Library of tbe Museum OF COMPARATIVE ZOOLOGY, AT HARVARD COLLEGE, CAMBRIDCE, MASS. Hounde bp private subscription, fn 1861. From the Library of LOUIS AGASSIZ. No. S S 01. sl 20/4. A = _. > VAT 7 Lo vs. ". | d se se Le 4 4 QUESTIONS MARITIMES ET COLONIALES e : 7 s i PÊCHES MARITIMES ft SUR È LINDUSTRIE HUITRIÈRE DES ÉTATS-UNIS Æ | FAITE PAR OADSE DE S, E. M. LE COMTE DE CHASSELOUP LAUBAT - MiNISTRE DE LA MARINE ET DES COLONIES MT NS CAR Vaugt TC UTS Mc PPS 22 # Suivie de divers aperçus sur l'industrie de la Glace en Amérique, les Ba- teaux de Fèche pourvus de Glacières, les Réserves floitantes à Poisson, la péche du Maquereau, etc. L SE LT Par M. P. DE BROCA Licutenaut de vaisseau, Directeur des mouvements du port du Havre NOUVELLE EDITION AUGMENTÉE DE DIVERS DOCUMENTS EI DE NOTES RIT FOR LIL PILOTE ER « Celui qui possède une terre avoisinant » le rivage de ia mer et ne peut en tirer » d’utiles” productions, doit chercher un re- » venu sur la mer elle-inème. » COLLUMELLE (De re Ruslica). L-2 IL D D —— lun eh jt à 0 UD Et jet à RSS PARIS GHALLAMEL AINÉ, ÉDITEUR | Libraire- commissionnaire pour les Colonics, la Marine ct l’Orient # 30, RUE DES BOULANGERS-SAINT-VICTOR “1865 - Le ff l'onecons cu #8 MES Trasar . TiuT: Pa Ter) pur M he Ho. mé Cp. Creme) x Tone nee I 27 1 "PES 7 sdpèe Le c/me 23 laser. FER Don. ‘- ÉTUDE SUR L'INDUSTRIE HUITRIÈRE DES ÉTATS-UNIS F] ‘a re 6 re à ; | VERSAILLES. — IMPRIMERIE CERF, F L: F ST L AS ” \ PÊCHES MARITIMES ÉEUDE: SUR L'INDUSTRIE HUITRIÈRE DES ÉTATS-UNIS FAITE PAR ORDRE DE S, E. M. LE COMTE DE CHASSELOUP-LAUBAT MINISTRE DE LA MARINE ET DES COLONIES Suivie de divers aperçus sur l'Industrie de la Glace en Amérique. les Ba- teaux de Pêche pourvus de Glacières., les Réserves flottantes à Poisson. la pêche du Maquereau, etc. Par M. P. DE BROCA Lieutenant de vaisseau, Directeur des mouvements du port du Havre NOUVELLE ÉDITION AUGMENTÉE DE DIVERS DOCUMENTS ET DE NOTES « Celui qui possède une terre avoisinant » le rivage de la mer et ne peut en tirer » d’utiles productions, doit chercher un re- » venu sur la mer elle-même. » COLLUMELLE (De re Rustica). PARIS CHALLAMEL AINÉ, ÉDITEUR Libraire-commissionnaire pour l'Algérie, les Colonies et la Marine 30, RUE DES BOULANGERS-SAINT-VICTOR 1865 de Cou JA Dr: ŸE a à fi FA FAIRE CT LU NA { ATOS UT at in DAME QNUIIRN NAT TTC NET TES [4 1. #1 - 10) AURAI : « LL: D ds -- ; "A ed [ ER 1 * er. è le LA | FU Rte tas ea 4 * APT € + GTI Alt ALT LE HUE * BA TO" ca - « x pet rh Yuta? 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De retour au Havre, depuis le 2 octobre, je m’em- presse d'adresser à Votre Excellence un Rapport sommaire sur Ma mission, en attendant que Je puisse Jui envoyer un travail plus étendu, comprenant Pensemble de mes investigations sur le littoral amé- ricain. | Parti de Boston, le 47 septembre, sur le steamer de la Compagnie Cuuard : Asia, j'ai débarqué le 29 1 Te à Liverpool, après une traversée de douze jours, accomplie dans des conditions de temps assez peu favorables. J’avais pris avec moi une colonie de mol- lusques, principalement des Mya Arenaria, dont je n'ai sauvé, malgré les soins les plus minutieux, que quelques spécimers! Plus heureux avec les Venus Mercenaria et les huîtres de la Virginie, j'ai pu en faire arriver deux mille vivantes au Havre, d’où elles ont été immédiatement expédiées à la Hougue-St- Waast. Avant d’entrer, Monsieur le Ministre, dans les dé- tails de ma mission, permettez-moi de mentionner les circonstances qui l’ont précédée, car il en résulte quelques enseignements utiles à enregistrer. Vers la fin de l’année 4860, un de mes cousins, M. de Férussac, me parla des ressources alimen- taires que le peuple des États-Unis tirait de deux espèces de mollusques marins, la Mya Arenaria et la Venus Mercenaria, qu’on désigne dans la contrée sous le nôm de Soft Clam et de Round Clam. Ces renseignements n'ayant été d’ailleurs confirmés par plusieurs capilaines américains fréquentant le port du Havre, je m'’emjressai de les communiquer à M. Coste, en lui proposant, s’il le Jugeait convenable, de faire venir quelques spécimens des mollusques en question par les transatlantiques de New-York. Cette proposition immédiatement acceptée, des fonds PS LE du Collége de France furent mis à ma disposition, et au mois de mai 4861, l'officier comptable de l’Arago, qui avait bien voulu se charger de celte affaire, ap- porta au Havre une colonie de Venus Mercenaria et d'huitres de la Virginie, dont l'espèce est entière- ment différente de celle qui vit sur nos rivages. Quelque temps après, l'Empereur, dont l’atten- tion est constamment dirigée sur tout ce qui peut concourir à l'accroissement de nos ressources ali- mentaires, prenait lui-même l'initiative de laccli- matation générale des mollusques comestibles amé- ricains, et M. de Montholon, consul-général de France à New-York, était invité à se concerter, à cet effet, avec Le célèbre professeur Agassis, de l'Uni- versité de Cambridse, aux Etats-Unis. M. Coste, Membre de lfestitut, fut chargé par Sa Majesté de prendre, en France, les mesures néces- saires pour assurer le succès de cette utile entre- prise. | Au mois de septembre, de la même année, M. Bur- kardt, dessinateur du Museum d'Histoire Naturelle de Cambridge, partit de Boston avec les espèces sui- vantes de mollusques et de crustacés réunis par les soins de M. Agassis: 1° Mya Arenaria; 20 Venus Mercenaria; 3° Pecten Concentricus ; LL — 4° Homarus Americanus; D° Mactra Solidissima ; Go Mytilus Edulis. La traversée d'Europe s’effectua dans de si mau- vaises conditions, que la plupart de ces espèces mou- rurent en route; en outre, le steamer n'étant arrivé à Liverpool qu'après le départ du bateau à vapeur du Havre, M. Burkardt fut obligé d’aller s’emhar- quer à Southampton, après avoir traversé l’Angle- terre avec les coquillages encore vivants. Finale- ment, de toute la colonie emportée de Boston, 200 Venus parvinrent seules en France, où elles fu- rent placées dans les parcs de St-Waast, suivant les instructions de M. Coste. Telles furent, Monsieur le Ministre, les premières tentatives d’acclimatation qui eurent lieu, et si, dans ce rapport, j'en ai mentionné les circonstances, ce n’est pas que j'aie l'intention de revendiquer la moindre part de ce qui fut fait alors; mon seul but est de montrer par l'intervalle de temps écoulé, de- puis l’époque à laquelle je reçus les premiers spéci- mens d'huitres et de clams, combien leur acclimata- tion présente de chances de succès, puisqu'ils ont pu vivre depuis dix-sept mois, dans les eaux de la Manche, absolument comme dans la contrée na- tale. À la fin de l’année 1861, deux faits importants nn eh = étaient déjà acquis à la science; savoir : de que les mollusques en question pouvaient Supporter facile- ment la traversée de l’Atlantique ; 2 que le régime de nos eaux salées, ne paraissait en rien les affecter ; toutefois leur nombre n’était pas suffisant pour qu’on essayät d'ensemencer une petite portion de baie, et toutes les espèces sur lesquelles on voulait expéri- menter, n'étaient pas parvenues en Europe. Ces rai- sons déterminèrent M. Coste à demander à Votre Excellence mon envoi aux États-Unis, non-seulement pour en rapporter une nombreuse colonie de mol- lusques, mais aussi pour examiner les conditions dans lesquelles devraient être faits les essais, COns{a- ter la nature des fonds, et le régime des eaux où vi- vent les animaux à acclimater; enfin pour m'éclairer Sur {ous les points qui pourraient assurer le succès de l’entreprise. Je reçus, en outre, l’ordre d’étu- dier les procédés de l’industrie huitrière, et le 29 mars 18692, je m'embarquai à Liverpool sur le Steamer Asia desservant la ligne de New-York. Par des motifs indépendants de ma volonté, mon départ qui aurait dû avoir lien en février, avait été différé, de sorte qu’à mon arrivée en Amérique, je me trouvai, ma mission n’étant que de deux mois, dans l'obligation de combiner mes travaux de manière à revenir en Europe dans le milieu de juin, époque à laquelle la température rendrait les transports fort D difficiles. N’ayant encore (ue des données fort incer- taines sur la manière dont il convenait de traiter les mollusques pour leur faire traverser Atlantique, je pensai que le plus sage était de consulter les per- sonnes compétentes du pays: toutes, je dois le dire, elles furent unanimes à ME prédire un insuccès , si j'effectuais des envois dans la saison chaude. < En présence d’une opinion aussi nettement ex- primée, el après m être entendu avec M. le Consul- Général de France, je me décidai à faire une expé- dition immédiate par le steamer Asia, dont le capitaine, homme fort intelligent, m’avait fait ses offres de services. Le 23 avril, je mis à bord 3,000 Venus Merce- naria et 600 huîtres de la Virginie, provenant des plantations de la baie de New-York. Quelque temps après, je fis un second envoi de 2,000 Vénus par le Persia, le plus rapide des navires de la compagnie Cunard. {ci, Monsieur le Ministre, je dois faire ob- server à Votre Excellence, que la suppression de la ligne Transatlantique du Havre, dont les bâtiments ont été mis en réquisition par le gouvernement Fé- déral, pour les nécessités de la guerre, vint déranger mes prévisions, el me mit dans l'obligation de re- courir à la voie anglaise. Toutes les causes d’insuccès pour le transport des coquillages se trouvèrent ainsi considérablement augmentées . Fr J + 48 CA 2 (Ses Après un séjour de deux semaines à New-York, pendant lestuelles je commençai mes recherches sur l’industrie coquillière, je me rendis à Boston, afin de m'éclairer des conseils de la haute expérience de M. Agassis, pour qui M. Coste m'avait remis une lettre d'introduction. _ Avecune bonté et une bienveillance, auxquelles je ne saurais rendre trop d'hommages, l’illustre pro- fesseur me fit part des moyens qui pouvaient le mieux assurer le succès de mes travaux. Il m'indi- qua les parties du littoral des États du Nord, où je devais plus particulièrement porter mes investiga- tions, et se mit, en un mot, à ma disposition pour les diriger dans Ïa voie la plus fructueuse. Néan- moins, lorsqu'il apprit que mon séjour en Amérique ne devait pas dépasser un mois, il ne me dissimula point combien j’éprouverais de difficultôs, par suite d'une mission aussi limitée. Selon lui, les études que j'avais à faire, au point de vue de l’industrie huitrière, exigeaient à elles seules bien plus de temps qu’on ne m'en avait accordé ; car aux Élats- Unis, où nul octroi ne permet d'établir la statistique de la consommation des villes, où il n’existe aucune centralisation, où chaque État est régi par des lois particulières, ce n’est que par des recherches per- sonnelles qu’on peut se procurer des renseignements exacls. Ce = Le transport d’une grande quantité de mollusques dans le mois de juin lui paraissait surtout fort ha- sardé ; aussi m’avoua-t-il qu’en raison même de l'intérêt qu’il portait à une entreprise, due tout en- uère à l’iniliative de Sa Majesté, il ne redoutait rien tant qu’un insuccès, qui, sans rien prouver contre l’œuvre elle-même, pourrait cependant la compro- meltre et entraîner son abandon. Devant de pareilles considérations, Monsieur le Ministre, Je n'avais évidemment qu’à m'incliner, mais comme, avant tout, je tenais à ne point agir sans des ordres précis de Votre Excellence, je priai M. Aoassis d'écrire à M. Coste, en lui développant les motifs qui exigeaient la prolongation de mon séiour aux États-Unis. Le 27 avril, je reçus de Cambridge la lettre sui- vanie : « Je viens d’expédier une longue lettre à M.Coste, » conforme à l'opinion que je vous ai soumise sur la » nécessité de prolonger votre séjour aux États-Unis, » pour atteindre le but de votre mission. Je crois » qu’il est indispensable que vous passiez ici la sai- » son chaude afin de vous mettre au courant de » ce qui Se fait pour la pêche et la conservation des » huîtres, et que vous attendiez l'automne pour ex- » pédier avec plus de chance de succès les mollus- + — < L SL » ques que l’on se propose d’acclimater sur les côtes » de France, etc. Signé : AGASsIs. » Décidé désormais à attendre une réponse de Votre Excellence, je commençai à Boston des expériences, pour m'assurer du traitement qu’il convenait d’ap- pliquer aux mollusques, en vue d’une traversée d'Europe. J'achetai donc une certaine quantité de clams et d’huîtres de la Virginie qui, placés dans des cuves, sur une couche de gravier, furent abreu- vés, malin et soir, avec de l’eau de mer bien pure qu'on allait chercher à quelque distance du port. Les cuves étaient vidées après que l’eau avait sé- journé une heure environ sur les coquillages ; ces expériences donnèrent les résultats suivants : Peude temps après avoir été placées danslescuves, les myes avaient dépéri visiblement, et le douzième jour il n’en restait aucune de vivante. De ce côté l’insuccès était à peu près complet. Les Vénus et les huîtres, au contraire, se trouvè- rent si bien de ce mode de traitement, qu’un mois après elles étaient en aussi bon état que le premier jour, la mortalité ayant été insignifiante et pouvant être attribuée à plusieurs causes. Pendant mes ab- sences, M. Higgins, planteur etexpéditeur d’huîtres, voulut bien se charger de suivre ces expériences, dont il me tint constamment au courant. 0 — Les succès obtenus sur les huitres et les Vénus m'inspirèrent une telle confiance, que le 28 mai j’en embarquai dix paniers sur le steamer Europa, par- tant de Boston. Dans les premiers jours du mois de juin, ayant été informé par une dépêche de l’amiral de la Ron- cière, que Votre Excellence avait bien voulu prolon- ger la mission, je me mis en mesure de continuer les envois. Le 40 juin, M. le capitaine de vaisseau de Selva, commandant la frégate la Bellone, se chargea d'ap- porter en France des huîtres et des Vénus, ainsi qu'une quarantaine de tortues d’eau douce, que J'envoyais à M. Coste, à titre de spécimens des es- pêces américaines. De nouvelles expériences, accom- plies sur le littoral de l'île Long-Island, m’ayant démontré la possibilité de conserver des myes hors de leur élément, pendant une vingtaine de jours, même dans la saison chaude, j’embarquai, le 18 juiller, 800 de ces mollusques sur l’Europa, avec six paniers d’huîtres de la baie de la Delaware. Les myes, enterrées dans des caisses remplies de sable, comme daps leurs gisements naturels, furent arro- sées d’eau salée plusieurs fois par Jour pendant la traversée, et j'ai appris depuis que 400 d’entre elles sont arrivées vivantes à St-Wast, Le 29 Juillet, le Persia emporta 2,000 Vénus, et MR le 40 août, je mis trente tortues d’eau douce à bord de l’Australasian ; enfin, les 3 et 10 septembre, l'ex- pédiai, par les steamers anglais, plusieurs milliers de mollusques. Tous ces envois, Monsieur le Ministre, ainsi que je lai appris depuis mon retour au Havre, n'ont pas été également heureux. Sur trente mille coquillages environ que jai fait partir d'Amérique, en y com- prenant ceux que j'ai apporiés avec moi et ceux qui vont arriver incessamment, On ne peut guère COMpP- ter sur plus du tiers. Il est certainement regrettable qu'une quantité plus considérable n'ait point échappé aux périls de la traversée, mais ce résultat ne sau- rait étonner, quand on Songera que Jj ai été forcé de confier les colonies de mollusques à des personnes ne prenant, en délinitive, qu’un intérêt médiocre à leur conservation. À chaque envoi, je remellais à bord du bâtiment une note d'instructions, mais j'ai tout lieu de penser qu’elles n’ont pas été suivies avec soin par les agents inférieurs chargés d’en as- surer l'exécuiion. Du reste, ainsi que j'ai déjà eu honneur de le dire à Votre Excellence, rien n'a été plus fâcheux pour le succès de ma mission, que la suppression de la ligne américaine du Havre, at- tendu que l’embarquement des mollusques, sur Îes steamners anglais, nécessitait leur transbordement à Liverpool sur un second navire, les faisail passer 119 L 21 par plusieurs mains, augmentait la durée des tra- versées, et, en fin de compte, mulliplait toutes les causes de mortalité. Les Directeurs de la compagnie Cunard, à New- York et à Boston, m'ont cependant prêté le concours le plus empressé; et dès qu'ils ont appris que mes envois étaient destinés à une œuvre d'utilité pu-". blique, ils ont constamment refusé de recevoir au- cune rémunération pour les transports. Quoi qu'il en soit, Monsieur ie Ministre, je pense qu'il y a maintenant à Saint-Wasi tout ce qui est nécessaire Four l'essai d’acclimatation projetée, et j'ajouterai qu'avec les relations que j'ai main- tenant à New-York, et surtout avec les arrange- ments éventuels que J'ai pris à Liverpool, avec le Directeur de Ja compagnie Cunard, rien ne sera plus facile que de faire venir durant lhiver de nouvelles colonies de mollusques, si on le juge né- cessaire. Pendant mon séjour aux États-Unis, j'ai parcouru successivement les parties du littoral des États du Nord, où l’iadustrie huîtrière est dans l’état le plus florissant. La guerre m'a empêché, il est vrai, de visiter les oisements d'huîtres et les plantations de la baie de Chesapeake, mais comme en définitive les procédés de culture sont les mêmes partout, je n'aurais pu y Li PR, À Pertes Prat Cs Cens PR 1 72 2 +, Dern ey2 de DE 17 Pit ll 8716; Jarre, 1427218) PRES A. (Repas v 9 ere fes FTP CALE . tome _2T TA rt. Are s Ca. DRE AE lt = TS Cite Lun en LT C2 ler ff Are, CTRGLLCIITIIQ Fe Ps Re a at pf82e4 SE Es 24 are or D Fort) een. 1 Ar C2MtAic : ne” D pere lc LI 3817 Es CF r47 ras #0 Ù ; Mate CHR In ae CC conf er) ar 2: T2 CLT Toma | PE “PE Da S'am) 2 & Hi . CS Nr recueillir que des documents identiques à ceux que j'avais déjà. Dans mes excursions, m’étant trouvé à chaque instant en rapport avec des personnes s’occupant des pêches cotières, j'en ai profité pour recueillir des documents qui m'ont paru devoir intéresser les industries similaires que nous avons en France. A New-London, où j'étais allé visiter des pêcheries de clams , j'ai fait relever les plans de plusieurs ba- teaux pêcheurs construits par M. Becwith, un des meilleurs constructeurs de ce genre de bâtiments. J'apporte pour le bureau des pêches, les plans d’un cutter ayant un vivier, d'un schooner ayant une gla- cière, et d’un second schooner ayant à la fois, un vi- vier et une glacière. Depuis mon arrivée en Amérique, jusqu’à mon départ, j'ai envoyé à M. Coste, sous la direction du- quel j'ai été spécialement placé par Votre Excel- lence, différents travaux sur l’industrie de la glace aux États-Unis, et son emploi comme moyen de conservation du poisson, sur l'installation des vi- viers et des glacières à bord des bateaux pêcheurs, sur les réserves flottantes à poisson établies dans les ports, sur l’industrie du homard à Boston, sur la pêche du maquereau, et sur celle du flétan que nos pêcheurs de Terre-Neuve auraient tant d'intérêt à combiner avec celle de la morue. Tous ces rap- ports complétés par des renseignements ultérieurs seront annexés au Mémoire que j'aurai l’hon- neur de remelire incessamment à Votre Excel- lence. Dans le cours de mes études, Monsieur le Minis- tre, je me suis principalement attaché à voir le côté pratique des choses et à les juger impartialement, en faisant, autant que possible, abstraction de mes préjugés nationaux. Un procédé m’a-t-il paru nou: veau ? je l’ai examiné avec attention, et je me suis bien gardé de le repousser, par cela seul, qu'il n'était point usité en France. Egalement me suis-je défendu d’ure admiration trop enthousiaste pour certains faits séduisants au premier abord, et n’ai- Je point accepté sans contrôle les renseignements qu’on me fournissait. Aux États-Unis, plus que par- tout ailleurs peut-être, il ne faut admettre les asser- tions que sous bénéfice d'inventaire, car avec des dehors froids, sérieux et réservés, les Américains du Nord sont singulièrement portés à l’exagération, toutes les fois qu’il est question du commerce, de l'industrie ou de l’excellence de leur pays. Cet amour-propre extrême, qui ne manque pas d'une certaine grandeur, forme un des traits les plus sail- lants de leur caractère. Durant mes investigations sur l'industrie hui- trière, on m’a fourni à chaque instant des reusei- TEE gnements en contradiction les uns avec les autres et quelquefois même entièrement erronés. A New-York, à Boston, à Philadelphie, etc., mal- gré toutes les recherches que j'ai faites dans les bibliothèques et chez les libraires, 11 m'a été impos- sible de trouver un seul ouvrage traitant de Pindus- trie coquillière, et fout ce qu’on m’a moutré, se réduisait à des documents de statistique fort incom- plets ou à des articles de journaux, envisageant Ja question au point de vue commercial. Quant à la culture des mollusques, à leur plantation, pour me servir de l'expression américaine, il m'a fallu Pap- prendre tout entière en allant visiter les établisse - ments et en faisant causer les pêcheurs; je n’ai eu du reste qu’à me louer de la population marilime, et une fois la première glace rompue, je lai trouvée en général fort obligeante, et prête à me fournir les indications qui m'étaient nécessaires. Eu terminant, Monsieur le Ministre, je crois de- voir exprimer toute ma reconnaissance pour le bien- veillant appui que j'ai trouvé en Amérique auprès de Messieurs les Consuis de France à New-York et à Boston. De même, que Votre Excellence me per- mette de lui dire que je conserverai comme un titre d'honneur, le souvenir de la faveur qu’elle m'a accordée, en me chargeant d’une mission qui m'a mis étroitement en rapport avec des sa- USE © vants aussi éminents que MM. Coste et Agassis. Pour un officier désireux de s’instruire, une telle faveur est une grande récompense. J'ai l'honneur d’être, avec le plus profond res- pect, De Votre Excellence, Monsieur le Ministre, Le très-obéissant serviteur, Le Lieutenant de Vaisseau de la Marine Impériale, Directeur des mouvements du Port du Havre: Signé : DE BROCA. PP ONONN INT PT SS ORTS PREMIÈRE PARTIE ÉTUDE SUR L'INDUSTRIE HUITRIÈRE DES ÉTATS-UNIS ACCLIMATATION EN FRANCE Des Mollusques comestibles de cette contrée. ETUDE SUR L'INDUSTRIE HUITRIÈRE AUX ÉTATS-UNIS. CHAPITRE PREMIER INTRODUCTION L’aphorisme de Brillat-Savarin : « La découverte d’un meis nouveau fait plus pour le bonheur du genre humain que la découverte d’une étoile, » n’a Jamais été plus vrai qu’à notre époque, où l’accrois- sement continuel de la population soulève chaque jour le grave problème de l'alimentation publique. — Sur un territoire comparativement restreint, la France compte aujourd'hui près de quarante mil- lions d’habitants, et malgré la fertilité du sol, le . perfectionnement de l’agriculture, l’élevage de nom- = AD = breux troupeaux, nous ne saurions nous dissimuler que la production des denrées alimentaires com- mence à n'être plus en rapport avec la consomma- tion. Dans les années où les récoltes de céréales sont au-dessous de la moyenne, nous devons même re- courir aux nations étrangères pour combler le défi- cit, et, disons-le hautement, si, dans ces derniers temps le peuple n’a pas eu à souffrir de fàcheuses privations, il le doit uniquement à la prévoyante sol- licitude du gouvernement, qui a su prendre à temps les mesures nécessaires pour conjurer les calamités. Ce serait un tort, néanmoins, que de s'endormir dans une fausse sécurité, et mieux vaut reconnaître qu’il y a là un danger permanent auquel il faut por- ter remède, car 1l peut surgir telle éventualité, une guerre par exemple, qui, dans un moment donné, sera de nature à paralyser les meilleurs efforts, et empêcher l’arrivée des denrées alimentaires néces- saires à nos besoins. Assurer la nourriture des populations en faisant profiter l’agriculture des découvertes de la science, encourager les laboureurs, repeupler les cours d’eau si appauvris, exploiter le littoral maritime, créer, en un mot, des ressources plus abondantes et moins chères, telle est évidemment la mission que doivent poursuivre avec persévérance {ous ceux qui Ont à cœur la grandeur et la prospérité du pays. Ar QC Parmi les moyens qui sont en notre pouvoir pour atteindre un but si désiré, un des plus puissants, sans contredit, consiste à acclimater en France les végélaux et les animaux comestibles vivant à l’étran- ger. Dans les végétaux, que d'exemples d’acclima- tation accomplis ne pourrait-on pas citer, et, pour ne plus parler que d’un seul, disons qu'une mo- deste plante, la pomme de terre (1), importée d’A- mérique au seizième siècle, a produit dans l'économie publique une telle révolution, que des populations entières lui doivent maintenant de voir leur subsis- lance assurée !— Le maïs est dans le même cas. Parmi les espèces animales, les acclimatations ont aussi apporté un large contingent à la richesse na- tionale. Les chevaux arabes, les mérinos d’Espagne ont régénéré nos races ahäiardies, le dindon des États-Unis, la pintade d'Afrique, les coqs de la Chine et de l'Inde, les canards de Barbarie, diverses espè- ces de pigeons, etc., peuplent nos fermes par mil- liers, et, par le croisement avec les espèces indi- (1) « La pomme de terre fut apportée en Irlaude, en 1545, par le capitaine John Hawkins ; elle fut cultivée dans le Lancashire, en 168, dans la Saxe, en 1717, en Ecosse, en 1728, et dix ans plus tard, elle se répandit en Prusse. En France elle était cultivée dans quelques provinces, dès le règne de Louis XV, mais c’est Parmen- tier qui, à la fin du dernier siècle, contribua le plus à la faire ap- précier et à la propager dans notre pays. LŒILLET, Encyclopédie morale. Su 99 gènes, fournissent des produits plus grands et plus savoureux. Depuis quelques années, la Société Impériale d’Acclimatation fait les plus louables efforts pour doter la France d'éléments nouveaux d'industrie et d'alimentation, et, à son exemple, des sociétés ana- logues, formées dans les départements, concourent avec elle à cette œuvre si éminemment patriotique. Yest ainsi que l'hémione, entièrement domestiquée, est à la veille de prendre place dans l’industrie che- valine, dont elle sera l’un des plus gracieux orne- ments; que les chèvres d’angora vivent sur plusieurs points de la France, sans qu'on ait encore observé aucune dégénérescence dans leur nature; que de jeunes autruches, nées et élevées dans les jardins zoologiques d’Alger et de Marseille, nous font espé- rer que le moment n’est pas éloigné où la chair de ces oiseaux prendra rang parmi les viandes de bou- cherie les plus estimées; bien d’autres entreprises, enfin, qu'il serait trop long d’énumérer, sont en cours d’expérimentation, avec des chances de succès du meilleur augure, D'où vient, cependant, que parmi tant d’essais on en compte si peu qui aient eu pour objet les poissons, les crustacés et les mollusques? Dans les temps modernes, à part la carpe et le cyprin doré de la Chine, poisson purement de luxe et sans SN Na grande utilité, on ne peut citer que bien peu de faits, car l'introduction dans nos cours d’eau, de poissons vivant dans des localités peu éloignées, ne constitue pas une acclimatalion dans l’acception ri- soureuse du mot. (4). L’essai tenté sur le gouramy de la Chine, le plus succulent de tous les poissons d’eau douce, est resté jusqu'ici sans résultat; mais, chose précieuse à enregistrer, on est parvenu à lui faire franchir une étape vers l’Europe, et actuelle- ment ilen existe de nombreux spécimens à liîle Maurice. Quant aux mollusques comestibles, la première entreprise d’acclimatalion qu’on puisse mentionner, est probablement celle qui se poursuit aujourd'hui sur lPhuiître de la Virginie et la Venus Mercenaria, que j'ai été chargé d'importer en France. Avant la découverte de la vapeur et des chemins de fer, ces deux grands leviers de l’activité mo- derne, les transports des productions marines ou fluviales étrangères, présentaient d'immenses difii- A ————— tm mt (4) La carpe fut introduite en Angleterre en 1514, par Marshal et en Danemark en 1550, par Pierre Oxe. De nos jours, M. Coste a naturalisé dans nos eaux l’ombre chevalier. Au commencement du siècle, Péron et Lesueur tentèrent en vain d’apporter le gouramy en France, et quelques années plus tard, le capitaine Philibert sui- vit leur exemple sans plus de succès ; néanmoins il conserva le dernier poisson survivant jusqu’en vue des côtes de France. cultés. Le peu de rapidité de la navigation à voiles constituait évidemment une condition trop défavo— rable, à laquelle venait s’ajouter encore l’absence de toute étude préliminaire pour guider les voya- geurs dans la manière dont ils devaient opérer. Avec de la persévérance, la chose n’était cependant pas impossible, comme le prouvent l’importation du gouramy à l’île Maurice, et quelques autres faits re- cueillis par l’histoire (4). De nos jours, en 1824, M. Milbert, voyageur du Museum d'Histoire Naturelle, parvint à amener au Havre quelques poissons des États-Unis! Malheu- reusement toute la colonie périt à l’arrivée, par l’incurie d’un capitaine qui la laissa sur le pont pendant une forte gelée d'hiver. Milbert re se con-— sola jamais de cet insuccès. Autre exemple encore : il y a vingt-cinq ans environ, un négociant améri- cain fit jeter dans la rade de Boston un chargemeni (1) Dans l’antiquité, les Romains, non contents d’avoir natura- lisé, dans quelques lacs d'Italie, le Vulsinum et le Ciminus, dif- férentes espèces de poissons, vivant à l'embouchure des fleuves, in- troduisirent encore dans la mer de Toscane, le scare des mers de Syrie. Cette entreprise remarquable fut accomplie sous le règne de Claude, par un deses affranchis, Elipertius-Optatus, qui comman- dait la flotte romaine. Les scares furent apportés dans des bateaux- viviers, et pendant quelques années, tous ceux que prirent les pècheurs dans leurs filets, furent soigneusement rejetés à la mer. de black-fish (perche-noire), pris dans la baie de New-York, et conservés dans un bateau-vivier. Depuis cette époque, ces poissons inconnus autre— fois dans les parages de Boston, s’y sont multipliés au point que les pêcheurs en capturent journelle- ment quelques-uns. Disons-le, du reste, si à l’é— poque où les bâtiments à voiles étaient les seuls moyens de transport, les entreprises d’acclimatation des poissons et des mollusques n’ont pas été plus nombreuses, c’est que véritablement le besoin ne s’en faisait pas sentir. Avant que les cours d’eau de la France eussent été emménagés pour les besoins de l'industrie, ils étaient très-poissonneux, et il n°y a pas si longtemps déjà que dans certaines localités de la Bretagne, les domestiques, à l'instar des paysans écossais, ne voulaient se louer qu’à la con- dilion de ne pas manger de saumon plus de trois fois par semaine. L'augmentation des récoltes par une agriculture mieux entendue, élevage des troupeaux. le perfec- tionnement des races, elc., se présentait alors plus naturellement à lesprit, pour accroître les ressour- ces alimentaires, que des entreprises considérées à bon droit comme fort précaires. De nos jours, il n’en est plus de même : les fleuves et les rivières, par suite d’un déplorable aménagement, ne don- nent plus que d’insignifiants produits; les bancs 2 NET d’huitres, les gisements de mollusques comestibles sc dépeuplent de jour en jour, et il faut absolument recourir aux sciences fécondes de ,;a pisciculture et de l’ostréiculture pour réparer les destructions. D'une autre part, à aucune époque on ne s'est trouvé dans de meilleures conditions pour mener les projets d’acclimatation à bonne fin. Les bateaux _transatlantiques et autres, rayonnant vers tous les continents, ont ouvert des communications régu- lières avec les contrées les plus éloignées du globe, et la perfection des constructions navales, ainsi que la rapidité des traversées, ont en outre atteint à peu près tout ce qu'on peut demander au génie hu- main (1). Les moyens de transport existent aujourd’hui sur la plus grande échelle, sans compter que les bâti- ments de la Marine Impériale pourront concourir à ces utiles travaux, ei recevoir même, dans certaims cas, des installations spéciales, incompatibles avec le service des steamers du commerce. Les poissons et les mollusques, ne loublions pas, om mm mm “om. (1) Pour ne parler que de la France, Marseille, à part son service de la Méditerranée, vient d’en établir un second sur l’extrème Orient. Bordeaux en a un sur le Brésil et la Plata. Saint-Nazaire, un sur les Antilles et le golfe du Mexique, et certainement dans le courant de cette année, le port du Havre inaugurera la ligne des États-Unis. d'aË pit présentent d'incontestables avantages sur les autres animaux, non-seulement par la rapidité avec la- quelle ils se multiplient, dès qu’ils sont acclimatés, mais encore parce que les dépenses premières sont infiniment moins élevées. Seuis, parmi les êtres que l’homme soumet à son pouvoir, ils vivent dans un milieu où ils savent trouver d'eux-mêmes une nour- riture qu'on n’est point obligé de leur fournir à grands frais, et qui, dans aucun cas, n’est prélevée sur nos besoins, ainsi que cela arrive pour le gi- bier. Des quadrupèdes étrangers parviennent:ils à s’accoutumer au climat de la France, il faudra tou- Jours attendre de longues années avant d’avoir des produits nombreux, sans compter que les maladies peuvent tout compromettre. Que de mécomptes la Société d’Acclinatalion n'a-t-elle pas éprouvés pour l’aeclimatation des lamas et des alpacas! Avec les oiseaux on est dans des conditions un peu meilleu- res, mais néanmoins leur reproduction est égale- ment lente, tandis qu'avec les poissons et les mol- lusques, dès que quelques spécimens seront accli- matés au régime «de nos eaux, la reproduction atteindra en quelques années des proportions con- sidérables, car chez la plupart de ces espèces, les germes se comptent par milliers. Tout le monde connaît l’étonnante faculté de reproduction que possèdent les huitres et les moules. Les naturalistes — 28 — ont compté les œufs par centaines de mille chez le brochet, par un demi-million chez la carpe et le ma- quereau, six millions chez la plie, ce qui explique la pullulation prodigieuse de ce poisson dans Îles étangs de la Frise orientale, où les Hollandais l’ont introduit au commencement du siècle, Enfin, selon M. le professeur Valenciennes, on ne compte pas moins de treize millions d'œufs chez le muge à grosses lèvres, On voit, par ces exemples, qu'il se- rait facile de multiplier, combien il s'attache d’in- térêt à l’acclimatation d’espèces possédant la faculté créatrice, à un degré aussi remarquable. La question du gouramy va sans doute être pro— chainement reprise au moyen des bateaux à vapeur de l’Indo-Chine et de ceux qui desservent la ligne d'Alexandrie. Pendant mon séjour aux États-Unis, bien que ma mission se rapportàt plus particulièrement à l’accli- matation des mollusques, j'ai cependant étendu mes recherches sur d’autres espèces utiles. Dansle nom- bre, je mentionnerai les tortues terrapins qui vivent aux embouchures des fleuves ainsi que dans Îles marais d’eau saumâtre, et sont si délicates à man— ger; le homard américain, plus grand, mais peut- être moins savoureux que le nôtre, et plusieurs tortues exclusivement d’eau douce, parmi les- quelles la red-belly, est une des plus estimées. ‘ CEA nt. OMAN) 2 | L | è 0 Gi 25 Dés dé PE I PE TC .." mt ati ntm dt) ant te — 29 — Prochainement, le savant Directeur du Museum de Cambridge (Massachusetts) expédiera en France un nombre suffisant de spécimens de cette dernière es— pèse pour que l’on puisse tenter un essai d’'acclima- tation dans les étangs des environs de Paris. Parmi les poissons d’eau douce, la grande truite des lacs (Salmo-Amethystus), et le white fish (Cor reganus-Albus) seraient de véritables conquêtes pour lPicthyologie française si l’on pouvait parvenir à les transporter en Europe. M. Agassis (1), dont l'opinion fait autorité en pareille matière, regarde la fécondation artificielle comme un moyen certain de réussir dans cette entreprise signalée par lui à l'Empereur, et dont j'ai eu moi-même l’honneur d’entretenir Sa Majesté pendant l'audience qu’elle a daigné m’accorder à Saint-Cloud. Quoi qu'il en soit de l'avenir de ces projets, men- (4) L’illustre professeur est d’avis que le gouvernement français devrait entreprendre l'acclimatation du nandou, qui, bien mieux que l’autruche du Sahara, est susceptible d’ètre naturalisé en France, par le seul fait qu’il vit dans une contrée tempérée. En 1860, j’ai signalé à M. Coste la moule perlière comme pouvant ètre introduite sur les côtes de l'Algérie; et j’ai même ouvert à ce sujet des relations avec un négociant grec, d'Alexandrie, qui s’est occupé de la pèche des perles dans la mer Rouge. Dernièrement, M. Lamiral a publié dans le Bulletin de la Société Impériale d’Acclimatation un article fort intéressant sur cette matière. 9 se AA PES tionnés uniquement pour montrer combien de ri- chesses nous pouvons encore conquérir, je les lais— serai maintenant de côté pour m'occuper de l’aceli- matation des mollusques qui à fait l'objet de mon voyage en Amérique. Celte question exige d’ailleurs d'assez longs développements pour être appréciée à sa juste valeur. À part l'huitre commune et la moule, le littoral maritime de nos deux mers est singulièrement pau vre en bonnes espèces de mollusques comestibles. Quelques coquilles Saint-Jacques sur les côtes de Bretagne, quelques espèces de Vénus peu abon- dantes dans les baies de l'Océan et de la Méditerra-— née, quelques Cardiums..…, etc. Voilà à peu prés à quoi se réduisent nos ressources. L'Amérique du Nord, au contraire, sur les rivages baignés par l’Atlantique, présente de telles richesses coquillières, qu'elle est probablement la contrée du globe la plus favorisée pour ce genre de productions (1). L’huitre, (1) « Au point de vue de l’industrie de la pêche , le littoral américain présente une conformation unique au monde, Depuis le cap Féar jusqu’à l’extrémité nord de l’île Long-Island, presque par- tout entre l'Océan et la terre ferme, sont interposées d'étroites ban- des siblonneuses (sandy beaches) qui courent paral'èlement au ri- vage, à une distance de un à plusieurs milles. Ce sont tantôt des îles, tantôt des presqu'iles ayant quelquefois une grande longueur, sur uné largeur qui varie depuis quelques mètres jusqu’à un demi- mille. Ces langues de sable déterminent une foule de baies, de a — dont on distingue trois espèces, furme sur les côtes des bancs imnenses dont la pêche verse chaque an- née dans la consommation publique, une masse de produits dont nous ne saurions nous faire une idée en Europe; en outre, dans les baies, dans les bras de mer, les détroits, etc., on rencontre à chaque in- stant des gisements de mollusques comestibles con- nus sous le nom général de clams, et dont les plus importants sont : le soft-clam et le round-clam (Mya Arenaria et Venus Mercenaria) des natura— listes. Les huîtres, les Venus Mercenaria et les Myes des sables, pour ne parler que de ces trois espèces, en- trent aujourd'hui pour une si large part dans l'ali- mentation publique, que de grandes privations ré- sulteraient certainement du manque de cet ali- ment. Dans la ville de New-York, le centre ie plus po- puleux des Élats-Unis, le commerce des huîtres esl estimé annuellement à 35 millions de francs, et dans _——_——___—___—————— ———————_—_——2 sunds, {de lagunes, etc,, dans les conditions les plus favorables pour la multiplication des poissons et des mollusques. En outre, comme les ouvertures communiquant avec la mer, sont peu nom- breuses, il en résulte qua dans les endroits où viennent aboutir des fleuves ou des rivières, la salure d2s eaux est moins forte qu’au large, ce qui augmente encore les chances de proauction de certains poissons et mollusques, notamment des huîtres. » AXE. ed toute la contrée il est évalué à 100 millions; toute- fois, ces chiffres, malgré leur élévation, ne présen- tent nullement la valeur totale des produits, attendu que sur les côtes, les pêcheurs et les riverains en font une consommation journalière qui échappe à Pestimalion. En 1859, le Merchants Magazine and Commer- cial Review établissait ainsi le commerce des huîtres dans les principales villes de l’Union : Virginie... 1,050,000 Boisseaux. Baltimore... 3,500,000 » Philadelphie... 2,500,000 » New-York... 6,950,000 » Fair-Haven..…..… 2,000,000 » DAME: | Autres villes, telles que Providence, elc. 4,000,000 » Total en Boisseaux..... 