ÏÊÛa! wmt COLLECTION OF William Schaus ® PRESENTED TOTHE National Muséum MCMV tefefMJbfeteLft &SBS :^t^^^^^^2^ ÉTUDES DE LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE PAR Charles OBERTHUR Fascicule X (texte) RENNES IMPRlMliRIH OBERTHUR Mars 1915 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 6^L Fasc. 10 Text ^ETUDES ânt. DE LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE , PAR Charles OBERTHUR Fascicule X r ':> f"* RENNES ~^.-"""«'- IMPRIMERIE OBERTHUR Septembre 1914 Faune des Lépidoptères de la Barbarie C'est en 1876 que parut la première livraison des Etudes d' Entomologie, ouvrage ayant pour objet la publication des Faunes lépidoptérologiques et la description des Espèces de Lépidoptères présumées nouvelles ou restées peu connues. En ce temps-là, aussi bien qu'aujourd'hui, je considérais qu'une bonne illustration en couleurs était indispensable pour rendre les descriptions intelligibles; je ne crois pas avoir souvent manqué de me conformer moi-même à la règle que je n'ai cessé de préconiser. J'obtins d'ailleurs, pour l'exécution des planches en couleurs, le concours de plusieurs artistes distingués. La première livraison des Etudes d^ Entomologie ayant été consacrée - — aussi bien que l'est ce X^ fascicule des Etudes de Lépidoptérologie comparée — à la Faune des Lépidoptères d'Algérie, les planches de cette première livraison, au nombre de quatre, furent très bien gravées par Dcbray, d'après des aquarelles dues au pinceau justement renommé de feu Poujade. Je ne tardai pas à réunir les éléments d'un premier supplément à la Faune algérienne; par suite, une nouvelle planche portant le N° 5, avec la mention : Supplément, parut dans la troisième livraison des Etudes d'Entomologie. La gravure fut exécutée sur pierre, dans notre Imprimerie même, par M. lenoch, d'après les aquarelles de Poujade. Plus tard, M. d'Apreval, à la fois peintre et graveur d'histoire naturelle,- accepta de faire le dessin, la mise sur pierre et le coloriage des modèles pour la V^ livraison et les 8 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE suivantes; il illustra ainsi mes travaux jusqu'à et y compris la XIP livraison; après quoi, M. d'Apreval me déclara qu'ayant entrepris d'autres travaux iconographiques, il ne pouvait plus continuer à se charger des miens, Entre temps, la Faune des Lépidoptères algériens étant tou- jours restée l'objet constant de ma sollicitude, plusieurs nouveaux suppléments étaient devenus nécessaires. C'est ainsi que M. d'Apreval, en outre d'autres planches où se trouvent représentés des Lépidoptères de diverses provenances, avait gravé les planches suivantes qui sont consacrées à la repré- sentation de papillons d'Algérie, savoir : pour la VP livraison des Etudes cV Entomologie, les planches I, II, III et XI; pour la IX", la planche III; pour la XIL, les planches V, VI et VII. Après M. d'Apreval, mon collaborateur artistique fut M. Dal- longeville, alors employé comme graveur lithographe dans notre Imprimerie. M. Dallongeville a exécuté, sous ma direction personnelle, les travaux iconographiques qui ont illustré les livraisons XIII à XXI des Etudes d' Entomologie, ainsi que le premier fascicule des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Pour assurer la fidélité du dessin, je remettais toujours à M. Dallongeville, avec les spé- cimens à reproduire, une photographie prise à la grandeur natu- relle. De cette façon, un calque de la photographie était toujours le premier élément du travail de figuration. Grâce à cette méthode, la coupe des ailes, l'emplacement des taches, la nervulation se sont toujours trouvées représentées rigoureusement conformes à l'original. Les suppléments que j'ai continué à publier, relativement à la Faune algérienne des Lépidoptères, ont donné lieu à la gravure des planches entières VI, Vil et VIII, dans la XIIL livraison des Etudes d^ Entomologie, et à quelques figures sur les planches I, V et VI dans la XX" livraison. Nul ne contestera la haute valeur de cette figuration qui fut l'ouvrage de M. Dallon- LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE geville. Cependant cet artiste éminemment consciencieux, s'étant senti fatigué et ayant voulu se retirer à la campagne, j'eus la satisfaction de trouver en M. Jules Culot, de Genève, le digne successeur de MM. d'Apreval et Dallongeville, et pour mes tra- vaux entomologiques, le plus précieux coopérateur (*). Entomologiste expérimenté autant que dessinateur et peintre excellent, M. Jules Culot jouit actuellement dans le monde des Lépidoptéristes de la plus légitime notoriété. Nous sommes unis par les liens de la plus cordiale am^itié et je remplis toujours le plus agréable des devoirs en rendant un juste hommage au remarquable talent de M. J. Culot. Depuis 1909, dans les divers fascicules des Etudes de Lé-pi- do ptérologie comparée, j'ai publié de nombreuses figures de chenilles et de chrysalides de papillons algériens. J'ai trouvé, pour cette figuration dont les modèles en aquarelle ont été exécutés d'après nature par M. Harold Powell, un second colla- borateur artistique, également très habile, en même temps qu'un observateur de grand mérite. Maintenant il s'agit non seulement de coordonner tous les travaux successifs et épars qui ont été jusqu'ici publiés sur la (*) Voici le relevé des articles consacrés à la Faune des Lépidoptères d'Algérie, dans les Etudes d'Entomologie, publiées à Rennes, depuis 1876 juseju'à 1902. Etudes d'Entomologie : Livraison I, 1876. Faune des Lépidoptères d'Algérie, pages 1-74 ; 4 Planches coloriées. Livraison III, 1878. Premier Supplément à la Faune des Lépidoj)tères d'Algérie, pages 37-48; I Planche coloriée. Livraison VI, 1881. III. Lépidoptères d'Algérie, pages 39-96; 4 Planches coloriées. Livraison IX, 1884. IV. Lépidoptères d'Algérie, pages 31-40; i Planche coloriée. Livraison XII, iS88. Lé|)i(loi)tères d'Europe et d'Algérie, pages 21-44; 3 Planches coloriées. Livraison XIII, 1890. Lépidoptères d'Algérie, pages 17-33, 3 Planches coloriées. Livraison XIX, 1894. Lépidoptères d'Algérie, pages 14, 35, 36, 38; Planche VI, fig. nos 40^ 41^ 42, 52, 53. Livraison XX, 1896. De la Variation chez les Lépidoptères, Planche I, fig. 8; Planche IV, fig. 46; Planche V, fig. 83^ 84; Planche VI, fig. loi. 10 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE Faune algérienne des Lépidoptères par divers Auteurs, dans différents mémoires, mais encore d'ajouter toute la documentation qui résulte des plus récentes découvertes. C'est à cet ouvrage que je me suis appliqué. Je n'ignore pas qu'il restera encore après cela beaucoup à faire, relativement à la Faune algérienne des Lépidoptères; mais j'ai la confiance, par la réunion et la mise en ordre de tant de renseignements dispersés, de faciliter les progrès à venir. Mon intention est d'établir — non sans lacunes, car qui donc peut se flatter de tout connaître? — tout au moins une base d'après laquelle on pourra corriger, amender, ajouter; mais qui n'en restera pas moins, dans ma pensée, la synthèse soigneusement édifiée des connaissances acquises jusqu'à ce jour, relativement à la faune des papillons algériens ; ce sera en outre le tableau exact et complet, selon la mesure des moyens dont je dispose, du résultat des recherches entomologiques effectuées en Algérie depuis que les Français ont pris possession, par les armes, des Etats barbaresques. D'ailleurs, on peut dire de la faune lépidoptérologique algérienne qu'elle est aujourd'hui mieux connue que la faune ibérique et aussi bien connue que la faune française elle-même. L'Algérie, comme la Tunisie, — qui a été placée sous le pro- tectorat de la France et est ainsi devenue aussi facilement accessible aux Européens que l'Algérie elle-même, — présentent une faune mélangée d'Espèces spéciales et d'Espèces siciliennes, espagnoles, provençales, languedociennes, même asiatiques. Quant au Maroc, il est encore à peu près inexploré au point de vue qui fait l'objet de nos études; mais le peu qu'on a été à même d'observer sur cette terre jusqu'ici particulièrement inhospitalière aux Nations chrétiennes, laisse espérer, principalement dans les hautes montagnes de l'Atlas marocain, la réalisation d'une riche moisson d'Espèces et de formes nouvelles et imprévues. Y trouvera-t-on des papillons des Genres Erebia et Parnassius, comme dans la Sierra-Nevada d'Andalousie ? L'Avenir nous révélera ce qui est resté jusqu'à ce jour un secret. Peu à peu, l'armée française ouvrira le Maroc à la péné- LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE II tration européenne, comme jadis elle a ouvert l'Algérie à notre colonisation. Des voies de communication seront, grâce à notre armée, graduellement ouvertes sur le territoire marocain, et bientôt sans doute la sécurité se trouvera suffisamment garantie aux voyageurs, même dans la région montagneuse de l'Atlas, la plus intéressante à explorer au point de vue de la Faune et de la Flore. Cependant on conçoit qu'il faut encore un certain temps pour que les Européens se trouvent en sûreté au milieu des populations musul- manes des montagnes; en effet, les Marocains de l'Atlas semblent animés d'une antipathie particulièrement violente et farouche contre les Chrétiens qu'ils ne connaissent presque point et qui n'ont pu jusqu'ici pénétrer que très difficilement dans des régions très accidentées et dépourvues de routes. Mais lorsque les plaines seront pacifiées, ce sera le tour des montagnes d'être appelées à faire du commerce avec les Européens. Des chemins seront tracés ; les voyageurs se hasarderont alors à parcourir les hautes terres du Maroc méridional. Nos successeurs jouiront amplement, j'en ai du moins l'espoir, des découvertes que les vaillants Naturalistes-Explorateurs ne manqueront pas de réaliser dans la Faune et la Flore de ce pays. Je compte mentionner dans le présent ouvrage, à titre d'indi- cation, le petit nombre d'Espèces et de Formes géographiques marocaines décrites par M. E. G. B. Meade-Waldo, dans les Transactions of the entomological Sa ciel y of London, for the year 1905, et par M. Charles Blachier, de Genève, dans les Annales de la Société ent ontologique de France, 1908, ainsi que dans le Bidletin de la Société lépidoptérolo gique de Genève, 191 3, d'après les documents possédés et communiqués par M. Vaucher. Ce sera comme une pierre d'attente aux travaux de l'Avenir. Rennes, octobre 191 3. Charles OberthÛR. 12 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE Papilio Machaon, T.inné. Ma collection contient 38 Imago et 4 chenilles soufflées du Machaon de Barbarie. Les Imago viennent de : Maison-Carrée, Alger, Hussein-Dey, Sebdou, El-Outaya, Biskra, Laghouat, Lambèse, Mascara, Sfax, Tanger; les chenilles ont toutes été récoltées à Biskra et elles appartiennent à la forme Hospitonides, Obthr. {Etudes d'Entomologie, Liv. Y^ll, PI. V, fig. 19). J'ai lieu de croire que toutes les larves du Papilio Machaon, originaires de Biskra, sont des Hospitonides; mais j'ignore encore comment sont les larves de Papilio Machaon, dans la plupart des autres localités algériennes et marocaines. J'ai appris qu'à Lambèse, les larves du P. Machaon se présentent assez conformes à la morphe européenne. C'est à cela c|ue se bornent mes informations. M. P. Chrétien, dans des Notes biologiques sur les Lépidop- tères de Biskra (^Le Naturaliste, 15 décembre 1908), parle en ces termes du Papilio Machaon de Biskra : « Chenille en mai, sur le Deverra Scoparia. Comme cette ombellifère est presque aphylle, la chenille en mange l'écorce et le sommet des tiges. En juin, j'ai trouvé plusieurs chenilles de Machaon sur VHalophyllum tubercidatum, Forsk., une Rutacée. )> Le savant Entomologiste de la Garenne-Colombes, qui a observé au cours de sa laborieuse carrière un si grand nombre d'Espèces de chenilles aux environs de Paris et ailleurs, ne dit pas un mot de la livrée de la chenille du Papilio Machaon, à Biskra. Il eût été pourtant intéressant de savoir si quelques variations ont été rencontrées par M. Chrétien dans la forme Hospitonides. Je n'en ai jamais vu; mais ce n'est pas une raison suffisante pour établir la réalité du fait. En Algérie, le Papilio Machaon vole depuis mars à octobre, presc]ue sans interruption. Il y est fort variable. La forme Saharœ, Obthr. {Etudes d' Entom., Liv. IV, p. 68), figurée par Vcrity sous le n" 8 de la PI. II, dans Rhopalocera LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 13 palœarciica, se distingue par sa taille relativement petite, la réduction de la tache anale rouge et l'angle presque droit présenté par le côté intérieur de la bande transversale noire, maculée d'atomes bleus, aux ailes inférieures, en dessus. De plus, sur le dessous des ailes inférieures, les taches orangées font souvent défaut ou sont très atténuées. Mais il n'est pas facile de classer les diverses morphes algériennes du Papilio Machaon, car l'Espèce est très inconstante dans les manifestations de son Imago. L.a couleur du fond des ailes est généralement d'un jaune primevère; elle peut cependant être d'un jaune plus foncé; la taille des exemplaires est extrêmement variable; il y a des indi- vidus très grands et d'autres encore plus petits que le Machaon- Sphyroides-Cypria-immaculata, de Larnaca (île de Chypre), figuré par Verity, sous le n" i de la PI. III, dans Rhopalocera palœarctica. Le trait cellulaire noir des ailes inférieures peut tantôt être éloigné et tantôt très rapproché de la bande maculaire noire transverse qui descend depuis le bord antérieur jusqu'à la tache rouge du bord anal. A Biskra, -V. Faroult a capturé l'Ab. F eue st relia, Verity {Rhop. palœarct.i, p. 295), caractérisée par la ligne jaune qui divise le trait noir cellulaire (généralement assez épais), aux ailes infé- rieures. Les Ab. C onvexifasciatus et Concavtfa^ciatiis {Rhop. palœarct., p. XV et 295) se remarquent chez les Machaon algériens. La ligne limitative du côté intérieur de la large bande trans- verse extracellulaire des ailes inférieures peut, ou bien être sinueuse, très ondulée et décrire un arc de cercle, ou bien former un angle droit et se présenter avec une ondulation et une sinuo- sité atténuées. Il ne faut pas négliger de constater la différence surtout abdominale entre les formes vernale et estivale. Les Papilio Machaon d'été ont le corps jaune, avec une faible arête médiane noire, et dépourvu de pilosité. L'abdomen des Imago printaniers est plus noir et plus pileux. On trouve à Tanger une forme géante de Papilio Machaon dont M. Vaucher, de Genève, m'a offert 8 beaux échantillons. 14 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Verity a donné le nom de Maxima à cette race géographique et en a publié une figure noire sous le n" 2 de la PI. LU, dans Rho- palocera palcearctica. La biologie du Papilïo Machaon en Algérie est donc fort intéressante; mais jusqu'ici elle est imparfaitement connue. La variabilité de l'Espèce est considérable, puisque la larve elle- même se trouve à Biskra si différente de la larve ordinaire en Europe. J'ignore ce qu'est la larve en Asie, où le Papilio Machaon est très répandu et présente de nombreuses et importantes variations. Cette simple notice indiquera combien nos connaissances sont encore limitées et incertaines, relativement à une des Espèces de papillons les plus répandues dans la région palaearctique. J'ai reçu de mon excellent collaborateur M. Harold Powell des notes très intéressantes concernant le Papilio Machaon algérien; je les transcris textuellement comme suit : « Le Papilio Machaon est une Espèce très rare sur les Hauts Plateaux algériens, et, d'après mes observations, peu abondante sur le versant méridional de la chaîne saharienne. Le Papilio Machaoji paraît plus commun dans la région méditerranéenne; mais, n'ayant que très peu chassé dans cette partie de l'Algérie, je ne peux la signaler que dans les environs d'Alger. Sur les Plateaux, j'ai rencontré Machaon dans toutes les régions que j'ai explorées longuement, tant à l'ouest qu'à l'est; quoique très répandu, il y est partout rare. Certaines plantes de la famille des Ombellifères ne faisant pas défaut sur les Hauts Plateaux, on ne peut pas attribuer sa rareté au manque d'une nourriture convenable pour la chenille; je ne crois pas non plus que les conditions climatériques lui soient défavorables dans cette région; il faut probablement chercher la cause dans l'abondance de quelque ennemi naturel. Comme en Europe, les cfcT se plaisent à voler autour des sommets des collines et des montagnes; ils paraissent s'y attacher LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 15 et reviennent même après avoir été effrayés par un coup de filet maladroit. Voici les quelques notes que j'ai conservées sur Machaon en Algérie : Hauts Plateaux Sebdou, provmce d'Oran, altitude 930 mètres. 1 1 mai 1907. — Un exemplaire très abîmé sur une colline au sud du village. Pas conservé. 23 mai 1907. — Un Machaon a été vu dans une clairière de la forêt des Azaïls (cette forêt est dans la plaine au sud-ouest de Sebdou; elle est peuplée de chênes verts clairsemés, genévriers et lentisques). 3 juillet 1907. — Deux g Q de grande taille, à queues très longues; pas très fraîches; le corps d'un des sujets est presque entièrement jaune. Dans le champ au sud-ouest de la Redoute. Géryville, province d'Oran; altitude 1.3 15 mètres; limite sud des Hauts Plateaux. I'''' juillet 1910. — Il n'y a pas trace de la chenille de Papïlïo Machaon sur les Ombellifères dans la prairie de l'Ain Agdel, Djebel Ksel. 14 aoiit 1910. ■ — • Près de l'Ain Mecter nous avons trouvé un champ d'énormes Ombellifères ressemblant exactement au Fenouil, à part une odeur d'orange très prononcée; il n'y avait pas de chenilles de Machaon sur ces plantes; d'ailleurs elles avaient été en bonne partie dévorées, par les chèvres probable- ment. 16 septembre 1910. — Dans le lit de l'oued à l'ouest de Géry- ville poussent les grands Fenouils à odeur d'orange. Ils ne portent aucune trace de la chenille de Machaon. P. Machaon paraît être le plus rare des papillons de cette région; on ne l'a pris qu'une seule fois (en juin) et en mauvais état. l6 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Aflou, province d'Oran; altitude 1.405 mètres; dans le Djebel Amour; limite sud des Hauts Plateaux. 9 juin 191 1. — Un Machaon a été aperçu ce jour sur les coteaux au nord-est. 12 juillet 191 1. — On ne voit pas trace de la chenille de P. Machaon sur le Buplevrum Fructicesccns ni sur deux autres Ombellifères très communes dans l'Alfa sur les collines entre Aflou et Aïn Tirahine. Le papillon ne se montre pas non plus. 13 juillet 191 1. — Nous n'avons pas vu Machaon au sommet du Djebel Sidi Okba, qui est le point culn>inant des environs d'Aflou. 18 septembre 191 1. — Un petit cf abîmé a été capturé aujour- d'hui à Aïn Mansour. à 5 kilomètres à l'est d'Aflou. 28 septembre 191 1. — J'ai cherché en vain la chenille de Machaon sur les Fenouils à odeur d'orange, au bord des jardins de l'Aïn Suisiffa. Lambèse, province de Constantine; altitude 1.180 mètres; limite sud des Hauts Plateaux. Le 3 août 1912 j'ai eu la chance de trouver, dans un champ près du ravin, une chenille de Machaon sur un Fenouil à odeur d'orange. Elle était arrivée à son complet développement et se distinguait très bien sur une longue tige florale. Elle s'était nourrie de fleurs et des parties tendres près du sommet de la tige. Le champ contenait beaucoup de Fenouil, mais, malgré mes recherches, je n'ai pas trouvé d'autres chenilles. Je suis souvent venu dans cette localité et dans le ravin, où les Fenouils étaient abondants et très beaux, mais je n'ai plus retrouvé la chenille à Lambèse. Celle-ci a été photographiée le même jour; la photo- graphie a paru dans les Etudes de Lépuloptérologie comparée, fascicule VII, pi. photo. 28. Le dorsum était d'une couleur ver- dâtre très pâle ; les flancs, les pattes et le ventre blancs ; les bandes noires transversales minces. La chenille n'était pas de la forme LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE IJ Hospitonides. Elle s'est fixée, le 4 août, sur le bois de la cage, pour la métamorphose, et s'est transformée en chrysalide le lendemain. La chrysalide était de la forme grise. Huit jours plus tard, le 13 août, un papillon cf est éclos. 6 juin 191 3. — Nous avons vu deux Papilio Machaon de petite taille, en état absolument abimé, volant autour de l'extrémité ouest du sommet de l'Ichali. Ils y étaient encore le lendemain. Le Djebel Tchali (1.809 mètres) est le point culminant du coin nord-ouest de l'Aurès; le sommet, en dos d'âne, est relié, par un col élevé, à la chaîne de Titouguelt qui s'abaisse vers le sud, et par un autre col, au nord, à un contrefort qui domine Batna et qui forme l'extrême limite nord-ouest de l'Aurès. Au pied de la montagne, à l'ouest, s'étend la plaine qui sépare l'Aurès des monts de Bellezma. L'Ichali est boisé principalement de chênes verts; au sommet ce ne sont actuellement que des buissons, une coupe y ayant été faite il y a quelques années. Pendant mon séjour à Khenchela dans le coin nord-est de l'Aurès, en mai, juin et juillet 1908, je n'ai pas noté Machaon. M. Adrien Nelva, de Batna, a plusieurs fois pris le papillon dans sa région ; il l'estime rare. Chaîne Saharienne En octobre 191 1, j'ai exploré à pied le versant méridional du Djebel Amour, au sud-est et au sud d'Aflou. Pendant ce voyage, les chasses ont souvent été contrariées par le mauvais temps, mais, même lorsque le temps était beau, je n'ai vu que fort peu de papillons et Machaon n'était pas de leur nombre. Dans les gorges et les ravins qui débouchent sur le Sahara, le Deverra Scofaria est assez abondant; par places, on voit ses touffes sans feuilles sur les collines arides également. En descendant l'oued Morra, affluent de l'oued Mzi, j'ai examiné sans résultat des quantités de cette plante, dans l'espoir 2 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE de trouver quelques chenilles de Machaon; je n'ai même pas vu des traces de leur passage. A Laghouat, je suis monté sur le Rocher des Chiens le 28 octobre, par une belle journée; c'est un point où on pourrait s'attendre à voir voler des cfcf de Machaon, mais il n'y en avait point ce jour-là. En retournant à Aflou, j'ai longé pendant trois jours les pre- miers contreforts de la chaîne saharienne. Une nuit (le 2 no- vembre 191 1), nous avons campé dans le lit sec d'un oued, à la sortie des gorges de Foum Redad, à l'ouest de Aïn Mahdi ; c'est là que, pour la première fois en Algérie, j'ai trouvé la chenille de Machaon. Le Deverra Scoparia poussait dans les îlots de végétation du lit pierreux de l'oued, et, sur ses bords, escarpés par places, beaucoup de touffes fleurissaient. Peu après avoir commencé l'examen des plantes, j'ai trouvé deux chenilles sur une même touffe. Une de celles-ci était dans l'avant-dernier stade et de la forme Hospiionides; l'autre était plus jeune, mais évi- demment de la même race. Elles se nourrissaient des fleurs. Je n'ai pas trouvé d'autres chenilles. Pendant le voyage de retour à Aflou, les chenilles ont souffert d'être enfermées dans une boîte métallique; une est morte; j'ai gardé l'autre pendant trois semaines en la nourrissant avec du Fenouil, le Deverra n'existant pas à Aflou ; elle a mué, et, dans son dernier stade, à cause sans doute de sa captivité dans un endroit sombre, sa livrée est devenue très foncée par extension des dessins noirs; malgré cela, elle est restée Hospitonïdes. Finalement, elle est morte; je n'ai pas pu la souffler à cause du ramollissement des tissus. Vers la fin août 191 2, nous avons chassé pendant quelques jours à El Kantara, dans le sud de la province de Constantine. Le pays est sec, montagneux et semi-désertique; il a beaucoup d'analogie avec la partie sud du Djebel Amour; la végétation n'est pas absolument la même, mais beaucoup de plantes sont communes aux deux régions. Le 26 août, nous étions sur le versant nord de la chaîne, à l'est des gorges; le Deverra Scoparia croît assez abondamment en LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ig touffes, entre les rochers éboulés et sur la falaise en dessous de la crête où pousse également le Câprier. J'ai vu voler une Q de P. Machaon autour d'une des touffes sur la face de la falaise; elle était tout juste hors de portée. Elle y est retournée à plusieurs reprises, mais elle ne s'est pas décidée à pondre; elle a disparu enfin en passant par-dessus la falaise. Sur la crête, nous avons vu quelques exemplaires, des cfcf sans doute, tournant autour des points culminants. I-e 28 août 191 2, je devais faire l'ascension du Djebel Metlili, mais je n'ai pu y aller, étant malade. Chierotti est donc parti seul avec l'Arabe Zeidi. Il a rapporté, entre autres espèces, quatre P. Machaon pris au sommet (1.495 mètres), volant autour du Poste Optique. Nous n'avons pas réussi à trouver la chenille sur les Devena, malgré l'examen d'un grand nombre de touffes dans les gorges d'El Kantara et sur les montagnes arides et escarpées des environs. Le 22 août 191 3, je suis monté moi-même sur le Metlili. Le Deverra, non fleuri encore, poussait par places au bord du sentier jusqu'à mi-hauteur de la montagne, surtout dans les endroits rocheux. Nous sommes arrivés au Poste Optique vers 1 1 heures du matin par un temps calme et très chaud, orageux dans le nord. D'abord, je n'ai vu voler que des Sut y rus Fulia Alhovcnosa près de la maison; mais, vers midi, un P. Machaon a fait un tour du sommet pour disparaître ensuite. Je l'ai revu de très près vers 2 h. 1/2, au moment 011 nous commencions la descente; il était bien frais; mon coup de filet l'a manqué, malheureusement, et il n'est pas revenu. Je n'ai pas aperçu Machaon sur une colline rocheuse au nord de la montagne de sel à El-Outaya, où je me trouvais le 24 août 191 3. Le Devenu Scopana s'y trouvait, ainsi qu'une autre Ombellifère ressemblant un peu au Fenouil. J'ai soigneusement examiné ces plantes dans l'espoir de trouver des chenilles, mais en vain. 20 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE Littoral méditerranéen A la fin du mois de juillet 1910, j'ai vu, à deux occasions, voler Machaojt entre Maison-Carrée et les usuies de la Compagnie des Eaux. I.e papillon fréquente le talus du chemin de fer, sur lequel pousse le Fenouil. Je dois ma connaissance de cette localité à l'amabilité de M. Holl, de Hussein Dey. M. Holl a fait des études très intéres- santes sur Pa-pilio Machaon, et il connaît mieux que personne sa chenille, ses morphes et ses mœurs dans la région d'Alger. Lors de mes passages à Oran, à Bône et à Philippeville, je n'ai pas vu l'Espèce. Harold POWELL. » PLANCHE CCLXXVI N°^ 2253. Papilio Machaon, Linné, Maison-Carrée. 2254. Papilio Machaon-S.\harae-Fenestrella, Verity, Biskra ; janvier 1910. 2255. Papilio Machaon-Maxima, Verity, Tanger. PLANCHE CCLXXVII N°^ 2256. Papilio Machaon-Concavifasciatus, El-Kantara; août 1912. 2257. Papilio Machaon-Convexifasciatus, El-Outaya; juillet 1910. LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 21 Papiiio Feisthamelii, Duponchel. Je suis arrivé à penser que le PapiLio Feisthamelii, suivant ic sens qui est présentement attribué par la plupart des Natura- listes, à la valeur du mot Espèce, pourrait bien être, non pas une variété ou race géographique de Papiiio Podalirins, mais bien plutôt une Espèce distincte de Podalirius, Linné. C'est aussi à cette conclusion que paraît être parvenu le Doc- teur Roger Verity, de Plorence, Auteur du bel ouvrage publié de 1905 à 191 î, sous le titre de Rhopalocera palœarctica. En effet, à la page 293 (supplément) Verity s'exprime ainsi : « Sans entrer dans des détails inutiles ici, je crois pouvoir affirmer à présent que, selon moi, Feisthavielïi et Podalirius sont deux Espèces tout aussi distinctes que le sont Rapce, Manni et Ergane. Le fait que Podalirius vole sur toute l'étendue de l'Espagne jusqu'à Tanger, mêlé à Fei^lhamelii et que ces deux papillons se maintiennent bien distincts, prouverait à lui seul, à mon avis, la distinction spécifique ». De plus, Verity donne le nom de F eisthamelides à un supposé hybride de Podalirius et de Feisikamelii trouvé en Andalousie, dans les montagnes de Grenade, faisant partie de la collection de Walter Rothschild, à Tring, dont l'image est reproduite photograpiiiquement, mais non coloriée, sous le n° 2 de la PI. LVII, dans Rhopalocera palœarctica. Je n'ai jamais vu, pour ma part, Podalirius et Feisthamelii volant ensemble, pas plus dans les Pyrénées-Orientales qu'en Espagne ou à Tanger. Je ne prétends cependant pas que le fait soit inexact; mais j'estime qu'il demande confirmation, malgré l'assertion de M. Meade-Waldo ainsi conçue {Trans. eut. Soc. London, 1905, p. 371) k Both P. podalirius and var. feisthamelii occur at Tangier in March ». M. Blachier cite (Ann. Soc. ent. France, 1908, p. 2'->i) Pap. Podalirius L. Y. Lotîeri, Austaut, Tanger; mais si M. Blachier nomme la variété Lotteri qui se rapporte à Feisthamelii, il ne mentionne pas la forme type Poda- lirius qu'il connaît parfaitement, tandis que nos Collègues 22 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE anglais sont généialement moins bien familiarisés avec les Espèces de papillons iiabitaht l'Europe continentale et étrangers à leurs Iles. J'ai pris F eisthamelii en Andalousie, je n'ai jamais aperçu, ni capturé, dans l'Espagne méridionale, aucun Papilio Poda- lirius. En tout cas, laissant à des observations ultérieures le soin de nous ûxer définitivement sur la question de savoir si Podaliriits et Feisikameln cohabitent réellement en Espagne et à Tanger; je puis citer encore l'opinion du Général Jean Levaillant parais- sant également favorable à la séparation spécifique de Podaliriiii et de F eisthamelii. Cette opinion a été émise, il y a longtemps ; elle se trouve imprimée aux pages 407-409 dans les Annales de la Société entomologïque de France, 1849. Je reproduis dans son intégra- lité et comme suit, la Notice présentée sur le Papilio F eistha- melii par ledit général Jean Levaillant ("'') et lue à la séance de la Société entomologique de France, le 8 novembre 1848 : (*) Le Général Levaillant a longtemps guerroyé en Afrique et, tout en bataillant avec les Arabes, il recueillait des Papillons. J'ai cité dans le Vo- lume III des Etudes de Lé-pidofi. cumfarée, le Cigaritis Massinissa, Lucas, découvert dans les vallées du Ujebel-Amour par celui qui fut plus tard le Général de division Jean Levaillant. Cet officier général quitta l'Algérie en 1854, pour faire partie de l'armée d'Orient; le Général Levaillant commanda d'abord la 5^ Division; il avait pour Générau.'c de brigade MM. de la Motte- Rouge et Couston; son chef d'Etat-major était le Lieutenant-Colonel Valazé ; les troupes composant la 5« Division étaient : le 9'' Bataillon de Chasseurs à pied, les 21^ et 42*^ régiments d'Infanterie de ligne (Brigade de la Motte- Rouge), les 46^ de Ligne et 5^ Léger, — un peu plus tard 80^ de Ligne — (Brigade Couston). Le Général de la Motte-Rouge, devenu lui-même division- naire, en récompense de ses magnifiques services de guerre, a laissé sous le titre de Souveriirs et Campagnes, des Mémoires fort intéressants. J'e.xtrais de la II« série des Souvenirs et Campagnes, pages 177 et suivantes, son appréciation sur le compte de son chef qui a laissé une réputation militaire très glorieuse. .Le Général de la; Motte-Rouge s'exprim.e ainsi : » 26 août 1854. Dans cette même journée, le Général Levaillant, commandant la 5» Division, et son état-major, le Général Couston commandant la 2^ Brigade arrivaient à Gallipoli, avec le 5^ Léger. Le Général Levaillant établit son quartier général à 'Varna, dans la maison que j'avais occupée moi-même au moment de mon arrivée. J'allai lui faire ma visite, le 27 août, avec les officiers supérieurs de ma Brigade. Je le trouvai affable et bienveillant et je lui donnai tous les renseignements désirables sur notre nouvel établissem.ent sur la route LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 23 « Quelques entomologistes pensent que le P Feisthamelii n'est qu'une variété du Podalirhis. Pour décider cette question, il est nécessaire d'étudier ces deux papillons dans leurs divers états, et c'est dans ce but que j'ai réuni les observations suivantes qui pourront être comparées avec celles que l'on a faites en France sur le Podalirius. Le P. Feisthamelïi est commun dans les environs d'Alger depuis le mois d'avril jusqu'à la fin de juillet. Pendant ces quatre mois, on trouve simultanément la chenille et l'insecte parfait. La chenille vit sur le pommier, le pêcher, et plus habituelle- ment sur le prunellier. Elle ressemble, pour la forme et la cou- leur, à celle du Podalïruts ; mais elle est plus grosse et est souvent parsemée de taches brunes que je n'ai pas aperçues sur la che- nille du Podalirius. Quand on la touche, elle montre deux espèces de cornes transparentes qui exhalent une odeur particulière extrêmement pénétrante. Elle est abondante aux en\'irons de de Franka, sur notre état sanitaire et moral qui ne laissait rien à désirer depuis que le choléra nous avait définitivement quittés. » Le Général Levaillant a commencé sa carrière comme soldat et est même arrivé assez tard à l'épaulette d'officier, après huit ans de service, je crois. Fils du célèbre naturaliste connu par ses explorations dans le centre de l'Afrique, d'un caractère ardent, d'une nature nerveuse, d'une santé robuste, d'une grande bravoure, intrépide chasseur, il commença à se faire remarquer comme Capitaine adjudant-major au régiment de Zouaves, dans les campagnes d'Afrique de 1835 à 1846. Lieutenant-Colonel du 17^ Léger, pendant que ce corps avait pour chef le duc d'Aumale, il lui succéda dans le comman- dement de ce régiment, fut bientôt nommé Génér.il de brigade, puis Général de division en 1853 ». Le Général Levaillant ne tarda pas à quitter Varna, il arriva en Crimée, le 17 Octobre 1854, avec sa 5" Division qui devint, en Février 1855, 2» Division du ler Corps, sous le commandement en chef du Général Pélissier, plus tard Maréchal de France et duc de Malakoff. Le Général Levaillant avait les plus beaux états de service. Sa famille était originaire de Metz; son père François Levaillant était né à Paramaribo; il était parti pour l'Afrique en 1780; il mourut en 1824, laissant de nombreuses relations de voyage et plusieurs travaux d'histoire naturelle, notamment sur les oiseaux d'Afrique, d'Amérique, des Indes, les perroquets et les oiseaux de paradis. Ses récits, d'abord suspectés, ont été appréciés ensuite avec, plus de justice. Le Général Levaillant extrê- mement brave, aventureux, soldat très énergique et naturaliste très observateur, était le digne fils du célèbre voyageur. Bien que des> notices lépidoptérologiques aient été envoyées à la Société entomologique de France par le Général Levail- lant et insérées dans ses Annales, je ne crois pas que le Général Levaillant ait jamais été membre de la dite Société. 24 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Mustapha supérieur, près d'Alger, sur les petits prunelliers isolés qui croissent à l'abri du vent de mer. Lorsque la femelle veut pondre, elle voltige longtemps autour de l'arbrisseau qu'elle a choisi, se pose quelquefois au bord d'une feuille et recourbe son abdomen atin d'en mettre l'extrémité en contact avec le dessous d'une feuille. Mais il paraît qu'elle ne pond pas un œuf chaque fois qu'elle fait ce mouvement, ou bien que l'œuf expulsé ne se colle pas toujours à la feuille; car après avoir vu une femelle se livrer huit ou dix fois à ce manège sur des feuilles que j'avais parfaitement marquées, je n'y ai trouvé qu'un seul œuf. Les œufs que le papillon dépose, par mégarde, sur la partie supérieure des feuilles et qui sont exposés à l'ardeur du soleil, sont stériles. L'œuf est blanc, brillant et beaucoup plus gros que celui du Machaon. Au bout de quatre jours, il devient noirâtre. Quatre jours plus tard, il en sort une chenille allongée, noire, un peu velue, munie d'une grosse tête, et marquée sur le dos de deux taches blanches qui deviennent vertes quand la chenille a com- mencé à manger. Après la première mue, elle prend la couleur verte et la forme qu'elle doit conserver jusqu'à sa transforma- tion. Elle se meut avec beaucoup de circonspection, et assure sa marche à l'aide de hls dont elle tapisse les branches et les feuilles. Avant la seconde mue, elle reste ordinairement ûxée sur la nervure médiane des feuilles dont les bords relevés en gout- tière forment une concavité qui la met à l'abri du vent. Les chrysalides provenant de chenilles recueillies pendant les mois de mai et de juin donnent toujours le papillon après qua- torze jours d'incubation. Parmi celles prises plus tard, les unes éclosent après quatorze jours, et les autres, en plus petit nombre, hivernent. Dans le premier cas, les chenilles et les chrysalides restent d'un beau vert; dans le deuxième, la chenille, avant de se transformer, prend une teinte jaunâtre et produit une chrysa- lide couleur nankin foncé. Cette particularité permet de recon- naître à l'avance, avec certitude, les chrysalides qui doivent se transformer immédiatement et celles qui doivent hiverner. Toutes LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 25 les chenilles que j'ai trouvées dans le mois d'août ne m'ont donné le papillon qu'au printemps suivant;. Les chrysalides vertes sont d'une teinte uniiorme, sans aucune tache; seulement le contour des ailes est marqué d'une ligne jaune, et l'extrémité des pointes de la tête et du corselet est brun rougeâtre. Les autres chrysalides sont tantôt couleur nankin foncé, tantôt de la même couleur très claire. Elles sont toujours parsemées de taches brunes ou grises. Les deux papillons offrent entre eux de nombreuses et impor- tantes dissemblances. .S'ils ne forment qu'une seule et m.ême espèce, il est bien difficile d'expliquer comment le climat algérien, qui aurait aussi profondément modifié le Podalirïus^ a pu laisser intacts le Machaon et les nombreuses espèces européennes qu'on rencontre dans le Nord de l'Afrique. » Pour être complet, je dois rapporter ici une autre opinion, celle de M. Boyer de Fonscolombe {Bulletin Soc. ent. France, 1849, p. XLVIIl), contestant, partiellement du moins, la valeur des rai- sons alléguées par le Général Jean Levaillant. M. H. I^ucas qui devait, annonçait-il, soumettre à la Société entomologique de France, un travail sur le même sujet, prit la parole pour appuyer l'avis de M. Boyer de Fonscolombe, qui se trouvait formulé comme suit ; (( J'ai lu dans le 4" numéro. Tome VI des Annales, une note sur le Papilio F eïsihanielïi. Je soumets à la Société et à l'Auteur lui-même, l'observation suivante : M. le général Levaillant pense que cette espèce est réellement distincte du Papilio Podalirius, mais il me semblerait que les raisons qu'il en donne, raisons fondées principalement sur les premiers états de ce lépidoptère, infirmeraient plutôt son opinion. La chenille du Podalirijis vit, comme celle du F eisthamelii, sur le pêcher, le poirier franc ou sauvage {Pyrus amy gdalij ormis) et le prunellier. Je l'ai souvent élevée en Provence; j'ai vu très ordinairement les taches brunes que M. Levaillant croit particulières à celle du F eisthamelii. 26 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Elle fait aussi paraître des cornes charnues qui exhalent une odeur forte. La chenille aussi bien que la chrysalide est tantôt verte, tantôt jaune grisâtre ou nankin. Au reste cette variété de couleur se remarque aussi, suivant les diverses circonstances, dans la chrysalide du P. Machaon. Ces observations peuvent cependant ne pas empêcher de séparer ces deux espèces, si les différences dans leur état parfait l'exigent » Quoi qu'il en soit, le Papïlio F eisthamelïï se trouve répandu en Algérie et en Tunisie, à l'exclusion du Podalïrius, me semble-t-il, ainsi que je le fais observer plus haut; car je n'ai jamais vu un seul exemplaire pouvant être rapporté à Podalïrius et provenant authentiquement d'Algérie ou de Tunisie. M. Harold Powell n'a pas vu Pudalinus en Algérie; il n'y a observé que Feisthamelii. Le Papilio Feisthamelii habite la zone du littoral et toute la région du versant méditerranéen; je ne crois pas qu'on l'ait trouvé dans les contrées désertiques. Suivant les localités, c'est- à-dire en raison des conditions diverses d'altitude et de climat, l'éclosion du Papilio Feisthamelii est, en Afrique, plus ou moins précoce. Il y a deux races saisonnières : celle du printemps avec l'abdomen plus velu et moins blanc, les queues moins allongées et la dentelure des ailes inférieures moins profondément découpée; celle d'été, appelée Lotten, Austaut, avec l'abdomen sans villosité, presque entièrement blanc, le fond des ailes très blanc et moins opaque, la dentelure très accentuée et la taille des Ç) souvent plus développée. Dans Rhopalocera palœarctica, Verity a figuré sous les n°^ 7 et 8 de la PI. I, la forme vernale du Papilio Feisthamelii, d'après un (S de Lambèse, presque semblable à ceux du Roussillon, et d'après un autre cf d'Alger, ayant la dentelure des ailes infé- rieures plus prononcée. Sous le n° 11 de la même PI. T, se trouve LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 2J représentée la forme estivale Q de la variété saisonnière Loi /cri, d'après un exemplaire de ma collection, capturé à Sebdou. Je possède un d* obtenu d'éclosion à Alger, au printemps, pré- sentant la même variété dite : undecimlineatiis, que Podaliriits. Je dois rappeler que le D'' Roger Verity a publié dans Linnean Society' s Journal-Zoology, Vol. XXXII, May 191 3, un article fort intéressant intitulé : Revision of the Linnean types of ■palœarctic Rhopalocera. Malheureusement aucune illustration n'accompagne cette Revision. Cependant Verity fait connaître que Linné a reçu de nombreux insectes de Erik Brander qui était Consul de Suède à Alger, de 1753 à 1765, et que, par conséquent, les types de quelques Espèces vulgaires d'Europe sont africains. Dans ces conditions, le Papilio Podaliriiis, Linné, serait Feisthamelii- Lotteri. En conséquence, le D'" Verity propose une série de modi- fications « altérations » dans la Nomenclature présentement admise et, pour l'Espèce qui nous occupe, il établit le tableau suivant : (( Synopsis of proposed altérations Substitute : In place of : Pa-pilio sinon sinon, Poda Papilio podalirius, a.\ic\.., sanclaew:, Zell. " vernus, nom. nov " " fodalirius. fodalirius fodalirius -poda- " feisthûmeli,Dvip.,lotteri,lot- lirius, L. teri, Aust. " maura, Verity, po- " " maiira lotteri , dalirius, L. Aust. " podalirius feistha- " " feisthameli feis- îneli, Dup. thameli. " miegi, Thierry-M., " " mirgi feisthameli.» " feisthameli, Y)\!i\). La Notice de M. le D*" Roger Verity suscite un réel intérêt; je ne demande pas mieux que de désigner désormais le Feistha- meli-Lotteri (estival) d'Algérie, sous le nom de Podalirius Poda- 28 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Ihiiis-P odaliriiis, Linné, et le même F eisthamelï (vernal) algé- rien, soas le nom de Podalirius-Maura, Verity, Podalirïus, Linné. Cependant on m'excusera d'attendre une mise au point plus complète de la question, avant de bouleverser, par le présent ouvrage, la Nomenclature déjà si chancelante de l'origine linnéenne. Ma collection contient des exemplaires algériens du Papilio Feisthamelii, provenant des localités suivantes : Sebdou; juillet et août 1907 (^Lolter'i); Slissene; Pr. Oran, 29 juillet 1907 {Lotteri); Alger, pris par le lieutenant Mathieu, au printemps. Lambèse; Khenchela, juillet 1908 (^Lotterï); Montagne de Tessalah ; Sidi-bel-Abbès; Bône; Tlemcen; Daya. Il est nécessaire de faire observer que certains exemplaires algériens de Feisthamelii ont le fond des ailes jaune et non blanc. Je crois devoir faire figurer une Q capturée à Lambèse en juillet 191 2, par M. Harold Powell; elle est remarquable par sa couleur jaune et son abdomen noir et velu, quoique le papillon soit né en été. Je fais représenter une Q prise à Lambèse au même mois de la même année, dont le fond blanc des ailes contraste avec le fond jaune de l'autre exemplaire qui est cependant bien un Papilio Feisîhamelii, comme en fait foi la tache anale bleue surmontée du sourcil arqué noir et orange. Ainsi qu'on le sait, le Papilio Podal^riu^ diffère nettement de Feisthamelii, notamment par la forme de la tache anale de l'aile inférieure. M. Harold Powell m'a remis des notes que je reproduis textuellement comme suit : « La limite méridionale de Feisthamelii en Oranie semble être le bord nord des grandes plaines élevées; je ne l'ai jamais vu autour des rares points habités que l'on rencontre en traversant les plateaux. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 29 Il n'existe pas à ma connaissance dans le Djebel-Amour; je ne l'ai trouvé ni à Géryville ni à Aflou. Dans les jardins de ces deux centres de colonisation, certains arbres fruitiers sont cul- tivés, pruniers et amandiers notamment, et il est fort probable que si l'Espèce s'était trouvée dans la région, elle se serait installée dans ces jardins de création relativement récente. Plus au sud, dans les vallées du versant Saharien, l'abricotier et le pêcher sont cultivés par les Indigènes; mais Feistharnelu n'y existe pas. Les plus hautes montagnes du Djebel-Amour sont en général assez bien boisées du côté exposé au nord ; c'est le cas pour le Djebel-Sidi-Okba et le Djebel-Gourou, dans la région d' Aflou; pour le Ksel, près de Géryville; je n'ai pas remarqué le prunellier sauvage sur ces montagnes, ni d'autre Rosacée qui pourrait nourrir la chenille, à part peut-être l'aubépine qui pousse peu abondamment dans les ravins les plus frais. Dans la Province de Constantine, Feïstkainelii traverse les Hauts-Plateaux. On le trouve sur les montagnes de l'Aurès et même, paraît-il, jusqu'à El-Kantara où il est évident que l'espèce suit les cultures et vit uniquement sur les arbres fruitiers ; car il n'y a dans cette région aucune plante indigène qui pourrait nourrir sa chenille. A Sebdou, Lambèse et Khenchela, Fehtha- melii fréquente surtout les jardins; mais je l'ai plusieurs fois vu et pris très frais dans les ravins et sur certains sommets, loin de tout jardin, au sud et au sud-ouest de Lambèse. Je n'ai jamais trouvé sa chenille que sur les arbres fruitiers des jardins et sur des pruniers dans le ravin au-dessus de Lambèse ; les pruniers en question sont probablement échappés des cultures voisines. Les papillons de la deuxième génération {Lotteri) étaient très abondants dans les jardins et les rues de Lambèse (surtout dans le jardin de la Maison Centrale) en juillet 191 2; j'étais arrivé trop tard pour l'éclosion du printemps; cependant j'ai vu voler un certain nombre d'individus, mais passés, en mai. Le papillon était bien moins abondant à Lambèse en 1913. 30 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Voici une liste des localités dans lesquelles j'ai rencontré l'espèce en Algérie : Sebdou (Oran), 930 mètres d'altitude, où le papillon est à sa limite sud et n'est pas commun. 24 mai 1907, près des grottes d'Adbelkader, dans un jardin arabe contenant des amandiers (Feisthameliï). 30 mai 1907, i Q sur le chemin du Teniet-el- Ahmar {Feisthameliï). 3 juillet 1907, cT et Q (Lotterï). 18 juillet 1907, chenilles sur amandier, i*"" août 1907 ^Lotterï). 23 août 1907, I Ç) très fraîche, peut-être un exemplaire de la troisième génération {Lotterï). Daya (Oran), 1.400 mètres d'altitude; 2y juillet 1907, i Q très fraîche {Lotterï) et 4 chenilles. Slissene (Oran), 29 juillet 1907 {Lotterï) et 2 chenilles. Khenchela (Constantine), 1.200 mètres. Dans les jardins, en juillet {Lotterï). 4 juillet 1908, 3 chenilles, bien avancées, sur des petits pommiers du jardin de l'Hôpital militaire; 2 étaient déjà chrysalidées le 10 juillet; une chrysalide brune, l'autre verte. 12 juillet 1908, 2 exemplaires pas frais {Lotterï). Maison-Carrée, fin juillet 1910. Rare et à peu près toujours en mauvais état (Lotterï). Le prunellier sauvage pousse dans une localité sur le talus de la voie ferrée P.-L.-M. ; mais la chenille doit se nourrir ici, surtout des arbres fruitiers, dans les jardins environnants. Lamhese (Constantine, 1.180 mètres). Mai 1912 et 1913; exem- plaires passés de la génération printanière. Juillet 191 2 et 191 3, deuxième génération {Lotteri), très abondante en 191 2. Les deux premiers exemplaires de la deuxième génération ont été vus en 191 3, le 4 juillet. Le i'"' septembre 191 2, j'ai trouvé dans une rue du village une belle Q de Lotteri très fraîche, éclose sans doute le jour précédent ; elle était un peu abimée, probablement par une averse de grêle tombée vers 5 heures du matin. Cette Q appartenait-elle à une troisième génération ? Je n'ai pas vu d'autres exemplaires à cette époque; une troisième éclosion est en tout cas exceptionnelle dans les régions élevées; toutes les chenilles provenant des pontes de la deuxième gêné- LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 3I ration, que j'ai élevées, ont donné des chrysalides brunes, des- tinées à hiverner. Une chenille adulte trouvée sur un petit amandier près de la Maison Forestière de Mizab (Sebdou), le 6 octobre 1907, pro- venait peut-être d'un œuf pondu par une Q de la troisième éclosion ; mais Mizab est élevé (1.400 mètres environ) et les nuits y sont fraîches, miême en été; il est donc possible que cette chenille était le produit de parents retardataires de la deuxième génération. Plantes noj^rricières. — J'ai noté les espèces suivantes : Atnygdalus communis, L.; A. Persica, L. ; Prunus Insititia, L. ; Pints Malus, L. ; Pirus communis, L. ; toutes cultivées dans les jardins. Je n'ai jamais trouvé la chenille sur l'abricotier; mais il est très probable qu'elle s'en nourrit aussi. Les espèces pré- férées à Lambèse sont l'amandier et le prunier. Le Pirus Longipes, Coss., espèce spontanée des forêts de l'Aurès, doit également pouvoir nourrir la chenille. Dans ses premiers états et dans ses mœurs, F eisthamelïi res- semble beaucoup à Podalirïus. Je n'ai pas eu l'occasion d'exa- miner comparativement, les unes à côté des autres, les chenilles et les chrysalides des deux espèces ; ce serait cependant le seul moyen de percevoir les différences qui pourraient exister. M. Henry Brown, qui a eu des chrysalides de Feisthanieliï et de Podalirïus en même temps, sous les yeux, m'a affirmé que les différences entre les deux lui ont paru appréciables. Les œufs sont déposés, un à la fois, presque toujours en dessous des feuilles ; on trouve souvent plus d'un œuf sur une même feuille; mais, dans ce cas, ils se trouvent généralement en différentes phases de développement, ce qui prouve qu'ils n'ont pas été pondus le même jour. A Lambèse, en 191 2, une très grande proportion d'œufs de la première génération n'a pas donné de chenilles; les pertes ont été surtout élevées dans le cas d'œufs pondus tardivement; dans bien des casj les chenilles se développaient, mais se dessé- chaient sans éclore; le plus souvent les œufs étaient parasités 32 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE par un Hyménoptère solitaire qui éclosait vers la fin de juin, en perçant la coque sur le côté. A la fin de mai, j'ai trouvé une cinquantaine d'œufs sur un seul petit prunier isolé dans le ravin de Lambèse, mais pas un seul n'a donné sa chenille. Si tous ces œufs étaient éclos, il est certain que le prunier n'aurait pas suffi à nourrir jusqu'au bout toutes les chenilles; le cas était tout à fait exceptionnel. Une autre fois, le 26 juin, j'ai trouvé, sur trois jeujies amandiers, dans un ravin très chaud, au-dessous de la Maison Forestière de Titouguelt, une douzaine de chenilles plus ou moins avancées, et les traces de beaucoup d'autres chenille? qui avaient déjà quitté les arbres pour se chrysalider. Il y en avait aussi en nombre relativement grand sur les quelques petits pêchers dans le jardin potager de M. Karr, à Baïou. Sans les parasites qui s'attaquent aux œufs, Feisthamelii pourrait devenir un véritable fléau dans cette partie d'Algérie, et il en serait de même, sans doute, dans le Tell et sur le littoral. Je n'ai jamais obtenu de parasite de la chenille. Celle-ci a les mœurs et l'apparence de la chenille de P. Podalirius; elle tisse, sur le dessus de la feuille qui lui sert de point de repos, un fin tapis de soie blanche qui devient plus épais à mesure que la chenille grandit; le pétiole et la branche qu'elle suit en allant manger sont également tapissés de soie ; elle se déplace lente- ment avec le même mouvement oscillant que l'on remarque chez Podalirius, en filant toujours de la soie sans laquelle elle ne pourrait se tenir qu'avec beaucoup de difficulté sur l'arbre. Si la chenille doit produire une chrysalide destinée à passer l'hiver, elle quitte l'arbre pour se métamorphoser, mais, dans le cas contraire, elle se suspend souvent sous une branche ou sous une feuille. Il a été observé que les chenilles qui vont donner une chrysalide brune, tournent au jaune brun, vers la fin du dernier stade; mais il y a un moyen de reconnaître ces chenilles bien plus tôt; j'ai remarqué, en effet, que toutes les chenilles de Podalirius et de Feisthamelii chez lesquelles des taches brunes se développent sur le dorsum, quelques jours après la quatrième mue, produisent des chrysalides brunes destinées à hiverner. LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 33 Ceci se passe chez une bonne proportion de chenilles produites par la première génération, principalement dans le cas des retar- dataires, et chez toutes les chenilles que j'ai élevées de la deuxième génération. Une troisième éclosion est rare sur les Hauts-Plateaux, ainsi que je l'ai déjà dit, mais elle doit se produire quelquefois d'une façon restreinte, à en juger par les papillons pris un août et commencement septembre, et par les chenilles trouvées en octobre. L'éclosion des chrysalides vertes a lieu 8 ou lo jours après la métamorphose. En montagne, F eisthamelïï aime à se poser sur les fleurs de chardon; et, en outre, les mâles se plaisent à voler autour des sommets. Dans les jardins et les villages, ils planent souvent dans certaines allées et rues, revenant se poser sur une même branche d'arbre. Ils se battent volontiers avec d'autres mâles s'aventurant dans leurs zones particulières ». Thais Rumina, Linné. Décrite par Linné en ces termes : « P. N. (Papilio Ts! ymphalis) alis dentatis variegatis supra primoribus punctis sex, posticis quatuor rubiis. Osbeck iter. 51 Pap. tetrapus, alis ex coccineo luteo argenteo nigroque variegatis, primoribus rotundioribns. Habitat in Europa australi. Aiœ postica: subtus maculis 8 albis » (Insecta Lepidop- tera, p. 783 ; Caroli a Linné, Systema Naliircc, Tom. L Pars H. Editio décima tertia (*), ad Editionem duodecimam reformatam (*) L'exemplaire de ma bibliothèque a appartenu au Docteur Boisduval ; il porte la note suivante qui offre quelqu'intérêt : « Quoique cette édition, porte le chiffre 13, ce n'est point celle généralement connue comme édition 13, laquelle n'est point estimée et n'est autre que l'édition Gmelin. Celle-ci n'est qu'une réimpression exacte de l'édition XII. Cet exemplaire a appartenu au Botaniste Ventenat dont il porte la signature. » Il a reçu aussi la signature : Libin. Le sort des livres est de passer ainsi de mains en mains. Ils survivent à ceux qui les ont tant de fois consultés, pour être de nouveau lus et étudiés par les successeurs qui eux-mêmes se remplacent. Les livres durent souvent plus long- temps que les hommes; ils font partie du patrimoine intellectuel commun à l'Humanité tout entière. J'en connais qui sont de bien bons amis pour moi. 3 34 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Holmiensem; Vindobonas, Typis loannis Thomas nob. de Trat- tnern, Cass. reg. aulae typogr. et bibliopol^, MDCCLXVII). Dans la Révision of the Linnean types of palccarctïc Rhopa- locera, par Roger Verity {Lmnean Socieiy's Joiirnal, XXXII, May 191 3), Thaïs Rumina est cité avec la brève indication sui- vante : « (1758). No Linnean spécimen ». M. Charles Blachier, dans les Ann. Soc. en t. France, 1908, p. 211, Lépid. du Maroc, crée, pour le Thaïs Ruinïna marocain, les deux variétés ornatïor et ornatissïma; la forme de Rumina considérée comme type de l'Espèce étant celle d'Espagne, quoique Linné exprime l'idée plus générale : Habitat in Europa australi. Dans le Bidletin de la Société lé pido ptérologique de Genève, Vol. II, fasc. 4, aoiit 191 3, M. Charles Blachier décrit (p. 251, 252) et figure (PI. 20, fig. 3) l'ab. Ornatissiina. J'ai pris moi-même à Tanger, en mai 1894, une très grande Q de la forme Ornatïor. M. Holl a découvert à Alger TAb. qu'il a appelée Mackeri et qui est caractéiisée par le remplacement des taches rouges nor- males en taches jaunes à peu près de la couleur du fond des ailes. La même Aberration Mackeri a été trouvée à Digne où vole la Variété Medesicaste. L'Ab. Mackeri affecte les deux sexes; je l'ai fait représenter sous le n" 554 de la PI. LX du Volume V, part. I, des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Roger Verity a publié dans Rhopalocera palœarctica, PI. VII, sous le n° 20, la forme africaine normale de Thaïs Rumina, et sous le n" 24, un exemplaire andalous de l'Ab. Canteneri, Stgr., chez lequel la couleur du fond des ailes est jaune d'ocre au lieu d'être jaune primevère. Cette même Ab. Canteneri affecte aussi bien les exemplaires algériens que ceux d'Espagne méridionale. Je possède l'Ab. Canteneri d'Alger (Kouba) et de Sebdou. On ne l'a iamais observé chez Medesicaste. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 35 Le papillon éclôt en Algérie et au Maroc de février à mai. Ma collection contient des exemplaires provenant de Tanger, Sebdou, Tlemcen, Alger, Aïn-Seur, Djurjura, Cap-Aokas, Aïn-Draham. La Thaïs Rumina n'est pas désertique ; elle iiabite le versant méditerranéen et ne paraît pas s'avancer dans l'intérieur de la Barbarie, très loin du littoral. Ayant reçu des chrysalides vivantes d 'Aïn-Draham, j'ai vu éclore en même tem.ps d'assez intéressantes variétés portant sur le développement et l'intensité des taches noires et rouges; j'ai ainsi obtenu une série de qua- torze exemplaires présentant une curieuse déformation de la dentelure des ailes inférieures. De plus, en dehors de cette den- telure, c'est-à-dire entre les croissants jaunes et le bord mar- ginal, dans le liséré noir, on distingue, chez certains individus, plusieurs taches et linéaments rouges. M. Povv^ell, au cours de son exploration de l'Algérie, a ren- contré la Thaïs Rumina à Tlemcen, le 8 mai 1907, près des cas- cades; le 13 mai de la même année, M. Powell captura un exemplaire très frais sur un îlot entre deux chutes d'eau, près de la source de la Tafna, non loin de Sebdou. K Merchich, près Sebdou, le 20 mai 1907, un exemplaire de petite taille fut pris en même temps que deux jeunes chenilles sur V Aristolochia pallida. (Le nom spécifique de l'Aristoloche reste cependant douteux.) LJn peu plus tard, au même lieu, des chenilles plus avancées dans leur grosseur furent récoltées sur des pieds à^ Aristolochia qui végétaient entre les palmiers nains. Enfin, le 30 mai 1907, un papillon fut recueilli sur le chemin des Azaïls. M. Powell n'a pas observé la Thais Rumina à Khenchela (1908), à Géryville (1910), à Aflou (191 1), à Lambèse (1912 et 1913)- Aporia Cratasgi, Linné. J'ai décrit à la page 120 du Volume III des Etudes de Lépi- doptérologie comparée, avec le nom de Mauritanica, la race algérienne de V Aporia Cratœgi. Le cf est d'un blanc éclatant 36 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE avec les nervures noires, fines, et aboutissant fréquemment, sans aucun empâtement, au bord terminal. En dessous, la surface des ailes inférieures est le plus généralement très faiblement sau- poudrée de gris. Je fais figurer un cT et une Q pris en mai 1907, à Sebdou, par Harold Powell, sous les n"^ 2264 et 2265 de la PI. CCLXXIX. Ma collection contient une bonne série d'exem- plaires récoltés tant à Sebdou qu'à Lambèse où ils ont été cap- turés en juin 1884 et à la fin de mai 191 3. Linné décrit Cratœgi en ces termes : Cralcegi y 2 P. H. {Papïlio Heliconius) alis integerrimis rotundatis albis : venis nigris. ?Iabitat in Pruno, Crata?go, Sorbo, Pyro. Heliconium esse indi- cant alae, apice denudatse. » L.a chenille, en Algérie, vit sur des variétés de l'aubépine qui croissent spontanément dans les lieux un peu frais, spécialement au fond des vallées. \.^Apona Cratœgi habite, mais pas très abondante, à Lambèse, à Khenchela et à Sebdou. M. Powell n'a pas observé XWforia Cratœgi dans le Djebel-Amour. Pieris Brassicae, Linné. J. Merkl a trouvé la Pieris Bras.ùcœ en avril, à Philippeville et à Lambèse; H. Powell l'a capturée en mai à Sebdou; il l'a trouvée, en mai, à Misserghm oii la chenille vit sur une crucifère sauvage; H. Powell a capturé une Q, en octobre 191 2, sur une petite colline de la région désertique, entre Tazleft et M'chou- nech, au sud de l'Aurès. L'Espèce ne paraît pas très commune en Algérie. Il ne me semble pas que les exemplaires algériens que contient ma collection diffèrent de ceux d'Europe. Voici comment Linné a décrit Brassicœ : (( 75 P. D. (Papilio Danaus) alis integerrimis rotundatis albis : primoribus maculis duabus apicibusque nigris, major. Alas posticas margine antico, subtus ilavas ». De plus on lit en note : « Papiliones Brassicae Rapae, napi, etc., LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 37 notantur in alis primoribus macula nigra : mares tantum subtus; feniinaî vero utnnque ». Feu Aurelio Vazquez, de Madrid, donr la collection est pré- sentement jointe à la mienne, avait capturé à Madrid une Q Brassicœ curieuse par la coloration grise de son apex, les autres taches restant noires; c'est sans doute une Q de la génération vernale. Feu Delahaye avait trouvé à Angers la même variété dont il m'avait envoyé un cf et une Q. J'ai fait figurer l'exemplaire récolté à Madrid, sous le n° 2207 de la PI. CCLXIV, dans le Vol. IX, Part. II. Verity, dans Revision of the Linnean types, dit en parlant de Pieris Brassicœ : « The only Linnean spécimen bears his label. It is a Q 01 the first brood, with paie grey apical crescent and underside of hind wings suffused with a thick black dustine ». Pieris Rapae, Lmné. Commune en Algérie, surtout sur le versant méditerranéen; mais habite aussi le nord de la région désertique. Je possède une série d'exemplaires pris ù Alger, en février, juillet et août; Biskra en mai; Lambèse en avril; Djurjura en juillet; Sebdou ; Magenta en juin; Hussein-Dey en octobre; Cap Aokas en avril. Roger Verity, dans Rhopalocera palœarctica, a figuré sous les n"" 43 et 44 de la PL XXXIII, un cf d'Algérie et une Q de Tanger, appartenant à la génération d'été, en les désignant comme forme Mauritanica, Verity. Sur la PI. XXXIV du même ouvrage, Verity représente avec la dénomination de Rapœ-metra- leucotera, Stef., un çS d'Ona (Algérie), ex coll. de Joannis, et une Q de Nefta (Tunisie), ex coll. Daniel Lucas. Harold Powell a capturé la Pieris Rapœ à Misserghin (mai 1907), à Sebdou (mai, juin, juillet, août, septembre 1907), à LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE Géryvillc et à Aflou. Les chenilles ravageaient les choux cultivés dans les jardins, à Khenchela, en juin et juillet 190S. Pieris Napi, Linné. Je possède d'Algérie un seul exemplaire Q que Merkl a pris dans le Djurjura, en juillet 1884. 11 ressemble un peu à l'échan- tillon du Tarf, en Tunisie, que Roger Verity a figuré sous le n" 17 de la PI. XXXIl, dans Rhopalocera -palœarctica. Pieris Glaiiconome, Klug. Ma collection contient un seul exemplaire de cette Espèce, pris à Constantine par M. Roland Trimen, en avril 1881. J'ai commu- niqué cet échantillon de Glaucoîiome à Roger Verity qui en a figuré le dessous des ailes sous le n" 32 de la PI. XXX, dans Rhopalocera -palœarctica. Je mentionne Glancononie algérienne à la page 125, dans le Volume 111 des Eijides de Lèpïdoptho- Icgie comparée. Pieris Daplidice, Linné. Décrit par Linné comme suit : (( Daplidice 81 P. D. {Papilio- Danaus) alis integris rotundatis a Ibis margine fuscis subtus luteo griseis albo maculatis. Habitat in Europa australi et Africa. Statura P. Cardamines alas primores concolores albas. Maculas duae f uscae in disco utrinque f eminœ, at mari una supra ; apices fusci maculis albis nonnullis sparsis; subtus, concolores, sed loco nigredinis virescentes. Posticas supra mari albas immaculatae; Feminae limbo fuscescente et albo maculato subtus alb« vires- cente maculatas. La Pieris Daplidice est très répandue en Algérie on elle vole aussi bien dans la zone méditerranéenne que dans la région désertique. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 39 Il y a deux formes saisonnières principales reliées par de nombreux passages. La forme vernale a été appelée Bellidice, Ochs ; en dessus, les taches noires ont un aspect grisâtre à cause d'un épais semis d'écailles blanches; en dessous, les macules des ailes inférieures sont d'un vert foncé. L,a forme estivale a été désignée par moi-même avec le nom d'Albidice et j'en ai donné la figure sous le n° 12 de la PI. V, dans la XIV livraison des Etudes d.' Entomologie. De plus, la couleur blanche du fond des ailes peut devenir d'un jaune canari. Merkl a pris à Biskra, en mai 1884, un cf de cette variété que j'ai appelée Sidphurea et que j'ai fait figurer sous le n" 8 de la PI. I, dans la XX** livraison des Etudes d' Entomologie. J'ai aussi appelé Flavescens la Ç) dont le fond des ailes est lavé de jaune soufre {Etudes d'Entomol., XIP liv., p. 22). J'ai exposé dans les Etudes de Lépidoptérologie comparée, Vol. III, p. 122-125, l'erreur que Staudinger et Rebel ont commise dans leur Catalog 1901, en faisant tomber Albidice, Obthr., comme synonyme de Raphani, Esper. Sans se donner la peine de vérifier la synonymie telle que l'ont présentée Staudinger et Rebel, Verity accepta dans Rhopalocera palœarctica, comme étant l'expression de l'infaillible science, la faute commise par les savants allemands. Je dois dire que Roger Verity a reconnu, à la page 329 de son bel ouvrage, le bien-fondé de mon observation. Je ne reviendrai pas sur ce sujet, que j'ai amplement traité dans le Volume III des Etudes de Lépidoptérologie comparée; mais je mettrai de nouveau les Lépidoptéristes trop confiants en garde contre les assertions du Catalog 1901, par Staudinger et Rebel. Le nombre des erreurs est considérable dans ce Catalog, et il est prudent d'en vérifier très soigneusement tous les articles, si on tient à faire des déterminations correctes. Verity a représenté sur la PI. XXX, dans Rhopalocera palœ- arctica, la Daplidice flavescens Q de Biskra (fig. 14); la Dapli- dice-Bellidice, Ochs., de Biskra (fig. 2.3); la Daplidice- Albidice, Obthr., de Lambèse (fig. 29). 40 LÉPIDOPTEROLOGIE COMPAREE Anthocharis Belia, Linné. La description du Systema Natures, édition XII, 1767, est conçue en ces termes : (( Belia, 84 P. D. {Papilio Danaus) alis rotundatis albis; subtus flavis grisescente subfasciatis. Habitat in Barbaria. Brander. Simillinrus P. Cardamines feminae, sed minor. Corpore subtus flavo : Alœ prnTiores concolores albae lunula f usca ; apiceque lutescentes. Posticae supra albae immacu- latae; subtus flavissimas lituris aliquot transversis griseis. )) Brander est le nom du « Swedish Consul at Algiers from 1753 to 1765 » qui procura des objets d'histoire naturelle barbaresques à son compatriote Linné. Dans Revision of the Linnean types of palœarclic Rhopalocera (p. 178), le D" Verity dit à propos d'Euchloë Belia (1767) : « Under this name there exist two spécimens, one of them bearing Linnaeus's label ; they are both females of the species which is generally known as Eiipheno, Linn. ». D'après l'article qui suit dans Revision, etc., par Verity, et qui est consacré à VEuchloë eupheno (1767J, le nom que doit porter V Aurore d'Algérie, n'est ni Douei, comme l'avait proposé Pierret, ni Eupheno, ainsi que Staudinger l'a fait généralement admettre, mais Belia, Linné {Systema Naturce, p. 761, n° 84), dont j'ai rapporté la description plus haut. C'est du reste la solution à laquelle se rallie W. F. Kirby, dans A Synonymie Catalogue of Diurnal Lepidoptera, ouvrage publié à Londres en 1871. Il me semble que l'opinion de Kirby est la bonne; mais il faut changer l'attribution du nom de Belia, l'enlever à Y Anthocharis tout blanc et sans tache apicale aurore, en dessus, figuré par Cramer, avec le nom de Belia, sous les fig. A et B de la PI CCCXCVII, et désigner l'Espèce que nous avons coutume d'appeler Belia, sous le nom de Crameri, donné par Butler en 1869. Dans V Atlas zit Morits Wagner' s Reisen in der Regenschaft LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 4I Algier, in den Jahren 1836, 1S37 i-^^cl 1S38, publié à Leipzig en 1841, les deux sexes de la Poiilia Doiici se trouvent bien repré- sentés en dessus et en dessous, sur la Tab. IX, avec Hipparchïa Meone et Euprcpia Dido. \J' Anthochans Belia, Lniné (q Belia, n" 84, qui fut la pre- mière décrite; cf Eîipheno, n' 88), est répandue dans toute la région barbaresque du versant méditerranéen. Je l'ai prise, en 1868, à Alger et à Lambèse; elle vole au printemps; en 1894, je l'ai aussi capturée à Tanger, où la forme paraît être semblable à celle d'Algérie et de Tunisie. Cependant à Mogador (Maroc), la morphe est très différente; elle est beaucoup plus grande, et la Ç), plus colorée, se rapproche davantage du cf ; cette morphe marocaine a été appelée Androgyne par Leech. Verity, dans Rhopalocera palœantica, a figuré les deux sexes sous les n"** 43, 44 et 45 de la PL XXXVIII. On lira peut-être avec intérêt la description d' Eupheno {Belia cf) telle qu'elle a paru dans le Systema Tslatiirœ, en 1767 : « Eupheno, 88, P. D. Alis integerrimis rotundatis flavis : primo- ribus apice (medio fulvo) nigris, posticis subtus lituris fuscis. Habitat in Barbaria. — Simillimus P. Cardamines, paulo minor. Alas flavissimas : Primores supra apice fulvo, cincto nigredine, subtus apice fulvo non cincto nigredine, sed flavo communi, cum macula nigra ad basm fulvi. Secundariae utnnque flavae; subtus lituris tribus, fuscescentibus, obsoletis, curvis, margine exteriore crassioribus. )) La Q semble plus variable que le d"; cependant les deux sexes présentent des exemplaires de taille très inégale. La couleur du fond des ailes de la Q est blanc ou soufré et l'apex des ailes supérieures est très diversement nuancé de rouge-orange ou de brun; chez le cf, la tache apicale rouge est tantôt fortement entourée de noir, tantôt la teinte noire est presque entièrement absente. Je fais représenter plusieurs cf et plusieurs Q, afin de donner une idée exacte de la variabilité ordinaire de l'Espèce, sous les n*^* 2277 à 2282 de la PI. CCLXXX et sous les n"^ 2283 à 2285 de la PI. CCLXXXI. 42 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Harold Powell a capturé VAnlhocharis Beha, Linné {Eiipheno, sec. Stgr.), dans les vallées de l'Aurès où elle est commune. Le même explorateur l'a trouvée à Misserghni, le 3 mai 1907; mais il commençait à être défraîchi à cette époque, dans cette localité; à Tlemcen, un peu plus tard, en mai 1907; il s'y trouvait plus frais qu'à Misserghin. Le 20 mai 1907, le papillon volait à Sebdou; mais l'espèce finissait. A Géry ville, l'espèce fut prise sur le Djebel-Oustani, le 17 mai 1910. Anthocharis Charlonia, Donzel {Levaillantïï, Lucas). Le célèbre entomologiste lyonnais Hugues Donzel, qui fut un chasseur si ardent et qui explora avec tant de zèle, notamment les départements des Basses-Alpes et des Pyrénées-Orientales, décrivit et ûgura avec le nom de Charlonia, dans les Annales de la Société entomologique de France, 1842, la rapide Piéride algérienne, aux ailes d'un jaune primevère si éclatant, que le capitaine Charlon avait découverte à Emsilah, en Algérie; c'est le même capitaine qui avait trouvé le magnifique Bombyx Philo- palus, aux environs de Constantine. Les deux Espèces Anthocharis Charlonia et Bombyx Philo- palus faisaient partie de la collection Dardouin, à Marseille; elles sont figurées sous les n"^ i et 2 de la PI. 8, dans le Tome XI des Annales Soc. ent. France. Cinq ans plus tard, H. Lucas, employé au Laboratoire d'Ento- mologie du Muséum d'Histoire naturelle, à Paris, décrivit dans le Bulletin de la Soc. ent. France, p. XLIX et L, avec le nom de Levaïllantii, une Anthocharis prise dans le Djebel- Amour par le colonel Levaillant, cet officier entomologiste dont j'ai déjà fait ample mention à propos du Papilio F eisthamelii. Lucas n'ignorait pas que Donzel avait déjà fait connaître V Anthocharis Charlonia, et il s'est évertué à indiquer des différences spécifiques, d'ailleurs illusoires, entre sa Levaillantii et la Charlonia. Il a figuré deux fois V Anth. Levaillantii -. 1° sous les n°^ i et i a de la PI. 2 (Lépidoptères), dans l'Atlas de V Exploration scienti- LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 43 fique de V Algérie (Paris, Inip. Nationale, MDCCCLIX) ; et 2" sous les v^'' \ a çX. \ b de la Pi. 2, dans les Annales Soc. enl. France, 1850. La notice que Lucas consacre à V Anlhocharis Levaillantii, aux pages 90-96 des Annales, est intéressante à lire; mais Lucas voulant séparer spécifiquement Charlonia de Levail- lantii, plaide une mauvaise cause. 11 n'y a qu'une Espèce. La priorité du nom appartient à Charlonia, Donzel. J'ai connu per- sonnellement H. Lucas, jadis employé au Muséum de Paris. C'était un homme fort aimable, très bienveillant et d'un com- merce plutôt agréable; mais il ne m'a jamais paru bien doué au point de vue du jugement et du coup d'œil, comme Entomologiste. 1^' Anlhocharis Charlonia est un gracieux habitant des parties désertiques de l'Algérie; mais comme c'est un puissant voilier, malgré sa petite taille, il semble parfois quitter son lieu d'origine et on trouve des exemplaires erratiques très loin du désert. Voici le relevé des localités d'où proviennent 200 échantillons de V Anthocharis Charlonia que renferme ma collection : Région de Géry ville, mai 191 0; El-Outaya (Prov. Constantmej, mars, avril 1910; Biskra, janvier, février, mars, avril 1910; mai 1884; mai 1885; Sfax; Mecheria, mars 1886; Sebdou, mai 1880; Bou-Saada, avril, mai 1875; Lambèse, avril 1884; mai, juin 1912; février, mars 1913; Alger, 1885 (i seul cf) ; El-Kantara, avril 1882; octobre 191 2; Aïn-Sefra, avril 1886; Colomb Béchar, avril, mai 1912. \J Anthocharis Charlonia varie beaucoup pour la taille; pour l'épaisseur de la tache apicale noire, et pour la forme et la dimension de la tache cellulaire noire, aux ailes supérieures en dessus. Cependant la tache cellulaire présente plus ordinairement l'aspect d'un accent circonflexe que d'un rectangle un peu 44 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE allongé. La taciic apicale iiûire est aussi plus ou moins traversée dans son milieu par une série de taches jaune soufre. Le bord des ailes supérieures, en dessous, est liséré d'un rose vineux qu'on perçoit même en dessus, chez certains individus, et qui est d'un agréable effet. Bien que V Anthocharis Charlonia soit fort bien connue, je crois devoir faire représenter dans cet ouvrage quelques exem- plaires, aûn de donner une idée assez exacte de la variabilité ordinaire de l'Espèce. Voici les notes dont M. Powell m'a fait part au sujet de C-harlonia; elles résument les observations faites par cet habile chasseur : (( Cette Espèce est bien moins abondante dans les parties élevées de l'Algérie que sur les collines des confins du Sahara. A Sebdou, où elle était rare, j'ai vu et pris, en mai 1907, quelques exemplaires passés, sur un terrain aride, au bord d'un affluent de la Tafna; ce n'est qu'au mois de septembre que j'ai revu Char- lonia dans la région, un individu fraîchement éclos ayant été capturé le 24 de ce mois aux abords du village. A Géryville, station plus élevée que Sebdou, mais au sud des Hauts-Plateaux et plus près du désert, le papillon était bien moins rare. Je l'y ai pris : le 13 mai 1910, sur les steppes, à une dizaine de kilomètres au nord-ouest du village, volant avec Anthocharis Cranieri et A. Belemïa; le i'"' juin, au Djebel-el- Beiod, montagne aride derrière le village; le il juin, au sommet du Djebel-Bouderga. Une nouvelle éclosion a eu lieu dans la dernière quinzaine de juin; j'ai capturé un exemplaire frais, le 15, et ensuite plu- sieurs sujets bien frais, sur les monticules et petites crêtes s 'éle- vant sur la plaine au sud-est de Géryville. Ici encore, Charlonia volait en compagnie de Belemia et de Cranieri, suivant les crêtes pierreuses qui couronnaient les plissements parallèles du terrain et tournant autour des points les plus élevés; on n'avait qu'à se poster sur un des points culminants pour prendre les Anthocharis au fur et à mesure qu'ils arrivaient; Charlonia, LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 45 bien moins abondante que les deux autres Espèces, était aussi plus timide, et ne retournait pas au même sommet, si on avait le malheur de la manquer. Plusieurs Crucifères à fleurs jaunes ou lilas poussent sur ces plaines et collines, entre les touffes d'Alfa, d'Hélianthème, d'Acanlhyllis, etc. Je n'ai pas rencontré Charlonia dans l' arrière-saison à Géry ville. A Aflou, en 191 1, l'Espèce était rare; je l'ai prise en mai et juin. Dans la région de L-ambèse, Charlonia est répandue mais peu abondante sur les collines arides qui se trouvent dans la direction du nord-est et de l'est : Djebel-Aiia, Marcouna, Timgad, etc.; on la rencontre surtout au printemps; je l'ai prise aussi en octobre. En octobre 191 2 nous avons remarqué et souvent pris l'espèce dans la région aride et chaotique entre Tazleft et M'chounech, de même que sur le chemin entre ce dernier point et Biskra; à El-Kantara et à Aïn-Touta. A Lambèse, j'ai vu pondre un œuf, par une Q de Charlonia, sur les fleurs jaunes d'une petite Crucifère poussant au bord d'un sentier, à la limite des champs d'orge et de la broussaille. Cette plante correspond à la description de la Succowia Balearica, Medick ». Anthocharis Pechi, Stgr. (nec Obthr.). Je considère V Anthocharis Pechi, Stgr., comme une Espèce à part et nullem.ent comme une variété de Tagis, ainsi que le sup- pose cependant Roger Verity {Rhopal. falœarct., p. 184). \J Anthocharis Pechi a été figurée en couleurs, par Verity, en dessus, sous le n° 59 de la PI. XXXVI, et en dessous, sous le n° 19 de la PI. XLIX, dans Rhop. palœarct., d'après un échan- tillon d'El-Kantara, communiqué par Miss Fountaine. Le même auteur Verity a figuré de nouveau l'A. Pechi, en noir, sous les n°^ 18 et 19 de la PI. L, d'après les soi-disant types de 46 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE la collection Staudinger. Il me semble que les photographies des 11°^ 18 et 19 reproduites par Verity sur la PI. L ne sont pas obtenues d'après la nature, mais plutôt d'après un dessin d'ail- leurs très médiocre. Le n° 20 de la PI. L, représentant le dessus des ailes du même papillon qui est figuré sous le n° 20 de la PI. XLIX, en couleurs et en dessous, est bien un exemplaire référable à Pechi, Stgr. Le papillon en question, figuré par Verity, faisait partie de la collection Guenée ; je le possède encore aujourd'hui. J'ai publié, pour ma part, dans les Etiid. Lépid. comp., une figure en couleurs de VAnihocharis Pechi, sous le n° il 18 de la PI. CXXVI, d'après un cf d'El-Kantara dont je suis redevable à l'obligeance de M"^ de la B. Nicholl. Je possède actuellement environ 150 exemplaires de VAittho- charis Pechi; la plupart de ces papillons pris à Guelt-es-Stel, les 20 et 21 mars 1913 et en mars 1914, m'ont été, les uns, cour- toisement offerts par M. Nissen, Consul général du Danemark à Alger, et les autres envoyés par un chasseur établi dans la localité même. Les autres ont été pris par des chasseurs arabes à El-Outaya, en mars 191 3, et par M. Harold Powell, dans le Djebel-Aurès (Djebel-Ichali'), vers 1.800 mètres d'altitude, et à El-Kantara, en 1913. \J' Anthocharis Pechi, Stgr., a le fond des ailes blanc, en dessus. A l'apex, les supérieures présentent une tache presque triangulaire d'un gris noirâtre, plus ou moins traversée par une série d'éclaircies blanchâtres. Tout près du bord costal des mêmes ailes, un trait gris noirâtre, d'accentuation très variable, non contigu au bord costal dont il est généralement séparé par un mince espace blanc, se relie au trait cellulaire de même nuance, qui est plus ou moins épais, selon les individus. Les poils du collier et de la tête paraissent légèrement jaunâtres en dessus. Le revers des ailes est vert, sauf le fond des ailes supérieures qui reste blanc; on distingue aussi une éclaircie blanchâtre, de développement assez variable, sur le milieu des ailes inférieures, en dessous. LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 47 M. Harold Powell a trouvé V Anthocharis Pechi, dans son exploration de la région de Lambèse, au commencement de juin 191 3; il a noté les observations suivantes : (( Au Djebel-Ichali, seule localité en Algérie où j'ai rencontré Pechi, ce papillon se trouve surtout au sommet; un seul exem- plaire a été capturé, le 4 juin 191 3, sur le sentier forestier de Titouguelt à Boursalah, à l'endroit où ce sentier contourne l'Ichali; trois autres individus ont été pris, le 6 juin, au sommet même de la montagne, et un cinquième, le 7 juin, au même endroit. Le dernier sujet pris était le plus frais, mais tous avaient volé depuis longtemps; nous n'avons vu que des mâles. C'est à l'extrémité ouest du sommet que nous avons trouvé Pechi; son vol n'est pas si rapide que celui de Charlonia; nous n'avons pas eu de difficulté à le prendre. Dans les deux localités, d'ailleurs peu éloignées l'une de l'autre, pousse une plante que je n'ai pas remarquée autre part dans la région et qui pourrait bien être la plante nourricière, ou une des plantes nourricières, de l'Espèce; c'est Vîberis Ciliata, L., dont les nombreuses fleurs lilas ou violacées font un bel effet dans les espaces libres du maquis de chênes verts. Nous avons examiné beaucoup de ces Iberis sans trouver, cepen- dant, ni œufs, ni chenilles. Une autre localité pour Pechi dans les environs de Batna est le sommet du Djebel-Tuggurt (Pic des Cèdres) ; un entomolo- giste de passage à Lambèse y a pris un exemplaire au commen- cement de mai 191 2. Le Pic des Cèdres a près de 2.100 mètres d'altitude ». Anthocharis Tagis=algirica, Obthr. XJ Anth. Tagis est assez rare partout où on la rencontre; elle a été observée jusqu'ici en Portugal, Andalousie, Castille, Pro- vence, Corse, Sardaigne et Algérie. Elle présente une série de 48 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE morphes géographiques assez stables et aisément distinctes. Suivant la valeur attribuée présentement au mot Espèce, la forme des îles méditerranéennes pourrait bien être considérée comiïie spécifiquement différente des formes continentales. La race algérienne de 7^ a gis que j'ai appelée Tagis-algirica, a été décrite à la page 145, dans le Volume III des Etudes de Lépidoptérologic com-parée et figurée sous le n° il 17 de la PI. CXXVI, dans le Volume VI du même ouvrage. Le premier — et jusqu'ici seul — exemplaire venu en ma possession, fut pris par le lieutenant Lahayc, à la fin de mars 1886, aux environs de Mécheria. En dessus VAnthocharis Tagis-algïrica ressemble beaucoup à la forme Bel lésina, de Digne. Cependant, autant que je puis en juger d'après le seul exemplaire authentique, la tache cellulaire noire est un peu plus épaisse, nette et ovale sur le dessus des ailes. En dessous, les parties verdâtres ne présentent pas la teinte verte d'une nuance aussi claire que chez Bellezina\ la couleur verte du fond des ailes inférieures et de l'apex des supérieures est, chez Tagis-algirica, d'un vert olive tout à fait analogue à la teinte qu'on remarque chez Tagis-gallica et Tagis-lusitanica. Les taches blanches éparses sur le dessous des ailes inférieures, au milieu du fond vert, sont nettes, mates, et dépourvues de l'éclat porcelané qui distingue Crameri, Butler (Belia, Cramer). La forme des ailes est comme celle de Bellezina, plus arrondie, moins allongée et moins anguleuse que chez Crameri. Le caractère de matité des taches blanches est, à mon avis, très important. Ma collection contient une longue série à'' Anthocharis algériens parmi lesquels j'ai très attentivement cherché s'il ne se trouverait pas quelque Tagis. En effet, à El-Outaya, Lambèse, dans le Djebel-Aurès, on rencontre, au printemps, des exemplaires à ailes plutôt arrondies que pointues, nullement anguleuses ; c'est ainsi que j'ai mis à part 10 exemplaires des deux sexes qui me sem- blaient bien voisins de Tagis-algirica; mais, sur le dessous des ailes inférieures, les taches blanches sont recouvertes d'un éclat LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 49 de porcelaine, luisant et légèrement argenté. J'ai laissé ces 10 spécimens en observation et n'ai pas osé les rattacher à Tagïs- algirïca dont l'exemplaire unique et authentique ^ ainsi que je le dis plus haut, présente des taches blanches tout à fait mates, comme chez Bellezïna, et nullement porcelanées, comme chez Crarnerï. Je renouvelle l'expression de ce détail à cause de l'im- portance que je lui attribue. J'ai cependant longtemps hésité en présence de ces lo échan- tillons dont l'aspect général est plutôt celui de Tagïs-alginca. Tandis que Crarnerï paraît être une Piéride robuste et agile, faite pour voler rapidement, il semble que Tagïs-algïrïca est plus déli- cate et moins douée pour fendre énergiquement les airs. A part cette seule considération des taches blanches nacrées plutôt que mates, j'aurais classé comme Tagis-algirica la petite série d'Aiithocharis que je laisse avec doute jointe aux Crameri. J'ai pour principe d'exposer très sincèrement mes hésitations, en fait d'identification entomologique. S'il y a des spécimens qui ne prêtent à aucune confusion, il y en a d'autres qui peuvent passer pour former une transition presque parfaite entre deux formes généralement envisagées comme spécifiquement distinctes et dont l'ensemble des exemplaires peut être aisément séparé. Il serait tout simple de passer sous silence ces difficultés ; mais je considérerais toute réticence comme contraire à la probité scienti- fique; ceux qui écrivent sur un sujet entomologique ont le devoir de très exactement renseigner au sujet des questions litigieuses qui se rencontrent au cours des études lépidoptérologiques, même s'il n'est pas en leur pouvoir de fournir le rayon de lumière. Du reste, comme l'a dit Linné, il y a un siècle et demi : Pauca hœc vidiinus openini Dei, multa abscondita, sunt minora his majora. C'est pour lever des doutes comme celui dont je viens de faire part que l'examen des genitalia peut rendre de précieux services. J'aviserai à y recourir, lorsque cela sera possible. 50 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Anthocharis Mauretanica, Rober {Peclii, Obthr.). 11 s'agit du papillon que je crois resté toujours unique et que J. Merkl captura à Lambèse, en avril 1884. J'en ai donné la ûgure sous le n° 11 de la PI. V, dans la XII' livraison des Etudes d' Entomologie. Verity a reproduit le dessous des ailes de l'exemplaire-type que je lui avais confié, en couleurs, sous le n° 4 de la PL XXXVII; il a figuré en noir le dessus des ailes, sous le n° 9 de la PI. L, dans Rhofalocera palœarclica, avec le nom de Melanochloros, Rober, et comme variété de Crameri, Butler {Belia, Cramer). Mais on peut en voir une autre figure copiée sur celle que j'avais publiée {loc. cit.) à la ligne d de la PI. 22, dans l'ouvrage : Die Gross-Schmetterlinge der Erde, von Dr. Adalbert Seitz, Stuttgart, 190Ô. Je lis, sur la PI. 22 en question, le nom mauretanica, donné à cette figure qui est rapportée comme variété à 1 agis. Voici comment Verity s'exprime à la page 176, dans Rhopal. palœarctica : u Sous le nom de Melanochloros, Rober (Seitz, Gross-Schmett., I, p. 52, 1907) décrit une petite forme de Batna (Algérie) (ûg. 30), dont le dessin apical est réduit, le lavis basai très étendu, le revers des postérieures très obscur avec de très petits points blancs. L'exemplaire figuré par Oberthùr, comme Pechi {Etudes d'Ent., XII, p. 22, PI. V, f. 1 1, 1888), et que Rober (/. c, p. 53), sans l'avoir vu, attribue à Tagis, sous le nom de mauretanica, appartient sans aucun doute à cette forme de Belia (PI. XXXVII, fig. 4, et Pi. L, &g. 9) )). Rien ne prouve cependant que Melanochloros, Rober, et Mauretanica, Rober, désignent une seule et même Espèce. D'ail- leurs Nomejt Melanochloros est nuaum, puisque nulle figure n'a été publiée de la forme ainsi désignée. C'est alors avec le nom Mauretanica appliqué à la copie du papillon que j'ai fait initialement figurer et à qui le nom Pechi ne peut être maintenu, pour double emploi, que je distingue V Anthocharis algérienne, qui, suivant moi, n'est pas plus une LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 51 forme de Cramerï {Belia) que de Ta gis. Il me paraît certain que VAnthocharis Mauretanica est une Espèce à part, sans doute rare et localisée. Des recherches ultérieures fourniront, je l'espère, une documentation suffisante pour faire cesser tous les doutes aussi bien en ce qui concerne Mauretanica que Tagis-algirica. Il est curieux de constater une fois de plus avec quelle insou- ciance de la Vérité, Staudinger et Rebel ont traité la synonymie dans leur Catalog 1901. A l'art. 64 (p. 13), ces Auteurs inscrivent Pechi, Obthr., comme synonymie de Pechi, Stgr. Comment pareille bourde est-elle possible ? Ni Staudinger, ni Rebel n'ont donc jeté les yeux sur la figure d'ailleurs très exacte que j'ai publiée! Puisque Staudinger possédait le type de Pechi, la comparaison entre son papillon et celui qui se trouve figuré dans mon ouvrage était facile et démonstrative; la preuve aurait apparu évidente que les deux Pechi n'étaient nullement synonymes l'une de l'autre; il ne coûtait que la peine de regarder. Anthocharis Crameri, Butler. Dans le bel ouvrage : Papillons exotiqties des trois parties du Monde publié à Amsteldam, chez S. J. Baalde, et à Utrecht, chez Barthélémy Wild, Pierre Cramer, Directeur de la Société Zelan- doise des Sciences, à Vlissingue, et membre de la Société Con- cordia et Libertate, à Amsteldam, a publié sous les lettres A (dessus) et B (dessous) de la PI. CCCXCVII, la figure d'un papillon blanc qui est décrit comme suit aux pages 225 et 226 du Volume IV, portant la date 1782. « Belia. Cette Danaïde blanche ressemble à la femelle du Pap. Cardamines qui a été représenté par Rôsel, Ins. Tom. I. Pap. Diurn. Cl. 2, pag. 45, Tab. 8, fig. S. 9. Mais quand on les compare exactement, on trouve que les extrémités des ailes supé- rieures, sur les deux surfaces, diffèrent beaucoup dans le dessin des taches noires, blanches et verdâtres, et de plus encore la tache noire du milieu de ces ailes varie très visiblement. Les ailes infé- 52 , LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE rieures de la Fig. B ont aussi un dessein entièrement différent, dans les taches vertes, et leur fond blanc est comme d'un nacre de perle luisant. L'original d'après lequel nous avons fait cette ligure est une femelle, et je ne saurais dire si les mâles ont aussi une tache couleur d'orange sur les ailes supérieures, comme celle du susmentionné Pap. Cardannnes. En vertu de la description de M. Linnaeus, il faudrait conclure qu'il a devant soi un mâle et que les couleurs de son objet varient de celles de la femelle que nous représentons ici. Elle a été prise à Smyrne, mais on la trouve pareillement sur la Côte de Barbarie, et dans la partie méridionale de la France, en Provence et au Languedoc. Mr. C. van Lennep, Echevin et Conseiller de cette Ville, me l'a prêtée, pour la faire dessiner. — Linn., Sysl. Nattir., pag. 761, n" 84, Pap. Dan. Cand. — Ernst et Engramelle, Pap. d'Europe, Cahier V, PI. 52, Fig. 108. C. D. » J'ai scrupuleusement reproduit dans cette copie tous les détails de la partie française du texte, telle qu'elle se trouve imprimée dans l'ouvrage de l'auteur hollandais. Cramer a donc considéré le papillon blanc dont il publiait la figure avec le nom de Belia, comme la femelle du papillon Belia, décrite par Linné, sous le n" 84, à la page 761 de Systema Nalurce, dans les termes que j'ai déjà reproduits plus haut (page 40), à propos de V Anthocharïs Belia, Linné. Ce papillon {Belia, Linné), n'est lui-même autre chose que la femelle d'un autre papillon également décrit, par Linné, sous le n° 88, à la page 762 du Systema Naturœ, avec le nom d' Eupheno ; les deux papillons : Belia et Eupheno, selon Linné, en réalité Q et cf d'une seule et même Espèce, habitent en Barbarie, et la femelle Belia fut transmise à Linné par Brander, ainsi que nous l'apprend la notice linnéenne qui lui est consacrée. Arthur G. Butler avait, dès 1869, remarqué l'erreur d'appré- ciation imputable à Cramer; dès lors, rétablissant pour VAniho- charis Douei, Pierret, le nom linnéen de Belia, il avait imposé à Belia, Cramer, — afin de faire cesser le double emploi d'un même LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 53 nom spécifique dans un même Genre, — la dénomination Crameri, Butler. Crameri, Butler, désigne alors la forme vernale de VAntho- charis que Huebner et Boisduval avaient appelée Belia, d'après Cramer. Mais nous ne sommes point encore sortis de l'imbroglio de la Nomenclature et nous n'avons pas fini de tirer au clair tous les malentendus. En effet, on remarque chez Belia occidentale trois formes : 1° Celle du printemps dans les plaines et les basses montagnes, c'est Crameri, Butler {Belia, Cramer); 2° Celle de l'été dans les plaines, vulgairement (mais à tort) désignée par le nom de Ausonia; 3° Celle des montagnes, qui ne paraît qu'à la fin du printemps et en été, connue (également à tort) sous le nom de Simplonia. Huebner, sous le n" 416, a figuré la forme estivale des plaines, mais avec le même nom de Belia qu'il a également appliqué à la forme vernale, laquelle est représentée sous les n°^ 417 et 418; tandis que le même Huebner a inventé le nom d' Aîisonia pour la forme des montagnes, dont le cf est très bien figuré, recto et verso, sous les n°^ 582 et 583. Or, nous appelons aujourd'hui couramment : Ausonia, Huebner, la forme estivale que Huebner désigne comme Belia, c'est-à-dire du même nom que la forme vernale, et nous appelons Simplonia la forme montagnarde à laquelle Huebner attribue le nom à^ Ausonia. Verity, dans Rhopalocera pahvarctica, paraît s'être assez bien rendu compte de tout le désordre qui subsiste encore aujourd'hui dans la Nomenclature, ainsi que des erreurs qui se sont accumulées et que tout le monde accepte pourtant comme étant l'expression de la vérité; mais qui donc prend la peine de remonter aux sources ? Ce que Staudinger et Rebel ont publié dans le Caialog 1901 est malheureusement fautif, suivant l'usage. Pourtant W. F. Kirby, dans A Synonymie Catalogue of Diurnal Lepidoptera, 54 LÉPIDOPTEROLOGIE COMPAREE London, 1871, avait eu le mérite de reconnaître la vérité, et il eût été sage, de la part des Auteurs allemands, de se reporter aux données synonymiques de l'Auteur anglais et de s'y conformer. Si donc on veut aujourd'hui déterminer correctement les Anthocharïs que Staudinger et Rebel appellent dans leur Catalog 1901, à tort : Belia, Ausonia et Simplonia, il faut, comme l'a proposé W. F. Kirby, remplacer : 1° L.e nom de Belia par le nom de Cramerï, et appliquer ce nom de Crmneri à la forme vernale des plaines et des collines de l'Algérie er du sud-ouest de l'Europe; 2° Remplacer le nom de Simplonia par le nom de Ausonia, Huebner, 582, 583, et appliquer ce nom Ausonia à la forme des Alpes et des Pyrénées; 3° Substituer au nom A' Aîisonia, Huebner, le nom de Esferi, Kirby, et appliquer le nom Esperi à la forme estivale des plaines et des basses montagnes de l'Afrique septentrionale et de l'Europe sud-occidentale. Qu'on me permette de prier le Lecteur de se reporter à la page 506 du Catalogue, par Kirby. Je crois que la synonymie y est aussi correctement présentée qu'elle paraît mal établie dans le Catalog par Staudinger et Rebel, 190T. Verity n'a sans doute pas osé, dans Rhopalocera palœarctica, s'affranchir de l'mfluence, plutôt fâcheuse, que le Catalog alle- mand a exercée sur son esprit. Il n'en a cependant pas ignoré les erreurs ; il a prétendu, pour excuse, que le papillon décrit par Linné, sous le nom de Belia, est problématique, probablement parce que, dans le Catalog igoi par Staudinger et Rebel, il a lu : (( Sed Belia, L. species est dubia ». En réalité la description linnéenne de Belia ne peut pas compter parmi les plus douteuses. D'ailleurs il ne faut pas oublier que tout ce qui n'a pas été bien figuré, est : species dubia; dès lors, l'identification de Belia, d'après la description linnéenne, ne serait ni plus ni moins incer- taine que toutes les autres dont la figure n'existe p>as et dont les types authentiques sont perdus. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 55 Seulement, dans la circonstance présente, nous savons qu'il n'en est point ainsi. Verity lui-même nous a récemment appris que « under this name (Belia) there exist two spécimens, one of them bearing Linnasus's label; they are both females of the species which is generally known as Eupheno, Linn. » Dès lors, le doute n'existe pas, puisque les types existent encore. Verity, avant d'avoir publié Revision of the Linncean types, etc., s'est trouvé, dans Rho-palocera falœarctica, timoré en face d'une résolution qui lui a semblé trop radicale et susceptible de contestations. Alors il a fortifié et propagé les malentendus, faute d'avoir pris la décision que doit toujours inspirer le souci de la vérité, lors- qu'on parvient à s'en rendre maître. Il est cependant juste de savoir gré à Verity, non seulement pour son utile travail : Revision of the Linnean types, mais encore pour la bonne et abondante figuration qu'il a publiée sur la PI. XXXVI; mais c'est dommage que toutes les déterminations concernant Belia, Ausonia, Siniplonia y soient restées fautives. D'après Verity, il y a deux grandes races géographiques {Rhop. pal., p. 174) de l'Espèce qui nous occupe présentement : 1° La forme Romana, de l'Italie centrale, de la Grèce, de la Russie méridionale et de l'Asie Mineure; 2° La forme Alhambra, de l'Espagne méridionale, de l'Afrique du Nord et de la France. Un peu plus loin {Rhop. pal., p. 175), Verity dit qu'il lui semble utile de séparer le deuxième groupe {Alhambra), sous le nom de var. occidentalis. Il me semble que le nom occidentalis est simplement synonyme d' Alhambra et désigne la même race géographique ? Dès lors, je crois qu'il faut ranger dans la varitété Alhambra, la race algérienne de VAnthocharis Crameri. Le nom : Crameri, Butler, remplacera, pour les exemplaires de In variété saisonnière vernale, le nom Belia, Cramer ; le nom Esperi, Kirby prendra la place du nom Ausonia, falsè Huebner, Godart, Boisduval, etc., pour la variété saisonnière estivale. 56 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE On trouve V Anthocharis Crameri, Butler (vernalis) et Esperi, Kirby (asstivalis) dans un grand nombre de localités d'Algérie et de Tunisie, depuis le littoral jusqu'à la latitude de Biskra, vers le sud. Je relève dans ma collection, les indications suivantes de lieu et date de capture : Forme vernalis : Cramen; Lambèse, avril 1868; avril 1884; avril 191 3; Djebel-Aurès, Baïou, avril 1913; El-Outaya, avril 1913; Sebdou, mars 1880; mai 1907; Mecheria, mars 1886; Cap-Aokas, avril 1909; Ain-Sefra, avril 1886; Géry ville, mai 1886; Biskra, janvier et février igio. Forme aestivalis : Esperï, Bou-Saada, mai 1875; Djebel-Aurès (Djebel Ichali, 1.800 m. ait.), juin 1913; Djebel-Aurès (Baïou), juin 1913; Sebdou, mai 1907; Khenchela, juin 1908; Lambèse, avril 1884; mai, juin 1907; Ei-Kantara, mai 1908; Biskra, mai 1885 , Géry ville, mai 1886; juin 1910; Bône, avril 1881 ; Aïn-Draham, 1909; Hammam-Rhira, mai 1909. On remarquera que les deux formes dites : saisonnières : ver- nalis Crameri et aestivalis Esperi, peuvent au même lieu, se rencontrer en même temps ; ainsi à Géryville en mai 1886, Sebdou en mai, etc., mais cette coïncidence ne s'observe pas dans la LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 57 partie extrême des saisons ; on ne l'a constatée que dans la partie moyenne, lorsque l'une finit et que l'autre commence. La variété gitddra, Verity, caractérisée par la grosseur de sa tache noire cellulaire aux ailes supérieures, en dessus, ne paraît pas présenter cette tache aussi accentuée en Algérie qu'en Andalousie; cependant je possède quelques très beaux exem- plaires référables à la morphe Quadra, pris çà et là, notamment à Sebdou, en compagnie d'autres ayant la tache noire cellulaire beaucoup moins épaisse. \J Anthocharis Crameri a un vol très vif, et sa capture nécessite parfois des courses rapides et prolongées. Au temps de ma jeu- nesse, saisir au vol les Anthocharis et les Zegris, était un sport auquel j'aimais à me livrer. Plus d'un exemplaire, dans ma collection, me rappelle qu'il fut le prix de mon effort. Cette année 1913, j'eus encore à Hyères, en compagnie de M. Harold Powell, de deux de mes petits-fils et du jeune Marc-Adrien Dollfus, condisciple et ami de mon petit-fils Henri, le plaisir de voir voler Crameri dans les sites agrestes qu'elle affectionne ; mais ce n'était plus moi qui pouvais capturer au vol V Anthocharis Crajfieri. Il fallait des jambes plus jeunes et plus vaillantes. J'avais du moins la satisfaction de voir dans la jeune génération qui s'élève, une ardeur qui n'avait pas dégénéré. Il m'a semblé que la race provençale de Crameri ne présente pas de différence, comparativement à la race algérienne. Les dessins verdâtres du dessous des ailes inférieures chez Crameri et Es-peri ne sont pas absolument symétriques, côté à côté; toutefois la différence est généralement minime. M. Harold Powell a pris, au cours de ses explorations en Algérie, des notes dont je suis très heureux de faire profiter mes Lecteurs. Ces notes, écrites généralement le jour même de la chasse, ont un caractère d'exactitude qu'aucun souvenir ne saurait égaler. Voici donc la notice que m'a remise M. Powell, d'après les divers manuscrits auxquels il s'est lui-même reporté : 58 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE « Dans presque toutes les localités que j'ai visitées aux mois de mai et juin en Algérie, j'ai trouvé Craineri ou sa forme sai- sonnière Esperi. Je l'ai notée dans la Province d'Oran, à Sebdou, au commencement de mai 1907; les exemplaires étaient souvent très petits, ainsi que je l'ai plusieurs fois remarqué pour la forme vernalis, non seulement à vSebdou, mais aussi dans le Djebel- Amour et le Djebel-Aurès. A partir du 15 mai, on rencontrait la forme aestivalis Esperi, mais, ainsi que cela a été signalé ci-dessus, j'ai observé qu'avec elle, volaient encore des individus de la forme printanière, et même des sujets intermédiaires; j'ai noté quelques spécimens tenant à la fois de Crame.ri et de Esperi, à Merchich, près Sebdou, le 20 mai. Esperi n'a pas volé longtemps en juin 1907, à Sebdou; le dernier exemplaire en état frais a été noté le 4 juin. A Saïda, le 7 mai 1910, Crameri volait en assez grand nombre, avec Belemia, dans la vallée et sur les collines à l'ouest; les sujets tenaient plutôt de Ja morphe Esperi, mais les taches blanches de l'aile inférieure en dessous, quoique grandes, étaient partiellement argentées. Un peu plus tard, le 9 juin, je traversais la vaste plaine d'Alfa, sans aucune culture, qui s'étend entre les montagnes du Tell et l'Atlas Saharien; j'allais de Bouktoub à Géryville. C'est une région sans arbres, à végétation basse, peu dense, mais comprenant bon nombre de plantes d'espèces diffé- rentes ; l'Alfa prédomine sur les petites collines et monticules qui interrom-pent de loin en loin la plaine; dans les bas fonds et le long des oueds desséchés, les Armoises (.4. Campeshis et A. Herba-Alha) et le Lygeuin SparUtm occupent le premier rang. Plusieurs Crucifères, entre autres une Bisentelle, croissent sur cette plaine sèche. Du camion automobile, qui faisait à cette époque le transport des voyageurs et marchandises entre Bouktoub et Géryville, je voyais voler, parfois, au-dessus de l'Alfa, une petite Anthocharis blanche dont je ne pouvais reconnaître l'espèce au vol ; à une vingtaine de kilomètres de Géryville, non loin du caravansérail de Zouireg, plusieurs de ces petits papillons blancs volaient LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 59 ensemble; ils me semblaient trop uniformément petits pour être Cramcri. Je décidai donc de revenir au plus tôt pour être fixé. Le 13 mai, je suis retourné vers Zouireg; mais avant d'y arriver, V Anthocharis était déjà retrouvée; c'était bien Crameri, d'une petite forme vernale; avec elle volaient A. Belemia et A. Charlonia, toutes trois en état défraîchi. Trois espèces de Crucifères ont été observées, croissant entre les touffes d'Alfa; une Biscutelle n'a rien donné; mais sur une autre Crucifère, à fleurs jaunes et à silicules minces et allongées, j'ai pris deux chenilles de Crameri; elles me paraissaient semblables à celles que je connais d'Hyères. Le 16 mai, deux Crameri ont été prises au Djebel-el-Beiod, dont une bien fraîche, avec une bonne proportion de jaune sur les inférieures en dessous. Le T/ mai 1910, j'ai inscrit sur mon carnet la note suivante qui a rapport à une excursion faite, ce jour-là, au Djebel-Oustani, au sud-est de Géryville : (f En traversant la plaine, le matni, nous n'avons presque rien vu ni pris; cependant, sur une des petites collines où pousse une Alfa très vigoureuse et certaines plantes basses, notamment VOnobrycJîis Argentea et des Crucifères à fleurs jaunes, nous avons pris Mclanargia Incs et M. Syllins-pciagia, ainsi qu'une Anthocharis Bclia {Crameri^, et un exemplaire d'une très petite Espèce à.' Anthocharis qui n'est pas Bclia, je pense; les taches blanches de l'aile inférieure en dessous sont, par places, réunies de façon à former des lignes, ce qui donne l'impression d'une forme tenant le milieu, pour ce caractère, entre Bclia et Belemia. Le sujet était en très mauvais état. •» Plus tard, j'ai conclu qu'il s'agissait d'une Crameri aberrante. Le printemps 1910 a été très frais, même froid, sur les Hauts- Plateaux; l'éclosion de beaucoup d'Espèces a été retardée de ce fait; Crameri n'a pas échappé à l'influence des basses tempé- ratures de mai, et ce n'est que vers le 25 du mois que la forme Esperi a commencé à paraître, mais, au début, elle n'était pas 6o LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE bien tranchée, les sujets faisant transition d'une forme à l'autre, et ce n'est qu'après le réchauffement des premiers jours de juin que Esperi est devenue plus caractérisée. Cramerï vernale a été notée les jours suivants à Géryville, à partir du 20 mai 1910 : 20, 21 et 30 mai, et jusqu'au 12 juin; Esperi, le 26 mai, sur le versant sud du Djebel-el-Beiod, localité chaude et assez aride, en avance sur la plaine de plusieurs jours, et les 5, 1 1, 12, 19 et 21 juin, sur les monticules et dans la plaine. L'Espèce se trouvait au sommet du Djebel-Ksel, le 25 juin, volant autour du signal, à 2.008 mètres d'altitude. La note suivante sur les mœurs du papillon est inscrite sur mon carnet à la date du 19 juin 1910 : (( Sur les collines basses surmontées de petites crêtes rocheuses, qui aboutissent à l'oued Chadli (ravin à sec), à l'est-sud-est de Géryville, volaient, ce matin, beaucoup de papillons, surtout les AntJwcharis et les Melanargia...; il y avait souvent cinq ou six Belia et Belemia se battant ensemble au sommet; elles faisaient cercle autour de moi; si on les manquait du premier coup de filet, elles ne s'en allaient pas, à moins d'avoir été touchées... En somme, ce n'est que l'attraction du sommet qui rend les Belia et les Belemia plus hardies; si on manque une de ces Espèces dans la plaine, c'est fini. En piquant les Belia, je rejetais souvent des individus en mauvais état ; les mâles qui voltigeaient autour de moi (les femelles ne volent pas sur les sommets) se posaient très souvent pour examiner leur frère m.ort, croyant avoir affaire à une Q posée, probablement. Belia est plus abondante que Belemia sur ces collines. » Les Belia {Crameri) dont il est question dans la note ci-dessus étaient de la forme aestivale; cependant leur taille n'était pas bien grande et les taches blanches du dessous manquaient rare- ment de traces de nacre. Le 25 mai 1910, Charles David a rap- porté une chenille de A. Crameri du Djebel-el-Beiod; il l'avait trouvée sur une Crucifère dont elle mangeait les fleurs jaunes. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 6l La chenille se développe rapidement, mais elle n'est pas très lacile à élever. A AHou, en 191 1, les conditions paraissaient plus favorables pour Cramen et BeLenua qu'à Géryviile, l'année précédente; mais les deux Espèces se sont montrées bien rares à Aiiou. Le premier exemplaire de Crânien a été vu le 30 mai seulement; il écait tout à fait défraîchi, et je ne l'ai pas gardé. En juin nous n'avons pris que très peu de sujets. Dans la Province de Constantme, à Lambèse et à Batna, la forme vernale est souvent bien petite. Lnanen vole ici dans les champs d'orge avec Belemia et les mâles se rencontrent souvent sur les sommets. Je n'ai jamais observé que Belïa {L'raineri) volât de nouveau à r arrière-saison, tandis que L karlonïa reparaît à l'automne. » Anthocharis Falioui, G. AUard. Il n'est peut-être pas un plui charmant papillon que V Antho- ckarïs FalLoui. Gaston Allard a dit avec raison que c'est une brillante et gracieuse Espèce, lorsqu'il la fit connaître aux pages 312, 318 et 319 des Annales de la Société cnluniologïque de France, année 1867. Deux excellentes figures numérotées i a ei I b représentent sur la PI. 6, dans les mêmes Annales, la Q en dessus, et le cf en dessous. Les modèles furent peints par Pou jade et la gravure exécutée par Debray. Depuis 18Ô7, V Anthucharïs Falioui a été fréquemment re- trouvée, notamment aux environs de Bou-Saada, de Biskra et d'El-Outaya; elle vole en janvier, février, mars et avril, mai et même juin; elle apparaît de nouveau en automne. Ma collection contient environ 250 exemplaires, ce qui permet d'apprécier la variabilité de l'Espèce. Les rayures vertes sur le dessous des ailes inférieures, ne sont pas symétriques ; l'effet général est cependant le même; mais un examen un peu attentif démontre aisément l'asymétrie ordinaire des bandelettes d'un vert olive, séparées 62 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE les unes des autres par des espaces d'un blanc porcelané. Le dessus des ailes inférieures, chez la Q, est le plus souvent lavé d'une teinte chamois pâle; le cf varie pour la taille; pour l'inten- sité et le développement des parties noires apicales, sur les ailes supérieures en dessus; pour les ailes inférieures, tantôt d'un blanc pur et immaculé en dessus, tantôt légèrement noircies le long du bord marginal. Aux pages 638-645 du Volume IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée, j'ai donné des détails biologiques sur V Anihochari^ Falloui. Je prie le Lecteur de s'y reporter. La chenille vit sur Moricuiidia arvensis ; la chrysalide peut rester très longtemps vivante sans donner son papillon. Je possède depuis trois ans, une certaine quantité de chrysa- lides de VAnlhocharis Falloui, parfaitement vivantes au moment où j'écris ces lignes (novembre 1913). Plusieurs fois, à des saisons diverses, quelques papillons sont sortis et c'est un plaisir de voir la jolie Anîhocharis Falloui, dans toute sa fraîcheur, apparaissant avec tant de grâce, fixée, au moyen de ses pattes fines, sur une tige sèche dans la boîte oii la chrysalide reposait (*). C'est à Gaston Ailard qu'on est redevable de la découverte de Y Anihochans Falloui, il la captura dans les environs de Biskra, au cours des voyages qu'il effectua au sud des provinces d'Alger et de Constantine, pendant les hivers et printemps de 1864 et 1866. Les Entomologistes français ne devront jamais oublier que Gaston Allai d a remis en honneur parmi nous, l'étude des Lépi- doptères algériens, restée un peu délaissée après l'exploration scientifique de Lucas. Grâce à l'initiative de Gaston Ailard, à ses recherches entreprises en Algérie, au momeilt opportun, et aux observations qu'elles suscitèrent dans les Annales de la Soc. enf. de France d'abord, puis dans les Etudes d' Entomologie, le soin de dresser l'inventaire de la faune lépidoptérologique algérienne resta, pour la part principale et essentielle, à des Entomologistes (*) Une Ç) est éclose le 24 décembre 1913, dans mon laboratoire entomolo- gique, après être restée trois années en chrysalide; d'autres exemplaires sont éclos à la fin de l'hiver 1914; des chrysalides sont encore vivantes. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 63 français. Les travaux des Français, dans la matière, leur ont donc conservé la prépondérance, comme c'était un droit et un devoir pour eux. Gaston Allard fut bien inspiré et je m'honore en donnant à son mérite une publicité dont son extrême modestie s'est toujours détournée. Anthocharis Belemia, Esper. Comme sa congénère Cramen, Butler {BeLia, Cramer, nec Linné), V Anthocharis Belemia se présente avec deux formes, celle du premier printemps, appelée Belemia, et celle qui paraît un peu plus tard dans la saison, connue sous le nom de Glauce. Mais les deux formes : Belemia et Glaiice, se rencontrent assez fréquemment au même moment de l'année, en avril et mai, de sorte qu'il n'y a pas entre les deux morphes une séparation sai- sonnière bien nette. Ma collection contient des Belemia algériennes provenant des localités suivantes : Sebdou, janvier 1879; "^^i IQO/; Méchéria, mars 1886; Sfax; Lambèse, avril 1868; 1884; Aïn-Sefra, avril 1886; Biskra, mai 1885; janvier, février, mars 1910; janvier, février 191 4; Hussein-Dey, décembre 1907; Cap Aokas, avril 1909; Aflou, mai 191 1 ; El-Outaya, mars 191 4; Guelt-es-Stel, mars 19 14. Quant aux Glauce, je relève les renseignements de localité et d'époque de capture, comme suit : Biskra, mai 1885 ; Sebdou, mai 1907; 64 LÉPIÛOPTÉROLOGIE COMPARÉE Khenchela, juin 1909; Alger; Afiou, juin 191 1 ; Bou-Saada, mai 1875; Lambèse, juin 1884; Géry ville, mai 1886; Maison-Carrée, mai 1908; Hussein-Dey, mai 1907; Cap Aokas, avril 1909; Hamnian-Rhira, mai 1909; Aïn-Draham, 1909; Oran, avril 191 2 (Transition à Beleniia). Dans un ouvrage publié sous le titre de Alcune nuove forme dï Lepidolleri, dans le journal Naturalisla siciliano, anno XVIII, 1905, le Comte Emilio Turati a distingué par le nom de Dese.rtonim, une forme de Belemia, capturée à Biskra. Les carac- tères de cette forme sont ainsi indic^ués : viinor, diluiior, subtiis signât itris viridibus angustis. Sur la Tav. II, VEiichloè Beleniia ab. Désert urum, Turati, est photographiquement reproduite sous les n°^ I, 2, 3 comi^arativement aux n°'' 4, 5 et 6 représentant le type, d'après des échantillons rencontrés (c nella parte setten- trionale d'Algeria )). Après examen de la longue série d'exemplaires algériens de Belemia^ rangés dans ma collection, je trouve difficile de fixer une séparation entre la petite forme {Désert or uni) et la plus grande. Cette dernière me paraît d'ailleurs infiniment plus rare, tandis c][ue Desertorum est plus abondante et se rencontre aussi bien au Cap Aokas et à Lambèse que dans la zone désertique. Ce qui me semble le plus intéressant à constater, ce sont les exemplaires paraissant d'ailleurs très peu communs et formant la transition entre les morphes Belemia et Glaiice. Victor Cotte, dans son voyage entomologique en Algérie, pendant les mois d'avril et mai 191 2, a capturé à Oran un individu tout à fait intermédiaire entre Belemia et Glauce. C'est une Glane e avec les LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 65 stries plus nettes et d'un vert plus foncé, sans trace de lavis jaunâtre sur le dessous des ailes inférieures oîi les espaces blancs sont encore un peu nacrés. Roger Verity, dans Rhopalocera palœarciïca, a très rapidement décrit VEuchloë Belemia et la génération estivale Glauce; il cite avec le nom de dïstincta une grande forme qui serait peut-être celle que le Comte Turati a figurée comme typique {loc. frœctt. Tav. II; fig. 4, 5, 6) et qui se trouverait constamment à Philippe- ville. De plus, Verity mentionne une ab. evanescens, Rôber, d'El- Kantara, privée de dessins noirs sur le dessus des ailes. Sur la PI. XXXVI, dans Rhopal. palœarct., Belemia est figurée sous les n"' 7, 8, 9, 10 {Desertonun); 11 {Distincta); 12, 13, 14 {Glauce); 15 {Glauce-palœstinensis). J'ai disserté assez longuement sur V Anthocharis Belemia aux pages 153, 154 et 155 dans le Vol. III des Etudes de Lépidop- térologie comparée. M. Harold Powell a pris sur V Anthocharis Belemia les notes suivantes : (( Belemia, proche voisine, dans ses mœurs, de Crameri, se trouve en Algérie dans les mêmes localités que cette dernière Espèce; elle me paraît plus abondante que Crameri dans la région Méditerranéenne, mais un peu moins commune que celle-ci sur les hauteurs du Centre. L'époque de son éclosion varie suivant l'altitude; elle vole aux mois de janvier, de février et de mars, à Biskra et à El-Kantara; en mars, avril et mai sur les Hauts- Plateaux, où sa forme saisonnière Glauce éclôt en mai et en juin; dans les parties les plus élevées de sa distribution, ce n'est souvent que vers la fin du mois de mai que paraît Glauce. L'Espèce affectionne les champs de céréales, le bord des che- mins, les collines plus ou moins arides; les mâles aiment à voler autour des sommets, se tenant sur le côté protégé du vent, si celui-ci est fort. Son vol étant rapide et soutenu, Belemia n'est pas très facile à capturer; elle se pose, parfois, sur les fleurs de Crucifères. 5 66 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Ayant rencontré Belemia en même temps que Crameri et presque partout avec cette dernière, je trouve inutile de citer moi-même les localités. Je n'ai jamais observé une éclosion de cette Espèce dans l' arrière-saison; cependant, si après une période de temps froid, en automne, il revenait une série de jours plus chauds, je considérerais comme possible qu'une troi- sième génération de Belemia se produisît par anticipation sur le véritable printemps. En effet, M. Nissen, Consul général du Danemark à Alger, entomologiste très distingué, a signalé une morphe qui lui paraît tenir à la fois de Belemia et de Crameri et qui est éclose en novembre 191 2, à Guelt-es-Stel, près Boghari, au sud de la pro- vince d'Alger; mais il a été pris jusqu'ici trop peu d'exemplaires pour qu'une définition bien précise de cette Anthocharis puisse être donnée. » Calicharis Nouna, Lucas. Il est fort probable que Nouna se rattache spécifiquement à l'une des nombreuses formes (ou Espèces) de Calicharis {Tera- colus) qui habitent en Afrique et en Arabie, et dont Miss Eniily- Mary Bowdler Sharpe a commencé d'écrire une monographie illustrée. La publication de cet estimable ouvrage est malheureu- sement arrêtée depuis 1902. Lucas a donné dans VExploration scientifiqîie de V Algérie (^Lépidoptères, PI. I), les premières figures de V Anthocharis Nouna, sous les n°^ 2, 2 a, 2 b. J'ai fait moi-même représenter Calicharis Nouna, en couleurs, sous les n°' 555 et 556 de la PI. LX, dans le V Volume (Part. I) des Etudes de Lépid. comparée. De plus, j'ai donné dans le fasci- cule IV bis des mêmes Etudes, quelques photographies de la chenille de Calicharis Nouna sur une feuille de la Capparis Droserifolia (*) qui la nourrit, ainsi que des localités où vit cette (*> Il semble plus exact de désigner la Caffaris avec le nom spécifique de t-pinosa. Voir Flore anal, et synoft. de V Algérie et de la Tunisie, par Battandier et Trabut, Alger, 1902. LÊPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 67 plante dans la région désertique algérienne. De plus, dans le Volume IV des Etudes de Lépid. comparée, aux pages 638-645, j'ai reproduit les renseignements biologiques que je tenais du chasseur Faroult, aussi bien relativement à V Anihocharis Falloui qu'à Calicharïs Nouna. Je ne crois pas devoir les répéter ici. T.a Calicharis Nouna voie quelquefois abondamment à Magroua près El-Outaya, non seulement au printemps, mais en juillet et août, et conformément à la Pieris Daplidice qui donne une forme d'été très claire appelée Albidice, la Nouna présente une morphe estivale très différente de la forme printanière que j'ai d'ailleurs représentée. De son côté, mon ami Charles Blachier nous en a fourni une nouvelle et excellente figuration, sur la planche 20 du Vol. II du Bidletin de la Soc. lépid. de Genève. Les figures n°' 4 et 5, données par M. Blachier, représentent la forme Nouna qui vole au printemps, en avril, dans la région de Biskra, et les fig. 6 et 7 reproduisent celle qui vole en été (juin et juillet), dans le Maroc, entre Marakesh et la chaîne de l'Atlas. M. Charles Blachier appelle Biskicnsis la forme de Biskra (fig. 4 et 5), et réfère à la Nouna, Lucas, type, d'Oranie, la forme du Maroc. Comme le fait remarquer avec raison M. Charles Blachier, les figures qu'il publie de Nouna marocaine sont d'accord avec les fig. 8 et 9 de la PL XIX consacrées par M. E. G. B. Meade-Waldo à la représentation de la même Espèce, dans les Transactions Ent. Soc. London, 1905. Seulement M. E. G. B. Meade-Waldo rapporte à Daira, Klug, la var. Nouna, du Maroc. Voici d'ailleurs la copie du texte imprimé à la page 372 du mémoire intitulé : On a collection of Butterfàes niade in Marocco, in 1900-01-02, by E. G. B. Meade-Waldo (Trans. ent. Soc. London, 1905) : (( 9. — Teracolus Daira, Klug, var. Nouna, Lucas (PI. XIX; fig. 8 cf, 9 Q)- I only saw this species at Agurgur, where it was abundant in a damp wood at an élévation of about 3.500 ft. I saw one torn spécimen near Tsigidir-el-Bor about 30 miles south. Agurgur, June 24th 1901 ; Tsigidir-el-Bor, June 25th 1901 ». 68 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Dans l'explication des figures de la PI. 20 du Bulletin de la Société lépidoptérolog. de Genève, M. Blachier indique pour la fig. 6, comme localité, Imi-Tala, et pour la fig. 7, Agurgur, Maroc, région de l'Atlas, fin juin; coll. Vaucher. C'est donc avec des éléments provenant de la même région que MM. Meade-Waldo, d'une part, et Blachier, d'autre part, se sont trouvés documentés. En ce qui me concerne, je ne possède aucun exemplaire qui ait été capturé au Maroc; mais j'ai reçu un nombre considérable d'échantillons de la variété Biskrensis et j'en ai en ce moment même plus de 500 sous les yeux. Ma collection contient aussi 7 cotypes sans doute capturés par le colonel Levaillant, aux environs d'Oran, on elle fut découverte pendant les mois de juillet et d'avril (Explor. scient. Algérie, Vol. III, p. 351). Je puis, dans ces conditions, me rendre compte de la variation saisonnière de la C alicharis-lsJ ouna-Biskr ensis . La forme qui éclôt en juillet et août a le dessus des ailes d'un blanc très vif; le corps et l'abdomen sont blancs, sans pilosité; la tache aurore ne paraît pas de couleur plus vive qu'au printemps ; mais la bordure noire, en dents de scie, sur le bord terminal à partir de l'apex, est généralement moins prolongée; la frange est blanche, quelquefois rosée. Le dessous des supérieures est blanc et le des- sous des inférieures est d'un jaune très clair; la tache apicale aurore est, en dessous, rétrécie, et moins apparente que dans la génération du printemps ; on aperçoit parfois un point noir, très vif, mais extrêmement petit, sur chaque aile. Enfin la taille est plus petite en été. Dans la forme du printemps, le dessous des ailes inférieures est d'un jaune nuancé de rose-saumon; on aperçoit chez certains individus quelques atomes noirs sur le des- sous des ailes supérieures. En dessus, les ailes inférieures ont le bord marginal marqué de taches triangulaires noires, et quel- quefois — mais plus souvent chez les Q que chez les O* — une ligne noirâtre horizontale, partant de la base des ailes, s'étend assez entière, le long du bord costal des inférieures, et plus interrompue, le long du bord interne des supérieures. Certaines Q montrent aussi sur les inférieures, en dessus, une ligne noire qui LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 69 est brun rouge en dessous, formant un angle presque droit, descendant du bord costal et aboutissant vers le bord anal. Cette ligne est parfois interrompue dans son parcours. La chenille a pour parasite un petit diptère, aux ailes blanches tachetées de gris, qui sort d'un puparium formé en dehors du corps de la chenille. C'est du moins l'opinion que s'est faite M. Harold Powell qui a constaté dans une boîte d'élevage où il nourrissait des chenilles de Calicharis Noima, la présence du petit diptère qu'il a supposé sortir du corps des chenilles de Nouna, sans toutefois en avoir acquis l'absolue certitude. Je fais figurer les diverses formes saisonnières de la Calicharis N ouna-Biskrensis, Blachier, sous les n°^ 2286 à 2296 de la PI. CCLXXXI. Je complète l'histoire biologique de Nouna, en reproduisant ICI les notes que M. Powell a rédigées comme suit : (( C'est en août 191 2 que j'ai rencontré pour la première fois la Calicharis Nouna; nous sommes arrivés à El-Kantara le 24 août, venant de Lambèse, où ni le papillon ni sa plante nourricière n'existent. Le lendemain j'ai pris des papillons et vu des chenilles dans tous les stades, ainsi que quelques chrysalides, sur les plantes accessibles de Capfaris Spïnosa, Lin. Cette plante, à laquelle les indigènes donnent au moins trois noms différents, suivant les localités, mais dont le plus répandu est « Koubar )>, pousse sur les falaises escarpées et sur certains grands blocs de pierre calcaire détachés ; ses touffes, accrochées aux parois à pic ou surplombants, forment des taches d'un vert foncé intense sur le calcaire rougeâtre; elle croît dans des situations semblables à Maafa, à Menaa, à Tazleft, à Tighanimine et dans bien d'autres localités arides et rocheuses de l'Aurès méridional; là où se trouve le câprier, on peut être certain de rencontrer Nouna. La jeune chenille ronge le parenchyme de la feuille qui est glabre et épaisse, sans toutefois la perforer complètement; plus 70 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE âgée, elle découpe la feuille, en s'attaquant aux bords; elle n'est pas très facile à voir, sa couleur se confondant bien avec celle des feuilles, et sa fine pubescence estompant la netteté de son contour; elle montre peu d'activité, se meut lentement et ne s'écarte que rarement des quelques feuilles qui suffisent à la nourrir. Son évolution est rapide, surtout en été; les chenilles prises les 25-28 août se sont toutes chrysalidées avant le 6 sep- tembre; quelques-unes, cependant, n'étaient pas encore arrivées à l'avant-dernier stade quand on les a trouvées; elles se sus- pendent, pour se chrysalider, à la façon des Anthocharis, c'est- à-dire en se fixant par les pattes anales à un petit amas de soie, se maintenant en outre par un fil passant autour du corps et dont les extrémités sont adhérentes au point d'appui, qui est le plus souvent le dessous d'une grosse feuille située près de la base d'une branche. La chrysalide est tantôt vert pâle, tantôt couleur paille plus ou moins pâle, ou bien grisâtre; celles que j'ai trouvées sur les plantes, en août 191 2 et 1913, à El-Kantara et à El-Outaya, étaient vertes ou paille très pâle, mais les chenilles élevées dans des boites, en août et au commencement de sep- tembre, produisirent certaines chrysalides d'une couleur paille grisâtre. Les chenilles trouvées à Tazleit, le 14 octobre 191 2, ont été élevées en boîte; elles se sont transformées entre le 16 et le 31 octobre, en donnant des chrysalides gris jaunâtre, mar- quées de points et stries gris brun. Toutes les chrysalides tant vertes que de couleur paille, trouvées dans la nature, ou obtenues en captivité, aux mois d'août et de septembre 1912-1913, ont donné leurs papillons au bout de 8-15 jours; celles formées vers la fin d'octobre hivernent probablement; en tout cas, c'est ce qui a lieu dans les régions les plus élevées habitées par l'espèce; les quelques chrysalides que je possédais à la fin d'octobre 191 2 sont mortes, les chenilles ayant souffert de manque de nourriture vers la fin de leur existence. Je n'ai jamais trouvé la chrysalide sur le rocher dans le voisinage de la plante. Il y a certainement plus de deux générations par an de Nouna LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE /I dans le sud de l'Aurès ; mais comme elles chevauchent, il n'est pas facile d'être ûxé sur leur nombre; à partir de mai, on peut rencontrer l'Espèce à El-Kantara; elle y est commune en juin, et on continue à la voir voler là jusqu'en septembre, du moins à ma connaissance. Voici d'ailleurs la liste des localités où j'ai trouvé Nouna, avec les dates précises : El-Kantara, papillon du 25 au 28 août 1912; le 22 août 1913; j'ai obtenu en septembre 191 2 l'insecte parfait provenant de chenilles trouvées à la fin d'août. Gorges de Tighanimine, papillon le 10 septembre 191 2. Tazleft, papillon et chenille, le 14 octobre 1912. J'ai capturé ce jour-là une dizaine d'exemplaires, dont six assez frais, ainsi que quatre chenilles. Tazleft, au sud du Djebel-Azreg, est une localité un peu plus élevée qu'El-Kantara. Tahanent, papillon le 10 septembre 191 3. Tahanent est le point le plus septentrional pour Noitna dans la vallée de l'Oued- Fedhala; le papillon volait dans un ravin sec et pierreux, au pied d'une barre rocheuse. El-Outaya, papillon et chenille, le 24 août 191 3, sur une colline escarpée et rocheuse au nord de la Montagne de Sel. Maafa, les 11 et 12 septembre 1913. Le papillon volait dans les superbes gorges naturellement creusées dans le calcaire; il était assez commun et beaucoup d'individus étaient frais; sur les câpriers, on a trouvé, ces mêmes jours, des chenilles de toutes les tailles. Menaa, le 13 septembre 1913; la meilleure localité était à côté de l'entrée de la gorge dite : des 99 sources. Col des Ouled-Sidi-Hamadi, le 15 septembre 191 3; je transcris l'observation faite à la date même, la localité m'ayant paru remarquable pour Nouna. « Nous sommes partis le matin de Chir, en suivant la nouvelle route jusqu'à la hauteur de Nouader, village indigène bâti sur un contrefort de la montagne, de l'autre côté de l'Oued-Abdi. 72 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE De la maison cantonnière, un sentier grimpe sur la montagne à l'ouest de la vallée; mauvais, rempli de pierres et rochers, ce sentier est très fréquenté par les Arabes de Nouader et de Bou- zina, qui peuvent communiquer rapidement par le col; jadis, quand la mine de mercure de Taghit était exploitée, c'est par ce chemin que le métal était transporté à dos de mulet jusqu'à la gare d'Aïn-Touta. Entre le fond de la vallée de l'Oued-Abdi et le col que nous voulions attenidre pour aller ensuite à Bouzina et à Aïn-Berdh, il y a plus d'une barre rocheuse longeant le flanc de la montagne; sur la face des rochers, nous avons remarqué de beaux câpriers, et à leurs bases volaient des C. Nouna; l'exposition est sud-est, par conséquence les rochers sont bien chauffés pendant la journée, mais on est déjà à environ 1.300 mètres d'altitude. Plus haut encore, une falaise sert de rempart à la crête, et le col lui-même est atteint par une large échancrure dans la barre calcaire. J'étais bien surpris de trouver Nouna ici et de constater la présence des câpriers sur la falaise à la hauteur même du Teniet-Ouled-Sidi-Hamadi, c'est-a-dire à 1.568 mètres; le papillon y est à son extrême limite d'altitude, grâce à l'expo- sition favorable; sur le versant nord-oue?t du col il n'y a plus ni câpriers, ni Nouna ». Je n'ai jamais piis l'Espèce dans la Province d'Oran. Je crois me souvenir que Miss Fountame du avoir capturé un seul exem- plaire sur le sommet d'une colline, à l'est de Sebdou, le 27 juin 1903 ». Colias Hyale, Trad. (nec Linné). Je dis que le nom Hyale, pour désigner la Colias à laquelle tous les Entomologistes contemporains attribuent ce nom de Hyale, ressort de la tradition et non de l'Auteur du Systema Naturœ. En effet, voici quelle est la description, en tout cas fort incomplète dans ses termes, de Hyale, par Linné : ce P. D. {Pafilio LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 73 Danans) alis integerrimis rotundatis flavis; posticis macula fulva, subtus puncto sesquialtero argenteo. Faun. Suer. 1040. Habitat in Europa, Africa, America septentrionali. » Il est évident que Linné ne faisant d'une part nulle mention de la bordure noire des ailes chez H y aie, commet d'autre part une confusion en attribuant, en outre de l'Europe et de l'Afrique, l'Amérique septentrionale pour patrie à Hyale; car jamais Hyale n'a été rencontrée dans le Nouveau-Monde. Mais il y a plus ; Linné donne une série de citations synonymiques. J'en retiens une que je copie textuellement comme suit : (c Rocs. ins. 3. t. 46. f. 4, 5 ». J'ouvre donc le volume III de l'ouvrage de Roesel von Rosenhof et, sous les n°^ 4 et 5 de la Tab. XLVI du volume III, avec le titre de Classis II PafïLionum Diurnontm, que vois-je ? la figuration excellente, en dessus et en dessous, de Colias- Edusa Q. Tout le monde peut très aisément faire la même constatation. Linné a confondu probablement plusieurs Espèces de Colias en une seule et il a désigné par un même et unique nom des Espèces différentes. Ce n'est pas la première fois que pareille erreur est commise par Linné. Cependant, de tous ces malentendus, de ces observations trop légèrement rapportées, quel trouble à la base de la Nomenclature ! Je sais bien que dans Révision, of the Linnean types of palœarctic Rhofalocera, le docteur Roger Verity dit avoir trouvé dans la collection linnéenne 2 o' et i Q de Culias Hyale « which ail hâve the look of Linnean spécimens and seem to be of the summer brood ». Cette remarque a une valeur incontestable et je tiens l'assertion du docteur Verity comme parfaitement exacte; mais j'estime que le nom de Hyale, avec l'attribution que nous en faisons encore actuellement, est plutôt un nom de tradition qu'un nom linnéen. J'ai cru devoir remonter aux sources parce que ce genre de recherches est très rarement pratiqué. Chaque auteur semble se borner à copier la synonymie présentée par un auteur précédent; il l'accepte avec confiance comme étant exactement établie, sans se rendre compte que, depuis bien longtemps, on a 74 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE perdu l'habitude de contrôler les renseignements synonymiques imprimés dans les ouvrages lépidoptérologiques. J'ai connu des Entomologistes dits : de premier ordre par l'importance des collections qu'ils ont formées; ils n'ont jamais essayé de déter- miner au moyen des livres, aucun papillon de leur collection fai- sant partie de la faune européenne; ils réservaient pour la déter- mination des exotiques, leurs investigations bibliographiques. Le Gênera & Index mcthodïciis publié en 1840 par le docteur Boisduval, leur a amplement suffi jusqu'au moment où la pre- mière édition du Catalog par Staudinger, en 1861, a préparé l'abandon du Gênera. Ces excellents collectionneurs ont reporté sur les éditions successives du Catalog, la même aveugle confiance dont ils ne se sont jamais départis envers le Gênera, tant que ce livre est resté seul leur guide pour le rangement méthodique des papillons. En 1844 parut le Catalogue, par Duponchel; mais la faveur resta attachée au Gênera, par Boisduval, et le Catalogue, par Duponchel, n'eut aucun succès. Combien de fois me suis-je rencontré avec d'anciens amateurs, chez le docteur Boisduval ! Ils apportaient une boîte contenant les lépidoptères le plus souvent capturés par eux-mêmes au cours de leurs excursions entomologiques; il s'agissait d'en connaître les noms. Le docteur Boisduval ouvrait libéralement ses tiroirs et donnait au besoin son avis. Alors la besogne était accomplie et les déterminations ainsi obtenues devenaient intangibles dans l'esprit de l'heureux propriétaire de telle ou telle rareté. Achille Guenée, vivant à la campagne, muni d'une bibliotiièque assez importante, aimant à étudier et à écrire, faisait exception à la mentalité générale des Entomologistes d'autrefois. Mais dans les souvenirs que je ressuscite, il me revient que les contemporains de Guenée le considéraient comme une sorte d'archiviste ayant du temps à perdre. Mes vieux amis étaient surtout d'infatigables chasseurs et des collectionneurs passionnés. Au contraire, Guenée fut plutôt un Entomologiste de cabinet; il aimait à écrire, et je possède des volumes de manuscrits tracés LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 75 en caractères presque microscopiques et qui ont servi de base pour le Species Général, ou bien qui étaient destinés à lui pré- parer un supplément. Malheureusement Guenée, au point de vue des documents lépidoptériques, était insuffisamment pourvu. Il eût fallu engager des dépenses qui répugnaient à son caractère particulièrement économe; aussi l'insuffisance dans la quantité des papillons que Guenée eut à sa disposition fut la cause que ce remarquable savant travailla trop souvent dans le vide. Chacun ici-bas a ses qualités et ses défauts. Cependant revenons à l'Espèce que nous avons coutume d'ap- peler Colias Hyale. Elle paraît très rare en Algérie. J'en possède seulement deux exemplaires pris à Beni-Ounif par M. le lieu- tenant Bacqué. Feu le D"" Seriziat a prétendu qu'il avait trouvé la Colias Hyale à Collo. Gaston Allard en avait capturé un ou deux exemplaires à El-Haçaïba. Il n'en est pas moins vrai que la Colias Hyale est en Algérie extrêmement rare. Colias Croceus, Fourcroy {Edusa, Fabr. et c^eteri auctores). Un des papillons les plus communs en Barbarie. Ma collection contient des exemplaires pris à Tanger, en juin 1880; à Biskra, en mai 1884 et 1885, en janvier et février 1910; à Lambèse, en juin 1884 et en mai 1912; à Sebdou, en juin et août 1907; à Bône, en juin 1884; à Yakouren, en juillet et août 1907; à El- Kantara, en mai 1908; à Khenchela, en mai et juin 1908; mais j'ai reçu des exemplaires de la Colias Croceus {Edusa) de beau- coup d'autres localités. On peut dire que l'Espèce est répandue dans toute la Barbarie. Le cf varie beaucoup pour la taille et l'intensité de la colo- ration orangée du fond des ailes. Certains exemplaires sont d'un jaune assez pâle, tandis que d'autres — et c'est le plus grand nombre — sont d'un jaune orangé très vif; je possède un cT pris à Khenchela, en juin 1908, qui est d'un jaune extraordinairement pâle. La bordure noire est, selon les individus, plus ou moins 76 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE large; elle est traversée par des traits nervuraux très fins, jau- nâtres, et sablée d'une poussière jaune; mais cette poussière semble fugace et disparaît dès que le papillon a un peu voltigé. Chez certains individus, la bordure noire des ailes est d'un brun pâle et par conséquent légèrement albinisante. Il y a deux races de Q : celle à fond des ailes jaune comme le cf, et qui est la plus abondante, et celle à fond des ailes blanc; celle-ci est connue sous le nom de Hélice, Huebner. Le passage entre Edusa Q type à fond des ailes jaune, et Hélice Q, à fond des ailes blanc, se rencontre assez rarement; je l'ai désigné par le nom de Helicina. Dans la plupart des cas, les taches jaunes qu'on remarque chez la Q, au milieu de la bordure noire des ailes, sont plus pâles que la teinte du fond, c'est-à-dire d'un jaune primevère, lorsque le fond des ailes est d'un jaune orangé vif. La tache orbiculaire médiane des ailes inférieures en dessus est, chez la variété Hélice, tantôt d'un rouge orangé, tantôt d'un blanc légèrement rosé. D'ailleurs, toutes les transitions se remarquent entre la cou- leur rouge orange et la teinte blanc carné de cette tache orbicu- laire. Je possède des Q Hélice algériennes dont le fond des ailes est d'un blanc verdâtre; c'est une forme un peu spéciale, mais à laquelle il me semblerait abusif de donner un nom. I^es Ç) varient comme les cf pour la taille et pour la largeur de la bordure noire des ailes, en dessus. Il y a aussi des Q qui, sans pouvoir être classées parmi les Helicina, sont d'un jaune beaucoup plus pâle que les exemplaires jaunes normaux. Ainsi que je l'ai dit plus haut, ce même mode de variation se remarque chez les cf- La Colias Croceus {Edusa) est une Espèce migratrice. J'ai donné de longs détails sur son histoire aux pages 167-176 du Volume m des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Roger Verity, dans Rhop. palœarctica, a désigné (p. 268) sous le nom de Deserticola, (( une race qui vole dans les régions arides et qui se distingue par l'exiguité de sa taille et ses teintes pâles, surtout chez le cf qui est presque jaune ». Je possède plusieurs cT de Biskra, référables à Deserticola. Mais ces Croceus-Deseriicola LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 77 s'observent voltigeant avec des exemplaires plus grands et plus vivement colorés. A mon sens, ils ne constituent pas une race; ce sont des échantillons plus petits et plus pâles éclosant en même temps que d'autres plus grands et d'une teinte orangée plus vive; ils sont individuellement l'expression d'une variation qu'on peut rencontrer ailleurs que dans le Sahara algérien. Edusa, dans la Mythologie, était la déesse protectrice des enfants ; on lui faisait des offrandes lorsqu'on les sevrait et lorsqu'on commençait à leur faire prendre une nourriture solide. M. Harold Powell a observé que les Q de Colias Croceus {Edusà) pondaient en Algérie sur des plantes très variées, mais appartenant toutes à la famille des Légumineuses. Je cite, d'après les renseignements qu'il veut bien me donner, les indi- cations suivantes : (-- Colutea arborescens, Lin. ; Medicago saliva, Lin.; Lotus species ? Astragalus species ? Ac.anthyllis tragacan- ihoides, Pomel ; A. numidica, Pomel ; AnthylUs tetraphylla, Lin. Gonepteryx Rhamni, Linné. Il y a en Barbarie deux morphes : i" celle que Rober a appelée meridionalis, et dont Roger Verity, dans Rhop. palœarctica, figure sous le n° 40 de la PI. XLVII, un (j pris dans le Djurjura, en juillet 1884, et que je lui avais communiqué. A la page 283 de son bel ouvrage, Verity fait ressortir comme suit les caractères de meridionalis : h Envergure : 65-70 mm. Ainsi, de beaucoup supérieure à celle du vrai Rhanini; coupe des ailes exactement semblable à celle de G. farinosa, c'est-à-dire qu'elles sont moins élancées que chez le type, et les postérieures présentent généra- lement une série de dentelures très marquées ; le revers est du reste aussi variable par la teinte que celui du type; la Q, sur les deux surfaces, se rapproche de celle de farinosa ». 2'' la morphe plus petite, tout à fait analogue, pour la taille, à celle de l'Europe centrale. Je possède une paire de cette petite 78 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Rhamni, prise à Alger par feu le lieutenant Mathieu, et dont l'expansion des ailes est à peine égale à celle des exemplaires ordinaires provenant de Croydon ou de New-Forest, en Angle- terre. Par contre, j'ai reçu des exemplaires très grands pris à Tunis. Quant à ceux capturés à Yakouren, en juin et juillet 1909, ils sont de taille très inégale, les uns très grands, les autres moyens. Donc, si l'on veut disserter avec exactitude sur un sujet, si peu important soit-il, une documentation assez considérable s'impose; autrement on courrait risque de prendre une exception pour la règle et on généraliserait à tort un caractère qui, dans le cas de Rhamni, reste à peu près individuel. Je transcris comme suit les observations dont M. Harold Powell me fait part : « Rhamni est une Espèce de la côte et des chaînes boisées du versant méditerranéen ; je crois qu'on peut dire avec vérité qu'elle n'existe ni sur les Hauts-Plateaux, ni dans les montagnes limi- tant ces plaines au sud; je ne l'y ai jamais rencontrée, pas plus, d'ailleurs, qu'à Sebdou ou a Tiaret. Dans la vallée du Pont-Romain, près de Philippeville, le 10 mai 191 3, j'ai pris un seul cf de la grande forme Meridionalis ; il était en bien mauvais état. La végétation sur ces collines de la côte est plus dense que celle qui recouvre les hauteurs centrales et en diffère très sensiblement; à l'endroit où Rhamni a été pris, poussait un véritable maquis; j'ai remarc[ué de très beaux sujets de Rhamnus alaternus, dans la broussaille; il est probable que cet arbuste nourrit la chenille de Rhamni, en même temps que celle de G. Cleopatra, espèce commune à Philippeville )>. Gonepteryx Cleopatra, Linné. Répandue en Barbarie, dans le bassin méditerranéen; mais n'a pas été observée dans la région désertique. Cleopatra est exceptionnellement fertile en hermaphrodites. Ma collection contient actuellement quinze échantillons atteints LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 79 d'hermaphroditisme, dont cinq proviennent de Barbarie; trois furent capturés à Khenchela, en juin 1908 et juin 191 1 ; un autre à Yakouren, en juin 1909, et un à l'unis, le 2 juin 1908. Aucun de ces hermaphrodites que je possède ne présente une séparation régulière des caractères distinctifs du cf et de la Q, c'est-à-dire une paire d'ailes avec la livrée entière de l'un des sexes, et l'autre paire avec la livrée entière inverse; mais on voit sur un fond blanc verdâtre, couleur de la Q, les parties jaune et orangée du cf inégalement et asymétriquement réparties. L'effet de cette dis- persion inégale des couleurs vives du cf est du reste très agréable. A Sebdou, en juin 1900, M. H. Powell a pris quelques cf appartenant presque à la var. taiinca, Stgr., caractérisée par la teinte pâle et l'étendue réduite de la tache orangée des supé- rieures. Dans le Djebel Aurès et en Tunisie, la teinte de la tache orangée, chez les Cleo pat r a cf, paraît un peu plus vive qu'à Sebdou; mais elle est très généralement loin d'atteindre l'éclat de la Cleo-patra du Languedoc. En conséquence, je crois qu'on peut dire de la Cleopatra algérienne qu'elle constitue, dans l'en- semble des individus qui la composent, une race très voisine de Taitrica et qui pourrait lui être rattachée. Les notes prises par M. Harold Powell permettent de com- pléter la notice concernant Goiiepleryx Cleopatra par les renseignements suivants : « Cleopatra s'est montrée en abondance à Sebdou (Oran) à partir des premiers jours de juin 1907; elle volait sur les collines boisées de chênes verts et dans les vallées moins arides ; mais sa meilleure localité était un champ inculte, à moitié recouvert de grands chardons ; ce champ se trouvait près de l'oued, au sud-ouest du village; on pouvait prendre chaque matin, sur les fleurs du chardon, des quantités de Cleopatra, toutes fraîches, non seulement dans le champ, mais aussi au bord de l'oued. En mai, nous n'avons pris que des sujets ayant hiverné, tous défraî- chis. L'Espèce a continué à se montrer abondante en juillet, mais je ne l'ai pas signalée dans mes notes au mois d'août. 80 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Nous l'avons prise assez abondamment à Khenchela, au mois de juin 190S, surtout dans la forêt, vers Fontaine-Chaude; ici encore, Cleopatra se plaît à butiner sur les fleurs des grands chardons, qui abondent dans les enclaves ou clairières de la forêt. Dans le Djebel-Amour, l'Espèce est bien moins abondante qu'elle ne l'est à Sebdou et dans l'Aurès; je l'ai prise plusieurs fois, cependant, sur le Djebel-Ksel, près Géry ville, vers la fin du mois de juin et en juillet 1910, ainsi qu'en juillet 191 1 à Aflou, 011 elle volait sur le Djebel-Sidi Okba, principalement du côté exposé au nord-ouest. Le Rhammis alaternits, Lin., sa plante nourricière, est rare dans le massif du Djebel-Amour; sur le Ksel, en 1910, j'ai bien trouvé quelques maigres buissons presque dépourvus de feuilles, mais sur le Sidi-Okba, les recherches que j'ai faites n'ont pas été couronnées de succès ; néanmoins, la plante existe dans les bois de cette montagne; j'en ai eu la preuve en rencontrant un jour un Arabe qui en rapportait une branche; il me dit qu'il allait s'en servir comme médicament et nomma la plante « Safeira », ainsi que cela se trouve déjà relaté à propos des Lycœna Bœlica et lolas, à la page 92 du Volume V, Part. Il, des Etudes de Lépid opter ologie comparée. La chenille de Cleopatra vit très probablement aussi sur le Rhaninus rnyrtifolia, Willk., qui se rencontre sur les rochers des montagnes élevées; je crois avoir reconnu ce Nerprun sur le Djebel-Bouderga, près de Géryville. Cleopatra n'est pas rare, en juin et en juillet, dans la partie boisée de la région de Lambèse; nous l'avons prise dans la forêt vers Boursalah ; dans la vallée de Bel-Achir, où le brigadier des Eaux et Forêts, M. Karr, l'a trouvée en assez grande abondance; à Baïou; à Sgag; sur le Djebel-Gueddelane, où j'ai remarqué une Q volant autour des petits Aunes poussant dans les fentes des rochers de la crête; j'ai observé cette Q pendant un bon quart d'heure; elle voltigeait près des Aunes et se posait de temps en temps sur les feuilles des branches basses, comme si LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE elle allait pondre; je l'ai vu visiter une demi-douzaine de ces arbustes, mais elle n'a pas pondu ; la couleur des feuilles de l'Aune la trompait sans doute; elle croyait avoir affaire à un Rhamnns, et ce n'est qu'après s'être posée chaque fois sur la plante qu'elle s'apercevait de son erreur; je n'ai pas vu de Rhamnus dans le voisinage; l'altitude à ce point de la crête est d'environ 2.000 mètres; c'était le 7 juillet 1913. J'ai trouvé la chenille à deux occasions dans le ravin au-dessus de Lambèse, une première fois le 15 mai et ensuite le 10 juin 1912; elles se trouvaient sur des petits pieds de R. alaternus poussant à côté des rochers, et elles mangeaient, exposées à un fort soleil matinal, les feuilles tendres des branches basses. On ne trouve que 3 ou 4 chenilles sur un même Rhamnus, et elles ne sont pas faciles à voir. L,a croissance est rapide; celles prises le 15 mai, dans les troisième et quatrième stades, se sont respecti- vement chrysalidées les 29 mai, 3 et 6 juin. L'éclosion a lieu au bout de 20 jours environ, plus tôt, probablement, dans les endroits bien chauds. Je n'ai pas connaissance d'une deuxième éclosion, même partielle, dans les régions élevées de l'Algérie. » Charaxes Jasius, Lmné. (< Habitat in Africa, pra^sertmi Barbaria », dit Linné. On lit dans le Volume III des Etudes de Lépidoplérologie comparée (p. 179) que (( le Charaxes Jasius se trouve en Algérie, mais que je n'ai encore jamais vu d'exemplaire authentique de cette pro- venance )). La situation a changé en ce sens que j'ai reçu une seule Q prise à Aïn-Draham, en Kroumirie, par Faroult. Mais je n'ai pas vu d'autre exemplaire de cette magnifique Espèce authentique- ment pris en Barbarie. La Q d 'Aïn-Draham est de grande taille. Linné avait emprunté le nom Jasius à l'histoire ancienne. Jasius fut le nom d'un roi d'Arcadie et aussi d'un roi du Latium. 82 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE En Algérie, on n'a pas trouvé d' Apatura, ni de Limenitis, ni de Neplis. Jusqu'ici on y a constaté l'existence des Vanessa Atalanta, Car dut, Polychloros, C. Album et Egea; mais les vul- gaires papillons d'Europe, Vanessa In, Antiopa, Urticœ, les Araschnia Levana semblent manquer dans le nord de l'Afrique. Il en est de même de beaucoup de nos Argynnis européennes. Seules, jusqu'ici, les Argynnis Pandora, Paphia, Aîiresiana et Lathonia ont été observées en Barbarie. Je dois cependant faire connaître l'observation suivante dont je suis redevable à M. Harold Powell. Cette observation concerne la Vanessa Urticœ, et voici en quels termes M. Powell a rédigé la note que je transcris : (( Près de Philippeville, le lo mai 1913, j'ai vu un papillon que je regrette beaucoup de n'avoir pu capturer. Il volait avec quelques Vanessa Cardui, dans un maigre champ d'artichauts. Il m'a semblé que c'était un exemplaire très frais de VaJiessa Vrticœ. En effet, par sa taille et son vol, il res- semblait bien à Urticœ; même, il m'a paru que sa couleur était analogue à celle de la morphe corse Ichnusa. Nous avons pu le voir pendant trois minutes environ, Chierotti (*) et moi, et il a passé entre nous deux, sans que nous ayons pu le saisir. Je dois cependant ajouter que je n'ai pas vu le papillon en question posé; il a constamment voltigé devant nous. Je crois pouvoir affirmer que ce n'était pas Erylhronielas ». Vanessa Atalanta, Linné. Paraît rare en Algérie; je possède quelques exemplaires 6.' Atalanta provenant d'Alger, de Philippeville et de Lambèse. M. Powell l'a observée à Géryville. (*) Stefano Chierotti avait été amené par M. Powell, d'Hyères en Algérie, d'abord en 1912, puis en 1913, pour aider à l'exploration entomologique dont M. Powell s'était chargé. Chierotti n'avait pas tardé à rendre, comme chasseur, de très bons services. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 83 Le nom d'Alalante prend son origine dans la Fable. Il y avait plusieurs Atalantes ; d'abord Atalanie, fiiile de Jasius, roi d'Ar- cadie, et de Climène; c'est cette Atalante-là qui porta le premier coup au sanglier de Calydon; par cette action hardie, elle mérita l'amour de Méléagre qui lui remit les dépouilles du sanglier. Elle eut un fils nommé Parthénope. Une autre Atalanie — celle sans doute à laquelle pensait Linné, lorsqu'il donna ce nom au superbe papillon qui anime si agréablement nos jardins à la fin de l'été. — était fille de Schénée, roi de .Scyros; cette Atalante fut passionnée pour la chasse; elle ne quittait plus les campagnes et les bois; elle devint si légère à la course qu'il était impossible aux hommes les plus ggiles de l'atteindre. Atalante était d'ail- leurs fort belle et avait, à cause de cela, beaucoup d'amoureux; elle leur déclara, d'accord avec son père, qu'elle ne donnerait sa main qu'à celui qui arriverait au but avant elle. Ce fut Hippo- mène qui obtint cet avantage, grâce à 3 pommes d'or cueillies dans le jardin des Hespérides et que lui avait données Vénus. Il laissa tomber ses pommes. Atalante les ramassa, se laissa ainsi devancer et devint le fruit de la victoire d'Hippomène. Plus tard les deux époux, pour avoir offensé Vénus, furent changés en lions. Vanessa Cardui, Linné. Quelquefois très commune en Barbarie, aussi bien dans la région désertique que sur le revers méditerranéen. Je possède une série d'exemplaires algériens et tunisiens provenant de Lambèse (juin 1884), de Biskra (mai 1885), de Bou-Saada (mai 1875), de Sebdou, d'Omach (mai 1885), d'Aïn-Draham ; en outre, j'en ai reçu de plusieurs autres localités algériennes; mais, comme il ne semblait pas qu'il y eût de variations notables parmi toutes ces Vanessa Cardui, faute de temps, je n'ai pas pris soin de leur faire étaler les ailes. Je possède une seule variation algérienne de Cardui; c'est une Q de Biskra, assez pâle, avec les dessins effacés, surtout aux 84 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ailes inférieures, en dessous. C'est une transition vers l'Ab. Elymi, Rambur, dont ma collection contient plusieurs spécimens bien caractérisés; cependant aucun de ces Elymi n'a été capturé en Algérie. Je fais figurer dans le présent ouvrage le spécimen aberrant capturé à Biskra, en mai 1885. M. Harold Powell me communique les observations qu'il a faites au sujet de la V ânes sa Cardui. Elles sont rapportées comme suit : (( Le papillon était particulièrement abondant dans la province d'Oran en 1907; je l'ai rencontré d'abord au mois de mai, à Misserghin, près d'Oran; la chenille était commune sur les char- dons dans cette localité; à Tlemcen, également, Cardin se trouvait en bon nombre, mais à Sebdou, où je suis arrivé le Q mai, c'était par milliers qu'on les voyait voler, dans la plaine, sur les collines, enfin partout ; leur nombre me parut augmenter journellement ; ils nous gênaient beaucoup dans la chasse aux autres papillons, qui se confondaient dans la foule des Cardui; il était surtout difficile de ne pas perdre de vue les Cigaritis; aussitôt qu'un de ces petits papillons, généralement posés sur le sol, se levait à notre approche, il était immédiatement entouré de Cardui; dans le cas des Lycènes, l'intervention des Cardui était moins gênante, car on les distinguait mieux que les Cigaritis au milieu des Vanesses. J'ai noté, le 1 1 juin, un grand nombre de chenilles sur les chardons; en certains endroits, elles avaient complètement dévoré toutes ces plantes et on en voyait de toutes les tailles errer à la recherche de leur nourriture; il y en avait encore énormément, le 15 juin. Tous les Cardui du mois de mai étaient défraîchis, il y avait longtemps qu'ils volaient, et je crois qu'ils n'étaient pas nés dans les localités oii nous les trouvions; l'augmentation progressive du nombre de papillons usés par le vol semble indiquer une migration; mais d'où venaient-ils? Les Q ont pondu et les chenilles qui ont réussi à trouver une LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 85 nourriture suffisante ont donné une éclosion fort abondante dans le courant du mois de juin; à partir du 15 juin, les Cardui, nés sur place et d'une fraîcheur irréprochable, volaient par milliers à Sebdou; leurs habitudes n'étaient pas celles de leurs parents du mois de mai ; au lieu de se poser par terre, de se disputer ensemble et avec d'autres espèces, et de se montrer indifférents envers les fleurs, les individus de cette nouvelle génération se préoccupaient surtout de leur alimentation ; ils montraient une préférence pour les fleurs de chardon, sur lesquelles on pouvait les voir chaque jour en grand nombre, côte à côte avec Gonepieryx Cleopaira, Argynnis Pandora et, bien plus rarement, Satyrus Prieuri. Mais les Cardui de cette génération n'ont pas tardé à disparaître, ou à peu près; voici un extrait de mon carnet de notes : ce 17 juillet 1907... Les quantités énormes de Vanessa Cardîii qui sont éclos ici au mois de juin ont disparu depuis longtemps; on ne voit maintenant que des exemplaires isolés; mon opmion est que ces papillons sont partis vers le nord ; leur grande abondance a cessé presque subitement, et il n'est pas possible d'admettre que tous ces papillons récemment éclos et pleins de vigueur soient morts; ils sont partis; peut-être iront-ils continuer leur existence en Europe; il me paraît qu'il n'y aurait rien d'impossible en cela ». Pendant les voyages que j'ai faits depuis cette époque, j'ai partout retrouvé Cardin; cependant jamais en si grand nombre qu'à Sebdou en 1907. Dans le sud de l'Aurès, en octobre 191 2, l'Espèce était assez abondante et en mauvais état; le 14 octobre, dans une cuvette aride entourée de falaises terreuses, tout près de l'oasis de M'chounech, nous avons vu des quantités de che- nilles de Cardui, d'une morphe assez foncée, vivant de leur mieux sur de toutes petites Mauves, ras de terre ; leur nourriture leur était disputée par un troupeau de chèvres, broutant sur le même terrain ; ces chenilles devaient donner lieu à une éclosion à la fin d'octobre et en novembre; je me suis demandé si les papillons nés en automne dans ces régions désertiques du sud n'allaient pas se répandre sur les Hauts-Plateaux, au printemps. 86 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE pour produire la génération de juin, qui continuerait le voyage vers les pays du nord? » Vanessa Polychloros, Linné, et var. Erythromelas, Austaut. En Algérie et en Tunisie, la plupart des exemplaires de Polychloros appartiennent à la var. Erythromelas dont j'ai fait ûgurer un exemplaire sous le n^ 12 de la PI. XI, dans le Vol. III des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Cette variété Ery- thromelas est remarquable par la couleur fauve très chaude et très vive de ses ailes, en dessus. Ma collection contient des Erythromelas recueillis à Tlemcen, Sebdou, Khenchela, Lambèse, Djurjura, Aïn-Draham; j'y vois aussi des exemplaires moins caractérisés, assez semblables à ceux qu'on observe ordinairement en Sicile et en Corse et qu'on ne peut pas rapporter à Erythromelas. Ils font la transition entre cette variété et la forme normale de la France centrale et de l'Angleterre. M. Harold Powell, qui a élevé la chenille de Polychloros- Erythromelas en Algérie, me communique les observations dont il a eu soin de prendre note sur place. Voici le texte même, tel que M. Powell l'a écrit : (( Les chenilles, pareilles à celles de Polychloros, sont souvent très abondantes, en mai et dans la première quinzaine de juin, sur les ormeaux et les micocouliers plantés en bordure des routes; elles peuvent même complètement défolier certains jeunes arbres, ainsi que j'ai pu le constater à Sebdou en mai 1907, à Lambèse et à Batna en mai et juin 1912 et 1913; dans ces deux dernières localités, les routes sont bordées d'un mélange de micocouliers, ormeaux, ailanthes, acacias et quelques peupliers; il était difficile de trouver un micocoulier ou un ormeau exempt de chenilles à.' Erythromelas; chaque arbre portait un ou deux paquets de ces larves voraces, et les dégâts faits étaient très apparents; au moment oh. les chenilles descendaient des arbres pour aller se suspendre sous les corniches, contre les murs, etc., LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 87 les routes en étaient presque couvertes (c'est le matin qu'elles se mettent en marche à la recherche d'un endroit pour se chrysa- lider). Erythromelas vit aussi sur le cerisier et le poirier; dans les ravins et le long des ruisseaux, la chenille se rencontre très souvent sur le Salix pedicellata, Desf., et le Salix cinerea, Lin.; on ne la trouve que rarement sur les autres Espèces de saule; je ne l'ai vue qu'une seule fois sur un peuplier; c'était à Lambèse. En juin 1908, plusieurs chrysalides ont été découvertes sur les branches et le tronc d'un ormeau, à Fontaine-Chaude, près de Khenchela. L'éclosion du papillon a lieu en juin; il ne vole pas beaucoup en été, mais se répand un peu partout sur les montagnes et dans les vallées, se réfugiant dans les arbres ; je l'ai aperçu quelquefois en automne. Ainsi que cela se passe pour la morphe d'Europe, Erythro- melas est très sujet au parasitisme; la majorité des chrysalides trouvées sur les murs, etc., fournit des quantités de petits Hymé- noptères, vers la fin juin et en juillet; d'ailleurs, en suivant un mur, sur lequel se trouvent bon nombre de chenilles suspendues et de chrysalides fraîchement formées, on peut quelquefois voir un ou deux de ces parasites sur chacune d'elles, occupés à les piquer; cette opération de ponte par l'hyménoptère se fait avant le durcissement de la chrysalide. La chenille est souvent parasitée par un Diptère, dont la larve sort de la chrysalide, un peu avant l'époque d'éclosion du papillon, et tombe par terre; un ûl pend de la chrysalide, ainsi abandonnée, qui ne tarde pas à se des- sécher. Erythromelas est très rare dans le Djebel- Amour; nous avons vu quelques exemplaires, en juillet 1910, sur le Ksel, à une ving- taine de kilomètres à l'est de Géryville. Le Salix pedicellata pousse dans certains ravins frais du côté nord de ces montagnes, et c'est sans doute sur cet arbuste que la chenille vit, dans la région. Aucune trace de la chenille de Erythromelas n'a été trouvée sur les ormeaux et micocouliers plantés à Géryville et à Aflou ». 88 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Vanessa C Album, Linné. Je possède quatre exemplaires algériens pris à Bône (juin 1884), au Djurjura (juillet 1884), à Alger et à Lambèse. Ces quatre échantillons (3 cf et i Q) ne diffèrent pas du type ordi- naire européen. En dessous, ils sont, tous les quatre, d'une teinte brune assez claire. Faroult m'envoya jadis cinq exemplaires qu'il dit avoir cap- turés a Aïn-Draham, en Kroumirie. Ces Va7tessa C Album ne diffèrent pas des individus d'Algérie et d'Europe. M. Harold Powell m'a transmis la note suivante : (( Une chenille de C. Album a été trouvée par moi, en juin 1908, sur un ormeau, près de la ferme de Fontaine-Chaude, à 6 kilo- mètres à l'ouest de Khenchela; une chrysalide a été prise, en même temps, sur une branche de l'arbre. Malheureusement la chenille et la chrysalide ont péri. L'Espèce est rare dans le Djebel-Aurès, où elle ne se trouve que dans la partie bien boisée du nord; en 191 2 et en 191 3, nous avons aperçu le papillon deux ou trois fois seulement, aux envi- rons de Lambèse; M. Karr a pris un exemplaire dans la vallée de Bei-Achir, à la fin de juin 191 3 )>. Vanessa Egea, Cramer. L'Espèce a été prise à Alger. Je possède une Q, semblable à la forme des Alpes-Maritimes, envoyée de Ain-Draham par Faroult. Argynnis Pandora, Esper. Très répandue en Algérie et en Kroumirie; elle vole en juin; la forme est superbe en Barbarie; elle a été distinguée par le nom de Seitzï, Fruhstorfer. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 89 Dans l'ouvrage populaire publié sous le titre de Die Gross- Schmetterlïnge der Erde, par le Prof. D"" Adalbert Seitz, la morphe Seitzï est figurée sur la PI. 71, d'après des exemplaires que Seitz lui-même a recueillis dans le Djebel-Aurès. « Ils sont plus grands que les européens, en dessous d'un vert plus clair, en dessus plus obscurs et d'un jaune verdâtre; le dessin noir est plus fortement marqué; il semble plus riche et quelquefois tend à la confluence ». Je possède un nombre considérable d'exemplaires de V Ar- gynnis Pandora-Seitzi venant des environs de Lambèse, Sebdou, Magenta, Yakouren, des montagnes du Djurjura et de Aïn- Draham, où ils volent en juin. Il y a des exemplaires très grands et vraiment superbes; d'autres de taille un peu moindre. Je n'ai jamais vu d'aberration notable prise en Barbarie, parmi les cen- taines d'individus qui ont passé sous mes yeux. Argynnis Paphia, Linné. J'ai décrit dans le Bulletin de La Société entoniologique de France, 1908, aux pages 26 et 27, la forme algérienne Dives, dont les deux sexes se trouvent figurés sous les 11°'' 10 et ii de la PI. XI, dans le Vol. III des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Ces Argynnis Paphia-Dives, et non Diva, ainsi qu'il est imprimé, par erreur, dans l'édition allemande de l'ouvrage de Seitz cité plus haut, proviennent de Yakouren. Voici en quels termes je décris la variété Dives : « Le cf est caractérisé, en dessus, par la teinte plus chaude et plus orangée de ses ailes; en dessous, les ailes inférieures sont très variables. Tantôt le fond est doré, sans les bandes d'argent dont la couleur paraît éteinte, mais dont le dessin reste très apparent; tantôt, au contraire, les bandes d'argent sont très brillantes avec un léger reflet rose. Il existe des exemplaires de transition entre les deux formes. La forme à bandes d'argent est beaucoup plus rare que l'autre. QO LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE La Ç) est, en dessus, d'une teinte fauve un peu obscure, mais très chaude. En dessous, le fond de ses ailes inférieures est or pâle, avec les dessins ordinaires vert doré. La variété Dives ne peut être confondue avec la variété hnmaailata (de Corse, de Provence, de Castille), dont les ailes, en dessus, ne sont pas aussi vivement colorées en fauve orangé, et dont les ailes inférieures, en dessous, ont le fond beaucoup plus uni. Chez Dives, tous les dessins du dessous des ailes infé- rieures sont bien écrits sur un fond or pâle que je n'ai encore vu chez les Pa-phia d'aucune autre localité ». En outre de la Kabylie, V Argynnis Paphia-Dives habite le Djebel-Aurès oi^i elle vole abondamment en juin. La variété Dives est une magnifique forme de Paphia. Avec la superbe variété Argyrorrhytes, Alphéraky, du Caucase septen- trional, l'algérienne Dives est bien certainement la plus riche expression jusqu'ici connue de Paphia. M. Harold Powell a relevé sur ses notes les indications sui- vantes relatives à V Argynnis Paphia-Dives : (( C'est dans les vallées et ravins les mieux boisés et dans certaines clairières gazonnées et parsemées de chardons fleuris que vole Paphia-Dives ; le papillon aime bien à se reposer, à l'ombre, sur les branches et les feuilles du chêne vert; il se plaît aussi à butiner sur les chardons et les fleurs de ronce; son vol est beaucoup plus imposant, moins pressé et affairé, que celui de A. Aitresiana, qui se trouve souvent dans les mêmes lieux. Nous avons pris Dives à Eontaine-Chaude, près Khenchela, au commencement de juillet 1908, sur les ronces fleuries qui bor- daient la forêt; ensuite, en 1912 et 1913, dans plusieurs localités forestières aux environs de Lambèse. L'Espèce n'est nulle part plus commune que dans la vallée de Bel-Achir, à une dizaine de kilomètres de Lambèse; cette vallée, qui descend des hauteurs gazonnées du Ras-er-Rih, en suivant une direction nord-nord-est, se développe sur environ huit kilomètres de longueur; sauf dans la partie la plus élevée, elle est très boisée ; la forêt de Bel-Achir LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE QI n'a jamais été exploitée; elle est actuellement une des plus belles de l'Aurès, mais cela ne tardera pas à changer; les beaux chênes verts, aux troncs énormes, vont disparaître; déjà, en 1912, les coupes étaient commencées; en 19 13, l'œuvre dévastatrice conti- nuait; pas un arbre n'est épargné dans ces coupes, tout est rasé; il est vrai que les chênes verts repoussent; mais il faudra des siècles pour qu'ils redeviennent ce qu'ils étaient. Paphia Dïves est particulièrement abondante dans quelques petites clairières humides ei très veites, en dessous d'une barre de roches calcaires, sur la pente de la montagne fermant la vallée à l'est; c'est vers la fin du mois de juin que le papillon commence à voler; il devient commun dans la première quinzaine de juillet et on peut le prendre sans trop de difficulté sur les fleurs de chardons et sur les ronces, dans les clairières susdites. Nous l'avons pris également dans le ravm de Lambèse, au-dessus de la maison forestière de Boursalah ; dans les montagnes de Bel- lezma, près du Col de Telmet, le 15 juillet 191 2, au courant d'une excursion faite avec M. Nelva, pharmacien et entomologiste de Batna; dans la haute vallée de l'Oued-Doufana; à Sgag, oii il n'était pas rare, du 9 au 13 juillet 1913, près de la cascade de la vallée de Tafrent; cette vallée, très verte, est en pleine forêt de cèdres, à environ 1.600 mètres d'altitude; deux vues photo- graphiques des environs de la cascade sont reproduites sur les planches qui accompagnent le présent ouvrage. Au nord du col de Doufana, la localité préférée par Dïves est un petit ravin, très en pente, que traverse le sentier muletier, quelques centaines de mètres avant d'arriver sur le terrain à' Auresïana; ce ravin, bien vert, contient beaucoup de Graminées, quelques Fraxïnus dimorpha, Cosson, des Cratœgus à feuilles velues {C. laciniata, Ucria?) et des chênes-verts; la violette pousse abondamment sous les buissons, et, dans une sorte de petite clairière en contrebas du chemin, on voit fleurir des char- dons, des Euphorbes et des Scabieuses. D'un côté de la clairière, sur la pente gazonnée, est un chêne qui paraissait, dans les pre- miers jours de juillet 191 3, exercer une attraction toute spéciale 92 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE sur Dives. Sur ses branches, nous avons pris deux paires accou- plées, ainsi que de nombreux cfcT qui venaient s'y poser, à l'ombre; tous ceux qui montaient ou descendaient le ravin interrompaient leur vol pour faire le tour de cet arbre, même s'ils ne s'y arrêtaient pas; presque toutes ces Dives étaient très fraîches à ce moment-là; elles éclosaient, évidemment, dans cette partie du ravin, et ne s'en éloignaient que plus tard pour des- cendre beaucoup plus bas, où on les trouvait alors sur les fleurs de la ronce; les scabieuses et chardons ne les attiraient que peu, du moins en ce moment-là. Dans la même clairière volaient quelques Auresiana, mais la bonne localité pour cette Espèce est plus haut sur la montagne. Ayant remarqué beaucoup de violettes dans le sous-bois autour de la cascade de Tafrent, à Sgag, le lo juillet 1913, j'ai long- temps cherché sur elles et parmi les débris végétaux qui les entouraient, dans l'espoir de trouver quelque chenille retardataire d'Argynne; les feuilles étaient souvent découpées, mais nous n'avons pas trouvé d'autre trace laissée par les chenilles; cepen- dant, dans quelques anfractuosités du rocher qui traverse le ravin à cet endroit, j'ai découvert, près de terre, cinq chrysalides de Dives, dont trois mortes et desséchées; continuant nos recherches, Chierotti et moi, nous avons pris d'autres chrysalides, suspendues sous les troncs abattus de vieux cèdres; quelques-unes étaient vivantes, d'autres desséchées et plusieurs déjà vides. La chrysalide ne me paraît pas différer de celle de Paphia d'Europe; elle est figurée phoiographiquement sur une des planches. Les six chrysalides vivantes, rapportées de Sgag, ont donné six Q Ç), dont une avortée, entre le 16 et le 25 juillet 1913, les éclosions se produisant toujours à une heure matinale. Je n'ai jamais rencontré Paphia var. Dives dans la province d'Oran; je suis certain qu'elle n'existe pas dans le Djebel- Amour, où je n'ai jamais vu, non plus, Argynnis Pandora, Espèce beaucoup plus répandue, cependant, que Dives, en Algérie ». 'L' Argynnis dives n'ayant jusqu'à présent été figurée que sous LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 93 l'une de ses formes, — celle qui est d'ailleurs la plus répandue et dont le fond des ailes inférieures, en dessous, est doré, — sans traces d'argent (^Etudes Lépid. comfarée. Vol. III, PI. XI, Cf fig. lO, Q fig. Il), il paraît utile de figurer aussi la Paphia- dives-argyrea, Obthr. Argynnis Auresiana, Fruhstorfer. Je ne crois pas que V Argynnis Aîiresiana soit une variété à' Adippe, comme Seitz l'indique à la page 238 de son ouvrage : Die Gross-Schmetterlirzge der Erde. A mon sens, Auresiana est une Espèce spéciale. D'après ce que mon excellent et respectable ami D' Prof. Reverdin me mande à la date du 27 octobre 191 3, V Argynnis Auresiana est pourvue d'un appareil génital mâle différent de celui des Argynnis voisines et de Adippe en parti- culier. Au contraire, en ce qui regarde Dives, les genitalia sont semblables à ceux de Paphia, d'après les constatations effectuées par le savant Anatomiste genevois. 'L' Argynnis Auresiana est abondante en juin dans le Djebel- Aurès. Elle semble varier très peu. J'ai fait figurer le cf et la Q sous les n°' 1836 et 1837 de la PI. CXC, dans le Volume VII des Etudes de Lépidoptérolo gie comparée. M. Harold Powell s'est attaché tout particulièrement à l'ob- servation des mœurs de V Argynnis Auresiana. On lira avec intérêt les notes prises par M. Powell, au cours de son exploration du Djebel-Aurès, en 191 2 et 191 3 : « En 191 2, année précoce dans l'Est-Algérien, quelques cfcf ài^ Argynnis Auresiana ont été pris, au commencement du mois de juin, dans le haut de la vallée de l'Oued-Doufana, près Lambèse; le 14 juin de la même année, d'autres cfcf ont été capturés sur le versant nord de la chaîne de Lambèse ; le papillon est devenu très abondant dans cette même localité (une éclaircie de la forêt près du Col de Doufana) à partir du 20 juin. En 191 3, la saison était bien moins avancée; quoique nous ayons 94 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE cherché Auresiana dès les premiers jours de juin, dans ses habitats connus, aucun sujet n'a été vu avant le 21 juin; l'Espèce abondait, cependant, à la un du mois. La durée de son existence, à l'état d'imago, est assez courte; déjà, le 4 juillet 191 3, peu de sujets frais se rencontraient au Col de Doufana. Pour donner une idée de ses mœurs et du genre de localité habitée par Aure- siana, il me semble que je ne puis mieux faire que de copier textuellement certaines de mes notes, prises sur place. Voici donc, en premier lieu, des passages extraits de mon carnet et datés du 18 juin IQ12; il est également question de A. Pandora dans ces notes ; mais je crois bien faire de transcrire aussi ce qui concerne Pandora, afin de ne pas modifier le texte des observations réa- lisées dans la forêt : <.<■ Départ le matin du 18 juin 191 2, à 7 heures, pour le Col de Doufana, au sud-ouest de Lambèse; très beau temps, atmos- phère limpide et petite brise du nord; le soleil chauffait forte- ment; mais l'air est resté frais toute la journée. Au début de la montée, dans les petits chênes de l'autre côté du ravin, j'ai pris la première Efinephele Ida de la saison; quelques Thecla Escidï-Mauretanica étaient déjà posées sur les fleurs du Teiicrium foliuvi, qu'elles aiment tant... Après la pre- mière forte grimpée, on traverse des petits plateaux calcaires, assez secs, en partie semés d'orge et de blé, et entourés de chênes verts et de pins d'Alep; les grands chardons à fleurs rouges poussent dans ces champs maigres au milieu des céréales, et il n'est pas rare de voir VArgynnis Pandora butinant sur ces fleurs, au soleil, les ailes ouvertes aux trois quarts ; Pandora est un papillon méfiant; on peut cependant l'approcher quand il est posé sur un chardon, mais il faut se garder de faire le moindre mouvement brusque, car il partirait. Alors il n'est pas très facile de le suivre de l'œil, à cause de son vol plané et rapide; se maintenant à peu près au niveau des yeux, il présente à l'obser- vateur le minimum de surface. Le coup de filet le manqué assez souvent lorsqu'il est posé, car il a l'habitude de faire un plongeon en voyant venir le coup. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 95 Le sentier rentre dans la forêt, et plus on monte, plus celle-ci devient belle; à environ 1.500 mètres d'altitude, on trouve, mélangés aux chênes verts, des érables (Acer nions pessulammi) et des aubépines à feuilles tomenteuses ; le sous-bois est un gazon court, bien vert, et, dans les nombreuses clairières, poussent les euphorbes (Euphorbia hiteola, Coss.), les chardons à fleurs rouges et à fleurs jaunes et les scabieuses. A se trouver entouré de toute cette verdure on se croirait, presque, sur une montagne de France, mais la vue sur les vastes plaines au nord, tachetées de blanc par les étangs salés et traversées par des chaînons arides, est bien algérienne. Le but principal de la chasse de ce jour était VArgynnis Aiiresiana. Chierotti avait rencontré cette Espèce, le 14 juin, sur une pente près du col, et en avait pris plus d'une douzaine de cf ; aujourd'hui nous avons aperçu la première Auresiana dans une clairière à gauche du sentier, près de sa jonction avec le chemin forestier qui côtoie les montagnes jusqu'à Baïou ; 200 mètres plus loin, on arrive au quartier général à-Witresiana; c'est une sorte de clairière en forte pente, peu boisée, mais recouverte d'une végétation dense; il s'est produit ici, dans le passé, un plissement de terrain occasionné, peut-être, par des excavations pratiquées par les Romains; en haut de la clairière, existe une tranchée remplie de belles touffes d'Euphorbe; entre cette tranchée et le chemin, il y a une pente très raide recouverte presque entièrement de végétation basse ; on y remarque surtout les buissons de YErinacea pungens, Boissier, curieux genêt aux fleurs lilacées avec calices enflés ; le Cytisus balansœ, Boiss., buisson hérissé, d'apparence semblable au précédent, m.ais à fleurs jaunes non enflées, des euphorbes et des Graminées. Sous les genêts et les petits chênes verts poussent les violettes en abondance. De nombreux cf d' Auresiana volaient sur ce ter- rain; ils étaient à la recherche des Q, car ils voltigeaient bas sur les buissons d'Erinacea, descendant souvent entre les touffes pour explorer le (( sous-bois »; quelquefois ils se posaient sur le sol, les ailes aux trois quarts ouvertes, se réchauffant au soleil; 96 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ils ne s'arrêtaient que rarement sur les fleurs de chardon ; ils n'étaient pas du tout farouches et, en conséquence, faciles à approcher, mais moins faciles à prendre à cause de leur habitude de se tenir si près des buissons piquants ; nous les avons presque tous pris au vol; ils sont habiles à éviter le coup de filet, en plongeant; moins habiles, cependant, que Pandora. Nous sommes restés à cet endroit jusqu'à midi, et y sommes revenus deux heures plus tard, après avoir établi le campement sur le versant sud du col. Total pour la journée, 40 cf ; pas de Q ; la majorité des individus était fraîche ». Le lendemain, nous avons pris quelques Q, et celles-ci étaient devenues assez com- munes, le 24 juin. La Q montre beaucoup moins d'activité que le cf ; elle se pose volontiers par terre et sur les fleurs de scabieuse et de chardon. Voici ce que je trouve dans mes notes pour le 4 juillet 1913 : (c Au-dessus de la localité de A. Paphia-Dives^ dans le petit ravin près du Col de Doufana, Aiiresiana est très abondante; nous avons pris des quantités ici, le 30 juin. Ce jour-là, peu de cf étaient frais, aujourd'hui encore moins; néanmoins, j'ai pris quelques individus semblant éclos dans la matinée même. Les cf volent en bon nombre autour des buissons de « Djdida » {Erinacea pungens et Cytïsus Balansœ) et descendent presque à terre en explorant l'herbe dans l'espoir de trouver une Q vierge; la Q ne paraît guère voler avant l'accouplement qui a lieu peu de temps après l'éclosion; j'ai trouvé aujourd'hui cf et Q accouplés sur une branche de chêne vert. Après la fécondation, la Q va se poser sur les fleurs, dans les branches des arbres ou par terre; elle ne possède plus d'attraction pour les cf, qui ne s'attardent pas auprès d'elle; je ne peux dire si un deuxième accouplement peut se produire plus tard; cela ne me semble pas probable. Je ne crois pas que la ponte commence immédiatement ; les quelques Q que j'ai vues occupées à chercher des endroits pour pondre n'étaient pas de première fraîcheur; elles volaient bas sous les buissons où poussaient des violettes et ne pondaient pas sans avoir cherché soigneusement un point favorable pour LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 97 déposer l'œuf; je n'ai d'ailleurs trouvé qu'un seul œuf pondu en liberté; la Q l'avait placé sur une brindille sèche, dans l'herbe, sous un buisson ; il y avait des touffes de violette à peu de dis- tance de là. En dehors des localités d'éclosion et de ponte, le cf a un vol rapide; il s'arrête sur les scabieuses et les chardons, mais il n'est alors pas très facile à prendre; tandis que quand il est à la recherche de la Q, on le capture sans trop de difficulté ». Les mœurs d\A/iresiana m'ont paru ressembler à celles d'Ag/aia et encore davantage à celles de Elisa, de Corse. L'Es- pèce est abondante dans les clairières de la forêt de Bel-Achir et à Sgag; elle est plus rare dans le haut du ravin de Lambèse, où le docteur Adalbert Seitz l'a découverte en 1903. Nous l'avons rencontrée près du Col de Telmet, dans les Monts de Bellezma, le 15 juillet 191 2. J'ai vainement cherché la chenille d'Au/esia7ia dans l'excel- lente localité du Col de Doufana, le 9 juin 191 3; Chierotti, l'Arabe Amar Sari et moi-même, nous avons fouillé pendant trois heures sous les buissons de chêne vert, d'Erinacea et de genévrier, dans le débris végétal et autour des violettes; pour bien examiner les amas de feuilles et de bois mort entourant la plupart des plantes, il fallait souvent se mettre à plat ventre et ramper sous les buissons épineux; beaucoup de feuilles étaient découpées comme par des chenilles, d'autres paraissaient avoir été broutées; au milieu de cette broussaille se trouvent de grosses pierres calcaires qui pouvaient abriter des chrysalides dans leurs anfractuosités et sous leurs corniches ; nous n'en avons pas trouvé trace; il était certainement un peu tard pour les chenilles, mais on aurait dû voir des chrysalides. A Sgag, un mois plus tard, A.7(resiana volait en bon nombre avec Paphia-Dives, autour de la cascade, mais, quoique nous ayons pris plusieurs chrysalides de Dives, aucune d'Auresiana, même vide, n'a été aperçue. Désirant obtenir des œufs, j'ai emprisonné, à différentes reprises, quelques Q^ sous des cloches en mousseline couvrant des touffes de violettes plantées en pot ; sous les feuilles, je 7 98 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE plaçais des feuilles sèches, des débris de plantes et des brindilles de bois; c'est sur des débris de ce genre que les œufs furent pondus, sous les brindilles et quelquefois en contact avec le sol. Deux Q ayant été placées sur des plantes sans entourage de débris, n'ont pondu que très peu d'œufs; quelques œufs avaient été placés sur le dessous de feuilles fraîches; une des Q étant morte et se trouvant sous les feuilles, l'autre a pondu plusieurs œufs sur ses ailes, en dessous, contre le sol. Les Q capturées le i8 juillet 19 13 ont pondu, le 19 et le 20, en tout, une cinquaritaine d'œufs, principalement sur les débris secs; plus de 20 œufs se trouvaient ensemble, sur un glomérule sec de Marrubium recouvert par les feuilles de violette; il sem- blait que la Q avait pondu plusieurs œufs en une seule séance; la chose s'est probablement passée ainsi. Certaines Q maintenues en captivité à la fin de juin 191 2 ont pondu quelques œufs sous les feuilles vertes, et un bon nombre sous des pierres et mottes de terre à la surface du sol; il a fallu, dans certains cas, que les Q aient réussi à introduire l'extrémité de leur abdomen dans des crevasses assez exiguës ; je ne leur avais pas fourni des débris secs en 1912. La ponte a lieu dans la matinée surtout; je voyais souvent les Q descendre dans les touffes de violette, et recourber l'abdomen en cherchant un point pour déposer l'œuf; mais il n'était pas possible, sans les déranger, de se rendre compte exac- tement de leurs opérations; je crois que, bien souvent, plus d'un œuf est pondu avant que la Q ne s'envole pour chercher un autre point; elle marche sous les plantes et parmi les brindilles sèches, choisissant avec soin un endroit favorable. Il est nécessaire de bien nourrir les Q gardées en captivité; nous leur fournissions des fleurs fraîches, chardons et scabieuses principalement, et aussi du sirop de sucre dilué, qu'elles venaient boire sur la mousseline ; on abritait une partie de la cloche de façon à leur permettre de se préserver du soleil; plusieurs fois dans la journée, on aspergeait la cloche avec un peu d'eau; sans ces précautions, les Q succombaient dès le premier jour. Je n'ai malheureusement pas obtenu l'éclosion de la chenille; LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 99 les œufs pondus en 1912 ont été dévorés pendant l'été par des fourmis qui s'étaient introduites dans le pot; les œufs pondus en 1913 ont passé l'été et l'hiver; mais il n'y a pas eu d'éclosion, et en mars 191 4, j'ai trouvé les petites chenilles desséchées dans les œufs : Voici une description de l'œuf : Forme, celle d'un cône tronqué à large base; hauteur, 0.00095 environ; largeur maximum, 0.0008 environ. La forme est un peu variable; quelquefois, à cause d'une pression plus forte au moment de la ponte, la base se montre très large et plate; si l'œuf est pondu plus légèrement, ce qui arrive souvent, la base est un peu moins large et son bord est arrondi, moins net. On remarque 14 fortes côtes verticales, très en relief, à arêtes minces mais non acérées; 9 de ces côtes atteignent le sommet, se recourbent ensuite et s'évanouissent dans la cuvette micropylaire ; les autres, diminuant de hauteur, s'arrêtent en dessous du som- met; les côtes transversales sont peu élevées, mais distinctes; avec les côtes verticales elles forment sur la surface de l'œuf un réseau de cellules quadrangulaires, allongées; la surface est très finement pointillée, ce qui lui donne une apparence mate, perlée. La dépression micropylaire est assez profonde; elle occupe tout le sommet de l'œuf ; les cellules qui recouvrent sa surface sont petites, mal définies. Au moment de la ponte, l'œuf est jaune pâle; cette couleur s'obscurcit graduellement et, au bout de deux jours, elle est carnée; la couleur chair continue à se foncer et, le cinquième jour, elle est un peu grisâtre; des zones obscures et plus claires existent alors, mais elles ne sont pas très nettes ; vers la base il y a une large zone ou bande foncée, puis, à l'équateur, un cercle mince, pâle ; ensuite, on distingue une bande foncée qui atteint presque le sommet de l'œuf; les zones foncées s'accentuent peu à peu; examinés le 29 juillet, les œufs pondus les premiers (au commen- cement du mois) avaient acquis une couleur de plomb, un peu moins foncée à l'équateur; le chorion est incolore, quoique irisé; 100 LÉPIDOPTEROLOGIE COMPAREE c'est le contenu de l'œuf qui donne la couleur grise, par trans- parence. A cette époque, je crois que la chenille était développée; l'aspect de l'œuf n'a pas changé d'une façon appréciable ensuite; aucune chenille n'est éclose cependant, et, par consé- quent, je ne puis dire si la chenille commence sa vie extérieure en automne, ou bien si elle hiverne dans l'œuf ». Il me paraît intéressant de faire figurer une variété d'Argynnis Auresiana O*, due au grossissement des taches noires médianes des ailes supérieures, en dessus ; elle fut prise par M. Powell, en juin 191 2, au Col de Doufana. Argynnis Lathonia, I^inné. Espèce très répandue dans presque toute l'Algérie; ma col- lection contient une série d'exemplaires provenant de Lambèse et de Sebdou; mais j'ai reçu des Argymtis Lathonia de plusieurs autres localités algériennes. Je ne vois aucune différence entre les exemplaires d'Europe et ceux de Barbarie. Les cf, à Lambèse, sont plutôt de petite taille. Je n'ai jamais vu d'aberration même peu importante de Lathonia qui ait été jusqu'ici recueillie en Algérie. Melitœa Desfontainii, Godart. Sous le n° 12 de la PI. XI de la VP livraison des Etudes d'Entomologie, j'ai donné une excellente figure de la Melitœa Desfontainii gravée et coloriée par d'Apreval. Aux pages 51 à 54, dans l'ouvrage précité, j'ai traité de l'histoire de Melitœa Desfontainii, Godart {Encyclopédie méthodique, tome IX, pp. 278 et 279). Le premier exemplaire avait été rapporté par le chevalier Desfontaines, membre de l'Académie des Sciences et professeur au Muséum d'Histoire naturelle. Je prie le Lecteur de se reporter aux Etudes d' Etitojnologie pour tous les détails LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE lOI synonymiques et de différenciation spécifique que j'ai déjà énoncés. A mon avis, la Melitcea Desfontainii est une Espèce à part et qu'on ne doit pas envisager comme variété àJ Aurinia (A r ternis). Elle paraît assez rare et est très localisée; elle vole en mai. Les 28 exemplaires que je possède, assez semblables entre eux, sauf pour la taille qui donne des différences relativement assez sensibles, viennent de Sebdou, Daya, El Haçaiba. Je n'ai jamais vu d'exemplaires de la Melitcea Desfontainii pris en Tunisie, ni dans l' Est-Algérien. Par la teinte générale plus rouge du dessus et du dessous de ses ailes, la Melitcea algérienne Desfontainii se distingue de la Melitcea espagnole Bcetica qui en est une simple variété géographique. Melitaea Cinxia. M. Harold Powell a pris 2 c? à Sebdou, en mai 1907; ils sont de petite taille; les taches noires sont très accusées; en dessous, les ailes supérieures présentent une série de taches noires assez grosses, extracellulaires, descendant, suivant une direction courbe, du bord costal au bord interne. En dessus, les lignes noires maculaires sont également bien accentuées. Le fond des ailes, en dessus, est fauve. A Sebdou également, M. Neuschild a trouvé, au nombre de deux exemplaires, le Polyommatus Chryseis, Bergstraesser. N'est-ce pas remarquable que dans cette même localité de Sebdou, on puisse rencontrer — très rarement, il est vrai, — deux Espèces de Rhopalocères de l'Europe centrale qu'on n'a point encore observées dans les autres parties de la Barbarie? Melitaea /Ttherie, Huebner. Très jolie Espèce à propos de laquelle j'ai assez longuement disserté aux pages 235-237 du Vol. III des Etudes de Lépid. 