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Il ejl peu dépar- ties dans le corps humain, dont les Ana- tomijles n'ayent examiné & découvert la aij IV jirucîure admirable & la compoftion. Ils ont également travaillé à découvrir les ufages de ces mêmes parties y mais quoi qu'on fait avancé dans cette connoif- Jance , il y en a cependant plufieurs fur lef quelles la Médecine nya encore que des notions imparfaites. Le moyen le plus propre pour parvenir à en acquérir de plus sures y ejl V Anatomie comparée. Cette étude cultivée par les Anciens , & négligée depuis long- tems , a fixé depuis quel- ques années V attention des Phyfciens & des Naturalises , & elle entre dans le plan de travail que la Société Royale de JVLédecincs'cft tracée d'après vos confeils. Cejl pour répondre à ces vues , que j'ai cru devoir publier ces trois Dijfertations fur V organe de Fouie. Quoique cet ou- vrage /oit peu confidérabk , & qu'il foit compofé depuis long- tems } j'ai penfé pouvoir en faire hommage à la Société Royale, en le faifanî paroître fous les ûufpices dtfonChef&defon Préfident. V D'ailleurs cette production ejlla première que je donne au Public, depuis que j'ai l'honneur d'être Membre de cette Société. Daigne^ la recevoir y Monsieur, non comme un hommage digne de vos talens & de votre réputation , mais comme un tribut Jincere de ma reconnoijfance pour V amitié que vous m'ave^ toujours témoignée. Je ne V oublierai jamais , ainjl que V honneur que vous rrîave^ fait de vouloir bien préfider à une de mes The~ fes , & les marques de bienveillance, dont vous ave^ accompagné cette faveur. Cejî avec cesfentimens & le plus Jincere & ref- peBueux dévouement que je fuis , MONSIEUR, Votre très - humble & tics- obéiilant ferviteur, Geoffroy. a nj DigitizecLby the Internet Archive in 2012 with funding from Open Knowledge Confirmons and Harvard Médical Schdll http://www.archive.org/details/dissertationssurOOgeof Avertijfernent* vij AVERTISSEMENT. IL y a long-tems que les Differtations que je publie aujourd'hui ont été compo- fées. La première concernant l'organe de l'ouïe de l'homme > & l'ufage des diffé- rentes parties de l'oreille , fut envoyée il y a plufïeurs années à l'Académie des Scien- ces & Belles - Lettres de Caen , qui fie l'honneur k l'Auteur de l'agréger au nom- bre de fes Membres. La féconde , qui roule fur l'organe de l'ouïe des reptiles , fut pré- fentée & lue à l'Académie Royale des Sciences de Paris en 1 7^ 2 , & elle fe trouve imprimée dans le fécond volume des Mé- moires des Sçavans Etrangers de cette Académie, où l'on peut confulter les plan- ches qui accompagnent cette Differration. L'Auteur n'y a fait depuis que quelques légers changemens. Enfin la troifieme , où l'on décrit l'organe de l'ouïe des poif- fons, a été auflî lue & préfentée à l'Aca- démie Royale des Sciences en 17^3. Je ne fçais par quel accident l'exemplaire qui avoit été dépofé a l'Académie , a été perdu , ainfi que les figures & les deiîins qui Tac- a iv viij Avtrtijfcmtnu compagnoient, en force que cette Difler- ration n'a pas vu le jour. Dans ce tems , l'or- gane de l'ouïe âcs poiiïbns étoic encore prefque inconnu , & je crois pouvoir apu- rer que je fuis le premier , qui en aie donné un détail complet & circonftancié. Depuis ce temps deux perfonnes fe font occupées du même travail , fans avoir eu connoiiïance de cette DifTertation. Le pre- mier eft l'illuftre M. Camper , célèbre dans les faftes de TAnatomie & rornement de l'Ecole de Hollande. Ce fçavanc a donné dans le fixieme volume des Mémoires Étrangers de l'Académie , un Mémoire fur l'Anatomie du cerveau & de l'organe de l'ouïe de quelques poiflbns. Ceux dont il parle font l'Égrefin , la Baudroye , le ? Brochet & la Raye. J'ai vu avec plaifir que mes découvertes fe rapportaient exactement avec celles de ce fameux Ana~ tomifte. Quoique le détail qu'il donne de l'organe de l'ouïe de ces animaux foit un peu moins circonftancié , il eft totalement fem- blable à celui que j'avois lu dix-fept ans auparavant a l'Académie : nous ne diffé- rons de fentiment que dans quelques arti- cles. i°. M. Camper ne reconnoît point le trou auditif externe , que j'ai trouvé dans Avertijfcmcnt. ix les poiffons , & il penfe que feau tranfmct au nerf l'imprefîion du fon à travers les mufcle? de la têre & les os du crâne , qui font minces & vibratiles dans cette claffe d'animaux. 2°. M. Camper a découvert dans le Brochet , une machine cartilagi- neufe, qui fert a tendre fuivant lui la cap- fuie élaftique ou la véficule , & qu'il appelle tcnfor , dont je n'ai point parlé. 30. Enfin dans le même poiffon il donne le détail d'un pilier offeux , qui foutient la voûte de la caiffe offeufe de l'oreille & que je n'ai fait qu'indiquer. A ces légères diffé- rences près, M. Camper a décrit dans quel- ques poiffons ce que j'ai détaillé dans un plus grand nombre. Peut-être que s'il eût examiné plufieurs autres genres , il auroit vu que quelques poiffons , comme l'An- guille , n'ont que deux canaux demi-cir- culaires au lieu de trois. Au refte, j'ai été flatté de voir qu'un auffi célèbre Anato- mifte fe fût parfaitement rencontré avec moi ; & dans rimpoffibilité ou je fuis de continuer un pareil travail a caufe de mes occupations y je defîre que M. Camper pourfuive Ces recherches anatomiques fur les poiffons, recherches auffi nouvelles que curieuies, & dont il vient de me commu- x Avertiffement. niquer plufieurs de vive vohc. Perfonne n'eft plus en érac que lui de nous donner un travail curieux , exad & bien fuivi fur l'Anatomie comparée. L'autre Anatomift© qui a travaillé fur l'organe de l'ouïe des poifTons, eft M. Vicq-d'Azir, Do&eur- Régent de la Faculté de Médecine , & Secrétaire perpétuel de la Société Royale. On trouve de lui dans le feptieme volume des Mémoires des Sçavans Étrangers de l'Académie des Sciences , deux Mémoires fur TAnatomie des poifTons. Dans le fé- cond de ces Mémoires, il y a une defcrip- tion fuccin&e de l'organe de l'ouïe. Comme cet organe n'étoit point l'objet principal du travail de M. d'Azir, il n'eft pas entré dans un aufli grand détail que M. Camper & moi. Cependant tout l'eflentiel s'y trouve , & il eft fîngulier que M. Camper & lui , fans connoître leur travail mutuel ni le mien , fe foient auflï bien rencontrés. M. d'Azir appelle conduits aqueux y les canaux que je nomme demi - circulai- res ; dans la Sole il n'a pu trouver le troi- fîeme ofTeîet que j'ai conftamment obfervé dans tous les poifTons. A cela près, ce qu'il dit fur l'organe de l'ouïe de ces animaux, eft cflentiellement fembîable au travail de M. Avertijfement. xj Camper & au mien , fi ce n'eft qu'il eft moins étendu. Cette conformité entre trois Anatomiftes qui ne fe font point concer- tés , répand un grand jour fur l'organe de l'ouïe des poifîbns , qui auparavant éroic inconnu. C'eft ce qui m'a engagé à publier ma troifieme Differtation que je tenois renfermée depuis vingt - quatre ans. Mais j'ai fait précéder les deux premières , afin d'amener infenfiblernent le Le&eur à la connoiflance de l'organe de l'ouïe des poifïbns. Cet organe plus cornpofé dans l'homme & dans les quadrupèdes , fe fim- plifie par dégrés dans la clafïe des reptiles , & parvient fucceffivement à un plus grand degré de (implicite dans les poifîbns. Si l'on paffoit brufquement de l'examen de l'oreille de l'homme à celui de celle des poifîbns , on ne pourroit guère recon- noître cette dernière, tant cet organe dans des cîaffes fi éloignées paroîc avoir peu de rapports & de relfemblances. Les reptiles femblent tenir le milieu. L'organe de l'ouïe dans ces animaux fe fimplifie par dégrés. Les premiers chaînons de cette claffe approchent des quadrupèdes pour la conformation de cet organe, tandis que les derniers reffemblent plus aux poiifons. xi] Avcrtljfcment. J'aurois défiréque mes occupations m'eu& fenc permis de me livrer de nouveau à un travail auffi curieux qu'inftru&if , & de faire de nouvelles préparations anatomi* ques , fur lesquelles on auroit refait des figures , qui remplaçant celles que j'ai per- dues , auroient facilité l'intelligence de ces Mémoires. Le tcms ne me le permettant point, je n'ai pas cru devoir biffer perdre des Differtations qui peuvent être inté- réflantes , & qui faciliteront le travail de ceux qui voudront s'occuper d'un article aufli agréable. Les préparations qu'ils fe- ront , Suppléeront aux figures qui ont été' perdues. Xllj EXTRAIT DES REGISTRES DE LA SOCIÉTÉ ROYALE DE MÉDECINE. N Ou S avons été chargés par la Société Royale de Médecine, M. Paulet Émoi,, d'examiner un Ou- vrage de M. Geoffroy, Do&eur - Régent de la Fa- culté de Médecine de Paris, ayant pour Titre ; Dif- fertatlons fur V Organe de V Ouït de V Homme , des Rep- tiles & des Poijfons. Dans la première Diflertation ^ M. Geoffroy décrit d'une manière fuccincte i'arganede rouie de l'Homme. Il paffe rapidement fur tout ce qui eft connu , & il en tire des confequences relatives à la théorie des fons & de leur perception. Ces réfultats font autant de principes , dont l'Auteur tire le plus grand parti, foit pour la comparaifon de l'oreille interne, dans les différentes clafles d'animaux , foit pour l'ex- plication dess phénomènes qu'elle préfente dans les Reptiles & dans les Poiflbns. Dans la féconde Diflertation, M.Geoffroy entre en matière , & il commence, en expofant fes découvertes fur|Porgane de l'ouïe des Reptiles. Voulant en dé- crire la ftu£hire avec méthode , il les divife en deux claffes. Dans la première , on trouve extérieurement quelque apparence de tympan ; dans la féconde, on n'en rencontre aucunes traces. Dans le Lézard , dans la Grenouille & dans le Cra- paud , on obferve à l'extérieur du crâne un efpace circulaire recouvert par une peau mince , différente 4e XIV celle de l'anima!. En enlevant cette membrane avec précaution , on rencontre deux offelets. On obferve même dans la grenouille une trompe d'Euftache tris- ouverte par proportion au volume de l'animal. L'Orvet, en latin Cecilia , la Vipère , la Couleuvre , îe Serpent d'Afie , le Salamandre aquatique & la Raye , n'ont en dehors aucune trace de tympan. La peau qui recouvre le trou auditif, eft femblable à celle dont tout le corps de l'animal eft enveloppé. M. Geoffroy a inutilement cherché le conduit demi-circulaire dans l'Orvet , dans la Vipère & dans la Couleuvre ; & ce qui peut encore induire à croire que ces conduits n'y exif- tent point, c'eft que des recherches faites avec toute l'adreffe & le foin dont M. Geoffroy eft capable , dans deux têtes de gros Serpens d'Afie , qui lui ont été don- nés par M. de Juîîîeu , n'ont pas été plus heureufes. Dans l'Orvet , il y a deux offelets , & il n'y en a qu'un dans la Vipère , dont l'organe de l'ouïe eft d'ailleurs plus enfoncé. Dans le Salamandre aquatique & dans la Raye, au lieu de petits offelets , tels que ceux dont nous venons de parler , on trouve une fubftance blanche femblable à de i'amidon. Le Salamandre a deux conduits demi- circulaires , & la Raye en a trois dans chacun defquels on trouve un conduit membraneux très-détaché du tym- pan externe qui eft de nature cartilagineufe. Dans la troifieme Differtation , M. Geoffroy a réuni tout ce qui eft relatif à l'organe de l'ouïe des Poiffons proprement dits. En foulevànt fccaille des ouïes , il a trouvé un trou bouché par une mem- brane très- fine qui y tient lieu de celle du tympan. Les Poiffons ont en général trois offelets, dont un très- petit a été appelle par Cafférius du nom d'os len- ticulaire. Les deux autres' font plus gros & ils font réunis par de petites poches ou véficules membra- neuFes qui communiquent entre elles. Klein a connu ces offelets & leur enchaînement ; mais il n'a point appercules conduits demi- circulaires que M. Geoffroy dit être au nombre de deux feulement dans l'Anguille , XV &au nombre de trois dans la Carpe & dans la Limande ; d'ailleurs on n'y trouve point de Limaçon. Tel eft le tableau abrégé des observations de M, Geoffroy; par-tout Tes deicriptions font claires , fes comparaisons font exades , & fes réflexions font lurni- neuies. Chacun de ces faits feroit précieux, même étant ifolé. Combien ne doivent-ils pas être intéreffans , étant réunis & fe prêtant un mutuel appui. L'enfem- ble fait donc le plus grand mérite de cette production., Le célèbre M. Camper a aufTi décrit l'organe de l'ouïe de plufieurs animaux. Son excellent Mémoire qui fe trouve dans le tome VI des Savans étrangers , eft fuivi de plufieurs figures qu'il a deiïinées lui-même , qui ne laiflent rien à defirer à cet égard, Uu d'entre nous à auffi décrit l'oreille interne de la Raye dans un fécond Mémoire fur l'ouïe des Poiflbns, ( Voyez le feptieme volume des Savans étrangers). Mais nous avouons bien volontiers que le travail de M. Geoffroy eft pj us com- plet. Ces descriptions nous fournirent les conféquences fuivantes, que l'on ne pouvoit attendre que de Panatomie comparée. 1°, L'organe de l'ouïe confidéré dans l'Homme , dans les Reptiles & dans les PoifTons , a de grands rapports puifque dans ces différentes efpeces d'animaux M on ren~ contre des o/felets , des membranes & des conduits demi-circulaires. 1°. Les offelets dans les Poiflbns épineux font dif- pofés comme dans l'Homme , puifqu'un touche à la membrane qui tient lieu de celle du tympan ; tandis que le dernier eft fitué près des conduits demi-circu- laires. 3°. Le Limaçon eft une partie fur-ajoutée à l'organe de l'ouïe, fans doute pour fa perfection $ mais elle n'eft pas néceffaire pour la perception des fons , puifqu'elle manque, dans les Reptiles & dans les Poiflbns ; nous pouvons même ajouter qu'elle n'eft qu'ébauchée dans les Oifeaux. 40. Les conduits demi-circulaires ont une utilité plus XVJ étendue; mais on peut dire qu'ils ne font pas abfolu- ment requis pour que les fonspuiiïènt s'y tranfmettre , puifquela Vipère & ieSerpent n'ont rien qui y reflembîe. 50. Enfin on peut conclure qu'il fuffit que la pulpe auditive foit ébranlée, pour que la perception fe rafle ; que les conduits demi-circulaires rendent cette percep- tion plus forte & plus intenfe ; que le Limaçon y ajoute encore ; que les oflelets en augmentent les împrefilons, qu'un ou plufieurs fuffifent quelquefois pour cet ébran- lement, comme dans la Vipère & dans le Serpent; qu'en- fin l'Homme, les Quadrupèdes & les Cétacées forment la première clafle des animaux , dont l'ouïe eft le plus fin & le mieux organifé -y que les Oife.aux doivent être rangés dans la féconde , les Reptiles qui ont extérieure- ment des traces de tympan dans la troifieme; les PoifTons cartilagineux dans la quatrième; les Poiflbns épineux dans la cinquième; les Poiflbns anguiliformes qui pa- roiflent n'avoir que deux conduits demi -circulaires bien formés dans la fixieme : & enfi^n les Serpens , Vipères & Couleuvres qui n'ont point de conduits-demi-circulaires apparens dans lafeptieme & dernière. Telles font les réflexions qui fe préfentent d'elles- mêmes , en parcourant les découvertes faites jufqu'ici fur l'organe de l'ouïe des divers animaux, & fur-tout les trois Diflertations de M. Geoffroy que nous penfons très-dignes de l'approbation de la Société Royale. Signés y Vicq-d'Azyr & Paulet. Je certifie que le prêtent Rapport qui a été lu dans une des Séances de la Société Royale de Médecine , eft entiè- rement conforme à V original contenu dans les Regifîresde cette Compagnie. « A Paris 9 ce zi Novembre «777. VICQ-D'AZYR, Secrétaire perpétuel de la Société Royale de Médecine. DISSERTATIONS DE L' O U ï E. PREMIERE DISSERTATION. Sur l'organe de l'Ouïe de l'homme & des quadrupèdes ; Oà Von examine "principalement la théorie de l'Ouïe & l'ufage des parties de cet organe. JL/Organe de l'ouïe eft tellement corn- pofé , & en même temps fi fin , fi déli- cat , il eft fîcué dans des parties olTeufes , où il eft fi difficile à examiner > qu'il eft étonnant que les Anatomiftes modernes ayent pu le décrire avec tant de précifïon* A a Dijftrtations Quelque foin que Ton prenne a rechercher de nouveau cet organe, quelque exa&itude & quelque attention que Ton apporte à travailler cette partie , on ne peut rien ajouter à ce qu'en on dit plufîeurs Auteurs célèbres , & fur-tout l'illuftre M. du Ver- ney. Ce travail eit tellement approfondi , qu'il paroît épuifé. Mais s'il étoit difficile de connoître parfaitement l'organe de l'ouïe , il étoic encore moins ailé d'expliquer l'ufage de fes parties. Renfermées dans une cavité oiïeufe , elles ne peuvent être fou m îles à notre travail , que lorfqu'elles ont perdu leur jfentiment & leur action, & il ne nous eft pas pofïïble de les voir agir. D'ailleurs, .comment découvrir le jeu d'une machine compofée, dont une partie des refïbtts peut à peine s'appercevoir, Aufîi le même M. du Verney , malgré le grand nombre d'ex- cellentes chofes qu'il a données fur cet article , avoue-t-il qu'il n'eft pas fatisfait de ce qu'il en a dit ( i ). Valfava ( 2 ) , qui depuis a travaillé ( t ) Traité de l'organe de l'ouïe. Paris, 1683, in-ii.Âverriirement ,page V. ( 1 ) Valfava, de aure humana. Trajedi, 1707, fur F organe de Foule. 3 cette même matière, a laiffé pareillement plufieurs particularités à découvrir , & les différens Auteurs , qui enfuite ont parlé de l'ouïe & de fon organe , n'ont rien ajouté d'efTentiel à ce qu'avoient dit ces grands Anatomiftes. Il eft des génies fupé- rieurs, qui approfondifTent tellement les fujets qu'ils traitent, qu'il eft prefque im- poffible de trouver quelque chofe de nou- veau, lorfqu'on veut les examiner après eux. Audi ce feroit une témérité de croire pouvoir donner quelque découverte fur la théorie de l'ouïe , fi Ton s'en tenoit aux moyens , dont fe font fervi ces grands hommes. Mais il en eft d'autres qui peu- vent fournir de nouvelles vues , & qui, mis autrefois en ufage par les Anatomiftes , ont paru trop négligés pendant quelque temps. Ce font ceux que nous fournit fana- tomie comparée. Ce travail pris dans toute fon étendue & fuivi avec exa&itude, peut frayer des routes nouvelles, pour conduire à connoître l'ufage de plufieurs parties du corps humain. En eifet , fi dans un organe auffi compofé que celui de l'oreille , on voit plufieurs parties de cet organe man- quer les unes dans une clafTe , les autres dans une fe£tion entière d'animaux , tandis ^ T)ifftrtatlons que quelques autres fe rencontrent conf- tamment dans toutes les dalles , tous les genres & toutes les efpeces ; ne doit -on pas être afïuré que ces dernières font eflen- tieiles a l'action de cet organe , au lieu que l'ufage des premières n'efl: pas au/Ti nécef- faire, & fournit fimplement quelque uti- lité? De plus, la manière de vivre & difle^ rentes circonstances propres aux animaux dans lefquels manquent certaines parties , peuvent aider à reccnnoître de quelle uti- lité particulière (ont ces parries dans ceux auxquels la natuî*e les a accordées. Tel eft le plan que je me fuis formé , pour établir l'ufage des différentes parties de l'oreille qui concourent a la perception du Ion. J'ai cru devoir traiter cette ma- tière avant que d'examiner l'organe de l'ouïe des reptiles & des poifïbns ; on verra par ce moyen que leur organe , quoique beaucoup plus fimple & moins compliqué que celui de l'homme &c des quadrupèdes, renferme néanmoins les par- ties eiTentielles pour percevoir les fons , oc que ces animaux ne font pas privés de ce fens, quoique peut-être moins diftind: êc •moins parfait. Mais avant que d'entrer en matière > je fur V organe de Fouie. \ Croîs nécefTaire de rappeller en peu de mots la ftru£ture de l'organe de l'ouïe. Cette defeription fera très-fuccinde, n'é- tant pas le but principal de mon travail , & cet organe ayant été décrit avec foin par beaucoup d'Anatomiftes. L'oreille fe divife en externe & en in- terne. On appelle oreille externe , toyte cette partie extérieure compofée d'un car- tilage couvert par la graifTe & la peau , qui forme différens plis & replis. Ce car- tilage a quelques petits mufcles , qui peu- vent lui donner de légers mouvemens , quoiqu'il foie bien plus immobile dans l'homme que dans les animaux. Outre cette partie , l'oreille externe comprend auffi le conduit auditif jufqu'à la mem- brane du tympan, qui fépare l'oreille ex- terne & l'oreille interne. Cette dernière eft compofée de deux cavités. La première 6c la plus extérieure eft la caifie du tympan. C'eft dans cette cavité que font renfermés les trois oftelets de l'ouïe. Elle a en devant une ouverture large , prefque circulaire > qui eft fermée par la membrane du tym- pan , & par laquelle elle communique avec le conduit auditif Poftérieurement elle en a deux autres > que l'on nomme fenê- A iij 6 Dtjfertations très ronde & ovale ; enfin elle en a unô quatrième vers fa partie inférieure & an- térieure, à laquelle fe termine la trompe d'Buftache. Toute cette cavité eft revêtue d'une membrane ou période > qui forme la lame poftérieure de la membrane du tympan, de même que la lame antérieure de cette membrane eft une fuite & une continuation de l'épidémie , qui garnie l'oreille extérieure & le conduit au- ditif. Mais ce qui mérite le plus d'attention dans cette partie , ce font les trois ofle- Icts , partie efTentielîe à l'organe de l'ouïe , quoique quelques perfonnes ayent pu en- tendre fans ces oflelets , ainfi que M. Bertin en donne un exemple dans fon Oftéologie. Ces trois ofTelets font le marteau , l'en- clume & récrier , auxquels d'autres en ajoutent un quatrième, qu'ils appellent l'os lenticulaire, mais qui dans le fond paroîc n'être qu'une épiphyfe de l'enclume. Le marteau compofé d'une tête & d'un man- che avec deux apophyfes , l'une plus lon- gue & l'autre plus courte & plus grofle , eft fi tué prefque perpendiculairement. Sa tête eft enchâffée dans la partie fupérieure de la caifte , & fon manche eft cçllé con- fur Vovgant de Vouït. * tre la membrane du tympan. Cet ofTelet a un mufcle deftiné à le faire agir. L'en- clume ; compofée d'un corps &c de deux jambes , s'articule par fon corps avec la tête du marteau , & par fa plus longue jambe , à. laquelle fe trouve fos lenticu- laire , ou l'épiphyfe , dont nous parlions ci-deffus, elle va s'articuler avec l'étrier. Ce dernier , ainfi nommé à caufe de fa forme, eft joint par le haut avec la lon- gue jambe de l'enclume ; & fa bafe pleine , en forme de platine, ferme exactement la fenêtre ovale. Cet oflelet a auffi un mufcle, qui s'attachant à fa tête , fert à le faire agir. La féconde, ou dernière cavité de Po- reille interne, eft le labyrinthe. Ce labyrinr the eft compofé de trois parties , le vefti- bule , les canaux demi - circulaires & le limaçon. Le limaçon , ainfi nommé à caufe de fa figure , eft formé de deux fpirales & demie , tournantes à l'entour d'un noyau. Mais ce canal en fpirale n'eft pas fimple : il eft divifé en deux par une lame , moitié ofleufe & moitié membraneufe , & par cette divifion il forme deux rampes, dont la fupérieure s'ouvre dans le veftibule , & la féconde communique avec la caiffe du A iv S Dijfcrtations tympan par la fenêtre ronde. Nous entre* rons dans un plus grand détail de ces diffé- rentes parties , en parlant de leur ufage. La cavité du veftibuîe, outre l'ouverture de la rampe fupérieure du limaçon , en a une autre dans fa partie antérieure , que Ton nomme la fenêtre ovale , & que nous avons dit être fermée par la bafe de fétrier. L'on apperçoit de plus cinq autres trous , par lefquels les extrémités des trois ca- naux demi-circulaires communiquent avec le veftibuîe , deux de ces canaux fe joi- gnant enfernble par leurs extrémités , qui n'ont qu'une feule ouverture commune. Enfin il y a une dernière ouverture par- tagée en deux , par laquelle la portion molle du nerf auditif y pénétrant dans le veftibuîe , fe divife en deux 'branches. Ce nerf garnit l'intérieur du veftibuîe , & des canaux demi - circulaires y tandis qu'une autre de fes divifîons , pénétrant dans le noyau du limaçon , va fe diftribuer dans la membrane, qui fépare fcs deux rampes. Nous ne nous étendrons pas davantage fur la defcription de cet organe. Il fuffit d'avoir donné la ftru&ure & la pofîtion de chacune de fcs parties en général , pour former un eofembie , qui puiflç iixer les fur V organe de Fouie. y idées , lorfque nous parlerons de chaque partie en particulier, & que nous détail- lerons fes ufages. Nous fuivrons dans cette féconde partie de notre travail , le même ordre a peu près que nous avons pris en détaillant l'or- gane de fouie , & nous commencerons par parler de l'oreille externe. Tous les Anatomiftes & les Phyfïciens font d'accord que cette efpece de pavil- lon , que Ton nomme oreille externe, fert à ramaffer les fons , & à les diriger par le conduit auditif fur la membrane du tym- pan. Mais pourquoi cette partie a- t- elle tant de replis dans l'homme , tandis que dans les quadrupèdes elle paraît beaucoup plus fimple ? C'eft ce qu'il s'agit d'exa- miner. Les ondulations de l'air , qui produi- fent le fon , ou qui du moins fervent à le tranfmettre, ont été comparées il y a déjà long-temps à celles que l'on obferve dans l'eau , lorfqu'on y a jette quelque corps, ou excité quelque mouvement. Ces ondu- lations, partant du corps fonore , comme d'un centre , fe répandent dans l'air des environs , allant en s'affoiblifTant à mefure qu'elles s'éloignent de ce centre. Le corps io Dijfertations fonore eft donc comme un point , d'oif part une infinité de rayons , dont le mou- vement progreffif s'affoiblit également dans tous, à moins que quelque caufe l'in- terceptant , ne f arrête , ou ne le diminue dans quelques uns. On a regardé ces rayons fonores , comme moins dire&s que ceux de la lumière, & une expérience bien (im- pie femble d'abord le prouver. En effet, le moindre obftacle arrête & intercepte les rayons lumineux, au lieu que les corps les plus folides ne nous empêchent fouvent pas d'entendre , quoiqu'interpofés entre le corps fonore & notre oreille. Mais il eft aifé de fe convaincre que ces rayons ne font pas moins dire&s que ceux de la lu- mière , fi on fait réflexion que la plupart des corps font fuceptibles du même mou- vement d'ondulation , qu'excite dans l'air le corps fonore , & que par conféquent ils peuvent fervir d'intermède pour com- muniquer à l'air de l'autre côté , à celui qui eft entre eux & notre oreille , ces mêmes ofcillatîons , quoique plus ou moins affoiblies. C'eft ce que fçavent les Phyfi- ciens, & ce que prouve l'expérience des verres & des vitres , qui fe caftent quel- quefois au feul fon de la voix. Ainfi rien fur F organe de Pouïe. % % ne nous empêche de penfer que les rayons fonores font dire&s , & aufli direéfo que ceux de la lumière, Cela pofé, fi l'homme avoir été dépourvu de l'oreille extérieure , il n'y auroit eu qu'une très-petite quantité de rayons fono- res, qui euflent pu enfiler le conduit auditif. Le fon auroit été foibie & peu diftind y & l'homme né pour la fociété & la con- verfation avec fes femblables , avoit befoin d'entendre plus clairement & plus diftinc- tement que les autres animaux. Ceux-ci , dont l'oreille externe eft autrement con- formée que la nôtre , qui ont une efpece de cône tronqué , ont reçu de la nature un fupplément à ce qui leur manquoit du côté de la conformation de cette partie. Leur oreille eft mobile , ils peuvent par la contra&ion dedifférens mufcles, la diriger vers l'endroit d'où part le fon , en forte qu'une grande quantité de rayons fonores enfile le canal auditif. Mais il n'en eft pas de même de l'homme. Malgré les trois petits mufcles , l'un fupérieur y l'autre pof- térieur , & le troifieme antérieur , dont eft pourvue foreiile, elle eft prefque im- mobile , & il rifquoit de perdre une grande partie des fons. Mais les plis & les émi- / 12 Dïjfertationï nences > que forme le pavillon de Poreiïfe* les arrêtent, les réfléchirent , & les diri- gent vers l'embouchure du canal auditif C'eft ce que Ton conçoit aifément en con- fîdérant cette partie , & en examinant fur- tout avec quel art toutes ces éminences par leur pofition dirigent le fon vers l'ou- verture du canal , comme vers un centre commun, en forte qu'il échappe à l'oreille très-peu des rayons fonores , qui tombent fur fon pavillon. Cette première conformation doit d'a- bord nous prouver que l'homme eft celui de tous les animaux , qui reçoit propor- tionnément l'impreffion d'une quantité plus grande de fons , l'oreille des quadru- pèdes n'étant pas configurée fi avantageu- sement. De plus , les oifeaux , les reptiles , & les poiflbns, dans lefquels cette partie extérieure manque totalement , doivent admettre moins de rayons fonores que les quadrupèdes. Peut-être cependant les os minces du crâne des oifeaux , qui font très-fufceptibles des vibrations du fon , peuvent - ils compenfer en partie ce qui leur manque , & leur donner l'ouïe plus fine & plus diftinde. Les rayons fonores , ayant enfilé l'ou- fur V organe de Fouie. 13 verture de l'oreille , parcourent aifément le canal auditif. Mais avant que d'aller plus loin , il faut confidérer ce conduit. Formé en partie par un cartilage , & en partie oïfeux , il eft recouvert d'une peau, dans laquelle eft une infinité de glandes , qui fourniflent une humeur on&ueule, épailfe & cérumineufe , dont fes parois font en- duites. Déplus ce canal n'eft pas droit , il eft oblique , toutes circonstances , qui con- courent a la perfection de F ouïe. En effet , outre Fimpreffion moins vive, qu'excite fur le tympan l'air porté par un canal obli- que , & la fureté de cette partie , dont l'entrée eft fermée aux infectes & aux corps étrangers , qui voulant s'y intro- duire y font arrêtés par cette matière céru- mineufe , il réfulte encore de ces deux circonstances deux avantages. Première- ment l'obliquité du canal fert a réfléchir, & concentrer pour ain(i dire de plus en plus les rayons fonores , & la matière qui enduit le conduit contribue par fa confif- tance à empêcher une imprefîion inutile & peut-être nuifible , qu'exciteroient fur les parois .du conduit, les rayons & les vibra- tions du fon. Il n'eft perfonne, qui, après s'être nétoyé cette partie avec trop de foin, ï4 Dîjfcrtatîons n'ait quelquefois éprouvé une perception du fon trop aiguë & trop vive. Le car- tilage 3 qui compofe en partie le conduit auditif , eft très-fufceptible de f impreflïon des rayons fonores , & les vibrations , qui y font excitées, rendent le fon plus écla- tant , mais moins diftin&. La matière épaifle & moîle, qui tapi/Te ce conduit, amortit cette irnprelfion , & le fon ne porte principalement fon action , que fur la mem- brane du tympan. Cette dernière membrane , fans être abfolument effentielle à la perception des fons , puifqu'elle manque dans plufieurs animaux, qui ne lailTent pas que d'enten- dre, eft néanmoins très-utile pour enten- dre diftin&ement. En effet, elle n'eft pas feulement agitée par l'air, comme l'eft la peau d'un tambour, fur laquelle on frappe, &c qui ne peut rendre qu'une efpece de fon ; mais elle peut être plus ou moins ten- due , plus ou moins lâche , & par-là elle fe met à l'uniffon de tous les tons poffibles. C'eft ce qui s'exécute par l'intermède du marteau , dont le manche eft adhérent a la partie intérieure de cette membrane. Cet oiïelet , articulé avec l'enclume , & placé par fa partie fupérieure dans un en- fur l'organe de l'ouïe. i^j Concernent , eft mobile, & peut exécuter différens mouvemens par le moyen du mufcle, qui lui eft propre. Ainfi , fuivanc îes différens tons du fon, qui vient frapper l'oreille, cts mufcles fe contractent fym- pathiquement , & tirant plus ou moins le marteau , tendent où relâchent la mem- brane du tambour. Cette aétion fympathi- que de cts mufcles paroît d'abord un peu légèrement fuppofée , mais dans le fond elle n'eft pas plus difficile à expliquer que les contractions fpafmodiques de tant d'au- tres mufcles , tels que ceux de la refpira- tion dans l'éternument , le bâillement, &c. & le mouvement du cœur lui-même. D'ailleurs on peut même parvenir à en donner une explication au moins proba- ble, fi Ton fait attention a la distribution des nerfs de l'oreille. Les mufcles des ofle- lets reçoivent des fibrilles nerveufes de ce petit rameau de la cinquième paire, qui rentrant dans la caiffe , & pafTant derrière la membrane du tympan , eft connu fous le nom de corde du tympan. Ce rameau nerveux fe joint à la portion dure du nerf auditif , avant fa fortie de l'oreille entre les apophyfes ftyloïde & maftoïde , & cette portion dure du nerf auditif fe diftri- i£ Dijfertatlons bue dans toutes les parties de l'oreille eX~ terne. Cette communication des nerfs qui vont aux mufcîes du marteau avec ceux de l'oreille extérieure étant connue , ne peut - on pas penfer que l'a&ion de l'air fonore fur le pavillon & fur toute foreille extérieure peut exciter fur les nerfs de certe partie des vibrations , qui fe com- muniquant à la corde du tambour & aux fibres qu'elle fournit aux mufcles du mar- teau, fait contracter cts mufcles, & cela plus ou moins , fuivant les modifications du fon. Delà vient la tenfion plus ou moins grande de la membrane du tympan, fui- vant les difFérens fons. On peut objecter à ce que nous difons, qu'il y a plufieurs animaux , tels que la Tortue, les Grenouilles, &c. dont le tym- pan épais & cartilagineux ne peut être plus ou moins tendu. Mais cette objection n'anéantie point l'ufage que nous attri- buons à la membrane du tympan. Ces ani- maux doivent entendre moins diftin&e- ment , & fans doute qu'il leur fufïit d'en- tendre le fon , fans distinguer toutes {os inflexions. D'ailleurs il peut même y avoir un peu plus ou moins de tenfion dans le tympan de ces animaux. Ce tympan, un fur r organe de Voiîie. ty un peu moins large que l'ouverture qu'il Ferme , n'eft pas absolument immobile. Il tient à la circonférence de l'ouverture par l'intermède d'une membrane , qui peut être tendue ou relâchée , & par confé- quent il peut fervir à faire diftinguer les fons y moins parfaitement cependant que dans l'homme & les quadrupèdes. La membrane du tympan reçoit donc rimpreffion du fon,& il s'excite en elle des vibrations plus ou moins vives, fui- vant que ce fon eft plus aigu ou plus grave. C'eft ce que tout le monde conçoit aifément. Ces vibrations qui font à l'unif- fon avec les rayons fonores , agirent ôc communiquent la même imprefîion à l'air contenu dans la cavité de la caifTe , qui , communiquant avec celle du labyrinthe par le moyen de la fenêtre ronde , eft une première caufe de la propagation du fon jufqu'à cette partie. De plus, l'agitation de la membrane du tympan excite des fecouk fes y & les mêmes impreflions fur le man- che du marteau , celui-ci les communique à l'enclume à laquelle il s'articule , & cette dernière fait agir l'étrier , qui lui eft atta- ché , & dont la bafe ferme la fenêtre ovale ; féconde caufe de la communication du fou B îS T>iJfcrtatïons au labyrinthe. Nous allons examiner ces deux articles plus en détail. De même que l'air agité par les rayons fonores communique fes vibrations à tous les corps qu'il frappe , pourvu qu'ils en foient fufceptibles , il peut auflï recevoir ces mêmes vibrations par l'intermède de ces corps. Que Ton fafle fonner une clo- chette dans un récipient de verre , dont l'air n'eft pas entièrement pompé, elle fe fait entendre au dehors, quoique l'air con- tenu dans le récipient n'ait aucune com- munication avec l'air extérieur. Dans ce cas la propagation du fon ne peut fe faire que par l'intermède du verre y qui , rece- vant les vibrations de l'air intérieur , les communique à celui du dehors. La même chofe, ou, pour mieux dire, Finverfe arrive à l'air contenu dans la cavité de la caifîe de l'oreille. L'air extérieur frappe & agite le tympan, & celui-ci tranfmet ces mêmes vibrations à l'air de la caifîe. Mais non- feulement ces vibrations font communi- quées à l'inférieur, elles font de plus aug- mentées par là réflexion. Car l'intérieur de cette cavité n'efi pas lifîe ftr uni ; il eft inégal 6c raboteux. Or on fait combien cette conformation eft propre a réfléchir le fur P organe de Pouïe. i$ fon. On en a la preuve journalière dans i'infpection feule des endroits où il y a des échecs Ainfi le fon devient plus fore par cette réflexion, &, agit davantage fur la membrane qui tapiïïe la fenêtre ronde. Cette fenêtre, qui donne entrée dans la rampe inférieure du limaçon , communi- que à cette partie les impreffions du fon f les ondulations de l'air extérieur , & c eft une des voies par lefquelles le fon fe tranfmet jufqu'au labyrinthe. Avant que de paffer à la féconde voie , nous avons encore quelques circonftances à examiner par rapport à la caifle du tympan. Cette cavité , outre les ouvertures donc nous venons de parler , a encore deux au«- très conduits , dont nous avons fait men* tion dans la première partie de ce mémoire. L'un communique dans la cavité de l'a- pophyfe maftoïde ; l'autre fe nomme la trompe d'Euftache. M, du Verney leur attribue a l'un & à l'autre des ufages, qui d'abord paroiffent probables. Il veut que les cavités & finuofités de fapophyfe maftoïde fervent k recevoir l'air contenu dans la caiffe, lorfque cet air efi plus com- primé par la tenfîon de la peau du tam- bour, qui eft tirée en dedans , & que le B ii 20 Dijfcrtatïonf retour de ce même air dans la cavité de la caifle ferve à remettre cette peau dans fon état naturel , lorfque le relâchement fuc- cede à la tenfion. Autrement, dit-il, le mouvement de cette même peau pourroit bi n être empêché par le rejfort & la réfifl tance de Vairt s'il ne trouvoit point d'if- Jue. Quant à la trompe , ou cet autre canal qui va du palais à l'oreille, le même Auteur lui attribue l'ufage de renouveller l'air contenu dans la cavité de la caifle , & en même temps il en combat un autre, que la plupart des Anatomiftes lui avoient affigné, je veux dire celui de tranfmettre en partie le fon à cette cavité du tympan. Mais fi on examine avec attention les ufages que M. du Verney attribue à ces deux conduits , i! femble qu'ils fe com- battent l'un Faurre. En effet, fil'airpeut s'inrroduire par la trompe dans la cavité de la caifle , s il peut fe renouveller par ce con- duit , il peut également fortir par cette voie, lorfqu il efi comprimé. Il étoit donc inutile que la nature lui aflignât une autre cavité, où il pût fe retirer en cas de corn- preffion ; il fuffifoit qu'il pût s'échapper par 4a trompe, fans enfiler les finuofités de î^pophyfe maftoïde. Ce nouvel entrepôt fur F organe de Voiiïe. it n'etoit donc pas nécefTaire. D'ailleurs ces fînuofités communiquant avec la caifTe du tympan , font toujours remplies d'air j qui eft dans le même degré de comprefîion + que celui de cette cavité. Elles ne peuvent donc fervir de retraite à Tair de la caille, lorfqu'il eft comprimé.; feulement la com- preffion s'exerce également fur celui qu'el- les contiennent , & la difficulté, qui refaite de cette comprefiion , ainfi que du reffort & de la réfittance de Tair , fubfifteroiten fon entier , s'il ne trouvoit point d'autre iflue par la trompe. Cet ufage attribué aux Jinuofités de l'apophyfe maftoïde , parole donc trop légèrement fuppoié. Peut-être pourroit-on leur en affigner un autre plus probable , en fuppofant qu'elles fervent k augmenter les réflexions de Tair & du fon dans la caifTe. Plus la cavité de la caifTe fera agrandie, plus elle aura d'inégalités, de fînuofités, d'inflexions; & plus l'air y fouffrira de reflexions, plus aufïi le fon ac- quera de force > & c'eft ce que peuvent produire ces fînuofités de Tapophyfe maf- toïde. Je ne fais que propofer cette idée , & je n'oferois la fubftituer au fentiment de M. du Verney , fi elle ne me paroifToit plus conforme à la ftructure des parties. Il B iij 22 ' Diffcrtatîons réfulteroit delà , que les cavités de fapo-i phyfe maftoïdeauroientla même fon&ion; que toute la cavité de la caiffe dont elles feroient partie, & que le fon ayant acquis plus de force, en étant réfléchi dans ces différentes finuofités,, agiroit plus vive- ment fur la feriêtre ronde, qui Communi- que au labyrinthe. Quant à la trompe , cet autre conduit qui va du palais k la cavité de la caifle , il eft très - vraifemblable , comme le penfe M. du Verney , qu'il fert à renouveller l'air de cette partie. Chacun peut s'en aflu- rer par une expérience très-aifée. Si fon tient la bouche fermée , & que relevant le voile du palais , comme on le fait r quand on veut avaler , on vienne à expirer, ou du moins k faire un effort pour expirer , l'air ne trouvant point d'iflue pour fortir ', enfile en grande quantité la trompe : ce que fon fent fur le champ par un bour- donnement d'oreille , accompagné d'un mouvement & d'un bruit léger dans la membrane du tympan. Ce fait prouve auffi que l'air peut aifément fortir de la. caifle par ce conduit. Car dès que l'on vient k expirer , le bourdonnement cefle. Ainfî non- feulement l'air de la caifle peut fe fur V organe de Vouie. 