ayant été jetés par les vagues de la mer , ont été pénétrés de fable & def- féchés par l'extrême chaleur qui règne en ce pays-là. On en rencontre M O M i§3 aiiffî dans les déferts de Zara , où le fable eu û fubtil , qu'il pénètre tout , & où l'on ne trouve point d'eau pour fe défaltérer. Les voya- geurs qui ne fuivent point les caravanes , s'y égarent facilement & y périffent quelquefois par la faim & par la foif : leurs corps s'y deffé- chent tellement par l'ardeur brûlante du foleil , qu'ils ne pefent pas le quart de ce qu'ils devroient pefer : on appelle ces cadavres defféchés momies blanches , momies naturelles. Il y a en plufieurs pays chauds , comme à Touloufe, certaines ca- ves dans lefquelles , comme le rapporte Lemery , les corps morts fe def- fechent & fe conservent avec leur poil fans aucun embaumement jufqu'à deux cents ans. J'ai examiné fur le lieu même ces mânes refpedables ; mais il ne m'a pas été poflible de m'éclaircir au jufte pourquoi , quand & comment on les avoit confervés ainfi. Au refte , ces cadavres du ca- veau de Touloufe font autant de fquelettes hideux , décharnés , où il ne refte que quelques cheveux & des portions d'une peau rongée en divers endroits ; ce qui annonce que les cadavres ont éprouvé une at- teinte de putréfadion. Il n'en eftpas de même des momies embaumées on factices. Feu M. Rouelle de l'Académie des Sciences , dit que l'extrême vénération des anciens Egyptiens pour les corps morts de leurs parens , leur avoit fait cher- cher divers moyens de préferver leurs cadavres de la corruption : nous admirons encore aujourd'hui des momies Egyptiennes confervées depuis plus de deux mille ans , par la manière dont les corps avoient été embaumés. Ces momies ont été pendant long-temps l'objet des re- cherches des Antiquaires & d'un petit nombre de Phyficiens , qui ont tâché de deviner le fecret des Egyptiens & de tranfporter cet art parmi nous. Elles n'ont été bien examinées de nos jours que par M. Rouelle , qui a communiqué à l'Académie plufieurs idées que la ledure à^ Hérodote lui avoit autrefois fait naître. Cet Académicien a donné un Mémoire très-intéreffant , dans lequel il examine les principes fur lefquels eft fondé l'art des Egyptiens. ' Il paroît , dit-il , tant par les écrits de Clauderus , que par ce qu'on peut deviner du procédé fecret de Debils , que ces deux hommes em- ployoient principalement la defTication opérée par les fels alkalis pour préparer leurs cadavres. Hérodote qui nous a tranfmis une courte def- cripîion de l'art des Embaumeurs , dit qu'il y avoit trois différentes ma- nières d'embaumer ufitées parmi les Egyptiens , ôc qu'on fe fervoit des ^84 M O M unes ou des autres , fulvant la dépenfe qu'on vouîoit faire. Suivant Itf première ,qui étoit aufîi la plus chère , on ouvrolt par les narines avec un fer la bafe du crâne , & on tiroit la cervelle par cette ouverture, partie avec le fer même , 6c partie par le moyen des injeûions. On ti- roit les entrailles par une inciiion faite au côté : on les nétoyoit; on les paflbit au vin de palmier & dans des aromates broyés : on rem- plifîbit le ventre de myrrhe en poudre , & de toutes fortes d'autres par- fums , excepté l'encens : on fermoit l'ouverture , & on couvroit le corps de natrum pendant foixante-dix jours ; car les lois ou les ftatuts de l'art pe permettoient pas de l'y laiffer plus long-temps. Enfuite on lavoit le corps , & aprjès l'avoir tout enveloppé de bandes de toile de lin endui- tes de gomme , ils le rendoient aux parens. Lorfqu'on ne vouloit pas faire une fi grande dépenfe , on ne faifoit aucune incifion au cadavre ; on fe contentoit d'injeO:er par le fondement une quantité fuffifante d'une Jiqueur- onâ:ueufe qui fe tire du cèdre ; enfuite ayant bouché l'ouverture pour retenir l'injeftion , on mettoit le corps dans le natrum pendant foixante-dix Jours ; au dernier on tiroit du ventre la liqueur , qui entraînoit avec elle les entrailles confumées ou dliloutes : cela fait , on rendoit le corps aux parens. La troifieme manière étoit la plus fimple & la moins difpendieufe. Après les inje^^ions par le fondement , on mettoit le corps dans le na- trum pendant Joixante-dix jours , & on le rendoit fans y faire autre chofe. M. Rouelle penfe que cette defcriptlon de Tart des Embaumeurs eft fautive ; il prétend que l'objet principal d'un tel travail fe réduifoit à deux parties eflentielles ; la première étoit d'enlever du corps les liqueurs ^ les graifles qu'il contenoit , & qui en auroient occafionné la deftruc- tion ; la féconde étoit de défendre les corps de l'humidité extérieure ôc du contaft de l'air. Les Embaumeurs faloientle corps avec l'alkali fixe & opéroient par ce moyen fur les cadavres ce que les Tanneurs opèrent fur les cuirs par le moyen de la chaux. Le corps ayant été ainfi macéré pendant les foixante-dix jours , on appliquoit defTus des matières réfî- neufes & balfamiques qu'on y retenoit par des bandes dont on les en* veloppoit. M. Rouelle croit qu'on ne mettoit des parties balfamiques dans le corps qu'après l'avoir fait macérer dans le natrum, M. Maillet^ Conful au Caire , rapporte dans fes Lettres qu'il a trouvé lin grand oombre de corps couchés fujr des lits de charbons, emmaillotés dç M O M ,8^ de quelques linges , Sc couverts d'une natte fur laquelle il y avoit du fable à Tépaiffeur de fept ou huit pieds ; c'étoit apparemment la manière dont les plus pauvres confervoient les cadavres de leurs parens , car la confervation des corps faifoit chez les Egyptiens un point de Religion pour les pauvres comme pour les riches. M. Rouelle prétend encore que les toiles ou bandelettes n'étoient pas de lin, mais de coton ; qu'elles étoient empreintes de matières réfmeufes & balfamiques , & non de gomme : on en trouve qui ne font enduites que de matières bitumineu- fes ; & fuivant les obfervations de M. Maillet , il fe trouve des momies qui n'ont rien de tout cela ; mais elles font chargées en deffus de figures hiérogliphiques , & en-deflbus d'une écriture très-fine , qui femble être des vers rimes. Tous les corps étoient enveloppés de deux rangs de ban- delettes , & fouvent entre chaque rang on y trouve encore des amulet- tes , auxquelles les Egyptiens attribuoient de grandes vertus ; quelque- fois les ongles étoient dorés. On voit bien que ces bandes , les vers , les peintures dont on les ornoit , & les boîtes ou de porphyre ou de bois précieux & d'une feule pièce creufée à l'outil , dans lefquelles on enfermoit les momies , & qui étoient encore plus ou moins chargées d'ornemens, dévoient introduire une infinité de différences dans la fomp- tuofité des embaumemens. C'eft dans le Mémoire de M. Rouelle qu'il faut s'inflruire de toutes les autres particularités de l'art des Em- baumeurs. Il ne faut pas croire que les momies du commerce foient véritable- ment tirées des tombeaux des anciens Egyptiens ; celles-là font trop rares ; lesTurcs en empêchent, autant qu'il leur eftpoffible, le tranfport, & on ne les garde guère que par curiofité. Celles que les Droguifles ti- rent du Levant , viennent des cadavres de diverfes perfonnes que les Juifs ou les Chrétiens embaument , après les avoir vidés , avec des aromates réfmeux & le bitume de Judée ; ils mettent fécher au four ces corps ainfi embaumés , jufqu'à ce qu'ils foient privés de toute humi- dité. On employoit autrefois ces momies , qui ne font point d'une odeur défagréable , pour déterger , réfoudre , réfifler à la gangrené : mais on ne s'en fert aujourd'hui que comme d'appâts pour prendre du poiffon. On voit auffi dans quelques Cabinets des momies d'animaux brutes : nous avons dit aux mots chat & chien , que les Levantins ont une grande affedïion pour ces fortes de bêtes ; ils étoient autrefois dans l'ufage de les embaumer. En Egypte , à deux lieues *de Henifuma , près d'un vieux Tome IF. A a iS6 M O M Château nomme Tiimalracq , & qui n'eH: plus qu'un tas de décombres ,' on voit encore une douzaine de cavernes où l'on mettoit les chiens , les chats & les ibis qu'on embaumoir. Quelquefois on trouve dans les mo- mies des idoles en terre cuite , tels que des Ifis , des Ofiris repréfentés avec différens attributs. Les Egyptiens n'y mettoient ainfi leurs Dieux que pour les préferver des infulîes des dcmons , &c même de la cor- ruption. Ceux qui voudront voir des momies humaines peuvent fe tranfpor- tet au Cabinet du Roi , où il y en a une qui a été trouvée en 1756 en Auvergne. Cette momie peut être regardée comme le chef-d'œuvre de toutes les momies connues. Elle étoit bien fupérieure à celles des Egyptiens , qui ne font que des malTes defféchées informes. On la trouva dans un tombeau dirigé d'Orient en Occident , & conftruit de pierres : dans l'intérieur étoit un cercueil de plomb de quatre pieds fept pouces de longueur : le couvercle étoit percé de deux ouvertures en fente , l'une au-defîiis de la bouche , l'autre au-deffus de l'eftomac , & rebouchées avec de l'étoupe ; l'intérieur du cercueil étoit garni , comme enduit d'une fubflance aromatique mêlée d'argile. La momie d'environ quatre pieds n'étoit point roide , dure , feche : elle avoit la foupleffe , la couleur d'un cadavre mort depuis quelques jours, elle en avoit la flexibilité , prêtoit fous la main , ainli que les vifceres du bas-ventre ^ plufieurs articulations étoient flexibles , la langue même étoit très-bien confervée. Les vifceres n'avoient été ni enlevés ni defféchés , non plus que le cerveau. Ceux qui ont examiné cette momie croient que la ma- tière de l'embaumement étoit un mélange de poix , de poudre aro- matique , principalement d'encens , de meum , de cannelle , de valé- riane. Cette odeur étoit fort pénétrante ; on ne pouvolt la faire difpa- roître des mains qu'avec de l'efprit-de-vin. Cette momie, en reftant ex- pofée à l'air, efl: devenue noire , a perdu fa flexibilité &c s'efl raccourcie , dit-on , d'un demi-pied. On ignore quel étoit ce perfonnage : il y a tout lieu de croire que c'étoit quelque perfonne de diftindion. On remarque fur les bandelettes des carafteres flnguliers , tels qu'un grand G barré , un grand Y , & elle étoit enveloppée de deux fuaires très-fins , & re- couverte d'un gros fil tiffu en forme de nattes. On voit aufli des momies au Cabinet de Meffieurs de Sainte-Gene- viève & chez les Céleflins , à Paris : celles-ci font Egyptiennes. MOMIE VÉGÉTALE. M.- Cronjlcdt donne ce nom à une efpece de terre d'ombre friable. Il y en a à Boferup en Scanie. M O M MON 187 MOMOT , momotiis. Nom donné à un oifeau feul de fon genre 6c de la groffeiir d'une pie. Ses doigts font comme ceux du manakin : voyez ce mot. Son bec eft conique, & dentelé comme une fcie. Les deux mâ- choires font crochues par la pointe. On le nomme aufîi motmot & tupi' namhïs. Voyez Gu ARA. MONARDE , monarda. Genre de plante de la clafle des labiées. Selon M. Deleuie^ la fleur, qui dans la plupart des efpeces , na que deux étamines, eft divifée en deux lèvres dont la fupérieure eft oblongue , étroite & pliée en forme de gouttière ou de tube , 011 font renfermées les étamines. L'efpece la plus connue , monardafioribus coccinels , efl haute de deux pieds & plus : fes feuilles font ovales & pointues , dentelées , légère- ment velues , marquées de nervures fort apparentes , & portées fur des pédicules. Les fleurs qui font d^in beau rouge de vermillon , font ramafTées au nombre de vingt à quarante en anneaux le long de la tige , & en bouquet au fommet, chaque anneau foutenu par deux feuilles de la plante & par plufieurs flipules étroites légèrement colorées ; les calices ont aufîî une teinte de rouge. Toute la plante a une odeur agréable qui approche de celle de la menthe; elle efl originaire de l'Amérique Septen- trionale , ainfl que les autres efpeces. M. Bourgeois dit que les Fleuriftes cultivent cette plante dans leurs parterres ÔC plate - bandes , oii elle fait un très - bel ornement ; & que l'odeur de fes feuilles approche beaucoup plus de celle de l'orange , que de celle de la menthe , & qu'elle eft bien plus agréable. MON BAIN. C'efl un grand prunier des îfles Antilles : cet arbre vient de bouture , & fert en Guiane à foutenir les barrières au long defquelles^ on les plante. Sa fleur efl eu rofe. Son fruit efl jaune , ovale , peu charnu , & contient un noyau qui renferme quatre amandes ; il a wn goût affez agréable , il agace un peu les dents , mais l'odeur en efl flat- teufe. On en fait une marmelade qui reffemble beaucoup à celle de l'abricot par la couleur , & qui paffe pour exquife dans le pays. On la mêle avec l'eau-de-vie , & cette liqueur efl: délicieufe. Les Sauvagesr qui fe fentent attaqués de goutte, font un trou en terre où ils jetent de la braife bien ardente , fur laquelle ils mettent des noyaux de ces fruits ( qu'on appelle prunes de monbain ) , puis ils expofent defliis" la partie malade , ^ endurent la fumée très - chaude le plus long- Aa 1 i88 MON temps qu'ils peuvent. Ce remède fadorifîqne les foulage beau- coup. Il découle de cet arbre une gomme jaunâtre , claire ÔC odorante. Il y a aufTi dans les Ifles Antilles une efpecc de monbain fauvage , qui a les mêmes propriétés que le précédent. MONDE , mundus. Se dit de Taffemblage des corps qui compofent l'Univers , & qu'on diflingue ordinairement en quatre parties princi- pales ; favoir, le cid ^ Vair, Veau &c la terre. Toutes les planètes font- elles habitées comme l'efl: la nôtre ? . . . Je n'en fais rien. Voulez- vous vous en inftruire ? Confultez la Pluralité des Mondes , de M.' Fo/ttenelle , Livre qui a eu la plus grande réputation & qu'on regarde encore aujourd'hui comme faifant honneur à fon Auteur. . MONDIQUE. royei Mundick. MONE ou VIEILLARD, royei Singe varié. MONGON où MONGOUS. foyei à r article Makis. MONKIE. Quelques-uns donnent ce nom à un petit fmge à tête de mort. Voyei^ Singe. MONNOIE DE BRATTENBOURG. Foyei Écu de Bratten- BOURG. MONNOIE DE GUINÉE. C'eft la coquille univalve, nommée cp- lique ou coris. Voyez à l'article Porcelaine. . MONNOIE MÉTALLIQUE. Voyeià l'article MÉDAILLES. MONNOIE DE PIERRE , nummus lapideus. Voyez NuMiSMALES; MONOCÉROS. Nom qu'on a donné à l'animal licorne ou najicorni^ & au rhinocéros : voyez ces mots. Dans le pays de Bambuch & de Ga- lam , on donne aufîi ce nom à une très-grande efpece d'oifeau de Paradis. MONOCLE. Foyei à l'article Binocle & le mot Perroquet d'eau. MONODONE , efl le poifTon Narwhal. Voye^^ ce mot à la fuite de r article BalEINE. MONOPHTALME, monophtalmus, PoifTon des Indes Orientales, ainfi nommé , parce qu'il n'a qu'un œil au milieu de la tête ; fa tête efl extraordinaire , & refTemble à la tête de quelques infeftes : il a le corps mince , fa couleur efl bleue : fur le haut du dos , il porte de longues nageoires recourbées vers la tête : indépendamment de celles-là, il en a d'autres , tant fur le dos que fur le ventre ; ce qu'il a encore de MON ,89 fîngiilier , ce font des nageoires fous les ouies qui fe replient vers la partie antérieure. MONSTRE, monJîrum.Ce mot exprime communément un animal né avec une conformation contraire à l'ordre ordinaire de la na- ture , c'eft-à-dire avec une ilrudure de parties , très-différente de celle qui caraftérife Tefpece des animaux dont il fort ; car fi l'objet ne frap- poit pas avec étonnement , s'il n'y avoit qu'une différence légère àc fuperfîcielle , on ne donneroit pas le nom de monftre à l'animal où ces différences de conformation fe trouvent. Suivant la remarque de Leméry , il y a bien des fortes de monflres par rapport à la flrufture : les uns , ou ont trop , ou n'ont pas affez de certaines parties; tels font les monftres à deux têtes , deux bras, deux jambes & un corps, ou à deux corps & une tête, ou à trois jambes , ou ceux qui font fans bras ou fans pieds : d'autres pèchent par la con- formation extraordinaire & bizarre , par la grandeur difproportionnée , par le dérangement confidérable d'une ou de plufieurs de leurs parties , & par la place fmguliere que ce dérangement leur fait fouvent occuper ( tel étoit le monflre cyclope dont le Dofteur ElUr , Académicien de Berlin, a donné la defcription. Qu'on fe figure un fœtus de neuf mois, long de deux pieds quatre pouces , dont la tête ell énorme & le vifage affreux , ayant au milieu d'un vafle & large front un œil rougeâtre , fans fourcils ni paupières, mais très-enfoncé dans un trou quarré, & ayant immédiatement au-deffous de cet œil une excrefcence qui repré- fentoit au naturel une verge pourvue d'un gland , d'un prépuce , & de fon urètre , plus la partie couverte de cheveux , au-deflbus de la nuque ; ôc l'on aura l'idée du monfîre le plus extraordinaire , du moins il nous apprend qu'il efl le produit d'une conception déforganifée. Voye^ Embryon & Fœtus ) : d'autres enfin , ou par l'union de quelques parties, qui, fuivant l'ordre de la nature & pour l'exécution de leurs fondions, doivent toujours être féparées , ou par la défunion de quel- ques autres parties , qui , fuivant le même ordre & pour les mêmes raifons , ne doivent jamais cefTer d'être unies. C'efl dans les quatre Mé- moires de M. Lêmery , inférés dans VHiJloire de C Académie des Sciences , iy^8 & iy;^c) , qu'il faut voir les différentes manières dont les monftres font formés. M. du Verney a aufîi donné un Mémoire fur la même matière, M. HalleràÀi qu'il y a des monftres dont quelque choc ou quelque 190 M O N pafiîon a changé la {Iriitiure naturelle. Il y a d'autres flrudures origi- nairement mondrueufes, auxquelles le hafard n'a .aucune part : teleft, dit-il le renverfement de toutes les parties de gauche à droite , le fixieme doigt , Se plufieurs autres exemples ( M. d& Maupcnuis rapporte qu'il y a eu long-temps à Berlin , une famille à fix doigts ; que M. da RivilU en a vu une à Malthe , & il Ta décrite ). M. Renou , Maître Chirurgien à la Pommeray en Anjou , a donné «ne obfervation fur quelques fzmiWes fexdigitaires , répandues de temps immémorial dans plufieurs Paroifles du Bas- Anjou. Cette difformité fe perpétue dans ces familles quoiqu'alllées avec des perfonnes qui en font exemptes. Que ce foit la mère ou le père qui foient atteints & qui pro- pagent cet excès d'organes non-feulement inutile , mais incommode ôi même défagréable , leurs enfans des deux fexes en font indifféremment affeftés. Un homme ou une femme fex-digitaires ont quelquefois une partie & môme tous leurs enfans exempts de cette difformité , tandis que ces derniers au contraire produifent des rejetons chez qui elle re- paroît dans le plus grand degré. Ce vice de conformation eft donc héré- ditaire. Cette variation efl inférée dans le /o«r/z^/ Je Phyjiqui 6* d''HlJîoire Naturelle , mois de Novembre iyy4- , P^g^ 37^» Cette variété des mains fex-digitaires ne fe trouve pas comprife dans les Recherches fur quelques conformations monflrueufcs des doigts dans l'homme , inférées dans le volume de l'Académie des Sciences pour l'année 1771. M. Regnault, déjà connu avantageufement dans l'Hiffoire naturelle par fa colleûion des plantes d'ufage , coloriées fidèlement d'après nature, & connue fous le nom de la Botanique mife a la portée de tout le monde ^ Paris, 1774, travaille aûuellement à la colleâion des Monflrcs en plan- ches coloriées , qu'il publiera inceffamment. Une telle colleâion ne peut être que très-intéreffante , &: fera recherchée par les Phyficiens, les Mé- decins , les Naturalises , &c. Les Naturalises donnent auffi & indifféremment le nom de monjîres^ ou à des animaux énormes pour leur grandeur, tels que font parmi les quadrupèdes terreSrcs, les èUphans ,Si.]^2Xm\ les animaux marins , les requins y les baleines^ ou à d'autres animaux farouches & cruels, tels que les lions ^ les tigres & \e^ panthères , ou enfin à des animaux finguliers par leur efpece , qui viennent , dit-on , de l'accouplement de bêtes qui ne par font pas du même genre. Les Voyageurs difent que l'Afrique eft fé- conde en ces fortes de montres; les relations des Indes Orientales font MON 191 remplies de defcrlptions de monftres marins que la mer eft cependant avare de nous faire voir ; tels que les hommes marins ^ [qs fy renés, &c. Il y a aufîi des montres dans le règne végétal : les monflruofités font même plus ordinaires & plus bizarres dans les plantes que dans les ani- maux, parce que les difrerens fucs s'y dérangent & s'y confondent plus aifément. Dans les Mém. de C Acad. des Sciences, année lyoy , pci^e 44S , il eft parlé d'une rofe monftrueufe ; du centre des feuilles de cette rofe s'élevoit une branche de rofier, longue de deux à trois pouces, garnie de feiiilles. Foye^ les mêmes Mém. ly^c) , page ^4 ; & lyi^ P^g^ '-^o. Il eft fait mention dans les ^cies Helvétiques d'un chamœmelum extraordi- naire. On connoît le lilium album polyanthos , obfervé il y a quelques années à Breflau. Il portoit à fa fommité un faifceau de fleurs compofé de cent deux lis qui avoient tous la forme ordinaire. Il a été aufti parlé d'une tulipe monftrueufe, vue dans les jardins de quelques Amateurs; des baies de genévrier à cornes ; d'une balfamine à trois éperons , &c. Au refte ces produÛions végétales fi extraordinaires , fi contraires à l'or- dre naturel des chofes, font de ces écarts qui ont aufti leurs lois, 6c que l'on peut ramener à des principes certains , en diftinguant celles qui fe perpétuent foit par les graines, foit par la greffe, de celles qui ne font que pafîageres. Les monftruofités quife perpétuent font telles dans l'origine , & , pour ainfi dire, dans l'organifation de la graine de la plante; telles font les feuilles découpées ou crépues , &c. Le nom de monftre convient mieux dans les plantes aux irrégularités qui dépendent de la tranfplantation fréquente & d'une culture particulière ; telles que les fleurs doubles , &c. Les monftruofités qui ne fe perpétuent pas, & qui font dues à des caufes accidentelles & paftàgeres, qui , lorfque la plante eft développée , dérangent fon organifation primitive, comme font les maladies , le chaud ou le froid , la trop grande abondance ou la difette des fucs , la piqûre des infeftes, les contufions & les greifes naturelles , retiennent le nom de monjlres: telles font les loupes ou tumeurs, le rabougri , les galles , certaines panachures & autres vices femblables. Toutes les parties des plantes font fujettes à quelques-unes de ces mon- ftruofités qui varient en fituation , en figure , en proportion &: en nombre. On en trouve plufieurs exemples dans le premier volume des familles des plantes, page iiojufqu'à ti6. Il y a des arbres d'une groft'eur naturelle- ment ft démefurée , qu'on peut les regarder comme les cétacées des végétaux ; tels font le baobab , le uiba : d'autres acquièrent 5 mais 192 MON rarement, un volume fi extraordinaire, telsqiiele ckéne,Vîf, lefauleSc plufieiirs autres, qu'ils font aulîi des monftres parmi les végétaux. Enfin on foupçonne que les monftrcs font plus communs dans les plantes que parmi les animaux, parce que ceux-ci ne réuniiTent pas tant de manières de fe multiplier. Les plantes font rarement monftres dans toutes leurs parties , il y en a de montres par excès feulement dans le calice & la corolle; d'autres font montres par défaut uniquement dans lesfeuilles, les étamines & le fruit. Or une monftruofité , dit M. Jdanfon , n'a jamais fait changer de nom à une efpece ; elle n'en a jamais ébranlé l'immuta- bilité. Tous les Botanîftes confommés & conféquens ont toujours fu ranger ces mondruofitcs parmi les chofes accidentelles , qui , de quel- que manière qu'elles fe propagent, tendent toujours à rentrer dans Tordre & la régularité de leur efpece primitive , lorfqu'on les multiplie par la voie des graines , qui de toutes celles de la multiplication eft la plus naturelle & la plus confiante pour déterminer les efpeces. Une efpece efl comparable à une autre ; mais un monftre ne peut être en parallèle qu'avec l'individu de l'efpece dont il eft originaire. Voyez pour la tranfm.utation des efpeces , l'article Fleurs. On peut aufîi confulter les Obfcrvations Botaniques de M. Schlotterbec , de la Société de Bafle , fur les monilres des plantes, dans lefquelles il prétend démontrer que dans les règnes animal &: végétal la Nature fuit la même marche pour les produire. MONT ou MONTAGNE, mons , eft une élévation de terre fort con- fïdérable , au-deffus de tout ce qui lui efl contigu, & qui commande les lieux qui l'environnent : elle eft ordinairement remplie d'inégalités, de cavités , de baffins expofés plus ou moins à l'air, & de terrains entr'ouverts. On donne aufli ce nom à une chaîne de montagnes, comme quand on dit , le mont Atlas en Afrique , le Mont Caucafc qui.commence au- deffus de la Colchide, & finit à la mer Cafpienne ; les Monts Pyrénées qui féparent la France de l'Efpagne , & le Mont Apennin qui traverfe toute l'Italie: les Monts de Norwege , le Mont Liban, le Mont Emails, le Mont Olimpe, le Mont Etna & les Monts Crapat^y le Mont Hœcla font aufTi très-connus, ainfi que le Mont de la Lune en Ethiopie. On difliingue plufieurs fortes de montagnes : nous verrons que ces élévations de la terre n'ont pas toutes la même origine , & ne datent pas de la même époque. 1^ I» MON ,„ *. Les montagnes qui font en chaîne & neigées, peuvent être regar- dées comme anciennes, ou anté-diluviennes : leur élévation furpaffe de beaucoup celle des autres montagnes : en effet pour l'ordinaire elles s'élèvent très-brufquement , elles font fort efcarpées, & l'on n'y monte point par une pente douce : leur forme eft celle d'une pyramide furmon- tée de pointes, de rochers aigus, lefquels font comme pelés ou dé- pouillés de terre que les eaux du Ciel en ont emporté. Ces montagnes primitives ont à leurs pieds des précipices effrayans & des vallées pro- fondes. Les excavations font relatives à la quantité des eaux dont le mouvement efl: accéléré par leur chute, ce qui caufe quelquefois l'affaif- fement total ou l'inclinaifon de la montagne. C'eft fur les fommets de ces montagnes que l'on rencontre ces neiges &C ces glaçons éternels , des fentes , des rochers environnés de nuages vagues & flottans qui fe difîipent en rofée, enfin de ces cimes hériffées où la nature préfente en grand le fpeftacle du défordre & de la décrépitude. On prétend que l'on ne trouve pas dans l'intérieur de ces montagnes , de coquilles ni d'au- tres corps marins organifés ; & quelques recherches que nous ayons fai- tes fur le fommet des Alpes & des Pyrénées, en y faifant fouiller, nous n'en avons pu découvrir (excepté fur les flancs & vers la bafe ), mais beaucoup de roches fuivies, des grottieres, des mines en filons. La pierre qui les compofe efl ordinairement une maffe immenfe de pierre cornée ou quartzeufe , & peu variée , qui s'enfonce dans les profon- deurs de la terre prefque perpendiculairement à l'horizon. On n'y trouve du fpath alkalin que dans les écartemens qui ont de l'étendue & une direûion marquée. Toutes les montagnes primitives nous donnent des preuves de ces afTertions : ces montagnes en Europe font les Pyrénées, les ^Ipes , X Apennin^ les montagnes du Tyrol, le Rlcfenberg ou Monts des Géans en Siléfie , les Monts Crapat^ , les montagnes de la Saxe , celles desVolges, le Mont Bruclere au Hartz, celles de laNorwege, &c. En Afie l'on trouve les Monts Riphces , le Caucafe , le Mont Taurus , le Mont Liban; en Afrique les Monts de la. Lune, ; & en Amérique les Monts Apa- lâches^ les Andes ou les CordiUieres, &c. Telle efl l'efpece de montagnes que Dieu en créant notre globe forma pour donner de l'appui & de la folidité à l'habitation de l'homme , indépendamment des autres pro- priétés dont nous parlerons ci-après. 2°. Les montagnes qui font ifolées ou garnies de quelques group- pes de monticules , dont la terre efl tumultuairement & confufdment Tom& IF, là h 194 MON arrangée , graveleufe, qui d'ailleurs font comme arides ou pelées à leur extérieur, tronquées ou évafées en entonnoir vers le fommet, compo- fées d'amas , de débris ou de corps calcinés , à demi vitrifiés , en un mot des laves , &c. ces montagnes, dis-je , paroiffent avoir été formées par des terres foule vées & lancées dans les airs , lors de l'éruption de quelque feu fouterrain. Les IJles de Santorin, le Monte nuovo , \ Etna y le Pic d'Adam dans l'ide de Ceylan , le Pic de TénérifA^ns les Canaries , & plufieurs autres ont été formés ainfi. Si de telles montagnes très-éle- vées font couvertes de coquilles marines. Ton peut les regarder comme ayant fait partie du fol de la mer. Quantité de montagnes iemblables ont été formées de mémoire d'homme. Quand une pareille montagne touche à la terre & avance dans la mer plus que les terres contiguës , alors on l'appelle Cap , Tétc ou Promontoire ; tel eft le Cap de Bonne-Efpérnnce , à l'extrémité méridionale de l'Afrique. Ces montagnes du fécond rang font plus acceiîibles ordinairement. M. Huiler obferve que l'angle que fait leur bafe avec le talus , ell plus grand ; qu'elles ont moins de fources , & leurs plantes différent de celles des Alpes : les payfans , dit-il, les féparent des Alpes, en Suiffe , ôi en connoifTent la diffé- rence. 3°. Les montagnes plus ou moins élevées , groupées ou non , dont la terre ou pierre & par couches plus ou moins régulières , d'une ou de plufieurs couleurs & matières , doivent être regardées comme produites par des dépôts fuccefîifs des attériflemens lors des alluvions confidéra- bles. On voit tous les jours des monticules femblables qui fe forment ainfi : ces fortes de montagnes font arrondies par le haut , ou couvertes de terre qui forme fouvenî une furface affez plate & très-étendue. On y trouve aufîi foit du fable , foit des amas de cailloux arrondis, femblables à ceux qui ont été roulés par les eaux. L'intérieur de ces montagnes efl compofé d'un amas de lits ou de couches affez horizontales , lefquelles contiennent une quantité prodigieufe de coquilles, de corps marins, d'of- femens de poifTons. Tous ces phénomènes femblent prouver que c'efl principalement au féjour de la mer fur des parties de notre continent , qu'elle a depuis laifle à fec , que la plupart de cqs montagnes doivent leur origine. On y trouve aufli des bois , des empreintes de plantes , des couches de glaife , de marne & de craie , différens lits de pierre qui fe fuccedent les uns aux autres , tels que des ardoifes , des marbres Couvent remplis de corps marins ; des pierres à chaux qui paroilTent MON 195 uniquement formées de débris de coquilles , de la pierre à plâtre , des couches entières d'ocre , ou de ce qu'on appelle la mine, de fer Umonneufe; des lits de bitume, de fel gemme , d'alun. Les couches de ces montagnes récentes paroiffent quelquefois s'appuyer & prendre naiffance fur les côtés des montagnes primitives qu'elles entourent , & finiffent par aller fe perdre infenliblement dans les plaines. Cette remarque eft très-im- portante pour les Obfervateurs que ce voifmage pourroit induire en. erreur ; elle démontre fur-tout que les couches d'ocre ne font que le réfultat des mines en filons qui fe font décompofées , & qui ont été vifi- blement entraînées par les eaux. A l'égard de l'irrégularité de quelques couches dans les montagnes récentes , elle eft due à des révolutions lo- cales qui leur ont fait faire des coudes , des fauts , des affaiffemens. Nous faifons voir à l'article Terre dans ce Diûionnaire , la raifon pourquoi le nombre & l'épalfTeur des couches des montagnes récentes ne font pas par-tout les mêmes. Il y a des couches d'un quart de pouce d'épaifleur, d'autres qui ont plus de dix |)ieds : il y a des endroits où l'on trouve jufqu'à 30 & 40 lits qui fe fuccedent , d'autres oîi on n'en trouve que trois ou quatre. Dans les montagnes récentes &:compofées de couches, dit M. Lehman , la couche la plus profonde efl toujours celle du charbon de terre ; elle eft portée fur un gravier ou fable groffier & ferrugineux, Au-defTus du charbon de terre on rencontre les couches d'ardoife , de fchifle ou de pierre feuilletée ; & enfin la partie fupérieure des couches efl conflamment occupée par la pierre à chaux & par les fontaines falées. On fent de quelle utilité peuvent être ces obfervations lorfqu'il s'agira d'établir des travaux pour l'exploitation des mines; & en faifant attention à la diflinftion que nous avons donnée des montagnes, on faura la nature des fubftances que l'on pourra efpérer d'y trouver lorfqu'on y voudra fouiller. On appelle les petites montagnes ou monticules , collines. ■ En général on a obfervé que quand deux ou plufieurs montagnes courent parallèlement , les avances angulaires qu'elles forment corref- pondent aux angles rentrans , & ces angles font plus frappans & plus aigus dans les vallons profonds & refferrés. M. Haller dit qu'il y a beaucoup d'endroits dans les Alpes & dans les montagnes où les deux chaînes fe prolongent contre l'axe de la vallée , & fe joignent de manière à ne laiiTer que l'efpace néceffaire pour la rivière qui en décharge les (faux. Dans d'autres endroits la montagne fe continue , par exemple , Bb X 19(5 MON au Nord , & Te difcontinae au Midi , pour y ouvrir une vallée. Dans d'autres , les deux chaînes fe retirent & forment uue courbe de chaque côté , dont la concavité en regarde l'axe ; il en naît des vallons prefque ronds & tout-à-fait unis. Il eit bon d'obferver aufTi que les montagnes primitives qui forment de vafles chaînes , tiennent communément les unes aux autres , fe fuc- cedent pendant plufieurs centaines de lieues , & embraffent , tant par leurs troncs principaux que par leurs ramifications collatérales , la furface des Continens. Le Père Kircker de planeurs autres ont obfervé que la diredion de l'anneau ou chaîne principale eft affez confiante du Nord au Sud , &c de TEfl: à rOuefl, Les Cordillieres du Nouveau Monde, dit M. Ilaller, s'étendent du Nord au Sud; les Pyrénées en approchent : ce font les Alpes qui vont de l'Efl à l'Ouefl ; & en Afri- que il doit y avoir une chaîne pareille , puifque les grands fleuves de cette partie du Monde tendent à l'Efl d'un côté, & à l'Oueflde l'autre. La chaîne du Tibet paroît parallèle aux Alpes ; & on a fujet de croire, par la longueur du chemin qu'il faut faire à travers les neiges, que les montagnes du Tibet font très-élevées. Les montagnes qui font propre- ment les tiges principales & le point capital d'élévation & de partage , préfentent des maffes très-confidérables & par leur hauteur & par leur volume ou adoffement ; elles occupent & traverfent ordinairement le centre des Continens : celles de moindre hauteur naifîént de ces chaînes principales ; elles diminuent infenfiblement à mefure qu'elles s'éloignent de leur tige , & difparoiffent enfin ou fur les côtes de la mer ou dans les plaines. D'autres fe foutiennent encore le long du rivage de la mer, &c leur chaîne n'efl interrompue que pour ne point contraindre les eaux des mers , au-defTous du lit defquelles la bafe de ces montagnes s'étend , & la chaîne fe retrouve dans les Ifles qui perpétuent leur continuation jufqu'à ce que la chaîne entière reparoiffe. Les plus hautes montagnes &c le plus grand nombre d'Ifles font entre ou proche les Tropiques &z dans le milieu des Zones tempérées, tandis que les plus baffes avoifment les Pôles. M. Buache,de l'Académie des Sciences, vient d'établir un fyfîême de la Géographie phyfique fur la flrufture ou charpente du globe terraquée , confidéré par les grandes chaînes de- montagnes qui traverfent les continens & les mers d'un Pôle à l'autre , & d^Occident en Orient. Suivant ce fyflême , il y a fur la terre une f.iite non-inter- rompue de hautes montagnes ôc de terrains élevés qui la partagent en MON ,97 mtatre pentes , d'oîi s'écoulent les fleuves : ces chaînes de montagnes fe rendent d'un continent à l'autre par-defTous les mers; & leslfles que l'on y voit font comme les fommeîs des montagnes. L'ouvrage de M. Buacks eft connu fous le nom de TabUs & Cartes delà Géographie phyjiqu:. Tant d'obfervations nous aîteftentque les montagnes primitives peuvent être regardées comme la bafe , ou , pour ainfi dire , la charpente de notre globe. Nous avons déjà dit que les montagnes primitives fe diflinguent encore par leur flrufture intérieure , par la nature des pierres qui les compofent, & par les fubflances minérales qu'elles renferment. Les montagnes les plus élevées ne font proprement que des pics ou cônes compofés de roc vif ou de matière ignefcente ; peut-être que cette forme pyramidale n'efldûe qu'à une forte de cryflallifation ; & feu M. Rouelle- fuppofoit que dans l'origine des chofes , les fubflances qui comipofent notre globe nageoient dans un fluide. Les parties fimilaires qui compo- fent les grandes montagnes, difoit ce Phyficien , fe font rapprochées les unes des autres , & ont formé au fond des eaux une cryftallifation quel- quefois groupée & quelquefois ifolée. Ce fyflême fur la formation des montagnes primitives efl très-captieux & même vraifemblable ; fi ceci efl, nous pouvons analyfer une portion, un bloc de montagne primi- tive , le faire cryfrallifer , & l'on aura alors en petit une partie de la même économie ou connexion des montagnes, en un mot une portion figurative de l'ofTature de la terre. Les montagnes dont les fommets font plats , contiennent des marbres , des fofîiles , des pierres à chaux. Les colhnes dont la maffe efl: de grès, préfentent par- tout des pointes irré- gulieres qui indiquent des couches peu fuivies & un amas de décombres : celles qui font compofées de fubflances calcaires & friables , telles que la craie &c , ont une forme plus arrondie & plus régulière. La hauteur de la plupart des montagnes de première création n'efl pas moins digne d'attention que leur flrufture &: leur variété. Selon M. Pontoppidan , les plus hautes montagnes de Nor-^^ege ont trois mille toifes. Selon M. Brovalllus , les plus hauts monts de Suéde en ont deux mille trois cents trente-trois ( On prétend que ce calcul efl fautif). Selon les Mémoires de l'Académie des Sciences de Paris , les plus hautes montagnes de France élevées au-deiTus de la furface de la Médi- terranée, font le puy du Dôme qui a 810 toifes ; le mont d'Or en a 1048 : ces deux monts font en Auvergne , & on les regarde comme des 19S MON volcans éteints. Le î7iQnt Cantal en a 984 ; le tnont Fcntoux , 103^; le canigou des Pyrénées en a 1441. Selon M. Needham , les plus hautes Alpes de Savoie font h Couvent du grands. Bernard ^ à la pointe du roc au fud-oueil de ce mont, qui a 1 274 toifes ; le montSe^enne en a 1 281 : /îoS M O R de cabéliaii , elle eft plus mince & plus longue que l'efpece ordinaire. Ce poifTon a la peau extrêmement grafle & de bon goût : fon foie paffe pour un manger excellent. C'eft le ling des Anglois. M. Fréfier cite une efpece de morue que l'on pêche au Chili , de- puis Oclobre jufqu'à la fin de Décembre. On en voit auffi à la Chine une efpece qui reffemble à la morue de Terre-Neuve : elle a plus de trois pieds de long , & eft de différentes couleurs , mais ordinairement jaunâtre , tiquetée de bleu. On en fait dans le pays une confommation incroyable dans la faifon qui lui eft propre , & il s'en vend une quantité prodigieufe de falée dans le lieu même de la pêche. La morue noire ou charbonnier ^ ou kool-fish des Anglois, & même des Hollandois, efl noirâtre ; c'efl une efpece de petit cabéliau : elle eft fi maigre & a li peu de goût , que les Iflandois auxquels les meilleures ne manquent pas, n'en veulent point manger. La morue dite aigrefin^ ou aiglefin, ou hadoc ^ efl: auffi une efpece de cabéliau à écailles fines, qui n'efl ni d'aufîi bon goût ni aufïï grande que l'efpece de morue ordinaire ; on lui a donné le nom de fchels-fifch , qui fignifie poijfon à écailles. La morue jaune refTemble beaucoup à la morue verte , appellée Widing des Anglois , excepté qu'elle efl plus petite. Le merlu ou merluche a environ deux pieds de longueur : il efl d'une couleur grisâtre cendrée ; il a le dos blanc , la queue carrée , la tête avancée & plate , la mâchoire de deffous plus grande que celle de defuis. Ce poifTon efl très-goulu : il fait fa nourriture des petits poif- fons qu'il rencontre , c'eft ce qui lui a fait donner le nom de Brochet DE MER, merlucius ; il nage en grande eau , il n'a point de barbillons : fon corps efl en quelque forte tout couvert de gravier. On donne le nom de muchebout au merlu moucheté, La morue molle , qui efl le powting-powt des Anglois , efl très-large : les extrémités de fa queue & de fes nageoires font molles : elle a aufîî des taches noires près des ouies : fes écailles font petites & argentées : elle n'a pas plus d'un pied de longueur. Le Capclan efl la plus petite morue. Pêche de la Morue , & nourriture de ce poijfion. Les Anglois & les Hollandois prennent tous les jours , dans la met Baltique, une infinité de morues qu'ils falent au foleil , & qu'ils débi- tent à leur profit dans toute l'Europe. La pêche de la morue , dit , Schonneveld M O R 209 Schonnevdd, eiî fans contredit un des plus grands objets de commerce , ainfi qu'une des preuves les plus éclatantes de la providence qui fait abonder ce poiffon dans les pays feptentrionaux, en Danemarck, en Norvège, en Suéde , en Iflande , dans les îles Orcades, dans plufieurs endroits de Mofcovie,& dans d'autres Contrées qui ne produifent que peu ou point de froment , à caufe du trop grand froid &: de l'inclémence de l'air. Pour peu que la pêche en foit favorable , non-feulement tous les habitans fe nourriffent de ces poifTons , tant frais que féchés , au lieu de pain , mais ils en vendent encore une très-grande quantité à des Marchands étrangers qui les tranfportent dans l'intérieur de l'Europe. Les morues font peu fréquentes dans nos mers ; leur rendez-vous général eft au grand banc devant Terre-Neuve dans la baie de Canada , au Banc vert, à l'Ile Saint Pierre & l'Ile de Sable. Cet endroit a plus de cent lieues de long ; on l'appelle aujourd'hui le grand banc des Morues, La quantité en eft telle dans ce lieu , que les pêcheurs qui s'y raffem- blent de toutes les nations ne font occupés du matin au foir qu'à Jeter la ligne , à retirer , à éventrer la morue prife & à en mettre les entrailles à leur hameçon , pour en attraper d'autres. Un feul homme en prend quelquefois jufqu'à trois & quatre cents en un jour. Quand la nour- riture qui leà attire en cet endroit eft épuifée , elles fe difperfent & vont faire la guerre aux merlans dont elles font fort avides : mais étant moins légères à la nage que les merlans , elles en détruifent moins qu'il n'en refte pour notre fervice. Quelque grand que foit le nombre des morues qui font confommées par les hommes chaque année , ou dé- vorées en mer par d'autres animaux , ce qui en refte efl toujours plus que fuffifant pour nous en redonner un pareil nombre un an ou deux après. Leuwenhoeck a trouvé que la fomme totale des oeufs que porte ime morue ordinaire , fe monte à neuf millions trois cents quarante- quatre mille œufs. M. Ânderfon dit aufîi que la morue vulgaire ou le cabéliau , ce poiffon fi connu , eft la manne des peuples du Nord ; en effet c'eft le principal & prefque le feul poiffon dont fe nourriffent les habitans de l'Iflande. Sa chair fe divife en grandes écailles , & eft d'un goût fi exquis , qu'elle paffe généralement par-tout pour un manger délicieux ; il fe nourrit de toutes fortes de poiffons , principalement de harengs & même de vers de mer , de gros & petits crabes de mer, comme on le voit tous les jours; Torm IV, Dd jLïo M O R dans l'eftomac de ceux qu'on pêche proche Hilgeland, à l'embouchure de l'Elbe. Les Pêcheurs de l'île de Hilgeland , pour prendre du fchelfifch ( efpece de petite morue écailleufe , appellée hadoche. ou aigrefin , ou capdan ) , mettent leurs hameçons en mer pour fix heures , en fe réglant fur la marée. S'il arrive que peu de temps après que l'hameçon a été jeté , un cabéliau avale un fchelfîfch qui s'y étoit pris auparavant , on trouve en retirant la Hgne au changement de la marée , que le fchelfîrch eft déjà digéré , & que l'hameçon qui l'avoit pris tient au cabéliau , & il fert à le tirer de l'eau : fi au contraire il n'a avalé cette proie que depuis peu de temps, il s'efforce à la conferver avec tant d'acharnement, qu'il fe îaiffe enlever en l'air avec elle ; mais il l'abandonne aufîi-tôt &; fe replonge au fond de la mer. On apperçoit encore plus facilement cette faculté digeflive dans des cabéhaux qui ont avalé de gros crabes ; leur eflomac n'emploie guère plus de temps pour cette digeflion que pour digérer un fchelfîfch. M. Anderfon a appris des Pêcheurs les plus expérimentés, que l'écaillé afl d'abord la première attaquée dans l'eflomac de ces poifTons : elle devient bientôt aufli rouge qu'une écreviffe qu'on fait bouillir dans l'eau : elle fe diflbut enfuite en manière de bouillie épaiffe ; & à la fin elle fe digère tout-à-fait. Le P. FcuilUc ( dans le Journal de fcs Obfcrva-^ lions phyfiques , page 3 o3 ) dit que les tortues de mer font aufîi digérées très-promptement dans l'eflomac du crocodile. Je ne faurois , dit M. Anderfon, m'empêcher de remarquer ici en pafTant que ce poifTon infatiable a reçu de la Nature un avantage finguher , que beaucoup de gourmands fouhaiteroient pouvoir partager avec lui : c'elî que toutes les fois que fon avidité lui a fait avaler un morceau de bois ou quelqu'autre chofe d'indigefle, il vomit fon eflomac, le retourne de- vant fa bouche ; & après l'avoir vidé & bien rincé dans l'eau de la mer, il le retire à fa place & fe remet fur le champ à manger : ce fait efl avéré entr'autres par Denis {Befcript. de VAmér. Sept. ). Les Iflandois, continue toujours M. Anderfon , pèchent ce poîfTon à l'hameçon, en y attachant pour amorce un morceau de morue ( notam- ment les entrailles ) , ou de la mâchoire fraîche & rouge d'un cabéliau ré- cemment pris ; mais il mord bien mieux fur un morceau de viande crue & toute chaude , ou fur le cœur d'un oifeau qu'on vient de tuer. Il ef^ certain que de cette dernière manière un Pêcheur prend plus de vingt ^ M G R 211 poiiTons, pendant qu'un autre qui fera à côté n'en prendra qu'un avec i'amorce ordinaire ; c'eil auiïi pour cette raifon que ces artifices , trop avantageux pour un feul particulier, font défendus par un Edit du Roi de Danemarck dans le temps ordinaire de la pêche. En effet , un peu avant ce temps-là, la quantité de ces poifTons eft fi prodigieufe dans ces endroits , que les nageoires de leurs dos fortent de l'eau , 6c qu'on les voit fouvent mordre à un fimple hameçon de fer fans amorce. Ce poiffoa eft û glouton , qu'il fe prend aufTi à un limple hareng de fer blanc. Le véritable temps de la pêche de ce poiflbn commence le premier de Février, & dure ordinairement jufqu'au premier de Mai ; la faifon devenant alors plus chaude , on ne peut plus préparer le poiffon pour le garder. On remarque généralement que les différentes efpeces de morue montent toujours contre le courant de l'eau. La pêche s'en fait pendant le jour fur la haute mer , ainfi que dans les golfes profonds ; & pendant la nuit dans les endroits qui n'ont pas plus de fix braffes d'eau , ou dans d'autres où les flots violemment brifés contre les bancs de fable & les ro- chers, l'empêchent de fe fauver. Le meilleur & le plus délicat ell pris dans la haute mer, à quarante ou cinquante braffes de profondeur, oii il trouve fa nourriture la plus convenable. Celui qu'on pêche fur la côte ou dans les golfes peu profonds, n'eff pas à beaucoup près ni fi bon, ni û tendre. La morue noire , dit le charbonnier , fe trouve en grande quantité du coié du Cap du Nord; & on remarque qu'il dirige fa courfe du côté de la Norwege oîi il eff connu fous les noms de fcy , graafcy , Jll- fifck ou ofs. Il s'en prend fur-tout des quantités prodigieufes dans le temps qu'ils font pourfuivis par les baleines , qui les ferrent fouvent de fi près , que ne fâchant pas où fe fauver , ils viennent fe jeter fur îe rivage. Ce poiffon fert de nourriture aux plus pauvres gens , qui gardent fon foie avec foin pour en faire de l'huile : il y a même une Or- donnance -, dit M. Andcrfon , qui défend aux Négocians des villes anféa- tiques de nourrir leurs domeftiques avec ce poiffon , pour ne pas le renchérir aux dépens des pauvres ; à peine même les Pêcheurs de Hil- geland en trouvent-ils le plus petit débit à Hambourg. Les Anglois pèchent un très-grand nombre de merlus , qu'ils portent tout falés & defféchés par toute l'Europe. Les Hollandois en font peu de cas ; mais les habitans de Weftphalie le recherchent beaucoup. Les indiens font fécher leur merlu au foleil ^ ils l'appellent kair, D d 2 212 M O R Préparation des diverfcs efpeces de Morues, Les Iflandois fa vent préparer avec le cabéliau deux fortes àejîocfifchy qui eft dans ce pays aufli tendre & aufTi délicieux que dans aucun autre ( Stocfifch fîgnifîe poijfon à bâton ou poijjon dejjéché 6c roule : le premier fiocfifch eft forti de la Norwege , & la plus grande quantité en vient encore aujourd'hui. Voyez la Topographie de Norwege , pag. i /j &fuiv, fur la manière dépêcher ^ de préparer & dcfécher ce poijfon. ) La première forte, qu'on appelle J?^c//t72 du mot flacken , qui fignifîe fendre , eft la meilleure , la plus délicate & la plus chère : on la prépare de la façon fuivante. Les Pêcheurs étant arrivés à terre avec leur poiffon , le jetent fur le rivage où les femmes ou hommes ( décolleurs ) , qui les y atten- dent pour cet effet , lui coupent fur le champ la tête ; & après l'avoir vidé , les habilleurs ou trancheurs le fendent du côté du ventre du haut en bas. Les décoUeufes otent enfuite l'arête du dos depuis la tête juf- qu'à la troifieme vertèbre au-defTous du nombril , parce que c'efl fous cette arête principalement que le poiffon commence à fe gâter. Cet ouvrage étant fait , les femmes emportent fur leur dos les têtes coupées dont elles font leur repas. Elles brident les arêtes en guife de bois , & les foies leur fervent à faire de l'huile. Les hommes mettent enfuite ces poiffons fendus par peths tas , les uns au-delTus & à côté des autres, fans y mettre de fel ( quelquefois auffi ils les falent ) & les laifTent en cet état pendant environ un mois , félon que le vent eft plus ou moins fec , pénétrant & confiant. Ils conftruifent après cela des bancs carrés de cailloux de rivage , fur lefquels ils rangent le poiffon pour le fécher ; enforte que la queue de l'un foit à côté du ventre de l'autre , & que la peau de tous foit tournée en haut , pour empêcher que la pluie ne le pénètre , ce qui tacheroit le poiffon. Lorfque le temps efl: au beau , & que le vent fouffle beaucoup du Nord , il ne faut qu'environ trois jours pour fécher le poiffon à fon point. Quand il eff bien fec , on en fait des tas de la hauteur d'une maifon , &; on les laiffe expofés aux injures du temps jufqu'à ce qu'on les débite aux Négocians Danois, qui , en recevant cette marchandife , l'entaffent de même , & la laif- fent en cet état jufqu'à la Saint Jean. Alors ils la mettent dans des ton- neaux énormes , qu'ils chargent fur des vaiffeaux & que les gens du pays amènent à Drontheim & à Bergen, qui font les deux entrepôts d« cette marchandife , d'oii on la tranfporîe dans toute l'Europe. M O R î,3 La deuxième forte de flocfifch que les Iflandois préparent avec le ca- béliau , porte le nom de heng-fijch du mot hengeny qui fignifîe fufpmdrc. On commence d'abord à la préparer de la même manière que le flac- fifch , fmon qu'au lieu d'ouvrir le ventre du cabéliau on le fend du côté du dos ; & après en avoir ôté l'arête , on fait une fente d'environ fept ou huit pouces de long au haut de l'eflomac , pour pouvoir le fufpendre : on le couche enfuite par terre , & pendant qu'il y macère , on élevé quatre parois de petits morceaux de rocs , entaffés léc^érement les uns fur les autres & fans aucune liaifon , afin que le vent puiffe y pafler facilement de tous côtés : on couvre le tout avec des planches & des gazons. Lorfque le poifîbn eft fuffifamment macéré , on l'ôte de la terre & on l'enfile par la fente dans des perches de bois , qu'on fuf- pend les unes à côté des autres dans des cabanes confiruites de rocailles : le poiflbn s'étant à la fin bien féché à l'air , on l'ôte des perches & on l'arrange de la même manière que le flac-fîfch. Il y a , dit M. Anderfon , une différence comldérable entre le poifîbn féché fur un rivage abondant en cailloux, & un poiffon féché ample- ment fur le fable ; le premier devient beaucoup plus ferme , plus blanc & plus durable , au lieu que celui , qu'au défaut de pierre , on étend fur l'arête que l'on a ôté du dos , devient jaune & ne fe conferve pas fi long- temps que l'autre. Si un j}oifron fi gros & fi gras , préparé fi négligem- ment fans fel & entaffé en plein air , fe conferve fans pourriture , de façon qu'envoyé dans d'autres climats il fe garde pendant plufieurs an- nées , c'eft au froid pénétrant qui règne dans ce pays , principalement dans le temps oii Ton prépare ce poiffon , ainfi qu'à la pureté de l'air & à la féchereffe étonnante des vents du Nord , qu'il faut en attribuer la caufe. D'ailleurs dans la faifon où l'on prépare ce poifTon dans cette île , il n'y a point de groffes mouches , & fa feule odeur fait fuir tous les moucherons. Dans les Ifles de Weflmahoë on prépare le cabéliau à la façon de Norvège, pour en faire une efpece de flocfifch , qu'on appelle rotfchœr. On fend le poifTon du côté du dos aufTi-bien que du côté du ventre , en- forte que les deux moitiés ne tiennent enfemble que par l'extrémité de la queue ; enfuite on le couche par terre, puis on le fait deffécher com- me nous avons dit, à l'exception que les cabanes ne font pas couvertes. Cette efpece de ilocfîfch efl confommée dans le pays même ; on con- ferve cependant pour le commerce le rotfchœr le plus tendre , qui efl 214 M O R fait avec la morue appellée dorfch. On nomme ceî*otfchaer lart-fifcli^ qui fignifie poijfon tendre : on le fait paffer dans les pays Catholiques Romains , où il efl très -recherché pendant le Carême. Les Flibuftiers HoUandois ont une autre manière de préparer le ca- béliau fur les vaifleaux ; ils ne font autre chofe que de lui couper la tête, & après l'avoir vidé du côté du ventre, ils le rangent dans d«s tonneaux avec des couches de gros fel : ils lui donnent alors le nom de labberdam. Les ÉcofTois & les Irlandois l'appellent aberdaine , du nom du lieu oîi ils en ont préparé les premiers. Le labberdam fert de nourriture ordinaire aux Matelots. Les Hittlandois préparent aufli avec le cabéliau ou grande morue le klipp-fifch ou poifTon de rocher , ainfi nommé des cailloux ou rochers fur lefqueLs on l'expofe pour le faire fécher. Pour cette préparation ils pratiquent fur le bord de la mer de grands coffres carrés de bois qui contiennent cinq cents poiffons. Ils coupent d'abord la tête aux cabé- iiaux, & après les avoir vidés & leur avoir ôté la grande arête , ils les rangent par couches & les laiffent macérer ainii pendant fept ou huit jours. Ils les mettent enfuite dans des preffes de bois , qu'ils chargent avec quantité de pierres pour les bien applatir. Après les y avoir laiffés pendant dix jours, ils les étendent un à un au bord de la mer fur de pe- tits lits de cailloux bien polis & arrondis par les flots , & affez éloignés de l'eau, où ils les laiffent fécher au vent, au froid & au foleil; dès qu'ils font fecs ils les rangent par tas dans des magafins , ayant foin de les bien couvrir pour empêcher l'air & le vent humide d'y pénétrer &: de lesamolhr. Ils prennent cette même précaution lorfqu'ils embarquent leur poiffon dans les vaifleaux; car plus il efl couvert & à l'ombre, & mieux il fe conferve , ayant été une fois bien féché à fon point. C'efl dans le mois d'Août que fe pêche la grande morue propre à faire du kHpp-fifch. Ce qu'on appelle morue verte ou blanche , & morue feche ou merluche , fe fait avec le même poiffon ; la différence de la dénomination vient de la façon différente de le préparer. La morue verte qu'on embarque aufîi- tôt que le poiffon elf décollé & tranché , ôc que fans l'entonner on range par couches avec du fel dans le vaiffeau , n'efl autre chofe que le ca- béliau falé , connu fous le nom de labberdam. La morue feche reflémble beaucoup au klipp-fifch , qui après avoir été préparé comme nous MGR 21^ Tavons dit , efl entaffé fur des fagots dans le vaîiTeau oii on le tranf- porte. Par tout ce qui précède, on voit que la morue verte, connue à Paris fous le nom de moTuc blanche , ne fe pêche par les François que fur le banc de Terre-Neuve. A l'égard de notre morue feche, appeliée mir- luche owfiocfifch, ce font les François des côtes de Normandie , c'eft-à- dire, les Malouins & même les Bafques, qui la pèchent dans les parafes voifms de la Terre de Labrador ; & après qu'elle a paffé par une ving- taine de mains, ils la rembarquent & viennent la vendre aux côtes de France , de Portugal & d'Efpagne , où on la rembarque de nouveau , pour fervir de nourriture dans les voyages d'Afrique , des Indes Orien- tales & d'Amérique. On donne le nom de rund-fifch au cabéîiau rond, préparé dans le printemps, qui n'efl: point fendu, mais à qui l'on a feulement ouvert le ventre pour le vider, & que l'on a enfuite fufpendu par la queue avec une ficelle. Les meilleurs poiffons de cette efpece vont en Hollande & les autres à Brème. Ainfi les lilandois ont Xqwy fiac-fifch & leur heng-fifck^ les Norvégiens leur rund-fifch, les Hittlandois leur klippfifch^ les An- glois leur koolfifch, &c. M. Anderfon nous apprend encore qu'il n'y a rien d'inutile dans cet excellent poiflbn. Lorfque les Norvégiens vident leur cabéîiau pour en faire du flocfifch , ils ont grand foin de garder les inteflins & les œufs , & de les apporter avec leurs autres marchandifes à Drontheim & à Ber- gen. Les Marchands Forains, & fur-tout les Commis des comptoirs des Villes Anféaiiques , en achètent une grande quantité ; &: après les avoir bien arrangés dans des tonneaux, ils les envoient à Nantes, foit direfte- ment, foit par la voie de Hambourg. Les Nantois s'en fervent avec avantage dans leur pêche des fardines. Ils épluchent ces inteftins par petits morceaux, qu'ils jettent pour amorce dans les endroits oii ils ten- dent leurs filets ; cet appât attire les fardines de tous côtés , & en rend la pêche abondante & facile. La morue fraîche ou nouvelle de Terre-Neuve, efl un excellent man- ger: les mâles valent beaucoup mieux que les femelles. Onchoifitce poiflbn, blanc, tendre, nouveau & de bon goût. Quant à la morue feche , dite mcrhuht , c'efi un aliment qui ne convient pas à toutes fortes d'eilomacs, parce qu'elle a centrale une dureté olTeufe, & qu'elle ne ii6 M O S fe cuit qu'après avoir été battue & macérée long-temps dans l'eau ; en forte qu'elle efl toujours un peu coriace & difficile à digérer, mosaïque. Avant que l'induftrie humaine eût inventé l'art de pein- dre les pierres & les métaux, on imagina de profiter des couleurs de la nature, de les unir, d'affembler différentes nuances, d'en former des compartimens, des defîins & des tableaux variés. Pour cet effet on choififfoit des marbres de diverfes teintes , on les coupoit par morceaux, on les fîxoit fur du fluc, on affortiflbit les tons de couleurs , on en fai- foit des portraits , des figures , des payfages qui le difputoient au pinceau des Artilfes célèbres. On voit en Italie des chefs-d'œuvre de ce genre. Les ouvrages de mofaïque ( vmfivum opus ) éloient de différentes pro- portions , fuivant l'ufage auquel on les deliinoit. Les grandes pièces étoient employées à paver les Temples & les Palais, & n'offroicnt que de grands defîins Arabefques. Les moyennes s'employoient pour les tableaux, & exigeoient plus de compofition. Le travail des petites de- mandoit une patience & une adrefle fmgulieres. Il falloit mettre en pièces des blocs de marbre & rapporter des millions de morceaux, pour for- mer un tableau en miniature. Ces chefs-d'œuvre de mofaïque font fort chers. On affure que certains tableaux de Saint-Pierre de Rome ont coûté plus de cent mille livres de notre monnoie. On voit dans la galerie du Roi à Chantilly deux fuperbes bureaux garnis de tableaux plaqués , les plus grotefques , & ornés de colonnes : on y diflingue les pierres d'agate , de jafpe fleuri , de fardoine , de lapis , &c. MOSCATELLINE ou HERBE MUSQUÉE, mofchaull'ma foliis fu- mariez bulhofa aut Ranunculus nemorofus mofcliatellina diclus. Petite plante baccifere qui croît dans les prés , aux bords desruiffeaux, dans les haies ombrageufes, parmi les brouffailles & fous les arbres , dans un terrain léger & fablonneux : elle efl: feule de fon genre. Sa racine efl longue , blanche, entourée d'un nombre de petites écailles, qui ont la figure de la dent d'un chien, creufes en dedans, fucculentes, fans odeur, mais d'un goût douceâtre; jetant en fa partie fupérieure beaucoup de fibres longues , blanches , rampantes , par lefquelles elle tire fa nourriture. Elle pouffe de fa racine deux ou trois longues queues , qui foutiennent des feuilles verdâtres , découpées comme celles de la fumeterre bul- beufe. 11 fort d'entr'elles un pédicule , qui porte à fa cime cinq petites fleurs herbeufes ^ qui toutes ramaffées repréfentent un cube. Ces fleurs H les feuilles ont dans les temps himiides une odeur de mufc. A la fleur fuccede M O s 217 fuccede une baie molle, pleine de fiic, oîi l'on trouve ordinairement quatre femences aflez reflemblantes à celles du lin. Ce fruit a, dit-on, l'odeur & le goût de la fraife dans fa maturité. Cette plante, qui fleurit en Avril, paffe très-promptement. Quoi- que peu ufitée en Médecine, on attribue à fa racine une vertu déter- five , vulnéraire & réfolutive ; on l'emploie plus communément à l'ex- térieur. MOSCOUADE. Fqyei à rartkU Canne A SUCRE* MOSE ou MOOS. C'efl un quadrupède qui fe trouve fréquemment dans la Nouvelle Angleterre, & dans les autres parties Septentrionales de l'Amérique : il eft de la grandeur d'un taureau ; il a la tête d'un daim , avec des cornes larges & très-grandes, qui muent tous les ans. Son cou, qui reffemble à celui du cerf, eft garni de crin fort court , qui defcend un peu le long du dos. Cet animal a les jambes longues , de grands pieds faits comme ceux des vaches , & la queue un peu plus longue que celle des daims. La chair du mofe efl d'un affez bon goût , les Sauvages font fécher fa peau à l'air. Elle eft aufli épaifle que celle du bœuf, & n'efl pas moins utile à bien des chofes. Les mofes fe trouvent en quantité dans une île près de la Terre- Ferme. Pour les prendre , les Sauvages allument plufieurs feux , après^ quoi ils environnent les bois & les chaffent vers la mer : dès que ces animaux s'y font jetés , ils les pourfuivent avec leurs canots & les tuent. Leur courfe eft moins vite que celle du cerf : on croit que le mofe eft du genre de l'alcé ; il met bas trois petits à la fois. MOSKSTEIN. Voyc^^ MALESTROM. MOSQUILLES ou MOSQUITES , ou MOUSQUITES. Nom qu'on donne à une efpece de coufms, qui font un fléau à la Chine , aux Indes Orientales, & à la Côte d'Or, fur-tout pendant la nuit , près des bois & dans les lieux marécageux. Ces infedes paroifTent peu différer des maringouins , voyez ce mot. Leur piqûre caufe dans la chair une enflure fort douloureufe. Les Nègres de la Côte des Efclaves en Afrique , & ceux de Sierra-Léona, font aufli très-incommodés de ces mofquites. Le remède contre cette piqûre , efl: de frotter l'endroit blefl"é avec du jus de limon ou du vinaigre ; la douleur augmente pour un moment , mais elle s'appaife prefque auflî-tôt. Les Gens riches qui veulent écarter ces fâcheux animaux pendant le jour , lorfqu'ils font la méridienne , ont un Tome IK Ee 2i8 MOT MOU Nègre à côté d'eux , armé d'un grand éventail de peau , qui fert en même temps à rafraîchir l'air. Mais on a une autre reffource pour la nuit, ce font des rideaux ou un pavillon de mouffeline très-claire , même de la gaze , dont le lit eil environné ( c'efl ce qu'on nomme un mofquilLer ou un moujliqualre ) : on ferme par ce moyen toute entrée aux mofquilles , fans intercepter la fraîcheur de l'air. On s'en fert aufli pour les moufliquts; voyez ces mots. On n'a pas encore bien décrit la différence entre les mof- quites & les moufliques. MOTELLE. Petit poifTon de rivière & particulièrement de lac; il efl très-commun en SuifTe & en Bourgogne. Son corps efl: comme tortueux. Ce poiflbn a la peau vifqueufe , fans écailles , la tête grande , large & un peu applatie. Sa chair , quoique vifqueufe & graife , eil d'un affez bon goût. MOTEUX ou VITREC. Voyci Cul-blanc, MOTMOT. Oifeau du Bréfil du genre à^sfaifans. Voyez ce mot 6c Katracas. MOUAX. Voyei ^ l^irtick MARMOTTE. MOUCHE, mufca. Ce nom a ordinairement un fens très-vague & fe donne à des infeftes de clafTes différentes. C'efl dans fon acception la plus générale qu'on en va parler ici. Nous indiquerons les caradleres du genre auquel les Méthodifles modernes l'ont borné. Le nom de mouche proprem.ent dit , fe donne à une clafTe d'infedes des plus communs & des plus connus ; mais cette clafTe contient une très-grande divei-fité d'ef- peces. Selon notre plan ordinaire , nous parlerons d'abord àes chofes communes aux diverfes efpeces de mouches, telles que leur flruûure ou leur organifation , leurs transformations , leur manière de multiplier & de fe reproduire, les lieux oîi elles habitent, les divifions qu'on en peut faire pour les diflinguer dans ce chaos immenfe de différentes efpe- ces. Nous nous attacherons enfuite particulièrement à parler de celles qui peuvent flatter notre curiofité , par î'induflrie qu'elles nous font voir. Le caraûere général & le plus frappant , qui fait aîfément diflinguer ' les mouches d'avec quantité d'autres infeftes aîlés , c'efl d'avoir des aîles tranfparentes , qui femblent être de gaze , ou plutôt une étoffe glacée defîinée en ramage , & bordée d'une frange , & fur îefquelles il n'y a point de ces poufîîeres que les aîles des papillons laifTent fur les doigts qui les ont touchés, & qui font vraiment des efpeces d'ccailles. Les aîles MOU î,9 >3es moucîies ne font cachées fous aucune enveloppe ; c'eft ce qui les caradérife encore , 6c les diftingue des fcarabéesôc des fauterelles : les aîles des mouches font , à proprement parler , névropteres. Structure ou organlfatlon des Mouches, - Les mouches ont une tête , un corfelet & un corps ; c'eft au corfelet que les ailes font attachées. Le corps efl la partie oii font contenus les inteftins, l'eflomac, les parties de la génération & le plus grand nombre des trachées. La tête des mouches tient ordinairement au corfelet par un cou affez court, & fur lequel la tête peut tourner comme fur un pivot. Il y a des mouches qui ont comme deux corfelets féparés l'un de l'autre. Parmi ces infeâes , les uns ont fimplement une trompe ; les autres ont une trompe & des dents ou des ferres. Les yeux des mou- ches font à réfeau , leur flrufture efl des plus admirables , & chaque mouche efl pourvue d'une multitude d'yeux : voye:^ U développement de cette organlfatlon au mot YeUX A RESEAUX , Inféré dans l'article IN- SECTE. D'après les obfervations qu'on y verra, il efl certain qu'on ne peut point admettre le fentiment d'un ProfefTeur de Mathématique , inféré dans les Éphémérides des Savans de Rome , qui penfe que ce qu'on nomme yeux à réfeaux , ne font que l'organe de l'ouie ; parce que ces parties font renflées , tendues comme un tambour , & propres à rece- voir les vibrations de l'air extérieur : il fonde fon fentiment fur ce qu'on découvre fur la tête des mouches d'autres yeux dont il efl aufîi parlé à l'article Yeux a réseaux , au mot Insecte. Le long du corps de l'infede font des ouvertures que Fon nomme Jilgmates, & qui font autant de tranchées , à l'aide defquelles fe fait la refpiration de l'infe^le, Foyei aujji au mot Insecte , V article Stig- mates. Dans la mouche , dans le moucheron , dans l'infe £le le plus impercep- tible , fe trouve l'organifation animale , d'autant plus frappante & d'au- tant plus merveilleufe , que l'infe£le efl plus petit. On reconnoît dans la mouche le cœur, qui efl pâle , de figure conique, & couché fous le dia- phragme de l'abdomen : il n'a qu'un feul ventricule , & efl environné d'un péricarde. L'eflomac efl grand & membraneux , & fouvent il fe Tompt avec bruit comme une vefTie, lorfqu'on prefTe le ventre avec les 4oigts, On obferve dans la mouche commune la trompe qui ell Ee 2 220 MOU mufculeufe & aflez femblable à celle de l'éléphant; elle efl velue à Textré- mité & fendue comme la bouche : du milieu de cette trompe s'avancent deux petits corps cyli^idriques & velus. La trompe fert aux mouches pour fucer les viandes & les fruits dont elles font leur nourriture. Les mouches mâles ont une verge oblongue & noueufe. Manière dont les Mouches fe multiplient & fe transforment. Dans ce genre d'infeftes l'accouplement fe fait d'une manière fin- guliere ; la partie du mâle eft ouverte , & c'efl; elle qui reçoit celle de la femelle , qui entre dans le corps du mâle pour être fécondée. Le plus grand nombre de mouches font ovipares , mais cependant il y en a auflî quelques-unes qui font vivipares ; telles font ces efpeces de mouches . affez grandes , qu'on trouve ordinairement fur le herre. Lorfque les mouches ovipares s'accouplent , leur corps eft déjà rempli d'œufs, dont la plupart ont toute leur groffeur ; leur ventre eft très-gros ; mais lorfque les mouches vivipares s'accouplent , les embryons ne Ibnt encore aucunement fenfibles dans leurs corps. Les mouches vont dépofer leurs œufs dans les lieux où les vers qui en foniront peuvent trouver leur nourriture; ôi cela parce que nul infecle ne couve fes œufs , excepté les efpeces de cochenilles. La de- meure de ces vers varie fuivant les différentes efpeces de mouches auxquelles ils appartiennent. De ces vers les uns vivent fur les arbres & fur les plantes , & fe nourriiTent des pucerons qu'on y rencontre fou- vent par bandes très-nombreufes : tels font les vers des mouches aphi". d'.vores. Voyez ce mot. Certaines mouches dépofent leurs œufs dans les chairs d'animaux morts, ou dans d'autres matières pourries ; telles font les mouches hUues de la viande; d'autres vont les dépofer dans la fiente & dans les excrémens des hommes & des animaux ; telles font quelques mouches abeilliformes ^ ôcc. Ces œufs varient pour la couleur &i pour la forme. Des œufs bien (inguliers font ceux de la mouche merdivore , dont le ver vit dans la fiente ; ces œufs , qui font blancsSc oblongs , ont à un de leurs bouts deux efpeces d'aîlerons qui s'écartent l'un de l'autre comme deux cornes. Une pareille conformation étoit nécefîaire , à caufe de l'endroit où cet infede dépofe fes œufs. Il les place & les pique dans les exxrcmens des cochons , des vaches & autres femblables ; c^% Ai Al ailerons empêchent que Tœuf ainfi piqué ne puiffe enfoncer îrop avant; ime paràe de l'œuf, depuis l'origine des cornes, relie dehors, ôi le MOU 22, petit naiffant ne rifque pas de périr enfeveli fous la matière qui doit faire fon aliment. Voyez ci- après l'article mouche mer dlv on ovi Jîcrco" raire. Tous les œufs des mouches ne font pas aufïi fmguliers ; néan- moins en les regardant à la loupe on en voit beaucoup qui font diverfement cannelés & travaillés , tandis que d'autres font liffes , iimples & unis. 11 y a des mouches qui vont dépofer leurs œufs dans les eaux fales , bourbeufes & puantes , dans les cloaques &c les latriiies: ils vivent auflî dans la bouillie des chiffons dont on fait le papier. Quelque dégoûrans que paroiffent les vers qui en fortent , leur organifaiion mériie lexamen & l'atteniion d'un Naiura'ifle. Ces vers ont au-defTous du corps fept paires de mamelons courts & membraneux qui reffemblent à des jam- bes , & qui en font réellement l'otEce. Ce que ces vers préfentenî fur- tout de plus fmgulier, c'efl qu'au lieu de fligmates ils ont à l'extrémité du corps une longue queue qui s'élève à la furface de l'eau pour pomper l'air : cette queue a fair nommer ces infedes , par M. de Réaumur^ vers a. queue de rat. Le tuyau qi.i compofe cette queue n'eft pas f mple , il elt compofé de deux fourreaux, dont l'un entre dans l'autre comme ceux des lunettes d'approche; tous deux font capables d'alongement, &: le dernier fe termine au bout par un mamelon qii donne entrée à l'air : c'eft par-là que cet infefte refpire , & c'eft par cette raifon qu'il étend fa queue jufqu'à la furface de l'eau , pour recevoir l'air par ce fl^igmate a^ongé ; auiTi ces vers ne vivent-ils point dans les eaux pro- fondes , oii leur queue ne pourroit parvenir à la furface du liquide. Il faut cependant convenir que la queue qui n'a en apparence que fept ou huit lignes de longueur, peut fe prolonger de quatre à cinq pouces , fuivant que la furface de l'eau eft plus élevée. Tel eiî le véhicule mé- canique de l'air dans les inteflins de ce ver fordide. Pour fubir fa méta- morphofe , il fort de Teau , fe cache en terre : fa longue queue fe rac- courcit , fa peau fe durcit , forme fa coque fur laquelle on.remarque quatre petites cornes qui répondent aux quatre ftigmates du corfelet de la mouche future. C'efl: par ces organes que la nymphe refpire. Au bout de huit ou dix jours , la mouche fait fauter la partie fupérieure de fa coque , dont la calotte fe divife en deux pièces; elle prend fou ellbr , s'accouple & va dépofer fes œufs près des matières liquides & fales qui doivent fervir de nourriture à fa poflérité. Ces mouches ont la forme de guêpes, Foye^^ « /'^mV/^ Mouches abeilliformes. 522 MOU Tous les vers qui éclofent des œufs des mouches , avant de parvenir eux-mêmes à l'état de mouche , fubiffent une transformation ; ils pafTent par l'état de nymphe , Se cette nymphe eft renfermée par la peau même de l'infefte : voye^ au mot Insecte, à V article, Nymphe , ce qui arrive dans ces curieufes transformations. Les mouches vivipares ne font pas autant de petits que les mouches ovipares font d'œufs ; les œufs tiennent peu de place , au lieu que les petits étant plus gros , ne peuvent guère être plus de deux enfemble dans le ventre d'une mouche : aufîi ces mouches ne font que deux petits à la fois , tandis que les ovipares font des centaines d'œufs. Dïv'ijion des Mouches, L'Auteur qui a donné , il y a quelques années , VHîJloire abrégée des Infectes des environs de Paris , Ouvrage fort exaft , & auquel nous ren- voyons pour être inflruit plus au long des détails qui concernent les différentes efpeces de mouches , ainfi que les divers autres infeftes dont il a parlé ; cet Auteur, dis-je, diUribue les mouches en cinq familles différentes. La première famille contient les mouches dont les ailes ont des cou- leurs différentes qui les panachent & les bigarrent. La féconde renferme des mouches qui ont un caraûere fingulien" Toutes ont fur le devant de la tête une pellicule ordinairement de cou- leur claire tirant fur le blanc ou fur le jaune , qui paroît comme ren- flée , & qui forme à l'infede une efpece de mafque ; ce qui a fait donner à ces mouches le nom de mouches mafquées. Ces infeâes ont le corfelet alongé , les palettes des antennes plus longues que dans les autres efpeces , & quelquefois les ailes arrondies par le bout. Toutes ces particularités leur donnent un part aifé à reconnoître ; les vers qui donnent naifîance à ces mouches mafquées viennent dans l'eau , & y font leurs métamorphofes. La troiiieme famille contient les mouches dont le corps lui-même efî: panaché de plufieurs couleurs. Parmi ces efpeces il y en a de très-jolies* C'eft à cette famille que fe réuniffent les mouches dont les vers fe nour- riffent de pucerons. La quatrième nous préfente la plus brillante efpece de mouches „ qui font les mouches dorées. Ces efpeces ne font pas fi nombreufes , suais plus éclatantes par la couleur, foit dorée, foit cuivreufe qui MOU ti-^ Mie tantôt fur leur ventre , tantôt fur leur corfelet, & fou vent fur tous les deux. Enfin la dernière famille comprend les mouches ordinaires , celles qui font les plus communes , qui n'ont rien de remarquable. Il convient d'avertir que la divifîon qu'on vient de rapporter d'après Hâ. Geofrol , n'embraffe pas tous les infedes compris dans l'étendue de la fignifîcation vague du mot mouche. Elle n'a pour objet , dit M, DcUuie , qu'un genre de la claiTe des diptères. Voyez ce mot auquel cet Auteur a borné , après M, Llnneus , la dénomination de mouche , &: dont le caraâ:ere confifle en ce que les antennes font très-courtes, en forme de palettes ovales , & la bouche fans dents avec une trompe charnue» Ce genre ainfi limité eft encore le plus nombreux. L'illuftre Réaumur divife les mouches ( prenant ce mot dartsfonfens^ entendu ) en deux claffes générales : l'une compofée de mouches à deux ailes , & l'autre de mouches à quatre aîles. Ces deux clafîes générales en comprennent quatre autres qui leur font fubordonnées. La première de ces quatre claffes fubordonnées comprend les mouches qui ont une trompe , & qui n'ont point de dents ou de ferres. La féconde eft com- pofée de mouches qui ont une bouche fans dents fenfibles. La troisième renferme les mouches qui ont une bouche munie de dents ; & la qua- trième claffe comprend les mouches qui ont une trompe & des dents. La feule partie poftérieure aide encore à diflinguer bien des genres de mouches les unes des autres. Les mouches qui font armées de ces aiguillons dont on redoute les piqûres, n'ont que trop de quoi fe faire connoître ; d'autres portent au derrière des efpeces de tarières logées dans un étui : ce font les femelles qui portent cette longue queue, comme plufieurs femelles Ichneumons : woy^z le mot Ichneumons (Mouches ). Ainfi il y a des mouches à aiguillon & des mouches à tarière. Il y a beaucoup d'efpeces de mouches à fcie , qui méritent ce nom , à caufe d'un inflrument fmguller dont elles font pourvues , & qu'elles ne montrent guère que quand on les y force en leur prefTant le ' corps. D'autres mouches portent au derrière de longs filets , qui par- leur formel parla flrufture ont quelque refTemblance avec les an-- tenues. Parmi les mouches à quatre aîles , les éphémères ont de ces filets ^ voyelle 772or EPHEMERE : parmi les mouches à deux aîles, les mâles- dès gallinfeftes ont pareillement de ces filets. Foye^ Gallinsfctes,- C'efl par ces deux claffes générales de mouches , que M, o/iferaf long d'un pouce & davantage. Quelquefois aufTi le fungus fort du dos de la nym^jhe; dans l'une & l'autre pofitionles curieux regardent cet accident comme une produdion qui offre tout à la fois le végétal & l'animal liés enfemble ; Meilleurs Nccdham & Fougcroux ont déjà parlé de cette fm- gularité que l'on voit aujourd'hui dans la plupart des cabinets de l'Eu- rape. Il paroît qu'on peut attribuer la caufe de cette végétation à la na- ture même des graines de la plante , qui femblables à certains fungus ne lèvent jamais en pleine terre , mais feulemenj fur la corne des che- vaux morts. Le clavana mllitaris crocca fournit en Europe le même phé- nomène. On peut confulter la Lettre de M. MulUr à M. Buchmr fur la mouche, végétale d'Europe. M. Watfon dit, dans les Tranfaciions Philofophl- qucs , que les mouches végétantes desCaraïbes fe trouvent dans la Do- minique , s'enterrent dans le mois de Mai , & commencent à fe méta- morphofer en Juin. Le petit arbriffeau qui en naît, dit-il, reffemble à une branche de corail ; il croît jufqu'à la hauteur de trois pouces , & porte plufieurs petites gouffes oîi naiffent certains vers qui fe métamor- phofent enfuite en mouches, Le fait véritable , d'après les Obfervations MOU 14J de M. Uni & la plupart des Auteurs , eft que des cigales qui font fort communes tant à la Dominique qu'à la Martinique , s'enterrent dans leur état de nymphe fous les feuilles mortes , pour attendre leur méta- morphofe : fi le temps n'eîl: pas favorable , il périt un grand nombre de ces infeûes ; alors les femences de clavaria s'attachent aux cadavres , & fe développent à-peu-près ou de même qu'il efl: dit ci-delTus , comme lefungus ex pede equino qui vient fur la corne des chevaux morts. Les vers qui, fuivant M. Watfon, fortent des gouffes, font des vers qui ron- gent la tête des clavaria : on voit quelquefois croître fur ces cigales une efpece de fucus formé de longs filets blancs & foyeux qui recouvrent tout le corps de l'infede , & le débordent de fept à huit lignes deffus & defîbus le ventrl. Cette obfervation tend à confirmer^' qu'il y a des plantes qui vivent fur les cadavres de quelques animaux ; que celles qu'on connoît font prefque toutes du genre desfungus ; que même quel- ques-unes viennent fur les animaux vivans. On pourroit peut-être s'étonner de la confiance avec laquelle le cla- varia femble s'attacher par préférence aux nymphes des cigales dans l'Amérique , & de ce que dans les autres pays oii ces infeftes fe mul- tiplient , on ne trouve point cette plante fur elles ni fur leurs nymphes ; mais pour peu qu'on y faffe réflexion , on verra aifémcnt que rien n'efl plus naturel. Ces plantes font du genre des parafites , & on fait que chaque parafite affefte de s'attacher à une efpece de plante déterminée ; il n'eft donc pas étonnant que celle-ci s'attache par préférence à une même efpece d'infedes. Il efl aufîi facile de voir que le grand nombre de ces nymphes , qui fe trouve en Amérique , & les circondances du climat & de l'endroit, y rendent cette efpece de phénomène très-commun, quoiqu'on ne l'obferve pas dans les contrées de l'Europe où il y a le plus de cigales. M. le Laf a remarqué fur la tête d'une jeune abeille , entre les deux antennes & près de leur infertion, dans la partie écailleufe & antérieure de la tête , un corps , qui obfervé à la loupe & à l'œil nu , paroifToit com- pofé de quatre petits pédicules jaunes d'une ligne de long, terminés chacun à leur fommet par un bouton d'un jaune verdâtre ; les pédicules étoient à demi tranfparens , d'une confiflance molle , flexible; les boutons paroiffent à l'œil opaques & folides , mais vus à la loupe , on recon- noiffoit que c'é oit des efpeces de houppes compofées de petits fleurons pu d'exeroifTances véficulaires, alongées , rafl'emblées en boule. Étoient: Hh z 144 MOU ce encore des champignons en mafTue, du genre des clav aria ^{emhÏR' blés à ceux qui croifTent fur les nymphes de la petite cigale Caraïbe , nommée improprement mouche végétante ? Mais qu'il nous foit permis de répéter qu'ici cette prodùdion étoit fur un animal vivant; cette pe- tite obfervation dont il n'eil point parlé dans les Naturaliftes , mérite toujours d'être conftatée , parce qu'il n'eft point de petits faits dans la nature , qui ne puiffent devenir intérefîans , ou par eux-mêmes ou par leur comparaifon avec d'autres. Le même fait a déjà été re- marqué fur une mouche à miel , il y a deux ans , par M. Bruyfet fils ^ de Lyon. Mouches du vinaigre. Voyei Vers du vinaigre. MOUCHEFvOLLE. Foye^ Gobeur de mouches. MOUCHERON, cuUx ^ eft un infefte long & mollafle, qui eft du genre des mouches : il afix jambes très-longues, courbées en dehors , dont les deux de derrière font plus hautes que les autres. Son ventre eft formé de neuf lames ou anneaux: il a la tête petite , les yeux noirs & au-deffus deux antennes barbues ; au lieu de bouche il a une tromî>e pointue , dure & creufe , avec laquelle il perce la peau , & fuce le fang des animaux , & fur-tout celui de l'homme , dont il paroît le plus avide ^ & dont il fe remplit jufqu'à ce que fon corps devienne roide à force d'être plein & étendu. Sa poitrine efl large & élevée, & d'une couleur verdâtre. Les moucherons , difent Goëdard Sc Wagmnis , fe retirent en grand nombre dans les citernes lorfque l'hiver approche , & dépofent fur les plantes aquatiques , dit M. à'HurJfeau , de petits œufs jaunâtres , qu'ils y collent avec une forte glu. Voye^ la Micrographie A^Hook. Ces œufs étant échauffés par la chaleur du foleil dans le mois de Juin fuivant , il en fort de petits vers jaunâtres ou rougeâtres , ronds , menus , compofés de treize anneaux , & dont la tête eil: rouge : ils n'ont que deux pattes placées fous le premier anneau. Ces petits vermiiTeaux fanguins fe nour- riffent vraifemblablement de quelques petits animaux qui fe trouvent fur la fuperficie des eaux. Goëdard les nomme poux aquatiques. Ces vermifleaux, au bout d'onze mois, fe raflemblent en grand nombre & comme en peloton : ils font de grands mouvemens dans l'eau ; enfuite il fort de leur corps un fuc gluant qui leur fert à conftruire de petites coques molles & vifqueufes qu'ils attachent aux plantes aquatiques, ÔC dans lefquelles ils fe renferment comme dans une forte d'étui. Lorfqu'iU MOU 245 ont acquis une certaine grolTeur , & que leur corps eu. devenu d'un brun verdâtre , comme les feuilles des plantes qui leur ont fervi de nourri- ture , alors la métamorphofe fe fait ; & de cet amas il fort une quan- tité prodigieufe de moucherons qui fe mettent aufîl-tôt à voler , & fe répandent de tous côtés pour fucer le fang des animaux. Cet infedefait un bruit affez aigu en voltigeant; ce bruit eftpropor- donné à la force & à l'étendue des aîles : c'efl ainfi que le bruit que fait le frelon eu plus fenfible que celui des mouches , parce que les aîles du premier ont plus de confiftance ; c'eftpar la même raifon que les aîles des fcarabées étant cruHacées , le bruit que leur mouvement excite efl encore plus fort ; tandis que celles du moucheron étant plus petites , elles ne peuvent produire dans l'air que de petits fons aigus : ennu c'eil encore par la même raifon que le mouvement des aîles des papillons eft abfolument fourd , parce que les membranes qui les forment font farineufes , & revêtues d'une efpece de duvet. Go'édard dit que l'aiguillon des moucherons mâles a plus de force que celui des femelles. Toutes les fortes de moucherons , foit panachés , foit ceux que l'on nomme fauteurs , les faux pucerons du figuier ou du buis, font desinfe£l:es fort incommodes : ils fe raffafient de notre fang jufqu'à en regorger. Ces deux dernières efpeces , dont M. ^g Réaumur a fait mention , Mémoire X , Tome III , portent leurs aîles en toit fort aigu. Les nervures de leurs aîles paroiiTent compofées de carreaux de talc , de figure irrégu- îiere & encadrés : le milieu des deux dernières jambes efl ordinairement pofé parallèlement à la longueur du corps. MOUCHET ou ÉMOUCHET. C'efl le tiercelet & le mâle de Vipervier, Voyez ce mot. MOUCIEU. Voye^à V article GaleRE. MOUETTE ou MAUVE , gavia. Nom donné à plufieurs efpeces d'oi- féaux aquatiques , qui font macropteres , c'efl-à-dire , qui ont les aîles lon- gues; leurs pieds font courts & palmés, félon quelques Ornithologifles. Plufieurs efpeces de mouettes ont à la mâchoire inférieure, comme un article ou éminence. Certaines efpeces ont les deux mâchoires droites ; quelques-unes ont la queue égale , d'autres l'ont fourchue; les unes ont trois doigts devant , & n'en ont point derrière ; d'autres en ont quatre ^ trois devant & un derrière. Les marques caraâérifliques des mouettes , font d'avoir un bec 24^ MOU fort , long 5 étroit, pointu, courbé à l'extrémité: dans les petites efpeces, il eu. plus droit. Cet oifeau eft du même genre du goiland, La mouette a les narines oblongues, les aîles longues & fortes ; les pieds petits & palmés ; les ongles ordinairement garnis d'un tuberciûe charnu; le corps menu, très-emplumé, & fou vent de couleur blan- châtre ou cendrée. En général cette famille d'oifeaux eft peu charnue, toujours volant , toujours affamée , & fe nourrit de poiflbns plats : ils volent communément en troupe , môme pour aller chercher à vivre ; il y en a de la grandeur d'un oifon, & d'autres de la grandeur d'un pi- ,^eon: ils reffemblent à l'hirondelle de mer, & c'eft fur le bord des mers qu'on en trouve beaucoup. En Irlande , on les voit voler par milliers autour des marais, des fleuves & des prairies humides. La mouette eft fort criarde lorfqu'elle fait fes petits : elle vole çà & là , & crie contre les hommes 6c les animaux qui approchent de fon nid ; d'où eft venu le proverbe /arus parturit , quand on veut parler d'un homme qui ne fait que babiller. Son nid eu contre terre dans les landes, parmi les bruyères , proche de la mer , fouvent fur les rochers dans les petites IHes : cet oifeau pond en Odobre & en Novembre. Ses œufs font excellens , gros comme ceux de la canne : le blanc de ces œufs ne fe durcit point , dit-on, dans l'eau bouillante comme celui des autres œufs: il refte toujours comme une gelée. La coque des œufs de quelques fortes de mouettes, eft toute blanche; d'autres font parfe- înés d'un grand nombre de taches. Les mouettes ont une inimitié décla- rée contre les cannes & canards. On croît que ces oifeaux font de paf- fage ; il n'eft cependant pas difficile d'en apprivoifer quelques efpeces , que l'on nourrit de tripailles ,de chair & de poiflbn. Les mouettes les plus connues font , le cataracie , efpece de goiland brun , la mauve du Havre , le gavian , la mouette à pieds fendus , la mouette blanche , celle qui eft brune , la petite mouette d'Irlande , la grande mouette noire Sc blanche , qui eft la rcligieufe , enfin la grande mouette grife , grande & petite efpeces, la mouette cendrée. La mouette rieufe^ gravia ridibun^ da, ainfi appellée de ce que fon chant imite le rire d'une femme. Il y a des gens qui, au rapport de Ray^ prétendent que la mouette grife a coutume de harceler & d'effrayer les alouettes de mer, jufqu'à ce qu'elles fientent de peur : alors elle attrape leurs excrémens avant qu'ils tombent dans l'eau , & les dévore avec avidité comme un mets délicieux I mais Jlbin croit, ^vec beaucoup plus de vr^ifemblanee, MOU 247 que cette mouette leur enlevé le poiffoîi qu'elles viennent d'attraper ; en les forçant de le dégorger. Il a vu quelque chofe de femblable dans les Indes Occidentales , 011 il y a un oifeau nommé le vaijffeau de guerre , qui dès qu'un autre oifeau a faifi fa proie , le harcelé jufqu'à l'obliger de la dégorger , & il ne manque pas de l'attraper enfuite dans l'air. M. Anderfon dit qu'il y a une grande mouette de mer qui fait adroitement tirer de l'eau un poiflbn excellent , connu en Iflande fous le nom de runmagen. Cette mouette , qui a la figure d'un corbeau , n'a pas plutôt pris fon poiffon, qu'elle l'apporte à terre, où elle mange le foie, &: laifTe le refle. Les payfans ne manquent pas de profiter de ces captures , & ils inlîruifent même leurs enfans à courir promptement fur la mouet- te, aufTi-tôt qu'elle arrive à terre, pour lui enlever fa proie. Foye}^ Strund-jager. Les Européens du Cap tuent plufieurs milliers de mouettes toutes les . années pour avoir leurs plumes , qui font fort fines , & qui valent beau- coup mieux pour les lits que celle d'oie : c'ell auffi l'ufage qu'on en fait au Cap , dit Kolbe, L'oifeau que les Riverains de la Loire appellent falcorde ou poule d'eau , n'efl qu'une efpece 4e mouette , marquée de taches blanches ôc noires : elle fe trouve communément en automne dans ces parages , où l'on dit que fa préfence efl un augure de la crue prochaine de la rivière. On a remarqué que les mouettes grifes cendrées font les jeunes , & que les blanches font les vieilles. Le jean-vengentcn , que les HoUan- dois apportent de l'Afrique , efl aufîi une forte de mouette. MOUFFETTE ou MOFETTE, Foyei cet article à la fuite du mol Exhalaisons. MOUFFETTES. M. de Buffon défigne fous ce nom générique , trois Ou quatre efpeces d'animaux , qui renferment & répandent , lorfqu'ils font inquiétés, une odeur fi forte & fi mauvaife , qu'elle fuffoque , com- me la vapeur fouterraine qu'on nomme mouffette. Ces animaux qui fe trouvent dans toute l'étendue de l'Amérique Méridionale & tempérée, ont été délignés indiflindement par les Voyageurs , fous les noms de puans^ bêtes puantes^ enfans du Diable : M. de Buffon en diftingue quatre efpeces fous les noms de coafe , conipate , chinche &C lorille; les deux dernières appartiennent aux climats les plus chauds de l'Amé- rique Méridionale, & pourroient bien, dit-il, n'être que deux variétés, & non pas deux efpece* différentes, Les deux premières font du climat 248 MOU tempéré de la Nouvelle Efpagne , de la Louifiane , des lUlnoîs & de la Caroline, &c. & lui paroiffent être deux efpeces diftindes &: diffé- rentes des deux autres , fur -tout le coafe , qui a le caradere particu- lier de ne porter que quatre ongles aux pieds de devant , tandis que que tous les autres en ont cinq ; mais au refle ces animaux ont tous à-peu- près la même figure , le même inflinâ: , la même mauvaife odeur , & ne différent, pour ainfi dire , que par les couleurs & la longueur du poil ; le coafe efl d'une couleur brune afTez uniforme , & n'a pas la queue touffue comme les autres ; le conépatc a fur un fond de poil noir cinq bandes blan- ches , qui s'étendent longitudinalement de la tête à la queue ; le chinche efl blanc fur le dos & noir fur les flancs, avec la tête toute noire , à l'ex- ception d'une bande blanche, qui s'étend depuis le chignon jufqu'aii chanfrein du nez ; fa queue efl très-touffue & fournie de très-longs poils blancs, mêlés d'un peu de noir. Le gorille connu fur les bords de VOrc' noquc^ fous le nom de mapurha, paroît être d'une efpece plus petite; il a néanmoins la queue tout aufîi belle & aufîi fournie que le chinche^ dont il diffère par la difpofition des taches de fa robe ; elle eft d'un fond noir, fur lequel s'étendent longitudinalement des bandes blanches de- puis la tête jufqu'au milieu du dos , & d'autres efpeces de bandes blan- ches tranfverfalement fur les reins. La croupe & l'origine de la queue qui efl noire jufqu'au miheu de fa longueur, efl blanche depuis le milieu jufqu'à l'extrémité , au lieu que celle du chinche efl par-tout de la même couleur. Tous ces animaux font à-peu-près de la même figure & de la même grandeur que le putois d'Europe; ils lui reffemblent encore par les habitudes naturelles , & les réfultats phyfiques de leur organifation font aufTi les mêmes. Le putois efl de tous les animaux de ce Continent celui qui répand la plus mauvaife odeur , elle efl feulement plus exaltée dans les mouffettes, dont les efpeces ou variétés font nombreufes en Amérique , au lieu que le putois efl le feul de la lienne dans l'ancien Continent. MOUFLON. Efpece d'animal qui fe trouve en Rufîîe , dans la Sibérie Méridionale, dans la Grèce, les Ifles de Sardaigne,de Corfe,&qui paroît être la fouche primitive de toutes nos brebis , l'animal fortant des mains de la Nature ; auffi à l'extérieur paroît-il d'abord différer beau- coup de nos brebis. M. de Buffon^ qui a fait des recherches fur cet objet, nous dit que le mouflon exifle dans l'état de nature : il fubfifle ôc fe multiplie fans le MOU M9 îe iecours de l'homme; il reffemble, plus qu'aucun autre animal fau- vage, à toutes les brebis domefliques: il efl plus vif, plus fort & plus léger qu'aucun d'entr'eux: il a la tête, le front, les yeux &; toute la face du bélier : il lui reflembie aufîi par la forme des cornes , & par l'habitude entière du corps, enfin il produit avec la brebis domeftique ; ce qui feul fuffiroit pour démontrer qu'il efl de la même efpece , & qu'il en eit la fouche ( ^ ). La feule difconvenance qu'il y ait entre le mouflon & nos brebis , c'efl qu'il efl couvert de poil & non de laine; mais les obfervations apprennent qu'on ne doit point regarder la laine dans les brebis domefliques, comme un caraftere efTentiel. La laine n'efl qu'une production occafionnée par le climat tempéré; car ces mêmes brebis tranfportées dans les pays chauds, y perdent leur laine , s'y couvrent de poils, & tranfportées dans des pays très-froids, leur laine y devient aufîi grofTiere & aufTi rude que du poil ; dès-lors il n'efl pas étonnant que la brebis originaire , la brebis primitive & fauvage , qui a dû fouf- frir le froid & le chaud , vivre & fe multiplier fans abri dans les bois , ne foit pas couverte d'une laine qu'elle auroit bientôt perdue dans les brouffailles , d'une laine que l'expofition à l'air & l'intempérie des fai- fons auroient en peu de temps altérée & changée de nature ; d'ailleurs, continue M. de Buffon , lorfqu'on fait accoupler le bouc avec la brebis domeflique , le produit efl une efpece de moujlon ; car c'efl un agneau couvert de poil : ce n'efl point un mulet infécond , c'efl un métis qui remonte à l'efpece originaire , & qui paroît indiquer que nos chèvres & nos brebis domefliques ont quelque chofe de commun dans leur origine ; & comme nous avons reconnu par expérience , que le bouc produit aifément avec la brebis , mais que le beher ne produit pas avec la chèvre , il n'efl pas douteux que dans ces animaux , toujours confi- dérés dans leur état de dégénération & de domeflicité , la chèvre ne foit l'efpece dominante , & la brebis l'efpece fubordonnée , puifque le boiic agit avec puifTance fur la^ brebis , & que le bélier efl impuiflant à produire avec la chèvre : ainfi notre brebis domeflique efl une efpece bien plus dégénérée que celle de la chèvre , & il y a tout lieu de croire que fi l'on donnoit à la chèvre le mouflon au lieu du beher domeflique, ' I ■ . L ■ I ' ■ ■ " il ' -< {a) M. Haller dit que le mouflon retrouvé en abondance en Corfe ne paroît avoir an mouton que les cornes ; il a , dit-il , l'agilité , le port & les morves du chamois, PiQ, d'Hift. Nat. de Bomare , commenté à Yverdon, Tom& ly^ ' ' li 250 M t) U elle prodiiîroît des chevfeanx qui remonteroient à l'efpece de la chèvre, comme les agneaux produits par le bouc & la brebis , remontent à l'ef- pece du bélier. On voit de ces moiiflsns ou montons fauvages dans les montagnes de la Sibérie méridionale ; on les nomme argali dans ces pays ; les plus gros approchent de la taille d'un daim , leurs cornes naiflent au-deffus & tout près des yeux , droit devant les oreilles; elles fe courbent d'abord en arrière , & enfuite en avant ; l'extrémité efl tournée un peu en haut & en dehors ; depuis leur naiffance jufqu'à-peu-près de la moitié , elles forment des rides. C'eft dans ces cornes que réfide toute la force de l'animal. Les habitans des montagnes difent que ces animaux fe battent fouvent les uns contre les autres , en fe heurtant cornes contre cornes. On peut juger de la force de ces quadrupèdes , & par conféquent des înoyens de fe défendre que leur a donnés la Nature , lorfqu'on réfléchit quelle force ces animaux doivent employer , puifque dans leurs com- bats ils fe brifent leurs cornes ( Le mouflon qui fe voit dans la ménagerie de Chantilly, a cafTé net un des barreaux de fer de fa grille , en voulant donner un coup de tête à un homme qui l'agaçoit : ce barreau étoit carré, & large de dix-huit lignes fur toutes les faces ). Les cornes font en effet à leur origine de la groffeur du poignet , & on prétend qu'il y a de ces armes qui, mefurées dans toute leur étendue, ont plus d'une aune de longueur. Il efl aifé de juger par cette comparaifon combien l'efpece des animaux domefliques , en paiTant par la main de l'homme , & en chao- geant de climat , a été modifiée , altérée , changée. Tout concourt à prouver d'une manière évidente la modification oc- cafionnée par les climats , & combien le même animal paroît différent de ceux qui font les fouches primitives. On voit en Iflande une race de brebis à plufieurs cornes, à queue courte , à laine dure & épaiffe , au- deffous de laquelle , comme dans prefque tous les pays du Nord , fe trouve une féconde fourrure d'un laine plus fine , plus douce , plus touffue. Dans les pays chauds au contraire , on ne voit ordinairement que des brebis à queue longue & à courtes cornes, dont les unes font couvertes de laine , les autres de poils , & d'autres encore de poils mêlés de laine. La première de ces brebis des pays chauds efl celle que Fonappelle comvt\\.\ném.enX mouton de Barbarie , mouton d\4rabk, laquelle reffemble entièrement à notre brebis domeflique ; à l'exception de la queue , qui efl fi fort chargée de graiffe , que fouvent elle efl large de MOU 1^1 plus d'un pied & pefe jufqu'à vingt livres. Dans cette race de brebis à grofle queue , il s'en trouve qui ont la queue fi longue & fi pefante , qu'on leur donne une petite brouette pour la foutenir en marchant. Cette même brebis dans le Levant eft couverte d'une très-belle laine , de à Madagafcar & aux Indes elle eu couverte de poils. Dans ces moutons de Barbarie toute la graiffe , qui ordinairement dans les moutons fe porte aux reins , defcend dans leur queue ; c'eft au climat , à la nourriture & aux foins de l'homme qu'on doit rapporter cette variété ; car ces brebis font domeftiques comme les nôtres, & exigent même plus de foin 6c de ménagement. Le mouflon ou mouton fauvage que l'on trouve en grand nombre dans la Sibérie -méridionale , paroît plus fort , plus vigoureux que les autres qu'on trouve auffi dans la Grèce , dans les îles de Chypre , de Sardaigne & de Corfe. Cet animal a donc pu , dit M. de Buffon, peu- pler également le Nord Se le Midi ; & fa poftérité devenue domeftique, après avoir long-temps fubi les maux de cet état , aura dégénéré & pris , fuivant les différens traitemens & les climats divers , des caraderes relatifs , de nouvelles habitudes de corps , qui s'étant enfuite perpétuées par les générations , ont formé notre brebis domeftique, & toutes les autres races de brebis qu'on voit fur le Continent. Foye^ les articles Bélier & Agneau. MOULARD ou MOLÉE, eft la terre cimolée des Ouvriers r celle qui eft naturelle eft une forte de fmcclis ou argile à foulons ; mais celle qui efl: d'un grand ufage chez les Teinturiers , les Corroyeurs & les Peauffiers , fe trouve dans le fond des auges des Couteliers ou Rémou- leurs : elle eft produite par le frottement du fer fur le grès lorfqu'ils aiguifent leurs uflenfiles fur la roue. Cette efpece de moulard eft aufîi d'ufage en Médecine : on l'eftime aftringent. MOULE ou MOUCLE, 7/zyr///a5/e« mufculus. Nom donné à un genre de coquillages bivalves de mer , de rivière & d'étang. On en diflingue plufieurs efpecesde mer, qui font très-connues des Curieux. En général les moules font oblongues , en les confidérant de la tête au bord oppofé ; îes deux valves font conftamment égales, leur forme eft convexe, quel- quefois large vers le bas , & fîniflant en pointe aux fommets. Il y en a de remarquables par leur belle nacre intérieure, & les perles qu'on y trouve quelquefois. On les diftingue en trois fous-genres : i°. en moules proprement dites ^ dont les valves ferment exa^ement, & dont un des îi 2 1^1 MOU côtés eft prefqiie droit , tandis que l'autre & l'extrémité inférieure font arrondis. Il y a la moule des papous , dont la couleur efl violette & rofe , déforme très-bombée, bofliie par les fommets, d'où naiffent deux avances arrondies en portion de cercle ; la moule du Détroit de Magel- lan, fmguliere par fa couleur aurore , nacrée d'un bel orient, ondée de taches violettes , offrant aux yeux tant en dehors qu'en dedans , quand elle eft dépouillée de fa pellicule, toutes les couleurs de l'arc- en-ciel. Les Indiens joignent & affujettiffent enfemble les deux valves de cette coquille par une bordure d'écaillé , & forment ainfi une taba- tière à goulot , laquelle reffemble affez à nos poires à poudre. La moule de Rio de la Plata dont la robe efl violette-noire jouant l'opale ; la moule appellée la gueule defouris , par rapport à fa forme pointue & à fa couleur grife , tachetée de violet , & dont les bords font de couleur de rofe; la moule d'' Alger, qui eft couleur d'agate, avec une nacre vi- neufe ; la grande moule bleue des parages du Languedoc ; le cahu des côtes de Normandie, i^. Les moules cylindriques, dont les valves font fort longues, à-peu-près également larges des deux bouts, &: qui fe joignent très-exaftement : telles font Iqs dattes de mer, impropremerit z^^tWéts pholades bivalves, leur coque n'eft pas fort épaiffe. L'efpece connue fous le nom de moule arborifée , eft même très-mince , nacrée en dedans , un peu applatie vers l'un des bouts, fa robe efl partie fauve , & partie chargée d'un defîin en réfeau très-fin & plus coloré. 3°. Les moules triangulaires , nommées particulièrement /jz/z/ztj^ marines , àonlla forme efl applatie, à-peu-près triangulaire ifocele , & dont les valves ne ferment point exaftement. M. Adanfon fait un genre particulier de cette dernière moule fous le nom de jambonneau , voyez ce mot. A l'égard des tellines , c'efl un genre qui compofe la fixieme famille des coquilles bival- - res : voyez Telline. Décrivons maintenant la moule de mer, vulgairement appellée callleu ou cayeu. C'efl un ver teflacée, connu de tout le monde , oblong , plus ou moins gros , d'une figure informe ou approchante de celle d'un petit mufcle, d'où lui efl peut-être venu fon nom latin, mufculus. L'animal efl tendre , blanchâtre , une peu frangé fur fes bords, nageant dans une eau falée , délicat & fort bon à manger , renfermé dans une coquille à deux battans, afTez minces , convexes , & d'un bleu noirâtre en dehors, concaves & d'un bleu blanchâtre en dedans , ordinairement liiî'es des deux côtés , quelquefois chargés de vers à tuyaux ou de glands mariûs. MOU 253 Dn apperçoit à travers les valves de petites veines ou lignes bleues. La coquille efl large , tranchante à fa bafe , arrondie & finiffant en pointe au fommet , oii eft placé le ligament qui unit enfemble les deux pièces , d'une affez ample capacité , 6c de figure rhomboïde. M. Van-Hcydc^ Médecin , a fait une exaûe anatomie des moules : il a obfervé qu'elles ont une langue , de la graifle , des inteftins , un foie , des cornes comme les limaces. H y a dans toutes ces parties un mouvement de vibration , que M. Van-Htydc appelle mouvement radieux. Ajoutons que l'herma- phrodifme de la moule efl tel que ce ver teftacée fe multiplie indépen- damment d'un autre animal de fon efpece , & efl lui feul le père & la mère de ce qui vient de lui. Cet animal étonnant , ainfi que toutes les moules , fe ferme par la contraclion de deux gros mufcles fibreux , qui font intérieurement attachés à chaque bout de coquilles , & ces co- quilles font bordées tout autour d'une membrane ou épiderme qui s'ap- pliquent fi exa£lement l'une contre l'autre quand elles font mouillées que la moindre goutte d'eau ne pourroit fortir de la moule. Les moules refpirent l'eau comme les poifTons : fi elles font couvertes de peu d'eau , on voit un petit mouvement circulaire au-delTus du talon de la coquille ; quelques momens après , elles rejettent l'eau d'un feul coup par l'autre bout de la coquille. M. de Réaumur , dans un Mémoire fur le mouvement progrejjïfde diverfes efpeces de coquillages , nous apprend que les moules de mer , quoique communément attachées aux pierres , ou les unes aux autres par diffé- rensfîlamens , ne laifTentpas cependant d'avoir la faculté de fe mouvoir. Pour le prouver, il rapporte que dans le temps oii il ne fait pas affez chaud pour tirer du fel des marais falans , les Pêcheurs jettent quelque- fois dans ces marais des moules qu'ils ont prifes au bord de la mer; ils prétendent par-là rendre leur chair plus délicate , en les faifant vivre dans une eau qui devient tous les jours moins falée, parce qu'elle reçoit celle de la pluie. Les pêcheurs jettent les moules féparées les unes des autres & à diverfes diflances ; mais lorfqu'ils vont les pêcher enfiiite ^ ils les trouvent affemblés en gros paquets. Pour fe rapprocher ainfi, il a donc fallu que les moules fe meuvent ; mais il refle à favoir quelle partie elles emploient à cet ufage. Pour s'en inflruire , il ne faut qu'ouvrir la coquille d'une moule par le côté oppofé de fa charnière ; rien ne paroît alors plus diflinâement qu'une certaine partie noire , brunâtre & lon- guette, placée dans le *nilieu de la moule. On fe fera une image affez ÎÇ4 MOU reflemblante de la figure de cette partie , en concevant celle de la langue d'un animal. C'eft cette partie qu'on peut appeller hjami>e ou plutô[ le iras de la moule , puifqu'elle fe traîne par fon moyen plutôt qu'elle ne marche. Quand la moule fe prépare à changer de place, elle con'imence par entr'ouvrir fa coquille ; enfuite on voit paroître fur fes bords le bout de la jambe , qu'elle alonge quelquefois jufqu'à un pouce de diftance ; il paroît que l'animal s'en fert alors pour reconnoîrre le ter- rain. Enfuite il replie l'extrémité de cette partie , qui efl charnue & très- flexible , fur quelques corps pour le faifir & s'y cramponner en quelque façon ; de forte qu'en fe contractant, fa coquille eft obligée d'avancer vers ce corps. Cette manœuvre n'imite pas mal celle d'un homme , qui, étant couché fur le ventre , voudroit s'approcher de quelque endroit en fe fervant feulement de fon bras &: de fa main pour faifir un point d'appui. Les moules ne profitent pas fouvent de la faculté qu'elles ont de fe mouvoir ; car elles font toutes ordinairement attachées les unes aux autres , ou à d'autres corps par différens fils ; & ce n'efl que lorfque ces fils font rompus qu'elles ont recours à leurs bras. On lit dans les Mémoires de V Académie , que M. Poupart avoit déjà obfervé que les moules de rivière , étant couchées fur le plat de leurs coquilles , font fortir à leur volonté un bras, dont elles fe fervent pour creufer le fable fous elles , & par conféquent baifTer doucement d'un côté ; de forte qu'elles fe trouvent à la fin fur le tranchant de leur CO'- quille. Après cela elles avancent ce même bras le plus qu'il efl poffible , & s'appuient enfuite fur fon extrémité pour attirer leur coquille à elles, & fe traîner ainfidans une efpece de rainure qu'elles tracent elles-mêmes dans le fable , & qui foutient la coquille des deux côtés. Dans la moule de mer , c'eft de la racine du bras dont nous avons parlé ( lequel , dans les plus grofTes moules , a environ fix lignes de longueur & deux & demie de largeur) , que partent un grand nombre de fils , qui étant fixés fur les corps voifins , tiennent la moule affujettie. Chacun de ces fils eft gros à-peu-près comme un cheveu , & long d'un à deux pouces. Ils font attachés par leur extrémité fur des pierres , fur des fragmens de coquille , & le plus fouvent fur les coquilles des autres moules ; delà vient que l'on trouve ordinairement de gros paquets de ces coquillages. Ces fils font autant éloignés les uns des autres , que leur longueur & leur nombre le peuvent permettre : il y en a en tout fens coUés fur les différens corps qui entourent la moule. M, d& Réaumur O U îjj àffure en avoir quelquefois compté plus de cent cinquante employés à en fixer une feule : ces fils font comme autant de petits cables , qui tirant chacun de leur côté , tiennent pour ainfi dire la moule à l'ancre. Ces fils font ceux que les Cuifiniers ont foin d'arracher des moules de mer avant que de les faire cuire. Mais de quelle adrefie les moules fe fervent-elles pour s'attacher avec ces fils? Comment peuvent-elles les coller par leur extrémité, qui eft beaucoup plus groffe que le refle ? Nous avons dit que la moule fait fortir de fa coquille entr'ouverte un efpece de bras qu'elle alonge par degrés, & raccourcit enfuite ; c'eft par ces alongemens & raccour- ciiTemens réitérés qu'elle peut donner à ce bras jufqu'à deux pouces de longueur , & qu'elle parvient enfin à s'attacher par des fils en difFérens endroits plus ou moins éloignés. On voit par-là que la même partie eil deflinée à des fondions fort différentes , puifqu'elle fert à la moule tantôt de bras ou de jambes pour marcher , & tantôt de filière pour filer. C'efl dans l'Ouvrage de M. de Réaumiir qu'il faut voir tous ces dé- tails , entr'autres la defcription de la fente ou canal par où pafTe la li- queur qui forme les fils, & dans lequel elle fe fige enfuite & prend de la confiflance ; c'efl ce qui a fait dire à cet ingénieux Naturalifle , que le procédé des vers à foie , des chenilles & des araignées pour filer , reffemble à celui des Tireurs d'or ; mais que le procédé des moules au contraire , reffemble à celui des Ouvriers qui jettent les métaux en moule. On trouve dans le Tome II. de l'Académie de la Rochelle , un Mé- moire de M. Mercier du Paty , Tréforier de France , fur les bouchots à moules^ efpeces de parcs formés par des pieux avec des perches entre- lacées , qui font une forte de clayonnage folide , capable de réfifler aux efforts , & auquel les moules s'attachent par gros paquets pour y dépofer leur frai , s'y engraiffer , y croître & devenir plus faines & meilleures. Cet Académicien tâche de prouver par des raifons & àes expériences qui méritent d'être lues , que le mouvement progrefîîf ac- cordé à la moule par MM. Poupan , Fan-Hcyde^ de Réaumur 6z qneU ques autres Auteurs célèbres, n'a aucune réalité. M. Mercier prétend que la moule ne file point le byflus qui l'attache aux corps voifms , puifqu'il naît & croît avec elle comme une partie qui lui efl effentielle, « Les moules , dit notre Auteur, font fédentaires ; nées pour un repos » éternel , le même lieu les voit naître & mourir. EUes portent en 1^6 MOU, » naiiTant des chaînes qu'elles porteront toujours , & celles de leurs » volfins ferviront encore pour les rendre plus fortes & plus indiflblu- » blés. Mais ces chaînes n'ont rien de trifte pour elles ; leur falut dé- » pend de leur captivité même , leur byffus les attache conftamment » aux pierres , aux bois , ou les unes aux autres ; elles bravent ainfi les » efforts des vents & des flots. Malheur aux moules que quelqu'acci- » dent détache ; celles qui tombent dans la boue , referont dans l'en- » droit de leur chiite & y trouveront leur perte ». D'après cet expofé , il eft conftant que fi le peuple moule , avec la Hberté de forger & de rompre lui-même fes liens , avoit encore celle de voyager , il fonde- roit de nouvelles colonies quand il fe trouveroit trop gêné ou dépourvu de nourriture. Ceft au public éclairé k juger ce différend. Nous n'avons pu jufqu'ici trouver Toccafion favorable de répéter les expériences de M. du Paty y qui dit encore que le drap marin qui enveloppe les co- quillages , fert à l'accroiffement de leurs coquilles , de la même manière que le bois fe forme de l'endurcilTement de l'écorce , ôc les os de celui du périoile. Il ne faut qu'environ un an pour peupler un bouchot , pourvu qu'on y laiiTe un dixième de la famille & même un peu plus, comme cinq à fix mille , pour peu qu'un parc ait été dégarni. Cette récolte fe fait de- puis le mois de Juillet jufqu'en Odobre ; le temps du frai & le com- mencement des chaleurs en font feulement exceptés. La moule de mer fe trouve abondamment & par bancs le long de nos côtes maritimes. Ce petit ver teflacée a des ennemis ; car outre qu'on s'en fert beaucoup en qualité d'appât pour prendre du poifTon , M. de Réaumur a obfervé qu'il y a un petit coquillage de l'efpece de ceux qu'on nomme en latin trochiis ( fabot , efpece de limaçon à bouche appla- tie ) , qui en faitfa proie. 