102 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE comparée, /hthene semble avoir un habitat assez étendu en Bar- barie; ma collection contient des échantillons provenant d'Aïn- Draham, Lambèse, Baïnen, Sebdou. On remarque deux formes de Ç), celle dont le dessus des ailes est fauve clair et l'autre dont le fond des ailes supérieures est blanchâtre, avec un épaisissement général des dessins noirs. L,a Melitœa /E.therïe vole en mai, dans les prairies, à une altitude d'environ 1.200 à 1.500 mètres, en dehors de la région du littoral algérien. Melitaea Punica, Obthr. Je serais volontiers porté à considérer comme une Espèce spé- ciale la Melitœa Punica dont le cf est figuré sous le n° 3 de la PI. I de la i""*^ livraison des Etudes d' Ento7noiogie. Jusqu'ici j'ai rattaché Punica, comme variété, à Phœbe; cependant je trouve dans la taille plus petite, dans la forme des ailes plus ramassée et moins allongée, dans l'isolement de certaines taches noires aux ailes supérieures, et dans la comparaison du dessous des ailes, dont les parties blanches sont très vives et comme porce- lanées, des caractères qui me paraissent nécessiter l'observation des Genitalia, pour résoudre la question de séparation spécifique. Si les Genitalia de Punica diffèrent du même organe envisagé chez Phœbe, il faudra admettre l'unité spécifique de Punica. J'espère que l'étude comparative d'un organe qui a déjà révélé bien des secrets, quant à la séparation des Espèces de Lépidop- tères, sera prochainement réalisée. Sans être rare, Punica n'est pas très abondante. Les exemplaires que je possède viennent de Aïn-Agrab, Lambèse, Sebdou, Khenchela, Géryville et Aflou. Punica éclôt en mai et juin, à Lambèse et à Khenchela. La Q d'Aïn-Agrab a été capturée à la fin d'avril. Victor Cotte, de Digne, a capturé un cf à Sétif, en mai 191 3. Je fais ûgurer une belle Aberration prise à Lambèse en mai 191 3. Les notes prises par M. Harold Powell, au cours de ses voyages en Algérie, sont toujours empreintes d'une sincérité qui les rend pleines d'intérêt. Le plus souvent, c'est le jour même où les LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 103 observations ont été faites qu'elles sont rapportées sur le carnet de l'explorateur. Je suis heureux de les reproduire dans le présent ouvrage pour chaque Espèce de Lépidoptère qu'elles concernent. Voici donc ce que M. Powell a constaté relativement à Melitœa Punïca : « J'ai remarqué que Punïca vole dans certains ravins très secs et dans les lits d'oued desséchés, à Sebdou, à Géryville et à Aflou; elle y est toujours assez rare, se montrant par deux ou trois exemplaires à la fois. A Lambëse, elle se trouve souvent dans les ravins plus verts, tels que ceux de Baïou, de Sgag et de Titouguelt; ce n'est pas une Espèce de prairie, comme Mtherïe, et on ne la voit pas souvent en dehors des ravins; cependant, la g vole quelquefois sur les collines ou champs avoisinants. Le papillon se rencontre en avril, mai et juin, et, plus rarement, en juillet et en aoiit; il semble donc qu'il y a deux générations. En 1907, à Sebdou, je n'ai pas constaté une deuxième éclosion; le papillon y était d'ailleurs déjà bien rare en mai. En 191 1, à Aflou, nous n'avons pas trouvé l'Espèce avant le 30 juin; quelques exemplaires ont été pris en août, le dernier, capturé le 14 août, étant encore en assez bon état. L'observation suivante est datée du 21 mai 1910, à Géryville : « En remontant un petit ravin à sec, j'ai vu, de loin en loin, des mâles de Melitcea Punica posés sur le sol, se chauffant au soleil, les ailes ouvertes; sur une petite élévation aride, près du ravin, une Q a été vue se promenant sur une plante de la famille des Composées, dont les feuilles sont étalées sur le sol ; la Q cherchait un endroit pour pondre, mais le choix lui paraissait bien difficile; elle a examiné successivement cinq ou six plantes de la même Espèce et est revenue plus d'une fois à la première; en fin de compte, elle s'est envolée au loin sans avoir pondu, mais je suis persuadé que cette plante est bien celle qui nourrit la chenille ». M. le professeur Battandier, d'Alger, a bien voulu déterminer la plante en question; c'est le Rhaponticuni acaule, D. C; elle existe dans toutes les localités où j'ai rencontré Punica. » 104 LÉPIDOPTEROLOGIE COMPAREE Melitaea Didyma, Ochs. Dans le Volume III des Etudes de Lépidopiérologie comparée, aux pages 239 à 246, j'ai fait connaître ce que je savais non seulement au sujet de la Melitœa Didyma de l'Europe occi- dentale, mais aussi de la Barbarie. La M. Didyma habite la zone désertique où elle donne la variété Desertïcola, Obthr. {Etudes d'Ento7n., Liv. I, PI. III, fig. i); elle habite aussi la région du bassin méditerranéen (Aïn-Draham, Yakouren, Djur- jura, Constantine, Khenchela, Sebdou, Daya, Magenta), où elle présente une morphe plus analogue à nos formes européennes et que j'ai appelée : Mauretanica {Etudes Lépid. compar., Vol. III, p. 243). En dessus, le fond des ailes de Desertïcola est d'un fauve orangé uniforme, sauf le bord costal des supérieures qui est souvent pâli et d'un blanc jaunâtre, surtout chez certaines Q. En dessous, les dessins des ailes inférieures sont différents de la morphe normale; les traits noirs sont plus accentués et les taches fauves sont au contraire réduites. Au lieu de deux bandes fauves non interrompues, surtout dans la bande submarginale des ailes inférieures en dessous, ce sont des petites macules, séparées et indépendantes les unes des autres. Je dois dire qu'il y a des exemplaires de la morphe Mauretanica qui présentent plus ou moins une partie des caractères de Desertïcola; ainsi en est-il à Gafsa; il y a donc une transition assez bien établie entre les deux formes; mais si l'on considère l'ensemble des exem- plaires et non quelques exceptions, on reconnaît l'existence de deux races dont il me semble utile de donner la figuration au moyen d'exemplaires de Desertïcola pris à Biskra, en mai 1885, et à Méchéria, à la hn de mars 1886. Quant aux Melitœa Didyma- Mauretanica représentées dans cet ouvrage, elles proviennent du Djurjura (juillet 1884) et de Yakouren (juin, juillet 1907). Ayant décrit à la page 243 du Volume III des Etudes de Lépid. comparée, une Melitœa Abyssinica, je fais représenter LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE IO5 cette race éthiopienne de Didyma à côté de Deserticola et Maiire- lanica. Une Planche entière, portant le n" CCLXXXII, a été consacrée dans le présent ouvrage à la figuration des Melïtœa africaines. Les Melïtœa Abyssinïca portent les n°^ 2303 et 2304. Pour la Melitœa Didyma, les n"^ 2297 et 2298 représentent deserticola; les n°' 2299, 2300, 2301 et 2302 représentent maiiretanica. M. Harold Poweli m'a fait connaître qu'une deuxième géné- ration de la morphe Mauretanica était très abondante dans la verte vallée de Tafrent, forêt de cèdres de Sgag, pendant la première quinzaine de juillet 1913; plusieurs chrysalides y ont été trouvées suspendues aux tiges de plantes basses et sur les branches des buissons. Melitaea Dejone, Huebner. Je prie mes Lecteurs de vouloir bien se reporter à la notice concernant la Melitœa Dejone qui est imprimée sur les pages 253 et 254 du Vol. III des Etudes de Lépidoptérologie comparée. La Dejone algérienne constitue une morphe plus analogue à celle d'Andalousie qu'à celles de Provence, des Pyrénées-Orientales et surtout du Valais (Berisalï). Je fais figurer la Dejone algé- rienne, d'après des exemplaires pris à Sebdou, en mai 1907. J'ai désigné cette race oranaise par le nom de Nitida (Joe. cit., p. 254). J'ai distingué dans le même ouvrage et à la même page 254, la race de Gèdre (Hautes-Pyrénées^ par le nom de Rondoui. Je fais représenter comparativement dans le présent Volume la Melitœa Dejone-nitida, de Sebdou, sous les n""" 2305 et 2306 de la PI. CCLXXXII, et la Melitœa Dejone-Rondoui, de Gèdre, sous les n°^ 2307 et 2308 de la même Planche. M. Harold Poweli est, avec M. Gaston Allard, le seul chasseur qui ait trouvé Dejone en Algérie, du moins d'après ce qui est parvenu à ma connaissance. Le premier exemplaire algérien de Dejone dont je suis redevable à la générosité de mon ami Allard, I06 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE fut rencontré par lui, à Tlemcen, près de la cascade, le 2g avril 1870. Ne connaissant qu'un seul cT, j'ai dit — mais à tort — dans la première livraison des Etudes d^ Entomologie (p. 24), que la Dejone de Tlemcen ne diffère pas de la Dejone des Pyrénées- Orientales. Je m'excuse d'avoir commis cette faute d'apprécia- tion. Je reproduis ci-dessous les notes prises par M. Powell relati- vement à la Melïtœa Dejone dont il a capturé près de Sebdou une série d'au moins 150 exemplaires; j'en ai rangé dans ma collection une quantité de 79 individus superbes, ce qui permet de se faire une opinion très exacte sur la Melitœa Dejone-nïtida. Certes, elle mérite bien d'être qualifiée : nitida. (( Je n'ai jamais rencontré Dejone ailleurs en Algérie qu'à Sebdou; et là, elle était fort localisée en 1907. Voici ce que portent mes notes à ce sujet : « 24 mai 1907; belle et chaude journée; Ramo et moi, nous sommes partis de bonne heure pour suivre la Tafna, depuis le pont jusqu'au pied des cascades; de là nous nous sommes dirigés à droite et, après une petite ascension, nous sommes descendus dans la profonde et étroite vallée qui commence à la falaise de tuf. C'est sur les parois de cette falaise que l'on aperçoit l'ouverture de plusieurs grottes dites : d'Abdelkader, parce que le grand chef arabe s'y est abrité. La vallée descend, en s'élar- gissant, jusqu'à la grande prairie (Merdja de Sebdou). Le bout du vallon fermé par la falaise d'Abdelkader est très fertile, ainsi que les pentes rapides en dessous d'une autre grande falaise calcaire, qui domine ledit vallon au nord et au nord-est ; ces pentes sont cultivées par les indigènes, qui y ont planté des amandiers, jujubiers, figuiers et noyers, maintenant liés ensemble par les vignes grimpantes. Ces arbies ne sont l'objet d'aucune taille, ni d'aucun soin. Deux Espèces de Lïnaria y sont abon- dantes, surtout sur les terrasses abandonnées, un peu à l'est des grottes, où les arbres fruitiers sont plus clairsemés et les plantes sauvasses nombreuses. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 10/ La Melilœa Dejone (première génération) était fort abondante sur ces terrasses le 24 mai 1907; les papillons étaient très frais; tout d'abord, en les voyant voler, je n'ai pas reconnu l'Espèce, tant leur couleur était vive; les Q étaient plus rares que les cf ; les deux sexes butinaient sur les Scabieuses. Quoique abondante, Dejone m'a paru être très localisée; il m'a semblé qu'elle ne se trouve que sur cette pente en « escalier )) exposée au midi, dans un endroit excessivement chaud. A part deux M. Didyma, je n'ai pas vu d'autre Melitœa ici. Le 17 juillet, je suis retourné aux grottes d'Abdelkader, dans l'espoir de trouver une deuxième éclosion de Dejone; le papillon ne volait pas encore, mais toutes les Linaires à fleurs blanches portaient des traces de la chenille; quant à celles-ci, j'en ai pris une dizaine seulement; elles étaient dans l'avant-dernier stade; il semblerait que presque toutes les chenilles aient quitté les plantes étant encore jeunes, car les excréments qui se trouvaient au pied des Linaires n'étaient pas de la grosseur de ceux que produit la chenille, lorsqu'elle est complètement développée; les oiseaux qui abondent dans le vallon les avaient-ils dévorées? Aucune chrvsalide n'a été trouvée ». Satyrus Ellena, Obthr. Je suis porté à croire que le Satyrus Ellena dont le O* est figuré sous le n° 57 de la PI. 7, dans la XIX" livraison des Etudes d' Eniomologiey est une Espèce distincte d' Alcyone. Lorsque je connaissais seulement le petit nombre d'exemplaires que le D'" Vallantin m'avait envoyés de Bône, je considérais Ellena — mais à tort, me semble-t-il, — comme une race d'A/- cyone (loc. cit., p. 19). Depuis que j'ai vu les longues séries d'exemplaires récoltées à Yakouren, à la Glacière de Blidah, à Aïn-Draham et dans les montagnes qui avoisinent Lambèse, je me suis convaincu que le Satyrus Ellena est une Espèce à part, — au sens que la plupart des Naturalistes attribuent actuelle- ment au mot Espèce. — Telle est du reste l'opinion que j'ai déjà I08 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE exposée aux pages 259 et 260 du Volume III des Etudes de Lépïdoptérologie comparée. Ellena est toujours, en dessus, d'un brun beaucoup plus noi- râtre et foncé que les formes les plus obscures à.^ Alcyone, notam- ment celle de Cauterets, Barèges et Gavarnie que j'ai appelée Pyrenœa. Sur le dessous des ailes, la ligne qui sépare de la bande blanchâtre médiane transverse, la partie basilaire obscure, présente, dans son parcours, quelques notables divergences. Je prie le Lecteur de vouloir bien se reporter à la figuration com- parative de la PI. 7, dans la Liv. XIX des Etudes d'Entomologie. En effet, après le cf Ellena, se trouvent représentées dans les Etudes d'Entomologie, les Alcyone-V andalusica, d'Andalousie; Alcyone, des Pyrénées-Orientales, et Alcyone-Pyrenœa, de Cauterets. A Yakouren, Ellena vole en juillet et août; à la Glacière de Blidah, à la on de juillet; dans le Djebel-Aurès, depuis la fin de juin jusqu'en août. Je fais figurer un cf et une Q pris aux environs de Lambèse, le cT en juin et la Q en juillet 191 2, sous les n"^ 2313 et 2314 de la PL CCLXXXIV. M. Harold Powell a étudié avec le plus grand soin les pre- miers états du Satyrus Ellena. Je suis convaincu que ses obser- vations concernant cette Espèce seront lues avec le plus vif intérêt : (( I.e Satyrus Ellena n'est pas du tout rare dans les forêts de l'Aurès; il ne descend guère au-dessous de 1.400 mètres sur ces montagnes. Le papillon commence à éclore vers la fin du mois de juin, si la saison est normale; mais on ne rencontre que des cf isolés et peu nombreux pendant ce mois ; il devient commun en juillet et vole encore au mois d'août. En 191 2, quelques (3 ont été pris à partir du 24 juin, tandis Cju'en 191 3 le premier cf n'a été aperçu que le 30 juin. Ellena se tient dans les forêts de chênes verts et dans celles de cèdres; il fréquente surtout les parties de la forêt où les arbres sont grands; tel est le cas à Bel-Achir, à Sgag et dans les forêts de Lambèse et de Boursalah. Le papillon est presque LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE I09 exclusivement arboricole; je ne me souviens pas d'avoir vu plus de deux individus se poser par terre, et il s'agissait, à chacune de ces occasions, d'un sujet récemment éclos que j'avais effrayé; d'une façon normale, Ellena se tient sur le tronc des gros chênes verts, la tête en haut, les ailes fermées, les antérieures abaissées entre les postérieures ; dans cette position le papillon se confond avec l'écorce de l'arbre et n'est pas très facile à distinguer, à moins que l'on ne soit placé de façon à voir sa silhouette. Sur la planche photographique n" 25 des Etudes de Lépidoptérologie comparée, Vol. VIT, le papillon se voit posté sur un tronc de chêne vert. On le fait voler facilement, mais il ne va pas loin, et ne tarde pas à s'arrêter de nouveau sur un tronc, presque tou- jours à l'ombre et souvent à une assez grande hauteur, au-dessous de la jonction d'une branche. La Q vit longtemps; on en ren- contre encore en septembre, en mauvais état, bien entendu; je ne l'ai jamais vue au moment où elle pondait en liberté, mais j'ai obtenu facilement des œufs en enfermant des Q sous des cloches en mousseline recouvrant des Graminées plantées en pot. Les pots étaient placés au soleil, mais il fallait abriter une partie de la cloche de façon à permettre aux Q de se m.ettre à l'ombre quand elles en éprouvaient le besoin ; je les nourrissais avec du sucre humecté, dont je mettais un morceau sur le sommet de la cloche; j'arrosais le sucre au moyen d'un peu d'eau, deux ou trois fois pendant la journée. Traitées de cette façon, les Q peuvent vivre longtemps et elles pondent à peu près tous leurs œufs. Le sucre avait cependant l'inconvénient d'attirer de petites fourmis, très nombreuses partout à Lambèse, même dans les maisons. Ces insectes montaient sur la mousseline qu'ils perfo- raient souvent, ou ils pénétraient dans le pot en passant par le trou du fond et traversaient ensuite toute l'épaisseur de terre; arrivées aux œufs, les fourmis les dévoraient avec autant d'avi- dité qu'elles mangeaient le sucre; j'ai perdu beaucoup d'œufs de cette façon. Le seul moyen d'empêcher les fourmis de passer était de mettre le pot dans une assiette contenant de l'eau et d'en maintenir le niveau. Deux Q captives ont pondu beaucoup d'œufs no LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE entre le 20 et le 27 juillet 1913; ceux-ci ont été déposés le jour, principalement sur la mousseline, en haut de la cloche; un petit nombre se trouvait sur les feuilles et les tiges des Graminées; les œufs sont solidement fixés en place. Les éclosions de chenilles ont commencé le 9 août. L'œuf ne me paraît pas différer sensiblement de ceux de H crmione et àJ Alcyone; il est petit par rapport à la taille du papillon ; sa couleur, d'abord d'un blanc presque pur, quelquefois légèrement crème, prend une très légère teinte saumonée au bout de huit jours; deux jours avant l'éclosion de la chenille, une couleur gris pâle apparaît, due aux modifications survenues dans la couleur du contenu de l'œuf; le chorion n'étant pas abso- lument opaque, ces modifications sont appréciables; l'œuf est ovale, aplati à la base; le sommet forme un dôme bas, sur lequel viennent se perdre les côtes verticales, au nombre de 19 environ; en arrivant à « l'épaule » de l'œuf, les côtes deviennent granu- leuses et diminuent en s'approchant de la région micropylaire, pour disparaître en l'atteignant; il y a, par conséquent, autour du micropyle, une surface assez unie; les granulations sont bien moins développées sur le sommet de l'œuf d'Ellena que sur celui de 5. Briseis. Les éclosions des chenilles de S. Ellena ont commencé le 9 août 1913; la chenille, à sa naissance, est de la couleur paille pâle commune chez les jeunes Satyrides: dans le premier stade, la tête ne montre pas de rayures brunes, mais les lignes du corps sont fort bien marquées. Dans le deuxième et le troisième stades, la ligne médiodorsale est nettement plus foncée sur le premier bourrelet de chaque segment abdominal, ce qui produit l'effet d'une série de taches brun foncé réunies entre elles par une ligne plus claire; toutes les lignes ordinaires sont bien marquées, et les rayures de la tête paraissent. La longueur de la chenille à la fin du troisième stade est de 0.012, la largeur de sa tête de 0.0013. Au quatrième stade, la ligne brun noir médiodorsale n'est pas sensiblement plus foncée sur le premier bourrelet des segments LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE III abdominaux que sur les autres ; les lignes du corps et les rayures de la tête sont toujours très bien indiquées. Cinquième (dernier) stade; description faite d'une chenille quelques jours après la quatrième mue : Largeur de la tête, 0.0035; ses lobes sont finement pointillés de petites dépressions et portent de nombreux poils très courts, constituant une pubescence d'un brun doré pâle bien visible à la loupe; le front est glabre et sa surface plus unie que celle des lobes; les mandibules paraissent fortes; la couleur de la tête est paille un peu grisâtre; les rayures sont bien marquées, assez larges, d'un brun gris; elles sont au nombre de trois sur chaque lobe, comme de coutume chez les chenilles de Satyriis; le sillon central (très peu profond) est d'une couleur un peu plus claire que le fond, ainsi que les bords du triangle frontal. Le corps porte de très nombreuses et fines granulations (petites verrues) blanchâtres; de chacun de ces points part un crin très court, à peine visible à l'œil nu; la couleur fondamentale du dorsum est un gris jaunâtre très clair, mais elle n'apparaît pas beaucoup, étant presque recouverte par de très fines lignes brisées d'un brun carné pâle, assemblées de façon à produire des rayures secondaires entre les lignes foncées; à l'œil nu, la couleur fonda- mentale semble un peu rosée à cause de ce semis fin ; la véritable couleur fondamentale est visible, cependant, comme une étroite bordure de la ligne suprastigmatale, en dessus et en dessous, et moins nette en bordure de la ligne sousmédiane, ainsi que sur la limite dorsale; à partir du cinquième segment abdominal, les lignes secondaires brun carné pâle s'effacent peu à peu et laissent à découvert la vraie teinte fondamentale ; sur les segments thora- ciques, au contraire, le semis dont elles sont composées tourne au brun grisâtre et il en résulte un assombrissement de la partie antérieure de la chenille; la ligne médiodorsale est très nette, noir intense sur les segments abdominaux, un peu plus claire sur les segments thoraciques où elle s'amincit; à l'autre extrémité, elle se termine assez brusquement en pointe, à la fin du neuvième segment de l'abdomen; la sousmédiane est brun clair; elle pâlit 112 LEPIDOPTERULOGIE COMPAREE et s'amincit progressivement à partir du cinquième segment abdominal; mais elle arrive, bien affaiblie cependant, jusque sur la fourche anale; la suprastigmatale, plus large, est également brun clair ou bien grisâtre, et elle est parsemée d'atomes brun noir, visibles à la loupe; sa lisière supérieure est finement brun noir et cette lisière est plus épaisse et plus foncée sur les 5", 6", 7" et 8® segments abdominaux, spécialement sur le 6^ et le 7''; la suprastigmatale est prolongée sur la partie latérale de la fourche anale; la ligne stigmatale est de ton un peu plus chaud que la couleur fondamentale, par suite d'un semis de fines lignes et atomes brun carné pâle ; le bourrelet longitudinal en bordure du dorsum (Jiange) est plus clair, plus pâle. Les stigmates sont petits, ovale arrondi, brun très clair, avec centres noirs ; la surface ventrale est d'un blanc grisâtre très légèrement rosé, montrant par transparence une teinte gris verdâtre; les pattes sont conco- lores; la ligne, ou ombre foncée, qui se trouve chez la plupart des chenilles de Satyrus, en dessous du bourrelet limitant le dorsum, est presque nulle chez Ellena. La fourche anale est blanchâtre, moms longue que chez les chenilles du groupe de Fidïa et Faiina. Arrivées presque à leur complet développement, les 7 chenilles de Satyrus Ellena que j'ai pu élever n'avaient pas subi des modifications bien importantes depuis le commencement du der- nier stade; les lignes foncées s'étaient un peu affaiblies; la médiodorsale, d'un brun noir seulement un peu moins vif qu'au début, est restée parfaitement unie sur les segments abdominaux, sans montrer la moindre tendance à pâlir sur la moitié arrière de chaque segment. Par ce caractère, elle diffère de la chenille de 5. Hermïone dans le même stade, chez laquelle la ligne médiodorsale est plus foncée sur chaque premier bourrelet et présente, en conséquence, une série de taches ; elle est, au contraire, tout à fait semblable à la chenille de S. Alcyone, à tel point que je crois que si l'on mélangeait ensemble des chenilles de ces deux Espèces, on ne pourrait les séparer ensuite; mais il n'y aurait pas possibilité de confondre celles âCEllena avec celles d' H ermione, du moins dans les deux derniers stades. LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE II3 En Ellena, nous avons donc une Espèce dont les mœurs à l'état parfait sont semblables à celles de Herniïone et différentes de celles d^' Alcyone du midi de la France, qui habite souvent des localités peu boisées et se pose sur les rochers et les pierres; mais dans ses premiers états, Ellena est certainement très voisine à.\^lcyone. Comme toutes les chenilles de Satyrides, à ma connaissance, celles à.' Ellena ont des habitudes diurnes quand elles sont jeunes ; dans les deux premiers stades, les chenilles à.' Ellena montent sur les feuilles de Graminées, le jour, pour manger, et descendent dans les touffes, le soir; le troisième stade marque une période de transition entre les habitudes diurnes et nocturnes ; les chenilles sont alors plutôt nocturnes; mais je les ai vues quelquefois manger pendant l'après-midi; j'ai observé, notamment, un jour du mois de février, après une période pluvieuse, à 3 heures de l'après-midi, que toutes les chenilles étaient en train de manger; d'habitude, elles montaient au coucher du soleil; dans les deux derniers stades, elles sont franchement nocturnes; le jour, elles se tiennent cachées dans la touffe, vers la base des feuilles, et ne montent pour manger qu'après le coucher du soleil. Les chenilles que j'ai élevées à Hyères étaient dans le troisième stade, aux mois de janvier et de février 1914; vers le 15 février, quelques-unes sont entrées dans le quatrième stade, et toutes étaient dans ce stade en mars. En examinant, le g avril, la touffe de Graminée sur laquelle elles vivaient, j'ai trouvé toutes les chenilles dans le cinquième stade, qu'elles venaient d'atteindre depuis peu. Actuellement, le 15 mai 1914, les chenilles sont bien avancées et ne tarderont pas à descendre en terre pour se chrysa- lider; au repos, elles ont 0.03 de longueur; mais *en marchant, elles s'allongent davantage. Leurs mouvements sont lents, comme ceux de toutes les chenilles de Sai-^rus; elles se raidissent et se durcissent lorsqu'on les prend entre les doigts (*). (*) La première chenille a cessé «le manger le 22 mai et a disparu sous la terre contenue dans un pot, le jour suivant, après avoir erré pendant plusieurs heures. Une deuxième chenille a suivi son exemple le 27 mai. 8 114 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE Depuis leur naissance, en août 191 3, jusqu'au 20 avril 191 4, les chenilles ont été élevées à l'air libre; à partir du 20 avril, elles ont été gardées en boîte et nourries de Graminées coupées. La chenille accepte, comme nourriture, bon nombre d'Espèces de la famille des Graminées, surtout celles à feuilles non poilues; elles n'aiment pas l'orge et le blé, mais mangent bien le Brachy- podium ramosiim; la plante sur laquelle j'ai observé la chenille de Ellena en liberté est une Graminée à feuilles minces, peu coriaces, glabres, d'un vert tendre; c'est une Espèce des mon- tagnes qui pousse sous les Quercus ilex et dans les ravins verts. A la fin du mois de mai 1913, nous avons trouvé quelques chenilles, bien avancées, sous les arbres de la prairie de Timthemam; c'était en cherchant, la nuit, avec une lanterne, que nous les découvrions sur l'herbe; à cette époque je ne savais pas que les chenilles, que nous trouvions en très petit nombre, étaient des Ellena; je reconnaissais qu'elles n'étaient ni des Fidia, ni des Sylvicola; mais elles auraient pu être des Semele-Algirica, Espèce que j'ai élevée quelquefois et qui n'est pas très différente, quant à la chenille, de Ellena; je n'avais pas, à ce moment-là, des chenilles de Semele pour faire la comparaison. Les chenilles trouvées se sont chrysalidées dans les boîtes d'élevage; il est fort probable que si elles avaient été placées dans des pots contenant de la terre, elles auraient pénétré à 2 ou 3 centimètres dans le sol et se seraient fait des cellules souterraines, ainsi que font les chenilles de S. Alcyone et de S. Hermione. La chrysalide est de couleur acajou jaunâtre clair; je n'ai rien remarqué dans sa forme qui la différencie de celles de S. Alcyone, de S. Hermione ou même de 5. Semele-Algirica; il est vrai que je n'avais pas sous les yeux, pour la comparaison avec Ellena, des chrysalides des deux premières espèces, mais je les connais assez bien. L'état de chrysalide dure environ un mois; deux papillons, dont un mal formé, sont éclos vers le 10 juillet 1913; un autre le 15 juillet de la même année ». LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE II5 Satyrus Briseis, Linné. En Algérie le Satyrus Briseis est de grande taille et appar- tient à la forme major dont les deux sexes se trouvent figurés sous les n°' 692 et 693 de la PI. T.XXVI, dans le Volume V (Part. T) des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Les deux exemplaires de Satyrus Briseis-Major représentés sous les n°' 692 et 693 proviennent des environs de Sebdou où ils ont été pris en juillet. En Algérie et au Maroc, Briseis-Major se rencontre dans un grand nombre de localités calcaires. Il a été observé dans l'Atlas marocain à Tizi-Gourza, le ii juillet 1901, par une alti- tude de 9.000 pieds. M. E. G. B. Meade-Waldo signale dans The Transactions of the entomological Society of London for the year 1905, le Satyrus Mniszechi dont il décrit et figure la var. Maroccana (PI. XIX; fig. 3, Cf ; 4, q), comme abondant les 6 et 7 juillet, par une altitude de 9.000 pieds, à Tsauritz-Entsagauz. Le même Explorateur signale également (page 375, loc. cit.) Satyrus Actaea, Esper, commun dans le Grand Atlas, entre 8.000 et 10.000 pieds, le 6 juillet 1901 à Tsauritz-Entsagauz et à Tizi- Gourza ; enfin M. Meade Waldo cite le Pararge M aéra, Linné, à Tizi-Gourza, à environ lO.OOO pieds, le il juillet 1901. Aucune de ces trois Espèces de Satyridae n'a été jusqu'ici observée en Algérie, ni en Tunisie. M. Harold Powell a pris sur le Satyrus Briseis, aussi bien à l'état d'œuf qu'à l'état d'imago, des notes très intéressantes et cjue je fais reproduire comme suit : « Le Satyrus Briseis-Major est un papillon assez localisé dans chaque région habitée par lui en Algérie; il se trouve souvent en grande abondance sur les flancs et sommets de certaines collines et montagnes calcaires où il se tient dans des endroits pierreux, non boisés, et se pose sur les rochers et les pierres, que la couleur Il6 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE et les dessins de ses ailes, en dessous, imitent bien; ses vols sont généralement de courte durée; il se pose abruptement et ferme aussitôt les ailes ; les cf C^* aussi bien que les Q Q font quelquefois des vols prolongés, planant à une faible hauteur et battant des ailes par intervalles; mais j'ai remarqué que les Q Q qui volent loin, ne sont pas les sujets les plus frais. Le papillon butine par- fois sur les fleurs, principalement sur les Chardons, les Eryngium et les Euphorbes; il vit longtemps; ainsi, sur les montagnes des environs de Sebdou, où l'éclosion a commencé à la fin de juin 1907, on ne rencontrait plus de sujets frais un mois et demi plus tard, mais l'Espèce volait encore en septembre et au commence- ment d'octobre; le 6 octobre 1907 j'ai, en effet, vu plusieurs Briseis en mauvais état à Mizab, près Sebdou, et j'en ai rencontré plusieurs fois en septembre, toujours abîmés, à Merchich, à Sidi- Djlali et dans certaines autres localités de la montagne. Briseis me paraît être, en Algérie, une Espèce des régions élevées ; je ne l'y ai pas trouvé à une altitude moindre que i.ooo mètres, et les localités oîi il était abondant sont au-dessus de ce niveau; à Terny, entre Tlemcen et Sebdou, le papillon était en grand nombre, le long d'une pente recouverte de rochers cal- caires, à environ 1.300 mètres d'altitude; j'ai vu le premier individu, un cf, le 25 juin 1907; le lendemain, j'y ai pris plu- sieurs O'cf ; le i'"' juillet, 68 dçS et 14 Q Q, presque tous bien frais, ont été capturés; d'autres localités pour Briseis dans les environs de Sebdou étaient : Merchich, sur la montagne au- dessus de la maison Forestière, 1.400 mètres environ; Mizab, 1.400 mètres; Col des Azaïls, 1.200-1.300 mètres; Sidi-DjlaH, 1. 200-1. 300 mètres, et Ain-Tadjertila, 1.200 mètres environ; je ne l'ai pas vu sur la grande plaine au sud, où volaient Satyrus Abdelkader et Satyrus Fidia-Albovenosa. A Khenchela, en 1908, nous n'avons rencontré Briseis que par exemplaires isolés ; un cf a été pris par Ramo le 26 juin, sur la route de Fontaine Chaude, et en juillet, le même chasseur a pris quelques individus sur le Chabor, colline aride et rocheuse, à proximité du village; nous avons manqué de trouver sa bonne LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE II7 localité dans la région. Cependant il doit y avoir une place où Briseis vole en grande quantité. L'Espèce paraît manquer complètement dans le Djebel-Amour et aux environs de Géryville; nous ne l'y avons pas rencontrée au courant de l'exploration de ces régions faite pendant les années 1910 et 191 1. L-ans le nord du massif de l'Aurès, Briseis-Major est un papillon commun, mais qui ne se rencontre pas partout; il vole en abondance sur les plateaux élevés de Stoh et du Djebel-Asker, en juillet et en aoiàt ; ces plateaux couronnent les montagnes immédiatement au sud de Lambèse; leur altitude varie de 1.650 à 1.800 mètres; ils sont dépourvus d'arbres; mais ils présentent, par places, une végétation basse, composée largement de Gra- minées courtes; les plantes ne couvrent pas toute la surface des plateaux ; le gazon se trouve divisé par des espaces arides de terre crevassée ; il y a des pierres plates un peu partout et les excroissances rocheuses sont nombreuses; en hiver, la neige reste longtemps sur ces hauteurs, et, après sa fonte, l'eau doit séjourner dans les dépressions du terrain pendant quelque temps ; les bords des plateaux sont presque partout très rocheux, quelque- fois précipiteux ; VEiifhorbia luteola est commune ; près de l'endroit où le haut ravin de Doufana commence à se dessiner sur la partie ouest du plateau de l'Asker, il y avait, en 191 2, un grand champ d'Euphorbes fleuries, sur la pente d'un monticule calcaire; à la fin du mois de juillet, nous avons vu Briseis, en grand nombre, dans cette localité, certains exemplaires se tenaient posés sur les fleurs ; les autres planaient au-dessus des plantes; le papillon était très répandu sur le plateau, et on le faisait très souvent s'envoler des rochers, ou bien s'élever au- dessus du sol sur lequel il était posé; les mâles et les femelles n'étaient déjà plus bien frais à cette époque. Le 13 juillet 191 3, les cf cf étaient frais, mais pas encore très communs sur le Stoh ; le même jour, j'ai vu beaucoup de Briseis butinant avec Pandora, sur les grands chardons à fleurs roses, autour de la maison forestière de Sgag ; la localité était mieux abritée que les hauteurs Il8 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE du btoh, et les papillons y étaient plus avancés. Les premiers sujets de l'été 191 3 ont été pris dans la chaude vallée d'Abelgou, le 6 juillet, sur une pente pierreuse. Je n'ai pas rencontré l'Espèce dans la partie méridionale de l'Aurès, mais il y a, dans le sud, des montagnes calcaires et élevées, où il est possible qu'il existe : le Djebel-Bouss, le Djebel-Azreg et l'Ahmar-Khaddou par exemple. Il y a des problèmes concernant la vie et les mœurs de ce papillon, que je n'ai pu résoudre d'une façon concluante. Son existence, à l'état d'imago, étant longue, on se demande à quel moment a lieu l'accouplement et quelle est l'époque normale pour la ponte. Je ne me souviens pas d'avoir jamais vu Briseis accouplé; ainsi que cela s'observe chez Prieuri, les çjçS ne paraissent pas s'occuper des Q Q, pendant les premières semaines, mais plus tard, en août surtout, on peut les voir quel- quefois, poursuivant les Q Q et s' arrêtant derrière elles, lors- qu'elles se posent à terre. Ceci m'avait amené à supposer que l'accouplement avait lieu assez tard dans la saison, et le fait que les Q Ç) détériorées prises en septembre 1907 à Sebdou ont pondu beaucoup d'œufs, m'a paru une présomption favorable à cette opinion. Est-il admissible que les Q Ç, si elles sont fécondées au commencement de l'été, gardent les œufs dans leur corps jusqu'au mois de septembre? S'accouplent-elles plus d'une fois pendant leur vie? A Lambèse, à la hn du mois de juillet 191 3, des Q Q captives ont pondu des œufs fertiles; elles étaient déjà usées par le vol lorsque nous les avons prises, mais elles paraissaient n'avoir pas encore pondu. Ce fait prouve en tout cas que les Q Q peuvent être déjà fécondées en juillet. Laissées en liberté sur leurs collines desséchées, il est probable qu'elles auraient attendu plus longtemps avant de pondre ; mais en captivité nous les arrosions d'eau plusieurs fois par jour et je crois que c'est ce traitement, aidé par la présence de Graminées fraîches, qui les a décidées à commencer la ponte. Il me semble que la Q pond tardivement LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE I IQ pour éviter aux jeunes chenilles une trop longue période de jeûne en attendant la pousse des nouvelles feuilles de Graminée, qui se produit après les premières averses. L'époque de la ponte principale pourrait donc varier, selon que la température devient humide plus tôt ou plus tard. En effet, non seulement en ce qui concerne Briseis, mais pour certains autres Saiyridœ, le moment de la ponte semble être mfiuencé par l'approche d'une époque pluvieuse. Une Q assez fraîche de Briseis-Major, capturée et emprisonnée sur une touffe de Graminée dans les premiers jours d'août 1913, n'a pas déposé un seul œuf pendant huit jours, quoique bien nourrie et exposée, chaque matin, au soleil; ensuite elle a commencé à pondre sur la mousseline de la cloche, et, dans l'espace de deux jours, elle a pondu un très grand nombre d'œufs (environ 150) dont quelques-uns seulement ont été déposés sur les tiges et feuilles de Graminée; malheureusement, les fourmis ont découvert les œufs, et, perforant la mousseline, elles ont pénétré dans la cloche et ont presque tout dévoré. L'œuf est bien hxé sur la tige de Graminée ou autre objet sur lequel la Q le place; sa forme est grossièrement celle d'un tonneau placé debout ; la base étant un peu plus large que le sommet, et le plus grand diamètre horizontal se trouvant un peu plus près de la base que du sommet; celui-ci est presque plat, mais non pas nettement tronqué. Les dimensions de Tœuf sont : hauteur : 00Û095; plus grande largeur 0.00075. La couleur est blanc pur (*) ; quelques jours avant l'éclosion de la chenille, l'œuf devient grisâtre; la surface est porcelaine mate. On remarque de 13 à 16 côtes verticales bien définies, séparées entre elles par de larges vallées à fond presque plat; les côtes transversales sont très peu apparentes; en arrivant au bord du sommet, les côtes verticales se transforment en petites bosses ou boutons réunis entre eux par de très unes cloisons; ces boutons (*) Les derniers œufs pondus sont jaunâtres, mais ils n'éclosent pas. 120 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE diminuent progressivement de grosseur, vers l'espace micro- pylaire, qu'ils n'envahissent pas; l'espace micropylaire est à surface presque unie, la rosette centrale étant composée de bien petites cellules; les espaces intercostaux sont légèrement rugueux indépendamment des côtes transversales. L'œuf de S. Briseis est très voisin de celui de S. Prieitri; voici les quelques différences que j'ai pu relever : La surface est un peu plus mate chez Briseis; la forme est un peu plus étroite et l'œuf plus brusquement aplati au sommet, la partie aplatie étant plus large que dans Prieuri; les côtes paraissent légèrement plus espacées chez Briseis et la moyenne de leur nombre un peu moindre ; les boutons ou bosses du sommet de l'œuf semblent être moins serrés, quoique plus grands, chez Briseis; les côtes transversales sont un peu mieux définies chez Prieuri. La durée de l'état d'œuf dépend beaucoup de la tempéra- ture; les œufs pondus à Lambèse, à la fin du mois de juillet, ont donné les chenilles lo à 12 jours plus tard; tandis que des œufs obtenus au commencement de septembre, à Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), ne sont éclos qu'au bout d'un mois. Les chenilles de Briseis élevées en captivité acceptent plusieurs Graminées comme nourriture; sur les plateaux au-dessus de Lambèse, une Festuca est très répandue et nourrit probablement la chenille dans ces localités. A la fin d'octobre 1908, je possédais une dizaine de chenilles provenant d'œuf s pondus à Vernet-les-Bains ; elles étaient écloses au commencement de ce mois et n'avaient pas encore passé la première mue; je les ai élevées sur des touffes d'une Festuca, dans mon jardin à Hyères ; leur progrès a été très lent pendant l'automne et l'hiver; elles étaient encore dans le deuxième stade au mois de mars, et n'ont mué pour la deuxième fois qu'à la fin de ce même mois; elles n'ont jamais complète- ment perdu leur activité pendant l'hiver, et elles profitaient toujours des séries de journées plus chaudes pour monter manger en commençant par la pointe des feuilles; c'est en mars LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 121 et quand les chenilles étaient encore dans le deuxième stade, que l'habitude nocturne a commencé à se manifester, mais elle ne s'est établie définitivement qu'au stade suivant; j'ai noté, le 21 mars 1909, qu'après une journée très belle et tiède, aucune chenille n'a été observée, le soir, occupée à manger, mais que presque toutes se tenaient au repos, à mi-hauteur des tiges et feuilles. A partir du troisième stade, les chenilles ont grandi plus rapidement, et celles qui ont survécu avaient atteint leur complet développement à la un du mois de mai. Je n'ai pas obtenu l'éclosion du papillon. Je n'ai pris des notes détaillées sur la chenille que dans son deuxième stade ; je les transcris ici : largeur de la tête 0.00095 ; celle-ci est arrondie au sommet, sans proéminences; elle est un peu aplatie antérieurement, et sa plus grande largeur est à la hauteur des ocelles; la couleur de la tête est gris pâle et ses rayures brunes sont distinctes et larges. Le corps est assez trapu, ramassé, en forme de limace ; les pointes de la fourche anale sont courtes, épaisses; la couleur fondamentale est paille grisâtre pâle; la ligne médiodorsale est assez large; elle est grise et faiblement marquée sur les segments thoraciques, brune et bien marquée sur les segments abdominaux ; cette ligne est très distinctement divisée en parties plus claires et parties plus foncées; sur chaque segment, la partie foncée est sur le premier bourrelet transversal et la partie claire est sur les bourrelets suivants (le premier bourrelet est le plus grand; il occupe un peu plus d'un tiers de chaque segment) ; cette division de la ligne médiodorsale est surtout marquée sur les segments abdominaux. Chez les individus qui possèdent une ligne médio- dorsale plus sombre que d'habitude, le contraste des sections claires et des sections foncées n'est pas aussi prononcé que chez les exemplaires normaux; à partir du cinquième segment abdo- minal, la ligne médiodorsale s'amincit progressivement dans la direction de la fourche qu'elle n'atteint pas; en bordure de cette ligne, la couleur fondamentale paraît un peu plus claire que d'habitude; il y a deux lignes sous-médianes : la première étroite 122 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE et faiblement indiquée, légèrement ondulée, plus forte sur les segments thoraciques, la seconde plus distincte, dédoublée et ondulée, moins fortement ondulée cependant que chez Prieuri; entre cette ligne et la marge supérieure de la ligne suprastigma- tale, se trouve un étroit espace de la couleur claire fondamentale. La ligne suprastigmatale est large et légèrement ondulée, sur- tout sur son bord inférieur; elle est d'un gris brun foncé; ses bords sont d'un brun encore plus foncé; sur le bord supérieur, cette partie plus sombre prend la forme d'un large accent cir- conflexe sur chaque segment abdominal. La ligne stigmatale est assez large; elle est formée d'un semis d'atomes bruns qui se trouvent plus serrés sur les bords qu'au centre de la ligne; c'est une ligne beaucoup plus claire que la suprastigmatale; elle est très faible sur les segments thoraciques, où la ligne blanche en bordure dorsale (jlange Une) s'élargit. Les stigmates, vus à la loupe, apparaissent comme des petits points noirs; celui du segment prothoracique et celui du huitième de l'abdomen étant plus grands que les autres, comme d'habitude. La ligne en bordure dorsale est blanche; immédiatement en dessous d'elle se trouve une large ligne brun foncé, la plus foncée de toutes les lignes du corps; comme pour les autres lignes, les bords en sont plus sombres que le centre; cette ligne s'arrête sur le huitième segment abdominal. Le reste de la surface ventrale est gris, ainsi que les pattes thoraciques et membraneuses; la base des pattes a une teinte verdâtre et cette même teinte se retrouve sur le centre ventral ; la fourche anale est grise et la ligne supra- stigmatale est prolongée sur le bord extérieur de chaque pointe. La chenille est recouverte d'une très courte pubescence. Dans les trois stades qui suivent, la chenille ne change pas beaucoup d'apparence. Elle mange, alors, la nuit, et se tient cachée dans la touffe pendant le jour, la tête en bas ». La forme Q Pirata, chez laquelle la fascie normale blanche des ailes, en dessus, se trouve remplacée par une fascie fauve, n'a pas encore été trouvée en Algérie; pas plus d'ailleurs que la LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE I23 forme Q U hagonis qui est, pour Prieiiri, ce que Pirata est pour Bnseis. La Ç) U hagonis de Prieiiri n'a encore été observée qu'en Espagne. Satyrus Prieuri, Pierret. Vole tout l'été; est assez abondant dans plusieurs localités de la province d'Oran. La notice concernant le Satyrus Prieuri est imprimée aux pages 265 et 266 du Volume 111 des Etudes de Lépidoptérologie comparée. La forme Q U hagonis, Obthr., n'a pas été trouvée en Algérie jusqu'ici. D'ailleurs, en Espagne, où habite aussi le Satyrus Prieuri, la race que j'ai appelée Iberica (^Etudes de Lépidopt. comparée. Vol. III, p. 266), est bien distincte de la morphe algé- rienne du Satyrus Prieuri. Comme c'est en Algérie que le Satyrus Prieuri a été découvert, c'est la race algérienne, décrite la pre- mière, qu'on doit considérer comme typique. Le Satyrus Prieuri est assez abondant dans plusieurs localités de la province d'Oran ; le papillon vole en juin et en juillet. Je fais figurer, pour com- paraison, un c? Prieuri-lberica pris à Albarracin par Fabresse, en juillet et août 1907, ainsi que deux cf et une Q Prieuri, race typique, pris l'un des cf, à Sebdou par Harold Powell, en été de la même année 1907, et l'autre cf, ainsi que la grande g à Beni- Ounif par le lieutenant Bacqué. M. Harold Powell a noté sur la biologie du Satyrus Prieuri, un certain nombre d'observations que je transcris comme suit : (( Ce papillon est répandu sur les Hauts-Plateaux de la pro- vince d'Oran; mais je ne l'ai vu nulle part abondant; il se pose sur le sol, sur les rochers et sur les pierres des petites crêtes et collines des grandes plaines et se trouve aussi sur les montagnes élevées, montrant une préférence pour les pentes rocailleuses et les crêtes. On le voit souvent survoler l'Alfa. Pendant les plus fortes chaleurs de la journée, le papillon se met à l'ombre d'une pierre 124 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE OU d'une touffe d'Alfa; je l'ai souvent vu se réfugier dans les crevasses des talus en bordure des lits d'oueds d'où il n'est pas très facile de le faire s'envoler. Sur les montagnes de Sebdou, de Géryville et d'Aflou, Frieurï vole sur les sentiers rocailleux et dans les espaces libres, mais je l'y ai toujours trouvé assez rare; dans ce genre de localité, il s'arrête à l'ombre des petits chênes-verts et d'autres buissons, mais il ne se pose jamais sur le feuillage ni sur les troncs d'arbre. Nous avons vu Prïeuri pour la première fois à Sebdou, le 10 juin 1907. Ramo, qui était allé, ce matin-là, pour chasser vers la forêt des Azaïls, a rapporté 3 belles Q, bien fraîches, qu'il avait prises sur les fleurs de chardon, près de l'Oued, à 500 mètres de la Redoute. Le lendemain, j'ai été voir la localité; c'était un champ inculte où poussaient des quantités de gros chardons à fleurs roses très recherchées par divers papillons; en dehors du champ, il y avait aussi des chardons; Vanessa Cardui et Gonepteryx Cleo-patra étaient de beaucoup plus nombreux que tous les autres papillons, sur ces fleurs; nous n'avons pris, en passant, qu'un c? et une Q de Prieiiri; ils étaient très frais. D'autres Prieuri ont été capturés ensuite dans la même localité, principalement sur les chardons entourant le champ; il y avait ici, toujours plus de Q Ç que de (j CT; à cette époque, nous ne rencontrions pas Prieuri ailleurs ; il n'y en avait pas dans les terrains secs et broussailleux des environs ; en tenant compte de la fraîcheur des exemplaires pris dans le champ en juin, je suis persuadé que les papillons étaient nés dans son voisinage. Une Q déchirée, mais fraîche, a été capturée, le 24 juin, et gardée pour la ponte; elle n'a pas pondu. Prieuri vit très longtemps à l'état d'imago; on peut le voir voler pendant tout l'été aux environs de Sebdou, de Daya, de Géry- ville et d'Aflou; l'éclosion a lieu en juin et pendant la première partie de juillet, mais je crois que, pour la plupart, les papillons éclosent en juin; on ne rencontre plus de sujets parfaitement frais après la première quinzaine de juillet. La localité, près de Sebdou, où nous prenions, presque chaque LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE I25 jour, des Prieuri, au mois de juin, a été complètement abandonnée par l'Espèce un peu plus tard; alors, nous ne trouvions plus le papillon sur les fleurs, qui, d'ailleurs étaient devenues rares, mais il se rencontrait dans la plaine d'Alfa au sud et sur les collines calcaires plus ou moins arides. Les Frieuri venaient souvent se poser sur les excréments des chevaux et des mulets, au milieu des chemins et sentiers. La ponte s'effectue tard dans l'été; ce que j'ai noté à ce sujet pour S. Briseis s'applique également à Prieuri; cependant je n'ai jamais pu faire pondre les Q Q de Prieuri en juillet; ce n'est que vers la fin du mois d'août 1907 que quelques Q Q, gardées depuis une douzaine de jours en captivité, ont commencé à déposer leurs œufs. Pendant le mois de juillet et dans la première quinzaine d'aoïlt, j'avais plusieurs fois enfermé des Q Q sous des cloches de mousseline qui recouvraient des touffes d'Alfa et autres Gra- minées; j'avais soin de leur donner du miel dilué à boire et de les asperger d'eau plusieurs fois dans la journée; elles ont vécu, à chaque occasion, une quinzaine de jours, mais elles finissaient par succomber sans avoir pondu ; enfin, le 29 août, les dernières Q Q ont commencé à pondre et ont continué à déposer des œufs, les jours suivants. Le i" septembre, a éclaté un fort orage accom- pagné d'une abondante chute d'eau; cet orage a mis fin à la sécheresse et, à partii de ce moment, l'herbe et certaines plantes basses ont commencé à donner des pousses nouvelles ; il semble- rait que les Q Q de Prieuri aient pressenti l'approche de la période plus humide et que cet instinct ait éveillé chez elles le besoin de pondre. Les Q Ç) que l'on prend en juillet, en août et même en septembre, sont très vigoureuses, quoique souvent bien défraî- chies, et leur abdomen est gros, bien rempli d'œufs. Je crois que l'accouplement est répété plus d'une fois chez cette Espèce; la raison qui m'a amené à former cette opinion est la suivante : Toutes les Q Q capturées vers le 1 5 août, et gardées vivantes, ont pondu, au bout d'un certain temps, un petit nombre d'œufs, tous fertiles. J'ai obtenu des œufs, dans ces conditions, 126 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE à SebdoLi en 1907 et à Géryville en 19 10. Les Ç Q étaient donc déjà fécondées au moment de leur capture, vers le 15 août. En septembre 1910, j'ai plusieurs fois vu, à Géryville, des accouplements de P rien ri; comme toutes les Q Q prises vers le 15 août étaient déjà fécondées, il est probable que les accouple- ments constatés au mois de septembre n'étaient pas les premiers pour les individus observés. i:.n vue d'expliquer un deuxième rapprochement des sexes, il me semble admissible que ceci soit nécessaire pour la fertilisation de tous les œufs, à cause de l'intervalle considérable qui existe entre le premier accouplement et le commencement de la ponte; celle-ci continue pendant longtemps, le nombre d'œufs pondus par une Q, chaque jour, n'étant pas grand; vers la fin de sep- tembre, on prend encore des Q Q ayant des œufs dans le corps. Au début de leur existence à l'état parfait, les cfcf ne paraissent pas s'occuper des Q Q ; je n'ai constaté aucun accouplement, en juin ni en juillet. Au mois de septembre, au contraire, les cf cf sont très assidus; j'ai remarqué les mêmes mœurs chez S. Semele- Algirica, sans avoir été témoin d'aucun accouplement chez cette Espèce. Je transcris ici certaines notes prises à Géryville, en septembre 191 0 : « 16 septembre. En retournant à travers les ondulations arides de la plaine au sud-ouest, j'ai vu, aujourd'hui, trois couples de Salyriis Prieiiri et j'ai capturé une paire dont j'ai gardé la Q, qui s'était séparée du çS dans le filet, pour la faire pondre. De tous les Satyrus qui me sont connus, Prieiirï et Semele sont, peut-être, ceux qui vivent le plus longtemps. » La seconde observation qui suit, est datée du 24 septembre 1910 : (( J'ai remarqué une grande ressemblance dans certaines habi- tudes de Semele et de Prieiiri; les cf de Semele, comme ceux de frieuri, suivent beaucoup leurs Q (^ en ce moment ; si un cf ren- contre une Q, il la suit de près, conservant toujours une petite distance cependant; la Q se pose par terre;. le cf fait de même; LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE I27 tous deux ferment leurs ailes et restent immobiles, le cf se tenant à 20 ou 30 centimètres en arrière de la Q ; ils restent ainsi pendant 10 minutes parfois. Si la Q s'envole, le cf la suit immédiatement et ils se posent de nouveau de la même façon. J'ai pu observer des couples agissant ainsi pendant plus d'une demi-heure, et, le plus souvent, je les perdais de vue, le cf poursuivant toujours la Q. Je n'ai jamais été présent au moment oh le cf se décide à se rapprocher de la Q, mais j'ai vu, ce mois-ci, plusieurs accouple- ments de Prieuri. Les deux Espèces, Prieuri et Semele, sont défraîchies maintenant, ayant trois mois, et même plus, d'exis- tence, mais malgré cela, les individus sont encore vigoureux. » Prieuri est un papillon quelquefois assez facile à prendre; on le capturait sans trop de difficulté sur les chardons, à Sebdou en juin, et il se laisse approcher pendant la plus forte chaleur de la journée, surtout l'après-midi; il se tient alors à l'ombre; il arrive même que le coup de filet ne le fait pas s'élever du sol, et si l'on compte sur ceci pour le prendre au moment oii il s'en- vole, on peut quelquefois le manquer, le filet passant au-dessus du papillon. A d'autres occasions, il est bien plus méfiant, il s'envole avant que l'on soit à portée, et il se met souvent à planer, les ailes ouvertes et un peu relevées, agitées de petits battements de temps en temps. Quand on voit planer un Prieuri, cf ou Q, on peut supposer qu'il ira loin et que, s'il se pose, il ne se laissera pas facilement approcher. Les Q Q couvrent souvent de longues distances sans arrêt, volant à une faible hauteur au-dessus du sol. Les œufs pondus en captivité ont toujours été déposés par les Q Q sur la mousseline et non sur les tiges ou feuilles des Graminées; mais, à l'état libre, il est fort probable que les œufs sont fixés sur les Graminées. Je n'ai jamais trouvé la chenille de Prieuri en liberté; elle vit probablement sur l'Alfa et sur la Lygaeum Spartmn, peut-être aussi sur d'autres Graminées; en captivité, on peut l'élever sur certaines Festuca; la chenille accepte la Poa annua. 128 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE La durée de l'état d'œuf est variable dans certaines limites; les œufs de la var. Ibeiica Obthr., qui m'avaient été envoyés par Miss Fountaine (*), en 1905, sont éclos environ 10 jours après la ponte; à Sebdou, en 1907, les premières chenilles ont paru au bout de 22 jours; à Géryville, en 1910, réclosion des chenilles a eu lieu entre 15 et 20 jours après la ponte. L'œuf est petit pour un papillon de la taille de Prieuri; ses dimensions sont approximativement : hauteur 0.00 1 ; plus grande largeur 0.00085. Le sommet est moins tronqué, un peu plus arrondi que chez Brisets. La surface est blanche, porcelanée, la coque assez épaisse; il y a 16 ou 17 côtes verticales bien définies, séparées entre elles par de larges vallées à fond peu concave; au sommet, les côtes sont remplacées par de petites bosses, diminuant de grosseur vers la rosette micropylaire qui est composée de très petites cellules. Environ deux jours avant l'éclosion de la chenille, la couleur de l'œuf devient gris plomb pâle. La comparaison des œufs de Prieuri et de Briseis se trouve imprimée à un autre article, dans le présent ouvrage. Les chenilles provenant des œufs obtenus en Algérie n'ont pris que très peu de nourriture en automne et pendant l'hiver. A la fin du mois de janvier 191 1, aucune des chenilles que je possédais alors, et qui étaient nées à Géryville, n'avait encore passé la première mue; elles avaient, à ce moment, 0.004 ^e longueur; j'en ai fait la description suivante : La tête est brun gris foncé; la couleur fondamentale du corps est d'un gris brunâtre pâle et sur ce fond se détachent les lignes brunes; la ligne médiodorsale est plus foncée et aussi un peu moins large sur le premier bourrelet de chaque segment abdo- minal que sur les bourrelets suivants; ceci fait que la chenille (*) Prière de vouloir bien se reporter à une notice intitulée : Egg and young larva oj Satyrus Prieuri, parue sous la signature de Harold Powell, dans le n» 10 du Vol. XVII de The Etitomologisfs Record and Journal of Variation, October 15*'' 1905. LEPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 129 présente une série de taches foncées, de forme oblongue, le long du centre dorsal ; les marges de la ligne médiodorsale sont marquées par une fine ligne brune; intérieurement à la marge il y a, de chaque côté également, une autre fine ligne. Comme chez Briseis, les deux lignes sous-médianes se distinguent : la pre- mière étroite et faiblement indiquée, la deuxième plus foncée et bien apparente. Les lignes suprastigmatale et stigmatale sont bien marquées, ainsi que la ligne brune en dessous de la bordure du dorsum. La chenille ne montre aucune trace d'une teinte verdâtre. Par la vigueur de ses dessins, cette chenille, encore dans le premier stade, est comparable à celles de bien d'autres Saty- rides dans les stades plus avancés. Elle est un peu plus foncée que la chenille de S. Briseis, qui est, elle aussi, fortement marquée. I^es rayures brunes de la tête apparaissent dans le deuxième stade; elles sont larges et bien marquées (*). La chenille grandit assez rapidement dès le retour des temps plus chauds; elle arrive au cinquième stade, vers la fin du mois de mars, et descend se chrysalider sous la surface du sol un mois, environ, plus tard; l'habitude nocturne apparaît de bonne heure; dans leur deuxième stade, les chenilles sont déjà plus nocturnes que diurnes. Un caractère notable de la chenille de Priai ri est l'ondulation des lignes sous-médianes et suprastigmatale, ondu- lation plus prononcée que chez Briseis. Ce caractère est appré- ciable dans le premier stade; il est très marqué dans les deux derniers stades. La métamorphose a lieu dans une cavité souterraine, à peu de profondeur. La chrysalide est couleur acajou clair et paraît très voisine de celles de Alcyone, d'Ellena et de Semele; cependant, je n'ai pas eu l'occasion d'examiner une chrysalide parfaitement formée, la seule chenille qui avait réussi à se chrysalider n'ayant pu se débarrasser complètement de sa peau. » (*) Chez les chenilles de Prieiiri-Iberica, élevées en 1905-1906, les rayures de la tête étaient déjà visibles dans le premier stade I ^O LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE Satyrus Semele, Linné. Voici comment Linné décrit Semele dans Systeiiia Na/urœ, p. 772 (Editio décima tertia ad Editionem duodecimam rcfor- matam Holmiensem. Vindobonœ, MDCCLXVII) : (( Seinclc. 148. P. N. {JPapïlio Nymphalis) alis dentatis fulvo nigroque nebulosis : primoribus utrinque ocellis duobus; posticis supra unico ». Aux pages 267 à 270 du Volume III des Etudes de Lépidop- térologïe comparée, j'ai disserté sur les variations géographiques du Satyrus Semele, robuste et vivace Espèce, répandue depuis l'Ecosse jusqu'aux frontières sahariennes. Dans la i''" livraison des Etudes d'Entomologie (p. 27), j'ai désigné par le nom de Algirica la morphe algérienne de Semele; mais il manque tou- jours une figuration comparative de toutes les races de cette Espèce, si intéressante à cause de sa vulgarité même et de l'éten- due de son aire d'expansion dans la région palaearctique occi- dentale. Je commence à combler cette lacune par la représentation suivante : 1° deux Q de la race sicilienne Siciliana, Obthr., récoltées par Bellier de la Chavignerie; l'une de ces Q présente une troisième tache noire — presque un ocelle — aux ailes supé- rieures, en dessus; cette tache n'existe en dessous que d'un seul côté et encore très réduite. Je crois que la morphe Siciliana peut être classée à côté d'Alginca dont elle se rapproche le plus. Mais, outre que les cf siciliens paraissent très variables, puisque certains d'entre eux se distinguent à peine de ceux de Corse et de Sardaigne appelés Aristœns, les Q, en général, sont plus belles et plus grandes que celles d'Algérie. 2° Un cf et quatre Q de la race Algirica, comme suit : un cf de Sebdou (juin 1907), présentant, aussi bien qu'une des Q Siciliana, une tache noire, supplémentaire aux ailes supérieures, en dessus. Cette tache manque en dessous; — • une Q de Sebdou (juin 1907), mon- trant aussi une tache noire supplémentaire; mais cette tache surnuméraire, à l'inverse des deux cas précités, est placée en LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 131 dessous de la grosse tache ocellée inférieure normale, et non au-dessus. Cela indique qu'il doit exister des exemplaires de Semele ornés non seulement utrinque ocellis diiobus, comme dit Linné, mais ocellis quatuor, sinon même d'un plus grand nombre encore, c'est-à-dire d'autant de taches ocellées, ou pouvant passer pour telles, qu'il y a d'espaces intranervuraux le long du bord marginal des ailes supérieures ; — deux Q de Sebdou (juin et juillet 1907) plus vivement colorées que les précédentes; l'une a le fond gris des ailes inférieures, en dessous, presque unicolore, c'est-à-dire dépourvu de l'éclaircie blanchâtre, médiane ordi- naire, extérieurement contiguë à la ligne noire fulgurée trans- verse; — enfin une Q de Géryville (juin 1910) ayant un aspect plus clair que les précédentes. Linné a emprunté le nom de Semele à la Fable, aussi bien que tant d'autres noms distribués entre les Espèces de papillons qu'il désignait scientifiquement pour la première fois. Précédem- ment les occasions ne m'ont pas manqué d'observer combien le génie poétique de Linné, cherchant dans les souvenirs de l'anti- quité grecque et latine, les termes mêmes de la Nomenclature qu'inaugurait le Systenia Natnrœ, avait largement fait participer les légendes mythologiques à l'œuvre admirable qu'a suscitée son génie. Il paraît vrai de dire que « Les Grecs, enfants gâtés des Filles de Mémoire, De miel et d'ambroisie ont doré cette histoire. » Or, l'histoire en question commence avec les Equités Trocs : Priannis, Hector, Paris, Helenus, Anchises. /Eneas; elle se pour- suit avec les Equités Achivi : Menelaus, Ulysses, Agameninon, Diomedes, Pyrrhus, et cœteri. D'ailleurs, nul ne pourrait raisonnablement prétendre que cette agréable parure cueillie dans les rapsodies d'Homère, qui est le plus grand des poètes, et appliquée par l'illustre Natu- raliste suédois à une partie du monument immortel qui s'appelle 132 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE le Systema Naiurœ, ait pu faire quelque tort aux Sciences natu- relles elles-mêmes. Au contraire, sans faire rien perdre à la précision scientifique, l'évocation linnéenne des chimères panthéistes et des traditions héroïques de l'antiquité, présente comme une sorte de délassement à ceux qui, se consacrant à l'histoire naturelle des Lépidoptères, ne sont insensibles à aucune des circonstances qui intéressent l'étude de leur choix. Pour ma part, j'ai toujours goûté dans le commerce de la littérature entomologique, le charme qu'y a introduit l'imagi- nation de Linné, nourrie aux sources classiques les plus pures. Non seulement Charles Linné fut l'admirable inventeur de la nomenclature binaire qui fit sortir la Science de l'incohérence et du chaos; non seulement il se montra doué de ce merveilleux esprit de méthode, d'exactitude et de précision dont il fit profiter les Sciences naturelles; mais il était aussi savamment versé dans la connaissance approfondie des belles-lettres. On peut presque dire que la langue latine était l'expression la plus spontanée de sa docte pensée. L'ancien apprenti cordonnier, fils du pauvre pasteur suédois, devenu élève de l'Université d'Upsal, fit grand honneur à ceux qui furent pour lui le prœsidium et dulce decus dont Horace s'est dit lui-même redevable à Mécène, issu d'une race de rois. Il est juste de dire que ce fut une grande gloire pour les protecteurs de Linné, les Stobaeus, les Olaus, les Celsius, les de Rudbeck, d'avoir contribué à développer son génie; aussi les générations actuelles devront-elles toujours saluer avec recon- naissance la mémoire de ces hommes dont la générosité se montra si éclairée. Du reste la Science n'a pas besoin de sembler rébarbative, et, sans que la recherche de la vérité scientifique soit pour cela négligée, il me semble qu'en cours de route, il est permis au voyageur de s'arrêter aux portes de la ville, de jeter les yeux sur le paysage lointain et d'évoquer même, avant de se remettre en marche, quelques fabuleuses légendes et antiques souvenirs. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 133 Faisons ainsi, à propos de Semele. Elle était fille de Cadmus, fils d'Agénor et de Telephassa, et de Hermione ou Harmonie, fille de Mars et de Vénus. Semele avait trois sœurs : Ino, Agave et Autono'é. Sans doute elles étaient belles et plaisaient même aux Dieux. Les quatre filles de Cadmus portaient des noms qui ont tous servi à désigner des Espèces de papillons; l'un de nos plus grands poètes leur a consacré des vers harmonieux que je me permets de rappeler ici : (( Quand, sur le Cithéron, la Bacchanale antique Des filles de Cadmus dénouait les cheveux, On laissait la beauté danser devant les dieux ; Et si quelque profane, au son de la musique, S'élançait dans les chœurs, la prêtresse impudique De son thyrse de fer frappait l'audacieux. » (*) Semele ayant donc été admise à danser devant les dieux, sa beauté plut à Jupiter; il en résulta la conception de Dyonysos, communément appelé Bacchus. Cependant Semele mourut em- brasée par les foudres de Jupiter qui était venu la visiter. Cette visite du roi des dieux et des hommes fut suscitée par la perfide malice de la jalouse Junon. Celle-ci avait fait per- suader à Semele, par sa nourrice Beroc, d'exiger de Jupiter, comme preuve de son amour, qu'il vînt la voir dans tout i'éclat de sa gloire. Jupiter consentit à paraître au milieu des foudres et des éclairs; le palais s'embrasa; Semele, victime de son indis- cret désir, périt dans les flammes. Mais Jupiter fit retirer par Vulcain celui qui devait être Bacchus, le mit dans sa cuisse oii il le fit coudre par Sabasius et le garda ainsi le reste des neuf mois. Bacchus, devenu grand, descendit aux Enfers pour en retirer sa mère Semele; il obtint de Jupiter qu'elle serait élevée au rang des immortelles. Semele changea alors de nom et elle s'appela Chione. Mais de même que comme Semele, elle désigne un (*) A. de Musset. A la Mi-carême, mars 1838. 134 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE papillon du genre Saiyrns, anisi, comme CJnune, elle sert à dis- tinguer une variété de la Collas polaire BooLhii. Chaque année, j'aime à revoir le Satyrus Seme.le voltiger — oserai-je dire : danser — au milieu des champs secs et arides. Régulièrement il revient annoncer que l'été est proche et fait déjà jaunir les gerbes. Comme mon pays ^e trouve compris dans la zone d'habitat de l'Espèce, il me suffit d'un léger déplacement pour aller voir, de nouveau, à la saison propice, la résurrection des papillons, propagateurs inlassables de leur Espèce. C'est à la Côte d'Emeraude, à la pointe du Grom de Cancale, sur ce cap granitique dont la base est toujours battue par les flots écumeux, que j'ai vu, la dernière lois, en 191 3, le Satyrus Seniele, aller et venir sur la lande, au milieu des bruyères et des ajoncs en fleurs. Le Satyrus Seniele est assez familier; comme il est abondant, on l'aperçoit constamment animant de son activité la pelouse hérissée de rochers. Il me plaisait de regarder les autres papillons compagnons de Seniele, sur le promontoire rocheux du Groin de Cancale. Assis sur une pierre émergeant de la lande, en face de V Oceanus britannicus, je comptais les déifications de qualité diverse inventées par l'antiquité polythéiste et dont les noms servent aujourd'hui à désigner de simples papillons. Là, il y avait, avec le Satyrus Semele, le Papilio Machaon (flls d'Esculape et d'Epione, frère de Podalire), la Lycœna Icarus (flls de Dédale), les Satyrus Megœra (l'une des Furies) et Tïthonus (flls de Laomedon), VHesperia Actœon (flls d'Aristée et d'Autonoë, qui était elle-même l'une des filles de l'infortuné Cadmus... Sans doute tous ces petits papillons dont les Espèces vivent encore sur la Terre, étaient contemporains de l'Homme des temps antiques, lorsque quatre mille Dieux n'avaient pas un athée; mais l'Homme, dans les anciennes Sociétés d'Athènes et de Rome, n'apportait guère d'attention à l'étude d'aussi faibles créatures. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 135 Il a fallu attendre le XVI II" siècle de notre ère pour voir paraître les travaux de Linné et commencer l'inventaire et la classification des Espèces d'êtres créés. Le Papillon, envisagé d'une façon générale, ne tenait de place dans l'imagination poétique des Grecs que comme un symbole. Ils considéraient les papillons comme une image de l'âme humaine et désignaient par le même nom grec : Psyché, l'âme et le papillon. C'est toujours avec des ailes de papillon aux épaules que les Grecs représentaient la jeune princesse Psyché que sa merveilleuse beauté fit aimer de Cupidon, fils de Vénus. Dans les conceptions platoniciennes, le papillon semblait être comme une allégorie de l'immortelle renaissance de l'âme humaine, à cause de l'incessante transformation de la chenille en papillon, passant par l'état léthargique de la chrysalide. Les L-atins ont goûté l'idée grecque; Apulée, écrivain du IP siècle, semble s'en être fait l'interprète dans le poème des Métamorphoses où il raconte la fabuleuse, mais dramatique légende de Psyché. M. Harold Povvell donne sur Semele les renseignements sui- vants, en ce qui concerne les mœurs de ce Satyrits en Algérie : (( Le Satyriis Semele- Al girïca est un des plus communs des papillons d'Algérie, du moins dans les régions élevées; n'ayant que très peu chassé dans la zone du littoral, je ne puis dire s'il y est aussi abondant que sur les montagnes de l'intérieur. C'est surtout dans les bois et forêts de chênes verts que Semele se plaît ; il est beaucoup moins commun dans les régions entièrement déboisées. Nous l'avons trouvé en grand nombre sur toutes les collines et montagnes boisées des environs de Sebdou, Magenta, Daya, Géryville et Aflou, localités de la province d'Oran. L'Espèce m'a semblée moins abondante dans les montagnes de r Aurès qu'en Oranie ; mais Semele y était encore un des papillons les plus souvent rencontrés. T^'éclosion a lieu normalement pendant le mois de juin et se prolonge jusqu'en juillet ; si la saison est précoce, les éclosions 136 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE peuvent commencer en mai (je parle toujours pour les Hauts Plateaux et les montagnes d'entre 900 et 2 000 mètres d'altitude). Voici d'ailleurs les dates des premières captures de Semele pour six années : Sebdou (qoo- 1.400 mètres), 1907, 2 juin. El-Kantara (550 mètres), 1908, 18 mai; un exemplaire déjà passé. Khenchela (1.250 mètres), 1908, 23 mai. Géryville (1.400 mètres), 1910, 7 juin. Aflou (1.400- 1.600 mètres), 191 1, 13 juin. Lambèse (i. 250-1. 700 mètres), 191 2, 13 juin; déjà abondants à cette date. Lambèse (1.500 mètres), 1913, 6 juin. La saison chaude a été précoce en 1908; assez précoce en 1907 ; en retard en 1910 et en 191 1. Pendant le mois de juin, le papillon recherche les fleurs; nous l'avons remarqué, principalement, sur les thyms et les chardons; dans les clairières de la forêt et autour des champs incultes, à gauche et à droite du chemin de Teniet-el-Amar, près Sebdou, les Semele étaient par dizaines à la fois sur les fleurs de thym, dans les matinées chaudes de juui 1907; avec eux se trouvait VEpinephele Eudora-mauritanica, qui éclôt à peu près en même temps, et qui abonde, tout l'été, dans les mêmes situations que Semele. J'ai vu Semele également, en très grand nombre, au Djebel- Ksel, près de Géryville; là aussi, le papillon fréquentait les fleurs du thym, en juin, dans les enclaves ou clairières de la forêt; il y en avait beaucoup aux bords d'une grande prairie en tête de la vallée qui descend du Ksel vers Stiten ; l'altitude ici est de près de 2.000 mètres. Plus tard, en juillet, août et septembre, les fleurs font défaut ; le papillon se tient alors à l'ombre des buissons de chêne vert ou sur les troncs des arbres ; certains chênes verts semblent être préférés aux autres; en juillet et août, dans certaines parties de la forêt, à Sebdou et aussi sur le Ksel, des nuages composés des LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE I37 Satyrus Seinele et Eudora, ainsi que de Catocala nyinphœa, sor- taient des buissons à notre passage ; tous cherchaient à se réfugier de nouveau le plus vite possible, les Semele et les Catocala de préférence sur les troncs, les Eudora sur le sol au-dessous des buissons, quelquefois sur les feuilles; souvent les Semele tour- naient autour de nous ; leurs mouvements et leur vol sont rapides, ce qui les rend difficiles à prendre; ils ont aussi l'habitude de se poser sur les troncs protégés par les branches ; vers le soir, leur vol est encore plus rapide et erratique, lorsqu'on les dérange. Au mois de juin, posés sur les fleurs du thym, ils sont beau- coup plus faciles à prendre. En juillet, et même en août, on prend encore des individus bien conservés, principalement des Q ; quoique le papillon soit commun, on éprouve toujours du plaisir à prendre une belle Q bien fraîche de S ai y rus Seuiele-Algirica, forme si richement colorée. Il m'est arrivé plub d'une fois de voir voler cette Espèce autour de la lampe, pendant que nous chassions à poste fixe, la nuit. J'ai pris Satyrus Sylvicola de cette façon aussi; il s'agissait sans doute, dans chaque cas, de papillons se trouvant au repos dans le voisinage et que la clarté de la lampe avait éveillés. Semele- Al girica, ainsi que je l'ai déjà dit, est surtout un habi- tant des parties boisées d'une région; mais il se rencontre aussi sur les plaines incultes de l'Oranie et sur certaines collines et montagnes arides ; dans ces localités sans arbres, il se pose par terre ou sur les rochers, souvent à l'ombre d'une touffe d'alfa. Vers la fin du mois d'aoiÀt et en septembre, le cf, qui jus- qu'alors paraissait indifférent envers la Q, commence à s'occuper d'elle; il se comporte tout comme le Satyrus Prieuri dont j'ai déjà décrit la façon d'agir. Je n'ai jamais vu un accouplement de Semele, mais, considérant l'analogie qui existe, à ce moment, entre ses mœurs et celles de Prieuri, il est très probable qu'un accouplement a lieu à cette époque; ce n'est peut-être pas le premier. 138 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Les Q que j'ai plusieurs fois essayé de faire pondre, en juin et en juillet, n'ont jamais voulu déposer un seul œuf; à Sebdou, en 1907, ce n'est que dans les derniers jours d'aoiàt que les Q captives se sont décidées à pondre quelques œufs. J'ai obtenu plus facilement des œufs en septembre, mais je trouve que Semele-Algirica ne pond pas très abondamment en captivité. La chenille grandit lentement pendant l'hiver; elle est tou- jours disposée à se nourrir si la température n'est pas trop rigou- reuse, et ce n'est pas souvent le cas à Hyères où je l'ai élevée ; elle se chrysalide en terre au mois de mai. A Aflou, nous avons trouvé quelques chenilles de cette Espèce, le 15 mai 191 1, le jour, sous des pierres contiguës à de petites touffes de Lygtemn spartmn; elles étaient presque complètement développées et n'ont pas tardé à se mettre en chrysalide. Plusieurs chenilles de Semele-Alginca ont été prises, en mai 191 3, la nuit, sur les collines et montagnes des environs de Lambèse; elles y mangeaient plus d'une Espèce de Graminée; nous les trouvions souvent haut sur les feuilles, en train de prendre leur repas du soir ; si on les éclairait pendant quelques instants avant de les toucher, elles se retournaient, généralement, et redescendaient dans la touffe ». Satyrus Powelli, Obthr. Découverte par Harold Pov^ell, en septembre 1910, dans la région sud-oranaise de Géryville, et retrouvée l'année suivante, mais en plus petite quantité, à Aflou. L'Espèce a été décrite par moi dans le Bulletin de la Société entomologiqne de France, 1910, p. 333; j'ai donné la figuration de trois cf et deux Q, sous les n"^ 714 à / 18 de la PI. LXXVIII, dans le Volume V, Part. I, des Etudes de Lépidoptérologie comparée. M. Harold Powell a fait, à propos de la biologie de l'Espèce de Satyriis qu'il a découverte et que j'ai eu le plaisir de lui dédier, les observations suivantes dont il veut bien me faire part et que je transcris textuellement : LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 139 (( C'est le dernier Satynis à paraître, en Algérie; nous l'avons rencontré pour la première fois le 24 septembre 1910; l'Espèce ne volait certainement que depuis peu de jours, car les individus capturés étaient presque tous bien frais; à Aflou, en 191 1, le premier Poivellï a été pris le 21 septembre. L'éclosion ne doit pas commencer avant le 15 septembre; c'est entre le 20 et le 30 de ce mois que le papillon se montre le plus abondant; il vole encore en octobre; mais les sujets frais sont alors à l'état d'ex- ception, peu d'éclosions ayant lieu après la fin de septembre. La découverte de ce nouveau Satyni.s a été une surprise agréable; il y avait déjà plus d'un mois que Charles David et moi, nous explorions les montagnes élevées des environs de Géryville, dans l'espoir d'y trouver le Satyrus Hansii, et j'étais déjà convaincu, par l'insuccès de nos recherches, que Hansii manquait en cette partie de l'Oranie; c'était une déception; nous ne nous doutions pas qu'une Espèce inconnue, tout aussi intéressante c]ue Hansii, nous attendait dans la plaine. J'avais décidé de faire une tournée au nord de Géryville, en suivant la piste de Saïda, très peu fréquentée depuis la construction de la nouvelle route Géryville-Bouktoub. Je ne comptais pas trouver grand chose en fait de diurnes, la saison étant trop avancée, mais la chasse de nuit pouvait donner des Espèces intéressantes de ce côté. Nous nous sommes donc mis en route, le 24 septembre, avec l'intention de camper, le soir, à Kheneg-Azir, ovi se trouve un bordj inhabité, à 28 kilomètres de Géryville. Je cite ici les observations inscrites dans mon carnet, en ce qui concerne l'excursion, et les mœurs de Salyrus Powelli : « 24.9. 1910. Charles David et l'Arabe Kouider sont partis à 9 heures du matin avec l'âne noir chargé des provisions et du matériel; je les ai suivis après avoir arrangé la chasse de la veille; il faisait une belle journée tempérée, mais il a fallu lutter tout le long de la route contre un très fort vent du nord. Rien d'intéressant avant Aïn-Sfa; on voyait planer un bon nombre de Satyrus 140 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Abdelkader paraissant tous défraîchis, mais inapprochables à cause de la violence du vent ; Fidia et Seniele volaient par places; on les trouvait souvent en petits groupes, posés sur les excréments des chevaux et des ânes. A Aïn-Sfa j'ai rejoint notre caravane et nous avons mangé avant de continuer la route. La plaine est absolument inculte; on n'y voit guère que de l'alfa, du chir (^Artemisia Herba-Alba), du Gouf't {^Artemïsia cam-pestris) et du senagh {Lygœum spartian) ; la piste est tantôt près de la rivière, oued à lit sablonneux et desséché, sauf à certains points où l'eau remonte à la surface; tantôt le chemin s'éloigne de l'oued pour passer sur les petites collines et ondulations recou- vertes d'alfa en touffes plus ou moins espacées. A 3 kilomètres au nord d'Aïn-Sfa, Charles David attira mon attention sur un l)apillon qui venait de traverser la route et qui s'était posé sur la terre sablonneuse, derrière une touffe; j'ai failli le manquer, car j'étais un peu émotionné à la vue d'un petit Satyrus qui m'était tout à fait inconnu et bien distinct de Hansii, dont il avait la taille; ses ailes antérieures allongées et les nervures de l'aile inférieure, en dessous, tracées en blanc, lui donnaient une apparence toute particulière. Un peu plus loin, sur une petite colline sablonneuse, parsemée de touffes d'alfa, nous en avons pris deux autres, et, à 4 kilomètres d'Aïn-Sia, j'ai vu encore deux exemplaires que je n'ai pu prendre. L'Espèce doit voler depuis deux ou trois jours seulement; je n'ai vu que des cf frais, pas une Q. Nous sommes arrivés à Kheneg-Azir à 5 h. 1/2 ; le bordj est situé à l'entrée d'une tiouée faite par l'Oued-el-Beiod dans une chaînette de collines traversant la plaine; il y a plusieurs trous d'eau et nous avons pu manger du poisson, nourriture rare dans le Sud-Algérien. 25.9. 1910. Belle journée; le vent du nord .souffle toujours fort. J'ai été chasser, le matin, au nord du bordj, en suivant les petites collines sablonneuses à droite de la rivière; il y a partout de l'alfa, LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 14I excepté sur le bord même de l'oued, où cette Graminée est rem- placée par le « Senagh »; des Lauriers roses et des Rétama croissent dans le lit de l'oued; par places il y a des colonies de (( Harmal » et Ôl^ Artemisia Campeslris. Saiynts Abdelkader, S. Fidia, S. Semele et aussi la nouvelle espèce volaient ici ; de cette dernière, je n'ai pris que deux exemplaires, deux cf frais, au sommet d'un mamelon. L'après-midi, j'ai exploré toutes les petites collines et ondulations de terrain dans le voisinage de la rivière, rive droite, sur une distance de 3 kilomètres, en avant du borc^j, c'est-à-dire dans la direction de Géryville; le nouveau Satyrns se trouve également de ce côté, mais il n'est pas très abondant encore; j'ai pris 4 cf ; tous volaient et se posaient entre les touffes d'alfa. 26.9. 1910. Ayant arrangé la chasse de la veille, nous nous sommes mis en route de bonne heure pour faire les 14 kilomètres qui nous séparaient d'Aïn-Sfa, où il était décidé qu'on passerait la nuit ; je comptais prendre, chemm faisant, une bonne série de la nou- velle Espèce. Le temps était très beau ; une bonne brise soufflait du nord. Après avoir quitté Kheneg-Azir, la piste monte dou- cement vers le sud en suivant une large vallée ondulée, bordée par de petites collines; on est séparé de l'oued par un chaînon bas; le terrain est sablonneux; le sable un peu rosé, fin dans la vallée, est plus grossier et mélangé de pierres et de rochers de grès, sur les collines; partout beaucoup d'alfa. A un kilomètre du bordj, le Satyrus commençait à se montrer; nous fîmes s'élever quelques c? qui s'envolèrent rapidement, mais se posèrent de nouveau sur le sol, dans les petites clairières de l'alfa. Le papillon se laisse approcher jusqu'à un certain point, mais lorsqu'on est à 5 ou 6 mètres de lui, il s'envole, et il n'est pas toujours facile de le suivre de l'œil, à cause de son vol rapide et des détours fréquents qu'il fait; après l'avoir suivi de place en place, pendant un certain temps, il revient souvent au point de départ, surtout si ce point est le sommet d'une petite colline. 142 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Le papillon devient plus approchable, après avoir essuyé plu- sieurs coups cle filet, et il est alors plus aisé de le prendre; quand il se pose à l'abri d'une touffe d'alfa — et cela a lieu fréquemment — on peut arriver près de lui, en se baissant de façon à être caché par la touffe; malgré l'avantage qu'on a sur lui dans ce cas, il réussit souvent à échapper au coup de filet, en partant à grande vitesse à ras de terre; si on ne le manque pas, on risque de prendre dans le filet, en même temps que le papillon, du sable et des brins de l'inflorescence de l'alfa, au grand détriment des sujets frais; mais il n'y a pas d'autre procédé à employer; si on tente de le couvrir du filet, on le manque à peu près invariablement. Sur les larges sommets ou petits plateaux couronnant les col- lines, le Salynis nouveau se trouve en plus grand nombre; j'ai vu, aujourd'hui, jusqu'à quatre cf se battant ensemble; ils sont d'ailleurs assez batailleurs, mais leurs rencontres ne durent que peu; ils se séparent, après quelques coups échangés, pour aller se placer sur le sol, chacun de son côté. Tous les mouvements de ce papillon sont brusques; quand on s'approche de lui, avant de s'envoler, il relève quelquefois brusquement les ailes anté- rieures, jusqu'alors cachées entre les ailes postérieures, et découvre ainsi ses taches ocellées; si on reste immobile, il fait reprenrJre à ses ailes antérieures leur position primitive; pendant ce temps les ailes sont fermées. Il doit être l'objet d'une chasse acharnée de la part des lézards, très communs sur la plaine et les petites collines. A 7 ou 8 kilomètres de Kheneg-Azir, on arrive au point cul- minant de la route qui, de là, descend à travers les ondulations de terrain jusqu'à Aïn-Sfa dans le lit de l'oued. Ayant consacré beaucoup de temps à chasser en route, nous n'avons atteint le sommet qu'à 4 h. 1/2 de l'après-midi, mais nous avions dans nos boîtes de chasse une soixantaine d'individus du nouveau Satynis, dont deux Q seulement; la Q est encore rare; elle est tout aussi méfiante que le cf, mais s'on vol est plus droit ; ses nervures, en dessous, sont moins blanches que celles du cf- Entre LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 143 le col et Aïn-Sfa il y a des localités où le Satyrus existe, mais l'heure étant trop tardive, nous ne l'y avons pas aperçu aujour- d'hui. A part la nouvelle Espèce, nous avons pris, ce jour, des S. Abdel kader en bon état; ce papillon plane un peu partout à présent, mais il est toujours des plus difficile à prendre, et bien peu d'exemplaires sont frais. On a campé sur le sable, sous les peupliers d'Aïn-Sfa. 27.9. 1910. Départ le matin à 8 heures pour le retour à Géryville. Le vent venait du sud ce matin et a soufflé assez fort pendant la journée; il a fait très chaud ; les tourbillons, qui étaient devenus rares, ont été nombreux aujourd'hui. Nous avons presque aussitôt retrouvé le nouveau Saîyriis, sur les petites collines d'alfa, à gauche du chemin; les cf se tenaient surtout sur les crêtes, mais du côté nord, pour s'exposer le moins possible au vent. Ce papillon habite ici un terrain tout autre que celui fréquenté par Hansïi sur les montagnes de Sebdou ; les petites collines ou ondulations qui varient la plaine d'alfa, au nord de Géryville, sont formées de grès et de sable, et ne ressemblent nullement aux espaces calcaires et pierreux entourés de chênes verts, où vole Hansïi, à Sidi-Djlali et à Merchich. Han.