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Eurythmies

DU MÊME

la Librairie Léon VANŒIi)

Exil Doré. 1898.

JEAN ROYÈRE

Eurythmies

PARIS

IIBRA1RIE LÉON VANIER, EDITEUR

A. MESSEIN. Succr

19, QUAI SAINT- MICHEL, I 9

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Le Poète avoue volontiers qu'une collaboration décente avec Stéphane Mallarmé lequel par malheur je n'ai pas connu ï induisit à prolonger au-delà de l'œuvre choisie le jeu émouvant de sa lecture en combinant parée d'une grâce neuve et sans plus se souvenir de V aurore que s'il se fût évadé en un midi supra terrestre une Poésie qui contraignît le lisant à autant d'initiative que l'Ecri- vain, l'arrachant à celle route royale du verbe qui se dé- roule fertile et plate dans l'unanime majesté du paysage, nappe, dans les forets, régulatrice des futaies, raclant les guipures des venelles, pour V embellir des contours nuancés d'Eurythmies, quintessence, philosophie, rêves repliés comme d'un peu d'infini bu aux lèvres d'enfantines con- fidences— susurrements cueillis à l'Ecoute dans le Silence des herbes qu'un crépuscule balance entre des tombes l'im-

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possible de la clarté enclos d'harmonie fuie et retrouvée ductile h V ouvrer de doigts ingénieux le de V intuitif d'ailleurs développé en discursifs théorèmes d'une géomé- trie vive et succincte pour l'œil ennemi de gloses honteuses à qui sait comprendre et sentir le Poème.

EURYTHMIES

A mes amis Henry et Georges Ghika .

Une larme point dérobée Aux flots qui n'ont pas de sanglots Regarde vainement ces flots Vert or, manteau de scarabée, Sous la nue étroite et livide Collant son visage aux hublots Et de la chair d'azur fluide... Du rythme en cet espoir falot ? Pauvre cœur 1 filtre tes pavots Dans l'alambic horreur du vide !

n

Sombre malgré le clair de lune,

Clair du regard et du cerveau,

... Pauvre chair ! pauvre âme !... la dune

Se penche, se penche sur l'eau

Béate que ne fige aucune

Ombre de jais sur nul manteau

Fantôme accoudé sur la dune

Ou le sol mouvant d'un tombeau.

i3

La caresse du soir sur ce marbre fantôme, Atome inhabité frôlant d'autres atomes. Neige, pour une nuque ironique à souhait, Dans le nonchaloir que le crépuscule fait Peser sur le ciel gris qui de l'azur se gare Et tourne au noir ! C'est la mélancolique gare s'embarque, au déclin de l'arrière-clarté, Le soir espoir humain veuf de son entité.

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Je regarde les yeux si pâles. Si pâles, dans les blancs rameaux, Aubes et langueurs vespérales De mon cœur les frères jumeaux.

Convalescence qui s'apeure C'est du toujours qui refroidit : Mais quelle grâce dans cette heure ! La Mélancolie est mon dit.

Si la vie est l'envers des choses Il est logique apparemment Que les extases soient encloses De qui la mort est le ferment.

- 17

Neigeuse volupté sous la lune si tendre, Du crépuscule encore un peu vif pour entendre Dans le rose soyeux d'un ciel à falbalas Les soupirs maniérés de ce cœur déjà las De peigner pour la dent féroce d'Hyrcanie Les agneaux dérobés au bercail de Junie, Vers ce Sylvain Clilandre et ce Faune Damis, Passant les rêves flous et mièvres au tamis Du désir qui dans l'eau de la vasque rougeoie, Je mènerai ta chair inconstante et ta joie !

19

Naïve, comme une aube enfantine festonne, Verte et rose déjà, sous le regard atone Du petit jour la fête au village en bandeaux Une petite vieille entr'ouvre ses rideaux Aux gnomes sautillants d'un rayon minuscule - Mon âme, en ce présent passante ridicule, Insensible aux brocards du crépuscule aigri, Rêve paisiblement sous un ciel rabougri.

Une Aube encore un peu tremblante de rosée,

Heure mélancolique ou d'azur irisée,

Et pourquoi pas ? un soir de safran et d'extase,

Dans les sentiers rien que l'enfance qui jase,

Avec vos yeux d'angoisse et votre âme d'Orphée

Ne vous verrai-je pas une moderne fée

Assise au pied des lis les tempes couronnées

Filer cet écheveau d'images surannées

Pour en parer les mains d'une aïeule jaunie.