20,000,000 A quatre cents huîtres de taille moyenne seule- : ment par boisseau, on arrive au chiffre énorme de huit milliards de mollusques consommés ! J La même année, dans l’American Institute, “ M. Meigs écrivait qu’à New-York on payait, pour l'achat des huitres nécessaires à la consommation de la ville, plus d’argent que pour la viande de bou-“ cherie. L'emploi de cette nourriture est tellement ar — entré dans les habitudes de toutes les classes de la population, qu’il n’est pas de localité, pour ainsi dire, qui n’en reçoive un approvisionnement, et orâce aux chemins de fer et aux voies navigables, les huîtres en écaille, en chair crue conservée dans la glace, en marinade, en boîtes scellées au bain- marie, etc., pénètrent maintenant sous toutes les formes, jusque dans les parties les plus reculées de l'Amérique du Nord. Les villes de Fair-Haven, de Boston et de Baltimore sont à la tête de ce commerce intérieur, qui pendant six mois de l’année, procure du travail à un grand nombre d'ouvriers. Le soft-clam, en tout semblable à la mye des sa- bles, qui vit dans les mers du Nord de l'Europe et notamment en Ecosse, pullule tellement sur le litto- ral de la Nouvelle- Angleterre, que malgré une pêche incessante, ses gisements ne paraissent pas diminuer. Commun dans l'Etat de New-York, sa véritable pa- trie est néanmoins plus au Nord, où on le rencontre jusque sur les côtes de l’île de Terre-Neuve, mais nulle part il n’est aussi abondant que sur les grèves des Comités d’Essex et de Barnstable dans le Massa- chusetts, — En 1841, le docteur Gould, dans son histoire naturelle des invertébrés, évaluait à plus de dix mille boisseaux Ia quantité de soft-clams con- sommée dans le Massachusetts, mais ce chiffre, basé probablement sur ce que vendaient les pêcheurs de SPA: VISE profession, ne saurait donner une idée de Ja con- sommation réelle, vu que les réglements accordent à chaque citoyen de l'État, le droit de pêcher autant de mollusques qu’il lui en faut pour la nourriture de sa famille. Ici encore, aucune évaluation, même approximative, n’est possible. Ce qu’il y a de cer- tai, c'est qu'il se consomme à Boston des quantités énormes de soft-clams pour la confection de ces ex- cellentes soupes de coquillages, si appréciées des Anéricains ! les myes fournissent en outre un des meilleurs appâts que l’on connaisse pour la pêche de la morue, el {ous les ans, les industriels du Massachu- setts en salent des milliers de barils pour les pêche- ries du grand banc de Terre-Neuve. Fraîchement pêchées, elles se vendent sur les quais de Boston, 75 cents le boisseau. (1) (4) En général, à part les huîtres et les moules, nos populations de l'Océan consomment peu de mollusques. Dans les localités mêmes où quelques autres espèces comestibles sont cependant abondantes, il n'y a guère que les classes pauvres qui en mangent, et le préjugé qu'ont tant de personnnes contre ces produits de la mer, est d’au- tant plus absurde, que nous voyons dans la Méditerranée les popu- lations riveraincs, notamment les Provençaux ct les Italiens, en faire leurs délices. Qui ne connaît la passion des Marseillais pour les praires, les clovisses et les oursins, que les Bretons et les Normands dédai- gnent, bien que ces coquillages soient réellement excellents et puis- « sent en été supplécr au marque des huîtres. Les seiches et les cal- mars, si appréciés dans le midi, sont presque un objet de dégoût Le Round-clam, mollusque de grande faille, très analogue quant au goût à la Venus Verrucosa (praïre double des Marseillais) vit comme elle dans les baies abritées et peu profondes, où 1! se plaît à labourer les sables vaseux. Aussi prolifi- que que que la mye, il abonde sur le littoral des . États-Unis, situé au sud du cap Cod, qui paraît être sa limite vers le nord. On en trouve cependant quelques spécimens jusque dans les parages du cap Ann, mais ils n’y sont l'objet d'aucune industrie. Les pêcheries les plus importantes que j'aie visi- tées, sont celles des environs de New-York, de la grande baie du sud de Long-fsland, de la baie de New-Haven et du cap Cod. Où consomme, à New- York et à Philadelphie, pendant l'été, une grande quantité de round-elams, qui remplacent dans cette saison les huîtres que quelques personnes regardent comme malfaisantes, et soit qu’on les mange crus ou cuits. is constituent, dans les deux cas, une ex= cellente nourriture, Huîtres de Virginie, Venus Mer- cenaria et Mya Arenaria, teiles sont les Lois espèces de bivalves dent l’acclimatation se poursuit aujour- d'hui sur nos côtes, avec des chances qni permettent dans le nord, malgré la qualité de leur chair, qui se prête à une foule de préparations culinaires, et c’est à peine si quelques pé- cheurs font exception à la prévention générale, * — 90 — + d’augurer une réussite complète, au moins pour les deux premières. Quant à la troisième, dor je nai pu apporter que quelques spécimens, il y'aura lieu | probablement de la remplacer par l'espèce vivant en Écosse, d’où il sera aisé d’en faire venir une colonie pour ensemencer une portion de grève (1). Depuis que j'ai pu constater par moi-même les ressources alimentaires que les Américains retirent des mollusques en question, et principalement de l'huitre, je pense que c’est sur ce dernier coquillage que doivent plus spécialement porter les efforts de la \arine Impériale. Ce n’est pas que dans mon esprit je n’attache aussi une grande importance à l’acclimatation des mya et des Venus Mercenaria, mais comme ces deux espèces se développent lentement, ainsi que jai pu m'en con- vaincre par l’examnen de spécimens de différents âges, il faudra nécessairement attendre plusieurs années avant de les avoir en nombre suffisant pour les livrer à la corsommation. — L’huître, au contraire, aussi féconde que la nôtre, se développe en outre avec une si grande rapidité, que plusieurs personnes dignes nt <. (4) Depuis la première publication de ce travail dans la Revue mari- time et coloniale (Paris, Chailamel), j’ai appris qu’on trouvait à Dun- kerque, dans le bassin des chasses, une espèce de mya absolument emblable à celle des États-Unis. 11 ne s’agit donc plus d’acclimater, mäis de propager sur les autres points du Littoral ce bivalve précieux. 97. de foi m'ont assuré qu’un de ces mollusques planté en avril ayant sept à huit centimètres de longueur, pouvait croître de plus de moitié, avant la fin de Tautomne suivant. J'ai moi-même constaté que les huîtres plantées dans la baie de New-Haven, aveient grandi deux mois après, de plus d’un centimètre et demi. Dans mes courses sur le littoral, j'ai mangé des huîtres provenant des plantations les plus renommées, et presque partout, je dois le dire, je leur ai trouvé ce goût un peu fade, qui est u: des caractères les plus marqués de l'espèce (1); toutefois, dans le Massa- chusetts, j'en ai goûté de beaucoup plus salées, ce qui provient à la fois de la nature particulière des eaux et des terrains maritimes où elles sont cultivées. Comme nourriture consommée crue, il est pro- bable qu’elles ne seront jamais aussi appréciées des gourmets que nos bonnes qualités indigènes ; mais en revanche, elles seront l’objet d’une préférence mar- quée, des qu’il s’agira de les mariner, de les mettre en conserves, ou de les soumettre aux préparations culinaires, auxquelles elles se prêtent sans perdre aucune de leurs propriétés nutritives. Il est, je crois, (1) Les marchands d’huîtres divisent ces mollusques en huîtres douces et en huîtres salées; ces dernières proviennent des fonds sous-marins où les eaux de la mer ne sont point mélangées d’eau douce. 3 CHE. difficile de manger quelque chose de plus délicat, que certains plats d’huitres qu’on prépare dans les bons restaurants de New-York, chez Delmonico, par exemple. À mon avis, l’acchimatation de cette espèce, sus- ceptible d’un engraissement rapide, plus riche d’ail- leurs que la nôtre en substance alimentaire, complé- tera en quelque sorte l’industrie huîtrière française, en ce sens qu'elle apportera les éléments d’une vé- ritable nourriture, là où il n’y a eu jusqu'ici que des éléments de luxe. Ce qu'il faut, c’est arriver à mettre les huîtres à la portée de toutes les bourses, ainsi que cela a lien en Amérique, où elles sont considérées comme une des denrées les plus com- munes et les moins chères. Dans les établissements populaires de New-York, on peut, moyennant six cents, Se procurer une bonne soupe faite avec ces mollusques. Il suffit, du reste, d’avoir assisié, comme Je Pai fait à diverses reprises, à des ventes journalières de plusieurs milliers d’huîtres chez le même marchand, d'en avoir vu ouvrir sept à huit cents boisseaux par jour dans les établissements de Boston et de Fair Haven, pour en expédier à l'intérieur la chair con- servée dans la glace... 11 suffit, dis-je, d’avoir assisté à de pareils spectacles pour en retirer la conviction profonde que la culture de coquillages aussi proli- D. — fiques peut devenir, en France comme aux États-Unis, un des moyens d'alimentation les plus précieux (4). Je regarderais donc comme très-heureux qu’on pût obtenir, le plus tôt possible, leur reproduction en France, et tout fait espérer qu'elle aura lieu au printemps prochain, puisque les huîtres mères, dé- posées par M. Coste dansle bassin d'Arcachon, s’y sont développées aussirapidement que dans les meilleures plantations américaines. Dès que la reproduction permettra d’en livrer au commerce, je ne doute pas un seul instant que leurs excellentes qualités ne les fassent rechercher des consommateurs (2). En résumé, à quelque point de vue que l’on con- sidère l'industrie coquillière des États-Unis, elle présente des résultats remarquables : alimentation (1) Les huîtres américaines offrent encore l’avantage de pouvoir se passer du régime des parcs, et bien que quelques localités leur conviennent mieux que d’autres, en raison de la richesse du fond, - elles prospèrent néanmoins sur presque tous les points de Ja côte. Une longue expérience a démontré que celles de Chesapeake pou- vaient être transplantées dans tous les États du Nord, sans y per- dre aucune de leurs qualités, Il est même remarquable à quel point elles peuvent s’y améliorer sous l’empire des conditions hydrogra- phiques particulières. Ainsi, les huîtres salées du Massachusetts si estimées à New-York, proviennent en général de la Virginie, et ont séjourné pendant quelques mois seuiement dans la boie de Boston ou celle de Weilfleet (au cap Cod.) (2) Par une coïncidence assez remarquable, l’huître de la Virgi- pie,que nous cherchons à naturaliser dans le bassin d'Arcachon, se trouve à l’état fossile aux environs de Bordeaux. | — 10 — des populations, ressources qu’elle fournit à l’agri- culture par l'emploi des écailles, influence sur la na- vigation côtière qu’elle développe sur une large échelle, travail qu’elle procure aux classes pau- vres, etc., elle mérite sous tous les rapports de fixer l'attention des économistes. Les huîtres et les clams, devenus maintenant des objets de première néces- sité dans l'Amérique du Nord, montrent combien les productions de la mer peuvent apporter de richesses dans une contrée, quels que soient d’ailleurs les procédés par lesquels on parvient à les obtenir en abondance. En dehors même de l’intéressante question d’ac- climatation dont j'ai parlé, l’exposé de cette indus- trie me paraît de nature à réagir sur Ce que nous faisons en France, en nous démontrant la nécessité de nous lancer dans la voie féconde ouverte avec tant de persévérance par M. Coste, les merveilleux résul- tats obtenus en peu d’années sur les points du litto- ral où il a expérimenté, ne permettant plus d’ailleurs de mettre en doute la valeur de ses ingénieuses mé- thodes d'’ostréiculture. Il sera certainement indis- pensable de faire encore une étude plus complète de nos côtes, afin de prévenir des écarts, ou plutôt les entreprises mal conçues; mais ce travail une fois terminé, peu d'industries en France présenteront autant de chances de succès. OL — J'ai souvent entendu faire à l’ostréiculture le re- proche de n’avoir pas produit,dans la baie de Saint- Brieuc,tous Jes résultats qu’on en attendait, c’est-à- dire que bien que les fascines immergées se fussent couvertes d'embryons perdant la ponte des huiîtres- mères, ils n'y avaient point prospéré et formé de nouveaux bancs. N'ayant jamais été à même de véri- fier la valeur de ces assertions, Je ne saurais dire à quel point elles sont fondées, mais en les admettant comme vraies, je ne vois pas en quoi elles mettraient en cause l'ostréiculture. Tout au plus, démontre- raient-elles l'utilité de transporter ailleurs les jeunes générations fixées sur les appareils collecteurs, met- tant ainsi en pratique ce qui se fait pour beaucoup de produits du sol. Du reste, demander à une science qui date de quelques années à peine, de marcher avec cette sûreté d’allures qui n’appartient qu'aux choses consacrées par une longue expérience, n'est point, à mon sens, fort équitable. La pisciculture, l’hirudiculture, l'ostréicullure, en un seul mot, toutes les industries qui tiennent au domaine des eaux et en constituent l’agriculture, doivent nécessairement passer par toutes les phases, depuis lenfance jusqu’à la maturité ; mais pour qu’elles puissent porter rapidement leurs fruits, il ne faut point que des préjugés irréfléchis viennent les entraver dans leur marche. En Er — Les esprits les plus prévenus, avec lesquels j'ai eu l’occasion de causer sur l’ostréiculture, reconnais- sent bien.la possibilité de recueillir les embryons en nombre pour ainsi dire illimité, mais là, suivant eux, s’arrêteraient les résultats utiles (4). Ce qui se passe aux États-Unis, où le secret de la culture consiste à élever sur des fonds nourriciers les mollusques pêchés dans les lieux de production, montre évidemment le néant d’une pareille opi- nion. A l'exemple des planteurs américains, rien n’est plus simple que d’enlever les petites huîtres fixées dans les appareils collecteurs, et de les semer dans des claires ou des étalages bien abrités, dont le fond soit suffisamment ferme, pour qu'il n’y ait aucune crainte de les voir étouffées par les vases. Tout cela n’exigera ni une grande dépense, ni une manipula- tion compliquée, et quelques mois après, les mollus- (1) Pendant que quelques personnes en France en sont encore à mettre en doute les procédés d'’ostréiculture dus à M. Coste, nos voisins les Anglais,avec ce bon sens pratique qui les porte à adopter les améliorations réalisées à l’étranger, n'hésitent point à entre- prendre la culture artificielle de l’huître. Une société au capital de 50,000 livres sterling vient de se eonstituer en Angleterre, dans le but d’introduire sur les-côtes, les nouvelles méthodes française. On trouvera à la fin de cet ouvrage (note A.) le prospectus de cette So- “ ciété avec les diverses pièces à l’appui, qui renferment des détails intéressants sur l’industrie huitrière de l'Angleterre. 84 ques seront assez forts pour se défendre contre les causes ordinaires de mortalité. C’est une erreur malheureusement répandue chez quelques marins, que ce qui tient aux productions de la mer, ne saurait être modifié par la main de l’homme, et dans leur pensée, ils regardent au moins comme inutile de chercher à obtenir ces productions par des moyens artificiels. Une pareille idée, équi- valant à la négation de la science elle-même, est aussi absurde que le fatalisme des peuples Orien- taux, laissant à la Providence le soin de toutes choses, et légitimant ainsi leur paresse et leur in- souciance. Ne craignons pas de le dire, c’est mécon- naître la mission de l'humanité que de poser ainsi des limites à son intelligence et à son esprit d’inves- tigation. L'exploitation du domaine maritime fait chaque jour un pas de plus dans Popinion publique. Les populations des côtes sentent instinctivement qu’elle est destinée à leur apporter de grands éléments de prospérité, et à les racheter de cet état de misère qui, depuis longtemps, est leur seul apanage. Quel- ques années encore, et grâce aux lumières de [a science, de profitables industries seront établies sui le littoral, parmi lesquelles l’ostréiculture sera cer- tainement une des plus fécondes. Tandis que; d'une part, au moyen d’une réglementation intelligente, Ne - basée sur l’étude des cantonnements, on mettra des myriades de jeunes poissons à l’abri de la destruc- tion ignorante des pêcheurs, de l’autre, on s’appli- quera à élever dans des réservoirs, les espêces qui peuvent facilement supporter ce régime. — De même, développera-t-on l'industrie coquillière sur tous les points du littoral, où elle pourra être établie avec succès; et alors les populations, attirées à la côte par l’espérance d’une vie meilleure, appren- dront à connaître la mer, en viendront peu à peu à la considérer comme une bienfaitrice, et finalement, augmenteront, dans de larges proportions, les élé- ments de notre puissance maritime. un — CHAPITRE II HUITRES DES ÉTATS-UNIS Les naturalistes divisent en trois espèces les hui- tres comestibles qui vivent sur les côtes orientales de l'Amérique du Nord, ce sont : | L'huître de la Virginie (Ostrea Virginiana) ; L'huiître Boréale (Ostrea Borealis) ; L’huitre Canadienne (Ostrea Canadensis). Toutefois, malgré cette classification basée sur les détails de forme, soumis eux-mêmes à des change- ments notables, suivant les spécimens que l’on exa- mine, les mollusques en question (pêchées d’ailleurs dans les mêmes parages) ont tant de similitude, quant au goût, qu’on pourrait bien, en définitive, les considérer comme de simples variétés d'une espèce unique. Le docteur américain Gould admet presque le fait pour l'huître Canadienne et l’huître Boréale, et, dans tous les cas, les différences avec les huîtres d'Europe sont si tranchées, qu'aucune confusion 3- + 48 — n’est possible, et qu’il suffit &’un simple examen pour se convaincre qu’elles constituent une espèce à part Pendant que la forme des huitres communes d'Europe, croissant librement, est presque entière- ment ronde, celle des huîtres américaines est tou- jours plus ou moins allongée; en outre, leurs valves inférieures plus creuses, contiennent un mollusque plus épais, plus tendre, plus riche surtout en élé- ments nutritifs, el ayant un goût moins salé, qui, dans certains cas, se rapproche de celui de la moule. — Parvenues à tout leur développement, ce qui exige vingt ans, au dire des pêcheurs, elles acquièrent des dimensions plus considérables que les nôtres, leur coquille épaissit davantage, devient très-lourde, et lémail intérieur présente rarement ces parties molles, d’où s'échappe une eau fétide, lorsque par basard on vient à les percer. Huitre de la Virginie. L'huiître de la Virginie, la plus commune des trois, a la coquille étroite, s’élargissant graduelle- ment à partir du sommet, et modérément courbée dans le plan de l'intersection des valves, lorsqu'elle s’est développée librement. Les spécimens que l’on prend sur les bancs naturels, ont en général une forme tourmentée, résultant des conditions dans les AT y quelles s’est effectuée leur croissance, mais néan- moins, ils conservent toujours les caractères les plus saillants de l’espèce. De même qu’en Europe, les huîtres les plus régu- lières qu’on trouve dans le commerce, sont celles qui ont été améliorées par la culture. Les sommets de l’huître de la Virginie, très-pointus avec l’âge, sont peu recourbés, la partie opposée de la coquille est arrondie, la valve supérieure presque entièrement plate est la plus unie des deux, et la surface, lors- qu’elle n’a pas été usée par les frottements, présente de nombreuses lamelles de couleur plombée, dis- posées avec beaucoup plus de régularité que dans ces autres espèces. L’impression musculaire, très- ‘souvent centrale, est de couleur violet foncé. Un fait que je n’ai vu indiqué dans aucun ouvrage d’His- toire Naturelle, et qui m’a frappé comme un des ca- ractères les plus tranchés, est le peu de force du muscle, dans les huitres américaines en général. On trouve quelquefois des spécimens qui mesu- rent quinze pouces anglais de long sur trois et demi de large. Cette espèce, connue dans le commerce sous le nom d’huître de la Chesapeake, est commune sur toute la côte, principalement dans les Etats du Sud. En remontant vers le Nord, on ia rencontre jusque dans les parages de l'île du Prince-Edouard, et à l’embouchure de la rivière Saint-Lawrence. = € Ses caractères les plus essentiels sont sa longueur comparée à sa largeur, et la forme pyramidale des sommeis, Huître Boréale. L'huître Boréale a la coquille un peu arrondie et ovalée, ordinairement courbée, et toujours moins allongée que dans l’espèce précédente ; la valve su- périeure est plate, les sommets sont courts et recour- bés; la surface de la coquille, très-irrégulière, pré- sente des lamelles de couleur verdâtre, disposées sans vrdre; ses bords, plus ou moins découpés et festonnés, sont de nature calcaire dans la valve in- férieure, tandis que dans la valve supérieure ils sont flexibles, et paraissent de nature membraneuse. L'impression musculaire est de couleur violet-foncé, et l'intérieur des valves d’un blanc crayeux ou légè- rement verdâtre. La valve inférieure est encore plus creuse que dans l’espèce virginienne, et quelques spécimens ont un pied anglais de long sur six pouces de large. Cette huître, connue habituellement sous le nom d'huiître de New=York, attendu qu'on en trouve des gisements considérables dans la baie, se ren- contre, du reste, sur tout le littoral, et même dans la Chesapeake, où elle est mêlée à l’espèce prinei- pale On en pêche beaucoup dans la baie de Buz- zard (Massachusetts), 21.480 + Huître Canadienne. L'huître Canadienne, également moins allongée que celle de la Virginie, est généralement courbée, avec les sommets très-arqués et arrondis; la co- quille est large, étalée, extrêmement blanche et la- melleuse; la valve supérieure est légèrement con- vexe. Elle est commune dans la mer du Canada, à embouchure du golfe de Saint-Laurent, ainsi que sur une parlie du littoral des Etats-Unis, notamment dans les parages de New-York. L'huître américaine, sans distinction d’espèce, existe sur les côtes avec une profusion qui semble en avoir fait une manne providentielle pour les po- pulations. Depuis les provinces britanniques jusque dans le golfe du Mexique, elle forme partout des bancs inépuisables, qui, sans une pêche continuelle, finiraiert, dans certaines localités, par créer des écueils, modifier les courants, obstruer les passes, et paralyser, en un mot, la navigation. Abondantes partout, quelques parages paraissent néanmoins leur convenir plus particulièrement encore, et de ce nombre sont les côtes de New-Jersey, de l’île Long-Island, du Connecticut, du Rhode-lsland, les rivages de l’embouchure de la Delaware, et surtout ceux de cette magnifique baie de la Chesapeake, vé- D YA ritable grenier d’abondance, où chaque année des centaines de navires viennent s’approvisionner du précieux mollusque pour le transporter, de là, sur tous les points de littoral. Dans la Caroline du Nord, les sonnds d’Alber- male, de Pamlico, etc., produisent aussi d’excel- lentes huîtres (1). Gens pratiques par excellence, en ce qui concerne les choses matérielles de la vie, les Américains ont eu garde de dédaigner une pareille source de ri- chesses et, de bonne heure, ils ont compris les avan- tages qu’ils pouvaient retirer de tant de substance alimentaire, obtenue presque sans frais ; aussi la pêche de lhuiître et sa culture sont-elles devenues depuis longtemps de lucratives industries, qui pren- nent chaque jour une nouvelle extension, par suite des demandes toujours croissantes des consom- mateurs. Laissant de côté les méthodes de culture usitées en Europe, ils en ont adopté une, très-économique, (1) La multiplication véritablement prodigieuse de cette espèce a, depuis longtemps, attiré l’attention des savants et des naturalis- tes, et quelques-uns d’entre eux, en présence de cette production incessante de matière minérale, composant les écailles, ont émis l'opinion que beaucoup de bancs de calcaires n’avaient probable- ment pas d’autre origine. Semblables aux polypiers de la mer des Indes et de l'Océanie, ce mollusque, livré à lui-même, finirait par changer l’hydrographie des côtes. tal a. qui donne d'excellents résultats, ainsi qu’on le verra à l’article Pcanrarions. Comme les nôtres, leurs mollusques exigent, pour prospérer, des fonds de sable vaseux, riches en production animale, et suf- fisamment abrités contre la mer du large. Les eaux saumâtres, qu’on trouve aux embouchures de cer- taines rivières, où remonte la marée, constituent une des meilleures conditions pour le succès de cette industrie (1). La baie de la Chesapeake, d’où l’on tire en grande partie les huiîtres cultivées en Amérique, est un ma- gnifique bassin, où la Providence semble s'être complue à accumuler toutes les conditions qui pou- vaient en faire une localité exceptionnelle pour la pêche. Son entrée, entre le cap Charles et le cap Henry, s'ouvre dans la direction de l’est à l'ouest, mais à mesure qu'elle pénêtre dans les terres, elle change de direction, et se prolonge vers le nord à une distance de 150 milles avec une largeur de 20 (1) Les huîtres américaines produisent beaucoup de perles, mais elles sont de qualité tellement inférieure, qu'il est fort rare d’en rencontrer dont on puisse tirer parti. Elles sont d’un blanc crayeux quelquefois coloré d’une légère teinte violacée. 11 paraît que sur les côtes de New-Jersey, on a trouvé, il y a quelques années, un banc d’huîtres fournissant parfois de belles perles. Tous les esprits du pays s’exaltèrent, les pècheurs crurent à une merveilleuse décou- verte, mais au bout de quelque temps,on reconnut qu’il n’y avait aucune espérance à fonder sur l'exploitation de ces bancs. —— 59 — à 20 milles dans la partie sud, et de 10 à 15 milles dans la partie nord. Accessible aux plus grands bâ- timents, elle reçoit, en outre, un grand nombre de fleuves et de rivières navigables, dont les plus im- portants sont la Susquehanna, le Potomac, le Rap- pannahoc, la rivière d’York et le Saint-James’s- River. La masse d’eau douce, versée journellement dans son sein, par ces cours d’eau, le peu de largeur de l’entrée donnant accès à la marée, tout contribue à rendre les eaux de la Chesapeake moins salées que celles de l’Océan, circonstance qui favorise, comme se nc a bb A on le sait, la production naturelle des huîtres. Il faut * ajouter encore que, dans toute leur étendue, les ri- vages de la baie, découpée en une multitude de“ golfes, de baies, de criques, etc., sont parsemés de petites îles, qui augmentent le développement du « littoral, et déterminent une foule d’abris favorables à la multiplication des poissons et des mollusques. La quantité de poisson que fournissent les pêche- ries est très-considérable, et l’on estimait, avant la guerre, qu'il s’inspectait annuellement à Baltimore, près de quatre cent mille barils de poisson salé, principalement des harengs et des aloses (4). (1) La baie de la Chesapeake abonde en poissons de toute espèce; maquereaux, harengs, anguilles, perches, rougets, aloses, raies de md. |: Care La question des huîtres est néanmoins plus im- portante encore, et la production des bancs de la baie s’est élevée, en 1858, à 20 millions de bois- seaux. On comptait qu'à cette époque, dix mille personnes environ étaient employées à la pêche, ainsi qu’aux travaux des plantations établies sur le rivage. L'huiître de la Chesapeake est si naturellement grasse, en raison du milieu où elle vit, qu’elle peut, Ja plupart du temps, entrer directement dans la consommation sans passer par la culture. A Fair- Haven et à Boston, où 1l serait impossible, à cause de l’épaisseur des glaces, d’en conserver l'hiver, sur les terrains émergents, on fait venir de la Virginie, pendant cette saison, celles qui sont nécessaires aux besoins du commerce. Les goëlettes qui font les transports, échelonnent leurs voyages de manière à ce que les marchands soient constamment approvi- sionnés, et les mollusques restent ordinairement dans la cale de ces navires, jusqu’à ce que le char- gement soit épuisé. Quelle que soit la rigueur du froid, ils s’y maintiennent vivants pendant plusieurs jours, pourvu qu’on ait la précaution de n’ouvrir les différentes variétés, silures, etc, Gn prend dans le Potomac, dans le Saint-Jame’s-River et autres fleuves, d'énormes esturgeons du poids de 150 à 200 livres, = SE = panneaux que dans les moments indispensables. On en à vu vivre ainsi pendant un mois. | À quelques exceptions près, on peut dire que la majeure partie des huîtres, cultivées dans les États du Nord, provient de la Chesapeake et de l'embouchure de la Delaware, où les planteurs peuvent se les procurer à si bas prix, qu'il ne sau- rail y avoir de concurrence de la part des pêche- ries locales, du moins pour le commerce d’expédi- tion. Les pêcheurs du Maryland et de la Virginie les vendent seulement de 415 à 20 cents le boisseau, pou- vant en contenir de 300 à 400, suivant la grandeur. Disons-le, cependant, quoique ces huîtres puissent être modifiées par la culture et acquérir, dans cer- tains cas, une saveur plus salée, elles ne parviennent jamais à rivaliser entièrement avec celles qu’on pé- che sur les côtes du Connecticut, du Rhode-Island et de certains points du Massachusetts, etc. Ces huîtres natives, consommées, en général, dans la localité, se vendent à un prix plus élevé, et ne sont jamais expé- diées en chair, dans l’intérieur du continent. Les plus estimées proviennent de la baie de New- York, de New-Haven, de la baie de Providence, de différentes parties du sound de Long-Island et des côtes du Néw-Jersey, principalement de Mille-Pond et d’Absecum-Creck. NT — Selon moi, celles que l’on pêche à Blue-Point, dans la grande baie du sud de Long-Island, sont les plus délicates de toutes. Quand on ne les consomme point crues, les huitres sont accommodées de diverses facons : on les met en marinades, en conserves, suivant le procédé Appert; on les mange en soupe, à l’éluvée, rôties, au gratin, en pâtés, etc., et elles servent, en outre, d'accessoi- res à une foule de préparations culinaires. La con- sommation en est si répandue qu'il n’est guère de famille un peu aisée, dans les villes du littoral, qui, pendant la saison d'hiver, n’en ait un plat à chaque repas. Dans les grands centres de population, 1} existe de nombreux établissements connus sous le nom d’oyster-houses (maisons d’huîtres), où on les débite sous toutes les formes, Véritables restaurants, avec cette différence qu'ils sont plus spécialement desti- nés à la vente des mollusques de toute espèce, on en compte à New-York plus de trois cents, parmi les- quels il y en a de richement décorés, situés dans les beaux quartiers de la ville. Is sont fréquentés par la bourgeoisie, principalement par la partie commer- Çante qui va souvent y prendre le repas du milieu du Jour. En outre de ces établissements, il y a dans les villes une foule de boutiques, et même de comptoirs en plein vent, installés dans les rues, où la classe = 0 — ouvrière peut se procurer ce qui est nécessaire à ses besoins (1). La soupe aux huîtres est une des préparations que les Américains affectionnent le plus, et il leur est as- sez habituel, pendant la saison d’hiver, d’aller en manger dans les oyster-houses en sortant du théâtre. Elle est tellement populaire qu’elle s’est introduite jusque dans les grands bals, où elle apparaît inévi- tablement vers le matin, pour réparer les forces des danseurs (2). L'huître américaine, soumise à la cuisson, est vé- ritablement supérieure à la nôtre, et comme elle con- serve mieux ses propriétés nutritives, elle est un des mets que les médecins ordonnent de préférence aux convalescents. Beaucoup de personnes en mangent toute l’année, sans qu’on ait remarqué qu'il y eût le moindre inconvénient à agir ainsi, et, à ce sujet, je hasarderai une réflexion qui me paraît assez fon- dée..… La pêche, durant la belle saison, étant inter- dite par les règlements, il en résulte que toutes les huîtres qu’on trouve alors dans le commerce, pro- (1) Pendant l’été on conserve les huîtres dans les oyster-houses en plaçant par-dessus un bloc de glace qui produit un abaïissement de température, suffisant pour qu’elles puissent vivre pendant quel= ques jours. (2) Voir la note B, à la fin du volume, pour les préparations d’hui- tres les plus populaires. mé, fe viennent des plantations : or, comme elles y ont été apportées dans le mois d'avril, äu moment où commence pour elles le travail dela génération, il est probable que le fatigue du voyage et le chan- gement de milieu, doivent influer sur ce travail, et la plupart du temps larrêter complétement. Ne de- venant que raremeni laiteuses, elles ne sauraient in- commoder dans la saison chaude, si tant il est que, dans certains cas, elles puissent véritablement être malfaisantes. Le prix des huitres, à la consommation, est très- variable, et dépenil à la fois de leur qualité, de leur grosseur, de la réputation des plantations où elles ont été cultivées, et aussi de l’importance des éta- blissements où on les débite. Chez les marchands en gros, elles se vendent en moyenne un dollar le bois- seau, tandis que dans les marchés, dans les oyster- houses, elc., les prix s'élèvent et varient depuis 90 cents le cent jusqu’à deux dollars et demi pour les sujets de grande taille, servant à confectionner les plats de choix. Du reste, toujours intelligents en ce qui concerne leur profession, les marchands ont su établir une foule de distinctions entre les pro- duits, pour arriver à en tirer le meilleur parti possi- ble, et personne, mieux qu'eux, ne s’entend à spécu- ler sur l'engouement des consommateurs. Dans tous les marchés on peut se procurer des huîtres fraiches, ze Et. soit dans leur état naturel, soit enlevées de l’écaille, et, Sous cette dernière forme, elles sont plus parti- culièrement vendues aux restaurateurs, aux maîtres- d'hôtel, ainsi qu'aux familles qui les achètent dans le but de les faire cuire. Pour le commerce d'exportation et les expéditions à l’intérieur, on les vend : En nature ; En chair enlevée de lécaille ; En marinades ; En conserves alimentaires. Les huîtres en écailles s’expédient en grande quantité dans l’intérieur pendant la saison d’hiver : elles sont renfermées dans des barils de la grandeur d’un quart de farine, où on les arrime soigneuse- ment, pour les empêcher d'ouvrir leurs valves. Ces barils sont percés de petites ouvertures de distance en distance pour permettre la circulation de Pair. Les huîtres en chair, destinées en grande partie à être mangées cuites, s’envoicnt en toute saison dans l’intérieur, mais plus particulièrement en hiver. Les villes de Baltimore, Boston et Fair-Haven, sont les principaux centres de ce commerce, qui forme la branche la plus importante de l'industrie hui- trière. EU" 128 Huîtres marinées. Les huïtres marinées se préparent comme en Eu- rope, avec une addition de vinaigre et de quelques épices, dans l’eau qui a servi à les cuire ; toutefois, comme le vinaigre dont on se sert est inférieur à celui que nous employons en France, ces marinades sont loin de valoir les nôtres. Huiîtres en conserves. Ces conserves se confectionnent en grande partie à Baltimore. Les mollusques retirés de l’écaille, après avoir été légèrement cuits, dans une certaine quantité d’eau avec quelques grains de poivre noir, sont mis dans des boîtes cylindriques de fer blanc, percées à la partie supérieure d’un trou circulaire d’un pouce et quart de diamètre, et une fois rem- plies, ces boîtes sont fermées au bain-marie, en sou- dant sur l'ouverture une petite rondelle en fer blanc. Emploi des Ecailles, Les écailles d'huître donnent elles-mêmes lieu à différentes industries qui ne laissent pas que d’être assez importantes. On les utilise dans l’agriculture pour amender les terres, où la substance calcaire n’exisle pas en quantité suffisante. On s’en sert pour HD | madacamiser les routes et faire dans les jardins d'agrément des allées qui acquièrent, par l’emploi de cette substance, une blancheur éclatante. Enfin, en les brülant, on obtient une excellente chaux, très- employée dans les bâtisses au bord de la mer, et bien préférable, comme engrais, à la chaux ordi- « naire, en ce qu'elle ne contient point de magnésie, M En général, les grands expéditeurs d’huîtres don- nent gratuitement les écailles, à la condition que « leurs établissements en seront journellement débar- rassés. En 1857, on estimait que les écailles provenant des maisons d'expédition de Baltimore, donnaient lieu à un mouvement d’affaires de plus de 600,000 francs. Avant la guerre, les fours à chaux de M. Barnes, à Fair-Haven , en brülaient annuellement plus de 250,000 boisseaux. Maintenant, sur la côte des États-Unis, de nombreuses usines s'occupent de cette industrie. Le boisseau de chaux d'écailles d’huîtres se vend de 12 à 13 cents. PÉCHE DES HUITRES La pêche des huîtres se fait de plusieurs maniè- res, suivant que les bancs en exploitation sont situés “ Gb = plus ou moins profondément dans la mer. Les instru- ments en usage sont : la drague, le rateau et le tong, espèce d’engin particulier, dont je ne connais aucun analogue en Europe. La drague ressemble beaucoup à celle que nous employons en France, mais comme le poids n’en est pas déterminé par les règlements, elle esten général plus lourde ; la partie destinée à contenir les huîtres est tantôt en filet de corde, tantôt en mailles de fer. Les rateaux, semblables de forme à ceux dont se servent nos pêcheurs, larges en outre de 60 à 70 centimètres, avec des dents de fer de 6 à 10 pouces de longueur, sont munis à la partie postérieure d’une poche en filet, destinée à recevoir les produits de la pêche. Quelquefois on les construit entièrement en fer, avec des dents recourbées, pouvant contenir une certaine quantité de mollusques dans leur con- cavité. Ils se manœuvrent à la main au moyen d’une perche de 45 à 20 pieds de longueur, sur laquelle ils sont emmanchés. On les emploie fréquemment en hiver dans le Rhode-Island, pour pêcher des huîtres dans les étangs de la pointe Judith, dont la surface est parfois gelée pendantplusieurs semaines. La pêche se fait alors en pratiquant des ouvertu- res dans la glace, pour pouvoir introduire les ra- teaux. 200 "T0 L’oystertongs, que je n’ai vu qu'en Amérique, est un instrument qui mérite d’être connu en France, comme pou- vant rendre de grands services à nos pêcheurs pour la pêche es coquillages en général. fl représente, ainsi que son nom l'indique, une immense paire de pinces, ayant les extrémités inférieures garnies de rateaux dont les dents se croisent quand on les rapproche. Ces rateaux ont de 60 à 70 centi- mètres de largeur, et les dents, placées à un pouce et demi de distance l’une de l’autre, ont 4 pouces seulement. Les bran- ches ont de 15 à 20 pieds de longueur, le point de rotation se trouvant à un mêtre de la partie inférieure. Pour prendre les huîtres avec cet engin, les pêcheurs mouillent préalablement leurs Pinces à huitres. bateaux sur les fonds à exploiter, se placent ensuite près du bord, tiennent une des branches supérieures réi MEN Cal ss" de. dd es 68 des tongs dans chaque main, et les ouvrant et les fermant successivement, cherchent à mordre le fond et à arracher les mollusques. Dês au’ils sentent qu’ils en ont pris une certaine quantité, ils remontent instrument, en ayant soin de le tenir fermé et dé- posent leur capture sur le pont. La majeure partie des huîtres fournies par le Chesapeake, est prise de cette manière. Les tongs servent encore à l’exploita- lion des plantations et à la pêche des clams. Les bateaux qui font la pêche des buitres sont en général d’un faible tonnage, et la plupart de ceux que j'ai vus dans la baie de New-York et dans la grande baie du Sud de Long-Island sont construits à fonds plats, pour aller facilement sur les bancs, munis d’un dériveur, pour aller à la voile, ils sont montés par trois ou quatre hommes d'équipage. L'exploitation des bancs au moyen des tongs est éminemment conservatrice, en ce qu’on ne détruit pas, en pure perte, une masse de mollusques comme on le fait avec Ja drague. Sans doute l'emploi de ces instruments ne serait pas possible sur la plupart des bancs que nous possédons sur les côtes de Fraïce, mais dans le bassin d'Arcachon, dass Îles étangs salés du Midi, dans ceux de la Corse, ils pourraient, ce me semble, recevoir une heureuse application. Malgré la richesse véritablement extraordinaire LOT 47e des gisements d’huîtres de leur littoral, les Améri- cains ont néanmoins senti la nécessité d’une légis- lation protectrice pour en prévenir le dépeuple- nent. Dans ce but, les différents Etats maritimes ont établi des lois spéciales pour fixer les époques de la pêche et le mode dont elle doit être effectuée. Il y a quelques années, sur les côtes du Maryland et de la Virginie, l’enlèvement des huîtres pour la consommation, pour fabriquer de la chaux ou servir d'engrais avait pris de telles proportions que, dans la crainte de voir les pêcheries diminuer d’impor- tance, ces États durent voter des mesures de répres- sion très-sévères. Du reste, la législation qui régit industrie huîtrière en général est très-compliquée, et ne présente aucune uniformité dans son ensem- ble, attendu que chaque État rend des lois comme il l’entend, sans se préoccuper de les mettre en har- monie avec celles des États voisins. Elle peut se résumer ainsi : 1° Prévenir ia destruction des bancs d‘huiîtres na- turels en fixant l'époque et le mode de la pêche ; 29 Protéger l’industrie des planteurs contre les déprédations des malfaiteurs. 