ûi ne se trouve pas dans la plaine, du moins à ma connaissance. Dans les environs de Géryville, il n'y a que le sommet du Djebel-Ksel qui pourrait être comiparé aux localités préférées de Hansïi. Deux Q de la nouvelle Espèce ont été prises aujourd'hui, ainsi qu'un bon nombre de cf >^. Plus près de Géryville, sur les petites collines au sud-ouest, dans le voisinage de l'Aïn-Mérirès, le papillon se trouve égale- ment ; les Q ne se montrent pas en nombre aussi considérable que les cf. J'ai inscrit dans mon carnet de chasse, le 30 septembre 1910, l'observation suivante : (( Sur beaucoup de ces collines plus ou moins recouvertes d'alfa, on rencontre le nouveau Satyrus; il est toujours bien difficile à prendre; mais, si on a la patience de le suivre de place 144 LEPinOPTÉROLOGIE COMPARÉE en place, et la chance de ne pas le perdre de vue, on finit, le plus souvent, par le capturer. Les Q sont toujours rares ; sur 40 exem- plaires pris aujourd'hui, il n'y a que quatre Q. Les sommets de ces petites collines ont un attrait spécial pour les mâles ». Nous avons retrouvé l'Espèce, le 10 octobre 1910, sur la plaine, non loin de Méchéria; il y avait peu d'exemplaires frais à cette époque. J'ai trouvé sur une touffe de Lygœinn Spartîun, à Aïn-Mérirès, dans la nuit du 13 juin 191 0, une chenille de Satyride dans sa dernière livrée; j'étais persuadé qu'il s'agissait de Satynis Sylvicola, et j'ai noté à son sujet ce qui suit : (( Elle a la ligne médiodorsale un peu moins verdâtre et moins transparente que la plupart des Sylvicola que j'ai élevées, et se rapproche ainsi un peu de Fïdia; je ne crois pas qu'il y ait de doute que ce soit Sylvicola cependant ». La chenille était alors dans son dernier stade; je l'ai nourrie d'abord avec le Lygœiun, sa vraie plante nourricière, puis avec une autre Graminée, sur laquelle je trouvais Sylvicola au Ksel. Elle se serait sans doute chrysalidée dans une coque composée de terre, comme les autres Espèces du Groupe, mais je l'avais mise dans une boîte sans terre, et elle s'y est métamorphosée dans les premiers jours de juillet. A l'époque d'éclosion de Sylvicola, j'étais un peu étonné de ne pas voir éclore cette chry- salide ; quand est arrivé le mois de septembre et que la chrysalide ne montrait pas encore signe de modification, quoique paraissant parfaitement saine, je ne savais plus que penser. Enfin, le problème était résolu, le 27 septembre, par l'éclosion d'un cf de S. Powelli; l'état de nymphe avait duré bien près de trois mois ; ceci doit être tout à fait normal chez Powelli. A Aflou, dont nous avons exploré la région en 191 1, le premier Salyrîcs Powelli a été pris, le 21 septembre, au sommet d'une petite colline à l'ouest, bien semblable à celles des environs de Mérirès, près Géryville. L'Espèce était rare dans le voisinage immédiat d'Aflou, mais plus abondante dans la grande plaine LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 145 au nord du Djebel-Amour, entre Aflou et l'Oued-Sebgag, et sans doute au delà de cette rivière. Cette plaine fait suite à celle de Géryville; elle n'est, en somme, qu'une partie du vaste plateau Oranais, dans la moitié sud duquel S. Poiuelli paraît être répandu, habitant les steppes et non les montagnes. Revenant de Guelta-Sidi-Saad, à travers la plaine, le 3 oc- tobre 191 1, Charles David et moi, nous avons exploré tous les monticules recouverts d'alfa, sur lesquels on pouvait espérer trouver Powclli; nous en avons pris près d'une vingtaine entre 8 heures du matin et 2 heures de l'après-midi; les cf n'avaient plus leur première fraîcheur, mais les Q, très rares, étaient en bon état ; un très fort vent du sud-ouest rendait la chasse assez difficile. Ce Satyrus habite ici le même genre de localité qu'à Géryville. Quelques Q capturées à Géryville, à la fin de septembre 1910, et gardées vivantes, ont pondu un certain nombre d'œufs dans les derniers jours de ce mois et au commencement d'octobre; les œufs étaient fixés sur les tiges et feuilles de Lygœum spartum, et souvent sur la mousseline de la cloche. L'œuf est blanc, opaque; sa forme est semblable à celle de l'œuf de S. Sylvie ola; c'est-à-dire ovale, aplatie à la base et un peu au sommet ; l'œuf est cependant plus petit que celui de Sylvicola; la surface est finement mate; les côtes verticales, dont il y a environ vingt, ne sont pas très élevées; elles deviennent onduleuses et bosselées sur le som.met; le cercle micropylaire n'est pas large et ses bords pas très bien définis. L'œuf prend une teinte grise quelques jours avant l'éclosion de la chenille. Les chenilles ont commencé à éclore vers le 20 octobre; la dernière éclosion a eu lieu le 3 novembre; l'état d'œuf dure donc trois semaines environ. A sa naissance, la chenille a 0.0026 de longueur; la largeur de la tête est de 0.0007. Description de la tête : couleur paille terne; les taches entou- rant les tubercules et les tubercules eux-mêmes sont d'un brun 10 146 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE noir et très distincts sous la loupe, ainsi que les soies incolores portées par les tubercules; les ocelles sont bien apparents; au microscope, on voit que la surface des lobes 'est finement pointilléc de petites dépressions et ressemble un peu à l'écorce d'un citron pour ce caractère, qui est commun à toutes les chenilles de Satyrus, la finesse de la surface pouvant varier suivant les Espèces. La soie portée par chaque tache tuberculaire est renflée en massue au bout et courbée en bas. Description du corps : couleur fondamentale paille grisâtre; aspect semi-transparent; les lignes ordinaires sont d'un brun rosé; elles sont distinctes, mais non pas très fortement marquées; la ligne médiodorsale et la suprastigmatale sont les plus appa- rentes; la sousmédiane est faible; les pointes de la fourche anale sont longues ; les soies portées par les tubercules sont plus courtes que celles de la tête; celles placées respectivement sur les tubercules I et II sont recourbées en arrière; sur le prothorax, toutes les soies sont courbées en avant. Six chenilles ont été installées, au commencement de novembre, sur une touffe de Festuca, à Hyères; je n'ai pas eu l'occasion de les examiner de près avant le 15 décembre; à cette époque, je les voyais, le jour, haut sur les feuilles, en train de manger; elles paraissaient bien avancées dans le premier stade; la couleur du corps était devenue vert pâle, mais la tête et la fourche res- taient couleur paille clair; si on les dérangeait, elles se recour- baient horizontalement, de façon à faire presque rencontrer la fourche anale et la tête, se cramponnant à la tige ou feuille avec deux paires, ou simplement une paire de pattes membraneuses. Examinant de nouveau la touffe de Fes/îica, le 22 janvier 191 1, dans la soirée, je n'ai pu voir que deux chenilles; celles-ci, d'ap- parence très saine, se tenaient assez haut placées sur les feuilles; précédemment le temps avait été beau et chaud pendant le jour, froid la nuit, avec même un peu de gelée; les chenilles n'avaient pas fait grand progrès depuis un mois, puisqu'elles se trouvaient encore dans le premier stade, mais elles n'avaient pas entièrement perdu leur activité pendant ce temps, ainsi que le prouvaient les LÊPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 147 feuilles mangées. Leurs habitudes étaient encore diurnes. Voici la courte description que j'ai faite à cette date : (( La tête et la fourche sont grisâtres, le corps d'un vert d'herbe vif; les lignes ont une teinte pourpré pâle; on les distingue très bien à la loupe, mais assez mal à l'œil nu. Les lignes sous- médianes sont au nombre de deux; la première très faible et étroite, effacée à l'arrière de chaque segment; la seconde d'un blanc verdâtre, à bordures pourpres ; sur les segments abdomi- naux, le tubercule I est placé sur la preroière ligne sousmédiane, le II sur la marge supérieure de la seconde ligne; en outre, le tubercule I se trouve sur le premier bourrelet du segment et le tubercule II sur le quatrième bourrelet. La ligne en bordure du dorsum (Jlange) est blanche. Longueur de la chenille à la fin du premier stade : 0.005 "• Ce n'est que deux mois plus tard que j'ai eu l'occasion de revoir les chenilles. Dans la soirée du 20 mars, les deux larves se nourrissaient des feuilles de Festuca, commençant par la pointe et reculant au fur et à mesure que la feuille se raccour- cissait sous leurs mandibules ; ceci prouvait que l'activité nocturne était établie, mais ne prouvait pas que l'habitude diurne était entièrement supprimée; il est probable, au contraire, que les che- nilles mangeaient encore quelquefois le jour, leur couleur étant encore verte. Les chenilles venaient d'atteindre depuis peu le troisième stade; je n'ai pas de renseignement sur le deuxième stade, qui a duré pendant la plus grande partie des mois de février et de mars. Le 20 mars, j'ai enlevé une des chenilles de la touffe et je l'ai gardée ensuite dans un tube de verre pour pouvoir l'examiner plus attentivement. Le 16 avril, elle s'est mise au repos, la tête en bas, dans l'attente de la troisième mue. J'ai fait, le 18 avril, la description suivante de la chenille dans le troisième stade : (( Il est très évident que cette chenille appartient au groupe de Fauna; elle a une ressemblance remarquable, dans ce stade, avec la chenille de Hansiï; sa longueur, à la fi.n du stade, est de 0.012; la largeur de la tête est de 0.0015; la longueur de la 148 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE fourche anale, o.ooi i. La tête est d'un brun pâle, teintée de vert près du cou (à une période moins avancée de ce stade elle était d'un vert jaunâtre); les rayures de la tête, brunâtres, sont larges et distinctes. La surface dorsale du corps est d'un vert d'herbe vif; la ligne médiodorsale est d'un vert plus foncé; étroite sur les segments thoraciques, elle s'élargit progressivement sur les premiers segments abdominaux, et s'amincit à l'arrière du corps pour s'arrêter en pointe à la base de la fourche; cette ligne possède une très mince bordure intérieure d'un vert bien foncé, et une bordure extérieure vert blanchâtre, également mince; après un large espace de couleur verte fondamentale, vient une ligne étroite, d'un vert foncé; elle forme la bordure extérieure d'une large rayure vert blanchâtre, teintée légèrement de jaune; cette rayure contient deux étroites lignes vertes, parallèles, si minces qu'elles restent invisibles à l'œil nu; la rayure atteint tout juste le prothorax, sur lequel elle s'arrête, son bord supérieur décrivant une courbe descendante; elle devient très faible sur la partie postérieure du corps, avant d'atteindre la base de la fourche ; au-dessous de la rayure pâle se trouve la large ligne suprastigmatale, d'un vert foncé; sa marge supérieure est étroi- tement bordée de noir sur les segments abdominaux; comme pour la rayure pâle et pour la ligne stigmatale, cette ligne n'avance pas loin sur le segment prothoracique ; mais ce fait n'est apparent que par suite de la distension du segment par la nouvelle tête qui se forme actuellement sous la peau ; à une période moins avancée du stade, toutes les lignes semblent arriver au bord antérieur du prothorax. La ligne stigmatale et celle en bordure du dorsum ne paraissent former qu'une seule large rayure, dont la couleur est blanche sur la corniche en limite dorsale ainsi que le long de la marge supérieure de la rayure; toute la partie centrale de cette rayure composée, est de couleur saumoné sur laquelle se dessine une mince ligne rougeâtre au- dessus des stigmates et une ligne semblable au-dessous de ceux-ci. Les stigmates apparaissent comme de petits points noirs, chacun entouré par un cercle légèrement surélevé. La surface LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE I49 ventrale et la base de toutes les pattes est du vert d'herbe fon- damental, un peu plus foncé juste en dessous de la limite dorsale, sur les segments abdominaux ; les pattes thoraciques sont d'un brun pâle, ainsi que les extrémités des pattes membraneuses; les pointes de la fourche sont teintées de brun rosé clair ». Quatrième stade : Cette chenille a passé la troisième mue pendant la nuit du 20 au 21 avril; je l"ai examinée le matin; elle avait alors une grande tête verte, le front et la partie infé- rieure d'un vert foncé, la partie supérieure vert jaunâtre; les rayures de la tête étaient devenues assez distinctes vers le soir, particulièrement sur le sommet et à l'arriére; elles sont formées par un pointillé noirâtre, comme chez les autres Satyres. La surface dorsale, au-dessus de la ligne suprastigmatale, paraît annelée de larges bandes verdâtres et jaunâtres ; cette apparence est due au fait que la première sous-division (bourrelet) de chaque segment abdominal est d'un vert pâle, tandis que les quatre ou cinq petits bourrelets de la moitié postérieure du seg- ment sont d'un gris pâle jaunâtre; ce caractère n'est pas spécial à Powellt; je l'ai remarqué (surtout au commencement des deux derniers stades) chez les chenilles de Hansii, de Sylvïcola, de Fidïa et de F aima; au fur et à mesure que les chenilles gran- dissent dans le stade, la couleur devient plus uniforme par suite de la distension des segments; mais, même à une phase plus avancée du stade, lorsque la chenille, en se recourbant ou en se tassant, comprime les segments, les bandes jaunâtres réappa- raissent. La ligne médiodorsale est étroite sur les deux premiers seg- ments thoraciques; mais, tandis qu'elle se dessine très distinc- tement en noir sur ces deux segments, elle est grisâtre, teintée de vert, sur les autres segments, où elle est plus large et moins apparente; en s'amincissant vers la fourche elle se fonce un peu. La large ligne suprastigmatale est d'un vert grisâtre ayant un aspect quelque peu transparent; elle est ombrée de noir, le long de la marge supérieure. La ligne stigmatale, de couleur saumonée, est bordée d'une ISO LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE fine ligne blanche, au-dessus, tandis qu'au-dessous sa bordure est constituée par la corniche en limite du dorsum, blanche teintée de rose; comme dans le stade précédent, la surface stig- matale, de couleur saumonée, est bornée par deux lignes rose foncé, très étroites; celle placée au-dessus des stigmates étant beaucoup plus forte que celle au-dessous. Les bases des pattes thoraciques et les parties charnues des pattes membraneuses sont d'un vert vif. Les pointes de la fourche sont longues, verdâtres, et la deuxième ligne sousmédiane se prolonge, fine, sur leur surface supérieure. La longueur de la chenille à la fin du quatrième stade est de 0.022. Vers la fi.n de ce stade, sa robe avait pâli et s'était modifiée. J'ai fait la description suivante le 3 mai 1911 : u Tête gris pâle, les rayures foncées assez distinctes ; la surface dorsale du corps, au-dessus de la ligne suprastigmatale, est d'une couleur paille verdâtre pâle; cependant, entre la seconde ligne sous-médiane et la suprastigmatale, elle est plus jaune. La ligne médiodorsale est d'un vert pâle; elle se trouve rem- brunie et plus étroite sur les segments thoraciques ; la sous- médiane est de la même couleur que la médiodorsale, mais elle est plus étroite que celle-ci; la ligne suprastigmatale est plus large et d'un vert grisâtre plus foncé que les autres; la région stigmatale et la corniche en limite du dorsum ont une teinte gris très pâle; les deux lignes étroites, l'une au-dessus, l'autre au- dessous des stigmates, sont d'une couleur saumoné extrêmement pâle; la fourche est grise avec une très faible teinte rosée; la surface ventrale, ainsi que les pattes thoraciques et membraneuses, est gris verdâtre pâle. La quatrième mue a eu lieu le 9 mai. Cinquième (dernier) stade : « Largeur de la tête, 0.0035 environ. La chenille perd sa teinte verte à la quatrième mue ; elle est maintenant de la couleur gris LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 15I jaunâtre clair commune aux chenilles du groupe Fmma dans ce stade; la ligne médiodorsale est brun foncé, sans teinte verte; la sousmédiane est fine, brun clair; la suprastigmatale grisâtre, assez finement bordée de noir à sa limite supérieure; la stigma- tale, blanchâtre, ne conserve que de faibles indications des lignes couleur rosé; elle se confond avec la corniche en bordure du dorsum, sous laquelle se trouve une ligne d'un brun grisâtre peu foncé; la surface abdominale est gris blanchâtre, ainsi que les bases des pattes. La tête est légèrement plus jaunâtre que la couleur fonda- mentale du dorsum; ses rayures brun foncé sont nettes et dis- tinctes ; la fourche est longue. Dans ce stade, comme dans les stades précédents, la chenille présente bien les caractères du groupe Fauna, auquel le Satyrus Powelli appartient sans aucun doute. La chenille, dans son der- nier stade, est figurée sous le n° 1175 de la PI. CXXXIII du Vol. VI des Etudes de Lépido-ptérologie comparée. La seule chenille que j'ai réussi à élever jusqu'à l'état de complet développement, en 191 1, est morte au commencement du mois de juin. La chrysalide ressemble beaucoup à celle de S. Sylvicola; je n'ai pas décrit celle que je possédais en 1910, et qui provenait d'une chenille trouvée à Géryville, parce que je ne me doutais pas, alors, qu'elle appartenait à une autre Espèce que Sylvicola. La durée de la nymphose est remarquable chez ce Satyrus; parmi les Espèces que je connais, elle n'est égalée que par celle de Satyrus Abdelkader (à l'exclusion de la forme La7nbessanus'), et par celle de S. Hansii. Ces deux Espèces éclosent plus tôt dans la saison que Powelli, qui est le dernier de tous les Satyrus algériens à apparaître ». Satyrus Hansii, Austaut. J'ai figuré pour la première fois le Satyrus Hansii Q sous le n" I de la PI. III, dans la VP livraison des Etudes d'Ento- 152 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE mologie; j'en ai donné de nouveau une représentation plus complète sous les n°' 40, 43, 44, 45 et 46 de la PI. XVI, dans le Vol. m des Etudes de Lépido ptér olo gie comparée. La fig. 46 est celle de l'état larvaire de l'Espèce. Hansii vole en septembre, aux environs de Sebdou et Oudjda. Harold Powell a élevé depuis l'œuf quelques chenilles dont les chrysalides sont par- venues à bon port, entre nos mains, à Rennes. Les papillons sont sortis des chrysalides en question, au mois d'août 1908, un peu en avance sur ce qui se passe ordinairement dans la libre Nature. L'Espèce est assez variable, surtout pour la coloration plus ou moins claire, obscure, et dorée du dessus des ailes. Le dessous des ailes inférieures présente aussi quelques intéres- santes variations. M. Harold Powell a observé très soigneusement la biologie des Satynis algériens Hansii et Sylvicola. Je publie ci-après l'intéressante notice que m'a remise mon collaborateur pour le présent ouvrage : « Ce Satyrus n'est connu que de la région montagneuse au nord et à l'ouest de Sebdou (Oran); on ne sait encore jusqu'à quelle distance il avance vers l'est en suivant la même chaîne. Une exploration des montagnes de l'Ouarsenis, en septembre, serait intéressante au point de vue de la connaissance de la distribution de l'Espèce, qui pourrait bien se retrouver dans ce massif, et peut-être sous forme d'une race particulière? A l'ouest et au sud-ouest de Sebdou, Hansii suit la chaîne jusqu'à la frontière Marocaine, et je pense qu'il doit exister sur les montagnes élevées du Maroc que l'on aperçoit au sud-ouest, lorsqu'on est au sommet du Djebel-Medderba, près de Sidi- Djlali; les Arabes des environs m'ont dit que ces montagnes étaient celles des Beni-Bou-Yahi. Je n'ai pas trouvé l'Espèce à une altitude moindre de 1.200 mètres ; elle est commune surtout entre 1.300 et 1.600 mètres, si la localité s'y prête. Je ne l'ai jamais rencontrée sur les plaines d'Alfa au sud et au sud-ouest de Sebdou, ni dans les forêts de LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 153 chênes verts, ni sur les collines à proximité de Sebdou, ovi S. Sylvicola est abondant. Le papillon éclôt au commencement de septembre; peut-être se produit-il, même, quelques éclosions dans la Nature, vers la fui du mois d'août. Je l'ai rencontré pour la première fois, le 12 septembre 1907, à Sidi-Djlali, pouit situé à 30 kilomètres, environ, à l'ouest-sud-ouest de Sebdou; à cette époque, les indi- vidus bien frais étaient déjà en minorité. Le 20 septembre de la même année, nous avons retrouvé Hansii au-dessus de la maison Forestière de Merchich, volant sur un plateau calcaire au sommet de la montagne, à près de 1.400 mètres d'altitude; presque tous les exemplaires étaient alors passés. Enfin, le 6 octobre, j'ai vu voler l'Kspèce sur un terrain pierreux et assez aride, parsemé de buissons de chêne vert, près du point culminant de la montagne au sud de la maison Forestière de Mizab; ici, l'altitude était d'un peu plus de 1.400 mètres; tous les Hansii vus ou pris le 6 octobre, se trouvaient en bien piteux état. Voici ce que j'ai noté à propos du voyage à Sidi-Djlali : « 12 septembre 1907. J'ai quitté Sebdou à 4 heures du matin, à cheval, accompagné par l'arabe Bohas, lui perché sur son âne noir déjà chargé de la tente et des provisions; le temps était beau, l'air frais; le soleil se levait quand nous passions la colline de Sidi-Yahia, et il faisait déjà chaud à notre arrivée à l'Aïn- Tadjertila. A ce point, le calcaire cède la place au grès rougeâtre ou bleu-gris; la montagne de Tenouchfi et les monts à l'ouest, vers Sidi-Djlali, sont composés de grès; mais cette différence dans la nature du terrain ne paraît pas influencer la flore et la faune, qui restent à peu près les mêmes que dans les environs mon- tagneux de Sebdou. Après une montée à travers la maigre forêt, le sentier descend rapidement, en suivant une gorge qui débouche sur la grande plaine; ensuite on longe la chaîne jusqu'à l'ouver- ture d'un vallon à droite séparant le Djebel-Dourdaz du Djebel- Medderba; le petit plateau de Sidi-Djlali se trouve dans ce 154 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE vallon, au-dessus de la jonction de deux ravms; il est entouré de hautes montagnes boisées de chênes verts et d'Arars; par la coupure de la vallée, on a, au sud-sud-est, une vue sur la grande plaine et la chaîne lointaine du Djebel-Si-Aabed. Le Koubba du marabout est placé sur un mamelon à l'est du plateau ; il y a une bonne source captée. Nous avons trouvé le plateau occupé par le détachement de Sebdou du i" régiment Etranger; les légionnaires campaient dans la région depuis plusieurs semaines. J'ai reçu le meilleur accueil de la part des officiers, le Capitaine Nicolas, les Lieute- nants Guérin et Halid. Pendant une tournée faite, l'après-midi, j'ai pris, sur les pentes de la montagne au-dessus du plateau, le premier Satyrus Hansii. 13 septembre 1907. Chassant, le matin, sur les pentes d'une colline à l'ouest du plateau, j'ai capturé un bon nombre de Hansii; beaucoup d'individus cf n'avaient plus leur première fraîcheur, mais la proportion de Q Q fraîches était supérieure à celle des cfcf. Le 5. Sylvicola volait ici également; naturellement, pas un exemplaire n'était frais, puisque Sylvicola est un papillon des mois de juillet et aoiit, et l'éclosion de l'Espèce a pris fin, il y a au moins trois semaines. Dans l'après-midi, j'ai fait l'ascension du Djebel-Medderba, dont le point culminant, d'où on a une vue étendue sur les plaines élevées et les montagnes au delà de la frontière Marocaine, est à environ cinq kilomètres de Sidi-Djlali. Satyrus Hansii habitait toute la montagne, depuis les pre- mières pentes jusqu'au sommet où il est plus abondant. Le papillon se comporte à peu près de la même façon que le Fauna des Basses-Alpes; il se pose, les ailes fermées, sur le sol ou sur les pierres, et non pas sur les troncs d'arbres; ses vols sont de courte durée. C'est une Espèce variable, mais qu'on ne pourrait confondre avec Sylvicola, qui existe aussi sur le Medderba, où il fréquente LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 155 surtout les pentes inférieures, se posant tantôt par terre, tantôt sur les troncs. L'accouplement se fait très rapidement; j'ai vu, aujourd'hui, un çS de Hansiï poursuivre une Q ; ils se sont posés par terre, et, à peine 15 secondes après, ont repris leur vol, accouplés. Les papillons diurnes communs actuellement autour de Sebdou, le sont également à Sidi-Djlali; on y voit E-pinephele Eudora-Mauretamca, E. ]urtina-F ortunatUy Satyrus Semele, C œnonympha Fettigii, Vanessa Cardia, Chrysophaniis Phlceas et Lycœna Ages/is, mais tous sont maintenant en très mauvais état ». J'ai rapporté 57 Satyrus Hansii de Sidi-Djlali, sans compter quelques Q Q gardées vivantes pour la ponte. J'ai pris les notes suivantes relatives à Hansii, le 20 sep- tembre 1907 : « Nous sommes partis de la maison Forestière de Merchich, à sept heures du matin, pour faire un tour dans la forêt de chênes verts, où il y a d'excellentes clairières ; montant toujours vers l'est, nous sommes arrivés au sommet du Djebel-Merchich, qui est une sorte de plateau couvert de pierres calcaires, entre lesquelles poussent des touffes de thym, d'Helianthème et des Graminées ayant le port des Festuca; l'altitude y est d'environ 1.360 mètres. Hansii était assez abondant sur le plateau, mais pas bien frais ; c'est essentiellement un papillon de rocher; par cela je veux dire qu'il habite les endroits plutôt arides, et se pose sur les rochers, sur les pierres ou sur le sol, mais jamais sur les troncs d'arbres. J'ai observé, aujourd'hui, que, quand deux cfcf se rencontrent, ils montent, en se battant, verticalement et très rapidement dans l'air, à une hauteur de 30 mètres environ, autant qu'il est possible d'en juger; puis ils se séparent, et descendent aussi rapidement. Hansii d'Algérie et Fauna des Basses-Alpes ont des mœurs à, peu près analogues; 5. Sylvicola, par ses habitudes, est plus voisine de S. Allionia des environs d'Hyères. 156 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ' Sur le versant sud de la montagne de Merchich, poussent des palmiers nains, de l'Aristoloche, un peu d'Alfa et beaucoup de Diss {^Ampelodesmos tenax)\ les chênes verts ne sont pas très serrés; il y a quelques champs, jadis cultivés, maintenant envahis de chardons, de Graminées et de bien d'autres herbes. C'est dans ces champs que je prenais, au mois de mai, Thaïs Rumina, Melitœa JEtherie, Lycœna M elanops et Syrïchthus Leuzeœ. En descendant la pente rocailleuse entre la maison Forestière et la route de Tlemcen, j'ai pris, cet après-midi, encore quelques Satynis Hansii, et, pour une raison que je ne puis expliquer, ils étaient bien plus frais que ceux du sommet de la montagne ». Les Q Ç) rapportées vivantes de Sidi-Djlali, ont pondu assez abondamment pendant les journées des 15, 16 et 17 septembre ; les œufs étaient souvent axés sur les feuilles d'Alfa et de certaines autres Graminées que j'avais plantées dans le pot; ou bien les g Ç) les déposaient sur la mousseline qui recouvrait les plantes. L'éclosion des chenilles a eu heu au commencement du mois d'octobre; avant de commencer à se nourrir, la petite chenille est grisâtre; la tête étant plus pâle que le corps. J'ai eu, en même temps, des éclosions de chenilles de Satyrus Sylvicola; elles ressemblaient beaucoup à celles de Hansii, mais leur tête était sensiblement plus petite. A mon arrivée à Hyères, vers le 20 octobre, les chenilles ont été installées sur des touffes d'une Festuca qui est acceptée comme nourriture par la plupart des chenilles Satyrides que j'ai élevées. Description de la chenille de 5. Hansii dans le premier stade, faite le 8 décembre 1907, la chenille étant près de la fin du stade : (( Longueur totale de la chenille 0.0055. Tête : La tête est d'un gris pâle avec une trace de la couleur paille si souvent rencontrée chez les chenilles Satyrides dans leur premier stade; elle est décidément plus pâle que la tête de la LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 157 chenille de Sylvicola, dans le même stade; sa forme est celle du type Satyrus, arrondie, un peu aplatie sur la face; sa largeur maximum est de 0.0006; le sillon entre les lobes est très peu profond; les bases des soies sont d'un brun noirâtre; les soies elles-mêmes sont courtes, incolores, transparentes, courbées en bas et un peu épaissies au bout; la surface des lobes est recouverte d'un pointillé de petites dépressions en « écorce de citron )>, comme chez toutes les chenilles Satyrides; ce pointillé est plutôt fin chez Hansii. Corps : Couleur fondamentale vert clair; les lignes longitu- dinales principales sont d'un vert plus foncé que le fond; la médiodorsale est un peu plus sombre sur les derniers segments abdominaux ; ses marges sont plus foncées que la partie médiane, et forment ainsi deux minces lignes parallèles; des deux lignes sousmédianes, communes aux chenilles Satynis, on n'aperçoit que la seconde; celle-ci est assez mince, mais distincte; sous son bord inférieur, se voit une étroite ligne presque blanche, consti- tuant la bordure supérieure d'une ligne de la couleur fondamen- tale dont la bordure inférieure est également blanchâtre; ensuite vient la large ligne suprastigmatale, vert sombre, à bord supé- rieur plus foncé; un étroit filet blanc sépare cette ligne de la stigmatale (verte), en dessous de laquelle est la corniche en limite dorsale, blanche. Surface ventrale et base des pattes, vertes ; les pattes thora- ciques et les coussins terminaux des pattes membraneuses sont de la même couleur gris clair que la tête; les deux dents de la fourche anale font un angle aigu ; chaque dent porte trois tuber- cules (dont un est terminal), et chaque tubercule est surmonté d'un poil incolore; les dents de la fourche sont courtes; leur couleur est verdâtre teintée de rose pâle. Les tubercules du corps sont visibles, au microscope (x 25) comme de petites perles noires bien apparentes. Je puis compter dix de chaque côté du segment prothoracique ; sur les segments mésothoracique et métathoracique respectivement, les tuber- cules I, II, III et IV se trouvent sur le quatrième bourrelet trans- T5f? LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE versai; I est placé à proximité de la ligne médiodorsale ; II sur la seconde ligne sousmédiane (la première ligne sousmédiane, ainsi que je l'ai déjà écrit, n'est pas visible dans ce premier stade) ; III et IV très près l'un de l'autre, sur la ligne suprastigmatale, l'un étant en avant et un peu en dessous du niveau de l'autre; tubercule V paraît être tout à fait au bord antérieur du même bourrelet, sur la corniche. I se trouve sur le premier bourrelet des segments abdominaux, à la hauteur de la première ligne sous-médiane (invisible) ; II est contigu au bord supérieur de la seconde ligne sousmédiane, et placé sur le quatrième bourrelet; III est sur le deuxième bourrelet et près du bord inférieur de la ligne suprastigmatale; les deux tubercules suivants (IV et V?) sont sur la corniche en dessous du stigmate. Dans ce stade, les chenilles de Hansii ne me paraissent différer de celles de Sylvicola que par une taille légèrement supérieure, et par une tête décidément plus grande; j'ai comparé aujour- d'hui i6 chenilles de chaque Espèce, et chez tous les individus examinés la même différence était constatée entre les deux Espèces. La chenille de Satynis Sylvicola et celle de S. Hansii sont très voisines, dans leur apparence et par leurs mœurs, de celles de 5. Fauna et de S. Allionia; je regrette de n'avoir pu élever, en même temps que les deux Espèces Algériennes, les chenilles de Fauna et d' Allionia, ce qui m'aurait permis d'en faire une étude comparative suivie. Les chenilles de Hansii ne diffèrent pas, par leurs habitudes, de celles de S. Sylvicola; j'ai remarqué chez elles un trait qui caractérise également les jeunes chenilles de Fauna, d' Allionia et de Powelli : Quand une chenille est dérangée, elle recourbe latéralement la partie antérieure du corps, de façon à former un crochet; elle peut même se mettre presque en cercle; pendant ce mouvement, elle lâche prise de la feuille de Graminée, avec toutes ses pattes, sauf les deux dernières paires de pattes abdo- minales; il suffît, pour déterminer ce mouvement, de donner une petite secousse à la feuille ou tige sur laquelle se tient la chenille, LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE I 59 OU bien de frapper sur le pot contenant la touffe de Graminée; je n'ai pas observé cette habitude chez les chenilles de Salynis, en dehors de ce groupe; dans le genre Melanargia, la jeune chenille de M. Lachesïs se met aussi en crochet lorsqu'elle est effrayée; seulement, au lieu de se recourber latéralement, elle le fait verticalement et ramène sa tête en dessous du corps. Les chenilles de Hansii sont diurnes dans leur jeune âge; elles montent, le matin, sur les feuilles filiformes de la Festuca et mangent lentement, souvent exposées au soleil; une fois, cepen- dant, j'ai observé quelques chenilles, dans leur premier stade, en train de manger pendant la nuit; le cas m'a paru exceptionnel; normalement elles se mettent au repos sur les feuilles ou tiges, la tête en bas, sans descendre profondément dans la touffe, et elles passent la nuit dans cette position. Aucune chenille sur la touffe n'a encore passé la première mue (8 décembre 1907), mais une chenille gardée en tube est entrée dans le second stade le ô décembre ». J'ai noté, le 3 janvier 1908, que les chenilles de Hansii, dont un bon nombre était déjà dans le second stade, mangeaient, ce jour-là, en plein soleil. Voici une note inscrite à Hyères à la date du 16 février 1908 : « Le temps est resté beau et tiède, le jour, pendant tout le mois de janvier, mais il a souvent gelé la nuit ; la première semaine de février a été froide et sèche avec forts vents ; ensuite, et jusqu'à ce jour, la température est restée douce; pendant les journées chaudes, j'ai souvent vu les chenilles de Hansii, haut sur les feuilles, en train de manger; elles sont, maintenant, pour la plupart, près de la fin du second stade et leur couleur est aussi verte que celle de l'herbe qu'elles mangent ». Le 22 février, j'ai observé qu'une première chenille avait atteint le troisième stade, et que sa ligne stigmatale avait pris la couleur saumonée qui caractérise celle de la chenille de Faiina {Allionia comprise) dans ce stade et le suivant. Cette ligne n'est pas de couleur saumonée dans les deux premiers stades. l6o LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Chenille dans le second stade; description faite le i*"" mars 1908 : (( Longueur totale de la chenille à la fin du stade 0.0085. Tête : Largeur maximum O.ooi ; elle est d'un gris verdâtrc pâle, et offre une apparence semi-opaque; le triangle frontal est d'un vert plus accentué que le reste de la tête et sa surface est plus polie que celle des lobes ; la surface des lobes est de la nature « écorce de citron » commune aux chenilles de Satyrus; le poin- tillé de petites dépressions est plus grossier que dans le premier stade ; les soies sont très courtes, incolores ; leurs bases ne sont plus d'un brun noir, et ne ressortent pas, par conséquence, en taches foncées sur la tête. Corps : Le corps est maintenant pourvu de nombreux tuber- cules secondaires, chacun pourvu d'une très courte soie incolore, inclinée en arrière; ces petits tubercules sont noirs; et, examinés au microscope avec un grossissement de 25 diamètres, ils ressortent très bien sur le fond vert ; les dents de la fourche sont teintées de rose sur le côté et à l'extrémité; couleur fondamentale du dorsum vert clair et vif; la ligne médiodorsale est d'*in vert plus foncé; elle est étroitement bordée par un filet vert blan- châtre, en dessous duquel existe un espace de la couleur verte du fond, limité inférieurement par une ligne étroite, vert foncé (cette ligne foncée est la seconde ligne sousmédiane; la première étant faiblement indiquée par une ligne à peine plus foncée que le fond, et qui suit le bord supérieur de l'espace vert) ; juste au dessous de la seconde ligne sousmédiane, est une autre rayure de couleur fondamentale, à bordures supérieure et inférieure blanches faiblement teintées de vert; ensuite vient la large ligne suprastigmatale vert foncé; elle est plus sombre sur les segments abdommaux ; entre cette ligne et la stigmatale, se trouve une étroite ligne blanchâtre; la stigmatale est d'une couleur vert pâle; elle est légèrement teintée de rose vers la fourche; vient ensuite la ligne de la corniche en bordure de la surface dorsale; elle est assez large et* de couleur blanc-crème. La surface ventrale, les pattes membraneuses et le'^ bases des LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE l6l pattes thoraciques sont d'un vert vif; les articles des pattes thoraciques ont une teinte grisâtre pâle; les dents de la fourche ont la pointe effilée ; elles sont peu écartées et forment un angle très aigu; elles portent de nombreuses petites verrues pilifères )). Presque toutes les chenilles avaient atteint le troisième stade quand je les ai examinées, le i®"" mars, et elles progressaient rapidement; elles conservaient encore l'habitude de se recourber latéralement lorsqu'elles étaient effrayées, mais le mouvement était moins prononcé que dans les stades précédents ; je les ai vues, ce jour-là, à midi; elles reposaient alors; la matinée avait été grise et refroidie; mais le soleil a paru dans l'après-midi, et quand, à 5 heures, j'ai revu la touffe, toutes les chenilles étaient à la pointe des feuilles et mangeaient. Troisième stade; description faite le i^"" mars 1907 : <( Longueur totale de la chenille à la fin du stade, 0.015. Tête : Largeur maximum, 0.0016; la tête, sauf pour la diffé- rence de taille, est comme dans le stade précédent. Corps : La robe et la surface du corps ont subi certaines modifications; les tubercules secondaires paraissent plus nom- breux, mais ils sont moins apparents que dans le deuxième stade parce qu'ils ne sont plus noirs; ce ne sont plus que de petits points presque incolores. La coloration générale est plus vive ; la ligne médiodorsale est moins fortement marquée ; entre la seconde ligne sousmédianc (vert foncé) et la suprastigmatale (vert intense), se trouve une assez large ligne jaune à marges vertes; cette rayure semble être placée sur un fond blanc qui apparaît au-dessus et au-dessous, comme une bordure blanche (la ligne jaune est une modification de la (( rayure de couleur fondamentale, à bordures supérieure et inférieure blanches faiblement teintées de vert » notée dans le second stade; la partie médiane de la rayure étant devenue jaune, il en résulte une modification appréciable dans l'appa- rence de la chenille, à laquelle contribue la blancheur plus écla- tante des bordures); la ligne suprastigmatale est d'un vert même 11 l62 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE plus foncé que dans le second stade; la modification la plus frappante, cependant, est celle de la ligne stigmatale; cette ligne est devenue couleur rose saumoné et s'est élargie aux dépens de la mince ligne blanche qui la sépare de la suprastigmatale, et aux dépens de la ligne blanche en corniche; ces deux lignes se trouvent donc un peu réduites; celle qui longe la corniche en bordure du dorsum est plus ou moins lavée de couleur sau- monée, spécialement sur les segments abdominaux; la partie médiane de la stigmatale est plus claire que les bords, le bord supérieur étant surtout d'un rose saumoné très vif; sur les seg- ments thoraciques la couleur saumonée de la ligne stigmatale est mélangée de blanc et de vert. Les stigmates sont représentés par de petits « boutons » chitineux peu colorés ; ils sont placés dans la partie plus pâle de la ligne ; le stigmate du huitième segment abdominal est de forme ovale; il se trouve tout en haut de la ligne, qui présente une légère hernie à ce point. La surface ventrale est d'un vert vif, plus foncé juste en dessous de la corniche ; la bordure des dents de la fourche est rosée, ainsi que leur pointe; les soies qu'elles portent sont courtes, quoique plus longues qu'ailleurs sur le corps ». J'ai noté, le 15 mars 1908, que plusieurs chenilles avaient atteint le quatrième stade; en attendant la mue, la chenille repose, la tête en bas, sur une tige ou feuille; elle est généralement bien enfoncée dans la touffe; pendant ce temps, les couleurs pâlissent, surtout la couleur saumonée de la ligne stigmatale. L'habitude nocturne commence à s'établir, mais les chenilles mangent sou- vent le jour encore. Je relève l'observation suivante, faite le 29 mars 1908 : (< Presque toutes les chenilles de Hansii sont maintenant dans le quatrième stade; et celles qui ne l'ont pas atteint encore n'en sont pas loin; elles progressent bien plus rapidement depuis la venue d'une température printanière, et sont en avance de plus d'un stade sur les chenilles de Sylvicola, qui, pourtant, sont élevées dans les mêmes conditions. Il a fallu mettre les Hansii LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 163 sur une nouvelle touffe de Festuca, aujourd'hui; elles avaient presque rasé la première touffe et elles devenaient inquiètes. Aucune chenille Satyride n'aime continuer à manger les feuilles qui ont été broutées au-dessous d'un certain point, même lorsque ce qui en reste est vert ». Description de la chenille dans le quatrième stade; faite le 29 mars 1908 : K Longueur de la chenille à la fin du stade, 0.021 à 0.023. Tête : Largeur maximum, 0.0024; sa couleur est d'un vert gri- sâtre; les ocelles sont encerclés de blanc; les rayures se montrent, dans ce stade, pour la première fois; elles sont noir-grisâtre, assez étroites mais nettement définies ; le triangle frontal est marqué faiblement d'un /\ ; la forme de la tête est la même que celle des autres chenilles du groupe. Corps : Sur le dorsum, les segments thoraciques sont d'un jaunâtre pâle, teinté de vert, tandis que les segments abdo- minaux ont une couleur vert clair; la partie antérieure du premier segment abdominal et la partie postérieure du segment méta- thoracique montrent une teinte particulièrement jaunâtre; la ligne médiodorsale est très pâle, seulement un peu plus foncée que la couleur fondamentale; ses marges sont bien définies, cependant; sur les segments prothoracique et mésothoracique, la partie médiane de la ligne médiodorsale est marquée d'une ligne noire, qui s'évanouit sur le métathorax et ne réapparaît pas ailleurs; cette courte ligne noire est très apparente; la seconde ligne sous- médiane — qui correspond à la seconde rayure de la tête — - est nettement définie; elle est étroite et un peu ondulée, de couleur plus foncée que la médiodorsale et elle se prolonge sur le dessus des dents de la fourche ; la première ligne sousmédiane est très faible; en dessous de la seconde ligne sousmédiane, est une rayure blanc jaunâtre, dont la partie centrale est vert jaunâtre pâle; la couleur blanc jaunâtre ne paraît que sur les bords de la ligne, en un nimce filet; la suprastigmatale est une large ligne vert grisâtre foncé, plus sombre et naturellement plus étroite sur 164 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE les derniers segments abdominaux; elle se prolonge sur le côté de la fourche, comme cela se constate toujours chez les Salyrus; la ligne stigmatale est large; elle est d'une belle couleur sau- monée, peut-être un peu moins rosée que dans le troisième stade ; la ligne blanche en corniche est quelque peu envahie par la couleur rosée de la stigmatale. La surface ventrale est verdâtre, la couleur étant plus sombre juste en dessous de la corniche, surtout sur les segments thoraciques où l'on aperçoit une mince bordure noirâtre. Les dents de la fourche sont longues et assez effilées; elles ont une teinte rosée, pâle vers l'extrémité )). Dans la soirée du 3 avril 1908, j'ai examiné la touffe sur laquelle vivaient les Hansii; à l'exception de quelques individus qui attendaient la quatrième mue, toutes les chenilles étaient en train de manger; celles qui se préparaient pour la mue se tenaient immobiles, près des bases des tiges, la tête dirigée vers le sol ; leur couleur verte a presque entièrement disparu; elle est rem- placée par le gris paille pâle, et les chenilles semblent légèrement transparentes. La peau de ces chenilles est délicate, surtout dans les quatre premiers stades. Lorsqu'on veut préparer un exemplaire, il est nécessaire de le vider sans exercer un frottement ou une forte pression, car le pigment qui se trouve immédiatement sous la peau s'enlève très facilement. Le 19 avril, cinq chenilles étaient déjà dans le cinquième stade. Pendant plusieurs heures après la mue, la chenille reste très pâle; les rayures de la tête n'apparaissent pas immédiatement et les lignes du corps sont d'abord pâles; mais ensuite, les rayures et lignes s'accentuent, et dans deux jours, ou même moins, la chenille devient fortement marquée et très belle. La majorité des chenilles se trouvait dans le cinquième (dernier) stade, le 23 avril; elles grandissaient rapidement. J'ai noté, alors, qu'elles étaient d'un gris clair avec des lignes le plus souvent fortement marquées; quelques exemplaires, quoique ayant passé la période d'intensification des rayures et lignes qui LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 165 suit la mue, présentaient néanmoins des lignes bien plus pâles que chez la majorité. Elles ressemblaient beaucoup aux chenilles de Faiina et AUionia dans le même stade. Leurs habitudes sont entièrement nocturnes dans le dernier stade. Cinquième stade : Tête : Largeur 0.035 environ; elle est finement rugueuse, par- semée de petites bosses sétifères, placées aux angles des cloisons séparant les dépressions ou cellules qui recouvrent la surface; les petites bosses ont la forme de boutons, étant rondes et tronquées; elles ressemblent à des lentïculœ surélevées; la soie, courte, rude et effilée, part du centre du dise de chaque bosse; les yeux paraissent être des lenticulœ modifiées, dont le cercle chiti- neux, brun, est surmonté d'un dôme transparent; les rayures sont brunes, nettement marquées ; le triangle frontal porte deux étroites lignes brunes, convergentes ; elles ne se rencontrent pas cependant, le sommet du /\ n'étant pas complété. La couleur de la tête est nankin pâle. Corps : Le prothorax possède la glande ventrale visible chez toutes les chenilles de Satyrus; elle est située immédiatement en avant de la première paire de pattes; le plus souvent, elle est cachée dans un repli de la peau, mais lorsque la chenille est fortement irritée ou pincée, elle tourne brusquement la partie antérieure du corps à droite et à gauche en relevant la tête, et alors la glande devient visible; je n'ai pas remarqué qu'un liquide fût expulsé à ce moment, et je n'ai pu constater qu'une odeur quelconque accompagne l'apparition de la glande; on peut facilement examiner cet organe chez les chenilles soufflées; il est alors poussé en dehors et présente l'apparence d'un petit renfle- ment de la peau portant, au sommet, un corps ovoïde, jaunâtre, recouvert de minuscules aspérités et surmonté d'une languette. La ligne médiodorsale est brune, assez foncée sur les segments abdominaux; elle s'amincit et s'assombrit progressivement vers la tête, sur les segments thoraciques; ses marges sont plus foncées l66 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE que la partie médiane; en bordure de la médiodorsale, se trouve un filet de la couleur fondamentale nankin blanchâtre, auquel fait suite une rayure composée de unes lignes et d'atomes d'une couleur carnée, entrecoupés de la couleur du fond ; le bord infé- rieur de cette rayure est formé par une mince ligne brune (celle que j'appelle la seconde sousmédiane) ; vient ensuite un autre lilet, très étroit, fondamental, puis une rayure composée d'atomes carnés, plus étroite que celle décrite ci-dessus; ses deux bords sont plus unis et plus fortement marqués que la partie médiane, sur laquelle les atomes et ânes lignes sont assez espacés; une étroite ligne blanche sépare cette rayure de la suprastigmatale qui est d'un gris brun et un peu plus large que la médiodorsale; son bord supérieur est marqué par une mince ligne noirâtre, son bord inférieur par un ûlet encore plus étroit, mais également noirâtre; la stigmatale, nankin jaunâtre clair, à marge supérieure carminée et à bord inférieur faiblement brun carminé, est séparée de la suprastigmatale par un étroit filet blanc ; vient ensuite la ligne en corniche {jiange Une), blanche, un peu envahie, dans sa partie supérieure, par la couleur jaunâtre de la stigmatale; la surface ventrale est de la couleur fondamentale, et sa seule ligne est un hlet brun noir contigu à la ligne en corniche; ce filet se dégrade en ombre brun clair vers la base des pattes; les pattes et leurs bases sont un peu plus pâles que le fond ; la fourche est allongée, les deux dents, peu écartées, se terminent en pointe; la seconde ligne sousmédiane est continuée, très faible, sur le dessus de la fourche; la suprastigmatale se prolonge, assez bien marquée, sur son bord latéral; les deux rayures composées d'atomes et unes lignes carnés, qui se trouvent entre la médio- dorsale et la suprastigmatale, s'affaiblissent beaucoup, ainsi que la seconde ligne sousmédiane, à partir du cinquième segment abdominal; la médiodorsale ne pâlit que peu, et la suprastigma- tale tend plutôt à se foncer, en s' amincissant vers la fourche; le corps est recouvert d'une très courte pubescence rude; au microscope on constate que cette pubescence consiste en un grand nombre de soies courtes, assez rigides, chacune portée par une LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 167 petite verrue conique, généralement blanche, ou bien teintée de la couleur de la surface sur laquelle elle se trouve; les stigmates sont petits, arrondis, à centre brun foncé; le cercle extérieur est très pâle; le stigmate prothoracique et celui du huitième segment abdominal sont plus grands, de forme ovale arrondie. J'ai emporté avec moi en Algérie, le 5 mai 1908, trois chenilles de SatyriLS Hansiiy dans le dernier stade; elles ont été gardées dans une boîte en fer-blanc; à Biskra, je n'ai pas eu de difficulté à trouver une Graminée à leur convenance; c'était une Espèce à longues feuilles glabres, qui poussait dans les jardins; les chenilles se sont métamorphosées, sans coque et sans attache, entre le 10 et le 15 mai; il est très probable, par analogie avec fauna, que si elles avaient été placées dans un pot contenant de la terre, elles auraient construit un cocon souterrain, un peu au- dessous du niveau du sol, composé de terre et de petites pierres et débris végétaux liés ensemble par des ûls de soie peu résistants. La chrysalide, dont je ne possède pas une description détaillée, mais que j'ai figurée en aquarelle, est bien conforme au type de chrysalide du genre Satyrus, et très voisine de celles de S. Fauna et de 5. Sylvïcola; sa couleur est acajou plus ou moins clair; quelques jours après la métamorphose, une fine et très légère pulvérulence se développe sur la surface, et donne à la chrysalide une apparence de prune; cette couche blanche est beaucoup plus mince que celle qui recouvre les chrysalides des Catocalas et celles des Hespéries. Deux des chrysalides de Hansii étaient d'une couleur un peu plus foncée que celles de Sylvïcola, mais la troisième possédait la même teinte que ces dernières ; le dorsum en général, surtout la partie dorsale du thorax, est plus foncé que la surface ventrale, et moins jaunâtre. La période d'attente, depuis le moment où la chenille prépare sa métamorphose, est d'environ 6 ou 8 jours. Après avoir cessé définitivement de manger, la chenille erre pendant quelque temps, comme celles des autres Satyrus; elle pâlit et diminue de taille à cette époque et sa peau paraît s'épaissir. l68 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE L'état de chrysalide dure pendant les grandes chaleurs et sécheresses de l'été; les chrysalides formées, en captivité, vers le 15 mai, ont donné leurs papillons à la fin du mois d'août, soit au bout d'un peu plus de trois mois; à l'état libre, j'estime que la métamorphose doit s'effectuer à la fin de mai; l'éclosion du papillon a lieu dans les premiers jours de septembre et peut-être même commence-t-elle un peu plus tôt. Chez Sylvicola, la période léthargique est bien plus courte ; sa chenille qui, au printemps, arrive moins rapidement que celle de tlansïi, se chrysalide ordinairement vers le 30 juin (la date peut varier suivant les années et les régions, de fin mai à mi-juillet) ; les éçlosions ont lieu entre le 15 juillet et le 20 août. Sur les montagnes des environs de Sebdou, seule région, à ma connaissance, où Sylvicola peut se trouver sur le même terrain que Hansii, la moyenne de l'éclosion de Sylvicola précède d'en- viron un mois celle de Hansii. L'éclosion du papillon {Hansii) a lieu le matin vers 7-8 heures; il sèche ses ailes assez rapidement et peut commencer à voler une heure et demie plus tard. La peau de la chrysalide est très mince; il n'en reste que des pièces détachées et des débris, après la sortie du papillon ». Satyrus Sylvicola, Austaut. Une Q du Satyrus Sylvicola a été initialement figurée sous le n° 2 de la PI. III, dans la VL livraison des Etudes d'Ento- mologie. Plus récemment j'ai fait représenter le cf et la Q, d'après des exemplaires de Sebdou, sous les n"*" 38 et 39 de la PI. XVI, dans le IIP Volume des Etudes de Lépidoptérologie comparée. En dessus, l'aspect des cf de Sylvicola est très sombre; leurs ailes sont d'un brun foncé avec deux points noirs transparaissant sur les supérieures. Le dessous des ailes est d'un gris de cendre uniforme; une ligne brun foncé, ondulée, descend du bord costal LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 169 des supérieures vers l'angle anal des inférieures. Cette ligne se trouve placée un peu au delà de l'espace cellulaire, aux ailes antérieures, tandis qu'aux postérieures, elle est presque contiguë à l'extrémité de la cellule. Dans l'espace cellulaire des ailes supérieures, il y a deux traits brun foncé en forme d'accent circonflexe; l'un de ces traits ferme la cellule. Le long du bord marginal des ailes supérieures, entre la ligne noirâtre extra- cellulaire et le bord terminal, on voit deux taches noires rondes pupillées de blanc, entourées de jaune pâle; entre ces deux taches ocellées, il y a deux points blancs, le premier est contigu à l'anneau jaune qui entoure l'ocelle noir. Le dessus des ailes a un aspect soyeux, surtout dans l'espace basilaire des supé- rieures oii le duvet caractéristique du sexe masculin paraît plus obscur sur le fond brun des ailes. Les deux points blancs qu'on observe en dessous, transparaissent généralement en dessus. La Q a les ailes beaucoup plus décorées que le cf; la den- telure des inférieures est plus profondément accentuée; on distingue aux supérieures, sur le dessus, deux gros ocelles noirs, entre lesquels on voit deux points blancs. Autour de ces ocelles noirs pupilles, ou non, de blanc, il y a un entourage souvent incomplet de couleur jaune. En dessous, oii les macules du dessus sont reproduites avec un entourage jaune plus nettement et plus largement indiqué, le fond des ailes est d'un gris de cendre uni; quelquefois il y a sur les ailes inférieures une série intranervurale de quelques petits points jaunâtres, le long du bord terminal. Le Satyrus Sylvicola vole en août à Sebdou, à Géryville; il varie beaucoup pour la taille. On trouve aussi Sylvicola dans les montagnes voisines de Lambèse; mais la race de T Est-Algérien diffère un peu de celle de l'Oranie. On voit voler Sylvicola au mois de juillet dans la région de Lambèse; il continue d'y éclore pendant le mois d'août. Les Q de la race orientale diffèrent moins que les cf de la morphe occidentale algérienne. Les cf de Lambèse sont, en dessus, d'un brun moins uniforme; les ailes supérieures montrent I/o LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE deux ocelles noirs quelquefois pupilles de blanc et deux points blancs; les ailes inférieures ont une série submarginale de points blancs, comme les Q de Sebdou. Le dessous des ailes est d'un gris plus clair, donnant un aspect moins obscur que dans la race oranaise. Ces caractères se trouvent particulièrement accentués chez la race kabyle L]ue j'ai appelée Cinereus et que M. Dayrem a récoltée en juillet et août 1907 à Yakouren. Chez Cinereus, le dessous des ailes du cf est gris clair avec un semis de nombreux atomes noirs sur la surface des inférieures où l'on perçoit deux lignes noires ondulées transverses : l'une subbasilaire, l'autre médiane; l'éclaircie, au delà de la ligne médiane, commune, est blanchâtre; l'épi soyeux du cf sur les supérieures est bien appa- rent en brun grisâtre, sur un fond plus noirâtre, tandis que le gros ocelle noir inférieur se trouve sur un fond moins obscur. Enfin, il y a la petite race Holli, de la Glacière de Blidah, capturée en août par M. Holl; elle est très distincte; sa taille est très généralement réduite; elle présente une forme d'ailes plus arrondie, une teinte générale plus grise avec un reflet jaunâtre, et plus pâle; les ocelles noirs ordinaires sont bien saillants; les points blancs souvent nombreux et accentués; le dessous est gris pâle chez les cf, plus brun chez les Q. Les quatre races Sylvicola, d'Oranie, Lambessamis, de l'Aurès, Cinereus, de Yakouren, Holli, de la Glacière de Blidah, sont nettement distinctes et séparables. Cependant la morphe de Lambèse fait une liaison entre Sylvicola, de Sebdou, et Cinereus, de Yakouren; c'est une race transitionnelle très intéressante. Il convient encore d'observer les faits suivants : tandis que le Satyrus Hansii vole en septembre et n'a encore été rencontré que dans la province d'Oran, le Satyrus Sylvicola éclôt plus tôt et se rencontre, un peu modifié, il est vrai, dans la province de Constantine. J'ai fait représenter Cinereus, Obthr., de Yakouren {Etudes de Lépidoptérologie comparée, Vol. III, PL XVI, fig. 41 et 42), LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE I/I et HoUi, Obthr., de la Glacière de Blidah (^Eludes Lépidopt. comparée. Pi. XVI, fig. 36, 37). Je suis donc présentement convaincu que Hansiï est une Espèce à part, tout aussi bien que FoiuelLi; mais je crois que Sylvicola, Lambessanus, Cïnereus et Holli sont quatre morphes appartenant à une même unité spécitique. Seulement, à tpelle Espèce européenne peut-on correctement rattacher Sylvicola, Lambessanus, Cïnereus et Rollï? Est-ce à Fauna? ou à Fatiia. Alors se pose la question de savoir si Fauna et Fatua sont deux Espèces séparées ? Il me semble que seul l'examen biologique, par exemple la comparaison de la forme des œufs, d'une part, et l'examen anatomique des genitalia, d'autre part, peuvent aider à la solution du problème. Actuellement cette étude com- parative reste encore à faire; mais avec les documents que nous possédons, il sera bientôt possible de la réaliser. M. Elarold Powell a étudié dans ma collection, à Rennes, les séries de Satyrus Sylvicola, Sylvicola-Lambessanus, Cïnereus et dolli qui y sont classées. Je l'ai prié de faire précéder les notes biologiques qu'il a rapportées d'Algérie, relativement aux Sylvi- cola de la province d'Oran et des environs de Lambèse, par un expose de l'opinion que lui a suggérée l'examen comparatif de Sylvicola et Sylvicola-Lambessanus que lui-même a capturés, et de Cinereus et Molli qu'il n'a pas rencontrés au cours de ses explorations. V'oici donc le résultat de l'étude que M. Powell a faite à Rennes. C'est M. Powell qui parle : « Après avoir examiné comparativement les séries de Satyrus Sylvicola, S. Sylvicola-Lambessanus, S. Cinereus et ^. Holli con- tenues dans sa collection, je suis parfaitement d'accord avec M. Charles Oberthiir, quand il exprime la conviction que ces quatre Satyrus sont des morphes d'une même unité spécifique; je ne connais rien des mœurs, ni de la biologie des deux dernières races ; mais les papillons de ces deux races présentent un faciès général qui semble les lier intimement aux Sylvicola de l'Aurès et à ceux de la Province d'Oran; le S. Holli est celui qui diffère 1/2 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE le plus des autres formes connues de Sylvicola; cependant, je ne lui trouve pas un caractère suffisamment tranché pour justifier une séparation spécifique; je remarque chez Holli, les caractères décrits par M. Oberthiir, et, de plus, je constate que sur le dessus des ailes, la limitation de l'espace basilaire, qui est plus obscur que l'espace marginal, présente chez Holli une saillie moins importante et moins aiguë entre les deux taches noires ocellées des supérieures, que chez Cinereus, Lambessanus et Sylvicola; cette différence est particulièrement apparente chez les Q Ç), mais en examinant un grand nombre d'exemplaires, on trouve exceptionnellement certains individus de Cinereus, Lambessanus et Sylvicola chez lesquels la saillie n'est guère plus prononcée que chez Holli. Les ailes inférieures et les apices des supérieures, en dessous, dans les quatre races sont marquées d'un semis brun noir sur le fond gris; mais, tandis que ce semis est très effacé chez Sylvi- cola et Lambessanus, il est généralement mieux indiqué chez Holli et toujours très net chez Cinereus. Les éclaircies jaunes, antémarginales, qui, souvent, ornent trois ou quatre espaces internervuraux de l'aile inférieure de la g de Sylvicola et de celle de Lambessanus, en dessous, n'existent pas chez Cinereus; le petit point jaunâtre qui forme le nucleus de chacune de ces éclaircies jaunes, dans les deux premières races, est remplacé, chez Cinereus par un point blanc; chez Holli Q, les éclaircies et les points antémarginaux du dessous des inférieures, manquent généralement, ou ne sont que faiblement indiqués en gris clair jaunâtre. A Sebdou, Sylvicola commence à apparaître un peu après la mi-juillet; en 1907, j'ai capturé les deux premiers exemplaires (deux çj (3 très frais) le 18 juillet; l'Espèce est devenue assez abondante ensuite, dans toute la région montagneuse et boisée s'étendant de la frontière Marocaine à la forêt de Daya; Sylvi- cola n'était pas rare, non plus, sur les collines semi-arides au sud de Sebdou, et il volait aussi dans la grande plaine d'Alfa, fréquentant surtout la marge, qui est maigrement boisée de buis- LEPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 173 sons de chêne vert, à l'ombre desquels, le papillon aime à se poser; on le trouve dans cette localité, sur le même terrain que Fidia-Albovenosa; d'une façon générale, ces deux Espèces ne se rencontrent pas ensemble, Fidia habitant, dans les montagnes, les localités où le rocher calcaire apparaît à la. surface au milieu de touffes de Diss ou d'Alfa, tandis que Sylvicola préfère les parties mieux boisées. Je ne crois pas que Sylvicola se trouve répandu sur toute la vaste plaine, mais il peut paraître par places ; j'ai rencontré quelques exemplaires en mauvais état, sur les mon- ticules dans le voisinage d'El-Aouedje, les 27 et 28 août 1907; c'est un point avancé d'une dizaine de kilomètres dans la plaine. L'Espèce se trouve aussi à El-Aricha, qui est à cinqante kilo- mètres environ des forêts; je ne l'y ai pas prise moi-même, mais il existe, dans la collection de M. Oberthiir, des Sylvicola capturés par M. Austaut dans cette localité en 1896; ils proviennent pro- bablement de la montagne du Mikaidou près d'El-Aricha, qui possède quelques buissons et beaucoup d'Alfa. L'époque à laquelle il convient de chasser Sylvicola à Sebdou, est entre le 25 juillet et le 15 août; le papillon est alors assez abondant par places, et les individus sont, en général, frais. Le papillon ne se rencontre qu'assez rarement haut sur les mon- tagnes; il préfère les vallées, les pentes et les plaines boisées de chênes verts, lentisques et Fhillyrœa; il est vif dans ses mou- vements; son vol n'est pas soutenu, quoique assez rapide; il se pose sur le sol, à l'ombre des buissons, ou bien sur les troncs d'arbres, les ailes fermées; posé, il se confond bien avec son entou- rage, et n'est pas facile à distinguer. Sylvicola est méfiant, mais il n'est pas très difficile à prendre, car, si on le manque, il se pose presque aussitôt derrière quelque touffe ou buisson ; plus il est effrayé, moins il va loin, et on finit le plus souvent par le capturer. J'ai plusieurs fois vu le papillon posé sur les excréments de chevaux et de mulets, sur les sentiers et pistes ; et il vient quelque- fois voler autour des animaux en sueur; on remarque moins souvent ces habitudes chez Sylvicola que chez Fidia, cependant. 174 LÉPIDOrXÉROLOGIE COMPARÉE A Géryville, Sylvicola ne se rencontrait que sur les montagnes boisées, à une certaine altitude ; il manquait entièrement dans les plaines; sa meilleure localité était la forêt de chênes verts tapissant le versant nord-ouest du Djebel-Ksel entre 1.600 et 1.900 mètres. Quand nous sommes descendus, le 10 juillet 1910, de cette montagne, où nous venions de faire un séjour d'environ quinze jours, le papillon n'était pas encore éclos, mais à notre retour au même endroit, le 21 août, nous avons trouvé Sylvicola abondant; l'éclosion, sur le Ksel, doit commencer à la fin de juillet ou dans les premiers jours d'août; l'éclosion d'un papillon dont j'avais pris la chenille, pleinement développée, sur le Ksel, le 29 juin 1910, a eu lieu le 5 août de la même année. Voici ce que je trouve dans mes notes, relatives à Sylvicola sur la montagne du Ksel : « 22 août 1910. Belle journée; atmosphère très brumeuse; vent du N.-O. assez violent à partir de 10 heures du matin. Charles David et moi, nous avons quitté le campement d'Aïn- el-Kcheb à 7 heures pour explorer la montagne jusqu'au sommet. De notre point de départ jusqu'au point culminant (2.008 mètres), volait le Satynis Sylvicola; il paraît se produire peu d'éclosions à présent, et, en conséquence, nous n'avons pas pris beaucoup de sujets irréprochables; cette Espèce s'abime rapidement; comme tous les Satynis noirs, ou presque noirs, Sylvicola devient brunâtre au bout de deux jours de vol ; le dessus des ailes ne tarde pas à montrer des égratignures, surtout chez la Q ; sou- vent on en prend ayant le dessous intact et le dessus abimé. Au début de la matinée, le papillon se pose sur les pierres ; plus tard, lorsque le soleil prend de la force, il cherche l'ombre des arbres et des buissons de chêne vert, assez espacés ici ; il ne se pose que rarement sur les troncs ou sur les feuilles, mais se place, le plus souvent, par terre, à l'ombre. En marchant, on fait souvent s'envoler un Sylvicola de la place qu'il occupait sur une pierre; il va se poser, un peu plus loin, dans une position semblable, ou bien, si l'heure est avancée, LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 175 il se met à l'ombre d'un buisson, passant parfois à travers les branches pour ressortir de l'autre côté; si l'on voit exactement où il se place, on peut, généralement, l'approcher, en procédant avec précaution, et le couvrir d'un rapide coup de filet; mais il faut souvent le suivre de station en station avant de réussir; les cf Cf sont plus méfiants que les Q Q- Lorsqu'il fait du vent, comme aujourd'hui, cette chasse est rendue plus difficile; il n'est pas toujours très facile de suivre le papillon de l'œil, surtout s'il s'envole au milieu d'un petit nuage de Satyms Semele dérangés en même temps. Sylvicola succombe rapidement dans le flacon à cyanure; j'ai remarqué que tous les individus pris ce jour (environ 75), sont morts les ailes bien fermées; aucun ne s'est retourné à l'envers. Les plateaux pierreux, près du sommet, ressemblent beaucoup à ceux habités par le S. Hansiï à Sebdou ; si Hansii existe dans la région, on devrait le trouver ici, le mois prochain (*). Au sommet de la montagne Sylvicola était en moins bon état que dans les bois du versant N.-O. 24 août 1910. J'ai suivi, aujourd'hui, pour plusieurs kilomètres, la crête du Ksel dans la direction N.-E. d'Aïn-el-Kcheb; le som- met de la crête est assez plat, et, par endroits, couvert de grandes dalles de grès; il y pousse des buissons de chêne vert, des Ephedra et des Santolina (5. squarrosa?) ; le versant N.-O. possède de grands chênes verts, et de nombreuses petites prairies maigres et main- tenant desséchées où viennent paître les vaches du garde indi- gène, El-Hadj-Ahmed. Sur la crête, volait autour des buissons, un grand nombre de 5. Semele et quelques S. Sylvicola. Autour des arbres de la pente N.-O., Sylvicola était plus abondant, mais en assez mauvais état. J'ai pris, parmi les Sylvicola, un seul exemplaire de S. Fidia, un cf frais de très petite taille; ce papillon, qui commence à peine à voler, sur le Ksel, éclot, par conséquence, plus tard que Sylvicola dans cette localité; à Sebdou (*) Nous avons parcouru les plateaux du Ksel, en septembre, mais nous n'y avons pas rencontré Hansii, qui ne paraît pas habiter les montagnes de Géryville et de l'Amour. 176 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE également son éclosion commence un peu après celle de Sylvïcola; à Hyères, dans le département du Var, où on peut trouver 5. Fidia et 5. Alliotiia ensemble sur le même terrain, j'ai tou- jours remarqué que l 'éclosion de Fidia commençait un peu avant celle de Allionia. Ces faits indiqueraient une différence relative entre Sylvicola et Allionia. Fidia ne se trouve pas communément avec Sylvicola sur le Ksel ; il est assez abondant dans l'Alfa, sur les pentes inférieures, au N.-O. de la montagne, mais Sylvicola ne descend pas en dessous de la limite des arbres. Hier et aujourd'hui, 3.3 pour cent des Sylvicola capturés sont morts à l'envers dans le flacon à cyanure; la proportion n'est pas grande ». Sylvicola existe aussi sur le Djebel-Bouderga, montagne qui termine, au sud-ouest, la chaîne de Géryville; nous l'y avons pris, abimé, en septembre 1910. L'Espèce est commune à Aflou, presque partout où il y a des buissons de chêne vert ou de Jnniperns phœnicea; le premier exemplaire de l'année 191 1 y a été pris le 8 août. L'observation suivante a été faite le 23 août 191 1 au courant d'une chasse sur les collines à l'ouest d'Aflou, près de la Kouba de Sidi-Boulefa; ces collines possèdent une végétation assez riche en Espèces quoique peu dense; l'Alfa y est abondant par places, et les genévriers de Phénicie sont très beaux de ce côté : (( Sylvicola volait dans l'Alfa, et se posait dans l'ombre des touffes de cette Graminée, ou bien dans l'ombre des Genévriers; je ne trouve pas qu'il soit aussi commun ici que dans la forêt de chênes verts du Ksel, à Géryville; on constate déjà que bon nombre des cf cf sont défraîchis. J'ai pris, aujourd'hui, d" et Ç de Sylvicola accouplés; en marchant entre les touffes, je les ai fait s'élever du sol, où ils étaient posés ; c'est la Q seule qui volait, emportant le cf, qui pendait, les ailes fermées, sans faire un mouvement; même dans le ûlet, il ne s'est pas débattu ». LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 1/7 Au pied du Djebel-Oum-Guedour, le 27 août 191 1, j'ai remarqué que Sylvicola préférait se mettre à l'ombre des Arars (Genévriers de Phénicie) plutôt que de se poser derrière les touffes d'Alfa, ainsi que faisait Fidia dans la même localité. Le même jour, sur le petit plateau de grès, au-dessus de l'Aïn- Tedmama, j'ai vu plusieurs Sylvicola se reposant à l'ombre des Arars et des Tagas. On ne voit pas souvent butiner Sylvicola sur les fleurs, mais il faut dire que celles-ci sont fort rares à l'époque à laquelle vole le papillon; je me souviens toujours d'avoir vu un grand nombre de Sylvicola et de Fidia-Albovenosa, accompagnés de quelques Abdclkader, dans un champ d'Euphorbia luteola, à une douzaine de kilomètres au S.-S.-O. d'Aflou; c'était le 8 septembre; nous revenions d'El-Kheicha, et nous remontions le lit à sec d'un large oued traversant une région de collines d'Alfa et de Genévriers; près du point d'eau nommé sur la carte au 200,000", (( Aïn-el-Harfi- », l'oued fait une boucle, entourant à moitié un champ plat recouvert d'Armoises et de belles touffes d'Euphorbe; les Saiyrns étaient très nombreux sur les fleurs; ils venaient des collines environnantes; quelques Fidia se trouvaient encore frais, mais les deux autres Espèces étaient en bien mauvais état. Sylvicola (race Lambessanus, Obthr.) est très commun dans la partie boisée nord et nord-centrale du Massif de l'Aurès; on le rencontre sur toute la longueur de la chaîne qui s'étend, de l'est à l'ouest, au sud de Lambèse; Lambessanns a les mêmes mœurs que Sylvicola de la race Oranaise; on le prend abon- damment dans les rochers, au bord des plateaux élevés du Djebel- Asker et du Stoh ; dans ces localités il se trouve avec 5. Briseis- Major; il est commun dans la forêt de cèdres et chênes verts de ^S^iy 011 j'ai trouvé la chenille en juillet. Je n'ai pas trouvé Sylvicola sur les montagnes et collines du sud de l'Aurès. En 191 2, les premiers cf cf ont été pris le 25 et le 26 juillet, dans les bois de Baïou. Trois cf Cf et une g furent capturés le 12 i;8 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 28 juillet, dans le haut de la forêt de Lambèse; ils étaient fraîche- ment éclos; l'Espèce abondait pendant la première quinzaine d'août; à partir de cette date, on prenait de plus en plus rare- ment des sujets frais, et, à la fin du mois, il ne volait que des exemplaires tout à fait passés. On continuait à rencontrer Sylvi- cola-Lambessanus, en septembre. En 191 3, c'est le 2 août qu'on a pris les premiers individus, et, le même jour, nous avons vu les premiers Salyrus Fidia-Albo- venosa. On peut estimer l'existence de Sjdvicola, à l'état d'imago, à une durée de 5 à 7 semaines, les Q Q paraissant vivre un peu plus longtemps que les cf cf. L'accouplement se fait au début, et la période pendant laquelle la Q pond ses œufs, est assez pro- longée ; les Q Q capturées dans la seconde moitié de septembre ont encore des œufs fertiles dans le corps. En liberté, les œufs doivent être déposés sur les tiges et les feuilles des Graminées, et même quelquefois, peut-être, sur des objets étrangers se trou- vant dans les touffes. J'ai bien souvent fait pondre les Q Q, en captivité, sous cloches de mousseline; d'abord, à Sebdou, en septembre 1907, puis à Géry ville à la fin du mois d'août et en septembre 19 10 et ensuite à Lambèse, au commencement de septembre 1913; l'œuf est plus souvent déposé sur la mousseline que sur les feuilles ou tiges de la touffe; les Q Q captives pondent entre 8 heures du matin et 3 heures de l'après-midi, mais elles semblent préférer la matinée pour cette opération. Œuf. — L'œuf est fixé solidement à l'objet (feuille ou tige de Graminée, ou mousseline) sur lequel il est pondu. La chenille éclôt 10 ou 12 jours après la ponte si les conditions sont normales; l'éclosion peut être retardée par une température plus basse que d'habitude. L'œuf est blanc, mais il prend une teinte plomb pâle environ deux jours avant l'éclosion. Le chorion est assez épais. Hauteur de l'œuf o.ooi ; plus grande largeur 0.0008. La forme est celle d'un œuf de poule qui serait large- ment aplati à un bout (base) et plus faiblement aplati à l'autre LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE I 79 (sommet) ; ceci fait que le diamètre horizontal maximum est plus près de la base que du sommet; il y a seize côtes verticales séparées entre elles par de larges vallées peu profondes; les côtes transversales, qui se dessinent dans les vallées, sont nom- breuses, petites, peu accusées ; elles ne dépassent pas (c l'épaule » du sommet, où les côtes verticales s'abaissent, deviennent gra- nuleuses, onduleuses et confuses pour s'arrêter, enfin, au bord de l'espace micropylaire; cet espace est très légèrement renflé au centre; sa surface est recouverte de cellules microscopiques, mal définies; l'arête des côtes verticales est arrondie, non tran- chante; les granulations au sommet de l'œuf sont beaucoup moins développées que chez Briseis et Prieuri; la base de l'œuf n'est pas absolument plate, mais très faiblement bombée. La description donnée ci-dessus est celle d'un œuf pondu à Lambèse, le 9 septembre 1913. Pour sortir de l'œuf, la petite chenille découpe un cercle presque complet autour du sommet, qui, très souvent, revient en place et reste attaché à l'œuf par une (( charnière », après l'émergence; cette manière de sortir de l'œuf caractérise toutes les chenilles du groupe Fauna. La pre- mière nourriture que prend la chenille est quelquefois fournie par la coque vide; mais elle ne la mange pas toujours; avant de commencer à manger la Graminée qui doit la nourrir pendant la durée de son existence, la petite chenille peut supporter une période d'au moins une dizaine de jours de jeûne; cette faculté de résistance lui permet sans doute d'attendre la poussée de feuilles nouvelles et tendres, dans le cas où son éclosion aurait eu lieu avant la fin de la période sèche; j'ai d'ailleurs remarqué ce caractère chez plusieurs chenilles Satyrides. Satyrus Sylvicola vit sur plusieurs Espèces de Graminées; j'ai trouvé sa chenille sur trois Espèces différentes; au Djebel-Ksel, en 1910, et, dans les montagnes de Lambèse, elle mange plusieurs Graminées à feuilles glabres. En captivité, j'ai élevé les chenilles sur le Festiica qui nourrissait également les chenilles de Hansii; lorsque cette Graminée me manquait, je leur donnais le Foa anmia et certaines autres Espèces à feuilles glabres. l8o LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Sylvicola évolue moins rapidement que Hansii, ainsi que je l'ai déjà dit en traitant de la biologie de cette dernière Espèce. A l'éclosion, la chenille est grisâtre, mais après avoir commencé à prendre une nourriture végétale, la couleur verte se développe. Voici les notes sur le premier stade, que j'ai prises le 8 décembre 1907, à Hyères : (( Longueur totale de la chenille près de la fin du premier stade 0.004; largeur de la tête 0.00045. ^-^ description donnée de la chenille de Hansiï dans ce stade peut s'appliquer également à Sylvicola, mais il faut tenir compte du fait que la chenille de Sylvicola est un peu plus petite, que sa tête et la fourche sont un peu plus foncées que celles de Hansii, et que les lignes du corps, surtout les lignes pâles, sont un peu moins distinctes; la diffé- rence la plus importante est celle que l'on observe dans les dimensions de la tête chez les deux Espèces, et cette différence est constante chez tous les individus que je possède ». Le 16 février 1908, j'ai noté que les chenilles de Sylvicola étaient bien moins avancées que celles de Hansii; depuis six semaines elles n'avaient mangé que très peu; sur trois chenilles que j'ai pu voir sur les tiges, ce jour, deux venaient, depuis peu, d'atteindre le second stade; la troisième étant encore dans le premier stade. Le 29 mars, j'ai remarqué que les chenilles se portaient très bien, et qu'elles commençaient enfin a faire des progrès appré- ciables; deux d'entre elles attendaient la deuxième mue. Voici mes observations en ce qui concerne le second stade : (( Longueur totale de la chenille à la fin du second stade 0.0 1 1 à 0.013; largeur de la tête 0.0012 (on notera que la chenille de Sylvicola dépase celle de Hansii dans le second stade, pour la taille et pour la largeur de la tête). Tête : verte, avec une teinte grisâtre; les soies sont nom- breuses, incolores, très courtes sauf autour de la bouche, où il existe des poils plus longs. LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE l8l Corps : couleur fondamentale vert tendre; quand la chenille se courbe, les plis formés par la peau paraissent d'un blanc jau- nâtre, mais ce caractère n'est pas spécial à Sylvicola; la ligne médiodorsale est vert foncé, bordée de blanchâtre; au delà de cette bordure est une surface vert clair qui s'assombrit dans le voisinage de la ligne suivante, la deuxième sousmédiane, qui n'est pas d'un vert aussi foncé que la médiodorsale; immédiate- ment en dessous est une rayure blanchâtre, assez large, presque entièrement recouverte de vert pâle, le blanc ne se montrant que sur les bords; ensuite vient la large ligne suprastigmatale d'un vert foncé, plus pâle sur les segments thoraciques; le bord supé- rieur de cette ligne est très sombre; la suprastigmatale est séparée de la stigmatale par une étroite ligne blanchâtre; la stigmatale est vert pâle, large; la ligne en corniche est d'un blanc pur; elle paraît plus large que chez Hansii; les dents de la fourche sont longues, pointues, légèrement teintées de rose; la surface ven- trale, les pattes membraneuses et la base des pattes écailleuses sont d'un vert d'herbe, les pattes elles-mêmes étant d'un gris pâle; les tubercules, ou points sétifères, sont pareils à de petites perles noires (au microscope) ». En somme, la robe de la chenille ne diffère pas beaucoup de celle de Hansii dans le stade correspondant; les lignes et la couleur fondamentale sont seulement un peu plus pâles, et on ne distingue aucune trace de rose dans la ligne stigmatale. Le troisième stade a commencé, pour plusieurs chenilles, dans la première semaine d'avril; trois ou quatre chenilles étaient encore dans le second stade, le 23 avril. Les notes suivantes, se rapportant au troisième stade, ont été prises entre le 23 et le 30 avril : (( Longueur de la chenille à la fin du stade, 0.017; largeur de la tête, 0.0018. Tête : Verdâtre, le triangle frontal étant d'un vert plus net que les lobes; elle n'a aucune trace encore des rayures foncées. Corps : La couleur fondamentale et celle des lignes et rayures l82 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE sont ce qu'elles étaient dans le stade précédent; il y a une trace à peine perceptible de rose, dans la ligne stigmatale, qui est d'un vert très pâle sur les segments thoraciques et sur les pre- miers segments de l'abdomen; la ligne en corniche est large, blanche; les dents de la fourche sont teintées, au sommet, de rose très pâle. La différence entre les chenilles de Sylvïcola et de Hansii est très appréciable dans ce stade; elle se remarque notamment dans la ligne stigmatale, qui est vert très pâle avec une faible indica- tion de rose chez Sylvicola, rose saumoné chez Hansii; la plus grande largeur apparente de la ligne en corniche, chez Sylvicola, est due sans doute à la différence peu prononcée dans la couleur de ces lignes et au manque de limite nette entre les deux lignes en question. Pendant le troisième stade, les chenilles de Sylvicola mangent principalement pendant le jour; quelquefois, cependant, elles montent sur les feuilles, le soir. Une première chenille a atteint le quatrième stade le 3 mai 1908; une deuxième chenille a passé la troisième mue quelques jours plus tard ; leur développement se faisait plus rapidement a cette époque, mais elles étaient très en retard sur les Hansii. J'ai emporté deux chenilles avec moi, en Algérie, et j'ai trouvé moyen de compléter leur éducation en les nourrissant avec des Graminées trouvées dans les jardins de Biskra et de Khenchela; leurs habitudes sont plutôt nocturnes, dans le quatrième stade, ainsi que j'ai pu le constater chez des chenilles trouvées en liberté en juin 191 2, à Lambèse. Description de la chenille dans le quatrième stade : (( Longueur totale à la fin du stade 0.024. (II est probable que ce chiffre est au-dessous de la moyenne, parce que les deux chenilles observées avaient été nourries, pendant tout le stade, sur des Graminées coupées et, en conséquence, elles ne devaient pas avoir la taille de chenilles élevées sur la plante fraîche). Tête : Largeur 0.0027; elle est vert clair et les rayures brunes LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 183 sont maintenant visibles, mais elles ne sont que très faiblement marquées et diffèrent, pour ce caractère, des rayures très distinctes de la tête de Hansii dans ce même stade. Corps : Vert pâle; les lignes ressemblent à celles de la chenille de Hansiï; mais la médiodorsale et la sousmédiane sont un peu moins fortement marquées que chez cette Espèce; la stigmatale possède maintenant la couleur rose saumonée qui manquait presque complètement dans le stade précédent; la surface ven- trale, les pattes membraneuses et la base des pattes thoraciques sont vertes ; les dents de la fourche sont longues, leur extrémité est rosée )). Une chenille s'est mise au repos, dans l'attente de la quatrième mue, le 16 mai; elle a atteint le cinquième stade le 18 mai; ordinairement la période de repos qui précède une mue dure plus longtemps; sa durée est influencée par la température; il faisait très chaud à Biskra en mai 1908. Description de la chenille dans le cinquième (dernier) stade : « Tête : Largeur 0.0036 à 0.0038 ; sa couleur est nankin pâle un peu plus foncée que la couleur fondamentale du corps; les rayures sont bien moins fortement marquées que chez Hansii. Corps : La couleur fondamentale est d'un nankin blanchâtre, les lignes ressemblent à celles de la chenille de Hansii, mais elles sont en général moins fortement indiquées que chez cette Espèce, et la médiodorsale conserve, dans un certain nombre d'individus de SylvicoLa, une teinte verdâtre que je n'ai jamais remarquée chez Hansii après la période d'assombrissement qui suit immédiatement la quatrième mue; même chez les chenilles de Sylvicola, dont la ligne médiodorsale devient grise ou gris brun, cette ligne conserve une teinte verdâtre plus ou moins appréciable qui lui communique une apparence de profondeur. L'une des deux chenilles emportées en Algérie, a conservé jusqu'à la fin du dernier stade la couleur verte de la médio- dorsale; j'ai noté que la couleur de la ligne était d'un vert grisâtre clair, semblable à celle d'une eau profonde, bien éclairée; 184 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE chez l'autre chenille, la médiodorsale était verte pendant environ deux jours après la quatrième mue ; mais elle a tourné à la variété grise ensuite; cette ligne est plus foncée et plus étroite sur les segments thoraciques, spécialement sur les deux premiers; la couleur fondamentale, presque blanche, paraît en bordure, sépa- rant la médiodorsale de la rayure sousmédiane qui est formée d'un semis d'atomes d'un gris carné réunis en lignes microsco- piques ; les limites supérieure et inférieure de la rayure sous- médiane, sont nettement marquées en brun grisâtre; elles forment respectivement les lignes que j'appelle (( sousmédiane » et u deuxième sousmédiane » ; la deuxième sousmédiane est une ligne étroite mais très distincte, tandis que la sousmédiane est faible et très étroite; vient ensuite une rayure plus étroite, d'une teinte un peu plus jaunâtre que la rayure sousmédiane; elle est bordée de la couleur blanchâtre fondamentale; la rayure supra- stigmatale est large, d'un gris foncé; elle possède une apparence de profondeur, comme la ligne médiodorsale ; sa marge supé- rieure est noirâtre, plus épaisse sur les segments abdominaux 6, 7 et 8 ; un filet blanchâtre sépare la suprastigmatale de la stigmatale, qui est de couleur rose saumonée moins vive que dans le stade précédent; sa marge supérieure est formée par une étroite ligne d'un saumoné plus intense; la ligne en corniche est blanc nankin, et assez large; immédiatement en dessous de la corniche, se trouve une ligne de couleur gris brun ; la surface ventrale et toutes les pattes sont d'un gris blanc, le centre ventral étant un peu teinté de verdâtre. Les chenilles élevées en 1907- 1908 se sont chrysalidées vers la an du mois de juin; à Khenchela, j'avais placé une provision de terre dans la boîte qui contenait les deux exemplaires; les chenilles, arrivées à terme, ont erré dans la boîte comme celles de Hansii; ensuite chacune s'est confectionné, sous la surface du sol, un cocon composé de grains de terre réunis ensemble par une soie de faible résistance; le dessus du cocon se trouvait au niveau du sol ; dans la nature, les cocons doivent être construits au pied des touffes, je pense. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 185 La chrysalide est de la forme trapue de celles du genre Satynis; elle est d'un acajou clair, plus pâle sur les ptérothèques et sur la surface ventrale, plus foncé sur le thorax et la surface dorsale de l'abdomen ; elle est recouverte d'une bien une et mince couche de pulvérulence blanche. L'éclosion des papillons s'est produite à la fin du mois de juillet. En cherchant, la nuit, sur les Graminées poussant sous les chênes verts et entre les rochers du voisinage de Aïn-el-Kcheb (Djebel-Ksel près Géry ville), j'ai trouvé cinq chenilles de Sylvi- cola déjà bien avancées dans le dernier stade, à la fin du mois de juin 1910. Dans la soirée du 18 juin 1912, j'ai pris cinq chenilles (quatrième stade) au Col de Doufana, près de Lambèse; ces dernières mangeaient les Graminées qui poussaient au milieu des touffes de Buplevrum Spinosum et de Cytisus Balansœ; elles étaient à proximité de la forêt. En 191 3, entre le 9 et le il juillet, nous avons trouvé quelques chenilles de Sylvie ola dans la vallée de Tafrent, à Sgag; elles étaient alors pleinement développées; j'ai obtenu l'éclosion d'une Q provenant d'une de ces chenilles, le 17 août 1913. Je n'ai jamais rencontré, dans la libre nature, une chenille du dernier stade ayant la ligne médiodorsale aussi verte que chez certains exemplaires des chenilles élevées en captivité. Dans le dernier stade, la chenille ne montre de l'activité que la nuit; elle reste, la tête en bas, cachée dans les touffes, pendant le jour; l'habitude nocturne est déjà acquise dans le quatrième stade, mais je ne crois pas qu'elle soit alors absolue ». Satyrus Fidia, Linné. Voici, reproduite dans son intégralité, la description de Fidia par Linné, telle qu'elle se trouve imprimée dans l'édition du Sysle7na Natures datée de 1767 : (( Fidia, 138, P. N. {Papilio l86 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE N ymphalis) alis dentatis ; supra f uscis caeruleo micantibus pri- moribus ocellis duobus, duobusque punctis albis. — Habitat in Barbaria. — Corpus rnagnitudme P. Popidi. Alae supra omnes nigras caeruleo micantes; ocelli ad margmem exteriorem, inter quos puncta 2 alba. Subtus cinereae undis duabus albis nigro inductis : primores ocellis 2 et punctis albis, ut supra; posticœ posterius punctis 2 albis et i nigro, quae interdum supra etiam observantur. » Il résulte de cette description linnéenne que le type du Sut y rus Fidia se trouve en Barbarie et qu'il a la grandeur de la N ymphalis Populi. C'est donc la plus grande race algérienne à laquelle doit être légitimement attribué le nom de Fidia. Je l'ai fait figurer sous les n"^ iiio (cf) et 1 1 1 1 (ç ) de la PI. CXXV, dans le Volume VI des Eludes de Lépidopiérologie comparée. Le O* figuré vient de Yakouren et la Q d'Aïn-Draham, en Tunisie. Mais les n°'' 11 10 et un représentent la race albovenosa dont les nervures semblent se détacher en relief sur le dessous des ailes inférieures, et sont blanches, tandis que la description linnéenne est muette sur le caractère qui a motivé le qualificatif : albovenosa, appliqué à la morphe algérienne du Satynts Fidia. Il est constant que la plupart des Satyrus Fidia, en Barbarie, ont les nervures blanches aux ailes inférieures, en dessous; cependant pas tous. En effet, ainsi que je l'expose à la page 378 du Volume III des Etudes de Lépidopiérologie comparée, le lieutenant Mathieu a pris à Alger des exemplaires de grande taille et ne différant pas de ceux d'Europe. Dès lors il est pos- sible que les Fidia barbaresques décrits par Linné n'étaient pas albovenosa, notamment s'ils ont été pris aux environs d'Alger, ce qui est d'ailleurs probable, puisque Erik Brander, correspon- dant de Linné, fut, ainsi que je l'ai dit plus haut, « Swedish Consul at Algiers, from 1753 to 1765 )). Néanmoins, il pourrait se faire que la description de Linné ne fût pas complète et qu'il eût omis de signaler un caractère qui ne lui aurait pas paru important : c'est-à-dire la saillie en blanc des nervures aux ailes inférieures en dessous. Du reste, il LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 187 n'existe pas un seul exemplaire de Fidia dans ce qui reste de la collection Linnéenne, et voici comment, dans Révision of ihe Linnean types, le Docteur Roger Verity s'exprime (p. 184), à propos du Satyrus Fidia : <( Satyrus Fidia (1767). Linnaeus never possessed this species and never seems to hâve realised that Petiver's figure m « Gazophylacium » 12, PI. 7, fi.g. 5, which he quotes under hermione m reality represents this insect. » 11 faut remarquer en outre que Linné, n'ayant pas d'exem- plaires européens de Fidia pour comparer à ceux de Barbarie, a pu négliger de tenir compte du caractère d'albovenosa qui n'est frappant que par opposition aux spécimens non albovenosa. y\lors, pour établir l'exacte nomenclature relative au Satyrus Fidia, se pose de nouveau une objection que les circonstances m'ont déjà porté à faire plusieurs fois valoir dans les Etudes de Lèpidoptérolûgie comparée et que j'ai préalablement trouvé maintes occasions de proposer à l'examen et aux réflexions des Entomologistes : faute de ligure à V appui d'une description, — comme la description peut ne pas avoir tenu compte de tous les caractères dont une partie reste oubliée et -non signalée, — V exacte identification est toujours incertaine. Toutefois, comme quelques exemplaires algériens de Satyrus Fidia, pris à Alger, ne rentrent pas dans la catégorie qu'on peut appeler : albovenosa, le plus raisonnable paraît être de consi- dérer ces exemplaires barbaresques non veinés de blanc et de grande taille, comme le type de l'Espèce. Le type est alors représenté par les spécimens qui sont le moins abondamment répandus dans l'Afrique méditerranéenne; car les grands exem- plaires recueillis à Aïn-Draham et en Kabylie, ainsi que la petite race {ininor, Obthr., Etud. Lépid. conip., Vol. III, PL CXXV; Q, fig. II 12) récoltée dans le sud de l'Oranie, appartiennent, sans que j'aie jamais vu d'autre exception parmi eux, à la forme albovenosa, Austaut. Le Satyrus Fidia vole très abondamment en Barbarie, dans la région située au nord de la région saharienne; il éclôt en juillet et août. l88 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE A la page 277 du Volume III des Etudes de Lépïdoptérologie comparée, je relate la capture du Satyrwî Fidia dans la Loire- Inférieure; mais je considérais ce fait comme problématique. Mieux informé, je dois déclarer aujourd'hui que le Satyrus Fidia a été en effet plusieurs fois rencontré près de La Chapelle-sur- Erdre, par M. Ollivry, dont j'eus naguère l'avantage de recevoir à Rennes l'aimable visite. Le 14 décembre 191 2, M. Ollivry eut l'obligeance de m'envoyer deux Satyrus Fidia cf pris par lui- même au Plessix, Chapelle-sur-Erdre, en juillet 1883 et juillet 1887. Ces deux Fidia bretons sont tout à fait analogues à ceux qu'on rencontre à Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales). Linné, en attribuant le nom Fidia au Satyrus qui a fait l'objet des observations exposées ci-dessus, a sans doute emprunté ce nom à la Mythologie, comme tant d'autres. Cependant ce n'est pas une divinité tutélaire de la Bonne Foi que les Romains invocjuaient avec le nom féminin de Fidia, mais bien un dieu Fidius. Ils prenaient le dieu Fidius à témoin quand ils prêtaient serment ou qu'ils réalisaient des contrats; on disait à Rome : (( Me dius Fidius adiuvet! » Que le dieu Fidius me vienne en aide; ou plus simplement : (( Me dius Fidius ». On le nommait aussi Semo ou Sancus. Il eut un temple à Rome, sur le Quirinal; sa fête était célébrée aux nones de juin. M. Harold Powell a récolté un assez grand nombre d'exem- plaires du Satyrus Fidia en Algérie et a écrit sur l'Espèce des observations que je suis heureux de publier comme suit : <( J'ai rencontré le Satyrus Fidia-Albovenosa dans presque toutes les régions que j'ai explorées sur les Hauts Plateaux Algériens. L'Espèce se trouve dans les grandes plaines d'Alfa de la Province d'Oran et, par places, dans les montagnes au nord et au sud de ces plaines; elle n'est pas rare dans certaines localités des monts de l'Aurès, en la Province de Constantine, et je l'ai prise aussi sur les montagnes d'El-Kantara. Le papillon se plaît dans les endroits où soit les roches calcaires, soit le tuf appa- LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE l8g raissent au-dessus du sol, si en même temps on y trouve des Graminées, telles que l'Alfa et le Diss; on le rencontre aussi sur le grès en certaines régions ; dans la zone forestière, on découvre quelquefois une colonie de Fidia sur une pente rocailleuse, maigrement boisée, généralement bien chauffée par le soleil; le papillon n'habite pas la vraie forêt; il ne se pose jamais sur les troncs d'arbre, mais toujours sur les roches ou sur le sol, souvent à l'ombre; c'est un insecte extrêmement éveillé et méfiant, aussi difficile à approcher que le Satyriis Abdelkader ; cependant, poussé par la soif, Fidia vient souvent voltiger autour des chevaux ou mulets en sueur; je l'ai même vu se poser sur les personnes; c'est le Satynts que l'on voit plus souvent que tout autre sur les excréments d'animaux dans les pistes et routes. Le papillon aime à se placer sur les pierres et les rochers calcaires dont l'apparence et la couleur correspondent bien aux dessous de ses ailes ; posé, il tient presque toujours les ailes fermées, les anté- rieures baissées entre les postérieures; au commencement de son existence à l'état d'imago, il n'entreprend que des vols courts; mais, au bout d'un jour ou deux, on peut voir le cf survoler l'Alfa ou le Diss pendant une ou deux minutes à la fois, par les matinées calmes, malheureusement trop rares sur les Hauts Plateaux. La Q ne vole pas beaucoup au début, et même après la fécon- dation, ses vols ne sont pas de longue durée. Sur les terres élevées de l'intérieur, l'éclosion de Fidia-Albo- venosa doit commencer vers la fin du mois de juillet, dans beau- coup de localités; je n'ai, cependant, jamais pris le papillon avant le commencement d'août; les dates qui suivent sont celles des premières captures de l'Espèce pour les années et les loca- lités citées : 1907, Sebdou, 5 août; presque tous les exemplaires très frais. 1910, Géryville (plaine), 13 août; cinq cfcf fraîchement éclos. 191 1, Aflou, 19 août; un cf. 191 2, Lambèse, 13 août. 1913, Lambèse, 2 août; deux c?Cf très frais. IQO LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Dans les localités où Fid'ia et Sylvicola se trouvent sur le même terrain, j'ai observé que Fidia commence à éclore un peu plus tard que Sylvicola. Le papillon vole pendant les mois d'août et de septembre; j'ai même vu des exemplaires Q, en très mauvais état, dans les premiers jours d'octobre; peu d'éclosions se produisent après la fin du mois d'août. J'ai pris Fidia-Albovenosa pour la première fois, à Sebdou, sur une colline calcaire, rocheuse, maigrement boisée de chênes verts, lentisques et genévriers, et recouverte de touffes de Diss, poussant entre les pierres et les rochers; le papillon n'y était pas encore très abondant le 5 août, mais il est devenu plus commun, dans cette localité, un peu plus tard. Le 12 août 1907, j'ai retrouvé l'Espèce sur des collines sem- blables, mais plus à l'est de la première localité; toutes ces collines forment partie de la chaîne boisée à l'ouest de Sebdou. Les Fidia étaient, en général, très frais, le 12 août, et les Q Q encore excessivement rares; sur 35 exemplaires pris ce jour-là, il y avait 34 cfcf et une seule Q ; j'ai noté, le 12 août 1907, à propos de Fidia-Albovenosa, ce qui suit : (( Ce papillon recherche l'ombre des rochers et des buissons; il ne se pose presque jamais au soleil, pendant la forte chaleur de la journée; il est très farouche et d'une chasse bien difficile; le meilleur moment de le chasser paraît être le soir, aussitôt après la disparition du soleil ; on ne le fait pas s'élever aussi lacilement alors, mais quand on l'a découvert, il est plus aisé ensuite de le capturer que dans la journée ». Etant, le 14 août de la même année, aux puits de Zebch, j'ai trouvé Fidia et Sylvicola en assez grand nombre, des deux côtés du chemin et sur les collines semi-arides, maigrement parsemées de buissons et de touffes d'Alfa, qui entourent le point d'eau; j'ai remarqué que Fidia se laissait bien moins facilement appro- cher que Sylvicola, et que, dérangé, il parcourait, au vol, souvent 100 ou 200 mètres avant de se poser de nouveau ; des petits lézards LÉPIDOPTEROLOGIE COMPAREE I9I étaient partout abondants sur ce terrain, et ils faisaient une chasse sérieuse aux Satyrus; ils les attendaient à l'ombre des buissons et s'élançaient sur les papillons au moment oii ceux-ci venaient se poser par terre; les Satyrus se méfiaient assez bien des lézards, pourtant ; on voyait souvent un Sylvicola ou un Fidia, sur le point de se poser, s'envoler plus loin, ayant aperçu un léger mouvement du lézard aux aguets. Les papillons fraîchement éclos se défendent moins bien contre les attaques de ces reptiles, et ils doivent être souvent dévorés; on trouve fréquemment des individus frais chez lesquels il manque des grands morceaux aux ailes ; je pense que ces entailles sont faites par les lézards, qui n'ont pas réussi à saisir le papillon par le corps. Les Asilides font aussi une chasse acharnée aux papillons, en Algérie, et les Satyrus succombent assez souvent à leurs attaques. Plus au sud que Zebch, sur les limites broussailleuses de la grande plaine, h idia-Albovenosa n'était pas rare, à la un du mois d'août et en septembre; le 25 août, j'y ai pris un bon nombre de Q Ç) en état frais ou passable; celles qui se trouvaient abimées étaient plus souvent déchirées qu'usées par le vol. J'ai rencontré Fidia, le i" septembre 1907, dans l'Alfa, sur les petites élévations près d'El-Aouedje, dans la grande plaine, entre Sebdou et El-Aricha. Fidia et Abdelkader vivent très sou- vent sur le même terrain. Le premier Fidia que nous avons vu à Géryville est venu se mettre à l'ombre d'une couverture que j'avais fait placer sur (]uatre piquets, pour nous protéger du soleil pendant une halte; nous étions en excursion sur la grande plaine, à une douzaine de kilomètres au nord de Géryville; c'était le 13 août 1910, à 9 heures du matin ; le même jour, nous avons pris quatre autres exemplaires cf, très frais, sur les petites élévations recouvertes d'Alfa; l'éclosion de l'Espèce ne faisait que commencer; plus tard elle est devenue assez commune sur la plaine et aussi dans les montagnes, mais le papillon ne se rencontrait pas sur les parties les plus fraîches et les plus densement boisées du Ksel; ig2 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE il était, par contre, abondant sur les pentes inférieures de cette montagne, là où pousse l'Alfa; j'ai eu occasion, une fois (c'était le 28 août), de grimper sur ces pentes à 6 heures du soir, pour rejoindre notre camp à Aïn-el-Kcheb; Fidia s'envolait de temps en temps, dérangé par mon passage, des positions qu'il occupait sur les excroissances rocheuses ou à côté des touffes d'Alfa; malgré l'heure tardive, je l'ai trouvé d'une méfiance agaçante et je n'ai pu prendre que très peu d'exemplaires. Le lendemain matin, Charles David et moi, nous sommes descendus au-dessous de la limite des arbres pour chasser A hdel- kader et Fidia dans la localité où je les avais vus la veille; le terrain était peu commode pour la chasse, moins en raison de la pente qu'à cause des innombrables pierres et rochers qui se trou- vaient disséminés entre les touffes d'Alfa; un fort vent du sud- ouest ajoutait à la difficulté en emportant les papillons au loin et en gênant le coup de filet ; ces deux Satynis sont toujours des plus difficiles à prendre, mais nous n'avons jamais eu plus de peine à les approcher que ce matin là ; quand on était à une dizaine de mètres d'une touffe à côté de laquelle se tenait un Abdelkader ou un Fidia, le papillon s'envolait et allait se poser plus loin, Abdelkader continuant à voler bien plus longtemps que Fidia; lorsque ce manège se répète dix ou quinze fois pour chaque individu pris, et qu'on a fréquemment buté contre cer- taines pierres cachées par les touffes, on a une excuse de perdre parfois sa bonne humeur. Fidia était assez abondant, à partir du 20 août 191 1, sur les collines de grès au sud, au sud-ouest et à l'ouest d'Aflou; je retrouve la note suivante, à propos de l'Espèce, écrite à mon retour d'une exploration des collines et vallées prolongeant la chaîne de Sidi-Okba vers l'ouest, dans la direction de l'oued Sebgague : « 27 août 191 1. Fidia-Albovenosa se trouvait en état superbe aujourd'hui; presque tous les exemplaires pris étaient d'éclosion récente et quelques-uns étaient éclos le matin même. Comme tou- LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 193 jours, le papillon était très éveillé, très méfiant; les individus que je faisais s'élever, en marchant dans l'Alfa, ne s'en allaient pas très loin, mais il fallait prendre beaucoup de précautions pour arriver près d'eux; profitant de leur habitude de se poser à l'ombre des touffes d'Alfa, je m'approchais, presque en ram- pant, de la touffe derrière laquelle je venais de voir descendre un Fidia, en me tenant du côté opposé, de façon à être caché par la plante; dès que j'étais assez près, je faisais un bond sur la touffe, en fauchant avec le filet; le papillon s'élevait au même instant, et, assez souvent, je réussissais à le prendre. Il y a un peu de hasard dans cette chasse; en effet, comme on n'est pas toujours exactement fixé sur le point même où se trouve le papillon, on est exposé à mal diriger le coup de filet; il est alors à peu près inutile d'essayer de couvrir le papillon avec le filet ; pour cela, il faudrait le voir, mais on serait vu de lui ». Dans la partie montagneuse du sud de la province de Constantine, Fidia-Albovenosa habite les mêmes genres de localités que sur les collines et montagnes du sud Oranais; dans la partie nord-ouest de l'Aurès, on le rencontre sur les pentes rocailleuses 011 pousse le Diss ou l'Alfa; sur les montagnes d'El- Kantara, il vit dans l'Alfa, en des localités souvent assez scabreuses. Chieiotti l'a trouvé, le 28 août 191 2, sur le Djebel-Mctlili; il a pu prendre plusieurs exemplaires frais, mais l'éclosion tirait à sa fin. Dans la même localité, je l'ai rencontré moi-même, le 22 août 1913, mais les nombreux sujets que j'ai vus étaient tous plus ou moins usés par le vol ; le papillon était commun sur les pentes raides de la montagne, et se trouvait même au sommet', où quelques individus sont venus se poser sur les excréments du mulet, pendant la station que nous y avons faite, à l'ombre du poste optique. L'accouplement a généralement lieu peu de temps après l'éclo- sion, surtout pour la Q. La ponte s'effectue pendant le mois de septembre; à Sebdou, j'ai fait pondre des Q Q en captivité; elles fixaient quelquefois 13 194 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE l'œuf sur les tiges et feuilles des Graminées (souvent l'Alfa), que je leur fournissais, mais elles préfèrent, comme la plupart des Satyrus, pondre sur la mousseline. Je n'ai jamais élevé la chenille de J>. Fidia-Albovenosa, et je ne l'ai pas, non plus, trouvée en liberté; je ne puis donc dire si elle diffère de la chenille du S. Fidia de la forme du midi de la France, que je connais. Il me semble probable que, dans les grandes plaines, l'Alfa et le Lygœinn s pari uni nourrissent la chenille. Je n'ai jamais vu, dans les régions que j'ai explorées en Algérie, que des Fidia de la morphe Albovenosa; cette variété est de petite taille sur les hautes terres de la Province d'Oran. La figuration d'une Q remarquablement ocellée et capturée à Géry ville, en 1910, publiée sous le n" 1112 de la PL CXXV du Volume VI des Etudes de Lépidoptérologie comparée, fait connaître la forme Albovenosa-Minor, comparativement à la grande forme de Yakouren et de Tunisie qui est représentée sur la même Planche CXXV de l'ouvrage précité, et sous les n'"" 1 1 10 (cf) et 1 1 II (ç) )). A El-Kantara et aux environs de I-ambèsc, la taille de Sa f y rus Fidia est variable; à côté d'exemplaires aussi petits que ceux du Sud-Oranais, on rencontre des échantillons aussi grands que ceux du Yakouren. Il convient d'observer encore que les cf Cf à Aflou et à Géryville sont souvent d'une couleur grise uniforme, plus mate que clans les autres régions de l'Algérie; en tout cas ils ne sont nullement cœndeo uiicantes, comme il est dit dans la description linnéenne rapportée plus haut. M. Powell a pris à Aïn-el-Harfî près d'Aflou, le 8 septembre 191 1, un très joli (S Fidia, de petite taille et de couleur grise uniforme en dessus, avec quatre taches ocellées noires, partielle- ment cerclées de jaunâtre ; ces quatre taches sont de taille égale et descendent en ligne droite, dans l'espace subterminal des supé- rieures, en dessus, comme en dessous, où elles sont reproduites. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 195 mais avec une auréole jaune fauve complète et plus large qu'en dessus; les deux ocelles ordinaires semblent un peu réduits de grandeur; les deux ocelles supplémentaires leur sont tout à fait équivalents. J'ai donné à cette aberration remarquable le nom de Powelli et je la fais figurer dans le présent ouvrage, sous le n" 4432 de la PI. CCXCVI. RESUME DES OBSERVATIONS relatives aux œufs des Espèces de SATYRUS du groupe FAUNA Les œufs des papillons formant ce groupe sont toujours de forme ovale plus ou moins arrondie, avec aplatissement des deux pôles; ils sont pourvus de côtes verticales à arête émoussée, bien définies, dont le nombre peut varier selon les Espèces et, à un degré moindre, selon les individus d'une même Espèce. Le chorion est blanc, opaque, à surface extérieure finement mate; il est relativement épais et l'œuf conserve bien sa forme après l'éclosion. La couleur ne change, généralement, qu'environ trois ou quatre jours avant l'éclosion; l'œuf devient alors gris pâle; on ne remarque jamais, au bout de quelques jours, une coloration jaune rougeâtre ou des taches carnées telles qu'on les constate chez les œufs de certains autres groupes de Satyrides. Le sommet de l'œuf est en forme de dôme bas, plat ou presque plat au centre; sa surface, autour de l'espace micropylaire, est plus ou moins granuleuse; les granules ou bosses faisant suite aux côtes verticales et diminuant de grosseur dans la direction de la rosette centrale de très petites cellules, au centre de laquelle se trouve le micropyle. De nombreuses et très fines rides transversales existent dans les espaces séparant les côtes verticales; on les aperçoit aussi sur les pentes des côtes, mais non pas sur les arêtes ; chez la plupart igS LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE des Espèces, ces rides ne se distinguent pas bien au micros- cope X 20, du moins sur les côtés de l'œuf. La base est arrondie jusqu'au point de contact avec le support; elle est granuleuse sur le bord, finement rugueuse ailleurs. Les côtes verticales ne sont jamais acérées; ce sont des carènes arrondies, séparées entre elles par des vallées peu profondes ou par des plaines. L'œuf est solidement collé à la tige de Graminée ou à l'objet sur lequel la Q le place. La façon d'éclore est la même chez toutes les Espèces; la chenille découpe irrégulièrement le chorion en faisant un cercle au-dessous ou au niveau de la courbe amenant au sommet, mais le cercle n'est pas complété; il en résulte que le sommet reste attaché par une charnière et revient en place après la sortie de la chenille; celle-ci ne mange que très rarement la coque après l'émergence. Les quatre Espèces Farina, Powelli, Hansii et Sylvicola forment un groupe naturel auquel on pourrait ajouter Fidia, qui n'offre pas de caractères permettant de l'en séparer nettement. Sans doute, certaines Espèces asiatiques appartiennent à ce groupe, mais je n'ai pas eu l'occasion d'étudier leur biologie. Par leurs œufs, Actœa, Cordida, Briseis, Prienri, Hermione, Alcyone et Ellena ne s'éloignent pas beaucoup du groupe de F au fia, mais, à cause d'autres caractères biologiques, ces Espèces doivent être placées dans des groupes différents. Je donne, ci-dessous, les descriptions cies œufs de 5. Hansii et de 5. Fidia-Albovenosa, ainsi que celles des œufs de S. Faiina et de S. Fidia d'Europe; ces descriptions permettront la compa- raison avec les œufs, déjà décrits, de S. Sylvicola et de 5. Powelli; je crois utile de donner également des détails complémentaires de l'œuf de S.- Powelli. Satyrus Fauna (Basses-Alpes), œufs pondus 20-21 août. Hauteur, 0.00095 J diamètre horizontal maximum, 0.00065 à 0.0007. Pyriforme; le sommet tronqué, presque plat, à bord LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE IQQ arrondi; la base est aplatie, plus large que le sommet; il y a 14 côtes verticales séparées entre elles par des espaces pleins; les côtes se divisent parfois en fourche, juste avant d'atteindre la base; la surface micropylaire, peu étendue, est très légèrement déprimée; elle est recouverte d'un réseau de petites cellules arrangées en rosette; les côtes verticales s'abaissent progressi- vement en traversant le sommet et deviennent bosselées; elles disparaissent à la marge de l'espace micropylaire; la couleur est blanc de craie pendant les 10 premiers jours; elle tourne au gris pâle ensuite et se fonce progressivement jusqu'au développement complet de l'embryon; l'éclosion a eu lieu le treizième jour après la ponte. Satyrus Fidia (Basses-Alpes), pondus 23-24 aoiàt. Hauteur, 0.00135 à 0.0014; diamètre horizontal maximum, 0.00125; l'œuf est de forme ovale arrondie, avec un des pôles (la base) plat au point de contact avec le support; l'œuf est un peu plus étiré vers l'autre pôle; le sommet n'est pas absolument plat, mais légèrement bombé; il existe 23 ou 24 côtes verticales (beaucoup moins accusées que chez Cordulà) à arête émoussée; les intervalles entre les côtes sont des vallées et non pas des plaines ; de petites et très nombreuses rides transversales sont visibles au microscope sur les flancs des côtes ; elles ne sont pas très nettes ; la base est large, recouverte de très petites dépres- sions ou cellules; celles-ci sont plus apparentes vers le bord; en arrivant à la courbe basale, les côtes deviennent irrégulières et se divisent parfois ; elles sont terminées par une suite de petites bosses pareilles à celles que l'on remarque sur le sommet ; vers le sommet, les côtes diminuent de hauteur; elles disparaissent au bord du cercle micropylaire; la surface micropylaire est finement rugueuse à cause de la présence du réseau de petites cellules disposées en rosette; autour de cette rosette centrale, le sommet est irrégulièrement bosselé par de petites élévations 200 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE arrondies qui recouvrent, plus (ui moins, l'extrémité des côtes et forment souvent de courtes séries qui suivent, pour une faible distance, les sillons entre les côtes; la couleur de l'œuf est blanc de craie et sa surface est finement mate. Satyrus Hansii (Sebdou), pondus 16-17 septembre 1907. Hauteur, 0.00 1 ; diamètre horizontal maximum, 0.0009. Forme ovale arrondie ; la base et le sommet sont aplatis, mais non pas abruptement tronqués; l'œuf est plus arrondi, moins pyriforme que celui de F mina; les côtes verticales sont au nombre de 21 ou 22 ; elles sont bien accusées, à arête arrondie, séparées entre elles par des plaines ; la surface presque plate du sommet est assez bosselée autour de l'espace micropylaire; les extrémités des côtes, tout en s'abaissant sur le sommet, deviennent irrégu- lières, bosselées et fusionnent quelquefois ; les côtes ou rides transversales, très peu apparentes ailleurs, sont plus fortes sur le bord du sommet et forment ici, avec les côtes verticales, un réseau de cellules allongées, très irrégulier; c'est surtout à l'in- tersection des côtes que se produisent les petites bosses ; chez la plupart des œufs de Hansii que j'ai examinés, les rides ou côtes transversales sont plus fortes à <( l'épaule » du sommet qu'elles ne le sont dans les œufs des autres Espèces du groupe; mais ce caractère est un peu variable; l'espace micropylaire, dont les limites ne sont pas bien nettes, est plat ; un réseau de très petites cellules le recouvre; l'œuf est un peu plus volumineux que celui de Sylvicola; la hauteur est la même chez les deux Espèces, mais l'œuf de Hansii est légèrement moins élancé; chez tous les œufs de Hansii que j'ai vus, les côtes verticales sont séparées par des plaines; certains œufs de Sylvicola leur ressemblent pour ce caractère; mais, le plus souvent, les espaces intercostaux, chez Sylvicola, sont des vallons en V largement ouvert. L'éclosion a lieu une quinzaine de jours après la ponte. LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 201 Satyrus Powelli (Géryville). Description supplémentaire. Hauteur, 0.0009; diamètre horizontal maximum, 0.00075. Très voisin de l'œuf de 5. Hansii et de celui de S. Sylvie ola, mais il est sensiblement plus petit que l'un et l'autre; il y a 18-20 côtes verticales ; les espaces qui les séparent sont des plaines et la limite entre leurs bases et les plaines est bien nette ; les côtes sont très régulières sur les flancs de l'œuf ; en arrivant à la courbe du sommet elles deviennent sinueuses et bosselées et se terminent en une courte chaînette de petites bosses, qui atteint le bord de l'espace micropylaire; l'espace micropylaire est plat; une rosette de très petites cellules, clairement visibles au micros- cope X 20, le recouvre ; on ne distingue de rides transversales sur l'œuf qu'à la hauteur de la courbe amenant au sommet; ici elles relient ensemble les côtes verticales, et c'est aux points d'inter- section que se trouvent les petites bosses ; les dernières bosses sont, cependant, en dehors de ce réseau, qui est moins développé que chez l'œuf de Hansii, les rides étant moins élevées. Satyrus Fidia^Albovenosa (Sebdou). Hauteur, 0.00145; diamètre horizontal maximum, 0.00125 à 0.0013 ; P3-r sa forme, l'œuf est pareil à celui de S. Fidia d'Eu- rope; le nombre de côtes verticales est de 24 à 25 ; ces côtes, très régulières, sont séparées par des vallées évasées, à travers les- quelles sont placées les nombreuses et très fines rides transver- sales ; arrivées à la courbe du sommet, les côtes verticales s'abaissent et s'atténuent progressivement, pour prendre fin autour de l'espace central, micropylaire; elles ont très peu de tendance à devenir bosselées comme dans l'œuf de Fidia des Basses-Alpes, et elles ne sont que rarement un peu sinueuses à partir de la courbe du sommet; j'ai remarqué que ces deux der- 202 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE niers caractères peuvent être modifiés légèrement selon les individus ; les rides transversales ne sont pas plus accentuées aux environs de la courbe du sommet qu'ailleurs; la partie cen- trale du sommet est occupée par la rosette de petites cellules évasées ; l'œuf est blanc de craie. Harold PowELL. Hyères, jum 1914. Satyrus Abdeikader, Pierret; Satyrus Nelvai, Seitz ; Satyrus Lambessanus, Staudinger. Le Satynis Abdeikader a été pour la première fois décrit et figuré dans les Annales de la Soc. entom. de France, 1837 (pages 19-21 ; PI. I; cf, fig- 5 et 6), par Alexandre Pierret, dans les termes suivants : > {Ainpelodes7nos ienax, Vahl). Dans la région du littoral, le papillon paraît peu abondant; il a été signalé par H. Lucas dans les environs d'Oran; je suppose qu'il y habite des localités sem- blables à celles au nord de Sebdou, où on le trouve dans le (( DiSS )). Abdelkader type vole aux mois d'août et de septembre, dans la province d'Oran; j'ai remarqué que l'éclosion commence un peu plus tôt, dans le Djebel Amour (région d'Aflou) que dans les environs de Géryville, et de Sebdou; il semblerait que, plus sa localité est élevée, plus l'Espèce est précoce; M. Meade-Waldo signale Abdelkader sur le Tizi Gourza, dans l'Atlas Marocain, en juillet 1901 ; il l'a trouvé abondant sur cette montagne, le II juillet, mais, en raison de la nature difficile du terrain, il n'a pu capturer que deux Q usées ; le Tizi Gourza est une montagne de 12.000 pieds (3.600 mètres environ) d'altitude; puisque l'Espèce y est déjà commune, et que l'on rencontre des Q passées avant la fin de la première quinzaine de juillet, il est à peu près certain que l'éclosion commence en juin, dans cette localité. Ce n'est peut-être pas autant une question d'altitude qu'une question de température qui a de l'influence sur l'éclosion de 5. Abdelkader; dans les parties les moins élevées et les plus chaudes de sa distribution, la chrysalide estive; formée vers la fln du mois de mai ou au commencement de juin, elle ne donne son papillon qu'environ trois mois plus tard, à une époque où les nuits commencent à être un peu plus fraîches; c'est le cas à Sebdou, dans les plaines d'environ i.ioo mètres d'altitude, et à Géryville, qui. quoiqu'un peu plus élevé, est plus au sud et plus près du Sahara. A Aflou, les nuits sont moins chaudes qu'à Géry- ville; on y est à 1.400 mètres, et les terres de la région sont, en bonne partie, au-dessus de cette altitude; la différence de tempé- rature n'est pas très grande; mais elle existe néanmoins; aussi LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 219 nous y avons vu Abdelkader à la fin du mois de juillet (*); il n'y était déjà pas rare dans la première semaine d'août, époque à laquelle l'éclosion n'avait pas encore commencé à Sebdou en 1907, et commençait à peine à Géryville en 1910 (un cf isolé a été pris, le 6 août, à Bou Khed près Géryville, mais nous n'y avons pas revu l'Espèce avant le 27 août). La question de l'époque d'éclosion des races de 5. Abdelkader et de l'effet probable de la température sur la chrysalide, me paraît très intéressante; j'y reviendrai plus tard. C'est à Sebdou, le 21 août 1907, que j'ai vu et capturé 5. Abdelkader pour la première fois; il y avait déjà quinze jours que je m'attendais à voir voler l'Espèce, et je commençais à perdre l'espoir de la trouver. Il est dit {Etudes d'Entomologie, & livraison, p. 55) que le Satyrus Abdelkader est très commun à Sebdou où on le voit voler abondamment, vers le 15 août, dans l'Alfa. J'avais exploré deux fois — le 14 et le 17 août — la limite de la grande steppe d'Alfa qui commence à plusieurs kilomètres du village, au delà de la chaîne de petites collines barrant l'horizon au sud, mais je n'y avais pas vu trace du papillon; cependant, c'est bien ici que le 5. Abdelkader volait un peu plus tard; il y était surtout commun vers la fin du mois et en septembre. Le premier exemplaire capturé volait dans une localité tout autre; voici ce que j'ai noté au sujet de sa capture, le jour même, 21 août : « J'ai enfin pris le Satyrus Abdelkader^ une seule Q, pas très fraîche, à l'endroit nommé Ras-el-Oued, un peu plus haut que l'Aïn Sidi-Aissa, qui alimente le village en eau. Je n'avais encore jamais vu cette Espèce, mais en apercevant un gros papillon noir, semblable, au vol, à S. Cordula, je savais à quoi j'avais affaire. La localité est très humide; il y a des sources et des (*) Un exemplaire a même été vu par Charles David, le 23 juin 191 1, près d'Aflou, mais il n'a pu le prendre. Abdelkader est une Espèce qui ne ressemble à aucun autre papillon Algérien; Charles David connaissait déjà très bien Abdelkader, l'ayant chassé l'année précédente à Géryville, et je suis persuadé qu'il ne s'est pas trompé. 220 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE suintements marécageux traversés par l'oued qui prend naissance, en été, à une centaine de mètres plus haut. Le papillon, qui était posé sur des fleurs de menthe, s'est envolé; je l'ai pris un peu plus loin, sur les terrains secs couverts d'une broussaille de chênes-verts et lentisques qui entourent la dépression maréca- geuse. J'ai continué à explorer le cours desséché de l'oued en remontant pendant trois kilomètres, et en faisant des crochets dans la campagne à droite et à gauche; mais je n'ai pas ren- contré un seul autre Abdelkader ». Cet exemplaire était loin de sa localité d'origine; j'ai remarqué ensuite à Sebdou et ailleurs que, après avoir pondu la plus grande partie de ses œufs, la Q voyage souvent et va se perdre quelque- fois à des kilomètres de son lieu d'éclosion; le mâle aussi à des tendances à errer au loin vers la fin de sa vie; j'ai vu, plusieurs fois, des exemplaires usés dans les rues de Géryville et d'Aflou; les formes Nelvai et Lambessanus ont cette même habitude. On m'a dit, à Sebdou, que Abdelkader avait été trouvé près des grottes d'iVbd-el-Kader, non loin de la source de la Tafna. J'y suis allé le 23 août, mais le papillon n'y était pas; ce n'est d'ailleurs pas une localité probable pour l'Espèce. Le 25 août, j'ai trouvé son vrai habitat dans la plaine d'Alfa, à une dizaine de kilomètres au sud de Sebdou. <( Ayant entendu dire par des Arabes et des Européens venant d'El Aricha, qu'un gros papillon noir volait dans l'Alfa, je me suis mis en route, ce matin, pour El Aouedje. A 6 heures, le temps était couvert et frais; une odeur délicieuse montait de la terre humectée par l'averse de la veille; après trois mois et demi de sécheresse absolue, on apprécie énormément des conditions pareilles. A Zebch, oii j'ai pris un café chez les Arabes, à côté du puits, j'ai remarqué qu'il y avait plu davantage qu'à Sebdou ; le '< Chabat » (ravin) avait même coulé et il restait des flaques d'eau par places. Partout du gibier en masse; entre Sebdou et Zebch, j'ai vu 11 compagnies de perdreaux; ces oiseaux se laissent approcher à 50 mètres avant de se mettre à courir. Sur la haute plaine, il y avait des quantités LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 221 d'alouettes et de gangas, quelques outardes et une foule d'autres oiseaux. La chasse s'ouvre aujourd'hui, mais je n'ai pas vu un seul chasseur. Vers 9 heures, le ciel se découvrit et le reste de la journée fut beau et chaud, avec fort vent du sud, tournant au sud-ouest dans l'après-midi. Toute trace de pluie disparut bientôt et la poussière recommença à tourbilloner. A Zebch, dans l'Alfa, il n'y avait que des S. Fidïa et des 5. Sylvie ola tous usés par le vol et difficiles à prendre. Au sommet de la côte Gaspard, à 3 kilomètres environ au-delà des puits de Zebch, on arrive sur la grande plaine qui s'étend à perte de \ue, coupée seulement pai la clîaîne aride et dentelée qui la traverse de Bedeau à Berguent. Sur cette plaine, pendant les heures les plus chaudes de la journée, on voit monter vers le ciel de hautes colonnes de poussière qui s'acheminent lentement suivant la direction du vent. Tout à coup, à droite du chemin, je vois voler, au-dessus de l'Alfa, un gros papillon noir, pareil à un énorme Erebia Dupon- cheli. Il n'y a pas d'erreur, c'est Abdelkader. Encore quelques pas et un autre se lève, suivi d'un troisième; tous se laissent emporter au loin par le vent. Mais je ne les lâche pas, et bientôt j'ai la satisfaction de voir un des papillons se poser derrière une touffe. Je l'approche avec précaution, mais arrivé à 10 mètres de la touffe, il se lève de nouveau et vole loin encore, sans jamais monter haut. Cette fois, je le suis de près en courant de toutes mes forces, et j'arrive enfin assez près pour donner le coup de filet; il l'évite en plongeant vers la terre, et s'échappe, de la même façon, d'un second coup; mais il est effrayé, et, au lieu de s'en aller loin, il se pose presqu'immédiatement, les ailes supérieures abaissées entre les inférieures, incliné à un angle de 45° et recevant le soleil sur un côté. Je l'approche maintenant plus facilement, et, d'un coup de filet bas je le prends au moment 011 il s'envolait encore. Le fort vent est bien gênant, emportant les papillons rapidement au loin et entravant le coup de filet. Je trouve que le meilleur moyen est de suivre Abdelkader en LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE courant, de l'atteindre et de l'effrayer, si je le manque du premier coup. Si on ne l'effraye pas, il contniue à voler, en planant un peu de temps en temps, au-dessus de l'Alfa pendant de longues distances. C'est le Satyrus qui ressemble le plus à une Erebia, à part la taille; sa façon de voler et de se poser me fait penser à E. Glacialis var. Duponcheli et à E. Scipio; les Q volent peu et sont plus faciles à prendre, en ce moment du moins ; plus tard, lorsqu'elles se seront débarrassées d'une partie de leurs œufs, elles seront peut-être plus dégourdies (j'ai constaté, plus tard, l'exactitude de cette supposition). A partir de midi, les papillons ne volaient presque plus ; ce n'est qu'en les déran- geant que j'en prenais; il est vrai que le vent avait augmenté de force et les gênait sans doute. Abdelkader ne se pose jamais à l'abri des buissons de chêne- vert qui se trouvent sur cette partie de la plaine; il s'abrite à côté des touffes d'Alfa, posé sur le sol ; la nuit, et quand le temps est mauvais, je crois qu'il se cache dans les touffes. Fidia et Sylvicola préfèrent, au contraire, l'ombre des buissons de chênes-verts. Les chênes-verts n'avancent pas loin dans la plaine. Ayant trouvé ce que je cherchais à la côte Gaspard, je n'ai pas poussé plus loin aujourd'hui. La poursuite de ces Satyrus devient fati- gante à la longue et excite la soif; moi-même et l'Arabe Bohas, qui m'aidait à la chasse, nous sommes venus vite à bout de-notre provision d'eau, et nous aurions été obligés de descendre plus tôt à Zebch s'il n'était passé un groupe de Marocains qui nous ont cédé quelques litres d'une eau saumâtre et très sale. Nous avons quitté la localité à 4 h. 1/2 et sommes arrivés à Sebdou à la tombée de la nuit. La récolte de S. Abdelkader se chiffre, aujourd'hui, par 43 exemplaires dont dix en très mauvais état. Ce papillon doit voler depuis quelques jours déjà; cependant, lorsque je suis venu sur le bord de la plaine, un peu plus à l'ouest, le 17 août, je ne l'ai pas rencontré. On trouve encore beaucoup de sujets cf en excellent état et les Q commencent seulement à paraître; j'en ai pris quatre, dont deux tellement déchiquetées, quoique fraîches, que je les ai LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 223 gardées pour la ponte. Quand il est frais, ce papillon est bien fragile; ses ailes se déchirent, se cassent et se rayent d'égra- tignures dans très peu de temps ; en donnant le coup de fi.let on ne peut souvent pas éviter de l'abîmer; mais beaucoup de sujets frais portent des blessures et déchirures, aux ailes, qui ne sont pas occasionnées par le coup de filet ; il est probable que leurs blessures sont souvent le résultat de l'attaque des petits lézards qui abondent dans la plaine. » Quelques jours plus tard, je suis allé à El-Aouedje, un cara- vansérail sur la route d'El-Aricha; à l'est de ce point s'étend un grand lac desséché; mais à l'ouest, au sud et au nord, la plaine est variée de dépressions à bords escarpés et de monti- cules; l'Alfa abonde sur les hauteurs et sur la plaine élevée, tandis que dans les bas-fonds pousse le <( Chih » {Arteinisia Herba-Alba). S. Abdelkader et S. Fidia-Albovenosa sont com- m.uns à El-Aouedje, dans l'Alfa. J'ai trouvé que, dans les loca- lités où Abdelkader est abondant, le meilleur moment pour lui faire la chasse est entre sept et huit heures du matin; il n'est pas encore bien éveillé à cette heure, et ne s'envole pas loin; en marchant entre les touffes d'Alfa, on le fait se lever; on note la touffe derrière laquelle il se pose de nouveau et, en approchant doucement, de façon à être caché par la touffe, on réussit très souvent à le couvrir avec le filet au moment où il va s'envoler; plus tard dans la journée, le papillon devient beaucoup plus méfiant et il entreprend des vols très prolongés. Le 20 septembre, j'ai capturé deux exemplaires sur la mon- tagne de Merchich, au nord de Sebdou, et j'en ai vu d'autres; c'est une localité bien différente de celles de la plaine; la mon- tagne est boisée de gros chênes verts; il y a un sous-bois de Diss et d'autres Graminées, y compris un peu d'Alfa; au printemps, les clairières de la forêt (*) sont bien vertes, bien gazonnées. (*) Comme la plupart des forêts Algériennes, celle-ci est assez clairsemée; les parties en pente, exposées au sud, sont plus sèches et on y rencontre le palmier nain et certaines plantes des coteaux méditerranéens. 224 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Cette région ressemble aux localités de l'Aurès où vole, en mai, la race Lambessanus ; mais ici, c'est le vrai Abdelkader et on ne le rencontre pas au printemps; il n'y est d'ailleurs pas commun. Je l'ai pris aussi sur le Djebel Debdou, à l'ouest de Sebdou et sur les montagnes boisées entre le Col des Azaïls et Mizab. Le 21-22 septembre, j'ai traversé la grande plaine d'Alfa jusqu'à El Aricha; l'Espèce se montrait un peu partout sans être abondante; elle n'était plus fraîche; je n'ai pu prendre que six exemplaires en état passable, pendant mon séjour de deux jours dans la région d'El Aricha. Abdelkader n'est pas rare dans la grande plaine au nord et à l'ouest de Géryville; on peut le ren- contrer partout où pousse l'Alfa. Le 6 août 1910, un seul exem- plaire çS, très frais, a été pris par un voyageur venant de Bou Ktoub; moi-même, avec Charles David, j'ai traversé la plaine, le 8 août, pour une distance de 100 kilomètres, sans voir un seul exemplaire; le 13 août, nous sommes retournés dans la plaine et, pendant trois jours, nous l'avons explorée, en suivant surtout les petites crêtes et les monticules recouverts d'Alfa; pas un seul Adbelkader n'a été aperçu; le spécimen, pris le 6 août, est éclos à une époque anormale pour la région ; il était en avance de 20 jours, environ, car l'éclosion générale n'a commencé que vers le 25 août. Le 27 août, j'ai fait une nouvelle excursion dans la plaine et j'ai noté ce qui suit : « Fort vent du sud-ouest; temps chaud ; tendance orageuse l'après-midi avec quelques nuages. Je suis parti, le matin, à bicyclette, à la recherche de Satynis Abdelkader à Bou-Khed; j'ai suivi la piste de Mecheria, qui s'embranche sur la route de Bou-Ktoub, peu après la sortie des gorges de l'oued El-Beiod ; j'ai pris le premier individu dans la plaine; c'était un cf frais mais très frotté déjà; je me suis rapproché ensuite des collines qui forment les derniers contre- forts du Djebel El-Beiod, du côté de la plaine et qui s'étendent du nord-est au sud-ouest; l'Alfa y était abondant et les deux Satyrus Abdelkader et Fidia-Albovenosa s'y trouvaient, le premier étant rare; tous les Abdelkader paraissaient frais, mais ils étaient le plus souvent égratignés, sinon déchirés; ce n'est LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 225 pas toujours le coup de filet qui en est cause; j'en ai pris un, posé, en le couvrant du fîlet ; il ne s'est pas débattu ; mais, malgré cela, ses ailes portaient des égratignures. Je ne pense pas que Abdelkader soit plus difficile à prendre que bidia; tous deux sont d'une grande méfiance, ne se laissant pas facilement appro- cher; Abdelkader, une fois dérangé, vole très loin, lorsque le soleil est haut, et il n'est pas facile de déterminer, au juste, derrière quelle touffe d'Alfa, il se finit par se poser; Fidia ne s'en va pas aussi loin; mais il est encore plus méfiant q^' Abdel- kader ; les deux Espèces évitent bien le coup de filet. Aujour- d'hui, le grand vent du sud-ouest augmentait les difficultés de la chasse; je n'ai pris que huit Fidia, dont une Q, et six Abdel- kader cf ; la Q de ce dernier ne paraît pas être éclose encore. Vers I heure, un incendie s'est déclaré dans l'Alfa, sur le versant opposé d'une colline où je chassais; poussées par le vent, les flammes ont avancé avec une rapidité effrayante ; je me suis réfugié dans un ravin où j'ai amené ma bic3^clette que j'avais laissée au pied de la colline; au bout d'une heure, au moins 50 hectares étaient brûlés et les flammes s'étendaient de tous les côtés; je suis parti à 3 heures; à ce moment le feu ayant traversé le ravin, commençait à attaquer la colline d'en face et faisait rage. L'Alfa brûle comme de la celluloïdc. Ces incendies dans l'Alfa ne sont pas rares; ils sont générale- ment allumés par les Arabes, dans le but de se préparer des pâturages pour leurs troupeaux de moutons et de chèvres; après les pluies d'automne, l'Alfa repousse et les jeunes feuilles four- nissent une bonne nourriture pour ces animaux. Beaucoup de S. A^bdelkader et de 5. Fidia, à l'état de chrysalide, ont dû périr, cet après-midi, dans l'incendie; j'ai remarqué, en les élevant en captivité, que les chenilles à' Abdelkader ne descendent pas invariablement en terre pour accomplir la nymphose; il arrive, mais rarement, -que la chrysalide est formée dans l'épaisseur d'une touffe de Graminée, près de terre; les touffes d'Alfa étant bien plus épaisses et plus denses que celles des Graminées dont je nourrissais mes chenilles, il est très probable que, dans la libre 15 226 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE nature, la chrysalide se trouve souverit dans cette situation, exposée à être rôtie en cas d'incendie; même si elle était en terre, près d'une touffe enflammée, je ne crois pas que la profondeur serait suffisante pour la mettre à l'abri de la chaleur produite. Fidia se chrysalide à une très faible profondeur. » J'ai déjà parlé (voir page 192 du présent ouvrage), d'une chasse aux 5. Abdelkader et Fidia faite, le 29 août, sur les pentes inférieures du Djebel-Ksel, côté nord-ouest, en dessous de I1 limite des arbres; nous avons pris, ce jcur-là, une vingtaine d'exemplaires àJ Abdelkader frais et assez frais; les Q étaient encore rares. Le même jour, en remontant à l'Aïn-el-Khcheb, j'ai capturé deux Q qui se désaltéraient sur la terre mouillée, près de la source; elles n'étaient pas fraîches, et leurs corps étaient presque vides d'œufs; elles venaient évidemment de l'Alfa, près du pied de la montagne. Le 31 août, j'ai pris une demi-douzaine de S. Abdelkader sur les petites collines sèches autour de l'Aïn-Merirès, toujours dans l'Alfa; pendant le mois de septembre, nous avons souvent ren- contré l'Espèce dans cette localité, qui se trouve au sud-ouest de Géryville. Entre le 24 et le 27 septembre, nous avons vu et pris un bon nombre de 5. Abdelkader dans la grande plaine au nord; à ces dates on trouvait encore des individus fraîchement éclos ; mais la majorité était usée par le vol ; jai noté, le 26 septembre, que « ce papillon plane un peu partout à présent, mais il est toujours des plus difficiles à prendre et bien peu d'exemplaires sont frais ». Aflou, où nous avons passé plus de six mois, en 191 1, se trouve à environ iio kilomètres à vol d'oiseau à l'est-nord- est de Géryville, et à une trentaine de kilomètres de la limite des départements d'Oran et d'Alger; le village, qui est de création française, est situé sur les dernières pentes sud d'une chaîne de collines faisant partie du Djebel-Amour; les points culminants de cette chaîne sont : le Djebel-Guern-Arif (1.721 mètres), à 27 kilomètres à l'ouest-sud-ouest d 'Aflou et le Djebel-Sidi-Okba LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 22/ (1.707 mètres), à 8 kilomètres à l'ouest; au nord et au nord-est, les collines de la chaîne sont moins élevées; derrière cette chaîne, au nord, se trouvent des plateaux peu étendus, puis d'autres collines, peu élevées, et, finalement, la grande plaine. Au sud de la chaîne, se trouve la plaine ondulée d'Aflou, beaucoup plus longue que large; son altitude moyenne est d'environ 1.400 mètres et sa pente va du sud-ouest au nord-est ; à sa limite méridionale commencé une région montagneuse fort tourmentée et ravinée, dont les eaux s'écoulent vers le Sahara; la plus haute colline, de ce côté, est le Djebel-Zlag, qui, avec une altitude de 1.595 mètres au-dessus du niveau de la mer, paraît bien insigni- fiante, vue d'Aflou; les indigènes appellent cette région (( El Gada » ; elle est séparée de la chaîne de montagnes en bordure du désert par la vallée de l'Oued-Fareg. Le grès est très abon- dant dans le Djebel-Amour; autour d'Aflou on rencontre, surtout vers l'ouest, des surfaces recouvertes d'énormes dalles; les gorges et les falaises, dans le Gada, sont remarquables et souvent grandioses; sur certaines falaises, entre Enfouss et El-Kheicha, on remarque, taillés dans le grès, des dessins grossiers, repré- sentant principalement des animaux ; on attribue ces dessins aux hommes des temps préhistoriques. Le calcaire apparaît sur les crêtes de beaucoup de collines. La végétation arborescente du Djebei-Amour n'est pas riche; dans les forêts sèches de la chaîne au nord d'Aflou, on ne trouve guère que le chêne vert et les deux genévriers, Jiimpencs oxy~ cedrus et /. phœnicca; le /. phœnïcea devient énorme dans la région, et il est très commun ; certaines collines en sont presque exclusivement boisées, mais les arbres sont, alors, très espacés. La plaine d'Aflou est sans arbres, sauf pour quelques genévriers de Phénicie à l'ouest; cependant, le long de la petite rivière et autour des prairies et jardins au bas du village, poussent de superbes saules et peupliers. Les principales essences, dans le Gada, sont les deux genévriers et le Pin d'Alep; le chêne-vert y est rare. La végétation basse est très variée; certaines plantes prédominent; ainsi, il y a, dans la plupart des localités, une 228 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE abondance de Gouf't {Artemisia campeslris) et d'Hélianthèmes; le Thapsïa garganica, le Salvia lanlgera, V Onobrychis argentca et VEuphorbia Inteola étaient très communs; abondantes aussi étaient les deux Graminées, l'Alfa (Stipa tenacissima) et le Senagh {Lygeum spartuni) ; l'Alfa ne se rencontrait pas partout, cependant; dans la plaine d'Aflou, il n'y en avait pas; mais des collines entières au nord-nord-est en étaient recouvertes, ainsi que les collines limitant la plaine au sud; il y en avait aussi beaucoup dans la grande plaine au nord, vers Guelta-Sidi-Saad ; les planches photographiques n°' K^', K^™ et K^-^ {Etudes de Lépï- dopthologie comparée, Vol. VI ) donnent une idée de l'abon- dance de cette Graminée. dans certaines parties du Djebel- Amour, et de son aspect. Le Satynis Abdelkader éclôt dans les régions de l'Alfa; il est assez commun, à Aflou, pendant les mois d'août et de sep- tembre; l'éclosion commence plus tôt ici qu'à Sebdou et qu'à Géryville; ainsi que je l'ai dit précédemment^ le premier exem- plaire a été aperçu par Charles David, le 23 juin, mais cette date est tout à fait anormale; ce n'est que vers la un du mois de juillet que l'Espèce a été revue; dans les premiers jours d'août, plusieurs spécimens ont été observés et pris, sur les coteaux au nord-ouest, et, ensuite, dans les environs de l'Aïn Boukrouf, au sud de la plaine d'Aflou, où le papillon n'a pas tardé à devenir assez abondant. L'observation suivante est datée du 23 août 191 1 : '( Le sirocco, qui soufflait depuis trois jours el trois nuits, ayant cédé place à une bonne brise du nord-ouest, le thermomètre a baissé jusqu'à 16" pendant la nuit; la matinée a été fraîche et l'air clair; de temps en temps, le soleil était voilé par de passages lents de cirrus; vers 11 heures, un changement brusque est sur- venu; le sirocco s'est remis à souffler fortem.ent du sud, avec hausse rapide de la température, qui a atteint 34° à l'ombre au courant de l'après-midi; le vent du nord-ouest, fort, a repris le LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 229 dessus vers 5 heures et a continué à souffler dans la nuit, avec ciel couvert et quelques gouttes de pluie dans la soirée. A 7 heures du matin, je suis sorti dans la direction de Sidi- Boulefa, kouba située sur une colline au sud du Djebel-Sidi- Okba; près du premier réservoir, j'ai pris un Sut y rus Sylvi- cola O*; je n'ai rien vu ensuite avant d'arriver aux grands rochers de grès, à la limite de la zone des genévriers, où un second Sylvïcola s'est laissé prendre; plusieurs C hrysophanus Phlœas et Pieris Daplïdice volaient en cet endroit, ces deux Espèces se rencontrent, il est vrai, un peu partout. Près des rochers, poussent des buissons de Daphne, qui fleurissaient encore ; il y avait aussi un Héiianthème à feuilles hnes, très vertes, et fleurs jaunes; mais il y a bien peu de verdure en ce moment, à part le <( Gouf't », le Buplevrum spinosum et VOnobrychis argent ea; le B. spinosuni, curieuse Orabellifère ligneuse, en touffes serrées et arrondies, est en pleine floraison et marque le paysage de taches jaunes et vertes, surtout dans le voisinage des rochers; le « Gouf't » est d'un vert intense; les champs de cette plante sont nombreux, en dehors des collines. Peu après avoir dépassé les rochers, on com- mence à voir des touffes d'Alfa; cette plante ne pousse pas tiès serrée sur les collines de Sidi-Boulefa, maigrement boisées de genévriers et de chênes-verts; je n'ai pas tardé à rencontrer Satyrus Abdelkader, qui n'est, cependant, pas abondant de ce côté; les cf voltigeaient et planaient au-dessus des touffes, comme d'habitude, ne s'arrêtant pas souvent; ils sont très éveillés, évitant avec facilité le coup de fllet; quand on les poursuit, ils maintiennent, entre le chasseur et eux-mêmes, une distance d'en- viron 10 mètres, sans paraître se presser ni chercher à augmenter cette distance, à moins qu'on ne les effraie sérieusement; dans ce cas, ils se laissent emporter, par le vent, à de grandes distances ; cependant, s'il s'agit d'un papillon récemment éclos, celui-ci ne s'en va pas loin; il se pose assez brusquement derrière une touffe et on a quelque chance de le prendre en l'approchant sans se laisser voir. Les Q sont rares, du moins on ne les fait pas souvent se lever; 230 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE elles volent moins que les çS, surtout lorsqu'elles sont fraîches. J'ai observé, aujourd'hui, une tentative d'accouplement qui n'a pas réussi, probablement parce que la Q n'était pas vierge; elle avait déjà pondu la plus grande partie de ses œufs. Le cf planait quand je l'aperçus; il a plongé subitement derrière une touffe d'Alfa; je me suis approché avec précaution et je l'ai trouvé tête à tête (littéralement) avec une Q ; celle-ci repoussait le (S en lui donnant des coups de tête auxquels il répondait par un mouvement semblable; tous deux tenaient leurs ailes presque fermées, les antérieures très avancées au-dessus de la tête, et chaque coup de tête était accompagné d'un léger battement des ailes ; la Q faisait constamment face au cf, ne lui permettant pas de passer derrière elle; ils tournaient ainsi, le cf cherchant tou- jours à passer derrière; nu bout de trois minutes, la Q s'est envolée, suivie par le cf qui l'a rabattue à terre à peu de distance, et le même manège a recommencé; voyant, à la longue, que la Q finirait par s'échapper, je les ai pris au fi.let. Si la Q avait été vierge, l'accouplement aurait eu lieu immédiatement. » Nous avons rencontré Abdelkader autour du Djebel-Oum- Gedoitr, le 27 août, à une quinzaine de kilomètres à l'ouest d'Atlou; l'Espèce volait aussi dans la grande plaine au nord; par places sur toutes les collines limitant la plaine d'Aflou, au sud; près d'El-Kheicha, dans le Gada et enfin partout où pous- sait l'Alfa. A la fin du mois d'août, les éclosions avaient presque cessé, et les sujets frais étaient devenus rares. Je n'ai pas rencontré Abdelkader dans les environs d'Aflou, après le 15 septembre. Au contraire de ce que j'ai remarqué chez les autres Espèces du genre Satyrus dont j'ai eu occasion d'observer les mœurs, la ponte, chez Abdelkader, commence aussitôt après l'accouplement, et celui-ci a lieu, le plus souvent, d'après ce que j'ai pu constater, le matin même de l'éclosion de la Q ; elle semble être gênée par les gros œufs qui lui donnent un abdomen si volumineux, et elle LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 23 I se débarrasse de la plus grande partie dans les premiers jours de son existence à l'état d'imago; les Q gardées vivantes pon- daient même, assez souvent, dans les petites boîtes qui servaient à les rapporter à la maison, chose que j'ai observée quelquefois chez les Erebia, mais jamais chez les Satyriis. Certaines Espèces du genre Satyriis, dont la vie à l'état parfait est relativement courte — Cordula, Actœa et Powelli, par exemple, - — ne tardent pas, nécessairement, à commencer la ponte, mais je n'ai pas remarqué, chez elles, une velléité de pondre immédiatement après la fécondation. La Q d' Abdelkader ne pond pas tous ses œufs, cependant, dans les premiers jours qui suivent l'éclosion; dès que son corps a été suffisamment allégé, elle entreprend des vols prolongés et semble ménager les œufs qui lui restent; j'ai obtenu des œufs, à Sebdou et à Géryville, à la un de septembre, de vieilles Q qui avaient probablement un mois d'existence; le nombre d'œufs déposés par ces Q usées n'était pas grand, mais les œufs étaient, pour la plupart, fertiles. En captivité, l'œuf est souvent placé sur les feuilles ou les tiges de la Grammée que l'on fournit à la Q ; plus souvent encore, elle pond sur la mousseline de la cloche qui l'emprisonne. Il me semble évident que l'Alfa constitue la nourriture ordinaire de la chenille; elle mange très volontiers cette Graminée quand on la lui offre, et l'association du papillon avec l'Alfa paraît confirmer cette hypothèse; cependant, on n'a aucune difficulté à élever la chenille sur plusieurs autres Graminées coriaces; j'ai trouvé que, pour la question de nourriture, elle est moins difficile à contenter dans son jeune âge que plus tard. L'œuf n'est souvent pas très solidement fixé à l'objet sur lequel la Q l'a posé; il diffère sensiblement des œufs de tous les autres Satyrus que je connais, se rapprochant plutôt de ceux des Erebia; il est très distinct de l'œuf de S. Cordida et de celui de 5. Actœa. LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE Description de l'œuf fraîchement pondu (Sebdou, 26-27 aoûi 190;) : (( Couleur : blanc jaunâtre pâle. Dimensions : hauteur, 0.00175 à 0.00185 ; diamètre horizontal maximum, 0.00 16. L'œuf de S. Abdelkader est le plus grand de tous les œufs de Satyrides que je connais. Forme : ovale, base aplatie au point de contact avec le support. Les cotes verticales sont nombreuses, émoussées, peu élevées; elles diminuent en hauteur et en nombre et convergent, vers le sommet; on en compte environ 38 à l'équateur; il y en a parfois un peu moins; quelques côtes s'arrêtent près de 1' (c épaule » de l'œuf, mais la fusion de deux côtes contiguës est rare; dimi- nuant progressivement de hauteur et de largeur à partir de r (( épaule », les côtes deviennent un peu dentelées sur le sommet ; elles disparaissent au bord de la surface micropylaire, qui est très finement rugueuse à cause du réseau de cellules microsco- piques qui la recouvre; la surface micropylaire est, le plus sou- vent, presque plate, mais il arrive quelquefois qu'elle se trouve surélevée, formant ainsi un petit mamelon avec une dépression centrale évasée; les espaces au fond des vallons, entre les côtes, sont étroits; leur surface est plus brillante que celle des côtes; les vallons sont traversés par les petites côtes horizontales, très nombreuses; celles-ci sont particulièrement bien marquées sur la pente des côtes verticales; elles se dessinent moins bien sur l'arête. La coquille est semi-transparente, relativement mince, et l'œuf n'a pas l'apparence solide des œufs de la plupart des Espèces du genre Salyrus, telles que S. Briseis, S. Prietiri, S. Sylvicola, S. Cordida. La couleur de l'œuf se fonce légèrement, mais il n'y a pas un grand changement pendant les deux ou trois pre- miers jours; au bout de quatre jours, l'œuf acquiert une teinte brun rosé pâle; des taches et ensuite des lignes irrégulières, d'une couleur brune, apparaissent par transparence, ainsi que cela a lieu chez les œufs d'Erebia; mais, dans le cas des Erebia, ces LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 233 lignes et taches sont plus carnées, moins brunes, que chez Abdelkader; il y a une tendance à la formation de lignes en zigzag donnant à l'œuf à.' Abdelkader l'apparence d'être orné de dessins arabesques; il est probable que de pareilles taches et lignes se développent sous la coquille des œufs des Satyrus mentionnés ci-dessus, mais, dans leur cas, l'épaisseur et l'opacité de la coquille les rendent invisibles. Je compte, dans un des œufs, huit lignes, en zigzag ou bien ondulées, contournant l'œuf, les unes l'encerclant complètement, les autres interrompues; cet œuf est exempt de taches; un autre œuf est plutôt tacheté que marqué de lignes. La période des taches me paraît être une des premières phases de l'évolution de l'embryon ; les taches se résolvent ensuite, peu à peu, en lignes très irrégulières; finalement, ces lignes se rectifient et forment les rayures de la jeune chenille. Un jour avant l'éclosion, la couleur de l'œuf tourne au gris pâle et les lignes deviennent moins visibles. L'éclosion a lieu au bout d'une dizaine de jours, quand la ponte a été effectuée en août ou au commencement de septembre; elle est souvent retardée par une température plus fraîche, chez les œufs pondus plus tard. Normalement, la jeune chenille entame la coquille dans le voisinage de 1' <( épaule » et mange en suivant une ligne irré- gulière autour de l'œuf, sans, cependant, compléter le cercle; le sommet reste donc attaché par une sorte de charnière; souvent, après l'émergence, la chenille dévore partiellement la coquille, laissant la base, mais cette habitude est loin d'être constante; la coquille vide est blanchâtre, diaphane; elle présente des reflets irisés. Je fais suivre les notes que j'ai prises, en 1907-1908, concernant l'éducation des chenilles Ôl^ Abdelkader obtenues d'éclosion à Sebdou et élevées à Hyères ; « Les premières éclosions de chenilles se sont produites entre le 5 et le 10 septembre; elles provenaient d'œufs pondus le 26 et le 27 août. 234 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE La jeune chenille est incapable de vivre longtemps sans nour- riture; elle diffère, en ceci, de certaines Espèces Satyrides de ma connaissance qui, avant de commencer à se nounir, peuvent attendre même plusieurs semaines; cette faculté leur est acquise, probablement, dans le but de faciliter la conservation de l'Es- pèce; elle permet aux chenilles, le cas échéant, d'attendre la nouvelle poussée des Graminées desséchées pendant l'été, celle-ci ayant lieu après les premières bonnes pluies, qui peuvent être plus ou moins retardées. Une pareille prévision de la Nature n'aurait pas de raison d'être pour Abdelkader, qui vit norma- lement, selon toute vraisemblance, sur l'Alfa, Graminée ne se desséchant pas en été. Au début, je gardais les petites chenilles dans des boîtes en fer-blanc, leur donnant de l'Alfa coupé et d'autres Graminées coriaces; mais, plusieurs chenilles étant mortes par suite du dessèchement trop rapide de leur nourriture, je les ai transférées sur des touffes empotées d'une Espèce a leuilles rudes et glabres qui poussait le long des séguias ; elles ont accepté cette Graminée sans hésitation et ont prospéré ensuite, mangeant pendant la journée. La première mue a été passée, par toutes les chenilles, entre le commencement de la dernière semaine de septembre et la fin de la première semaine d'octobre. Malgré une température dmrne fraîche et des nuits même froides, les chenilles ont continué à montrer de l'activité et à se développer, pendant la première quinzaine d'octobre, se nourrissant le jour, surtout le matin ; leurs mouvements sont lents, comme ceux de toutes les Satyrides. J'ai quitté Sebdou le 21 octobre pour rentrer à Hyères le 29; les chenilles ont fait le voyage dans des boîtes en fer- blanc; je n'ai pu renouveler leur provision de nourriture qu'une seule fois en route; c'était à Alger, où je leur ai donné les feuilles d'une Graminée d'assez grande taille, à feuilles pendantes; elles ont mangé cette plante, mais sans paraître la trouver tout à fait à leur goût. Six chenilles ont succombé pendant le voyage. En arrivant, j'ai placé les chenilles vivantes sur une Graminée en pot; elles ont repris immédiatement leur santé et ont continué LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 235 à grandir assez rapidement, en novembre. Examinant la touffe, le 10 novembre, j'ai trouvé que presque toutes les chenilles avaient atteint le troisième stade ; à cette époque, leur activité était plutôt nocturne que diurne; je les voyais monter sur les feuilles de la touffe pour manger, le soir ; mais quelquefois, si le temps était couvert et humide, je trouvais une ou deux chenilles haut sur les feuilles, en train de manger, le matin; l'habitude nocturne n'est donc pas définitivement établie dans le troisième stade. Le 20 novembre, j'ai noté avoir observé deux fois, depuis le 16 novembre, une chenille dans son troisième stade en train de se nourrir vers midi, mais j'ai remarqué que le cas était exceptionnel, l'activité nocturne étant la règle générale; les chenilles faisaient alors de bons progrès, et la première touffe de Gramiriée se trouvait presque entièrement dévorée. Le 4 décembre, je notais qu'il y avait au moins une chenille n'ayant pas passé la seconde mue et se trouvant encore dans le deuxième stade; par contre, la chenille la plus avancée avait atteint le quatrième stade, ayant mué pour la troisième fois, le 30 no- vembre; pendant le mois de novembre un temps doux et un peu humide a prédominé, favorisant l'activité et la croissance des chenilles. Je les ai placées, le i" décembre, sur une nouvelle touffe d'herbe; deux jours plus tard, j'ai vu une chenille (3* stade) en train de manger au milieu de la journée; mais l'activité diurne devenait alors de plus en plus rare; j'avais souvent occasion de voir les chenilles en train de manger, le soir; le pot contenant la touffe sur laquelle elles vivaient restait toujours dehors, à l'air libre; si, par hasard, je l'apportais dans la maison, le soir, pour examiner les chenilles à la lumière^ celles-ci cessaient de manger et redescendaient les feuilles. La nouvelle touffe de Graminée donnée aux chenilles n'était pas de la même Espèce que la touffe précédente; aussi, elle ne leur réussit pas; au bout de quelques jours, j'ai remarqué que les chenilles se promenaient, la nuit, sur la cloche de mousseline, ne mangeaient que peu et ne grandissaient plus; j'ai donc changé leur nourriture, donnant à la moitié des chenilles une Graminée 236 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE coriace à larges feuilles glabres avec apex aigu, Espèce qui croît communément dans les bas-fonds humides des vallées du massif des Maures, tandis que je plaçais l'autre moitié sur des plantes de Brachypodiuni ramosum. Le 28 décembre, j'ai noté que la majorité des chenilles ne se portait pas bien; quelques-unes, seulement, continuaient à manger; les autres dépérissaient lentement, se tenant immobiles vers la base des tiges et des feuilles; le Brachy podium ramosum leur plaisait encore moins que l'autre Graminée; peu de chenilles ont voulu s'en nourrir; cependant, cette plante est acceptée avec empressement par presque toutes les autres chenilles de Satyrus que j'ai élevées. Me rendant compte que les chenilles d'Abdel- kader préféraient la Graminée à larges feuilles, je les ai toutes réunies sur une touffe de cette plante. Pendant le mois de décembre 1907, le temps, à Hyères, est resté généralement doux et humide ; il y a eu quelques nuits sereines et froides; le mois de janvier 1908 fut très beau, les journées tièdes et ensoleillées, les nuits fraîches ou froides avec quelques gelées blanches ; au commencement de février, un violent mistral a maintenu une température très froide avec grande sécheresse, pendant plusieurs jours. Sur les Hauts Pla- teaux Oranais, la température moyenne en hiver est plus basse qu'à Hyères et les écarts sont plus grands; l'air y est plus sec. En janvier, presque toutes les chenilles d^ Abdel kader se sont desséchées; je les trouvais mortes au pied de la touffe. Il me semble probable que cette mortalité était due à la fois à la nourriture et au climat, la faute étant attribuable principalement à la nourriture; mais toutes les chenilles ne sont pas mortes, cependant; un petit nombre a très bien résisté; le 7 février, j'ai trouvé, dans la touffe, une chenille à la fin du quatrième stade, attendant la quatrième mue; elle se tenait sur une feuille, près du sol, la tête en bas ; deux ou trois chenilles, moins avancées, étaient cachées dans la touffe; j'ai examiné de nouveau la touffe, le 16 février; la première chenille était alors dans le cinquième (dernier) stade; elle n'avait pas encore mangé depuis LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 237 la mue, et, craignant qu'elle succomberait, comme tant d'autres, si je ne changeais pas sa nourriture, je l'ai placée sur une plante de Fesluca, d'une Espèce qui convenait parfaitement aux che- nilles de S. Hansiï et de 5. Sylvïcola; au bout de quelques jours, voyant que la chenille d' Abdelkader refusait absolument de manger le Fesiuca, je l'ai remise sur la Graminée à larges feuilles; la chenille s'est très bien portée ensuite, montant régu- lièrement, le soir, pour manger, pendant tout le mois de mars ; au commencement d'avril, elle était bien avancée dans le dernier stade et paraissait très saine; une seconde chenille se trouvait, à cette époque, dans le quatrième stade; elle aussi, ne mangeait que la nuit, se tenant enfoncée dans la touffe pendant le jour, la tête en bas. Je n'ai pas retrouvé trace des deux ou trois autres chenilles qui vivaient encore au commencement du mois de février. J'ai quitté Hyères, dans les premiers jours de mai 1908, pour me rendre en Algérie; avant mon départ, j'ai soufflé la première chenille, qui était complètement développée et n'aurait pas tardé à se chrysalider; la seconde chenille était alors dans le dernier stade; je l'ai emportée en Algérie, mais, les conditions étant défavorables, elle est morte vers le 15 mai. » En 1910 et 191 1, j'ai pu continuer l'étude des premiers états de Satyrus Abdelkader type; cette fois, c'est à Géry ville que j'ai obtenu les œufs. Des g capturées les 17, 18 et 19 septembre ont pondu en captivité; la plupart des œufs avaient déjà acquis la teinte brun rosé pâle et les lignes de la jeune chenille se mon- traient par transparence; l'éclosion a eu lieu une dizaine de jours après la ponte, mais les chenilles ayant refusé de manger une Graminée coriace que je leur ai fournie, toutes sont mortes. A la fin septembre, plusieurs autres Q captives ont pondu, les œufs étant déposés principalement sur la mousseline et sur les montants en bois de la cage, quelques-uns seulement sur les tiges d'Alfa. Les éclosions ont commencé le 12 octobre et ont continué à se produire jusqu'au 23 de ce mois. En arrivant à Hyères, le 20 octobre, j'ai placé toutes les che- 238 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE miles déjà écloses sur une grande touffe d'une Graminée voisine des Festuca; elles se sont montrées satisfaites de cette nourriture et, vers la fin d'octobre et en novembre, je les apercevais souvent, pendant la journée, en train de manger; les repas durent environ vingt minutes ; la chenille commence à la pointe d'une des feuilles filiformes et réduit la feuille à deux tiers ou à la moitié de sa longueur originale; elle se retourne ensuite, descend le long de la feuille et se met au repos près de la base, la tête en bas. Je relève les notes suivantes, faites pendant l'hiver 1910-1911 et au printemps 191 1 : « 8 novembre 1910. — Les chenilles avancent assez rapide- ment; toutes s'approchent de la fin du premier stade et plusieurs attendent déjà la première mue, se tenant au repos, le prothorax gonflé par la nouvelle tête qui se forme sous la peau. 14 novembre 1910. — ■ Cinq chenilles, dans le deuxième stade, mangeaient aujourd'hui en plein soleil; ces chenilles ont passé la première mue tout récemment. 21 novembre 1910. — Plusieurs chenilles font de rapides progrès, dans le deuxième stade; l'activité nocturne commence à se développer; j'aperçois ce soir, à 7 h. 30, deux chenilles, bien avancées dans le deuxième stade, haut sur les feuilles qu'elles sont en train de manger; les autres se tiennent au repos, près de la base des tiges, mais, à en juger par l'apparence de certaines feuilles, je suis persuadé que plusieurs chenilles ont mangé ce soir. Quelques chenilles sont encore dans le premier stade, mais elles ne tarderont pas à muer. i^'' décembre 1910. — Depuis une quinzaine de jours, je n'avais pas remarqué d'activité diurne chez les chenilles d'Abdelkader, et j'étais disposé à croire que l'habitude nocturne était défini- tivement établie; cependant, aujourd'hui, journée ensoleillée faisant suite à près d'une semaine de pluie et de temps maussade, j'aperçois huit chenilles mangeant en plein soleil; toutes sont LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 239 dans le deuxième stade et certaines d'entre elles ne tarderont pas à arriver à la fin de ce stade; elles progressent bien plus rapidement que les chenilles de Satyrus Prienri, élevées dans les mêmes conditions et à côté des Abdelkader. 2 décembre 191 o. — Ce soir, toutes les chenilles se promènent sur la touffe et sur la mousseline qui la recouvre; j'en vois plu- sieurs en train de manger. 17 décembre 1910. - — Deux des chenilles sont maintenant dans le troisième stade; l'une a passé la deuxième mue aujourd'hui, l'autre a accompli cette mue, il y a deux jours, à part ces deux exceptions, toutes les chenilles sont encore dans le deuxième stade, plusieurs étant bien avancées, l.e temps a été assez doux (+ 10° à + 15°) et très pluvieux, depuis trois semaines. 14 février içji. — Entre la mi-décembre et le 11 février, aucune pluie n'est tombée à Hyères; le temps a été généralement très beau et il n'y a eu que peu de vent, à l'exception d'un très fort vent d'est à la fin de janvier; la température diurne s'est maintenue élevée, au soleil, mais n'a pas souvent dépassé 12° à l'ombre; les nuits ont été froides et les gelées fréquentes; il y a eu, une nuit, un minimum de — 7" (enregistré à l'Ecole d'Agri- culture). Pluie froide avec vents du nord-est et nord, les il, 12 et 13 février; aujourd'hui le temps est beau et doux. Pendant ce temps, les chenilles d' Abdelkader n'ont fait que de lents progrès; vers le 15 janvier, en examinant la touffe, je n'ai pu voir que deux chenilles, toutes deux dans le troisième stade et peu avancées. 17 février 191 1. — Je vois, ce soir, haut sur les feuilles et en train de manger, quatre chenilles bien avancées dans le troisième stade; la touffe paraît avoir été beaucoup broutée dernièrement, mais je crois qu'un bon nombre de chenilles a péri peu après le dernier changement de touffe; la cause de ces pertes serait la famine qu'éprouvèrent les chenilles sur la dernière touffe après l'avoir presque complètement dévorée. 240 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 17 avril 191 1. -— Les chenilles qui survirent sont maintenant dans le dernier (cinquième) stade, mais elles n'ont pas encore atteint leur développement complet; il y a dix jours, j'ai soufflé deux cPienilles du cinquième et une du quatrième stades; il en reste une demi-douzaine. Le commencement de ce mois a été marqué par une série de journées très froides, et la température est même maintenant un peu au-dessous de la normale. J'ai emporté avec moi les chenilles d' Abdelkader, en me ren- dant en Algérie au commencement du mois de mai; elles se sont chrysalidées à la fin de ce mois, à Aflou; une seule s'est méta- morphosée au centre d'une touffe de Graminée, la chrysalide étant placée dans la position verticale; les autres ont pénétré en terre et se sont chrj'salidées dans des cellules à une faible profondeur. Les six chrysalides ont donné leurs papillons entre le 20 et le 25 aoiÀt 191 1. L'éclosion du papillon a lieu le matin, dans les premières heures qui suivent le lever du soleil (ceci paraît être la règle chez les Satyrus) ; le papillon cf commence à s'agiter environ une heure après l'émergence, s'il est exposé au soleil ou à un jour assez fort; il est même enclin à entreprendre des petits vols avant que ses ailes ne soient complètement sèches ; la Q est un peu moins remuante, mais elle, aussi, s'agite si la lumière est forte; c'est à cette période de leur existence imaginale que beaucoup de S. Abdelkader reçoivent des égratignures et des déchirures aux ailes encore molles, probablement en se débattant dans les touffes d'Alfa; ils sont également plus exposés aux attaques de la part des lézards qu'après le raffermissement des ailes. Il convient de placer les sujets obtenus d'éclosion, dans une obscurité complète, peu après l'émergence, et de les tuer vers la fin de la journée; les ailes seront, alors, parfaitement sèches et les papillons n'auront pas volé. Le beau noir du papillon cf, fraîchement éclos, perd assez rapidement son intensité, devenant plus ou moins brunâtre après deux ou trois jours d'existence; cette modification de la couleur est à remarquer aussi, à un moindre degré, chez les individus tués frais et conservés en collection. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 24 1 Description de la chenille dans ses stades successifs : Premier stade. — Aussitôt après l'éclosion, la chenille a une longueur de 0.005 à 0.0055; la largeur de la tête est de 0.0013; celle-ci est de couleur paille pâle, plus pâle que le corps; sa surface est luisante, ponctuée de ces petites dépressions que l'on remarque toujours sur les épicrania des chenilles du genre Satyrus et Erebia; sa forme est arrondie et le sillon central n'est pas profond ; l'emplacement de chaque point sétifère est marqué par une petite tache brun noir très distincte ; les soies sont courtes, épaissies, incolores ; il n'y en a qu'une dizaine sur chaque moitié de la tête; les ocelles sont d'un brun noir. Le corps est de couleur paille pâle très légèrement grisâtre; la teinte est un peu plus chaude sur les segments thoraciques. Les lignes du dorsum sont très distinctes ; elles ont une couleur chocolat clair; on remarque : la ligne médiane, la deuxième sous- médiane, la suprastigmatale (large ligne, plus faible sur les segments thoraciques que sur les abdominaux et toujours un peu plus foncée vers sa marge supérieure) et la stigmatale, plus pâle et moins large que la suprastigmatale. La ligne limitrophe de la surface dorsale est plus pâle que la couleur fondamentale; quant à la première ligne sous-médiane, elle n'est pas encore apparente; la surface ventrale, les pattes thoraciques et les pattes membraneuses sont d'une couleur paille pâle. Les tubercules primaires apparaissent sous forme de petits points noirs ; sur les segments abdominaux, tubercule I est placé sur le premier bourrelet et se trouve peu éloigné de la ligne médiane; tubercule II est près du bord postérieur du segment, sur la marge inférieure de la seconde ligne sous-médiane; la fourche anale est bien développée; ses deux dents sont formées chacune de trois verrues coniques (tubercules modifiés), la prin- cipale dirigée horizontalement en arrière et portant, sur ses côtés, les deux autres, plus petites, placées obliquement, l'une du côté extérieur, l'autre du côté intérieur de la dent; un poil incolore 16 242 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE termine chaque verrue; les tubercules situés ailleurs sur le corps portent chacun une soie très courte; les stigmates sont indiqués par de petits points noirs. Une teinte verte apparaît après la première ingestion de nourriture et s'accentue progressivement, sans jamais devenir intense; la teinte verte ne se communique pas à la tête ni au segment anal ; les lignes foncées deviennent moins apparentes quand la couleur verte se développe ; la couleur chocolat primitive des rayures est remplacée par un vert foncé, dans le cas de la ligne médiane et de la suprastigmatale; les lignes stigmatale et deuxième sous-médiane verdissent aussi, mais d'une façon moins prononcée; la ligne pâle en limite du dorsum reste blanc jaunâtre et se montre plus distinctement. Vers la fin du stade, lorsque la chenille a cessé de manger et qu'elle s'est mise au repos dans l'attente de la mue, la teinte verte se modifie graduellement, pâlissant et cédant place au jaune paille légèrement verdâtre; les deux premiers segments thoraciques et les trois derniers segments du corps pâlissent plus spécialement et perdent toute trace de vert; les lignes s'affaiblissent beaucoup. La longueur totale de la chenille, à la fin du premier stade, varie, selon les individus, de 0.009 a 0.0097. L'intensité de la coloration verte de la jeune chenille dépend de la nourriture qu'elle absorbe; ainsi, certains individus, nourris avec de vieilles feuilles d'Alfa ne renfermant que peu de chlorophylle, ont pris une teinte gris verdâtre, tandis que d'autres, élevées sur une Graminée bien verte, ont développé une couleur verte beaucoup plus franche. Dans son premier stade, la chenille de S. Abddkader est la plus grande de toutes celles des Satyrus que je connais ; ses dimensions sont en rapport avec celles de l'œuf, par conséquent. Deuxième stade. — Immédiatement après la mue, la tête et le segment anal présentent une apparence semi-transparente et sont d'une couleur vert pâle; le corps est paille pâle et les lignes longitudinales sont bien distinctes; en séchant et en se raffer- LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 243 missant, la tête reprend de l'opacité et sa couleur tourne au paille un peu grisâtre; il en est de même pour le segment anal; sur la tête apparaissent maintenant les rayures brunes caractéristiques cies Satyrus; elles ne sont que très faiblement dessinées dans ce stade, même chez les sujets les plus fortement marqués. La forme de la tête n'a pas subi de modifications sensibles; elle reste arrondie, le sillon de suture des épicrânes à peine déprimé; sa surface est recouverte de petites dépressions comme auparavant; ce caractère est commun à tous les stades chez les Satyrides ; les soies, bien plus nombreuses que dans le premier stade, restent extrêmemicnt courtes, sauf autour de la bouche, où elles sont plus longues qu'ailleurs; elles sont incolores. La largeur de la tête dans le deuxième stade varie de 0.0015 à 0.00185; ces chiffres indiquent un écart considérable dans la grosseur de la tête, selon les individus; j'ai constaté que les chenilles originaires de Sebdou possédaient, dans ce stade, une tête un peu plus grosse, en général, que celles de Géryville. Peu de temps après avoir recommencé à manger, la chenille reprend une légère teinte verte, surtout sur la surface ventrale, mais cette coloration est moins prononcée que dans le stade précédent; la couleur fondamentale du corps est un gris jaunâtre teinte faiblement par le vert; les lignes foncées deviennent de moins en moins accusées à mesure que la chenille progresse dans le stade; elles sont brunâtres, et cette couleur est distincte comme fine limite marginale de chaque ligne, mais la partie médiane est affaiblie et plus ou moins envahie par la couleur fondamen- tale; la ligne suprastigmatale est celle la plus fortement mar- quée; la ligne en bordure de la surface dorsale reste un peu plus claire que le fond; les pattes sont d'un gris jaunâtre très pâle, ainsi que la surface ventrale, mais celle-ci est légèrement teinte de verdâtre. Plusieurs exemplaires n'ont presque pas trace de coloration verte sur le corps. Les points sétifères sont plus nom- breux que dans le premier stade; les soies sont extrêmement courtes. Les pointes de la fourche anale sont moins allongées que chez les Espèces du groupe Faiina. Vers la fin du stade, la 244 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE couleur de la chenille pâlit et perd toute teinte verte et les lignes du corps et de la tête s'affaiblissent beaucoup, celles de la tête disparaissant dans bien des cas, pendant la période d'attente qui précède la deuxième mue. La longueur totale à la fin du cieuxième stade est de 0.015. Troisième stade. — Pendant quelques heures après la deuxième mue, la tête est blanchâtre, semi-transparente, sans rayures; les lignes du corps sont assez fortement marquées, sur- tout la médiane et la suprastigmatale; elles sont d'un gris foncé. Peu à peu, en séchant, la tête et le segment anal se foncent et prennent de l'opacité; les rayures de la tête réapparaissent, alors, et, au bout de 24 heures, deviennent assez foncées. Les lignes de la surface dorsale du corps sont toujours plus vivement marquées au début d'un stade; elles diminuent pro- gressivement d'intensité pendant le développement de la chenille; la principale raison de cet affaiblissement doit être l'extension graduelle de la peau, qui accompagne la croissance de la chenille dans chaque stade; cette extension de la peau a lieu, naturellement, chez toutes les chenilles, avec un certain affaiblissement des dessins, qui est surtout sensible si ces dessins sont formés en grande partie par de petits traits et atomes plus ou moins étroitement agglomérés, comme cela est le cas pour les lignes ornant les chenilles des Satyrides ; plus la peau est tendue, plus les atomes composant les dessins se trouvent espacés et les dessins affaiblis en conséquence; mais l'extension de la peau n'est pas l'unique facteur de l'affaiblissement des lignes, car, vers la fin d'un stade, la couleur des petits traits et même des atomes pâlit. J'ai fait la desciiption suivante d'une chenille vers le milieu du stade : La largeur de la tête varie, selon les individus, de 0.0024 à 0.0028 (chez les chenilles originaires de Géryville, je trouve une largeur moyenne de 0.0025). La couleur de la tête est un nankin grisâtre pâle, un peu plus pâle que la couleur générale du corps; I.ÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 245 les rax'ures de la tête — au nombre de six, comme chez toutes les Espèces du Genre, - — sont d'un gris brun; quoique faiblement marquées, elles sont distinctes; leur intensité varie, d'ailleurs, jusqu'à un certain degré, selon les individus; ces rayures ont une largeur moyenne, par comparaison avec celles des autres Satyrits. La forme de la tête et son apparence, l'intensité des rayures et la grosseur mises à part, ne diffèrent pas sensiblement de ce qu'elles étaient dans le stade précédent; les soies sont nom- breuses et toujours très courtes, un peu plus longues autour de la bouche; le léger sillon entre les épicrânes est un peu plus clair que la couleur générale et cette teinte plus {jâle s'étend sur le bord des épicrânes contigu au clypeus. La couleur générale du corps est nankin grisâtre pâle; la peau est relativement mince et la substance souscutanée peu opaque; néanmoins, il n'y a aucune teinte verte. Le corps est recouvert de soies extrêmement courtes, imperceptibles à l'œil nu; sur la base des pattes membraneuses et sur la fourche anale, les soies surmontent de très petites verrues coniques, noires; elles sont un peu plus longues sur la fourche qu'ailleurs; les segments abdo- minaux possèdent six bourrelets transversaux chacun, dont le premier est le plus large; vues d'au-dessus, les deux dents de la fourche ont une forme grossièrement conique ; leurs bords inté- 1 leurs sont parallèles et très rapprochés l'un de l'autre, pour la plus grande partie de la longueur, mais divergents vers l'extré- mité. La ligne médiane est d'un gris clair; elle est plus foncée et plus étroite sur les segments thoraciques que sur les abdominaux; il y a un léger renflement de cette ligne sur le premier bourrelet des segments abdominaux ; son bord extérieur est formé par une étroite ligne brune en dessous de laquelle vient un espace de la couleur pâle fondamentale; ensuite on remarque une large rayure de couleur un peu plus foncée, dont la marge supérieure et la marge inférieure forment respectivement la première et la 246 LÉPIDOPTÊROLOGIE COMPARÉE seconde lignes sousmédianes ; ces deux lignes sont brunes ; la première est plus étroite que la seconde ; cette rayure sous- médiane se retrouve chez toutes les chenilles du genre, mais son aire médiane est, dans certains cas, si pâle qu'elle ne se distin- guerait pas de la surface environnante si ce n'était pour les marges foncées ; quelquefois (surtout chez les jeunes chenilles) la bordure supérieure, autrement dit (( première ligne sous- médianc », lui manque; chez Abdelkader, l'aire centrale de la rayure sous-médiane est recouverte d'un semis assez dense de petites lignes ondulées et d'atomes bruns, visibles à la loupe, et ceci rend la rayure apparente dans son ensemble; en dessous de la rayure sous-médiane se trouve un filet de la couleur fonda- mentale, puis vient une assez large ligne de couleur brun rouge terne, suivie d'un second filet de couleur plus claire que le fond ; la ligne suivante est la suprastigmatale, ligne fortement marquée dans toutes les Espèces du Genre, mais, à cause de la pâleur des autres lignes, elle est particulièrement remarquable chez Abdel- kader, dans les 2*, 3" et 4'' stades ; elle est large, grise, avec marge supérieure noirâtre, la marge inférieure étant plus mince et un peu moins foncée que la supérieure; la suprastigmatale est plus étroite sur les segments thoraciques que vers le milieu du corps, et elle diminue progressivement de largeur, à partir du cinquième segment abdominal, pour se prolonger, fine, sur le bord de la fourche; sa couleur grise est à peu près uniforme d'un bout à l'autre; le filet foncé formant la marge supérieure de cette ligne est plus épais sur les segments abdominaux que sur les thora- ciques. La ligne stigmatale est séparée de la suprastigmatale par un mince filet couleur du fond; elle est d'un brun rougeâtre clair avec bordures d'une teinte un peu plus foncée; les stigmates apparaissent, sous la loupe, comme de petits points noirs entourés d'un anneau clair; après la stigmatale, vient la ligne en bordure de la surface dorsale (fiange Une) ; elle est très claire, décidément plus pâle que le fond, et possède une nuance légèrement jaunâtre. La surface ventrale, les pattes thoraciques et les membraneuses LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 247 sont de couleur gris très pâle à nuance chaude; U )■ a trace d'une ombre foncée, en dessous de la limite dorsale. La longueur de la chenille à la fin du troisième stade est de 0.017 à o.oig. Ojiatrihne stade. — Sauf pour la grosseur, la tête ne diffère pas beaucoup de ce qu'elle était dans le stade précédent; les rayures foncées sont, cependant, mieux marquées, tout en restant faibles par rapport à celles de la tête de la plupart des Satynis. La plus grande largeur de la tête est de 0.0031. Il n'y a pas grand changement, non plus, dans la coloration et le dessin du corps; la ligne médiane est un peu plus fortement marquée, ainsi que la seconde sous-médiane; la bordure supérieure, noire, de la suprastigmatale, est nettement plus large sur les segments abdo- m.inaux 5, 6, 7 et 8; le stigmate du segment protharacique et celui du huitième segment abdominal ont une couleur brun rougeâtre; ceux des autres segments abdominaux sont plus foncés et plus petits. L'ne fine pubescence de soies très courtes, visibles sous la loupe, recouvre le corps. La longueur totale de la chenille à la fin du quatrième stade est d'environ 0.025. Cinquième (dernier) stade. — La largeur de la tête, dans ce stade, varie de 0.0035 à 0.0040 environ, suivant les individus; la tête est arrondie, légèrement aplatie sur la face; les mâchoires sont fortes, brunes; la surface des épicrânes est finement rugueuse, pointillée de petites dépressions; le sillon de suture, plus clair que le fond, est à peme déprimé; le clypeus est assez large et sa surface est plus uniforme que celle des lobes; ses bords latéraux sont marqués d'un trait brun d'intensité variable; ces deux traits ne se rencontrent pas à l'apex du triangle; un point brun foncé se trouve à la base de chacun des traits, près de la base du triangle formé par le clypeus ; un second point brun est placé vers le sommet du triangle, également sur chaque trait; les ocelles, au nombre de six, sont d'un brun noirâtre; cinq des ocelles forment un arc; le sixième est en dessous de l'arc. 248 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE La tête est recouverte de soies très courtes, drues; sa couleur est nankin grisâtre très pâle; le fond des petites dépressions est souvent noirci, surtout dans l'aire des rayures; les rayures sont plus prononcées que dans les deux stades précédents; elles sont relativement larges, mais d'un gris noirâtre peu foncé en com- paraison avec celles qui ornent la tête chez la majorité des chenilles du genre. Vers la fin du stade, la couleur de la tête devient plus foncée grisâtre, et les rayures apparaissent beaucoup moins nettement. Une pilosité très courte, invisible à l'œil nu, recouvre le corps; les poils sont raides, d'un brun ambré; cela ne se voit qu'avec l'aide d'une très forte loupe; comme chez les autres chenilles Satyrides, cette pilosité se révèle au toucher, les chenilles ne produisant pas une sensation froide aux doigts comme dans le cas des Noctuides et autres larves glabres. On ne distingue pas les tubercules primaires, perdus au milieu des nombreux tubercules pilifères secondaires. Les pattes thoraciques sont d'un blanc-grisâtre, mais les parties chitinisées sont légère- ment rembrunies; les pattes membraneuses ont la même couleur que les thoraciques ; leurs crochets terminaux sont brun-rou- geâtre clair. Les dents de la fourche anale ne sont ni si longues ni si aiguës à l'extrémité que chez S. Cordula, S. Actaea et les Espèces du groupe de Fanna; elles sont divergentes vers l'extré- mité, mais soudées ensemble sur environ quatre cinquièmes de leur longueur totale; le sillon marquant la ligne de jonction est assez profond ; les soies hérissant la fourche sont plus longues et les petites verrues qui les portent sont mieux développées que celles du corps. La couleur fondamentale du corps est un beige jaunâtre très pâle, couleur commune à beaucoup d'Espèces du même Genre, dans le même stade; les lignes sombres sont formées d'atomes et filets presque microscopiques, disposées en semis plus ou moins dense, selon les régions, sur un fond grisâtre peu foncé et, dans le cas des lignes les moins importantes, sur la couleur fondamen- tale même; la couleur de ce semis varie du noir (bord supérieur de la ligne suprastigmatale) au brun rougeâtre. La ligne médiane LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 249 est beaucoup plus luncée que clans le stade précédent; sa couleur est brun gris sombre, ou noirâtre, un peu plus intense sur les deux premiers segments thoraciques et aussi sur les segments abdominaux 7, 8 et 9; elle commence, finit, sur le prothorax, s'élargit progressivement jusqu'au cinquième segment de l'abdo- men et commence à s'amincn- après le sixième, pour terminer en pointe à la base de la fourche; entre le premier et le huitième segm.ents abdominaux, la variation dans la largeur de la ligne médiane n'est pas très sensible; les bords de cette ligne sont légèrement plus foncées que la partie médiane; l'étroit espace de couleur fondamentale, qui sépare la ligne médiodorsale de la rayure sous-rnédiane, est exempt d'atomes bruns; la rayure sous- médiane, est toujours très faiblement marquée; quelques atomes bruns l'indiquent sur les segments thoraciques, mais, sur ceux de l'abdomen, le semis brun rougeâtrc de son aire médiane est si pâle que l'on a bien de la peine à distinguer la rayure; son bord supérieur ( = première ligne sous-médiane) n'est visible que sur le thorax, même chez les individus les mieux marqués, mais sa marge inférieure ( = seconde ligne sous-médiane) est distincte- ment visible, en brun grisâtre, sur la partie antérieure du corps ; elle pâlit progressivement sur les segments abdominaux et se trouve, dans bien des cas, presque effacée à partir du quatrième ou du cinquième segment ; entre la seconde ligne sous-médiane et la suprastigmatale, on remarque une surface de couleur fonda- mentale, dont la partie centrale est occupée par une ligne à peine visible, composée d'atomes et filets ondulés, bruns; la large ligne suprastigmatale fplus étroite sur le thorax que sur l'abdomen) est gris pâle ; son bord supérieur est noir et très net, fortement marqué sur les segments abdominaux, surtout sur le 5^ le 6^ le 7® et le 8^ on le corps de la ligne est plus sombre qu'ailleurs, par suite d'un saupoudremen<" plus dense et plus foncé d'atomes noirâtres; le bord inférieur de cette ligne est très fin, noirâtre; la suprastigmatale, amincie, est prolongée sur le côté de la fourche anale; la ligne stigmatale est faible sur le thorax et presque effacée sur les segments abdominaux; les stigmates ont une 250 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE couleur brun rouge, le grand stigmate prothoracique étant plus clair que les autres; la forme des stigmates est ovale-allongée; un rebord surélevé, chitineux entoure le cratère central ; la limite dorsale, ou corniche, est plus claire que la ligne stigmatale; la surface ventrale et les pattes — sauf les parties chitinisées - — sont de couleur plus pâle que le dorsum et sont exemptes de lignes et dessins. Quand la chenille est au repos, la fourche anale est souvent infléchie de façon à ce que son extrémité touche la tige sur laquelle se tient la chenille. La croissance, dans ce stade, est accompagnée d'un pâlisse- ment progressif des lignes et rayures ; la ligne médiodorsale brune grisâtre reste, cependant, toujours fortement marquée, étant, de beaucoup, la ligne la plus foncée du corps, si on fait exception de la bordure supérieure de la suprastigmatale, qui reste noirâtre et très nette. A la fin du stade, à l'époque oii la chenille cesse définitive- ment de manger et erre sur le sol avant de s'enterrer, l'aspect de la tête et du corps se mcdiùe un peu; la tête grisonne et ses layures deviennent indistinctes; une diminution dans le volume du corps coïncide avec une opacité atténuée et les bourrelets transversaux se dessinent mieux, par suite d'un rembrunisse- ment — plus ou moins accentué selon les individus — n'intéressant pas les rides et incisions, mais seulement les bour- relets ; les segments antérieurs et surtout ceux du thorax, sont plus spécialement rembrunis pendant cette phase, mais à un degré moindre, me semble-t-il, que chez la forme Lambessanus; la peau paraît s'épaissir, en même temps. En résumé, la chenille de S. Abdelkader est la moins fortement marquée de toutes celles du Genre Satyrus que j'ai élevées; il faut, néanmoins, reconnaître que la ligne médiodorsale est aussi foncée et nette, dans le dernier stade, que chez beaucoup d'Espèces; elle ne montre aucune tendance à se diviser en sections plus foncées et sections plus claires, tendance qui lb:pidoptérologie comparée 251 caractérise plusieurs. Satyrus, tels que Herniione^ Neomyns, Prieiiri et Phaedra. Les différences qui séparent les chenilles des diverses Espèces du Genre sont rarement très frappantes, quoique, le plus souvent, parfaitement appréciables ; les mêmes lignes se retrouvent chez toutes, plus ou moins modifiées quant à la couleur et l'intensité; les rayures de la tête peuvent être plus ou moins intensifiées et nettes et elles peuvent varier un peu en largeur; certaines petites différences se constatent, aussi, dans la forme de la chenille (tantôt plus trapue, tantôt plus élancée) et dans celle de la fourche anale. La chenille de S. Ahdelkader diffère notablement de celles de 5. Act(va et de 5. Cordula qui sont les phis fortement mar- quées de celles que je connais. Chrysalide. — Elle ressemble beaucoup à celles des Satyrus en général, par la forme et la couleur; je n'ai pas remarqué de différence entre la chrysalide du type et celle de la forme Lambessanus, dont on lira la description plus loin. Forme Nelvai. Cette belle race de S. Abdelkader, tout en habitant une région souvent visitée, a échappé pendant longtemps aux recherches des Entomologistes explorateurs de l'Algérie. Cela s'explique par le fait que les Entomologistes, assez nombreux, qui ont exploré les montagnes des environs d'El- Kantara, habitées par Nelvai, s'y rendaient toujours en hiver, au printemps ou au commencement de l'été; naturellement, ils n'y ont pas rencontré le papillon, qui ne vole qu'à partir du 15 août jusqu'en octobre. C'est à M. Adrien Nelva, pharmacien de Batna, que revient l'honneur de la découverte du papillon qui porte son nom. M. Nelva captura les premiers exemplaires au cours d'un voyage qu'il fit, en août 1906 ou 1907, d'El-Kantara à Menaa. 252 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Etant à El-Kantara, vers la ftn du mois d'août 1912, moi- même et Stefano Chierotti, nous fîmes la connaissance de Nclva?, sur les montagnes au nord-ouest d'El-Kantara. En 191 3, j'ai fait deux excursions, dans le sud de l'Aurès, dont l'objet principal était la détermination des limites nord et sud de la zone habitée par cette race à.' A.bdelkader ; je voulais, également, mieux me fixer sur la question de ses mœurs et affi- nités. D'abord, je suis allé à El-Kantara, où j'ai retrouvé Nelvai sur le Djebel Metlili ; l'éclosion du papillon avait à peine com- mencé, le 22 août. Ensuite, accompagné de M. Nelva, j'ai fait, à pied, la route de Lambèse à Maafa par le Col de Doufana; de Maafa, nous avons traversé les montagnes jusqu'à Menaa, et de là, nous sommes revenus à Lambèse, par les chaînes du Mahmel et du Malou et la forêt de Sgag A mon retour de ce voyage, j'ai envoyé Chierotti au Djebel Metlili; il y est resté du 20 au 23 septembre; presque tous les exemplaires de Nelvai étaient passés à cette époque; le papillon continue à voler jusqu'en octobre, cependant, puisque Chierotti a capturé, le 20 octobre 191 2, un exemplaire, entre El-Kantara et Maafa, et il a vu un autre, le même jour. Les observations faites pendant ces voyages respectifs, ont démontré les faits suivants : L'époque d'éclosion est la même pour Nelvai que pour Abdel- kader de Sebdou et de Géryville. Comme Abdelkader, Nelvai éclôt dans l'Alfa. On le rencontre, le plus souvent, entre 1.200 et 1.400 mètres d'altitude, dans la zone subdésertique. Ses habitudes et mœurs sont analogues à celles de la forme typique. Nelvai et Lainbessanits n'habitent pas les mêmes parties de l'Aurès; Nelvai n'étant connu que d'une région du sud-ouest de ce massif. Cette région est limitée, à l'ouest, par la chaîne du Djebel- Metlili; à l'est et au sud-est, par la chaîne de montagnes séparant LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 253 la vallée de l'Oued-Abdi du territoire des Beni-Ferah ; au nord, par rOued-Smaïl. Au sud, Nelvai se trouve sur les montagnes des Beni-Ferah, mais ne descend pas dans la zone désertique. - — En longueur (est-ouest), cette région a environ 40 kilomètres; elle est large d'environ 20 kilomètres sous le méridien de Tahanent, mais beaucoup plus étroite à El-Kantara; au nord- ouest de cette localité, le papillon est restreint à la chaîne du ÎVietlili. Je ne pense pas que, vers l'ouest. Nelvai dépasse le Djebel-Metlili, puisque les derniers contreforts de cette chaîne disparaissent dans la vaste plaine, désertique et peu élevée, du Hodna; mais, à l'est, il se pourrait bien qu'on le retrouve au- delà de la vallée de l'Oued-Abdi, sur les versants sud-est du Djebel-Azreg de l'Ahmar-Khadclou ; peut-être le retrouvera-t-on, également, dans le Djebel-Chechar, au sud-est de l'Aurès? Aucun entomologiste n'y a chassé encore; du moins à ma connaissance. Nous ne l'avons pas vu, en septembre 191 2, aux environs de Tighanimine (Oued-el-Abiod), ni, en octobre de la même année, sur les montagnes entre Menaa et M'chounech; ces régions ne me paraissaient même pas propices; l'Alfa y faisant presque défaut; mais il y a de grandes étendues encore inexplorées de ce côté, je suis convaincu que Nelvai n'habite ni le nord de l'Aurès, ni les grandes montagnes du centre. Nous chassions presque jour- nellement, pendant l'été, sur les montagnes aux environs de Lambèse, où vole la race Lambessanns au printemps, mais nous n'y avons jamais vu Nelvai, pas plus qu'au cours de nos explora- tions des chaînes centrales, .Sauf sur le Metlili, Nelvai nous a paru rare; à Tahanent, à Maafa et au Djebel-Bouss, nous n'avons rencontré que des exemplaires isolés, qui s'étaient probablement un peu éloignés de leur lieu de naissance; au Djebel-Bouss, cependant, le terrain et la flore étaient semblables à ceux du Djebel-Metlili. M. Nelva a capturé les premiers exemplaires connus, dans la région monta- gneuse au sud de Maafa; il ne se souvient pas, malheureuse- ment, de l'endroit exact. 254 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE Le Djebel-Motlili forme une grande barrière au nord et au nord-ouest d'El-Kantara (voir les planches photographiques 59 et 60 du Vol. VII des Etudes de Lépidoptérologie Comparée) ; c'est une chaîne de montagnes presque aride, dont la végétation arborescente, très maigre, est composée d'Arars {Juniperus phœnicea), de quelques Pistachiers et de rares chênes verts sur les hauteurs; elle domine, d'environ i.OOO mètres, les vastes plaines désertiques de Barika et du Hodna, situées au nord- ouest et à l'ouest, et celles d'El-Kantara et d'El-Outaïa, au sud Elle est séparée du massif de l'Aurès par l'Oued-el-Haï et son affluent l'Oued- Tilatou, mais, au fait, le Metlili n'est que le prolongement d'une des chaînes de l'Aurès. Le versant sud, sur lequel nous avons trouvé S. Nelvai, est en pente très raide; la chaleur et la sécheresse y sont très grandes, en été. Le compte rendu suivant de l'ascension faite, le 22 aoiit 1913, donnera une idée de la localité et de sa flore. « A EI-Kantara, où nous sommes arrivés à 8 heures du soir (le 21 août), le thermomètre, sous les mûriers de l'Hôtel Ber- trand, accusait encore 4-31°; mais, dans les chambres à coucher, sur la terrasse, il y avait cinq ou six degrés de plus. J'ai dîné dans la cour éclairée par les becs à acétylène autour desquels j'avais capturé, l'an dernier, vers la fin du mois d'août, une Q de Lymantria non encore déterminé et quelques Noctuides. Cette nuit, je n'ai rien vu autour des lumières, à part quelques saute- relles. Il a été convenu avec le guide Arabe de l'hôtel, un nommé Agra, qu'il me procurerait un mulet pour 4 heures du miatin, afin de porter les vivres, l'eau et l'appareil photographique et de servir de monture en cas de fatigue. J'ai mal dormi à cause de la chaleur intense de la chambre, et à 4 heures j'étais debout, attendant le mulet. A cinq heures, comme ni Agra ni le mulet n'avaient paru, je me suis mis, avec Amar Sari, à la recherche d'un autre mulet. Nous avons eu beaucoup de difficulté à en trouver un, les Arabes souffrant tous de l'inertie du Ramadan; LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 255 enfin, à sept heures, nous avons pu nous mettre en route par un temps très chaud et beau. Nous avons suivi le ravin sec qui débouche près de la gare. 11 y avait bien moins de Lampides Theophraslus autour des jujubiers sauvages que l'année précédente; quelques jours plus tard, les fourreaux ai' Amie ta Quadrangularis étaient nombreux, sur les genêts, les Passerines et surtout sur les jujubiers; les chenilles contenues étaient en général pleinement développées. Le petit Arabe qui nous accompagnait, s'étant trompé de route, nous a amenés, ensuite, dans un ravin à gauche, séparé du Metlili par un chaînon de collines sèches et arides, qu'il a fallu tra- verser pour atteindre l'entrée de la gorge étroite dans laquelle s'engage le sentier du Poste Optique. Le sentier tourne à gauche, au bout de quelques mètres et grimpe, en lacets, sur une pente très raide, resserrée entre deux strates de roches calcaires, celle de gauche formant falaise surplombante. Sur cette falaise, poussent les touffes vertes du Capparis spinosa, presque toutes inaccessibles. J'ai pris, ici, un seul exemplaire très petit, très frais, de Calicharis Noima. Entre les blocs et les pierres éboulées de la pente, poussent quelques rares Térébinthes, des Scrophulaires (maintenant sans feuilles), de l'Alfa, un peu de Chih et le Devcrra scoparia. En montant, nous avons dérangé un Salyrus Fidia-Alvovenosa, le premier de la journée, qui était posé sur une pierre. En haut de cette raide montée, on arrive sur l'épaule- ment d'un petit contrefort de la montagne; il y a une courte descente, puis la montée en lacets recommence. Les Arars appa- raissent sur l'épaulement, et de là jusqu'au sommet, on les ren- contre en buissons ou petits arbres, très espacés. A peine avions-nous entamé la seconde partie de la montée que, de derrière une touffe d'Alfa, s'est envolé le premier S. Nelvai, de la journée ; c'était un cf tout frais, d'un noir intense, avec les apices des ailes antérieures d'un blanc éclatant; il se trouvait entre moi et Amar et se dirigeait vers ce dernier ; mais, bien avant de l'atteindre, il dévia à gauche et se laissa aller à la descente; le flanc de la montagne étant en très forte pente. 