1$ renouveller par la trompe , mais il peut auffi trouver par cette voie une iflue courte & facile, lorsqu'il eft comprimé, fans qu'il foit néceffaire de recourir pour cet effet aux finuofités de Papophyfe maftoïde. Mais fi l'air peut aifément entrer dans la caifle 6c en fortir par le moyen de la trompe , il paroîc naturel de penfer que les vibrations & les ondulations de l'air fonore , peuvent auffi lui être communi- quées par la même voie , & que le fon peut être tranfmis à l'organe de l'ouïe , au moins en partie , & dans certains cas par ce conduit. C'eft ce que beaucoup d'Au- teurs ont penfé, & ce que M. du Verney paroît nier ( i ). Prefquc tout le monde , dit-il , croit que ce/l par le moyen de ce canal, que certains four ds peuvent en- tendre le fon des injlrumens à corde > & que leur furdité conf fiant en ce que la peau du tambour ne fait plus fes fonc- tions , il ne faut pas s'étonner fi les trem* blemens de Vair extérieur fe communi- quant à celui de la caijfe par le moyen de ce canal , ces gens-là ne laijfent pas - — | * — i — — — m ( i ) Organe de l'ouïe , parr. II. page 89- Paris, 16%$) in-iz. B iv $4 Dijfertatîons d'entendre le fon d'un infiniment. 1/ Au-* teur combat cette opinion , fondé fur ce que ces fourds font obligés , pour enten- dre , de ferrer le manche de l'inftrumerïÉ entre leurs dents, ce qui lui paroît prou- ver que c'eft le tremblement de Finftru- fnent , qui fe communique aux mâchoi- res , aux os des tempes , ôc aux oflelets de l'ouïe y & non les vibrations de l'air , qui font portées dans la caifTe par la trompe. Mais qu'il nous foit permis d'examiner le fentiment de M. du Verney , & de nous y arrêter un moment. Plus les idées des grands hommes ont de poids & font ref- pe&ables, plus elles demandent d'être rec- tifiées, lorfqu'eiles ne paroiffbnt pas con- formes à la vérité. J'accorde à M. du Ver- ney , que le mouvement & l'ébranlement caufé dans les os pierreux , peut fuppléer à ce qui manque du côté de l'organe dans l'expérience qu'il apporte. Mais s'enfuit-il delà que la trompe ne puiffe fervir à tranf- mettre le fon? Nullement. Il faudrait pour cet effet prouver que dans tous les cas , où fon a fait l'expérience qu'il rapporte , la furdité venoit d'un défiut dans la mem- brane du tympan. C'eft ce qui peut être plus rare qu'on ne penfe. En effet } la fur- fur V organe de Vouitl if àité peut fouvent venir par la paraîyfîe du nerf acouftique, ou par dérangement dans l'organe immédiat de l'ouïe , dans le laby- rinthe. Dans ces derniers cas , l'expérience alléguée ne prouve rien , puifque l'air tranfmis , foit par la trompe , foit par le nerf auditif, ne peut exciter aucune fen- fation. Mais la furdité produite pair le feul défaut dans le tympan, eft beaucoup plus rare. Un grand Anatomifte , M. Ferrein , rapportoic dans fes leçons publiques une obfervation d'un homme qu'il avoit vu , & qui ne laiffbit pas d'entendre , moins diftinctement à la vérité, quoique la mem- brane du tambour eût été détruite par maladie. De plus , cette partie n'eft pas ab- folurnent effentielle à l'ouïe , puifqu'elle manque dans plufîeurs animaux. Il paroît donc qu'au moins la furdité produite par le vice de cette membrane eft rare, & ce ne feroit cependant que dans ce feul cas , où l'expérience rapportée par M. du Ver- ney pourroit prouver fon fentimenc. Dans les autres , lorfque l'organe immédiat de l'ouïe , ou le nerf auditif eft aife&é , on ne peut fa voir fi le fon fe tranfmet par la trompe , puifque , quand même il fe tranf- mettrait , l'organe n'en pourroit point rece- voir les imprefiïons. 2, 6 Eijfertatioiis Mais fi cette expérience ne prouve point le fentimçnt de M. du Verney > plusieurs raifons concourent a prouver le nôtre. Nous ne nous arrêterons point ici à celles que Ton a déjà rapportées plufieurs fois , de ces gens , qui , pour mieux entendre un concert , ouvrent la bouche par un mou- vement naturel ; nous ne répéterons point non plus ce que nous avons déjà dit plus haut , que l'air entrant & fortant par la trompe , de l'aveu même de M. du Ver- ney , il devoir par conféquent tranfmettre le fon à la caifle : nous nous bornerons à des faits tirés de TAnatomie comparée» Cette voie eft la plus sûre que Ton puifîe admettre en Phyfîque. Si on examine les reptiles ou amphibies , on verra que plu- fieurs de ces animaux ont un conduit fem- blable à la trompe d'Euftache, qui fe trouve dans l'homme & les quadrupèdes. Dans d'autres au contraire on ne le rencontre point. Cette diverfité qui paroît fînguliere dans des animaux de la même clafTe , ne Teft plus autant, lorfqu'on vient àexami^ ner le tympan de ces mêmes animaux. Ceux qui ont une trompe , comme les Grenouilles, les Tortues, le Caméléon, ont un tympan cartilagineux fort épais 2 fur Vorgane de Pouïe. 17 eu --même n'ont aucune marqué extérieure de l'ouïe. Cette trompe efl: fort large, & paroît fuppléer à ce qui manque du côté de l'organe extérieur. D'autres au con- traire , qui ont un tympan mince & déli- cat, comme les Lézards , n'ont point de conduit correfpondant h la trompe. Il paroît donc que ce conduit fert à tranf- mettre le Ton jufqu'à l'organe immédiat de l'ouïe dans cette claiTe d'animaux. C'eft ce que je démontrerai plus amplement dans la differtation fuivante. Mais fi ce conduit a un pareil ufage dans. les amphi- bies, pourquoi ne Tauroit-il pas dans les quadrupèdes ? La nature ett uniforme ., & Jes parties correfpon dames dans les diffé- rens animaux , ont ordinairement la. même fondion D'ailleurs Valfava ( 1 ) affure •qui fi l'ouverture; de la trompe vient à fe fermer, rla furdité furvient , preuve cer- taine de fa néceffité pour l'intromiffion & lafortie de fair du tympan. On peut donc afTurer que la trompe peut fuppléer dans certains cas à l'a&ion de la peau du tambour , qu elle peut tranfmet- tre, au moins en partie , l'air dans la cavité { x ) Valfava , cap. V. page 9a. a 8 Dijfcrtationi de la caîfle , & que cet air tranfmïs pai? l'une ou l'autre de ces deux voies , agiflant fur h membrane de la fenêtre ronde , com- munique au labyrinthe Tadion du fon* Telle eft la première voie, par laquelle ette impre/ïion eft reçue dans le labyrinthe. II en eft une autre non moins eilentielle ; c'eft celle qui fe fait par l'intermède des ofteicts. Le premier de ces oflelets \ lé marteau , eft enel âflfé par fa partie Ja plus greffe, que 1 on nomme fa tête , dans l'os qui forme la voûte de la caiffe. Arrêté dâtis cet endroit , il eft néanmoins fufeep- tibie de mouvemens , & ion manche , qui elt collé à la peau du tambour , obéit aux trémouflemens de cette membrane , lorf- qu elle eft agitée par les vibrations de fair. Ces trémouftemens font plus ou moins vifs dans l'un & dans l'autre , fuivant que le fon eft plus ou moins aigu. Mais lorfque cet ofleler fe trouve ainfî mis en mouve- ment , il communique bientôt la même impreffion à l'enclume, qui eft articulée avec fa partie fupérieure. Celle-ci tranf- met le même mouvement à rétrier, auquel elle eft attachée par fa jambe la plus lon- gue , & ceîiû-ci communique cette même luïpi'tdlioà au labyrinthe , par la fenêtr* fur l'organe de Fouie! %$ ovale que ferme fabafe. Ainfi les mouve«r mens du tympan parviennent , comme par une efpece de chaîne , jufqu'à cette fenê- tre du labyrinthe. Ce jeu des oflelets, qui ne paroît pas confidérable , eft augmenté par leurs articulations, & fur- tout par la pofition de l'enclume. Cette dernière , af* ticulée par fon corps avec la tête du mar- teau , a deux branches mobiles. Le corps de cet oflelet eft comme le centre de fon mouvement ; d'où fon conçoit que , quoi- que ce mouvement foit peu confidérable, il le fera davantage dans fes branches , a proportion de leur longueur. Elles font ici l'office des branches d'un levier. Par con- féquent le mouvement de l'étrier fera d'au- tant plus fenfible , qu'if eft articulé à la plus longue des deux jambes de l'enclume. Ce mouvement peut varier à l'infini , fui- vant les differens tons, & il étoit nécef- faire pour cet effet qu'il fût d'une certaine étendue. Nous voici parvenus à la dernière cavité de l'oreille , au labyrinthe , dans lequel fe trouve renfermé l'organe immédiat de 11 ouïe. Les autres parties que nous avons exa- minées jufqu'ici , neparoiffenc avoir d'autre $o Di/fertations ufage , que de tranfmettre le fon au lâby-» rinthe. Celui-ci au contraire eft deftiné uniquement a le recevoir, & à en commune querTiâTipreilionau cerveau , par le moyen du nerf auditif, qui tapifle une grande partie de fon intérieur. Mais toutes les par- ties qui compofent le labyrinthe, ne font pas également eflentielles à la perception^ du fon. C'eft ce que nous allons voir , en les examinait en particulier. On peut divifer tout le labyrinthe en trois différentes parties ; fçavoir , le vefti- bule , les canaux demi - circulaires & le limaçon. Le veftibule, ainfî nommé, parce qu'il fert d'entrée pour parvenir aux canaux demi-circulaires , & à la rampe fupérieure du limaçon, reçoit faction du fon parla fenêtre ovale. Cette fenêtre eft fermée par la bafe du dernier ofïeîet, ou de Tétrier ; & c'eft par le mouvement de cet oflelet, que le fon eft communiqué à la cavité du veftibule* Pour comprendre cette a&ion, il faut fe rappeller que la bafe de Terrier n'eft point immobile dans l'ouverture de la fenêtre ovale, qu'elle ne la ferme point exactement, mais qu'elle tient à fes bords par une membrane, qui eft une produ&ion du période > dont tout l'intérieur du vefti-S fur V organe de Fouie. 3 r feule eft tapifle. Par ce moyen, Tétrier étant plus ou moins agité fuivant les tons & les modifications différentes du fon , fa bafe fuit les mêmes mouvemens ; ce qui com- munique le fon à l'air enfermé dans la ca- vité du veftibule. Mais|comme, d'un côté, la rampe fupérieure du limaçon , &, de l'au- tre , les trois canaux demi-circulaires s'ou- vrent dans le veftibule , l'air ne peut être agité dans cette cavité , qu'il ne le foit bientôt dans ces autres parties. En même temps il fe fait une pareille commotion dans l'air contenu dans la rampe inférieure du limaçon par le moyen de la fenêtre ronde , & de l'agitation de la membrane qui la ferme ; en forte que les nerfs de tou- tes ces parties reçoivent les inîpreflïons du fon, Refte à feavoir comment ils la recoi- vent, & quelle eft la partie abfolument efTentielle à l'ouïe. Si l'on examine le labyrinthe de l'oreille des différentes claffes d'animaux , on verra que Thomme & les quadrupèdes font les feuls qui ayent un veftibule , des canaux demi-circulaires & un limaçon. Les poif- fons , les oifeaux & les reptiles n'ont point cette dernière partie ; ils n'ont qu'un veftibule & deux ou trois, canaux demi- 32 Dîjflrtatlo'ns circulaires garnis d'un nerf auditi£ Le lima-* çon ne paroît donc pas conftituer l'organe immédiat de l'ouïe , au moins il ne le conC* tirue pas feul.Ce font les canaux demi-cir- cuiaires & le veftibule , qui font l'organe propre de l'ouïe, du moins dans la plupart des animaux Ces parties font les unes & les autres garnies du nerf acouftique , qui reçoit Pimpreffion de l'air contenu dans leur cavité , à peu près comme l'expan- fion du nerf optique , que l'on nomme la rétine, reçoit celle des rayons lumineux; La première imprefïion fe fait dans le veftibule même. Mais fi elleétoit feule, la perception du fon ne feroit pas alfez diftin&e , & c eft à quoi fuppléent les ca- naux demi- circulaires dans tous les ani- maux , & de plus y dans quelques-uns , le limaçon. Ces canaux formés par une lame ofTeufe compacte , qu'entoure une partie plus fpon- gieufe , qui s'en fépare aifément dans les jeunes fujets, font par-là capables de rece- voir les trémouiïemens du fon. Déplus, leur figure eft encore propre à augmenter cet effet. Larges à leurs ouvertures , & allant en diminuant vers leur milieu , ils peuvent être confidérés comme compofés duo fur V organe de Vouée. 33 d'un grand nombre de cercles offeux, qui vont en diminuant par des gradations im- perceptibles. Chacun de ces cercles fera donc à funiffon d'un ton différent: les plus larges recevront les vibrations des tons graves >*ôc les plus étroits celles des tons aigus, de même que dans une trompette fes différens cercles font agités fuivant les différens tons. Or comme cette dégrada- tion de grandeurs fe fait par une infinité de nuances depuis l'ouverture de ces ca- naux, jufqu'à leur milieu, qui eft l'endroit le plus étroit, on voit que ces canaux peu- vent recevoir Timpreffion de tous les fons poffibles. Peut-être même deux de ces ca- naux ne s'unifîent-ils enfemble par une de leurs ouvertures , qu'afin que tous les tons les plus graves puflent trouver un organe capable de recevoir leur imprefîion Cette action du fon fur les canaux, & les vibra- tions , qui en font la fuite , ne peuvent s'exécuter , que le nerf auditif qui garnit ces parties, fans cependant y former les ban- des que décrit Valfava, ne foit ébranlé, & par cet ébranlement ne tranfmette au cerveau fa&ion des rayons fonores. Ainfi les canaux demi-circulaires fervent a rece- voir toutes les différentes inflexions & mo- dulations du Ion. C 34 Dijfcrtatîons Ils ne pourroient néanmoins avoir cet ufage , fans la conformation particulière dont nous venons déparier. Aufîi fuis -je perfuadé que dans les reptiles , & les poif- fons , où les canaux n'ont gueres plus de largeur à leur entrée, que dans le frefte de leur cavité, ils ne doivent pas produire le même effet. Ces animaux entendent, mais fans diftinguer exa&ement les inflexions du fon , qui probablement ne leur font gueres néceflaires , & cela d'autant plus qu'ils n'ont point de limaçon. Il n'en eft pas de même des oifeaux, à qui cette der- nière partie manque pareillement. Ces ani- maux ayant des canaux , dont les ouver- tures font plus larges, & la courbure plus confidérable que dans les poiflTons & les reptiles , & même que dans l'homme & tes quadrupèdes , doivent entendre très- diftin&ement , & cela d'autant plus , que les os de leur crâne & les parois de leurs canaux demi-circulaires font fort minces, & par conféquent très-fufceptibles de vibra- tions. C'eft aufii la raifon pour laquelle la nature ne leur a point donné de limaçon. Les oifeaux entendent diftin&ement fans cette partie, comme on le voit par l'expé- rience de ceux qui apprennent à parler. fur ? organe de l'ouïe. 3^ La conformation de l'homme & des qua- drupèdes eft différente. L os temporal eft fort dur & épais dans ces animaux; & quoi- que les canaux foient entourés d'une ma- tière plus fpongieufe , comme on le voit en préparant les oreilles des fœtus, néan- moins la perception des fons n'auroit pas encore été affez diftincte , fur- tout pour l'homme, qui devoit parler , entendre, & vivre en fociété. C'eft pour cette raifon que l'Auteur de la Nature a ajouté a l'oreille de l'homme & des quadrupèdes , le lima- çon qui peut fervir encore plus particu- lièrement que les canaux demi-circulaires à diftinguer parfaitement les f jns. Ce limaçon eft compofé de deux tours & demi de fpirales qui tournent autour d'un noyau. Mais les fpiraies font parta- gées en deux rampes par une cloifon , moi- tié offeufe, fort mince, qui tient au noyau, & moitié membraneufe. La rampe fupé- rieure s'ouvre dans le veftibule, & l'infé- rieure va aboutira la fenêtre ronde de la caiffe. Ces deux rampes font beaucoup plus larges à leurs ouvertures , & vont en dimi- nuant , à mefure qu'elles approchent du fommetdu limaçon. De plus, il faut remar- quer que le centre du noyau du limaçon cij 3^ Dîjfer tarions donne entrée à une branche de la portiotf molle du nerf auditif, qui jette une infi- nité de petites ramifications dans la mem- brane qui forme la cloifon intermédiaire des deux rampes. Telle eft la ftrudure admirable du lima- çon , dont l'expofition feule fuffit pour faire connoître que l'ufage d'une parti© auffi délicatement travaillée eft principale- ment de fervir a faire diftinguer toutes les inflexions & les modifications différentes» du fon. En effet, on peut confidérer la cloifon mitoyenne des deux rampes du limaçon * comme un compofé de cordes qui vont: infenfiblement en diminuant depuis l'en-* trée jufqu'au fommèt de cette partie ( i ), Ces petites cordes partent toutes du noyau & vont s'attacher à faune parois. Moyen- nant leur pofition , elles peuvent être frap^ pées en même temps des deux côtés par l'air de la rampe fupérieure , qui commu- nique avec le veftibule, & par celui de la rampe inférieure, qui a communication ( i ) M. MuiTembroeck & quelques autres Anatomiftes ont déjà comparé ces cordes à celles dune lyre. fur V organe de Vouïe. 37 avec la caifle du tympan par la fenêtre ronde. L'air agiflant ainfi des deux côtés fur ces petites cordes , fait mouvoir celles qui fe trouvent à l'unifTon avec les rayons fonores , k peu près comme le bruit d'un înftrument fait trembler & mouvoir les cordes d'un autre > qui fe trouvent mon- tées fur le même ton. Mais comme toute la membrane de la cloifon mitoyenne du limaçon eft parfemée de fibrilles nerveu- fes , aucun endroit de cette cloifon ne peut être mis en mouvement, fans qu'il y ait quelque partie du nerf acouftique , qui ne s'en reffente. Ainfi la perception des fons fera portée par l'aâion du nerf juf- qu'au cerveau. On ne fera plus étonné de la variété confidérable de fons , que l'oreille peuc percevoir , fi on confîdere en combien de parties d'inégale & de différente longueur, peut être divifée cette cloifon du limaçon ; & même on feroit porté k croire que plu- sieurs parties qui feraient a l'unilîbn , pour- roient agir en même temps , pour rendre la perception du fon plus forte. Au moins cette idée ne feroit-eile pas tout k fait hors de vraifemblance. Au refte, l'expérience faifant voir que dans les inftrumens les G iij 3$ Dïffcrtatlons cordes fes plus longues rendent les Tons plus graves , & les plus courtes les fons plus aigus , il eft aifé de penfer que la par- tie inférieure de la cloifon mitoyenne étant plus large > doit fervir à percevoir les fons les plus grades, tandis que les plus aigus fonr tranfmis au cerveau, par l'a&ion de la partie fupérieure de cette cloifon , qui eft plus étroite. Cette conformation de la cloifon mi- toyenne du limaçon peut nous faire con- cevoir la raifon d'un fait de Phyfique aftez fîngulier. L'organe de fouie eft le feul de tous les fens , qui peut mefurer exactement fon objet. Les yeux diftinguent bien les couleurs , mais ils ne peuvent établir des degrés fixes entre leurs nuances : il en eft de même de l'odorat & du ta&. L'ouïe feule 5 non - feulement diftingue les fons, mais les mefure avec tant d'exa&itude , que fon eft parvenu à diftinguer les tons, les demi-tons, & leurs différentes modifi- cations. C'eft delà qu'eft né l'art du chant, qui eft fi naturel à l'homme, que tous les peuples ont eu leur mufique , & que l'har- monie flatte tous les Auditeurs , fans qu'ils foient M uficiens. Sans doute que fi la rétine eût été partagée, comme le nerf auditif. fur V organe de Toute. ' 39 en petites cordes ou fibrilles de différente longueur, l'œil pourroitaufTî bien mefurer la lumière, que l'oreille mefure &c diftin- gue les fons. Refte maintenant a faire quelques re- marques particulières fur la ftru&ure du limaçon, i°. On peut confidérer cette partie comme un grand canal demi -circulaire , replié en deux tours & demi , mais qui n'eft ouvert que d'un côté. Ainfi par cette première raifon, l'a&ion de cette partie doit être femblable à celle que nous avons re- connue dans les canaux demi- circulaires, fur- tout ks parois du limaçon étant, de même que ceux de ces canaux , entourés d'une matière fpongieufe & plus rare , qui peut facilement s'en féparer , comme on le fait en effet dans les préparations de cet organe. Je dis plus : faction du limaçon doit être plus forte & plus confidérable que celle des canaux. Ceux-ci ont deux ouvertures , en forre que 1 air peut aifé- ment y circuler. îl n'en eft pas de même du limaçon , qui n'en ayant qu'une , tient l'air enfermé , en forte que fon a£fcion aug- mente par cette raifon , & par les inflexions & les contours de la fpirale. En çroifieme* C iv 40 JDijfertations lieu , l'a&ion de l'air fur le limaçon doit encore être plus forte par une autre raifon , à caufe de cett cloifon mitoyenne qui divife Tes deux rampes , & que l'air frappe des deux côtés ; & c'eft principalement tette cloifon qui doit donner une percep- tion très-diftinâ:e des fons. 2°. On demandera peut- être pourquoi la cloifon micoyenne du limaçon eft moi- tié offeufe & moitié membraneufe. Voici, je crois , la réponfe que l'on peut faire à cette queftion. Si cette cloifon étoit toute offeufe , elle auroit été moins fufceptible de vibrations ; d'ailleurs les nerfs répan- dus fur une furface ofTeufe, n'auroient pas pu être aifément ébranles , ce qui auroic rendu la perception du fon moins vive. Le contraire feroit arrivé , fi cette cloifon eue été toute membraneufe. Limprefïion des rayons fonores auroit été trop vive , ôc capable de caufer quelque douleur , ou même d'afïbiblir l'ouïe , comme, l'action trop vive de la lumière fur la rétine, caufe de la douleur à l'œil > & affoibiit fouvent la vue. C'eft pa^ cette raifon que la nature a formé cette cloifon de deux parties diffé- rentes, Par ce moyen , le fon agit fur la partie membraneufe avec toute fa force, fur V organe de Vouit 41 maïs cette même force eft amortie par la partie ofleufe de la cloifon. Toutes les parties du labyrinthe de l'o- reille, fçavoir , le veftibule , les canaux demi -circulaires & le limaçon font gar- nies par fexpanfion de la partie molle du nerf auditif ( 1 ). Mais ce nerf reçoit diffé- ( 1 } On trouve toujours les différentes cavl* tés du labyrinthe , arrofées par une féroiué lim- pide que fourniflent probablement les artérielles du pénofte qui le tapifîe. M* Cotunni, Profefleur d'Anatomie à Naples , a découvert deux con- duits ou aqueducs qui font deftinés à reporter le fuperflu de cette humidité dans l'intérieur du crâne. Ces aqueducs font au nombre de deux. Le premier appartient au veftibule. Il naît d'un orifice qui a été décrit par Caffébohm j fans que cependant fon ufage lui fût connu. 