3° À de rares exceptions près, réserver aux habi- tants de chaque État le bénéfice de la pêche lo- cale. 4° Enfin, dans certains cas, réserver exclusivement DER les pêcheries pour les habitants des circonscriptions maritimes où elles sont situées. J'ai réuni dans cet article et dans celui où il est traité de la culture de l’huître, les points de cette législation qui m'ont paru les plus intéressants. Etat du Massachusetts. Dans l’État du Massachusetts, nulle personne ne peut exploiter les bancs d’une circonscription mari- time sans une autorisation écrite, délivrée par le maire, les adjoints, ou les selectmen (1) de la loca- lité. Cette autorisation doit mentionner le temps de la pêche, la quantité de mollusques qu’il sera permis d'enlever, et les usages auxquels ils sont destinés. Toutefois, chaque habitant de l’endroit peut prendre des huîtres sur les bancs pour la nourriture de sa famille, depuis le 1° septembre jusqu’au 1er juin; en casde contravention, les délinquants sont passibles d’une amende de deux dollars par chaque boisseau d’huitres illégalement pêchées. Rhode-Island. Dans le Rhode-Island (2), un des États où la (1) Les selectmen sont des officiers publics nommés par le vote populaire pour administrer les localités ne comportant point une mairie. (2) Voir la note D, où je donne (in extenso) la législation Bui- trière du Rhode-Island. z. DER. ee législation est la plus sévère, la pêche des huîtres, réservée exclusivement aux citoyens, est prohibée du 15 mai au 45 septembre, sous peine d’une amende de 20 dollars par boisseau d’huitres enlevées. En outre, aux époques permises, les ordonnances réglementent la quantité de mollusques qu’il est permis de pêcher Jjournellement, quantité variable suivant les localités, mais qui, dans aucun cas, ne peut excéder 10 bois- seaux. Dans le but encore de protéger autant que Vossible les pêcheries contre les déprédations des malfaiteurs, les lois condamnent à 500 dollars d’a- mende, toute personne convaincue d’avoir endom- magé sciemment un banc d'huîtres, par quelque moyen que ce soit, moitié de l’amende au profit de État, et Pautre moitié au profit de celui qui a in tenté les poursuites ou dénoncé le fait. La pêche est permise seulement entre le lever et le coucher du soleil, et il est ordonné de rejeter à la mer toutes les petites huîtres qui ne sont pas de taille marchande. L'usage de la drague est sévère- ment interdit, les bateaux qui s’en servent, con- fisqués avec tous leurs apparaux, et chaque homme de l'équipage condamné à 300 dollars d’amende. Connecticut. Suivant les lois actuellement en usage, chaque localité de cet État possédan‘ des pêcheries d’huiîtres 250 et de clams, a le droit d'établir des règlements pour en régulariser l'exploitation et peut, en outre, dé- créter une amende ne dépassant pas 14 dollars, pour punir les contraventions. La pêche est partout interdite du 4° mars au 4° novembre sous peine de 7 à 50 dollars d'amende, ou d’un emprisonnement dont la durée ne peut dé passer 30 jours ; dans certains cas les délinquants peuvent être punis à la fois par amende et par la prison. New-York. L'exploitation des pêcheries communes est prohi- bée dans les mois de juin, juillet et août, sous peine d'une amende de 20 à 30 dollars, selon les localités. La moitié de lPamende est payée au surintendant des pauvres du comié où Poffense a été commise, et le restant à la personne qui a intenté les pour- suites. ILest défendu de prendre des huîtres dans l’Hud- son-River, pour les transporter hors de l’État, sous peine de 250 dollars d'amende ; lemplot de la dra- gue est prohibé dans le comté de Richmond, et plu- sieurs des pêcheries locales réservées aux circons- criplions maritimes où elles se trouvent. New-Jersey. I! est défendu de pêcher des huîtres dans les eaux 10825 de cet État, du 4er mai au 1°* septembre, sous peine d’une amende de 10 dollars. En outre, toute per- sonne,convaincue de s’être servie d’une drague, en quelque temps que ce soit, ou de s’être trouvée à bord d’un bateau ayant employé cet instrument, est passible d’une amende de 50 dollars. La même pé- nalité est applicable au patron ou propriétaire du bateau (1). Nul, sil ne réside depuis cinq mois dans la contrée, ne peut pêcher des huîtres et des clams, sous peine d’une amende de 20 dollars, et de la saisie de l’em- barcation avec tout ce qui se trouve à bord. En cas de condamnation par la cour, cette embarcation est vendue, et moitié du prix de vente, déduction faite des frais, est remise à la personne qui a dénoncé le fait, et l’autre moitié au collecteur du Comté où a été commis le délit. Une loi de 1857 punit d’une amende de 10 à 100 dollars, ou d’un emprisonnement de 10 à 30 jours, les pêcheurs reconnus coupables d’avoir dragué des huîtres dans Dennis-Creek (Comté de Cap- May). La justice peut, en outre, confisquer les ba- teaux avec les engins prohibés. (1) Les citoyens habitant le littoral de l’État, situé dans la baie de la Delaware, sont exceptés de cette mesure, LOS Delaware. L’interdiction de la pêche a lieu du 4 mai au 1° octobre, sous peine d’une amende de 10 dollars ; il est en outre défendu dans tous les temps de se ser- vir de la drague dans les criques, anses ou étangs de l’État, sous peine de la même amende, et de la con- fiscation des embarcations ayant servi à la contra- venlion. Aux époques où la pêche est permise, les huîtres doivent être triées sur place, et celles qui ne sont pas marckandes, rejetées immédiatement à la mer, sous peine d’une amende de 10 dollars. Nul, s’il n’est citoyen du pays, ne peut pêcher dans les parties de la baie de la Delaware apparte- nant à l’État, sans une autorisation préalable déli- vrée par le clerc de l’un des comtés riverains. Cette autorisation, valable pour un an, est spéciale aux bateaux qu'elle mentionne et se paie 50 dollars au profit de l'État, Les contraventions à cetie dernière loi sont puries d'une amende de 50 dollars et de la confiscation de l’embarcation avec tout ce qui se trouve à bord; toutefois, à bord d’un navire quel- conque on est libre de pêcher des huîtres dans la saison permise, pour la consommation particulière de l'équipage. eus Maryland. Dans cet État, la pêche est interdite du 4% mai au A octobre, et nul ne peut s’y livrer s’il n’habite le pays depuis douze mois au minimum, sous peine d’une amende de 400 dollars. Les seuls engins de pêche qui soient généralement permis sont les ra- teaux et les tongs; la drague, à quelques exceptions près, est rigoureusement prohibée, sous peine, pour le délinquant, d’une amende de 100 dollars et de la confiscation du bateau. Les lois permettent, en outre, de poursuivre les L pêcheurs de poisson qui font usage de la seine sur les « bancs d’huîtres, attendu que ces filets, en trainant sur le fond, arrachent une masse de mollusques ou les enfoncent dans la vase. Une loi de 1835 défend de nêcher des huîtres dans le but d’en engraisser la terre, sous peine d’une amende de 410 à 50 dollars. Enfin, quiconque n’est pas citoyen de l’État ne peut pêcher à moins de deux milles du rivage, sous peine d’une amende de à à 50 dollars et de Ja confiscation du bateau. Néan- moins, aucune poursuite ne peut être intentée sans un mandat spécial, délivré par la justice, sur Paffir- matiun assermentée de quelque citoyen de l'État. Les sheriffs des comtés riverains, les constables, les DR! d'A officiers civils et militaires, sont tenus de prêter ler concours à l’exécution de ces règlements. Virginie. Il est défendu, dans les mois de juin, juillet et août, de pêcher des huîtres dans les eaux apparte- nant à l’État, sous peine, pour chaque délit, d’une amende de 50 dollars. Sur les côtes, dans l’intérieur des rivières, dans les baies, le seul instrument de pêche autorisé par les lois, est le tong ; par exception, toutefois, dans les localités où se trouvent des eaux profondes, dans les sounds de Tangiers et de Pokomoke, par exemple, l'emploi de la drague est autorisé; mais ce privilége ne permet jamais de pouvoir prendre des huîtres en dedans des embouchures de rivière, dans l’intérieur des baies, ou par des profondeurs moindres que 20 pieds. La législation de la Virginie, afin de protéger d'une manière plus efficace encore une industrie qui fait la richesse du pays, a voté, en 1856, une loi par laquelle chaque comté peut, lorsqu'il le juge néces- saire, nommer des inspecteurs dont les fonctions consistent à arrêter les personnes et les bateaux soupçonnés d’avoir commis des contraventions. Ces inspecteurs sont assermentés et reçoivent la moitié des amendes infligées aux délinquants conduits par ER Me eux devant la justice. À l’exception de quelques cas indiqués par les règlements, l’enlèvement des huîtres sur les bancs, dans le but d’engraisser la terre ou de confectionner de la chaux, est puni d’une amende de 500 dollars. CULTURE DES HUITRES Les méthodes adoptées par les Américains pour cultiver, ou plutôt améliorer les huîtres provenant des pêcheries de la côte, n’ont aucune analogie avec les procédés compliqués et coûteux en usage à Ma- rennes, Ostende, Courceulles ou autres localités où l’on parque ces mollusques. Les parcs, dans le sens exact de ce mot, tel que nous l’entendons en France, y Sont inconnus; Car on ne saurait donner ce nom à quelques étangs ou réservoirs à huîtres formés dans certains endroits par le barrage d’une petite crique, au moyen d’une digue éclusée. Ce cas, d'ailleurs, est extrêmement rare, el je nai eu, pour ma part, aucune occasion de visiter un établissement de ce genre (1). (1) Quelques-uns de ces étangs à huîtres existent sur les côtes du Connecticut et du New-Jersey, NT - L'ostréiculture américaine, plus simple dans tous ses détails, consiste à semer les mollusques sur des terrains maritimes de la côte, reconnus propres par leur nature à les faire croître et à les engraisser promptement; c’est, à peu de chose près, ce que l’on fait à Saint-Waast et à Cancale, et on en obtient aux Eiais-Unis des résultats si satisfaisants, qu’ils dis- pensent de recourir à des procédés plus compliqués, ne pouvant d’ailleurs avoir d’autre effet que d’aug- menter le prix de la marchandise. Le succès de cette branche de l'industrie huitrière dépend à la fois de la configuration hydrographique des lieux où elle est exercée, de la nature des fonds, et du degré de salure des eaux de la mer. Ainsi que les nôtres, les huîtres américaines culti- vées ne prospèrent pas sur {ous les fonds indistine_ tement. Dans les sables purs, elles croissent faible- ment et ne s’engraissent pas ; dans les vases, elles contractent un mauvais goût et courent souvent ris- que d’être étouffées ; dans les sables modérément vaseux, au contraire, elles se développent à mer- veille, Surtout lorsque les eaux sont légèrement sau- matres (1). (1) Les huîtres plantées dans les rivières à marée ou dans les étangs d’eau saumâtre, grossissent et s'engraissent beaucoup, mais acquièrent un goût plus fade que celles cultivées dans les eaux pu= rement salées. 5 MESSE. Ces dépôts artificiels ou plantations, comme on les nomme dans la contrée, sont done nécessaire- ment effectués dans des conditions qui varient sui- vant les localités. Tantôt on utilise des terrains cons- tamment couverts par ia marée, tantôt, au contraire, comme à Boston, à Wellfleet et à New-Haven, on les établit sur des plateaux découvrant plusieurs heures chaque jour, où seulement pendant les grandes marées. Les endroits les plus favorables sont situés dans les baies, les criques, les embouchures de rivières à marée dont le lit n’est sujet à aucun déplacement, dans les bras de mer, les étangs salés, dans tous les endroits, enfin, suffisamment abrités pour qu’il wy ait point à craindre que les vagues de la mer vien- nent bouleverser les dépôts. L'action des courants, lorsqu'elle n’est pas trop forte, n’est point considérée comme une chose nuisible. Là profondeur maximum à laquelle on plante les mollusques , est de 12 ou 45 pieds de basse mer; mais plus commu nément, elle n’est que de 4 ou 5, afin que les travaux d'exploitation soient plus faciles et plus prompls. Les plantations les ‘plus importantes se trouvent plus spécialement dans le voisinage des grands cen- tres de population; toutefois, avec la facilité des moyens de transport qui existent en Amérique, Le ES on en rencontre sur presque tous les points de la côte (4). Quelles que soient, du reste, les localités choisies par les planteurs, ils ne peuvent, dans aucun cas, exercer leur industrie sur les bancs d’huîtres natu- rels, propriété commune des habitants, ni entraver en quoi que ce soit le libre exercice de la navigation. Ces conditions remplies, de grandes facilités leur sont, en général, laissées par les réglements ; mais dans quelques États, avant de rien entreprendre, ils doivent être munis de licences délivrées par les au- torités des circonseriptions maritimes, où ils désirent s'établir. Les limites des plantations sont indiquées par des perches légères enfoncées dans le sol, et de longueur suffisante, pour que les extrémités supérieures, gar- nies de menus branchages, puissent dépasser de deux pieds au moins ie niveau des hautes mers. — En outre, la surface entière du terrain est divisée en parcelles carrées de douze à quinze mètres de côté, (1) Dans les environs de New-York, les principales plantations sont situées sur les rivages de Staten-Island, notamment à Prince- Bay, dans l’East-River, dans la rivière de Harlem, dans celle de Shrewsbury, etc. À New-Haven, elles sont très-nombreuses dans la baie. et à l'embouchure du Quinipiac ; à Boston, les plus en renom sont établies sur les piages émergentes des Bird-Island, de Hog- Island, ainsi que dans certaines parties du Charles-River et du Mystic-River. PA. US au moyen de perches semblables aux premières. Ces dispositions, obligatoires dans la majeure partie des États, servent à indiquer en tous temps la position exacte des plantations, facilitent leur surveillance par la police des rades, et contribuent à accélérer les travaux d'exploitation. Les perches, par leur grande flexibilité, ne con- stituent d’ailleurs aucun danger pour les embarca- tions qui sont entraînées accidentellement sur les bancs. Les huîtres se plantent annuellement après la sai- son d'hiver, depuis le mois &e mars jusqu’au 1‘ mai, époque à laquelle le travail est en général terminé. Les navires qui les apportent de la Chesapeake, de la Delaware, ou de tout autre lieu de production, sont pour la plupart des schooners de 100 à 150 tonneaux, embarquant de 3,000 à 6,009 boisseaux de mollusques, et rendus à destination, ils les livrent aux planteurs qui les font porter sur leurs établisse- ments, et semer sur le fond, aussi régulièrement que possible. — Cette dernière opération, des plus im- portantes, puisque trop entassés les mollusques se nuiraient réciproquement, s'exécute de la manière suivante : les marins chargés du travail embarquent les huîtres dans des chaloupes, se transportent, à marée haute, sur les plantations, se placent au cen- tre de chacun des carrés dont j'ai parlé plus haut, | don ntm done ane dE Sd de OS SSSR nn ds à 11 — et là, au moyen d’une grande pelle à douze dents, jettent les mollusques autour d’eux, par un mouve- ment circulaire, très-analogue à celui que font les Jaboureurs en semant le bié. L'expression de planter où de semer des huîtres n’a probablement pas d’au- tre origine. Lorsque les chargements des chaloupes sont épuisés, on espace convenablement les mollus- ques sur le fond de la mer, afin qu’ils ne se gênent pas les uns les autres et, ce travail des plus faciles, lorsqu'il s’agit de terrains émergents, se fait avec des raleaux, sur ceux qui sont constamment cou- verts par la marée (4). Comme je l’ai déjà dit, les huîtres s’engraissent et orandissent beaucoup dans les bonnes plantations, et peuvent même y changer notablement de goût. N’étant plus gènés dans leur développement, leurs coquilles deviennent plus réguiières, s’étalent da- vantage, et prennnent une forme plus creuse et plus arrondie. Dans les endroits où elles sont tou- jours couvertes par les eaux, et où il n’y a point à craindre l’action des glaces, on en laisse souvent (1) On ne se préoccupe point d’ailleurs de la position des mollus- ques sur le sol, c’est-à-dire si la valve creuse est toujours en des- sous. Un phénomène remarquable, que j'ai observé plusieurs fois dans la baie de New-Haven, c’est que lorsqu'une huître se trouve posée sur cette valve, la croissance s’effectue de manière à ce queles bords de la coquille, se retournent vers la surface de l’eau. SL RE croître pendant quelques années, afin d’obtenir des sujets de grande taille ; mais, dans les localités où la rigueur de l'hiver les tuerait infailliblement sur les terrains émergents où elles sont cultivées, elles n’y séjournent que durant la belle saison, et sont enlevées avant l’époque des grands froids. Dans tous les cas, elles doivent rester au moins trois mois sur les fonds nourriciers, avant d’être livrées à la con- sommation, sans quoi le bénéfice de la culture serait perdu. On sème en général cinquante boisseaux de mollusques sur chacune des parcelles carrées de la plantation, et la récolte, quand le moment est venu, se fait journellement à marée basse, lorsque les fonds découvrent, et, dans le cas contraire, en se servant de rateaux et de tongs. Une croyance très-accréditée aux États-Unis et en Angleterre, c'est que l’on peut engraisser les huîtres en répandant de Ja farine fordinairement de mais) dans l’eau qui les baigne. Quelques planteurs du New-Jersey se servent, dit-on, de ce procédé dans de . petits étangs ; mais il est probable que l'emploi du mais n’a que peu ou point d'effet sur ces mollus- ques dont l’estomac délicat ne paraît point suscep- tible de digérer une semblable nourriture. Un moyen plus certain de bonifier les huîtres, et de leur enle- ver ce goût âcre qu'elles ont souvent quand elles viennent d’être fraichement pèchées, consiste à les HT — placer dans des baquets, après avoir soigneusement brossé les écailles pour les débarrasser de la vase et autres impuretés. On remplit ensuite les baquets avec un mélange d’eau de mer et d’eau douce qu’on renouvelle chaque jour pendant une semaine, au bout de laquelle les huîtres sont aussi délicates que si elles avaient séjourné plusieurs mois dans un parc. Le meilleur mélange est de deux parties d’eau de mer et d’une partie d’eau douce, mais les quau- tités peuvent être modifiées suivant que l’on désire que la saveur des mollusques soit plus ou moins salée. J’en ai fait vivre pendantdix jours dans deleau douce entièrement pure. Ce procédé, très-usitée en Angleterre, pourrait recevoir d’utiles applications dans nos villes du littoral de l'Océan ou des quan- tités considérables d’huîtres, entrent directement dans la consommation, sans passer par le régime des parcs et il est surtout excellent pour les mollus- ques destinés à la cuisson. La culture des huîtres donne aux États-Unis des revenus tellement certains, qu’elle est une des in- dustries où les faillites sont pour ainsi dire incon- nues, et la connaissance des points du littoral où elle peut être établie est maintenant si complète, que les planteurs n’ont pour ainsi dire à redouter aucune cause d’insuccés. Il y a quelques années, les bénéfi- ces s’élevaient à plus de 50 0/0 des capitaux enga- = gés, mais à mesure que la consommation s’est éten- due, et qu’un plus grand nombre de personnes s’est occupé de ce commerce, les bénéfices bien que tou- jours élevés, ont été ramenés à un taux plus raison- nable. La guerre qui désole le pays a, d’ailleurs, apporté une grande perturbation dans les affaires, la pêche ayant été interdite par la marine fédérale, sur une partie des côtes de la Virginie, afin d’empè- cher les pêcheurs d'établir des communications avec l'ennemi. Le mouvement de navigation, auquel donne lieu la culture des huîtres, est fort important. Suivant les renseignements qui m'ont été fournis, les plantations de la baie de New-York et des environs exigent une centaine de navires, et celles de la baie de Boston et du cap Cod, trente-cinq à quarante; enfin, avant la guerre, On estimait que cent-cinquante à deux cents schooners étaient employés pendant six mois de Pannée, soit pour apporter les huîtres nécessaires aux plañtations de la baie de New-Haven, soit pour approvisionner pendant l'hiver les marchands ex- péditeurs de Fair-Haven. LOIS CONCERNANT LES PLANTATIONS. L'industrie des planteurs d'huîtres est soumise à SN VER des lois différentes, suivant les États où elles sont votées. Dans tous, néanmoins, elles sont assez sé- vères pour assurer à celte industrie une protection suffisante contre les malfaiteurs. Il ne pouvait du reste en être autrement, car les plantations étant situées, la plupart du temps, dans des endroits écartés, souvent fort élcignés de la côte, une légis- lation rigoureuse pouvait seule les mettre à l'abri des dilapidations. Les contraventions sont con- statées par les officiers publics, les constables, les sherifis, les maîtres de port, chargés de la police des rades, et de plus, chaque personne qui à connais- sance d’un délit, est invitée à en donner avis à la justice. Voici quels sont les principaux règlements dans les États du Nord. Maine. Dans le Maine, les personnes qui veulent cultiver des huîtres sur le bord des rivières, des baies ou des criques appartenant à l’État, doivent préalablement obtenir la permission des propriétaires riverains. Il n’y a d'exception que pour les plantations situées sur des banes compris dans l’intérieur des baies ou des golfes, mais, dans aucun cas, la navigat'on ne peut être entravée. 8. É 2 “| Dre Massachusetts. Dans le Massachusetts, les maires, adjoints, ou se- lectmen de chaque localité maritime peuvent, parun écrit de leur main, accorder à tout habitant de l’en- droit l’autorisation de planter des huîtres et de les cultiver en quelque temps de l’année que ce soit, dans les eaux de la circonscription, pourvu que ce ne soit pas sur des bancs naturels. Cette autorisation, valable pour vingt ans, indiquant exactement les limites et la superficie des fonds à exploiter, doitêtre enregistrée par le clerc de la commune avant d’avoir son effet, et le magistrat qui l’a délivrée reçoit 2 dollars pour ses honoraires, et le clerc 50 cents seulement. Moyennant ces formalités, le planteur, ses héritiers ou ayant-droit, ont le privilége exclusif des fonds concédés et peuvent intenter une action en dommages-intérêts à quiconque, sans leur permis- Sion, se permettrait d’en enlever les huîtres; le dé- linquant est en outre puni par la loi, de 20 dollars d'amende pour chaque délit, Rhode-Island. Dans la rivière de Providence, les commissaires des pêcheries de mollusques peuvent sous leur respon- sabilité personnelle louer au profit de l’État, à tout citoyen du pays, toute espèce de terrain maritime DR CR CU PR NT couvert par les eaux où ne se trouvent point des hancs d’huîtres naturels, pour y établir des planta- tions. Ces concessions, données pour 5 ans au mini- mum, et 10 ans au maximum, sont grevées d’une taxe annuelle, payable au trésorier-général de l’État. Lorsqu'un habitant fait la demande d’une conces- sion, les commissaires doivent, avant de l’accorder, donner l'avis public du jour, de l'heure et de l’en- droit où se traitera cette affaire. L'avis, contenant la description exacte des terrains sollicités, est publié aux frais du solliciteur dans l’un des journaux de la ville de Providence, deux semaines au moins avant le jour de l'audience, afin que personne n’en ignore et que tout citoyen puisse venir développer aux com- missaires les motifs qui, selon lui, peuvent faire rejeter la demande. En aucun cas, il ne peut être concédé plus d’un acre à une personne et plus d’un acre par tête aux membres d’une compagnie. Les fonds sur lesquels, pendant la durée d’une concession, se seraient for- més des bancs d'huîtres, ne peuvent plus être loués de nouveau. Le bail de location est fait en double expédition, une pour le solliciteur, l’autre pour le trésorier-gé- néral, et si les commissaires le croient utile, ils peu- vent, avant de le signer, faire lever le plan de la con- cession demandée. Die Les plantations accordées doivent être exactement délimitées par des bornes établies sur le rivage adJa- cent et être entourées de perches ou de bouées pla- cées à 41 yards de distance lune de l'autre; le tout installé de manière à ne point entraver la navigation. Les bornes, les perches et les bouées sont renouve- lées lorsque les commissaires le jugent convenable. Ces fonctionnaires sont, en outre, autorisés par les lois, à nommer des gardiens spéciaux munis d’une embareation pour surveiller [es plantations de la rivière de Providence, connues sous le nom de Grand-Lit. Lorsque les conditions spécifiées dans les baux ne sont pas exécutées, les concessions peuvent être re- tirées, et il en est de même lorsque la redevance à l'Etat n’est pas exactement acquiltée. Les règlements défendent de prendre des huîtres sur les plantations, après le coucher et avant le lever du soleil, sous peine d’une amende de 20 dollars, et de [a confiscation du bateau. Quiconque dérobe des huîtres sur une plantation est passible d’une amende de 20 à 400 dollars, et à défaut de paiement, peut être emprisonné pour un terme n’excédant pas une année. Lorsqu'un planteur est reconnu coupable d'avoir enlevé des huîtres sur une plantation voisine, sa concession lui est retirée et tous les produits confis- CONTI ESS qués au profit de l'Etat, sans préjudice de l’amende à laquelle il peut être condamné pour un pareil vol. Le droit de pêcher des huîtres dans les eaux de PEtat est retiré pendant 3 ans, aux personnes prises deux fois en contravention des règlements relatifs aux plantations. . Connecticut. Dans le Connecticut, chaque localité a le droit, dans un meeting spécial des habitants, de nommer un comité de cinq membres, au maximum, chargés de désigner les points des eaux navigables où on peut cultiver des huîtres sans nuire aux droits des citoyens et à la libre navigation. Les personnes qui désirent établir une plantation sont tenues d'adresser une demande par écrit au comité, en indiquant clai- rement les parties de la mer ou des rivières qu’elles comptent occuper. Si rien dans cette demande n'est contraire à l'intérêt publie, le comité peut délivrer une autorisation indiquant les limites et la situation de la plantation, ainsi que le temps pendant lequel elle pourra être maintenue. La superficie du terrain occupé par une même personne ne peut excéder deux acres, et avant d’avoir son effet, l'autorisation doit être enregistrée par le clerc de la commune où se trouve la concession demandée. 2:=ÈG," : ARIER Les plantations doivent être entourées de perches dépassant de deux pieds au moins le niveau de la haute mer. Le propriétaire possédant une terre dans laquelle se trouve enclavée une crique, une petite anse, etc., peut, avec l’autorisation des selectmen, la fermer au moyen d’une digue éclusée, pour y établir un dépôt d’huitres et les y engraisser. Il en fait la de- mande aux selectmen de l’endroit, et si, dans leur opinion, le barrage ne peut causer aucun tort aux priviléges des habitants, ni faire obstacle à la navi- gation, ces fonctionnaires en rendent compte au meeting anpuel, et s'ils sont approuvés, la partie intéressée peut faire construire le barrage en question. Toute personne convaincue d'avoir enlevé des hui- tres sur une plantation, d‘en.avoir détruit ou en- dommagé les limites, est punie pour la première fois d’une amende n’excédant pas 7 dollars et d’un em- prisonnement n’excédant pas 30 jours. En cas de récidive, l’amende est de 7 à 20 dollars et l’empri- sonnement d’un à trois mois. Chaque offense ulté- rieure est punie de 50 dollars et de la prison pen- dant six mois, le tout sans préjudice de l’action civile, qui peut être intentée par la partie lésée. Celui qui, sans permission, établit une plantation sur un banc d’huîtres naturel, est passible d’une caf; Ego amende de 5 à 50 dollars, moitié pour le trésorier de ia commune où le délit a été commis, et l’autre moitié pour celui qui à intenté les poursuites. New-York. Dans l’État de New-York, toute personne possé- dant une terre sur le bord de la rivière de Harlem, a le droit de planter des huîtres dans le lit de cette rivière, en face de sa propriété, pourvu que lempla- cement soit indiqué par une marque bien visible, portant son nom, établissant le fait d’une industrie particulière. Cette condition remplie, nul que le pro- priétaire ou son mandataire, ne peut enlever des huîtres de la plantation sous peine d’une amende de 50 dollars pour chaque délit, sans compter la valeur des huîtres dérobées. Dans la baie de Jamaïca, comté de Queen's, les propriétaires bordant la baie et les cours d’eau tri- buiaires, peuvent planter des huîtres vis-à-vis de leurs terres, à partir de la ligne de basse mer, sur une largeur de 4 rods (66 pieds), mais nulle per- sonne, ni association de personnes, ne peut occuper plus d’un quart de mille de longueur de rivage. Dans cetie localité on punit de 25 dollars d'amende, les vols commis sur les plantations, New-Jersey. Dans certaines parties de cet État, les propriétai- = — res de terrains marécageux dans lesquels se trouvent enclavées de petites anses, criques ou flaques d’eau salée, ne conduisant à aucun lieu public de débar- quement, peuvent les utiliser pour cultiver ou entre- poser des huîtres, et à cet effet établir des clôtures ou barrages, afin d'empêcher qu’on ne puisse y en- trer. Les personnes qui, sans autorisation, prennent des huîtres dans les plantations, sont punies d’une amende de 20 dollars, sans préjudice de l’action en dommages-intérêts que peut intenter le proprié- taire. Delaware. Suivant la législation de cet État, tout citoyen peut établir dans les eaux publiques, une plantation n’excédant pas un acre en superficie, pourvu que ce ne soit pas sur un banc naturel d’huîtres, et que la navigation ne soit point entravée. 1 doit enclore son établissement avec des perches, l'indiquer par une marque bien apparente, et, ces conditions remplies, ioute personne qui se permettrait d’en dérober des produits, serait condamnée à 20 dollars d'amende. Nul, s’il n’est citoyen de l’État, ne peut, sous un prétexte quelconque, déposer des huitres dans les baies, criques ou rivières, sous peine d’une amende de 20 dollars et de la confiscation des mollusques. ad — Maryland. Tout citoyen du Maryland peut s’approprier dans les rivières, cours d’eau, criques ou baies de l’État, elc., une étendue de terrain maritime n’excédant pas un acre, pour y déposer ou cultiver des huîtres, soit pour son usage personnel, soit en vue du com- merce, pourvu qu'il n'apporte aucun obstacle à la navigalion, et qu'il ne lèse en rien les droits des pro- priétaires riverains. La description écrite de la plan- tation et de ses limites, affirmée par serment, sera enregistrée aux frais de la partie intéressée par le clerc du comté. Dans tous les cas, les propriétaires de terres con- tiguës au rivage, ont un droit de priorité sur un acre de superficie, à partir de la ligne ordinaire de basse mer en allant dans la direction du chenal prin- cipal. Les plantations devront autant que possible, être rectangulaires. Les propriétaires ayant dans l’intérieur de leurs terres des criques ou anses n’ayant pas plus de 4100 yards d'ouverture, peuvent les utiliser dans le même but. War « À re — JÙ — CHAPITRE Il DE L’INDUSTRIE HUITRIERE DANS QUELQUES VILLES DES ÉTATS-UNIS Un travail complet sur l’industrie huîtrière amé- ricaine,devrait à la rigueur embrasser toutes les 10- calités où elle est pratiquée avec quelque importance, mais, outre que cette tâche serait fort longue, par la difficulté de se procurer des renseignements précis, on serait encore exposé à tomber dans des rediles continuelles sans intérêt pour le lecteur. J'ai donc préféré borner mes études aux villes des Etats du Nord, où cette industrie a atteint le plus grand déve- loppement, pensant que ce serait suffisant pour montrer les ressources qu’en retire l'alimentation publique. Ces villes, dont j’ai eu l’occasion de parler plusieurs fois dans le courant de cet ouvrage, sont : New-York, Fair-Haven, Boston et Baltimore. Comme consommation ou expédition à l’intérieur, elles font us à elles seules plus de la moitié du commerce total." des huîtres dans l’Amérique du Nord. New-York. New-York, la riche et populeuse métropole des États-Unis, compte aujourd'hui près d’un million d'habitants, en y comprenant les villes de Brooklyn et de William:burg, qu’on peut considérer comme deux de ses faubourgs. Bâtie sur une longue pres- qu’ile au fond d’une magnifique baie de 25 milles de périmètre offrant des mouillages excellents, en- . tourée d’un côté par le bras de mer, connu sous le nom d’East-River et de l’autre par l’'Hudson, majes- tueux cours d’eau aux rivages pittoresques et acci- dentés dont le touriste ne se lassera jamais d’admi- rer les magnificences, cette cité au point de vue du commerce maritime et de la navigation est aujour- d’hui sans rivale dans le nouveau monde, et nulle part aux États-Unis, on ne peut se rendre mieux compte de l’activité fébrile des Américains, de leur aptitude pour les affaires en général, et de leur en- trainement vers les industries de la mer. On cultive l’huître sur une grande échelle aux environs de New-York, ce qui tient à la fois à l’ex- cellence des fonds qu’on trouve dans la baie et les parages avoisinants, et aussi à la nécessité où sont les marchands d’avoir à proximité de grands dépôts de pat! dé à dt à tt dl. à Nous #. : CE mollusques pour les besoins journaliers de la popu- lation. De toutes les villes américaines, c’est celle où la consommation des mollusques de toute espèce est la plus considérable, et J'ai déjà dit qu’en 1859, le Merchant s Magazine l’estimait annuellement, rien qu’en huîtres, à 6,950,000 boisseaux, c’est-à-dire à 49,000 boisseaux par jour, en prenant une moyenne dans l’année. Les plantations les plus renommées sont situées : d’un côté sur les rivages de Staten-Island et du New-Jersey, dans la rivière de Shrewsbury, etc.. et de l’autre sur le littoral de Long-Island et dans le - bras de mer connu sousle nom d’East-River, où l’on trouve une suite presque continuellie d’anses et de petites baies dans les conditions les plus favo- rables. | Les deux grands marchés pour la vente en gros des mollusques se tiennent: l’un à Catherine-Market, sur la rivière de l’est, et l’autre à Foot of Spring- Street sur l’'Hudson-River. Quant aux ventes de dé- tail, elles se font dans tous les marchés de la ville indistinctement, dans la plupart des oyster-house ainsi que dans les boutiques établies en ville pour le commerce du poisson. Les établissements de Catherine-Market et de Foot of Spring-street, construits sur des radeaux, sont de véritables maisons flottantes ornées avec = LL plus ou moins de luxe et ayant quelquefois un étage. Amarrées les unes à côlé des autres, en communi- cation avec les quais, au moyen d’un pont à bascule qui suit les mouvements de la marée, ces maisons mesurent communément 45 mètres de longueur sur 10 de large, et sont divisées en trois comparti- ments distincis : 1° La partie dans laquelle on entre par le pont, c’est-à-dire la véritable chambre de la maison ; 2° Ce que j'appellerai la cave, qui n’est autre que la partie immergée comprise entre la plate-forme de la chambre et le fond du radeau; go Le grenier formé dans le baut de la maison par un plancher construit à 2 mètres 50 centimé- tres d’élévation au-dessus de cetie même plate-forme. Ces établissements, désignés à New-York sous le non d’oyster-boats, Sont au nombre de 44 à Cathe- rine Market, et de 23 à Foot of Spring-street. Chaque oyster-boat est en général muni de deux portes : une qui communique avec le quai, et l’au- ire, percée en regard de la première, qui donne sur une pelite plate-forme construite à la partie arrière de la maison. Cette installation, extrêmement com- mode, permet aux pêcheurs de débarquer directe- ment leurs produits dans l’oyster-boat, et accélère ainsi tous les travaux. no NN = Ces établissements flottants offrent le grand avan- tage de pouvoir y conserver des huîtres plusieurs jours dans la saison d'hiver, quelle que soit la rigueur de la température extérieure, et 1l en est de même pendant les grandes chaleurs, par suite de la frai- cheur qui règne toujours dans les parties immer- gées. Les mollusques, huîtres ou clams, placés dans des mannes de la contenance d’un boisseau, sont emma- gasinés dans la cave et le grenier des oyster-boats; quant à la chambre, on y place seulement les échan- tillons des différentes qualités vendues par le mar- chand, afin que les clients puissent faire leur choix, et on y effectue les travaux d'emballage nécessités par le commerce, Du reste, bien qu’il y ait constamment de grandes quantités de mollusques dans ces établissements, ils n’y séjournent que peu de jours, les arrivages des plantations étant organisés de manière à renouveler régulièrement les approvisionnements. Le nombre des embarcations de toute espèce employé par les marchands et les planteurs de la baie, est estimé à 1500, en y comprenant les bateaux qui font la pêche des huîtres et des clams. Les oyster-boats paient une redevance à la ville pour lPemplacement qu'ils occupent le long des quais. | La: fu Les marchés principaux pour la vente des mal- lusques au détail, sont Fulton-Market et Washington- Market. Fulton-Market, situé à deux pas de la rivière de l'Est, dont il est séparé seulement par la largeur du quai, est un grand établissement de forme disgra- cieuse, où se trouvent réunies les différentes branches du commerce des comestibles. Une sorte de régula- rité y règne dans la disposition des boutiques, mais, néanmoins, il n’y arienlà qui ressemble aux installa- tions si bien ordonnées de nos marchés de Paris, ou autres grandes villes de France. Ici, on se sent au milieu d'une population accoutumée à prendre ses aises, et profitant largement de cetie liberté améri- caine, qui dégépèere trop souvent en licence. Plusieurs personnes, à Fulton-Market, s’occupent du commerce des mollusques, et malgré lexiguité de la place qui leur est concédée, tiennent en même temps des espèces de restaurants, très-curieux à vi- siter à l'heure de midi, où beaucoup de commer- çants et d’ouvriers du quartier viennent y prendre leur repas. Ce sont des établissements populaires dans toute la force du terme, où les huîtres accom- modées de diverses façons composent le fond de la nourriture. Devant les comptoirs des marchands sont installés de grands fourneaux de tôle, ordinairement rectan- | M — gulaires, de 2 mêtres d’élévation sur 2 mèêtres de longueur et 70 à 80 centimètres de largeur. La par- tie supérieure, servant de réceptacle à la fumée, est terminée par un gros tuyau allant à l'extérieur; la partie inférieure garnie intérieurement de briques réfractaires, peut contenir une forte quantité de charbon de terre destinée à produire un feu très- ardent, sur lequel, et à le toucher, est placé un gril de fer servant à faire cuire les aliments, el no- tamment les huîtres rôlies qui sont un des mets de prédilection des Américains. Je n’entrerai point dans le détail des différentes préparations vendues par ces restaurants, toutefois, comme l’huître rôtie est une chose spéciale à l’'Amé- rique du Nord, je crois devoir en dire quelques mois. Les mollusques dont on se sert pour cet objet sont de forte taille et viennent généralement du New- Jersey ou de la rivière de l'Est. On les place sur le gril la valve bombée en dessous, et dès que la cha- leur les a suffisamment cuits dans leur eau, le cuisi- nier les retire du feu et les sert aux consommateurs. Cette manière de manger les grosses huitres est ex- cellente, surtout lorsqu'on les saupoudre d’un peu de poivre, et qu’on à soin de les arroser de quelques gouttes de jus de citron. Rien ne saurait donner une idée plus exacie des 6 — 98 — habitudes du peuple américain qu’une visite dans ces restaurants, où se trouvent souvent réunis à la même table les éléments les plus divers de la société. Les établissements de ce genre sont nombreux à Ful- ton-Market, font de grosses affaires, et quelques- uns d’entre eux écoulent jusqu’à 10,000 coquillages par jour dans la saison d'hiver. À Washington-Market, les boutiques des mar- chands n’ont rien qui approche du confort de celles de Fulion-Market, et, bien que le commerce y soit fort considérable, il n’y existe point de restaurant ; car on ne saurait donner ce nom à de pelits empla- cements dans lesquels on sert de la soupe aux hui- tres pour le peuple. Les mollusques se vendent dans les marchés, soit en nature, soit enlevées de l’écaille, et à cet effet, les marchands entretiennent un certain nombre d’ou- vriers dont l'occupation consiste à ouvrir les co- quilles pour en retirer la chair. Chacun de ces hom- mes à devant lui une sorte de petite enclume de quelques pouces de longueur sur laquelle il casse le bord des huîtres avec un morceau de fer plat dont un côté sert de marteau, tandis que l'autre est ai- guisé en forme de lame. Il fait ensuite pivoter dans sa main cette espèce de couteau, introduit la lame entre les valves, enlève la chair et la jette dans un plat à moitié plein d’eau qui se trouve sur l’établi. nm Le travail marche ainsi très-rapidement et les ouvriers peuvent gagner de 8 à 10 dollars par se- maine, suivant leur dextérité ; quelques-uns gagnent jusqu'à 15 dollars, mais ce sont ordinairement des hommes de confiance, chargés par les propriétaires de s'occuper de la vente. New-Haven. — Fair-Haven. New-Haven, l’une des capitales du Connecticut, le cède seulement à Baltimore comme importance du commerce des huîtres. L'industrie huîtrière s’y divise en deux branches distinctes : la culture pro- prement dite des mollusques, et les différents tra- vaux que nécessitent les expéditions aux villes de l'intérieur. Les plantations principales sont situées dans la baie, sur une étendue de quatre mille mètres envi- ron, laissant libre, toutefois, les chenaux de naviga- tion qui conduisent au port (4), commençant à petite (1) Comme dans la plupart des localités où l’on cultive les huîtres, les plantations sont indiquées par des perches divisant le terrain en parcelles régulières. Quoique très-légères, ces pgrches sont en- foncées dans le sol avec tant de force, qu’elles peuvent résister aux chocs les plus violents. Dans mes courses sur les plantations, le bateau qui me conduisait naviguait à la voile, et à chaque instant, soit d’un bord, soit de l’autre, appuyait contre quelques-unes d’elles sans jamais les casser, Au milieu de pareils obstacles, il n’est pas possible du reste, de manœuvrer plus habilement des embarcations, que ne le font les marins de la baie. — 100 — distance de la tête du grand môle. elles s'étendent presque sans interruption, d’un côté jusqu'au sud de la pointe de sable, et de Pautre, jusqu’à l’anse Morris, et les terrains maritimes où elles sont éta- blies, découvrent en partieipendant les grandes ma- rées; quelques-uns néanmoins sont constamment immergés et varient de profondeur, depuis un pied jusqu’à six pieds de basse mer. Le fond est de sable vaseux, mélangé, dans certaines parties, d'herbes marines assez abondantes, la couche de vase sur laquelle reposent les huîtres ayant Ge deux à trois pouces d'épaisseur. Rien n’est plus curieux que le spectacle qu’on à devant soi, lorsqu'on se place à l'entrée du port. Aussi loin que la vue peut s'étendre, on aperçoit la baie couverte de myriades de perches, dont lextré- mité se balance sous l’impulsion des vents et des courants; on dirait une forêt submergée dont les sommités des arbres dépasseraient encore le niveau des eaux! | De distance en distance, sur les plantations, on rencontre, mouillées sur une ancre ou amarrées à des poteaux, de grandes chaloupes dans lesquelles sont construites des espèces de maisonnettes, affec- tées au logement des hommes chargés de surveiller les dépôts. Elles sont au nombre de quatre, ayant chacune un gardien spécial, dont les salaires men- 401 — suels, s’élevant à la somme de 440 francs environ, sont payés par la communauté des planteurs. Ce gardiennage est d'autant plus indispensable que Ja majeure partie des plantations, étant fort éloignées du port, pourraient être dévalisées avec impunité, pendant la nuit principalement. Les huîtres cultivées dans la baie y séjournent en grande partie jusqu’à l’automne, où les travaux d’ex- pédition se font sur une plus large échelle. A cette époque, les planteurs en consomment journellement de grandes masses, de sorte qù’il n’en reste plus une seule sur les bancs au moment où le froid commence à sévir. Cette manière de procéder est imposée à la fois par la rigueur de la température hivernale, e! le peu de profondeur des fonds cultivés (1). Cinq cents marins environ sont employés par les planteurs pour semer des huîtres au printemps, et pour repêcher dans la belle saison celles qui sont nécessaires aux besoins du commerce. Obligés d'aller sur les bancs à toute heure de la marée, étant exposés en outre à naviguer dans des bas-fonds où il n’y a souvent que très-peu d’eau, ils ont adopté des embarcations de construction parti- (1) Bien que les huîtres proviennent des contrées méridionales. il est probable néanmoins qu’il serait facile d’en conserver dans la baie d2 New-Haven, pendant la saison d° PARTS en ayant soin de les immei ger dans une eau profonde. Ge — 102 — culière nommées sharpees, ne tirant que quelques pouces d’eau et marchant cependant avec une grande vitesse. Entièrement plaies en dessous, avec un avant très-fin et le tableau de