2^6 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE rocaill'-nix et pierreux et parsemé de touffes d'Alfa, la poursuite du papillon n'était pas chose facile; il gagnait beaucoup sur nous, mais il n'allait pas en ligne droite; tantôt il montait, tantôt il descendait, sans paraître disposé à s'arrêter; son vol était bien celui de S. Abdelkadey typique; il planait, les ailes non pas étendues horizontalement, mais relevées d'un quart environ; de temps en temps il les battait légèrement; il ne s'élevait guère au- dessus de I m. 50 du sol. A un moment donné, il a passé au- dessous de moi, à. une distance de 2 m. 50 soutenu par la brise qui montait; j'ai pu, alors, admirer sa belle apparence, mais je n'ai pu l'atteindre de mon coup de filet, étant au bord d'une barre de rochers; j'ai sauté en bas, mais il était déjà loin. Nous avons continué à le poursuivre jusqu'au bord de la gorge aux parois presque à pic, dans laquelle il a disparu, à notre grand regret. Essoufflés, car la course avait été longue et mouvementée, nous avons repris la montée ; 500 mètres plus loin, un second cf a été aperçu, planant comme le premier ; au bout de cinq minutes de poursuite rapide, nous l'avons vu se poser sur le sol; Amar a pu même s'approcher à deux mètres de la touffe d'Alfa derrière laquelle le papillon s'était arrêté; mais, méfiant comme tous les individus de son Espèce, il s'est envolé de nouveau et a finale- ment disparu, en remontant la pente. De belles touffes de Dcverra scoparïa poussaient ici entre les roches et au bord du sentier et les petits buissons serrés de Genisia capïtellata commençaient à se montrer entre les touffes d'Alfa, mais VErmacca puiigens et le Genista Balansœ, si abondants sur les montagnes moins arides du nord de l'Aurès, faisaient complètement défaut. Fidia- Albovanosti n'était pas rare, mais, contrairement à ce que Chierotti et moi nous avions remarqué l'an dernier, le 28 août, presque tous les individu? étaient usés par le vol. Le sentier, tout en continuant à monter, longe maintenant le côté ouest d'un large amphithéâtre dont le fond est le ravin, ou plutôt la gorge, qui descend vers le sud-sud-est Le côté opposé de ce cirque est terminé par un pic de la chaîne, un peu moins élevé que le sommet couronné par le Poste Optique. Les pentes du LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 257 cirque sont très raides ; l'Alfa y est très abondant et les Arars y croissent en assez grand nombre. C'est sans doute la meilleure localité pour Nclvai, mais il faudrait y revenir huit jours plus tard; aujourd'hui le papillon était rare et les quelques sujets que nous avons vus étaient d'éclosion toute récente. Ayant noté, de loin, le point oii venait de se poser un Nclvaï cf, Amar a pu l'approcher d'assez près pour le prendre au filet au moment oii il s'envolait; de mon côté, j'ai poursuivi, pendant longtemps, deux individus différents, sans pouvoir les prendre; ils s'arrêtaient bien, de temps à autre, par terre, entre les touffes; mais toujours d'une méfiance extrême, ils s'en allaient avant d'être atteints ; ce n'est que par hasard qu'on peut capturer Nelvai au vol, d'abord à cause des difficultés qu'on éprouve à l'appro- cher, ensuite parce qu'il évite très habilement le coup de filet. A environ 400 mètres du sommet, nous avons trouvé un petit plateau recouvert d'Armoises (A. herba-albà), d'Alfa et de Genista capiteUata; quelques petits chênes verts croissaient aux alentours et entre ce point et le sommet. On pourrait installer un camp, à cet endroit, dans le cas où on viendrait chasser pendant quelques jours sur la montagne, mais il faudrait apporter sa provision d'eau d'Ei-Kantara, aucune source ne se trouvant sur le Metlili. 5. Fidïa-Albovcnosa n'était pas rare autour du petit plateau ; nous n'avons pas vu Nelvai au-dessus de ce point. En descendant, Amar a eu la chance de prendre un second exemplaire cf, sur les pentes du cirque. Aucune Q n'a été aperçue ce jour. Arrivés au pied de la montagne, nous avons été surpris par un court mais violent orage accompagné d'un ouragan de vent, qui, précédant l'averse, soulevait d'énormes nuages de poussière sur la plaine aride et dans la vallée d'El-Kantara. Après la forte chaleur et la sécheresse de la journée, la pluie nous a procuré une bien agréable sensation de délassement. )> En retournant à Lambèse, je me suis arrêté à Batna pour voir M. Nelva. Il a été convenu entre nous que nous ferions ensemble et le plus tôt possible, un voyage à travers les montagnes où se 17 25cS LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE trouve la forme Lanibessaniis au mois de mai, et, qu'ensuite nous descendrions vers le sud à la recherche de nouvelles localités pour Nelvai. Notre départ de Lambèse a été retardé par le fait que le pharmacien qui devait remplacer M. Nelva, pendant son absence, s'est fait attendre quelques jours; enfin, nous nous sommes mis en route, le 7 septembre. La première nuit a é'é passée au Col de Doufana, et une chasse à la lumière que nous y avons faite, a bien réussi. Le lendemain, 8 septembre, nous avons commencé notre chasse au Col, localité oii vole 5. Lam- bessanus, en mai; ensuite nous avons suivi la vallée de l'Oucd- Doufana jusqu'au moulin de Hafia. Cette vallée est la meilleure localité que je connaisse, dans le nord-ouest de l'Aurès, pour Lanibessanus ; au printemps, le papillon n'est pas du tout rare sur les flancs des collines boisées, en dessous de la jonction de rOued-Doufana avec le ravin d'Oustiii, volant au-dessus des touffes de Diss. Aujourd'hui, la seule Espèce du genre Satyrus, que nous avons rencontré était Fidia-Albovenosa; nous le faisions souvent s'élever de l'ombre des touffes et des rochers, où il aime à s'abriter pendant la forte chaleur du jour. De LaJii- bessanus, nous n'avons vu trace. Notre repas de midi a été fait à Aïn-Hafia, source entourée de lauriers-roses, au bord du ruisseau. Pendant l'après-midi, notre descente de l'oued a éLé poursuivie à travers un pays boisé de chênes verts. Les lauriers- roses, les Retams (Rétama sphaerocar pa) et le Fraxiiins d'unorpha abondaient dans la vallée. La rivière prend mainte- nant le nom de Oued-Fedhala; elle passe, près de Bou-Youssef, dans de curieuses gorges aux parois peu élevées, portant des traces de travaux Romains ; on y voit des trous carrés en aligne- ments, creusés dans le roc et destinés, sans doute, à recevoir les supports d'un aqueduc. Nous avons établi notre campement pour la nuit, à un point 011 la vallée s'élargit entre deux gorges. Les collines, aux alentours, étaient sèches et pierreuses, mais assez bien boisées de chênes verts, genévriers, cistes et romarins. Le 9 septembre, nous avons eu à lutter contre un fort vent du sud- ouest, en descendant la vallée. Après la dernière gorge, les col- LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 259 lines deviennent plus arides, plus basses et la vallée s'élargit. L'Alfa, le thym, le Globîdaria Alypinu et l'Arar couvrent les hauteurs, mais la végétation n'est pas dense. Dans la vallée, on voit des champs d'Euphorbe, de Retam et de Gouf't (Arlemisia campestris). Je n'aurais pas été surpris de rencontrer Nelvai par ici; mais le papillon ne s'est pas montré aujourd'hui. Nous avons campé, pour la nuit, dans un champ d'orge moissonné, près du confluent de l'Oued-Smaïl et de l'Oued-Fedhala, au pied du Djebel-Akhal; un vent épouvantable nous a empêché de dresser la tente. Dans la matinée du 10 septembre, pendant que les Arabes préparaient les charges peur les mulets, M. Nelva et moi, nous avons exploré les pentes inférieures du Djebel-Akhal. Le terrain est calcaire, très pierreux et fossilifère. La végétation, peu abondante, est composée principalement d'Arars, romarins, thyms, etc., mais, plus haut sur la montagne, croissent des pins d'Aîep. Nous n'y avons pas vu d'Alfa. Notre petite caravane s'étant remise en route, nous avons chassé, tout en avançant dans la direction sud-ouest, sur les col- lines à droite de la vallée, jusqu'au petit dechra de Tahanent (sur la carte de l'armée au 200.000^ le nom de Tahanent est donné à un dechra plus important, entouré de jardins, et situé à un peu moins de deux kilomètres plus haut dans la vallée; cepen- dant les indigènes nous ont assuré que ce dechra s'appelle Tarkaïrk et que le vrai Tahanent est le petit dechra qui se trouve au premier tournant de la vallée, en aval de Tarkaïrk). Enfin, sur une petite colline aride et sans Alfa, nous avons vu, ce matin, le premier Nelvai et aussi les premiers Calicharis Noiina de notre voyage. Nous n'avons pu capturer le Isl elvai, mais il n'y a aucun doute que l'exemplaire aperçu était un vrai Nelvai; M. Nelva et moi-même nous l'avons vu d'assez près pour en être sûrs. Je crois qu'il venait d'assez loin; car malgré une exploration sérieuse de la colline et des collines voisines, aucun autre exem- plaire n'a été vu près de Tahanent. L'altitude à ce point est d'environ i.ooo mètres. Au dessous du dechra, la vallée de rOued-Fedhala s'élargit encore; autour de quelques buissons de 200 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE jujubier sauvagje voltigeait bon nombre de L/iiipflcs Théo- phrase us, toujours difficiles à prendre à cause de leur habitude de ne pas s'écarter de cette plante épineuse, à laquelle le filet reste accroché. Après un court arrêt pour le repas, dans les jardins d'Oued-Soltane, nous avons traversé le lit de la Fedhala, complètement à sec, pour grimper dans la chaîne de montagnes élevées qui nous séparait de Maafa. Les premières collines étaient pierreuses ; ensuite, nous traversions des collines mar- neuses, fortement ravinées, sur lesquelles l'Alfa poussait en grande abondance. J'avais l'espoir d'y voir voler Nelvai, mais cet espoir ne s'est pas réalisé, malgré nos recherches dans toutes les directions. Continuant à monter, nous n'avons pas tardé à rentrer dans la zone boisée; d'abord, les Arars et Tagas (Juniperus oxycednis) apparaissent, puis les chênes verts; mais la forêt est très maigre et le terrain rocailleux et raviné; l'Alfa devient plus rare. J'ai remarqué ici, beaucoup de Lygemn spar- tum, Graminée qui n'est pas commune dans l'Aurès, du moins dans le nord et le centre. Il faisait très chaud et le sirocco soufflait avec force, accompagné de sa brume habituelle. Arrivés au sommet du col, nous avions le Djebel-Groum à notre droite et le Djebel-Djebroant, plus élevé et plus déchiqueté, à gauche. Le sentier traverse ensuite une série d'ondulations recouvertes de buissons de chênes verts et de genévriers ; puis la descente vers Maafa commence et on rentre clans une région de terrain rouge et salpêtre, fortement ravinée; sur les rochers, poussent les Câpriers au feuillage vert intense, contrastant fortement avec la couleur rouge des roches. Vers quatre heures, après avoir traversé un petit plateau, nous arrivions en vue des deux villages des Beni-Maafa, Meradsa et Felalela, séparés par un ravin profond, rempli d'arbres fruitiers, noyers, abricotiers, figuiers, jujubiers, etc. Meradsa, sur une pente accidentée, à l'entrée des superbes gorges de Maafa, est en partie entouré de haies et champs de Cactus et de murs en pierre sèche. Nous avons traversé ce dechra important, aux ruelles tortueuses et souvent voiltées, et sommes allés établir notre camp, avec la permission (modestement LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 261 rétribuée) du propriétaire, dans le dernier jardin à l'est, en i)leine crorge. Ce jardin contenait une belle source d'eau fraîche et une autre forte source jaillissait quelques mètres plus haut, dans la gor&î;e. Le site était grandiose; d'énormes falaises calcaires nous dominaient à pic, au nord et au sud, et la voûte de verdure formée par les arbres non taillés du jardin et les vignes grimpantes, cachait le ciel à nos yeux. Nous avons passé deux nuits dans la gorge, faisant des chasses à la lumière très fructueuses, les falaises nous abritant de la lune, presque pleine. Remontant la gorge, dans la matinée du 1 1 septembre, nous avons vu deux cT de Satyrus Nelvai; M. Nelva a réussi à en prendre un; l'autre s'est échappé. Ces deux exemplaires venaient certainement de loin, probablement des montagnes au sud de la faille; ils n'étaient pas frais. T^'Alfa ne pousse pas dans le ravin; je ne l'ai même pas vu sur les hauteurs avoisinantes. Le soir, nous avons tenu conseil pour décider dans quelle direction nous nous dirigerions le lendemain. Fallait-il suivre la direction ouest et nous rendre à El-Kantara, ou bien traverser la région montagneuse qui nous séparait de Menaa, au sud-est? Nous savions qu'à El-Kantara nous trouverions Nelvai, mais un des principaux objets du voyage était la découverte de nouvelles localités pour ce papillon. Les indigènes auxquels nous deman- dions des renseignements sur la végétation, etc., nous ont informés que l'Alfa était abondant sur le Djebel-Bouss, du côté de Menaa ; ceci nous décida, en fin de compte, de tenter la for- tune de ce côté. Dans la matinée du 12, notre caravane s'est mise en route de bonne heure; les deux premiers kilomètres se font dans la gorge; ensuite commence l'escalade de la paroi sud. Pour nous autres, à pied, la montée était rude, mais, pour les mulets chargés, le sentier était vraiment dangereux ; tantôt on grimpait sur des rochers que seules les chèvres auraient trouves commodes, tantôt on suivait des corniches étroites, surplombantes. Enfin, à force d'encourager et d'aider les bctes, nous avons atteint le sommet de la falaise 26j lépidoptérologie comparée De ce point, la montée continue, beaucoup plus douce, à travers les collines maigrement boisées de genévriers auxquels, plus haut, s'ajoutent les chênes verts. Dans l'après-midi, nous tra- versions le plateau élevé immédiatement au nord-ouest de la chaîne du Djebel-Bouss. Nous n'avions encore rencontré que de rares touffes d'Alfa et pas un seul Nelvai ne s'était montré. Sur le versant nord du Djebel Bouss, on doit pouvoir faire de bonnes chasses, au printemps, mais, au mois de septembre, il n'y vole guère que Lycaena Beilargus-Punctifera, Pararge Megaera et Pie ris Daplidice, le jour. A la dernière montée, avant d'arriver au col, j'ai pris deux Q Q d^ Euprepia Caligans-Poivelli. Au col, à près de 1.700 mètres d'altitude, soufflait un vent violent. On a une superbe vue du village de Menaa sur son mamelon entouré de verdure, dans la vallée aride, 800 mètres plus bas et de la masse imposante du Djebel-Azreg, du côté opposé de la vallée. Le versant sud-est du Djebel-Bouss ressemble beaucoup, à tous les points de vue, au Metlili et c'est ici que j'espérais retrouver Nelvai; cependant, nous n'avons pas vu le papillon en descendant les pentes raides et pierreuses parsemées de touffes d'Alfa. Il est vrai que l'heure était tardive et que le vent soufflait fort. J'aurais voulu camper sur la montagne, mais l'eau et la nourri- ture pour les mulets .manquaient et il a fallu descendre à Menaa. La descente est longue; quand nous arrivâmes aux premiers jar- dins, le soleil était déjà couché. Le Cheik Maamar, que je connaissais depuis longtemps et les deux gardes-forestiers, nous ont accueillis d'une façon très hospitalière. Notre camp a été installé dans un des jardins du Cheik. Le lendemain, 13 septembre, nous sommes remontés sur les pentes du Djebel-Bouss ; il faisait très chaud ; mais le sirocco était moins violent que la veille. J'ai été fort déçu par l'absence presque complète de papillons. De toute la journée, à part un seul exemplaire cf de Satynis Nelvai que j'ai capturé, nous n'avons vu que quelques Lycœna BeUar gns-Punctifera et de vieux Epinephele Etidora-Mauritanica. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 263 Nelva? vit sur le Djebel-Bouss; cela est prouvé par l'individu que j'ai pris sur la montagne; mais il y est rare; cependant, la localité est pareille à celle du Metlili, où le papillon est commun ; les pentes, semi-désertiques, ont presque la même orientation; l'altitude est la même, ainsi que la végétation. Il est possible que Nelvai soit plus abondant dans d'autres localités du versant sud-est de la chaîne du Djebel-Bouss. C'est dans les montagnes du territoire des Beni-Ferah, entre El-Kantara et Menaa, que M. Nelva captura les six premiers exemplaires connus, en 1906 ou en 1907; malheureusement, il ne se souvient pas de la localité exacte, ainsi cjue je l'ai déjà dit. Quittant Menaa, le 14 septembre, nous avons remonté la vallée de rOued-Abdi jusqu'à Chir; après avoir traversé les chaînes du Mahmel et du Malou, la forêt de Sgag et les plateaux élevés du Stoh, nous sommes rentrés à Lambèse, le 16. Aucun Nelvai n'a été rencontré sur cet itinéraire. Entre le 20 et le 23 septembre, Chierotti et Amar Sari ont chassé sur le Metlili. Ils y ont trouvé Nelvai en assez bon nombre; mais presque tous les sujets étaient passés. Ils m'ont rapporté à Lambèse quelques Q vivantes. Une de ces Q avait pondu trois œufs dans la boîte où elle avait été renfermée. Placées sur une touffe de Graminée recouverte d'une cloche de mousseline, les Q ont déposé une trentaine d'œufs sur les feuilles, les chaumes desséchés et la m.ousseline; ce n'est pas un bien grand nombre, mais presque toutes les O avaient pondu la plupart de leurs œufs, avant d'être capturées. Un œuf pondu le 23 septembre, a donné sa chenille le 14 octobre; d'autres chenilles, provenant d'œufs pondus le 24 et le 25 septembre, sont écloses quelques jours plus tard. L'œuf ressemble beaucoup à ceux du tj^pe et de la race Lain- bessanus, pour la forme, la structure et l'apparence. Il possède environ 38 cotes verticales, mais elles n'arrivent pas toutes, au sommet, les unes s 'arrêtant vers 1' « épaule », d'autres fusion- nant; les rides transversales sont bien nettes; la coquille est mince, semi-transparente. 264 I.ÉPIDOPTÉROLOGIf: COMPARÉE Au moment de la ponte, la couleur de l'œuf est crème; pen dant la période d'incubation, on constate des modifications sem- blables à celles que subissent les œufs d'Abdelkader et de Lani- bessamis. Les dimensions de l'œuf de Nelvai sont : hauteur 0.0019 à 0.002 ; plus grand diamètre horizontal 0.0016 à 0.0017. La comparaison d'un petit nombre d'exemplaires d'œufs des trois races me démontre que les côtes verticales et les rides transversales sont très légèrement plus fortes chez Nelvai que chez Abdelkader et Lmiibcssanns. L'œuf de Nelvai est un peu plus gros que ceux des deux autres races, mais la différence n'est que peu apparente; sa forme est ovale, très voisine de celles des deux autres, mais un peu plus atténuée vers 1' (( épaule » que chez Lambessanus et Abdelkader ^ ce qui fait que l'œuf de Nelvai a une légère tendance à être pyriforme. Pour la grosseur de l'œut, Abdelkader tient le milieu entre Nelvai et Lambessanus; pour la forme, c'est Lambessanus qui occupe la place intermédiaire; quant à l'accentuation des côtes et rides, Abdelkader et Lam- bessanus me paraissent s'équivaloir. Les différences entre les œufs des trois races ne sont, en somme, que très légères et ne me semblent pas bien stables. L'évolution de la chenille de Nelvai s'effectue dans le même intervalle de temps et à peu près dans les mêmes conditions que celle de la chenille d'Abdelkader. La chenille doit vivre, nor- malement, sur l'Alfa; en captivité, elle accepte diverses Gra- minées coriaces. L'éducation des chenilles écloses en octobre 191 3, a commencé à Lambèse. Je les élevais sur une touffe de Graminée d'une Espèce à feuilles glabres et relativement tendres, qui croît dans les forêts de l'Aurès septentrional. L'activité est franche- ment diurne, pendant le premier stade. Quelques chenilles ont mué pour la première fois, vers le 10 novembre. A mon retour à H}'ères, le 15 novembre, les chenilles ont été installées sur une touffe de la (jraminée coriace de l'Espèce qui m'avait déjà servi à nourrir Abdelkader et Lambessanus; je les laissais exposées à l'air libre, dans mon jardin. En décembre, je les voyais souvent en train de manger, dans la journée, mais je LÉPIDi^PTÉROT.OGIE COAIPARÉE 265 n'ai pas remarqué d'activité nocturne. Le mois de janvier IQ14 a été marqué par un froid exceptionnel; il a gelé fortement presque chaque nuit. Pendant au moins trois semaines, les chenilles de Nelvai n'ont montré aucune activité, restant cachées dans la touffe. La vague de froid s'est étendue à l'Algérie; une forte couche de neige recouvrait tout l'Aurès et y a persisté long- temps; sur le Metlili, les chenilles de Nelvai n'ont guère pu recommencer à se nourrir avant le 20 janvier. Février a été plu- vieux, à Hyères; à cause, probablement, de l'humidité prolongée, plusieurs Nelvai sont mortes d'une maladie lente, caractérisée par le développement d'escarres ou taches noires sur diverses parties du corps. J'ai déjà remarqué cette maladie chez les chenilles du genre Syrichthns, élevées en tube, mais je ne l'avais pas encore observée en dehors de ce genre, et chez les chenilles élevées à l'air libre. Le 27 février 19 14, belle journée après une semaine de pluie, presque toutes les chenilles survivantes se trouvaient haut sur les feuilles et en train de manger, à quatre heures de l'après-midi; une chenille était encore dans le premier stade, trois dans le deuxième stade et une dans le troisième stade. L'habitude nocturne n'a donc pas entièrement remplacé l'habitude diurne; dans le troisième stade. On remarquera que le progrès fait par les chenilles varie considérablement suivant les individus; ceci est également le cas pour Abdelkader et Lambessaniis. A partir de la troisième mue, l'habitude nocturne paraît être définitive- ment établie. Pendant le mois de mars, la mortalité a été élevée; les chenilles succombaient à la maladie mentionnée ci-dessus, ou se dessé- chaient sans raison apparente. Le nombre de chenilles ai' Abdel- kader, de Lambessauïts et de Nelvai mortes pendant l'hiver et le printemps, à Llyères, a, chaque fois, été grand; le climat y est probablement trop humide et les Graminées avec lesquelles je nourrissais les chenilles, ne paraissent pas très bien leur convenir, après les deux premiers stades; cependant, malgré les conditions adverses, j'ai réussi presque toujours, à élever 266 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE complètement un ou plusieurs individus. A la fin de mars 191 4, il ne me restait rjue deux chenilles de l^elvai; l'une a atteint le quatrième stade, le 31 mars, mais elle est morte quinze jours plus tard; l'autre, un peu moins avancée, a mué pour la troisième fois au cc>mmencement du mois d'avril et pour la quatrième fois un mois plus tard. Elle s'est très bien portée pendant la plus grande partie du dernier stade, se nourrissant d'une Graminée à feuilles dures, à Rennes ; mais, dans les derniers jours de mai, avant d'atteindre la fin du stade, elle est devenue malade; je l'ai donc soufflée. Premier stade. — Largeur de la tête 0.C013 ; longueur totale de la chenille à la fin du stade 0.008 1. Elle ressemble beaucoup à la jeune chenille d'Abdelkader. Au moment de l'éclosion la couleur du corps est paille pâle; la tête est un peu plus pâle que le corps ; les petites taches brunes sur lesquelles sont placées les soies de la tête sont pareilles à celles qu'on remarque chez Abdelkader et Lambessamts^ ainsi que les soies elles-mêmes. Les li.s^nes longitudinales sont assez nettes, d'un brun clair. La teinte verte, qui se développe peu à peu, n'est pas aussi prononcée que chez Lanibessaniis; elle me paraît correspondre à la couleur verte de la jeune chenille à.' Abdelkader ; la tête et le dernier segment ne v^erdissent pas. Il n'y a pas trace de rayures sur les épicranes. La fourche anale est courte et les tubercules et soies sont disposés comme dans les chenilles des deux autres races. La couleur verte disparaît à l'approche de la mue. Deuxième stade. — Largeur de la tête 0.0016 à 0.00175; longueur totale de la chenille à la fin du stade 0.014. La couleur fondamentale qui, au début du stade, est paille pâle, redevient verdâtre par suite de l'absorption de chlorophylle contenue dans la nourriture; la teinte verte n'est pas vive; c'est un vert un peu grisâtre; elle disparaît pendant la période de repos qui précède la mue. Les lignes ordinaires sont assez nettes quoique faiblement LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 267 marquées. Les rayures de la tête existent déjà dans ce stade, mais elles sont à peine perceptibles. Troisième stade. — Largeur de la tête 0.0025 à 0.00265 ; lon- gueur totale de la chenille à la fin du stade 0.020. La forme de la tête est la même que chez Abdelkader et Larn- bessanus; sa couleur est un jaune liège pâle, un peu plus terne que celle du corps; les rayures sont très faiblement marquées; les yeux et les pièces de la bouche sont bruns. La couleur fondamentale du corps est un liège jaunâtre pâle; les lignes me paraissent un peu plus faiblement marquées que chez Abdelkader, dans le même stade; la médiodorsale est grise; la première sous-médiane est à peine indiquée; la seconde sous-médiane, fine, peu apparente, d'un brun gris pâle, est placée à moitié distance entre les lignes médiodorsale et suprastigma- tale, sur une large rayure de couleur fondamentale, parsemée de petites lignes et atomes (visibles à la loupe) d'un brun rou- geâtre; la suprastigmatale est large, d'un gris lilas clair; elle est plus foncée et plus large sur les segments abdominaux que sur ceux du thorax; son bord supérieur est marqué d'un filet brun foncé, qui devient plus épais et plus foncé sur les segments abdo- minaux, notamment du cinquième au huitième inclusivement ; le filet brun du bord inférieur est très mince; la surface stigmatale est semblable à celle de la rayure sous-médiane; la bordure du dorsum (iia7ige) est un peu plus claire que la couleur fondamen- tale; immédiatement en dessous de la bordure, se trouve une ombre brune; le reste de la surface ventrale est de couleur liège blanchâtre, ainsi que les pattes. Les stigmates sont ronds et petits, à l'exception de ceux du prothorax et du huitième segment abdominal respectivement, qui présentent une forme ovale et sont à peu près deux fois plus grands que les autres ; tous les stigmates ont le centre brun noirâtre encerclé d'un anneau surélevé beaucoup plus pâle. Les pointes de la fourche anale sont courtes. Je n'ai remarqué aucune teinte verte dans le troisième stade. 268 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Ouiitr'ûme stade. — Largeur de la tête 0.003. Longueur totale de la chenille à la fin du stade 0.025 à 0.027. A part la taille plus grande, il n'y a pas de différence bien sensible, la robe de la chenille restant à peu près telle qu'elle était dans le stade précédent. Les rayures de la tête se distin- guent mieux, mais elles sont toujours faiblement marquées. La teinte générale du dorsum est un peu plus chaude que chez Abdelkader et Lanibessanus. Cïnquic77ie (dernier) stade. — Largeur de la tête 0.0042. L'unique exemplaire que j'ai pu examiner, dans ce stade, ressemblait tellement à certains exemplaires de la forme typique et de la forme Lambessaniis qu'il m'eût été difficile de le recon- naître au milieu d'un groupement de chenilles de ces deux races. I-es dimensions de sa tête dépassaient légèrement le maximum constaté chez Abdelkader et les ra\'ures qui l'ornaient étaient moins fortement marquées que chez les deux autres formes, mais ces caractères pouvaient être simplement individuels. La ligne médiodorsale me paraissait plus uniforme quant à la largeur; étant moins élargie sur les segments abdominaux, que dans le cas A^ Abdelkader et de Lambessanns. Enfin, les pointes de la fourche anale se trouvaient être un peu plus courtes que chez A bdelkader, qui lui-même, les a légèrement plus courtes que Lambessanus. Forme Lanibessanus, Stgr. La plus sombre des trois races connues de 5. Abdelkader habite le nord du massif de l'Aurès, les montagnes de Bellezma, à l'ouest et au sud-ouest de Batna et s'étend, à l'est, au moins jusqu'aux environs de Tebessa. Toutes ces localités se trouvent dans la province de Constantine, dans la zone du partage des eaux du bassin Saharien et des Hauts-Plateaux. Je crois que si on explorait les montagnes de Bou-Taleb et la chaîne au nord de la plaine du Hodna, on y retrouverait Lam- LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 269 bessaniis; actuellement, la faune de cette région, en ce qui concerne la I épidoptérologie, paraît être à peu près inconnue. Les mœurs de l'imago ne diffèrent pas beaucoup de celles du type et de la race Nelvai. Le cf vole sur les pentes des collines et montagnes recouvertes de Diss et le plus souvent boisées de chênes verts et genévriers; il se pose par terre entre les touffes et ne se laisse pas facilement approcher. La Q ne vole que peu, avant de s'être débarrassée de la première partie de ses œufs ; ensuite elle entreprend des vols prolongés et, dans bien des cas, s'éloigne beaucoup du lieu d'éclosion. Le (S aussi, est enclin à voyager, lorsque sa première fraîcheur est passée. Lauibessaniis, vole à une époque de l'année à laquelle les fleurs sont abondantes et variées; il montre une préférence très marquée pour les grandes fleurs jaunes de la Centaurea Balansœ, Boiss. Reut., plante acaule qui croît assez communément sur les sentiers forestiers et dans les champs et prairies incultes de l'Aurès ; on ne le voit que très rarement posé sur les fleurs autres que celle-ci. Je n'ai jamais rencontré Lambessanus en grande abondance; il n'est, cependant, pas rare sur les coteaux de la vallée de l'Oued- Doufana, à 10-12 kilomètres au sud-ouest de Lambèse et au Djebel-Tuggurt (Pic des Cèdres), au sud-ouest de Batna. On le trouve également, mais plus rarement, à Titouguelt et sur le Djebel-Ichali, sur les collines autour de Medina, près du Djebel-Chelia et à Khenchela. Les exemplaires passés, que j'ai vus et quelquefois pris à Lambèse même, venaient, sans doute, de loin. A Khenchela, en 1908, nous avons rencontré un premier exem- plaire, le 23 mai, haut sur le Djebel-Ras-Serdoun (*); le 25 mai, un cf très frais a été pris dans les environs de la Fontaine- Chaude; deux Q furent capturées, le 2 juin, à l'est du village de Khenchela, dans une prairie verte, un peu marécageuse; elles descendaient, évidemment, d'une colline recouverte de Diss, qui (*) Nous sommes arrivés à Khenchela le 20 mai 1908; sans doute Lambessanus y volait déjà depuis quelque temps. 2/0 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE se trouvait à proximité et sur laquelle nous avons pris un cf, le même jour. Quelques Q prises ensuite, sur cette colline et au Djebel- Djahfa, ont été conservées vivantes pour la ponte. Il est généralement supposé que Lainbessanus a deux généra- tions dans l'année, l'une au printemps, l'autre à l'époque d'éclo- sion d^Abdelkader de la Province d'Oran. Mon opinion ferme, formée à la suite de l'élevage de la chenille, trois fois répété et de mes recherches dans l'Aurès pen- dant les étés de 191 2 et 1913, est que le papillon n'a qu'une seule et unique génération par an. Les recherches de M. Nelva de Batna, en ce qui concerne une éclosion d'été, confirment le résultat des miennes: lui, non plus, n'ayant jamais vu voler Lambessaims en été. Chierotti et moi-même, nous parcourions, presque journelle- ment, en 191 2 et en 191 3, pendant les mois de juillet, août, septembre et octobre, des localités où le papillon vole en mai et juin, sans jamais rencontrer un seul exemplaire. Les chenilles élevées d'œufs pondus en juin, ont invariable- ment hiverné, et ne se sont chrysalidées que vers la fin de l'hiver ou au commencement du printemps. L'éclosion précoce est un des caractères les plus remarquables de la race Lanibessamts; elle commence dans les premiers jours de mai et se prolonge pendant un mois environ, mais le nombre de sujets très frais que l'on rencontre, après le 15 mai, n'est pas grand. T-es localités où j'ai trouvé Lambessaniis sont situées à des altitudes variant entre i 150 et 1.800 mètres; ses meilleures loca- lités se trouvent entre 1.400 et 1.700 mètres. Voici ce que j'ai noté en 1908- 1909 à propos de l'élevage de la chenille : (( Trois Ç) de Lambessanns emprisonnées sur une touffe d'Alfa, à Khenchela, ont pondu des œufs dans les matinées du 12, du 13 et du 14 juin; les chenilles n'étaient pas encore écloses, le 24 juin; j'étais alors malade et fus obligé d'aller à Constantine; à LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 271 mon retour à Khenchela, le 30 juin, tous les œufs étaient vides et les jeunes chenilles avaient commencé à manger ; quelques-unes ont même atteint le second stade, le 2 juillet. Pendant la troisième semaine de juillet, j'ai quitté Khenchela pour rentrer à Hyères, emportant avec moi, dans une boite métallique, les chenilles, toutes dans le second stade. J'ai été obligé de garder les che- nilles dans la boîte métallique, jusqu'à la fin du mois d'août et de les nourrir avec des feuilles coupées de Graminée. Etant alors à Vcrnet-les-Bains, j'ai pu placer les cinq qui survivaient, sur une touffe de Graminée coriace, plantée dans un pot. Elles étaient, alors, toutes dans le troisième stade. Les chenilles se trouvaient très bien sous ces nouvelles condi- tions, exposées à l'air libre et ayant une nourriture fraîche et abondante; je les remarquais souvent en train de manger, le soir. A la fin d'octobre, cependant, époque à laquelle il a fallu retourner à Hyères, il ne me restait plus que deux chenilles, les trois autres étant mortes d'une maladie contractée, probable- ment, pendant la période passée en captivité dans la boîte métal- lique et favorisée par le temps très humide de septembre et octobre. Les deux chenilles survivantes se trouvaient, alors, dans le quatrième stade; une d'elles étant près de la fin de ce stade. Arrivé à Hyères, je les ai placées de nouveau sur une plante de la même Espèce, rapportée du Vernet; la chenille la plus avancée n'a pas tardé a attenidre le cinquième (dernier) stade, mais l'autre n'a passé la quatrième mue qu'en décembre. Pendant l'hiver, leur progrès fut lent et elles ne montrèrent que peu d'acti- vité; quand le temps était froid je ne les voyais pas monter sur les feuilles, mais elles profitaient des périodes plus douces pour manger, le soir. J'ai constaté, le 16 mars 1909, qu'une des che- nilles avait creusé dans la terre au pied de la touffe, quelques jours auparavant; elle s'était construite une cellule dans laquelle elle se préparait à la métamorphose. Le couvercle de la cellule, composé de parcelles de terre liées avec de la soie très fine, était au niveau du sol; il possédait des (]ualités élastiques ; c'est-à-dire que le couvercle reprenait sa 2/2 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE position normale après avoir été légèrement déprimé avec le doigt. Le couvercle se confondait si bien avec la surface envi- ronnante, qu'on n'eût jamais soupçonné la présence de la cellule à l'endroit où elle se trouvait. A cette époque (i6 mars), la seconde chenille n'était pas loin d'avoir atteint son complet développement. En examinant la touffe, le 7 avril, j'ai trouvé qu'elle venait de se chrysalider au milieu de la touffe, entre les bases des feuilles et chaumes; la chrysalide se trouvait dans une position presque verticale, et s'était complètement débarrassée de la peau larvaire. Dans ce cas, la chenille n'avait pas creusé dans la terre, mais elle avait réuni autour d'elle quelques débris de feuilles, etc., en les liant ensemble avec une soie fine, peu résistante, de façon à ébaucher un cocon des plus rud inventaires. Quant à la première chenille, en ouvrant la cellule par elle formée, j'ai trouvé, le 20 mars, qu'elle n'avait pas réussi sa méta- morphose; la peau larvaire ne s'était retirée qu'à moitié, elle enveloppait encore l'abdomen, sauf sur une partie du dorsum; les ptérothèques n'étaient pas en place et il semblait évident que la chrysalide ne pourrait vivre longtemps. La cellule, de dimensions amples, par rapport à la chrysalide, avait été creusée dans de la terre plutôt dure et compacte; ses côtés étaient assez lisses, comme si la chenille les avait battus; la soie qui rentrait dans ia composition du couvercle était des plus fines et très peu résistante. J'avais observé, pendant une journée chaude, à la fin de mars, la seconde chenille errant sur le sol ; elle présentait une appa- rence fanée, et sur sa tête considérablement assombrie, on ne distinguait plus les rayures. Elle cherchait évidemment un endroit pour se chrysalider, et si elle s'est finalement décidée à se placer dans la touffe, c'est peut-être parce que la terre était alors trop dure pour être travaillée. Le cas doit se produire quel- quefois, dans la libre nature. L'éclosion du papillon, un cf qui ne s'est, malheureusement, pas bien développé, a eu lieu le 14 mai, dans la matinée. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 273 Les œufs pondus par une Q de Lambessanus, le 29 et le 30 mai 191 2, ont donné leurs chenilles entre le 12 et le 16 juin. Laissées dehors, sur une touffe de Graminée, celles-ci ont pro- gressé régulièrement, sinon très rapidement, pendant l'été; le 20 juillet, elles se trouvaient, toutes, dans le troisième stade; une première chenille a atteint le quatrième stade, le 2 août et toutes étaient dans ce stade, le 15 septembre. A partir de la fin du troisième stade, le développement s'est ralenti, et le quatrième stade a duré bien plus longtemps que les trois stades précédents respectivement. Au commencement d'octobre, toutes les feuilles de la touffe étant mangées, j'ai installé les chenilles sur une nouvelle plante, d'une Espèce qui me paraissait très voisine de la première; je ne les ai revues qu'à mon retour d'une tournée dans l'Aurès, le 19 octobre. J'ai constaté, alors, à mon grand regret, que toutes les chenilles, sauf deux, étaient mortes; la nouvelle Graminée que je leur avais donnée ne leur convenait point, et elles ne l'avaient pas touchée. Les deux chenilles survi- vantes ont vite repris sur une autre plante; la première a atteint le cinquième (dernier) stade à la fin d'octobre; la seconde n'y est arrivée que le i^'" décembre, après une longue période de pré- paration. A partir du 6 décembre, elles ont vécu sur une Graminée à feuilles coriaces, dans mon jardin, à Hyères. Presque chaque soir, je les voyais monter sur la touffe et manger, très lentement, les feuilles les plus jeunes et vertes; il fallait une température très basse pour les contraindre à rester immobiles, la nuit. A la fin du mois de février 191 3, les deux chenilles étaient à terme; la première a disparu en terre à cette époque et la deuxième s'est enterrée une quinzaine de jours plus tard. Le climat d'Hyères, moins rigoureux que celui de Lambèse, a dû activer un peu, la croissance des chenilles, pendant l'hiver; j'estime que, normale- ment, la chrysalidation a lieu vers la fin de mars. Avant de repartir pour l'Algérie, j'ai déterré les chrysalides; l'une était morte et desséchée, l'autre parfaitement saine; en ouvrant sa cellule j'ai remarqué que cette chrysalide était recouverte de 18 2/4 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE gouttelettes d'eau provenant de la condensation de l'humidité du sol. L'éclosion du papillon a eu lieu le 20 mai. En 191 3, j'ai obtenu, pour la troisième fois, des œufs de Lam- bessanus. Une première Q, capturée au Col de Doufana, a pondu sur les chaumes et les feuilles et sur la moussehne qui enveloppait une touffe de Graminée, pendant les journées du 10, du 1 1 et du 12 juin et une seconde Q a déposé des œufs, les 13, 14 et 15 juin. Elles n'étaient pas en état très frais et il est certain qu'elles avaient déjà pondu une bonne partie de leurs œufs avant d'être capturées; ceci explique, sans doute, le fait que plusieurs des œufs, pondus ensuite, sont morts avant la formation de la chenille. Les chenilles ont prospéré, pendant l'été, sur une Graminée de montagne, dont j'ai renouvelé la provision plusieurs fois, ayant eu soin d'empoter un certain nombre de touffes avant l'arrivée de la sécheresse. La provision se trouvant épuisée, au mois de septembre et les plantes étant desséchées sur les montagnes, j'ai donné aux chenilles une Espèce à feuilles assez raides, qui poussait le long des seguias (canaux d'irrigation); elles se sont contentées de cette plante, mais elles ont refusé absolument de manger des feuilles d'orge, que je leur ai offertes. Le développement n'a pas progressé avec la même rapidité chez tous les individus; le 31 août j'ai noté qu'une des chenilles venait d'atteindre, depuis peu, le dernier stade; à cette époque, la majorité était dans le quatrième stade, que quelques' chenilles n'avaient pas encore atteint. Elles ont continué à grandir lentement pendant l'automne et, à mon retour à Hyères, vers le 20 novembre, onze chenilles sur un total de dix-huit, se trouvaient plus ou moins avancées dans le dernier stade; les sept autres étaient encore dans le quatrième stade. A la fin de décembre il ne me restait plus que onze chenilles; j'en avais soufflé ciuatre et trois sont mortes. Plusieurs chenilles ont succombé en janvier; ce mois a été exceptionnellement froid en 1914, mais je n'attribue pas leur mort au froid; elles LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 275 mouraient, après une longue période de jeun, en se desséchant graduellement. En examinant la touffe, le 20 février 1914, je n'ai pu trouver que trois chenilles vivantes, dont deux clans le cin- quième stade et une à la fin du quatrième stade ; elles paraissaient très saines, alors, et quelques jours plus tard, les deux chenilles plus avancées se sont mises à errer comme elles ont l'habitude de le faire avant de s'enterrer; voyant qu'elles ne se décidaient pas à creuser leurs cellules, j'ai désagrégé les masses de terre durcie de la surface, mais, malgré cela, elles ont fini par se dessécher dans la touffe. La dernière chenille a atteint son complet développement à la fin du mois de mars; elle n'a pas réussi à se chrysalider. Il est probable que le progrès fait, pendant l'été par les che- nilles élevées en captivité sur des plantes bien arrosées, est plus rapide que dans la libre Nature ; en dépit de cette condition favo- rable au développement accéléré, aucune chenille n'est jamais arrivée à terme avant l'hiver. L'œuf de Lambessanus ressemble à ceux d'Abdelkader et de Nelvai; en décrivant l'œuf de Nelvai, j'ai énuméré les légères différences constatées entre les œufs des trois races. Chez quelques individus de Lavibessanus et d' Abdelkader, l'aire micropylaire est surélevée, en forme de petit mamelon avec dépression cen- trale, sur les pentes duquel viennent mourir les extrémités des côtes. Les individus qui présentent ce caractère ne sont pas nom- breux. Je ne l'ai pas encore observé chez Nelvai, mais le nombre d'œufs de cette dernière race, que j'ai eu occasion d'examiner, est trop limité pour que je puisse affirmer cju'il ne se présente jamais. Dans le premier stade, la chenille de Lambessanus ne diffère pas sensiblement de celle d'Abdelkader; sa tête est grande, arrondie, de couleur paille pâle; son corps, d'abord de couleur paille pâle, rayé de lignes brun chocolat clair, ne tarde pas à prendre la teinte verte. Le corps m'a paru d'un vert plus intense, dans le deuxième 276 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE stade, que chez les deux autres races; les rayures de la tête, qui se révèlent dans ce stade, sont encore plus faiblement indiquées chez Lambessanus que chez Abdelkader et Nclva'i; on ne les distingue même pas dans certains individus. Dans le troisième stade, la teinte verte du corps persiste encore; elle est moins intense que dans les stades précédents, mais sa présence, dans ce stade, établit un point de différence (que j'estime peu important d'ailleurs) entre Lanibessaniis et les races A bdelkader et Nelvai. La larg-eur de la tête varie, dans le troisième stade, de 0.002 1 à 0.0023 et la longueur totale de la chenille, à la fin du stade, est de 0.018. Qîialrième stade. - — Largeur de la tête 0.003 ; longueur totale de la chenille à la fin du stade 0.026. Il n'y a pas de différence appréciable entre la chenille et celle d' Abdelkader, si ce n'est que les rayures de la tête et les lignes du corps sont, en général, un peu plus faiblement marquées, chez Lambessaîius. 11 n'y a plus aucune teinte verte. Cinquième stade. — Largeur de la tête 0.004 ^ 0.0045. J'ai cherché, sans grand succès, à découvrir quelques caractères stables, permettant de distinguer Lambessanus à.' Abdelkader dans le dernier stade; la couleur fondamentale est la même chez les deux formes; la disposition et la couleur des lignes du corps sont identiques, mais la ligne médiodorsale est légèrement plus large chez tous les exemplaires de Lambessanus examinés et s'amincit un peu moins vers son point terminal postérieur, que clans le cas à' Abdelkader. Les stigmates, d'un brun rouge chez Abdelkader, sont d'un brun noirâtre chez Lambessanus ; ils ont une couleur intermédiaire dans le seul exemplaire de Nelvai examiné. Les pointes de la fourche sont très légèrement plus longues chez Lambessanus. Dans la plupart des sujets comparés, la tête se trouvait un peu plus aplatie sur le front chez Abdelkader que chez Lam- bessanus, mais ce caractère n'est pas stable, puisque la différence LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE n'existe pas chez tous les exemplaires. Enfin, à l'époque où la chenille, ayant atteint son complet développement, va faire ses préparatifs pour la métamorphose, la tête et les premiers seg- ments grisonnent et se foncent davantage chez Lambessanits. Chrysalide. — La ressemblance qui existe entre les chrysa- lides des Espèces du Genre Satyrus est même plus grande que celle que l'on remarque chez les chenilles. La chrysalide de 5. Abdelkader ne diffère guère, pour la forme et la coloration, de celles de ses congénères. Elle me paraît seulement un peu plus élancée que la plupart des chrysalides du Genre. Voici une description de la chrysalide de la race Lanibessanus: Surface unie, sans aspérités ni angles aigus ; le profil dorsal montre le thorax proéminent et arrondi, suivi d'un rétrécisse- ment ou (( taille » bien accentué, auquel succède la courbe régu- lière des segments abdominaux; les yeux sont grands et assez saillants et les ptérothèques amples; les gaines des pattes et de la spiritrompe sont unies, soudées ensemble et ne présentent pas de saillie; l'extrémité des maxillae (spiritrompe) dépasse légèrement les apices des ptérothèques, en s'élargissant un peu; la gaine de l'antenne est marquée régulièrement de petites dépressions transversales; son extrémité n'atteint pas l'apex de la ptérothèque, dont elle se trouve éloignée de deux millimètres. Les segments abdominaux sont rigides et la chrysalide ne paraît pas capable de faire le moindre mouvement. Les stigmates abdo- minaux ont la forme d'un grain de café vu du côté du sillon; ils se trouvent placés chacun sur un petit mamelon entouré d'une très faible dépression; leur couleur est d'un brun très foncé; le stigmate prothoracique se présente sous forme d'une excroissance allongée, d'un brun très foncé; le crémaster, ou pointe anale, est court, large et émoussé, assez fortement ridé; il est d'un brun noirâtre; vu du côté ventral, il ressemble, pour la forme, à la lèvre supérieure de la bouche d'un poisson. La couleur de la chrysalide est acajou rougeâtre clair, plus 278 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE foncée sur le dorsum, plus pâle et un peu jaunâtre du côté ven- tral; les yeux sont plus foncés que les autres parties de la chry- salide. Au microscope, avec un agrandissement de 25 diamètres, on constate que la surface, qui paraissait parfaitement unie, à l'œil nu, est légèrement ridée et recouverte de fines granulations; des rides longitudinales se remarquent sur la partie ventrale des segments abdominaux. Sur les segments abdominaux 4, 5 et 6, se voient les cicatrices laissées par les pattes membraneuses de la chenille. A mesure que la maturation de l'imago avance, les yeux se foncent davantage et les ptérothèques deviennent plus opaques; environ deux jours avant l'éciosion, la chrysalide noircit com- plètement. L'enveloppe chitineuse est très mince et l'éciosion du papillon l'endommage sérieusement. Je donne, ci-dessous, les dimensions principales d'une des chrysalides examinées : Longueur totale 0.017; du sommet de la tête aux apices des ptérothèques 0.014; des apices des ptérothèques à l'extrémité du crémaster 0.004; profondeur maximum du thorax 0.007; pro- fondeur à la (( taille » o.ocôi ; profondeur au deuxième segment abdominal 0.0085 ; profondeur au troisième segment abdominal 0.008 ; largeur à la hauteur des yeux 0.004 ; largeur à la hauteur des épaules 0.0065 ; largeur maximum à travers les ptérothèques 0.008. Considérations générales sur les races de S. ABDELKADER et les causes possibles de sa variation régionale. Il est curieux de constater que, dans le même massif mon- tagneux de l'Est Algérien, se trouvent les deux races d'Abdel- kader les plus différentes l'une de l'autre. Il est vrai que l'une de ces races, celle qui s'éloigne du type par un noircissement plus complet des ailes, n'habite, à ma connaissance, que les parties LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 279 nord de ce massif de l'Aurès et les régions semblables immédia- tement à l'ouest et à l'est, tandis que l'autre race, Nelvai, si remarquable par le blanchissement de l'aire apicale de l'aile antérieure, se trouve cantonnée dans les montagnes, plus arides et plus chaudes, du sud-ouest. Je n'ai jamais rencontré, dans l'Aurès, une forme intermédiaire entre ces deux races extrêmes, et leur croisement est impossible pour deux raisons; d'abord, parce que les époques de leur éclosion sont très éloignées l'une de l'autre, Lainbessanus paraissant depuis les premiers jours de mai jusqu'en juin, Nelvai en août et septembre; ensuite, parce qu'elles ne se trouvent pas dans les mêmes localités ; ce dernier fait interdit l'hypothèse d'après laquelle Nelvai représenterait la seconde génération de Lambessanns ; les résultats de mes observations et les élevages faits tendent à prouver, d'ailleurs, que LambessannSy Nelvai et Abdelkader n'ont qu'une seule géné- ration dans l'année. En admettant que Lambessanus et Nelvai soient réellement deux formes à.^ Abdelkader et non pas deux Espèces distinctes — et je n'ai pas connaissance d'un caractère suffisamment tranché pour justifier leur séparation spécifique (*) — on se demande comment il se fait que l'Espèce se trouve représentée par deux races si différentes dans le même groupe de montagnes. La variation pourrait bien être due à une différence de climat; la région habitée par Lambessanus est plus élevée, plus froide et moins sèche que celle habitée par Nelvai et il est admissible que ces conditions peuvent expliquer l'aspect plus sombre et le plus grand développement des taches bleu lilas chez Lambessa- nus. On pourrait supposer que ces mêmes conditions retarde- raient, plutôt qu'elles n'avanceraient, l'éclosion de Lambessanus; ce n'est pas le cas, cependant. D'après ce que j'ai pu constater chez Abdelkader type, qui vit sous un climat moins humide et (*) L'étude des caractères morphologiques de Lambessanus, (^'Abdelkader et de Nelvai, qu'a bien voulu entreprendre M. Le Cerf, nous fournira certai- nement d'intéressants renseignements sur ce point. 2S0 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE moins froid que celui du nord de l'Aurès, la maturation de l'imago semblerait être retardée par la chaleur et peut-être aussi par la sécheresse; on a vu que l'état de chrysalide, chez le type, dure près de trois mois (Géryville. Sebdou) ; formée vers la fin du mois de mai, la chrysalide estive pendant les plus grandes chaleurs et ne donne son papillon que dans la dernière quinzaine d'août ou au commencement de septembre (l'éclosion commence une quinzaine de jours plus tôt à Aflou, où le climat est déjà un peu moins chaud et sec qu'à Géryville et à Sebdou). S. Abdel- kader n'est, du reste, pas la seule Espèce du genre qui subit l'influence de la chaleur; 5. Powellï et S. Hansii estivent aussi, à l'état de chrysalide, dans à peu près les mêmes conditions. Sur les plateaux du Sud oranais, les très fortes chaleurs commencent justement vers l'époque de la chrysalidation d'Abdelkader et ceci est également le cas pour Nelvai, dans le sud de l'Aurès. Dans les montagnes du nord de l'Aurès, habitées par Lambessa- nus, les grandes chaleurs et la sécheresse se font sentir un peu plus tard ; la chrysalide de cette race, étant formée beaucoup plus tôt que celles d'Abdelkader et de Nelvai, n'est, donc, nulle- ment exposée à l'influence de l'été, avant le commencement de la maturation de l'imago et, par conséquent, l'évolution n'est pas retardée par ce facteur, le papillon émergeant au bout d'un mois et demi environ. Il serait intéressant de mettre cette théorie à l'épreuve, et d'essayer de retarder l'éclosion de.s chrysalides de Latnbessanus, en les soumettant, dès leur formation, à une chaleur et à une sécheresse comparables à celles de l'été El-Kantarien; inverse- ment, il faudrait tenter de hâter l'éclosion des chrysalides de Nelvai et d' Abdelkader type par moyen d'une température modérée et d'une atmosphère humide. Pour obtenir un résultat concluant, il serait peut-être nécessaire de traiter de cette façon plusieurs générations consécutives, puisqu'on aurait à combattre une tendance héréditaire, dans chacune des races. Il y a encore une explication possible de la plus courte durée de l'état de chrysalide chez Lambessanus que chez Abdelkader LÉPIDOPTÊROLOGIE COMPARÉE 28 I et Nelvai; elle m'a été suggérée par la lecture d'une notice écrite par le Dr. Paul Denso, et parue dans le Bulletin de la Société Lépidoptérologique de Genève^ en juin 1908 et intitulée (( De la fertilité des Sphirigides Européens dans la deuxième généra- tion ». On sait que, normalement, l'éclosion d'un papillon n'a lieu qu'après la maturation des cellules sexuelles; je reproduis le passage suivant de la notice du D'' Denso : (( Nous savons que les cellules sexuelles ne sont pas soumises à l'histolyse. Elles ne sont pas altérées par la métamorphose ; au contraire, leur déve- loppement s'opère régulièrement à partir des premiers commen- cements de la vie larvaire jusqu'à l'achèvement de la matura- tion. Il serait très arbitraire de supposer que, dans certains cas, et à partir de la chrysaiiddtion, puisse apparaître un développe- ment subitement accéléré (*) ». (*) Les remarques du D"" Denso, citées ci-dessus, ont trait à la question des chrysalides à maturation lente et de celles à maturation rapide. On sait que, chez plusieurs Espèces ayant deux générations dans l'année, la seconde génération n'est que partielle, une fraction du nombre total des chrysalides issues de la première génération étant composée d'individus destinés à hiverner, l'autre fraction étant formée par les chrysalides possédant la tendance au développement rapide. Il paraît impossible en tout cas chez un bon nombre de ces Espèces, d'accé- lérer la maturation des cellules sexuelles des chrysalides destinées à hiverner, par moyen d'une température élevée; mais les expériences de MM. Standfuss et Denso, faites avec les chrysalides de certains Sphingides, démontrent qu'on peut parfois accélérer la métamorphose de l'insecte, de sorte que le papillon éclose plus tôt; dans ces cas, les cellules sexuelles « ne sont pas encore mûres au moment de l'éclosion, ou bien elles sont gravement endommagées ; ou bien, enfin, elles sont détruites. » Chez bon nombre de Lépidoptères, la chaleur retarde la maturation de l'imago (et peut-être, aussi, celle des cellules sexuelles ?) ; ainsi, j'ai remarqué qu'en prolongeant artificiellement la chaleur estivale pour les chrysalides des Noctuides et Géometrides qui doivent éclore en automne, on retarde l'éclosion, à condition que la maturation de l'imago n'ait déjà dépassé un certain point avant le com- mencement du traitement artificiel. Dans la libre Nature, on constate, également, que les Espèces à éclosion unique, automnale, paraissent plus tard dans les régions plus chaudes de leur répartition que dans les parties plus froides. Chez les Espèces à chrysalides invariablement hivernantes, si les chrysalides sont maintenues, pendant toute la saison froide, dans une température élevée, elles donnent le papillon plus tard que d'habitude, au printemps; souvent, même, le papillon n'éclôt qu'au bout de deux ou plusieurs années. Il semble que, chez les chrysalides non pourvues de la tendance au développement rapide, il y ait un point déterminé dans la maturation de l'imago, au delà duquel la chaleur peut, dans la plupart des cas, accélérer l'éclosion, mais en deçà duquel elle exerce une influence ralentissante. 282 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Or, la durée de l'état de larve- est d'environ huit mois et demi chez Abdelkader type et ehez Nelvai; elle est de neuf mois et demi chez Lambessaniis; par exemple, une chenille de S. Abdel- kader, éclose le 15 septembre, se chrysalide normalement vers le 30 mai; une chenille de Lambessamis, éclose le 15 juin, se chrysa- lide vers le 30 mars. Donc, en admettant que les cellules sexuelles se développent avec la même vitesse chez les trois formes, elles se trouveraient, au moment de la chrysalidation, plus avancées d'un mois chez Lavibessanus que chez Abdelkader et Nelvai. L'état de chrysalide, pour ces deux dernières races, devrait durer, par conséquent, un mois de plus que pour Lam- bessanus et, en effet, c'est à peu près exactement ce qui se produit. Cette hypothèse, tout en fournissant une raison plausible pour la plus longue durée de l'état de chrysalide, chez Abdelkader et Nelvai, ne nous éclaire pas sur les causes originelles de la différence dans l'époque d'éclosion. Je crois qu'il faut reconnaître l'importance du rôle qu'a pu jouer le climat. Il est permis de supposer que, jadis, lorsque le climat de l'Algérie était moins sec et plus régulier qu'aujourd'hui, l'éclosion de l'Espèce se produisait partout au printemps, ainsi que cela se passe actuelle- ment pour Lanibessamis. Ensuite, dans les régions plus parti- culièrement affectées par les modifications progressives du climat, la maturation de l'imago aurait été, d'abord irrégulière- ment, retardée par l'arrivée, de plus en plus brusque et précoce, des chaleurs et de Ja sécheresse. Pendant cette période, l'Espèce avait, probablement, deux époques d'éclosion (non pas deux générations), sur les Plateaux Oranais et dans le sud de l'Aurès, à savoir : une éclosion partielle vers la fin du printemps ou au début de l'été et une seconde éclosion — fournie par les chrysa- lides retardées — au courant de l'été; l'apparition d'un exem- plaire de 5. Abdelkader, à Aflou, le 23 juin 191 1, est même un indice que cet état de choses a existé Les chenilles procréées par les papillons de l'éclosion tardive se chrysalidant plus tard, au printemps, que celles issues de parents de l'éclosion normale — et avec les cellules sexuelles en LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 283 état moins avancé, probablement, que chez ces dernières, au moment de la métamorphose ■ — leurs chrysalides se seraient trouvées plus exposées à subir l'infiuence ralentissante de la chaleur, et l'éclosion tardive étant mieux adaptée aux nouvelles conditions climatériques, elle aurait, à la longue, entièrement remplacé l'éclosion printanière, dans ces régions. Il est, je crois, généralement admis que le climat Algérien a subi un changement depuis les commencements historiques de la Barbarie. A l'époque de l'occupation Romaine, le pays était évidemment moins aride et moins sec qu'aujourd'hui. Mais, si on ne veut pas admettre qu'un changement dans le climat du pays ait déterminé la variation de l'époque d'éclosion de S. Abdel- kader, nous pouvons, alors, supposer que l'Espèce, restreinte d'abord aux régions montagneuses les plus élevées, s'est peu à peu répandue sur les plateaux et dans les montagnes moins élevées, où elle aurait changé ses habitudes pour mieux s'adapter aux conditions nouvelles pour elle, ne conservant l'éclosion printanière que dans le nord de l'Aurès, région la plus élevée de l'Atlas Algérien. Quoi qu'il en soit, les modifications ont dû se produire de la même manière. La race du Grand Atlas Marocain éclôt plus tard que Lam- bessamis, mais plus tôt que Nelvai et Abdel kader Oranais. Je ne la connais pas et ne puis dire si elle diffère des races Algériennes par d'autres caractères. Nous avons, en France, deux Satyrus dont les relations sont assez semblables à celles qui existent entre Lambessanus et Abdelkader. Ces deux Satyrus : Cordida et Actœa, sont certaine- ment très distincts à.'' Abdelkader ; mais sont-ils spécifiquement distincts l'un de l'autre? Les Entomologistes se trouvent divisés sur ce point et, en vérité, la question est difficile. On ne possède pas encore, je crois, une preuve concluante pour leur séparation spécifique. Leurs œufs, il est vrai, montrent des différences qui semblent dépasser les limites d'une simple variation, mais leurs chenilles, que j'ai élevées, côte à côte, ne présentent que de bien légères différences, à part celle de la taille; les papillons, eux- 2S4 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE mêmes, ne diffèrent pas beaucoup plus, l'un de l'autre, que J.ambessaniis ne diffère d' Abdel kader et surtout de Neivai. L'opinion de M. Charles Oberthùr penche plutôt vers la réunion spécifique que vers la séparation en deux Espèces de Cordula et Actaea {Lépidoplérologie Comparée, vol. III, p. 280) et, en effet, il paraît assez raisonnable de considérer Actaea comme le représentant méridional et de faibles altitudes, d'une Espèce dont Cord.ida serait la race Alpine II existe même, ainsi que le fait connaître M. Charles Oberthiir, une forme de mon- tagne qui est plus petite que Cordjila et qui semble faire le passage à Actaea. Cette forme (Actae'ma Obthr.) a été prise dans le Département des Hautes-Alpes et en Italie méridionale. Le 7 août 1901, j'ai capturé quelques exemplaires, appartenant sans doute à la forme A^ctaeina, sur une pente calcaire raide, au-dessus de Font Gaillarde (Basses-Alpes), à droite et à gauche de la route de Thorame-Haute à Annot; sur l'autre versant (est) de la montagne, se trouvait, à la même date, le vrai Cordîda, mais en état passé. La forme Actaeina paraît être assez localisée; elle ne fait pas partout (( tampon » entre les deux races (ou Espèces) ; dans cer- taines localités des Basses- Alpes et des Alpes-Maritimes où Cordula et Actaea se trouvent à leurs limites respectives, on les rencontre tous deux ensemble, ou bien, à peu de distance l'un de l'autre; à Digne, ils volent sur le même terrain; à Puget-Thé- niers, Actaea se trouve sur les pentes chaudes de la rive gauche du Var, tandis cjue Cordida vit sur le côté opposé, plus humide et moins chaud ; mais, dans ces localités, l'époque d'éclosion n'est pas la même pour les deux races (?), Cordida commençant à éclore une qumzaine de jours plus tôt qu' Actaea. M. Wheeler (The Bittterfiies of Swiizerland, etc., p. 109) estime que le fait que Cordula éclôt plus tôt qn' Actaea, dans une localité où on prend les deux, est une preuve de leur distinction spécifique. Cet argument ne manque pas de poids. En dehors de ces quelques localités au sud des Alpes, Cordula et Actaea n'existent pas ensemble; Actaea habite, seul, les col- LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 285 lines calcaires, arides et chaudes, du Midi, jusque dans le voisi- nage de la Méditerranée; Cordula se tient dans les vallées, moins arides, des Alpes, remontant jusqu'en Suisse. On notera le parallèle entre Cordula- Actaea et Larnhessanins-Abdelkadcr^ Cordula étant pour Actaea ce qu'est Lanibessanus pour Abdcl- kader, non seulement par la nature de son habitat, mais aussi par son éclosion plus précoce. Il est vrai que l'espace de temps qui sépare les époques d 'éclosion est moins considérable dans le cas de Cordida et Actaea que dans celui de Lambessanus et Abdelkader, cependant il est appréciable. Il y a lieu de supposer que des facteurs similaires ont agi dans les deux cas, pour l'éta- blissement des différences dans l'époque d'éclosion. M. Meade Waldo signale la présence de Satyrus Actaea dans le Grand Atlas Marocain. Il l'a trouvé commun à des altitudes entre 8.000 et 10.000 pieds, notamment sur le Tsauritz Entsa- gauz, le 6 juillet 1901, et sur le Tizi Gourza. Sur cette dernière montagne, M. Meade Waldo a pris, également, Satyrus Abdel- kader, le II juillet 1901. A ces dates, S. Actaea était frais (<( was common and only just on the wing »). Harold POWELL. * * * II me plaît toujours de lire et de relire les impressions et les souvenirs d'un amant passionné de la Montagne qui fut non seulement le plus convaincu des pyrénéistes, mais encore un délicieux écrivain. Il s'agit du Comte Henry Russell. Hélas! il n'est plus; mais sa mémoire est restée sympathique à tous ceux qui l'ont connu; son nom sera toujours prononcé avec respect ; la fidèle repro- duction de son image, coulée dans le bronze, et fixée sur un rocher auprès de Gavarnie, — pays qu'il aimait avec prédilec- tion, — rappellera aux générations suivantes la fine noblesse de ses traits et la distinction de sa personne. Un jour, me trouvant moi-même à Gavarnie et ouvrant un ouvrage publié par les cinq frères Cadier, intitulé : An pays des Isards, j'y trouvai une préface signée par le Comte Henry Russell. Les cinq frères Cadier sont jeunes, ils sont montagnards et ils jouissent de la plénitude de leurs forces auxquelles s'ajoute une audacieuse témérité. Le Comte Russell, au contraire, commençait à sentir le poids de la vieillesse; l'âge avait graduel- lement ralenti ses pas et rétréci ses ambitions alpestres. Il ne craignait du reste pas de regarder en arrière et, comparant le présent au passé, il se rendait compte de la décadence à laquelle l'accumulation des années l'avait peu à peu réduit. Cependant, dans un sourire qui, pour être un peu mélanco- lique, n'en restait pas moins empreint de l'exquise et bienveil- lante courtoisie dont s'était trouvée ennoblie toute sa carrière, le Comte Russell écrivait, à la date du 20 octobre 1903, les lignes que je transcris comme suit : « Hélas! il n'en est pas ainsi des hommes dont la jeunesse passe aussi vite que le premier sourire du jour sur une mer orageuse, 011 le soleil, à peine levé, disparaît dans les nuages et ne reparaît plus. Mais, sans nous attarder inutilement près du tombeau fleuri de nos souvenirs, encourageons et admirons les jeunes et les vaillants qui, venus après nous, font souvent mieux que nous. N'en soyons pas jaloux; jouissons de leurs triomphes comme si LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE c'était les nôtres, et saluons-les comme nous saluons l'aurore d'une belle journée » On me permettra de m 'approprier l'idée exprimée par le Comte Russell et de l'appliquer aux Entomologistes comptant encore parmi les jeunes, et notamment à ceux qui donnent si volontiers leur excellent concours aux Etudes de Lépido-ptéro- logie comparée. Comme pour le Compte Russell, le rayon qui a illuminé ma vie s'atténue avec rapidité, et je me sens averti que l'heure n'est plus très éloignée oii sa lumière s'abîmera dans les flots sans rivages d'un Océan qui appelle tout à lui. Toujours d'accord avec le Comte Russell, moi aussi, de mes vœux les plus cordiaux, je salue les jeunes et les vaillants qui, sachant profiter des progrès accomplis, grâce aux longs et labo- rieux efforts de leurs aînés, se trouvent désormais mieux armés que nous ne le fûmes jadis nous-mêmes, pour produire des travaux scientifiques plus définitifs et plus complets. Ils ont acquis l'expérience de recherches et de méthodes tout à fait dignes de notre encouragement et de notre admiration. C'est ainsi que je me trouve heureux de livrer aux Lecteurs des Etudes de Lcpidoptérologie comparée l'ouvrage dans lequel M. Ferdinand Le Cerf, préparateur d'entomologie au Muséum national d'Histoire naturelle à Paris, précise les divers éléments de comparaison morphologique des Satyr/ts- Abdclkader, Nrli'ni et Lambessanus. M. Le Cerf a exécuté avec une netteté parfaite, à l'appui du texte qu'il a savamment écrit, les dessins comparatifs de divers organes caractéristiques des trois beaux Satyrus algériens précités. Je le remercie d'avoir cédé avec tant de bonne grâce à la sollicitation de M. Harold Powell et à la mienne, en vue d'ob- tenir pour cet objet spécial sa précieuse collaboration. Voici donc avec quelle compétence M. Le Cerf a traité la question. Désormais, c'est lui qui parle. Ch. Oberthûr. ETUDE COMPAREE de quelques caractères morphologiques d'un groupe de SATYRUS ALGÉRIENS Par F^'. Le Cerf, Préparateur au Muséum National d'Histoire Naturelle de Paris. Dans l'étude systématique de la plupart des divers ordres d'Arthropodes, on utilise depuis longtemps les différences mor- phologiques pour la distinction non seulement des Espèces, mais encore des variétés que celles-ci fournissent; c'est surtout chez les animaux dont la coloration est uniforme, ou bien si instable et si variable d'un individu à l'autre que sa valeur en tant que carac- tère est nulle, que ceux qui les étudient se sont trouvés tout natu- rellement amenés de bonne heure à rechercher dans les modifi- cations morphologiques les caractéristiques taxonomiques. Chez les Lépidoptères, au contraire, la couleur est le caractère spécifique le plus apparent dans la très grande majorité des cas et, jusqu'à une époque récente, on n'a pas senti le besoin de recourir à d'autres indices que ses variations, plus ou moins accusées pour séparer les Espèces ou les Formes dans la même Espèce. Mais au fur et à mesure que des progrès se réalisaient dans la connaissance des diverses faunes, que s'accumulaient les matériaux de comparaison et que se transformait la conception ancienne de l'Espèce, sous l'influence notamment des notions de : variété non géographique opposée à celle de : race locale, soiis- cspéce ou variété géographique, des difficultés nouvelles — nées tant de l'ambiguïté de certaines formes que de l'excès de diffé- rence des autres — surgissaient et posaient des problèmes nou- 19 290 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE veaux dont la solution appelait des méthodes nouvelles. C'est alors qu'après l'étude rationnelle des variations de couleur, dont les lois ont été si clairement mises en évidence par M. Charles Oberthiir, les Lépidoptéristes en sont venus à étendre eux aussi leurs recherches aux modifications subies en dehors de la colo- ration ou parallèlement à elle, par certains caractères morpho- logiques Plus stables que le dessin et ses nuances et moins influencés par les facteurs extérieurs, ces caractères ont à leur tour fourni des éléments de comparaison et de certitude plus nombreux. Leur valeur s'est surtout affirmée dans le cas d'Espèces bien distinctes, mais si semblables extérieurement que leur autonomie, masquée par la similitude de forme et de couleur, n'avait pas été reconnue jusque-là, ou bien était restée tout à fait incertaine ; il me suffira de rappeler dans cet ordre d'idées : Callophrys nibi, L. et C. avis, Chapman, Lycœna Alexis, Hbn. et L. Thersites, Cant., Hesperia Malvœ, F. et H. Malvoïdes, Elw. et Edw., Hes- peria alveus, F. et H. Aniioricanus, Obthr., etc. On leur doit aussi l'établissement de races géographiques bien caractérisées dans des formes où la coloration ne présente pas, par rapport au type, de différence appréciable. Enfin, un autre résultat, et non des moindres, a été de donner une idée plus juste de la subor- dination des formes dans la même Espèce et, par suite, d'ap- précier plus exactement leur valeur sj'stématique, qu'ils servent en quelque sorte à mesurer. L'intérêt de ces recherches — si complètement délaissées rhez nous — la sûreté des résultats auxquels elles conduisent habi- tuellement m'a engagé à les entreprendre chaque fois que la possibilité m'en est offerte, et ce modeste mémoire en est l'appli- cation à des formes algériennes du genre Satynis. J'en dois les éléments à la libéralité de M. Ch. Oberthiir, que je prie de bien \'ouloir trouver ici l'expression renouvelée de ma vive et sincère gratitude. LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 29 1 C'est une des particularités de la faune de Barbarie de pré- senter chez beaucoup d'Espèces, et particulièrement chez celles qui lui appartiennent en propre, une variabilité très étendue par rapport à leur répartition sur son sol. En les comparant sur une documentation suffisante, on voit que, même chez les Espèces très répandues, les formes du littoral diffèrent de celles des hauts plateaux ou du versant saharien et que celles de l'Est ne sont pas identiques à celles de l'Ouest. Il n'est pas fréquent que les mêmes races soient communes à la Tunisie, à l'Algérie et au Maroc et parfois elles diffèrent d'un département algérien à l'autre. Une des causes principales de cette variabilité, à peu près générale et plus marquée qu'en d'autres régions, réside dans la diversité des climats qui se succèdent rapidement sur l'étroit terrain compris entre le Sahara et la mer, et la multiplicité des faciès qu'imposent à ce territoire les longues chaînes monta- gneuses parallèles qui le parcourent de l'Est à l'Ouest, et dont les accidents concourent à la localisation des formes. Rien que parmi les Rhopalocères, des exemples nombreux pourraient être cités, mais il n'en est pas de plus frappant que celui fourni par Satyrus Abdelkader, Pierret. Connu seulement d'Algérie et de quelques localités limitrophes du Maroc, il est assez généralement tenu pour le représentant africain du groupe de S. Cordula, Esp., bien que M. Ch. Oberthiir se soit élevé, dès 1876, contre l'opinion de Staudinger qui faisait de cette espèce une simple variété à'Aclœa dans son Catalogue de 1871. En réalité, et comme je m'en suis assuré, il est bien éloigné des deux et constitue avec les formes satellites : Lavibessanus, Stgr. et Nelvai, Seitz, qu'on lui rapporte comme variétés, un groupe bien à part, ayant ses caractères propres, et sans affinités directes avec les autres groupes eurasiens du genre Satyrus. Au contraire de 5. Atlantis, Austaut, dont l'étroite parenté avec les espèces asiatiques : Pclopea, Klug, Mniszeckl, H. -S., Telephassa, Klug, etc., est si évidente et en fait un des relictes les plus intéressants de la faune barbaresque, le groupe Abdel- 292 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE kader-Lanibessaniis-'N elvai apparaît comme l'unique et dernier rameau actuellement persistant et en voie de morcellement à son tour, d'une souche aujourd'hui disparue. Pour restreinte que soit l'aire de dispersion de ce petit groupe, elle présente au surplus la particularité d'être discontinue : la forme typique Abdelkadcr décrite d'Oranie n'a pas été capturée ailleurs et se trouve com- plètement séparée des formes Lambessanus et Nelvai — propres au département de Constantine — par toute la largeur du département d'Alger où l'Espèce fait peut-être défaut. En outre des caractères de coloration qui ont permis de les distinguer, nous avons appris par les belles observations de M. Harold Powell, qui les a élevées et étudiées dans la nature, que les trois races présentent de légères différences dans les états jeunes et dans la biologie de l'adulte; leurs habitats sont aussi bien distincts : Abdelkader se trouve depuis les régions assez, basses oii croît l'alfa jusqu'au voisinage des sommets de l'Atlas; Lambessanns vole dans la région centrale de 1" Aurès où les hivers sont rudes; Nelvai n'habite, à une courte distance et au Sud du précédent, que les pentes rocailleuses précédant immédiatement le versant saharien. Toutes n'ont qu'une génération annuelle, mais tandis que Lambessanns apparaît en mai dans une région où la végétation est encore très florissante, Abdelkader et Nelvai — si voisin géographiquement du premier — ne volent que de la fin d'août jusqu'en octobre dans des régions où toute verdure a depuis longtemps disparu, grillée par le soleil. En dehors de toute autre considération, un premier isolement des trois formes se trouve donc réalisé entre Abdelkader d'une part, Lambessanns et Nelvai de l'autre, par l'éloignement géo- graphique, et entre Lambessanus et Nelvai par des époques d'éclosion différentes dans des habitats également différents. La sensibilité aux facteurs naturels et la capacité de variation, dont le type Abdelkader fait preuve en fournissant trois races distinctes sur une étendue aussi limitée, m'a engagé à rechercher et à comparer les différences morphologiques éventuellement acquises par les races au cours de la ségrégation qui leur a donné LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 293 naissance. Dans un travail précédent, portant sur l'armure géni- tale des formes de deux Saty rides du genre Epinefhele, j'ai en effet été amené à constater, comme d'autres Auteurs l'avaient déjà fait, que les différences subspécifiques de coloration s'ac- compagnent de divergences morphologiques notables et souvent plus étendues proportionnellement que celles accusées par la couleur. Une autre étude appliquée à un ensemble de caractères chez certains Zerynthnnœ m'a permis d'établir, comme on devait s'y attendre du reste, que l'armure génitale n'est pas seule atteinte, mais bien la morphologie tout entière, à des degrés divers. Les travaux que je viens de rappeler ne portaient nue sur le mâle seul et, par suite, ne répondaient que d'une manière fort incomplète au but implicitement assigné à de telles recherches; les inconvénients en sont évidents, surtout chez les Satyrides, où des différences plus considérables dans l'armure génitale des femelles que dans celle des mâles ont été mises en lumière par N. J. Kusnezov pour deux espèces de Crimée. J'ai donc étendu aux deux sexes de chaque forme la recherche et la comparaison méthodique des caractères différentiels; les douze exemplaires que j'ai étudiés se répartissent ainsi : Satyriis Abdelkader, Pier. : i cf, Aflou, VIII-1911 (Dép' d'Oran), envergure 60 mill. — — — I Q, Géryville, IX-1910 (Départ' d'Oran), enverg^'' 59 Tm- — Lainbessanus, Stgr. : 4 cf, Lambèsc, VI-1915 (Dép* de Constantine), envergure 64/69 mill. — — — 2 Q, Lambèse, VI- 19 13 (Dép' de Constantine), envergure 66/68 mill. Nelvai, Seitz. ; i cf, El-PCantara, VIII- 191 3 (Départ* de Constantine), envergure 68 miU. 294 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Satyrus Nelvai, Seitz. : i Ç, El-Kantara, vlIl-1913 (Départ' de Constantine), envergure 74 mill. • — Cordida, Esp. : i cf, Italie septentrionale, envergure 52 mill. — — — I Ç), Italie septentrionale, envergure 52 mill. Ces deux derniers n'intervenant qu'à titre comparatif et en paragraphes séparés de ceux consacrés d'abord à l'analyse des formes algériennes. Antennes. Semblables à celles des autres espèces du genre Satyrus, elles se composent d'une quarantaine d'articles, dont vingt-cinq envi- ron croissant de longueur du second au vingt-deux ou vingt- troisième pour la tige, et le reste formant la massue terminale spatulifornie. Elles sont couvertes de petites écailles allongées, lancéolées, qui manquent sur la face inférieure de la massue et sur les derniers articles en dessus. Le dessous de la massue est déprimé par deux larges sillons concaves étendus de sa base, où ils naissent étroits et presque confondus, jusqu'au sommet qu'ils atteignent en s'élargissant progressivement d'abord, pour se rétrécir ensuite sur les deux derniers articles; ils sont définis par trois crêtes tectiformes saillantes, dont une médiane commune et deux latérales et sont, en outre, excavés en demi-ovale dans leur partie médiane sur chaque anneau. Les articles de la tige sont cylindriques, avec la base et le som- met épaissis au voisinage de l'articulation; ceux de la massue, graduellement élargis, ont en dessous leur bord distal fortement tridenté par le sommet prolongé des trois crêtes des sillons; leur bord proximal, engagé sous l'extrémité de l'article précédent, n'est pas nettement dé&ni et se confond en partie avec la mem- brane articulaire. En dessus et sur la plus grande partie de la tige, les antennes LEriDOPTEROLOGIE COMPAREE ?95 \. sont très finement réticulées ; en dessous, elles sont entièrement couvertes d'un revêtement compact de très petites spmules, cou- chées et dirigées vers le sommet, dont la taille augmente un peu sur les parties dénudées du dessous de la massue, et atteignent leur maximum de développement sur la partie médiane saillante de l'article terminal; ces spinules sont vaguement alignées en lignes sinueuses, mal définies, et elles recouvrent de petits points transparents disposés en rangées irrégulières et qui semblent des perfora- tions incomplètes du tégument. Enfin, on voit encore un petit nombre de larges pores très ouverts, autour desquels les spinules ont une disposition rayonné^ convergente ; le centre de certains de ces pores donne insertion à des soies senso- rielles assez brèves, raides et incolores ; d'autres servent d'orifice à des conduits ou chambres tubulaires assez courtes — deux à trois fois plus longues que larges — qui s'enfoncent obliquement dans l'antenne et se terminent par un fond membraneux un peu élargi. C'est seule- ment à l'extrémité supérieure et à la face inférieure de la massue et des derniers articles de la tige que sont localisés ces organes, et les seconds, au nombre de trois par article, sont placés : un, à la base et un peu à gauche de la saillie médiane; un, à la base et un peu en dedans de chacune des saillies latérales des sillons. Sur une préparation particulièrement réussie de S. Lambessamis Q, j'ai remarqué qu'elles existent ainsi du second article — en partant du sommet — jusqu'au seizième, puis manquent sur les dix-sept et dix-huitième et se retrouvent sous forme d'un seul à la base de la saillie grauche sur le dix- FlG. I. Massue de l'antenne de ^' ! ^ne par la face inférieure et montrant les deux sillons géminés avec leurs dépressions mé- dianes et l'emplacement des pores et des poils sensoriels. (Pièce montée au baume.) ?96 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE neuvième; ils sont plus nombreux dans le mâle, et j'ai constaté la présence sur le cinquième article d'un mâle de Lambessanus de trois chambres sensorielles courtes à gauche de la crê'.e médiane et d'une seule à droite et à la base des crêtes latérales. Les poils insérés dans les pores ont une disposition plus régu- lière et il y en a quatre qui se retrouvent toujours aux mêmes places sur chaque article : deux sont placés de part et d'autre de la crête médiane, au-dessus des chambres sensorielles, et les deux autres en dehors et au niveau du milieu des saillies externes. Les pièces traitées par la potasse et montées au baume se présentent de manière trop inégale pour qu'il soit tenu compte ici des petites diffé- rences qu'on trouve, çà et là, dans le détail des organes dont nous avons donné ci-dessus une des- cription sommaire; mais j'ai relevé, dans le nombre des articles qui composent en entier l'antenne, les chiffres suivants : ^ Abdelkader cf, 43 articles, dont 13 pour la massue. — 9,38 — ^ 13 — — Lambessanus çS, 37 ^ — — 15 — — — Ç.39 — — 13 — — Nelvai Cf, 41 — — 15 — — — Ç,42 — -- 14 — — J'ajouterai que le dernier article de l'antenne est presque discoïde et en majeure partie dorsal; il est FiG. 2. il. Lambensamis, StgT., cf ; ano- malie antennai- i- 11 . 1' 11 re : articles 1(5 partiellement soude sur son bord externe av-ec et 17 de l'an- , , , . , ^ . . tenne gauche 1 avant-dcmicr ; cette tendance a la fusion se mani- soudés. -111 • j feste accidentellement sur d autres points de l'appendice et j'en ai trouvé un exemple chez un mâle de Lam- bessanus dont les seizième et dix-septième articles d'une antenne sont unis et ne présentent plus que des traces parcellaires de suture, tel que le montre la figure 2. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 297 Autant que les autres caractères, les antennes diffèrent entre les formes du groupe de S. Cordnla et celles du groupe d'Abdel- kader; le nombre des articles est à peu près le même : 41 chez le cT et 37 chez la Q, dont 14 pour la massue dans les deux sexes ; mais l'article terminal est moins discoïde; les sillons de la face inférieure de la massue moins profonds, sans excavations médianes et les crêtes qui les limitent peu accusées et non pro- longées en dents aiguës au bord supérieur des articles qui est seulement sinué. La réticulation du dessus de la massue et de la tige est rugueuse et plus allongée, alors que les spinules du dessous paraissent sen- siblement plus faibles. Sur la surface dorsale, chaque article porte, de part et d'autre du milieu, deux ou trois poils sensoriels et des pores assez petits, mais nombreux, que la réticulation entoure de cloisons rayonnées. Les côtés sont plus densément recouverts d'aspérités plus longues, et sur la face ventrale, les pores se trouvent en plus grand nombre et placés plus haut, vers le milieu de la longueur de l'article; c'est ainsi que pour le quatrième (en partant du sommet), on n'en compte pas moins de 1 1 à gauche et 14 à droite, de diamètre assez inégal; les deux plus inférieurs portent de fortes soies sensorielles et les deux plus gros au- dessus d'eux et près de la ligne médiane sont les orifices de chambres cylindriques à parois internes épineuses, terminées en cul-de-sac transparent et irrégulièrement arrondi. Latéralement, près de la saillie externe gauche, ii y a quatre de ces pores super- posés, dont deux avec des poils, et l'inférieur marque l'abou- tissement d'une chambre un peu plus longue que celles de la zone médiane; à droite, les pores sont plus nombreux; mais la particularité la plus frappante est fournie par le développement considérable de la chambre sensorielle, dont la longueur est supérieure à cinq fois celle de son homologue de gauche; elle traverse obliquement l'article antennaire dans toute son épaisseur pour aboutir à l'un des pores les plus rapprochés du bord supé- rieur. Cette asymétrie des orifices et du développement des chambres sensorielles externes, qui frappe dès qu'on examine 29S LKPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE les antennes à un grossissement suffisant, et qui suffirait seule à séparer les deux groupes qui nous intéressent, se complique encore de la présence dans le septième article de deux de ces sin- guliers organes placés côte à côte sur le môme plan. Les deux sexes présentent cette disposition, mais, par ailleurs et contrairement à ce que nous avons rencontré chez Abdelkader et ses satellites, on constate un léger dimorphisme; chez la femelle, les chambres médianes sont très réduites et les latérales gauches, sauf sur le troisième article, à peine visibles et dispa- raissant rapidement en descendant vers la base; les grandes chambres allongées du côté droit, bien développées jusqu'au quinzième article, se réduisent brusquement au delà et devien- nent à leur tour de plus en plus obsolètes, tandis que chez le mâle leur réduction est progressive et n'altère pas leur caractère jus- qu'au delà du vingt-sixième article. Palpes. Les Palpes ne s'écartent pas noiablement de ceux des Espèces congénères; ils sont longs, dressés, et leurs trois articles ont, d'une race à l'autre, les mêmes proportions générales. L'article basilaire est court, large, un peu courbe avec le bord supérieur plissé, ou, plus exactement, ridé transversalement et la face interne concave; le second, trois fois plus long environ, est plus mince, de diamètre légèrement décroissant depuis sa base, qui est renflée, jusqu'au sommet qui est tronqué obliquement; sa section est régulièrement ovalaire; le troisième et dernier est petit, ovoïde et ne dépasse pas en longueur le cinquième du précédent; il porte à l'extrémité une chambre sensorielle cylin- drique à fond à peu près sphérique et dont la profondeur ne s'étend pas au delà du cinquième de sa longueur totale. Quoique cette description sommaire s'applique également bien aux deux sexes, un dimorphisme très net est accusé par les Palpes des femelles qui, dans l'ensemble, sont plus grands et plus forts que ceux des mâles, et chez lesquels, en outre, l'article terminal LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 2Çg Palpes de .s. ÂOiIrlkui Pi.'i-.. o" l't ?. est d'une forme un peu différente et l'article basilaire d'un volume plus considérable. J'ajouterai encore que, chez le mâle comme chez la femelle, ce dernier porte sur sa face interne deux or- ganes énigmaticiues dont le plus apparent est une large surface rugueuse située au milieu du bord articulaire basai et s 'étendant au delà du tiers de l'article; il cor- respond à ce qu'on a appelé la (( plaque de Reuter » et est constitué par de longues écailles ou lames chitineuses à sommet épaissi, aigu et libre, appliquées sur la surface du tégument et dont la pointe est dirigée vers le bord supérieur de l'article; elles sont arran- gées en lignes sinueuses, irré- gulières, et leur taille varie sur chaque bord de l'étendue qu'elles occupent, celles du bas étant les plus courtes et les plus fortes, et les plus rap- prochées de la partie supé- rieure diminuant graduelle- ment de longueur, tout en devenant plus minces et plus espacées. Des poils courts con- tinuent et terminent l'ensem- ble de cet appareil jusque sur ^ les plis qui sillonnent trans- versalement le dessus de l'ar- ticle basilaire. Fig. /i. — Pali-esde^'. Ae^î-a/, Scltz, cTot 9. 300 LEPIDOPTÉROLOGIE COAIPARÉE A l'extrémité de cet organe, qui n'est autre que la a plaque de Reutcr » de certains auteurs, et le touchant plus ou moins, s'en trouve un autre composé d'un petit groupe de gros pores circu- laires ouverts dans la chitine et disposés sans ordre sur une petite surface; leur nombre est très variable, et bien que l'irré- gularité de leur disposition m'mcite à une grande réserve en ce qui concerne la valeur à attribuer pour chaque forme à leur chiffre et à leur emplacement, je ne crois pourtant pas que les indications qu'ils fournissent doivent être négligées, et je les ai soigneusement notés et reproduits. C'est chez Abdelkader que les Palpes sont les plus grêles et les moins dimorphiques ; ceux de la femelle sont un peu plus longs que ceux du mâle; leur article ter- minal légèrement plus ovoïde et moins cylin- drique, et leur article basilaire un peu plus volumineux, mais de mê- me grandeur ; la diffé- rence de longueur porte sur le second article qui, outre une courbure un peu plus accentuée, est un peu plus allongé dans la femelle que dans le mâle. Plus grands et plus forts que chez Abdelkader, les Palpes de Nelvai sont de même longueur dans les deux sexes, à l'exception cependant de l'article basilaire qui est légèrement plus long chez le mâle; mais la différence dans le volume de cet article, si peu marquée chez Abdelkader, est ici très grande et se traduit par une augmentation d'un quart environ dans la largeur de son diamètre transversal. L'article terminal est cylindroconique dans ;,^ FiG. 5. — Palpes de S. Latiihessanuo, Stgr., d* et 9 • LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ^01 â le mâle, avec les côtés presque parallèles et légèrement concaves, avant le milieu, sur la face dorsale; dans la femelle, au contraire, ce même article est de contour ovalaire et ses côtés sont régulièrement convexes. Les Palpes de Lain- bessamts se distinguent immédiatement de ceux des deux formes précé- dentes par leur aspect plus robuste, une taille un peu supérieure et leur dimorphisme plus pro- noncé. A l'inverse de ce qui s'observe chez Abdelkader, ceux du mâle sont notablement plus grands que ceux de la femelle, malgré la plus forte taille du troisième article 9 FIG. 6. Premier article des palpes de -i'- AOdellader, Pier., cfet 9. chez cette dernière, et l'augmentation porte exclusivement sur le second article très robuste et un peu courbé dorsale ment, avant le som met. L'article termi- nal du mâle est petit et régulière- ment ovale, tandis que chez la femelle, il est d'un bon tiers plus long, plus volu- mineux, avec une base large et un sommet renflé. Entre les articles basilaires, la différence de taille FiG. 7. Premier article des palpes de i'. Lambessanits, Stgr., o* et Ç . ?o? LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE est moindre que chez Nelvai, à cause du plus grand développe- ment de celui du mâle. On peut noter dans l'organe rugueux de l'article basilaire des trois races, de légères différences dans l'étendue qu'il occupe et l'arrangement des stries écailleuses qui le composent; de ces dernières je ne dirai rien, craignant que le montage des Palpes en préparations microscopiques soit pour cpelque chose dans les modifications apparentes de direction que la comparaison révèle d'une forme à l'autre, mais la compression entre les lamelles de verre n'a pas eu d'in- fluence sur la surface de cet appareil, et on peut tenir pour suffi- samment exactes les proportions relevées dans les figures 6 à 8. On voit ainsi que son extension chez Abdelkader est pro- portionnellement un peu moindre que chez Nelvai et que c'est dans les deux sexes de Lainbessaniis qu'il atteint son maximum de développement. Les pores qui lui font suite sont très rapprochés dans le mâle et la femelle de Nelvai, davantage encore chez Lamhessanus femelle où quelques-uns d'entre eux sont en partie mêlés aux dernières lames chitineuses, tandis que chez le mâle de cette race et les deux sexes d\^bdelkader ils sont distinctement écartés; la disposition de chaque groupe peut être sommairement caractérisée comme il suit : Chez Abdelkader, on en compte 3 dans le mâle, disposés en triangle irrégulier, et 5 dans la femelle formant une ligne brisée VlG. s. Premier article des palpes de S. Arhai, Seiti;, cf et LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE ^O^ J'-'J biaiiguleuse, affectant vaguement la forme d'un N inversé et dont la branche mterne est formée à elle seule de trois pores rapprochés en ligne droite. Les deux sexes de Lambessanus en portent respectivement 6 et 7, sériés en deux groupes de trois, placés en triangle chez le mâle, espacés assez régulièrement chez la femelle où quatre d'entre eux forment un arc presque symétrique en avant duquel les autres constituent un triangle régulier. Chez Nelvai, le mâle en a 6 et la femelle 8 , ceux du mâle sont répartis en deux lignes parallèles concaves dont trois très rap- prochés en haut; les huit pores de la femelle sont groupés sur une surface grossièrement triangulaire, inférieure comme étendue à celle qu'occupent ceux du mâle; on peut y distinguer un groupe supérieur de trois prolongé inférieurement par un autre qui le relie à une ligne inférieure et inégale comprenant les quatre derniers. Comparés à ceux des formes du groupe précédent, les Palpes de S. Cordula montrent les différences suivantes : cf. — Ils sont un peu plus longs, plus minces et moins courbes que ceux de Lav.ibessanus ; l'écart porte surtout sur l'article terminal, allongé et grêle, un peu renflé au sommet et muni d'une chambre sensorielle qui atteint le quart de sa longueur et dont l'orifice est étroit. La forme et le volume du premier article rappellent ceux de Nelvai; l'organe rugueux est moins étendu, composé d'éléments plus longs et plus saillants, et entoure à son extrémité distale un des six pores écartés et disposés en trapèze de l'organe perforé. Q. — Les Palpes de la femelle sont plus épais et plus courts que ceux du mâle; leur article terminal est de même taille, mais d'un diamètre supérieur et régulièrement cylindro-ovoïde; sa chambre terminale est de moitié moins longue, avec un orifice deux fois plus large. L'article basilaire est au contraire plus long d'un cinquième avec un organe rugueux plus étendu, 304 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE plus dense et seulement quatre pores disposés en arc sur un seul ranr. Trompe. La Trompe est d'un développement égal dans les trois formes; elle paraît un peu plus forte et plus longue chez Lambessamis que chez Abdelkader et NcLvai, mais comme il est impossible d'obtenir des préparations avec des Trompes entièrement éten- dues et que l'enroulement qu'elles conservent n'est jamais pareil de l'une à l'autre, je n'ai pu effectuer de mesures comparatives assez exactes pour établir et justifier cette impression ; mon examen s'est, par suite, borné aux organes sensoriels. Ces organes sont de deux sortes : des poils et des papilles; ils sont bien tranchés et il n'existe pas d'intermédiaires, ni de transitions de l'un à l'autre de ces deux types. Les poils sont constitués par des soies raides et presque incolores, implantées au centre d'anneaux chitineux, placés entre les stries transversales couvrant la sur- face externe de la Trompe; ils corres- pondent bien aux « poils à tige », de (juyénot, et sont répartis isolément sur le dessous et les côtés, depuis la base jusqu'à une courte distance de l'extrémité; c'est dans la région médiane qu'on les rencontre en plus grand nombre et ils s'espacent de plus en plus, en même temps qu'ils dimi- nuent de taille et que leur base se réduit au fur et à mesure qu'ils se rapprochent de la zone des papilles; ceux qui avoisinent la base, au contraire, sont les plus grands et les plus forts, et ils sont supportés par des bases volumineuses, tronconiques, saillantes. FIG. 9. Extrémité d'une maxille do la trompe de S. Nelvai, Seitz, a'- LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 505 Au nombre d'une- quarantaine pour chaque maxille, les papilles sont groupées à l'extrémité de la Trompe sur deux rangs — dont l'externe est le plus long — et qui tendent à se confondre vers la pointe. Elles ne s'écartent pas du type bien connu du genre Salynis et comprennent un corps cylindrique arrondi au sommet, surmonté d'un bâtonnet ou cône, et portent latéralement de quatre à six lames radiales à sommet libre et aigu. ■e FlG. 10. Poils sensoriels (poils à tige de Guyéiiot) de la trompe de S. Lamhcssatius, Stgr., $ : b, région basilaire. m, région médiane, e, région terminale, un peu avant l'extrémité. Je n'ai pas observé de différence dans les poils sensoriels ni dans la forme des papilles, mais le nom.bre de celles-ci, quoique très voisin dans les trois formes, varie légèrement, et j'ai relevé dans chaque sexe les chiffres suivants pour chaque moitié de la Trompe : Abdelkader (j 38 papilles (total : 76). — Q 34 — ( — 68). Lanibessanus cf 36/37 ( — • 72 à 74). — Q 37/40 — ( — 74 à 80). Nelvai cf 33 — ( — 66). Q 43 - ( - 86). * 20 306 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE La Trompe de S. Cordula est un peu plus courte et de texture plus faible, mais pourvue des mêmes poils à tige et de papilles analogues, à cinq ou six — rarement sept — lames radiales; ces papilles sont aussi disposées sur deux rangs; elles sont plus irrégulièrement réparties et un peu moins nombreuses; chaque maxille n'en portant que 30 chez le mâle et 32 chez la femelle, ce qui donne au total 60 et 64. Ecailles. A l'œil nu, la vestiture des ailes ne paraît pas sensiblement différente chez Abdelkader, Lambessanus et Nelvai. Ils appar- tiennent à la série des Satyres sans androconie nettement définie, et on distingue seulement, chez les mâles les moins défraîchis par le vol, un épaississement léger sur le disque s' accompagnant parfois, et notamment chez Lambessanus, d'un aspect velouté plus ou moins perceptible; l'état de conservation, si différent dans les exemplaires pris au filet, entre d'ailleurs pour une bonne part dans l'impression qu'on retire de cet examen superficiel et empêche de formuler une appréciation catégorique et soli- dement assise. 