11 s'attache pour cela à la coquille d'une moule,' la perce d'un trou très-rond , de la largeur d'une ligne , & y fait pafTer ime efpece de trompe longue de cinq à fix hgnes , qu'il tourne en fpi^ raie & avec laquelle il fuce la moule. M. de Réaumur, qui a obfervé que les moules vides étoient toujours au moins percées d'un trou , eft perfuadé que ces coquillages ne contribuent pas peu à détruire les mou- lieres. On rapporte qu'en quelques lieux du Bréfil, on voit des moules fi grofles , qu'étant féparées de leur coquille , elles pefent quelquefois jufqu'à huit onces chacune ; & que les coquilles de ces groffes moules font d'une grande beauté. Il y a des pinnes marines qui font des efpeces de MOU 157 cîe moules triangulaires , & qui les furpafTent beaucoup en poids & en grandeur. Foje^ PiNNE MARINE. Lijîer dit que chez quelques habitans de Lancaftre en Angleterre , le principal ufage des moules eft pour fumer les terres voifmes de la mer, d'où on les tire par charretée. M. Linntus dit que le territoire de la Province de Heliingie en Suéde efl en grande partie compofé des mêmes coquillages : il ajoute que les Flamands mangent des moules ,' aufîi bien que les Anglois ( il auroit pu y joindre les François ) , mais que les Suédois n'en mangent point. Les moules de mer font les plus eflimées : elles font en effet d'un bien meilleur goût , & plus faines que celles de rivière ou d'étang. On doit choifir les moules tendres , délicates & bien nourries. Leur chair lâche le ventre , fournit peu de bonne nourriture , & ne convient qu'à ceux qui ont un bon eflomac , encore faut-il en ufer modérément ; car elles fe digèrent difficilement, &; produifent des humeurs vifqueufes: elles paflent même pour exciter la fièvre , & pour caufer des obflruûions dans le bas-ventre. Le Dofteur Mcchring, dans le VII Volume, des Ephcm, d^ Allemagne , année lyy^^pagt ii6 , rapporte plufieurs obfervations qui prouvent que les moules font fujettes à devenir venimeufes par des maladies qui leur arrivent & qui les rendent très-dangereufes dans l'ufage. Ces maladies de la moule font la mouffe 6^ la gale : les racines de la moufle s'introduifent dans la coquille , l'eau pénètre par ces ou^ vertures ScladifTout peu-à-peu. La gale efl une efpece de tubercules qui naiffent de la diflolution de la coquille. Certains petits crabes qui fe logent quelquefois dans les moules , peuvent auifi contribuer à les rendre mal-faines. Quelques perfonnes ayant mangé de ces moules, ont été attaquées d'anxiétés , de convulfions accompagnées d'éruptions cuta- nées : les remèdes en pareil cas font les vomitifs & les antidotes. On prétend que les écailles des moules étant calcinées & pulvérifées , font un excellent diurétique : je les croirois plutôt abforbantes. Les Maré- chaux emploient contre les taies & les onglets qui naiffent fur les yeux des chevaux , cette poudre en guife de collyre fec , qu'ils foufîlent dans leurs yeux. Moule de rivière ou d'étang. C'efl un teflacée fort différent de celui de mer: on en difîingue deux efpeces; la première efl celle dont la charnière fe trouve garnie de fort groffes dents ; la féconde efl celle dont la charnière paroît lifTe , tant les dents en font petites. La moule Tonii IV. Kk 258 MOU d'eau douce eft clu même genre des tellines. M. Merry y a découvert le même hermaphrodifme que dans la moule de mer ; mais il dit auffi que !a coquille de la moule de rivière s'entr'ouvre par le moyen d'unpuiflant reffort , & fe ferme par la contraftion de deux forts mufcles. Cet animal nage dans l'eau , & paroît quelquefois voltiger fur fa furface , dit M. Poupart: il rampe plus communément dans la vafe , fur laquelle il refte prefque toujours en repos. Les parties de la génération de cet animal, font deux ovaires & deux véficules féminales ; chaque ovaire & chaque véficule a fon canal propre. C'ell: par ces quatre canaux que les œufs & la femence de la moule fe rendent dans l'anus, où ces deux J)rincipes s'uniiïent enfemble en fortant ; ce qui fuffit pour la génération. Au refte, il eft à remarquer que les ovaires de la moule ne fe vident de leurs œufs qu'au printems , & ne s'en rempliffent qu'en automne ; de-là vient qu'on les trouve toujours vides en été , & pleins d'œufs en hiver. Dans cet animal , l'air entre par l'anus dans les poumons, Poye{^ les Mémoires de l^ Académie des Sciences^ année lyio^ p. ^oS, Pour la manière de filer & de marcher de cet animal , voyei l*anné& tyoG ^ page €0 de la même Académie. Schelammer dit , dans les Ephémérides des Curieux de la Nature , Die, il , année 168 y ^ qu'en Allemagne les moules font fort abondantes dans les fleuves , & reffemblent à celles de la mer , par la grofleur & par la figure , mais qu'elles ne font pas fi bonnes à manger. La moule d'étang eft toujours plus grande que celle de rivière ; mais c'eft néanmoins le même ordre d'animal. Son mouvement la porte à faire des tramées dans le fable & dans le limon , & à s'y enfoncer de deux ou trois pieds; au befoin , elle fait fortir une grande plaque ou langue , & ouvre fes deux battans de même que la moule de rivière. On remarque que les moules d'étang font plus folitaires que celles de rivière. Plufieurs des moules fluviatiles donnent d'affez belles perles ; telles font les moules d'Ecofte , de Bavière , de la Valogne en Lorraine & de Saint-Savinien. MOULES FOSSILES ou MUSCULITES , mytulites. Ce font àt% moules devenues foftiles, fouvent pétrifiées, quelquefois minéralifées; communérnent on n'a que le noyau formé dans la coquille. MOUFHETTE ou POUSSE. Voye^ au mot Exhalaisons souter- raines , 6* laJLTi du, mot Pyrites» MOU ij^ MOURINGOU. royei à fanlcU Ben. MOURON. Nom qu'on donne en Normandie à ïa Salamandre, yoyei^ ce mot. MOURON , anagaUls. Petite plante fort connue , & dont on diftin- gue plufieiu-s efpeces : nous ne parlerons ici que du mouron mâle , du mouron femelle & du mouron d'eau. Le Mouron mâle ou a fleurs rouges , anagallis mas phœnîceo fiore , a une racine fimple & fîbrée , fes tiges font tendres & couchées fur terre : fes feuilles font petites , arrondies , oppofées le long des tiges , deux à deux , quelquefois trois à trois , aflez femblables à celles cle lamorgeline. Ses fleurs font à rofette à cinq quartiers & rougeâtres ; il leur fiiccede de petits fruits fphériques , membraneux , qui s'ouvrent tranfverfalement par la maturité en deux parties, remplis de petites graines anguleufes & brunâtres. Le Mouron femelle ou a fleurs bleues, anagallïs fœmina ce- ruko fiore , ne diffère du précédent , que par fa fleur bleuâtre , ÔC qui efl: quelquefois blanche. L'un & l'autre mouron croifl^ent dans les champs , dans les jardins ôd les vignobles ; toute la plante a une faveur d'herbe un peu auflere : elle eft céphalique , vulnéraire & fudorifique ; fon fuc convient dans la pefte , & pour le crachement purulent : fa décoftion mondifîe le$ ulcères , & efl: bonne , dit-on , contre la morfure des chiens enragés. Cette vertu anti-hydrophobique vient d'être recorinue par plulieurs Membres de la Société Economique de Berne. M. Huiler obferve que c'efl une opinion qui a repris faveur de nos jours , même en Bavière & en Franconie. Le mouron n'a cependant , dit-il , aucune qualité exté- rieure , qui annonce une vertu aufli unique , que l'eft celle de vaincre le poifbn du chien enragé. MOURON D'EAU ou MOURON AQUATIQUE, anagallis aqua^ tlcajlvcfamolus. Plante qui croît aux lieux aquatiques & marécageux. Sa racine efl fibrée , blanche & vivace : elle pouflTe des tiges hautes d'un pied, grêles , rondes , dures , revêtues de petites feuilles : il part de la racine d'autres feuilles vertes , pâles & dentelées en leurs bords. Les fleurs font blanches , formées en godet découpé en rofette ; illeurfuc- cede des capfules ovales qui renferment dans une feule loge plufleurs fe- mences menues & roufsâtres. Cette plante fleurit en Juin , 6c fes graines font mûres en Septembre^ Kk z '^6o 1V1 O U on peut manger (es feuilles en falade : en Médecine elle eft eftimée an- ti-fcorbutiqiie , vulnéraire & apéritlve , mais elle eft peu d'ufage. MOURON DES PETITS OISEAUX, l^oyei Morgeline. . MOUS ou MOUX ou mollusques , anîmalia molUa aut mollufca. î^om que l'on donne à des animaux de mer, qui étant écorchés , n'offrent à la vue qu'une chair molle , quoiqu'ils contiennent en dedans une ma- tière qui leur tient lieu de fang : tels font les polypes , la fecke , le calmar^ le concombre marin , V ortie de mer , la velute , la plume de mer , la chc' nille ou la taupe de mer , le raijin de mer , ItS poumons marins , le lièvre marin , V anémone de mer , I3. pomme folle de mer. Voyez ces mots. Des Naturalises ne regardent les mollufques , que comme des efpeces de vers marins , qu'on appelle improprement imparfaits , fe fondant fur ce qu'ils font , dit-on , deftitués de têtes , d'oreilles , de nez , d'yeux, de pieds & de poumons ; mais l'expérience eft contraire ; s'ils n'ont pas toutes ces parties à la fois , ils ont au moins des équivalens. Parmi les mollufques les plus étranges , difent-ils , il y en a de nuds avec des bras , & qui vont & viennent dans l'Océan ; il y a des mollufques qui portent leurmaifon , ce font les ourfins ; enfin ils comprennent parmi ce genre d'animaux , la beUmnite , le litophyte , le tczthya , la néréide ou l'animal du Tubipore , la médufe , la mentula ou priape de mer , Vholoturie , & une grande quantité d'autres animaux marins & zoophytes qu'on ne connoît pas encore bien. En effet la nature les a tellement multipliés & variés , &il y a une fi grande différence entre les efpeces mêmes , que les meil- leurs Obfervateurs font fouvent embarrailés à quel genre ils doivent rapporter tel & tel animal. -. MOUSQUITE. Voyei Mosquilles. MOUSSACHE. f^oyei à l'article ManihOT. MOUSSE , mufcus. Ce genre de plante eft fort étendu , & même fl nombreux que dans les environs de Paris M. Vaillant en comptoit juf- qu'à cent trente-fept efpeces ; mais l'on n'a pas encore bien décidé ce qui efl efpece & variété dans la plupart des moufles. Ces plantes , dit M. Adanfon , approchent beaucoup de la famille des pins , fur-touî par la forme & la difpofition de leurs feuilles , & par les cônes des fleurs femelles de la plupart. Les moufTes font ordinairement ramafîees en ga- zon ou en touffes , & rampent fouvent en s*étendant comme un tapis fur la terre , fur les pierres ou fur le bois ; les rochers les plus durs & les plus unis font couverts d'une efpece de moufle qu'on ne peut déraciner MOU i5i fans détacher quelques parcelles du rocher. La deflruûîon de ce végé- tal forme bientôt une couche de terre fine qui contient les embryons propres à produire une nouvelle moufle plus abondante , & par fuc- ceflion de temps le rocher fe couvre peu-à-peu d'une plus grande quan- tité de terre où des herbes peuvent croître , plus des plantes plus éle- vées , enfuite des broflailles , des arbrifleaux, & enfin des arbres. On connoît des moufTes qui ont moins de quatre lignes de hauteur d'au- tres ont jufqu'à cinq à fix pieds. Toutes petites que foient ces plantes la plupart font vivaces , toujours vertes , & repoufTent autant à leur extrémité fiipérieure qu'elles perdent par la pourriture à l'extrémité in- férieure. Elles végètent lentement , & leur frudification ne s'accomplit guère que dans l'efpace de quatre à fix mois. Les moufl'es , quoiaue defTéchées depuis plufieurs années , ont la propriété de reverdir de nouveau lorfqu'on les humede. Aufîi aiment-elles les lieux frais, hu- mides & à l'abri du foleii. Leurs racines font menues , fibreufes , ra- meufes , mais courtes & ramafTées. Les feuilles font alternes, ou oppo- fées , ou verticillées , plus ou moins entières , la plupart triangulaires un peu concaves , affez ferrées , communément imbriquées & fe tou- chant les unes aux autres. Les fleurs mâles font féparées des fleurs femelles , & quelquefois fur des pieds diiférens : ce ne font que des étamines & des capfules , ou des cônes formés de feuilles rapprochées, & fouvent ouvertes en étoiles. Les fleurs femelles font toujours au- deffous des fleurs mâles , lorfqu'elles font fur le même pied. La pouf- fiere fécondante & les graines confiflent en globules fphériques & jaunes dans les unes , & ovoïdes dans les autres. Les graines des moufles ont été découvertes en 17 19 & 1741 par Dillm. M. Linnœus les a aufîi obfervées [a). ^1 — — — - -_ . — . . ■ — - ... . - . - ^ {à) Ces fleurs mâles & femelles font encore bien incertaines , dit M. Haller , 6c dlfférens Auteurs les ont entendues bien différemment. Prefque toutes les moujjes ont des capfules ou nues ou couvertes d'une gaine conique , remplie d'une poufîlere. Cette capfule a prefque toujours un couvercle plus ou moins plat , & quelquefois aigu comme une aiguille. Le contour de ce couvercle produit un ou plufieurs rangs de filets élaftiques , qui fe redreflent peu-à-peu , & font fauter le couvercle. La capfule répand alors une poufTiere , le plus fouvent contenue dans la cavité funple de la capfule ; mais il y a des mouffes dont la capfule a un fac membraneux , concentrique à la capfule & rempli de poulTiere ; & d'autres dont la capfule a un axe membraneux qui en partage la longueur. C'efl-là ce que Linneus appelle anthères ; & cerrainemenr. i6t MOU En général les moufTes font fans faveur : celles qui croîffent dans l'eau , étant mifes au feu , rougiiTent & fe réduifent en cendres , fans prendre ni communiquer aucune flamme (excepté la poudre des éta- mines du lycopodlum). La plupart des moufles font purgatives , vermi- fijges & fudorifîques. Aux Indes , on regarde l'efpece du lycopodlum , appellée tana-poud dans VHort. Malabar, vol. i2, T. /4, comme un excellent aphrodifiaque , & cette plante efl: célébrée dans toutes les fêtes oii l'amour préfide. Les habitans du Nord font de bons couffins & des fommiers avec la grande efpece de mouflTe , cip\)e\\ée Jphagnon par DïlUn , T. j 2. /! / , 2 , & ils emploient la mouiïefontinalis du même Auteur dans leurs foyers pour empêcher les incendies , fondés fur ce que cette plante ne prend ni ne communique la flamme. Toutes les mouffes bien féchées font d'un ufage merveilleux pour conferver féche- ment les corps fufceptibles d'humidité , & pour entretenir long-temps de jeunes plantes dans leur humidité fans les expofer à la pourriture , lorfqu'on veut les tranfporter fort loin. On fe fert de la moufle commune pour embaucher les oifeaux morts, &c. Maintenant nous nous contenterons de parler des mouffes qui mé- dit M. Haller , il y a bien de l'analogie entre les anthères & les capfules du lycopodlum. Mais Michdi a vu dans la même pouffiere des particules de différentes figures , dont il a pris une partie pour du fperme mâle , & une autre pour des graines. Ce qui s'éloigne le plus de l'opinion de M. Linneus , ce que d'habiles gens afiiirent avoir vu cette pouiîiere végéter & rendre de petites plantes de la même efpece ; ce qui prou- veroit qu'elle appartient plutôt à la clafle des graines. Pour les organes femelles de M. Linneus , c'eft une poufTiere plus ou moins fine contenue dans des rofes , que des tiges fans capfule portent prefque toujours à leur fommité, & quelquefois fur une tige. M. Haller iWt être bien certain que dans l'un & l'autre cas cette prétendue poufllere efl un amas de véritables feuilles ; c'eft un bou- ton comme celui des arbres. M. du Necher , Botanifte de l'Elefteur Palatin , vient de donner un Ouvrage fur les Mouffes ; cet écrit n'admet pas les parties de la fructification dans ces fortes de plantes : il n'admet qu'une feule clafle ou famille de moufles , qu'il divife enfuite en trois ordres, dont les caractères font établis fur la germination. Toutes les moufl!es , dit-il , font pérennelles , vivipares , & leur germination n'efl pas toujours la même : dans les imes , elle eft feuilletée , mufci frondefcentes ; dans d'autres, elle efl à plumes, mufci plumafcentes ; & dans quelques unes enfin , elle eft à fimple bourgeon , mufci gemmafcentes. Cet Ouvrage qui fouffrira peut-être beaucoup de contradiCiions , mérite cependant d'être lu par les Curieux en Botanique, MOU iffj tîtent le plus d'être connues , foit par leur ufage , foit par leur fingu- larité. La Mousse TERRESTRE ordinaire, mufcus urreftrls vulgatior ^ ell la plus commune de toutes les moufles, tout le monde la connoît : c'efl ime plante rampante une efpece de lichen qui couvre les terres maigres, ilériles , humides , & qui fe trouve dans les bois , dans les forêts , & fur les pierres dans les déferts. Ses feuilles font longues, menues comme des cheveux bien fins, molles , vertes, & quelquefois jaunâtres, atta- chées comme la barbe d'une plume fur une côte. Cette forte de moufle eft aflringente , propre pour arrêter les hé- morrhagies, étant appliquée defllis ; c'efl: un fecret, dit J. Bauhin, que les Empiriques ont appris des ours , qui étant blefl"és, arrêtent lefang de leurs plaies en fe roulant defl"us. Les Conflrud^eurs de navires font ulage de cette moufle pour calfater leurs vaiffeaux. On l'emploie aufli à tenir frais les jeunes plants que l'on tranfporte fort loin. Le même J. Bauhïn afliire qu'on peut détruire cette plante qui infefte les jardins & les prés humides dont elle étouffe l'herbe, en répandant defllis, au mois de Mars, de la cendre qui aura fervi à pafl'er la leflive. Les arracher à la herfe , fur-tout celles qui étouff'ent & font périr les foins , paroîtroit un procédé plus certain & moins difpendieux. La Mousse rampante a massue ou mousse des bois , appelîée PIED ou PATTE DE LOUP, lycopodïum ^ croît dans les forêts iablon- neufes du Nord, dans les lieux les plus écartés & les plus inacceflibles, entre les pierres &: les rochers maritimes , même dans certains bois aux environs de Paris &: en Suifl'e : elle poufl'e une tige fort longue qui rampe fur terre au loin & au large , s'y enracinant d'efpace en efpace par de longues fibres. Ses branches ou fléaux qui fe fubdlvifent conli- dérablement , font garnis d'un grand nombre de petites feuilles très- étroites , rudes & toujours vertes ; de ces fléaux ils s'élève des pédicules grêles , arrondis , repréfentant chacun vers fa fommité une double maffue molle , jaune & qui étant mûre répand fes étamines quand on la touche , c'efl une poufîiere femblable à de la fleur de foufre , & qui efl très-facile à s'enflammer : c'efl ce que l'on appelle foufre végétal ^ fulphur vcgetablk. Elle pouffe fes chatons en Juin , & c'efl dans les mois de Juillet, d'Août & de Septembre qu'on y peut recueillir cette efpece de poudre fubtile , jaune qui ne fe fond pas à l'eau même bouillante , mais qui étant jetée fur la flamme d'une bougie, prend feu tovU d'un coup. 164 MOU brûle comme une réfine pulvérifée , détonne & fulmine comme la poudre à canon : on s'en fert en Mofcovie & en Perfe dans la compofi- tion des feux d'artifice. On l'introduit aufTi dans les torches qui contien- nent de l'efprit de vin , & qui étant enflammées font un fi bel effet au fpeftacle de l'Opéra. Les doigts empreints de cette forte de poudre , &C plongés enfuite dans un vafe rempli d'eau , n'en font point mouillés. On y fubflitue fouvent la poufîlere fécondante du pin, dans les expé- riences phyfiques. La décodion de cette plante efl très-diurétique , & eu un bon topique contre la goutte chaude ; mife en poudre & délayée dans du vin rouge , elle arrête la diarrhée, la dy ffenterie, afiermit les dents & guérit le fcorbut. La fubflance pulvérulente dont nous venons de parler , efl eflmiée bonne contre l'épilepfie & les coliques venteufes des enfans. Les Po- lonois & les Suédois s'en fervent communément contre une maladie endémique des cheveux appellée/j/ic^ , aufrirappelloient-ils/j/zc^r/^. La poudre de pied de loup eil: ufitée en Allemagne, comme l'efl: ici la poudre de régliffe pour durcir les bols ; mais fon grand ufage , dit M. Huiler, c'efl d'adoucir les écorchures de la peau des enfans, les bleffures même au fein des nourrices. La Mousse d'arbre ou Usnée commune, mufcus arboreus , efl une efpece de lichen dont les feuilles font découpées menu comme des poils , blanchâtres, molles ; elle naît dans les crevafTes & fur les écorces raboteufes de plufieurs arbres , comme fur le chêne , fur le peuplier, fur l'orme , fur le bouleau , le pommier, le poirier , le pin , le fapin, le picea, le cèdre & fur le larix ou mélèze. La plus eflimée elt celle que l'on ramaffe fur le cèdre : elle efl fort aflringente ; prife en dé- codion , elle arrête le vomifTement , le cours de ventre & les hémor- rhagies : les Parfumeurs font avec cette moufle pulvérifée , le corps de leur poudre de Chypre. La mouffe qui croît fur le chêne efl, félon M, Bourgeois , un fort bon remède pour la coqueluche épidemique des enfans : on la donne en poudre depuis vingt jufqu'à trente grains , fuivant l'âge des enfans. Cette plante, faujfc parajite , nuit fmguliérement aux arbres. Voye^ ce que nous en avons dit au mot Arbre , T. l. pag. 240. La Mousse membraneuse ou Nostoch des Allemands ou Mousse fugitive , nojloch , efl encore une efpece de lichen fmgulier ou de mouffe membraneufe , un peu onftueufe , comme une efpece de gelée flottante ou tremblante au toucher , & prefque toujours entortillée. MOU î<^5 entortillée , de couleur verte pâle , un peu tranfparente , fans faveur , qui croît & s'étend beaucoup le long des chemins & dans les prés. Ce corps ne fe fond pas entre les doigts : tenace par nature , on a quelque peine à le déchirer , comme fi c'étoit une feuille , & néanmoins on n'y voit ni fibres ni nervures. On en trouve par-tout aux environs de Paris fur la terre fablonneufe ; lorfqu'elle s'étend , elle refîemble un peu à la mouffe à feuille de laitue : elle ne paroît qu'entre l'équinoxe du printems & celui de l'automne. M. Magnol àkqiiQ cette plante naît immédiatement après une grande pluie fur les bords herbus des champs , principalement de ceux qui font oppofés au foleil levant , mais qu'elle fe feche bien vîte au vent; alors elle fe plifTe , fe chifonne , s'afTaifle , raflemble à une petite croûte , & paroît avoir difparu ou péri : voilà pourquoi on l'appelle fugitive : elle fe diffout prefqu'entiérement dans l'eau , & fe corrompt en peu de temps. Ce qu'il y a de plus remarquable dans cette pro- dudion, eft fon origine qui paroît inflantanée , & en comparaifon de laquelle la naiffance des champignons eu très-tardive. Lorfqu'on fe promené en été dans un jardin où il n'y avoit pas le moindre vefllge de ce fmgulier végétal , s'il vient à pleuvoir, 6c qu'une heure après on retourne au même endroit du jardin, il y en aura une quantité prodi- gieufe. Les Alchimiil:es , à qui nous devons la connoiiTance du nojîoch , en racontent des chofes merveilleufes , le décorent de noms céîefles , &: le regardent comme le principe radical de toute la nature végétale : leurs écrits font à ce fujet remplis de fables & d'obfcurités. Le noftoch efl le cœli-foHum de Paracdfc , kfos terres &C le fos cœli de plufieurs Auteurs. Des Botanîftes Vzp^ellent ufnée plante , ufnea plantarum. M. Magnol, Profeffeur à Montpellier , a été le premier qui l'ait rangée parmi les plantes : M. Tourncfon en a fait de même. Mais M. de Réaumur efl celui qui a découvert fa véritable nature : .ce Narurahfte dit que quand le nojîoch a été féché de manière à perdre fa couleur & même à échapper à la vue , une nouvelle pluie le reproduit de nouveau & le rend vifible. Ainfi ce petit végétal fe transforme fucceflivement , toujours difpofé néanmoins à jouer le même rôle. M. Geoffroy le jeune , dans les Mé- moires de V Académie des Sciences^ ann. iyo8 , prétend avoir fait con- noître, plus évidemment que perfonne, la végétation des principes qu'on Tome IK , L 1 i6G MOU retire du nojîoch Sc fes iifages. 11 afllire avoir trouvé à cette plante des racines , & on en a même donné la defcription. Cependant M. de Réau» mur a toujours foutenu qu'elle n'en avoit point. Il a remarqué dans de certains temps, fur la furface de quelques-unes de ces plantes, quantité de petites graines qu'il croit être celles de cette plante , & il les a femées dans des vafes particuliers ; les graines ont germé , mais il n'y a jamais obfervé aucunes racines. Les jeunes feuilles forment toute la plante. Or s'il eft vrai que le nojioch n'ait point de racines , il faut nécefi'aire- ment qu'il croiiTe à-peu-près comme quantité de plantes marines qui n'ont pas non plus de racines & qui attirent par la furface de leur pelli- cule rhumidi é dont elles fe nourrilTent. Aufli le nojioch ne croît-il que îorfqu'il s'eft rempli d'eau , alors il grandit un peu chaque fois , & M. ^e Rèaumur aflure que fa croiflance dure au moins une année. Peut-être que cette efpece de végétal n'eft pas encore bien connue. Rien cepen- dant de plus fmiple que ce nojioch, dit M. H aller ; il y a plufieurs lichens gélatineux qui n'en différent que par de véritables foucoupes qu'elles produifent ; au lieu que le nojioch n'a que des efpeces de grains qui , fans être des graines , en ont l'apparence , mais qui ne font que des globes pelotonnés de la plante même. M. Geoffroy a écrit d'après un Médecin Suiffe , que l'eau diftillée du nojioch , à la feule chaleur du foleil , prife intérieurement , calme les douleurs , & qu'elle guérit les ulcères les plus rebelles , même les cancers & les fiflules , fi l'on en imbibe des linges ou des flanelles , & qu'on les applique fur ces maux. Sa poudre, à la dofe de deux ou trois grains, produit les mêmes effets ; les payfans en Allemagne s'en fervent pour faire croître leurs cheveux. Foye^ les Mémoires de r Académie, iyo8. Tout le merveilleux de cette plante confifle à s'imbiber de l'hu- niidité comme l'éponge : elle exifloit avant la pluie ; la chaleur, le vent la defTechent , & elle eft toujours prête à reparoître aux nouvelles pluies qui lui fervent de nourriture. Mousse aquatique. Elle eflcompofée de fiîamens foyeux & très- fins. Loejel, dans fon Catalogue des plantes de la PrufTe , donne ce nom au lin maritime A^ Imperams , qui eft le confcrva. Voyez ce mot. MOUSSE D'ASTRACAN. Foyei Buxbaumia. MOUSSE GRECQUE, mujcavi. Plante bulbeufe , très-baffe, dont on dlflingue cinq fortes : fa voir, la jaune hâtive , la tardive , la blanche^ la vineufe , & le Ulac de terre appelle uva ramofa, La jaune tantôt hâtive MOU 2(^7 tantôt tardive , a h moitié fupérieure de fa tige garnie de petites fleurs longuettes , faites en forme de grappes & de bonne odeur , les autres ne fentent rien. Voyez Oignon mufqiié. MOUSSE MARINE ou DE ROCHER , ou BRION. Foyei au mot CORALLINE. MOUSSE PÉTRIFIÉE. On ne trouve que desmouffes empreintes fur les pierres fîfîîles, argileufes, ou fchifteufes , quelquefois elles ne font -qu'incruflées. MOUSSERON, royei au mot Cham-VICSOî^, MOUSSONS. Vents périodiques ou anniverfaires , qui foufflent fîx mois du même côté , & les autres fix mois du côté oppofé. Foyei à. VartkU Vents. MOUSTAC. Ce linge à longue queue eft le même que celui que les Voyageurs ont nommé le blanc-m?^ , parce que {ç.s lèvres au defîbus de fon nez font d'une blancheur éclatante , tandis que le refte de fa face eft d'un bleu noirâtre : il a deux troupets de poils jaunes au deflbus des oreilles , & un toupet de poil hériflé au deffus de la tête ; ce qui lui donne un air très-fingulier : il marche à quatre pieds , & n'a environ, qu'un pied de longueur. C'eft la plus jolie efpece de fmge à longue queue. MOUSTILLE , eft une efpece de belette très-fauvage , qui ne vit qu'à la campagne , & dont la peau entre dans le commerce de la pelle-, terie. Voye^ Belette. MOUSTIQUE. Efpece de mouche qui fe trouve par nuées le long des rives de la mer dans les îles Antilles : quoiqu'elle ne foit pas plus grofle qu'une petite pointe d'épingle , elle pique encore plus vivement que ne font les maringouins, & fans s'annoncer par un bourdonnement comme ceux-ci. Elle laifTe une marque purpurine fur la peau : il n'eft pas poffible dans ces contrées de s'arrêter fur le bord du rivage le foir ou le matin , fans être cruellement tourmenté de ces infeûes. Ces mouftiques fe retirent la nuit derrière des roches , &c. à l'abri du vent: on en trouve auffi à la Louifiane , & l'on peut dire que cet infede , ainfi que le maringouin, fe font tellement muhipliés en Amérique , que c'eft un des fléaux de nos îles. Voyti^ Maringouin. MOUTARDE, //2^/;i. Plante dont on connoît plufieurs fortes ; on en diftingue deux efpeces principales par l'ufage que l'on en fait, La GRANDE Moutarde cultivée ou le Sénevé ordinaire yfinap\ Ll % i6S MOU fativnm , rapt folio , croît fréquemment fur le bord des foffés , parmi? les pierres &: dans les terres nouvellement remuées : on la cultive aufli dans les champs & les Jardins. Sa racine efl ligneufe , blanche, fîbreufe & annuelle : elle pouffe à la hauteur de quatre ou cinq pieds une tige moëlleufe, un peu velue & rameufe ; fes feuilles reffemblent affez à celles de la rave : fes fleurs font petites, jaunes & difpofées en croix; elles parolffent en Juin : lorfqu'elles font tombées , il leur fuccede des filiques affez courtes , anguleufes , remplies de femences arrondies , roufsâtres, noirâtres, & d'un goût acre & piquant. Cette graine eft fur-tout d'ufage en cuifme & en médecine , ainfi que lafaivante. La Moutarde blanche ou le Sénevé blanc , finapi apïï folio ^ Jiliqua hirfuta , fcmlm albo aut rufo , croît naturellement dans les champs parmi les blés : on la cultive auffi. Sa racine eft fimple & fîbreufe : elle pouffe une tige haute d'un pied & demi , rameufe , velue , vide ; (qs feuilles font laciniées & velues. Ses fleurs qui paroiffent en Mai & en Juin , font d'une odeur agréable , & ne différent de celles de l'efpece précédente , qu'en ce qu'elles font portées fur des pédicules plus longs: elles font fuccédées par des filiques velues , qui font terminées par une longue pointe vide , remplies de femences arrondies , blanchâtres ou roufsâtres & acres : elles font mûres en Juillet & Août. Ces plantes font de la claffe de celles qui contiennent un alkali volatil fpontané. La femence de la première efpece eft plus mordicante : elle eft fto- macale, antifcorbutique , propre pour les pâles couleurs & les affedions foporeufes : on l'emploie intérieurement & extérieuriement : on la prépare pour relever le goût des viandes en la mêlant avec du moût àdemiépaifîî, ou avec un peu de farine & de vinaigre ;& l'on en forme, par le moyen d'une meule , une efpece de pâte liquide , acre & pi- quante , qu'on fert fur les tables pour manger avec la viande rôtie ou bouillie , & qu'on emploie dans plufieurs fauces , notamment pour les mets tirés du cochon. La meilleure fe fait à Dijon & à Angers : ft l'on ne mêloit pas dans celle de Paris de la graine blanche de moutarde , elle feroit aufîi bonne. La moutarde-, préparée comme nous venons de le dire , convient aux vieillards : elle facilite la digeftion , mais elle échauffe beaucoup. Elle donne auffi une mauvalfe odeur à la bouche , fuivie de quelques rapports de l'eftomac. Si on fe contente de la flairer dans les accès des vapeurs , elle foulage auffi-tôt : elle réveille auffi les léthargiques. Sa MOU î^5 /emence efl un maflicatoire & fternutatoire des plus efficaces dans l'apo- plexie : elle eu excellente contre le fcorbut ; on en fait un grand ufage en Angleterre & en Hollande où le fcorbut eft fort fréquent & très- opiniâtre. Le feul inconvénient que j'ai remarqué, dit M. Bourgeois, d'un ufage fréquent & continué de la moutarde , c'efl qu'elle attaque un peu les nerfs des yeux , & difpofe aux fluxions & rougeurs de cet organe. On fait avec la moutarde des cataplafmes cauftiques , mais dont on affolblit l'effet à volonté. Ces cataplafmes font employés dans la goutte fciatique , & pour faire fuppurer les tumeurs fquirreufes. On fe fert aufîî de la graine de moutarde dans la préparation des peaux de faux chagrin. Malgré l'âcreté de la femence de moutarde qui eft émul- ûve, on en tire une huile par exprefîion qui polïede toutes les qualités communes des huiles grafles , qui eft par conféquent très-relâchante , très-adouciffante lorfqu'elle eft récente & tirée fans feu. Ce phénomène parut fort furprenant à Boerhaave. Confultez les EUmcns de Chimie de ce Savant. Il eft mention de la moutarde fauvage fous le nom de thlafpi. Voyez ce mot. MOUTARDIER. Efpece de grand martinet. Voyei^ à V article Hi- rondelle. MOUTON, vervex. Agneau mâle que l'on a coupé pour le faire en- graiffer plus facilement, & pour en rendre la chair plus tendre. En lifant l'article Bélier, enverra que tout dans cet animal eft devenu le domaine de la néceftiîé & de l'induftrie. Nous avons dit au mot Pago, que les quadrupèdes improprement appelles moutons du Pérou , dont on fe fert dans les pays pour voiturer , foit du minerai aux fonderies , foit d'es fardeaux d'une ville à l'autre, font des animaux d'un genre différent, Voyei^ Paco & Glama. MOUTON MARIN , aries pifcis , eft une forte de poifîbn qu'on appelle ainft, parce qu'il eft d'une couleur blanche & qu'il a des efpeces de crêtes ou cornes recourbées- comme celle du bélier. MOUTONS. Dans le Brcfil on a donné ce nom à des oifeaux d'un goût exquis de la grandeur du paon , dont le plumage eft noir & Jaune, & qui ont une fort belle huppe fur la tête. On les nomme aufti quehranta- hueJfos^Dom Pernetty dit que ces oifeaux s'abaiftent & fe foutiennent à fleur d'eau , ils en effleurent les lames & en fuivent tous les mouvemens fans paroître remuer les aîles , qu'ils tiennent toujours développées & étendues : quand ils ne fe repofent pas fur les lames , ils voltigent 110 - M O X M U F autour & très-près des navires. Ces oifeaux n'ont pas le corps plus gros qu'un fort chapon ; mais les plumes longues & ferrées dont ils font couverts, les font paroître gros. comme des coqs d'Inde : ils ont le cou affez court & un peu courbé , la tête groffe & le bec fingulier ; il paroît comme divifé en quatre ou cinq pièces : leur queue efl courte : ils ont le dos élevé , les jambes baffes, les pieds noirs &: palmés , trois doigts fur le devant & un quatrième très-court fur le derrière , les uns ôi les autre"^ armés d'ongles noirs , peu longs & émouffés. On diftingue plufieurs variétés dans ces oifeaux : il y en a dont le plumage eft blan- châtre , tacheté de roux ; d'autres ont la poitrine, le deffous des aîles, la partie inférieure du cou & toute la tête d'une grande blandieiir; mais le dos , le deffus des aîles & la partie fupérieure du cou font d'un rouge brun , moucheté par intervalles de marques d'un gris bleuâtre. Ces différences proviennent peut-être du fexe. Les aîles de ces oifeaux font fi longues , qu'elles ont plus de fept pieds d'envergure. Il n'eft pas rare de rencontrer ces oifeaux par un temps fercin ou orageux à plus de trois cents lieues éloignés de toute terre , &: l'on ignore quelles font les retraites , d'où ils viennent & où ils font leurs nids. MOX A D ES CHINOIS, arumïjia Chimnjîs, cujus moUugo moxa dicuurs Voyez à l'article Cotonnier. MOYTOU. Voyêi r article Ho COS. MOZAN. Petit fruit de la groffeur d'an pois, rouge d'abord, enfuite noir lorfqu'il eft mùr , d'un goût plus agréable que nos grofeilles. Les habitans de la montagne du Pic de Ténériffe en expriment une efpece de fuc mielleux, dont ils font ufage dans le flux de ventre, MUCKEN PULVER. ^qy^^MicHEN pulver. MU COR. Nom donné à la moifijjure. Voyez ce mot, MUE. Foyci ^ l'article Ois EAU. MUFLE , efl le bout du nez des quadrupèdes : on dit le mufle du veau , &c. MUFLE DE VEAU , antirrhinum. Le genre de Varitîrrhinum renferme plufieurs efpeces, & qui félon M.Deleu^e , ont pourcaraâere commun un calice partagé en cinq lobes plus ou moins longs , & une corolle mo- nopétale en tube terminé par deux lèvres renflées qui fe joignent ordi- nairement : à la bafe de la corolle efl: une protubérance , qui dans les efpeces nommées Unaires , s'alonge en éperon : la fleur contient deux paires inégales d'étamines ôç un piflil , auquel fuccede un fruit M U G 17, taprulalre percé de quelques trous à fa pointe dans la maturité. L'efpece appellée particulièrement mufie de veau , croît dans les champs aux lieux fablonneux, incultes & dans les vignobles. Sa racine eft ligneufe & blanche ; fes tiges font hautes d'un pied & demi , & moëlleufes : fes feuilles font femblables à celles du giroflier jaune ; (qs fleurs font en épis affez longs, de couleur de chair, repréfentant par un bout le mufle d'un veau : à cette fleur fuccede un fruit reflemblant à la tête d'un chien, ou plutôt à celle d'un cochon , & qui contient des femences menues & noires. La racine de cette plante efl: bonne pour adoucir les fluxions qui tombent fur les yeux. Quelques perfonnes en portent fur elles pour fe préferver de la contagion. Tout le monde fent ce que l'on doit penfer d'un femblable préfervatif. MUGE , mugil, efl: le nom qu'on donne à certains poiflbns écailleux^ qui , au rapport de Rondelet , fe prennent dans la mer ; on les trouve auflî dans les étangs formés par la mer , & ils remontent les rivières. Ils ne ditferent pas de figure , mais de fubflance & de goût. Les muges d'étang font plus gras , ceux de mer font de meilleur goût, parce qu'il y a toujours plus de bourbe dans les étangs que dans la mer. On fale les muges , & ils fe gardent aflTez long-temps. Le même Auteur parle de lix efpeces de muges de mer ; favoir , le cabot ou mulet , voyez ce mot ; \e fumerie chaîne , le maxon , le muge noir^ & le m.uge volant. Ray ajoute à ces efpeces le curema du Bréfil^ le parati, le mafela ^ le muge de la Jamaïque, Le muge , tant de mer que de rivière , a ordinairement la t^te grofl^e ,' le mufeau gros & court, le corps oblong, couvert d'écaillés. On trouve dans fa tête une pierre qu'on appelle //^/zo/zii/^, parce qu'elle eft en- tourée de pointes. Ce poiflbn efl: commun dans la Méditerranée; il nage d'une vîtefle fl extrême que les Pêcheurs l'attrapent diflicllement : fon cftomac étant deflfcché & mis en poudre , efl: propre pour arrêter le vo- miflement & pour fortifier l'eflomac. On regarde la pierre qui fe trouve dans fa tête comme apéritive. Les œufs de ce poiifon fervent à faire la boutarqiic ou boutarde qu'on mange en Italie &: en Languedoc avec de l'huile & du citron les jours maigres. Il s'en fait aufli beaucoup à Tunis en Barbarie, & à Martegue en Provence. Voici la manière de priparer la boutarque : on prend tous les œufs du mulet , on les met dans un plat & on les faupoudre de fel. On les couvre pendant quatre ou cinq heures l'ji M U G afin que îe fel y pénètre, après quoi on les met en prefTe entre deux planches. On les lave & on les faitfécher au foleil pendant quinze jours, ou on les fume. Le mu^e noir efl très-rare dans nos mers ; il efl couvert d'écaillés : il reffemble affez au muge ordinaire : fa couleur efl noire ; il a aufli des traits noirs depuis les ouies julqu'à la queue. Sa mâchoire inférieure eft plus avancée que la fupérieure , ce qui lui rend l'ouverture de la bouche fort grande ; il efl: garni de fept aiguillons au dos , & d'une petite na- geoire entre le dernier de ces aiguillons & la queue. Le muge de rivière qu'on nomme du côté de SlYdLshoMvgfchnot-fifch, a la chair molle & graffe : il efl long d'un pied ou environ, d'un vert ar- genté ; fes écailles font fines & remplies de points; il pefe à peine une livre. Le muge volant ou poiffon volant^ qu'on nomme faucon de mer à Agde, refTemble en tout au famé ; fa bouche efl petite , fes yeux font grands & ronds , fon dos & fa tête font larges ; il a de grandes écailles , & des aîles larges, attachées aux ouies, qui vont prefque jufqu'à la queue; les nageoires du ventre très-baffes ; fa queue finit en deux efpeces de nageoires , dont l'inférieure efl la plus longue ; fa chair efl d'affez bon 20Ût & de bon fuc. Tous les muges font de l'ordre des poifTons à nageoires épineufes , à l'exception du muge volant qui efl à nageoires molles. Voye^ Poisson VOLANT. Le muge de mer , appelle mulet , efl la première efpece de muge ; il a la iête plus large , plus grofTe & plus courte que les autres efpeces ; il a quatre ouies de chaque côté; l'ouverture de la bouche grande, fans dents ; le dos large & noirâtre ; le ventre blanc ; la toile du ventre blanche avec des traits noirs fur les côtés qui s'étendent depuis les ouies jufqu'à la queue. Il fraie en Décembre, dans \ & par confequent formoient une efpece bien diflinfte , fuivant les principes reçus. Un fait aufîi notoire & rapporté par un Philofophe très-digne de foi, prouve que l'efpece de mulet dont il eflqueftion, font des animaux fpécifiquement féconds en eux-mêmes & dans leur poflérité. Voici trois autres faits qui confirment la citation du Naturalise cité. On vit en 1703 une mule à Palerme en en Sicile, qui à l'âge de trois ans , engendra un muleton ; elle le nourrit de fon lait , dont elle eut une affez grande abondance. Voye:^ U Journal de Trévoux , Ociobre lyo^ , page 8 z , ainfi que la defcription Anatomique de cette forte d'animaux , faite par Blafius & Stenon. M. B. de B. nous a écrit qu'il a vu en 1767, une mule dans l'écurie du Roi de Naples qui allaitoit fon petit. M. Dubu'iffon , ancien Confeiller au Parlement de Paris , demeurant a£luellement à Saint-Domingue , a mandé à l'Académie des Sciences de Paris, que le 27 Novembre 1771 il a fait dreffer un procès-verbal, lequel conftate qu'il y a aux Terriers rouges de cette Ifle une mule qui a fait un muleton. L'animal qui l'a couverte eft un âne fervant d'étalon dans le pays , & la mule paroît âgée de neuf à dix ans ; cet âne efl: très-ardent , mais beaucoup plus auprès des mules que des cavalles. Columelle prétend qu'il ne faut pas foufFrir que ces animaux s'accou- plent, parce qu'après l'accouplement ils deviennent vicieux, capricieux, fantafques , malins & fujets à ruer. Les mulets font quelquefois fujets à s'épouvanter à l'afpeû des objets qui leur paroifTent extraordinaires , 6c alors il y a du danger à les mener ; aufîi fait-on beaucoup de cas Mm 2 %jG . M U L de ceux qui ne font point ombrageux : il y en a qui ne veulent obéir qu'à leur maître oii à celui qui a coutume de les gouverner. Les mulets vivent fouvent plus de trente ans ; ils font fort fains & trèsrufés, pleins de mémoire , & participent communément aux qualités des animaux de qui ils viennent , c'eft-à-dire qu'ils ont la force des chevaux & la dureté des ânes : ils femblent nés pour porter docilement & long- temps de gros fardeaux ; marchant d'un pied affuré , même au milieu des cailloux ; ils ne bronchent point. En Efpagne on ne connoît guère que les attelages de mulets , même aux carrofles. Ils fervent dans les mon- tagnes ; ils paiTent auiîi hardiment qu'adroitement fur les bords des précipices : les Marchands forains & les Meuniers s'en fervent utilement pour tranfporter leurs marchandifes dans les pays de montagnes ; on leur fait même labourer la terre & battre les blés dans les champs. En Auvergne ils tiennent lieu de boeufs ôc de chevaux, qui y font moins, communs. L'Auvergne, le Poitou & le Mirebalais nous fourniffent beaucoup de mulets ; les meilleurs font ceux qui proviennent d'un âne & d'une jument. Il faut qae l'étalon ait paHé trois ans , & qu'il n'en ait pas plus de dix : on eflime celui dont la couleur eft d'un noir fimple ou mou- chetée de rouge lirant fur le vif, & le gris argenté , le gris de fouris. doit être rejeté ; les jumens ne doivent pas avoir dix ans , & Ton doit aufîi aflbrtir leur poil à celui de l'étalon pour en tirer de beaux mulets noirs. Les ânes étalons deviennent fi furieux à la vue de la cavalle qu'on veut leur faire faillir, qu'il faut les tenir toujours mufelés de peur qu'ils- n'eftropient les Appareilleurs. C'efl ordinairement depuis la mi-Mars- jufqu'à la mi-Juin qu'on donne l'âne aux jumens , afin qu'étant à terme au bout d'onze à douze mois , & même treize, les mulets naiffent dans un temps où les herbages foient abondans , gras & bons. Les jumens couvertes par un âne ne peuvent allaiter leurs poulains que fixmois, àcaufe de la douleur qu'elles reflentent aux mamelles après ce temps- là : c'eft pourquoi il faut les fevrer à cet âge , ou leur faire teter une autre jument. Comme les mulets font plus forts que les mules , on les eftime davan- tage pour le travail & pour les longs voyages, mais pour la monture on préfère les mules. Un bon mulet doit avoir les jambes rondes & un peu grofTes ; il faut qu'il foit court de corps , ferme , gras , & qu'ils ait la croupe pendante du côté de la queue ; la mule au contraire doit M U L 277 avoir les pieds petits & les jambes feches , la croupe pleine & large , le poitrail large , le cou long & voûté , & la tête feche & petite. Oa connoît aux dents l'âge des mulets & des mules , comme dans les chevaux. Bien des gens jugent de la hauteur qu'ils auront par celle de leurs jambes, qui à l'âge de trois mois ont pris prefque toute leur croiffance , & qui pour lors font , dit-on , la moitié de la hauteur du mulet. Les mulets ne ruent que du derrière. On ne les doit faire fervir qu'à cinq ans ; d'ailleurs leur nourriture & leur gouvernement eft le même que pour les chevaux. Ils s'engraifîent par la boiiTon , & aiment , ainli que les ânes , à fe rouler pour fe délaffer. Quoique ce folt un animal aufli commun dans tous les pays chauds , qu'il efl rare dans les pays- froids, cependant il foutient alTez bien l'hiver , & même mieux que l'âne. Les parties du mulet dont on a fait ufage en Médecine , font l'ongle 5, l'urine & la fiente. L'ongle du mulet , pris intérieurement depuis douze grains jufqu'à deux fcrupules , efl propre pour arrêter les règles trop abandantes , & toutes les efpeces de flux ; on en fait aufTi des fumi- gations. L'urine avec fon fédiment , guérit les cors des pieds , & foulage la goutte : on s'en fert en fomentation. La fiente de cet animal convient pour réprimer le flux de la dylTenterie & celui des menflrues : elle efl aufli fudorifîque. Ces fortes de remèdes font profcrits ou oubliés de la Médecine moderne. MULET. On donne aufîî ce nom à un oifeau de race croifée , c'efl- à-dire provenu de l'accouplement de deux efpeces différentes, mais du même genre. Foyc^ à l'article Serin. Il y a aufîi des mulets parmi les plantes : on produit ces fortes de monflres végétaux en mettant de la poufîiere fécondante d'une efpece de plante dans le piflil ou dans l'utri- cule d'une autre. Il fuffira pour cela qu'il y ait quelque analogie dans leurs fleurs , & l'on aura une plante différente de l'une & de l'autre.- Voye^^ à V article. FLEURS. MULET ou Guêpe-Mulet. On donne ce nom à une efpece de guêpes qui ne font pas faites pour la multiplication de l'efpece , & qui fe nomment ouvrières , parce qu'elles font feules chargées du foin des- travaux dans le guêpier & à la campagne. On donne aufîi le nom de mulet aux abeilles & aux fourmis qui naiffent fans fexe. La piqûre de l'aiguillon de ces guêpes efl plus douloureufe , & le venin plus aâif ^ue celui des abeilles. Voye^^ aux mots Abeille , Guêpe & FoURMïtr MULET DE MER. Voytià VartïcU Muge,. 278 M U L MULETTE. Les Fauconniers appellent ainfi le géfier des oifeaux de proie , où tombe la mangeaille du jabot pour i'e digérer. l>^oye:i Faucon. MULLE. Foyei à l'article Garance. MULOT , mus agrejiis major. C'eft un animal plus petit que le ratôc plus gros que la fouris ; il n'habite jamais les maifons , & ne fe trouve que dans les champs & dans les bois. Il efl remarquable par les yeux qu'il a beaux & proéminens ; il diffère encore du rat 6c de la fouris par la couleur du poil qui eft blanchâtre fous le ventre, & d'un rouxbrua fur le dos. Il efl très-généralement & très-abondamment répandu, fur- tout dans les terrains élevés. Les mulots varient beaucoup pour la grandeur ; ce qui donne lieu de croire qu'ils font long-temps à croître : les grands ont quatre pouces ôc quelques lignes depuis le bout du nez jufqu'à l'origine de là queue. On trouve aufîi dans les terres un autre animal connu fous le nom de mulot a courte, queue , ou de petit rat des champs ; mais comme il eft fort différent du rat & du mulot , M. de Buffon lui donne un nom par- ticulier ; il le nomme campagnol. Voyez ce mot. On a donné en divers endroits différens noms au mulot , tels que ceux de fouris de terre , de rat-fautcrelle , parce qu'il va toujours par fauts ( le rat fauteur de mon- tagne eft peut-être le gerbuak des Arabes ; voye^ à l'article Gerboise); de rat à la grande queue , de grand rat des champs , de rat domefliquc moyen. Le mulot , dit M. de Buffon , habite dans les bois & dans les campa- gnes qui en font voifines ; il fe retire dans des trous qu'il trouve tout faits , ou qu'il fe pratique fous des buiffons ou fous des troncs d'arbres. 11 y amafTe une quantité prodigieufe de glands, de noifettes , de faines; on en trouve quelquefois jufqu'à un boiffeau dans un feul trou ; & cette provifion , au lieu d'être proportionnée à (qs befoins , ne l'efl: qu'à la capacité du lieu. Ces trous font ordinairement de plus d'un pied fous terre , & fouvent partagés en deux loges ; l'une où il habite avec fes petits , & l'autre oîi il fait fon magafm. Ces animaux font fouvent un grand dommage aux plantations. Mj de Buffon avoit femé quinze à feize boifîeaux de glands en 1740 ; les mulots déterrèrent & emportèrent tous ces glands dans leurs trous. Le meilleur moyen pour éviter ce dommage eft de tendre des pièges de dix en dix pas i il nç faut pour appât qu'une noix grillée , qu'on place M U L 2 fous une pierre platte foutenue fur une biïchette ; on en prend de cette manière une quantité prodigieufe : on détruit encore beaucoup de ces brigands en bouchant la plupart de leurs trous , & en faifant entrer dans les autres de la fumée de foufre dont l'effet eft très-adif & meur- trier. Les mulots ravagent fouvent les champs & les prés de la Hol- lande , mangent l'herbe des pâturages, & au défaut d'herbes montent fur les arbres & en rongent les feuilles & le fruit. M. Mufchembroek rapporte que le nombre de cqs animaux étoit fi grand en 1741 , qu'un payfan en tua pour fa part. cinq à fix mille. Le mulot pullule encore plus que le rat : il produit" plus d'une fois par an , & les portées font fouvent de neuf ou dix ; au lieu que celles du rat ne font que de cinq ou fix. C'efl fur-tout en automne qu'on les trouve en plus grande quantité ; il y en a beaucoup moins au printems,' car ils fe détruifent eux-mêmes , pour peu que les vivres viennent à leur manquer pendant l'hiver : les gros mangent les petits ; ils mangent auffi les campagnols , & même les grives & autres oifeaux qu'ils trou- vent pris aux lacets ; ils commencent toujours par la cervelle & fîniffent par le refle du cadavre. Nous avons mis , dit M. de Buffon , dans un même vafe douze de ces mulots vivans ; un jour qu'on oubUa d'un quart d'heure à leur donner à manger , il y en eut qui fervirent de pâture aux autres , & enfin au au bout de quelques jours il n'en refla qu'un feul, tous les autres avoient été tués & dévorés en partie , & celui qui refla le dernier avoit lui- même les pattes & la queue mutilées. Le mulot efl un animal généralement répandu dans toute l'Europe j^* oii il a pour ennemis les loups , les renards , les martes , les oifeaux de proie , & même les animaux de fon efpece. MULTIVALVES , polyvalvia. Les Naturalifles donnent ce nom à une famille de coquillages marins qui ont plufieurs pièces ordinairement inégales entre elles , ou adhérwites & jointes enfemble par des cartila- ges , ou articulées les unes avec les autres. Ces pièces excédent toujours le nombre de deux , & vont communément à trois , cinq , fix , douze y &c. ainli qu'on le remarque dans les outjins ^ les glands de mer, les poujfcpicds , les conques anatiferes & les pholades : des Auteurs y ajou- tent Vofcabrion & les tuyaux d* orgues ; mais les tuyaux Morgues font des vcrmiculaires ; il faudroit y fubflituer les tuyaux de mer muhivalyes^ iSô M U L MUR tels que le tarée. Voyez ces dlfFérens mots, Se l'article Coquille Sc Coquillage. MULU. C'eft le cerf-cheval de la Chine , qui n'eft qu'une efpece de cerf de la hauteur des petits chevaux : on l'appelle chumma dans les provinces de Séchuen & de Jun-Nau. Foyei à f article Cerf. Navaretu dit qu'il y a encore dans ces deux provinces une efpece finguliere de cerf qui ne fe trouve dans aucun autre pays ; ils ne deviennent jamais plus grands que les chiens ordinaires : les Princes & les Seigneiurs du pays en nourrifîent dans leurs parcs comme une curiofité. MUMIE. Fbyei Momie. MUNDICK ou MONDIQUE. Autrefois on ne donnoit ce nom qu'à une mine d'étain pauvre , dont les particules métalliques font tellement atténuées , minéraUfées & mélangées dans une terre ou pierre réfrac- taire , qu'elle ne mérite prefque pas la peine d'être exploitée : aujour- d'hui les Mineurs Anglois défignent par ce mot une fubftance dure & pierreufe qu'on trouve dans les mines d'étain. Ce minéral renferme du cuivre & quelquefois d'autres métaux , mais toujours minéraUfés pal* du foufre. Le mundlck , fuivant Bêcher , eu une pyrite blanche proba- blement arfenicale. MUNGO ou MESSE , ophlorrhiia foUis lance-lato-ov atls , LiNN. C*efl une plante que Kcempfer range entre les valérianes , dont cependant les Modernes la féparent. Elle efl fi commune en Guzarate , en Decan ," qu'on s'en fert pour le fourrage des chevaux. On prétend que fa racine a la vertu de préferver des fuites fâcheufes des morfures venimeufes des ferpens , des fcorpions & des chiens enragés. Sa femence eft grofle comme un grain de poivre & noirâtre. Quelquefois , dit Lemery , les hommes en mangent après l'avoir fait cuire comme du riz : cette femencft eft fébrifuge. MURENE , murcena. Artedi a donné ce nom à un genre de poifTons de la famille de ceux qui ont des nageoires molles, & qui ont dix offelets à la membrane des ouies & des narines tubuleufes, tels que l'anguille , le congre , le ferpent marin & la murène proprement dite. Nous ne parlerons ici que de cette dernière efpece d'animal, ayant parlé des autres à leur article particulier. La VÉRITABLE MURENE, murcena pînnls pecloralïhus carens y eft un poiffon de haute mer, & qu'on trouve cependant quelquefois vers le rivage : MUR iS, , rivage : il eu long de plus de trois pieds , femblable à ranguille , mais plus large ; l'ouverture de fa bouche efl grande ; fa mâchoire efl aquiline , garnie à fon extrémité de deux efpeces de verrues bien fournies de dents longues , fort aiguës , courbées au dedans de la bouche. Ses yeux font blancs & ronds , fes ouies font brunâtres , fa peau efl: liffe & tachetée de blanc. Il porte pour nageoire une pinnule fur le dos comme le congre : il nage & avance dans la mer par tortuofités , comme font les ferpens fur terre ; ce qui lui eft commun avec tous les poiflbns fort longs. Ce poiffon vit de chair : il fe tient caché pendant le froid dans les rochers; ce qui fait qu'on n'en pêche que dans certains temps. La murène eft ennemie de la poulpe ( efpece de polype de mer) : celui- ci fuit le combat autant qu'il peut ; & quand il ne peut plus l'éviter , il tâche avec fes longs bras d'envelopper la murène. Celle-ci gliffe Se s'échappe , & la poulpe devient fa vii^ime ; mais 4a langoufte venge la poulpe en détruifant à fon tour la murène. F'oyei Langouste. Roîidclct dit que les pêcheurs craignent la morfure de la murène ,' parce qu'elle eft venimeufe & dangereufe , ils ne la touchent , lorfqu'elle eft vivante , qu'avec des pinces ; ils lui coupent la tète ; & ies cendres , dit le même Naturahfte ,'guériftent fa morfure & les écrouelles. Quand la murène a mordu quelqu'un , le plus sur eft de couper la morfure. Les murènes font adroites à fe fauver ; lorfqu'elles font prifes à l'hame- çon, elles coupent la Hgne avec les dents. Quand elles fe voient prifes dans les filets , elles tâchent de pafTer au travers des mailles. On ne pêche ce poifTon que fur les bords caillouteux des rochers : on tire plufieurs de ces cailloux pour faire une foffe jufqu'à l'eau , ou bien on y jette un peu de fang , & à l'inftant on y voit venir la murène qui avance fa tète entre deux rochers. Aufîi-tôt qu'on lui préfente l'hameçon amorcé de chair de crabe ou de quelqu'autre poifTon , elle fe jette gou- lûment defTus & l'entraîne dans fon trou ; il faut alors avoir PadrefTe de la tirer tout d'un coup ; car fi on lui donnoit le temps de s'attacher par la queue , on lui arracheroit plutôt la mâchoire que de la prendre. Cela fait voir que fa force eft au bout de fa queue , ce qui vient de ce que la grande arête de ce poifTon eft renverfée de haut en bas, enforte que les arêtes , qui dans tous les autres poifTons font penchées vers la queue , font rebroufTées dans celui-ci ; elles remontent du côté de la tète. Quoique la murène foit hors de l'eau, on ne la fait pas mourii" Tom& ly^ Nn i82 MUR fans beaucoup de peîne , à moins qu'on ne lui coupe le bout de la queue ^ ou qu'on ne l'écrafe. Ceci prouve que la vie animale s'étend jufqu'au bout de la moelle épiniere de la murène. La chair de la murène eft blanche , grafle , molle , d'alTez bon goût, & à peu-près nourriflante comme celle de l'anguille ; les grandes font beaucoup meilleures que les petites. Il feroit à defirer que quelque Obfervateur habitant les parages de la mer , pût reconnoître û la mu- rêne n'eft pas un animal vivipare , & de l'ordre de l'anguille. MUREX ou ROCHER. Nom que les Conchyliologiiles donnent à un genre de coquillage univalve en volute , qui approche beaucoup de celui des buccins , mais qui en diffère à pîuiieurs égards. Le murex cft communément garni de pointes & de tubercules , avec un fommet chargé de piquans ou de clous , quelquefois élevé , & quelquefois applati : la bouche efl toujours oblongue , dentée ou édentée ; la lèvre dans quelques-vins étendue en aile , dans d'autres garnie de doigts ou pattes , rephée & déchiquetée ; le fût ridé , quelquefois uni. Telles font Igs coquilles délignées fous les noms de I^ois veiné ^ la înujique, \e plein chant ^ \q foudre , le rocher triangulaire ou dragon^ le turban, le cafque^ X araignée ou \?i gri^c du diable, le fcorpion , V oreille de cochon^ la tour-' ierelle , Vaigrette, le bé^oard. Dans la comparaifon de ces coquillages, on trouve à plulieurs d'entr'eux des caraderes fpécifîques & eifentiels •dans la figure de leur robe. On en a des exemples dans le rocher qui ;ii'a point de pointes & qui a des ailes , l'araignée qui a des pointes 9 ainfi que des doigts ou crochets remarquables ; le rocher cannelé , quî eft fans pointes , ni aîles , ni boutons , avec la tète plate , mais dont la bouche eft dentelée & oblongue. f'oye^ ces differens mots. On a donné le nom de murex à ce genre de coquillage , parce qu'ii a la figure d'un rocher hériffé. Le murex , dit M. d^Argenville , de l'Ouvrage duquel nous avons extrait une partie de ce qui précède , eft pris chez plufieurs Naturaliftes pour le nom générique de plufieurs coquillages qui fournifîent la teinture de pourpre ; d'où il fuit , fui- vant le même Auteur , que la pourpre & le buccin n'en font que des cfpeces. M. Adanfon met le murex dans le rang des coquillages operculés , & du genre des pourpres. Comme les efpeces qu'il a obfervées fur les côtes du Sénégal , ont des noms particuliers , & que le travail de cet Académicien mérite d'être lu , nous y renvoyons nos Lç^eiurs» MUR î8î Ce coquillage tenoit lieu de cochenille aux Anciens. Flr^iU dans fon Enéide , L. IF, dit : Tyrioque ardebat murîce îana , parce que le fuc de ce ver teftacée fervoit chez les Anciens à teifidre leur robe de pourpre , & que ceux de Tyr y excelloient. Cette même liqueur couleur de pourpre fervoit aufîi aux Empereurs Romain^ d'encre pour figner ou foufcrire leurs Edits : on l'appelloit/^rrw/Tz tncau" tum , & nul autre que l'Empereur ne pouvoit ufer de cette encre fans commettre un crime de leze-Majefté. On prétend que le hafard feul fît connoître aux Tyriens l'ufage de cette magnifique teinture ; un chien ayant dévoré un ou plufieurs de ces animaux à coquilles fur le bord de la mer , en eut tout le tour de la gueule coloré du rouge le plus vif & le plus beau , ce qui fit naître l'envie de s'en fervir à ceux qui l'obferverent. Le murex eft appelle pijfeiir en Amérique, à caufe qu'il jette promp- tement fa liqueur qui eft la véritable pourpre : cochUa vcram purpuram fundens. Cette liqueur, dit le Père Plumier^ eft confervée dans un grand repli qu'il a fur le dos près du cou en façon de gibecière; il faut être bien adroit pour recueillir ce fuc , car il le jette très-rapidemnnt dehors. Chacun de ces animaux en contient environ plein la moitié de la co- quille d'une petite noix. Ce fuc étant tiré de l'animal efl d'abord blanc, enfuite d'un beau vert , puis d'un magnifique rouge purpurin. Le linge teint de ce fuc conferve toujours fa couleur. Il n'eft pas étonnant , pour- fuit le P. Plumier, que la pourpre des Anciens fut fi précieufe , en cgard au grand nombre de ces petits animaux qu'il falloit pour four- nir à teindre feulement un manteau. On a parlé dans le Journal deTrévoux {Octobre lyi^) d'un petit limaçon des Indes occidentales, qu'on trouve au Sud de Guatimala , oii l'Amérique Septentrionale confine avec VIfthme de Darien. Ce petit animal , dit Lcmtry , paroît être le murex des Anciens : il eft de la grofl*eur d'une abeille. Sa coquille efi mince & peu dure ; on le ramafle à mefure qu'on en trouve , & on le conferve dans un pot plein d'eau ; mais comme il eil rare d'en trouver beaucoup à la fois , les Indiens font long-temps à en ramaffer la quantité nécefifaire pour teindre un morceau d'étoffe d'une certaine grandeur : enfin on les écrafe avec une pierre bien polie, & l'on mouille auffi-tôt le fil de coton ou l'étoffe dans la liqueur rouge s Nn X 2S4 MUR il s'y fait une teinture de pourpre la plus riche qui fe puiffe voir. Ce qu'il y a d'avantageux, eil que plus on lave l'étoffe qui en eft teinte , plus fa couleur en devient belle & éclatante : elle ne s'altère point par la vieilleffe : cette teinture eft d'un haut prix ; les femmes Indiennes les plus riches s'en parent, f^oyei maintenant VartïcU Pour PRE. MURICITE. Coquille foflile & univalve de la famille des rochm ou murex. MURIE, muria^ nom que l'on donne aux eaux, aux terres & aux pierres qui contiennent beaucoup de fel marin ou de fel gemme. MURIER , morus , eft un arbre dont on diftingue deux efpeces prin- cipales : favoir , le mûrier blanc & le mûrier noir. Cette dillindion au refte n'eft fondée , ni fur la couleur de la feuille ou de l'écorce , ni même fur celle du fruit. On appelle mûriers noirs ceux qui produifent de gros fruits bons à manger , & qui font toujours d'un rouge fi foncé , qu'ils paroiflent noirs : ceux là fe rcduifent à deux ou trois variétés. Tous les autres mûriers font rangés dans la clafle des mûriers blancs , foit que le fruit foit gros ou petit, noir, blanc ou rouge. Entre ceux-ci il y en a qui ont les feuilles blanchâtres , d'autres d'un vert foncé ; les uns pro- duifent de très-grandes feuilles entières , d'autres de très-petites pro- fondément échancrées. Le fruit de tous ces mûriers eft ordinairement fade & mucilagineux. La culture du mûrier blanc , arbre qui tire fon origine de l'Afie , doit nous intéreffer d'une manière particulière , parce que i^s feuilles fer- vent de nourriture au ver à foie , infeûe précieux qui nous fournit les plus belles étoffes. On n'a commencé à cultiver des mûriers en France que fous le règne de Charles IX. L'expérience a appris que cet arbre n'efl: pas tellement particulier aux pays chauds , tels que l'Efpagne , l'Italie, la Provence , le Languedoc & le Piémont, qu'il ne puiffe au/îi réulfir fort bien dans d'autres Provinces affez froides , telles que la Touraine , le Poitou , le Maine , l'Anjou, l'Angoumois près de la Ro- chefoucault ,&même en Allemagne , où ces arbres fourniffent aux vers à foie une très-bonne nourriture. Il y a des mûriers qui ne portent que des fleurs mâles , & d'autres qui portent des fleurs femelles , ou quelquefois des fleurs mâles & des fleurs femelles fur le même arbre. Les fleurs mâles font attachées fur un filet en forme d'épi ; elles n'ont point de pétales, mais quatre étamines. Les fleurs femelles n'ont point de pétales , mais un pifl:il formé d'un MUR agj embryon ovale , qui devient une baie fucculente. Les baies ou grains font rafTemblés fur un poinçon commun , & forment une efpece de tête plus ou moins alongée , qu'on nomme mûre. Les feuilles des mûriers font pofées alternativement fur les branches ; mais il y en a de figures très-différentes fuivant les efpeces. Les unes font entières, dentelées feulement fur les bords ; d'autres font découpées très-profondément. Parmi les mûriers fauvages , il y en a un dont les feuilles font rondeletes , afTez conformes à celles du rofier : aufîi l'ap- pelle-t-on mûrier à feuilles de rofe. Le climat , le fol , la culture , & d'autres caufes accidentelles , produifent beaucoup de variétés de mû- riers. Les mûriers viennent dans toutes fortes de terrains ; ils croifTent plus vigoureufement dans les terres fortes & humides ; mais on prétend qu'ils donnent des feuilles qui forment une nourriture trop grofîiere , peu favorable à la fanté des vers, & préjudiciable à la bonne qualité de la foie. Une bonne terre légère efl la meilleure. On a vu de ces mûriers blancs croître dans des terrains fablonneux , oii la bruyère croifToit à peine ; mais on dit que leurs feuilles font trop feches, & ne donnent point afTez de nourriture aux vers à foie. On peut multiplier les mûriers de rejetons enracinés ou par la fe- mence , par les marcottes & par les boutures. Si l'on veut élever des mûriers noirs , onchoifit les plus greffes & les plus belles mûres pour en tirer la graine; fi ce font des mûriers blancs qu'on veut multiplier, on tire la graine des plus belles mûres qui fe trouvent fur les mûriers dont les feuilles font grandes , blanchâtres , douces , tendres , & les moins découpées qu'il efl pofîible. La meilleure graine fe tire ordinai- rement du Piémont, du Languedoc , &c. J'incline en général, dit M. Duhamel, à donner la préférence à la graine qu'on recueille dans les pays où il fait quelquefois afTez froid ; il m'a paru que les arbres qui en proviennent en étoient plus capables de réfifler à nos gelées. Il arrive fouvent dans les hivers rigoureux , dit M. Bourgeois , que la gelée détruit la tige des jeunes mûriers , fur- tout le premier hiver ; mais il ne faut pas s'en inquiéter ; on n'a qu'à les couper à rafe terre , & ils repoufTent des tiges aufîi belles & auffi vigoureufes que les premières. Les cara£^eres d'une bonne graine font d'être grofTe , pefante , blonde , de répandre beaucoup d'huile lorfqu'on l'éçrafe , ôc de pétiller lorfqu'on la jette fur une pelle rouge, iS6 MUR On (eme cette graine dans une bonne terre. Dans l'automne de la féconde année , on arrache du femis tous les arbres qui ont de petites feuilles d'un vert très-foncé , qui font rudes ou profondément déchi- quetées ; ces efpeces d arbres ne produiroient point de bonnes feuilles pour les vers à foie. A la troifieme année , lorfque le plant eft de la groffeur du doigt , on Farrache pour le mettre en pépinière. Selon M. Bourgeois , on doit déjà tranfplanter les mûriers au printems de la fé- conde année ; ils réuffiiîent beaucoup mieux , & ils prennent plutôt leur àccroiflement. Sans cette tranfplantation, les mûriers ne poufîeroient qu'une racine en pivot , & la plus grande partie des arbres périroit, quand on les arracheroit pour les mettre aux places où ils doivent tou- jours refier. Quelques Cultivateurs prétendent qu'il faut coiper à rafe terre tous ces jeunes arbres à la troifieme année , gros ou petits , droits ou tortus , pour leur faire pouffer plus de racines. D'autres ne prati- quent cette méthode que pour ceux qui font tortus ou languiiTans. On peut élever les mûriers blancs pour les vers à foie , (on en taillis ,' foit en quinconce , en leur laifTant acquérir leur grandeur naturelle. Un des plus sûrs moyens d'avoir de belles feuilles de mûriers , c'eil de les greffer. Les greffes réuffiffent en fente , en écuffon , en fifflet , fur- tout quand on greffe les mûriers d'Efpagne fur nos mûriers à petites feuilles. Les mûriers entés fur des fauvageons , qui font d'une bonne efpece , comme ceux qui viennent de la graine du mûrier d'Italie, appelle mû" rier rofe , ou du mûrier d'Efpagne^ donnent , dit M. Bourgeois , des feuilles beaucoup plus belles Si d'une meilleure qualité pour les vers à foie , que ceux qui (ont entés fur le iàuvageon comm.un ou épineux à petites feuilles. C'eft une obfervation qui a été faite par un grand nombre de Cultivateurs de mûriers , notamment par M. Thomé de Lyon , dont l'au- torité fur la culture des mûriers , & les inffrudions fur ce qui concerne la manière d'élever les vers à foie, doivent être d'un grand poids. Les mûriers greffés donnent , il eft vrai , plus de feuilles , & des feuilles plus nourriffantes pour les vers à foie , que les mûriers fauvageons; mais l'expérience apprend auffl que les mûriers fauvageons peuvent exifter pendant deux fiecles ; au lieu que l'extenfion des feuilles produite par la greffe , occafionne dans l'arbre une diffipation de fève préma- turée , qui en accélère le dépériffement. On propofe , dans un Mémoire inféré dans un Traité fur la culture des mûriers blancs , par M* Pomicr , MUR Î87 ^Ingénieur des Ponts & Chauffées, de greffer les mûriers blancs fur les mûriers noirs ; & il y a lieu de penfer que ces arbres alors fubfifteroient bien , parce qu'il eft démontré que le mûrier blanc périt ordinairement par les racines ; au lieu que le mûrier noir n'eft fujet à aucune ma^- ladie. On voit dans prefque tous les Livres d'agriculture , qu'on peut greffer les mûriers fur l'orme : je n'oferois affurer , dit M. Duhamel, que cette greffe n'aura jamais de fuccès ; cependant je l'ai tentée bien des fois inutilement, & j'ai bien des raifons de penfer qu'elle ne peut pas réuffir. On voit auffidans ces mêmes Ouvrages, que le mûrier peut fe greffer fur le figuier & fur le tilleul; mais il faut en général, pour que les greffes réufîiffent , qu'il y ait une grande analogie entre les arbres , & fur-tout que la fève fe mette en mouvement dans ces arbres dans le même temps. Plus on prend foin des mûriers , en les déchargeant des branches gourmandes , & en les labourant , plus ils donnent de belles feuilles. On fait un tort confidcrable aux mûriers , quand on les effeuille trop jeunes pour en nourrir 1er vers, parce que les feuilles font les organes de la tranfpiration des arbres , & en partie de la nutrition , par leurs pores abforbans qui s'abreuvent de l'humidité de l'air. Voye^^ Us articles Arbre & Feuille. Les mûriers ont une fi grande abondance de fève , -qu'ils peuvent repouffer jufqu'à deux ou trois fois de nouvelles feuilles. Lorfque l'hiver efl doux , les mûriers pouffent leurs feuilles de très- bonne heure ; mais il eff toujours dangereux de faire éclorre trop tôt les vers , en fe fondant fur cette efpérance , parce que l'on ne doit compter que fur les feuilles du commencement de Mai , les autres étant fujettes à périr par les petites gelées. En Tofcane , & fur-tout aux environs de Florence, ainfi que l'a -obfervé M. l'Abbé A^o//^/, leshabitans, avec moitié moins de mûriers que n'en cultivent les Piémontois, ont trouvé le moyen, toute proportion gardée , d'élever & de nourrir le double de la quantité de vers à foie. Ils obfervent pour cela de ne faire éclore que dans deux temps différens. Les premiers vers étant éclos, fe nourriffent de la première dépouille ^es mûriers , & lorfqu'ils ont produit leiu" foie , on fait éclore d'autre* vers , qu'on nourrit de la féconde récolte des mêmes arbres. M. Bourgeois ù^w qu'on cultive aujourd'hui près de Bienne en Suiffe Jplufiêurs efpeces de mûriers blancs, Selon cet Obfervateur, parmi les 288 MUR mûriers blancs fauvageons^le Mûrier épineux eft lemoins eftlmé. II produit des branches hérifTées d'épines &: de feuilles très-petites & peu abondantes: il eft très-difficile & difpendieux à cueillir. Le Mûrier SAUVAGEON ORDINAIRE & commun , produit des feuilles dentelées, oblongues &: très-minces; mais il mérite quelque confidération, parce ■qu'il réufîit très-bien en haie comme la charmille , & dans une expofi- tion favorable ; il eft plus printanier que les autres efpeces. Le Mûrier SAUVAGEON qui provient de graine de mûrier rofc ou ^Italie enté , pro- duit beaucoup de feuilles un peu arrondies , de grandeur moyenne , tirant fur le jaune clair &: d'une très-bonne qualité. Parmi les mûriers blancs entes , il y a le mûrier rofc ou à' Italie enté y qui pouffe des feuilles groffes, épaiflés, liffes &fort abondantes; c'efl l'efpece qui efl aujourd'hui la plus cultivée en France , en Italie & en Piémont. M. Thomé lui donne la préférence fur toutes les autres efpeces de mûriers pour élever les vers à foie , & l'a mis fort en vogue. Cet arbre eft cependant délicat, il a beaucoup fouftert enSuiffepar les hivers rigoureux de 1766 & 1767. Le mûrier appelle feuille Romaine pouffe de très-grandes feuilles, qui le diflinguent de toutes les autres efpeces; il n'eil: pas rare d'en trouver qui égalent la feuille de courge. Le mûrier, d'Efpagne , a beaucoup de reffemblance avec le mûrier rofc fauvageon ; fes feuilles font cependant plus grandes & plus pointues : il n'eff point délicat, & ilréfifte aux plus fortes gelées & aux hivers les plus rigou- reux des climats froids. Le mûrier ?ippûlé petite reine y a la feuille très- liffe, oblongue, d'une grandeur médiocre ; cette efpece eft très-effimée & très-bonne. M. Miller parle de mûriers de Virginie dont les feuilles font velues: ils font fort rares en Europe. On trouvera, iZKwor Ver A SOIE , Tufage & l'utilité de chacune de ces efpeces de mûriers, & les expériences qu'on a faites nouvellement en Languedoc & enSuiffe , fur la propriété de ces différentes feuilles pour la nourriture & le produit des vers à foie. L'utihté des mûriers blancs ne fe borne pas à la nourriture des vers à foie ; on peut les émonder tous les trois ou quatre ans, comme les faules (Scies peupliers, pour en faire des fagots, dont on fait manger la feuille aux moutons pendant l'hiver, avant de les brûler. Ces animaux font fort friands de cette feuille, qui les nourrit bien , & leur procure de très-belle & fine laine, On pourroit même dans tous les pays & dans la plupart des MUR î89 ^es campagnes , comme cela fe pratique en Efpagne , attendre la pre« îiîiere gelée blanche , pour fecouer les feuilles de ces arbres , qu'on ramafle pour les faire fécher fous des hangars, ayant la précaution de les remuer de temps en temps. C'efl avec cette feuille qu'on nourrit en Efpagne les moutons pendant le froid & les gelées. Par cette méthode on ne gâte point les mûriers qui fourniffent des feuilles chaque année , & on prétend que cette nourriture contribue beaucoup à la beauté & à la fineffe des laines d'Efpagne. D'après toutes ces confidérations, M. Bouf' geois conclut, que même dans les pays où on ne gagneroit pas à élever des vers à foie , foit à caufe de la nature du climat , foit à caufe de la difette Se de la cherté des ouvriers & de la main-d'œuvre , ou enfin à caufe de quelques circonftances particulières , on ne devroitpas négliger la culture des mûriers blancs. Les oifeaux font très -friands des fruits des mûriers blancs, Se on remarque que ceux qui font engraiffés avec ces fruits, font un excel- lent manger : ( en effet les merles nourris Se engraiffés avec le fruit de cet arbre , font d'une grande délicateffe Se d'un goût exquis. M. Bour- geois dit les avoir trouvés préférables à ceux qui fe nourriffent de cerifes & de raifins. Cependant le fruit du mûrier blanc a un goût douceâtre Sz très-fade ). On doit par conféquent mettre ces efpeces de mûriers dans les remifes, fila terre efl affez bonne pour que ces arbres puifTent y^ fubfifler. On cultive les mûriers à gros fruit noir, à caufe de leurs fruits qui font bons à manger. Ces fruits mangés à jeun dans leur maturité, paf- fent pour être laxatifs Se adouciffans. On fait avec ces mûres, cueillies avant leur maturité, un firop propre à calmer les inflammations de la gorge pris en gargarifme , Se pour déterger les ulcères de la bouche. Le fuc des mûres noires fert à colorer plufieurs liqueurs Se quelques con- fitures. Quelques pèrfonnes s'en fervent pour donner une couleur foncée au vin rouge, il contribue même à lui donner de la douceur. Quoique ce fuc foit inutile pour la teinture , il imprime aux doigts Se au linge une couleur rouge, qui s'enlève difficilement. Le verjus, l'ofeille, le citron Se les mûres vertes , emportent ces taches de deiTus les mains ; mais pour le linge , le plus court efl: de mouiller l'endroit taché , & de le fécher a la vapeur du foufre ; l'acide vitriolique qui s'échappe de cette fub-. ilance en combuflion , emporte tout de fuite la tache. Le bois du mûrier efl jaune , il efl affez dur Se propre à faire difFéreps _Tom& /^ Oo 190 MUR ouvrages de tour Se de gravure. On peut faire rouîr ce bois dans l'eau i pour en détacher l'écorce fîlamenteufe qui eft propre à faire des cordes. L'ëcorce des racines du mûrier noir eft un excellent vermifuge , prife en poudre à la dofe de trente grains, ou en infufion à la dofe d'une drachme. MURIER DE RENARD, ^oyei Ronce. MURIER A PAPIER, morus papjrifera , LiNN. On le cultive dans le Japon. Le P. du Hulde dit qu'on dépouille les branches de leur écorce & qu'on en fait un papier affez fort pour couvrir les parafols ordinaires , fur-tout quand il eft huilé & coloré. Les feuilles de ce mûrier fervent auffi de nourriture aux vers à foie. M. de la Rouvierc prétend avoir tiré une belle foie végétale de l'écorce des Jeunes branches de mûrier, cou- pées dans le temps qu'elles font en fève, enfuite battues & rouies. Les femmes de la Louifiane cholfiffent , pour cette même produftion , les jets ou pouffes qui fortent de la fouche des mûriers , & qui ont quatre ou cinq pieds de haut ; elles en ôtent l'écorce , la font fécher au foleil , puis elles la battent pour en faire tomber la partie extérieure ; l'inté- rieure , qui eft l'écorce fine, refte toute entière. Elles battent derechef cette dernière pour la rendre plus fine encore ; après quoi elles la met- tent blanchir à la rofée : enfuite elles la filent , en font divers ouvrages, tels que des réfeaux , des franges , fouvent même elles la treffent & en fabriquent un tiffu croifé. MURIER. Nom donné à un oifeau de Lorraine qu'on avoit regardé comme une efpece de traquct , & qui eft une efpece de gobe-mouch& à collier . Il paroît en ce pays vers la mi- Avril : il habite les forêts , no- tamment celles de haute - futaie : il niche dans le creux de quelque vieil arbre. Son nid eft compofé de brins d'herbes & de moufle : fa ponte eft de ftx oeufs , dont la couleur eft d'un vert clair : le père & la mère nourriflent les petits. La picorée confifte en infedes volans. Les mûriers voltigent toujours d'arbre en arbre : ils fe fauvent à l'approche de l'homme : ils aiment la folitude , & fe retirent ordinairement dans l'endroit le plus épais de la forêt : ils quittent le pays dans le mois d'Août. MURRA. Efpece de matière femblable à la porcelaine dont on a fait des vafes fort recherchés par les Romains. Du Sault ^ tradudlion de Juvénal , fatyre VI. n°. i6. VoyeT^ à l'ankU Vases. MURTE. Fb^^^ MiRTHE, MUR MUS 191 MURTILLE. C'eft un arbre fort commun dans toute la partie Mé- ridionale de l'Amérique , jufqu'au Détroit de Magellan ; il porte pour fruit une efpece de raifm de la grolTeur d'un pois , & femblable aux grains de grenade pour la forme & la couleur. Les Naturels du pays l'appellent unni. Ils font avec ce fruit une forte de vin , qui eft une li- queur agréable & faine. MUSA. Voyei Bananier. MUSARAIGNE ou MUSET, mufaranms. Selon M. de Buffon , la mufaraigne femble faire une nuance dans l'ordre des petits animaux , & remplir l'intervalle qui fe trouve entre le rat & la taupe , qui fe ref- femblant par leur petitefle , différent beaucoup par la forme , & font en tout des efpeces très-éloignées. La mufaraigne , plus petite encore que hfouris , reffemble à la taupe par le mufeau , ayant le nez beau- coup plus alongé que les mâchoix-es ; par les yeux , qui , quoiqu'un peu plus gros que ceux de la taupe, font cachés de même , & font beaucoup plus petits que ceux de la fouris ; par le nombre des doigts , en ayant cinq à tous les pieds ; par la queue , par les jambes , fur-tout celles de derrière , qu'elle a plus courtes que celles de la fouris ; parles oreilles, & enfin par les dents. La couleur de la mufaraigne efl d'un brun mêlé de roux ; mais il y en a auffi de cendrées , de prefque noires , & toutes font plus ou moins blanchâtres fous le ventre. Elles font très-communes dans toute l'Eu- rope , mais il ne paroît pas qu'on les retrouve dans l'Amérique. Ce très-petit quadrupède a une odeur forte qui lui efl particulière , Sc qui répugne aux chats : ils chafTent & tuent la mufaraigne , mais ils ne la mangent pas comme la fouris. C'efl apparemment cette mauvaife odeur & cette répugnance des chats , qui a fondé le préjugé du venin de cet animal & de fa morfure dangereufe pour le bétail , & fur-tout pour les chevaux. Mais l'ouverture de la gueule de cet animal eu même trop petite , pour qu'il puifTe les mordre. Les enflures qui arrivent aux chevaux , ne viennent vraifemblablement que d'une caufe interne , 6c ne font certainement pas caufées par la morfure ou la piqûre de cet ani- mal , comme le vulgaire le penfe. La mufaraigne habite affez communément , fur-tout en hiver , dans les fermes où elle mange du grain , des infeftes , des chairs pourries. On la trouve auffi fréquemment dans les bois à la campagne , foitdans des trous d'arbres , foit dans des trous en terre. On dit qu'elle donne Oo z 292 MUS autant de petits que la fouris , mais moins fréquemment. Elle a îè cri beaucoup plus aigu qu'elle : elle n'eft pas aufîi agile à beaucoup près j on la prend aifément , parce qu'elle voit & court mal. MUSARAIGNE D'EAU. C'eft un petit animal amphibie qui a été obfervé pour la première fois en 1756 par M. Ddubmton ; il efl un peu plus grand que la mufaraigne , il a le mufeau plus gros , la queue & les jambes plus longues & plus garnies de poils ; la partie fupérieure de fon corps efl de couleur noirâtre , mêlée d'une teinte de brun , & la partie inférieure a des teintes de fauve ; fa queue efl de couleur grife & prefque nue , à l'exception du côté inférieur , qui eft revêtu d'un bout à l'autre de poils courts & blanchâtres ; les doigts ont aufîi fur les côtés des poils qui ne fe trouvent pas dans la mufaraigne. La mufaraigne d'eau refle cachée pendant le jour dans les fentes de- rochers , ou dans des trous fous terre le long des petits ruiffeaux. Lorf- qu'on veut la prendre , il faut la chercher à la fource des fontaines 3, vers le lever ou le coucher du foleil. Elle met bas au printems , ôc produit ordinairement neuf petits, MUSC. Voyti^ à l'article GazeLLE ; voye^ aiijjî h wo/PoRTE- M USCJ MUSCADE ou NOIX MUSCADE , nux mofchata , aut nuxmynhica aromatica , eft le fruit aromatique d'un arbre de l'Inde Orientale , qui eft grand comme un poirier. Le bois de cet arbre efl: moelleux, & fon écorce eft cendrée. Ses feuilles refTemblent à celles du pêcher ; elles font verdâtres en deffus , blanchâtres en deffous , fans queue : étant froiffées entre les mains , elles répandent une odeur pénétrante. Sa fleur eft formée en rofe , jaunâtre & fort fuave. Il lui fuccede un fruit arrondi , de la groffeur d'une petite orange , attaché à un long pédicule ^ & dont le noyau eft couvert de trois écorces. La première de ces trois écorces eft charnue, molle, pleine de fuc, épaiffe d'environ un doigt, velue & roufîe , parfemée de taches jaunes , dorées & purpurines , de même que nos abricots & nos pêches. Cette grofte écorce , qui eft d'un goût acerbe , s'ouvre d'elle-même dans le temps de la maturité. Sous ce brou ou première écorce eft une en- veloppe réticulaire ou membrane à réfeau , qui eft en quelque forte partagée en plufieurs lanières , d'une fubftance vifqueufe , huileufe , mince & comme cartilagineufe , d*une odeur très-aromatique , fort agréable, d'une faveur acre, balfamique , afl'ez gracieufe 6c de couleur rougeâtre jaunâtre : c'eft ce que l'on appelle macis en Europe , l>isl?efe ou MUS 195 lèeshahe dans î'Afabîe, &aux Moliiques, bongopala 1, Sr que quelques Commerçans nomment improprement avec le public fi&ur de mufcade, A travers les mailles de cette féconde enveloppe , on en apperçoit une îroifieme , qui efl une coque dure , mince , ligneufe , d'un brun rouf- sâtre , caffante , laquelle contient un noyau qui eft la noix mufcade. Cette noix efl ovale , de la figure d'une olive , longue de huit à dix lignes , ridée ; d'une couleur brune cendrée , dure , fragile , panachée intérieurement de nuances jaunâtres & de rouge brun ; d'une excel- lente odeur , d'une faveur acre & fuave , quoiqu'amere, & d'une fubflance très-huileufe. M. Geoffroy (^ Mat. Mèd'ic.') dit, que lorfque l'on fait une incifion dans le tronc du mufcadier , ou que l'on en coupe les branches , il en découle un fuc vifqueux, d'un rouge pâle comme le fang difîbus : ce fuc devient bientôt d'un rouge foncé , & laiffe fur la toile des marques que l'on a bien de la peine à effacer. Le mufcadier vient de lui-même dans les ifles Moîuques , & dans quelques autres de FOcéan Oriental ; mais on le cultive fur-tout dans îa Province de Banda , qui eft compofée de fix petites ifles , qui font Nira , Lontar, Pulo-way , Gunon-gapy ^ Pulorong &C RoJJîngyen. Les trois premières de ces ifles font extrêmement fertiles en noix mufcades. Il y a deux fortes de véritables noix mufcades dans les boutiques ; l'une efl de la figure d'une olive & s'appelle mufcade femelle ; c" tH celle que nous venons de décrire , & qui eft fi fort en ufage ; l'autre efl ap- pellée mdle par quelques-uns, les Hollandois la nomment maneque ^ elle efl: plus alongée & un peu moins aromatique ; aufîi efl- elle moins recherchée. Entre ces deux fortes de noix il y en a de figures irrégu-» îieres , qui font des jeux de la Nature. Il y a de plus les noix mufcades fauvages. Les Hollandois en diflinguent plufieurs efpeces , & nomment ïa principale, noix mufcade mâle des boutiques ; elle efl plus groffe que la noix mufcade ordinaire ou femelle ; elle efl oblongue, comme carrée 3 prefque fans odeur , & d'un goût défagréable ; elle efl intérieurement panachée de veines noirâtres. Les vers la rongent afî'ez facilement ; & fi onîa mêle avec les autres mufcades , on prétend qu'elle les corrompt; c'efl pourquoi il a été défendu de la mêler. A Banda on l'appelle /^^/^ï- tuhir, c'efl-à-dire , noix de montagne ; les Anciens l'appelloient acerbe; mais à peine efl-elle connue aujourd'hui,en France. Quelques fuperflitieux- 194 MUS la recherchent feulement pour en préparer des phîltres , dans Tidée d'en faire des chofes furprenantes. L'arbre qui donne ces fortes de noix mufcades, croît dans le Malabar & dans les ifles MoUiques ; il eft plus haut que le mufcadier ordinaire , mais moins branchu & moins feuillu ; fon macis efl pâle , fans fuc & d'une odeur difagréable. Cueillette & préparation des noix mufcades, Lorfque ces fruits font mûrs , les habitans montent fur les arbres & ils les cueillent en tirant à eux les rameaux avec de longs crochets. Quelques-uns les ouvrent auffi-tôt avec le couteau , & ils en ôtent le brou ou première écorce que l'on entaffe dans les forêts, où elle pourrit avec le temps. Dès que fes écorces fe pourriffent, il croît deffus une certaine efpece de champignons , que l'on appelle bolcti mofchocatyni: ils font noirâtres , & très-recherchés des habitans , qui les regardent comme un mets délicieux. Ils emportent à la maifon ces noix dépouil- lées de leur première écorce , & ils enlèvent foigneufement le macis avec un petit couteau. Ils font fécher au foleil pendant un jour ce macis , qui eft d'un beau rouge ; mais dont la couleur devient obfcure. Enfuite ils le tranfportent dans un autre endroit moins expofé aux rayons du foleil , & l'y laiffent pendant huit jours , afin qu'il s'y amolifle un peu. Puis ils l'arrofcnt de l'eau de la mer, pour l'empêcher de trop fécher , & de peur qu'il ne perde fon huile. Ils prennent garde aufîî d'y mettre trop d'eau , car il fe pourriroit & les vers l'attaqueroient. Enfin ils le renferment dans de petits facs , &: ils le preflent fortement : il ne faut pas confondre le macis avec le macer. Voyez ce dernier mot. On expofc au foleil pendant trois jours les noix qui font encore re- vêtues de leur coque hgneufe; enfuite on achevé de les bien fécher près du feu , jufqti'à ce qu'elles rendent un fon quand on les agite > &: alors pn les frappe avec de petits bâtons pour les débarraffer de leur coque qui faute en morceaux. On diftribue ces noix en trois tas, dont le pre- mier contient les plus grandes & les plus belles , qui font deftinées à être apportées en Europe ; le fécond renferme celles que l'on réferve pour l'ufage des gens du pays, & le troifieme contient les plus petites, qui font irrégulieres ou non mûres ; on brûle celles-ci , & on emploie une partie des autres pour en tirer de l'huile par exprefîion. Une livre en donne ordinairement trois onces ; cette huile eft de la confiftance ^u fuif , & a entièrement le goût de la noix mufcade ; ççtte même noix MUS 19J donne auffî par la diftillatlon , de même que le macis , une huile effen- tieJIe , tranfparente , volatile & d'une odeur exquife. Ce qu'il y a de fingulier , c'eft que les noix mufcades que l'on a choi- fies , fe corromproient bientôt , fi on ne les arrofoit , ou plutôt fi on ne les confifoit,pour ainfi dire, avec de l'eau de chaux faite de coquil- lages calcinés que l'on détrempe avec de l'eau falée à la confiftance de bouillie fluide : on y plonge deux ou trois fois les noix mufcades ren- fermées dans de petites corbeilles , jufqu'à ce qu'elles foient tout- à-fait enduites de la liqueur. Enfuite on les met en un tas , où elles s'échauffent , & toute l'humidité furabondante s'évapore. Dès qu'elles ont fué fufE- famment , elles font bien préparées & propres pour pafTer la mer. On confît aufîi dans l'Ifle de Banda le fruit entier du mufcadier de la manière fuivante. Lorfque ces fruits font prefque mûrs , mais avant qu'ils s'ouvrent, on les fait bouillir dans l'eau, & on les perce avec une aiguille : enfuite on les fait tremper dans l'eau pendant dix jours , juf- qu'à ce qu'ils aient perdu leur faveur acerbe & âpre : alors on les cuit légèrement dans un firop de fucre ; fi on veut qu'elles foient dures , on y jette un peu de chaux. On répète pendant huit jours cette même opé- ration & toujours dans un nouveau firop ; enfin on met pour la dernière fois ces fruits ainfi confits dans un firop un peu épais , & on les garde dans un pot de terre bien fermé. On confît encore ces noix dans de la faumure ou dans diï vinaigre ; & quand on en veut manger, on les macère dans de l'eau douce, enfuite on les fait cuire dans du firop de fucre , &c. Ufages & propriétés de, la, Mufcadc. On fert dans les defferts les mufcades entières confîtes; les Indiens €n mangent quelquefois en buvant du thé ; les uns n'en prennent que la chair , d'autres en mâchent aufîi le macis ; mais on a coutume de re- jeter le noyau , qui efl préclfément la noix mufcade. Bien des Voyageurs marins qui vont dans le Nord , en mâchent tous les matins. Les Hollan- dois ont obfervé que fi l'on fait un ufage immodéré de cette forte de confiture, elle attaque la tête & caufe des maladies foporeufes. On em* ploie fréquemment la noix mufcade fmple & non confite pour ailaifon- ner les alimens : on s'en fert aulfi en Médecine ; elle fortifie l'eftomac, facilite la digeflion , corrige la mauvaife haleine , appaiie le vomiffe- ment , diffipe les vents ôc guérit les coUques j elle arrête le flux de 2.^6 MUS ventre , excite les règles , provoque U femence , augmente le mouve- ment du fang , réfifte aux poifons , & eu fort utile dans les maladies froides des nerfs. Cependant il en faut ufer fobrement , car elle caufe rafroupiffement& rend lourd. On vante la fumigation de ces noix comme un remède éprouvé dans les coliques venteufes & dans certaines dou- leurs de la matrice, qui viennent quelquefois après l'accouchement. Ces noix torréfiées conviennent dans la dyffenterie. Le macis a la même vertu que la noix mufcade ; il eft moins aftrin- gent , mais l'excès n'en eft pas moins dangereux. L'huile de noix mufcade tirée foitpar exprefTion , foit par diftillation ,' efl: , ainfi que celle du macis , très-propre dans les tranchées du ventre, dans les coliques néphrétiques , Si. dans certaines maladies des nerfs : elle appaife le hoquet ; & fi l'on en frotte légèrement les tempes , elle procure le fommeil. On peut blanchir cette huile en la macérant long- temps dans l'efprit de vin : elle eft la bafe de quantité de baumes com- pofés , reconnus fouverains dans l'apoplexie &c les maladies convulfives» Ray prétend même qu'elle a la finguliere propriété de faire croître la gorge ou les mamelles , appliquée extérieurement, Obfcrvatlons fur k comnicrcc de la Mufcade , du Girofle & de la Cannelle. Par ce qui précède , on a vu que les mufcadiers croiffent dans plu- iîeurs Ifles de l'Océan Oriental. Les HoUandois dont les plus grands obftacles n'ont jamais laïïe la patience , s'en font approprié la récolte , ainfi que celle du girofle & de la cannelle qui naiffent dans les Ifles de Ternate & de Ceylan , &c. foit à titre de conquête , foit en payant aux Infulaires des penfions , qui font plus utiles à ceux-ci que l'ancien pro- duit de leurs arbres. Toujours eft-il vrai qu'ils ont engagé ou contraint les habitans des Ifles Moluques , &c. à abattre & arracher tous les giro- fliers, & ils ne les ontconfervés que dans l'Ifle d'Amboine & de Ter- nate , dont ils font comme les maîtres ( On fait effedivement que pour dédommager le Roi de Ternate de la perte du produit de {ç.s girofliers dans les autres Moluques, les HoUandois lui paient tous les ans environ dix-huit mille rixdales en tribut ou en préfent ; & qu'ils fe font en outre obligés par un traité de prendre à fept fous fix deniers la livre tout le girofle que les habitans d'Amboine apportent dans leurs magafms ). Ils font auiTi parvenus à détruire la cannelle par-tout ailleurs que dans l'Ifle de MUS i97 <îe Ceylan qu'ils pcffedent. Il en eft de même à l'égard du poivre blanc , &c. de forte que l'Europe entière &c prefque toute l'Afie paiTent par leurs mains pour cette efpece de commerce. Il n'y a donc que les iept ou huit Compagnies Hollandoifes de l'Inde Orientale qui nous apportent ces fortes d'épiceries fines. Foye^ les mots Cannelle & Girofle. Les magaiins que les Hollandois ont de ces précieux aromates , tant dans l'Inde qu'en Europe , font immenfes & d'une richeffe très-conli- dérable;ils en ont aftuellement chez eux la récolte de feize années* Ils ne didribuent point aux Nations voifmes leur dernière récolte , mais toujours la plus ancienne: en 1760 ils vendoient la provifion de 1744. On dit communément en France &: ailleurs , que quand les Hollandois ont trop de girofle , de mufcade , &c. dans leurs magafins , ils les jetent à la mer. Mais ce n'eft pas ainfi qu'ils s'en débarraffent , ils les brûlent. Le 10 Juin 1760 , j'en ai vu à Amflerdam , près de l'Amirauté , un feu dont l'aliment étoit eflimé huit millions argent de France : on devoit en briller autant le lendemain. Les pieds des Speftateurs baignoient dans l'huile efTentielle de ces fubftances ; mais il n'étoit pas permis à per- fonne d'en ramafTer , & encore moins de prendre les épices qui étoient dans le feu. Quelques années auparavant & dans le même lieu , un pauvre particulier qui dans un femblable incendie ramaffa quelques muf" cades qui avoient roulé du foyer , fut pris au corps , condamné tout de fuite à être pendu & exécuté fur le champ. Nous nous étendrons plus fur cet objet dans le Journal de nos Voyages, que nous nous pro- pofons de donner dans quelque temps. Nous ajouterons feulement que la jaloufie des Hollandois , pour fe conferver l'unique débit du girofle , n'a cependant jamais pu empêcher qu'il ne s'en fît un afTez grand di- vertifTement par quantité de leurs propres Ofîiciers en plufieiirs lieux des Indes. Une manière qu'ils ont de tromper la Compagnie, dit M. dcJaucoiirt^ efld'en vendre aux navires des autres Nations qu'ils rencontrent en mer, & de mouiller le refle , afin que le nombre des quintaux de girofle qui font leur cargaifon , s'y trouve toujours ; ce qui peut aller à dix par cent , fans que les Commis des magafms qui les reçoivent à Batavia , puifTent s'en appercevoir. Nous apprenons de M. de. Rome de Lljle qui efl arrivé il y a quelques années de l'Inde , que les Anglais tirent beaucoup de cannelle , de poivre & de girofle de l'Ifle de Sumatra : ils en font l'entrepôt au comptoir de Tome IV* Pp 298 MUS Bancoul ; ce qui déplaît fort aux Hollandois. Nous avons vu aufîl un échantillon d'alTez bonne cannelle tranfplantée à la Martinique. Enfin on a trouvé les moyens d'obtenir plufieurs milliers de plants de girofliers & de mufcadiers & de les planter à l'Iile de France où ils donnent déjà les plus grandes efpérances. MUSCARDIN. Foyeià la fuite du mot LoiR. MUSCAT. Nom donné aux raifms blancs de Frontignan, & aux raifins rouges de Toulon : on en fait d'excellent vin. On donne encore le nom de mufcat à la poire roujfeline. MUSCHEBOU T. Ei'pece de merlu moucheté de taches noires. Foye^i à L'article Mo RUE. MUSCLE , mufculus , efl: la partie charnue & fibreufe du corps de l'animal , defiinée uniquement à être l'organe ou l'inftrument du mou- vement. La flru£lure des mufcles & la caufe de leur gonflement , leur nombre & leur infertion, leurs ufages ou propriétés, tous ces effets de la Nature étonnent le Phyficien& font dignes de la réflexion duPhilofophe, & notamment de l'étude de l'Anatomifte qui s'occupe aux difl'eâions myologiques. MUSCULITES ou MYTULITES. Foyei Moules Fossiles. MUSET. ^(^>'^{ Musaraigne. MUSIMON. Quadrupède connu dans les Ifles de Corfe & de Sar- daigne , fous le nom de mujîo ou mufron : il court avec grande vîtefTe, Les Chafleurs font cas de fa chair. C'efl: le moujlon. Voyez ce mot. MUSIQUE. Nom donné à une efpece de coquillage univalve , de la famille des murex , lequel fe diflingue par des points rougeâtres , & par la netteté de fes cinq lignes , pareilles à celles d'un papier de mufique : c'efl: le coupct de M. Adanfon. MUSSOLE. Coquillage bivalve que quelques-uns regardent comme étant de la famille des moules ; mais que M. Adanfon met dans le genre du pétoncle. On l'appelle communément Jrche de Noé, MUSTELE , mufda. Rondelet donne ce nom à deux poifTons. Le premier s'appelle mufele vulgaire ; Sc le fécond fimplement mufiele, La MuSTELE VULGAIRE , mufela vulgaris^ eft un poiflbn de mer, du genre des morues , qui fe nourrit de fquilles & de petits poiflbns. Il a le corps brun , large , fans écailles ; la bouche afTez grande & les dents petites : le bout de fa mâchoire inférieure eft garni d'un barbillon blanc; celle de deffus en a deux qui font noirs ; fon corps finit en pointe , une MUT M Y R 19^ ligne droite commence aux ouies & finit à la tête : fa chair eu molle 6c friable. L'autre muftele eft prefque femblable à la précédente , les nageoires qu'elle a aux ouies , refîemblent beaucoup à des barbillons. On donne quelquefois le nom de mujîde fiuviaùU à la lote. Voyez ce mot. Schonevdd fait mention d'une muftele vivipare que les Allemands nomment aelguappe : c'efl Vcelpout, Voyez ce mot. MUTHUSUSA. Foyei à r article BisON. MYLkBKE ^mylabris. Infeftecoléoptere dont les antennes plus grofTes vers le bout , & à articles hémifphériques un peu triangulaires , font pofées fur une trompe courte & large : quatre antennes accompagnent la bouche ou l'extrémité de la trompe de ce petit animal. Les élytres ou étuis font prefque ronds & fi courts qu'ils ne couvrent que les deux tiers du corps. On trouve le mylabrc fur les fleurs. Ses yeux font afTez faillans. ^ - MYRABOLTS. C'efl: le nom que l'on donne à la myrrhe qui vient d'Arabie , mais que les Européens tirent fouvent de Surate. Foye^^ Myrrhe. MYROBOLANS , myroholani , eft le nom que l'on donne à des fruits defféchés qui viennent des Indes Orientales, oii ils font appelles />///« du panel, & dont nous diflinguons cinq efpeces principales.; favoir , les citrins ou jaunes , les Indiens ou noirs , les chébules , les bellerics &C les emblics ou Chinois. Nous favons peu de chofe touchant les arbres fur lefquels on les recueille. Plufieurs Auteurs prétendent qu'ils croiffent fur des arbres entièrement différens. M. Adanfon au contraire , dans l'Ouvrage intitulé Familles des Plantes, Vol. II , page 442, dit pofi- tivement que des cinq myrobolans connus dans les boutiques , il n'y a que l'emblic qui faiTe une efpece & même une genre dif^inâ: de la famille des tithymales. Les quatre autres ne font, ajoute-t-il, que des variétés du même fruit. Le myrobolan Indien n'efl que ce même fruit encore petit & dans fa jeuneffe. Le belleric eft le même dans fa ma- turité , enfin le chébule & le citrin ne font que des variétés plus ra- courcies'& prefque fphériques. M. Adanfon aJure que ceci a été vérifié aux Indes tout récemment par un Obfervateur verfé dans la Bota- nique. On prétend que la fève de Bengale efl encore une efpece de myrobolan, Pp 2 300 M Y R Les MyROBOLANS CITRINS , myrobolanl citrîncz , font des fruits- oblongs, arrondis , de la groffeur du pouce , mouffes par les extrémités, de couleur jaunâtre ou citrine , communément ornés de cinq grandes cannelures longitudinales, & d'autant de petites. L'écorce extérieure efl: glutineufe , amere & un peu acre : elle couvre un noyau dur , an- guleux, fillonné, jaunâtre, lequel contient une amande de couleur grife ou fauve. Ces fruits viennent , dit-on , fur un arbre qui efl de la gran- deur du prunier fauvage , dont les feuilles font conjuguées ; fembla- blés à celles du cormier, & qui croît principalement vers Goa. Les MyrobolaNS CHÉBVL^S , myrobolanl chebulœ ^n^^^QmhXtnizux citrins , mais ils font plus grands & imitent plus la forme de poire : ils font également relevés de cinq côtes , ridés , d'une couleur brunâtre en dehors, & d'un roux noirâtre en dedans; ils ont le même goût ôc la chair plus épaiffe que les précédens; leur noyau eft anguleux & creux , contenant une amande oblongue; onles cafle difficilement. On dit que l'arbre où ils naiffent a des feuilles fimples , femblables à celles du pê- cher ; &: des fleurs rougeâtres en étoiles : il croît aux environs de Décan & de Bengale. Profper Alpin a décrit une efpece de myrobolan chébule que l'on cultive au Caire , mais qui eil: tout différent du pré- cédent. Les Myrobolans Indiens, myrobolanl nlgra ^ font gros & longs comme de petits glands , ridés, noirs en dehors , brillans, creufés ex- térieurement d'un fillon , comme s'ils n'ctoient pas des fruits parfaits , contenant une amande avortée. Quand on les mâche , ils s'attachent aux dents & font cracher ; leur faveur eft acerbe , amere &: acide : on prétend que les feuilles de l'arbre qui les porte , font femblables à celles du faule ; il croît à Cambaye. Les Myrobolans bellerics , myrobolanl belUrlcœ , font arrondis,. peu anguleux , gros , de la figure de la noix mufcade , un peu jaunâtres, fe terminant en un pédicule un peu gros , comme la figure. Leur écorce eft un peu molle , auilere & aflringente ; elle contient un noyau grisât tre, dans la cavité duquel fe trouve une amande femblable à une aveline.- L'arbre qui les porte naît à Bengale ; il a des feuilles femblables à celles du laurier, mais plus pâles; du moins telle eft l'affertion de ceux qui font , des cinq efpeces de myrobolans , autant de fruits abfolument différens. Les Myrobolans emblics , myrobolanl €/7;Mc<2, fontpre%ie rondsj^ M Y R 30, relevés par fix côtes , de la groffeur d'une noix de galle Se d\in gris noirâtre : ils contiennent , fous une pulpe charnue , qui s'ouvre en fix parties en mûriffant , un noyau léger , blanchâtre , gros comme une pe- tite aveline, anguleux, divifé en trois cellules , & qui s'ouvre en trois parties lorfqu'il eft mûr. On ne nous apporte communément que les fegmens de la pulpe defféchés : ils font noirâtres & d'un goût aigrelet & un peuauûere. Ces fruits croiffent, dit-on , fur un arbre dont les feuiiles font courtes & découpées fort menu , comme celles de la fougère. Les Indiens fe fervent des emblics pour tanner le cuir , le verdir , & pour faire de l'encre ; ils en mangent aufii de confits dans de la faumure pour exciter l'appétit. Ils naiffent à Bengale. L'eau dans laquelle on a fait macérer lesmyrobolans, rougit le papier bleu : ils purgent fans danger , & on s'en fert dans les cas où il faut refferrer en même temps. Leur décodion eft fort utile pour raffermir les dents qui branlent. Les myrobolans étoient autant autrefois en iifage , feuls , que le font aujourd'hjui le féné & les tamarins enfemble. Le hohis des Indiens Occidentaux , eft auiîi une efpece de myrobolan. Les habiîans fe fervent des fommités les plus tendres de l'arbre qui les produit , ainfi que de fon écorce , pour en faire une eau odorante propre à fortifier les membres fatigués ; ils en mettent auiîi dans leurs bains. Le fruit , qui eft une efpece de prune , eft laxatif. Si l'on fait des inci- fions à la racine de l'arbre qui porte ce fruit , il en fort une eau qui efl bonne à boire. La Fève de BENCkLE,fahaBengalenJîs , efl encore un fruit étranger, que Samuel Date croit être le myrobolan citrin, qui a avorté à caufe de la piqûre de quelque infede. Ce fruit a la forme d'un nombril , il efl large d'un pouce , brun en dehors & noirâtre en dedans. Dans le vingt- feptieme Recueil des Lettres édifiantes, on trouve une Lettre du Père Cœurdoux , accompagnée de recherches de M. Poivre , dans laquelle il efl dit que le cadoucas , dont les Indiens fe fervent dans leur teinture , efl un vrai myrobolan citrin , qu'ils mêlent avec du lait de buffle femelle , &: qui leur fert pour noircira laide d'une eau vitrio- lique. Ils nomment pend Joucadoucaie le myrobolan à demi-mûr , &. cadoucaipou , la noix de galle du myrobolan : on fe fert dans l'Inde de celui-ci , avec le chajaver, qui efl une efpece de caille- lait blanc du Malabar , pour teindre & peindre , foit en jaune , foit en vert ^ foit en. bleu, en faifant les mélanges convenables de ces ingrédiens. 302 M Y R MYRRHE, myrrha. Ceft un fiic réfino -gommeux-, connu chez les Arabes , fous-le nom de Ur-mur-mor : on nous l'apporte de cette partie de l'Ethiopie que l'on appelloit autrefois \q pays des Troglodltes. Dans le commerce , la myrrhe eft en morceaux , qui varient-beaucoup pour la groffeur , la confiftance , la couleur , l'odeur, le goût & la tranfparence, La belle myrrhe efl en larmes ou en morceaux plus ou moins gros, de couleur jaune ou roufle un peu tranfparente. Lorfqu'on la brife , on y voit des veines blanchâtres comme la bafe de l'ongîe , ce qui fait dire myrrhe ongUc ; elle efl d'un goût amer , un peu acre & aromatique , cau- fant des naufëes , d'une odeur forte. Mais fi on la pile ou qu'on la brûle elle exhale une odeur affez agréable ; elle doit être un peu friable &: peu grafle. Les morceaux bien tranfparens, qui ne font point amers dans l'intérieur , ne font que de la gomme arabique ; il faut les rejeter , & re- tirer également ceux qui font brunâtres , vifqueux & d'une faveur défa- gréable. Ces derniers ne font fouvent que du bdellium. On ne dit rien de certain fur l'arbre dont la myrrhe découle ; & on ne fait point fi c'eft par incifion qu'on la retire. Quelques-uns prétendent que nous n'avons pas la bonne myrrhe des Anciens , parce qu'elle n'a pas l'odeur exquife de celle dont tous les Auteurs font mention ; çn en aromatifoit les vins les plus déhcats , & on la préfenta comme un parfum très-précieux au Sauveur du monde, pendant qu'il étoit dans la crèche. Mais on peut répondre à cela , qu'il en eft des parfums comme des goûts & des couleurs , dont on ne doit pas difputer. Les hommes font éga- lement inconftans à l'égard des odeurs : le mufc & la civette, &c. en fourniffent des exemples fenfibles. Les Anciens diflinguoient deux fortes de myrrhe; l'une liquide, qu'ils appelloient y?^zf?é; & l'autre folide , qu'ils nommoient myrrhe troglodlte. Ils retiroient la myrrhe flafté par incifion , & la recevoient dans des vafes qu'ils bouchoient exadement. Souvent les gros morceaux font comme pleins d'un fuc huileux, que les Modernes nomment quelquefois RuiTiJîacié. La myrrhe, comme gomme-réfme , efl en partie inflammable, en partie difToluble dans l'efprit-de-vin , &i en partie diffoluble dans l'eau. Suivant Cartheufer, la myrrhe contient fept parties de fubflance gom- meufe. On l'eflime prife intérieurement, pour les obflru£lions de la matrice ; elle excite les règles , les purgations des femmes accouchées ; elle chafTe le placenta & le fœtus mort : mais les femmes groffes qui en prendroient témérairement pourroient avorter. On la prefcrit utilement M Y R M Y T 303 dans l'aflhme Se la toux , dans la jaiiniffe &: les atfeûions fcorbutiques : elle convient auffi à l'eftomac : on la recommande comme un baume fmgulier pour les ulcères , tant internes qu'externes ; on la donne en fubilance depuis demi-gros jufqu'à un gros , fous la forme de bols ou de pilules, quelquefois en diffolution dans l'efprit-de-vinou de l'eau-de-vie. Cette teinture appliquée extérieurement , préferve de la pourriture vermineufe , & de la gangrené ou corruption des plaies : c'efl: encore un bon remède pour déterger & fortifier les gencives attaquées du fcorbut : on en met une cuillerée à café dans un demi-verre d'eau de fauge diftillée : on fe fert de ce mélange matin & foir en guife de gar- garifme. Mais pour peu qu'on foit fujet au piffement de fangou à quel- qu'autre hémorrhagie , il en faut faire peu d'ufage intérieurement. En Pharmacie on fait , avec la myrrhe , plufieurs compofitions & prépara- tions qu'on trouvera décrites dans tous les Livres qui traitent de cet Art : elle entre aufîi dans la thériaque 6c dans la conft£lion d'hya- cinthe , &:c. MYRRHINA, MURRINA , MURRA, MORRH A , morrhlnœ v af a. On foupçonne que cette matière qui fe trouvoit en Caramanie & avec laquelle les anciens Romains formoient'des vafes précieux connus fous le nom de vafes myrrhins , & dont ils fe fervoient dans leurs repas & pour renfermer des parfums , étoit une efpece de pierre de galHnace, Voyez ce mot , &: ce qui eft dit des vafes myrrhins à la fuite de l'article Vases. MYRTE. Voyei Mirthe. MYRTILLE. Foye?^ Airelle & Mirthe. MYTULITE, mytuUus, Nom donné aux moules pétrifiées ou foiîiles. 304 N A C N. • N- ACELLE. Efpece de Upas à coquille chambrée , & qui reffemble . parfaitement bien à une nacelle : il fe plaît dans les fables , & s'attache quelquefois aux autres coquillages : il fe trouve au Sénégal. NACRE , efl dans certains coquillages la partie blanche , brillante , argentée ou orientée comme les perles. La plupart des coquillages n'ont une nacre qu'en leur furface intérieure ; d'autres ont befoin d'être dé- pouillées de leur drap marin & même de leur pellicule , pour que leur nacre foit à découvert. NACRE DEPERLES,ou Mère DE Perles, ouHuiTRE a écaille NACRÉE , mater perlarum , feu concha margaritifcra. Ce riche coquillage efl une huître à écailles nacrées , qui varie en grandeur & qui fe pêche dans les Mers Orientales & dans l'île de Tabago. On lui a donné le nom de mcn des perles , parce qu'on y trouve beaucoup plus de perles, & de plus belles que dans d'autres coquillages. La nacre de perles (mot tiré d*e l'Efpagnol, qui appelle nacar de perlas la coquille des perles) efl un coquillage bivalve fort pefant , gris en- dehors , ridé & âpre , mais non cannelé , blanc ou de couleur argentée, uni & luifant en-dedans , d'une fubflance plus dure & plus folide que Iqs perles mêmes qu'il produit. Il efl un peu verdâtre , de figure appîa- tie & circulaire , ayant vers le milieu intérieur la marque des mufcles de l'animal qui en ont été arrachés. La coquille de l'huître perliere efl grande , épaifTe & peu creufe. Les perles , perlez aut margaritcz , qu'on y trouve font, de même que la coquille nacre, des fubflances pierreufes &: calcaires, c'efl-à-dire calcinables & diffolubles aux acides , rondes & anguleufes , grenées , comme tranfparentes , d'une faveur terreufe , ainfx que les écailles mêmes. Origine des Perles, S tenon , ce favant Auditeur de Bartholin , qui fut élevé à l'Epifcopat ,' &: qui a eu l'honneur d'être inhumé dans le tombeau des Grands Ducs de Florence ; Stenon , dis-je , dans fa iSiffertation fur les Corps folides qui fe trouvent naturellement contenus dans d'autres corps folides , prétend , en parlant des coquilles , que la variété de leurs couleurs , leurs piquans & N A C 305 6c leurs inégalités , doivent leur origine au limbe de l'animal renfermé dans la coquille. A mefure que l'animal croît, s'étend & change de place , le limbe de l'animal s'étend aufîi , s'avance fuccefTivement , & laifle fon empreinte fur le limbe de chaque petite coquille , foit que ce dernier limbe foit formé de la matière qui tranfude de celui de l'animalj ou qu'il ne foit autre chofe que le limbe même de l'animal qui fe de- tache tous les ans du refte du corps , & qui eu remplacé tous les ans par de nouveaux limbes qui fe développent fucceflivement. C'eil: par ces mêmes principes que Stenon explique la formation des perles, tant de celles qui font fixées à la coquille & qui font peu ron- des , que de celles qui fe trouvent dans l'intérieur de l'animal , & qui y ont acquis ou confervé une rondeur parfaite ; car la feule différence qui fe trouve entre les lames dont font compofées les perles , & celles des petites coquilles de la nacre , c'eft que ces dernières font prefque planes , & les autres courbes ou concentriques. Stenon ajoute , 1°. que certaines perles inégales , qu'on appelle baroques , ne le font que parce qu'elles faifoient partie d'un grouppe de plufieurs petites perles ren- fermées fous une enveloppe commune ; 2°. qu'un grand nombre de perles jaunes le font non-feulement à la furface , mais encore dans tous les points de leur fubflance ; vice qui doit provenir de l'altération des humeurs de l'animal ; il ajoute que les perles les plus belles deviennent quelquefois jaunes , étant long-temps portées. Ce fentiment de Stenon fur l'origine des perles , eft conforme à celui des Modernes , qui penfent que la matière des perles n'efl autre chofe que celle qui forme la nacre de la coquille , & non une lèpre ou excré- ment des huîtres , ni une concrétion graveleufe , formée du fuc nour- ricier dans les huîtres vieilles ou attaquées de maladies. Et M. Geoffrol le jeune n'a rangé les perles parmi les bézoards , que parce qu'il a mis dans cette claffe toutes les pierres formées par couches , qui s'engendrent dans les animaux. La perle n'eft exaftement produite que par l'abondance de la liqueur nacrée qui , en tranfudant de l'animal au lieu de s'applatir &: de former des couches dans le fond de la coquille, a ftillé par gouttes ou par petits pelotons qui fe font conglomérés. Cette liqueur eft repliée tantôt régulièrement , tantôt d'une manière chiffonnée ; ce qui a formé des perles plus ou moins régulières. En diffolvant lentement dans un acide nitreux ôc très-afToibli une perle , on s'eft convaincu de la vérité de ce Tome IV. Qq 3o6 N A C qu'on avance ici. ^oye^ les articles Corail , Corallines 6'CoQinL'i LES , pour la théorie de cette petite expérience , & l'hilloire de ces fortes de produdions formées par de petits animaux. Pour une perle que Ton trouve dans la partie charnue de l'huître , on ■%n Trouve mille attachées à la nacre , oii elles font comme autant de globules ou de verrues. Il arrive même quelquefois que les perles, qui font diftribuées indiftindement dans toutes les parties de l'huître, s'ac- croiflent au point d'empêcher les coquilles de fe fermer , & alors les huîtres périffent. On trouve ordinairement dans chaque nacre une ou deux perles, mieux formées que les autres. On a obfervé que toutes les coquilles bivalves, dont l'intérieur efl nacré , produifent des perles: on en trouve dans le marteau^ dans h pintade grife , dans Yhirandelle ou mouchctte^ &C. Vhuîcre à écaille nacrée n'efî point défagréable à manger , à moins qu'elle n'habite des côtes fangeufes. Pêche des Ferles, Prefque toutes les perles viennent des pays étrangers : il y en a quatre pêcheries dans l'Orient. Tavernierè^\\. que la première efl autour de Flfle de Barhen ou Baharen dans le golfe Perfique ; la féconde fur la côte de TArabie heureufe, proche de la ville de Catifa : elle appartient à un Prince Arabe ; la troilieme près de l'Ifle de Ceyîan , dans la mer qui bat un gros Bourg appelle Manar , là efl le lieu qui s'appelle côte de la pêcherie; la quatrième fur la côte du Japon : &il ajoute qu'on en pêche rarement dans cette dernière , parce que les Japonnois ne fe foucient guère de joyaux. On compte aufîi quatre pêcheries de perles en Occident , qui font toutes fituées dans le golfe du Mexique , le long de la côte de la Nouvelle Efpagne. La première efllelong de l'Ifle de Cubagna, à cent foixante lieues de Saint-Domingue ; la (deuxième efl à l'Ifle de la Mar- guerite ( Ijle des Perles ) , à une lieue de Cubagna ; la troifieme efl à Comogote , afTez proche de la Terre-ferme ; la quatrième efi au Rio de la Hacha ou rivière de la Rencheria , le long de la même côte. On pêche encore des perles dans la Méditerranée : on en pêche auffi fur \ç:S côtes de l'Océan , en EcofTe & ailleurs. La pêche des perles près de rir.o de Ceylan efl la plus confidérable, & produit un grand bénéfice à la Compagnie des Indes de Hollande. Cette Compagnie ne fait pas pêcher pour fon compte, mais elle permet aux habitans du payS;» N A G 307 d'avoir pour cette pêche autant de bateaux qu'ils veulent , & chaque bateau lui payeFlibixante écus , & même quelquefois davantage. Vers le commencement de l'année en Mars & en Avril , la Compagnie en- voie d'abord dix ou douze bateaux qui fe féparent en diverfes rades ; des plongeurs pèchent chacun quelques milliers d'huîtres à perles qu'ils apportent fur ce rivage. On ouvre chaque millier à part, & on met aufîi à parties perles qu'on en tire. Si le prix de ce qui fe trouve dans ce millier fe monte au-delà d'un écu , c'eft une marque que la pêche fera en ce lieu très-abondante. Si le prix eft de moitié moins , on ne pêche point cette année-là. Si l'épreuve réufîît, on publie que la pêche fe fera ; alors une affluence extraordinaire de peuple & de bateaux ar- rive. Les CommifTaires Hollandois viennent de Colombo pour préfider à la pêche , le jour qu'elle doit commencer , l'ouverture s'en fait dès le matin par un coup de canon. Dans ce moment tous les bateaux partent & s'avancent dans la mer, précédés de deux grofTes chaloupes HoUan- doifes , qui mouillent l'une à droite & l'autre à gauche , pour aiîigner à chacun les limites de l'endroit oii il peut pêcher uniquement, & auffi-tôt les plongeurs de chaque bateau fe jettent à la hauteur de trois , quatre & cinq brafles. Un bateau a plufieurs plongeurs qui vont à l'eau tour à tour ; aufîi-tôt que l'un remonte , l'autre s'enfonce. Ils font atta- chés aune corde dont le bout tient à la vergue du petit bâtiment, & qui eu. tellement difpofée , que les Matelots du bateau , par le moyen d'une poulie , la peuvent aifément lâcher ou tirer félon le befoin qu'on a ; celui qui plonge a une pierre du poids d'environ trente livres attachée aux pieds ( rarement à l'eflomac ) , afin d'enfoncer plus vite , 6c une efpece de fac à fa ceinture pour y mettre les huîtres qu'il pêche. Dès xju'il efl defcendu au fond de la mer , fans perdre de temps il court ça ' & là , quelquefois fur un fable , tantôt fur une vafe très-vifqueufe , &C tantôt parmi les pointes des rochers ; il ramaffe promptement ce qu'il trouve d'huîtres & les met dans fon fac. S'il y a plus d'huîtres qu'il n'en peut emporter, il en fait un monceau , & revenant fur l'eau pour pren- dre haleine , il retourne enfuite ou envoie un de fes camarades pour le ramaffer. Le plongeur pour revenir à l'air donne le fignal , en tirant fortement une petite corde différente de celle qui lui tient le corps : il y a toujours un ou deux Matelots dans le bateau qui tiennent l'autre bout de la corde pour obferver le mouvement. Il eft rare qu'un Plon- geur accoutumé dès fon enfance à plonger , puiffe retenir fon hakin^ 3o8 N A C plus d\m quarL-d'heitre ; il a toujours foin de mettre du coton dans Tes narines & (es oreilles , fouvent il arme fes doigts d'ef^j^ces de mitaines de cuir pour éviter d'être blefTé aux rochers. Comme les huîtres à perles font quelquefois attachées aux pierres & rochers , alors ils les détachent avec un inftrument de fer dont ils font munis. Les bateaux ne font pas fi éloignés les uns des autres, que les Plongeurs ne fe battent aflez fou- .vent fous les eaux pour s'enlever les monceaux d'huîtres qu'ils ont ra- maffés. Ils prétendent qu'à foixante pieds de profondeur , ils y voient auffi clair qu'à terre. Ces Pêcheurs font expofés à de grands périls ; car outre lesrifquesde fe précipiter fi profondément dans la mer, de de- meurer accrochés en quelque endroit, de s'eftropler , ou même de fe îuer en tombant fur quelque pierre , ou de s'évanouir en manquant d'air , ils courent encore celui d'être dévorés par des requins. Voilà pour eux le danger le plus grand & le plus ordinaire. On préfume bien qu'un tel métier eft très-fatigant ; aufli ces habitans , quoiqu'habiles , ne peuvent guère plonger que fept ou huit fois par jour. Le travail dure jufqu'à midi , & alors tous les bateaux regagnent le rivage ; quand on eu. arrivé, le maître du bateau fait tranfporter dans une efpece de parc ou de fofles creufées dans le fable les huîtres qui lui appartiennent , là il les étale à l'air, & l'on attend qu'elles s'ouvrent d'elles-mêmes, ce qui dure trois ou quatre jours , afin d'en retirer les perles fans les en- dommager ; les perles étant tirées & bien lavées , on a cinq ou fix petits baffins à cribles qui s'enchâffent les uns dans les autres, en forte qu'il refte une diftance entre ceux de deffus & ceux de deffous. Les trous du fécond crible font plus petits que ceux du premier , & ainfi des autres. Les perles qui ne paffent point par le premier crible , font du premier ordre ; celles qui relient dans le fécond , font du deuxième ordre ; & de même jufqu'au dernier, lequel n'étant point percé reçoit les femences deper/eSf ce font les plus petites. Ces différens ordres font la différence des perles pour la grofTeur , & leur donnent ordinairement le prix , lorfqu'elles font bien conformées & d'une belle nacre. Les Hollandois fe réfervent toujours le droit d'acheter les plus groffes , au moins ils ont la préférence fur le prix que l'on en of&e. Toutes les perles qu'on pêche le premier jour appartiennent au Roi de Maduréou au Prince de Marava , fuivant la rade où fe fait la pêche. La pêche des perles Occidentales fe fait depuis le mois d'Oûobre jufqu'au mois de Mars, On fait quelquefois une féconde pêche de perles N A C 309 (dans les Indes Orientales; celle-ci a lieu dans les mois d*Aoùt & de Septembre. Il règne pour l'ordinaire de grandes maladies fur ces pa- rages au temps de la pêche : elles peuvent être caufées par la quan- tité du peuple qui s'y rend & qui n'habite pas fort à l'aife , ou parce que plufieurs fe nourriffent de la chair des huîtres qui eft indigène & mal- faifante , foit encore à caufe de Tinfedlon de l'air , occafionnée par la chair des huîtres . qui étant expofée à l'ardeur du foleil , i'e corrompt en peu de jours & exhale une puanteur qui peut feule caufer des ma- ladies contagieufes. 11 y a d'autres animaux teftacées que l'huître , qui fournifTent des perles, comme les moules du Nord ôc de la Lorraine ; V/uronde//e , le marteau, la pintade grijc & les huîtres communes. Celles de Lorraine fe trouvent communément dans une petite rivière des Vofges ; Son AltefTe Royale le Duc Léopold, avolt établi des gardes pour veiller à ce que perfonne n'en péchât, s'en réfervant pour lui feul le produit. Feu Madame la PrincelTe Charlotte, Abbefle de Mons , avolt un collier fait avec ces perles; mais quoique brillantes & blanches, elles font la plupart baroques , & nullement comparables en beauté à celles des mers d'Orient & d'Occident : on fait cependant que le Roi de Suéde vient d'ennoblir M. Linneus pour avoir trouvé le moyen de faire groffir les perles des moules & des huîtres du Nord , & de les rendre belles , &c. En faveur de cette découverte , les Etats du Royaume ont permis auffi à ce favant NaturaHde de fe nommer un fuccefîeur dans fes difFé- rens emplois ; mais le fecret n'a point été rendu public. Ce moyen fe- roit-il de faire parquer des moules dans des étangs où l'on mettroit des fcolopendres marines ? car on a remarqué que toutes les moules ta- raudées par ces infeâes marins, contenoient les plus grofles & les plus belles perles. Parmi les perles , il y en a de différentes couleurs , de blanches , de jaunâtres , de verdâtres & de noirâtres ; la couleur blanche paroît leur être la plus naturelle. Les perles de couleur plombée ne fe trouvent qu'en Afrique , oîi le fol de la mer eft très-vafeux. La couleur jaunâtre ou verdâtre, fi eftimée des Arabes, peut provenir de ce que les Pê- cheurs , vendant leurs huîtres par monceaux, & les Marchands atten- dant quelquefois quinze jours qu'elles s'ouvrent d'elles-mêmes pour en tirer les perles, quelques-unes de ces huîtres nacrées perdent dans cet intervalle leur eau , fe gâtent , s'empuantiflent , 6c produifent des 310 N A C émanations qui colorent les perles qu'elles contiennent. Nous le répétons ," plus les nacres de la coquille font belles , plus les perles le font : le volume des perles répond aufTi à la grandeur de l'animal : la pintade gris de lin donne des perles dont la couleur eft aufTi d'un gris de lin : celles-ci font tort rares , ainfi que cellesde couleurde corail rouge qui fe trouvent quelquefois attachées à la nacre intérieure & vineufe de la pinne marine. Parmi les huîtres nacrées qu'on pêche , il y en a beaucoup qui ne contiennent pas de perles. Les années pluvieufes font les plus favorables pour cette pêche : on a fait cette même obfervation à l'égard de nos perles d'Ecofle & de Lorraine. O bferv ations fur les Perles, La concrétion ou loupe pierreufe qu'on appelle perle , eft d'une eau argentée comme celle de la nacre; la beauté de la perle peut furpaffer même celle de la nacre de la coquille , quoique formées toutes deux d'une même matière. Cette différence vient de ce que la nacre de perles touche par (es extrémités à la bourbe ; au lieu que la matière de la perle a été reçue entre les membranes qui la tiennent à couvert. M. de Réaumur a obfervé aufîi que la couleur des perles répondoit à la couleur de la coquille oii elles fe trouvoient renfermées ; & que les perles , moitié couleur de nacre &c moitié noirâtres , avoient été formées dans le confluent de deux vaifTeaux qui contenoient des fucs de différentes couleurs. Mémoires de l'Académie des Sciences , année '7/7. Les Joailliers appellent loupe ou coque de perles \m fuc pierreux & nacré qui s'efl extravafé en forme de nœud. Quand ils en trouvent de demi - fphériques , ils les font fcier ; & de deux de même groffeur, collées enfemble , ils compofent une perle. Les perles d'une figure irré- guliere, c'efl-à-dire , qui ne font ni rondes ni en poires, font appellées baroques: telles font les perles d'Ècoffe. Les perles parangones font des perles d'une groffeur extraordinaire. Les perles les plus eftimées en Europe font celles d'Orient ; & entre celles-là on choifit par préférence celles qui font les plus groffes, parfai- tement rondes , polies , blanches , luifantes , qui réfléchilTent les objets, qui font rayonnantes & paroifTent tranfparentes fans l'être : c'efl ce qu'on appelle /'er/e^ d'une belle eau ou d'un bel Orient. Leur prix efl plus OU moins haut , fuivant qu'elles approchent plus ou moins de ces qualités. N A C 311 En Perfe & dans les Régions Orientales, elles ne fe vendent qu*au poids de l'or; mais en Europe elles fuivent le tarif des pierreries. L'ufage des perles pour le luxe &C la parure des Dames, en a fait un très -gros objet de commerce. Colliers, braffelets , pendans d'oreilles, coiffures ou aigrettes, ajuflemens, toutes ces parures introduites par le caprice, adoptées par la mode, perfedionnées par l'art & le goût, font des bi- joux de toilette faits pour ajouter aux grâces de la beauté & quelquefois pouryfuppléer.Parmila quantité de perles que l'on pré fente tous les ans au Roi d'Efpagne , ce Prince fait mettre à part les plus belles & les de- iline à l'ornement du Service Divin. On peut juger de la quantité qu'il en confacre à cetufage pieux par un habit de la ftaîue de la Vierge Noire- Dame de la Guadeloupe. Dans cet habillement tout le blanc n'efl autre chofe que des perles , le rouge & le vert font d'émeraudes & de rubis. Il n'y a dans le monde que le Souverain des Indes qui puiffe mettre une fi grande magnificence dans fa dévotion. En 1579 on préfenta au Roi Philippe II une perle trouvée à Panama : elle étoit naturellement faite en poire , & de la groffeur d'un œuf de pigeon. Elle efl prifée à 14400 ducats. Tavernier en a vu une entre les mains de l'Empereur de Perfe , en 1 63 3 , & que l'on avoit achetée d'un Arabe 1 10400 livres flerling. Pline évalue la perle de CUopatre à quatre-vingts mille livres ilerllng. On fait que cette R^ine crut ne pouvoir mieux prouver fon luxe & fon opulence à Marc-* jintoiney qu'en avalant dans un repas qu'elle lui donnoif, une des fa- meufes perles qui lui fervoient de pendans d'oreilles. L'hilloire nous apprend encore que Clodius Efopus , fameux Comédien Romain, vou- lant furpaffer en magnificence fon père , fît avaler des perles diffoutes dans le vinaigre à tous les convives de fon feflin. En Médecine on ne fe fert que des perles menues , qu'on appelle fe-^ menées de perles. Quoique moins chères que les groffeSj elles n'ont pas moins de vertu: leur préparation confifte à les réduire, fur le porphyre , en une poudre impalpable. La -nacre de perle préparée par cette même méthode , n'efl pas moins bonne. Ces fubflances font abforbantes , & pro- pres à arrêter le vomiiTementôc le dévoiement. On fait entrer ces diffé- rens produits de l'huître dans plufieurs difpenfations médicinales ; mais les Médecins inftruits & de bonne foi, conviennent que les perles & la nacre de perles ne font que des abforbans terreux qui n'ont pas plus de vertu que la nacre des huîtres les plus communes , & que leur prépa- ration ne peut être employée par préférence que pour relever la pompo & le prix de^ médicamens. 3ii N A C N A D Les Dames employoient autrefois dans leur fard la nacre de perles; enfuite on leur a fait accroire que les préparations cofmétiques étoient de perles fines : aujourd'hui on gâte leur teint avec le blanc de bifmuth. Les Tabletiers font avec la nacre de perles des cuillers, des jetons , des manches de couteaux , des navettes & beaucoup d'autres petits ouvra- ges fort agréables , mais qui jaunirent , ainfi que les perles , à force d'être expofés à l'air : moins d'un fiecle fuffit pour en altérer la beauté. Avant que de finir cet article nous croyons devoir parler de la charla- tanerie de certains Juifs , qui prétendent qu'ils ont l'eflomac propre à nétoyer les perles, 6c à en augmenter le poids. Ce fait eft d'autant plus impoffible, que les perles, comme les os, l'ivoire & les dents s'amol- liflent dans des liqueurs acidulées & chaudes , & qu'elles perdent de leur poids. On en a des preuves qu'on ne peut révoquer en doute. Si les perles fe nétoyoienî dans un eftomac Juif, il en feroit de même dans un eftomac Mufulman ou Chrétien; mais dans tous ce feroit aux dépens du volume des perles. Voici un exemple bien frappant du ramollifTe- ment des perles : en jetant les fondations de S. Pierre de Rome on trouva un caveau où avoient été dépofés 1 1 1 8 ans auparavant les corps de deux jeunes filles de StiHcon, qui avoient été promifes, l'une après l'autre, à l'Empereur Honorius ; toutes les richeffes qui y étoient renfermées , * étoient en très-bon état, à l'exception des perles qui étoient fi tendrçs qu'elles s'écrafoient facilement entre les doigts. On tire parti aufii de la charnière des huîtres nacrées ; c'efl: un (^ros ligament que des Hollandois , voifins des pêcheries de perles, font deffé- cher , ont l'art de tailler & de polir enfuite de manière à imiter une plume : ils les vendent fous le nom diO. plume, de paon; elle eftd'un beau bleu verdâtre chatoyant. A l'égard des faufiles perles , voyc-;^ à C article Able. NACRÉ. Voyei ^ l'article Prince & le mot Roi. NADDE ou MELETTE ou APHÎE PHALARIQUE. Ceft unpoifibn rare , du genre des carpes & de la famille des poifTons à nageoires molles: on le trouve plus communément dans les parties boréales de la Suéde que par-tout ailleurs: il a un pied de longueur, quatre pouces de large ; la tête obtufe; les trous des nageoires font doubles ; la bouche eft fans dents; la membrane des ouies a trois rayons ; la queue efi: four- chue; la couleur du dos eft brune , blanche aux côtés , argentée au yentre , & rouffe à la poitrine. Les écailles font larges, obtufes & ftriées : on N A G ' N A I 313 on mange ce poiffon en'Weflrobothnie. La naddU ell une petite fardine, NAGEUR, natrïx torquata. Nom donné à un ferpent aquatique , qui crie , dit-on , comme la grenouille : il fe nourrit de grains , d'infeftes , de tout ce qu'il trouve , &, comme la vipère, il fait la chaffe aux rats. Les François appellent ce ierpent le charbonnier. Voyez ce mot. NAGEOIRES. Foyei à C article. PoiSSON & au mot BALEINE. NAGMAUL. roye^ ScHiNDEL. NAGOR. Nom que l'on donne à une efpece particulière de gazelle d'Afrique. Sts cornes font femblables à celles du nanguer. NAIN. Nom donné à celui qui eft petit au-delà de ce que naturelle- ment il doit être. Le nain & le géant font les deux extrêmes de la flature des hommes. /^oy^^ GÉANT. Pour avoir une idée de la race des nains , nous donnerons un extrait de l'origine, de la vie , de la conformation de Bébé, de M. Borwjlaski , ôc de M. Berefchny, Bebéf ce fameux nain du Roi de Pologne , naquit à fept mois dans les Vofges , de parens bien faits , bien conftitués & fains. 11 n'avoit pas tout- à-fait huit pouces en naiffant: il ne pefoit alors qu'une livre & un quart. Sa mefe l'éleva avec beaucoup de peine; fa petite bouche ne pouvant s'appliquer qu'en partie fur le mamelon, une chèvre fut fa nourrice. Un fabot qu'on rempliflbit de laine à moitié, lui fervit long-temps de ber- ceau : on l'eût pris pour un Lilliputien: à l'âge de deux ans il commença à marcher: on lui fît des fouhers de dix-huit lignes de longueur. A fix ans il étoit haut de quinze pouces. Son accroilTement fut proportionné à fa petitefTe première jufqu'à l'âge de douze ans: à cet âge la nature ût un effort dans quelques parties feulement. Les côtes grandirent plus d'un côté que de l'autre. L'épine du dos s'arqua en cinq endroits , & l'apo- phyfe nafale s'étendit beaucoup. Ce petit individu n'a jamais donné que des marques très-imparfaites d'intelligence : il fembloit qu'elle ne paffoit pas les bornes de l'inflinû , & malgré la bonne éducation qu'il a reçue, il n'a conçu aucune notion de l'Etre fuprême. Il paroifToit aimer la mufi- que , on étoit même parvenu à le faire danfer & à battre quelquefois la mefure afTez jufte. Il avoit fans cefTe les yeux dreffés fur fon maître qui par des fignes dirigeoit tous (qs mouvemens, ainfi qu'on le remarque dans les animaux brutes qu'on a dreffés. Les pafTions cependant régnè- rent dans fon ame : il étoit fufceptible de colère , de jaloufie & d'empor- tement dans fes defirs. II avoit tous les organes libres , & toi^t ce qui Tomi I r» Rr 314 N A I tient à la phyfiologie paroiffoit félon l'ordre ordinaire de la nature. A l'âge de quinze ou feize ans il avoit vingt-neuf pouces de hauteur ; c'étoit fon âge brillant ; il ëtoit joli. A l'âge de dix-fept à dix-huit ans les fignes de fa virilité ou de puberté furent irès-évidens & même très-forts pour fa petite ftrudure: il paroît même prouvé qu'une gouvernante enavoit long-temps abufé, & l'on attribue aux excès de ^ félon M. ^ Argenville , eft un limaçon à bouche demi-ronde , qui n'a point de gencives , ni de dents , feul caraûere qui le diftingue de la nérite. Voyez ce mot. NATIF. Dansl'Hiftoire Naturelle du règne minéral c'eft un fynonyme de vierge ; il exprime un métal , ou un demi-métal qui fe trouve dans le fein de la terre fous la forme qui lui eft propre & fans être mêlang^. On dit de l'argent vierge , du cuivre & de l'or natifs. NATRON , natrum. C'eft un fel alkali terreux , appelle quelquefois alkali terrejlre Oriental. Il eft en partie fixe , & toujours mêlé avec des corps terreftres. Quelquefois il contient du fel marin , ou un fel alkali volatil , de manière cependant que l'alkali fixe y domine. Le natron fond aifément à l'humidité de l'air ; réfous en liqueur , il fait moins d'effer- vefcence avec tous les acides que fous une forme folide , il fe difîbut dans quatre fois fon poids d'eau chaude. Cette efpece de fel minéral , qu'il ne faut pas confondre avec la véritable foude végétale en pains durs & aflez blancs , que l'on fabrique en Egypte , & dont on fe fervoit autrefois en France pour faire du favon & du verre , fe trouve auffi en Egypte , en Syrie , dans l'Afle mineure & dans les Indes Orientales. On peut même le regarder comme le nitre des Anciens , lequel fermentoit avec des liqueurs acides , & ils s'en fervoient comme d'un fel lixiviel pour laver leurs habits , & pour mettre dans leurs bains purificatoires ( Jeremie , chap. %, verf. 22 ). Us le mêloient avec du fable pour en Sf i 324 N A T faire du verre (Tacit. îiv. 5.). Salomon fait entendre cette effervef- cence du nitre d'Egypte avec le vinaigre , lorfqu'il dit dans les Prover- bes , ( chap. 25. verf. 20. ) celui qui chante des airs à un cœur affligé ^ fait ct>mme fî C on mêloit du nitre avec du vinaigre. Or , il n''y a que le natroH qui pofTede cette propriété. Aujourd'hui nous voyons rarement ce fel daus le commerce , ainfi que la foude végétale d'Egypte , que l'on ap- pelloit aufîi natron , celle-ci ayant été prohibée fous le miniftere du Grand Colbert. On lui fubftitue le fel de verre ou l'anatron fadice. Le natron naturel , tel qu'il fe trouve dans la terre , eft ordinairement d'un blanc rougeâtre & en maffes informes. Nous avons donné dans notre Minéralogie un détail affez circonflancié de la préparation & de l'ufage de ce fel en Egypte. C'eft dans l'hiver que ce felfuinte naturellement de la terre : on le ramafle dans l'état de liqueur dans deux grands lacs, dont l'un eft fitué près de Memphis, & l'autre aux environs d'Alexandrie. Les vents qui régnent dans ces contrées ne tardent pas d'en faire évaporer la furabondance d'eau , & lorfque l'eau eft alTez diminuée pour que le fel commence à fe criftaîli- fer , on le retire avec des pelles faites en écumoire , puis après l'avoir égoutté , on le tranfporte dans de grands magafms à Terrané & à Damanchou. Les Payfansfont contraints par corvée d'en voiturer qua- rante-cinq mille quintaux, partie en bateau fur le Nil, 6«: l'autre partie fur des chameaux : mais cette obligation forcée leur tient lieu de la taille qu'ils devroient pour leurs terres enfemencées. Les Arabes emploient ce fel pour blanchir leur cuivre & le linge ; les Egyptiens s'en fervent au lieu de foude dans leur favon & leur verre:; les Boulangers d'Alexandrie en mettent dans leur forgo ; les Tanneurs du pays en préparent leurs cuirs ; les Bouchers , &c. s'en fervent aufli pour attendrir ou conferver les viandes, &c. Voye\^notre Minéral. Torru ^' P^S'3'9 ^ j2o. Le fel alkali qui fe trouve dans quelques eaux thermales &: minérales , a beaucoup de rapport avec le natron: '^l'on donne auiïi au fel d'Ebshom le nom de natron d!