11 s'étend de bas en haut dans FépaifTeur du rocher , & après avoir fait à peu près une ligne de chemin dans cette dire&ion, il le courbe & fe termine à la face poftérieure du rocher par une petite ouver- ture oblongue. A l'endroit où il s'ouvre dans le crâne , les deux lames de la dure mère font écar- tées , de forte que l'on trouve entre elles une petire cavité remplie d'un fluide qui paroi: être de nature aqueufe. Le fécond aqueduc paroït appartenir au lima- çon. Il a auprès de la fenêtie ronde un orifice 42 Dijfcrtations remment l'impreffion du fon dans ces diffé- rentes parties. Dans le veftibule , ce nerf eft que du Verney a décrit. C'eft-li que commence ce conduit qui eft très-étroit. Il fe dirige de haut en bas vers l'intérieur du crâne , où il s'ouvre au deflous du trou auditif interne. On peur in- troduire un ftylet très-fin par cette ouverture , qui eft triangulaire. On peut aufli fe fervir d'une petite feringue femblable à celles d'Anel, pour inje£ter du mercure dans ces deux aqueducs f foit du côté du crâne , foit du côté du veftibule ; ce que Ton fait aflez commodément par l'ou- verture delà fenêtre ovale, fuivant la remarque d'un Auteur moderne. M. Cotunni & fes Se&ateurs penfent que les mouvemens de Terrier fe communiquent à la féro- fïté épanchée dans le veftibule, qui exerce fur la pulpe nerveufe du nerf auditif, la compreffioîi néceflaire pour la perception des fons. Ils croi nt que dans quelques circonftances la férofité du veftibule eft repoufTée dans le crâne par les aqueducs. Au refte, quel que foit leur ufage, M. Cotunni eft le premier qui ait fait une mention claire Se détaillée de ces aqueducs , & je fuis redevable de leur connoiflance à M. Vicqd'Azyr, qui joint à une profonde connoiftance en Anatomie, le mérite encore plus eftimablede chercher à obli* ger les fçavans ôc (qs confrères , & qui a eu la bonté de me communiquer la Diflertation de M. Cotunni, intitulée , de aqu fouvent il refte un vuide dans fon milieu ; il ne forme plus qu'un cercle cartilagineux aflez large , fon centre fe déchirant & ref- tant attaché à l'offelet. C'eft ce qui a fait croire à Oligerus Jacobasus dans fes obfer- vations fur les Grenouilles, que leur tym- pan n'étoit formé que par un cercle carti- lagineux ; il admet même une petite ou- verture extérieure à la peau fur ce cercle , ce que je n'ai jamais pu rencontrer ( i ) ( i) Organaauditûs talem oftendunt fabricant In cranio utrinque circulus oflfeus , vel ad mini- fur l'organe de Fouie. i) 9 Lorfque le tympan eft enlevé, on apper- çok deux chofes. La première , c'eft que cette plaque cartilagineufe n'eft attachée à des os, que dans fa partie antérieure, où elle tient à l'os de la mâchoire fupérieure , tout le refte de la caifle n'étant formé que par des ligamens. Auffi ce cercle ne peut-il fe conferver dans un fquelette de tête de Grenouille ; il fe retire , & Ton ne peut plus reconnoître que fa partie antérieure , que les os foutiennent. La féconde chofe à obferver dans la caiiTe , après avoir détruit le tympan, eft le premier oflçlet , qui tient lieu du marteau. Cet oflelet eft aflez court & épais. Si on l'examine à la loupe , on voit qu'il repréfçnte une efpece de prifme triangulaire. Son extrémité inférieure , qui eft plus large , fe termine par une furface un peu oblique, qui s'applique fur le cen- tre du tympan intérieurement , à la diffé- — ■ — < •* mum cartilagineus eft5cui obtenditur eadem fubf- tantia cutis ., quae reliquum corpus invertit. Ita autem circulum ambit haec fubftantia cutis, mem- branam tympano analogam intus latentem invei- tiens 5 ut apemiram & foraminulum quoddam meatui auditorio fimile relinquat. Oliger. Jaco- baeus , de Ranis obfecvationes. Parifiis, 1676 * in 8°. page 41, £o JDiJfcrtatlons rence du Lézard, dont le marteau eft colle & comme enclavé entre tes d'eux lames du tympan. L'extrémité fupérieure de ce petit os ne tient qu'à l'autre oiïelet , auquel elle eft articulée. Celui-ci, plus long & plus gros que le premier , lui refTemble aflez pour fa forme. Il a pareillement trois an- gles & trois furfaces dans fa longueur ; il fe porte directement du dehors de l'oreille a l'intérieur, ôc traverfant la caifle, il s'é- vafe à fon extrémité , & ferme le petit trou , qui tient lieu de fenêtre ovale , par une furface triangulaire ( i ). Cet oflelet n'a donc point de platine mince , comme dans le Lézard , feulement la furface de Y extrémité la plus épaifle , qui va fermer la fenêtre ovale , eft recouverte d'un petit cattilage, qui peut facilement s'en feparer, & qui paroît fuppléer à la platine. L'on voit que ce petit os fait l'office de l'en* clume & de l'étrier. ( i ) Oliger. Jacobaeus , dans l'endroit ciré ci'déflus, parle de ces oiïelets, & en donne la figure. La defeription & la figure font l'une & l'autre peu exa&es > & l'on n'y peut reconnoître la véritable forme de ces oflelers. Voyez les figures que j'en ai données dans les Mémoires préfentés à l'Académie. Tome IL page 196, fur l'organe de Vouïê. 61 Lorfque la fenêtre ovale eft ouverte , elle paroît aflez grande pour la petitefle de ces animaux, & elle eft d'une forme ovale , mais un peu irréguliere. La cavité à laquelle elle conduit , eft la dernière de l'oreille , que Ton peut appeller veftibule du labyrinthe. Elle eft creufée dans un os , qui fe trouve à la partie poftérieure du crâne, k côté du trou occipital , mais un peu plus en avant. L'extérieur de l'os, qui contient cette cavité , fournit quelques fujets de remarque. Au-deffus delà cavité du labyrinthe on voit fur cet os , qui en forme la voûte , un enfoncement ovale aflez confidérable. Cet enfoncement eft terminé k l'entour par une légère éléva- tion circulaire , dans laquelle fe trouve une très-petite ouverture à la partie la plus pof- térieure. J'examinerai dans un moment la raifon de cette conformation. Quant à l'intérieur du veftibule , la pre- mière chofe qu'il offre k la vue , eft un petit trou aflez diftin£t, qui fe trouve k fa partie la plus enfoncée, vis-à vis la fenêtre ovale , & qui pénétre dans le cerveau , une ligne environ au-devant du trou occipital. Ce petit trou , femblable k celui que j'ai déjà obfervé dans les Lézards, donne pa- Ci Dîjfertations reillement entrée au nerf auditif , dont fex- panfion revêt tout le labyrinthe. Le refte de la cavité du veftibule eft afTez irrégu- lier, & n'a rien de remarquable, à l'excep- tion de trois ouvertures pofées à des dif- tances inégales les unes des autres dans la voûte du veftibule. Ces trois petites ouver- tures rendent dans trois canaux inégaux , que nous nommerons demi-circulaires , à caufe de leur ufage, & de leur correfpon- dance à ceux des quadrupèdes , quoiqu'ils ne faflent que des portions de cercle. C'eft ce qu'il eft aifé d'appercevoir en entrou- vrant cette élévation circulaire, que nous avons remarquée extérieurement. On voit qu'elle eft formée par une efpece de canal circulaire , qui s'ouvre en trois endroits de fa face intérieure dans le haut du vefti- bule, en forte que ces trois portions de cercle formant comme trois canaux pref- que demi -circulaires , on peut les confî- dérer de cette façon , ou comme un feul canal qui a trois ouvertures. Ces ouver- tures ne font pas à égales diftances , & les portions du canal ne font pas égales. L'une eft plus petite , l'autre moyenne , & la troi- iieme plus grande: en forte que la pofition de ces trois petits trous repréfente afTez fur V organe de rouie. 63 tien les excrêmités des angles d'un triangle re&angle. Outre ces ouvertures , il y en a une qua- trième plus petite à l'extérieur. C'eft celle dont j'ai parlé plus haut. J'ai examiné dans plufieurs Grenouilles , quel pouvoit être l'ufage de ce petit trou. Mais la fineiïe de ces parties ne m'a pas permis d'en rien dé- couvrir: peut-être fert-il de paflage à quel- que vaifleau , ou à quelque nerf. Outre les parties que nous venons de détailler dans l'oreille de la Grenouille, & qui approchent de celles que l'on voit dans plufieurs autres reptiles , il y en a une qui lui eft particulière, & que je n'ai encore trouvée que dans cet animal. C'eftjune large ouverture que l'on peut appercevoir aifé- ment dans la gueule de ces animaux même vivans , qui pénétre dans la caifle du tym- pan. Cette ouverture fe trouve placée au côté de la mâchoire fupérieure , un peu avant fon extrémité. Elle a près d'une ligne de diamètre dans les petites Grenouilles , & davantage dans les groffes. Le canal auquel elle donne naiffance, & que Ton peutappeller la trompe, puifqu'il fait l'office de la trompe d'Euftachc , eft large & fort court. Si l'on y introduit un ftylet, fa pointe 64 Dijfertations pénétre derrière le tympan cartilagineux Lorfqu'on a enlevé ce tympan , on voit pareillement cette grande ouverture , qui rend dans la gueule. Il ne paroît pas douteux que cette ou- verture ne ferve a admettre le fon dans l'intérieur de l'oreille. Le Tympan carti- lagineux des Grenouilles amortit confidé- rablement Tes vibrations. Il étoit cepen- dant nécefTaire , pour garantir un organe fi délicat , dans un animal qui vit plus dans l'eau que fur terre , & qui ne s'avançanc que par fauts répétés , auroit couru rifque de déchirer un tympan forint par une fim- ple membrane. La nature y a fuppléé y en formant une féconde ouverture , par la- quelle le fon pût s'introduire. M. Valifnieri eft un des premiers , qui , dans fon Hiftoire du Caméléon , ait parlé de cette efpece de trompe , non pas dans les Grenouilles , mais dans les Tortues , les différentes efpe- ces de Lézards & les Serpens ( 1 ). Je viens de détailler l'organe de l'ouïe des Lézards, ( 1 ) Abbiamo Panalogia d'un taie artificio , anche ne' Ramarri , nelle lucertole , e né Ser- penci , i quali tutti hanno i fori aperti délie orrechie nel paUto , enon nel efl^erno , dove gli dans fur Vorgane de Fouie. é^ dans lefqueis je n'ai pu appercevoir une pareille trompe , quelque recherches que j'aye faites. Je ne l'ai point non plus apperçue dans les Serpens ', & je n'ai même rien vu d'approchant dans les Crapauds , qui refTemblent fi fort aux Grenouilles, à bien des égards. Peut-être fe pourra-t-elle rencontrer dans la Tortue , que je n'ai point examinée. Mais il ett étonnant que Valifnieri , dont l'ouvrage n'eft qu'une critique continuelle des Anatomiftes Fran- çois j n'ait pas apperçu un trou auiïi vifi- bledansla Grenouille, tandis qu'il le fup- pofe dans les Lézards &c les Serpens , dans lefqueis il n'exifte point. D'ailleurs les re- marques qu'il a faites , & qu'il donne au fujet de l'ouïe de ces animaux , font peu circonftanciées. Il ne dit qu'un mot des oflelets, fans parler du labyrinthe & des canaux demi - circulaires , & c'eft d'après un pareil détail , qu'il part , pour aceufer l'Académie des Sciences d'avoir avancé grand nombre d'erreurs , que j'examine- rai , quand je traiterai l'organe de l'ouïe hanno chiufî , o fpianaci da una membrana. &c. Valifnieri iftoria del Cameleonte Africano. In Venezia, 171 5 , 11**4°, page 11. E C£ Dîjfcrtations dont une partie paroîc a l'ouverture de la caifTe, reflembîë à celui des Grenouilles pour fa pofîtion ôc fa direction , il en diffère feulement par fa ftruiture. Premièrement, cet oiïelet n'eft pas à trois angles & prifmatique , comme celui de la Grenouille , mais afTez rond. La partie qui va fe coller à la membrane du tympan n'eft pas fi diftinde du refte de ce petit os , quoiqu'elle puiffe s'en dé- tacher^ elle ne paroît pas articulée avec l'autre portion , mais feulement collée & jointe par un petit cartilage intermédiaire. Secondement le corps de l'offelet , qui tient lieu d'enclume , a une apophyfe aflez confidérable au-delà de fa partie moyenne y en approchant de la fenêtre ovale. Enfin cet ofleîet fe termine par une platine car- tilagineufe 8r tranfparente , tandis que le refte eft offeux. Cette platine eft fore grande , eu égard aux autres parties , & le Crapaud eft celui de tous les reptiles * E iij yô Dijfcrtattons où je l'ai trouvée proportionnément la pïu& confidérable. Elle fe détache fort aifément du refte de f oflelet , & il eft très-difficile de les enlever enfemble. Quant à fa forme, elle eft lifïe & un peu concave du côté qui ferme le veftibule ; mais elle va un peu, en diminuant de l'autre côté , en forte que feparée du refte de foffclec , elle repré- fente aflez bien un cône tronqué , dont les côtés feroient feulement un peu ren- foncés vers leur milieu. L'oflelet enlevé , on découvre la fenêtre ovale, qui eft fort grande, de même forme que la platine qui la couvroit , & entou- rée de bords un peu élevés. Cette fenêtre conduit dans le veftibule , qui eft aflez grand , repréfentant une cavité ovale , plus large que profonde , femblable en tout au labyrinthe de la Grenouille. On y décou- vre le trou , qui donne paflage au nerf auditif, renfoncement ovale à F extérieur de l'os , qui eft entouré par un canal cir- culaire, qui s'ouvre en trois par des ouver- tures pratiquées à la voûte du veftibule , ce qui forme trois portions de cercle. La feule différence que j'aye obfervée , c'eft par rapport à l'ouverture extérieure du canal circulaire, qui dans la Grenouille fe fur Vorgànt de Vouiei yt trouve à la partie poftérieure , & dans le Crapaud à l'extrémité antérieure. On voit par ce détail combien l'organe de l'ouïe eft femblable dans ces deux ef- peces d'animaux. Il n'y a de différences eflentielles , que dans le tympan & dans la trompe, qui ne fe trouve que dans les Grenouilles , la petite variété qu'on obferve dans la forme de l'offelet, & dans la pofi- tion du trou extérieur de la voûte du vef- tibule , paroiffant de peu de conféquence. Du refte, ces deux animaux , la Grenouille & le Crapaud ont l'organe de l'ouïe fore grand & fort apparent pour leur groffeur; & de plus, ce font ceux de tous les repti- les , où l'on peut fuivre le plus aifément ces petites parties , les os temporaux n'é- tant que cartilagineux dans l'animal frais, quoiqu'ils paroiffent durs & ofleux dans le fquelette. Nous voici parvenus au fécond ordre des reptiles. La première fous-divifîon ren- ferme ceux qui n'ont aucune marque ex- térieure de l'ouïe , mais qui font munis d'offelets, tels que l'Orvet, la Couleuvre , la Vipère & les autres Serpens. Je com- mencerai par TOrvet , dans lequel l'or- gane de l'ouïe approche le plus de celui È iv yz Dîjfcrtatlons àcs animaux que j'ai déjà examinés , & qui femble tenir le milieu entre eux & les autres Serpens. l' O R V E T. L'Orvet r Cecilia } n'a aucune marque, d'oreille k l'extérieur. La peau écailîeufe de cet animal eft par -tout la même , & dans l'endroit y où elle recouvre l'oreille , elle eft auffi épaiïïe & auffi dure que dans tout le refle du corps. Si on levé cette peau a la partie poftérieure de la tête , où le trouve l'organe de l'ouïe dans tous les reptiles, on n'apperçoit d'abord que quel- ques membranes & plufieurs fibres muf- culeufes , jointes k beaucoup de graifie. Du refte, nulle marque , nul veftige d'or- gane de l'ouïe > en forte qu'on feroit tenté de croire cet animal entièrement dépourvu de ce fens , ainfi que l'ont cru quelques Naturaliftes qui l'ont appelle le fourd* C'eft ce qui m'eft auffi arrivé la première fois que j'ai examiné l'Orvet; je m'en tins k ces premières apparences , fans aller plus loin. Mais fi on levé ces fibres mufculeu- {cs , qui paroifTënt d'abord, on apperçoit enfin l'organe de l'ouïe. La membrane du fur V organe de l'ouïe. 73 tympan, qui eft fort fine, & qui n'a pas une demi-ligne de diamètre , fe préfente la première à la vue. En f examinant avec la loupe , on découvre un petit offelet , qui y eft collé. Ce petit offelet plus carti- lagineux qu'offeux , part de la partie fupé- rieure & un peu poftérieure du bord de l'ouverture que ferme la membrane du tympan, & s'avançant obliquement , il fe termine en defeendant, à la partie moyenne de cette membrane. La cavité de la caiffe eft formée dans ce reptile , comme dans ceux que nous avons déjà vus , en partie par des os , & en partie par des membra- nes & des ligamens. La partie antérieure eft offeufe , & ces os forment l'ouverture de la caiffe , depuis l'endroit d'où part le premier offelet cartilagineux , jufqu'à la partie moyenne inférieure , faifant plus d'un demi - cercle, A ce bord offeux on voit une duplicature , qui le fait paroître comme compofé de deux lames > dont l'intérieure déborde l'extérieure. Le refte du trou auditif n'eft terminé que par des ligamens. C'eft dans la cavité de la caiffe , qu'eft contenu le fécond offelet , ou l'offelet à platine. Ce petit os eft attaché par fa partie 74 Differtations antérieure au premier offelet, un peu avant la fin de celui-ci. Il m'a été impoflïble de découvrir fi cette attache étoit une véri- table articulation , ces parties étant ex- trêmement fines dans f Orvet , qui a la tête fort petite , & ne pouvant fe décou- vrir qu'à l'aide de la loupe. Depuis cette attache ou articulation, le fécond oflelet pénétre dans la caiffe en montant , & fe termine par une platine aflez grande , qui ferme l'entrée du vcftibule , ou la fenêtre ovale. Le corps de cet offelet fait dans ce chemin une double courbure en forme de S , qui reflemble aflez en petit à la confi- guration de la clavicule dans l'homme. La platine qui le termine , ne s'en détache pas aifément, en quoi elle diffère de celle des reptiles , que j'ai déjà examinés. La fenêtre ovale, qui eft fermée par la platine de même forme , eft très - petite ; à peine peut - elle admettre le bout dun crin. Elle conduit dans le veftibule , qui eft oblong & aflez grand , vu la petitefle de tout cet organe. Cette cavité eft tapjf- fée en dedans d'une efpece de mucilage blanchâtre , qui n eft que l'expanfion du nerf auditif, dont on apperçoit l'entrée à la partie la plus enfoncée du veftibule , fur Vorgant de Voùii. y$ par un petit trou , qui pénétre dans le cer- veau, Hors cette petite ouverture, je n'ai rien apperçu de remarquable dans cette dernière partie de l'oreille. Je n'ai trouvé aucun canal demi-circulaire dans la voûte du veftibule , quelque recherche que j'aye faite pour en découvrir. Je ne voudrois point cependant aflurer qu'il n'y en eut point dans cet animal. La reffemblance qui le trouve entre lui & le Lézard , par rap- port à f organe de l'ouïe , donneroit à pen- fer qu'il doit y en avoir: mais j'avoue que ces parties font fi petites , que je n'y en ai jamais pu reconnoître. La Vipère. La Vipère a l'organe de l'ouïe encore plus enfoncé & plus recouvert que l'Or- vet. Non-feulement on ne voit à l'exté- rieur aucun indice de cet organe, mais il faut aller le chercher fous des mufcles , & même fous des os. Quand on a enlevé la peau de la Vipère , on trouve un grand nombre de mufcles, qui fervent au mou- vement des mâchoires , mouvement fin- gulier dans cet animal , & que quelques Auteurs ont décrit avec