11 n'en va plus de même dès que l'on soumet les écailles à l'analyse microscopique, et là encore on trouve des différences qui correspondent et s'accordent avec celles que nous constatons dans les autres caractères. Prélevées dans les deux sexes de chaque forme au centre dé l'angle formé par la cellule et la naissance de la nervure 3 (SMi), elles montrent dans leurs formes et leurs dimensions des caractéristiques dont les plus marquantes sont reproduites dans les figures 1 1 à 22. On observe au moins deux sortes d'écaillés : les unes très allongées, et quelquefois très étroites, avec la partie médiane du sommet saillante et polydentée ou poly lobée; les autres bien plus courtes et plus larges, à sommet moins proéminent et découpé en un plus grand nombre de dents ; ces dernières sont plus ou moins complètement cachées par les premières dont la partie LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 307 terminale les recouvre et forme l'imbrication apparente de l'écaillure. A ces Ecailles normales et communes aux deux sexes s'ajoutent, chez les mâles seulement, des Ecailles modifiées de deux sortes : les Ecailles androconia- les proprement dites en forme de raquette ou lancéolées avec le sommet lacinié, et d'autres crinif ormes ayant simplement l'as- pect de poils plats (*). Ces deux sortes d'E- cailles, qui n'entrent que pour une part minime dans la vestiture, peuvent faire com- plètement défaut isolément ou simultanément. Mâles. — L'écaillure d' Abdelkader (fig. 11 et 12) comporte : I" De grandes écailles allongées (a, b, c), croissant assez régulièrement de largeur de la base vers le sommet qui est un Fig. 11. — Aspect général de l'écaillure df S. AbdelJcader, Pier., cf. Fig. 12. — Ecailles caractéristiques de ii- Ahdelkader, Pier., çf : a, b, c. écailles long:ues. — d, e, écailles larges. /, deux écailles androconiales. (*) Qu'il ne m'a pas paru nécessaire de figurer. 3o8 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE peu rétréci et se termine par des dents arrondies, irrégulières et formant au maximum 4 ou 5 lobes plus ou moins distinctement détachés. 2" De larges écailles d'un plus grand dia- mètre que les précé- dentes, mais bien plus courtes. Certaines sont presque rectangulaires {d), d'autres irrégu- lièrement cordi formes {e), avec un côté plus convexe que l'autre; la base des premières est large; celle des secondes est étroite. Leur sommet, très fai- blement saillant, est découpé en multiples dents inégales, médio- crement prononcées et dont le nombre varie de 8 à 12 environ. 3" Des Ecailles androconiales lancéolées, de forme régulière, à base large et à sommet en pointe allongée, terminé par un panache de filaments (/). FlG. i3. — Aspect géuéi-al de l'écailluro de S. Nelvai, Seitz. cf. a Ecailles caractéristiques de S. Nelvai, Seitz, cf a, b, c, d, e, écailles longues. /. g, écailles lari^-ps. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 309 Je n'ai pas observé de transition entre ces différentes formes d'Ecaillés; les deux premières sont épaisses et fortement colo- rées, sauf dans la région basale qui est progressivement pâlie. Elles sont parcourues longitudinalement par de fortes stries parallèles, très rapprochées, entre lesquelles on distingue, à un fort grossissement, une autre striation transversale extrêmement ténue. Les Ecailles longues, à 4 ou 5 dents terminales, sont celles qui prédominent et de beaucoup avec les Ecailles larges rectan- gulaires, les formes à la fois très étroites et très allongées, telles que a, ou très élargies du type c, par exemple, ne se troiivant qu'en très petit nombre. Les Ecailles androconiales sont éparses parmi les précédentes que leur sommet lacinié dépasse seul ; elles sont blanchâtres, un peu irisées, et par transparence apparaissent finement ponctuées. Le revêtement écailleu.x de Nelvai (fig. 13 et 14) est plus varié que celui d'Abdelkader avec lequel il a beaucoup de ressem- blance; ses écailles longues sont moins grandes dans l'ensemble et de tailles très inégales, les moins larges étant les plus longues, et leur sommet moins rétréci se divise en trois, quatre ou cinq dents inégales, plus saillantes et moins arrondies {a, b, c, d, e). On constate aussi que les plus courtes de ces Ecailles allongées — c, par exemple, — forment distinctement transition aux Ecailles larges qui, avec une longueur à peu près pareille, sont plus étroites que leurs homologues d\^bdelkader et toutes à base aiguë. Elles ont le sommet plus saillant, mais à dents moins nombreuses - — 5 à 6 — et encore plus irrégulières; on en trouve également dont un côté est plus ou moins rectiligne, tandis que l'autre est convexe. Les Ecailles androconiales font défaut. L'apparence plus épaisse que donne à l'œil la vestiture de Lambessaniis (&g. 15 et 16) se trouve confirmée à l'examen microscopique par la densité remarquable de l'écaillure composée d'éléments plus rétrécis et plus nombreux que chez les deux formes déjà étudiées. 10 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE Les Ecailles longues sont beaucoup plus étroites que celles à' Abdelkader et certaines les dépassent en longueur; celle-ci varie du reste nota- blement et, comme chez Nelvai, les plus larges sont en même temps les plus courtes {c). Leur sommet est très saillant, généra- lement divisé en deux dents, rarement en une seule; il est tou- jours encadré à la base par deux dents longues et aiguës, prolongeant directement les côtés de l'Ecaillé. Toutes ces dents sont bien moins inégales que dans Abdelkader et Nelvai, et je n'ai noté qu'un seul cas où l'une d'entre elles était subdivisée secondairement {d). De même que chez Abdelkader, les formes de transition paraissent manquer et les formes larges FlG. 15. — Aspect général de récaillurjj de S. Lambessanus, Stgr., cf. M m çi -Ecailles caractéristiques de S. Lambessanus, Stgr., cf a, b, c, d, écailles longues. — e, f. écailles larges. g, deux écailles androconiales. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 311 diffèrent de ce type et de Nehai, en ce qu'elles ne comprennent que des éléments à base large, dont les uns sont subrectangii- laires (/) et les autres fortement rétrécis au sommet {c); dans FIG. 17, - Aspect général de l'écailli,re do S. Abdelkader, Pier., ç. les deux formes, celui-ci est nettement saillant dans sa partie médiane et découpé en dents inégales, mais toujours aiguës, et dont les deux latérales, homologues de celles des écailles FiG. IS. Ecailles caractéristiques de 5'. Abdelkader, Pier., 5 a, 6, c, d, écailles longues. *. /. g. ft, écailles larges. 313 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE longues, ne manquent dans aucun cas, quoique d'un dévelop- pement variable et bien moins proéminentes. Les Ecailles aridroconiales se trouvent en plus grand nombre que chez Abdelkader; leur longueur est identique, mais elles sont plus étroites à la base et portent vers le milieu un étran- glement au delà duquel elles s'élargissent un peu, ce qui fait paraître leur sommet plus court; leur panache terminal ne diffère pas de ce que nous avons vu chez Abdelkader, non plus que leur teinte, ni leur ponctuation. Femelles. — Les formes des Ecailles, chez les femelles, sont moins diverses que chez les mâles; elles comprennent également des Ecailles longues et des Ecailles larges, mais ces deux types extrêmes sont reliés par des transitions graduelles et ne pré- sentent jamais les grandes différences qu'on relève chez les mâles. On distingue dès l'abord les Ecailles à' Abdelkader Q (fig. 1/ et i8) de celles à" Abdelkader cf par leurs dimensions beaucoup plus petites, et conformément à ce que nous avons vu chez le cf, ce ne sont pas les plus grandes qui sont les plus larges {a et b) ; on n'en trouve pas d'uii allongement comparable à celui que présentent certaines de leurs homologues de l'autre sexe. Les Ecailles subrectangulaires manquent; toutes les Ecailles de la catégorie large sont à base étroite et leur sommet porte trois à six dents plus aiguës et moins irrégulières que dans le mâle. Par une correspondance singulière, ce sont les Ecailles de Nelvai Q (fig. 19 et 20) qui se rapprochent le plus par la forme et la dimension de celles d' Abdelkader cf ; elles ne sont pas aussi grandes et on n'en voit pas d'aussi larges, mais on trouve des Ecailles qui, pour les proportions et la forme du sommet, rap- pellent certaines de celles représentées sur la fig. il. Dans l'en- semble, elles marquent une tendance à être arrondies dans la partie médiane du sommet et quelques-unes sont régulièrement circulaires et complètement dépourvues de dents {c). Les Ecailles LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 313 larges sont toutes à base étroite; leur sommet est plus ou moins saillant et porte un petit nombre de dents peu accusées et presque lobulaires; celle que je figure sous la lettre h est remarquable par le rétrécis- sement régulier qu'elle présente de la base \ers le sommet. C'est chez Lambessanus Q que se rencon- trent les Ecailles les plus grandes et les transitions les plus complètes entre les Ecailles longues et les Ecailles larges; celles-ci sont du reste en majeure partie d'un faciès intermédiaire entre les deux, et les formes à carac- FlG. 19, — Aspect général de l'écaillure de S. Nclvm, Seitz, ?. FrG. 20. — Ecnillos caractéristiques de *'. Srirm, Seitz, 9 a, b, c, (/, e, j, écailles long-ues. g, h, écailles larges 314 LEPIDÛPTEROLOGIE COMPAREE tère large bien accusé ne sont ciu'en petit nombre. Parmi les longues, il s'en trouve de dimensions exceptionnelles, comme celle qui figure en tête de la rangée sous la lettre a; c'est de beaucoup la plus grande que j'ai obser- vée dans les deux sexes des trois formes qui nous occupent. A côté d'elle, j'ai placé une autre Ecaille singu- lière, à sommet atténué, arrondi et entier, rap- pelant ce que nous avons déjà relevé chez Nelvai Q . Ces Ecailles présentent dans l'ensemble les mêmes caractéris- tiques que celles des mâles, mais à un bien moindre degré; les Ecailles larges sont beaucoup plus larges et leur sommet moins proéminent n'est pas aussi profondément denté; l'acuité des FIG. ill. — Aspect g-énéral de l'éoailluro de S. Lambessamts, Stgr., Ç. FlG. 22. — Ecailles caractéristiques de S. Lamhessanus, Stgr., Ç a, b, c, écailles longues. — (t, e, /, g, h, écailles larges. /^ LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 315 dents, qui se trouvent en nombre sensiblement égal, est diminuée par la largeur plus grande sur une hauteur proportionnellement moindre. Le type le plus caractérisé des Ecailles larges {h) est à base étroite et à sommet très irrégulièrement et faiblement festonné, tandis que celui qui le précède dans l'échelle des tran- sitions montre, au contraire, des indentations particulièrement profondes et aiguës; tous les deux d'ailleurs sont aussi nettement pourvus que les autres des deux dents latérales constamment présentes et que j'ai déjà signalées dans le o"- * * C'est de l'écaillure de Lainbessaniis que se rapproche le plus celle de Cordida; mais les deux types d'Ecaillés : Ecailles longues, Ecailles larges, sont plus tranchés; toutes ont les dents du sommet encore plus aiguës et souvent plus nombreuses; parmi les longues, on en trouve beaucoup à 5 dents; la dent supplémentaire médiane étant toujours notablement plus longue et plus saillante que les autres; la même observation peut s'ap- pliquer aux Ecailles larges dans lesquelles ce sont aussi les dents qui avoisinent le milieu qui sont les plus hautes et les plus poin- tues. Il y a beaucoup d'Ecaillés criniformes; mais les Ecailles androconiales manquent comme chez Nelvai. Les Ecailles de la femelle ne diffèrent guère de celles du mâle que par la plus forte proportion d'Ecaillés larges, un aspect général un peu plus court et la moindre élévation des dents du sommet. Pattes. Les Pattes médianes étant incomplètes ou faisant défaut chez quelques-uns des individus que j'ai étudiés, la comparaison s'est trouvée limitée aux Pattes antérieures et postérieures. Conformément à ce qui s'observe pour les autres organes, c'est chez Latnbessanus que les Pattes ont les plus grandes 3i6 LÉPIDOPTÉROLOGIE COAIPARÉE dimensions et chez Abdclkader que leur taille est la plus res treintc, Nelvai étant assez exactement intermédiaire entre les deux. Je parlerai d'abord des Pattes postérieures dont les diffé- rences, minimes en apparence, sont pourtant intéressantes en ce qu'elles portent sur des organes actifs dont la fonction et le rôle mécanique sont identiques chez les trois formes considérées. FlG. i'i. — Pattes postérieures et premier article du tarse : L, de S. Lambeesanus, Stgr. A', de -S. ISicUai, Seitz. A, Ae S. Abdclkader, Pier. En dehors de la grandeur et de la force, c'est dans les longueurs proportionnelles du fémur, du tibia et du premier article du tarse qu'apparaissent les variations que l'on peut exprimer ainsi : Chez Abdelkader, la longueur du tibia dépasse un peu la moitié de celle du fémur, mais est légèrement inférieure à celle du premier article du tarse. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 317 Chez Lanibessanus, le tibia est plus long par rapport au fémur et dépasse nettement en longueur également le premier article du tarse. Chez Nelvai, la taille du tibia est inférieure d'un tiers environ à celle du fémur, mais surpasse de plus d'un dixième celle du premier article tarsal. A ces écarts de dimensions que les croquis de la fig. 23 per- îiiettent d'évaluer mieux que la simple description, on peut encore ajouter le développement plus accentué chez Nelvai que chez Abdelkader et Lambessamis du nombre et de la dimension des épines qui arment le tibia et le tarse. Beaucoup plus importantes et plus signi- ficatives sont les différences fournies par la comparaison des pattes antérieures. Pour en mesurer tout l'intérêt, il suffit de rappeler que ces appendices sont complè- tement infonctionnels dans les deux sexes chez les Satyrides, que leur dégénérescence morphologique s'observe à tous les degrés dans les familles de Rhopalocères à station tétrapode et que l'on trouve ici comme fig. 24. .,, ,. , . 1 i V Patte antérieure de 6'. //«(/t- ailieurs un dimorphisme sexuel très mar- ùMsanus. stgr., o'- que, « les pattes en palatine >• des mâles étant toujours moins .longues, moins volumineuses et plus atro- phiées que celles des femelles. Dans nos trois Satyres, le fémur s'articule avec la hanche par un trochanter cylindrique, volumineux, prolongé en avant et en arrière à sa partie inférieure et ne permettant que des mouve- ments très limités; le tibia qui lui succède est plus ou moins bref et porte un tarse réduit, chez le mâle, à un seul article auquel, chez la femelle, s'en ajoute un autre, antéterminal, tout à fait rudimentaire, com.plètement soudé et en forme de bouton plus ou moins saillant. Les divergences que présentent entre elles ces différentes pièces, dans les deux sexes de chaque forme, sont remarquables et, en prenant comme base la régression la moins 3i8 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE prononcée, peuvent être disposées et énumérées dans l'ordre suivant : Lambessaniis cf. ■ — Trochanter court, à bord supérieur con- cave; inférieur légèrement oblique et convexe, à prolongements antérieur et postérieur arrondis et non saillants. Fémur un peu tronc-conique, plus épais au sommet qu'à la base et fortement renflé au-dessus de son articulation avec le tibia; celui-ci est moins épais, cylindrique et plus court d'un tiers environ que le fémur. Tarse régu- lièrement cylindrique, plus grêle que le tibia et plus long d'un quart à peu près ; il se termine par quatre fortes épines groupées par deux, de chaque côté d'une légère dé- pression transversale que surmon- tent sur la face postérieure d'autres épines échelonnées à des écarts variables et représentant des ves- tiges de l'armure complète et régulière qui existe à tous les articles des autres pattes. Lambessaniis Q. — C'est dans ce sexe qu'on observe le dévelop- pement maximum de toutes les parties de la patte antérieure. Le trochanter est très volumineux et les saillies de sa face inférieure atteignent, surtout en arrière, une taille plus grande que partout ailleurs; sa longueur totale représente presque un tiers de celle du fémur qui est épais, arrondi au sommet et à large ouverture articulaire. Tibia sub- cylindrique, un peu renflé vers le milieu, d'un diamètre inférieur à celui du fémur et plus long d'un quart. Tarse très allongé, mais proportionnellement moins grêle que chez le mâle. Sa lon- gueur dépasse de plus d'un tiers celle du tibia et atteint presque FiG. 25. Patte antérieuro de S. Lambc Stg-r., 9- LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 319 le double de celle du fémur; son sommet, arrondi, est précédé en avant par l'article appendiculaire formant ici un fort pro- cessus allongé. Abdelkader cf. — Trochanter plus court que celui de Laui- bessaniis et à saillies inférieures pas plus accusées ; fémur cylin- drique insensiblement renflé avant l'arti- culation et d'un quart plus court que le tibia dont la forme et le diamètre sont à peu près pareils; en diffère cependant un peu parce qu'il est légèrement courbé et épaissi au sommet. Tarse cylindro-conique, décroissant régulièrement de diamètre et terminé en pointe arrondie; sa longueur est inférieure d'un cinquième à celle du tibia. FIG. 20. Patte antérieure de .S'. Abdel- hader, Picr., (f. Abdelkader Q. — Trochanter relativement petit, à bord supé- rieur un peu déprimé; bord inférieur faiblement prolongé en avant, mais à saillie postérieure assez aiguë. Fémur plus épais au sommet qu'à la base et fortement renflé au-dessus de l'articulation avec le tibia, dont la lon- gueur est à peu près égale et la forme cylindrique. Tarse légèrement fusi forme, plus épais que le tibia et plus long d'un dixième; il est arrondi au sommet et l'article rudimentaire consiste en un bou- ton court placé un peu latéralement. Nelvai cf. — A l'inverse de Lambes- saniis, cette forme représente le terme le plus avancé dans l'atrophie des pattes antérieures. Trochanter petit et court, à bord supérieur bref et non creusé; bord inférieur un peu renflé en avant et obliquement arrondi en arrière. Fémur plus court que chez les deux formes précédentes FiG. 27. Patto antérieure de S. Abdel- kader, Pier., ?. 120 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE et régulièrement cylindrique. Tibia de même taille que le fémur mais plus épais et fortement fusiforme. Tarse d'un diamètre moindre et plus court d'un cinquième que le tibia, de forme ovoïde régulière et très allongée. Nelvai Q. — Trochanter subcarré, pres- que aussi volumineux que chez Lambessa- niLS, avec les saillies inférieures moins prononcées. Fémur très gros, ovoïde et seu- lement deux fois plus long que large. Tibia de même longueur que le fémur, un peu moins épais et renflé en avant. Le tarse est d'une taille légèrement supérieure à celle du fémur et du tibia, d'un diamètre nette- ment plus fort et, comme eux, de forme ovale, mais un peu allongé au sommet; l'article appendiculaire, inséré à peu près au même endroit que chez Abdelkader, se réduit à un très petit bouton à peine saillant. * * * FIG. 28. Patte antérieure de S. ^el vat, Seitz, cf. La ressemblance entre les pattes des groupes Abdelkader et Cordula est très grande et, chose curieuse, les antérieures parais- ^_ sent varier parallèlement dans les deux groupes; si des recherches futures ve- naient confirmer cette découverte et lui donner un caractère général, il y aurait lieu de tenir compte, dans l'avenir, de la comparaison de ces appendices pour la détermination et les caractéristiques taxonomiques des diverses races d'une même unité spécifique. Dans la race d'Italie méridionale décrite sous le nom de var. Calabra, les pattes antérieures rappellent, avec un développement moindre, celles de Lambessanus, et leur trochanter FlG. 29. Patte antérieure do IS. Nelvai, Seitz, $. LEPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 321 n'est pas muni à sa partie postérieure du prolongement saillant, si remarquable chez cette forme. I,e fémur est un peu fusi forme; il s'articule avec un tibia presque cylindrique et un peu courbe, de même longueur que lui-même, auquel fait suite un tarse un peu plus long, grêle et droit, muni, avant l'extrémité, d'un fort bouton granuleux, de forme très irrégulière. La Patte de la femelle est plus grosse et plus longue, avec un tibia plus nettement fusiforme; il porte un tarse plus long que lui, d'un tiers, et couvert au sommet, du côté postérieur, par des épines très aiguës, presque transparentes et serrées, aux- quelles succèdent deux lobes membraneux, aplatis transversale- ment, en partie granuleux à la base et recouverts des mêmes épines. Du côté externe, un épaississement géminé occupe la place de l'article rudimentaire et une forte épine implantée sur une forte base termine l'appendice. Chez Cordula, de Suisse, au contraire, les pattes sont presque aussi réduites que dans Nelvai d'El-Kantara; celles du mâle sont très courtes, avec un fémur épais et renflé, un tibia à peine plus long, suivi d'un tarse ovoïde de diamètre réduit et dont la longueur totale ne dépasse pas les trois quarts de celle du fémur; son somrc.et ne porte pas de processus, mais est seulement un peu épaissi. La femelle a des pattes plus volumineuses, à tibia d'un quart plus long que le fémur et muni extérieurement, dans l'exemplaire que j'ai étudié, d'une épine en haut et en dehors, assez près de l'articulation. Le tarse est presque cylindrique, il dépasse d'un quart le tibia et n'est pas armé d'épines à l'extrémité. L'article rudimentaire est gros, mais court, et possède encore une articu- lation assez distincte; il surmonte extérieurement le sommet divisé en cinq lobes assez proéminents, donnant chacun naissance à une soie aiguë et forte. Les deux formes ont des pattes postérieures plus courtes dans l'ensemble que celles de l'autre groupe. Leur fémur est plus épais, le tibia ne dépasse que de très peu la moitié de sa lon- gueur et il est armé d'épines plus faibles à l'exception de celle 21 322 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE du sommet qui est épaisse, fort longue et supportée par un pro- cessus saillant; le premier article du tarse est d'une taille légè- rement inférieure à celle du tibia. Armure génitale mâle. L'Armure génitale cf des Satyrus Abdelkader, Pier., Lavibes- sanus, Stgr. et Nelvai, Seitz, est conforme au type général carac- téristique de la famille et s'accorde dans l'ensemble avec celui des autres Espèces du genre Satyrus dont les ailes sont entières dans les mâles et à peine festonnées chez les femelles. 5. Abdelkader, Pierret, type. — Un eus long et fort, élargi à la base, terminé en pointe un peu courbe et au-dessous duquel s'insèrent des apophyses latérales en forme de tiges, à base large et à sommet obtus. Ces apophyses sont plus courtes que Vuncus, un peu divergentes et assez écartées pour qu'il puisse s'élever et s'abaisser en laissant entre elles et lui un écart assez grand. Entre les bases de Vuncus et des apophyses latérales, s'ouvre l'orifice anal qui est nu, ni saillant, ni chitinisé. Tegumen très développé, long et large, courbé à son insertion avec Vuncus duquel le sépare un sillon qui se prolonge en arrière des apophyses latérales; il porte inférieurement des processus symétriques aplatis et à sommet irrégulièrement arrondis avec lesquels s'articulent les valves. Immédiatement en arrière, nais- sent les connectifs latéraux rattachant le tegumen au saccus, qui est épais, court et triangulaire, avec l'extrémité arrondie. Entre les connectifs et au-dessus du saccus, suspendue par la membrane qui tapisse la cavité de l'Armure génitale externe, se trouve la lame subpénienne, sorte de gouttière large et courte sur laquelle repose et glisse Vcsdeagus. Les valves, articulées en haut avec les processus inférieurs du tegumen et en bas avec le saccus, sont moins longues que le tegumen et Vuncus réunis, un peu courbes, à bords subparallèles, légèrement rétrécies et arrondies à l'extrémité; leur longueur est LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 323 environ deux fois et demie ou deux fois trois quarts plus grande que leur largeur maxima, et leur bord inférieur forme un repli épais qui se prolonge au delà du milieu; on peut ainsi détailler leurs contours : Bord supérieur un peu tordu, creusé à la base d'une large con- cavité au centre de laquelle saille légèrement un épaississement chitineux et à laquelle fait suite une convexité allongée, peu élevée, qui en occupe toute la partie médiane; au delà de celle-ci, le bord se relève et s'épaissit fortement pour se terminer en une large pointe arrondie, en même temps qu'il se gar- nit de saillies spinuleu- ses épaisses et serrées, inclinées obliquement de la base vers l'extrémité, et de plus en plus nom- breuses jusqu'au sommet qu'elles couvrent de leurs rangs serrés. Bord inférieur recti- ligne ou à peine sub- concave dans son tiers proximal, puis continué par une courbe légère- ment bisinuée et rac- cordé enfin à la saillie terminale par une courte partie droite. Des poils raides, de lon- gueur variable, sont répartis sur les bords et les régions immé- diatement avoisinantes de la surface interne ; ils sont peu nombreux au bord supérieur où ils se trouvent à peu près loca- lisés sur la partie médiane; le bord inférieur en porte beaucoup plus, assez courts vers la base mais croissant rapidement de longueur jusqu'à l'extrémité de la valve où. ils sont abondants et longs ; quelques-uns plus grêles et très courts sont épars, çà et là, sur la membrane interne de la valve qui est entièrement inerme. FlÔ. 30. Armure génitale de 6'. Abdelkader, Fier., cT (pièces oaractéristiques, œdeagus exclus). 324 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE Mdedgus en tube irrégulier, légèrement tordu en S dans le plan sagittal, déprimé antérieurement dans le sens dorso-ventral, un peu renflé à la base et prolongé postérieurement par une lame basale peu longue, en gouttière tronquée et bordée d'un épaissis- sement chitineux. Il s'amincit et se termine en dessus par une pointe inégale de contours peu définis, au-dessous de laquelle s'ouvre obliquement le méat large et long, étendu sur plus du quart de l'organe, et par lequel fait saillie en une vesïca bilobée le sac intrapénien. Ses bords latéraux sont épaissis et portent des dents courtes, épais- ses, un peu courbées et dont la pointe est dirigée vers l'extré- mité; ces dents sont inégales et complè- tement dissymétri- ques, le côté gauche en portant 5 tandis qu'il n'y en a que 2 à droite. Au-dessous et un peu en arrière de la vesica terminale, le sac intrapénien est armé, sur une courte longueur de sa paroi interne, d'un revêtement d'épines formant un manchon inter- rompu à la partie supérieure ; ces épines sont de simples saillies de la membrane, très faiblement chitinisées et sans base distincte; elles paraissent plus nombreuses sur les parois latérales que sur la paroi inférieure et celles de chaque extrémité du revêtement sont un peu plus courtes que les autres; toutes sont couchées et diri- gées du dedans vers le dehors. Pendant la copulation, lorsque le sac intrapénien se dévagine dans les voies génitales de la femelle, leur direction devient inverse; elles hérissent complète- . FlG. 3i. Armure génitale de S. Lanibesmnus, Sigr., cf. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 325 ment la membrane dilatée qui les porte et ont alors un rôle de fixation et peut-être même de propulsion lors de l'émission de la spermatothèque. Subsp. Lambessanns, Stgr. — Très voisine de celle du type, l'Armure génitale de Lambessanns s'en distingue pourtant, dès l'abord, par un aspect plus robuste et l'épaisseur plus grande de ses diverses parties. Le tegiimen, plus large et plus long, est moins courbé à l'avant et ses processus inférieurs sont un peu plus allon- gés; Viincus n'est pas sensiblement plus grand, mais son épaisseur est plus forte et les apophyses latérales, à base très large, ont le sommet tronqué obliquement. A part une largeur un peu plus grande correspondant au développement général de l'ensemble, les connectifs latéraux et le saccus ne présentent pas de particu- larités spéciales, et c'est dans la valve et Vœdeagus que se trouvent les plus m.arquantes. La valve est moins régulièrement courbée et son contour est plus heurté; elle est aussi plus longue, et sa base élargie la fait paraître plus triangulaire; la concavité basale du bord supérieur n'est pas sensiblement différente, mais le renflement ou callosité médiane est plus élevée et moins longue et au delà le bord se continue presque en ligne droite jusqu'au sommet. La concavité basale du bord inférieur est plus prononcée et plus longue, elle aboutit à une courbe assez saillante à laquelle fait suite une longue portion rectiligne, parallèle dans sa moitié distale avec l'extrémité du bord supérieur auquel elle se relie par un coude brusque, et une partie terminale concave un peu oblique donnant à la valve un aspect tronqué caractéristique. On peut encore ajouter que le repli inférieur est plus large dans sa partie médiane et que la membrane interne est également dépourvue de spinules. \Jœdeag7is est plus grand dans toutes ses dimensions, mais sa forme n'est pas différente; seulement les fortes dents qu'on trouve à droite et à gauche de la partie distale chez Abdelkader sont ici réduites à une seule, du côté droit. Le sac intrapénien est 120 LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE un peu plus différencié et son armure épineuse interne est très développée; les épines qui la constituent sont plus nombreuses, plus denses latéralement et couvrent une surface plus étendue; sur les côtés, certaines paraissent plus fortement chitinisées. Subsp. Nelvai, Seitz. — Peu différente des précédentes comme aspect général, l'Armure de Nelvai n'en présente pas moins des particularités que la comparaison met rapidement en relief. Plus large que chez Abdelkader, le tegwnen l'est moins que chez Lam- bessanus, mais diffère des deux par son bord supérieur très peu courbé, presque droit et qui se rac- corde avec V 7m eus par une convexité intermédiaire entre celles d' Abdelka- der et de Lambes- sanus; ses proces- sus inférieurs sont plus courts que chez ces deux formes. IJvincîîs est égale- ment plus court, plus droit et sur- tout plus épais, tan- dis que ses apophy- ses latérales sont plutôt plus grêles, malgré la largeur de leur base. Les connectifs latéraux et le saccus n'offrent pas de différences. La valve est de même longueur que chez Larnbessaniis, avec une forme plus régulière et une surface totale plus grande; son bord supérieur, peu creusé à la base, ne présente qu'un renflement médian à peine accusé; dans sa partie basale, le bord interne rappelle Abdel- kader, il est peu concave d'abord, puis légèrement convexe et se continue en une courbe peu prononcée, parallèle au bord supé- FtG. 32. Armure grénitale do H. Nehai, Seitz, cf. LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 327 rieur; c'est à ce parallélisme, plus marqué et plus prolongé que chez Lambessaniis, qu'est due l'augmentation apparente de sur- face de la valve chez Nelvai. Elle se termine comme chez La7)i- bessamis par une partie tronquée, mais moins excavée et plus oblique; le rebord interne paraît intermédiaire pour la largeur FIG. 33. — Aideagus des trois formes ; A = a. Abdelkader, Pier., tu de profil et de dos. A = 6'. Nelvai. Seitz, vu de dos. L = *'. Lam-hcssaniis, Stgr., vu de dos. entre Abdelkader et Lambessamts, et il en est de même pour la pilosité; mais on trouve sur la membrane interne un caractère qui fait totalement défaut dans ces deux formes. C'est une aire rugueuse, bien développée, constituée par de courtes épines fortement chitinisées, inégales et inclinées de L'ÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE la base vers rextrémité; la plupart sont droites, mais il en existe aussi de courbes ; leur disposition est irrégulière, un peu rayon- nante, le champ qu'elles couvrent est ovalaire, mal délimité et situé au-dessous de la callosité médiane du bord supérieur. l^'csdcagus n'est pas plus long que celui d'Abdel/cader, il paraît un peu plus mince, mais porte quatre dents à gauche et trois à droite; à cette augmentation des dents, correspond une réduction notable dans le nombre des aspérités du manchon spinuleux intrapénien qui ne cou- vre plus que la moitié ^^&lW'é^ /(\V'VS'''''^>M ^"'''^°^' ^^ ^^ surface véK»^ « ''^^W (fe^fW'^''i*v*wl occupée chez Lambes- \%vfcVl'.''if KU.^mAÏmà sanus; elles sont aussi un peu plus faibles et moins colorées. L'Armure génitale mâle de Satyrîts Cor- dida est beaucoup plus volumineuse que celle du groupe d' Abdelka- der, avec qui elle mon- tre des différences très notables. Le tegwnen, Viinciis et les apophyses latérales ont une forme analogue, mais sont de moitié plus grands dans toutes leurs dimensions; il en est de même des connectifs latéraux et surtout du sacciis sensiblement plus prolongé en arrière; on peut aussi remarquer que Vuncus est moins épais proportionnellement, et arrondi au sommet, au lieu d'être terminé en pointe courte aiguë. Extrémité de Vœdeagus de &'. Nelvai, Seitz, laissant voir par transparence le manchon épineux du sac intrapénien (pièv^e montée au baume). FiG. 34. Extrémité de Vœdeayiis de S. Lambessanus, Stgr., avec le manchon épineux du sac intrapénien vu par transparenee (pièce montée au baume). LÉPIDOPTÉROLOGIE COAIPARÉE 329 La valve est deux fois plus large à la base et se termine en pointe très aiguë; son bord supérieur est à peine concave, il forme près de la base une longue et haute convexité et se rattache à l'arti- culation par une inflexion brusque et profonde. La pilosité est restreinte et manque presque complètement au bord supérieur qui est tout à fait inerme, ainsi que la membrane interne. \Jœdeagus participe de l'augmentation générale des dimen- sions; il est plus régulièrement cylindrique et se termine posté- rieurement par une longue lame basale; sur toute sa partie médiane, sont éparses de petites granulations chitineuses et ses bords portent aussi des dents inégales dont 4 à droite et 2 à gauche, mais, caractère tout à fait particulier, la dent terminale de chaque côté se trouve placée sur une plaque chitineuse allongée et séparée du cylindre principal de l'organe par une membrane mince. Le sac intrapénien ne parait pas former de vesica bilobée; il porte sur sa paroi inférieure une espèce de gouttière chitineuse très étroite et allongée correspondant à la partie membraneuse médiane séparant les plaques qui supportent les dents terminales, et sur l'extrémité de laquelle s'insère une partie des dents du sac intrapénien; ces dents sont en nombre plus réduit que dans le groupe Abdelkader et aussi plus inégalement développées; celles du sommet de la gouttière étant de beaucoup les plus grandes et les plus épaisses, et les plus éloignées de ce point très petites et transparentes. Armure génitale femelle. L'armure génitale femelle en majeure partie cachée sous le septième sternite, auquel la relie la membrane articulaire profon- dément réfléchie des septième et huitième segments, est composée d'une large plaque vaginale de structure compliquée, grossiè- rement quadrangulaire, encadrée par deux expansions latérales en forme de triangles allongés et un peu courbes; l'ensemble donne à peu près en plan la figure d'un croissant à concavité tournée vers l'extrémité de l'abdomen. .-):> "^o I-KPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE Elle est séparée, par les extrémités amincies du huitième ter gite, d'une vaste surface membraneuse plissée longitudinalement, aboutissant entre la base des valves de l'ovipositor et que sa structure particulière permet de considérer comme un organe sensoriel en rapport probable avec les fonctions sexuelles, mais dont le rôle est énigmatique. La base de cet organe forme, le long des bords du huitième tergite, un bourrelet élevé, largement interrompu sur la ligne médiane et découpé en épais festons couverts d'épines inégales, perpendiculaires à la surface du tégument duquel elles naissent directement et sans base diiïé- FIG. 3fi. Ensemble do l'Armuro génitale femelle de S- Abcleikader, Pier., vu de profil. renciée. Tout le reste de sa surface est entaillé par des plis pro- fonds, lisses et parallèles un peu ramifiés perpendiculairement dans la profondeur et qui persistent à l'état de stries denticulées, lorsqu'elle se dévagine en un sac volumineux sous l'effet d'une pression interne. La plaque vaginale apparaît divisée en un certain nombre de pièces par des plis, des saillies et des expansions. Examinée de face, l'extrémité de l'abdomen étant orientée en haut, on peut lui considérer une face postérieure concave, qui se confond avec la paroi abdominale, et une face antérieure convexe, masquant LÉPIDOPTÉROLOGffi COMPARÉE 331 la pi^emière, et couverte par la membrane articulaire; entre les deux se trouve un espace libre (.\m constitue la ca\ité sexuelle externe. La face postérieure est limitée en haut par le bord supérieur, libre, et en forme de gouttière excavée sous la membrane arti- culaire précédant le huitième segment; il est rectiligne, membra- neux ou faiblement chitinisé dans sa partie médiane et aboutit de chaque côté à de larges et profondes invaginations chitineuses en forme de cône arrondi, enfoncées obliquement dans l'abdomen et dont le bord externe se termine inférieurement en pointe courte. Du milieu du bord externe, naît en arrière de la gouttière une épaisse saillie qui descend verticale- ment en diminuant régulièrement de largeur jusqu'au-dessus de l'orifice vaginal ; celui-ci est circulaire et s'ouvre aux deux tiers inférieurs du fond de la cavité sexuelle, dans une plaque for- mée par l'union de deux lames chiti- neuses étendues à droite et à gauche de la saillie médiane, s' arrondissant au- dessous des invaginations coniques terminales du bord supérieur et se rac- cordant avec les expansions latérales au fond des profondes échancrures que découpe, dans la base du bord supérieur de celles-ci, la pointe terminale des invaginations coniques. Immédiatement sous l'orifice vaginal s'étend horizontalement une petite et mince lame arrondie, suivie inférieurement de plis- sements épais, vermiculés et réfléchis en angle aigu, engagés parallèlement les uns dans les autres et formant deux groupes symétriques à droite et à gauche de la ligne médiane. Enfin, au- FlG. 37. Schéma de coupe longitudinalQ_de l'Armure g'énitale externe de N. Alxlelkader, Pier., 9. T' = Septième tergite. 6'' = Septième sternite. T' = Huitième terg-ite. T' = Neuvième tergite. Oip. = Ovipositor. (.'. ij. = Cavité génitale externe. B c. = Bourrelet épineux limitant inférieurement la mem- brane plissée. 33- LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE dessous de ces plis prend naissance une très large lame chiti- neusc, glabre et concave, qui s'accole à la paroi antérieure de la cavité sexuelle externe. Elle se recourbe presque jusqu'au niveau du bord supérieur et, de chaque côté de sa base, ses bords se prolongent sur la paroi opposée en deux crêtes saillantes symé- triques, excavées en dehors et atteignant à peu près le fond de l'échancrure qui marque la jonction des expansions latérales triangulaires et des plaques géminées entourant l'orifice d'accou- plement. fjg. 38. Armure génitale extornj de S. Abdclkader o. partie principale vue de face. Cette lame se présente chez Abdelkader comme un trapèze à angles supérieurs largement arrondis et à partie inférieure convexe; son plus grand diamètre, entre les angles inférieurs, est supérieur à l'écartement des cavités terminales du bord supérieur; sa surface est rayée de saillies transversales assez courbes, peu nombreuses et isolées. Libre dans la cavité génitale externe, cette pièce caractéristique s'appuie par sa face externe convexe contre la membrane articulaire réfléchie. Dans l'ensemble, les plaques génitales des femelles de LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 333 Lajnbessanns et de Nclvai ne s'écartent pas notablement de celle d' Abdel kader; mais elles s'en distinguent par le 'développement des invaginations terminales du bord supérieur et la structure de la large lame antérieure. Dans ces deux formes, les invagi- nations du bord supérieur sont plus larges et plus profondes, surtout chez Lainbessauns où leurs dimensions sont considé- rables; l'écart entre leurs sommets est de beaucoup supérieur à FiG. 39. Lame foliacée antérieure de la plaque vaginale et oarites terminales du bord supérieur df- *'■ Abdelkader, Pier., Ç. la largeur maxima de la lame subvaginale. Celle-ci est aussi plus épaisse et apparaît comme un trapèze irrégulier à sommet largement échancré; elle est parcourue par des saillies longitu- dinales nombreuses et épaisses. Chez Nelvai, la forme générale est très irrégulière ; le lobe supérieur gauche est presque de moitié moins volumineux que le lobe droit; il y a une longue saillie, bifurquée en haut à gauche, parallèle au bord supérieur; une autre oblique du lobe droit vers l'angle inférieur gauche qu'elle n'atteint pas et qui se trouve reliée à la première par deux autres petites saillies verticales parallèles délimitant ainsi au centre de la LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE I)laquc un rectangle de chaque côté duquel, et plus près des bords, se voient encore quelques courtes nervures verticales et obliques. La lame de Lanibessanus est plus haute, ses bords plus entaillés et l'évidement qui échancre son sommet, forme deux lobes presque égaux; il n'y a pas de plateau limité au centre, FIG. /lO. Lame foliacée antérieure de la plaque vaginale et cavités terrainales du bord supérieur de H- iSetvai, Seitz, 9» mais du sommet de chatjue lobe descendent trois longues saillies verticales et presque parallèles; inférieurement on en trouve encore quelques autres, très brèves et plus ou m.oins transversales. Bien qu'une grande réserve s'impose dans l'interprétation des rapports apparents de pièces et d'organes dont nous connaissons le rôle, mais dont le fonctionnement exact ne se peut étudier que sur le vivant, je ne puis m'empêcher de remarquer la corrélation apparente qui existe entre le développement des culs de sac latéraux du bord supérieur de la plaque vaginale des femelles et la forme de l'extrémité des valves des mâles auxquelles ces pièces paraissent servir de butoir pendant la copulation. LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE -) T r A cette constatation s'en ajoute une autre tirée de la compa- raison d'un appareil chitineux de l'armure interne très peu utilise jusqu'ici et dont les différences paraissent aussi corrélatives de celles que présentent chez les mâles V œdeagus et plus spécia- lement le sac intrapénieii. II s'agit de la double zone épineuse FlG. il. Lame Joliacée antérieure de la plaque vaginale et cavités terminales du bord supérieur de «V. Lambessanue, Stgr., 9- développée sur la paroi interne de la poche copulatnce {biirsa copuiatnx) et désignée sous le nom de lames dentées {laniïmc dentatœ). Elles consistent chez les Satyrïdes en surfaces bien définies, recouvertes de rangées transversales de fortes dents chitineuses formant deux arcs allongés, peu courbés, opposés par leur concavité et dont les extrémités se rapprochent sans se tou- cher; étendues sur toute la hauteur de la biirsa cofidatrix, elles sont symétriques sans que la disposition des dents qui les com- posent soit rigoureusement pareille de part et d'autre. Ces dents sont plus ou moins hamuliformes et divergentes par rapport à l'espace médian séparant les deux arcs; de l'un à l'autre, elles 336 LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE varient dans les rangées correspondantes, soit par anastomose, soit, par séparation de quelques-uns de leurs éléments; mais ces variations sont minimes et insuffisantes pour altérer les carac- téristiques propres à chaque forme et qui demeurent bien nettes. Parallèlement à ce qu'on observe dans le développement de Vcs- deagus et de l'armure épineuse du sac in- trapénien, c'est chez Lambessanus que les lames dentées attei- gnent les plus grandes dimensions et la plus forte structure; ce sont de longs croissants régulièrement rétrécis en haut et en bas, à peine courbés et dont le bord interne est presque droit. Ils com- prennent chacun tren- te-six rangées de dents dont la première et la dernière une seule, et la plus large — vers le milieu — ■ six, dont une très petite. Longues et épaisses, du sommet vers l'extrémité inférieure, ces dents se réduisent rapidement de taille et d'épaisseur pour finir en une série de petites plaques de moins en moins saillantes et de plus en plus minces. Chez Abdelkadcr, nous trouvons avec une longueur moindre une courbure bien plus accusée, des dents moins fortes, disposées moins irrégulièrement, mais avec des caractéristiques très voisines FIG. -^ Lamina dentata gauclip de la bursa copu latrix chez les femelles de : L = IS. Lambcssanu iV = S. yeliai. Seitz. A = S. Abdelkadt'r, Fier Stjrr. LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 337 dans le sommet et l'extrémité inférieure; à cet endroit, la dégra- dation des dents se fait plus régulièrement et porte sur les éléments des douze dernières rangées sur les trente-huit qui composent chaque lamina déniât a. Un peu plus courte f\\x'Abdelkader, Nclvai. est intermédiaire pour la courbure entre celle-ci et Lambessanns ; mais elle s'écarte des deux par un aspect plus massif, dû à ce qu'elle commence par une ligne de trois fortes dents égales, immédiatement suivie de rangées plus nombreuses, et se termine inférieurement par une pointe qui ne comporte c}u'une rapide diminution du nombre des dents, sans réduction accusée dans le volume de celles-ci; elle finit brusquement par deux dents géminées à courbures opposées représentant la trente-quatrième et dernière rangée. Les différences que présente avec celle du groupe Abdelkader l'Armure génitale femelle de Saiyrus Cordula sont bien plus marquantes que celles qui existent entre les organes mâles. Elle offre naturellement la même disposition générale, mais ses dimensions sont plus grandes. On constate tout d'abord l'absence complète de bourrelet festonné épineux et de membrane régulièrement plissée. Le bord supérieur, membraneux dans son milieu, est formé de deux profondes gouttières convergentes, divisées intérieurement par des plis asymétriques en plusieurs lobes dont les plus volumineux sont les plus rapprochés de la ligne médiane et qui, au contraire de ce que nous avons observé dans l'autre groupe, s'atténuent et s'effilent latéralement. L'orifice d'accouplement s'ouvre également à la partie inférieure d'un renflement vertical, mais la chitinisation de la paroi posté- rieure ne forme pas de croissants latéraux, et il n'y a pas de petite lame foliacée, ni de plis encastrés symétriques. La lame antérieure est extrêmement large, environ trois fois plus que haute et presque de même diamètre que toute la cavité sexuelle; elle est divisée par une échancrure médiane très profonde en 22 33^ LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE deux lobes symétriques à sommet assez aigu, parcourus par des sillons longitudinaux, irréguliers, peu nombreux et entièrement recouverte de courtes épines chitineuses à sommet émoussc, dressées verticalement sur toute sa surface. Les laniinœ dentatœ de la bursa copulaîrix sont plus longues, plus étroites, composées de dents plus régulières et plus espacées que dans le groupe Abdelkader; les rangées les plus larges n'en comptent pas plus de trois et on remarque que ces dents ne sont pas réparties sur des lames plus ou moins distinctes mais s'érigent directement de la plaque unique formée par toute la lamina dentata sur laquelle elles sont disposées; elles sont aussi moins courbes et leur sommet forme une courte pointe brusque- ment rétrécie. Chacune des deux laniime comporte 46 rangées diminuant régulièrement de largeur et de nombre vers l'extré- mité inférieure. Cette étude sommaire a porté sur un trop petit nombre d'indi- vidus pour qu'il soit possible d'en tirer dès maintenant des con- clusions définitives. Elle comporte cependant un certain nombre d'enseignements utiles et confirme l'identité ^spécifique des trois formes : Abdelkader, Lauihcssauns et Nelvat; car aucune des différences qui distinguent celles-ci, prise isolément, n'est d'ordre spécifique, quelle que soit son importance apparente à première vue, alors que, dans leur ensemble, elles fournissent une série de transitions qui rapprochent ou opposent alternativement ces formes. En nous les faisant connaître plus complètement, elles nous donnent une idée plus juste de la valeur taxonomique qu'il convient d'attribuer à chacune et, de plus, leur comparaison fait ressortir à côté des divergences, certaines corrélations que nous signalerons en les résumant brièvement. Les différences que montrent les Antennes sont minimes en apparence, et, seule, une constance suffisante permettrait de défi- LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 339 uir leur importance; celle qui porte sur le nombre des articles est sans doute la moins significative, car nous savons que ce nombre peut varier dans bien des Espèces entre les individus obtenus ab ovo d'une même ponte, et j'ai donné plus haut un exemple très net de tendance à la fusion complète, montré par deux articles de la tige chez un mâle de Lambessanus. Pour les organes sensoriels variés qui se répartissent à leur surface, nous manquons tout à fait de termes de comparaison, c'est une étude spéciale qui reste à faire en entier — ou à peu près. Il n'est cependant pas sans intérêt de remarquer que si les différences de race à race, à l'intérieur d'une même Espèce, ne sont pas très accusées, il n'en est pas de même d'Espèce à Espèce, comme nous l'avons indiqué entre Abdelkader et Conliila. De la Trompe, je dirai peu de chose, me bornant à renvoyer à ce qui la concerne, dans la partie analytique; mais je veux signa- ler en passant que le nombre et la répartition des organes sen- soriels dont elle est munie ne paraît pas en rapport avec les con- ditions de fonctionnement que lui assure l'état de la végétation dans les localités propres à chaque forme. On ne voit, en effet, aucune corrélation apparente entre le chiffre des papilles de Nelvai, celui un peu supérieur d' Abdelkader et de Lambessanus, et le nombre plus réduit de Cordula, à qui la flore abondante et variée des massifs européens assure un fonctionnement par- ticulièrement actif. Ce qu'on remarque d'abord dans les Palpes, c'est le dimor- phisme sexuel qu'ils présentent à des degrés divers, suivant les races. Très notable chez Nelvai, il est moindre chez Lambessanus et peu accentué chez Abdelkader. Par contre et malgré son enver- gure plus restreinte, ce dernier se rapproche de Nelvai par la longueur, tandis que Lambessanus est sur ce point, comme sur tant d'autres, supérieur en taille aux deux formes précédentes dans toutes ses parties. C'est principalement sur le premier article que s'observent les caractéristiques propres à chaque race; elles consistent d'abord 340 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE dans sa forme et son volume, qui varient dans les limites assez grandes que nous avons notées, ensuite et surtout dans les organes sensoriels de deux sortes dont sa face interne est pour- vue. On constate le développement inégal et asymétrique de l'organe perforé dont les pores sont répartis en apparence d'une façon tout à fait quelconque; peut-être pensera-t-on que l'étendue et la structure de l'organe rugueux (plaque de Reuter), mieux déûni dans sa forme et plus différencié présente une importance plus grande; dans tous les cas, nous ne voyons pas de rapport entre d'autres organes et ceux-ci, dont le rôle et le fonctionne- ment sont, du reste, complètement inconnus. Depuis les belles recherches de A. Pictet, on sait que les écailles ont une tendance très grande à se déformer au cours de leur développement, sous l'influence des variations thermiques; il n'est donc pas surprenant que nous ayons à constater des diffé- rences assez nettes dans l'écaillure des S. Abdelkader, Larnbes- saniLS et Nelvai, puisque ceux-ci ont à supporter des régimes climatériques différents dans leurs habitats particuliers; mais, en dehors des caractéristiques qui en résultent pour chacune des trois races, ces différences constituent encore un exemple de variation subie en dehors de la coloration, celle-ci restant sem- blable chez toutes à l'endroit où les écailles ont été prélevées. L'absence, chez Nelvai, des écailles androconiales est assez singulière. Si elle ne constitue pas un cas exceptionnel et tout à fait particulier à l'exemplaire étudié - — ce que je n'ai aucune raison de croire — et qu'on retrouve quelque chose d'analogue dans d'autres Espèces, elle peut être de nature à diminuer l'importance attachée par la plupart des Auteurs à la présence ou à l'absence des Androconies. Il me suffira de citer parmi les Satyrides le groupe si vaste des Lelhinœ, dans lequel des espèces manifestement voisines par ailleurs se trouvent dispersées et réparties dans des séries éloignées sous le seul prétexte que leurs mâles sont, ou non, pourvus de ces caractères sexuels secondaires, pour montrer combien paraît discutable, ou au moins exagérée, la valeur attribuée à ces productions. Chez ces mêmes Lethinœ, LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 341 comme d'ailleurs chez la plupart des Satyrides, on peut trouver dans le développement des Androconies des variations plus ou moins étendues, souvent caractéristiques de races géographiques, mais parfois aussi purement individuelles. Les Pattes offrent des particularités nombreuses et intéres- santes. Indépendamment des antérieures, dont le fonctionnement normal est aboli et qu'il faut étudier à part, les deux dernières paires constituent un des meilleurs exemples sur lesquels se vérifie l'absence de rapport entre le développement des appen- dices et le volume du corps, que nous avons déjà rencontré ail- leurs. En nous en tenant aux postérieures, seules étudiées com parativement ici, nous voyons que, chez Nelvai, elles sont bien plus faibles et plus courtes que chez Lambessanus dont la taille est moindre et qu'elles ne dépassent que de peu en lon- gueur celles d' Abdelkader, qui a lO millimètres de moins d'en- vergure. Cette différence ne résulte pas d'une cause commune aux trois paires, puisque, si nous comparons à ce point de vue les pattes antérieures, nous voyons bien, là encore, Lambessanus présenter les plus longues et les plus fortes, mais Abdel- kader vient s'intercaler entre elle et Nelvai, chez qui elles sont — et de beaucoup — les plus courtes. La cause de la régression fonctionnelle de ces appendices est aussi énigmatique que les modifications qu'elles montrent d'une forme à l'autre et le rôle qu'elles jouent actuellement. Les variations qu'elles présentent, et dont nous avons noté le parallélisme entre le groupe Abdel- kader et deux des formes du groupe Cordula, suffisent à établir qu'elles participent sûrement aux fonctions de l'insecte et qu'elles réagissent aussi aux influences modificatrices du milieu; à ce titre, elles méritent d'intervenir dans la détermination des races chez les Rhopalocères à station tétrapode. L'amplitude de la variation du développement des pattes antérieures est telle, et ses degrés sont si tranchés, au moins entre les formes extrêmes, que si mon examen avait porté seulement sur LauibessavMS et Nelvai, je les aurais tenues pour spécifique- ment distinctes; ici encore Abdelkader est intervenu comme 342 LEPIDOPTÉROLOGIE, COMPARÉE terme moyen et j'ai dû renoncer à une séparation qui perdait du coup sa justification. En dehors du grand développement relatif de la patte anté- rieure tout entière, celui pris, ou plus exactement gardé, par le tarse chez Lajubessanus est très remarquable, et doit être inter- prété par rapport à A^bdelkader et 'N elvai, comme l'indice d'une évolution moins avancée dont on trouve d'ailleurs une autre preuve dans l'existence des quelques épines qui arment son sommet chez le mâle, et représentent les derniers vestiges de l'armure tarsale disparue en même temps que la segmentation en articles distincts. \J Armure génitale des deux sexes montre des différences variées. Dans le mâle, si nous considérons d'abord Vœdeagiis, nous voyons que la dimension d'une part, le nombre et la grandeur des dents qui l'arment de l'autre, séparent tout d'abord Lainbessanus de N elvai et à' Abd el leader, ceux-ci ayant une longueur moindre et des dents plus nombreuses. Par contre, le développement du sac intrapénien montre une grada- tion inverse; c'est dans Lajubessaïuts qu'il atteint le maximum d'étendue et de différenciation, et chez Nelvai qu'il est le plus restreint. J'ai déjà indiqué la corrélation qui s'observe entre cet organe et les laminœ dentatce de la femelle et je me borne à la rappeler. Dans les organes préhensibles : iinais et ses apophyses, connectifs latéraux, teginnen et sac eus, on ne trouve que des divergences peu accusées; il n'en est pas de même pour les valves qui sont plus caractéristiques. Celle d' Abdelkader, par sa forme plus courbe et à sommet en pointe arrondie, s'écarte assez distinctement de celles de Lambessanus et de Nelvai dont les bords sont plus ou moins longuement parallèles dans leur partie distale et qui sont tronquées obliquement à l'extrémité; la dernière possède en outre en propre un caractère qui fait entiè- rement défaut chez les deux autres, c'est Vaire rugueuse déve- loppée sur sa membrane interne que j'ai décrite et dont je n'avais constaté jusqu'ici la présence que chez des Espèces distinctes, LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 343 î ' » = r- ' ■ particulièrement ehez les diverses races de Satyrus Parisatis, Kollar, d'Asie occidentale. J'ai remarqué que cet organe varie en densité et en étendue, celles-ci pouvant être restreintes. En ce qui concerne Nelvai, l'asymétrie de sa disposition, le désordre de ses éléments, leur inégalité de développement indiquent que nous nous trouvons en présence d'un caractère en voie de diffé- renciation assez peu avancée et, par conséquent, d'une valeur incertaine. Le rapport qu'il paraît y avoir entre son existence et l'absence des écailles androconiales, n'en est pas moins intéres- sant à signaler. L'étude de V Arunire génitale femelle, à peine commencée, demanderait une plus longue pratique et l'appui de comparai- sons nombreuses pour permettre d'apprécier avec assez d'exac- titude les différences que nous avons rencontrées. De celles-ci quelques-unes, telles que les cavités terminales du bord supérieur de la plaque vaginale, la longueur des lamïnce dentativ et la force des dents qui les couvrent, sont symétriques des parties correspondantes de V Arnnire mâle; il en est d'autres comme la vaste lame foliacée libre dans la cavité génitale externe dont la dimension, la forme et la sculpture paraissent sans rapport avec aucun organe mâle; mais je noterai en passant que c'est préci- sément cette lame qui, de tous les caractères mis en parallèle entre les groupes Abdelkader et Cordula, présente les caractères les plus divergents. Pour conclure et comme conséquence de ce qui précède, je vois, pour ma part, dans l'Espèce Abdelkader, trois formes d'un même type ayant acquis, chacune, par l'effet de leur localisation définie et de leur adaptation éthologique, des caractéristiques différentielles divergentes si accentuées qu'elles doivent être considérées comme des Soiis-Espèces, au sens le plus exact du mot. Si larges, en eftet, que soient les limites que l'on peut assigner d'avance aux variations individuelles, je ne pense pas 344 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE qu'elles puissent combler des écarts aussi grands que celui qu'on observe entre les pattes antérieures de Lambessanns et de Nelvai qui sont précisément, dans la répartition géographique discon- tinue de l'Espèce, les deux formes à la fois les plus opposées par le degré d'évolution et les plus rapprochées par l'habitat. Ce que nous savons des lois de l'évolution, et notamment de l'orthogenèse, nous permet de prévoir que cette différenciation déjà si accentuée des trois Sous-Espèces dans presque toutes leurs parties, ne pourra que s'accentuer, dans l'avenir, pour aboutir enfin à leur séparation complète. En ce qui concerne Lambessanus et Nelvai, j'ai déjà indiqué que cette séparation pourrait presque être considérée comme un fait acquis, si Abdel- kader n'existait pas, non plus que les individus transitionnels que je n'ai pas vus, mais dont l'existence est possible. Dans tous les cas, la disposition philogénique probable des trois Sous-Espèces formant actuellement le groupe Abdelkader, peut être imaginée ainsi : Souche? Lambessantts Abdelkader Nelvai A un point de vue général, nous trouvons encore dans les différences de ces races une preuve de la répercussion sur la morphologie tout entière des influences locales dans les diverses formes d'une même Espèce. Bien que généralement admise, cette idée n'avait jamais été vérifiée — à ma connaissance tout au moins — sur un ensemble de caractères des deux sexes chez les Lépidoptères, et l'on peut remarquer qu'elle se trouve concorder ici avec les modifications subies par la coloration et confirme les conclusions admises et basées sur ce seul caractère. Paris, juillet 1914. F. Le Cerf. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 345 Melanargia Lucasi, Rambur. L'Espèce a été l'objet d'une longue dissertation qui se trouve imprimée aux pages 354-357 du Vol. III des Etudes de Lépidoptérologie comparée. J'ai fait figurer sous les n°^ 683 et 684 de la PI. LXXIV, dans le Volume V^ du même ouvrage, un cf pris à Sebdou en mai 1907 et une Q récoltée à Lambèse en juin de la même année. Le cf présente une série complète d'ocelles sur le dessous des ailes inférieures, tandis que chez la Q, on voit, comme dans le plus grand nombre des exem- plaires, subsister la lacune intranervurale entre les deux groupes de 2 et de 3 taches ocellées. Je ne pourrais que rééditer les renseignements qui sont insérés au V^ol. III, dans la notice consacrée à la Melanargia Lucasi, une des espèces de Rhopalocères les plus communes en toute la contrée barbaresque au nord de la région saharienne. Je prends donc la liberté de prier le Lecteur de vouloir bien s'y reporter. Il est très intéressant d'observer dans le Genre très homogène Melanargia l'application étendue à toutes les Espèces du Genre, des mêmes Lois de variation. Ainsi la règle actuelle, c'est que l'un des espaces intranervuraux des ailes inférieures manque de tache submarginale ocellée, tandis que tous les autres espaces intranervuraux sont occupés par un ocelle. Mais il arrive : 1° que la lacune dans cet espace intranervural se trouve comblée par un ocelle, ce qui forme alors une série non interrompue de taches ocellées aux ailes inférieures, en dessus, comme en dessous, ou sur l'un des côtés plus complètement que sur l'autre; 2° inversement, que toutes les taches ocellées, ou simplement que quelques-unes de ces taches fassent défaut. Ces deux modes contradictoires de variation atteignant également toutes les Espèces de Melanargia, constituent comme un des caractères même du Genre. M. Harold Powell m'a remis la notice suivante au sujet de Melanargia Lucasi : 346 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE u L'Espèce est abomlante dans ies prairies montagneuses, an nord et au nord-ouest de Sebdou, où je l'ai rencontrée à partir du 20 mai 1907; elle continue à voler, dans cette région, jusqu'à la fin de juin. Elle paraît manquei à la région de Géryville; cependant, les localités où l'on pourrait espérer la trouver n'y sont pas rares, surtout dans le massif boisé du Ksel. Plus à l'est, près d'Aflou, nous avons trouvé Lucasï commun, mais localisé; le papillon n'y volait que dans les prairies marécageuses — ■ parfois très peu étendues — aux environs de certaines sources. L'Espèce n'a commencé à éclore, en 191 1, à Afiou, qu'après le 15 juin; la saison, en 191 1, était certainement en retard, mais, d'une façon normale, Lucasi doit éclore plus tard, dans le Djebel-Amour, qu'à Sebdou et dans les localités moins élevées du Tell. Je l'ai noté, comme très frais, autour de l'Ain-Aflou, le 28 juin 191 1; assez frais, le 8 juillet et commun, le 12 juillet, dans une prairie touffue et marécageuse entourant l'Aïn-Tirahine; à cette dernière date, presque tous les cf étaient usés par le vol, mais certaines Q se trouvaient encore très fraîches. Melanargïa Lucasi est abondant dans le nord de l'Aurès. Nous l'avons rencontré communément dans les prairies et les clairières gazonnées, aux environs de Khenchela, en mai et juin 1908, par i.ioo à 1.200 mètres d'altitude; les premiers individus y ont été signalés, le 23 mai; il est probable, cependant, que l'éclosion avait commencé quelques jours plus tôt; le 13 juin, nous prenions encore des Q bien fraîches. Plus haut sur les montagnes, l'Espèce paraît un peu plus tard que dans le voi- sinage immédiat de Khenchela. Il en est de même à Lambèse, où ce papillon est extrêmement abondant dans toutes ies prairies cultivées, dans les ravins des montagnes et dans les clairières de la forêt. Les 7 et 8 juin 191 3, nous avons rencontré un nombre phéno- ménal d'individus dans le haut des vallées de Talramt et cfe l'Oustili, surtout dans le fond des petits ravins, où, par places, l'herbe ét^it haute et vigoureuse. Pareil fait avait été noté, le 10 juin 191 2, à Baïou, près Lambèse. LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 34/ Lucas} ne fréquente pas les coteaux secs et les jDlaines arides; je ne l'ai jamais vu dans la région désertique; ses mœurs sont semblables à celles de M. Galathea et de M. Lachesis. J'ai souvent observe, de très près, la Q libre, dans l'espoir de me rendre compte de la façon dont est effectuée la ponte; ces observations m'ont convaincu que l'œuf n'est pas fixé sur une tige, feuille ou objet Cjuelconque; je crois qu'il est lâche par la Q, pendant son vol et qu'il tombe à terre ou dans une touffe. Je n'ai jamais pu constater la chute de l'œuf, mais les agisse- ments des Ç Q m'ont quelc]uefois persuadé qu'elles pondaient pendant que je les observais. La Q qui semble vouloir pondre, vole, pour deux ou trois minutes, à une faible hauteur au-dessus de l'herbe; elle passe souvent entre les chaumes et feuilles, n'avançant que lentement, mais avec un battement d'ailes assez rapide; ensuite, elle se pose sur une tige ou sur une feuille et ne reprend son vol au-dessus des Graminées qu'après quelques minutes de repos. Comme je n'ai jamais vu pondre une Q posée, j'imagine que les œufs sont toujours lâchés pendant le vol. Les œufs que j'ai extraits du corps des ç Q , ressemblent beau- coup à ceux de M. Galaihea-Procida du sud de la France. La chenille, que j'ai trouvée plusieurs fois, dans son dernier stade, en mai, aux environs de Lambèse, a une grande ressem- blance avec celle de Gaîathea-Procida, qu'elle dépasse en taille cependant; elle présente deux formes. Tune verte, l'autre d'un gris carné clair. La forme verte est de beaucoup la plus commune, à en juger par les individus rencontrés à Lambèse. Dans son dernier stade — et probablement dans les deux stades précédents — la chenille se tient cachée, le jour, dans la touffe d'herbe et ne monte sur les feuilles, pour manger, que la nuit. Elle vit sur plusieurs Graminées et je l'ai rencontrée quel- quefois, en cherchant avec la lanterne, le soir, dans l'herbe des prairies au-dessus de Lambèse, ainsi qu'à Timthemam. Elle atteint son maximum de développement, en avril-mai, à Lambèse. A 1. 200- 1.500 mètres, sur le versant nord des montagnes, la 34^ LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE chenille ne se rencontre guère après le 15 mai, mais à Timthemam. à une altitude d'environ 1.700 mètres, je trouvais encore des chenilles, bien avancées, à la fin de mai 191 3. L'éclosion du papillon se produit trois ou quatre semaines après la chrysalidation. La chrysalide ne me paraît pas différer sensiblement de celle de Gdlaihea-Procida, sauf par la taille plus grande. En captivité, les chenilles se sont chrysalidées à la surface de la terre contenue dans la boîte d'élevage, sans avoir construit de cocon ». Melanargia Syllius, Herbst, var. Pelagia, Obthr. J'ai traité déjà assez longuement de l'histoire de Melanargia Syllius dans les Volumes III et V (part. J ) des Etudes de Lépi- doptérologie comparée. A la page 362 du Vol. III, j'ai signalé l'Espèce comme ayant été capturée à Sebdou, en mai IQO/, et aux pages 188 et 189 de la Part. I du Vol. V, j'ai défini les caractères qui différencient, chez Melanargia Syllius, la race algérienne des races euro- péennes. J'ai donné à la morphe algérienne de Syllius le nom de Pelagia et j'ai fait figurer sous le n" 547 de la PI. CX un exemplaire <3 de Melanargia Syllius-Pelagia-novemocellala, d'après un exemplaire capturé à Géryville par Harold Powell, en mai 1910. Je prie le Lecteur de vouloir bien consulter les renseignements détaillés qui sont donnés sur Pelagia, dans les Volumes III et V^, aux pages précitées. La Melanargia Syllius, mais dans une morphe différente de l'algérienne Pelagia, habite en Espagne, dans les Pyrénées- Orientales, en Languedoc et en Provence. Voici le résumé des notes prises par M. Powell : « Cette Espèce ne paraît pas être très abondante, en Algérie; elle se trouve sur les Hauts Plateaux de la Province d'Oran; mais LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 349 elle n'a été signalée, à ma connaissance, ni sur le littoral» ni dans le Tell. Je ne l'ai pas rencontrée dans la Province de Constantine. A Sebdou, en 1907, je n'ai pris que deux cfcf de la race Algérienne de Sylliits; un premier individu, le 16 mai, à deux kilomètres au sud-ouest du village et un second, le 23 mai, au même endroit. Le papillon est bien moins rare à Géryville et à Aflou. A Géryville, nous le prenions assez communément, en mai et en juin 1910, dans la grande plaine ondulée au nord des gorges, ainsi que sur les petites élévations de la plaine de Géryville et sur l'aride Djebel-El-Beiod. Un peu plus abondant que M. Inès, avec lequel il volait, nous le trouvions moins facile à capturer que ce dernier, non seulement parce qu'il se montrait plus méfiant, mais aussi parce qu'il se laissait emporter bien plus loin par le vent, si on le manquait du premier coup de filet. SylliHS'Pelagia était déjà éclos, le 13 mai 19 10, date à laquelle j'ai fait une première chasse dans la plaine d'Alfa du nord, et il se trouvait, alors, en état moins frais, en général, o^'lnes; mais les deux Espèces ont continué à éclore jusqu'en juin, les éclosions ayant été retardée^i, probablement, par le temps froid de la dernière quinzaine de mai. Une Q de Pelagia, très fraîche, a été capturée le 18 juin, mais, à partir de cette date, le papillon est devenu rare et n'a pas tardé à disparaître. Charles David m'a assuré avoir vu un accouplement de Syllius- Pelagïa ç avec Inès cT, mais je n'ai moi-même jamais observé pareil fait. A Aflou, les premiers exemplaires ont été pris le 7 juin 191 1. I^'Espèce y est plus rare qu'à Géryville. L'œuf de M. Syllius est déposé sur les tiges et les feuilles des diverses Graminées qui nourrissent la chenille et y reste fixé. Je crois qu'en Algérie, la chenille vit principalement sur le Lygeum sfartuvi et l'Alfa; je ne l'ai jamais trouvé, dans ce pays, mais le papillon fréc]uente des localités où ces deux Graminées sont les seules Espèces abon- dantes. En captivité, la Q pond très bien sur l'Alfa ». 350 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Melanargia Inès, Hoffm. Charmante Espèce très répandue dans diverses localités de la Barbarie. Elle est commune à Sebdou, où elle vole en mai; à Bou-Saada (mai) ; à Lambèse (mai et juin); à Méchéria (mars) ; à Oran; à Beni-Ounif (mars). Elle varie beaucoup pour l'ocellation des ailes inférieures, en dessus aussi bien qu'en dessous. Comme dans les autres Espèces de Melanargia, les exemplaires normaux présentent sur les deux faces un groupe de deux ocelles séparé, par une lacune intra- nervurale, d'un autre groupe de trois ocelles. En dessus, les cmq ocelles sont noirs pupilles de bleu violâtre; en dessous, le centre des taches ocellées est blanc bleuâtre cerclé de lilas rosé, puis de jaune et enfin de noir. Quelquefois, les ocelles sont très réduits et partiellement absents sur les deux faces; c'est l'Ab. reducla, Obthr. ; inversement, un point noir, surgissant dans l'espace intranervural libre, fait plus ou moins complètement la liaison entre le premier groupe de deux ocelles et le second groupe de trois ocelles; c'est l'Ab. compléta, Obthr. J'ai déjà fait figurer sous les n""* 685 et 686 de la PL LXXIV, dans le Volume V, part. I, des Etudes de Lépidoptcrologic comparée, l'Ab. mélanienne Hiiehncri, Obthr., de lues; je fais figurer cette fois, sous les n"' 2325 et 2i2(i de la PI. CCLXXXVII, l'Ab. compléta, prise à Beni-Ounif, en mars 191 2, par M. le lieutenant Bacque, et l'Ab. reducta, de la vallée de Ronda, en Andalousie (juin 1906), sous le n" 2327 de la même Planche. Je ne possède pas d'exemplaire algérien présentant l'Ab. reducta. La Melanargia Inès n'a jusqu'ici été rencontrée qu'au sud de l'Espagne, en Portugal et en Barbarie. D'après M. Harold Powell, la Q de M. lues pond ses œufs à la façon de Syllius, c'est-à-dire qu'elle 'es fixe isolément sur les tiges et les feuilles des Graminées qui nourrissent la chenille. En captivité, plusieurs Ç) Q ont pondu sur l'Alfa, à Géryville, LEPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 35 I en mai IQIO. La chenille vit, selon toute probabilité, sur plusieurs Graminées croissant dans les localités plutôt sèches, fréquentées par le papillon ; M. Powell ne l'a pas élevée. Pararge Megera, Lniné. Décrite comme suit par Linné (1767) : <■; Megera 142. P. N. {Fapilio N yniphalis) alis subdentatis luteis fusco fasciatis . utrinque primoribus sesquiocello; posticis supra quinis. — Habitat in Austria, Jacquin; in Dania, Fabricius. — Similis P. Mœrœ, sed alae supra luteae fusco fasciatas, nec totse fuscae. Primores ad apicem utrinque similiter ocello, cum adjacente minuto, supra obsoleto, Postice supra lutescentes, ocellis quinque : primo cœco, ultimo didymo. Subtus cinercae, griseo undulatEe ocellis 6: postremo didymo; margo posticarum vix manifeste dentatus ». Dans une autre édition du Sys/ciiia Kd/iifu', '.rom. I, Pars \, au lieu de Megera, on lit ; u Megœra, 142. P. alis dentatis luteis fusco fasciatis : anterioribus ocello; posterioribus supra quinis, subtus sex. Habitat in Europae graminosis. Larva villosa, viridis, pallido striata; cauda bifida ». Aux pages 364-367 du Volume 111 des Etudes de Lép'uiopté- ralogie comparée, le Lecteur trouvera une notice assez développée, relativement aux variations géographiques observées jusqu'ici chez Pararge Megera, Espèce répandue depuis l'Angleterre jusqu'au Sud-Algérien. Le Pararge Megera ne paraît guère mériter de porter le nom de la seconde des trois Furies; il n'excite, en effet, ni querelles, ni haine, et il paraît le plus moffensif des papillons. Sa larve elle-même ne peut être rendue responsable d'aucun dommage. D'ailleurs, l'abondance de Pararge Megera semble partout assez modérée. La morphe algérienne de Megera présente une teinte générale un peu plus vive que celle de l'Europe centrale, bien que tous les 35- LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE échantillons ne se . trouvent pas aussi vivement colorés que d'autres. Ce sont surtout les g qui offrent, en Algérie, des exemplaires d'un fauve orangé plus clair. Ma collection contient des échantillons de Sebdcu Tmai, août et septembre 1907); de Biskra (mai 1884 et 1885, janvier et février 1910); de Lambèse (mai 1885 et juin 1907); de Khen- chela (mai 1908); de Yakouren (juillet et août 1907); de Magenta; de Méchéria; de Hussein-Dey (décembre 1907 et février 1908) et de Tunisie. Le Pararge Megera varie pour le nombre des ocelles, notam- ment aux ailes supérieures, en dessus et en dessous. Il y a des localités où ce mode de variation s'accentue d'une façon très curieuse et plus fréquemment qu'ailleurs, notamment à Lectoure (Gers). En Algérie, la règle paraît être un gros ocelle noir pupille de blanc aux ailes supérieures, surmonté quelquefois d'un très petit point blanc cerclé de noir, vers l'angle apical, comme il est dit dans la description linnéenne. Aux ailes inférieures, en dessus, il y a le plus ordinairement une rangée de quatre ocelles noirs pupilles de blanc, intraner- vuraux; quelques rares exemplaires en montrent cinq et d'autres trois seulement; mais les trois ocelles du centre sont toujours plus gros que les deux extrêmes. Pararge yïgeria, Linné. En rapportant les termes de la description linnéenne sur la page 372 du Vol. III des Eludes de Lépidoptérologie comparée, j'ai fait observer que l'Espèce avait été initialement décrite d'après des échantillons de l'Europe méridionale et de Mauri- tanie. 11 ne semble pas que le Pararge JEgeria ait été conservé dans la collection de Linné, puisque Roger Verity écrit dans Révision of îhe linnean types of palœarctic Rhopalocera, ce qui suit : (( Pararge Aigeria (1758). Linnœus does not seem to hâve LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 353 possessed this species, for which he gives Southern Europe and Africa as habitat ». Le Docteur Moritz Wagner, dans Atlas zu Reisen in der Regentschaft Algier in den Jahren 1836, 1837 und 1838, donne sur le Tab. IX une figuration très bonne, en dessus et en dessous, de VHipparchia Meone, forme algérienne que nous appelons aujourd'hui JEgeria, d'après Linné. Le nom Meone, jadis appliqué pour désigner la forme méridionale à'A^geria, se trouve désormais dépourvu d'application. Dans la description de Linné, on lit ces mots : Ahs dentatis fitscis luteovariegatis. On peut, en effet, se servir de l'adjectif lut eus pour qualifier la couleur des taches qui sont répandues sur le fond brun des ailes. Le Pararge Aigeria est assez commun dans la plupart des localités de la Barbarie où l'on a jusqu'ici collecté des Lépidop- tères : Tanger, Sebdou, Tlemcen, le littoral algérien et tunisien, Lambèse, Yakouren, Biskra. Dans les Etudes d'Entomologie, j'ai fait figurer sous le n'' 18 de la PL 2 de la XX' livraison une aberration d'^geria très intéressante dont ma collection renferme deux échantillons cf semblables, l'un pris dans la Gironde et l'autre à Sebdou, par le Docteur Codet. Le fond des ailes, au lieu d'être fuscits, est d'un blond pâle, mais les tache.^ sont restées d'un fauve orangé vif. C'est l'exemplaire girondin qui a été figuré dans les Etudes d'Entomologie. J'ai donné le nom à.' Albescens à cette Aber- ration albinisante de Pararge Mgeria. En Algérie on voit voler, presque toute l'année, la Pararge JEgeria. Elle donne à Alger une éclosion en décembre et janvier, une seconde en mars et avril, une nouvelle en été; comme des exemplaires précoces ou tardifs de chaque génération ne cessent d'établir la liaison entre les générations successives, il ne se passe guère de lacune dans toute l'année, pour le vol de ce Satyride, amateur des buissons, fréquentant les jardins même urbains et ne s'éloignant guère du lieu où il est né. 23 354 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Epinephele LycaonMauritanica, Obthi. J'ai distingué la morphe algérienne de Lycaon par le nom de Maicrilanica, à la page 58, dans la VP livraison des Etudes cV Entomolo gie. La g, en Algérie (PL CCLXXXVII, ûg. 2329), est d'un aspect très sombre. Aux ailes supérieures, les deux ocelles noirs sont simplement cerclés de jaune pâle et le fond des ailes est d'un brun assez foncé. Chez le çS (PI. CCLXXXVII, fig. 2328), les androconies tranchent vigoureusement par leur épaisseur et leur couleur noirâtre sur le fond brun soyeux des ailes. L'Espèce est commune à Géryville, en juillet; à Sebdou, en juin; à Lambèse, en juin; à Khenchela, en juin; à El-Kantara, en mai; à Magenta, en juin, et sans doute dans beaucoup d'autres loca- lités algériennes. On constate des variations assez notables dans la taille; quant à la teinte du fond des ailes, elle est, chez les cf, plus ou moins grise ou blonde; mais les Q présentent une morphe très sensiblement égale ou uniforme, bien qu'il y ait des différences individuelles, comme on en remarque dans toutes les Espèces lorsqu'on a sous les yeux une longue série d'exem- plaires. En Italie, au Monte Cairo, M. Orazio Querci a trouvé des Lycaon g analogues à celles d'Algérie {Mauntanica), en même temps que des g ayant le fond des ailes supérieures très largement envahi par la couleur jaune. Ce n'est plus un cercle jaune qui entoure les ocelles noirs; lesdits ocelles ressortent sur un lavis entièrement jaune. Je fais figurer un cf et une g de Géryville sous les n"' 2328 et 2329 de la Planche CCLXXXVII, ainsi que cela est déjà indiqué plus haut. M, Powell m'a transmis les renseignements suivants : ({ Epinephele Lycaoïi-Maitrïtanica éclôt en juin; les éclosions continuant à se produire en juillet, dans les régions les plus élevées; le papillon vole, ensuite, pendant la plus grande partie de l'été et on rencontre encore quelques Q g usées et affaiblies, au commencement d'octobre. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 355 I.ycaon-Maurïtanica aime beaucoup les fleurs de thym, de Teucriuui et de divers chardons; il m'est souvent arrivé de faire s'élever un véritable nuage de papillons de cette Espèce, occupés à butiner sur les fleurs du thym, dans quelc]ue clairière de la forêt. Au plus fort de l'été, après la disparition plus ou moins complète des fleurs, le papillon recherche, pendant la journée, l'ombre des buissons et arbres de chêne-vert ou de genévrier; en passant à côté de certains buissons, on en fait sortir des vols considérables de Lycaon, de Satynis Seniele-Algirica, de S. Sylvi- cola, de Catocala Nymphcea et de C. Nymphagoga; les Satyrides se reposent, le plus souvent, sur le sol, à l'ombre, tandis que les C al 0 cal a se tiennent sur les troncs et les branches. Lycaon est, alors, difficile à capturer; son vol est rapide et très irrégulier et il se réfugie de nouveau, le plus vite possible, dans les buissons touffus. L'Espèce abonde sur les collines et montagnes boisées qui limitent les Hauts Plateaux au nord et au sud. Je l'ai trouvée aux environs de Sebdou et de Géryville, ainsi qu'à Aflou et dans le Djebel-Aurès ; on ne la rencontre que rarement dans la plaine d'Alfa. La ponte ne commence guère, je pense, avant la mi-juillet; elle se prolonge jusqu'en septembre. L'œuf est déposé sur les feuilles et les brindilles sèches de certaines Graminées, le plus souvent très près du sol. L'œuf, dont la hauteur est d'environ 0.0007, est de forme ovoïdo-conique, à somm.et et à base tronqués, l'aire basale étant plus large que celle du sommet. Le sommet est marqué de deux cercles surélevés, l'un intérieur, bornant la rosette de cellules micropylaires, l'autre extérieur, près du bord du sommet; le diamètre du cercle intérieur est d'environ 3/20 de millimètre, celui du cercle extérieur d'environ 1/3 de millim.ètre. Ces deux cercles sont reliés entre eux par une série de côtes, assez larges, mais en très faible relief. La cuvette micropylairc, très évasée, est recouverte de cellules minuscules. Les côtes verticales, au nombre de 18, sont très nettes, peu élevées et assez largement séparées entre elles par des plaines; 356 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE elles partent du bord de la base et atteignent le cercle extérieur du sommet. Les rides transversales sont peu prononcées et asser. mal définies. La coque de l'œuf est blanche, peu épaisse. Des œufs pondus en captivité, à Lambèse, entre le 15 et le 18 août 191 3, ont commencé à éclore le 29 août de la même année; la jeune chenille est munie de longs poils blanchâtres, légèrement recourbés ; elle dévore plus ou moins complètement la coque, après l'éclosion. Les quelques chenilles de Lycaon-Mauretanica que j'ai obtenues d'éclosion, ont bien commencé à se nourrir de la Gra- minée que je leur avais fournie, mais en examinant la touffe, en octobre, je n'ai pu en retrouver une seule; toutes avaient disparu ». Epinephele Jurtina, Linné. Le Docteur Verity, dans Revision of the linnean types of palœarctic Rhopalocera (p. 184), fixe la question restée jusque là litigieuse de savoir à quelle Morphe pouvait s'appliquer le nom Jurtina. Voici les termes employés par le Docteur Verity : « Epinephele Jurtina (1758). The spécimen bearing the Linnean label is a fine female of the North African race, usually known under the name of Jonunata, Alph. As this name stands in Syst. Nat. before Janira, Staudmger has donc well to point out that, according to the accepted rules, it has the right of prionty, but, now we know that the type is of African origin, \ve must furthermore add that this race should be considered as nimo- typical and Alpheraky's name sunk in synonymy; it must also be noted that Linnaeus gives Africa as well as Europe as habitat of jurtina, showing he knew of females frcm both localities ». D'après Verity, Janira est un petit mâle de la même Espèce, mais de la race européenne, de sorte que le nom de Jurtina convient pour désigner la morphe algérienne, tandis que le nom de Janira sera conservé pour la morphe de l'Europe centrale. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 35/ £pinephele Janiroïdes, Herrich-Schaeffer. Le cf a été figuré par. Herrich-Schaeffer dans Systematische Bearbeitnng der Schmetterlinge von Enropa, sous les n°^ 533 et 534 de la Tab. 1 1 1 {Papilionides Eîtrop.) ; puis par moi-même, sous les n"^ 5 <7 et 5 (^ de la PI. i, dans la première livraison des Eludes d^ Entomologie. XJ'Epinephele Janiroïdes a été trouvé jusqu'ici le long du littoral algérien et tunisien à l'est d'Alger; ma collection contient des exemplaires de Collo; Bône (juin 1884); Djurjura (juillet 1884); Yakouren (juillet et août 1907); Aïn-Draham, en Krou- mirie. M. Holl a pris Janiroïdes à Baïnen (mai à juillet) et à la Glacière de Blida (juillet). J'ai donné une notice sur Janiroïdes, aux pages 387 et 388 du Volume III des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Dans la ligne b de la PI. 46 de l'ouvrage : Les Macrolépidop- tères du Globe, le Docteur A. Seitz a publié la figure d'une forme nouvelle cf : abbreviata, chez laquelle la bande fauve des ailes supérieures, en dessus, n'atteint pas l'ocelle subapical qui se trouve ainsi placé en dehors et au-dessus de cette bande fauve. Tous les passages existent entre la forme qui est considérée comme normale et celle que le Docteur Seitz a distmgué par le nom de abbreviata. Pour la taille, Janiroïdes est assez analogue à son congénère Telmessia qui est bien certainement une Espèce distincte et non une variété de Jurlina. Dans les deux Espèces : Janiroïdes et Telmessia, chez la Q les ailes sont sensiblement plus grandes que chez le cf. L'ocelle noir situé à l'apex des ailes supérieures de Janiroïdes est quelquefois double, pupille d'un ou de deux petits points blancs. Dans les cf, les taches fauves sont de couleur plus ou moins claire ou orangée, plus ou moins développées ou rétrécies. C'est dans la forme abbreviata que se classent les exemplaires dont les taches fauves sont le plus réduites. Les Q présentent 35S LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE généralement la surface des ailes, en dessus, très largement teintée de fauve; mais certaines Q sont très rembrunies dans l'espace basilaire. En dessous, quelques Q montrent, le long du bord marginal des ailes inférieures, une série de taches ocellées jaunes plus ou moins pupillées de noir; d'autres Q sont abso- lument dépourvues de ces petits ocelles jaunes et il y a entre les deux formes extrêmes tous les passages. J'ai fait figurer une Q Janiroïdes remarquable par sa taille relativement grande, sous le n° 2330 de la PI. CCLXXXVII. Epinephele Pasiphaë, Esper. J'ai traité de l'histoire de Pasiphaé aux pages 393-395 du Volume III des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Aux environs de Nemours et de Sebdou, en Oranie, on rencontre le plus ordinairement la morphe appelée Philippina par Austaut ; cette morphe est caractérisée par le rétrécissement de la bande- lette blanche, transverse, sur le milieu des ailes inférieures en dessous. L'expression extrême de Philippina a été décrite par le même Entomologiste Austaut, sous le nom de Tessalensts, d'après des exemplaires provenant de la montagne de Tessala. Je fais figurer sur la PI. CCLXXXVIII un cf Tessalensis (fig. n° 2333), un cf et une Q Philippina (fig. n"' 2334 et 2336), tous co-types de la description de M. Austaut et que m'a offerts jadis l'auteur lui-même. J'ai dit plus haut que la race de Sebdou était généralement réf érable à Philippina. Ayant sous les yeux une série d'environ 70 exemplaires de Sebdou, je constate qu'en dessous, suivant l'observation faite par Austaut, les ailes postérieures sont ordi- nairement plus obscures, parce que la bande blanche ordinaire se trouve rétrécie; mais, en dessus, on remarque à Sebdou, comme dans d'autres localités algériennes, d'intéressantes variations résultant de ce que l'espace basilaire est plus ou moins envahi par la couleur brune. Certains exemplaires algériens cf paraissent LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 359 avoir le dessus des ailes aussi clair que les d' ordinaires de y Epïnephele Ida auxquels ils ressemblent beaucoup. Certaines Q sont en dessus très largement lavées de fauve et quelques-unes sont très ocellées, même aux ailes supérieures. Je fais figurer un cf de Magenta et une Q du Djurjura qui représentent assez exactement le genre de variation, que je signale ci-dessus (PI. ccLxxxviii; cr fig. 2335; 9 fig. 233;). Comme il pourrait arriver qu'un autre que moi, pour peu qu'il appartienne à l'école fruhstorférienne, s'empresserait de donner des noms à ces variétés, je préfère procéder moi-même à cette dénomination; je désigne donc la race O* de Magenta, avec le vocable de Taurina, pour rappeler le taureau blanc auquel Pasiphaë, fille du Soleil et de Crête, suggestionnée par Vénus, voua un amour si désordonné. Le d* de la variété Taurina a les ailes supérieures, en dessus, beaucoup moins obscurcies non seulement que Thilippina, mais que les races française et espa- gnole de Pasiphaë. On peut rencontrer des Variétés Taurina dans diverses localités algériennes. Quant à la Q viultiocellata, elle est rare; en effet, en Algérie, il est extraordinaire qu'on voie des points noirs dans l'espace fauve, au-dessous de l'ocelle subapical. Au contraire dans le Var, aux environs d'Hyères et dans les Bouches-du-Rhône, il semble que la majorité des Epinephele Pasiphaë montre une tache noire supplémentaire située mférieurement à l'ocelle subapical. Dans les Pyrénées- Orientales, aussi bien qu'à Vittoria et à Carthagène, cette tache noire surnuméraire se laisse très rarement remarquer. Epinephele Ida, Esper. Le nom Ida désigne une nymphe fille de Melisseus, roi de Crète; une fille de Corybas, épouse de Lycaste et mère de Minos; une fille de Dardanus, roi des Scythes; enfin, la montagne au pied de laquelle avait été bâtie la ville de Troie. C'est donc une dénomination mythologique dont la signification est très diverse. 