* Angleterre, Voyez •Sex d'Ebshom. NATURALISTE. C'efl un Phyficien & unPhïlofoplie qui confidere '*l'affemblage 6i l'état àts chofes créées dans la nature : il y en a peu qui '^'occupent également de toutes les parties de cette fcience ; l'un étudie ""'ies foiTiles & les minéraux ; l'autre tâche de connoître méthodiquement ^^^es individus du règne végétai , fouvent il fe boraeà la .culture des îï A T 315 ■|>îantes : ^autafes ne trouvent d'agrément que dans les curkufes recher- iChes & obfervations du fegne animai , ou même d'une de fes parties ^ .-quelques-uns étendant la fphere de leur génie , n'étudient point ce qui les environne immédiatement, leurs yeux armés du télefcope , confiderent .& obferventce qui ie paffe dans l'immenCté des cieux ; d'autres enfîn^ fe restreignent à l'obfervation météorologique. Ainfi le Minéralogifte, •le Botanifle , le Zoologifte, l'Aftronome , &c. font les démonllrateurs ^oules interprètes des ouvrages Se des opérations de la Nature, f^oyei ks .articles CiEL 6' PLANETE , ANIMAL , PLANTE, MiNÉRAL & HISTOIRE iNATURELLE. NATURE , natura.. Ce mot pris en général comprend le fyflême du Inonde , la machine ou le mécanifme de l'univers , l'affemblage de toutes %es chofes créées. La nature eft le monde réel , pofîible , ou l'univers iCréé , natura naturata. Les Phyficiens étudient la nature fuivant l'ordre & le cours naturel des chofes , fuivant la fuite des caufes fécondes , ou :Jes lois du mouvement que Dieu a établies , & qui agifTent dans toutes lies occafions par une néceffité inévitable. Les Théologiens appellent rÊtre qui a ordonné 6d préfidé à cet enchaînement des caufes & des >-eiFets , natura naturans. Tout fe tient dans l'univers ; ce n'eil qu'un tout îfubfiilant par l'accord & la correfpondance de toutes i^s parties : il ,n'y exifte rien , jufqu'au plus petit atome , qui n'y foit auiîi néceiîàlre ^■que l'exiftence de la mouche l'eft à la fubfiilance de l'araignée : tout f.^ft foumis à l'ordre univerfel : la nature entière n'eft qu'un feul & vafle îfyftême que tous les êtres compofent. Les animaux compofent un fyf- itême qui fe réunit à celui des végétaux ; celui-ci au fyflême des autres îCorps qui couvrent la furface de notre globe : tout prouve que tous & non découpées ou à futures comme dans la corne d'Ammon , qui paroît extérieurement Tt 2 33i N A U herborifée uniquement par cette difpofition de pièces de rapport.' 2°. La coquille du nautile qui eu mince, s'appelle Nautile papi- "RACÉ , nautilus papyraceus polypofus. Celle-ci eft à oreilles & fans oreil" les , cannelée , d'un feul vide , à carène tuberculeufe , plus ou moins large , & d'un roux enfumé , le refle d'un blanc de lait , fans articu- lations ou concamérations , & l'animal qui y demeure ne tient point , dit-on , à fa coquille comme dans Tefpece précédente. Ondifiingue plus exactement i°. le nautile poli & épais; 2^. le même ombiliqué ; 3°. le nautile commun , chambré & partagé en plufieurs cellules ; 4°. le nautile cannelé , mais vide & fans aucune féparation ea dedans ; 5°. le nautile papiracé , applati & mince ; 6°. le nautile à oreilles 8i à large carène ; 7°. le même nautile à carène ondée en fillon & den- telée des deux côtés ; 8°. celui dont la carène efl par-tout dentelée; Enfin fi toutes les cornes d'Ammonfolfiles, &;c. que nous trouvons dans la terre font autant de moules intérieurs de nautiles , il doit fe trouver autant d'efpeces de nautiles qu'il y a de cornes d'Ammcn , & par confé- quent le nombre des efpeces de nautiles encore inconnues feroit bie»i grand par rapport au nombre des efpeces connues. On a donné le nom de nautile à cette coquille , parce qu'on a pré- tendu que c'efl de l'animal qui l'habite que les hommes ont appris à na- viguer. Au moins la forme de cette coquille approche de celle d'ura vaiffeau , & l'animal femble fe conduire fur la mer comme im Pilote conduiroit un navire. Quand le nautile veut nager , il élevé deux de fes bras en haut & étend la membrane mince & légère qui fe trouve entre fes deux bras comme une voile ; il fe fert des deux autres appendices, qu'il alonge & plonge dans la mer, & qui lui tiennent lieu d'avirons-, im autre lui tient lieu de gouvernail. Il ne prend d'eau dans fa coquille que ce qu'il lui en faut pour lefter ce petit navire, & pour marcher avec autant de vîteffe que de sûreté ; mais à l'approche d'un ennemi ou dans îes tempêtes , il replie fa voile , retire fes avirons & remplit fa coquille il'eau pour couler ou fe précipiter plus aifément au fond de la mer. Il retourne fa barque fens deifus defTous lorfqu'il veut s'élever du fond de la mer, & à la faveur de certaines parties qu'il gonfle ou comprime à volonté , il pcnit traverfer la mafle des eaux ; mais dès qu'il a atteint la fuperfîcie de l'eau , il tourne adroitement fon petit vaiiTeau , dont il 'vide l'eau , & épanouilTant fes barbes palmées , il fe met à vaguer en •s'abandonnant au gré des yQni$, C'eft un navigateur perpétuel , qui ell K A U NEC 33.3 tout â la fois le Pilote & le vaiffeau. On voit quelquefois dans les temps calmes de petites flottes de cette efpece fur la fuperficie de la mer. L'animal qui habite cette coquille eft une efpece de polype à huk •pieds , polypus ociipes tejlaceus : quand il fe retire , il n'emplit pas toul- à-fait fa coquille. Le derrière de fon corps eft creux & couvert de por- Teaux ; le deffus efl: plat , cartilagineux & ridé , tirant fur la couleuir fombre, avec de certaines taches noires. On voit, dit M. d'ArgenvUlcy à la partie de devant une multitude de petits pieds, pofés l'un fur l'autre, avec plufieurs lambeaux couvrant la bouche des deux cotés. Ces lam- "beaux reffemblent à la main d'un enfant , & f e divifent en vingt doigts •très-petits. Ils fervent à l'animal pour s'alonger , fe retirer , faifir fa -proie & la porter à fa bouche. Cet animal n'ayant point de couverture à l'entrée de fa coquille, ni de défenfe , eft en prife aux crabes, aux araignées & aux fcorpions de mer. On fait peu d'ufage dans les tables de ce teftacée , parce que fa chair eft fort dure ; mais l'écaillé , dans l'efpece qui eft épaiffe & nacrée en dedans , fert à faire des vafes à boire , qu'on grave en dehors : ks Sauvages en font des cuillers , qu'ils -nomment papeda ; on en tire aufîi une forte de burgaudine. Les plus beaux nautiles, ceux à coquilles épaifles, fe pèchent dans l'Inde, à Amboine , à Batavia , aux Moluques & au Cap de Bonne-Ef- péranee. Celui qui eft papiracé fe trouve dans plufieurs lieux de la Mé- diterranée &e ; fon écaille eft d'un blanc de lait , quelquefois tirant fur ie jaune & enfumé par la carène. ' NAUTILITE. On appelle ainfi le nautile qui eft devenu foffiîe ou pé- trifié : on en connoît quatre à cinq variétés. On rencontre plus communé- fnent celwi qui eft chambré que le papiracé. Les naxiùllus ont un certain rapport avec les cornes d'Ammon ; les uns & les autres font compofds 'de plufieurs fpirales tournées fur elles-mêmes, & qui vont en diminuant ■ jufqu'au centre , leurs volutes font féparées intérieurement en plufieurs cellules traverfées d'un petit fiphon articulé, qui pafTe de l'une à l'autre: -mais la corne d'Ammon a plus de volutes extérieurement, &c. Voyt^ •Corne d'Ammon & Nautile. NECTAR , fe dit d'un fuc végétal , dont l'odeur & la faveur font ex- t^iaifes ; mais dont la vertu eft nourrift'ante, & même enivrante. On trouve beaucoup de ce fuc mieiieu:^: dans les nc^aires , ncBarUi (organes de k^ 334 NEC NEF fccréîion du miel ) de certains végétaux. Fojei ^ l'artick pLANTE & à celui de Fleur. NECYDALE, nccydalls. Petit infe£le noirâtre à étuis & à antennes filiformes, qui reffemble aflez à nos clcindelcs , mais qui en diffère par le nombre des articles de les tarfes ( il y en a quatre à toutes les pattes ) , & par la forme de fes étuis qui font beaucoup plus courts que fon corps : les ailes débordent les élytres & recouvrent tout fon ventre. Ses yeux font gros 6i. faillans ; le corfelet a un rebord. Cet infede n'efl pas com- mun aux environs de Paris : on le trouve fur le chêne. On donne aufli le nom de necydale à la nymphe des infeâes. NÉFLIER, mcfpilus. Il y a plufieurs fortes d'arbriffeaux compris fous ce nom générique ; tels font les a^erol'urs^ les auh&pïns , le buiffon ardent^ les amelanch'urs , V alchminur. Le NÉFLIER , mefpïlus vul^ans , eft un arbriffeau ou un arbre de mé- diocre grandeur, dont le tronc eft ordinairement tortu : fon bois eft doux & s'ufe par le frottement ; fes gros troncs font recherchés pour les vis de preffoir : les branches font difficiles à rompre ; on fait avec les plus jeunes qui font pliantes oc élafliques les meilleurs manches de fouet : les feuilles font affez femblables à celles du eerifier , lanugineufes & blanches en deffous ; fes fleurs font en rofe , blanches ou rouges ; le fruit efl comme une petite pomme fauvage, prefque rond , rougeâtre lorfqu'il efl mûr , charnu , terminé par une efpece de couronne comme un ombilic. Ce fruit a une faveur âpre ; mais en mûriffant il acquiert une faveur douce , vineufe , fort agréable , de forte qu'il peut fervir à garnir les defferts fur les tables : il contient quatre ou cinq oflelets pier- reux , très-durs. Il y a une efpece de néflier dont le fruit efl fans noyau ; fon fruit efl le plus petit de tous & de moindre qualité. Comme les nèfles commen- cent d'abord à mollir par le cœur , il arrive fouvent que cette partie elt pourrie avant que le defîiis foit en état d être mangé. Pour prévenir cet inconvénient , avant que les nèfles molhfTent, on les fecoue dans un van , pour meurtrir le deffus , qui alors s'amollit aufli promptement que le dedans. Pour que le fruit du néflier foit bon , il faut qu'il ait été greffé : on l'ente fur le poirier fauvage , ou fur l'épine blanche. Le néfïlier épineux efl l'arbrifl^eau connu fous le nom ^q pyracantha ou Inùffon ardent : nous en parlerons ci-après. NEF 335 L'azerolîer ou Pommette, aiarolus. Les feuilles de cet arbrlffeaii font reffemblantes à celles de l'aubepin , mais plus grandes ; Tes fleurs font en grappe , de couleur herbeufe , en rofe ; le fruit efl: rond , plus petit que la nèfle , avec une couronne formée par les pointes du calice : il ell: d'abord vert , mais en mùriflant il devient rouge , aigrelet & fort agréable au goût ; il contient trois offelets. On le culiive en Italie & en Languedoc oiiilfe nomme pommette. Les azeroles blanches ne font pas fi bonnes ; en Provence on en fait des confitures. Les azeroliers font un fort joli effet dans le mois de Mai, lorfqu'ils font en fleurs. Cet ar- brifTeau mis dans les remifes, attire le gibier par fes fruits ; il n'a pas tant d'épines que l'aubépine , il croît plus vite & devient plus grand. L'azerolier de Virginie mérite d'être cultivé à caufe du brillant de fes feuilles & de l'éclat de fon fruit. L'Aubépine ou Épine blanche, oxîacamha ^ efîun arbriileau mé- diocrement gros , rameux , armé d'épines fortes & piquantes , plus dures encore que le bois : ce bois efl couvert d'une écorce rougeâtre ou brune cendrée , fuivant l'âge ; fes branches fermes & piquantes , font très- propres à préfenter toutes fortes de figures fous la taille du Jardinier. Ses fleurs qui font très-odorantes , fout en rofe , ramafTces en bouquet : fes fruits font un peu plus gros que les baies de mirthe , ronds , rouges dans leur maturité, ayant un ombilic noir , remplis d'une pulpe molle, glutineufe , douceâtre ; il croît par-tout dans les haies. Cet arbriffeau efl très-agréable dans le mois de Mai , fur-tout l'aubépine à fleurs doubles. Il ne paroît point vraifemblable que l'odeur de cette fleur foit capable de gâter la marée , comm.e quelques-uns le difent. Le fruit de cet arbrilTeau relie attaché aux branches bien avant dans l'hiver, & fert de nourriture aux oifeaux , fur-tout aux grives & aux merles; les hom- mes en mangent dans le Nord , & on en peut tirer un efprit ardent. Son bois excelle pour la dureté & l'égalité; il va immédiatement après le buis , & l'on en fait grand cas pour les ouvrages du tour. Le Buisson ardent ou Arbre de Moïse, pyracantha , aut mef- piliis acuUata pyr'foUo , efl un arbriffeau épineux dont les feuilles reflèm- blent en quelque façon à celles du poirier fauvage : (es fleurs font dif- pofées en rofes , de couleur jaune rougeâtre ; fes fruits reffemblent à ceux de l'aubépine , mais ils font d'un beau rouge écarlate : lorfqu'ils font en grande quantité , ils font paroître l'arbriflèau comme en {çu. Le builTon ardent croît naturellement dans les haies ôc dans Us jardins en 33^ N E G Provence & en Italie ; fes feuilles font toujours veftés , & fes fruits ne quittent point durant tout Thiver : fon écorce efl: noirâtre. La confor- mité du nom a fait croire que cet arbrifleau étoit le buifTon où Dieu apparut à Moïfe , & lui ordonna de défaire fes fouliers , parce qu'il étoit en Terre-Sainte ; &:que c'efl à raifon de cette prérogative que fon £ruit refîe perpétuellement attaché à l'arbre. Peut-être n'efl-il nommé buiffon ardent qu'à caufe de l'éclat de fon fruit. L'Amelanchier , diofpyros ^ eft un arbrifTeau qui a beaucoup de rapport avec lesprécédens ; fes fleurs font blanches ; (qs feuilles reffem- blent à celles du poirier & font lanugineufes en deffous. Le fruit de-' vient bleu , dit M. HalUr , & on peut le manger. Il obferve que c'eft plutôt une poire par la quantité de graines, qui va jufqu'à dix. Uamelanch'ur velu ^ ow cotonajler , eft un très-joli arbufte. Toutes les efpeces de néfliers dont je viens de parler, ont, ainfi que le néflier lui-même , deux flipules ( ce font deux efpeces de petites feuilles ) aux pédicules de leurs feuilles. Le cotonafter & le pyracantha ont pour ftipules deux petits filets. Toutes ces efpeces de néfliers s'accommodent affez bien de toutes fortes de terrains. La graine de néflier ne levé fouvent qu'à la féconde année. C'efl une excellente pratique , que de répandre beaucoup de fruits d'aubépine , d'azeroliers & de buiffons ardens dans les femis des bois ; car ces arbriffeaux , qui ne font aucun tort au chêne ni au çhâtaigner , couvrent la terre , font périr les herbes , & le grand bois y croît mieux. Toutes les efpeces de néfliers font longues à croître , leur bois efl dur; ils font très-propres pour greffer des poiriers qui refient nains, & qui donnent du fruit plutôt que s'ils étoient greffés fur des poiriers fauvageons. Tous les fruits de ces arbriffeaux pafTent pour aflringens, NÉGA. Voye?^ Cerisier. NEGRE. Nom qu'on donne à une variété d'hommes qui font tout noirs , & qui fe trouvent dans la Zone torride , fur-tout en Afrique , entre les deux Tropiques. La femme s'appelle Négrcjfc , &: (on enfant Négrillon on Négriie. Nousavons donné àîa fuite du motHoMME la def- çription des différentes races noires. En général les Nègres varient en- tr'eux par la nuance de leur teint, mais ils différent encore des autres JFionîmes par tous les traits de leur vifage , des nez larges écrafés ou plats > N E G 337 pîats , de groffes levrôs ; en un mot une laîdeiif , une irrégularité dans ^ la figure. Les femmes ont les reins écrafés & une croupe monftrueufe , ce qui fait paroître leur dos en forme de felle de cheval; cette variété d'humains paroît être plus vicieufe que celle des autres parties du Monde." On prétend que la pareffe , la perfidie , la vengeance , la cruauté, l'im- pudence , le vol, le menfonge , l'irréligion , le libertinage , la mal-pro-' prêté & l'intempérance , femblent avoir étouffé chez eux tous les prin- cipes de la Loi naturelle & les remords de la confcience ; les fentimens de compaffion leur font donc prefque inconnus : ferolt-ce un exemple terrible de la corruption de l'homme laiffé à lui-même ? L'on peut jufqu'à certain point regarder les races des Nègres comme des Nations barbares & dégénérées ou avilies. Leurs ufages font quel- quefois fi extravagans & fi déraifonnables , que leur conduite jointe à leur couleur , a fait douter pendant long-temps , s'ils étoient véritable- ment des hommes iffus du premier homme comme nous, tant leur féro- cité & leur animalité les faifoit en certaines circonftances reffembler aux bêtes les plus fauvages. On a vu de ces peuples fe nourrir de leurs frères & dévorer leurs propres enfans. Prefque tous les Noirs ne regardent leurs femmes , notamment celles de Loanga, que comme de viles ef- claves créées uniquement pour les amufer , les fervir & leur obéir : fouvent elles n'ofent les regarder & leur parler qu'à genoux. Seroit-il vrai qu'un état fi pénible & fi humiliant ne les afflige point ? On trouve cependant des Nègres allez attachés à leurs femmes ou très-amoureux de leurs maîtreffes : celles ci ne le cèdent en rien aux hommes, fuivant farts réferve l'ardeur de leur tempérament. Onvoitaufîi des Nègres du Congo , qui dans le deffein de plaire , deviennent grands railleurs , pan- tomimes , &CC. un feul Congo fufîit pour mettre en bonne humeur tous les Nègres d'une habitation. Mais par quelle fingularité les NégrefTes , qui font très-fécondes en Afrique , ne multiplient-elles pas autant dans l'Amérique ? Le Gouvernement a intérêt de découvrir la caufe d'une pareille llérilité , difons plutôt d'un avortement ; car l'amertume de leur fort les porte à fe délivrer d'un fardeau qui fait la joie des autres mères. Un peu plus d'humanité de la part des Blancs , préviendroit bien des maux. Je frémis d'horreur en apprenant qu'on fait des parties de plaifir dans nos Ifles pour aller à la chaffe des S^egres Marons ( Nègres fugitifs ) comme nous faifons des loups & des fangliers en Europe , & que la chaffe efl bonne , quand on en a tué un grand nombre : quelquefois Tome JF^ Vy 33^ N E G çncore des barbâf es & impitoyables maîtres de ces hommes noirs poignar- dent inhumainement les malades mutilés ou trop vieux , dans la crainte que les frais n'abforbent le prix de la vente de ces efclaves. Comment certains habitans de l'Amérique , policés & élevés en Europe , peu- vent-ils , malgré le cri de l'humanité , ne donner que peu ou point de nourriture à leurs efclaves Nègres ? Ces hommes infortunés facrifîent leur vie & leurs travaux aux befoins de leurs maîtres , & fouvent à fatisfaire leur luxe & leurs paflions frivoles , fans attirer fur eux ïa même pitié qu'on a pour les bêtes de fomme que l'on fait travailler. Les Turcs , qui paflent pour moins barbares , femblent imiter le commerce infâme des Nègres, en vendant des Blancs de l'un& l'autre fexe , achetés exprès dans la Géorgie , dans la Mingrélie , dans la Cir- caffie & dans divers lieux voifms de la mer Noire. Ce marché qui fe tient à Conftantinople , s'appelle JaJJir-Barat ; c'eft un endroit fermé de murailles & planté de grands arbres. Là on commence par prier pour le Sultan : les jeunes filles font nues fous une couverture qui les enveloppe , un Crieur en publie le prix. L'acheteur vifite la marchan- dife ; fi elle lui convient , il la paye & l'emmené. Qu'il nous foit per- mis ici de faire encore une réflexion qui eft un cri de douleur & de pitié fur les égaremens & les préjugés qui fubjuguent quelquefois des Nations entières , & qui bleffent leur fcnfibihté au point de leur laifTer voir de fang froid les ufages les plus barbares ( nous parlons des Eunuques ) : l'humanité , la ralfon , la Rehgion font également outra- gées par les voies faâices , qu'on fait payer fi cher aux malheureux à qui on les donne. Qui ne gémit en voyant des pères cruels immoler eux-mêmes leurs fils , leur poftérité , & peut-être des Citoyens qui auroient été quelque jour la gloire & l'appui de leur Patrie t Voye^^ Vat" ticle Eunuque à U fuite du mot Homme. La couleur des Noirs ou des Nègres a fait enfanter nombre de fyflê- mes : on a beaucoup difputé fans que perfonne ait pu donner encore des raifons faîisfaifantes furie principe de cette couleur fi contradiftoire avec la nôtre , & fi confiante à fe perpétuer dans ces races lorfqu'elles ne s'expatrient pas. On prétend avec beaucoup de vralfemblance que î'aclion du foleil eft la caufe primitive & principale de la couleur des hommes noirs. Les peuples du Nord font les plus blancs : & infenfible- ment à mefure que les terres font plus près de la ligne équinoxiale , ÔC N E G 339 qu'elles reçoivent les rayons du foleil plus perpendiculairement, la cou- leur des hommes prend une nuance de noir ; & fi ces mêmes hommes , noircis par la puiffante aûion du foleil, vont habiter le Nord , ils blan- chifTent peu-à-peu , du moins leur poftérité , & perdent leur couleur brûlée. Jufqu'ici la couleur des Nègres ne paroît que locale , extrinfe- que , accidentelle , & leurs cheveux courts & frifés reffemblentà une fine laine. Ne pourrpit-on pas dire auffi que la variété de la couleur des Nègres dont la peau eft toujours nue, n'eft due qu'à la différente tem- pérature de leurs brulans climats ? car ils ont huit mois entiers de fé- cherefle continuelle , un ciel toujours net , fans pluie , fans tempête , fans orage , une chaleur extrême , un ferein abondant. Leurs ahmens & les exhalaifons de leur fol peuvent auffi concourir à produire un tel phénomène phyfique. Dans un Européen ou un Blanc , la lymphe efl blanche , excepté quand elle efl mêlée de bile ; car elle donne à la peau un teint jaune. Mais dans un Nègre , félon quelques-uns , où la lymphe & la bile font noires , le teint de cet individu doit être de la même cou- leur; cependant d'habiles Anatomifles foutiennent que le fang des Nè- gres, leur lymphe , leur chyle & les autres humeurs, même leurs yeux , leurs dents , leurs os, l'intérieur de leurs lèvres , &c. n'ont pas une couleur différente des nôtres. Il eft donc inconteftable que la race des hommes blancs &: la race des hommes noirs ne font pas deux efpeces différentes , puifque le fruit de leurs alliances conferve la vertu repro- dudrice , à la couleur près. Les Négrillons nouveaux nés, reffemblent en tout aux Blancs , à l'ex- ception d'un filet ou cercle brun ou noir qui borde l'extrémité des ongles , & d'une petite tache noire au bout dufcrotum ou au bout du gland. Ces marques font un fîgne certain que l'enfant fera noir ; & les pères Nègres qui fufpeftent la fidélité de leurs femmes , n'ont pas befoin d'autres preuves pour abandonner les enfans, comme ne leur appartenant pas , dès qu'ils naiiTent fans cette marque noire. Cette tache efl grife chez les Indiens, & d'un rouge pâle chez les Mulâtres. Le corps des Négrillons efl blanc les huit premiers jours : leur peau commence par brunir, & devient enfin noire. Quelques Anatomifles modernes & très-célebres , en cherchant la caufe de cette noirceur , ont trouvé que le tiffu de la membrane réticu- lairc de la peau des Nègres étoit effeûivement noir comme de l'encre, & que c'étoit cette couleur muqueufe qui paroifToit au travers de VV 2 340 N E G l'épiderme blanchâtre qui eft fort déliée & tranfparente. Voyez Mim. de L Acad. des Sciences , pan. 3 o , art. ij , ann. lyox. Voyez auffi le Traité de la couUiir de la peau humaine , par M. LE Cat , où il dit que c'efl dans le fyllême nerveux & dans fes appartenances qu'il faut chercher la fa- brique des couleurs qui teignent la peau des animaux, & en particulier de rérhiops animal, qui donne la couleur au Nègre. Ajoutons à cela que la fubftance médullaire de leur cerveau eft communément bleuâtre. Plulieurs Auteurs rapportent quantité d'autres faits auffi fmguîiers , 011 il s'agit de différens hommes nés blancs en Europe, & devenus noirs en Europe. De nos jours une pareille métamorphofe de blanc en noir, &de noir en blanc, fe renouvelle annuellement dans la perfonne d'une Dame de diflinûion très-refpeâable , fort aimable , d'un beau teint ÔC d'une peau fort blanche : dès qu'elle eft enceinte , elle commence à brunir & vers la fin de fa grofleffe elle devient une véritable Négrefle. Après {ç.s couches la couleur noire difparoît peu-à-peu , fa première blancheur lui revient, & fon fruit n'a aucune teinte de noir. L'on compte auffi des Nègres nés en Guinée , & devenus également , & pour tou- jours , blancs en Afrique. On a reçu tout récemment de Surinam la relation d'un Nègre d'Angola parfaitement blanc à la peau & aux che- veux , quoiqu'il fiit né d'un père & d'une mère des plus noirs. Ses yeux font toujours tremblotans , 6c ne diflinguent bien les objets que dans l'obfcurité. Tables des mélanges pour devenir blanc ou noir. i^. Un Blanc avec une Nègre (Te , ou un Nègre avec une Blanche 5 produifent un mulâtre , moitié blanc & moitié noir. 2°. Un Blanc avec une Mulâtre , ou un Nègre avec une Mulâtre produifent un Quarteron , trois quarts noir & un quart blanc , ou trois quarts noir & un quart blanc. 3^. Un Blanc avec une Quarteronne , ou un Nègre avec une Quar- teronne produifent un Ochavon , fept huitièmes blanc & un huitième noir, ou fept huitièmes noir & un huitième blanc. 4°. Un Blanc avec une Ochavonne , ou un Noir avec une Ochavonne •produifent l'un tout blanc , Pautre tout noir. Telle eft la marche des influences & des caufes phylïques de la dégradation ou du retour de la couleur dans l'efpece humaine. L'on fent bien que les mélanges d'un Mulâtre avec une Quarteronne ou N E G 341 avec une Ochavonne , produiront d'autres couleurs qui approche- ront du blanc ou du noir , en proportion de la progreffion ci-deiïus établie. Nous avons dit, d'après plufieurs Obfervateurs, aux articles Homme, Ane , &c. que la caufe qui maintient & perpétue l'efpece , procède de celui qui dans l'ade de la génération a montré le plus de vigueur & de force ; &c c'eft ordinairement le père. Une jeune Négreffe de Virginie, après avoir avoir accouché la première fois d'un enfant noir, accoucha la féconde de deux jumeaux ; l'un, qui étoit garçon, fe trouva noir; & l'autre , qui étoit fille , fe trouva mulâtre. Le garçon confervoit en croiiTant fes cheveux courts , naturellement frifés & reflemblans à de la laine : par d'autres marques encore il montroit qu'il étoit un vrai Nègre, & femblable en tout au père noir qui l'avoit fait naître. La fille au contraire étoit afTez blanche , avoit des yeux bleus , des cheveux noirs , longs & non frifés naturellement : elle reffembloit beaucoup à rinfpedeur de la plantation, Thomas Plum , que le mari Nègre favoit habiter avec fa femme , & dont il étoit jaloux. Enfin pour la troifieme fois cette Négreffe accoucha de trois enfans dont deux étoient mulâ- tres , & l'autre abfolument Nègre. Cet eifet doit-il être attribué à une pure imagination ? Le Phyficien n'admet point une explication aufîi charitable : il la rejette comme abfurde & contraire en tout point aux loix de la nature. Il faut donc admettre pour l'explication du troifieme accouchement, le concours de deux pères de race différente, & alors ime fuperfétation. Voyez le favant Difcours de M. Alflroëmer dans le Journal d'FIifloire NaturclU de M. l'Abbé Rofier. Ainfi, l'on voit que la blancheur ou la noirceur ne font qu'une variété accidentelle dans les climats chauds , qui fe confirme ou s'efface par une fuite de générations fous des climats étrangers. De même la couleur noire naturellement inhérente dans la plupart des climats à diverfes fortes de brutes , s'oblitère ou fe change fous des zones oppofées. C'efl ainii que le merle , le corbeau , l'ours font noirs chez nous , & gris ou blancs dans le Nord. Ces variétés deviennent héréditaires dans le mariage des mêmes efpeces & dans les mêmes climats. Nous le répé-. tons encore , la caufe de la couleur noire fous la Zone torride efl ex- trinfeque. Nous devons regarderies Blancs comme, la tige de tous les hommes, Adam, Eve. 6c leurs defcendans jufqu'à l'époque du déluge 342 N E G imiverfel furent blancs : dans cette première durée du monde aucun peuple noir n'a paru fur la face de la terre : les régions de la zone torride avoient été inconnues aux hommes jufqu alors. On peut confulter les Hiftoriensfacrés & profanes : on y verra que Noé , fes trois fils 6c leurs femmes refpeûives qui furent fauves de l'arche , partagèrent tout l'an- cien continent, & l'Afrique alors y fut comprife. Ce ne fut qu'après la confufion des Langues à la Tour de Babel, que les enfans de Noé fe diviferent. Celui qui entra en Afrique , y multiplia : (es defcendans pé- nétrèrent peu-à-peu jufqu'aux extrémités de cette prefqu'île. Les pre- miers de ces habitans Africains étoient blancs d'abord , & ils y devin- rent un peu bafanés : leurs enfans offrirent aux yeux des teintes plus foncées, & prefque mulâtres : d'autres générations fucceffives parurent par la fuite des temps parfaitement maures : ceux qui furent forcés de s'étendre vers les Tropiques , devinrent bientôt demi-noirs : enfin ceux qui furent fous l'Equateur, dans la Zone Torride, recevant les im'prefiions du climat & des ardeurs du foleil , parurent après quelques générations d'un noir parfait. Il a fallu fans doute un tems affez conli- dérable pour opérer infenfiblement & degré par degré cette métamor- phofe. Ceux des Ifmaélites , des Sarrafins , des Maures , des Arabes qui envahirent l'Afrique Occidentale , y devinrent noirs aufiî après quelques générations , tandis que ceux de ces mêmes peuples qui envahirent l'Efpagne , ne changèrent pas de couleur , qui étoit blanchâtre chez les uns , bafanée ou jaune chez les autres. Qu'on obferve philofophique- ment & avec attention deux Nègres , l'un de race ancienne &: l'autre de race moderne ; l'on reconnoîtra que les parties de la peau qui ne font que peu ou point expofées aux rayons du foleil , font peu ou point colorées , ou au moins nuancées de blanc , favoir les aifTelles , le dedans des mains , l'entre-deux des doigts , le deflbus du menton & fur-tout des pieds , l'entre-deux des cuiffes , le bas ventre ; tandis que la tête , le deffus des bras , le dos , le ventre & les épaules , découvertes félon l'habillement du pays , car c'eft leur peau qui leur fert de vêtement, font plus noirs. Les femmes du pays qui blanchiffent , & qui par con- féquent ontfouvent les mains dans l'eau , les ont prefque blanches. Ceux qui ont reçu des bleffures ou ont été brûlés , ou couverts des pullules de la petite vérole fur quelques parties du corps , ont ces parties brû- lées ou cicatrifées , blanches ou de couleur bafanée. Celui qui fe noie , N E G 345 garde après fa mort la pâleur que la frayeur & le faififfement lui avoient caufée. Les Nègres qui font fort âgés n'ont pas la teinte noire fi foncée ni fi brillante. C'efl fur les côtes occidentales de l'Afrique , notamment de la Guinée & d'Angole , que les Nègres vendent aux Européens , non-feulement les Efclaves Nègres qu'ils ont pris en tems de guerre , mais encore leurs propres enfans. Souvent une mère Négrefle livre fa fille à un étranger pour une fomme de cauris , qui fert de monnoie en ce pays, &: dont elle fe fait des bracelets ou des colliers propres à relever la noir- ceur de fon teint ; fouvent des garçons , auffi dénaturés que laNégrefTe, tâchent de furprendre & de garoter leur père pour le vendre également au marché , foit pour quelques ferpes , foit pour quelques bouteilles d'eau-de-vie. Le fpeftacle d'un tel marché fait frémir la nature ; & fi quelques Africains , brigands & idolâtres , ont affez de cruauté pour faire un commerce d'hommes , comment des Chrétiens de l'Europe peuvent-ils regarder cette contrée comme le terme de leur voyage , & être très-empreffés à fe trouver à l'enchère de cette abominable vente ? Cet ufage, dit-on, ne choque point aujourd'hui , parce que les préjugés de la naiflance & de l'éducation , & le befoin d'hommes pour cultiver nos Colonies , nous accoutument à ce négoce inconnu à nos pères. Quel affreux fyftême ! Nous conviendrons cependant que les François , dont l'inclination eft naturellement compatliTante, fe refufent à de certaines perquifitions qui choque la bienféance & font fouffrir l'humanité. Lorf- qu'il s'agit d'examiner un Nègre efclave , ils s'affurent particulièrement de fon âge , de fon tempérament & de fon caradere. Les Portugais, les Anglois , les Hollandois & les autres Nations qui ont des établiffemens dans les Indes Occidentales, tiennent à cet égard une conduite moins timide &: qui les rend moins dupes dans leur achat ; ils vifitent toutes les parties du corps des Noirs , & n'oublient aucune attitude dont ils font fufceptibles ; ils les remuent avec violence pour découvrir fi l'in- térieur répond à ce qui paroît ; ils les fcrit courir , crier , fauter , &:c. ils ne dédaignent pas de leur lécher la peau pour découvrir par le goût de la fueur s'ils n'ont point contrafté certaines maladies ( car les Nègres ne fe plaignent jamais : la peur des forciers & des efprits qu'ils appellent :{ambLS leur feroit braver la mort ) , & fi le poil du menton n'eft pas d'une force à indiquer un âge plus avancé que la déclaration qu'on leur €n a faite, Ces efclaves ne font pas toujours enchaînés j on fe contente de 344 N E G leur paiTer au bras une efpece de menote à laquelle une pièce de bois eft attachée : c'efl la marque de leur efclavage qui devient héréditaire dans la poUcritc de ces humains ; preuve nouvelle de l'inhumanité des Blancs. Nous avons un Édit donné à Verfailles au mois de Mars 1724 , appelle communément le Code noir^ & qui fert de Règlement pour l'ad- miniflration de la juflice , police , difcipline & le commerce des Efclaves Nègres , &c. NEGRE. Ceil une forte de poiffon de l'Amérique, qui efl: tout noir, & qui a la figure d'une tanche. Selon quelques Auteurs , il y a des poiflbns Nègres , dont la chair eft d'un très- bon goût, & fort nourriffante , fur-tout en Amérique; & d'autres qui pefent jufqu'à cent vingt livres , & qui font tellement venimeux , qu'ils donnent tout-à-coup la mort à ceux qui en mangent, NEGRES-CARTES. Dans le Comnicicc on donne ce nom à des émeraudes brutes de la première couleur ; elles font eftimées. Foye^ ÉMERAUDE. ^tGKlLLO^ , Nigrite & NégnJJ'c. Voyez à l'article Negre. NEGRO. C'eft une efpece de cigogne de la Guiane; fon bec efl large de deux pouces, & long d'onze pouces. Les yeux & le bec font noirs. La mâchoire fupérieure efl: plus épaiffe que l'inférieure, & un peu courbe par la pointe. NEGUNDO. C'efl: un arbre des Indes Orientales & particulièrement du Malabar , qui efl: du genre du vitex félon les Modernes: on en diflin- gue deux efpeces : l'une efl: appellée^;^/e,& l'autre y^/ze//^. Le mâle efl: grand comme un amandier: fes feuilles refl^emblent à celles du fureau ; elles font dentelées, lanugineufes & velues comme celles de la fauge. La femelle efl;appellée par les Portugais , norchila; par les Canarins, nier- gîindi ; en Malagate, y^w^^//; & en Malabar, noche. Cet arbre femelle croît à la même hauteur que le mâle; mais fes feuilles font plus larges, plus arrondies , non découpées , & femblables à celles du peuplier blanc. L'une & l'autre efpece , dit Lemery ^ font appellées, par les Arabes, par les Perfes , & par les habitans de Décan , bachc ; & par les Turcs, ayt» Leurs feuilles ont l'odeur & Te goût de la fauge, mais un peu plus acres & ameres. Vers le lever du folcil, il paroît fur ces feuilles une certaine liqueur blanche, qui en efl fortie la nuit. Leurs fleurs refl!emblent aflez à celles du romarin, & leurs fruits au poivre noir. Les feuilles , les fleurs & les fruits étant éçrafés, cuits dans de l'eau, &: fricaflTés dans de l'huile, foulagent N E I 345 foulagent quantité de doukurs, fur -tout celles des jointures; ce re- mède eu auiTi vulnéraire & cicatrifant. Les femmes du pays font une décodion de toutes ces mêmes parties de l'arbre, dont elles boivent ôc fe lavent le corps, dans l'idée que cette liqueur aide à la conception; tandis que les feuilles feules étant mâchées, donnent une bonne haleine & réprime , dit-on , les ardeurs de Vénus. NEIGE, nix. Efpece de météore, que l'on peut regarder comme des parcelles de nuages condenfées, concrètes &c glacées par le froid dans la moyenne région de l'air. Elle tombe fur la terre en petits flocons blancs , fort rares , très-légers, & qui font d'autant plus menus , que le temps efl plus froid. Ainfi la neige , dont les différences d'avec la grêle font vifibles & connues de tout le monde, n'eft aufli que de l'eau qui s'eft glacée dans l'air. Lorfque les molécules aqueufes quife font élevées dans l'atmofphere en forme de vapeurs, retombent en bruine ou en pluie , il arrive affez fouvent que le froid eft aflez conlidérable pour les geler : elles fe changent alors en neige ou en grêle ; en neige fi la con- gélation les faifit avant qu'elles fe foient réunies en grolTes gouttes; en grêle û les particules d'eau ont le temps de fe joindre avant que d'être prifes par la gelée, f^oje^ Grêle. La neige tombe plus fouvent la nuit que le jour , elle eft plus fré- quente dans les pays feptentrionaux que dans les tempérés. Elle eft en rayons criftallins plus ou moins épais , parallèles , durs , pointus &c hé- rifl'és ; le nombre des rayons n'eft pas toujours déterminé , ni leur forme ; c'eft ce qu'on peut reconnoître en recevant de la neige fur une toile cirée , & en l'examinant dans un lieu frais ; alors on verra des criftaux en flocons , velus , en étoile , en roue. Chaque flocon eft fouvent com- pofé, comme d'autant de petites branches garnies de feuilles & de fleurs légères ; c'eft un amas de petites lames glacées , confufément couchées les unes fur les autres , qui obfervent cependant un ordre afl!ez régulier ( celui de la glace ) par rapport à l'arrangement de leurs parties. En effet , la tendance des molécules de l'eau à s'unir en gelant fous des angles de foixante degrés , fe fait remarquer dans la ftrudure des par- ticules de la neige. Ce font des étoiles communément à fix rayons , fimples ou branchues, ces derniers compofés d'un filet principal, èc de filets latéraux attachés au premier fous un angle de foixante degrés. 11 en eft de plus compofés encore, mais on y voit prefque toujours le même arrangement : cette ftrufture régulière ne peut fe bien obferver Tome IF»^ X X 54iOYER& Pack-^E. NOIX PÉTRIFIÉES. Il y a quelques années qu'en creufant des anciens puits de falines abandonnés depuis cent cinquante ans à Lons-le-Saunier en Franche-Comté, on trouva à environ trente toifes de profondeur de-s noix pétrifiées, très-fmgulleres en ce qu'il n'y a que l'amande qui foît pétrifiée , tandis que l'extérieur ou la partie ligneufe & le zeft même, n'ont point changé de nature, ^ojei Mémoires de l^ Académie Royale des Sciences de Paris , année /742 , pag. jj ^34» NOIX DE PISTACHE, f^oye^ au. mot Pistachier. NOIX DU RICIN INDIEN. Voyei Ricin. NOIX DE SERPENT ou NOIX NHANDIROBA. Voyer^knovki & AVILA. NOIX DETERRE. Voye^ Terre-Noix. NOIX VOMIQUE , nux vomie a aut malus Malabarlca fructu cort^ cofo , amaricante , fcminc piano , comprejfo. C'efl une petite amande plate , de la forme d'un bouton , d'une fubftance dure comme de la corne , de couleur grife , un peu îanugineufe , remarquable par une efpece de nombril qui eft au centre. Ces amandes fe trouvent au nombre de quinze dans un fruit rond , qui croît fur un arbre très-gros ( fon tronc ayant dix pieds de contour ) , lequel naît au Malabar & à la côte d!e Coromandel , & qui porte des fleurs d'une feule pièce , en entonnoir. On foupçonne que cet arbre efl le même que celui qui donne le bois de couleuvre: voyez ce mot. Mais ce font, félon M. Linncus ^ deitx efpeces du genre qu'il nomme Jlrychnos, Les noix vomiques , ainfi que tous les médicamens amers, feconent violemment les nerfs fenfibles de l'ellomac dgs animaux , ôi les font N O î . 375 périr. La noix vomîque eà un poilbn pour les quadrupèdes & les oifeaux, ainfi que pour l'homme , dont une très- petite dofe bou- leverfe l'eftomac & occafionne des mouvemens convuliifs & de terribles angoiffes. Diverfes expériences faites fur des chiens, prouvent que ce poiion produit le même phénomène dans les autres animaux , c'eft-à-dire des mouvemens convulfifs, l'épilepfie & la mort. La direc- tion des animaux, à qui on en avoit fait manger, a appris qu'il n'agit point par voie de coagulation dans le fang ou dans le fuc nerveux , car il n'a paru aucun engorgement femblable à ceux qu'occafionnent les poifons coagulans; tel que l'on dit qu'en produit la ciguë d'eau. Ce poifon ne corrode point les membranes de l'eftomac , mais il irrite les fibres nerveufes , dont il détruit le mouvement uniforme & ofcillatoire. Dès que le fuc ilomacal a commencé à dlffoudre la noix vomlque , les effets du poifon commencent à fe faire fentir ; c'eft au bout d'un quart- d'heure ou d'une demi-heure. Tout prouve que la noix vomique efl très - dangereufe , quoique quelques-uns ofent affurer qu'elle n'eft funefte qu'aux bêtes & point aux hommes; fon ufage doit donc être abfolument banni, à moins qu'on n'en faffe ufage à l'extérieur, la poudre de ces noix étant réfolutive. On lit dans V Encyclopédie , f^ol. If^ ,p. 2S1 , col. 2 , qu'on peut fauver la vie des oifeaux qui auroient avalé de ce poifon , en leur faifant boire de l'eau par force , & qu'on fauve pareillement le chien en lui faifant avaler du vinaigre. L'on croit , mais à tort , que la noix igafur des Philippines , autrement dite fève de S, Ignace , efl aulîi une efpece de noix vomique. L'ifagur, iî connu chez les Indiens fous le nom de mananaag^ cathologan , & chez les Efpagnols fous celui de pkita de Blfayas , eft un noyau arrondi , inégal, comme noueux, très-dur, d'une fubftance comme de corne, femblable à l'hermodafte , d'une faveur de graine de citron , mais très- amere , d'une couleur blanche-^verdâtre , qui devient brune en viell- liffant. La plante qui donne l'igafur, s'appelle cantara ou catalongay , elle eft très-rampante ; fon tronc efl ligneux , liffe , poreux, de la grofieur du bras ; fes feuilles reffemblent à celles du malabathrum , fa fleur à celle du grenadier , & il lui fuccede un fruit gros comme un melon , couvert d'une peau fort mince & d'une autre fubftance dure , comme pierreufe; l'intérieur de ce fruit efl rempli d'une chair un peu amere , 374 N O I NO M jaune & molle dans laquelle font renfermés communément vingt-quatre noyaux gros, mais qui diminuent beaucoup en fe féchant. Ce font les Jéfuites Portugais Mifîionnaires, qui nous ont apporté depuis peu ces fruits, qui étoient inconnus jufqu'alors. Le P. George CameUi, l'un d'entr'eux, raconte des chofes furprenantes du cas que les Indiens en font. Le commun du peuple , dit-il, donne indifféremment la noix igafur pour guérir généralement tous les maux du corps humain, fans avoir aucun égard au temps, à la maladie, à l'âge, ou même à la dofe ; & même plufieurs la portent fufpendue au cou , & ils croient que par le moyen de cette amulette , ils font à l'abri & exempts de tout poi- fon, de la pefle , de la contagion, des enchantemens magiques, des philtres, & fpécialement an fopto , ou de cette efpece de poifon que l'on dit qui tue en le refpirant feulement, &, ce qui cft bien plus, du démon même. Cependant notre Miffionnaire dit qu'il ne faut pas pren- dre ce remède témérairement , parce qu'il produit des mouvemens con- vulfifs, entr'autres le ris fardonique & le fpafme dans les Epagnols, au lieu qu'il n'en excite aucun dans les Indiens : en général (es vertus fem- blent différer peu de celles de la noix vomique , mais ces amandes n'ont aucune reffembîance entre elles; au refîe ce remède, dit M. Haller, n'a pas pu prendre en Europe. NOIX VOMIQUE FOSSILE, c'eft \a pierre lenticulaire. Voyez ce mot. NOKTHO. Les Siamois donnent ce nom à un oifeau appelle grand gofier en Afrique par tous les Voyageurs, & en Amérique /'«///c^/z, ou onocrotale par les Naturaliftes : voye^ PÉLICAN. NOMBRIL, ou OMBILIC, umbilicus^ eft le nœud formé de la peau & de la réunion des vaiffeaux ombilicaux , au milieu du ventre , & que l'on coupe à l'enfant aufli-tôt qu'il efl né. Chez les hommes le nombril eft apparent & bien marqué , au lieu que dans la plupart des brutes il eft prefque infenfible & fou vent entièrement oblitéré; les fmges n'ont même qu'une efpece de callofité ou de dureté à la place du nombril. Il eft probable que les hommes n'auroient pas le nombril plus apparent s'il avoit été lié & coupé à fleur du ventre, après la naiffance de l'enfant, Voyei^k V article HoMME. Le nombril eflfujet, particuHérement aux femmes , à la tumeur que les Médecins nomment exomphale. NOMBRIL MARIN, umhiUcus marinus^ ell un limaçon ombiliqué: yoye^ ti« ;/?o; Limaçon DE MER, NOM N O R 375 Les naturalises donnent aufîl le nom de nombril marin aux opercules des coquillages marins & operculés. NOMBRIL DE \ É'^US, umbilicus ^emris. Vldinte. autrement connue fous le nom de cotyUdon, & dont on dillingue deux efpeces principales que nous allons décrire. 1°. Le grand Cotylédon ou Nombril de Vénus, ou Escudes ouEscuELLES COMMUNES, cotylédon major. Cette plante, qui croît naturellement dans les rochers & les vieux murs des édifices, aux lieux pierreux & chauds , eft affez commune dans plufieurs Provinces de France; elle ne s'élève pas il aifément dans les jardins. Sa racine efl tubéreufe , charnue , blanche , fîbreufe en deffous ; elle poufTe des feuil- les rondes-, épaiffes, grafles, pleines de fuc, creufées en bafîîn comme un nombril, attachées par des queues longues, verdâtres, d'un goût vifqueux & infipide ; d'entre lefquelles s'élève une tige menue , haute d'environ un demi-pied, qui fe divife en plufieurs rameaux revêtus de petites fleurs en cloches, de couleur blanchâtre ou tirant fur le purpurin: ces fleurs font remplacées par des fruits à plufieurs gaines membra- neufes , qui renferment des femences fort menues. Cette plante com- mence à paroître vers l'automne ; elle conferve its feuilles pendant l'hiver , elle fleurit en Avril & Mai , alors fes feuilles fe flétriffent. Le Cotylédon ou Nombril de Vénus a fleur jaune, cotylé- don flore luteo.-fa. racine eu. longue, vivace & rampante ; fes feuilles font plus épaiffes que les précédentes , 6<: crénelées en leurs bords ; la tige eflrougeâtre , les fleurs jaunes & difpofées en épi: à ces fleurs fuc- cedent cinq capfules oblongues , verdâtres , remplies de graines très- menues & rougeâtres. Cette plante vient ordinairement de Portugal; on la cultive dans les jardins curieux, oii elle n'efl pas difficile à confer- ver, mais elle périt comme la précédente efpece. Les feuilles du cotylédon ont un goût vifqueux & aqueux; elles font rafraîchiffantes , & produifent , ainfi que la joubarbe , de très-bons effets - dans les inflammations externes , fur les brûlures & les hémorrhoïdes. NONNATA. A'oy^^ Aphie. NONNETTE. f^oyei au mot MÉSANGE. NOPAL. Foyei Opuntia. NORD-CAPER, efl une petite efpece de baleine, qui fe pêche fur les côtes de Norvège & d'Iflande : c'efl la baleine glaciale de Klein, Voyez au mot Baleine, 37^ N O R N O Y NORRKA. Les Naturalises Suédois donnent ce nom à une pierre de roche compofée , comme graniteufe , où le mica abonde ; nous en avons qui contiennent auffi du talc. NOSTOCH. Efpece de fucus terreftre. Foyei à fanlcU Mousse. NOTOPEDE. ^oj^^Taupin. NOYAUX , nucUi aut mctroluL Communément on donne ce nom aux empreintes intérieures & folides des coquillages: la matière qui com- pofe ces noyaux varie beaucoup : elle provient ordinairement des mêmes couches qui forment les Uts des pierres oii ces fofTiles étoient enfermés; elle s'efl infmuée fous la forme d'une vafe liquide dans la cavité de la coquille , & s'eft endurcie & moulée à mefure que l'eau s'en retiroit : il n'eft pas toujours poffible de bien déterminer à quelle forte de coquille tel noyau peut fe rapporter , cette empreinte ne pouvant porter le ca- raflere que la plupart des coquilles ont extérieurement, &qui fouvent en fait la différence fpéclfîque. On dit auffi noyaux d'amande , de pêche , de cerlfe , de prune , d'abri- cot, &c. Le noyait^ ojficulum^ efl la partie dure des fruits qui contient un corps tendre & bon à manger, auquel on a donné le nom d'amande. Enfin on appelle noyau la partie la plus dure qui fe trouve au centre de certains cailloux. NOYER , nux juglans. Le noyer eft une arbre qui devient très-beau , agréable par fon feuillage, & qui efl d'une très-grande utilité, tant par {çs fruits que par fon bois. Il y a plufieurs efpeces de noyers qui différent foit par leurs fruits , folt par leurs feuilles. On difllngue le noyer ordinaire, dit auffi noyer royal: le noyer à gros fruits , dit noix de jauge ; {qs noix font extrême- ment grofles , mais elles ne font jamais bien pleines , & ont peu de faveur : il y a une efpece de noyer à fruit tendre , un autre à feuilles découpées : le noyer qui donne fes fruits deux fois l'année: le noyer de la Louifiane, dont le fruit a la figure d'une noix mufcade, & que l'on nomme pacane^ & quelques autres efpeces du Canada , même celle d'Europe qu'on nomme en France noyer de la S. Jean , & que Carlowl^ & Falvajfor ont décrit ne frudilîer qu'à la S. Jean; c'eflle nux fruclu ferotino des Au- teurs. Comme les noyers fe multiplient de femence, il fe forme beaucoup de variétés dans ces arbres. Les noyers portent fur les mêmes pieds des fleurs mâles & des fleurs femelles. , N O Y 377 femelles. Les fleurs mâles forment des chatons; cette pouffiere fécon- dante des chatons pafTe pour être bonne dans la dyffenterie. Les fleurs femelles font affemblées deuK ou trois enfemble. Aux fleurs fuccedent les fruits qui font couverts d'une écorce charnue, verte, acerbe & un peu amere, que l'on nomme l^rou de noix, qui recouvre une écale ou coque ligneufe qui renferme une amande divifée en quatre lobes. Pref- que tous les noyers ont les feuilles conjuguées & attachées fur une côte terminée par une feuille impaire; elles ont une bonne odeur. Les noyers fe plaifent le long des chemins, dans les vignes, le long des terres labourées , fur les collines & dans les gorges des montagnes à î'expofition du Nord & du Levant. Leurs racines pénètrent dans du tuf, dans de la craie, lieux où aucun arbre ne jetteroit des racines, fi on en excepte la vigne. On doit avoir foin de labourer la terre au pied des noyers réunis en quinconce, fi on ne veut point les voir périr. On pré- tend que les cendres font le meilleur & le feul engrais qui convienne aux noyers. Il faut cependant avertir les Economes rufliques qu'on ne doit point planter de noyers dans les vignes, ni dans les terres labourées , î^ur ombrage leur efl: pernicieux; les graines ne mùriffent point fous leur ombre : ajoutons que les racines des noyers s'étendant à plus de iix toifes dans les terrains cultivés & fumés, elles dérobent la nourriture aux ceps de la vigne , qui languit & ne produit rien. Les noyers ne fe multiplient ordinairement que par femences ou noix, quoique quelques pcrfonnes difent avoir réufîi avec fuccès à lefs greffer. Cet arbre commence à donner quelques fruits au bout de.fept ans de femence , & il eft à fa perfeûion lorfqu'il efl: âgé d'environ foixante ans. Si l'on fait une incifion à fon tronc , il en fort une liqueur abondante qui peut fervir de boiffon. Les noix différent par la groffeur , la figure , la" dureté & le goût : il y en a une efpece dont l'amande efl amere. Les noix font très-bonnes à manger quand elles approchent de leur maturité , on les nomme alors czrntaux. Les noix que l'on garde pour l'hiver, acquièrent un peu d'acreté ou de rancidité en féchant ; mais en les mettant tremper quelques jours dans l'eau , l'amande fe gonfle , on peut la dépouiller de fa peau , & alors elle efl: affez douce. On confît les noix vertes, foit avec leur brou, fbit fans brou. On fait avec les noix feches & pelées une efpece de con- ferve brûlée affez agréable , que l'on nomme nouga. On emploie les noix verte* pour faire un ratafia de fantç très-flomachique. Pour cela Tome li^, Bbb 37» N O Y on les dépouille de leur brou & on les grille au fucre. Quelquefois on fait infufer les noix vertes entières dans de l'eau-de-vie & du fucre ; c'efl encore un ratafia très-ufité & connu fous le nom de brou de noix» Les noix vertes n'ont d'autre emploi médicinal que d'être un des ingré- diens de l'eau appellée Veau de. trois noix. M. Baron, dans fes Notes fur Lèmery , prétend qu'au lieu de noix il vaudroit mieux n'employer que des fleurs de noyer , & ne les difiiller qu'une fois. Le plus grand ufag* que l'on fait des noix feches & pilées fous la meule, eft d'en retirer par expreffion une première huile, que quel- ques perfonnes préfèrent au beurre &: à l'huile d'olive , pour faire des fritures : cette huile en vieiiliffant acquiert de la vertu ; elle devient propre à entrer dans plufieurs emplâtres , dans les cataplafmes contre i'efquinancie , dans les lavemens adouciffans. On prend enfuite la pâte qui refte après avoir exprimé cette huile , on la met dans de grandes chaudières de fer fur un feu lent ; lorfque cette pâte eft bridante , on la met aufTi-tôt dans des toiles & on la porte au prefl'oir; par ce moyen on en retire une féconde huile , qui a une odeur défagréable , mais qui eft bonne à brûler , pour faire du favon , & excellente pour les grofTes peintures, fur-tout quand on a foin de la mêler avec de la htharge i cette huile a la propriété de faire fécher plus promptementles couleurs. L'huile de noix mêlée avec de l'effence de térébenthine eft propre à faire im vernis gras, qui eft aflez beau & qu'on peut appliquer fur les ou- vrages de menuiferie. La décodion des feuilles de noyer dans de l'eau fimple, déterge les ulcères , fur-tout en y ajoutant un peu de fucre. Elle eft très-efticace ( fans fucre ) pour détruire les fourmis qui gâtent les arbres & les prairies. Voye^^ la manière d"* en faire ufage à Uaniclc FoURMl. On pré- tend qu'un cheval qui a été bouchonné ou épongé avec la décoftion de feuilles de noyer, n'eft point tourmenté de mouches pendant la Jour- née, parce que cette amertume empêche les mouches de s'y attacher. On a dit que l'ombre de cet arbre étoit fatale aux animaux; l'expé- rience, dit-on, fait voir que le mal de tête funient à quelques perfonnes qui fe couchent fous les noyers pour s'y repofer & y dormir; ce qui n'eft pas caufé par l'ombre , mais par lesexhalaifons qui fortent de fes feuilles, & qui font contraires à quelques cerveaux^Si cette ornière pouvoitcaii- fer quelque incommodité , cela pourroit peut-être arriver à des pei-fonnes qui, par ia fuite d'un exercice violent ayant extrêmement <:haud, fe N O Y 379 jnettroient fous (on feuillage , & dont la tranfpiratîon fe trouveroit arrêtée par la trop grande fraîcheur de la place. On fait ufage en médecine de toutes les parties du noyer. Cet arbre eft très-précieux pour les Arts. Les Teinturiers en emploient les racines , l'écorce , fur-tout celle des racines, les feuilles & le brou pour faire des teintures en fauve ou de couleur de café ou de noifette très-folides ; les étoffes même que l'on teint avec ces fubftances , n'ont pas befoin d'être alunées. La décodion du brou de noix eft fpécifîque contre les punaifes & le venin des animaux ; les coquilles & les zeftes de ce fruit font fudo- rifîques & utiles aux perfonnes qui ont une conftipation de ventre habi- tuelle ; les noix confîtes font fort prolifiques &c corrigent la mauvaife haleine ; elles font eflimées pour fortifier l'eflomac & arrêter les vomif- femens qui viennent de la foiblefTe de ce vifcere. Les Menuifiers & les Tourneurs font avec le brou pourri dans l'eau une teinture qui donne aux bois blancs une belle couleur de noyer. Le bois de noyer efl liant, affez plein , facile à travailler ; on en fabrique les meilleurs fabots. Il efl recherché par les Sculpteurs , les Ebénifles , les Armuriers , les Tour- neurs, &;c. & c'efl un des meilleurs bois de l'Europe pour faire toutes fortes de meubles , il n'efl pas fujet à la vermoulure. M. Bourgeois dit que c'efl fur-tout de la racine de noyer que les Ebénifles & les Table- tiers fe fervent pour faire de beaux meubles de chambre , comme tables , commodes , tablettes , armoires. On fcie ces racines en travers &c en lames minces d'un quart de pouce , pour en faire des placages qui re- préfentent le marbre & toute forte de ramages. Ces racines font fi fort recherchées en Angleterre où les noyers font rares , qu'on en tranfporte par eau depuis la SuifTe. Les noyers de la Virginie & ceux de la Louifiane, dit M. Duhamel, ont leur bois plus coloré que le nôtre ; il eu. quelquefois prefque noir, mais fes pores font fort larges : ce font de fort beaux arbres ; leurs feuilles font très - longues , & quelquefois chargées d'onze foholes. Mais le fruit des noix noires n'efl bon qu'en cerneaux , parce qu'étant mûres, les cloifons intérieures font trop dures ; cependant les Naturels du pays en font une efpece de pain : voici leur méthode. Ils écrafent les noix avec des maillets , & ils lavent cette pâte dans quantité d'eau : îe bois fumage avec une portion d'huile , à mefure qu'ils remuent la pâte avec les mains , & il fe précipite au fond une efpece de farine : c'eft celle dont ils font ufage. Il n'y a que la noix pacarie ou de pacane Bbb 2 396 N U A qui foit fort bonne , non-feulement parce que fon écorce n'eft pas fort dure, mais encore parce que fon amande participe un peu du goût de la noifette. En Canada il y a une efpece de noyer qui fournit , quoiqu'en petite quantité , une liqueur auffi épaifle & aufli fucrée qu'un firop ; mais cette liqueur eil moins agréable que celle de l'érable. U croît fur le tronc du noyer un champignon ou une fubflance fpon- gieufe, de la confiftance du cuir , dont les Anciens fe fervoient comme de cautère : ils l'appliquoient d'un bout fur la peau & mettoient le feu à l'autre bout, & le laifloient ainfi brûler jufqu'à ce qu'il fiit réduit en cendres. Les Turcs employoient de la même manière le farment de vigne, &c. NUAGES ou NUÉES , nubes. Un amas de vapeurs humides qui font fufpendues dans l'air fupérieur, ou qui font mues par le vent, produit les nuages : ainfi les nuées font formées par l'évaporation des eau>: , tant Gagnantes que coulantes , & notamment par celles de la mer. Elles ne fe forment point lorfqu'il pleut ; au contraire, elles fe détruifent; mais dès qu'il fait beau temps , c'eft-à-dire quand la lumière du foleiî^ qui doit éclairer notre atmofphere , n'eil point affoiblie par l'inter- pofition des nuages , alors Tévaporation des eaux a lieu , & ces vapeurs humides montent avec la fumée des cheminées en colonnes, en trom- pes, &c. jufques dans une certaine région de l'air, dont elles égalent la pefanteur , & où elles paroiiTent flotter & nager fous la forme de miages d'abord légers , enfuite plus épais , enfin noirâtres : c'efl alors qu'ils abforbent la lumière , obfcurcillent Fair d'autant plus , qu'ils font plus amaffés & arrêtés enfemble ; mais dans tous les temps, ils font le jouet des vents qui agitent l'air ; ils leur font prendre dijfférentes formes & en augmentant la grandeur , c'eR-à-dire la longueur & le diamètre, les difperfent de telle manière qu'ils difpâroiilent entièrement. Le vent fait quelquefois avancer les nuées avec tant de rapidité , qu'elles font deux à trois lieues en une heure. C'eft quand les nuages font trop épais , ou que la colonne d'air qui les foutient efl: trop foulée , qu'il tonne , ou qu'il fait une violente tempête de vents , que le cours , l'amas, le choc &:la féparation des nuages a lieu , & qu'ils fe réfolvent €n gouttes plus ou moins grofles , ce qui produit les différentes /?///ig.f. Voyez ce mot , celui de Mer , & celui des Eaux du ciel , à l'article Eaux. Il y a des nuages qui paroiffent rouges au lever & coucher du foleil , N U A 381 Se d'autres qui fe trouvent plus proche de l'horizon paroiffent violets & deviennent bientôt après de couleur bleue. Ces couleurs dépendent de la lumière qui pénètre dans les globales de vapeur tranfparente , & qui venant à réfléchir , fort par un autre côté & fe fépare en fes couleurs, dont le rouge vient d'abord frapper notre vue, enfitite la violette , puis la bleue , fuivant la différente hauteur du foleil. Ces couleurs fe forment à-peu-près de la même manière que celle de l'arc- en-ciel. f^oye^ ce mot. Tous les Voyageurs Phyficiens s'apperçoivent facilement de la for- mation des nuages ; il fuffit de contempler dans un lointain le lieu où fe rendent les brouillards des rivières ^ de la mer , &c les vapeurs qui fortent des cheminées d'une grande Ville. Dans les pays de monta- gnes on voit les nuages fe former, comme fi les montagnes rendoient de la fumée. Ces nuages nailTent, montent, fe réunifient, s'étendent & occupent bientôt tout l'horizon. On a éprouvé mille fois que les nuages , même les plus épais que l'on a vu du pied des montagnes s'accrocher au fommet , & que l'on a enfuite traverfés pour arriver au haut, ne font que des brouillards fcmblables à ceux qui s'abaiflent de temps en temps fur les plaines. On voit quelquefois des nuages qui font fufpendus les uns au-defîus des autres , & qui paroliTent fort dilîinâs & très-éloignés les uns des autres , ce qui dépend fur-tout de la différence de leur pefanteur fpécifique qui les tient en équilibre avec un air plus ou moins denfe. Ces différens nuages plus ou moins élevés, prennent fouvent différentes routes , fans fe mêler enfemble ; ils font aufîl de différentes figures , & quand ceux de même élévation fe réuniffent, c'efl toujours par leurs bafes qu'ils fe confondent. Selon l'élé- vation ou la région qu'habitent les nuages , l'eau qui en diilille ell fou- vent congelée avant que de parvenir fur notre fol. /oyez aux mots Grêle & Neige. Au rciîe les nuages , d'où tombent la grêle , ne font jamais plus élevés, dit KepUr\ que d'un quart de mille , c'efl-à-dire, cinq mille pieds du Rhin. Fromond , dans fa Météorologie , prétend qu'un nuage de pluie efl rarem.ent placé plus haut qu'à cinq cents pas ou à deux mille cinq cents pieds de la terre. Ceux qui (ont blanchâtres , peu opaques , & qui réfléchiffent encore la lumière du foleil , font élevés d'environ demi-lieue : ainfi l'ufage des nuages eil, i^. de fou- tenir &; de contenir la matière dont la pluie efl formée ; 2*'. de défendre la terre contre la trop grande & trop longue ardeur du foleil qui la ^ 382 NUI N U M poiirroit deffécher. 3°. Enfin d'être une des principales caiifes des vents libres qui foufflent de toutes parts , & font dîme très -grande Utilité. NUIT, nox. Nom donné à cet état de ténèbres oppofé à la clarté, à la lumière du jour , qui ne commence qu'à la fin du crépufcule , & qui dure tant que le foleil efl fous l'horifon. AV^e^JoUR. Sous l'Equateur les nuits font égales au jour ; fous le Pôle la nuit dure la moitié de l'année. Le jour des équinoxes , les nuits font égales aux jours dans tous les climats de la terre. Dans l'hémifphere Septentrional que nous habitons , les nuits font plus grandes que les jours , depuis l'équinoxe d'automne jufqu'à celui du printems ; & les nuits font plus courtes que les jours , depuis l'équinoxe du printems jufqu'à celui d'automne. Les plus grandes nuits de l'hémifphere Septentrional arrivent au folflice d'hiver , & les plus courtes au folflice d'été ; c'eft le contraire dans l'hémifphere Méridional. NUMISMALES. On donne ce nom aux ^i^rr es frument aires ou mim- mulâtres , & notamment aux pierres lenticulaires. Voyez ce mot & l'ar- ticle Pierre numismales. • NUMMULAIRE , ou Monnoyere, ou Herbe aux Ecus , ou Herbe a cent maux, nummularia aut centi-morbia ^ aut lyfimachia ^ humi fufa , folio rotundiore , flore luteo , Tournefort. C'eft une plante qui croît très-communément à la campagne dans des lieux humides , le long des foliés &: des chemins , & proche des ruiffeaux. Sa racine efl traçante , menue : elle pouffe plufieurs tiges longues , grêles , anguleufes , rampantes à terre , portant des feuilles oppofées deux à deux , larges d'un doigt , arrondies & un peu crêpées , vertes , jau- nâtres , d'un goût fort aftringent. Ses fleurs fortent pendant l'été des aiffelles des feuilles : elles font grandes, jaunes, formées en rofette: jl leur fuccede de petits fruits fphériques, qui contiennent des femences fort menues. Cette plante efl du genre des lyfymachies. Voyez Chasse- SOSSE. La nummulaire s'étend plus ou moins en grandeur, fuivantles terres 011 elle naît ; celle qui fe trouve dans les jardins eft plus grande que celle des champs. On doute que cette plante faffe aucun mal aux mou- tons , comme le prétendent quelques Payfans : elle efl aflringente , anti-fcorbuîique , vulnéraire , excellente pour arrêter toutes fortes de flux , 6c pour confolider les plaies & les ulcères du poumon. N U T N Y M 383 NUTA JrON. En Botanique , c'eft la direaion de la plante du côté du foleil : voye^ cette ejp^ce de mouvement à V anïcU PLANTE : Ls. natation en afîronomie fe dit d'une efpece de mouvement qu'on obferve dans l'axe de la terre , en vertu duquel il s'incline tantôt plus , tantôt moins à l'éclip- tique. La nutation de l'axe de la terre vient de la figure de cette planète qui n'elî pas parfaitement fphérique , & fur laquelle Taûion du foleil , & notamment de la lune eft un peu différente , félon les fituations où ces deux aflres font par rapport à nous , c'eft-à-dire que la force de cette aftion ne palTe pas toujours exatlement par le centre de gravité de la terre , & par conféquent elle doit produire dans fon axe un petit mou- vement de rotation, f^oyei Terre. NYCTANTES. Cette nouvelle plante Indienne préfentéeàla Société Royale de Londres par M. Jonas Berguès , Médecin Suédois & Membre de cette Société , porte (es branches penchées, oppofées, rondes, les inférieures font unies, les fupérieures font velues , rameufes, & les rejetons que la tige pouffe font oppofés. Les feuilles font oppofées , en forme de cœur alongé, terminées en pointe, grandes de deux pouces, aiguës, entière^, unies de tous les côtés, nerveufes , ayant le bord un peu ondulé & d'un beau vert. Les feuilles inférieures font plus petites , & celles qui font tout-à-fait au bas font en forme de cœur ovale Se petites. Les fleurs font rafî'emblées au nombre de cinq ou fix , difpofées en ombelles, ou plutôt en corymbe , & elles ont un pédicule fort court. Le calice ou périanthe efl d'une feule pièce , tubulé , à fix ou fept di- vifions dans fa partie fupérieure : ces divifions font en forme d'alênes & velues , la corolle efl monopétale, le tube cylindrique, cannelé, long d'un pouce & renflé dans le haut , le limbe eu plane , féparé en huit ou neuf divifions qui font ovales, oblongues & aiguës; les étamines au nombre de deux font fort courtes , leur fommet ou anthère efl linéaire , obtus , fiUonné de part & d'autre , caché dans le tube de îa corolle. Le germe efl de forme ronde , tronqué , émouné , poli , &z le flile efl en forme de fils de la longueur des étamines , le fligTate efl gros &c fendu en deux. NYMPHE & Chrysalide, Aurélie , Fève & Nécydale , font des termes dont les anciens Naturalifles fe font fervis indifféremment pour défigner la forme & l'état mitoyen, par lequel les chenilles, les mouches , & le plus grand nombre des infe£les , paffenî en fortant de l'état de chenille ou de ver, pour parvenir à celui de mouche ou de 384 N Y M ' papillon; c'eft cet état, qu'en matière de ver à foie , on exprime parle mot àe/êve; mais aujourd'hui le fens en tH fixe , comme nous le ver- rons à la fin de cet article. La Nature , fi féconde & fi variée dans fes oeuvres , n'obferve point les mêmes lois dans la naiiTance des infedes , que dans celle des grands animaux. Les grands animaux naifi^ent , ou d'un œuf couvé dans le ventre de la mère, fi nous nous en rapportons au fentiment d'un grand nombre d'Anatomilles , ou d'un œuf couvé hors de fon ventre ; ce qui fait nommer les premiers vivipares , & les autres ovipares, f^oye^ ces mots. Dans l'un & l'autre cas , ils fortent de l'œuf tout parfaits : ils n'ont plus befoin que de croître. La nature paroît avoir fait de plus grands préparatifs pour les infe£les : elle les fait pafiTer ( du moins le plus grand nombre des infeûes ailés que nous connoifixjns ) par plufieurs états , avant de les amener à leur perfeftion ; elle les fait être fuccefiî- vement trois efpeces d'animaux , qui paroififent à l'extérieur n'avoir nul rapport l'un à l'autre. Prenons l'exemple du papillon. Il efl d'abord contenu dans un œuf; mais que fort-il de cet œuf? Ce n'efi: point un papillon; c'efi:un infe£le que l'on appelle larve ou chenille , qui rampe, qui broute l'herbe , qui a de fortes mâchoires , un prodigieux efiomac , grand nombre de jambes , qui file & fait une coque avec beaucoup d'art. Après un certain nombre de jours marqués par la Nature , ce prétendu ver jaune devient malade , mue ou change de forme , & de- vient ce qu'on appelle y^V^ ou chryfalide^^ nymphe dans d'autres- infedes. L'animal ne prend cette forme , qu'après s'être défait de fa peau , de fes jambes, de l'enveloppe extérieure de fa tête , de fon crâne & de fes mâchoires , de fa fihere , de fon prodigieux efiomac , & d'une partie de fes poumons. En quittant cet état de chenille, & les parties qui lui étoient propres , il reparoît couvert d'une membrane dure & ferme , qui l'enveloppe de toutes parts , fans lui laifiTer la liberté d'aucun de fes membres ; ainfi empaqueté & emmailloté , il pafi!e un temps afi'ez notable , les uns plus , les autres moins , quelques-uns julqu'à plus d'un an , fans prendre aucun aliment, & la plupart dans une inaftion totale. Pendant cette efpece de léthargie , il fe fait une tranfpiration infenfible des humeurs fuperflues , qui fait prendre de la fohdité aux parties inté- rieures de la chryfallde ; & enfin , de ce corps mitoyen entre un animal vivant & un animal mort , il en fort un animal qui n'a plus rien de la forme du premier. Le premier rampoit ; celui-ci vole: le premier broutoit N Y M s 385 broutoit rherbe , Ce traînoit lourdement fur la terre ; celui- ci plus agile, vole leftement , n'habite plus que la région de l'air , ne vit que de miel , de rofée , & du fuc qu'il pompe dans les glandes neftariferes des fleurs. La larve avoit des mâchoires pour hacher; le papillon n'a plus qu'une trompe pour fucer , & ne rend pas d'excrémens fenfibles : la larve ignoroit parfaitement les plaifirs de l'amour , elle n'avoit aucune con- noiffance de fon fexe , le papillon femble n'avoir plus d'autres penfées, & «'être né que pour perpétuer fon efpece. Ce changement eft le dernier que l'infeQe éprouve. Les anciens Philosophes ont raifonné beaucoup fur ces changemens , & fouvent afTez mal : les uns ont pris ces changemens pour des méta- morphofes complettes ; les autres ont regardé l'état de fève ou chryfalldcy comme une véritable mort ; & le retour de l'animal en papillon , comme une réfurreôion parfaite. Rien de plus contraire à la vérité & même à la raifon , que ces divers fentimèns. Le ver à foie , dans quelque temps qu'on le prenne , foit chenille , foit fève , foit papillon , n'a jamais ceffé de vivre , ni d'être le même animal ; la feule différence qu'on peut remarquer dans fes dilférens états, efl qu'il avoit, étant chenille , des parties qui dévoient être inutiles au papillon : elles fe font defféchées & détruites , lorfque le ver a pris la forme de fève ou chryfalide. D'autres parties néceflaires au papillon, comme les ailes , la trompe, les parties de la génération étant inutiles au ver , n'ont commencé à fe développer que lorfque le temps d'en faire ufage s'eft approché. Cette merveille , que la nature opère dans les infeftes, arrive auflî en nous. Combien de parties deviennent inutiles à un enfant qui vient de naître ? Le thymus, le trou ovale, le cordon ombUical, & bien d'autres , s'anéan- tiffent après la naiflance ; d'autres , qui étoient inconnues à la première enfance , fe développent avec l'âge. Cet échange de parties fe fait en bien plus grand nombre , & dans un temps plus court dans les infedes, ce qui le rend plus remarquable : c'efl aufli ce qui a donné lieu à quel- ques Auteurs de regarder le ver à foie comme un animal différent de fon papillon , de penfer que le papillon efl un foetus nourri & élevé dans le corps du ver. Il eft aiféde démontrer le contraire. Un foetus peut périr dans le ventre de la mère , fans qu'il en arrive d'accident à la mère , parce que le fœtus & la mère font deux animaux complets , qui ont Séparément les parties néceffaires à la vie. Il n'en efl pas de même du ver à foie & du papillon. Que l'on ouvre un ver à foie. Tome IF, Ccc 3S(^ • N Y M lorrqu'il eft dans l'état de ver , on lui trouvera diftinftement un cœur ou une longue artère qui en fait l'office , une moelle épiniere , un cerveau , un grand nombre de mufcles , & des ouvertures qui tiennent lieu de poumon. Que l'on ouvre un femblable animal étant chryfalide, étant papillon , on retrouvera toujours ces mêmes parties. Ces parties eflentielles à la vie & au mouvement , font uniques dans le ver à foie , qui paroit fucceffivement fous trois formes différentes , quoiqu'il ne foit toujours que le même animal , puifque les parties qui conftituerit la vie font toujours les mêmes. A tout inftant l'Hiftoire Naturelle nous préfente de femblables mer- veilles , qui toutes réfléchiffent la puifTance du Créateur. La chryfalide , ainfi nommée à caufe de fa couleur d'or , ou fève à caufe de fa forme , font deux termes fous lefquels efl connu l'état d'un ver qui , après avoir quitté fa peau de larve , paroît enveloppé d'une membrane nouvelle ordinairement lifTée & quelquefois velue , qui fe deffeche , devient fo- îide & forme une efpece de boîte angulaire ou arrondie , dans laquelle il efl incruflé ; le ver à foie & toutes les chenilles fe mettent en chry- falides. On ne connoît point de coques angulaires qui ne donnent des papillons diurnes ; & on n'en connoît peu d'arrondies qui ne produifent à.QS phalènes. Voye^ ce mot & rartkk Papillon. On appelle nymplu l'état des infedes qui s'enveloppent d'une membrane tranfparente , très- fine , flexible & qui laifTe voir la figure du futur infede toute formée. Toutes les mouches pafTent par cet état , où elles ne laifTent pas d'aller & venir quelquefois , & de prendre de la nourriture. Parmi les chry- falides ou îtM^s, celles qui n'ont point de mouvement progrefTif , font autant de coques foyeufes ou nues , cachées fous des feuilles ou dans des creux d'arbres , ou dans des trous en terre ; parmi celles-ci quelques- unes relTemblent à de petits lingots d'or. Ce font les véritables auréUes ^ fur- tout les infeâes, tels que- les larves descoufms, des tipules , &c, qui naiffent dans l'eau. M. de Réaumur a cherché d'où pouvoit venir aux chryfalides cet or qui les couvre quelquefois avec profufion ; & il a découvert qu'une peau brune très-fine couvre une autre peau lifTe , polie , d'un blanc très- clair ; la couleur de cette dernière peau mêlée à celle de la peau fupé- rieure,nous fait voir de l'or où il n'y en a pas : c'eflainfi encore que les écailles de plufieurs poifTons paroiflent dorées. C'efl un effet produit par la réflexion de la lumière. Ainfi la différence entre lesy^vei,les ■■ " N Y M \ ^87 nymphes , les chryfaUdes OU aurêlies , confi{1:e dans leur forme , dans la franfparence du voile qui les couvre ou fon opacité , dans leurinaftion ou leur mouvement. La pellicule membraneufe qui les couvre eft une toile derrière laquelle l'infefte rampant change d'habit. La toile fe brife, L'afteur paroît avec un appareil éclatant , & vient jouer un nouveau rôle fur le théâtre de l'Univers. Il faut obferver que la plupart des chryfalides , nymphes , &c. réfiftent aux vapeurs les plus pernicieufes ; celle du ibufre ne les détruit pas abfolument : la privation de l'air par le moyen de la machine pneumatique fembleroit indiquer qu'elles n'ont pas befoin de refpirer; mais il on les plonge dans l'huile d'olive , elles périffent , figne certain du befoin de l'air. Pour avoir une idée plus complette de la vie & des mœurs des in- fères , voyei les articles INSECTE & CHRYSALIDE. Nymphe , félon M. Pluche , fignifie jeune mariée , parce que c'efl dans cet état que l'infeûe prend fes plus beaux atours, & la der- nière forme fous laquelle il doit paroître pour multiplier fon efpece par la génération. NYMPHES. En Anatomie , le mot nymphes , nymphce , fignifie deux efpeces de crêtes fpongieufes , fenfibles au toucher , d'un rouge ver- meil & fermes dans les jeunes filles , une de chaque côté , qui defcen- dent en grofTiffant jufques vers le milieu de la vulve. Elles ne font ni de même longueur dans tous les fujets , ni toujours de même groffeur l'une que l'autre : elles s'alongent tellement dans quelques femmes % fur-tout en Afrique , qu'on eft obligé de les couper , autrement elles incommoderoient en s'afteyant , en marchant , & même dans l'aûe vé- nérien. L'excifion des nymphes a lieu en Orient fous le nom de circonr. cîjion, Voyei^ cet article au mot Homme. Ccc î ■^^^ O A I OBI O. o AILLE. Fqyei à l'article PhOLADE. OBIER ou AUBIER ou OPIER , opulus, C'eft un arbriffeau qui fé trouve en Europe & dans l'Amérique Septentrionale , & dont il y a plufieurs efpeces : Tune aflez jolie , qui croît dans les haies ; & l'autre que l'on cultive dans les jardins. Les rameaux de la première efpece font fragiles , & remplis d'une moelle blanche comme le iirop. Ses feuilles font découpées en trois lobes. Ses fleurs font blanches, odo- rantes , difpofées en parafol ; mais de deux fortes. Celles de la cir- conférence font plus grandes que les autres : elles font découpées en rofettes à cinq quartiers inégaux , & font itériles y les fleurs plus petites qui font au centre , font en godets , découpées aufîi en cinq quartiers , & contenant le même nombre d'étamines. Celles-ci font hermaphro- dites : on voit fuccéder à ces fleurs des baies molles , affez femblables à celles du fureau , mais plus grandes & rouges. Elles font vomitives & purgatives; fouvent cet obier s'appelle \e fureau d'eau. L'obier du Canada efl le pemïna. L'arbriffeau que l'on cultive pour faire des bofquets , &c. ne diffère du précédent que par fes fleurs, qui étant blanches ou quelquefois pur- purines & ramaffées en un globe épais , font un coup-d'œil charmant : toutes les fleurs en font flériles. On donne à cet arbriffeau divers noms, tels que ceux de rofe-gueldre , ou pdou de neige (c'eft l'obier à fleurs doubles) , ou pain blanc ou caillebote. Cet arbriffeau s'élève à douze ou quinze pieds , & fe multiplie facilement par marcottes ou par dra- geons enracinés. 11 fe plaît de préférence dans les lieux humides & gras : il fleurit en Mai ; fes fruits mûriflTent à la fin de Septembre , mais ils ne font bons qu'après l'hiver» Ils reftent long-temps fur l'arbre après la chiite des feuilles. Les oifeaux font fort friands des baies de Tobier; ainli il eft propre à être planté dans les remifes : on met fes fleurs dans les appartemens pour le plaifir de la vue & de l'odorat. La rofe-gueldre dont les fleurs font ramaffées en rond , produit un effet des plus agréa- bles dans les parterres. OBIER ou AUBIER , eft la couche ligneufe qui fe trouve immédia- tement fous l'écorce du tronc des arbres. Foye^^ au mot Arbre, O B L O C E 389 OBLETI A. M. U Monn'ur a appelle ainfi un genre de plante , du nom de lÂ.Obht Botanifte François, qui a enrichi le Jardin Royal des Plantes d'une quantité de femences qu'il a rapportées de Cay enne & de l'Ifle de France. On a démontré cette année (1771) dans le Jardin Royal une plante de ce genre fous la dénomination de VerhmnaAmericana tuho flore longifjîmo. Le Profefleur en a reçu la graine , il y a trois ans , de l'Amérique Sep- tentrionale , dans des terres de miclos. VobUtia eft une plante vivace qui fe conferve ici l'hiver dans l'oran- gerie ; elle réunit à la beauté l'avantage d'être en fleur une très-grande partie de l'année. La fleur efl de couleur pourpre , & a quatre éta- mines : les femences font brunes , les feuilles font en forme de cœur &: oppofées ; la tige qui efl haute de deux ou trois pieds , efl rougeâtre , quadrangulaire , très-velue : la racine eft blanchâtre , fibreufe & che- velue. I OBSIDIENNE. Foyei PieRRE obsidienne. OCÉAN. C'efl cette immenfe étendue de mer qui embrafTe les grands continens du globe que nous habitons. L'océan ne comprend pas en gé- néral toutes les mers , comme toutes celles qui font refferrées & en- fermées dans de certains efpaces de terres. V'oye:^ au mot Mer. OCELOT. Animal du nouveau monde , d'un naturel féroce & car- nalîler , & qui reffemble afTez pour la figure au Jaguar & au couguar. Voyez ces mots. Le mâle , dans cette efpece de quadrupède , efl de tous les animaux tigrés celui dont la robe efl la plus belle & la plus élé- gamment variée. On y voit beaucoup de fleurs & d'ornemens qui man- quent à celle de la femelle , dont les couleurs font en général moins vives. On a vu en 1 764 deux de ces jeunes animaux à Paris à la foire S. Ovide : ilsavoient été apportés des terres voifmes de Carthagene. A trois mois ces ingrats furent déjà affez forts & afTez cruels pour tuer & fucer une chienne qu'on leur avoit donnée pour nourrice ; ils lui déchirèrent la tête , & fucerent jufqu'à la det-niere goutte de fang. Ces animaux arrivés à leur grandeur naturelle , peuvent avoir deux pieds & demi de haut , fur quatre pieds de longueur : ils font plus altérés de fang qu'avides de chair ; c'efl pourquoi ils font beaucoup de meur- tres pour fe raffafier ou étancher leur foif ardente. Ils grimpent fur les arbres , d'où ils épient les animaux & fondent fur eux ; ils font cepen- dant timides ; & lorfqu'ils font pourfuivis par des chiens , ils fe fauvenf en grimpant promptement aux arbres les plus voifins. 390 O C H Parmi ces animaux, le mâle prend fur la femelle un empire bien dé- cidé , il n'a aucun égard pour elle ; celle-ci tremblante n'ofe point tou- cher à ce qu'on leur donne à manger , que le mâle , brute & fauvage , ne foit tout-à-fait repu , & ait raflafié fon appétit vorace : elle attend même patiemment que le mâle daigne lui jeter quelques morceaux dont il ne fe foucie plus. Je fuis humilié de connoître des hommes qui ont les mœurs de l'ocelot..... OCHRE , ochrus folio Integro capreolos emiitente. Plante qui croît dans les champs des pays chauds , entre les blés. Sa racine eft fibreufe , Se pouffe des tiges qui ne reffemblent pas mal à celles de la geffe. Ses feuil- les font oblongues , les unes fimples , les autres compofées d'autres feuilles rangées par paires , & terminées par des vrilles. De Taiffelle des feuilles naiffent des fleurs légumineufes , blanches & fuccédées de fruits en goufles ou coffes , lefquelles contiennent cinq ou fix graines arrondies , de couleur d'ochre obfcure. Cette plante eft eflimée réfolu- tive. OCHRES , ochr7 Cette chatoyante nous vient , ainfi que l'oeil-de-chat ^ de l'Arabie 6c de l'Egypte : on en trouve aufll en Chine. (EIL-DE-PAON. Nom donné à un beau papillon de jour provenant d'une chenille épineufe , à fond noir , piqué d'un peu de blanc , qui fe nourrit de feuilles d'orties. Ce papillon œil-de-paon efl connu de tous les Curieux d'infedes : mais il ne faut pas le confondre avec le paon de, nuit , qui efl une belle efpece de phalène dont la chenille fe plaît fur l'abricotier, le pêcher , le prunier & autres arbres fruitiers. La chenille du petit paon fe trouve fur la ronce & le rofier. Voye^^ Chenille a tu- bercules & Chenille épineuse. ŒIL-DE-SERPENT, en Italien occhio diferpe. Les Joailliers donnent quelquefois ce nom à la crapaudine ou hnfonite , laquelle n'efl que la dent molaire , de forme hémifphérique ou oblongue , foit de la dorade, foit du grondeur. D'autres fois ils appellent ainfi les taches cer- clées d'une forte d'agate , connue fous le nom ^onix , que l'on taille de façon à repréfenter un œil. Voye:^ les mots Crapaudine 6*. Onix. ŒILLET , caryophillus major hortenfis. C'efl une plante que l'on élevé dans les jardins , à caufe de la beauté de fes fleurs, de leur douce odeur, & de fa taille légère. Sa racine efl fimple & fibreufe : fes tiges font nom- l)reufes , liffes, cylindriques, hautes d'une coudée , genouillées , noueufes & branchues : fes feuilles naiffent de chaque nœud deux à deux ; elles font longues , étroites , dures , épaiiTes & verdâtres. Les fleurs naiffent aux fommets des tiges , elles font à plufieurs feuilles difpofées en rond , légèrement dentelées , fou vent de différentes couleurs , & d'une odeur douce de clou de girofle. Le calice eft d'une feule pièce en tube découpé à fon extrémité en cinq dents, & garni à fa bafe de deux paires d'écail- lés; ce qui fait, dit M. Deleu^e , le principal caraftere de ce genre. Le piftil des fleurs devient dans la fuite un fruit arrondi, rempli de femences applaties , comme feuillées & noires. Qualités des Œillets, Il y a un grand nombre de ces fleurs qui forment un genre de plante. M. de Tournefort en diflingue quatre-vingt-neuf efpeces qui différent par la grandeur , la couleur & le nombre des pétales. Toutes ces variétés viennent de la différente culture , & font regarder l'œillet comme la première des fleurs. Les noms que les Fleurifles donnent aux œillets. 39^ ŒIL font nombreux , & dépendent de la fantaifie des Amateurs , qui les appellent , par exemple, le Duc de Candah , le Grand-Céfar ^\q Grande Cyrus , la Beauté triomphante : ce dernier eft un œillet d'un rouge de fang fur un blanc de lait , &c. Les œillets qu'on dillingue communément font les violets , les rouges , les incarnats^ les couleurs de rofe^ les piquetés & les œillets-tricolors. L'œillet de la Chine efl: décrit par Tournefort dans les Mémoires de V Académie Royale des Sciences^ année tyoi ^ Caryophillus Sinenjis , fupinus , leucoii folio , flore vario aut plcno. Les œillets les plus eftimés aujourd'hui par les Fleuriftes , font , dit M. Bourgeois , les œil- lets jaunes piquetés de cramoifi ; mais fur-tout les œillets d'un jaune- citron de trois pouces de large , fans mouchetures, & qui ne crèvent point. Ces œillets n'étoient point connus dans la Suifle il y a vingt ans , ils y font venus d'Hollande ; ce font des œillets de graine que le hazard a produits. On a encore une nouvelle efpece d'œill et, qu'on appelle œil- lets de plumes , parce qu'ils relTemblent parfaitement à ces œillets arti- ficiels qu'on fait de plumes d'oifeaux à Venife : le cœur dé cette fleur efl d'un cramoili foncé , & les feuilles du tour font d'un blanc de neige : on les eftime fur-tout parce qu'ils fleuriflent un mois avant les autres efpeces ; mais ils font fort délicats , & périiTent fouvent en hiver par l'humidité & la gelée. Bradley & Miller ont trouvé qu'on pouvoit affez commodément divifer le genre des œillets en cinq ordres , qu'ils diftin- guent par les noms à^ œillets piquetés , de dames-peimes ^ de bigarres , d'étin- celans & Ae flambés. Les piquetés ont le fond blanc & font tachetés de rouge ; les dames-peintes ont les pétales blancs en defibus & tachetés de rouge en deffus. Les bizarres font rayés & diverfifiés de quatre cou- leurs. Les étincelans ne font que de deux couleurs , mais toujours par raies; Enfin les flambés ont un fond rouge , toujours rayé de noir ou de brun très-foncé : aujourd'hui nos Auteurs y ajouteroient les œillets jaunes & les œillets de plume. Un œillet pour être parfait , doit avoir les panaches bien oppofés à la couleur dominante, & nullement confondus avec elle. Ces panaches doivent s'étendre fans interruption, depuis la racine des feuilles jufqu'à leur extrémité. Les gros panaches , par quart ou par moitié , font plus beaux que les petits. Un bel œillet doit avoir trois pouces de large , & neuf ou dix de tour : ceux qui en ont quatorze font trop fujets à crever. L'œillet doit fe terminer en formant une houpe ronde ; il ne doit pas avoir une trop grande quantité de mouchetures , ni de dentelles , qui (E I L 399 le brouillent & le hérîffent, & les feuilles ne doivent point s'alonger en pointe. Culture des Œillets. On les peut élever de graines , de marcottes & d'oeilletons : mais on les multiplie plus fouvent par les marcottes que l'on Tépare des pieds , que par la graine : car les fleurs qui viennent fur les pieds élevés de graine, deviennent fauvages, & donnent des fleurs communément plus petites, variées ; mais toujours moins odorantes 6c fmiples, quoique la la femence ait été tirée d'œillets à fleur double. La terre qu'on donne aux œillets , doit être réglée fur l'efpece dont ils (ont : les violets , les pourpres , les rouges, Iqs piquetés , demandent une terre compofée d'un tiers de fable noir, qui fe trouve fur le bord des eaux; l'autre tiers , moitié de terreau de cheval & moitié de terreau de vache , bien pourris , & un tiers de terre douce & moelleufe , le tout mêlé , pafle à la claie ôc au crible quand on veut les emporter : les in- carnats veulent une terre compofée moitié de terreau bien pourri , moi- tié de fable noir ou de terre taupinière. La marcotte des œillets dure depuis le 20 Juillet jufqu'au mois d'Août : elle fe fait au milieu du nœud , près de la racine. Dans l'hiver il faut les garantir du froid , au moyen des paillaffons ou de la ferre ; arrofer au befoin , & les éloigner des murailles, afin que l'air circule autour d'eux également. Il faut encore ménageries feuilles, foutenir les tiges avec des baguettes, & les y attacher avec des fils ; ôter les nœuds du dard & du pied, afin que le maître bouton réufllire ; faire la guerre aux poux verts , aux pucerons , aux chenilles , & particulièrement aux perce-oreilles , qui ruinent cette fleur. Les foins de la culture relèvent beaucoup la beauté & les grâces que les œillets ont reçu de la nature. On récolte la graine à la fin de Septembre, & on la feme à la fin de Mars. On peut confulter Bradley & MilUr fur la culture des œillets. Provrietés des Œillets. L'odeur des œillets efl fubtile , pénétrante & d'une odeur de girofle très-agréable : on les recommande , fur-tout ceux dont la couleur efl d*un beau rouge pourpré , dans toutes les maladies de la tête & du cœur , mais fur-tout dans les maladies maUgnes 6l peftilentielles. Quelques uns vantent le fuc de cette plante entière comme propre à réfifler^au venin. 40O (E I L On prépare dans les boutiques un firop , finipiis, de tunîca, une conferve, un vinaigre , une poudre & une eau diftillée d'œillets : l'eau excite les fueurs ; le vinaigre d'œillets rouges a une faveur & une odeur agréables : dans les temps de pefle , on en imbibe des linges qu'on flaire , & dont on frotte les tempes : on en prend aufîi deux cuillerées le matin. La con- ferve & le firop d'oeillet fonteftimés en Médecine comme de grands cor- diaux : on fait aufîi un ratafia d'oeillet domeflique très-agreable avec l'eau- de-vie , le fucre & un peu de cannelle. ŒILLET- DE- DIEU ou Passe-fleur, lychnis. Plante dont on diflingue deux efpeces principales; l'une cultivée & l'autre fauvage. 1°. La Passe-Fleur cultivée, lychnis vulgaris. On cultive cette plante dans les jardins: fa racine efl: fibreufe , & pouffe des tiges hautes d'un pied & demi, droites, rameufes & cotonnées: fes feuilles font longues de trois ou quatre doigts , larges d'un doigt , pointues , lanugi- neufes & molles ; fes fleurs font compofées de cinq feuilles difpofées en œillet, garnies vers leur centre de deux ou trois pointes qui , jointes à -celles des autres feuilles, forment une couronne au milieu de cette fleur: fa couleur efl variée quelquefois d'un rouge enflammé, d'autres fois d'un rouge clair ou incarnat, ou blanche. A cette fleur pafTée fuccede un fruit de figure conique qui s'ouvre par la pointe , & prend fouvent la figure d'un pot: il contient deux femences arrondies. 2°. La Passe-Fleur sauvage, lychnis fylveftns, alha Jlmplex. Lé- mery dit que fa racine efl longue de trois pieds, groffe quelquefois comme le poignet , blanche , fendue & plongée profondément en terre , d'un goût acre & amer. Les autres parties de la plante reffemblent affez à celles de l'efpece précédente : elle croît dans les champs proche des haies. Le fuc de ces plantes afpiré par les narines excite l'éternument: leurs femences prifes au poids de deux fcrupules dans du vin , conviennent pour la piqûre du fcorpion. La graine de lychnis^ {m\2a\\. Diofcoridc^ étoit autrefois en ufage contre les morfures venimeufes des ferpens ; aujourd'hui on ne la voit guère recherchée que par les moineaux , & fur-tout par les chardonnerets. ŒILLET FR ANGE ou la MIGNARDISE , diofanthos , efl une efpece d'œillet fauvage fimple ,dont les fleurs font petites & découpées comme la barl)e d'une plume , de couleur blanche ou incarnate ; & comme elle repréfente CE I L 401 repréfente par la finefle de fes découpures les franges ou effilures du linge qu'on porte dans le deuil, on l'a nommée effilée : fes fleurs font propres à réfifter au venin. ŒILLET- D'INDE , tagctes. Plante de genre & de claffe entièrement différens de l'œillet, & dont on diftingue deux efpeces principales. 1°. Le grand CEillet d'Inde, CaryophUlus IndUus major. Sa ra- cine eft fort fibreufe ; elle pouffe une tige haute d'environ trois pieds » groife comme le pouce , nouée , rameufe , pleine de moelle : {(ts feuilles reffemblent à celles de la tanaifie ; leurs bords font tiquetés de points tranfparens qui font des glandes véficulaires : fes fleurs naiiTent feules aux fommets, belles, garnies, radiées, rondes & quelquefois grolTes comme le poing: elles font, dit M. Deleuie, compofées d'un difque de fleurons & d'un petit nombre de demi • fleurons portés fur un placenta ras , & foutenus par un calice d'une feule pièce en godet à cinq pointes. A ces fleurs fuccedent des femences rondes, couronnées de pointes iné- gales & noirâtres. 2°. Le petit (Eillet d'Inde , caryophyllus Indiens mlnor. Sa racine efl' courte & fibrée ; elle jette des tiges hautes d'un pied, moëlleufes; elle reffemble pour le refte à lefpece précédente. On cultive les œillets d'Inde dans les jardins, à caufe de la beauté de leur fleur. On diflingue plufieurs variétés du grand œillet d'Inde ; il y en a dont les fleurs font d'un jaune pâle ou de foufre , d'autres de cou- leur orangée: il y en a même à fleurs blanches: toutes ces variétés font ou fimples ou doubles , &; elles ont une odeur peu agréable ; elles com- mencent à s'épanouir vers le mois de Juillet, & durent jufqu'aux gelées. Le grand œillet d'Inde vient originairement du Mexique : nous l'avons naturalifé dans ce Royaume. Dès le mois de Mai le petit œillet d'Inde commence à donner des fleurs jaunes veloutées , mêlées de roux & de couleur fafranée ; ces fleurs durent pendant tout l'été, & leur odeur n'efl pas plus agréable que celle du grand œillet d'Inde. Les Fleurifles cultivent depuis peu une nouvelle efpece d'œillet d'Inde dont l'odeur eft agréable. L'œillet d'Inde fe multiplie de graine ; on la feme fur une couche tempérée , & on la tranfplante quand elle a acquis un peu de force , elle fe plaît dans prefque tous les terrains ; quand on veut la conferver pour l'hiver, il faut l'abriter de la gelée. Les Auteurs font peu d'accord fur les vertus médicinales de cette efpece d'oeillet. Hcrmandei, dans fon Tomi IV^ Eee 402 (E I L (E N A Hifloire des Plantes du Mexique , dit que le fiic ou la déco£l:ion des feuilles provoque l'urine , la femence , les menûrues & les fueurs. Z>o- donéc,îi\\ contraire , prctend que Toeillet d'Inde eft un poifon : il en cite plufieurs exemples. En attendant que cette conteflation foit décidée, il vaut mieux ne point mâcher ni avaler les feuilles de cette plante , qui, employée extérieurement, eft bonne pour déterger & pour réfoudre. ŒILLET DE MER. Efpece à^ajlroïte ou de produâion à polypier. Ce corps marin & organifé eft creufé par des filions ondoyans ou feuil- letés, & a en général la figure d'un œillet qui feroit comprimé & épa- noui. Voyc^^ Madrépore. ŒILLETON. Foyc^ à Van, Plante. Quand on détache avec la main les œilletons de l'œillet & de l'oreille d'ours, & qu'on les replante dans les pots , cela s'appelle œïlUtonntr. CENANTHE ou FILIPENDULE AQUATIQUE ou PERSIL DE MARAIS, œnanthe^ plante dont on diftingue deux efpeces principales qu'il faut bien fe garder de confondre enfemble. 1°. L'CEnanthe a feuille d'ache, œnanthe apii folio. Ses racines font des efpeces de navets noirs en dehors , blancs en dedans , fufpendus par des fibres longues , s'étendant plus en large qu'elles ne pénètrent avant dans la terre : elles ont un goût de panais. Ses feuilles font d'abord larges, répandues à terre, femblables à celles du perfil; enfuite elles prennent la forme de celles de la queue de pourceau. Il s'élève d'entre elles plufieurs tiges hautes de deux pieds , rameufes , cannelées : fes fleurs qui paroift'ent pendant l'été, font difpofées en ombelles, compofées chacune de cinq feuilles rangées en fleur de lys; de couleur blanche tirant fur le purpurin. Elles font fuccédées par des femences jointes deux à deux , oblongues & cannelées. M. Deku^^e obferve que les fleurs de la circonférence de l'ombelle fontftériles: chaque graine eft à cinq angles , couronnée d'un petit calice à cinq pointes, & du piftil. Les ombelles particuheresfont garnies à leur bafe d'une fraife de feuilles. Cette plante croît aux lieux marécageux : on la cultive aufti dans les jardins des Cu- rieux. Sa racine qui refl^emble un peu à celle de la filipendule , eft apéri- tîve , difllpe les vents & appaife les douleurs des hémorrhoïdes. 2°. L'CEnanthe a feuille de cerfeuil, œnamhc chœwphylU foins aut cicutœ ficic ^fucco yirofo , croceo. Cette plante qui ne croît guère que dans les pays froids & feptentrionaux , le long des ruifî'eaux en Angle- terre, en Irlande & en Hollande , a beaucoup de rapport & de reftem- (ESI (EST 403 blance avec la ciguë , même pour les propriétés. Ses racines font des navets , comme celles de l'afphodele , blancs , attachés immédiate- ment à leur tête , fans aucunes fibres , remplis du même fuc que la plante. Il fort de la racine plufieurs tiges hautes d'environ trois pieds, éparfes , rondes , rameufes , portant des feuilles aflez femblables à celles du cerfeuil, vertes brunâtres, d'un goût acre & dégoûtant, rem- plies d'abord d'un fuc laiteux, mais qui jaunit enfuite & devient virulent, puant, venimeux & ulcérant. Ses fleurs font difpofées en ombelles com- me celles de la ciguë , compofées de plufieurs feuilles rangées en rofe ou en fleur de lys : elles font fuccédées par de petits fruits, compofées de deux femences oblongues & cannelées. Cette efpece d'œnanthe , appellée dans le pays de Galles racine à cinq doigts, & dans la province de Cumberland, langue morte, efl un poifon corrofif , dangereux. Il caufe dans le ventricule une ardeur très- douloureufe ; il trouble la vue & l'efprit , refferre les mâchoires, excite des hoquets & des efibrts inutiles de vomir, des hémorrhagies par les oreilles, une tenfion confidérable vers la région de l'eflomac , & il en cauterife la tunique nerveufe. Les antidotes ou remèdes à ce poifon con- fiflent à boire beaucoup d'huile , de graiffe ou de beurre fondu , de lait, ôc • d'autres liqueurs onftueufes qui puifîent adoucir le fuc rongeant de cette plante , & l'évacuer par haut & par bas. La faignée efl encore utile en pareil cas. Dix - fept prifonniers François , dans la guerre de 1744 eurent la liberté de fe promener à Pembroke & aux environs ; ayant rencontré une grande quantité de cette plante forte , qu'ils prirent pour du céleri fauvage, la cueillirent avec les racines, la lavèrent & en man- gèrent fur le champ , & en petite quantité , la racine avec du pain & du beurre; deux en moururent; & les autres éprouvèrent une partie des (ymptomes annoncés ci-defTus. M. HaUerâÀX<:\ne c'eflde l'œnanthe dont parle Stalpaart wandcr Wiel, & que '""■■. Méad a pris pour de la ciguë aquatique de Wepfer. C'efl la même plante encore qui a été funefle à quelques foldats François en Corfe , & qui pourroit bien être Vherbc fardoa des Anciens. DesNaturalifles ontaufTidonné le nom ^xnanthe à plufieurs oifeaux , tels que le cul blanc , le traquet , &c. Foyei ces mots. ŒSIPE ou SUINT. Voyei au mot Laine. ŒSTRE, œfirus. Genre d'infede diptère, c'efl-à-dire à deux aîles , dont les antennes fétacéçs , courtes &: fort petites, naiffent d'une grofTe 404 (E U F bafe qui repréfente un bouton rond. Au lieu de bouche ce petit anima! a trois points enfoncés qui lui fervent probablement de fuçoirs pour tirer quelque peu de nourriture liquide. Peut-être que l'œftre devenu infefte parfait, n'a plus befoin de nourriture ; cette propriété lui feroit commune avec plufieurs autres infeûes. Les larves de l'œftre reffemblent à des efpeces de vers courts. On remarque à leur partie poftérieure deux grands fligmates. Ces larves varient de figure fuivant les différens endroits où elles vivent ; on les rencontre tantôt dans le fondement des chevaux, tantôt dans les cavités du nez des bœufs & des moutons, quelquefois fous la peau des bœufs. Foyei à Vartick Vers des TUMEURS des Bêtes a cornes , & à tarùcU Taon. A l'égard de Tœftre aquatique , roye^ MouCHE A CORSELET ARMÉ. Voye^ aujjj. Mouches des intestins des che- vaux, Mouche de la gorge du cerf, Mouche du nez des moutons. (SUF 5 ovum. Ce nom fe donne à la fubllance que pondent les fe- melles des oifeaux , des poiffons , des lézards , de la plupart des ferpens & des infecles ; l'on dit ordinairement œuf de poule , œuf de tortue , œuf de carpe , œuf de fourmi , œuf de ferpent, œuf de crocodile , &c. Tous les animaux ovipares produifent une fubftance fembîable ; mais les uns couvent leurs œufs fécondes dans le fein de la mère , & les font éclorre par la chaleur de l'incubation; tels font les oifeaux: d'autres les dépofent au fond des eaux pour être enfuite vivifiés par les maies & perfedtionncs dans ce même élément ; tels font les poiffons propre- ment dits : d'autres enfin mettent bas leurs œufs , fécondés dans le fein de la mère , dans un lieu , où quand ils viennent à éclore par la chaleur de l'atmofphere , ils trouvent à fe nourrir : tels font la plupart des infedles qui naiffent reptiles , & fîniffent par être volatiles ; tels font encore les lézards, les tortues & la plupart des ferpens. On appelle ovaire, la partie de la femelle dans laquelle l'œuf fe forme; Tous les animaux ovi- pares peuvent pondre , ou frayer ou couver ( un œuf, proprement dit , eff ce total de quoi l'animal fe forme ) ; mais ces œufs ne produiront rien s'ils ne font fécondés par l'approche plus ou moins immédiate du mâle. C'efl ainfi que la poulette met bas communément des œufs ftériles ; ibuvent des poulettes en font de petits qui n'ont point de jaune, &: que le vulgaire fuperffitieux ou ignorant amateur du merveilleux & par pré- jugé d'éducation , attribue fawffement au coq. Ces œufs fe nomment (E U F 405 aufs blancs ; étant couvés ils ne prodiiifent rien. Voye^^ a V article CoQ Vextrait d'un Mémoire de M. de la Ptyron'u imprimé dans VHijloire d& V Académie des Sciences ^ année lyio ^ fous U Titre d'Obfcrvations fur les aufs de poule fans jaune , que ton appelle vulgairement œufs de coq. Il y a àts, poules qui pondent quelquefois des œuf^ fans écaille ou coque; cela leur vient probablement, ou d'une maladie , eu par .une grande fécondité , ou d'être trop grafles ; il en eft peut-être de même pour les gros œufs qui ont deux blancs & deux jaunes , ovagcmellifica. On a cependant obfervé qu'ils font ordinairement le fruit des poules jeunes , vigoureiifes & lafcives. Les jaunes font toujours nus dans l'ovaire & dans les trompes , le blanc 6l la coque ne fe forment jamais que (3ans la matrice ; de pareils œufs jumeaux & formés font difiinds & féparés dans l'ovaire & dans le conduit des œufs ; mais parvenus à l'utérus , ils comm.encent par jaunir & font enfuite enveloppés par le blanc & par la même coque. En pourroit-on dire autant de ces œufs qui con- tiennent un autre œuf, ovum in ovo, ayant également fa coque ? On nomme les œufs fans coque ou fimplement recouverts d'une membrane , œufs hardés ( on tenteroit inutilement de faire couver un tel œuf J & œuf nain ^ ovum centeninum , le petit & dernier œuf que la poule pond de la faifon. Il eft aufli fans jaune. M. W^olf?i montré aux Membres de l'Académie des Sciences de Pétersbourg un œuf fmiple , contenant dans un feul blanc & un feul jaune deux embrions développés par fix jours d'in- cubation ; ce phénomène mérite une place parmi les faits les plus rares. Pour compléter l'hifloire de l'œuf, voye^^ rartich Insecte , celui de Poisson & celui d'OiSEAV. On verra dans ce dernier ce que contient l'œuf, & la manière dont le petit s'y forme & en fort. Quelques Au- teurs , & même le plus grand nombre des Modernes, penfent que tous les animaux & les hommes même font produits ^<^ ovo. Ce que les An- ciens appelloient teficules chez les femmes , porte aujourd'hui le nom ^ovaire. On trouve les ovaires dans les filles , & divers Auteurs citent des femmes accouchées dime quantité d'œufs plus ou moins confidé- rable; chacun de ces œufs efl: ordinairement de la grolTeurd'un pois, il eft fécondé, organifé & animé lorfqu'il eft encore dans la femme. Foye^ r article HoMME. Nous invitons inftamment nos Lefteurs à confuîter les Confidérations fur les corps organifés & la Contemplation de la Nature , ils y trouveront l'efquift'e la plus fublime , la plus profonde fur la manière dont on peut 4c6 CE U F concevoir la nutrition & raccroiffement des germes avant la féconda- tion dans l'hypothefe de l'emboîtement. Ces Ouvrages favans & im- mortels du célèbre M. Bonnet de Genève , font aujourd'hui dans les mains de tout le monde , & exigent des plus favans Phyficiens , Natu- ralises, Philofophes , &c. la plus grande attention & les méditations les plus profondes : je ne peux trop le dire , ces ouvrages font honneur au génie de M. Bonnet: s'ils eifrayent Timagination, ils élèvent l'ame, étendent la penfée , offrent & crayonnent à l'entendement des vues vafles & des hautes idées de la pr.iflance & de l'intelligence de l'Auteur qui a prélidé à la conftruftion des êtres organifés : en un mot ces ouvra- ges ne font point fufceptibles d'extrait. Parmi les poillbns , il y en a dont les œufs font venimeux, ou du moins qui purgent violemment : tels font ceux du brochet, du barbeau , &c. Chez les oifeaux les œufs des premières pontes font moins gros que ceux de la féconde & de la troifieme. OmD^tWe œufs frais ^ ceuxqui font récemment pondus, & même tous ceux qui n'ont point encore perdu cette partie qu'on nomme le lait & qu'on trouve d'abord en les ouvrant , quand ils ne font point trop cuits» Non-feulement c'eft une chofe curieufe de conferver frais par leurs qualités des œufs qui font vieux par le temps; mais il y a un avantage réel à fe procurer toujours en bon état un aliment qui devient fouvent équivoque quand il eil gardé. Dans les voyages de mer, & dans les faifons où les poules ne pondent que très - rarement , c'eft une véritable refiburce qu'une provifion d'œufs qui font auflî bons que s'ils étoient nouvellement pondus. On fait que l'œuf expofé à l'air s'y corrompt par le laps du temps. Sous la machine pneumatique il fe conferve fans fe gâter. D'après ces principes connus, feu M. de Réaumur nous a offert un moyen fort fimple , facile & très-siir : il a con- feiîlé de boucher les pores de la coquille de l'œuf avec un enduit indiifo- luble à l'eau, tel que deux ou trois couches de vernis le plus commun, ou une légère couverture de graiffe de mouton, ou d'huile , ou de cire liquéi^ée. On a l'expérience qu'un œuf ainfi préparé & gardé fix mois, fait encore le lait, & n'a pas le moindre mauvais goût. Cependant quand on veut les conferver plus sûrement & plus long-temps , il faut choifir des œufs qui n'aient point été fécondés , autrement le germe étouffé fous le vernis ne manquera pas d'en corrompre une partie. Ces œufs veniis n'ont pas feulement l'avantage de fe conferver bons , pour être (E U F ' 407 mangés comme frais ; ils ont encore celui de pouvoir être couvés en toute sûreté, pourvu qu'on n'attende pas au-delà de ûx femaines ; en pareil cas l'on ôte le vernis qui efl fur la coque de l'œuf fécondé : ceci nous offre encore un moyen d'élever des oifeaux étrangers qu'on ne peut tranfporter vivans qu'avec beaucoup d'embarras , & qui pour l'or- dinaire ne s'accouplent point hors de leur pays. Ces différentes manières d'interdire la tranfpiration & l'accès de l'air extérieur dans les œufs & dans tous les corps que l'on veut préferver de corruption ou d'altération, expliquent en même temps la caufe qui auroit fait conferver pendant trois cents ans trois œufs dans un mur d'Eglife dans le Milanez,&; qu'on a trouvés après ce temps très-bons. En effet, un de ces œufs ouvert à l'infîant n'avoit rien perdu de fa fraîcheur , odeur & faveur. Les deux autres ouverts huit jours après , commençoient à fe gâter. Les Payfans fe contentent de conferver leurs œufs dans delà fciure de bois,dufon, de la cendre bien prefTée dans un tonneau. Us favent aulîi que tout œuf vieux offre une cavité intérieure quand il efl: cuit, & que ce vide efl lamefure de la quantité du liquide qui a tranfpiré au travers de la coque ; ainfi un œuf frais doit être plein, ce qu'on reconnoît en le plaçant entre une lumière & l'œil. Un œuf cuit pour être falutaire, ne doit être ni glaireux , ni dur, mais d'une fubflance molle & humide , comme le dit parce vers, l'Ecole de Salerne : Si fumas ovum , molle fit atque novum. M. Bourgeois rapporte un fait fmgulier par rapport à la confervation des œufs de poule , & dont il efl difficile de donner une raifon phyfique fatisfaifante : c'efl que les œufs pondus pendant le courant du mois d' \oLit, fe confervent beaucoup mieux & ne fe corrompent pas comme ceux pondus dans les autres mois de l'année : cependant de tous les mois c'efl celui d'Août où les fubflances animales & même les végétales tendent plutôt & plus facilement à la corruption. Les Payfannes de la Suifîe con- fervent prefque tous leurs œufs du mois d'Août , pour les vendre pen- dant l'hiver dans les foires & les marchés ; parce qu'ils. font beaucoup plus rares & plus chers. Quoique ces œufs ne foient pas auffi bons que les œufs frais , il efl cependant rare qu'on en trouve de corrompus , & qu'on ne puifTe employer aux ufages de la cuifine. Entre les animaux ovipares, il y en a qui, au fortir de rœuf,fe trouvent fous leur forme parfaite : ils ne la quitteront plus tant c^u'ils vivront t 4o8 (E U F tels font la plupart des poifTons & des amphibies cuiraffcs , les limaçans qui fortent de l'œuf avec une petite maifon fur le dos , les araignées qui changent de peau , ainfi que les cruftacées & les amphibies ; d'autres paffent par diffirens états , tels que les infecles qui fe métamorphofent ; la grenouille qui a d'abord une queue fans pieds , & enfuite des pieds fans queue. Les oifeaux fortent de l'œuf avec une forte de duvet, mais bientôt ils acquièrent des plumes qui les garantilTent du froid , de l'hu- midité, & leur fervent à voler. Confultez le Noiivd An de faire, ècLorn en toutes falfons des œufs d'oifeaux domeftiques à la fuite de l'article CoQ. Les œufs différent entr'eux par le volume , par la dureté de la coque & la marbrure de cette enveloppe, dont le fond de la couleur efl ou blanc , ou d'un bleu verdâtre, les taches font ou noirâtres ou roufsâtres: ils différent auffi par la forme & par le goût de leur fubilancc intérieure. Les œufs de ferpent font ronds , ceux d'autruche font oblongs , égale- ment gros ou pyramidaux par les extrémités : ceux de poule ont un bout plus conique que l'autre ; enfin il y en a de longs & ronds comme un cylindre. Certains œufs d'infeftes font aigretés , ou bien ornés d'une efpece de couronne de poils. Ceux des poifîbns fe couvrent d'une ef- pece de blanc , albumen , pour les garantir de l'eau lorfqu'ils font hors du corps de la mère. ŒUF COQUILLE. On donne ce nom à unteflacée du genre des por- celaines : ceux qui font épais ont la lèvre extérieure renflée & dentée , & le dedans orangé. Ceux qui font minces & fragiles , (ont papy racés. ŒUF MARIN. Nom donné par quelques-uns aune efpece particu- lière d'ourfm , briffus. Voyez à l'article Oursin. ŒUF DE SERPENT ou ŒUF DES DRUIDES. La fuperflition de ces Prêtres Gaulois les portoit à dire que les œufs de ferpent étoient for- més de la propre bave de ces animaux, yoyei^ à l'article Serpent. Boëce de Boot a donné le nom à^œuf defrpent , ou ôHœufs de mer à des échinites ou ourfms devenus foffdes. Voye^ Oursin. ŒUFS DE MER , carnumi. Voyez Microscome. ŒUFS DE PIERRE ou PIERRE OVAIRE. Nom que l'on donne à une pierre compofée de petits grains gros comme des têtes d'épingles. Voyei CENCHRITE5 , MÉCONITES & PlSOLITES , & fur- tout le mo^ OOLITHES. Il y a des Auteurs qui ont aufîi donné le nom à! œufs de pierre à un our- fm foffde ou pétrifié. Voyci Échinites. ŒUFS (E U F O I G 40^ ŒUFS DE VACHE & DE CHAMOIS. Foyei Êgagropile. OFFE , eft une efpece de jonc qu'on apporte d'Alicante en Efpagne, & qu'on emploie beaucoup dans nos provinces méridionales , fur-tout à faire des filets pour la pêche. Foye^ à VartïcU JoNC. OIE. Voyci Oye. OIGNON ou OGNON , cepa , efl: une plante potagère , bulbifere , & généralement connue ; fon nom efl commun à la plante & au fruit ; fa racine efl bulbeufe , de différentes couleurs & figures , fuivant l'efpece. L'oignon efl rempli d'un fuc fiibtil & très-acre , qui pique les yeux & les fait pleurer ; (es feuilles font fîfluleufes : cette plante ne fleurit qu'à la féconde année ; elle porte à fon fommet unetêîe de la groiTeur du pomg, compofée de fleurs en lis : à ces fleurs fuccedent des fruits arron- dis , partagés en trois loges qui contiennent la graine. Outre les treize efpeces d'oignon que compte M. de Toumefort , il s'y trouve encore d'autres variétés en couleur, en groffeur , en forme , que produit l'art de la culture. L'efpece la plus commune dans nos jardins efl l'oignon blanc ou rouge , cepa vulgaris ^jloribus & tunïcis candidis velpur- purafcemïbus. L'oignon blanc d'Efpagne eft V oignon doux par excellence , cepa Afrkana maximabulbâ lionarlâ dulci. L'oignon de Strasbourg efl plus amer &fe conferve plus long-temps : mais aucun oignon d'Europe n'ap- proche de la douceur, du goût agréable & du parfum léger des oignons d'Egypte. Tout le monde fait les ufages des oignons ; les blancs font plus doux & plus eflimés que les rouges. Leurs vertus pour la fanté font très-re- marquables : ils font pedoraux & apéritifs , & fouverains dans plufieurs maladies. Dans la dernière pefle de Marfeille , on s'en efl fervi avec le plus grand fuccès pour guérir les pefliférés : on donnoit au malade le fuc exprimé d'un oignon dont on avoit ôté le cœur , à la place duquel on fubflituoit un peu de thériaque , & qu'on faifoit cuire enfuite au four : le malade qui l'avoit mangé fuôit abondamment & étoit guéri ; on appli- quoit aufîi fur le bubon un femblable oignon ( M. Bourgeois craint qu'un tel remède n'augmente la fonte , la diffolution & la putréfadion des hu- meurs qu'on doit , dit-il , plutôt chercher à prévenir. C'efl dans cette vue que les bons Praticiens modernes fe fervent prefque uniquement des acides minéraux & végétaux , & du quinquina dans les fièvres ma- lignes &peflilentielles). On prétend qu'un oignon pelé , affaifonné de miel & de fel , efl un fouverain remède pour la morfure des chiens Tomi IF. Fff 4IO O I G enragés : fon jus exprimé , dont on imbibe un peu de coton , mis dans les oreilles , en arrête lesbruiffemens ou tintemens. L'oignon crud ou cuit fous la cendre , & même dans les alimens , eu, félon M. Bourgeois, un excellent remède contre l'hydropifie : il ouvre les obftrudions , il réta- blit la circulation de la lymphe arrêtée dans le tiffu cellulaire , & procure une copieufe évacuation par les urines. Il produit prefque le même effet que l'oignon de fcille , qui efl: fi utile dans cette maladie. La Ciboule , cepafi[fdis , a à peu-près les mêmes qualités & pro- priétés que Véchalote , voyez ce mot : elle en diffère par la grandeur , mais elle lui reffemble par la fleur : on peut fubflituer l'un au défaut de l'autre : ils demandenffcus les deux la même culture. On coupe les feuil- les de la ciboule menu & on les mêle crues dans la falade 6c dans les viandes falées pour leur donner du haut goût : mais ces feuilles fe digè- rent difficilement : elles rendent l'haleine mauvaife & produifent des rap- ports défagréables. Les oignons ne viennent que de graine ; ils aiment une terre bien ameublie , mais plutôt maigre que graffe , & même un peu fabîonneufe : fi on les plante dans une terre bien fumée & humide , ils pouffent , dit M. Bourgeois ,hQ^\\QO\\T^ en feuilles , & la racine ou la bulbe refte petite. Selon cet Obfervateur , pour avoir de beaux & gros oignons , il ne faut point mettre de fumier dans la couche où on les plante , mais il faut la couvrir avec de la fiente de poulailler. Lorfqu'ils font devenus grands & qu'ils ne profitent plus , on en foule les montans avec le pied , afin- qu'ils deviennent plus beaux. Voyez le Journal Economique , Janv,- Les Fleurifles donnent le nom de caïeux (^foboles ) à de petits oignons^ de fleurs qui naiffent autour des gros , & qui fe confervent long-temps hors de terre pour y être repiqués quand on veut; ils fe fortifient quand ils refient trois ans de fuite en terre , & ils portent dans l'année qu'on les replante. Lorfque l'on tire les oignons tous les ans , les caïeux ne font point afl'ez forts ; il faut les mettre dans une planche en pépinière , dont on levé de temps en temps des oignons qui font en état de fleurir. Les caïeux dans les anémones changent de nom , ils s'appellent /jar/e^ • dans les renoncules ce font des grijfes. Les caïeux confervent feuls les plus belles efpeces de fleurs , fans dégénérer. Voyei à r article Flevrs, OIGNON MARIN ou DE SCILLE. Fojei Scille. OIGNON MUSQUÉ , mufcari , efl une plante que Ton cultive dans OIS 41X les jardins des Fleurifles : l'on en diftingiie plufieurs efpeces , -qui diffé- rent par la couleur de leurs fleurs , ou par la largeur de leurs feuilles; ou parce qu'elles font fauvages. M. de Tournefon a fait une différence <îe ce genre de plante d'avec la jacinthe , par la fleur , qui dans le muf- cari efl: un grelot , c'eft-à-dire une cloche rétrécie par l'ouverture , au lieu que celle de la jacinthe eft fort évafée. La racine de l'oignon muf- <}ué eft une groife bulbe , couverte de pîufieurs tuniques , d'un goût amer garni en deffous de quelques fibres longues & groffes ; cette racine eft vomitive ; elle pouffe cinq à fix feuilles cannelées & couchées à terre; il fort d'enîr'elles une groffe tige , haute d'im demi-pied, revêtue , dans le milieu de fa longueur , de fleurs en grelots , crénelées , d'un vert bleuâtre ou purpurines d'abord , enfuite jaunâtres & aromatiques , comme mufquées : à ces fleurs fuccedent des fruits triangulaires, qui renferment dans trois loges des femences greffes comme des orobes, rondes & noires. Foye^Movs^^ Grecque. OISEAU , avis , eft un animal bipède , couvert de plumes , qui a des aîles & un bec de fubftance de corne &c. Sa femelle eft ovipare : fes plumes font renverfées en arrière , & couchées les unes fur les autres dans un ordre régulier : fon corps n'eft ni extrêmement maffif , ni éga- lement épais par-tout , mais bien difpofé pour le vol , aigu par devant groffiffant peu-à-peu , par-là il eft plus propre à fendre l'air. Tous les oifeaux viennent d'œufs : leur manière de vivre , la variété de leurs cou- leurs fuivant les faifons , leur chant , leurs différentes figures & gran- deurs , tout mérite l'attention du Philofophe , & pique la curiofité de l'homme qui cherche à s'inftruire. Nous en tracerons quelques efquiffes dans le tableau raccourci que nous nous propofons d'en donner ici , d'après les Naturaliftes qui en ont traité. Tous ceux qui , depuis Arljlotc & Pline jufqu'à MM. Linnccus , Klein & Brijfon , ont écrit fur la nature des oifeaux , les ont divifés en tcrref- tres & en aquatiques , puis en oifeaux domejliques , en pajfagers , en oi- feaux des bais , oifeaux de rivière , oifeaux de nuit , & en oifeaux de ■proie. Ils ont marqué , dans les différentes claffes qu'ils en ont faites , ce qui les diftingue les uns des autres , foit par les plumes , le bec , les ongles , foit par la tête , le cou , les aîles, les cuiffes , les jambes & les pieds. On peut réduire les oifeaux à fîx ordres principaux. 