l'arrière fort incliné, ces embarcations sont munies d’un dériveur leur permettant d'aller à la voile. Leur voilure, extrême- ment simple, consiste en une ou deux voiles trian- gulaires s’enverguant sur des mâts dont les extré- mités un peu flexibles sont terminées en pointes. En outre, des perches légères, installées comme dans la voilure à la Livarde, servent à tendre les voiles du sharpee, de manière à ce qu’elles soient entièrement plates. IT en résulte que lorsque lembarcation, na- viguant au plus près, se trouve chargée par le vent et s'incline sur le côté, il arrive un moment où le vent glisse sur les voiles et ne tend plus à faire cha- virer. Cette voilure, reconnue la seule convenable, a été adoptée par tous les marins. Les sharpees peuvent porter communément de 70 à 80 boisseaux de mollusques (1). Les bancs de New-Haven jouissent d’une grande réputation, relativement à la culture des huîtres, et on estime à 250,000 boisseaux la quantité qui est p'antée annuellement. DS DR D RS ee de {4) Ces embarcations, d’ailleurs, très-Clégantes de forme, seraient employées en France avec avantage dans les baies, les rivières, les étaugs, etc., où la mer ne se fait point sentir avec violence. A PDT MAÏT ee of ee TT Loos — 103 — Les établisseiments destinés au commerce d’expé- dition se trouvent, pour la plupart, à Fair-Haven, charmant village bâtidans une des situationsles plus pittoresques qu’il soit possible de voir (1). Coupé en deux par le Quinipiac, ses deux parties communi- quent ensemble au moyen d’un pont et du viaduc du cheruin de fer de Boston (2); les ateliers des mar- chands sont placés des deux côtés de la rivière, et plusieurs sont construits, en partie, dans l’eau, afin que les pêcheurs puissent décharger plus aisément leurs embarcations. L'opération d'enlever les huitres de l’écaille est faite exclusivement par des femmes, Irlandaises pour la plupart, qui procèdent, à peu de chose près, com- me on le fait a New-York. Assise devant un établi contenant une certaine quantité de mollusques, cha- cune d'elles est munie d’un petit marteau avec (1) Quelques marchands sont établis à la pointe Oyster, dans l’ouest de la baie. (2) En face de Fai:-Hayen, le Quinipiac, très-encaissé dans ses rives, est large de près de 200 mètres et se trouve abrité contre les vents du sud et de l’est, par une chaîne de collines boisées, parallèle à son cours. Il forme, jusqu’à son entrée dans la baie, une belle nappe d’eau, où les courants de flot et de jusant se font sentir avec une grande intensité, mais non cependant de manière à bonleverser les plantations établies dans le lit de cette rivière. Plusieurs mar- chands, avant d'employer les huîtres provenant de la baie, les dépo- sent pendant deux ou trois jours dans le Quinipiac dont les eaux légèrement saumâtres, améliorent et donnent un meilleur aspect à la chair de ces mollusques. — 10% — lequel elle brise le bord des coquilles sur une lame de fer implantée dans l’établi ; elle prend ensuite un couteau à lame mince, ouvre l’huître et jette la chair dans un seau de bois qui se trouve à sa droite. Les femmes reçoivent 8 cents par gallon de mol- lusques, en y comprenant l’eau aw’ils entraînent avec eux. À ce prix, les plus adroites peuvent gagner deux dollars par jour, pendant l'hiver, où le travail dure toute la journée ; mais plus ordinairement les salai- res ne dépassent pas un dollar et demi. On évalue à 7 ou 800 le nombre de celles qui vivent de cette in- dustrie, et certains expéditeurs en emploient jusqu’à 60 à la fois. | Dès qu'une Irlandaise a fini d’emplir une mesure, le surveillant de latelier l’inscrit à son compte, et la vide immédiatement dans une trémie de fer blanc, percée de trous, placée sous le robinet d’une fon- taine. Il lave la chair des huîtres à grande eau, en la remuant à mesure avec la main, afin que les débris d’écailles soient entrainées par le courant, puis ül jette le tout dans un tonneau. Suivant les saisons, les marchands expédient les huîtres crues dans de petits barils de bois, nommés kegs, ou dans des boîtes de fer blanc (cans) de la contenance d’une pinte. | Pendant l'hiver, les barils de bois sont considérés comme suffisants, tandis que dans la belle saison, et + is ti a CÉR S D _e : , — 105 — toutes les fois que la température est un peu élevée, ou que le lieu de destination est éloigné, on se sert exclusivement de boîtes. Les travaux d'emballage se font dans l’atelier ou dans un local attenant, mais quels que svient les vases où on renferme les huîtres, elle ne peuvent être mélangées de plus d’un quart de leur volume d’eau pure (1). Un ouvrier ferblantier est attaché à chaque maison pour fermer les boîtes, en soudant une ron- delle de ferblanc sur l'ouverture ; elles sont ensuite déposées dans un réfrigérateur jusqu’au moment de les envoyer au chemin de fer. Lorsqu'on fait des envois à des villes éloignées, celles de l'Ouest, par exemple, les boites sont em- ballées dans des caisses de bois de sapin, pouvant ordinairement en contenir quatre douzaines. L’arri- mage est fait très serré, et on laisse au milieu de [2 caisse, une place vide, destinée à recevoir un petit bloc de glace servant à conserver la marchandise jusqu’à destination. (1) (1) Dans l’Etat de New-York, les marchands reconnus coupables: d’avoir expédié ou vendu des huîtres dans des boîtes ou des barils contenant plus du quart de leur volume en liquide, sont passiblet d’une amende de 20 dollars. (1) Lorsqu'ils font des envois à petite distance, les marchands emploient un procédé plus économique encore. Les huîtres, mélan:- gées avec des morceaux de glace, sont placées dans des espèces de charniers, munis d’un couvercle, et mises au chemin de fer sans — 106 — Le nombre de barils et de boîtes consommés an- nuellement à Fair-Haven est si considérable qu’il a donné lieu a des industries spéciales occupant 450 personnes environ, Deux manufactures se sont éta- blies pour la confection de ces objets, et celle qui fa- brique les kegs emploie la vapeur comme force mo- trice. Tout s’y fait mécaniquement, une machine taillant les douvelles des barils, une seconde faisant les fonds, d’autres enfin perçant les trous ou tour- nant les bouchons. Les barils se vendent en gros aux prix suivants : Barils de la contenance d’un gallon, 1 dollar 8 cents la douzaine: (1) Barils de la contenance d’un demi gallon, 94 cents la douzaine ; Les boîtes de ferblanc valent 5 dollars 50 cents le cent. Les huîtres en chair sont divisées en deux caté- gories, Celles de grande taille valent 20 cents de plus par gallon; les boîtes se vendent en moyenne 3 dollars 4,2 la douzaine, chacune d’elles pouvant contenir de 70 à 100 mollusques. En 1858, la consommation totale des établisse- autres précautions. C’est ainsi qu’on les expédie à Hartfort, Syra- cuse, Utica et autres localités peu éloignées. (1) On fait des barils de la contenance de 2, 1, 3/4, 1/2 et 1/4 de gallon de capacité. PPS ES PO ES CE le CU PT 0" — 107 — ments de Fair-Haven fut de 2,000,000 de boisseaux, de mollusques. Il est reconnu depuis longtemps que peu d’indus- tries en Amérique peuvent donner autant de béné- fices que celles des expéditions d’huîtres. En 4856, le Journal le Commerce rapportait qu’une seule mai- son de Fair-Haven avait gagné près de 400,000 doi- lars dans les quatre dernières années. Cette même année, la maison Lewi-Rowe, qui avait des succur- sales à Buffalo, Détroit, Cleveland, etc, expédia 150,000 gallons pour sa part. Elle employait 20 na: vires pour ses approvisionnemenis et occupait de 75 à 400 jeunes filles dans ses ateliers durant la saison d'hiver. Vingt-cinq à trente maisons se partagent aujour- d'hui la plus grande masse des affaires, quelques- unes expédient jusqu’à 4,500 galions de mollusques par jour. Les hulires plantées dans la baie de New-Haven et dans le Quinipiac, étant toutes consommées avan l’Hiver, les établissements de Fair-Haven sont ap- provisionnés dans cette saison par des envois régu- liers de la Chesapeake ou de la Delaware. A l’arri- vée des goëlettes faisant les transports, les huîtres sont placées à terre dans des magasins, ou conser- vées dans les cales des bâtiments, jusqu'à ce que toute la provision soit consommée. — 108 — Il y à quelques années, le commerce de Fair-Ha- ven était beaucoup plus important qu’aujourd’hui, surtout dans l’ouest. Depuis lors les expéditeurs ont cté supplantés en partie sur le marché de St-Louis par ceux de Baltimore qui ont des communications bien plus faciles avec cette localité. En 1857, 200 à 250 goëlettes faisaient les voyages de la Chesapeake pendant six mois de l’année, pour approvisionner les industriels du Connecticut. Au- jourd’hui ce nombre ne dépasse pas 100. Boston Le Massachusetts, bien que l’un des plus petits États de l'Union, relativement à l'étendue du terri- toire, est néanmoins un de ceux dont l’influence se fait Le plus sentir dans la contrée. Par son commerce, l'intelligence pratique des habitants, leur esprit d'entreprise, etc., il marche en tête du mouvement industriel, comme aussi il est sans rival pour FPim- portance des institulions littéraires et scientifiques. Situé sur lPAtlantique, de la manière la plus favora- ble pour les industries maritimes en général, tout ce qui tient à la grande et à la petite pêche y jouit d’une remarquable prospérité. Les parages de Nan- tucket, du cap Cod, de Plymouth et du cap Ann, etc., nourrissent d'énormes quantités de homards, les plages abondent en bivalves comestibles, enfin, sui- — 109 — vant les saisons, d'immenses colonnes de poissons voyageurs, tels que les morues, les flélans, les ma quereaux, les aloses et les harengs, viennent, chaque année, apporter la richesse aux vaillantes corpora- tions de pêcheurs qui vivent sur les côles. Dans le tonnage général des pêcheries américai- nes, le Massachusetts compte, à lui seul, pour plus de moitié. La ville de Boston, capitale de l’État, entre natu- rellement pour une large part dans ce mouvement industriel et maritime, et, pour ne parler que de Pindustrie huitrière, la seule dont j'aie d’ailleurs à m'occuper ici, je dirai que cette ville joue dans l’ap- provisionnement des Etats du Nord, le même rôle que Baltimore et Fair-Haven remplissent dans ceux du centre et de l’ouest. Bâtie sur une presqu'île, dans l’intérieur d’une baie, défendue contre la mer du large par une ceinture d’ilots, elle est presque entièrement entourée de vastes nappes d’eau salée où se trouvent accumulées les meilleures conditions pour la culture de l’huître, suivant la méthode amé- ricaine. Quatre rivières, dont les plus importantes sont Charles river et le Mystic-river, se jeltent en outre dans la baie et concourent à augmenter en- core les éléments de l’industrie locale (1). (1) Les plantations d’huîtres sont nombreuses dans la baie, sur les fonds émergents de Bird-Island et de Hog-Island. On en rencontre Le D = 410 — Dix marchands principaux s'occupent des diffé rentes branches du commerce des huîtres. L'un d’eux, M. Higgins père, m’a fourni beaucoup de dé- tails sur cette question, et m’a procuré la majeure partie des mollusques que j'ai envoyés en France; à la fois marchand, planteur et propriétaire d’un oyster-house bien achalandé, nul autre ne pou- vait, mieux que lui, me donner des renseignements précis. Son établissement, semblable en tout à ceux de ses confrères, est situë sur le quai du City-Warf, partie du port plus spécialement réservée au sta- tionnement des bateaux de pêche. Il consiste en un magasin de neuf mètres de largeur sur huit mètres de profondeur, disposé d’ailleurs de la façon la plus économique, et tout autour dans l’intérieur règne, à hauteur d'appui, une sorte de lit de camp hori- zoütal, d’un mètre et demi de large, sur lequel. on Leut placer de grandes quantités d'huîlres. De dis - tance en distance, de petits carrés de bois d’un pouce d'épaisseur, cloués sur le bord du lit de beaucoup aussi dans le Charles’-river et le Mystic-river. Toutefois, comme elles ne peuvent suffire au commerce de la belle saison, on y supplée par les plantations du Cap-Cod dont les produits passent en majeure partie à l’approvisionnement du marché de Boston. La quantité d’huîtres plantées au printemps, dans ces diverses locali- tés, s'élève environ à 100,000 boisscaux. — A1 — camp, indiquent la place des travailleurs, et four- nissent en outre un point d'appui commode, pour ouvrir les coquillages. Placés les uns à côté des au- tres, de manière à ne point se gêner dans leurs mouvements, ces hommes, la main gauche envelop- pée d’un gant de grosse toile, exécutent leur travail avec un Couteau particulier, consistant en une lame d’acier mince et eflilée, de deux pouces et demi de longueur, taillée en langue de carpe, et emmanchée dans un morceau de bois rond. Lors- qu’un ouvrier veut ouvrir une buitre, il la saisit avec la main gauche, la pose sur le morceau de bois carré, la partie opposée à la charnière lui faisant face, perce ensuite le bord de la coquille de ma- nière à introduire la lame du couteau entre les valves, coupe le muscle, enlève la chair, et la jette dans une mesure de ferblanc qui est à côté de lui. J'ai constaté à plusieurs reprises que les hommes expérimentés pouvaient ouvrir ainsi 48 huîtres à la minute. Nulle part, je n’ai vu ce travail s’exé- cuter avec autant de rapidité, et comme on ne brise point le bord des coquilles, il en résulte que la den- rée est bien moins mélangée de débris. Au fur et à mesure que les approvisionnements placés sur le lit de camp sont consommés, quelques personnes se détachent pour en apporter de nouveaux. Quant aux écailles, chaque ouvrier les jette dans un — 112 — tonneau placé à sa droite, et dès qu’il est rempli, le roule à la porte de l’atelier et le vide sur la voie publique. Les salaires sont fixés à 10 cents par gallon de mollusques en chair, et dans l'hiver, ies bons tra- vailleurs peuvent gagner jusqu'à 3 dollars par jour, lorsque les huîtres sont de moyenne taille, les petites étant beaucoup plus défavorables (4). Six cents ou sept cents hommes sont employés annuellement à ce travail, la plupart d’entr’eux s’oc- cupant en même temps de l’exploiiation des planta- tions de la baie, pour le compte de leur patron. Les travaux d'emballage, la fermeture des barils et des boîtes en ferblanc, l’empaquetage dans les caisses avec l’auxiliaire de la glace, etc., tout se fait de la même manière qu'à Fair-Haven, et en usant des mêmes précautions (2). (4) Les principaux débouchés des marchands sont les villes du Massachusetts, du New-Hampshire, du Vermont et du Canada, no- tamment Québec et Montréal. (2) Pour les envois à petite distance, pendant la belle saison, il est assez d’usage d'employer des vases de ferblanc semblables à ceux dont se servent nos laitières. Les huîtres y sont placées avec des morceaux de glace qui suffisent pour les conserver jusqu’au lieu d'arrivée. Les industriels de Boston étant en rapport continuel avec les marchands des villes voisines, ces derniers leur envoient jour- nellement des vases marqués à leur adresse, qui leur sont inimédia- tement retournés pleins. Rendues à destination, les huîtres sont également mises dans la glace et doivent être consommées dans les trois jours qui suivent. — 113 — Chez M. Higgins, cs huîlres crues sont conser- vées jusqu’au moment de l'emballage dans des cais - ses doublées en zinc, de la contenance de 50 à 60 gallons, où elles sont mélangées de morceaux de glace. En hiver, les établissements d'expédition sont approvisionnés de la même manière que ceux de Fair-Haven. Baltimore. Baltimore est, de toutes les villes des États-Unis qui s'occupent du commerce des huîtres, celle où les expéditions à l’intérieur et à l’étranger sont les plus considérables. Du reste, aucune localité n’est plus avantageusement située pour ce genre d’af- faires. Par sa position sur une rivière navigable, dé- bouchant dans la baie de la Chesapeake, elle est à même de recevoir des chargements de mollusques sans avoir à payer des frais de transports élevés, comme aussi elle peut écouler rapidement les pro- duits de son induitrie par les différents chemins de fer qui convergent vers elle. Depuis trente ans environ, la capitale du Mary- land est devenue le marché principal où les villes de l'Ouest viennent s’approvisionner d’une denrée plus appréciée de jour en jour par les populations. Une chose fort singulière, néanmoins, c'est que jusqu’à ces dernières années, les publicistes ne se sont pour — 114 — ainsi dire point occupés de ce commerce, et c’est à peine s'il en est fait mention dans les statis- tiques annuelles de l’État. Les seuls documents un peu complets que j’ai pu me procurer ne remontent pas au-delà de 1856, époque à laquelle le journal l’'Américan, de Baltimore, consacra un article som- maire à cette question. Depuis le commencement de la guerre civile, une grande perturbation a été apportée dans les affaires; aussi les renseignements consignés dans cet article se rapportent-ils plus spécialement à la situation de l’industrie huitrière telle qu’elle était il y a deux ans, Ces renseignements sont extraits, en grande par- tie. de l’excellente publication imprimée à New— York sous le nom de Merchant’s and Commercial Review. | En dehors de ce qui est nécessaire à la consom- mation de la ville, les maisons d’expédition envoient dans l’intérieur les huîtres à l’état naturel, enlevées de l’écaille ou préparées en conserves alimentaires, en employant les procédés de conservation dont j'ai parlé dans les articles précédents (1). (1) Les huîtres consommées par les expéditeurs proviennent à la fois de pêche directe des bancs et des plantations établies sur les côtes du Maryland et de la Virginie. Depuis quelques années, il en vient de grandes masses sur les marchés, qui sont pêchées dans les parages de Norfolk, et sont très-appréciées, en raison de leur taille — 115 — Les huîtres en écaille, ainsi que la marchandise crue, sont expédiées aux villes de l’ouest et du nord-ouest ; quant à l’article conservé ou mariné, une partie prend la même direction, tandis que Pautre est embarquée pour la Californie, l’Austra- lie, les Antilles et quelques marchés européens, où la première de ces préparations jouit d’une granäe faveur. La ville de Saint-Louis du Missouri, est le centre des expéditions dans l’intérieur des États de l'Ouest. D’après les documents officiels publiés par l’État du Maryland, en 840, les commerçants de Balti- more consommaient 710,000 boisseaux d'huîtres à cetle époque. Pendant la saison de 1856 à 1857 du mois de septembre au mois de mai), les envois-se répartirent de la manière suivante : Huitres en écaille À Cincinnati el Chicago...... 400,000 boisseaux. DONPAS TNMIES eu des ce 400,000 » Consommation de Baltimore... 150,000 » ASFepOrter. +. +. 950,000 boisseaux, et de leur qualité supérieure. Dans le Maryland, les plantations les plus importantes se trouvent dans les comtés de Saint-Mary, de Dorchester, de Talbot et de Sommerset. Dans la Virginie, elles sont situées dans les comtés de Northampton, d'Accomack, d’York, de Gloucester, de Norfolk. de Lancastre et de Middlesex. Report RARES 950,000 » Huitres enlevées de l'écaille, à l'état cTu Ou préparées en conserve PMP CANTIONMIES 7... 4... 0. 200,000 » MORAMM=EOMIS 2... 5.02. 450,000 » res Niles. 10e 310,000 É Ports Étrangers............. 50,000 » FORAL : LINE 1,600,000 boisseaux (1). Pendant la saison de 1859 à 1860, les affaires furent excellentes, et commencèrent avec beaucoup d'activité. Au mois de septembre, les demandes en huîtres crues, emballées avec de la glace, furent très-nombreuses, et les produits furent peut-être supérieurs à ceux des années précédentes, surtout en ce qui concernait les huîtres de grande taille pê- chées sur les bancs du large (2). La marchandise se maintint constamment à un prix convenable, et les principaux marchands travaillèrent jour et nuit pendant tout l'hiver. Quant à l’article en conserves, préparé pour l'exportation étrangère, 1l fut aussi : (1) En 1858, il fut constaté que dans l’année officielle se termi- nant au mois de septembre, les chemins de fer transportèrent envi- ron 2,543,620 livres pesant d’huîtres en boîtes, La consommation générale s’éleva à 3,500,000 boisseaux. {2) Ce sont des huîtres pêchées dans les grands fonds de la baïe de la Chesapeake qui, moins exploitées que les autres, fournissent des produits de plus grandes dimensions. DT | DEP ln.» — 117 — très-demandé et se vendit à un prix raisonnable, quoique les huîtres en écaille eussent augmenté de prix. Pendant cette saison, les ateliers consommèrent parfois jusqu’à 25,000 boisseaux par Jour. Une moitié des principaux expéditeurs s’occupait plus particulièrement de la marchandise crue, et l’autre des préparations en conserves. Le nombre des pavires employés à cette époque à lPapprovi- sionnement du marché de Baltimore, était diverse- ment estimé de 800 à 1200 (1), Dans la saison de 1860 à 1861, malgré l’état de souffrance du commerce en général, les marchands d’huitres firent néanmoins des affaires importantes, les premiers mois principalement. Du 4° septembre au 45 juin, on consomma 8,000,000 de boisseaux, c’est-à-dire 10,006 boisseaux par jour en moyenne. Les deux tiers des mollusques livrés aux expédi- teurs, furent emballés avec de la glace à l'état cru, et envoyés dans l’ouest. Cette année, la situation commerciale était répar- tie de la manière suivante : (1) Une partie des bâtiments employés dans la baie au transport des huîtres à Baltimore, consiste en espèces de goëlettes nommées pungies, particulières à la Chesapeake, et marchant avec une grande rapidité ; elles portent de 300 à 900 boisseaux d’huîtres par voyage. £. — 118 — Nombre des principales maisons L'EXPORT EL es cou ae 30 Quantité d'huîtres vendues sur le marché de Baliimore..... 3,000,000 de boisseaux. Prix de revient des huitres à 35 cents par boisseau ......... 1,050,000 Dollars. Navires employés au transport. 500 Personnes employées aux diffé- rents travaux que nécessite l’industrie des expéditeurs.. 3,000 Capitaux engagés dans le com- MOnedir io. és PA ATEN 7 1,800,000 Dollars. Valeur commerciale de la mar- chandise préparée.......... 3,000,000 » Pour ne pas répéter de nouveau ce que jai dit ailleurs, je ne parlerai point de la manière dont s’exécutent à Baltimore les différentes opérations de l’industrie des expéditeurs, tout se faisant à peu de chose près comme à Fair-Haven. Les huitres sont ouvertes ordinairement par des personnes de cou- leur appartenant aux deux sexes, tandis que les ou- vriers blancs s’occupeni de la mise en boîtes, de la préparation des conserves, de l’emballage, etc. Il est d’usage, à Baltimore, d’emballer les boîtes de mollusques crus dans des caisses de trois pieds et demi de longueur sur 17 pouces de largeur et 8 pouces de profondeur seulement. Les boîtes sont arrimées avec soin, et on laisse un espace vide dans le milieu pour placer un bloc de glace. M. Malby, riche marchand ayant gagné une for- — 119 — tune de 10,000,000 de francs à ce commerce, m'a assuré que pendant la saison chaude, on plaçait les caisses dans les wagons glacières disposés de ma- nière à ce qu’un courant d'air froid passàt conti- nuellement sur la marchandise. L’emballage des huîtres crues, enlevées de l’é- caille, et la préparation des conserves, forment au- jourd’hui une des industries les plus lucratives de Baltimore, et nulle autre branche de commerce ne présente une base plus solide, puisque la demande des articles en question est continuelle et que les ventes se font ordinairement au comptant, L’impor- tance de cette industrie, sur laquelle je ne saurais trop m’appesantir, est une des preuves les plus sai- sissantes de l'influence que peut avoir sur la fortune publique Postréiculture dévelopnée sur une large échelle. 2 ou 3,000 marins naviguent sur les bâti- ments qui approvisionnent les maisons d'expédition, 2,000 personnes des deux sexes s’emploient à ou- vrir les huîtres, 200 ouvriers travaillent à fermer les boîtes, à les emballer et à confectionner les cais- ses. Enfin la fabrication des boites exige 300 fer- blantiers. On suppose que la valeur des feuilles de fer blanc et de la soudure employées annuellement, s'élève à 150,000 dollars et que le nombre de piels de sapin servant à confectionner les caisses d’embal- lage, est de près d’un million. — 121 — CHAPITRE IV CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR L’HISTOIRE NATURELLE DES CLAMS COMESTIBLES Soft clam (Mya Arenaria) Le soft clam est, après l’huître, le bivalve le plus utile du littoral américain, au double point de vue de l'alimentation publique et de l’industrie de la pêche, à laquelle il fournit l’un des appâts les plus estimés que l’on connaisse. Son extrême abondance dans les parages où on le rencontre, le bon marché auquel le vendent les pêcheurs, la facilité avec la- quelle chaque personne peut s’en procurer en allant sur les bancs au moment de la marée basse, tout contribue, en un mot, à faire de ce mollusque, une des ressources les plus précieuses pour la nourriture des classes pauvres (1). —_— ee —— (1) Dans quelques localités, la mya arénaria a conservé son an- cien nom indien de maninose. — 122 — Ses caractères les plus essentiels sont les sui- vanis : Coquille ovale, équivalve, presque équilatérale, mince, bâillante sur deux extrémités et principale- ment à la partie postérieure, qui ne peul jamais être fermée, par suite de la conformation des valves. Surface extérieure, ridée, exhaussée en quelques endroits par des lignes de croissance qui font saillie. Couleur générale : tantôt d’un blanc crayeux, tan- tôt d’un bleu-noir plus ou moins foncé, la valve gauche est munie d’une dent cardinale très-saillante, aussi large que longue ; l’impression musculaire est double et le ligament qui réunit les deux valves est entièrement caché par les sommets. Dans les sujets de grande Laille, les syphons ont près de deux pouces de longueur. Comme je l'ai dit dans l'introduction de cet ou- vrage, les soft-clams forment, sur le littoral de la Nouvelle-Angleterre, d'immenses gisements sans cesse exploités par les populations, sans que pour cela on ait remarqué une diminution notable dans leurs produits. Les parages où on les trouve en plus grande abondance que partout ailleurs, sont les grèves émergentes des comtés de Banstable et d’Essex dans le Massachusetts. À mesure qu’on descend vers le Sud, ils deviennent plus rares, et si j’en crois ce qui — 123 — m a été rapporté à ce sujet, ils ne dépassent point la latitude de l'embouchure de la Delaware, Ils sont si nombreux dans la baie de Boston que j'ai pu moi- même, dans un mètre carré de superlicie, en déter- rer plus de cent de toutes les tailles, sur les plages de governor’s Island. Les fonds qui leur conviennent le mieux sont les sables mélangés d’une grande quantité de vase où ils peuvent s’erfoncer plus ou moins profondément, suivant les saisons. Dans les sables purs, dans les graviers trop compactes, ils se développent moins et n’atteignent guère que deux pouces et demi de lon- gueur, tandis que dans les vases facilement péné- trables, 1ls parviennent généralement à 3 pouces et demi de longueur. Le docteur Gould a possédé un spécimen qui mesurait Cinq pouces et demi. La couleur et l’épaisseur des coquilles sont elles- mêmes extrêmement variables, suivant le milieu où on pêche l'animal. — Dans les sables, elles sont presque blanches; si le gravier prédomine, elles sont plus résistantes ; dans les fonds vaseux, au contraire, elles prennent une teinte bleuâtre plus ou moins pro- noncée. Les soft clams sont, dans toute l’acception du mot, de véritables coquillages de grève, vivant à la ma- nière des Solens, des Tellines et des Donaces, dans les bancs qui découvrent à la marée, et dans cer- OL — æ laines localités, on les trouve à quelques pieds seu- lement, du point du rivage où vient mourir le flot, au moment de la haute mer. Il en résulte alors que pendant les grandes chaleurs de l'été, il sont expo- sés une partie de la journée à une température très- élevée. En hiver, où les glaces couvrent souvent pen- dant plusieurs semaines le littoral de la Nouvelle- Angleterre, les pêcheurs prétendert que les elams quittent les parties élevées des bancs et se rappro- chent de la mer. Je ne sais jusqu’à quel point cette assertion est fondée, n’ayant pas été à même de la vérifier, mais J’incline plutôt à penser que les mol- lusques en question s’enfoncent tout simplement à upe plus grande profondeur dans les sables, à me- sure que la température devient plus rigoureuse. — Ce qui semble le prouver, c’est qu’on les pêche éga- lement dans cette saison, en ayant soin de casser préalablement la glace. Quoi qu’il en soit de la réa- lité de cette émigration, ilest reconnu qu'ils peu- vent, sans mourir, supporter une température très- basse, puisque M. Agassis a souvent trouvé, dans l’intérieur de ces mollusques, des aiguilles de glace qui ne paraissaient nullement les incommo- der. L'époque du frai, au dire des pêcheurs, doit être placée dans les mois de juin et de juillet. Quant au temps nécessaire pour qu'ils atteignent toute leur — 125 — croissance, il est complètement inconnu, les natura- listes américains n’en ayant fait l’objet d'aucune étude. Ce temps doit néanmoins être assez long, si on en juge par les différences si peu sensibles qui existent dans le jeune âge, entre des spécimens appartenant évidemment à des pontes distinc- tes. Les gisements de clams se trouvent ordinairement dans les parties de la côte les plus abritées ou du moins dans celles qui ne sont point exposées à une grosse mer capable de bouleverser les bancs et de changer leur niveau. J'ai observé ce fait plusieurs fois à Nahant, résidence d’été d’une partie de laris- tocratie financière de Boston. Dans toute la partie Est de cette presqu'île battue par la mer du large, on ne rencontre pas une seule mye des sables, mais en revanche, dans la partie ouest, où règne un calme relalif, elles sont très-communes. La pêche se fait à l'aide d’une bêche, lorsque la marée laisse les bancs à découvert. Les retraites de elams sont d’ailleurs reconnaissables à une foule de petits trous par lesquels ils lancent un jet d’eau aus- sitôt qu'on foule le sol autour d’eux ou qu’on l’é- branle avec l'instrument. Cette habitude si caracté- ristique ieur à fait donner par le peuple un nom fort peu poétique, mais d’une saisissante exactitude. Dans certaines parties du sound de Long-Island, les — 126 — pores ont l’habitude d’aller à mer basse sur les bancs pour manger des clams dont ils sont très-friands. Ils les déterrent avec beaucoup de sagacité, et savent parfaitement à quel moment ils doivent retourner au rivage afin de ne pas être surpris par la marée mon- tante. | La consommation de ces mollusques est considé- rable en toute saison, principalement en été, sur le littoral des États du Nord, depuis New-York jusqu’à la frontière du Maine, mais, nulle part, elle n’est aussi élevée qu’à Boston Dans la plupart des localités, les pêcheurs de pro- fession vendent les soft-clams dans leur état natu- rel ; dans d’autres, à New-York, par exemple, ils les enlèvent généralement de la coquille et les envoient au marché, enfilés par paquet de vingt-cinq. — On les vend alors à raison de 75 cents le cent. Les marchands de coquillages conservent, pendant l’été, la chair des clams en la mélangeant avec des morceaux de glace; en hiver, cette précaution n’est pas nécessaire. Du reste, en toute saison, la pêche est basée sur la consommation habituelle, afin que les approvisionnements soient journellement renou- velés. La cuisine américaine ire un grand parti de ces mollusques pour une foule de préparations culi- paires, parmi lesquelles la plus populaire est, sans — 127 — contredit, une espèce de soupe que l’on apprécie beaucoup à Boston (1). Quelle que soit, disons-le toutefois, l'importance des (1) Dans le Rhode-Island et le Massachusetts, les soft-clams ser- vent, chaque année, de prétexte à des fêtes très-curieuses (nommées clams- bakes), qui ne sauraient être passées sous silence. La descrip- tion suivante est extraite d’un ouvrage d'Histoire Naturelle publié aux États-Unis : u Les clams-bakes qui ont lieu chaque saison près de Bristol, ainsi que dans plusieurs autres localités de Rhode-Island et du Massachusetts, proviennent d’une tradition indienne. » Les aborigènes de ces contrées étaient dans l’usage de se réunir chaque année en grand nombre pour faire un grand repas, com- posé de clams et de maïs vert, cuits ensemble entre des couches d’algues marines. Le moderne clam-bake est un perfectionnement de l’ancien. A cet effet, on dispose sur le sol, avec de grosses pierres, une couche circulaire de dix pieds de diamètre, sur la- » quelle on fait un feu assez ardent pour les rougir entièrement. On » place par dessus une couche d’algues supportant une couche de clams de trois pouces d'épaisseur, recouverte elle-même par une » nouvelle couche d’algues ; vient ensuite une couche de maïs vert » dans son enveloppe, mélangé de pommes de terre et autres légu- mes, puis une couche de poulets cuits et assaisonnés, puis une autre couche d’algues, puis encore une couche de poissons et de homards recouverte par de nouvelles algues. — On répète ces couches suivant le nombre des personnes qui prennent part à la fête, et lorsque la pile est terminée, on la recouvre entièrement avec une toile, afin d'empêcher la vapeur de s'échapper. Quand le tout est cuit à point, chacun se sert sans façon. Le luxe de ce festin est au-dessus de toute description, et l’on affirme que ja- mais personne n’en a été incommodé. Autrefois, les guerriers In- diens les plus renommés venaient de fort loin pour assister à ces fêtes ; aujourd'hui elles sont le rendez-vous des hautes classes de la société, qui s’y rencontrent souvent au nombre de plusieurs centaines de personnes. » — 128 — soft-clams, au point de vue de la nourriture des po=n pulations du littoral, cette Importance est plus grande encore en ce qui concerne l’industrie de la pêche. Il y a longtemps déjà que les pêcheurs américains se sont aperçus de la prédilection marquée que beau- coup de poissons, et particulièrement ceux du genre morue, avaient pour la chair des clams, quelleque fût la forme sous laquelle elle leur était présentée.CGe fait, démontré par l'expérience, était facile à pré- voir; tous les marins fréquentant les bancs de Saint- Georges et de Terre-Neuve, ayant observé cent fois que les morues consomment pour leur nourriture beaucoup de bivalves analogues aux clams des cô- Les, que l’on nomme en histoire naturelle, Mya trun- cata. On en trouve fréquemment dans le ventre de ces poissons. Les clams destinés à servir d’appât sont employés vivants ou à l’état de salaison, suivant que la pêche doit s’effectuer sur le littoral ou sur les bancs du large. Dans le premier cas, ils sont enveloppés dans des pièces de filets et conservés dans les viviers dont sont pourvus la majeure partie des bateaux qui pê- chent sur la côte. Lorsque cette installation n’existe pas, on peut également les garder à sec pendant plusieurs jours, en les plaçant dans un endroit frais. Dans le second cas, après les avoir tirés dela coquille on les sale, on les embarille soigneusement et on les — 129 — vend pour à à 6 dollars le baril aux armateurs qui s’occupent de la pêche à la morue sur les bancs de Terre-Neuve et de l’île de Sable. En 1840, le docteur Gould évaluait à 40,000 bois- seaux la quantité de clams nécessaires annuellement pour la confection des appâts salés; et en outre, une quantité au moins égale était employée sans prépa- ration par la pêche côtière. Les clams salés sont encore emnloyés, avec suc- cès, dans la pêche du maquereau, où l'on s’en sert comme rogue pour aliirer ce poisson et le faire nordre à l'hameçon. Round-Clam (Venus Mercenaria). Le round-clam est une espèce de Vénus comes- tible presque aussi abondante sur les côtes que la Mya arenaria , et vivalisant avec elle, comme article alimentaire; néanmoins, comme objet d'économie servant à l'industrie de la pêche, elle est loin d’avoir la même importance. Dans quelques localités, les populations lui ont conserve le nom de Quahog, par lequel le dési- gnaient les anciens aborigènes de l'Amérique septen- trionale, qui fabriquaient avec la partie violette de la coquille, des espèces de colliers colorés nommés wampums, leur servant de monnaie courante. Les mollusques qu’ils employaient veraient en majeure — 130 — partie de l’île de Long-Island, appelée l’île des Co-* quilles, dans le langage imagé des Indiens Mohi-“ cans. Le round-clam a la coquille transverse, régulière, épaisse, fortement renflée avec les bords crénelés, et trois dents cardinales à chaque valve; la surface ex- térieure présente de nombreuses lignes concentri- ques quelque peu proéminentes, la partie rappro = chée des sommets est toujours plus ou moins usée ; le ligament de couleur brune est large et très-appa- rent; la lunule est ovale; la surface extérieure, or- dinairement d’un blanc sale, est quelquefois bleuà- tre suivant les terrains maritimes où on a pêché animal. L’impression musculaire est double, et les bords intérieurs des valves plus ou moins colorés en violet selon l’âge des spécimens que l’on examine. Les sujets parvenus à toute leur croissance ont com- munément trois pouces et demi de longueur, deux pouces et demi de largeur, et deux pouces d’épais- seur. Une espèce de Vénus très-rapprochée, la Vénus Notata, ressemble beaucoup à celle dont je viens de parler, et n’est probablement qu’une de ses varié- tés. Les round-clams sont répandus avec une grande profusion sur le littoral Américain, depuis de Cap Cod jusqu’à l'extrémité de la presqu'île des Flori- — 131 — des (1). Ils habitent en générai dans les golfes, les baies, les embouchures des grands fleuves, moins exposés que le reste de la côte à être battus par la mer du large, leurs gisements variant de profon- deur depuis six pieds jusqu’à vingt-cinq au-dessous du niveau de la basse- mer. Ainsi que tous les mol- lusques de la même famille, ils affectionnent parti- culièrement les sables fortement vaseux où ils s’en- fouissent de quelques pouces seulement, les syphons dirigés vers la surface du sol. Pendant mon séjour dans l’île de Long-Island, il m'est arrivé fréquem- ment de pêcher des clams dont les coquilles étaient couvertes de végétations marines, preuve évidente du peu de profondeur à laquelle ils s’enterrent dans les vases. Les marins pêchent les clams aux moyens des tongs et des rateaux, en allant se placer sur les gise- ments avec des embarcations, au moment convena- ble de la marée. Les tongs en usage sont exactement semblables à ceux qui servent à prendre les huïtres : quant aux (1) Nulle part les clams ne sont en une si grande abondance que dans le sound de Long-Island, dans la grande baie du sud de cette île, dans la baie de Sandy-Hook, sur les côtes du Jersey et à l’em- bouchure de la Delaware. — On en pêche encore de grandes quan- tités dans la baie de la Chesapeake, ainsi que dans les sounds d’Albemarle et de Pamlico. — 132 — rateaux, ils sont entièrement en fer, larges de 60 à 70 centimètres, avec des dents demi-circulaires, dont la courbure fait l'office de la poche en filet dans les rateaux ordinaires. — Ces dents, espacées entre elles d’un pouce et quart environ, peuvent avoir 50 à 60 centimètres environ dans tout leur dévelop- pement Rateau pour pêcher les rounds-clams. Les rateaux sont emmanchés sur des perches lé- gères de 20 à 25 pieds de longueur, suivant la profondeur des terrains à exploiter. Je répêterai ici ce que j'ai dit à propos des hui- tres, sur les grands avantages que présentent: ces instruments pour exploiter lespetits fonds. Non-seu- lement on n’est point exposé à détruire un grand nombre de coquillages en pure perte comme on le ferait avec des engins plus pesants, mais encore, grâce à l’écartement des dents dont ils sont armés, il n'arrive que rarement d'en prendre de petites di- mensions. — Les bancs ne sauraient donc être dé- peuplés. md Der — 4133 — Les tongs et les rateaux, dont j'ai fait venir des modèles d'Amérique pour Je bureau des pêches, méritent, selon moi, d’être vulgarisés sur nos côtes où ils rendront certainement d’utiles services aux pêcheurs! En outre, je ne doute pas qu'avec leur secours, Un ne parvienne à découvrir dans nos baies de l'Océan et de la Méditerranée, des gisements de mollusques inconnus aujourd’hui. Nous ne saurions nous dissimuler, en effet, que la reconnaissance exacte de nos richesses coquillères, est encore pres- que entièrement à faire par suite des entraves des anciens règlements sur la pêche. L’exploration du fond ae la mer, au moyen des instruments en ques- tion, ne présente d’ailleurs aucun inconvénient au point de vue de la multiplication du poisson, si j’en crois l'opinion des pêcheurs Américains. Les round-clams ne sont l’objet d'aucune industrie spéciale, ayant pour but de les améliorer ou de les faire croître promptement, et de même queles paires doubles de la Méditerranée, 1ls ne sont jamais plus délicats que lorsqu'ils viennent d’être fraîchement pêchés ; néanmoins, dans beaucoup de localités, on en forme des dépôts, dans des anses ou des criques bien abritées, afin d'en avoir constamment sous la main pour les exigences du commerce (1). (1) ANew-London, les marchands de poissons ont à côté de leurs établissements, bâtis sur pilotis au bord de la mer, des installations 8 13% — En général, les pêcheurs approvisionnent directe- ment les marchands en réglant, autant que possible, la production de la pêche sur la consommation ordi- naire. Les clams sont, du reste, tellement vivaces, qu'il est possible en toute saison de les conserver plusieurs jours hors de l’eau en les tenant à l’ombre. Pendant le temps frais, ils vivent ainsi plus de quinze : jours et peuvent être expédiés par les chemins de fer, à des localités fort éloignées de l’intérieur du continent. En été, la consommation de ces mollusques, dans les villes de New-York (1) et de Philadelphie, est très-considérable, et dépasse de beaucoup celle des mya arenaria. Vendus comme ces dernières, soit dans leur état naturel, soit enlevés de la coquille, ils servent à confectionner une foule de plats, dont le plus estimé est lé clam-chowder. Beaucoup de gens mangent crus les sujets de petite taille, et pour ma part, lorsqu'on les arrose de quelques gouttes de jus —— spéciales pour conserver lesround-clams. Elles consistent tantôt en caisses flottantes, pouvant en contenir plusieurs milliers, tantôt en parcs de bois établis à l’abri du soleil, entre les pilotis, de manière à être couverts par la marée, pendant plusieurs heures chaque jour.