300 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE UEpinephele Ida est une Espèce répandue dans plusieurs localités algériennes. La petite forme d'El-Kantara, dont je fais mention à la page 392 du Volume III des Etudes de Lépidopté- rologie comparée, sans la distinguer par aucun nom, est sans doute celle que le Docteur Seitz a appelée lapidipeta. Elle est, en effet, très petite; du moins le cf. Les androconies sont larges, mais le dessous, chez les nombreux exemplaires que je possède, est moins foncé que ne le représente la figure publiée par Seitz, dans la ligne d de la PL 46 de l'ouvrage : Les Macrolépidoptères du Globe. La description de lapidipeta ne fait pas état du méla- nisme des ailes inférieures en dessous; elle indique seulement que le dessous est plus uniforme. D'après Seitz, la morphe Cecilia, Vallantin, du versant nord de l'Atlas oriental, a éga- lement le dessous des ailes plus uniforme, particulièrement chez le cf; mais le Docteur Seitz indique que cette morphe mérite à peine un nom. A la page 392 précitée du Volume III des Etudes de Lépidop- térologie comparée, j'ai indiqué les localités algériennes d'où j'ai reçu VEpiîiephele Ida-^ je les insère de nouveau comme suit : Djurjura (juillet 1884); Lambèse (juin 1885); Tanger (juin 1880); Bône (juin 1884); El-Kantara (mai 1908); Alger (mai 1908); Terny, près Sebdou (i*"" juillet 1907); Nemours. Cœnonyrapha Arcanioïdes, Pierret. Je prie le Lecteur de vouloir bien se reporter aux pages 19-23 du Volume IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Je ne trouve rien à ajouter à la notice que j'ai déjà publiée dans l'ouvrage précité, si ce n'est que dans l'énoncé des localités, il faut supprimer Sebdou et mettre à la place Misserghin. Je rappelle cependant que j'ai distingué la seconde génération estivale sous le nom de Holli. Le Docteur Adalbert Seitz appelle Major la morphe printanière que je considère comme type. Dans la description originale {Annal. Soc. ent. France, 1837, p. 306 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 36 1 ^t 307), Alexandre Pierret ne parle pas de l'époque où le Satyrus Arcanioïdes fut capturé. Il dit seulement que ce fut à Oran, dans la Barbarie. Mais, d'après la figure publiée sous le n° 5 de la PI. 12, dans les Annales précitées, la taille du papillon et le disque de ses ailes supérieures largement fauve et non rembruni, comme chez Holli, indiquerait que la forme typique d' Arca- nioïdes est plutôt celle de printemps que celle du mois d'août. Voilà pourquoi je considère la forme dite Major par Seitz comme étant la race type. Dès lors le nom Major ne semble pas devoir être appliqué. Je fais figurer un cf Holli œstivalis, pris à Maison-Carrée le 31 août 1908, et un (S biocellata, pris à Rovigo le 20 mai 1907, sous les rf^ 2331 et 2332 de la PI. CCLXXXVII. Cœnonympha Dorus^Austauti, Obthr. Je ne connais d'autres exemplaires algériens du C œiionympha Dorus que ceux provenant de Nemours et dont je suis redevable à M. Austaut. J'ai fait représenter le cT Austauti, de Nemours, sous le n" 386 de la PI. XLVIII, au Volume IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Dans la description initiale de la variété Austauti qui se trouve imprimée aux pages 59 et 60 de la VP livraison des Etudes d'' Entomologie (mars 188 1), j'appelle l'attention sur les traits fauves intranervuraux qui sont placés, chez le cf, au-dessous de la tache orbiculaire noire apicale des ailes supérieures, en dessus. Je fais remarquer qu'en dessous, sur les ailes inférieures, la ligne blanche extracellulaire est plus vive ; enfin, en ce qui concerne la Q, non seulement les dessins sont aussi vivement accusés que dans le cf, mais les ailes sont assez obscurcies. A la page 35 du volume IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée^ j'ajoute quelques observations, comme suit : (( Sur les ailes inférieures, en dessous, l'espace blanc est plus étroit et intérieurement il est limité par une ligne plus droite; 362 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE les points ucellés, sans être en série rectiligne, chevauchent moins que dans les Doriis du Midi de la France ». Le caractère rectiligne de l'éclaircie blanche sur le dessous des ailes inférieures est très remarquable. Une très intéressante race française du C œnonympha Dorus est celle de l'Aveyron que j'ai appelée : micro phthalma et dont un cT est figuré sous le n" 388 de la PI. XLVIII précitée. La variété micro phthalma semble très constante; j'en ai vu un nombre considérable d'exemplaires qui constituent une très remarquable spécialité. Je prie d'ailleurs le Lecteur de vouloir bien se reporter, pour l'histoire du Cœnonympha Dorus, à la notice qui se trouve imprimée aux pages 31-38 du Vol. IV des Eludes de Lépidopt. comparée. Cœnonympha Fettigii, Obthr. Le cf est figuré sous les n°' \ a di b de la PI. I, dans la I'''' livraison des Etudes cV Entomologie (1876). Je n'ai rien à ajouter aux renseignements contenus dans le Vol. IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée (p. 38-44) ; les deux sexes de la forme Eettigii type, de Sebdou, sont figurés sous les n"' 398 et 399 de la PI. XLVIII du Vol. IV, et les deux sexes de la morphe HoUi, provenant de la Glacière de Blida, se trouvent eux-mêmes représentés sous les n°' 396 et 397 de la même PI. XLVIII. Depuis la publication du Vol. IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée (avril 1910), je n'ai ajouté à ma collection aucun exemplaire du C œnonympha Fettigii; M. Powell n'ayant ren- contré l'Espèce ni dans le Djebel-Amour, au sud de la province d'Oran, ni dans le Djebel-Aurès, en la province de Constantine. Cœnonympha Vaucheri, Blachier. Les deux sexes de cette Espèce marocaine ont été figurés sous les n"" I et 2 de la PI. XIX dans les Trans. ent. Soc. London, LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 363 1905, d'après des exemplaires que M. E. G. B. Meade-Waldo indique comme provenant de Tsauritz Entsagauz (6 juillet) et de Tizi Gourzâ (11 juillet 1901). Comme le dit Elwes, (( Cœnonympha Vaucheri is a very distinct species which can be mistaken for no other )>. Je ne trouve aucune addition à apporter à la notice concernant Cœnonympha Vaucheri et insérée aux pages 45 et 46 du Vol. IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Cœnonympha Pamphilus, Linné. Au printemps, on trouve en Algérie la forme Pamphilus, légè- rement modifiée par rapport à la forme de l'Europe centrale, et en été, la forme Lyllus, Esper, produisant l'Ab. Thyrsides dont j'ai fait figurer un exemplaire pris à Khenchela, sous le n° 393 de la PI. XLVIII, dans le Volume IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Depuis que j'ai publié dans le Volume IV de l'ouvrage pré- cité, aux pages 46-49, une notice assez détaillée sur Cœnonympha Pamphilus, j'ai reçu de ce petit Satyride si commun partout où il habite, une abondante série récoltée aux environs de Lambèse, durant les années 191 2 et 191 3, tant par l'Arabe Sari-Lakdar- ben-Laouès, depuis le mois de février, que par Chierotti, sous la direction de Harold Powell, en juin, juillet et août. Jusqu'en juin, c'est la forme Pamphilus qui paraît sans mélange de la morphe Lyllus; cependant en Algérie, même en février, le Cœnonympha Pamphilus a le fond des ailes inférieures, en dessous, un peu plus teinté de jaunâtre que dans le centre de l'Europe; à partir de juin, on observe un mélange de Pamphilus et de Lyllus, avec des échantillons curieusement transitionnels. Certains cf, notam- ment, ont le dessus des ailes plus jaune et moins rougeâtre. En juillet et août, Lyllus prédomine, et ce sont surtout les Q qui sont accentuées dans le sens Lyllus. Les cf, en dessus, ne sont pas toujours très différents, en été, de la forme printanière 364 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE de leur Espèce; cependant, en dessous, le fond des ailes infé- rieures est beaucoup plus ocracé. On remarque des variations d'ocellation très intéressantes. Le cf, surtout, peut ne présenter d'ocelle subapical que sur la surface inférieure des ailes supérieures; en dessus, ce n'est que par transparence du dessous, qu'on perçoit la présence de l'ocelle noir sur l'autre face; quelquefois, sur le dessous des ailes supérieures, on constate la présence de deux, trois, quatre et même cinq taches ocellées, noires, cerclées de fauve pâle; le gros ocelle subapical ordinaire est généralement seul pupille de blanc, en dessous; car, lorsqu'il paraît en dessus, il semble que l'ocelle subapical des ailes supérieures est toujours aveugle. Le dessous des ailes inférieures présente souvent une rangée sub- marginale de six petits ocelles noirs, cerclés et très finement pupilles de blanc. Le gros ocelle noir subapical, aux ailes supé- rieures, en dessous, peut être accompagné, en haut ou en bas, d'un ocelle plus petit et qui lui est contigu. Il convient de remarquer que les ocelles supplémentaires ne sont pas toujours complets; ils paraissent souvent indiqués par une simple éclaircie arrondie. L'ocellation semble assez symétrique sur les deux côtés des ailes, chez chaque individu. Il est très rare de trouver en Algérie la variété qui est marquée d'une série de points noirs submarginaux, intranervuraux, aux ailes inférieures, en dessus. Cette variété, que Tutt a appelée ocellaia, semble abondante à Akbès. Je n'ai vu aucun exemplaire algérien de la var. bipupilla/a, laquelle est distinctly double- pupilled, en dessus. On peut capturer en été, dans les diverses localités de l'Algérie, de superbes échantillons de l'Ab. Thyrsides. L'Espèce, malgré sa vulgarité, offre donc, à cause de sa variation saisonnière et des circonstances si diverses de son ocellation, un réel intérêt; aussi, les Chasseurs Entomologistes auraient tort de négliger la récolte du C œnonynipha Pamphilus, ainsi que cela arrive tou- jours trop souvent. En effet, c'est une erreur de croire que l'intérêt LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 365 scientifique d'un papillon se mesure à la valeur vénale qui lui est attribuée par les trafiquants de l'Entomologie. Libythea Celtis, Esper. A été trouvée par M. Holl, à la Glacière de Blida, en juin et juillet. Zephyrus Ouercus=Iberica, Stgr. Très abondante dans diverses localités des trois provinces d'Algérie, en juillet et août. J'ai signalé les localités algériennes d'où je possède Zephyrus Querciis-Iberka, à la page 60 du Vol. IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Thecla Ësculi, Huebner. Ainsi que je l'ai exposé à la page 75 du Vol. IV des Eludes de Lépidoptérologie cojnparée, les Thecla Esculi et Ilicis cons- tituent deux unités spécifiques absolument distinctes. Ilicis ne se trouve pas en Algérie et j'ai eu tort d'écrire {loc. cit., p. 75) que u M. Holl signale la Thecla Uicis-Cerri, Hùbner, du Camp des Chênes, en juin, et de Blida-Glacière, en juillet (province d'Alger) ». Cette observation se rapporte à Esculi-Poiuelii, non à Ilicis- Cerri, à qui je répète que je l'ai attribuée à tort. Dans le Volume IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée, j'ai traité longuement de la question qui intéresse la Thecla Esculi. J'ai fait figurer sous le n° 405 de la PI. XLIX le cf de la Thecla Escidi-Mauretanica, Stgr., de Sebdou, et sous les n"' 403 et 404 de la même PI. XLIX, le cf et la Q de Thecla Esculi-Mauretanica-Poîuelli, de Khenchela. Staudinger et Rebel, dans leur Catclog 1901, définissent Mauretanica comme suit : « Minor, subtus obscurior, fere unicolor ». 366 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Il y a aussi la forme llicoïdes, Gerhard; elle est unicolore en dessus, d'une teinte noirâtre foncée, d'assez grande taille, avec les taches rouges bien apparentes; elle se rencontre à Yakouren. Maure.tanica et Powcllï se trouvent toutes les deux également à Scbdou et à Khenchela. C'est un papillon très abondant sur les chênes verts. Callophrys Avis, Chapman. I.a question relative à Callophrys Avis et Riibi a été exposée aux pages 85 à 95 du Volume IV des Eludes de Lépidoptérologie comparée. La Callophrys Avis, dont la découverte est due à la remar- quable sagacité de M. le Docteur T. A. Chapman, de Reigate, a été observée en Barbarie, dans les localités suivantes : Tanger, Khenchela (Povvell), Alger (Holl), Tunisie (Faroult). La Callo- phrys Avis est bien plus localisée que Rubi. J'ai fait figurer Avis de Aïn-Draham, en Kroumirie, sous le n° 420 de la PI. L. Callophrys Rubi, L mne. On trouve en Algérie une luurphe de Thecla Rubi assez ana- logue à celle de France et d'Angleterre et une autre race que Staudinger {Calalog, 1901) a appelée Fervida. J'en ai publié la figure sous le n" 421 de la PI. L, dans le Volume IV des Etudes de Lépïdopthologie comparée. Staudinger définit Fervida comme suit : « Supra multo dilutior, fere brunnea )>. Il y a des exemplaires dont le dessus des ailes est d'un brun rougeâtre assez clair, ce qui ne se remarque pas chez les échan- tillons de l'Europe centrale. En Algérie, la Thecla Rubi est assez répandue. Ma collection contient des spécimens capturés en Tunisie, à Lambèse, Méchéria, Sebdou, Cap Aokas, Khenchela, Alger, Géryville, Glacière de Blida. Le papillon éclôt au premier printemps; on le voit voltiger de mars à juin, suivant les localités et les altitudes. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 367 Thestor Ballus, Fabr. La forme type du cf est unicolore. Aux pages 97 et 98 du Vol. IV des Etudes de Lépïdoptérologïe comparée, j'ai donné, par analogie à l'Espèce voisine Thestor Mauritaniens qui pré- sente la même variété, le même nom nndulatus, Gerhard, aux cf Ballus ayant le bord marginal des ailes inférieures, en dessus, orné de quelques petites taches rouge orange. M. Dupont a décrit une Q de Thestor Ballus prise à Mascara, par le Docteur Gros, chez laquelle la couleur rouge du dessus des ailes est remplacée par de l'or pâle. G'est la var. Crosi, Dupont. M. Holl a appelé Oberthiiri une Q albinisante présentant une exagération de la variété Crosi, en ce sens qu'une teinte crème remplace la couleur normale rouge orange du dessus des ailes. Le même Entomologiste a désigné une Q mélanisante sous le nom de Weheri; les ailes inférieures de W eberi sont entièrement envahies par la teinte brun foncé. Les Ab. Oberthiiri et W eberi ont été prises aux environs d'Alger. Je ne les connais pas plus en nature que je ne connais l'Ab. Crosi. L'Arabe Sari-Lakhdar-ben-Laouès a fait, de février à mars 191 3, une abondante récolte de Thestor Ballus à Lambèsc. Le; dessous des ailes donne quelques jolies variétés, notamm.ent pour la couleur verte des ailes inférieures. Gertains individus tendent au bleuâtre; d'autres sont d'un vert franc. La ponctuation noire, aux ailes supérieures, varie pour le nombre et la position des macules noires si finement soulignées de blanc. En Algérie, Ballus habite à Alger, Maison-Garrée, Méchéria, Lambèse, Gollo, Tlemcen, Kouba, Mascara et sans doute en bien d'autres lieux; on l'a aussi trouvée en Tunisie. Thestor Mauritanicus, Lucas. En outre des localités algériennes où il est à ma connaissance que Thestor Mauritanicus a été rencontré et que j'énumère à la 368 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE page g6 du Vol. IV des Etudes de Lépïdoptérologïe comparécy je dois citer les environs de Lambèse. L'Arabe Sarî-Lakhdar- ben-Laouès y a fait, en février et mars 1913, une ample récolte de la jolie Lycaenide qui paraît spéciale à la côte barbaresque. J'ai précédemment distingué iloc. cit., p. 96 et 97) les variétés suivantes de Thestor Mauritanicus : Ab. cf, SabidosiLS ; le dessus des ailes plus ou moins complè- tement d'un ocre jaune clair; Var. cf, Boisduvali; le dessus des ailes supérieures orné d'une tache orange, comme chez la Q, mais moins large et moins vivement colorée; Var. cf, Undulatus, Gerhard ; le Ijord marginal des ailes infé- rieures, près l'angle anal, est marqué de deux ou trois taches, quelquefois assez grosses, d'un rouge orangé Il y a d'autres variétés que m'ont révélées les chasses de Sari- Lakhdar-ben-Laouès. Je nomme l'Ab. cf trisiis; en dessous, les ailes supérieures sont presque entièrement dépourvues de l'éclair- cie orangée. Par ailleurs, on constate une grande diversité chez les cf, comme chez les Q, pour la ponctuation noire des ailes supérieures, en dessous; généralement, on observe ime ligne arquée, maculaire, submarginale, prenant naissance au bord costal et se dirigeant vers l'angle interne. Les quatre ou cinq premières taches de la série maculaire sont d'un noir vif et assez grosses; les autres, qui sont le prolongement de la série, sont plus ou moins réduites ou même quelquefois nulles. Dans l'espace médian, près de la côte, il y a un amas de taches noires; tantôt presque compact, formé de quatre taches, tantôt présentant cinq ou six taches divisées en deux groupes plus ou moins contigus, d'autres fois encore présentant une seule bande maculaire, composée de cinq taches qui descendent du bord costal vers le bord interne; enûn, vers la base, on constate un nombre très variable de taches ou traits noirs. De plus, il convient d'observer que le fond des ailes varie LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 369 pour la couleur et que la maculature et les linéaments noirs des ailes inférieures sont aussi très variables. Dans ces conditions, il ne me semble pas qu'il y ait lieu de distinguer, par des noms, les variations dont les caractères manquent de fixité et sont simplement individuelles. Les figures qui sont publiées dans le présent ouvrage, sous les 11°^ 23S8, 2389, 2390, 2391, 2392, 2393 et 2394 de la PI. CCXCII, seront le meilleur enseignement de la variabilité du dessous des ailes chez le Thestor Mauritaniens. Cigaritis Siphax, Lucas. J'ai déjà traité amplement la question des Cigaritis algériens aux pages 401-404 du Volume III des Etudes de Lépidopté- rologie comparée. Je distinguais alors quatre Espèces et une Variété : Siphax y Lucas; Allardi, Obthr. ; Zohra, Donzel; Massinissa, Lucas ; et la variété fugurtha, Obthr. Mamtenant je considère Zohra, comme le cf, et Massinissa, comme la Q d'une même Espèce. La première Espèce Siphax ne semble donner lieu à aucune contestation. Elle a été figurée par Lucas dans VExploration scientifique de l'Algérie {Lépid., PI. I, fig. 8 et 8 a). J'ai moi- même publié dans la XX*" livraison des Etudes d'Entomologie, sous les n°^ 83 et 84 de la PI. 5, la figure de deux variétés prises à Bône et que j'ai appelées pallida et pauciniacîdata. Staudinger a nommé Erythrea une forme qu'il a ainsi définie : alis posticis subtus obscure violaceis. Il me semble que ce sont surtout les exemplaires du littoral oriental de l'Algérie et de la Tunisie qui présentent cette variation Erythrea. 24 370 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE J'ai reçu Siphax des localités suivantes : Bône, Collo, Aïn- Draham en Kroumirie, Khenchela (mai et juin 1908), Djurjura (juillet 1884), Aflou (mai iQii). L'Espèce est assez variable. Tantôt le dessous des ailes, notamment chez le cf, est obscur et d'un brun terne, avec une faible éclaircie fauve sur le disque des supérieures; tantôt, au contraire, le dessus des ailes offre sur le milieu des supérieures, et plus ou moins largement sur les inférieures, une coloration d'un fauve rougeâtre assez vif. En dessous, le fond des ailes inférieures varie du brun ocracé jau- nâtre assez clair au brun vineux foncé; les taches argentées ressortent généralement bien sur le fond des ailes; les taches en question sont entourées d'un cercle brun plus ou moins obscur, par rapport à la teinte du fond des ailes. Quoique ces diverses variations ne représentent qu'une modalité dans la tonalité de la coloration, l'aspect des papillons est cependant quelquefois assez différent chez Siphax. Ainsi les exemplaires d'Aflou qui donnent d'ailleurs deux races, l'une claire, l'autre foncée, sont généralement, surtout par le dessous des ailes inférieures, bien distincts de la var. Erythrea. On constate du reste tous les pas- sages entre les formes extrêmes. Sur les Planches CCXCII et CCXCIII, on peut voir sous les n°^ 2397 à 2402, les figures de diverses morphes du Cigaritis Siphax, cf et Q. Cîgaritis Allardi, Obthr. Sebdou, en mai. Je possède trois cf et six g du Cigaritis Allardi; l'Espèce paraît rare; elle est figurée sous les n°^ 8 et 9 de la PI. III, dans la IX^ livraison des Etudes d'Entomologie, avec le nom erroné de Zohra, Donzel. La Cigaritis Allardi est une Espèce très tranchée et bien distincte, notamment par la direction rectiligne des trois séries de macules brunes pupillées d'argent qui se détachent sur un fond blanc pur et prennent naissance au bord costal des ailes inférieures, en dessous. J'ai donné une description détaillée de LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 37 1 la Cigaritis Allardï sur les pages 401-403 du Vol. III des Eludes de Lépïdopiérologïe comparée. Allardi et Siphax ne suscitent point de doute quant à leur séparation spécifique, relativement aux autres Espèces algériennes de Cigaritis. Les figures 8 et 9 sur la PI. III, dans la IX'' livraison des Etudes d'Entomologie, sont fort exactes. Cependant je crois devoir faire figurer dans le présent ouvrage, à nouveau, une paire de Cigaritis Allardi, afin que toutes les Espèces algériennes de Cigaritis se trouvent repiésentées en même temps et dans le même ouvrage. De cette façon les distinctions spécifiques se trouveront facilitées. Les figures 2395 et 2396 de la PI. CCXCII sont consacrées à la représentation du Cigaritis Allardi cf et Q. Cigaritis Zohra, Donzel Qu'est-ce exactement que Zohra, Donzel, et Massinissa, Lucas ? La réponse, d'après mon opinion actuelle, c'est que Zohra est le cf et cjue Massinissa est la Ç d'une seule et même unité spécifique. En effet, si l'on se reporte aux figures 5 et 6 de la PL 8 de la 2® série, tome V, des Annales de la Société ent ontologique de France, 1S47, on a l'impression que le papillon représenté par Donzel et décrit à la page 528 des Annales précitées, comme étant une Q, est plutôt un cf, contrairement au dire de Donzel. D'ailleurs, Staudmger et Rebel (Catalog, 1901, n° 525, p. 76) réunissent Zohra et Massinissa, les considérant comme appar- tenant à une même Espèce. C'est que, sans aucun doute, les auteurs précités auront, ainsi que je le fais maintenant moi- même, envisagé Zohra et Massinissa comme étant les deux sexes du même Cigaritis ? Quant à Massinissa, il a été représenté par Lucas, sous les n"^ 2 (î et 2 1^ de la PI. 2, clans le Volume VIII (2'' série) des Annales de la Société cntomologiqiie de France, 1850, d'après un échantillon capturé par le général Jean Levaillant, sur les plateaux du Djebel-Amour, 372 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Lorsque j'écrivis la notice qui est consacrée à Cigarïtïs Massinissa et qui se trouve imprimée aux pages 403 et 404 du Volume m des Etudes de Lépidoptérologic comparée (1906), je ne connaissais les papillons du Djebel-Amour que d'après la maigre récolte rapidement faite dans la région de Géryville, en mai 1886, par le lieutenant Lahaye. M. Harold Powell n'avait point encore exploré cette partie du Sud-Oranais à laquelle il consacra deux saisons (Géryville, 1910, et Aflou, 191 1). M. Powell trouva en juin, dans les environs de ces deux localités, le véritable Cigarïtis Z ohra-M assinissa. Je lui suis redevable d'une grande quantité d'exemplaires en excellent état de conservation; notamment certaines Q cadrent parfaitement avec la figure que Lucas a publiée de Massinissa, en 1850. Nous sommes donc présentement exactement fixés sur ce qu'est Massinissa, puisque des échantillons dont l'identification ne peut faire aucun doute, ont été retrouvés dans le Djebel-Amour. Chez Zo/îra, comme chez Massinissa, le fond des ailes inférieures, en dessous, est blanc. Donzel se contente de dire que le Cigaritis Zohra a la Barbarie pour patrie. Mais dans ses Observations sur les Lépidoptères des Genres Papiiio, Anthockaris, Cigaritis et Cerocala du Nord de l'Afrique (Ann. Soc. ent. France, 1850), H. Lucas fait connaître, à la page 25, qu'il a appris par le général Levaillant que Zohra avait été trouvée dans les vallées du Djebel-Amour. Dès lors nous savons que Zohra et Massinissa ont été initia- lement récoltés dans la même contrée. Rien que j'aie déjà fait représenter sous le nom de Massinissa (mais avec un point de doute) un çj (n" 128) et une Q (n" 132) d'un Cigaritis pris à Géryville, en mai 1886 {Etudes de Lépid. comparée. Vol. III, PI. XXV), je crois, comme je le dis plus haut, à propos de Cigaritis Allardi, utile de représenter ensemble toutes les Espèces algériennes actuellement connues du Genre Cigaritis, aftn d'en faciliter l'étude et d'en fixer exactement la différenciation spécifique. C'est ainsi que je fais aussi figurer de LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREE 373 nouveau le Cigaritis Jugiir/ha, Obrhr., variété de Zohra-Massi- nissa, caractérisée par la couleur brun clair, et non blanche, du fond de ses ailes inférieures, en dessous. La première figuration du Cigarilis Jugurtha se trouve publiée dans les n"' 6 et 7 de la PL III, dans la IX*" livraison des Eludes d'Entomologie. La variété ] iiguriha a été capturée à Sebdou, à Saïda et à Kralfallali. Elle est assez constante, bien qu'il y ait des individus dont la teinte brune, sur le fond des ailes inférieures, en dessous, paraît plus ou moins accentuée. La Cigarilis Z ohra-M assinissa et la variété Jugurtha varient beaucoup, principalement pour la dilatation des dessins des ailes inférieures, en dessous. Chez quelques spécimens, les taches brunes confluent et recouvrent presque entièrement le fond du dessous des ailes inférieures. La figuration du Cigaritis Zohra et de la variété jugurtha se trouve sur la Planche CCXCIII, depuis le n" 2403 au n° 2413. Polyommatus Chryseis, Bergstraesser. A la page 129 du Vol. IV des Etudes de Léfidoptérologie comparée, je fais connaître que M. Neuschild a trouvé une race petite et obscure de Chryseis à Tlemcen, en Oranie. D'après ce que m'a écrit M. Neuschild, deux cf furent capturés par lui. Il voulut bien m'offrir l'un de ces deux exemplaires dont je n'aurais pas soupçonné l'existence en Algérie. Le cf que je possède ainsi, grâce à l'obligeance de M. Neuschild, est de très petite taille et comme décoloré, quoique très bien conservé et nullement usé par le vol. J'ignore si tous les exemplaires algériens de Chryseis sont comme celui de Tlemcen. Les points discoïdaux noirs sont bien marqués; la bordure, qui est d'un brun violet, paraît large; la teinte or rouge semble éteinte. Le dessous est coloré comme chez les Chryseis d'Auvergne et de Picardie; les points noirs sont petits mais vifs. 374 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Polyommatus Thersamon, var. Omfhale, Klug. Signalé par M. E. G. B. Meade-Waldo (Transact. entomolog. Society of London, 1905, p. 378) comme capturé au Maroc. Voici les termes mêmes de la notice de M. Meade-Waldo : (( I only took one worn spécimen on the outskirts of Marocco City on June I2th. This species has not, as far we know, been previously taken in Africa ». Polyommatus Alciphron, var. Gordius, Sulz. Maroc. M. Meade-Waldo {loc. cit. sufra) rapporte la capture de Polyoïmnatiis Gordius dans les termes suivants : « I only saw it in the Atlas, \yhere it did not seem common; it was probably going over, as I only took two spécimens that were fresh. Tizi Gourza, July iith. Tsauritz Entsagauz, July 6 th 1901 )>. M. Blachier a décrit et figuré, avec le nom de heracleana, la forme marocaine du Folyonimatus Alciphron-G ordius (Bulletin Soc. lépid. Genève, Vol. II, fasc. 4, août 1913, p. 255, PI. 20, Cf fig. I, g fig. 2). Polyommatus Phœbus, Blachier. Maroc. Décrit aux pages 216 et 217 des Annales Soc. ent. France, 1908, et figuré, en dessus seulement, sous le n° 6 de la PI. 4 des mêmes Annales. Polyommatus Plilaeas, Linné. Toute la Barbarie, sur la côte aussi bien que dans la région saharienne. M. Blachier figure le dessous des ailes d'une aberration marocaine albinisante, sous le n" 7 de la PL 4, dans les Annales Soc. ent. France, 1908; cette aberration est décrite avec le nom à'Oberthiiri, aux pages 217 et 218 des Annales, igo8. LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 375 L 'histoire du Polyoïninutns Phlœas est traitée assez longue- ment aux pages 98-105 du Volume IV des Etudes de Léfidopt. comparée. I,a var. Eleus, Fabr., se trouve plus ou moins fréquemment en Algérie, ainsi que la variété cœrideopiinctata, Stgr. La caudature des ailes mlérieures, en Algérie comme ailleurs, est moins accentuée chez Phirsas-ventalis que chez Vhlœas- œstivalis et il semble que c'est surtout Phlœas-œstïvalis qui donne la morphe obscure El eus. Le Polyoïnmatus Phlceas, en Algérie, vole presque toute l'année. A Yakouren, en juillet et août 1907, M. Dayrem a capturé des exemplaires de très grande taille avec les taches noires des ailes supérieures très grosses. M. Powell a trouvé à Sebdou, en juillet 1907, une Q qui est presque ciiprinus et, au même lieu, en mai 1907, un cf extrêmement pâle avec le fond des ailes grisâtre et la teinte or feu très claire. Lycaena Bœtica, Linné. Habite toute l'Algérie. M. Powell a obtenu de nombreux exemplaires à Géryville, oi^i ils sont éclos en mai et en septembre 1910, et à Aflou, où les principales éclosions se sont produites en juillet et août 191 1. Les chenilles vivaient dans les gousses du baguenaudier. J'ai publié dans la Part. II du Volume V des Etudes de Lépid. comparée, aux pages 85-96, les observations faites par M. Harold Powell, au cours de son exploration des environs d'Aflou (Sud-Oranais), en 191 1, sur la symbiose des fourmis et des chenilles de trois Espèces de Lyccena. Il s'agit des Lycœna Bellargus, Bœtica et Jolas. Ne pouvant répéter ce qui a déjà été imprimé précédemment, je prie le Lecteur de vouloir bien se reporter aux pages précitées. Sur la PI. photographique H a (Lépidopt. d'Algérie), dans la Part. II du Volume V des Etudes de Lépidopt. comparée, se trouve très bien représentée, mais agrandie, une Lycœna Bœtica Q 376 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE fraîchement éclose, posée à l'extrémité d'une branche de Juni- perus Phœnicea. La Lycœna Bœtica a été observée à Biskra, en janvier, février, mars et mai; à Lambèse en juin; dans le Djurjura, en juillet; à Bône, en juin; à Sebdou, en juin et juillet; à Sebdou, en mai et en septembre. J'ai cité plus haut les localités de Géryville et Aflou. Les générations de la Lycœna Bœtica doivent, dans certaines localités, surtout du sud, se succéder presque sans interruption. J'ai reçu de Bône la forme de Q que j'ai appelée albovittata, et qui présente une bande maculaire blanche submarginale aux ailes inférieures en dessus. Il semble que ce soit la seule forme Q dans certaines localités du sud, notamment au Sénégal. Il est juste de rappeler que ce fut Guenée qui signala, le premier, — mais sans pouvoir en expliquer l'usage, — l'organe spécial au moyen duquel la chenille du Lycœna Bœtica sécrète la liqueur agréable aux fourmis. La notice écrite par Guenée a paru dans les Annales Soc. ent. France, 1867, pages 665-668, pi. 13, fig. 9, 10 et II. Lycaena Telicanus, Huebner. De même que sa congénère Bœtica, la Lycœna Telicanus se trouve répandue dans toute l'Afrique, les Indes-Orientales et le Sud de l'Europe; mais Telicanns s'avance vers le nord beaucoup moins loin que Bœtica. Elle est toujours fragile et délicate; aussi est-il rare de prendre au filet des exemplaires bien purs. Le cf, en dessus, a le fond des ailes d'un bleu violet assez sombre. Dans les régions tropicales : Sierra-Leone, Kamerun, Zanguebar, Natal, Lrichinopoly, Sikkim, Sénégal, lac Tanga- nika, île Bourbon, Madagascar, la Lycœna Telicanus présente un aspect plus clair qu'en Europe méridionale et en Barbarie. C'est ainsi que, dans les régions les plus chaudes, le dessous des ailes de Telicanns a le fond blanc, au lieu d'être blond ou brun doré, ainsi que cela se remarque généralement en Espagne, en LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 377 Italie, en Corse, en Provence. Dans toutes les contrées habitées par la Lycœna Telïcanus, en dessus, la base des ailes de la Q est sablée d'écaillés bleues; mais, tandis que le fond des ailes, en dessus, reste brun, chez la Q, au nord du Sahara, il est blanc dans la zone tropicale. Partout, les ailes inférieures, en dessous, sont ornées, près de l'angle anal, de deux taches noires ocellées cerclées de vert brillant et d'orangé. Lycaena Theophrastus, Fabr. Je prie le Lecteur de se reporter à la notice concernant Lycœna Theophrastus, publiée aux pages 157-160 du Volume IV des Etudes de Léfidoptérologie comparée. Je n'aurais presque rien à ajouter aux renseignements que j'ai déjà fournis. Une figuration de l'Espèce se trouve donnée sous les n°^ 409, 410, 411, 412, 413 et 414 de la PI. XLIX, dans Et. Lépid. comparée, Vol. IV. Le n° 409 représente une Q aberrante, ayant, en dessus, les ailes brunes du côté gauche et bleues du côté droit; j'ai donné à cette Aberration asymétrique le nom de micœndescens. Le n° 410 donne la figure de l'Ab. Radiât a. La Lycœna Theophrastus affectionne le jujubier; non seu- lement elle habite en Barbarie, à Biskra, Scbdou, Djurjura (juillet), Bou-Saada, Aïn Sefra, Laghouat ; mais aussi on la trouve dans l'Inde, au Sénégal, en Abyssinie, à Kimberley, à Sierra-Leone et dans le sud-est de l'Europe où elle donne la forme Balkanika. Dans les régions tropicales, conformément à ce que l'on observe pour la Lycœna Telicanus, la Q Theophrastus tend à avoir le fond des ailes blanchissant en dessus. Lycaena Martini, G. Allard. Une jolie Lycœna abondante dans l'Est algérien, pendant les mois de mai et de juin. Elle est commune à Lambèse, Batna, 3/8 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Khenchela. M. Holl l'a trouvée à Rovigo et au Camp des Chênes. J'ai traité avec détails de la Lycœna Martini^ aux pages 220 et 221 du Volume IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée. Je fais' de nouveau figurer sous les n°^ 2356 et 2357 de la PI. CCLXXXIX, un cf et une g de la Lycœna Martini. La g (fig"- 2357) est très foncée en dessus et presque dépourvue d'atomes bleues, tandis qu'une seconde Q, représentée sous le n" 2358 de la PI. CCXC, se trouve assez largement lavée de bleu sur le dessus des ailes supérieures. Je possède des exemplaires dont les points noirs sur le dessous des ailes inférieures sont très réduits. On n'a pas encore trouvé la Lycœna Martini en Europe. Lycaena AUardi, Obthr. N'a encore été trouvée que dans l'Ouest algérien, à la diffé- rence de sa congénère Martini qui habite plutôt la partie orientale de l'Algérie. M. Harold Powell a pris un cf à Géryville en mai 1910 et un cf à Aflou en juin 191 1. C'est à Sebdou que la Lycœna AUardi a été rencontrée en plus grand nombre d'exem- plaires. Elle y vole en mai. Gaston x^llard avait pris le premier cf à Daya. De même que j'ai de nouveau décrit la Lycœna Martini dans le Volume IV des Etudes de Lépidoptérologie comparée, ainsi j'ai essayé de tracer l'histoire de la Lycœna AUardi aux pages 225 et 226 du même ouvrage. Je prie le Lecteur de vouloir bien s'y référer. Il est possible que les deux Lycœna Martini et AUardi soient les deux formes orientale et occidentale d'une même Espèce ; cependant la connaissance comparative des premiers états est nécessaire pour trancher cette question. Je fais représenter un cf de la Lycœna AUardi sous le n" 2353 de la PI. CCLXXXIX et deux q sous les n"' 2354 et 2355 de la même Planche. La Q (fig. 2354) est bien plus obscure en dessus et en dessous que l'autre Q. Pas plus que la Lycœna Martini, la Lycœna AUardi n'a été jusqu'ici rencontrée en Europe. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 379 Lycaena Dorylas, var. Atlantic a, Elwes. Magnifique morphe marocaine de Dorylas, découverte à Tsauritz Entsagauz et à Imentalla où, d'après M. Meade-Waldo, elle était extrêmement abondante sur le sommet d'une colline, en juillet 1901. La figure du cT et de la Q est publiée sous les n"' 5 et 6 de la PI. XIX, dans les Trans. eut. Soc. London 1905. La Q est très largement bordée de taches rouge-orange. En dessous, les points noirs des ailes supérieures sont très gros. Lycasna Icarus, von Rottemburg. C'est en Europe la plus répandue des Lycœna\ on la trouve aussi dans toute l'Algérie; j'ai fait connaître une Ab. Q Rufina, de Bône [Etud. d'Entojuol., XIX' liv., PI. 6, fig. 52) et une morphe Q sîiprà-Cœndea, de Lambèse {Etiid. d'EntojnoL, XX" liv., PI. 4, fig. 46). La Var. Celina, Austaut, n'a pas encore été figurée. Cette variété est caractérisée par sa taille très réduite et la ponctuation noire qui borde les ailes inférieures du çS. Je possède des exemplaires de Aïn-Draham (Tunisie), Cap- Aokas (avril 1909), où presque toutes les g sont caerulescentes; voici le relevé des autres localités de Barbarie d'où j'ai reçu la Lyccena Icarus -. Lambèse (avril 1884, juin 1885); Sidi-beLAbbès (printemps 1879); Bône, Djurjura (juillet 1884); Géry ville (mai 1886); Magenta (juin 1886); Sebdou ; Daya; Biskra (mai 1885) ; Aflou (août 191 0; Hammam-Rhira (mai 1899). 380 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Je suis porté à croire que la Lycœna Icatus se rencontre dans toute l'Algérie, depuis le littoral méditerranéen jusqu'au com- mencement du Désert. Je n'ai pas encore vu un seul exemplaire algérien de Lycœna Ther sites. Lycaena Agestis, W. V. Aux pages 244 à 254 du Volume IV des Etudes de Lépidopté- rologie comparée, j'ai essayé de faire connaître les races géogra- phiques de la Lycœna Agestîs; j'aime à disserter sur les Espèces dites communes, généralement trop méprisées par certains ama- teurs d'Entomologie. A cause de leur large diffusion sur la terre et du grand nombre d'exemplaires au moyen desquels leur Espèce prolifique anime si agréablement nos champs et nos bois, ce sont pourtant ces vulgarités qui nous donnent parfois la clef de bien des problèmes. Elles méritent donc mieux que notre dédain. D'ailleurs, pouvons-nous dire que nous les connaissons, parce qu'elles sont très abondamment répandues dans les mon- tagnes et les plaines, au midi comme au nord? Combien nous reste-t-il encore à apprendre en ce qui concerne leur biologie! Tout ce que j'ai écrit précédemment à l'égard d' Agestis est demeuré, me semble-t-il, lettre morte. Pourquoi.^ Parce qu'aucune figuration n'est encore intervenue. Lorsque j'eus le plaisir de recevoir à Rennes la visite de l'excellent Rév. George Wheeler, il me demanda à voir mes boîtes d' Agestis, parce qu'il étudiait pré- cisément cette Lycœna, en vue de continuer, me dit-il, l'œuvre de feu le regretté Tutt. Je me rendis compte que M. Wheeler, n'ayant pas vu de figures à l'appui de mes observations, avait besoin de voir les papillons eux-mêmes sur lesquels j'avais appuyé le texte écrit par moi; sans cela, il ne pouvait comprendre les différences de morphe dont j'avais cru reconnaître l'existence et dont j'avais tâché d'indiquer les caractères. Il y avait, en effet, faute de figures, une grave lacune dans mon travail. La figuration s'est fait attendre, mais mon digne ami LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 38 I Jules Culot, avec son talent si apprécié, a magistralement comblé la lacune en question dans le présent ouvrage. Aussi bien, je publie des Etudes auxquelles j'ai donné la qualification de Lépidopiérologie comparée. Donc, tout en parlant ici plus spécialement de la Faune de la Barbarie, je dois, pour mettre exactement en valeur les Lépidoptères de cette Faune particulière, si besoin est, publier, à côté de la figure des papillons barbaresques, et comparativement, la représentation des mêmes Espèces observées dans d'autres pays. Il en sera ainsi dans le présent Volume, pour la Lycœna Agestis. Cependant, je prie le Lecteur de se reporter au Volume IV des Eludes de Lépidopiérologie comparée. C'est l'exposé de mes observations relativement à la variation géographique de la Lycœna Agestis, tel que je l'ai présenté en avril 1910, que j'ai l'intention de rendre intelligible, grâce à de nombreuses figures dont je reconnais de plus en plus l'impé- rieuse nécessité. La Lycœna Agestis habite l'Ecosse, l'Angleterre, la France, l'Espagne, l'Italie, l'Algérie, l'Allemagne, la Russie, l'Asie jusqu'au Sikkim ; donc, elle vole depuis le nord des îles britan- niques jusqu'au commencement du Sahara et depuis la Bretagne armoricaine jusqu'à des limites encore inconnues vers les pro- fondeurs de la région asiatique. Je fais donc figurer les morphes suivantes : r Artaxerces cf et Q, Fabr., Ab. quadripunctata, Tutt. Edinburgh (cf, ex coll Bellier; Q, ex coll. de Graslin, par Doubleday). (PI. CCXC, fig. 2364 et 2365.) 2" Salrnacis cf (*), Stephens, Nord de l'Angleterre (ex coll. de Graslin, qui l'avait reçu de Doubleday). (PI. CCXC, fig. 236Ô.) (*) Salrnacis était le nom d'iine fontaine de Carie, près d'Halicarnasse, la n° 2363 (var. medio-ptinctata) a été envoyée do Digne par Augustin Coulet, qui l'a capturée le 16 avril 191 1. 2364 ) Lyc/Ena Agestis-Artaxerces-quadripunctata cf et q , Tutt. 2365 \ Ecosse. 2366. Lyc.ïNA Agestis-Salmacis cf, Stephens. Nord de l'Angle- terre. 2367. Lyc^.na Agestis- Adonis, Huebner. Sud de l'Angleterre. 2368. Lyc^na Agestis-Impunctata q, Obthr. Folkestone. 2369. LyC^NA AgesTIS-AllOÛS cf, Huebner (fig. 990; nec 988, 989, 991 et 992). Borolcoro. 2'?7o ) ^ ^ Lyc^na Agestis cf et 9, Huebner (fig. 303, 304, 305, 306) ^^ > {Alloûs, Huebner, fig. cf 988, 989; Q 991, 992). cf, Larche (août 1896), Q Ryffelalp (juillet 1898). PLANCHE CCXCI. NOS 2372 ) ( Lyc^na Agestis-Nevadensis cf et q, Obthr. Sierra-Nevada, 2373 J 2374 j 2375 { Lyc.ena Agestis-Gallica cf, Q , Q , Obthr. 2376 ^ Les n°^ 2374 et 2375 ont été pris à Cancale (Hle-et-Vilaine), en juillet 1909; le n° 2376 a été capturé à Plouharnel (Mor- bihan), en août 1909. LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 429 j^os 2377. Lvc.îîNA Agestis cf, Huebner. Digne (avril 1912). 2378. Lyc.ïna Agestis-Pallidior cf, Obthr. Akbès. ( Lyc.ïXA Agestjs-Calida cf et Q, Bellier. Corse. 2380 j ^' 2381 ) Lyc-îna Agestis-Ornata cf et Q, Stgr. 2382 ( Le cf vient de Géryville (mai 1886) ; la Ç) a été rapportée de Lambèse (juin 1884). 2383. Lyc,«na Agestis q, transition entre Calida et Ornata. Lam- bèse (juin 1912). 2384. Lyc-ena Agestis-Ornata-Lilliputana cf, Obthr. Sicile. 2385. Lyc.ena Agestis-Calida-Lilliputana cT, Obthr. Sebdou (juil- let 1907). PLANCHE CCXCIL N°' 2386. Lyc.ïNA Agestis-ORNATA {minor) cf, Stgr. Biskra, mai 1885. 2387. Lyc.ena Agestis cf, Huebner. Simla (N. W. Inde). 2388. Thestor Maurhanicus-Boisduvali cf, Obthr. (ex musœo Boisduval). 2389. Thestor Mauritanicus-trisfis cf, Obthr. Lambèse. 2390 2391 2392 \ Thestor Mauritanicus cf , cf , cf , Q , Q , Lucas. 2393 \ Les Thestor Mauritaniens n°^ 238g à 2394 ont tous été 2394 1 capturés à Lambèse, en février et mars 1913- 2395 J Cigaritis Allardi cf et g, Obthr. Sebdou, mai 1907; 2396 ( H. Powell. 2397 i CIGARITIS Siphax-immaculatt'S cf et Q , Obthr. Aflou, mai 2398 ( 191 1; H. Powell. 2399. CiGARiTis Siphax-Erythr^a Q, Stgr. Bônc, 1894. PLANCHE CCXCIIL N°* 2400. Cigaritis Siphax-Erythr.«a q, Stgr. Bône. 2401 ) Cigaritis Siphax-Funebrjs cf et g, Obthr. Aflou, mai 191 1 ; 2402 ( H. Powell. 430 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE N°^ 2^03 \ 2404 / CiGARITIS ZOHRA cf, cT, Q, O, Donzel. Aflou, mai 1911; 2405 r H. Povvell. 2406 j ■ ■ 2407 ) CiGARITIS ZoHRA-CONFUSA cf, Q, Obthr. Aflou. mai-juin 2408 \ 191 1 ; H. Powell. 2409 \ 2410 ' 2411 CiGARITIS ZOHRA-JUGURTHA çS , (S , Q, Obthr. Scbtlou, mai 1907; H. Powell. 2412 ) CiGARITIS ZOHRA-JUGURTHA-CONFUSA cT et Q , Obthr. Sebdou 2413 ^ mai 1907; H. Powell. PLANCHE CCXCIV. N°« 2414 kArgvnxis Paphia-Dives-Argvrea cf. Ç^, Obthr. Djebel- 2415 \ Aurès ; Bel-Achir, fin juin, juillet 1913. 2416. Argynxis Auresiana, variété, cf, Fruhstorfer. Lambèse ; Col de Doufana, juin 1912 ; H. Powell. 2417. Vanessa Cardui, variété, Q , Linné. Biskra, mai 1885. PLAiXCHE CCXCV. N"^ 2418 ^ Hesperia (Adopœa) Lixeola-Semicolon cf, Q, Stgr. Lam- 2419 ^ bèsc, mai 1875. 2420 ) \ Hesperia Act.eox cf, cf, ^^ Rott. Bône,' 1901. 2421 J 2422. Hesperia Act.eox o, v. Rott. Région de Géryville, mai 1910; H. Powell. 2423 ') Syrichthus Xumida cf, cf, Obthr. Djebel-Ichali, dans le 2424 C Djebel-Aurès, altitude 1.800 mètres, juin 1913 ; H. Pow.-ll. 2425. Hesperia Act.«ox q, v. Rott. Alger; E. Holl. 2426 j 2427/ Hesperia Hamza cf , cf, Ç , Q , Obthr. 2428^ Le cf 2426 et la Q 2428 viennent d'Ailiou (juin 1911); 2429 j le cf 2427 a été pris par le lieutenant Lahaye, à Méchéria, en mars 1886; la Q 242g a été capturée à Sebdou, en juin 1907, par Harold Powell. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 43 I N"^ 2430 ) SVRICHTHfS NX'MIDA Q, Q, Obthr. Djebel-Auiès, IQ13 ; 2431 ( Harold Powell. La Q 2430 a été trouvée en juillet, au Djebel-Gueddelane, entre 1.600 et 2.000 mètres; la Q 2431 provient du Djcbel- Ichali où elle volait en juin; altitude 1.800 mètres environ. PLANCHE CCXCVI (*). N"^ 4432. Satvrus Fidia-Albovenosa-Powelli, Obthr. Aflou (8 sep- tembre 191 i). 4433. Carcharodus Lavater-ï-Rufescens q, Obthr. Sebdou (juin 1907). 4434 ) AUGIADES Bexuncas-Pallida cf, cf, Stgr. Bcrut-Dagh (juillet 4435 ) l'V)- 4436. Chenille complètement développée d'une Hespérie du genre Hesperia (Adopta), trouvée à Lambèse (Algérie), en mai 1912. La chenille est morte au moment de la métamorphose; je ne puis dire à laciuelle des trois Espèces CiAdofcea communes à Lambcse {Lincola, Actœon et Hamza) elle appartenait. Elle se nourrissait d'une Graminée. Grandeur naturelle. 4437. SvRICHTHU.s Proto, Esp. ; chenille à la fin de l'avant-dernier stade, X 2. J^ambèse (26 mai 1912). 4438. S^"RICHTHU,S Proto ; cheniUe dans le dernier stade (forme foncée). Lambèse (27 mai 1912). Grandeur naturelle. 4439. Fourreau d'une chenille de Coleo-phora Phlomidella, Chr., Espèce qui n'était encore connue c|ue de Sarepta où elle a été découverte vivant sur Phlotiiis puiigens, trouvée assez communément sur le Phlomis Herba-Venti, à Lambèse. Le fourreau est composé de morceaux découpés dans les feuilles. Grandeur naturelle. Lambèse (26 mai 1912). 4440. SVRICHÏHUS Proto ; chenille dans le dernier stade (forme pâle). Cette chenille est vm peu plus avancée c|ue celle figurée sous le n° 4438 ; elle est représentée sur sa « tente » (*) Les notices exph'catives des Planches CCXCVI à CCCIX ont été rédigées ])ar M. Harold Powell, auteur des aquarelles reproduites sur pierre par M. J. Culot. C'est par erreur que le lithographe chargé d'écrire sur pierre la numcratiou des figures de la ]^1. CCXCVI et des suivantes a passé de 2431 à 4432. 432 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE formée par la réunion de deux feuilles de la plante nour- ricière, le Phloinis Herba-V enti, L. Grandeur naturelle. Lambèse (27 mai 1912). N°*444i. SvRICHTHUS Proto; chenille dans le dernier stade, pen- dant la période léthargique prolongée qui précède la méta- morphose. Grandeur naturelle. Lambèse (30 juillet 1912). 4442. SvRiCHTHUS Proto. Chrysalide x 2 1/4. Lambèse (l'^'août 1912). La chrysalide est recouverte d'une fine jDulvérulcnce blanche que je n'ai pas essayé de reproduire. Certains indi- vidus sont plus foncés cjue celui que j'ai figuré, la chrysa- lide étant parfois d'une couleuf de prune (pourpre sombre), surtout sur la tête, le thorax et l'abdomen. 4443. AUGIADES Benuncas ; chenille dans le deuxième stade, x 8 (28 mars 1914). PLANCHE CCXCVIL N°^ 4443. Malope malachoides L. ; une des plantes nourricières de Syrichthus Onopordi, à Lambèse. Carcharodus Alceœ vit également sur cette plante. 4444. C-ARCHARODUS Al.CE.î'., Esp. ; chcnillc dans le troisième stade. Grandeur naturelle. Lambèse (14 mai 1912). 4445 ^ Carcharodus Alce.e; chenilles dans le dernier stade. Gran- 4446 \ deur naturelle. Lambèse (24 juin 1912 et 5 juillet 1912). J'ai remarqué que la robe de la chenille de C. Alceœ est plus brune et moins grise en Algérie qu'en France mé- ridionale, du moins pour les individus que j'ai élevés et trouvés à Lambèse et ailleurs sur les Hauts Plateaux. Le papillon m'a paru, en général, plus brun qu'en France, et cela en toute saison. Aussi Zellcr a-t-il désigné la race algérienne par le nom : Australis. 4447. Carcharodus Alce.E; chrysalide vue de profil dans sa tente ou cocon cemposé de fils de soie et de feuilles assemblées ; une feuille a été enlevée pour montrer la chrysalide ; celle-ci est recouverte d'une fine pulvérulence blanche, que je n'ai pas essayé de reproduire. Lambèse (5 juillet 1912). 4448. Syrichthus Onopordi, Rbr. ; chenille arrivée à son complet développement, forme claire; sujet trouvé à 1600 mètres d'altitude. La teinte de la robe est un peu trop jaune, dans l'aquarelle. Grandeur naturelle. Lambèse (8 juillet 1912). LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 433 N°M449- SVRICHTHL'S OXOPORDI ; têtc et segments thoraciques de la chenille clans son dernier stade ; forme claire. Agrandi. Lambèse (8 juillet igi2). 4450. SVRICHTHUS OxOPORDI ; chenille dans le cjuatrième stade, X 3 (25 février 1913). Cette chenille a été élevée d'un œuf pondu à Lambèse, en octobre 1912 ; elle est d'une forme plus foncée cjue celle représentée par la figure n° 4448. La robe du dernier stade, chez les chenilles élevées en automne et hiver, est presque pareille à celle du quatrième stade. Toutes les chenilles à'Oitopordi, de Lambèse, élevées pendant l'au- tomne et l'hiver, appartenaient à la forme foncée ; la variété claire paraît être une forme d'été. 4451. SVRICHTHUS OxOPORDI ; chrysalide vue de dos. 4452. SVRICHTHUS OxOPORDi ; chrysalide vue de profil. Lambèse (juillet 1912). Les deux dessins de la chrysalide la repré- sentent légèrement agrandie. PLANCHE CCXCVIIL N"^ 4453. Ex'RRANTHis Pennigeraria, Hb. Var. Chrvsitaria h. g.; chenille pleinement développée, sur Arte-iiiisia gallica. Cette chenille a été trouvée, avec d'autres, à Lambèse, en octobre 11J12, sur Artnnisïa herha-alba, qui est sa vraie nourriture. Elle a été élevée à Hyères (France) sur A. gallica. Gran- deur naturelle (18 décembre 1912). 4454. Eurra.xthis Pexnigeraria Var. Chrysitaria ; chenille dans son troisième stade, x 3. Elevée de l'œuf, sur Artemisia Canipestris, à Lambèse (2 septembre 1912). 4455. Excoxista Mixiosaria, Dup. Var. Perspersaria, Dup. ; chenille entièrement développée. On la trouve communé- ment, en mai et au commencement de juin, dans les envi- rons de Lambèse, sur le Calycoiome spinosa, VErinacea pungens et le Cytisus Balansœ. Grandeur naturelle (14 juin Tgi2). 4456. Thamxoxoma SemicAiXARIA, Frr. ; chenille entièrement déve- loppée. Elle n'est pas rare en mai et juin, à Lambèse, oii elle vit sur le Calycotome spinosa. Cette chenille ressemble beaucoup à celle de Perspersaria, mais elle est bien plus 28 434 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE l)etit(' et sa tête c'st be'aucoup moins fortement tachetée de points noirs. Grandeur naturelle (14 juin 1912). N"^ 4457. PsEUDOTERl'XA CORONILLARIA, Hb. ; chenille dans le troi- sième stade, X 2. Elle a été élevée de l'œuf, sur Caly- cotome spinosa, à Lambèse (g août 1912). 4458. PSEUDOTERPNA CORONILLARIA ; tête et premiers segments de la chenille, troisième stade. Très agrandis. (La tête et la peau du corps sont recouvertes de fines granulations blanches). Lambèse (g août igi2). 445g. Enconista Miniosaria Var. Perspersaria ; chrysalide vue de profil. Grandeur naturelle. I^ambèse (2 août 1913). 4460. Earias Insulana, B. ; chenille dans le dernier stade, x 2.7. Elle a été trouvée plusieurs fois sur un saule (probable- ment Salix -pedicellata, Desf.), à Lambèse (17 juillet 1912). 4461. Earias Ixsulaxa; cocon, x 2. Lambèse (iS juillet 1912). 4462. SOMABRACHVS species A; chenille pleinement développée, sur un fruit de Hclianthemum fergamaccmn, Pomel, cjuVllc est en train de manger. Presque deux fois la grandeur na- turelle. Lambèse (14 juin 1913). Cette chenille est assez variable ; elle montre, (juelqucfois, une ligne médiodorsale à bords fins et nets, jamais large et de couleur pourpre A^incux comme chez l'Espèce C. Elle est bien voisine de la chenille de S. Manastabal, Obthr. ; on rencontre des va- riétés d'un gris jaune un peu verdâtre qui ressemblent beaucoup à la chenille de cette Espèce; mais le bord du prothorax et la plaque anale ne sont jamais roses et les tubercules n'ont pas la couleur orangé de ceux de Manas- tahal. 4463. SOMABRACHVS species C; chenille pleinement développée. Elle est beaucoup moins commune à Lambèse que l'Es- pèce A. Presque deux fois la grandeur naturelle (19 juin 1913)- 4464. SOMABRACHYS species ( ?) D ; chenille dans le dernier stade. Deux fois la grandeur naturelle. Espèce ou Forme trouvée plusieurs fois à Timthemam et à Titouguelt (Aurès), à une altitude d'environ 1700 mètres, à la fin de mai et au com- mencement de juin igi3. Elle se nourrit des fleurs de plusieurs plantes basses, entre autres le Salvicn argentea, L. Il est possible que cette chenille soit une variété de l'Es- pèce A, avec laquelle on la trouve parfois, mais je ne l'ai LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 435 jamais trouvée aux environs immédiats de Lambèse, où la chenille A est très commune. Les chenilles A, C et D sont polyphages. Elles appartiennent, toutes trois, au groupe de Manastabal. PLANCHE CCXCLX. ^ , PVG.ERA POWELLI, Obthr. ; chenilles dans le dernier stade 4466 \ ' Elevées à Lambèse, en juillet et août 1912, sur le saule. Grandeur naturelle (8 août 191 2). 4467 \ Prosopolopha (Ligia) Yaminaria, Obthr. ; chenilles élevées à \ sur Calycotome s-pinosa, d'œufs pondus en octobre 1912, 4470 \ à Lambèse. La chenille représentée par la figure n" 4467 vient d'at- teindre le cinquième stade. Les figures 4468, 4469 et 4470 représentent des chenilles clans le quatrième stade ; le n° 4470 montre une partie de la ligne blanche médio-ventrale. Grandeur naturelle (février 1913). 4471. Prosopolopha (Ligia) Jourdaxaria, Vill ; chenille dans le cinquième (dernier) stade, sur Arte))iisia gallica. Elevée d'un œuf pondu à Lambèse, en octobre 1912. Sa véritable plante nourricière, à Lambèse, est V Artemisia herha-alba, mais elle accepte volontiers VA. gallica. Gran- deur naturelle. Hyères (23 février 1913). 4472 ) Prosopolopha (Ligia) Jourdanaria ; chrysalides x 2 (deux 4473 ^ fois la grandeur naturelle). La figure 4472 montre la cou- leur verte des i^térothèques, antennes, pattes, etc., qui persiste pendant deux mois, environ', après la métamor- phose. La chrysalide figurée sous le n° 4473 a été dessinée le 3 août 19 13, après la disparition de toute teinte verte. Lambèse. 4474. SCODIONA HOLLI, Obthr. ; chenille dans le dernier stade, sut Artemisia canif estris. Elevée d'un œuf pondu à Lambèse, en mai 1913. Grandeur naturelle. Hyères (27 décembre 1913). 4475. ScODIONA HoLLi, Obthr.; chrysalide cf, x 1.33. (1" janvier 1914). 4476. ScODIONA HOLLi ; chrysalide g. Grandeur naturelle (28 dé- cembre 1913). 436 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE PLA^'CHE CCC. N°M477- HvPEUTHlXA :Numida, Obthr. ; chenille dans le cinquième stade. Deux fois la grandeur naturelle. Dessinée à Hyères, le 23 janvier 1913. 4478. Hypeuthina Numida; chenille dans le sixième (dernier) stade. Grandeur naturelle. Dessinée à Hyères, le 2 mars 1913- 4479. Hypeuthina Numida; cocon en boue desséchée. Grandeur naturelle. Lambèse (6 août 1Q13). 4480 ) Hypeuthixa Numida ; chrysalide cf vue de face et de profil. 4481 ^ Deux fois la grandeur naturelle. Lambèse (6 août 1913). Dans la figure n° 4481, Téchancrure au sommet de la tête est un peu trop prononcée. Cette Espèce a été deux fois élevée de pontes obtenues à Lambèse; en 1912-1913 et en 1913-1914. La connaissance des premiers états de Hypeuthina Numida nous démontre, d'une façon concluante, que ce papillon est une Noctuide et non pas une Arctiide. Le genre Hy-pcuthina n'est donc pas à sa place, à côté de Coscinia, Hi-pocrita et Deiopcia, daiis le Catalogue Staudinger et Rebel de 1901. 4482. Lasiocampa Bomilcar, Ohthr. ; œufs x 5 environ. a, pôle opposé au micropyle. h, œuf placé debout, montrant une des deux dépressions de la périphérie. c, région du micropyle. Ces œufs furent pondus par une Q capturée à M'Chounech (32 kilomètres à Test-nord-est de Biskra), le 14 octobre 1912. Sur une trentaine d'œufs pondus, deux seulement ont donné la chenille ; une chenille est éclose le 5 janvier 1913, une autre le 14 janvier. 4483. Lemoxia Vallantixi, Obthr. ; chenille dans le premier stade, quatre jours après l'éclosion. Presque trois fois la grandeur naturelle (22 février 1913). 44S4. Lemoma A'allaxtim ; chenille dans le second stade. Presque deux fois la grandeur naturelle (23 février 1913)- 4485. Lemonia Vallantini ; chenille dans le cjuatrièmc (avant- dernier) stade. Forme moyenne. Certains individus sont plus sombres que celui représenté, par suite de la réduc- LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 437 tion des taches jaunes et de l'obscurcissement de la ligne blanche, ondulée et interrompue, qui limite le dorsum. D'autres, au contraire, sont presqu'entièrement recouverts de jaune, dans le quatrième stade. Un peu plus grand que nature (mars 1913). Les chenilles qui ont sorvi de modèle pour les figures 4483, 4484 et 44S5 provenaient d'oeufs pondus à Batna, le g novembre 1912 et sont écloses à Hyères, entre le 21 janvier et le 20 février 1913. Elles ont été élevées d'abord, sur la vraie plante nourricière, le Podos-permu^n laciniaiujn, D. C, mais, plus tard, je les ai nourries avec la laitue cultivée. Dans le dernier (cinquième) stade, la chenille présente deux formes : \^ celle représentée par la figure 1169 de la Planche CXXXII des Etudes de Lé-pi- doptérologie Comparée, No\. \'I ; 1° une forme chez lacjuelle les taches rougcâtres manquent complètement. N°^ 4486. La.siocampa Bomilcar, Obthr. ; chenille dans le premier stade, 18 jours après l'éclosion. x 3 (i*^"" février 1913). La chenille fut élevée jusqu'à la fin du premier stade seulement. Elle accepta comme nourriture VAtriplex porUi- lacoïdes, L., paraissant le préférer à VAtriplex Jialimus, L. Je crois cjue sa vraie plante nourricière est VHaloxylon articulatuni, Boissier. Cette Espèce est voisine de Lasio- campa Serrula, Gn. 4487. Lemoxia Vallaxtixi ; œufs X 5 environ; pondus à Batna, le 9 novembre 1912. a truf vu de côté; b œuf vu de dessus. 4488 ) Chenilles d'une Arctiide, trouvées, le 6 juin 1913, dans la 4489 ( prairie de Timthemam, Aurès, à environ 1,700 mètres d'al- titude, sur un Helianthemum dont elles mangeaient les boutons et les fleurs épanouies. J'ai pu conserver vivante une de ces chenilles, jusqu'à la fin de juillet; elle a cessé de manger vers le 15 juin et a mué deux fois ensuite, sans changer d'apparence et sans augmenter de taille ; finalement, elle s'est desséchée. Leurs mouvements étaient rapides, comme ceux des Trichosoma, et leur forme rappelait celle de la chenille de T. Pierreti. N'ayant pu réussir leur élevage, je ne puis dire, malheu- reusement, si réellement c'est au genre Trichosoma qu'il convient de les rattacher. Les figures 4488 et 4489 représentent les chenilles 1/3 plus grandes que nature. 438 LÊPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE PLANCHE ceci. N°^ 4490 ) Thestor Mauritanicus Luc. ; chenilles vers la fin du 4491 i dernier stade, sur Heyâisarum pallidiivi, Desf. Grandeur naturelle. Lambèse (27 mai 1913). Chez beaucoup d'individus, la couleur verte est plus étendue que dans ceux figurés. La chenille de T. Maiiri- tajiiciis mange les fleurs dd plusieurs plantes Légumineuses herbacées. 4492. Thestor Ballus, Fab. ; une des variétés de la chenille, dans le dernier stade. Un peu jdIus grand que nature. Lambèse (28 mai 1913). La chenille de T. Ballus est très variable dans son dernier stade ; une forme, rencontrée plusieurs fois, est d'un blanc jaunâtre sale, presque sans dessins et sans couleur rouge. Elle se nourrit des fleurs/ de plusieurs Légumineuses basses. 4493. ZvG.ENA Oraxa, Dup. ; chenille dans son dernier stade- Grandeur naturelle. Lambèse (28 mai 1913). Cette chenille, trouvée sur Hcydisarîtm fallidum, à Mar- couna, diffère un peu de la forme rencontrée à Aflou, en 191 1, et figurée sous le n° 1183 de la PI. CXXXV du Vol. VI des Etudes de Lé-pido-ptérologie Comparée. Il y a aussi une différence de forme dans les cocons ; celui de la chenille obtenue à Marcouna étant plus ramassé et moins fusiforme que ceux trouvés à Aflou. Le papillon, un retar- dataire, est éclos le 15 juin 1913. 4494. ZvG.EiMA Orana ; cocon formé par la chcnilk' figurée sous le n° 4493. Grandeur naturelle. 4495. Zyg.ena Félix, Obthr. ; chenille dans son dernier stade, sur Acanthyllis numidica, Pom. Grandeur naturelle. Lambèse (25 mai 1913). La chenille de Félix a souvent été trouvée, en mai 191 2 et 1913, toujours sur V Acanthyllis numidica. A Khenchela, en juin igo8, les Q pondaient sur la même plante. 4496. ZVG.ENA Félix ; cocon. Grandeur naturelle (10 juin 1913). Le cocon de Félix est parfois verdâtre. 4497. Tige iiorale de Salvia argentea, L. sur laquelle se trouvent trois chenilles de Lycœna Fati>ia, Obthr., dans le dernier stade. Grandeur naturelle. Lambèse (15 juin 1913). LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 439 N°^ 4498. Lycena Fatma, Obthr. ; chenille au commencement du dernier stade, avant le développement de la teinte verte. Trois fois la grandeur naturelle. Lambèse (18 juin 1913). 4499. Lyc^NA Fatma ; chenille dans le dernier stade, ayant atteint son entier développement. Deux fois la grandeur natu- relle. Lambèse (25 juin 1913). 4500. LYC.iiNA Fatma; les cinc| derniers segments de la chenille (très agrandis), surface dorsale. Sur le septième segment abdominal, on voit la glande à miel, c^ue je n'ai jamais vu , fonctionner dans cette Espèce ; je n'ai pu trouver trace des tubes télescopiqucs (fans) qui sont présents sur le huitième segment abdominal chez les chenilles des Lycaenidcs myrmecophiles. 4501. Lyc.exa Fatma; chrj-salide cf, vue de face et chrysalide Q, vue de profil. Deux fois hi grandeur naturelle. Lambèse (5 août 1913). La chenille de L. Fatma est abondante, mais assez loca- lisée, sur les hautes montagnes du nord-ouest de l'Aurès, en mai et en juin. Elle vit dans les boutons et les fleurs de la Salvia argentea. Malgré la présence de la glande à miel, la chenille ne paraît posséder aucun attrait pour les fourmis. PLANCHE CCCIL N°^ 4502 4503 Satyrus Ellena, Obthr. ; chenilles dans le cinquième (dernier) stade. Elevées d'œufs pondu; à Lambèse, à la fin de juillet 1913. Grandeur naturelle. Rennes (2 mai 1914). 4504 ) Satyrus Ellena ; chenilles dans le quatrième stade. Gran- 4505 \ deur naturelle. Hyères (16 mars 1914). 4506. Satyrus Abdelkader-Lambessanus, Stgr. ; chenille dans le dernier stade. Elevée d'un œuf pondu à Lambèse, en juin 1913. Grandeur naturelle. Hyères (20 février 1914). 4507 ) Satyrus Abdelkader-Nelvai, Seitz. ; chenilles dans le 450S \ troisième stade. Elevées d'œufs pondus par une Ç) d'El Kantara, en septembre 1913. Grandeur naturelle. Hyères (6 mars 1914). 4509. Satyrus Abdelkader-Nelvai ; chenille dans le cinquième (dernier) stade. Grandeur naturelle. Rennes (mai 1914). 440 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE N°^ 4510. LvC-EXA Martini, Allard ; chenille dans le deuxième stade, X 20. Cette chenille est éclosc, en mai 1912, d'un œuf pondu, à Lambèse, environ huit jours auparavant ; elle a mué pour la première fois au commencement de juin ; à la fin de ce mois, étant alors bien avancée dans le second stade, elle a quitté la plante nourricière {YAcantJiyllis numidica, Pom.) pour se construire un petit cocon en soie blanche, dans une crevasse du sol ; la chenille n'est sortie de ce cocon que le 8 février 1913 ; elle était encore dans le second stade, puisque je n'ai pu trouver aucune dépouille dans le cocon qu'elle venait de quitter; d'ailleurs le nombre et la disposition des points pilifères se trouvaient pareils à ce qu'ils étaient avant le commencement de l'état léthargique. J'ai pu la garder vivante jusqu'au mois de mars, en la nour- rissant avec VAstragalus viassiliefisis; elle est morte avant d'atteindre le troisième stade. PLANCHE CCCIII. N°''45ii. Prosopolopha (Ligia) Yamixaria, Obthr. ; chenille dans le dernier stade (variété a). Un peu plus grande que nature. Hyères (iq février 1914). 4512. Prosopolopha (Ligia) Yaminaria ; chenille dans le dernier stade (variété b). Un peu plus grand que nature. Hyères (21 février 19 14). La chenille de Yauii}iaria présente de nombreuses va- riétés; sur une trentaine d'exemplaires élevés en 1913-1914, il n'y avait pas deux exactement pareils dans le dernier stade. La chenille figurée sous le n° 451 1 représente la forme la plus pâle; le n° 4512 montre une chenille à lignes et dessins bien contrastés ; d'autres sont prescju'entièrement noires. Elles proviennent d'œufs produits à Lambèse. 4513. Cladocera Polvbela, de JOANNIS; chenille dans le qua- trième stade. X 2 1/2 environ. Hyères (11 février 1914). 4514. Cladocera Polvbela ; chenille dans le cinquième stade. Grandeur naturelle. Hyères (13 février 1914). 4515. Cladocera Polvijela; chenille dans le sixième (dernier) stade, pleinement développée. Grandeur naturelle. Hyères (19 février 1914). LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 441 Les chenilles de Polybcla ont été élevées sur Poa annua. Elles sont écloses vers la fin de novembre 1913, d'œufs pondus à Lambèsc au commencement de ce mois. N^Mf!^^- Orthosia Witzkxmaxxi, Standfuss ; chenille dans le cinquième stade, x i 1/2. Hyères (4 avril 1914). Dans l'aquarelle, la ligne sous-médiane d'un blanc ver- dâtre n'est pas assez fine. 4517- Orthosia Witzexmanxi ; chenille dans le sixième (dernier) stade. Grandeur naturelle. Hyères (13 avril 1914). Les œufs pondus par une Q de Witseniiianni, les 27-29 octobre 1913, à Lambè>e, ont donné leurs chenilles entre le 11 février et le 13 mars 1914. Celles-ci ont été élevées à Hyères, sur l'Arbousier {Arbutus uneào). L'Ar- bousier n'est certainement pas la nourriture normale de l'Espèce, mais la chenille l'accepte volontiers ; je la crois polyphage. Le saule est cité comme nourriture de Witsen- manni; je ne pense pas, cependant, que la chenille vit uniquement sur cet arbre, puisque j'ai souvent capturé des papillons très frais et en bon nombre, à de grandes distances des saules les plus rapprochés. ^ SvRiCHTUS NUMIDA, Obthr. ; chrysalide vue de dos et de I profil. X 4.375. Elevée d'un œuf pondu à Lambèse, en ' juin 1013. Rennes (mai 1914). 4520. Hesperia Ali, Oblhi. ; chrysalide Q vue de profil, x 4. La chenille a été élevée d'un a^uf pondu à Lambèse, en sep- tembre 1913; elle s'est chrysalidée le 2 avril 1914. Hyères (avril 1914). PLANCHE CCCIV. ZvG.EXA LovsELls, Obthr. ; chenilles dans le stade esti- hivernant (quatrième stade). Les figures 4521 et 4523 représentent la chenille encore loin de la mue post-hivernale, presque trois fois et demi plus grandes que nature; ces deux aquarelles ont été faites le 21 novembre 1912. La chenille figurée sous le n" 4522 est tout près de la mue post-hivernale ; elle est représentée trois fois plus grande que nature (23 mars 191 4). 442 LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE N°M524. ZvG.EXA LovsELIS; chenille dans son dernier (septième) stade. Deux fois la grandeur naturelle (30 mars 1914). A partir de la quatrième mue (mue post-hivernale), la chenille de Loyselis présente deux formes : celle à bande substigmatale carminée (fig. 4524) et celle, figurée sous le n" 4527, qui ne possède pas cette bande. Une chenille à bande carminée, trouvée dans son cocon, à Géryville, le 10 mai 1910, aj donné un papillon cf. En 1914, je n'ai obtenu que deux éclosions des chenilles élevées de l'œuf, en 1913-1914, à savoir un cT provenant d'une chenille à bande carminée et une Q provenant d'une chenille sans bande carminée. Il semblerait donc que la bande carminée soit un attribut du cT, mais le nombre de sujets obtenus d'éclosion n'est pas suffisant pour qu'il soit possible d'affirmer que ceci est invaria- bieincnt le cas. Z. Loyselis, dans ses trois derniers stades, vit sur les plus jeunes feuilles et pénètre dans le cœur de VEryngium cam-pestre. 4525. ZvG.EXA Favoxia, Frr. ; chenille dans son dernier stade. Deux fois la grandeur naturelle. Elevée d'un œuf de Lam- bèse. Monterfil (28 avril 1914). 4526. ZvG.ENA Sarpedon, Huebner ; chenille dans le dernier stade. Deux fois la grandeur naturelle. Hyères (11 avril 1914). Figurée pour la comparaison avec Faz'onia, d'après un exemplaire trouvé sur Eryngiiim campestre, à Hyères. 4527. ZVG.'ENA LOVSELIS ; chenille sans bande carminée, dans son dernier stade. Deux fois la grandeur naturelle. Hyères (11 avril 1914). Les chenilles de Z. Loyselis, figurées sur cette planche, ont été élevées d'œufs pondus à Lambèse, en juin 1913. 4528. ZVG.'ENA Loyselis ; cocon fixé sur une pierre. Grandeur na- turelle (17 juin 1914). 4529. ZVG.ENA Orana, Dup. ; chenille dans le stade post-hivernal (5'' stade ?). Six fois la grandeur naturelle. Hyères (26 mars 1914). Elevée d'un œuf pondu sur Hedysartim -paUidum à Mar- couna près Lambèse, en mai 1913. 4530. Cucullia Santolix.e, Rambur; chrysalide. Grandeur natu- relle. LEPIDOPTEROLOGIE COMPARÉE 443 La chenille de cette Espèce a été trouvée, en mai 1913, sur Artemisia herba-alba, près de Lambèse. L'éclosion du papillon a eu lieu à Rennes, le 5 mai 1914. PLANCHE CCCV. Croquis pour montrer la disposition des tubercules chez les chenilles de Hypentkina Numida et de Protomeceras Mimicaria, dans certains stades. N°8 4531 ; Hypeuthina Numida, Obthr. ; premier stade; tête et cinq 453- \ premiers segments. Dans ces dessins, on remarquera que quelques tubercules semblent porter deux crins ; au fait, les tubercules ne portent jamais qu'un seul crin chacun, mais, la chenille dessinée étant à la fin du stade, à quelques heures seule- ment de la mue, sa peau transparente laissait apercevoir le crin appartenant au stade suivant, appliqué contre le corps. Le tubercule post-stigmatal n'a pas été figuré sur les segments abdominaux, dans la fig. 4531 et le petit tuber- cule des segments mésothoracique et métathoricique, qui se trouve en arrière de l'alignement transversal, est placé placé trop bas, dans la même fig. 4531. Agrandi. 4533 . Hypeuthina Numida ; troisième stade ; tête et cinq premiers segments, vue de dos. Agrandi. 4534. Hypeuthina Numida; troisième stade; tête, segments thora- ciques et segments abdominaux jusqu'au cinquième abdo- minal inclusivement, vus de côté. Agrandi. 4535 . Hypeuihina Numida ; cinquième stade ; huitième et neuvième segments abdominaux et segment anal (moins une patte). Agrandi. 4536. Protomeceras Mimicaria, Obthr. ; premier stade. Aire dorsale. Vingt-quatre fois la grandeur naturelle. Lambèse (i'^'" novembre 1913). 4537. Protomeceras Mimicaria; premier stade. Aire latérale. Vingt-six fois la grandeur naturelle. Lambèse (i'"" novembre 1913)- 4538. Protomeceras Mimicaria; deuxième stade. Tête, segments thoraciques et segments abdominaux jusciu'au sixième abdominal inclusivement. Très agrandi (25-26 novembre 1913)- 444 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE PLANCHE CCCVI. , Carcharodus Stauderi, Rcverdin ; chenilles dans le dernier / Stade, pleinement développées. Grandeur naturelle. Lam- ' bèsc (29 août 1913). 4541. Carcharodus Stauderi; chrysalide. Grandeur naturelle. Lambèse (3 septembre 1913). La ciirysalide de C. Stauderi est recouverte d'une fin.' pulvérulence blanche c|ue je n'ai pas essayé de reproduire dans l'aquarelle. 4542. SvRICHTHUS Ali, Obthr. ; chenille dans le troisième stade; variété à dorsum verdâtre. Trois fois la grandeur naturelle. Lambèse (octobre 1913). 4543. SVRICHTHU.S Ali ; chenille dans le dernier stade. Grandeur naturelle. Hyères (5 janvier 1914). 4544. SvRiCHTHUS Ali ; chenille dans le quatrième stade. Deux fois la grandeur naturelle. Lambèse (novembre 1913). 4545. SvRlCHTHUS Ali ; chenille dans le quatrième stade, montrant la tète, les segments thoraciques et les trois premiers segments abdominaux, très agrandis. La chenille représentée se trouvait à la fin du quatrième stade et attendait la mue; c'est pour cela que le segment prothoracique est si distendu. Les chenilles de S. Ali ont été élevées sur le Poterium Magtiolii. Spach. ; c'est sui cette plante que les œufs ont été pondus dans la libre Nature, à Lambèse, en septembre '913- ( SvRlCHTHUS Numida. Obthr. ; chenilles dans l'avant-dernier "' ) stade, sur Hclia7it]ieinin>i croccum. Grandeur naturelle. r Lambèse (29 octobre 1913). 4548. SYRICHTHU.S Numida; chenille dans l'avant-dernier stade; tète, segments thoraciques et premier segment abdominal, très agrandis. Lambèse (25 octobre 1913). 4540. Thecla Esculi-]NL\uretanica, Stgr. ; chrysalide. Environ deux fois la grandeur naturelle. Lambèse (juin 1912. D'après l'aquarelle du Capitaine Albert. LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 445 PLANCHE CCCVII. N°" 4550. Satyrus Hansii, Austaut. Chenille dans le deuxième stade. 4551 455^ 4553 4554 Satvrus Hansii, Austaut. Chenilles dans le troisième stade. Satvrus Hansii, Austaut. Chenilles dans le quatrième stade. / Satvrus Hansii, Austaut. "' ( Chenilles dans le cinquième (dernier) stade. 4557 ) 45 58. Satvrus Hansii, Austaut. Chrysalide. Toutes les figures sont de la grandeur naturelle. Les figures 4555 et 4556 représentent une forme bien marquée; dans la figure 4555 les incisions intersegmentales sont trop accentuées. La chenille figurée sous le n" 4557 est une variété pâle; elle est plus avancée, dans le dernier stade, que celles figurées sous les n"^ 4555 et 4556. Chez la chrysalide figurée, la maturation de l'imago a fait quelque progrès ; dans un état moins avancé, la couleur est à peu près celle de la chrysalide pâle de S. sylvicola représentée sur la Planche CCCVIIL Les chenilles de S. Hansii ont été élevées en 1907-1908 d'œufs pondus à Sebdou, en septembre iqo/. 4559. Ccenonvmpha FEiriGll, Obthr. Chenille dans le premier stade ; un peu plus grande que nature. 4560. Cœnonvmpha Fettigii, Obthr. Chenille dans le premier stade; environ c|uatre fois plus grande (|ue nature. 4561. Cœnonvmpha Fettigii, Obthr. Tête du premier stade, x 6 environ. 4562 4563 Ccenonvmpha Fettigii, Obthr. Chenilles dan^' le troisième stade. Grand 'ur naturelle. 44^ LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE N°« 4 soi) [ Cœnoxvmpha Fetticui, Obthr. 4565 \ > Chenilles dans le quatrième stade. Grandeur naturelle. 4566 ) \. \ Cœnonympha Fettigii, Obthr. 4567 \ ^ . Chenilles dans le cinquième (dernier) stade. Grandeur naturelle. 4568. Ca-:NOXYMi'HA Fettigii, Obthr. Chrysalide vue de dos et de côté. Grandeur naturelle. Les chenilles de C. Fettigii ont été élevées à Hyères, en 1907-1908, sur Brachypodium ramosum. Elles provenaient ■ d'œufs pondus à Scbdou, en août 1907. N"» 4569 4570 4571 457 PLANCHE CCCVIIL Satvrus Svlvicola, Austaut. Chenilles dans le deuxième stade. 7- \ J Satvrus Svlvicola, Austaut. ■^ ( Chenilles dans le troisième stade. 4574 4575 4576 Satvrus Svlvicola, Austaut. Chenilles dans le quatrième stade. S.\tvrus Svlvicola, Austaut. Chenilles dans le cinquième (dernier) stade. 4579. Sat\'rus Svlvicola, Austaut. Cocon et trois chrysalides. Toutes les figures sont de grandeur naturelle. La chenille figurée sous le n" 4578 est une variété pâle à ligne médiodorsale verte ; j'ai obtenu cette variété en captivité, mais je ne l'ai jamais rencontrée à l'état libre. Chez la forme ordinaire, la ligne médiodorsale, verte au commencement du stade, devient bientôt grise ou brun grisâtre, ne conservant qu'une très légère teinte verte. La chrysalide pâle a été dessinée et peinte, trois ou quatre jours après la métamorphose ; les deux autres sont plus avancées ; la forme de la chrysalide pâle est normale, tandis que chez l'autre chrysalide représentée de profil, Tabdomen est plus recourbé que d'habitude. Les chenilles LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 44; figurées ont été élevées d'œufs pondus à Sebdou, en sep- tembre 1907. N"^ 4580. Cladocera Optabilis, Boisduval ; chenille dans son dernier stade. Elevée d'un œuf pondu à Lambèse, au commence- ment d'octobre 1913. Grandeur naturelle. J'ai cru utile de figurer cette chenille parce c^u'elle diffère beaucoup de celle figurée par Millière {Iconographie et descripiions de Chenilles et Lépidoptères inédits, Tome III, PI. 137, fig. 4). Il est possible que Millière se soit servi, pour modèle, d'une chenille soufflée, ayant atteint tout son développement. Vers la fin du dernier stade et avant de s'enterrer, la chenille cYOptabilis perd la plupart de ses dessins. 4581. Protomeceras Mimicaria, Obthr. Chenille dans le troisième stade, vue de côte, x 12 1/2 (25 décembre 1913). 4582. Protomeceras îNIimicaria. Chenille dans le troisième stade, vue de dos, x 10 (23 décembre 1Q13). Les chenilles de cette curieuse Espèce ont été élevées, jusqu'au troisième stade seulement, d'œufs pondus en sep- tembre 1913, à Lambèse; elles se sont nourries de Gra- minées. PLANCHE CCCIX. N°« 4583. Satvrus Abdelkader, Pierret. Chenille dans le premier stade, après le développement de la teinte verte. 4584 4585 4586/ Satvrus Abdelkader, Pierret. Chenilles dans le deuxième stade ; la chenille figurée sous le n° 4585 est bien avancée dans le stade et montre la couleur verdâtre ; les deux autres débutent dans le stade. Satvrus Abdelkader, Pierret. Chenilles dans le troisième stade; dans la figure 458S, / la rayure sous-médiane — visible de chaque côté de la ligne médiodorsale — est un peu trop large et *rop accentuée. 4588 44^ * LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE / Satyrus Abdelkader, Pierrot. X°* 4589 \ Chenilles dans le quatrième stade ; sous le n'' 4590 se 4590 1 trouve figurée une chenille aux lignes particulièrement \ foncées ; ni Tune ni Tautre n'est très avancée, dans le stado. 4591. Satyrus Abdelkader, Pierret. Chenille dans le cinquième stade; ses lignes sont plus fortement accentuées que chez la majorité des exemplaires. 4592. Satyrus Abdelkader, Pierret. Chrysalides. 4593. Satyrus Abdelkader, Pierret. Chrysalide vue de profil, dans sa cellule souterraine. Toutes les figures sont de grandeur naturelle. Les chenilles ont été élevées, en 1907-1908, d'œufs pondus à Sebdou, en septembre 1907. 4594. Satyrus Powelli, Obthr. Chenilles dans le troisième stade. Grandeur naturelle. 4595. Satyrus Powelli, Obthr. Tête, segments thoraciques et deux premiers segments abdominaux, vus de côté, pour montrer la disposition des yeux, tubercules et stigmates, dans le premier stade. Agrandi. 4596. Satyrus Powelli, Obthr. Patte membraneuse du cinquième segment abdominal. Premier stade. Agrandi. 4597. Satyrus Powelli, Obthr. Surface dorsale du troisième segment abdominal, mon- trant la position des tubercules I et II (trapézoïdaux). Premier stade. Très agrandi. 4598. Satyrus Powelli, Obthr. Segment anal. Premier stade. Très agrandi. PLANCHE CCCX. N"» 4599. Papilio Cacicus-Apollixaris q, Obthr. Nouvelle-Grenade. M. le frère Apollinaire-Marie, des Frères de la Doctrine chrétienne (Institut de la Salle) a eu la bonté de m'envoyer le papillon représenté ci-dessus et qui fut capturé en octobre LEPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 44g 1913, à la Vega, en terre chaude, à 66 kilomètres au Nord- Ouest de Bogota. Ces excellents Frères de la Doctrine chrétienne qui se sont pendant de si longues années dévoués à l'enseignement des enfants des classes populaires françaises et cjui ont rendu avec tant de modestie de si importants services à la France, ont été l'objet d'une proscription inique et contre laquelle tous les bons citoyens ne sauraient protester assez hautement. Exilés de France par la plus haineuse ingratitude, et au mépris des principes sacrés de la Liberté et des Droits de l'Homme et du Citoyen, ils ont été à l'Etranger répandre les bienfaits de l'instruction et de l'éducation chrétiennes. Sans rancune contre la Patrie dont une majorité parlemen- taire sectaire a forcé l'aveu, ils se vengent noblement en faisant aimer la France et en travaillant pour faire progresser la Science. Que les Frères de la Doctrine chrétienne veuillent bien accepter au moins l'hommage cordial et res- pectueux cjue ma plume indépendante se plaît à leur rendre ! N" 4600. PAriLlo Cacicu.S-Nais Q, Roths. Jord {Novitates Zoologicae, Vol. XIII; 1906; p. 653; type). Sud de la Colombie ; frontière de l'Equateur. PLANCHE CCCXI. N°« 4601 . PAriLio Cacicus cf, Lucas. Sud de la Colombie. 4602. Papilio C.\rtereti cf, Obthr. Iles de l'Amirauté (Meek) (Voir la description dans le Bulletin de la Société entoniologique de France; 1914, 25 mars; pages 187, 18S). PLANCHE CCCXII. N° 4603. Papilio Cartereti q, Obthr. Iles de l'Amirauté (JMeek). Décrit dans le Bulletin de la Société entoniologique de France; 1914, 25 mars; pages 187, 188. M. W. Niepelt a décrit (page 53) et figuré en photographie (Taf. XI; fig. i), dans l'ouvrage Lepidoptera Niepeltiana 29 450 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE paru en mai 1914. arec le nom de Weyiiicri, Niepelt, la Q que j'avais moi-même décrite un peu avant lui, dans le Bulletin de la Société entomologique de France, avec le nom de Cariereti, en l'honneur du Navigateui anglais Carteret, officier de marine d'origine normande, qui visita les îles de l'Amirauté {Admiralty Idands), en 17Ô7. PLANCHES CCCXIII, CCCXIV et CCCXV. N"» 4604 4605 4606 4607 4608 \ Celerio Euphorbiae Mauretanica, Stgr. 4 09 l Très grande race dont M. Harold Powell a élevé, en 1913, 4°"° j un grand nombre de chenilles provenant de Djebel-Ichali, 4^' au-dessus de Lambèse. Ces chenilles se trouvaient par une ^ I altitude de 1.800 mètres environ. La race du Djebel-Ichali (Djebel-Aurès) est bien différente de celle de Biskra qui est connue sous le nom de Deseriicola. A Biskra, comme dans le Djebel-Aurès, le Celerio Eu- ■phorbiae paraît assez variable. L'éclosion du Celerio Eufhor- biae Mauretanica se fait principalement en juillet et août. Les variétés pâles (fig. 4610) sont moins rares que les variétés brunes (fig. 4612). La variété chez laquelle le fond des ailes supérieures est presque jaune d'or (fig. 4609) est fort rare. Les formes les plus abondantes sont représentées sous les N°« 4607 et 4608. Au mois d'avril 1914, M. Harold Powell vint à Rennes pour collaborer à la rédaction de la Faune des Lépidoptères de la Barbarie. Il acheva quelques aquarelles destinées à être repro- duites par M. Culot; il classa les photographies diverses qu'il avait prises pendant ses deux campagnes de 191 2 et 191 3, dans la province de Constantine, et procéda au dépouillement des notes et observations recueillies par lui au jour le jour, au cours de ses voyages en Algérie. A la fin de juin 1914, j'avais terminé la rédaction du texte concernant les Rhopalocera. L'impression des 12 premières feuilles, soit jusqu'à la page 192, était faite. Entre temps, j'avais confié à M. Ferdinand Le Cerf, du Muséum national d'Histoire Naturelle de Paris, tous les docu- ments que je possédais au commencement de l'année 1914, rela- tivement aux Sesia algériennes. M. Le Cerf a spécialement étudié les Sesia et il avait très obligeamment accepté d'écrire l'histoire de ce groupe difficile pour lequel il avait toujours éprouvé une véritable prédilection. Je ne pouvais donc remettre le soin de traiter les Sesia algériennes à un Entomologiste plus compétent et mieux préparé. De plus, nous avions pourvu dans la collection au classement à peu près complet d'au moins quarante mille Heterocera, de Barbarie, dont l'étalage et le dégraissage, — opérations longues, minutieuses, mais indispensables, — venaient d'être achevées. Nous pouvions dès lors envisager que la publi- cation du présent volume X, consacré aux Rhopalocera et aux Sesiadœ, aurait une suite désormais rapide. Du reste, M. Culot avait déjà reçu, pour en assurer la figuration, en outre des Rhopa- 454 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPAREIE locera et des Sesiadce de Barbarie, une certaine quantité de modèles, notamment dans la famille des Arctiadœ. Les choses étant à ce point, au commencement de juillet 19 14, M. Harold Powell entreprit un voyage d'exploration entomolo- gique dans les Pyrénées, avec mon petit-fils Henri (*) et son ami Marc-Adrien Dollfus, qui venaient, tous les deux, de passer avec succès, à Paris, l'examen de Baccalauréat pour la Philosophie. Le but était de parcourir les Pyrénées orientales, de traverser le pays d'Andorre, la Haute-Catalogne et de gagner Luchon. De là, les trois voyageurs devaient nous rejoindre à Gavarnie, où je m'étais rendu avec d'autres membres de ma famille. L'exploration entomologique pyrénéenne réussit à merveille; une fois réunis, nous passâmes quelques jours paisibles et heureux à Gavarnie où la saison était superbe et les papillons abondants. Les chasses du soir, autour des lampes électriques de l'Hôtel du Vignemale, ne cessèrent pas d'être très fructueuses et d'ajouter à la récolte réalisée pendant les heures de jour, dans la montagne, les plus intéressantes captures. MM. le Docteur T. -A. Chapman et Champion étaient à Gavar- nie. Ce sont des compagnons bien aimables, pleins de respecta- bilité, toujours souriants, très savants d'ailleurs, observateurs remarquablement avertis et avisés, sachant se concilier l'univer- selle sympathie par leur simplicité et leur bonhomie charmantes. Nous avions le plaisir de les voir souvent, ainsi que les vieux amis P. Rondou, de Gèdre, et LIenri Passet, de Gavarnie. Celui- ci, je le rencontrai pour la première fois, en juillet 1869, à la Cabanasse, lorsqu'il parcourait les Pyrénées avec le célèbre Bota- niste anglais Pack. Nos amicales relations datent donc de 45 ans. Dans le plus beau des paysages, jouissant du charme de la famille et de l'amitié, les jours passaient, pour nous, trop rapides et dans une parfaite tranquillité. (*) Entré dans sa i8<' année et engagé volontaire au io2« régiment d'Infan- terie, le i^r mars 1915. LEPIDOPTEROLOGIE COMPAREE 455 A Gavarnie, on est loin du bruit et des nouvelles; la vie y est extraordinairement calme et paisible ; les habitants, pendant l'été, sont tout occupés de la récolte du fourrage que trop souvent ils sont obligés de disputer aux orages et aux brouillards. Les journées de soleil sont très précieuses et ils savent les utiliser. Cependant, le lundi 27 juillet, nous trouvant réunis à l'Hôtel si accueillant du Cirque de Gavarnie, nous apprîmes que des guides venaient d'être expédiés à la recherche du colonel du 144" régiment d'Infanterie qui s'était mis en route, depuis assez peu de temps, pour le Mont Perdu. Une dépêche le rappelait d'urgence à son régiment qui faisait partie de la garnison de Bordeaux. Les jours précédents, le colonel du 144" d'Infanterie avait fait des excursions et des ascensions avec mes petits-fils. Nous regret- tâmes le brusque départ de cet aimable et très distingué com- pagnon (*). A la suite de ce rappel, l'inquiétude commençait à s'emparer des esprits. Aussi, le mardi 28 juillet, nous jugeâmes prudent de rentrer dans nos foyers respectifs. Durant notre traversée de la France, en automobile, nous trou- vâmes tous les cœurs résolus à l'accomplissement du plus grand des devoirs, si les circonstances l'exigeaient; néanmoins, jusqu'au vendredi soir 31 juillet, jour de notre arrivée à Rennes, l'espé- rance que la paix serait conservée s'était généralement maintenue parmi les Français. Hélas! l'action diplomatique fut vaine, car la volonté bien arrêtée de l'Allemagne était non point la paix, mais la guerre... (*) Les journaux nous ont appris que M. le colonel Joseph Gauthier, comman- dant le 144»= régiment d'Infanterie, né à Grenoble, âgé de 59 ans, avait été tué glorieusement dès le début de la guerre. M. Lucien-Victor Meunier, dans la France, de Bordeaux, à la fin d'août 1914, rend un juste tribut d'éloges aux mérites et au caractère du Colonel Gauthier. 45^ LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE Le i^'' août 1914, le Kaiser Guillaume II osa assumer l'effroyable responsabilité de déchaîner le plus épouvantable des conflits qui ait jamais effrayé le monde. Il envoya un ultimatum à la Russie. Dès lors, la France ne pouvait manquer d'être elle-même brus- quement attaquée. En effet, le dimanche 2 août, de grand matin, les troupes allemandes, ayant la France pour objectif, violèrent la neutralité du Grand Duché de Luxembourg et pénétrèrent, par les ponts de Wasserbillig et de Remich, sur le territoire neutre luxembourgeois. La France se trouvait donc directement menacée par l'Alle- magne, ainsi que son alliée la Russie; elle se voyait obligée de mobiliser ses forces; en conséquence, l'ordre de mobilisation parut ce même jour, 2 août 1914. La Belgique, sollicitée par l'Allemagne de permettre, sur son territoire, le libre passage aux armées impériales marchant contre la France, protesta noblement et rejeta énergiquement une pro- position qu'elle jugeait offensante pour son honneur. Malgré la disproportion des forces, la Belgique ne craignit donc point d'opposer à la puissante Allemagne un refus formel à ce qu'elle considérait comme une violation flagrante du droit des Nations. Dans ces circonstances si graves, le 4 août 19 14, le Gouverne- ment de Sa Majesté Britannique s'unit à la Russie et à la France, offrant ainsi à la Belgique de s'associer à une action commune en vue de résister, autant que possible, à l'emploi de la force que l'Allemagne allait tenter contre cette Nation neutre. Le Gouvernement Impérial allemand avait pourtant solennel- lement reconnu la neutralité de la Belgique; mais comme Herr von Jagow ne craignit pas de le dire à Sir E. Goschen, Ambassadeur de la Grande-Bretagne, à Berlin, le 4 août 1914, (( Il nous faut pénétrer en France par la voie la plus rapide et la plus facile, de manière à prendre une bonne avance dans les opérations et s'efforcer de frapper quelque coup décisif, le plus tôt possible. Car c'est pour l'Allemagne une question de vie ou LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 457 de mort. Agir avec rapidité, voilà le maître atout de l'Alle- magne (*) )). Seulement si c'était pour l'Allemagne, au dire de Herr von Jagow, une question de vie ou de mort d'avancer à travers la Belgique, en violant la neutralité de cette dernière Nation, c'était, selon Sir E. Goschen, une affaire de vie ou de mort pour l'hon- neur de la Grande-Bretagne, (( a matter of life and death for the honour of Great Britain », de tenir l'engagement solennel pris par l'Angleterre de faire, en cas d'attaque, tout son possible pour défendre la neutralité de la Belgique. Le 4 août 191 4, la guerre se trouvait donc allumée entre l'Alle- magne aidée de son alliée l'Autriche-Hongrie, d'une part, et la Russie, la France, la Belgique, l'Angleterre et la Serbie, d'autre part. Le Japon prit fait et cause pour les cinq nations à qui l'Allemagne et l'Autriche venaient de déclarer la guerre. Plus tard, la Turquie se laissa entraîner à marcher avec l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie. Il ne m'appartient pas, dans cet ouvrage dédié à l'Entomo- logie, de me faire l'historien de la plus sanglante et épouvan- table guerre qui fut jamais. Je ne trouverais du reste pas de paroles pour traduire la douleur et l'indignation dont mon cœur est rempli. Partout où passèrent les armées allemandes, ce fut le pillage, l'incendie, l'assassinat. Les monuments les plus vénérables, ceux qui, en Belgique comme en France, faisaient partie du patrimoine reli- gieux, historique, scientifique ou artistique de l'Humanité tout entière, furent détruits sauvagement, sans aucune raison militaire, (*) Sir E. Goschen, British Ambassador in Berlin, to Sir Edward Grey. ... « Herr von Jagow again went into the reasons why the Impérial Government had been obliged to take this step, namely, that they had to advance into France by the quickest and easiest way, se as to be able to get well ahead with their opérations and endeavour to strike some décisive blow as early as possible. It was a matter of life or death for them, as if they had gone by the more southern route they could not hâve hoped, in wiew of the paucity of roads, and the strength of the fortresses, to hâve got through without formidable opposition, entailing great loss of time »... (Livre bleu anglais : Great Britain and the euro-pean crisis, 1914; pièce 160, page 78). 458 LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE uniquement pour accomplir, avec une criminelle méthode, tout le mal possible et dans la plus horrible et cruelle mesure. En des temps aussi malheureux, alors que les nouvelles les plus affligeantes pour toutes les familles ne ressaient d'arriver, — faisant connaître la mort glorieuse, sans doute, mais si doulou- reuse, de quelque parent ou ami comptant parmi les plus chers et les plus affectionnés, — on conçoit que tout travail scientifique soit devenu impossible et que la publication de tout ouvrage entre- pris en des circonstances plus propices ait été ajournée sine die. Voilà pourquoi la date « septembre IÇ14 », imprimée dès le mois de mai 19 14, sur la page 5 du titre du présent livre, se trouve depuis longtemps dépassée. Cependant le volume X des Etudes de Lépidoptéroiogie com- parée, pour ce qui concerne les Rhopaloce/a, était à peu près terminé. Je me décide donc à publier ce volume, tel qu'il se trouve actuellement, c'est-à-dire au point 011 il a pu être amené. Je n'ignore pas qu'un supplément lui sera nécessaire; cependant j'ai cru devoir prendre cette détermination avant que les mobili- sations successives n'aient achevé de priver notre Imprimerie du Personnel technique indispensable à l'impression de mon livre. Depuis les premiers jours d'août, combien de nos excellents collaborateurs, en âge de porter les armes, ont quitté notre maison pour reprendre bravement leur place dans Tarme oi^i, étant plus jeunes, ils avaient reçu l'instruction militaire! Notre sympathique souvenir les accompagne au front où refleu- rissent si admirablement les vertus guerrières de notre Nation. Si nos vœux les plus chers sont exaucés, ils reviendront, glorieux, reprendre leur place parmi nous. Mais quand sera-ce? En attendant, accablé par l'angoisse patriotique et familiale, ressentant vivement la douleur que tant de morts ont causée autour de nous, dans notre ville et dans les campagnes bretonnes, vieilli par les soucis plus encore que par l'âge, j'ai lieu de croire que le présent ouvrage entomologique, avec la partie relative aux LÉPIDOPTÉROLOGIE COMPARÉE 459 JEgcrndœ, en voie de très prochain achèvement, est le dernier que je pourrai désormais produire. J'aurais voulu, avant l'extinction définitive de mes forces, achever la Faune des Lépidoptères de V Algérie. C'était un projet qui m'était cher; la guerre que les Nations civilisées se trouvent obligées de soutenir, depuis plus de 7 mois, contre les Barbares, est la cause que, vraisemblablement, le rêve ne deviendra pas la réalité. Rennes, mars 191 5. Charles OberthOr. IMP. OBERTHUR, RENNES (165I-I4J. PORTRAITS LÉPIDOPTÉRISTES Deuxième Série MM. Frederick Du Cane Godmax, Thomas Algernon Chapman, Claude-François Jeunet, Pierre Chrétien, Serge AlphÉRAKY, Max Standfuss, Gédéon Foulquier, William Schaus, le Comt© Emilie TuRATI, Pierre RONDOU, Jules Culot, Jules Culot, Henri Oberthûr et Charles Oberthûr, Jules Culot et Charles Oberthûr, Henry Rowland-Brown, Harold Powell, Ferdinand-Louis Le Cerf, André AviNOFF. "'"^''"^i^- Hhr^n^^n/ w^m^^mmm ]/5itete!^ mn^^m &^ iS;^ y^^^^^H a^Mk f? n l 'f ï y f- y '( 9M^TOS2S2§S§a§ffiSeD SMITHSONIAN INSTITUTION LIBRARIES 3 ^Dfla DDBSDD3b 1 nhent QL542.012 tasc. E:tudes de l:epitopt:erologie com .' .. »v: 'mm