foin. C'eft fous 76 Dljfcrtatïdns ces mufcleâ , qu'on apperçoit l'oflefet âa l'ouïe , qui eft encore à couvert par un petit os , qui foutient les deux mâchoires , tant fupérieure qu'inférieure , & qui fait avec elles une efpece de baffe-cul , ou de levier. Pour ce qui eft du tympan & du trou auditif, il n'y en a aucun veftige dans la Vipère ; en forte que des trois parties que Ton distingue dans l'oreille , il y en a deux qui manquent totalement dans cet animal , l'oreille extérieure, & la caiffe: il n'y a que la dernière qui exifte, je veux dire le veftibule. Mais quoiqu'il n'y ait ni tympan ni caiffe, on trouve néanmoins un offelet allez femblable a celui des au- tres reptiles. Cet offelet eft un peu long , terminé d'un côté par une platine , & de l'autre par un petit cartilage , qui aboutit auprès de l'os , qui foutient les mâchoi- res ; en forte qu'on peut divifer cet offelet en trois parties , la platine , le manche & la partie antérieure , qui forme comme un offelet cartilagineux , féparé du premier y & articulé avec lui. De cet offelet cartila- gineux part un ligament large, qui va s'at- tacher àTos, qui foutient la mâchoire , & qui joint cet offelet à ce dernier os par une connexion forte, quoique affez lâche fur Vorgant de Vouk. jy pour que Tune de ces parties puifle re- muer, fans que l'autre fuive fon mouve- ment. Outre ce ligament , il part encore de la membrane qui enveloppe Toffelet , & lui tient lieu de périofte , plufîeurs filets ligamenteux, qui s'avancent entre les muf- clés dont cet organe eft recouvert , & pa- roiflent s'y perdre ; du moins je n'ai pu les fuivre plus loin , à caufe de leur extrême finefle. Je ne doute pas cependant que la plupart de ces filets ne parviennent jufqu'k la peau de l'animal , en forte qu'ils puiffent fervir au mouvement de l'offelet. La peau doit faire l'office du tympan , & les offe- lets n'y font point attachés immédiate- ment , mais par l'intermède de plufîeurs filets ligamenteux. L'offelet à platine s'enfonce en fe por- tant un peu obliquement en devant, & va fermer par fa platine une ouverture , qui eft à la partie poftérieure du crâne , & que Ton peut appelles, quoique improprement, fenêtre ovale* Car ce trou eft à peu près rond , & il conduit dans la cavité du vefti. bule, qui eft affez irréguliere. On y remar- que à la partie inférieure ? vis - à - vis la fenêtre ovale , une ouverture , dont les bords font faillans , & qui pénétrant dans y 8 Dijfertatîons le cerveau , donne entrée au nerf auditif* Dans la partie fupérieure , il y a un enfon- cement affez confidérable , en forte que le haut du veftibule paroît plus profond du double que le bas. Quant aux canaux demi- circulaires, je n'en ai apperçu aucuns, ni à la voûte , ni dans les parois de cette cavité : peut - être l'enfoncement , dont je viens de parler, en fait-il l'office. Du refte on voit, parce que je viens de détailler , que l'organe de l'ouïe eft bien moins compofé , & moins parfait dans la Vipère , que dans les reptiles examinés ci-deffus. Elle n'a ni caifle , ni tympan, ni canaux demi-circulaires. On y voit feu- lement un veftibule & des oflelets. Encore ceux-ci par leur pofition femblent-ils n'être que médiocrement capables de percevoir le fon & de le tranfmettre au nerf acouf- tique. La Couleuvre. L'organe de l'ouïe de la Couleuvre eft prefque le même que celui de la Vipère. Il y a très -peu de différences entre ces deux animaux : aufîî traiterai- je cet arti- cle fort fuccin&ement. On ne voit dans la Couleuvre , de même que dans la Vipère , fur l'organe de Fouie. 79 aucun indice d'oreille à l'extérieur , nulle marque , nulle ouverture à la peau. Lors- qu'on l'a enlevée , on découvre plufieurs plans de mufcles, & fous ces mufclesl'os qui foutient les deux mâchoires , la Supé- rieure & l'inférieure. C'eft fous la partie interne de cet os , que paroît l'oflelct, qui eft, comme dans la Vipère, compofé de trois portions ; une première , qui fait un petit oflelet féparé , du périofte duquel partent quelques filets ligamenteux : la féconde , ou le manche de l'oflelet à pla- tine , qui eft un peu long , à peu près égal £c rond dans toute fa longueur , & qui s'avance de derrière en devant : enfin la troifieme ou la platine , qui termine l'ofle- let, & ferme la fenêtre ovale. Cette fenê- tre conduit dans le veftibule, qui reflem- ble à celui de la Vipère, & dans lequel on n'apperçoit que le trou du nerf auditif , fans aucun canal demi-circulaire. La feule différence que j'aye obfervée entre la Vipère & la Couleuvre , c'eft que l'enfoncement du haut du veftibule m'a paru moins pro- fond dans cette dernière. Du refte, l'organe de l'ouïe eft abfolument conftruit de même dans ces deux efpeces d'animaux* 8o Dljfcrtatïons Serpens ou Couleuvres d'Asie, Comme j'avois déjà examiné la Vipère & les Couleuvres de ce pays - ci , M. de Juffieu , auquel j'ai beaucoup d'autres obli- gations , me donna deux têtes de gros Ser- pens d'Afie , qui depuis leur extrémité antérieure, jufqu'à la fin du crâne, avoient bien fix pouces de long. Les Serpens , dont ces têtes avoient été prifes , font dans le genre des Couleuvres, & j'y ai trouvé les mêmes parties , le même organe de de l'ouïe , que dans la Couleuvre , mais beaucoup plus en grand ; ce qui m'a donné lieu de faire quelques nouvelles remarques fur l'organe "de l'ouïe de ces animaux. Pre- mièrement le petit offelet , que j'appelle plus fouvent l'offelet cartilagineux, parce qu'il eft moins dur que l'offelet a platine , paroît n'être dans ces animaux qu'une (im- pie appendice cartilagineufe , de la mem- brane de laquelle partent les filets liga- menteux dont j'ai parlé. En effet fi on exa- mine la conformation de l'oreille de la Couleuvre & de la Vipère , on verra qu'il n'étoit pas néceffaire qu'il y eut dans ces animaux un offelet cartilagineux, figuré comme fur V organe de Vouïc. 81 comme dans les autres reptiles , & articulé avec l'autre ofTelet , parce que dans ces Serpens il n'y a pas de tympan auquel il puifte fe coller. Une {impie production cartilagineufe fuffifoit pour foutenir ces ligamens ; au lieu que dans les animaux qui ont un tympan, cet ofTeîet y tient, & doit être autrement conformé , comme je l'ai remarqué dans les Lézards, les Cra- pauds , les Grenouilles & l'Orvet , dans lçfquels il fait l'office du manche du mar- teau des quadrupèdes. Secondement , le manche de l'oftelet à platine eft grand dans les Couleuvres de la côte de Ccroman- del; il a bien un demi pouce de long. Il eft lifte, afTez rond, très -peu courbé, & re- couvert d'un période ; mais on voit évi- demment qu'il n'eft pas continu avec la platine. Celle - ci fait corps à parc, & eft articulée avec l'autre , fur lequel elle a un mouvement de charnière, Elle n'eft ni ronde, ni ovale , mais elle approche plus" d'une forme triangulaire irreguliere. Utj de fes côtés eft plus long, l'autre moyen , & le troifïeme plus court ; la face de cetto platine eft un peu concave. Quant au vef- tibule, je n'y ai rien remarqué déplus que dans les Couleuvres de ce pays - ci. J'ai F S 2 JDiJfer tarions examiné avec foin fi renfoncement qui fe trouve à la partie fupérieure du fond , comme dans la Vipère , n aboutirait poinc à quelque ouverture , ou canal demi-cir- culaire , & je n'ai pu en trouver. J'ai feule- ment remarqué que cet enfoncement fe prolongeoit à la partie antérieure , & y formoit un cul-de-fac, qui n'a aucune iflue. Quant aux ligamens qui partent de l'extrémité de l'oflelet, & s'avancent vers l'extérieur, j'ai efïayé de les fuivre dans ces animaux. J'ai vu que les filets , qui partent du périofte de l'ofielet, & paroif- fent en être une production , pénétrent entre les plans des fibres mufculaires , où ils fedivifenten plufieurs rameaux. Je les ai fuivis jufqu'aux plans demufcles les plus extérieurs , mais jamais je n'ai apperçu qu'ils parvinffent jufqu'à la peau. Peut- être que la macération de ces têtes avok caufé la rupture des extrémités les plus fines de ces filamens. Mais une des chofes que j'ai recherchée le plus attentivement dans ces greffes têtes de Serpens , c'eft la trompe d'Euftache , ou le prétendu trou de Valifnieri. Cet Auteur admet cette trompe dans les Vipè- res , les Couleuvres , les Serpens , dans fur V organe de l'ouïe. 83 lefquels je favois inutilement cherchée. Néanmoins l'autorité de Valifnieri me paroiiïbit d'un Certain poids ; il alïuroit avoir vjj , & je craignois de m'être trompe ; des têtes aufîi grofïes me fourniflbient un moyen de voir aifément en grand, ce qui m'auroit échappé dans le petit. Mais quel- ques recherches , quelque examen , que j'aye fait , je n'ai pu découvrir la moindre apparence de cette trompe , & je crois pouvoir alîurer qu'elle n'exîfte point dans lesSerpens. D'ailleurs , d'où pourroit-elle partir ? Les Serpens font dépourvus de la caifTe du tympan ; ils n'ont qu'un veflibuîe très-peu compliqué ; ils ne peuvent donc avoir une pareille trompe, qui dépendrait de la caifTe qui leur manque. Il eft vrai que l'organe de l'ouïe de ces animaux ne paroît guère propre à admettre le fon dans toute fa force , & que la trompe aurait bien fervi pour y fuppléer. Mais peut-être la nature y a- t -elle pourvu par d'autres moyens que nous ignorons. La dernière fous-divifion, que j'ai éta- blie dans la clafle des reptiles, comprend ceux qui , n'ayant point de marque exté- rieure d'oreille, manquent d'offelets , du moins femblables à ceux des autres reptiles, F ij 84 Dïjfcrtatïons mais qui ont des canaux demi - circulaires, Telles font la Salamandre aquatique & la Raye. La Salamandre aquatique, Dans la Salamandre aquatique ., non- feulement l'organe de l'ouïe ne paraît point à l'extérieur , mais à peine peut-on le dé- couvrir par la difTe&ion. Il faut bien con- noître l'endroit où il efl: fîtué, pour y par- venir du premier coup. Cet organe eft caché fous plufieurs mufcles, & fous l'os de la mâchoire inférieure. Ce n'efl: qu'après les avoir enlevés , qu'on l'apperçoit en re- gardant fort attentivement à l'extrémité 'latérale &c poftérieure du crâne. On décou- vre une ouverture circulaire afTez grande, mais très-exaâement fermée par une pla- tine ofTeufe , fans pédicule ou manche & de forme ovale. Voiià le feul offelet que l'on trouve dans la Salamandre aquatique. Il n'y a donc dans cet animal , de même que dans les Serpens, ni oreille extérieure, ni caifTe, ni tympan : on ne trouve que la troifieme cavité de l'oreille, je veux dire le labyrinthe ; il n'y a pas même d'ofTelets femblables à ceux de la Vipère, de la Cou- leuvre, ÔlC. fur V organe de Fouie. 8«$ La platine étant enlevée , on apperçoic l'ouverture qu'elle fermoit , qui eft ovale , & qui conduit à la cavité du labyrinthe , qui eft aflez grande pour un aufïi petit ani- mal. Ce veftibule eft tapiffé, comme dans les autres reptiles, par un mucilage blan- châtre, qui eft uneexpanfion du nerf audi- tif Mais de plus , cette cavité eft encore remplie par une matière blanche, un peu plus ferme , qui refTemble a de l'amidon dans Tanimal frais , & qui , lorfqu'elle eft fechée, fe durcit, & prend la forme & la confiftance d'un plâtre un peu graveleux. Si on Técrafe, lorsqu'elle eft fraîche , elle paroît d'un très-beau blanc. Cette matière s'offre d'abord à la vue , lorfqu'on a ouvert la fenêtre ovale , en enlevant la platine , & tirée hors du veftibule , elle a une forme lenticulaire. Je n'ai pu découvrir dans un aufti petit animal que la Salamandre , ft cette lentille plâtreufe étoit attachée aux parois du veftibule par quelques membra- nes ou ligamens , mais l'analogie qui fe rencontre entre cet animal & d'autres rep- tiles plus grands, où j'ai obfervé une (eiri« blable matière , me tait penfer qu'il peut y en avoir. Ce n'eft qu'après avoir débar- raiïe le veftibule de ce corps lenticulaire, F iij 8o D ijfcrtatîons qu'on en peut examiner l'intérieur. Pour lors on y obferve trois chofes remarqua- bles. Premièrement, un petit trou dans la partie la plus enfoncée vis-à-vis la fenêtre ovale , qui pénétrant dans le cerveau , donne entrée au nerf auditif Seconde- ment un enfoncement aflez confidérable au-deflus de cette ouverture , creufé dans le haut de la partie la plus profonde du veftibule , & femblable à celui que nous avons vu dans les Serpens. Enfin en troi- fieme lieu, quatre ouvertures dans la voûte du veftibule. De ces quatre ouvertures , deux font placées dans la partie antérieure de la voûte , & les deux autres dans fa par- tie poftérieure. Celles-ci font plus proches Tune de l'autre , les premières plus éloi- gnées. Ces quatre trous font les iflues de deux canaux demi-circulaires, l'un anté- rieur, en regardant la fenêtre ovale en face, l'autre poftérieur. Ce dernier eft fort court, l'autre eft plus long. Ces deux canaux font oppofés & placés aflez exactement vis-à- vis l'un de l'autre. Ils forment deux por- tions d'un cercle aflez régulier ; le refte de ce cercle n'eft continué que par une im- preflion qui fe trouve à l'intérieur de la voûte du veftibule, & qui , a l'extérieur > fur V organe de Fouie. 8t forme avec les canaux une élévation cir- culaire, que Ton apperçoit à la vue fimple. En ouvrant extérieurement cette éminence circulaire , on découvre aifément rendrait des deux canaux, par le moyen de leurs parois inférieures qui reftent. La Raye. Le dernier animal par lequel je finis ma quatrième fous-divifion des reptiles , eft la Raye. L'organe de l'ouïe de la Raye ne paraît point du tout à l'extérieur , Ôc fon entrée n'eft point aifée à découvrir. Cachée fous des mufcles , elle eft placée proche les condyles, qui fervent à l'arti- culation de la tête fur la première vertè- bre , à leur partie latérale externe. Cette ouverture eft aflez grande , mais elle eft fermée par des ligamens tendineux , qui ne fe diftinguant pas facilement du carti- lage , dont le crâne eft formé , la rendent difficile à trouver. Elle conduit droit au ¥eftibule , fervant tout h la fois de trou auditif, & de fenêtre ronde & ovale, eo forte que la Raye , de même que la Sala- mandre , n'a ni organe extérieur de l'oreille, ni caifle , ni tympan , ni oflelet , mais F iv 88 Dijfcrtatlons feulement la dernière cavité, ou le laby- rinthe. Malgré cette (implicite apparente, l'organe de l'ouïe de la Raye ne laifle pas que d'être compliqué , & plufieurs de fes parties échappent à la première infpe&ion. Il eft même difficile d'en donner une def- cription exacte , qui fe puiiïe entendre aifément , fans avoir fous fes yeux la tête de l'animal. Je tâcherai d'y fuppléer , par un détail des parties , le plus clair qu'il me fera pofîlble. L'ouverture extérieure de l'oreille , qui fe trouve a côté du condyle, parok (im- pie ; mais en la fuivant à l'intérieur , on voit qu'elle donne naiflan'ee à deux canaux; l'un fort court, qui pénétre dans la cavité du veftibule par une fente longue, irrégu- licre, dont les bords font comme déchi- rés ; l'autre plus long , qui , s'avançant fous le condyle , va pénétrer dans le crâne par une ouverture prefque circulaire , un peu au-devant des bords du trou occipital. Ce dernier canal donne palFage à un nerf , qui rentre dans le labyrinthe. La cavité dans laquelle il pénétre, eft grande, irrégu- lïere , plus longue que large & remplie d'éminences & de finuofttésr La première chofe qu'on obferve dans ce veftibule en fur V organe de rouie. 89 l'ouvrant, eit un corps blanc, que Willugby nomme glanduleux , quoiqu'il ne reilem- ble nullement à une glande. Il efl gros comme un pois dans une Raye médiocre, de forme ronde un peu alongée ; tir^ hors de Tanimal frais , il refTemble à une pâte d'amidon & fe difîbut aifément, mais en fe féchant, il acquiert de laconfiltance, & refte toujours d'un fort beau blanc. Cette matière blanche , qui a été obfervée ôc décrite par pîufieurs Auteurs , & en parti- culier par Klein ( 1 ), ett foutenue dans le milieu du veftibule par pluneurs produc- (i)Cranii parte dete&a, qmm fufpicabar fedem organorum auditûs ^ loco veficuîa? quee maxime dinphana in pifeibus fpirrofîs eft , offendi reti- ctilnm quoddam fubrile expanfum 3 relo ertica- rum confufo quodammodo fimile^ fub quo la- pilli , qaos ad organa auditûs penmere reor , {qÇ quos auditorios puto , qui in duo corpora glandulofa, gélatine auç fur V organe de Vouie. 91 la portion dure & la portion molle de ce nerf font-elles deux nerfs féparés & dif- tin&s dans cet animal , l'un des deux , fçavoir , celui qui paile par la première des deux ouvertures , dont j'ai parlé , m'ayant paru plus dur que l'autre , qui eft extrêmement mou & fe rompt très - aifé- ment. Outre ces deux trous , on voit dans la cavité du veftibule fix ouvertures afTez grandes. De ces fix ouvertures , quatre font pratiquées dans la voûte ; fçavoir , deux dans fa partie fupérieure & anté- rieure, deux autres dans la partie latérale , un peu inférieurement, les deux dernières font dans les parois poftérieures du vefti- bule, a coté du trou auditif. Ces fix ou- vertures font toutes oblongues , d'une forme approchant de la triangulaire , & aiïez larges pour admettre un brin de bou- leau. Elles forment l'entrée de trois ca- naux , deux pour chacun des trois. Par leur pofition , on conçoit que de ces trois canaux il y en a un fupérieur, un latéral, & un poilérieur, Le canal fupérieur va de ■-- 1 ■ 1 ■ - — ' ■ — ~~~ amylo fimiiia , innumeris ramulis fpargunrur , quamvis & aiio ramos emicranc. Willugby , Hift, Pifc. Londini, 1686, in-fol. page 70. jz Dijfertatlons derrière en devant dans la partie la plus élevée de la voûte du veftibulc, & s'avance obliquement fur le côté* Le canal latéral va aufîi de derrière en devant dans la par- tie latérale de la voûte du veftibule, un peu plus bas que le premier. Il s'avance de même un peu obliquement, mais dans un fens contraire , en forte qu'en, le prolon- geant jufqu'à fautre , leur jon£Hon for- merait un angle un peu aigu. Enfin le troi- sième ou poftérieur eft placé perpendicu- lairement dans Tépaiffeur du crâne , au côté extérieur du trou auditif. Ce dernier eft le plus court des trois , & le premier eft le plus long. Outre ces trois canaux, & les deux ou- vertures qui pénétrent jufqu'au cerveau % on remarque encore dans le labyrinthe ds Ja Raye deux autres trous. Ceux - ci font placés dans la voûte du veftibule , entre le canal fupérieur & le trou occipital. L'un eft plus grand, c'eft le poftérieur; l'autre eft plus petit. Tous deux font fermés par des ligamens, & recouverts par la peau de ranimai. I/ufage de ces deux ouvertures me paroît difficile a découvrir. Peut-être fervent - elles auffi à admettre le foa , & par-là elles pourroient fuppléer en partie fur V organe de V ouïe. . 93 h ce qui manque du côté du trou auditif, qui fe trouve fort enfoncé à la bafe du crâne , & de plus recouvert de mufeies & de graifTe. Peut-être auffi n'ont-elles point d'ufage particulier ; car le crâne de la Raye, autant ligamenteux que cartilagi- neux , eft rempli d'ouvertures ; & il s'en trouve en particulier deux fort grandes & très longues à la partie fupérieure du crâne , qui ne font fermées que par des ligamens. CONCLUSION. On voit par le détail que je viens de donner de l'organe de l'ouïe de plufîeurs reptiles 9 qu'il y a dans tous ces animaux une certaine uniformité par rapport h cet or- gane , avec des différences plus ou moins grandes , fuivant les différentes efpeces. Des trois parties que l'on compte ordi- nairement dans l'oreille , Tune manque abfolument dans tous , c'eft l'oreille ex- terne • aucun n'eft dépourvu de la der- nière, ou du labyrinthe; il n'y a que la partie mitoyenne, je veux dire la caiffe , qui n'eft pas confiante dans cette clafTe d'animaux. Elle fe trouve dans plufîeurs, comme dans les Lézards, les Crapauds, les Grenouilles & l'Orvet ; dans plufieurs 24 Diffcrtations autres , comme la Vipère , les Serpens i la Salamandre & la Raye , cette partie ne fe rencontre point. Tous ceux a qui la nature a donné cette caiffe , font pourvus d'un tympan ; mais les Lézards font les feuls , dans lefquels la peau tranfparente en cet endroit le laifTe appercevoir ; dans les autres , elle le cache à nos yeux. Tous ont des ofTelets figurés k peu près de même , foit qu'ils foient pour- vus ou dépourvus de caifle : il n'y a que la dernière fous - divifion qui varie fur cet article , & dans laquelle les ofTelets paroif» fent fuppléés par ces efpeces de corps blancs qui font dans le veftibule. Enfin tous ont un nerf auditif ; tous à l'exception des Ser- pens , Vipère , Couleuvre & Orvet , onc des canaux demi - circulaires , & aucun n'a la trompe d'Euftache, ou le trou que Valifhieri leur attribue , fi ce n'eft la Gre- nouille , qui Ta fort grand, & dans laquelle il ne Ta point marqué. Il paroît donc que tous les reptiles doi- vent entendre , mais avec des différences bien fenfibles dans la manière dont ils reçoivent l'impreffion du fon. Le Lézard eft celui de tous , qui, ayant l'organe le plus complet , peut entendre le plus dif- fur V organe de Vouit. 