— Les mollusques vivent longtemps dans ces réserves, pourvu qu’ils ne soient pas entassés en trop grand nombre. (1) À New-York, les clams en coquilles valent 3 dollars et demi le mille, chez les marchands de Washington-Market et de Fulton- Market. R > dar ; — 4195, — de citron, je les trouve aussi délicats que les clovis- ses et les paires doubles, si chères aux Marseillais. L’acclimatation des round-clams, en Europe, pré- sente, je crois, au moins autant de chances de suc- cès que celle des huîtres de la Virginie, et ceux que j'ai pu faire parvenir en France, au nombre de cinq ou six mille, vivent aujourd’hui sur nos côtes, sans que ce changement de milieu, paraisse le moindre- ment les incommoder. On peut poser en principe que partout où l’on rencontre des paires doubles, des pétoncles et des palourdes, on est certain d’y faire également pros- pérer les Venus mercenaria. — Le reste ne sera plus qu’une question de temps! Avant de terminer cet exposé succinct de l’indus- trie coquillère des États-Unis, je crois devoir insister encore sur l'utilité de propager la mya arenaria sur nos rivages de l'Océan, ne serait-ce qu’au point de vue de la pèche côtière. Depuis mon retour d'Amérique, M. Fournier, commissaire de l'inscription maritime, à Dunker- que, m'a fourni sur la mya des sables des mers du Nord, des renseignements précieux, de nature à faire faire un grand pas à la question. Ce bivalve (je lignorais entièrement) se trouve en abondance dans les paräges de Dunkerque, notamment dans le bassin des Chasses, et certes, lorsque l’illustre — 136 — professeur Agassiz énumérait à Sa Majesté l’Empe- reur, les nombreux avantages que présenterait pour la France l’aeclimatetion du clam de Boston, il était loin de se douter que nous avions sous la main tous les éléments de cette utile entreprise. Pour être bien certain que les bivalves en question sont bien les mêmes que ceux que M. Burkardt et moi avons vai- nement essayé d'importer d'Amérique, je m’en suis fait apporter quelques douzaines par le capitaine de l’un des steamers qui font les voyages entre le Havre et Dunkerque. Parmi les spécimens qui me furent remis le 30 juin 1863, il y en avait de toutes les tailles, et Pun d'eux mesurait un peu plus de trois pouces de longueur sur deux de large. Au premier coup d'œil je reconnus les Soft-clams de la Nouvelle-Angle- terre. Les coquilles bâillantes aux deux bouts avaient la même conformation tourmentée, et par l'ouverture supérieure l’animal projetait un long syphon musculeux, pouvant se contracter de ma- nière à rentrer tout entier dans l’intérieur des valves; la dent cardinale avait la même forme et la même grandeur relative; la couleur extérieure des écailles était d’un blanc sale, quelquefois bleuà- tre, enfin, sous tous les rapports, ces coquillages élaient identiques à ceux d'Amérique. Poussant plus loin mon examen, J'ai goûté les myes des salles de 2x haT — Dunkerque crues, j'en ai fait accommoder de di- verses façons et les ai trouvées excellentes ; toutefois, comme elles provenaient d’un bassin où l’eau de mer nest pas suffisamment renouvelée, elles étaient un peu moins délicates que celles des bancs de la baie de Boston; mais en les transplantant dans un milieu plus convenable, elles rivaliseraient sans doute avec ces dernières. L'importance de ce fait que le soft-clam de lA- mérique du Nord vit dans les parages de Dunkerque, n’échappera à personne, en ce sens qu’il montre la possibilité, je dirai même la certitude, de réaliser le programme du professeur Agassiz. Une fois pro- pagé sur plusieurs points du littoral, ce mollusque fournira un appât sans rival pour la pêche côtière, et, en le préparant salé, il pourra être utilisé pour la pêche de la morue en Islande et à Terre-Neuve. Nous savons combien à certaines époques de l’année, nos pêcheurs du littoral se procurent difficilement de l’appàt pour garnir leurs hameçons, témoins ceux du Havre qui, dans la saison de la pêche des gros-yeux, paient parfois les petites seiches cinq centimes la pièce et ne peuvent pas toujours en avoir en quantité suffisante. La mye des sables comblerait cette lacune ! L’ensemencement de quelques grèves émergentes de la Bretagne et de la Normandie au moyen de ces 8. — 138 — coquillages serait donc un véritable hienfait pour les populations maritimes, et si on ne les y rencontre pas, cela tient probablement à la mobilité des banes des parages de Dunkerque, ainsi qu’à la violence des courants; en un mot, les conditions hydrogra- phiques sont telles que, livrées à elles-mêmes, les myes des sables ne peuvent franchir les espaces qui les séparent d’autres parties du littoral où elles vi- vraient à merveille si la main de l’homme les y transplantait. Il y a là tout au moins une expérience à faire, qui ne saurait d’ailleurs être coûteuse, puisqu’une fois emplacement choisi, il suffira de quelques jours pour y porter une colonie de mollusques, en em- ployant à cette opération un des bateaux à vapeur garde-pêche du 1° arrondissement maritime. FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE DEUXIÈME PARTIE APERÇUS DIVERS SUR LA PÉÊCHE COTIÈRE APERÇUS DIVERS SUR LA PÊCHE COTIÈRE CHAPITRE PREMIER PÊÈCHE DU FLÉTAN Un des poissons qu’on trouve le plus communé- ment en Amérique, sur les marchés des villes ma- ritimes, est le halibut (flétan des mers du Nord) dont nos pêcheurs de Terre-Neuve ne font aucun cas, par suite d’un préjugé aussi absurde que celui qu’ont les Anglais à l'égard de la raie. La chair du halibut possède cependant toutes les qualités qui peuvent la faire rechercher par les consommateurs : blanche, ferme, délicate, elle manque peut-être de — 112 — saveur, mais en revanche, elle se prête aux combi- naisons culinaires les plus diverses, et lorsqu'elle a été fumée, elle peut, selon moi, rivaliser avec les meilleures préparations du même genre. Quelle que soit la manière de l’arranger, elle est aujourd’hui tellement appréciée aux États-Unis, que les marins font de la pêche du halibut l’objet d’une industrie importante, qu’ils combinent en général avec celle de la morue, soit qu'ils l’effectuent sur les côtes ou sur les bancs du large, Le flétan se trouve en abondance sur les rivages de la Nouvelle-Angleterre, sur ceux des possessions anglaises, ainsi que sur les bancs de Saint-Georges, de l’île de Sable et enfin sur celui de Terre-Neuve (1). Géant de la famille des pleuronectes, il parvient à des dimensions telles, que parmi les poissons de mer comestibles, on peut le considérer comme l’a- nalogue du bœuf parmi ies animaux de boucherie. On en prend souvent du poids de cent livres, et lon cite de nombreux exemples de pêcheurs qui en ont capturé d’un poids plus considérable encore. Il y a quelques années, il en parut un sur le marché de Boston qui pesait 400 livres, et un autre que l’on (1) Le flétan habite également toutes les mers du nord de l’Eu- rope où ilest l’objet d’une pêche importante de la part des Islandais et des Norwégiens principalement. Les Anglais et les Hollandais en consomment d’assez grandes quantités pour leur nourriture, — 143 — prit en 1807, à New-Ledge, à 60 milles dans le sud- est de Portland, dépassait 600. D’après cela, il est véritablement étonnant que des poissons représen- tant une masse aussi considérable de substance ali- mentaire, n'aient point aitiré depuis longtemps lattention des pêcheurs français de Terre-Neuve ou d'Islande, et ne leur ait pas suggéré l’idée d’essayer d’en tirer parti. Pendant la belle saison, on pêche les halibuts dans des eaux peu profondes, à quelques milles seule- ment du rivage ; mais à mesure que le temps de- vient plus rigoureux, ils émigrent vers les bancs du large où on doit les suivre pour les capturer. Une partie de ceux que l’on prend sur les côtes ainsi que sur les bancs de Saint-Georges et de l'ile de Sable, sont apportés frais sur les marchés, en employant les procédés de conservation en usage en pareil cas. Les sujets de petite taille sont conservés dans les vi- viers, tandis que ceux de grande dimension sont placés dans les glacières des bâtiments. Les pêches les plus importantes sont faites par des schooners de 70 à 120 tonneaux de jauge appartenant aux États du Maine, du Massachusetts, du Rhode-lsland et du Connecticut. — Ils embarquent pendant l'été de 20 à 25 lonues de glace à chaque expédition. Cette pêche est devenue si avantageuse par suite de la grande faveur dont jouit le flétan auprès des — 144 — consommateurs, que certaines localités se trouvant un peu éloignées des parages fréquentés par les maquereaux, ont presque abandonné la pêche de ce dernier poisson pour s'occuper plus spécialement de la première, qui est beaucoup plus certaine, Le port de New-Loñdon est dans ce cas. En outre des grands bateaux dont je viens de parler, il y en a encore beaucoup de plus petits, qui se livrent à la même industrie, mais ne s'écartent guère de leur port d'armement au-delà de 50 milles. Quant aux pêcheurs qui prennent le halibut sur le grand banc de Terre-Neuve, concurremment avec la morue, ils le découpent en longues tranches lon- gitudinales, afin de pouvoir le saler plus facile- ment, et au retour le livrent à des industriels qui s'occupent de le fumer de la même manière que le SautnOn. Dans le courant de l’année 1858, il se vendit sur le marché de Gloucester dans le Massachusetts, 200,000 kilogrammes de halibut frais. La pêche totale des bateaux-pêcheurs du port de New - London est estimée actcellement à environ 1,500,000 kilogrammes. En 1861, la valeur du ha- libut pris par les pêcheurs de Gloucester fut de 120,000 dollars. Par ces exemples que je pourrais multiplier, puisque partout sur le littoral de la Nouvelle-Augleterre on s’cecupe de cette pêche, 1l sera facile de se rendre compte de la masse de nour- riture fournie annuellement à la consommation pu- blique par ce seul poisson. Nos pêcheurs de Terre-Neuve ne pourront évi- deminent jamais apporter en France du halibut frais, mais qui les empêcherait de le saler comme font les Américains? Quels que soient leurs préjugés à cet égard, je ne doute pas qu'une fois fumée, la chair de ce poisson ne soit accueillie avec faveur par nos populations, d'autant qu'on pourra la leur livrer à 7 ou 8 sols la livre, prix ordinaire qu’elle vaut à Boston. Les Américains comprennent si peu notre manière d'agir, que l’un d'eux m'a dit plusieurs fois que, si le gouvernement français voulait Pautoriser à pêcher dans les pêcheries de Terre-Neuve réservées à nos nationaux, il s’engagerait à ne prendre que du hali- but et à déposer à Saint-Pierre toutes :es morues qu'il viendrait à capturer. M. le consul de France, à Boston, a reçu plusieurs fois des ouvertures dans le même sens. L’antuipathie irréfléchie de nos pêcheurs devrait être combattue par le seul fait, qu’elle cause un préjudice notable à l'alimentation publique, et qu’il est d’ailleurs impossible d'admettre qu’un poisson consommé par les classes élevées d’un pays aussi ri- che que les États-Unis en produits de toute nature, 9 — 146 — puisse être en lui-même une mauvaise chose, à la- quelle on ne saurait accoutumer nos compatriotes. Pour ma part je serais fort embarrassé de dire le- quel je préfère, du saumon ou du halibut fumé. Avant mon voyage en Amérique, je ne connaissais le flétan que par les descriplioi.s des naturalistes, sans savoir qu'il fût l’objet d’une pêche aussi impor- tante ; mais depuis que j’ai été à même de juger des ressources qu’il fournit à toutes les classes de la po- pulation américaine, Je trouve que nos marins commettent une insigne folie en négligeant une pareille source de bénéfices. Le meilleur moyen de relever la pêche française de son état de malaise, c’est de lui faire comprendre qu’elle doit faire flèche de tout bois et ne point dé- daigner sans motifs les richesses qu’elle trouve à sa portée. Lorsqu'une nation compte, comme la nôtre, une nombreuse population à nourrir, C est presque commettre une mauvaise action que de la priver d’un élémert d'alimentation à la fois économique et agréable! Dans bien des cas, d’ailleurs, la pêche du flétan pourrait devenir un utile auxiliaire de celle de la morue et en comblerait les déficits. En résumé, sans m étendre plus longuement sur cette question, je pense qu'il conviendrait de la faire éludier sur les lieux de pêche à Terre-Neuve ou en du. “0 à AT — 147 — Islande, afin de tenter au moins un essai, L’appâl pour prendre le halibut, dont la gloutonnerie est proverbiale, se compose de poissons salés du genre hareng, n'ayant pour ainsi dire aucune valeur en Amérique, tellement ils sont abondants et de qualité inférieure. Ce sont les mêmes dont on se sert pour attirer le maquereau el pour fumer les champs de maïs. Le baril d’appàt tout préparé se vend à raison d’un dollar à un dollar et demi; s’en procurer sera la chose du monde la plus facile, et M. le consul de France, à Boston, pourra en ex- pédier à Saint-Pierre autant qu’on le jugera conve- nable (1). Quelques personnes objecteront sans doute que, si véritablement cette question présentait autant d'intérêt que je le prétends, on n'aurait pas attendu si longtemps pour la signaler. Ce raisonnement n'aurait pour moi aucune valeur, car rien ne saurait en définitive aller contre la vérité. Je n’ai point le mérite d’avoir découvert quoi que ce soit qui n'eût pu être constaté mille fois mieux par nos consuls ou par toute autre personne compétente; mais enfin J'ai vu, J'ai touché du doigt, j'ai goûlé et reconnu (1) Il est inutile de se préoccuper de la question de l’appât, at- tendu qu’il n’y aura qu'à employer celui dont se servent les pêcheurs Islandais et Norwégiens. — Î18 — que la chair du flétan est supérieure à celle d’une foule de poissons qui paraissent sur nos marchés. Ne pouvant me refuser à l’évidence, Je considère comme un devoir de signaler le fait! CHAPITRE II COMMERCE DE LA GLACE AUX ETATS-UNIS EMPLOI DE CETTE SUBSTANCE DANS, L'INDUSTRIE DE LA PÊCHE CÔTIÈRE La propriété que possède la glace de préserver les corps organisés de la corruption, a élé constatée de- puis des siècles ! Personne n’ignore aujourd’hui qu’un animal, recouvert après sa mort d’une épaisse couche de cette substance, peut se conserver pour ainsi dire éternellement ; {émoin ce Mammouth an- tédiluvien, trouvé par les Russes sur les bords de la mer Glaciale, dont la chair servit à nourrir les ours blanes, bien qu’elle eût séjourné pendant des mil- liers d’années dans un bloc de glace. Les Groënlan- dais, les Lapons, les Samoyèdes, tous les peuples enfin qui habitent ia zone boréale, n'ont, on le sait, d'autre manière de garder leurs provisions que de les exposer à la gelée et de les enterrer ensuite sous la neige. — 150 — En présence de faits aussi bien établis et sur les- quels les voyageurs et les naturalistes ont appelé tant de fois l'attention publique, il est difficile de comprendre comment il se fait que les nations euro- péennes, avancées en civilisation, n’aient point songé à utiliser la glace comme moyer ordinaire de con- server les denrées alimentaires. La plupart, il est vrai, s’en servent habituellement pour ra- fraichir les boissons et confectionner des sorbets délicats ; quelques-unes l’emploient accidentellement pour la conservation de certains produits, mais néanmoins on peut affirmer que nulle part, dans l’ancien monde, elle n’est pour les populations un objet de consommation usuelle. Les Américains des États du Nord de l’Union, avec lesprit si éminemment positif de leur race, ont eu bien garde de dédaigner une pareille source d'économie domestique, et, de bonne heure, ils ont reconnu les avantages qu’ils pouvaient en retirer dans les besoins journaliers de la vie. Habitant une contrée où, à latitude égale, les étés sont plus chauds et les hivers plus froids qu’en Europe, ils ont com- pris que le meilleur moyen d’atténuer les fâcheuses influences d’une température trop élevée, était pré- cisément d'utiliser les ressources que la Providence avait mises à leur portée. Dans ces Élats, en effet, depuis la Virginie jusqu’à la frontière du Canada, — 151 — le froid est assez rigoureux en hiver pour qu’il soit possible de recueillir chaque année d’abondantes provisions de glace. De ce côté, disons-le, les Améri- cains sont placés dans des conditions plus favorables que la plupart des peuples de PEurope; mais il est juste de reconnaître qu’ils ont su en profiter avec une intelligence qu’on ne saurait trop admirer. Dès l’année 1792, quelques fermiers du Maryland avaient fait construire de petites glacières pour leur usage personnel, et sans doute il en existait dans beaucoup d’autres localités, À partir de cette épo- que, l'emploi de la glace se répandit rapidement. — Dans tous les grands centres de population des États du Nord et du Centre, ayant à proximité des lacs, des étangs, des marais ou des cours d’eau convena- bles, 1l se forma des compagnies pour l’exploitation de cette branche de commerce. De vastes établisse- ments s’élevèrent de tous côtés pour recevoir les ap- provisionnements annuels de la substance conserva- trice, et se multiplièrent au fur et à mesure que la consommation s’étendit davantage. L’art mécanique, appelé bientôt au secours de la nouvelle industrie, vint faciliter les travaux, diminuer les frais d'ex- ploitation et en vulgariser tout naturellement l’em- ploi ; en même temps, les industriels s’ingénièrent à construire des appareils réfrigérateurs pour renfer- mer les denrées alimentaires et arriver à tirer tout — 152 — le parti possible de la substance en question. Il existe aujourd'hui une foule de ces appareils de tous les modèles et de tontes les dimensions, depuis le simple réfrigérateur des familles, contenant quel- ques livres de glace seulement, jusqu’à celui du boucher ou du marchand de comestibles, qui peut en recevoir une centaine. L'esprit inventif des Amé- ricains a prévu tous les cas (1). COTE EEE CU UL CLS RENE dé POULE EEE EUUE EEE ER TEE! TOI U EEE —— RELMSTE FE ï QN LEE» 41 LOU TT TVas ——= MN QU Modèle d'un réfrigérateur pour les familles. (1) Les réfrigérateurs employés par les familles consistent en es- pèces de coffres rectangulaires en bois à parois épaisses de trois pouces, revôtues intérieurement d’un doublage en feuilles de zinc. Is sont ordinairement divisés en deux compartiments : l’un pour mettre la glace et l’autre pour dépos2r les denrées à conserver... Le lait, le beurre, la viande, le poisson, etc , sont placés, en été, 0153 — Dans l’origine, l’usage de la glace fut presqu'en- tiérement limité aux États du Nord, mais il se répandit bientôt dans ceux du Sud, où son action salutaire était encore plus précieuse. Un négociant dont le nom doit être inscrit parmi les bienfaiteurs de l'humanité, M. Frédéric Tudor, de Boston, entre- prit en 4805 de transporter par mer des chargements de glace dans les contrées intertropicales. Les pre- miers essais furent loin d’être heureux, la guerre vint d’ailleurs les entraver, mais rien ne pouvant lasser sa persévérance, il les reprit à la paix et enfin, après vingt ans de traverses continuelles, pendant lesquels sa fortune fut souvent compromise, il finit par doter la capitale du Massachusetts, d’une nou- velle branche de commerce. En Europe, la glace, à de rares exceptions pres, est consommée par les classes riches et ne constitue à vrai dire qu’un objet purement de luxe. Aux États-Unis, au contraire, grâce au bas prix auquel les marchands la livrent, elle est devenue une des denrées les plus communes, un article de première nécessité dont les populations ne sauraient se passer oo dans ces appareils, jusqu’au moment de les consommer. Lorsque la glace est immédiatement en contact avec les corps à conserver, elle leur enlève une partie de leur saveur, surtout s’il y a commence- ment de fusion, mais on obvie à cet inconvénient en les soumettant seulement au froid qu’elle produit. 9. — 154 — dans la saison chaude, tant il leur rend de services. Et, disons-le, son emploi de tous les instants, a pro- duit une véritable révolution dans l’alimentation publique, en ce sens qu’une masse de produits se perdaient autrefois pendant les grandes chaleurs, qui rentrent aujourd’hui dans la consommation (1). Les bouchers, les épiciers, les marchands de co- mestibles, de poisson, etc., en font un usage continuel pendant la plus grande partie de l’année. Les fa- milles bourgeoises en reçoivent chaque jour une provision, comme à Paris on reçoit une provision d’eau. Dès six heures du matin, dans les villes amé- ricaines, on voit les rues sillonnées par les voitures des marchands de glace, déposant à la porte de leurs clients, un ou plusieurs blocs de cette substance sui- vant l’importance des commandes. La navigation elle-même s’est enrichie de ce moyen de conservation (1) Dans les campagnes où l’abseuce des voies de communication et l’élévation des prix de transport, etc., ne permettent pas de faire venir la glace des centres de production, les cultivateurs installent des glacières à côté de leurs fermes et les remplissent pendant l'hiver. Si, par hasard, il n’existe point dans le voisinage, des tangs ou des cours d’eau, ils creusent une grande mare qui, se remplissant pendant la saison des pluies, leur fournit en hiver la provision de glace nécessaire aux besoins de l'année. Les glacières en question, construites d’ailleurs avec beaucoup d'économie, ren- dent de grands services en été pour la conservation du beurre, du laitage et autres denrées comestibles. On y garde également des fruits. — 155 — à la fois si simple et si efficace, et les bateaux à va- peur transatlantiques des différentes lignes améri- caines et anglaises, desservant les États-Unis, n’en emploient pas d’autres maintenant pour préserver les provisions du voyage d’une détérioration préma- turée. Bon nombre de bâtiments à voiles, principa- lement ceux qui portent des passagers, s’en servent également, de sorte que l'inconvénient majeur d’em- barquer des animaux vivants et de les tuer pendant latraversée.a pu être ainsi complètement supprimé. Le prix de la glace varie annuellement selon que la récolte a été plus ou moins abondante. Néanmoins il se maintient toujours à un chiffre modéré. — Le tableau suivant donnera une idée des prix ordinaires à Boston : 1°9 livres de glace fournies tous les jours pendant cinq mois de l'année, du 1°mai au 1° octo- DE; 56 PAR 2 Te ne ch dun v5 Le 24 » dollars 29 15 livres prises de la même façon .......... 8 :% is US NP PRE 12 » 4° jes bouchers, épiciers, marchands de poisson, etc., qui prennent 100 livres par jour, se pafentà-raison de. 4 .:4.::.4.%100 0,17 cents 5° les hôtels, restaurants, pâtissiers, etc., qui consominient 500 livres, paient la tonne EP ON ORNE NP de 3 dollars 6° Lorsqu'on vend la glace en grande quantité, pour l’embarquer, par exemple, on livre le tonneau à raison de............... 2 dollars — 1861 — Depuis l'iuitiative prise par M. Tudor, d'envoyer des chargements de glace dans les contrées méridio- nales de Amérique, d’autres industriels se sont lancés dans la même voie, et l’on compte aujourd’hui à Boston plusieurs compagnies s’occupant de ce commerce. Les étangs de Fresh-Pond, de Spy et de Neyham, etc., situés dans les environs de 1a ville, sont les points où ils récoltent leurs produits, et l’on n’estime pas à moins de trois cent mille tonnes, la quantité de glace qu'ils peuvent emmagasiner dans leurs glacières (1). (1) Les glacières sont ordinairement en bois, quelques-unes néanmoins sont faites en briques. Vues de loin, elles ressemblent à d'immenses maisons rectangulaires, mesurant de 100 à 200 pieds de longueur, avec une hauteur et une largeur proportionnelles. — Les bords de l’étang de Fresh-Pond, dans le voisinage de Boston, sont couverts de ce genre de constructions. Où recueille la glace dans les mois de décembre et de janvier, époque à laquelle elle est généralement parvenue à l'épaisseur de 9 à 20 pouces, nécessaires pour une bonne conservation. Ceux qui s'occupent de cette industrie se servent, dans les différents travaux, d’uu système complet de machines et emploient la vapeur comme force motrice pour amener la récolte à la porte des glacières et l’arrimer dans l’intérieur. L'expérience ayant démontré que la glace se conservait d'autant mieux qu’elle était en morceaux plus volu- mineux, il est d'usage de la couper en blocs carrés de 4 à 5 pieds de côté. Pour mettre autant que possible les approvisionnements à l’abri de la température extérieure pendant la belle saison, on isole la glace des murs des glacières, en interposant des corps mauvais conducteurs, tels que : du charbon, de la sciure de bois, des copeaux de menuisier, des enveloppes de riz, des résidus de tan, etc. (Voir la note D). » A — C’est depuis 1852 que le commerce d’exportation a pris surtout un grand développement. Ceite année là, la quantité de glace embarquée fut seulement de 4,352 tonnes, mais en 4854 elle s’éleva à 156,540 tonnes, sur lesquelles 100,000 environ furent en- voyées aux États du Sud de l'Union. Charlestown, Mobile, et principalement la Nou- velle-Orléans, étaient, avant la guerre, les princi- paux débouchés de Boston, et, dans chacune de ces villes, de grandes glacières servaient à recevoir les chargements à mesure qu’ils arrivaient du Massa- chusells. Les navires de Boston transportent la glace dans l'Inde, aux Antilles, au Brésil, au Chili, en Austra- lie, etc., et quelquefois même en Europe. D’après les relevés de la douane, les exportations, en 1859, se répartirent de la manière suivante : 4° A divers points des Etats du Sud........ 88,486 tonnes 2. 2). ji ya. d,128 3 D LULS E PRNSINE PReLe 12% 2 LISE TEE SENS Fe PAT Ce SE NT: 7,966 » A Alexandrie (Egypte) .:...:.......... 330 - » podustraliesi ee 30 2 OM Ps. ET 7187 » Pau mes rientiles (b):25: 25 HE OZ : 2 (1) Les armateurs transportant la glace dans l’Inde, considèrent comme un excellent résultat de pouvoir sauver la moitié du charge- ment. — Toutes les précautions en usage dans les glacières sont employées à bord des bâtiments. — 158 — Comme il est inutile de mentionner tous les ports qui reçurent des chargements, qu’il suffise de dire que cette même année, le chiffre total des exporta- tions s’éleva à 129,403 tonnes. En 1847, la quantité de glace consommée dans la ville de Boston était de 25,000 tonnes ; en 1854 elle fut de 60,000. Dans les environs de New-York, on en récolte an- nuellement 280,000 à 300,000 tonnes, qui passent presque entièrement à la consommation de la ville et des localités voisines. — Les principales glacières se trouvent sur les bords du lac de Rockland, qui fournit à lui seul plus de 100,000 tonnes. Baltimore, Philadelphie et Washington récoltent, en hiver, dans leurs environs, ce qui est nécessaire à la consommation annuelle; toutefois, la glace de luxe, servie dans les hôtels et les restaurants, vient ordinairement de Boston. Quel que soit le point de vue sous lequel on con- sidère le commerce de la glace aux Etats-Unis, on ne peut méconnaitre qu'il a augmenté la richesse nalionale et développé le mouvement maritime dans de notables proportions. Grâce à la persévérance de M. Tudor, plusieurs contrées du globe sont aujour- d’hui tributaires des Américains pour une denrée n'ayant pour ainsi dire aucune valeur sur les lieux de production. Faire de l'or dans de pareilles con- — 159 — ditions, n’est-ce pas, je le demande, le véritable quine de la spéculation? Voilà pourtant ce qui a été réalisé dans le Nouveau-Monde ! En 1854, on évaluait à 7,000,000 de dollars le chiffre des capitaux engagés dans les différentes branches du commerce de la glace, et à 40,000 le nombre de personnes s’occupant des différents travaux d'exploitation. Les glacières des environs de Boston en emploient maintenant 3,000 pour leur part. Emploi de la Glace dans la pêche côtière. La pêche côtière, dont les produits sont si expo- sés à se corrompre pendant les grandes chaleurs, à été naturellement une des premières industries à profiter des avantages dont je viens de parler. Les marchands de poisson du littoral emploient une énorme quantité de glace, non-seulement pour con- server les poissons, les crustacés et les mollusques destinés à la consommation des habitants, mais en- core pour en expédier des provisions aux villes de l'intérieur. Les propriétaires de glacières ont, en général, des dépôts à proximité des marchés, dans le but de satisfaire plus facilement à toutes les de- mandes. À Fulton-Market, New-York, dans le local affecté aux produits de la pêche, les tables sur les- quelles on élale le poisson, mesurent de 3 à 4 mèe- tres carrés de superficie, sont légèrement inclinées et munies d’un rebord de 6 pouces d’élévation, afin d'empêcher la marchandise mélangée de morceaux de glace, de glisser sur le sol. Lorsque la vente est terminée, les poissons, également entremêlés de glace concassée, sont déposés jusqu’au lendemain dans des caisses disposées le long des murs. A Bos- ton, les marchands se servent, dans le même but, de grands réfrigérateurs munis de couvercles. A New-London, un des ports du Connecticu', où la pêche est la plus florissante, j'ai visité une bou- tique installée avec plus d'intelligence encore. Le propriétaire avait fait construire, dans l’intérieur, une véritable glacière ayant la forme d’une petite chambre carrée avec des parois parfaitement calfa- tées, épaisses de 4 pouces environ; une ouverture, percée à hauteur d’appui et fermant avec un pan- neau plein, permettait d'entrer dans cette glacière, divisée nour plus de commodités en deux compar- ments dans la partie inféricure seulement. Les poissons , recouverts de glace, reposaient sur un lit formé de gros blocs de cette substance. Lorsqu'il s’agit d'envoyer des.poissons à des villes éloignées, on les place dans des barils ou des coffres en bois de sapin, de différentes dimensions, en em- ployant les mêmes procédés de conservation : rem- plissant les vides laissés par l’arrimage, la glace a — 161 — encore l'avantage de prévenir les ballottements nu'- sibles à la marchandise, et une fois pleins, les barils et les caisses sont expédiés le plus promple- ment possible au chemin de fer, à l’adresse des des- tinataires. Une des plus utiles applications de la glace à été, sans contredit, son emploi à bord des bateaux de pêche. Cent fois, durant mes excursions sur le litio- ral des États-Unis, j’ai été à même de reconnaitre les avantages qu’en retirent les pêcheurs; aussi je n'hésite pas à déclarer que, de toutes les innova- tions à introduire dans la pêche française, celle-ci sera une des plus fécondes en bons résultats. Du reste, l’idée d'employer la glace à bord comme moyen de conservation, n'appartient pas exelusive- ment au Nouveau - Monde. Les pêcheurs Sardes, Toscans et Napolitains la mettent en pratique de- puis de longues années ; toutefois, l'emménagement de leurs bateaux ne présente rien qui se rapproche des installations si bien conçues des navires améri- caius (4). (1) En Chine, où la glace est utilisée depuis des siècles, les pè- cheurs chargent dans leurs bateaux de grandes quantités de pois- sons entremélés de glace ou de neige et recouverts d’une couche de paille, pour éviter l’action de l’air extérieur. Chez ce peuple intelli- gent, tout ce qui tient à l'industrie de la pêche a reçu des dévelop- pements extraordinaires, où les peuples européens pourraient puiser d’utiles enseignements, — 162 — Les bateaux pêcheurs faisant habituellement usage de procédés propres à conserver leurs pro- duits, penvent se diviser en quatre catégories : 1° Ceux qui se servent uniquement d’un vivier; 2° Ceux qui sont pourvus d’une glacière; 3° Ceux qui ont à la fois une glacière et un vivier. 4° Enfin ceux qui, à l’occasion de certaines prèê- ches, celle du maquereau par exemple, installent à bord une glacière provisoire. Bateau-Vivier. Les bateaux de la première catégorie sont trop connus pour qu’il soit nécessaire d’en donner la des- cription complète ; cependant, comme il peut se faire que dans la construction du vivier ils présentent quelques différences avec ceux qui sont employés en Hollande et en Angleterre, je crois utile d’en parler sommairement (1)}. Dans les bateaux américains, le vivier est con- struit de manière à ce que la cloison supérieure soit constamment au-dessous de la ligne de flottaison. Un puits évasé par le bas et de dimensions restreintes (4 m. 20 sur 0 m. 80 à l’ouverture), va du pont à celte cloison, et c’est dans son intérieur que s'établit le niveau avec la mer. Il résulte de cette disposition (1) Voir la note E, — 163 — que, dans les mouvements de tangage et de roulis, la masse des eaux contenue dans le vivier ne subit aucun déplacement ; tous les mouvements se concen- tirant uniquement dans le puits.— Les poissons sont ainsi bien moins fatigués ! Bateaux ayant une Glacière. Les bateaux de la deuxième catégorie ont une glacière construite dans la cale, entre les deux mâts s'ils sont mâtés en goëlelte, et sur l’arrière du mât de misaine s’ils sont mâtés en cutters. La cloison in- térieure est formée par une forte plate-forme repo- sant sur le lest, distante du pont de 5 à 7 pieds, sui- vant la grandeur du navire. Les cloisons avant et arrière partent de la plate-forme, se raccordent avec le pont, sont épaisses de 3 à 4 pouces, soigneu- sement calfatées, et pour plus de précaution on cloue sur les coutures de légères lattes de bois de sapin. La glacière occupe toute la largeur du bà- timent, et, suivant le tonnage, mesure de 4 à 6 mè- tres de lorgueur ; elle est divisée à l’intérieur en plusieurs compartiments indépendants les uns des autres, ayant chacun une porte donnant dans une coursive de 0,80 centimètres de largeur, qui règne dans le milieu du navire d’un bout à l’autre de la glacière. Le panneau par lequel on entre est à dou- ble fermeture, afin d'empêcher, autant aue possible, l’action des agents extérieurs. Fig. 1. Glacière à six compartiments. La figure n° 4, donnera une idée exacte de ces installations qu’il suffit de voir une seule fois pour en comprendre immédiatement l'effet. Les bateaux sur lesquels j'ai pris ces renseignements Jaugent de 40 à 50 tonneaux et font, sur le littoral des États du Nord, la pêche de la morue, du flétan, ainsi que de plusieurs autres espèces de poissons. Dans leurs croisières, qui durent seulement une quinzaine de jours, ils emploient de 10 à 15 tonnes de glace em- barquée à bord en blocs aussi volumineux que pos- sible, expérience ayant démontré que cette subs- tance se conserve ainsi plus longtemps. Les blocs sont emimagasinés dans les diverses parties de la glacière. Au furet à mesure que les pêcheurs prennent des poissons, ils les arriment dans les comparti- ments en les disposant par couches séparées entre elles par de la glace concassée, de manière à remplir — 165 — les vides. — Dès qu’un compartiment est plein, la porte est remise en place el solidement assujettie, pour ne plus être ouverte qu'a l’arrivée au port, vers lequel on fait route aussitôt que la pêche est suffisante. Bateaux mixtes ayant un vivier et une glacière. Ces bateaux. les plus intelligemment disposés, ser- vent pour la grande pêche de la morue et du flétan, destinés à être vendus frais sur les marchés. Ce sont ordinairement des schooners de 80 à 100 tonneaux de jauge et au-delà, poussant leurs croisières jusqu’au banc de l’île de Sable, à mesure que le poisson s’é- carte du rivage. La morue est conservée dans le vi- vier, tandis que le flétan, surtout quand il est de grande taille, est mis dans la glace, dont on embar- que de 20 à 26 tonreaux à chaque expédilion. Fig. 2. Bateau vivier et glacière. GG glacières, V vivier. La figure 2 montre les dispositions intérieures de ce genre de bâtiment. Le vivier construit dans Île centre de la cale contient un mètre d’eau seulement, c’est-à-dire que sa cloison supérieure est à cette dis- tance de la carlingue. Dans la partie vide de la cale — 166 — comprise entre le pont et le vivier, on a établi une glacière disposée comme dans les bateaux dont je viens de parler, avec cette différence qu'elle com- munique avec le pont par deux panneaux situés, lun à l’avant, l’autre à l'arrière du puits. Cette gla- cière, dont la hauteur est de 5 à 6 pieds, est tantôt de même longueur que le vivier ettantôt plus longue, selon les idées de l’armateur. Elle est également divisée en compartiments indépendants les uns des autres, et le calfatage de la cloison supérieure du vivier et des parois du puits, doit être fait avec le plus grand soia, afin de prévenir les infiltrations. Bateaux n'employant la Glace qu’exceptionnellement. Le 3 juin 1852 j'ai visité, sur la rade de New- York, un schooner de 70 tonneaux de jauge, faisant dans la saison la pêche du maquereau, soit pour le saler, soit pour le vendre frais au marché; il se li- vrait alors à cette dernière opération, et était emmé- nagé d’une façon particulière qui mérite d’être rap- porlée. — 167 — Le croquis n° 3 représente une coupe horizontale de schooner au-dessous du pont, les lignes ponc- tuées indiquant la position des écoutilles. À B C D est la cale, les parties en dehors, à l’avant et à l’ar- rière, servent à loger le capitaine et l’équipage.— Les cloisons À B, OR, P N et C D, la divisent en quatre compartiments, toutefois, les trois dernières vont seules depuis la plate-forme établie sur lest, jusqu’à toucher le pont, la cloison À B n'étant pas assez élevée pour empêcher de communiquer avec le logement des matelots. Les deux compartiments ORPNe PNCD, complètement isolés l’un de l’autre, communiquent avec le pont par l’écoutille percée sur l'arrière du grand mât, et par la moitié de celle de l'avant (M), la cloison O R montant jus- qu’au niveau de la partie supérieure de l'iloire. Ainsi que dans les bâtiments dont j'ai parlé pré- cédemment, ces écoutilles sont à double ferme- ture. Dix caisses numérotées de 4 à 10 sur le dessin, sont placées dans la cale, deux sur lPavant de la cloison O R, et les autres en abord dans les compar- timents isolés qui remplissent l'office de glacière. Les premières, étant plus exposées à laction de Pair extérieur, sont à doubles parois d’un pouce d'épais- seur chacune, séparées par un pouce d'intervalle. Ces différentes installations n’ont d’ailleurs rien de — 168 — permanent et, lorsque le bateau fait Ia pêche pour saler le maquereau, les cloisons sont démontées et les caisses mises à terre, afin que l’on puisse loger les barils et la provision de sel. À mesure que l’on prend des poissons, on les ar- rime dans une caisse avec de la glace, et dès que les couches atteignent un pied d’épaisseur, on place par dessus un châssis de bois reposant sur des ta- quets, afin que les poisssns ne soient point écrasés par le poids des couches supérieures. — On continue l’arrimage jusqu’à ce que la caisse soit pleine, en interposant de nouveaux châssis entre chaque cou- che d’un pied d'épaisseur, après quoi on met le couvercle, Sur lequel, par surcroît de précaution, on place un morceau de toile humide. Quand toutes les caisses sont remplies, on emmagasine le restant de la pêche dans l’espace vide qu’elles laissent entre elles. — Suivant leur grandeur ell:s peuvent con- tenir de 500 à 800 maquereaux. La quantité de glace embarquée à chaque voyage, est de 8 à 10 tonnes. Tels sont les procédés intelligents au moyen des- quels les pêcheurs américains font arriver sur les marchés, leurs produits en parfait élat de conserva- tion, quoique les ayant quelquefois à bord depuis — 169 — plus de dix jours. N’étant pas obligés de s’en défaire immédiatement en arrivant au port, ils en relirent un plus grand bénéfice, sont libres de les vendre au moment opportun, et, par suite, ne subissent point la loi des marchands. Le capitaine du dernier navire dont j'ai fait la description, envoyait tous les jours au marché ure certaine quantilé de maquereaux qui était vendue à son compte moyennant 5 0/0 sur le produit de la vente. Dans les bateaux faisant emploi de la glace, les panneaux ne sont ouverts que pendant le temps strictement nécessaire pour prendre les poissons dont on a besoin, et les pêcheurs ont les mains ga- ranties par des gants en forttissu de laine, afin de ne pas être incommodés par le froid et ne point alté- rer la fraicheur de la marchandise. Du reste, il faut bien le dire, pour conserver des poissons à bord et les transporter à de grandes dis- tances, il n’est nullement indispensable que les bâ- timents soient emménagés d’une façon spéciale. Beaucoup de petits bateaux emploient la glace sans être pourvus de glacières, et j’ai mème eu l’occasion de voir à New-York un brick de 200 tonneaux, ar- rivant de Rhode-Island avec un chargement de 50 à 60 tonnes de poisson frais, arrimé tout simplement dans la cale. De gros blocs de glace formaient le fond 10 — 170 — sur lequel reposaient les poissons cutassés pêle-mêle avec les morceaux de cette substance, dont on avait embarqué près de 100 tonnes à bord. Le jour où j'ai visité le bâtiment, on débarquait la cargaison à la pelle pour lenvoyer dans des tombereaux au marché le plus voisin, et d’après ce que m'a &it le capitaine, elle était en majeure partie destinée à la ville de Philadelphie. | Evidemment j'ai eu là sous les yeux un des se- crets de la vie à bon marché, car ce n’est qu’en faisant venir ainsi des masses de denrées des lieux de production, qu'il est possible de les livrer aux populations à des prix modérés, L'Amérique du Nord, pays productif par excel- lence. a poussé plus loin qu’auecun autre Part de conserver les denrées alimentaires ; aussi, bien que ce qui tient au luxe y soit fort cher, par contre, la nourriture animale s’y est-elle maintenue à un taux raisonnable. Les procédés de conservation produisent de si grands résultats , pour lapprovisionnement des villes, qu’on ne saurait trop s’appesantir sur celte question, ne serait-ce que pour inciler nos natio- naux à entrer dans une voie semblable. Mais il fau- drait auparavant que l’industrie de la glace sortit de l’ornière où elle est restée jusqu'ici en France. Tant que cette denrée ne pourra être livrée au pêcheur à sb — An — un prix minime, son emploi restera forcément limité. Je ne sais jusqu’à quel point il est possible d’éta- blir en France un commerce de glace analogue à celui des États-Unis, mais dans tous les cas, ne pourrait-on pas y suppléer par l’industrie étran- gère? La Norwége, on le sait, marchant sur les traces de l’Amérique, expédie depuis quelques années des cargaisons de glace, à diverses contrées de l'Europe, notamment en Angleterre (4). Un des plus riches négociants, M. Parr, que l’on nomme dans le pays le roi de la glace, possède aux environs de Christiania, un vasie établissement, d’où il en a expédié cette année-c1 30,000 tonnes à la Grande-Bretagne. En supposant donc que nos industriels ne puissent point se livrer sur une grande échelle à cette bran- che de commerce, nous pourrions certainement être approvisionnés à bon marché par les bâtiments Nor- (1) La ville du Havre possède deux glacières approvisionnées annuellement par des bâtiments norwégiens. Le propriétaire , M. Saillard, fournit la glace aux pâtissiers de la ville, aux cafés ainsi qu'aux bâtiments transatlantiques qui fréquentent le port. Le prix en gros est de 70 francs le tonneau, mais si la consomma- tion s’étendait davantage, nul doute que ce prix ne pût être consi- dérablement abaissé. Malgré les plus Jouables efforts, M. Saillard n’a pu parvenir encore à faire comprendre à la population le parti qu’elle pourrait tirer de l'emploi de cette substance, = — wégiens, si la consommation de la glace s’étendail davantage. Ne sommes-nous pas en définitive vis-a- vis de la Norwége dans une position bien meilleure que la Nouvelle-Orléans ne l’est vis-à-vis de Boston? Le jour où l’usage habituel de la glace sera adopté, la pêche côtière aura fait un grand pas! — 173 — CHAPITRE III RÉSERVES FLOTTANTES A POISSONS ET A CRUSTACÉS. Une autre innovation qui contribue également à alimentation publique, est la création dans les ports de réserves flotiantes pour conserver les poissons vivants apportés par les pêcheurs, — les réserves sont en quelque sorte le complément des bateaux- viviers. La partie de Fulton-Market à New-York, où s’ef- fectue la vente du poisson, est située sur Île bord de la rivière de l'Est et se trouve séparée du marché principal par la rue longeant les maisons des quais. — Cet établissement, plus que modeste, je dirai même fort mal teuu, fait néanmoins de grandes af-- faires. Bâti en partie sur pilotis, il est entouré, du côté de la mer, à hauteur des quais, d’une plate-forme faisant saillie de deux mètres, sur laquelle débuu- 10. 