1°. Ceux du ^eme. corbin^ c'eft-à-dire , qui ont le h^c courbé , fort ^ Fff 2 411 OIS & les ongles crochus ; tels font les oifeaux de pf oie qui font carnivores , c'eil-à-dire , qui. vivent de rapine ou de chair, qui tiennent leur proie dans une patte , & qui la déchirent &: la mangent étant appuyés fur une jambe , comme les aigles, le faucon, les chats-huants, le duc, le milan , Je lanier , le hobereau , le condor , le vautour , l'épervier , le coucou , & même les pies-griéches & les perroquets , &c. cependant ceux-ci vivent plus communément de fruit que de chair. Nous difons que le bec des oifeaux de proie eu affez fort pour dépecer les chairs; les ferres ne font pas moins propres à déchirer & à porter la proie ; leurs cuifTes font très-robuûes, ils ont une vue perçante & fubtile pour épier de loin. On diftingue ces oifeaux en diurnes ou oifeaux de jour ^ & en nocturnes ou oifeaux de nuit. On connoît les oifeaux de rapine , fur-tout les diurnes , par leur tête & leur cou court , par leur bec & leurs ongles crochus , par leur langue large, épaifle & charnue comme celle de l'homme. Les oifeaux de proie nocturnes , qui ne volent que la nuit pour butiner , ont la tête grofle & faite à-peu-près comme celle des chats; tels font les hiboux cornus ou chat-huants , la fréfaie , le faucon de nuit , la chevê- che , &c. Les oifeaux de nuit ont les doigts irréguliers , car le dernier n'eft pas , à proprement parler , un doigt de devant , il efl placé de côté & peut fe tourner en arrière ; ces oifeaux l'alongent pour prendre leur proie , c'efl ce qui fait que la plupart des oifeaux de nuit femblent avoir deux doigts devant & deux derrière : ces oifeaux ont une membrane calleufe que les Naturalises nomment céra , & qui fait le tour de la bafe du bec. Prefque tous ces oifeaux vivent folitaires , ne s'attroupent point, mul- "tiplient peu , & ne produifent guère que deux petits à la fois ; ils font très-garnis de plumes , & vivent plus long-temps que les autres efpeces d'oifeaux : comme les repas de ces oifeaux ne font pas toujours affurés, la nature leur a donné la faculté de fouffrir long-temps la faim. Dar^s ce genre d'oifeaux , les femelles font plus grandes que les mâles , d'un plus beau plumage , plus fortes , plus courageufes & plus féroces, parce qu'elles ont feules foin de leurs petits , les mâles étant d'un tiers moins grands font appelles Tiercelets ^ tercelUni, quafi tertiarii. Ces oifeaux font non-feulement les tyrans des airs , ils chaffentauffi dans les plaines. On divife les oifeaux de rapine diurnes en grands & en petits : les grands font les aigles & les vautours ; leur caraftere eft fi féroce , fi indompta- ble, qu'on ne peut les drefîer pour la fauconnerie. Les petits oifeaux de O I s 4,3 proie diurnes, font encore confidérés comme poltrons , tels que le mi- lan, ou comme courageux & de haut vol, tels que l'autour, l'épervier, le gerfaut & l'émenllon ; ceux de bas vol, font le faucon, le lanier, le hobereau & le facre. Voyez , pour l'hiftoire & la manière de dreffer ces oifeaux à la chafTe du vol , au mot Faucon. Le fécond ordre comprend les oifeaux à hu de pic , tels que les cor- beaux, les corneilles, les pies , les pics, le geai, la huppe , le loriot, l'étourneau , les merles, &c. Quelques-uns de cette famille ont le bec un peu oblong, fort & gros; on les appelle dcmi-oifeaux de proie ou demi-rapa- ces. Ces oifeaux fréquentent indifféremment les pâtis , les guérets, les taillis , de même que les prairies & les rivages : ils vivent de fourmis , de moucherons , de fruits & de graines. Le troifieme ordre contient les oifeaux qui fréquentent les bords des eaux douces , les lieux marécageux, & les rivages de la mer , qui volent autour de cet élément pour y trouver du poifTon dont ils font leur nour- riture , & qui cependant ne nagent pas ; ils ont les pieds fendus (Jifjîpedes) , les jambes & les cuifTes fort longues ( imantopedes ) , un bec long &: pointu {fcolopaces ) ; ils n'ont point de plumes au-deffous des genoux , afin d'entrer plus facilement dans les eaux bourbeufes; tels font les hé- rons, la grue , le flamand, le butor, la cigogne , le courlis, &c. Quel- ques-uns de cette famille font haut-montés fur leurs jambes & ont le bec court, comme le vanneau, le chevaUer, le pluvier, &c. Souvent ces oifeaux fe tiennent fufpendus en l'air fur les eaux , & guettent d'en haut fi par hafard quelque poifTon remonte vers la furface des eaux; & quand ils en apperçoivent, ils fe plongent fur le champ avec une rapidité éton- nante , & il eflrare qu'ils manquent leur proie. Le quatrième ordre renferme les oifeaux aquatiques par excellence , c'efl-à-dire,qui marchentmal fur terre & nagent bien dans l'eau ; tels font le pélican , la palette , le cygne , les oies , les efpeces de canards , le mo- rillon , la macreufe , le cormoran , &c. en un mot tous les oifeaux à.oxit les doigts des pieds font unis par une toile membraneufe , ou même qui peuvent nager fans être abfolument palmés, comme la foulque, Plu- fieurs d'entre ces oifeaux , qui ne fe nourriffent que de poifTon, ont le becdentelé , crochu à fon extrémité : ils font la ^\w^d.n podicipedes , c'efl- à-dire , qu'ils marchent enfe tenant prefque droits fur leurs pieds comme l'homme ; ils paroifTent boiter, & ont prefque tous les jambes courtes ^ les çuiffes couvertes de plumes à la jointure , les orteils de derrière 414 OIS courts , le croupîon moins élevé que les autres oifeaux, le bec terminé par une appendice qui pend en deffous. On comprend dans le cinquième ordre, les oifcaux qui n'ont point d'habitation fixe , & qui fréquentent rarement les rivages , les prairies , les hautes futaies ; ils vont indifféremment dans les taillis , les guérets , les buiflbns & les haies , où ils fe nourriffent d'infedes , de graines , de baies, &c. tels font les pigeons, la tourterelle , les efpecesde pinçons , l'alouette, le chardonneret, le verdier , le ferin , l'ortolan , la linotte , la bergeronnette , les bruants, la fauvette, le roitelet, les hirondelles , le tarin ; & tous ces petits oifeaux , dont le bec efl affez droit , quel- quefois courbé, plus ou moins long, qui ont les jambes courtes, les aîles fort étendues , un vol fort & rapide, &: une queue longue. Ceux qui ont le bec grêle , foible & pointu , vivent d'infeftes ; ceux qui vivent de graines , d'herbes cpineufes , l'ont fort court & propre à broyer. Le fixieme & dernier ordre renferme les oifeaux du genre des poules ; tels que le paon , le coq d'Inde , le coq privé & celui de bruyères , le faifan , la perdrix , la gélinote , &c. ces oifeaux ont le bec affez court , un peu recourbé , le corps gras , pefant & la chair blanche , des aîles courtes , concaves , ce qui fait qu'ils ne peuvent pas voler fort haut ni long-temps ; leurs pieds font , ainfi que ceux de la première famille , garnis d'une peau : ils fe retirent dans les lieux fecs , & vivent d'herbes , quelquefois d'infeftes : ils font leur nid à terre ; leurs petits , qui font couverts de duvet, fuiventla mère, courant çà&là, &; ramaffent ce qu'ils peuvent avec leur petit bec. On pourroit encore faire un genre d'oifeauxterreftres , qui ont le bec droit & les ongles moins crochus que les oifeaux de proie ; ce font ceux qui font d'une énorme grandeur , & qui ont des aîles peu propres à voler, comme l'autruche , l'émeu oulecafoar & le dodo. L'autruche d'Afrique n'a que deux doigts par-devant , & point fur le derrière : l'autruche d'A- mérique en atrois , point par derrière : le cafoar, la canne-petiere , l'ou- tarde , &:c. fourniffent la même remarque. Quiconque voudroit adopter une méthode facile , pourroit prendre la fuivante , qui eft de M. Klein ^ elle confifte à ne confidérer les oifeaux que par leurs pieds ; alors on en feroit huit familles. La première com- prendroit ceux qui n'ont que deux doigts aux pieds fur le devant , & point par derrière ; telle eft l'autruche, Dans la deuxième , on rangeroit ceux OIS ^tf <|uî en ont trois pat-devant & point par derrière ; tels font rémeu , l'ou- farde , la pie de mer , le pluvier vert, le vanneau , l'autruche d'Améri- que. Dans latroirieme,les oifeaux qui ont quatre doigts, dont deux font dirigés en avant , & les deux autres en arrière ; tels que le perroquet, lé coucou , la pie , &c. Dans la quatrième , les oifeaux à quatre doigts , trois devant & un derrière ; tels que les oifeaux chantans , les roffignols , les alouettes, les colibris, même les aigles, les vautours , les faucons ,r les oifeaux de nuit, les corneilles , les grues , les cicognes. Dans la cin- quième, les oifeaux palmipèdes , à quatre doigts aux pieds, trois devant &:un derrière ; tels que le canard & le plongeon. Dans la fixieme, les oifeaux palmipèdes , à quatre doigts en avant , tels que le cormoran y Fonocrotale , &c. qui ont tous les doigts unis par la membrane du pied. Dansla feptieme, les palmipèdes à trois doigts en avant , tels que le pin- guin : enfin dans la huitième les oifeaux daftilobes , h quatre doigts fran- gés de chaque côté , c'eft-à-dire bordés par une membrane , & dont pUi- fieurs ont trois doigts devant & un derrière , tels que le colimbe &c les foulques. En réfléchiflant fur cette dillribution fynoptique , on y trouve quelque confufion: on voit dans la quatrième famille l'aigle, le cohbri , le coq & la grue : on pourroit , en fe fervant des caraâ:eres généraux dont il eflfait mention ci-deffus, étendre les fubdivifions au nombre de vingt- fix ordres , ainfi que l'a fait M. Allamand d'après M. Brijfon ; alors on auroit ; Premier Ordre. Le genre du pigeon y qui contient quarante-quatre efpeces & un grand nombre de variétés : les tourterelles appartiennent à ce genre. Second Ordre. Il eft divifé en deux fedions : La première eft compofée Du genre du dindon , & comprend deux efpeces & deux variétés. * Du genre du coq & de la poule , & comprend fix efpeces & quelques variétés. Du genre de la pintade. La deuxième fedion eft compofée Du genre de la gèlinote , & comprend douze efpeces. Le' coq de bruyères appartient à ce genre» 41^ OIS • ' Du genre de la perdrix , & comprend vingt-une efpeces 5c quelques variétés. Le francoLin & la cailLe appartiennent à ce genre. ■■ Du genre du falfan & du paon , & comprend dix-huit efpe- ces & quelques variétés. Les hoccos appartiennent à ce genre d'oifeaux. Troisième Ordre. II eft divifé en deux fedions : La première eft compofée Du genre de répervler , & comprend trente-neuf efpeces & quelques variétés. Vautour^ \q faucon , le lanier, le ger- fault , le facre , le hobereau , Vémérillon , le bufard , le milan ^ appartiennent à ce genre. ' Du genre de C aigle , & comprend quinze efpeces. Du genre du vautour , & comprend quatorze efpeces. La féconde fedion eft compofée Du genre du hibou , & comprend neuf efpeces & quelques variétés. Les ducs appartiennent à ce genre. ' Du genre du chat-huant , & comprend onze efpeces. La huloti & la chouette appartiennent à ce genre. Quatrième Ordre. Il efl divifé en deux feftions ; • La première efl compofée Du genre du coracias , & comprend deux efpeces. ' Du genre du corbeau , & comprend onze efpeces & quel- ques variétés. La corneille & le choucas font de ce genre. • Du genre de la pie , & comprend fix efpeces & une variété. — : Du genre du geai , & comprend quatre efpeces ôc une variété. ■ Du genre du caffe-noix , & comprend une efpece, La deuxième fedlion du quatrième ordre eft compofée Du genre du rollier , & comprend dix efpeces. — Du genre du troupiaU , & comprend trente-deux efpeces. Le cajjîque , le baltimore & le carouge font de ce genre. ■ ' ■ Du genn de l'oifeau du paradis , & comprend deux efpeces. CiNquiEjviE OIS 417 CinquiemeOrdre. * Il eft divifé en deux fedions : La première eft compofée Du genre de la pie-grieche ^ Sc comprend vingt-fix efpeces èc une variété. Uécorcheur eu. de ce genre. ■ Du genre de la grive , & comprend foixante-fix efpeces & quelques variétés. Le mauvis , la lltorm , la rouff^erole , le merle ) le moqueur y le mainate , le loriot y lejafeur font de ce genre. Du genre du cotinga , & comprend dix efpeces. La deuxième fedion du cinquième ordre eft compofée Du genre du gobe-mouche, & comprend trente-huit efpeces. Le tyran efl de ce genre. Sixième OrdrEv Il efl: divifé en deux ferions : La première eft compofée Dm genre du pique-bœuf , Sc comprend une efpece. La féconde fedion eft compofée Du genre de rétourneau , & comprend quatre efpeces & quelques variétés. Septième Ordre. îl eft divifé en deux ferions : La première efl: compofée Du genre de la huppe , &c comprend une efpece. La féconde feftion efl compofée Du genre du promcrops , & comprend cinq efpeces. Huitième Ordre. 11 efl compofé Du genre du tête-chcvre , & comprend fept efpeces. Du genre de l'hirondelle , & comprend dix-huit efpeces 52 une variété. Le martinet efl de ce genre. Neuvième Ordre. • Il efl divifé en trois ferions : Tom^ IF, Cgg 4i8 OIS La première eft compofée Du genre du tangara , & comprend trente-quatre efpeces.' Uejclave , Vévéque & le cardinal font de ce genre. . Du genre du chardonneret , & comprend fept efpeces & un plus grand nombre de variétés. Le tarin efl de ce genre. ■■ Du genre du moineau , & comprend foixante & quatorze efpeces & quelques variétés. La veuve , quelques cardi- naux étrangers , la linotte , le pinçon , le fcrin , le ver^ dicr , le bengali , le femgali , le màia , le grenadin font de ce genre. ■■ Du genre du gros-bec , & comprend vingt efpeces , parmi lefquelles fe trouve le cardinal huppé, — Du genre du bruant , & comprend quinze efpeces & quel- ques variétés. Vortolan , le proyer appartiennent à ce genre. La féconde fedion efl: compofée Du genre du coliou , & comprend deux efpeces. •— ^ Du genre du bouvreuil^ ÔC comprend dix efpeces &C deux variétés. La troisième fedion efl: compofée Du genre du bec croifé , & comprend une efpece. Dixième Ordre. Il efl: divifé en deux ferions : La première efl: compofée Du genre de C alouette , & comprend treize efpeces & trois variétés. Le cujelier^ la farloufe ^ la calandre font de ce genre. . "Dw genre du bec-figue^ & comprend quatre-vingt-deux ef- peces & quelques variétés. Lr fauvette , le rojjlgnol , le rouge-queue, la. gorge- bleue , la. rouge- gorge , le roitelet, le traquet , le cul-blanc , la lavandière , la bergeronnette , le chantre , le figuier , le /?/)?// , font de ce genre. La deuxième fedion eft compofée Du genre de la méfange , Sc comprend dix-huit efpeces. Le pou owfoulci appartient à ce genre. OIS 4,5 Onzième Ordre. Il efl compofé Du genre du torckepot , Sc comprend cinq efpeces & deux variétés. Douzième Ordre. Il eft dîvifé en deux ferions : Lg première efl compofée Du genre du grimpereau , & comprend trente-trois efpeces & une variété. Le fucrier appartient à ce genre. Du genre du calibri , $c comprend feize efpeces. La deuxième fedion efl: compofée Du genre de roi/eau mouche , & comprend vingt efpeces. TreiziemeOrdre. Il eft divifé en cinq ferions : La première eft compofée Du genre du torcol, & comprend une efpece & une variété. Du genre du pic , & comprend trente-deux efpeces. La deuxième fedion eft compofée Du genre du jacamar , & comprend deux efpeces. La troifieme feftion eft compofée Du genre du barbu , & comprend cinq efpeces. — = Du genre du coucou, & comprend vingt-huit efpeces & une variété. La quatrième feé^ion eft compofée Du genre du couroucou , & comprend fept efpeces. Du genre du bout-de-petun , & comprend deux efpeces. — Du genre du perroquet , & comprend quatre-vingt-dix-fept efpeces &; deux variétés. Les arras ou les macaos , les kakaious, les lorys , \ts perruches font de ce genre. La cinquième feftion eft compofée Du genre du toucan , & comprend douze efpeces. Quatorzième Ordre. Il eft divifé en cinq ferions ; Ggg X 420 OIS La première efl: compofée Du gcnn du coq-de-roche , & comprend une efpece. , Du genre du manakin , & comprend treize efpeces. La deuxième feclion eft compofée Du genre du momot , & comprend deux efpeces. La troifieme fe£lion efl compofée Du genre du martin-pêcheur, &C comprend vingt-fix efpeces> — Du genre du tod'ur , & comprend trois efpeces. La quatrième fection eft compofée Dw genre du guêpier, & comprend treize efpeces, La cinquième fe£lion eft compofée Du genre du calao, ôc comprend fix efpeces. Quinzième Ordre. II efl divifé en trois ferions: La première eft compofée Du genre de V autruche ^ & comprend une efpece, La deuxième fedion efl compofée Du genre du thouyou , & comprend une efpece» ■— Du genre du cafoar, & comprend une efpece. La troifieme fcdion ell compofée J)\.\ genre du drame ^ & comprend une efpece. Seizième Ordre. Il eft divifé en ti'ois ferions : La première efl compofée Du genre de V outarde , & comprend trois efpeces. La cmiTK pct'ure efl de ce genre. La deuxième fedion efl compofée Du genre de Vèchajfe , & comprend deux efpeces. Du genre de Vhuîtrier , Sc comprend une efpece. La troifieme feftion efl compofée Du genre du pluvier, & comprend feize efpeces. Le courlis, de terre efl de ce genre. Dix-septieme Ordre. Il efl divifé en douze fedions: La première efl compofée Du genre du vanneau , ôc comprend huit efpeces. O I s 411 . — Du g^nre dujacana , & comprend cinq efpeces. Le chirurgien eft de ce genre. La deuxième fedion eft compofée Du genre du coulon-chaud , & comprend deux efpeces. La troifieme fedion efl compofée Du genre de la perdrix de mer , Sc comprend quatre efpeses, La quatrième feftion efl compofée Du genre du râle , & comprend dix efpeces, La cinquième fedion eft compofée * Du g'inre du bécajfeau , & comprend vingt-une efpeces & une variété. La guignette , le combattant , le chevalier , V alouette de mer, la maubêche , le me rie. Ici grive d'eau 6c le canut font de ce genre. . Du genre de la barge , &: comprend huit efpeces. Du genre de la bécajfe , &C comprend fix efpeces & une variété.. La fixieme fedion eft compofée Du genre du courlis, & comprend quatorze efpeces & une variété. Uibis eft de ce genre. La feptieme fedion eft compofée Du genre de lafpatule , & comprend trois efpeces. La huitième fedion eft compofée Du genre de la cicogne , & comprend douze efpeces. La grue appartient à ce genre , ainfi que la demoifelle de Nu- midie. — — — — Du genre du héron , & comprend quarante-fept efpeces. Le butor, V aigrette , le crabier , le bihoreau font de ce genre, Tin genre de Vombrette, & comprend une efpece. La neuvième fedion eft compofée Du genre de la cuilliere , & comprend deux efpeces & une variété. La dixième fedion eft compofée Du genre de Coifeau royal, & comprend une efpece. La onzième fedion eft compofée Du genre du cariama , & comprend une efpece. Du genre du kamichy , & comprend une efpece,' La douzième fedion eft compofée 4ii 0 ï $ Du genre de la pouk-fuUane , & comprend dix efpeces & une variété. Dix-HUiTiEME Ordre. Il eft divifé en deux fe£tions. La première eft compofée Du genre de la poule d'eau , & comprend trois efpeces. La deuxième feftion eft compofée Du genre du phalarope , & comprend quatre efpeces, » T>\\ genre de la foulque , & comprend trois efpece*. Dix-NEUviEME Ordre. Il eft compofé Du genre du grèbe , & comprend onze efpeces & vme variété. Vingtième Ordre. Il eft divifé en deux fedions : La première eft compofée Du genre du guillemot ^ Sc comprend quatre efpeces.' La deuxième feftion eft compofée Du genre du macareux , & comprend une efpece. _ — Du genre du pingo'm ou penguïn , & comprend trois ef- peces. ViNGT-UNIEME ORDRE. Il eft divifé en deux ferions : La première eft compofée Du genre du manchot , & comprend deux efpeces. — Du genre du gorfou , & comprend une efpece. La deuxième feûion eft compofée Du genre du plongeon , & comprend ftx efpeces. ViNGT-DEUXIEME OrdRE. Il eft compofé Du genre de P albatros , & comprend une efpece. Vingt-troisieme Ordre. Il eft divifé en deux ferions : OIS 423 La première eiî: compofée Du genre du puffin , & comprend quatre efpeces. Du genre du pétrel, & comprend trois efpeces. Du genre du Jiercoraire , & comprend trois efpeces. Du genre de goéland , &c comprend quinze efpeces. Les mouettes font de ce genre. La deuxième fedion efl compofée Du genre de VhïrondilU de mer , & comprend fept efpeces» Du genre du bec-en-cijéaux ^ 6c comprend une efpsce. ViNGT-QUATRIEME OrdRE, Il eû divifé en deux fedions : La première efl compofée Du genre du harle , & comprend huit efpeces. La deuxième fedion eft compofée Du genre de Voie, & comprend feize efpeces & une variété. Le cygne efl de ce genre , ainfi que Véderdon. "■• Du genre du canard , & comprend quarante-deux efpeces & plufieurs variétés. La tadorne, le morillon, la macreufe^ hifarcelle font de ce genre. ViNGT-CINQUIEME OrDRE, Il efl divifé en deux ferions : La première efl compofée Du genre de Vanhinga , & comprend une efpece. Du genre du pail-en-cul , & comprend trois efpeces. La deuxième feûion efl compofée Du genre du fou , & comprend fept efpeces. Voie de Se land, roifeauy?t/g^/e font de ce genre. — -~— — Du genre du cormoran , & comprend deux efpeces. Du genre du pélican , & comprend trois efpeces & une variété. ViNGT-SIXIEME OrdRE. Il efl divifé en deux fedlions : V La première efl compofée Du genre du flamand , & comprend une efpece, La deuxième feâion efl compofée 4^4 OIS Du genre de V avocate , & comprend une erpece." ' Du genre du coureur , & comprend une efpece. Amours des oifeaux , leurs nids , leur accouplement , leur ponte , leur habitation , leurs émigrations , leur vol , leur durée , leur marche , leur chant , leur plumage , &c. Le printemps paroît être la faifon déterminée pour les amours des oifeaux ; c'eft alors que les tefticules des mâles commencent à s'enfler confidérablement, & qu'ils défirent tous perpétuer leur efpece. Entre les oifeaux l'on en voit qui font plus portés à l'amour que les autres ,' même des mâles plus lubriques que des femelles , & des femelles plus amoureufes que les mâles. Pour ce vœu de la Nature, on voit ces ani- maux briller non-feulement par la beauté de leur plumage , mais encore l'amour les fait chanter prefque tout le jour ; alors leur voix eft plus forte. Les mâles paroiflent fe difputer à qui chantera le plus mélodieufement & le plus long-temps, comme on le remarque dans les rofîignols, dans les fauvettes , & même dans les coqs , qui s'animent à la vue de leurs rivaux. La tourterelle a un chant plaintif, attendriflant. Chaque oifeau a fon chant & fon cri particulier , par lequel on le peut diilinguer. Ils s'en- tendent les uns les autres, & fe répondent conftamment ; & comme dans ces animaux les mâles ( fans en excepter aucun) chantent mieux que les fem.elles, celles-ci femblent donner la préférence à ceux qui, dans leur efpece , les charment le plus , & méritent mieux de jouir de leurs faveurs. Nous expoferons dans la fuite de cet article plufieurs détails fur la voix des oifeaux. Tous les mâles qui, félon Redi ^ ont deux verges, & qui font oii crêtes , ou éperonnés , ou barbus , ne cochent pas leurs femelles de la même manière: les uns la tiennent contre terre, les autres tout de bout.' Il femble que la plupart des oifeaux ne faffent que comprimer fortement la femelle , comme le coq , les moineaux , les pigeons , &c. dont la verge eflfort courte; d'autres à la vérité comme l'autruche, le canard,' l'oie &c. ont un membre d'une groffeur confidérable , & l'intromifllon n'ell: pas équivoque dans ces efpeces. L'accouplement étant pafle , la plupart fe tiennent compagnie pendant tout le refle de l'année jufqu'au retour du printemps. Voyez les Exercitations de Harvey fur la génér ration. On cite plufieurs obfervations qui tendent à prouver que la morfure des OIS 4^5 des oifeaux , excités par un certain degré de colère , notamment dans la faifon qu'ils font animés de la paffion de l'amour , étoit venimeufe , & même mortelle , fans en excepter ceux des oifeaux dont le bec paroît le moins propre à mordre, tels que les canards. Confultez la î^ attire conjidcréc , &Cc, page 246^, /3 Novembre iyy4* Les femelles des oifeaux pondent les œufs : elles les couvent conflam- ment de leur propre chaleur jufqu'à ce que le petit vienne à éclorre. Cette adion de couver s'appelle incubation. La poule , qui elî: un trélor pour l'homme , pond prefque tous les jours en certaines faifons ; d'autres oifeaux pondent indifféremment tOute l'année, d'autres une fois l'an. La quantité des œufs elt en quelque forte déterminée à chaque efpece; car fi l'on encaffe, ou qu'on leur en retire quelques-uns , ils en font bien-tôt un pareil nombre pour compléter la couvée ; c'efl fur-tout ce qu'on remarque dans les canards, les hiron- delles & les moineaux. Qu'on ne touche point aux œufs des poules , on rembarquera qu'elles cefleront de pondre & fe mettront à couver auffi-tôt qu'elles en auront quatorze ou quinze : au contraire qu'on leur ôte tous les jours leurs œufs, elles continueront de pondre jufqu'à ce qu'elles en aient produit quatre ou cinq fois autant. Ceci démontre que li les oifeaux n'ont pas une connoiffance exade du nombre de leurs œufs, ils ne laiiTent pas de diitinguer un grand nombre d'avec un petit. Il eft heu- reux que les oifeaux les moins nuifibles & les meilleurs à manger de tous les animaux, font ceux qui fe multipUent le plus. Au refle, on a remarqué que ceux de ces animaux qui nourriffent leurs petits , n'en ont ordinairement qu'un petit nombre ; ceux au contraire dont les petits mangent feuls dès qu'ils voient le jour , en ont jufquà dix-huit , & quel- t^uefois plus. Mais quel foin ne prennent-ils pas de leurs œufs ! Ton ne peut qu'être enchanté du mécanifme même de l'œuf, de la naiffance & de l'éducation des petits. Commençons par examiner les nids. Les oifeaux conftruifent leurs nids & les façonnent avec un art admi- rable ; les uns les font fous l'herbe à plate terre , les autres au haut des arbres , ou les fufpendent à des branches ; d'autres dans des arbriffeaux ; d'autres dans des creux d'arbres ; d'autres dans la terre ; d'autres dans des rofeaux ; d'autres dans des fentes de rochers ; enfin , en quelqu'en- droit qu'ils les logent , c'eft toujours fous quelque abri, foit fous des herbes, ou fous une groffe branche , ou fous des feuilles doublées. On ne peut trop admirer, dit M. Piuchi,h parfaite reffemblance qui Torneir, Hhh 42(5 OIS fe trouve entre les nids des oifeanx d'une efpece & ceux d*une autre i chaque famille en effet les conflruit avec la même matière & de la même façon ; rinduflrie , la propreté & la précaution y régnent par-tout. Sup- pofons dans un feul endroit i»n amas de brins de bois fec, des écorces, des feuilles féches, du foin, de la paille, de la moufle , de la bourre, du crin, du coton, de la laine, de la foie, des toiles d'araignées , des plumes & quantité d'autres menues provifions , on verra nos habitans de l'air venir en faire emplette à cette foire. Celui-ci a befoin d'un brin de moufle ; celui-là demande une plume ; il faut à cet autre un fétu , à un autre de la laine : il y a quelquefois des grandes querelles, alors chacun tire de fon côté, & emporte au nid ce qu'il peut. Les dehors du nid font des matières groflleres pour fervir de fondement : on y emploie les épines, les joncs , le gros foin , & la moufle la plus épaiffe : fur cette première aflife encore informe , ils étendent , entrelacent & plient en rond des matériaux plus délicats , & difpofés de manière à fermer l'en- trée aux vents & aux infe£les. Comme chaque efpece a fon goût ou une façon pour fe meubler, ils ne manquent point de tapifler le dedans de petites plumes, ou de l'étoffer avec de k laine, des duvets, tréfor & luxe de leur nid , mais néceflaires, de peur que leurs œufs ne fe froiffent ou ne fe caffent , & pour entretenir une chaleur autour d'eux ÔC de leurs petits. L'étendue du nid efl: proportionnée au nombre des enfans qui doivent naître , & jamais la ponte n'en prévient la flruûure. Les outils des oifeaux font leur bec ; avec un tel inftrument ils fabriquent des ouvrages oii l'on trouve la propreté du Vannier , & l'induAirie du Maçon : il y en a dont toutes les pièces font proprement attachées & liées avec un fil que l'oifeau fe fait avec de la bourre, du chanvre , du crin & des toiles d'a- raignées ; telle efl la méfangc. Voyez ce mot. Les loriots, dont le mâle & la femelle fe recherchent prefqu'à leur arrivée dans nos climats , font leurs nids fur des arbres élevés , quoique fouvent à une hauteur fort médiocre ; ils les façonnent avec une flngu- liere induflrie ; ils les attachent ordinairement à la bifurcation d'une pe- tite branche & ils les enlacent autour des deux rameaux qui forment cette bifurcation; de longs brins de paille ou de chanvre , dont les uns allant droit d'un rameau à l'autre , forment le bord du nid par devant , & les aiitres pénétrant dans le tiflii du nid ou paffant par deffous &: reve- nant fe rouler furie rameau oppofé, donnent la folidité à l'ouvrage. Ces OIS 4^7 longs brins de chanvre ou de paille qui prennent le nid par defTous , en {ont l'enveloppe extérieure; le matelas intérieur deftiné à recevoir les œufs , eft un tiffu de petites tiges de gramens , dont les épis font ramenés fur la partie convexe, & paroiffent fi peu dans la partie concave, qu'on a pris plus d'une fois ces tiges pour des fibres de racines : enfin entre le matelas intérieur & l'enveloppe extérieure il y a une quantité confidé- rable de moufTe, de lichen & d'autres matières femblables qui fervent, pour ainfi dire , d'ouate intermédiaire & rendent le nid plus impé- nétrable au dehors, & tout à la fois plus mollet au dedans. Ce nid étant ainfl préparé, la femelle y dépofe quatre ou cinq œufs, dont le fond blanc fale eu femé de quelques petites taches bien tranchées , d'un brun prefque noir , & plus fréquentes fur le gros bout que par tout ailleurs: elle les couve avec afîiduité l'efpace d'environ trois femaines , qui efl le terme de l'incubation de cet oifeau. D'autres oifeaux , comme le merle & la huppe , enduifent l'intérieur du nid d'une petite couche de mortier , qui colle & maintient tout ce qui efl defTous , & qui , à l'aide d'un peu de bourre ou de moufTe qu'ils y attachent quand il efl encore frais , forment par dedans une muraille ou un appartement meublé, d'une propreté parfaite. D'autres enfin , comme l'hirondelle , font un nid fans bois , fans foin , fans liens ; ils gâchent la poufîiere avec l'eau qu'ils ont prife en volant à la fuperfîcie de l'eau, & conflruifent un logement d'une flrudlure tout-à-fait fmguUere. C'efl ainfi que les oifeaux fabriquent pour leurs petits une habitation foHde , & qu'ils ne la bâtifTent pas indifféremment en toutes fortes d'en- droits , mais toujours] dans un' lieu où ils puifTent être tranquilles & à l'abri de leurs ennemis. Tous couvent leurs œufs nuit & jour avec tant de patience , qu'ils aiment mieux fouffrir la faim que de les expofer en allant chercher leur nourriture. L'oifeau , cet animal fi agile , fi in- quiet , fi volage , oublie en ce moment fon naturel , pour fe fixer fur ies œufs pendant le temps né,cefTaire. Les oifeaux les plus timides & les plus foibles montrent du courage & de la force lorfqu'il s'agit de fauver leurs œufs , même des œufs flériles , ou des œufs qui ne viennent pas d'eux, &, ce qui efl encore plus étrange , des œufs fimulés. L'ardeur que les poules ont pour couver efl très-grande ; lorfque ce feu les anime , on les entend gloufTer , on les voit s'agiter , abaifTer leurs ailes , hérifTer leurs plumes , & chercher par-tout des œufs qu'elles puifTent couver. Mais pafTons à l'hifloire de l'œuf. Hhh 1 428 OIS Les œufs des oîfeaux différent par la couleur de leur robe & par la groiTeur ; tous ont une coque ou écorce affez dure, blanche , fragile , calcaire , & en dedans une membrane qui enveloppe tout l'œuf. Prenons pour exemple l'œuf d'une poule , oîi les parties font plus fenfibles : on y diftingue facilement le jaune , r/V^Z/ww , qui eft au cœur; le premier blanc , albumen , qui environne le jaune ; un fécond blanc dans lequel la maffe du milieu nage , les ligamens qui foiitiennenî le jaune vers le centre de l'œuf, les membranes qui enveloppent l'une le jaune , l'autre le premier blanc, & une troifieme & une quatrième qui environnent le tout ; enfin la coque qui fert de dcfenfe à tout le refte. Tout ce qui efl: intérieur eft façonné le premier ; la coque fe forme la dernière , ôc fe durcit d'un jour à l'autre : l'ufage de cette croûte eft double ; i°. elle met la mère en état de fe délivrer de l'œuf fans l'écrafer ; 2°. elle met Je petit à couvert de tout accident , jufqu'à ce qu'il foit formé & en état de fortir. On peut dire de mSme que l'œuf tient lieu aux petits oifeaux de la mamelle & du lait qui nourrit les petits des autres animaux , parce que le poulet qui eft dans l'œuf, fe nourrit d'abord du blanc de l'œuf, & enfuite du jaune îorfqu'il eft un peu fortifié , & que fes parties com- jnencent à s'affermir. C'eft fur la membrane qui environne le jaune que fe trouve la cicatrïcuk , cicatrïcula , ou petite tache blanche , qui efl feule le véritable germe , Jlamcn , où réfide le poulet en petit. Il a dès- lors tous fes organes (dit M. Pluche d'après Villhughbi & Malp'ighi^ y mais applatis , repliés & enveloppés dans un point ; dès que la moindre portion de l'efprit vital qui eft deftiné à l'animer , a paffé au travers des enveloppes jufqu'au cœur , alors le poulet vit & tout commence à fe mouvoir en lui. Il y a, pour ainfi dire, une forte de rapports généraux pour la manière dont l'efprit vivifiant fe glifte par les pores des mem- branes de l'oifeau encore dans fon œuf, & du fœtus dans la matrice ;ii en eft à peu-près de même pour la manière dont le poulet reçoit des fucs mitritifs. Tous ces petits canaux auparavant applatis , fe gonflent ; tout prend nourriture , & le poulet commence à croître. Il eft prefque impoffible de démêler dans les liqueurs qui l'environ- nent la nature des progrès & des changemens qui lui arrivent de jour en • jour pendant le temps de Tincubation jufqu'à ce qu'il perce fon écaille. M. Pluche fait encore obferver ici une précaution aufîîfenfible qu'admi- rable , qu'on remarque dans la fituation de la cicatrlcule où le poulet fe forme. Cette petite tache ronde , chalafa , qui gft fur l'enveloppe du OIS 429 jaune , fe trouve toujours placée prefque au centre de l'œuf & vers le haut du côté de la mère , pour en recevoir la chaleur dont il a befoin. De quelque manière qu'on remue l'œuf, le petit n'ell jamais renverfé : le jaune efl foutenu par deux ligamens qu'on trouve toujours à l'ouverture de l'œuf, & qui s'attachent de part & d'autre à la membrane commune qui eft collée fur la coque. Si on tiroit une ligne d'un ligament à l'autre , elle ne pafferoit pas julle par le milieu du jaune , mais au-deiTus du centre , & couperoit le jaune en deux portions inégales ; en forte que la moindre partie du jaune où le germe efl pofé , demeure nécefTairement élevée vers le ventre de l'oifeau qui couve l'œuf; & que l'autre partie étant plus grofîe & plus pefante , defcend toujours vers le bas autant que les liens le permettent. Si l'œuf fe déplace, le petit n'en fouffre point, & il jouit, quoi qu'il arrive , de la chaleur qui met tout en adion chez lui, & qui perfectionne peu- à- peu le développement de fes parties. Ne pouvant plus gliffer en bas, il fe nourrit à l'aife , d'abord de ce blanc liquide & déhcat qui efl à portée de lui ; enfuite il tire fa vie & fon ac- croifiement du jaune, qui efl une nourriture plus forte. Lorfque fon bec eft durci &c qu'il a prefque rempli toute la capacité de fa maifon, il fe met en devoir de rompre la coque ; il fait déjà entendre diflindement fa voix avant que fa coque foit fêlée , ce qui prouve la pénétrabilité de l'air à travers les pores de la coque : enfin il en fort ayant le ventre rempli de ce jaune qui lui tient lieu de nourriture encore quelque temps jufqu'à ce qu'il puifTes'aifermir fur fes pattes, & aller. chercher lui-même à vivre ; ( chez la plupart des oifeaux ce font le père & la mère qui lui en vien- nent apporter ). On prétend avoir obfervé qu'en général les petits oifeaux ne voient que le feptieme jour qu'ils font éclos ; mais ils en- tendent aufîl-tôt Vappel ou cri du père ou de la mère qui leur an- noncent la nourriture, f^oye^ la manière dont les poulets s'y pren- nent pour fortir de l'œuf, à la fuite de l'article Coq : vojei aujji U mot Œuf. . . Le corbeau & les corneilles mâles , dans le temps de la couvée, ap- portent à manger à leurs femelle*. Avec quel art les oifeaux mâles par- tagent & adouciflent la peine de leurs fidelles compagnes ] l'un réitère i^s voyages fans fe rebuter, & met dans le bec de la femelle , la mangeaille toute préparée ; un autre accompagne ces petits fervices de fon ramage ; par-tout l'on voit l'inquiétude oiBcieufe du mari , & l'affiduité pénible de la mère. 450 0 1 S Les pigeons, les moineaux, & plufieiirs autres oifeaux, qui ne s'ac- couplent point indifFéremment , &C font comme un ménage à part de mâle à femelle , couvent tour à tour; mais parmi les autres , on ne voit pas que les mâles prennent le moindre foin de leurs petits, puifque même ils abandonnent leur femelle. On remarque que la plupart des canards , quand ils font obligés de quitter leurs œufs pour aller chercher à manger , s'arrachent une bonne quantité de plumes pour les couvrir & les garantir du froid. Quel foin, quelle follicitude pour pourvoir à la nourriture de leurs petits nouvellement éclos , jufqu'à ce qu'ils aient afTezde force pour voler & pour aller chercher eux-mêmes leur pâture! Non-feulement le pigeon mâle couve les œufs & travaille à la con- ftrudion du nid comme la femelle , mais les petits pigeons ne pourroient pas digérer des graines dures, file père & la mère ne les avaloient au- paravant pour les ramollir dans leur gofier; enfuite de quoi , ils les dé- gorgent dans le bec des pigeonneaux. Le hibou fait fon nid fur le haut de quelque montagne efcarpée , dans l'endroit qui eft le plus expofé aux ardeurs du foleil , afin que les cadavres qu'il y apporte, fe changent par la chaleur en une efpece de bouillie pro- pre à nourrir fes petits. Le coucou pond (es œufs dans le nid des autres oifeaux : il laifle à ceux-ci le foin de les couver &c de les faire éclorre. Mais quelle étrange furprife pour la mère , qui croit trouver de l'afFedlion dans le nouveau né ! A peine celui-ci a-t-il' quelques jours , qu'il dévore les petits de l'oi- feau dont le nid lui a fervi de berceau , & fouvent , comme Car- nivore , il extermine & mange fa prétendue mère, f^oye^ à L^anide Coucou. Tous les oifeaux ( excepté le coucou ) font très-attachés à leurs pe- tits : ils fentent alors ce que c'eft que d'être chargé de famille ; il faut trouver à vivre pour fix ou dix au lieu de deux. Dans le temps que les petits grandiffent, le rofîignol Se la fauvette fufpendent leurs concerts accoutumés ; le befoin les fait aller en quête dès le foleil levant : de retour, ils diflribuent la nourriture aux petits avec beaucoup d'égalité. Au devoir de nourrice fuccede celui de fentinelle , & l'amitié change les humeurs , en corrigeant les défauts ; c'eft ainfi qu'une poule gourmande & infatiable n'a plus rien à elle quand elle a des petits. Cette mère , na- turellement timide , nefavoitque fuir auparavant : à la tête d'une troupe de pouffins , c'eft une héroïne qui affronte tous les dangers pour la OIS 431 défenfe de fes petits. Cette conduite eft égale audefir qu'elle a de pondre & de couver. La poule d'Inde , fuivie de fa petite famille , a l'art de pouffer un cri lugubre qui oblige tous (es enfans à fe tapir fous les buiffons, & de contrefaire les morts. Ce cri annonce qu'il y a dans l'air un oifeau de proie prêt à fondre fur eux ; l'oifeaude proie difparoît-il, l'alarme ceffe, & la mère de famille pouffe un autre cri qui retire les petits de la con- ilernation. A mefure que l'on étudie de plus en plus la Nature , fon mé- canifme , (on art , fes reffources , la multiplicité de fes moyens dans l'exécution , fes défordres mêmes apparens , tout nous étonne , tout nous furprend. On peut confulter l'article Perdrix. Lorfque les petits loriots font éclos , la mère les défend contre leurs ennemis & même contre l'homme , avec plus d'intrépidité qu'on n'en at- tendroit d'un û petit oifeau : on a vu le père & la mère s'élancer coura- geufement fur ceux qui leur enlevoient leur couvée ; &, ce qui eft encore plus rare, on a vu la mère prife avec le nid, continuer de couver en cage & mourir fur fes œufs. Les perdrix blanches habitent les Alpes , oii elles fe nourriffent de fe- mences du bouleau nain ; &c afin qu'elles fuffent plus en état de courir parmi les neiges , la nature leur a donné des pattes couvertes de plu- mes ; femblablement à nos perdrix grifes , elles s'apparient le mâle avec la femelle , & s'aident mutuellement pour élever leurs petits. Le pélican habite dans les déferts arides; & comme il fait fon nid dans les lieux fort éloignés de la mer , & qu'il lui faut aller chercher bien loin la provifion de l'eau &c. qui lui efl néceffaire, tant pour lui que pour fes petits , la Nature l'a pourvu d'un inflrument propre à cet ufage : il porte fous la gorge une efpece de fac affez ample & profond ; il le rem^ plit d'une quantité d'eau & de poiffon , qui lui eft fuffifante pour s'abreu- ver & fe nourrir pendant plufieurs jours. Foyei à l'article Pélican. Les oies , les canards & les plongeons , qui vivent dans l'eau , y trou- vent à fe nourrir d'infeâes aquatiques, de petits poiffons , d'œufs de poiffons, &c. La forme de leur bec, de leur cou , de leurs pattes & de leurs plumes, répond admirablement bien àl'inftinâ: & au genre de vie qui leur font propres. La même remarque peut fe faire dans toutes les autres efpeces d'oifeaux. Les canards & tous les oifeaux qui comme eux ont les doigts des pieds réunis par une membrane , qui dans nos climats fe repofent 452 OIS pendant la rruit fur la terre, ceux qui vivent au bord des eaux, &quî ne le perchent point en Europe , paiTent toute la nuit fur des branches d'ar-» bres à la Guiane : ils auroient couru trop de périls fur une terre cou- verte de reptiles dangereux par leur nombre 3c par leur force, la nc- ceiTité leur a appris à triompher de leur forme & des obilacles qu'elle a du leur caufer. Ainfi le mécanifme & la difpofition des organes , ne dé- terminent pas feuls les avions des animaux. L'inllind, une maininvifible, ou une prévoyance bienfaifante , en règlent 6c en dirigent les mou- vemens. Un oifeau palmé de Nor-îrege ( efpece de mountz ou plutôt de jlercorairî qui efl le (Irund-jagcr de Ray ) a une façon de vivre tout-à-fait particulière. Comme il n'a pas la même facilité que les autres oifeaux aquatiques de plonger dans l'eau pour prendre des poiflbns, il fe nourrit aux dépens des mauves , qui , fe voyant pourfuivies , rejettent une partie de leur proie dont il fait fon repas. Comme les poifTons fe tien- nent en automne au fond de l'eau , une efpece de plongeon , qui a la facilité de s'y enfoncer encore plus avant que les mauves , fournit aufïi de quoi vivre à cet oifeau. La nourriture la plus ordinaire des petits oifeaux efl: \e polygone vul- gaire ( renouée ), plante fort commune , qui fe trouve par-tout jufques dans les grands chemins , & qui après la moiffon eft très-abondante dans les champs. Les femences, dont elle eft toute chargée, tombent à terre , &: font recueillies durant toute l'année par les oifeaux qui por- tent le nom de granivore. Les gros oifeaux de rapine vivent de petits quadrupèdes & de divers petits oifeaux. Ceux d'entr'eux qui font foibles & plus lâches que les autres , fe contentent des cadavres que le hafard leur fait trouver. Dans tous les animaux qui pafTent l'hiver fans prendre de nourriture , on obferve que le mouvement périftaltique des inteftins eft fufpendu , ce qui fait que pendant ce temps-là ils ne font nullement prelTés de la faim : telle elî l'expérience qu'en a fait Lijîcr. Leur fang ne fe coagule point dans la palette , comme celui des autres animaux , & en eft par là plus propre à entretenir la circulation. Les coqs de bruyère fe creufent fouvent des retraites fous la neige, où ils fe promènent pendant l'hiver , mais ils muent en été ; de forte que ne pouvant plus voler au mois d'Août , ils font contraints de cou- rir à travers les bois pour chercher leur nourrirure , qu'ils trouvent néanmoins V OIS 433 néanmoins fans peine ,' parce que le fruit de ValrelU , qui eft alors en fa maturité, leur fournit abondamment de quoi manger. Les petits, au con- traire , ne muent point au commencement de l'été , parce que n'étant pas encore en état de bien courir , ils ont befoin de leurs ailes pour s'éloigner en cas de péril. Les autres oifeaux qui fe nourriflent d'infeâes , vont vivre chaque année fous un climat plus tempéré , tandis que toutes les terres fituées plus près du Nord , où ils ont paiTé l'été fort agréablement , font cou- vertes de neiges & de glaçons. Rien de plus fmgulier que la manière dont voyagent les oifeaux de paflage. Le jour du départ eft marqué pour chaque efpece ; ils s'afTemblent par troupes : la réfolution étant prife & annoncée à chacun d'eux, ils fe mettent en route , & maintien- nent une forte de difcipline ; nuls traîneurs , aucuns déferteurs : fans boufTole & fans carte , mais par l'indindl des befoins , ils fuivent invaria- blement la route qui conduit au lieu où ils fe propofent d'arriver (^a). Le degré de froid ou de chaud qui règne dans l'atmofphere , accélère ou retarde les émigrations des oifeaux de paflage ; il y a apparemment un rapport fecret entre la température qui convient à la conftitution de certaines efpeces , & celle qui efl néceffaire pour la prodiiftion des alimens dont elles fe nourriffent. Les vents paroifTent avoir aufîi une grande influence fur les voyages des oifeaux : l'hiftoire de ces émigra- tions efi: eifentiellement liée aux obfervations météorologiques , &: les fuppofe. Quoi qu'il en foit, ces émigrations régulières fur notre hémi- fphere , par diverfes fortes d'oifeaux, font très-avantageufes à plufieurs Nations différentes , qui profitent de la vifite de ces nouveaux habitans. Ces oifeaux font nommés pnJJ'agers , & prefque tous retournent par bandes chacun dans leurs climats à Jour marqué : il en refte cependant beaucoup, qui ne fortent pomt du pays où ils font nés. Le Moteur de la nature a donné à ceux-ci l'inflinft puifTant de trouver confîamment la nourriture annuelle dans leur pays natal. On obfervera que ceux des {a) On prétend que la peile peut quelquefois être apportée par les oifeaux ; voici les obfervations fur lefquelles on fe fonde. Dans la dernière pefte de Marfellle , les oifeaux quittèrent le pays & n'y revinrent qu'après qu elle fut entièrement difflpée. On fe rappelle qu elle fut apportée , il y a quelques années , en Italie par une cor- neille. Comme cet oifeau y efl très-rare , il fut ramafle avec empreflement par plu- fieurs perfonnes. De vingt-fept qui compofoient la compagnie,, & qui touchèrent l'olfeau fatal , il «n mourut feize, Tom& IK^ lii 434 OIS oifeaux qui ne font pas de tranfmigrations ont le bec fort & mangent de tout , tandis que ceux qui ne vivent que dmfe£tes ailés ont le bec foible ; ceux-ci font donc obligés , pour vivre , de pafler en d'autres contrées. Les srrivcs , les éwurneaux , les pinçons & les cailles , forment autant de caravanes emplumées , qui nous quittent dans l'automne ; & pour nous dédommager en quelque forte de leur abfence , le froid nous amené les bécaffes , les bécaffines , &: toutes fortes d'oifeaux aquati- ques ( M. Bourgeois obferve ici que le paffage &leféjour desdifférens oifeaux varient dans chaque pays, fuivant la nature du climat. En SuifTe, dit-il , les grives à pieds noirs n'arrivent qu'à l'entrée de l'hiver , &C elles y refient pour l'ordinaire jufqu'au printems : les bécaffes 6c les bécaffines font leur paffage au printems & en automne : on n'en voit point en cette contrée pendant l'hiver , ni pendant l'été ). Vêtourncdu , dit M. Linneus , ne trouvant plus en Suéde , fur la iîn de l'été , une auffi grande quantité de vermiffeaux qu'auparavant , defcend chaque année dans la Scandinavie , l'Allemagne ôc le Dane- marck. Quelque répandu que foit le loriot, il y a des pays qu'il femble éviter; on ne le trouve ni en Suéde , ni en Angleterre , ni dans les montagnes de Bugey , ni même à la hauteur de Nantua, quoiqu'il fe montre régu- lièrement en Suiffe deux fois l'année. C'efl vers la fin du printems que les loriots arrivent dans nos climats. Dès que les petits font élevés , la famille fe met en marche pour voyager ; c'efl ordinairement vers la fin d'Août ouïe commencement de Septembre : ils ne fe réuniffent jamais en troupes nombreufes : ils ne refient pas même affemblés en famille ; car on n'en trouve guère plus de deux ou trois enfemble , quoiqu'ils volent peu légèrement & en battant des ailes , comme le merle : il efl probable qu'ils vont paffer leur quartier d'hiver en Afrique , car on les voit paffer à Malte dans le mois Septembre & repaffer au printems. Arrivés dans nos climats , ils font la guerre aux inf'eftes, & vivent de fcarabées , de chenilles & de vermiffeaux ; mais leur nourriture de choix , celle dont ils font le plus avides , ce font les cerifes , les figues , les baies de forbier , les pois, &c. Les loriots ne font point faciles à élever ni à apprlvoifer ; on les prend à la pipée , à l'abreuvoir , & avec divers fortes de filets. Quand l'automne répand dans nos climats les derniers rayons qui annoncent les approches de Thiver , alors les infères commencent à OIS 435 difparoître, les hirondelles planent dans l'air , volent en rafantles eaux, s'afîemblent & fe rejoignent pour fe tranfporter dans des climats plus chauds où elles trouvent un afile & des vivres, f^oyei Hirondelle* De même les pinçons , notamment les femelles , pafTent en grandes trou- pes par la Hollande aux environs de la Saint Michel , fe joignent aux nôtres , & vont habiter tous les hivers les pays Méridionaux. Les oifeaux aquatiques quittent les régions du Nord avant que les eaux foient glacées , & fe retirent l'hiver dans celles du Midi. On voit auffi de ces oifeaux à qui Içs befoins font braver l'intempérie des faifons les plus oppofées : c'efl ainfi que tout Paris a vu en Août 1765 , des légions de cicognes qui voloient fur deux couches au-deffus l'une de l'autre ; l'inférieure étoit fi balle qu'on auroit pu en prendre à la main ; les unes fe répandirent dans les environs de cette ville , les autres fe perchèrent fur les toits des édifices les plus élevés de la Capitale : ces oifeaux accoutumés à vivre dans des pays aquatiques & froids ( la Hollande & l'Allemagne ), fembloient venir par la route d'Efpagne pour gagner les endroits du Nord où ils trouvent de quoi vivre facile- ment & en abondance. Autrefois lorfque cespafTages extraordinaires de cigognes arrivoient, on les regardoit comme un préfage de grands malheurs ; mais aujour- d'hui que l'on connoît la caufe de ces effets naturels , l'on n'en efl point effrayé ; l'oifeau quitte les pays qu'il habite quand la nourriture nécef- iaire y manque , la nature le prefTe d'en chercher ailleurs. Les grues quittent pendant l'hiver les régions Septentrionales , pour voler vers les campagnes du Midi : on les voit pafTer par troupes de cinquante , de foixante & de cent ; la nuit elles s'abattent fur la terre pour prendre de la nourriture , & après l'hiver elles retournent à leur première demeure où règne un froid plus fupportable : elles s'élèvent toujours en troupe & forment un vol figuré. On voit en automne , furies marais de Pologne, une multitude in* nombrable de canards , ^oies & de cygnes, qui par différentes rivières, vont fe rendre au Pont-Euxin , dont l'eau falée ne fe gèle point , & qui reviennent au retour du printems , vers les marais Septentrionaux, pour y pondre leurs œufs , parce que dans ces régions , fur-tout dans la La- ponie , ils trouvent une grande quantité de moucherons. La bécajfe refle dans les vallons & les bois en Angleterre & en France, pendant la faifon des frimats , & en fort aux approches du printems ,< lii 1 4^6 O I S après que le mâle s'eft appareillé avec fa femelle ; enfuite elle remonte jfiir les montagnes. Dans ces plages oii l'Océan Septentrional bouillonne en de vafles tourbillons autour des ifles éloignées, triftes & folitaires deThulé, ainfi qu'aux lieux oîi les flots Atlantiques fe brifent contre les orageufes Orcades , l'air eft comme obfcurci au printems par l'arrivée d'une mul- titude d'oifeaux aquatiques qui viennent y aborder ; la rive retentit du bruit fauvage que produit l'enfemble de leurs cris. Le canard à duvet repaire aufîi dans les creux des rochers éboulés dans les eaux. Le canard cTIflandc pafîe en Suéde au mois d'Avril & continue fe courfe jufqu'à la mer Blanche. L'oifeau nommé bec recourbé , fe retire en Italie tous les ans chaque automne. Le colymbe pafle tous les étés, ainfi que tous les automnes, en Allemagne. La ^rzVe remplit les forêts de Suéde au printems, & les quitte en hiver pour pafTer en France & ailleurs. Le moineau de neige (emberiza) abandonne les Alpes pendant touî l'hiver, & pafTe en Allemagne & en Suéde. La. ?nauve , pendant l'hiver, voyage en Efpagne , en Italie & en France. Vhirondelle pourfuit les différentes efpeces d'infeftcs qui voltigent dans l'air. Le pic, pour fe nourrir , tire avec fa langue les infeftes qui fe tiennent cachés dans l'écorce des arbres. Les corbeaux vivent de cadavres, & fuivent quel- quefois les armées. Qui peut raconter combien de ces nations volantes vont & viennent fans ceffe ? Combien de nuages ailés s'élèvent au-deffus des nuages de l'air dans toutes les faifons? Les oijeaux évitent les rufes de leurs ennemis par le vol qui leur eft particulier, & par ce moyen ils échappent m.ême fouvent aux oifeaux de proie ; car fi le pigeon , par exemple , voloit de la même manière que répervier, il ne pourroit prefque jamais éviter fes griffes. Les cigognes & les faucons font des bêtes de rapine très-nécefTaires pour empêcher la trop grande multiplication des autres efpeces. Ces oifeaux , au rapport de Bclon , nétoyent l'Egypte d'une multitude infinie de grenouilles , dont tout le pays efl couvert après ley inonda- tions du Nil. Ils détruifent aufïï les rats qui infeflent la Palefiine, Les oifeaux (dit M. Clayton, dans les Tranfaci. Philofoph.^ qui ont le bec plat , & qui cherchent leur nourriture en tâtonnant , ou en fouil- lant dans la terre , ont trois paires de nerfs qui s'étendent jufques dans leur bec : c'eft par ces nerfs qu'ils difiinguent avec tant de fagacité &: d'exaûitude ce qui eft propre à leur fervir de nourriture , d'avec ce OIS 437 qu'ils doivent rejeter ; choix qu'ils font uniquement par le goût , fans qu'ils voient les allmens : ces nerfs paroiffent avec plus d'évidence dans le bec & dans la tête du canard , auffi n'y a-t-il pas d'oifeau qui fouille autant pour trouver fa nourriture. On trouve auffi deux de ces nerfs dans la partie fupérieure du bec de la corneille , du grôle , & proba- blement les autres oifeaux à bec rond ont ce même avantage. Par-tout on voit que le Créateur a donné aux brutes une efpece d'inflinâ: qui leur fait rejeter ce qui leur eft nuifible : cet inftinâ: l'emporte fouvent fur notre raifon , par l'abus que les hommes en font. La nature a auffi placé fous le gofier de ces animaux une poche qu'on nomme \q jabot , où ils mettent leur mangeaille en réferve : la liqueur bîi elle nage dans ce jabot , aide à en faire la première digeflion ; le géiier, cette poche mufculeufe où il n'entre que très-peu de nourriture à la fois , fait le refle , fouvent à l'aide de quelques petits graviers & de cailloux raboteux que l'oifeau avale pour mieux brifer fa nourriture, & peut-être pour tenir les pafTages libres. Ainfi l'on voit que dans les oifeaux la digeftion fe fait par voie de diflblution & de trituration : par difiblution dans ceux qui ont, comme la bufe, un efîomac mem- braneux , & par trituration dans les oifeaux qui ont un géiier. M. de Réaumur , qui avoit étudié la Gaflrologie des oifeaux , fit avaler à des dindons de petites boules de verre , pour prouver cette dernière propriété de digérer ; ce qui lui réuffit affez bien. Au refce le géiier des oifeaux eil très-robuile , très-compade , & a une faculté de tritu- ration bien étonnante. L'intérieur de cette poche eil rempli de rugoiités & de plis très-compades. Voyez fHiJî. de VAcadcm. des Scienc. ann, ijSz. En un mot , il réfulte des expériences de M. de Réaumur^ dont on peut voir auffi le détail dans le Journal des Savans de Juin & Juillet 1763 ; il réfulte, dis-je , que dans les oifeaux de proie la digeilion paroit fe faire uniquement par l'adion d'un fuc diifolvant , fans indice de trituration : cette dernière aftion eil au contraire très-marquée & paroît le principal moyen de digelKon dans les oifeaux de l'ordre des poules , des pigeons , & généralement dans les granivores. Il n'en eil: pas, dit Bélon^ des oifeaux comme des animaux terreflres» ^ qui dans chaque efpece font ou plus grands ou plus petits , fuivant les régions qu'ils habitent. Les oifeaux fauvages , fuivant l'efpece dont ils font , confervent affez conflarament par-tout leur grandeur , leur forme , leiw couleur , leur nature ; un coq vivant en Afrique , t& 43^ OIS fcmblable au coq qui vit en Afie & en Europe. Tous les oifeaux*," excepté ceux qui ne fortent que la nuit , ont la tête petite à proportion de la groffeur du corps. Ils ont auffi le corps plus court , plus large , & plus épais que les animaux quadrupèdes ; Toifeau mouche eft le pygmée des oifeaux connus , & l'autruche & le condor en font les géants. Les oifeaux ont des yeux ôc des paupières , comme les autres ani- maux ; mais les yeux des oifeaux , comme ceux des poifTons , ont moins de convexité que ceux des quadrupèdes : ils couvrent leurs yeux d'une membrane qui fort du grand angle de l'œil , & qui recouvre l'œil en tout ou en partie au gré de l'oifeau , quoique les paupières reftent ouvertes. Cette membrane fe trouve aufîi dans plufieurs quadrupèdes, elle fert à nétoyerlafurface de l'œil. Les oifeaux voient tous fort clair, mais les uns plus que les autres ; les uns voient pendant le jour , & les autres pendant la nuit. Les oifeaux de proie ont les yeux ombrés. Aucun oifeau n'a de cils , ni de fourcils , du moins qui portent du poil autour des yeux , comme chez les quadrupèdes : il eft vrai cependant qu'il y en a , tels que les faifans , qui ont quelque chofe d'approchant. L'on a toujours cru que la paupière fupérieure des oifeaux ne fe baiffoit point , excepté celle de l'autruche , & qu'il n'y avoit que la paupière inférieure qui s'élevoit fur l'œil ; cela eft vrai dans le coq- d'inde , le coq domeflique , la poule , l'oie , le canard , le moineau & le merle ; mais le pigeon , la tourterelle , le ferein &: toutes les efpeces de hiboux , ont la paupière fupérieure mobile : elle fe baifTe & va trouver la paupière inférieure. C'eft le contraire quand ces oifeaux font morts. Il convient d'expofer tous les détails connus fur cet article. En voici le fommaire : nous difons que les yeux des oifeaux font dans quelques parties , organifés différemment de ceux de l'homme & des animaux quadrupèdes , qu'outre les deux paupières fupérieure & in- férieure , les oifeaux en ont encore une troifieme nommée paupière interne , membrana nicîitoria aut ni'àitans ; elle fe retire & fe pliffe en forme de croiffant dans le grand coin de l'œil , fes cillemens fréquents & rapides s'exécutent par une mécanique mufculaire très-curieufe. La paupière fupérieure efl: prefque entièrement immobile , mais l'inférieure eft capable de fermer l'œil en s'élevant vers la fupérieure , ce qui n'arrive que lorfque l'animal dort , ou lorfqu'il ne vit plus ; ces deux paupières ont chacune un point lacrimal , ôc n'ont point de rebords OIS 439 cartilagineux ; la cornée tranfparente eu environnée d'un cercle ofTeux, compofé de quinze pièces , plus ou moins , pofées les unes fur les autres en recouvrement , comme les tuiles ou les ardoifes d'un toit ; le criiilallin eu plus dur que celui de l'homme , mais moins dur que celui des quadrupèdes &c des poifibns , & fa plus grande courbure eft en arrière ; enfin il fort du nerf op:ique, entre la rétine &L la choroïde, une membrane noire , de figure rhomboïde & compofée de fibres pa- rallèles , laquelle traverfe Thumeur vitrée , & va s'attacher quelque- fois immédiatement par fon angle antérieur, quelquefois par un filet qui part de cet angle , à la capfule du criftallin ; c'efl à cette membrane fubtile , tranfparente, que MM. les Anatomifles de l'Académie des Sciences ont donné le nom de bourfi ; fon ufage efl, félon M. Petit ^ d'abforber les rayons de lumière qui partent des objets qui font à côté de la tête , & qui entrent directement dans les yeux : l'organe de la vue chez les oifeaux, comme on le voit , eft plus compofé que dans les quadrupèdes ; aufTi les oifeaux l'emportent-ils par ce fens fur les autres animaux. Les oifeaux ont fur le bec deux trous qui leur fervent pour l'odorat. Ils ont un bec fans dents ; mais il y a quelques oifeaux de rivières , qui ont le bec dentelé & fouvent crochu, d'autres voiité & tranchant , d'autres droit & rond , d'autres long & pointu , &c. Voye^ à V article, Bec. Les oreilles des oifeaux n'ont point de conque à l'extérieur , & dans la plupart le conduit auditif eft fans aucun couvercle , mais il y en a dans les oifeaux de proie nodurnes , & dans quelques-uns des diurnes ; .voyez l'article Ouie, Confultez aufîi la Théologie Phyjîqm de Dcrham. Non-feulement les oifeaux différent par le bec, mais encore par la langue : les uns l'ont courte , les autres large ; d'autres déliée &: la plu- part dure : il y en a qui ont la queue longue , d'autres courte , & d'autres qui n'en ont point du tout; tous ont les plumes fendues & attachées à la peau. La racine en eft creufe : outre ces plumes, ils ont encore une efpece de poil , ou une efpece de duvet. Les oifeaux qui ont les pattes longues ont aufTi le cou long, autre- ment ils ne pourroient prendre leur aliment fur la terre ; mais tous ceux dont le cou eft long n'ont pas les pattes longues , tel eft le cygne. Ceux qui n'ont point de doigt en arrière ne fe trouvent jamais fur les arbres. Avec quel artifice les palmipèdes replient leurs orteils & leurs pieds , quand ils tirent à eux leurs jambes, ou qu'ils les étendent pour nager! 440 OIS ils élargiiTent & ouvrent tout le pied quand ils preflent l*eau,' ou quand ils veulent aller en avant. Les jambes font pliées dans tous les oifeaux, afin qu'ils puifTent fe percher, jucher & fe repofer plus facilement,- Cette diiplicature leur aidj encore à prendre l'effor pour voler. En général les oifeaux vivent long-temps ; cependant on a remarqué que ceux qu'on djtenoit en cage , & même qu'on apprivoifoit, n'avoient pas une vie de û longue durée, que quand ils ne font point efclaves. Les uns vivent deux ans, d'autres dix : on prétend qu'il y en a qui vivent cinquante , & môme plus ; tels font les oifeaux de proie , le perroquet, dont le cours de la vie ne paroît pas réglé : au refte les femelles de ce genre d'animaux vivent plus long-temps que les mâles. Ceux qui ont les ongles droits & qui fréquentent les rivières, fe lavent en tout temps dans l'eau : ceux qui ne volent pas fort haut , comme les poules , aiment à fe vautrer dans la poufTiere. On voit qu'un oifeau eft malade quand fon plumage eil hériffé &c mal en ordre; cette maladie eu. fouvent indé- pendante de la mue qu'éprouvent tous ces animaux. La mue confifte dans leur changement de plumes , ce qui arrive une fois chaque année : c'efl pour eux un temps critique &c qui leur eft fouvent mortel. Cette mue fe fait quand les tuyaux des plumes ceflfent de prendre de la nourriture & fe deffechent; alors les fucs nourriciers qu'elles ne s'approprient plus, font portés au germe de la plume nouvelle qui croît Se force l'ancienne plume au bout de laquelle il eft , de lui laifTer la place & de tomber. Jamais les oifeaux ne pondent dans cet état maladif, 6c il arrive quel- quefois que la couleur du plumage fouffre dans la mue des change- mens. Cette fingularité dépendroit-elle de l'îige , des paftions , ou de la nourriture de i'oifeau? On peut confulter un Mémoire intitulé. Parallèle di la nourriture des plumes , & de celle des dents , par M. Rojlan. On connoît les oifeaux à la différence de leur vol &: de leur marcher : plufieurs d'entr'eux marchent toujours pas à pas comme le paon ; d'au- tres ne peuvent aller qu'en fautant, comme la pie , d'autres en courant, comme la perdrix ; d'autres en jetant leur pas en avant ; quelques- uns ne pouvant marcher fur terre, ne ceffent de voler, ou s'arrêtent bien peu. Les oifeaux qui ont de grandes ailes, ainfi que ceux qui ont des ongles crochus , tels que les oifeaux de proie , ne marchent que difficilement. Il y en a qui preffent leurs aîles en volant , après avoir frappé l'air feu- lement d'un feul coup ; d'autres ne peuvent voler qu'ils ne remuent fouvent OIS 44T foiivent les aîles ; d'autres s'élancent par reprifes , ou avancent par bonds ; d'autres femblent fe gliffer dans l'air , ou le fendre d'une courfe égale. Ceux-ci vont toujours terre à terre ; ceux-là s'elevent jufqu'aux nues ; d'autres ne s'élèvent de terre qu'en jetant un grand cri avant de partir ; d'autres ne font aucun bruit. Les uns s'élèvent tout droit de terre ; d'autres ne peuvent s'élever fans prendre leur courfe ; d'autres partent du fommet de quelques hauteurs , d'autres enfin favent diverfi- fîer leur vol ; ils montent en ligne oblique ou circulaire , ou paroiflent fe laifTer tomber & fe relever tout d'un coup , fe fufpendre & demeurer comme immobiles , planer enfuite , s'écarter à droite , à gauche , re- brouffer chemin , &c. La tête de l'oifeau Se fur-tout le bec, eft fait pour fe frayer un chemin commode au travers de l'air ; la fituation du poumon , la difpofition de la poitrine & de fes os rangés en forme de quille , tout fert à contre- balancer fa tête & fon cou ; fa queue lui tient lieu de gouvernail , tandis qu'il rame avec fes aîles. Mais ce gouvernail ne fert pas feulement à maintenir l'équilibre du vol , il fert aufli à hauffer , baiffer , tourner oii l'oifeau veut ; car la queue ne fe porte pas plutôt vers un côté , que la tête fe porte d'un autre. Les oifeaux qui ont la queue courte & les pattes longues étendent les pieds en arrière lorfqu'ils volent. Si la queue eft grande , l'oifeau approche (es pieds de fon corps en volant ou les laiffe pendans : l'oifeau qui a peu ou point de queue comme le colymbe , vole difficilement & aie corps prefque droit en l'air. Les grandes plumes de la queue font toujours en nombre pair. Que l'art brille dans la conflruâion générale des aîles Se dans chacune de leurs parties ! Elles ont été placées par la Nature dans le centre de gravité , l'endroit le plus propre à tenir le corps de l'animal volant dans un exaû équilibre au milieu d'un fluide aufïl fubtil que l'air. Quant à ceux qui nagent & qui volent , leurs aîles , pour cet effet , font attachées au corps hors du centre de gravité ; Se pour ceux qui fe plongent plus fouvent qu'ils ne volent , leurs jambes font plus reculées vers le der- rière , Se leurs aîles plus avancées vers le devant du corps. Quelle légèreté dans ces aîles , Se en même temps quelle force I Le tuyau de chaque plume efl creux , roide , léger Se cependant très-fort; les barbes des plumes font rangées de chaque côté , Se compofées de filets artiftement travaillés : elles font creufées Se bordées de petites plu- mes qui s'engrènent les unes dans les autres. Les grandes plumes des aîles Tome ir. Kkk 442 OIS font recouvertes à leirr origine , d'autres petites plumes en defllis & en defTous. C'eft par cet arrangement mécanique , que les ailes peuvent frapper l'air qui eft û fluide , & fervir à l'oifeau de point d'appui con- tinuel pour s'élever à fon gré & pour mieux aider à fon mouvement pro- greffif dans l'air. Quel appareil d'os très-forts , mais fur-tout légers , de jointures qui s'ouvrent , fe ferment , ou fe meuvent de tel côté que l'occafionle de- mande , foit pour étendre les ailes , foit pour les refferrer vers le corps! De quel ufage ne font point les plumes de la queue , pour conduire l'oifeau dans fon vol , ou lorfqu'il veut s'abaifler I La force des mufcles pe£loraux efl fur-tout remarquable, parce qu'ils font plus forts & plus robufles à proportion dans les oifeaux que dans l'homme & dans les au- tres animaux qui n'ont point été faits pour voler. Indépendamment de tous les autres obilacles qui s'oppofent à l'art ex- travagant qu'ont cherché les hommes de voler , les mufcles des bras ne feroient point affez forts ; les jambes y feroient plus propres. Mais il faut reléguer cette entreprife avec celle de produire le mouvement per- pétuel , de trouver un remède univerfel , & autres femblables , qui font plutôt voir la foibleffe que la force de l'efprit humain. Quand on confidere un oifeau qui vole , rien de plus naturel aux yeux de l'habitude , rien de fi étonnant aux yeux de la raifon. Cette mafle qui s'élève dans l'air malgré le poids de cet air qui gravite fur tous les corps , eft emportée , non par une force étrangère , mais par un mou- vement qui lui efl propre , & qui s'y foutient long-temps avec vigueur & avec grâce. Les gros & grands oifeaux ont l'art de s'enfler , & d'avoir toujours des provifions d'air en volant. A volonté ils rendent leur corps plus ou moins léger dans leur vol , ou plus gros lorfqu'ils nagent , ou plus pefant & moins gros lorfqu'ils plongent. Quoique tous les oifeaux aient des ailes , il y en a qui ne peuvent pas voler ; tels font l'autruche , l'émeu , le pingouin , qui n'étendent Se n'a- gitent leurs ailes que pour accélérer leur courfe. On ne jouit point de cet afped varié lorfque les oifeaux font détenus en cage , pas même dans une grande volière. Leur génie eu flétri par la captivité : les vi- fites fréquentes interrompent également ces petits prifonniers ; ce n'eft qu'après un certain temps qu'on y peut voir leurs carefles , leurs que- relles & leurs ménages. La nouvelle nourriture qu'on leur donne , & qui ne confiile pas envers , en chenilles , en mouches , en efpeces de OIS 443 graines partkutîefes , dont ils favent tous fe tr^ter chacun fitivant leiîr appétit dans chaque faifon , ne leur fait pas moins regretter ia folitude & la liberté ; en un mot , ils agiffent moins librement , & on reconnoît moins la diverfité de leurs earaâeres & de leurs travaux. Ajoutons que la domei&ité ou l'efclavage produit les grandes variétés dans les indi- vidus de la même eipece d'oifeau. Tout au contraire des oifeaux fau- vages. C'eil cet état d'efclavage qui les rend dociles à la voix ; ils appremient à chanter , à fiiïler un air , à prononcer quelques mots. A cet égard ils font au-deffus des animaux quadrupèdes > quoique leur cer- veau ne paroifle pas plus adapté à l'imagination & à la mémoire. La lat»- gue des oifeaux mérite plus notre attention par fes variétés , la forme , la ftruâure , les attaches &. les mufcles : nous en citeroas des preuves ci-après. Des Voyageurs ont dit que les oifeaux des Indes , fur-tout dans le pays de Juda , furpafîent pour le plumage & pour le chant ceux d'Europe. C'efl à tort ; le concert que les oifeaux forment dans les bois de l'Europe efl fupérieur à celui qu'on entend dans les autres parties du monde , & il nous femble que pour la beauté même du plumage , nous n'avons rien à defirer dans nos oifeaux Européens ; car fans parler du paon , qui eft- fans contredit le phœnix des oifeaux , ni de nos autres volailles domefli- ques , n'avons-nous pas le faifan , la perdrix rouge , les canards , l'ou- tarde , le francolin , les efpeces de geais , la huppe , le loriot , l'étoujf- neau , le pluvier doré , le vanneau , la pie , les pics , le bouvreuil , le chardonneret , le martinet pêcheur , & plufieurs autres ? Quant à la dif- férence des plumes , il eft aifé de s'en convaincre en Jetant les yeux fur les plumes de V autruche , du paon , de V aigle , du cygne , du perroquet , de la chouette , an pingouin , de Voifeau du paradis , du cafaar ^ enfin de tou- tes les efpeces d'oifeaux que nous connoiflbns. Les plumes varient fuivant l'âge de l'oifeau. Les jeunes loriots mâles reffemblent affez aux femelles pour le plumage lorfqu'ils font jeunes; dans le premier temps ils font mouchetés encore plus que les femelles , il le font même fur la partie fupérieure du corps ; mais dès le mois d'Août le jaune commence déjà à paroître fous le corps : ils ont aufîi un cri différent de celui des vieux ; ceux-ci difent jo , yo , yo , qu'ils font fuivre quelquefois d'une forte de miaulement comme celui des chats. Les plumes du côté du corps font garnies d'un duvet mou , chaud : voye:^ Duvet. Du côté de l'air , elles font garnies d'un double rang de Kkk 1 444 ' OIS barbes plus longues d'un côté que de l'autre. Ces barbes de largeur inégale font une enfîkde de petites lames minces & plates , couchées & ferrées dans un alignement aufli jufte , que fi on avoit taillé les extrémités avec des cifeaux. Les plumes , fur-tout celles de l'aile , font outre cela difpo- fées de façon que le rang des petites barbes de l'une fe gliffe , joue & fe découvre plus ou moins entre les grandes barbes de l'autre plume qui eu. au-deffus : un nouveau rang de moindres plumes fert de cou- verture aux tuyaux des groffes : l'air ne peut pafTer nulle part , & par- là, comme nous l'avons dit plus haut , l'impulfion des plumes fur ce fluide devient très-forte & très-agiffante : on nomme les plumes de Taîle le pennagc. Mais comme cette économie fi néceffaire pourroit fouvent être altérée par la pluie , les oifeaux ont aufTi un moyen de les en préferver, au moyen d'une bourfe pleine d'un fuc huileux , faite comme un mame- lon , lequel compofe prefque tout le croupion : ce mamelon a plufieurs ouvertures ; & lorfque l'oifeau fent fes plumes defféchées , gâtées , entr'ouvertes ou prêtes à fe mouiller , il prefTe ou tiraille ce mamelon avec fon bec : il en exprime une humeur grafle qui eft en réferve dans deux glandes , & faifant ghffer fucceflîvement la plupart de fes plumes par fon bec , il les pafle à l'huile ; l'onftion de cette matière vifqueufe les luftre , les raffermit aufii & remplit tous les vides ; après quoi l'eau ne fait que couler fur l'oifeau. La poule de nos baffes-cours eft moins fournie de cette liqueur que les oifeaux qui vivent au grand air, d'où il arrive qu'une poule mouillée eff un oifeau fingulier à voir : au con- traire , les cygnes , les oies , les canards , les macreufes , & tous les animaux deftinés à vivre fur l'eau , ont la plume enduite d'huile dès leur naiffance ; d'ailleurs leur réfervoir graiffeux efî abondant , & une de leurs plus grandes occupations eff de paffer leurs plumes àl'huile con- tinuellement. Les anciens ont appelle pulvérateurs les oifeaux qui ont l'inilinû de gratter la terre ( ces oifeaux font frugivores , granivores ) , d'élever la pouffiere avec leurs aîles , & en fe poudrant , pour ainfi dire , avec cette pouffiere , de fe délivrer de la piqûre des infeftes qui les tour- mentent , de même que les oifeaux aquatiques s'en délivrent en arrofant leurs plumes avec de l'eau. La plupart des oifeaux cachent leur tête fous leur aîle pendant leur fommeil ; la plupart auffi ne fe tiennent que fur un pied pendant qu'ils dorment , ils approchent l'autre de leur corps pour le réchauffer. OIS 445 Les jambes & les pieds font dénués de plumes dans la plupart des oi- feaux , quelques-uns n'en ont point fur la tête , tels font le coq d'Inde , l'émeu ; mais il n'y a peut-être que l'autruche qui n'ait pas le corps entier couvert de plumes. Il y a des oifeaux qui font toujours attroupés plufieurs enfemble y foit qu'ils volent , foit qu'ils reftent en repos ; tels que les pigeons : d'au- tres vont deux à deux , le mâle & la femelle dans la faifon de leurs amours, de la ponte & de l'accroiffement de leurs petits, qui eil infini- ment plus prompt que chez les quadrupèdes. Il y a des oifeaux qui chantent , d'autres ne chantent pas ; tels que les oifeaux de proie , & plufieurs femelles de divers oifeaux. C'eft lorfque le temps efl ferein qu'on entend ces animaux chanter dans les bois. La iaifon du printemps ramené les amours que le trifte hiver a fait fuir- c'eft aufTi la faifon des mélodieux concerts des oifeaux : ils font alors , & fur-tout la nuit , l'agrément des bois. L'un chante à minuit & au point du jour, l'autre à l'aurore & à midi, un autre au foleil couchant , &c. tels font le coq, l'oie , les farcelles , l'alouette , le vanneau , le courlis , le pluvier, la grue , le roffignol, la perdrix & plufieurs autres qui fervent d'horloge aux Payfans. On trouve dans le XIII vol. part. II. des Tranfacilons Philofop. des expériences & obfervations fur le chant des oifeaux, par M. Daniel Barrington, Vice-Préfident de la Société de Londres: en voici le précis. Ce Phyficien dit , que pour fe faire mieux entendre de (qs Lefteurs , il a été obligé de créer pour ainfi dire , des mots ; à la vérité la difette de mots pour exprimer les différens fons ou notes des oifeaux, a forcé Belon à dire de la grue, du roffignol, de Toifon , qu'ils chantent. Ceci ne donne aucune idée du chant de ces bipèdes. Le P. Kircherz rapporté dans fa Mufurgia quelques traits du chant du rofîignol , du coucou & de la caille , & il les a défignés par des notes de mufique ; mais ces exem- ples prouvent feulement que le chant de certains oifeaux renferme des notes qui correfpondent aux intervalles de notre oftave. M. Barnngton dit que le premier accent ou fon du jeune oifeau, tant mâle que femelle, efl 1°. le piaulement; il s'en fert pour demander fa nourriture à fa mère. Ce premier fon qui efl fi différent dans tous les oifeaux, qu'il fait diflin- guer leurs efpeces fans les voir, efl foible, très-plaintif, & diminue à mefure que l'oifeau prend de l'accroiffement. A-t-il acquis fa force , fa grandeur, ces différens fons changent abfolument. Le jeune roffignol a 44^ OIS un piaulement raiique- Si défagréable. Le piaulement eu formé d'un ion fimple , répété dans des intervalles très-courts. 2°. Le ion que Toifeaii fend un mois après fa nailTance, eu V appel: dans le plus grand nombre c'efl: la répétition d'une même note que l'oifeau, tant mâle que femelle, çonferve toute fa vie ; à moins qu'ils n'aient été enlevés de leur nid le deuxième ou troifieme jiour après leur naiffance, pour entendre l'appel d'un autre oifeau au moment de la becquée. 5®. Les Oifeleurs appellent fiutoyeryJifiiryga:^oulLUr,\Q chant qui fe développe enfuite dans les jeunes oifeaux. On peut comparer les efforts que les jeunes oifeaux font pour chanter à ceux d'un enfant qui tâche de bégayer; ce n'eft pas le feul trait de comparaifon dans la gradation des fons : on a entendu plufieurs fois des oifeaux qui n'avoi^nt guère qu'un mois, préluder ou commencer h fiffler. 11 paroît que ce premier effai ne contient pas les principes dii famage dont l'oifeau doit par la fuite affeâer fi agréablement nos oreil* les: quelles peuvent être les vues de cet effai? Suivons l'oifeau dans fes diiférens âges. Dans le temps que ce jeune muficien bipède s'exerce ainfi à former fon gofier, s'il failit quelque paiTage agréable , il répète fouvent & çonferve ce ton. S'il prend un ton faux, peu concordant avec celui qu'il femble chercher, affez fouvent il l'abandonne, femblable à nos Chanteurs qui haufîent la voix lorfqu'ils fe fouviennent de quelques parties d'un air , qu'ils peuvent exécuter avec précifion; & d'autres fois ghffent légèrement par defTus les tons dont ils ne fe font pas tout-à-fait rendus les maîtres, ou comme ii ce paffage ne leur faifoit pas plaifir „ ou peut-être dans la crainte de fe compromettre : l'oifeau paroit en faire autant. L'oifeau détenu en cage s'exerce ordinairement à fiffler pendant plus des deux tiers de l'année : quand il efl fiir, pour ainfi dire, de fes notes & en état d'exécuter toutes les parties de fon chant naturel , ou d'un air qu'on lui a appris au moyen d'une ferinette , il ne varie plus dans fa mélodie ; il s'exerce à les chanter de fuite ,. & en lie les différens paiTages fans fe repofer. M. Barrington dit, qu'il paroît que le chant des oifeaux n'efl qu'une fuccelfion de trois notes différentes ou d'un plus grand nombre , con- tinuées de fuite dans un intervalle qui correfpond à une croche de mu- fique de quatre noires , ou bien l'efpace de quatre fécondes. Ceci étant , QO doit en exclure V appel du coucou & le gloufement de la poule , qui ne confiJîe qu'en deux notes. Il y a plus , on a obfervé que la poule OIS 447 qui couve , répète foiivent la même note à des intervalles très- courts, & finit fur unefixieme qu'elle fait extrêmement longue; c'eft un appd varié. On doit encore diilmguer de ce qu'on appelle ramage ces courts éclats de voix que les oifeaux font entendre quand ils s'efforcent de le difputer à d'autres par le chant , & qu'ils forment comme une efpecé de concours vocal : alors leur chant ne fe continue pas quatre fécondes. Tout ce que nous venons de dire ne peut guère s'appliquer qu'aux oifeaux qui ont reçu une éducation fuivie. Les notes ne font pas plus innées dans les oifeaux que le langage dans l'homme: elles dépendent donc du maître qui les élevé. Ajoutons qu'il faut que leurs organes foient tels qu'ils puifTent imiter les fons qu'ils doivent entendre fouvent. Les linots mâles en état de voler , que l'on diflingue dès leur bas âge des femelles par une blancheur qui s'étend dans toute la longueur dti fanon de la plume ( dans la femelle elle ne va qu'à moitié ) ; ces fortes d'oifeaux, dis-je , offrent une grande docilité & un talent fmgulier pour l'imitation du chant: dans la plupart des autres oifeaux qui ont un chant décidé, on ne diflingue pas aufîi fùrement le mâle de la femelle. Il efl aufïï rare d'entendre les femelles d'oifeaux chanter comme les mâles , qu'il efl extraordinaire d'entendre les poides chanter comme les coqs. L'on préfume aufîi que les perroquets & les pies qui apprennent fi diffi- cilement à parler, font des femelles de leur efpece. M. Barringion dit qt'il avoit trois efpeces d'alouettes qui étoient féparées, & qui chan- toient parfaitement bien: l'une étoit Vaiouette des champs, l'autre celle des bois , & la troifieme Vaiouette méfange. Il plaça avec chacune de ces alouettes de jeunes linots qui imitèrent bientôt le chant de leur maître de mufique : quand le chant de ces écoliers fut entièrement fixé , on les plaça avec d'autres jeunes linots , dont ils devinrent à leur tour les maîtres de mufique, & tous ces linots oublièrent abfolument les notes & tout le mode de leur chant , pour conferver conflamment celui de îalouette. Un jeune linot d'Europe fut élevé dans une cage où étoit un vengolina d'Afrique , qui efl un beau chanteur: le petit Européen parvint à imiter l'Africain avec une fi grande perfedion , que quand ils chan- toient enfemble , il étoit impoiîible de les dilîinguer l'un de l'autre : un chardonneret chantoit uniquement l'appel du roitelet , parce qu'il n'avort jamais entendu d'autre accent. Tous ces faits prouvent affez que les oifeaux n'ont point d'idées innées des notes qu'on fuppofe particulières à chaque efpece. Si dans Tétat de vie fauvage ils apprennent & gardent 44^ OIS tous conftamment le même chant, c*efl parce que les jeunes oifeaiix n'ont danné leur attention qu'au chant du père , qui néglige lui-même les notes de tous les autres oifeaux qui chantent dans les environs; ion génie & (es befoins lui font chercher & trouver la nourriture qui lui convient: dans une cage ce génie fe flétrit parla captivité , il s'attache à fon pourvoyeur, qui le carefTe, qui le fifîle, & il en retient des fons , des parties d'airs ou des airs entiers; & nous le répétons, s'il n'a été mis en cage qu'un mois après fa naiflance , il n'oubliera point V appel de fon efpece. On voit dans des volières des ferins avec des oifeaux d'ef- peces différentes , chacun ne chante que le ramage de fon père. Les moineaux qui nichent dans les maifons, n'ont jamais que le piaulement de leur efpece , tant qu'ils reftent fauvages: leur chant devient mixte ou compofé , Il après leur naiffance on les met avec un hnot , un chardon- neret, un rofîîgnol, une gorge-rouge. Il y a aufîi de jeunes oifeaux qui, n'ayant pas entendu l'appel de leur père , paroiffent plus enclins, étant dans une volière , à retenir les fons de certains oifeaux que d'autres : on en voit qui aiment affez le roulis du rouge-gorge. Les oifeaux dans l'état de vie fauvage ne chantent ordinairement que pendant deux mois & demi de l'année , ou tant que la pâture efl abon- dante , encore les feuls mâles de quelques efpeces jouilTent de ce pré- cieux avantage ( car il y a beaucoup d'oifeaux qui ne chantent aucu- nement ). M. Barrington croit que cette propriété ou avantage du chant dépend de la force des mufcles du larynx, qui efl fupérieure dans les mâles. Des obfervations anatomiques démontrent qu'il n'y a aucune différence fexuelîe à cet égard dans les oifeaux qui ne chantent point. Mais pourquoi ne chantent-ils pas , notamment les gros oifeaux? Notre Phyficien prétend que fi ces gros bipèdes étoient doués de cette faculté, la plénitude de leur voix , jointe au volume de leur corps , tout les décéleroit à leurs ennemis ; & que la Nature n'a pas permis aux oifeaux femelles de chanter , parce que ce talent feroit pour eux un talent funeile & pernicieux dans le temps de l'incubation : ainfi ce qui efl un défaut phyfique efl compenfé par un bien moral. On dit qu'il y a plu- fîeurs oifeaux qui chantent & qui cherchent à récréer leurs femelles pendant cette pénible fonQion. Notre Obfervateur paroît nier ce fait. Voyons maintenant en quoi le chant des oifeaux reffemble aux inter- valles de notre mufique , qui ne font jamais ou rarement moindres d'une demi-note. Ligon dit que le chant de la grive efl compofé de quarts OIS 449 quarts de notes , qui, par progreffîon, montent fucceffivement les uns au-deffiis des autres. Le chant d'un petit nombre d'oifeaux offre des pafTages qui correfpondent aux intervalles de la game de notre mufique; l'appel du coucou en eft un exemple bien frappant & bien connu; mais la plus grande partie du ramage des petits oifeaux ne peut guère s'exprimer en carafteres de mufique , parce qu'il eft trop rapide , & que l'on ne connoît prefque pas le point où l'oifeau doit s'arrêter : fa voix ordinairement perçante qui fe fait entendre de fort loin , s'élève à un degré beaucoup plus haut que les notes les plus aiguës de nos inftrumens , & les intervalles des oftaves fi élevées, d'ailleurs fi courts , fi délicats , font plus difficiles à faifir que ceux des bas, & plus encore que ceux des oftaves qui gardent le milieu. Aufîî parmi les hommes qui ont voulu chanter comme les oifeaux, il y en a peu qui aient pu imiter le ramage de quelques-uns, tels que le rojjïgnol ^ V alouette , le merle, la perdrix: encore mettent -ils dans leur bou- che une efpece d'appeau. Si quelques ferins , &c. détenus en cage lifflent des airs connus , avec de plus longs intervalles , ce fifflement n'eft , comme nous l'avons dit , que la répétition de la leçon qu'on leur a donnée depuis l'inftant qu'on les a pris dans le nid. Si on entend chanter une douzaine d'oifeaux d'efpeces différentes, raffemblés dans un même lieu , l'oreille n'eft frappée d'aucune diffonance défagréable : le chant des oifeaux n'efl cependant pas toujours à la même élévation , ou chanteroient-ils tous d'après la même game ? M. Barrington le pré- fume d'après le tableau fuivant , qui a été fait ou remarqué au moyeu d'une harpe. F naturel de r alouette des bois ; A naturel dans un coq ordi- naire ; C naturel dans l'oifeau moqueur mâle ; B bas dans un très-gros coq ; C tombant communément en A dans le coucou ; A dans les grives; D dans quelques chouettes ; B bas dans d'autres ; G fur un rofjîgnol qui étoit détenu tn cage. Voilà fix notes ; il ne manque plus que E pour compléter la game : au refte ces fix notes fuffifent , en fuppolant que les oifeaux chantent fur la clef de F avec une tierce aiguë , ou fur la clef de G dans une tierce baffe : ceci étant , Lucrèce a eu raifon de dire que les oifeaux nous ont enfeigné la mufique. Parmi les oifeaux chanteurs & éduqués , il y en a qui imitent non- feulement les mêmes notes , les mêmes tons , mais ils articulent encore des mots & même de petites phrafes qu'on leur répète fouvent. Les Grecs & les Romains fe font beaucoup occupés de cet art. On a Tome IK LU 450 O I S oblervé que quand les oifeaux entrent dans la faifon où ils chantent ) leur bec change fenfiblement & par degrés de couleur. On affure que le coq ne chante jamais tant qu'il a la tête bien rouge. Le pinçon & le linot , ont d'abord leur bec d'un bleu foncé , &: il pâlit de nouveau quand la faifon du chant eft paiTée. Ce changement paroît être plutôt un fymp- tome qu'une caufe du chant des oifeaux. 11 n'en eft pas de même des oifeaux châtrés , ils ne chantent pas , l'éducation ne donne pas de nou- veaux organes à l'oifeau ; mais dans l'étendue de fa voix il efl le maître de l'imitation. Le perroquet articule les mots plus diftinftement qu'au- cun autre oifeau. Il ell auiîi plus familier , & fes manières fuppofent aufîi plus de mémoire. A l'égard des différences qu'on remarque dans le chant des oifeaux d'une même efpece, quelques-uns les comparent aux ditférens dialecles de chaque province. Cette différence d'unité de voix n'efl-elle pas due au rétréciffement du larynx , ou à fon alonge- ment dans d'autres ? M. Banington , d'après fes obfervations fur le chant des oifeaux , a fait une table qui fert à comparer le mérite du chant de quelques oifeaux , tels quele roJ/ignol^Valouetie des champs, celle des hoisj V alouettc-mêfangô , le linot , le chardonneret , \e pinçon , le verdict , la îête-roujfe , la grive , le merle , la gorge-rouge , le roitelet , le moineau de marais, la tête noire,, ou rojjignol moqueur, ou polyglotte. Dans cette table qui eft en colonnes , on y trouve des degrés de perfedion , com- parés pour la mélodie du ton , l'élévation des notes , les notes plainti- ves, le période ou longueur du ramage, Se pour l'exécution. On y trouve que le roffignol a le plus grand nombre de ces degrés , excepté par l'élévation des notes, l'alouette des champs le furpafTe en cela» Nous ofons nous flatter que notre Lefteur ne défapprouvera pas la longueur de cette digreffion fur le chant des oifeaux. Cet extrait offre trop de fmgularités, &ilconvenoit d'en faire mention. On donne le nom de Volière, aviaria , à l'endroit où l'on tient des oifeaux enfermés. Les Grecs & les Latins ont aulîl tiré la dénomi- nation de chaque efpece d'oifeau de la nourriture qu'il prend. C'eff ainfi que les Grecs ont nommé farcophages , & les Latins carnivores , ceux qui vivent de chair. On nomme les oifeaux de proie rapaccs ; & demi- rapaces ceux qui, comme les corbeaux, n'ont pas le bec crochu. On appelle entom.ophages ou infeciivores , les mangeurs d'infe£les ; acantho- phases, ceux qui ne vivent que de chardons; carpophages ou frugivores y l^s mangeurs de fruits ; graminivores , les mangeurs de pîantules ; grani- ■ y ores , les mangeurs de ^rainQS ; pifcivons y ceux qui ne vivent que de OIS 45t poilTon ; panphages^ ceux qui vivent également de toutes chofes ; fcolo- paces, ceux qui ont le bec long & effilé; macropteres , ceux qui ont les ailes longues ; imantovedcs , ceux qui ont les cuifTes & les jambes lon- gues ; palmipèdes , ceux qui ont les doigts des pieds unis par une mem- brane afin de nager; fiffîpcdcs ^ ceux qui ont les doigts détachés; diurnes i ceux qui volent & butinent le jour ; &: nocturnes , ceux qui , comme la chouette , ne fortent que la nuit. On appelle Oiseaux de PASSAGE , paffens , ceux qui ne refient qu'un certain temps de l'année dans un pays , &c. Quant à la chafTe du vol, rqye{ ce que nous en avons dit au mot FAU- CON, pour les oileaux de proie. Les oifeaux de nuit font univerfelle- ment haïs ; & dès qu'on en a découvert quelqu'un , il fe fait une con- juration générale contre ce malheureux oifeau : petits & grands , tous l'environnent avec grand bruit, quoiqu'il foit rare qu'il en foit attaqué au/îi impunément qu'il en efl: infulté. A quels dangers ne s'expofent pas certains hommes dans la chaffe aux oifeaux, qu'on pratique parmi les rochers de la Norwege ? Pour les oifeaux de jour, de plaine, des bois, &c. ils fe prennent ou au fufil ou à la pille , aux filets ou à la traînaiTe , ou aux gluaux, & par quantité de méthodes différentes , dont nous avons fait mention dans l'hifloire particulière des oifeaux. Au refle nous par- lerons ci-après des moyens de fe procurer les oifeaux pour être con- fervés dans les Cabinets des Curieux. Nous avons parlé aufîi des diverfes. qualités de leur chair, qui eflplus ou moins délicate. Celle des oifeaux de proie efl maigre , & n'efl pas bonne à manger; celle des oifeaux de rivière ell: ordinairement fîbreufe,& plus difficile à digérer que celle des oifeaux terreflres. En général, les oifeaux qui fe nourriffent de grains, d'herbes & de fruits, fourniffent un meilleur fuc & plus facile à digérer , que ceux qui fe nourriffent d'infeftes , de viandes ou de poifTon. La chair des premiers rfefini trop terreflre ni trop aqueufe. Aurefle les faveurs font analogues aux goûts des différentes Nations : c'efl ainfi que l'autruche efl un régal chez les Africains , comme l'efl le poulet parmi nous. Les oifeaux les plus en ufage fur les tables en Europe , font le courlis, la poule d'eau , le cul-blanc , la poule d'Inde , l'ortolan , la caiile , le pluvier, la bécaffe , le faifan , la poule privée , les pigeons & les mauviettes. Les Payfans mangent volontiers le paon, la corneille, la pie , le geai, & tous les LU % 45i OIS autres petits oifeaux. Dans tous ces animaux les os font fi vides & fi min- ces, qu'ils n'ajoutent prefque rien au poids des chairs. Nous ne parlons point ici de l'utilité des diverfes plumes des oifeaux , ni des combats de ces animaux; nous en avons fait mention à chacun de leurs articles. Il nous fuffira de dire que c'ell avec les plumes de l'au- truche qu'on orne quelquefois la tête des Rois, des Héros, & même des Dames ; celles du coq fervent aufîi à faire des panaches ; l'édredon , qui efl une efpece de duvet , eil employé dans les coxivre-pieds ; les grofles plumes de cygne , &:c. fervent à écrire. Les Vénitiens & les Na- politains favent mieux que toute autre Nation colorer les plumes du ventre du cygne , &c. pour l'ufage des fleurs artificielles. Le caraftere belliqueux des oifeaux fe reconnoît dans le coq, dans les oifeaux de proie , &c. Il eu encore d'ufage en Angleterre & en quelques lieux de l'Italie, de faire battre enfemble les coqs, les cailles, &c. chacun félon fon efpece, C'efl un fpeâacle pour tout le peuple , & fouvent pour bien des Grands , voyei aux mots CoQ , Caille , &c. Il y a beaucoup d'oifeaux qui n'ont point de noms particuliers : tels font ceux dont nous ferons mention ci-après. Ils ont confervé le nom général d'oifeau , avec une épithete qui fert à les défigner.. Par cet expofé des oifeaux , on voit qu'il y en a peu qui ne nous foient utiles. Les plus redoutables mangent les charognes qui nous in- feâeroient ; & s'ils font quelquefois main baife fur nos volailles , conî- bien d'autres oifeaux nous délivrent de cette immenfe quantité d'infeftes , dont la multiplicité ell un fléau. D'autres nous amufent par leur ra- mage , ou nous fervent de nourriture. En Europe on récompenfe ceux qui tuent le laemmer-geyer : voye\^ au mot Condor ; au lieu que dans le pays de Bénin , les habitans refpe£tent un animal femblable , qu'ils ap- pellent oïfcau noir : il efl môme défendu , fous peine de mort, de lui faire le moindre mal. Il y a des Miniflres établis pour fervir ces oifeaux, &z pour leur porter de la nourriture dans un endroit des montagnes qui leur efl: particulièrement confacré. Manière Je fe procurer les différentes efpeces d'oifeaux , de les préparer ^ & de les envoyer des pays que parcourent les Voyageurs, ■ Nous avons donné à l'article Uijloire Naturelle , une efquiffe du fpeftacle enchanteur qu'offre aux regards des Curieux une belle collégien OIS 453 d'oîfeaux : c'ef! Tans contredit , après celle des papillons, la partie la plus brillante, la plus apparente, & celle qui féduit le plus généralement Thomme le plus indifférent. La manière de fe procurer les différentes efpecesd'oifeaux, &c. a été expofée avec clarté & précifiondansun Mé- moire inilruftif qu'adonné fur cet objet M. le Dodeur Mauduit , de Paris, dont le Cabinet en ce genre d'animaux & en infedes, prouve le goût & les connoiffances , ôcc. Voici le fommaire de ce Mémoire circonflancié. On prend les oifeaux au piège , au fUt , aux lacets , à la pipée , par la chajje du vol, ou on les tue avec Varc ou le fujil. On ne prend que les oifeaux de proie au piège, & cette méthode a, par rapport àl'ufage que l'on veut faire de ces animaux , de grands inconvéniens. Les pièges brifent les os, délabrent les parties engagées, & ne donnent pas toujours la mort aux animaux , on eu. obligé de les étouffer ou de leur introduire dans le cervelet une épingle proportionnée au volume de la tête de l'oi- feau ; dans cette opération on doit avoir foin de ménager le bec & les plumes du cou. On ne prend au Jile£ & avec les lacets , que les petits oifeaux, & on les a par ce moyen, en très-bon état. On fait la pipée par le moyen de petits bâtons enduits de glu ( on les nomme gluaux ) qui collant les plumes les unes aux autres , ôtent aux oifeaux la faculté de voler : les oifeaux pris par cette méthode , ne peuvent guère fervir à entrer enfuite dans une colIe£lion. La glu efl une forte de réfine excefîl- vement tenace , que l'eau ne diffout pas , & que l'efprit-de-vin n'enlevé qu'imparfaitement : voyei l'article Glu. Les plumes qui en font une fois imprégnées ,1e font pour toujours. La chaffe avec Varc ou \efujil , efl le moyen le plus facile pour abattre les oifeaux ; il efl certain que par cette induflrie traîtreffe & meurtrière , le Chaffeur exercé peut s'en pro- curer davantage. M. Mauduit dit qu'il préfère pour les oifeaux , ainfi que pour les quadrupèdes , l'arc , quand on fe trouve à portée d'en faire ufage : le plomb du fufil les crible ibuvent de toutes parts. On peut envoyer les oifeaux entiers, ou feulement leur peau, en les préparant de la même manière que les animaux à quatre pattes ; voye:^ ce quiejldit à ce fujet à la fin de V article QUADRUPEDES. La liqueur confervatrice efl la même , & on doit prendre les mêmes précautions en arrangeant les oifeaux entiers dans les barriques. Si l'on a defTein de n'envoyer que des peaux, il faut écorcher les oifeaux, en voici la pratique. 454 OIS On pofe furie dos l'oifeaii qu'on veut écorcher, on le doit étendre fur une table. AfTeyez-vous devant de manière que la queue de l'oifeau foit de votre côté. Écartez avec le manche d'un fcalpel à droite & à gauche , les plumes qui couvrent la poitrine , vous verrez qu'il y a dans fon milieu un efpace dégarni de plumes; faites fur cet endroit une inci- Hon longitudinale , commencez-la au haut du brcchetÇ cartilage xiphoïde^ & conduifez-la un peu au-deffous de fon extrémité. Prenez avec \gs doigts de la main gauche , ou faifilTez avec une pince la peau d'un des côtés de l'incifion , détachez cette peau d'avec les chairs , d'abord avec la lame d'un fcalpel , enfuite avec le dos du même inilrument, ou avec les doigts &même la main entière , fuivant la groffeur de l'animal; fou- levez la peau & la détachez des chairs le plus avant que vous pourrez , en enfonçant, & fur le côté & en haut vers le cou , & en bas vers Tanus. Faites enfuite la même opération de l'autre côté. Craignez-vous en enfonçant les doigts ou le manche du fcalpel , de déchirer ou de per- cer la peau ? Que les doigts de la main oppofée répondent toujours en dehors à l'aûion du fcalpel ou à celle des doigts au-defTous de la peau. Le ta£l vous avertira de fon état , de la force qu'elle a pour réfifler , & fi l'effort que vous faites n'efl pas au - deffus de fa force réfiflante. Nous convenons qu'il faut ici & de l'adrefîé & de l'habitude. La peau étant détachée des chairs aufîî avant qu'elle peut l'être par cette pratique , alors faifiifez le cou un peu au-deffus de fon articulation avec le corps ; tirez-le en dedans de la main droite , repouffez la peau de la main gauche , détachez-la du cou , & quand vous êtes parvenu à l'en féparer dans un point circulaire , coupez le cou avec de forts ci- feaux, ou avec un couteau , fuivant le volume de l'oifeau. Le cou étant féparé d'avec le corps , il faut opérer fur les ailes. Vous en retirez une en dedans , en la faififfant vers fon moignon avec la main gauche , tandis que de la droite vous refoulez la peau en dehors, vous la détachez des chairs. Êtes-vous parvenu au pli de l'aile, alors vous coupez les chairs, 6c vous féparez les os dans l'articulation. Vous remettez la peau dans fon état , & vous opérez de la même manière fur l'autre aile. Quand toutes les deux font dégagées & féparées d'avec le corps , vous paffez aux cuiffes; vous les dépouillez comme les aîles l'une après l'autre lorf- qu'opérant fur chaque cuiffe en particulier , vous en avez retiré une en dedans , ôc vous l'avez dégagée de fa peau jufqu'au bas du pilon ou OIS 455 Jurqu'au genou , alors vous féparez les os dans cet endroit , qui efl: celui où la cuifTe s'articule avec la jambe. Le cou , les ailes , les cuiffes, étant féparés d'avec le corps , vous en faififfez & foulevez la mafTe de la ma'n gauche, tandis que de la droite vous déprimez, vous féparez la peau qui tient encore au dos. Bientôt elle n'adhère plus qu'a\i feul croupion* Quand il eft à découvert , vous le coupez en dedans de la peau , un peu au-deffous de l'endroit où il articule avec le corps. Celui-ci n'i^dhere plus par aucun point à la peau , vous l'enlevez & le mettez de côté» Vous revenez au cou , vous en prenez le bout avec la main gauche ; de la droite vous doublez la peau en la retournant , vous tirez le cou à vous de la main gauche , & vous refoulez la peau de la droite. Le cou fort comme le corps d'une anguille qu'on écorche , ou comme le doigt d'un gant qu'on retourne. Parvenu à la tête vous vous arrêtez quand vous êtes vers fon milieu ; vous détachez avec le tranchant du fcalpel la langue fur les côtés fans la couper; vous féparez le cou à fa jonftion avec la tête , & avec le cou vous emportez la langue , l'œfophage ou le conduit des alimens , & la trachée artère ou le canal qui fert au pafTage de l'air pour la refpiration. Il ne refte plus qu'à agrandir le trou qui fe trouve naturellement derrière la tête , & par où paffe la moelle épiniere. Ayant agrandi ce trou avec des cifeaux ou avec un foret , ou la pointe d'un couteau félon les circonftances , vous videz la cer . elle , vous remettez enfuite la peau dans fon état naturel , vous la rempliffez de coton ou de moufTe , ou d'une autre manière analogue ; vous obfervez de mettre peu de coton dans le pli des ailes. La peau flafque en cet en- droit peut vous tromper ; elle prête beaucoup , il faut remplir très-peu cette partie ; au contraire , il faut avoir foin de fourrer la peau qui en- veloppoit les cuiiîes, & de les marquer. Votre opération étant finie, vous réuniffez la peau par des points de future ; vous remettez les ailes dans leur pofition , Se vous les y afllijettiirez en entourant tout le corps d'un ruban ou d'une ficelle. Il refle encore les yeux qu'il faut enlever, €n les arrachant avec un fer pointu & courbé , en prenant garde d'en- dommager les paupières ; puis prenant un côté de la paupière avec le bout d'une pince, le foulevant d'une main, vous introduifez de l'autre main du coton pour en remplir la cavité ( Ceux qui voudroient confer- ver dans le pays natal, l'oifeau ainfi préparé, y mettroient des yeux d'émail de grandeur & de figure naturelles, on les introduit dans l'or- bite en écartant les deux côtés des paupières ). On peut encore exécuter 45^ OIS autrement cette opération : en voici la manière. Quand , redoublant îa peau du cou , on eu parvenu à la tête , on continue de redoubler la peau jufqu'à ce qu'on découvre le globe des yeux. On le fépare de la mem- brane qui l'attache aux paupières , avec la lame du fcalpel ; on remplit l'orbite ou la cavité de l'œil de coton qu'on foule bien & qu'on a roulé auparavant dans fes doigts pour le rendre plus denfe ; retirant enfuite la tête en dehors , les yeux fe trouvent fermés comme ils doivent l'être. On préfume bien qu'en écorchant les oifeaux , il faut avoir foin de n'en pas falir la peau , & y porter les mêmes attentions qu'en écorchant les quadrupèdes : en un mot, avoir près de foi du coton , & faire ufage d'un mélange de poudre de chaux & d'alun , & fuivre en tous points pour la préparation des peaux d'oifeaux le procédé indiqué pour celles des quaz drupedes. Voyez ce mot. M. Mauduit dit encore que quelque attention qu'on apporte à fon opération en écorchant les oifeaux , leurs peaux fe trouvent fouvent falies par trois accidens différens ; par la vafe fur laquelle ils couchent; par \efang qui fort des plaies ; par la graijfe , qui au bout de quelque temps s'atténue , devient fluide & s'imbibe dans les plumes. La vafe fe nétoie aifément par le moyen de l'eau feule ; le fang, quand il efl une fois fec , s'enlève difficilement , l'eau pure ne le diffout que très-im- parfaitement; les plumes enreftent colorées, à moins qu'on ne fe ferve d'eau faturée de nitre ; ce qui , pourfuit le même Obfervateur , efl peut-être la feule fubftance qui ait la propriété de rendre la partie rouge du fang defléchée , parfaitement mifcible à l'eau , & par confé- quent de fournir le moyen d'en nétoyer les parties qui en font falies. On enlevé la graiffe en faifant ufage d'une eau de leffive ; on fait que c'eft de l'eau chaude qui a filtré à travers des cendres de bois neuf. Ceci étant, il eft probable qu'une petite dofe de fel alkali fixe , diifoute dans l'eau , auroit la même propriété que la leffive. Maintenant il convient d'expofer les obfervations & les notes que les Voyageurs devroient joindre aux oifeaux étrangers qu'ils envoient. 11 importe fur-tout de favoir s'ils habitent dans le pays toute l'année, ou s'ils font de pafTage : quand & par oîi ils arrivent ; de quel côté & en quelle faifon ils fe retirent ; d'où l'on croit qu'ils viennent , & oii l'on penfe qu'ils vont ; s'il y a des oifeaux qui ne paroifient qu'un moment & qui difparoifient pour long -temps ; s'ils font rares ou communs ; quelle ell leur nourriture ; comment ils fe la procurent ; quelle différence OIS 457 différence il y a de la taille , du plumage entre le mâle êc la femelle ; en quoi les couleurs des petits différent des adultes ; fi les oiCeaux ne muent qu'une ou plufieurs fois l'année , & dans quelles faifons ; s'ils ne changent pas de couleurs plufieurs fois dans la même année , ce qui n'efl pas très -rare parmi les oifeaux des climats qui font entre les Tropiques ; s'ils pondent toute l'année , ou dans une faifon feulement; & quelle efl cette faifon ; combien la femelle fait de pontes ; combien d'œufs à chaque ponte ; quelle efl la couleur des œufs ; de combien de temps eiî la durée de l'incubation ; comment & avec quelles fub- flances la mère fait fon nid , où elle le place ; fi elle le conftruit feule , ou û le mâle l'aide dans cette opération ; s'il partage avec elle l'ennui de la couvée , & les fatigues de la nourriture des petits ; fi ceux-ci vivent long -temps en fociété , & quand ils fe féparent ; de quelle utilité font les oifeaux , ou quel tort ils font ; comment on les chafTe s'ils font fauvages ; quels foins on en prend s'ils font domefliques ; s'informer du nom qu'on leur donne dans les pays où on les trouve; fpécifier fur-tout la forme & la couleur des yeux, du bec & des pieds, leur couleur efl très-fujette à changer ; en un mot parler de leurs cris, ÔC les faire connoître autant qu'on le peut. Manière d'envoyer les œufs & les nids. Les œufs & les nids font des objets inféparables de l'Hifloire Natu- relle des oifeaux. Nous avons parlé de l'un & de l'autre dans la fuite de l'article Oifeau : les nids font ces réduits où l'oifeau pond fes œufs, couve &: élevé fes petits : les nids font plus ou moins grands, & conflruits quelquefois d'une manière fort fimple ; d'autres offrent de l'élégance , beaucoup de foins dans fart de les conflruire ; d'autres ont une forme très-finguliere , quelquefois bizarre, & méritent d'être connus , notam- ment ceux que l'on appelle penfiks , qui font fort longs , fe balancent au gré des vents , n'étant attachés au bout d'une branche que par quelques liens fort déliés. On range les nids les uns à côté des autres; on choifit ceux de la même élévation pour les arranger enfemble dans une même boîte , de manière qu'ils y foient comprimés également & mollement. On a foin d'y attacher leur nom. Quant aux œufs , on diflingue ceux qui font frais en les expofant à la lumière d'une bougie , alors ils offrent une forte de tranfparence ; ceux qui font opaques indiquent qu'ils ont été couvés. On doit prendre garde à la fragilité de Tome IF. M m m 458 OIS ces objets quand on veut les vider. Pour cela on les perce par les deux extrémités , on fouffle par l'un des bouts , alors la fubftance liquide de l'œuf fort par le trou oppofé : on l'expofe ainfi à l'air pendant quel- ques jours ; il fe deffeche à l'intérieur : on écrit fon nom fur la coque ; enfuite on les place dans des boîtes garnies de cafés matelaffées de coton, les cafés font formées plufieurs à côté l'une de l'autre & main- tenues par un chaiTis ou par des traverfes de bois en fautoir & bien afTujetties. Ces fautoirs , qui doivent avoir une hauteur fupérieure au diamètre des œufs, fervent à les pincer pour être enlevés de la boîte à volonté : la boîte peut être profonde & contenir plufieurs divifions : on doit mettre les gros œufs au fond & garnir auffi de coton le deffus des œufs , de manière que la boîte folt pleine. OISEAU-ABEILLE ou SUCE-FLEUR. On l'appelle ^umBourdonneur ou oifeau murmure, : c'eft OU le colibri ou l'oifeau mouche, roye^ à l'arti' de Colibri. OISEAU D'AFRIQUE ou POULE DE BARBARIE , avis Afra, /^oje^ Pintade. OISEAU ARCTIQUE. Edwards donne ce nom au Surcaraire. Voyez ce mot. OISEAU DE COMBAT , ou Paon de mer ou le Combattant j avis pugnax. Les Suédois , chez qui cet oifeau de rivage eft commun, le nomment bruthane. Ce volatile eft du genre du bécaffeau , & de la grandeur du chevalier : fon bec & les plumes de fon cou font longs. La bigarrure du plumage dans les mâles efl admirable ; il eft toujours iî varié en couleurs , qu'on en trouve difficilement deux de pareils. Le devant de fa tête eft couvert d'une infinité de petites papilles couleur de chair ; il a le bec & les pieds rouges. Cet oifeau porte fon nom de fa pafîionbelliqueufe. Les mâles aiment tant à fe battre , fur-tout lorfqu'ils font en amour, que quand deux fe rencontrent , le duel s'engage & le combat ne cefTe que par la mort du vaincu. Les oifeleurs qui les guettent , tendent alors leurs pièges & les attrapent avant qu'ils foient fur leurs gardes : lorfque ces oifeaux commencent à m.ucr , des enflures blanches s'élèvent autour de leurs yeux & de leur tête ; quand on veut les élever & les engraiffer , on les tient féparés ou enfembîe dans un lieu clos Se obfcur , on les nourrit avec de la mie de pain &: du lait. Ils muU tiplient aufîî en été dans les marécages de Lincoln en Angleterre. OISEAU DU CADRAN SOLAIRE. Foyc^ à l'anicU Pie. OIS 459 OISEAU COURONNÉ DU MEXIQUE. Toj^^ Oiseau de plumes DU Mexique. OISEAU DE FEU. Voyei Foulimene. OISEAU FRÉGATE. Toy^^ Frégate. OISEAU GOITREUX. -^07^:5; Pélican. OISEAU DES INDES. Ctefias , Ariftote , Elien , Paaifanias & quel- ques autres ont donné ce nom par excellence diW Perroquet. OISEAU DE JUNON ou DE MÉDIE. Voye^ Paon. OISEAU DE JUPITER , eft l'aigle. Quelquefois aufli on donne ce nom au chardonneret. OISEAU DE MER. Tqy^^ Paille-en-cul. OISEAU DE MONTAGNE. Foye^ à r article Ho COS. OISEAU DE MORT. Le peuple donne ce nom ?i\\ papillon tête de mort & à iRfréfaie. Voyez ces mots. OISEAU MOUCHE , mellifuga. Voyez à l'article Colibri. OISEAU MURMURE. Foyei Colibri. OISEAU DE NAZARETH. On a donné ce nom par corruption à un très-gros oifeau trouvé dans l'ifle de Nazare , & qui fe voit aufli dans rifle Maurice aujourd'hui l'ifle Françoife. Cet oifeau a du rapport avec le dronte , mais il en diffère par plufieurs carafteres ; il eft plus gros qu'un cygne , au lieu de plumes il a tout le corps couvert d'un duvet noir , & cependant il n'efl pas abfolument fans plumes , car il en a de noires aux aîles , & de frifées fur le croupion , qui lui tiennent lieu de queue. Il a le bec gros , recourbé un peu par deffous , les jambes hau- tes couvertes d'écaillés , trois doigts à chaque pied , le cri de l'oifon , & fa chair eft médiocrement bonne. La femelle ne pond qu'un oeuf, & cet œuf eft blanc & afîez gros. OISEAU DE NEIGE. Oifeau femblable à lalinote. Son nom lui vient de ce qu'il ne fe voit jamais que fur la neige glacée à Spitzberg. Cet oifeau eft fi familier qu'il fe laifîe prendre à la main , ce qui peut être produit par la faim qu'il éprouve dans ce climat glacé : fa chair eft d'un affez bon goût. Cet oifeau ne feroit-il pas le moineau de neige ? Voyez ce mot. OISEAU DE NERTE , ou CHACHA. Voye^ à l'article Grive. OISEAU DE NUIT. Foye^ au mot Oiseau. OISEAU DE PARADIS ou Manucodiata , avis paradifœa , eft un oifeau très-beau à voir par la fuigularité, la forme & la fituation de fe$ Mmm z 4^0 OIS aîles , différentes de celles de tous les autres oifeaux ; car des côtés de la poitrine fbrtent de très-longues & nombreufes plumes qui paffent de beaucoup la longueur de la queue , 6c qui font très-larges ; Se du crou- pion de quelques-uns de ces oifeaux , fortent deux longs filets noirâtres non empliimés, mais bien plus longs que les plumes mêmes. La tête & les yeux font petits à proportion du corps , le bec eft efTiU comme celui de la pie. Les Naturalises & les Voyageurs en difîinguent de plufieurs efpeces. Rai dit que ce font des oifeaux de proie de la petite efpece. On a fauffement cru qu'ils fe nourriffent de l'air, qu'ils volent toujours fans relâche , Se qu'ils font fans pieds. Ils ne les perdent que par la vieil- lefTe ou par la maladie. Ils ont quatre doigts à chaque pied , trois devant & un derrière , les ongles font courbés & pointus. Ils font la chalTe aux pig'^ons , aux verdiers & à d'autres petits oifeaux. femblables , & fe nourriiTent comme les autres oifeaux de proie. Il efl encore auiTi faux qu'on n'en trouve que de morts. Ces oifeaux fe perchent fur les arbres , & par rapport à leur vol prompt & rapide , femblable à celui des hiron- delles , les Indiens les appellent hirondelles de Ternate , du lieu où il s'en trouve beaucoup. Helbigius dit qu'on ne rencontre ces oifeaux que dans les terres Auflrales Orientales. Clujius fait deux genres de ces oifeaux de Paradis : M. Brijfon n'en fait qu'un qui comprend la grande & la petite efpece. Chaque efpece a fa couleur différente. Les grands font les plus beaux , &: fe trouvent ordinairement dans la principale des Mes d'Arou : ils ont des filets au croupion. Les petits, qui font moins beaux , fe rencontrent dans les Ifies nommées Papua , ou dans la nouvelle Guinée. Ils n'ont point de filets: ils font blancs & jaunâtres. Ces deux fortes d'oifeaux ont \\n Roi diflingué par fa petitefîe , & par un vol plus élevé que ceux de fon efpece. Son plumage efl éclatant : il porte à fa petite queue deux filets deux fois aufîl longs que le corps de l'oifeau , & qui lui font communs à la vérité avec fes fujets , mais il n'y a que lui qui les ait ornes d'yeux à l'extrémité. Rien ne refTembîe mieux aux crins d'une queue de cheval, dont les extrémités feroient terminées par une boucle de plumes frifées & colorées. La fpiralede chaque filet -, ournée en dedans efl: beaucoup plus groffeque le filet , ce qui préfente un coup d'œil très-fingulier. Ces magnifiques oifeaux, fi recherchés des Européens curieux, font nommés, dit ALdrovande ^ par les habltans des Ifles Moluques , manu- codiatœ , c'efl- à-dire , oifeaux de Dieu , parce qu'on prétend ignorer OIS 461 leur origine. L'oifeau de Paradis de la grande efpece, eft de la grandeur de la colombe : {qs ailes font rouges. Hclbigius dit qu'ils font prefqiie neuf mois fans plumes , à caufe des pluies & des tempêtes, & qu'à peine les voit-on une fois pendant tout ce temps : mais au commi'ncement du mois d'Août, lorfqu'ils ont fait leurs petits, leurs plumes reviennent; pendant le mois de Septembre &: d'Odobre , ils fuivent en troLjpe fidelle & bien difciplinée leur Roi , comme font en Earope les étoiirneaux. Amis entr'eux ils demeurent toujours immobiles fur Tarbre fur lequel ils fe {ont affemblés le foir , jufqu'à ce que le Roi paffe , & emmené avec lui toute la troupe docile. Toutes leurs démarches font réglées fur la fienne. Ils fe nourrilTent aufîi de baies rouges qui croiffent fur des arbres branchus & élevés. On conftruit fur les branches de ces arbres de petites cabanes percées de plufieurs trous , dans lefquelles un chaffeur fe cache avant l'arrivée des oifeaux , & de là on les tue , en leur lançant des petites flèches faites avec des rofeaux. Si le Roi efl percé d'une flèche ^ on tue affez ordinairement tous les autres qui reftent ; c'eft ainli qu'on fe rend prefque maître de la troupe entière. Dès qu'ils font tom- bés à terre , & qu'on les a ramaffés , il y en a qui leur ouvrent le ventre avec un couteau , & ayant enlevé les entrailles avec une partie de la chair , ils introduifent dans la cavité un fer rouge , enfuite les font fécher à la cheminée , & les vendent à vil prix à des Marchands , fous le nom de hurang-haru. Les Portugais appellent l'oifeau de Paradis oifeau dufoklL Les Indiens de l'île de Papoë coupent les pieds & les ailes de l'oifeau de paradis noir , les étendent, les préparent & les fechent pour en faire des éventails ou des plumets, des panaches dont ils ornent leurs caf- ques. Cet oifeau, quoique d'un plumage noirâtre, a auffi un éclat de pourpre , mêlé d'or très-brillant. Les pkimes de la queue font les plus variées de vert , de bleu & de rouge très-Iuftrés. Le mélange des couleurs dans les oifeaux de paradis efl: infini ; il n'efi guère poffible de déterminer la variété qui appartient à chaque efpece , fans entrer dans une énumération plus ennuyeufe qu'utile. Nous nous contenterons donc de dire que toutes les plus belles couleurs principales s'y trouvent réunies, non pas généralement, mais par des nuances in- termédiaires, dont le mélange & le luftre éclatant font de la plus grande beauté : il y a toujours au moins une couleur dominante; fi c'efi: la rouge, elle efl mélangée de vert , de bleu , de noir, de jaune pâle ou citron, de jaune doré, d'or, 6cc. Lorfque le dcfTus delà tête ôc du cou font 46z OIS jaunes , la gorge efî: verte , le dos châtain-rougeâtre , ainfi que les aîles. Les plumes qui fervent à couvrir l'animal font longues , pointues au bout , grifes, blanches, jaunes & roufsâtres : elles fe réunifient & for- ment un faifceau de plumes, d'autant plus beau, que les plumes font d*une grandeur différente. On prétend que ceux qui ont le bec rouge , ainfi que les deux filets du croupion, font les mâles : ce n'eft encore qu'une conjefture. OISEAU PEINT, avis picla. C'efl le même oifeau que la poule de Barbarie. Foye^ Pintade. OISEAU POURPRÉ. ^ojc^Porphyrion. OISEAU DEPLUMES DU MEXIQUE ou COURONNÉ. Les Or- nithologifles ont donné ce nom à un oifeau huppé & couvert de plumes, qui pour la plupart égalent la beauté de celles du paon. Il eft de la grandeur d'un pigeon ; fon bec eft courbé & roufsâtre, ainfi que fes pieds. Sa queue ell garnie de plufieurs longues plumes d'un vert clair & couleur de paon , femblables pour la forme à des feuilles de glayeul ; les autres qui font couvertes , font noires par-defTus & par-defîbus , & reffemblent à celles du paon. Sa huppe ou crête qui fe redreffe &s'abaifre comme celle de notre huppe , eft quelquefois fourchue & compofée de plumes très-belles & luifantes : il a la poitrine &: le bas du cou rouges , & le haut comme le paon , ainfi que le dos, le deffous des aîles & le dedans des cuiiTes. Les quatre premières plumes des aîles font rouges, longues & pointues ; le relie du pennage efl pourpre ; les petites plumes des épaules font vertes. Cet oifeau vit dans la province de Tecolotlanvers Honduras : il aime à fe promener au foleil , & ne peut être apprivoifé en cage : il fe nourrit de vermiffeaux &: de certains fruits fauvages appelles maiatU : il élevé fes petits dans des trous qu'il fait aux arbres; il a le cri du perroquet, & chante le matin, à rnidi & le foir : il vole en troupes. Les plumes de ces oifeaux font plus eftimées que l'or : on en fait des aigrettes, &c. On tâche de les prendre vivans , pour avoir leurs plumes fans les tuer. La chaiTe de cet oifeau efl royale comme celle de nos cerfs ; aufîi n'efl-elle permife qu'aux riches du pays : quand ils ont de ces oifeaux fur leurs terres, ils les regardent comme un bien qui doit paffer à leurs héritiers. OISEAU RHINOCÉROS. Efpece de calao. Fojei ce mot. OISEAU DE PROIE. Voye^ à V article OiSEAU. OISEAU DE ROCHE, 4r/5 charadriosjlvc hiaticula. Oifeau de nuit O I s 4^3 qui fréquente le bord des eaux , il efl de la grandeur du pluvier , & a le bec long & effilé , d'un jaune noirâtre ; le derrière de fa tête efl cendré , & le menton aune couleur blanche ; le cou efl: cerclé de blanc 6c de noir ; le dos & les petites plumes des ailes ont une couleur cendrée ; la poitrine & le ventre font blancs ; les pieds ont une couleur jaune- pâle , & les ongles font noirs. On ne trouve point de doigt derrière. On voit beaucoup de ces oifeaux dans les montagnes de la Laponie & en Amérique. OISEAU ROYAL. Nom que les habitans de Congo donnent au héron & au l>utor. A la Chine on donne le nom d^oifeau royal ou à'oifcau du. foUilâMinanucodiata ( oifeau de paradis ). M. Perraut croit au contraire, ainfi que nous , que la grue baUarîque efl le véritable oifeau royal. Foycz ces mots. OISEAU DE SAINT -MARTIN. Voye^ Jean-le-blanc. OISE AU DE SAINT- PIERRE. Toye^ Pétrel. OISEAU DE SAUGE, falicaria. Cet oifeau qui fréquente les endroits humides entre les faules & les grandes fauges , a le bec délié, droit & d'un rouge fombre : fes mâchoires font d'un blanc fale : fon dos & fes ailes brunâtres : la poitrine & le ventre font d'un blanc pâle & jaunâtre : tous les bords extérieurs des ailes font d'un jaune pâle : les jambes & les pieds font d'un jaune rougeâtre : la queue efl compofée de douze plumes brunes. L'oifeau de fauge efl la fauvette des ro féaux, qui fe nourrit de mou- ches & autres infedes qu'il trouve parmi les faules; & pour les avoir à lui feul , il en chafTe tous les petits oifeaux. OISEAU DE SCYTHIE. On a donné ce nom à une efpece d'aigle dont la femelle fait, dit-on, éclorre deux petits fans couver les œufs fécondés qu'elle a pondus : elle fe contente de les mettre dans la peau d'un lièvre ou dans celle d'un renard, & elle les porte ainfi enveloppés fur l'enfourchure des branches d'un arbre. Quand elle ne chafTe point , elle refle perchée auprès du nid &: fait fentinelle : malheur à celui qui alors grimpe fur l'arbre pour lui enlever fes petits ; car elle les défend avec une vigueur extraordinaire. OISEAU DU SOLEIL. Foye^ Partule Oiseau de Paradis. OISEAU SORCIER ou DE MAUVAIS AUGURE. Foye^ Frésaie; OISEAU TAILLEUR. Nom donné à un très-petit oifeau de l'Ifle de Ceylan. Ce bipède vivant au milieu d'une troupe d'ennemis , tels que 4^4 OIS fmges , ferpens , &zc. a reçu de !a Nature un inflîn£l très-fingulier & plein d'induftrie pour la confervation de fa poftérité. Le rameau le plus flexi- ble ne lui paroît pas un afyle affez fur contre ces brigands. Il prend une feuille morte , la coud à une feuille verte ; fon bec mince & délié eil fon aiguille ; des fibres de duvet & de plumes lui fervent de fA, Ceux qui vifitentle curieux Mi/fxum de Londres peuvent y obferver plulieurs de ces nids. OISEAU DE TEMPÊTE , procelUrla avis. Nom donné à un oifeau gros à-peu-près comme un merle : fon dos efl noir au fond , mais le deffus de fes plumes eft d'un beau bleu pourpré chatoyant : le cou eft un peu verdâtre , fa tête entièrement bleue : les ailes & le croupion font tiquetés de blanc. Les ailes font fort longues à proportion de fon corps. Il habite la furface de la mer & fe nourrit de poiffon : fes pieds n'ont point de talon , mais fes doigts font palmés : il a le regard affuré , les jambes très-longues & fans plumes , fon bec pointu , un peu arqué : cet oifeau fe rencontre dans toutes les latitudes des mers un à un , excepté quand la tempête eft prochaine ; alors il s'élève de deffus la furface de la mer , & en un infiant il eft à perte de vue , &: traverfe bientôt tout l'horizon vifible pour aller chercher quelqu'abri & s'y mettre à couvert. Mais fi cet animal rencontre en pleine mer un vaifTeau , il ne manque jamais , pour éviter la tempête qui s'avance dans les airs , de rafer la furface de l'eau & de s'attacher au navire du côté oppofé au vent ; les Nautonniers , fur-tout ceux de la mer du Danemarck , accoutumés au phénomène de ces mefiagers , ne manquent pas de plier les voiles & de fe préparer contre le gros temps qui menace , quoique la mer foit calme & qu'il ne règne point de vent. Le préfage qu'il donne de la tem- pête , vient apparemment de ce qu'ayant les ailes fort grandes il reffent l'impreflion la plus légère qui arrive dans les airs. A cette première fen- fation , la Nature l'invite à chercher les Mes & les vaifTeaux pour fe mettre à couvert du danger. Foye:^ Pétrel. OISEAU DES TERRES-NEUVES. Bdon donne ce nom au toucan vert du Bréfil. Voyei Toucan. OISEAU TROMPETTE. ^07^^ Trompette. OISEAU DU TROPIQUE. Foyc^ Paille-en-cul. OISEAU VERT du Cap de Bonne-Espérance. Il refTemble affez au perroquet ; mais il n'en a pas toutes les manières de faire. Il vole autour des arbres où les mouches ont fait des rayons de miel ; il en eft très-avide , OIS O L I 465 très-avide , & en fait fa nourriture ordinaire. Quand les habitans du pays voient cet oifeau s'arrêter fur une branche , c'eft pour eux un in- dice sûr de l'endroit oii le miel eft caché. Le plumage de cet oifeau eil de la plus grande beauté. Séba a donné la defcription d'un nombre infini d'oifeaux qui n'ont point de noms particuliers. Foye^ l'Ouvrage de cet Auteur. La plupart fe trouvent néanmoins décrits dans le corps de ce Diclionnaire , avec les noms adoptés par les nouveaux Voyageurs ou par les Naturalises modernes. OISEAUX DE PASSAGE. Ce font ceux qui à certaines faifons ré- glées de l'année fe retirent de certains pays , & dans d'autres faifons fixes y retournent en traverfant de vaftes contrées. Foye^ à Vanick Oiseau. OISEAU ou OISEAU TESTACÉE. Nom que l'on donne à une co- quille bivalve du genre des moules : on l'appelle aufli ailk ou hiron- delU ou la mouchette , parce qu'au coin de fa coquille elle porte deux efpeces d'ailes qui augmentent fa largeur du double de fa longueur. M. Adanfon la met dans le genre àiW jambonneau. Voyez ces mots. OISON, efl le petit d'une ou. Voyez ce mot, OLAMPI. Voyc^ Résine Olampi. OLEB. Faux lin qu'on apporte d'Egypte , & qui eft auITi bon que celui qu'on nomme forcette , mais d'une qualité inférieure à celui du fquinanti , dont on fait dans le pays un très-grand commerce. Il ne faut pas confondre ce fquinanti avec \e fquenante ou jonc odorant , qui eft une efpece de gramen. Voyez SchÉnante. OLIBAN ou ENCENS , olibanurn aut thus , eft une fubflance réfi- neufe , feche , dure , d'un jaune blanchâtre , à peine demi tranfparente, en larmes groffes comme des noii^ettes , arrondies &: oblongues, fari^ neufes en- dehors , brillantes en dedans , d'un goût acre, amer , & d'une odeur pénétrante, s'enfiarnîtiant facilement, exhalant une vapeur très- aromatique , & s'éteignant difficilement ; quelquefois ces larmes ou gouttes d'encens font accouplées , & reffemblent à des tefiicules ou à des mamelles ; c'efl de-là que font venues les diilinvtlons ridicules d'encens mâle & d'encens femelle. On appelle manm d'encens les miettes ou les petites parties qui fe font formées par le frottement des mor- ceaux , &: l'on donne le nom de Juic d^cnuns à cette manne brûlée de Tome IF, Nnn 4^6 O L 1 la manière qu'on brûle Tarcançon ou la poi:i pour faire du noir de fumée. L'encens a été connu dans tous les temps , de prefque toutes les na- tions ; & (on ufage a été très-fréquent & très-célebre dans les facrifîces,. car autrefois on les faifoit avec de l'encens. On s'en fervoit, comme l'on s'en fert àpréfent, pour parfumer les* temples d'une odeur agréable.- Cette coutume a pafTé chez toutes les nations & dans toutes les reli-^ rgions pour le culte divin. On prétend que cette réfine eu. tirée par incifion d'up petit arbre ,' dont les feuilles font feinblables à celles du lentifque , & qui croît abondamment dans la Terre-fainte , & dans la partie de l'Arabie appellée Saba. On appelle cet arbre arbor thurifera ; d'autres difent que l'Ethio- pie, dont quelques peuples s'appellent aufîi Sabéens, produit égale- ment cette réfine odoriférante , &c. On la trouve aufîi dans le pays des Maures du côté d'Arguin. Nous ne fommes pas plus certains de l'arbre qui porte l'encens ; on dit cependant que c'eft un genévrier à fruit jaune ; mais les Voyageurs s'accordent prefque tous à dire , que les habitans de l'Arabie & du Levant obfervent des cérémonies fuperfli- îieufes dans la manière de récolter cette réfme. M. l'Abbé Demanet , ci-devant Curé & Aumônier pour le Roi en Afrique, dit pofitivement dans le fécond volume de V Afrique Françoife^. p. 149, que l'arbre ou arbrilTeau qui donne l'encens , efl: affez fem- blable au lentifque , fes branches font nombreufes , affez déliées &r iîexibles ; leur écorce eft mince , fort adhérente &: de couleur grife ; fes feuilles font longues , étroites , tendres , charnues, toujours vertes & par paires ; mais les branches font terminées par une feule feuille ; le pédicule qui les foutient eft rouge & affez fort. Ces feuilles ont une -odeur forte, aromatique, & quand on les broie dans la main, elles rendent une liqueur onftueufe. On recommande l'ufage interne de l'oliban pour les maladies de la tête, de la poitrine, de la matrice, du flux de ventre, & pour le cra- chement de fang : on emploie l'encens extérieurement dans les fumiga- tions de la tête , pour les catharres & les vertiges ; diffous dans l'efprit -de vin, il mondifie les plaies. Selon M. Bourgeois, on fait un emplâtre -avec l'encens pulvérifé & la térébenthine, qu'on applique avec beau- .coup de fuccès fur les entorfes & foulures de nerfs, après avoir diffipé O L I 467 f enfÎLife & l'inflammation par le moyen des fomentations aromatiqvies. Autrefois on avoit coutume d'apporter avec l'oliban Técorce de l'arbre de l'encens , qui eft aftringente : on ne s'en fert plus aujourd'hui. On la diftribuoit dans le commerce fous le nom de narcaphte ou thy- mïama , ow parfum , ou à^cnc&ns des Juifs, parce que ce peuple s'en fervoit fouvent dans { doit paroître rougeâtre ou enfumée. L'on a de la peine à trouver ces pierres bien parfaites , aufîi font-elles chères quand elles ont un certain volume. Ceux qui travaillent à les fcier & polir , choififTent celles dont les taches font difpofées de manière à repréfenter , à l'aide de la taille j quelques parties d'animaux : c'eft ainfi qu'en levant une partie de la première couche , on évide la féconde , qui efl: blanche ou bleuâtre , & l'on peut travailler fur trois cordons de différentes couleurs : par ce moyen, dis-je , l'on forme de prétendus yeux pétrifiés d'animaux, que l'on vend affez cher au peuple crédule. On en fait communément des cachets & des bagues : il étoit d'ufage chez les Anciens de travailler cette pierre , de façon que le fond étoit d'une couleur, & ce qui étoit gravé , foir en creux , foit en reUef , d'une autre couleur. Les Orientaux font un fi grand cas de l'onyx , que dans la Chine , oii on l'appelle y ou , il n'y a que l'Empereur qui ait droit de la porter : elle ell nommée h pierre des pierres dans l'Ecriture Sainte, La memphite ou camée efl: encore une forte d'onyx , gravée , mais natu- rellement compofée de couches, l'une noire , roufsâtre ou bleuâtre , ou couleur de chair , & l'autre blanche ou grife : il arrive que l'on peut quelquefois féparer ces couches les unes des autres. Cette forte d'onyx eft très-recherchée des Graveurs en relief, fur-tout quand elle efl d'un certain volume. Foye^ F article Agate. ONOCROTALE ou GRAND GOSIER. Tc^y^t Pélican. 