9^ tîn£tement. Auffi voit-on que le moindre bruit fait fuir ces animaux. Le Crapaud & la Grenouille , dont l'organe ne diffère eflentiellement de celui du Lézard, qu'en ce que le tympan eft recouvert de la peau , doivent affez bien entendre , quoiqu'ils ayent l'ouïe un peu moins fine. La Gre- nouille fur-tout , qui a un tympan carti- lagineux , devroit aufîi avoir l'ouïe moins délicate , (î ce défaut n'étoit compenfé par la large ouverture de la trompe y qu'elle a dans fa gueule, L'Orvet , la Vipère , la Couleuvre & les autres grands Serpens doivent entendre encore moins diftincie- ment. Ils n'ont point de canaux demi- circulaires , & la Vipère, la Couleuvre & les Serpens n'ont point de caifie ; ce qui doit rendre la perception du fon moins forte. Enfin , ceux qui doivent entendre le moins de tous , font la Salamandre aqua- tique & la Raye , qui n'ont ni ofleîets , ni caifle 5 mais un fîmple labyrinthe avec des canaux , & réellement ces animaux paroiffent entendre fort peu. J'ai mis plu- fieurs Salamandres dans feau , & pendant qu'elles y étoient , j'ai fait du bruit à côté de la jatte où je les avois mifes; j'ai excité des fons plus ou moins forts & aigus ; qui devoit recevoir limpreilion de fon mouvement , fut auffi fin & auffi délicat que dans les autres animaux qui ne vivent que fur la terre. C'eft ce que je me propofe d'examiner àc plus en plus , à mefure que je continuera^ ces recherches fur l'organe de l'ouïe de . différens animaux, Puifle ce même tra-- vail me mettre en état de déterminer quel eft le véritable fiege de l'ouïe dans tous les animaux & dans l'homme lui-même , & de réfoudre une quefiion auffi curieufe pour la Phviique , qu utiie pou/ la Médecine! TROISIEME fur V organe de rouie. 97 TROISIEME DISSERTATION. Sur V organe de Fouïe des Poijfons* E s recherches que j'ai faites fur l'or- gane de l'ouïe des reptiles , & que j'ai dé- taillées dans la précédente difïertation , m'ont conduit à un autre travail , qui eft une fuite ch premier. L'organe de fouïe des poiflbns > fur l'exiftence duquel les difFérens Auteurs font fi peu d'accord, m'a paru un fujet égakment curieux & inté- reflant à traiter. D'ailleurs fî l'on peut par- venir à la découverte d'un pareil organe , ce fera le moyen le plus sûr de décider toutes les- queftions , que Von a plufieurs fois agitées au fujet de fouïe des poiflbns. Ces différentes queftions fe réduifent à trois. La première confifte à fçavoir fi le liquide dans lequel vivent les poiflbbs , eft capable de leur tranfmettre les vibrations & les imprefïions du fon. Quant à la féconde , il s'agit d'examiner fî les poiffons paroif- fent fentir & percevoir ces vibrations , & fi par conféquent ils entendent ; enfin en G 58 Dijfcrtations cas que les poiflbns entendent , il faut trou- ver & déterminer l'organe, qui leur fert à cet ufage. Je ne m'arrêterai point ici à la première queftion. Je la regarde comme décidée par les expériences qu'a faites une main trop habile en ce genre., pour qu'on puifle les révoquer en doute ; & je fuppofe dé- montré d'après M. l'Abbé Nollet ( 1 ) , que l'eau eft un milieu capable de trans- mettre le fon. La féconde queftion n'eft pas aufïï aifée à réfoudre , & les fentimens des Auteurs font partagés fur cet article. Pline (2), Severinus (3), Boy le (4), & quelques autres Naturalises admettent dans les poif- fons la faculté de l'ouïe ; & fi les expérien- ces fur lefquelles ?/s s'appuyent étoient in* conteftables , leur fentiment en feroit une fuite néceflaire. En effet , s'il eft vrai , comme ils îe rapportent , que dans quel- ( 1 ) Hift. & Mém. de l'Académ. Royale des Sciences , 1743 , 14 Avril. (i)Hift. Nat. X.70. ( 3 ) M. Aurel. Severin , de refpiratione pif- cium y Difput. i*, page 5 1 , a. (4) Robert Boyle , Pbilof. Works , part. III, page 41. fur V organe de Fouie. 99 ques étangs on ait pu accoutumer ces ani- maux à s'affembler au fon d'une' cloche, ou à venir à la voix d'un homme, qui leur portoit à manger , on efl forcé de conclure que les poifïbns entendent. Mais on fçait combien les expériences faites a ce fujet peuvent être fautives. L'habitude , la finefTe de la vue , qui dans les poifTons pourroic compenfer le défaut de l'ouïe , & mille autres circonftances peuvent concourir au même effet , & diminuent par confé- quent la force de ces preuves. Aufïi Ray n'a - t - il ofé prendre de parti , & après avoir paru pencher alternativement pour Tune & l'autre opinion , il finit par laifTer la queftion indécife, Son exemple a été fuivi en ce point par un grand Naturalifte moderne, Artedi , qui a travaillé plus que perfonnefur les poifTons. Cet Auteur paroît d'abord condamner ces animaux à une en- tière furdité ( 1 ) , & s'il leur accorde la faculté d'entendre, c'eft d'une manière fi obfcure & fi imparfaite , qu'ils ne puifTenc diftinguer les inflexions & les articulations du fon. Je pourrais ajouter ici les noms de ( 1 ) Pétri Artedi, l&hyologia. page 19 , part. II ,§.45. Gij I oo Dijfcrtations plufieurs Naturaliftes , qui fe font déclarés pour ou contre le fentiment de l'exiftence de l'ouïe dans les poiiîbns ; mais cette énu- mération afTez inutile ne feroit que retar- der le rapport de l'examen que je vais faire des caiifes de cette incertitude , examen nécessairement lié a celui de la troifieme queftion, fçavoir, quel eft l'organe qui peut fervir a l'ouïe dans les poifTons. On trouve dans les poifTons cétacés uri organe extérieur de l'ouïe, un trou audi- tif, quoique fort petit: aufîi perfonne nV t-il refufé l'ouïe a ces animaux. Mais les Naturaliftes ne voyant point ce même organe dans les autres poifTons , ont em- brafTé des fentimens contraires. Quelques- uns les ont cru abfolument dépourvus d'o- xeille, & par conséquent fourds. Les autres conduits par l'analogie, ont penfé que ce fens devoit exifter, quoiqu'il ne parût point «l'organe- à- l'extérieur. Ils ont donc cher- ché quelque partie qui pût y fuppléer. Xes uns , comme TVillugby & Julïus CaJJerius , Te font imaginé que les ouver- tures des narines fervoient auiïï à tranf- jnettre le fon ; d'autres , comme Ray , ont afîigné cet ufage à des ouvertures , qui pe fe trouvent que dans les poifïbns carti- fur V organe de Fouie: ro i jfagineux , & qui communiquent à leur gueule. Quelques autres ont cru découvrir d'autres trous auditifs , que M. Klein a prétendu démontrer dans le Brochet , quoique ces trous n'appartiennent nulle- ment à l'oreille, ainfi que je le ferai voir. Enfin un Auteur moderne , M. l'Abbé Nollet, a penfé que toute l'habitude du corps des poiffons pouvoit leur fervir comme d'organe pour recevoir fimpreffion des fons, fondé fur ce qu'il avToit reffenti lui- même en fe plongeant dans l'eau. Ce der- nier fyftême eft ingénieux , & la probabi- lité que lui donnoient les expériences de fon Auteur , a pu le faire admettre , tant qu'on n'a point connu le véritable organe de l'ouïe dans les poiffons. Mais la recherche & la découverte de cet organe étoit le feul moyen de décider & de réfoudre d'une manière sûre ces diffé- rentes queftions. En effet , fi les poiffons fe trouvent dépourvus de l'organe de l'ouïe , qu'eft-ii befoin d'examiner s'ils entendent ? Au lieu que fi l'on trouve cet organe dans ces animaux, on doit penfer qu'il n'eft pas inutile. Il ne fera donc plus néceffaire de rechercher quelle eft la partie, qui dans les poiffons peut fuppléer à l'oreille , &. "J 102 Dîjfcrtatîons quelles font les ouvertures par lefquelles le fon peut leur être tranfmis , fi on con- noît une fois dans cette clafle d'animaux un organe complet de l'ouïe , qui ait une communication avec l'air extérieur. C'eft cette partie que je me fuis propofé de rechercher , incertain de réuflir dans un travail auffi difficile , que plufieurs per- fonnes avoient déjà entrepris , & où toutes avoient échoué jufqu'ici. J'ai long-tems examiné fans fuccès un grand nombre de poifTons de difFérens genres. La petitefTe & la (ituation fïnguliere des parties que je voulois découvrir, rendoient mes recher- ches fi difficiles , que je me fuis vu plu- fieurs fois à la veille d'y renoncer ; & ce n'efl: qu'avec la plus grande patience & en revenant fouvent fur mes pas , que je fuis enfin parvenu à la connoiflance complette d'un organe inconnu jufqu'à préfent. J'ai d'abord fucceffivement découvert dans difFérens poifTons quelques-unes des par- ties de l'oreille, plus apparentes dans les uns que dans les autres ; & lorfqu'une fois j'ai bien connu toute la fuite de cet organe, je l'ai examiné dans une grande quantité de poifTons. Aujourd'hui je fuis en état de Je démontrer dans toutes les efpeccs de fur V organe de Touîci ï 03 cette clafle. Son exiftence détruit tous tes fyftêmes ; elle décide toutes les queftions propofées ci - deflus , & prouve que les poiffons peuvent & doivent entendre , puifque rien ne leur manque du côté de la conformation de l'oreille , & que le liquide dans lequel ils vivent, n'y forme point d'obftacles. Il paroîtra peut - être étonnant que je fois parvenu le premier à décrire cet or- gane , que n'ont pu découvrir plufieurs pcrfonnes plus verfées dans l'Hiftoire Na- turelle & dans l'Anatomie, & Ton feroit tenté de révoquer en doute l'exiftence d'une partie que Ray , Willugby & d'au- tres habiles Naturaliftes ont inutilement cherchée. Néanmoins aucun poiflbn n'eft dépourvu d'oreille ; c'eft ce dont je me fuis afluré par un examen exad. Mais ces Au- teurs avoient négligé un moyen abfolu- ment néceffaire pour reconnoître un or- gane auflî délicat. Ils n'ont point procédé par analogie. Je fuis perfuadé que la plupart des parties qui compofent l'organe de l'ouïe des poiffons > n'auront pas échappé à leurs regards ; mais elles paroiffent d'a- bord avoir fi peu de rapport avec celles qui compofent l'oreille des quadrupèdes <> G iv ' ïb4 Dijfertations que cette différence frappante leur en au$â fait méconnoître Fufage. Ils auront man- qué de décrire une partie k laquelle ils n'attribuoient aucune fon&ion. La même chofe me feroit arrivée $ fi je n'euffe pas commencé mon travail par les reptiles. Ceux-ci femblent tenir le milieu entre les quadrupèdes & les poiffons , & conduifent par des différences & des nuances prefque infenfibles, depuis \ts Lézards, dans les- quels Forgane eft le plus parfait , le plus apparent , & le plus approchant de celui des quadrupèdes, jufqu'à la Salamandre & aux poiffons cartilagineux , dont Foreille moins compofée ne diffère prefque pas de celle des autres poiffons. Cette voie étoit la feule qui pût mener à la découverte de Forgane de Fouïe, hcs poiffons, dans lefquels j'entreprends de le décrire , font les poiffons épineux ou à arrêtes, & généralementtous les genres de poiffons , k Fexception des poiffons car- tilagineux , que j'ai joints aux reptiles , &c des cétacés ou plagiures , dont Forgane de l'ouïe , femblabîe à celui des quadrupèdes , eft connu , & a été fuffifamment décrit. J'ai choifi parmi ces poiffons quelques- uns de genre différent , que j'examine avec fur V organe de Vouie. *o$ foin , pour que Ton voye les différences les plus remarquables , qui s'obfervent fuivant les différens genres. Mais avant que d'entrer en matière , je dois rendre ici à M. Klein la juftice qui lui eft due- Cet Auteur eft le feul qui aie approché de la vérité touchant l'organe de l'ouïe des poiflbns ; aucun autre n'en a eu connoiflance. Lui feul en a décrit une partie ; & il eft étonnant qu'ayant fait le premier pas & le plus difficile , qui étoit de découvrir le fiege & la pofition de cet organe , il n'ait pas pouffé plus loin fa découverte , & n'ait avancé ce qu'il en a donné que comme de fimples probabilités. M. Klein eft un des premiers qui ait parlé des pierres que l'on trouve dans la tête des: poiflbns au nombre de fîx , qui en ait donné les figures tant en fituation , que féparées. Il fembloit qu'il ne lui reftoit qu'un pas à faire pour trouver le refte de cet organe , puifqu'on ne peut aller cher- cher ces pierres , fans le parcourir & le dé- chirer. Cependant il n'en dit pas un feul mot. On fentira encore davantage com- bien ce fait eft fîngulier , en voyant les différentes deferiptions de l'oreille des poi£ ions , que je vais donner. I oé Dijfertatzons Des trois parties qui compofent 1\H reille de l'homme & des quadrupèdes f fçavoir l'oreille excerne, la caifle du tym- pan & le labyrinthe , il y en a une qui man- que abfolument dans tous les reptiles , c'eft l'oreille extérieure ; mais la plupart ont les deux autres. L'oreille des poifïbns eft plus fimple; ils n'ont qu'un labyrinthe, qu'une feule & unique cavité dans laquelle leurs ofîelets & les canaux demi-circulaires font renfermés ; encore fait- elle portion de la cavité que forme le crâne. Elle en eft feu- lement féparée par une membrane plus ou ou moins forte , fuivant les différens poif- fous, & même dans quelques-uns par des avances & des appendices offeufes , qui foutiennent le cerveau, & l'empêchent de pefer fur l'organe de l'ouïe. Ce labyrinthe eft placé aux deux côtés du cerveau , à la partie poftérieure & inférieure du crâne» Si on examine la tête des poifTons , lors- qu'elle eft entière , on n'apperçoit aucune ouverture extérieure , qui communique avec cette cavité , & c'eft fans doute ce qui a fait penfer que les poifïbns n'avoient point d'organe de l'ouïe. M. Klein , qui a travaillé plus particulièrement fur cet arti- cle , a cru découvrir une ouverture exté- fur l organe de Vouie. 107 ïîeure de l'oreille , qu'il a décrite dans deux poiflbns , & en particulier dans le Brocher. Il en donne la figure, table première de fa DifTertation de pifeium auditu. Ce font deux trous qui font a la partie poftérieure & fupérieure du crâne de ce poifïbn , un de chaque côté. Il prétend qu'ayant inféré des foies de Porc dans ces ouvertures, elles ont pénétré dans le crâne jufqu'aux petites pierres , qu'il regarde avec raifon comme les ofîelets de l'ouïe. J'ai examiné ce fait attentivement , j'ai diflequé des têtes de Brochet, j'ai introduit des foies & des crins dans l'ouverture dont parle M. Klein , & jamais je ne les ai vu pénétrer dans l'inté- rieur du crâne. Le crâne du Brochet eft rempli d'ouvertures , de même que celui de plufieurs autres poiffons. Il y en a dans celui-ci huit àneuf paires apparentes dans la partie fupérieure , fans compter celles des mâchoires & quelques autres plus pe- tites. Ces ouvertures communiquenttou- tes les unes avec les autres par des canaux, qui rampent entre les deux tables du crâne, & elles donnent paffage à des vaiffeaux & à des nerfs. Le prétendu trou de l'oreille eft de ce nombre , il communique pofté- rieurement à deux autres ouvertures , Iô8 Dijfertations & antérieurement avec un autre trou. Mais en fuivant les crins que Ton a introduits dans ces canaux , on n'en voit aucun qui puifle pénétrer dans l'intérieur du crâne , à moins qu'il n'y ait à l'os quelque déchi- rure ou quelque ouverture non naturelle. Ce n'eft donc point à cet endroit qu'il faut chercher l'ouverture extérieure de l'oreille , fi difficile a trouver dans les poif- fons, Mais fi on prend un crâne de quelque poiflbn que ce foit, bien nétoyé de fa peau & des autres tégumens , on voit à la par- tie poftérieure & inférieure de ce crâne deux ouvertures , allez petites dans la plu- part , qui communiquent dans l'intérieur du crâne , précifément à l'endroit où fe trouve placé l'organe de l'ouïe , & fou vent vis-à-vis un des offelets. Chacune de ces ouvertures répond à une des oreilles. Elles ne communiquent point immédiatement avec l'air extérieur, mais elles font recou- ■ vertes par la peau délicate , qui garnit la cavité où fe trouvent les ouïes , & qyi érant appliquée fur l'os en cet endroit , peut faire l'office de tympan. De plus , la cavité des ouïes qui fe trouve devant y peut fervir auffi à ramalTer les fons , de même que la conque de l'oreille de l'homme fur V organe de Fouie. 109 & des quadrupèdes ; en forte qu'il femble- roit que ce ne feroic pas tout-à-fait fans fondement que cette partie auroit reçu le nom d'ouïe , qu'on avoit cru lui avoir été donné mal-à-propos. Il eft aifé de s'afTurer de ces faits , en examinant la tête d'un poiffon à arrêtes. Il ne s'agit que de foule- ver la grande écaille , qui couvre la cavité des ouïes , & d'enlever avec deux ou trois coups de feapel la membrane afTez fine , qui tapifle le fond de cette cavité ; on apperçoit auflitôt fous cette membrane l'ouverture dont je parle. On voit com- bien ce trou auditif reflemble pour fa fitua- tion & pour fa figure à celui que j'ai décric dans la Salamandre & dans la Raye. Lorfqu'on pénétre dans le crâne par cette ouverture, qui fert tout à -la fois de trou auditif, & de fenêtres ronde & ovale , on trouve un enfoncement fur le côté & vers le fond, féparé du refte du crâne par une membrane , dans laquelle font conte- nues toutes les parties quicompofent l'or- gane de l'ouïe. Les premières , les plus apparentes , & les plus connues de ces parties , font les offelets ou ces pierres qu'on remarque dans les têtes des poiflbns > & dont quelques- 1 1 0 Dijfertations unes font d'ufage pour la Médecine. Elles font blanches , à demi-tranfparentes , d'une fubftance très-dure & d'un grain fort fin , femblable à celui d'une belle porcelaine. Pline, Athénée, Elien & Plutarque, parmi les anciens , ont fait mention de ces pierres qui fe trouvent dans le crâne du Merlan , & de celles d'un ou deux autres poifïbns. Parmi les modernes , Bellon , Salvien > Severinus , Rondelet, Aldrovande , Ar- thedi & plufieurs autres ont remarqué les mêmes pierres dans un plus grand nombre de poifïbns. Bromelius a été plus loin : il a donné dans les a&es de Suéde , un catalo- gue d'un grand nombre de poifïbns, dont il avoit ramaffé les pierres. Mais tous ces Auteurs n'ont reconnu que deux pier- res dans le crâne des poifïbns qu'ils ont examinés, une de chaque côté , telles que tout le monde les voit dans les têtes de Merlan. Il n'y a que CafTerius ( i ) qui ait été plus loin , & qui ait découvert ces pierres au nombre de (ix dans le Brochet, trois de chaque côté. M. Klein qui a tra- vaillé plus particulièrement fur cette ma- +*>•< " ■ ■■■■!