17 — chent les corridors des diverses boutiques de mar- chands. — Cette disposition a pour but de faciliter les communications des employés avec les réserves. Devant la plate-forme, sur une étendue de plu- sieurs centaines de mètres carrés, la mer est cou verte de coffres flottants, au nombre de plus de cent, amarrés les uns à côté des autres, de façon à former un plancher solide sur lequel on peut circuler. Ils sont ordinairement carrés, mesurent de 3 à 4 mètres de côté sur 1 mètre de profondeur, et. sont munis d'ouvertures suffisamment larges pour que l’eau puisse y circuler facilement, On y dépose, pour le compte des marchanis, les crustacés, les tortues de mer et les poissons apporiés journellement par les bateaux-viviers. Sur la partie supérieure des coffres, une trappe, fermant à cadenas afin d'empêcher les larcins, sert à introduire la marchandise ou à la retirer avec un filet à main, pour la transporter sur les tables de vente. Au mois d'avril 1862, j'ai vu dans ces réserves une quantité de morues que je ne saurais estimer à moins de 30 ou 40,000 mille. — On les prenait à chaque instant pour les porter sur les tables du marché ou pour les expédier toutes vivantes avec de Ja glace aux différentes villes de la contrée. — 5 à 600 de ces poissons, tenaient à l’aise dans les coffres, et les pêcheurs m'ont assuré qu’en leur donnant de PAUNTS — temps en temps de la cüair de clams, on pouvait les y conserver pendant plusieurs semaines (4). Il yaurait, je crois, le plus grand intérêt à adop- ter en France l’usage de ces réserves qui, concur- remment avec les bateaux-viviers et l'emploi de la glace, rendraient d'immenses services à nos pê- cheurs, en les affranchissant d’une foule de tribula- tions auxquelles ils sont exposés aujourd’hui. Je n’ai jamais assisté, au Havre, à la vente de poisson à la criée, sans être navré du peu de bénéfices que font ces braves gens, obligés, la plupart du temps, de donner à un prix modique des denrées qui, un instant après, portées à la halle, doublaient et tri- plaient de valeur entre les mains des revendeuses. Une des plaies de noire pêche côtière, c’est d’être dévorée par les parasites, et cela parce que les ma-— rins ne connaissant ou n’employant en général aucun moyen de conservation pour lenrs produits, sont obigés de s’en défaire quand même, dès qu'ils ren- (1) On vend à Londres beaucoup de morues vivantes apportées dans des bateaux viviers qui remontent la Tamise jusqu’au point où la salure des eaux permet encore de conserver ces poissons. Ce sont de véritables étangs voyageurs. Sur la côte occidentale d’Ecosse, quelques personnes élèvent et engraissent des morues dans des bassins d’eau salée, en les nourrissant avec de la chair de moule. Ne pourrait-on pas tenter un essai de ce genre sur nos côtes de la Manche, où l'on pêche, dans la saison, une assez grande quantité de ces poissons ? Her Le trent au port. — Que de pertes ne subissent-ils pas chaque année, pendant les grandes chaleurs, au grand détriment de la nourriture publique! En fin de compte, la plupart d’entre eux sont misérables, tandis que les pêcheurs américains sont comparali- vement dans l’aisance. - Les bateaux-viviers que la Marine Impériale vient d'accorder aux pêcheurs de La Rochelle, sur la de- mande de M. Coste, entraineront, sans doute, la création de réserves à poissons, soit qu’on les cons- iruise en maçonnerie , Ou qu’on se contente de celles dont il vient d’être question. Dans les localités situées en pleine côte, où les eaux sont pures et conservent une certaine hauteur à basse mer, le procédé américain sera plus que suf- fisant et les ports du Nord, depuis le Havre jusqu’à Dunkerque, s’en serviraient avec avantage. Du reste, les différentes espèces de poissons de mer ne suppor- tant pas également le régime des réserves, lexpé- périence seule apprendra quelles sont celles sur lesquelles il conviendra d'opérer. Dans tous les cas, la limpidité des eaux est tou- jours une garantie de succès, et en ce qui concerne les crustacés, il est en outre indispensable qu’elles soient suffisamment salées. À New-York, les mar- chands perdent parfois de grandes quantités de ho- mards, lorsque lHudson verse dans la baie une Nr masse d’eau douce plus considérable qu’à Pordi- paire. Réserves à Hoemards,. Les caisses flottantes, pour conserver les homards vivants, sont employées à Boston sur une plus grande échelle que partout ailleurs et donnent lieu à un commerce lucratif, combiné avec la préparation des crustacés bouillis. Du reste, ces réserves ne sont pas d'invention américaine et sont connues depuis longtemps en Europe, notamment en Angleterre. — En France, quelques-uns de nos marins de la côte de Bretagne en font usage habituellement, et les Napo- litains qui ex"'oitent dans la Méditerranée les pêche: ries du détrui, de Bonifacio, se servent, dans le même but, d'immenses paniers construits en roseaux, dans lesquels ils déposent les langoustes, en attendant le moment de les transporter à Naples. — Néanmoins, c’est encore à Boston que ce procédé de conservation est appliqué de la manière la plus intelligente et la plus profitable. Les homards américains,quant à l’aspect général, ont beaucoup de ressemblance avec ceux que nous possédons dans les mers de l'Europe; ils en diffe- rent, toutefois, par des caractères anatomiques assez tranchés, pour qu'on ne puisse point les confondre ET — ensemble, et parviennent à des dimensions plus con- sidérables. Il est assez commun d’en pêcher du poids de 12 à 15 livres, et l’on cite même des exemples d'animaux qui en pesaient près de trente (4). Ils sont répandus sur tout le littoral des États- Unis, depuis le golfe du Mexique jusqu'aux parties les plus septentrionales, mais à mesure qu’on $s’a- vance vers le Nord ils deviennent plus abondants. On en prend des quantités énormes autour des îles Rocheuses du Sound de Long-Island, dans les pa- rages du Nantuket, du Cap Cod, du Maine, de la Nouvelle-Écosse, et les rivages de Terre-Neuve en nourrissent également de grandes colonies. La pêche des homards, dans la baie du Massachu- setts, commence au printemps et se termine en au- tomne, époque à laquelle ils quittent la côte pour regagner les eaux profondes, où ils passent la saison rigoureuse. Elle se fait, comme en France, au moyen de nasses amorcées de débris de poisson, notam- ment de têtes de morues et de flétan (2). Les crusta- cés apportés à Boston dans les bateaux-viviers sont, (4) En 1840, le docteur Gould évaluait à 200,000 le nombre de homards pris dans les eaux du Massachusetts. (2) Ordinairement les pêcheurs de homards sont associés avec les armateurs qui leur fournissent les engins de pêche, et leur paient une certaine somme pour chaque crustacé. Un homme peut pren- dre pour envion 40 nasses. D dès en arrivant, livrés aux propriétaires des réserves, et déposés dans des caisses flottantes jusqu’au mo- ment de les mettre en consommation. — La plupart des établissements où l'on s'occupe de cette industrie se trouvent sur les chaussées de Cambridge et de Charlesiown quitraversent un bras de mer,dont les eaux, renouvelées à chaque marée, sont suffisam- ment limpides et salées pour que les crustacés puis- sent y vivre quelque temps, malgré la gêne qu’ils éprouvent dans les caisses. Ces dernières sont amar- rées autour des établissements, dont une partie est bâtie sur pilotis, tandis que l’autre forme façade sur la chaussée elle-même. — Elles peuvent contenir un millier de hbomards environ, mais autant que possible, on évite de trop entasser ces animaux afin de pouvoir les conserver plus longtemps. En temps ordinaire, ils n'y séjournent, d’ailleurs, que quel- ques semaines, par suite de la grande consommation qu'on en fait journellement, et du renouvellement continuel des approvisionnements. IL est d’usage, à Boston, de vendre les homards bouillis, et ce sunt les propriétaires des réserves qui s'occupent eux-mèmes de cette préparation. À cet effet, dans un coin de leur magasin, se trouvent une ou plusieurs chaudières demi-sphériques en fonte de fer, d’un mètre à un mètre vingt centimèlres de diamètre et de capacité à pouvoir cuire à la fois 60 à 80 crusla- — 180 — ces, suivant la taille ; elles sont montées sur des four- naux en tôle ou en maçonnerie et chauffées au moyen de charbon de terre. — Le travail de Ïa cuis- son, effectué en général dans la matinée, se calcule sur les besoins de la consommation, et aussitôt qu'il est terminé, la marchandise est expédiée aux diffé- rerits marchands de la ville, ainsi qau’aux clients des localités de l'intérieur. L’habitude d'acheter les ho- mards bouillis est si générale maintenant à Boston, qu'il est fort rare d'en voir de vivants sur le mar- ché. Les habitants trouvent à agir ainsi, non-seule- ment une économie de temps pour leur cuisine, mais encore l’avantage de manger des crustacés par- faitement cuits à l’eau de mer, ce qui ne serait pas toujours possible dans les ménages. Les marchands ont d’ailleurs lattention de ne jamais préparer des animaux morts ou dans un état maladif, et, disons- le, la facilité avec laquelle ils peuvent s’approvision- ner de cette denrée, ainsi que le bas prix auquel la vendent les pêcheurs, rendent inutile de recourir à une fraude coupable, qui aurait d'autre effet que de discréditer bientôt leur commerce. Pour ma part, je n’ai jamais entendu personne se plaindre de leur mauvaise foi. Les homards bouillis se vendent depuis cinq jus- qu’à huit cents la livre, suivant que la pêche a étéplus ou moins abondante. Au mois de juillet 1862, me — 181 — trouvant dans le Connecticut, j'ai vu annoncer, chez un marchand de seconde main, la vente d’un charge- ment de homards à raison seulement de deux dol- lars et demi le cent. C'était à ne pas y croire! Dans les boutiques des marchés, dans les restau- rants ou autres établissements de débit, on conserve, pendant l'été, les crustacés bouillis en les plaçant sur des b'ocs de glace, et, à l’aide encore de cette substance, on les expédie aux villes les plus éloi- gnées du continent, L’extrême abondance de ces animaux sur le litto- ral des États-Unis a suggéré l'idée, afin d’arriver à en tirer tout le parti possible, d’en faire des conser- ves et des marinades (pickles). MM. Underwood et Ce, de Boston, ont une usine dans l’île Pénobscot, sur les côtes du Maine, où 1ls font confectionner la première de ces préparations, sur une grande échelle. — Après que les homards ont été cuits dans de vastes chaudières, on les dépouille de leurs cara- paces, et on met la chair dans des boîtes de fer- blanc, que l’on ferme au bain-marie. Ces boîtes, pe- sant une livre, se vendent en gros au prix modique de 1 dollar 75 cents la douzaine. — Quant aux marinades, dont on s'occupe aussi dans cette usine, elles se vendent à raison de 2 dollars et demi la dou- zaine de flacons de la contenance d’un demi-litre. — Elles sont loin de valoir les conserves, le vinaigre ul — 182 — faisant disparaître presqu’entièrement le goût déli- cat des crustacés (1). On prépare, pour PAngleterre, de petites conser- ves où l’on ne met que les œufs et les parties cré- meuses servant à confectionner des sauces. Cette indusirie pourrait sans doute être pratiquée avec succès sur les côtes de Bretagne et de la Corse, où vivent de nombreuses tribus de homards et de langoustes. — Si l’on adoplait, dans ces localités, J’usage des bateaux-viviers el la méthode de prépa- rer les crustacés sur les lieux de pêche pour les en- voyer, de là, suries marchés des grandes villes de la France, il est probable qu'il y aurait à la fois de grands avantages pour les consommateurs et pour les commerçants : chacun y trouverait son compte. Les pêcheurs eux-mêmes pourraient s'organiser en vue de cette exploitation et ne seraient plus exposés à vendre leurs produits à vil prix ou à les perdre pendant les grandes chaleurs de l'été. Ils s’affran- chiraient ainsi de tous les intermédiaires. Et, en outre, il est évident que des homards convenable- ment cuits à l’eau de mer, par des pêcheurs honné- tes et intelligents, seront toujours préférés aux mé- mes produits préparés dans les ménages. (4) Les conserves de homards de messieurs Underwood, se trou- vea…t maintenant chez tous les marchands de comestibles du Havre, — 183 — La fabrication des conserves pourrait aussi être introduite à Saint-Pierre et Miquelon, où l’on ne tire aucun parti des masses de crustacés qui vien- pent visiter ces îles durant la belle saison. Il faut du reste le reconnaître, depuis quelques années, le commerce des crustacés, au moyen des bateaux-viviers, ainsi que leur Conservation dans des réservoirs, ont fait de grands progrès en Eu- rope, notamment en France et en Angleierre. On estime qu'il se vend annuellement sur le marché de Londres environ 2,500,000 grands crustacés, et ce chiffre, pour toute la Grande-Bretagne, n’est pas au-dessous de cinq millions. Il en vient une immense quantité des côtes de la Norwége, de l'Irlande et de la Corse, d'où on les transporte au moyen de bateaux-viviers, pour les li- vrer aux personnes qui s'occupent de les conserver, et celles-ci les déposentdans des réservoirs alimentés par l’eau de mer où on peut les garder une quarantaine de jours vivants, après avoir eu la précaution de leur cheviller les grosses pinces, pour qu'ils ne se tuent pas les uns les autres. Il exisie aux environs de Southampton, à Hamble, un de ces réservoirs, pouvani facilement contenir 50,000 homards, et le propriétaire possède trois grands bâtiments-viviers avec lesquels il peut en transporter jusqu’à 10,000 dans un seul voyage, = AR En France, tout le monde connait les remarqua- bles résultats d'élevage des crustacés, obtenus par le pilote Guillou, dans les réservoirs de Concar- neau, Où il a constamment des approvisionnements considérables. Enfin, dans le marais de Kermoor (côte de Brela_ gne) converti par M. de Cressoles, en de vastes réser- voirs pour la pisciculture maritime, on a déposé, en 1862, plus de 60,000 langoustes qui y viennent à merveille, grâce aux conditions favorables dans les- quelles elles sont placées. CHAPITRE IV PÊCHE DU MAQUEREAU A LA LIGNE SUR LE LITTORAL DE LA NOUVELLE-ANGLETERRE. Parmi les choses nouvelles que j'ai eu l’occasion d'étudier sur le littoral de la Nouvelle-Angleterre, il en est peu qui m'aient plus vivement intéressé, que la manière dont les pêcheurs prennent le ma- quereau à la ligne. Leurs procédés, entièrement différents des nôtres, constituent un progrès réel, dont on se rendra facilement compte, lorsqu'on saura que la pêche à ligne (chez nous l'exception) fournit en Amérique le principal moyen de s’appro- visionner de ce poisson, et bien que les filets flot- tants et les seines y soient également employés, ils sont loin néanmoins de fournir autant de produits à la consommation (1). Je ne sais jusqu'à quel point (1) Dans quelques baies de l'Amérique du Nord on prend les ma- quereaux avec d'immenses seines. Cette pêche se pratique princi- palement sur les rivages de la Nouvelle-Écosse, et dans une baie du cap Canso, il est arrivé de prendre 1800 barils de poissons d’un seul coup de filet. St — les méthodes dont je vais donner la description sont susceptibles d’être appliquées en France, mais elles m'ont paru si intelligentes et si profitables, que j'ai cru devoir les consigner dans cet ouvrage, ne serait-ce qu à titre de renseignement, sur ce qui se pratique aux États-Unis, Sur nos côtes de l'Océan et de la Manche, de même, à ce quil paraît, sur une partie du littoral de la Nouvelle-Écosse, où vivent de nombreuses fa- milles de marins d'origine française, on pêche le maquereau à la ligne traînante, les bateaux étant à la voile et sillant de l'avant avec plus ou moins de vitesse, suivant la force de la brise. Dans l'Amé- rique du Nord, cette pêche se fait sous petite voi- lure, de manière à faire très-peu de route, et de plus, au lieu d'employer des lignes traînantes gar- pies de plombs suffisamment lourds pour que les hameçons soient constamment immergés, les ma- rins pêchent le long du bord avec des lignes très- fines, dont l'hameçon est installé d’une façon par- ticulière qui sera indiquée plus loin. Toutefois, mal- oré ces différences notables avec notre manière de faire, ce n'est point en cela que consiste principale- ment le secret de la pêche américaine : il est tout entier dans l'emploi d'une espèce de rogue dont on se sert pour attirer le ncisson, le retenir auprès des navires, l’appâter, en un mot, et finalement le faire — 187 — mordre plus facilement à l'himeçon (4). Cette rogue, que je comparerai à celle qu’on emploie en Europe pour faire lever la sardine, donne des résultats si avantageux , que tous les pêcheurs américains en ont adopté l'usage, laissant de côté l’ancienne mé- thode de la pêche à la balle, considérée par eux comme beaucoup moins productive. Dans la mer Méditerranée, nos marins ont bien, il est vrai, une manière de prendre le maquereau, ayant une cer- taine analogie avec celle des États-Unis; mais, outre qu’elle est moins perfectionnée dans les détails, elle ne saurait aucunement lui être comparée comme résultat. Dans la pêche américaine, tout est calculé pour le but qu’on se propose, depuis la construc- tion des navires, leur marche rapide, leur supé- riorité d'armement, jusqu’à la manière dont les lignes et les hameçons sont installés et le soin avec lequel on confectionne l’appât, dans la composition duquel on ne fait entrer que les éléments reconnus par expérience, comme Îles plus favorables pour attirer le po'sson. En parlant du commerce des huîtres à Boston, (1) Cette nouvelle manière de prendre le maquereau, n’est prati- quée, dit-on, par les pêcheurs américains, que depuis une quaran- taine d'années environ. Dans l’origine on employait pour confec- tionner l’appât (bait), de vieilles salaisons de harengs et de maque- reaux, — 188 — j'ai dit que le Massachusetts était l'État de l'Union où l’industrie de la pêche maritime avait atteint le plus grand développement. Sans m’appesantir de nouveau sur cette question, j’ajouterai qu’en ce qui concerne la pêche du maquereau, cette prééminence est encore plus importante, la majeure partie des armements se faisant dans les ports qui avoisinent le cap Ann et le cap Cod, et notimment à Glouces- ter. En 1854, le nombre total des navires engagés dans celte industrie, était d'environ 1800, sur les- quels un quart au moins était armé dans la cir- conscription de Gloucester (1). Du reste, si je men- tionne ainsi cette localité de préférence à toute autre, c’est uniquement par la raison que la ma- jeure partie des renseignements que j'ai recueillis m'ont été fournis par M. Elwell, capitaine d’un schooner de pêche apparienant au cap Ann, L’im- portance de Gloucester, qui tend d’ailleurs à s’ac- croître tous les jours, tient à plusieurs causes. Par (1) En 1858, la statistique de la pêche à Gloucester donnait les chiffres suivants : Nombre desschoonersemployés dansla pêche. 325 FURRARC PÉREÉTALS Le Fe npem es mene ee vs 24,000 tonnes. Barils de maquereaux pêchés............. . 608,000 — Valeur des barils. . RUE ve. 560,000 dollars. Capitaux engagés dans des Averses pêches.. 1,200,000 — Marins employés. . p" PPT > 3,200 En 1861, les RÉ tES # RARE prirent 100 barils de ma- quereaux et vendirent pour 120,000 dollars de flétan. Là 489 … sa position au centre des parages les plus poisson- peux de la Nouvelle-Angleterre, par son port vaste et sûr, cette localité se trouve véritablement dans des conditions exceptionnelles, et si l’on ajoute à cela l'intelligence et la hard'esse proverbiale de ses marins, le soin apporté à la construction et à lar- mement des navires, Ja précaution qu'ont les arma- teurs , de n’embarquer à bord que des denrées de premier choix pour l'équipage, etc., on ne sera point étonné de l'entrainement de la population maritime vers l’irdustrie de la pêche en général. Les maquereaux se wontrent sur les côtes d’A- mérique au commencement du printemps(1). Leurs premières légivns apparaissent dans le Sud, par la latitude de l’emboucbure de la Chesapeake; mais ils sont alors si maigres, qu'ils ne valent guère la peine d'être pêchés, et ce n’est qu’à mesure qu'ils s'avan- cent vers le Nord qu'ils acquièrent un embonpoint convenable. Extrêmement capricieux dars leurs migrations, on les voit, Sans raisons apparentes, disparaître pendant plusieurs années, de parages où ils étaient jusque-là fort abondants, tandis qu’on les retrouve sur d’autres points qu’ils n'avaient pas l’habitude de fréquenter. Ces anomalies, difficiles à (1) Les migrations des maquereaux se font en sens contraire de celles des harengs qui s’effectuent du Nord en allant vers le Sud. 11. — 190 — expliquer, tiennent sans doute à une question de nourriture, et peut-être aussi à la présence inac- coutumée d’un grand nombre d'espèces de poissons faisant une chasse active aux maquereaux. Les parages les plus avantageux dans la baie de Massachusetts sont Jeffrey's-bank, Cash’s-ledge, Jeffrey’s-ledge et certains points du banc de Saint- Georges. Chacun de ces endroits est fréquenté, à l’époque de la pêche, par des centaines de bâti- ments (1). Pendant la mauvaise saison, les maquereaux dis- paraissent, pour prendre leurs quartiers d'hiver, dans des parties inconnues de la mer, et malgré que l'on ait essayé, à diverses reprises, de les suivre dans leurs voyages de retour, on a constamment perdu Îles traces des dernières bandes dans un rayon de cinquante milles au sud de lîle Nantucket. Di- verses Opinions ont été émises pour rendre compte de ce fait, mais aucune ne paraît satisfaisante. Certains pêcheurs prétendent que les poissons, après avoir quitté les côtes, descendent au fond de la mer, (1) Une partie de l’immense flottille de bateaux pêcheurs, armés par les différents ports de la Nouvelle-Angletcrre, pousse ses croi- sières à la recherche des maquereaux, jusqu'à la baie de Chaleur et l’île du Prince-Edwards, dans les provinces anglaises, en traversant le détroit de Canso. L'autre partie, composée de navires de moindre tonnage, exploite plus particulièrement la baie tu Massachnsetts, depuis le cäp Cod jusqu’à la baie de Fundy. — 191 — où ils restent dans un état de torpeur jusqu’au retour de la belle saison; d’autres disent qu’ils émi- ogrent vers les latitudes chaudes, où ils se tiennent à une grande distance de la surface de l’eau, afin d’avoir une température convenable à leur nature; d’autres enfin, plus crédules, assurent, tant il est vrai que le merveilleux doit avoir sa part en toutes . choses, que les maquereaux, après avoir abandonné les rivages de l'Atlantique, se transforment en bo- nites, dorades et autres poissons voyageurs qui silonnent les mers tropicales. Ce qu'il y à de bien prouvé, c’est que ceux qui quillent les rivages amé- ricains au commencement de l’hiver, sont de taille modérée et très-gras, tandis que ceux qui retour- nent au printemps sont de grande taille, maigres el trés-affamés. La pêche du maquereau commence en juin, finit généralement vers la fin d'octobre, et durant celte période. les pêcheurs prennent le poisson tantôt pour lapporter frais sur les marchés du littoral, tantôt pour le saier : quelques-uns d’entr'eux font, pendant-toute la saison , la première de ces opera- tions; mais plus habituellement dans les deux der- niers mois on S’occupe de la seconde. Au commen- cement du printemps, lorsque les bandes de maquereaux font leur apparition daus le Sud, on voit des bâtiments aller à leur rencontre jusque — 192 — par la latitude du cap May, et quelquefois plus loin encore; mais la pêche est alors peu fructueuse, les poissons n’ayant aucune des qualités qui les font rechercher deux mois plus tard. L'automne est la saison où leur chair parvient à son maximum de saveur et d’embonpoint, et le seul avantage de ces expéditions prématurées est de s'assurer ainsi de bons équipages pour le moment opportun, Ce qui ne serait pas toujours facile, lorsque la majeure partie de la floitille entre en armement. Les navires servant à la pêche jaugent depuis 40 jusqu’à 120 tonneaux, et sont, presque Sans excep- tion, mâtés en schooners. Armés de 8 à 12 hommes d'équipage en y comprenant le cuisinier, solidement construits afin de pouvoir résister à la grosse mer qui règne sur les côtes de l'Atlantique, ils sont re- marquables par leur bonne tenue, et nulle part, pas même en Angleterre, je n’ai vu des bâtiments aussi soignés ; leurs excellentes qualités de marche cons- tituent une des principales conditions du succès de la pêche, car les parages fréquentés par les maque- reaux comprennent une si vaste étendue de mer, que les pêcheurs ont de longs trajets à faire dans leurs croisières à la recherche des poissons. Aussi, tout navire qui n’est point doué d’une marche suffisante , risque-t-il de faire de mauvaises opé- ralions. — 193 — Les schooners jaugeant de 90 à 100 tonneaux coûtent communément depuis 3,600 jusqu’à 5,000 dollars. Pendant les premiers mois de l'année, les pé- cheurs de Gloucester font la grande pêche de la morue et du flétan. Vers le mois de janvier, ils arment pour le banc de Terre-Neuve, le bane de l’île de Sable, et même pour les pêcheries plus rap- prochées du banc de Saint-Georges, suivant que leur intention est de pêcher pour saler ou pour rap- porter le poisson conservé dans la glace ou dans les viviers. En général, vers le mois de juin, ils sont de retour à Gloucester, afin de réparer les navires, prendre les rechanges et se préparer à la pêche du maquereau, considérée par les marins comme un temps de plaisir et de repos, comparativement aux faugues de tout genre qu'ils ont eues à supporter sur les pêcheries des banes. L’appât pour attirer le maquereau se compose de poissous et de clams salés, Différents poissons ser- vent à cet usage, parmi lesquels le plus communé- ment employé est une espèce de clupée (clupea tyrannus) tellement abondante sur les côtes de ja Nouvelle-Angleterre, principalement à l'embouchure du Connecticut-river, que les fermiers s’en servent pour engraisser les terres où l'en cultive le mais et pour faire d'excellents composts, — 194 — On triture les clams et les poissons avant de s’en servir, et on les mélange dans la proportion de 4/4 des premiers sur 3/4 des seconds, mais cette prépa- ration ne s’effectue qu’à bord. Avant de saler les poissons, on leur coupe la tête et la queue, et après les avoir fendus en deux, on leur enlève l’épine dorsale. Quant aux clams, ils sont mis en saumure tels qu’ils sont au sortir de lé- caille. Ces deux espèces de salaisons sont préparées à part dans des barils séparés, par les pêcheurs eux-mêmes ou par des industriels qui s'occupent de ce commerce, et les prix ordinaires à Gloucester sont de 2 dollars le baril de poissons salés, et de 4 dollars le baril de clams. Ces chiffres, qui n'ont rien d’absolu, subissent de légères variations, sui- vant que la matière première est plus ou moins abondante (4). l En partant pour la pêche du maquereau destiné à la saumure, les schooners emportent de 20 à 25 barils d’appäts, sur lesquels 6 à 8 bariis seulement de clams , quaulités qui suffisent pour prendre (1) Suivant les lois du Massachusets, les barils d’appâts de clams doivent contenir 230 livres américaines de mollusques salés, et les contrats de vente sont établis sur cette donnée ; en cas de contesta- tion entre un acheteur et un marchard, ce dernier peut, s’il le juge convenable, provoquer une expertise, à condition d'en payer les frais, si la marchandise est reconnue conforme au réglement. — 195 — 300 barils de poisson, chargement ordinaire des grands bateaux. Pour la pêche du maquereau frais, on en embarque une moindre provision, attendu que, revenant souvent au port, on peut la renou- veler facilement, et, par suite, l’avoir en meilleur état. La confection de la rogue se fait à bord des na- vires, au moyen de deux instruments qui permet- tent de réduire, en peu de temps, les poissons et les clams au degré de ténuité voulu pour la pêche. Le premier de ces instruments , que J'appellerai un hache-poissons, se compose d’un cylindre en bois d’un demi-pied de longueur sur six pouces de dia- mètre, armé à la surface de six rangées de dents, disposées en lignes hélyçoidales. Ces dents, taillées en langue de carpe, ont 3/4 de pouce de longueur, 1/2 pouce de large, et sont munies d’une petite queue pour pouvoir les fixer dans le bois. Le cylin- dre, monté sur un axe, tourne au inoyen d'une ma- nivelle manœuvrée à la main dans une caisse rec- tangulaire, dont les faces, parallèles à l'axe, portent aussi une rangée de dents se croisant avec les pre- mières dans le mouvement de rotation. Cet appareil est fixé à babord sur le pont, contre la muraille et par le travers du grand mât. Pour briser Îles pois- sons, On en place une éertaine quantité dans la partie supérieure de la caisse, on tourne rapidement — 196 — le cylindre, et on reçoit les débris par une ouver- ture ménagée dans le bas de la machine. Le second instrument, destiné à triturer les clams, est formé d’un anneau circulaire en acier ou en fer bien trempé, de 8 pouces de diamètre, À pouce 1/2 de hauteur et 2 lignes d'épaisseur, tranchant à la par- tie inférieure et emmanchée sur une tige de fer de 1 metre de longueur environ. Il se manœuvre à la main, en frappant verticalement dans une masse de clams contenue dans un seau ou une petite baulle. Lorsqu'on pêche pour le maquereau frais, cet instrument sert encore à broyer la glace à bord des bâtiments pourvus de glacières. Confectionnée au fur et à mesure des besoins, la rogue est d'autant plus efficace qu’elle se trouve d’une nature plus grasse, Ce qui dépend uniquement de la bonne qua- lité du poisson. Lorsque les pêcheurs, rendus dans les parages convenables , se trouvent au milieu d’un banc de maquereaux, ils disposent les voiles de leurs na- vires de manière à faire le moins de route possible. Toutefois, comme ils naviguent assez souvent en grand nombre dansle même endroit, et qu’il pourrait arriver de nombreuses avaries si l'on pêchait in- distinctement sous toutes les allures, ils ont adopté, d’un commun accord, l’usage de pêcher tribord amures au plus près, afin que toute la flotülle dé- — 197 - rive du même bord. Il en résulte que, sur le pont des bâtiments, tous les engins sont disposés à tri- bord, la pêche ne pouvant d’ailleurs se faire com- modément qu’au vent (1). Voici, du reste, comment sont disposées les goëlettes de Gloucester que j'ai visitées à New-York et à New -London. A partir du dernier hauban de misaine sur l'arrière, le plat-bord est divisé en au- tant de parties qu’il y a de marins à bord, chacun d’eux occupant un espace de trois pieds environ. A l’intérieur des pavois , vis-à-vis de chaque emplace- ment, sont accrochées 6 à 7 lignes par individu, ainsi qu’un couteau commun pour couper la boîte qu’on met sur les hameçons, et ouvrir les maque- reaux lorsqu'on fait la salaison. En outre, devant chaque homme un morceau de bois blanc de 15 pouces de longueur, cloué sur le plat-bord, sert à faire ce travail sans abimer le navire. (4) Les capitaines des schooners sont munis d’excellentes longues- vues au moyen desquelles ils reconnaissent, à 2 ou 3 milles de dis- tance, si un de leurs confrères a commencé la pêche. Ils se dirigent aussitôt vers lui, et il n’est point rare de voir en quelques heures affluer au mème endroit une foule de navires disséminés aupara- vent sur tous les points de l’horizon. Il s’établit entre eux dans ces occasions des luttes de vitesse qui coustituent l’un des spectacles les plus intéressants de l’industrie en question, et montrent d’ail- leurs les grands avantages des bons voiliers. Rendus les premiers au milieu des bandes de poissons, ils ont déjà fait une capture im- portante quand leurs concurrents attardés parviennent à les re- joindre. — 198 — Les lignes faites avec du chanvre ou du coton, mais plus communément avec cette dernière ma- tière, sont tantôt blanches, tantôt teintes en bleu, suivant les idées des pêcheurs. Parfaitement confec- tionnées , très-solides, malgre leur finesse, et d’une longueur de 6 à 7 brasses au maximum, elles ont environ un millimètre 4/2 de diamètre. Les hame- çons ont la queue prise dans une petite masse de plomb mélangé d'étain, en forme de poire allongée, dont on aura une idée exacte par les figures 1, 2 et 3. Il en existe de plusieurs modèles différant entre eux par la grandeur des hameçons ou le poids de la masse de plomb, mais toujours cons- truits dans les données que je viens d'indiquer, et les pêcheurs les installent eux-mêmes au moyen d'un moule qui permet de couler le plomb attaché à la queue d’une facon régulière. On se sert ensuite de limes, de ràpes et de papier sablé, pour unir les petites masses de métal de manière à les rendre aussi brillantes que possible, lexpérience ayant démontré que les maquereaux sont ainsi bien mieux attirés. On remarquera d'ailleurs que là forme gé- nérale des hameçons, garnis de leur poids, se rap- proche assez bien de celle d’un petit poisson, ce qui contribue encore à induire les maquereaux en erreur. Le n° 3 est employé dans les temps calmes ou — 199 — lorsque la brise souffle faiblement, tandis que les deux autres modèles servent lorsque lé navire fait plus de route ou dérive davantage, Pendant la pêche, les marins, échelonnés depuis les haubans de misaine jusqu’à l'arrière, tiennent une ou plusieurs lignes à la main, selon que le pois- son est plus ou moins vorace; mais, en général, ils n’en manœuvrent que deux à la fois. Les hameçons sont amorcés, soit avec de la chair de maquereau, soit avec un morceau de couenne de porc salé, si l’on commence la pêche sans avoir du poisson à bord, et quelques pêcheurs se servent habituellement de cette dernière boîte, qui, tenant — 200 — très-bien à l’hamecon, n’a pas besoin d’être aussi souvent renouvelée. Lorsqu'on emploie du maque- reau, on coupe, sur la partie blanche du ventre, des petites tranches, dont on forme des parcelles de 2 centimètres de longueur, qu’on enfile sur lha- meçon , au nombre de 3 ou 4; on racle ensuite avec la lame du couteau une partie de la chair, de façon à ce qu’il en reste très-peu attenante à la peau. D’autres fois on se contente d’enlever, sur le corps des poissons, de petites bandes de peau dont on garnit également les hameçons, et, dans tous les cas, si la boîte a été faite avec soin, elle peut servir pen- dant plusieurs heures sans qu'il soit nécessaire de la renouveler. Durant leurs croisières, dans les parages fréquen- tés par les maquereaux, les pêcheurs jettent de temps en temps de la rogue à la mer pour en faire lever quelque bande, et, s'ils réussissent, ils dimi- nuent immédiatement la vitesse du navire en dispo- sant les voiles d’une façon convenable. Chacun se rend aussitôt à son poste, les lignes amorcées sont jetées à la mer, et le marin chargé d’attirer le pois- son se place sur le beaupré, lançant de temps à autre de l’appàt à l’eau au moyen d’une grande cuiller; mais, pour ne pas perdre inutilement une denrée coûteuse, il a soin de n’en dépenser que ce qui est nécessaire pour qu’on en aperçoive constam- — 201 — ment des parcelles autour du navire. Dès qu’un maquereau est pris, le pêcheur le hâle vivement à la surface de Peau, se penche en dehors du bord, saisit la ligne à deux pieds environ de l'hamecçon, : et, par un mouvement rapide du bras, lance le poisson dans un baril placé sur le pont à sa droile. Si cette manœuvre est faite avec dextérité, l’ha- meçon, brisant la bouche du maquereau, se décro- che par la secousse et est rejefté à la mer par le mouvement de retour du bras. Les pêcheurs amé- ricains acquièrent, dans cet exercice, un degré sur- prenant d’adresse, ce dont j'ai pu me convaincre à plusieurs reprises à bord de la goëlette du capitaine Elwell, où l’on a bien voulu me montrer tous les détails de cette intéressante industrie. Pendant tout le temps que les maquereaux mor- dent, on a soin de les appâter, afin de les retenir autour du bâtiment. La quantité de rogue consom- mée pour en prendre un millier, par exemple, est très-variable, et dépend à la fois du temps de l’é- poque où se fait la pêche, et plus encore des dis- positions momentanées des poissons. — Tous les jours ne sont pas également favorables, et le gros temps ainsi que les brouillards sont particulière- ment des causes majeures d'insuccès, auxquelles il faut ajouter l'incertitude des migrations des ma- — 902 — quereaux. On passe quelquefois deux ou trois se- maines sans faire la moindre capture, bien qu'il y ait des poissons en vue, tandis que dans d’autres circonstances c’est à peine si l’on a le temps de hâler les lignes, tant ces animaux sont affamés (4). En 1537, au large du cap Cod, un schooner prit en deux heures 30 barils de maquereaux, et dans le même temps, 200 smacks qui se trouvaient dans ces parages, firent une pêche également abondante. Le capitaine Elwell m'a personnellement assuré qu’il lui était arrivé d'en prendre 80 barils dans une journée, mais ce sont là des cas tout à fait excep- tionnels, et le chiffre de 15 à 20 barils doit être con- sidéré comme très-satisfaisant. Une remarque faite depuis longtemps, qui expli- que pourquoi les pêcheurs américains opt Fhabi- tude de se réunir en flottilles nombreuses pour al- ler à la recherche des maquereaux, c’est que lors- qu'un certain nombre de bâtiments se trouve dans des parages poissonneux, chacun d’eux en particu- lier fait une meilleure pêche que s’il s’y était trouvé seul. Ce fait s'explique par la grande quantité de rogue que dépense une flottille, ce qui naturellement (1) Pendant la pèche, il faut éviter autant que possible de faire du bruit, le silence étant toujours une grande condition de succès : un baril tombant sur le pont avec fracas sufit souvent pour faire enfuir le poisson. + 0 — doit beaucoup mieux relenir les bandes de poissons que la faible quantité d’appât que jetterait un navire isolé. Dans les moments où les poissons, tout en restant autour du navire, ne veulent cependant pas mordre à l’hameçon, on emploie, pour s’en emparer, divers instruments fort ingénieux, qui, Je pense, n’existent qu'aux États-Unis. L'un d’eux est formé d’un double hameçon à pointes opposées, dont les branches ont 4 pouce d'ouverture avec une queue de 6 pouces de lon- gueur, Attaché à une petite ligne de quelques brasses de longueur, cet hameçon est lancé à la mer, au milieu des maquereaux, et c’est en le hà- lant vivement à plusieurs reprises, qu’on finit par en accrocher quelques-uns. L'autre instrument, dont l’emploi est regardé comme pernicieux par beaucoup de marins, consiste en une petite tige de fer, longue de 3 pieds, terminée par un double croc très-acéré, représentant assez bien un fer de gaffe ayant deux branches dans le même plan; la tige est en outre emmanchée dans une légère perche de bois de sapin ayant 4 à 5 pieds de longueur. On se sert de cet instrument en le lan- çant au milieu des poissons et en le retirant vive- ment jusqu’à ce qu'on ait fait une capture, mais il n'y à que les hommes adroits qui puissent s’en ser- — 20% — vir avec avantage. La pêche au croc se fait concur- remment avec celle à la ligne, et n’est confiée qu’aux marins les plus habiles. Nommée par les Américains Gaffing-Makerel, elle donne parfois d'assez bons résultats, mais comme on lui reproche de contribuer à effaroucker le poisson, beaucoup de capitaines en condampnent l’usage. On se sert aussi, dans le même but, de lignes garnies d’hameçons sans plombs et sans boîtes, que l’on jette à la mer, où ils s'enfoncent très-peu; les maquereaux, allant et venant autour du navire, se prennent d’eux-mêrues, tantôt par une partie du corps, tantôt par une autre. Lorsqu'on doit saler la pêche, cette opération se fait dans les moments où le poisson cesse de mordre, afin de ne pas perdre le fruit d’une boune occasion; néanmoins on hâte ce travail autant que possible, car la bonne qualité des produits en dépend. Les pêcheurs se distribuent les rôles : les uns fendent le poisson, d’autres lhabillent, c'est-à-dire enulèvent les entrailles et les ouïes; d’autres, enfin, le passent au sel ou le renferment dans les barils. Les Améri- cains fendent les maquereaux par le dos, en faisant glisser une lame de couteau très-mince, depuis la tête Jusqu'à la queue, à toucher l’épine dorsale, de manière à diviser proprement les chairs, sans enta- mer la peau du ventre qui doit rester intacte. Pré- paré de cette façon, le poisson prend mieux le sel, ee peut être débarrassé facilement du sang et des im- puretés intérieures qui en altéreraient la saveur, et les acheteurs peuvent