Ogivale, au rêver d'une obscure atonie.

- *3 -

Franges des jours, aubes, pieusement Dans un tiroir balsamique rangées, Tissus choyés pour l'assoupissement Des fronts dévots qu'éclairent doucement Les vitraux roux aux flammes allongées, Dans un soupir téméraire et béat Je tends la langue aux riantes hosties Que, sous le dais d'un ciel jaune etlilas, Vous dispensiez à l'âme de là-bas, Petites sœurs des blanches sacristies !

2S

Une aurore-clarté dans les ombres diffuse

Pour l'image plus glauque et plus lente des lis

S'offre sourire-joie au cortège des Muses

Diaphane qu'attriste un rose enseveli

Dans le gris allongé de l'azur pâle encore...

Çà et les soupirs-rèves de la mandore

Des rougeurs que les cieux traînent incessamment

Pleurent le sang métaphorique et les calices

Des lis, las de servir de symbole aux amants,

Des larmes du matin essorant les délices,

Se gorgent de rosée emblème en se pâmant.

Le front sur la cendre des morts Quand dans la chair des lis tu bouges, Pourrais-je, moi, sans un remords, Azurer les pétales rouges ?

29

J'écoute, à la clarté des choses endormies, Dans l'espace assoupi de traînantes phalènes, La Cendre remuer sur vos lèvres blémies Et sous le plomb figé la fraîcheur d'une haleine.

Vous, nul azurbéat/mais une lampe amie, Ariane aux secrets du vivant labyrinthe, Venez guider l'amour dans les lacs_de la crainte Et d'un doigt somnambule égrener les momies,

Pour savoir si, les plis des ombres effacées - Joints au galbe des lis dont les urnes sont pleines, Nous ne trouverons pas dans nos langueurs passées De quoi ressusciter le cadavre d'Hélène !

3i

Quêteuse au seuil de l'ombre idolâtre et profane s'enroule, luxure, un corps de courtisane Egyptienne aux rais d'Ammon inapaisé De flammèches criblant le fard lourd de baisers Jusqu'à ce que le rut du nard et du cinamme Sourde des reins repus au marché de Pergame Vos yeux vrillent le beau silence hypnotisé ! Mais la serpe d'or de nos regards croisés, Ivre de l'Ombre éteinte en cette âme fragile, Ira-t-elle couper le rameau de Virgile ?

33 -

A. P. Custot.

L'hiver a du printemps dans l'aile ! Bleus échos Devinés sous la neige immense du repos, Outre-tombe miré sur le steppe, les arbres Augustes dénudés comme un rêve de marbre, Sur les regards lascifs ce voile d'or tombé, Si chaste, et le désir d'un cerne lourd plombé,, Il va falloir encor que tout cela s'entr'ouvre...

Beaux bracelets d'argent encastrés dans le rouvre !

5)

Poursuivons tu le veux ce rêve d'améthyste

Parmi le ciel sanguinolent ! Hors le throène aimé que nulle Ame n'attriste

Rien n'agite un suaire blanc. En nos cœurs tout de marbre je veux que se mire L'azur blême du soir épanoui sur nous Peut-être une Cité, Babylone ou Palmyre, Composera ce baume défaille l'époux ! Mais si l'onde et les lis sont à ce point fragiles D'une chair plus vivante abhorrant le remous Va, n'allons pas chercher à disjoindre Targile !

37

Frêle automne, au revers d'un amour coutumier, Dans la Moire du cœur mirant ta nuque blonde, Dis quels reflets d'antan dans les dessins noyés Que le vert crépuscule allonge sur cette onde ?...

Moins l'azur dans le Ilot s'enchante et se marie

Que mon rêve au vôtre s'incarne,

Belle rive dormante, ne me contrarie

Quand l'œil se colle à la lucarne

Ni le regret d'aimer proche la berge amène

La déesse rieuse aux contours indécis

Que la brise indolente éparpille et ramène,

Sœur du lis écarlate et du jaune souci,

Ni de votre tiédeur me sentir engourdi,

Laiteuse chair, qui pâme à mes lèvres fanées

Au refleurissement des roses surannées.