478 O N O O O L ONOURÊ. Oifeau de marécage qui fe trouve en Guiane ; il a les plumes émaillées de gris & de blanc ; fon bec eft court & pointu ; dès que la nuit eft venue , il fait entendre ces quatre notes , ut, mi , fol, ut. Les Nègres en tuent beaucoup ; il n'eft bon qu'à la daube. ONYCHITES , unguis lapid&us. Mercati donne ce nom à des pierres qui ont une forte de reflemblance à des ongles humains. U y a apparence que ce font des foffiles ( peut-être des fragmens de palais de poifTons ) , qui ont été arrondis par le mouvement des eaux & enfevelis en terre, OOLITHE. Nom que les Naturalises donnent à de petits corps pier- reux arrondis , qui ont un certain rapport avec les cenchrites , les méco- nitcs, \^ pierre ovaire , ou avec les Jiigmites , les hammites , les pifolites , les orobites, les phacites , &:c. M. Sch/nidi , ProfeiTeur honoraire en antiquité dans rUniverfité de Bafle, qui vient de donner un Mémoire furies ooli- thés , dit que toutes ces pierres font d'une nature très-différente ; & qu'elles ne fe reflemblent qu'en ce qu'elles font toutes des amas de glo- bules plus ou moins ronds & de toute forte de grandeur , de couleur & de matière. Il dit avec raifon que ces différens noms ont caufé une telle confulion parmi les Naturalises , qu'il eu prefque impoïïible de les entendre. M. Schmidt entreprend de fixer dans fon Mémoire la véritable nature des oolithes ; & il n'accorde ce nom qu'aux œufs pétrifiés des poifTons , ou d'autres infedes & animaux ovipares aquatiques. Ainfi les véritables oolithes ne fe trouvent , félon lui , que rarement & en petite quantité ( M. Dannone, Réfident à Bafle , conferve dans fon cabinet un crabe chargé d'œufs pétrifiés à l'endroit même oii ces œufs fortent de l'animal ). Les graines des plantes pétrifiées ne font pas plus communes ; & il conclut que tout le refle, fur-tout les amas immenfes de corps ronds , qui forment quelquefois des montagnes entières , ne font autre chofe que des jeux de la Nature prefque toujours formés par une terre glaife ou martiale , difpofée par couches fous une forme plus ou moins arrondie ; mais l'Auteur des Annales Typographiques répond à cette affertion , que le hafard n'ell point une caufe ; & quand il en feroit une , comment imaginer , dit-il, qu'une caufe fi aveugle eût pu produire des montagnes entières de corps de même forme déterminée , telles qu'on en trouve près de Neufchâtel, dans le Piémont, fur le mont Randen& ailleurs .^ Quant à notre fentiment fur les oolithes , il efl certain que parmi ces concrétions globuleufes qui reifemblent plus ou moins bien à des œufs de O P A 479 poîflbns , d*écrévires marines , &c. il y en a d'argilleufes , de mar- tiales, & d'autres qui font fpatheuies, femblables à des débris de co- quilles roulées ; d'autres font compofées de couches comme les bé- zoards; enfin d'autres reffemblent beaucoup à des boutons d'étoiles marines. Toutes ces variétés de figures & de couleurs indiquent nécef- fairement une différence dans la caufe comme dans le produit. M. De/- marets a lu à f Académie des Sciences, en tyGi^pluJieurs obfervations fur ces fortes de corps. L'on a donné à ces corps pierreux, des noms arbitraires ou analo- gues aux fubilances qu'ils repréfentent : orobites , quand ils ont la figure d'orobes ; pifoUtes , quand ils imitent des pois ; méconites , quand ils ont la figure des grains de pavot; ccnchrltes, quand ils font de la grandeur des grains de millet, &c. Le gluten qui tient ces corps les uns aux autres, n'efl pas toujours le même; ce qui fait que la maffe totale qui réfulte de leur affemblage a plus ou moins^de dureté , de confiflance & de couleur. OPALE , opalus. Cette pierre précieufe , défignée dans Pline fous le nom àe pœderos , efl: d'un bleu laiteux ou de couleur de nacre de perle, prefqu'entiérement tranfparente , ayant la propriété de réfléchir tout à la fois les couleurs de l'iris , ou de les changer fuivant la différente expofition au jour fous laquelle on la regarde : on en diilingue de plu- fieurs fortes, qui toutes font feu avec l'acier. 1°. L'Opale de couleur de lait, opalus ireos lacims. C'eff celle que les Joailliers appellent opale Orientale ou opale ArUquine ou opale à. paillettes , parce que les lames couleur de gorge de pigeon qui s'y obfervent , paroiffent comme autant de taches de différentes couleurs détachées. Boéce de Boot , Auteur du Parfait Joaillier, la regarde avec raifon comme la plus précieufe des opales, & même comme la pierre la plus merveilleufe que la nature produife en ce genre : elle eft dure , luifante, prefque tranfparente , r^fplendiffante , d'un beau blanc laiteux- „ d'où fort en chatoyant le feu du rubis , la pourpre de l'améthyfle „ le jaune de la topaze, le bleu du faphir , le vert de Témeraude & toutes les autres couleurs les plus brillantes des pierreries. Cet éloge magni- fique n'efl que la tradudion du paffage de Pline fur l'opale. Cette pierre , dont il efl fait mention dans VApocalypfe , chap. 2/ , fous le nom de la plus noble des pierres , étoit autrefois en fi grande eflime chez les Romains , que Nonius le Sénateur aima mieux être privé de fa patrie y 48o O P A O P E que céder fon opale à Antoine qui la lui demanda. Cette pierre orien- tale fe trouve dans le Ceylan , oii on l'appelle pierre élémentaire , lapis elemcntarius. Les Indiens l'eftiment autant que le diamant. On ne la taile point en facettes, mais en cabochon. Il y a une autre forte d'opale orientale qui eft eftimée. On la nomme opale enflammes, parce que cette pierre chatoyé comme fi c'étoient des feux qui s'élançaffent par lignes parallèles. 2°. L'Opale occidentale, opalus occidentalis ^ efl ou jaunâtre ou noirâtre : la première , qui fe trouve en Chypre & dans l'Arabie , do- mine par le jaune au travers duquel on voit quelques couleurs foibles ; celle qui eft noirâtre , laifl'e fortir un éclat d'efcarboucle ; l'on diroit d'un charbon noirâtre allumé par un côté. On la trouve en Egypte. Celle qui eft verdâtre eft peu eftimée. Celle qui fe trouve dans la mine d'argent de Freyberg en Saxe efi: allez belle. On nomme argentine celle qui eft à fond blanc & à petits points, couleur d'argent. On trouve aufll des opales à Eybenftock en Saxe , en Bohème & en Hongrie : elles font de peu de valeur. Les opales font ordinairement par morceaux détachés , enveloppées dans des pierres d'autre nature , depuis la groffeur d'une tête d'épingle, jufqu'à celle d'une noix. Les opales de ce dernier volume font très rares. Il efi bien fingulier que toutes les belles couleurs de l'opale foient fufceptibles de difparoître ou de changer de modifications , quand on la divife en éclats : l'expérience , qui a démontré plus d'une fois ce phéno- mène, fait croire que tout le jeu éclatant de l'opale eft du à la réfradions des rayons de la lumière fur cette pierre , difpofée naturellement pour produire cette réfraûion : peut-être que ^ œil de chat, Vœil du monde , & mieux encore le girafol &C la chalcédoine , ne font que des efpeces d'o- pales. Au refte toutes les opales font les feules pierres que l'art n'a pu contrefaire avec autant de fuccès que les autres pierreries. On en a cependant apporté une faftice d'Egypte qui a trompé l'œil des Joail- liers du Levant, fi experts dans cette connoiflance. OPASSUM , efpece de philandre, Voye^ Didelphe. OPERCULES , opercula , font les couvercles des coquilles univalves qui ferment leur bouche. Foys^ l'article Opercules , au mot Coquil- lage , vol, II. P' 2. g 4 de ce Diciionnaire, On appelle operculites les opercules devenus fofîiles. OPHIOGLOSSE, O P H O P O 481 OPHIOGLOSSE, ou Herbe sans couture ou Petite Serpen- taire, ou Langue de Serpent, ophioglojfum ^ eft une plante qui croît dans les lieux humides & quelquefois dans les endroits monta- gneux où il y a des fources : fa racine s'enfonce profondément en terre ; elle efl garnie d'un nombre de fibres afTez grofTes, & ramafTées comme dans Vhellebore. Voyez ce mot. Elle poufTe une queue haute comme la main, laquelle foutient une feule feuille, afTez fembîable à une petite feuille de poirée , d'un goût douceâtre &vifqueux. Du milieu de cette feuille , c'efl-à-dire du bout de la queue , fort un fruit qui a la figure d'une petite langue applatie , pointue , dentelée , & partagée en plu- lieurs petites cellules qui renferment, au lieu de femence, une poufîiere menue qu'elles laifTent échapper lorfqu'elles viennent à s'ouvrir dans la maturité. L'ophioglofTe tranfplantée dans les lieux ombrageux des jardins , s'y conferve , & repouffe tous les ans en Avril: elle refte en vigueur juf- qu'au mois de Juin , enfuite elle fe fane entièrement & difparoît. Cette plante efl: vulnéraire ; on en fait une infiifion au foleil avec de bonne buile d'olive : alors c'efl un baume excellent , tant pour l'intérieur que pour l'extérieur, particulièrement dans les maux de gorge violens. OPHIOMORPHITE. Divers Auteurs donnent- ce nom à la corne d'Ammon, à caufe de fes fpirales qui la font reffembler à un ferpent entortillé. OPHIONOT. FoyciUxjsiMO^. OPHITE , ophitcs , efpece de porphyre à taches de forme carré long , blanchâtres , difpofées fouvent en forme d'étoile ou en forme de croix, fur un fond vert foncé. Cette pierre connue des anciens efl, dit-on , le mzmphius de Phne. OPHT ALMITES , nom donné à certaines pierres qui imitent un œil. OPIER, VoyciOm^^. OPiUM ou AMPHION DES INDIENS : voy^i à l'article Pavot BLANC. L'opium cyrénaïque ell V JJfa fœùda, OPOBALSAMUM. Voye^ BAUME de Judée, OPOCALPASUM ou OPOCARBASUM , fubflance gommo-réfi- neufe , qui reffemble beaucoup à la meilleure myrrhe liquide , & que l'on mêloit du temps de Galien avec la myrrhe même ; il étoit diffi- cile , félon cet Ecrivain , de les diflinguer l'une de l'autre , fmon par les effets : c'étoit un fuc empoifonné , qui caufoit rafToupifTement & l'étran- TQm& IK Ppp. 4S2 O P O O P u glement fubit : il dit avoir vu plufieurs perfonnes mourir pour avoir pris de la myrrhe , dans laquelle il y avoit de l'opocarbafum fans qu'elles le fuflent : peut-être n'étoit-ce qu'un fuc compofé d'une diffolution d'Eu- phorbe , dans laquelle on macéroit les larmes d'opium. Les poifons de c-ette efpece ont été de tout temps aufîi en ufage en Afrique , que l'eft en Amérique celui des flèches empoifonnées par le fuc du mancelinien Voyez ces mots . OPOPANAX : voyeifon article au mot GRANDE BerGE. OPOSSUM ou OPASSUM. Efpece de P/z/Y^Wre. Voyez Didelphe; OPUNTIA , Figuier d'Inde , Raquette , Nopal , ou Cardasse , cactus coccinellifer : c'eft une plante originaire d'Amérique & qui fe fait remarquer , dans les ferres du jardin du Roi , par fa forme. Dans fon pays natal elle devient grande & très-belle. On dit communément que les feuilles de cette plante fortent les unes des autres ; mais on pourroit dire , avec plus de jufteffe , que ce font fes branches : les feuilles font proprement ces petits boutons qui paroiffent toujours aux endroits où les épines croiffent par la fuite. Au refle , puifque ce que nous appelions des branches , avec Bradley , a toujours été regardé comme des feuilles j, nous continuerons à leur donner le même nom que tout le monde. Il y a plufieurs efpeces de ces plantes , qui différent principalement par la grandeur de leurs feuilles , la couleur de leurs fleurs & de leurs fruits , par la couleur & la longueur de leurs épines. En général , elles ont toutes les feuilles de figure ovale ; il y en a des efpeces qui les ont de près d'un pied de longueur , & d'autres feulement de deux ou trois pouces : leurs feuilles font ordinairement garnies de diflance en diflance de nœuds d'épines ; il y en a de fi longues , que les Indiens du pays s'en fervent au lieu d'épingles ; d'autres ont les épines fi courtes qu'on les apperçoit à peine. Les petites épines caufent des piqûres cuifantes , & quand elles font entrées dans la peau , elles font quelquefois plus d'un mois à fortir , fl on n'a bien foin de les chercher fur le champ & de les enlever. Une particularité fmguliere , c'efl que le fruit paroît toujours avant les fleurs fur cette efpece de plante , & lorfqu'il femble être bien mur , la fleur s'épanouit à fon extrémité ; elle efl compofée d'environ dix pétales & d'une grappe de petits filets au milieu. Cette fleur s'ouvre tou^ jours à la chaleur du foleil , & fe referme à l'approche de lanuit. Les étami- nes font douées d'une grande fenfibilité; en effet,fl l'on touche les filets des çtamines , avant qu'elles aient répandu leur poufligre fécondante , qui O P U 48} «fi compofée de molécules ordinairement fphérîques ^ très-petites , jaunâtres & luifantes , ils fe couchent tous circulairement les uns fur les autres , pendant que les anteres jettent la poufîiere qu'elles contiennent ( un mouvement femblable a été obfervé par M. de Jufjim dans les éta- mines de Vhéliamhéme. Voyez ce mot. ), Quand le fruit eft mûr , il a une refTemblance grofîiere avec nos figues : voye^^ Hljî. de la Jamaïque de Hans-Sloane, Il efl ordinairement d'une couleur rouge foncée , & il a cela de particulier , qu'il rend l'urine de celui qui en mange trop , rouge comme du fang , fans cependant qu'il en éprouve la moindre douleur. C'efl le fuc de ce fruit , qui donne la couleur rouge à la cochenille qui s'en nourrit ; aufli cet infeûe nous donne-t-il en teinture une des plus belles couleurs. On dit que les Teinturiers Indiens fe fervent du fuc même du fruit pour teindre en rouge. Les fleurs des opuntia font jaunes pour l'ordinaire , à l'exception d'une efpece qui a des fleurs couleur d'écarlate ; mais cette efpece efl plus tendre , plus difficile à conferver , & plus fujette à pourrir que les autres. Celle-ci eft le tuna mitior , fiore fanguineo cochenïUifera de Dille- lîius. Les unes fe plaifent à ramper fur la terre , d'autres croiflent plus droites ; mais toutes aiment les endroits pierreux & les rochers. Ces plantes demandent une chaleur proportionnée au climat d'où elles vien- nent : il y en a une petite efpece à feuilles rondes , qui vient d'Italie ; on peut la laifler dehors tout l'hiver ; & elle porte du fruit- en abondance. Les efpeces de la Caroline & de la Virginie peuvent auffi réUfler en plein air à l'abri d'une muraille bien expofée. On les multiplie toutes en plantant des feuilles fimples à deux pouces de profondeur. Les Indiens plantent & cultivent autour de leurs habitations ces no- pals à fruits rouges , fur lefquels ils efperent de faire plufieurs récoltes dans l'année. Ces prétendues feuilles , comme celles de quantité de plan- tes graffes des pays chauds , peuvent refier long-temps hors de terre ^ fans fe defTécher , & reprendre étant fichées en terre. L'avantage qu'on en peut tirer pour la nourriture des cochenilles ( infedes précieux qui fournifTant la plus belle couleur rouge , font l'objet d'un très-riche com- merce ) ; cet avantage , dis-je , donne lieu à quelques Américains d'y employer des terres inutiles , trop maigres , ou comme épuifées par d'au- tres plantations : elles y croifTent jufqu'à la hauteur de huit pieds , quand on a bien foin d'empêcher l'herbe de croître aux environs. Voye^^ Co- chenille, Ppp 2 484 O R OR, aurum. Ce métal , le principe de l'aifance, rauteiir du luxe, l'idole de l'avarice , mobile puiflant des avions de l'homme ; l'or, dis-je , eft un métal ordinairement jaune , peu dur , peu claftique , à peine fonore , mais très-compaâe ; il furpafle tous les autres métaux en flexibilité , en pefanteur , en dudilité , en ténacité & en valeur. L'or n'efl . altéré, ni par l'air, ni par l'eau ni par le feu des fourneaux. Il tombe au fond du vif argent qui le diffout , ou plutôt avec lequel il s'amalgame en tout ou en partie ; tandis que tous les autres métaux , tant parfaits qu'impar- faits , y furnngent jufqu'à ce qu'ils aient été dilTous ou pénétrés par ce menftrue métallique ; il n'y a que ceux qui ne s'amalgament point avec le m.ercure qui y furnagent continuellement. Nous difons que l'or eft le métal le plus malléable ; c'eft ce que l'art du Batteur d'or & celui du Tireur d'or démontrent tous les jours : le premier peut multiplier une étendue donnée d'or , cent cinquante-neuf mille quatre-vingt-douze fois, au moyen d'un fourreau de parchemin, de la baudruche & du marteau. On lit dans les Mémoires de C Académie des Sciences, année 1713 ? qu'une once de ce métal peut être tirée en im million quatre-vingt-quinze mille pieds de long, e'eft-à-dire en une ligne de foi\:ante-treize lieues de long , à deux mille cinq cents toifes la lieue. Enfin l'idée avantageufe que nous avons de l'or efl fondée fur fon excellence réelle. L'or varie par la dureté , la couleur & la pefanteur; ce qui .provient peut-être de fes degrés de pureté : c'efl ainli que l'or d'une guinée eil à volume égal, moins pefant que le louîs d'or, celui-ci moins que le ducat dont le pied cube pefe vingt-un mille deux cents vingt onces poids de Paris. L'or de Siam efl moins cafTant que le nôtre , & le fort des cordes de^'clavecin qui en font faites, efl infiniment plus grave. Ce métal montre dans l'endroit de la fradure de petits angles prifmatiques; fa couleur efl plus ou moins foncée. L'or d'Europe ell plus haut en couleur que celui d'Amérique. Ce dernier efl pâle , & Fon prétend -que celui de MalacafTe ( ou Malgache ) , efl tout-à-fait pâle & fe fond prefqu'aufîl promptement que du plomb. L'or s'écrouit fous le mar- teau ; il entre en fufion un peu plus facilement que le cuivre, & aufîi- tôt après avoir rougi : on remarque que lorfqu'il fe fond il prend une couleur d'aigue-marlne , ou de bleu céladon. Il efl de tous les métaux celui qui s'échauffe le plus dans le feu ( c'efl en raifon de fa denfué ) & qui s'amalgame le plus facilement avec le mercure : on diroit qu'il O R 4S5 y a une fympathié entfe ces deux métaux. C'eft un axiome en Mé- tallurgie , que For n'eft jamais minéralifé par le foufre ni par l'arfenic ; cependant la feule vapeur d'un grain d'étain fuffit pour ôter la propriété malléable à huit onces de ce métal ; mais il la recouvre par la tufion. L'or rélifte à tous acides agiffans féparément. Il y a deux grands diffolvans de l'or; l'un eft compofé de l'acide marin & nitreux, c'eft l*tau régaU ordinaire : l'autre eft la combinaifbn de l'alkali fixe avec le foufre. Ce dernier menftrue ou-diflblvant eft connu fous le nom de fo'u de foufre. Si l'on en précipite la dift'olution faite à l'eau régale nitreufe & ammo- niacale , par un alkali fixe ou volatil, on en obtiendra une poudre auri- fîque , fulminante, qui defîechée détonnera avec foixante-quatre fois autant de force élaftique qu'un pareil volume de poudre à canon. On ne peut manier cette poudre avec trop de précaution. Nous le répétons, Jfes e^tts font violens & terribles. La chaleur , le frottement occafionnent fon inflammation & fon explofion. Il en coûta la vue & prefque la vie à un jeune homme de notre connoifTance qui , après avoir verfé de l'or fulminant dans un flacon , voulut le fermer , un grain pris entre le bou- chon &; le goulot, s'enflamma par le frottement ;rexplofion fut femblable à un fort coup de fufil. Le flacon fe brifa en éclats, le renverfa par terre & lui creva les deux yeux. La vitrification de l'or au foyer d'une des grandes lentilles de Tfch'ir- nhaufen , quoique donnée comme certaine par M. Humbert , a été con- teftée , & eft demeurée au nombte de ces faits douteux qui demandent à être vérifiés ; mais MM. Macqiur , Briffon, Lavoificr & Cadet ont fait fur cet objet, ainfi que fur un grand nombre d'autres fubftances, des expériences très-intéreflantes avec cette grande lentille de Tfchïrnhaufen^ tirée du Cabinet de l'Académie, alnfi qu'avec la petite lentille de Tfchir- nhaufen , que leur a confié M. le Comte de la Tour d"" Auvergne ; elle eft, ainfi que celle de l'Académie , de trente-trois pouces de diamètre , mais fon foyer eft un peu plus court. Ces Académiciens dont on connoît la fagacité , l'intelligence & le coup d'œil fin de l'obfervation , après avoir expofé au foyer de ces lentilles un grand nombre de fois de l'or très-fin & très-pur , & lavoir mis fucceftivement fur des fupports de différente nature , tels que des creufets d'argile réfradlaire , des teflbns de poterie de grès , de porcelaine dure , crue ou cuite , de pierre de grès très-réfraftaire &: de charbon , & dans prefque toutes ces épreuves avoir obtenu des vitrifications de couleur brune pourprée à la furface 4^6 O R de ce métal, n'ofent point encore afliirer pofitivement que ces vitrifi- cations ibient dues à une portion de la fubftance même de l'or ; en va- riant ces expériences ils ont eu la fatisfaûion d'appercevoir & de bien conilater plufieurs phénomènes importans dont les Phyficiens qui les ont précédés n'ont point fait mention. De ce nombre font, i°. un cercle de couleur pourprée fur le fupport de l'or , qu'ils n'ont jamais manqué d'obtenir , de quelque nature qu'ait été ce fupport ; 2°. une fu- mée très-fenfible fortant certainement de ce métal , de même que de l'argent, & s'élevant quelquefois jufqu'à cinq ou fix pouces ; 3°. une lame d'argent a été très-bien dorée à cette feule fumée de l'or , de môme qu'une lame d'or a été argentée à celle de l'argent; 4°, ils ont obfervé une rotation rapide de petits globes d'or & d'argent fondus au foyer , qui leur a paru affez conftamment dans le fens ou elle devoit être ,' en fuppofant qu'elle eut pour caufe une impulfion de rayons folaires , que ces Meilleurs ont déjà foupçonnée , mais qu'ils fe propofent de conftater par une fuite d'obfervations aulîi multipliées & aufîl exaftes que l'exige l'importance de la matière. Ces favans fe propofent de fuivre ces recherches avec des inftrumens bien fupérieurs à ceux qu'ils ont em- ployés, & c'eft avec une lentille à eau de quatre pieds de diamètre , de l'exécution de laquelle M. Bernieres s'eft chargé. Cet inftrument devant furpaffer de beaucoup en grandeur , en netteté , & par conféquent en force , tous ceux qui ont été faits jufqu'à préfent , femble promettre une Chimie Hydro-Pyrotechnique nouvelle , & paroît deftiné à faire une de ces époques qui deviennent mémorables dans l'Hilloire des Sciences. L'or fe trouve dans des mines qui lui font propres ou particulières ,' comme en Afie , à Aracan, & dans le Pégu , au Japon & près de Batavia," dans la Guinée , le Sénégal & le Royaume de Galam en Afrique , & fur- tout à l'endroit que l'on nomme la Côte d'Or. ( M. de la Chapelle a obfervé que l'or de Guinée ne peut fe battre en feuilles , ni fe tirer par la filière ) , à Malacafle en Madagafcar , & dans les pays de Bambouc & de Congo. En Europe , on rencontre des mines d'or en Suéde , en Norvège , en Sibérie & à Chemnitz en Hongrie. La mine d'or de Siderocaps dans le Jambolien Europe, efl fort riche. Dans l'Amérique Méridionale, l'or le trouve dans le Bréfil , dans le Mexique , dans le pays de Maricabo , à Sumatra, à Valvidia, à Copiapo & AndacoU , dans le Chili, dans la Province de Quito , & dans le Potofi au Pérou. jLes galions d'Efpagne exportent de ces dernières contrées en Europe O R 487 pour plus de quinze millions de ducats d'ôr en barres ou en lingots , par la voie de Cadix. C'eft , dit un Auteur moderne , pour le malheur de {es habitans que cette partie de l'Amérique produit ime û grande quan- tité d'or. L'infatiabilité de l'avarice y a fait autrefois commettre, fous un dangereux prétexte, toutes les aftes de cruauté que peuvent infpirer le fanatifme & la cupidité. A-t-on eu tort de dire : Quld non mortalia, peclora cogis , aurifacra famés ? Quel bien ont produit en effet ces riches mines du Pérou } Il a péri, dit M. de, Buffon , des millions d'hommes dans les entrailles de la terre pour les exploiter ; & leur fang & leurs travaux n'ont fervi qu'à nous charger d'un poids incommode. L'or vierge eft d'une couleur jaune aurore ; fa matrice ordinaire efl le quartz , quelquefois la pierre cornée , fouvent le fer & l'argent , rarement le cuivre & le plomb ; quelquefois dans de l'argile endurcie , tantôt il eft en petits points ou en grains , tantôt en feuilles ou en mafles , ou en rameaux. On reconnoît facilement , que les grains jaunes que l'on voit dans une pierre , font de l'or , quand avec la pointe d'un cifeau on y trace facilement des lignes , ou quand en lui faifant recevoir la va- peur du mercure , il blanchit ; & que jeté dans le feu , il ne fe détruit point. C'eft par un procédé femblable qu'on a reconnu que la mine de Carthagene au Mexique , dont le métal reffemble tout-à-fait à une mine de cuivre chatoyante grillée , étoit de l'or. Il n'en eft pas de même pour l'or qui fe trouve dans la pyrite , que M. de Jujll appelle gelft ou g'dfc^ Cette efpece d'or eft pâle & folide dans cette forte de matrice miné- ralifant les métaux ; lorfque l'or efl allié à l'argent dans la mine ou à d'autres métaux, il efl déguifé, ou du moins fa couleur efl fortement altérée. Des Minéralogifles modernes prétendent que l'or dans l'état de pyrite , a été uni au foufre par Tintermede du fer qui fert comme de lien d'union entre l'un & l'autre , & que la vitrioUfation qu'éprouve enfuite cette pyrite aurifère donne naifîance à l'or en cheveux ou en- fîbres capillaires. On trouve aufTi de l'or dans la belle efpece de lapis la^ili de Perfe t yoyti^ ce mot. Il y a aufîî une mine de cinabre en Hongrie qui contient de l'or , on l'appelle mine d'or rouge. Combien de fables de rivières font aurifères , fur-tout à l'endroit où elles font angle ! Rien ne reffemble mieux à des grains de mica. Nous avons plufieurs rivières en France qui cnçontiennent des quantités trop petites pour mériter attention \ teU 488 O Pv font le Rhin ; îe Rhône , dans le pays de Gex ; le Doux , en Franche- Comté ; la Cefe , dans les Cevennes; le Gardon, près de Montpellier; la Rigue , près de Pamiers ; l'Arriege , dans le pays de Foix ; la Ga- ronne , près de Touloufe ; la Salât, dont la fource eft dans les Pyrénées ; voyci^ à cefujet k Mcmolre de M. de Réaumur dans les Mémoires de f Aca- démie des Sciences^ année iyi8 ^ page 108 & fuivantes ^ & rHiJloire d& V Académie des Belles-Lettres , Tome XXI, page 24, à l'occalîon du Paftole. On abandonne ces paillettes d'or aux recherches des gens du pays, dont le travail pénible eft rarement récompenfé par les décou- vertes qu'ils font. Il y a des rivières dans la Caramanie & la Siléfie , où l'on trouve des grains d'or gros comme des pois : on en trouve aufîi dans le Tage & le Danube. Il eft certain qu'en rétrogradant & fouillant avec attention les bords de ces rivières , au-deffus du lieu où elles font angle , ou mieux encore en travaillant dans les hautes montagnes oii ces rivières prennent leur fource , l'on parviendroit à découvrir la minière, peut-être que les Souverains feront un jour exécuter ce projet chacun dans leurs Etats. Pline parle de l'or dont la mine étoit dans la Gaule , nous ignorons l'emplacement de cette ancienne mine : il eft probable qu'elle n'a pas été entièrement épuifée , mais la fureur des guerres, la barbarie & la révolution des temps en ont effacé jufqu'à la trace : il faut efpérer qu'on la retrouvera un jour. On nomme Paillottcurs ou Orpailleurs ceux qui, par le moyen d'une fébille ( efpece d'écuelle ou de vaiffeau profond fait de bois , dont l'in- térieur efl tout fillonné ou rempli de rainures ) , prennent & lavent le fable des rivières, pour en retirer la fubflance métallique précieufe. Lémery , Dictionnaire des Drogues , page 1 1 , dit qu'on voit beaucoup de Nègres en Afrique , qui ne font employés qu'à plonger & aller cher- cher de l'or. On en ramafle aufîi de cette manière une grande quantité dans le Pérou. M. Fréfier prétend qu'on y trouve fouvent dans le fond des rivières de l'or en malTe , du poids de quatre livres , & quelque- fois de beaucoup plus confidérables ; c'eft , dit-il , ce qu'on nomme pépites. Lorfque l'or eft répandu dans différentes efpeces de terres ou de fables , il n'a point de figure déterminée : il y en a aufTi de différentes couleurs qui font comme mafquées ; il eft ordinairement femblable à de petites pointes d'épingles. On en trouve cependant une efpece, qui efl: fous O R 489 fous la forme de petits grenats bien rouges , & tranfparens : c'eft ce qu'on appelle grenats d'or ; on en trouve aux Monts Crapacks , en Hon- grie. Il s'en rencontre aulîi en Amérique. Quand on trouve l'or pur, on l'appelle or natif ou or vierge : il efl facile à graver; c'eft celui de la première efpece. L'or qui forme des cfpeces de filons ou veines dans des pierres, ou ferrugineufes , ou fchifleufes , ou quartzeufes, eft celui de la féconde efpece : l'or quife rencontre dans les glaifes rougeâtres , & les fables ( c'ell: le Lavaderos des Efpagnols ) , & qui eft en petites paillettes , n'a befoin que d'une (impie lotion pour en être féparé : cet or de lavage eft celui de la troi- fieme efpece ; on l'appelle or paléoU ou poudre d'or. Enfin l'or qui eft en grains , & que des Plongeurs retirent des rivières , eft celui de la qua- trième efpece : il s'appelle or pépite , c'eft le moins bon , il n'eft guère qu'à dix-huit karats. La méthode ulitée pour l'extradion & la purification de ce métal interpofé dans les pierres , confifte dans le lavage , le pilage , l'amalgame & l'ignition. S'il y a mélange de métaux , l'on a recours , ou aux diflbl- vans , ou à la fufion : le procédé en eft fondé fur le même principe , que pour le traitement de la mine ^argent. Voyez ce mot^ & ce qui en eft dit dans notre iW/Wr^/o^ze; mais particulièrement dans le Diciionnaire de Chimie, Ce métal , qui dans la fociété eft d'une très-grande utilité pour repré- fenter la valeur de tout ce qui peut être néceffaire , utile ou agréable aux hommes , fert aufîl beaucoup, à caufe de fon éclat, de fa beauté , de fon inaltérabilité., pour quantité d'ornemens & de bijoux précieux. L'or n'eft donc pas feulement un moyen général d'échange entre les peuples , puifqu'il devient une fource de chefs-d'œuvre dans les mains induftrieufes d'une multitude d'Ouvriers. En effet , ce métal fe plie faci- lement à tous les caprices du goût & de la mode. On l'emploie à maf- quer tous les autres métaux. Nous avons expofé fa grande dudilité, elle le rend propre à cet ufage. On trouve chez les Batteurs d'or de quatre fortes d'or en feuilles. Le plus beau fert aux Damafquineurs , on l'appelle or d'épée : la féconde forte eft employée par les Armuriers , on la nomme or de pijlolet: la troifieme fert pour dorer les livres, on l'appelle or de Relieur: la qua- trième enfin , fert aux Peintres , & en Pharmacie , pour envelopper , orner & mafquer le mauvais goût des médicamens , on l'appelle o^ Tome JK Qqq 490 O R d' Apothicaire. Ses propriétés particulières en Médecine nous paroifTent très-précaires & fort chimériques , nous dirions volontiers une pure charlatanerie. Qui ne connoîtle fens figuré de cette expreffion prover- biale y dorer Lt pilule ? On eil parvenu , par l'art de la dorure , à appli- quer ce métal fur une quantité de différentes matières auxquelles iî donne un extérieur de propreté & d'opulence : en le mêlant avec Tétain on en tire une très-belle couleur pourpre pour la peinture des émaux & de la porcelaine. Foye{^ le Diclionnain des Arts 6* Métiers. Les Doreurs ie fervent d'un mélange d'or ik d'argent , qu'ils appel- lent amalgame d''or & d'argent , parce qu'il s'étend facilement fur les ou- vrages. On dore fur les métaux, ou fur les cuirs, ou fur le bols, ou fur les lambris de pierre. Ceux qui dorent fur le bois commencent par l'en- duire de plufieurs couches de blanc, enfuite de jaune , enfin d'un pâte compofée de bol & de molybdène, &c. c'eflfur cette dernière couche , mouillée avec de l'eau gommée ou collée , qu'on applique la feuille d'or. On doit à feu M. de Montamy la manière de retirer ce métal pré- cieux employé fur le bois : elle confifte à faire fubir une fimple ébulli- tion au bois doré; le métal s'en détache avec la colle qui l'affujettilToit; on évapore l'eau , il refte une matière qu'on pulvérife , & qu'on jette auffi - tôt dans le feu pour brûler la portion de colle , puis l'on procède par la voie de l'amalgame avec le mercure en la ma- nière ufitée. Les ouvriers appellent or trait , un lingot d'argent doré au feu, & quia pafTé par la filière. L'or en lame ^ qui ed prefque le même , efî un fil applati entre deux rouleaux d'acier poli; on l'emploie, comme Vorfili, dans la fabrique des étoffes de foie ou de broderie , ou du galon. Une once d'or peut recouvrir & dorer très-exaftement un fil d'argent long de 444 lieues ; qu'elle dudilité I L'on peut dire que l'art du Tireur d'or & du Batteur d'or, oii le commun des hommes ne trouve qu'un objet de commerce, ou des refTources pour le luxe , préfente aux yeux d'un Phyficien des merveilles qui n'ont point échappé aux obfervations de Boy le, du P. Merfenne, de Rohault, & notamment de M. de Réau- mur. Voyez Mémoires de V Académie des Sciences , /7/j , pag. 20S , &c. Ce que l'on appelle or en coquille , font les baftréoles , c'efl-à-dire les rognures de feuilles d'or , qu'on broie & qu'on incorpore avec du miel; on les met enfuite dans de petites coquilles ; cet or ainfi préparé , iert aux Peintres en miniature. OR O R A '491 Les Orfèvres défignent la pureté de l'or par le mot karat. Un karat ell la vingt-q^trieme partie du titre de l'or : l'or pur ou fin eft nommé or à vingt-quatre karats^ mais il n'y en a que peu ou point à ce titre. Le karat eft un fcrupule , le fcrupule eft vingt-quatre grains ou le tiers d'un gros : fi l'or eft allié ou diminue au feu d'un vingt-quatrième , il T^Qw reflera plus que vingt-trois parties , & l'on dira or à vingt-trois karats, Vor au titre eft à vingt karats : il n'eft employé que pour les bijoux d'or. On détermine auffi le karat d'or par l'épreuve de la pierre de touche ; voyez ce mot. Depuis quelques années le luxe qui rend les Ârtiftes inventifs , leur a fait imaginer des moyens pour donner à l'or différentes nuances par les alliages, ce qui produit des ornemens agréables à l'œil, m.ais aux dépens de la valeur intrinfeque du métal qui eft facrifié à la beauté de l'ouvrage. Il y a de Vor vert ^ qui fe fait en alliant beaucoup d'argent avec l'or: Vor rouge fe fait en l'alliant avec beaucoup de cuivre: Vor Jaune ei}: l'or pur: l'or l^Ieu fe fait par le mélange de l'arfenic ou de la limaille d'acier , ou par le moyen du gros fil de fer doux amalgamé dans l'or fondu : Vor è/anc des mêmes Artiftes, eft l'argent pur. Or blanc, ou Platine, f^oyei Platine. Or de chat, Foye^^aumot MiCA. ORAGE. Nom que Ton donne , taniôt à une tempête de vent fur mer, tantôt à un ouragan fur terre , 1 un & l'autre accompagnés d'une groffe pluie fouvent mêlée de giboulées, de grêle, & ordinairement précédée d'un changement de vent , ou d'un calme dans l'air , ou d'une grande chaleur, ou d'un temps fort chargé. Alors on voit des éclairs, des arcs-en-ciel , & l'on entend fouvent gronder le tonnerre : les nuages font for ement agités; ils fe rapprochent, fe condenfent, &: dans l'in- ftant ils fe convertilTent en grofles gouttes d'eau qui tombent avec VÎteiTe. Il eft rare qu'un orage, accompagné d'éclairs & de tonnerres, continue quelque temps fans qu'il furvienne une grofte pluie. Lorfque ces fortes d'ondies viennent à tomber , elles emportent ordinairement avec elles beaucoup de cette matière qui produit la foudre ; ce qui fait que l'orage celTe beaucoup plutôt lorfqu'il pleut , que lorfqu'il fait un temps fec. Ce phénomène n'eft jamais univerfel: il fuit le courant d'un vent impétueux , qui fiffle & tourbillonne ; aufti ne fe fait-il fouvent remarquer que dans une petite étendue de quelques contrées; mais il n'y répand pas moins l'épouvante, la défolation ÔC l'horreur, C'eft dans 49* O R A des inftans femblables que des campagnes fleuries fe conver tiffent ett des déferts d'un afpeâ: affreux. . * Les orages les plus confidérables & les plus efFrayans qu'on ait efTuyés en Europe, font celui des environs de Londres en 1713 , celui des environs de Ratisbonne le 22 Mai 1710, celui de Leicefter en Angleterre le 22 Juin 1724, celui de Hambourg le premier Juillet 1717 , celui de Francfort fur le Mein le 25 Juillet 1723 , celui de Nimegue en Hollande le 25 Juillet 1725, celui de Crème en Italie le 30 Août 1720, celui de Boulogne en Picardie en 1722. La Suifle eft fu jette à être affligée & ravagée par les orages : les habitans fe fouviendront long temps de celui qui confterna Zurich en 1449 , de celui de Rothembourg en 1 597 , qui fit difparoître toute la moiffon ; le furieux orage de grêle qui épouvanta tant les Citoyens de Vienne en 1689, fut auffi des plus confidérables. L'orage nodurne de Triefte en 171 9 fut encore plus terrible : avant que ce météore commençât , on vit courir dans l'air une grande quantité de flammes femblables à des feux follets : on entendit foudain un grand fracas de tonnerre , qui , accompagné d'éclairs & de grêle , fit trembler toute la Nature dans cette contrée , où Ton trouva des maifons criblées de trous , & des arbres déracinés , caffés , brûlés par la chute d'une grêle prcdigieufe & du tonnerre. Le 24 Juillet 1771 , fur les deux heures après midi, le ciel s'étant cxtraordinairement obfcurci à Grenoble , il tomba pendant quelques minutes une pluie très-abondante , laquelle fut fuivie d'un orage de grêle qui dura un peu plus long-temps. Les moindres grains étoient du volume des plus groffes noifettes, & quelques-uns étoient gros comme des œufs de poule ; toutes les vitres expofées au midi & au couchant flirent entièrement fracaifées , & une heure après , les rues étoient encore couvertes de grêle de la hauteur d'un pied : les blés & les chanvres des environs de cette ville furent coupés & hachés , & tous tes arbres furent dépouillés de leurs fruits. Le défaftre a été encore plus terrible à Plombières en Lorraine : fur les dix heures du foir , les eaux montèrent en un quart-d'heure jufqu'à dix pieds dans les maifons, & en firent écrouler dix-fept ; les bains furent comblés de décombres & de débris , plufieurs perfonnes périrent. Le même orage fe fit fentir «n même temps dans toute la Province : la Meufe , la Mofelle , la Meurte , la Nied , la Seille , la Sarre & les autres rivières qui y coulent , O R A 493 aînfi que tous les ruifleaux qui y affluent : par -tout les eaux mort- terent en moins de fix heures aufîi haut qu'en 1740. Les dégâts que cette inondation générale & fubite caufa , furent confidérables : ce fut particulièrement dans les Vofges qu'on en reflentit les plus terribles effets. L'orage de pluie qu'on a éprouvé à Aix & aux environs de cette ville , le 15 Septembre 1771 , a été aulîi des plus remarquables, & a caufé beaucoup de ravage. En 1773 le 18 Août, il tomba pendant toute la journée une pluie prodigieufe à Moncontour en Baffe-Bretagne ; le vent étoit Sud-Eft , le baromètre à irj pouces 4 lignes , la chaleur médiocre , & l'air extrê- mement lourd. L'après-midi, on entendit le tonnerre gronder, le ther- momètre varia de 1 3 à 16 degrés , fur le foir il fe fixa à 14 ; alors la pluie augmenta confidérablement , & vers minuit elle devint fi groffe , qu'elle fembloit tomber en maffe. Le vent, difons l'ouragan , ayant tourné au Nord-Efl, il s'éleva une tempête affreufe ; le tonnerre gronda iâns interruption , l'air étoit tout en feu , & les eaux s'accrurent excefîî- vement. Qu'on fe repréfente un volume immenfe d'eau fe précipitant par une chiite rapide entre deux montagnes dans une gorge étroite 3 couverte de gros quartiers de pierre , roulant avec un fracas horrible ces lourdes maffes , entraînant tout ce qui s'oppofe à fon paffage , haies, murs , chauffées , ponts , ravageant & couvrant de pierres , de fable & de limon les vergers , les prairies , &c. après un cours de plus de 800 toifes , ce torrent raffemblant toute fa violence , brifant les portes de la ville , inondant les maifons ou les ébranlant, les renverfant de fond en comble , noyant les habitans , les befliaux , détruifant ou boulever- fant les moulins ; dépofant çà & là dans les vallées les meubles , les débris & les cadavres ; arrachant les moiffons , interrompant les com- munications , & l'on n'aura qu'une- image imparfaite de cet épouvan- table & funefte fpeâacle. Le même orage n'a pas moins produit de ravages dans les environs , fur-tout à Saint-Brieux, à Guingamp , &c. fur la grande route de Breff. La ville de Chatelaudren a prefque été entiè- rement fubmergée en un moment ; la digue de l'étang de la mine , fitué à 1200 toifes au-deffus de celui de la ville, ayant été renverfée , les eaux fe précipitèrent dans la ville , oti elles s'élevèrent à plus de dix pieds , & obligèrent les habitans dont les édifices inondés réfiftoient en- core à l'effort des eaux, à monter dans leurs greniers, fans pouvoir être 494 O R A fecourus ; dans cette affreufe fituation , ils attendoient la mort qui leur éioit inévitable. Voici la defcription de l'orage du Bas- Maine faite & obfervée par M. Buon , Prêtre & Précepteur du jeune Marquis de Dnux : l'orage du 4 Août dernier ( 1774) a commencé fur les quatre heures du foir. Il avoit été précédé quelques jours auparavant d'une grande chaleur avec des éclairs au Nord-Ouefl; mais ce jour-là la chaleur fut étouffante , & le thermomètre de M. de. Rêaumur étoit à vingt-quatre degrés au-deffus de la congélation. Le tonnerre après avoir grondé fourdement depuis midi , éclata enfin par des explofions qui furent le prélude du fléau terrible quia défolé ce canton , & ceux qu'il a rencontrés dans fa mar- che. Un nuage épais & fombre venant de la partie du Nord-Ouefl: , inter- cepta la lumière au point qu'on auroit eu peine à pouvoir lire : il s'éleva un vent impétueux qui fuivit conftamment la même direûion de l'orage. Bien-tôt après l'on entendit les fifîlemens de la grêle qui déjàfaifoit au loin un épouvantable fracas, & qui fans être mêlée de pluie ne difcon- tinua point de tomber pendaiit près d'une demi-heure. La première ôi la plus volumlneufe pefoit depuis une livre jufqu'à deux & trois; il y a même des Curés voifms qui ont affuré en avoir trouvé de beaucoup plus pefantes. La plus groiîe , comme la plus menue , étoit de différentes configurations ; on voyoit des grains ronds & armés de pointes à^peu- près comme certaines noix de galle , d'autres carrés ou triangulaires, ou alongés & terminés en angles , & de diverfes autres figures ; & elle étoit fi dure & fi compare que notre Obfervateur en a trouvé trois femaines après dans des endroits fombres plufieurs grains gros comme des œufs ordinaires. Dans la largeur à-peu-près de cinq quarts de lieue 011 la grêle a donné, la dévaflation a été générale dans la campagne : les maifons totalement découvertes, particulièrement du côté oppofé à l'orage , hs grains enterrés , les pailles en plus mauvais état que fi elles eufîent été foulées par vingt mille hommes de cavalerie , les arbres hachés en leurs cimes, pelés en plufieurs endroits à leurs troncs, & dépouillés de leurs feuilles & de leurs fruits , ofïroient aux yeux des malheureux habitans du Bas- Maine un fpedacle tel qu'au mois de Décembre , mais mille fois plus défolant pour eux. Les hommes & les animaux domelliques éloignés de leurs habitations ont beaucoup fouffert , & des Laboureurs qui condui-^ R A 49^ foîent leurs voitures diargées de gerbes , ne pouvant dételer leurs beftiaux , devenus furieux , les ont laiffés aller à leur gré pour fe mettre eux-mêmes à couvert. Le gibier a été prefque tout détruit , fans même en excepter les renards , qui malgré leurs rufes & leurs fourrures , n'ont pu foutenir un û terrible choc. Aufîi-tôt après la tempête une partie de la grêle étant déjà fondue , il s'efl: élevé un brouillard épais d'une odeur beaucoup plus forte &c plus infecle que celle qui frappe ordinairement l'odorat dans les temps orageux. Vers le commencement de Septembre , M. l'Abbé Buon a été témoiri d'un autre phénomène plus étonnant encore que les préccdens, La fève du mois d'Août , dont la circulation étoit alors dans toute fon aélivité , ne trouvant plus rien dans les arbres capable de l'épuifer , a agi for- tement fur les boutons qui , fuivant l'ofdre naturel, ne dévoient fe dé- velopper qu'au printems fuivant , & bientôt après l'on a vu naître de nouvelles feuilles &C des fleurs auxquelles ont fuccédé des fruits qui , parvenus à la groffeur des noix , font tombés aux premières gelées. A confidérer les phénomènes qui précèdent , qui accompagnent Se qui fuivent un orage , j'aurois bien des détails à propofer au ledeur: mais la caufe des orages tenant au fyftême des autres météores , tels que les vents , les tourbillons , le tonnerre , les éclairs , la groffe pluie , les ouragans y la grêle , les nuées , &c. ( voyez ces mots ) , une obfervation importante eu que l'air eu autant agité avant un orage qu'il tû ordinai- rement calme après. II y a plus , ceux qui fe trouvent fous l'orage ne Tentent que peu ou point de vent. ORANGER , aurantium. L'oranger eft un arbre des plus beaux , par la blancheur & l'odeur fuave de fes fleurs , par fes feuilles d'un beau vert, &: dont il n'eft jamais dépouillé , par fes fruits couleur d'or , malus aurantia , & fur-tout par le fpeftacle agréable qu'il réunit en même temps , de boutons , de fleurs épanouies , & de fruits. Quoique zeX. arbre ne paroifl"e naturel qu'aux Provinces Méridionales de la France , il fait l'ornement de nos plus beaux jardins , parce qu'on l'élevé eh caiffe , & qu'on le garantit , dans les ferres , des rigueurs de l'hiver. Louis XIV étoit fi grand admirateur de cet arbre , qu'il avoit. toujours des orangers en fleurs , même pendant l'hiver , dans une galerie de fon Palais , où ils étoient placés fur des piédeflaux dans des caifles gravées & argentées. Pour parvenir à lui procurer ce délicieux fpe^ade pendant tout l'hiver. ^9^ O R A les Jardiniers choififfoient un nombre d'arbres fuffifant , cefToient de les arrofer jiirqu'à ce que les feuilles tombaffent , & ayant mis enfiiite de la terre nouvelle fur la furface de leurs caiffes , ils les arrofoient fou- vent dans un réduit garni de vitrages , d'où ils ne fortoient que chargés de fleurs & de feuilles nouvelles. Parmi les vingt efpeces d'orangers connues (^f oranger à fruit aigre o\x bigarade avec ou fans feuilles panachées ; l'oranger à fruit doux ; T oranger à feuilles coquillées ; l'oranger à fleurs panachées ; l'oranger à fruit cornu ; V oranger hermaphrodite ^ dont le fruit participe de l'orange & du citron ; V oranger de Turquie ; l oranger tortu ; le Panipelmoufe ; la groffe orange; l'orange étoilée; C orange à écorce double ; l oranger à fleur double ; l'oranger de la Chine ; V oranger nain à fruit aigre ; le même à feuilles & fruit pana- chés , &c. ) il y en a deux principales , dont le fruit eu en ufage parmi nous ; favoir , V oranger à fruit aigre ^ amer ou bigaradier ^ &C V oranger à fruit doux. Il n'y a aucune différence pour le port , les feuilles & les fleurs de ces deux fortes d'orangers. La defcription que nous allons en donner, conviendra donc aux deux , fi ce n'efî pour les fruits qui ont des diffé- rences bien fenfibles. L'oranger devient d'une hauteur médiocre ; fes racines font jaunes & s'étendent beaucoup : le bois du tronc ell dur, compade, blanc vers le cœur, odorant : (qs feuilles font toujours vertes, épaiffes, liffes, portées fur des queues feuillées , & qui repréfentent la figure d'un cœur , remplies d'une infinité de petites cellules huileufes , tranfparentes , qui paroifTent autant de petits trous , de même que dans le mille- pertuis. Ses fleurs font en rofe , odorantes , compofées de cinq pétales blancs , difpofés en rond. Dans le bigaradier le piflil fe change en un fruit prefque fphérique. Avant d'être mûr, il efl de couleur verte, amer, acre & piquant à la langue; lorfqu'ileft mûr , on exprime des cellules intérieures du fruit un fuc acide. Les bigarades font d'un jaune pâle : au lieu que les oranges douces font d'une couleur vive de fafran; leur jus efl doux & agréable. Ces arbres font originaires de la Chine , d'où les Portugais ont ap- porté les premières graines. On voit encore à Lisbonne , dans le jardin du Comte de Saint-Laurent , le premier arbre d'où font fortis tous les orangers qui font l'ornement de nos jardins d'Europe. Les orangers fe font comme naturalifés dans nos Provinces Méridionales : dans les îles d'Hyeres & en Provence , où ils forment des forêts agréables par leur verdure O R A 497 verdure qui ne change point, & par les fruits, dont ils font toujours chargés. Les feuilles , les fleurs, l'écorce , la moelle & la graine des orangers font d'ufage. Cet arbre nous charme trop par fa beauté , pour que nous ne difions pas quelque chofe fur fa culture. M, de la Quintinh a donné un Traité fur cet objet. L'oranger doux eil préférable , tant pour la beauté de fes feuilles , que pour la bonté de fon fruit. L'oranger de la Chine ne fait jamais un bel arbre ; car il a toujours l'air malade , ôc fon fruit mûrit rarement. L'oranger de Gênes , à feuilles de plulieurs couleurs , mérite d'être placé dans un jardin, comme une rareté , à caufe de la beauté de fes feuilles. L'oranger nain efl: très-agréable par fes petites feuilles & la quantité de fleurs dont il fe couvre. On peut élever des orangers par le moyen de quelques jeunes oran- gers qui nous viennent de Provence ou de Gênes , ou en femant des pépins de bigarade dans une terre préparée : on les greffe enfuite. On prétend que la petite efpece de citron doit être préférée pour y greffer les efpeces qu'on defire. Une caiffe de douze ou quinze pouces leur fufïit jufqu'à l'âge de fept ou huit ans ; alors on les tranfplante dans la der- nière caiffe qui doit avoir vingt ou vingt-quatre pouces de large. Une bonne terre pour les orangers , efl un mélange d'un tiers de terreau de brebis , repofé depuis deux ans , d'un tiers de terreau de vieille couche , & d'un tiers de terre graffe de marais. En taillant l'oranger , on cherche à lui donner une belle forme. Lorfque par maladie un oran- ger jaunit , on lui donne une nouvelle terre , ou bien on taille toutes les racines gâtées , & on ne les expofe au foleil que pendant deux ou trois heures. S'il efl attaqué par les gallinfecles qui le fucent , on doit frotter l'arbre avec du vinaigre. Il faut fur-tout défendre les orangers du froid & du vent. Le fumier à contre-temps leur efl également perni- cieux : on n'en doit jamais mettre de celui de vaches , ni de pourceaux ; tous les autres doivent être bien confommés & mis avec prudence. Quoique ces arbres aiment l'ombre , ils périfTent bientôt lorfqu'on leur donne trop d'humidité ; le fumier de brebis ou de chèvre , trempé dans l'eau dont on arrofe les orangers , les rend fains & vigoureux. L'effet que produifent les arrofemens fréquens & trop abondans fur ces arbres, efl de faire jaunir , & fouvent tomber les feuilles ; ils languifTent un an ou deux fans pouffer aucune tige , & à la fin ils meurent entièrement. On doit ferrer les orangers depuis le milieu d'O^obre jufqu'au retour de Tome IF, '^ Rrr 498 O R A la belle faifon. Il y a dans le Journal Economique pour le mois de Juillet l année lySy , un Mémoire fur la culture des orangers , oii l'on démontre qu'on doit préférer de les mettre dans de grands vafes de terre , plutôt que dans des caifTes , à l'exemple des Génois , parce que ces pots s'é- chaufFent plus aifément , fe refroidiffent moins vite , ôc confervent mieux tous les fels de la terre que les caiffes. Depuis quelque temps on fe fert avec fuccès des feuilles d'oranger (dans les convulfions , les affedions vaporeufes & l'épilepfie. On en fait ufage en poudre au poids d'un fcrupule qu'on délaye dans une laffe de chocolat. Des perfonnes ne fe fervent que de la décoûion des feuilles , & y joignent du vin & du fucre. C'eft encore un fpécifique contre la colique des Peintres. La décoftion doit fe faire dans un vafe fermé. On préfume que ce remède efl efficace dans toutes les maladies du genre nerveux. Les fleurs d'orange , à caufe de leur odeur agréable qui eft préférée à celle des rofes , de l'ambre & du mufc , font fort en ufage parmi nous , foit dans les parfums , foit dans les affaifonnemens. On en tire , par la diflillation une eau qui eft céphalique , ftomachique , hyflérique, & une huile efTentielle , qui porte le nom de néroly ; c'eft un excellent parfum. L'eau de fleurs d'orange ell: auffi très-efficace contre les ^txs • & contre la toux qu'elle calme ; & félon M. Bourgeois , elle facilite l'expeftoration ; mais elle ne convient pas à toutes les femmes , contre les vapeurs ; il y en a un grand nombre auxquelles elle eft fort contraire, Uejfence de Portugaise fait avec l'écorce d'orange ; il fuffit d'exprimer cette écorce pour l'obtenir. On fait avec ces fleurs des conferves diffé- rentes , foit folides , foit molles , des tablettes qui font très-agréables au goût & que l'on fert au deffiert , ou que l'on mêle dans les médica- ïiiens pour corriger leur goût défagréable , & pour fortifier l'eflomac. On fait auffi avec ces fleurs , un firop & un ratafia délicieux. On confît les écorces de ce fruit. Tout le monde fait combien la pulpe d'orange douce efï agréable. On prétend que fi l'on mange une orange douce toute entière avec l'écorce , avant l'accès de la fièvre intermittente , & fur- tout de la fièvre tierce , elle arrête fouvent l'accès , & guérit quelque- fois la fièvre. Enfin , avec le fuc exprimé d'oranges aigres , délayé dans l'eau & adouci avec le fucre , l'on fait une boiiTon que l'on appelle communément orangeat ou orangeade ; c'ell un bon rafraîchifTant. Quand on veut que celte boiifon foit bien aromatifée & plus gracieufe, on y joint O R A 49^ un peu ^ oUofacchûrum préparé fur le champ , en frottant un petit mor- ceau de fucre contre l'écorce de la même orange ; c'efl le moyen d'unir le parfum de l'écorce à la faveur du fuc. L'orange amere n'e il employée parmi nos alimens qu'à titre d'afiaifonnement ; on arrofe de fon fuc la plupart des volailles & gibiers rôtis , à defîein d'en faciliter la digeflion; fon écorce râpée eil bonne pour corriger la fadeur , l'inertie des poilTons gras mangés en ragoûts , comme l'anguille , &:c. Cette même écorce efl flomachique, fébrifuge & vermifuge ; mais c'efl fur-tout, dit M. Bourgeois ^ un bon remède contre les pertes des femmes , & le flux trop abondant de leurs règles : on la donne feche en poudre à la dofe de trente à quarante grains , & on fait une décoûion de l'écorce verte , en faifant cuire l'é- corce de fîx oranges avec quatre livres d'eau , pendant une demi-heure : on en donne un verre trois ou quatre fois le jour. ORANG-OUTANG. Nom que l'on donne aux Indes Orientales , à l homme fauvage ou des bols , efpece de grandy//?^-^ , connu aufîî fous le nom de barris. C'efl le véritable genre de finge , qui fe rapproche le plus de l'homme par la figure ; il marche comme lui debout ; on doit diflinguer deux efpeces d'orang-outang ; la grande efpece , qui efl le barris ou drill des Anglois ou le pongo de Guinée , & la petite efpece qui efl lejocko. Ce genre de finges diffère de l'homme à l'exté- rieur par îe nez , qui n'efl pas proéminent , par le front qui efl trop court , par le menton qui n'efl pas relevé à la bafe ; fes oreilles pro- portionnellement font trop grandes , fes yeux trop voifins les uns des autres , l'intervalle entre le nez & la bouche trop étendu ; ce font-là les feules différences de la face de l'orang-outang avec levifagede l'homme. Le corps & les membres différent en ce que les cuiffes font relative- ment trop courtes , les bras trop longs , les pouces trop petits , la paume des mains trop longue & trop ferrée , les pieds plutôt faits comme des mains que comme des pieds humains ; les parties de la génération du mâle ne font différentes de celles de l'homme , qu'en ce qu'il n'y a point de frein au prépuce ; les parties de la femelle font à l'extérieur fort femblabies à celles delà femme : àl'intérieur cette efpece diffère de l'efpece humaine par le nombre des côtes ; l'homme n'en a que douze , l'orang-ourang en a conflamment treize ; il a auffi les ver- tèbres du cou plus courtes , les os du bafîin plus ferrés , les hanches plus plates, les orbites des yeux plus enfoncés ; il n'y a point d'apo- phyfe épineufe à la vertèbre du cou, les reins font plus ronds que ceux Rrr 2 500 O R B O R C de l'homme , & les uretères ont une forme différente , auffi-bîen que la veflie & la véficule du fiel , qui font plus étroites & plus longues que dans l'homme ; toutes les autres parties du corps , de la tête & des membres, tant extérieures qu'intérieures , font fi parfaitement femblables à celles de l'homme , qu'on ne peut les comparer fans admiration , dit M. di Buffon , & fans être étonné que d'une conformation fi pareille , & d'une organifation qui eft abfolument la même , il n'en réfulte pas les mêmes effets ; par exemple la langue & tous les organes de la voix font les mêmes que dans l'homme , & cependant l'orang-outang ne parle pas ; le cerveau efl abfolument de la même forme & de la même pro- portion , & il ne penfe pas : y a-t-il une preuve plus évidente que la matière feule , quoique parfaitement organifée , ne peut produire ni la penfée , ni la parole qui en efl le figne, à moins qu'elle ne foit animée par un principe fupérieur ? L'orang-outang n'a point de poches au dedans des joues , point de queue , point de callofité fur les fefles ; il les a renflées & charnues ; il a toutes les dents & même les canines femblables à celles de l'homme ; il a la face plate , nue & bafanée ; les oreilles ,' les mains , les pieds , la poitrine , le ventre aufîî nus ; il a des poils fur la tête qui defcendent en forme de cheveux des deux côtés des tempes^ du poil fur le dos & fur les lombes , mais en petite quantité ; il a cinq ou fîx pieds de hauteur & marche toujours droit fur (ts pieds. Voye^^ maintenant VarticU HoMME DES BOIS. ORBAINE. Voye-i^ Arbenne. ORBIS. Nom que les Voyageurs donnent zwpoljTon rond ^ & quel- quefois à la lune poijfon. Voyez ces mots. ORCA efl le cétacée que les Anglois appellent witUpooU , & le& Naturaîifles épaidar. Voyez à la fuite du mot Baleine. ORCA NETTE , anchufa puniceïs jlor'ihus aut buglojfum radiez rubra^ efl une efpece de buglofe, qui croît dans le Languedoc & dans la Pro- vence aux lieux fablonneux. Sa racine efl greffe comme le pouce , rouge en fon écorce , blanchâtre en fa partie ligneufe : elle pouffe plufieurs tiges , hautes de huit pouces ou environ , fe courbant vers la terre» Ses feuilles font femblables à celles de la buglofe fauvage , longues, garnies de poils rudes ;fes fleurs font en entonnoir, en pavillon découpé, de couleur violette : il fticcede à chacune quatre femences grisâtres, qui reffemblent à une tête de vipère. On fait fécher la racine d'orcanette au foleil , & on l'envoie aux O R C 501 Droguiftes qui la débitent : on choifit celle qui eft nouvellement féchée,' un peu flexible, de couleur rouge foncée extérieurement, rendant une belle couleur vermeille quand on en frotte l'ongle. C'étoit le fard des Anciens. On s'en fert en Pharmacie pour donner une teinture rouge aux médicamens qu'on veut déguifer , à l'onguent rofat , à des pommades, à de la cire , à de Thuile , étant infufée dedans. Des Cuifmiers habiles s'en fervent aufli pour imiter la fauce ou beurre. d'écrev'iJJ'es. Il n'y a que fon écorce qui colore : l'intérieur n'eft point colorant. Cette racine eft aftringente ; prife en décoftion , elle arrête le cours de ventre. On nous apporte quelquefois du Levant une efpece d'orcanette , appeWéQorcanetie de Conjlantïnople ; c'eft une racine prefque auffi longue & grofTe que le bras , mais d'une figure particulière ; car elle paroît , dit Lémeriy un amas de grandes feuilles entortillées comme le tabac à l'an- douille , de couleurs différentes , dont les principales font un rouge obfcur, & un très -beau violet; il paroît au haut de cette racine une forte de moifTiffure blanche & bleuâtre. Dans le miUeu l'on trouve une petite écorce mince , roulée , d'un beau rouge en dehors & blanche en dedans. Quoique cette racine paroifTe artificielle , elle rend une teinture encore plus belle que la nôtre , mais moins durable. Comme la teinture de l'orcanette ne confifîe que dans le rouge dont fa fuperficie efl couverte , Px)met confeille avec raifon de préférer celle qui efl menue aune plus greffe ; c'efl aufîi celle qu'emploient les Teintu- riers: on la tire de Marfeille & de Nîmes. ORCHETTA. Nom donné fur la côte de Gênes à une efpece de fquille à tête large , de la grandeur d'une langoufle. On en prend peu du côté de Marfeille , mais beaucoup fur les côt€S de Barbarie, ORCHIS , orchys. Nom donné à une famille de plantes qui approche beaucoup de celles des gingembres : Voyez ce mot. Leurs racines font des efpeces de tubercules charnus ; leurs feuilles font marquées de ner- vures longitudinales afl'ez groffieres ; leurs fleurs font en épi ou en panni- cule , au fommet des tiges ( M. Halkr dit qu'elles ont trois pétales extérieurs , nés du haut du germe , deux pétales intérieurs , les uns & les autres fimples & uniformes , & un fixieme pétale dont la figure varie à l'infini : les étamines naiffent fouvent d'une colonne , qui s'élève diî centre de la fleiir & qu'on prend pour la trompe, quoiqu'elle n'en ait pas la flrufture , & qu'une rainure gluante paroiffe être le véritable chemin du fperme mâle ) : leiu: fruit efl une capfule , à une loge 6c trois 502 O R E battans: les graines font en très-grand nombre & fort menues; les racines font douées d'une grande âcreté , qu'elles perdent par l'exficca- tion, ou bien en les échaudant dans l'eau. On range parmi les orchys les efpeces du fatyrion, de la vanille^ &c. Voyez ces mots. OREILLE , auricula. Organe de l'ouie : nous en avons parlé à l'article Homme. La ftru^lure de l'oreille eft très-diverfifiée dans les animaux. Si nous n'avons pas encore eu occafion de reconnoître cette organe dans les infedes ,• nous n'en dirons pas de mcme à l'égard des oifeaux , des quadrupèdes, des gros poiflbns, &c. les uns l'ont large, droite & ouverte; d'autres cachée bien avant dans le derrière de la tête. Tous les quadrupèdes ont l'oreille très-faillante : cette analogie ne fe retrouve pas dans les oifeaux & les poiffons. Les taupes qui font enterrées toute leur vie, n'ont point le conduit de l'oreille ouvert à l'ordinaire ; car pour empêcher la terre d'y entrer, elles l'ont fermé par la peau qui leur couvre la tête & qui fe peut ouvrir ou fe fermer en fe dilatant ou en s'étréciffant. Plufieurs animaux ont ce trou abfolument bouché, comme la tortue, le caméléon, & la plupart des poiffons: il y a une efpece de baleine qui ne l'a pas fermé , mais elle a cette ouverture fur les épaules ou placée derrière l'œil : c'eft un conduit couvert d'un épiderme , & aif fond duquel eft un os en forme de coquille. L'adreffe du Pêcheur con- fifte à enfoncer le harpon dans cet endroit foible & fenfible. C'eft cet os qui eft improprement connu dans les Apothicaireries fous le nom de pierre de tiburon. Prefque tous les quadrupèdes ont ce trou ouvert par des oreilles mobiles & plus ou moins longues , qu'ils lèvent & tournent du côté d'où vient le bruit. Les lions, les tigres, les léopards ont les oreilles courtes ; l'homme , le finge , le porc-épic les ont applaties contrs la tête; le veau marin, les lézards, les ferpens n'ont point du tout d'oreilles externes; les oifeaux ont le trou auditif couvert feulement de plumes; il s'en trouve cependant parmi ces bipèdes qui l'ont décou- vert , comme l'outarde , le cafoar , le coq-d'Inde , la pintade, OREILLE D'ANE. Voye^ Consoude grande. OREILLE DE COCHON ou CRÊTE DE COQ. Les Curieux don- nent ces noms à une coquille bivalve du genre des huîtres. Sa couleur eft d'un brun violet; fes deux valves font ornées du côté de l'ouverture, de replis anguleux qui s'emboîtent très - exadement les uns dans les autres. Voye\^ Crête de Coq. On donne aufti le nom ^oreille de cochon à un murex allé ; voye^^ MuREX. O R E 503 OREILLE D'HOMME. rqy^{ Cabaret. OREILLE DE JUDAS. Foye^ au mot CHAMPIGNON, OREILLE DE LIEVRE. Toy^^ Perce-feuille vivace, au mot Perce -FEUILLE. OREILLE DE MERouORMIER, halïods, C'eftun coquillage uni- valve , fait en baffin ovale , contourné , dont les fpires font applaties & fort larges, & la bouche extrêmement grande & évafée. Ce coquil- lage fe trouve fur les côtes de la Bretagne , dans plufieurs autres parages de nos mers , & très-communément dans l'Inde , &c. Il elt très - fortement attaché aux rochers à fleur d'eau , & l'on a beau- coup de peine à l'en détacher, ainfi que le lépas. L'ormier a une forte de reflemblance avec l'oreille d'homme. M. (rAr^mvilUàS.\.Q^\ç. l'animal meurt dès qu'il eft détaché du rocher: fa chair efl jaunâtre , & l'on en mange. Cet Auteur dit aufli qu'il vide fes excrémens par les trous qui font fur la fuperficie de fa coquille. A mefure que l'animal grandit, il fait un nouveau trou à fa coquille , & en ferme un autre : on voit de ces coquilles qui ont deux trous , d'autres en ont communément fix , fept ou huit. Ces trous font difpofés près de la lèvre gauche ou bour- relet fur une ligne courbe , cependant parallèle à la longueur de la co- quille. Les trous qui ont été bouchés, paroiffent toujours fous la forme de mamelons. M. Adanfon dit en avoir compté jufqu'à cinquante. Lorf- que l'oreille de mer efl en marche , fon pied déborde beaucoup l'étendue de la coquille , qui efl revêtue en fon fommet de quelques fpires , dont une feule efl très-apparente: fa couleur efl affez variée; il y en a d'un cendré noir , de vertes , de tachetées de vert & de brun & d'une forme longue, de rougeâtres, avec une très-belle nacre en dedans, dont la couleur pafTe alternativement du blanc au vert, du vert au violet mêlé de pourpre , en un mot, toutes les différentes couleurs de l'arc-en-ciel, fuivant les différens afpe£ls fous lefquels on la regarde. La furface exté- rieure de la coquille efl coupée par un nombre infini de filions creufés légèrement dans les unes, profondément dans les autres , ce qui forme des flries tantôt longitudinales en vive-arête , tantôt tranfverfales , ondu- leufes & rabattues toutes d'un même côté en forme de feuilles roulées, & qui vont, en prenant la courbure d'un demi-cercle, fe répandre fur toutes les parties du bord droit de la coquille , où ils fe perdent. Les fpires qui paroiffent en relief en dehors, font en creux en dedans. Ces coquilles ont communément trois pouces de longueur, deux pouces de largeur ôc environ un pouce de profondeur. La lèvre droite efl courbée 504 O R E en arc , mince dans les jeunes , épaifTe dans les vieilles. La lèvre gauche,^ au contraire, eft épaifle , repliée comme un large bourrelet au-dedans de la coquille, & nacrée comme elle: on trouve auffi de ces coquilles plus alongées, d'autrefois plus courtes qu'ovales. Le nombre des fil- Ions , comme des trous , augmente avec l'âge ; on compte quelquefois dans les grandes & vieilles oreilles de mer neuf trous ouverts , & cent cinquante-quatre filions ; tandis que les jeunes n'ont fouvent que trois ou quatre trous & cinquante filions. Il y a aulfi des oreilles de mer fans trous, on les nomme oreilles de Venus. Les vieilles d'entre toutes ces fortes de coquilles font prefque toujours couvertes d'un limon gras ÔC verdâtre , ou enveloppées d'une croûte pierreufe qui les défigure; il n*eft pas rare d'en voir qui font chargées de glands de mer : il faut les en dépouiller pour découvrir leur couleur naturelle , qui eft un fond orange ou rouge marbré de blanc; le milieu de la partie nacrée eft fou- vent furfemé d'efpeces de loupes de perles. On emploie les plus com- munes de ces coquilles, à caufe de leur nacre , à décorer les grottes ÔC ies cafcades. M. Adanfon dit qu'il y a peu de coquillages dont l'animal foit aufîj varié pour la couleur : tous les rochers de la côte du Sénégal nourriflent, dit il, une grande quantité de ce coquillage; les Nègres en mangent beaucoup. OREILLE DE MIDAS. Nom donné à une coquille de la farnilU des Buccins à bouche entière dépourvue de queue; fa bouche efl ordi- nairement couleur de chair , garnie d'une ou deux dents , & de forme approchante de celle d'une oreille ; étant dépouillée , toute fa robe efl couleur de chair pâle , fafciée de blanc : cette coquille efl commune en différens parages d'Amérique. Voye^ Buccin. OREILLE D'OURS ou AURICULE , auricula urfi. C'eft une des plantes les plus agréables , par la variété de fes efpeces , la beauté des couleurs , l'odeur fuave de fes fleurs , & par la durée de î^s bouquets. On contemple , avec plaifir , la richeffe du pinceau de la Nature , fur un théâtre garni des efpeces de ces plantes. Ces fleurs méritent, avec raifon , les foins de l'Amateur de la belle nature. L'oreille d'ours eft une plante dont les feuilles font longues de deux à trois pouces, polies, graffes, tantôt dentelées, tantôt entières, ôc d'un goût amer; le nom de cette plante lui eft venu de la reffemblance de fes feuilles avec l'oreille d'un ours. Du milieu de fes feuilles s'élèvent des O R E Ç05 <îes tîges qui foutiennent en leur fommet des fleurs en forme d'un tuyau évafé en entonnoir à pavillon, & découpé en lîx ou fept parties. Ces fleurs varient en couleur fuivant les efpeces. Les Amateurs les diftinguent en trois claffes , Voreille d'ours pure , la panachée & la biiarre. La pure eft celle qui n'a qu'une couleur , comme rouge , cramoifi, violet, pourpre , &c. Les jaunes & les blanches font des efpeces dégénérées : on préfère les pures , parce qu'elles font grandes , plus étoffées , plus veloutées. Les panachées ont leurs parti- fans , on exige que leurs panaches foient nets ; les panaches blanc de lait & d'un jaune doré , font les plus beaux. Les bizarres ont diverfes couleurs oppofées , agaçantes , comme le blanc au noir dans le même fleuron. Le caradere de la belle oreille d'ours, eft d'avoir la fleur ronde, l'œil grand , rond, net, n'anticipant point dans la couleur ; que les piftils foient placés à fleur de l'œil , le rempliiTent & le furpaflTent : les Curieux exigent encore d'autres qualités qu'il feroit trop long d'ex- pliquer. Les oreilles d'ours eftimécs les plus belles , font toutes fimples; celles qui font doubles n'ont point l'œil , qui efl la principale beauté de cette fleur, & ne fe foutiennent pas. Un point eflientiel dans la culture des fleurs, efl: d'approprier la nature du fol à l'efpece de fleur : c'efl de la Nature qu'il faut apprendre l'expolition , & l'efpece de terre dans la- quelle elles peuvent fe plaire. L'oreille d'ours efl une plante humide , montagneufe , & qui aime l'ombre : il lui faut une terre qui réponde à fon tempéramment, &: qui conferve toute fa fraîcheur. La terre la plus appropriée à cette plante , efl un mélange de terre de taupinière , de curures de rivières ou de foffés de prés , avec un peu de terreau de fumier de cheval ou de vache. Il efl efTentiel , lorfqu'on empotte une plante , de ménager l'écoulement des eaux fuperflues ; c'eft pourquoi il faut mettre au fond du pot une écaille d'huître fur le trou. La terre des oreilles d'ours ne demande à être re- nouvellée que tous les trois ans; plus fouvent, on courroit rifque d'a- voir de médiocres fleurs , tant la nature des alimens influe fur la flrufture organique. On peut faire cette opération au commencement de Mars, ainfi que celle de les œilletonner. On fépare, dans la longueur de toute la racine fur les côtés , les œilletons avec le doigt ou avec un couteau de buis ; la tige principale en porte des fleurs plus belles & mieux nourries : on élevé ces œilletons féparés , & ils donnent les mêmes fleurs que la tige principale. Le Fleurifle attentif enduit la bleflîire avec la Tome IK Sff 50^ O R E térébenthine de Venife , qui empêche l'eau de pénétrer & de pourrir îa racine. On laifTe fleurir ces plantes dans un endroit où il y a très-peu ou point de foleil , parce qu'il en brûleroit les nuances. Le goût du Fleu- rifte fe fait remarquer dans l'art de difpofer les fleurs fur fgn théâtre , afin de les faire contrafler, & d'en relever les beautés par leur oppofi- tion. C'efl dans le temps de la floraifon, que l'Amateur apperçoit que les panachées ou anciennes bizarres dégénèrent, ce qui fe reconnoît quand elles deviennent entièrement de la couleur dont elles panachoient, La beauté altérée ne reviendra plus. Les pots doivent être confervés à l'ombre , même lorfque la fleur eft palTée : le Fleurifîe ne doit jamais épargner les plus petits foins. La meilleure manière de les conferver , €Û de les mettre dans une ferre ( froide ou non ), parce que ces plantes ne craignent pas la gelée. Il faut dépotter tout œilleton , dont les feuilles fe recoquillent , afin de le garantir de la pourriture , dont c'efl une marque infaillible : on y remédie en coupant le navet jufqu'au vif ( Quoique les oreilles d'ours réufliffent affez bien dans les pots , j'ai ce- pendant obfervé, dit M. Bourgeois , qu'elles profperent beaucoup mieux, & qu'elles viennent plus grofles & plus belles en pleine terre , pourvu qu'on obferve de les planter dans des plate- bandes , qui foient un peu humides , & qui n'aient , s'il eu pofTible , que le foleil levant. On doit auiîi faire attention , pour avoir de belles oreilles d'ours, de ne îaifTer à la plante ni trop, ni trop peu d'œilîetons. On en doit laifier au plus cinq à fix, & jamais moins de quatre ). Lorfqu'on veut avoir de belles fleurs , il faut femer , & fe fier à la Nature , qui efl inépuifable dans (es couleurs , fur-tout fur les oreilles d'cflirs, dont les efpeces ne fe repro- duifent jamais fans variétés. Il faut faire choix, pour femence , de la graine des plus belles fleurs , des plus grandes , des plus veloutées & des plus foncées en couleur , avoir foin que la graine ait toutes les qualités requifes de maturité. Il faut femer en Décembre , dans des terrines , fur une terre préparée, ainfi que nous l'avons dit, & recouvrir la graine avec une ferre feche tamifée , environ de l'épaifTeur d'un liard : il efl efTentiel de ne les arrofer qu'avec un arrofoir très-fin. Dès le mois d'Avril la graine commence à lever ; lorfque le plant a fix feuilles, on le repique ; & au bout de deux ans l'Amateur choifit dans le noriibre de celles que la Nature a pris plaifir à embellir. Il efl: , dans la culture de ces fleurs & des autres que l'on cultive par prédiledion , mille petits foins qui font le plaifir de l'Amatewr. C'efl vraiment dans la culture d,=s '"' O R E 507 fleurs Se des fruits que Ton admire Tempire que l'Auteur de îa Nature a accordé à Thomme fur ces individus. Avec quelles délices ne voit-il pas paroître par fes foins de nouvelles beautés inconnues jufqu'alors ? Par combien de titres l'oreille d'ours mérite-t-elle d'être chérie ! elle le dif- pute à la tulipe , par fon brillant , par fon étoffe veloutée : elle a de plus une odeur fuave , un air fin. Sans vouloir relever fes attraits par la com- paraifon avec les autres fleurs cultivées par les Curieux , deux mots font fon éloge : elle fleurit ordinairement deux fois par an , & fon feuil- lage eu toujours vert. Vous pouvez confulter dans ce^pays un traité fort détaillé fur la culture de Corcilk d'ours. Il efl imprimé à Paris , en 1745, ^" ^ ^'^'^' ^-^-i^* L'oreille d'ours efl \àfanïckdis Alpes : fes feuilles font vulnéraires & bonnes pour les coupures. UoreilU (Tours de Mycone , dont on fe fert plus communément en Mé- decine , eft une forte de petit bouillon blanc qui croît naturellement fur les Pyrénées & en Catalogne , fur le mont Ferrât & autres lieux ombra- geux. Ses racines font auflî délices que des cheveux; fes feuilles font éparfes & courbées fur terre, ayant à-peu-près la figure de celles de îa bourrache , un peu découpées & chargées de poils. 11 s'élève d'entre ces feuilles deux ou trois petites tiges , hautes de huit pouces , rondes , folides , pleines de fuc, rougeâ très & d'un goût aflringent. Les fleurs font bleues , à une feule feuille difpofée en rofe. A cette fleur pafTée fuccede un petit fruit ovale qui fe divife en deux loges , remplies de femences menues , anguleufes. Cette plante prife en décodion eft efli- anée propre pour la gravelle : of! en fait difliller une eau dont les Ef^ pagnols fe fervent pour la toux; & par cette raifon ils ont donné à cette plante le nom deyerva tujfcra. OREILLE DE RAT. Foyci Piloselle. OREILLE DE SOURIS, myofotls incana rcpens. C'efl: un genre de plante qui diffère de la morgeline par la figure de fon fruit , lequel reffemble à une corne de bœuf tronquée. Celle dont on cite ici le nom efl originaire des pays chauds. M. de Tournefon en a cité de pluiieurs efpeces. L'oreille de fouris la plus ulitée croît aux lieux montagneux , notamment fur les Alpes ; fa racine efl fibrée ; fes tiges qui font couchées à terre , font velues & garnies de petites feuilles lanugineufes , faites comme des oreilles de fouris : fa fleur eil à plufieurs feuilles difpofées en rofe , il lui fuccede une çapfule qui a la figure de la corne d'un Sff %, joS O R E O R F bœuf, & qui renferme plufieurs femences menues , arrondies : cette plante eu. aftringente , rafraîchiffante , & fa racine efl eftimée propre pour les fiftules lacrymales. II y a une efpece d'oreille defouris à feuilles & à fleurs blanches , avec laquelle on peut faire dans les jardins des tapis foyeux , argentins , de la plus grande beauté. OREILLERE. f^oye^ Perce-oreille. OREILLETTE, ^oyei Cabaret. ORFRAIE, Briseos, Ossifrageou OssiFRAGUE;oifeau nommé aufli grand aigle de mer ^ a'quila marina. Cet oifeau eft à-peu-près aufîi grand que l'aigle ; il paroît même avoir à proportion le corps plus long , mais fes ailes font plus courtes , car l'orfraie a trois pieds &: demi de longueur depuis le bout du bec jufqu'à l'extrémité des ongles , & en même temps il n'a que fept pieds de vol ou d'envergure ; tandis que le grand aigle qui n'a communément que trois pieds deux ou trois pou- ces de longueur de corps, a huit & jufqu'à neuf pieds de vol. L'orfraie efl remarquable par fa grandeur, & reconnoifTable, i°.parla couleur Se la figure de fes ongles , qui font d'un noir brillant & forment un demi- cercle entier; 2°. par les jambes qui font nues à la partie inférieure , & dont la peau efl couverte de petites écailles d'un jaune vif; 3°. par une barbe de plumes qui pend fous fon menton ; ce qui lui a fait donner encore le nom à' aigle barbu. Cet oifeau fe tient volontiers près des bords de la mer, & afiez fouvent dans le milieu des terres à portée des lacs , des étangs & des rivières poifTonneufes ; il n'enlevé que le plus gros poifTon , mais cela n'empêche pas qu'il ne prenne du gibier ; & comme il efl très-grand & très-fort , il ravit & emporte aifément les oies &les lièvres , & même les agneaux &: les chevreaux. On obferve dans l'or- fraie une particularité finguliere : l'ouverture de la pupille qui d'ordi- naire n'efl recouverte que par la cornée , l'efl encore dans cet oifeau par une membrane extrêmement mince , qui forme l'apparence d'une petite taie fur le milieu de l'ouverture de la pupille ; la partie circulaire qui environne la pupille efl tranfparente , au lieu que dans les autres oifeaux, elle efl opaque & de couleur obfcure. Il réfuîte de cette con- formation , que cet oifeau porte fur le milieu de tous les objets qu'il regarde une tache ou un petit nuage obfcur , & qu'il voit mieux de côté que de face ; cependant on ne s'apperçoit pas par le réfultat de fes allions , qu'il voye plus mal que les autres oifeaux ; il efl vrai qu'il ne s'éleve pas à beaucoup près à la hauteur de l'aigle , qu'il n'a pas non plus le vol aufli rapide , qu'il ne vife ni ne pourfuit fa proie d'auffi loin : ainfiil eft probable qu'il n'a point la vue aufli nette ni aufîî perçante que les aigles ; mais il efl fur qu'il ne l'a pas , comme les chouettes , offuf- quée pendant le jour, puifqu'il cherche & ravit fa proie auffi bien le jour que la nuit , & principalement le matin & le foir. Les oifeaux de nuit ne voient mal ou point du tout pendant le jour , que parce que leurs yeux font trop fenfibles , & qu'il ne leur faut qu'une très-petite quantité de lumière pour bien voir. Leur pupille eft parfaitement ou- verte , & n'a pas la membrane ou la petite taie qui fe trouve dans l'œil de l'orfraie. La raifon qui a déterminé Arïfiou , dit M. de Buffon , à placer l'orfraie avec les oifeaux de nuit , c'eft qu'en effet il pêche & chaffe la nuit comme le jour ; il voit plus mal que l'aigle à la grande lumière ; il voit peut-être auffi plus mal que la chouette dans l'obfcu- rité ; mais il tire plus de parti , plus de produit que l'un ou l'autre de cette conformation fmguliere de fes yeux , qui n'appartient qu'à lui , & qui eft auffi différente de celle des yeux des oifeaux de nuit , que des oifeaux de jour. On croit que Vorfraie s'unit au balbuiard ; ce qui rend croyable cette poffibihté du mélange & du produit du balbuzard & de l'orfraie , c'efl la conformité des appétits , du naturel & même de la figure de ces oifeaux; car quoiqu'ils différent beaucoup par la grandeur, l'orfraie étant de près d'une moitié plus groffe que le balbuzard , ils fe reffemblent affez par les proportions , ayant tous deux les ailes & les jambes courtes en comparaifon de la longueur du corps , le bas des jambes & les pieds dénués de plumes : tous deux ont le vol moins élevé & moins rapide que les aigles : tous deux pèchent beaucoup plus qu'ils ne chaffent , & ne fe tiennent que dans les lieux voifins des étangs & des eaux abondantes en poiffon .• tous deux font affez communs en France & dans les autres pays tempérés: ces efpeces font affez voifmes pour pouvoir fe mêler ; & des raifons d'analogie perfuadent à M. d& Buffon que le mélange efl fécond , & que le balbuzard mâle produit avec l'orfraie femelle des orfraies; mais que la femelle balbuzard avec l'orfraie mâle produit des balbuzards , & que ces bâtards , foit orfraies, foit balbuzards , tenant prefque tout de la nature de leurs mères , ne confervent que ^elques carafteres de celle de leurs pères , par lefquels carafteres ils différent des orfraies ou balbuzards légitimes. Par exemple, on trouve quelquefois des balbuzards à pieds jaunes ôc des orfraies à 510 O R G pieds bleus , quoique communément le balbuzard les ait bleus, & For- fraie les ait jaunes. Cette variation de couleur peut provenir du mé- lange des deux espèces. Comme cet oifeau ne pond que deux œufs par an , que fouvent il n'élevé qu'un petit , l'efpece en eft peu nom- breufe ; mais elle paroît commune aux deux Continens. Foye^^ au mot Fresaie. ORGANE. Partie du corps animal qui efl: capable d'exécuter telle aftion ou telle opération. Les fens extérieurs font des organes , au moyen defquels l'animal efl affefté lorfqu'il touche , qu'il entend, qu'il voit, qu'il flaire ou qu'il goûte. Les principaux organes des plantes font les moyens ou les inflru- ïTiens qui les font agir , & qui leur portent la nourriture nécefîaire. Ainfi l'organifation efl l'arrangement des parties qui conflituent les corps ani- més , & dont le premier principe fe trouve dans les femences. Voy&i^ les articles ANIMAL , PLANTE & MOLÉCULES ORGANIQUES. ORGANO. Foyer^ à V article RoUGET. ORGANSIN. Voye^^ à r article Ver a soie. ORGE, hordeum. Les Botanlfles font mention d'un nombre affez con- fidérable d'efpeces ou de variétés d'orges ; mais nous ne parlons ici que de celles que l'on cultive communément, L'orge , comme toutes les autres plantes dont la tige efl en tuyau, a beaucoup de racines fîbreufes; fa tige a deux à trois pieds de hauteur, &; efl garnie de cinq à fix noeuds , à chacun defquels nalffent des feuilles afifez femblables à celles du chiendent, & verdâtres : fes épis font corn-' pofés de paquets de fleurs garnies en leur bafe de filets barbus, & aux- quelles fuccedent des graines longues, pâles ou jaunâtres , farineufes , pointues & renflées en leur milieu : un même grain poulTe plufieurs tuyaux ; chaque tuyau qui efl penché vers la terre, porte en fon épi quelquefois vingt grains fur chaque côté. Il y a,une efpece d'orge qu'on peutappeller orge d'hiver, parce qu'elle fe feme en même temps que le froment ; on la nomme en françois orge çarrè, parce que les grains, qui font rangés fur quatre lignes parallèles , donnent une forme carrée à l'épi; on la nomme ^.wKi efcourgeon. Les grains en font fort gros. Les BrafTeurs font ufage de ce grain , foit feul , foit mélangé avec du froment pour faire la bierre : c'efl Vkordeurn polyjlicum hibemum. On peut , avec l'efcourgeon, faire des prés artificiels , on le coupe O R G 5,t en vert , on le donne aux chevaux 6c aux âneffes dont on tire le lait pour les maladies : on pourroit en faire une féconde coupe fans perdre fa moiffon , qu'on récolteroit feulement un peu plus tard; mais pour l'ordinaire on laboure la terre , & on y feme des hc.ricots ou des pois." Il eft bon d'avertir ici avec M. Duhamel, que l'herbe de fromenî: donnée en trop grande quantité aux befliaux, les rend malades. L'orge carré eft. excellent pour nourrir la volaille ; ce grain eil d'im grand fecours pour les pauvres dans les années de difette , quoiqu'il fourniffe une nourriture afîez grolîiere : il a l'avantage de mûrir de bonne heure. Il y a d'autres efpeces d'orge qui font du nombre de ces grains qu'on appelle mars , parce qu'on ne les feme que dans le mois de Mars : on les appelle orge avancé , hofdeum poLyflicum vernum ; il y a auffi une de ces efpeces d'orge qui eft carrée. L'orge le plus commun , dont les épis font plats , eft celui qui fe cultive en plus grande quantité dans plufieurs provinces; il grene beaucoup. Il y a encore une autre efpece que les payfans nomment ris, parce que les grains en font blancs, & qu'ils rendent peu de fon. Les épis d'orge font remarquables par leur longue barbe. Toutes les efpeces d'orge produifent quantité de grains quand ort les feme dans un bon fonds bien cultivé & bien fumé : elles fe plaifent mieux dans les terres douces que dans les argilleufes. Il y a des pro- vinces où cette récolte eil: fi importante , qu'on y cultive les orges avec prefque autant de foin que les fromens. En Suéde l'orge fait la femaille ordinaire ; il en eft de même aux Alpes , dit M. Haller : la ré- colte eu. plus riche que celle du froment , & elle eft fouvent au dodé- cuple ( douze fois autant ) de la femence. On a mandé de Berlin qu'un grain d'orge, mis au printems de l'année 1763 dans une terre de jardin bien fumée , poufla d'abord une touffe d'herbe compofée de plufieurs tiges , que le Cultivateur ( M. Kret^chmer ) fépara du jet principal pour les tranfporter dans les environs : chacune de ces tiges ainfi tranfplan- tées, forma , comme la première, une nouvelle touffe; elles furent marcotées de même, & les pieds qu'on en tira formèrent à leur tour de nouvelles marcotes, au moyen de la tranfplantation ; de forte que toutes ces marcotes s'étant multipliées fuccelfivement pendant l'efpace de feize à dix-huit mois, un feul grain d'orge fe trouva avoir produit au-delà de quinze mille épis. On parle d'une trouffe d'orge que les Pères de la Doftrine Chrétienne de Paris confer voient, & qui étoit 512 O R G compofée de deux cents quarante-neuf tuyaux , aux épis defquels on comptoit plus de dix-huit cents grains. L'orge mêlé avec le froment fait de très-bon pain , mais feul il en fait un qui n'efl pas fi eftimé ; il n'efl bon que lorfqu'il efl frais , ce qui dure fort peu ; cependant les pauvres s'en nourriffent dans certains pays : il ne convient qu'à ceux qui s'exercent à de rudes travaux, parce qu'il eft difficile à digérer. L'orge n'a pas les mêmes vertus que le fro- ment, qui échauffe ; mais de quelque manière qu'on prépare l'orge , il rafraîchit. On dépouille l'orge de fa peau , &. on en fait ce qu'on ap- pelle Vorge mondé ou orge grue, de même qu'on prépare l'avoine pour en faire du gruau : ces nourritures font excellentes pour les perfonnes infirmes , & qui ont quelque maladie qui attaque la poitrine. Les tifanes d'orge mondé font très-bonnes pour appaifer l'ardeur des fièvres bi- lieufes. L'orge eft fort recherché pour faire de la bierre : cette liqueur , nommée autrefois cervoife , tient le milieu entre le vin 6i l'eau. Les peuples du Nord en font un grand ufage ; l'orge leur eft aufii néceffaire pour faire de la boiffon , que le froment pour faire du pain : ils font dans l'habitude de n'employer dans la compofition de leur bierre que du malt, c'efl-à-dire , du grain germé par une forte de fermentation faite à l'air libre , immédiatement après avoir été macéré pendant deux jours dans une cuve: le grain commençant à germer, on le defieche , on le torréfie légèrement, enfuite on l'écrafe à la meule, puis on l'arrofe d'eau chaude , on agite le tout , &c. on ajoute du houblon & du levain , ou de la lie de bierre, & l'on procède à une bonne fermen- tation. On fubflitue quelquefois le froment & l'avoine à l'orge pour faire le malt , dont le négoce efl en Angleterre d'une étendue confidé- rable ; on eftime qu'il s'en confomme dans ce pays quarante milliers de boiffeaux. Ce calcul ell fait d'après le produit de l'impôt appelle malt-tax. En quelques pays on nomme l'orge pain de difctte. Du temps de Pline, les Gladiateurs Athéniens qui avoient coutume de fe nourrir d'orge , étoient furnommés Hordearii. Le ma^a ou mafTe-huile des An- ciens, étoit compofé de farine d'orge rôti , mêlée &: pétrie avec quel- que liqueur, comme de l'eau, de l'huile, du lait, du vin cuit, du miel, &c. On faifoit aulîi une bouilUe d'orge appellée /o/i^/zr^. L'or- geat , dont on fait tant d'ufage pour défaltérer agréablement , doit avoir O R G O R I 513 avoir pour bafe une décoûion d'orge : l'orgeat eft la crème d'orge des Anciens. On prépare en Allemagne & en Flandres un orge réduit en des grains ronds très-blancs , de la grofleur d'un grain de millet ; c'efl: ce qu'on appelle orge pcrU y parce qu'il reffemble grofliérement à des perles; on le fait avec l'orge mondé que l'on met fous une meule fufpendue; le grain étant brifé en partie , on paiîe au crible ce qui a échappé à la meule. Les Allemands en font beaucoup plus d'ufage que nous : ils en mangent en bouillie , au lait , & quelquefois avec du bouillon de viande. On peut confulter la Lettre fur l'ufage d'une nou- velle découverte de pâtes , de firops & de tablettes d'orge, par M, de Chamoufet , à Paris , chez Barbou. ORGE PETIT ou PETIT ORGE. Voyc?^ Cevadille. ORGUE DE MER, ou TUYAU D'ORGUE, tulmUda marina pur^ purca. Efpece de vermiculaire rouge ou d'un beau pourpre ( nous en avons de blanc ), du genre des vermiffeaux tubulaires de mer. L'arran- gement de ces tubes comme tedacées eft admirable ; chaque ver eft l'architede de fon tuyau , & ce tuyau prefque cylindrique , dur & plus ou moins droit , eft adhérent à celui de fon voifin par le moyen d'une fubilance qui leur eft commune , & qui fert à les groupper & à joindre leurs différens étages. Ainfi l'orgue de mer , dont l'animal n'eft pas bien connu , eft compofé de tubes réunis en maffes , adhérens les uns aux autres par des lames plates , minces, circulaires, extérieures, entourant chaque tuyau & pofées irrégulièrement , quelquefois ces tuyaux font collés par leurs côtés. L'orgue de mer fe pêche dans les Moluques. On prétend que les Naturels des Moluques , notamment à Amboine , ont une certaine horreur de cette efpece de tubulaire marin ; ils ne cueil- leroient pas le fruit d'un arbre auquel on auroit attaché un de ces tuyaux d'orgue , ils craindroient, en touchant ce fruit , d'être attaqués d'une ébullition par tout le corps. Superftition qui a pris naiflance dans quelque efprit fimple , & qui a fait donner à ce corps le nom de pierre magique ou àçs magiciens. Les Habitans de Java s'en fervent comme d'un diuré- tique. Foyei maintenant r article VeRMïSSEXVX DE MER. ORICHALQUE. Voyeiàt article Cuivre de Corinthe. ORIGAN, origanum. Plante dont les Botaniftes diftinguent avec Tournefort quatorze efpeces : nous en citerons deux qui font en ufage , Tom& IF, Ttt ÇÎ4 O R ï &qiii{e trouvent dans notre pays; favoir, l'origan commun & îe petit origan. 1**. L'Origan commun ou grand Origan, ou la Marjolaine d'Angleterre sauvage & bâtarde, onganumvulganfpontan&um , eft une plante qui croît non-feulement dans les pays chauds , mais aufli dans les pays froids , comme en Allemagne , en Angleterre & en France : on la trouve fréquemment aux lieux fecs &: expofés au foleil , dans les brouflailles , le long des haies , & principalement fur les collines & les montagnes; fes racines font ligneufes , filamenteufes, traçant oblique- ment en terre : elles jettent plufieurs tiges à la hauteur de deux pieds ou environ , dures , carrées , velues : fes feuilles naiffent des nœuds des tiges , oppofées ( les plus grandes reflemblent à celles du calament vul- gaire , & les plus petites à celles de la marjolaine ) , velues, odorantes , d'un goût acre & aromatique : fes fleurs paroiflent en été , elles font comme en parafol aux fommités des tiges , dans des épis grêles & écail- leux, qui forment de^o^ bouquets : chaque fleur efl: en gueule & d'un rouge blanchâtre ; il leur fuccede des femences très-menues & arrondies. Cet origan varie beaucoup parias feuilles & par fes fleurs. Tragus ob- ferve que ces fleurs font de trois fortes , l'une ponceau , l'autre rouge- blanchâtre , & la dernière toute blanche. L'origan commun qui fe trouve en Efpagne , efl: préférable au nôtre. En Suéde les fommités d'origan font ufitées pour teindre les laines en rouge & pourpre. 2°, Le PETIT Origan ou la petite Marjolaine sauvage, ongw num minus. Cette plante efl aflez rare , excepté dans la forêt d'Orléans , où elle eft abondante : fa racine efl ligneufe , roufsâtre & fîbreufe : fa tige e(l petite , ronde , haute de fix à fept pouces , rameufe : elle reflemble -d'ailleurs à l'efpece précédente , même pour les vertus^ L'origan efl diurétique , hyftérique , flomacaî & bon pour la tête : on en prend en infufion thélforme dans l'afthme & dans la toux violente : il efl utile dans les indigeftions , les rapports aigres & les vents, même pour augmenter le lait aux nourrices en facihtant la digeflion , & faifant faire un chyle plus abondant. Son huile efl"entielle efl excellente contre la douleur des dents caufée par la carie ; on tamponne le trou de la dent avec un peu de coton trempé dans cette huile , & la douleur cefl!e bientôt. On emploie extérieurement cette plante dans les lave-pieds & dans les demi - bains qu'on prépare contre les vapeurs 6c les pâles O R î O R M 51^ couîeiifs , contre la paralyfie & les rhumatifmes , notamment pour celui du cou , appelle torticolis. Selon M. Bourgeois , l'origan eftaulll un excel- lent aromatique qu'on fait entrer dans la plupart de fomentations qu'on met en ufage contre la foibleffe des nerfs , les contufions , les enflures & autres accidens qui font la fuite de quelque coup , de chûtes, d'en- torfes, &c. ORIGNAC , ou ORIGNAL. Efpece d'élan de l'Amérique. Foye^ Elan. ORISEL. Voyei Sereque, ORME, ulmus^ eft un grand & gros arbre de futaie, connu auflî fous les noms à!ormeau , ormilU, & arbre au pauvre homme. On dlflingue plufieurs efpeces d'ormes qui différent par les feuilles & par la nature de leur bois ; mais il y en a beaucoup qui ne font que des variétés , ainft qu'on l'éprouve par la culture de la graine d'orme , d'où il naît des arbres dont quelques-uns ont des feuilles aufîi petites que l'ongle , & d'autres plus larges que la main ; les uns ont des feuilles rudes , d'autres molles. On dit vulgairement que l'orme à larges feuilles eft femelle , & que celui à petites feuilles eft mâle , mais c'eft improprement. Voici la def- cription de l'orme ordinaire ou orme franc : fa racine eft grofle , dure , & trace au loin d'un côté & d'autre dans la terre : fon tronc eft fortrameux, affez droit, couvert d'une écorce crevaflee, rude , de couleur cendrée , rougeâtre en dehors , blanchâtre &fouple en dedans : fon bois eft robufte, dur, jaunâtre , tirant un peu fur le rouge; fes branches étalent ou s'éten- dent beaucoup : hs feuilles font aft'ez larges , ridées , veineufes , oblon- gués ; dentelées en leurs bords , pointues , verdâtres & nerveufes : fa fleur qui naît avant les feuilles au fommet des rameaux , eft un enton- noir à pavillon découpé : à cette fleur fuccede un fruit membraneux qui contient une femence blanche , douce au goût ; les Latins appellent cette %rd^mç famara. L'orme fournit une exempfe merveilleux de la fécondité en fait dé graines feulement. Un orme peut aifément vivre cent ans , & fans le fecours de l'art , il peut rapporter pour une année de fécondité moyenne beaucoup plus de 33000 graines, ce qui donne pour les cent années de la vie de l'orme 3,300,000 graines provenues d'une feule graine. Voyez VHiJloire de t Académie des Sciences^ année lyoo. L'orme croît dans les champs & dans les plaines , en terre grafle & humide , proche des rivières : il fleurit en Mars ôc Avril. C'eft un arbre. Ttt z 5i<^ O R M aflez long à venir; la voie la plus courte eft de l'élever de rejetons qui fortent de (es racines en pépinière. Le temps le plus favorable de le planter eu au mois de Février : on peut greffer en écuffon à œil dormant les efpeces qu'on aime davantage , fur celles dont on fait moins de cas. Comme ces arbres fe prêtent & fe plient à toutes les formes , ils font très-propres pour faire des bofquets , des quinconces , des falles de verdure, des allées & de grandes avenues qu'on appelle ormayes ou ormoies , & dont l'ombrage eft fort fain tant pour les hommes que pour le bétail. Nos Anciens avoient ordinairement une ormaie derrière leur maifon pour fervir d'abri , de vue , de promenade , & pour leur fournir le bois de chauffage & de charronnage dont ils avoient befoin. L'orme à petites feuilles convient le mieux pour les paliffades. En Italie où l'on n'a que des vignes hautes , on plante des ormes pour les accoter & les foutenir : c'efl ce que les Latins ont nommé ubnus maritUy comme qui diroit orme marié avec la vigne. On dillingue onze efpeces principales d'ormes: i°. Vorme champêtre, à feuilles panachées ou non panachées; a°. V orme de montagne ; 3°. Vorme teille ; 4°. Vorme à feuilles lijfes plus ou moins panachées. 5°. \e petit orme à feuilles jaunâtres ; 6°. \ ormeau Hol- lande à feuilles quelquefois panachées ; 7°, \ormc £ Angleterre à feuilles étroites ; 8°. ^orme de France à graine étroite ; 9^. Vorme à écorce blanche ; 10°. Vorme de Virginie; 1 1°. Vorme de Sibérie , c'eft un orme nain. Il y a peu d'arbres forejftiers qui fouffrent auiîî facilement la tranfplan- îation que l'orme : on le peut tranfplanter avec fuçcès , même au bout de vingt ans. On prétend que l'orme reprend de fa nature fi aifément que des perfonnes ayant femé des -copeaux d'orme dans une pièce de terre labourée , il en a pouffé une grande quantité de ces arbres. Bradley qui ne nie pas la poffibilité du fait , dit dans {qs obfervations phyfiques fur le jardinage , qu'il y a certainement des cas où des bourgeons , des feuilles , & même des racines fibreufes de plante , végètent & produi- fent des arbres. On a fait prendre racine à des feuilles d'orangers , qui ont pouffé des branches, des feuilles, des fleurs & du fruit, en les enfonçant à moitié en terre : on a fait la même chofe avec des feuilles de laurier thym. Revenons aux plants d'orme : on les place à quinze ou vingt pieds l'un de l'autre , dans des trous fort larges & peu pro- fonds. Lorfque l'orme a douze ou quinze ans , on peut en couper les branchages tous les cinq ans , pour en faire des fagots ; à trente ans ils produifent le double 6c au-delà à proportion de leur crue , & fi oa O R M 517 é'na beaucoup , on les ébranche par coupe réglée : depuis quarante ans jufqu'à foixante ils font dans leur force. On fait ordinairement avec le bois d'orme des moyeux , des efîîeux , des jantes , des flèches ô<: autres ouvrages de charronnage ; on en fait aufîi des canaux, des pompes , des moulins , les parties des vaiiTeaux qui font toujours dans l'eau , &c. On préfère Vorme tortillard , c'eft-à-dire qui eft plein de nœuds , un peu tortu & le plus dur pour faire les moyeux de roue. On débite ces pièces en grume , & on peut les laiffer ainfi deux ou trois ans fans craindre le ver ni la fécherefle. Les Menuifiers , les Carrolîiers & les Tourneurs font aufîi ufage de ce bois. L'on a obfervé que l'orme à feuilles très-larges , & qui ne pouffe point de rejets fur le tronc , ni fur les groffes branches , a le bois tendre & prefque aufîi doux que le noyer : l'autre efpece d'orme aufTi à larges feuilles , mais qui pouffe beaucoup de branches , efl tout rempli de nœuds : c'efl le plus recherché pour faire des moyeux de roue. Ray dit avoir vu en Angleterre plufieurs ormes de trois pieds de diamètre fur une longueur de plus de quarante pieds. Ce fameux Bota- tanifle rapporte encore qu'un orme à feuilles lifTes , de dix-fept pieds de diamètre au tronc , fur cent vingt pieds de diamètre à fa tête ou pomme , ayant été débité , fa tête feule produifit quarante-huit chariots de bois à brider , & que fon tronc , outre feize billots , fournit huit mille fix cents foixante pieds de planches : toute fa maffe fut évaluée à quatre-vingt-dix-fept tonnes. On a*vu dans le même pays un orme creux à-peu-près de même taille , qui fervit long-temps d'habitation à une pauvre femme qui s'y retira pour faire fes couches. On a des exemples d'autres efpeces d'arbres infiniment plus monflrueux. Voyc^^ h baobab au, mot Vais de singe. L'écorce de l'orme Se les feuilles font remphes d'un fuc mucilagî- neux & gluant , qui efl propre à la réunion des plaies. L'on emploie la déco(Sion de fes racines contre toutes fortes de pertes de fang : on trouve quelquefois fur les feuilles de l'orme , certaines vefîies qui s'en- flent jufqu'à la groffeur du poing , femblables en figure aux truffes ; elles contiennent une liqueur dans laquelle on voit nager des pucerons \erdd- tns. La liqueur s'appelle eau d'ormeau. Ces vefîîes ont été formées , dit Lémery , par des moucherons qui ont piqué les feuilles de l'orme au printems y & qui ont donné lieu au fuc de la feuille de s'étendre ; les pucerons qui font fortir de leurs œufs des moucherons , font comme 5i8 O R M O R N autant de mafques qui couvrent de nouveaux moucherons ( ceci n'eft n'ert pas tout-a-fait exa.Q , dit avec raifon M. Delcuie. Les pucerons qu'on trouve dans les veffies d'orme , font la vraie caufe de cette dilatation des feuilles : comme une partie des pucerons acquièrent des ailes , c'efl: peut-être ces pucerons ailés qu'on appelle ici des moucherons ; mais ils ne font pas tels en naiflant : peut-être M. Lémery a-t-il voulu parler des petits ichncumons ou cynips , dont les larves vivent dans le corps des pucerons , mais elles ne contribuent point à la formation des vefïies ) : ces veiîies font nuifibles à l'arbre , mais le baume qu'elles renferment eft très-bon pour les plaies nouvellement faites & pour les chûtes : on paffe ce baume naturel par un linge pour en féparer les pu- cerons. Voyei^ Us Mémoires de r Académie des Sciences , an. lyz^. Les Payfans d'Italie & de Provence y font infufer les fommités de mille- pertuis : la liqueur devient rouge & fe conferve plufieurs années , la plus vieille efl la meilleure. On prétend que les fleurs de l'orme font nuifibles aux abeilles , & fes graines aux pigeons ; mais fes feuilles font une excellente nourriture en hiver pour les moutons , les chèvres , ôc fur-tout pour les boeufs qui en font aufîi friands que d'avoine. Pour conferver ces feuilles , on coupe le menu branchage d'orme à la fin d'Août , & on le fait fècher au foleil. ORMIER ou HALIOTITE. Voye^ Oreille de mer. ORMIN , horminum verum , eft une plante que l'on cultive dans les jardins : elle a quelque rapport aveCla fauge , & plufieurs la confon- dent avec Vorvale. Voyez ce mot. L'ormin a une racine ligneufe & fibreufe ; fes tiges font hautes d'en- viron un pied , rougeâtres , carrées , velues & rameufes ; fes feuilles font oppofées & lanugineufes , peu odorantes & d'un goût légèrement amer : les fommités des branches font garnies d'un amas de feuilles pur- purines tirant fur le violet : fes fleurs qui fortent de l'aiffelle des feuilles, font en gueule , verticillées , de couleur purpurine & blanche ; il leur fuccede des capfules qui contiennent des femences arrondies : toute la plante eft déterfive , réfolutive & ftomachique. On diftingue aufîi l'or- min fauvage , horminum fylve (Ire latifolium verticillatum. Ses propriétés font les mêmes. ORNE. Nom donné à une efpece de frêne de l'Italie qui croît dans les forêts & fur les montagnes, & dont l'écorce eft lifle & roufsâtre, Foye^ les mets Frêne & Manne, O R N V9 ORNITHOGALLE ou CHURLE , ornlthogalum vulgan , eft une plante qui croît dans les haies & dans les blés. Sa racine , qui eft une bulbe en grappe , blanche & fîbreufe , eft empreinte d'un fuc vifqueux tirant fur l'amer ; on la mange en guife d'oignon dans les lieux où elle fe trouve : (qs feuilles reffemblent un peu à celles du gramen , elles font creufes & marquées d'une ligne blanche dans leur longueur. La tige eft haute d'un demi-pied , & porte en fon fommet plufieurs pédicules en manière d'ombelle , qui foutiennent des fleurs difpofées en rofe , ver- dâtres en dehors , blanches en dedans : il leur fuccede des fruits arron- dis , relevés de trois coins , & divifés intérieurement en trois loges qui renferment des femences noirâtres. En Médecine on fe fert de la racine d'ornithogale pour exciter les crachats & les urines. Il y a l'ornithogale jaune qui fleurit en Mars & Avril , quelques Curieux le nomment étoile Jaune ; fes fleurs font vertes en defllis , & d'un beau jaune par dedans ; elles font difpofées en bouquet & ont la forme d'une étoile ; l'ornitho- gale vert fleurit en été. L'ornithogale à bouquet furnommé par les Fleu- riftes dame cConie heures fait un très-bel effet dans les parterres , fes fleurs font larges & blanches; elle commence à s'épanouir à neuf ou dix heu- res ; elle l'eft entièrement vers les onze heures du matin. ORNITHOLITES. Nom que l'on donne à des parties d'oifeaux foffiles ou pétrifiées : tels que les becs , les ongles , les os , les œufs , les nids , &c. celles que nous avons toujours vues fous ce nom ne font que des empreintes ou des incruftations* ORNITHOPODE ou PIED D'OISEAU, ornhhopodlum.^UntQàont M. de Tournefort compte fix efpeces. Voici la principale, la grande, omithopodium majus, C'eft une plante qui croît dans les champs fablon- neux, tant avant qu'après la moiffon, fur les collines , dans les prés arides & expofés au foleil , le long des chemins dans les fables. Sa racine eft petite, blanche, fimple, fîbreufe, & un peu tuberculaire ; elle pouffe plufieurs petites tiges grêles, rameufes , prefque couchées à terre & velues; fes feuilles font oppofées; {t^ fleurs font petites, legumineufes & jaunâtres ; il leur fuccede des goufl^es courbées en fau- cilles, & réfléchies en haut, compofées chacune de cinq , fix ou fept pièces attachées bout à bout , & terminées par un ongle pointu. Ces lihques naifTent deux ou trois enfemble , difpofées comme les griffes d un oifeau : on trouve dans chacune de leurs pièces une femence arron- die comme celle du navet. 520 O R O Cette plante fleurit en Juin : prife en déco£lion , elle eft apéritive Sc excellente pour chaffer les graviers des reins : pilée & appliquée en cataplafme , elle convient pour les hernies. OROB ANCHE , orobanche, PlanLe parafite dont on diflingue deux efpeces principales. 1°. La grande OKOBk'^cn^^ orobanche major caryophyllum oUns : elle croît toujours au voifinage de quelqu'autre plante, dans les champs, entre les légumes , entre le lin, le chanvre , le fenugrec, & dans les blés proche le genêt, elle fe nourrit à leurs dépens. Ses racines font bulbeufes , grofles comme le pouce , arrondies , formées en cône , écailleufes & noires en dehors , blanchâtres ou jaunâtres en dedans > tendres , empreintes d'un fuc vifqueux & amer : en fe féchant elles deviennent dures comme de la corne : elles pouffent une tige haute d'environ un pied &: demi , droite , arrondie , d'un rouge jaunâtre , velue , fîftuleufe & fragile : elle ne porte que des feuilles avortées &: fpongieufes, lefquelles fe corrompent en peu de temps: {ç^s fleurs font velues , purpurines ou jaunâtres, odorantes; chacune d'elles efl, félon M. de Tourncfort , un tuyau évafé & taillé en mafque d'une manière grotefque : elle renferme deux paires inégales d'étamines , & un piflil : le calice efl fendu en quatre lanières oblongues : à cette fleur fuccede un fruit oblong qui s'ouvre en deux coques remplies de femences très- menues & blanchâtres. C. Bauhin dit, que quand cette fleur naît contre le genêt commun , elle efl verdâtre ; mais fi elle naît contre le genêt 4'Efpagne , elle efl jaunâtre & plus grande. On mange l'orobanche comme les afperges. 2°. La petite Orobanche, orobanche ramof a minor. Sa racine efl tubéreufe , greffe comme une aveline & fîbreufe : (qs tiges font hautes d'environ demi-pied , plus menues & plus dures que celles de l'oroban- che vulgaire. Ses fleurs font difpofées en épis. Elle reffemble d'ailleurs à l'efpece précédente : elle naît ordinairement entre le chanvre & les blés. L'orobanche féchée & pulvérifée efl propre pour la colique ven- teufe; la dofe en efl depuis un fcrupule jufqu'à un gros ; on prétend que cette plante met le taureau en rut quand il en a mangé : c'efl pourquoi on la nomme aufïï herbe de taureau. Voyez maintenant à l'article Plante PARASITE, OROBE O R O çiï OROBE ou ERS ou POIS DE PIGEON, orobus , feu ervum vcrum^ eft une plante dont on diftingue plufieurs efpeces. 1°. L'OROBE VULGAIRE DES HERBORISTES , orobus vulgaris Herha- rîorum. Cette plante fe feme dans les champs en pktiieurs provinces dô France pour la nourriture des beftiaux : elle croît aufîi naturellement parmi les blés en Efpagne ôc en Italie. Sa racine eft menue & blan- châtre : fes tiges font hautes d'un pied , anguleufes , très-rameufes ; fe$ feuilles font femblables à celles de la lentille , & rangées par paires le long d'une cote ; fes fleurs font légumineufes , petites , purpurines » quelquefois blanches : elles font remplacées par des goulTes longues d'un pouce, menues, pendantes, ondées, blanchâtres étant mûres, & contenant des femences femblables à de petits pois , d'un rouge brun , & d'un goût de légumes qui n'efl: ni amer ni défagréable. Cette plante fleurit à la fin du printems , & fa femence efl: mûre en Juillet. C'efl une nourriture très-agréable aux pigeons , & qui les fait beaucoup multiplier ; l'orobe fe plaît en terre maigre & fablonneufe. 2°. La PETITE ESPECE d'orobe , crvum feminc minorc. On l'appelle communément orobe de Candie : elle ne diffère de la précédente que par fa petitefTe ; on la cultive entre les choux. M. Haller obferve que quoique l'orobe paroiffe être le nom grec de Vcrvum , les Botanifl:es diftinguent cependant les deux genres : Vervum a les filiques articulées & elle monte , l'orobe a les filiques hffes & vient toute droite. C'eft , dit-il , l'efpece première & féconde de M. Vaillant qui appartiennent à Vcrvum ; la troifieme efl un orobus» 3°. L'orobe des bois , orobus fylvaticus nofiras. Ses fleurs font purpurines bleuâtres ; fes femences font ovales , plus menues que celle de la vefce , un peu ameres: cette plante croît dans les champs & dans les forêts aux lieux incultes. La femence d'orobe efl la feule partie de cette plante qu'on emploie en Médecine : elle eft réfolutive , apéritive , & augmente le lait aux nourrices. Les anciens Médecins la réduifoient en poudre , & la don- noient incorporée avec le miel dans l'aflhme humide pour faciliter l'expeftoration. On en a fait du pain dans des années de difette ; mais il étoit de mauvais goût, & fourniflbit peu de nourriture : aujourd'hui cette femence efl: une des quatre farines réfolutives qu'on emploie fi Communément en Chirurgie. OROBIAS, OROBITES.r^iy^^aumot OoLiTHES. Tome ir, Vvv 522 O R O O R P ORONGE. Nom que l'on donne en Guienne à la bonne & délicate efpece de champignon , fî vantée des gourmets , c'eft le laferas de J. Bauhin. On peut dire auffi que c'eft le plus beau des champignons. Il le développe dans le fuc qu'on trouve dans la racine du panicaut lorfqu'il fe pourrit. Il ibrt de terre enveloppé d'une mem.brane très-blanche qui , en fe fendant , laifte voir la pe'tite oronge fous la forme & la cou- leur d'une orange de Portugal , laquelle s'épanouit enfuite en un para- fol d'un jaune doré en deftlis & d'un beau blanc par deflbus f^oyc^ Champignon. ORPHIE. Poiftbn très-commun fur les côtes de Normandie : on l'appelle egulUettc en Bretagne. Il eft long comme une anguille , mais plus gros , plus charnu & plus carré ; fa peau eft d'une couleur argentée bleuâtre ; fa chair eft blanche , ferme , un peu feche , & a un alTez bon. goût. Il eft également bon à toutes fauces. Les vertèbres de l'orphie deviennent vertes par la cuiftbn , & fe détachent aifément de la chair : il a fur le nez un avant-bec, qui eft pour l'ordinaire d'une cinquième partie de la longueur du refte du corps. La figure de ce bec lui a mérité le nom ^ éguïlUtu ; mais il ne faut pas confondre ce poiflbn avec celui qui eft décrit fous le nom à\iiguilk. Voyez ce mot. Voici la manière de faire la pêche de ce poiiTon , qui dure depuis le mois de Mars jufqu'en Juin , plus ou moins , fuivant la fttuation & l'expofition ÀQS côtes que ce poiftbn vient ranger , comme tous ceux de fon genre qui nagent en troupes & par bandes. Les Pêcheurs fe mettent la nuit quatre dans leurs bateaux ; l'un eft placé en avant avec un brandon de paille enflammée , dont l'éclat attire les orphies , & les trois autres ont des fouanes ou dards en forme de râteaux, avec une douille de fer où le manche eft reçu ; ces inftruments ont au moins vingt tiges ou branches barbelées , de fix pouces de haut & fort preftees ; la tête du râteau n'a au plus que treize ou quatorze pouces de long, avec un inanche de la longueur de huit, dix ou douze. Dès que les Pêcheurs voient les orphies ou éguillettes attroupées , ils lancent leurs dards, & en prennent fouvent plufieurs d'un feul coup. Comme le bateau dérive doucement, la manœuvre de la pêche n'effarouche point les orphies. Les Pêcheurs qui font les plus heureux ou les plus adroits , en peuvent prendre jufqu'à douze ou quinze cents dans une feule nuit; mais il faut qu'elle foit fort obfcure , & que le temps foit calme , ainfi que pour toutes les autres pêches qui fe font au feu dans l'obfcurité de la nuit, Diclionnain dis Animaux y T. III. O R P 5,j Tout îe produit de cette pêche ne fert pas à la nourriture des hom- mes : la pkis grande partie s'emploie principalement à faire des appâts pour garnir les hameçons des lignes. On donne auffi le nom d'orphie à un poiffon qui Te trouve aux Antilles, & qui reOemble beaucoup à V aiguille de mer. Voyez ce mot. Il fe jette quelquefois en l'air & fait des fauts de trente pas de long : on prétend que fi dans ce temps il rencontroit quelqu'un dans fon chemin , il le perceroit de part en part; fa chair eft d'un aiTez bon goût, quand il n'a pas mangé du fruit de mancelinier , voyez ce mot : ce qu'on reconnoît en lui voyant les dents blanches ; fi elles font autrement, il efl fort dan- gereux d'en manger. L'orphie du Cap de Bonne-Efpérance relTemble prefque entièrement à l'orphie de nos côtes. ORPIMENT ou ORPIN MINÉRAL ou ARSENIC JAUNE, aurl^ pigmentum aiit arfenicum fiavum nativum , eft une fubftance minérale d'un jaune verdâtre ou rougeâtre ou citrin , arfenicale , friable , cepen- dant compare , remplie de paillettes ou de lames comme talqueufes & dorées , lefquelles ne font cependant la plupart que des criftaHifa- tions feuilletées d'orpiment môme ; fouveùt l'orpiment paroit contenir des veines comme fpatheufes ; ce n'efl encore que de l'orpiment diffé- remment criftalifé. Cette fubiiance arfenicale efl minérahfée par le foufre , brillante dans Tendroit de la fradure , donnant fur le feu une légère flamme d'un bleu blanchâtre , accompagnée d'une fumée fort épaiffe , & d'une odeur faffoquante de foufre & d'ail. On trouve l'orpiment natif en morceaux de différentes groffeurs • difpofés par lits 6l attachés à la furface des fentes de mines , dans la Lu- face, dans le territoire de Neuhfol , de Servie & du Piémont, parti- cuHérement dans la Turquie d'Afie , dans la Myfie. Tout l'orpiment du commerce nous vient , par l'entremife de l'Angleterre, de Hollande, d'Allemagne, de Suéde & d'Italie, & notamment du Piémont, où on i'appelle or de Piémont. L'on trouve dans les boutiques une efpece d'arfenic jaune fa£lice qui fe fait en quelques lieux de l'Allemagne avec une pyrite arfenicale , qui contient plus ou moins de foufre , félon que la couleur en efl plus ou moins vive : on l'appelle ou orpinpur^ ou réalgar. Voyez RÉALGAR. On emploie l'orpiment à divers ufages , par la fufion & par la folu- tion , dans la peinture & dans la verrerie : mis en poudre il prend le nom à'orpin. On nous a aifuré que fi les Peintres broient l'orpin à l'eau Vvv a 524 0 R P pendant que le tonnerre roule , la couleur de l'orpin qui efl: d\in beau jaune , devient aufîi-tôt noirâtre. Des Marchands de bois de couleur fe fervent de l'orpin pour jaunir les bois blancs dont on fait des peignes , &c. afin de les faire paffer pour du buis. Cette fophiftication eft dan- gereufe & criminelle , en ce que des perfonnes tiennent tous les jours leur peigne à la bouche. On devroit même le défendre en peinture fur les boiferies : car non-feulement il altère les couleurs avec lefquelles on le mêle , & celles qui font dans fon voifmage, mais il en exhale fouvent des odeurs pernicieufes qui portent fortement à la tête , &C influent certainement fur la fanté : mêlé avec de l'indigo , il devient vert. Les Maréchaux en font entrer aufîi dans leurs onouens efcarroti- ques. On fait avec l'orpiment & la chaux , une liqueur dépilatoire qui eft d'ufage chez quantité de Barbiers en Allemagne. Les Orientaux s'en fervent dans la compofition de leur rufma artificiel. Foyei Rus MA. Les Empyriques font avec l'orpiment , la poix blanche & la poix noire , un emplâtre qu'ils apphquent fur la tête des enfans attaqués de la mauvaife teigne. Au bout de vingt-quatre heures , ils enlèvent l'emplâtre qui emporte avec lui les cheveux & leurs racines fans grande douleur : on réitère cette opération jufqu'à ce qu'il ne refte plus de cheveux , & la teigne fe trouve entièrement guérie. L'orpiment & la chaux donnent une encre de fympathie & une liqueur à éprouver le vin lithargirifé. Voici fa préparation; on prend une partie d'orpiment & deux de chaux vive qu'on fait diffoudre enfemble dans l'eau commune , on obtient alors \efoie defoufre arfenical. Si l'on en verfe dans des vins fufpeds , le vin noircit fur le champ. Le phlogiftique du foufre s'unit au plomb. La vapeur de ce foie de foufre fait paroître en noir d^s carafteres tra- cés avec une diflblution de fel de Saturne par une fuite des mêmes prin- cipes , & fert alors d'encre de fympathie. Foye^^ U Diciionnaire ds Chimie & notre Minéralogie. On a banni l'orpiment de la Médecine comme \m poifon funefte. ORPIN , anacampferos y vutgo faba crajfa, CeitQ plante également connue fous les noms de reprife, Ôlq joubarbe des vignes , àe grajfette & de fève ipaijfe , reflemble à la joubarbe par fa fleur , fon fruit & fes feuilles , qui font épaiiTes & fucculentes : on l'en diftingue cependant , parce qu'auffitôt qu'elle pouffe , elle monte en tige , au lieu que les feuilles de la joubarbe fe ramaffent en des globules , qui reffemblent à des yeux de bœuf ( M. HalUr dit qu'il y a des orpins , dont les feuilles forment ORS 525 des artichauts mieux marqués que ceux de plaûeurs fedums ; comme le palujlrc ). La racine de l'orpin eft formée de tubercules charnus & blancs. Ses tiges font droites , rondes , folides , comme rameufes, hautes de deux pieds : fes fleurs font rougeâtres. L'orpin croît dans les lieux ombrageux & humides , fur-tout le long des haies. On fait ufage de (es racines & de fes feuilles ; elles font vul-« néraires, confondantes i leur fuc exprimé, appliqué extérieurement dans les plaies récentes, arrête le fang, déterge les ulcères, les fait cicatrifer, excite la fuppuration des tumeurs , & adoucit les douleurs des hémor- roïdes. On appelle cette plante tekphlum du nom de Télephe Roi de Myfie , qui s'en eft fervi pour guérir les ulcères. L'orpin efl du nombre des fimples qui entrent dans la préparation de l'eau d'arquebufade. Il y a plufieurs autres efpeces d'orpin , entr'autres celle qu'on appelle ORPIN ROSE , rhodia radïx ^ parce que le goût & l'odeur de la rofe fe trouvent en fa racine, qui efl: groffe , tubéreufe, inégale, blanche, charnue , fucculente : on en fait ufage pour guérir les taches qui viennent de coups de foleil. On en vante le cataplafme pour des maux de tête & les migraines : on l'applique fur les tempes. On nous envoie la racine feche des Alpes : elle pouffe pluiieurs tiges hautes d'environ un pied, chargées de beaucoup de feuilles , charnues , dentelées &: vertes. Les fleurs font des bouquets en ombelles , difpofées en rofe , jaunâtres ou purpurines : il leur fuccede des fruits ramaffés en manière de tête , & remplis de femences oblongues & pâles : M. Haller efl, félon M. Bourgeois, d'un grand fecours dans les pertes immodé- rées des femmes : la graine de cette plante en tifane , efl: très-utile dans toutes les efpeces d'hydropifie , parce qu'elle efl très-apéritive & diu- rétique. La graine d'ortie grieche prife en poudre, à la dofe de trente à quarante grains matin &foir, guérit très-fou vent le goitre, fans nuire à l'eflomac , ni à la fanté , comme la plupart des autres qu*on met en iifage contre cette maladie. On fait que les orties hachées & mêlées avec du lait caillé font une excellente nourriture pour les dindon- neaux : dans quelques Provinces de la France on donne pendant l'été les feuilles fraîches d'orties aux vaches , & pendant l'hiver les feuilles qui ont été féchées à l'ombre. On afiiire que la graine d'ortie bien mûre , mangée par les poules , les échauffe & les fait pondre plutôt. Des Maquignons Danois pulvérifent cette graine , en mettent une poignée avec l'avoine qu'ils donnent à leurs chevaux foir & matin ; cet anment les rend gras & leur rend le poil lifTe & luifant. Les tendrons d'ortie cuits , purifient le fang : la racine d'ortie confite efl: un bon remède contre la jauniffe & pour la vieille toux. Le cataplafme d'ortie e£i émol- lient & réfolutif, & foulage les goutteux. Plufieurs Médecins praticiens recommandent aufïi, comme un bon remède contre la fciatique , la paralyfie &: la léthargie , de frapper les parties affligées jufqu'à rougeur avec un paquet d'ortie , & de les laver enfuite avec du vin chaud. Ca remède a fouvent rendu le fentiment & le mouvement. PafTons à quel- ques autres efpeces d'orties différentes , & qui font aufîi d'ufage en Mé- decine. Mais nous avertiffons que les autres plantes auxquelles on a donné improprement le nom amortie, {ont des lamïum ;^ leur caradere , dit M. H aller , efl: infiniment éloigné des orties. Telles font : L'Ortie Morte a fleur blanche, ou Ortie qui ne pique O R T 53Î iJOINT, OU LaMIER blanc , urtica imrs florlbus alb'is ^ aut lammm vul" gare album. On trouve cette plante dans les lieux incultes ; fes rejetons font nombreux & rampans. Ses tiges font longues , carrées & moins greffes vers la terre , branchues , entre-coupées par quelques nœuds , purpurines en leur bafe ; le duvet de leurs feuilles ne fait point de mal : fes fleurs font verticillées , petites , blanches & formées en gueule : les fommets des étamines font bordés de noir, & ne repréfentent pas mal un 8 de chiffre. A chaque fleur paffée fuccedent quatre graines trian- gulaires , rougeâtres , luifantes , tombant d'elles-mêmes quand elles font mûres. Toute la plante a une odeur défagréable. Les Médecins modernes recommandent cette efpece d'ortie pour les fleurs blanches, les mala- dies du poumon , les tumeurs & les duretés de la rate , & fur-tout pour arrêter les hémorrhagies de la matrice , & pour confoîider les plaies : on fait ufage de ces fommités fleuries en infufion théiforme ou en con- ferve. On applique auflî deux fois par jour la plante pilée avec du fel fur les ulcères gangreneux. Il y a une autre efpece à'orde morte à ^eurs purpurines ou Jaunes , qui ne diffère de la précédente que par fa couleur. L'Ortie MORTE puante ou Galiopse, ou Ortie rouge, lamlum purpureum , fœtldum , aut lamium folio ohlongo , fiore purpuno ( lamier rouge ). Sa racine n'efl: pas rampante : fes tiges font garnies d'une ou deux paires de feuilles prefque nues. Ses fleurs font purpurines , & fes graines triangulaires &: brunâtres. Toute cette plante a une odeur fétide & défagréable , & vient dans les lieux incultes : elle eft vulnéraire, réfolutive , adouciffante & pro- pre à déterger les ulcères putrides. On donne aufîi le nom à^ ortie pied- de-poule à une forte d'ortie rouge , annuelle & des jardins, & le nom Sortie mufqule ou piquante à une efpece de galeopjis. En général , fous le nom latin de galcopJls de M. Tournefort , autre genre , dit M. H aller , qui diffère du lamium , on comprend la grande & la petite orties puantes ^ ^ V ortie morte à fieurs jaunes. La grande ortie puante , «/m-<î iners^ magna ., fœtidijjîma ., a une racine rampante, & donne quelques tiges grêles qui fortent de {es nœuds. Ses fleurs forment des épis longs. Cette plante efl fort puante, & diffère peu de l'efpece d'ortie puante & rouge. La petite efpece d'ortie pucinte y galeopjis pa~ lujiris ^ anguJîi-foUo ^ fœtida j vient fur le bord des ruiffèaux : fa racine 534 O R T eft inégale & boflelée, &fes fleurs piirpurînes font en gueules, ayant les lèvres panachées : on elHme fes feuilles très-fpécifîques pour l'en- rouement & contre les fièvres tierces : elle eft encore efHcace , appli- quée fur les plaies ; c'efl elle dont il efl parlé dans quelques Auteurs fous le nom de panax colonl^ c'eft-à-dire, /7a/2^c;£;e du Laboureur: à l'égard de l'ortie morte àfleurs jaunes, d'une feule pièce & en gueule , lam'mm jlore lutco & folio oblongo ^ cette plante eft rarement d'ufage ; on s'en fert quelquefois à la place de Vortie morte & blanche. Il y a plufieurs au- tres efpeces de gakopfis & de lamium dont nous ne ferons pas mention ici. Au refle les galeopjis n'ont rien de commun avec les orties , dit M. Deleu^e , que la dénomination que quelques Auteurs leur ont donnée dans l'enfance de la Botanique. ORTIE ERRANTE. Foye^ à i: article Ortie de Mer. ORTIE DE MER ou ORTIE MARINE , ou POISSON-FLEUR ; urtica marina. On donne afîez improprement ce nom à certains corps marins dont on diftingue deux efpeces ; favoir les orties marines fixes & le s orties marines errantes. Les premières font appellées fixes ^ de la lenteur de leur mouvement progrefTif : on diroit qu'elles font immobiles; à peine au bout d'une heure ont-elles avancé de l'efpace d'un pouce : l'on en trouve beaucoup fur les côtes du Poitou & du pays d'Aunis , où on les appelle culs d& chevaux; on les nomme culs d^dnes fur les côtes de Normandie. M. de Réaumur dit dans un Mémoire de l'Académie des Sciences , année lyio , page^GG ^ que ces noms leur conviennent beaucoup mieux que celui qui leur efl commun avec une plante terreftre , puifqu'ils retracent une image de la figure que ces corps marins font paroître dans un grand nombre de circonflances. Cet Académicien dit que ces orties ne caufent point de démangeaifons cuifantes à ceux qui les touchent , comme on l'a prétendu; que ces corps marins font de véritables animaux bien or- ganifés , fufceptibles de fentiment quand on les touche , qui attrapent des poifTons ik des coquillages pour ^tn nourrir. Ils ouvrent la bouche plus ou moins grande fuivant le volume de la proie qu'ils avalent , re- jetent enfuite les os ou la coquille par la même ouverture. Lorfque la bouche efl ouverte , on voit toutes les cornes de l'ortie de mer qui refTemblent en cet état à une fleur épanouie , ce qui l'a fait nommer poijfion-fieur. Quoique ces orties prennent fuccefTivement quantité de figures difîe* tentes , on peut cependant dire qu'en général elles ont extérieurement la figure d'un cône tronqué ; leur bafe eft très-fortement appliquée fur les pierres , auxquelles on les trouve toujours adhérentes : il y en a dç verdâtres , de blanchâtres & de couleur de rofe. Nous en avons trouvé de brunes & de bleuâtres fur les parages de l'Ifle de Rhé , Se fur la côte de Plugaftel au-delà de Breft. M. de Rome de Vljle m'a affuréen avoir vu de noires à l'Iile de Sainte-Hélène. Dans quelques orties ces couleurs paroifTent par-tout fur la furface ; dans d'autres elles font mêlées par raies ou par taches diftribuées d'une manière très-agréable : on en trouve auffi dans les fentes des rochers qui bordent la mer ; elles reffemblent à une grande chevelure & paroifTent vivipares. 