d’ailleurs bien mieux juger de la qualité Ge la marchandise. Dès que les maque- reaux ont été habillés, on les met à tremper pendant une heure dans l’eau de mer pour qu'ils jettent le sang, après quoi on les sale, et on les embarille im- médiatement (1). Avec des équipages aussi nom- breux que ceux des eschooners, ces différentes opé- rations se font avec une grande rapidité, d'autant qu'il existe entre les marins une grande émulation, et c’est à qui aura le plus vite accompli sa tâche. Si le temps est chaud, on sale le plus vivement possible, afin que le poisson ne perde point de sa fraîcheur et de sa fermeté. Les pêcheurs américains, pour faire valoir leurs produits, pratiquent tous une petite fraude consistant à passer sur les parties charnues de l’intérieur des maquereaux une espèce de couteau de plomb qui, refoulant les chairs sans les diviser, leur donne une apparence plus belle et plus grasse. Il en résulte qu’on fait ainsi passer du poisson de deuxième qualité pour du poisson de première. (1) L’approvisionnement du sel est calculé à raison d’un baril pour trois barils de maquereaux salés; si le poisson doit être conservé pius d'un mois à bord, on augmente un peu cette quan- tité, 12 "206 — A titre de curiosité, j'ai remis ua modèle de ce cou- teau au ministère de la marine. Les marins des schooners reçoivent comme sa- laire la moitié des poissons qu’ils prennent, déduc- tion faite de la dépense de lPappât, des gages du cuisinier, ainsi que des frais d'inspection des barils en arrivant au port (4). Les armateurs fournissent les provisions, le sel, les hameçons, les lignes, le plomb, l’étain, et se ré- servent le plus souvent le droit de vendre la pêche au plus fort enchérisseur avant le relour du bâti- ment; toutefois, les pêcheurs sont libres de disposer de leur part comme ils entendent; mais la plupart préfèrent que l’armateur s'occupe de la vendre, et leur en remelle Île prix en argent. Les maquereaux salés sont achetés par des négo- ciants de New-York et de Boston, qui font souvent leurs offres aux armateurs plusieurs jours avant le retour des navires, s'engageant à prendre la totalité de la pêche à raison d’un certain prix pour chaque qualité de produits (2). (1) Les 4/5 des équipages sont des Américains ou des marins de la Nouvelle-Ecosse; le reste est composé d’Anglais, d’Irlandais, d’Ecossais et d’Allemands. (2) Les poissons inspectés vont ensuite sur les marchés de Phila- delphie, New-York, Baltimore, New-Orléans, etc., et les qualités inférieures sont plus particulièrement expédiées aux Antilles, — 907 — J'ai dit précédemment que les pêcheurs d’origine française, vivant sur le littoral de la Nouvelle- Écosse, pêchaient à la ligne trainante, et que les Américains les considéraient comme fort arriérés, et ne pouvant retirer de leur profession que des béné- fices comparativement restreints. N'ayant fait au- cune expérience sur laquelle je puisse m’appuyer pour trancher cette question, je ne saurais exprimer une opinion bien arrêtée. Toutefois, en raison du développement de la pêche américaine, des richesses qu’elle procure aux pêcheurs, du soin apporté aux moindres détails de l'armement des navires, etc., il est probable que leur méthode de pêche à la ligne, supérieure à celle que nous pratiquons, remplacerait même avecavantage la pêche aux filets flottants. Ce qu’il y à de certain, c’est que les pêcheurs de Gloucester, de Province- Town, Barnstable, Newbu- ryport, etc., vivent convenablement de leur industrie, el que les propriétaires des navires font également d'excellentes affaires. Depuis une dizaine d'années, les armateurs de Gioucester se sont, pour la plupart, constitués en société de secours mutuels, et, par suite, affranchis du tribut onéreux qu’ils payäient aux compagnies d'assurances. Ils calculent qu'ils ont ainsi réalisé une économie de 50 pour 100 sur leurs anciens déboursés. En résumé, les pêcheurs américains ne font que — 208 — mettre en pratique, pour prendre le maquereau à la ligne, ce qui se fait chez nous pour différentes espè- ces de poissons fluviatiles ou marins, demandant absolument à être appâtés. Leurs procédés reposent donc sur des bases rationnelles qui doivent les faire prendre en considération, et il est au moins utile de les faire connaître, puisqu'ils peuvent ouvrir une nouvelle voie à l'intelligence de nos marins. A mon retour d'Amérique, j'ai remis au bureau des pêches une collection de lignes et d'hameçons achetée dans le Massachusetts, ainsi qu'un moule pour couler le plomb des hameçons, et différents autres objets se rapportant à cette industrie. Les éléments avec lesquels se fabrique la rogue ne sont pas tellement indispensables, d’ailleurs, qu'on ne puisse y suppléer chez nous avec diverses espèces de poissons et de mollusques indigènes. La rogue de la sardine serait probablement excellente, et dans tous les cas le hareng de qualité inférieure pourrait être employé à cet usage, ainsi que beaucoup d’autres poissons huileux, et les moules, si abondantes sur le littoral de Océan, pourraient peut-être remplacer les mya arenaria (1). (1) Pour remplacer les clams, les pêcheurs américains se servent quelquefois de morue fraiche, bouillie et broyée qu’ils mélangent avec le poisson salé. Ils emploient aussi du riz cuit, et l’un d’eux m’a assuré qu’il y a des moments où, en jetant aux maquereaux — 209 — A différentes reprises, le capitaine Elwell m'a dit que si le gouvernement français désirait faire sur nos côtes, un essai de la méthode américaine, il serait heureux de se mettre à sa disposition, et qu'il vien- drait passer quelques mois en France pour en mon- trer les différents détails. Il se munirait des engins nécessaires, montrerait comment les pêcheurs du Massachusetts salent à bord pour conserver au poisson toutes ses qualités, et donnerait enfin à la marine d'uules renseigne- ments sur les bateaux-glacières et sur la façon de les conduire pour arriver à rer tout le parti possible de la glace. Comme complément des renseignements que je viens de donner sur la pêche américaine du maque- reau, j’ajouterai qu’en arrivant au port les pêcheurs et les armateurs des schooners sont tenus de faire inspecter la pêche par des fonctionnaires spéciaux institués à cet effet. Dans le Massachusetts, l'isspec- teur-général du poisson, nommé par l’État, dépose un cautionnement de 10,000 dollars et ne doit avoir, directement ni indirectement, aucun intérêt dans le quelques poignées de sel, on en obtient un excellent résultat. Il pa- rait que ces poissons, incommodés par le sel qu’ils avalent, descen- dent au fond de !a mer pour y dégorger leur nourriture, et remon- tent immédiatement très-affamés, i2. — 210 — commerce et la préparation des poissons salés ou fumés. Pour faciliter ses opérations, il nomme, dans chaque port où la chose est nécessaire. un inspecteur-adjoint relevant de son autorité; mais comme il reste pécuniairement responsable des actes de cet agent, il peut exiger de lui, en garantie, un cautionnement suffisant. L'inspecteur-général et les inspecteurs-adjoints ont pour mission de veiller à la bonne préparation du poisson, à la solidité et à la confection des fûts et caisses d'emballage, ainsi qu’à leur capacité régle- mentaire. Lorsque leur inspection est terminée, 1ls doivent faire marquer sur le haut de chaque fût, en lettres bien lisibles, le nom du poisson emballé, la qualité suivant un numéro d'ordre, l’année de la préparation et le nom abrégé : (MASS.) de l’État de Massachusetts, En outre, ils doivent, en témoignage de l’accomplissement de leur travail, faire inscrire sur les fûts la première lettre de leur nom de bap- tême et leur nom de famille en entier. D’après les règlements, les maquereaux salés sont divisés en quatre qualités, suivant leur taille, leur état sain et la manière plus ou moins parfaite dont ils ont été préparés. Le no 4 comprend les poissons ayant au moins treize pouces de longueur de l’ex- trémité de la tête à la queue, libres de taches ou . de meurtrissures quelconque, et ne présentant pas — A1 — la plus légère trace de rance ou de moisi, ce dont il est facile de s'assurer en les ouvrant en deux. Le n° 2 se compose de poissons ayant au moins onze pouces de taille et dans un état tout aussi parfait de conservation que les précédents; quant aux deux autres numéros, ils comprennent des pro- duits inférieurs, quoique cependant encore dans d'excellentes conditions pour servir à l'alimentation publique (4). On fabrique les fûts destinés à l'emballage avec du chêne blanc, du frêne, du chêne rouge, du sa pin, du pin ou des douvelles de chataïgnier; 1ls sont marqués du nom du fabricant, et, avant d’être mis en service, l'inspecteur de la localité les examire soigneusement et rejette ceux dont la confection est défectueuse, ou dont la capacité n’est point conforme aux règlements. On en emploie de diffé- rentes grandeurs, désignées par les dénominations suivantes : Le liercon contenant 300 livres de poisson salé. Le barilen contenant 200 — — Le 1/2 baril — 100 — — Le 4/4 — CREED Es Le 1/8 — = 5 ee se (1) Je ne crois pas commettre une erreur en affirmant la supério- rité des maquereaux saiés américains sur les nôtres, supériorité qui tient à Ja fois à la manière de les préparer, à l’usage de les fendre cn deux pour les saier, et aussi à la bonne organisation des inspec- La législation du Massachusetts se montre très- sévère contre les contraventions aux dispositions précédentes. Ainsi, d’après les règlements en vi- gueur : « Tout poisson mariné, salé ou fumé, n'ayant point été inspecté cé marqué, que l’on embarque sur un navire ou que l’on charge sur une voiture pour l’envoyer hors de l’État ou le vendre dans l’intérieur, peut être confisqué, et l’inspecteur-général a droit de le faire saisir par- tout où il se trouve. En outre, les capitaines ou autres personnes ayant mis le poisson à bord ou l'ayant chargé sur une voiture, sont passibles d’une amende de 40 dollars par chaque cent livres de poisson saisi. Enfin, quiconque transporte dans l’État, ou exporte au dehors du poisson gâté dans l'intention de le vendre, — à moins que ce ne soit dans un autre but que de le faire servir à la nourriture, — encourt la même amende de 40 dollars par chaque 100 livres de poisson. » Les frais d’inspection du poisson salé on fumé, sont fixés à : tions. Tout le monde sait d’ailleurs que le poisson pris à la ligne est incontestablement supérieur à celui qui provient des filets flot- tants. La longue agonie après laquelle il périt dans ces derniers engins, lui enlève une partie de ses qualités. — 213 — 44 cents, par tierçon inspecté 9 — par baril — 6 — par 1/2 baril — 3 — par chaque fût de plus petite dimension. L’inspecteur a droit en outre à un cents par fût, quelle que soit sa capacité au moment où il le fait définitivement fermer pour y apposer ses marques. Ces différentes indemnités sont acquittées par les pêcheurs, les propriétaires de bateaux ou les mar- chands réclamant les services de l'inspecteur, avec faculié par eux de se faire rembourser ces avances par ceux qui, plus tard, achèteront la marchandise. L’inspecteur-général est autorisé à prélever sur les salaires perçus par ses agents une taxe de 4 cents par tierçon, À cents par baril, et 4/4 de cents par chaque fêt de moindre dimension. Tous les ans, au mois de janvier, l’inspecteur- général est tenu d'établir un relevé exact du poisson salé et fumé, inspecté par lui et ses agents, en ayant suin de désigner les espèces, les quantités et les différentes qualités des produits sur lesquels on a opéré; ce document est transmis au secrétaire de. VÉtat du Massachusetts, qui le fait immédiatement insérer dans un des journaux officiels de la ville de Boston. : Ces relevés sont, du reste, très-intéressants à consuller, en ce qu'ils montrent les grandes fluc- — 214 — tuations de la pêche du maquereau et combien peu l'on doit, d’une année à l’autre, compter sur des ré- sultats semblables. On en jugera par le tableau sui- vant, où sont mentionnées les quantités de barils inspectés dans les différents ports du Massachusetts, depuis 4825 jusqu’en 1861 : BARILS INSPECTÉS. Années. Nombre de barils. Années Nombre de barils. 1 L F5 SPAS NE EE 254 381 OA. crier 86 151 _K: 7. TRES ES 158 740 19495-02780 202 302 SAME ET" 190 310 1846::70,87 188 261 - KATENRAR 237 324 BEL SORA 251 917 Et EPS 295 877 1828: 0 317 101 KE; | ORPRESR 308 485 1849 43e 231 856 Lie) Rare 383 658 1850542628 249 572 à. : MER) CARS 222 452 LE. 10 PPT 929 442 M2 ct 222 926 SR IREM 217 530 À! 5 TION 252 884 1855310 183 340 1h42 ENS 197 411 185%: 2408 135 349 1896..:..7. 177 056 18552 211 952 Il: 54 PRES 144 189 1856202 214 312 DE 1 er A 110 740 HS PT 168 705 j Li): À: DRASS RARES 74 243 1998..,4:5te 131 602 1SADLE LE 1 50 490 1859: LES 134 528 18446. 55 437 1860, %:rerst 9233 685 1858.64 75 543 1861........ 1949283 1048-4202 64 451 Comme on le voit par ce tableau, 1830, 1831 et 1848 furent des années exceptionnelles pour l’a- — 215 — bondance de la pêche; tandis que de 1839 à 1844, c’est à peine si on réalisa quelques profits. Actuel- lement, malgré le malaise général qui résulte de la guerre civile, la situation est encore satisfaisante, et, sans doute, dès que la trenquillité régnera de nouveau dans la contrée, cette situation redeviendra ce qu’elle était dans les années les plus prospères. Du reste, beaucoup de marins des États du Nord ont abandonné momentanément la profession de pêcheur pour embarquer sur les bâtiments de guerre, où les attirent à la fois le pairiotisme et l’appât des primes élevées que paie le Gouverne- ment fédéral. En terminant ces détails sommaires sur l’une des pius intéressantes industries de la Nouvelle-Angle- terre, je ne saurais trop m’appesantir sur lutihté des inspections officielles comme moyen de maintenir le commerce du poisson salé à l’état de moralité, qui seul peut l'empêcher de verser dans la consom- mation publique des produits inférieurs. Grace aux sages prescriptions des règlements, à la pénalité sé- vère qu'estrainent les infracliuns, grâce surtout à l'emploi de marques spéciales pour distinguer cha- que qualité de poisson salé, on peut, aux États-Unis, acheter cette denrée avec certitude de ne pas être trompé par Îles marchanäs. Les pêcheurs eux- mêmes, connaissant toute lPipportance du classe- — 216 — ment des produits, sont conduits par l'intérêt per- sonnel à donner de grands soins à la salaison à bord, et à l’exécuter avec célérité dans les grandes cha- leurs principalement. Il est donc juste de recon- naître que l'application des règlements sur les in- spections tourne au profit de la masse, entretient en même temps l’émulation des pécneurs, et porte les armateurs à faire construire des navires rapides, afin de pouvoir lutter contre leurs concurrents avec de plus grandes chances de succès. De pareilles institutions seraient -elles avanta- geuses en France, et auraient-elles pour effet de relever quelques -unes de nos préparations salées de l’infériorité où elles se trouvent, quoi qu’on en dise, si on les compare aux produits similaires ve- nant d'Angleterre et de la Hollande? Pour ma part, je n'en doute pas un seul instant, et je me suis laissé dire que plusieurs de nos commissaires de l'inscription maritime des quartiers du Nord avaient, à diverses reprises, proposé des mesures semblables. Les règlements américains, calqués en partie sur ce qui se fait en Angleterre, établissent trois quali- tés d’aloses et de saumons salés: quant aux harengs et aux alewises (c/upea serrata) fumés , ils les dis- tinguent en deux catégories seulement, et les inspec- teurs sont tenus de rejeter comme rebut tous les Pt. EE poissons ayant le ventre crevé, montrant des traces de brülé, ou n’ayant pas suffisamment de sel pour être de bonne conservation. En ce qui concerne spé- cialement les maquereaux salés, aucune comparai- son n’est possible avec les nôtres, tant ces derniers leur sont inférieurs. Renfermés dans des barils bien confectionnés, où ils baignent entièrement dans une saumure faite avec soin, ils acquièrent une saveur délicate et particulière qui n’est point sans analogie avec celle de l'anchois salé ; aussi ces poissons sont- ils recherchés par les classes riches, qui les consi- dèrent comme une des nourritures les plus appé- tissantes qu’on puisse manger dans la saison d'été. Aux Aniilles, et notamment dans la Havane, ils sont également l’objet d’une grande faveur. La meilleure manière de les accommoder après qu’ils ont été dessalés, consiste, selon moi, à les faire griller et à les servir simplement avec de bon beurre frais ma- nié de fines herbes. Il est pénible de le dire, mais chez nous les mêmes poissons ne paraissent guère que sur les tables des familles peu aisées. Dans les divers articles insérés dans ce volume, tout en traitant les questions techniques et montrant l'extrême liberté dont jouit en général l’industrie de la pêche aux États-Unis, je me suis attaché à faire connaître en même temps la pénalité rigou- reuse qui punit les contraventions dans lesquelles 13 — M8 — l'intérêt public est compromis. Le peu de mots que j'ai dits sur la législation suflira, je pense, pour montrer combien nous sommes injustes, en France, dans la manière dont nous apprécions le plus sou- vent les institutions qui nous régissent. Ainsi nos pêcheurs, si prompts à se récrier contre toute ré- glementation, même contre celle qui protége le mieux leurs intérêts, se croiraient victimes d’un odieux arbitraire si on leur appliquait la loi amé- ricaine. Que diraient-ils, s’ils se voyaient, comme les marins du Rhode-Island, condamnés à 1,500 fr. d'amende pour avoir employé un engin prohibé? Et je ne parle même pas de la prison et de la con- fiscation du bateau. Ces braves gens n'auraient cer- tainement pas assez de voix pour faire entendre leurs plaintes; et pourtant, dans la trop libre Amé- rique, nul ne songe à s'élever contre de pareilles mesures; mais aussi chacun comprend que la fécon- dité de la mer finirait par s’épuiser si on l’exploitait sans discernement, et que l'intérêt de la masse a besoin d’être d'autant plus protégé que la liberté individuelle est elle-même plus illimitée. Que di- raient encore nos chalutiers de Trouville, Dieppe, Fécamp, etc., si on leur apprenait qu'aux Etats- Unis, où la pêche côtière s’exerce sur des espaces immenses, où l'abondance règne partout, le chalut n’est usité nulle part, sans excepter les localités où — 219 — il pourrait plus particulièrement donner d’énormes bénéfices? Rien n’est plus vrai cependant; et si les pêcheurs de cette contrée ne s’en servent point et donnent la préférence à d’autres filets et à la pêche aux cordes, c’est parce qu'ils ont reconnu ses effets destructeurs et la nécessité d’en prohiber l'emploi. Cessons donc nos récriminations, n’accusons point nos règlements de manquer de tolérance, et recon— naissons avec justice que dans bien des cas ils pè- chent plutôt par l’excès contraire, témoin le chalut, que tant de raisons devraient faire supprimer. Nous ne pouvons nous le dissimuler, le poisson diminue progressivement dans la Manche; et si la pêche donne encore des bénéfices suffisants, c’est grâce à l'élévation du prix de vente sur les marchés. Mais il est à craindre que le mal ne vienne à empi- rer, et probablement, dans un temps rapproché, les - gouvernements sentiront la nécessité de s’entendre pour défendre un instrument qui tue dans son essence même l'industrie du pêcheur. Quelques personnes trouveront sans doute mes craintes exagérées, d’auires les taxeront de pué- riles, et se chargeront au besoin de prouver que, loin d’être nuisible, le chalut, en labourant le fond de la mer, contribue à sa fécondité et l’approprie mieux aux conditions d’existence du poisson. Ces Opinions ne sont pas nouvelles, et se sont reproduites — 220 — toutes les fois qu’on a attaqué la pêche en question ; mais de là à la vérité, 1l y a tout un monde, et les intérêts particuliers qu’elles abritent sont trop évi- dents pour ne pas éveiller la défiance. Une fois pour toutes, la marine impériale devrait couler cette affaire à fond, en donnant l’ordre à un garde-pêche de faire des expériences rigoureuses dans les para- ges fréquentés par les chalutiers. On déterminera ainsi les quantités de frai et de jeunes poissons, qu’un bateau pêchant dans les conditions habi- tuelles peut détruire dans le courant d’une année, et je n’hésite pas à déclarer d’avance qu'on sera ef- frayé du résulta. Qu'on ne s’y trompe pas, il y a là une grosse question à résoudre , la plus importante peut-être que présente aujourd’hui la pêche côtière, car le chalut est aussi dangereux pour le poisson de mer que le drap des morts pour le gibier de nos cam- pagnes. Je ne m’étendrai pas plus longuement sur ce sujet, qui préoccupe vivement les esprits en An-— oleterre (1) et provoque de fréquents meetings, je (1) Le journal anglais le Times rendait compte il y a quelques temps de l’intention des pêcheurs du Northumberland, du Durham et du Yorkshire, de provoquer une loi pour la suppression du cha- lut, Dans un meeting tenu dans le Northumberland, un orateur, après avoir parlé de l’origine et des progrès de la pêche au chalut, adjurait les assistants de réunir tous leurs efforts contre un système — 221 — _terminerai en disant que le peuple américain, en repoussant une méthode pernicieuse, a montré une fois de plus son bon sens et son entente profonde des véritables intérêts maritimes. Que nos pêcheurs aussi acquièrent un peu de cet esprit pratique; que, moins routiniers, ils deviennent accessibles aux in- novations, qu’ils profitent des perfectionnements réa- lisés à l'étranger, et bientôt, comme leurs confrères du Nouveau -Monde, ils verront le bien-être s’as- seoir à leurs foyers. UN DERNIER MOT Il m’a fallu une résolution bien arrêtée et une cer- taine méfiance de moi-même pour concentrer unique- ment mes investigations sur l'étude des mollusques et des poissons, alors que tant d'hommes éminents, malgré les préoccupations d’une guerrequi passionne les esprits les plus froids, me dévoilaient les secrets de pêche également nuisible aux intérêts des pêcheurs et de la for- tune publique. A la suite de ce discours, diverses résolutions furent adoptées tendant à adresser au Parlement une pétition pour faire examiner la question. Dans un autre meeting, M. Bell rendit compte qu’il y avait plus de quatre cents smacks se servant de chaluts sur les côtes nord-est d'Angleterre, et qu’on estimait à des milliers de tonnes la quantité de frai ou de petits poissons qu'ils détruisaient annuellement. — 222 — du grand problème de l’alimentation générale, ré- solu par la coopération honorablement spéculative de la population elle-même. C’est que l'habitude et l’amour du travail constituent le caractère distinctif du peuple américain et que toutes ses facultés sont dirigées vers les connaissances utiles et applicables. Sa raison ne se laisse troubler par rien d’imaginaire, et il a compris, encouragé en cela sans doute par les législateurs et les bons esprits du pays, qu'il fallait avant tout assurer aux masses une subsistance facile. On peut s’en convaincre en voyant converger vers les grands centres les denrées alimentaires à un prix tellement abaissé, relativement à l’élévation des sa- laires, que le gibier, la venaison, les poissons, la viande, les légumes, les fruits, etc., tout ce qui cons- titue enfin le luxe de la table, est à la portée de la majeure partie de la population. Les chemins de fer aident d’ailleurs puissamment à ce résultat, les compagnie ayant su comprendre que tout en sauve- gardant les intérêts des actionnaires, dans une Juste mesure, elles avaient à remplir, vis-à-vis de la na tion, un impérieux devoir, celui de faciliter par des tarifs modérés, l’approvisionnement des villes. En ce qui concerne spécialement l’industrie de la pêche, il est possible aux États-Unis d'envoyer, par la grande vitesse, aux localités de l’intérieur, les mol- lusques et les poissons frais, sans avoir à payer des — 223 — frais de transport qui absorbent, ainsi que cela ar- riveen France, le plus clair des bénéfices des pê- cheurs, et augmentent la cherté des produits. Ne l’oublions pas, la valeur morale d’un peuple et la dignité de son caractère sont les conséquences de la vie à bon marché, qui seule le met à l'abri de la corruption de la misère !… J'aurais eu encore une étude fort intéressante à faire sur les instincts maritimes du peuple améri- çcain et leur influence sur le développement de la richesse et de la puissance du pays. Lorsqu'on parcourt le littoral des États du Nord, il est impossible de ne pas être frappé de l'intérêt profond que portent les habitants à tout ce qui tient aux choses de la mer. Partout où l’agriculteur aboutit au rivage de l’Océan et des fleuves, il fait ordinairement de la pêche l’annexe du travail des champs, et possède presque toujours un bateau pour transporter ses produits. Dans une autre sphère, on voit également les né— gociants, les propriétaires, vivant sur le littoral, les jeunes gens des villes maritimes s’adonner avec pas- sion à la navigation de plaisance, se livrer dans la saison à lexercice de la pêche et chercher sur la mer une foule de distractions que les belles et élé- gantes américaines, elles-mêmes, ne dédaignent point de partager. Nulle part, sans en excepter l’An- — 224 — gleterre, on ne se sent au milieu d’un peuple plus essentiellement marin ; aussi ce que l’on voit sur les côtes de yatch, de canots, d’embarcations de toute sorte appartenant à de simples particuliers est à peine croyable, et partout celte fusion de la popula- tion avec les choses de la mer porte des fruits. Un jour que j’admirais les manœuvres faites par un navire de plaisance, je fus fort étonné d’apprendre qu’il appartenait à un riche propriétaire de l’île Long-Ilsland, monsieur A. Jones, et que depuis le capitaine jusqu’au mousse, toutes les différentes fonctions du bord étaient remplies par des familiers de sa maison. Qui, le valet de chambre (c'était le capitaine), qui le cocher, qui le valet de ferme, etc.; puis, aussitôt rentré au port, chacun de s’en revenir à ses occupations journalières, dont aucune n’aurait certes pu faire soupçonner des connaissances aussi spéciales du métier de marin, Il faut bien le recon- paitre, une population familiarisée ainsi dès l’en- fance avec la pratique de la navigation et ses rudes labeurs, ne peut guère redouter une guerre mari- time, car, le jour où elle serait sérieusement mena- cée, elle trouverait, en dehors de l’élément purement marin, un précieux auxiliaire pour la défendre. Ha — NOTE A PROSPECTUS DE LA COMPAGNIE ANGLAISE « pour la re- production des poissons et des huîtres» constituée par acte de l’année 1862... Capital 50,000 lv. st. en 10,000 actions de 5 liv. st. chaque. La Compagnie se propose : 4o D'établir en Angleterre des huîtrières artificielles suivant les procédés modernes français, qui sont appliqués avec succès sur le continent. 20 De louer et d'améliorer les anciennes pêcheries d'huitres appartenant à des particuliers et qui sont négligées. 3° De créer de nouveaux bancs d’huîtres et de repeu- pler ceux qui sont épuisés. 4° De louer les rivières à saumons improductives, afin d’en régénérer les pêcheries par des moyens artificiels ou autres. 5° De créer des établissements pour la fécondation, la 43. — 226 — reproduction et la vente des meilleures espèces de poissons d’eau douce et d’eau salée. Les grands bénéfices qu’on peut retirer de la repro- duction artificielle des huîtres, lorsqu’elle est conduite avec soin, sont démontrés par ce qui à été fait en France dans les dernières années. Les opérations entreprises sur une large échelle, pour le compte du gouvernement français, par le savant professeur Coste, ont compléte- ment prouvé que la culture de l’huître pouvait être plus lucrative que n'importe quelle récolte. Les remar- quables succès obtenus en Bretagne, ont été mis hors de doute par la Commission chargée, en 4862, par l'É- tat de Jersey, de visiter les nouvelles huîtrières; Com- mission dont le rapport, récemment publié, constate que l’on tire maintenant en France d'immenses revenus de différentes parties exiguës du littoral dont on ne ti- rail aucun parti quelques années auparavant. Si l’on considère l’énorme faculté de reproduction d’un coquil- lage donnant dans la saison de un à deux millions de petits, on ne sera point étonné qu’en empêchant, par d'intelligents moyens, le frai de se perdre, on puisse faire produire aux huîtres 5 ou 40 pour un, ce qui est le chiffre le plus bas obteuu sur les huitrières artificiel- les françaises. La valeur des anciens bancs d’huîtres de l’Angleterre, tels que ceux de Whitstable, Colchester, elc., est assez — 227 — connue; mais, quoique ces bancs donnent depuis long- temps de grands revenus aux propriétaires ou aux lo- calaires, ils sont cependant loin d’être exploités selon les principes de la science de l’ostréiculture. En créant de nouveaux bancs dans les localités pré- sentant les conditions requises pour la croissance des mollusques, et en les emménageant suivant les plans de M. Coste pour recueillir le frai, la Compagnie compte sur des résultats supérieurs à ceux qu'on obtient sur les bancs livrés à eux-mêmes. Avec la supériorité incontestable des huîtres nalives anglaises sur les huîtres du continent, l’augmentation croissante de leur prix et le goût effréné du peuple an- glais pour cette nourriture de prédilection, il est évident que la réussite de l’entreprise en question donnera des bénéfices inusités. Des arrangements ayant été pris pour louer à des prix avantageux des fonds maritimes réunissant les conditions les plus favorables pour produire les meil- leures huîtres, la Compagnie est en mesure de com- mencer immédiatement ses opérations, d'autant qu’elle s’est assuré les services d’une personne connaissant parfaitement l’ostréiculture moderne. —. 228 — Exrrait d’un rapport adressé à l'Etat de Jersey (ile), sur les huitrières de France, annexé au Prospectus de la Compagnie Anglaise. ‘AUX MEMBRES DU COMITÉ DÉSIGNÉ PAR LES ÉTATS DE JERSEY POUR FAIRE UNE ENQUÊTE SUR LES HUITRIÈRES, Messieurs, Désignés par vous pour visiter les différentes localités de la France où l’on s'occupe de la propagation artifi- cielle des huîtres, nous avons pensé qu'il était préféra- ble de différer notre inspection jusqu’à l’époque où les jeunes huîtres seraient suffisamment grandes pour que pous puissions bien juger de leur croissance. Dans le but de rendre notre rapport plus satisfaisant pour ceux qui s'occupent de la pêche, nous avons jugé utile de nous adjoindre une personne qui, s'étant depuis long- temps occupée, ici, du commerce des huîtres, pourrait contrôler les renseignements qu'on nous fourmrait. Nous avons demandé, en conséquence, qu’on nous ad- joignît M. Samue! Le Four. De retour maintenant à Jersey, nous venons vous soumettre les résultats de nos recherches. A l’île de Ré, une quantité incroyable d’huîtres a été produite sur une plage n’ayant aucune valeur; de sorte que cette nouvelle industrie réalise aujourd’hui des bé- néfices considérables, et répand le bien-être dans un — 229 — grand nombre de familles jusque-là dans l’indigence. À Saint-Martin, l’autorité maritime a créé des parcs mo- dèles où nous vimes jes pierres tapissées d’une immense quantité de jeunes huîtres, toutes de la plus belle con- formation. Au moment de la basse-mer, la vue de ces parcs est magnifique. A Saint-Martin, nous fimes la connaissance du doc- teur Kemmerer, homme de mérite qui se livre à l’éle- vage des huîtres, et a publié sur celte matière divers ouvrages fort intéressants. C'est de 1858 seulement que date l'industrie en question, et. depuis cette époque, 2,000 parcs ont été créés sur une étendue de plage d’environ 5 milles de longueur. D'une superficie de 30 yards carrés, ces parcs coûtent en moyenne, à établir, 12 livres sterling cha- que, et le docteur Kemmerer prétend que, toutes dé- penses de construction payées, ils ont donné en trois ans l'énorme bénéfice de 1,000 pour 100. A La Teste, le commissaire de l'inscription maritime nous a conduits sur quelques-unes des huitrières arlifi- cielles du bassin d'Arcachon, où nous avons vu les ou- vriers occupés à détacher les jeunes huîtres les unes des autres, dans le but de leur donner plus de place pour grandir. Le propriétaire de l’un de ces établissements, que nous trouvèmes sur les lieux, nous assura qu’il y avait dépo:é 500,000 huitres trois ans auparavant, el qu’il n’estimait pas à moins de 7,000,000 le nombre de celles qu’il possédait actuellement. Quelque temps après, nous visitèmes la baie de — 230 — Saint-Brieuc, où on a jeté, il y a quelques années, des huîtres pour régénérer les bancs; en sus, nous explo- râmes la baie de Cancale, où, malgré la violence des marées, la plage est couverte d’élalages d'huîtres au nombre d'environ 3,000, construits à peu de frais au moyen de pieux enfoncés daus le sable. Les huîtres y croissent à merveille. Ayant lu les rapports instructifs et intéressants de M. le professeur Coste sur l'industrie huîtrière, nous nous attendions à voir des choses surprenantes; mais, néanmoins, Ce que nous avons vu a dépassé notre at- tente. P.-W. NicoLLé, juré justicier. EbwaARD LE HUGUET, connétable de Saint-Martin. Jersey, 9 décembre 1862. NoTE sur les huîtres et Les bancs d’'huiître annexés au Prospectus de la Compagnie Anglaise. Les huîtres fraient annuellement du mois de juin au mois de septembre, et, comme elles sont hermaphro- dites, chacune d'elles peut émettre du frai. Elles com- mencent à frayer dès la troisième année, quelquefois plus tôt, et le nombre des germes on œufs expulsés par un seul sujet excède un million. Lors de son expulsion, le frai d’huitre est, dans le langage des pêcheurs, « floatsome » (de nature flottante), — 231 — et a besoin, pour pouvoir se fixer, de quelques objets saillants, tels que coquilles, pierres, etc., que l’on dé- signe, dans ce cas spécial, sous le nom de « cullch. » Observé dans ses premières phases d’adhürence au « culich, » le frai a l'apparence de taches de suif, dans lesquelles on voit les coquilles se développer rapidement el former en peu de temps des huîtres en miniature. Dans cet état, le frai prend le nom de « spat, » etil en faut, autant qu’on peut l’estimer, 25,000 pour former un boisseau. Le spat, dans la seconde année, s'appelle « brood, » et il en faut de 4,800 à 6,400 pour faire un boisseau. L’année suivante, le brood devient « ware, » et il en va de 4,800 à 2,400 au boisseau. La quatrième année, il faut de 1,200 à 4,600 huîtres pour la même capacité. On suppose avec une grande apparence de raison que la nourriture de l’huître consiste en infusoires dont l’eau de mer abonde. On peut observer que ce coquil- lage, conservé dans un aquarium, a les valves légère- ment entr’ouvertes, et que, par le moyen des organes ciliés de ses branchies, il produit un courant d’eau continu, qui lui amène les particules nutritives dont il a besoin, et qui sert en même temps à éloigner les excréments. On sait, depuis longtemps, que l'huître gagne beaucoup en grosseur et en qualité quand on la transplante de la pleine mer dans des endroits où les eaux douces se déchargent en abondance, ce que Pline avait déjà observé : « Gaudent dulcibus aquis et ubi plurimi influent amnes. » —_n— Au marché de Londres, les huîtres sont divisées en deux grandes catégories : les natives et les communes. Les natives sont celles qui naissent dans les eaux des estuaires de la Tamise et dans les criques de ses af- fluents, des deux côtés de Kent et d'Essex. La supério- rité des huîtres natives consiste dans la grandeur rela- tive du mollusque comparée à celle de la coquille, dans sa remarquable succulence, sa délicate saveur, sa forme compacte, ainsi que dans la dureté et le brillant de l’écaille. Le prix des huîtres natives est conséquemment très- élevé en comparaison des autres qualités, et dernière- ment il était, pour celles de quatre à six ans, de 40 à 45 shellings le boisseau en contenant environ 4,600. Sous la désignation de communes, on comprend tou- tes les autres huîtres qui sont encore distinguées en- tr’elles par le nom de la localité d’où elles proviennent : comme huitres de Manche, de Jersey, des parages de l'Ouest, etc. Le prix des huîtres communes, suivant l'endroit où elles ont été pêchées et leur taille varie de 5 à 45 schel- lings le boisseau. NorTa.— Ces différents prix, s’appliquent propablement à la vente en gros des huîtres, par les pêcheurs ou les propriétaires des bancs. Des banes d’huîtres. Il y en a: 1° De deux sortes par rapport à la qualité des produits : — 233 — les bancs d’huitres communes et ceux d’huîtres na- tives ; 20 De deux sortes relativement à la propriété : les bancs publics et ceux qui appartiennent à des parti- culiers ; 3° De deux sortes eu égard à leur origine et au mode d'exploitation qu’on leur applique : les bancs natu- rels et les bancs artificiels. Ce qui distingue principalement les bancs d’huiîtres nalives des bancs d’huîtres communes, c'est laqualité de leurs produits ; mais il est impossible de dire aujourd’hui à quelle cause on doit attribuer la grande supériorité des huîtres natives sur les autres. La circonstance la plus remarquable, se rattachant à la question des bancs d’huîtres natives, c’est qu’ils sont tous situés sur « l’ar- gile de Londres » ou sur des formations géologiques de semblable nature. . Commencçant au rivage de Kent, les bancs d’huîtres natives s'étendent à des intervalles irréguliers dans l'Ouest, depuis Ramsgate jusqu'à Sheerness et Queen- borougb, et dans l’Est sur la côte d’Essex el ses riviè- res, depuis Leigh jusqu’à la rade de Harwick. Les bancs des autres parties de la contrée sont considérés comme bancs d’huîtres communes. Plusieurs des meilleurs bancs connus d'huîtres nati- ves sont en grande partie faclices, et comme ils ne possèdent pas un pouvoir certain de reproduclion, ils seraient bientôt épuisés s’ils n'étaient fournis de jeunes généralions, par d'autres bancs même situés pour pro- — 934 — duire et retenir le frai. Tels sont les célèbres bancs d’huîtres de Whit-Stable, où une bonne tombée de « Spat » n’a lieu qu'accidentellement, ce qui cependant ne produit pas moins de 30,000 livres sterlings en un an, à Ja «Compagnie d’huîtres de Whit-Stable » en rendant inutile l’achat du naissain (brood). On n’y fait d’ailleurs usage d'aucun procèdé artificiel pour recueil- lir ia semence, qui se fixe au hasard sur le cultch des bancs et sur le rivage adjacent, ou bien va se perdre au large. Certains bancs d’huîtres natives, entr'autres Île «pont», à l'embouchure des rivières «Colne et Blackwater », sont pourtant remarquables par leur production en apparence inépuisable de frai, dont, sous forme de « brood, » les bancs de Whit-Sable et ceux de Kent et d'Essex sont en grande partie approvi- sionnés. Le « brood », ce produit si précieux pour entretenir les bancs d’huîtres de la Tamise, a récemment aug- menté de valeur, et a été vendu, dans la saison de 1862 à 1863, au prix de 40 schellings le boisseau. BANCS D’HUÎTRES. Les bancs particuliers sont ceux qui, étant de temps immémorial, la propriété exclusive d'individus ou de compagnies, sont marqués par des bouées ou autres in- dications. Tous les autres bancs sont réputés propriétés publiques et accessibles à tout le monde. —. 235 — Dans l’état actuel de la législation anglaise relative aux eaux navigables, les bancs particuliers, situés au- dessous de la laisse de basse-mer, sont limités à ceux d’ancienne date, attendu qu’il n'existe aucun moyen lé- gal de restreindre la jouissance de ceux qui se trou- vent dans des endroits, dont la propriété n’est point prescrite par un droit reconnu. Toutefois, en Irlande, les commissaires des pêches oat été autorisés à accor- der, par des licences au nom de la Couronne, le droit exclusif d'élever et de pêcher des huîtres, dans des loca- lités convenables pour cette industrie, lorsqu'il n’existe aucun droit antérieur ; il en est de même, par rapport aux rivages de la mer sur lesquels la Couronne à un droit de contrôle, à l'exception de ceux qui ont été cé- dés par don ou autrement. Dans quelques districts, et plus particulièrement dans l'estuaire de la Tamise, la Couronne a, dans une grande étendue, perdu ou dis- posé de ses droits sur les plages qui sont devenues, en conséquence, la propriété priiée des riverains. Dans ce dernier cas, les plages sont généralement gardées avec soin par leurs propriétaires, en vue de la pêche des coquillages, coques, petoncles, moules, elc., qu’elles prodaisent, aussi bien que pour y déposer, au printemps, des huîtres communes, destinées à être en- graissées par la vente des mois d’été et d'automne. _ Les bancs naturels, proprement dits, sont en majeure partie des bancs d’huîtres communes, et setrouvent ordi- nairement dans le domaine public ; ils sont toujours si- tués au-dessous de la laisse de basse-mer, et sont rare- — 236 — ment couverts de moins de trois pieds d'eau de basse- mer. Quelques bancs d’huîtres natives sont néanmoins de vrais bancs naturels, et les principaux bancs de Coilne appartiennent à cette calégorie; mais les autres bancs d’huîtres natives, qui demandent à être entretenus au moyen de jeunes huîtres étrangères, ne sauraient être considérés comme naturels, dans l’acceplion rigoureuse du mot. Ils tiennent une position intermédiaires entre les véritables bancs naturels, et les bancs purement ar- tificiels, dont il n’a été encore créé aucun spécimen en Angleterre. ; Les bancs artificiels sont ceux dont la reproduction est assurée par des moyens factices, et à l'exception de ceux du lac Fusaro, qui datent des Romains; ils sont tous de création moderne, ayant été inventés par le professeur Coste et établis par lui sur les côtes de France. Ils sont formés sur des plages émergentes afin de fa- ciliter la construction et les soins à donner aux appa- reils-collecteurs, ainsi que la manipulation des huîtres. Ce dernier travail, qui améliore grandement les pro- duits, consiste à détacher les petites huîtres des appa- reils-collecteurs, à les séparer quand elles sont collées ensemble, à détruire les étoiles de mer, coquilles de chien, moules et autres parasites, comme aussi à enle- ver, en l’agitant, la vase dont l’accumulation sur les bancs pourrait étouffer les mollusques. e . D L Lu LD L L e. L e e. L LL — 937 — Pour obvier à la gelée et à l’ardeur du soleil, qui sont également nuisibles aux huîtres laissées à sec par la marée, il doit rester environ un pied d’eau sur les bancs de basse-mer. Sur ce point, les Français ont pro- fité de l’expérience des propriétaires des plages de la Tamise, où ce frai d’huître tombe naturellement de temps en temps, en quantités variables, On a remarqué que ce frai peut toujours être élevé, même dans les hi- vers les plus rigoureux, s’il reste à marée-basse un pied d’eau environ sur les bancs. | Lechiffre moyen de la reproduction obtenue en France, par les méthodes artificielles d'élevage, est d'environ quatorze pour un. Quoique ce rendement soit très- beau, il y a encore un énorme déchet, que des amélio- rations ultérieures dans le mode d'arrêter et de fixer le frai, diminueront sans aucun doute, de sorte que les bénéfices de la culture arüficielle des huîtres augmen- teront encore (1). (1) Les documents qu’on vient de lire ont été traduits presque littéralement et les renseignements qu’ils fournissent sur les hui- tres natives anglaises, nous paraissent devoir être consultés avec fruits. Ils corroborent ce que nous avons dit sur la manière dont les Américains élèvent, et améliorent les huîtres de la mer, en les transplantant dans des fonds convenables, sans qu’il soit nécessaire de recourir au parcage proprement dit. La supériorité, incontestée, des huîtres natives de l'embouchure de la Tamise, devrait engager, selon nous, le département de la marine à faire faire une étude complète des terrains sous-marins, où sont situés les bancs qui les produisent. Comme nous avons probablement des terrains analo- gues sur nos côtes, nous pourrions peut-être arriver à produire des mollusques aussi délicats. (Note de l’auteur.) = ip NOTE B PRÉPARATIONS CULINAIRES DES HUITRES ET DES CLAMS. Soupe aux Huîtres. Prenez l’eau d’une centaine d'huiîtres, passez-la au iravers d'un tamis pour enlever les débris d’écailles, ajoutez une pinte (un demi litre) de bon lait pour cha- que pinte d’eau d’huîtres, assaisonnez avec poivre en grains, macis, une tête de céleri lavée et hachée menu, mettez le tout dans une marmite, faites bouillir et écu- mez soigneusement. Quand le liquide bout, jetez-y les huîtres, ainsi qu’un quart de livre de bon beurre frais, que l’on divise en quatre parties, roulant chacune d’el- les dans de la farine. Si on à de la crême, on en ajoute une demi-pinte, ou bien on fait bouillir six œufs durs, dont on émiette le jaune dans la soupe. — Dès qu’on a mis les huîtres dans ce liquide, on ne doit laisser jeter qu’un bouillon, suffisant pour les gonfler, sans quoi elles se racorniraient et perdraient une partie de leur saveur. — On les ôte et on les met à part à refroidir. — 239 — Quand la soupe est cuite, mettez dans le fond de la soupière de petits croûlons de pain grillé, versez la soupe dessus, ràpez-y un morceau de muscade et ajou- tez les huîtres. Cette soupe doit être servie très-chaude. Une auire préparation consiste à hacher menu les huîtres, en enlevant d’abord les parties dures. On fait Ja soupe de la même manière, et l’on ajoute les huîtres hachées au dernier moment, de facon à ce qu’elles res- tent cinq minutes au plus dans le liquide bouillant. C’est une fort bonne recette quand on ne fail qu’une pe- tite quantité de soupe. Huiîtres frites. Pour confectionner ce plat, on se sert des huîtres de grande taille, les plus fraîches qu’on puisse trouver. — Celles qui sont salées ne sont pas aussi convenables que les autres. — Après les avoir ôtées de lacoquille, on les sèche dans une servietie et on les trempe dans du pain ou du biscuit râpé, assaisonué d'un peu de poivre de Cayenne. On répète deux fois cette opération afin qu’el- les soient bien recouvertes et on les fait frire dans une friture composée par moilié de saindoux et de beurre frais. Celte friture doit être très-chaude afin que les huîtres soient sa.sièes immédiatement et ne deviennent point graisseuses. On Îles retire dès qu’elles sont d’un beau jaune doré et on les sert immédiatement. — Ce plat est incoutestablement un des plus délicats qu’on puisse faire avec les huîtres américaines. — 240 — Huîtres rôties. L'ancienne méthode de rôtir les huîtres consistait à les placer sur la picrre chaude d’un foyer et à les recou- vrir de cendres brûülantes. — Aujourd’hui on les pla- ce sur le gril de fer au-dessus d’un feu très-ardent, en ayant soin de les disposer les unes à côté des autres la valve creuse en dessous. — La chaleur fait bientôt ouvrir les coquilles et dès que l’on juge les huîtres sufli- samment cuites dans leur eau, on les retire et on les sert sur de grands plats dans leurs écailles. — Quel- quefois on sert seulement la chair. On mange les huitres rôties avec du biscuit, du beurre et des pieds de céleri, dont on a enlevé toute la partie verle.— On boit de l’ale ou du porter. —Une autre ma- nière consiste à enlever de grandes huîtres de la co- quille et à les saupoudrer de farine. On les place ensuite séparément sur un gril de fil de fer et on les fait griller jusqu’à ce qu’elles soient cuites. On les sert sur un plat avec un pelit morceau de beurre frais mis sur chacune d’elles, en les assaisonnant à sa convenance. Huîtres marinées pour conserver. Prenez 5 à 600 huîtres de la plus belle et de la plus grande espèce, mettez sur le feu avec leur eau, ajoutez de 10 à 12 onces de bon beurre frais et faites cuire dou- cement pendant 40 minutes, en ayant soin de bien écu- mer. Si on les laissait bouillir vivement et plus long- temps, elles deviendraient dures et raccornies. Otez-les LUE _ du feu, enlevez-les de la marmite et placez-les à l'air sur de grands plals, afin qu’elles refroidissent vite, ou bien jetez-les dans de l’eau froide, ce qui les rend fer- mes. Ajoutez au liquide dans lequel elles ont bouilli, une quantité égale de bon vinaigre (de cidre), assaison- nez avec sel, poivre en grains, Macis en poudre, mus- cade, et faites bouillir cette liqueur jusqu'à ce qu’elle soit réduile à la quantité nécessaire pour bien couvrir les huîtres et mettez le tout dans un vase de grès ou au- ire, de manière à le remplir entièrement. — Versez une cuillerée d’huile d'olive par dessus pour empêcher l’action de l'air et bouchez herméliquement. Clam chowder. Le Clam chowder, préparation aussi populaire que la soupe aux huîtres, se fait de la manière suivante : Mellez une centaine de petits clams dans de l’eau bouillante, et dès que les coquilles sont ouvertes, ôtez- les aussitôt, car ils ont suffisamment bouilli, et enievez les parties dures. Coupez du lard en tranches minces en assez grande quantité, pour qu'en le mettant dans une grande marmite sur le feu, il puisse produire une demi- pinte de jus ou de sauce; ôtez alors le lard et ajoutez au jus une couche de claims, puis une couche de biscuit trempé dans de l’eau ou du lait, puis une autre couche de clams par-dessus laquelle vous placerez encore du biscuit. Continuez ainsi jusqu’en haut äe la marmite et assaisonnez acc des épices, poivre, macis, etc. On peut ajouter trois ou quatre oignons bouillis, coupés en tran- 14 — 242 — ches, un peu de marjolaine hachée ainsi que quelques pommes de terre bouillies, pelées et coupées en quar- tiers. Il faut que la couche supérieure soit composée de clams. On couvre le tout avec de la pâte et l’on fait cuire dans un four en fer ou à défaut on fait bouillir dans un grand vase de ce métal. — 243 — NOTE GC LÉGISLATION HUITRIÈRE DU RHODE-ISLAND EXTRAITE DU Revised Lan Statute.— 1857. CHAPITRE XCVI. Des Pêcheries d’Huîtres libres et communes. SECTION Î. — Quiconque prendra des huîtres dans les pêcheries communes du ressort de l’État, ou qui vendra celles qui en proviendront, entre le 45 mai et le 45 septembre, sera puni d’une amende de 20 dollars pour chaque délit. SecT. II. — Quiconque prendra plus de trois bois- seaux d’huîtres par jour dans les pêcheries communes, situées au sud d’une ligne tirée entre l'extrémité de l4 pointe Fox et un monument érigé par les commissaires des pêcheries de coquiilages sur le rivage de Seekonk, paiera 20 dollars par boisseaux d’huîtres en sus du nombre permis. SECT. [Il. — Quiconque prendra ee de cinq bois- — 9h — seaux d'huîtres par vingt-quatre heures dans les pê- cheries communes, situées au nord de Ja ligne dont il vient d’être parlé dans la section précédente, paiera 20 dollars d’amende par boisseau illégalement pêché (4). SECT. IV. —. .. SECT. V. — Les amendes infligées à ceux qui en- freindront les dispositions précédentes, seront parta- gées entre l'État el la personne qui intentera les pour- suites. SECT. VI. — Les embarcations faisant la pêche des huîtres dans les pêcheries communes de l'État, ne peu- vent être armées par plus de deux hommes. — En ou- tre, chacun d’eux ne prendra que la quantité d’huîtres permise par le réglement. SECT. VII. — . SECT. VIII. — Quiconque prendra des round-clams dans les gisements de la rivière de Providence, connus sous le nom de Long-Bed, West-Bed et Great-Bed, entre le 45 maiet le 45 septembre de chaque année, sera puni d’une amende de 20 dollars pour chaque contravention. SecT. IX. — Toute personne qui prendra des huîtres sur les pêcheries communes de l'État, avec une drague ou tout autre instrument plus destructeur que les tongs ordinaires, ou qui sera trouvé dans une embarcation (1) Un amendement ultérieur à la révision de 1857, porte à 10 boisseaux la quantité d’huîtres qu’on pourra pêcher dans les eaux de l'Etat indistinctement. — 245 — avec les engins ci-dessus mentionnés, sera puni de la confiscation de son embarcation avec tout ce qu’elle contiendra; en outre, chacune des personnes trouvées à bord au moment du délit, sera punie d’une amende de 300 dollars. SECT. X. — Rien, dans la section précédente, ne sera interprété de manière à empêcher les citoyens de l’État de prendre. des huîtres dans les étangs de la Pointe- Judith, au moyen d’un rateau disposé de la manière suivante : — « Le manche aura de quinze à vingt pieds » de longueur, et la tête, de un à deux de longueur, » sera armée de dents en fer de six à dix pouces de lon- » gueur; cet instrument est destiné à pêcher les hui- » tres, principalement en hiver, en le passant dans des » trous pratiqués dans la glace. » SECT. XI. — Quiconque dégradera ou endommagera à dessein et sciemment des pêcheries communes d’hui- tres appartenant à l’État, sera puni d'une amende de 500 dollars, moitié au profit de l’État, et moitié au profit de celui qui intentera les poursuites. SEcT. XII. — Ceux qui prendront des huîtres dans les pêcheries communes, devront rejeter à la mer les petites huîtres, les vieilles coquilles, les pierres, etc., en un mot, tous les corps qui serveni à conserver les bancs en élat prospère. — Les huîtres marchandes peuvent seules être enlevées. SECT. XIII. — Il est défendu de prendre des huîtres dans les pêcheries communes de l’État, après le coucher et avant le lever du soleil. 14 — 246 — SECT. XIV. — Nul, s’il n’est citoyen du Rhode-Is- land, n’a le droit de pêcher des huîtres ou autres co- quillages. SECT. XV. — Toutes les fois qu'un nouveau banc d’huîtres sera découvert dans les eaux de l’État, les Commissaires des pêcheries de coquillages (1) devront, aussitôt qu’ils en seront informés, procéder à sa visite, et s’ils ne jugent point qu’il puisse encore être exploité, ils feront placer dessus une bouée, qui restera en place jusqu’au moment où l’exploitation pourra en être per- mise. SECT. XVI. — Les Commissaires sont tenus de faire connaître, par la voie de l’un des journaux de la ville de Providence, le jour de la mise en place et de l’enlè- vement de la bouée, ainsi que les motifs qui les font agir ainsi. Ces avis seront publiés pendant une semaine après la mise en place de la bouée et avant son enlève- ment. SECT. XVII, — Pendant le temps que la bouée res- tera sur le banc, il est expressément défendu de pêcher des huîtres ou tout autre coquillage. Il est, en outre, interdit d'enlever ou de déplacer la bouée sans l’ordre des Commissaires. SECT. XVIIT. — Quiconque enfreindra les dispositions contenues dans les douzième, treizième, quatorzième et dix-septième seclions, sera puni d’une amende de (1) Ces fonctionnaires, au nombre de 5, sont élus annuellement par le vote populaire. — 247 — 20 dollars pour chaque délit, moitié au profit de l'Etat et moitié au profit de celui qui intentera les poursuites. En outre, les bateaux ou embarcations avant servi en aucune façon à prendre des huîtres ou coquilles, con- trairement aux réglements, seront confisqués avec leur armement et tout ce qui se trouvera à bord. SECT. XIX. — Tout habitant du Rhode-Island, con- vaincu d’avoir violé deux fois les dispositions de ce cha- pitre, sera, en outre de la pénalité encourue, privé du droit de pêcher des huîtres pendant trois ans, sous peine d’un emprisonnement de trente jours pour chaque délit; si le coupable n’est pas citoyen de l'État, il pourra être condamné à un emprisonnement de trois mois au maximum. CHAPITRE XCVII. Des Pêcheries d’Huîtres appartenant à des Particuliers. SECTION 1. — Les Commissaires des pêcheries de coquillages doivent surveiller les pêcheries d’huîtres ou autres mollusques, poursuivre toutes les iafractions aux lois el de Lemps en lemps soumettre, à l’assemblée gé- nérale, les moyens qui, dans leur opinion, peuvent préserver ces pêcheries, les rendre plus productives et augmenter leur valeur. Va — SECT. If. — Les commissaires pourront louer au nom de l'État, sous la responsabilité de leur signature et de leur sceau, à toute personne convenable habitant l’État, pour un terme de cinq ans au minimum et de dix ans au maximum, toute espèce de terrain maritime (spéci- fié dans ces réglements) où n’existe aucun banc d’hui- tres naturels, afin d’y établir des lits artificiels d'hui- tres, — à la condition, pour le locataire, de se soumet- tre à toutes les dispositions qui régissent la matière, et à verser annuellement la rente du loyer au trésorier général de l'État. SEcrT. III. — Chaque fois qu’un habitant de l’État adressera une demande aux Commissaires pour louer une partie du terrain maritime, pour établir une plan- tation, ces fonctionnaires, avant d’accorder la demande et d’entrer en pourparlers avec le solliciteur, donneront l'avis public du jour, de l’heure et de l’endroit où se discutera cette affaire et feront la description du terrain demandé. Cet avis sera publié aux frais du solliciteur dans un des jouruaux de la ville de Providence, deux semaines au moins avant le jour fixé pour l’audience, el toute personne aura le droit de venir développer, de- vant les Commissaires, les raisons qui pourraient faire rejeler la demande en question. Secr. IV. — Les Commissaires peuvent quelquefois ajourner une affaire semblable, et assigner les témoins de l’une et l’autre partie, qu’ils croiront nécessaire d’entendre. 1ls donneront aux personnes qui se présen- teront devant eux, l’avis du moment et de l'endroit où — 249 — ils prendront une décision, laquelle sera définitive, à moins que l’on ne fasse appel, conformément à ce qui sera indiqué ci-après. SECT. V. — Toute personne mécontente du jugement rendu par les Commissaires, relativement à la demande d’une concession de pêcherie d’huîtres particulière, peut faire appel de cette décision devant le tribunal compétent, à la première session qui sera tenue dans le comté le plus rapproché de l’endroit ou se trouve la concession demandée. SECT. VI. — . ,. SECT. VIT. — . .. SECT. VIII. — Les commissaires ne pourront louer, ni remettre en localion pour l’établissement de planta- tions d’huîtres, les terrains maritimes couverts par les eaux où se formeront ou se seron!: formés des bancs d’huîtres natures. SECT. IX. — Personne ne pourra obtenir une con- cession de plus d’un acre de superficie, ni une compa- gnie plus d’un acre, par chaque personne qui la compose. SECT. X. — Le bail sera fait par le locataire, aussi bien que par les Commissaires, en double expédition ; une sera délivrée au locataire, l’autre sera remise par les Commissaires au trésorier général de l’État. Ce bail mentionnera les différentes conüitions auxquelles est faite la concession, ainsi que les cas où elle pourra être relirée pour inexéculion de conventions stipulées. SECT. XI. — Avant de signer ie bail, les Commis- saires pourront, s’ils le jugent convenable, faire arpen- — 250 — ter et lever le plan de la concession demandée, auquel cas une copie du travail sera annexée au bail. Dans tous les cas, le terrain, exactement délimité par des bornes, devra être indiqué par une marque placé sur le rivage, et le plus près possible de la concession, le tout installé de manière à ne point gêner la navigation. Le terrain sera, en outre, enclos avec des perches ou bouées pla- cées à 41 yards au maximum de distance l’une de l’au- tre. — Les bornes, les perches ou les bouées seront re- nouvelées toutes les fois que les Commissaires le juge- ront nécessaire. SECT. XII. — La rédaction des baux, les plans et Parpentage de la concession, la mise en place des bornes, l'entourage au moyen des perches ou des bouées, etc., seront établis sous la direction des Commissaires, aux frais du solliciteur. Les Commissaires recevront de cette personne un dollar et demi de vacation par jour, pen- dant tout le temps qu’ils seront occupés à ces travaux. SECT. XIII. — Quiconque effacera ou abimera les- dites marques, ôtera ou détruira les perches ou les bouées, sera puni de 20 dollars d'amende pour chaque contravention, moitié au profit de l’État, et moitié au profit du plaignant. Les délinquants pourront, en outre, être poursuivis en dommages-intérêts, par la partie ci- vile. SECT. X{V. — Les huîtres placées sur un terrain ma- ritime, concédé comme il vient d’être dit, seront la propriété exclusive du locataire pendant la durée du bail, et les vols ou déprédations qui y seront commises, — 251 — seront punies de la même manière qu’on punit les actes semblables, dans les propriétés en général. Les pro- priétaires auront d’ailleurs le droit de poursuivre de- vant les tribunaux la réparation des torts qui leur au- ront élé faits. SECT. XV.— De temps à autre, les Commissaires devront s'assurer si les conditions stipulées dans les baux sont remplies avec exactitude et si la rente est régulièrement payée. En cas d’inexécution des conven- tions stipulées, les concessions seront retirées aux loca- taires. SECT. XVI. — Les Commissaires garderont copie des baux qu’ils ont donnés, et le Trésorier général leur signalera, s’il y a lieu, les locataires qui auront négligé d’acquitter leurs rentes depuis quatre semaines après l'échéance. SECT. XVII. — Les Commissaires sont autorisés à faire, au nom de l’État, les poursuites nécessaires pour faire acquitter les rentes qui ne seront point payées avec exaclitude. SECT. XVIII. — Les Commissaires pourront nommer deux personnes convenables comme gardiens, pour sur- veiller, pendant les heures qu'ils indiqueront, les pêche- ries particulières d’'huîtres de la rivière de Providence counues sous le nom de Grand Lit. SECT. XIX. — Ces gardiens seront nommés pour une année, mais 1ls pourront être renvoyés par les Commis- saires à n’imporle quelle époque, pour mauvaise con- duile ou négligence dans leur service. Pendant tout le — 252 — temps de leur mandat, ils auront les pouvoirs de l’au- torité des constables de la ville de Providence. SECT. XX. — Les Commissaires pourront fournir aux gardiens, un bateau avec l’armement nécessaire qui stationnera sur les pêcheries dont il a été question à la section précédente, et la dépense qui en résullera, ainsi que les salaires de ces gardiens, seront payés au moyen d’une taxe prélevée par les Commissaires sur les diffé rents locataires de ces pêcheries. SECT. XXI. — Les Commissaires devront, pendant uue semaine, donner l'avis public de leur intention d'établir cette taxe, et après qu’elle l’aura été, ils de- vront également donner avis, pendant au moins trois semaines consécutives, du chiffre auquel elle s’élèvera et de l’époque où on devra la payer. SECT. XXII. — Si un locataire d’une plantation d’huîtres refuse ou néglige de payer ladite taxe aux époques indiquées, les commissaires ont le droit de re- prendre son bail et de disposer de la concession en fa- veur de n'importe qui, en se conformant aux lois, abso- lument comme si celle concession était vacante (4). SECT. XXII. — L’embarcation mentionnée ci-dessus sera la propriété de l’État et sera placée sous la direc- tion des Commissaires. (1) Suivant acte passé en 1860, lorsque la rente n’est pas acquit- tée, les commissaires retirent la concession et peuvent faire vendre les huîtres en vente publique, en en donnant avis dans un des journaux de la ville de Providence. — 253 — SECT. XXIV. — Quiconque prendra des huîtres sur une plantation particulière ou privée, après le coucher du soleil ou avant son lever, sera puni d’une amende de 20 dollars pour chaque offense, et l’embarcation ayant servi à commettre le délit sera confisquée avec tous ses apparaux. SEcT. XXV. — Quiconque sera convaincu d’avoir pris et emporté des huîtres d’une plantation voisine, sera puni d'une amende de 20 à 100 dollars, et à défaut de paiement, sera emprisonné pour un terme n’excé- dant pas un an. SECT., XX VI. — Tout locataire d’une concession ou toute personne agissant comme son agent, ayant prêté serment peut, comme un constable spécial, arrêter qui- conque sera pris en flagrant délit de vol d’huîtres sur une plantation particulière comprise dans les eaux de l'État, et amener le coupable devant l'autorité compé- tente, pour qu’il soit jugé conformément aux lois. SECT. XXVIL — Tout locataire convaincu d’avoir pris des huîtres sur une autre plantation que la sienne, sera privé de sa concession, et toutes les huîtres qui s’y trouvent confisquées au profit de l'État, sans préjudice de la punition encourue pour une telle action. SECT. XXVIIL. — Dans toute plainte, poursuite ou accusation de ce genre, il ne sera pas nécessaire d’af- firmer et d'établir à quelle plantation particulière les huîtres ont été dérobées et à qui elles appartiennent. SECT. XXIX. — Les commissaires, les gardiens ou les planteurs, ayant prêté serment comme constables, 15 — 294 — ne sont pas tenus, lorsqu'ils font une plainte, de fournir une caution pour le paiement des frais. SECT. XXX.— Touie personne convaincue d’avoir violé deux fois les dispositions de ce chapitre, sera, en plus de la pénalité encourue, privée pendant trois ans du privilége de pêcher des huîtres dans les eaux de l’État, sous peine d’un emprisonnement de trente jours pour chaque délit. SECT. XXXI. — Rien, dans ce chapitre, n’empêchera les citoyens de pêcher des clams sur les rivages des eaux de l'État, non mentionnés dans ce réglement. — 9255 — » » NODE D MANIÈRE DE RÉCOLTER LA GLACE DANS LES LACS DES ENVIRONS DE BOSTON. » La récolte de la glace se fait en Décembre et Jan- vier. À cette époque on peut estimer quel sera le rendement des lacs ou étangs. Ceux qui s’occupent de cette industrie n’ont pas besoin, comme les agri- culteurs, de semer pour avoir des produits : ils n’ont qu'à attendre patiemment le travail de la nature, à laquelle ils viennent en aide quelquefois, en prati- quant des ouvertures dans la surface gelée des lacs, afin que l’eau se répande par dessus et que l’épaisseur de la glace en soit augmentée. On enlève aussi la neige de temps en temps, car elle est nuisible. » À part ces travaux préparatoires, il n’y à guère qu’à attendre l’époque de récolter cette moisson gla- cée. >» Quand la glace est en état convenable pour être coupée, c'est-à-dire a atteint neuf ou vingt pouces d’é- paisseur, suivant qu'elle est destinée à être consom- mée dans la contrée ou à être exportée, le propriétaire — 256 — de l’étang fait d’abord enlever la couche de neige (s’il en existe), avec une machine en bois traînée par un cheval, et la fait mettre en tas sur les limites de sa propriété. Celte opération terminée, on enlève la neige glacée dont on ne tirerait aucun parti, avec une machine de fer, armée d’un instrument tranchant en acier trempé. Cette machine, qui est une espèce de râcloir, permet d'enlever plusieurs pouces de neige glacée. » La troisième opération consiste à diviser la sur- face glacée en parcelles carrées de quatre à cinq pieds de côté, au moyen d’un instrument tranchant installé sur une machine traînée par un cheval, et se manœuvrant à peu près comme une charrue. On passe ensuite, dans les sillons qui ont été tracés, un autre instrument adapté à une machine traînée éga- lement par des chevaux, avec lequel on coupe pro- fondément la glace, mais non cependant de manière à la diviser entièrement; il ne reste plus qu’à séparer les blocs, avec une scie à main, pour qu’ils puissent flotter librement dans les canaux qu’on a pratiqués dans la surface de l’étang, pour amener la récolte au rivage. » De la plage on transporte la glace sur des char- reltes, ou ce qui est préférable, on la place morceaux par morceaux sur un plan incliné, où elle est remon- tée par une machine à vapeur jusqu’à une certaine élévation, et de là on la dirige à bras d'homme jus- qu’à la porte de la glacière, par un plan incliné en y 2 — 9251 — sens contraire el moins rapide, qui se raccorde avec le premier. » On se sert d’une machine à vapeur pour arrimer les blocs dans la glacière, et ce travail se fait aussi bien la nuit que le jour, lorsque le temps le permet. » On estime à Boston que l’emploi des machines et de la vapeur, dans les différentes opérations de cette industrie, économise au moins 45,000 dollars par an! » (Extrait du Merchant's and Commercial Review, Août 14858). — 958 — NOTE E SUR LES BATEAUX-VIVIERS En Europe, ce sont les pêcheurs anglais et hollan- dais, et notamment ces derniers, qui font le plus fré- quent usage des bateaux-viviers. A l'exposition inter- nationale de pêche, qui eut lieu à Amsterdam en 1864, les Hollandais exposèrent deux modèles de bateaux qui sont décrits de la manière suivante, dans le Rapport de la Commission française chargée, par S. E. M. le Ministre de la marine, d'examiner les produits de l’exposilion : « Bateaux de pêche.— Les Hollandais exposent trois » genres de bateaux. Le plus grand, de quatre-vingts à » cent tonneaux, coûte 7,000 florins, dure dix ars, et » porte généralement quatre cents barils de cent cin- » quante kilogrammes pour la préparation du hareng » ou de la morue. Il fait la pêche toute l’année ; de la » mi-juin jusqu’à la fin de novembre, il va chercher le » hareng dans la mer du Nord ; depuis le mois de dé- » cembre jusqu’à la mi-juin, il pêche la morue à la li- » gne. Rien n’est oublié dans l’emménagement de ce » bateau; il a même sur son avant un réservoir à lam- — 259 — proie, les marins du pays, après des expériences pratiquées pendant des années, ayant reconnu que le meilleur appàt pour prendre la morue était la lam- proie, mais la lamproie coupée vivante, et attachée toute fraîche à l’hamecon. Au commencement de de l'hiver, les négociants font venir leurs lamproies, de la Tamise à Rotterdam, par des bateaux à vapeur; le poisson, soigneusement placé dans un vivier, sup- porte parfaitement ce voyage; il est ensuile dirigé dans l’intérieur de la Hollande par des canaux et mis dans des réservoirs sur lesquels un homme est cons- tamment en faction, se mouvant comme un balan- cier, de droite à gauche et de gauche à droite pour renouveler l’eau contenue dans le réservoir. Le mo- ment de la pêche arrivé, les lamproies sont vendues de 20 à 30 florins le cent aux bateaux qui se dirigent vers le Dogger-Bank. La morue se montre très- friande de cet appât; mais il faut de toute nécessité qe le morceau attaché à l'hameçon ait été coupé sur la lamproie encore vivante; sans cela aucun poisson ne mordrait. Quelque abondante que soit la péche, les bénéfices que retirera l’armateur reposent sur la plus on moins grande quantité de morues vivantes que rapporteront les marins. Dans le commerce, trois poissons morts valent à peine un poisson vivant, et si le mort remonte déjà à quelques jours, il faut donner au mojns quatre morues mortes pour remplacer une morue vivante. Les bateaux hollandais ont donc tous un vivier qui n'est autre chose que l’espace compris A es entre deux couples, fermé latitudinalement par des cloisons étarches et percées d’une foule de petits trous donnant à l’eau un libre passage. Ce vivier peut con- tenir jusqu’à mille morues vivantes; les armateurs, qui souvent n’entreprennent cette pêche que dans le but de vendre le poisson vivant, ont tout intérêt à posséder les plus grands viviers possibles. Le prix du poisson ainsi rapporté est très-mobile; on a vu des morues se payer jusqu’à 8 florins la pièce, et tom- ber le lendemain à 7 centimes, par suite d’une grande abondance sur le marché. » Le deuxième spécimen de bateau exposé par la Hollande est un bateau chalutier de Scheveningen, pouvant porter environ cent barils de harengs de cent cinquante kilogrammes chacun. Il fait les trois genres de pêche : il a des filets dérivants pour le ha- reng, des lignes pour la morue et pour le poisson frais, deux chaluts pouvant fonctionner simultanément. Un compartiment étanche placé au miheu du bateau fait l'office de vivier; un tuyau donne l'entrée libre à l’eau. Tout autour de la cloisen intérieure sont dis- posés des crochets destinés à pendre par la queue le poisson plat capturé; avec l’unique tuyau donnant passage à la mer, il devient nécessaire, pour la con- servalion de la pêche, de pendre le poisson plat, qui, maître de ses mouvements, ne manquerait pas d’aller boucher l’orifice servant à renouveler l’eau. Ce trai- tement, auquel on assujettit les poissons plais, ne pa- raît abréger en rien leur existence. Tous les bénéfices = ARE » de la pêche sont encore dans la plus ou moins grande » quantité de poissons vivants rapportés; jamais un » Hollandais de bonne maison ne souffrira qu’on lui » serve sur sa table un poisson qui n’a pas été acheté » plein de vie. Les chalutiers de Scheveningen jaugent » trente tonneaux : ils ont quarante pieds de long, dix- huit de large, soixante de mât et de cinq creux; ilssont bordés à clin et portent, comme tous les bateaux hol- landais, deux dériveux, qui, placés le long du bord, » servent à leur faire tenir le vent, tout en leur faisant » perdre beaucoup de vitesse. Cette construction a pour » motif unique de préserver les bateaux des coups de » mer, aussitôt que, rentrés au port, ils ont été échoués » sur le rivage. » En France, pour conserver vivant le poisson d’eau douce, on se sert depuis longtemps, sur les fleuves et rivières, de bateaux-viviers nommés bascules ou bouti- ques, avec lesquels on peut transporter les carpes, tan- ches, perches et même les brochets à de grandes dis- tances, pourvu que ces animaux ne soient pas trop en- tassés. Les orages, le tonnerre, les fortes gelées ou les crues subites produites par la fonte des neiges, sont les causes d’insuccès les plus à redouter. On se sert des ba- teaux en question dans Ja Saône et le Rhône, notam- ment dans les parages de la Camargue. Autrefois les pêcheurs de Dunkerque, à l’imitation des Hollandais, avaient également des viviers à bord pour conserver le poissor pris sur le Dogger-Bank, et Duha- me], daus le Traité -géneral des pêches, constate que de — 262 — son temps on en gardait pendant un mois, si les viviers avaient une capacité suffisante. Quelques bateaux avaient un vivier unique, tandis que d’autres l’avaient divisé en plusieurs compartiments pour mettre à part les dif- férentes espèces, et, dans tous Îles cas, pour pouvoir conserver quelque temps les poissons, on avait soin de leur donner de la nourriture. COMMERCE DU GIBIER A NEW-YORK C’est avec raison qu’on peut regarder New-York comme une des villes du monde les mieux approvision- nées en gibier. La venaison, proprement dite, se trouve sur tous les marchés, en approvisionnements considérables, et le prix en est des plus modérés. Les perdrix se vendent, en moyenne, à raison de 75 cents la paire. | La saison des bécasses est du 1° juillet au 1° décem- bre. New-York en reçoit, pendant ce temps, environ cinquante mille; en moyenne elles valent 75 cents la paire. La caille du pays vaut de 4 dollar à 4 dollar 50 cents la douzaine. En hiver on les traqüe sur la neige, en — 263 — quantités immenses, dans les plaines de l’ouest, d’où il en arrive des chargements. Le coq de Bruyère (grouse) et la poule des prairies ne valent, en hiver, que 1 doilar au maximum la paire, tellement ils sont abondants. Le canard sauvage, le plus estimé et le plus rare, le célèbre canvass-bach, est acheté au prix de 1 à 2 dol- lars la paire. C’est le morceau le plus délicat qui figure sur les tables américaines. On estime au moins à cent mille le nombre des canards de toute espèce qui se ven- dent sur le marché de New-York. Les pluviers et les bécassines, ces dernières surtout, dont une espèce est de la grosseur de la bécasse, sont très-abondants; ils figurent pour le chiffre de dix mille douzaines environ. Quant aux pigeons sauvages, on peut se faire une idée de Ja consommation qui s’en fait à New-York en disant qu’il en arrive, dans un seul jour, pendant la Saison, jusqu’à deux mille douzaines. Ils valent 50 cents à À dollar et demi la douzaine. FIN A + {NTM MON LUE af: = TE Ai AU al MALE 0 ABATE pi N 4 +. ‘ Mi Ls 4 ROLE: te 23 “ { . £ ra | 2 5 “6 » LÉ Pa 1 ‘à HAS : 6 a! 124 i 4 7: J * pe" +! . ca t é | ? { , à : Lost : . hf MOTTE © € | CRÉES 1 à ï h5 ’ » . L it EL > SE LE À ? «. : 9 rot t# : U " 4 > ffark = IT 1 CU +{1 L 4, L PAT tf: CA pt LE À i - a … #1] * « p A LE LS v : é : 3 j Avi Tr HS " FE ù ï * M EURE : Lier - a \ , s + mL 4 : LT , 7 5. 20 S FAR: +. 1 : « = 15 : ns 2 LA nn rx pr à s L u ? M 66! HE hi 2 hER : t Fr n LA 1 L , « Êl : e Rapport à Son Excellence M. le Ministre de la Marine et des Colonies. INTRODUCTION. . HuiTrEs DES ÉTATS-UNIS. Huître de la Virginie. . , Huître Boréale. . TABLE DES MATIERES L2 Huître Canadienne. . Huîtres marinées. Huîtres en conserves. Emploi des écailles . PÈCHE DES HUITRES. . LÉGISLATION CONCERNANT LA PÈCHE. Etat du Massachusetts . Rhode-lsland. . . Connecticut. New-York . New-Jersey . Unis. Delaware. Maryland. . Virginie... CULTURE DES HUITRES. Lois CONCERNANT LES PLANTATIONS État du Maine. ) Massachusetts . Rhode-Island. . . Connecticut. New-York... New-Jersey . Delaware. Maryland. DE L’INDUSTRIE HUITRIÈRE DANS QUELQUES : ILLES . D’'HuiT RES. . Pages. . DES ETATS- 4 19 45 46 48 49 59 tb. ‘b. 60 64 65 ib. 66 67 ib. 69 70 71 72 80 81 82 tb. 85 87 tb. 88 89 91 Pages. New-York. 08 6". . 2 0 New-Haven ét Fair-Haven, -. 4, COS BoStOn. . th seu » ‘où 0e 2 le OS Plémne ER CC -nLe 5 ss 5 à COTE CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LOTS NATURELLE DES OSAMS COMESTIBLES, | … . . +. COCO Myÿa-Aretraria (Soft-Clâmi): ©: .: 7 2 NON Venus-Mercenaria (Round-Clam). -. . . . . . 429 APERQUS DIVERS SUR LA PÉCHE COTIÈRE.. . -. "OO Pêche du Flétan.…. °.:5 1% 465. 0 CONSO ComuErce de la Glace aux Etats-Unis. . . . . . 2 . . 149 Emploi de la Glace dans la Pêche côtière. . . : .,. 1959 Bateaux-Viviers + à. S'LAMSENERRR NL ed, | | Bateaux ayant une Glacière.. . . RENNES Bateaux mixtes, ayant un Vivier et une e Glätiëré: 1° 60 Bateaux n’employant la Glace qu'exceptionnellement. . 166 Réserves flottantes.” ”. *% ‘. *.," ‘: SONO Réserves à Homards. :. 2° 52 SOON Pêche du maquereau. +"... PROS Un dérnier mot. *. "9, 2.2, COURS 221 NOTEST" SNA NO MERRE te PL de LL | A — Prospectus d’une Bombe anglaise « pour la re- production des huîtres et des poissons. » . . . . 6b. B — Préparations culinaires des Huîtres et des Clams.. 238 C — Législation huitrière du Rhode-Island. . . . . 243 D — Manière de récolter la glace aux environs de Boston 255 E — Bateaux-viviers. 2. 5". 1. °C Commerce du gibier à New-York. , . . . . . . 262 FIN DE LA TABLE 2 VERSAILLES. — IMPRIMERIE CERF, RUE DU PLESSIS, 99. Chez CHALLAMEL aîné, Libraire-Éditeur COMMISSIONNAIRE POUR LES COLONIES, LA MARINE ET L'ORIENT 30, RUE DES BOULANGERS (5° ARRONDISSEMENT). “6 —- LES ÉCOLES NAVALES ET LES OFFICIERS DE VAISSEAU, dépuis Richelieu jusqu’à nos jours (étude historique), par J. de Crisenoy, ancien oflicier de marine. In-8. 2 fr. ÉTUDE SUR L'INDUSTRIE HUITRIÈRE DES ÉTATS-UNIS, faite par ordre de Son Excellence M. le Ministre de la marine et des colonies; Suivie de divers aperçns sur l’industrie de la glace en Amérique, les bateaux de pêche pourvus de glacières, les réserves flottantes à poisson, la pêche du maquereau, etc . par M. P.de Broca, lieutenant de vaisseau, directeur des mouvements du port du Hâvre. Nouvelle édition, augmentée de documents et de notes, in-18. 3 fr. 50 NOTICE SUR LES PÈCHES DU DANEMARK, des îles Féroé, de l'Islande et du Croenland, par M. Zrmingerï, capitaine de vaisseau, adjudant- général de S. M. le roi de Danemark. Br. in-8. Li NOTICE SUR LE CORPS DES MÉCANICIENS ET OUVRIERS- CHAUFFEURS DE LA FLOTTE. Résumé des conditions d'admission, d’avancement, de solde et de retraite, attribuées aux divers grades.In-8. 75 €. LES GRANDES PÊCHES DANS LES MERS POLAIRES, par J. Layrie, lieutenant de vaisseau. Br. in-8, LNir. RAPPORT SUR L'EXPOSITION INTERNATIONALE D'APPA- REILS DE PÈCHE D'AMSTERDAM, par P. Lonquëty aîné, armateur. In-8, avec vignettes. 1 fr. 50 NOUVEAU PROCÉDÉ DE LAÇAGE DE FILETS À LA MAIN, par J. Légal. Br. in-8, avec vignettes. LE À STATISTIQUE DE LA JUSTICE MILITAIRE POUR L'ANNÉE 1859, par À. Trève, sous-commissaire de la marine. Br. in-8. 75 c- L'ENQUÈTE SUR LA MARINE MARCHANDE, par Léon Renard. Br. in-8. 1 fr. 26 RAPPORT SUR LE VOYAGE DU TROIS-MATS LE SUGER, transportant un convoi d’'Indiens immigrants de Pondichéry à la Guadeloupe, par L.-A. Gaigeron, chirurgien principal de la marine, délégué du Gouver- nement. Br. in-8. 1 fr. 25 NOTICE SUR LA COLONIE DU SÉNÉGAL et sur les pays qui sont en relation avec elle, par le général Faidherbe, gouverneur de cette colonie. In-8, avec une carte du Sénégal et du Haut-Niger, dressée sous la direction de l’auteur, par V.-4. Maltebrun. 3 fr. 50 COTE OCCIDENTALE D'AFRIQUE. — COTE-D'OR. — Géographie, commerce, mœurs, par Peuchgaric, capitaine au long cours. Br. in-8, 2 fr, CHALLAMEL, LIBRAIRE, 30, RUE DES BOULANGERS, PARIS. ANNUAIRES, BULLETINS OFFICIELS ET JOURNAUX DE TOUTES LES COLONIES FRANÇAISES. LA QUESTION DE COCHINCHINE au point de vue des intérêts français, par ÆZ. Abel. Br.in-8. lfr. ONZE MOIS DE SOUS-PRÉFECTURE EN BASSE-COCHINCHINE, contenant en outre une notice sur la langue cochinchinoise, des phrases usuelles françaises-annamites, des notes nombreuses et des pièces justifica- tives. Avec une grande carte de la Basse-Cochinchine, par L. de Gram- mont, capitaine au 44e de ligne. Un îort volume in-8. 12 fr. NOTICE SUR LA BASSE-COCHINCHINE, par L. de Grammont. Br. in-8. 1 ii ee DOCUMENTS OFFICIELS RELATIFS A LA LOI SUR LE RÉGIME DOUANIER des colonies de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Réunion. In-8. 2 ire VOYAGE D'EXPLORATION DANS LE HAUT-MARONI (Guyane française). Septembre à novembre 1861, par M . Vidal, lieutenant de vais- seau. Br. in-8. 2 fr. 50 LES GISEMENTS AURIFÈRES de la Guyane française,par Hardouin, Br. in-8. I fr. 25 MISSION DE CAYENNE ET DE LA GUYANE FRANÇAISE, avec une carte géographique. Un volume fort in-8. 6 fr. ILE DE LA RÉUNION. Notice sur les principales productions natu- relles et fabriquées de cette île, jar G. Imhaus. Br. in-8. 2 fr. 50 MADAGASCAR, possession française depuis 1642, par Barbié du Bo- cage, avec une grande carte, par V.-A. Maltebrun. Un volume in-8. 7fr. UN VOYAGE A MADAGASCAR (janvier 1862), par le baron Bros- sard de Corbigny, capitaine de frégate. Br. in-8. 1 fr. 50 Collection d'ouvrages sur toutes les Colonies françaises. REVUE MARITIME ET COLONIALE Suite à la Revue Coloniale, 1853-1858, et à la Revue algérienne et colo- niale, 1859-1860. (Ministère de la Marine et des Colonies). La REVUE MARITIME ET COLONIALE parait le ler de chaque mois par cahiers de 10 à 12 feuilles grand in-8°, accompagnés de cartes, plans et croquis, qui ajoutent à l'importance de ce précieux recueil. PRIX DE L'ABONNEMENT: Pour Paris, un an, 25 fr.—Pour les départements; etl’Algérie, 30 fr —Pour l'étranger et les colonies françaises,35 fr.—-On s’a- bonne chez Challamel aîné, libraire-commissionnaire pour les colonies, la marine et l'Orient, 30, rue des Boulangers, à Paris. VERSAILLES. — IMPRIMERIE CERF, 59, RUE DU PLE-SI3. 2 — 2 ——— — CHALLAMEL AIXÉ, LIBRAIRE-ÉDITEUR Commissionnaire pour l'Algérie, la Marine, les Colonies et l'Orient 30, RUE DES BOULANGERS-SLINT-VICTOR (5€ ARRONDISSEMENT) ; par ordre de Son Ext ‘ellence M. le diner + la marine à des colonies; suivie de divers aperçens sur l’industrie de la glace en Amérique, les bateaux de pêche pourvus de glacières, les réserves flottantes à DOisson, I DÉCRE du maquereau, ete. par AZ. P.de Broca, lieutenant de vaisseau, directeur des, mL de notes, in-18. (Œ NOTICE SUR LES PÊCHES DU DANEMARK, des fes Féroé, l'Islande et du Croen!and, par M. 7r ménger, € capitaine de vaisseau, Adyude général de S. M. le roi de Dancmark. Br. in-8. + NOTICE SUR LE CORPS DES MÉCANICIENS ET OUVRIERS- CHAUFFEURS DE LA FLOTTE. Résumé des conditions d'admission, d'avancement, de solde et de retraité, attribuées aux divers Sradcs A1E8-75" 0 ‘LES GRANDES PÈCHES DANS LES BIERS POLAIRES, ee D 2 Layrle, lieutenant de vaisseau. Br. in Sup 1 RAPPORT SUR L'EXPOSITION INTERNATIONALE D'aPe e REILS DE PÊCHE D'AMSTERDAM, par P. Louquéty aîné, arinateut. n-8, avec vigneites. L re NOUVEAU PROCÉDE DE LAÇAGE DE FILEYS A LA MAIN par J, Légal. Br. in 8, avec vignettes. 40: STATISTIQUE DE LA JUSTICE MILITAIRE POUR L'ANNÉE 1859, par À. Trèvé, sous-commissaire de la marine. Br. in-8: L'ENQUÈTE SUR LA MARINE MAR CHANDE, par Léon ER # Br. in-8, Ar, Re De LT AR REVUE MARITIME ET COLONIALE Suite à la REVLE coLoxraLE, 1853-1858, et à la REYGE ALGÉRIENNE Br. A COLONTALE, 1859-1860. 4 (MINISTÈRE DE LA MARINE ET DES COLONES) ue La REVUE MARITIME ET COÉONTALE paraît le 1 de chaque mots @ par cahiers de 10 à 12 fouilles grand in-8, accompagnés de cartes, | "A plans et croquis, qui ajoutent à li importance de ce précieux recueil. Qui Prix de l’abonnement : Pour Paris, un an, 25 fr, — Four les dé partements et l’Alzérie, 30 fr. — Pour l'Étranger et les françaises, 35 fr. — On s’abonre chez CBALLAMEL ain, libraire commissionnaire pour les Colonies, la marine et l'Orient, 39, ue des B ulangers, à Paris | VERSAILLES, — IMPRIMERIE CERF, RUE DU PLESSIS, 59, d % tF 1 t le! [A pe Î * ‘in , ) LIUY CR LR r 1m ut 1 ni (0 Et Al LP we Û id nn 3 2044 106 218 191 Date Due | | AAC | uit FUN DA seu He FPMIETAN TA {; [4 qui is t} TE 14 Li ji ik 5 4 qu ER (] MANN FM (4 | se) {À } ns FU ? ie ju ét, A sun a kt mr re" z = CE se, nee, _ be _ RE LE? ' I Ur A Œ 4 at AU 44 FHIQS SF Sp SR EN ! 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