■■ ■■ I I ■ ■ I ( i ) Julius Caflèrius Placentinus, Pentsthefei , page 217. fur V organe de Fouie. i r i çiere , après avoir pendant long-tems re- cueilli feulement deux pierres dans chaque crâne de poiflbns , parvint à en trouver quatre , deux de chaque côté ; & dans le même tems l'ouvrage de Caflerius lui étant tombé entre les mains , il fe mit à recher- cher les deux autres d'après cet Auteur. Mais ce fut d'abord inutilement. Il étoit réfervé à fa fille de trouver la première ces trois paires d'oflelets dans plufieurs poif- fons de différens genres. On peut voir les figures de ces pierres dans l'ouvrage de M. Klein. Inftruit de ces diverfes tenta- tives , j'ai commencé par chercher fix pierres dans le crâne des poiflbns , & parmi une grande quantité que j'ai examinés , j'en ai toujours trouvé ce nombre. Leur figure varie fuivant les différens genres , & même plus ou moins fuivant les diffé- rentes efpeces de poiflbns , quoiqu'on apperçoive une certaine conformité entre celles qui font tirées des poiflbns du même genre. Mais malgré les différences qui fe rencontrent entre elles , prefque toutes les efpeces de poiflbns ont ceci de commun, que des trois pierres qui entrent dans la compofition de chaque oreille , il y en a toujours une plus alongée que les deux î 1 2 Dijfcrtations autres ( î ). De ces deux dernières , l'une eft placée afTez proche du trou auditif, ce qui feroit penfer qu'elle auroit le même ufage que le marteau dans l'oreille des quadrupèdes. Auprès de cette pierre , & aflez fouvent dans une même véfîcule , fe trouve l'autre qui eft la plus longue , & que je regarde à caufe de fa forme & de fa iituation , comme fervant d'enclume. Enfin la troiiieme , fouvent plus petite que les premières , eft plus éloignée & un peu plus haut dans une véficule particulière , mais qui communique avec celle qui ren- ferme les deux autres. Cette dernière pierre a été appellée par Caflerius Vos lenticu- laire. Les véficules dans lefquelles ces pierres font renfermées , fe trouvent rem- plies d'une liqueur claire & limpide, dans laquelle ces petits ofîelets paroiflent nager. Outre cette enveloppe commune , chacun de ces oflelets a un périofte très -lin, une membrane arachnoïde prefque impercep- tible , qui les recouvre , dans laquelle , à l'aide du microfeope ,on apperçoit des ra- mifications de vaifTeaux fanguins. ( î ) J'ai confervé une fuite de ces pierres tirées de différens poi(Ton$, Telle fur V organe de Voiïic. i ijj Telle eft la fituation générale de ces offelets, qui varie, de même que leur figure , fuivanc les différentes efpeees de poiffons. Dans la plupart, les deux premiers offelets font vis-à-vis , ou prefque vis-à-vis le trou auditif; dans plufieurs, un peu plus bas , & dans d'autres, ils font enfoncés immédiate- ment au-deflbus du trou auditif, dans une cavité qui fe trouve à la bafe du crâne , comme M. Klein Ta obfervé dans le genre des Carpes. Quant au troifîeme offelet ,ou os lenticulaire de Cafferius, il eft conftam- ment éloigné des premiers, & plus élevé. La véficule qui renferme les deux pre- miers offelets , communique avec celle qui contient le troifîeme par un canal large & irrégulier, comme Ta fort bien remarqué M. Klein , qui n'a pas pouffé plus loin fes découvertes fur l'organe de l'ouïe des poif- fons. Mais ces trois pierres ou offelets , renfermés dans leurs véfïcules , ne feroienc pas feuls capables de conftituer un pareil organe, fi ces parties ne répondoient à plu- fieurs autres , qui formaffent une efpece de labyrinthe , & fi tout cet affemblage n'avoit quelque nerf qui pût tranfmettre au cerveau les imprefîions qu'il reçoit. C'eft ce qu'aucun Auteur n'a encore remarqué H î 1 4 Dijfcrtations dans les poiffons. M. Klein , qui a été le plus loin, s'eft contenté d'obferver les trois offe!ets& les véfîcules qui les renferment; perfonne n'a parlé du labyrinthe admirable que Ton trouve dans ces animaux. C'eft ce dont j'ai voulu m'affurer , avant que de donner comme nouveau ce que j'avois dé- couvert à ce fujet. Parmi un grand nom- bre d'Auteurs , il n'y a que Swammerdam qui paroi fie avoir entrevu ce labyrinthe , dont il ne dit qu'un mot en paffant, afTez pour faire voir qu'il en a eu connoiffance , & trop peu pour le faire connoître aux autres. Voici fes paroles : a Intérim varia i> quidem animantia, quibus autores au- » ditum negârunt , hoc tamen gaudere r> comperio, uti Y. G. Chameleontes. In yy ranis etiam atque in pifcibus hune fen- » fum adeffe obfervavi. Imô in pifcibus » labyrinthus miro quodammodo fabrt- yy faclus efï(i) »; Swammerdaim , comme on le voit par ce paffage, fe contente d'an- noncer qu'il a obfervé que les poiffons ont un organe de l'ouïe , & un labyrinthe , dont la ftru&ure eft admirable. Mais il n'indique point l'endroit où il fe trouve; ■ ' , ■ ■ ,i * ( i ) Swammerdam , BibL Nat. 1. 1. p. 1.1 u fur V organe de Vouie. 1 1 ^ il n'en donne point la defeription, & fem- ble avoir gardé pour lui feul la découverte qu'il paroît avoir faite. Aufli les Auteurs , qui ont écrit depuis lui , n'ont-ils pu pro- fiter de cette connoiflance. Tous ont laifle le paflage de Swammerdam dans l'oubli, & aucun n^a travaillé à rechercher ce qu'il annonçoit. Néanmoins ce labyrinthe de l'oreille des poiflons étoit moins difficile à découvrir pour ceux qui, comme M. Klein, étoient parvenus a reconnoître les trois oflelets. Nous avons vu que les deux véficules , qui renferment les trois pierres des poif- fons, communiquent entr'elles par un canal inégal & aflez long- Ces trois parties , je veux dire le canal & les deux véficules , font comme le fondement & le centre , auquel répond le labyrinthe & tout l'or- gane de l'ouïe des poiflons. C'eft de cette bafe que partent trois canaux demi-circu- laires dans prefque tous les poiflons , & deux feulement dans quelques-uns. Ces canaux fe rendent k ce centre par des ou- vertures , qui font au nombre de fix dans plufieurs poiflons , & de cinq dans d'au- tres , lorfque deux de ces canaux s'Unifient cnfemble, comme les canaux demi-circu- H ij Il 6 Dijfcrtatïons laires de l'homme. Les deux véficules & le canal intermédiaire reçoivent les extré- mités de ces canaux, de façon que des cinq ou fix ouvertures , deux répondent afTez communément à la véficule des deux pre- mières pierres , deux autres à la véficule de l'os lenticulaire , & une ou deux au canal intermédiaire. Les canaux donc elles font les extrémités, font membraneux, tranf- parens , délicats & creux dans leur inté- rieur. A in fi il exifte , par le moyen de ces canaux, une communication des ofTelets & des véficuiesles unes avec les autres, outre celle qui fe rencontre déjà par l'intermède du canal qui fe trouve entre les véficules. Ces canaux demi-circulaires font féparés dans quelques poiflbns ; dans d'autres au contraire , ils fe croifent & paflent alter- nativement les uns fur les autres , comme on le verra dans l'examen particulier de ces animaux. Cette conformation femble- roit faire craindre que ces canaux ne s'en- tremelaflent , & ne fe nuififfent mutuelle- ment Mais la nature a pourvu à cet incon- vénient , en formantdes canaux offeux, par lefquels pafîent ces canaux membraneux, ce qui les retient dans la même fituation, & les empêche de quitter la place qui leur fur V organe de Vouie. r r 7 ft été aflïgnée. Ces canaux ofleux font plus larges que les membraneux , & de plus ceux-ci ne font point adhérensaux parois ofleufes , mais flottent librement dans la cavité des premiers ; en forte qu'on peut les tirer alternativement par les deux ex- trémités du canal ofleux , à peu près comme une corde qui pafle par le creux d'une poulie. Pour s'aflurer de Texiflence de cgs ca- naux ofleux, il faut examiner le crâne de quelque poiflbn. On apperçoit les extré- mités de ces différens canaux , & fi Ton y pafle un crin, on voit fon extrémité fortir par l'autre bout du canal. Ces canaux ofleux font peut-être une des caufes qui ont empêché ceux qui ont travaillé fur cette matière, de reconnoître les canaux membra- neux de l'oreille despoiflbns. Car, comme ceux-ci paflent dans les premiers , il eft impoflible de les conferver, fi on fe con- tente d'enlever l'organe de l'ouïe ; ils fe déchirent , & il n'en refte plus que des por- tions mutilées, qu'on ne peut reconnoître. Pour les conferver en entier , il faut dé* truire petit-à-petit & avec foin les canaux ofleux à travers lefquels ils paflent. Par ce moyen on voit les canaux membraneux: H iij i 1 8 Dijfcrtations demi-circulaires en entier, & on peut con* ferver toutes les parties de l'organe de l'ouïe dans leur fituation naturelle. C'eft ce que j 'a vois fait fur tous les poilïbns que j'avois examinés anciennement , & c'efl: d'après ces préparations qu'avoient été fai- tes , il y a vingt-cinq ans , les figures de cet organe, qui ont été perdues. Outre ces différentes parties qui corn- pofent l'organe de l'ouïe des poiffons , il y en a encore une effentielle, fans laquelle tout cet appareil feroit inutile , je veux dire le nerf auditif. Ce nerf dans les qua- drupèdes fe divife en deux portions , que Ton appelle , l'une portion molle , l'autre portion dure , à caufe de la diversité que l'on remarque dans leur confiftance. Mais il n'y a que la première qui appartienne proprement & réellement à l'organe inté- rieur de l'ouïe. Dans les poiffons , le nerf auditif fe divife en un bien plus grand nom- bre de branches. On en compte au moins quatre ou cinq, qui fe fubdivifent encore en plusieurs petits fiîamens. Ce nerf ne for- mant d'abord qu'un faifceaude filets, part de la partie antérieure de la bafe du cer- veau , derrière les nerfs optiques. Il fe replie, & lorfqu'il eft parvenu à l'organe fur V organe de Fouie. 119 de l'ouïe , il commence k fe divifer. Des quatre ou cinq divifions qu'il forme , deux fe portent ordinairement à la véficule de l'os lenticulaire , une ou deux autres s'avan- cent jufqu'à la véficule des deux premiers ofielets, & la dernière fort du crâne par une ouverture , qui fe trouve à côté du trou auditif, avec lequel dans quelques genres de poiflbns elle ne fait qu'une feule ouverture oblongue , mais féparée en deux par une membrane. Cette dernière bran- che fe perd dans les mufcles , & femble répondre à la portion dure du nerf auditif des quadrupèdes , tandis que les quatre autres font l'office de la portion molle du même nerf. Ces différens nerfs ne font qu'un afïemblage d'un grand nombre de petits filets nerveux , qui fe répandent dans les membranes des deux véficules , en forte qu'on pourroit les divifer en une infinité de nerfs , qui ne fe diftinguent qu'à la loupe. Je me fuis contenté de fuivre ces quatre portions principales , que l'on apper- çoit à la vue fimple, outre quelques peti- tes fibres nerveufes, qui, partant de la bran- che principale , vont fe diftribuer dans le canal intermédiaire. Ce détail général fufïit pour montrer H iv '«6 Dijfer tarions combien cft parfait & compofé Yorganè de l'ouïe , dont on avoit jufqu'à préfenc nié l'exiftence dans les poiflbns. Ces ani- maux ont tous de chaque coté un trou auditif, trois oflelets, & deux ou trois canaux demi-circulaires. A cet aflemblagc de parties fe joint un grand nombre de nerfs, & le tout enfemble , féparé du cer- veau par une membrane, eft comme en- fermé dans une cavité particulière , que forment les os du crâne. II n'eft point dou- teux que toutes ces parties ne fervent à l'ouïe des poiflbns. Leur ftru&ure & leur fïtuation feules peuvent le prouver. On trouve dans cet organe des parties qui ré- pondent exa&ement à celles de l'oreille des autres animaux , & fur-tout des rep- tiles , clafle dont celle des poiflbns appro- che le plus. D'ailleurs il eft placé précifé- ment au même endroit , & Ton verra par les defcriptions particulières, qu'il y a peu de différences entre cet organe , & celui des derniers reptiles , que j'ai décrit , tels que la Salamandre & la Raye. Perfonne ne doute de l'exiftence de l'ouïe des Lé- zards, quiparoît extérieurement. Dans les autres reptiles , qui ne différent de ces pre- miers que par des nuances prefque infenfi- fur F organe, de l7ouieé 1 2 r i>Ies, cet organe n'eft pas moins évident. Pourquoi voudroit-on attribuer un ufage différent à un organe précifément fembla- ble , que Ton rencontre dans les poifïbns ? Ces faits une fois pofés , il ne me refte plus qu'à examiner & décrire en particu- lier l'organe de l'ouïe dans différens gen- res de poiflbns. On verra par ce détail , ce qu'ils ont tous de commun , & les différences particulières qui fe rencontrent entr'eux. L7 A N G U I L L E. Je commence ces deferiptions par l'An- guille , qui diffère des autres poiflbns , & femble fe rapprocher des reptiles. L'An- guille (Anguilla Ràj. Aldrovand.&c.JWi/- rœna unicolor , mâxillâ longiore. Arted» gen. 24.fyn. 39. fpec. 66. & Linnœi. fann. fuec. 290.) aies ouïes communes à tous les poiflbns , mais fa peau eft lifïe & n'a point d'écaillés , comme les autres ani- maux de cette clafle. Audi en differe-t-elle par rapport à l'organe de l'ouïe. L'ouver- ture de cet organe, ou le trou auditif: fe trouve placé dans cet animal , comme dans les autres poiflbns ; je veux dire à la partie 1 2 2 Dijfcrtatïons poftérieure & inférieure du crâne. CTeft dans cet endroit qu'on l'apperçoit, après avoir enlevé la peau, qui garnit le fond de la cavité des ouïes. Outre cette ouverture, on rencontre dans la tête de l'Anguille plufieurs autres parties , que Ton pourroit croire d'abord avoir quelque rapport avec l'organe deTouïe. Premièrement, lorfqu'on enlevé la peau de cet animal , on trouve fur fa tête , & principalement à la région de l'oreille, des canaux afTez larges , d'une confiftance ferme & prefque cartilagi- neufe , qui rampent fous la peau dans le tiffu graiffeux. Je m'étois d'abord ima- giné que ces canaux qui s'enfoncent fous \ts mufcles , pouvoient conduire à l'oreille de l'Anguille. Mais ayant introduit des crins dans leur cavité , je trouvai qu'ils n'y avoient aucun rapport , mais qu'ils fe terminoient de part & d'autre h la peau. Je penfe que leur ufage eft plutôt de four- nir continuellement à la peau de cet ani- mal , cette liqueur grafle & vifqueufe , dont il eft toujours enduit. Secondement , on rencontre un peu plus haut fur la tête de ce même poifîbn, un autre canal afTez femblable aux premiers , mais qui en diffère en ce que les crins qu'on y introduit, péné- fur V organe de Fouie. 123 trent dans l'os,précifément à l'endroit où M. Klein fuppofeun trou auditif extérieur dans quelques poiflons. C'eft ce qui me fie examiner ce fait avec plus d'attention. Mais ayant dépouillé le crâne de l'An- guille, je trouvai que le crin que j'avois introduit par cette ouverture, fortoit anté- rieurement par une autre , fans pénétrer dans l'intérieur du crâne , en forte que ce canal n'appartient nullement a l'oreille , mais reffemble à ceux qu'on rencontre dans les têtes des Brochets , des Carpes , & d'un grand nombre d'autres poifïbns , foit que fon ufage foit femblable à celui que j'ai afligné aux premiers, comme le penfe Artedi , foit qu'il en ait un autre , que l'expérience n'a pas encore fuffifam- ment démontré. Ce ne font donc point ces canaux , que l'on doit regarder comme les ouvertures extérieures de l'oreille. Le feul trou auditif de l'Anguille , eft celui dont j'ai parlé, qui fe trouve h la partie latérale poftérieure & inférieure du crâne. Ce trou conduit précifément à la cavité intérieure de l'oreille. Cette cavité enfoncée latéralement dans l'os du crâne , en eft distinguée par un rebord olTeux , auquel eft attachée une i 24 Dijfertations membrane fine , qui fépare l'organe ttk queftion d'avec le cerveau. La première partie qui fe préfente à la vue, eftle plus grand des deux premiers offelets, qui, avec la véficule dans laquelle il eft renfermé r fe trouve placé dans un enfoncement pra- tiqué à la partie la plus baffe de l'oreille , au-deffous de l'ouverture du trou auditif. À la tête de foffelet, dans ce même en- foncement , mais plus près de la bafe du crâne, fe trouve f autre offelet, dont la véficule paroît particulière & féparée de la première , quoiqu'elle communique avec elle. C'eft à ces deux véficules que répon- dent les ouvertures des canaux demi-circu- laires. Ces canaux , au nombre feulement de deux dans l'Anguille , font inégaux ; l'un eft plus grand, & l'autre plus coure & plus petit de moitié. Ils font placés de façon que le plus long paffe fous un canal offeux horifontal, & l'autre plus court paffe dans une fituation perpendiculaire fous un autre canal offeux , auffi perpendiculaire. Ces deux canaux font fimples, ne s'unif- fent point enfemble , & ont quatre extré- mités & ouvertures différentes , qui, s'élar- giffant, s'ouvrent dans le canal commun , auquel aboutit aufîi la véficule des deux fur V organe de Vouie. 1 2<5 premiers oflelets. A Tune des extrêmirés du canal le plus court, on voit Fos lenti- culaire de Caflerius , qui fe trouve vis-à-vis l'ouverture de la grande véficule. Il paroît par cette conformation, que toutes ces par- ties communiquent enfemble. La véficule des deux premiers ofTelets s'ouvre dans ce canal irrégulier , qui communique avec l'autre véficule, & dans lequel fe rendent les quatre extrémités des deux canaux demi - circulaires. Si on fépare ces parties bien entières , l'eau claire & limpide qui les remplit , peut être pouffée foit vers les canaux , foit vers la véficule , fans qu'on apperçoive de féparation entre ces cavités. Seulement cette liqueur à quelquefois un peu plus de peine à pafler par l'extrémité du canal vis-à-vis duquel fe trouve l'os lenticulaire. Le période dont ce petit offe- let eft garni , comme les autres , eft attaché par plufieurs filets à la membrane de la cavité dont je parle , ce qui Taffujettit? au même endroit, & l'empêche de changer de fituation. Mais ces adhérences diminuent la cavité du canal, d'ailleurs affez large en cet endroit ; ce qui fait un obftacle au pafîage de la liqueur , & l'empêche de pénétrer auffi facilement dans le canal nG Dijftrtatïons Peut-être le mouvement que Toflelet doit recevoir par cette a&ion , eft- il néceflaire pour tranfmettre le fon dans les canaux demi-circuîaires; en quoi il paroîtroit faire l'office de la bafe de rétrier deg quadru- pèdes. Toutes ces parties de l'oreille de l'An- guille font garnies des ramifications du nerf acouftique. Ce nerf parvenu à, l'or- gane de l'ouïe , fe divife en deux branches principales. La première s'implante par un grand nombre de ramifications dans la grande véficule. La féconde fe fubdivife en deux branches, qui donnent des rameaux au canal intermédiaire, & aux origines des canaux demi - circulaires , qui y aboutif- fent. Il eft impoffible, même avec la loupe, de fuivre plus loin ces ramifications qui deviennent infenfibles à la vue. Mais ce détail abrégé peut fuffire , pour donner une idée de l'organe de l'ouïe de l'An- guille, Des trois offelets qu'on y remar- que , le premier , placé le plus près du trou auditif, femble faire l'office du marteau. Le {econd, plus grand & plus long, parole tenir lieu de l'enclume, puifqu'il tient, comme elle , le milieu entre les deux autres , ôc communique les vibrations du fon de" l'un fur V organe de Poule. 1 27 à f autre. Enfin le troifieme , ou l'os lenti- culaire, placé à l'ouverture d'un des canaux demi-circulaires, repréfente,par fa fituation & fa forme , la bafe de Tétrier. Le canal intermédiaire, auquel aboutirent les au- tres parties , peut auffi être regardé comme le veftibule du labyrinthe, & les nerfs dont il efl: garni , font voir qu'il doit être une des parties eflentielles de tout cet organe. Peut-être y a-t-il d'autres correfpondances encore plus particulières entre toutes ces parties , mais que leur finefTe & leur déli- catefle dérobent à la vue , ne nous laiflant appercevoir que l'extérieur de ce laby- rinthe. Le Merlan- Le Merlan ( Merlangus> Bellon. Gefner. &c« fecunda afellorurn fpecîes. Rodelet. lib. 9. c. 10. G a dus dorfo tripterygio , ore imberbi , cor pore albo> maxillâfuperiore longiorc. Arted. gen. 16. fyn. 34. fp. 62. ) efl: un poifTon du genre des Morues, dans lequel tout le monde connoît une des par- ties de l'ouïe , je veux dire les os du Mer- lan , fi aifés à trouver pour leur grofleur, & dont la Médecine fait ufage. Ce poiflbn efl: aufliun de ceux dans lefquels l'organe 1 28 Dîjfertarions de l'ouïe fe reconnoît le plus facilement. À peine a-t-on enlevé la peau qui tâpiffe la cavité des ouïes , que Ton découvre de chaque coté une ouverture aflez large , qui pénétre dans l'intérieur du crâne à l'en- droit de l'oreille. Ce trou auditif efl: placé à la partie latérale & postérieure du crâne. Il conduit a un enfoncement pratiqué dans la partie latérale des os de la tête, & qui eft féparé du refte du cerveau , non-feu- lement par une membrane , mais encore par une efpece de production ou colonne olfeufe particulière à ce poiflbn , qui fou- tient le cerveau , le fépare de l'oreille , & l'empêche de pefer fur cet organe. Si on ouvre en deux, fuivant fa longueur, le crâne d'un Merlan , & que l'on détache douce- ment le cerveau , on apperçoit cette co-» lonne oflTeufe , & la membrane qui recou- vre l'enfoncement , dans lequel l'organe de l'ouïe eft renfermé. A travers cette membrane on entrevoit quelques* unes des parties qui compofent l'oreille , & en par- ticulier le grand offelet. Mais fi au lieu d'enlever le cerveau & de le féparer de l'or- gane , on détruit peu à peu les os & les canaux ofTeux à travers lefquels paflent les canaux demi-circulaires membraneux, fans fur t organe de Fouie. 