2°. Les Orties errantes. Celles-ci n'ont de commun que le nom avec les précédentes : on les appelle orties détachées ou orties erra, mes y &c. Mais M. de Réaumur dit que s'il vouloit joindre un nouveau nom aux anciens qu'elles ont , il les appelleroit gelée de mer ; nom qui efFeftive- ment caradérife fi bien la fubftance dont elles font formées , qu'il vaut feul une petite defcription pour aider à les reconnoître. Leur chair, leur enfemble , a la confifiance & la couleur d'une vraie gelée. Dans Feau les gelées marines remuent avec affez de vîtefi^e , elles s'y foutien- nent par un mouvement de contradion & de dilatation ; mais jetées à fec fur la grève , elles paroifiTent fans aucune a£lion. Sur les bords de la Méditerranée , les gelées de mer fe nomment capello di mare {^chapeau de mer"). Rondelet dit que c'efl une mafiTe fpon- gieufe , ronde , creufe & percée au milieu , ayant tout autour un petit cordon rouge ; par cet endroit elle refl^emble à un chapeau ; l'autre partie refiTemble aux pieds des poulpes : elle en a , dit-il , huit , gros & carrés dans leur commencement , & qui finiffent en pointe ; on en trouve aufiî qui n'en ont que quatre. Nous en avons vu beaucoup en été dans les parages de Cette en Languedoc , & aux ifles d'Hyere ; leur corps efl gélatineux , couleur de rofe , très-brillant , un peu tranf- parent ; on les voit fouvent flotter comme au gré des eaux , & il nous a paru que fi on les manie long-tems , elles fe dilatent , fe contractent , & caufent une petite démangeaifon aux mains ; il femble même que la chaleur de la main les diffout prefqu'entiérement , &: fi l'on porte aufiî-tôt les mains fur les yeux , la fenfation de chaleur & notamment de démangeaifon eit infiniment plus vive. Il paroît que M. Linneus regarde la gelée de mer, comme une efpece de médufe. Voyez ce mot. \ 536 O R T O R V Tous ces individus ont la propriété de faire rentrer dans leur intérieur le rhomb ou rofe de pattes dont elles Ibnt fournies. Les orties de mer font des zoophytes , de la clafTe des moUufques. ORTOLAN, honidanus aiit ortolanus , eft un oifeau de paflage , du genre du bruant, très-connu par l'excellence de fa chair : on en diftingue de plufieurs efpeces , qui ne varient que par les couleurs. L'ortolan des rofeaux a les plumes de la poitrine & du delTus de la tête , noi- râtres. Le véritable ortolan des Naturalises , miUaris pingucfcens , efl un peu plus grand que l'alouette , il en a auffi la couleur : il a une grofleur notable fur le bec : il fe nourrit principalement de millet : c'eft un oifeau très-gras : fa chair rôtie eft tendre , délicate , fucculente , & d'un goût fi exquis , que les Grands le recherchent beaucoup pour leurs tables. En Suéde , on les fait payer aux Etrangers un ducat la pièce , quoique ce ne foit pas toujours le véritable ortolan. C'elt une nourri- ture reflaurante , fortifiante : fa graifle efl émoUiente , réfolutive ôc adouciffante. Cet oifeau eft fi tendre , que la courte application d'une" chaleur légère fuffit pour le cuire parfaitement. On pourroit facilement l'enfermer dans des coques d'œufs de poule bien réunies, le cuire dans l'eau ou fous la cendre , & répéter à peu de frais une des magnificences de Trimalcion qui eft un jeu de feûin aiTez plaifant. L'ortolan fe rencontre dans les pays chauds , depuis le quinze d'Avril jufqu'à la fin d'Août ; on en voit vers Saint-Jean de Bonne-Font une fi grande quantité , que les Oifeleurs y viennent de vingt lieues à la ronde pour en prendre. On en trouve encore communément fur les térébinthes àSmyrne ; fon cri eft li-^i. Les ortolans du Cap de Bonne-Efpérance ôC de la Louifiane , ont de belles couleurs aurores. Il y a auffi l'ortolan jaune ; l'ortolan tout blanc ; l'ortolan noir ; l'ortolan des rofeaux : celui de la Caroline , celui de neige : l'ortolan à collier, &c. ORVALE ou TOUTE-BONNE , ouSCLARÉE, horminum fdarea dicium , eft une plante que l'on cultive dans les jardins & dans les ver- gers ( il y a aufti la toute- bonne des prés^. L'orvale eft la principale efpece du genre des fc/arJes de M. de Tourne/on , & celle qu'il défigne fous le nom de fclarea pratenjis , flore cceruleo. Sa racine eft fimple , ligneufe & fibrée , brunâtre , d'un goût qui n'eft pas défagréable , & qui échauffe les palais & la gorge : elle poufte une tige à la hauteur d'environ deux pieds , de la grofleur du petit doigt , carrée , velue , poueufe , rameufe & rem.plie de moelle : fes feuilles font oppofées deux O R V 537 deux à deux , & portées fur de longues queues ; elles font ridées , gluantes , oblongues , larges en leur bafe , & terminées en pointe , légè- rement crénelées, velues ^ Se d'une odeur défagréable, mais citronnée, d'une faveur amere & aromatique : au fommet de chaque tige , font deux feuilles oppofées , petites , creufes , fans queue , & d'une cou- leur purpurine : fes fleurs font difpofées en longs épis , comme par anneaux , d'une feule pièce , en gueule , bleuâtres , dont la lèvre fupé- rieure eft alongée en forme de faucille : à chaque fleur fuccedent quatre grofl^es graines arrondies , convexes d'un côté , anguleufes de l'autre , de couleur roufsâtre. Toute cette plante a une odeur forte & puante , &c une faveur amere ; elle efl: toute d'ufage. L'orvale efl: connue , fur-tout des Caba- retiers Allemands , dit Ettmuller , pour falfifîer leurs vins ; car ils ont coutume de changer le vin du Rhin en un vin mufcat , par l'infiifion des fleurs d'orvale Se de fureau. Tragus afllire qu'un tel vin efl: d'un grand fecours pour les femmes qui font froides , fl:ériles , &: pour guérir les fleurs blanches : il faut cependant en faire un ufage modéré , car il porte à la tête , & y caufe , dit Lobel, des pefanteurs. On prétend que la graine d'orvale introduite dans l'oeil , en fait fortir les corps étrangers. L'orvale efl: beaucoup en ufage dans les pays du Nord pour faire de la bierre ; car quand le houblon eft rare , ou qu'on veut rendre la bierre plus forte , on en met dans les chaudières bouillantes , & l'on fait alors une liqueur qui enivre, même prife en petite quantité ; fou- vent elle caufe une gaieté qui tient de la folie. Hoffman met l'orvale parmi les remèdes fpafjiiodiques. iif^jK rapporte que lesAnglois font des gâteaux avec des feuilles d'orvale , des œufs , de la crème &: un peu de farine , & que l'on frit dans la poîle : ces gâteaux font agréables, on les fert au defl^ert pour exciter à l'amour. L'Orvale des prés eft aflez commune par-tout, & fe diftingue principalement par la difpofition de fes fleurs , rangées en anneaux fur des branches dégarnies des feuilles , dit M. Deleu^e , chaque anneau formé feulement de fix fleurs , & accompagné de deux ftipules en cœur fort petites. Les fleurs font bleues , leur lèvre fupérieure eft grande, en faucille & un peu gluante. ORVET ou OR VERT, cœcilla, eft le ferpent ovipare , décrit dans beaucoup d'Auteurs fous le nom à^anvoye ou à^ aveugle ;\\ eft très-connu en Allemagne & au Cap de Bonne -Efpérance : on le trouve le plus Tome IF. Yyy 5 38 O R U OS foLivent dans les fentes des rochers & aux environs : on le tue fans beaucoup de peine : on le prendroit au premier afpe£l pour une an- guille. Sa longueur ordinaire eft d'un pied : il eft de forme cylindrique : fa peau paroît fort unie tout le long du corps : il a la lèvre fupérieure très-élevée & obtufe : fes yeux , quoique brillans , font fi petits , que quelques-uns ont avancé qu'il n'en avoit pas : il eft partagé de taches noirâtres , blanches & purpurines ; fes dents font û menues, qu'à peine paroiffent-elles : fa langue eft fourchue , il rampe d'une grande vîtefle : on prétend que fa morfure eft très-dangereufe , mais elle ne l'eft pas plus que celle de la couleuvre ordinaire ; fa queue ell: obtufe & fi courte , qu'à peine la diftingue-t-on ; l'ouverture de l'anus eft placée à l'extrémité du corps. Les Auteurs citent Tanvoye de Surinam , de la Négritie , de l'Amérique , de la Guinée &: du Ceylan. f^oye^ Seba» ORUBU. /^ojé^ Vautour DU Brésil. OS , os , eft cette fubilance endurcie , qui fert à foutenir toutes les autres parties du corps dans les animaux; c'eft un compofé de fibres blanches très-dures, très-folides , très-feches & caflantes , entrelacées les unes dans les autres , incapables de flexibilité , & fervant de bafe ^ de foutien , d'appui , d'attache , de pafTagë , de rempart , de borne & de défenfe à toutes les parties qui les environnent. En un mot les os font le fupport de toute la machine animale. La charpente de l'os ou.l'ofîature , zppeWée fu/chrum , n'a pas de folidité par elle-même ; elle efl cartilaglneufe , poreufe , on diroit d'ua réfeau , dont les mailles & tous les intervalles font remplis d'une matière compare , calcaire. Néanmoins la légèreté fe trouve dans la confîruc- tion des os , réunie à la force : leur flrudure réticulaire eu des plus admirables , elle donne pafTage à une multitude de petits vaiffeaux qui y portent la vie & la nourriture ; un réfeau foutient la moelle & l'em- pêche de s'affaifTer. Par-tout on reconnoit la main habile du Créateur. Mais entrons en matière. Si l'on prend l'os de la jambe ou du bras d'un enfant venant au monde , qu'on le dépouille bien de {es chairs , l'on pourra alors le couper par tranches auffi facilement que les cornichons du cerf, qui s'endurciffent auffi par la fuite. Ces os , tendres comme ces cornichons , font flexibles ; ils fe confument entièrement dans le feu : ils ne font point d'effervefcence avec les acides ; mais dès que des fucs chargés de parties calcaires , ont commencé à fe dépofer dans les pores . de ces os, alors ils prennent de la confiHance^ de la folidité & de la dureté. O s 55^ Si l'on expofe ces os à l'aâ:ion du feu , la partie cartUagineufe brûle , en exhalant une forte odeur de plumes brûlées. Querefte-il ? une terre blan- che , calcaire , foluble dans les acides. Si l'on fe contente d'enlever feu- lement par l'uftion , le gluten animal , qui mafque les furfaces de cette terre , l'acide y aura également prife , & la détruira ; on peut auffi dé- truire cette terre fans le fecours de la calcination , mais par une macé- ration acidulée ; de forte que l'os qui étoit dur peut enfuiîe redevenir mou, être replié & chiffonné comme un linge. Par cette théorie de la na- ture des os des animaux , qui a un rapport aflez immédiat avec les madré- pores & les coquilles , &c la manière de les ramollir par le moyen d'une liqueur nitreufe , affoiblie par l'eau commune ( opération qui eft due à M. HlriffanL de l'Académie des Sciences ) ; par cette théorie , dis-je , l'on peut concevoir rofTification & même le ramolliiTement des os , tel qu'on l'a obfervé en la perfonne de la femme Supiot , il y a quelques années à Paris. On prétend que la fuite d'un lait répandu , dont l'acide s'étoit développé , en fut la caufe. Nous nous étendrons ci-après davan- tage fur cet objet , d'après les remarques de M. Hèriffant. Nous difons que les os font quelquefois fujets à une forte de ramol- liflement général. Dans cette maladie , que les Anatomifles nomment carnificadon ou ojîeofarcofe , la fubftance des os efl: entièrement changée, elle perd fa dureté ; fes fibres ne paroiffent plus fibres ofTeufes ; les os ont une confifîance de chair , &: l'on diroit qu'ils font en effet devenus chair : voyez Mémoires de C Académie des Sciences tyiï , pag. 2.2.^ , plu- fieurs obfervatlons de MM. Petit & Morand , qui confîatent la certitude de cette maladie. En confultant les ouvrages des Anciens on y trouve auffi plufieurs obfervations de ce genre. Ifmaël Albufeda parle ( en 1 570 ) d'un homme fans os , & Olhuiy ajoute qu'on le portoit fur une claie de branches de palmier ; il efl encore queflion d'un ramolliffement des os , par Ahbon , Moine qui vivoit dans le neuvième liecle : d'un autre par Houlier , Médecin de Paris ; on a vu à Sedan, en 1672, le nommé Pierre Siga âgé de trente-trois ans , dont les os de tout le corps devinrent mous comme de la cire , de forte que dans trois ans de temps fon corps fe trouva réduit à la grandeur de celui d'un enfant de trois ans, & il mourut en cet état. On trouve encore des citations d'autres faits fem- blables dans la Bibliothèque raifonnée, &c. &c. M.^t; Halkr a donné auffi deux Mémoires fur la formation des os; Yyy z 540 O S fondés fur des expériences. On y voit avec plaifir la flruélure organi- que de ces corps , qui commencent par être une colle , qui deviennent cartilage , & qui fîniffent par être un os. De la glu au cartilage , dit M. d& Hallcr , le paffage efl prompt & fa- cile : il paroît qu'il ne faut qu'un degré de folidité de plus ; mais du car- tilage à l'os , la marche ert plus longue & plus obfcure ; il faut former des fibres , des lames , des alvéoles , des vaiffeaux , de la moelle , & douer le cartilage de toutes ces parties qu'il n'avoit pas. Il n'y a guère, félon cet Auteur, que les artères capables d'effeÛuer dans le cartilage les changemens qui le transforment enos. La nature ofleufe fe déclare par l'o- pacité, parles fibres longitudinales ,& par la couleur jaune qui s'introduit dans le cartilage : le noyau offeux efl une nouvelle preuve de l'influence des artères fur 1 ofTification ; ces artères naifîent du milieu de l'os & du tronc nourricier. Si tous les cartilages ne deviennent pas ofTeux, il faut l'attribuer à la petitefTe de leurs vaiffeaux , toujours trop fins pour ad- mettre les particules du fuc offeux. On a obfervé que les têtes des os deflinées à éprouver des frottemens dès l'inflant de la naifîance , font les premières ofTifîées , & même les plus dures. Il fufîit d'examiner les extrémités de la mâchoire inférieure & des faufles côtes. On peut encore confulter fur l'ofTification les Mémoires de C Académie des Sciences^ *73^- Nous ajoutons ici que des fraftures dans les articles , des luxations ou autres caufes peuvent donner lieu à l'épanchement du fuc offeux^ néceffaire pour la formation du cal , ou à la fynovie , matière qui lu- brefîe les jointures des os , entretient leur foupleffe. Alors l'anchylofe fe forme des os qui devroient être mobiles , ils s'articulent, fe foudent , & ne font plus qu'une pièce continue. Toutes les parties ofl'eufes dans leurs jointures & leurs articulations y font fujettes : combien d'exemples en ce genre ne voit-on pas dans les divers morceaux d'Oftéologie con- fervés dans les Cabinets ! On voit quelquefois dans certains fujets, par des vices particuliers, des parties molles s'ofTifîer, tels que le foie, le pancréas, même des vaiffeaux, des veines & des artères. La Nature , fi fage & fi réglée dans fa marche , efl quelquefois trou- blée par diverfes caufes au moment de fon développement ; de-là naiffent les différentes difformités dans la charpente ofTeufe. Les enfans noués ou rachitiques le deviennent ordinairement depuis l'âge de neuf mois juf- qu'à deux ans. Les extrémités des os groffiffent aux articulations des bras & des jambes, leur démarche devient chancelante. Fatigués ^ ils fe O s ^4, plaifent dans l'inaâion ; du refte ils ont très-bon appétit , leurs fens font très-bien difpofés , ils font même plus gais , ont l'efprit plus vif que leurs camarades de même âge. On prétend que cette maladie ne s'eft fait connoître dans l'Europe Septentrionale que depuis deux cents ans. Son époque avec celle de la maladie vénérienne , pourroit , dit-on , faire foupçonner qu'elle en a été un des principes. Voici des détails intéreflans fur les os & fur les coquilles , & autres corps qui y ont le plus de rapport. Dans le volume des Mémoires de V Acad. Roy ah des Sciences de C an. lySS , on trouve un Mémoire fur VOJJification par M. Hérijfant , Médecin de la Faculté de Paris, &c. Cet Auteur y fait d'abord une queftion : il demande qu'eft-ce qui conflitue la dureté des os , enfuite il démontre par quantité d'expériences très- curieufes , que la transformation des membranes & des cartilages en des parties offeufes, n'eft point du tout l'effet d'une offifîcation parfaite, telle qu'on l'a cru jufqu'au moment de fes découvertes ; mais qu'elle eil réellement l'effet d'une efpece d'incruflation animale formée par le moyen d'une matière terreufe qui enduit de toutes parts les fibres &: fibrilles du réfeau qui conflitue le parenchyme cartilagineux de la partie qui s'ofîifîe. Après cela M. Héri[fant donne les moyens de faire reparoître fous leur première forme les cartilages ou les membranes qui fe font o/îifîés, en les dépouillant entièrement de la matière terreufe dont chaque fibrille efî encroûtée en dedans & en dehors. Il fuit des découvertes de cet Académicien , que les os font des organes dans la compofition defquels il entre deux fubflances principales : l'une , qui fert de bafe à l'autre , efl une efpece de parenchyme cartilagineux qui ne s'olîifie jamais ; la féconde fubflance efl purement terreufe : c'efl elle qui donne la folidité & la dureté aux parties ofleufes. Le procédé dont notre Auteur s'efl fervi pour dépouiller la fubflance animale des os de fa matière terreufe, confifte à laifTer tremper des os^lus ou moins de temps dans une liqueur compofée d'une partie de bon efprit de nitre & de trois parties d'eau commune; alors les os perdent, au profit delà liqueur, prefque la moitié de leur poids. M. Hérijfant ayant fait évaporer cette liqueur jufqu'à pellicule , il en a retiré des criflaux jaunâtres, affez femblables à un fel neutre vitriolique à bafe terreufe. Il fit enfuite calciner dans un creufet toute cette maffe faline , laquelle devint alors très-blanche & analogue en tous points à une vraie terre abforbante ; elle pefoit , à 54i O S quelques grains près , lemême poids que celui que les os d'épreuve avoient perdu après la difToluîion entière de la matière terreufe. La fubflance animale & cartilagineufe , dépouillée ainfi de toute fa terre & préfentée à la flamme d'une bougie , brûla aufîi-tôt comme un morceau de cuir ou de veffie defféchée : il n'en refta qu'un charbon noir, fpongieux , luifant , léger & friable. M. Hérijfant a fait pafTer tous les os du corps humain par les mêmes épreuves que les précédentes , & il n'a trouvé que l'émail des dents qui ait apporté une exception à cette conformation , en fe diffolvant totalement dans fa liqueur acide , fans y laifl'er aucun veftige de fub- ftance animale. Cette conformation de l'émail des dents eft encore expli- quée par lemême Auteur dans un Mémoire de l'Académie, année 1754. M. Hérijfant a prouvé depuis cette époque , que les madrépores , les coraux &c les diverfes productions de polypiers à confiftance de pierre font , ainfi que les os , formés par incruflation. Les os de poiffons & les cartilages en général ne différent des os des autres animaux , que parce qu'ils ne fe trouvent incruftés que d'une très-petite quantité de matière terreufe. Dans le même volume de l'Académie, M. Hérijfant rapporte un autre Mémoire intitulé , Eclaircijfemens fur les maladies des os. Cet Au- teur démontre , par une longue fuite d'expériences , que toutes les maladies des parties ofTeufes ( fi l'on en excepte les luxations ) com- mencent par un ramolliffement plus ou moins fenfible , qui fe manifefte dans une ou dans plufieurs portions de ces organes : d'où il réfulte né- ceffairement une décompofition plus ou moins complette de l'os malade. En forte que ces parties font obligées de fe recompofer de nouveaiL pour fe rétablir. L'Académicien établit deux fortes de décompofitions ; favoir une infenjîble , & l'autre fenjîbU, La première confifte en la dé- perdition plus ou moins grande de la matière terreufe des os , que les fucs viciés rongent & détruifent peu-à-peu. La décompofition fenfible eft toujours la dernière , & a lieu lorfque les os perdent leur forme naturelle , leur volume ou leur confiftance. La décompofition des os, dit M. Hérijfant ^ confifte en ce que les fucs viciés dépouillent la partie terreufe de la fubflance cartilagineufe , en forte que les os acquièrent par-là un degré de moUeffe toujours relative à la déperdition de cette terre calcaire. La décompofition des os a lieu dans les exoftofes , dans les anchylofes , dans la carie , dans le cal des os , dans l'exfoliation , &c. os 543 & la matière terreiife fe porte alors du côté des urines ; c'efl ce que M. Hérijfant a démontré très-évidemment , tant dans le cas de vérole , de fcorbut & d'humeurs froides , que dans celui où l'on efl attaqué d'une goutte avec exoftofes ou des nodofités. M. Ravoton , Chirurgien Major de l'Hôpital royal & militaire de Lan- dau , &c. a fait plufieurs remarques fur l'exfollation des os , qui eft pro- prement l'ouvrage de la Nature. La Nature , dit-il , emploie plus ou moins de temps dans cette opération. L'adion de l'air agiflant fur la furface d'un os mis à découvert , ne peut être regardé tout au plus que comme caufe féconde. Les os ne s'exfolient que parce que le périofte qui les couvroit , & qui leur apportoit par des milliers de petits tuyaux un flic propre à les nourrir , n'exifte plus ; d'où il fuit que la portion d'os qui en étoit pénétrée , doit fe delTécher & perdre infenfiblement fon principe de vie. L'air féconde cette exfoliation dans une plaie expofée fouvent à nud. Plus les hommes font jeunes , vigoureux & bien conftitués , & plus l'exfollation des os eft prompte & adive ; fi au con- traire les hommes font vieux , foibles ôi languiffans , l'exfollation fera longue & tardive : cette différence ne provient que de l'abondance & du degré de bonté des fucs qui s'épanchent au temps que la circulation eft ceftee dans la portion d'os qui doit fe féparer. M. Ravoton dit que l'exfoliation de ceux chez lefquels le fangfe trouve imprégné d'un vice vénérien , chancreux , écrouelleux ou fcorbutique , éprouve des lon- gueurs & des difficultés infinies; elle fe fait le plus fouvent par parcelles où il fe développe un principe de carie , qu'on ne détruit que bien diffi- cilement , & après avoir mis en ufage les moyens les plus propres à combattre le vice dominant. On fait que les exfoliaticns fuperfîcielles du crâne & celle des grands os de la jambe fe font en quarante ou cin- quante^ jours; mais fi l'agent qui a mis les os à découvert, les a contu- fionnés profondément , la portion qui fe féparera fera épaifTe , & fe fera attendre près de trois mois.- M. Hlrlffant^ dans un autre Mémoire lu à la Rentrée publique , année 1766, a voulu éclairclr la formation des moules, des pétoncles, des huîtres , &c. Il démontre aufiî qu'il y a une grande analogie dans la formation & la nature des os , & dans celles des coquilles. Cet Aca- démicien ayant prouvé de refte l'exiftence d'une fubftance animale & d'une fubftance terreufe dans la compofition des coquilles , a cherché à connoître fi l'organifation de cette matière animale étoit la même 544 O S dans toutes les coquilles , ou bien û elle n'offroit point quelques diffé- rences dignes de notre attention. Pour s'en inflruire d'une manière non équivoque , il a fait paffer une quantité prodigieufe de coquilles par des épreuves femblables à celles oii ilavoit déjà fait pafler tout le fqiielette humain, & il a découvert que cette fubifance n'eft qu'un tiflu de fibres à réfeau engendrées d'une liqueur analogue à celle qui nous donne la foie. La difpofition 6c l'ar- rangement de ces fibres donnent lieu à deux fortes d'organifations des coquilles, dont l'une eÛ^mpk, & l'autre compofée : la. JimpU eft celle oii ces fibres forment fimplement des membranes ; la compofée eft celle où non-feulement ces fibres forment des membranes , mais encore où ces membranes fe trouvent hériffées d'une quantité prodigieufe de petits poils foyeux ramaifés en manière d'aigrettes. Enfaite M. Hérijfant fait voir que les couleurs des coquilles dépen- dent principalement des particules colorantes des liqueurs variées qui circulent dans la fubftance animale ; lefquelles particules teignent les molécules de la fubftance terreufe qui feules fe chargent des particules colorantes. Cet Académicien fait voir encore que les coquilles croiffent par développement , & que leur dureté dépend de l'interpofuion de la fubftance terreufe qui en pénètre les fibres & les incruûe à mefure qu'elles prennent leur forme. Enfin , cet Auteur finit endifant que les pores, les madrépores , mille- pores , les coraux , &c. font, i°. des efpeces fingulieres de grouppes formés par une quantité prodigieufe de petits tubps dont chacun efl à l'individu qu'il renferme ce qu'une coquille efi: par rapport à l'animal qui y eft renfermé , & que ces tubes font compofés , comme les coquilles, d'une fubftance animale & d'une fubflance terreufe. 2°. Que ces belles machines animales , aufli bien que les glands de mer , les tuyaux vermicu^ laires , les perles fnes , les coquilles d'œufs , Vos dcfeche^ les cruflacées , les belemnitcs, les piquans d'ourjins foffîUs , les glojfopetres , &c. font autant d'incruftations qui donnent, par l'analyfe chimique , les mêmes principes que les coquilles. 3°. Enfin que l'organifation de la fubliance animale de toutes ces produirions eft des plus dignes de notre attention , comme on fera à portée d'en juger par les deifins & gravures qui font placés à la fin de ce Mémoire. Quelle variété ne trouve-t-on pas dans les os des animaux ? Les dents qu'on O s 545 qu'on ne peut s'empêcher de regarder-comme des efpeces d'os , en four- nifTent un exemple ; il nous fuffira de citer celles du cachalot , de l'élé- phant , du narwhal , de la lamie , du lion , de la dorade , de la vache ma- rine, du crocodile, du marfouin, & celles de l'homme, qui font de tous les os humains les plus durs &c les plus compares. FoycirartkU Dents. Peut-être que fi les cornes du bœuf, du bouc , &c. euffent été rem- plies par la nature àes fucs calcaires , elles auroient acquis la dureté de celles du cçd, de l'élan , du chevreuil , qui font des efpeces d'os. Ne pourroit-on pas en dire autant des ongles des oifeaux 6c des quadru- pèdes } Dans la tête de la feche , de la carpe, de l'aîofe , du merlan , dans le cœur du cerf, & dans une infinité d'autres animaux, l'on trouve une linguliere variété d'os : il y a quelques poiffons , tels que l'orphie , dont les os verdifTent par la cuifTon : les os des cruflacés , animaux que l'on ne peut guère s'empêcher de regarder comme couverts d'une efpece d'os, deviennent rouges par une femblable cuiffon: les os des quadru- pèdes & des volailles , même l'ivoire, fe ramoUiffentôc deviennent fria- bles en les faifant bouillir dans un vafe fermé, qui contient une cer- taine quantité d'eau. De quelle utilité ne font pas les os dans les befoins de la vie ? Sans parler de ceux qui font , dit-on, utiles en médecine , tels que ceux du talon & du cœur du cerf, les cornes de cerf, les dents de brochet, la coquille d'huître, celle de l'œuf, l'os de la feche , celui du crâne hu- main, & quantité d'autres que l'on regarde comme aftringens, anti-épi- leptiques , alexipharmaques , &c. les os font employés par les Tabîet- tiers pour faire des touches d'épinettes, des fpatules , des peignes,, des jetons , & quantité d'autres ouvrages moins chers que ceux faits avec l'ivoire ; les dents du cheval de rivière fervent à faire des dents arîiiî- cielles, elles en ont la dureté. L'os de feche, connu fous le nom de bifcuits de mer^ fert aux Oifeliers pour amufer les ferins , &à quelques Fondeurs qui en mettent dans la compofidon de certains moules où ils coulent des métaux : les os de mouton calcinés donnent une poudre dont les Diamantaires fe fervent pour dégraiffer leurs pierreries : enfin, l'os du bœuf qui ne fembloit être qu'une matière de rebut, & feulement propre aux Cordonniers pour pohr la femelle de leurs fouiiers , vient d'être employé avec fuccès comme un moyen de fubfiilance pour les Tome 1 r» Zzz 54<5 O S pauvres, Se même pour les riches dans un temps de difette. Ceft as> employant ces os cruds ou cuits que la Société Littéraire de Clermont- Ferrand a , fmon appris , au moins reftifîé l'art utile d'en faire des bouil- lons gras , très-bons , très-nourriffans , de la gelée, & de lesréduire en tablettes pour l'utilité du Voyageur, du Soldat, du Marin, &c. Confultez fon Mémoire fur Tufage économique du Digejîcur de. Papin , année lyGi. Les tablettes de bouillon offeux , peuvent auffi fervir de coulis de viande , elles ne reviennent pas à un fou chaque : cependant une tablette €iî la dofe d*un excellent bouillon, ou d'un potage très-fain pour une perfonne. On ne doit pas inférer de cet avantage connu que les os foient fari- neux , & que lorfqu'ils ont été épuifés par un long féjour dans une terre humide , ils contiennent encore quelque matière alimenteufe : il n'en eft rien ; & l'idée de réduire en poudre les os d'humains ô£ de les con- vertir en aliment à titre de cori^s farineux , qui fut conçue en effet Sz exécutée pendant le fiege de Paris , au temps de la Ligue , ne peut être tombée que dans une tête effentiellement ignorante & bouleverfée par la faim & par le défefpoir,. Dans les animaux les os compofent prefque tout le volume apparent; réunis enfemble , ils portent le nom de fquelette , lequel efl l'image de la conformation de l'animal auquel il a appartenu. Prenons pour exem- ple celui de l'homme : quel fpeâ^acle merveilleux préfente à un œilr philosophique cette charpente animale ! nous l'avons déjà dit, quelle légèreté & quelle force dans ces os ! quel appareil ! quelle variété ad- mirable dans les formes , dans leurs diverfes manières de fe joindre , de fe mouvoir , tous appropriés d'une manière finguliere à leurs ufages : mouvement de coulifle , de charnière , de genou , de pivot ; on obferve des cavités , des foffes , des fmus , des rainures, des échancmres , des trous deftinés à recevoir , à loger diverfes pièces de la machine , à- donner pafiage aux veines, artères, nerfs , vaifTeaux qui portent la- nourriture, le mouvement & la vie à toutes les parties du corps animé..,- La plupart des brutes ont, pour ainfi dire , une charpente femblable au fquelette de l'homme : ceci étant, on les pourra reconnoître & comparer, dans rhiiloire des os du corps humain que nous allons donner. . Defcription du fquelette de L'homme. ■ On fait que le fquelette eii raiTemblage de tous les os du corps^ linmain : on le divife en tête , en tronc & en extrémités : la tête comprend ïe crâne & la face. Le crâne eft une boîte offeufe, arrondie , un peu ovale ou fphéroïde , formée de l'aiTemblage de huit os , qui font le coronal ou frontal, Voc- cipital , les deux pariétaux , les deux temporaux , le fphénoïde & Vcth' moïde. On regarde communément les fix premiers comme les os propres , du crâne , &: les deux derniers , communs au crâne &; à la face. Ces os font plus durs à la furface , que dans le milieu de l'épaiffeur : c'efl ce qui les fait diftinguer en deux tables , l'externe & l'interne , & en partie moyenne appellée dlploé , qui eft d'une fubftance fpongieufe. La/ace eft formée de l'aflemblage de plufieurs pièces qu'on renferme fous deux principales , appellées mâchoires , dont l'une eft fupérieure &C l'autre inférieure. La mâchoire fupérieure eft immobile , & compofée de treize os , favoir de deux os maxillaires , qui font les plus grands, & font proprement la mâchoire fupérieure; de deux os propres du ne^ , de deux os de la pomette , des deux os unguis , des deux lames inférieures dunei, ^^^ deux os du palais & du vomer, à quoi il faut ajouter feize dents : favoir , quatre incifives , deux canines ou œillères & dix molaires. La mâchoire inférieure eft faite d'un feul os , qui contient aufli feize dents , quatre incifives , deux canines ôc dix molaires. Foye^ l'article Dents. Le tronc peut être divifé en trois parties , une commune appellée V épine , & deux propres qui font le thorax ou \z poitrine d>L le bajjîn, Uépine du dos eft une colonne ofleufe très-forte compofée de vingt- quatre vertèbres , diftinguées en cervicales, en dorfales^ en lombaires , &C de Vos facrum à l'extrémité duquel fe trouve joint un autre os appelle coccix. ^ ^ Le thorax ou la poitrine eft formé i**. par vingt-qua^ cotes , douze de chaque côté , dont on appelle les fept fupérieures vraies, & les cinq inférieures /z«//^5 ; 2°. par le Jlernum qui eft ordinairement compofé de deux pièces ; 3°. & par les vertèbres dorfales. Le baffîn ainft nommé de fa forme & de fon ufage eft fait de deux grands os , dits innominés , ou les os des hanches , qui fe joignent enfem- ble par devant , & font attachés par derrière à Vos facrum qui achevé de former le baftin. Les extrémités àw fquelette font au nombre de quatre; deux fupérieures & deux inférieures. Zzz 2 548 O S Chaque extrémité fiipéneure eft divifée en èpauU , en bras , & avant» Iras &c en main. L'épaule eft faite de deux pièces , une antérieure ap- pellée clavicule , & une poftérieure dite omoplate. Le bras n'eft fait que d'un feul os nommé humérus. L'avant-bras en comprend deux, l'un eft appelle Vos du coude , & l'autre , rayon ; la main efl diftinguée en trois parties; favoir, en carpe ou poignet qui efl compofé de huit os, en métacarpe qui efl fait de quatre , & en doigts qui font au nombre de cinq, chacun defquels efl: formé de trois pièces d.'^^^WcQS phalanges. Chaque extrémité inférieure ell partagée en cuijfe , enjamhe & en pied; la cuiffe n'efl faite que d'un os , appelle fémur ; la jambe efl com- pofée de deux grands os, nommés tibia &c péroné^ & d'un petit appelle la rotule. Le pied efl divifé en trois parties , comme la main : favoir , en tarfe , en mhatarfe , & en doigts ; le tarfe efl fait de fept os , favoir de Vajlragaly du calcamum ou OS du talon , de l'os naviculaire ou fcaphoïde, du cuboïde & des trois cunéiformes. Le métatarfe efl fait de cinq pièces , & les doigts ou orteils font au nombre de cinq , dont le plus gros eft fait de deux os , & chacun des autres de trois appelles /^/z^/^^^e^. Il fe trouve encore plufieurs petits os que l'on ne conferve pas ordinaire- ment dans le fquelette ; tels font les offelets de r oreille , l'os hyoïde , & ceux qu'on nomme fefamoïdes. On peut aifément fupputer le nombre de tous les os qui compofent pour l'ordinaire le fquelette d'un adulte humain , félon le dénombre- ment que nous venons de faire ; favoir , cinquante-quatre à la tête , cinquante - quatre au tronc , en prenant le coccix pour une pièce &c leflernum pour deux , & cent vingt-quatre aux extrémités ; d'où refaite le nombre de deux cents trente-deux , auxquels , fi Ton ajoute les huit offelets des oreilUs , dont il efl parlé à l'article des fens , au mot Homme, & les troiflf- pr^lppales pièces de Vos, hyoïde, on trouvera que le total monte à deux cents quarante-trois os , fans y comprendre les os fefa^ moïdes. Comme le tifTu des os efl fpongieux , & que leurs cavités font rem- plies de liqueurs & de moelle , pour parvenir à former de beaux recueils d'ofléologie , & à conferver leurs os avec leur blancheur, on a recours- à. quelques procédés. On fait bouillir les os à plufieurs reprifes dans de l'eau , & on les place enfuite à l'air pour les faire fécher à l'expcfition d^i levant & du midi ; de manière qu'ils puifTent recevoir les différentes imprefTions de l'air, le foleil, la pluie , la rofée : on les met fur une os 54^ table couverte de fable , qui en abforbe l'humidité. Si Ton fait macérer les os dans une eau contenant de la chaux vive , du fel de foude , de l'alun , ils acquièrent par ce procédé , qui a fes défagrémens , une plus grande blancheur. Après ces opérations , il faut enduire les os d'ua vernis léger ; il les garantit de l'imprefTion de l'air. Obftrv allons fur les fquclettes des hommes & des brutes. Il y a long-temps qu'on a remarqué de la variété dans le nombre des os du fquelette humain. Les jeux de la Nature fur le feul nombre des côtes nous en fourniflent un exemple : s'il fe trouve par hazard treize vertèbres au dos , il s'y trouve aufTi treize côtes ; mais quelquefois on en trouve onze d'un côté & douze de l'autre. On a nommé adamites les hommes qui fe font trouvés dans ce cas-là. Ruifch , Bonius , Fallope , &c, citent des fujets qui avoient chacun vingt-fix côtes. Ces faits fuffifent pour juftifîer que ce n'efl point une chofe étrange que le manque ou l'excès du nombre des côtes , au-delà de l'ordinaire. Mais dans tous les cas notre machine n'en foufFre aucun dommage : l'on en peut dire autant des perfonnes dont les futures du crâne, fur-tout dans la lamibdoïde, font garnies d'iles ofTeufes qu'on nomme dès ou os wormiens , ojja wor' m'iana (ainfi appelles de leur Auteur Allemand) : ces os furnuméraires qui tombent ordinairement quand on démonte les pièces du crâne , ne fe rencontrent pas dans tous les fujets. On peut confulter l'excellente Oféogonie ou Anatomie des os , par M. Monro , imprimée à Edimbourg , en Anglois , in-iz. dont M. Sue a donné une traduction ornée de très- belles planches. Nous avons expofé que la tète eu une boîte ofTeufe compofée d'une multitude de pièces de diverfes formes & ftruftures , lefquelles s'em- boîtent avec une jufleiTe finguHere les unes dans les autres ; elles font difpofées de manière que tout le poids qui paroîtroit devoir écraferla tête , tend au contraire à les Hèr plus étroitement. Avec quel art l'os de la pomette efl-il retenu ! c'eft lui qui efl la vraie clef du crâne ; c'efl fur lui: que fe porte tout l'eiîbrt. Tous les événemens font prévus par la fage nature. Elle a difpofé les diirérentes pièces du crâne , comme celles d'un parquet d'appartement. G'eft cette flru£ture qui fait que quand un coup efl: reçu fur une pièce, il fe trouve anéanti dans les autres. En un mot le crâne peut réfifler aux ditîerens chocs modérés qiiî peuvent lui arriver dans tous les temps. S'il eût été d'une feul« 550 O S pièce , le moindre coup lui eût occafionné des fêlures. Nous avons dit auffi qu'on dîflinguoit le crâne en deux tables. C'eft encore cette ftrudure qui fait qu'une partie du crâne peut s'exfolier dans toute fon épaiffeur &fe féparer du refle ; témoin cette femme de l'Hôtel-Dieu de Paris dont parle Saviard (^Oh{. XC ) qui demandoit l'aumône dans fon crâne } objet touchant pour Thumanité , & fujet de fpéculation pour un Anato- mifle Phyficien. C'eft cette même femme dont il eu queftion dans les Mémoires de f Académie des Sciences ^ année lyoo , page 4.S. Au relie tous les os du crâne font joints entr'eux , & quelques-uns même ave<: ceux de la face par futures , & ces futures font d'autant plus apparentes , que les fujets font plus jeunes. On voit au Cabinet du Roi, une fuite de crânes humains , dont les variétés qu'on obferve dans la figure & le volume paroiffent fi étranges, qu'on ne comprend pas comment le cer- veau a pu fe développer d'une façon qui y réponde , & qui foit fi diffé- rente de celle qu'il doit naturellement avoir. Il efl bon d'obferver que l'homme , en comparaifon des autres animaux , a la tête plus grofïe, & qu'à proportion elle contient plus de cervelle. Foye^ Cerveau. Enfin il efl digne de remarque i*'. que l'épine du dos efl le principal appui de la tête , des bras & de la poitrine. 2°. Que les vertèbres font articulées enfemble , tant médiatement qu'immédiatement par des car- tilages & des ligamens qui donnent à l'épine la facilité d'obéir aux mou- vemens du corps. La forme des vertèbres varie admirablement fuivant la nécefîité de la place oii elles ont été mifes. La nature defcend par nuances de la forme de la première jufqu'à la dernière. L'épine des brutes nereffemblepointà celle de l'homme, tant par la quantité des vertèbres que par la différence , la difficulté ou la privation du mouvement. Dans les ferpens qui, comme les couleuvres, ne fontpointvenimeux, les vertèbres font plus fouples & en grand nombre , ce qui fait que pris par la queue , ils peuvent s'entortiller autour du bras. La vipère qui efl venimeufe n'a pas cette propriété. Les apophyfes fpinales peuvent chez l'homme être horizontales au lieu d'être perpendiculaires , ainfi qu'on le remarque dans les perfonnes qui font des tours & qu'on a exercées dès leur jeu- neffe à différentes flexions. Les oifeaux n'ont de vertèbres qu'au cou , & elles égalent en longueur le refle du corps. Mais on ne les voit point fe raccourcir , & prendre une forme irréguliere, comme on le voit dans les différens boffus de l'efpece humaine, yoye:^ maintenant l'article Ver^ ,téres, 3°. Que l'attitude droite efl la plus ferme & la plus affurée , os 55, parce que la furface du contaft des points d'appui elT: plus large , 6z que le poids porte deffus plus perpendiculairement. 4°. Que les os font plus larges , plus épais, plus élaftiques à leurs extrémités qu'au milieu, afin de mieux s'articuler &:de fupporter un effort plus confidérable fans fe déplacer ou fe difloquer facilement. 5°. Que les lames des os &leur gluten font plus rapprochées les unes des autres & en plus grande quantité dans le milieu qu'aux extrémités : auffi font-elles dans cet en- droit d'un tilTu plus fort & plus ferré : ce font elles qui , comme autant de petits crochets , retiennent la moelle , & l'empêchent de s'affaiffer Se de tomber au moindre effort , ce qui produiroit des douleurs très- aiguës dans les os; c'eil ce mal qu'on appeWe fpinamentofu : en effet la moelle étant tombée, ne reçoit plus de nourriture , elle fe corrompt &c gâte les os, qui sVxfolient. Mais heureufement ces cas font rares. 6°. Que le coccix étant encore cartilagineux fe prête lors de l'accouche- ment; mais lorfqu'il efl uni à l'os facrum , il fait obftacle ou rend plus difficile l'enfantement ( Le coccix efl aufTi ce qui fert de queue à tous- les animaux par fon prolongement. ). 7°. Que le bafïin efl plus grand, plus évafé chez la femme que chez l'homme , afin de donner de la place à l'accroiffement du fœtus. Ses os inno minés font aufîi plus élevés, fes hanches plus égales , plus larges & plus en arrière , ce qui lui donne finon plus de foupleffe , au moins plus de grâce dans la marche & la danfe. 8°. Que le flernum des femmes va toujours en augmentant depuis le haut jufqu'en bas; il efl aufTi plus large que celui des hommes. Leur poitrine efl encore plus courte , plus relevée, plus large, & le ventre bien plus long que n'ont les hommes. Il manque fouvent au flernum unt os, ou bien l'on y obferve un trou qui fert de paffage aux vaiffeaux des mamelles. 9°. Que la poitrine des animaux , tant quadrupèdes que volatiles, diffère de celle de l'homme; celle des quadrupèdes efl termi- née par une épine qui règne tout du long, & leurs bras font placés fur le devant de la poitrine; les oifeaux au contraire les ont fur le dos,- & leurs côtes font attachées à une large épine , unies les unes aux autres*, garnies de beaucoup de chair , ainfi que leur poitrine , & de' mufcles très-forts. 10°. Que les quadrupèdes qui fe fervent de leurs^ pattes antérieures pour porter à la bouche ont une clavicule comme Phomnie. Celle des oifeaux efl par proportion infiniment plus longue ,, ce qui leur efl d'une grande utilité pour maintenir leurs aîles à égaler diflances , ôc pour les rejetter en arrière. On a obfervé que les^ 55i O S quadrupèdes qui ont une clavicule , ont , comme les jfouris , les écu- reuils , les finges, &c. les jambes rentrantes. Le cheval & le bœuf n'ont point de clavicule , leurs bras ( jambes antérieures ) font attachés à l'omoplate en devant de la poitrine; aufîi leurs jambes font-elles cagnes, & leurs mamelles, au lieu d'être en devant, font placées en arrière. Les femmes ont la clavicule plus longue & plus large que chez les hommes, ce qui repoufTe leurs bras plus en arrière , & leur donne une plus grande agilité dans tout ce qu'elles font, & ne gêne point le volume des mamelles, fur-tout dans le temps qu'elles allaitent; leur omoplate ell: auffi plus platte & plus large que celle des hommes qui eft voûtée & triangulaire. ii°. Que le pied, pour être bien conformé , doit être large , long & voûté , & que nous fommes d'autant plus fermes èc plus forts étant debout, que le triangle que forment les extrémités des pieds avec les talons efl plus grand, foit qu'on ait les pieds toiu"nés en dehors , ou en dedans. ose ABRION ou OSCABIORN , efl un coquillage que M. Adanfon a rangé dans la claiTe des univalves , à caufe de l'animal qui l'habite , & qu'il a reconnu appartenir à la famille des Upas. M. d'JrgenvilU en çompofe la féconde famille de (ç.s muUivalves : voyez ce mot. Cet Au- teur dit aufli que c'efl une efpece de lépas à huit côtes féparées , qui s'attache aux rochers , ainfi que les autres ; mais comme ces pièces dé- tachées reffemblent un peu à la queue d'un petit crabe , & que les divifions de cet Ecrivain ne font en quelque forte fondées que fur les coquilles même privées de leurs animaux, dans ce fyftême l'ofcabrion rentre naturellement dans la claffe des coquilles multivalves. "Lqs of cabrions ont \^ forme d'un demi-ovoïde, & font compofés de huit écailles courbes, pofées en recouvrement les unes fur les autres, de devant en arrière , relevées toutes dans le miheu d'une petite côte plus ou moins aiguc, & enclavée vers le bas dans une membrane fle- xible , écailleufe &: chagrinée dans fon contour. L'ofcabrion offre plufieurs variétés connues fous différens noms. Si leur forme eft un peu applatie , on les appelle cloporte de mer , ou pu- naîfe de nur^ cimex marina; fi la forme eft arquée finueufe , c'eft la chenille de mer; enfin s'ils font un peu arqués, on les appelle nacelle: en ^^Qt ils refTemblent beaucoup à une chaloupe , les membres & les varaiigues font repréfentés par les écailles courbes de la coquille. Quand on détache les huit pièces de l'ofcabrion pour en faire voir la ftrudure , il refte une membranç os OSE 553 membrane qui reffemble alors à la carcafTe d'une chaloupe privée de fon bordage. L'on nous en apporte une très-belle efpece de l'Amérique: on la prend fur les côtes de la grande Anfe , île de Saint-Domingue , à quatre pieds de profondeur ; ils font d'un gris cendré en-dehors^ chagrinés fur leur bords , verdâtrcs en-dedans. Ceux du Chili font à écailles violet-noir nuées de jaune. Il y en a qui font d'un bleu célefte en-dedans , & dont le defTus efl à taches alternatives de gris 6c de noir. Ceux de la Caroline font gris de lin, nues de vert en-deffus & blancs en-dedans. Les ofcabrions des parages des Magellans font fort larges , & leurs écailles étant nétoyées paroiffent brunes , tachées dans le milieu de blanc. Ceux de nos mers font ou gris ou bruns nues de verdâtre , quel- quefois violets , en-dedans de forme étroite & alongée. On dit que l'ofcabrion s'attache fur l'algue , fur le bois & fur le do$ de la baleine, & qu'il vit en parafite. Il ne faut pas le confondre avec le pou de la baleine: voyez ce mot. Les Pêcheurs de la mer d'Iflande, où ilfe trouve des ofcabrions, en mangent pour étancher leur foif: on pré- tend que c'efl encore un bon remède pour le mal de mer , notamment l'efpece de petite pierre rubine qu'on trouve dans fon corps , & que les Iflandois avalent volontiers pour obtenir l'accompliffement de leurs fouhaits : ils nomment ce corps pierreux , Peter s Jîein , pierre de Saint Pierre , & fon enveloppe Petersfkip , barque de Saint Pierre. Confultei les ^cies de Coppenh. & les Colleclions Académiques ^ tome IF. page 2^4» pour la defcription anatomique de l'ofcabrion , entr'autres celles de Hannas Tharlevius, & de jACOBiEus , oïl l'on apprend avec éton- nement le nombre d'yeux fixes de ce teftacée. OS DE SECHE, roye^à l'article SechE. OSEILLE ou SURELLE, acetofa feu oxalis. C'eft une plante dont on diflingue trente -une efpeces : nous en rapporterons de trois fortes principales qui font en ufage dans les cuifmes , dans la médecine & dans les pâturages. 1°. L'Oseille ordinaire ou Oseille longue ou vinette , ace- tofa longi-folia aut oxalis vulgaris pratenjls. On la trouve communément dans les prés &les forêts, on la cultive aufli dans les jardins pour l'ufage de la cuifme : fa racine eft fibreufe, longue , jaunâtre, amere & acerbe; elle pouffe des feuilles alternes, oblongues, à oreilles du côté qu'elles tiennent à leurs queues, vertes, luifantes & remplies d'un fuc acide; fa tige eft cannelée ôc monte à la hauteiur d'un pied & demi, portant eil Tome IK* AAaa 554 OSE fa fommité dès fleurs fans pétales. /. Ray obferve que dans Ceii& efpecé de plante il y a des fleurs ilériles & d'autres fertiles; les fleurs flériles ne portent point de fruit, & le pif^il de celles qui font fertiles fe change en une graine triangulaire de couleur de châtaigne & luifante. La fruûi- fîcation de l'ofeille efl , dit M. D&kiL{e. , eflentiellement la même que celle de la patience , & elle efl du même genre , mais elle porte des fleurs mâles & des fleurs femelles féparëes fur difFérens pieds. On emploie la graine , les feuilles & la racine de cette plante : le fua de l'ofeille efl d'un goût acide manifefle , qui donne la couleur de pour- pre au papier bleu : aufîi en fait-on quelquefois ufage pour préparer le fil de lin , celui de chanvre & les toiles de fil pour la teinture rouge : on en tire un fel effentiel qui , jeté fur les charbons ardens , brûle comme la crème de tartre; mais fi on le mêle avec le fel de tartre, il répand ime odeur urineufe, de même que le fel ammoniac. On peut dire que cette plante potagère pofTede toutes les propriétés des végétaux. La vertu des graines, dit M. Geoffroy , Mat. Médic. efl entièrement diffé- rente de celle des feuilles & des racines. 2**. l'Oseille ronde ou franche , acetofa rotundi-folia hortenfts. Sa racine efl rampante , ainfi que fes tiges ; fes feuilles font prefque rondes , garnies à leur bafe de deux oreillettes ; leur couleur eîl un vert de mer : du refle elle reffemble à l'efpece précédente , mais fes fleurs font hermaphrodites : on la feme dans les jardins pour l'ufage de la cuifme. 3°. La petite Oseille, ou l'Oseille sauvage, ou Oseille PE MOUTON , acetofella ov'ina. Cette plante qui croît dans les champs aux lieux fablonneux , efl haute de quatre pouces ou environ ; fes feuilles font petites , & ont la figure d'une lance ; fes fleurs font difpo- fées par grappes : cette petite plante paroît toute rouge fur la terre, principalement quand fes femences font mûres ; fa racine efl rampante, ligneufe , fibreufe & rouge : c'efl la plus acide de toutes les ofeilles ; les brebis en mangent ; & c'efl de-là que lui efl venu le nom à'ofellU de mouton. On fait avec les feuilles de l'une & l'autre ofeille des fauces très- bonnes ; car elles rendent les viandes plus agréables , & excitent l'ap- pétit par leur goût acide : on en fait aufîi des conferves & unfirop. L'ofeille prife intérieurement, efl rafraîchiffante , tempère le mouve- ment du fang , réprime la bile qui bouillonne : elle l'épaifïït ou l'adoucit OSE O S ï J55 félon les circonftances ; elle convient dans les fièvres peftilentieîles &c intermittentes : c'efl: iin bon fpécifîque dans le fcorbut alkalin. Banholirt dit dans les Mém, de Coppenh. tGyt , Obf. IX , que les Peuples du Groenland en font ufage avec le cochléaria dans les bouillons d'avoine ou d'orge pour la même maladie qui y efl endémique. Il dit aufîi que Toreille & le cochléaria naiflent abondamment dans ce pays , & qu'on doit faire ufage des deux enfemble. La racine d'ofeille eil: peu ou point acide , mais fort huileufe ; elle efl apéritive. Cette racine étant feche , a la propriété finguliere de donner à l'eau bouillante une belle couleur rouge délayée : on peut profiter de cette propriété pour faire une tifane dont la couleur imite celle d'un vin rouge , & tromper avec cette boiffon certains buveurs malades , à qui il feroit dangereux d'en accorder. La graine de l'ofeille efi: efiimée cordiale , & convient dans la dyfîenterie : les feuilles font réfolutives , m.aturatives & fuppuratives ; en général l'ufage de cette plante potagère eft recommandé dans toutes les maladies qui ont poue caufe un alkali fpontané. Les perfonnes fujettes àl'afthme , à la toux , aux aigreurs de l'eflomac , & les filles attaquées des pâles couleurs , en doivent éviter l'ufage. OSEILLE DE GUINÉE. M. de Prifontalne dit qu'on fe fert des feuilles de cette plante dans la cuifine comme de l'ofeille de jardin , au défaut d'autre : on en fait une boiffon agréable &: des confitures. Maifon RuJÎLque de Cayenne. M. Haller dit que cette plante efi \\n géranium, OSERAIE. On donne ce nom à un lieu planté de jeunes ojisrs, OSÎER , efpece de faule : voye^ à r article Saule, OSINOWIECK. Nom que les habitans des environs de Kafimof ert Sibérie donnent à un champignon d'une efpece très-fmguliere : à peine i'a-t-on coupé, que le chapeau dont il eft couvert devient bleu ; la chair, qui eft blanche , prend également la couleur bleue lorfqu'elle eil ex- pofée à l'air ; enfuite elle devient verte : le jus qu'on en exprime fur un morceau de toile paiTe prefque fubitement de nuances en nuances , jufqu'au vert de Saxe , & puis fe change en bleu, couleur qui pâlit enfuite & qu'on n'a pu encore fixer. Ce champignon croît fur-tout ^ans les bois où l'on trouve beaucoup de peupliers ; il reffemble aflez au holetus vifcidus, efpece de moufferon , mais il efl: plus charnu. Nous avons obfervé plufieurs fois dans les bois de Chantilly que îiombre de champignons de çuifme qui paroiffoient fufpeds au jugement AAaa z 55^ O S M O S T des gourmets, devenolent aufîitôt bleuâtres à l'endroit où j'en avois en- levé une portion du chapeau. OSMONDE. f^oyei au moi FOUGERE. OSSEMENS FOSSILES ou PÉTRIFIÉS. Foyei Ostéolithes. OSSIFRAGE , c'eil Vorfraie : on la nomme aulîi ojfîfrague. OSSONS. Nom que les Nègres de Guinée donnent aux éléphans. OSTÉOCOLLE ou PIERRE DES ROMPUS , lapis offifragus aue jlelcchites. C'efl ' communément une pierre topheufe ou en forme de tuyaux qui reflemble à des racines d'arbres , ou à des portions de rofeaux comme pétrifiées ; elle efl: raboteufe , grisâtre, ou blanchâtre , ou jaunâtre , d'une (ubftance marneufe , où la partie calcaire & le fable dominent tantôt plus , & tantôt moins: elle fe forme par incrufla- tion dans tous les lieux arides , fablonneux, garnis de végétaux & arro- iés d'eaux qui charient avec elles les fubftances qui la compofent , & qui la forment par dépôt. L'oftéocolle fe durcit à l'air , mais tant qu'elle eft en terre , elle eft tendre & fragile ; ce qui eft caufe qu'on a de la peine à la tirer en grands morceaux. Voye:^^ à C article Stalactites de cet Ouvrage , & le Mémoire fur les Stalatlites par M. Gucttard, lequel fe trouve parmi ceux de V Académie Royale des Sciences, année lyS^, Voyez aufîi les Obfervations fur l'oftéocolle , par MM. Gleditfch & Margraff", Mémoires de T Académie de Berlin , année iy^8 , page ^6-6 C), Merman fait mention d'une oftéocolle bleue de Maffel, qui eft aujour- d'hui très-connue , parce qu'elle contient cinq onces & demie d'argent par quintal. L'oftéocolle eft d'un grand ufage dans la Pharmacie d'Allemagne : on prétend que prife intérieurement , elle a la propriété de réunir les os rompus ; mais toute la propriété de cette fubftance foftile ne confifte guère que dans les préjugés , qu'on accueille avec enthoufiafme contre toute raifon : aufti Cartkeufer l'appelle-t-il rude^ cra^um & ignobile concretum, OSTÉOLITHES. En général on donne ce nom à des os d'animaux décharnés qu'on retire de la terre , & qui font plus ou moins altérés: iî y en a qui peuvent recevoir le poli ; quelques-uns font colorés ^ d'autres font comme calcinés : on en trouve des exemples dans les tnrquoifes, l'unicorne foftile ou les os de mammoth , les gloffopetres, les os humains, ceux d'olfeaux & de quadrupèdes. On reconnoît fouvent à quelle efpece d'animaux ces os ont appartenu , témoins zts parties de fquelettes de rheone 6c d'iiippopotame, qui ont été foupçoniiées tels parles Acadé« O s T O V A 557 miciens de Paris, & qui ont été trouvées à mi-côte fous une même roche dans un lit de lable gris près d'Etampes ( M. Gmttard penfe que ces os ont appartenu les uns à une bête fauve & les autres au tur ). Témoins encore ces os d'éléphans , de chiens ou de loups , de brebis , de che- vreaux , de bœufs & de cerfs avec leurs cornes , que le Dodeur Targionl' Toietii a trouvés dans les coltines & dans la vallée inférieure d'Arno en Tofcane: on trouve quelquefois-dès arêtes de poifTons très-bien con- fervées , fur-tout dans les lieux d'où l'on tire les pétrifications des ma- tières marines. Nous avons ramaffé des côtes, des mâchoires, &c. dans les plâtrieres de Montmorenci & de Montmartre. Les environs de Dax au pied des Pyrénées offrent aufîi un amas très-confidérable d'os de poiflbns , de dents, de vertèbres , & entr'autres la mâchoire d'un cro- codile de l'efpece appellée gavial dans le Gange : on a trouvé à Mary près de Meaux, un os de la tête de l'hippopotame. La Sibérie, la Polo- gne,l'Allemagne & l'Angleterre font remplies d'oftéohthes. Confulte{ une Differtation latine quia pour titre : Œdipus ojleolithologicus ^ feu Dijfer^ tatio de cornlbus & ojjîbus fojjilïhus Canfladïenjîbus par David SpUifs, Confultez auffi les Mém. de VAcad. Royale des Sciences^ année lyi^ & lyzy, OSTRACITE , ojîracites. On appelle ainfi les efpeces d'huîtres proprement dites & devenues foifiles , &: parmi lefqu elles il y en a dont on ne rencontre pas l'analogue marin : voyez Huître, Quantité d'oftracites font encore effervefccnce avec les acides , & d'autres font en quelque forte affez pétrifiés & affez durcis pour faire feu avec le briquet; on en rencontre par-tout dans des lits de pierres calcaires & fableufes. Les anciens Métallurgiftes ont auiîi donné le nom à'ojlracites aux cad- mies des fourneaux de fonderie. Foyei^ le mot Cadmie. OSTRÉOPECTINITE. Foyei Hystérolite d-TÉRÉBRATULE. OUACAPOU. Arbre de la Guiane qui a les mêmes propriétés ôc ufages que Vouapa. Voyez ce mot. OUAILLE. Arbre qui croît dans les plaines & fur les hauteurs de la Guiane, & qui fert à faire des canots & des bois de bâtiment; celui des montagnes eft rouge & celui des plaines efl: blanc. OVAIRE. En Botanique on entend par ovaire l'endroit oii les femen- ces des plantes font attachées, & où elles reçoivent leur nourriture. En Anatomie , on entend par ovaire les deux corps blanchâtres, ovales, applatis & attachés aux deux côtés du fond de la matrice ; ils font très- petits avant l'âge de puberté, relevés & polis dans cet âge, moins gros & ridés dans les vieilles, ôc remplis de cicatrices dans celles qui ont 55S O U A eu plurieiirs enfans : il y a des chofes bien fingulieres à remarquer dans les ovaires ; il y a les faux œufs qu'on appelle hydatides. L'ovaire efl ordinai- rement de la groffeur d'un œuf de pigeon ; on y trouve quelquefois vingt ceufs , chacun gros comme un pois. Des Anatomiiles penfent que le fœtus fe forme d'un de ces œufs fécondé par la liqueur feminale du mâle, enfuite détaché de l'ovaire & porté dans la matrice. Toujours eft-il vrai que les femelles ne fauroient concevoir fans les ovaires , & que celles à qui on les a coupés , ceiTent, dit-on , d'avoir du penchant à l'amour. OUANDERONS ou OUANDEROU. Nom donné aux fm^es ba- bouins du Ceylan. U y en a en grande abondance & de diverfes efpeces, les uns font grands comme nos épagneuls; ils ont le poil gris & le vifage noir, avec une grande barbe blanche, qui va d'une oreille à l'autre , laquelle les feroit prendre pour des vieillards fauvages ; il y en a aufîi dont la barbe & le corps efl couleur d'écarlate pâle ; ils ne vivent que de feuilles & de bourgeons : d'autres qui fe nomment rilLoiirs , font fans barbe , mais leur vifage eft blanc , & leurs cheveux fe partagent comme ceux de l'homme. Cette efpece de fmge fait beaucoup de tort aux grains. On lit dans VHlJloire générale des Foyagcs^T. VIII, page 6 46", Edit. in-12, que les Chingulais eftiment autant la chair de ces efpeces de finges que celle du chevreuil. Le véritable ouanderon efl une efpece de babouin quia des abajoues, des callofités fur les feffes, la queue de feptouhult pouces de long, la tête environnée d'une large crinière & d'une grande barbe de poils rudes, marche plus fouvent à quatre pieds qu'à deux : il y a dans cette efpece des races qui varient pour la couleur du poil ; les uns ont celui du corps noir & la barbe blanche ; les autres ont le poil du corps blanchâtre & la barbe noire. Lorfque les ouanderons ne font pas domptés , ils font fi méchans qu'on efl obligé de les tenir dans une cage de fer , où fou- vent ils s'agitent avec fureur ; mais lorfqu'on les prend jeunes , on les apprivoife aifément , & ils paroiffent même être plus fufceptibles d'éducation que les autres babouins. Les Indiens fe plaifentàlesinllruire, te ils prétendent que les autres finges , c'efl-à-dire les guenons , ref- peûent beaucoup ces babouins , qui ont plus de gravité & plus d'intel- ligence qu'elles. Les ouanderons blancs font les plus forts de tous &c les plus méchans : ils font très-ardens pour les femmes , & affez forts pour les violer lorfqu'ils les trouvent feules, & fouvent ils les outragent jufqu'à les faire mourir. O U A 5^,; OUANGUE ou OUANGLE. FoyeiSESAME à /'^mc/e Jugoline. OUAPA. C'ed: l'orobe en arbre qui croît en Guiane dans les terres graffes : il eft tortueux & fouvent creux ; mais il efl utile pour divers ouvrages : on en fait des fourches & des piquets qu'on emploie au ibutien des terres. On s'en fert dans le pays avec le plus grand fuccès pour le pilotis , parce qu'il fe conferve dans l'eau & dans la vafe. Maif. Ruji. de Cay. OUARINE. L'ouarine & l'alouate font de la famille des fapajoiis ; êcce dernier ne diffère de l'ouarine que parce qu'il n'a point.de barbe bien marquée , qu'il a le poil d'un rouge-brun , au lieu que l'ouarine l'a noir. L'ouarine a la face large & carrée , les yeux noirs & brilîans, les oreilles courtes & arrondies , la queue nue à fon extrémité , avec laquelle il s'accroche & s'attache fermement à tout ce qu'il peut em- braffer : les poils de tout le corps font longs , luifans & pclis ; des poils plus longs fous le menton & fur la gorge lui forment une efpece de barbe ronde ; le poil des mains , des pieds & d'une partie de la queue efi brun; il n'a point d'abajoues , point de callofités fur les feffes ; ces parties font couvertes de poil comme le refte du corps ; il efl de la grandeur d'un lévrier ; le poil long qu'il a fous le cou lui forme une efpece de barbe ronde , & il marche ordinairement à quatre pieds. Ces fapajous ont une voix qui retentit comme \\\\ tambour , & fe fait entendre à une très-grande diflance. Marcgrave raconte que tous les jours, matin & foir, les ouarines s'affemblent dans les bois ; que l'ua d'entr'eux prend une place élevée & fait figne de la main aux autres de s'affeoir autour de lui pour l'écouter ; que dès qu'il les voit placés il commence un difcours à voix û haute & fi précipitée , qu'à l'entendre de loin on croiroit qu'ils crient tous enfemble ; que cependant il n'y en a qu'un feul ; & que pendant tout le temps qu'il parle , tous les autres font dans le plus grand filence ; qu'enfuite , lorfqu'il cefle , il fait figne aux autres de la main de répondre , & qu'à l'inftant tous fe mettent à crier enfemble , jufqu'à ce que , par un autre figne de main , il leur ordonne le filence ; que dans le moment ils obéiffent & fe taifent; qu'enfin alors le premier reprend fon difcours ou fa chanfon , & que ce n'efl qu'après l'avoir encore écouté bien attentivement qu'ils fe féparent & rompent l'afTemblée. Ces faits , dont Marcgrave dit avoir été plufieurs fois témoin , pourroient bien être exagérés & afîaifonnés d'un peu de merveilleux : le tout , dit M, de Buffon , n'çfl peut-ctre ^6o O U A fondé que fur le bruit effroyable que font ces animaux ; ils ont dans leur gorge une efpece de tambour offeux , dans la concavité duquel le fon de leur voix groiîit , fe multiplie & forme des hurlemens par écho ; aufTi a-t-on diflingué ces fapajous de tous les autres par le nom de hurleurs. OUAROUCHI. C'eft l'arbre à fuif de la Guiane. Il paroît un peu différent de celui dont nous avons parlé fous le nom Marbre à fuifàQ la Chine : celui de Cayenne efl: laiteux, & paffe pour un figuier : fa graine, qui eft jaune, de la figure d'une mufcade , & de la groffeur d'une noifette , ell couverte d'une petite pellicule , qui renferme fon amande : c'eft de cette amande grattée , lavée &pilée, qu'on fait une pâte qu'on doit remuer fortement dans une chaudière jufqu'à ce qu'elle fe couvre d'humidité & d'une efpece de fumée : on la met alors à la preffe , & il en fort le fuif qui fe fige : on le fait rebouillir le lende- main , on le paffe dans un linge , enfuite on le jette dans un moule. L'on récolte la graine en Mars, temps oii elle tombe ; on la laiffe lécher pendant deux ou trois jours avant que de la mettre en œuvre. Le lait qu'on fait fortir de l'arbre , en l'entaillant , eff un remède contre les vers auxquels les enfans font fujets : on fait prendre cette matière laiteufe avec de l'huile & du citron. OUASSACOU. Arbre de la Guiane auquel on donne des coups de hache , pour en faire fortir le lait , prenant garde qu'il n'en faute dans les yeux , à caufs de fa vertu corrofive : on prend autant d'eau que de lait , que l'on braffe avec un peu de vafe ; on met le tout dans une feuille , ou linge qu'on laiffe tremper dans les foffes à prendre du poiffon : la fubtilité du poifon efl telle , que le poiffon , enivré de cette façon , paroît fur le champ fur l'eau : il faut même éventrer ce poiffon, aufîl-tôt après , car il fe gâte en très-peu d'inftans. Maif. Rujl. de Cayenne» OUATTE ou HERBE DE LA HOUETTE ou OUATIER. Fojei Apocin & Ton-Nyhiou. OUAYE. Plante de la Guiane , appellée ainfi du nom de la Nation Indienne des Ouayes , où elle a été d'abord connue : elle eft fort rare en Guiane , & ne vient que dans les endroits qui lui font propres ôc particuliers. La tige fert de bois de mèche , ou d'amadou aux habitans ; fon corps , dont la couleur eft brune , fait des cannes très-propres , partagées de nœuds ; fes feuilles fortent de terre ; elles font plates , courtes, en éventail , & formées comme celles du latanier ; elles font les meilleures O U C OUÏ 561 meilleures de toutes celles qu'on emploie dans le pays de Cayenne , pour couvrir les maifons ; elles durent très-long temps , fur-tout quand elles font employées par les Indiens ; le feu n'y fait que fon trou , & ne fe communique pas au relie. On en garnit aufTiles chapeaux de paille contre la pluie. OUCLE , eft une liane groffe & épineufe fort commune à la Côte de Mahury : on peut s'en fervir pour faire des cercles de barriques. f^ojei Liane. ouïe , efl une fenfation excitée par les fons reçus dans l'oreille , c'eil-à-dire une perception du fon qui fe fait dans l'ame par le fecours de tout l'organe nommé auditif. Voyez ce que nous avons dit de Voui& à l'article des fens , inféré à la fuite du mot Homme, OVIPARE. Se dit des animaux qui fe multiplient en faifant des œufs, tels que les oifeaux, la plupart des infeftes, les cruflacées , les ferpens, les lézards , les tortues , &c. L'on oppofe à cette claffe d'animaux les vivipares , c'efl-à-dire ceux qui produifent leurs petits tout vivans , comme l'homme, les quadrupèdes. Foye:;^ à la fuite de C article Vi viPARE, & le mot (SuF. OUISTITY. Cette efpece de petit fagouin eft des plus jolis , a la forme élégante, les moeurs douces , il n'a pas plus d'un demi-pied de longueur, le corps Ôc la tête compris ; fa queue a plus d'un demi-pied de long & eft marquée par des anneaux alternativement noirs & blancs , fa face eft nue de couleur de chair affez foncée ; il eft coiffé fort fmgu- liérement par deux toupets de longs poils blancs au devant des oreilles; en forte que quoiqu'elles foient grandes , on ne les voit pas en regardant l'animal en face , il n'a ni abajoues , ni callofités fur les fefles ; fes oreilles font arrondies , plates , minces & nues ; fes yeux font d'un • châtain rougeâtre , il marche à quatre pieds ; ils fe nourriffent de fruits, légumes , infedes , limaçons ,. bifcuits , même de poifTons ; on en a vu muhiplier en Portugal , ce qui donne lieu de croire qu'ils pourroient auffi multiplier dans les Provinces Méridionales de l'Europe : les petits en naiffant font d'abord fort laids , n'ayant prefque point de poils fur le corps , ils s'attachent fortement aux tettes de leur mère ; quand ils font devenus un peu grands , ils fe cramponnent fortement fur fon dos ou fur fes épaules , & quand elle eft laffe de les porter , elle s'en dé- barraffe en fe frottant contre la muraille ; lorfqu'elle les a écartés , le mâle en prend foin fur le champ ôc les laide grimper fur fon dos pour Tonii IF, BBbb 5(^2 O U L O U R foiilager la femelle. On voit un ouiflity du Mexique dans un des Cabinets de Chantilly, OULEMARY, efl un des grands arbres du pays de la Guiane : fa feuille eu luifante , & refTemble à celle du citronnier. Il eft revêtu d'une écorce brune , épaiffe de près d'un pouce. Le dedans fe fépare en phi<- fieurs feuillets roufsâtres , unis, minces comme les feuilles du balifier, &C fur lefquelles on peut écrire comme fur du papier. M. de Préfontaine dit qu'il fe fouvient que ce fut par un feuillet de cet arbre , fur lequel un Indien avoit écrit, Oyapockejîpris ^ qu'on apprit en 1745 à Cayenne la prife du Fort d'Oyapock : cet Indien qui étoit alors à Oyapock trouva le moyen de faire parvenir cette lettre. Ces feuillets fervent aux Indiens à un autre ufage: ils roulent dedans,, le plus ferré qu'ils peuvent , une feuille de tabac, &; en font ainfi ce qu'on appelle aux Iles une cîgaU , ce qui leur fert de pipe. JMaifon Rufà- ^Ui de Cayenne, OURAGAN. Ce phénomène, qui produit quelquefois la défolation èi. l'épouvante tant à la ville qu'à la campagne , efl: un tourbillon ou tournoiement d'air en tout fens produit par des vents contraires très- violens qui s'élèvent promptement, & qui fe drfTipent bientôt après: ces ouragans font communs dans la mer de la Chine & du Japon , dans celles des îles de Bourbon & des Antilles, & dans plufieurs autres en- droits de la mer, fur-tout auprès des terres avancées &: des côtes éle- vées ; mais ils font encore plus fréquens fur la terre , & les effets en font quelquefois prodigieux ; fouvent on en fent les approches par un fiffle- ment qui fe fait entendre des montagnes , & ce fifrlement efl: fuivi de pluie &; de tourbillons de vent affreux. Le Père Fourn'ur , dans fon Hydrographie , dit que les fignes des vents & des tempêtes font , 1°. un image rouge fur l'horilbn, au lever ou au coucher du foleil; 1°. un cer- cle bleuâtre ou noir autour du foleil lorfqu'il fe couche ; 3°. la pâleur ,du foleil couchant & celle du foleil levant annoncent la pluie ; 4°. la rougeur du foleil couchant; 5°. les rayons qui fortent par le milieu des .nuées qui couvrent le foleil levant ; car fi le foleil darde (es rayons par defTous, il n'y a que de la pluie; 6°. les nuées qui viennent de toutes parts & s'afTemblent autour du foleil ; 7°. une nuée que le foleil, en- traîne après lui en fe couchant ; 8°. plufieurs cercles blanchâtres &; in- terrompus autour de la lune, quand elle paroît rougeâtre ; 9°. enfin 4:\il: (■\^nz d'une longue 6c rude tempête, lorfque la mer paroît noirâtre.. O U R .5^3 & que {on écume épaîffe çà & ià paroît s'élever fur l'eau en bulles. On peut dire aufîi que les ouragans tiennent au fyflême des mouffons^ des typhons & àes gouffres ; ceux-ci ne font que des tournoiemens d'eau qui font produits par des courans oppofés. ^oyci Vents, Gouffre, COURANS , & ce qui en ejt dit à l^ article MeR. M, de Chanyalon , dans fon f^oyage à la Martinique^ donne la def- cripîion d'un ouragan furieux qui ravagea une partie de cette île le 12 Septembre 1756. La défolation & la mort accompagnèrent cet ouragan : fes traces furent comme celles du feu ; tout difparoilToit fur fon paffage , & ce changement fut aufîi prompt qu'il étoit terrible : les maifons furent détruites tout-à-coup il n'en refta d'autres vefliges que leurs débris ré- pandus de toutes parts. Des arbres , peut-être auiîi anciens que nos éta- bliffemens dans cette Colonie , & dont la groffeur énorme avoit bravé jufqu'alors tous les efforts des élémens , furent déracinés , enlevés de terre , & renverfés tout entiers ; ceux qui réfiflerent furent brifés comme de fragiles rofeaux ; les plantations de toute efpece détruites & boule- verfées; l'herbe même foulée & defféchée comme fi elle eût été brfdée; l'œil appercevoit de tous côtés des crevafTes & des cavernes creufées fur le penchant des coteaux, par l'éboulement des terres qu'entraînent la chute des arbres & les torrens de pluie. Qui ne frémiroit pas en voyant des Heux toujours ornés de verdure, dépouillés dans un inftant par une main invifible ! Les horreurs de l'hiver fuccederent tout-à-coup aux charmes du printems ; la terre étoit comme ébranlée ou tremblante fous les pieds ; le jour étoit prefque éclipfé par une obfcurité qui voiloit tout le ciel , & qui préfentoit par-tout l'image effrayante de la nuit. Les animaux effarés cherchoient de tous côtés quelque afile pour fe préferver de Fimpétuofité de l'air , qui en fuffoqua un grand nombre. La terreur & la confternation régnoient par- tout : la Nature épouvantée fembloit toucher à fon dernier terme ; & dans cet inllant oii tout gardoit un fdence d'effroi , le vent feul fe fît entendre avec un bruit femblable au tonnerre. La mer offrit en même temps le trifle fpeftacle de tous les ravages d'une tempête ; le rivage & les eaux furent couverts des débris des naufrages ; les bâtimens fracaffés &: battus par les lames , flottoient de toutes parts, confondus avec les membres & les corps défigurés des malheureux qui en avoient été la viftime. M. de Chanvalon, qui étoit témoin de ce défaflre , dit que fon habitation effuya ce même ravage , BBbb 2 5(^4 O U R & que les couleurs de ce tableau ne font ni chargées , ni noircies par la douleur. Ces ouragans font des phénomènes fi communs en Amérique , qu'ils auroient fuffi feuls pour la faire déferter , ou la rendre inhabitable de- puis des fiecles; mais ces ouragans fi terribles dans le moment de leur a£lion, amènent des récoltes plus abondantes, & hâtent les reprodu- ctions de la terre , foit que de fi violentes agitations ne déchirent fon fein que pour le préparer à la fécondité , foit que l'ouragan charie des corpufcules propres à la végétation des plantes; & on a remarqué que ce défordre apparent & paiTager étoit non-feulement une fuite de l'ordre confiant qui pourvoit à la génération par la deflruâion même, mais un moyen de conferver ce tout, qui n'entretient fa vie & fa fraîcheur que par une fermentation intérieure , principe du mal relatif 6c du bien général, OURDON, efpece de plante qu'on nomme 2X\^\ petit férié ^ Se dont les feuilles fe trouvent quelquefois dans les balles de féné qu'on envoie en Europe : fouvent ce n'ert que du plantain féché & brifé. OURS, urfus , eft un animal quadrupède & fauvage , d'une flrufture informe par lui-même , &c qui nous le paroît encore davantage , parce qu'il eft couvert de longs poils qui cachent le contour de toutes les parties de fon corps; fa tête a quelque rapport à celle du loup par la forme & la pofition oblique des yeux ; les pieds de devant de l'ours pofent fur la terre jufqu'au poignet , & les pieds de derrière jufqu'au milieu de la plante ; fon garot paroît fort élevé, parce qu'il eft couvert d'un poil long & hérifle ; fa queue a peu de longueur , & fes pieds de devant font un peu tournés en-dedans. L'ours , dit M. de Bufon, a les fens de la vue , de l'ouie & du tou- cher très bons , quoiqu'il ait l'œil très-petit relativement au volume de fon corps , les oreilles courtes , la peau épaifî'e , le poil fort touffu : il a l'odorat excellent, & même plus exquis qu'aucun autre animal ; car la furface intérieure de cet organe fe trouve extrêmement étendue ; on y compte quatre rangs de plans de lames oft'eufes , qui , féparés les uns des autres par trois plans perpendiculaires , multiplient prodigieu- fement les furfaces propres à recevoir les impreiîions des odeurs. Il a les bras & les jambes charnus comme l'homme ; il a cinq orteils aux pieds de derrière ; le plus gros doigt eft en-dehors de cette efpece de O U R 565 jnain , au ïieu que dans celle de l'homme il eu en-dedans ; fes doigts font gros , courts & ferrés l'un contre l'autre , aux mains comme aux pieds ; les ongles font noirs & fort durs. Il frappe avec fes poings , comme l'homme avec les fiens : mais fes refTemblances groffieres avec l'homme ne le rendent que plus difforme , & ne lui donnent aucune fupériorité fur les autres animaux. Il n'y a aucun animal , du moins de ceux qui font affez généralement connus , fur lequel les Auteurs d'Hiftoire naturelle aient autant varié que fur l'ours : leurs incertitudes , & même leurs contradiftions m'ont paru venir , dit M. de Buffon , de ce qu'ils n'ont pas diftingué les efpe- ces , & qu'ils rapportent quelquefois de l'une ce qui appartient à l'autre. D'abord il ne faut pas confondre l'ours de terre avec Tours marin , ni avec l'ours de mer , appelle communément ours blanc , ours de la mer glaciale; ce font des animaux très-différens , tant pour la forme du corps , que pour les habitudes naturelles ; voyez ours blanc & ours marin, Enfuite il faut diflinguer deux efpecesdans les ours terrejlres , les bruns & les noirs, lefquels n'ayant pas les mêmes inclinations, les mêmes appétits naturels, ne peuvent être regardés comme des variétés d'une feule & même efpece, mais doivent être confidérés comme deux efpe- ces diftindes & féparées. De plus, il y a encore des ours terrellres qui font naturellement blancs, & non point par la rigueur du climat qui les fafle blanchir dans l'hiver , comme les hermines ou les lièvres. Quoique ces ours reffemblent aux ours de mer par la couleur , ils en différent par tout le refte , autant que les autres ours. On trouve ces efpeces d'ours dans la grande Tartarie , en Mofcovie , en Lithuanie & dans les autres Provinces du Nord. C'efl dans les Alpes que fe trouve affez communément V ours brun, ^ rarement l'owri/zoir, qui fe trouve au contraire en grand nombre dans les forêts des pays Septentrionaux de l'Europe & de l'Amérique. Le brun efl féroce & fouvent carnafTier ; mais , comme dit M. Halkr, il ne l'efl que par nécefîité, il mange avec plaifir toute forte de fruits , des raifins même & du pain. C'eft la faim qui le contraint d'attaquer des troupeaux. On élevé les petits, & on les garde dans desfoffes, en leur donnant des efpeces de foupes fans leur laifTer goûter de chair. Vours noir n'efl que farouche , & refufe conftamment de manger de la chair : celui-ci eil fi friand de miel ôc de lait , lorfqu'il en rencontre , qu'il fe 566 0 U R laifieroit plutôt tuer , que de lâcher prife. Suivant le témoignage cle M. du Prati , on en voit à la Louiiiane defcendre en troupes des mon- tagnes couvertes de neige ; preffés par la faim , ils ne recherchent que des fruits & des racines , nourriture que les bêtes uniquement carnaf- fieres refufent de marfger. On dit qu'il y a en Savoie , & en Canada , des ours rougedtres qui font auffi carnafliers que les loups. Les ours noirs n'habitent guère que les pays froids ; mais on trouve des ours bruns ou roux dans les climats froids & tempérés , & même dans les régions du Midi. Ils étoient communs chez les Grecs ; les Ro- mains en faifoient venir de Libye , pour fervir à leurs fpedacles : on trouve des ours dans tous les pays déferts , efcarpés , ou couverts; on n'€n trouve point dans les pays bien peuplés, fi ce n'efl peut-être quel- ques-uns dans les montagnes les moins fréquentées. L'ours, félon M. de Biiffon^ eft non-feulement fauvage , mais foli- taire : il fuit par inilinâ: toute fociété ; il s'éloigne des lieux où \es hommes ont accès ; il ne fe trouve à fon aife que dans les endroits qui appartiennent à la vieille nature , une cayerne antique dans des rochers inaccefiibles, une grotte formée par le temps dans le tronc d'un vieux arbre , au milieu d'une épaiffe forêt , lui fervent de domicile ; il s'y retire feul , y palîe une partie de l'hiver fans provifions , fans en fortir pendant plufieurs femaines : cependant il n'eft point engourdi , ni privé de fentiment, comme le loir ou la marmotte. Mais, comme il eft natu- rellement gras, &: qu'il l'efî: excefîivement fur la fin de l'automne , tems atiquel il fe recelé , cette abondance de graiffe lui fait fupporter l'abf- tinence , &; il ne fort de fa bauge ou tanière , que lorfqu'il fe (^nt afiamé. On prétend que c'eil environ au bout de quarante jours que les mâles fortent de leurs retraites ; mais que les femelles y reftent quatre mois, parce qu'elles font leurs petits. J'ai peine à croire , continue M. d& Buffon , qu'elles puiflent non-feulement fubfifter , mais encore allaiter leurs petits , fans prendre elles-mêmes aucune nourriture pendant un auffi long efpace de temps. S'il eft vrai que les mâles , preffés par le befoin de prendre de la nourriture, fortent au bout de quarante jours, il n'efl pas naturel de penfer que les femelles ne foient pas encore plus preffées du même befoin, puifqu'en allaitant leurs petits , elles fe trou- yent doublement épuifées; à moins qu'on ne veuille fuppofer qu'elles- O U R 5^7 "en dévorent queîques-iins avec leurs enveloppes , & tout le refte du produit fuperflu de leur accouchement; ce qui ne me paroît pas vrai- femblable , malgré l'exemple des chattes, qui mangent quelquefois leurs petits. Au refle,nous ne parlons ici que de l'efpece des ours bruns, dont les mâles dévorent en effet , peut-être par jaloufie , les ourfons nouveaux nés, lorfqu'ils les trouvent dans leurs bauges. Mais les femelles, au contraire , femblent les aimer jufqu'à la fureur : elles font , lorfqu'elles ont mis bas , plus féroces , plus dangereufes que les mâles ; elles com- battent , Se s'expofent à tout pour fauver leurs petits. C'efl vers l'automne que les ours fe recherchent; la femelle efl, dit- on , plus ardente que le mâle : on a vu l'ourfe qu'on avoiî féparée de fon mâle Se qu'on lui avoit enfuite rendu , embrafîer le mâle avec une joie & une tendreffe marquée. On prétend qu'elle fe couche fur le dos pour le recevoir, qu'elle l'embrafie étroitement, qu'elle le retient longr temps ; mais il efl plus certain qu'ils s'accouplent à la manière àes qua^ drupedes. On a vu des ours captifs s'accoupler Se produire ; mais on n'a point obfervé le temps de la geflation : comme l'ours vit vingt ou vingt-cinq ans. Se que le temps de la gefîation efl ordinairement pro- portionné à celui de la durée de la vie , il y a lieu de croire que la gef- tation efl de plufieurs mois. Le mâle Se la femelle n'habitent point en- femble, le plaifir ne les réunit qu'un moment : ils ont chacun une retraite féparée , Se même fort éloignée. Lorfqu'ils ne peuvent trouver une grotte pour fe gîter , ils grimpent fur les arbres , cafTent des branches Se ramaffent du bois pour fe faire une loge , qu'ils recouvrent d'herbes Se de feuilles au point de la rendre impénétrable à l'eau. La femelle prépare à (es petits ourfons un lit de mouffe Se d'herbe dans le fond de fa caverne : elle n'en a ordinairement qu'un, deux, trois ou quatre,, qui ont befoin du fecours de leur mère , & la fuivent pendant un aa ou deux. La voix de l'ours efl un grondement , un gros murmure, fouvent .mêlé d'un frémiilement de dents , qu'il fait fur-tout entendre lorfqu'on l'irrite : il efltrès-fufceptlble de colère , &: fa colère tient toujours de la fureur Se fouvent du caprice. Quoiqu'il paroiffe doux pour fon maître Se même obéifTant lorfqu'il efl apprivoifé , il faut toujours s'en défier Se le traiter avec clrconfpeclion ; fur-tout ne le pas frapper au bout dii ■nez, ni aux parties de la génération. On lui apprend à fe tenir debout_, •a gefliculer, à datifer; il femble même écouter le fçji des inflrumens^. 568 O U R ôcfuivre grofTicrement la mefure : mais pour lui donner cette efpece d'éducation , il faut le prendre jeune & le contraindre pendant toute fa vie. On voit à Berne , ville d'un Canton de la Suiffe , la folTe aux ours ; ce font deux efpeces d'antres ouverts, dans lefquels on nourrit plufieurs ours qui , pour être habitans d'une cité très-peuplée , n'en paroiffent pas moins cruels ( ils ont déchiré des malheureux qu'une infortune avoit expofé à leur férocité ) : ce monument ell fans doute confacré aux armes de la Ville Se du Canton qui font un ours. L'ours fauvage ne fe détourne pas de fon chemin , ne fuit pas à l'afpeâ: de l'homme ( il n'attaque pourtant qu'à l'extrémité, dit M. HalUr , & il y a plus d'un exemple où cet animal a laiffé pafTer même des femmes fans les inful- ter ) ! cependant on prétend qu'en Iflande par un coup de fifflet on le furprend , on l'étonné au point qu'il s'arrête & fe levé fur les pieds de derrière; on lui jette un gant pour Tamufer, car il ne manque jamais d'en tourner & retourner chaque doigt : c'efl-là le temps qu'il faut prendre pour le tirer. Ces animaux qui rempliffent en été les forêts & les campagnes du pays des Kamtfchatka , font peu farouches & n'attaquent jamais un homme , à moins qu'ils ne le trouvent endormi , encore en tuent-ils rarement. Ce qu'il y a de plus fingulier, c'efl; que les ours de cette contrée ne font jamais de mal aux femmes ; lorfqu'elles vont pendant l'été cueillir des fruits fauvages , ces animaux les fuivent & ne leur font d'autre mal que de leur dérober quelques-uns des fruits qu'elles ont ramaffés. Quelle peut être la raifon phyfique de cette forte de prédi- îeftion que certains animaux paroiffent avoir pour les femmes ?.... Les habitans ont plufieurs manières de tuer ou de prendre ces ours , mais le moyen le plus extraordinaire efl celui que nous allons décrire. Un hom- me prend dans fa main gauche un couteau , & à fa main droite un Hilct aiguifé par les deux bouts , & une corde dont il enveloppe fon bras ; il s'avance ainfi vers un ours, lequel fe drefle comme d'ordinaire furfes pattes de derrière & attaque le ChafTeur la gueule ouverte. Celui-ci avec autant d'adrefTe que de courage , enfonce fa main dans la gorge de l'ours & y place le flilet verticalement, de manière que non-feulement cet animal ne peut plus refermer fa gueule , mais qu'il eft forcé , par les douleurs cruelles qu'il reffent , de fuivre le Chail'eur fans réfiflance par-tout où l'on veut le mener : on tue l'animal; c'efl: un jour de ïèie , on le mange avec fes voifms 6c (ts amis. Il y a une manière bien moins dangereufe O U R 569 dangereufe de prendre ces animaux , ainfi qu'il fe pratique en Suéde , en Norvège , en Pologne , &c. c'eft de les enivrer en jetant de l'eau-de- vie fur le miel qu'ils aiment beaucoup , & qu'ils cherchent dans les troncs d'arbres. A la Louiiiane & en Canada où les ours noirs font très- communs ( l'on en voit un dans la ménagerie de Chantilly ) , ils fe nichent dans des troncs d'arbres pourris à la hauteur quelquefois de trente ou quarante pieds, car ils grimpent très-bien : on met le feu à l'arbre, &c quand la mère defcend on la tue avant qu'elle foit à terre. Les petits defcendent enfuite , on les prend en leur palTant une corde au cou , 6c on les emmené pour les élever ou pour les manger, car la chair de i'ourfon efl délicate & bonne : celle de l'ours efl mangeable & même fort ellimée en Chine; mais comme elle eft mêlée d'une graifle huileufe, il n'y a guère que les pieds dont la fubllance efl plus ferme, qu'on puifîe regarder comme une viande délicate. En Allemagne ils font encore réfervés pour la table des Princes , 011 l'on fert des pattes d'ours falées ôc enfumées. Les Kamtfchadales mangent la chair & la graifTe de cet animal ; & quand ils ont tué un ours , ils font obligés de régaler leurs voifms. La chaffe de toutes les efpeces- d'ours eft affez dangereufe , dit M. Bourgeois , car fi on ne fait que bleffer cet animal fans l'arrêter , il fe met en furie & court fur le Chafîeur qu'il alTomme avec (es pattes an- térieures & déchire avec fes griffes ; il l'embraffe aufîi avec ces mêmes pattes &c cherche à l'étouffer : le Chafleur ne peut échapper au danger qu'en montant fur un arbre, pourvu qu'il foit armé d'un bon coutelas ; iî n'a qu'à couper les pattes de l'ours lorfqu'il grimpe après lui fur l'arbre oîi il s'eft réfjgié, ce qui le fait tomber tout de fuite à terre , & alors il aie temps de charger fon fufil pour le tuer. Cette chaffe efl très- utile lorfqu'on la fait avec quelque f iccès. La peau efl de toutes les fourrures grofîieres celle qui a le plus de prix ; la quantité d'huile qu'on retire de l'ours efl confidérable. A la Louifiane on voit dans l'automne des ours qui fe font tellement engralffés , qu'ils n'ont pas la force de marcher, ou du moins qu'il ne peuventcourir aufîi vite qu'un homme. Les ours noirs de ce pays s'engraifTent ainfi en mangeant des patates , du mahis ôc les fruits des plaqueminiers fur lefquels ils grimpent , ils fe mettent à califourchon fur une branche, fe tiennent d'une patte & de l'autre cueillent les fruits. La graiffe dont les ours font chargés les rend irès-légers à la nage ; on leur trouve en automne jufqu'à dix doigts Tome JK CCcc 570 O U R d'épailTeiir de graifTe aux côtes & aux cuifTes ; le deiTous de leurs pieds eu. gros & enflé : lorfqu'on le coupe , il en fort un fuc blanc & laiteux. Cette partie paroît compofée de petites glandes qui font comme des mamelons, & c'eft ce qui fait que pendant l'hiver dans leurs retraites, ils fucent continuellement leurs pattes. On prépare la graifle d'ours, on la purifie; on en retire une huile claire qui furnage ,qui , dit-on, eft auffi bonne que la meilleure huile d'olive ôc fert aux mêmes ufages. Au defTous de cette huile on trouve un fain-doux auffi blanc , mais un peu plus mou que le fain doux de porc , & qui fert aux befoins de la cuifme.' Les Sauvages trafiquent beaucoup avec les François de l'huile d'ours ; on dit qu'elle ne fe fige guère que par un grand froid , que quand cela arrive elle efî toute en grumeaux, & d'un blancheur à éblouir. En France les Eplciers-Droguifles ne tiennent point d'huile d'ours ; mais ils font venir de Savoie , de SuifTe ou de Canada , de la graiffe ou axonge qui eft rarement purifiée ; on fe fert de cette graiffe comme de topique pour les hernies , les rhumatifmes , &c. & beaucoup de gens affurent en avoir reffenti de bons effets. On dit que la graiffe d'ours efl encore très-utile pour faire croître & épailfir les cheveux des enfans & des convalefcens qui les ont perdu dans quelque maladie. OURS A FOURMIS. Foyei Fourmillier. OURS BLANC ou OURS DELA MER GLACIALE, urfus albus maris glacialls. Nom donné à un animal très-cruel , très-vorace , qui attaque les animaux , même les hommes , & fe jette fur \qs cadavres. Il ne faut pas confondre l'ours blanc de mer avec l'ours blanc terrefîre ; ce font des animaux très-différens par plufieurs caraderes. L'ours blanc de mer efl feul de fon genre , 6c ne fe trouve que le long de la mer feptentrionale. Voici la copie d'une lettre adreffée à feu S. A. S. Monfeigneur le Duc de Bourbon , & que nous avons trouvée dans le dépôt des Cabinets de Chantilly; elle concerne les ours blancs & les loups de Labrador^ pays de la Nouvelle France. « M. de Brouugue , Commandant à Labrador , revenant de Québec » dans un canot d'écorce , lui cinquième , a trouvé à la mer , à une lieue » & demie au large de la côte, & à 1 5 lieues de fon pofle , fitué à la » côte de Labrador , pays des Efquimaux , un ours blanc qu'il apperçut » nageant à la mer ; il lui tira un coup de fufil , & l'ayant manqué , l'ours ft plongea & vint au canot. L'ayant apperçu dans l'eau il le fit éviter , O U R 571 >f & l'ours s'étant remis à nager il s'en éloigna toujours Jufqu'à ce que « Ton fufil fût chargé ; il lui tira un fécond coup & le bleffa au cou , ÔC » la balle fortit par la mâchoire. » L'ours replongea & revint une féconde fois entre deux eaux au » canot. Il l'apperçut une féconde fois , fît la même manœuvre que la » première , ôc l'ours s'étant remis à nager , il lui tira un troifieme coup, M ayant chargé fon fufil à deux balles , & le tua roide. » M. de Brouague fit approcher fon canot de cet animal , qui alors » flottoit fur l'eau ; il lui fit attacher une corde à la patte , & remorqua » à terre avec fon canot. >> En arrivant à la côte , il y trouva des Sauvages qui étoient venus au » coup de fufil qu'ils avoient entendu ; ils fe mirent tous à tirer à terre » cet animal , qui pefoit aux environs de deux mille , & ils étoient , tant » hommes que femmes , plus de quarante à le mettre à fec. Les Sauva- » ges mangent ces animaux, & il fut bientôt partagé entr'eux. » M. de Brouague en réferva feulement pour lui la peau & un des » paturons qu'il fit écorcher ; les Sauvages mangèrent la chair; & la » peau de deflbus & de deifus le paturon avoit trois pieds de large. Il » a apporté cette peau du paturon en France , laquelle après s'être » retirée , a encore vingt-un pouces de large ( Cette pièce qui s'eft un peu rétrécie fe voit aûuellement dans l'un des Cabinets de Chan- tiiiy). » C'efl le deuxième ours blanc qu'il a tué à la mer ; il en a tué trois » autres à terre , dont il y en avoit un qui étoit plus gros ôc qui pefoit » environ trois milliers. » Il y a de ces animaux qui font aufîî gros que trois moyens bœufs; » ils ont les jambes plus courtes que celles du bœuf 6c confidérablement >> plus groffes , avec cinq griffes à chaque pied. Ils ont environ fept à » huit pieds de long , la queue de trois à quatre pouces de long , le » cou court & prodigieufement gros , la tête auffi très-groffe & faite y> comme celle d'un mouton , à l'exception que deffous le menton il s'y » trouve quantité de poil long de plus d'un pied , ce qui lui forme une » barbe comme à une chèvre , mais bien plus fournie. » La peau de cet animal efl couverte d'un poil blanc & luifant , quî » efl: gros & affez court. Il a à chaque patte cinq griffes noires , au lieu » que les ours noirs ont des doigts comme ceux d'un homme , qui font CCcc 2 572 O U R » très-délicats à manger. Le poil de deflbus les pattes de l'ours blanc » eft long &c en grande quantité. » On ne fait nul ufage de fa peau, & les Sauvages fe fervent feule- » ment de la peau des jeunes pour faire des mitaines, 6i mettent le » poil en dedans. » La chair de cet animal eil: fort vermeille & tendre comme celle de » l'ours noir , mais elle n'eft pas fi bonne à manger. » La graiffe ne s'en fige point, non plus que celle de l'ours noir,' » mais elle efl bien plus pénétrante. Les Sauvages la boivent comme uri » grand régal. » Cet animal va par préférence à la mer ; il y vit de loups marins, » de poiflbns & de coquillages ; & quand la mer efl glacée & qu'il ne » trouve plus à y manger , il va à terre oh il vit de la chaffe que les » loups y font au caribou : en forte que quand un ours blanc arrive dans » un endroit où un loup marin a tué un caribou , le loup s'en va fur le » champ de peur d'être mangé , & abandonne fa proie ; il manque par- » là fouvent de nourriture , & devient fort maigre jufqu'à ce qu'il puiffe » retourner à la mer, » Il y a à la côte dé Labrador d e très - gros loups & de différentes ^> couleurs , y en ayant de noirs , de gris fale , d'argentés , de blancs 8c » de roux. On en trouve des bandes de cinquante qui marchent enfemble. » L'ours blanc marche au plus trois enfemble, fa femelle & deus >> petits. Il ne cabane point l'hiver comme l'ours noir; il va à terre plus w vite qu'un homme , &: à la mer nage fort vîîe , & de manière que » c'efl tout ce que quatre hommes dans un canot peuvent faire que de 5> s'en éloigner. » Il fe trouve à préfent à cette côte très -peu d'ours blancs, ils fe *> retirent du côté de la baie d'Hudfon ; la quantité de navires qui vont >» à la pêche & les habitations de quelques François à la côte les en ont » éloignés. » Il y a aufîl très-peu d'ours noirs. » il fe trouve aufïi de c-es ours blancs au nord du lac fupérieur , Sc s^ il en a été tué dans là rivière de Nepigon. Ceux de ce pays-là font plus i> foUvent dans le lac & dans les rivières qu'à terre. » Il y a beaucoup de ces ours blancs dans la Napolie & à la Nova ^ Zembla, qui veut dire en Ruffe nouvelle terre; ris font aufîi gros & » aufli féroces que dans le nord de l'Amérique >u O U R 575 Il paroît que l'ours blanc eft une efpece différente de l'ours marin , dont le poil eft coloré ou nué de différentes teintes , & dont nous par- lerons à l'article OuRS MARIN. Sa defcrip.ion eu très curieufe. L'ours blanc n'efl point amphibie comme les phoques, & ne peut point relier fous l'eau aulîl long-temps qu'il le voudroit, ainfi que l'ont avancé quelques Auteurs. Le contraire eft évident, dit M. de Buffon & réfulte de la manière dont on les chaffe ; ils ne peuvent nager que pendant un petit temps, ni pourfuivre de fuite un efpace de plus d'une lieue. On les fuit avec une chaloupe , & on les force de laffitude. S'ils pouvoient fe paffer de refpirer , ils fe plongeroient pour fe repofer au fond de l'eau; mais s'ils plongent, ce n'eft que pour quelques inflans; & dans la crainte de fe noyer, ils fe laifîent tuer à fleur d'eau. La proie la plus ordinaire des ours blancs font les phoques , qui ne font pas affez forts pour leur réfifter; mais les morfes auxquels ils enlè- vent quelquefois leurs petits , les percent de leurs àé^Qnks & les mettent enfuite à mort. U en eft de même des baleines; elles les affommentpar leur maffe , & les chaffent des lieux qu'elles habitent , où néanmoins ils raviffent & dévorent fouvent les petits baleineaux ou baleinons. OURS MARIN. C'efl: une efpece d'animal demi-amphibie, vivipare, de l'ordre des phoques ^ affez femblable à l'ours pour la figure de fa tête , l'inffinftjla manière dont il exécute les mouvemens de la partie anté- rieure de fon corps , & la férocité de fon naturel. L'hiffoire de ces ani- maux préfente des particularités affez fmgulieres. M. Steller y de l'Académie de Petersbourg, qui s'eff trouvé dans le cas de pouvoir obferver les ours marins , dit que ces animaux changent de climats comme les oies , les cygnes & les hirondelles parmi les oifeaux ; les /r«ir^5 parmi les poiffons ; les lièvres & les rats parmi les quadrupèdes. Certains animaux ne changent de demeure que pour chercher de la nourriture quand ils commencent à en manquer. Les oifeaux cherchent des lieux folitaires, & les poiffons des mers tranquilles pour y dépofer plus fûrement leurs oeufs, pour y peupler fans être inquiétés & pour réparer leurs forces. La Nature a donné le même inflincl aux ours marins ; ils cherchent les mers méridionales & les Ifles défertes qui font en grand nombre entre l'Amérique &rAfie, depuis le cinquantième degré de lati- tude jufqu'au cinquante-fixieme; ils s'arrêtent dans les parties du Con- tinent qui paroiffent les plus tranquilles ; c'eff-là qu'ils fe livrent à leurs amours ôc muhiplient fans trouble j les femelles y mettent bas leur 574 O U R portée, nourriffent leurs petits & s'en retournent avec eux, au bout de trois mois , dans leurs premières demeures. Comme on voit de ces demi-amphibies dans l'hémifphere boréal , il y a lieu de croire que cette même efpece d'animaux fe trouve tant dans rhcmifphere boréal que dans l'hémifphere auftralfous le même degré de latitude. Les mères mettent leurs petits au jour vivans; ils font en naiffant d'un noir très- brillant, mais au bout de quatre ou cinq jours les poils des pieds de devant changent un peu de couleur; le ventre, qui fe termine en cône, & les côtés , fe bigarent. Les mâles, dès en naiffant, font plus grands & plus forts que les femelles , leur peau devient de jour en jour plus noire ; au lieu que celle des femelles efîconflamment cendrée, avec quelques taches rouffes fous les pieds. Lorfque les femelles ont mis bas , elles coupent avec les dents le cordon ombilical; & à force de le lécher, elles arrêtent le fang & deffechent le cordon. Leurs petits naiffent les yeux ouverts , ils les ont fort grands & faillans, & la bouche armée de trente-deux dents ; mais les dents canines qui font les plus grandes, les plus fortes, & dont ils font le plus d'ufage dans leurs combats, ne paroiffent que le qua- trième jour : elles font tournées vers le gofier. Les femelles ont pour leurs petits une tendreffe extrême ; elles ne les quittent pas & font toujours raffemblées avec eux fur le bord du rivage où elles paffent une partie du temps à dormir. La jeuneffe folâtre entr'elle comme de jeunes chiens , ils imitent leurs pères & s'exercent déjà aux combats. Si l'un d'eux renverfe l'autre à terre, le père fur- vient en murmurant , les fépare , careffe le vainqueur , le lèche ten- drement & légèrement ; car fa langue eu. très-rude : il l'oblige quelquefois à fe coucher fur la terre , & s'il réfifte , il paroît l'en aimer davantage: le père femble s'applaudir & fe féliciter d'avoir un fucceffeur digne de lui ; mais il témoigne moins d'empreffement pour les lâches : ces pol- trons font toujours à la fuite de la mère , tandis que les courageux accompagnent leur père par-tout. Les ours marins , quoique raffemblés par milliers , font toujours divifés par familles ; une famille efl fouvent compofée de cent vingt; chaque mâle a fon férail formé de quinze & jufqu'à cinquante femelles: il les poffede feul ; jaloux par nature , il les garde avec beaucoup de foin & d'inquiétude : fi quelque rival en approche & ofe les lui difputer, il entre en fureur, 6c le combat le plus fanglant commence entre ces deux O U R 575 amans. Les fultanes tranquilles alors fpeâatrices fe déterminent à fuivre le vainqueur , le lèchent amoureufement , Se pouffent en commun des cris de vicloire. Ces animaux font d'une intrépidité étonnante : lorfqu'ils ont une fois pris un porte , rien que la mort ne peut le leur faire quitter ; ils ne permettent point aux autres de venir s'établir trop près d'eux. Lorfqu'il s'élève des fujets de guerre entr'eux , on les voit quelquefois fe battre une heure entière , fe tendre des pièges, fe coucher de laffitude, l'un auprès de l'autre , haletans , fans force & fans mouvement ; puis fe relevant tout-à-coup l'un & l'autre , s'exciter & recommencer avec chaleur un nouveau combat. Chaque athlète ne quitte point la place qu'il a prife : ils tournent la tête de côté , & f e frappent de bas en haut , chacun tâchant d'éviter le coup de fon adverfaire. Tant qu'ils font d'égales forces , ils ne peuvent frapper que des pieds ; mais bientôt le plus fort faifit fon adverfaire avec les dents & le terrafle ; les autres ours, fpeftateurs du combat , accourent alors au fecours du plus foible, & terminent la querelle. On les voit toujours , dit M. StdUr , prêts à fecourir le foible & l'opprimé. Si deux ours en attaquent un feul, les autres, comme indi- gnés de l'inégalité du combat , viennent à fon fecours : ceux qui font encore dans la mer, lèvent la tête pour contempler ce fpedacle fan- glant ; alors il fe fait des partis : la colère les enflamme , ils s'animent , fortent de l'eau , & viennent tout furieux fe jeter dans la mêlée ôc augmenter le carnage. Les ours marins , comme nous l'avons dit , ne quittent point leurs portes. Quelquefois les Voyageurs obligés de pourfuivre leur chemin écartent ces animaux, en les attaquant à coups de pierres, fur lef- quelles ils fe jettent, & qu'ils faifirtfent avec cette fureur qu'on remarque quelquefois dans les chiens ; leur rage en augmente , & ils rempliiTent l'air d'hurlemens affreux. Lorfqu'on veut les attaquer , on s'attache d'abord à leur crever les yeux , & à leur caffer les dents à coups de pierres : mais quoiqu'aveugle & couvert de bleffures , un ours maria ne quitte jamais fa place , parce que s'il s'en éloigne d'un pas , \^s. autres fe jettent fur lui , & l'obligent à coups de dents de la reprendre , & quelquefois le mettent en pièces. Si quelques-uns d'entr'eux accourent à lui pour l'empêcher de fuir , d'autres les foupçonnent de vouloir fuir ^76 O U R eux-mêmes, & fe jettent fur eux ; ce qui donne lieu à dilTérens combats particuliers, & forme un fpedacie curieux, mais horrible. On voit ces ours marins refter un mois entier dans la même place , fans la quitter un feul moment. On a tué de ces animaux dans ces circonfîances, on les a ouverts, &C on n'a trouvé dansl'eflomac &; les inteftins que de l'écume fans excrcmens. On a remarqué que le panicule adipeux diminuoit tous les jours , ainfi que la circonférence de leur corps , & que leur peau devenoit fi flafque , qu'elle pendoit de tous les côtés comme un fac ; ce qui fait croire que pendant ce temps d'inaftion & de repos ces demi-amphibies ne fe nourrifl'ent que de leur propre graifle , qui eft repompée par les vaiffeaux abforbans. L'accouplement de ces animaux fe fait, dit-on , fur le bord des eaux ,' ils n'ont que la tête dehors. Pour cette fon£i:ion la femelle fe couche fur le dos , &c reçoit fon mâle entre fes bras , elle le ferre vigoureufe- îïient ; le mâle appuie mollement l'extrémité de fes lèvres fur celle de fa femelle , comme s'il vouloitlabaifer. Cette opération fe fait ordi- nairement vers la fin du jour. Une heure avant de s'accoupler , le mâle & la femelle nagent tranquillement à côté l'un de l'autre & re- viennent fur la grève ; enfuite le mâle appuyé fur fes pieds de devant fe livre ardemment à fon inftinft ; fes pieds font entièrement Qachés dans le fable , dans lequel fon poids fait enfoncer tout le corps de la femelle, à l'exception de la tête ; ils font fi fort occupés de leurs amours qu'on eft fouvent long-temps à les examiner avant qu'ils s'en apperçoivent. Si on s'avifoit de les troubler & de les diflraire , le mâle quitteroit fa femelle , fe jetteroit fur la perfonne & la dévoreroit , û elle ne pouvoit fe fauver par la fuite , ou tuer l'animal. Quand les ours marins fortent de l'eau, ils fecouent tout le corps,' fe frottent la poitrine &: arrangent ce qu'ils peuvent de leurs poils avec leurs pieds de derrière , lefquels font palmés. Lorfqu'ils font couchés à quelque abri au foleil , ils élèvent les pieds de derrière en haut , &C les remuent fans ceffe , comme les chiens remuent la queue. Ils fe couchent tantôt fur le dos , tantôt fur le ventre , tantôt tout le corps plié en cercle. Quelque profond que foit leur fommeil , avec quelque précaution qu'un homme puiffe marcher , ils s'en apperçoivent & s'éveillent. Le fentent-ils , l'entendent-ils ? c'eft ce qu'on n'a pas encore découvert. On O U R Ç77 On dit que ces animaux nagent avec tant de facilité , qu'ils peuvent faire plus de deux milles d'Allemagne par heure. Quand ils nagent fur ie ventre , on ne voit jamais leurs pieds de devant , mais ceux de derrière paroiiïent fouvent hors de l'eau. Ces animaux peuvent de- meurer très -long-temps dans l'eau , parce qu'ils ont le trou ovale un peu ouvert. Les Kamîfchadales attaquent & bleffent les ours marins avec une efpece de javelot troué , dont le fer abandonnant le bois , refte dans îe corps de' l'animal ; & comme il entre de biais , il n'en peut fortir : le fer efl arrêté à une corde très-forte , dont les Pécheurs tiennent l'autre extrémité. L'animal bleilé fuir avec la vîtefîc d'une flèche, entraîne avec lui la barque , jufqu'à ce que fatigué par fa courfe & épuifé par la perte de ion fang, il s'arrête. Dans ce moment les Pêcheurs tirent à eux la corde , percent l'ours de leurs lances ; &c s'il fait quelques mouvemens pour renverfer la barque, on lui coupe les pieds de devant avec une hache. Ils s'attachent particulièrement aux femelles qui vien- nent de mettre bas au printems , & entre les mâles aux plus jeunes. On voit une grande quantité de ces ours niarins dans l'iUe de Bering, La chair 6c la graiffe des mâles eft fort dégoûtante, celle des femelles eft déhcate. OURS DE MER. Nom donné à un cruflacée , fans piquans , que l'on pêche en Y/alachie , en Bulgarie & en Servie : c'eft le même qu'on appelle à.Naples & à Mefîine , mcffacara. -^ OURSE. Nom de deux conflellations voifmes du pôle Septentrional, Tune portant le nom de grande ourfe , l'autre celui de petite ourfc ; cette dernière efi celle oit fe trouve l'étoile polaire , ainfi nommée parce qu'elle n'eft qu'à deux degrés du pôle. Suivant Ptolomée , la grande ourfe e(l compofée de 3 -, étoiles. OURSIN DE MER, Bouton ouChataigne de mer , ouHérisson DEMER jcckinusmarinus. C'eftun genre de coquille multivalve, de forme voûtée , plus ou moins convexe , ronde , ovale , à pans irréguliers , quelquefois anplatie & toute unie , d'autres fois mamelonnée & élevée. L'ourfin eft compofé d'une quantité prodigieufe de pièces de rapport à futures & fragiles , &c couvertes de pointes fort ncmbreufes , affez femblab'es en cela, & pour la forme , aux enveloppes àes châtaignes. Ces pointes tombent fouvent après la mort de l'animal , & laiffent alors Tome ir, DDdd 57S O U R à découvert les apophyfes Se les petits trous fans nombre dont la coquille efl: couverte ; l'appareil avec lequel eft formé cet animal ell merveilleux. Ce ver teflacée ou coquillage eft fort connu fur le bord des mers,' & particulièrement fur les côtes de la Méditerranée : il y en a de noirs , de verts , des rouges , de purpurins ou violets ; mais ces couleurs s'altèrent après la mort de l'animal : les uns habitent les bords des mers; d'autres vivent en haute mer. Leurs piquans font plus ou moins gros, & plus ou moins longs, les uns font obtus , d'autres très-pointus &; plus ou moins durs ; aufîi voit-on des ourfms qui ne font revêtus que de petites pointes femblables au poil des animaux , tandis que d'autres ont des pointes fort grandes en forme de baguettes. Ces piquans font ou ronds, ou trian- gulaires , en un mot de différentes configurations, félon l'efpece d'ouriin, mais tous font affez durs &c fe cafTent net : ils fervent de pieds à l'animal; car quand il veut s'en aller d'un lieu à un autre , il s'appuie fur ces pointes, mobiles dans leurs charnières, & tourne non fur lui-même, mais affez horizontalement : fon mouvement progrefîif ell û prompt, qu'il eft fouvent difficile de l'attraper. M. de Réaumur eft le premier qui nous a donné une idée exafte du fquelette de l'animal , & qui a développé la mécanique fmguliere de fon mouvement progreffif. Mém. de L Acad. des Sciences, ann. 1712. Ce qui fert de tête aux ourfms eft placé au centre inférieur , c'eft la partie concave , qui eft toujours contre terre : mais la partie par oîi ils fîentent eft en-deffus , quelquefois aufïi en-deffous près de la bouche même. Cet animal a cinq dents aiguës & vifibles , creufes en dedans , femblables à des oflelets , qui toutes enfemble ont la figure d'une lanterne (aufîi l'appelle-t-on la lanterne d'Arifîote^ , & entre lef- quelles eft un petit m.orceau de chair qui lui fert de langue, à laquella eft attaché le gofier , enfuite le ventre , divifé en cinq parties , de forte que l'on diroit que l'ourfm a plufieurs ventres féparés les uns des autres & pleins d'excrémens ; mais ils dépendent d'un feul ventricule, & tous fe terminent à un boyau culier. Ainfi les ourfins n'ont que deux ouvertures proprement dites , dont l'une eft la bouche , & l'autre l'anus. Les ourfins n'ont point de chair vers le ventre comme au refte du corps : leurs œufs font attachés aux cinq pans ou parois ou lobes O U R 579 intérieurs de la coquille en grand nombre ; les ourfms font tous bons à manger ; leur couleur efl rouge étant cuits ; ils ont le goût des écre- viffes , fur-tout ceux de la Méditerranée. On prétend avoir obfervé que ces animaux préfagent la tempête^ & qu'ils coulent à fond pendant l'orage , en s'attachant aux plantes du fond de la mer , ou à d'autres corps , avec des filets gonflés par le bout, d'une fubflance afTez femblable aux cornes des limaçons : on a compté plus de treize cents de ces filets , ce font autant de cordages dont l'animal fe fert , foit pour tâter le terrain , foit pour fe tenir à l'ancre dans le fort de la tempête. Ces filets fortent par les petits trous dont nous avons parlé : il peut marcher la bouche en haut , en bas & dans une infinité d'autres pofitions. Dans la féance publique que l'Académie de Rouen tint le 3 Août 1774, M. Diifay , de Dieppe, lut un Mémoire fur les ourfins. Cet Obfervateur décrit cet animal avec un appareil plus nombreux. Il réfulte qu'un ourfm de quatre pouces &: demi de diamètre , fur trois pouces de hauteur , efl formé de neuf cents cinquante pièces , parfemées de quatre mille cinq cents mame- lons , dont chacun fert de genou à une épine m.obile, & qu'il efl perforé de trois mille huit cents quarante petits trous , par lefquels pafTent autant de cornes flexibles qui aident aux fenfations de l'animal ; il efl à préfumer que les petits ourfms de la même efpece ont leur coquille, compofée d'autant de pièces , d'autant de mamelons , d'autant d'épines, d'autant de trous & d'autant de cornes ou filets flexibles; mais les ourfins d'efpeces différentes ne parolffent pas être munis d'un appareil de pièces aufîî nombreux : au refle on ne peut qu'admirer la fymétrie des pointes & des mamelons de l'ourfm. M. à^ Argcnvilk dit avoir compté fur la fuperfîcie d'un ourfm de la Mer Rouge , cinq divifions à deux rangs de mamelons , & de grandes pointes au nombre de foixante-dix, fans compter cinq autres rangs de petites , & toutes les bandes qui féparent les rangs des mamelons , lefquelles font percées d'une infinité de petits trous par où fortent fes cornes ou untacula. Dès que l'ourfm efl à flot , il contrarie fes filets entre les bafes ou mamelons de fes pointes. On apperçoit auffi l'ourfm fur la grève par un beau temps , & comme il efl fouvent couvert de dix à douze pieds d'eau , on fe fert pour le prendre d'un long rofeau entr'ouvert dans un des bouts par un petit morceau de bois pour en écarter les parties : on l'en- fonce dans l'eau, on le darde fur l'ourfm , ôc à la place du morceau de DDdd z çSo O U R bois qui fe dégage aifément de lui-même , Tourfin s'y loge ; alors on le retire de l'eau: quelquefois , quand le flux & le reflux eft grand, on le fuit fur la grève très-avant dans la mer ; alors on peut le prendre à la main. On vend dans les rues de Marfeille les ourfins , comme l'on vend à Paris les huîtres. Pour les ouvrir on a une main gantée à caufe des pointes , & des cifeaux à l'autre ; on les cerne tout autour , puis avec de petits morceaux de pain taillés en carrés longs , comme quand l'on veut manger un œuf à la coque , on ratifie la fubflance interne , rougeâtre, pleine d'œufs , avec ce pain , & on le mange ainfi alTaifonné. On en efl dégoûté dans les premiers jours; car rien ne refTemble mieux à du pus , que cet amas d'œufs , qui procure fouvent un petit cours de ventre ; mais on s'accoutume bientôt à ce mets , qui étant cuit a le goût des écreviifes. On nomme l'intérieur de l'ourfm, echinus ovarius, & l'ex- térieur echinus disitatus. Les ourfins de la Mer Rouge font plus épais que ceux de la Médi- terranée ; ceux-ci font d'un meilleur goût que ceux de l'Océan &: de la Manche. M. Klein a donné au public deux difîributions fynoptiques de ces coquilles ; l'une tirée de l'anus, l'autre de la bouche : on peut y joindre celle tirée de la figure extérieure de la coquille. Voici les efpeces principales des ourfms , & les endroits où on les trouve. 1°. Les ourfins de forme hémifphérique ou fphéroïdale, nommés turbans ( cidares ). Le fommet efl élevé, à bouche arrondie & fituée an milieu de labafe, qui efl un peu convexe, à grands & petits colures, chargés d'apophyfes nombreufes en forme de grains dcmilUt: fes pointes font fines comme des aiguilles , bien rondes ou flriées ; tel efl le turban mïliaire. Il y en a de différentes couleurs, rougeâtres , verdâtres, vio- lets , d'un gris cendré ; quelquefois l'extrémité des pointes efl blanche ; ils fe trouvent dans nos mers : les turbans à panneaux ont les colures marbrés ou nues de couleur rofe , de verdâtre & de brun; ceux à bou- che décagone font un peu anguleux ; tantôt ce font les grands colures qui font élevés , tantôt ce font les petits ; tel efl le turban turc. Ceux dont les apophyfcs font un peu grandes , s'appellent /«/^^/zi à grains d& petite virole. Celui que l'on nomme ^artichaut ou le chardon , a de grands piquans applatis en forme de fpatuleou de pignons de pommes de pin, fe recouvrant mutuellement , & ne laifTant voir que les extrémités eri O U R ,Si petits pentagones : la bafe de ces oiirfins eft aiiflî hériffée de petites pointes. Vourfin digité eH hérifle de gros piquans en forme de pieux de paliffade ou de doigts , cendrés , rayés vers le bout & par zones de fauve clair , longs , arrondis , finiffant en tiers-point. On voit à la bafe d'autres pointes plus petites en forme de fpatule. On en voit dont les piquans font en lames d'épée , triangulaires & verdatres. Le turban à mamdon a les apophyfes féparées les unes des autres par des bandes onduleufes dont les bords font ordinairement en filigrane ; ainfi qu'on le voit bien dans le turban maure, dont les piquans font pyramidaux , ftriés dans leur longueur & forés dans le bout ; ces derniers ourfms ne fe trouvent guère que dans les parages des Indes. 2^. Les ourfins de forme ovoïde, échancrée d'un côté , à bafe un peu applaîie & à partie fupérieure un peu fiilonnée , nommés pas de poulain , barillets , cœurs marins ( fpatagi ). Il font ornés en defîiis d'une efpece d'étoile en manière de fleur à cinq pétales rabatus , quatre defquels font bordés d'une double ou quadruple rangée de petits trous , fcmés dans le refle d'apohyfes inégales & peu faillantes. La bouche efl près de la circonférence. 3°. Les ourfms de forme ovoïde fans échancrure , & fort convexe depuis la bouche jufqu'à la pointe tronquée : on les nomme œ'fs marins ( bri(Jî ). On y diftingue quatre larges filions partant d'une cavité garnie de quatre trous , ornés chacun de quatre rangées de petits trous , & entourés d'un autre fillon très-léger. Les apophyfes font comme autant de petites femences de perles , & les pointes font capillaires. La cou- . leur de ces ourfms eft ordinairement d'un gris ou blanc fale. Le contour de quelques-uns femble repréfenter cinq baflions avec leurs flancs & leurs courtines qui correfpondent à une étoile à cinq rayons qui fe voit fur le dos. Ces ourfins font communs dans les mers des Indes. 4°. Les ourfins à pans irréguliers , de forme large & peu bombée , & ornés dans leur partie convexe d'une efpece de fleur à cinq pétales , normnés pavois ou boucliers (^fcuta ) : leur bafe efl concave, la robe efl femée de petits cercles creux dans lefquelsfont les apophyfes. Les cinq dents molaires font doubles : ces ourfins font plus communs aux para- ges de l'Amérique , qu'ailleurs. 5°. Les ourfins de forme applatie, ornés dans leurs deux faces de cinq feuilles , quelquefois percés de plufieurs trous oblongs ; on les nomme gâteaux ou beignets {^placcntcc); l'efpece nommée le pain d'épice 5^2 O U R eft percée de part en part de plufteurs larges fentes ; la bouche efl au centre , & l'anus près de la troifieme partie de l'axe ; fes pointes font capillaires , de couleur grife : ces coquilles fe trouvent dans les deux Indes. 6°. Les ourfins appelles rotules ( rotulœ. ) ont la même forme que les précédens, mais plus de la moitié de la circonférence eft rayonnée ou dentée en forme de roue , tandis que l'autre moitié eft entière & ar- rondie. L'efpece appellée owr/?/zyb/^i/-^ a douze rayons, dans la moitié de fa circonférence. Lorfqu'on veut conferver des ourfins pour les Cabinets des Curieux, il faut aufîi-tôt qu'ils font fortis de la mer, les faire tremper dans l'eau douce pendant quelques heures , enfuite les laifler fécher fans les vider, afin d'en conferver les mâchoires , & de ne rien défigurer. Sa fubflance intérieure n'efl qu'une gélatine dont la plus grande partie s'évapore , & l'autre fe defTeche : il importe d'en hâter la defîication , avant que la putréfadion attaque les membranes qui foutiennent les pointes dont l'animal efl hériffé , ce qui caufe leur chute. Pour éviter cet accident , M. Maiiduit confeille de faire promptement fécher ces animaux au grand foleii ou dans un four , dont la chaleur foit très-douce , il faut enfuite les tenir dans des lieux bien fecs. OURSINS DE MER FOSSILES, echinltes, font les mêmes coquilles multivalves que les précédentes , devenues foffiles par la récefïïon des mers qui couvroient autrefois les lieux où l'on en trouve préfentement. Il y a de cesfofTiles qui font mutilés ou changés de nature ; l'on en trouve qui font d'une nature fpatheufe , d'autres font changés en filex , & ont confervé leur forme & leurs carafteres primitifs. On diflingue encore fur ces coquilles, les futures, les petites éminences, les milliers de petits trous, les efpeces de gravures autour des mamelons, dont il efl parlé dans V article des OvRSit^s viVANS. On peut confulter l'Ouvrage latin fur les ourfms de M. Klein , & qui efl traduit en françois par M. Desbois , & imprimé à Paris en !y6^, in-8°. On peut aufïi rapporter aux ourfins foffiles, les parties qui en font féparées,& que l'on trouve également dans la terre, telles que leurs dents , leurs offelets, leurs pointes & leurs mamelons. Les pierres ou pointes judaïques , font aufîi des dards fofîiles d'ourfins, yoye:^ Pierre Judaïque. Les pointes d'ourfins fo/Hles & ordinaires , font des baguettes pier- O U R O U T 583 reufes , communément fpatheufes , cylindriques , liffes ou flriées , & de de différentes grandeurs. FoyeiOvRSiN DE MER. On donne le nom à^écujfon d''ourJin pétrifié^ à ces pièces carrées, ou de figure irréguliere , dont l'afTemblage d'un certain nombre compofe l'ourfin lui-même; on en peut fouvent compter jufqu'à fix cents. Les ëcufTons orbiculaires font les mamelons de l'ourfin mamillaire. Voye:^ Mamelons. On trouve beaucoup d'ourfins ou de parties qui en dépendent, de- venues foffiles ou pétrifiées, dans plufieurs provinces en France, en Angleterre , dans les Pays - Bas Autrichiens, en Suifîe , & en quantité d'autres contrées. OURSINE, efl: le nom que l'on donne à un phalène ( papillon noc- turne ) qui provient d'une chenille toute velue , laquelle fe trouve fur la laitue. OUTARDE, OTARDE ou BITARDE, otls.fcu tarda avis. Genre d'oifeaudonton diflingue plufieurs efpeces. Uoutardc vu/gaireou la biflar' di efl un oifeau de la grandeur du coq d'Inde; elle a la tête & le cou de couleur cendrée, le ventre efl blanc & le dos bigarré par de lignes tranfverfales, ronfles & noires ; fon bec efl conique & un peu femblable à celui d'une poule : elle n'a point de doigts de derrière , ce qui efl fort notable , car par cette marque & par fa grandeur elle efl fufKfamment di- flinguée de tous les autres oifeaux aveclefquels on a voulu la confondre. Elle n'a que trois doigts pofésantérieurementj dont les ongles font larges, courts, peu crochus , peu pointus, de figure ovale & convexe, tant en defliis qu'en deffous. Le duvet de l'outarde efl: un peu rofe ou rou- ge âtre. En hiver les outardes vivent en troupe dans les plaines , c^s fociétés fe défuniffent en Avril , c'efl la faifon de leurs amours. Lorfqu'elles font à terre, en bande, il y en a toujours quelques-unes un peu éloignées de la troupe qui font fentinelle, ayant toujours la tête levée pour avertir par un cri les autres quand quelqu'un paroît, & comme elles ont beau- coup de peine à s'élever, à caufe de leurs aîles courtes, elles s'y pren- nent de bonne heure. Lorfque l'outarde efl chaflee , elle court fort vite, en battant des aîles , & va quelquefois plufieurs milles de fuite fans s'ar- rêter; mais comme elle ne prend fon vol que diflîcilement & lorfqu'elle efl aidée, ou fi l'on veut, portée par un vent favorable, & que d'ailleurs elle ne fe perche ni ne peut fe percher fur les arbres, foit à caufe de fa 584 O U T pefanteur , foit faute de doigt poflérieur dont elle puiffe faifir la branche & s'y foiitenir, les lévriers, les chiens courans la peuvent forcer, &c même l'attrapent fouvent lorfqu'elle ell: peu élevée de terre : on la chaile auffi avec l'oifeau de proie , & on lui tend des fikts. On prétend que dans ce genre d'oifeaux d'Europe les individus font ceux qui ont le plus de rapport avec l'autruche, que les femelles ont au-deffus de l'o- vaire des tefticules comme les mâles , & que le mâle dans le temps de l'amour, fait aufll la roue avec fa queue. On la prend encore à l'hame- çon , en y attachant un morceau de pomme ou de viande. On prétend que les outardes font carnaïTieres 6c qu'elles fe nourriffent de grenouilles, de fouris, de mulots, de petits oifeaux & de difFérens infedes ; toujours e(l-il vrai que pendant l'hiver elles mangent des feuilles de navets, des choux, des plantules & des graines. On a trouvé fouvent dans leurs eftomacs, de petits cailloux qu'elles avalent , comme l'autruche , pour faciliter le broiement des grains qu'elles mangent. Quand ces oifeaux s'accouplent , ils vont ordinairement à l'écart ( chaque couple ) pour jouir folitairement de leurs plaifirs. Quelque- fois des rivaux fe difputent une femelle , ils fe battent à toute outrance, &c on trouve de temps en temps de ces viûimes de Tam.our fur le champ de bataille. Le mâle exprhne fes defirs à fa femelle , en faifant la roue ou l'éventail avec fa queue , comme le coq d'Inde ; pendant qu'il fe pavane ainfi , la peau de defTous fon cou s'enfle, fe colore, de même que lorfqu'il entre en fureur. Ils font leurs nids dans les terres en friche , & fe contentent le plus fouvent de creufer la terre. La femelle y dépofe deux œufs, qui font blancs, avec quelques taches rouifes aux gros bouts , du refte ils font auffi blancs que des œufs de cygne. La ponte fe fait fur la fin de Mai ou de Juin. La couvaifon eft à-peu-près de cinq femaines , comme celle des dindes. Les petits courent, comme les poulets, auffi-tôt qu'ils font éclos. Le cri des outardes eil à-peu- près femblable à celui du corbeau. La chair de cet oifeau a le goût de celle du dindon. On voit beaucoup d'outardes aux environs de Châlons en Champagne : il y en a auffi en Poitou. On trouve quelquefois de ces oifeaux engour- dis au milieu des neiges, 6l on les prend aifément. On en élevé dans les baffes-cours. La vraie outarde eft fort rare dans bien des pays. La graiffe de cet oifeau eft anodine & réfolutive. Les Sauvages fe font des robes des plumes d'outarde \ DUT O X I 585 ti'outarde : on tî'Oiivc la defcription anatomique de l'outarde dans les Mémoires de V Académie des Sciences. Petite outarde ou CANNE-PETIERE, otïsminor^ anascampeflrls, vulgà dicta. Cette petite efpece d'outarde a, dit M. de Buffon^ tous les attributs extérieurs de la grande , & même prefque toutes les qualités intérieures , le même naturel , les mêmes mœurs , les mêmes habitudes ; il femble que la petite foit éclofe d'un œuf de la grande, dont le germe auroit eu moins de force de développement; le mâle fe diftingue de la ■femelle par un double collier blanc & par quelques autres variétés dans les couleurs; la femelle pond au mois de Juin, trois , quatre, & jufqu'à cinq œufs fort beaux, d'un vert luifant; les petits ne commencent à voler que vers le milieu d'Août, & quand ils entendent du bruit ils fe tapiiient contre terre , 6vfe laifferoient plutôt écrafer que de remuer de la place ; leur cri d'amour eft brout ou prout , ils le répètent fur-tout la nuit, & on l'entend de fort loin. La petite outarde eil: moins répandue que la grande, &:paroît confinée dans une zone beaucoup plus étroite ; elle paroît particulièrement habiter le climat de la France &efl: commune dans le Maine , dans la Normandie. La petite outarde efl naturellement ■nifée & foupçonneufe , au point que cela a paffé en proverbe , & que l'on dit des perfonnes qui montrent ce caraûere , qu Ils font de la canm-petiere, Lorfque ces oifeaux foupçonnent quelque danger , ils partent & font un vol de deux ou trois cents pas très-rapide , &fort près de terre ; puis lorf- font qu'ils pofés , ils courent fi vite, qu'à peine un homme les pourroit atteindre. La chair de la petite outarde eft noire & d'un goût exquis. On trouve en Afrique une efpece de petite outarde : voye^HovQkRk ; & en Arabie une grande outarde huppée: rc>y^{LoHONG. On trouve •aufîi en Afrique une petite outarde huppée connue fous le nom de rhaad» Voyez ce mot. OUTIN. VoycT^YikVTm. OUTREMER EN PIERRE. Voyei Lapis Lazuli. OXICEDRE ou PETIT CEDRE. Foyei ^^' '""^ Cèdre. OXIPETRE , eft tantôt une terre farineufe , &: tantôt une pierre criftal' Une , blanche , jaunâtre , d'un goût aigrelet , laquelle fe trouve dans le territoire de Rome : on nous a affuré qu'on s'en fert dans le pays en boiftbn , pour modérer la chaleur de la fièvre. Les oxipetres que nous avons reçues de cette contrée , étoient alumineufes ou vitricliqueSi Voyei^ Alun 6- Vitriol. Tome IF, EEee 58(5 O Y E OlfEoiiOIE, anfer, eft un oifeaii très-vorace , aquatique , & 3ont on diiîingue beaucoup d'efpeces , dont le caraftere eft d'avoir trois doigts antérieurs & palmés , & celui de derrière fans membranes ; le bec eft convexe en deffus, plane en deftbus , d'une largeur & grofl'eur égales dans toute la longueur , onguiculé par le bout qui eft obtus , les côtés du bec font denticulés comme une lime. Nous donnerons ici Thiftoire de Voie domejilque , & nous ne rapporterons que les fmgularités des autres efpeces qui font fauvages. L'oie domestique ou privée, anfervulgarls. C'eft un oifeau de baffe-cour connu de tout le monde; il eft plus petit que le cygne , mais plus grand & plus gros que le canard : il pefe jufqu'à dix livres étant cngraifle : fa longueur , depuis le bout du bec jufqu'à celui des pieds , eft de trois pieds ; l'envergure a plus de quatre pieds & demi : le bec eft long de deux pouces & demi; la queue longue de fix pouces & demi, êc compofée de dix-huit grandes plumes; les ailes ont chacune vingt- fept grandes plumes. L'oie a le cou plus court que le cygne , & plus long que le canard : la couleur de fon plumage varie comme dans tous les autres oifeaux domeftiques ; tantôt elle eft brune & bigarée; tantôt elle eft cendrée ou blanche , mêlée de brun. Le mâle eft ordinairement blanc. Le bec & les pieds font jaunes dans les jeunes oies , qu'on nomme cifillons & oifons^ ou cyons quand elles font un peu plus grandes : ceux clés vieilles font rouges. On nomme le mâle oyard ou Jars. Quand l'oie fe met en colère , elle fifîle comme le ferpent : elle vit fort long-temps. Willughby cite une oie qui avoit quatre - vingts ans (il fuftit de lire vingt ans), & qu'on fut obligé de tuer, à caufe de fa méchanceté & des mauvais traitemens qu'elle faifoit aux oifons. L'oie eft un oifeau amphibie qui vit, comme le canard, fur la terre & dans l'eau. L'on en voit le long de la Loire s'aftembler en certains temps de l'année, & faire leur pafiage en d'autres pays, d'oii elles reviennent enfuite chacune dans leurs maifons. Cet oifeau fe nourrit principalement d'herbes & de grains : il eft pefant , s'exerce peu à voler & marche lentement: cependant on mené quelquefois une troupe d'oies à plus de quinze lieues , comme l'on conduit des dindons. Belon dit que l'oie privée tire fon origine de l'oie fauvage , & qu'il y en a une efpece grande , de belle couleur & féconde ; & l'autre qui tire fur l'oie fauvage , eft plus petite & de moindre revenu. Les bons Economes qui faventtirer avantage des oies, préfèrent celles qui font blanches & de O Y E 5^7 grande race à celles dont le plumage change de couleur. Maïs quoique ces oifeaux s'élèvent par-tout , l'on n'en peut tirer bon parti que quand l'on eft proche d'une rivière , d'un ruiffeau , ou d'un étang, ou d'un très- grand vivier toujours plein d'eau pour les faire barboter. Deux mâles fiiffifent pour fix ou fept femelles : celles-ci font jufqu'à trois pontes par an, & dix à douze œufs à chaque ponte. Jean LUbault nous apprend dans fa Maifon Rujîique , que fi l'on ne retire pas les œufs des oies à , mefure qu'elles pondent , elles les couvent dès que leur ponte eft com- plette ; mais que quand on les leur ôte, elles ne ceffent point de pondre quelquefois jufqu'à deux cents œufs, & même jufqu'à en périr. Leur ponte commence en Mars 6l finit en Juin : elles n'oublient point l'endroit où on les a menées pondre pour la première fois : elles couvent trente jours, & la couvée eft de quinze à trente œufs. Dans le Hainault, l'Artois, & dans quelques autres provinces de France on en tire un grand profit ; aufii voit - on , après la moiffon , de nombreux trou- peaux d'oies pâturer dans les champs avec les dindons : en automne on les engraifie dans l'efpace de quinze jours ou trois femaines , en leur crevant \qs yeux. Les Juifs excellent dans la manière d'engraiffer ces oifeaux. On en fait vers la S. Martin un débit confidérable. Autrefois l'on en débitoit à Paris dans la feule rue aux oies , d'oii l'on a fait par corruption la rus aux ours : les RôtifTeurs qui les vendoient fe nommoient Oycrs. Les jeunes oies font attaquées aux mois de Juin & de Juillet d'un plus grand nombre de maladies, & de maladies beaucoup plus dange- reufes que dans les autres faifons de l'année ; c'ell à cette époque qu'elles périfient en quantité. La négligence avec laquelle on élevé ordinaire- ment ces fortes d'oifeaux, doit être regardée comme la caufe principale de ces pertes. On lit dans la Nature conjidérée fous dlfférens afpccis des moyens pour prévenir la mortalité des oifons, tirés de la Gazette d'A- griculture. Dans ces deux mois de l'année ( Juin & Juillet ) , il faudroit donner à ces jeunes oifeaux plus de foins que dans tout autre temps ; parce qu'alors la nature les pourvoit d'ailes & leur fait pouffer leurs plus groffes plumes, ce qui doit les affoiblir beaucoup; d'ailleurs la nourriture maigre & fouventfeche qu'ils trouvent dans les prairies pen- dant les grandes chaleurs , n'eft pas fufiifante pour les nourrir & ajouter à leurs forces; il faudroit donc leur donner une bonne pâture avant fju'iis fe répandent dans les prairies & à leur retour : l'expérience a EEee z 58a O Y E démontré le fiiccès de cette pratique pendant que ces oifeaux prennent leurs plumes. D'autres efpeces de maladies font une cruelle guerre à ces jeunes oîfeaux, en voici les divers fymptômes : fi dans les mois de Juin & de Juillet il vient à pleuvoir beaucoup , l'herbe qui pouffera trop rapidement, acquiert une qualité qui donne le dévoiement aux oies qui la picorent; ces pluies abondantes rafraîchiffent & même re- froidiffent par trop ces oifeaux. Peut-être auffi le mal peut-il provenir d'une eau rougeatre , remplie d'infeftes du genre des monocles & de5 binocles, qu'on leur laiffe boire en cette faifon : voye^ Vartïch BiNOCLE, D'habiles Economes ont employé divers moyens fuivis de bons effets, & dont voici la méthode. Il faut faire boire aux oifons attaqués de la dyffenterie une infufion légère de baies & de petites branches vertes de fapin pilées & broyées enfemble dans de l'eau bien propre : le lierre mêlé avec un peu d'orge égrugée eff auffi un bon remède en pareil cas ; l'ufage de ce breuvage eff pour le matin avant d'envoyer ces oifeaux aux champs , & le foir lorsqu'ils font de retour. La paille hachée très- menue & le fon forment dans l'effomac des oifons une bouillie vif-* queufe , qui tempère l'âcreté de l'eau fale , des infeftes & de l'herbe tendre & froide qu'ils ont avalés. Cette nourriture , en fortifiant l'efto- mac , adoucit auffi les inteflins ôc arrête la dyffenterie. Le chardon pild & mêlé avec le marc des brafferies & un peu d'orge égrugée , eft encore un remède plus sûr que les précédens , fur-tout fi on faupoudre cette nourriture trois ou quatre fois par femaine d'un peu de cendre de tabac: alors c'eff encore un excellent fpécifîque contre les autres m.aladies de3 oifons, quelesinfeftes, & fur-tout lesfang-fues qu'ils avalent leur occa- fionnent. Un autre fléau pour les oifons, ce font les petits infeftes , poux , moucherons, coufms, &c. qui fe mêlent dans les oreilles & lesnafeaux de ces bipèdes ,.qui les tourmentent, les fatiguent ,les épuifent de force , êf les font périr par l'excès de la douleur. Les oifons qui eii font attaqués marchent les aîl&s pendantes, fecouent la tête, ou alongent le cou, & ne mangent que peu ou point. Pour faire déloger ces hôtes impor* tuns & cruels , il faut préfenter aux oifons , au retour des champs , de l'orge au fond d'un vafe rempli d'une eau bien claire ; ces oifeaux avides de l'orge , voulant la manger, font obligés néceffairement de mettre la tête & le cou dans l'eau , les infeûes fuient ou fe retirent au haut du cou , c'eft-à-dire près du corps ; les parties affeftées, malades, fe nétoiens & bientôt ces bipèdes recDuvrent la fanté : en répétant pendaat quelque.3. O Y E 5§9 ^mifs cette opération , les infeâes n'y tiennent pas & abandonnent leur proie pour toujours. Une fridlion d'huile de fapin battue dans de l'eau ou d'onguent mercuriel peu chargé de vif-argent, écarte & détruit aulîi. ces ennemis opiniâtres. C'efl à tort qu'on a taxé l'oie d'être ftupide , elle efl: vigilante ; fon fommeil eu. léger, elle fe réveille au moindre bruit; elle efl même aufîi propre que quelques chiens à garder la nuit une maifon de campagne ; car dès qu'elle entend quelque chofe, elle ne cefle de jeter des cris» On en cite un exemple fameux dans l'Hiftoire Romaine , où elle étoit au rang des oifeaux facrés , pour avoir averti les foldats de l'approche des Gaulois , près de s'emparer du Capitole. Il efl certain , dit Lémery^ que cet oifeau efl difciplinable ; cet Auteur en a vu un tourner une roue de cheminée pour faire rôtir de la viande, . Perfonne n'ignore combien cet oifeau entre dans nos ufages domefli- ques : fes petites plumes fervent à faire des lits , des coufîins & des oreillers , qui nous facilitent un fommeil agréable ; & les grandes plu- mes de fes ailes nous fournifTent des plumes à écrire , dont l'ufage efl connu de tout le monde. On peut plumer les oies deux fois l'année , au printems & en automne. Il ne paroit pas que les Anciens euffent coutume de fe coucher fur la plume d'oie : Bcion dit qu'ils ne connoif- foient pas même les lits de plumes , puifqu'ils ne font pas encore au> jourd'hui en ufage chez les Orientaux : leurs lits font compofés de bourre ^e chameau , de laine , de coton & de fommités de rofeaux. On prétend que la fiente de l'oie gâte un peu les prés & brûle l'herbe ; ces oifeaux font capables de faire beaucoup de dégâts dans les jardins &: dans les blés , fi l'on n'y prend garde : la jufquiame , la ciguë & l'a- mande amere font des poifons pour ces animaux ; mais en revanche l'oie aime beaucoup l'orge qui l'engraifTe. Il y a peu de volaille plus fujette à produire des monflres que l'oie : les Payfans prétendent con- noître , par la grofleur & par la figure des œufs , ceux qui doivent en faire naître , & ils les rejettent comme neu propres à être couvés, ou plutôt comme ne devant pas produire des êtres d'une longue & bonne durée. La chair de l'oie efl un afTez bon manger , mais elle efl peu falutaire , étant grofîîere & difficile à digérer : il faut être robufle , faire de l'exer- cice pour qu'elle nourriffe bien & qu'elle produife un aliment folide ^ durable ; ceux qui font fédentaires > & particulièrement les gens de* 59CJ O Y E cabinet , doivent s'en abftenir. On choillt cet oifeau d'un âge moyen , car étant trop jeune , fa chair eft virqueufe & moins faine ; quand au contraire il eft trop vieux , fa chair efl feche , dure & indigefte. On mange l'oie rôtie ou en ragoût : l'on fait en quelques pays des pâtés de cuifTes d'oies qui font fort eftimés ; en Gafcogne on les marine , en les falant à fec , les faifant cuire à demi dans de la graiffe d'oie : c'efl ainfi qu'on les mange dans les potages aux choux verts , que les Béarnois appellent garbure. Les œufs de cet oifeau fe mangent chez le petit peuple , mais ils ne font pas à beaucoup près auiTi agréables que ceux de poule. Le fang de l'oie eit alexipharmaque : fa graiffe qui efl très-fine , très-douce , eft émolliente , réfolutive , nervale & laxative ; elle empêche les grains de la petite vérole de creufer pro- fondément : cette fubftance , ainii que le foie du même oifeau , pafloit chez les Romains pour quelque chofe d'exquis ; tout le monde con- noît encore les foies gras de l'oie qui nous viennent de Metz. Sa fiente eft hyftérique , diurétique , fébrifuge , fudorifique , &: très - propre contre la jaunifle : on prétend que la première peau des pieds de l'oie eft propre pour arrêter toutes fortes de flux , &c. Voie huppée n'eft qu'une variété de l'oie domeftique. L'Oie de neige , anfer niveus , eft blanche par tout le corps ; les les cinq premières groftes plumes font noires : elle ne paroît chez nous qu'en hiver , oii elle vole en troupes. L'Oie sauvage, anfer férus aut fylveflrls. Cet oifeau fréquente les terres labourées oii il pâture ; il eft plus petit que l'oie domeftique , s'apprivoife difficilement ; il arrive chez nous en hiver après les grues ; voyez ce mot. Il vole par bandes le jour & la nuit avec beaucoup d'ordre en forme d'angle rediligne , comme font les grues & les ca- nards fauvages. Celui qui eft en tête fend l'air, dont il foutient le choc , les deux colonnes fuivent ; lorfqu'il eft fatigué , il retourne à la queue , & eft remplacé par celui qui le fuit. La troupe s'abat fur terre ; comme ils ne s'élèvent de terre que difficilement , un d'entre eux fait fentinelle , eft aux aguets , avertit fes camarades du moindre danger. Leur cri eft perçant & fe fait entendre de fort loin ; aufti a-t-on remarqué que dans l'oie fauvage , la trachée-artere eft réfléchie comme dans la grue en façon de trompe. Son envergure eft très étendue , fon cou eft fort long ; fon bec , fes jambes &; its, pattes font d'un jaune fafrané ; fa mâchoire fupérieure eft toute garnie de plufieurs rangs O Y E • ^9, 'ée petites dents , &c celle de defTous d'un feul rang de cliaqne côté , la langue en a aufïi un de chaque côté fur la membrane extérieure ; quelquefois le palais eu. auffi denté. Cette oie fe plaît dans les grandes plaines remplies de blé vert qui lui fert de pâture. Elle fait (es petits dans les Ifles &: dans les lieux maritimes où il y a des marécages. Sa chair efl: infiniment plus légère , plus favoureufe & plus délicate que celle de l'oie domeftique. On voit aux environs de Ferrare en Italie & dans la Flandre , quel-» ques oies fauvages qui varient par le plumage. Il y a auiîi l'oie fauvage du Nord : c'eft Voie moqucufe d'Edwards , la môme aux ailes bleues de la baie d'Hudfon, L'Oie de mer , merganfer. Cet oifeau qui eft le grand plongeon de pluiieurs Naturalises , a une envergure moins confidérable que les autres oies en proportion de fa taille. 11 a le corps long , le dos large èi plat ; fon plumage fupérieur efl d'un cendré brunâtre , l'inférieur cft de couleur ifabelle, les grandes ailes ont les pointes blanches : le bec efl plus long que le doigt index , d'une couleur brune-jaunâtre ; la mâchoire fupérieure efl crochue par le bout : toutes deux font ar- mées de dents , & reffemblent à une petite fcie de chaque côté : les jambes & les pattes font rouges. C'eft une efpece de hark. Voyez ce mot. L'Oie Nonnette. Cet oifeau n'efl pas fortcommim parmi nous : on le nomme ainfi , à caufe de fa contenance commune avec celle de l'oie, & parce que fon plumage refTemble à l'habillement d'une Religieufe vêtue de blanc & de noir. Il n'efl pas fi grand que l'oie vulgaire ; mais il efl plus grand que le canard. Sa queue efl courte & noire : il efl haut monté fur jambes ; fes pieds font plats , larges ôc fort noirs , de môme que fes jambes , Ion bec & fes yeux ; fon bec efl court , mais large & comme denté. Belon dit que l'oie nonnette a la finefîe du renard pour faire échapper fes petits quand quelqu'un veut s'^n faifir. Elle fait femblant de vouloir fe laifTer prendre , & leur donne le temps de s'échapper. Quelquefois elle fait comme fi elle avoit les ailes & les cuifTes cafTées; & quand elle voit fes petits hors de danger , elle s'envole & s'échappe à fon tour des mains des ChafTeurs. Elle prend les mouches qui volent fur l'eau; ce qui l'a fait appeller anas aiit anfcr mufcaris. Plufieurs Méthodifles re- gardent l'oie nonnette comme une variété de la bernache , bernicla, l'Oie de Soland, Oie d'Ecosse , Oie de Bassan, anfcr Bajfanus, 59^ O Y E Elle a la peau fur les côtés de la tête , au-delà des yeux , dégarnie de plumes : elle n'a point de narines; mais il y a une rigole à leur place qui s'étend des deux côtés tout le long du bec : les bords des deux mâchoires font toujours gluans ; les quatre doigts font liés enfemble par la mem- brane qui va jufqu'à lanaiffance des ongles; fes pattes font noires. Cette forte d'oifeau, qui efl: une véritable efpece de/o«, voyez ce mot, ne multiplie que dans Tlfle de Bafs en Ecoffe , où il en vient annuellement un nombre prodigieux ; chaque femelle ne pond qu'un œuf. Elle fait fon nid dans les rochers élevés de l'Ifle fituée dans la mer d'Ecoffe : elle aime fes petits très-tendrement; malheur aux enfans du pays qui iroient les dénicher , ils s'expoferoient à perdre la vie. Comme on tire rarement fur ces oifeaux, & que perfonne ne les effraie, ils nourriffent avec con- fiance leurs petits tout près des habitations. Leur nourriture eft de poiffon. Les Ecoffois difent que la chair de cet oifeau eft exquife : ils fe fervent de fa graiiTe pour la compofition de quelques remèdes. Le Sei- gneur de rifle en tire annuellement de grands revenus , car on les vend cher : ils ne viennent que dans le printems , & s'en vont dans l'automne. Ces oifeaux font d'excellens pêcheurs ; ils vont à la pêche pour eux & pour-leurs petits ; moyennant quoi les Infulaires font fournis dans tout l'été de poiffon frais , car ils partagent fouvent le fervice de la table de ces oifeaux. L'Oie de Moscovie , anfer Mofcovlticus , eft plus grande que les oies ordinaires ; la mâchoire fupérieure eft chargée d'une forte de tuber- cule ou de boffe large , ronde & de couleur orangée ; & le deffous du bec a une grande bourfe. Le bec, les jambes & les pieds font d'une belle couleur d'orange ; le plumage eft d'une couleur fombre. C'eft le cygnoldts Oruntalls de LiNNEUS. Les Naturaliftes font mention de pîufteurs autres fortes d'oies : il y a celle de Brenta, Brenta anas torquata Bdlonii ; c'eft le cravant : celle de Canada, ajias Canadmjîs^ l'une & l'autre ne font que des variétés de l'oie ordinaire : celle d'Efpagne ou de Guinée , anfer Hifpanicus aut Gu'meenJIs , qui eft très-grande & qui femble être une efpece de cygne abâtardie par l'accouplement du cygne & de l'oie ; fa chair eft excel- lente. L'oie de marais eft la même que l'oie fauvage; l'oie d'Iflande eft le canard de montagne de Spitzberg. M. Anderfon dit que les oies d'Iflande font connues fous le nom de margées ; & qu'elles y viennent çxx il grande quantité, que leurs troupes font par milliers, Ces oifeaux font O Y E 593 font , dit-il , û fatigués en arrivant , vraifemblablement par la grande route qu'ils viennent de faire en traverfant la mer , qu'on en peut tuer des milliers à coups de bâton. L'oie de Magellan eft , félon Ray , le penguin des Anglois. Foyei Penguin. Au cap de Bonne-Efpérance on trouve trois fortes d'oies ; favoir Vole fauvagc , celle de montagne & Voie aquatique : elles différent beau- coup foit pour la couleur , foit pour la grofleur ; celle de montagne efl plus grofTe que nos oies d'Europe. Ses plumes font d'un beau vert écla- tant : on donne à ces oies fauvages le nom de Jabotleres, à caufe de la grolTeur extrême du jabot qu'elles ont. On dit que les foldats & le commun du peuple en font des poches pour mettre du tabac , qui peuvent en contenir environ deux livres. Ces oies ne feroient-elles pas des efpeces de pélicans ? Vole à duvet du Danemarck ell le canard à duvet d'Iflande. Les oies fauvages de la Gambra ont des éperons aufli longs , dit-on^ que ceux de nos coqs. Les lacs de la Chine font aufîi remplis d'oies. Uole Magellanique de Clujius efl une efpece de manchot. Voyez ce mot. Nous le répétons , les marques caraôérifliques de ces oifeaux font d'être grands de corps , d'avoir le cou long , les ailes amples , ainfi que la queue qui efl ronde ; un anneau blanc proche du croupion ; le dos élevé & rond , & non aufïi plat que dans le genre des canards ; le bec fort, épais à la bafe, comme denté, pointu vers le bout & plus crochu que celui des canards. Tome IK FF f £ 594 PAC p. P AC. C'eft le nom que les Perfans donnent à une efpece d'aigle de mer , nommée en Afrique maroly. Voyez ce mot. PACA. Petit quadrupède femblable à un pourceau de deux moisr. Il y en a une grande quantité dans l'Amérique Méridionale , & il ne fe trouve point dans notre continent : quelques-uns font d'un blanc de - neige ; leur chair eft entrelardée & tendre , ainfi que leur peau , mais difficile à cuire : elle a le goût de celle du lièvre : c'eft un mets exquis pour les habitans du pays ; les blancs fe trouvent rarement ailleurs qu'aux rivages de la rivière de Saint-François. Le paca a depuis le bout du mufeau jufqu'à la queue environ un pied de long ; fa tête eft groffe , fa mâchoire inférieure courte : cet animal aune grande barbe de lièvre , des oreilles pointues & très-courtes , ainfi que la queue-; les jambes de devant plus courtes que celles de derrière : il a cinq doigts à chaque pied ; le corps couvert de poils courts , rudes au toucher ; il eft tacheté régulièrement de blanc, gris & noir : aufîi fa peau donne-t-elle une afîez belle fourrure. Les Guianois l'appellent ourma &c pack. Ces petits animaux ont le grognement &: l'allure du cochon : comme lui ils fouil- lent la terre avec leur mufeau pour chercher leur nourriture. Ils font organifés de manière à plonger & refier pluiieurs heures fous l'eau. Ils font difficiles à chaffer pendant l'hiver. Les grandes eaux leur font favorables. Les femelles portent au commencement des pluies ou de l'hiver. La chafTe de ces animaux efl alors très-pénible. Il faut àts chiens dreffés pour les prendre. Ils fe creufent des terriers comme les lapins, mais peu profondément ; de forte que fouvent les ChaiTeurs en marchant enfoncent dans l'endroit où ils font cachés, & les {ont partir. Il y a trois îfTues en triangle dans la retraite qu'ils fe font. Ils la recou- vrent de feuilles feches , qui font croire au Chafleur que c'efl un ancien trou abandonné. Quand on veut les prendre en vie , on bouche deux ifTues & on fouille la troifieme ; mais il faut être fur fes gardes , car ils fe défendent vigoureufement & fe vengent en mordant avec autant d'acharnement que de vivacité. M. Btijfon place \ç paca dans le genre du lapin ; mais M. Klein le range parmi les cavia, petits animaux, dit-il, que les Portugais nomment ratos do matto , qui habitent les bois , qui PAC 595 . ont le poil & le cri du cochon , & qui Te retirent dans des trous ou dans des creux d'arbres. PACAGE ou PASCAGE. C'efl un pâturage humide dont on ne fau- che point l'herbe , & qui fert pour la nourriture des beftiaux. Quand le pâturage eu fec on le nomme paùs. Les mots de pacages , pâtura- ges , pâtures , pâtis ou pafquis , herbages & communes , font prefque fynonymes. PACAL. Arbre de l'Amérique méridionale, qui croît aux bords d'une rivière diilante de vingt-cinq lieues de Lima : la defcription de cet arbre eft infuffifante. On dit que les Indiens en retirent par l'ufiion une cen- dre qu'ils mêlent avec du favon, pour guérir toutes fortes de vieilles cicatrices , des dartres & de feux volages. PACANE ou PACANIER. Efpece de noyer de la Louifiane. P"oy&i au mot Noyer. PACAY. C'efl le pois fucré de la Guiane. Voye^ ce mot. PACHÉE. Voye-:^aa mot ÉmeRAUDE. PACO ou PACOS. L'hiftoire de ce quadrupède & du lama, que nous réunifTons dans ce même article, d'après ce qu'en a dit M. deBuffon^ fournit un exemple que dans toutes les langues on donne quelquefois au même animal deux ou un plus grand nombre de noms différens , dont l'un fe rapporte à fon état de liberté , un autre à celui de domefti- cité , &c. Le fangUer & le cochon ne font qu'un animal , & ces deux noms ne font pas relatifs à la différence de la nature , mais à celle de la condition de cette efpece , dont une partie cil fous l'empire de l'homme , & l'autre indépendante. Il en eft de même àespacos^ des lamas qui étoient les feuls animaux domeftiques des anciens Américains ; ces noms font ceux de leur état de domeflicité ; le lama fauvage s'ap- pelle huanacus ou guanaco , & le paco fauvage vicunna ou vigogne. Les Anglois ont défigné le lama par la dénomination de peruicheattU , c'eft- à-dire bétail du Pérou, Quelques-uns l'appellent aufli cornera de tierra, mouton de terre. C'eft le guanapo de Gentil^ le wianaque de Wood^ le pelon ichiatl oquitli à' Hernande:^^ le chameau du Pérou de M. Brijfon^ le glama^ de plufieurs Auteurs , & la brebis du Pérou de Marcgrave, Le lama & le paco font deux animaux à laine qui appartiennent uniquement au nouveau Continent, & ne fe trouvent pas dans l'an- cien ; ils afFeftent même de certaines terres , hors defquelles on ne les îîouve plus : en effet ils paroiflent attachés à la chaîne des montagnes FFffz perent & fe tuent en battant la terre à droite & à gauche avec leur tête. Ils ne favent pas fe défendre des pieds ni des dents , & n'ont pour ainfi dire d'autres armes que l'indignation ; ils vomiflent ou cra- chent à quelques pas de diftance , à la face des hommes qui les inquiè- tent , qui les infultent , qui les outragent : & l'on prétend que cette falive qu'ils lancent dans la colère par la fente de leur lèvre fupérieure, eft acre &: mordicante , au point de faire lever des ampoules fur la peau. Le lama ( les Efpagnols prononcent Charria ) eft un animal fans cornes, bifulce, ruminante porte-laine; il efl haut d'environ quatre pieds , fa longueur eft de cinq ou fix pieds; le cou feul a près de trois pieds de long; fa tête qu'il tient levée eft bien faite, cependant petite en proportion du corps , & tenant un peu de celle du cheval & de celle du mouton , dit Fréjier; fes yeux font grands , le mufeau alongé , les lèvres épaifles, la fupérieure fendue, & l'inférieure un peu pendante; il manque de dents inciiives & canines à la mâchoire fupérieure ; fes oreilles font longues de quatre pouces , il les porte en avant , les drefle & les remue avec facilité , fa queue qui a huit pouces de longueur , eft droite , menue & un peu relevée; (qs pieds font fourchus comme ceux du bœuf, mais ils font furmontés d'un éperon en arrière, qui aide à l'animal à fe retenir & s'accrocher dans les pas difficiles ; il eft couvert d'une laine courte fur le dos, la croupe & la queue, mais fort longue fur les flancs &: fous le ventre : du refte les lamas varient par les cou- leurs ; il y en a de blancs, de noirs & de mêlés: leur fiente reilemble à celle des chèvres, La nature qui dans toutes fes opérations, agit ordinairement par les moyens les plus faciles , paroît s'en écarter dans le phylique de ces animaux; le mâle a le membre génital menu & recourbé, en forte qu'il pifTe en arrière : c'eft un animal très-lafcif , & qui cependant a beaucoup de peine à s'accoupler. La femelle a l'orifice de la vulve fort étroit ; elle fe profterne pour attendre le mâle , & l'invite à l'afte de la généra- tion par fes foupirs; mais il fe pafTe toujours plufieurs heures & quel- j^uefois un jour entier avant qu'ils puifTent jouir l'un de l'autre , 6c tout PAC çç^ ce temps fe pafTe à gémir , à gronder , & fur-tout à fe confpuer ; & comme ces longs préludes les fatiguent plus que l'acte même , on leur prête une main fecourable , officieufe , pour abréger , c'eil-à-dire , pour les aider à s'arranger, à s'appareiller: ils ne produifent ordinairement qu'un petit, & rarement deux. La mère n'a auffi que deux mamell s , & le petit la fuit au moment qu'il eu né. Nous avons dit que la chair des jeunes eft très-bonne à manger, celle des vieux efl: feche &: trop dure ; en général celle des lamas domeftiques eft bien meilleure que celle des fauvages , & leur laine eft aufti beaucoup plus douce & mieux fournie : leur peau eft aflez ferme ; les Indiens du Pérou en faifoient leurs chauflures , & les Efpagnols l'emploient pour faire des harnois de cheval. Ces ani- maux fi utiles & même fi néceflaires dans le pays qu'ils habitent, ne coûtent ni entretien ni nourriture , la conformation de leurs pieds 6c répaifteur de leur fourrure , difpenfent de les ferrer & de les bâter. Le Condufteur prend feulement foin d'arranger leur laine de façon qu'elle ne porte pas fur l'épine du dos. L'herbe verte qu'ils broutent eux-mêmes leur fuffit, &c ils n'en prennent qu'en petite quantité; ils font encore plus fobres fur la boiflbn: & l'on afllire qu'au befoin ils s'abreuvent de leur falive , qui dans cet animal eft plus abondante que dans aucun autre. Le lama dans l'état de nature, & que l'on appelle huanacus , eft plus fort , plus vif & plus léger que l'efpece domeftique ; le lama fauvage court comme un cerf & grimpe comme le chamois fur les rochers les plus efcarpés , fa laine eft moins longue , moins fournie & toute de couleur fauve : ces efpeces fauvages, quoiqu'en pleine liberté, favent fe raftembler en troupes , & font quelquefois deux ou trois cents enfem- ble : lorfqu'ils apperçoivent quelqu'un , ils regardent avec une forte d'attention, fans marquer d'abord ni crainte, ni plaiftr; bientôt l'éton- nement fuccede , enfuiîe ils foufFient des narines & henniftent à-peu-près comme les chevaux, & enfinîls prennent la fuite tous enfemble vers le fommet des montagnes; ils cherchent de préférence le côté du Nord, & la région froide ; ils grimpent & féjournent fouvent au-deftiis de la ligne de neige: nous l'avons déjà dit, ces animaux bifulces voyageant dans les glaces & couverts de frimats , ils fe portent mieux que dans la région tempérée ; autant ils font nombreux & vigoureux dans \esfierras , qui font les parties élevées des Cordillieres, autant ils font rares , rabou- gris, au moins chétifs dans les lanos ou parties qui font au-deftbus. s ^oo PAC On chaffe les huanacus ou lamas faùv âges ^ pour en avoir la toifon; ^ les chiens ont beaucoup de peine à les fuivre ; & fi on donne aux huana^ eus le temps de gagner leurs rochers, le Chaffeur & les chiens font contraints de les abandonner. Ils paroiffent redouter la pefanteurde l'air autant que la chaleur; on ne les trouve jamais dans les terres baffes, & comme la chaîne des CordiUieres qui eft élevée de plus de trois mille toifesau-deffus du niveau de la mer au Pérou , fe foutient à-peu-près à cette même élévation au ChiH, & jufqu'aux terres Magellaniques, on y trouve des huananus ou lamas fauvages en grand nombre ; au lieu que du côté de la Nouvelle Efpagne où cette chaîne de montagnes fe rabaiffe confidérablement, on n'en trouve plus, & l'on n'y voit que les lamas domeffiques que l'on y conduit, M. de Buffon dit que les pacos ou vigognes font aux lamas une efpece fuccurfale , à-peu-près comme l'âne l'eft au cheval ; ils font plus petits &: moins propres au fervice , mais plus utiles par leur dépouille ; la longue & fine laine dont ils font couverts eft une marchandife de luxe aufTi chère , auffi recherchée & aufîi précieufe que la foie. Les pacos qu'on appelle aufïi, dit Fréjier, alpagnes ou alpaques ^ & qui font les vigognes domeffiques , font fouvent tout noirs & quelquefois d'un brun mêlé de fauve. La toifon des vigognes ou pacos fauvages efl de cou- leur de rofe feche , un peu clair , & cette couleur naturelle efl fi fixe , qu'elle ne s'altère pas fenfiblement fous la main de l'Ouvrier. On fait / de très-bons mouchoirs de cou , de très-beaux gants & bas fort doux,' / très-chauds, & autres ouvrages de bonneterie avec cette laine de vigo- gne ; l'on en fait d'excellentes couvertures & des tapis d'un très-grand prix ; en un mot le caff or du Canada , la brebis de Calmouquie , la chèvre de Syrie ne fourniffent pas un plus beau poil , & la laine de vigogne forme feule une branche dans le commerce des Indes Efpagnoles. On difflngue même dans le commerce trois fortes de laines de vigogne , la fine yXdicarndineow bâtarde, & lepelotage; toutes trois néanmoins font employées, on en mêle auiîi avec du poil de lapin & de lièvre pour faire des chapeaux; on enfaitauffi descordes. La vigogne ( c'eft levicunas des Efpagnols) a beaucoup de chofes communes avecle lama; mêmes mœurs, même naturel, même tempérament, originaires de la même contrée , habitant le même canton : cependant comme la laine de la vigogne efl beaucoup plus longue & plus touffue que celle du lama , ranimai vigogne paroît craindre encore moins le froid ; il habite èc paffe PAC 6oi pafle dans les endroits les plus élevés des montagnes ; il fe tient plus volontiers dans la neige & fur les glaces, & les contrées les plus froides, paroiffent plutôt le récréer que l'incommoder : on le trouve en grande quantité dans les terres Magellaniques. Les vigognes reffemblent auffi par la figure aux lamas , mais elles, font plus petites , leurs jambes font plus courtes & leur muffle plu* ramaffé; leur toifon eu d'une teinte bien diiférente. Les vigognes n'ont point de cornes; elles vont en troupes & courent très - légèrement : timides ou craintives, dès qu'elles apperçoivent quelqu'un, elle s'en- fuient, & fi elles ont des petits , elles les chaffent devant elles. Les an- ciens Rois du Pérou, qui connoifToient bien les avantages réels que produifoient ces animaux, en avoient rigoureufement défendu la chaffe , parce qu'ils ne multiplient pas beaucoup. Se aujourd'hui il y en a infini- ment moins que dans le temps de l'arrivée des Efpagnols, Comme la chair des vigognes fauvages ou pacos fauvages n'efl pas fi bonne que celle des huanacus ou lamas fauvages , on ne recherche les vigognes que pour leur toifon & pour les bézoards qu'elles produifent. La manière, dont on prend ces animaux, prouve leur extrême timidité, ou fi l'on veut, leur imbécillité : quantité d'hommes s'afTemblent pour battre les bois, on les fait fuir & ils s'engagent dans des pafTages étroits où l'on a tendu des cordes à trois ou quatre pieds de haut, le long defquelles on laifTe pendre des morceaux de linge ou de drap ; ces animaux arrivant à ce pafîage , font tellement intimidés par le mouvement de ces lam- beaux agités par le vent , qu'ils n'ofent pafTer au - delà , & qu'ils s'at- troupent , demeurent en foule & deviennent la proie du ChafTeur qui les tuent en grand nombre , ou qui peut les prendre vivantes avec un lacet de cuir; mais fi dans la troupe , dit Fréjier^ fe trouvent quelques huanacus ( lamas fauvages ), comme ceux-ci font plus hauts de corps & moins timides que les vigognes, ils fautent par deffus les cordes; oC dès qu'ils en ont donné l'exemple , les vigognes fautent de même & échappent aux ChafTeurs. On fe fert de vigognes domefliques ou pacos , comme des lamas, pour porter des fardeaux ; mais les pacos étant plus petits, plus foibles, ils portent beaucoup moins ; ils font encore plus capricieux , plus obfli- nés; lorfqu'une fois ils fe couchent avec leur charge, ils fe laifTeroient plutôt hacher que de. fe relever. Les Indiens n'ont jamais fait ufage du Tome ir. GGgg éoi PAC lait de ces animaux , parce qu'ils n'en ont que la quantité nécefiaire à !a nourriture de leurs petits. Le grand profit que les Efpagnols avoient retiré des vigognes , les avoit engagés à tâcher de naturalifer ces animaux en Europe : ils en ont tranfporté plus d'une fois , ainli que des lamas , par ordre du Roi , en Efpagne pour les y faire peupler ; mais le climat fe trouva fi peu conve- nable, qu'ils y périrent tous. Cependant , dit M. de Buffon , Je fuis per- fuadé que ces quadrupèdes , plus précieux encore que les lamas, pour- roient réufîir dans nos montagnes , & fur-tout dans les Pyrénées. Ceux qui les ont tranfportés en Efpagne n'ont pas fait attention qu'au Pérou même les vigognes abandonnées à la Nature, ne fubfiftent que dans la région froide , c'efl-à-dire dans la partie la plus élevée des montagnes , oîi elles paiffent en troupes ; qu'on ne les trouve jamais dans les terres baffes , & qu'elles meurent dans les pays chauds : qu'au contraire elles font aujourd'hui très-nombreufes dans les terres voifmes du détroit de Magellan , où le froid eft beaucoup plus grand que dans notre Europe méridionale, & que par conféquent il falloit, pour les conferver, les débarquer non pas en Efpagne , mais en Ecoffe , ou même en Norwege, & plus fûrement encore aux pieds des Pyrénées & des Alpes , où elles euffent pu grimper & atteindre promptement la région qui leur con- vient, celle qui approche le plus de celle des Cordillieres. Je n'infifle fur cela , dit M. de Buffon, que parce que je m'imagine que ces animaux feroient une excellente acquifition pour l'Europe , & produiroient plus de biens réels que tout le métal du Nouveau-Monde, qui n'a fervi qu'à nous charger d'un poids inutile , puifqu'on avoit auparavant pour un gros d'or ou d'argent , ce qui nous coûte une once de ces mêmes métaux. Les animaux qui fe nourriffent d'herbes &: qui habitent les hautes montagnes de l'Afie & même de l'Afrique, donnent les bézoards que l'on appelle orientaux , dont les vertus font , dit-on , les plus exaltées ; ceux des montagnes de l'Europe , où la qualité des plantes &c des herbes eft plus tempérée, ne produifent , dit M. de Buffon, que des pelotes fans vertus qu'on nomme égagropiles ( cependant ils donnent quelque- fois des bézoards ) : & dans l'Amérique méridionale , tous les animaux qui fréquentent les montagnes fous la zone torride , donnent d'autres bézoards que l'on appelle occidentaux ^ qui font encore plus folides 6c PAC 605 peut-être auflî qualifiés que les orientaux : néanmoins lis ne font pas autant eflimés en médecine , ni aulîi recherchés des Commerçans. La vigogne fur-tout en fournit en grand nombre , le huanacus en donne auffi , & l'on en tire , dit Acojîa , Hijî. Nat, des Indes Occid. page 207, des cerfs & des chevreuils dans les montagnes de la Nouvelle Efpagne» Les lamas & les pacos ne donnent de beaux bézoards qu'autant qu'ils font huanacus & vigognes , c'eft-à-dire dans leur état de liberté , en un mot fauvages ; ceux qu'ils produifent dans Tefclavage , dans leur condi- tion de ferviîude , font petits, noirs , & ont peu de vertu: les plus eftimésfont ceux dont la couleur eft d'un vert obfcur, & ils viennent ordinairement âes vigognes, fur-tout de celles qui habitent les parties les plus élevées de la montagne , & qui paifTent habituellement dans les neiges. De ces vigognes montagnardes , les femelles comme les mâles produifent des bézoards , & ces bézoards du Pérou tiennent le premier rang après les bézoards orientaux , & font plus eflimés que les bézoards de la Nouvelle-Efpagne qui viennent des cerfs , &: font les moins effi- caces de tous. Vers le mois de Novembre, on trouve auffi dans le pre- mier ou fécond ventricule de quelques vigognes, l'efpece de bézoard de poil appelle égagropiU. Voyez maintenant les mots Bezoard 6c Egagropile. PACOCEROCA, alpln'ia, plante d'un genre particulier, félon quel- ques Botaniftes. Cette plante croît à la Martinique & au Bréfil, elle a le port &; le feuillage de la canne d'Inde. Sa tige principale eft haute de iix à fept pieds , droite , fpongieufe, verte , & ne donne point de fleurs; mais de fa racine , & même à côté d'elle , s'élèvent deux ou trois autres tiges moins hautes , d'environ un pied & demi , grofles comme le petit doigt, & chargées de fleurs rouges , auxquelles fuccedent des fruits gros comme une prune , oblongs , triangulaires , remplis d'une pulpe iilamenteufe , fucculente , d'un jaune fafrané , d'une odeur vineufe ôc agréable au goût , renfermant beaucoup de femences triangulaires , jaunâtres & ramaffi^es en un petit peloton, contenant chacune une petite amande blanche : le fuc du fruit donne une teinture d'un très -beau rouge , ineffaçable à la leffive. Si l'on y mêle un peu de fuc de citron , îe mélange teindra alors en im beau violet. La racine de cette même plante efl noueufe & rend une belle couleur jaune , étant bouillie dans fie l'eau : Lçmery dit que toute la plante étant écrafée avant que fon GGgg % 6o4 PAC PAG fruit foit mûr , rend une odeur de gingembre , 8c que les Indiens l'em- ploient dans leurs bains. PACQUIRES , efpeces d'animaux femblables aux porcs , lefquels fe trouvent dans l'île de Tabago : ils ont le lard ferme , peu de poil, & le nombril fur le dos; les Sauvages en mangent beaucoup. PADUSouBOIS DE SAINTE-LUCIE: voye^à l'article Cerisier. PAGALOS, oifeau étranger affez femblable à une poule pour le port & la hauteur. Son plumage eft de différentes couleurs fort vives; fa queue a environ deux pieds de longueur : on en a vu dans la Ménagerie de Chantilly. PAGANELLO. A Venife on donne ce nom à une efpece de goujon de mer, qui ell: mis dans le rang des poiflbns à nageoires épineufes. J^oye{BoviLLEROT , au motGovjON. PAGAYE, arbre de Cayenne , mal bâti, creux , mais fort droit. Il y efl: fort commun; il dure long-temps; il eu bon à faire des fourches : ■on en fait principalement des canots , qu'on appelle de fonnom. Mai/on Rujilque de Ciyenne. PAGE DE LA REINE. En Hollande on donne ce nom à un beau papil- lon de Surinam, qui provient d'une chenille -toute couverte de pointes > au bout defqueiles pend une toile noire. {Y oy ez T H ijloin des Infecies de Surinam , PL ^8 ). PAGEL , rubellio erythrînus. PoiiTon de mer à nageoires épineufes , mis par Arudï dans le rang des fpares. En hiver , ce poifTon ne quitte point la haute mer ; mais en été , il vient proche des rivages où en le pêche : la couleur de fon dos efi: roufle en hiver, bleuâtre en été; celle de fon ventre eft blanche : il a beaucoup de reflemblance extérieure avec le pagre : cependant il en diffère par fon mufeau plus pointu , plus étroit; il a le corps moins large, les yeux grands, la bouche petite, ainlî que les dents qui font rondes & pointues : fa chair eft blanche , nourrlflante , laxative & de bonne digeflion. Il a des pierres dans la tête; on pêche plus de femelles que de mâles. PAGGERE. Les Portugais appellent ainfi un animal teflacée du Cap de Bonne-Efpérance. Kolbe dit qu'il a une efpece de corne ou piquant fi venimeux, que fi la main en eft bleffée , on y fent aufîi-tôt des douleurs ti-ès-vives: l'inflammation s'y joint, & même on perd la main, û l'os n'eft fecouni promptement. PAG P A I (J05 PAGRE, phagmst poiffon de mer à nageoires épîneufes qu'^r/é^i met ainfi que le pagel , au rang des (pares. Foyei ce mot. Ce poiffonfe trouve fouvent dans le Nil : Rondelet dit qu'il reflemble , par les nageoires , à la petite dorade ; mais il en diffère par les aiguillons , par la queue , & par la couleur qui eft roufle en tout temps ; il a le mufeau épais & figuré en nez aquilin : ce poiflbn a une grande veffie pleine d'air. On lui trouve des pierres dans la tête : il vit de bourbe, d'algue , de feches & de petits poifîbns. Rondelet , Hiil:. Nat. desPoiff. Part. I. Liv. V. Chap. XV. PAGUL ou PAGURUS , eft une des efpeces de cancres de la Mé- diterranée : il y en a qui pefent jufqu'à dix livres. Voye:^ Cancre. PAILLE , fe dit du tuyau ou de la tige du blé , de l'avoine , &c. lorfque le grain en eft dehors. Voye^^ à la fuite du mot Fourrage. Les pailles d'un diamant font autant de défauts. Voye^^ Diamant. PAILLE DE LA MECQUE : voye^ Schenante. PAILLE-EN-CUL ou Fétu-en-cul ou Oiseau des Tropiques ou Oiseau de mer, Uptums , c'efl: \e phaëton œthereus de Linneus, On a donné ce nom à un genre d'oifeau qui habite la Zone Torride, c'eft-à-dire , l'efpace qui efl entre les deux Tropiques. Le Père Labat , dans fes Voyages aux IJles de C Amérique , Tome FUI , pag. joj , dit que ces oifeaux font à-peu-près de la grolfeur d'un pigeon : ils ont la tête petite & bien faite ; le bec d'environ trois pouces de longueur, affez gros, fort , pointu , un peu courbé, dentelé & tout rouge , ainfi que les pieds qui font palmés : en effet les quatre doigts tiennent en- fcmble par une membrane commune. Leurs ailes font très-grandes & longues , à proportion de la grandeur du corps ; le plumage ell affez blanc. Il y en a auffi de tachetés de noir & de fauves. La queue eft compofée de douze à quinze plumes de cinq ou fix pouces de longueur, du milieu defquelles fortent deux plumes longues d'environ quinze à feize pouces , lefquelles femblent accollées, &: n'en faire qu'une : c'eft ce qui a donné occafion aux Matelots d'appeller cet oifeau , paille^ tn-cul. Il a un cri perçant ; il vole très-bien & fort haut ; il s'éloigne de terre autant que l'oifeau nommé frégate : mais fi le trajet efl trop long, il fe repofe fur l'eau , comme les canards. Il vit de poifTons ; il pond , couve & élevé fes petits dans les Ifles défertes. Le Père du Tertre , Hijl. Natur. des Antilles , Tome 11 , pag. lyG , croit que c'eft un oifeau de paradis ; cependant il ne lui refîémble guère : cet Auteur ajoute qu'on ne le voit prefque jamais à terre pour couver & nourrir 6oS P A I^ fes petits : les Sauvages font grand cas des deux longues plumes de îa queue ; ils les mettent dans leurs cheveux , & les paffent auiîi dans l'entre-deux des narines en guife de moullaches. PAÎN , panis. Nom donné à une pâte cuite qui fe fait avec îa farine 'de blé &de plufieurs autres grains, ou fruits & racines, tels que de fei^c , à' orge, de millet, de n{^t à^épeautre , d'avoine, àt farafin , de manihot , de gland , de marron , àHarum , à'afpliodele , ÔCC. Voyez ces mots. La manière de bien faire le pain de froment , conHfte , i°. en la quantité & qualité du levain que l'on met dans la farine ; 2°. dans le degré de chaleur de l'eau que l'on verfe fur la farine & le levain ; 3°. dans l'exaûitude du pétriflage ; 4°. dans le degré de fermentation ôc de (ronflement qu'on doit donner à propos à la pâte ; 5". enfin , au de^^ré de chaleur qu'on emploie pour faire cuire le pain dans le four, M. BarthoUn, Médecin Danois, dit qu'en certains pays de la Nor- vège , on fait une forte de pain qui fe garde jufqu'à quarante ans ; ôc c'eft , dit-il , une commodité : car quand un homme de ce pays-là a une fois gagné de quoi faire du pain , il en cuit pour toute fa vie , fans craindre la famine. Ce pain, de fi longue durée , efl une forte de bifcuit fait de farine d'orge & d'avoine pétries enfemble, & que l'on fait cuire entre deux cailloux creux ; ce pain efl: prefque infipide au goût : plus il eft vieux , & plus il eft favoureux ; de forte qu'en ce pays-là l'on eft auffi friand de pain dur , qu'ailleurs on l'eft de pain tendre. Auffi a-t-on foin d'en garder très-long-temps pour les feflins , & il n'efl pas rare qu'au repas qui fe fait à la naiffance d'un enfant , on mange du pain qui a été cuit à la naiffance du grand-pere. PAIN A COUCOU , efl la plante appellée alléluia : voyez ce mot, PAIN BLANC. Voyei Obier. PAIN DE CASSAVE ou de Madagascar. Voyei Manihot. PAIN D'ÉPICE. Pain fait de miel & de farine de feigle. C'efl à Reims qu'on a l'art de le faire plus nourriiTant & d'un goût plus agréable que par-tout ailleurs , il s'y en fait un très-grand débit. Ce pain peut fervir de cataplafme maturatif dans la formation des abcès qui vien- nent dans la bouche. Ce qu'on voit dans les droguiers fous le nom de vain d'épice , paroît être une préparation du fruit du Courbaril, ^oyei ce mot. PAÏN FOSSILE; artolîthus aut panis dœmonum. Quelques Auteurs P A I ^07 ont donné ce nom à des concrétions pîerreiifes à quî la nature a donné accidentelement la forme d'un pain : ce font là des vrais jeux de la nature propres à amufer ceux qui ne cherchent que le fmgulier : ils en trou- veront dans le voifinage de la ville de Rothweil , dans les montagnes des environs de Bologne en Italie ; on en rencontre auiîi dans les grottes des montaçjnes du Hartz. PAIN D'OISEAU ou Vermiculaire BRULANTE : voyeik l'article Joubarbe. PAIN DE POURCEAU COMMlJl mais celles-ci pourroient être équivoques. Les carafteres de ces noms avoient environ fix pouces de haut , & les noms occupoient deux pieds en longueur, c'eft-à-dire moins de la huitième partie de la circonférence de l'arbre. En fuppofant même que ces caraderes enflent été gravés dans la première enfance de l'arbre , il en réfulteroit que , li en deux cents ans il a pu croître de fix pieds en diamètre , il faudroit plus de huit fiecles pour qu'il pût arriver à vingt-cinq pieds de dia- mètre , en fuppofant qu'il crût toujours également ; mais il s''en faut bien que cette fuppofition puifTe être regardée comme vraie , car M. AdanfoTi a obfervé que les accroiflemens de cet arbre , très-rapides dans les premières années qui fuivent fa naiflance , diminuent enfuite affez confidérablement ; &: quoique la proportion dans laquelle fe fait cette' diminution , ne foit pas bien connue , il croit cependant devoir foupçonner que les derniers accroiffemens du baobab fe font avec une extrême lenteur ; & que ceux de ces arbres qui font parvenus à là grolTeur dont nous avons parlé , peuvent être fortis de terre dans des temps peu éloignés du Déluge univerfel. En un mot, il paroît par nombre d'obfervations , dit notre Auteur, qu'un baobab qui a vingt-cinq pieds de diamètre , a déjà vécu trois mille fept cents cinquante ans, & qu'il doit vivre & groilir infiniment au-delà. Celui dont le tronc aura trente pieds de diamètre , foixante & treize pieds & demi de hauteur , aura cinq mille cent cinquante années : qu'on juge à préfent de l'âge de celui qui avoit trente-fept pieds de diamètre. Mais ce qui eflbien à re- marquer , c'efl que ceux qu'on élevé ici dans des ferres tenues foigneu- fement à la température de leur climat , n'y prennent tout au plus que la cinquième partie de l'accroifTement qu'ils reçoivent au Sénégal , dans un tem.ps femblable ^obfervaîion qui prouveroit bien, s'il étoit pofTible d'en douter, que la chaleur artificielle ne peut, que très-imparfaitement , tenir lieu aux plantes étrangères de la température de leur climat naturel. Le baobab , comme toutes les autres plantes de la famille des mal- vacées, a une vertu émoUiente , capable d'entretenir dans les corps une tranfpiration abondante , &; de s'oppofer à la trop grande arcjeur du fang, HHhh 2 6ii PAT Les Nègres font fécher fes feuilles à l'ombre , & ils en font une poudre qu'ils nomment alo ; ils la mêlent avec leurs alimens , non pour leur donner du goût, car cette poudre n'en a prefque aucun , mais pour en obtenir l'effet dont nous venons de parler. M. Adanfon lui-même en a éprouvé la vertu : la tifanne faite avec fes feuilles réduites en poudre ^ l'a préfervé , lui & un feul des Officiers François qui voulut s'aftreindre à ce régime , des ardeurs d'urines & des fièvres ardentes , qui attaquent ordinairement les Etrangers au Sénégal , pendant le mois de Septembre , &qui régnèrent encore plus furieufement en 175 1 , qu'elles ne l'avoient iait depuis plufieurs années. Le fruit récent de cet arbre n'efl: pas moins utile que fes feuilles : on en mange la chair , qui efl aigrelette & affez agréable ; on fait , en mêlant le jus de cette chair avec de l'eau & un peu de fucre , une boifîbn très-propre dans toutes les affedions chaudes , dans les fièvres putrides & peflilentielles ; enfin , lorfque ce fruit efl gâté , les Nègres en font un excellent favon en le brûlant , & mêlant i^s cendres avec de l'huile de pahnier qui commence à rancir. Les Nègres font encore un ufage bien finguHer de cet arbre prodigieux : ils agrandiffent les cavités de ceux qui font cariés , & en font des efpeces de chambres , où ils pendent les cadavres auxquels ils ne veulent pas accorder \ts honneurs de la fépulture : ces cadavres s'y deflechent par- faitement, &y deviennent de véritables momies, fans aucune autre pré-- paration. Le plus grand nombre de ces cadavres , ainfi defféchés , font ceux des Guiriots , appelles Gucouls , qui peuvent être comparés aux anciens Jongleurs, fi fameux chez nos Aïeux : ce font des Poëtes-Mu- ficiens , en aflez grand nombre à la Cour des Rois des Nègres, qui les divertiffent & qui les flattent avec excès dans leurs poéfies ( ils entre- prennent auffi la conduite des fêtes , des bals & des danfes du pays ), Cette fupériorité de talens les fait regarder des autres Nègres comme des Sorciers. Cette defcription du baobab fait préfumer que cet arbre ell: vrai- femblablement le plus gros des végétaux connus de l'univers. On cite cependant , dans les Ouvrages de différens Naturalises dignes de foi Si dans quelques Voyageurs célèbres , d'autres exemples d'arbres très- connus, &:dont lagrofTeur étoit fi prodigieufe , qu'on doit les regarder comme des montres dans les Végétaux. Nous en avons fait mention- aux articles Poirier, Saule, Yeuse, Ceiba, Platane, Tilleul, P A î 613 Orme, Chêne, ChâTAigner , &:c. Ray cite encore le rapport des Voyageurs qui ont vu au Bréfil un arbre de cent vingt pieds de tour , e'efl-à-dire quarante-deux pieds de diamètre ou environ , & qu'on con- ferve religieufement à caufe de fon ancienneté : c'eft peut-être un baobab, îl efl dit dans VHort. Malabar, que le figuier appelle attl-mecr-alou par les Malabares , a communément cinquante pieds de circonférence , ce qui fait environ dix-fept pieds de diamètre , & qu'il y en a un dans la Pro- vince de Cochin , près du Temple de Beika , qui vit depuis deux mille ans. Mais Pline en cite de beaucoup plus gros : il dit , Liv, iz , Ckaj?. 6 , de fon H'ijloire Naturelle , que la conquête d'Alexandre en fît connoître qui avoient pour l'ordinaire foixante pieds de diamètre. Il eft encore mention d'autres arbres plus merveilleux dans les dernières Hifloires de la Chine : le premier de ces arbres fe trouve dans la province du Suchu, près de la Ville de Kien : il s'appelle yF^/z/zic A , c'efl-à-dire , arbre de mille ans. Il efl fi vafte , qu'une feule de fes branches peut mettre à couvert deux cents moutons. Un autre arbre de la Province de Chékiang a près de quatre cents pieds de circonférence , & environ cent trente pieds de diamètre. M. Adanfon dit que fi la grofl'eur , fi difproportionnée de ces arbres de la Chine à celle des arbres aftuellement exiftans en Europe , n'efl pas digne de croyance , le baobab d'Afrique, qui a trente-fept pieds de diamètre , fuffiroit feul pour en conflater la pofnbilité. Le châtaigner colofTal qui exifle encore en Angleterre , qu'on croit âgé de plus de neuf cents ans , & dont M. Collinfon a envoyé la defcrip- tion en 1767 à M. Duhamd ^ mérite bien d'être rangé parmi ces indi- vidus gigantefques. Suivant l'échelle jointe à la defcription , le tronc de ce châtaigner a cinquante pieds de circonférence à cinq pieds au- defTus de terre , c'efl-à-dire , plus de feize pieds & demi de diamètre , mefure d'Angleterre. PAISSE SOLITAIRE ou VkSS^.paJfcr folitarius, efl un oifeau affez commun en France, c'efl une efpece de moineau : ii tient beaucoup du rofîignol par fa contenance ; il eft de la grofTeur d'un mauvis : on pourroit le prendre pour une efpece de grive ; fon plumage efl d'un- roux fauve grivelé de gris ; il remue fa queue après avoir volé ou marché en avant ; fon bec efl rond & pointu , d'un gris noirâtre , &: plus fort- que celui d'un merle. Il a les jambes & les pieds comme ceux d'une grive- ôc de la même couleur ; il fe nourrit d'infedles , & fe plaît dans leS' ■vallées ; il fe retire dans certains temps de Tannée fous les toits des- 6i4 PAL maifons couvertes de tuiles concaves ou imbricces ; il fait Ton nid dans les lieux pleins de rochers &c de buiffons. On élevé quelquefois cet oifeau en cage ; fon chant doux & agréable le rend efclave de nos amu- femens, il chante la nuit comme le jour; la vue de la lumière lui donne encore plus de gaieté : cet oifeau eft fujet aux mêmes maladies que le ferin commun , fur-tout à Tépilepfie. PALAIS DE LIEVRE. Foyei Laitron. PALE ou PALETTE ou BEC A SPATULE , p/ai^a feu leucoroMus: M. Perrault , qui dans \qs M cm. de C Académie des Sciences ^ Tom. III, Part. III ., a donné la defcription anaîom^que de quatre palettes., dit qu'il ne fait pas pourquoi l'on a mis cet oifeau au nombre des hérons ; car d'avoir un panache au derrière de la tête & vivre de poiffons comme le héron, font des chofes qui lui font communes avec beaucoup d'oi- feaux : cet oifeau eft , dit-il , d'ailleurs très-dilférent. Les noms qu'on lui a donnés à caufe de la figure de fon bec , femblent avoir plus de fonde- ment ; fon bec vers le bout eil large , arrondi &applati en defiiis & en deiTous comme une pelle , & la partie voifme de la tête eft étroite & faite comme le manche d'une palette. Ce bec efl droit dans fa longueur, & reffemble en totcd à la fpatule dont les Apothicaires fe fervent. L'oifeau bec à fpatule ne doit pas être non plus confondu avec le pélican. M. Perrault dit que ceux qu'il a dilTéqués étoient blancs par tout le corps , & d'un blanc fale vers l'extrémité des plumes , ayant des plumes courtes au cou , fort longues & fort étroites au derrière de la tête , oii elles faifoient comme un panache renverfé en arrière ; les jambes éioient garnies de plumes jufqu'à moitié , le refte étoit couvert d'écaillés . les ongles longs & pointus, le bout du bec fupérieur avoit une petite pointe recourbée en defTous ; ce bec qui efl d'une figure particulière & extraordinaire , quoique d'une fubiiance ferme, nuancée de gris , de brun , de noir ôi de rouge , ne fauroit ferrer que foiblement, parce qu'il eil long de fix pouces , mince , uni & flexible. Sur la partie du bec la plus large , il y a quatorze grandes cannelures. M. Brijjon fait un genre particulier de la palette , & l'on en didingue plufieurs efpeces. Albin dit que ces oifeaux font leur nid dans un petit bois près de Leyde en Hollande fur le fom.met des arbres les plus hauts, & qu'ils y engendrent annuellement en grand nombre. Lorfque les petits font prefque en état de s'envoler, ceux qui tiennent le bois à ferme les PAL 615 defcendentdans leur nid avec des crochets attachés à de longues perches. Les œufs en font aufTi gros que ceux d'une grande poule , ils font blancs & mouchetés de rouge. La palette a trente-quatre pouces de longueur depuis la pointe du bec jufqu'à l'extrémité des griffes , & vingt-quatre pouces de cette pointe jufqu'au bout de la queue : elle n'a ni plume , ni duvet au-delà des yeux ; l'angle de la mâchoire inférieure efl chauve ; & félon Albin , les doigts de devant font attachés enfemble par une membrane ; il ajoute encore que les bouts de quelques grandes plumes font noirâtres. Selon prétend que cet oifeau fe voit aufli fur les confins de la Bretagne & du Poitou : on le rencontre affez communément dans la Guiane, près des bords de la mer; dans la mue fes plumes changent de couleur, elles changent auflide nuance à mefure que l'animal vieillit. Wïlluohhy cite la palette du Mexique , tlauhquechul ^ qui efl d'une couleur rouge ou d'un blanc rougeâtre ; fonbec a une couleur cendrée ; la tête , le cou & une partie de la poitrine font dégarnis de plumes & blancs ; il y a un large trait noir entre la tête & le cou. La palette de Cayenne efl d'un beau couleur de rofe , mais cette couleur n'efl pas toujours la même dans la durée de l'oifeau ; fon bec efl jaunâtre. Quand on approche de cet oifeau , il fait réfonner fon bec avec le même bruit que fi l'on frappoit deux palettes de bois l'une contre l'autre. PALÉTUVIER ou PARÉTUVIER. Quelques-uns prétendent que ce n'efl pas le même arbre que \q figuier admirable de l'Amérique. Peut- être ces arbres ne font-ils avec \enfade , le chivef, le mangrove , le man-' glier, &ic, que des variétés du même arbre, & qui ont dégénéré par tranfpîantation ^ ou par la nature du fol & du climat ; peut-être aufîi ces différences ne proviennent-elles que de la confufion que certains Voya- geurs peu inflruits ont jeté dans leurs defcripîions. M. de Préfontaine dit dans la Maif. Ruft. à Vufage de Cayenne , qu'il y a trois fortes de palétuviers ,^le blanc, le rouge &z le violet. Le bois n'en efl bon qu'à brûler. Les Indiens fe fervent de l'écorce du violet pour teindre en cette couleur & en noir : elle feroit propre aufîî à tanner les cuirs , de môme que le chêne &c l'orme. Il part des branches des parétuviers un grand nombre de filamens , qui, de même que dans la cufcutc , defcendent verticalement à terre , 8c y prennent racine, ce qui produit en peu d'années une forêt épaifle. Les Caraïbes s'en fervent pour lier. Quand on veut conferver les feines , les lignes & les autres 6i6 PAL inflrumens de pêche , on les fait bouillir avec l'écorce de cet arbre , â laquelle on joint un morceau de gomme d'acajou ; la teinture violette qu'ils acquièrent , les rend plus durables. Suivant M. de Préfontaine , le palétuvier blanc de Cayenne diffère beaucoup par fes parties efîentielles du mangU véritable ; voyez ce mot. M..Fcrmin dit que la deuxième écorce du palétuvier reffemble beaucoup au quinquina ; voyez ce mot. PALIPOU ou PAREPOU , palma dactylifera , frucîu minori turbinatOy Barr. eft un palmier de Cayenne , dont le régime reflemble à celui du palmier aouara. Voyez ce mot. Le fruit eil petit ; on le préfente au deffert cuit fmiplement avec de l'eau & du fel. Son goût eil fi peu attrayant , qu'on a de la peine à s'y accoutumer ; mais on s'y fait , & on le mange enfuite avec d'autant plus de plaifir , qu'il excite à boire & provoque l'appétit. PALIURE, ou ÉPINE DE Christ , ou Porte chapeau , ou l'Argalou des PROVENÇAUX,/?tf//^/'«5. Efpece d'arbriffeau qui croît naturellement dans les haies, aux lieux humides & incultes des pays méridionaux de la France & de l'Italie : il eft quelquefois de la hauteur d'un arbre. Sa racine eft dure , llgneufe ; fes longues tiges font d'un bois très-ferme , courbées & garnies à chaque infertion de deux épines , dont l'une eft droite & l'autre crochue. Les épines qui fe rencontrent proche des feuilles , font plus petites & moins nuifibles que celles des autres endroits , qu'on ne manie pas impunément tant elles font aiguës & roides. Ses feuilles font petites , arrondies d'un vert brillant ou rou- geâtre : fes fleurs qui paroiffent en Juin , font jaunes , petites, ramaffées aux fommets des branches , difpofées en rofe ; elles fe changent enfuite en un fruit fait en chapeau dégancé , contenant un noyau divifé en trois loges qui renferment ordinairement chacune une femence de la couleur & du poli de la graine de lin. Les fleurs du pahure paroiflent à la fin du printems , ou au commen- cement de l'été , fon fruit mûrit en automne , & tient à l'arbrifiTeau tout l'hiver. Quelques-uns nomment le paliure épine de Clirijl , en Anglois the Clirijl thorn, parce qu'ils croient que la couronne d'épine que les Juifs mirent fur la tête de Jefus-Chrift, étoiî faite de cet arbrifleau. Au- jourd'hui Ton en fait des haies vives , très-commodes pour empêcher les incurfions des animaux. Il fupporte aufli afliez bien l'hiver : cet .arbufte n'eft pas encore bien commun en France. La racine , les tiges & les PAL 617 les feuilles de cet arbrifleau , prifes en décoftion , arrêtent le flux de ventre ; fon fruit eu. très-diurétique , & facilite l'expeâoration dans Tafthme humide. M. Gufialdi le regarde comme un excellent remède contre la pierre. Ses graines ont été employées avec fuccès dans l'hy-. dropiiie, comme donnant le ton aux fibres trop relâchées. On fait que Tefpece de paliure qui efl le ceanothus de M. Linncus , paffe pour le fpéçifîque , non-feulement des gonorrhées qu'elle arrête en deux ou trois Jours fans aucune fuite fâcheufe, mais même des ma- ladies vénériennes les plus invétérées qu'elle guérit , à ce qu*on pré- tend , en moins de quinze jours dans la Virginie & le Canada oh. croît cette plante. Pour préparer ce remède, on fait bouillir un gros de la racine dans une livre & demie d'eau jufqu'à réduftion d*une livre , qu'on prend en deux fois tous les jours : il faut fe fervir d'un grand vafe pouf cette décoftion , parce que cette plante jette pendant l'ébullition un€ grande quantité d'écume qu'il ne faut pas perdre : peut-être que les racines du paliure de notre pays auroient les mêmes propriétés. PALME DE CHRIST ou VikKkVkT,palma Chrifti. Sous-arbrifleaii commun aux îles du Vent, dont le tronc & les branches font creufes comme un rofeau , & dont les feuilles reffemblent à celles du plane ; mais elles font plus grandes & plus noires. Les Jardiniers ont comme naturalifé par la culture cette plante dans nos jardins pour fervir d'or- nement dans les plates-bandes : on prétend qu'elle chaffe les taupes. Les Nègres tirent de fa graine , qu'on appelle faux café , une huile fort commode dans nps habitations d'Amérique , fur-tout pour éclairer , & pour faire mourir la vermine ou pour s'en préferver. Les Caraïbes en lèvent la peau par aiguillettes , en font un frontal contre le mal de tête , chauffent la feuille , en frottent la partie douloureufe , & en reçoivent du foulagement. On ramaffe le fruit en Novembre : il s'ouvre de lui- même au foleil & lance au loin fes graines. Quand on en a tiré l'huile avec précaution , on s'en fert pour purger. Huit groffes graines de karapat , pilées & braflees dans un verre d'eau chaude , paffées enfuite par une étamine , font un remède dont les Nègres fe fervent contre la fièvre. On donne auflîle nom de palma Chrlfll à la racine d'une efpece d'or- chis ou fatyrion , qui eft difpofé en main ouverte. Il paroît que le ricin ordinaire ^\q palma Chrijii , autrement A^r^/jtf/, différent peu l'un de l'autre. Foye^^ à farticU RiciN. Le palma Chrljli efl fort commua Jornè IV* II ii ^i8 PAL auffi à la cote de Coromandel. M. de Rome de rijle eft porté à croire •que le nom de karapat donné à cet arbriffeau , vient de la reffemblance de fa. graine avec rjnfefte appelle tique, que l'on nomme karapat aux Indes. Cette conjefture eft d'autant mieux fondée, que le nom latin riciniis convient également à cet infede & au ricin , qui eft une efpece de palma Chrijii. PALME MARINE ou PANACHE DE MER, litophyton reticuLatum purpurafcens. C'eft une efpece de lithophite à réfeau , étendu en éven- tail. Le lacis ou les mailles de cette produdion à polypier reffemblent à un rets à prendre des poiffons & des oifeaux : il y en a de différentes couleurs , mais plus communément d'un rouge violet ; les plus beau:$ & les plus curieux fe trouvent en Amérique & aux Indes Orientales. On dit que les Dames Indiennes s'en fervent comme d'éventail dans les grandes chaleurs. /^oj^^/'^mV/eLiTHOPHYTE, à lafuite du motQoKk'L-'_ LINE, vol. II , page J22 de cet Ouvrage. PALMIER, palma. C'eft un arbre ou un arbriffeau, également vivace , & ayant depuis deux jufqu'à cent pieds de tige , & dont les feuilles font ramaifées en faifceau au fommet des tiges ; les racines for- ment une maffe de fibres communément fimples. Les jeunes pouflés de. la plupart de ces plantes forment, à leur fortie de la terre > comme une bulbe conique , totalement couverte d'écaillés imbricées , qui ne font autre chofe que des appendices de feuilles imparfaites. La tige eft ordi- nairement fimple, non rameufe, cylindrique, remplie d'un fuc vineux & entièrement compofée de fibres longitudinales très-gro(fieres , fans écorce apparente ; la partie fupérieure de la tige , qui porte le nom de chou^ eft ordinairement bonne à manger ; les feuilles font alternes, di- vifées en éventail ou en parafol , ou ailées , & portées fur un pédicule ou branche feuillée , dont l'origine embraffe fouvent la plus grande partie de la tige , mais fans faire gaine : elles font toutes d'abord re- couvertes d'une pouftiere brune & groffiere comme celles des fougères. Les fleurs font communément ou toutes mâles ou toutes femelles fur le même pied; quelques-unes fortent d'une gaine qu'on appelle fpathe les autres font accompagnées d'écaillés ; mais elles font toutes difpofées en pannicule. Les fleurs , foit mâles, fait femelles, ont chacune un calice à fix feuilles. La poufîiere fécondante eft compofée de grains ovoïdes , jaunâtres & tranfparens ; le fruit qui vient par- régime , efl arrondi ou ovale , charnu 6c recouvert d'une peau coriace, fouvent P A L 61c, comme écailleufe , contenant des offelets. La famille des palmiers ne laiffe pas d'être nombreufe , & toutes les efpeces peuvent être élevées de graines. EnHn , quand on examine le palmier en Naturalise , l'on apperçoit qu'il mérite à tous égards l'attention du Phyficien. On peut même dire avec M. Guetcard , que la claffe des palmiferes efl" une de celles qui ont le plus fourni aux Indiens, aux Afiatiques, aux Américains pour leurs habillemens, pour les cordages, les voiles des navires 6c autres uflenfiles. PALMIER DE L'AMÉRIQUE ou A PAPIER. C'efl le même que V arbre, de la Nouvelle Efpagne. Voyez ce mot. PALMIER AOUARA. Efpece de chou palmifle qui naît à Cayenne ; il croît aufîî au Sénégal , au Bréfil & aux Indes Orientales : il efl fort haut & épineux le long de fa tige. Son fruit vient par bouquets dans une efpece de gouffe qui fe fend lors de fa maturité. Ces fruits font gros comme des œufs de poule , charnus 6l de couleur jaune dorée , &c« Les Indiens en mangent: fa chair renferme un noyau gros comme des noix de noyer, ayant trois trous , dont deux font plus petits. L'écorce de ce noyau a deux lignes d'épaifleur, & efl affez dure pour être tra- vaillée au tour: l'amande efl blanche & d'une très-grande dureté; étant mâchée , elle a d'abord un goût agréable , qui devient bientôt acre , femblable à celui d'un fromage rance. Les habitans de la Guiane s'en fervent pour engraiffer leurs befliaux ; mais une autre utilité bien plus grande , c'efl qu'on tire de cette amande, par décodion ou par expref- fion , une huile épaifTe comme du beurre , de couleur jaune dorée & d'un goût affez doux. Dès qu'on a récolté la noix d'aouara, qu'on ramaffe au pied de l'arbre , on la met par tas qu'on couvre de feuilles & qu'on charge de bois, pour la garantir du grand air & du foleil: elle efl pourrie au bout de quinze jours : on la pile alors dans un canot ( efpece d'auge qui ne fert qu'à cet ufage) , afin de féparer toute la chair d'avec le noyau. On achevé avec la main ce que le pilon n'a pu faire. On jette cette chair dans une chaudière placée fur le feu ; & quand elle fume fortement , on la met fous une prefTe : l'huile qui en fort efl reçue dans un vafe , & mife tout de fuite dans des pots. Quand toute la récolte efl finie , on fait rebouillir cette huile pour la purger de ies parties aqueufes; alors elle efl de garde : on s'en fert pour éclairer dans les maifons ; elle brûle en entier fans la moindre perte. Les Nègres de l'Amérique & de l'Afrique Ilii 2 €io PAL en mangent comme du beurre : ils en afiaîfonnent leurs mets. Les Blanc^ s'en fervent aufTi pour le même ufage , quand ils n'en ont point d'autreJ Cette graifTe s'appelle huile de Sénégal ou de Quioquio , ou de Pumicin ou de palme des IJles, Etant extérieurement appliquée , elle eft propre pour adoucir la goutte & les rhumatifmes , pour les douleurs de coliques & celles d'oreilles , & pour fortifier les nerfs. Cette huile de palme eft différente de celle du Commerce , qui communément eft falfifiée. L'amande du fruit aouara eft adouciffante & aftringente. Le noyau ^u'on a féparé du fruit , fe conferve pendant une année , au bout de laquelle on le caffe pour en tirer l'amande. Il ne faut prendre de ces -amandes que trois ou quatre poignées , qu'on jette dans une chaudière moyenne mife fur un feu modéré , pour pouvoir les brafter à fon aife« L'huile fumage peu-à-peu : on l'enlevé à mefure avec une cuiller : on a ^rand foin de la pafler avant que de la mettre dans un vafe , parce C[u'elle fe fige prefqu'aufli-tôt. Si on la veut employer en friture, on la ^it bouillir auparavant avec un peu de caffave ; ce qui achevé de lui <>ter un goût aromatique qui lui eft naturel. Huit cuillerées de cette îiuile dans quatre d'eau de pourpier , purgent fortement , mais fans tranchées , le Nègre le plus robufte. Mai/on Rujîique de Cayenne. PALMIER A COCO. En parlant des cocos de mer des Maldives à le rapport qu'il a avec ces fofliies que Ë'QnJrouve abondamment en Suiflfe, en Allemagne & en France. 6i2 PAL Qu'on imagine une colonne pyramidale, compofée de pierres étoiléeS à cinq pans , mifes les unes fur les autres, on aura une idée afTez jufle de ce qui compofe le corps de cet animal. Cette colonne a , d'cfpace en efpace , des renflemens , d'oii partent cinq pattes , compofées de plus ou moins de vertèbres , fuivant leur longueur , & qui finiHent parim crochet pointu. M. C l'autre efpece eft fans feuilles ( le refte en eff garni tout autour), fans branches & couverte d'une écorce cendrée. Peut-êtie que ces différences ou diflindions de fexe dans les papayers ne proviennent Tome IF, M M m m 641 ■ P A P que de leur fécondité , confidérés les ims comme fauvages , fes autref' comme cultivés. Le Papayer mâle ,pinoguacu mas, croit à la hauteur de vingt pieds,' & eft de la groffeur de la cuiffe ; fon bois eft creux &fpongieux en dedans , fi tendre qu'on peut le couper entièrement en travers d'un feul coup de fabre ; il s'élève en peu de temps : fes feuilles font à-peu- près grandes comme celles du figuier, découpées en fix ou fept parties ,- attachées à des queues longues , groffes , rondes , creufes , rougeâtres & recourbées : fes fleurs font longues , difpofées en étoiles jaunâtres,., inodores : elles font , dit-on , ftériles. Le Papayer j^emelle, p'moguacu famîna , que l'on cultive dans les jardins au Bréfil , aux iiles Antilles & aux Indes orientales , eft un peu plus élevé ; fes feuilles font bien plus grandes & attachées à des- Comté ; elle fe mit en chryfalide le 3 Septembre 1770. Je la portai *> à Paris , l'ai menée aux Pyrénées , comptant qu'au mois d'Août elle » deviendroit papillon , apparemment que les neiges l'ont empêchée de » fuivre l'ordre de la Nature : je l'ai menée fur les frontières d'Efpagne w en Oftobre , je pofai la boîte qui la contenoit fur le manteau d'une » cheminée oii j'avois bon feu , même en Août , elle a toujours gardé » V incognito ; enfin le 21 Janvier \']'Ti--i j'ai trouvé un afTez vilain pa- » pillon gris avec des filets noirs & jaunes , dont le defTm imitoit le point M d'Hongrie ; calcul fait , ladite chenille a été cinq cents fix jours en » chryfalide, elle naquit chenille fur les rives du Br&uchier, & devint \ 666 P A P » papillon fur celles de la Charente. Sont-ce les voyages qui ont retardé » fa métamorphofe ? » Je le crois ; d'ailleurs la chaleur abrège , de même que le froid prolonge l'état de la chryfalide. PAPILLON DES TEIGNES ivojei à la fuue du mot Teignes. PAPILLON A TÊTE DE MORT. Ce papillon, l'un des plus fin- 'guliers & qui porte des caraûeres uniques , vient de l'efpece la plus grande de nos chenilles. Lorfque cette chenille a acquis toute fa grandeur naturelle , elle a quatre pouces & demi de longueur: fa couleur eftun jaune clair , pointillé de noir fur certains anneaux ; on obferve fur fon dos comme des efpeces de chevrons. Cette chenille a cela de fmgulier qu'elle porte une corne à l'extrémité poftérieure , contournée en fens contraire de celle des autres: cette corne efl: rougeâtre & toute chargée de petits grains graveleux, qui imitent affezbien une rocaille: on trouve cette chenille principalement fur le jafmin , quoiqu'elle s'accommode aufîi des feuilles de fèves de marais & de celles de choux ; c'eft dans le mois d'Aoïit qu'il faut la chercher. Vers ce temps elle fe creufe un trou dans la terre ; c'eft là qu'elle fe change en chryfalide de laquelle , au mois dw' Septembre , fort le papillon à tête de mort , qui a porté plus d'une fois Tallarme Se l'effroi dans l'efprit du peuple imbécille , & des gens foibles & ignorants. Ce papillon efl: très-grand , il a trois pouces de longueur de la tête à la queue ; c'efl: un phalène du genre des fphinx "ijjerv'urs. Sqs aîles étendues ont jufqu'à cinq pouces de vol ; la couleur de fes aîles efl: obfcure , d'un brun noir mêlé avec des taches de jaune feuille-morte ; ce jaune divifé par quelques traits noirs , forme fur fon corfelet une figure qui n'imite pas mal une tête de mort ^ ce qui lui en a fait donner le nom. A cette image funèbre , peinte fur fon corps, fe joint encore une fingularité unique dans ce papillon , le feul dans lequel on l'ait obfervée ; il fait entendre un bruit fort aigu , qui approche un peu de celui d'une foaris , mais quia quelque chofe de plus plaintif & de plus lugubre. En falloitil davantage pour jetter l'effroi dans l'efprit du peuple qui a donné à ce papillon le nom d'oifeau de mort ? Auflî l'al- larme fe répandit-elle , il y a quelques années , dans certains cantons de la Baffe-Bretagne , parce que ces papillons y furent plus communs que d'ordinaire , pofitivement dans un temps où il y avoit beaucoup de ma- ladies. On leur attribuoit tout le mal , on ne les voyoit qu'avec frayeur, on les regardoit comme les fmiflres avant- coureurs des malheurs; ti même encore préfentem^nt le geuple s'allarme , dit-on , à leur P A P 6(^7 pféfence : tant les préjugés populaires font difficiles à déraciner. Le cri fin-- gulier que fait entendre ce papillon , fur-tout lorfqu'il eft troublé dans fa marche ou renfermé , &: qu'il redouble fans ceffe lorfqu'on le tient entre les doigts ; ce cri , dis-je , fujet de tant de frayeurs , eu. occafionné parle bruit que faitia trompe de ce papillon, qui eft courte &écailleufe , en frottant contre deux lames mobiles & très dures entre lefquelles elle eu logée. L'épreuve en eu. facile ; que l'on écarte avec la pointe d'une épingle une des deux lames d'auprès de la trompe , l'animal ne rend que la moitié du fon ordinaire ; qu'on les écarte toutes deux , il eu muet. C'efl en Septembre & Odobre que l'on voit ces papillons en diverfes provi::ces du Royaume : on le trouve aufîi fous divers climats , en Angleterre , en Egypte. Nous avons déjà eu occafion de dire que chaque plante a (on infeâe,' & peut-être n'y a-t-il point d'arbres , d'arbuftes , d'arbriffeaux & de plantes qui n'aient auffi leur chenille & fon papillon : c'efl: pourquoi nous renvoyons , pour les papillons qui fortent des chenilles , au mot même CHENILLE , oii nous avons décrit les principales. On trouvera à leur article , fuivant l'ordre alphabétique , l'Hiftoire d'une quantité d'autres chenilles & de papillons célèbres , fous les noms particuliers qu'ils portent. Nous terminerons cet article en difant que fi les pa- pillons des Indes font plus grands & plus beaux que les nôtres , ils font en plus petit nombre que ne le font chez nous ces fortes d'infeftes. PAPILIONACÉES ( Plantes ) Foyer^ce que c'efl à la fuite de l'article LÉGUMES. PAPION ou BABOUIN , papio , efpece de finge propre à l'ancien continent ; il fe trouve particulièrement aux Ifles Philippines & au Cap de Bonne - Efpérance. On en diflingue deux ou trois efpeces pour la gran- deur de la taille. Lepapionalaqueue très-courte; il marche plusfouvent- à quatre qu'à deux pieds : fes griffes font des armes redoutables ; les chiens n'ont guère de prife fur lui que quand il s'efl: enivré de raifin , mets dont il efl: très-friand. Sa femelle efl fl:érile dans les climats tem- pérés ; dans fon climat natal , elle ne fait même qu'un petit qu'elle porte entre fes bras & comme pendu à fa mamelle. Ces animaux qui lont forts & robufles tiendroient tête à plufieurs hommes. Ils font de grands dégâts dans les vignes , les jardins & les vergers. Pour exercer leur brigandage , ils fe réuniffent en troupes ; une partie entre dans l'enclos pour piller ; le refte /orme une chaîne de communication PPpp 2 66B P A P PAR depuis le lieu du pillage , jufqu'à l'endroit du rendez-vous. On cueille ,- on arrache , on jette de main en main; on reçoit avec une adreffe fin- guliere : en un inftant , un jardin eft dévafté , ravagé , & quelques uns de ces individus placés en fentinelle , avertiffent au moindre danger, 6i la troupe s'enfuit en gambadant. Le naturel des papions èc babouins efl méchant & féroce ; mais les traits principaux de leur caraderô , font l'impudence & la lubricité. L'afpeft des femmes excite l'effronterie: des mâles ; de même , l'afped des hommes excite la lafciveté des fe- melles. Sur cet article ils font incorrigibles. Foye^ ce qui en eft dit à la fuite de l'article Singe. PAPYRACÉE. Épithete qu'on emploie en Hifloire Naturelle , pour défigner une coquille extrêmement mince. PAQUERETTE on PASQUETTE. J^oyei Marguerite petite; PAPYRUS. Foyei Papier du Nil. PARANACARE, efpece de crabe du Bréfil , qui, félon Marcgmve; n'eft pas bon à manger. Il eil: long de trois doigts : il a deux bras garnis de pinces , quatre jambes longues de trois doigts , & quatre autres qui font très-courtes ; une queue ftriée & longue d'un doigt & demi ; deux yeux longs & élevés , & deux filets. Sa coquille efl brunâtre , ainfi que Iqs poils qui la recouvrent ; toutes les parties inférieures font bleuâtres, de même que les yeux & les filets ou antennules : on le trouve fur le ri- vage, proche du fleuve Paraiba. Ruijch, cxfang. p, 27. PARASILENE. C'eil: un météore dans lequel on apperçoit quelque- fois l'image apparente de la lune : cet effet eft occafionné par les mêmes caufes que les parhé/ies du foleil. if^oyei ParhÉLIE. PAREIRA BRAVA ou BUTUA. C'eff le nom d'une racine qui nous «ft apportée du Bréfil par les Portugais : on ne connoît pas encore bien la plante dont on la retire : cependant on foupçonne que c'efl la même que le caapcha. Voyez ce mot. Cette racine eft ligneufe , dure^ tortueufe, brune en dehors , d'un jaune grifâtre intérieurement; étant coupée tranfverfalement , on y voit plufieurs cercles concentriques, traverfés de plufieurs rayons qui aboutiffent au centre : elle n'a point d'odeur , & efi: un peu amere ; elle eft de la groffeur du doigt , & quelquefois du bras d'un homme. Les Portugais & les habitans du. Bréfil la regardent comme une panacée fouveraine. Ils font dans l'ufage de la tremper dans l'eau , & de l'ufer fur une pierre à aiguifer ; ils la délaient enfuite dans quelque liqueur appropriée , & la font prendre PAR ■66(). à leurs malades : nous l'employons aufii râpée. L'expérience a appris que fbn ufage eft fpécifîque dans la colique néphrétique & la fup- preffion d'urine : la douleur eft difîipée prefque en un inftant par un écoulement abondant d'urines. Cette racine produit fon effet en divifant les matières miiqueufes qui engorgent les couloirs des reins. Elle a été employée avec fuccès dans un aflhme humoral qui fuffoquoit le malade : fon ufage a été fuivi d'expedoration. Cette racine eft fort utile dans la gonorrhée , & pour arrêter les hémorrhagies. On la donne^ €n poudre à la dofe de vingt à trente grains , trois à quatre fois le jour , dans la tifane de fleurs de mauve ; & en déco£ïion , à la dofe de deux à trois gros. A Cayenne on l'emploie en tilane au défaut du faffafras. Paràra ^r^v^ efl un nom Portugais , qui Ç\pï\?kQ vigne fauvags ou bâtarde. Butua eft un nom Indien , qui fignifîe un bâton ( M. Lochner qui a écrit {\xr\t pareira brava ^ le diflingue du butua^. Les Bréfilois donnent aufîi le nom de membrocq à cette racine. M. Ameloty Conieiller d'Etat , efl le premier qui ait apporté le parelra brava en France , au. retour de fon AmbaiTade de Portugal, en 1688, PARELLE : voye^ Patience. PAREPOU : voyci Palipou. PARESSEUX ou AI ou HAY. Quadrupède de l'Amérique & du Ceylan, dont on diflingue deux efpeces; le grand & le petit. M. Linneus, les met dans l'ordre des antrhopomorphcs , ou animaux à figure humaine. Il nomme bradype celui d'Amérique, Cet animal habite les endroits les plus chauds de cette partie du monde. Il a trois doigts aux pieds de devant , & il efl fans queue. C'efl Vignavus gracilis aut agilis de Seba^ La grande efpece a cependant une forte de queue longue d'un demi- doigt , & ronde. L'animal eft de la grandeur d'un renard de moyenne taille , & a des yeux noirs & fort fombres ou endormis. Le même Auteur nomme le fécond tardigradusCeylanicus. Ce grande/ efl Vigrïuvus major hirfutus , pilis longis & grifeis des Auteurs, M. Klein fait aulTi une différence de VAi du Ceylan, d'avec celui de l'Amérique. Celui du Ceylan n'a que deux doigts aux pieds de devant , & trois à ceux de derrière , tous armés d'ongles forts & crochus. Ses oreilles , qui font placées & appliquées contre la tête , font cachées fous les poils. Il n'a point de queue : tout fon corps eft couvert de poils épais , roux ou de couleur incarnat par deffus le dos , & d'un cendré clair par-deftbus le ventre» Il a le mufeau un peu plus alongé 670 PAR que le parefleux de rAmérique. On dit que les femelles de ce^ anî- maux ont deux mamelles entre les pieds de devant. M. Briffon met le pare[fcux dans l'ordre fécond de la clafîe des qua- drupèdes velus, qui n'ont que des dents molaires. Ces dents ne font point à lobes , comme celles des autres quadrupèdes : elles font cy- lindriques , & terminées par un bout arrondi. Le petit que la femelle de VJï met bas , naît fans poils ; il reffemble au petit chien par l'ouverture de la gueule , & par tout le corps à Tefpece de fmge cynocéphale. Il n'a point de queue ; îes oreilles font courtes & rondes, collces contre la tête, comme font ce les des finges: ce qui fait que M. KUin le nomme Jimia perfonata. Seha fait mention d'un panffeux de rJménque , dont les poils font très-épais , crépus & femblables à de la laine. Ces animaux , dit-on , rient & pleurent en même temps : nfum. jlau mïfunt. Leur voix eft claire comme le cri d'un jeune chat , mais qui prononce gravement i , i, i , i , i, fur le ton des /a , fol , fa , mi , re : ce cri a fait dire plaifamment à Clufius que \Al étoit l'inventeur de la Mufique. On trouve dans les Obfervaùons £ Hifiolre. Naturelle de M. Gautier^ Tome I. Part. 2.pag.24o & fuiv. une defcription de l'extérieur & de l'intérieur de cet animal. Voye^^ aufîi Séba pour les defcriptions OC les figures qu'il donne des différentes efpeces à' Aï. Autant, dit M. de Buffon^ la Nature nous a paru vive, agiflante, exaltée dans les finges , autant elle eft lente , contrainte & refîerrée dans ctsparcffeux ; & c'eft moins pareffe que mifere, c'eft défaut , c'eft dénuement , c'eft vice dans la conformation ; point de dents incifives , ni canines , les yeux obfcurs & couverts , la mâchoire aufli lourde qu'épaiffe , le poil plat & femblable à de l'herbe fcchée , les cuiftes mal emboîtées & prefque hors des hanches, les jambes trop courtes, mal tournées & encore plus mal terminées ; point d'aftiette de pied, point de pouces , point de doigts féparément mobiles ; mais deux ou trois ongles exceftivement longs , carinés , pointus , recourbés en defTous , qui ne peuvent fe mouvoir qu'enfemble , &: nuifent plus à marcher qu'ils ne fervent à grimper ; la lenteur, la ftupidité , l'abandon de fon être , & même la douleur habituelle , réfultant de cette con- formation bizarre & négligée ; point d'armes pour attaquer ou fe dé- fendre , nul moyen de fécurité , pas même en grattant la terre ; nulle reffource de falut dans la fuite ; confinés , je ne dis pas au pays, mais PAR ^7î à la motte de terre , à l'arbre fous lequel ils font nés ; prîfonniers au milieu de l'efpace ; ne pouvant parcourir qu'une toife en une heure , grimpant avec peine , fe traînant avec douleur , une voix plaintive 6c par accens entrecoupés qu'ils n'ofent élever que la nuit ; tout annonce leurmifere, tout nous rappelle ces monftres par défaut, ces ébauches imparfaites , mille fois projetées , exécutées par la Nature , qui ayant à peine la faculté d'exifter , n'ont du fubfxfter qu'un temps, & ont été depuis effacés de la lifte des êtres ; & en effet û les terres qu'habitent les parejfeux n'étoient pas des déferts , fi les hommes & les animaux puiifans s'y fuflent anciennement multipUés , ces efpeces ne feroient pas parvenues jufqu'à nous , elles euffent été détruites par les autres, comme elles le feront un jour. Faute de dents , dit notre illuftre & fublime Écrivain , ces pauvres animaux ne peuvent ni faifir une proie , ni fe nourrir de chair , ni même brouter l'herbe ; réduits à vivre de feuilles & de fruits fau- vages , ils confument du temps à fe traîner au pied d'un arbre , il leur en faut encore beaucoup pour grimper jufqu'aux branches , & pendant ce lent & trifte exercice qui dure quelquefois plufieurs jours ils font obligés de fupporter la faim & peut-être de fouffrir le preffant befoin ; arrivés fur l'arbre ils n'en defcendent plus , ils s'accrochent aux branches , ils les dépouillent par parties , mangent fuccefîivement les feuilles de chaque rameau , pafTent ainfi plufieurs femaines fans pouvoir délayer par aucune boiffon cette nourriture aride ; & lorf- qu'ils ont ruiné leur fond , & que l'arbre eft entièrement nud , ils y reftent encore retenus par l'impolliblité d'en defcendre ; enfin quand le befoin fe fait de nouveau fentir , qu'il prefTe & qu'il devient plus vif que la crainte du danger de la mort , ne pouvant defcendre ils fe laifTent tomber , & tombent très-lourdement comme un bloc , une mafïé fans refTort , car leurs jambes rondes & pareffeufes n'ont pas le temps de s'étendre pour rompre le coup. A terre ils font expofés à la merci & même livrés à tous leurs en- nemis : comme leur chair n'eft pas abfolament mauvaife , les hommes & les animaux de proie les cherchent & les tuent : il paroît qu'ils multiplient peu, ou du moins que s'ils produifent fréquemment, ce n'efl qu'en petit nombre ; car ils n'ont que deux mamelles. Tout concourt donc à les détruire , & il eft bien difficile que l'efpece fe maintienne: il eft vrai que quoiqu'ils foient lents , gauches ôc prefqu'inhiibilcs au 6'7^ PAR mouvement , ils font durs , forts de corps & vivaces ; qu'ils peuvent fupporter long-temps la privation de toute nourriture ; que couverts d'un poil épais & fec , & ne pouvant faire d'exercice , ils diffipent peu & engraifTent par le repos , quelque maigres que foient leurs alimens ; ces animaux ayant quatre eftomacs , comme les quadrupèdes ruminans , peuvent compenferce qui manque à la qualité de la nourriture par la quantité qu'ils en prennent. Une fmgularité remarquable , c'efl que leurs inteftins , au lieu d'être longs comme ils le font dans les animaux ruminans , font au contraire très-petits & plus courts que ceux des animaux carnivores ; une autre fmgularité c'efl qu'au lieu de deux ouvertures au dehors , l'une pour l'urine , l'autre pour les ex- crémens , au lieu d'un orifice extérieur & diftinft pour les parties de la génération , ces animaux n'en ont qu'un feul , au fond duquel eft un égout commun , un cloaque comme dans les oifeaux. Au refte, ditM. f/<; Buffon, avec cet efprit philofophique qui règne toujours dans (es ouvrages , fi la mifere qui réfulte du défaut de fenti- jnent n'eft pas la plus grande de toutes, celle de ces animaux, quoique très-apparente, pourroit ne pas être réelle; car ils paroifTent très mal ou très-peu fentir: leur air morne, leur regard pefant, leur réfiflance indolente aux coups qu'ils reçoivent fans s'émouvoir, annoncent leur infenfibilité ; & ce qui la démontre , c'efl qu'en les foumettant au fcalpel ' en leur arrachant le cœur & les vifceres , ils ne meurent pas à l'inflant» Pif on qui a fait cette dure expérience , dit que le cœur féparé du corps battoit encore vivement pendant une demi-heure, & que l'animal remuoit toujours les jambes comme s'il n'eût été qu'afToupi ; par ces rapports ce quadrupède fe rapproche non-feulement de la tortue, dont il a déjà la lenteur , mais encore des autres reptiles & de tous ceux qui n'ont pas un centre de fentiment unique & bien diflinft : or, tous ces êtres font miférables , fans être malheureux ; & dans fes productions les plus né- gligées , la Nature paroît toujours plus en mère qu'en marâtre. M. Vofmàir , Naturalifle Hollandois , vient de donner la defcription du pareffeux penta-daclyU ( à cinq doigts ) du Bengale , & qui a vécu dans la chambre du Stadhouder. Sa longueur , depuis le fommet de la tête jufqu'à l'anus, efl de treize pouces. Il a la tête prefque ronde, n'ayant que le mufeau qui foit un peu pointu. Les oreilles font fort , minces , ovales & droites , mais prefqu'entiérement cachées fous un poil laineux j elles font velues aufTi en dedans. Les yeux gros, orbiculaires PAR <^73 & placés fur le devant du front, immédiatement au-deHus du nez, & tout proches l'un de l'autre , de couleur brun-obfcur. Quand on éveille l'animal pendant le jour , la prunelle efl: d'abord fort petite, mais elle gro/Tit par degrés à \m point ccnfidérable : lorfque cet animal, qui paroît être du fexe mâle , s'év-eille le foir , & qu'on fe préfente à lai avec une chandelle allumée, on voit également cette prunelle s'étendre & occuper à-peu-près tout le rond de l'œil. Le nez eu. petit, applati en. devant &c ouvert fur les côtés. La mâchoire inférieure a au-devant quatre dents incifives , étroites & plates, fuivies des deux côtés d'une plus grande, & enfin de deux groffes dents canines: après la dent canine, font de chaque côté deux autres dents rondes & pointues ; ce qui fait en tout douze dents. M. Fofma'ér dit qu'il y a de chaque coté deux ou trois dents mâchelieres: la mâchoire fupérieure n'a au-devant dans le milieu, que deux petites dents écartées; un peu plus loin, deux petites dents canines, une de chaque côté; enfuite deux dents plus petites encore , ce qui fait huit dents , fans compter les mâchelieres qui font au nombre de deux ou trois. La langue efl affez épaifle & longue , arrondie en devant & rude. Le poil long, fin, laineux , mais rude au toucher: fa couleur eil: grifâtre ou cendré- jaunâtre-clair , un peu plus roux fur les flancs & aux jambes; autour des yeux, des oreilles, la couleur efl aufîl un peu plus foncée ,& depuis la tête tout le long du dos règne une raie brune. Cet animal a une petite apparence de queue d'environ deux ou trois lignes de longueur. Les doigts des pieds antérieurs font au nombre de cinq ; le pouce efl plus long & plus gros que les autres doigts, dont celui du milieu efl le plus long, & celui du devant le plus court; les ongles font comme ceux de l'homme; les doigts des pieds poflérieurs font conformés de même, à l'exception que celui de l'index ( premier doigt ) efl fort long & fe termine en pointe aiguë. Tous les doigts , continue M. Vofmaèr, paroiflent avoir trois articulations; ils font feulement un peu velus .en - deffus & garnis d'une forte pellicule brune en-deffous : la longueur des pieds antérieurs efl de fix pouces, celle des pieds poflérieurs efl de huit pouces. A cette defcription du panffcux penta-daclyU du Bengale , M. Vofmaër joint l'hifloire naturelle de cet animal, & ajoute quelques réflexions i\xx ce qu'a écrit M. de Buffon^ concernant le parefTeux. M. de Buffon, dit'il, H'ifloire Naturelle Tom. XIII. page j^ , n'aiïigne pour patrie au parefTeux que le nouveau monde ; c'efl une créature fi furprenante, Tome IF. QQqq <^74 PAR par fon incroyable lenteur, qu'il s'eft attiré l'attention de tous ceux qui l'ont vu; fa conformation, fa voix plaintive, fon aiToupifTement continuel, tout en lui excite tour à tour des fentimens naturels d'hor- reur & de compafîion mais cet état , félon M. Vofmaér , n'eft pas aufîi miférable que fon premier alpeft l'annonce ; fouvent nos premières idées, dit-il, nous font illufion dans l'examen extérieur des êtres créés dont nous ignorons les rapports à la Nature entière ou à eux-mêmes. Notre Naturalifte Hollandois prétend avoir été détrompé à cet égard par des recherches plus exades , & que ces nouvelles obfervations le conduifant à des idées plus générales, plus fublimes, l'ont convaincu que chaque être relativement à foi-même ou au tout pris enfemble, éto'u trh-bUn. Il envifage , fous une tout autre fin , l'aifreufe mifereque M. de Buffon attribue à cette créature. Le tableau le plus magnifique feroit plat & défagréable , fans les ombres , les dégradations & les autres fecours de l'Art, il en eft de même de la Nature, dit M. Vofmdèr ; fon grand Architefte, qui a difpofé toutes choies avec une fagefle impéné- trable , n'a point jugé que toutes fes créatures brillaflent d'une égale beauté de forme & de coloris, ni qu'elles fu fient douées de la même intelligence, de la même force, du même naturel doux ou féroce, d'une même lenteur , ou d'une même agilité : que l'on compare le fuperbe paon avec le difforme dodo , le finge &: le cheval , le mouton & le tigre, le parefi!eux & l'écureuil; que l'on parcoure tous les genres d'animaux en général, & qu'on defcende de la contemplation de ces créatures terribles, telles que le crocodile, la baleine & l'éléphant, à celle de la puce aquatique , du puceron & des autres petits animaux microfcopiques ; qu'on life enfin le grand livre de la Nature, dans les œuvres de la création; qu'on obferve le naturel, les propriétés & l'é- conomie des créatures ; que de tableaux admirables ne vont pas s'offrir à nos yeux ! on y verra que la chétive taupe , qui habite dans des ténèbres éternelles , y mené une vie heureufe ; & qu'un animal comme le paref- feux, defliné , pouf ainfi dire, à ne vivre que la nuit, confiné à l'arbre fous lequel il efl né, dormant fur fes branches , &, fuivant M. de, Buffon , ne fe nourriffant aufîi que de feuilles &: de fruits fauvages; qu'un tel animal, dis-je, efl formé & difpofé d'une façon analogue à fa manière de vivre. J'avoue , continue M. Vofmaër, qu'à l'égard du tableau de la Nature entière , le parefTeux paroît en être une ombre, unetache obfcure, & PAR (S75 comme deftiné à rehaiiffer l'éclat des autres objets ; mais confidéré en lui-même , & par rapport à fa nature , de quoi lui ferviroit une plus grande agilité ? Pendant la nuit , lorfqu'il fe traîne fur les branches des arbres, elle ne pourroit que l'expofer à mille accidens; malgré fa len- teur il a une force incroyable dans fes pattes ( fi on lui laiile faifir une canne , il la ferre peu à peu tellement , qu'il la fait fendre ) ; cette force lui eft néceffaire , ainfi que la difforme flrudure de fes pieds poftérieurs , pour fe tenir la nuit&: en dormant attaché aux branches Se pour grimper d'un arbre fur l'autre. M. Fofmaër prétend que ces animaux ne font pas obligés de fe laiiTer tomber comme un bloc lorfqu'ils font fur un arbre Se qu'il veulent être à terre , & il dit encore que quant à leur anéantiffement total , on ne le doit pas craindre : ils fe font confervés depuis tant de fiecles ; d'ailleurs la vigilante Nature paroît y avoir fuffi- famment pourvu de toutes parts. Cet Obfervateur remarque , avec M. Daubcnton , que cet animal a les mâchoires garnies de dents canines , ( M. ^V Biiffon dit qu'ils n'en ont pas ) , le nombre des dents canines & mâchelieres eft dans '^ai ou parefTeux le même que dans Vunau : voyez ce mot. M. Vofmaèr avoue que le parefTeux fe trouve dans le Nouveau Monde , mais il foutient qu'il s'en trouve aufîi une efpece dans l'Ancien Monde , & qui a fa demeure en Afie; c'efl \q parejfeux penta-daclyU du Bengale que nous avons décrit ci-deiTus. Vakntïn avoit déjà dit que le parefTeux fe trouve aux Indes Orientales , & Sèba en avoit reçu deux qui lui avoient été envoyés du Ceylan. M. Vofma'ir dit que le parefTeux de Bengale paroît former une efpece intermédiaire (eu égard uniquement à la figure extérieure) , entre les parefTeux vulgaires & connus des Indes Occidentales , & ces animaux fmguliers , que Séha nomme parejfeux fliuts de Ceylan , & auxquels M. de Buffon donne le nom de loris. Voyez ce mot. Le parefîeux de Bengale que M. /^(o///2^è> nourrifToit dans fa chambre, avoit une odeur défagréable \ il dormoit tout le jour , c'étoit en été , il ne s'éveilloit qu'à huit heures & demie : il dormoit confîamment afîis fur fon derrière , la tête penchée en avant entre les pattes antérieures , repliées contre le ventre : dans cette attitude , il fe tenoit toujours en dormant très-fermement attaché autreilHs de fer de fa cage par les deux pattes de derrière , & fouvent encore par une des pattes antérieures : cette étran e propriété fuppofe que l'animal dort ordinairement fur les arbres , & fe tient attaché aux branches qui l'environnent ; foa QQqq 1 6-]^ PAR mouvement, étant éveillé, étoit extrêmement lent ,re traînant de barre en barre qu'il faififfoit avec fes pattes antérieures : s'il rampoit à terre fur le foin , il fe mouvoit & traînoit avec la môme lenteur : fi on le chaiToit avec un bâton , il n'alloit pas plus promptement , il ne lâchoit pas prife , il mordoit le bâton , c'étoit-là toute fa défenfe : dès qu'il s'éveilloit il mangeoit , & enfuite il rendoit {ç.s excrémens : fon urine avoit une odeur forte , défngréable ; il étoit friand de riz , de fruits , de pain , de bifcuit {ç.z-^ il flairoit l'eau fans la boire; il aimoit beaucoup les œufs & portoit fa nourriture à fa bouche à la manière des écureuils & des fouris. M. Vofmaèr lui préfenta un moineau , enfuite un hanneton, un pinçon qu'il avala fort goulement & en entier : quoique lent dans fa démarche , cet animal étoit adroit à faifir une proie vivante , & elle ne pouvoit plus échapper de fa griffe : fon cri continuel étoit di^ aï, aï , traînant fort long-temps chaque aï d'un ton plaintif, langoureux ÔC tremblant. PARESSEUX. Nom que Gocdacn donne auiïi à un ver qui fe trouve dans les heux d'aifance , & fe nourrit de l'excrément de l'homme : fa marche ell: très-lente. 11 fe métamorphofe en une petite mouche, qui ne fe nourrit aufîi que de nos excrémens. PARESSEUSE. Le même Auteur appelle ainfi une fliuffe chenille que l'on trouve fouvent fur les feuilles durofier, où elle fe nourrit pendant la nuit : elle marche très-lentement , & quand on la preiTe , fa défenfe ne confifle qu'à faire de fon corps un petit monceau. Cette larve fe fait une maifonnette tranfparente & tiffue comme un filet, pour y attendre fa métamorphofe , qui fe fait ou pendant l'automne , ou pendant le printemps. Alors elle en fort dans l'état de mouche. PARETURIER ou PARETUVIER. Voye^ Palétuvier. PARFUM. Nom donné à l'odeur aromatique , plus ou moins fubtiîe & fuave , qui exhale d'une fubflance quelconque. Les parfums folides ou fecs & les plus eflimés, font ceux de l'Arabie ; qui font, l'encens, la myrrhe , le benjoin , le ftorax , le labdanum , le baume blanc , le flyrax liquide , le thymiama ou narcaphte , la graine d'ambrette , le coflus odorant ; enfuite les parfums de l'Inde , qui font pour l'ordinaire , des pots-pourris, compofés d'écorce de citron , de bois d'aloès , de girofle, de fantal citrin , de macis , de mufcade, de cannelle , d'ambre , de mufc & de civette. Nos parfums d'Europe ne font peut-être pas moins agréa- bles; on les compofe avec les fleurs de lavande , de jafmin , de thym. PAR Cj^ àt romarin , de rofes , de tubéreufes , un citron piqué de clous de girofle , des bois de rhode & de cèdre , & de l'iris de Florence : on aromatife ce mélange d'un peu d'huile eflenîielle de bergamotte. Les parfums liquides font en général les efprits & effences des plantes très-odorantes. Souvent les fleurs qui ornent les parterres de nos Jardins communiquent à l'atmofphere une vapeur aufli douce , auflî délicieufe , que les odeurs qu'un vent chaud fait exhaler des plaines aromatiques de l'Arabie. Telle efl communément labafe de nos pots-pourris & de nos caJfoUttes, On fait que ce nom a été donné à une compofition odoriférante , formée de l'amas de tout ce qui rend une odeur agréable; obfervant toutefois qu'il y ait une certaine analogie entre les odeurs , car il peut arriver , ou qu'elles foient rendues plus fuaves , ou qu'elles fe corrom- pent par le mélange : on renferme ces aromates tantôt dans de petites boîtes d'or ou d'argent portatives & bien fermées, mais qu'on ouvre à volonté ; tantôt dans des vafes de faïence ou de porcelaine, garnis de baguettes en manière de pied de réchaud , & dont le couvercle ell percé de part en part , afin que les odeurs pafl^'ent & fe répandent dans l'ap-» partement où les cajJ'oUtus font dépofées. Voy&i^ V article, Odorat dans le chapitre des SenS , inféré à la fuite du mot HoMME. L'ufage des caffolettes efl: fort ancien. Les Indiens ont de tout temps brûlé des parfums dans des efpeces de réchauds , pour recevoir plus magnifiquement leurs convives : l'encenfoir fumant efl dans la main du Prêtre une caflblette. Uacerra des Anciens étoit un vafe ou coffret defliné aux parfum.s. Ces inflrumens de facrifices fe voient très-fouvent dans les anciens monumens , & quelques-uns font ornés de figures fymboliques. A quel degré les Romains n'ont-ils pas poufl'é leur luxe dans les odeurs, foit pour l'ufage des facrifices , foit pour donner une marque de leur refpeft envers les hommes conflitués en dignité ? on s'en fervoit encore aux fpeftacles , dans les bains ; les rofes y étoient prodiguées , & la profufion des parfums devint fi exceflive dans la célébration des funérailles , que l'ufage en fut défendu par les lois des douze tables. Par quel contrafle les Dames Romaines ont-elles aujour- d'hui de l'averfion pour les odeurs ? & pourquoi les Poètes ne chantent- ils que la douceur de l'haleine de leur maîtreffe, fans chanter auflî le mufc & l'ambre dont elles font parfumées par l'adion de ces corps odoriférans ? Foye:^ Aromates. 678 PAR Les Sculpteurs fotit aufli dans rufage d'imiter les caffolettes en faifant des efpeces de vafes ifolés de peu de hauteur , du fommet & fouvent des côtés defquels s'exhalent des flammes ou des parfums afFeûés : ces vaTes fervent fouvent d'amortiflement à l'extrémité fupérieure d'une maifon de plaifance , ou bien ils couronnent les retables d'autels ; on les emploie au.Ti dans la décoration des catafalques, des arcs de triom- phes , feux d'artifice , &c. PARHÈLIES ou FAUX SOLEIL. Ceft un météore dont l'afped a quelque chofe de fort étonnant : on apperçoit un ou plufieurs faux foleils fous la forme d'une clarté brillante , qui paroifTent à côté du folell , & qui font formés par la réflexion des rayons du foleil. Ces parhélies ne paroiffent jamais qu'au lever & au coucher du foleil , parce qu'alors les rayons de cetaftre ont à traverfer une plus grande quantité de vapeurs, & que ces apparences font l'effet de la lumière réfléchie par les vapeurs. Ces apparences s'offrent quelquefois avec un très-grand appareil , quelquefois elles font plus fimples ; mais toujours effrayantes pour le peuple : quelquefois on n'en voit qu'une partie , parce que la totalité dépend d'un grand nombre de circonflances qui ne fe rencontrent pas toujours à la fois. L'agitation de l'air caufée par le vent , des nuages qui paffent au deffous interceptent le fpedacle ou en rompent le cours; leurs figures ne font pas aufTi parfaitement rondes que celles du foleil ; on leur remarque fouvent des angles; elles ne brillent pas non plus tant que le foleil , quoique leur lumière ne laiffe pas d'être quelquefois aufîi grande que celle de cet aflre. Lorfqu'il en paroît pkifieurs à la fois, quelques-unes ont moins d'éclat & font plus pâles que les autres. Les cercles des parhélies différent tant en nombre qu'en grandeur, ils ont cependant tous le même diamètre , lequel efî égal au diamètre apparent du foleil; il fe trouve des cercles qui ont le foleil dans leur centre ; ces cercles font colorés, & leur diamètre efl de 45 degrés , & même de 90 : plus les couleurs de ces cercles font vives , plus la lumière du véritable foleil paroît foible. On voit ordinairement les parhélies en hiver lorfqu'il fait froid ou qu'il gcle un peu , tant qu'il règne en même temps un petit vent du nord. Lorfque les parhélies difparoifîent , il commence à pleuvoir ou à neiger , & on voit alors tomber une efpece de neige oblongue , faite en manière d'aiguilles. PAR.IÉTAIRE, pariaaria. Cette plante connue également fous les PAR PAS 679 noms 6e paritoire , vitriole, cajfepierre y ou perce-muraille , croît abon- damment dans les vieux murs , quelquefois le long des haies ou des mafures : fa racine eft fîbreufe &c rougeâtre , elle pouffe plufieurs tiges à la hauteur d'environ deux pieds ; ces tiges font rondes , rougeâtres fragiles & rameufes : les feuilles de cette plante font oblongues , velues , pointues , & s'attachent facilement aux habits ; ces feuilles en fe féchant deviennent prefque tranfparentes : {es fleurs font petites , elles fortent par tas des ailfelles des feuilles le long de la tige ; elles font compofées ordinairement chacune de quatre étamines , dont les fommets font d'un blanc purpurin ; elles font aufîi fi élaftiques , que dès qu'on y touche avec un ftilet , elles fe développent fubitement Sz fecouent fortement leur poufliere roufTâtre : à ces fleurs fertiles 8z différentes pour la figure des fleurs flériles , il fuccede des femences oblongues & luifantes , renfermées dans des capfules rudes au toucher. Les feuilles de cette plante font d'un grand ufage en médecine ; elles font apéritives , émollientes & rafraîchifTantes , tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. On vante cette plante pour les maux de reins , & on rap- porte des exemples où elle a fufpendu pendant des années entières les douleurs de la pierre. Plufieurs Médecins afTurent avoir guéri des hydropifics rebelles avec la décoftion de ce diurétique. Les Payfans fe fervent de la plante pour nétoyer les verres. PARCETONIUM. Des Naturaliftes modernes croient que le fel dont les Anciens ont parlé fous ce nom efl un fel marin tiré par l'é- vaporation des eaux de la mer. Le par(ztonium a une faveur muria- tique & la lucidité de l'alun. Quelques Auteurs prétendent cependant que le parce,tonium des Anciens étoit tiré des murailles. PAS. Voyei^ Detroit. PASAN. C'efl ^antilope he^oanica de M. Pallas, Voyez à l'article Gazelle. PAS D'ANE, roy^^ Tussilage. PAS DE POULAIN , pajfus equinus. Quelques Naturalises donnent ce nom à deux coquillages multivaves du genre des ourfins de mer : l'un eft connu fous le nom defpatagus , & l'autre fous celui de bryjfus ou œuf marin. Le premier, dit M. d'Argenville , reflemble à un petit tonneau garni de fpatules ; l'ouverture de fon dos a la figure d'un cœur, au lieu que le bryffus qui n'a point cette ouverture , efl toujours de figure ovale avec des filions crénelés & pondues au fommet. On 6So PAS prétend qu'ils n'ont poînl: de dents ni l'un ni l'autre , ils ont une mâchoire pour prendre l'eau & le fable , &c en dedans un feul inteflin rempli d'eau qui leur tient lieu de chair & d'œufs. Le compartiment de Vourjin bryjfus en étoile percée à jour , & tous fes points faillans font agréables à la vue ; fa couleur efi: grife ou blanche , avec une ouverture dans le haut & une autre vers le miheu dans la partie de deflbus ; c'eft par ces trous que l'animal refpire & vide fes excrémens : la partie inférieure , qui eft le ventre , efl toute chagrinée. Les autres ourfms font ouverts dans le milieu. Vourjin fpatagus re^QmhXo. communément ?iW bryJfus\>o\xt la couleur & les ouvertures , mais fon compartiment eft ditférent , il eft échancré , femé d'apophyfes très-fines & garnies de fpatules , &, comme nous l'avons dit ci-defîhs , l'ouverture de fon dos repréfente la figure d'un cœur. On en voit quelquefois , mais rarement , d'une couleur violette. Foyei V article. OuRSiN de mer. PASSE ou PASSERILLES, /j^^^//^. On donne ce nom à des raifms mufcats féchés au foleil : on en fait un grand commerce à Frontignan ; à Damas , à Smyrne & en Candie. Voyt?^ Raisin. PASSE-BUSE. C'eft \2i fauvmt de, haie. Voyez Fauvette. PASSEFLEUR. On donne ce nom à la Coquelourde des jardins & à l'CEiLLET de Dieu. Foye^ ces mots. PASSE-MUSC , petit animal dont il eft mention dans les Tranfaciions Philofophiques ^ n. ij7 rfes teflicules, quoique long-temps gardés , & même defféchés jufqu'à devenir noirs , exhalent une odeur de mufc , I qu'on préfère au mufc des boutiques. PASSE-PIERRE ou Perce-Pierre, Bacile, Criste ou Crête- marine , ou Fenouil marin , ou Herbe de St. Pierre , en latin crithmum. Plante maritime ou efpece de pourpier de mer , dont on diftingue deux efpeces , favoir , la grande & la petite. C'eft prefque la feule différence qu'on y remarque : nous ne parlerons que de la pe- tite paffe-pierre, C'efl une plante qui pouffe des tiges longues d'environ un pied, rampantes pour l'ordinaire à terre : fes feuilles font découpées , étroites , fermes , charnues , fubdi vifées trois à trois d'un vert brun , & d'un goût falé : fes fleurs font jaunes , mais dans la grande efpece elles font blanches , toutes deux en ombelles , & difpofces en rofe. Sa graine reffemble à celle du fenouil, elle efl feulement plus grande. Le goût en efl agréable , piquant & aromatique. Cette plante , qui croît na- turellement dans les lieux maritimes Ôc pierreux , meurt tous les ans au commencement PAS éSt commencement de l'hiver , &c renaît vers la fia de Juin ou le commen-, cernent de Juillet ; on la nomme perce-pierre , parce qu'elle fort d'entre les fentes des pierres : on l'élevé cependant dans les jardins , le long des murailles. La cueillette de la pajfe-pierre efl permife à tout le monde ; néanm.oins il n'y a guère que les femmes , les filles & les enfants des ri- verains qui en font la récolte : ceux-ci la portent par facs& paniers dans les villes voifines , ou ils la vendent pour être falée & fervir aux falades d'hiver. Il faut la faler avec un vinaigre foible & un peu de fel. Lorfqu'elle a reilé environ un mois dans cette première faumure , on la tranfvafe foit dans des barils ou des pots de terre , oiil'on met de nouveau vinaigre plus fort. On prétend que le vinaigre blanc de la Rochelle efl celui qui y convient le mieux. L'on ajoute au fel du gros poivre , quelquefois aufît des clous de girofle , quelques feuilles de laurier, & même un peu d'é- corce de citron. On a obfervé que la crête-marine qui croît furies bancs de terre que la mer couvre journellement, efl la plus tendre & la meil- leure ; celle qui vient au bord des marais & que l'eau de la mer mouille plus rarement , efr feche & dure. Il n'en croît pas fur les fables purs : il y a des endroits où l'on ne confît que les feuilles de la paffe-pierre , & on les mêle avec les cornichons dont il efl parlé à l'article concombre. Voyez ce mot. Les feuilles de la paûe-pierre font eflimées apéritives , lithontriptiques & propres à réveiller Tappétit. PASSE-RAGE ou CHASSE-RAGE VULGAIRE, lepidium vulgare ^ eft une plante qui croît abondamment aux lieux ombrageux , dans les pierrailles , les mafures & près des jardins oii on la cultive. On la trouve aufTi fur les Alpes. Sa racine efl grofîe comme le doigt , blanchâtre , rampante fous terre & d'une faveur fort acre : elle pouffe plufieurs tiges, hautes de trois pieds , rondes, moëlleufes & rameufes , cou- vertes d'une poufîiere d'un vert de mer , qui s'emporte aifément : fes feuilles font alternes , & refTemblent à celles du citronnier ; elles font dentelées en leurs bords : on trouve fes fleurs au fommet des tiges & des rameaux , elles font petites , en croix , & blanches : elles font fuivies par de petits fruits , formés en fer de lance , qui fe divifent en deux loges , remplies de menues femences , oblongues & roufîes. Toute la plante efl d'une faveur acre , aromatique , qui approche de celle du poivre & de la moutarde : c'efl un bon antifcorbutique ; li on mange fes feuilles à jeun elles excitent l'appétit. Simon Pauli dit qu'en Danemarck les Cuifmiers mêlent avec le vinaigre le fuc que l'on a Tome IK RRrr 6Si PAS exprimé de la paffe-rage , pour en faire des fauces aux viandes rôties. PASSE -RAGE SAUVAGE. Foye^ Cresson sauvage ou des Prés. PASSEREAU , pajfer. C'efl: le nom donné aux différentes efpeces de moineaux, f^oye^ ce mot & celui de Roitelet. PASSE-ROSE, f^oyci Mauve des Jardins ou Rose Tremiere à t article Mauve. Quelques-uns donnent auiîi le nom de pajfe-rofe à la pafle-fleur , dite œillet de Dieu. Voyez ce mot. PASSE-VELOURS. Voyei Amaranthe. PASTÉ, C'efl le coq des jardins. Voye^^ ce mot. PASTEL , Guesde , glaflumfeu ifatisfativa , vel latifoUa. Plante que l'on cultive dans nos Provinces méridionales , en Provence & en Lan- guedoc , pour l'ufage de la teinture : on s'en fert pour teindre en bleu. On la cultive aufîi en Normandie , & on dit qu'elle réulTit en Allemagne ; mais le paftel de Languedoc eft le plus eftimé. Cette plante pouffe des tiges hautes de trois pieds, groffes comme le doigt ; elles fe divifent par le haut en quantité de rameaux chargés de beaucoup de feuilles , rangées fans ordre. Ses feuilles font liffes & d'un vert bleuâtre. Ses rameaux font chargés de fleurs formées de quatre pétales jaunes , difpofées en croix ; le piftil devient une capfule applatie fur les bords : chaque capfule contient deux femences oblongues. La racine de cette plante eft groffe , ligneufe & pénètre profondément en terre. Le paftel demande à être femé dans une bonne terre , légère , noire ; douce & fertile. Après avoir donné à la terre les façons néceffaires , on feme la graine en Avril : lorfque la plante commence à grandir , on arrache les mauvaifes herbes, fans quoi les feuilles de paftel ne devien- droient point belles. On fait ordinairement deux récoltes de feuilles de paftel dans la même année ; quand la faifon a été favorable , on en fait jufqu'à quatre : la première fe fait vers la fin d'Août , & la dernière vers la fin d'Odobre ; mais il faut avoir attention de faire cette dernière ré- colte avant les premières gelées, autrement les feuilles qu'on recueille- roitne vaudroîent rien. Lorfque la plante eft venue à fa maturité, on coupe toutes les feuilles , on les met en tas pour qu'elles fe fléîriffent , ayant foin de les tenir à l'abri du foleil & de la pluie ; enfuite on les broie Ibus la meule d'un moulin jufqu'à ce qu'elles foient réduites en pâte, puis on fait des piles de cette pâte au dehors du moulin : pn preffe biea PAS 683 !a pâte avec les pieds & les mains ; on la bat & on l'unit , de peur qu'elle ne s'évente : quinze jours après l'on ouvre les petits morceaux , on les broie de nouveau avec les mains ; de l'on mêle avec le dedans la croûte qui s'étoit formée defllis , puis on fait de cette pâte de petites pelotes. Cette opération s'appelle mettre en coque, c'eft-à-dire qu'on les met dans de petits moules de figure ovale ; on les fait fécher de nouveau ; ces coques deviennent fort dures , &c c'eft en cet état qu'on les vend aux Marchands fous les noms àepajiel, cocagne ^fiorée & vouëde. Quand on veut en faire ce que les Teinturiers appellent la cuve , il faut les mettre long-temps tremper dans de l'eau. Le paftel ainfi préparé fournit une excellente teinture bleue , très- folide , & dont on peut varier les nuances. Les anciens Bretons s'en fervoient pour fe colorer le corps. On emploie à préfent beaucoup plus d'indigo que de paftel pour la teinture bleue , parce que la première de ces drogues fournit beaucoup plus de couleur , & qu'elle eft plus facile à traiter que la féconde. On a grand foin de recueillir de bonne graine de paftel , pour refemer l'année d'après. Outre les premiers froids , les mauvaifes herbes , la fé- cherefTe qui caufent beaucoup de dommage aux champs de paftel, il arrive quelquefois que les fauterelles dévorent tout un champ dans une foirée ; quand ce cas arrive , il faut promptement couper toutes les feuilles, pour que les pieds en repoujGTent de nouvelles. On ne doit point mettre de paftel dans le même champ l'année d'après , mais on pourra y mettre du blé , l'année fuivante du millet , & la troi- fieme année du paftel , dans la fuppofition que la terre ait été bien fumée. On donne particulièrement le nom de vouëde au paftel petit & fauvage de Normandie. Foyei Vouëde. M. Marcgraff vient de faire mention d'un ver qu'on trouve dans le vouëde lorfque cette plante eft; pilée, & qu'elle tombe en putréfadion. Ce ver, dans fon premier état , a environ deux lignes de long ; il fe nourrit de la matière de la plante , & en prend la couleur qui eft bleue : dans l'état de nymphe il de- vient brun , & il fe métamorphofe en une mouche dont le corps eft: fort long. PASTEL D'ÉCARLATE. Foyei au mot Kermès. PASTEL ou FLORÉE D'INDE. Voye^ cï-deffus Pastel-Guesde, PASTENADE. Voye^^ Panais, PASTENAQUE ou TARERONDE , papnax aut pafiinaca marina ?. RRrr z 6S4 PAS poifTon de mer dont on diftlngue trois efpeces qui font de la claffe des poiiTons à nageoires cartilagineuCes : ce font des efpeces de raies. La première a une queue quireffemble, par fa couleur & fa rondeur, à îa racine nommée pafienade. Ses nageoires font étendues comme les aîles de la tourterelle. Ce poiflbn plat & cartilagineux a la peau liffe : il n'a qu'un aiguillon long , pointu , dentelé comme une fcie de côté & d'autre , & placé à la queue, qui ell: longue & flexible & va toujours en diminuant. Cet aiguillon ell venimeux , même après la mort de l'ani- mal. Ce poifibn a le bec pointu, les yeux au-deffus de la bouche ; ôi au-deflbus , des trous , au lieu de narines , & d'autres trous devant les ouies : fa bouche , quoique petite & fans dents , ne laifTe pas que d'être large en dedans. Ses mâchoires font dures & rudes : il nage à plat : il n'a qu'une petite nageoire à la queue ; il vit dans les lieux fangeux & peu éloignés des rivages , & fe nourrit de poiffons. La paftenaque a pour ennemi le chien de mer. Les Pêcheurs du Lan- guedoc mangent la chair qui eft autour de la queue de ce poiflbn , quoi- que d'une faveur peu agréable ; mais ils ont foin auparavant d'en ôter l'aiguillon. On prétend que cet aiguillon, réduit en cendre, appliqué fur la plaie avec du vinaigre , eft un remède à fon venin même. La féconde efpece de paflenaque eft celle que Ton nomme à Naples chavelaÇ^altavellc'), Elle a la tête &: toutes les auties parties plus petites que la précédente. Sa couleur efl la même : fa queue n'eft pas fi longue que la moitié de fon corps : elle eft auiîi armée d'un aiguillon & quel- quefois de deux , garnis de dents crochues : fa chair n'eil pas défa- gréable. La troifieme efpece que l'on nomme aufîi aigb poijfon , aqulla marina, pifcis , & qui porte en Languedoc le nom de glor'uufc > eft en tout fembîable à la première efpece par fa manière de viv're , par fon aiguillon qui efî: venimeux , &c. Elle a cependant la tête plus grande , le bec moins pointu , rond, court , fembîable à la tête d'un crapaud. Ses yeux font grands , ronds & élevés : fes nageoires font femblables aux aîles d'une chauve- fouris. Ce poiffon pique de fon aiguillon les poiflbns qui nagent autour de lui : fa chair eft molle , humide & de mauvais goût : on le pêche dans la Méditerranée; il eft très-commun à Naples. C'eft le rofpo des Génois. Redi a obfervé que la chair de ce poiftbn pajlenaquc devient îumi- neufe lorfqu'elle commence à fe corrompre, ainfi que les graiftes, les PAS PAT 685 chairs , les os huileux de l'hirondelle de mer , du dauphin , de la vipère marine , du brochet de mer. Il n'a jamais pu obferver le même phéno- mène fur la chair des vipères & des ferpens terreflres. PASTEQUE. Foyei Citrouille & U mot Melon d'eau. PASTILLES D'ALLEMAGNE ou DU LEVANT , eft le nom que l'on donne aux terres bolaires ou terres figillées. Voyc^ au mot Bol. PATACH efl: une efpece d'algue d'une figure fmguliere , laquelle croît abondamment aux environs des Châteaux des Dardanelles ôi fur les bords de la Mer Noire. Ses cendres entrent dans la compofition du favon. PATApONS. Nom donné à des peuples d'une très-grande taille , qui habitent des liles vers le Pôle Antardique. Ce font \ts géants de l'efpece humaine : au contraire les Lapons qui habitent l'extrémité fep- tentrionale de l'Europe , font des pygmées par la petiteffe de leur Urudure. Ainfi les Patagons & les Lapons paroilTent les termes extrêmes de la race des hommes. PATAGU ou PATAGAU. C'efl une efpece de came qui diffère beaucoup de \3. palourde : voyez ce mot. Elle efl moins grande, moins ronde , plus liiTe , chargée de taches jaunes , blanches & noires. Les bords de fa coquille font tapifîes de deux membranes épaiffes qui l'environnent. L'animal qui habite cette coquille n'a qu'une trompe qui eft de différentes couleurs &: d'environ quatre pouces de longueur. Cet organe prend toute forte de mouvemens , & fournit à tous (es befoins, fans qu'elle puifTe avancer ni reculer, mais feulement s'enfoncer dans la vafe comme la palourde. Quoique cette trompe ne paroifTe former qu'un tuyau, elle efl cependant partagée en deux par une efpece de cloifon, & chaque tuyau a fon trou particulier qui fe voit à l'extrémité de la trompe. Le fupérieur qui rejette l'eau à trois pieds de diflance , efl plus étroit que l'inférieur par où elle entre , & l'orifice des deux tuyaux efl garni de deux petits poils blancs. Ainfi cette trompe fert à l'animal d'ancre contre le mouvement tumultueux des flots , de bras pour prendre fa nourriture , de bouche & d'eflomac pour l'avaler & la digérer. PATAOUA. Palmier très-commun dans la grande Terre, plus fort que le marïpa , mais foutenanî moins ies feuilles. Le fruit en efl plus petit &: plus rond. On tire de ce fruit une huile qui n'a aucun mauvais 6B6 PAT goût , & qui eft bonne pour être mangée en falade : on la tire comme celle de Vaouara. Voyez au mot Palmier Aouara. Les Nègres marons fubfiftent en partie avec l'amande de ce palmier, qui eu affez agréable lorfqu'on Ta fait paffer au feu. PATAS eft le nom que les Nègres du Royaume de Galam dans le pays de Bambouc , donnent à une efpece de finges, d'un roux û ardent, qu'ils femblent être peints par l'art , en cette couleur : ils font gros & peu ingambes ou pefants,; mais leur génie eft malin , hardi, moqueur & querelleur. Le P. Labat dit qu'à l'approche d'un vaifleau fur la côte, ils defcendent du haut d'un arbre , tous à la file les uns des autres; £c que quand ils en ont examiné les hommes,* ils fe mettentàles huer, ou à leur faire des grimaces , accompagnées de gambades , de geftes & des poftures très-plaifantes : non contents de cette infulte , il leur jettent au vifage des morceaux de bois itc, ou des pierres qu'ils vont ramafler à terre , ou enfin leurs ordures , qu'ils font exprès dans leurs pattes : ils ne refufent pas même de fe battre en duel , c'eft-à-dire, contre autant de perfonnes qu'ils font de fmges. Il n'y a guère que les coups de fufils qui leur faffent fentir que la partie n'eft pas égale. C'eft ainfi qu'on les punit de leur témérité. PATATTE ou PAPAS : voye^ Battate. PATELLE , voyei LÉPAS. On donne le nom de paulllus ou de Icpaditcs aux lépas fofîiles. PATIENCE , lapathum. On donne ce nom à plufieurs efpeces de plantes , dont nous rapporterons les plus ufitées. Les fleurs des plantes de ce genre ont , dit M. Deleu^e , fix étamines & trois piftils ; un calice à trois feuilles & une corolle à trois pétales, qui s'agrandit & fert d'enveloppe à la graine qui eft une femence liffe, pointue & à trois coins. 1°. La Patience des jardins ou Parelle , patuntU aut lapathum hort&nfc , folio oblongo. Cette plante que l'on cultive dans les jardins, a une racine droite , longue , fibreufe , jaune en dedans : elle poufte une tige noueufe , haute de quatre pieds & demi ; fes feuilles font oblongues ; fes fleurs font placées le long des rameaux & par anneaux. Sa graine eft triangulaire ; elle eft aftringente & apéritive. z°. La Patience aquatique ou Parelle des marais, hydro- lapathum. Elle vient communément dans les lieux aquatiques, dans PAT 687 les marais & les foffés humides. Sa racine eu très-fîbreufe , noire en dehors , d'un jaune de buis en dedans , fort aftringente & amere. Ses fleurs & fes graines reflemblent à celles de la patience fauvage ordi- naire. Ses feuilles font femblables à celles de la rhubarbe des Moines;, elles font légèrement crépues à leur bord. Cette forte de patience eft , félon Mumingius , la véritable plants britannique- des Anciens : fon fuc eft fpécialement utSe pour les ulcères qui rongent la bouche & les amygdales. Sa racine , de même que celle des autres patiences , amollit, lâche le ventre & purifie le fang. L'ufage de cette racine eft en tifane ; on en fait des cures de printems pour les maladies d'obftrudions , celles de la peau , comme dartres , gale : elle convient dans la goutte & dans les maladies chroniques rebelles, même pour le fcorbut ; elle arrête toutes les efpeces de flux ; enfin elle eft très - utile pour les maux de gorge & le relâchement de la luette. M. Bourgeois a cependant obfervé qu'elle détruit & relâche les fibres de l'eftomac , lorfqu'on en fait un long ufage , & qu'il feroit utile d'y joindre quelque ftomachique , comme la racine d'aunée qui eft d'ailleurs très -bonne dans tous les cas oîi la racine de patience convient , & qui eft un très-bon ftomachique. 3°.La grande Patience DES Jardins, ou Rhubarbe des Moines; ou Rhapontic des montagnes, rhaharbarum Monachorum. On la cultive dans les jardins ; mais elle croît aufti dans les montagnes , notamment en Auvergne. Sa racine eft garnie de pîufieurs fibres : elle a intérieiirement la couleur & prefque les mêmes principes que la rhubarbe bâtarde , dont elle a aufll les vertus, principalement pour les diarrhées. Sa tige eft rougeâtre , cannelée , fort rameufe & haute. Ses feuilles , qui font portées fur de longues queues rougeâtres , font longues de plus d'un pied, pointues , fermes, peu dures , mais roides, & d'un vert foncé : fes bords font quelquefois repliés en deftiis. Ses graines font anguleufes , & reft"emblent à celles de l'ofeille. Cette plante eft de l'efpece du rheum ou rhubarbe , & a neuf étamines. 4°. La Patience rouge ou Sang de Drajcon , Uphatum fan- guineum , aut folio acuto ruhcnte. On la cultive dans les jardins pour fervir d'herbe potagère ; c'eft la hette fauvage de Galien. On la diftingue facilement de toutes les efpeces de patience , par ion fuc rouge , & par les nervures qui s'étendenr & s'entrelacent dans les feuilles , & qui font de coideur de fang,, de même que les queues des feuiliesâ ^88 PAT ce fuc teint les mains & le chamois , d'abord de couleur purpurine, qui dégénère bientôt en une couleur bleue. Quelques - uns mangent fes feuilles dans le potage : elles font laxatives & rafraîchifîanîes. Sa graine, qu'on appelle improprement ^/-^//ze de fang de dragon , eu. allringente &c anodine. Horace a célébré cette plante dans fes louanges de La vie rujlique. .^^ 5°. La Patiei^Be sauvage, lapatkum ^a/;///;z. On en diftingue de trois fortes; favoir , i°. celles dont les feuilles font arrondies. Sa racine eft plongée profondément en terre ; fes feuilles font larges d'une palme, &: deux fois plus longues, fmuées , comme crénelées, garnies de nervures , & d'un vert pâle.- Ses tiges font hautes de deux pieds & moëlîeufes. Ses fleurs font en épis , verticillées , & leurs graines font brunâtres & triangulaires : on trouve cette patience dans les environs de Paris , près de Montmorency. 2°. Celle qui ed frifée , ne diffère de la précédente que par fes feuilles qui font crépues , plus petites , mais plus alongées : fes fleurs font aulH plus nombreufes. 3°. La patience fauvage ordinaire. Ses feuilles font plus courtes que celles de la précédente ; fes tiges font quelquefois tortueufes ; les anneaux des fleurs plus écartés , plus petits ; (es graines moins grofles. On la cultive dans les jardins , & on la fubftitue fouvent à la patience fauvage frifée ; on s'en fert dans toutes les maladies qui viennent d'obflrudion. M. //^//cj; recommande l'emploi des racines de la patience fauvage pour teindre en jaune. 6°. La Patience violon, lapathumjinuatum. Sa racine efl: épaiffe; fes feuilles font nombreufes , longues de deux pouces , & moitié moins larges , échancrées vers le milieu , & obtufes aux deux bouts ; de forte qu'elles ont la figure d'une table de violon. Les Provençaux cultivent cette patience parmi leurs plantes potagères, & en mangent pendant l'hiver. M. Hallcr dit que les feuilles de cette plante devien- nent très-dures en été. L'ofeille , le bon henri , les épinards , plante dont nous avons parlé en leur lieu, font regardés auffi, par la plupart des Botaniftes, comme des efpeces de patiences. PATTE -DE -LION, Uontopodmm^ eft une plante qui croît fur le fommet des Alpes, & dont les feuilles font oblonges & cotonneufes ; fes tiges font limples , hautes de quatre pouces; fes fleurs font en rofe. Il fort de leur centre quatre à fix têtes noirâtres & écailleufes , qui renferment PAT P A V 6^9 renferment chacune plufieurs fleurons foutenus par des graines menues Se aigretées : cette plante efl defficative & aftringente. PATTE ÉTENDUE. F'ojer^ à l'article CHENILLE A BROSSES. PATTE - D'OIE, /7e5 anferinus, efl une efpece d'arroche fauvage à larges feuilles , chenopod'mm Jlramonli folio. Elle croît le long des vieilles murailles , fur les chemins & aux lieux incultes. Sa racine eft ligneufe & fibreufe ; elle pouffe une tige haute d-'un pied & demi; elle eft aiTez groffe, rameufe; {qs feuilles font finueufes, vertes-brunâtres, luifantes & d'une odeur forte : elles ont une reffemblance groiîiere avec la patte de l'oie. Ses fleurs naiffent en grappes ou épis ; elles font fuivies par de menues graines arrondies, & contenues dans une capfule comme étoilée , qui a fervi de calice à la fleur. On prétend que cette plante feroit un poifon, fi on la prenoit intérieurement , & qu'elle fait mourir les cochons qui en mangent. PATURAGE. Foyci Pacage & Prairie. PATURE DE CHAMEAU, ou JONC ODORANT. Foyci Sch(E- NANTE. PAU , efpece de léopard de Tartarie. Sa peau efl blanchâtre , tachetée de rouge & de noir. Il a la tête & les yeux femblables à ceux du tigre , mais il efl moins gros que cet animal & fon cri efl différent. PAVAME , efl un afTez bel arbre de l'Amérique. On l'appelle bois de cannelle , à caufe de fa bonne odeur. On prétend que c'efl le même que ÏQfaJfuf ras: voyez ce mot. PAVANE , pavana, efl le bois àw pignon cTInde : voyez ce mot à la fin de r article Ri Cl^. PAVATE, efl un arbrifTeau des Indes, haut de neuf pieds ou environ, peurameux, grifâtre, portant quelques feuilles femblables aux petites feuilles de l'oranger. Ses feuilles font fans queue , Se d'une belle cou- leur verte ; fa fleur efl fort petite , blanche , de l'odeur du chèvrefeuille : elle efl , félon M. Linneus, monopétale , en entonnoir, dont le pavillon efl découpé en quatre quartiers , & contient quatre étamines & un piflil. Le germe placé fous la fleur , devient une baie monofperme : fa femence efl grofle comme celle du lentifquie ,& noirâtre : fa racine efl blanche & un peu amere. Lémery dit que cet arbrifTeau croît le long des rivières appellées Mangate & Cranganor. Les Indiens fe fervent du bois & de la racine du pavate , principalement pour guérir les éryfipeles. On en mêle la poudre dans une décoûion de riz , on la laifTe aigrir , puis on en Tom.ir, SSff 6(^0 P A V fomente l'éryfipele. On enboitaufli pour guérir les fièvres ardentes, le flux de ventre & les inflammations du foie. PAVÉ, lïthoflratum aut pavimmtum ^ eft le nom vulgaire que l'on donne à la pierre fur laquelle on marche dans les rues. Le pavé varie pour la forme & la nature: à Paris c'eft un grès que l'on taille en cubes; â Lyon, ce font des cailloux roulés que l'on ramafle dans le Rhône , &c.. Enfin l'on pave les villes & les grands chemins félon l'efpece de pierre dure du pays. C'efl: ainfi que dans une partie de la France l'on ne fe fert que de granitc. A Shluyfen en Zélande,le pavé efl une efpece de faux èafalte, &c. à l'égard du pavé des Géants^ voyez Basalte. PAVERACCIA. L'Auteur du DiQionnaire des Animaux dit que ce snom fe donne aujourd'hui à Rimini , à Ravenne & à Ancône , à la première efpece de came, coquillage bivalve que lA. Adanfon nomme .clonijfe , d'après Selon & Rondelet^ & qui eft lepiveronne des Vénitiens ^ Varfelle desGénois jVarmiila des Efpagnols, & le boiikch des Sénégaloisi voyei ClONISSE. PAVIE. Efpece de pêche. Voyez ce mot. PAVILLON D'ORANGE. Coquille univalve du genre des buccins à louche èchancrk dépourvue de queue, fuivant M. de Vlfle^ & du genre des cornets , fuivant d'a,utres Naturalises. Ce teftacée rare eft rayé par zones alternatives de blanc & d'orangé ; fa tête eft affez élevée , fa -clavicule eft blanche & finit en bouton. PAVOIS ou BOUCLIER. Voye^ à Panicle OuRSiN. rPAVONITE. M. Guettard donne ce nom à des polypiers fofîiîes, 'dont le caraftere générique eft d'être compofé , depuis l'attache jufqu'à l'autre extrémité , de couches de plus en plus grandes , comme ondées ou fans ondulations. PAVOT, papaver. Genre de plante à fleur en rofe, & dont M. de Tournefort compte quarante-quatre efpeces : nous en décrirons feule- snentcinq, le blanc ^ le rouge, le noir, le Jaune, enfuite V épineux. Pavot blanc , papaver honenfe , femine albo,fativum , eft la plante qv.i donne Vopium. Sa racine eft de la grofTeur du petit doigt, empreinte comme le refte de la plante, d'un ftrc laiteux & amer. Elle pouffe une 'tige haute de trois à quatre pieds, rameufe , garnie de feuilles oblongues^ •larges, dentelées, crêpées, d'un vert de mer très-tendre. Ses fleurs qui maiffent en Juin aux fomraités , font en rofe , compofées le plus fouvent îjde quatre pétales blancs , placés en rond.: elles tombent promptement» P A V 6^1 Le caîîce efï compofé de deux feuilles ; il en fort une petite tête entourée ■ d'abord d'un grand nombre d'étamines , laquelle fe change enfuite en une coque ovoïde , qui n'a qu'une feule loge , couronnée d'un chapiteau étoile; elle eft verdâtre d'abord, puis elle blanchit à mefure qu'elle înûrit; elle eu de la groffeur d'une orange & garnie intérieurement de plufieurs lames minces , longitudinales , qui tiennent tout autour à (es parois. A ces lames eft attaché un grand nombre de très-petites graines arrondies, blanches, d'un goût doux , huileux &c farineux. Cette graine eu adoucîffance , peftorale , & peu ou point fomnifere. On tire par l'expreffion de cette femence une hurle qui eft propre à décraffer , à polir & à adoucir la peau. Toute la plante efl pleine d'un lait amer, dont l'odeur eft fort défagréable & mal- faine. M. de Tour/iefort, qui a voyagé dans le Levant, dit que.dans plufieurs provinces d'Afie, on feme les champs de pavots blancs, comme nous femons le froment. Auffi-tôt que les têtes paroiffent , on y fait une légère incifion & il en découle quelques gouttes de liqueur laiteufe , qu'on laifTe figer & que l'on recueille enfuite. Ce Naturalise rapporte aufîî que la plus grande quantité de Vopium fe tire par la contufion & l'expreffion de ces mêmes têtes. Belon Se Kempfer qui diftinguent trois fortes A^opium tirées feulement par l'incifion, difent que dans la Perfe on fait des plaies en fautoir à la fuperjfîcie des têtes qui font près d'être mûres. Le couteau qui fert à cette opération a cinq pointes , & d'un feul coup il fait cinq ouvertures longues, parallèles. Le lendemain on recueille avec des fpatules le fuc qui découle de ces petites plaies, & & on le renferme dans un petit vafe attaché à la ceinture ; enfuite on fait la même opération de l'autre côté des têtes. La larme qui découle la première s'appelle gobaar, c'eft la plus chère, elle pafTe pour la plus convenable à calmer le cerveau. Sa couleur efl d'abord d'un jaune pâle, enfuite rouffâtre. Après que l'onaainfi recueilli I'o/j/wz/z , on lui donne une préparation en l'humeftant avec un peu d'eau ou de miel. On remue long-temps ce mélange dans une afïiette de bois plate avec une forte fpatule jufqu'à ce qu'il ait acquis la confiflance de la poix; on manie enfuite cet opium , & Ton en fait de petites boules cylindriques que l'on met en vente dans le pays. Lorfque les Marchands n'en veulent que de petits morceaux, on le coupe avec des cifeaux. Les Perfes appellent cet opium thériaak malideh , ou afiuum , c'eft-à-dire , thériaquc opiée ; par-là ils la diftinguent de la thériaque d'Andromaque, qu'ils appellent ekcnaak SSff 2 6ç^i P A V faruuck. Ces peuples regardent V opium comme un remède quî procure îâ tranquillité, la joie & la férénitéi éloge dont honoroit autrefois l'ants- dote d'Andromaque. Cette manière de préparer Vopîum efl le travail perpétuel des reven- deurs mercenaires qui font dans les carrefours. Mais ce n'eft pas là la feule manière de préparer le fuc de pavot : fouvent on le charge d'une fi grande quantité de miel pour tempérer fon amertume , qu'on l'em- pêche de fe fécher , & c'efl ce que Ion appelle fpécialement bœhrs. L'opé- ration la plus remarquable fur Vopium , eft celle qui fe fait en mêlant exadement avec ce fuc, de la mufcade, du cardamome , du fafran , de la cannelle & du macis , réduits en poudre fine : c'eft ce que l'on appelle polonia OU ph'donium de Perfe. Outre ces préparations , dont on ne fait ufage qu'en pilules , les Perfes font une liqueur à'opium fort célèbre fous le nom de coconar ^ & dont ils boivent en abondance par inter- valles; mais nous ne voyons guère ces fortes ôi opium. Vopium ou meconium des boutiques, eft une fubiiance rcfino-gom- meufe , compare , dure , d'un roux noirâtre , d'une odeur narcotique défagréable , d'un goiit amer , acre , formée en gâteaux arrondis , applatis , gros comme le poing , & enveloppés dans des feuilles de pavots. On nous envoie ce fuc concret de la Natolie, de l'Egypte & des Indes. Les Médecins ont toujours fort célébré Vopium de Thcbes , que l'on recueillolt en Egypte près de Thebes ; mais au refle , de quelque endroit que vienne Xopium , pourvu qu'il foit de bonne qua.- lité , l'origine en eft affez indifférente. Il eft formé en partie par le fix qui découle naturellement de l'incifion faite aux têtes des pavots blancs, & en partie de celui que l'on tire par exprelTiOn ou par décodion , tant des têtes que des feuilles de pavots : on n'en trouve aucune autre efpece chez les Turcs & à Conftantinople , excepté celui qui découle à l'aide d'une fmiple incifion. Les peuples en font une grande confoni- mation , parce qu'il leur caufe une agréable ivreiîé. Vopium tiré par la feule expreffion du pavot blanc , s'épaifîit en un extrait réfineux qu'on appelle aufîi gomme cxtraclivc. On en fait des préparations avec diffé- rentes drogues que l'on y mêle pour fortifier & récréer les efprits ; c'eft pourquoi on en trouve différentes defcriptions, La principale & la plus célèbre , efl celle dont on ell: redevable à Has-jun-Bcji ( ce nom , félon M. HalUr, paroît être celui de la dignité d'un premier Médecin), puifque l'on dit qu'elle excite une joie furprenante dans i'efprit de celui P A V .-^93 qiii en avale , & qu'elle charme le cerveau par des idées & des plaifirs enchantés. Seroit-ce dans cette efpérance que quelques perfonnes mangent à leur deffert les têtes de pavot les plus tendres & confites dans du vinaigre? Sylvius DcUbo'é , Médecin, diioit qu'il ne voudroit pas exercer fon art fi on lui ôtoit Vopium; on Tappelloit Docior opiatus, le Dofteur de Vopium. Sydenham n'y avoit pas moins de confiance. Tout le monde ne donne pas tant d'éloges à Vopium, Combien de perfonnes ont éprouvé , en avalant quelques grains de ce fuc concret , qu'il appefantit la tête , excite un fommeil lourd &; forcé , afFoiblit la vue & l'organe de l'ouie , & caufe une longue léthargie qui fe termine par la mort ! Le paffage en eft fi peu fenfible , que Xow paroît toujours dormir très-tranquillement. C'efl donc un fomnifere dangereux , dont on ne doit fe fervir qu'avec prudence. Cependant lorfqu'un Médecin éclairé connoît bien la nature & les effets que produit Vopmm dans les maladies , pourquoi ne s'en ferviroit-il pas dans des cas particidiers , où ce fuc peut faire le triomphe de fon art? Il etl par exemple difficile , dit M. Hdlkr ^ de guérir les d3Afîenteries fans opium. Mais examinons plus particuUérement l'effet de cette fubftance employée tant à l'exté- rieur qu'à l'intérieur. Uopium appliqué extérieurement amollit , réfout & procure la fuppuration. Appliqué très-long-temps fur la peau , il en fait tomber les poils : lorfqu'on en met fur le périnée , il réveille les féns& excite quelquefois à l'amour ; d'autres fois il éteint cette paffion en engour- diffant le fentimentdans l'organe de la génération. Quand on le met en trop grande dofe fur les futures de la tête pour appaifer les douleurs , il relâche les nerfs , il caufe la flupeur & la paralyfie , & quelquefois la mort. Uoplum produit des effets admirables , fur-tout aux perfonnes qui font habituées à en faire ufage. Un grain pris intérieurement en fubilance félon l'âge & la force , agir bientôt : il excite dans les entrailles unç certaine fenfation agréable ; diffipe , ainfi que le vin , l'inquiétude & la triffeffe , calme les maladies , foulage le corps accablé de lafîîtude , il donne de la vigueur à l'efprit des gens en fanté. Auffi les Turcs en prennent-ils hardiment une grande àoie ( un gros) pour fe préparer au combat; ils prétendent qu'il leur donne du courage, de la confiance, de l'audice ; enfin il leur infpire le mépris des dangers. Vojyium a plus d'effet dans les temps chauds ôc humides 6c dans \e& 6c,4 P A V corps mollaffes , comme dans les femmes & les enfans ; il excite les fueurs, augmente le lait des nourrices, caufe le gonflement des ma- melles , le priapifme , les fonges amoureux accompagnés de pollution , il endort nos déplaifirs dans une douce ivrefle. C'eft ainfi qu'agit le plus communément ce fuc narcotique , étant pris à dofe convenable & dans des circonftances néceflaires ; car fi l'on en prend trop , fur-tout après de grandes hémorrhagies , il rend d'abord de bonne humeur , enfuite il fait bégayer , donne le hoquet & excite graduellement l'anxiété , I-e vomiffement , les fyncopes , l'aliénation de l'efprit , les vertiges , le ris fardonique , la ftupidité , la rougeur au vifage , le gonflement des lèvres, la difficulté derefpirer, la fureur , les fueurs froides, la défaillance, enfin un profond fommeil, & fouvent la mort. Ceux que ces accidens ne font pas périr , font délivrés le plus fouvent par un abondant flux de ventre , ou par des fueurs copieufes qui ont l'odeur de Vopium , qui font accompagnées d'une grande démangeaifon de la peau. La moindre chofe qui arrive à ceux qui font un ufage trop continué &: en dofes trop fortes de Vopium, c'efl la fainéantife , l'engourdiiTement du corps , une forte d'ivrefTe habituelle ,' des dégoûts, ditférentes affeûions de nerfs , & une vieillefTe prématurée. Au relie les tempéramens varient fuivant les climats. C'efl ainfl que les Turcs éprouvent tous les fâcheux fymptômes dont nous venons de parler , lorfqu'après un long ufage de Vopium pris en forte dofe , ils s'en abfliennent tout d'un coup. On croit que Vopium agit beaucoup fur le fang , parce que l'on a obfervé que le fang des Turcs & des Indiens qui font tués dans les combats après en avoir pris , efl aufîi fluide wu ou deux jours après leur mort , que s'ils ne venoient que de mourir. Les remèdes qu'on fait à ceux qui ont trop pris âiopium & qui ont encore des forces , confiftent dans la faignée & les émétiques , enfuite il faut donner des fucs acides , afin de réprimer la trop grande fluidité du fang : on inje£le des lavemens acres , & l'on foufHe dans les narines de forts fternutatoires , afin de procurer une forte fecouffe fur toutes les membranes nerveufes. Les fels volatils , les véficatoires font encore très-utiles. On trouve dans les pharmacopées différentes préparations à^opium , dans lefquelles il efl ou purifié ou afîbcié avec plufieurs autres médi- camens qu'on a cru propres à corriger fes mauvaifes qualités. Mais M. Tralles , Dofteur de Breflau, qui a examiné la façon dont ce fuc F A V 695 agît <îans les mélanges , & le mécanifme par lequel 11 produit les effets qu'on lui remarque dans le corps humain , eil porté à conclure que la caufe des effets de Vopium ne confifte que dans le principe volatil qui y -«ft contenu. C'eft ainfi qu'il attribue fon effet immédiat fur les nerfs , à la raréfaftion qu'il caufe dans le fang : & lorfque le cas exige de 'Vopium , il faut le prendre pur & fans corredif. On affure qu'il produit des effets merveilleux après les grandes veilles , dans les vomiffemens énormes ou les déjeftions confidérables , & dans les douleurs vives &: longues. Quand les propriétés de Vopium ne feroient que paffageres & palliatives , elles feroient toujours un grand bien au malade : c'eft au Médecin favant & prudent à diftinguer les cas oii il convient d'ad- miniftrer le médicament. D'après cet expofé, l'on doit fentir le danger qu'il y a auffi d'avaler des infufions ou déco£lions de têtes de pavot iblanc en trop grande dofe , même de celui qu'on cultive dans nos climats , quoiqu'il n'ait pas une vertu auffi fomnifere que celui des pays- plus chauds : le nôtre n'efl en effet ni aufii narcotique , ni aufîi amer : & M. Bourgeois eftime qu'il a fix fois moins de force. Mais ce qu'il y a de fmgulier, c'eftque la graine de cette efpece de pavot , qui feule eil l'origine entière de toute la plante , n'eil pas fomnifere , fur-tout dans ce pays : à la vérité , il y a des nourrices qui en mêlent quelque-- fois dans la bouillie de leurs enfans pour les endormir , mais elles ne leur procurent par ce moyen qu'une fubftance huileufe , nourriffante , qui en calmant leurs douleurs , les laiffe dans leur état naturel de l'enfance , c'eft-à-dire dans le befoin de dormir. On faifoit autrefois du pain de la graine de pavot blanc & noir. MathioU écrit que ceux qui habitent dans la vallée du Trentin, dans la Styrie & la haute Autriche 5. fe nourriffent de gâteaux faits avec les graines de pavots blanc & noir , & avec de la farine. Il dit encore que nonobllant qu'ils ufent de l'huile que l'on exprime de ces graines , cependant ils n'en dorment pas plus- long-temps. C'efl un ufage très commun en Pologne , que de manger à- toute heure de ces mêmes graines. Les Romains avoient le même' goiit pour ce mets , comme il le paroît par les vers de Virgile. Les oliviers étant morts par le froid de 1709, on s'eft fervi ici d'huile tirée de deux fortes de pavots au lieu d'huile d'olives , fans qu'il en folt réfulté rien de funeffe : de plus, Tourne fom remarqué qu'à. Gènes les Dames les plus nobles & les filles mangeoient beaucoup de graines de pavot ;C0uvertes de fucre, & qu'elles n'en étoient pas moin» 6^6 P A V éveillées pour cela. En Perfe , dit Chardin , les Boulangers en fement la graine fur le pain , parce qu'ils croient qu'elle provoque au fommeil qu'on prétend être falutaire en ce pays après le repas. L'huile de pavot eft connue dans le Commerce fous le nom impropre à^huïLc. £œïlkt ; on s'en fert pour décrafîer , polir & adoucir la peau : les Peintres en confomment une grande quantité. Cette huile eft afTez douce lorfqu'elle efl: récente , pour qu'on puiffe la faire paffer pour de l'huile d'olives commune. Pour éviter les tromperies qu'on pourroit faire à ce fujet, le Miniilere avoit ci-devant ordonné que les Commis des barrières de Paris verferoient une pinte d'effence de térébenthine dans chaque tonneau d'huile d'oeillet, ou plutôt de pavot, qui entre dans cette ville. On fait beaucoup de cette huile à Strasbourg & en Flandres , dont on ufe dans les alimens : les pains qui reftent après i'exprefîion de cette huile , fervent à nourrir les roiTignols qu'on élevé en cage. Enfin , M. l'Abbé Rofîcr a démontré dans fon Traïd fur la, culture de la navette , &c. que l'huile de pavot pure n'étoit ni fomnifere, ni dangereufe ; l'entrée & la vente en font permifes aujourd'hui. Pavot cornu , Glaucium a fleur jaune , papaver cornutum, luteum. Cette plante dont on diflinge plufieurs efpeces , croît aux lieux maritimes & fablonneux ; on en trouve au bois de Boulogne près de Paris , devant le château de Madrid. Cette plante eft plus commune en Angleterre & en Suifte qu'en France. Sa racine eft grofl'e comme le doigt , longue , noirâtre , empreinte , commue toute la plante, d'un fuc Jaune , de mauvaife odeur & d'un goût amer ; elle poufle des feuilles longues, larges, charnues, velues, découpées profondément, den- telées à leurs bords , comme crêpées , de couleur vert de mer ; ces feuilles fe couchent fur terre pendant l'hiver , & réfiftent au froid : fa tige ne s'élève que la féconde année ; elle eft forte , dure , noueufe & rameufe , pouflant de fes nœuds des feuilles plus petites que celles d'en-bas & moins découpées ; fes fleurs font grandes comme celles du pavot cultivé , compofées chacune de quatre feuilles , difpofées en rofes & de couleur jaune , contenant plufieurs étamines & foutenues par un calice à deux feuilles. A ces fleurs fuccedent des efpeces de filiques longues de deux pouces , grêles , rudes au toucher & courbées , contenant des femences noires , à doubles rangs , & rondes comme celles du pavot blanc. Si on feme cette graine dans les jardins en automne, çlle vient au printems & fleurit en Juin 6c Juillet , fes goufTes mùriflent P A V 697 en Août. Toute la plante eft empreinte d'un fuc jaune , Se teint en jaune ; elle efl. en môme temps de mauvaife odeur , d'un goût amer. En Portugal on fait boire à ceux qui font fujets à la pierre un verre de vin blanc , dans lequel on a fait infufer des feuilles de cette plante, G aridel rapporte qu'en Provence les Payfans fe fervent de (qs feuilles pilées pour dcîerger les ulcères qui fuccedent aux contufions & aux écorchures des bêtes de charge, notamment les enflures & engorgemens des jambes de chevaux-, qui proviennent de foulures , quelque grofl'es & dures qu'elles foient ; le fdc de cette plante les g^jérit infaillible- ment, pourvu que le malnefoit pas trop invétéré. Cet Auteur dit qu'ila connu des perfonnes qui fe font bien trouvées d'en avoir appliqué de la même manière fur des jambes ulcérées. Nous croyons qu'il eu très- fage de ne point ufer intérieurement de cette plante , qui a paru fatale plus d'une fois en Angleterre. Co/ifulte^ Tranfacîlons Philofopkiquesn^. 242, hes deux autres efpeces de pavots cornus ont , l'un la fleur rouge ÔC l'autre violette. Pavot noir cultivé ou des Jardins , papaver honcnfc femine nlgro. Cette efpece diffère du pavot blanc en ce que fa fleur efl rouge, tantôt fimple , tantôt double & de différentes couleurs ; en ce que fa tête ou coque efl: plus arrondie , & en ce que fes femences font noi- râtres : cette plante étant verte , efl ainfi que fa fleur , empreinte d'un fuc huileux , d'une odeur fétide : fa fleur orne beaucoup les jardins ôc les parterres, par fes agréables variétés : on la cultive aufli pour l'u- fage de la Médecine. Les fentimens font afl^ez partagés fur les propriétés de cette efpece de pavot noir , cependant bien des Pharmaciens l'em- ploient avec le même fuccès que le blanc : c'eft précifément de fa graine que l'on tire plus communément VhuiU d^xilUt , dont nous avons parlé ; on s'en fert pour les lampes , pour les fritures , en un mot c'eft l'huile d'olive du petit peuple dans les Provinces. Pavotrouge des champs, ouPavotsauvage, ou Coquelicot, papaver rhœns aut crraticum majus. Sa racine , qui efl moins grofle que celle des autres efpeces de pavots , efl fibreufe & amere au goût : elle poufl^s plufieurs tiges à la hauteur d'un pied ôc demi ; fes tiges font rondes , fermes , hériffées de poils & ramcufes , fes feuilles font dé- coupées çà & là , comme celles de la chicorée , velues , & d'un vert brun ; fes fleurs font compofées de quatre feuilles larges , minces, d'un rouge couleur de feu très-éclatant ; elles foot fipeu adhérentes qu'elles Tom Tome, IV. CCccc 754 P E R y> qui s'étendirent tout le long de la Côte , & y firent un dégât » affreux , fans qu'on ait pu découvrir d'où venoient ces oifeaux en fi » grand nombre ». Les perroquets ont beaucoup d'adreffe à conftruire leur nid ; ils ra- maffent quantité de joncs & de petits rameaux d'arbres, dont ils forment un tiffu qu'ils ont l'art d'attacher à l'extrémité des plus foibles branches des arbres les plus élevés ; de forte qu'y étant fufpendus ils font agréa- blement balancés par l'animal : ce jeu eft une des voluptés de cet oifeau, même lorfqu'il eft détenu en cage. La forme de ce nid efl celle d'un ballon , & il eft de la longueur d'un pied : ils n'y laifTent qu'un feul trou pour leur fervir de paflage : peut-être que ces oifeaux , dans les mains de la nature , choififfent ces branches foibles pour fe garantir des ferpens , à qui leur pefanteur ne permet pas de les attaquer dans cette retraite. Souvent auffi ils choififfent des trous dans les arbres pour faire leurs nids ;&pour peu qu'un trou de branche rompue foit com- mencé , ils l'ont bien-tôt agrandi avec leur bec : puis ils s'arrachent quelques plumes qu'ils mettent au fond. Le mâle & la femelle couvent tour à tour les deux œufs que la femelle pond : ces œufs font blancs y. à-peu-près de la groffeur de ceux d'un pigeon , quelquefois tiquetés comme ceux de la perdrix. Les perroquets font rarement des petits dans nos climats : on n'en- cite même que trois exemples ; i*'. chez la veuve de M. Auger , Gou- verneur de S. Domingue , en 1707 ; 2°. chez un Chanoine d'Angers en 1740 ; mais on ne put les élever , vraifemblablement faute de nour- riture convenable à cette efpece de jeunes oifeaux : 3°. un chez M, Mefnard , Contrôleur-Général des Fermes du Roi, à Villeneuve-lès- Avignon: ce Propriétaire mit enfemble , en 1773 , deux perroquets, l'un mâle, l'autre femelle, & il en provint deux œufs qui furent couvés,» mais fans fuccès : M. Mefnard ne fe rebuta point ; au printems fuivant , il a réuni ces deux mêmes oifeaux , & deux œufs ont encore été le fruit de leur union. L'un n'a pas réuffi par le défaut de germe ; l'autre après vingt-cinq jours d'incubation , a donné le 1 1 Juin un petit perroquet vivant qui promettoit beaucoup. M. Anderfon ( Hijloirc Naturelle de Groenland , page 56. ) dit qu'il y a un oifeau dans cette contrée que les Marins nomment perroquet à caufe delà forme de fon bec; voy^z Perroquet d& mer. Le perroquet d'Allemagne eil le ^eai. Voyez ce mot. P E R 75J PERROQUET D'EAU ou Monocule, ou Mo^socle ^monoculus, Infefte aquatique nommé perroquet à caufe de fon bec réfléchi en deflbus : on en diftingue plufieurs efpeces. Nous avons parlé au mot BINOCLE, de ces vers infeûes, qui donnent une couleur apparente de fang à l'eau , ce qui fait croire quelquefois au peuple que l'eau eft changée en fang. M. Linneus a fait mention d'une efpece de monocule , qui fe trouve auffi dans les rivières & dans les marais , & qui a une coquille bivalve un peu plus greffe qu'une femence de chou, oblongue , égale de chaque côté , boffue par devant , un peu émouffée : elle ne s'ouvre que dans l'eau ; car quand elle en eft fortie , elle reffemble à une femence de plante : cette efpece de perroquet d'eau nage avec vîteffe , comme les autres efpeces ; fa coquille eft cendrée : quand elle s'ouvre , l'infefte fait fortir par une de {ts extrémités beaucoup de petits filets égaux en longueur, & blancs : en remuant ces filets , il efV porté fur l'eau , & il ne s'arrête point que fa coquille n'ait trouvé quelque chofe de folide. PERROQUET DE MER, labrus pfutaco rofiratus. En Amérique on donne ce nom à certains poiffons qui reffemblent affez à nos carpes, leur dénomination efl prife dans la configuration de leurs véritables dents , qui imitent affez bien par leur forme celle du bec d'un perroquet. La peau & les écailles de ce poiffon font d'un vert foncé fur le dos , mais qui s'éclaircit à mefure qu'il approche du ventre. Lahat dit qu'il a deux empanures furie dos & quatre à fes côtés , qui aufîi bien que fa queue font colorés de bleu , de jaune & de rouge , d'une beauté inimitable : cette belle peau couvre une chair excellente ; elle efl blanche , graffe , ferme , d'un bon fuc , & facile à digérer. Il fe trouve auffi de ces poiffons à rifle de France. Voyc^^ à la fin du mot Vieille, Le poiffon perroquet de Tlfie de Tabago eff auflî couvert d'écaillés d'un beau vert jaune brillant : il a la tête faite effedivement comme un perroquet : fa chair eff d'un goût admirable ; fa taille égale celle d'un maquereau. PERROQUET DE MER. Voye^ Macareux. PERROQUET PLONGEUR. Oifeau qui ne reffemble en rien au perroquet , excepté par la forme de fon bec qui a trois pouces de long : fes pieds font palmés & rouges , fes jambes font courtes ; fon plumage e(l noir fur le dos & blanc au ventre. Cet oifeau plonge fouvent & long-temps : fa chair eft délicate. CCccc i 75^ P E R PERRUCHE. Nom qu'on donne à la plus petite efpece du genre des perroquets à longue queue ; c'eft un genre d'oifeau extrêmement diverfifîé. On le nomme zuûi perroquet moineau ; en général , leur cri eft perçant & fort incommode. J^qyei à V article Perroquet. PERSICAIRE , perjicaria. Plante dont M. de Tournefort diftingué dix -neuf efpeces : nous parlerons ici des deux qui font d'ufage en Médecine. 1°. La PerSICAIRE douce, tachée & ORDI'S aire, per^cariamitis & maculofa. Cette plante n'efl point acre au goût comme la fuivante, mais elle a une faveur un peu acide ; elle croît par-tout aux lieux aquatiques : fa racine eil grêle , oblique , fibrée , ligneufe & feche : elle pouffe des tiges à la hauteur d'un pied , rondes , creufes , rou- geâtres , rameufes & nouées ; chaque nœud accompagné d'une gaîne membraneufe blanchâtre , bordée de cils , portant des feuilles fembla- bles à celles du pêcher ou du faule , marquées quelquefois au milieu d'une tache plombée : fes fleurs fortent dans l'été en épi des aiffelles des feuilles d'en haut, attachées à de longs pédicules; chacune de ces fleurs eft monopétale, de couleur ordinairement purpurine & luifante, quelquefois blanchâtre, divifée profondément en cinqfegmens ovales, & contenant cinq , fix ou fept étamines & deux piflils : à ces fleurs fuccedent des femences ovales , applaties , pointues & noirâtres. M, de. Tournefort a remarqué que cette plante étant mâchée & goûtée laiffe de l'aflridion , & qu'elle rougit un peu le papier bleu : elle eft effimée vulnéraire & aflringente : la.décoftion en efl bonne pour le cours de ventre , pour la dyffenterie , fur-tout lorfqu'on foupçonne quelque ulcère dans les inteffins , & pour les maladies de la peau ; ainfi l'on en fait boire utilement la tifane à ceux qui ont la gale ou d'autres érup- tions cutanées. On lit dans les Mèm. de tAcad. des Scienc. ann. lyo^ , pag. J04 , que le même M. de Tourne/on affure que cette efpece de perlicaire eft un des plus grands vulnéraires qu'il connoiffe , & que fa décodion dans du vin arrête la gangrené d'une manière furprenante ; ce que ne fait pas la perficaire acre. Le même Auteur a donné dans les Mémoires cités la defcription de la perficaire du Levant , qu'il nomme perjicaria Orientalis , nicotiance folio , calice fiorum.purpureo ; c'eft la plus grande & la plus belle efpece de perlicaire. 2°. La Persicaire acre ou brûlante, ou Piment d'eau, ou Poivre d'eau , ou Curage , perjicaria urcns , feu hydropiper. Elle FER 7 & portant à leurs fommités , avant que les autres feuilles paroiffent, des fleurs difpofées en bouquets à fleurons purpurins , & femblables , dit M. de Tournefon ^ à de petits godets découpés en quatre ou c nq parues. Ces fleurs fe flétriffent en peu de temps , & tombent avec leur tige ; elles font fuivies par des femences , garnies chacune d'une aigrette ; après que la tige efî tombée , il s'élève des feuilles fort g'-andes , arrondies , un peu dentelées en leurs bords , vertes-brunes en deffojs , attachées par le milieu à une groffe queue longue de plus d'un pied : ces feuilles ont la figure d'un chapeau renverfé , ou d'un grand champignon porté fur fa queue. Il y a des endroits où ces feuilles croiffent à la hauteur d'un homme ; enforte que paffant au travers, il femble qu'on fe promené entre des arbres: elles durent jufqu'à l'hiver, après lequel il en repouffe de nouvelles. Cette plante eft le tuj[Jîlago fcapo imbricato thyrjlfero ^fiof" culls omnibus hcrmaphroditls , de Linmus. 2°. Le petit Petasîte , pztafitzs mlnor. Cette efpece de petafite eflà fleur blanche , plus petite que la précédente : elle fleurit également au printems , & avant l'apparition des feuilles : on la trouve plus rare- ment que le ^rand pctafîu : elle naît fur les montagnes humides & ombragées. La principale différence entre cçs deux plantes confifle en ce que le grand petafite a tous fes fleurons hermaphrodites, & que le petit petafite a les (iens femelles mêlés avec les hermaphrodites. On fe fert en Médecine de leurs racines, & rarement deleurs feuilles : elles font hyftériques, apéritives, vulnéraires & antlvermineufes. Les Allemands appellent cette racine antipeJliUntidle , à caufe de fes vertus : DDddd z 7^4 PET on l'emploie extérieurement pour réfoudre les bubons , & pour mx)nr difîer les ulcères , même pour la teigne ôc les ulcères malins. PETEUSE, royei Bouvier. PETIT CEDRE. Foyei au mot Cèdre. PETIT CYPRÈS. Foyei AuRONE. PETlT-GRIS, animal qui reffemble beaucoup à récurêuîl : on le trouve dans les parties Septentrionales de l'un & de l'autre Continent ;. fa peau ell très-eftimée & d'un grand ufage pour les fourrures ; mais on doit le regarder comme une efpece diftinfte & différente de celle de Pécurenil. -Le petit-gris efl plus grand que l'écureuil : il n'a point le poil roux ^ mais d'un gris plus ou moins foncé ; fes oreilles font dénuées de ces longs poils , qui furmontent l'extrémité de celles des écureuils ; il a la queue étendue en panache. Ces animaux différent des écureuils , comme on le voit , non-feulement par la grandeur & par la couleur , înais aufîi par les habitudes naturelles. On en trouve en grand nombre dans les forêts du Nord & de Sibérie; ils fe réuniffent en troupes, voyagent de compagnie , &c changent quelquefois de contrée. H arrive * &c fur-tout en France , qui partage avec lui les prérogatives dont » nous venons de faire mention : la feule différence que nous y trou- » vons, c'efl que notre petun-fé de France fait plus de feu, frappé » avec l'acier; & pour trancher le mot, ce petun-fé efl \e fcld fpath » des Auteurs , c'eft-à-dire un quarti^ vitreux ou lamelleux. On en » trouve en quantité dans les roches de granité en Allemagne , & » particulièrement au Hertrey, près d'Alençon , lieu oii il fe trouve » aufîi une efpece de kaolin , qui en Chine efl la féconde matière de » leur porcelaine. On trouve auffi dans les Vofges une pierre verdâtre » qui participe beaucoup des propriétés du petun-fé de la Chine. » Voy6{^ Kaolin ». Depuis cette édition , nous avons appris qu'indépendamment de PET 77Î refpece de kaolin à terre calcaire , dont nous avons parlé d'après les échantillons que nous confervons dans notre cabinet , & que nous avions rencontré fur le terrain , ou reçu du P. àHIncarville , Miffionnaire à la Chine , il exiftoit auiïï un kaolin , dont toute la partie terreufe ne faifoit aucunement efFervefcence avec les acides , & nous avouons que nous en devons la defcription à M. Giuttard. Voyez fon Mémoire fur la découverte des terres à porcelaine , lu à l'Académie des Sciences , ann. 1765. Lorfque nous écrivions l'article kaolin de la féconde édition de cet Ouvrage , nous ne pouvions encore , ni ne devions rien ajouter, foit à nos connoiffances acquifes , foit à celles qu'on avoit rendues publiques ; l'illuilre Académicien que nous venons de citer en récla- mant rhonneur de la découverte faite en France d'un kaolin femblable à celui de la Chine , n'a eu probablement enfes mains que des kaolins dont la terre paroît femblable aux argiles blanches ; car il paroît douter que nous ayons rencontré , ou vu , ou analyfé des koalins à terre calcaire. Nous ofons cependant afTurer à tout le monde chimique , que nos yeux font accoutumés à l'expérience , & notre plume à la vérité. ... Au refle , nous aimons mieux croire que M. Guatard n'ayant vu qu'une même efpece déterre à kaolin (celle qui effedivement efl la plus abondante ) , il n'a pas pu en admettre d'autre. . . . Que n'avons- nous pu deviner les intentions ou les motifs de ce favant Naturahfte î Voyei^ le Supplément de iow Mémoire cité ci-defllis ; voyci;^ aufîi les Obfervations faites à ce fujet, & fur le petun-fé par M. Torcha de Saint- Victor , Ingénieur des mines de France. Journal de. Médecine , Février & Juin lyGG. Le Lefteur trouvera réunies de fuite toutes les difcuffions faites à ce fujet dans le premier Volume des Mémoires fur différentes parties des Sciences & Ans ^ par M. Guettard. PETZCOALT, efl un ferpent du Mexique , long de quatre pieds & demi , gros à proportion : il a le defîus du corps jaune, mêlé d'un peu de rouge , couvert de grandes écailles taillées en lofange, unies , & ghiTantes au toucher : les écailles tranfverfales du ventre font mélangées de roux & de jaune ; fa tête eft garnie d'amples & fortes écailles relevées en bofle : {^^ yeux font beaux & très-grands. Cette efpece de ferpent repaire dans des creux d'arbres , d'où il épie fa proie , & fond rapidement deffus quand elle fe préfente. Il n'efl pas rare , dit Séha^ de voir deux ou trois de ces ferpens être aux aguets & vifer au même butin. 77^ PEU PEUCEDANE. P^oye^ Queue de pourceau. PEUPLADE. Terme dont on fe fert pour parler du frai, de l'alvin , & de tous les petits poifîbns que l'on met dans un étang pour l'em- poifTonner. On appelle auiîi peuplade , une colonie d'étrangers qui viennent chercher des habitations dans une contrée. Peuple fe dit en- core di^s jetons ou talles qui viennent aux pieds des arbres Se des plantes bulbeufes. PEUPLIER , populus. Le peuplier efl un grand arbre , dont il y a trois efpeces principales ; favoir , le peuplier blanc , le peuplier noir , &: le peuplier tremble , défigné ordinairement fous le feul nom de tremble. Il y a des peupliers qui ne portent que des fleurs mâles ; ceux qui portent des fleurs femelles donnent du fruit. Chaque fleur mâle efl: à huit étamines attachées à une efpece de corolle en entonnoir fort évafé , taillé obliquement , & foutenue par une écaille frangée. Les fleurs femelles font difpofées en chatons écailleux, difFérens de ceux des fleurs mâles , en ce qu'au lieu des étamines , on y trouve , le long du filet , des piflils auxquels fuccedent des capfules à deux loges , dans lefquelles on voit des femences aigreltées. Les feuilles de la plupart des peupliers font rondes ou rhomboïdales, & attachées à de longs pédicules : elles font pofées alternativement fur les branches. Le peuplier blanc à grandes feuilles , ou grifaille de Hollande , ou franc-picard à grandes feuilles , & le peuplier blanc à petites feuilles ^ ont les feuilles velues & extrêmement blanches par defTous, d'un vert brun par deflus. Ces efpeces de peupliers croiflent avec une extrême viva- cité dans les lieux aquatiques : ils viennent cependant bien dans les terrains afTez fecs. Nous en avons planté entre de gros ormes , dit M. Duhamel^ pour remplir des places vides, & ils y ont bien réufll , ce qui n'efl: pas un médiocre avantage. On donne aufTi le nom ôJypreau ou de blanc de Hollande ^ à un orme à larges feuilles. Le premier nous eft venu de la ville d'Ypres. Les Pariflens donnent le nom A\tubel ou à' orme blanc , au peuplier blanc. Les peupliers noirs ne peuvent faire de grands arbres que dans les terrains humides : ils fe plaifent finguliérement fur les berges des fofl^és remplis PEU 777 remplis d'eau : leurs feuilles font rhomboïdales , pointues , dentelées & liiles. Il y a une efpece de peuplier noir , qui n'eft qu'une variété de Tefpece précédente , dont les feuilles font dentelées plus profondément & ondées fur les bords : on cultive cette efpece dans les vignes pour l'employer en place d'ofier : c'efl pour cette raifon , & affez mal-à- propos , qu'on l'appelle oficr blanc. On l'étête fort bas , & on coupe tous les ans fes rejets. Il y a une autre efpece de peuplier noir, dont les feuilles reffemblent allez à celles du précédent , & qui vient de Lombardie : cette variété donne des arbres qui forment de belles pyramides ; & ces arbres réuffiffent parfiûtement dans les lieux maré- cageux. 11 y a encore une autre efpece de peuplier noir , que l'on nomme aufîî tacamahaca : fes boutons répandent un baume très-odorant ; ce qui lui a fait auiîi donner le nom de baumier. Cette efpece d'arbre aime l'humidité ; mais il demande auiîi une expofition chaude , ôc il craint les trop grands hivers : cependant , placé dans un jardin bas , M. Duhamel lui a vu paffer l'hiver de 1754, qui a fait périr beaucoup d'autres arbres. On le multiplie par marcottes & par boutures. Les peupliers noirs ont leurs boutons , qui font les œilletons ou germes des feuilles, chargés d'un baume dont l'odeur eft affez agréa- ble ( on les nomme yeux de peuple , oculi aut gemmez popull nigrœ^ • c'efl pourquoi on fait entrer ces boutons dans quelques baumes com- pofés Se dans Vongnent populeum ; maïs il n'y en a point qui en répan- dent autant, & d'une aufîi agréable odeur, que celui de l'efpece à feuilles ovales , furnommé baumier. Cette efpece de peuplier , par rapport au baume qu'il répand , efl affurément préférable à tous les autres pour l'ufage de la Médecine. On tire de ces boutons de peuplier noir une teinture avec de l'efprit de vin , qui efl: propre à arrêter les anciens cours de ventre : on en fait aufîi ufage pour les ulcères internes. La dofe ordinaire efl un demi-gros , foir Se matin , dans une cuillerée de bouillon chaud. Les feuilles de peuplier noir font eflimées propres à calmer les douleurs de la goutte & des hémorrhoïdes , étant pilées & appliquées fur la partie malade. On peut tirer des boutons à fleur des peupliers une efpece de cire ; en voici le procédé. Il faut cueillir ces boutons à l'inflant de leur maturité , c'efl-à-dire , lorfqu'ils font l?ien vifqueux ; on les écrafe dans un mortier & on les fait tremper 4ans de l'eau bouillante, oa verfe le tout dans un fac de groffe toile , Tomc à^Jrgenville. Nous avons vu des pholades compofées de fix pièces fort inégales entr'elles & plus ou moins fines , dont les deux plus grandes, qui font latérales, répondent auxbattans des bivalves , & fur-tout de certaines tellines ; les autres, qui font beaucoup plus petites , fe trouvent fixées par des ligamens , partie fur le fommet & fur le repli extérieur de chaque battant, partie le long des battans mêmes , foit en deffus , foit en deffous ; il faut obferver que ces dernières pièces font fi fragiles & fi minces , qu'il efl: rare de les trouver jointes aux deux principales , qui d'ailleurs ne ferment jamais exaftement. Voilà les pholades à fix pièces owfextivalves: on les trouve fur les parages de prefque toutes les mers. Les deux grandes valves font fmueufes & évafées , bombées vers l'une des extré- mités , à larges replis fur les fommets , à bords dentelés ; la robe efl \\n réfeau granuleux , dans un tiers de fa longueur & près la tête : il y en a qui ne font réticulées que dans la partie antérieure , le refle de la robe efl flrié. Il y a certaines efpeces de pholades qui ne fe logent que dans les bois qui fe trouvent dans la mer, leur forme efl prefque conique, leur robe efl prefque réticulée ; elles ne font ordinairement compofées que de cinq pièces , ou quimivalves. Ces pholades ne font pas li communes. Les dails-moules , dacfyli Plinii ( ce font probablement les dattes de mer ) , ont la propriété de luire dans les ténèbres , & la lumière qu'ils répandent efl d'autant plus brillante , que le coquillage renferme plus P H O 795 plus de liqueur : cette lumière , dit Pline , Hljlolre Naturelle , Lib. IX y Chap. LXl y paroît jufques dans la bouche de ceux qui mangent des dails pendant la nuit ; elle paroît fur leurs mains , fur leurs habits & fur la terre , dès que la hqueur de ce coquillage fe répand , n'y en eût-il qu'une goutte ; ce qui prouve que cette liqueur a la même pro- priété que le corps de l'animal. Ces faits ont été vérifiés, il y a quelques années, fur les vraies pholades des côtes du Poitou , & fe font trouvés vrais dans tous les détails. On ne connoît fur cette côte aucun autre coquillage , ni même aucun poilTon , ni aucune forte de chair d'animaux qui aient cette propriété avant d'être pourris. Les dails , au contraire , ne paroiffent jamais plus phofphoriques que lorfqu'ils font plus frais , & même ils ne jettent plus aucune lumière lorfqu'ils font corrompus à un certain point. L'animal , dépouillé de la coquille , eft lumineux tant à l'intérieur qu'à l'extérieur ; car fi on le coupe , il fort de la lu- mière du dedans comme du dehors : ces coquillages en fe defféchant , cefient d'être lumineux. Si on les humefte , il reparoît une nouvelle lumière , mais foible ; de m.ême celle que jette la liqueur qui fort de ce coquillage s'éteint peu-à-peu à mefure que cette liqueur s'évapore. Cependant on peut la faire reparoître par le moyen de l'eau : par exemple , lorfqu'on a vu cette lumière s'éteindre fur un corps étranger qui avoit été mouillé de la liqueur du coquillage , on fait reparoître la même lumière en trempant ce corps dans l'eau. Mémoires de C Académie RoyaU des Sciences , année i.y^.^ . PHOLADITE , eft la coquille précédente devenue foiTile. Il n'y a pas long-temps qu'on a découvert ces fortes de coquillages foiUles. PHOLIDOTE. Efpece de lézard écaïlleux. Voyez ce mot. PHOSPHORE ou PORTE - LUMIERE. Nom que l'on donne aux corps qui paroifTent lumineux dans l'obfcurité. Il y a des phofphores naturels & d'artificiels : les premiers font les vers lumineux des huîtres , les dails ^ le bois-pourri^ \e poiffon puant , X^syeux du chat, le ver-luifant^ le porte-lanterne d'Amérique , la mer lumineufc , les éclairs dans les nuages orageux y \qs prétendues étoiles qui filent ou qui tombent ; fou vent la chair, le fang , les cheveux, les écailles , les cornes , la farine , & une infinité d'autres matières provenues des plantes & des animaux , mais particuliè- rement les urines , font propres à devenir noftiluques. C'efl ainfi qu'au moyen de l'art , on produit auflî des phofphores; il fufHt de chauffer ou de frotter vivement les diamans , les cailloux , les quartz , les bois durs Tome IF. HHhhh 794 P H R & réfineux, îe fucre , de calciner la pierre de Bologne^ de verfer de refprît de nitre fur de la craie , de cuire de l'alun avec du miel , d'évaporer l'urine , &c. Les phofphores produits par ces dernières opérations , s'appellent /lyro/'/zor^^ , & font d'autant plus fuiguliers , qu'on peut en allumer de l'amadou, brûler du papier, écrire des lettres de feu ; cette écriture lumineufe peut être utile pour établir une correfpondance fe- crete & myftérieufe pendant la nuit : en effet on peut s'en fervir fur mer pour s'expliquer tacitement d'un vaiffeau à l'autre durant l'obfcurité , ou pour faire connoître de la même manière les befoins d'une Place affiégée , à ceux avec lefquels on feroit convenu de la fignification de certains carafteres, M. Dufay dit (Mémoires de l'Académie , 1730) que la pierre à plâtre , les marbres , & toutes les pierres calcaires , même les bois calcinés, produifent auffi de la lumière dans l'obfcurité : mais entre les pierres phofphoriques,la pierre de Bologne & quelques fpaths fluors tiennent le premier rang. L'on trouve encore près de Stockholm & de Plombières une efpece de terre qui , frottée dans un endroit obfcur , donne de la lumière ; il n'y a perfonne qui ait encore fait fur cette terre les recherches nécefiaires pour favoir à quelle eipece on doit la rapporter. Combien de fubftances produiront aufîi des émanations lumineufes , fi avant de les porter dans un lieu obfcur on les a expofées quelque temps aux rayons du foleil pour s'imbiber de fa lumière! Com- bien d'autres dans lefquelles l'élément du feu qu'elles contiennent de- viendroit apparent, il on leur faifoit fubir une forte de décompofition ou de putréfa£lion , ou qu'on les fournît à quelque changement! PHRYGANE ou YKlGPi^E, phrygama. Nom générique que l'on donne, d'après M. Linneus, à plufieurs efpeces de mouches aquatiques, parmi lefquelles on a rangé l'hémerobe & la charrée : voye^ Charrée, L'hémerobe forme un genre à part : voye^ Hémerobe. La phrygane & la charrée paroiffent être le même infefte , ou au plus deux variétés de la même efpece. M. Geoffroy {Hijl. des Infect, des cnvir, de Paris^ dit que la phrygane eft un infeâe à antennes filiformes , & très-longues; qui a des aîles bigarrées & pofées latéralement en forme de toit aigu, Se relevées à l'extrémité ; la bouche efl formée par une petite trompe accompagnée de quatre barbillons , &c fa tête de trois petits yeux liffes ; la queue eu iîmple & nue. Divers Naturalises nomment ces infed^es mouches p api lio- nacées» IlsrefTemblent un peu aux perles pour la forme & la manière de P H R 795 fe faire des fourreaux dans l'état de larves. Rien d'aufîl barroque que la figure de ces fourreaux: on diroit d'un trophée de petites coquilles & de plantes ; rien encore d'auffi finguller que de voir la larve de la phry- gane fe promener dans l'eau avec le fourreau, dont la plupart des ma- tières qui' le compofent font légères. Cet étui, dans lequel l'infefte rentre loutes les fois qu'on l'en retire , ne femble formé que pour cacher fon habliant qui , fans cela , deviendroit la proie d'un nombre infini d'infedes aquatiques voraces & même des poifî'ons, qui en au- roienî bientôt détruit l'efpece, fi la nature dans l'état de foibleffe oii elle a laiffé cette larve , ne lui avoit donné en partage la rufe & l'indu- Urie pour éviter les continuelles pourfuites de fes vigilans ennemis : en effet, autant fa retraite eu. foible & d'une forme bizarre , autant elle ed propre à donner le change aux ennemis qui pafTent à chaque inftant fur le corps de l'animal , fans avoir le moindre foupçon de toucher de û près la proie qu'ils cherchent avec tant d'avidité. Le goût , le beicin Sc l'adreffe de notre petit architede aquatique , décident de la variété de la conflrudion de fa maifon , qui n'eft pas la même pour tous ceux de la même efpece ; les uns s'enveloppent d'une fimple feuille verte de jonc, ou de quelqu'autre herbe fraîche qu'ils enduifent en dedans d'une matière impénétrable à l'eau ; les autres font un amas de différens brins de joncs de feuilles feches , de petites coquilles plus ou moins entières , qu'ils lient enfemble fans ordre ; tout eu bien calfaté en dedans : chaque larve pratique deux ifTues dans fa loge ; l'une pour fe procurer la nour- riture , &L l'autre pour s'en décharger , fans être obligée de fortir de fa îTîalfon , qu'elle ne quitte plus quand elle en a une fois pris pofîeflion; elle la tranfporte par-tout avec elle dans fes différens voyages de fantai- ant la jaunifle , les pâles couleurs , & levant les obftrudions des vifceres ; enfin elle convient fmguliérement pour l'hy- dropifie & pour la mélancolie hypocondriaque : la dofe en eft depuis un demi-gros jufqu'à un gros. Cette racine ei\ très-utile , dit M. Bourgeois ^ dans l'afthme pituiteux , en fondant les matières glaireufes amaftees dans les glandes bronchiales. C'eft encore un excellent remède pour les efto- macs foibles & remplis de glaires attachées à leurs parois : elle fait la bafe de l'excellente poudre ftomachique de Birchnanj dont on fait un PIE 815 ufage très-fréquent dans la pratique. Tragus affure que la pulpe de la racine à^arum fraîche eft un excellent antidote pour les poifons & la perte. Il y a des Dames qui préparent des eaux diftillées des racines de pied-de-veau pour fe farder , pour faire difparoître les rides du vifage & réparer les torts de la vieilleffe. On en fait aufli une fécule qui eft propre aux mêmes ufages ; car on dit qu'elle rend la peau brillante : nous en avons vu fur la toilette de plufieurs Dames. Dans le Poitou , les femmes de la campagne font une maffe des tiges & des racines de ^ette plante fleurie , qu'elles coupent menue , & qu'elles macèrent pendant trois femaines dans l'eau qu'elles renouvellent tous les jours : elles pilent cette maffe & la font fécher ; enfuite elles s'en fervent au lieu de favon pour nétoyer leur linge. /. Ray prétend que ce fecret n'efl pas inconnu dans quelques endroits de l'Angleterre. L'Arum montant d'Amérique à grandes feuilles percées , arum hcderaceum , amplis foliis pcrforatis , s'attache au tronc des arbres de la même manière que nos lierres: c'efl le bois de couleuvre des Antilles, L'Arum d'Amérique à feuilles de flèche , arum Americanum , arboref- cens ^ fagittarix foliis , porte un fruit qui pique la langue, tandis que fa racine efl douceâtre & d'un affez bon goût ; c'eft Varum cfculentum , fagittaricz foliis viridi-nigricantibus de Sloam. PIED-DE- VENT. Phénomène dont on trouve la defcription dans VHiJioirc de V Académie des Sciences ^ année ly^i , & qu'on doit ranger dans la claffe de ceux que les nuées repréfentent par leur différente fituation. La difpofition de ce météore eff l'arrangement naturel que lui donne le vent , & qui , fuivant les règles de l'Optique , nous paroît affeder fenfiblement telle & telle figure. PIERRES , lapides. Les pierres font compofées de fubfîances terreufes ou fablonneufes , endurcies au point de ne plus s'amollir dans l'eau. Selon que les parties qui les compofent font plus ou moins atténuées & homogènes , elles font plus ou moins étroitement liées les unes aux autres. Les pierres doivent donc leur origine à l'afïluence , aux dépôts & aux couches fucceffives & externes des particules intégrantes de la terre ou du fable : il entre auffi quelquefois dans leur compofition d'au- tres particules hétérogènes ; le véhicule de ces différentes parties qui concourent enfemble à former les pierres, efl un liquide ; les principes moteurs font l'air & le feu : la caufe de leur liaifon eff la preffion des autres corps & la cohéfion ôc lattradion des parties fimilaires, qui 8i4 PIE croifTent en raifon du contai: & des furfaces. Toutes les pierres fe forment par juxta-pofition. Parmi les pierres, les unes font tendres comme le talc, ou poreufes comme la ponce ; d'autres font dures , & ne peuvent être travaillées qu'avec l'acier & l'émeril , comme l'agate & le jafpe , ou même avec la poudre de diamant , comme les plus belles pierres précieufes. Toutes les pierres varient beaucoup pour la figure , le tiffu, la gran- deur de leur mafle , les couleurs ôc les propriétés. Les unes font opa- ques, irrégulieres ou informes & communes; les autres font tranfpa- renîes, configurées & précieufes; les unes font fimples , d'autres com- pofëes. En général, elles ne différent des terres que par la dureté & la liaifon des parties , toutes circonftances qui font l'effet du temps & da hafard. Les pierres fe divifent félon leur effence en cinq ordres princi- paux, que l'on détermine facilement parles expériences fuivanîes , &C qui donnent toujours une divifion méthodique plus confiante que celle qui eft établie d'après le coup-d'œil extérieur. Le premier renferme les pierres arglleufes , petrœ argiUofa: ; elles ne font point d'effervefcence avec les acides, mais elles durciffent au feu ordinaire : voje:^ Argile. Le deuxième comprend les pierres calcaires , lapides calcarel; elles fe diffolvent avec effervefcence dans les acides , perdent leur liaifon dans le feu , & s'y réduife^it en chaux : voyc^ Pierre a chaux. Le troifieme contient les pierres gypfeufes ou à plâtre , lapides gypfei; elles ne fe diffolvent point dans les acides , mais elles forment du plâtre par l'adion du feu: voye:;^ le mot Gypse. Le quatrième comprend les pierres ignefcentes ou fcintlllantes, la- pides igncfcentes aut fcintillantes ; elles ne font point attaquées par les acides & n'éprouvent que peu ou point d'altération au feu : mais frap- pées contre l'acier, elles produifent des étincelles: roj^^ Caillou , Agate, Jaspe, Quartz, Cristal, &c. Le cinquième renferme les pierres fufibles par elles-mêmes au degré du feu où les précédentes ont réfiflé ; elles ne font point de feu avec le briquet ; elles font ordinairement très - pefantes : l^oye^ Spath fusible. Dans notre Minéralogie nous avons donné à ce genre de pierres le nom de pierres médiaflines. Ce font des pierres vitreufes , lapides vitrefcentes. Confultez maintenant l'article Terre vitrifiable. Il y a aufîi l'ordre des Pierres de roches agrégées. PIE 815 PIERRE ACIDE , ox'ipetra^ eftlamine d'alun pierreufe : voyei Alun 6* Pyrite d'Alun. PIERRE D'tELAND. Efpece de marbre fort dur d'un rouge mat, rempli de coquilles & fur-tout d'orthocératites, lequel fe trouve dans rifle d'iEland dans la mer Baltique, vis-à-vis de la ville de Calmar, cil il y en a des couches immenfes , & dont on fait des tables , des chambranles de cheminées , &;c. PIERRE D'AIGLES. Foye^ Etites. PIERRE A AIGUISER , appellée naxienne :\oy, Pierre a rasoir. PIERRE A AIGUISER DE TURQUIE. ;^c?x5(/e//;o^GR Aïs deTur^ QUIE à VarticU GraIS. PIERRE D'AIMANT. Foyei Aimant. PIERRE D'ALCHERON. On donne ce nom à la pierre qui fe trouve dans la veffie du fiel des bœufs. Voye\^ Us mots BÉzoARD & Bœuf. PIERRE ALECTORIENNE ou PIERRE DE COQ, i^emma alecioria, Efpece de pierre qui fe forme dans l'eftomac & dans le foie des coqs, & même des chapons: celles qui fe trouvent dans le foie font les plus groffes. Celles de l'eflomac font la plupart affez femblables aux fe- mences de lupin pour la figure, & à une fève pour la grandeur; leur couleur efl d'un gris obfcur : il s'en trouve qui font cannelées & rou- geâtres. PIERRE D'ALTORF. Nom que l'on donne aujourd'hui à une efpece de marbre coquiller, nouvellement découvert aux environ d'Altorf. Ce marbre contient beaucoup de cornes d'Ammon, qui font quelque- fois métallifées, & une quantité de bélemnites & d'imprelTions de diffé- rens coquillages On vient d'établir, près de Nuremberg , une fabrique cil l'on travaille cette efpece de marbre dont on fait des tables d'une grande beauté par la mofaïque charmante qu'y font appercevoir les coquilles foffiles , &c. PIERRE DES AMAZONES. Voyei à ParticU Jade. PIERRE DES AMPHIBIES. Dans cet ordre d'animaux le ferpent cobra, la tortue, le caftor, le cayman, &c. fourniffent des efpeces de biipards ou calculs. Voyez ces mots. PIERRE DES ANIMAUX. On donne ce nom au bézoard ou calcul, ainfi qu'à toutes les efpeces de pierres qui fe trouvent ou dans les reins ou dans la veffie, &c. deplufieurs animaux: r(rK./e /;7or Bézoard. Il n'eft pas rare de rencontrer encore une pierre fous la langue de l'homme. Voyez ^i6 PIE dans les Mémoires de l^ académie Royale de Chirurgie, tome III ^pace 4G0 ,' une Differtation de M. Louis ^ &c. PIERRE DE L'APOCALYPSE. Foye^ Opale. PIERRE APIRE. C'eil: celle qui a la propriété de réfifter à la plus grande aftion du feu des fourneaux fans en recevoir d'altération fen- fible, c'eft-à-dire, qui ne doit éprouver, de la part du feu , ni fufion , ni aucun autre changement , tel eil le quartz pur , le criftal de roche : &c. Voyei^ ces mots. - On nomme pierre réfraciaire celle qui a également la propriété de réûfter à la violence du feu fans fe fondre , quoiqu'elle éprouve d'ail- leurs des altérations confidérables : telles font , plus ou moins , les pierres calcaires , les amiantes , les mica , les talcs , les pierres ollaires , &c. Il fuit de là, comme le dit très-bien l'Auteur du didionnaire de Chimie, que toute fubflance réfradaire n'efl: point apyre. Au refte toutes les pierres ne font réfradaires , ou même apyres, que relativement au degré du feu qu'on leur fait fubir. PIERRE ARBORISÉE. Voyei à V article Agate & Dendrite. PIERRE ARGILEUSE. Voye^au mot Pierres & â l'article Argile. PIERRE D'ARITHMÉTIQUE. Pierre ainfi nommé parce qu'on y voit un ou plufieurs chiffres fort bien repréfentés par la Nature. On appelle pierre de U alphabet celle qui repréfente une ou plufieurs lettres de l'alphabet. PIERRE D'ARMÉNIE ou Arménienne ou Mélochite , lapis Armenus. On l'appelle quelquefois pierre d'azur femelle ou a^iir Occi- dental. Voyez Azur au mot Lapis lazulî. Cette pierre efl grave- ieufe , opaque , bien moins dure que celle du lapis, recevant un poli terne , d'un bleu verdâtre ou obfcur , privé des parties pyriteufes ou aurifères qui fe trouvent quelquefois dans le lapis oriental. Comme certains carafteres extérieurs rapprochent quelquefois la pierre Armé- nienne du vrai lapis , il ne doit pas paroître étonnant que quelques Marchands Juifs & Turcs les vendent fouvent l'une pour l'autre aux perfonnes qui n'ont pas une grande connoiffance de ces fortes de pierres ( ici la friponnerie eft en rivalité avec l'ignorance ). Cependant la vraie pierre Arménienne diffère effentiellement du lapis , en ce qu'elle fe calcine au feu, qu'elle s'y vitrifie facilement, & que fa couleur s'y détruit. La poudre bleue qu'on en retire eftaufîi bien inférieure en beauté & en durée à celle de l'outre-mer ; mais elle eft , en revanche , de toutes les PIE 817 les pierres colorées en bleu, celle dont on retire le plus aîx)ndammeftt du cuivre de la meilleure efpece. C'efl: communément avec cette pierre qu'on fait le bleu de montagne fadice des boutiques. On s'en fert aufli en peinture & en teinture; on la vend fouvent fous le nom de cendre verte, fur-tout quand elle efl en poudre & préparée par cette même préparation de la pierre Arménienne , qui efl: décrite dans notre Miné- ralogie : on en tire d'abord le p^tit outremer ou la poudre d'azur com- mun , puis la cendre verte , enfuite le vert de terre , &z enfin le vert d'eau ; toutes drogues dont les Marchands de couleurs font un grand débit. La pierre d'Arménie , qui ne fe trouvoit autrefois qu'en Arménie , fe rencontre aujourd'hui dans les pays de Naples, du Tirol, de Bohême, de Wirtemberg : on en trouve aufîi en Auvergne. Llmery dit que cette pierre en poudre efl un purgatif bon pour les maniaques ; mais on ne peut trop redouter de femblables remèdes, à moins que ce ne foit pour l'extérieur. PIERRE D'ARQUEBUSADE,eflla pyrite de foufre. Voyelle mot Pyrites. PIERRE ASSIENE ou D'ASSO , lapis ajjlus aut farcophagus. C'efl une pierre peu pefante, friable, veinée, couverte d'une poudre fari- neufe , jaunâtre & légère , falée & un peu piquante : cette pierre fe trouve fouvent en Italie. Llmery dit que les Anciens s'en fervoient pour conflruire leurs fépulcres, afin que les parties charnues des morts fufTent promptement confumées par cette pierre, avant qu'elles eufîént le temps de fe corrompre. La fleur ( l'efîlorefcence ) de cette pierre nétoientles vieux ulcères & les cicatrices. Cette pierre a tiré fonnom d'une ancienne Ville nommée autrefois Afius^ où Ton s'en fervoit pour les tombeaux des morts qu'on y apportoit. Toutes les efpeces de pierre afîienne ou de farcophage , que nous avons vues , étoient de la mine d'alun en efïlorefcence. PIERRE ATRAMENTAIRE. On donne ce nomàdiverfes pierres vitrioliques. Voye'{^ aiimot Vitriol. PIERRE D'AVANTURINE. Foye^ Avanturine. PIERRE D'AZUR, l^oyei Lapis lazuli, 6- le mot Azur. PIERRE DE BASALTE. Dans l'envoi des minéraux que Guftave ITI, Roi de Suéde, a fait à S. A. S. Monfeigneur le Prince de Condé, nous avons examiné avec foin les fubflances qui y font défignées fous le nom de bafalte , ôc il y en a une belle fuite très-variée par la figure 3 la Tome IK LLIU 8i8 PIE couleur, la dureté , le brillant & les gangues tant pierreufes que mé- talliques. Nous avons reconnu que ce nom eil: appliqué tantôt au fpath fufible , tantôt au fckorl criftallifé en aiguilles prifmatiques , tt femblable à celui qui fe trouve dans le criflal de Madagafcar , tantôt à l'asbeile coloré , à la ^éolitc en rayons concentriques ; ceux-ci font tendres , & on les défigne fous le nom de bafalu fpatïqm. Il y en a qui ressemblent à la roche de corne en canons, au trapp, au horn-bUndc , à la faufTe galène noirâtre , au feld-fpath en feuillets parallélogrames & de couleur hépatique, au wolfram ou ftrié ou en écailles ; ceux-ci font durs. Ces pierres ont pour matrice ou gangue , tantôt le quartz , le ipath calcaire, la pyrite cuivreufe , l'asbeile, le mica, la fléaîite , la pierre ollaire ; elles font prefque toujours accompagnées de fer , quel- quefois de grenats impurs , & fe trouvent dans les minières de fer , quelquefois dans celles de cuivre , rarement dans celles d'argent. En général ces bafaltes envoyés de Suéde , tiennent de la nature du fchirl : voyez ce mot. Ils ne reflemblent aucunement aux bafalles de Blaud & Saint-Sandoux en Auvergne. PIERRE DE BŒUF. Foyci Pierre d'Alcheron & Bézoard. PIERRE DES BESTIAUX , /'«/i/A^i. On en trouve quelquefois dans l'eftomac des vaches & des bœufs ; & on a lieu de croire que ces animaux les ont avalées. Il ne faut pas confondre ces fortes de pierres avec celles qui font fouvent dans les reins & dans la véficule du fiel de ces animaux , ni avec les égagropiles dont nous avons parlé. PIERRE DE BOLOGNE , lapis Bononunfis, C'efl une pierre de la grofleur d'un œuf de poule , défigure irréguliere , grisâtre, pefante, d'un œil vitreux , qui fe trouve près de Bologne en Italie , au pied du Mont Paterno : c'efl: après les grandes pluies qu'on en découvre» Cette pierre ne fait aucune effervefcence avec les acides ; mais lorfqu'elle a été calcinée , elle acquiert la propriété phofphorique , & répand alors une légère odeur fétide Si urineufe. Dans cet état , fi on l'expofe au foleil ou au grand jour , & même à la clarté du feu , elle s'im.bibe de la lumière ; & portée à l'inflant dans l'obfcurité , elle paroît kimi- neufe comme un charbon ardent , mais fans chaleur fenfible. Cette lueur s'évanouit à la fin , mais on la rend à la pierre en la mettant de nouveau dans un lieu éclairé. Les pierres de Bologne les plus lui- fantes font celles qui font le moins remplies de taches , & couvertes à leur furface d'une croûte blanche , mince ^ opaque. Quand on F I E 819 calcine ces pierres , on les enduit, après les avoir imbibées d'eau-de- vie, d'une poudre très -fine ôc bien tamifée , provenant d'une de ces pierres de Bologne , qu'on a pulvérifée ; on met enfuite la pierre à calciner au feu de réverbère ; on conferve ces phofphores dans de la laine ou du coton , en les préfervant foigneufement des impreffions de l'air. Lorfqu'elles ont perdu entièrement leur propriété phofphori- que , on la leur rend , en les faifant calciner de nouveau. M. Wallerius range cette pierre célèbre parmi les gypfes ; mais nous la rapportons avec Wolurjdorf -àw genre des pierres ou fpaths-fufibles. Henckil attribue le phénomène phofphorique de cette pierre à l'acide du fel marin, qui y efl contenu ; & M, Pott à une matière fulfureufe îrès-fubtile : mais on fait que perfonne n'a mieux traité cette matière que M. Marcgraff , dans les Mémoires de, t Académie Royale des Sciences de Berlin année ty^Ç) , &c. confultez aufîi l'Ouvrage de M. Mamelius , divifé en quatorze Chapitres, fur la comparaifon de la pierre de Bologne, dans les Ephém. des Cur. de la Nat, Tom. IV ^ App, pag. i6S, Voyez maintenant Spath fusible. PIERRE DE BOMBACO ou de MOMBAZA. Les Portugais donnent ce nom au bézoard du cheval fauvage des Indes. PIERRE A BOUTON. En Allemagne on donne ce nom à une efpece d'ardoife , fouvent pyrite ufe , qui fe vitrifie au feu , & qui devient par-là fufceptible de la taille & du polim.ent. On donne aufTi le nom de pierre à bouton à une efpece de porpites. PIERRE BR ANCHUE. Nom donné à des corps pierreux qui fe trou- vent en terre , & dont les uns ne font que des madrépores foffiles ou pétrifiés , les autres ne font que des corps accidentellement configurés qui fe trouvent dans les creux fillonnés & horizontaux des couches de terre. L'eau en perçant & s'infiltrant en ferpentant dans la terre , forme peu à peu des canaux tortueux; elle fe charge de particules friables, foit de terre , foit de pierre , coule ainfi fous l'état de guhr terreux , fe ramaffe dans ces cavités branchues, s'y évapore enfuite, & la matière terreufe s'y moule à mefure qu'elle fe condenfe & fe folidifie. Ces pierres branchues configurées font de différentes natures & de diverfes formes ; fouvent elles font enclavées les unes dans les autres ; celles qui font effervefcence aux acides font crétacées , communément de couleur ou grife ou bleuâtre & de forme baroque : extérieurement çiles ont luie écorce plus ou moios épaiffe , & plus ou moins dure ÔÇ LLUl a 820 PIE raboteufe , quelquefois friable. On peut ranger ces pierres branchues, dont on trouve une grande quantité à Riom , dans l'ordre des dépôts; voyei Canklc Stalactites. On peut confulter les Obfervations fur ce genre de pierres configurées dans le cinquième volume àj^^ Savans étrangers , pag. 54. PIERRE BRÛLÉE. En Auvergne , dans le Bourbonnois & à An- dernack fur le Bas- Rhin , on donne ce nom à une efpece de lave grife dont on fait des meules de moulin ; elle fert aufli à bâtir. La pierre de Vol vie eft une pUrn brûlée. PIERRE CALAMINAIRE ou CALAMINE, lapis calaminaris , eft une terre dure & de différentes couleurs , chargée principalement de zinc dans l'état d'ochre (^ochra linci). MM. Pott & Marcgrajff' , de l'Académie Royale de PrufTe , ont été les premiers qui ont fait con- noître que la calamine , ainfi que la bknde , font des mines de ce demi- métal ; voye:^ ce mot & V article ZiNC. La pierre calaminaire qui efl une ochre chargée de zinc, paroît avoir été formée par la décompofition du vitriol blanc. PIERRE CALCAIRE , lapis calcareus aut calcis. On donne ce nom à toutes les efpeces de pierres , qui font prefqu'entiérement folubles par les acides, & qui en font attaquées avec effervefcence. Ces fortes de pierres qui paroiffent tirer évidemment leur origine des corps orga- nifés & durs, appartenans au règne animal, comme os, coquilles, madrépores , &c. voye^ au mot Fossiles , fe calcinent au feu & s'y réduifent en chaux. Il y en a d'opaques , non criftallifées , rarement brillantes, fmon dans leurs fraftures ; telles font les pierres à chaux, qui fe trouvent en quantité dans prefque tous les lieux où il y a des coquilles foffiles grouppées & à demi-dénaturées. La véritable pierre à chaux , celle dont on fe fert pour le ciment , eft ou dure & com- pare , d'un grain fin ou raboteufe , ou brillante , écailleufe & tendre , d'une couleur peu agréable , quoique variée de blanc, de jaune , de gris & de rouge ; fe divifant en morceaux irréguliers ; voye^ notre Minéralogie pour les variétés de cette pierre calcaire , avec la manière de la calciner & de la fufer. On prétend que l'excellence de la chaux des Anciens Ro- mains , ne confiftoit que dans l'emploi de cette chaux, long-temps éteinte par de l'eau très-pure , avant qu'on en fît ufage ; mais aufli un tel ciment ne convient pas tant pour les édifices que l'on conftruit dans l'eau : il y a même des cas oii il ne faut éteindre la chaux qu'à l'inflant où i'oi^ PIE Si, ÏÏoît l'employer. Il feroît cependant à defirer que quelqu'un fît le com- merce de chaux éteinte depuis trois années au moins. Dans plufieurs contrées des Indes, on fait de la chaux avec des coquilles ou des madrépores. L'on en fait de même dans tous les autres endroits où l'on eft à portée d'en faire de grands amas , comme dans le reflbrt de l'Amirauté de Breft. Pendant le temps des chaleurs , lorfque la pêche des huîtres ceffe partout ailleurs , on ne laiffe pas de la continuer dans ce Canton , non pour l'animal qui ne vaut plus rien , mais pour les écailles dont on fait une chaux , qu'on emploie à blanchir le fil & les toiles qui s'embarquent à Landernau pour le commerce d'Efpagne. Cette chaux peut être très-bonne à cet ufage : on peut auffi l'employer aux gros ouvrages de maçonnerie : mais il eft d'expérience qu'elle ne vaut rien à blanchir la furface des murs , & qu'elle s'écaille. Les autres pierres calcaires font , le marbre , le fpath calcaire , les Jîalaclites & V albâtre calcaire. Voyez chacun de ces mots. La plupart des pierres calcaires fpathiques de Suéde font très-variées pour le tifTu &la couleur , mais elles font fouvent mêlées de quartz , de pyrites , &c, A l'égard de la chaux naturelle , que quelques Auteurs difent fe trouver dans les eaux de Bath en Angleterre , afliirant de plus qu'elle a la propriété de produire une ébullition très-confidérable avec l'eau froide , &:de l'échauffer au point qu'on pourroity faire cuire ^^s œufs; nous croyons pouvoir dire ici , qu'ayant répété l'expérience avec le thermomètre , s'il s'en eft trouvé qui eût cette propriété , on devoit l'attribuer à des feux fouterrains qui l'avoient calcinée. La pierre à chaux calcinée , fufée & étendue dans l'eau , donne à cette liqueur une pro- priété utile à un grand nombre de maladies chroniques & rebelles : on l'eftime un puiffant lithontriptique , fur-tout fi on y joint le favon. Quant aux propriétés phyfiques de la chaux, lefquelles font communes aux alkalis fixes , voye:^ le Diciionnaire de Chimie. PIERRE DE CASTOR. ^07^7^ Pierre des amphibies. PIERRE DE C AYENNE. On a vu à la ménagerie du Roi , fous ce nom, un oifeau connu au Mexique fous le nom àe paiixi , & dans quelques Auteurs fous les noms àecuxo ou cushcw , ou die poule de Numidie : cet oifeau a beaucoup de rapport avec le hocco , mais il en diffère par plufieurs carafteres, fa taille eff plus petite , fon bec eff plus fort , plus courbé, & prefque autant que celui d'un perroquet ; fon plumage d'un beau noir fait voir des reflets bleus & couleur de pourpre ; fur fon bec Su PIE eûun tubercule bleu, en forme de poire. Suivant Aldrovandc^ la femelle a le bec moins crochu , elle n'a point de queue , ce qui feroit , dit M. de, Buffon , un trait de conformité avec le hocco des Amazones de Barrercy dont la femelle a la queue beaucoup moins longue que le mâle; ce ne font point les oifeaux feuls d'Amérique qui n'aient point de queue; il y a même tel canton de ce Continent où les poules tranfportées d'Europe ne peuvent vivre long-temps fans perdre leur queue , & même leur croupion. L'oifeau /^ie/re de Cayenne fe perche fur les arbres , fa femelle pond à terre comme les faifans, mené fes petits & les rappelle de même ; les petits vivent d'abord d'infeftes , & cnfuite , quand ils font grands , des fruits , de grains & de tout ce qui convient à la volaille : il eit fi ftupide qu'il fe laiffe tirer jufqu'à cinq ou fix coups de fufil fans fe fauver ; cependant il ne fe laifTe ni prendre ni toucher: on ne le trouve que dans les lieux inhabités , ce qui fait que l'on a aflez rarement cet oifeau en Europe. PIERRE DES CENDRES. Fpyei Tourmaline. PIERRE A CHAMPIGNON. Foyci à la fuite d& t article. Cham- rjGNON. PIERRE CHATOYANTE. Voyei d'abord le mot Chatoyante, & mfu'ue l* article (ElL DU MONDE. PIERRE DE CHAUDRON. Foyei au mot STALACTITES. PIERRE ou Pavé de la Chaussée des Géants. C'eft wno. pierre ignefcente & \ configurée , qui eft au rang des merveilleufes produftions naturelles de l'Irlande , dont le Dofteur Pocock Se le Natu- ralise tf'^co/?^ nous ont donné une defcription très-détaillée, Foyei le mot Basaltes. PIERRE A CHAUX ou A CIMENT. Voye^ Pierre calcaire. PIERRE DE CHELIDOINE. C'eft la picm d'hirondelle. Voyez ce mot. PIERRE DE CHEVAL , hlppolltus. C'eft une efpece de hèipard. Voyez ce mot. On trouve des pierres dans l'eftomac, dans la véiicule du fiel, dans la velîie & dans le canal falivaire des chevaux , dans la tête & dans . la mâchoire des ânes fauvages , dans l'eflomac & dans les inteflins des. mulets. Les pierres d'éléphans font de vrais hc^oards^ ainfi que celles des fmges. PJERRE DE CIRCONCISION. On a donné ce nom aux haches de PIE S13 pierres dont nous avons parlé , parce qu'on croyoit que les Anciens s'en fervoient pour l'opération dont elle porte le nom. La nature' de cette pierre n'eft pas toujours la même : il y en a de filicées , d'autres font ou de pétrofilex , ou de bafalte, ou de jade. PIERRE DE CLOCHE, chakophonus. Pierre dont il eft mention dans Boëce de Boot : c'eft une pierre couleur de marbre noir , qui rend le même fon que l'airain quand on la frappe , & qui fe trouve au Mexique , dans le lit d'une rivière qui ne coule pas toujours & qui traverfe la ville de Cuantala. Cette pierre eft ornée d'une tache , ou plutôt d'une incruftation très- adhérente & de matière différente. M. Anderfon ( Hijloire Naturelle du Groenland^ parle aufii d'une fem- blable pierre d'un verd-bleu , & qui a le fon d'une cloche : on prétend que la pierre de cloche fe trouve en Canada. Cette pierre ne feroit-elle pas plutôt du cuivre fondu par quelque feu fouterrain ? PIERRE CLOISONNÉE. Pierre figurée à cloifons. Quelques-uns rangent cette pierre au nombre des jeux de la nature. Voye^ Ludus HELMONTII. PIERRE DE COBRA ou de serpent du Cap de Bonne-Espé- RANCE. Fojei au mot PiERRE DE Serpent. PIERRE DE COCHON. C'efl une efpece de bérj^ard. . PIERRE COLUBRINE, lapis colubrimis. C'eil une efpece de /^/Vr^ ollaire folidc , un peu graffe au toucher : elle eft compofée de particules très-fines , fufceptible d'être travaillée fur le tour avec des outils de fer ; mais elle ne peut recevoir aucun poli : il y en a de dure , fa couleur efl d'un gris de fer ; une autre qui eft feuilletée , & enfin une froifieme variété qui efl tendre : on s'en fert quelquefois pour tracer &: former des defîins fur des murailles. On trouve la pierre colubrine -à Sahlberg & à Carpenberg. PIERRE DE COME ou COLOMÏNE, lapis comenfis. C'efl une efpece de pierre ollaire , peu dure & facile à travailler fur le tour , opaque, grife , de diverfes couleurs , comme marbrée, & remplie de particules talqueufes ou micacées, qui y forment des manières d'ondes. Si on lui fait fubir Tadion du feu , elle fe durcit & y acquiert un éclat ai-gentin : on trouve cette pierre dans le Jemteland, & particuUérement chez les Grifons, près de Pleurs , Plurium , ville ou bourg confidérable , fitué autrefois près du lac de Corne. Cette ville fut cnfévelie en 1618 fous les débris d'une montagne voifine , d'où l'on tiroit la pierre àon\ 824 P I E il s'agit, & qu'on avoit creufée trop inconfidérément : foti etnpîace- ment eft aujourd'hui un lac. On fait encore de cette pierre des vafes ou poteries qui réfiflent au feu, & qu'on porte enfuite à Côme , d'où lui eft venu le nom de pierre, de Côme, Il y a plufieurs autres mines de pierre oUaire chez les Grifons , i°. auprès de Chiavenne ; i**. dans la Valteline , chez les Grifons mêmes , appelles Lave^îi , où la pierre ollaire étoit autrefois appellée Lave^e, Les habitans de la montagne de Galand l'appellent craie verte favonneufe, PIERRE COMPOSÉE, roye^ au mot Roc HE. PIERRE DE COQ. -^oj'^^ Pierre Alectorienne. PIERRE DE COQUILLES. Foye^r article Perles, au wo/ Nacre DE Perles. PIERRE DE CORNE, lapis corneus. Les Naturalises Allemands, & les ouvriers des mines de ce pays, donnent le nom de pierre de corne ( hornflein ) à plufieurs efpeces de pierre de nature différente. Henckel dit qu'on défigne par-là une pierre feuilletée, & qui efl un vrai jafpe : elle reifemble parfaitement au caillou & au quartz qui feroient colorés en brun , en jaune , en rouge , en gris &: en noir. Le même Auteur dit qu'il fe trouve de la pierre de corne en Saxe dans le voifmage de Frey- berg, & qu'elle eft compofée d'un aflemblage de petites couches de fpath pefant, d'améthyfte , de quartz, de jafpe , de criftal, qui font entremêlées les unes fur les autres. D'autres donnent le nom de pierre de corne à cette efpece àejilex ou pierre a fufil jaunâtre , qu'on trouve fouvent dans des fablonnieres , ou par morceaux répandus dans la campagne , & dont la couleur ref- femble à celle de la corne des animaux. Voyez notre Minéralogie , féconde édition , vol. I. & l'article RocHE DE CoRNE dans ce Dic- tionnaire. PIERRE DE CRABE. Foye^ Queue de Crabe. PIERRE DE CRAPAUD, ^oye^ Crapaudïne. PIERRE DE CROIX , lapis cruclfer. Cette pierre qui eft en partie d'une nature de marne & en partie filicée, a une couleur de corne grife , & porte exaûement dans fon intérieur la figure d'une croix noirâtre , tout-à-fait différente des macles que Ton appelle quelquefois SiUÛ\ pierre de croix. Voyez Macle. La pierre de croix ne femble être qu'une frondipore ( efpece de madrépore ) foITile , dont deux lames de nature filicée fe croifent de manière PIE 825 manière qu*étflnt fclces horizontalement ou même verticalement, •& enfulre polies, elles ne repréfentent pas mal une croix, dont l'intervalle des angles feroit rempli d'une matière fem.blable à une pierre ollaire, ou à de la marne îrès-argileufe ÔC très-durcie. On trouve beaucoup de ces pierres en bafTe Normandie , en Poitou ou en Saintonge , dans la Guienne , & principalement aux environs de Compoflelle en Efpagne, à vingt milles de l'Eglife de Saint Jacques. Des Joailliers d'Efpagne les taillent en amulettes, &i les enchâffent dans de l'or ou de l'argent pour fatisfaire à la crédulité des gens du pays , qui prétendent qu'on trouve ainfi ces pierres toutes polies , & pour des caufes dont ils ont leuls la révélation ; on en fait auffi des chapelets, des roiaires, &zc. PIERRE A DÉTACHER, On fait que la glaiîe piîre , lorfqu'eîle eft feche , a une grande difpofuion à imbiber les matières huileufes &C graiTes ; cette propriété fait qu'on s'en fert pour faire les pierres à enlever les taches des habits , & qu'on les nomme /7/é/-r^5 à détacher, M.. Bourgeois prétend que la bonne marne pure efl: la meilleure de toutes les pierres à détacher; elle efl, dit-il, préférable à toutes les efpeces de glaifes , parce qu'outre la glaife qui en fait la bafe , elle contient i:ne terre abforbante qui fe charge encore mieux que la glaife , des huiles qui tachent les étoffes. PIERRE DIVIxNE. VoyeiUjy^. PIERRE DE DOMINÉ. Nom donné à une efpece de marne qui fe pétrifie , & qui , au rapport des Voyageurs Hollandois , fe trouve dans une rivière qui paffe près de la fortereffe de Vidoria , dans l'ifle d'Am- boine. Cette pierre efl mouchetée comme du marbre ferpentin , & de la grofleur d'un œuf d'oie , chargée de mamelons ; cependant liffe , affez tendre & facile à polir. On prétend que c'eft un Curé Proteflant ( que les Hollandois nomment Dominés^ qui le premier Ta découverte & fait connoître : on affure même qu'il en faifoit mâcher à fes malades. Dictionnaire, univcrfd de Hubner. PIERRES DE DRAGÉES, confetti. Nom donné à des congélations lapidifîques qui imitent des dragées. Le château d'Arbent en Bugey eri eilprefque entièrement bâti. Voye^ Dragées de Tivoli. PIERRE DE DRAGON , draconites. Pierre demi-tranfparente que quelques anciens Naturaliftes ont prétendu fe trouver dans la tête du dragon, & fur laquelle on a débité beaucoup de rêveries. Voye^ Boèce de Boot de Lapid. 6* Gsmm. p, 4^1 , édit, de iS^^. M. Stobaeus ( Stobei Tome J K M M m m m 2i6 P . E Opufcula , pag. /jo , &c. ) croit que la draconite n*eft autre chofe que l'aftroïte. Il prétend que les' Charlatans , pour en relever le prix, fe font imaginés de dire qu'elle venoit des Indes , & qu'elle avoit été tirée de la tête d'un ferpent endormi , avant que de lui couper la tête. La forme d'une étoile qu'on remarque dans cette pierre , fuffifoit d'ailleurs pour la rendre merveilleufe aux yeux du peuple , qui ne pouvoir manquer d'y appercevoir des marques d'une influence célefte. Une autre circonftance qui devoit encore frapper des gens peu inflruits > c'eft qu'en mettant du vinaigre fur cette pierre , on y apperçut du mouvement; effet affez naturel lorfque la pierre eft poreufe & du genre des calcaires qui ont la propriété de fe diffoudre dans les acides , & d'y faire effervefcence": c'ell: un phénomène femblable qui a fait donner à la pierre lenticulaire le nom de pierre forciere. Voyez ce mot. La pierre de dragon eft une aftroïte convertie en fpath '^yoye:^ Astroite & Spath. PIERRE A ÉCORCE. Foye^ Roche de Corne. PIERRE D'ÉCREVISSES. Foyeià la fuite du mot ÉCREVISSES. PIERRE D'ÉMERIL. VoyeitiAERil. à û article Fer. PIERRE ÉCUMANTE. Cette fubftance minérale que les Suédois appellent ^^y?g/z , bouillonne dans le feu , forme de l'écume , & a beau- coup de propriétés analogues à celles de \2l gcUe minérale , &: fur-tout avec la léolite. Voyez ces mots. PIERRE ÉLÉMENTAIRE. Les Lithologiftes donnent ce nom ou à une agate de quatre couleurs^ ou à une opale. Voyez ces mots. PIERRE EMPREINTE. Voyei Typolites & l'article Empreintes. PIERRES D'ÉPONGÉ, lapis fpongia. Ce font de petits corps ou concrétions poreufes & pierreufes qui fe trouvent dans les pores de V éponge ou dans l'intérieur de la terre : alors ce font des efpeces à^oftéo- colle. Voyez ces mots. PIERRE D'ÉTAIN. Les Mineurs donnent ce nom à l'étain minéralifé dans la pierre : ils le donnent aufli à la mine d'étain bocardée , lavée & prête à être purifiée par la fonte. Voye^^ à V article Étain. PIERRE D'ETHIOPIE. Il femble que c'eft le bafanite ; mais le bafa- lîîte eft-il le vrai bafalte , ou un marbre noir très-dur ? On n'a encore rien éclairci à ce fujet. PIERRE ÉTOILÉE ou ASTERIES. Voye^^ au oto/ Palmier marin. PIERRE A FARD. C'eft une efpece de talc Voyez ce mot. Le nom de fard fe dit de toute comipofiticn foit de blanc , foit de rouge , dont les femmes ôc quelquefois les hom.mes mêmes fe fervent PIE %zj dans certains pays pour embellir leur teint , imiter les couleurs de la jeunefTe , ou les réparer par artifice. On lit dans l'Encyclopédie que l'amour de la beauté a fait imagina de temps immémorial tous les moyens qu'on a cru propres à en aug- menter l'éclat, à en perpétuer la durée ou à en rétablir les brèches, & que les femmes , chez qui le goût & l'art de plaire font très-étendus , ont cru trouver ces moyens dans \qs fardemens ( Confultez le Livre êiEnoc ). L'antimoine eft le plus ancien fard dont il foit fait mention dans l'Hifloire , & en même temps celui qui a le plus de faveur. Comme dans l'Orient les yeux noirs , grands & fendus paflbient , ainfi qu'en France aujourd'hui , pour les plus beaux, les femmes qui avoient envie de plaire fe froîtoient le tour de l'œil avec une aiguille trempée dans du fard d'antimoine pour replier la paupière , afin que l'œil en parût plus grand : on ne fauroit croire combien l'ufage d'un tel fard s'étendit & fe perpétua. Ce qu'il y a de fmgulier , c'eft qu'aujourd'hui les femmes Syriennes , Baby- loniennes & Arabes fe noirciffent du même fard le tour de l'œil , & que les hommes en font autant dans les déferts de l'Arabie pour fe conferver , difent-ils , les yeux contre les ardeurs du foleil. Tous ces peuples tirent une ligne noire en dehors du coin de l'œil , pour le faire paroître plus fendu, & les femmes Barbarefques croiroient qu'il manqueroit quelque chofe d'effentiel à leur parure fi elles n'avoient pas teint le poil de leurs paupières & leurs yeux avec de la poudre de molybdène. Voyez ce mot. Les femmes Grecques & Romaines empruntèrent des Afiatiques la coutume de fe peindre les yeux en noir ; mais pour étendre en- core plus loin l'empire de la beauté, & réparer les couleurs flétries, elles imaginèrent deux nouveaux fards inconnus auparavant dans le monde, & qui ont pafTé jufqu'à nous, c'efl-à-dire le blanc 8>c le rouge. La plupart des Peuples de l'Afie & de l'Afrique font encore dans l'ufage de fe colorier diverfes parties du corps , de noir , de blanc , de rouge , de bleu , de jaune , de vert , en un mot de toutes fortes de cou- leurs , fuivant les idées qu'ils fe font formées de la beauté. Avant que les Mofcovites eufTent été policés par le Czar Pierre I , les femmes RufTes favoient déjà fe miettre du rouge , s'arracher les four- cils, fe les peindre ou s'en former d'artificiels. Nous voyons aufîi que les Groënlandoifes fe bariolent le vifage de blanc & de jaune ; & que les Zembliennes, pour fe donner des grâces , fe font des raies bleues au front & au menton : elles ont aulfi la coutume de fe percer le nez MMmmm 2 SiS P I E & les oreilles , Sz d'y attacher des pendans de pierres bleues. Les Mingréliennes fur le retour , fe peignent tout le vifage , les fourcils , le front, le nez & les joues. Les Japonnoifes de Jédo fe colorent de bleu les fourcils &c les lèvres. Les Infulaires de Sombréo au nord de Nicobar, fe plâtrent le vifage de vert & de jaune. Quelques femmes du royaume de Décan fe font découper la peau en fleurs qu'elles teignent de diverfes couleurs. Les Arabes , outre ce que nous en avons dit ci-deffus , font dans l'ufage de s'appliquer une couleur bleue aux bras , aux lèvres & aux parties les plus apparentes du corps : ils mettent , hommes & femmes , cette couleur par petits points , & la font pénétrer dans la chair avec une aiguille faite exprès : la marque en eft inaltérable. Les Turqueffes Africaines s'injedent de la tuthie préparée dans les yeux pour les rendre plus noirs , &c fe teignent les cheveux , les mains & les pieds en couleur jaune & rouge. Les MaurefTes fuivent la même mode , mais elles ne teignent que les paupières &C les fourcils avec la. molybdène. Les filles qui habitent les frontières de Tunis fe barbouillent de couleur bleue le menton & les lèvres ; quelques-unes impriment une petite fleur dans quelqu'autre partie du vifage , avec de la fumée de noix de galle & du fafran. Les femmes du royaume de Tripoli font confilier les agrémens dans des piqûres fur la face , qu'elles pointillent de vermillon , elles peignent leurs cheveux de même: la plupart des filles Nègres de Sénégal, avant de fe marier ^ fe font broder la peau de différentes figures d'animaux & de fleurs de toutes couleurs. Les Négreffes de Serra-Liona fe colorent les yeux de blanc, de jaune & de rouge. Les Créecks & les Habitans du détroit de Davis en Amérique , dans la vue de s'embellir , fe découpent la peau du vifage, &c. en ferpens, lézards, crapauds & fleurs, & rempliffenf ces coupures de couleur noire. Les Floridiennes feptentrionales fe peignent par piqûres le corps , le vifage , les bras & les jambes de toutes fortes de couleurs ineffaçables. Enfin les Sauvageffes Caraïbes fe barbouillent toute la face de roucou. Si nous revenons en Europe , nous tî-ouverons que le blanc 2i-îe rouge ( le talc &c le carmin ) ont fait fortune en France. Nous en avons l'obligation aux Italiens qui pafTerent à la Cour de Catherine de Médicis : mais ce n'eil que fur la lin du fiecle paffé que l'ufage du rouge , du crépon de Strasbourg & du na- karat de Portugal, ell devenu général parmi les femmes de condition , &:c. &c. on a même étendu l'ufage dii fard jufques fur les cheveux : on fe fert ajjjourd'hui de poudre à poudrer blanche i il y a des perfonnes P I E 829 dw fexe qui prétendant être guidées par le bon goût , adoptent l'ufage de la poudre blonde ; d'autres adoptent , pour relever l'éclat naturel de leur teint , une poudre d'une teinte plus foncée ; enfin quelques autres , peut - être par fantaifie , peut - être par caprice , exigent une poudre entièrement roufTe. Il eft à defirer, en faveur du beau fexe , que les Parfumeurs , pour fe conformer à la variété des demandes , ne dé- bitent que de la poudre d'amidon brûlé , enfuite broyé & tamifé : jfuivant la calcination de l'amidon , il elt réduit en une efpece de char- bon d'une couleur plus ou moins foncée ; mais nous l'avons dit , ces nuances obfcures ne fatisfaifant pas toujours quelques perfonnes , il a fallu , dit M. de la Follie , remonter la couleur avec du roucou , du colcothar &c autres drogues femblables, qui mêlées avec de la poudre déjà échauffée & defféchée au point d'avoir perdu un tiers de fon poids fur le feu , forme un compofé mal-fain fur la peau , nuifible à la con- fervation des cheveux, & d'une odeur dont le retour ne flatte pas toujours l'odorat. Puifqu'il ed: du bel air de faire ufage des poudres de différentes nuances, M. de la Follie propofe aux Dames le moyen d'en faire qui ne foient aucunement dangereufes & plus agréables que toutes celles qui font ufitées. Il faut colorer la poudre d'amidon avec une décodion de fix onces de bols de Bréfil, faite dans quatre livres d'eau bouillante & repofée , en former une pâte qui ne foit pas trop liquide : on divife cette pâte en petites portions pour la faire fécher , enfuite on l'écrafe & on la fait paffer au tamis : cette poudre eu d'un beau jaune chamois. On met dans le refte de la déco£tion de bois de Bréfil un demi-gros d'alun qu'on fait diilbudre fur le feu ; on laifîe refroi- dir &repofer ce bain aluné ; on en verfe fur une autre livre de poudre de la même manière que ci-deffus , &c on en obtient une poudre qui conferve au (ec une belle couleur rofe. Le bois d'Inde & l'ahm de Rome produiroient par le même procédé une poudre d'un gris -rofe très - agréable. Le vitrioi de Chypre en place d'alun prochuroit une poudre d'une belle couleur lilas : la furface de cette poudre expofée à l'air devient entièrement bleue; maisfi on remue cette poudre, elle redevient de couleur de lilas , & ces changemens de couleur s'opèrent autant de fois qu'on renouvelle les furfaces. Ce phénomène dione de l'attention du Phyficien peut amufer une Dame à fa toilette. Des poudres colorées avec le bleu de PrufTe & mêlées avec les poudres rofes pro- duifent de belles couleurs violettes ôt lilas , 6c les furfaces n'éprouvent 830 PIE point à l'aîr les changemens finguliers de la poudre précédente. Si au lieu d'alun & de vitriol de Chypre , on met dans la déco6lion de bois d'Inde de la couperofe verte , on aura une poudre d'un bleu ardoifé uniforme. Le fard ne peut réparer les injures du temps , ni rétablir furies rides du vifage la beauté qui s'eft évanouie ; & loin que les fards produifent cet effet , prefque tous gâtent la peau , la rident , l'altèrent & ruinent la couleur naturelle : heureufement que les Dames qui entendent leurs intérêts , ne fe lailTent guère abufer ni fur la qualité du rouge , ni fur celle du blanc , &c. autrement leur peau perdroit tous fes agrémens. Voyci les articles TaLC , BiSMUTH , COCHENÎLLE & HOMME , Oll l'on trouvera plufieurs autres fortes de détails fur la beauté &c l'art cofmé- lique des différens Peuples. PIERRE A FAUX. Voyei Grais DE Turquie. PIERRE A FEU MÉTALLIQUE. Foyeil'artlclcVYRlTES, PIERRE DE FIEL. Concrétion pierreufe qui fe trouve dans l'amer ou véficule du fiel de plufieurs animaux : elle efl formée par l'épaiffifle- ment & le defféchement de la bile , dont elle conferve la couleur &: l'amertume. Elle efl: plus ou moins groffe & arrondie ; celle du bœuf étant broyée fur le porphyre , fait un jaune doré très-beau : elle peut s'employer à l'huile , quoique rarement , fon plus grand ufage étant pour la miniature ou détrempe. PIERRES FIGURÉES , fignrata. On donne ce nom à toute efpece de pierre qui porte naturellement en fa fuperficie ou dans fon total, une figure extraordinaire , & tout-à-fait étrangère au règne minéral : Voyei r article Jeux DE LA Nature. Il y a aufii des pierres figurées arti- ficielles , que l'on rencontre quelquefois dans la terre à différentes profondeurs, communément dans des butes & dans des tombeaux ; telles font 1°. les prétendues pierres de tonnerre ou de foudre , faites en forme de croix , ou pyramidales par les deux extrémités , renflées dans le milieu , & percées d'un trou ; 2°. les haches de pierre ; 3°. les marteaux de pierre ; 4^. les couteaux de pierre; 5°. \qs jleches de pierre. Il paroît que ces pierres font des armes , des inflrumens & uftenfiles dont ancien- nement les hommes , & fur-tout les Sauvages , fe fervoient foit à la guerre , foit pour d'autres ufages , avant que de favoir traiter le fer. On peut ajouter à ces fortes de pierres taillées ou figurées, 6°. les langues de pierre l'j^. les urnes fipulcrales ; 8°. les de:^ de Bade, &C. PIERRE A FILTRER. Foyei à C article Grais. PIE 831 PIERRE DE FLORENCE. Efpece de marbre opaque , grisâtre Se orné de figures jaunâtres , qui relTemblent affez à des ruines ; ce qui lui a fait donner le nom de lapis ruderum. On en fait des tableaux en pièces de rapport qui font entre les mains de tout le monde. Voyt:^ à r article M ARBRE. PIERRE DE FOUDRE ou DE TONNERRE. Pierre dont le vulgaire penfe que la chute ou même la formation du tonnerre efl toujours accompagnée. Son exiftence efl fort douteufe. Ce qu'on a pris pour une pierre de foudre ou de tonnerre eft une matière minérale fondue par Taftion du feu du Ciel , ou peut-être même quelque fubflance , telle que la terre en renferme beaucoup dans les endroits où elle a été fouillée par des volcans qui fe font éteints. Le tonnerre étant venu à tomber dans ces endroits , & le peuple y ayant enfuite rencontré ces fubflances qui portent extérieurement des preuves certaines de l'adion du feu , il les aura prifes pour ce qu'il a appelle àes pierres de foudre. Voye^ CeraUNIAS & BelemniteS. PIERRE FR.OMENTAIRE ou FRUMENTACÉE , lapis frummtarius. Ce font des corps foiïiles , qui étant grouppés & caiTés latéralement reffemiblent alors à des grains de froment, fuivant les différens afpeds que préfente cette pierre : on lui donne aufli d'autres noms. Voyè:^^ Pierre lenticulaite & Pierre numismale. PIERRE A FUSIL ou SILEX. Voye^^ aux mots Caillou & Silex. PIERRE DE GALLINACE. Efpece de verre noirâtre , très-dur , opaque ou obfcur , fort pefant , fufceptible du poli, & dont les Péruviens fe fer voient en guife de glaces pour faire leurs miroirs. Les Indiens l'appellent aufîî guanucuna culqui ( argent des morts ) , parce qu'ils avoient coutume d'en enterrer divers morceaux avec leurs morts. On en trouve en effet dans leurs anciens tombeaux des morceaux taillés. On en voit un très-beau dans le Cabinet d'Hiftoire Naturelle du Pvoi ; il fut tiré d'un tombeau^fort écarté dans les montagnes de Pichencha près Quito. Il a neuf pouces de diamètre , &dix lignes & demie d'é-s- paifTeur ; il eft de figure convexe des deux côtés , mais de convexités inégales, & oiiy remarque une face plus polie que l'autre. M. Godin dit avec raifon qu'il y a une mine de pierres de gallinacés à plulieurs journées de Quito ; elle n'en eft même éloignée que de neuf lieues dans la partie de l'Eft , dans les montagnes de la grande Co»^dilliere , Paroifte de Quincbe ; là fe trouve un rocher entièrement compofé de cette fubftance , dans lequel eft une grotte que les Indiens nomment §32 PIE quijlca-miichal , & les Efpagnols machay-cueva , & d'oîi l'on peut tirer des pièces de gallinace de plus de cinq pieds de largeur. On ne peut tra- vailler cette pierre qu'en l'ufant. Il paroît que \2l gallinace eft un verre ou un laitier des volcans du Pérou. Foyei Pierre obsidienne. PIERRE DE GO A. Efpece de bsipafd faclice. Voyez au mot EÉZOARD. PIERRE GYPSEUSE. Fqye/, Gypse. PIERRE HÉMATITE. FoyeiàCamcU Fer. PIERRE HÉLIOTROPE. Voyei au mot Jaspe. PIERP».E HÉPATITE. Quelques-uns ont donné ce nom à la pierre appellée lawene. La pierre hépatite ou hépatique efl: le produit d'une combmaifon de l'acide vitrioHque, du phlogifrique & d'une terre cal- caire: en la frottant , elle exhale une odeur de foie de foufre ; elle ne fait pas efFervefcence avec les acides: elle tient le milieu entre la pierre- porc & le gypfe. PIERRE HERCULÎENNE , efl Valmam. Voyez ce mot. PIERRE HERBORISÉE. roye^ à CanicU Agate & Dendrite. PIERRE D'HIRONDELLE. Nom donnée de petites pierres que l'on prétend fe trouver dans l'eftomac de l'oifeau qui porte ce nom, & qu'il avoit avalées pour faciliter fa digeftion. Ce font de petits grains d'agate, ou de pierre à fufil ou de quartz plus grands qu'une femence de lin. Il y en a de blanches, de grifes , de bleuâtres , jaunâtres , grisâtres, plus ou moins unies & luifantes. Ces pierres onr une réputation très-an- cienne parmi le peuple , & même parmi les NaturaHftes qui les ont eftimées ophtalmiques. Les Cabinets les plus diftingués offrent de ces petits cailloux ou fables peu intéreffans par eux-mêmes : on a pré- tendu que ces fortes de pierres fableufes ne fe trouvoient que dans les cuves & les grottes de la montagne de SafTenage , près de Grenoble en Dauphiné; l'on y en rencontre quelquefois, mais c'efl en petite quantité & en certains temps : le véritable endroit où ils abondent aujourd'hui & où on les ramaffe en tout temps , eft au-deffus des grottes, dans une partie de la même montagne, où l'on ne peut parvenir qu'en faifant un circuit d'environ trois heures de chemin : on va de là , par une montée très-rapide , au bord d'un ruiffeau appelle Germe , qui fort avec impétuofité d'un antre creufé par la na- TCure dans le rocher , & va fe joindre enfuite non loin de là, à un autre ruiffeau nommé Feron , où il perd fon nom. Voilà l'endroit où les pierres dont PIE §35 iont il eft mention fe trouvent en abondance dans un fable mélangé avec de petits fragmens d'une pierre blanche , tendre ou fpatheufe , ou marneufe. Il fe trouve des pierres d'hirondelle ou de faffenage d'un très-beau poîi: elles n'afFeftent point de figure déterminée, il y en a d'orbiculaires ou rondes, de triangulaires, d'aiguës, d'irrëgulieres. Ces pierres , d'un grain plus ou moins fin , fe trouvent aufli dans un ruiffeaii du Bailliage d'Aigle , au Canton de Berne : quand elles font pures Se fans être mélangées , elles ne font aucune efFervefcence avec les acides. On voit encore bien des perfonnes avoir confiance en cette pierre » étant introduite dans le coin de l'œil , pour en extraire les corps étran- gers qui le fatiguent. Cette propriété que le jade & le crillal de roche auroient de même , n'eft due qu'à fon poli , qui fait qu'elle peut aller ÔC venir impunément fur la furface de l'œil fans le bleffer , & détacher quelquefois les atomes d'ordures qu'elle rencontre fur fa route. PIERRE A L'HUILE ou D'ORIENT. Foyei Pierre a rasoir, PIERRE DES HUMAINS. A^oy^^ au mot Calcul et Pierre des ANIMAUX. PIERRE HYSTÉRIQUE. Foyei Histérolïthe. PIERRE DES INCAS , pkdra de los Ingas, el^ une efpece de pyrite arfenicale , luifante comme de l'étain ou du fer recuit : elle ne fe ternit que peu ou point à l'air; fa figure efl indéterminée. Les Incas, Rois du Pérou, l'ont mife en honneur ; ils attribuoient de grandes vertus à cette pierre opaque , qui eftune véritable marcaiïite arfenicale , ils l'eftimoient propre à guérir la paralyfie ; ils en portoient des bagues montées à jour, des amulettes; ils les faifoient tailler à facettes, & l'on en mettoit dans leurs tombeaux. On en a fait aufii des miroirs très-unis & des colonnes. On prétend que l'on a retiré quelques-unes de ces pierres de certains tombeaux des Incas , qui avoient près de quatre cents ans d'antiquité , fans qu'elles paruffent altérées en rien. Ces marcafiites font d'autant plus rares aujourd'hui , qu'on ne les rencontre guère que dans ces tombeaux. Suivant la coutume de ces peuples , on enterroit avec le défunt fes bijoux les plus précieux. PIERRE INFERNALE. VoyeiàVanlch Argent. PIERRE D'IRIS. Les Anciens ont donné ce nom à une pierre pré- cieufe , tranfparente , dans laquelle on remarque les différentes couleurs de l'arc-en-ciel. Quand un criftal de roche efl équilatéral , & qu'on re- garde le foleil ou le jour au travers, on y reconnoît le même phéno« Toim IF, NNnna $34 PIE mené : foiivent un criflal , étonné par le contre-coup d'un marteau , foît dans l'eau chaude , foit à l'air libre , eft fufceptible de réfléchir des iris, PIERRE judaïque, ou DE SYRIE, ou DE PHÉNICIE, lapis Judaicus. On préfume , & même il paroît démontré , que c'efl: la pointe d'une efpece particulière d'ourfm , devenue fofîile, & même convertie en fpath : elle eft oblongue , obtufe , renflée dans fon milieu , tantôt unie & tantôt chagrinée , ou ornée de lignes perlées , d'une couleur grisâtre. Ces fortes de pierres ont un pédicule , au bout duquel eft une cavité cotyloïde , peu profonde , qui fert d'emboîture : elles fe caflent tou- jours obliquement. On les trouve communément en Syrie , & dans plufieurs autres endroits de la Judée. Il y en a aufîl en forme de gland, Confultez le Tome, IV, des Mémoires des Savans étrangers, PIERRE DE LAIT. C'eft le morochtus ou le morochite des Auteurs,' On donne aufli ce nom au lait de lune fojjile à demi-folide ; voye\^ ce mot. Cependant le vrai morochite eft une fubftance argileufe , verdâtre ou jaunâtre , de la nature de la craie deBriançon : c'eft le milch-flein des Aile mands , qui attribuent beaucoup de propriétés imaginaires à cette fub- ftances : on s'en fert quelquefois pour dégraifler , & pour tracer des lignes. Voyei^auJfiQk.i.kcrzYT 6» Galaxie. PIERRE DE LA LANGUE. Voye^ à C article CtCLCVl.. PIERRE DE LARD ou DE LARRE , lardltes, C'eft une pierre ollaire qui nous vient de la Chine , oîi on lui donne toutes fortes de figures de magots , d'animaux , &c. & d'où elle nous eft envoyée toute façonnée : elle eft douce , favonneufe au toucher , d'une tranfparence de cire ou de fuif , aflez dure , de différentes couleurs , tantôt blanche &; tantôt marbrée ; c'eft \?ijléatite des Anciens , le gemma-huya du Di£lion-. naire de Trévoux , lefpeckjlein & le fmeclites des Modernes. PIERRE LENTICULAIRE ou PIERRE NOMMULAIRE , lapis lenticularis aut Uns lapideus ^ feu nummus diaboUcus. Parmi les corps les plus inconnus de la Lithologie , les Naturaliftes regardent comme un des plus fmguliers la pierre lenticulaire^ ainfi nommée de fa parfaite reffcmblance extérieure avec des lentilles , ou avec certaines monnoies. On foupçonne cependant que ces corps organifés font des teftacites , c'eft-à dire qu'ils ont été dans leur origine des coquillages marins : peut- être font- ce des efpeces fingulieres de petits nautiles fofllles. Les pierres lenticulaires font des corps ronds ou orbiculaires , applatis, plus ou moins épais en leur milieu, liftes , quelquefois radiés en defîlis, très- durs , d'une fuperficie plus ou moins confidérable i les petites ont trois PIE 83^ à quatre lignes de largeur ; il y en a même d'une petiteffe impercepti- ble ; les moyennes en ont fix à huit , mais on en trouve de quinze lignes & plus ; ces foifiles font compofés de plufieurs couches faciles à diflin- guer lorfqu'on vient à les ufer jufqu'à la moitié de leur épaiffeur , car on voit alors fix à fept traces concamérées en volute , dont l'œil eft au centre de cette coupe ; les premières révolutions font grenelées ; û on coupe ces pierres dans le julle milieu ou leur grand diamètre , on voit des traces ovales & concentriques , quelquefois diftinguées les unes des autres par une matière plus ou moins dure : voyei Pierres numisma- LES. Il y a des pierres lenticulaires par maffes & par bancs , les unes font calcaires, d'autres filicées; il y en a de blanchâtres , de jaunâtres & de noirâtres : on en trouve beaucoup fur le mont Randen & aux environs de SoifTons , & on leur donne le nom de pierre fromentacée , quand elles ont été ufées , arrondies par des frottemens naturels & fuivant leur grand axe ou diamètre. PIERRE DE UyikC^woyeiàt article LiMACE. PIERRE DE LINX,/â:/7/i/y/2c/5; voye^BELEMNiTE. PIERRE DE LIS ou ENCRINUS : voye^ Lilium lapideum y & l'article Palmier marin. PIERRE LUMACHELLE ou DE LIMAÇON. Cette pierre que les Italiens nomment ainfi , eft le marbre conchyte de la plupart des Natura- liftes. On n'a jufqu'ici que des idées très-incertaines de cette produdion de la Nature , & de tous les corps organifés qui s'y rencontrent, mais rarement entiers ; on y diftingue quelques limaçons à coquille , quel- quefois des écailles de poiffons de mer, des efpeces de cornes d'ammon, des bélemnites , &c. La pierre lumachelle eft fufceptible de poli , & fe trouve dans des collines compofées de couches horizontales de fable & de craie. En 1758 Madame Poncher découvrit dans fa terre de Chacenay en Champagne , près de Bar-fur-Seine , une carrière de ce marbre , dont elle fît conduire quelques blocs à Paris ; le fieur Adam , Marbrier du Roi, ^les a travaillés, & en a fait de très-beaux ouvrages. Par l'échan- tillon qui nous a été préfenté , nous y avons reconnu des gryphites , des cochlites , la plupart converties en fpath ; le gluten ou la pâte de ce marbre eft d'un grain fin, dur , fans fils, & fufceptible d'un beau poli. Les blocs qu'on tire de la carrière ont ordinairement fix à fept pouces d'épaiffeur , cinq à fix pieds de longueur , & trois à quatre pieds de largeur : on pourroit en tirer de plus confidérables. Ce marbre conchyts, NNnnn i 83« PIE nous a paru pour le moins auffi beau que le lumachdlày fi eftimé efl Italie. PIERRE LUMINEUSE: Foyei au mot Phosphore. PIERRE DE LUNE. Efpece d'agate nébuleiife ou d'opale foible, qui réfléchit la lumière comme la lune. PIERRE DE LIDIE , ell l'erpece de pierre argileufe qui fert de pierre de touche. Voyez ce mot. PIERRE DE MALAC, efl: le bé^oard du porc-épic. Voyez ce mot. PIERRE DE MALLACA. Efpece de bézoard faftice. Foyei au mot BÉZOARD. PIERRE DE LA MATRICE ou DE VÉNUS. Voyeiau mot Hys- TEROLITHE. PIERRE DE MANSFELD , efl une efpece de fchifle noirâtre qui fe trouve près d'Eifleben en Allemagne; on y voit diftinftement des em- preintes de divers poiiîbns fous un état pyriteux. Cette pierre efl: une vraie mine de cuivre, dont on tire ce métal avec fuccès dans les fon- deries du voifinage. PIERRE DE MEMPHIS, efl: une onyx. Voyez ce mot. Les Anciens appelloient auflî memphite une pierre qui , mife en macération dans du vinaigre , engourdiflbit les membres au point de les rendre infenfibles à la douleur & même à celle de l'amputation. Le memphite de Pline eft Vophite noir. Voyez Ophite. PIERRE MEULIERE , lapis molitoris. Cette pierre efl une de celles auxquelles un ufage journalier & intéreflîint donne une certaine célé- brité. On doit la confidérer comme une efpece de quartz carié , fur-tout celle de France , car elle varie de nature fuivant les différens pays d'où on la tire , comme de l'Allemagne , du Nord , &c. Il y en a qui reflem- blent à un amas de cailloux de différentes efpeces , d'autres paroifl^ent compofées de grains de fable quartzeux ou de matières graniteufes, comme celles de Malung en Dalécarlie. Au refle la furface de ces fortes de pierres efl aflTez inégale, comme trouée, & afîez dure pour pouvoir moudre le grain, & même pour faire feu, lorfqu'elle éprouve des frottemens rapides. La porofité de ces mêmes pierres fait qu'on les emploie communément en maçonnerie : le ciment, en entrant dans {ç,s cavités , les unit beaucoup mieux que toutes autres pierres pleines. Voyez ce que nous avons dit de la pierre meulière au mot Grais & à celui de Quartz carié. P 1 E §37 PIERRE DE MOKA, eft la belle agate herborifée, dont on trouve des quantités près de Moka en Arabie. ^oye^DENDRiTEÔ' Agate. PIERRE DE MORAVIE. Voye?^ Pierre rayée de Naniest. PIERRE NAXIENNE ou QUEUX. Voye^ Pierre a rasoir. La vraie pierre naxienne fert à aiguifer la faux. PIERRE NÉPHRÉTIQUE. FoyeiJkDE. PIERRE NOIRE. Foyei Crayon noir. PIERRE NOMMULAÎRE , nummus diabolicus. Voyez Pierre len- ticulaire (S* Écu DE BrATTENSBOURG. PIERRE NUMISxMALE, lapis numifmalis. On en diftingue de plu- lieur fortes , favoir , la pierre Ujidculaire ow nommulaire & \di pierre fro-^ mentaire. Quand on veut voir l'intérieur de ces corps organifcs , &: qu'ils font efFervefcence avec les acides, il fuffit de les chauffer fur un charbon, & de les jeter toutes chaudes clans de l'eau froide ; aufîl- tôt elles s'élèvent par couches minces , ou fe féparent fuivant leur largeur en deux parties égales, hémifphériques ; on remarque une fpirale fur leur furface intérieure , ou une ligne qui va en s'élargiffant vers la circonférence : le long de cette fpirale eft diftingué par de petites ftries qui forment des efpecesde petites cloifonsou de chambres. Voye^ Pierre lenticulaire. Quelques-uns regardent ces pierres comme l'opercule d'une coquille; mais nous préfumons que c'efl un coquillage particulier & chambré , au refle , ceci n'efl qu'une conjefture. On trouve près de SoiiTons une grande quantité de ces pierres jointes enfemble, ou liées par la matière de la pierre qui les environne ou les enclave > on en trouve auffi qui font détachées & répandues dans le fable ou dans la terre. PIERRE OBSIDIENNE , Upis ohfidianus. On trouve dans Pline la defcription d'une pierre nommée objidienne du nom ^Objldius , qui l'apporta le premier de l'Ethiopie. On en faifoit \q.s va/es mirrhins: voyez Myrrhina, & ce qui eft dit à la fuite de l'article Vafes, Feu M. le Comte de Caylus, fi avantageufement connu des Savans, a étudié particulièrement ce pafiage de Pline; & fes obfervations lui ont donné matière à un excellent Mémoire qu'il a lu à l'Académie des Infcrlptions, le lo Juin 1760, auquel M. Bernard de Jujfieu^ par fes profondes con- noiiTances & {ç.s> grandes recherches , a fourni toutes les remarques qui font du reffort du Naturalise , & MM. Majault Se Roux les expé- riences chimiques. Il réfulte de ce Mémoire que l'Auteur voulut bien SjS PIE nous confier , en nous permettant d'en faire l'ufage préfent avant fon impreffion ; il refaite , dis-je , que le lapis ohfidïanus n'eft ni le lapis objîdius du Commentateur Saumaife, ni une efpece de jayet, comme l'a cru Jgricola , & après lui Cœjîus & Walkrius ; ni un marbre noir , comme le penfe Aldrovandc & fes Sénateurs , mais une forte de laitier fourni par des volcans , femblable en tout point à la /^/^rre de gallinacc des Péruviens: voyez ce mot. PIERRE ODONTOIDES. rqye;j;GLOSSo-p êtres. PIERRES ODORANTES. On donnecenomàdifférens corps fofTiles, tels que la pierre porc o\x puante, la. pierre de violette de Ledelius , les petites cornes d^Ammon du mont Raudius , &c. Voyez CObfervation p. 2C)6' du vol. I. de notre Minéralogie y II. Edition ; voyez aulîi Pierre DE VIOLETTE. PIERRE DES OISEAUX, lapis avium. Sous ce nom on comprend la pierre aleclorienne , qui eft celle de coq , la pierre d'hirondelle , celle de penguin , & la pierre de vautour. PIERRE D'OLIVE , tecoUthos. Cefl la pierre judaïque liffe & non rayée, f^oye^ ce mot, PIERRE OLL AIRE , lapis ollaris. Sous ce nom générique on com- prend les pierres fmeclites ou Jléatites ; c'eft-à-dire , celles dont la fur- face eft gliflante , & comme favonneufe au toucher , qui font médio- crement pefantes , tantôt plus tantôt moins tranfparentes , de couleiu-s différentes ou mélangées , peu dures , propres à être fciées , tournées & travaillées avec des outils de fer , ou qui admettent le poli , qui ne fe diffolvent point par les acides; en un mot, qui, comme toutes les pierres argileufes , fe durciffent dans le feu & y deviennent rarement friables. Telles font la pierre de lard , la pierre de corne molle , la pierre de corne , la pierre coluhrine , la. ferpentine , la pierre de touche argileufe , & toutes les efpeces de talcites. Voyez ces mots. Bien des perfonnes regardent le crayon noir molybdène & le crayon rouge o\\ fanguine , comme à^s ^{^QQÇsô^oUaires Jléatites & métallifères: voyez ces mots. M. Guettard{^it mention dans les Mémoires de l'Académie des Sciences , année lySz , de quatre fortes de pierres ollaires, lefquelles fe lèvent par feuillets , comme les fchiiles. Il obferve qu'elles ne font prefque qu'un amas confus de parties talqueufes , réunies par une matière non çalcinable , mais qui lui a paru être de la nature du fchifte. La fînelTe P I E 839 du graîn de cette pierre & le peu de dureté qu'elle a , dît-il , au fortir de la carrière, permettent d'en faire différens ouvrages & difFérens vafes , marmites , chauderons , &c. Ces vaiffeaux fe travaillent fur une efpece de tour mù par un courant d'eau. On en fait un commerce afTez confidérable , puifque M. Scheuchier afllire qu'il va à plus de foixante mille couronnes d'or: c'eft dans la SuifTe que l'on trouve abondam- ment la pierre ollaire ; on en a découvert aufîi dans le Canada, qui , félon M. Gmttard , ne font pas 11 propres à être travaillées. Les pierre ollaires varient pour la couleur & pour le tifTu ; il y en a de noires , qui peuvent fervir de crayon & qui font aufîi ondueufes que les fîéatites ; d'autres font grenelées & friables : confultez notre Minéralogie; enfin il y en a de jaunâtres, de grifâtres, ou cendrées, &|d'un tifTu comme flrié. Prefque toutes ces fortes de pierres fedivifent à l'aide du fer en morceaux de figure indéterminée : communément on met cuire au fourneau des potiers dans des boîtes ou gazettes de fer battu, ou de tôle, enduites de glaife , les vafes qui font faits des pierres ollaires. Pour avoir une idée plus ample de cette efpece de pierre, voy. Pierre DE côme-SJlP L't't: ^"^ lï / ■■^^ ,fi # ^',^ .^. ■•■. \^ :>^S A^:. .fiJ-:^ .«>, y'^^ Mk » i ; ss-^u!.' "t, «f? <■• 4 K