4i

A. Charles- Adolphe Cantacu^ène.

Le blême azur qui dort aux prunelles de marbre, Dans vosyeuxd'or mussit, regarde, comme un arbre, Vers ce passé lointain même une clarté Ne se distingue pas de son obscurité Entre les pavés gris une mousse si fruste, Et mon hceccéité ! Mais pensais-je, vétusté, Devant ce bloc penaud qu'illustre un piédestal, Dans une pauvre cour sans phare ni chenal, Au lointain frémissant d'une cloche qui tinte, Voir palpiter si loin tant de candeur éteinte !

43 -

Mon âme glisse aux jeux de langueur éphémère nul mensonge ailé sur un ciel de chimère Qui ne heurte en passant l'azur évanoui; Rythmique va-et-vient du rêve épanoui Berce la nef candide en ses bras d'émeraude: Plus d'un regard voilé sollicite ou maraude Vers le miroir que touche un égoïste aveu, Et maint geste, obsédé d'un tyrannique vœu, ^ûr de l'heure enjôleuse et du passé frivole, Médite en évitant de dire une parole h

45

C'est de l'hiver en plein midi Que ces yeux au brusque miroir, D'un cerne bleuâtre agrandi, Avec défense de s'y voir Autrement que faune rangé De tous les péchés capitaux, Ou clcun iombant de ses tréteaux Aux pieds de madame Sapho Sous l'écran d'un ciel orangé !

47

Avec le midi des caprices En chèvrefeuilles tortillés J'ai fait vos yeux ensoleillés, Yeux de faunesses que tu plisses Rut délicat des jours d'été.

Quoi ! cependant que j'y étais,

Je n'aurais pas au long des cuisses

Grimaçantes des déités

Fleuri de spasmes entêtés

Les cheveux pâles des Narcisses ?...

Et tisonné pour le réveil

Tes pauvres feux toujours pareils 1

49

Sous l'yeuse, se traîne un jour décoloré, Cherche, ô silencieux, quelque rive hagarde : brise au roc poli qu'un doigt fantôme garde Le reflet pâlissant Ju ciel transfiguré.

5i

L'ombre des pins mouvant sur cette ombre dallée, Hyménéale, unit à la vie en allée Le souffle de la vie actuelle.., la voie Prolonge sous l'azur le dessin d'une joie Devinée à travers les voiles dans l'église Au jour cru des ciseaux sur la nuque d'Elise, La Voie nous allons, chère âme, vous et moi, Devant la mort majestueuse, front de roi, Qui, tandis que nos cœurs s'essorent en prière, Nous regarde passer avec ses yeux de pierre !

53

Une fontaine au gré des heures pâlissantes se mirent, candeur, mille clartés décentes, Evanouissement du tremble dans l'azur, Sera notre clepsydre à dater sur l'impur Ecoulement du temps les jours nous vécûmes, Comme au gouffre des flots surnage un peu d'écume.

55

A. Th.D. Certes

Dans le flot qui chante et moutonne J'entends son appel monotone.

Le vent, enchaînant les rameaux, Découvre sa force aux ormeaux.

Nuit, de l'azur le dernier tome, Serait-ce pas toi son fantôme ?...

Mais rien, dites, dans mon cœur seul, Même un lambeau de son linceul... ?

57

Derrière ce ciel de métal Cherche les brumes en allées De ton calvaire horizontal, Les brumes d'or, gouttes perlées... Tant de soleils, de soleils nus Sur la lunique de Vénus ! Ton âme passe, plus d'automne, De printemps, regarde ! Personne ! Arbres en pleurs et jours en di La Douleur seule a reverdi.

59

Céans c'est le jardin d'un silence trop beau Pour être vrai : duchesse errant au crépuscule, Riche de ce parterre, et qu'on fête au flambeau, Votre Garden-party, ce soir, est ridicule.

L'heure approche,... à quoi bon cet anneau de Gygès Qui semble ici requis des invités de marque Pour regarder fleurir un bouquet d'aloès, Et jouer au Nocher en peine d'une barque?

6i

L'Hier de cet azur éphémère pâli Sous le reflet latent des prunelles éteintes Serait-ce ce halo de jour enseveli Derrière les clartés déferlent les teintes Dans le prisme usurpé de ce soir que tu vois, Gemme des yeux, qu'effleure en fugaces étreintes Je ne sais quel écho de formes et de voix, Jusqu'à ce que la main de la Nuit tard venue Balance sur le front de ces ifs crénelés Dans le vaste préau des cieux démantelés L'homicide clarté d'une lune ingénue.

-6* -

Peut-être la rosée à cette fleur de neige, A l'âme ce regard d'écureuil pris au piège, Dans le feuillage encor ces rayons prisonniers Refondent au pistil des rêves printaniers Tous les hiers gonflés de poussière jaunâtre, Cependant que l'aïeule, assise au coin de l'âtre, Face au galbe assombri d'une Vénus d'albâtre, Distraitement regarde au bout du tisonnier Les volutes mourants d'une flamme bleuâtre.

- 65 -

Lumière s'enveloppe un jour atténué D'aube frêle attardée au couchant qu'étiole Je ne sais quoi de rare encore et de muré

Dans les ifs d'une nécropole Le solitaire effroi de la cendre mué En espoir ingénu paré d'azur frivole Ou Nuit, nuit qui s'étend sur tous ces yeux fermés , Passé superposé sous la pierre tombale, Dis-nous, cœur ironique au vivre accoutumé, Quelle énigme te plut de ce Sphinx bicéphale ?

6*

67 -

Si proches vos regards en l'azur si lointain Que je ne puis pas voir l'aube spirituelle Fluer sur cette aurore, et le miroir sans tain

De votre présence réelle, Aurore fugitive au geste indifférent Me renvoyer la flamme invisible qu'attend, Pour luire à l'unisson du Ciel et du village, Mon âme encor fermée au sens du paysage.

- 69 -

Le Soir si pâle au gré de la Nuit dense, Fut la rosace rêvent d'autres yeux, S'efface, gris renversé des nuances, Vers les cyprès du rond-point otieux Dont l'ombre encore allongée et verdâtre Bronze le stupre au mur presque éboulé Du Sang si vieux qu'il écaille le plâtre. Grotesques trous d'un concombre fêlé Par les carreaux de minuit qui grimace, Bave, et ces chairs gluantes de limace Sur l'abricot velouté du baiser, Ricanera, blafarde, cette face Jusqu'au fini de me désabuser ? (*)

(') Un mois à peine après cette pièce je perdais ma mère manière! et trois semaines après ma sœur.

TABLE

Le Poète avoue volontiers... (Avant -dire) Eurythmies

Une larme point dérobée

Sombre malgré le clair de lune .... La caresse du soir sur ce marbre fantôme

Je regarde les yeux si pâles

Neigeuse volupté, sous la lune si tendre . . Naïve, comme une aube enfantine festonne Une aube encore un peu tremblante de tosée Franges des jours, aubes, pieusement . . . Une aurore-clarté dans les ombres diffuse . Le front sur la cendre des morts .... J'écoute à la clarté des choses endormies. . Quêteuse au seuil de l'ombre idolâtre et profan L'hiver a du printemps dans l'aile ! Bleus échos. Poursuivons tu le veux ce rêve d'améthyste Frêle automne, au revers d'un amour coutumier Moins l'azur dans le flot s'enchante et se marie .

5

7

9

ii

13

i)

17

l9 21

23 25 27 29 3i 33 3) 37 39

72 TABLE

Le blême azur qui dort aux prunelles de marbre ... 41

Mon âme glisse aux jeux de langueur éphémère ... 43

C'est de l'hiver en plein midi 45

Avec le midi des caprices 47

Sous l'yeuse se traîne un jour décoloré 49

L'ombre des pins mouvant sur cette ombre dallée ... 51

Une fontaine au gré des heures pâlissantes 53

Dans le flot qui chante et moutonne 5/

Derrière ce ciel de métal 57

Céans c'est le jardin d'un silence trop beau 59

L'hier de cet azur éphémère pâli 61

Peut-être la rosée à cette fleur de neige 63

Lumière s'enveloppe un jour atténué 65

Si pioches vos regards en l'azur si lointains 67

Le Soir si pâle au gré de la nuit dense 69

Table 71

FIN DE LA TABLE

296

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Saint-Araand (Cher). Imprimerie Bissifre.

La Bibliothèque Université d'Ottawa Echéance

The Library University of Ottawa Date Due

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