129 fans endommager ceux - ci , on parvient à enlever le cerveau avec tout l'organe de l'ouïe en fituation. Anciennement j'avois confervé dans l'efprit de- vin , quelques cer- veaux de poifîbns détachés de cette ma- nière; c'eft une des meilleures méthodes pour voir l'organe de l'ouïe en entier dans fa pofition naturelle. Si l'on regarde un cerveau ainfi préparé par le haut & en defîus , on n'apperçoit qu'une partie du grand ofîelet , & des trois canaux demi- circulaires qui fe trouvent dans le Mer- lan , parce que la fubftanee du cerveau couvre le refîe de cet organe. Mais fi au contraire on regarde le cerveau par def- fous , on voit dans le plus grand détail toutes les parties de l'oreille. Le premier ofîelet fe trouve dans une véfîcule , qui paroît féparée , mais qui communique avec celle du fécond ou du grand. Il eft de forme prefque quadran- gulaire , afîez mince, convexe d'un côté, & concave de l'autre , avec une rainure dans fon milieu, qui femble le partager en deux parties. La véfîcule, qui le ren- ferme , s'ouvre dans celle du fécond ofîeler. Je ne m'arrêterai point à décrire celui - ci que tout le monde connoît. J'obferverai I 130 Dijfertarions feulement qu'il eft fort grand dans le Mer- lan , proportionnément à la grandeur de ce poiffbn , & à celle des deux autres oflelets , quoiqu'en général dans tous les poiflbns , ce fécond ofîelet foit le plus long,& afîez fouventle plus grand. Les véficules de ces deux oflelets font placées dans un enfoncement à la bafe du crâne , & derrière la colonne ofleufe , de façon que le premier ofîelet eft le plus près de la partie poftérieure ou occiput. Enfin l'os lenticulaire , irrégulier quant à fa forme , eft placé à la partie poftérieure , dans une véficule particulière , qui communique avec celle du grand ofîelet, & avec l'ex- trémité d'un des canaux. Ces canaux , au nombre de trois , n'*ont que cinq ouvertures , deux d'entr'eux s'u- nifîant enfcmble pour ne former qu'une extrémité commune , de même que les canaux demi - circulaires de l'homme & des quadrupèdes. Ces extrémités font plus larges que le refte des canaux. Deux d'en- tr'elles fe rendent antérieurement dans la véficule de Tos lenticulaire , deux autres au milieu aboutiffent à une cavité com- mune avec celle de la véficule du grand offelet , & enfin une feule va s'ouvrir pof- fur V organe de Vouic. 13 r têrieurement dans la véficule où le pre- mier offelet eft renfermé» Ces trois ca- naux membraneux paffent dans des canaux ofleux fore courts , qui font pareillement au nombre de trois. L'un eft antérieur , Pautre poftérieur, & le troifïeme plus in- férieur. Leur peu de longueur & leur lar- geur confidérable font voir qu'ils fervent feulement à contenir les canaux membra- neux dans leur fituation naturelle. Car ceux-ci plus étroits & plus longs flot- tent librement dans la cavité des pre- miers. Toutes ces parties font garnies des rami- fications du nerf acouftique , qui mar- chant de devant en arrière , va s'implanter dans les tuniques des véficules , en four- niflant encore quelques filets nerveux aux autres parties. Le Brochet. Le Brochet ( Lucius. Rondelet. Aldrov. Jonft.Raj. Efox rojîroplagioplatco. Arted. gen. i4«fyn. 26. fp. «54. & Linn. faun.fuec. 304. ) eft un des poifîbns dans lefquels M. Klein a prétendu démontrer les trous audi- tifs externes. Ces trous font deux ouver- 131 Dijfertations tures ( i ) placées aux deux côtés de îà partie poftérieure du crâne, dans lefquelles cet Auteur dit avoir introduit des crins qui pénétroient dans la cavité de l'ouïe-, & alloient fe rendre à la véficule de la grande pierre ou du grand offelet, en forte qu'en pouffant le crin, on faifoit mouvoir les offelets. Ce fait, s'il étoit vrai, prou- veroit incontestablement l'ufage que 1VL Klein attribue à ces trous ; aufîi ai- je voulu m'en affurer. J'ai donc pris une tète de Brochet affez groffe ; & après avoir nétoyé le crâne avec j foin , j'y ai compté distinc- tement huit paires de trous remarquables dans la partie fupérieure, fans compter les deux cavités des orbites , & les ouvertu- res qui font fur les côtés. J'ai commencé comme M.Klein, par introduire trois crins dans un de ces trous. Chacun de ces trois crins eft refforti par trois ouvertures diffé- rentes, en forte que j'ai vu clairement que ces trois trous étoient les iffues d'un feul & même canal, qui rampoit entre les deux tables de l'os , niais qui n'avoient aucun rapport avec l'organe de l'ouïe. J'ai enfuite introduit un autre crin , dans un autre ( i ) Klein, de pifcium auditu. tah* i. fig. i. fur Vorgant de Vouïc: 135 trou , qui eft à côté du précédent, & l'ex- trémité de ce crin a été reflbrtir auffi par une ouverture différente , ce qui montre la communication des unes & des autres. Après m'être affuré que toutes ces ouver- tures n'étoient point celles de l'oreille, je fuis venu k l'ouverture, que M. Klein pré- tend être le trou auditif. Ce trou eft plus grand que les précédens, & y ayant intro- duit plufieurs crins , trois ont pénétré , fçavoir , un en avant & deux en arrière. Celui qui alloit à la partie antérieure eft encore refTorti par une autre ouverture ; & des deux qui étoient entrés dans une direc- tion oppofée, l'un eft forti par un trou pos- térieur, & l'autre par une ouverture qui fe trouve à l'extrémité du crâne. J'ai effayé fi je ne pourrois point faire pénétrer par ce chemin quelqu'un des crins dans l'inté- rieur du crâne ; mais après avoir inutile- ment tenté , j'ai vu que fa cavité n'avoit point d'autres ifïues, que celles quej'avois trouvées. Par conféquent on ne doit point regarder l'ouverture , dont parle M. Klein , comme le trou auditif, & s'il a vu des crins pénétrer par cet endroit dans la cavité du crâne, il faut qu'il y ait eu quelque déchi- rure accidentelle arrivée k cette partie. C'eft I iij ï^4 DîJfertatîonS auflï pour tn*afîurer davantage de ce que j'avance , que j'ai réitéré cette expérience fur plufieurs têtes de Brochet , & elle a toujours été la même. Ainfi cette ouver- ture , femblable aux autres , qui font en grand nombre dans le crâne du Brochet , & ayant communication avec elles tou- tes, n'appartient nullement à l'oreille. Les unes & les autres doivent avoir un ufage particulier , dont il n*eft point queftion a&uellement. Mutant alfuré que je ne pourrais ren- contrer le trou auditif en cet endroit, je l'ai cherché au même lieu, où je l'avois déjà découvert dans d'autres poiffons , ôc j'ai trouvé à la partie latérale & pofté- rieure du crâne une ouverture , qui eft le véritable trou auditif du Brochet. L'en- foncement de l'os , dans lequel elle con- duit , renferme l'organe de fouie , & eft féparé du reftede la cavité du crâne par une membrane aflez délicate. Cet organe appro- chant de celui du Merlan , confifte en trois offelets, & trois canaux demi-circulaires. Le premier offelet eft de figure alongée> convexe d'un côté , concave de l'autre > avec une rainure dans fon milieu. Cet offe- let ne paraît point avoir de véficule propre fur V organe de Vouïe. 135 & particulière , mais il eft placé k la tête du grand oflelet , renfermé dans une même véficule , commune à tous les deux. Celui-ci eft le plus grand des trois , long , de forme irréguliere , plein de finuofités fur fa furface , & échancré en plufieurs endroits de fes bords. L'une de fes extré- mités eft plus aiguë ; c'eft celle qui regarde la partie antérieure du crâne ; l'autre pos- térieure eft plus large , ê& c'eft auprès de celle-ci quefe trouve le premier oflelet , à moins que le poiflbn n'ait fouffert la cuiflbn, car dans ce cas les parties fe dérangent , comme M. Klein fa obfervé , & le plus petit oflelet va fe loger dans la rainure, qui fe trouve a la partie intérieure du grand. Dans fétat naturel, la véficule dans laquelle ces deux oflelets font renfermés , eft rem- plie d'une liqueur claire , tranfparente & aufli limpide que de l'eau , & elle com- munique avec le canal intermédiaire dans lequel fe rendent les extrémités des trois canaux demi - circulaires. C'eft k l'extré- mité antérieure de cette partie , que fe trouve la véficule particulière , qui con- tient le petit oflelet ,ou l'os lenticulaire de Caflerius. Cet oflelet , quant à' fa forme , eft irrégulier, ayant deux échancrures ou I iv fjï Differtations fînuofités confîdérablcs ; quant à fa por- tion , il répond à l'ouverture de deux des canaux demi-circulaires. Ceux-ci fe croi- fent mutuellement ; ils ont fix ouvertures, aucun de œs canaux ne fe joignant enfem- ble, ou tout au plus ne fe joignant qu'à leur extrémité- Deux d'entr elles vont fe rendre à la grande véficule , deux autres au canal intermédiaire, & les deux der- nières répondent à la capfule du petit ofle- Jet> De ces trois canaux membraneux , il n'y en a que deux qui paffent par des ca- naux ofîeux. Le troifieme flotte librement fans pafler par aucune cavité offeufe , en forte qu'il y a trois canaux demi-circulaires membraneux dans le Brochet, & feulement deux canaux offeux , ce qui n'eu: pas par- ticulier à ce poifïbn. Tout cet organe eft garni du nerf acouf- tique , dont on peut remarquer trois bran- ches principales. Deux vont à la capfule de l'os lenticulaire , & une à la véficule des deux grands oflelets. Pour voir toutes ces parties en fituation , on peut enlever le cerveau avec l'organe de l'ouïe , en détrui- fant les os du crâne, comme je l'ai déjà dit en parlant du Merlan. De cette façon on a cet organe dans fa pofxtion naturelle 9 fur V or gant de Vouie. 137 & on peut le confidérer en defïus & en defîbus. C'eft ainfi que je l'avois defîîné dans les figures qui ont été perdues. Ou bien on peut féparer feulement l'organe de l'ouïe , & l'étendre fur un morceau de verre mouillé , & pour lors on voit encore diftin&ement toutes ces parties, La Carpe. La Carpe ( Cyprïnus > des différens Ichtyologiftes. Cyprïnus cirrhïs quatuor, gJJïcuIo tertio pinnarum dorji anïquc un- cïnatis. Arted. gen. 4. fyn. 3. fp. 25. & Linn. fann. fuec. 317.) eft un des poif- fons , où l'organe de l'ouïe eft le moins aifé à fuivre. Toute cette partie eft comme enfevelie dans une graille huileufe > qui la cache à nos yeux , & qu'il eft très- difficile d'enlever , fans détruire l'oreille , ou du moins fans endommager fa fituation D'ail- leurs, quoique l'organe de ce poifïbn & de ceux du même genre foit compofé des mêmes parties qui fe rencontrent dans les précédens , néanmoins il en diffère par plufieurs particularités , qui en rendent l'examen encore plus difficile. Première- ment , le trou auditif eft beaucoup plus 1 38 Dijfcrtatîons grand & plus long que dans les poiflbns que j'ai déjà examinés , quoiqu'il foit placé au même lieu. Aufli cette ouverture , qui dans le fquelette paroît feule & fimple , eft dtvifée en deux dans l'animal. La por- tion la plus proche des vertèbres fert du trou auditif, & la portion antérieure , fé- parée de la première par une membrane allez forte , donne paflage k un nerf. Ce conduit mené dans renfoncement où eft placé l'organe de l'ouïe , organe compofé à peu près comme dans les autres poiflbns, c'eft - à -dire , de trois oflelets & de trois canaux membraneux. Mais de ces trois oflelets , les deux premiers renfermés dans la même véficule, font enfoncés à la bafe du crâne dans une cavité particulière fer- mée de tous côtés , excepté antérieure- ment, où elle fe joint avec le canal inter- médiaire. Aufli les deux premiers oflelets font - ils d'abord afifez difficiles à trouver dans ce poiflbn , parce qu'il faut déchirer l'os & entrouvrir cette cavité pour les aller chercher. De ces deux oflelets le premier eft le plus grand de tous, au contraire des poifîbns , que nous avons vus jufqu'ici. Il eft d'une figure approchante de l'ovale, convexe d'un côté, avec unefinuofitéaflez fur V organe de rouie. 139 confidérable de l'autre, & fes bords font échancrés & comme dentelés. Vers fon extrémité la plus pointue , eft placé le fécond oflelet. Celui-ci eft plus long, comme il l'eft ordinairement dans tous les poiftbns, mais très-mince, prefque comme une aiguille, quoiqu'un peu plus large vers l'extrémité poftérieure, qu'à la partie anté- rieure. La véficule qui renferme ces deux oflelets, communique avec le canal inter- médiaire par une efpece d'appendice , qui fort de la cavité où elle eft renfermée par l'ouverture antérieure de cette cavité. Pour concevoir cette conformation , il faut fça- voir que la cavité, qui, dans Porgane féparé, paroît ouverte par en-haut, eft, dans 1 état naturel, recouverte d'une lame ofleufe,qui la ferme exactement , excepté dans fa par- tie antérieure, C'eft par cette ouverture aflez ferrée , que la véficule enfoncée dans la cavité , communique avec le canal inter- médiaire. Ce canal irrégulier reçoit les cinq ouver- tures des trois canaux demi - circulaires , deux de ces canaux s'uniftant pour n'en former qu'un , & n'avoir par conféquenc qu'une ouverture commune. A l'extrémité antérieure de ce canal intermédiaire, eft le 140 Dïjfertations troifieme oflelet, ou Tos lenticulaire, de forme oblongue & irréguliere, plus élevé que les deux premiers. Des cinq ouvertures des canaux demi- circulaires, deux répondent à la véficule de Tos lenticulaire , deux autres aboutirent a l'endroit où fe rend l'appendice de la grande véficule y & enfin une feule s'ouvre dans le milieu du canal. Ces trois canaux font couverts d'une grande quantité de graifle huileufe ce qui les rend difficiles à trou* ver. Ils font foutenus par des canaux ofleux, à travers lefquels ils paffent3 mais de façon cependant qu'il n'y a que deux canaux ofleux , quoiqu'il y en ait trois membra- neux , en forte qu'un de ceux-ci flotte librement. Ce dernier canal , placé feule- ment dans une finuofité qui fe trouve dans Tos , fuit la direction de cette finuofité jufqu'a l'endroit où il fe joint à un des autres canaux. Celui-ci s'enfonce par un trou dans un canal ofleux , médiocrement long , dont il reffbrt par un autre trou. Le troifieme canal s'enfonce pareillement dans un long canal ofleux, qui va jufqu'au bord du crâne , & il en reffbrt par une ouver- ture avec le fécond canal , fur lequel il fe croife. Enfin le canal formé de la jonction fur P organe de Pouïe. 1 41 des deux premiers , n'entre dans aucun canal ofleux. On concevra plus aifément ce détail , aflez difficile à rendre , en en- fonçant des crins dans cts différentes ou- vertures , qui fe remarquent aifément dans le fquelette d'une tête de Carpe. Les ramifications du nerf auditif , qui vont fe distribuer dans cet organe , font au nombre de trois principales. L'une s'en- fonce dans la cavité qui renferme la grande véfîcule , & va fe diftribuer dans fon enveloppe. Les deux autres fe rami- fient dans le canal intermédiaire , à V en- droit de la véficule du petit ofîelet ; en forte que Ton voit dans ce poiflbn , comme dans les autres , que c'efl: principalement aux véficules des oflelets , que vont aboutir les ramifications du nerf acouftique. Le Gardon. Le Gardon ( Gardus des différens Au- teurs. Cyprinus S argus diSus. Ârted. gen. 3. fyn. 9. Sargus , Sargo & Cepha- lus, & Gardo. Bellon, & Gefner. Leucîf- eus. Rondelet. ) efx un poiflbn du même genre que la Carpe , & qui en diffère peu par rapport à l'organe de l'ouïe. Mais 142 Dijfertations comme les poiffons que j'ai déjà exami- nés , différent entre eux par le genre , j'ai voulu joindre le Gardon à la Carpe , pour faire voir les différences légères qui fe trouvent entre deux poifîbns du même genre , & feulement d'efpeces différentes. Ain fi je m'attacherai principalement à ces différences particulières dans ma defcrip- tion. Premièrement, le trou auditif, placé toujours au même endroit du crâne , efl: petit dans le Gardon , & refTemble moins à celui de la Carpe , qu'à l'ouverture de l'oreille des autres poiffons. Outre ce trou , on trouve dans le crâne du Gardon , de même que dans celui de la Carpe , plu- fleurs petits trous à la partie fupérieure , dans le même endroit, où M. Klein place le prétendu trou auditif Mais hs crins en- foncés dans ces ouvertures > font voir clai- rement , qu'elles n'appartiennent point à l'organe de l'ouïe. Les offelets relfemblent à ceux de la Carpe : feulement le premier eft plus ar- rondi , & fes bords font échancrés en feie. Il ett renfermé avec le fécond , ou le long, dans une même véfîcule placée , comme dans la Carpe , dans une cavité vers la bafe du crâne. Cette cavité exa&emenc fermée fur l'organe de Fouit. 143 de tous côtés, a feulement une ouverture à fa partie antérieure , par laquelle elle donne paflage à l'appendice de la grande véficule qui va fe joindre au canal inter- médiaire. C'eft à l'autre extrémité de ce canal , que fe trouve TofTelet de CafTerius, & les cinq ouvertures des trois canaux demi-circulaires fe rendent dans fa cavité, de même que dans la Carpe. Mais il y a dans la direction de ces canaux quelques différences. Premièrement, un des canaux pafle fous un petit canal ofîeux , qui ne fe trouve point dans la Carpe , en forte que dans le Gardon il y a trois canaux offeux. Secondement, le grand canal, en pénétrant dans un canal offeux , ne croife pas les autres canaux , comme dans la Carpe , mais fe trouve placé inférieurement Quant aux autres canaux, ils n'ont rien de particulier dans le Gardon. Les nerfs font auffi dans la même pofition , c'eft-à-dire, qu'ils abou- tirent, comme dans la Carpe , aux véhi- cules des offelets. Cette comparaifon de la Carpe & du Gardon, fait voir qu'il y a une grande fimi- litude par rapport à l'organe de l'ouïe entre les poiffons d'un même genre , mais que néanmoins il y a quelques différences pro- 144 Dijfertations près k chaque efpece. Je vais paffer actuel- lement à l'examen d'un poifîbn d'un genre bien différent. C'eft un de ces poiiîbns plats, qui étant toujours couchés au fond de la mer , portent leurs deux yeux du même côté de la tête , & ont par cette raifon cette partie finguliérement con- formée. La Limande. La Limande ( Limanda Bellon. Gef- ner. Pleuroncctcs oculis à dextrâ , fqua- mis ajpcris , fpinâ ad anum , dcniibus obtufis. Arted. gen. 14. fyn. 33.) Ce poif- fon , comme tous ceux de fon genre , a la partie antérieure de la tête fort différente de celle des autres poifïbns , mais il n'en eft pas de même de la partie postérieure, dans laquelle eft renfermé l'organe de l'ouïe. Audi cet organe ne differe-t-il pas , autant qu'on le penferoit d'abord , de ceux que j'ai déjà examinés. Son ouverture, le trou auditif eft placé au même endroit que je lui ai aftîgné , c'eft à-dire, à la partie latérale &-poftérieure du crâne. Il eft fort petit, & à;côté de lui on remarque une ouverture plus grande, qui donne paflage à un nerf. L'enfoncement dans lequel conduifent fur V organe de Y ouïe. . "14^ conduifent Tune & l'autre de ces ouvertu- res, eft féparé du refte de la cavité du crâne par une membrane , qui dans toute fa cir- conférence eft attachée à un rebord ofleux afîez faillant. C'eft au fond de cette cavité , vis-à-vis & un peu au - deffous des deux ouvertures mentionnées ci~deflus, que fe trouve la véficule qui renferme les deux pre- miers offelets. L'un, beaucoup plus grand, eft d'une figure irréguîiere , approchant de Povale. On voit au centre de l'une de fesfurfaces, une cavité ou rainure oblon- gue, & il paroîtroit formé de plufieurs couches concentriques ajoutées en diffé- rens temps , qui fe font remarquer des deux côtés. L'autre , beaucoup plus petit, eft de figure un peu longue , plus large à une extrémité qu'à l'autre , & il eft placé à côté du premier à fa partie antérieure , fouvent enfoncé dans une petite échan* crure de fes bords* La véficule de ces deux offelets communique par fa partie anté-* rieure à la cavité commune , où fe ren- dent les trois canaux demi - circulaires. Ceux-ci font fimples , allez égaux, repré- fentans par leur pofition régulière trois demi-cercles conftruits chacun fur un des côtés d'un triangle prefque équilatéral. Par K I4 ôc les efpeces de poifîbns , avec quelques légères différences: organe délicat & mer- veilleufement compofé pour un animal , dans lequel les fenfations paroifîent fi peu diftin&es , qu'on lui en avoit refufé une partie. A&uellement il n'eft plus douteux que les poifîbns entendent , puifque la nature les a tous pourvus de l'organe nécef- faire à ce fens, que fa délicatefîe , les ca- naux ofleux a travers lefquels il pafTe , ôc la graiffe quifouventledérobea nos yeux, avoient feuls empêché de reconnoître. Ces mêmes circonftances m'auront peut-être fait échaper plufieurs parties, qui en ren- droientla defcription plus complette, mais du moins j'aurai indiqué la voie que doi- fur t organe de Tome. 1 5 1 vent tenir ceux qui voudront donner par la fuite un détail plus circonftancié de cet organe , & j'aurai fait voir le premier ( 1 ) Texiftence d'une partie effentielle, qui jus- qu'à préfent a été inconnue. ( 1 ) Lorfqtie je lus ce Mémoire à l'Académie des Sciences, en 1753 , j'étois lepremier , comme je le dis , qui eue démontré l'organe de l'ouïe des poiffbns. Depuis , MM. Camper &c Vicq-d'Azir ont donné l'Anatomie de ce même organe, comme je le marque dans rAvertiflement. FIN. ! - m ■-'m ■ S '-if ,"■ ' i . •• • K&M m •**-..: